we CO OO De STE on see sie mg he LA * : Lis y ve + F F os on : ru : 1 S.à re 4 + … OS 0 + ; | . : ï . : 4% es 4 RIRE: 4 HS ets etat o { tie ' one Lt + tit qe : Le 1: : t Er à " A re 5% 0 i # | . . y ù se CS ds 4 , + , , . St EUR v - 2 L dé n : ar + . : ù »5 x x À, dhié 4 2 3 , ? ù 2%. | £ . * , 1% L ô Al Pré Lt) : } . È Lo 4 Li nr #3: +4! | - à 5 | ! 4 . + So PO E Ca “ is + L2 û ‘ Viitea SE den . 0 + CRC LA COLA, CX, PON ARS + eco WRI LEE + +... ne +. se . + .... … “+. ONCE AE + OC Let BULLETIN BIOLOGIQUE DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE TOME: EV 1921 Comité de rédaction : L. BLARINGHEM (Paris). F. MESNIL (Paris). G. BONN (Paris). P. PELSENEER (Bruxelles) M. CAULLERY (Paris). Cu. PÉREZ (Paris). CH. JULIN (Liége). Er. RABAUD (Paris). BULLETIN BIOLOGIQUE (Précédemment, BULLETIN SCIENTIFIQUE) DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE FONDÉ PAR ALSREE GARD: Tome LV PARIS Laboratoire d’Evolution des Étres organisés! 3, rue d'Ulm Léon LHOMME, rue Corneille, 3. LONDRES DULAU & GC, 34-36 Margaret str. Cavendish sq. TABLE Pages De BEAUCHAMP (P.) et LAMI (R.). — La bionomie intercoti- dale de l’île Bréhat (# planches) 184 CHATTON (Epouarp) et PÉRARD ( Du. ——- De ICE lidæ, Infusoires intestinaux des Gondis et des Damans, et le byelé évoluant dés Ciliés (planches) 4h 0: ma PT, 87 LAMI (R.). — (V. DE BEAUCHAMP). LICHTENSTEIN (J.-L.) et RABAUD (Er.). — Le Comportement des Polysphincta, ichneumonides parasites des Araignées (avec 11 figures dans le texte) . . . . 267 De MAN (J -G.). — Sur quelques oies obsert Ales ie ; espèces du genre Pinnotheres de l'Archipel indien (f planche CR SR REC EAU TENUE St à € AN En EM 260 PÉRARD (CHarLes). — (V. GHATTON). RABAUD (Eriënne). — L'adaptation et l'instinct des Cassides (5 figures dans le texte) . . ANA. ANR C0 RME 153 RABAUD (ErtENNE). — (V. nr TUR (Jan). — La Cardiocéphalie (nouvelle forme de monstruo- sité embryonnaire) et la te de la fovea Cardiaca {avec 4 planches doubles). . . 288 VANDEL (A.). — Notes biologiques sur les Plana aires des envi- rons de Montpellier (5 figures dans le texte) . . . 239 VANDEL (A.). — Recherches expérimentales sur les de de reproduction des Planaires triclades DL es (avec 41 figu- res dans le texte) . . . 343 DE La VAULX (R.). — L' eh che un C ne c brie cère (Daphnia atkinsoni) (35 figures et 2 lableaux) . . . . ! MEN RACE REGIS MR AURAS re 266 et 519 Le tome LV a été publié en 3 fascicules sortis des presses aux dates ci-après : Fascrcure 1 (pages 1 à 152), 20 juillet 1921. FascicuLe 2 (pages 153 à 266), 15 octobre 1921. “ FascicuLe 3-4 (pages 267 à 521), 15 février 1922. | CHAR KR. de Ea VATLX L'INTERSEXUALITE CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCERE Daphnia atkinsoni Bainp SOMMAIRE NAN BR OPO ST ve es (ES EE UT Re re C2, INTRODUCTION. — Caractères sexuels primaires el secondaires. Gynandromorphisme et intersexualité. Le gynandromor- phisme dans le règne animal . Principaux faits “signalés chez les Crustac és, particulière- ment chez les Cladocères AA PE PAC l. Description de la femelle et du mâle de € Daphnia PAS OMR D DITES ER ET 0e — MO re AR, Il. Description des intersexués les plus ar répartis en neuf catégories [IT. £tude détaillée de la morphologie des organes inter- seæués. — Coloration des mues. Antennules; comparaison avec les formes embryonnaires et jeunes ainsi qu'avec les lypes normaux des autres Daphnides. Pattes. Carapace. À 4 Éd , 3 Les glandes génitales des intersexués. —_ Constitution des Noir normales. Fécondité des intersexués. Ovo-testis. Teneur en graisse des mâles, des ons; el des inter- SEXUÉS: : |. À é ; VLes éphippies des intersexués. — Constitution des éphippies normales. Formes anormales. Rapport avec la morphologie de l'individu. Aptitude des intersexués à porter des éphippies. VI. Régéneration des antennules chez les mâles et Les inter- SexUes . MST TRES VIL. Hérédité des anomalies intersexuelles. îtat de la ques- tion. Procédés d'élevage. Etudes de Cullures en masses. Résultats VIIL. Jypothèses. _ Déterminisme syng amique dus sexe. . Hypothé: ses de Boveri, Morgan, Lang, Doncaster. Elimination du chro- mosome. . Théorie de l'intersexualité de Goldschmidt à Déterminisme du sexe et des cycles génétiques chez les Cladocères. Impossibilité d'appliquer à ces animaux les hypothèses précédentes. Tentative d'explication de l'in- ltersexualité des Cladocères Comparaison avec le cas des Phasmes . RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS GÉNÉRALES INDEX BIBLIOGRAPHIQUE . s3 AVANT-PROPOS Au cours de nos premières études zoologiques, nous nous étions convaincu qu'il est préférable de ne pas entreprendre de recherches biologiques sans avoir acquis, au préalable, la con- naissance détaillée d'un groupe d'animaux, tant au point de vue de la systématique et de l'anatomie que de la physiologie et de l’éthologie. Même si, durant ces études, le hasard ne vous met pas spontanément en face de faits nouveaux, point de départ d'un travail intéressant, on a l'avantage, par la suite, d’expéri- menter sur un matériel connu dont on pourra tirer le maxi- mum de profit. Imbu de ces idées, nous avions porté notre choix sur les Cladocères, séduit par les facilités que ces Crustacés offrent à l'observation et à l'élevage et par les intéressants problèmes biologiques que présente l'étude de leur reproduction. Nous nous étions déjà engagé dans la recherche si ardue du déterminisme des cycles, lorsque nous avons rencontré par hasard des cas de gynandromorphisme dans l’un de nos élevages (1). C'était là un sujet que de récents travaux plaçaient au premier plan de l'actualité biologique, d'autant plus intéres- sant que l’origine parthénogénétique des Cladocères ne permet pas d'appliquer à ces animaux les hypothèses proposées jus- qu'ici pour expliquer ce genre d’anomalie. Telle est l’origine du présent travail. Avant d’en aborder l'exposé, nous tenons à remercier M. le Professeur CAULLERY qui nous à aimablement ouvert son labo- ratoire et qui, après s'être intéressé à notre travail, l’a accueilli, d'accord avec MM. Rasaun et Pérez, dans le Bulletin biologique. Nous sommes heureux de pouvoir témoigner ici notre gra- titude à M. le Professeur Hérouarp qui, au début de nos recher- ches, nous à encouragé dans l'étude des Cladocères et nous a fait profiter de son expérience sur ce sujet, ainsi qu'à M. le Pro- fesseur Hexneeuy et à M. Fauré-Fréwier qui, au printemps 1919, (!) La lignée où le gynandromorphisme est apparu dérive d'une Daphnia atkin- soni Baird provenant du Laboratoire de zoologie de la Sorbonne. Ces Daphnies vivaient, mêlées à des D, pulex dans un bac que J. Jézéoque, le garçon du labo- ratoire, avait garni de terre « à Branchipes », prise aux Fonceaux (Meudon). ve RUES RE" o2 L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE nous ont aimablement accueilli au laboratoire du Collège de France. Nous devons une reconnaissance particulière à notre ami A. Vannez qui n'a cessé de nous prodiguer ses encouragements et ses conseils et dont nous avons pu apprécier limépuisable complaisance. Introduction. Si quelques organismes inférieurs semblent capables de se multipler indéfiniment par simple scission, la plupart des êtres ne peuvent se propager sans qu'intervienne, au cours de leur cycle évolutif, un phénomène plus complexe dont la significa- ton demeure encore mystérieuse : la sexualité. Dans la forme la plus parfaite que revêt ce phénomène, l'être nouveau provient d'un œuf ou zygote, produit par la fusion de deux éléments cellulaires différents (gamètes) doués d’'affinité réciproque et généralement issus de deux êtres distincts.'Ces deux parents, nommés #724le et femelle suivant la nature des gamètes produits (caractères primaires), se distinguent presque toujours par un nombre plus où moins grand de caractères secondaires, morphologiques et psychiques. Ceux-ci, malgré le peu de rapport qu'ils ont généralement avec la fonction reproductrice, paraissent si intimement liés aux caractères pri- maires qu'ils suffisent, dans la pratique, à distinguer le mâle de la femelle. En fait, le sexe d’un individu est constitué par l’ensemble des caractères primaires et secondaires et ceux-ci coïncident avec uue telle régularité que l’on à pu considérer le sexe comme un des éléments les plus fondamentaux et les plus homogènes de la personnalité, comme un tout dont les parties sont indis- solublement liées. Ce n’est donc pas sans étonnement que lon rencontre dans presque tous les embranchements du règne animal des êtres offrant une sorte de panachure de caractères mâles et femelles. Dans l'impossibilité où l’on se trouve d'at- tribuer ces êtres à l’un des deux sexes, on est contraint de leur assigner une place intermédiaire. On verra par l'étude que nous consacrons à l'examen mor- R. DE LA VAULX FPS phologique et génétique d’une série de cas de ce genre, combien l'analyse de ces phénomènes peut modifier l'idée que l'on se fait habituellement du sexe et des rapports entre les caractères primaires et secondaires, mais nous croyons utile, avant d’abor- der notre sujet, de passer une revue rapide des principaux faits déjà signalés dans cet ordre d'idées. Lorsqu'il s'agit de dénommer ces individus de sexualité aberrante, on se trouve en présence d’une terminologie fort confuse dans laquelle il importe, avant tout, de mettre de l’or- dre. Les auteurs employent, un peu au hasard, les termes d'hermaphrodite, de pseudo-hermaphrodite, d'androgyne, de gynandromorphe, d'intersezué, pour ne citer que les principaux. En principe, le terme d'hermaphrodite, qui désigne les ami- maux normalement porteurs des deux sortes de gonades, ne devrait s'appliquer qu'aux aberrations comportant la formation d'œufs et de spermatozoïdes par le même individu, celui de gynandromorphe étant réservé aux anomalies limitées au carac- tères sexuels secondaires. Mais, dans la pratique il n’y a pas de limite tranchée entre les deux sortes d’aberrations : Les insectes gynandromorphes, pour lesquels ce terme a été créé, ont fré- quemment les deux sortes de glandes. Il semble que ce dernier mot doive seul subsister pour désigner toutes les anomalies sexuelles, celui d’hermaphrodite étant réservé aux animaux chez lesquels les sexes n’étant Jamais séparés, la ques- tion des caractères secondaires ne se pose pas. Récemment Gocpscamipr (15) et Rinpze (16) ont proposé le terme d’intersexué (antersexzual form et sex intermediate) qui, en principe, dait s'appliquer à des individus présentant, dans leur ensemble, un état intermédiaire entre les deux sexes, celui de gynandromorphe étant laissé aux animaux portant une mosaique plus ou moins fine de caractères nettement mâles ou femelles. Là encore, malheureusement, aucune limite ne peut être établie : beaucoup de Papillons intersexués de GozpscamipT ont l'aspect typique des gynandromorphes, et parmi ces der- niers, la plupart ne présentent pas seulement une disposition en mosaïque de parties sexuellement distinctes maïs aussi des régions de forme intermédiaire. Le terme d'intersexué, renfermant une idée intéressante, mérite d'être conservé, mais il nous semble inutile de l’opposer sr rs, 14 Hé Lt dl D du. sh" (S,4 L’'INTERSEXUAIITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE à celui de gynandromorphe. Le premier évoque la genèse et la signification biologique de l'animal aberrant, tandis que le second nest relatif qu'aux données immédiates de l'analyse morphologique ; aussi peut-on dire que le gynandromorphisme est la forme la plus habituelle de l'intersexualité. La présence, sur un individu sexué, de caractères primaires ou secondaires appartenant à l’autre sexe a été signalée dans presque tous les groupes d'animaux gonochoriques (1). On a trouvé des glandes mixtes chez des Étoiles de mer (Cuénor, 1898, Dera6r, 1902) et des Oursins. Chez les Vers, le gynandromorphisme n’est pas inconnu (CauzzerY et Mesniz, 18). Bazrzer (44) en à signalé plusieurs cas chez Bonellia au cours de ses intéressantes expériences de modification sexuelle sous l'influence de facteurs externes. Il ressort des expériences de GouLp (17) sur Crepidula et des observations de Danrax sur les Huîtres que le sexe des Mollusques peut aussi présenter une forte labilité. | Les Arachnides ont livré quelques exemples de gynandro- morphisme mais ce sont les Insectes, chez lesquels les sexes sont toujours séparés et généralement très distincts, qui ont fourni les cas les plus nombreux et les plus typiques. Rien que chez les Papillons. 6n connait plus d'un millier d'individus offrant le mélange des caractères sexuels. Beaucoup sont nette- ment divisés en deux parties, respectivement mâle et femelle. IL est remarquable que certaines espèces et même certaines lignées semblent particulièrement prédisposées à la produc- 2 tion de ces anomalies (?). {!} Nous laissons totalement de côté les animaux normalement hermaphrodites, chez lesquels la question des caractères secondaires ne se pose pas. @) Il convient de signaler ici toule une série de faits offrant quelques analo- gies avec l’intersexualité et le gynandromorphisme et que l’on réunit sous le nom de polymorphisme sexuel. Lorsque, dans une espèce, un sexe est représenté par plusieurs types, il arrive qu’un ou plusieurs de ceux-ci rappelle plus ou moins l'aspect des individus du sexe opposé. On peut ainsi distinguer, chez des Lucanides, des Dynastides, une pæcilandrie de stature, chez les Lycènes, une pœcilandrie chromatique et chez les Bostrychi- des un polymorphisme que Lesxe (C. 2. Ac. Sc. 1901) a décrit sous le nom de pœcilandrie périodique. Dans ce dernier cas, il est possible d'observer, dans une même espèce, plusieurs types de mäles se rapprochant graduellement du type femelle suivant un proces- sus de féminisation qui intéresse successivement la tête, le prothorax et les ély- tres. L’armature génitale, toujours normale, indique que l’on a affaire à de vrais - 6 R. DE LA VAULX Chez les Vertébrés la question se complique par la présence d'hormones, substances sécrétées par les gonades et influen- cant plus ou moins fortement l'apparition des caractères sexuels secondaires, I'importe, en effet, de ne pas confondre les modi- lications sexuelles provenant d’une castration expérimentale, pathologique ou sénile, avec le véritable gynandromorphisme qui existe d’ailleurs très certainement ici. On à signalé, chez les Poissons, des gynandromorphes chez des Squales (Vayssière) et chez Fundulus. L. Lereevre a trouvé, dans ses élevages, des femelles de Xiphophorus helleri, d'ailleurs stériles, dont la nageoïre caudale se terminait en glaive comme chez le mâle. L'absence presque générale de caractères sexuels secondaires très nets explique sans doute la rareté des gynandromorphes dans cet ordre, car l’on à signalé fréquem- ment la présence de glandes mixtes. Un grand nombre d'anomalies sexuelles ont été décrites chez les Batraciens mais l'on sait par les expériences d’Herrwi6 (06) que, chez ces animaux, le sexe possède une labilité remarquable dans le jeune âge. Le gynandromorphisme semble rare chez les Reptiles. Mor- &an (19) en cite deux cas chez Lacerta agilis et Testudo qræca. Outre un très grand nombre d'exemples de mélanges de caractères sexuels dus à des altérations des gonades, les Oiseaux offrent plusieurs cas très nets de gynandromorphisme, dont quatre sont des gynandromorphes bipartis. Le Pinson de Wegeret Le Bouvreuil de Pozz sont, en quelque sorte, classiques. L'action des hormones est, à elle seule, impuissante à rendre compte de dispositions de ce genre. Les cas de véritable gynandromorphisme sont extrèmement rares chez les Mammifères; il semble que les anomalies des caractères secondaires n'accompagnent jamais des gonades normales et les gynandromorphes nettement bipartis parais- sent inconnus. Là, encore, il est difficile de démêler ce qui doit être attribué à l’action des hormones. Les gynandromorphes ont lontemps été considérés comme des cas tératologiques sans grande signification biologique et : males. Il ne s'agit done pas à proprement parler d’intersexualité mais plutôt d'une pœcilandrie gynandromorphique, L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 7 leur genèse attribuée à quelqu'accident de fécondation. Il fallut pourtant s'apercevoir que certaines races et surtout certains croisements se montraient plus fertiles que d’autres en anoma- lies sexuelles. C’est en croisant des races de Vers à soie fran- caises et japonaises que Tovama (06) obtint ses curieux indi- vidus bipartis pour le sexe et la race. En reprenant, en grand, des expériences de cet ordre sur un autre Bombycien, Lyman- tria dispar, R. Gornsenwbr arriva à produire, à volonté, par des croisements judicieusement choisis, des Papillons offrant un gynandromorphisme d’un degré plus où moins accentué. Ainsi s'établit la notion de formes interseruelles, indiquant qu'à l’origine de ces anomalies est un conflit entre les forces déter- minant l'apparition de l’un ou de l’autre sexe. Cette notion fut reprise par Rinoze (16) pour les Pigeons dont il détermine le sexe par des croisements judicieux ou en soumettant la mère à un travail reproducteur excessif, et par Baxra (146) pour les Cla- docères. Il est probable qu'elle pourrait s'appliquer à un grand nombre de cas de gynandromorphisme. Le croisement entre variétés qui est, depuis longtemps, connu pour changer la proportion des sexes dans la progéniture et former des indivi- dus stériles, semble être aussi un des principaux moyens de faire naitreles intersex as. Keizix et Nurrazz (19) ont obtenu un grand nombre de ceux-ci par croisement du Pediculus capitis et du Pediculus corporis. Les Crustacés jynandromorphes. — Au cours de notre revue rapide des faits de gynandromorphisme, nous avons momenta- nément négligé les Crustacés qu'il convient d'examiner mainte- nant avec quelques détails. Ces animaux, chez lesquels on n'a d’ailleurs pas encore signalé d’hétérochromosome, semblent posséder une stabilité sexuelle moins forte que celle des autres Arthropodes ("). Laissant de côté les cas classiques d'hermaphrodisme simul- tané ou successif imputables à la fixation ou au parasitisme (Cir- (:) Mazaqui (1901, Arch. Zool. Exp.) a montré que chez les Monstrillides endo- parasites des Salmacynes, le sexe est cn rapport avec le nombre de parasites contenus dans l'hôte. On ne trouve jamais plus d'une femelle dans la même Anné- lide, La multiplicité des embryons détermine le sexe mâle et peut même engen- drer le nanisme avec atrophie des gonades, 8 R. DE LA VAUILX ripèdes, Cymothoadiens, Cryptoniciens, ete.) on peut citer à l'appui de cette opinion les exemples suivants : Les jeunes mâles de certains Amphipodes (Orchestia gamma- rellus, O. deshayesi) forment presque toujours des œufs dans leurs testicules (Neseskr, 1880, Cu. Bourexcer, 1908). Un fait analogue se rencontre chez une Gébie du Japon (Gebia major) et chez une Crevette de nos côtes (Lysmata seticaudata). Dans un genre d’Ecrevisse, Parastacus, les mâles et les femelles, bien qu'ayant des glandes unisexuées, possèdent les deux paires de conduits évacuateurs ainsi que leurs pores géni- taux à la base des troisièmes et cinquièmes paires de pattes. Calocaris macandrae est, d'après WozLe8oëk (1909), un véritable hermaphrodite avec les deux sortes de glandes. Rappelons pour mémoire les cas où une infestation parasitaire modifie la sexua- lité de certains crabes (castration parasitaire de Grar»). I n'est donc pas étonnant de trouver chez les crustacés de nombreux cas où Les sexes sont accidentellement mélangés. On connait, parmi les Homards (Nicuozs, 1734 et A. P. Waicar, 1919) et les Langoustes (Burcer, 1902) trois cas de gynandro- morphisme biparti (bilateral qynandromorphs des Anglais). Un certain nombre d'Ecrevisses gynandromorphes ont été décrites notamment par W. Scnmrewirseu (1889), W. Bexnam (1891), V. La Vazerre SainT-Gronce (1892), Faxon (1898), Hay (1907), E. A. Anprews (1909). L’une d'elles à un ovaire de chaque côté et de plus, à droite, un testicule stérile muni de son canal déférent. La forme extérieure est celle d’un jeune mâle sauf pour les pores génitaux qui s'ouvrent à la base de la troisième paire de pattes. Des gynandromorphes sont également connus dans le genre Cambarus. ressort des notes d'Ewixe (1885) et de BerGexpaz (1888), que des faits analogues se présentent chez les Crabes. Tout récemment Moncax (20) décrit sous le nom d’interseres un certain nombre de Crabes (Unca) offrant quelques anomalies des caractères sexuels secondaires, et dont l’organisation interne n’est malheureusement pas étudiée. Dans plusieurs des cas rapportés, où des mâles ne se rapprochent du type femelle que par légalité des deux pinces, on peut mettre en cause un simple arrêt de développement de la pince normale- ment plus forte: Si l’on passe aux Entomostracés, on trouve des faits sembla-- PT FES US D ORTON EET ce Lt dll # L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE S 9 bles. Rengere (1880) à décrit un Cyclops agilis présentant des caractères mâles à droite et femelles à gauche. J. Ricaano (89) signale un individu mâle de Praptomus cœruleus portant à droite une antenne du type femelle. Plus récemment Mnrazek (1914) et Breuer (19144) ont revu des cas analogues. Les Euphyllopodes, en raison de leur rareté relative, n'ont fourni jusqu'ici que peu d'exemples de gynandromorphisme. En janvier 1880, C. F. Gisszer trouve dans une petite mare. parmi un grand nombre d'Eubranchipus.vernalis « pales et transparents » un individu « hermaphrodite » et le décrit avec soin. Il s'agit d’un gynandromorphe biparti. Le côté droit, de sexe mâle, est presque normal; l’auteur note seulement que l'extrémité du crochet antennaire d’accouplement est mois ridé que sur les individus normaux. Le côté femelle est plus aberrant : le cordon ovarien est tordu et ne laisse voir qu'un seul œuf; l’oviducte ne forme plus qu'un sac triangulaire elos de toutes parts et porte des glandes cémentaires irrégulière- ment distribuées. Du côté gauche (®), le segment génital est moins développé que de coufume et porte deux protubérances imperforées. Henry Benvano (91 et 96) à signalé chez des femelles de Lept- durus glacialis, puis chez Apuscancri formis et Lepidurus apus des glandes mixtes dont certaines régions produisaient des gamètes mâles. Il en a conclu à l'hermaphrodisme normal et fonctionnel des Phyllopodes. D’autre part, chez des Apus can- criformis mâles, Zocrar (07) a trouvé des tétrades (œufs et cellu- les nourricières) issues de la paroi du testicule. Nous allons maintenant examiner en détail l'historique de la question chez les Cladocères. Pour la première fois, Kurz signale en 1874, sous le nom d'androgyne misshildung quatre cas d’intersexualité chez les Cladocères. 11 décrit d'abord un individu de D. pulex de Gxer, dont l’antennule droite est du type ©, tandis que la gauche est du type œ, mais plus petite. De ce même côté gauche, se trouve une première patte munie d’un crochet et d’un fouet (type cf‘) et un testicule bien développé, rempli de spermatozoïdes, tan- dis que le côté droit montre un ovaire et une première patte Q. L'ensemble de l'animal (tête, carapace, abdomen) est d’ailleurs femelle quoique le bord antérieur des valves, courbé et cilié, 10 RC DE, L'AUVAULX se rapproche du type c,. Cet animal a été observé en octobre 1873. Au mois d'août de la même année Kurz avait vu un exem- plaire de Daphnia schæ fferi Baird (variété de D. magna Straus) qui s'écartait du type ® par la présence, à droite, d'une anten- nule de forme analogue à celle du &, mais notablement plus réduite et dépourvue de soie sensitive. La nature des gonades n'est pas notée. Les deux autres Cladocères aberrants appartiennent à l’es- pèce A/ona quadranqularis (O0. F. Muller). L'un, trouvé en novembre, à l'apparence générale d’un mâle et présente effec- tivement du côté gauche une antennule munie d’un flagellum, une patte portant un crochet (plus réduit que normal), et un tes- ticule fonctionnel. À droite, par contre, l’antennule est dépour- vue de flagellum, la patte est du type Q et il y a un ovaire. Le second spécimen, trouvé en mai, a également le contour géné- ral d’un mâle, mais porte deux antennules ©. La première patte droite est du type G'; Le postabdomen est conforme au type ® mais contient un canal déférent. Le côté gauche et les gonades n'ont pas été observés. Ainsi, les deux individus dont les gonades furent examinées se montrèrent de véritables hermaphrodites. Ces premières trou- vailles laisseraient donc supposer un rapport étroit entre la glande sexuelle et les caractères secondaires. Kurz (74) ayant trouvé tous ses spécimens aberrants au moment où les mâles commencent à apparaitre, voit en eux des formes de transition entre les deux sexes. Il suppose qu'ils proviennent de germes males ayant fait retour au type femelle. Aucune autre mention de Cladocères intersexués n’est faite jusqu’en 1897 ou Groscaowskr décrit une Leptodora hyalina (= L. kindtii, Focke) possédant des antennules appartenant chacune à un sexe différent et une femelle de Rhypophilus per- sonatus Schôdler (= Pleuroxus uncinatus Baird) ayant un ros- tre de forme masculine. Ces deux spécimens. dont les gonades ne sont pas décrites, avaient été capturés à la fin de l'été. Wozrerecx en 1908 signale, sans plus de détail, la présence de « Zwitterbildung » parmi de Daphnia longispina. En 1909 parait pour la première fois, sous la signature d'O. Kurrxer, une étude sérieuse de la question. L'auteur ayant découvert, dans ses cultures de D. pulex, une femelle portant L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE li une anomalie antennulaire, en étudie attentivement la descen- dance. Il trouve ainsi un grand nombre de « pseudo-herma- phrodites » et trois hermaphrodites vrais qu'il décrit avec quelque soin. On voit, par ses descriptions et ses figures, la variété des formes intermédiaires, et la possibilité de variations indépendantes dans un même organe. Un individu porte d’un côté une patte munie d'un crochet et d'un fouet court, et de l’autre une patte dépourvue de crochet, mais munie d’un long fouet. L'auteur commet d'ailleurs quelques erreurs, notamment lorsqu'il qualifie de « männliche Tastborste » (p. 660) la soie sensitive qui existe dans les deux sexes. Il ne signale pas de glandes anormales, mais, chez un individu portant un testicule à droite, 1] aperçoit à gauche une glande ne montrant qu'une trainée de « tissu pâle ». Quatre générations sont suivies et chacune d'elles fournit environ 25 0/0 de mâles et de pseudo- hermaphrodites et 75 0/0 de femelles. L'auteur, tout en recon- naissant que ce nombre, bien que d’allure mendélienne, ne peut autoriser à faire appel aux lois de l'hybridation, pense que l’on est en présence d'un fait de « mécanique héréditaire ». À la vérité ces chiffres n'ont aucune importance ; ils sont fonction du nombre de pontes examinées, puisque Ktrrner nous apprend que ja proportion d’anormaux peut varier de 0 à 100 0/0 d'une portée à la suivante. Ils réunissent d’ailleurs abusivement les mâles normaux et les gynandromorphes. En 1915 Asawonra donne une description minutieuse de qua- tre D. pulex intersexuées. La masculinisation est faible, les ovaires sont normaux ainsi que les descendants qui furent exa- minés. C'est au milieu d'avril 1915 que nous trouvons notre première Daphnie gynandromorphe dans une culture de D. atkinsont mal alimentées. En 1916 et 1918 paraissent, dans les Proceedings de l'Aca- démie nationale des Sciences de Washington, deux notes de À. M. Baxra dont nous n'avons eu connaissance qu'au début de 1919. C'est Le travail le plus intéressant paru sur la question. L'auteur trouve des aberrations sexuelles dans des lignées de Sumnocephalus vetulus et de Daphnia longispina cultivées depuis longtemps en laboratoire, et en étudie la transmission héréditaire pendant un grand nombre de générations. IL assi- 12 R: DE LA VAULX mile tout à fait ces animaux aberrants, qu'il nomme sex inter- grades, aux intersexués de Goznscaminr et de Rinpse. Il insiste sur l'abondance des caractères intermédiaires, tout en notant que parfois des organes complètement G'et d’autres complète- ment ® se trouvent réunis sur un même animal. La proportion d'intersexués et de mâles est fort grande chez Simocephalus (en moyenne 40 0/0 de c', 8 0/0 de @ et le reste en « sex intergrades »), plus faible chez D. longispina. Au cours des chapitres IV et VIT nous indiquerons et critiquerons au besoin les principaux résultats acquis par Banra. Pour être complet nous devons signaler les intéressantes trouvailles, encore inédites, de notre ami A. Vanper. C'est d'abord celle d’un individu de Pleuroxus trigonellus qui, bien que possédant un postabdomen ® typique, montrait à droite un crochet d’accouplement à la première patte et une anten- nule G‘. Le côté gauche ainsi que les gonades n’ont pu être étu- diés par suite d’un accident de préparation. Dans une lignée de D. pulex provenant d’un bassin du Jardin botanique au Muséum, VAnNDEL à trouvé, mêlés à de nombreux mâles, un certain nombre de Daphnies gynandromorphes semblables à celles décrites par Kurrner. Nous avons retrouvé nous-mêmes l'année suivante, dans un bassin voisin du premier, des gynan- dromorphes analogues, provenant, sans doute, de la même lignée. Les aberrations nous ont paru moins fréquentes que chez D. atkinsoni. On voit par cet exposé que des anomalies sexuelles ont été signalées jusqu'ici chez 9 espèces de Cladocères dont 4 appar- tenant au genre Daphnia (*). C'est chez D. puler que le phé- nomène a été observé le plus souvent, ce qui tient, sans doute à la netteté des différences sexuelles chez cette espèce et à_sa large répartition. |. — Description du mâle et de la femelle de « Daphnia atkinsoni » Les 350 Daphnies anormales qui nous ont permis une étude détaillée de l'intersexualité appartiennent à l’espèce Daphnia {‘) Bien que la priorité du mot Daphne (0. F. Muller 1776) ait été signalée par KeiLHAck, nous croyons préférable de nous en tenir au terme de Daghnia (0. F. Muller 1785) universellement connu. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 13 atkinsoni décrite en 1859 par Bairp parmi des Entomostracés récoltés en Palestine. Depuis, cette espèce à été signalée en Autriche, en Suède, en Russie, au Groënland, en Espagne, en Algérie, en Tunisie et en Angleterre. Elle à longtemps été inconnue en France où be Kennervé et nous-mêmes n'avions obtenu quelques individus que par culture de vase desséchée. En 1916 Paris la trouvait dans quelques mares de la Côte d'Or et nous devons à son obligeance d’avoir pu comparer à ceux que nous étudions quelques animaux provenant de ces localités. L'identité est absolue ; bien que les individus venant directement de la pleine eau soient, comme de juste, de taille notablement plus grande. Afin de mettre en lumière l'importance des anomalies que nous aurons à signaler, il est utile de décrire avec quelques détails Les types normaux, mâle et femelle, en insistant sur les caractères distinctifs des deux sexes. La longueur des femelles adultes peut atteindre jusqu’à 5 millimètres sans l'épine (Paris 48) mais ce chiffre est tout à fait exceptionnel et c'est 2 millimètres à 2mm.5 qu'il faut comp- ter comme taille normale. La tête forme environ le quart de la longueur du corps ; elle est séparée de celui-ci par une impression dorsale légère (presque nulle chez le jeune). La partie postérieure de la tête (fig. 1) est, chez la femelle adulte, plus haute que la région antérieure dont elle est séparée par une dépression caractéristique très nette. La fornix (repli chi- tineux protégeant l'insertion de l'antenne) est très développée et va Jusqu'au-dessus de l'œil. Le rostre est court. Les antennules sont subcylindriques, plus grandes que chez aucune autre Daphnie ; ellés portent à leur extrémité environ 7 bàâtonnets sensitivement courts et, à la base, extérieurement, une fine soie sensitive sortant d’un - disque uni. | Les grandes antennes, garnies de petites épines et de cils grèles ne présentent rien de caractéristique au point de vue sexuel. É Les valves, larges dans leur première moitié, se rétrécissent rapidement jusqu'à l’épine caudale, ce qui leur donne un con- tour subtriangulaire très caractéristique de l'espèce. Le bord dorsal est garni, de part et d'autre, d'une ligne d'épines qui va 14 R. DE LA VAULX de l’épine caudale jusqu'à l'impression dorsale. À ce niveau, les deux lignes, qui généralement cessent alors d’être épineu- ses, s'infléchissent vers chaque joue et se réunissent après avoir limité un espace cordiforme. Au moment de la mue, la pièce Fig. 4. — Daphnia atkinsoni ® (X 43). a!, antennule ; a?, base de l'an- tenne (cet appendice n'est plus figuré sur les dessins suivants) : g, glande anlennaire ; 0, ovaire ; d, crochets dorsaux ; p, postabdomen : deux œufs dans la cavité incubatrice, cordiforme ainsi délimitée est découpée dans la région nucale et se trouve rattachée à la mue des valves (fig. 26). La ligne de suture ne cesse pas toujours de porter des épines en s'écartant de limpression dorsale, Dans certains cas, les Daphnies por- L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 15 tent une sorte de couronne d’épines formée par la continuation des lignes épineuses de la carapace ; il s’agit toujours alors d'animaux de petite taille et mal nourris. Ces conditions, jeu- nesse et disette, semblent nécessaires mais non suffisantes car, dans une même culture, des animaux de taille semblable pgu- vent être munis ou privés de cet ornement céphalique. Celui-ci disparait d’ailleurs après une ou deux mues (!). _ Le bord ventral de la carapace est muni de quelques petites dents et intérieurement de cils grèles assez abondants et plus longs dans la région médiane (fig. 26, dr.). La fornix céphalique se prolonge sur le côté des valves par une fornix secondaire qui se poursuit jusqu'à la région ova- rienne. Elle est parfois munie de denticulations dans les mêmes conditions que la couronne céphalique mais plus fréquemment. La cavité incubatrice est plus ou moins large suivant l’âge de la mère et l’importance des pontes : elle est limitée vers le bas par des prolongements dorsaux ou crochets abdominaux. Ceux-ci sont au nombre de trois, le supérieur étant beaucoup plus grand que les suivants. La partie dorsale du thorax porte quatre petites boursouflures que ScnarrexBerG (40) à décrites chez 1) magna comme des organes sensoriels énigmatiques en rapport avec l'ovaire. Nous avons pu nous convaincre, par de nombreux examens portant sur plusieurs espèces de Daphnies, que ces organes de la cavité incubatrice existent chez les mâles comme chez les femelles. - Le postabdomen porte dans la partie distale de son bord dotsal, de chaque côté de l’anus, une série de 10 à 12 dents recourbées. Des 5 paires de pattes, seule la première offre des caracté- ristiques sexuelles. Nous en donnerons une description détail- lée au chapitre IT. De chaque côté de l'intestin se trouve un ovaire s'étendant de la région cardiaque. jusqu'à la $° paire de pattes (voir ch. IV). Mäle. — Le mâle (fig. 2) reste toujours de petite taille, environ (!) RicuarD a décrit sous le nom de D. bolivari une variété de D. atkinsoni portant normalement à l'état adulte la couronne épineuse. Cette couronne serait même formée de deux rangs d'épines. A la vérité, nous avons rencontré parfois une disposition analogue chez de jeunes D. atkinsoni, maïs nous avons pu nous convaincre que l’un des deux rangs appartenait à la nouvelle carapace, tandis que l’autre partait avec la mue. 16 RMDE LA VAULX de 1 mm. 3 à2 millimètres. Le front bas et saillant contient un œil volumineux. Contrairement à ce qui existe chez la femêlle, la partie antérieure de la tête est plus haute que la région pos- ténieure, qui s'abaisse fortement jusqu'à l'impression dorsale, faible mais nette. De part et d'autre du rostre, émoussé et relevé, partent deux \ N Fig. 2. — D. atkinsoni 4 (X 41). La première palte droite n'est pas figurée. longues antennules mobiles, normalement dirigées en avant (fig. 19). Elles sont ornées sur toute leur longueur de séries de petites lignes épineuses transversales et portent à leur extrê- mité, en plus des 7 bâtonnets sensitifs, un fagellum biarticulé dont la partie distale porte inférieurement une sorte de petite brosse formée de poils courts. Près de son extrèmité antérieure, l'antennule présente extérieurement une soie sensitive, homo- logue de celle que l’on voit à la base de l'organe femelle corres- pondant (1). (!} On admet généralement que, dans le règne animal, le mâle présente un type plus évolué, c'est-à-dire plus éloigné de la forme originelle que la femelle. C'est +. AR Lt LINTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 17 Les pattes de la première paire sont munies d'un crochet servant à retenir la femelle lors de l’accouplement et d'un long fouet, homologue de la soie, plus courte, dont est pourvue la patte © (fig. 23, p. 38). = Au lieu d'être régulièrement courbées comme chez la femelle, les valves de la carapace présentent, en haut, un angle sail- lant, à bord épaissi, abondamment garni de soies. A la hauteur des crochets des pattes, les valves s’écartent l’une de l’autre afin de permettre le libre jeu de ces appendices. Le postabdomen (fig. 3) se distingue, à première vue, de celui Fig. 3. — Postabdomen 7 (X 100), d'après la mue. de la femelle par la présence de deux tubulures où papilles : génitales où aboutissent les canaux déférents. La région anale, concave, est garnie d'une dizaine de dents plus fines que celles que possède la femelle en cet endroit. D'autres dents minus- cules se voient à la partie postérieure des papilles. Les crochets abdominaux sont représentés par trois saillies à peine indiquées et la cavité incubatrice est très réduite. Les testicules forment, comme les ovaires, deux masses allon- gées de part et d'autre de l'intestin (voir chap. IV). Il faut ajouter que les mâles ont une allure plus vive et sont à une opinion opposée que conduirait l'étude des antennules des Daphnies. Remarquons en elfet : f° que l'embryon, qui est censé reproduire des stades évo- lutifs antérieurs, possède des antennules relativement plus importantes que chez Ja femelle adulte ; 2 que les {ypes de Cladocères généralement considérés comme prumilbifs (Sida, Moïna) ont des antennules femelles d'assez grande taille ; 3° que typiquement-les eux paires d'antennes différent peu de longueur chez le Crustacé (Nauplius), que cette dlférence est énorme chez les femelles de Daphnie et beau- . coup plus faib'e chez lès mâles (longueur, mobilité, ornementation épineuse, j rés: nee du flagellum, homologue probable d'une soie). l! résulte de ces considérations que c’est chez la femelle que l’antennule à subi la modification la plus forte par rapport aux formes ancestrales présumées. 9 P4 18 R. DE LA VAULX généralement plus colorés que les femelles. Ce dernier carac- tère, qui permet souvent de les distinguer au sein d’une culture, est dû principalement aux gouttelettes graisseuses dont leur corps est bourré. Comme on à pu le voir par ces descriptions et par les figures, les caractères sexuels distinetifs de D. athinsoni, plus nets que chez la plupart des autres Daphnides, permettent une analyse minutieuse de lintersexualité. Il. — Description des Daphnies intersexuées Les Daphnies intersexuées dont l'étude fait Pobjet de ce tra- vail ont été trouvées soit au cours de prélèvements effectués dans des cultures en masse, soit dans des séries d’élevages méthodiquement suivis, portée par portée, pendant plusieurs générations ainsi qu'il sera expliqué au chapitre VIT. Chacune d'elles est désignée par un numéro relatif à l’ordre dans lequek elle a été trouvée. | Ne pouvant songer à décrire les 350 Daphnies aberrantes exa- minées au cours de nos recherches, beaucoup offrant d’ailleurs entre elles une grande similitude, nous nous bornerons à pré- senter ici les principaux types, en les rangeant en 9 catégories d’après leur masculinité croissante (de 0 — femelle normale à 10 — mâle normal). En dehors de l’ordre qu'elles introduiront dans l'exposé, ces catégories auront l'avantage de permettre de désigner, par la suite, chaque intersexué par un exposant indi- quant approximativement le degré de la masculinisation. I] faut seulement noter que la création de ces catégories est totalement artificielle, que de l'une à l'autre la maseulinisation n’est pas régulièrement progressive et que l'attribution d'un individu à l'une d'elles est, en partie, affaire d'appréciation personnelle, tous les termes de passage pouvant exister. | | Afin d'user de règles suffisamment claires, nous nous appuyons, pour établir ces catégories, sur les principes suivants. 1° Se bor- ner à considérer les parties les plus importantes : antennules, carapace, pattes, postabdomen, gonades. 2° Tenir compte du nombre d'organes masculinisés sur le côté où ces organes sont le plus nombreux. Les animaux n'ayant que des anomalies antennulaires étant L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 19 fort nombreux, nous leur réservons les trois premières catégo- ries. Viendront ensuite ceux qui possèdent, en plus, une, deux ou trois autres régions modifiées. Les trois dernières catégories comprendront les animaux ayant, à la place d'ovaires normaux, respectivement : deux glandes anormales, un ovo-testis et un testicule et deux testicules. Nous déerirons d’abord les intersexués asymétriques, de beau- coup les plus nombreux, puis, s'il y a lieu, ceux qui sont excep- tionnellement symétriques. Nous finirons par les individus chez lesquels l'asymétrie change de sens suivant l'organe considéré (asymétrie inversée). Catégorie I. — Nous plaçons dans cette première catégorie les individus femelles présentant une anomalie légère de l'an- tennule, sans que celle-ci porte de flagellum. [l s’agit généra- lement soit de bosse à la base de l'antennule, la soie pouvant alors être portée par cette protubérance (fig. 20, n° 6) ou demeurer à sa place habituelle, soit d’appendices saillant diversement de l'organe (fig. 22, à droite). La région anormale porte souvent des séries de petites épines analogues à celles de _lantennule G'. Nous placons également ïei les animaux portant une antennule recourbée en avant ; trois de ceux-ci (203, 995, 330), ayant les deux antennules dans ce cas, sont symétriques. À part ces exceptions, une seule antennule est touchée dans cette première série comprenant 62 individus. Notons que ces anomalies sont si faibles que l’on ne songe- rait pas à y voir de l'intersexualité si des = ns s ee à Æ T'Y £ formes de passage ne les reliaient pas à HE æ E mA des aberrations plus importantes. Des dis- 2 À Fe a positions telles que celle que présente le " n° 6 rappellent d'ailleurs l’état jeune de we certaines antennules plus modifiées (voir I & fis.-19,:p. 33). ee 2 n + A d'or FE 1 ni Catégorie II. — Nous rangeons à la Fig: 4 — a° droite du CAPES OS id n° 15 (X 200); la pro- suite les animaux offrant deux types d'ano- {ipérance portant le malies antennulaires qui, bien que de flagellum est plissée natures et peut-être de genèses différen- ©n accordéon, ce qui lui donne un aspecl tes, présentent des degrés d intersexua- polyarticulé. lité équivalents. La première anomalie (type 1) consiste dans la présence sur une antennule ® d'un 20 R. DE LA VAULX flagellum, généralement porté par une proéminence issue de diverses régions de l'organe {25 cas] (fig. 4 et 22 à gauche). læ) Dans l'autre type (2) Pantennule ne possède pas de flagellum mais se rapproche du type Go par sa taille et sa direction 8 exemples. Dans ce cas la soie ne reste généralement pas à la base de l’antennule, mais occupe des positions diverses le long de cet appendice. L'antennule du côté opposé est normale où appartient aux types déerits dans la catégorie précédente. Catégorie IIT. — Dans cette catégorie sont réunis les indivi- dus ® portant une antennule répondant plus ou moins exacte- ment au type c', c'est-à-dire ayant à l'extrémité un flagellum Fig. 5. — Antennules du n0 195 (X 250, : la droite fsecond plan) est du type Q normal. dirigé parallèlement aux bâtonnets. Ces antennules sont mobiles ou fixes, de taille et de direction variables ; la soie occupe des situations diverses mais est très rarement basale. Toutes les formes de passage existent entre les types de la catégorie précé- dente et l'organe -& parfait (n° 195, fig. 5). L'antennule du côté opposé est fréquemment modifiée suivant le même type (n° 74, fig. 33) ou un de ceux qui sont décrits précédemment. Il existe même quelques individus symétriques. Catégorie IV. — Les intersexués dont nous avons parlé Jus- qu'ici ne présentaient que des anomalies antennulaires ; nous décrirons maintenant ceux qui offrent, de plus, une seconde région plus ou moins masculinisée : ‘carapace, patte ou postab- domen. La masculinisation porte sur les deux côtés ou sur un seul ; elle n’est pas nécessairement plus accentuée sur l'anten- nule que sur l’autre région anormale. Voici quelques exemples : L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 91 N° 466 : à dr. : ant. @ légèrement recourbée en avant et papille génitale rudimentaire. N° 91 : à dr. : ant. © portant une protubérance, bord de la carapace épaissi ef cilié. N° 94 : à dr. : ant. ©, crochet normal, fouet rud. ; à g. : ant. G pas de crochet, fouet développé (inversion de l’asymétrie). Le 1e souvent la région antennulaire est la plus touchée Ex. : n° 315 : à dr: ant. genre catég. Il type 1, patte © : à g. : ant. ne IT, patte . Aucun mdividu symétrique n'a été trouvé mais 5 cas d’inversion de l’asymétrie ont été observés. > N°15 : à dr. : ant. catég. Il type 1 (Gg. 4); à g. : pap. génit. rudimentaire. N° 19: à dr. : ant. interm. catég: IL type 2 (fig. 20); à g. carap. lég. épaissie et ciliée. N° 257 : (fig. 6) à dr. : ant. ca- +&. [Il type 2 courbée ; à g. : ant. ca- tég. [, carapace proche du type c. No 310: à dr. : ant: Gun peu courte ; à g. : ant. © courbée (ca- tég. D) et patte G° (voir plus haut n° 94). Cette quatrième catégorie ren- ferme 41 individus parmi lesquels Fig. 6. — Antennules et cara- 16 portent la 2 anomalie sur la cara- pace du n° 257 (x 200). pace, 17 sur les pattes et 8 sur Le postabdomen. Catégorie V. — Sur les animaux de cette catégorie les anc- malies antennulaires coincident avec des aberrations portant sur deux autres parties différentes du corps : carapace et pattes (combinaison la plus fréquente), carapace et postabdomen, pattes et postabdomen. Pour chaque région, la modification peut porter sur un ou sur deux côtés. Voici quelques exemples : N° 170 : à dr. : a! G, carap. presque &, crochet et fouet : à g. : ant. Q recourbée en avant, carap. interm., patte interm., postabdomen Q. N° 934 : à g. : a! © recourbée en avant, carap. interm. eiliée patte . (Les régions non décrites sont toujours du type ©.) ° 302 (fig. 7) : à dr. : a! G', patte interm., crochet faible ; à g. : a C' fixe et dirigée vers le bas, carap. très lég. ciliée, patte interm., crochet faible. 19 to R. DE LA VAULX Les trois régions peuvent n'être que très légèrement modi-, liées. Ex. N° 320 : à g.: a! ® portant une saillie, carap. interm., pap. sénit. rudimentaire. N° 339 : à dr.: a! Q portant une protubérance, carap très Fig. 7. — N°0 302 (X 43): Fig. 8. — No 207 (X 43), Type symétrique. légèrement masculinisée, patte interm., fouet court, crochet rudimentaire. Le n° 207 (fig. 8) s'est montré tout à fait symétrique : rostre interm., 2 ant. q médiocrement développées, 2 pattes G', cara- pace intermédiaire de chaque côté.” On rencontre quélques cas d'asymétuie mversée : L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 23 N° 531 : à dr. : carap. interm., à g.:a! G immobile, earap. Q, patte intermédiaire. N° 243 (fig. 9) : à dr. : a! Gt immobile, carap. Q ; à g. : at Q mais carap. interm. ciliée, crochet et fouet rudimentaire. Fig. 9. — No 243 (X 43). À dr. : la patte et la carap. sont du type ©, Catégorie VI. — Dans cette catégorie la masculinisation porte, à la fois, sur les antennules, les pattes, la carapace et le postabdomen, mais à des degrés variables, Un côté est pres- que toujours plus touché, mais l’autre n'est jamais indemne (exception n° 83). Les animaux sont encore capables de pon- dre des œufs, mais en petit nombre. Ex. n° 5: à g. : ant. © assez longue et recourbée, carap. interm., crochet, fouet, pap. gén rud.; à dr. : ant. © portant un rudiment de flagellum; pond à plusieurs reprises des œufs qui avortent plus ou moins précocement. te = R DIS TE MAUT:X No 183 : à dr. : ant. ® assez grosse, recourbée et garnie d’épi- nes (caractères qd), carapace Interm., patte lég. masculinisée, postabdomen offrant une interruption dans la ligne d’épines f (caract"CEcpene rares {masculinisation faible répartie sur quatre régions). N° 935 : à_g. : a! GC, carap. type G', patte O', pap. gén. rud. ; à dr.: a! ® recourbée, carap: presque ©, patte G', pas de pap.. L'animal a eu des portées de 10 ©, puis de 2 ® (sur 6 œufs). N° 950 : (fig. 10 et 20) tête et rostre intermédiaires, à dr. à g'; à g. : ant. recourbée; des patte G' et pap. gén. L’animal pond 4 œufs (dont un très petit) qui dégénèrent ainsi que ceux qui se forment ensuite dans l’ovaire. Dans trois cas l’inversion de l’asymétrie a pu être constatée : N° 195 : à dr. : a! courte, cour- bée, sans flagellum, carapace un Fig. 10. — No 250 (X 34). peu épaissie. patte"; à g. : type © sauf pap. gén. rud.; forme deux éphippies puis pond des œufs parthénogénétiques l'éclosion de 71 ® (sur 8 œufs) puis de 9 © (sur 12 œufs)|. N° 969 : à dr. : a! G insérée latéralement sur rostre pres- que ®, carap. interm., patte C', pap. gén. ; à g. : a ®, carap. presque d', patte interm. (fouet, pas de crochet), pap. gén. : 2 ovaires qui d’après la coupe paraissent normaux. Voir aussi n° 45 (S V, fig. 32). \ Les Daphnies pouvant être classées dans cette catégorie sont - en petit nombre, environ 24 dont 9 ayant donné des pontes par- thénogénétiques; dans ce cas, une partie, au moins, de ces œufs avortent. La plupart des individus offrant une maseulini- sation aussi poussée possèdent des gonades nettement anorma- les et se rangent dans la catégorie suivante. Catégorie VII. — Mêmes types morphologiques que précé- demment, mais la ponte ne s'effectue pas et les œufs dégéné- deux côtés, carap. interm. cihée, ic finit 1S L'INTERSEXUAUITÉ CREZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE rent. Dans un grand nombre de cas l'examen histologique à pu «+ déceler l'existence de glandes mixtes renfermant des cellules germinales et ®. Ces ovo-testis sont fréquemment terminés par des canaux déférents plus ou moins bien développés. Voici quelques exemples : N° 99 : Type SG, mais à g. l'ant. est un peu renflée à la base et la carapace ainsi que la pap. gén. sont moins accusés; 2 ovo- _testis dont les œufs n occupent que la région médiane. N° 182 : (fig. 11) tête type ®, a! 8. type G' mais fixe, a! dr., type interm. recourbée et garnie de petites épines dans la région convexe; carapace proche du type G' mais peu ciliée sur- tout à dr.; 2 pattes c', pap. gén. à dr. et non à g.; 2 ovo-testis sans canaux déférents, région çf réduite et dégénérescente. Remarquer l'opposition de la tête de forme Q et du tronc qui est du type G. : 26 R. DE LA VAULX N° 273 : (fig. 12) type c', mais avec a! dr. plus courte et carap. interm. non ciliée à g.; ovo-testis des deux côtés, partie Gs réduite; éphippie anormale. ae da ar tr dd à doué btté d'aitst Fig. 42. — No 273 (X 30). Sur cette figure, ainsi que sur la suivante, la dimension des cellules du gaufrage de l’éphippie a été exagérée. Les cas d’asymétrie inversée sont d’autant plus fréquents que le nombre des parties masculinisées est plus grand. Ex : Fig. 13. — No 258 (X 30). N° 75 : à dr. : a! ®, carapace et patte G', pas de papille; à [N2] 1 L'INTERSEXUALITIÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE g.: a! d', carap. interm., patte Q®, pap. gén; ovaires en dégé- nérescence. N° 97: à dr. : a! G normale, carap. et patte © ; à g. : a! S' fixe à extrémité élargie, soie à la base, carap. légèrement ciliée, patte ® ; pap. gén. rud. des deux côtés, crochets dor- saux ®. 2 ovo-testis avec œufs en dégénérescence, pas de canaux déférents. N° 958 : (fig. 13) à dr. : a! ‘typique, carap. interm., patte interm. presque ®, pap. gén., ovo-testis sans canal déférent dont la partie d'est confinée dans la région moyenne; à g. a! d'courte, carapace plus masculiniséé qu’à droite, patte pap. gén. rud., ovo-testis, avec canal déférent, plein d'œufs, à partie G‘ très réduite. N° 349 : (fig. 14) : tête intermédiaire avec renfoncement Fig. 14, — No 342 (X 31). médian; à dr. : a! ' mobile, carap. d, patte interm. (fouet mais pas de crochel); à g. : at d fixe dirigée vers le bas, carap. Interm., patte interm. (crochet et pas de fouet), postabdo- men type o' mais crochets dorsaux interm.; de chaque côté, ovo-testis avec canal déférent. Catégorie VIII. — Les animaux de cette catégorie (en nombre d'environ 18), très masculinisés portent un testicule 28 R. DE LA VAULX plus ou moins normal d’un côté et de l’autre un ovo-testis. Nous n'avons jamais vu un ovaire normal, capable de pondre, faire pendant à un testicule et il n’est pas impossible que les auteurs (Kurz, KUuTTNER, Banra) ayant signalé des faits de ce genre se soient contentés d’apercevoir, #7 vivo, des œufs dans une glande pour la considérer comme un ovaire. N° 291 : à dr. : a! ‘courte et immobile, carapace et patte 9; à g. : a! g' normale, carap. interm. patte cf, postabdomen À droite, on apercevait, ?n vivo, un testicule avec canal défé- rent; la coupe a montré sur le côté dorsal une tétrade en for- mation (fig. 28). Cet individu constitue donc une forme de pas- sage entre cette catégorie et la précédente. À gauche se trou- Fig. 15. — No 284 (X 31). vaient plusieurs tétrades plus importantes et le canal déférent manquait. N° 83 bis : presque c‘ extérieurement, ant. g. un peu plus courte; testicule normal à g.; ovo-testis (fig. 30) à dr. avec spermatozoïdes et œuf de durée en formation. N° 98 bis : type o° avec œil moins proéminent; à dr. la carapace est légèrement arrondie et se rapproche un peu du type 9 ; à g. : test. normal; à dr, : ovo-testis. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 29 N° 987 : Presque G° sauf la patte gauche qui est du type © ; test. à dr., ovo-testis à g. N° 337 : tête © avec rostre; à dr. : a! Q recourbée avec pro- tubérance, carapace presque ®. patte 9, ovo testis avec œufs mürs pleins de matières de réserve, spermatozoïdes ef canal déférent terminé en cul-de-sac; à g. : a! G', carapace ciliée, patte c', test. mür normal mais dépourvu de canal déférent; postabd. interm, 2 pap. gén. rud. et crochets dorsaux peu déve- loppés. Un cas d’inversion de l’asymétrie est offert par le n° 284 (fig. 15} : à dr. : a! et patte G', carap. cihiée, test. dépourvu de canal déférent, pas de papille; à g.:a! Gf fixe et recourbée carapace non ciliée, patte ®, pap. gén., ovo-testis (fig. 29); tête et crochets dorsaux de forme intermédiaire. Catégorie IX. — Cette catégorie comprend Les animaux munis de deux testicules mais présentant quelque altération du type G normal. Ils sont peu nombreux (5 ou 6). Ex. N° 79: (fig. 16) : type g' parfait sauf pour la carapace légère- ment arrondie à sa partie moyenne et les antennules : celle de droite se rap- proche du genre de la catég. [, par un appendice saillant et sa soie basale : celle de gauche est plus longue et mobile mais dépourvue de flagellum. N° 144 : a! gauche ‘mais la région portant le flagellum est retroussée carap. interm., ‘pour le reste. N° 175 : (fig. 17) à dr. : a! courte et légèr. courbée, carap. interm. portant une encoche, pas de crochet; à g. : carap. interm., pas de crochet, fouet court et recourbé à sa base ;: pap. gén. peu saillantes, crochets dorsaux intermédiaires. N° 900 : la région oculaire est moins haute que la région médiane de la tête. N° 326 : ant. g. plus courte, tête de forme intermédiaire. On à pu voir, par les descriptions précédentes ce qu'une classification fondée sur le nombre des organes modifiés avait d'arbitraire, attendu que chacun de ceux-ci peut être touché à des degrés divers. Cette impression sera confirmée par l'étude & Fig / 30 R. DE LA VAULX de quelques types aberrants ne pouvant être rangés avec exactitude dans les catégories précédentes. Tous les intersexués décrits jusqu'ici offraient des anomalies antennulaires; trois exceptions peuvent être citées. Dans les . deux premiers cas (191 et 293) seul le côté droit de la carapace, Fig. 17. — No 175. (X 47). épaissi el cilié, était maseulinisé. Le n° 274 présentait de plus 2 papilles génitales. Nous avons vu que les individus, chez lesquels l’intersexualité atteint quatre sortes d'organes, n'ont presque jamais de gona- des normales. Exceptionnellement l'impossibilité de pondre, suivie de la dégénérescence des œufs peut se rencontrer chez des animaux appartenant aux cinq premières catégories. Ex. : N° 107 (catég. D) : l'ant. dr. est recourbée et renflée inférieu- rement. Les deux ovaires sont atteints de dégénérescence grais- seuse. | Les no 59 et 185 bien qu'appartenant morphologiquement à la catég. IV ont des ovaires dégénérescents; le second porte . L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 31 même, à g., où se trouve une patte g, une ébauche de canal déférent. Le n° 243 (catég. V) porte à dr. un ovaire dégénérescent et à g. un ovo-testis contenant des spermatogonies, Le n° 181 qui n'a pu être examiné histologiquement semble être dans le même cas. À part le post- abdomen qui est du type femelle, l'ani- RTE mal est d’ailleurs très masculinisé. Les re. D œufs. ne purent également être pondus Nice par le n° 37 (fig. 18) catég. V : à dr. ENER ant. ® avec protubérance, carap. lég. /Oes = masculinisée, à g. a! d'; crochets dor- nie saux ®, pap. génit. des 2 côtés. Res Le n° 330 rentre morphologique- us , T É hs A ment dans la catég. V car son postab- | 1 “ y Le e domen. est du type Q@ ; pourtant il : A 2 porte à dr., côté masculinisé, (a!, carap. et patte GS), un testicule sans canal déférent et à g. (a', carap. et patte ©) une, glande, ovaire ou ovo-testis, dont les œufs non pondus ont dégénéré. Fig. 18 — No 37 (X 30). L'animal est, mort sans pouvoir être Sous le muscle abduc- : teur de l’antenne, se voit fixé. la glande antennaire Tous ces faits montrent qu'il est im- triangulaire. possible de dégager des lois de cor- rélation dans la variation des organes. On peut, tout au plus, faire quelques remarques : Les antennules, si caractéristiques des sexes, sont plus souvent touchées que les autres organes, ce qui provient sans doute de la précocité de leur différen- ciation dans l'embryon. Les gonades sont beaucoup moins fréquemment atteintes que les organes externes, et l'ano- malie dont elles sont atteintes est généralement d'autant plus forte que l’animal est plus masculinisé. Notons également que leur symétrie est beaucoup plus grande que celle des autres régions; ce fait s'explique si l'on se rappelle que d'après Grogsex (79) les glandes génitales ne se séparent en deux masses distinctes que postérieurement à la différenciation des appendices. $ La taille des intersexués des trois ou quatre premières caté- 92 R. DE LA VAULX gories ne diffère pas de celle des femelles normales; elle se réduit ensuite d'autant plus que l’animal est plus masculinisé. I Il est remarquable que, même lorsque la carapace est d’un type sexuel différent à droite et à gauche, on n'observe jamais de distorsion latérale comme chez certains insectes gynandro- morphes. La taille est en effet conditionnée par le métabolisme général qui ne peut se concevoir qu'indivis et uniforme pour l'être tout entier. III. — Morphologie des organes intersexués On a vu, par les individus intersexués décrits au chapitre précédent, que les diverses régions du corps étaient modifiées indépendamment les unes des autres. L'étude particulière des organes aberrants va montrer que cette absence de corrélation se retrouve dans les plus petites parties. Lorsqu'il s'agit d'examiner des détails très fins, 1l y a géné- ralement avantage à employer pour l'étude, la mue qui repro- duit fidèlement les moindres particularités de la morphologie externe. Malheureusement la grande transparence de la dépouille. chitineuse ‘est’ parfois gènante, surtout lorsqu on désire, pour la conserver, monter celle-ci dans un médium plus réfringent que l’eau On peut remédier à ce défaut par la colo- ration, pour laquelle nous avons établi une technique spéciale : La pièce à colorer est immergée pendant un quart d'heure dans une solution concentrée de sulfate ferrique. On rince à l’eau disüllée, puis l’on fait agir une solution de pyrogallol dans l’eau distillée. L'objet prend rapidement une teinte bleue virant bientôt au brun foncé. On laisse une demi-heure dans le colorant et après avoir soigneusement lavé la mue dans l’eau distillée, on la monte dans la gélatine glycérinée. Par ce procédé, nous avons pu, en conservant les mues successives d'un même individu, garder l’image fidèle des sta- des de croissance d’un même organe (voir par exemple les trois mues &, b, c, de l’antennule du n° 201, fig. 19). Antennules. — En raison de la grande divergence qu'ils pré- sentent suivant le sexe et de la fréquence avec laquelle ïls sont modifiés chez les intersexués, ces organes sont ceux dont l'étude est la plus démonstrative. L'INTERSEXUALEITCÉ CHEZ UN CRUSTAC# CLADOCÈRE 33 Rappelons brièvement leurs caractéristiques Antennule Q (fig. 1, a! et fig. 5, second plan) : petite, sub- cylindrique, lisse, immobile, dirigée vers le bas légèrement en Fig. 19 — En haut, antennule de. d’un 7 normal de D. atkinsoni (X 150). J. © n.,antennules et rostre d'une jeune ® normale venant d’éclore. Let [l, ant. gauche du no 39 à l’éclosion et après trois mues. @, b, c, trois stades de croissance de l’ant. dr. du n° 201* d’après les 2e, 3e et 4e mues (X 285). avant, insérée sous le rostre : soie sensitive latérale, à la base, près de l'insertion. Antennule G (fig. 2 et 19) : longue, cylindrique, avec région rétrécie près de l'extrémité distale, recouverte de lignes épi- neuses transversales, mobile, dirigée normalement en avant. AR 3 34 R: DE LA VAULIX ° L'extrémité, légèrement dilatée, porte, en plus des bâtonnets, un flagellum biarticulé muni d’une sorte de -brosse à son extré- mité et la soie sensitive, latéralement, du côté externe. L'ébauche antennulaire apparait de bonne heure, peu après celle de l'antenne et avant tous les autres appendices. Par la suite, l’antennule présentera chez Pembryon et chez le jeune Fig. 20. — Antennules anormales : n0 6 et 10 (au second plan a! & plus réduite) (X 200) ; no 213 (d'après la mue) et no 250 (X 140) ; noS 19, 85 et S5 (X 100). une taille relativement plus grande -que chez l'adulte. A la naissance, elle se montre constituée, chez la femelle, par un gros mamelon conique terminé par les bâtonnets ; la soie sensi- ‘tive, relativement grande et bien dégagée est très visible (J. & n. fig. 19). Chez le c venant d'éclore l’antennule est déjà Æ ia + dt L'INTEÉRSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 39 d'assez grande taille et permet de reconnaitre facilement le sexe, mais elle a la même direction que celle de la © et est dépourvue de flagellum. Ce n’est qu'à la 3° ou 4° mue qu'elle atteint son aspect normal. Le flagellum apparait vers la 2° mue sous la forme d’une petite protubérance. On peut étudier une première série d’appendices intersexués reproduisant plus ou moins fidèlement les principaux stades de croissance de l’antennule mâle. On voit fréquemment des antennules de fype @ ayant à leur base une protubérance qui porte la soie et la ramène en avant Fig. 21. — A, a! dr. du n° 240 ; B,2 a' du n0 305 (d'après les mues) (X 190). (n° 6, fig. 20, n° 257, a! g., fig. 6). Des antennules plus mascu- linisées présentent souvent ce type à l’état jeune (n°39, I, fig. 19). Une accentuation de cette disposition, rapprochant soie et bâtonnets, reproduit un type très voisin de l’antennule du # jeune G'(n° 240, fig. 21). L'allongement de l’appendice, l’appa- rition de l'ornementation épineuse et du flagellum, conduisent par étapes à la réalisation typique de l'organe que possède le mâle adulte. En dépit d’un développement normal, l’antennule des 36 R. DE LA VAULX intersexués peut garder l’immobilité et la direction de l'organe Q correspondant; l’immobilité est due alors, non à l'absence de musculature, mais à la rigidité et à la forme de l'insertion (voir par exemple n° 309, fig. 7 et n° 342, a! g., fig. 14)! La soie sensitive peut occuper des places variables le long de l'anten- nule, indépendamment du stade de développement présenté par celle-ci (Ex. : n° 305, fig. 21 et n° 195, fig. 5). On trouve fréquemment des appendices courbés de diverses façons (Ex. : n° 257, a! dr., fig. 6 et n° 213, fig. 20) et dans ce cas la région convexe est exclusivement ou plus abondamment garnie d’épi- nes, ce qui semble indiquer que la flexion provient d'un plus grand développement de la région plus masculinisée. Les bâtonnets ou le flagellum sont parfois portés par une sorte de diverticulum de l'antenne (n° 83 et 85, fig. 20). Le rostre où s'implantent ces antennules revêt souvent une forme intermédiaire; d'autres fois il est asymétrique, relevé et émoussé du côté où s'insère l’appendice mâle. On trouve néanmoins fréquemment des antennules Œ insérées latérale- ment (n° 250, fig. 10 et 20) ou inférieurement (fig. 7) sur un rostre femelle. Une seconde série montre que la présence du flagellum peut être indépendante des autres caractères mâles. Tandis que chez le mâle celui-ci n'apparait que lorsque l’antennule a presque atteint sa forme définitive, il se montre chez de nombreux : intersexués sur des appendices qui, par la forme et la taille, se rapportent au type femelle. Le flagellum est, dans ce cas, généralement issu d'une protubérance ou d’un diverticulum saillant de diverses régions desl'appendice (n° 10, fig. 20 et n° 97, 199, 909, fig. 22). Certaines antennules, chez lesquelles la protubérance existe seule (fig. 22 à dr.) peuvent être consi- dérées comme des formes de passage conduisant à la disposi- tion précédente. Le flagellum apparait toujours assez tardive- ment, parfois même après une première ponte. De prime abord, il semble que l’on soit, dans ces derniers cas, en présence d'organes femelles évoluant secondairement vers Le type mâle, mais les cas aberrants précédemment décrits et, mieux encore, l'ensemble de ce travail montrent qu'un appendice, pas plus qu'un individu, ne présente pas néces- sairement, dans toutes ses parties, une évolution sexuelle . PE ae ME aid Di %] + | L’'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE à homogène et synchrone. Des antennules de ee type peuvent d’ailleurs se rencontrer chez des intersexués possédant, de l’autre côté, un appendice mâle typique (n° /0, fig. 20). Quand on regarde quelques-uns des types d’antennules aber- 172 à 4 bre 202 fa 135 . e ’ “ , : Fig. 22, — Antennules genre catég. 1 (à dr.) el catég. IT type 1 (à g.) (X 200). rantes que nous figurons, on ne manque pas d'être frappé par la ressemblance qu’elles affectent avec certaines formes réali- sées normalement chez d’autres espèces de Daphnides. C’est ainsi que l’a’ g. du n°74 (fig. 33) reproduit le type d'a’ de D. pulex ; Va! dr. n° 19 (fig. 21) est la copie de l’a! @ des Moïna ; certaines antennules, dont la soie est reportée en avant (genre n° 6, fig. 20), rappellent des types d'a! Q de Simocepha- lus-ou de Scapholeberis ; Va! g. n° 195 (Hig.5) présente une dispo- sition analogue à celle de certaines a! œ de Ceriodaphnia. Asaworra /13, p. 316) avait déjà noté ce fait et y voyait une preuve de l’affinité génétique des genres. Ces ressemblances nous suggèrent une autre idée, à savoir l'existence de degrés 38 R DE. LA EAUX dans la différeneiation sexuelle des divers genres ou espèces de la famille des Daphnides. Cette hypothèse n'a plus rien de choquant maintenant que l'on tend de plus en plus à voir dans le sexe une caractéristique capable de manifester des degrés, une notion non plus seulement qualitative mais quantitative. On sait par les expériences de Rinpce (Pigeons à deux ovaires), Lis. 23. — Premières pattes droiles normales mäle el femelle (d'après la ; P mue) (X.122): de STEeINAcH (hypermasculinisation d'un castrat consécutive à la greffe) et les observations de Moncax (super-màles d'Unca à deux grosses pinces) qu'il est même possible d'exalter les L'INTERSEXUALITÉ CUHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 39 caractères sexuels normaux d'un individu. Il est permis de voir dans les formes intersexuelles de D. atkinsoni, espèce à types sexuels très opposés, des étapes de différenciation mor- phologique auxquelles se sont arrêtés certains genres de Daph- nides. Pattes. — La constitution des pattes de la première paire est assez compliquée et demande à être schématisée. Un tronc cylindrique (fig. 23) porte, en plus de la lame branchiale externe, 12 soies principales réparties de la manière suivante : en haut, deux soies en forme de crochets servant, ainsi que les griffes du postabdomen, à débarrasser la région buccale des détritus pouvant l’obstruer ; latéralement 3 groupes de soies ciliées repliées vers l’intérieur : 4 soies partant directement du tronc puis deux groupes de deux, portées par une pièce basi- laire. Derrière cette première rangée se trouve une autre com- prenant 3 soies secondaires (4 chez Je c') peu ou pas cihées. Enfin, à la partie antéro-imférieure du tronc partent 2 soies importantes portées chacune par une région basilaire assez large et qui sont, l’une et l’autre, caractéristiques du sexe. Chez la ©, les deux soies ne diffèrent guère que par la taille : l'antérieure (L, fig. 23) est la plus développée et présente à la base de son insertion une soie minuscule. Chez le «° la soie antérieure s'allonge considérablement et forme le fouet (I à g., fig. 23, sa partie basilaire est étroite et mobile. Par contre, la région d’où part l’autre soie (Il à g., fig. 23) est fortement élar- gie et porte un crochet destiné à retenir la femelle lors de Pac- couplement. Cette soie (11) est beaucoup plus courte que chez la Q© mais, à côté d'elle, part une seconle soie assez réduite. Chez le jeune G'le crochet est rudimentaire et les deux soies (Let Il) ne diffèrent pas plus entre elles que chez la Q. C'est une disposition analogue que devraient présenter les intersexués si l’on admet qu'ils proviennent d'un revirement dans la dominance sexuelle (Goznscammpr). Effectivement plu- sieurs d'entre eux portent de tels appendices (n° 187, fig. 24) mais d'un seul côté, la symétrie étant exceptionnelle. À la vérité, la plupart des pattes intersexuées que nous avons examinées offrent des dispositions beaucoup plus complexes, de sorte que, là encore, on est forcé de reconnaitre l'indépendance de varia- tion des parties d’un mème organe. Voici quelques exemples : 40 KR: DIS LA VAULX . ke: AUS Fig. 24. — Première patte droite inter- sexuée du n° /84 (d'après Ja mue), (X 186). Fig. 25. — A, première palle g. inters. du n° # ; crochet à peine ébauché. — B, première patle dr. inters. du n° 251 ; crochet rudimentaire (X 122). — CO, crochet anormal biarliculé de la patte dr. du n0 263 (X 100). L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN ÜURUSTACÉ CLADOCÉRE 1 On observe fréquemment des pattes offrant le type c° mais sans crochet (n° 173, 175, fig. 17 côté droit, 181, 185, 969, 349, fig. 14 à g.), celui-ci est parfois représenté par un petit appendice (n° 3, fig. 25) ou demeure à l’état rudimentaire (n° 951, fig. 25). Lorsque le crochet manque totalement 1l n’est pas rare de voir la partie basilaire de la seconde soie se recour- ber en imitant la forme du crochet (n° 349, fig. 14 à g.). Dans d’autres cas, on trouve au contraire un crochet bien développé sur des pattes munies d'un fouet court semblable à la soie Q (n° 243, fig. 9). Trois fois, nous avons pu constater sur un même animal, de part et d'autre, la présence des deux types (crochet sans fouet et fouet sans crochet), réalisant ainsi une inversion compensatrice de l’asymétrie (n° 94, 969, 349, fig. 14). Les pattes intersexuées peuvent porter 3 soies secon- daires (type ©) ou 4 (type d) indépendamment de leurs autres particularités. Signalons également quelques cas bizarres : l’atrophie pres. que complète du fouet (n° 272) ou la flexion de sa base (n° 175 à g. fig. 17), la présence d'une articulation au milieu du cro- chet {n° 263, C, fig. 25). Les pattes intersexuées peuvent faire pendant soit à des pattes normales G' ou ®, soit à des appendices anormaux. Carapace. — Elle offre très rarement le type G'normal chez les intersexués mais réalise presque toujours une disposition intermédiaire soit dans son contour, soit dans l'importance de sa ciliation. Les deux côtés varient indépendamment lun de l'autre (n° 199, fig. 26). On observe parfois, sur les valves, des encoches (n° {75 à dr. fig. 17) qui sont peut-être imputables à leur formation intersexuelle. Postabdomen — On peut trouver tous les termes de passage entre le type ©'et le type cf, bien que ce dernier ne soit guère réalisé complètement que dans la IX° catégorie. Le premier indice de maseulinisation de cet organe est fourni par une inter- _ruption dans la ligne épineuse qui doit être continue chez la femelle ; dans ce cas, la région qui précède les griffes est fré- . quemment proéminente (n° 2/6, à g. fig. 27). On observe ensuite tous les intermédiaires entre la papille génitale de taille nor- male et son ébauche. Il faut noter que la présence de la papille n'implique nullement l'existence d’un canal déférent et que les rs 19 R. DE LA VAULX deux côtés du postabdomen varient indépendamment l’un de l’autre. Trois fois (n°5 77, 161, 341, fig. 27), nous avons vu une papille minuscule occuper une place inaccoutumée sur le postabdomen ; de l’autre côté se trouvait une papille normale. Les crochets abdominaux dorsaux, presque nuls chez le G Fig. 26. — Mue de la carapace du Fig. 27. — Parties terminales des n° 199, 1ype © à dr., type interm. postabdomens intersexués des très masculinisé à g. (X 32). nos 246 (en haut) et 341(en bas), d'après les mues (X 100). (fig. 2) et très développés chez la Q (fig. 1), offrent des formes intermédiaires chez les intersexués très masculinisés (Ex. : n°907, fig. 8 ; 950, fig. 10; 309, fie. 71: 349 48, 14) De l’étude détaillée des organes comme de celle des indivi- dus se dégage la même impression. Il n’y a pas de corrélation entre les variations sexuelles des diverses parties du corps. IV. — Les glandes génitales des intersexués Parmi les premiers auteursayant décrit des anomalies sexuelles chez les Cladocères, les uns se sont exclusivement attachés à la L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 43 description des formes extérieures, les autres se sont bornés à mentionner la présence de glandes normales : soit de deux ovaires, soit d'un ovaire d'un côté et d’un testicule de l’autre (Kurz, Kurrner). Banra, dans sa première note, à signalé briè- vement l'existence de glandes mixtes dans la phrase suivante : «the same individual, even the same sex gland, may develop eggs and sperm at the same time or sperm at one time and (æ, -eggs at another time » (16, p. 582). Les nombreux individus que nous avons eu l’occasion d’exa- miner vont nous permettre d'apporter quelques précisions. fl est d'autant plus utile de spécifier, dans chaque cas, l’état des gonades que beaucoup de biologistes, s'appuyant sur la théorie des hormones, si fertile chez les vertébrés, s’obstinent à recher- cher partout une relation causale entre les caractères primaires et les caractères secondaires. Rappelons brièvement la constitution des gonades normales. Le testicule jeune consiste en une masse allongée formée de _cellules spermatogoniales et enveloppée dans une mince paroi membraneuse se terminant en canal déférent. A l’état adulte il est rempli de spermatozoïdes, courts bâtonnets de 4 à 5 4 de. longueur et les spermatogonies ne forment qu'un revêtement de quelques couches à l'intérieur de la paroi. Caamgers (18) à montré comment les spermatogonies évoluent par «ilots » jus- qu'au stade spermatozoïde. À ce moment, les ilots confluent pour ne plus former qu'une masse de sperme enrobant les spermatozoïdes libres. À l'état jeune, l'ovaire ne se distingue guère du testicule, mais les cellules germinales ne tardent pas à se transformer en oocytes et en œufs. Sur une glande müre, on voit qu'elles naissent uniquement de la région inférieure d’un germarium dont les cellules augmentent progressivement de taille en s’éloi- gnant de leur point d'origine. Elles apparaissent par groupes de quatre ou tétrades, dont seule la troisième cellule en partant du germarium est destinée à donner un œuf après avoir absorbé les trois autres. Les œufs augmentent encore considérablement de volume en se remplissant de vitellus et de graisse et sont pondus quelques minutes après la mue. Ils se fraientun passage à travers les cellules du germarium puis s'engagent dans l’ovi- ducte, formé par une couche de cellules épithéliales revêtue / R. DE LA VAULX Fr intérieurement d'une mince paroi chitineuse. Vu l'exiguïté de l'orifice, les œufs sont en quelque sorte éjectés, Les globules vitellins passant à la file comme les grains d'un sablier. Pen- dant la ponte, l’œuf revêt ainsi la forme d’un bissac pour pren- dre ensuite, dans la cavité incubatrice, celle d’un croissant, puis d’une sphère. Nous avons déjà eu l'occasion d'indiquer, au chapitre Il, que la grande majorité des individus intersexués possèdent des ovaires normaux. Un très petit nombre d’entre eux portent deux testicules (catég. IX). Nous avons rangé dans les catégo- ries VIT et VIII les animaux présentant soit deux glandes anor- males soit un testicule et un ovotestis. Un premier point à examiner est celui de la fécondité. Celle- ci ne semble nullement diminuée chez les animaux portant des anomalies légères, tels que ceux qui sont classés dans les trois ou quatre premières catégories ; mais il est remarquable que chez les individus des catégories suivantes, portant des ovaires d'apparence tout à fait normale et nourris copieusement, les pontes ne dépassent jamais un certain maximum notablement * inférieur aux chiffres habituels. Ces œufs, pondus en petit nom- bre, éclosent généralement normalement mais, dans quelques cas, il y à un certain déchet, quelques-uns d’entre eux dégéné- rant à un stade plus ou moins avancé (voir les exemples cités au chapitre IT, catég. VD. Il nous a même été donné d'observer un embryon anormal fort curieux, déjà décrit par ailleurs (18). I s'agissait d'une dissociation des blastomères, donnant à l'embryon l’apparence d'une petite morula dont chaque cellule serait munie d’une sorte de pseudopode à croissance rapide. Un phénomène d’osmose était probablement cause de ces productions bizarres. Un degré de plus dans l’anomalie est marqué par la suppres- sion de la ponte. Bien que l'ovaire soit rempli d'œufs mûrs, ceux-ci ne sont pas évacués après la mue, comme d'habitude, et après quelques mues stériles, on assiste à leur dégénéres- cence. Is s'infiltrent de plus en plus de graisse, ce qui leur donne, en lumière réfléchie, une couleur blanchâtre analogue à celle des œufs de durée. L'impossibilité d’évacuer les œufs pro- vient, le plus souvent, d'une malformation de la partie inférieure de l'ovaire qui porte parfois une ébauche de canal déférent. rss L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE Cette impossibilité de pondre, suivie de la dégénérescence des œufs, affecte généralement les deux ovaires mais dans quelques cas un seul côté est atteint (n° 2/7, voir Tableau 11). Elle peut même succéder à une ponte effectuée normalement ; mais alors les œufs pondus sont en nombre très restreint et souvent avortent (Ex : n° 161 catég. VI: ov. dr. dégénéresc. ; ov. g. pond { œuf d’où sort une Q puis s'intiltre de graisse et dégénère; n° 237 catég. V : pond plusieurs œufs qui avortent. puis, les ovaires dégénèrent). Lorsqu'on pratique des coupes (!) à travers ces glandes anor- males on ne trouve parfois que des œufs, dont plusieurs dans un état plus ou moins avancé de dégénérescence, envahis par la graisse et réduits à leurs substances de réserve, mais, le plus souvent, on distingue des cellules germinales mâles : amas de spermatogonies ou de spermatocytes, ilots de spermatides ou de spermatozoïdes. Ceux-ci peuvent se rencontrer dans diverses régions de la gonade, entourés par les œufs ou leurs produits de dégénérescence. Comment doit-on concevoir la formation et l’évolution de ces glandes mixtes ou ovo-testis? L'observation sur le vivant ne peut apporter d'indications suffisantes et la méthode des coupes interdit de suivre l'évolution d’une gonade. H faut donc se contenter d'interpréter les séries de coupes fournies par plusieurs individus. Il ressort de cette étude que, dans la majo- rité des cas tout au moins, les ovo-testis doivent être considé- rés comme des testicules dans lesquels des œufs se sont déve- loppés secondairement. Cette manière de voir est d’ailleurs en accord avec les enseignements de la morphologie externe qui montre qu'un développement orienté vers le sexe mâle a été, par la suite, enrayé et détourné de sa direction primitive par la DA Re de facteurs femelles (?). Notons que dans les glandes mixtes les éléments mâles s'arrêtent généralement à (‘) La plupart de nos échantillons ont été fixés au Bouin alcoolique et colorés à l'hémalun-éosine; tel est, en particulier, le cas des nes 83 bis, 284, 291 dont les couÿes sont figurées ci-contre. D'autres exemplaires furent fixés au Flemming ou au Carnoy et colorés à l'hématoxyline au fer. (2) IE est-bien entendu que l'emploi des mots facteurs ou déterminant DE dE nullement l'adoption des théories particulaires : ce sont des mots © QUES pour désigner la ou les causes qui déterminent l'apparition d'un sexe, 46 R+ DE LA VAULX un stade jeune, spermatogonies, spermatocytes ou spermatides ; les spermatozoïdes libres sont rares Voici quelques exemples illustrant les conclusions précéden- tes : Le n° 297 (voir chap. I, catég. VII) semble, in vivo, avoir un testicule à droite, tandis que de l’autre côté on distingue une glande renfermant des œufs. La coupe de l'animal montre, en effet, à droite, un testicule demeuré à un stade jeune, rem- Fig, 28. — Région moyenne du Fig. 29. — Ovo-testis gauche du n0 284. testicule droit du n° 291 mon- Les œufs sont confinés dans la moitié trant une jeune tétrade (X 600). supérieure (X 215). pli de spermatogonie, avec quelques régions dégénérescentes et des infiltrations de graisse mais, vers le milieu de la longueur de la glande, on aperçoit, latéralement, 4 cellules volumineu- ses (fig. 28) constituant à n'en pas douter une tétrade jeune (rappelle ce que Zo6rar (17) a trouvé chez Apus). L'autre glande / L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE — rs offre un aspect analogue, mais à un stade plus avancé : on dis- tingue dans la région inférieure, refoulant les spermatogonies, une grosse tétrade et d’autres cel- lules femelles moins développées. Le n°287 (fig. 15) possède, à droite, un testicule dépourvu de canal déférent, à développement retardé, rempli de spermatides (bàtonnets spermatiques encore inclus dans le noyau) et à gauche un ovo-testis typique (fig. 29). Contrairement au cas précédent, c'est ici la région inférieure qui contient les sperma- togonies et les ilots de spermati- des ; dans la région moyenne, on distingue des œufs en croissance, tandis que la partie supérieure est occupée par un œuf mür, rempli de matières de réserve. Le n° 98 brs (voir catég. VIIT) possède, à droite, un ovo-leslis contenant dans la région médiane un-certain nombre d'œufs parthénogénétiques et un œuf de durée en formation. Le reste de la gonade, terminée d’ail- leurs par un canal déférent est rempli de spermatogonies et de spermatides. L’ovo-testis du n° 83 bis (catég. VIIT) offre une structure analogue mais avec des _ilots de spermatozoïdes libres (fig. 30). Le n° 99, presque mâle extérieurement, possède deux ovo- testis dans lesquels les œufs sont confinés dans la région médiane. Dans beaucoup de cas, la partie Fig. 30. — Ovo-lestis droit du no 83 bis. On distingue 3 ilots de spermatozoïdes (s) dans la moitié inférieure de la glande (X 252). mâle est réduite à de minuscules ilots de spermatides. Ces glandes mixtes sont parfois terminées par un canal défé- rent normal mais, le plus souvent, celui-ci se réduit à une » 4S R. DE LA NAULX ébauche plus ou moins importante. La glande peut même se terminer en cul-de-sac. Il n'y a d’ailleurs aucun rapport strict entre le développement du canal déférent et la constitution histologique de la gonade. Ex. : n°958 : ovo-testis g. avec canal déférent, partie G‘réduite à un ilot confiné à la partie inférieure ; ovo-testis droit analogue, mais sans canal déférent; n° 287 : tes- ticule droit à développement retardé, mais sans œufs, pas de canal déférent. A la question des glandes génitales se rattache celle de la teneur en graisse. On a insisté, ces derniers temps, sur la différence de métabo- lisme qui, en dehors des dissemblances morphologiques, per- mettrait de distinguer le mâle de la femelle. En particulier chez les Daphnies, G. Smira (15) a souligné la différence qui existe, dans la teneur en graisse et en glycogène, entre les femelles parthénogénétiques d’une part et les éphippiales et Les mâles d'autre part. Pour cet auteur, c'est en modifiant le méta- bolisme que les diverses conditions expérimentées par lui (tem- pérature, accumulation !« crowding » |) agiraient sur la réparti- tion des individus sexués. L'accumulation de glycogène déterminerait la reproduction parthénogénétique, tandis que la forte teneur en graisse serait en rapport avec la reproduction sexuée. Si la quantité de glycogène, décelée par la réaction de l'iode ioduré, nous a paru différer fort peu dans les deux sexes, il n’en est pas de même pour la graisse. On peut constater facilement, même à l'œil nu, que dans des conditions nutritives semblables les mâles a des réserves adipeuses (généralement colo- rées en rouge-orangé) beaucoup plus considérables que celles des femelles parthénogénétiques. Mais ce fait ne dépendrait-1l pas simplement du fonctionnement des ovaires, absorbant les graisses au fur et à mesure de leur assimilation ? Les observa- tions suivantes nous semblent plaider en faveur de cette manière de voir. 1° Aucune différence n’est observée chez les animaux mal nourris, mais alors les femelles sont à peu près stériles. Dès que l'alimentation devient favorable, les mâles se chargent de cor- puscules graisseux et les femelles pondent abondamment. 2 Lorsque des femelles sont accidentellement stériles, leur dl. PET: L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 49 corps est bourré de globules graisseux aussi abondamment que celui du mâle. C'était, en particulier, le cas chez des femel- les ayant subi une sorte de castration parasitaire par infestation de microsporidies (probablement Pleëstophora acuta Moniez). 3° Lorsqu'un seul ovaire ne fonctionne pas, la graisse est plus abondante de ce côté. 4° Le corps des gynandromorphes incapables de pondre est peu à peu envahi par la graisse. Celle-ci est, au contraire, en quantité normale lorsque les pontes se produisent régulière- ment. Il n’est pas étonnant que les femelles éphippiales, bien nour- ries, accumulent de la graisse, car la formation des deux œufs de durée absorbe nécessairement moins de graisse que celle de nombreux œufs parthénogénétiques. On voit, par l'exposé de ces faits, sans qu'il soit nécessaire d'insister, que la teneur en graisse des gynandromorphes est en rapport, non avec le degré d’intersexualité totale, tel que le révèle la morphologie, mais avec la nature et le fonctionnement des glandes ("). (‘) En expérimentant sur des animaux plus gros que les Cladocères, il y aurait de bien curieuses éludes à faire sur le métabolisme des inlersexuës et des gynan- dromorphes. Il est remarquable que chez les Insectes, le sang de l’un des sexes est toxique pour l’autre. Chez un Lymantria, genre de Bombycien ayant fourni un grand nombre dl’anomalies sexuelles, le mélange des hémolymphes du mäle et de la femelle provoque un abondant précipité qui ne se proiluit pas lorsque celles-ci proviennent d'individus de même sexe (0. Srecue, Zeit. indukt. Abstam. Vererb., VIII, 1912). On peut admettre « priori, que les caractéristiques humorales des intersexués résultent du mélange ou, mieux, de l'interaction des prodails de métabolisme propres au sexe mate et au sexe femelle. Il s’agit, en toui cas, d’un milieu interne nouveau, différent, et il est très significatif qu'il ne provoque pas, sur la totalité des organes de l'individu anormal, des formes sexuelles également nouvelles, inédites, pour ainsi dire, mais coexiste avec une juxtaposition, soit de formes sexuelles normales, soit de formes intermédiaires réductibles à des formes nor- males à développement rudimentaire. De loute évidence, il n'y à pas de rapport étroit entre le métabolisme général, caractéristique imdivise de l'animal, et les formes sexuelles opposées offertes par la worpholoyie. Il résulte de ces considérations qu'il serait peut-être téméraire de s'autoriser de quelques expériences de morphogénie expérimentale pour attribuer la genèse des formes aux causes (hormones, harmozones, substances chimiques, ele.) qui, parfois, déclenchent ou inhibent leur manifestation, Dans les phénomènes de la sexualité, le métabolisme intracellulaire semble être plus intéressant à considérer que le métabolisme général révélé par l'étude du milieu intérieur. 50 R. DE LA VAULX V. — Les Ephippies des Intersexués On sait que les Cladocères sont capables de pondre, non seu- lement des œufs parthénogénétiques à développement immédiat, mais encore des œufs à coque dure, ne se développant qu'après fécondation pour donner toujours des individus femelles. Ces « œufs de durée () » improprement nommés parfois œufs d'hiver, résultent d'une ovogénèse spéciale. Chez les Daphnies, ils proviennent d’une tétrade dont la cellule œuf, régulière- ment située au niveau de l'insertion de la cinquième patte, s’in- filtre de fines gouttelettes graisseuses, ce qui lui donne une teinte grise en lumière directe et blanchâtre en lumière réflé- chie. Cet œuf absorbe, non seulement les trois cellules nour- ricières de sa tétrade, mais toutes les autres tétrades de l'ovaire et finit par remplir complètement celui-ci. Pour recevoir ces œufs, capables de supporter la gelée et la dessiccation, la cavité incubatrice se modifie de façon particu- lière de manière à leur constituer une sorte d'enveloppe pro- tectrice ou éphippie qui se détache au moment de la mue. Il est d'autant plus utile de définir la constitution de cette éphippie que les ouvrages français en donnent généralement une descrip- tion inexacte, la présentant comme un épaississement de la région interne de la carapace (voir, entre autres, Ricaarn 95, p. 322). En réalité elle est formée par les régions ?nternes et externes de la carapace correspondant à la cavité incubatrice. La partie externe est la plus modifiée (gaufrage, pigmentation, formation des loges); c’est elle qui donne à l’éphippie un aspect caracté- ristique pour chaque espèce. La présence de l’éphippie apporte à la mue les modifications suivantes : 1° Celle-ci s'effectue après la ponte et non plus avant, ce qui. aurait pour résultat de priver les œufs de leur enveloppe protec- trice. 2° La fente dorsale par laquelle la Daphnie parthénogéné- tique se libère de sa dépouille chitineuse est remplacée par {!) Cette expression, traduction litlérale du mot allemand Pauerei, est généra- lement employée par les auteurs. Le terme d'œufs fécondubles serait peut-être plus clair. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÉÈRE 51 deux incisions internes et externes, contournant l'éphippie et destinées à la séparer du reste de la mue des valves qui se trouve ainsi réduite à deux pièces falciformes (fig. 31). La partie interne de l’éphippie enveloppé Les œufs peu après la ponte, mais les valves externes ne peuvent naturellement se refermer qu'après s'être dégagées de la carapace maternelle. Cette libération peut se produire grâce à la grande souplesse de la nouvelle carapace qui présente d'ailleurs, pendant quel- que temps après, un aspect chifflonné caractéristique. Il est si … Fig. 31. — Ephippie légèrement anormale (échancerure inférieure) du n° 211. La ligne pointillée rétablit le contour normal du gaufrage. En avant, mue de la valve droite (X 40). difficile de concevoir, à priori, le dégagement de la nouvelle carapace, pincée entre les œufs et les deux valves bosselées de l’'éphippie, que l'on s'explique que F. A. Surrr (61) ait pu to R. DE LA VAULX mettre en doute les descriptions si précises de J. Lusrock (57). L'éphippie de D. atkinsont est très caractéristique. Elle com- porte deux loges subtriangulaires inégales dont la plus petite estsituée à l'extrémité caudale. Elle est surmontée par une pièce cordiforme découpée dans la mue céphalique (voir $ F, p. 1%) très caractéristique de l'espèce (fig. 31). Dès nos premières trouvailles, nous nous étions demandé si les femelles manifestant des caractères mâles seraient capables de produire des œufs de durée et de former des éphippies. Ce Fig. 32. — Côtés droit et gauche du n° 45 (X 31). point n'était pas encore élucidé par les auteurs. Les 30° et 35° gynandromorphes nous permirent de trancher la question par l’affirmative. Ces individus portaient des éphippies tout à fait normales, mais l’on pouvait se demander si cela ne prove- nait pas de leur faible masculinisation. Par la suite, nous avons pu étudier un grand nombre d'éphip. pies portées par des animaux, souvent très masculinisés, et constater qu'elles présentent presque toujours des anomalies d'importances diverses. La plus fréquente de celles-ci consiste dans une échancrure plus ou moins prononcée de la région inférieure, intéressant soit les deux côtés, soit un seul (8 eas, | | | se. 2e cn dmuntt 473 L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 53 voir échancrure très faible fig. 31). Cette anomalie peut s'ajouter à d’autres plus importantes (n° 45 (fig. 32 , n° 96, n° 170) J- Fréquemment, les loges sont réduites en nombre (n° 45, côté Fig. 33. — No 74 (catég. I). Côté g. de la loge inférieure réduit et non pigmenté (X 38). dr., fig. 32) ou en étendue (n° 77 (fig. 33), loge infér. g. réduite et non pigmentée) et peuvent.mème disparaitre (n° 958, fig. 13) et le gaufrage ne se montre que par plages irrégulières (n° 273 g., fig. 12). Parfois, principalement lorsque le dessin de l'éphip- pie est rudimentaire, la mue ne s'effectue pas suivant le type éphippial décrit plus haut mais avec la fente dorsale habituelle. Les éphippies anormales sont presque toujours asvmétriques et 1l est intéressant d'examiner le rapport qui peut exister entre leurs aberrations et celles du reste du corps. D'une façon géné- rale, les éphippies les plus anormales se rencontrent sur les individus rangés dans les catégories VI et VIT, mais contraire- ment à ce que l’on pourrait prévoir, ce n’est pas nécessairement du côté le plus masculinisé que les anomalies éphippiales sont 1 R, DE LA VAULX le plus prononcées. L'indépendance des parties, déjà reconnue à propos des autres organes, se manifeste d'autant plus dans le cas présent que l’activité des gonades joue certainement un rôle dans la construction des éphippies. En effet, celles c1 n'appa- raissent que lorsqu'un œuf de durée se forme dans l'ovaire et1l est possible qu'une gonade anormale secrète des produits hor- moniques capables de nuire à leur formation. Il est néanmoins certain que la forme de l’éphippie est, avant tout, déterminée par une sorte de structure latente de la carapace, ainsi qu’il résulte des observations suivantes : n° 45 (fig. 32), l'éphippie est échangée des deux côtés et ne possède qu'une loge, l'inférieure, du côté le plus masculinisé, Pourtant, des œufs de durée bien formés et égaux se trouvent dans les ovaires. Ceux-ci sont nor- maux et ont donné précédemment des œufs parthénogénétiques Fig. 34. — Région supérieure g. des {re el 3e éphippies du n0 84 (X 44). en assez grand nombre (voir plus loin chap. VIE tableau 1). Le n° #8, catég. IV, faiblement masculinisé à gauche, forme, après 6 pontes parthénogénétiques normales, 3 éphippies, foutes légè- rement échancrées inférieurement des deux côtés, puis trois autres pontes normales, Le n° 87, catég. VI, après deux pontes mixtes (cg, © et inters.) porte une éphippie normale à gauche, mais échancrée inférieurement à droite (côté Le plus maseuh- nisé). L'animal forme encore deux éphippies qui, bien que séparées de la précédente par une ponte parthénogénétique, présentent la même anomalie. Le cas du n° 84, catég. V, est plus complexe : des trois éphippies successivement formées, la seconde était normale, tandis que la première et la troisième offraient, à gauche (côté légèrement plus masculinisé), des ano- malies différentes mais intéressant la même région (fig. 34). Dans les trois cas, l'œuf de durée, à peine ébauché, faisait place à une ovogénèse parthénogénétique, et avant la troisième éphippie trois œufs (dont deux avortèrent) furent pondus. tons PR TE L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 99 Dans les exemples précédents, l’anomalie éphippiale affecte le côté Le plus masculinisé ; il n’en est plus de même dans les suivants : N° 130 : à dr. : a', patte et carap. ©, pap. gén., 3 œufs blan- châtres dans l'ovaire (œufs de durée?), éphippie sans loge ; à ge. : a’, patte, carap. G', pas de pap. gén., ovaire d'abord peu visible, se remplit par la suite d'œufs qui dégénèrent, éphippie normale à 2 loges. Le n° 170, catée. V, porte une éphippie ayant deux loges du côté le plus maseulinisé et une loge de l’autre. N° 279, catég. IV, à dr. : a! G, © pour le reste, pas de loge de ce côté de l’éphippie ; à g. : a! interméd: carap. très légèr. masculinisée, 2 loges à l'éphippie : deux ovaires identiques de part et d'autre. N° 958, catég. VII (fig. 13), ovo-testis de chaque côté mais région spermatique plus étendue à g.; asymétrie mver- sée; ephippie sans loge des deux côtés. N° 273, catég. VIT (fig. 12), masculinisation très forte, un peu supérieure à g.; 2 ovo-testis ; celui de g. contient un ilot de sperme dans la région inférieure, deux œufs parthénogénétiques mûrs et un œuf de durée en for- mation ; celui de droite n’a pu être étudié en entier mais semble contenir également un œuf de durée en plus des œufs parthé- nogénétiques et des ilots de sperme; éphippie anormale un peu plus rudimentaire à gauche. Il semble que, de tous ces faits, on peut conclure que, si la forme que peut présenter l'éphippie dépend de la morphologie de l'animal, sa production plus ou moins complète est sous lin- fluence des gonades. C'est d'ailleurs le seul cas où lon soit autorisé à mettre en cause une action hormonique dans la struc- ture des intersexués ("). Il arrive fréquemment que l’œuf de durée, avant, ou même après son développement complet, est absorbé par des œufs parthénogénétiques qui, peu à peu se substituent à lui etil peut mème se produire qu'après la formation d’un premier œuf et la libération d’une éphippie vide, il en apparaisse un second qui repousse Le premier. On peut trouver ainsi, dans le mème ovaire, (') Le cas des éphippies n'est pas le seul où l'on puisse, chez le: Invertébrés, soupçonner l'influence d’une hormone. Celle ci parait se manifester chez les Lom- brics : Sozzas 1914 ct Hanus 1912), chez des Mollusques (Crepidula, Gouzo 1917), chez des Planaires (A. Vanpez, C. À. Ac. Se. 1920). Certains changements de tro- pisme en rapport avec l’activité des gonades (vol nuptial, etc.) sont aussi proba- bvlement sous la dépendance de sécrétions internes. 56 RLDE LA VAULX trois œufs de durée reconnaissables à leur aspect blanchâtre en lumière réfléchie. Il est même possible de voir deux œufs de durée S'ébaucher en même temps dans un ovaire, mais l’un des deux disparait alors assez vite. On sait que, dans une population de Cladocères, l'apparition des mâles est presque toujours accompagnée par la formation d'éphippies chez certaines femelles ; on peut done se demander si les femelles masculinisées ne sont pas prédisposées à porter des éphippies, réalisant ainsi les deux formes gamogénétiques sur un même individu. Îl semble bien, d'après certaines obser- vations, qu'il en soit effectivement ainsi. Le J'octobre 1919 nous trouvons, au cours de prélèvements dans une culture, 19 © adultes normales sans éphippie, 2 G'et 7 inters. dont 3 éphippiales. Le 16 mars 1920, 10 © norm. dont 1 à éphippie et 2 inters. dont 1 à éphippie etle 23 de ce même mois 34 © norm. dont 2 à éphippie et 4 inters. dont 2 à éphip- ; É 3E pie, ce qui donne au total pour les © norm. “sr et pour les s 3E 6 CRT inters. : —, proportion tout à fait remarquable. L'examen des ) portées peut fournir des exemples analogues : dans une portée de 10 (5 Q et 5 intersexués) seul l’intersexué 988 (catég. VID) porte une éphippie d’ailleurs anormale : sur une ponte de 12 Q@ et 2 intersexués, seul l'intersexué 2/9, le plus masculinisé, porte une éphippie. Ces Jails mettent en linnière la prépondérance des facteurs internes dans la production des œufs de durée et des éphippres. I faut, enfin, remarquer que les intersexués porteurs d'éphip- pie ne se répartissent pas également dans les diverses catégo- ries que nous avons établies, mais se rencontrent dans les pro- portions suivantes : 0 1 4 D) PL) 3 rx 8 $ 1 é = = ses Fe Jia A 2e UT Cat. les" T's, Us , I\ à IN ssl SN 5; VIFS (os soil: 00/0 30,0. 7,2 0,0 7.30/0 16,60/0 12,50/0 190/0 5,5 0/0 Ces chiffres, assez faibles, n'ont que la valeur d’une simple indication, mais il est intéressant de constater qu'ils confirment (‘) I s'agissait d’une trace, lrés légère, de formation éphippiale. I est évident que lorsque la masculinisation est poussée aussi loin que chez les individus de la VITE categorie elle devient un obstacle à la production des éphippies. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE )7 le rapport, déjà soupçonné, entre le haut degré de masculini- sation et l'aptitude à former des éphippies. Dans un seul cas, il nous à été possible de constater la fécon- dation d'un intersexué éphippial ‘(n° 35, catég. IV). Des œufs de durée sortirent deux femelles qui malheureusementne vécu- rent que très peu de temps. Un des principaux intérêts de l'étude des éphippies anor- males est qu'elle met en évidence l'existence d’une constitution intersexuelle dans des régions habituellement dépourvues de caractéristiques sexuelles morphologiques. La nature sexuelle d’une partie du corps ne peut, en effet, être définie que là où elle se manifeste par des aspects nette- ment différents, mais, même sur les territoires morphologique- ment neutres, toute cellule possède une sexualité virtuelle. C'est un de ces états latents que la formation d'un œuf de durée révèle en provoquant l'apparition d’une éphippie. Celle-ci est normale si la région où elle se constitue est purement femelle : dans le cas contraire, l’intersexualité se manifeste par des ano- malies. VI. — Régénération des antennules On sait, par les expériences de Przisram (99) et de KurTrner (13), que les branches des antennes rameuses des Cladocères ne régénèrent pas après sectionnement mais que le moignon du membre se garnit bientôt de soies ciliées semblables à celles que la mutilation a fait perdre. Celles-ci repoussent, d’ailleurs, en nombre variable. Nous avons souvent eu l’occasion de véri- fier le fait. Le nombre des soies apparaissant après la mutila- tion est en effet irrégulier, fréquemment plus grand que la normale, mais il semble y avoir parfois une sorte de compen- sation entre les deux branches. C'est ainsi que nous avons pu observer, après sectionnement, respectivement 8 et 1 soies, réalisant ensemble le même total 9 (5 et 4) que sur les branches normales. Une antenne, naturellement anormale, présentait un exemple de compensation analogue : la branche antérieure possédait deux articles au lieu de trois: or le segment inférieur, tenant la place des deux articles manquants, normalement 58 R. DE LA VAULX munis chacun d'une soie distale, portait, à son extrémité, deux soies au lieu d'une. Ayant refait des expériences semblables sur les antennules des mâles, nous avons constaté une régénération très nette de ces organes, à condition de ne pas pratiquer la section trop près du point d'insertion. Le membre mutilé reprend sa longueur primitive mais en s'amineissant; à son extrémité, apparait un nouveau flagellum, parfois même, un second, surnuméraire, par contre la soie sensitive et les bâtonnets, en rapport avec les ganglions nerveux supprimés par la mutilation,.ne se régénèrent pas plus que ceux-ci. IL était intéressant de tenter la même expérience sur des Æ: = Fig. 35. — A droite : trois stades de régénération de l'antennule droite du no 67 ; l'a', du type 4, a élé sectionnée suivant æ y; l’a! gauche, non figurée, est du type ®. ; gauche : {rois stades de croissance d’un second flagellum sur Fantennule gauche du n° 100, sectionnée et regénérée comme la précédente. L'a' dr. est du type 4 (X 75). r 2-2 intersexués munis d’antennules mâles. Nous avons pu la réus- sir deux fois dans de bonnes conditions (sur les n°° 67 et 100). La régénération se produit de façon absolument semblable, dans les moindres détails, qu'il s'agisse d'un mâle normal ou d'un intersexué ; dans le second cas (fig. 35 à gauche) il y a même eu formation d'un deuxième flagellum Les deux ami- maux opérés ont formé des œufs dans leurs gonades, mais celles-ci devaient être anormales car la ponte n'a pas eu lieu. Ces individus moururent sans pouvoir être fixés et coupés. Ils offraient une masculinisation assez accentuée (cat. VIT). L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 59 Ces expériences montrent que la régénération ne dépend que de la nature de l'organe sectionné et que la sexualité générale de l'individu, ainsi que la nature des gamètes produits sont sans influence sur elle. Elles confirment celles de $S. Kopec (48) démontrant l'indépendance de la régénération des antennes des Lépidoptères vis-à-vis des gonades. VII. — Hérédité des anomalies intersexuelles Lorsqu'un caractère nouveau se montre chez un être vivant il y a lieu de rechercher l'importance relative des facteurs inter- nes et externes. L'anomalie est elle due à l'action momentanée du milieu ou se transmet-elle avec une indépendance plus ou moins grande vis-à-vis des influences extérieures ? Parmi les auteurs ayant signalé des aberrations sexuelles chez les Cladocères, seuls Kurrner et Baxra se sont préoccupés d'en étudiér la transmission héréditaire. O. KuTrNER à examiné avec soin, pendant quatre générations, les portées successives d'une Daphnia pulex et a conclu que la proportion de mâles et de gynandromorphes est, à chaque génération, de 25 0/0, chiffre faisant prévoir une loi de « méca- nique héréditaire ». Ces conclusions sont inacceptables, car la proportion variant censidérablement d’une portée à l'autre les chiffres se modifient fortement suivant le nombre de portées examinées ; de plus, il n’y à aucune raison de joindre les mâles normaux aux intersexués. Banra à suivi uù nombre de générations plus important chez Simocephalus vetulus et Daphnia longispina et apporte des résultats intéressants. Il constate, comme nous avons pu le faire, que les intersexués très modifiés sont souvent stériles, Les œufs se désagrégeant avant d'êfre pondus ou avortant après la ponte. D'après cet auteur, le pourcentage d’intersexués produits par chaque femelle ne varicrait, d’une portée à l’autre, que dans des limites étroites et serait en rapport direct avec la masculinisation de la mère. Ces dernières assertions ne con- cordent pas, d’ailleufs, avec les résultats que nous avons “obtenus. | Nos premiers gynandromorphes ont été trouvés au cours de 60 , R. DE LA VAULX prélèvements pratiqués dans des élevages en commun. Sans abandonner cette méthode, qui présente quelques avantages, nous avons isolé des individus et suivi leur descendance pen- dant un certain nombre de générations, afin d'étudier les modalités de la transmission héréditaire de l’intersexualité. Elever des Daphnies en masse, dans de grands bocaux, ne présente pas de difficulté. Il suffit de garnir ceux-ci d’eau, de petits morceaux de bouse de vache et de quelques tiges de végé- taux (Fontinalis où Hypnum) destinées à assurer laération. Lorsque l’eau à acquis une teinte jaunâtre, on y introduit les animaux qui y prospèrent et se multiplient pendant des mois” sans qu'il soit nécessaire de rien ajouter. Mais un pareil procédé n'est pas applicable aux cultures d'animaux isolés dans des récipients de petite dimension, tels que les tubes à essai utilisés dans nos élevages. Il faut, dans ce cas, recourir aux algues monocellulaires qui constituent, pour Les Daphnies, un aliment de choix. Nous avons tour à tour employé des Scenedesmus, des Chlorella et des Selenastrum minutum. Ces algues prospèrent parfois dans des récipients d’eau de source abandonnés à la lumière, mais il est préférable de leur fournir un milieu de culture approprié. Les solutions de Caonar et surtout celle de Miquez (voir le Diatomiste n° 9, juin 1892) telle qu'elle fut employée par Taousox et G. Suit (14) (!) pour la culture des Euglènes, nous ont donné de bons résultats. Voici quelle était notre façon d'opérer pour suivre la descen- dance des Daphnies. Les animaux en observation, placés dans des tubes numérotés, étaient examinés chaque jour. Dès qu'une éclosion était constatée, la mère était transférée dans un nou- veau tube approvisionné d'algues et sa progéniture n'était exa- minée que quelques jours après, lorsque le développement des individus permettait un examen suffisamment instructif de leurs caractères sexuels (4 à 10 jours, suivant la température). D'après l'intérêt qu'ils présentaient, les jeunes étaient ensuite jetés ou laissés en observation dans de nouveaux tubes. Le 15 février 1919, une première Daphnie normale est isolée (N1). Elle donne en 6 pontes 119 © et 24 GS normaux, la (} Thomson et Smrru. On the nutrilive conditions determiving the growth of certain Fresth-water and soil Pro'ista (Proced. Royal Soc., Sér. B, LXXX VII, 1914). , , PPT SAV SCREPEN U Las se de où 2 jo , TaBLEAU | : Les colonnes correspondent aux générations successives. ; Les portées d'un même animal sont réunies par une accolade et disposées de haut en bas suivant l’ordre de leur apparition. Les intersexués sont désignés par le signe @ suivi d’un chiffre relatif à l’ordre dans lequel ils ont été trouvés. Un exposant indique ap- 15 9 +1 @ —| Lion (v. chap. IT). Les N suivies d’un numéro d'ordre repré- 40 ® sentent les femelles normales, dont la des- 35 © cendance est suivie à titre de comparaison. = 19 — 46? LISTE = _ ©e DAS R proximativement leur degré de masculinisa- SE 9 suivies — 1010040 A QHOIOHDOHO AO + 1 © : 87-> { 88! 6941 +0) 1040 4010 40040 010 10040410 41 N5 (17 Q 9® +46 \ 52,537 39 j | 545,542 — 30 555,58* : dont 1suivieN3- [13 © +6 ) 567,59! N2 (577.60: | | Q +1 | 1410 +10 :73! | M 179% | 20 +41 | 78,79is7 9 | 831 29 a 22 10Q +2 biss A ® 1Q +125 : sta _ 1270 24 2990 +3@ 40: \3 G' mn (61! 2 4 © : 45° ——) ;; ; 9 #9 on 455— ) 5 Q 1146 G +2 e(62—> 47 ca € :427 2 d E 26 ; 471 R 2 © 100+1+16:471 E 6 16 © 13 © 3 © +9 © ( 48‘ 150 Q = 412\10 © À da 31 Œ 34 © +1 €! :44— 5112 G 18 G' 15 E re) à] 6 © dont { suivie Nr 3G +19 3 Q +16 :14097->) 3 © 1HO) | 8 Q +1 :144 (96 © ( 414! te 19 +2e 4458 Ç 92 —— P®+26e(93 6 Q +1 € : HG 3Q +16 :94—>(2 © 953 96 43 © 4 Q +6 © | 985 98nis8/9 E 997 4007 2 ® E :2 0 +10 :97 8 Q +1 :84—{#û 40+1:91 tE 3 Q 1 © Tagceau Il | 3 Q 9 Q +1 © : 143! (1re partie) | 6Q NOR 19Q dont 1 suivie N14- ES 29 © +2 © ( 20% 4192? 5 © dont 1 suivie N10 t6 © { 203 [ 4 5) - 1 } (10+1e :4143 Ÿ de 2 1 © : 112! 4 $ : o N11—=\2 © © : 197! 1 6 +15g+10 95» |ont suivies rot Le (@) . à 230) = 4Q +66 :(149-454)° et ae UT) 21 © +1: 198! 5 © +1 @ : 201 4 Q > 28 © N125)2 © { 1Q +1 : 204 42 Q 8 © (Voir la suile sur le tableau suivant) om / 5 © dont N22——-->(7 g' 7 e À 8 Q TagLeaAu IL (et 53 18 & (2e partie) 21 O +308 2216——>}20 © + 1 ©: 239! : ÿ (217 — ls © dont 14 VESONRE 3 d N14 > Jdonnent ensemble— | 12 Q +26 i 219° = (] 10 Q de : ( 220 49 +1 :2384-> :8 © 17 © —\719 +20 G' +20 ( 229° 5 O0 +16 :212| 16Q RE GR one 23 © dont N 15 — 8 © 10Q+1e:218—>)8 © +1 221: | 10 © dont 1 suivie W18->( 6 Q 15 © () dont 2 suivies—; 129 8 © 22921) 4 © + 1€ : 2465 :2 Q 19 +1 3 © | Oo te: 247: 15 Q © 13 120 +91 +2 11 o Re de (6 © N16 | 19+30+1€: 23552 © dont 1 = N22— 2241 3 © * -/33Q +2© 41 Q 214 225'—— {18 Q \: ? ‘520 3 © —N23> ù l 4 Q l ? F2 6QO4+1c V.àdr.du tableau 19Q +26 +2 ? 228: .9 248! 4949 O—N25——+ L 3 6Q eue 3? 390 +10 +10: 2265> 2532,252:-| |19+9 Q +92 ( 289! 109 +66254,2552—> t 290: 256%,257:- 262°,2637 | (5 © +56 | 284",285° 19 30® rue) 264 255 286:,2877 N17 266:,2672 2887 + 1 : 218? 52420 + 26 (293! 2 © (2942 ja Las 10 +1d+1@:297 80 ® + se) 2914 — 0 9 & 2321 ps Q >} © dont N24——+ 49 ® 29 © 1 © er | | ÿ 1 © : 275? 2 Q _ 20 © { 276' 9 © +3 2717: 11Q | 278: ( 295! 2825 6? +30 +3 © | 283: —— 18 © + 1 © : 296? 5 O +1 : 318 { 3227 3237 3 Q +1G+5 324 326! | 327: 17 ® +16: 325! Q +16: 3167 3 O + 11 G'+ 10:328° 15 parmi la descendance 2921 19 © { 306: É 15 © + 2€ ? 307; > 120 +1d+1e:7 Fe | © : 299! La si NOM 1e 2791 1280: —.(42 G + 1 Q ( 330! 70 ® + 5 e } 331: {5 © +1: 298! à 232: { 311: 312! 15 © + 5) 313! 314 315‘ 1Q +16 :319 5 G ( 333: 22 © 3 © +20 1334 28 © X {5 Q 97 © + 3 @ ( 237: 238: V1 © | 239: 16 40 © + 1 © : 243 he (e) 50 © 15 © + 1 0 : 250° 171 © +16 :251î ñ 10 Q +1 + 10 : 258’ 69 +2 +10 : 261: CEE LE 10 9 +2 ( 268 ( eur) & UE ne ES 59 +2+2e Vs s | 274 Le 59 +6 d + 30 { 271%, 2724 1 © (sur 4 œufs) ) 2737 (92 Q 4 © (sur à œufs) 2 Q dont 2 suivies N20 Le) = 2 © + 1 © : 244! 5 Q +1:240i/ 21 © + 1 © : 245! œufs avorlent 6 © nf à LE L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 61 lignée n’est pas suivie. Uue autre {N2) mise en observation le 24 fournit dès la 2° portée trois gynandromorphes (39, 40, #1) dont la descendance est suivie jusqu'à la fin de juillet. Les résultats sont donnés dans le tableau I. Les numéros en carac- tères gras désignent les intersexués (©) dont le degré de mas- culinisation est indiqué par un exposant {voir chap. I). Les chiffres précédés d’un N représentent les Daphnies normales dont, à titre de comparaison, nous avons suivi la descendance. Le 21 novembre de la mème année, nous recommencons une étude analogue en prenant pour point de départ l’intersexué 192” (flagellum à l'extrémité de l’ant. © dr, fig. 22). Les résul- tats suivis jusqu à fin juillet 1920, sont consignés dans le tableau IT. La méthode des prélèvements périodiques dans des cultures en masse peut compléter les données fournies par les généalo- gies précédentes. Elle fut pratiquée avec plus ou moins de suite, pendant 6 ans, depuis avril 1915. Quoique beaucoup moins précise ef moins instructive que la précédente, elle pré- sente quelques avantages. La sélection qui peut fausser les résul- tats dans les élevages pedigree, est mise, ici, hors de cause puisque les Daphnies examinées ne sont pas remises dans le bocal (quelques femelles normales ont été exceptionnellement remises lorsque la culture, réduite à un trop petit nombre d'in- dividus, menaçait de péricliter). De plus, les conditions alimen- taires variaient peu et restaient les mêmes pour tous les occu- pants d’un même bocal. Elles étaient presque toujours fort médiocres, ainsi que l'attestait le nombre modéré d’embryons contenus dans la cavité incubatrice (0-6). | Il serait fastidieux de noter ici les résultats détaillés des nombreux prélèvements opérés. Il nous suffira d’en tirer les conclusions générales. La proportion des intersexués est d'environ 10 0/0, double de celle des mâles (population du Bocal C, suivie d'avril 1919 à octobre 1920 : 821 Q normales, 84 inters., 40 G. La proportion de mâles était encore plus faible dans le bocal À où les condi- tions alimentaires étaient plus défectueuses). I faut noter, qu'en raison de leur nourriture spéciale et de l'accumulation des produits d’excrétion, les occupants de ces cultures en commun avaient presque toujours le saccule de la glande du test et la 62 À R. DE LA VAULX glande antennaire rudimentaire (!) (fig. 1 et 2,g.) colorés en Jaune. On peut trouver des intersexués à toutes les époques de l’an- née, mais, la proportion est maxima en été et en automne : juin, juillet, septembre, octobre {les documents manquent pour août) tandis qu'elle est très faible en hiver (décembre, janvier, février). L'examen des tableaux précédents donne l'impression d'une irrégularité complète dans la transmission héréditaire de l'in- tersexualité et il est évident qu'aucune loi précise ne peut être formulée. Il est néanmoins possible de faire les constatations suivantes : 1° Les portées ne comprenant pas de femelles ne renfer- ment pas d'intersexués, la multiplication étant alors nettement orientée vers la production des mâles. 2° Celles qui comprennent une forte majorité de mâles sont généralement dans le même cas (voir tableau [ : 12. + 1 9, 18 +1Q$,2 +19) | 30 Les portées mixtes ne rentrant pas dans le cas précédent, comportent presque toujours des intersexués. Ex. : tableau I, 4 portées sur 5 ; tableau IF, 14 sur 16. Ces portées constituent un indice de labilité dans le déterminisme du sexe, état favora- ble à l'apparition de l’intersexualité. 4° Les Intersexués apparaissent bien plus fréquemment que les mâles quoique ces derniers soient, dans l’ensemble, beau- coup plus nombreux ; autrement dit, ceux-ci se répartissent sur un plus petit nombre de portées. Ex. : tableau I : 85 © répartis sur 41 portées et 313 G°sur 24 portées; tabl. IT : 104 © en 56 p. et 264 G' en 26 portées. Cette plus grande abondance des mâles ne se constate que chez les Daphnies, bien nourries, de nos élevages pedigree (?). Dans les cultures en masse, où les conditions alimentaires étaient assez mauvaises, les intersexués étaient bien plus nom- breux que les mâles (voir plus haut). Ces observations contredi- (!) Ainsi que nous l'avons déjà signalé (18) D. atkinsoni (Q et 4) possède la curieuse glande antennaire déja mentionnée par quelques auteurs chez D. magna et Simacephalus velulus. (?) Une alimentation très copieuse ARE également favoriser la parthénogénèse Les portées numériquement les plus importantes ne comportent généralement que des femelles. C’est une question de degré. he an le à. - « d L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 63 sent les théories, jadis classiques sur linfluence favorable de la disette sur l'apparition des mâles, théories que le nombre élevé de mâles (31,43) renfermés dans quelques portées suffirait à infirmer. 5° Dans une même lignée, la proportion d'intersexués n’est pas plus forte dans la descendance des animaux anormaux que dans celle des. Daphnies normales, sœurs d'intersexués ou appartenant à des portées entièrement normales. L'hérédité peut ainsi sauter une ou plusieurs générations. Ex. : tableau L: le n° 39 donne 17 puis 30 ©, une de celles-ci N3 donne à son tour 15 © normales et 1 © : #6? ; celui-ci fournit en 8 portées 37 ®,22 Get 2 © tandis que deux des 15 sœurs normales donnent respectivement N4 : 420,33 c', 6 @ en 7 portées et N5 : 109 ©, 5 c'et 12 © en 9 portées. La proportion d’inter- sexués est ici plus forte dans la progéniture des femelles nor- males. 6° Les intersexués très masculinisés ont des pontes réduites (parfois nulles), mais leur descendance ne comporte pas, néces- sairement, plus d’anormaux que celle des Daphnies normales ou faiblement masculinisées. A la vérité, certains faits sembleraient confirmer les asser- tions de Baxra (18 p. 377) relatives à la production plus abondante de mâles et d’intersexués par les femelles plus mas- culinisées, mais un examen attentif de nos tableaux montreja que les exceptions sont trop nombreuses pour qu'il soit possi- ble de généraliser. Exemples: Tableau L: n° 45 (fig. 32) donne 27 Get 2 © con- tre 29 © et 44°, 27 G'et 2 © pour 3 Q. Ces deux animaux, qui finissent d’ailleurs par former des éphippies, se comportent con- formément à la règle formulée par Banra, mais il faut remar- quer que N6 (normale) donne 6 Œ et 8 © contre 7 Q et #0! 93 Get 2e contre 92 Q. NS donne des résultats encore plus curieux. Les 4 premières portées fournissent seulement 4 Get 1 © pour 90 © tandis que les 6 dernières donnent 1 Get 17 © contre 53 Q. Ce dernier exemple montre que la masculinisa- tion de la mère n’est pas la condition principale de l'apparition des intersexués. Le tableau IT fournit des faits analogues : n° 296% (trois orga- nes maseulinisés, mais faiblement, voir ant. fig. 22) donne 64 R. DE LA VAULX 14 © pour 46 ©, mais N95 produit 7€ et 1 & contre 25 ©. 214, dont un seul ovaire fonctionne (plus masculinisé que 226), ne donne qu'un @ pour 17 Q (en 5 portées). Les 3 premières por- tées de N16 ne comportent que des ® cet les 4 dernières ren- ferment de nombreux &° et 7 €, etc. | 7° La proportion d’intersexués apparaissant à chaque portée 1 48 plus considérable dans Les portées réduites que dans les por- tées renfermant un grand nombre d'individus. La nutrition abondante n’est donc pas favorable à la production de l'inter- sexualité. Aucune portée ne comprend plus de 6 intersexués. 8° Les individus provenant de la même mère, voire de la mème portée, ne présentent pas nécessairement des anomalies de même degré ou de même nature. Quelles conclusions pouvons-nous tirer de ces constatations ? L'aptitude à la production de formes intersexuées fait partie du patrimoine héréditaire d'une lignée, dans laquelle elle appa- rait à la facon d'une mutation. Elle parait se maintenir sans modification d'ensemble au cours des générations successives. Elle est plus ou moins accusée suivant la lignée étudiée (!), mais, dans une progéniture. donnée, sa manifestation est indépen- dante des anomalies constatées chez la mère. La formation des intersexués est liée à la gamogénèse (fré- quènce dans les portées mixtes. rareté des «et des @ en hiver, prédisposition des intersexués à porter des éphippies) : mais, tandis que les mâles n'apparaissent en abondance que lorsque la nourriture est suffisamment copieuse, les intersexués se montrent aussi fréquemment dans les plus mauvaises condi- tions alimentaires, telles que celles qui régnaient dans nos éle- vages en masse. L'intersexualité correspond donc à une forme incomplète et simplifiée de la gamogénèse (qui pratiquement se manifeste par l'apparition des mâles) et, par suite, se produit plus aisément et plus fréquemment que celle-ei. Il est probable que, dans les lignées normales, les conditions requises pour que les mâles , .  4 “ n Q ’ / est fort variable (de A 1 Elle est, d'une façon générale, ) * < (‘) Environ 10 0/0 dans notre lignée de D. alkinsoni, 52 0/0 dans la lignée de S. velulus suivie par Banra, 25 0/0 (4 + ®) chez les D. pulex de Kurrner. De tels chiffres n’ont de valeur que si un grand nombre d'individus à été examiné, L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 65 apparaissent ne se trouvent parfois réalisées que d’une façon insuffisante ; mais alors, les mâles et les femelles pouvant seuls se montrer, un mécanisme s'oppose à la production d'anoma- lies. Dans les lignées anormales, ce mécanisme se trouve faussé et les moindres impulsions vers la gamogénèse se manifestent par la formation d'intersexués. VII, — Hypothèses relatives à l'origine du gynandromorphisme et de l’intersexualité Le problème du gynandromorphisme est intimement lié à celui du déterminisme du sexe et ce n'est qu'en utilisant les connaissances acquises sur celui-ci que l'on a pu tenter d'abor- der Le premier. Il convient donc de résumer brièvement les hypothèses que les travaux ont suggérées au sujet des causes déterminant l'évolution d'un germe vers un sexe. Une foule de recherches portant sur les résultats des croise- ments et la cytologie des gamètes ont permis d'acquérir un premier point, à savoir le rôle prépondérant joué par la chro- matine. [l faut d'ailleurs s'empresser d'ajouter que, selon toute vraisemblance, celle-e1 n’agit qu'indirectement, par l’état phy- siologique que son interaction avec le cyloplasme établit dans chaque cellule, et que son influence, plus quantitative que qua- litative, peut souvent être mise en échec par d'autres facteurs. Quelles que soient les réserves qu'appellent les conclusions, parfois hâtives, de quelques généticiens modernes, il faut recon- naitre que la chromatine fournit actuellement l'élément le plus facilement observable du complexe déterminateur du sexe et que son étude s’est déjà montrée singulièrement féconde. Elle pourrait, d'après nos connaissances actuelles, agir sur le sexe de trois façons différentes. Dans un premier cas, le sexe varierait selon que Les chromo- somes seraient en nombre haploïde ou diploïde, c'est-à-dire, suivant que l'œuf serait parthénogénétique ou fécondé (cas des Abeilles et de beaucoup d'Hyménoptères) (). ({) Ce cas diffère peu du suivant, si l’on admet que, chez les Hyménoptères en question, les spermalozoïdes déterminateurs du sexe mâle dégénérent. Lo) 66 R. DE LA VAULX Dans un deuxième cas, deux espèces de spermatozoïdes, dif- férant par un ou plusieurs chromosomes accessoires détermine- raient, par leur conjugaison, le sexe de l'œuf primitivement indifférent (cas de la plupart des Insectes (sauf les Papillons) et probablement des Mammifères, et de plusieurs groupes d’In- vertébrés : Echinodermes (‘), Vers, etc.). Enfin, chez les Papillons et les Oiseaux, une seule sorte de spermatozoïdes féconderait des œufs de compositions chroma- tiques différentes, correspondant au deux sexes. Dans ce dernier cas, le sexe dépend de la nature de l'œuf tandis que, dans le précédent, il est déterminé par le spermatozoïde. Les premières hypothèses sur le gynandromorphisme ont tenté d'expliquer la genèse des Abeilles aberrantes. Boverr (88 et 02) suppose que la conjugaison des pronuclei peut n’avoir lieu qu'après une première division parthénogénétique du noyau femelle. La moitié du corps de l’animal, possédant le nombre diploïde (noyau fécondé) serait seule femelle ; l’autre, ne contenant que la chromatine maternelle (nombre haploïde) aurait le sexe mâle et ne manifesterait que les caractères maternels. MorGax (05) fait remarquer que plusieurs sperma- tozoïdes pénétrant parfois dans l’œuf, il peut se faire que quel- ques-uns se divisent et participent à la formation de l’embryon. Les cellules ayant cette origine, ne comprenant qu'une chro- matine réduite, auraient le sexe mâle et Les caractères du père. On voit que, suivant que la région mâle du corps d’un gynan- dromorphe hybride portera les caractères paternels ou mater- nels on recourra à l’une ou à l’autre des hypothèses précé- dentes. Dans le cas où le sexe dépend de la nature du spermato- zoïde, on peut imaginer avec Lans (12) que deux spermato- zoïdes différents ont pu féconder les deux moitiés d'un œuf prématurément divisé. Quant aux animaux qui possèdent des œufs de deux sortes, ils sont justiciables de l'hypothèse sui- vante imaginée par Doxcasrer (14). Cet auteur a trouvé des œufs de Papillon (Abraras) contenant deux noyaux capables de se conjuguer chacun avec un snermatozoïde. Si, au cours des (!) D’après Tennewnr (Biol. Bull. 1911) il y aurait deux sortes de spermatozoïdes chez Hipponæ esculenta. Par contre, chez d’autres Oursins, BaLTzer (1909) à décril un dimorphisme nucléaire des ovules. Lun nai . dun sé ion. iles à ss cute. 44. ‘ L'INTERSEXUATITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 67 divisions de maturation, l’un des noyaux expulse le chromo- some sexuel tandis que l’autre le garde, après fécondation, les deux moitiés de l’être résultant seront de sexes différents. Toutes ces hypothèses ont, entre autres défauts, celui de ne pouvoir guère élucider que la genèse des gynandromorphes bipartis. Il n’en est pas de mème de la suivante, esquissée par Lane et mise au point tout récemment par Morcax (49) qui l'a appliquée au cas des Drosophiles. Cet auteur admet que, lors d'une division précoce ou tardive, un des chromosomes sexuels indispensables à l'apparition du sexe femelle ne se divise pas et passe tout entier dans une des cellules filles. Toute région du corps formée par les cellules provenant du blastomère ainsi privé d'un chromosome, réduites à la formule XO au lieu de XX sera mâle. MorGan a pu montrer que, sur cés mêmes régions males, tous les caractères, qu'il suppose portés par le chromo- some X ainsi éliminé, font effectivement défaut. Cette théorie de l'élimination du chromosome peut donc rendre compte tout aussi bien des gynandromorphes bipartis que des autres, mais exige qu'ils proviennent tous d'œufs des- tinés à donner des femelles. De plus, il faut admettre qu'il y à toujours mosaïque stricte, juxtaposition d'éléments de sexe défini et non formation intersexuelle. Cet inconvénient n'existe plus dans la théorie de R. Gozn- scamibT, fondée sur l'étude de l'hybridation chez les Papillons. Un sait depuis longtemps que des croisements entre variétés donnent fréquemment un assez grand pourcentage d'anomalies sexuelles et que celui-ci varie suivant le sens du croisement. Par de nombreuses expériences, GoLpscHmIDT à précisé ces faits et a réussi à les expliquer au moyen des hypothèses suivantes. L'œuf possède, en puissance, les caractères des deux sexes, mais, normalement, le lot qui prédomine se montre seul ; l'autre demeure latent. Pourtant, si la relation quantitative qui existe entre les deux sortes de facteurs, assimilés par l’auteur à des - enzymes, se trouve faussée, les deux sexes pourront se mani- fester sur le même individu. L'auteur arrive à montrer comment le fait peut se produire dans l'hybridation en attribuant aux symboles sexuels mendéliens une certaine salence ; par exemple : M (symbole &) — 60, F (symbole @) — 80 chez Lymantria dispar, l'espèce: étudiée. La femelle étant hétérozygote, les 68 R. DE LA VAULX formules sexuelles deviennent : P = FMm soit 80 — 60, & — FMM soit 80 — 120. | GoLbscumibr est ensuite amené à faire les deux hypothèses suivantes : 1° seuls les facteurs 47, logés dans-les chromoso- mes sexuels, sont des facteurs mendéliens typiques; les fac- teurs À, situés dans le cytoplasme, ne peuvent être transmis que par la mère ; 2 la valence des facteurs varie suivant les races de Lymantria dispar. Ainsi, en admettant que dans une race d'Europe F# — 80 et M — 60 tandis que dans une race japonaise F — 100 et M — 80, on s'explique la divergence des résultats suivant le sens du croisement. Soit : @ Jap. FMm (100 — 80) >< G Eur. FMM (80 — !60 +60/)) gamètes FM et Fm Met (100 — 80) (100) (60) (60) auront en première génération des descendants ayant respec- livement pour formule : Œ FMM (100 — |80 + 60)) soit 100 —- 140. (] FM (100 — 60). Dans chacun des sexes les valences voulues dominent les autres d’au moins 20 points ; la progéniture est normale. Il n’en est plus de même dans le croisement inverse. © Eur. FMm (80 — 60) >< G' Jap. FMM (100 [80 — 80)) gamètes Fm et. FM M ‘et .M (80 — 60) (80) (80) (80) & FMM (80 — [60 + 80]) — 80 — 140. E FMm (80 — 80). Les mâles seront normaux car le nombre 140, somme des deux NW, surpasse fortement 80, valeur de F fournie par la femelle européenne mais chez les femelles les valences de F et de M, respectivement transmises par la femelle européenne et le mâle japonais, s'équilibrent ; Les caractères mâles pouvant se manifester autant que les autres, l'individu sera intersemué. L'auteur ayant pu se procurer toute une série de races offrant une gamme des plus variées quant à la valence des facteurs sexuels, toutes sortes de degrés d'intersexualité ont pu être obtenus par croisement. Mais pourquoi l’intersexualité frappe- t-elle certains organes avant d'autres et aboutit-elle à la pro- F, F3 L'INTERSEXUALITÉ CH: UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 69 duction de gynandromorphes ? Pour l'expliquer, Goznscumor (17) est amené à de nouvelles hypothèses (*). Les facteurs sexuels seraient des sortes d’enzymes (qu'il dénomme andrase et qynase) dont la chromatine ne serait que le support visible. Le dévelop- pement de l'embryon commencerait sous l'influence du fer- ment prépondérant mais, l’action de celui-ci tendant à dimi- auer, l’autre prendrait sa place et cela, d'autant plus tôt que la supériorité quantitative du premier ferment serait plus faible. I s’en suit que lors d’une suprématie très nette de l'une des enzymes (cas normal), le développement pouvant se faire entiè- rement sous l'influence de l’andrase ou de la gynase, aucune anomalie ne se produit. Dans le cas contraire, un organe à d'autant plus de chance d'être modifié par l'entrée en action du ferment primitivement dominé que son ébauche est plus tardive. Le degré d'intersexualité se trouve ainsi dépendre du moment où se produit la substitution de l’action des facteurs sexuels et la précocité de ce point critique ({urning point) est elle-même fonction de la proportion d'andrase ou de gynase contenue dans l’œuf. De fait, on constate que les antennes des Papillons, qui se différencient assez tard, sont les organes Le plus fréquemment modifiés chez les intersexués. L'étude des autres organes permet de vérifier cette loi : l'ordre de fréquence de l'apparition de l'intersexualité sur une région du corps est l'inverse de l’ordre de différenciation au cours du développement, c’est-à-dire : un organe est d'autant plus souvent modifié qu'il se différencie plus tard. La plupart des intersexués obtenus par Gorbscamipr sont des femelles masculinisées, ce qui est conforme à la théorie. En effet, le mâle renfermant deux fois le facteur A7, il est difficile de rencontrer une F de valence si forte dans une race et un W de valeur si faible dans une autre que l'addition de ces derniè- res valences (M + M) ne surpasse pas nettement celle de F'au point d’écarter toute possibilité d'intersexualité. Gorpscamwmr est néanmoins parvenu à obtenir quelques mäles imtersexués, modifiés dans leur morphologie externe et la constitution de leurs gonades (?). j (t) Gozoscamipr suppose que les enzymes agissent sur la {otalité de l'individu en provoquant la formation d'hormones (?). Nous avons vu que chez les Clado- cères, tout au moins, les faits s’opposent à l’adoption de cette hypothèse. (2) Nous ne pouvons donner ici que les traits fondamentaux de la théorie de 70 H. : DE LA AUX Cette théorie, qui explique merveilleusement les faits pour lesquels elle à été construite, appelle cependant certaines réserves, notamment au sujet de la localisation des facteurs et du revirement du sens de leur action. Elle suppose, de plus, aux gynandromorphes une symétrie qui manque à la plupart d'entre eux, voire à quelques-uns des sujets obtenus par lau- teur. En particulier, la genèse des gynandromorphes bipartis devient totalement inconcevable, une moitié de l'embryon ne pouvant se développer avant l’autre. Elle offre, néanmoins le grand avantage de substituer aux idées simplistes et rigides des théories particulaires, une conception plus souple, plus physio- logique et de se rapprocher du courant moderne qui, en biolo- sie, fait de plus en plus appel à l’action directrice des enzymes (TnozanD 17). Toutes les théories précédentes, fondées sur le déterminisme syngamique du sexe ne peuvent, a priori, s'adapter sans modi- : fication au cas des Cladocères, d’origine parthénogénétique. Il convient donc maintenant d'examiner l’état de nos connais- sances sur le déterminisme du sexe chez ces animaux. Au point de vue cytologique, nous savons-fort peu de choses. À. Künx (08), ayant étudié avec soin l’ovogénèse de D. puler, a montré qu'il n'y avait pas de division réductionnelle dans l'œuf parthénogénétique. D'autre part, Caamsers (13) admet que chez Simocephalus la moitié des spermatozoïdes dégénèrent, les autres étant sans doute déterminateurs du sexe femelle (on se rappelle que, de l'œuf fécondé des Cladocères, sort toujours une femelle). Mais plus récemment, Monica Tayzor (44) n'a trouvé qu'une sorte de spermatozoïdes chez le mâle de D. pulex et, fait important, a reconnu dans les cellules somatiques et la lignée germinale de celui-ci le nombre diploïde de chromo- somes. Il n’y aurait donc pas de différence chromatique visible entre les deux sexes. Etudier les dissemblances cytologiques des œufs mâles et des œufs femelles est d’ailleurs presque impos- sible, attendu que l'on ne peut prévoir avec certitude le sexe de la progéniture. | GoLbscaurro et négligeons les parties dépourvues d'application dans le cas qui nous occupe. Par exemple, l'auteur fait intervenir le facteur vitesse de diftéren- tiation : les mâles de Zymantria dispar se développant plus rapidement que les femelles. Or on ne constate pas de différence de cet ordre dans la croissance des Daphnies. ni tece tt mit ct) dÉdÉ, ÈS, Sd se find L'INTERSEXU ALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 71 Le rapport que certains ont voulu établir entre le sexe et la taille ou la couleur des œufs est inexistant ou impossible à généraliser. Les œufs plus petits donnent naissance à des embryons de taille réduite, quant à la couleur de lœuf, elle nous à semblé, tout au moins chez D. magna et D. athkinson, n'avoir pas de rapport avec le sexe mais plutôt avec lalimen- tation de la mère ("). L'étude de l'influence des facteurs externes sur l'apparition des individus gamogénétiques a donné lieu à un nombre consi- dérable de travaux, trop souvent contradictoires. On peut sérier les conclusions des auteurs en trois groupes distincts. La conception la plus ancienne est celle de Weismanx (74-79), souteque depuis par quelques zoologistes notamment par Kurr- ER et SrrouL. D’après ces observateurs, les facteurs externes, température, alimentation, etc. n'auraient aucune action sur la formation des mâles et des éphippies. Ceux-ci apparaîitraient suivant des cycles propres à chaque espèce. Il y aurait des ani- maux spécifiquement acycliques, monocycliques, bicyeliques, polyeycliques, ces derniers aboutissant fatalement à la gamo- génèse après un nombre de générations déterminé. On est pour- tant forcé d'admettre qu'il y a, tout au moins, des races locales, le cycle d'une même espèce montrant des périodicités différen- tes suivant la provenance des animaux. Réagissant contre cette théorie trop exelusive, un certain nombre d'éexpérimentateurs, entre autres be Kernervé (95), Issa- KkovircH (05) et Acar (14) se sont efforcés de mettre en lumière l'influence, maintenant indiscutable, des facteurs externes et ont même fini par penser que les cycles étaient entièrement sous leur dépendance. Les travaux les plus récents et les mieux conduits plaident en faveur d'une conception intermédiaire qui semble bien être, en effet, la bonne. Le rôle des facteurs internes, hérités, n'est pas douteux : Les différentes espèces de Cladocères ne montrent pas une pareille aptitude à la gamogénèse : les Moïna donnent plus souvent des mâles que les Daphnia et celles-ci plus que les Sida. D'autre part, il est certain que l’expérimentation per- (!) Témoin l'observation suivante : une © de D), magna pond successivement : 3 œufs verts donnant 2 Q + 1 4, 1 œuf bleu donnant 1 © et 8 œufs bruns d’où sortent 8 ©. 1 to R. DE LA VAULX met d'agir, tout au moins chez les espèces polycyeliques, sur la périodicité des cycles. Les auteurs qui ont suivi les cycles d'ani- maux vivant en liberté, Snnéeuin (95,97), Gurxey (05), KeizHack (09) admettent également l'influence combinée des facteurs internes et.externes. Par contre, l'unanimité disparaît lorsqu'il s'agit de spécifier la nature du facteur externe influent. Une dis- cussion des expériences et des théories nous entrainerait trop loin et nous nous bornerons à exposer l’opinion que nous nous sommes faite d'après la lecture des mémoires et notre expé- rience personnelle. Il semble, contrairement à l’opinion courante, que les fac- teurs température et quantité de nourriture doivent être écartés, tout au moins, en tant qu'agents prépondérants. L’élévation de température, accélérant les échanges vitaux, augmente notable- ment la fréquence des pontes (tous les 8 jours à 8°, tous les 3 jours à 25°), mais ne modifie pas la sexualité de la progéni- ture. L'abondance de la nourriture augmente le nombre des œufs, mais la grande quantité de mâles que comportent cer- taines éclosions suffirait à démontrer qu’elle n’entrave pas la production d'individus gamogénétiques, comme l'ont pensé quel- ques auteurs (‘). D'autre part, nous avons pu élever, dans des conditions alimentaires défavorables, des Paphnia magna pen- dant trois ans, sans voir apparaître la moindre trace de gamo- génèse. Quel est done le facteur capable d'agir sur les cycles? Des expériences de Laxcnaxs (09) et de Wozrereck (14) et surtout de ScHarFeNBeRG (10) et de G. Suira (18, 15), il résulte que l’on doit, avant tout, mettre en cause l’action des produits de désassimilation. ScHanFeNBgerRG (40, 14) arrive à faire appa- raitre presqu'à volonté les éphippies chez D. magna et les males chez D. pulex en alimentant ses Daphnies avec des rési- dus d'algues, déjà digérées {(Mudd Nahrung). G. Surra, par des expériences très nettes, met en lumière l'influence du confine- ment dû à la pullulation des individus (erowding) dans un espace restreint. Les animaux, soigneusement isolés de leurs sœurs dès leur naissance, et plus tard de leur progéniture, se montrent presque indéfiniment parthénogénétiques (Banra à pu (:} Dans la nature, il n’est pas rare de voir pulluler les mâles et les femelles éphippiales aux époques d’abondance alimentaire. Q2 L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE ‘ élever par ce procédé 130 générations sans voir apparaître de mâle). Par contre, les mâles se montrent très nombreux parmi les Cladocères élevés en grand nombre dans la même culture. L'action des facteurs isolement et accumulation, qui se réduit, en dernière analyse, à celle des produits de désassimilation, semble donc bien établie ; mais si elle permet de modifier for- tement la proportion des sexes, elle ne suffit pas à déterminer leur apparition. Celle-ci reste toujours liée à des facteurs inter- nes qui nous échappent et qui doivent être bien difficiles à con- trôler. Dans le cas des portées mixtes, comprenant des mâles et des femelles, 1l faut admettre en effet qu'un même germa- rium à pu produire, presque simultanément, des œufs de sexe différents. Il n'y a donc pas de rapport strict entre l’état phy- siologique de la mère et le sexe de la progéniture. On pourrait faire observer que les expériences que nous venons de résumer sont relatives à l'apparition des périodes de gamogénèse et non au déterminisme du sexe. A la vérité, cette distinction ne doit pas entrer iei en ligne de compte. D'un œuf parthénogénétique, ne peuvent sortir que deux sor- tes d'individus : des mâles et des femelles, et peu importe qu'avec l'apparition des mâles coïncide généralement un chan- gement dans l'ovogénèse de quelques femelles. Nous avons vu d’ailleurs que cette ovogénèse spéciale, accompagnée de la production d’éphippies, se retrouve assez souvent comme corollaire de l'intersexualité. Au moment dé proposer une explication des faits décrits au cours de cette étude, nous sommes amenés à écarter Les hypo- thèses du gynandromorphisme fondées sur la considération des chromosomes sexuels pour les raisons suivantes : origine par- thénogénétique des sujets, similitude constatée par Monica Taycor dans la constitution chromosomique du mâle et de la femelle, présence. d'organes intermédiaires irréductibles à la mosaique stricte. La théorie de Gozbscamipr sera-t-elle d'un plus grand secours ? Nous devons rejeter, non seulement toute la partie qui fait intervenir le symbolisme mendélien, par suite de l'origine parthénogénétique des Daphnies, mais encore, en rai- son de l'asymétrie des intersexués, l’hypothèse de la permu- tation des déterminants sexuels manifestée synchromiquement dans la totalité de l'individu. Il reste néanmoins des théories 74 R. DE LA VAUEX de Gozpscumibr quelques idées fort séduisantes notamment celle de la valeur quantitative du déterminisme sexuel et celle de l’in- version de la dominance des facteurs 4 condition de limiter'celle- ct à certaines régions de l'organisme, sans corrélation stricte ni synchronisme. I est d'autant plus indiqué d'appliquer ces notions au cas des Daphnies que, parti d'un point de vue dif- férent, Wozrereck (11) a été amené à attribuer les variations du cycle des Cladocères à l'activation ou l'inhibition de ferments déterminateurs. Nous rappelions plus haut, combien devait être délicat et diffi- cile à influencer par les facteurs externes le mécanisme de la pro- duction des mâles, puisque, dans un ovaire, un même groupe de cellules germinatives peut donner simultanément une pro- portion variable d'individus des deux sexes, sans que la féconda- tion intervienne. C’est cette extrême labilité constatée dans les pontes normales qui peut nous aider à comprendre la genèse des Daphnies intersexuées. On peut supposer que cette grande instabilité de l’œuf se maintient parfois au cours de l'ontogé- nèse et que, par suite d’une mauvaise répartition des ferments déterminateurs ou de toute autre cause, les blastomères con- servent une indépendance analogue à celle des cellules germi- nales. Selon que l’inversion de dominance (‘) sera précoce ou tar- dive une région plus ou moins grande de l'organisme sera modifiée. Si elle se produit dans l’un des deux premiers blas- tomères on obtiendra un gynandromorphe biparti, que des revirements cellulaires plus tardifs ou de nouvelles répartitions inégales de ferment pourront d’ailleurs remanier. En admettant l'instabilité sexuelle des blastomères, on concoit que les cellules filles n’héritent pas nécessairement d'un sexe définitivement fixé, mais seulement d'une plus grande apti- tude à mamifester un sexe restant sujet à revirement ; on peut aussi s'expliquer pourquoi, si un côté de l'animal ou un organe présente, dans son ensemble, un certain sexe, certaines de ses parties peuvent faire exception comme cela se produit, par exemple, dans les cas d’inversion de l'asymétrie. La similitude d'évolution des cellules d’une même région (‘: I se peut que la dominance ne soit pas toujours absolue et que parfois, les deux « facteurs » sexuels antagonistes agissent simultanément pour orienter le développement d’un organe vers un type intersexuel. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 15 provient, non d'une liaison actuelle, telle que celle que pro- duisent les hormones, mais de l’hérédité cellulaire. Elle est done d’autant plus forte que le degré de parenté est plus grand, c'est-à-dire que les cellules ont une origine commune plus rapprochée. Cette similitude de nature due à la parenté n’ex- clut pas d'ailleurs toute indépendance dans l'évolution ulté- rieure, pas plus que les modifications dues à l'interaction avec les régions environnantes. C'est ainsi que les jumeaux vrais, en dépit de la grande ressemblance qu'ils doivent à leur origime commune, conservent une certaine individualité. Les formes intersexuées, parfois si bizarres, que nous avons rencontrées ne sont pas réductibles à une mosaïque de cellules mâles et femelles et ne peuvent s'expliquer si l’on n'admet l'existence de cellules douées d'une sexualité mixte. À la vérité, Cockayxe (15) à montré que la teinte intermédiaire des ailes de certains Papillons gynandromorphes était due à un mélange très fin d'écailles propres à chacun des deux sexes, et que la structure synevtiale et la migration nucléaire que l’on observe dans l'œuf des Lépidoptères permettent de comprendre la genèse des mosaïques les plus fines. Une pareille explication ne peut convenir aux Cladocères, chez lesquels la segmentation se montre très régulière ; par contre, il n'y a aucune difficulté à imaginer qu'une répartition inégale des ferments (!) détermi- nateurs du sexe, qui doit logiquement se produire lors de lovo- génèse pour donner, en l'absence de fécondation, des individus de sexes différents, puisse se continuer au cours des divisions ultérieures des cellules embryonaires. Nous ne croyons pas possible de diviser les individus déerits au cours de ce travail en #ndles interserués, et femelles inter- sexuées, ainsi que l'ont fait certains auteurs. Faudrait-il d’ail- leurs tenir compte du sexe originel probable (méthode de 6oL1b- scHuIpr) où du sexe prédominant chez l’adulte (Baxra) ? "Nous savons, par exemple, par l'étude de l'antennule des femelles peu masculinisées (catég. Il), que, suivant que le flagellum se trouve présent sur une antennule de type femelle, ou qu'il man- (:) L'hypothèse des ferments déterminateurs de Wozrereck el de GOLOHSCHMIDT donne une forme concrète aux causes amenant la manifestalion d’un sexe. On pourrait attribuer à celles-ci une toute autre nature, sans que le principe de l'ex- plication que nous proposons doive être modifié. 76 R. DE LA VAULX que sur une antennule de type mâle, on peut supposer que cet appendice a débuté par l’un ou l'autre sexe; mais la forme sexuelle de l’autre antennule suffit à démontrer que cette con- clusion n’est pas valable pour l’ensemble de l'individu. in s'en tenant aux grandes lignes de la morphologie des intersexués, il semble néanmoins possible d'admettre que, dans la majorité des cas, l'influence male a dû dominer au début de l’ontogénèse pour être ensuite supplantée plus ou moms vite par les facteurs femelles (!). Cette opinion découle, non seulement de la comparaison entre les formes intersexuées et les formes embryonnaires, mais encore de l’étude des gonades anormales et des conditions dans lesquelles apparaissent les intersexués. Kurz considérait ses hermaphrodites comme des mâles avortés et cette manière de voir semble renfermer une part de vérité. Il faut pourtant se rappeler que les intersexués se montrent beaucoup plus fréquemment que les mâles, ce qui parait bien indiquer qu'ils ne proviennent pas d'œufs mâles, mais d'œufs tntersexués présentant une dominance mâle msuf- fisante. La facilité avec laquelle le déterminant femelle reprend son emprise sur la formation de l'embryon est sans doute en rapport avec la fréquence et l'abondance de la production de ce sexe chez les Cladocères. Nous avons vu que l'aptitude à donner naissance à des inter- sexués fait partie du patrimoine héréditaire d’une lignée ; mais qu'elle peut être la cause première de cette anomalie qui apparaît subitement comme une mutation ? Le parasitisme semble pouvoir être mis hors de cause; non seulement les Cla- docères anormaux ont toujours été reconnus indemnes de toute infestation, mais nous avons pu observer des D. atkinsoni venant de la Côte d'Or, parasitées par une Microsporidie, et dépourvues de toute trace de masculinisation. Dans ce cas, pourtant, l’ovaire était avorté et incapable de produire des œufs. On doit également écarter toute action possible de la fécon- dation. Nos premières Daphnies anormales furent trouvées dans un élevage dont les individus se reproduisaient parthéno- génétiquement depuis plus de seize mois sans qu'aucune ano- (:) Feraient, sans doute, exception : {fe les intersexuês de la catégorie IT, type 1, 2% Jes trois intersexués (191, 223, 274) dont les antennules sont normales, 3 le n° 79 (fig. 16) ayant le type © et les antennes peu masculinisées, L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE SET, malie apparaisse, et les premiers Simocephalus intersexués découverts par Banra provenaient d'une 131° génération parthé- nogénétique. Il est remarquable que la plupart des individus aberrants signalés jusqu'ici ont été trouvés au cours d’élevages en labo- ratoire, alors que de nombreux zoologistes descripteurs ayant, pour des travaux de systématique ou de faunistique, examiné des milliers de Cladocères vivant en liberté, n’en ont jamais mentionné. On serait ainsi tenté d'imcriminer les conditions anormales de l'élevage qui peuvent troubler la succession sai- sonnière habituelle des cycles ou lintoxication due à l’accumu- lation des produits d'excrétion. C'est effectivement dans un éle- vage offrant des signes manifestes de dégénérescence (ralentis- sement des pontes, coloration des glandes excrétrices) que nos premiers gynandromorphes sont apparus (‘). Il faut cependant noter que des D. magna, élevées dans des conditions analogues, n'ont jamais présenté la moindre trace d'intersexualité. Comparaison avec les Phasmes. — Si par leur origine parthé- nogénétique les Cladocères intersexués se distinguent nettement des individus similaires issus d'œufs fécondés, leur cas est tout à fait comparable à celui des Phasmes. On sait, depuis longtemps, que beaucoup de ces Orthoptères sont capables de se reproduire parthénogénétiquement et, dans ces conditions, donnent constamment des femelles. On en a d'abord conclu (R. pe Sixéry, 01) à une thélytoquie absolue, inverse de l’arrhénotoquie des Abeilles, la fécondation étant indispensable à l'apparition du sexe mâle. Mais des observa- tions plus récentes de J. Partez, R. DE Sinéry, Mac Brie, JacksoN, Meissxer et G. Foucner ont montré que des mâles peu- vent aparaitre sporadiquement dans des pontes strictement parthénogénétiques. Bien plus, PanTez et pe Sinéry (08) Caoparp (18) ont signalé sous le nom d'hermaphrodite des indi- vidus offrant des anomalies tout à fait comparables à celles que nous venons de décrire chez les Daphnies.. Le Bacillus (Clo- nopsis) gallicus décrit par Caoparv est porteur -d'organes rudi- mentaires intersexués (valve de l’oviscape) et manifeste une inversion de l’asymétrie sexuelle comparable à ce que lon {t) La première lignée intersexuée suivie par Fou provenail également d’une culture mal alimentée. a 78 R. DE LA VAULX observe chez certains Cladocères (mésonotum Q à droite, ovis- cape rudimentaire à gauche). Ces faits sont d’ AN plus significatifs que Les Phasmes appartiennent au groupe d’Insectes où l'existence d’un chromo- some accessoire déterminateur du sexe a été démontrée avec le plus de netteté. R. pe Sixéry a, notamment, publié des figures relatives à la spermatogénèse d’un Phasme du Portugal (Lepty- nia allenuala) qui ne laissent aucun doute à cet égard. La possibilité d'apparition de mâles et d'intersexués porteurs d'or- ganes intermédiaires, en dehors de toute fécondation, chez des animaux où le chromosome sexuel est aussi net, permet d’émet- tre quelques doutes sur le pouvoir déterminateur de ce grain de chromatine. En tout cas, son action ne parait pas indispensable et peut être suppléée par d'autres facteurs. Résumé et Conclusions Nous pouvons résumer les résultats obtenus au cours de ce travail dans les conclusions suivantes : 1° Le déterminisme du sexe des Cladocères parait être de nature quantitative. Bien que l'œuf possède virtuellement la possibilité de réaliser l’un ou l’autre sexe, le facteur détermi- nant (enzyme ou autre) est généralement réparti en proportion suffisante pour imposer une sexualité définie à l'embryon. Par suite d’une anomalie héréditaire, il peut se faire que certains œufs se trouvent porteurs d'une sexualité dominante quantila- livement insuffisante et par suite aboutissent à la formation d'intersexués, 2 L'analyse morphologique des intersexués montre que ce facteur, à dominance insuffisante et transitoire, doit se répartie irrégulièrement entre les blastomères lors de leur division. On s'explique ainsi que l’asymétrie soit la règle et que fréquem- ment le sens de l’asymétrie s’inverse suivant les organes ou les régions considérés. 3° L'anomalie amenant la répartition irrégulière des facteurs déterminants sur les œufs et Les blastomères fait partie du patri- moine héréditaire d’une lignée où elle apparait brusquement, pour des causes encore inconnues. L’hérédité ne suit aucune loi L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 79 définie car sa manifestation semble dépendre non seulement de facteurs internes, mais aussi de facteurs externes analogues à ceux qui influencent les cycles. IL faut noter que la pénurie alimentaire, qui à une action défavorable sur l'apparition des mâles, est, au contraire, propice à la production des imter- sexués. #* Däns une même lignée, Pabondance des aberrations sexuelles offerte par une progéniture ne dépend pas étroitement du degré de masculinisation de la mère. 5 Lorsque la ,najeure partie des organes externes sont mas- culinisés, les gonades sont rarement normales : elles consistent alors, le plus souvent, en ovo-testis renfermant les deux sortes de cellules germinales. Ces glandes mixtes ne sont pas fonction- nelles. 6° Les intersexués produisant des œufs peuvent former des éphippies. Celles-ci se montrent d'autant plus fréquemment et offrent des structures d'autant plus anormales que la masculini- sation de la mère est plus accentuée. 1° Les antennules mâles, portées par des imtersexués régé- nérent dans les mêmes conditions que celles des mâles nor- maux. 8° Par la répartition irrégulière de caractères franchement mâles et femelles, les Cladocères anormaux rappellent les gynandromorphes typiques (") (Drosophiles de Morçan), tandis que la présence de formes Intermédiaires ainsi que leur mode d'apparition les rapprochent des intersexués tels qu'ils sont définis par Goupscamipr et Ripoce. Du fait de cette double affinité et de leur origine parthénogénétique les Cladocères que nous veñons de décrire présentent un aspect nouveau du phénomène de l'intersexualité et leur genèse ne peut s'expliquer par les théories proposées jusqu'à ce jour. | Ces conclusions ne sont valables que pour les seuls Clado- cères, mais elles peuvent, peut-être, contribuer à jeter quelque lumière sur des questions de portée plus générale. {‘) Chez les Daphnies intersexuées il n'y à probablement jamais de mosaïque stricte, telle que MorGax la décrit chez les Drosophiles, c'est à dire passage sans transition d'une forme mâle à une forme femelle. Même si, le long de la zone de contact, il n’y a pas interaction entre les tissus de sexes différents, les deux régions doivent s'adapter mécaniquement l’une à l’autre et offrir des formes inter- mediaires. [ s0 R. DE LA VAULX Une des premières qui se posent est celle des rapports qui unissent les caractères morphologiques à la nature des gamètes. Le succès des recherches relatives à l'action des hormones chez les Vertébrés a fait naître dans l'esprit de beaucoup de biolo- gistes la conception d'une relation causale, fondamentale et nécessaire, entre les caractères primaires et secondaires. Cha- que fois qu'une anomalie de ceux-ci était constatée, on s'effor- çait, même chez les Invertébrés, d’en rechercher la cause dans une aberration correspondante des gonades: c’est ainsi que toute altération sexuelle causée par un parasite était considérée, a priori, comme castration parasitaire. Il a fallu les belles expé- riences de Ounemans, KezLo6c, MEIsENHEIMER, Kopec pour mon- trer que les liaisons hormoniques ne constituaient pas le rap- port fondamental des caractères sexuels dans le règne animal et que les Insectes, tout au moins, faisaient exception. Depuis, les travaux de G. Surra (08-15) et, plus récemment, de S. Kon- HAUSER (19) ont porté atteinte à la notion de castration parasi- taire chez les Arthropodes en montrant que le parasite pouvait, en modifiant le métabolisme, agir directement sur les carac- tères secondaires, les gonades étant parfois intactes (Korx- HAUSER). Nous avons vu que, chez les Daphnies, les glandes génitales présentent des états intersexuels bien plus rarement que les appendices. Les hormones ne semblent pas constituer le procédé de relation fondamental et nécessaire entre les caractères pri- maires et secondaires, mais plutôt un perfectionnement des moyens de corrélation. Elles sont souvent dépourvues de spé- cificité zoologique, voire sexuelle, et certaines substances pour- raient même parfois les remplacer (Kozzmanx, 19). Faut:il rappeler que des traumatismes extragénitaux amènent parfois (chez les Cervidés, par exemple) des résultats analogues à ceux que produisent les hormones et que celles-ci ne peuvent suffire à rendre compte des cas de gynandromorphisme obser- vés chez les Vertébrés. Dans son beau travail sur l’origine des caractères sexuels secondaires, KammERER (142) a montré que ceux-ci ne se distin- guent en rien des caractères de race ou d'espèce, ainsi qu'il résulte d'un grand nombre d'expériences sur les croisements, la régénération, l’action des facteurs externes, etc. Les hor- Lu. di, Ltd. L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÈRE 81 mones peuvent parfois les révéler, mais non les créer (). Comment peut-on s'expliquer que les deux sortes de carac- tères sexuels se trouvent normalement unis ? Tout œuf possède un sexe qu'il transmet à chacune des cel- lules filles. Toutes les cellules du corps se trouvent donc posséder, normalement défini depuis l'œuf, un sexe qu’elles manifestent, suivant qu'elles appartiennent au « germen » ou au « soma », par la production de gamètes déterminés ou par la réalisation des formes caractéristiques du sexe. Mais l'œuf n’est orienté vers la production d’un sexe que par un certain état métabolique, déterminé, sans doute, par un rapport entre la chromatine et Le cytoplasme. Cette orientation n'est pas toujours définitive, le métabolisme voulu est plus ou moins nettement instauré et l’on sait que, dans certains cas, il peut se modifier secondairement (hermaphrodisme successif, expériences de Bazrzer, de GouLn, d'Herrwie, etc.). Cette labilité sexuelle n’est d’ailleurs pas le propre de l'œuf et peut se retrouver à un certain degré dans les cellules filles qui sont capables de réagir isolément et de montrer une sexua- lité différente de l’ensemble du corps. I y à alors production de gynandromorphes. Il faut noter, cependant, qu'un animal n’est pas un simple agrégat de parties diverses ; il forme un tout, une individua- lité, douée de certaines caractéristiques au nombre desquelles figure le sexe. Un individu formé d'un assemblage de régions mâles, femelles ou intermédiaires ne peut conserver cette for- mule hétérogène pour un certain nombre de particularités qui ne se conçoivent qu'indivises. Tels sont : le métabolisme général (parfois la taille), Le comportement, le psychisme. Il en résulte que, même chez les gynandromorphes formés de parties nette- ment attribuables à l’un ou l’autre sexe, la notion de {ype sezuel intermédiaire s'impose pour l’ensemble de l'individu. IL est probable que cette conception ne doit pas se limiter aux gynandromorphes, mais qu'elle peut s'étendre à certains (!) On peut admettre que les caractéristiques pigmentaires, « livrées », orne- mentations diverses résultent de l’action directe des produits secrétés par les gonades mais une pareille supposilion est invraisemblable lorsqu'il s'agit d’or- _ganes compliqués étroitement adaptés à une fonction précise. Si l’on désire expliquer l’origine de ceux-ci mieux vaut faire appel aux facteurs évolutifs habi- tuellement invoqués pour les caractères spécifiques. 82 R. DE LA VAULX individus dans toutes Les espèces gonochoriques, y compris l'es- pèce humaine, même en l'absence d'anomalies notables des caractères sexuels secondaires. En effet en dehors de ceux-ci qui, presque au même litre que les gamètes, sont caractéris- tiques du sexe, 1l est possible de distinguer des caractères ter- liaires habituellement liés à un sexe au point d'en compléter la physionomie. Tels sont, par exemple, dans l’espèce humaine : la taille, le développement des muscles, la finesse des extré- mités et des articulations, une infinité de caractères psychiques. Ces particularités sont Ioin de se répartir uniformément entre les différents individus appartenant à un même sexe et permet- traient peut-être d'établir des degrés dans la sexualité. C'est d’ailleurs pour l'espèce humaine que le terme de type sexuel intermédiaire (!) a été créé par Hirscarecn à propos de cer- taines aberrations psychiques. Quelle que soit l'extension que doive prendre par la suite la notion d'intersexualité, l'étude de ce phénomène permet déjà d'établir des données importantes. Les sexes ne constituent pas deux alternatives exclusives, deux polarités incompatibles, mais plutôt les deux points extrè- mes de toute une série continue d'états intermédiaires. Ceux-ci sont exceptionnellement capables de se réaliser, sur un indi- vidu ou un organe, lorsque divers phénomènes : croisements hétérogènes, mutilation, intoxication etc. viennent influencer les agents déterminateurs du sexe. De plus, les différentes par- ticularités qui sont généralement réunies pour caractériser l’un ou l’autre sexe sont susceptibles de se dissocier et de se répartir irrégulièrement sur un même être. L'étude des Cladocères intersexués, en fournissant de nom- breux exemples de ces deux ordres de faits : graduation sexuelle et désagrégation des caractères peut jeter quelque lumière sur un nouvel aspect des problèmes de la sexualité. (1) Sexuelle Zwischenstufe. Voir Simac (11). L'INTERSEXUALITÉ CHEZ UN CRUSTACÉ CLADOCÉRE 83 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 1914. Acar, W.-E. — Parthenogenetic and sexual reproduction in Simoce- phalus vetulus and other Cladocera (Journ. Genetics, HT, 179). 1909. 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Edouard CHATTON et Charles PÉRARD Maitre de conférences Vétérinaire sanitaire de biologie générale de la Seine, à la Faculté des Sciences Attaché à l’Institut Pasteur de Strasbourg. de Paris. LES NICOLLELLIDÆ Infusoires intestinaux des Gondis et des Damans ET LE ‘ CYCLE ÉVOLUTIF ‘” DES CILIÉS SOMMAIRE AVANT-PROPOS. LES HOTES ET LEURS PARASITES Le gondi, p. 90. — La faune intestinale de gondi, Le 91. Les ciliés du gondi, p. 92. — Les damans, p. 93. — Les ciliés des damans. FRS OS ED CET ETUDE DESCRIPTIVE DES GENRES ET DES ESPÈCES. LEE GENRE NICOLLELLA ; Nicollella ctenodactyli, p. 94° — Forme, orientation, (dimensions, p. 94. — \Gouttières, 'ori- fice, cavités, p. 95. — Ciliature, p. 96. — jEctoplasme, structure de Ia gouttière préorale, p. 96. — Les fibrilles sidérophiles ou myonèmes. p. 97. -- Endoplasme, p. 98, Noyaux, p. 98. — Scissiparité, ipetites formes, p. 99. Con- jugaison, p. 100. — Anomalies de la conjugaison, p. 102. Petites formes non nn p. 102. — Formes de résis- lance . SPORE ES RE EE RE EE RE Re ee A GENRE COLLINELLA; Collinella qundii, p.102. — Forme, orientation, dimensions, p. 102. — Goutlières, orifices. cavités, p. 103. — Ciliature, p. 103. — Fibrilles sidérophiles ou myonèmes, p 104. — Endoplasme, p. 104 — Noyaux, p. 105. . 105. — Conjugai- son, p. 107. — Fusion des ébauches macronucléaires, p. 108. — Anomalies de la conjugaison, p. 111. — Petites formes non conjugantes . MU ES Collinella sp. de Procavia capensis : GENRE PYCNOTHRIX ; Pycnothrix Te des p. 113, — Le Pycnothrix monocystoides d’après Scausorz, p. 113. — Le Pycnothrix de Procatia Brucei (matériel Brumrr), d’après nos propres observations. LR Cilié indélerminé de Procavia capensis 93 04 102 111 HE 115 118 88 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD ETHOLOGIE DES NICOLLELLIDÆ . . . RS QUE 118 Siège et répartition dans l'intestin, p. 119. — Nutrition ECS 120 ORIGINE ET ÉVOLUTION DES CARACTÈRES ANATOMIQUES EN RAPPORT AVECETMAOLOGIE HE NNETNUAESRE 121 Les caractères anatomiques familiaux, p. 121. — Les caractères anatomiques originels, p. 122. — L'évolution éthologique, p. 124, — L'évolution anatomique, p. 124. — Les perturba- lions mécaniques de la scission, p. 126. — L'équilibre impar- ED LAN DRE EL: CE HER ee D A ne de 197 DISCUSSION DU « CYCLE ÉVOLUTIF ». . . AOC 128 LE « CYCLE ÉVOLUTIF » DES CILIÉS LIBRES, b. 128. — Les données de Maupras, p.128. — Interprétation des données de Maupas, p. 128. — Les travaux postérieurs à Maupas, p. 132. La « sénescence » et ses relations avec la conjugaison et l'en- domyxie, p.132. — Les effets de la conjugaison, p. 234. — Le déterminisme de la conjugaison, p. 137. — Le détermi- nisme de l’enkystement ; ses relations avec l'endomyxie, p.497. = Réflexions Per" TRE JR 138 LE « CYCLE ÉVOLUTIF » DES CILIÉS PARASITES …. . 2, 139 LE « CYCLE. ÉVOLUTIF »s DES NICOLLELLIDÆ, p.141. Les condititions de la culture intestinale, p. 141. — La mullipli- cation d'état et la ee de crise ; le rôle de la con- jugaison. + . DE EU TANT ROME 143 POSITION SYSTÉMATIQUE DES NICOLLELLIDÆ. , .… .}. . 144 INDEX: BIBLIOGRAPHIQUE AL Re ONE PRE PEN PE EXPLICATION DES PLANCHES. AVANT-PROPOS En octobre 1913 M. le docteur Roux, directeur de l’Institut Pasteur de Paris et M. le docteur Caarzes Nicozze, Directeur de l'Institut Pasteur de Tunis, chargeaient l'un de nous d’une mission de recherches dans le Sud-Tunisien sur l’étiologie du Bouton d'Orient. À cette étude dont il avait jeté les bases, CH. Nicozre nous conseillait de'joindre celle de la toxoplasmose du gondi, qu'il avait découverte en 1907, en cherchant chez ce rongeur le virus de la leishmaniose cutanée. Une première mission en 1913, qui n'avait été qu'une pros- pection, fut suivie d'une seconde en 1914, que la guerre inter- rompit. Les résultats en ont été publiés dans une série de mémoires que celui-ci continue et qui n’est pas close. Ce travail a pour origine la découverte chez le gondi de deux LES NICOLLELLIDÆE 89 ciliés parasites, dont nous faisons connaitre d'une manière pré- eise et détaillée la structure et l’évolution (!). Ils sont le noyau d'une famille nouvelle d’holotriches à laquelle nous rattachons avec certitude un parasite intestinal des damans, forme très aberrante, incomplètement comprise et jusqu'ici tout à fait isolée et flottante dans les classifications, le Pycnothrir mono- cystoides ScauBorz (1908). Nous avons pu reprendre nous-mêmes l'étude de ce parasite grâce à M. le professeur BrRumPT qui l'avait recueilli en 1901 chez un daman d’Abyssinie et qu'il a très aimablement mis à notre disposition. | C'est done l’étude de trois genres, formant une famille nou- velle, que nous présentons ici. Leur intérêt majeur est qu'ils constituent trois jalons d’une évolution remarquable qui conduit du type holotriche normal à des formes extrêmement modifiées, non seulement dans leur statique, mais aussi dans leur ciné- matique ; le processus fondamental, si simple et si général, de la scission transversale des ciliophores y est profondément dénaturé. ; Dans l’existence de parasites si voisins, chez des hôtes aussi éloignés phylogénétiquement que le sont les Cténodactylides et les Hyracoides, nous voyons la conséquence de l'identité com- plète de mœurs, de régime et d'habitat que présentent ces mammifères. L'interprétation et la sériation des formes et des phases de leur évolution nous à imposé un examen critique préalable, général quoique très raccourei, de la notion de «eyele évolutif » chez les ciliés, et des principaux travaux expérimentaux sur la conjugaison. _ La question qui se pose là est de savoir si les Ciliés libres ou parasites évoluent suivant un cycle prédéterminé, rigoureuse- ment ordonné, fatal, indépendant des conditions extérieures, ou si, au contraire, les phases de ce cycle sont conditionnées dans leur apparition et Leur succession, par l'action du milieu. Institut zoologique de l'Université-de Strasbourg. / Ÿ 15 mai 1920. (t) Nous avons brièvement décrit ces deux genres dans une note préliminaire (4949). 90 ED. CHATTON ET CH PÉRARD LES HOTES ET LEURS PARASITES Le Gondi. — Le Gondi (Goundi des Arabes), Crenodactylus Gundi (Parras), est le type d’une petite famille de rongeurs actuellement localisés au continent africain. Trouxssanr (1905), avec la plupart des auteurs, les range dans les Hystrichomor- phes et leur reconnait des affinités avec les Octodontidæ sud- américains. Cependant Tuzz8erG (4899) en fait des Sciurogna- thes Myomorphes, mais leur assigne une place très à part dans ce groupe. Outre le genre Ctenodactylus, la famille comprend les genres Massoutiera et Pectinator. Le type des Massoutiera, M. Mzabi a été découvert à Gardaïa dans le sud-algérien par Laraste (1881). Une autre espèce vit au Sénégal. Le genre Pectinator est propre au pays Somali. : Le genre Ctenodactylus a trois espèces : C. Gundi (PazLas), décrit par RorTamanx et par PaLLas dès 1778, s'étend dans tout l’atlas saharien, des Ksours oranais à la Tripo- litaine au delà de laquelle on ne le retrouve plus vers l’est. C. Massont Gray de l'Afrique australe, longtemps confondu avec C. Gundi, en à été distingué par Larasre (1881). C. Vali Orrixzp Tomas (1902) a été décrit d’après des exem- plaires rapportés par Warraker de la région de la Tripolitaine en bordure du désert de Lybie à la latitude de Benghazi. En Tunisie les exemplaires nombreux que nous avons eus entre les mains se rapportaient tous, quelque soit leur prove- nance, à l'espèce C. Gundi, même ceux de Tataouine dont le djebel fait déjà partie du système orographique tripolitain. Le gondi existe dans toutes les rocailles des montagnes ou des col- lines de la zone sub-saharienne ; sa limite nord paraît être à peu près le parallèle de Tebessa, sa limite sud n'est pas fixée, que nous sachions. Les mœurs du gondi ont été bien décrites par Brean (14877) mais c’est LATASTE qui a mis en lumière les traits dominants de son éthologie, et en particulier la corrélation qui existe entre sa morphologie et son habitat exclusivement saxicole. Il à fait justice de l'erreur de Gervais qui présentait le gondi comme un animal fouisseur, et il a montré que la conformation de ses 1 LES NICOLLELLIDÆ 91 extrémités lui interdit de gratter tandis qu'elle est spécialement adaptée à l'escalade. in fait le gite du gondi est toujours une cavité préexistante dont il est incapable de modifier l’état. Il abonde dans Les ébou- lis, les ruines (Ksour des Matmata et de Tataouine). Il à colonisé rapidement les ouvrages en pierres sèches de la ligne du chemin de fer du Seldja. Mais on ne le trouve pas là où le rocher n’est ni désagrégé n1 anfractueux. Larasre insiste encore sur ce que le gondi est aussi inhabile à ronger qu'à gratter. Aussi son régime est-il herbivore beaucoup plus que granivore. Les nombreux examens du contenu intesti- nal de gondis tués au fusil, ou récemment capturés, nous ont toujours montré un magma d'herbes triturées, et jamais une purée farineuse comme celle que contient l'intestin des Muri- dés. En somme le régime du gondi est sensiblement le même que celui du lièvre ou du cobaye, et il se traduit comme chez ces animaux, par le grand développement du cæcum. La flore dont le gondi tire sa nourriture est certainement un des facteurs de sa localisation stricte à la zone subsaharienne. Les autres facteurs, extrêmement importants aussi, de sa loca- lisation sont d'ordre thermique et hygrométrique. En liberté, le gondi passe des heures entières juché sur une pierre en plein soleil ; sa fourrure est sèche et touffue. En captivité, même dans les meilleures conditions, ses poils s'agglutinent et se plaquent à la peau. Les gondis vivent dans leurs repaires en petites colonies, peut être seulement par couples isolés. Ils ÿ accumulent leurs excréments en une sorte de guano. Ils se reproduisent une fois par an en février. Les petits au nombre de un, deux ou trois naissent comme ceux des cobayes, couverts de poils et aptes à marcher. La faune intestinale du gondi. — 1° Protozoaires. Dans l'estomac pas de Protozoaires. Dans l'intestin grèle fréquence d'une coccidie du genre Eimeria dont les ookystes mesurent 35 u de diamètre. Quoique parfois très dense, l'infection ne parait pas mortelle Dans l'intestin postérieur une amibe du genre Entamæba, et très probablement du type coli, dont nous ne connaissons pas les kystes ; enfin les deux ciliés décrits ci-dessous Nicollella ctenodactyli et Collinella qundii. 9? ED. CHATTON ET CH. PÉRARD 29 Cestodes : Un ténia non identifié très commun dans l'intes- tin grêle. 3° Nématodes : Nous avons recueilli tous les nématodes que nous avons rencontrés chez le gondi, et les avons adressés à M. Seurar. L'envoi à été égaré. À défaut de détermination de nos exemplaires nous donnons ici, d'après le travail de Seurar (1918), la liste des parasites du cténodactyle de Tunisie. Esto- mac : Physaloptera tacapensis Seurar et P. brevivaginata SEüRAT ‘Ascaridæ). Intestin grêle : Nematodirus filicollis (Rud.) (Tri- chostrongylidæ). ntestin postérieur : Syphacia hilgerti. Seurar (Oxyuridæ) et Seuratum tacapense (Seurar) (Heterakidæ). Protophytes : pas de formes caractéristiques comme le sont du lapin : la levure Saccharomycopsis quttulatus ou du cobaye : l'oscillariée incolore Oscillospira Guilliermondi. Les ciliés du gondi. — Nicollella ctenodactyli et Collinella qundii se rencontrent, la première chez 60 0/0 environ des gondis, la deuxième chez 80 0/0. Celle-ci est aussi toujours plus abondante. Les deux formes sont localisées au cæcum et à la portion antérieure du gros intestin, Nicollella dans le côlon seulement (30-35 premiers centimètres), Co/linella dans cette même portion et dans tout le cæcum. Elles se présentent là sous des formes variées, échelonnées suivant un ordre constant. Nous reviendrons en détail sur ces faits au chapitre de l’étho- logie. Disons seulement ici, comme préambule à la partie descriptive, qu’il y a à distinguer dans chacun des parasites, d'une part de grandes formes végétatives, et d'autre part des formes moyennes et petites parmi lesquelles se trouvent les conjugants. : | Quand l'infection est peu intense elle ne se décèle qu'à l'exa- men microscopique. Mais quand elle est très dense, ce qui n'est pas très rare, elle est apparente dès l'ouverture de l'abdomen. Le cæcum et l'intestin qui, à l'état normal, ont la teinte brun verdâtre du contenu, sont alors lactescents, et la muqueuse en est comme guillochée ; ceci est dû à ce que les replis valvu- laires sont visibles par transparence. Etalée, la muqueuse est entièrement revêtue d'une couche finement villeuse, et du fond des replis valvulaires sourd une sorte de sanie grenue. Tout cela est formé par l'accumulation des infusoires. Dans ces cas l'intes- tin et le cæcum sont moins turgides que d'ordinaire et plus ou LES NICOLLELLIDÆ 93 moins fripés. L'infection à ce degré n'est pas sans troubler les fonctions digestives de l'hôte. C’est un cas comme celui que nous venons de décrire qui, dès nos premières autopsies, nous fit découvrir ces parasites. Les damans. — Les Hyrar où Procavia, comme les Cteno- dactylidæ ont embarrassé les classificateurs. Rangés d’abord dans les rongeurs, puis à côté des marsupiaux (OKEx) classés par Cuvier dans ses pachydermes, errant ensuite aux confins de ce groupe, ils constituent maintenant un ordre autonome d'ongu- lés, les Hyracoidea (Max Weger 1904). Ils n'auraient done rien de commun, phylogénétiquement, avec les gondis; mais ils s’en rapprochent par leur éthologie d'une manière complète. Ce sont des animaux xérophiles, héliophiles, saxicoles, grimpeurs et herbivores. Leur répartition géographique est à peu près celle des Ctenodactylidæ ; les quelques 14 espèces qui consti- tuent le genre sont localisées à l'Afrique et à l'Asie Mineure. On les trouve en Afrique australe, au Sénégal, en Abyssinie, en Syrie, en Arabie et, fait intéressant, en Afrique Mineure. Le Procavia Bounhioli Kozimanx (1942) du Sahara algérien doit y être au contact des peuplements de Gondis. Deux espèces nous intéressent spécialement ici comme hôtes de ciliés : Procavia capensis (Pazras) de l'Afrique du sud, et Procavia Brucei Gray de l'Abyssinie (Harar Brumpr). Le grand daman de l'Abyssinie, Procavia abyssinica luteogastra Gray, ne serait pas infecté (Brumrr). Les ciliés des damans. — Chez Procavia Brucei Bruupt (en avril 1901) et chez Procavia capensis Scau8orz (1908), ont trouvé le Pycnothrix monscystoides Scavsorz. Cet auteur à vu en outre, associés au Pycnothrix, deux ciliés dont l’un est certainement une Collinella; l'autre n’est pas identifiable. Nous ne savons rien de leur fréquence. SCHULTZE qui a recueilli le matériel étudié par Scaugorz l'aurait extrait de l'intestin grêle du daman du Cap. Bauupr n'a pu nous renseigner sur la localisation exacte du Pycnothrix de Procavia Grayi. Nous n'acceptons pas comme définitif le renseignement donné par ScauLTZzE, et ceci pour trois raisons : {° l'existence de ciliés dans l'intestin grêle d'un mammifère est une exception qui mérite confirmation ('); 2° parmi ces trois ciliés il y a une (‘) Tous les ciliès intestinaux des vertébrés, abstraction faite de ceux de la panse 94% ÉD. CHATTON ET CH. PÉRARD Collinella qui chez le gondi est parasite du gros intestin ; 3° Les Hyracoides, seuls parmi les mammifères, possèdent au milieu du gros Intestin un cæcum surnuméraire, qui à pu être confondu avec le véritable cæcum, et le segment compris entre ces deux cæcums à pu être attribué à l'intestin grèle. Nous reconnaissons qu'aucune de ces raisons n'est décisive; aussi bien ne les pro- duisons-nous que pour susciter une vérification du siège des Pycnothrix. Nous n'avons pas cru devoir faire dans la littérature le relevé des parasites intestinaux des damans, autres que les Ciliés, que nous n'avons pas nous-mêmes observés. I serait néanmoins inté- ressant de savoir si les affinités de leur faune intestinale avec celle des gondis se manifeste pour l’ensemble des parasites comme elle apparait dans l’étroite parenté de leurs infusoires. ÉTUDE DESCRIPTIVE DES GENRES ET DES ESPÈCES. FamiLLe pes Nicollellidæ Carr. er P£RARD. 4919 Nicollellidæ, Cuarr. et Pérarn 1919, p. 10-17. Genre type de la famille Genre Nicollella Cnarr. et Pérarp 1919 (1) Nicollella Cuarr. et Pérarp 1919; p. 10-17 : fig. 1. Espèce type du genre : Nicollella ctenodactyli Cuarr. et Pérarp 1919 Nicollella ctenodactyli Cuarr. et Pérann 1919: Loc. et. Type de l'espèce parasite dans le cæcum et le gros intestin de Ctenodactylus Gundi (Pazras) ; Metlaoui, sud-tunisien ; toute l'année (fig. 2-27). Forme, orientation, dimensions. — Nicollella au maximum de sa taille à la forme fondamentale, en réalité très altérée, d'un des ruminants, sont des parasites du gros intestin. Il y a lieu de rappeler que c'est aussi dans le cæcum qu'ont été rencontrées les cinq espèces des genres Balantidium, Entotinium Cyathodinium que Nerva, DA Cunua et Travassos(1914) ont découvertes chez l'Aperea (Cavia aperea Erxe) le cobaye sauvage du B:ésil, qui est aussi un herbivore {() Dédiée à Ca. Nicozue, directeur de l’{nstilut Pasteur de Tunis. / LES NICOLLELLIDÆ 95 ovoïde allongé (fig. 2-3), à gros bout antérieur. Celui-ci est défini comme tel, anatomiquement, par l'origine de la gouttière préorale, homologue du péristome des autres ciliés, mais com- parable surtout aux péristomes en gouttière étroite et linéaire de certains Uronema, des Dileptus, des Spirostomum, ete. Le siège de la vacuole pulsatile et de son orifice, qui est en même temps un cytopyge, à l'extrémité opposée du corps, désigne celle-ci comme postérieure. Physiologiquement, le gros bout est défini comme antérieur par le sens de la progression, ou plutôt par le sens des ondes cilaires, qui s'éloignent de cette extrémité ; la progression est en effet très réduite chez ces ciliés, et ne se manifeste, croyons- nous, que lorsque l'animal est dérangé. Sans parler de fixation ni même d'adhérence, nous insistons sur ce que tous les para- sites, d'une manière constante, ont leur gros bout au contact de la muqueuse ou dirigé vers elle. La face parcourue par la gouttière préorale, à l'extrémité pos- térieure de laquelle se trouve la bouche, est la face ventrale. Toute sa moitié antérieure est à profil rectiligne, mais elle n’est nullement aplatie, ce que prouvent les coupes transversales (fig. 4 et 5). Ces grandes formes végétatives mesurent jusqu'à 550 de long sur 150 x de large. - Gouttières, orifices, cavités. — La gouttière préorale décrit du pôle antérieur à la bouche, située à l'équateur du corps, une courbe à grand rayon, à concavité gauche (fig. 3 g. p.). C’est un sillon à profil aigu, taillé obliquement de droite à gauche dans l'épaisseur de l'ectoplasme. Par suite de cette obliquité, sa lèvre gauche est aiguë et recouvrante, sa lèvre droite obtuse. Mais ni l’une ni l’autre ne sont saïllantes. La profondeur de la gouttière augmente d'avant en arrière (fig. 4et 5). La fente buccale ou cytopharyngienne qui la termine, est une profonde dépression de son fond, dont l'axe est normal au sien. Elle pénètre donc le corps de droite à gauche, à la limite de l’ectoplasme et de l’endoplasme (fig. 5). Au pôle postérieur se trouve une poche de volume variable (fig. 2, 3, 6 v. e.) que. nous n'avons pas vu se contracter. Ge ne peut être que la vacuole excrétrice. EHe débouche par une lon- gue fente (fig. 8) entre deux lobes arrondis comme ceux d’un 96 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD gland pénial. Le méat de ce gland est dans un plan perpendi- culaire au plan de symétrie du corps, c’est-à dire frontal. Il n'y a, S'ouvrant dans la poche, ni canalicules excréteurs, ni vacuoles accessoires. Ciliatiure. — Elle est du type holotriche pur. Les cils qui s'insèrent sur les crêtes des lèvres de la gouttière préorale, et ceux qui revêtent les lobes postérieurs, sont à peine plus déve- loppés qu'ailleurs. Ils ne sont nulle part agglutinés en membra- nelles. Ils sont :mplantés sur des lignes très rapprochées formant une double striation longitudinale et transversale, la première seule fondamentale (fig. 7 et 8). La disposition du système ciliaire, et ses rapports avec la gouttière, sont conformes au schéma général (Bürscazt 1889), et en particulier au diagramme que cet auteur (1887) a donné de ces rapports pour les diffé- rentes situations de la bouche en rétrogradation. Il n'y a qu'un revêtement ciliaire très court sur l'abrupt des lèvres de la gout- tière et qui n’en atteint d’ailleurs pas le fond. I] fait défaut dans le cytopharynx. Le mouvement ciliaire produit des ondes qui parcourent le corps d'avagt en arrière, sans jamais amener un déplacement rapide de l’infusoire. Lorsque celui-ci est en état de souffrance, ces ondes s'accusent beaucoup. EÉctoplasme, structure de la qouttière préorale et du méat excréteur. — Le grand développement de l’ectoplasme au pôle antérieur et dans la région préorale, et son individualité par rapport à l'endoplasme, sont parmi les caractères les plus sail- lants des Nicollellidæ. Il est formé de trois lames (fig. 4, 5, 6, 9) : une externe, de structure homogène, de 2 x environ d'épaisseur, qui contient les grains basaux des cils ; une lame interne, encore plus mince que la lame externe et qui n’est peut être qu'une surface de contact ; une lame moyenne épaisse, de structure finement alvéolaire et striée normalement à sa surface. Il semble que ces stries ne sont autre chose que des racines ciliaires, mais 1l ne peut y avoir à cet égard de certitude absolue. Cette lame moyenne est d'épaisseur très inégale suivant les régions du corps. Elle a 70 y au pôle antérieur; de là elle diminue progres- sivement dans tous les sens, sauf sur la face ventrale, où elle a, jusqu'au niveau de la bouche, une épaisseur de 20 y. Au des- ne és te die di PP VRP ET ER éd. te ste mt nt is à ot tune té tte. ét LES NICOLLELLIDÆE 97 sous de la bouche, elle devient brusquement extrêmement mince, sinon virtuelle, comme dans tout l'hémisphère posté- rieur. Là, la lame externe et la lame interne semblent être au contact. Le plastron ectoplasmique ventral s'amincit progressi- vement sur les faces latérales (!). Au niveau de la gouttière préorale, la lame ectoplasmique moyenne fait complètement défaut (fig. 4). La lame externe s'infléchit sur l’abrupt des lèvres et vient au fond du sillon au contact de la lame interne. L’abrupt des lèvres, vu de face, pré- sente une palissade très régulière de fibres ou de bâtonnets très colorables (fig. 10). Ces bâtonnets nous paraissent représenter quelque chose d'analogue à ceux de la nasse pharyngienne des holotriches gymnostomes, qui sont également sidérophiles, si l'on en juge d'après ce que H. N. Mur (1908) à vu de ces élé- ments chez Prorodon teres. Aux cils de la face externe de la lèvre droite, qui ne sont cependant pas plus développés que ceux de la lèvre gauche, correspondent de très longues racines (fig. 5). Eiles traversent non seulement l’ectoplasme, mais elles se prolongent très loin dans l’endoplasme. Cet allongement est maximum au niveau de la bouche ; il diminue progressivement vers le pôle antérieur. Nous retrouverons une disposition tout à fait homologue chez Collinella et chez Pycnothrix. La lame ectoplasmique externe se réfléchit dans Le méat excré- teur, qu’elle revêt entièrement, puis elle s'étale en pavillon, dont les bords, en certains points, viennent affronter par sa face interne l’ectoplasme de la surface générale, délimitant ainsi dans le pôle postérieur une sorte d’espace annulaire (fig. 2 et 6). C'est dans ce pavillon qu'est située la vacuole excrétrice. Dans toute cette région les racines ciliaires sont très développées et se prolongent dans l’'ectoplasme en faisceaux irréguliers. Les fibrilles sidérophiles dites « myonèmes ». — Dans toute la région antérieure du corps, jusqu’à la bouche, il existe, sous la lame ectoplasmique interne, intimement appliquées contre elle, ou se confondant avec elle, des fibres sidérophiles circulaires, semblables à celles que, chez beaucoup de ciliés, l’on considère comme des myonèmes (fig. 4 et 5). Si nous ne les donnons pas {") Voir pour les homologies de ces zones p. 114-415. 98 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD catégoriquement comme tels,-c'est que nous n'avons pas la preuve de leur contraetilité. Elles prennent leur origine sur le fond de la gouttière préorale et s'étendent jusqu’à la face dor- sale, formant chacune, dans un plan transversal, un cerele complet où interrompu dorsalement. Elles sont tout à fait indé- pendantes des stries transversales d'insertions ciliaires. Les espaces qui les séparent équivalent à celui occupé par quatre ou cinq de ces stries et leurs intervalles. [l y a une corrélation étroite entre ces fibrilles et la gout- tière préorale, puisqu'elles font complètement défaut au delà de celle-ci. Endoplasme. — 11 comprend une couche de fines alvéoles sous-jacentes à l’ectoplasme, et une masse centrale de cyto- plasme de texture beaucoup plus grossière et hétérogène. Les vacuoles avec ou sans contenu figuré y abondent. Certaines contiennent des ingesta volumineux (ookystes coccidiens ou petits | individus de Pespèce elle-même, fig. 3 et 5). L'aspect de l’endoplasme varie d’ailleurs avec le régime ali- | mentaire de l'hôte. Quand les gondis sont bien nourris, l’endo- plasme est tellement chargé de granulations que la silhouette du noyau est masquée. Cet aspect s'obtient facilement en four- nissant aux gondis des amylacés (orge, pain). Normalement, chez les gondis nourris d'herbes, l'endoplasme est assez translu- - cide pour laisser voir le noyau, mais il est cependant toujours plus sombre que l'ectoplasme. Noyaux:— Le N a la forme d’un ellipsoïde allongé, ou même d'un cylindre à bouts arrondis mesurant de 60 à 80 x de long sur 30 à 35 de large. Il est rectiligne ou incurvé. Dans un petit nombre d'individus (nous parlons des grandes formes), il y a deux N subsphériques égaux chacun à la moitié d’un noyau unique. In vivo, le N ne montre aucune différenciation structurale. Au contact des solutions hypotoniques il se résout en une infi- nité de fins granules. Chez les imfusoires colorés en masse à l'hématoxyline au fer, il se teinte d’une manière intense et parait absolument homogène. Mais sur les coupes minces colo- rées de la même façon il parait constitué par une masse fonda- mentale finement granuleuse creusée de vacuoles contenant des blocs également sidérophiles plus ou.moins volumineux LES NICOLLELLIDÆ 99 (fig. 5). Il est entouré d’une membrane résistante qui s'en décolle souvent sous l’action du fixateur. C’est bien une membrane propre. Dans les frottis ou dans les préparations à l’état frais, où les N sont fréquemment expulsés sous l'effet de la compres- sion, on en voit un certain nombre se vider de leur contenu qui s'échappe de leur membrane comme d'une capsule. Le x est sphérique de 10 y environ de diamètre, toujours, au repos, dans une échancrure du N. IT est constitué par une vési- cule centrée par un earyosome compact el de la chromatine périphérique appliquée contre la membrane nucléaire. Tel, il a l’aspect d’un protokaryon. Le complexe nucléaire occupe dans l’endoplasme une situa- tion quelconque et certainement variable suivant les courants de cyclose. Dans les grandes formes à deux N, il n'y a qu'un seul ». Scissiparité, petites formes. — Malgré le grand nombre d'in- dividus de toutes tailles contenus dans nos préparations, ou exa- minés sur le vif, nous n'avons rencontré que de rares images de division chez les grandes formes. La figure 11 représente la scission d'une forme moyenne. Le N et Le n sont déjà scin- dés ; l'étranglement équatorial est ébauché, et la calotte ecto- plasmique antérieure de l'individu postérieur est indiquée par l'épaississement de l'ectoplasme autour du sillon de constric- tion. La nouvelle bouche de l'individu postérieur n'apparait pas encore, non plus que le cytopyge de l'individu antérieur. La scission est rigoureusement transversale. Nous considérons les formes qui mesurent de 250 à 350 comme procédant d'une semblable seission binaire transver- sale égale ou subégale de grands individus. Elles n’en diffèrent point. Mais au-dessous de 250 v la silhouette se modifie. En raison de ce que les scissions se succèdent sans croissance compensatrice la longueur diminue ; le parasite prend la forme d'un ovoïde trapu à bout antérieur plus eflilé que le postérieur, ce qui tient surtout à l'effacement des lobes qui prolongeaient ce bout (fig. 11-27). La vacuole excrétrice, son méat et son pavil- lon n’en existent pas moins. ; La taille peut s’abaisser ainsi par scissions successives jusqu à 10 y de long sur 40 de large, c'est-à-dire jusqu'au septième de la longueur et aux deux septièmes de la largeur des plus 100 ÉD. CHATTON ET CH. PÉRARD grandes formes. Chez les individus présentant les dimensions ci-dessus, le N sphérique mesurait de 12 à 15 y (fig. 27). La structure reste la même que dans les grandes formes. Cependant l’endoplasme a ici la texture finement et uniformé- ment alvéolaire qui est celle du plasma cortical des grandes formes. Il ne montre que rarement des vacuoles et ne contient jamais d’inclusions solides. Il semble done que ces petits indi- vidus ont perdu la capacité de se nourrir par ingestion. Le cône fibrillaire oral est particulièrement visible (fig. 12, 48, 25, 26). Semblable abaissement de la taille marquant la dégénéres- cence (scénescence, dépression), ou conduisant à la conju- gaison est chose commune, sinon générale, chez les cihés, mais il n’atteint le degré que nous lui voyons ici que chez les parasites. Nous reviendrons sur ce phénomène dans le chapitre du cycle évolutif. Conjugaison. — Nous ne l'avons vu intervenir qu'entre de petites formes, ne mesurant pas plus de 100 à 110 sur 60 à 70 u. Elle est très rare chez les toutes petites formes, qui paraissent peu aptes à se conjuguer. La conjugaison est nettement liée à l’abaissement de la taille, car dans toutes les préparations contenant de petites formes on en trouve toujours un plus ou moins grand nombre en voie ou en fin de zygose. Le matériel ne se prête pas à une étude précise de la matu- ration, à cause de l'impossibilité de compter les chromo- somes. Les caryodiérèses sont comme chez tous les ciliés du type mésomitotique. La figuration de tous les stades nous permettra d’être brefs dans la description, pour laquelle nous userons de la nomenclature de Mauras (1889). Stade A (fig. 13-14). — Micronucleus gonflé, à caryosome dissocié en blocs chromatiques. Dans un seul cas nous'avons compté six de ces blocs accouplés deux par deux. Si ce sont bien des chromosomes ils seraient en même nombre que chez Collinia branchiarum. Nous n'avons pas vu avec certitude le stade « à facies de synapsis » ou «en parachute » et la pro- phase unipolaire observés chez cette espèce (B. Corzix 1909, Bruupr 4913) et dont l'existence apparait comme de plus en plus générale chez les ciliés (Cazrins 1919). | Le stade À est atteint et même. dépassé (deux » en activité) chez des individus isolés. La fréquence des isolés à micronucleus LES NICOLLELLIDÆ 404 gonflé (fig. 13), nous persuade que le signe nucléaire de la conjugaison peut précéder F'accouplement. Dans la syzygie les conjoints sont en contact intime par leurs faces orales. Ils sont parfois de tailles très différentes (fig. 17) et dans ce cas, leurs évolutions nucléaires sont asynchroniques. Stades B et C (fig. 15-16). — Des quatre nr produits par les deux divisions de maturation, l'un reste beaucoup plus volu- mineux que les autres ; c'est Le noyau sexuel. Il offre cette particularité de s'engager toujours d'une manière précoce dans le cône fibrillaire préoral (fig. 16) (1). Stades Det E. (fig. 18-19). — C'est dans ce cône qu'il se dédouble. Ce stade est d’une extrême rareté eu égard à la fréquence du précédent. Il est certain que, chez ces formes, le dédoublement est suivi d’une rétrogradation du pronucleus femelle. Les deux pronuclei sont d’ailleurs bien différenciés par leur taille (fig. 18). Nous n'avons pas vu la caryogamie (stade E). La séparation des conjoints doit la suivre de très près, car au stade F les individus sont toujours isolés (fig. 19). Le -synkaryon se distingue bien des trois n de réduction, dont la résorption est très lente. Ceux-ci peuvent se retrouver aux stades G/1 et même G/2, dont ils compliqueut l'interprétation. Le N disparait aux stades Det E, laissant un amas de pous- sière chromatique (fig. 18). Stades F et G. — Le synkaryon donne deux (fig. 20-21-22), puis quatre (fig. 23) noyaux fils; mais les deuxièmes mitoses ne sont pas synchrones ; on trouve généralement un fuseau et deux » au repos, de taille inégale. L'un en dégénérescence, est de rebut, l’autre est le n définitif. Quant au fuseau il donne les deux ébauches macronucléaires (fig. 22-23). Stade H.— Le n de rebut a disparu, le » définitif a sa taille et sa structure normales. Les ébauches macronuelé- aires sont tout d'abord identiques aux # en anaphase : vési- cules à spirème ou à granulum chromatique central, entouré d'un espace clair (fig. 24). Ces vésicules se comblent par diffusion ou pulvérisation de cette masse centrale et deviennent des noyaux massifs, sphériques, à structure réticulée (fig. 25). Ils sont le plus souvent très rapprochés, en contact intime et finissent par se fusionner, formant ainsi le N définitif (fig. 26). 102 ED. CHATTON ET CH. PÉHARD Le », presque toujours engagé d'avance dans le sillon de tangence, se trouve, après la fusion, enclavé dans la région équatoriale du N : mais ces rapports peuvent se modifier dans la suite. Cette fusion des ébauches macronucléaires, qui n’est pas sénérale chez les ciliés, se produit également chez Collinella, où nous l’étudions plus en détail. Anomalies de la conjugaison. — 1° Asynchronisme de lPévo- lution nucléaire dans les deux conjoints ; 2° persistance des n de réduction jusqu'au stade G, ou leur disparition précoce dès les stades D où E ;: 3 production d'un seul x après la division du synkaryon, ou d’une seule ébauche macronucléaire ; — 4° fusion très tardive ou défaut de fusion des ébauches macro- nucléaires, d'où l'existence d'individus à deux N sphériques qui sont de moitié plus petits que les N normaux. Petites formes non conjugantes. — Toutes les formes dont la taille s'abaisse au dessous de 120 y entrent-elles en conju- gaison ? ou les bipartitions peuvent-elles se poursuivre sans zygose ? Quelle est dans l’un ou l’autre cas leur destinée ? Ces questions se posent aussi à propos de Co/linella et avec plus d'éléments d’information. Nous les examinerons dans la discussion du cycle évolutif des Nicollellidæ. Formes de résistance. — Elles nous sont inconnues aussi bien chez Nicollella que chez Collinella. : Genre Collinella. Caarr. et PÉranp, 1919. Collinella Cuarr. et Péranp, 4919 : p. 10-17 ; fig. 2. Espèce type du genre : Collinella Gundii Cuarr. et P£rann. 1919. Collinella Grundii Cuarr. et Pérann, 1919 ; loc. cit. Type de l'espèce : parasite dans le cæcum et le gros intestin de Clenodactylus (Gundi (Parras) ; Metlaou, Sud-tunisien ; toute l’année (fig. 28-60). Forme, orientation, dimensions. — La forme est beaucoup plus élancée que chez Nicollella, la différenciation des pôles 9 LES NICOLLELLIDÆ 103 plus accusée, l'un étant tout à fait arrondi, l’autre aigu (fig. 28-29). C'est encore le pôle arrondi qui est antérieur, quoique la bouche occupe ici le pôle postérieur même. Elle n'en est pas moins en relation avee le pôle antérieur par la gouttière préorale. La vacuole excrétrice est aussi postérieure, mais subter- minale, comme déviée de sa situation primitive par la bouche. La face ventrale parcourue en ligne méridienne par la gout- tière préorale, est aussi de profil subrectiligne, et se distingue par là des autres faces, comme d’ailleurs par l'épaisseur de son ectoplasme (fig. 28). Les plus grandes de ces formes mesurent de 550 à 600 y de long, sur 100 y de large. . Leurs rapports avec l'épithélium intestinal sont les mèmes que chez Nicollella ; mème locomotion réduite. Gouttière, orifices, cavités. — Partie du pôle antérieur en droite ligne, la gouttière préorale, à partir du dernier tiers, s’infléchit vers la gauche et se termine sur la face gauche du pôle postérieur par la fente buccale. C’est le même sillon que chez Nicollella, taillé dans toute sa longueur dans le plastron ectoplasmique. Mais ce sillon est ici normal à la surface. Ses deux lèvres sont par conséquent égales (fig. 31). La bouche est une fente comprimée dorso-ventralement, qui, vue de profil, paraît s'ouvrir dorsalement vers l'arrière, au-dessus d’un lobe saillant formé par l'extrémité du plastron ectoplasmique ventral (fig. 28). En réalité, elle est ouverte à gauche et elle s'enfonce de gauche à droite ; mais elle échancre nettement le profil postérieur. Elle parait profonde, mais c'est là une illusion due à ce qu'elle est prolongée vers le haut par la gouttière préorale. Elle pénètre le corps beaucoup moins profondément que chez Nicollella. Le cytopyge s'ouvre en avant de la bouche, à gauche de la gouttière, par un canal qui, après un court trajet très oblique d'arrière en avant, débouche dans une vacuole excrétrice, située au-dessus de la bouche (fig. 28-32 et 33). Ni vacuoles accessoires, ni canalicules excréteurs. Le segment externe du canal vésiculaire est cilié. Ciliature, — Exactement de même type que chez Nicollella 10% ED, CHALTON ET (‘H. PÉRARD (fig. 30-34). Mais les cils sont plus longs et il n’y a pas de différence entre ceux des lèvres, ceux du pôle postérieur et ceux du revêtement général. Ectoplasme, structure de la qouttière préorale. — Mème structure fondamentale que chez Nicollella. Mais, les cils étant plus forts, leurs racines sont plus nettes et on ne distingue pas d'alvéoles entre elles. La calotte ectoplasmique antérieure est moins épaisse que chez Nicollella (20 à au maximum) ; elle se prolonge ventralement jusqu’au pôle postérieur par le plastron déjà décritet de même épaisseur qu’elle-même (fig. 28). La gouttière préorale n’est pas de section triangulaire, mais trapézoïde, parce que ses lèvres ne s'affrontent pas au fond du sillon (fig. 31-32-33). La lame ectoplasmique externe n’est pas appliquée sur l’interne ; elle se soulève en une crète aussi longue que la gouttière elle-même. Elle forme d’une manière analogue une saillie de section en 7 sur l’abrupt droit de la coutfière. Sauf le long de ces saillies, la lame externe réflé- chie porte des cils. Chaque lèvre est soutenue, comme chez Nicollella, par une palissade de bâtonnets sidérophiles, qui, au lieu de s'affronter à angle aigu au fond du sillon, traversent la lame ectoplas- mique interne et ne s'affrontent qu'assez profondément dans l’'endoplasme, à la manière de chevrons. Fait intéressant, la lame de longues racines ciliaires de la lèvre droite de Nicol- lella se retrouve ici tout Le long de la gouttière ; ces racines se prolongent dans l'endoplasme, au-delà de l'axe du corps, quelquefois jusqu'à la paroi opposée, comme une sorte de septum diamétral (fig. 31-32-35). Dans le tiers antérieur du corps, les fibrilles de ce septum convergent en éventail, dans les deux tiers postérieurs elles sont parallèles. IL n'y a dans l'appareil excréteur rien de comparable à l’entonnoir ectoplasmique de Nicollella. Fibrilles sidérophiles dites « myonèmes ». — Ce sont les mêmes fibrilles sidérophiles que chez Nicollella, çà et là anas- tomoséés, et montrant les mêmes rapports avec la gouttière C'est dire qu'elles existent ici tout Le long du corps (fig. 31-34). Endoplasme, — Zone corticale plus nette que chez Nico/lella. Endoplasme proprement dit de même structure, mais moins chargé de vacuoles et d’ingesta, Ces derniers ne sont jamais LES NICOLLELLIDE 105 que de fines particules. Variations de l'aspect de l'endo- plasme suivant le régime alimentaire de l'hôte. Noyaux. — Complexe nucléaire identique à celui de Nicol- lella. F y à aussi des formes à deux N avec un seul ». Scissiparité, petites formes. — Rare chez les grandes formes, la scissiparité est fréquente chez les moyennes et les petites. Elle s'annonce par deux signes qui ne sont pas cons- tamment synchrones : 1° Le gonflement du n, la dissociation de son caryosome, comme pour la première mitose de maturation (fig. 36) ; mais ce gonflement est plus limité. 90 Une contraction très sensible du N à l'intérieur de sa membrane, dont il se décolle. 3° L'apparition à l'équateur du corps, sur la face dorsale, d'un épaississement ectoplasmique, bien visible seulement de profil, et qui est l'ébauche de la calotte ectoplasmique du futur individu postérieur (fig. 36-39-40). Ce signe est souvent plus précoce que les signes nucléaires, et il permet toujours de distinguer les individus qui vont se diviser des préconjugants. Les cinèses micronucléaires végétatives sont plus frustes que les cinèses sexuelles, comme on le voit en comparant les figures 43 et 47. Ces différences sont de même ordre que celles observées par Pranprz (1906) entre les scissions micronu- cléaires végétatives et les sexuelles chez Didinium nasutum. Ces différences sont d’ailleurs très générales. Une particularité remarquable des phénomènes nucléaires de la scissiparité chez Collinella c'est l'évolution étroitement solidaire du N et du_x, qui se comportent comme noyau et centrosome dans la métamitose. Le 7 en anaphase est intimement appliqué contre Le N, et ses deux moitiés restent ainsi jusqu à ce que, ayant contourné la masse macronucléaire, elles viennent en prendre les pôles (fig. 44-45-46). Elles sont encore souvent réunies à ce stade par leur tractus fusorial. Synchroniquement et comme soumis à une force émanée des 7, le N s'étire sans remaniement structural interne (fig. 39-40). Dans certains cas cet étirement parait s'effectuer très difficilement comme en témoigne son retard sur la scission cytoplasmique. Dans ce cas les n étroitement accolés aux pôles du N ont une taille excep- tionnelle pour le stade de repos (fig. 38-47). Y a-t-il un 106 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD rapport entre leur masse et l'inertie macronucléaire ? quelle ést sa nature ? Ou bien la taille des 7 annonce-t-elle la pro- phase d'une scission qui suivrait de très près celle qui est en cours (1)? Le mode de scission cytoplasmique de Collinella n'est pas non plus banal. Le plan de scission, au lieu d’être transversal, sub- équatorial comme c’est la règle chez les ciliés (les péritriches exceptés) est 1c1 sublongitudinal (fig. 37-38). La constriction qui s’ébauche tout d’abord au-dessus de l’épaississement ectoplas- mique dorsal, au lieu de se poursuivre et de s'achever suivant le plan équatorial, progresse en écharpe, d’avant en arrière, jus- qu'à la bouche, au-dessus du lobe ectoplasmique terminal ; tout cela comme si le plastron ectoplasmique ventral s’opposait au clivage. Le sillon de scission s’insinue entre la bouche et la vacuole pulsatile de sorte qu’il laisse, suivant la règle générale, la bouche à l'individu antérieur et le cytopyge à l'individu («t) De semblables rapports du N avec le » pendant la division n'ont été obser- vés à notre connaissance que chez Boveria subcylindrica (Srevens 1904). Mais la l’analogie avec un complexe mitotique est encore plus frappante parce qu'il se produit dans le N une répartition de la chromatine en une masse médiane, qui figure comme une sorte de plaque équatoriale, et deux masses coniques qui en représenteraient le fuseau, Mais il n’y a pas, d’après Srevens, de différences entre la chromatine de la masse centrale et des masses polaires. Rowrez (1894) à bien décrit chez KXentrochona nebaliæ une sorte de mitose du macronucleus avec fuseaux polaires achromatiques et centrosomes ; mais DoFLEIN (1896) a démontré que ces centrosomes étaient en réalité deux des trois » qui existent chez cette espèce, et que le N se divisait tout à fait indépendamment d'eux. Romprez avait pris pour des figures de division les images du N au repos, qui est, comme celui de Spirochona, composé d'une masse chromatique entre deux cônes de substance achromatique ; et les rapports des centrosomes avec ce noyau qu’il avait figurés, ne correspondaient qu’à des positions fortuites des 7, en dehors de tout phénomène de division Srevexs n'en reconnait pas moins que le n a quelque influence sur la division du N chez Boveria. Ces faits n'étaient pas encore connus que déjà, et sur la base du simple dua- lisme nucléaire des ciliés, des cylologistes et des protistologues avaient émis l'hypothèse de l’origine, sinon de la nature micronucléaire, du centrosome des autres protistes et des métazoaires. Nous ne ferons pas ici l'historique de cette question que l’un de nous a déjà résumée (Carron 14910). 1 ne nous semble pas que ni le cas de Boveria, ni celui de Collinella puissent fournir de nouveaux arguments aux partisans, très rares aujourd'hui semble-t-il, de l’homologie micronucléus-centrosome. La liaison qui existe chez ces Ciliés entre le nr et le N peut n'être que la conséquence d'une viscosité spéciale du cyÿto- plasme, spéciale à ces deux formes, Cette propriété n'aurait de sens phylogé- nique que si Collinella et Boveria nous apparaissaient elles-mêmes comme les témoins d’une évolution qui aurait conduit des ciliés aux êtres à centrosome, ou de ceux-ci aux ciliés, Rien ne nous autorise à leur accorder une telle significa- tion. C’est d’ailleurs là un ordre de questions où les hypothèses sont aussi faciles à faire qu'impossibles à justifier. LES NICOLLELLIDÆ 107 postérieur, chacun de ces individus reconstituant ce qui lui manque (). Les deux individus issus d'une telle scission sont très dissem- blables. L'antérieur qui a conservé la longueur de l'individu initial a toute la moitié postérieure de son corps fortement entaillée sur la face dorsale. L’individu postérieur n’a que la moitié de la longueur de l'individu antérieur ; il est trapu sans entaille dorsale, et presque régulièrement ovoïde. On peut aisé- ment distinguer dans les préparations les individus des deux catégories. Nous ne savons pas si ces deux sortes d'individus se compor- tent différemment dans l’évolution du parasite. Il est certain que les individus « postérieurs » continuent à se diviser active- ment, et comme les pertes en longueur ne sont pas compen- sées par la croissance, ils se raccourcissent de plus en plus (fig. 39, 40, 41). Les individus les plus petits issus de ces seissions répétées mesurent 120 » sur 60 y, c’est-à-dire le cinquième de la lon- gueur et un peu plus de la moitié de la largeur des plus grandes formes. Ils en ont tous les attributs. Conjugaison. — Elle suit essentiellement la même marche que chez Nicollella. Les stades qui se montrent rares (c’est- à-dire courts) chez la première forme font défaut chez la seconde. Les conjugants sont ici des formes moyennes, de 250 à 350 p (fig. 47-48). Nous n'avons jamais vu de syzygies de petites formes, celles-ci étant cependant très nombreuses dans nos pré- parations. Les conjugants sont soit égaux (fig. 47), soit mégaux ‘ (fig. 48). L'accouplement commence par les segments anté- rieurs des faces ventrales qui s’accolent ensuite sur toute leur longueur. | Stades À, Bet C. — (Gonflement du # beaucoup plus accusé que dans les seissions végétatives. Il s'éloigne du N. Pas de stade « synapsis » où « en parachute» reconnaissable ; chro- mosomes non distincts. La figure 48 représente la première mitose de maturation. Au stade C (fig. 49) l'un des quatre noyaux, le noyau sexuel, est déjà précocement engagé, comme chez Nicollella, dans le champ fibrillaire en éventail sous-jacent {‘} Voir pour l'interprétation de ces faits, p. 126-127. 108 FD. CHALON ET CH. PÉRARD au segment antérieur de la gouttière. Nous n'avons jamais vu ce noyau dédoublé (stade D) ni d’ex-conjugués à quatre noyaux (stade E), mais nous pensons que tout se passe là comme chez Nicollella ('). La résorption du N doit se faire pendant ces phases. La lacune s'étend encore plus loin : elle nous prive des stades F et (x où nous devrions assister aux deux divisions suc- cessives du synkaryon et de ses noyaux fils. Mais nous avons d'assez nombreux stades ex-conjugués qui montrent les pro-. duits de ces divisions (fig. 50.51,52): deux » dont un de rebut et deux ébauches macronucléaires plus ou moins différenciées ; et de très nombreux stades à un seul » et à deux jeunes N (fig. 53). La différenciation des ébauches macronucléaires s'effectue de la manière suivante : à l'anaphase de la dernière mitose, la chromatine est en fines granulations tassées au centre du noyau en une masse sphérique qui laisse entre elle et la membrane. nucléaire un espace vide (fig. 51). Cet espace se comble pro- gressivement par extension de la masse centrale. Au fur et à mesure que celle-ci se développe, ses granulations se fondent dans la substance fondamentale, de sorte que la vésicule com- blée est de structure homogène, faiblement chromatique (fig, 52). En son centre se voit un gros caryosome dans une auréole claire. Nous n'avons pas pu reconnaitre l'origine de cette formation qui est si précise, si constante, qu'elle parait être comme un micro- nucléus dans le macronucléus (fig. 52, 53, 54). Elle est capable de se diviser ou de bourgeonner dans le noyau (fig. 55, 56, 57, 58). Ces divisions sont toujours parfaitement synchrones et symétriques dans les deux ébauches. Il en résulte des micro- somes de plus en plus nombreux, auréolés. La masse fonda- mentale est finement granuleuse et reste très longtemps achromatique. Elle est enfermée dans une membrane bien indi- vidualisée, isolable. Sur coupes la masse fondamentale est de texture assez grossière et plus colorable que sur frottis. FUSION DES ÉBAUCHES MACRONUCLÉAIRES. — Les deux ébauches d'abord indépendantes viennent en contact (fig. 53), se dépriment réciproquement (fig. 55, 56) et s'accolent si inti- mement qu'elles ne se séparent pas, même quand le complexe (‘) Cependant l'hypothèse que ce noyau (fig. 49) représenterait le synkaryon n’est pas à rejeter a priori. \ LES NICOLLELLIDE 109 nucléaire est expulsé par traumatisme. Elles forment alors un ellipsoïde à cloison mitoyenne double. Celle-ci va se résorber purement et simplement. Cette fusion ne s accompagne d'aucun remaniement structural des ébauches ; les macrosomes et les microsomes restent séparés et comme témoins de la dua- lité originelle du macronucléus (fig. 59). La masse subit cepen- dant une légère contraction, puis une condensation, qui la rend plus dense et très fortement colorable ; 1l faut des coupes très minces pour y reconnaitre la structure primitive. | L'attraction qui rapproche les ébauches macronucléaires, s'exerce aussi sur le micronueléus qui vient s’accoler au cou- ple, généralement dans le sillon de tangence. La différenciation des ébauches macronucléaires est rapide, mais leur rapprochement et leur fusion demandent un temps très long. Un grand nombre de ces stades se trouvent dans les préparations, même dans celles qui ne contiennent aucune syzygie. Et beaucoup de ces formes à deux ébauches s’accrois- sent presque jusqu'à la taille maxima avant que la fusion ne se produise. : La fusion des ébauches macronucléaires n’est pas chose aussi exceptionnelle que le laisse supposer le silence fait à son sujet dans les livres classiques et la plupart des mémoires consacrés à la conjugaison. Maupas (1889), l’a signalée chez Paramæcium caudatum et il a même montré qu'elle s'y produisait sous l'influence de lina- nition. Les individus végétatifs de cette espèce ont deux N et un #. Chez les ex-conjugués il y a quatre ébauches et deux ». Une scission intervient à la fin du stade H qui rétablit les nom- bres mormaux. Mais chez les ex-conjugués mal nourris cette scission ne se produit pas et les quatre ébauches se fusionnent en un seul N. Dans ces conditions celui-ci peut même s’adjoin- dre des fragments des N anciens non encore résorbés. Chez Euplotes patella aussi, les résidus de l’ancien N peuvent s'in- corporer au nouveau N. Ce sont là évidemment des cas pathologiq: es de l’ordre de ceux que nous offrent les syncytiums produits sous l'influence de parasites, spécialement quand ils jouent vis-à-vis de ceux-ci un rôle nourricier : fusion des noyaux (caryomyxie de REGNARD 1914) dans le syncytium des spermatogonies de Po/ymnia nebu- \ 110 HD. CHATTON ET CH PÉRARD losa formé autour de la coccidie Caryotropha Mesnili (Sieprecki 1907), ou dans le syncytium des cellules intestinales de Glosso- siphonia complanata nourricières de la grégarime Metamera Schubergi (Recxarn 1914), pour nous en tenir aux cas indiscu- tables. L'observation de Mauras trop négligée par les auteurs qui sesont occupés de ces questions, à fs valeur d'une expé- rience qui met bien en évidence le déterminisme de la caryo- myxie. La fusion des ébauches macronueléaires se produit d'ailleurs — et probablement sous les mêmes influences — mais d'une manière normale, chez d’autres ciliés. Maupas l’a constatée, sans l'avoir suivie dans tous ses détails, chez Leucophrys patula, et il la admise comme nécessaire chez Cryptochilum migricans et chez Stylonichia pustulata. Praxozr (1906) l’a observée chez Didinium nasutum sans en préciser la marche. Il faut enfin signaler mais comme d'une signification peut- être différente la fusion des huit macronueléi d'Uroleptus mobi- lis qui précède toujours la bipartition chez les formes végéta- tives (Cazrins, 1919). D’après B. Cozux (1912) Les fusions nucléaires observées dans les kystes de copulation de certaines opalines, par Lécer et Dugosco (1904), par Brumpr (1909, 1910) chez Balantidium col, et par Gers (in Bürscaur, 1889) chez Colpoda cucullus, pour- raient n'être aussi que des fusions purement végétatives. Chez Balantidium littorinae, Cuacas (1911) décrit et figure des formes à deux micronueléi et huit noyaux sphériques, peu chromatiques, contenant dans une large vacuole un «caryo- some » volumineux. Sous l'influence des idées de HaRTMANx, Caagas voit dans l'existence de ces corps la preuve d'un dua- lisme nucléaire dans le macronucléus des ciliés. Cette concep- tion ne nous intéresse pas ici. Nous pouvons relever simple- ment l’existence chez un Balantidium d'ébauches nucléaires d'une structure tout à fait comparable à celles de Collinella, et qui, si l’on en juge d’après la taille du macronucléus défi- nitif, doivent se fusionner pour le constituer. Balantidium coli, tel qu'il se présente dans la muqueuse intestinale du pore ou de l’homme, montre souvent au lieu du N ellipsotdal unique, deux N sphériques moitié moins grands, et ceci en dehers de toute bipartition. Nous nous demandons si LES NICOLLELLIDÆ 111 ces formes ne sont pas des ex-conjugués à deux ébauches macro- nucléaires destinées à se fusionner. Nous avons insisté sur la durée très longue de ces stades de différenciation, d'accroissement et de fusion des ébauches macro- nucléaires, relativement à celle des autres stades de l’évolution sexuée de nos Nicollellidæ. D'après les observations de Matüpas, ces stades sont toujours aussi les plus durables chez les ciliés libres, mais ils sont chez certaines formes exceptionnellement longs. Tel est le cas du Prorodon leres, holotriche qui nous parait être le type libre le plus proche de la souche des Nicol- lellidæ (v. p.36) dont les conjoints montrent encore plus de six jours après leur séparation, les ébauches macronucléaires en vole de croissance. Anomalies de la conjugaison. — 1° La plus fréquente : non- fusion des ébauches macronucléaires. "Celles-ci n'en acquièrent pas moins la structure définitive. Il en résulte des individus binucléés dont nous avons signalé la fréquence parmi les grandes formes végétatives. Ces individus doiventèêtre considérés comme _anormaux, car ni chez Nicollella, ni chez Collinella,onneles voit prendre part à la conjugaison ou à la scissiparité normales. Nous croyons cependant qu'ils peuvent se diviser et rétablir l’état uninucléé (!). Nous avons vu de semblables formes qui montraient l'épaississement ectoplasmique ventral et le gonfle- ment micronucléaires signes prémonitoires de la scissiparité. 2° Persistance du 7 de rebut frère du n définitif d'où indivi- dus à deux x et un N quand les ébauches macronucléaires se fusionnent, ou à deux N avec un # chacun, quand elles ne se fusionnent pas. 3° Scissions supplémentaires des x générateurs des N, avec ou sans persistance du » de rebut : individus à trois ébauches et un » ou à quatre ébauches et un ou deux n. 4 Avortement d'un des N. 5° Scission supplémentaire asymétrique d’un des » et persis- tance des deux 2 fils : individus à trois 2 dont un plus gros. Petites formes non conjugantes. — Les petites formes de .moins de 250 4 ne nous ont jamais montré de signes ou de ves- (‘) C'est ce qui se passe normalement chez les cihés où les ébauches sont en noinbre double de celui des n définitifs (Paramcæcium, Colpidium), mais dans ces cas il y à toujours au moins un micronucleus par ébauche macronucléaire, 112 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD tiges de la conjugaison. Nous avons suivi par contre leur genèse directe à partir des grandes formes végétatives. Nous voyons celles-ci, ou au moins une partie de celles-ci, résulter de la croissance d’ex-conjuguées. Tout cela nous impose la notion que les conditions qui déterminent une active scissiparité ne sont pas lesmêmes que celles qui déterminent la conjugaison, et que celle-ci ne prépare pas celle-là, ni réciproquement. Nous ferons état de cette notion plus loin. ; Nous ne connaissons pas les formes de résistance. Collineila sp. parasite de Procaria capensis Cilié indéterminé Scausorz (1908), pp. 13-18, pl. I, fig. 15-17, pl. II, fig. 46-47. Parasite dans l'intestin grêle (?) de Procavia(Hyrax) capen- sts (Pallas) ; Afrique australe (localité?) Au genre Collinella et peut-être même à l'espèce qundii, se rapporte ce cilié que ScauBoTz (1908) a observé, mélangé au Pycnothrix monocystoides, dans l'intestin gréle (‘) d’un Daman du Cap : Procavia (Hyrax) capensis (Pallas) (?). L'examen des figures de Scausorz convaincra le lecteur de l'étroite parenté de ces ciliés avec notre Col/hinella. Dimensions de même ordre-: de 300 à 450 y de long sur 85 y de large. Existence de petites formes trapues de 90 » sur 50 x, non figu- rées. Fréquence de formes plurinucléées. ScauBorz se demande si ce parasite ne ferait point partie du cycle du Pycnothrix. W reconnait à ces deux ciliés des carac- tères communs ; l’épaississement ectoplasmique et le sillon vibratile ; mais il n'y a qu’une gouttière chez ces petites for- mes, deux chez Pycnothrix. I n'y à pas de transition entre la taille des deux parasites. Les petites formes se trouvant fré- quemment dans l’endoplasme des grosses, Scauporz les consi- dère, ou comme engendrées par celles-ci, ou comme les para- sitant ; il indique cependant sa préférence pour la seconde. hypothèse. Nous en suggérons une troisième : ces ciliés sont la {‘) Voir sur ce point nos réserves de la page 93. (%) Voir pour ce qui concerne les /’rocavia, p. 93. LES NICOLLELLIDÆ 113 proie des Pycnothrix comme les petites Nicollella sont celle des grosses (v. p. 121). Ils n’ont pas d’autres relations avec leurs prédateurs que les liens de parenté qui unissent Pycnothrix à Collinella. Ces petits ciliés ne se trouvaient pas avec le /yceno- thrix de Procavia Grayi que nous à fourni M. Brumwpr. Genre Pycnothrix ScHuBorz 1908 Pycnothrix Scuusorz 1908, pp. 1-15, pl. I, I, I. Pycnothrix monocystoides ScauBorz 4908 Pycnothryx monocystoides Scuueorz 1909 ; loc. cit. Type de l'espèce parasite dans l'intestin grèle () de Proca- via (= Hyrax) capensis (Pallas) ; Afrique australe (localité ?). Forme apparemment identique trouvée par Brumpr dans l'intestin de Procama Brucei Gray: Harar, Abyssinie; avril (fig. 61-64) (*). Alors que nous ne connaissions cet infusoire que par ce qu'en dit Mixcuin dans son « Introduction to the Study of the Pro- tozoa » (1912), ses affinités avec nos Micollellidæ nous avaient paru suffisamment nettes pour pouvoir les indiquer dans notre note préliminaire. La lecture du mémoire de Scausorz nous à convaincus qu'il devait être annexé à la famille. L'étude du parasite de Procavia Brucei a confirmé notre conviction et nous permet de la justifier ici par des documents inédits. Nous devons ce matériel à M. -le professeur E. Bruupr, qui l’a recueilli en 1901. Devancé dans son étude par Scaugorz, M. Baumrr s'était contenté de le conserver en collection. Nous lui sommes extrè- mement obligés d'avoir bien voulu le mettre à notre disposi- tion. Simplement fixé et conservé dans l’eau formolée à 5 p. 100, ilnous a fourni des préparations, surtout en coupes, d’une par- faite précision. Le Pycnothriz monocystoides d'après Scausorz. — Cilié gigan- tesque de 2 à 3 mm. de long sur 0,3 à 0,5 de large, de la forme que représente la figure 61 (‘), à gros bout antérieur, parcouru sur toute sa longueur par deux gouttières ciliées diamétrale- (‘) Voir réserves de la page 93. (*) Figures oriviaales du Pycnothrix de Procavia Brucei, 114 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD mentopposées, à course légèrement hélicoïdale. Celles-ci pren- nent naissance à quelque distance du pôle antérieur, l’une plus près que l’autre de ce pôle. Au fond de ces gouttières, 1l y a, tout le long d'elles, et de place en place, des dépressions qui sont autant de bouches. j Un pore excréteur(p. e.)en dehors des sillons, à la limite des deuxième et troisième tiers postérieurs, desservant, non une vacuole pulsatile, mais un système ramifié de canaux endo- plasmiques ciliés dans leurs segments les plus proches de l'onifice. Ciliature holotriche très dense. Ectoplasme épais de 50 y sur toute son étendue, sauf vers Le pôle postérieur où il est un peu aminci, strié normalement à sa surface, contenant de place en place des vacuoles. Scaugorz y distingue trois couches : une externe (1) ou cuticule elle-même décomposable optiquement en deux lames, une couche moyenne parcourue normalement par les racines ciliaires (ID), et une couche interne encombrée de myonènes (IT). Ceux-ci sont entrecroisés en tous sens, même dans le sens radiaire (fig. 62,63, 64). Les sillons vibratiles sont taillés dans l'épaisseur de cet ecto- plasme. Les dépressions buccales le traversent et s'enfoncent dans l’'endoplasme ; les myonèmes s’agencent autour d'elles en sphincters. Le N est subsphérique de 100 & de diamètre, contenant le » dans une échancrure superficielle. Très rares individus à deux noyaux, nombreux individus anucléés. La scission est précédée d'un phénomène étrange, unique à notre connaissance chez les cihiés : un premier clivage au niveau du pore excréteur sépare du corps toute la partie postérieure anucléée; ce n’est qu'ensuite que se produit à l’équateur du corps ainsi élagué le vrai clivage de bipartition, qui, autant qu'on en peut juger d’après les figures de Scauporz, parait aussi anormal que chez Collinella. | Conjugaison : l’auteur à vu des couples de grandes formes, accolées soit parallèlement, soit tête bèche ; mais il n'ose aftir- mer que cesont bien là des syzygies. Nous partageons sa réserve. L’endoplasme de ce Cilié contenait des nématodes parasites ou ingérés ? ou intrus ?) que nous n'avons pas retrouvés dans « Le) le Pycnothrix de Procavia Brucei, y et en D né nn ha à à PrAETUEU LES NICOLLELLIDÆ 115 - Le Pycnothrix de Procavia Brucer (matériel Brumpt) d'après nos observations personnelles. — La forme et l'anatomie générale sont exactement celles de Pycnothrix monocystoides. La strue- ture ne diffère que par quelques détails qui nous paraissent ne tenir qu'à la technique et au coefficient personnel des obser- vateurs. Nous apportons cependant ici un complément de précisions qui nous permettra une interprétation de l’organi- sation du Pycnothrix toute différente de celle que suggérait la description de Scauotz, et une comparaison anatomique rigou- reuse des trois genres de la famille. Les figures 61 à 64 illus- trent ces précisions. L'ectoplasme est séparé de l’endoplasme par une limitante plus ou moins masquée par les myonèmes. Ceux-ci se pro- longent dans la couche IT de ScauBorz, par de fines fibrilles, jusqu à la cuticule sur laquelle elle paraissent prendre appui. ScauBorz a recherché les homologies de ces trois couches ecto- plasmiques de Pycnothrir avec celles que Bürsenzr (1889) a distinguées schématiquement chez les ciliés : cuticule, couche alvéolaire, plasma cortical (nombre d'auteurs attribuent d’ail- leurs cette dernière à l’endoplasme). Selon Scaurorz la couche I avec ses deux lames équivaudrait à la cuticule et à la couche alvéolaire réunies ; les couches IT et IT appartiendraient au plasma cortical. Nous avons comparé l’ectoplasme des Nicollellidæ à celui de Balantidium entozoon. Chez ce dernier le tégument général est formé d’une seule couche décomposable optiquement en deux lames comme la couche externe de Pycnothrir. Elle correspond à la lame externe de Collinella. Mais sous la lèvre péristomienne droite il y a une couche épaisse bien séparée de l’endoplasme, parcourue et même traversée par les racines ciliaires. Elle est manifestement l'homologue, avec sa limitante interne, de nos lames moyennes et internes. Or chez Balan- tidium cette couche est manifestement une individualisation du plasma cortical, qui là, est lui-même partie intégrante de l'endo- plasme. C'est done à l'endoplasme que nous devrions attribuer nos lames moyenne et interne, et aussi les couches [1 et IT de _ScauBorz. C’est là une question de conventions. Le tégument d’un cilié ne résulte pas comme celui d'un métazoaire de la juxtaposition et de la concrescence de feuillets primitivement 116 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD distincts et autonomes. Il résulte de la différenciation progres- sive, de la surface vers la profondeur, selon les conditions du milieu, de couches successives qui sont toutes, en fait, d'origine endoplasmique, et cette différenciation ne s'effectue pas néces- sairement suivant le même plan. En présence de la grande diversité des structures, il parait commode de faire entrer conventionnellement dans l'endoplasme toutes les couches tégumentaires de protection, de soutien ou d'absorption qui sont nettement séparées du cytoplasme indifférencié. En ce qui concerne les homologies des couches ectoplas- miques des ciliés du gondi et de Pycnothrix, nous considérons les couches IT et IL de celui-ci comme équivalant à l’ensemble des lames moyenne et interne de la couche des myonèmes de ceux-là. La limitante interne des premiers se retrouve chez Pycnothrix où elle est masquée par le grand développement des myonèmes. Tout ce qui est compris entre cette limitante interne et la couche lou cuticule, correspond à la couche movenne des ciliés du gondi. Ce n’est qu'arbitrairement que l’on peut diviser cette couche en deux zones chez Pycnothrix. S'il est exact que, dans l'interne, les myonèmes sont très abondants, 1l n'en est pas moins vrai qu'ils pénètrent l'externe jusque sous la cuticule (fig. 64). C’est le développement des myonèmes qui caractérise la structure ectoplasmique de Pycnothrix. Les deux gouttières, ScauBorz l’a vu, ne prennent pas nais- - sance au pôle antérieur mème, mais un peu au dessous, l’une un peu plus près que l’autre de ce pôle (fig. 61). Elles y sont, et restent tout le long du corps, diamétralement opposées. Il n’y a aucun contact entre elles au pôle antérieur, mais au pôle postérieur, elles sont en continuité. Ceci à échappé à Scaurorz qui n’en fait mention nulle part et parle partout de deux sillons. Cependant cela pouvait déjà se déduire de plusieurs de ses figures, où l’on voit le pôle posté- rieur nettement échancré. La chose est d'importance : il ne nous est pas indifférent qu'un Cilié présente une seule ou au contraire deux gouttières préorales. Ce dernier cas eut été une unique exception dans le groupe, où l’on ne connait pas jusqu'ici de formes à symétrie bilatérale itérative. Il n’y a pas de « diplozoaires » parmi les Cïliés, comme il s’en trouve parmi les flagellés (Hexamitus, Octomitus, Lamblia). Les deux LES NICOLLELLIDÆ 117 sillons symétriques de Pycnothrix ne pourraient s'ils étaient indépendants s'interpréter que comme correspondant à deux bouches symétriques. Ils ne sont en réalité qu'une seule et même gouttière qui, issue du pôle antérieur selon la règle, atteint le cap postérieur comme chez Collinella, double ce cap et remonte tout le long de la face opposée jusqu'au voisinage du pôle antérieur. Les coupes transversales de Scaurorz fournissaient dès l’abord un argument à l'appui de cette interprétation : chez Pycnothrix, comme chez Nicollella, les deux lèvres de la gout- tière ne sont pas symétriques : l'une est légèrement recou- vrante. Or sur la coupe transversale les deux lèvres de même ordre de chaque sillon s'opposent au lieu d’alterner (fig. 62). Il ne peut qu'en être ainsi si l’un des sillons est la continua- tion de l’autre. Puisque les deux sillons forment gouttière unique, des deux extrémités voisines du, pôle antérieur, lune est l’initiale, l’autre la terminale. Il est logique de penser que l'initiale est l'extrémité la plus proche du pôle antérieur. En fait, en partant de cette donnée à priori pour orienter notre cilié, nous aboutissons à une homologation parfaite de son anatomie avee celie de Collinella et de Nicollella. Chez cette dernière (v. fig. 4-5-31), la lèvre gauche de la gouttière est recouvrante ; chez les deux formes, la lèvre droite est marquée par le prolongement dans l'endoplasme de ses racines cilaires, qui y forment la lame en palissade que nous connaissons bien. Nous retrouvons exactement les mêmes rapports chez Pycnothrix, où l'allongement des racines eiliaires de la lèvre droite est également bien marqué. Celles de la lèvre gauche s’allongent aussi, mais beaucoup moins que celles de la lèvre droite. Cet allongement n'existe d’ailleurs que sur la portion ventrale ou descendante de la gouttière. Remarquons que les relations qui existaient chez Nicollella et chez Colli- nella entre l'ectoplasme épaissi, les « myonèmes » et la gout- tière sont ici intégralement conservés, puisque l'extension de celle-ci a entrainé l'extension de ceux-là. Quoique réduite ainsi à la morphologie normale des ciliés, celle de Pycnothrix n'en présente pas moins ce caractère aberrant et unique que nous avons vérifié : l'existence de 118 ED. CHALTON ET CH. PÉRARD multiples bouches tout le long de la gouttière. Chacune de ces bouches est aussi bien constituée que celle de Micollella, et également fonctionnelle. L'endoplasme contient en effet chez le Pycnothrix de Brumer des particules intravacuolaires qui ne peuvent être que des ingesta. D’autres particules, résidus de la digestion, se trouvent dans les canaux excréteurs ; ceux-ci sont d'ailleurs en continuité avec le système vacuolaire endo- plasmique (fig. 62, ce). Le matériel Brumpr ne nous a fourni ni stades de division, ni stades de conjugaison. Nous avons l'impression que les acco- lements figurés par Scauorz ne sont point des syzygies. Par contre les figures de division, si étranges et si complexes qu'elles paraissent, si fragmentaires qu'elles soient, corres- pondent certainement à quelque chose de réel. Que Scaurorz n'ait pu les interpréter, cela n'est point surprenant : il lui manquait la elef de l'énigme qui nous est fournie par Collinella. Comme cette question dépasse de beaucoup le cadre d’une description spécifique, qui doit rester objective, nous l'exa- minons dans le chapitre général que nous consacrons aux caractères anatomiques de la famille. CILIÉ INDÉTERMINÉE Parasite de Procavia capensis (Pallas) Scausorz (1908) ; p. 15-18 ; pl. I, fig. 19-21. Associé au Pycnothrir monocystoides et à la Collinella dont nous avons parlé page 112 un troisième cilié a été observé par Scauporz chez Procavia capensis. IL mesure de 16 à 36 et de 12 à 30 y. Il est ovale ou subsphérique et montre un sillon” oblique allant du pôle antérieur au niveau de l'équateur comme chez Nicollella, mais il n'y a ni épaississement ecto- plasmique ni orifice postérieur. Le N est ellipsoïdal et contient le 7 dans une échancrure. Scuusorz considère, et nous avec lui, ce petit cilié comme spécifiquement autonome. Holotriche parfait, à gouttière préorale linéaire de même course que chez Nicollella, il est peut-être apparenté aux Nicollel/hid:e. Il n'existait pas dans le matériel de Procavia Brucei que nous à cédé M. Bruwprr. PERS OP PS PR NN PO A EP PPT) SES LES NICOLLELLID Æ 119 ETHOLOGIE DES NICOLLELZIDÆ Ca Les rapports généraux des parasites avec leurs hôtes ont été étudiés dans le premier chapitre de ce mémoire. De Pycnothrix nous ne savons rien de plus que ce qui à été dit là, non plus que de la Co/linella qui l'accompagne chez Procavia capensis. Nous rappellerons 1c1 les réserves que nous avons faites quant à leur siège dans l'intestin grêle des damans (p. 7). L'étude qui suit ne se rapporte qu'aux parasites du gondi. Situation et répartition dans l'intestin. — Nous avons déjà dit brièvement comment ceux-ci se présentent dans l'intestin (v. p. 6). [ls sont au contact de la muqueuse, remplissant tous les replis valvulaires, à l’état de pureté. [n'y à que de très rares individus isolés dans le flux fécal même. Le contact des parasites avec la muqueuse est certainement très intime. Examinés in vivo, ils ne manifestent, malgré l'intensité de leur mouvement eiliaire, qu'une motilité très réduite, et nous avons l'impression, difficile à vérifier objectivement, que leur mise en mouvement est le fait d'une excitation due aux manipu- lations. Les coupes de segments d'intestin fixées avec précau- tion, les montrent, là où elles sont normales à la muqueuse, leurs pôles antérieurs tous orientés vers elle (fig. 1). On y voit aussi, qu'à la convexité de chaque parasite, correspond une concavité de la surface épithéliale, comme si celle er se moulait sur celle-là. Il semble que les parasites qui sont au contact de la muqueuse, s'y taillent une sorte d’alvéole très peu profonde, peut-être par un mouvement de rotation sur place (1). Dans les cas d'infecti n intense la couche parasitaire comprend plusieurs assises de parasites, mais leur orientation n'en reste pas moins constante. Dans ce cas les Nicollella sont toujours dans la couche la plus éloignée dé la paroi. Mais ceci (t} On sait que beaucoup d'infusoires peuvent adhérer aux suppor:'s par le moyen de leurs cils simplement immobilisés, Cette immobilisation au contact a élé râmenée par JEnninGs (1907), aux phénomènes généraux de laclisme et appelée thigmotactisme. Faure-Frémrer (1910), qui l’a étudiée dans la série des aliés la considère comme le premier degré de la différenciation de l'appareil fixateur, qui sous toutes ses formes, même les plus complexes, est constitué ou élaboré par une plage ciliaire plus ou moins modifiée. 120 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD concerne surtout les grandes formes. Les petites sont plus mobiles et paraissent beaucoup moins sédentaires. La répartition des ciliés Le long de l'intestin n’est ni uni- forme ni quelconque. L'examen, segment par segment, d'un gros intestin de gondi à partir du cæcum a donné les résultats suivants : dans le cæcum et jusqu'à 16 cm. au-delà du cœcum, très nombreuses formes grandes et moyennes de Collinella ; du 10° au 16° centimètre la proportion des grandes formes diminue ; vers le 19° centimètre, mêmes formes moyennes très nombreuses de Collinella, et quelques grosses Nicollella : 23 cm., petites Collinella et grosses Nicollella ; 26 em., très nombreuses petites: Collinella et assez nombreuses grosses Nicollella : 29 cm., petites Collinella plus rares et mélange de grosses et de petites Nicollella : 31 cm., nombreuses Nicollella très petites, à l'exclusion de toute autre forme ; 32em., matières submoulées, plus aucun cilié, pas de kystes. Aucune trace des parasites au delà de ce niveau. Sans avoir enregistré dans chaque cas Les constatations faites nous avons toujours retrouvé, lorsque l'infection était quelque peu dense, cette même répartition des parasites. On peut la définir comme suit : la zone à Co/linella s'étend de la valvule iléocæcale dans tout le cæcum et dans le gros intestin jusqu'au point de condensation des matières fécales (vers Le 25°-30° em.) ; la zone à Micollella est localisée entre les 2° et 30° cm. du gros intestin, mais elle dépasse toujours de quelques centi- mètres la zone à Co/linella vers le bas. Dans les deux zones, les grandes formes existent seules aux niveaux supérieurs, et font place progressivement aux petites dans les niveaux inférieurs. Il est évident que la cause de cette répartition et de cette sériation des formes est l’état des matières fécales. La preuve en est que chez les gondis qui, en captivité, faute de leur régime normal, ont des matières fécales diarrhéiques, l'infection s'étend tout le long de l'intestin postérieur, de sorte que l’on peut recueillir des parasites à l'anus. Mème dans les cas d'infection intense, il n'y a jamais de parasites dans l'intestin grêle. Nutrition. — À ce point de vue, les trois formes se com- portent très différemment. Nicollella est capable d'ingérer des proies relativement volumineuses : chez les gondis infestés par CO RE EE RE "2 | | | LES NICOLLELLIDÆ 421 l'Eimeria dont nous avons parlé plus haut, un certain nombre de MNicollella contiennent toujours des ookystes de cette coccidie qui mesurent 35 u. D’autres contiennent de petites Nicollella de T0 à 90 &. La bouche est loin d’avoir ce diamètre, elle est donc extensible comme chez les holotriches préda- teurs (Prorodon, Didinium, ete.). Le grand développement du cytopyge est en rapport avec cette capacité d’ingestion. L'en- tonnoir interne parait destiné à recueillir de gros résidus, le méat est de taille à les laisser passer. Pycnothrix paraît jouir d’une capacité d'ingestion de même ordre, toutes proportions gardées, si l'on en juge par la présence de volumineuses Co/linella à son intérieur. Scausorz qui n’a pas songé que celles-ci pouvaient être des proies, n'a pas vu d'ingesta dans l’'endoplasme. Nous y avons observé des particules d'une certaine taille dans les canaux écréteurs. En tout cas, les bouches paraissent organisées pour l'mgestion. Chez Collinella, au contraire, les plus grosses particules ne dépassent pas 5 y. Rien pourtant dans la constitution de la bouche ne parait s’opposer à l’ingestion de corps volumineux. Elle parait même plus béante que celle de Nicollella. Mas c’est probablement sa situation au pôle postérieur et l'orientation du cytopharynx vers l'arrière, presque en récurrence par rapport à la gouttière préorale, qui est la cause de cette inca- pacité relative. L'ORIGINE ET L'ÉVOLUTION DES CARACTÈRES ANATOMIQUES EN RAPPORT AVEC L’ÉTHOLOGIE Les caractères anatomiques familiaux (Hg. rame L'anatomie des Micollellidæ est essentiellement caractérisée par l’épaississement ectoplasmique, la structure si spéciale de la souttière préorale et les myonèmes. La structure intime, iden- tique à des détails près, dans les trois genres, ne laisse aucun doute quant à leur parenté. Ils représentent trois degrés du développement du plastron ectoplasmique préoral, trois stades de la rétrogradation de la bouche et de l’extension de la gout- tière préorale. \ Des trois genres, Nicollella est le plus proche du type 122 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD normal du cilié. I est dans les Nicollellidæ, Véquivalent d’un Uronema dans les holotriches ou d'un Balantidium dans les hétérotriches, formes à bouche subéquatoriale, et à gouttière semi-méridienne. La vacuole excrétrice y est en position normale, postéro-terminale. Chez Collinella, la rétrogradation de la bouche atteint un point que l'on pouvait considérer comme extrême avant de connaître Pyenothrir, et dont il n'existe point d'exemple, que nous sachions, chez les ciliés : le pôle postérieur même. La gouttière préorale le plastron ectoplasmique s'étendent sur toute la face ventrale ; et les myonèmes encerclent tout le corps. La vacuole pulsatile, déjetée de sa position axiale par la bouche, est un peu en avant d'elle et à sa droite. Chez Pycnothrix, d’une manière inattendue, et par un mode qui n’est, croyons-nous, réalisé chez aucun autre cilié, la gout- tière et la zone ectoplasmique épaissie se prolongent au delà de l’extrémité postérieure en la doublant et en remontant sur la face dorsale jusqu'au voisinage du pôle antérieur. Ce qui est très remarquable aussi, c’est que la bouche ne rétrograde pas purement et simplement, mais qu'elle se « multiplie » tout Le long de la gouttière, marquant en quelque sorte chaque stade de sa rétrogradation par un orifice de même structure qu'elle-même. Les caractères anatomiques originels. — Ün peut conce- voir, et on trouvera peut-être des intermédiaires entre ces trois formes. Nous pouvons aussi imaginer une Nico/lellidæ où la bouche serait beaucoup plus près du pôle antérieur que chez Nicollella, sinon apicale. Ce serait un cilié holotriche réguliè- rement ovoïde, à gros bout antérieur, où, comme chez Prorodon Fig. L-IX. — I-V, Figures demi-schématiques de : 1, Holotriche gymnostome du type Prorodon; I, forme idéale intermédiaire entre celui-ci et Micol- lella ; A, Nicollella ; IN, Collinella ; V, Pycnothrix, pour montrer le développement progressif de la gouttière préorale des Wicollellidæ à par- tie d’une bouche antéroterminale de gymnostome, et l'extension conco- mitante du plastron ectoplasmique et de la zone à myonèmés. VI-VIT. — Les pôles antérieurs de 1 et de Il en vue apicale. VIII. — Coupe sagiltale de Prorodon teres d’après N. Marer (1903), montrant la calotte ectoplasmique antérieure et les rapports de la nasse avec les myonèmes. Ke Coupe transversale de Collinella gundii à comparer à la précédente. TI t “id ji jui ii A MM DRE : Ca ï i . t 0 Ü 0 1 TN DT &0 LE US L L [ n LE OUR PRC AE P Ce ARTE LhaReTs Me IEEE S 6 MRC AUE) QT ty NS À \ 5 “ ls DO CTETD : l Îl \ 4 ? 1 Dose 7” \ RAR TRS A 2e PRES rene Sue A TR D A TE 1 © LIEU AVE ; SR EE ANS TRANS > # ‘ ‘ : D 1 : . ‘ , RS ïj LU L E ï Fe | SMILE . ss) ,," mes Dis ss Le te 14 RE 11 s a+ (NE » ee s 124 ED. CHATION ET CH. PÉRARD teres, la bouche, axiale, profonde, tronconique, oceuperait le centre d’une calotte ectoplasmique plus ou moins épaisse. Les parois de la bouche sont renforcées par des baguettes d’ecto- plasme condensé formantnasse, mais quine dépasseraient pas ici la limite de l'ectoplasme. L'extrémité externe de chaque baguette est l'origine d’une strie d'insertion ciliaire et l’extrémité interne donne insertion à une fibrille contractile, radiaire, sous- jacente à l’ectoplasme, semblable aux myonèmes qui dilatent la nasse pharyngienne du Prorodon. L'évolution éthologique.— Ce Prorodonestlibre et prédateur et recherche activement sa nourriture. Comme beaucoup de ciliés libres, il s'enkvyste, et ses kystes fortuitement ingérés traversent indemnes l'estomac, sont digérés dans l’intestin grêle et les infusoires mis en liberté ('), trouvent dans le cæcum des conditions favorables à leur nutrition. D'abord prédateurs comme à l’état libre, ils font leur proie des flagellés ou des ciliés déjà installés dans l'intestin de leur hôte. Dans ce milieu dense et malgré le renforcement de leur ciliature, leur vitesse de progression est réduite. La faune intestinale s'épuise tandis que des particules toutes préparées par la digestion de l'hôte, et une riche flore bactérienne encombrent le milieu. Le cilié ne s’y établira définitivement que s'il modifie son régime, Îl s’habitue passivement et progressivement à ingérer et à digérer ce qu'il y trouve, et autant à cause de l'inutilité qui en résulte pour lui de se mouvoir, qu'à cause de la diffi- culté qu'il y éprouve, il devient sédentaire et se localise là où il n’est point entrainé par le flux fécal. Mais une condition sine qud non, de cette nouvelle existence est que la nourriture qu'engloutissait la bouche béante à l'avant du corps soit maintenant attirée et conduite vers elle. L'évolution anatomique. — On peut avet Bürscart (1889) et avec Decace et Herouarb (1895), admettre que la bouche s'est d'abord allongée, puis que cet allongement continuant, la fente se suturait (incomplètement ici) par son extrémité antérieure - (t) Ce n’est pas là une hypothèse gratuite. Ou sait que certains holotriches, le Colpoda cucullus et le Chilodon uncinatus ont été accidentellement trouvés dans les selles humaines, sinon à l'état végétatif, du moins à l'état de kystes capables d'éclore. LES NICOLLELLIDÆ 125 tandis qu'elle progressait par son extrémité postérieure, formant ainsi la gouttière préorale organe collecteur des particules. La réalité d’un semblable mécanisme semble démontrée par le cas de Pycnothrir, dont les nombreuses bouches seraient autant de défauts de suture. Mais li cause même du phénomène reste pour nous très obscure. On peut évidemment faire intervenir une excitation fonctionnelle de toute la région préorale dont les cils propulsent les particules alimentaires et qui aurait déterminé un accroissement spécialde cette zone. Mais autre chose est de le démontrer objectivement, et d'en débrouiller le mécanisme intime. Il n’en est pas moins vrai que le résultat de l'allongement de la gouttière est une collection plus complète des particules nutritives. On conçoit aussi qu'il y ait un rapport utile et néces- saire entre le développement et la puissance de l'appareil collecteur et la taille du cilié. Ce rapport est manifeste chez Pycenothrir. C'est d'un rapport analogue entre la taille et le développement des voies d’ingestion que ce même cilié nous offre l'exemple (1). Dans toute cette série des Nicollellidæ, l'extension de la zone ectoplasmique péribuccale a suivi celle de la gouttière Les myonèmes, même s'ils ne sont plus fonctionnels, ont con- servé avec elle les rapports qu'ils avaient avec la bouche chez la forme originelle hypothétique, et qui existent en fait chez Prorodon teres. Et il semble bien que cette zone en extension se soit comportée comme une nappe qui refoule tout sur son passage. Chez Collinella aussi bien que chez Pycnothrix, elle à déplacé l'appareil excréteur de sa situation originelle. Consta- tation suggestive : chez Pycnothrir, l’orifice excréteur à été ramené beaucoup plus haut que chez Collinella, comme (!) Ce n’est là, à l’état d’hypothèse, qu'un cas particulier de la corrélation si; bien mise en lumière par Maupas (1888), qui existe chez les ciliés entre le régime alimentaire et la structure de l'appareil ciliaire préoral, d'une part, et leur capacité habituelle de mouvement d'autre part, corrélation qui régit pour une grande part l’organisation de ces infusoires. Les ciliés à bouche dilatable, sans ciliature préorale différenciée sont tous des ciliés capteurs ou chasseurs, très actifs nazeurs. Les ciliés à cihature preorale développée, et qui par les courants et les tourbillons que celle-ci détermine, attirent à leur bouche les particules nutritives, sont des forines sédentaires ou fixées. Faure-Frémier (1910) qui, avec beaucoup d'art, a renouvelé l'expression de ces fails, à d'une manière imagée qualifié d’ « infusoires-pièges » les ciliés de la deuxiéme catégorie. 426 HD. CHATTON ET CH. PÉRARD chassé par la récurrence dorsale de la nappe ectoplasmique ; et il se trouve à peu près à égale distance des deux gouttières dans la zone d’affrontement des deux nappes, qui est celle où il devait subir la poussée minima de la part de la nappe ascen- dante. Vues de l'esprit ? Il n’est pas douteux cependant que la nappe ectoplasmique doive être considérée comme une couche résistante. Elle s'affirme comme telle par le trouble que son extension jette dans la marche de la scission chez Collinella et chez Pycno- thrix. Les perturbations de la scission. — Mico/lella, comme tous les ciliés, se clive suivant un plan équatorial et sensiblement transversal, conformément à la loi très générale d'Oscar HerrwiG (1884). Chez Collinella le clivage débute normalement sur la face dorsale non épaissie. Il se poursuit suivant le plan équatorial jusqu’au moment où il se heurte au mur eetoplas- mique ventral, le long duquel il s’infléchit dès lors pour venir couper l’ectoplasme au pôle postérieur, là où celui-ci n'est point renforcé. Chez Pycnothrix, Scausorz a entrevu, sans pousoir en saisir la signification, des perturbations analogues, et certamement plus complexes encore, de la scission. Ses documents, malheu- reusement fragmentaires, sont d’une interprétation délicate. On a vu que d'après lui, la scission comporte deux actes distincts et successifs : 1° étranglement du corps au niveau du pore excréteur et séparation de tout le segment postérieur anucléé ; 2 clivage compliqué du corps ainsi tronqué, par des sillons naissant à son équateur, mais s’incurvant ensuite vers le pôle postérieur. Si nous comprenons bien le texte et les figures de Sceausorz, les sillons de clivage effectueraient la même course que chez Collinella. Mais comme la suite du phénomène n’a pas été observée, il est très difficile d'en pousser plus loin l'interprétation. Nous essayons de comprendre l’ensemble des deux processus de la manière suivante : l'équilibre de division étant atteint, un sillon de constriclion apparait là où [a paroi offre le moins de résistance, au niveau du pore excréteur, où elle est considé- rablement amincie (fig. 63). Ce clivage se poursuit d'une manière plus ou moins régulière, soit transversalement, soit LES NICOLLELLIDAÆ 497 obliquement de sorte que le point où le segment anucléé se détache de la souche n’est pas constant, comme en témoignent les figures 27, 29 et 30 de Scaugorz. Dans le corps émondé, désormais mieux équilibré et bien centré par ses noyaux, un nouveau clivage s’ébauche, équatorial cette fois. Mais il ne semble pas qu'il s'achève au niveau où il débute, étant donnée l'inflexion des sillons le long des gouttières, comme si celles-ci faisaient obstacle à leur progression dans le sens initial. On voit quel intérêt il y aurait, au point de vue de la méca- nique de la division cellulaire à réétudier cette forme, pour en comparer la scission à celle de Collinella. L'équilibre imparfait. — À un autre point de vue encore, ces perturbations de Ia scission nous paraissent intéressantes : elles expriment, pour nous, la régularisation incomplète d’un état de choses récemment apparu. Il ne manque pas de ciliés dont l'anatomie comporte de semblables causes de trouble, et chez lesquels la scission s'effectue cependant d’une manière régulière. Tels sont, par exemple les Ophryoscolecidés dont la scission est bien transversale. I semble que partout les forces mises en jeu, à la division, par l'équilibre de masse, ont fini par déterminer dans les obstacles qui leur étaient opposés, une ligne de moindre résistance, coïncidant avec celle du clivage normal (!). Collinella et Pycnothrix n'en seraient pas encore arrivés à ce stade de régularisation. Nous considérons done nos Nicollellid comme des formes à adaptations parasitaires encore incomplètes. Co/linella avec sa bouche à peine fonctionnelle, et peut-être à nutrition partiel- lement osmotique, apparait comme la plus évoluée dans ce sens. C’est dire que nous ne la plaçons pas dans la lignée qui a conduit des formes primitives du groupe, dont Nicollella ous donne une idée, à la forme Pycnothrir. Toutes ces formes ne sont probablement que des témoins latéraux d’une telle évolution, dont l'axe nous est mconnu. (t) 1 y a bien en effet une liyne de moindre résistance correspondant au plan de clivage habituel du cilié. Cazxins (1911) enlève à des Paramæcium caudatum uu segment antérieur ou un segment postérieur, sans que le niveau du plan de scission et sa direction soient modifiés pour cela. La division s'effectue suivant une « zones de scission » prédéterminée. 128 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD DISCUSSION DU « CYCLE ÉVOLUTIF » Dans quel ordre se succèdentles formes etles phénomènes que nous connaissons maintenant chez les Nicollellidæ ? Quelle est leur signification ? Quels sont les éléments qui assurent le pas- sage du parasite par le milieu extérieur et l'infection de nou- veaux hôtes? Ces questions ne concernent que les parasites du gondi puisque l’évolution du Pycnothrir nous est entièrement inconnue. Mais même pour ceux-là, nous ne pouvons, faute de bases expérimentales, sérier les stades que par analogie avec ce que nous connaissons du cycle évolutif des autres ciliés. LE « CYCLE ÉVOLUTIF » DES CILIÉS LIBRES Telle qu'elle résulte de l'étude des ciliés, la notion de cyele évolutif est loin d’avoir la précision que lui ont donnéeles recherches sur d’autres groupes de protistes, et en particulier sur les sporozoaires. On peut même dire que plus les faits s'accumulent, surtout dans l’ordre expérimental, plus cette notion d'un cycle évolutif devient nébuleuse. Dans les ouvrages classiques et dans nombre de mémoires originaux, on la trouve encore schématisée en une formule comme celle-cr : après une série plus ou moins longue de bipartitions, tout cilié arrive à un état tel qu'il meurt si n'intervient la conjugaison. Celle-ci a pour effet de rajeunir, de rénover les individus, de leur con- férer une vitalité nouvelle et la possibilité d'effectuer une nou- velle série de bipartitions, jusqu'à l'annonce d’une nouvelle ‘ dégénérescence. Et c'est bien un cycle que cette scissiparité qui se elôt néces- sairement et périodiquement par une sexualité, point de départ d'une nouvelle scissiparité. A cette notion est attaché le nom de Mauras (1888, 1889). Elle a dominé non seulement l'étude des ciliés, mais encore celle de tous les protistes. La découverte de l'alternance des périodes schizogonique et gamogonique dans l’évolution des rhizopodes et des sporozoaires est venue comme ue éclatante confirmation de sa valeur générale. Elle n’est cependant qu'une Lan. ht mm. és date me + if. Êns.t. e mn é LES NICOLLELLIDÆ 159 expression incomplète, et à plusieurs égards inexacte, des résultats acquis par le célèbre biologiste (1). Elle résulte d’une sélection faite parmi ses conclusions non d'après leur valeur objective ou expérimentale, telle qu'elle apparait à la lecture critique de l'exposé des faits, mais d’après leur portée générale ou philosophique apparente. Le compila- teur n'en est pas seul responsable. Mawpas lui-même, exalté par sa controverse avec WEIsmaxN sur l’immortalité des pro- tozoaires, s'est laissé entrainer à un développement d'idées théoriques qui nuit à la mise en valeur des résultats objectifs et en dénature parfois la sigification. Tels qu'ils ressortent de la lecture du mémoire, ces résultats objectifs sont : 1° La durée limitée du pouvoir de multiplication, et l’appa- rition (dans les conditions des expériences) au bout d'un certain nombre de bipartitions, de dégénérescences diverses, signes d'une extinction proche et fatale de la culture. Cette mort survient entre la 200° et la 600° génération, selon les espèces. C’est là la dégénérescence sénile ou sénescence. 2° Dans ces mêmes conditions, l'apparition fréquente, mais non générale, de la conjugaison, avant ou pendant la période de dégénérescence Elle n'intervient jamais qu’à un âge assez avancé des cultures (stade de maturité caryogamique), et les couples ne sont « fertiles » que s'ils sont formés d'individus appartenant à des lignées différentes. [ls sont stériles aussi quand la dégénérescence des conjoints est trop accentuée. Il y a donc une période optima ou « eugamique ». 3 Mais en dehors de toute sénescence, la conjugaison peut être toujours facilement provoquée dans une culture sauvage en faisant passer celle-ci d'un régime putritif abondant à un régime de disette. C’est le procédé qu'emploie Mawpas pour se procurer les couples nécessaires à ses recherches (et qu'uti- lisent depuis lors tous ceux qui étudient la conjugaison). Dans ces conditions la conjugaison est précédée chez beaucoup d'espèces d’une active multiplication d’où il résulte des conju- gants de très petite taille. ; 4° Comme l'avaient déjà remarqué EncrLmanx (1876) et {'} Voir la note de la page 132. 130 HD. CHATTON ET CH. FÉRARD Burscuzi (1876), la conjugaison ne détermine pas une multi- plication immédiate ; elle n'est pas en elle-même un phéno- mène de reproduction; elle ne conduit pas à un phénomène de reprodugtion ; elle n'a même pas pour effet, contrairement à ce que pensaient ces auteurs, une élévation du pouvoir de multiplication chez les ex-con'ugués. 5° Les phénomènes nucléaires de la conjugaison sont rigou- reusement ceux de toute fécondation. 6° La conjugaison est précédée chez beaucoup d’espèces par une multiplication active qui abaisse la taille des conjugants. 1° L'enkystement est provoqué par l’inanition, mais tout à fait indépendamment de la conjugaison. Chacun de ces faits est établi par des observations et des expériences répétées et concordantes, dont on à pu, par la suite, critiquer la technique et l'interprétation, mais qui parais- saient à leur auteur inattaquables. Aussi bien, n'est-ce pas leur justification, mais celle des conclusions qui en ont été tirées que nous discutons ici. S'il avait été moins préoccupé de réfuter WEismanxn, Maüras aurait-il conclu de lextinction de ses cultures à l'existence d'une sénescence périodique et fatale dont il dit qu « elle est inhérente à l'organisme et relève de causes internes qui agissent indépendamment des conditions extérieures de milieu » ? Sa technique se caractérise précisément par la constance de ces conditions, tant pour ce qui est de l’espace que pour ce qui est du régime nutritif. Lui, qui n’était pas avare de sa peine, n'a institué aucune expérience pour apprécier dans quelle mesure des modifications de ces conditions* pourraient in- fluencer l'évolution de ses infusoires. Admettant comme établie cette sénilité périodique, 1l devait, pour expliquer la survivance des espèces, faire intervenir avec la même périodicité la conjugaison, « qui compense et annule les effets délétères de la sénescence ». Mais cette relation entre la sénescence et la conjugaison ne ressort pas non-plus d’une manière nelte de ses expériences. Mauras à entretenu jusqu à leur extinction des cultures des cinq espèces suivantes : S/ylo- nichia pustulata, S . inytilus, Onychodromus grands, Oxytricha sp. et Leucophrys palulu. Il n'a eu de conjugaisons que chez la deuxième et la quatrième. LES /NICOLLELLIDÆ 131 Ces résultats contrastent avec ceux qu'il obtient si régulie- rement et si facilement par l’inanition. Que fait Maupas lors- qu'il veut se procurer les couples nécessaires à l’étude de la conjugaison ? Met-il en train l’un de ces laborieux élevages sur lames où les ciliés sont menés à la sénescence par un régime aussi abondant que régulier ? Non ; ilrisquerait trop de voir la culture s'étendre sans y trouver de couples, ou de n’en avoir que d’anormaux et d'infertiles. Maupas prélève dans une de ses plus belles cultures sauvages une goutte aussi chargée que possible en infusoires et la porte sur lame en chambre humide. La nourriture s'y épuise rapidement et tous Les indi- vidus sont bientôt accouplés. Jexnixes (1913) qui, après beaucoup d’autres, emploiera ce procédé, obtiendra en moins de vingt-quatre heures la conjugaison massive de Paramaæcium caudatum. Pendant deux ans, dit Maupas, je me suis procuré (par ce procédé) des accouplements de ciliés.en si grande abon- dance que j'en ai été constamment débordé (1889, p. 169). Il admet implicitement comme établi par ses expériences sur les lignées pures que les ciliés qui se conjuguent ainsi se trouvent dans les conditions qu'il a reconnues nécessaires de maturité caryogamique et d'ascendance hétérogène. Ces deux conditions « organiques » étant réalisées, l’inanition intervient comme condition « occasionnelle » pour déterminer la conju- gaison. C'est une condition « interne » ; seules Les conditions physiques : lumière, chaleur, sont des conditions externes et comme celles-ci lui paraissent sans influence, Mawpas conclut que « le rajeunissement caryogamique des ciliés est comple- tement indépendant des conditions extérieures » (1889, p. 402). Il n’y a là qu'une question de mots. L'inanition est bien une « condition interne », mais le défaut d’aliment qui la cause est un facteur externe, tout comme le défaut d'oxygène, de lumière, ou de chaleur. Sur ce malentendu verbal s’installe un paradoxe durable : l’inanition est une condition prati- quement suffisante de la conjugaison ; elle est un moyen à peu près sûr de l’obtenir dans n'importe quelle culture sauvage, elle devient la technique de choix pour ce faire. Et cependant, en théorie, la conjugaison est indépendante des conditions extérieures. L’inanition ne joue dans son déterminisme qu'un _rôle occasionnel, subordonné à celui d’autres facteurs, états 132 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD : organiques (maturité caryogamique, ascendance hétérogène). Par eux, elle est liée à la sénesence, elle-même indépendante du milieu, et dont elle prévient ou atténue les effets. Comment ce rôle rénovateur apparait-il dans les expériences de Maupas ? Il ne s’en trouve dans ses travaux, comme l’a fait remarquer JENNINGS (1913), aucune preuve expérimentale. Cette notion parait résulter d’une constatation unique : une S/yloni- chia pustulata, de Ta 156° génération d’une lignée qui devait s'étendre à la 215° génération, s’accouple avec une S/ylo- nichia Sauvage. Après la disjonction, « une des ex-conjuguées est supprimée et l'autre devient le progéniteur d’une lignée de 316 générations. Que signifie cette expérience si, et Mawras n'a pas exclu cette possibilité, c’est l’ex-conjuguée sauvage qui a été le progéniteur (1) ? Partout ailleurs Maupas constate chez les ex-conjugués une réduction du pouvoir de multiplication et souvent une fragilité particulière. Il insiste même à plusieurs reprises, réfutant ExGELMaNN, Bürscazr et BaLBrant, Sur ces conséquences de l'acte sexuel. En somme, nous pouvons avec Jexnixées (1913) dire que si jusque-là le concept du rajeunissement caryogamique avait un sens morphologique (rénovation de l'appareil nucléaire), il n'avait pas de précision physiologique et expérimentale. Les travaux de Maupas ont été suivis de nombreux autres dont nous devons passer en revue les principaux, dans l’ordre analytique suivant : la sénescence et ses relations avec la (:) Cetle notion de la sénescence fatale a été vulgarisée à tel point que certains auteurs croient pouvoir la présenter sous forme d'expériences idéales. A quel fantaisiste auteur BLariNGHeMma-t-il emprunté la relation suivante? « Maupas a suivi dans une infusion de foin les divisions successives d'un-être monocellulaire, la Paramécie : après 400 divisions environ, la taille de ces infusoires diminue uotablement ; bientôt les divisions cessent et tous les individus meurent. Dans une autre expérience, deux paramécies donnent des divisions analogues ; au moment où la taille des produits diminue, Mauras mélange leur contenu (?) ; il peut suivre au microscope, sur une goutte prise dans le mélange, les infu- soires du premier bocal À el celles du second B ; elles s’accouplent deux par deux pour se fusionner en une sorte d'œuf (sic). Le mélange protoplasmique équivaut à un rajeunissement et correspond à une véritable fécondation ; la décrépitude sénile des deux lots disparait et les paramécies résultant de la fusion des deux individus provenant de l’un et l’autre lot se divisent-à leur tour jusqu’à 500 divisions avant de présenter de nouveau le phénomène de la dégénérescence. » (Les problèmes de l’hérédité expérimentale, Bibliothèque de philosophie scien- tifique, Paris, Flammarion, 1919, p. 35.) < LES NICOLLELLIDÆ 133 conjugaison, les effets de la conjugaison, Le déterminisme de la conjugaison, le déterminisme et les phénomènes nucléaires de l’enkystement. | La sénescence et ses relations avec la conjugaison et l'endomyxie. — CaLkivs (1909 «a et b, 1904, 1913) expéri- mente sur les paramécies et montre qu'il est possible d’allonger beaucoup la série des bipartitions, à condition de changer le milieu nutritif quand le pouvoir de multiplication commence à s'abaisser, premier signe de la sénescence ou dépression. Ces dépressions sont périodiques. Malgré toutes les précautions, 1l arrive toujours un moment où la culture ne peut plus être régénérée. Il n'y a pas de conjugaisons dans ces cultures, et c'est à cela qu'est due leur extinction. La notion de sénescence fatale et périodique et de rénovation par la conjugaison se retrouve là aussi précise que chez Mauras, et passible des mêmes critiques. Elle semble, à la suite des patientes recherches de WooDRüFF (1908, 1909, 1911, 1919, a, b, c) et de ses collaborateurs (Wooprurr et Barrsez, 1911,.a, b, c), perdre de son crédit. Avec une persévérance méritoire, ces auteurs entretiennent des cultures de paramécies qui commencées en mai 1907 attei- gnaient 2.121 générations en décembre 1910, et plus de 4.500 en juin 1914, sans que ni grandes dépressions ni conjugaisons soient intervenues. On ne constate que de petites variations « rythmiques » du pouvoir de multiplication, indépendantes des conditions extérieures (!). C’est le pouvoir de multiphi- cation indéfinithéoriquementaffirmé par Weismann (1882, 1884). Mais voici un fait inattendu : lors de chacune de ces petites dépressions, lorsque le pouvoir de multiplication est à son minimum, les paramécies sont le siège de remaniements nu- eléaires qui rappellent étrangement ceux qui préparent la con- jugaison (résorption des macronuclei, production par deux divi- sions de quatre micronuelei et dégénérescence de trois d'entre eux, mais sans fusion des micronuelei restants). C’est l'endo- (1) Wooorurr (1900) définit ainsi le cycle et le rythme: « A rhythm is a minor periodie rise and fall of the fission rate, due to some unknown factor in cell meta- . bolismi, from wich recovery is autonomus. A cycle is a periodie rise and fall of the fission rate, extending over à varying number of rhythms, and ending in the extinction of the race unlessit is « rejuvenated » by conjugation or by changed environment », 13% ED. CHATTON El CH, PÉRARD myxæie de Woopnurr et Erpmanx (1914) (nom malencontreux puisqu'il implique l'idée d’une fusion nucléaire). R. Herrwie (1914-1917), qui observe des phénomènes semblables chez Paramacium aurelia, les tient pour une vraie parthénogénèse. YouxG (1917) les retrouvera chez cette même espèce, FERMOR (1913) dans les kystes de Séylonichia pustulata et Caikiss (1919) dans ceux d'un autre hypotriche Uroleptus mobilis. Malgré ces observations convergentes, la généralité et la signification de ces phénomènes n'est pas encore définitivement établie. Il reste tout au moins à montrer qu'ils sont réellement indépendants des conditions de milieu. Quant à cela les expé- riences ont donné des résultats tout à fait contradictoires. Dans celles de Wooprurr (1917, a et b) les variations du régime nutritif et de la température n’ont nullement influencé le rythme. Celui-ci serait caractéristique de l'espèce, et synchro- nique dans toutes les lignées parallèles de même âge et de même origine. Dans celles de Jozros (1919), de Youxc et de Merazikorr (1919) il n'y a pas de périodicité fixe dans l’appa- rition des petites dépressions et de l’endomyxie ; celle-ci n'est pas soustraite aux influences extérieures et peut être provoquée expérimentalement. Depuis longtemps Exriques (1903, 1905, 1907, etc.) attri- buait les dégénérescences qui caractérisent l’état de sénescence ou de dépression à l’action des produits bactériens accumulés dans le milieu. Et Wooprurr lui-même (1911) reconnait que le pouvoir de multiplication est fonction dans une certaine mesure du volume du milieu de culture. Une expérience ulté- rieure de Bairsezz (1914) est très suggestive à cet égard : de trois cultures de Pleurotricha lanceolata issues de la même souche, deux entretenues sur lames creuses, selon la technique utilisée dans tous ces travaux, en milieu par conséquent très confiné, dégénèrent et s'éteignent, tandis qu une troisième, cn tubes, se perpétue indéfiniment, sans conjugaisons. L'action nocive des produits AE peut naturellement s'ajouter à celle des excrétas des ciliés. Il est à remarquer combien ilest rare de voir la conju- saison, même infertile intervenir dans celles de ces expériences où s'établit la sénescence Les effets de la conjugaison. — JENNINGS (913) reprochait LES NICOLLELLIDÆ 435 très justement à tous ses prédécesseurs qui avaient proclamé le pouvoir rénovateur de la conjugaison, de n'avoir jamais institué d'expériences pour mettre en évidence une augmen- tation de la vitalité à la suite de la zygose. Elles s'imposaient d'autant plus que Bürscurr et Maupas reconnaissaient déjà qu'elle n’élevait pas le pouvoir de multiplication. JENNINGS étudie_ comparativement sur les paraméceies, la descendance d'individus d'une même culture pédigrée, dont les uns ne sont pas entrés en conjugaison ou ont été séparés aussitôt qu'accouplés, et dont les autres ont effectué la zygose complète. IL les compare au point de vue de la taille, du pouvoir de multiplication, de la mortalité et des anomalies, et enfin de la variabilité. Taille : les individus de la lignée conju- guée sont toujours légèrement plus grands que ceux de Ja lignée non conjuguée, mais la différence s’atténue à la longue. Pouvoir de multiplication : la lignée conjuguée est en infériorité, souvent considérable. La mortalité y est plus fréquente et les anomalies y sont aussi plus nombreuses. Mais la conjugaison a partout pour effet d'amplifier les variations. Elle peut produire ainsi un petit nombre d'individus dont la vitalité est supérieure à celle de n'importe quel individu de la lignée témoin non conjuguée, vitalité qu'il transmet à sa descendance. C'est là, essentiellement, l'effet favorable de la conjugaison. IT peut aussi se faire sentir en enrayant une multiplication ‘trop active ('). (1) N'étant pas finalistes, nous ne sommes nullement surpris que la conju- gaison n'apparaisse pas dans ces expériences comme le remède immédiat et approprié aux conditions défavorables qui la déterminent, que ses effets ne soient pas correcteurs précis de ceux de sa cause. Ceci étant bien entendu, et préci- sément parce qu’il nous plairait d'avoir de cet ordre de faits un exemple inatta- quable, nous devons dire que les expériences de JENNINGS ne nous paraissent pas absolument convaincantes. Suivant toujours la technique de Maupas, JENNINGS prélève dans une culture bien nourrie des individus en pleine multiplication et il les porle sur une lame creuse dans le milieu même où ils vivaient. Le matériel nutritif y est rapidement épuisé et au bout de vingt-quatre heures les individus sont accouplés. Après la séparation précoce, ou après la conjugaison, ils sont remis progressivement au régime noribal nutritif, qui doit être très favorable, puisqu'il s'agit d’éprouver le pouvoir de multiplication. Or ce ne sont pas là les conditions dans lesquelles les effes de la conjugaison se font sentir dans la nature. Il est certain que les causes qui la déterminent ne cessent pas dès qu’elle s'est effectuée; pour mesurer ses effets dans des conditions naturelles, et c'est cela surtout qui nous importe, il faudrait procéder à l'analyse faite par JENNINGS sur les lisxnées entretenues dans les conditions mêmes qui ont provoqué la zygose. Rien ne permet de dire a priori que l’infériorité montrée par les 136 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD Toutes différentes sont les conclusions que Cazkins (1919) tire de ses expériences sur l’hypotriche Uroleptus mobilis. Ge cilié en cultures sur lames se comporte exactement comme le Stylonichia de Mauras. IL dégénère et meurt au bout de 250 à 350 bipartitions, si la conjugaison n'intervient pas. Le pouvoir de multiplication s'abaisse progressivement de trois à quatre scissions par décades tous les deux mois. Mais la conju- gaison intervenant fait remonter ce pouvoir dans une mesure qui peut aller de 0.25 à 17 ou 18 bipartitions par décades. Ces constatations sont impressionnantes et elles bénéficient du prestige qui s'attache aux résultats de sens positif ; elles n'en appellent pas moins de nouvelles recherches. D'ailleurs c'est beaucoup moins dans les effets de la conjugaison, si imté- ressants soient-ils, que dans son déterminisme qu'il faut essayer de découvrir sa signification. Le déterminisme de la conjugaison. — Des trois condi- tions de Mauras, l'inanition, la maturité caryogamique, l’ascen- dance hétérogène, la première seule parait aujourd'hui néces- saire. Déjà Mauras enregistrait comme embarrassante, la conju- gaison du Leucophrys patula à quelques générations seulement de distance d’une première zygose, conjugaison fertile qui était à l'origine d’une lignée de près de 300 générations. Mais là les couples étaient formés d'individus de lignées différentes. Dans une même lignée Jexnixes (1910) à pu obtenir à quatre générations de distance la répétition de la conjugaison, et cela neuf fois de suite. Exriques (1908) avait déjà vu-des ex-conJu- gués de Chilodon dentatus reconnaissables comme tels à leur appareil nucléaire incomplètement reconstitué, se recon- juguer. Et B. Couux (1919) montre par l'étude des vestiges de l'appareil nucléaire que l’acimétien Tokophrya cyclopum peut se reconjuguer sans arrêt ni repos trois fois successivement. L'inanition reste donc le facteur essentiel de la conjugaison. Cette notion a d'ailleurs reçu la plus significative des consé- crations : elle est devenue le principe d’une technique. À la notion fondamentale, telle qu'elle se dégage des expériences conjugués dans de bonnes conditions se manifesterait @ fortiori dans de mauvaises. Les expériences de cet ordre n'ont de sens que si on y tient comple de la donnée fonction du milieu. - LES NICOLLELLIDZÆ 137 de MauPras (qui ne l’a pas fait ressortir à sa valeur dans ses conclusions), Cazkins (1909) et JExNINGS (1910) ont apporté cet amendement : ce n’est pas tant la faim. que le passage brusque d'un régime abondant à un régime déficient qui détermine l’accouplement. Mais si cette rupture d'équilibre est la condition prati- quement suffisante de la conjugaison, dans des cultures sau- vages, il n’en est pas de même dans les lignées pures. Cest leur étude qui avait fait concevoir à Maupas la nécessité des deux autres facteurs, car il n’y obtenait pas à volonté la zygose par le jeûne. Dans les expériences de ZwerBauu (1912), on retrouve chez les Paramécies semblable inaptitude à la conjugaison des lignées pures. Cependant on arrive tonjours à la vaincre par un jeune prolongé de quatre à cinq semaines. Les paraméceies conservent alors leur aptitude à la zygose pendant très long- temps, même bien nourries. Mais ce n'est qu'une aptitude ; la conjugaison n’est déterminée que par la suppression brusque de l'aliment. Il faut reconnaitre que cette condition d'aptitude rappelle beaucoup la condition eugamique de Mavpas. Il n'est pas sans intérêt de savoir, qu'elle aussi est sous la dépendance de linanition. Fa A côté de ce facteur essentiel, Enriques (1908, 1909), puis Zwermaux (1919) mettent en évidence d’autres conditions de la conjugaison : optimum de température, limites de concentration des sels, ou des facteurs adjuvants : nature des électrolytes. De tout cela il résulte qu'on ne saurait plus soutenir mainte- nant-que la conjugaison est soustraite aux conditions extérieures. Le déterminisme de l'enkÿystement. — Il na pas fait Jus- qu'ici l’objet de travaux expérimentaux détaillés. Mauras (1888) nie l'influence de la concentration du milieu, affirmée par Ciexkowsky (1885) et par CLararine. I le voit résulter tou- jours, comme la conjugaison, de l'inanition. Mais les deux phénomènes sont tout à fait indépendants. I y à là un pro- blème séduisant : pourquoi la même cause produit-elle des effets aussi différents ? La découverte de l’endomyxie chez les paramécies, et'celle des phénomènes tout analogues sous les kystes de Sfylonichia pustulata (Fermon 1913) et d'Uroleptus mobilis (Cazkins 1919) 138 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD font entrevoir, à côté de la relation de causalité, une relation d'essence entre les deux phénomènes. Mais ce lien est-il général? Chez les paramécies, lendomyxie ne se produit jamais sous un kyste (l’enkystement est inconnu dans ce genre). Ÿ a-t-1l endomyxie dans tous les kystes ? Cet acte est-il d’ailleurs général ? Si ces questions recevaient une réponse affirmative, on serait amené à voir dans l'enkystement une sexualité ébauchée, et dans son déterminisme par lPinanition un phénomène qui ne ee avec le déterminisme semblable de la conjugaison, qu'une différence quantitative, soit dans l’état des individus qui y participent, soit dans l'intensité des influences qui le déclanchent. | Réflexions. — C'est, on le voit, un litige d'importance que soulève la question posée au début de ce chapitre. I à frait à l'essence même des phénomènes vitaux, ou pour le moins à la mesure dans laquelle ils sont accessibles à notre intervention expérimentale. Mais ce n’est pas ici le lieu de l’examiner dans toute son ampleur. Nous nous étions demandé ce que l'on devait entendre par «cycle évolutif » chez les ciliés. La question n'est pas de savoir si ceux-ci évoluent d’une manière cyclique. Il est certain que tout observateur qui se trouve en présence d’une sexualité ou d'un enkystement s’'intercalant entre deux séries scissipares, ou d'une série scissipare comprise entre deux enkystements ou deux conjugaisons, est fondé à parler d'évolution cyclique. Le débat est celui-ci : la sénescence, la conjugaison ou l’endo- myxie, l’enkystement, se manifestent-ils avec une périodicité régulière, et suivant uu ordre constant, sous l'influence de causes internes, ou sont-ils conditionnés par le milieu indépen- damment les uns des autres ? En d’autres termes sont-ils l'expression d'une évolution fatale comme l'est actuellement la vie individuelle d’un métazoaire à génération sexuelle néces- saire, où ne sont-ils que des incidents d’origine cosmique dans une vie théoriquement uniforme et indéfinie (immortalité poten- tielle de WeismanN) ? Il n'y avait pas, à priori, de raisons de penser que l’évo- lution d’un cilié dut être calquée sur celle d'un métazoare. C'est cependant ce rapprochement qui a séduit Mauras et qui a contribué à l'amener à son concept de la sénescence, équi- LES NICOLLELLIDÆ 139 valent de la caducité des métazoaires. C'est cette même idée qui guide Cazkixs (1909) lorsqu'il homologue au soma des métazoaires Le stock des générations comprises entre deux conjugaisons, et où, dans l’un comme dans l’autre la vitalité des cellules s'abaisse progressivement. Nous ne nous laisserons pas entrainer dans une discussion, qui risquerait d’être pure- ment verbale, sur ce qui chez les cïliés peut correspondre au soma des métazoaires. La question de la sénescence n'est pas morphologique, mais physiologique. De ce point de vue il ny a aucune analogie à rechercher entre Le soma du métazoaire et le stock des individus dissociés du protozoaire. La caducité résulte chez le premier de l’entassement, du confinement et surtout de la spécialisation des cellules et des tissus. Les mdi- vidus cellulaires dissociés du protozoaire ne subissent aucune de ces causes dé vieillissement, et il y a toutes raisons pour leur attribuer à priori une vitalité indéfinie. Mais soumis à ces mèmes causes, comme ils le sont sur les lames d'élevage, en milieu confiné, ils subissent les mêmes dommages. La sénes- cence des ciliés telle qu'elle est ainsi réalisée est bien compa- rable à la vieillesse des métazoaires, mais fatale chez ceux-ci elle est contingente chez ceux-là. C'est bien aussi ce qui découle de l'exposé des expériences. Si nous nous refusons à voir dans la sénescence un phénomène inévitable, si nous considérons, les faits nous y obligent, Ia conjugaison et l'enkystement comme étroitement conditionnés par le milieu, il ne peut plus être question de cycle pério- dique et régulier, qu'en rapport avec des conditions pério- diques et régulières. De semblables conditions doivent être l'exception dans l'existence des ciliés libres. L'ÉVOLUTION DES PARASITES Les parasites sont exposés à subir l'influence du rythme physiologique de leurs hôtes. Ainsi d’après Cerève 1910) la conjugaison d'Orchitophrya stellaruni parasite des testicules d'Asteracanthion rubens, coïnciderait avec la spermatogénèse de son hôte. Chez les Opalines des batraciens l'enkystement s'observe surtout à l'époque de laccouplement et de la ponte, - 140 ED. CHATTON EL CH. PÉRARD Mais des relations de cet ordre sont encore loin d’être connues pour tous les parasites. : I y a chez les ciliés tous les intermédiaires entre les formes libres ‘et parasites, aux points de vue de l’éthologie, de l’ana- tomie et de l'évolution, sans parallélisme dans les modi- fications de ces trois ordres qu'entraine le parasitisme. Des parasites très régressés, des astomes comme les Orchitophrya se multiplient, s'enkystent et se conjuguent suivant le mode le plus banal. Au contraire, chez l'Ichtyophtirius multifilirs parasite dans la peau des poissons, qui a tous les attributs d'un holotriche libre, la multiplication par bipartitions espa- cées et compensées par la croissance, fait place à une multi- plication rapide qui est l'équivalent d’une sporulation. Cette phase de multiplication active existe très marquée chez beaucoup de parasites, sans exclure comme chez 1chthyo - phtirius celle des bipartitions normales. Chez lés uns (Opalines des batraciens), elle précède l’enkystement, qui est le prélude de la conjugaison (Neresaemmer, 1908 ; Mercazr, 1908 ; Bruwpr, 1915). Chez les autres elle mène directement à la conjugaison (Collinia du sang des édriophtalmes, B. Couu, 1909) Gymno- dinioides et Polyspira des mues des pagures (Mnkiewicz, 1913). Cette phase de multiplication préconjugale n’est pas l'apanage exclusif des parasites. Elle existe, quoique beaucoup moins marquée chez beaucoup de formes libres. Maupas l’a bien mise en évidence chez Leucophrys patula où les individus végéta- tifs mesurent 150 4, les conjugants de 50 à 60 x, chez Proro- don teres, où l’abaissement de la taille est de 360 à 80 », chez Enchelys farcimen où il est de 100 à 40 x, chez Didinium nasu- lu où il est de 160 à 90 », et même chez les paramécies. Il est à remarquer que ce sont surtout les holotriches, auxquels se rattachent la plupart des parasites, qui la présentent. Maupas voit dans cet abaissement de la taille un effet de l'inanition qui mène à la conjugaison, et les Allemands appellent ces scissions précipitées « divisions de jeûne » (Hungertheilungen). C'est aussi à l’épuisement du milieu nutritif par le grand nombre des parasites que Cozuin (1909) attribue l'intense ‘multiplication préconjugale de Collinia branchiarum, qui abaisse la taille de 120 y jusqu'à 8 x. Mais Bruwvr (1913) qui a étudié Collinia circulans, n'accorde: à f | | | | / LES NICOLLELLIDÆ 141 l'inanition qu'un rôle tout à fait secondaire dans le déter- minisme de sa sexualité. De ses recherches sur cet infusoire, comme de ses observations sur les ciliés intestinaux des batra- ciens, Brumpr conclut que « les causes déterminantes des épi- démies de division sont celles qui déterminent la sénilité des infusoires ». Pour lui l'enkystement aussi peut être considéré comme « l'aboutissant d’une dégénérescence sénile incomplète ». Et du déterminisme de la dégénérescence sénile BrumPr exelut même l’action toxique du milieu. C'est bien là la sénescence au sens strict de Maupas « inhérente à l'organisme et relevant de causes internes qui agissent indépendamment des conditions de milieu ». « C'est », dit Baumpr, « parce que les opalines parasitent depuis longtemps un hôte et parce que certaines conditions surajoutées et encore peu connues se produisent que les opalines se segmentent et s'enkystent en masses ». Ce qu'on ignore complètement dans la plupart des cas, c’est la destinée des ex-conjugués. Chez les sporozoaires et même chez nombre de protistes libres (Volvocinées) on est habitué à voir le zygote s'enkyster. Celui-ci est l'élément de résistance et le moyen d'expansion extérieure de l'infection. Sauf chez les opalines, ou dans ces cas encore très rares et incomplètement étudiés de conjugaison totale sous un kyste (Opalina satur- nalis, Lécer ét Dusosco, 1904: Balantidium coli, Bruuer, 1909 et 1910, fig. 91, p. 149), on ne saisit pas chez les ciliés para- sites, de rapports constants entre la conjugaison, la. migration et l'expansion du parasite. Se préciseront-ils dans ceux que l’on entrevoit entre l’endomyxie et l'enkystement ? Il y a là matière à recherches. L'ÉVOLUTION DES NICOLLELLiDÆ Dans une culture homogène, dans le sang d'un crustacé ou d'un ver, dans le vaste sac rectal d’un batracien, les condi- tions varient à peu près uniformément dans tout le milieu. Le long de l'intestin postérieur du gondi, surtout dans sa portion rétrécie (côlon), au niveau où la muqueuse résorbe de l’eau, les conditions varient rapidement d'un segment à l’autre. L'état même des matières fécales, qui sur un parcours de moins de 149 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD cinq centimètres passent de Pétat subliquide à un état presque solide, le démontre. Dans le premier cas, les stades de l’évo- lution ne peuvent être sériés que dans le temps. Ici ils peu- vent l'être dans l’espace, et cette circonstance favorable sup- plée quelque peu le défaut de documents expérimentaux. La condensation du contenu intestinal agit sur les parasites par la raréfaction de l'aliment et du liquide, par sa concen- tration en produits dissous ou par une inhibition mécanique de l’ingestion. Il peut en résulter soit une intoxication des ciliés menant à la dégénérescence, soit un certain degré d’inanition qui détermine la multiplication et la zygose. Au point de vue des conditions de la conjugaison, la masse des parasites contenus dans l'intestin équivant à une culture sauvage de ciliés Hibres. Nous pouvons considérer qu'une raré- faction suffisamment brusque de l’aliment déterminera toujours la conjugaison. I y à un niveau du côlon, celui où le milieu est le plus favo- rable, où le parasite végète avec sa taille maxima. La culture s'étend là de proche en proche. Pour Coflinella elle n'a de limite supérieure que la valvule iléo-cæcale. Pour Nicollella cette limite est dans le côlon même, et le parasite n'y montré aucune tendance à la division ou à la conjugaison. On peut essaver de rendre compte de ce fait en imaginant là des con- £ ditions non seulement insuffisantes mais prohibitives. Ce niveau est précisément celui où la culture de Nicollella se heurte à celle de Col/linella, et ou celle-ci est maxima. Il ne manque pas d'exemples de ces sortes d'incompatibilités parasitaires. Par contre aux limites inférieures des zones de culture des grandes formes, celles-ci font insensiblement passage aux petites ; elles y sont induites à se diviser. Cette division est d'autant plus poussée que Le milieu est plus déficient. Elle se poursuit alors jusqu’à l'extrême limite inférieure de la taille des espèces. Cette multiplication sans croissance est la consé- quence de la raréfaction progressive de l'aliment. Elle .n'aboutit pas nécessairement à la conjugaison. Mais si, en quelque point, cette raréfaction est brusque, la conjugaison intervient. Dans la zone à Collinella elle parait s'effectuer là où commence la culture de Nicollella. Dans la zone à Nicollella elle à lieu et d’une manière massive, au niveau inférieur U ! à à » < PP NT ST EP SR PRE PT PR PRE CE OR EE EP LES NICOLLELLIDÆ 143 extrème de la zone de culture, là où les crottes se moulent. Chez Collinella, telle que nous l'avons observée, elle parait rare, et lorsqu'elle existe, elle n'affecte qu'un petit nombre d'individus. Chez Nicollella au contraire elle est massive. Chez Collinella elle interrompt la multiplication des formes de taille moyenne, multiplication qui peut se poursuivre chez les individus qui s'en affranchissent. Chez Nicollella, elle survient vers la fin de la multiplication. Nous disons que la conjugaison interrompt la multiplication chez Collinella. On sait que les ex-conjugués de cette espèce mettent un temps très long à régénérer leur macronueléus normal. Quoique les conjugaisons soient rares on trouve de nombreux stades de cette régénération. Or, jamais ces stades ne sont en division. Celle-ci ne peut s'effectuer que lorsque les ébauches macronucléaires ont subi la condensation chroma- tique maxima, et encore est-elle 1à exceptionnelle. Dans les masses de parasites où les bipartitions sont nombreuses, et où la taille s'abaisse au-dessous de celle des conjugants, il n'y a pas une seule forme reconnaissable comme ex-conjuguée. Cet arrêt de la multiplication par la conjugaison est conforme à tout ce que nous ont appris Mauwras et Jexxixées de ses effets chez les paramécies. Non seulement la conjugaison arrête la multiplication, mais encore elle remet les ex-conjugués en état de s’accroitre. On suit cet accroissement dans les préparations parallèlement à la reconstitution de l'appareil nucléaire normal. Et cela aussi ” Jexnies l’a mis en évidence chez les paramécres. Ces constatations nous amènent à préciser notre compré- hension du rôle de la conjugaison. Quand on dit qu'elle n’a _pas pour effet de renforcer le pouvoir de Up mesure de la vitalité, on exprime une idée qui n’a pas de sens défini. I faut distinguer chez les ciliés entre Îa multiplication par bipartitions espacées, compensées par la croissance, multi- plication d'équilibre, de prospérité, qui marque l'état de la vitalité et la multiplication par bipartitions précipitées, non compensées, multiplication de déséquilibre, de disette, qui marque une crise de la vitalité et qui conduit à la dégéné- rescence. Les conditions qui déterminent 4, MONTE gaison sont aussi 144 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD celles qui déclanchent la multiplication de déséquilibre. Que celle-ci soit arrêtée, cela ne prouve pas du tout que la conju- gaison n'ait pas renforcé la vitalité. Au contraire, puisqu'elle a enrayé l’une des conséquences de la crise On ne s'étonne pas de ce que la conjugaison ne mène pas d'emblée à la multi- plication d'état puisqu'elle s'effectue chez des individus débi- lités. Elle est elle-même une crise, comme l’est toute refonte organique importante (mue, métamorphose, régénération, immunisation) et 1l n'y a pas à s'étonner que les ex-conjugués se montrent inférieurs aux non conjugués mis au concours avec eux dans des conditions rendues artificiellement très favorables (Expérience. de JENNINGS, v. p. 135). L'effet de la conjugaison n'est que suspensif. Il ramène les conjugués à un état d'équilibre éphémère, au cours duquel ils ont quelque chance d'échapper aux conditions qui ont déclenché la crise et de retrouver celles qui sont nécessaires à leur régé- nération. Cela n'exclut pas, bien entendu, son rôle purement amphimixique. Dans le cas particulier des Nicollellidæ, ces chances paraissent assez grandes pour les ex-conjugués de Collinella qui diffèrent peu par leur taille et leur forme des individus normaux. Elles sont semble t-il beaucoup plus rares pour les ex-conjugués de Nicollella très diminués par rapport aux formes normales. Quant aux petites formes non conjugantes, nous ne voyons pas pour elles, dans les conditions où nous les avons étudiées, de possibilités évolutives. Il se peut que dans d’autres condi- tions elles soient, comme les petites opalines de printemps, capables de s’enkyster. L’infection des jeunes gondis ne peut se concevoir que par le moyen de kystes, mais malgré de persévérantes recherches effectüées même à l’époque de la. parturition et chez des femelles allaitant, nous n'avons observé aucun indice d’enkystement de nos ciliés. POSITION SYSTÉMATIQUE DES NICOLLÉLLIDÆ L'hypothèse que nous avançons (v. p. 124), d'une évolution éthologique et anatomique qui aurait conduit des ciliés très proches du type Prorodon aux Nicollellidæ exprime très exac- LES NICOLLELLIDÆ 145 tement nos vues sur la situation de la famille dans la elassi- fication des infusoires. Mais il y a quelque difficulté à les concilier avec l’état actuel de cette classification. Nous ne pouvons, en effet ranger les Nicollellidæ à côté des Prorodon, c'est-à-dire des Holophryine : bien que les protistologues les plus qualifiés, Bürscnzr, Maupas, admettent que les holotriches à bouche latérale et à péri- stome, dérivent des holotriches à bouche antérieure et sans péristome, la classification actuelle coupe les séries évolutives en faisant des premiers les hyménostomes, et des seconds les gymnostomes. La forme hypothétique que nous plaçons à l'origine des Nicollellidæ se classerait dans ceux-ci, nos Nicol- lellidæ dans ceux-là. Etil en est certainement ainsi de plusieurs autres phylums, tel que, par exemple celui des /sotrichidæ, ou des Paramaæcid:æ. Mais comme nous ne tenons les classifications actuelles que pour de provisoires systèmes d'ordre, nous clas- serons nos Nicollellidæ, sous les réserves faites, dans les hymé- nostomes. On peut arbitrairement leur y faire une place entre les Chiliferidæ et Les Isotrichideæ. Le type de la famille est le genre Nicollella, qui en reflète l'origine et qui en synthétise tous les caractères. ScauBorTz énumérant toutes les particularités de l’organi- sation du Pycnothrix : le développement exagéré de l’ecto- plasme, les « deux sillons » avec leurs nombreuses bouches, l'appareil excréteur canaliculaire, les considère comme autant de caractères interdisant de ranger ce genre dans l’un quel- conque des ordres de ciliés déjà existants, et il le laisse provi- soirement en appendice au groupe. _ On ne peut que savoir gré à l'auteur de sa réserve. Mais les règles de la nomenclature sont telles que tout honorable scru- pule est une: imprudence. À la faveur de ces lois, opèrent des spécialistes du démarquage. Franz Pocne (1913), sans avoir ni étudié, ni revu, ni tenté de comprendre le Pycnothrix, exploitant les scrupules de Scausorz, introduit dans la nomen- clature un ordre des Pycnotrichidea Poche équivalent aux Holotriches, Hétérotriches, Péritriches, etc., et une famille des Pycnotrichidæ Poche, seule de l’ordre. Nous n'avons découvert ces noms que tout récemment. L'ordre reste pour compte à son auteur ; le nom de famille 10 146 ED. CHATTON ET CH. PÉRARD a la priorité sur celui de Nicollellidæ, et il doit lui être sub- stitué. Nos successeurs feront d'eux-mêmes le redressement. Nous n'avons pas cru devoir, pour notre part, consacrer, fût-ce par un trait de plume dans notre manuscrit, le genre de travaux dont celui de Pocne est le prototype ("). C'est de propos délibéré que nous nous abstenons de donner des diagnoses de la famille et des genres. Il est imprudent de vouloir prévoir les variations, pas nécessairement orthogé- nétiques, d'un groupe de formes. On s'expose ou à donner une définition trop large et sans précision, ou à se voir obligé de de les remanier à chaque extension du genre ou du groupe. Le mieux, nous semble-t-il, est de caractériser les grou- pements de formes en indiquant les formes types, comme nous l'avons fait. La description détaillée des espèces est la base nécessaire et suffisante d'une bonne systématique. (:) Cet auteur édifie de vastes « systèmes » de nomenclature, aussi complé- tement dépourvus de faits que d'idées personnelles, et dont le seul objet est de. marquer à son chiffre le labeur des-autres. Son « System der Protozoa » (1913), dont le titre évoque quelque chose comme l’œuvre magistrale et impeccable d'un Bürsceau, n'offre d'autre originalité que la « pochisation » de 150 classes, ordres, tribus, familles, sur les quelque 400 qui constituent le groupe. C’est ainsi qu'un auteur qui n'a fourni en tout et pour tout d’autrecontribution à la connaissance des protozoaires, que la description erronée d’un trypanosome, qui est un lrypanoplasme, et d’un Oxyrrhis qui est un Gymnodinium, prétend marquer de son empreinte le tiers d’une science qui ne lui doit rien. Tout cela ne tirerait nullement à conséquence et ne mériterait point l'attention, si les lois de la nomenclature n'étaient une provocation au démarquage par la consé- cration qu'elles lui donnent. Voici un autre exemple, entre beaucoup, de la maîtrise taxonomique de Pocxe : V. Docrez avait décrit en 1906, 1908, 1910, des parasites intestinaux des annélides polychètes, les Æaplosoon, dont il avait fait un groupe de mésozoaires, les Catenata. Bien que Pocue eût pu trouver dans les notes de Cnarron (1907-1908), dans un mémoire de NeresHeiIMER (1908) et dans ceux-mêmes de Docrez (1908-1910), les indications les plus claires sur la vraie nature de ces organismes, qui sont en réalité des dinoflagellés très modifiés, il en fait dans son « System », une classe des Æaplozoidea, équivalente de celles des rhizopodes, flagellés, sporo- zoaires. Ceci, d’ailleurs au mépris des règles de la nomenclature qui ne permet- taient pas de rejeter pour une classe la dénomination de Catenata. BIBLIOGRAPHIE 147 BIBLIOGRAPHIE 1914. Barrseze (G.-A.). — Experiments on the Reproduction of the Hypotri- chous Infusoria. — IT. À Study of the So-Called Life-Cycle in Oxytricha fallax and Pleurotricha lanceolata (. of. exp. sool., XVI, p. 211-233). 1895. 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Protis- tenk., XX VI, pp. 275-394). RC RL DE me Vin 7 PORT en, © Noa drone LAVAL. —— IMPRIMERIE L. BARNÉOUD ET G°. “ EXPLICATION DES PLANCHES Toutes les figures sont tirées de matériaux fixés au liquide de Bourx- Dusosco, sauf celles de Pycnothrix dont les matériaux ont été fixés et conservés par BrumrPr dans l’eau formolée à 5 0/0. Toutes les préparations ont été colorées à l'hématoxyline au fer. { Lettres : b., bouche ; c. e, canaux excréteurs ; g. p., goullière préorale ; {.i, lame ectoplasmique interne ; » , myonèmes:; p.e, pore excréleur ; v. e, vésicule excrétrice. PA È Fr: EN EXPLICATION DE LA PLANCHE I Fig. 1. — Secteur d’une coupe langentielle de l'intestin grèle d'un gondi infecté de Collinella qundii, x 70. Fig. 2-27. — Nicollella ctenodactyli Chatt. et Pérard. Les figures 2 et 5, A1 à 27, au grossissement de 250 : 4, 10, au grossissement de 480. Fig. 2. — Grande forme végélalive vue de profil par la face gauche (coupe optique). Fig. 3. — Grande forme végétalive vue de face par la face ,ventrale. Deux ookystes coccidiens dans l’endoplasme. Fig. 4. — Coupe transversale au niveau marqué + dans la figure 2. Fig. 5. — Coupe transversale au niveau de la bouche. Fig. 6 — Coupe sagittale du pôle postérieur, montrant l'entonnoir de la zone excrétrice. j Fig. 7. — Vue apicale du pôle antérieur avec l’origine de la gouttière préorale et les lignes d’insertions ciliaires. Fig. 8 - Vue apicale du pôle postérieur avec le méat excréteur. Fig. 9. — Coupe du pôle postérieur au niveau marqué + dans la figure 5. Fig. 10. — Coupe sagiltale passant par la gouttière préorale ; palissade des fibres de soutien de la lèvre droite et racines ciliaires prolongées dans l’'endoplasme. Fig. 11. — Forme moyenne en bipartition. Fig. 12. — Petite forme au repos. Fig. 13. — Prophase de la première mitose de maturation chez un isolé. - Fig. 14. — Syzygie au stade À : première mitose de maturation. Fig. 45. — Syzgyie au stade B:un fuseau de la deuxième mitose de maturation. Fig. 46. — Stade C : le noyau sexuel engagé dans le champ préoral et les trois micronucléi de réduction. Fig. 17. — Syzygie à conjoints non assortis et à évolution nucléaire asynchronique. Fig. 48. — Stade D : le noyau sexuel est dédoublé ; pronuclei migra- teurs dans le champ préoral, pronueléi stationnaires revenus dans l’endo- plasme. Un des N en voie de résorption. Fig. 49. — Stade E : un ex-conjugé avec le synkaryon et les trois x de rebut et le N en résorption. Fig. 20. — Stade G : mitoses des noyaux fils du synkaryon. Fig. 21. — Stade F : le synkaryon dédoublé. Fig. 22. — Stade G:le x définitif et son frère de rebut sont formés ; fuseau de formation des deux N futurs ; résorption des x de réduction. Fig. 23. — Stade H : le x définitif, son frère de rebut et les deux ébauches macronucléaires. Fig. 24. — Stade H : le » et les deux ébauches macronucléaires. Fig. 25-26. — Rapprochement et fusion des ébauches macronucléaires. Fig. 27. — Une des plus petites formes. Planche 1 Paris Imp. Catala frères. = Fe 2 L:4 T [=] = £ oo = SE = C2 et Va Ve à = Es ASF Bo 1 #= à La ‘ ci = É + 5 = 2 al _ EXPLICATION DE LA PLANCHE II Collinella qundii, Chatt. et Pérard., formes végétalives, scissiparité et petites formes. Les figures 28 et 29, 36 à 47 au grossissement de 250 ; 30 à 35 au grossissement de 480. Fig. 28. — Grande forme végétative vue de profil par la face gauche. Fig. 29. — Grande forme végétative vue par la face ventrale. Fig. 30. — La gouttière préorale vue de face avec ses palissades de soutien et l'origine des lignes d’insertions ciliaires. Fig. 31. — Coupe transversale équatoriale. Fig. 32. — Coupe transversale du pôle postérieur au niveau marqué + sur la fig. 28. Pore excréteur. : Fig. 33. — Coupe transversale au niveau marqué X sur la coupe fig. 28. Bouche et vésicule excrétrice. Fig. 34. — Vue superficielle du tégument, de la surface vers la profondeur: le système des grains basaux des cils, les « myonèmes », les alvéoles de l'endoplasme cortical. Fig. 35. — Coupe sagittale intéressant la gouttière préorale ; la palissade de bâätonnets de soutien de la lèvre droite se prolongeant dans l’endo- plasme ainsi que la lame fibrillaire de racines ciliaires. Fig. 36. — Grande forme végétative montrant les premiers signes de la scissiparité : épaississement ectoplasmique dorsal équatorial, contraction du N, gonflement du n. Fig. 37. — Clivage transversal puis longitudinal. Résidu du fuseau micronucléaire entre les deux 7. Fig. 38. — Scission presque achevée. La division du N est en retard sur la scission cytoplasmique. Les x gonflés sont aux pôles du N annonçant probablement la scission suivante très rapprochée. Fig. 39. — Clivage d'une forme moyenne, provenant elle-même d’une précédente scission. Fig. 40. — Clivage d'une petite forme. Remarquer les rapports des n avec le N. Fig. 41. — Trois des plus petites formes. Fig. 42, 43, 44, 45, 46. — Premiers stades de la division du complexe nucléaire aboutissant à ceux que représentent les figures 37, 39, 40. Fig. 47 (et 38). — Micronuclei gonflés aux pôles du N, annonçant proba- blement une scission suivant sans délai celle qui est en cours. Planche IT Bulletin Biologique. T. LV. POLCT nr T DIE Imp. Catala frères. Paris E. Chatton, del. CON l EN AE Bite, CRETE A Dal EXPLICATION DE LA PLANCHE NH Fig. 48-60. — Collinella qundii, Chatt. et Pérard., conjugaison X 250: Fig. 48. — Syzygie au stade A : première mitose de maluration. Fig. 49. — Syzygie à conjoints non assortis, mais évoluant synchroni- quement. Stade GC : le noyau sexuel déjà engagé dans l’ectoplasme de contact et non encore dédoublé, trois x de MERS Fig. 50. — Ex-conjugué au stade E : le synkaryon et trois n de réduction. > Fig. 51. — Ex-conjugué aussitôt après la fin des deux divisions du synkaryon (stade H) : deux x dont un sera résorbé et deux ébauches macronucléaires. Fig. 52. — Ex-conjugué à un stade un peu plus avancé. | Fig. 53. — Ex-conjugué ancien avec un x et deux ébauches macronu- cléaires très accrues et rapprochées. è Fig. 54-59. — Evolution des ébauches macronucléaires jusqu’à la fusion . Fig. 60. — Quatre ébauches macronueléaires et deux n résultant d'une don supplémentaire d’un des noyaux fils du synkaryon. Fig. 61-64. — Pycnothrix monocystoides Schubotz de Procavia Brucei (matériel BrumPT). : Fig. 61. — Vue ventrale, X 70. Fig. 62. — Coupe transversale équatoriale, X 250. Fig. 63.%— Coupe transversale passant par le pore excréteur, X 250. Fig. 64. — Secteur très grossi d'une coupe transversale montrant la structure de l’ectoplasme, X 900. _— » CA nn mn. * û » | - - + LA , î à - “ & . : F Planche III Bulletin Biologique. T. LV. ne ATEN DR mn RES TES L:Chatton del. Imp. Catala frères, Paris P : Ycnothrix monocystoides. a L=1 a S =) La] = = Le] EF = = = | S Ce] se Ex co + Ra | DE A OR ea UN Etienne RABAUD L'ADAPTATION ET L'INSTINCT DES CASSIDES (Avec 5 figures dans le texte) SOMMAIRE 1. LE CYCLE ÉVOLUTIF. — Apparition des adultes au printemps ; ils s’ac- couplent et pondent. Eclosion et vie des larves. Les adultes naissent au début de l'été ; ils ne s’accouplent pas et hivernent. ; II. ACCOUPLEMENT ET PONTE. — Une femelle pond plusieurs oothèques. Aspect de l’oothèque ; existence d’un enduit noirâtre chez certaines espèces ; son absence chez les autres. Constitution de l'oothèque. Situa- tion des œufs à la face inférieure des feuilles ; il ne s’agit pas d’une influence géotropique ; influence du relief des nervures des feuilles ; cas particulier de Cassida viridis. Les œufs ne se développent pas sur les feuilles sèches. III. L'ALIMENTATION. — Régime alimentaire des diverses espèces ; sa spéci- ficité ; rôle des conditions du milieu. Les Cassides mangent sur la face supérieure des feuilles ; déterminisme de cette position ; influence de l’épaisseur de l’épiderme. IV. FORMATION DU PAQUET STERCORAL. — Opinions de RéÉaumuretde divers autres observateurs sur la formation et le rèle du paquet stercoral. A) Constitution du paquet. — Il renferme tous les excréments et toutes les exuvies. B) Déterminisme de la formation du paquet. — Larves portant leurs excréments et larves ne les portant pas. La différence est d'ordre analo- mique. Toutes les larves ont même altitude et même conformation exté- rieure. Constitution de la partie terminale de l'abdomen et fonction- nement du rectum ; le prolapsus rectal. Parallélisme des deux groupes de Cassides; groupe intermédiaire. La dévagination rectale s'effectue nécessairement et mécaniquement. V. CONSÉQUENCES ET CONCLUSIONS. — Disposition anatomique et compor- tement sont-ils un moyen de défense ? L’un et l’autre sont quelconques, à ce point de vue. Nocivité de la sensibilité des œufs à la dessiccation: Inutilité de l’enduit qui revêt certaines pontes:; ce « caractère indif- férent » n’est lié à aucun « caractère utile ». 11 154 E. RABAUD Le paquet stercoral et l'instinct ; il n'y a pas QC instinct» au sens de stimulus interne ; le paquet n'a aucune utilité : linsensibilité relative des larves au contact facilite leur infeslation par les parasites ; la pré- tendue défense contre la sécheresse. L'existence de larves à paquet et de larves sans paquet résoutla question de ladaptalion morphologique. L'une des disposilions est-elle primitive et l’autre secondaire ? La question ne comporte aucune réposse valable. L'adaptation n'existe que du point de vue physiologique. Préambule Si, du point de vue systématique, les Cassides ont fait l'objet d’études approfondies, les conditions diverses de leur compor- tement n'ont guère attiré l'attention. Tous les auteurs, assu- rément, notent les particularités si caractéristiques des larves, qui portent leurs excréments fixés sur un appendice du segment anal ; ils notent également quelques traits de mœurs ; mais ils passent rapidement. Et pourtant, certains faits auraient dû retenir l'attention, car ils soulèvent, dès l’abord, de fort importantes questions d'ordre général touchant à l « adap- tation » et à | «instinct » sous leurs différentes formes. Même, en la circonstance, ces questions se présentent sous un biais spécial qui permet une analyse et une discussion suffisamment poussées. 1. Le cycle évolutif Les auteurs ne fournissent que fort peu d'indications sur le cycle évolutif des Cassides. Ils se bornent à indiquer le moment où ils rencontrent les adultes des diverses espèces. À cet égard, du reste, leurs indications sont notoirement insuf- fisantes. Seul, à ma connaissänce, Kunckez n’Herncuzais () avance que ces adultes hivernent. J'ai pu préciser ce pont pour Cassida stigmatica Suffr., C. rubiginosa Mull. et C. deflo- rala Suffir ; j'ai des raisons de croire tout à fait généraux les résultats de mes investigations. £ Dès le premier printemps, on trouve des adultes sur les (') Kuncxez np'Hercuzais. Les Merveilles de la nature de Breux, t. VIT. Les Insectes, 0 1 + ner DURE EL sécu 2 ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 155 diverses plantes nourricières. À la fin de mars où au début d'avril, dans le Sud-Ouest, j'ai capturé C. rubiginosa et C. deflorata sur des feuilles de Cirse ou de Cynara; au bord de la Seine, à Poissy, C. s/igmatica est assez abondante dans le courant de mai sur 'anacetum vulgare. Tout d'abord, on trouve les adultes seuls ; bientôt après on commence à trouver des pontes. Celles-ci ne tardent pas à devenir très nombreuses, car les femelles pondent sans discontinuer, comme lon s'en rend facilement compte en élevant quelques couples. L'incubation dure environ 3 semaines pour C. s/igmalica. Elle doit durer un temps sensiblement égal pour €. rubiginosa et C. deflorata ; mais je n'ai pu m'en assurer, pour des raisons que j'indiqueràai plus loin. C'est donc au début de juin qu ap- paraissent les larves de €. s/igmatica et je n'en ai point capturé avant cette date. L'apparition des larves des Cassides du Sud-Ouest est, naturellement, plus précoce. Pour toutes, l’évolution dure un mois environ. On rencontre pendant quelque temps des adultes accouplés, mêlés à des larves d’âges divers ; plus tard, à partir de juillet, on rencontre encore des adultes (non accouplés) mêlés aux larves, mais on rencontre également des nymphes et des dépouilles de nymphes. Ce dernier fait indique que les adultes qui vivent à ce moment sont — au moins pour une grande partie — des individus fraichement éclos ; ils descendentdes adultes qui s'accouplaient et pondaient six semaines auparavant. C’est une génération nouvelle qui commence et qui se mêle à la génération précé- dente ; celle-ci, d’ailleurs, ne va pas tarder à disparaitre entièrement. Les adultes de la nouvelle génération ne s’accouplent pas. Tandis que J'ai obtenu en captivité, et sans la moindre diffi- culté, des accouplements, puis des pontes, avec les individus capturés en avril ou mai, je n'ai jamais obtenu ni les uns ni les autres avec les individus qui venaient d'éclore. Ces der- niers vivent tout l'été, mangeant les feuilles de Tanaisie. J'ai également élevé sur Inula dysenterica, Cassida ferru- ginea capturée en août dans l'Orne par M. Benez, sans obtenir ni accouplement ni ponte. D'ailleurs, à partir de juillet, on ne trouve plus aucune ponte sur la plante nourricière des diverses espèces. 156 E. RABAUD A la vérité, J'ai constaté deux fois, un accouplement entre individus venant d'éclore ; dans un cas il s'agissait de C. stig- maltica, dans l’autre de C. ferruyinex ; mais ces deux cas sont demeurés tout à fait isolés et, dans aucun d'eux, l’accouplement n'a été suivi de ponte sous une forme quelconque. On peut donc affirmer que les Cassides qui éclosent à la fin du printemps ou au début de l'été sont sexuellement immatures et persistent en cet état pendant tout l'été. Quand vient l’automne, elles pénètrent sous terre ou dans un trou quel- conque où elles passent l'hiver. Tout au début du printemps, ces individus sortent et, devenus sexuellement mürs, s’ac- couplent. D'une façon générale, l’état immature entraine l'inactivité génitale ; mais des exceptions peuvent se produire à cet égard. Comme ‘elles n'ont aucune suite et que les accouplements prématurés n’entrainent pas une ponte prématurée, il n'y a pas lieu de les. retenir au pont de vue qui nous occupe en ce moment. Dès lors, on doit considérer que le cycle évolutif, des Cassides comprend une longue phase d'état imaginal, trois semaines d'incubation, un mois de vie larvaire. Quant à la période de vie nymphale, mes observations sur C. stigmatica me conduisent à admettre une durée d’une dizaine de jours. Il y a une seule génération par an; mais la génération d'une année n’a pas encore entièrement disparu quand éclosent les adultes de la génération nouvelle ; par suite, on rencontre des adultes pendant toute la belle saison ;°en outre, pendant quel- ques semaines, des individus de tous les âges et de tous les stades vivent mélangés sur les mêmes plantes. Naturellement, l'influence des saisons provoque des varia- tions dans la durée des diverses phases du cycle. C’est ainsi- qu'en 1913, j'ai capturé, et en nombre, sur Cwsium arvense des larves de Cassides à la fin de juillet. Depuis, je n’en ai plus retrouvé à la même époque. Permis, de son côté, a capturé en septembre, sur une Centaurée, des larves de Cassida vibez (1); il se demande s'il s'agit d'une ponte tardive ou d'une deuxième génération ; la première hypothèse me parait être la vraie. | (t)Ëd, Penrnis. Nouvelles promenades entemologiques, Ann. Soc. ent. fr. 1876, p. 235. ANR æ ‘ ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 157 2. Accouplement et ponte L'accouplement commence dès le début du printemps et s'effectue généralement à la face supérieure des feuilles ; il se renouvelle fréquemment. La ponte suit à quelques jours d'intervalle. C'est ainsi qu'une femelle de Cassida rubiginosa accouplée le 7 juin fait une première ponte le 11. Tous les œufs ne sont pas émis en une seule fois, mais successivement, par paquets. Généralement, chaque femelle ne fait qu'une ponte par jour ; la multiplicité des accouplements n'y change rien : les femelles enfermées dans un tube avec un mâle et les femelles isolées après accouplement pondent avec la même fréquence et de la même manière ; une femelle isolée, par exemple, m'a donné 8 pontes en 9 jours, et une femelle accouplée, 7 pontes en 8 Jours. Les œufs, comme on sait, sont généralement englués dans un produit de sécrétion et l’ensemble forme un véritable oothèque en forme de lentille plan-convexe. Je n’ai jamais pu assister à une ponte et ne saurais fournir à ce sujet d'indications spé- ciales. Le nombre des œufs par paquets varie suivant les espèces ; j'en ai compté de 8 à 10 pour Cassida deflorata et le nombre ne m'a pas paru très différent pour Cassida shigmatica. À l'ordinaire, les auteurs insistent sur le fait que la femelle recouvre ses pontes d’excréments: Sans aucun doute, les pontes de C. deflorata et de C. rubiginosa sont enduites d'une substance noirâtre dont l'aspect rappelle celui des excréments ; ne l’ayant point vue au moment de l'émission, Je ne puis me prononcer sur sa nature véritable. Toutefois, J'ai observé diverses pontes toutes fraiches et J'ai constaté que l’enduit noirâtre, extrêmement fluide, n’a nullement la consistance pâteuse des matières fécales. Il ne me paraît donc nullement prouvé que les assertions renouvelées des auteurs à ce sujet soient exactes et reposent sur des constatations positives. Volontiers, j'admettrais que si l'aspect noirâtre de la ponte à suggéré l’idée que la femelle enduit ses œufs d’excréments, cela découle du fait que les larves de Cassides portent un paquet d'excréments fixé sur un appendice du segment anal. Du reste, la coloration noire des pontes n'est pas générale ; 4158 f. RABAUD les pontes de Cassida stigmatica sont brunes et, sûrement, en ce qui les concerne, l’enduit noirâtre fait défaut. Cette consta- tation enlève beaucoup de son importance à Ja coloration noire des pontes d'autres Cassides. D'ailleurs, les détails manquent sur la façon dont est constitué l’oothèque et sur l'origine des substances qui enveloppent les œufs. PEerris (1) à vu pondre Cassida deflorata et a constaté que l’agglutination des œufs en oothèque s'effectue secondairement. Les œufs sont tout d'abord émis un à un, puis la femelle rejette un mucilage incolore semblable à de la gomme dissoute; elle en recouvre le petit tas d'œufs et termine par l'émission d’«excréments noirs ». Le mucilage proviendrait de lanus aussi bien que les excréments. L'étude: mérite d’être reprise, car l’assertion parait erronée et dériver d’une confusion due à la disposition des orifices de l'utérus et de l'anus. L'un et l'autre s'ouvrent dans une sorte de cloaque nettement dessiné par Mu et Saarr (?) et c’est l’orifice de ce cloaque que Perris a probablement pris pour l'anus. De plus, des glandes collé- tériques sont annexées à l'appareil ovarien et, suivant toute vraisemblance, le « mucilage » provient de ces glandes, comme aussi les excréments noirs. Chez d'autres Insectes, la ponte est suivie d’une abondante évacuation de glaires et son origine ne laisse prise à aucune incertitude. C'est le cas de Larinus carlinæ () qui dépose un œuf au fond .d'un trou. pratiqué dans un réceptacle de Chardon et le recouvre d'une abondante secrétion émise par l’oviducte. Remarquons, d’ailleurs, que l’agglutination des œufs ne suit pas nécessairement la ponte. Deux C. rubiginosa de mes élevages ont pondu 15 à 17 œufs isolés, éparpillés un à un ou par deux sur une feuille. Les mêmes femelles avaient fait une ponte normale la veille ou lavant-veille et je n'ai pu me rendre compte de la cause de ce fonctionnement anormal. Qu'il ait pu se produire en dehors de toute disposition anatomique aberrante, c’est un fait à retenir. (!} Ed. Pernis. Promenades enlomologiques. Ann, Soc. ent. fr., 1873, p. 66. Il nomme l’Insecte C. sanguinea, mais 1l rectifie en 1876 (Nouvelles promenades entomologiques, #bid., p. 205). @) F. Mur and D. Suarr. On the egg-cases and early stage of some Cassidæ. Trans. of the entom. soc., 1904. (*) Etienne Rasaun. Accouplement et ponte des Zarinus. Bull. Soc. ent. fr. 1913. Liga ie Es 0 2 À d'agr AÙ tc 08 e ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 159 Une autre particularité fort intéressante de la ponte réside dans la situation que les œufs occupent sur les feuilles. D'une façon très générale pour les Cassides que j'ai observées, la ponte est déposée à la face 2n/érieure des feuilles. Pernis à également constaté le fait pour C. rubiginosa (1). Dans cette situation, les œufs échappent évidemment aux regards et l’on peut se demander si ce mode de ponte, présentant un « avan- tage », ne résulte pas d'une «adaptation » ou d’une « sélec- tion ». Pour qu'il en fut ainsi, il faudrait qu'une influence actuelle, toujours la même, conduisit la femelle à occuper dans l’espace une certaine position. La question se posant de cette manière, il suffisait, pour la résoudre, de disposer des feuilles horizontalement dans des tubes à essais en tournant la face onférieure vers le haut. C'est ce que Jai fait avec une douzaine de C. rubiginosa, et j'ai fait des observations parallèles sur C. sfigmatica. Les résultats ne laissent place à aucune incertitude : quelle que soit la face de la feuille qui regarde en haut, la femelle dépose toujours ses œufs sur la face inférieure, ce terme étant pris dans son sens anatomique. J'ai ainsi obtenu une centaine de pontes situées en dessus, les feuilles étant retournées. Il ne s'agit donc pas, évidemment, d'une position dans l’espace. La femelle de Casside ne subit pas, au moment de pondre, une influence géotropique qui l'amène sous les feuilles. Cependant, la constance du comportement, pour toutes les femelles des espèces étudiées, dépend nécessairement d'une influence actuelle ; et cette influence tient forcément à la feuille elle-même, puisque la position est liée, non pas à l'orientation de la feuille, mais à l’une de ses parties. La seule explication plausible réside, à mon sens, dans le relief des nervures, beaucoup plus marqué à la face inférieure qu'à la face supé- rieure. Le réseau de nervures détermine une série de dépres- sions qui facilitent l’émission de l’œuf, tandis qu'une surface plane offre à cette émission une certaine résistance et inhibe le réflexe de ponte. Divers faits appuient directement ou indirectement cette interprétation. Tout d’abord, il convient de remarquer que les pontes sont le plus fréquemment déposées, à la face mférieure (*) Op. cit., 1873. 160 E. RABAUD des feuilles, le long de la nervure médiane, particulièrement saillante. En second lieu, dans les quelques expériences, très peu nombreuses, où les femelles ont pondu sur la face supérieure des feuilles, les œufs étaient précisément déposés dans un repli accidentel du limbe et non sur une partie plane. Enfin, Cassida viridis pond sur les feuilles de Mentha rotun- difolia indifféremment en dessus et en dessous, et ce comportement coïncide justement avec ce fait que les feuilles de M. rotundifolia sont très accidentées sur les deux faces. D'autre part, l’inhibition exercée sur la ponte par tout obstacle gênant la dévagination de l’oviducte s’observe nettement chez Lari- nus carlinæ et d’autres Charançons. Si l’on écarte l’un d’entre eux du trou qu'il vient de forer dans un réceptacle de Chardon, l'abdomen s'étire néanmoins, mais il se rétracte aussitôt si l'extrémité libre parvient au contact de la surface du capitule avant que l'extension soit complète, et la ponte n’a pas lieu. F. PicarD a également constaté que la Teigne des Pommes de terre pond sur les surfaces rugueuses et non sur les surfaces lisses 1. On n'aperçoit aucune autre explication possible de ce « choix » si particulier que font les femelles de Cassides, puisqu'il est nettement lié à la feuille elle-même et non à la position qu'elle occupe dans l’espace. Du reste, les feuilles d'un très grand nombre de plantes présentent plus de reliefs et de creux à la face inférieure qu’à la face supérieure, et — Mentha rotundifolia mis à part — tel est le cas des plantes sur lesquelles vivent les Cassides que J'ai étudiées, sans en excepter Tanacetum vulgare. Souvent, même, les lobes termi- naux des feuilles de cette dernière plante sont gondolés et retournés en dessous, constituant une sorte de cavité. Notons enfin, touchant les œufs, une dernière particula- rité, et non la moins importante au point de vue général. Tout au début de mes recherches, je recueillais des pontes dans le but de suivre de près l’évolution des larves et je n'obtenais aucune éclosion. Ces échecs tout à fait constants, se renouvelant pour les diverses espèces, me conduisirent à (*) F. Picann La Teigne des Pommes de terre (Phthorimæa operculella Annales des Epiphyties, t. F1, 1913), VER Béédl luus ‘if te. à dé à sn meet été bé à ps ue de na nées éme à tin modfss on ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 161 supposer que le développement s'effectuait seulement quand les œufs demeuraient collés sur une feuille fraiche. Pour apprécier la valeur de cette hypothèse, 1l suffisait de faire pondre des femelles sur des plantes poussant en vase, de laisser une partie des pontes sur la plante et de couper les feuilles portant l’autre partie. J'ai procédé de Ia sorte avec C. stigmatica sur T.vulqare : dans ces conditions, foutes les pontes demeurées sur la plante fraiche ont donné des larves, aucune des autres n’en à donné. Le résultat ne laisse pas prise à la discussion. Il concorde fort bien, du reste, avec l'observation de PErRIS qui n’a obtenu que très difficilement l'éclosion de C. deflorata avec des pontes recueillies sur des feuilles coupées. Du texte, semble ressortir que Perris aurait obtenu une seule éclosion. Il s'agissait vrai- semblablement alors d'œufs déjà avancés dans leur déve- loppement. Le fait est remarquable et nous y reviendrons. Il n'est d’ailleurs pas isolé car, d’après SruLer ("), les œufs d'un Lépidoptère, Macroglossa tityrus, pondus à la faceimférieure des Lonicera, Galium, Scabiosa, n'écloraient que dans la mesure où les feuilles restent vivantes. Si les feuilles tombent et se dessèchent, l'éclosion ne s’effectuerait pas. | 3. L'Alimentation Chaque espèce de Casside à un régime alimentaire assez strict; mes observations confirment, sur ce point, toutes les précédentes. Cassida rubiginosa vit sur diverses Carduacées. CORNÉLIUS (°) et Perris l'ont capturée sur Cirsium arvense. Bevez l'indique comme spécialement attirée par les Cirses (*). Je l'ai, pour ma part, vue sur C. arvense, mais je l'ai vue en outre, et en abon- dance, sur Carduus tenuiflorus. Suivant toutes probabilités, elle doit vivre également sur d’autres plantes de la même famille. (!} Cité d’après Frronner. Les” premiers états des Lépidoptères français, &. IT, 1910. (*) Corxeurus. Zur Entwickelungs- ünd Ernachungsgeschisete einiger Schildkä- ferarten Set. ent. Zeil. 1846. (*) L. Bees. Faune des Coléoptères du bassin de la Seine, t. V, p. 356, 4162 E. RABAUD Cassida deflorata vit aussi sur les Carduacées et semble tout spécialement attirée par Cynara scolymus. Suivant Beper, elle vivrait sur Si/ybum marianum. Pour ma part, je lai capturée sur Carduus tenuiflorus et jamais sur C. arvense. Inver- sement, je nai jamais vu (. rubiginosa sur Cynara scolymus. Cela ne veut pas dire qu'elle ne mangerait pas, à l'occasion, cette dernière plante, mais elle n'est évidemment pas attirée par elle autant que parles autres. Nous voici, dès lors, conduits à une constatation intéressante : C. deflorata et C. rubiginosa, toutes deux attirées par les Carduacées, ne sont pas éga- lement attirées par les mêmes. Tandis que la première subit plus fortement l'influence de Cirsium arvense, la seconde subit plus fortement l'influence de Cynara scolymus. Dans l’un et l’autre cas, la spécificité n’est que relative. La spécificité parait être plus étroite pour C. stigmalica. Cette espèce n'a guère été rencontrée jusqu'ici que sur T'ana- cehum vulgare ; je n'ai pu l’observer moi-même que sur cette dernière plante et dans la station classique des rives de la Seine, à Poissy. Sur d’autres Composées, vivent C. prasina et C. inquinata. Je les ai capturés sur Achillæa millefolium. Broez, qui a éga- lement capturé C. prasina sur la même plante, pense qu’elle vit aussi sur Matricaria et Anthemis. Le même auteur à observé C. inquinata sur les Matricaires, et Révecière l’a vue, en Corse, sur Anthemis ; je l'ai capturée sur Tanacetum vulgare. La spécifité de ces deux espèces parait done étendue dans une certaine mesure. Enfin, C. viridis vit sur diverses Labiées. Je l'ai capturée sur Mentha aquatilis et Lycopus europæus ; elle a été signalée sur Slachys recta et Galeopsis tetrahit. D'une manière générale, du reste, il faut se garder d’attri- buer à la spécificité du régime alimentaire une valeur absolue. Des conditions extrèmement diverses peuvent entrainer un Insecte vers une plante ou vers une autre ; et le fait se produit d'autant plus facilement que les plantes se ressemblent davan- tage par leur constitution. On ne doit pas s'étonner, en consé- quence, qu'une espèce envahisse une plante nouvellement introduite dans une æégion. Larasre soulignait, en 1876, Le fait que Cassida nebulosa L. vivait en abondance, en Lozère, sur CD TNT ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 163 Chenopodium quinoa importée des Andes l'année précédente (?) ; or, cette Casside vit normalement sur les Chénopodiacées et l’on ne saurait être surpris que les propriétés d'un Chenopo- dium exotique soient assez voisines de celles d’un Chenopodium indigène pour que le premier attire, avec une suffisante intensité, les parasites habituels du second. Il n'est même pas néces- saire, pour comprendre le phénomène, de faire appel à la théorie du Peuplement des places vides, soutenue par L. Cuénor. C'est toujours d’un Chenopodium qu'il s’agit : des Betteraves indigènes, plantées dans le même champ, auraient assurément rempli le même rôle, bien que ne pouvant être considérées, suivant la définition, comme une « place vide ». Toutefois, le régime alimentaire ne tient pas seulement à l’attraction de l’Insecte par la plante ; d’autres conditions entrent sûrement en ligne de compte, qui modifient cette attraction ou la neutralisent. Souvent, ces conditions échappent à l'observateur ; parfois, cependant, il en peut reconnaitre quelques-unes. Relativement aux Cassides, nous ne possédons dans cet ordre de faits que des indications peu nombreuses ; il convient de les noter soigneusement, afin qu'elles servent d’amorce à des recherches plus précises. Certaines Cassides sont nettement localisées et leur locali- sation ne dépend pas uniquement de la répartition de la plante nourricière. Deux espèces. en particulier, semblent plus spécia- lement attirées par les plantes qui croissent dans les lieux humides : C. s{igmatica vit sur Tanacetum vulgare et, d'une manière très générale, sur les pieds qui poussent tout au bord de l’eau. C. viridis se rencontre de préférence sur les Labiées qui poussent dans les fossés et les terrains humides. Quant aux autres conditions qui interviennent dans la répar- tition de ces deux espèces et des autres Cassides, nous les ignorons pour le moment. Retenons, dans tous les cas, que la dispersion des Cassides ne se superpose pas nécessairement à celle de leur plante nourricière. Et, de même, leur répartition sur la plante n'est pas abso- (1) F. Larasre. Ann. Soc. entom. fr. 1876, p. CCXX. 164 “A E. RABAUD lument quelconque. Lorsque C. rubiginosa envahit un pied de Cirse ou de Chardon, non seulement elle se localise sur les feuilles, mais encore sur la face supérieure des feuilles. C. deflorata, C. viridis, C. stigmatica, C. inquinata se loca- lisent de la même manière, elles se montrent exclusivement, ou presque, sur cette face supérieure, pratiquant des man- geures assez régulièrement arrondies et qui ne traversent pas les feuilles. Le fait est vrai, aussi bien pour les adultes que pour les larves. Dans le cas particulier de C. stigmatica, les larves âgées et les adultes dévorent largement la feuille sans res- pecter aucune de ses parties, mais cela tient à la forme découpée des feuilles de Tanacetum. Ce cas mis à part, la localisation est très frappante. Je me suis demandé quel pouvait en être le déterminisme. Pour ce qui est de la larve, l’idée que la localisation était liée à la présence d’un paquet stercoral sur la fourche anale venait aussitôt à l'esprit, et bien que cette hypothèse ne parût guère probable, il fallait néanmoins l'envisager. Elle tombe d’elle- même, d'ailleurs, car elle ne correspond pas à un fait général et ne saurait expliquer que les adultes de toutes les espèces et les larves des espèces sans paquet stercoral se comportent de la même manière. Quelques essais expérimentaux corroborent ces raison- nements & priori. Dans plusieurs tubes à essai, je dispose des feuilles d'Artichaut, soit horizontalement de façon à ce que la face supérieure de la feuille regarde en dessous, soit verticalement de façon à ce que les deux faces se trouvent dans la même position et reçoivent un éclairement de même intensité. Des adultes ou des larves sont introduits dans les tubes ainsi disposés, en’ayant soin d'éviter toute influence capable d'entrainer les individus d’un côté ou de l’autre. Une : partie des individus est. déposée sur la paroi du tube, l'autre sur la face de la feuille regardant en haut (face inférieure). Dans le plus grand nombre des cas, les Insectes viennent se placer sur Ja face supérieure regardant en dessous et entament les feuilles par cette face; de même, les individus placés dans Le tube à feuilles verticales entament le plus sou- vent la feuille par la face supérieure. Le résultat ne laisse aucun doute ; ce n’est pas une question de chance qui envoie 1 ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 169 l’Insecte sur une face plutôt que sur une autre, car les excep- tions sont peu nombreuses et résultent d'interférences diverses ; ce n’est pas non plus une position déterminée dans l’espace qui attire, et l'on ne peut s'arrêter à l'idée d'un géotro- pisme négatif orientant l'Insecte d'une certaine manière. Après divers essais, et en suivant attentivement les indi- vidus mis en expériences, je suis arrivé à conclure que la face supérieure n’exerce aucune attraction spéciale, tandis que la face inférieure exerce une sorte de répulsion. L'action est, d'ailleurs, d'ordre purement mécanique et tient à lPépaisseur de l’épiderme inférieur. Cet épiderme, notamment sur les feuilles de Carduacées, est nettement plus épais que l’épiderme supérieur ; il offre aux mandibules une résistance que n'offre pas l’épiderme supérieur. Le déterminisme serait alors le suivant : l’Insecte est attiré par les feuilles d'une plante déterminée ; s'il aborde ces feuilles par la face inférieure et s’il mord, ses mandibules ne parviennent pas à entamer ou entament mal ; dès lors, il n'est plus spécialement retenu par un point de la feuille plutôt que par un autre et subit plus aisément les diverses excitations motrices qui s'exercent sur lui et le mettent en mouvement. Néanmoins, retenu par la feuille, il ne l’abandonne pas et se déplace simplement sur elle ; il parvient ainsi à la face supérieure, mord de nouveau et, rencontrant alors des parties plus molles, il est définiti- vement retenu. | Au surplus, il convient de remarquer que les individus placés sur la face inférieure, ou qui y viennent sous une influ- ence quelconque, y stationnent sans aucune difficulté, et même l’attaquent avec leurs mandibules ; mais ils l’abandonnent assez rapidement et gagnent la face supérieure. Remarquons, en outre, que la mangeure ne traverse géné- ralement pas la feuille et s'arrête nettement au contact de l’épiderme inférieur. Au contraire, quand la mangeure débute par la face inférieure, elle ne s'arrête pas toujours à l’épiderme supérieur et l’Insecte troue la feuille de part en part. La perfo- ration à également lieu quand la feuille est particulièrement mince, comme il arrive pour les feuilles jeunes de Cirses, les feuilles de Lycopus et d’autres plantes. Tous ces faits donnent bien le déterminisme d'un compor- 166 E. RABAUD tement qui parait assez singulier au premier abord. La position de l'Insecte, larve ou adulte, sur la plante ne répond à aucune nécessité spéciale ; elle est simplement fonction de la structure des feuilles et de lépaisseur de l’épiderme. Supérieur ou inférieur, celui-ci offre’ toujours une certaine résistance ; quand la résistance est brisée, l'Insecte se trouvant au contact d'un parenchyme relativement tendre ronge sans difficulté ; en parvenant au contact de l’autre épiderme, 1l trouve une différence de consistance qui l'arrête généralement. De là l'aspect habituel des mangeures. 4. Formation du paquet stercoral Abstraction faite de la manière dont elles mangent et se tiennent sur la face supérieure des feuilles, les larves de Cassides méritent un examen spécial, en raison du paquet stercoral qu'un certain nombre d'entre elles portent constam- ment accroché à leur segment anal. Ce paquet stercoral n'a pas été examiné jusqu'ici avec un som suffisant, quant à son mode de formation et quant à ses consé- quences sur la vie de l'animal. Sur le premier point, Réaumur (‘) émet l'avis que l'Insecte élève plus ou moins son anus quand il veut, laisse tomber les excréments sur la fourche, les arrange et les pousse en avant au fur et à mesure de leur production. Cnapuis et CANDÈZE adoptent cette explication et la précisent : « la fourche que porte le segment anal se replie vers la partie antérieure de l’Insecte de manière à former avec le corps un angle ouvert en avant ; l’anus s'ouvre près de cet appendice et lorsque la larve rejette ses excréments, ils sont retenus sur la fourche. Par suite de leur accumulation, ils sont poussés en avant, 8e. ) collent les uns aux autres... ». Cornétius (?) n'a pas examimé la question de plus près et lui accorde une mention som- maire à propos de €. sanguinosa Crtz (*). Plus récemment, Muir et Suare {*), poussant l'analyse du mécanisme un peu plus (t) Réaumur. Mémoires pour servir à l'histoire des Insectes, 1737, t. I, p. 235 et sq. . ; () F. Cuapuis et J. Canpëze. Catalogue des larves de Coléoptères. Mém. Soc. sci. de Liëge, t. NII, 1853. (2) CornéLius. Op. cit. (*) Mur et Sxarr. Op. cit. nr] jo MS etat FA ta onu dé D DS + ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 167 loin, ont vu quil était lié aux mues ; nous allons y revenir. Sur le second point, deux opinions ont été émises, l'une par CaNpèze qui voit dans le paquet stercoral un moyen de défense contre les ennemis, l’autre par Weie qui le considère comme une protection contre la sécheresse. Mur et Suarp paraissent accepter l'une et l'autre manière de voir. a) Constitution du paquet stercoral. — Ce qui caractérise le paquet stercoral, c'est qu'il commence à se former dès que la larve rejette ses premiers excréments et renferme tous les éxcré- ments que la larve rejette de sa naissance à la nymphose. Le paquet s'accroit donc graduellement au cours de la vie larvaire. Naturellement, le dépôt de matières se fait par Parrière. Néanmoins, le paquet ne déborde pas l'extrémité postérieure de la larve ; tout se passe comme s'il progressait d'arrière en avant, comme sil était refoulé ; et l'on s'explique très bien l'erreur commise par Résumur. Toutefois, si l'on examine avec soin la constitution de ce paquet, comme l'ont fait Mur et SaarP et comme je l'ai fait après eux (), on découvre un méca- nisme tout autre. Ce paquet ne renferme pas seulement les excréments de la larve, mais aussi les dépouilles des mues successives. Réavmur à bien aperçu une exuvie en dessous du paquet, mais il n'en a vu qu'une ; Cnapuis et CANDèZE ont fait une constatation analogue, mais ils n’en ont pas compris l'intérêt : « cette espèce d’'opercule formé des excréments de la larve, quelquefois aussi des dépouilles de ses mues...», écrivent-ils. Et CorNéLius, avant eux, s’exprimait d’une manière analogue : « Auf diesen Dornen trägt die Larve ihren Unrath, der meistens mit Hautüberresten von der Hæutung vermengt ist ». PErnis parle de la « fourche caudale chargée de la peau chiffonnée de la dernière mue et de très peu d'excréments » à propos du C. margaritacea (?). Léon Durour (*), au contraire, estime que la première mue seule tient à la fourche et sert de base aux premières masses stercorales. (:) Et. Ragaup Notes sommaires sur la biologie des Cassides. II. Le cycle évo- lutif, les mues et le paquet d’excrément. Bul. Soc. ent. fr. 1915. Au moment où J'ai publié cette note, le travail de Mur et Suarp avait encore échappé à mes recherches bibliographiques. (2; Op. cit., 1876. (5) Léon Durour. Histoire des métamorphoses de C. maculata. Ann. Soc. nat., 1847. Î68 £. RABAUD Ces divergences entre les auteurs ne proviennent pas des différences entre les espèces, mais d'observations insuffisantes. Au point de vue des mues, toutes les Cassides se comportent de la même manière et més observations, complètant celles de Muir et Suarp, autorisent une généralisation sans réserves. En fait, la larve n’abandonne complètement aucune de ses mues ; toutes demeurent successivement accrochées à l'extrémité de la fourche, la plus antérieure étant naturellement la plus ancienne. On le voit nettement sur les larves qui n'ont pas de paquet stercoral (fig. 3) ; mais on le voit aussi sur les autres. En examinant par-dessous Le paquet stercoral d'une larve âgée, Fig. 4. — Paquet exuvio-stercoral de Cassida rubiginosa, vu en dessous. Les 4 exuvies successives sont nettement distinctes. on aperçoit nettement les 4 exuvies disposées en file et collées aux excréments (fig. 1). Dès lors, on comprend, sans aucune difficulté, d’où provient l'illusion d’une progression du paquet d’arrière en avant : chaque exuvie se trouvant en arrière de la précédente, le paquet stercoral formé pendant le premier âge sera nécessairement situé en avant du paquet stercoral formé pendant le second âge, et ainsi de suite, car les nouvelles masses d’excréments s'accumulent- sur l’exuvie la plus rap- prochée de l’anus, c'est-à-dire sur la plus récente. Entre deux mues, le paquet stercoral n’est nullement refoulé en avant, il s'accroit en arrière, s’élargit à gauche et à droite à mesure lits. dé est ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 169 que la larve grandit; lextrême-avant, fait des premières déjections, est très étroit, tandis que le bord postérieur est, au contraire, large et épais ; l’ensemble affecte la forme d’un triangle. Le processus se trouve ainsi complètement élucidé. b) Déterminisme de la formation du paquet stercoral. — Reste alors à savoir comment les exeréments sont rejetés sur la fourche qui prolonge le 8° segment. La question ne manque pas d'importance ; elle touche directement à la question de l'instinct, et d'autant plus que toutes les Cassides ne rejettent pas leurs excréments sur la fourche. À quoi tient donc cette différence de comportement et que signifie-elle ? Sur cette question, tous les auteurs sont muets. Tous ont constaté la différence, mais aucun d'eux ne semble y avoir prêté une attention suffisante. Naturellement, certains d’entre eux, à la suite de Réaumur, invoquent la « volonté » de l’ani- mal qui fixerait les excréments aux points convenables (!) ; Em. BLancaarb affirme, même, que la larve pourrait se débar- rasser de son paquet par un mouvement brusque (?). J. Wriss, constatant l'absence de paquet chez C. sfigmatica, explique que «der After offnet sich nich also nacht oben und vorn, sondern nach hinten » (5); mais il ne dit pas si cette direction différente de l'anus tient à l’activité propre de l’animal ou à une disposition anatomique. L'indication reste donc vague ; elle est d’ailleurs très incomplète. IL s’agit, en réalité, d'une différence anatomique extrè- mement nette, et que nul auteur, à ma connaissance, ne parait avoir entrevue. Ce qui frappe, au premier abord, quand on compare une larve portant un paquet avec une autre qui n'en porte pas, c’est la similitude complète de conformation exté- rieure et d'attitude. Les unes comme les autres ont une fourche fixée sur Le 8 segment abdominal et cette fourche retient les exuvies toutes, tiennent l'abdomen relevé de telle manière que l'anus regarde en haut et que la fourche soit horizontale. Cette attitude dépend d’une contraction tonique qui cesse rare- tt) L. Durour. Op. cit. (2?) En. BLancuarn. Mélamorphoses, mœurs el instincts des Insectes, Paris, 1877. () J. Weiss. Bemerkung über die ersten Stande von Cassida stigmalica. Stelt- ent Zeit, 1908. 42 470 Ë. RABAUD ment. Parfois, cependant, le corps entiér s'allonge horizonta- lement et la fourche devient alors verticale. J'ai longuement observé C. sligmatica et C. prasina, larves dépourvues de paquet, et me suis assuré que cette attitude persiste pendant qu'elles marchent ou qu'elles mangent, tout comme chez C. deflo- rala, C. rubiginosa, C. viridis, C. pusilla, qui portent un paquet. Chez les unes et les autres, l'attitude est liée à un réflexe ; on peut l’exagérer en touchant légèrement un point du tégument dorsal, ou le supprimer en touchant un point du tégument abdomino-ventral: c’est une attitude entièrement indépendante de la formation ou de l'existence d'un paquet stercoral. Quant au mécanisme même de la formation, il dépend du mode de constitution de la partie terminale de l'abdomen et du mode de fonctionnement du rectuin. Pour saisir clairement ce Fig. 2. — Orifice anal de Casside, vu en dessus. mécanisme, 1l faut comparer avec soin la larve au repos avec la larve au moment de la défécation. Chez la larve au repos, l'anus s'ouvre, ou parait s'ouvrir, à l'extrémité du 8° segment (fig. 2). Dès que la défécation va s'effectuer, il se produit un mouvement de dévagination de l'extrémité postérieure de l'abdomen, et deux nouveaux segments apparaissent à la suite l’un de l’autre, tous deux étroits, le second presque cylindrique, d'aspect chiti- neux et mat (fig. 3 et 5). À n'en pas douter, ce sont Les 9° 6t 10° segments abdominaux s’emboîtant l'un dans l’autre ; une fois dévaginés, ils sont rigides et peu mobiles. Tous deux existent chez les diverses larves de Cassides, qu’elles aient ou non un paquet stercoral ; ils sont très visibles et le mouvement de dévagination les met en particulier relief. Il semble, cepen- dant, qu'ils ont été pris par les divers observateurs pour le: \ . « 4 ‘ : + . PFÈ FA Ne we x À: \ v LS En D ge Ve À ur A LL FPUST: : ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 171 rectum lui-même. L. Durour, notamment, signale un prolap- sus rectal, sans faire aucune allusion à l'existence de segments abdominaux invaginés à l’état de repos. Or, c'est là, préci- sément, que git la différence entre les deux groupes de larves de Cassides. Chez celles qui n'ont pas de paquet stercoral, telle que €. stigmatica, une fois dévaginés les deux derniers segments abdominaux, la défécation n'est accompagnée que d'une très légère dévagination du rectum, formant bourrelet à lextré- Fig. 3. — Cassida stigmatica. Dévaginalion des deux segments terminaux de l'abdomen. nuité du 10° segment (fig. 3 et 4). Dans ces conditions, l'anus regarde directement en haut, les excréments sont projetés dans la même direction et retombent généralement en arrière. Chez les larves qui ont un paquet stercoral fixé sur la fourche, à la dévagination des deux derniers segments abdominaux fait suite un prolapsus rectal considérable (fig. 5). Le segment de rectum, qui sort ainsi à l'extérieur, se différencie nettement des segments abdominaux auxquels il fait suite. Sa surface est luisante, sa paroi transparente, sa consistance molle ; il est souple et mobile. De plus, la dévagination de ce «€ segment » 172 E. RABAUD s'effectue au moment même de la défécation, tandis que la dévagination des deux autres constitue un premier temps, qui Fig. 4, — Cassia stigmatica. Exlrémité terminale de l'abdomen très grossie, pour montrer le bourrelet rectal. précède parfois d'assez Join le second. Enfin, on n’aperçoit, à l'extrémité de ce « segment », rien de semblable au bourrelet Fig. 5. — Cassida rubiginosa. Dévaginalion des deux segments terminaux - el prolapsus reetal. pe c qui apparait aù moment de la défécation chez C. s'igmatica ou prasina: ce « segment » représente précisément le bour- relet. Il faut noter, en outre, que le mouvement de dévagi- 1 ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 173 nation rectale diffère de celui des segments abdominaux celui-ci est un mouvement de projection direct, rectiligne ; celui-là est nettement hélicoïdal. Une fois complètement dévaginé, Le rectum décrit une courbe à concavité antérieure, de sorte que l'anus regarde obliquement en haut et en avant. En conséquence, les excréments sont rejetés dans la même direction et tombent sur les exuvies. Le rectum se déplaçant légèrement dans le sens latéral sous des influences diverses, les excréments tombent tantôt d’un côté, tantôt de l'autre, rarement au milieu. Quand la matière est de consistance molle (C. rubiginosa, C. deflorata, C. inqui- nata), elle forme une masse compacte ; quand elle est de consistance plus ferme (C. viridis) la masse exerémentitielle conserve la forme cylindrique qu’elle possède au sortir du rectum, et les apports successifs constituent une sorte de buis- son, nettement séparé en deux parties symétriques. Le prolapsus, en tout cas, persiste tant que le paquet demeure attaché à l'orifice rectal ; je l'ai vu persister chez C. viridis, durant 5 heures consécutives. De même, le bourrelet persiste, chez C. stigmatica, jusqu’à la chute de l’excrément. Il existe donc un parallélisme très remarquable entre les deux groupes de Cassides. Leur attitude normale, leur consti- tution morphologique est la même ; la différence réside essen- tiellement dans l'étendue du prolapsus rectal (!), considérable dans un cas, très limité dans l’autre. L'opposition paraît extrè- mement nette. Pourtant, il n’y a peut-être pas, entre les deux groupes, une séparation absolument tranchée. Muir et Suarr, en effet, décrivent une Casside, Aspidiomorpha tecta, dont le paquet stercoral, en buisson, est exclusivement en rapport avec la première exuvie et ne se forme, par conséquent, que pendant une courte période, dans les premiers temps de la vie. Il en résulte, nécessairement, que le prolapsus rectal, considérable au début, après l’éclosion, diminue après la (!} IL existe aussi des différences entre les segments dévaginés, que l'on aper- coit en comparant les figures 3 et 5 Chez C. stigmatica. notamment, l’axe de ces deux segments est légèrement oblique sur l'axe du 8° segment, tandis que ces deux axes se confondent chez C. rubiginosa, Mais ce léger changement de direc- tion ne suffirait pas à supprimer ou à déterminer la formation du paquet NE coral ; le prolapsus rectal joue inconlestablement le rôle essentiel. 174 E. RABAUD première mue, à tel point que les excréments ne tombent plus sur Ja fourche. Le fait témoigne d'un changement important dans l'état du tube digestif, changement qui survient entre le moment de lPéclosion et celui de la deuxième mue. Aucune autre explication n'est possible en l'état actuel dé nos connais- sances. On pourrait supposer, évidemment, que la larve cesse de rejeter ses excréments sur la fourche, parce qu'elle n’en éprouve plus le besoin, Mais ce mode d'interprétation impli- querait que la formation du paquet stercoral tient à un effort spécial et volontaire de la larve, Or, chez les Cassides que j'ai observées, la dévagination entraine mécaniquement le rectum dans la direction postéro-antérieure, en raison même de sa forme anatomique. On en peut fournir la preuve expérimentale par le procédé suivant : lorsque Le prolapsus est complet chez C..deflorata, l'excitation du rectum au moyen d’une aiguille fine détermine une contraction localisée; en excitant un point de la paroi postérieure, la contraction se localise en arrière en même temps que le prolapsus se réduit légèrement; le rectum subit alors une flexion en angle droit, telle que sa moitié terminale ,demeure seule évaginée et que l'anus regarde en arrièré. Au moment de la défécation, le coude ainsi produit arrête le paquet stercoral, jusqu’à ce qu'une forte poussée entraine la dévagination complète et le redressement du rectum. Le redressement est brusque, le rectum prend aussitôt la direction postéro-antérieure, et l'on voit bien alors qu'il n'en peut pas prendre une autre. Force nous est donc d'admettre que le changemént constaté chez Aspidiomorpha lecta provient d'un changement anato- mique, d'une véritable métamorphose survenue au cours même de la vie Jarvaire. 5. Conséquences et conclusions L'ensemble de ces faits demande à être envisagé d'un point de vue général. En toute occasion, lorsque les naturalistes constatent une disposition anatomique où un comportement, ils en recherchent aussitôt l'utilité, mettent la première sur le compte de l'adaptation et le second sur le compte de l'instinct. A priori, 1s considèrent que ces deux mots fournissent une ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 475 explication suffisante et définitive ; ils prouvent l'utilité par l'adaptation ou l'instinct, démontrant ensuite l'adaptation et l'instinct par l'utilité. Mais, constamment, ils négligent de faire une démonstration véritable, fondéé sur une analyse étroite du processus. Procédé facile, reposant pour l'esprit, car 1l aboutit toujours à montrer que tout se passe toujours de la meilleure façon etne peut se passer d'autre sorte. En prenant, toutefois, les faits sous un autre biais, en essayant d'éviter de s'’enfermer dans un cercle, en s’efforçant d'obser- ver sans idée préconçue, en comparant les organismes sem- blables vivant dans des conditions analogues, on parvient à une conception certainement plus exacte des phénomènes. Le com- portement des Cassides nous en fournit un très remarquable exemple. ? Nous constatons que nombre de ces Insectes mangent sw» les feuilles et pondent en dessous. On peut imaginer, à coup sûr et sans peine, que chacun de ces procédés procure un avantage spécial. En se tenant sur les feuilles, la larve n'assu- rerait-elle pas au paquet stercoral une position telle que le corps serait presque entièrement dissimulé ? En pondant sous les feuilles, la femelle ne dissimulerait-elle pas les œufs aux regards ennemis ? Quelques secondes suffisent pour imaginer des explications de ce genre qui trouvent un crédit immédiat auprès de la plupart des lecteurs. Acceptées sans discussion, elles deviennent l'expression stricte de la Vérité pure et acquiè- rent la valeur d'un argument d'autorité Et cependant-elles partent d'une hypothèse sans fondement, l'hypothèse que tout comportement dérive de la nécessité de se défendre con- tre des ennemis nombreux et variés. L'explication une fois admise, la question se trouve aussitôt résolue et la recherche arrêtée. Mais il faudrait, au préalable, démontrer l'hypothèse initiale. Dans le cas particulier des Cassides, quelques essais la réduisent vite à sa juste valeur. Que l’on retourne Les feuilles dans un sens ou dans un autre, les larves Les abordent toujours par la même face et les femelles pondent toujours sur la même face ; les observations dans ia nature donnent des indications analogues. D'ailleurs, les adultes, qui n'ont pas de paquet stercoral, mangent en dessus, aussi bien que les ’ 176 E. RABAUD larves, et l’on constate une correspondance nette entre cette facon de manger et la constitution anatomique des feuilles. De même, les femelles pondent sur le côté où la feuille présente le plus de creux ou de reliefs ; elles pondent indis- tinctement en dessus ou en dessous si les accidents de surface s'équivalent des deux côtés. La liaison étroite de l’Insecte avec les conditions extérieures, en fonction de sa constitution, apparaît alors avec la plus grande netteté ; Ja force muscu- laire de ses pièces buccales lui font éprouver plus de résis- tance d’un côté que de l’autre, et l’élongation de l'abdomen se fait mal sur une surface régulièrement plane. Quant à l’importance que peuvent avoir ces divers effets sur la vie de l'individu, sur la façon dont il échappe aux diverses causes de destruction, cette importance est, tout à fait nulle. Où qu'il mange et où qu'il ponde, l’Insecte aura les mêmes chances de survivre ; cette partie de son comportement ne lui procure ni avantage ni désavantage : elle est tout à fait quel- conque. Par contre, le fait que les œufs n’éclosent pas si la feuille qui les porte ne demeure pas fraiche constitue un véritable danger, dont on n'aperçoit vraiment pas la contre-partie. Cette sensibilité à la dessiccation est un désavantage évident, et si toutes les espèces de Cassides n'ont pas depuis longtemps disparu, c’est, assurément, une pure chance. On cherche en vain par quelle subtilité scholastique on transformerait cette propriété nuisible des œufs de Cassides en un avantage, même léger. Il est bien clair que la persistance de ces œufs ne saurait être attribuée à un processus de sélection ; le fait, pour une ponte, de se développer ou de disparaître tient uniquement aux circonstances diverses qui laissent ou non vivantes les feuilles portant des pontes, et ces circonstances ne dépendent en aucune manière des propriétés spéciales des œufs. L’avan- tage appartient certainement aux œufs qui se développent indépendamment de l’état du support ; or les Cassides persis- tent etles œufs d'aucune d'elles ne possèdent pareil avantage : on ne saurait souhaiter plus évidente preuve de l'inefficacité de la sélection darwinienne. Les pontes de Cassides donnent encore une autre indication de même sens. L'enduit noirâtre qui revêt un certain nombre At rh iask:s + ji a Vo Cd am Elite EE ON É de dé à tr béta ÉCRIS " d'5 ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 177 d'entre elles a-t-il pour effet, comme la plupart des auteurs le pensent, de dissimuler les œufs en leur donnant l'apparence d’exeréments ? Nous avons vu que cette interprétation ne tenait pas compte de tous les faits. Les pontes de certaines espèces, C. stigmatica en particulier, ne sont point recouvertes d’un pareil enduit. Or, ces Cassides persistent : dans les stations où elles vivent, elles se multiplient en grand nombre : l'absence de « protection » fournie par l'apparence des. pontes ne se fait donc point sentir. Sürement, les auteurs ont mis trop de hâte à déclarer utile une disposition probablement quel- conque, dont on peut dire. simplement qu'elle n'empêche pas les œufs de se développer, qu'elle n’est pas nuisible. Elle fait partie de cette catégorie de « caractères indifférents », au sujet desquels les naturalistes se demandent s'ils donnent ou non prise à la sélection. Mais l” « indifférence » n'existe que par rapport à des « avantages » hypothétiques et, & proprement parler, la question n'a pas de sens. Ici, tout spécialement, elle n’a de sens en aucune manière. Divers auteurs pensent, en effet, que ces « caractères indifférents » sont liés à un « Carac- tère utile ».0r, sinous envisageons les pontes,nous apercevons un «caractère nuisible », la sensibilité des œufs à la dessiccation, commune à toutes les espèces ; nous n'apercevons rien qui soit particulier aux pontes revêtues d’un enduit noirâtre et les distingue des autres. Par quelque bout qu'on la prenne, la sélection n'intervient done iei à aucun titre. * * # L'existence ou l'absence de paquet stercoral soulève aussi des questions de même ordre, sous une forme plus précise peut-être. Tout d’abord la question de l'instinct. L'existence du paquet, sa fabrication, passent pour être le produit d’un «instinct » qui pousserait la larve à construire un parasol ou un bouclier. L'instinet résiderait, évidemment, dans ce fait que la larve dévagine son rectum et le tourne de telle manière que les excréments tombent sur une fourche, précisément disposée pour les recevoir. Et, naturellement cet instinct aurait un résultat — ou un but — utile. * [ci encore, l'analyse précise des faits, la comparaison d'orga- nismes se ressemblant de très près, conduisent à une interpré- 178 E. RABAUD tation rationnelle. D'instinct, au sens de stimulus interne, d'inmpulsion que subirait l'animal en dehors des influences externes et des:° dispositions anatomiques, 11 n'y en a pas. Rien ne permet de concevoir une propriété mystérieuse qui pousserait l'animal à se comporter d'une certaine manière spécialement avantageuse : tout réside dans une disposition anatomique et dans un mode de fonctionnement du tube digestif, plus spécialement du rectum, fonctionnement pure- ment mécanique et non pas manœuvre soumise à l’interven- tion active de l'animal. Qu'il le « veuille » ou non, le prolapsus rectal se produit au moment de la défécation, et de telle manière que les excréments tombent sur la fourche chargée des exuvies. Ce fonctionnement se réduit à lui-même ; l'attitude spéciale de la larve n'en dépend nullement par voie de cause à effet : cette attitude existe aussi bien en l'absence du prolapsus rectal. Tout se ramène donc, en dernière analyse, à un réflexe fixe, nettement déterminé par le passage de la masse fécale. Il ne diffère pas essentiellement du réflexe qui se produit cons- tamment en pareille ocurrence; il n’y a qu'une disposition anatomique en plus, qui donne au réflexe un résultat partieu- lièrement visible. Ce résultat attire l'attention, 1l excite l’ima- gination et entraine à des interprétations erronées. L'erreur apparait dès que l'on examine la question de savoir si l'existence du paquet stercoral joue un rôle utile dans la vie des larves. Moyen de défense, a-t-on dit ; et cette fin utile une fois admise, justifiait l'interprétation. Examinons-la done. Le paquet stercoral dissimulerait les larves à leurs ennemis, en même temps quil permettrait de chasser ceux qui appro- cheraient à trop courte distance. Les faits connus vont exac- tement à l'encontre de cette manière de voir, Au point de vue du mimétisme et de l’homochromie, il est bien prouvé, je pense, que nous attribuons aux animaux notre propre appréciation des formes et des couleurs, commettant ainsi une grave erreur. J'ai trop longuement insisté ailleurs sur ce point pour y revenir ici (*): {!) Etienne Ragau» : a) Qu'est-ce que le Mimétisme, Revue du Mois, 1912; b) Les défenses de l'organisme et la persistance des espèces, Revue philoso- phique, 1917. e) Essai sur la vie et la mort des espèces, Bul. Sci. Fr.-Bel., 1917. tés. À. : 14 bénat de suomi à 6 mi à. nue à 2e Ë F 1 ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 179 Ce point de vue, du reste, se relie étroitement au suivant. Car si nous constatons que les larves de Cassides sont soumises à l'attaque effective et efficace de parasites ou de prédateurs, la valeur d'un moyen de défense, quel qu'il soit, diminue singulièrement. Muir et Suarp () ne paraissent pas avoir observé de parasites pour les larves munies de paquet ster- coral. Cela prouve, probablement, que leurs observations sont incomplètes. Pour ma part, j'ai obtenu d’une larve de C. rubi- ginosa un essaim de # ou 5 Chalcidiens non déterminés, et j'ai trouvé un assez grand nombre d'individus infestés par des parasites divers. Avec W.-R. Taompson, notamment, j'ai obtenu une Tachimaire, Winella chalybeata, qui évolue chez l'imago, mais s'installe, suivant toute vraisemblance, au cours de la période larvaire (?). De plus, j'ai rencontré des larves de Chrysope dévorant des larves de Cassida inquinata. L'agres- seur tenait sa victime par le milieu de la région dorsale, c’est- à-dire par la région que « protège » le mieux l'amas stercoral. La présence de cet amas ne trompe donc ni prédateur ni parasite. Bien mieux, les larves de Cassides facilitent, en quelque sorte, les agressions, grâce à leur faible sensibilité au contact. De petits Insectes ou des Acariens, d'ailleurs inof- fensifs, peuvent courir sur le dos de Cassida deflorata ou de C. rubiginosa sans provoquer aucune exagération de la flexion tonique qui maintient l'anus relevé et la fourche horizontale. Au bout d'une demi-minute, environ, les marches et contre- marches provoquent un très léger mouvement de flexion, mais beaucoup trop faible pour chasser l’Insecte ou l'Acarien. Dans les mêmes conditions, une Tachinaire aurait eu le temps de déposer un ou plusieurs œufs, un Chaleidien aurait pu piquer et pondre. Les réactions de la larve sont telles, en effet, qu'une piqûre ainsi faite doit déterminer un mouvement insi- gnifiant. Il faut appuyer assez fort avec une pointe très fine, (une épine de Cirse), sur le tégumentdes larves de C. rubiginosa - pour obtenir un mouvement, et encore ce mouvement ne suf- firait-1l pas à produire un effet utile. Le mouvement a lieu d'arrière en avant si la piqüre porte sur la face dorsale, d'avant () Mur et Suarp. Op. cit. (2) Ramauo et W.-R. Tuowpsox. Note biologique sur Minella chalybeata, parasite de Cassida deflorata. Bull, Soc. ent. fr., 191%. 48Ù E. RABAUD en arrière si elle porte sur la face ventrale relevée, il a lieu dans le plan antéro-postérieur, et non dans le plan trans- versal. Par suite, le paquet stercoral n'est incliné ni à droite, ni à gauche, mais toujours en avant ou en arrière. Dans ces conditions, si un parasite se pose sur une larve de Casside, cette larve bougera peut-être au moment de la piqüre, mais Al sera souvent trop tard à ce moment; et d'ailleurs, l'ampli- tude du mouvement sera insuffisante ou sa direction le rendra inopérant. I faut, enfin, spécifier que si le mouvement se produit, cest toujours à la suite d'un contact immédiat. Certains auteurs pensent que les Cassides agitent et redressent leur paquet stercoral à l’approche d'un danger. Mais le discer- nement de ces larves ne va pas jusque-là ; elles s’agitent sous l’action d’une excitation effective ; les bruits extérieurs, même les secousses légères qui se produisent dans leur voisinage, ne provoquent guère de réaction : tout semble conduire done à conclure que le paquet stercoral ne joue pas de rôle dans la. « défense ». Et cette conclusion s'impose de façon péremptoire si nous nous souvenons qu'outre les Cassides qui rejettent leurs excré- meuts sur la fourche, d’autres existent qui les rejettent en arrière et en dehors d'elles. Or, ces deux groupes de larves, on ne l'a pas assez remarqué, mènent exactement le même genre de vie, et cette similitude va, parfois, Jusqu'au régime alimentaire. Elles courent donc les mêmes dangers, elles sont soumises à un ensemble de conditions communes, et les unes persistent comme les autres, sans qu’un agresseur quetcpre décime les unes plus que je autres. Le paquet stercoral protégerait-il les larves contre la séche- resse ? l'hypothèse mérite à peine de nous arrêter. Pour en mesurer la valeur, il suffit de constater que toutes les Cassides vivent en plein soleil, à la face supérieure des feuilles, aussi bien celles dont la fourche porte seulement les exuvies, que celles dont la fourche porte, en outre, les excréments. De plus, au moment de la nymphose, le paquet stercoral tombe très souvent. -Tournant toujours dans le même cercle vicieux. les auteurs pensent qu'à ce moment le paquet devient inutile : L ÿ à he Qi FTUNETS ant PET ll NIET Ÿ " FES ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 181 = on n’aperçoit cependant pas que les agresseurs deviennent moins nombreux ni le soleil moins vif. Si le paquet tombe ct que les nymphes persistent, l'inutilité du paquet devient déer- dément évidente — et avec elle l'inutilité du prolapsus rectal, de la flexion tonique du corps, de la fourche même qui retient les exuvies ; visiblement, l'absence de paquet n'entraine aucune conséquence et sa présence ne diminue pas les risques courus. * # * Alors se pose l'ultime question. En présence des dispositions et du fonctionnement compa- rables à ceux que nous observons chez les Cassides, les natu- ralistes imaginent d’abord leur utilité, puis ils recherchent l'origine de l « adaptation » qui met si exactement les orga- nismes en harmonie avec les conditions de vie. Nous nous trouvons ici en présence de faits particulièrement précis pour l'examen de ce point de vue. Si nous entendons par « adaptation » cette mise en harmonie des organismes et de leurs conditions d'existence, nous abou- tissons à une contradiction majeure. Morphologiquement, les larves de Cassides ne diffèrent guère les unes des autres que par la forme générale des épines latérales, rameuses chez les unes et simples chez les autres ; éthologiquement, elles ont le même genre de vie, subissent les mêmes influences, courent les mêmes risques ; or, les unes forment un paquet que les autres ne forment pas. Il semblerait, pourtant, qu’à des organismes si voisins, placés dans des conditions analogues et parfois identiques « convienne » une seule et même « adaptation ». Or, du point de vue anatomique, nous en constatons indiscutable- ment deux. Serait-ce alors que l’une est une disposition primitive et l’autre une disposition secondaire ? Comment en décider ? L'analyse des faits ne montre nullement que la production d'un prolapsus rectal et la formation du paquet stercoral réa- lisent un perfectionnement et doivent être considérés comme d’origine récente. À certains égards, cependant, on serait tenté d'adopter cette solution. Toutes les Cassides possè- dent une fourche et, chez toutes, Les exuvies demeurent atta- ” 189 E. RABAUD chées à la fourche ; ne pourrait-on, dès lors, penser que l'apparition de la fourche, la façon dont s'effectuent les mues, sont une « adaptation » primitive et que le prolapsus et le paquet représentent une complication secondaire ? Il faudrait alors fournir la preuve que les exuvies placées en file sur la fourche procurent un avantage à la larve, mais un avantage insuffisant, qu'améliore beaucoup l'adjonction des excréments. Or, non seulement nous n'avons pas cette preuve, mais nous aurions aisément la preuve que le paquet d’exuvies et, par suite, la fourche, n'interviennent nullement dans la vie des Cassides, que leur absence n'apporte de trouble à aucun degré, qu'ils ne procurent nul avantage. Où serait alors l « adap- tation » ? à quel genre de vie correspondrait cette disposition morphologique et cette particularité des mues ? Ces questions ne comportent aucune réponse. On pourrait soutenir avec autant de raison que la fourche portant les exuvies seules est le reste d’une disposition plus complexe aboutissant à la formation d’un paquet stercoral. Et de fait, le cas d'Aspidiomorpha lecta, qui a un paquet stercoral pendant le premier âge, puis cesse d’en avoir, semblerait mdiquer que l'existence du paquet correspond à un état primitif et son absence à un perfectionnement. Mais alors que signifie ce changement d’ «adaptation » ? Non seulement les larves de toutes les espèces vivent de la même manière, mieux encore la larve d’Aspidiomorpha conserve, durant toute son existence, le même genre de vie, elle demeure exactement dans les mêmes conditions. Rien ne permet donc de supposer que le changement constaté soit une amélioration. Si l'une des dispo- sitions est une adaptation aux conditions de vie, celles-ci res- tant les mêmes l'autre disposition est aussi une adaptation. Nous nous trouvons en face d’une contradiction majeure. I nous reste la ressource de penser que les deux dispositions | dérivent d'une troisième ; mais nous n'en comprendrons pas mieux qu'elles soient toutes deux des adaptations différentes d'organismes très comparables à des conditions identiques. En fait, du point de vue morphologique ou fonctionnel, ni l'un ni l’autre des groupes de Cassides n’est une « adap- tation ». Les dispositions ou les fonctionnements qui les caractérisent sont absolument quelconques relativement à ADAPTATION ET INSTINCT DES CASSIDES 183 leur genre de vie ; celui-ci ne comporte aucune circonstance spéciale à laquelle on puisse rattacher la fourche, le mode de mue ou le prolapsus rectal. Nous perdons uotre temps à trouver perfectionnement ou avantage là où 1l y à tout simplement une disposition et un fonctionnement dont on peut dire, uniquement, qu'ils ne sont pas incompatibles avec l'existence L'adaptation n'existe que du point de vue physiologique. Les Cassides éclosent, se nourrissent, grandissent et se repro- duisent ; les conditions dans lesquelles elles se trouvent permet- tent ainsi la continuation régulière de la vie : les Cassides sont donc adaptées, et elles le sont indépendamment de leur confor- mation anatomique, de la façon dont s'accomplit la mue ou fonctionnent leurs organes Quant à l'origine de ces dispositions et de ces fonctionnements qui nous paraissent singuliers, nous l’ignorons complètement. Nous avons, cependant, toutes rai- sons de penser que l'apparition d’une fourche résulte de la modification des épines latérales des segments terminaux, modification tout à fait quelconque par rapport au comporte- ment habituel de l'Insecte, mais qui a eu pour conséquence immédiate de retenir les exuvies successives. Que le prolapsus rectal ait accompagné ou suivi cette modification des trois der- niers segments du corps, ceci n'offre aucun intérêt. Il nous inté- resse seulement de savoir que cette modification ne porte aucun obstacle aux possibilités de vivre des Cassides, qui sont demeu- rées adaptées, c’est-à-dire capables de continuer leurs échan- ges avec l'extérieur. Elles n’ont pas mieux vécu après qu'elles ne vivaient avant, et rien ne prouve que la Rene constante d'un paquet stercoral ne soit plutôt une gène. Ainsi, à tous les points de vue, les Cassides nous offrent un très remarquable exemple de comportement où l'instinct, stimulus interne et mystérieux, se réduit à une conformation anatomique et à un mode de fonctionnement; où la confor- mation anatomique ne correspond à aucune nécessité de la manière de vivre, où le comportement se ramène, dans son ensemble, à l'interaction de l'organisme avec son milieu, sans qu'infervienne aucun processus le ‘if, sauf au moment où la . vie deviendrait absolument impossible et où la sélection ne serait plus que la suppression du pire. P. de BEAUCHAMEP et R. LAMI Chargé de cours à la Faculté des Sciences Licencié ès sciences de Dijon — Directeur de l'Office Central de Faunistique LA BIONOMIE INTERCOTIDALE DE L'ILE DE BRÉHAT Avec les planches IV à VII AVANT-PROPOS L'un de nous a publié en 1914 une monographie bionomique détaillée de la zone des marées dans la région de Roscoff ; en l’utilisant comme point de départ, il est maintenant intéressant de prendre tout le long de nos côtes de l'Ouest un certain nom- bre de bases d'étude, qui permettront de vérifier la généralité des faits décrits et des classifications posées, et de suivre les variations graduelles de la faune et de la flore quand on s’éloi- gne du point employé comme type. Une semblable exploration, qui demandera d’ailleurs de nombreuses années et maints colla- borateurs, est un des principaux domaines qui s’offrent à l’acti- vité de l'Office Central de Faunistique récemment créé par la Fédération française des Sociétés de Sciences naturelles et doté par l’Académie des Sciences pour entreprendre l'étude métho- dique des animaux de notre pays et de leur répartition. La monographie très sommaire de l'ile de Bréhat que nous publions aujourd'hui peut être regardée comme une première tentative en ce sens, imparfaite par suite de diverses circonstances exté- rieures, Un peu aussi par la nature même des choses. Attirés en eflet vers Bréhat, où l’un de nous avait commencé, il y à plusieurs années, des recherches algologiques, par sa position spéciale et une certaine notoriété qu’elle a gardée du séjour de QUATREFAGES, nous n'avons point tardé à reconnaitre - qu'elle n'était point un excellent endroit pour une semblable étude. Chorologiquement d'abord, elle est trop rapprochée de Roscoff pour qu'on ait chance d'y trouver une faune différente f BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 185 dans son ensemble comme en fourniraient des points beaucoup plus septentrionaux ou méridionaux, ou bien des conditions de vie particulière comme sur des côtes d’une autre nature géolo-. gique. Ensuite, si un domaine insulaire à l'avantage d’être déli- mité par sa nature même, celui-e1, infiniment découpé, est déjà trop grand pour pouvoir être fouillé en totalité à moins d'y consacrer de nombreuses années et d’avoir une petite embarcation à moteur à son entière disposition; une étude de ce genre mériterait d'ailleurs de tenter un naturaliste possédant une propriété dans l'ile même. D'autre part la richesse et la variété du bios sont loin d’être en proportion de la complexité topographique ; ïl n'y a en réa- lité à chaque niveau que deux ou trois faciès qui se découpent et s'enchevêtrent à l'infini, et pour des raisons que nous verrons ceux-ci n'affectent pas une succession simple permettant une étude logique. Aussi le nombre des associations distinctes à étudier, et le chiffre total des espèces à trouver, bien que considérables par rapport à d’autres points de nos côtes, sont relativement faibles par rapport à la région de Roscoff, qui représente il est vrai, au-sens que nous lui avons donné, une étendue de littoral beaucoup plus considérable ; celui qui est familier avec celle-ci y trouve peu de sujets d'étonnement. Tout cela néanmoins ne nous à pas fait renoncer à notre projet : il était déjà intéressant de constater que les principes posés à Roscoff étaient encore valables à 50 kilometres de là, et de plus les quelques différences constatées, la présence ou l'absence de certains biotes, l'abondance relative de beaucoup d’autres, posent une série de problèmes intéressants que l'un de nous a l'intention de reprendre plus en détail au point de vue botanique. En tous cas ceci nous permettra d'être brefs et de rappeler seu- lement les faits acquis en d’autres points. Nous commencerons bien entendu par un exposé géologique et géographique sommaire qui nous fixera sur les eonditions offertes aux êtres vivants. Ensuite nous passerons en revue les principales associations groupées par niveau, mode et faciès (voir leur classification dans pe B. 1914 & et b) en insistant sur les particularités qu'elles offrent à Bréhat. Il ne s'agit pas là bien entendu d’un inventaire des formes animales et végétales existant dans l'ile ; celles que nous citerons comme caractéris- 13 186 P. DE BEBAUCHAMP ET R. LAMI tiques des associations importantes ne sont qu'une faible partie de celles dont nous avons constaté la présence (1). Nous observe- rons une grande prudence sur les caractères purement négatifs du bios, instruits par l'exemple de Joux qui affirme l’absence dans l'île du Cardium edule L., Icquel y est comme partout un des Mollusques les plus communs. Enfin nous résumerons le tout en faisant méthodiquement le tour de notre domaine pour y pré- ciser l'étendue de chaque association. ‘ Description physique du domaine considéré L'ile Bréhat (*), plus exactement le groupe d’ilots réunis aux marées très basses dont Bréhat forme le centre et, sauf Pilot Béniguet, la seule partie habitée, fait partie du département des Côtes-du-Nord et se trouve comprise entre 48°4930" et 48952! . lat. N. d’une part, 5°18' et 5°24! Iong. W. Paris de l’autre, sen- siblement au milieu de la côte bretonne de la Manche. En ce point celle-ci, qui depuis les baies de Saint-Michel en Grève et de Lannion où nous avons arrêté l’étude des environs de Roscoff file en ligne presque droite, avec de petites découpures secon- daires, à l’E.-N.-E., se casse brusquement et descend au $S. où commence presque aussitôt la vaste concavité de la baie de Saint-Brieuc : c'est l’aire d'effondrement des bandes tectoniques parallèles à la côte qui forment le Trégorrois, et à partir de ce point les caractères géographiques et bionomiques du littoral se modifient complètement. Mais Brébat, un peu en retrait sur la pointe externe, appartient encore au Trégorrois et même à sa bande anticlinale la plus septentrionale, celle de Perros-Guirec, constituée principalement de granit rose pénétré de roches U (‘) D'une facon générale la responsabilité des déterminations zoologiques incombe à P. de Beauchamp, celle des déterminations botaniques à R. Lami. Nous adressons ici nos remerciements à MM, Chevreux, Fauvel, Koehler, Lamy et Vayssière qui ont bien voulu nous identifier un certain nombre d’échantil- lons. L'étude sur place a été terminée durant l'été de 1919. (?) Consulter : les cartes au 1/200.000 et au 1/80.000 du Service géographique de l’Armée, les cartes du Service h7drographique, dont le plan spécial à Bréhat, la carte géologique détaillée (feuille de Tréguier) par Ca. Barrors et son explica- tion (1908). BIONOMIE DE LILE DE BRÉHAT 187 intrusives, qui forme presque toute la côte N. L'estuaire du Trieux s’est creusé précisément à la jonction de cette bande et de la bande synclinale de Paimpol qui la borde au S. et que la rivière coupe obliquement. Les alluvions vaseuses qu'il trans- porte ont empâté toute cette côte du sillon de Talbert à la pointe de Minard et l'archipel même de Bréhat qui en est un fragment séparé par deux passes que parcourent des courants violents : au N. l'entrée proprement dite de la rivière, au $. le Ferlas. Cette circonstance individualise le domaine que nous allons décrire. De cette orientation découlent tous ses caractères. Le Ilong de la côte du Trégorrois, des Sept-Iles aux Héaux, le grand cou- rant de flot qui balaie les rives de Bretagne file tout droit en ne laissant de sédiments qu'aux petites anses abritées par un rideau d'écueil. H sculpte les rochers célèbres de quelques-unes de ses pointes et quand la terre lui manque, entraine blocs et galets Le long de l’ancienne moraine qui forme le sillon de Tal- bert, prolonge la côte et lui soude quelques récifs isolés. S'in- fléchissant brusquement au delà pour gagner la baie de Saint- Brieuc, et trouvant un calme relatif sur cette côte abritée des vents dominants, il y dépose une grande partie des sédiments qu'il balayait (ceux notamment de la rivière de Tréguier qui ne peuvent s'arrêter près de son embouchure), et ceux-ci joints à ceux du Trieux noient dans la vase et le sable tous les détails du littoral. A l'abri du sillon de Talbert une vaste nappe de sédiments mous, découverte à marée basse, empâte tous les ilots de la côte orientée N.-S. entre lui et le Trieux, jusqu'à Pen ar Rest à 4 kilomètres de la terre ferme. Une semblable comble plus au $. la baie de Paimpol. Entre les deux l'archipel de Bréhat est isolé par les deux chenaux que s’est réservés Le fleuve appuyé par les courants. Toute sa région W. est formée à mer basse de pointes de rochers émergeant du même manteau de sédiments, abandonné par les eaux qui tourbillonnent sur place ; il n’est séparé au phare de la Croix et à Trébeyou que par 300 mètres à vol d’oi- seau des nappes attenant à la terre ferme, mais la profondeur au-dessous du zéro atteint 30 mètres dans le premier chenal, et 7 seulement dans le second. Au $. au contraire la violence, et surtont l'orientation constante, des courants ne lui à per- 188 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI mis de se déposer que dans les anses, à l’abri des pointes qui plongent à pic dans l'eau, profonde de 5 ou 6 mètres juste en dehors de la banquette que limite le zéro des cartes. Sur le flanc E. il en est de même aux pointes extrêmes, mais elles sont portées par des ilots isolés; entre eux et lile principale s'étend un labyrinthe de rocs et d’anfractuosités où les sédi- ments se précipitent en se mélangeant au hasard des courants : vase molle, vase sableuse, sables plus où moins grossiers s’en- treméêlent par plaques ou bandes minces. Au N. par contre, la seule partie réellement exposée aux vagues des gros temps, la vase manque tout à fait et les sables, galets et blocs qui résul- tent de la trituration sur place remplissent un espace assez restreint entre les pointes abruptes. Enfin sur là rive W. de l'ile proprement dite, le chenal étroit du Kerpont la sépare de Béniguet et de la grande nappe sédimentaire, mais, parcouru par un courant énergique à chaque marée, n'est pavé que de bloes relativement gros. Faible exposition aux vagues, courants violents léchant des pointes abruptes, envasement de tout ce qui se trouve un peu à l'abri, ces caractères résument la géo- graphie intercotidale de l'ile Bréhat et toute la bionomie qui en dérive. Nous pouvons à présent donner une description topographi- que un peu plus précise avec l’aide dela carte ci-jointe (pl. VI) qui est pour le tracé une réduction du plan au grand point du Service hydrographique de Fa Marine, sur laquelle nous avons porté avec l'approximation que permettent l'échelle et le mode de reproduction la répartition des sédiments telle que nous l'avons observée. La seule association bionomique qui y soit figurée est celle des Zostères. Les n° marquent les points inté- ressants indiqués dans le texte par des chiffres gras. L'ile de Bréhat sensu striclo est formée en réalité de deux parties sépa- rées autrefois à marée haute par une passe, large de quelques mètres au point que franchit aujourd'hui une chaussée. L’ile N. est grossièrement triangulaire, avec un rétrécissement au milieu; elle mesure environ 2 kilomètres sur un de ses grands côtés, de la chaussée au phare du Paon, un peu plus sur l’autre, de celui-ci à l’amer Rosedo. L'ile S. est un peu plus grande, à peu près quadrangulaire, mesurant 1 km. 800 du N.aus., 1 ki. 680 de largeur maxima. Entre elles s'étend à l'W de la \ BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 189 digue le port de la Corderie, très allongé et qui formerait un excellent abri si sa profondeur n'était insignifiante : tout le trafic est concentré au $S. dans l’anse du Port Clos ouverte face à la pointe de l’Arcouest. La structure est celle quiest bien connue pour toutes les côtes et ilots de la péninsule armoricaine, et qui a été rappelée dans DE B. 1914 4: ossature de granit, aux pointes désagrégées puis arrondies par la mer d'une part, les agents atmosphériques de l’autre. Il appartient uniquement d’après la Carte géologique au granit de Perros, mais se présente sous deux variétés, l'une grise l’autre rose, cette dernière prédominant aux pointes $. et N. (Port Clos, falaises du Paon, du Chandelier, ete.) où elle forme les célèbres rochers rouges qui ont fait la notoriété pitto- resque de l'ile. Les deux ne diffèrent guère d’ailleurs dans leurs formes d'érosion. La tendance à lx décomposition par deux séries de plans perpendiculaires où inelinés l'un sur l’autre en blocs parallélipipédiques est extrèmement marquée en certains points et donne au paysage une régularité cubiste. Entre ses apophyses et par dessus ses grandes ondulations s’est étendue une nappe de limon ancien dont le rôle est si important dans la structure des côtes bretonnes. Non seulement il couvre toute l'ile S., comme l'indique la Carte géologique, mais de même qu'aux environs de Roscoff il affleure sous les sédiments marins en divers points de la grève reconnaissable à sa compacité, à sa teinte jaunâtre ét à sa structure feuilletée ; 11 y détermine des conditions spéciales pour les organismes, notamment entre Beniguet et Grouezen (12), et entre Lavrec et Raguenez-meur où il forme des terrasses autour d’un chenal d'écoulement (2). Au contraire le limon parait peu abondant sur l'ile N,, où la culture est de ce fait beaucoup moins développée ; pour- tant celle-ci présente à quelques décimètres de la surface du sol une couche imperméable qui retient l'eau des pluies et la fait affleurer, dès que cette surface se déprime, en marécages naturels ou artificiels ; tels sont ceux du Rosedo où l’un de nous a déerit récemment le Rhadocæle Catenula Sekerai (ve B. 1920). Dans l'ile S. le plan d’eau, qu'atteignent les puits, est beau- coup plus bas et son niveau semble correspondre à peu près l'été au niveau moyen de la mer. ù Un autre trait important de la structure des rivages, ce sont 190 P, DE BEAUCHAMP ET R. LAMI les filons verticaux de la diabase ophitique de Pleubian qui traversent le granit surtout au N., mais aussi parnn les ilots de l'E. jusqu'à Logodec inclus. Orientés en général N.-W.- S.-E. comme l'indique très schématiquement la carte géologi- que, ils sont en réalité très nombreux, de faible largeur (2 ou 3 mètres souvent), mais droits et d’une épaisseur très régulière. Partout où ils se sont trouvés exposés, l'érosion et les intempéries les ont détruits, beaucoup plus rapidement que le granit, de sorte qu'il en est résulté des couloirs réguliers pénétrant à une certaine profondeur dans le rivage, à parois verticales équidis- tantes de granit rose qui contrastent vivement avec le fond noir arrondi et poli par places par le frottement des blocs déta- chés qu'on y retrouve. Parfois des couloirs de ce genre se bran- chent à angle droit l’un sur l’autre (amer Rosedo pl. IV, 1) indice de deux filons injectés dans des diaclases perpendicu- laires du granit. Ces petites criques offriraient des conditions très favorables à la faune et à la flore si elles n'étaient en géné- ral situées à des niveaux assez élevés. On rencontre parfois aussi des couloirs creusés à même le granit compact, mais au lieu de parois parallèles ils montrent des séries d'étranglements successifs témoignant qu'ils sont formés de cuvettes juxtapo- sées, creusées comme des marmites glaciaires par des galets tourbillonnant sur place. Tous ces caractères s’observent le plus facilement sur la côte N., dépourvue comme nous lavons dit de sédiments très fins et dont l'aspect rappelle beaucoup les côtes semblablement orientées de l’île de Bas et de l'ile de Siec : pointes élevées descendant graduellement dans la mer en s’effritant ; champs de gros blocs qui les prolongent ou les relient, à peu près dépour- vus d’Algues sauf dans le fond des anses où ils sont reliés par du sable plus ou moins grossier. Le fond de celles-ei est barré par une digue de galets arrondis, souvent de grande taille, haute de plusieurs mètres ; elle peut retenir en arrière les eaux de pluie mêlées aux embruns des grosses lames et former des narais comme celui qui se trouve au milieu de la côte, d'ailleurs à sec pendant l’été. Des parois verticales plongeant presqu’à pic dans l'eau même à marée basse paraissent plus fréquentes que dans la région de Roscoff : on les observe surtout aux deux extrémités de la côte N,, en écueils isolés ou en falaises 427 BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 194 creusées de couloirs par le procédé que nous avons indiqué. En redescendant vers l'E., on aperçoit au large les ilots gra- nitiques peu élevés mais très découpés de Pistissec et Scoeden ; la côte reste droite et abrupte un moment, mais à partir de la pyramide Ar Morbic reliée à la terre par un nouvel épi de galets, elle prend un caractère tout différent, défendue par une série d'ilots assez grands portant végétation phanéroga- mique (Ar Morbic, Raguenez-meur et plus en dedans Lavrec et Séhérès, Logodec) et par une poussière de rochers de toute taille qui les sépare. Là, comme nous l'avons dit, se dépose abondamment le sédiment meuble et s'observent en apparence sans ordre toutes les transitions du caïlloutis formé sur place à la vase molle où l’on enfonce à mi-Jambe. Un examen plus attentif permet de découvrir la loi de leur répartition. En partant de la terre ferme, on trouve d’abord une bordure de vase molle, qui suit le limon, le sable ou les petits galets de la plage exceptionnellement couverte, et qui forme à Bréhat une ceinture presque complète, la rive N. exceptée, particula- rité fort désagréable pour le faunisticien ou le simple amateur de pêche. Ensuite un grand chenal s'allonge parallèlement à la côte, qu'il sépare des ilots déjà cités. Les eaux s’écoulent quand la mer baisse d'une part vers le $S., de l’autre vers lé N., la ligne de partage se trouvant à l'angle N. de la pointe W. de Lavrec. Son fond, lavé par le courant, est formé de sable consistant ; plus creux dans sa partie N.,1l y forme comme nous le verrons une série de cuvettes à Cystosires (4, 5, 6, pl. VII, les flèches indiquent la direction du courant au jusant), puis l'immense herbier s'étendant entre Lavrec, Roch’ Louet, Raguenez-meur et le plateau déchiqueté des Roho qui grâce à lui n’est accessible qu'aux marées exceptionnelles et qu'une branche latérale isole de l'ile précédente. Au $. le che- nal ne s’approfondit qu'entre Logodec et la pointe du Guersido pour former le mouillage de la Chambre, mais envoie au N. de cette ile, de part et d'autre de Quistillic, deux branches comme lui à fond ferme et implantées d'herbier à leur extrémité. En dehors de son milieu la vase se dépose sur les bords des îlots comme de l'ile principale, à l'abri de chaque roche isolée, au centre de chaque petit groupe d'écueils qui crée un calme rela- dif, parfois en plaques de quelques mètres carrés au milieu du 199 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI sable. Tous les intermédiaires comme mélange existent bien entendu, et le tout n'a qu'une fixité très relative. En certains points la vase forme de véritables bancs ou dômes s'élevant au-dessus des autres sédiments, et donnant implanta- tion comme nous le verrons à une végétation spéciale qui la consolide. arrive qu'ils soient l'indice d’un mamelon de limon ancien ou de gravier recouvert de quelques centimètres de vase, mais souvent aussi ils sont formés par l'accumulation de la vase seule au milieu des remous. Les blocs.et arènes résultant de la désagrégation sur place s’entremêlent bien entendu à elle et au sable proprement dit. Une caractéristique des zones supérieures à Brébat et sur les îlots, ce sont de vastes étendues - couvertes d’'éelats de granits provenant des rochers taillés pour la construction des maisons et que leurs arêtes vives distinguent des produits de l’abrasion marine. Ils sont naturellement à peu près azoïques. Au bord externe des ilots extrêmes, des falaises plus ou moins découpées plongent à pic dans la mer et les her- biers qui les séparent s’approfondissent brusquement. La ligne du O des cartes marines, limite purement artificielle en géné- ral, coïncide à Bréhat avec une brusque augmentation de pente due à l’abrasion effectuée par les courants. Cette disposition prédomine sur la côte S., sans ilots détachés, et à part la vase habituelle au fond du Port Clos du sable assez gros s'amasse seul dans les petites anses jusqu'à Beg ar Raz à l'entrée du Kerpont. Au N.de ce point les deux baies de Nod- goven et du Moulin laissent à nouveau déposer la vase molle. La dernière, assez profonde, a été fermée par une digue et transformée en étang alimentant un moulin à marée aujourd'hui hors d'usage : depuis un an ou deux ses vannes ne sont plus fermées et l'étang se vide à chaque jusant, ce qui a fait péricli- ter la florule intéressante d’Algues implantées sur les murs du canal. Par contre des Fucus se sont établis depuis lors sur la rive intérieure de l'étang. Mais en s'écoulant les eaux ont tracé là aussi un chenal à fond résistant où S'entretient une végétation de Zostères, Cystosira, Halopitys, ete. à un niveau qu'elle n’at- teindrait pas sans cela (17, au-dessus du numéro). Le Kerpont, que balaie un courant très rapide, est pavé de blocs relative- ment volumineux avec sable grossier sur les bords ; le point où l’on peut le traverser à toutes les marées moyennes (14) est Ë | se ee 1 BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 193 constitué par une trainée plus haute, artificiellement régulari- sée, de ces blocs. Le flot ayant dans le $. de l'ile un retard marqué par rapport au N. (18 minutes en vive eau entre les heures des Héaux et celles du Port Clos d’après l'Annuaire), la partie N. du chenal se remplit la première et il existe une dénivellation qui peut atteindre plusieurs mètres au moment où l’eau se précipite en cataracte par dessus la chaussée ; puis sur le Kerpont entier s'étendent les trainées tourbillonnantes des courants. Chose remarquable, l’anse de la Corderie, malgré sa profon- deur et son niveau élevé, ne renferme presque pas de vase pure, son fond étant surtout constitué de sable fin. Sans doute parti- cipe-t-elle déjà au régime de la côte N. qu'on peut faire com- mencer en ce point. Du reste son ensablement augmente pro- gressivement et une ligne tirée de Moucello Richard à Min ar Fave, qui passe au-dessous du O sur la carte marine, affleure en réalité aujourd’hui par des marées non exceptionnelles (1 m.). La rive W, du Kerpont formée par les îlots Beniguet et Groué- zen est tout à fait semblable à l'autre, mais entre ceux-ci un calme relatif a permis le dépôt de couches épaisses de vase en dômes ou en banquettes arrondies encadrant un chenal sinueux, avec plus de netteté que partout ailleurs. Au N. les sédiments vaseux disparaissent à peu près, jusqu'aux pointes exposées de Men ar Gal, et des trainées surélevées de sable grossier très coqüillier s'y font remarquer par places. Enfin, à l'W. de cette rangée d'ilots, émerge à mer basse une immense nappe trian- gulaire qui va rejoindre l'Ile Verte, Les Trois Iles, le Phare de la Croix et la Roche Melen qui forme la pointe du coin enfoncé entre les deux chenaux. Cette région est presqu'aussi étendue à elle seule que tout le reste de la zone intercotidale autour de Bréhat. C'est un labyrinthe dans lequel les courants tourbillon- nent à chaque marée de façon différente et que nous avons dû renoncer à explorer un peu complètement. En effet, outre l'impossibilité d'y accéder autrement qu'en bateau et avec des circuits fort compliqués, une étude bionomique devrait être pré- cédée d’un levé topographique détaillé, car la carte marine en donne une idée détestable : on croirait à la voir qu'il ne s’y trouve que quelques pointes de roche émergeant de la surface sablo - vaseuse recouverte d'herbier. Mais en réalité l’aspect donné par 19% P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI elle est bien plutôt celui qu'on observe à mi-marée quand l'ex- trémité des rochers seule émerge, le seul intéressant d’ailleurs pour la navigation. Ces rochers sont beaucoup plus étendus qu’il n'est figuré et, en tenant compte de leurs soubassements, des affleurements non marqués et deschamps de blocs qui les entou- rent, couvrent à peu près la même étendue que les sédiments meubles. Ceux-ci s'enchevêtrent d'après des règles analogues à celles que nous avons posées dans l'E. Nous représentons donc cette région de facon tout arbitraire sur la carte ci-jointe qui reproduit faute de mieux les inexactitudes de la carte marine, et n y reviendrons que pour les observations bionomiques que nous avons pu faire en des points très localisés. Au point de vue hypsométrique, pour la comparaison des données que nous allons fournir avec celles relatives à Roscoff, il ne faut pas oublier que l'amplitude des inarées, qui croit de Brest à Granville, est plus grande à Bréhat, et corrélativement le zéro des cartes marines différemment placé. La liste que con- tient l'Annuaire des Marées indique malheureusement pas sa hauteur par rapportau O du nivellement Bourdaloue pour le point qui nous occupe, mais à Saint Malo il est à 5 m. 61 au-des- sous de celui-ci, et à Roscoff à 2 m. 68 seulement. L’amplitude Maxima d'une marée, fixant les limites extrêmes de la zone intercotidale, a été fixée par Pruvor à 9 m. 70 pour Roscoff et à 11 im. 82 pour Bréhat. Cet auteur a en effet inelus dans son tra- vail de 1897 pour Bréhat comme pour une série d’autres points de la côte normanno-bretonne le calcul des hauteurs d’eau maximum et minimum et les niveaux, relevés par lui, qu'attei- gnent les principales associations. Mais faute de renseignements détaillés ces indications n’ont pas grand intérêt pour nous. Le maximum des Chthamales et le maximum des Fucus, tous deux plus bas que ceux de Roscoff malgré la dilatation plus grande de la Zone, nous indiquent déjà qu'il n'y à pas à Bréhat de points ni si abrités ni si exposés que dans l’autre région; le niveau des Zostères, notablement plus bas, paraît erroné comme nous le dirons. Quant aux Laminaires elles suivent-régulière- ment là comme ailleurs la courbe des intensités de marée et dépassent un peu la moyenne des basses mers de vive eau. Nous donnons en parallèles les moyennes des hauteurs en syzygie ét en quadrature à Roscoffet à Bréhat, telles qu'elles sont BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 195 portées sur les cartes marines respectives et au voisinage des- quelles il convient de placer les limites, très arbitraires, des zones distinguées par de B. en 1914 : Roscoff Bréhat Pleine mer vive eau. 8 im. 7 10 m. 4} one] Pleine mer morte eau 6 1 8 m. 1 Basse mer morte eau . . 3 m. 3 m 6) Zone Basse mer vive eau : ln 1m? Zone II RS TT vire ZONE Du reste, 1l nous a été impossible de faire des mesures hypso- métriques de quelque précision, la méthode de Pruvor étant plus sujette à caution qu'ailleurs vu les différences considéra- bles de hauteurs de marée entre deux points voisins, que tra- duit la violence des courants. Les appréciations données plus loin sont déduites d'observations de maximum ou de mini- mum d'une marée, pour lesquelles les chances d'erreur sont moindres. IT LES DIFFÉRENTES ASSOCIATIONS 19 Les faciès rocheux Classant comme d'habitude les associations par faciès, nous considèrerons le faciès rocheux aux différents niveaux, avec tous ses sous-faciès. Nous tiendrons compte aussi du mode abrité où plus où moins exposé, les modes saumâtres n'existant pas à Bréhat où l'eau douce ne forme dans la zone des marées que des suintements insignifiants. Sur la roche compacte, comme nous le savons, la zone Il est occupée normalement par les diverses associations des Fucacées, des Pelvetia cana- liculata (L.) aux Fucus serratus L. qui ont un développement réciproque très variable suivant les points et remontent par exception au début de la zone ['oceupée simplement par un ver- nis plus ou moins continu de Verrucaria maura Wahl. Dans les endroits exposés elles se raréfient peu à peu et sont remplacées 196 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI par les Chthamales qui en même temps empiètent sur cette dernière et finissent par l’occuper tout entière ; la zone III ren- ferme surtout des.F. serraltus entremêlés de diverses Fioridées - et Phéophycées, et bordés souvent dans le bas d'Himanthalia lorea (L.). | Cette répartition générale se retrouve à Bréhat sans particu- larité notable, mais les différents types s'y enchevêtrent et l’on trouve rarement une surface de quelque étendue appartenant en propre à l’un des modes. Le mode très abrité,_où les Fucacées forment un manteau dense empiètant sur la zone [, est excep- tionnel : fonds des ports, où toute la partie inférieure manque, quelques points de Ia côte E. vers son milieu, abrités par la série des ilots C'est pour cela que Pruvor trouve les Fucus remontant un peu moins haut relativement à l'amplitude des marées, à Bréhat qu'à Roscoff, ce que nous pouvons confirmer d’une facon générale ; 1l donne 8 m. 3 au-dessus du O0 comme maximum des Fucus à Bréhat, et nous avons observé sur la côte E. de l’ile N. à la hauteur du Moulin des touffes de F. platycarpus var. limitanea qui se trouvaient à 8 m. 4 sur le roc découvert (davantage dans les anfractuosités) d'après une obser- vation faite au maximum d'une marée de morte eau qui donne plus de certitude que les calculs basés sur le temps de des- cente ou de remontée. Au même point les Pelvetia formaient au-dessus une zone d'au moins 50 centimètres de large. Le plus souvent dans Le labyrinthe rocheux de la côte E., on observe d'un rocher à l’autre et sur les différentes faces du même tous les passages entre le revêtement complet de Pelvetia, F. pla- Lycarpus, Ascophyllum, F. vesiculosus, et Les toulfes isolées, les petites bandes localisées dans une dépression, avec des Chtha- males jamais abondants dans l'intervalle et des plaques de Lichina pygméæa (Vightf.) un peu partout. Il est difficile aussi de suivre avec netteté la disparition des diverses zones à mesure qu'on approche de points plus battus, bien que l'entrée du chenal de la Chambre montre assez bien ce phénomène sur le flanc W. de Logodec; dans l’autre sens également vers le milieu du chenal de Lavrec la partie moyenne des Fucus s'efface peu à peu, une petite bande de Pelvetia ave quelques F. pla- tycarpus Thur. subsistant en haut. La disparition presque totale des Fucacés dans la zone Il, A LA ins cs de. hs ma ste de A É, | | É È : D À vx Lost ' Pr0 ns * n ve . ' LAURE L DER ae ” CA in à dun ES BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 197 avec revêtement continu de F. serratus persistant dans la zone HT, phénomène si caractéristique des points moyennement exposés à Roscoff, ne s'observe guère avec netteté qu'à l'W. de l'entrée du Port Clos, à l'extrémité de la pointe qui porte la bat- terie, et à l’autre bout du Kerpont, au N. de l'entrée de la Cor- derie. Sur les pointes voisines du Guersido et en beaucoup d’autres points analogues, on trouve les l'ucus, vesiculosus aussi bien que serratus à l'état plutôt dissocié, en petites touffes rigi- des et dressées ; dans l'intervalle de vastes surfaces sont cou- vertes {août-septembre) par de jeunes pousses dressées aussi, qui ne paraissent pas destinées à reformer un revêtement plus dense (pl. V, phot. 3). L’ensablement assez marqué en ces points contribue aussi à cette évolution spéciale. En somme, nous n'avons pas ici les conditions exceptionnellement favo- rables qu'offre à l'étude bionomique le chenal de Roscoff, très abrité.en son milieu et passant insensiblement aux points déjà fort exposés conme Bloscon ; l'enchevêtrement des rochers en certains points, en d'autres l'absence de transition entre la base des pointes et leur extrémité léchée par un courant violent (quine produit pas exactement les mêmes effets que la vague), détruisent la succession régulière des phénomènes. La partie inférieure de la zone IT est marquée à Roscofl même, comme on le sait, par une bordure bien développée d’Hi- manthalia lorea (L.). L'on a fait remarquer ailleurs que cette bordure manque, sans raison apparente, sur presque toute la côte comprise entre Terrénès et Locquirec et qu'elle est loin d'être constante sur le littoral breton. De même Lapicque a fait récemmentobserver qu'elle faisait défaut sur celui des Côtes- du-Nord par opposition à celui du Finistère. La chose est exacte pour Bréhat : non que la plante n’y existe pas, elle est comme nous le verrons assez fréquente dans les cuvettes de la rive N. surtout (pl. VI, phot. 9), mais nulle part on ne la rencontre développée en bordure etse laissant exonder à toutes les grandes marées. Nous avons aperçu quelques thalles jeunes à sec, dans le N. également, à un niveau très bas, mais ils paraissent ne jamais former dans ces conditions leurs lanières fertiles. La cause de ces caprices de répartition ne peut même pas être soupçonnée actuellement et mériterait une étude attentive tout le long de la Manche et de l'Océan. Nous ne savons à quoi 198 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAM se rapporte l'indication de Pruvor qui indique Himanthalia comme remontant à 2 m. 3 du zéro à Bréhat; s'il s’agit comme il est probable des plantes en cuvette, ces données ne sont en rien comparables à celles de Roscoff portant sur des plantes exondables. Comme il est habituel en pareil cas, l'Himanthalie est sou- vent suppléée par Bifurcaria tuberculata (L.\ qui devient très abondante au niveau qu’elle devrait occuper (pointes un peu saillantes des îlots E.). Quand, ce qui est fréquent, les rochers s'enfoncent plus ou moins dans le sable ou le gravier à ce niveau, on observe aussi un grand développement de CAorda filum (L.) qui flotte dans leau et simule de loin la bordure d'Himanthalie un peu réduite; Lapicque l’a également noté. Fait curieux, on peut compter parmi ces espèces vicariantes les Cystosires elles-mêmes, C. ericoides (L.), C. granulata (L.) qui au moins dans l'anse comprise entre Quistillie et Logodec (9) garnissent régulièrement les parois rocheuses compactes et se laissent découvrir par une marée de 1 m. 20; chose tout à fait exceptionnelle pour ces formes de cuvettes par excellence. Les Floridées aussi, prennent part au revêtement de la zone II; Rhodymenia palmata (L.) est toujours assez abondante parmi les Fucus du bas, mais sous forme d'individus petits et extrè- mement laciniés, verdâtres pendant l'été, les grands individus larges comme ceux qui se trouvent à Roscoff dès le milieu du chenal n ‘apparaissent qu'au N. sur les pointes très exposées et les écueils. Chondrus crispus (L.) quine manque nulle part arrive en certains points (Kerpont entre Min Granouille et la Corderie) à couvrir tout le rocher de ses petites toulfes frisées, remplaçant également là le bas des Fucacées. Tel est l'aspect de la végétation dans les points abrite et médiocrement exposés ‘ilest inutile d'insister sur la faunule qui lui estassociée et qui se compose principalement des Gastéro- podes banals ; elle ne présente rien qui s'écarte de ce que nous connaissons, sauf peut-être l'abondance des Patelles de grande taille et de forme haute même sur ces rochers abrités. Il faut aller loin pour trouver les biotes caractéristiques des points battus. Sur la côte E., les Chthamales prolifèrent rapidement au point de donner à ses rochers extérieurs, vus de la côte, une teinte blanchâtre qui les différencie nettement des plus BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 199 internes. Leur abondance est liée d'ailleurs à la nature du subs- tratum : l'Horloge, qui est une inclusion disciforme de diorite apparaissant dans une falaise à pic au flanc E. d'Ar-Morbie, en porte à peine quelques-uns tandis que le granit qui linclut en est couvert. Les galets de l’épi qui relie la pyramide Ar-Morbic à la terre en portent aussi en grande quantité, fait qui ne s’ob- serve (DE B., 1914 4, p. 192) qu'aux points où le courant est assez violent pour créer sur ceux-ci un ressac favorable sans qu'il y ait de vagues pour les déplacer. Par contre, l'apparition des Nemalion n'a lieu que sur les pointes extrèmes de Quistillie, Raguenez-meur, Ar-Morbic, sous forme de nombreux filaments assez courts et peu ramifiés, espacés sur la roche à peu près nue, sauf les Patelles et quel- ques touffes de Fucacées. Aux mêmes points il faut y regarder d'assez près pour trouver des Baranus réfugiés comme il est fréquent dans les fentes ef sous les surplombs. Dans le nord il est vrai leur développement devient notable en même temps que celui des Chthamales, mais là encore il faut s’avancer jus- qu'aux pointes surplombant réellement l'eau même à mer basse pour trouver les uns et les autres bien développés. Toutes les parties un peu en retrait (comme cela s’observe à un moindre degré dans le N. de l'ile de Bas) sont protégées par là même et les pointements compacts, a fortiori les blocs détachés, ne témoi- gnent de l'action des vagues que par la raréfaction des Fuca- cées. Mais ces Balanes, médiocrement favorisées à Bréhat par le ressac, le sont au contraire beaucoup par les courants qui ont sur elles la même action. Aussi leur lieu d'élection dans lile est-il le Kerpont, où elles tapissent non seulement les roches bordantes, mais encore et surtout tous les blocs immergés dans le chenal, en rendant le déplacement fort pénible aux mains délicates. À ce point de vue comme pour le reste de leur faune ils rappellent beaucoup ceux qui couvrent le grand plateau de Duon. Même dans les ruisseaux formant déversoir d'herbier Le courant est suffisant pour les faire apparaitre en quantité fort notable. Quand aux Moules, Jourin en a déjà noté la rareté à Bréhat; on en trouve à l’état de petits individus isolés un peu partout sur les côtes N. et E., éventuellement même W., mais il faut aller aux récifs plus éloignés comme Pistissec et Scoeden pour 200 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI les rencontrer en quantité notable, encore n'y forment-elles pas de véritables moulières. Sur ces ilots la roche est presqu'à ou, à part les Cirrhipèdes, au-dessus des Laminaires. i Les formes d’eau plus ou moins agitée suppléant les Fucacées sont donc relativement rares à Bréhat, quand on n’y compte pas les Lichina pygmæa (Lightf.) et les Rivularia bullosa (Poi- ret) abondantes dans les zones supérieures, surtout les dernières qui sont comme on l’a fait remarquer ailleurs les-hôtes de points pas très abrités et se multiplient au voisinage des her- biers. La nudité plus grande des roches caractérise presque seule les points exposés. Un fait remarquable est notamment l'absence du gazon particulier d’Algues, formé surtout par Gigartina acicularis (Waulf.) et bordé au-dessus de Laurencia pinnatifida (Gümel.) qui est si caractéristique aux environs de Roscoff, dans la zone IIL, et couvre souvent de grandes surfaces de rocher pourvu qu’elles soient un peu abritées de la dessic- cation par un surplomb ou un bloc voisin. En un seul point, au flanc S. de l'Ile Verte, nous l'avons trouvé typiquement déve- loppé. Ceci se rapporte aux observations faites en août-septem- bre, les plus comparables à nos données de l’autre saison. Mais durant l'hiver on voit au contraire sur ces parties qui n'ont pas de Fucacées, un revêtement épais de Floridées, en particulier de longues L. pinnatifida d'un beau pourpre foncé, qui ont tota- lement disparu l'été; sans doute est-ce ce revêtement hivernal qui subsiste à Roscoff localisé et avec une disposition particulière dont il ne semble pas v avoir trace ici. De même pour l’autre type d’encroûtement à Rhodocorton floridulum (Dillw.); celui- ci ne manque pas à Bréhat, il s’observe même en beaucoup de points, mais toujours sur de petites surfaces et étroitement loca- lisé, surtout au voisinage des plages sableuses (S. de l'entrée de la Corderie). Quant aux Hermelles, Sabellaria alveolata (L.) et ses blocs caractéristiques paraissent totalement absents (comme du reste aux environs immédiats de Roscoff); S. spinulosa (Link.) appa- rait par ci par là avec ses tubes isolés (N. du Chandelier, ete.) : et tente timidement à Min ar Fave de former un petit revête- ment mêlé de Lithothamniées et pénétré par quelques commen- saux (Polydora ciliata Johnst., Syllis gracilis Grube [Polych.}, Pranizes). Sur les falaises saillantes, un mince vernis de Litho- / BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 201 thamnium avec flocons d'Algues, Codium tomentosum (Huds.), Dictyota dichotoma (Huds.) et quelques Floridées : Ceramium divers, Corallina officinalis L., Grif fithsia setacea (EI.), Lomen- Laria articulata (Huds.), Wrangelia multifida Huds., Monospora pedicellata (Engl. bot.), Delesseria alata (Huds.), D. ruscifolia (Turn.), couvre seul la roche dans le bas de la zone III mêlé à quelques petites plaques de Botryllus violaceus M.-Edw. et à des tubes de Serpuliens. Sur les parois absolument verticales (Ar Morbic, Roch Louet), presque tout disparait jusqu'aux Laminaires. Un mot de celles-ei avant de décrire des groupements plus spéciaux. [1 sera bref car, on le sait cette sous-formation pré- sente des caractères tout à fait homogènes Le long des côtes de France. Leur développement dans la zone accessible à pied autour de l'ile est assez médiocre, grâce aux abrupts par Les- quels s'arrête partout le rocher. Des marées exceptionnelles dont nous n'avons pas joui auraient été nécessaires pour les étudier dans toute leur extension. De beaux champs s’observent au N. de Men ar Gal (Velven), au Chandelier, aux ilots de Pis- tissec et Scoeden, etc., formés par les espèces habituelles Laminaria flexicaulis Le Jol. qui apparaît la première partout, en petits individus accrochés à la roche et empiètant d’ailleurs sur la zone supérieure, L. saccharina L. dans les pierrailles et cuvettes d'herbier, au-dessous les deux, plus développées et mêlées aux grandes Saccorhiza bulbosa (Huds.) ainsi qu'aux Desmarestia et Halidrys. Nous n'avons pas rencontré d'individus bien typiques de L. Cloustoni Le Jol. et l'A/aria esculenta (Lyngb.) n'a été trouvée qu’en épaves. Mais certaines parois rocheuses des zones [IT et IV montrent à Bréhat des associations beaucoup plus intéressantes, comme s'écartant davantage de ce qui nous est connu ailleurs. Deux Algues Siphonées spécialement s'y font remarquer, Codium bursa (L.) etC. adhærens (Cabr.), qui paraissent rares dans la Manche, où ils sont pourtant signalés de Saint-Vast à la rade de Brest : on trouvera la liste des stations et des auteurs dans Caazon. Le premier est par contre commun dans la Méditer- ranée, où le second, répandu sur la côte basque, au Maroc et aux Canaries, pénètre aussi s’il est synonyme de €. difforme Kütz. comme le veut pe Ton. Il forme comme on sait des vési- : - 14 202 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI cules arrondies, atteignant la taille d’une pomme, à paroi épaisse |, et relativement consistante, d'un beau vert foncé légèrement bleuâtre. Quand elles grandissent davantage ces vésicules s'aplatissent et on ne peut mieux les comparer qu'à un béret de laine dont elles ont la forme (en remplaçant l'ouverture par une base adhérente), l'épaisseur et la taille. C. adhærens a la même couleur ét une épaisseui un peu moindre, mais au lieu de former des vésicules donne des croûtes mamelonnées etplissées qui peuvent recouvrir plusieurs décimètres carrés et se décoller sous forme de bourrelets ou de crêtes. L'un et autre sont abon- dants à Bréhat en certaines stations nettement définies : C. bursa d'abord peut se trouver sur les blocs isolés dans les cuvettes d'herbiers et surtout sur ceux, même petits, qui se trouvent dans les déversoirs de celles-ci et abritent toujours une faune fort riche. Il est commun de cette facon dans le déversoir infé- rieur de la grande cuvette du chenal de Lavrec (5-6) dont nous reparlerons, et de l'autre côté, dans ceux des grands herbiérs à l'E. des roches Lavnec et Music (16, phot. 2, pl. IV) ainsi que vers l'Ile Verte (19). L'une et l’autre espèce se rencontrent aussi ensemble dans un type particulier de stations : parois verticales de granit assez avancées (jamais en dedans d’autres ilots), en général pointes limitant une anse ouverte ou rochers isolés dans celle-ci, qui est toujours occupée par un hérbier. Sur de semblables surfaces les Codium peuvent couvrir des étendues de plusieurs mètres carrés, C. bursa en vésiculés qui atteignent là leur taille maxi- num et portent à leur surface des pellicules brunes d'Aglaozo- nia replans Kütz., C. adhærehs, en croûtes qui entourent les autres étroitement ét les enchässent par place, si bien qu'on se demande au premier abord s'il ne s’agit pas d'une même espèce très polymorphe. Mais le tissu de tous deux est un peu diffé- rent, et ils peuvent aussi se rencontrer isolément dans de telles stations. Cette association a été déjà bien décrite par CrouAx au banc de Saint-Marc (rade de Brest). Les exemples typiques s'en trouvent au bord des petites anses comprises entre Quistillic et Raguenez-meur (7), plus au $. également à Min Allan près du Port Clos. Egalement au N. de Grouezen (Men ar Gal) et à l’Ile Verte. Ils manquent au contraire dans lé N., trop exposé et dépourvu d'herbier, et semblent se raréfier dès le grand herbier SU GR BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 203 des Roho et de Roch’ Louet.En hauteur ils ne dépassent guère 1 m. 70 (sur ces parois qui découvrent sans former cuvette) et sont par conséquent limités au bas de la zone HT et à la zone IV; ils recherchent de préférence les parois exposées au N., ce qui joint à leur teinte peu actinique rend très difficile d'en obtenir une bonne photographie. Celle de la pl. V, à en donnera une idée. Mais les deux Codium ne sont, bien enter idu, pas les seuls habi- tants des stations de ce genre; 1ls participent à une association très caractéristique. D'autres Algues en touffes isolées, Fucus serratus L., Codium tomentosum (Huds.), Rhodymenia palmata (L.), chiaa bulbosa (L.), n'ont rien de spécial, Bryopsis hypnoides Lam. est plus intéressant. Comme animaux nous trouvons les Ascidies, surtout composées, habituelles près des herbiers : Fragarium elegans (Gard), Amarouciuinm Nordmanni M. Edw. et À. densum Giard, Morchellium arqus (M. Edw.), Leptoclinum asperumM.Edw., L. fulgidum M. Edw., Botryllus violaceus M. Edw., ete. en colonies qui restent assez petites. Une autre prend un développement considérable, c'est Diploso- moides Lacazei (Giard) que nou; avons déjà défini à Roscoff comme caractérisantles rochers en bordure d’herbier ou en cuvette parmi eux. Relativement rare dans ladite région, où il est loca- lisé à quelques points de l'entrée des baies dé Penpoull et de Morlaix, il est une des Ascidies Les plus communes à Bréhat et, y tapisse souvent plusieurs décimètres carrés de paroi rocheuse dans les stations que nous venons de décrire, mariant sa riche couleur rouge cerise velouté aux teintes vert sombre des Codium. Au même niveau il encroûte Les pierres des cuvettes et déver- soirs à la face inférieure aussi bien qu'à la supérieure, les sou- ches des Cystosires et des Laminaires. Il s’avance d’ailleurs plus au large et s’observe encore en petites plaques isolées au pied des falaises les plus avancées, même dans le Nord bien qu'il n’y soit pas abondant. . Nous connaissons de Roscoff l'Eponge Tethya lyncurium (L.) comme hantant les mêmes endroits et lui étant souvent asso- ciée, et 1l est naturel de la retrouver à Bréhat ; sans y être abondante, on la rencontre en effet à Min Allan, Roch’Louet, etc. Sa congénère Echinoclathria seriata (Bow.) qui forme des encroûtements presque de même couleur que Diplosomoides 204 P. DE BEAUCHAMP ET R: LAMÏ est aussi à mentionner au bas des rochers plongeant dans l’eau. L'Actinie Arplasia Couchi (Cocks) est d’une abondance remar- quable à Bréhat non seulement dans l'association spéciale que nous décrivons et dont on peut la compter comme un membre, mais dans toutes les associations voisines où nous la retrouve- rons. Mentionnons enfin une Astérie, Henricia sanquino- leata (Müller) !Cribrella oculata (Penn.,]en petits individus rouges ou rose vineux qu'on trouve presque toujours sur ces parois rocheuses à demi-exposées. L'apparition à leurs points un peu excavés de quelques autres Ascidies et Epon- ges relie par de nombreuses transitions la faune en ques- tion à la faune des grottes. Celle-ci ne présente point à Bréhat de particularité très spéciale. Les fentes des niveaux supérieurs et points très abrités montrent les encroûtements habituels de Catenella onuntia (Good. et Wood.) qui dans les coins envasés Î se mélangent de Bostrychia scorpioides Ag., puis d'Eponges banales, qui parfois en sortent pour se répandre sur les parois un peu ombragées. Dès le bas de la zone IT, comme d'habitude apparaissent les grottes à Syelopsis qui sont répandues tout autour de l'ile : balises du Port Clos, où l’on trouve aussi le type à Polycarpa et autres Cynthiadés, et où certaines se trouvent à découvert sur une paroi exposée au N., pointes de Min Allan, etc. dans le $. de l'ile. Pas très développées dans la région E., pas plus parmi les herbiers qu'aux pointes, elles atteignent un beau développement sur les falaises au N. d’Ar Morbic, où l'espèce se présente à l’état pur, en individus propres et d'un rose vif comme il est habituel là où l’eau est pure et agitée. La région du Chandelier en offre, mais assez peu, de même que l'ilot Pistissec, le seul que nous ayions visité à ce point de vue, etil est remarquable de ne pas trouver là l'équivalent des splen- dides grottes d'Estellen-bihan, écueil encore plus battu que ceux là. Sans doute la nature de la roche s'y prête-t-elle plus mal en ne formant que des couloirs larges et bien ouverts au heu des fentes sinueuses des schistes. Les S/yelopsis sous blocs sur- plombants sont nombreux le long du Kerpont où ils revêtent aussi la face inférieure des cailloux mobiles, favorisés par le courant puissant qui les lèche. Mais on n’en trouve un développe- ment réellement exubérant, avec nombreuses formes associées, que dans les grands herbiers dé l'W., spécialement autour de sétl. : séais LUS 4 « BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 205 l'Ile Verte. Les grottes de ce point sont très comparables à cel- les qui se trouvent, en bordure d'herbier également, autour de l'ile Callot, aux entrées des baies de Morlaix et Penpoull. La faune associée est variable suivant les points. Les plus banales, Crisia cornuta(l.)[Bryoz.|, Clathrina coriacea(Mont.), Grantia compressa (Fabr.), se trouvent partout. Les autres Epon- ges, en dehors des ubiquistes Halichondria panicea Johnst. et Hymeniacidon caruncula Bow., prennent parfois un grand déve- loppement et mériteraient une étude systématique approfon- die qu'il nous était impossible même d'ébaucher. Pachymatisma Johnstoni Bow. est abondant sur le flanc E. de Quistilhie et à la pomte de Logodec bien que les Ascidies y soient rares, parti- cularité analogue à ce qui s'observe à Saint-Jean-de-Luz sur la côte extérieure (pe B., 1907). Spongelia fragilis Johnst. et de grosses formes telles que Polymastia mamillaris (Müller), Vibr- linus hispidus (Mont.), Raspailia ramosa (Mont.), Reniera simu- lans Johnst. sont très abondantes dans les grottes des herbiers de l’W.et la dernière en sort souvent pourramper sur les parois de roc surplombant les cuvettes. Nous avons déjà mentionné Tethya lyncurium (L.). Dans les Bryozoaires, outre les Crisies Bugules et Bicellaires, A/cyonidium hirsutum (Flem.) est com- mun partout où des grottes à Styelopsis sont bien développées et atteint même une exubérance considérable sous certains sur- plombs (près de Min ar Fave) où ses pendeloques se comptent par centaines. Certaines colonies, amplement ramifiées, sont aussi grandes que la main. Les Ascidies autres que les Stye- lopsis nous offrent les caractères déjà notés dans celles des parois découvertes et que montrent aussi celles des blocs mobi- les : extrême rareté (peut-être absence totale) des Hetero- carpa qglomerata (Alder) ce qui est assez remarquable en com- paraison avec Roscotf; petitesse des colonies de Morchellium, Fragarium, Amaroucium ; rareté des Botrylles jaunes et verts (smaragdus, Schlosseri), abondance du B. violareus ; beau déve- loppement des Leptoclinum (asperum, fulgidum, gelalinosum) et surtout de Diplosomoides bien qu'il ne soit pas à propre- ment parler une forme de grotte. Une espèce plus rare, A pli- dium puñctum Giard se trouve asséz fréquemment aussi bien à Min Allan qu’à l'Ile Verte. Dans les Cœlentérés, outre quelques Hydraires sur lesquels 206 P. DE BEAUCHAMEP ET R. LAMI nous ne pouvons insister, les Actinies montrent un développe- ment relativement faible. Sagartia sphyrodeta Gosse et Tealha felina (L.), si communes à Roscoff, sont ici très localisées : les premieres, rares dans PE., n'abondent qu'au Kerpont et autour de l'He Verte et du Phare de la Croix; les secondes se trouvent par cl par là. Par contre Atplasia Couchi{Cocks) a, comme nous l'avons dit, une abondance considérable et les flaques que sur- plombent certains petits rochers en sont entièrement tapissées. Enfin il nous à été impossible de rencontrer un seul exemplaire de Corynactis viridis Allmann, si caractéristique des blocs et grottes de la zone IV (et même un peu au-dessus) à Roscoff. Par contre les Alcyoniaires sont intéressants. La forme banale, 4/cy0- nium digitatum (1) () se trouve un peu partout dans les grottes bien développées, mais sur le flanc S. de l'Ile Verte, en bor- dure du petit chenal qui la sépare de la Roche Thomas (et vient complètement à sec à mer basse, contrairement aux indications de là carte marine), sont plusieurs grottes (20) où leurs gros mamelons blanes et oranges s'associent à de petits lobes rameux, roses ou rouge-carmin (avec polypes jaunes), qu'on doit rap- porter d'après le Pr Hicxsox à À. glomeratum (Hassall). Cette espèce est bien connue dans la Manche, bien que plus rare que l'autre, mais nous ne l’avions jamais trouvée à la grève à Roscoff, Les deux tapissent abondamment ces fentes, étroites et d'un accès difficile, en association avec un Madréporaire qui parait nouveau pour la faune française mais dont nôus n avons encore pu obtenir la détermination exacte ; il est très abondant aussi, en petites masses sessiles à calices nombreux. À la même associa- tion participaient quelques Eponges, des Ascidies (4pliduun punclum Giard, Amarouciunr densum Giard entre autres), des Alcyonidium et la Sagartia elegans (Dalyell) que nous n'avons pas trouvée ailleurs dans l'ile. Le niveau de cette station si intéressante n'est pas exceptionnellement bas, 11 correspond au bas de la zone III ; la roche plonge dans l'herbier à sa partie 8 I inférieure. < La faunule vagile associée aux Eponges et aux Ascidies encroû- tantes, surtout aux S/yelopsis, n'a pu être étudiée en détail bien que nous en ayions recueilli quelques échantillons que des spé- ( C'est l'espèce citée par pe B. 1914 D, comme 4. lobatum Edw. (w1 dote fins DA Ar Là BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 207 cialistes sont en train d'étudier. Ce qui nous à frappé est le peu d’abondance des Némertes. L'infection, constante à Roscoff, des Styelopsis par Œrstedia rustica (Joubin), parait beaucoup plus rare. Le bios des euvettes nous offre les mêmes caractè- res généraux que celui des grottes : banalité aux niveaux supé- rieurs, où elles sont tapissées d'Entéromorphes et de Cladopho- racées, aux inférieurs quelques particularités, surtout quantita- tives, par rapport à ce qu'on observe à Roscoff, Comme il fallait s'y attendre, les associations de cuvettes proprement dites à fonds rocheux compact, qui prospèrent surtout aux points bat- tus, sont peu développées dans le $S. et l’W., un peu plus aux pointes de l'E. et surtout dans le N. L'apparition d’un mince vernis de Lithothamnium Lenormandi{(Aresch.), celle des Algues brunes caractéristiques, Bifurcaria tuberculata (1) et Cystoseira myriophylloides Sauv. se fait comme d'habitude. Les grandes cuvettes des pointes N., d’une profondeur dépassant 1 mètre, hébergent une flore très riche de Cystoseira, Haliseris, Codium, Desmarestia, Halidrys, et Laminaires des espèces ordinaires, quoiqu'on n'en trouve pas d'aussi belles qu'à Duon ou Triagoz. Elles sont, comme nous l'avons dit, un refuge pour Himanthalia lorea (L.) qu'on ne trouve pas à sec, mais qui y est très fré- quente (phot.9). A Pistissecles cuvettestrès basses ont surtout au printemps un beau développement de Delesseria sanguinea (L.). Par contre le développement des Algues calcaires est faible : Lithophyllum incrustans Phil. forme des concrétions par et par là, une mince bordure, jamais les gros trottoirs des points très exposés. Les cuvettes très plates ne renferment que des Anemo- nia sulcata (Penn.) gazonnantes, jamais de Paracentrotus lividus _(Lmk.). Les cuvettes à fond de pierraille vont nous conduire à l'étude des sédiments meubles, et en particulier des herbiers dont les plus intéressantes ne sont qu'un appendice : c'est sur les pla- teauxretenant un peu d'eau pendant toute Fa marée, aux endroits où les Zostères s'éclaireissent le sédiment étant trop gros où pour toute autre cause, qu'on observe les plus étendues et les plus riches ; mais également au-dessus de la limite de ceux-ci des Algues peuvent s'implanter sur les fonds appropriés et donner naissance à une association très féconde. Ces groupements sont très développés autour de Bréhat et d’un grand intérêt ; nous 208 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI pouvons confondre avec leur étude celle de la faune développée à la face inférieure des blocs mobiles, qui n’atteint une grande richesse qu’en de tels endroits. Nous en étudierons un premier type dans le grand chenal de Lavrec. Au niveau de la pointe $ -W. de cette ile se trouve, comme nous l'avons dit, une ligne de partage des eaux. Au $. de celle-ci, le chenal qui se déverse dans la Chambre (10) forme plutôt un ruisseau à fond sableux, à touffes de Fucacées isolées sur des cailloux, se vidant assez rapidement à chaque marée, plus vite, chose de dans les moyennes que dans les très fortes, car dans ce dernier cas il est traversé par toute l’eau amassée entre les ilots et la terre. Son fond est tapissé de nombreuses coquilles, parmi lesquelles on trouve, fait assez curieux, outre les Lamellibranches fouisseurs, d'assez fréquents individus d'Huitres bien vivantes ('). Plus au N. au contraire s'étend un grand bassin (4) qui conserve au moins quelques centimè- tres d’eau et dont le fond, bien que sableux, s’entremêle de pierrailles. Sur elles s'insèrent de nombreuses Algues où prédominent : Dictyosiphon fœniculaceus (Huds.), Cp c granulata (L.) et fœæniculacea (L.), Asperococcus bullosus Lam., Cutleria multifida (Engl. bot.), Chorda filum (L.). [Phéoph.}, Laurencia oblusa (Huds.), Ceramium rubrum (Huds.), Graci- laria compressa (Ag.), Chondria tenuissima (Good. et Woodw.) [Rhodoph.]. Des Griffithsia corallina (Lightf.) décolorées sont aussi abondantes dans le déversoir. De nombreux Spirographes sont insérés parmi elles, et au bas de l'eau l'extrémité de leurs tubes émerge. Enfin le Pecten maximus (L.) n’est pas rare dans cette cuvette, bien que Jousin ne la signale pas à ce point de vue. Comme animaux encroûtants sur les souches et sous les cailloux, on ne trouve quère qu "Hymeniacidon caruncula Bow. et d’autres Eponges jaunâtres, de maigres Botryllus vio=. laceus M.-Edw. avec quelques autres Synascidies hanales; la faune vagile y est encore fort pauvre. Tout à fait en haut, les petits cailloux venant à sec sont encroûtés de Rhodocorton flori- dulum (Dillw.) qui les transforme en boules sableuses, comme dans le port de l'Ile de Bas (ne B. 1914 4, p. 199). Cette cuvette appartient par son niveau à la zone IT. (t) Dans le ruisseau même cst très dév dcppee l'hiver l’Algue Punctaria latifo- lia Grev. qui disparait en été, sd nl BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 209 Au contraire, un peu plus au N., la cuvette semblable qui se trouve en contre-bas (5) appartient déjà à la zone HI, ce qui permet à de nombreuses plaques de Zostères insérées sur les parties sableuses de s’entremêler aux Algues des cailloux. Parmi celles-ci prédominent les Cystoseira : granulata, fœniculacea, ericoides ; Codium tomentosum (Muds.), Laminaria saccharina L. apparaissent déjà. Les Spirographes et les Sabelles y sont abondants et sous un rocher à base immergée s'abritent avec de nombreuses Aiplasia plusieurs beaux individus de Bispira volutacornis (Mont.), forme très caractéristique de semblables stations à Roscoff où elle est rare et qui est assez fréquente à Bréhat. Sur les bords E. de la cuvette, dans ses petites anses en partie sableuses on remarque (pl. V, 5) un beau développement de Padina pavonia (L.) [Phéoph.} et les Annélides fouisseu- ses habituelles : Branchiomma, Lanice, ete. Par contre dans les parties peu profondes et découvertes le cailloutis et les coquil- les vides s’incrustent abondamment d'Algues calcaires. De riches encroûtements d’Ascidies et d'Eponges s’observent dès ce niveau sur les souches de Cystosires et les pierres, renfer- mant presque toutes les espèces énumérées par De B., 1914 6, pe 100 Mais ils atteignent leur maximum dansle déversoir, par lequel cette cuvette se vide dans une troisième (6) qui forme le che- nal central du grand herbier et où les Algues sont masquées par les feuilles de Zostères flottant au-dessus. Nous reviendrons sur la description de celui-ci, en particulier pour la végétation qui est à peu près la même que plus haut avec adjonction de Cys- toseira fibrosa (Huds.) et de nombreuses Floridées en petites touffes. Les animaux sessiles principaux sont : Halichohdria pani- cea Johnst., Oscarella lobularis (Schmidt), Terpios fugax Duch. et Mich., etc. {Spong.|, Ascidia mentula Müller, Cynthia morus Forbes, Perophora Listeri Wieger, Clavelina lepadiformis Sav., Morchellium arqus (M. Edw.), Fragarium elegans Gard, Ama- roucium Nordmanni M. Edw., A. densum Giard, Leptoclinum gelatinosum Giard, L. perforalum Giard, L. fulgidum M. Edw. Botrylius violaceus M. Edw., Botrylloides rubrum M. Edw., etc. [Ase.|. Dans le courant dont on vient de parler, toutes ces espè- ces existent à la face inférieure et sur les flancs des pierres, très encroûtées de Chthamales et dans une certaine mesure 910 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI (moins qu'on ne s'y attendait) de Lithophyllum incrustans Phil. Nous avons déjà cité en cet endroit Codium bhursa (L.). Les espèces les plus abondantes sont à ce niveau comme Ascidies Cynthia, Diplosomoides et les Leptoclines, surtout L. /ulgidum dont certaines plaques, habituellement plus roses, arrivent presque à mimer la couleur de ce dernier, comme Actinies Ane- mona suleata (Penn.) ct surtout Aiptasia Couchi (Cocks). Les formes à squelette calcaire sont, comme il est habituel dans les points où le remous est violent, très nombreuses dans cet encroû- tement : Serpules, Filigranes ou Salmacines, Lepralies, Dias- topores et Tubulipores, ainsi que quelques Mollusques qui les accompagnent volontiers : Anomia ephippium (L.), Modiola barbata (L.), Fissurella græca L., Pecten (Chlamys) varius (L.); Haliotis tuberculata KL. y est fréquente, mais en individus ascez petits. Inutile d'insister sur la faune vagile d’une richesse. cor- respondante en Annélides, Crustacés, ete. (1). En somme cet ensemble de cuvettes superposées serait un excellent champ d’études pour la monographie détaillée, qui n’a encore été faite nulle part, de cet ensemble d'associations des cuvettes à Cysto- sires et similaires, ainsi que de ses variations suivant le niveau. À ce type de plateaux et de cuvettes, qui se répète au pour- tour et au sein du grand herbier que nous venons d'aborder, vers les Roho, Roch Louet, Ar Morbic, et d'autre part dans tous ceux de L'W. près de Grouezen, de l'Ile Verte, ete. (en beau- coup moins riche aussi autour de ceux du Port Clos) nous oppo- serons celui qui remplit le chenal du Kerpont dans sa partie asséchant partiellement, en face du moulin (44); les différen- ces sont dues à la constance et à la violence beaucoup plus grandes du,courant, qui entraine le faible développement des herbiers, rejetés loin de l'axe du chenal. Par contre, il ne nuit pas à l'abondance des Algues qui ne manquent (à l’exception de nombreux Nemalion) que sur les blocs du « rapide » central et de la chaussée arüficielle qui le coupe. Ces blocs sont cou- verts sur toutes leurs faces de grosses Balanes en même temps que de Chthamales et le Lithothamnium Lenormandi(Aresch.) forme souvent à leur surface un enduit violet. Les Algues brunes sont les mêmes que nous avons énumé- (t) Parmi ces derniers la fréquence de Pisa tetraodon (Penn.} est à noter. BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 214 rées : Gystosires de toutes les espèces, Chorda, Laminaria sac- charina et L. flexicaulis avec Halidrys dans le bas, ete. Les Fucus serratus forment encore dans les cuvettes profondes de belles touftes très encroûtées d’épiphytes, et F. vesiculosus même descend très bas, avec des frondes d’une largeur extra- ordinaire. Les Floridées sontextrêmementabondantes et variées, et offrent au botaniste un matériel superbe. Surtout dévelop- pées en hiver où elles couvrent d’une nappe pourpre tous les blocs qui paraissent nus plus tard, elles sont encore nombreu- ses à la fin de l'été. Les plus caractéristiques sont : Chondrus crispus (L.), Laurencia obtusa(Huds.) et L. pinnatifida (Gmel.), Lomentaria articulata (Huds.), Corallina officinalis L. et C. squamata Es, Ceramium rubrum(Huds.), C. echionotum J. Ag., C. ciliatum (EI), Griffthsia setacea (EIL.), Monospora pedi- cellata(Engl.bot.), diverses Polysiphonia, Sphrococcus corono- pifolius (G. et W.), Gastroclonium ovale (Huds.), Plocamium coccineum (Huds }), ces trois derniers étant les plus développés en hiver. Mentionnons spécialement Æalopitys pinastroides (Gmel.};espèce presque aussi grande qu'une Cystosire et d’un port fort élégant grâce à ses rameaux enroulés qui en font un hôte précieux pour la petite faune associée, etqui paraît comme bien d'autres sporadique dans sa répartition ; nous ne l’avions pas trouvée sur l’autre flanc de l'ile, et elle parait manquer (au moins dans la zone des marées) dans toute la région de Ros- coff au sens où nous avons pris ce mot d'autre part, quoi qu'elle existe bien plus à l'Est dans la Manche (Saint-Vast, Dinard) aussi bien que dans l’Océan (Saint-Jean-de-Luz, ete.). Elle remonte à un niveau élevé dans le déversoir du moulin. Les Algues calcaires encroûtantes sont surtout abondantes en dehors des rapides parmi les cuvettes de gravier peu profondes et bien découver- tes où Lithophyllum incrustans Phil., et aussi L. lichenoides (Ellis) assez rare d'habitude dans ces conditions et qui pousse aussi bien sur les Algues (/Æ/alopitys) que sur les eailloux, atteignent un grand développement. Comme animaux, Anemonia sulcata et Aiptasia Couchi sont encore plus abondantes là que partout ailleurs ; certains cail- loutis du bord, parmi les Fucus, où il n’y a presque pas d'au- tre organisme, en sont littéralement remplis. Les encroûte- ments sont maigres à l'entrée du chenal, du côté de Beg ar Raz, 212 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI où les niveaux profonds sont sableux : rares Oscarella, Botryl- lus violaceus et Leptoclinum gelatinosum, Styelopsis à l'état isolé. Plus près du gué on retrouve toutes les Eponges et Ascidies citées de Pautre côté, avec des modifications dans la fréquence relative. Dans les secondes Botr. violaceus se montre souvent à découvert sur le flanc des blocs, Styelopsis abondant sous les surplombs se trouve aussi à la face inférieure des pierres mobiles (individus surbaissés, mais confluents) ; Ascidia et Diplo- somoides sontrares, Ciona, Clavelina, Morchellium abondants. Le plus intéressant ot le développement, très relatif d’ailleurs, pris par certaines formes qui étaient rares dans notre type de cuvettes de l'E. : les Leptoclinum du type asperum-maculatum, ou paraissaient même y manquer : les Botrylles du type Schlos- seri-smaragdus, auxquels on peut ajouter comme Actinie la Sagarlia sphyrodeta Gosse. Nombreux arbuscules de Bugula avicularia (L.) et d'autres espèces probablement. Les formes calcaires et les Mollusques énumérés d'autre part prédominent bien entendu au voisinage du rapide ; des Moules et Huitres s'y mêlent par ci par là. | La faune vagile est surtout caractérisée, en plus d’'Haliotis abondantes et de grande taille, par les Crustacés : Cancer paqu- rus L.; Portunus puber (L.), surtout Pilunnus hirtellus (L.) qui appartient à ce type d'association. Bien entendu les Porcella- nes et Galathées banales. Comme caractères négatifs, absence totale de Paracentrotus lividus (Lmk.) [Echin.] qu'on pouvait s'attendre à y trouver; un Parechinus miliaris (Müller) de temps en temps (). Pour en finir avec la faune des blocs et pierrailles il ne nous reste qu'à dire quelques mots des points les plus battus de l'ile, _les anses du N., les récifs isolés comme Pistissec. Les encroû- tements, bien entendu très maigres, s'y réduisent à des Lepra- lia et des Styelopsis isolés, avec quelques Eponges. Mais les Crabes déjà cités sont encore très abondants ainsi que quelques ‘Annélides des graviers, Marphysa sançguinea (Mont.) en parti- culier. (!) Trois Echinodermes abondants à Roscoff dans les faciès et niveaux analogues, Antedon bifida Penn (rosaceus (Linck<)}, Ophiothrix fragilis (Müller), Cucu- muria Montagui Fleming n'ont été rencontrés pAg nous qu'à l'ile Verte, encore n'y sont-ils pas fréquents. ro en = BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHA'T 20 Les faciès non rocheux Il est assez difficile de donner une description isolée de cha- cun des faciès ou sous-faciès non rocheux car, par les conditions spéciales de la sédimentation auxquelles nous avons déjà fait allusion, il est très rare qu'une même plage soit homogène à ce point de vue- à tous les niveaux: le plus souvent la plage supérieure est vaseuse, les sédiments les plus meubles s'étant déposés en auréole autour de la terre ferme. Inversement les niveaux correspondant à la zone IV ou au bas de la zone IT se trouvent à l'entrée d'une anse ou au fond d'un chenal d'écoule- ment, et balayés par Les courants n’offrent qu'un sable relative- ment grossier. Enfin parmi les rochers en labyrinthe lintrica- tion des divers sédiments atteint une complication considérable. Nous adopterons donc pour notre exposé un plan mixte entre l'étude par niveau et l'étude par faciès, et de plus nous sépare- rons provisoirement l'étude du revêtement végétal éventuel de la surface, qui présente à Bréhat des particularités beaucoup plus spéciales (en y joignant celle des animaux qui peuvent le hanter), de celle de la faune fouisseuse qui occupe la profondeur: le lieu entre Les deux est en effet assez lâche. Les zones subterrestres au-dessus de [ nous montrent une végétation phanérogamique halophile, qui a déjà été bien étu- diée par Camus, et où ne manquent que les formes du sable meuble et des dunes, le sol étant constitué à ce niveau soit par les digues de gros galet signalées d'autre part et dont Crambe maritima L. etSalsola kalil. sontles hôtes caractéristiques, soit par des petits galets ou pierrailles légèrement couverts de vase desséchée qui donnent insertion de préférence à A/riplex por- tulacoides L., soit par le limon ancien ou un sable vaseux assez ferme où s'implantent Salicornia herbacea L., Suæda maritima Dum., Sperqularia marginata Kitt. etc. Dans les anses profondes où la pente est insensible et où se produisent de légers suinte- ments d'eau douce on rencontre un véritable schorre en saillie de quelques centimètres au-dessus du sable ou de la vase nue ; pour le constituer s'ajoutent aux espèces précédentes Glyceria maritima WNahlh., Salicornia radicans Smith., Plantago mari- _tima L., Frankenia levis L., Statice limontum L., Aster tripoltum 214 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMiÏ L., Inula crithmoides L. 11 en est ainsi notamment au fond et sur les bords du port de la Corderie, où Suæda fruticosa Fork., forme rare dans la Manche, est abondante et autour de l'étang du Moulin, où la profondeur des mottes est habitée par quel- ques-uns des animaux subterrestres caractéristiques : Anurida maritima Laboulb., Hydroschendyla marilima (Gr.), ete. Dans les zones marines proprement dites, les associations végétales importantes sont : 1° les gazons de Vaucheria, 2° les plaques de Fucus lutarius, 3° les herbiers à petits Zostères, 4° les herbiers à grands Zostères. Les deux premières se trou- vent uniquement sur la vase des niveaux supérieurs, où leur fait suite la troisième quoiqu'elle se trouve parfois aussi sur du sable plus ou moins pur. Rares à Roscoff, où cette vase ne se rencontre que dans les estuaires ou l’extrème fond des baies, elles sont des plus communes à Bréhat vu les caractères spé- ciaux de la sédimentation. Nous avons néanmoins déjà signalé (ne B.19144)ces gazons de Siphonées où Vaucheria ThuretiWoron. prédomine, qui hérissent la surface de trainées verdâtres et lui donnent de loin une teinte permettant de la confondre avee les herbiers, bien que ceux-ei se trouvent notablement plus bas. Ils hantent de préférence des surfaces bien horizontales, où la vase est relativement ferme, et remontent aussi haut que les Fucacées les plus élevées. Nous n'y insisterons pas davantage, non plus que sur les taches d'Oscillariées fréquentes aussi sur celle des niveaux élevés (?). Beaucoup plus intéressantes sont les plaques de Fucus luta- rius Kütz., espèce très rare sur nos côtes et qui n'était connue U} C'est au même niveau Qu'il faudrait placer l'étude des Ulvacées, Ulva et Ente- romorpha des espèces banales, qui peu développées pendant l'été couvrent pen- dant l'hiver des étendues considérables sur la plage tout à fait supérieure, prin- cipalement dans les fonds de baie.L'anse qui étrangle en deux l'ile du N.au milieu de sa côte E. est remarquable à ce point de vue. mais on les trouve de même dans les recoins du Port Clos, de la Corderie, de l’étang du Moulin et de toutes les petites baies de Bréhat et de Béniguet, ainsi que dans le « marais » de la côte N. La raison de celte répartition saisonnière et spatiale est facile à com prendre : en hiver l’eau des pluies suinte de tous les côtés sur la plage supérieure et permet le développement dé ces formes dont le goût pour les milieux saumà- tres est bien connu, en tous les points assez abrités pour que le courant ne les emporte pas : des individus d'E. éntestinalis (var. bulleuse et crispée ) atteignent 1 mm. 45 mais se brisent au moindre contact. En été, vase et sable sont complète- ment desséchés à ce nivéau durant chaque marée basse, et cela suffit pour exter- miner cette flore spéciale qui ne prospère en celte saison qu'aux points où l'ap- port d'eau douce est permanent. BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 245 sur le littoral N. de la Bretagne que par l'observation de DE B. et Zacus à Terrénès (voir aussi SauvaGeau, 1908). Elle est pres- que banale à Bréhat et s'y observe en de nombreuses stations, toujours à la surface de ces banes de vase supérieure. Son appa- rence est d'ailleurs assez différente de celle des individus de Terrénès ; tandis que ceux-ci présentaient, sur des étendues de vase très molle, de grands pieds isolés, se ramifiant régulière- ment en rosette autour du mince filament par lequel ils y sont implantés, à Bréhat nous trouvons un véritable gazon d'individus contigus et enchevèêtrés, petits et peu ramifiés mais avec pousses adventices à la base, àla surface d'un banc de vase relativement dure (pl. VI, phot. 7). Ils rappellent à première vue les gazons courts des Fueus ordinaires (platycarpus Surtout) sur des bancs rocheux semblablement disposés ; mais ils s’en distinguent à coup sûr par la largeur moindre des frondes, leur torsion très marquée et leur implantation dans Ia vase sans substratum solide (pl. VI, phot. 7). La couleur du F. lutarius est aussi plus foncée que celle de ses congénères, d’un brun rappelant les Pelvetia desséchées, sans préjudice de la vase dont il est . toujours souillé. Le contraste s'accuse du fait qu'au milieu d’un semblable gazon on trouve toujours quelques individus de F. vesiculosus et plalycarpus insérés sur de petites pierrailles et qui paraissent des géants au milieu des autres (on trouve même de jeunes pousses épiphytes sur /utarius). Hs fructifient assez souvent vers la fin de l'été. Quant à leur répartition, ces gazons se trouvent dans les endroits très-abrités, donc contigus à la terre où entourés d'ilots, et sur la vase fine, mais non trop détrempée ; les chenaux for- més par l'écoulement des eaux et où celle-ci est molle, mame- lonnéé, criblée de déjections d'Arénicoles n’en renferment jamais ; mais les banquettes au milieu desquelles ils sont décou- pés en portent, non sur leurs flancs arrondis, mais sur leurs faces supérieures à peu près régulièrement horizontales. L’exis-' tence de ces plateaux assez consistants est liée en beaucoup de points à celle des terrasses de limon ancien sur lequel on tombe en creusant de un ou deux décimètres (c’est très net notamment dans la grande station de Lavrec); mais en d’autres points il est certain que la vase s’est déposée d'elle-même dans les points calmes au milieu des courants et des chenaux d'écoulement, 216 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI qui l'ont découpée jusqu'à former de véritables dômes s'élevant à { mètre ou { m. 50 au dessus du sable ou des pierrailles et que nous retrouverons à propos de l’association suivante. Leur niveau approche de celui des Fucacées supérieures sur les rochers voisins où elles atteignent, en ces points très abrités, leur hauteur maximum ; ils correspondent aux F. vesiculosus, Ascophyllum et F. plalycarpus, S'entremêlant aux gazons de Vau- cheria qui les dépassent en haut, mais ne remontent certaine- ment pas aussi haut que les Pel/velia. Comme ces autres Fuea- cées donc ils ne sont pas couverts aux plus faibles hautes mer de morte eau, qui restent en dessous de 7 mètres. Plus bas ils disparaissent sans doute devant la concurrence des petits Zos- tères qui ont les mêmes besoins. Les endroits présentant les conditions favorables sont nom- breux autour de Bréhat une fois exclue la rive N., et même la riveS. insuffisamment découpée. Toutlelong dela rive E., prinei- palement un peu au S. du Bourg et un peu au N. de la sépa- ration des deux iles (pl. VI,6)s’observent de nombreuses plaques à tous les degrés de développement, depuis quelques décimètres carrés jusqu'à plusieurs mètres; dans certaines qui sont en for- mation on ne trouve (août-septembre) que de très courtes pous- ses dressées analogues aux jeunes gazons de platycarpus ou vesiculosus sur les rochers. Parmi les ilots, dans tous les points sans courant prononcé s'en rencontrent d'autres pourvu que la vase s'y trouve à des niveaux assez élevés. La plus belle station est entre Lavrec etRaguenez-meur {[2). La cuvette qui se déverse au N. dans le grand herbier est entourée presque complètement de terrasses de limon couvertes d'une légère couche de la vase qui tapisse le chenal. Sur celle-ci s'implantent les /u/arius en de nombreux points de la périphérie (!). Sur la rive W. il y en a notamment juste au-dessous du Moulin et dans l’anse de Nod- goven, mais surtout de très belles stations entre Grouezen et (!) Cette station est remarquable par un autre point : la présence de l'Oncidiella celtica (Guv.), ce curieux Pulmoné nu et amphibie qui passait jusqu’à présent pour ne se trouver que sur des rochers battus, en des points assez isolés (be B. 4914 D, p. 160) ; la seule station analogue à la nôtre serait celle de DauTzENBERG et Durouenoux à la tour de Solidor (Saint-Malo). On le trouve non parmi les lutarius même, mais dans les anfractuosités que forme la paroi verticale du Lalus limo- neux, ombragée par quelques grands Fucus retombant, et uniquement aux points où suintent du limon de très minces filets d’eau douce où poussent quelques Entéromorphes. | BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 247 Béniguet sur lesquelles nous reviendrons. Il n’est certainement pas rare dans le dédale des rochers et herbiers à VW. et au S. de ces points, que nous n'avons pu suffisamment explorer. Les herbiers à petits Zostères sont également une caractéris- tique de Bréhat, et un trait commun de sa bionomie et de celle de l’anse de Terrénès, à l’exclusion des autres points de la région roscovite. Nous avons dû en 1914 (ve B. et Zacns) laisser en suspens la détermination exacte des Zostères à feuilles étroi- tes qui remplissent à Terrénès l’arrière-fonds et le petit herbier du port et sont identiques à ceux qui se trouvent dans les mêmes conditions à Bréhat. Pour ceux-ci, l'examen des échan- tillons nous les fait rapporter sans hésitation à Zos/era nana Roth qui n'est point rare sur nos côtes de Bretagne et de Nor- mandie et vit partout où elle a été signalée (Sauvaceau 1908), dans des conditions analogues. Il reste néanmoins un point que nous n'avons pu préciser encore. À la limite supérieure des herbiers de Z. marina L. on trouve toujours des individus beaucoup plus petits (f. angusti- folia auet.). Leurs caractères distinctifs restent-ils toujours tran- chés et comment s'entremèlent les deux espèces aux points, d'ailleurs pas très nombreux, où il y a continuité entre le « grand » et le « petit » herbier? C’est ce qui fera l'objet de recherches ultérieures. | Les herbiers de Z. nana ont beaucoup de caractères communs avec les gazons de F. lutarius ; ils occupent comme eux des espaces relativement restreints, quoiqu'en général plus éten- dus, en des points très abrités, formant souvent banquette au bord d'un chenal d'écoulement, mais souvent aussi cuvette dans un petit bassin entouré de rochers et de pierrailles. Dans la grande majorité des cas ils s'installent sur la vase plus ou moins pure et c’est un petit dépôt de celle-ci entre quelques rochers qui a été le facteur déterminant leur implantation. Quelquefois néanmoins ils s’enracinent au même niveau sur du sable véri- table (petit herbier de Raguenez-meur 3, pl. VI, phot.3).Dureste, comme nous le verrons pour les grands herbiers, la forme cuvette appartient plutôt aux herbiers sableux ou sablo-vaseux, la forme banquette aux purement vaseux, limités par un chenal. De toutes façons, l'herbier isolé possède un véritable déversoir par où s'écoule à marée basse l’eau retenue entre les feuilles et 15 218 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI dans le sol, et ce déversoir est habité par la série d’Algues carac- téristiques des ruisseaux aux niveaux élevés, Chondria tenuis- sima (Good. et Woodw.), Gracilaria confervoides (L.), Entero- morpha sp. diverses, ete. Sur la surface de l'herbier les Zostères sont disposés par touifles assez espactes, rarement confluentes, et il n'existe aucun feutrage d’Algues entr’elles. On les trouve normalement fleuris en août comme les Z. marina. En beaucoup de points, des Zostères en train de mourir indiquent une modi- fication des conditions assez précaires qui ont permis l’établis- sement de Pespèce (*). Reste à préciser le niveau qu'ils atteignent. Il est à première vue supérieur à celuides Z. #arina el paraît en certains points étonnamment rapproché des limites supérieures de la marée (phot. 8). En réalité, il ne semble pas que Z." nana franchisse jamais la hauteur des plus faibles hautes mers de quadrature et puisse par conséquent rester pendant deux marées consécutives hors de l’eau. Du moins ont-ils toujours couvert aux hautes mers les plus faibles (7 m. 20 environ) que nous ayions observées. Malgré la difficulté d'observations précises nous ne croyons pas nous tromper en mettant leur limite supérieure vers 6 m.au-des- sus du zéro, soit vers le milieu de notre zone Il, tandis que Z. marina dépasse peu ou pas à Bréhat comme à Roscoff la zone III (2). Le rapprochement avec les Fucagées des mêmes points (les rochers contigus sont couverts d’Ascophyllum) con- duit à la même conclusion. Quant à la répartition, absence bien entendu complète, sauf l'exception citée en note, dans le N. où n'existe aucune associa- tion végétale non rocheuse. Sur la côte E. ils sont abondants, mais jamais en bordure immédiate de la côte comme F. lutarius ; ils occupent deux espèces de stations : d’une part les bords et (!) Dans le « marais » formé par la grosse digue de galets au milieu della rive N. nous avons observé en été, alors qu fl est complètement à see, quelques brins de Z. nana morts mais régulièrement implantés, paraissant provenir de pieds qui auraient péri sur place, Il semble done que quelques graines y aient germé au printemps alors que le marais étdit rempli par les tempêtes de l'hiver et donné de petites plantes qui ont succombé sans fructifier. Pourtant dans les observations faites eu hiver nous n’y avons noté que des Entéromorphes. {?} Pruvor (1897) p. 550 et 581, indique qu’en un seul point des côtes normanno- bretonnes, la grande ile de Chausey, les Zostères dépassent le niveau des basses mers maxima de morte eau, atteignant 6 m. 2, et sa courbe fait en effet un brusque crochet en ce point. Il est très probable que cette GE se rapporte à. 2.1 nana qui est signalé aux Chausey. BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 249 l'extrémité des branches du grand herbier de Z. marina, rem- plissant le fond des petites anses oùils s’'enfoncent parmi la pier- raille, parfois en continuité avec lui, plus souvent séparés par une bande de sédiments nus ; — d'autre part une série de fla- ques isolées, de quelques mètres carrés de surface en général, parmi les rochers, entre Lavrec, Raguenez-meur, Quistillic et Logodec. Les principaux ont été marqués sur la carte. Ils man- quent totalement de la Chambre au Port Clos, remplissent au contraire une partie de l’anse de Nodgoven sur les bancs de vase situés en retrait du Kerpont. D'autres taches apparaissent sur des bancs analogues latéralement au déversoir du Moulin (qui renferme des Z. marina), et au fond même de l'étang, dans la partie qui garde l'eau la dernière ; une tache située le long _de sa rive S. a disparu depuis la destruction des vannes. Ils paraissent manquer totalementdans le port de la Corderie, mais un peu plus au N., le long de la jetée de l’ancien canot de sau- vetage (aujourd'hui remplacé par une propriété privée) il en existe une petite tache Sur fond de sable (18). De l’autre côté du Kerpont une des plus jolies stations se trouve entre les ilots GrouezenetBéniguet(18). En ce point, en remontant depuisle gué on trouve successivement : chenal très sinueux serpentantentre des banes arrondis de vase molle dont la surface supérieure est couverte de Z. nana; plus haut atténuation du chenal, pla- teau incliné de vase plus ferme à FÆ. /utarius; à la partie supé- rieure 1] n'a plus qu un gazon de Vaucheria, puis après un espace nu de sable vaseux on tonbe sur les premières Salicornia her- bacea L. suivies de quelques graviers qui bordent le schorre à Atriplex portulacoides L. creusé de trous, à peu près azoïques, où l’eau séjourne. La succession des zones de végétation est typi- que, et sur l’autre flanc de la digue sédimentaire obstruant cette passe reparaît l'herbier à petits Zostères qui va se perdre dans le grand herbier de Lannek. Nous laissons de côté encore lW. et le S. de Béniguet où il en existe certainement. à Nous pourrons être brefs sur le grand herbier à Z. marina qui ne s'écarte point de ce que nous connaissons à Roscoff. Il existe comme dans les autres régions des herbiers vaseux et des herbiers sableux, avec toutes les transitions, et comme les divers sédiments sont plus enchevêtrés que partout ailleurs le même souvent change plusieurs fois de substratum dans un 290 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI espace restreint. Pourtant quand ils acquièrent une certaine étendue ils présentent des différences bien tranchées qui influent sur l’ensemble du paysage et permettent de les reconnaitre à distance. D'une façon générale l'herbier vaseux à une surface convere, il revêt des banquettes de vase molle. presque planes au sommet, mais s'arrondissant sur les flancs pour plonger dans un chenal plus profond de 1 à 2 mètres par où s'écoulent les eaux et dont les ramifications les découpent de façon diverse. Les Zostères couvrent le sommet et la partie supérieure des flancs, manquent souvent dans la partie touchant le chenal, qui est for- _mée de vase très molle; le fond de celui ci, tapissé de graviers et de coquilles lavés par le courant, permet la progression. Au contraire l’herbier sableux a une surface concave. forme cuvette retenant en général quelques centimètres d'eau même à marée très basse et dont la partie centrale forme un chenal aussi, mais peu individualisé. C'est là que se développe sur les pierrailles la riche flore de Cystosires, Halopitys et autres Floridées, Lami- naires mêmes, que nous avons déjà décrite comme association des cuvettes à fond de gravier. Très fréquemment, les deux types sont combinés, les bords de l’herbier, non balayés par le courant, sont vaseux et présentent des banquettes arrondies plongeant dans la cuvette qui occupe le milieu, et où celui-e1 ne laisse déposer que du sable grossier. Les trois types : her- bier vaseux, herbier sableux, pierraille à Cystosires se succè- dent de la périphérie au centre. C'est le cas du grand herbier de la rive E. que nous pouvons prendre comme type d'une description détaillée. 11 occupe comme nous l'avons dit la partie N. du chenal parallèle à la côte par lequel s’écoulent les eaux de cette rive. L'embouchure se trouve au $. de la pyramide Roch'Louet, c'est-à-dire qu'en ce point il disparait sous l’eau (qui n’abandonne jamais le cen- tre du-chenal), aux marées les plus basses; mais il se raccorde certainement plus bas avec le prolongement qui remonte entre Roch’Louet et Ar Morbie. Son extrémité supérieure se trouve, comme nous l'avons vu, dans le chenal de Lavrec, sous la forme de deux ou trois cuvettes entremêlées de Cystosires et reliées par des déversoirs. Il a d'autre part une dérivation latérale qui se déverse entre les Roho et Raguenez-neur, et plusieurs euls- de-sac remontant entre les rochers, principalement sur sa rive 4 dt hi CS thé ef PV. \ BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 221 W. Ceux-ci et les bords du principal sont de vase assez molle, tout le reste est sableux. Nous avons déjà parlé de ses rapports avec Z. nana. Sur la vase, les Zostères, comme il est habituel, ne présen- tent aucun épiphyte et ne sont point séparés par un feutrage d'Algues. Dans les cuvettes sableuses au contraire celles-ci se développent : au point central, qui garde toujours quelques décimètres d’eau, elles sont abondantes, mais on n'observe guère le développement exubérant de Polysiphonia fruticulosa (Wulf.) qui caractérise les herbiers de Roscoff même. Par con- tre on y rencontre une quantité de touftes de petites Floridées, Griffithsia setacea (Ellis) et G. corallina (Lightf.), Plocamium coccineum (L.), Sphærococeus coronopifolius (G. et W.), Dudres- naya coccinea (Ag.), Bonnemaisonia asparagoides (Woodw.) (°), ces deux dernières très rares en place à Roscoff où elles paraissent vivre plus bas, au niveau du mærl. Au même endroit, riche développement d’épiphytes : Actinies banales, Haliclystus octoradiatus (Clark) {[Acal.] et des Campanulaires, Diplosoma Listeri (M. Edw.), Aplidium zostericola M. Edw. [Asc.], sans compter les Algues : Ceramium diaphanum (Lightf.), GCal- lithamnium corymbosum (Engl. bot.), Melobesia Le Johsu Rosan. ete. L’'abondance de ces épiphytes est, même dans l'her- bier sableux, très variable d’un point à un autre ; comme ilfaut s'y attendre ils se développent aux points où le niveau est assez bas et où il existe une certaine stagnation et souvent sur une grande étendue ies feuilles de Zostères sont absolument nettes. Comme espèces vagiles vivant parmi les Zostères (à l'exelu- sion de la faune fouisseuse sur laquelle nous reviendrons), on retrouve les formes habituelles : Prostheceræusvittatus(Mont.) [Turb.|(?), Hermione hystrix (Sav.)[Polych.}, Zizyphenus striatus et Z. exasperatus, Trophon muricatus, Archdoris marmorata (1) Sauvaceau (1918), nie complètement l'existence de cette espèce sur les rochers littoraux à Saint-Jean-de-Luz. Pourtant, Fun de nous l'a trouvée il y a quelques années en abondance dans la baie, sur un cailloutis à algues calcaires près de la balise voisine de l’entree du port du Socoa. Qu'il lui soit permis aussi de faire remarquer que dans un travail de 1907 il signalait dans cette baie, derrière la digue de ce port, la présence d’Ascophyllum nodosum L. que M. SAUvAGEAU n'a pu encore y rencontrer. a (2) M. Prenaxr 1949, signale dans un travail histologique à Bréhat Prosthiostomum siphunculus (delle Chiaje) espèce qui vit sur les Ascidies composées, sans indi- quer de station plus spéciale ; il avait d’ailleurs été déjà signalé dans l'ile par HazLez (1894). 19 2 19 P. DE BEAUCHAMP ET KR. LAMI Bergh et Jorunna Johnstoni (AN. et Hanc.), sans parler des Labres, Gobies, Crevettes habituels. Des pontes de Seiches se trouvaient sur les Zostères durant l'été 1919, mais peu abondan- tes. Le bel Eolidien Spurilla neapolitana d. Ch. mérite une mention spéciale : il ne semble pas avoir jamais été signalé dans la Manche, sa limite septentrionale étant jusqu’à ce jour Arcachon d'après M. VayssiÈre à qui nous devons sa détermi- nation (voir aussi Cuéxor, 1906). D'ailleurs les individus sont d’une coloration absolument différente de celle des individus méridionaux et mériteraient sans doute de former une variété géographique spéciale. Au lieu d’une teinte générale rougeâtre ou brunâtre avec taches blanches sur le dos, l'animal a son corps et son pied d’un blanc pur sur lequel tranchent l’extré- mnité rouge des tentacules et des rhinophores et les cirrhes d’un bleu gris ardoisé avec pointe jaune. Il atteint et dépasse 4 em. de long. M. Vayssière a trouvé aussi les nématocystes différents de ceux des individus de la Méditerranée, ce qui tient évidem- ment à la nourriture différente. Sa présence à Bréhat ne parait pas accidentelle et sporadique comme il est fréquent pour les Nudibranches, car aussi bien en août 1916 qu'en août 1919 nous avons rencontré de nombreux individus dans les herbiers et parmi les Fucus, ainsi que leur ponte, en ruban spiralé et godronné. DE QuarreraGes (1844) signale à Bréhat cmq espèces d'Eoldiens dont quatre nouvelles ; nous ne les avons pas retrou- vées faute de recherches spéciales, quelques-unes sont d’ailleurs banales en Bretagne. Un grand herbier descendant au-dessous de la zone des marées occupe certainement tous les bords E, et S.-E de Bré- hat ; le précédent s’y raccorde ainsi que les plus petits qui rem- plissent les anses entre Raguenez-meur, Quistillic et Logodee, la rade de la Chambre, l'anse du Guersido et celle qui la suit, le Port Clos. En tous ces points les Zostères plongent sous l’eau avee une pente beaucoup plus brusque comme nous l'avons dit et on les aperçoit au delà des Laminaires des pointes rocheuses abruptes. Ces herbiers ressemblent au précédent, mais en réduction. En général ïls sont sur un fond de sable à peine vaseux, en pente d’abord douce, puis plus forte, sans formation de cuvette, de chenal, ni de déversoirs bien nets. Au N. de Logodec seulement quelques recoins vaseux qui se ratta- _ BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 293 chent aux « petits » herbiers. En corrélation avec ces caractères, les Zostères remontent beaucoup moins haut que dans les bran- ches du grand herbier : au Guersido, l'herbier ne commence à découvrir que par des marées de 2 m. 20, et à la Chambre il est plus bas encore. Le chiffre donné par Pruvor (2 m. 80) parait se rapporter à des points de ce genre plutôt qu'à la hau- teur maximum réelle des Z. marina autour de l'ile, laquelle s’écarte certainement peu de la limite supérieure de la zone TI (3 m. 60). De plus la flore associée est très peu développée, les épiphytes rares ou absents (quelques Diplosoma pourtant) : on saisit bien l'influence de la forme cuvette et de la stagnation qui en est la conséquence. Nous avons signalé par contre les formes des rochers bordants, Codium et Diplosomoides en particulier. Dans le chenal du Kerpont Le Zostère, sauf tout à l'entrée, ne peut occuper le milieu de la passe. Il se localise en petits lam- beaux latéraux au-dessus de la ligne du 0, mais remontant peu et peu peuplés comme les précédents. Totalement absent du gué, il réapparait à lafaveur du déversoir du Moulin au centre duquel il offre un beau développement et une jolie faune de cuvette, et continue en mince bande au N. jusqu à l'entrée de la Corderie où très bas (un peu plus de 1 m.), il forme encore un large tapis. Mais Le plus vaste champ pour les herbiers nous est offert par l'immense nappe triangulaire étendue de Béniguet au Phare de la Croix, et qu'ils recouvrent sans interruption autre que les écueils et champs de blocs (beaucoup plus déve- loppés d'ailleurs que ne l'indique la carte), qui se dressent à sa surface. Quelques bancs de sable grossier de place en place sont aussi dépourvus de Zostères. Au N., cette nappe déborde Grouezen et Béniguet, s'insinue entre les rochers et arrive jusqu'au Kerpont. Ce n'est point à dire qu'elle soit uniforme et lisse comme le sont (dans une certaine mesure) les grands her- biers des baies de Penpoull et de Morlaix : l'abondance des rochers et la variété du substratum y créent des accidents remarquables, obéissant aux lois que nous avons posées; les herbiers de vase se recourbent en dos d’âne de part et d'autre d'un chenal sinueux, les herbiers de sable se creusent en cuvet- tes superposées séparées par des rapides où l'eau brise entre des cailloux ornés d'une faune extrêmement riche. De très beaux +2 LS] A P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI types s’en trouvent entre les ilots de la trainée N. (Lannek, Music, Drainsec) et à VE. de l'Ile Verte. Des chenaux profonds recueillent en définitive la masse des eaux. Leur tracé sur la carte marine est Jui aussi fort imparfait : la passe entre l'Ile Verte et la Roche Thomas existe bien, mais vient à sec par des marées de 0 m. 6 ou 7. Passons à la faune du substratum, couvert ou non par les asso- ciations végétales. La plage supérieure, en général vaseuse ou au moins sablo-vaseuse, ne présente absolument rien de parti- culier. Elle est unie ou légèrement vallonnée, criblée de déjec- tions d'Arénicoles et de coquilles vides des Lamellibranches qu'on y déterre au même niveau. L'une des plus communes est le Car- dium edule L. nié par Joubin, puis viennent les Lucines et les différents Tapes; Venus verrucosa L., qui donne lieu à une pêche active, s'observe surtout aux points nombreux où des graviers se mêlent à la vase. Très haut, dans la partie couverte l'hiver par les Entéromorphes, on trouve Scrobicularia piperata (Gmel.) ce qui confirme le rôle joué par les infiltrations d’eau douce de la mauvaise saison dans cette région. Nous avons négligé l'étude des Annélides -plus spéciales, Cirrhatuliens, Spioniens, Ariciens qui se rencontrent à ces niveaux très élevés, mais un peu plus bas apparaissent les Clyméniens et les Capi- telliens(Leiochone clypeataSaint-Jos., Notomastus latericeus Sars principalement), lespetitsarbuscules de Laniceconchilega(Pall.), et presque partout Branchiomma vesiculosum (Mont.) dont le panache brun ou strié vient émerger à l’orifice du tube si un ruisseau ou une cuvette conserve quelques centimètres d’eau, et surtout au moment du retour du flot. Cette espèce est inté- ressante par ce qu'à Roscoff on ne la trouvait guère que dansles herbiers, quelqu'en fut d’ailleurs le substratum (voir pe B. et Zacus) tandis qu'ici, sans manquer dans ceux-ci, elle est un hôte constant du sable et de la vase nus même dans la zone If. Audouinia tentaculata (Mont.) et le Sipuncubhen PAhascolosoma elongatum Kef. sont aussi des formes banales. Des Spirographes et des Sabelles apparaissent implantés dans le sable des ruis- seaux un peu importants (S. du grand chenal de la rive E.); les Cereus pedunculatus (Penn.) [Act.] sont très communs partout sur les petits cailloux enfoncés. Enfin apparaissent les Synaptes, dont les deux espèces signalées d'autre part se ren- PP tue tÉmnanent sot e nSe d +2 2 33 ro Lo © : BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT contrent à Bréhat, parfois mélangées. Là aussi S. Galliennei . Hérap. prédomine dans le sable relativement pur, S. inhærens (Müller) dans le gravier, sans que cela ait rien d'absolu. Nous avons trouvé ces deux formes moins différentes par les propor- tions de leurs spicules qu'elles ne le sont à Roscoft et Terré- nès (be B. etZacus, fig. 3, p. 226); surtout en ce qui concerne celles de l'ancre et de la plaque : trhærens à la plaque plus grande par rapport à l'ancre et Galliennei l'ancre plus allongée que dans les stations précédentes. Mais les différences dans la den- ticulation et les trous subsistent. La plage inférieure est en général formée de sable moins vaseux et se constitue partout où les herbiers ne commencent pas dès le haut de la zone IT. De nombreuses coquilles de Sulen (surtout S. vagina L.), Dosinia cxoleta (L.) (beaucoup moins abondante qu'à Roscoff) et D. lupinus (L.), Tellina crassa Penn., Lutraria elliptica Lam. et Lutraria oblonga ete. sont éparses sur le sol que criblent leurs trous. Les Polychètes compren- nent outre les formes citées plus haut Polycirrus sp. (1), Clymene lumbricoides Quatref. et C/. Ærstedi Clap., Petaloproctus terri- cola Quatref., Marphysa Belli, Aud. et Edw., Nephthys cæca (Fabr.), ete. On observe ce type dans le bas des plages du Guer- sido et dela Chambre, au-dessus de l'herbier et à l’entrée de la baie de la Corderie. En ce dernier point ont été aussi rencon- trées deux Annélides rares, Hyalinæcia qrubei Marenzeller (connu seulementde Dinard et de Saint-Malo sur nos côtes), ct Phyllodoce papulosa Saint-Jos. Cette dernière avait été aussi trouvée par l’un de nous à Terrénès, d’après un échantillon qui n'a point été cité dans pe B. et Zacasetque M. Fauver nous à éga- lement déterminé. À la surface du sable aux mêmes points on trouve des moïtes isolées d’//ymeniacidon caruncula Bow. [Spong.]|, des Gibhuia maga(L.), des Pagures aux coquilles char- sées de commensaux, Ficulina, Calliactis, Hydractinia. Toutes ces formessont surtout nombreuses dans les flaques sableuses que délimitent les petits herbiers du_S.-E., au N. et au $S. de Quistillie ; on y rencontre aussi près de cette pyramide la Mol- () Nous n'avons pas rapporté de matériaux suffisants pour l'étude des Polycirrus du sable et des herbiers. 2. aurantiacus Gr. est certainement commun dans les deux, mis le seul Polycirrus délerminable que nous ayions soumis à M. Fauvel est un P. caliendrum Clap. 926 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI gule Anurella roscovita Lae.-Duth. [Asc.] (1), déjà signalée en 1877 par Lacaze-Duraiers lui-même ; il cite de Bréhat dans le mème travail plusieurs autres Molgulidées que faute de recher- che spéciale nous n’y avons pas rencontrés, non plus que la Cynthia sigillata qu'il mentionne en 1892. Telle est la succession normale des faunes de haut en bas des plages nues, dont les sédiments se modifient parallèlement comme nous l'avons vu. Passons à quelques types plus spé- claux de substratum. Les seuls points où l’on observe du sable relativement-pur se trouvent aux deux entrées du Kerpont, où il est grossier et très mélangé de débris de coquilles et de mærl : au S., les petites plages au-dessous de la batterie ont | à peu près la faune habituelle avec prédominance de Nephthys | cæca (Fabr ) et. Nereis irrorata Malmgr. ; elles sont perforées de trous ronds, assez gros, par lesquels on voit s'échapper en jet l'eau drainée dans le sable au-dessus Leur auteur, qui nest point commode à capturer,est un Thalassinide, Ca/lianassa subterranea (Mont.) ou Axiusstirhynchus Leach dont nous avons pris des échantillons dans des stations semblables et dans les berbiers. Là a été aussi recueillie une holothurie assez rare sur nos côtes, Pseudocucumis mixla Ostergren. Plus près du chenal le sable grossier, ondulé à la surface et évidem- ment remanié sans cesse par le courant, ne renferme rien. À l'autre bout du Kerpont, juste au N. de Grouezen, s'observent au milieu d'herbiers en régression ou accolés aux -rochers des tas de sable peu étendus, mais très vallonés appelant à première vue le grand banc du Loup près de Roscoff (15). Ils n’en possèdent point la faune très caracté- ristique et on n'y trouve guère que Nrphthys cæca peu abon- dante. Le point intéressant est le nombre considérable de coquilles de Lamellibranches, la plupart brisées d'ailleurs, qu'y concentrent [es courants (on ne les trouve point en place) : Dosinies, Tellines, Mactres, Lutraires des espèces banales, et chose curieuse Pholas dactylus L. en très beaux échantillons parfois entiers. L'habitat de cette espèce caractéristique des (t) Le nom correct de éette espèce est Cœsira oculala (Forbes et Hanley), mais comme il a été fait dans les Grèves de Roscoff nous conservons en principe les noms employés dans la littérature faunistique de nos côtes là où il n’y a pas eu de révision spécifique récente. [A BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 997 falaises calcaires est sans doute dans notre région les talus de limon ancien, mais nous n'avons pu arriver à le découvrir. Les plages sableuses proprement dites font passage aux champs de blocs par des trainées de graviers et pierrailles, par- fois mêlés de vases, dont la faune est fort riche. Comme Mollus- ques, guère que Venus, mais un développement considérable de Polychètes et de quelques autres formes inférieures où certaines espèces s'ajoutent à celles que nous avons déjà vues. Par exem- ple au Kerpont, immédiatement à l'E. du gué, ces graviers (en- croûtés superticiellement d’Algues calcaires aux points formant un peu cuvette), renferment en abondance : Eunice Harassi Aud. etEdw., Arabellairicolor (Mont.), Lumbriconereis Latreiller Aud. et Edw., Harmothoe lunulata (D. Ch.,) Lagisca extenuata Gr., Aricia Cuvieri Aud.‘et Edw., Audouinia tentaculata(Mont.), Polycirrus sp. Branchiommia vesiculosum (Mont.), Phascolosoma elongatum Kef.— Synapta inhærens (Müller), £dhvoardsia Beau- tempsi Quatref. (‘). Le Crabe Prhomnus hirtellus (L.), très com- mun sous les pierres, s’y mêle aussi. On rencontre des types analogues près de l'Ile Verte, où ont été trouvés en plus (mais ceci est certainement contingent) Marphysa sanquinea (Mont.), Sthenelais boa (Johnst.), Chætopterus variopedatus (Ren.), et même dans le N.de l'ile, parmi les blocs enfoncés dans le gra- vier des petites anses un peu abritées, où la faune est à peine moins riche (Arenicola Grubei Clap. n'a été noté que près du Chandelier). La vase pure, aux niveaux inférieurs, ne s'’observe guère dépourvue de Zostères que près des chenaux de certains her- biers et sa faune comporte Nephthys cæca et d'autres formes déjà trouvées dans le sable ; nous y avons trouvé en abondance le long du grand herbier de l’E., sous la pointe N. de Lavrec, Synapta Galliennei Herap. qu'il ne nous était jamais arrivé de rencontrer dans ces conditions. Quant à la faune fouisseuse des herbiers elle diffère, chose curieuse, extrêmement peu de celle des mêmes sédiments découverts. La raréfaction des Lamellibranches, partout où les (:) Fiscuer (1888) a décrit de Bréhat, à l'entrée de la Corderie, une nouvelle espèce d'Edwardsie (£. lucifuga) d’après une ancienne aquarelle de QUATREFAGES ; elle nous paraît comme à Narteyan (1912) ne pas être distincte de lubiquiste E. Beautempsi. 228 P. DExBEAUCHAMP ET R. LAMI Zostères sont denses, est le trait dominant; les Annélides et autres formes ne varient qu'en abondance et fréquence relative, comme d’ailleurs elles varient sans cela suivant les endroits. Les ubiquistes, qui remontent le plus haut et se trouvent à peu près partout, sont Audouinia tentaculata, Branchiomma vesicu- losum, Phascolosoma elongatum; dès que la faune s'enrichit s'ajoutent les Lumnbriconereis, Arabella, Marphysa (*), Clymene, Polycirrus, Phascolosoma vulgare Blainv. (assez rare), dans les Némertes Tubulanus polymorphus Ren. ‘et d'autres Tubulanus annelés de blanc que nous n’avons pas déterminés), Lineus bili- nealus(Ren.). Des Synaptes même quelquefois. I est rare, bien que la composition fondamentale soit la même, de trouver une densité d'organismes égale à celle de certains points de l'herbier vaseux à Penpoull. L’abondance des fouisseurs est d’ailleurs loin d’être proportionnelle à celle des animaux de surface et épiphy- tes ; les grandes cuvettes si peuplées de l'E. en sont assez pau- vres, il est vrai que les herbiersdes petites baies sableuses le sont encore plus. Quant aux herbiers à Z.. nana la faune est fonda- mentalement là même avec l’appauvrissement dû au niveau plus élevé, et Audouinia lentaculata est la dernière forme qui persiste. TI LA RÉPARTITION DES TYPES BIONOMIQUES AUTOUR DE BRÉHAT. CONCLUSIONS ; Nous pouvons à présent résumer ce qui vient d’être dit en entreprenant méthodiquement le tour de Pile pour y grouper les associations que nous venons de décrire l’une après l’autre, et partager la zone intercotidale de Bréhat en un certain nombre de districts bionomiques dont ce groupement fournira les carac- tères. Cette besogne est assez facile d’après ce que nous avons dit, et la division correspond à peu près aux points cardinaux. (‘} La grosse AZ. sanguinea très recherchée des pêcheurs comme appt est recueil- lie par eux, aux fortes marées, aussi bien dans les herbiers que dans les-graviers des points assez battus, 17 17 BIONOMIE DE LILE DE BRÉHAT ; 929 Un premuer district comprend toute La côte N., depuis l’en- trée de la Corderie jusqu'un peu au delà du Paon (presque jus- qu à la pyramide Ar Morbic). I correspond au mode battu autant qu'il peut exister à Bréhat, et c’est le seul où le choc des vagues ait plus d'importance que l'action des courants. Les falaises granitiques tombent à pie dans l’eau sur le court espace compris entre Kervarec et l’amer Rosedo, où elles sont à peu près dépourvues de végétation. Sur le reste, sauf au Paon où de grands rochers s'isolent, des pointes prolongées par des éboulis de pierres, séparées par des champs de bloc de toute taille que du gravier cimente à la base ; en retrait, un peu de sable grossier, au fond de chaque anse une levée de galets en saillie sur la terre ferme, basse et facilement inondée. Couloirs créés par l'abrasion de la diorite dans Les falaises massives. Grâce à l'abri relatif des pointes et trainées, des Fucacées (mème Pe/velia) peuvent s'établir au moins sur les parties en retrait, mais toujours à l’état de taches de quelques mètres car- rés au maximum. Les Chthamales revêtent en haut toute la roche et s'entremèêlent aux pointes de Balanes, surtout localisées aux anfractuosités, et de petites Moules ; en général elle est presque nue, à part quelques touffes de Fucus serratus, Bifur- caria et grandes Rhodymenia au-dessus du niveau où commen- cent les Laminaires, bien développées en plateaux et sur les flancs des rochers isolés. Les couloirs facilitent leur développe- ment et celui des Floridées, mais descendent rarement assez bas. Les Styelopsis sont communs sous les surplombs et les cail - loux mobiles, généralement à l’état pur. Plus haut nombreuses cuvettes profondes, à flore riche, dont l'Himanthalie est un des éléments caractéristiques. Développement assez médiocre des Algues calcaires. Pas de Zostères ni de sédiments capables d'en porter; les graviers et le sable entre les blocs, aux points un peu en retrait, hébergent une riche faune d’'Annélides, d’ailleurs banales ; Crabes et Porcellanes à la surface. Les écueils de Pis- tisec et Scoeden sont analogues avec suppression du type un peu abrité des points en retrait. Le second district, le district E., va d’Ar Morbic à Logodec. Très développé en largeur, il a pour caractéristique l’émiette- ment des têtes rocheuses parmi des sédiments de toute grosseur, inextricablement enchevêtrés. Les eaux retenues entre elles 230 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMÏ s’'écoulent par les deux bouts d'un chenal principal parallèle à la côte, de Roch Louet à Ia Chambre ; sa moitié se déversant au N. est occupée par le grand herbier dont les tentacules iso- lent le plateau des Roho, se prolongent entre Roch Louet et Ar Morbic et plus bas vers la chaussée qui joint les deux îles. La moitié S. au contraire est formée de sable vaseux à Bran- chiomma, Lagisca ete., parsemé de coquilles vides ; un herbier rappelant l’autre en plus petit s'installe entre Quistillic et Logo- dec comme très bas dans l'embouchure de la Chambre. La vase forme bordure le long de la côte où elle remonte, sauf inter- ruption de pierrailles, jusqu'à la bordure phanérogamique, se dépose ailleurs sur les bords et dans les diverticules du chenal principal en une quantité de petites anses et cuvettes isolées ; elle y donne insertion aux associations caractéristiques des pla- ques de Fucus lutarius égrenées le long de la côte et parmi les rochers, des herbiers de Zostera nana plutôt au milieu de ceux- ci ou se rattachant aux bords vaseux des grands herbiers. Le tout se combine le plus nettement dans le grand bassin com- pris entre Raguenez-meur et Lavrec où le chenal central boueux, avec Z. nana sur certains dômes, s’entoure de terras- ses de limon à F. lutarius et suintements hantés par les Onci- dies. De riches cuvettes d’Algues (Dictyosiphon, puis Cystosires) emplissent le point culminant du chenal principal sous Lavrec et passent à l'herbier où ces dernières et leur faune associée (AScidies composées surtout) prennent un magnifique dévelop- pement; de même sur les rochers qui y plengent et les blocs des déversoirs où se multiplient les Mélobésiées, les Chthamales et autres organismes calcifiants. Tout autour les sédiments, vase aussi bien que sable, présen- tent une faune très variable suivant les points et peu différente, au moins comme Annélides, des herbiers correspondants. Les points les plus éloignés de l'herbier et ceux où la zone supé- rieure est le plus étalée (golfe creusé dans l’île N.) sont d'une grande pauvreté et remarquables seulement par le fort dévelop- pement des Ulvacées en hiver, lié aux infiltrations d'eau douce de la région. La végétation des rochers présente tous les inter- médiaires entre la succession normale des zones de Fucacées, très complète le long de la côte et sur tous les écueils en retrait, et leur disparition graduelle au profit des Chthamales vers les BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 234 entrées du chenal et sur les pointes externes des iles ; Jamais d'Himanthalie à sec, mais Bifurcaria et Chorda visent par place à la remplacer. Ces pointes extérieures, garnies de Laminaires, tombent à pic, plus même que dans le’N., dans le courant qui les lèche, en mème temps que les herbiers s'y enfoncent; c'est lui, plus que la vague, qui fait réapparaître 1à un type battu bien caractérisé quoiqu'un peu différent du précédent : au-des- sous des Nemalion, petites touffes d'autres Floridées (Rhody- menia toujours laciniée), de Codium, Dictyota, etc. sur la roche enduite de Lithothamnium (Botrylius et Diplosomoides par place), Balanes et même Moules dans Les fentes, peu de grottes, renfermant des Pachymatisma plutôt que des Styelopsis. Le bord des anses garnies d'herbier présente des caractères inté- ressants : c'est Ià qu'on trouve les bordures de Cystosires sor- tant de l’eau, et surtout les Codium bursa et adhxrens mèêlés aux Ascidies composées, surtout Diplosomoides qui n’est pas d’ail- leurs exubérant comme ailleurs. Le district occupant le S.-E. et le $S. n'est qu'un appauvrisse- ment du précédent, lié à la très faible largeur de la zone émergente et à l'absence des grands herbiers en cuvette. Les petites anses, où les Zostères remontent très peu de sorte que la faune de la plage inférieure avee ses Lamellibranches et Annélides à la place de s’y installer, sont uniquement sableuses, les Zostères eux-mêmes dépourvus d’épiphytes. Dans le fond du Port Clos seulement on observe de la vase nue au-dessus des Zostères avec des Ulves dans les suintements et la faune pauvre des endroits souillés ; plus de F. /utarius ni de Z. nana. Entre les anses, sur les roches, les zones supérieures sont à peu près disparues, le F. serratus dense sous la batterie se dis- socie lui-même à l'E. du Port Clos et les gazons jeunes et plans dressés sont très fréquents. À la place, peu de Chthamales et pas d'autres organismes, de sorte que le rocher est souvent remarquablement nu. Par compensation, d'assez belles grottes à Styelopsis avec autres Ascidies et Eponges associées et quel- ques Codium encore sur les pointes abruptes. Le quatrième district est constitué par le Kerpont avec ses deux rivés. Là tout est subordonné à l'influence des courants de marée, qui quatre fois par jour le balayent avec violence. Ils rejettent sur les côtés les sédiments meubles et leurs associa- 232 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI tions : aux deux extrémités sable grossier, vallonné et mêlé de coquilles vides ou occupé par l'herbier qui forme une mince bande de part et d'autre, manque au milieu, de toutes façons- peu peuplé. Dans les anfractuosités profondes au contraire, passe de Grouezen à Béniguet, anse de Nodgoven, anse du Mou- lin, la vase peut se déposer, avec les associations de F. lutarius et Z. nana qui réapparaissent, et l’étang du Moulin produit dans son déversoir un remarquable relèvement des Zostères et des Algues de cuvettes. Les rochers massifs et blocs plongeant dans le courant au N. et au S. du point guéable ont encore des F. serratus bien développés mais sont relativement pauvres en autres organismes, à part Aplasia. Au contraire, au voisinage de ce gué, la plate-forme se creuse de grandes cuvettes à fond rocheux ou sableux où s'implante une superbe floraison d'Al- gues, Cystosires, Laminaires, Floridées (surtout Halopitys qui manquait dans l'E.) se mélangeant d'herbier sur les bords; Les Algues calcaires prolifèrent dans les moins profondes et le rapide même, sur ses blocs couverts de Balanes et Némalons, héberge une très riche faune d'Ascidies et d'organismes calci- fiants. Le cinquième district est formé par tout ce qui est à l'W. de Béniguet. Nous l'avons peu exploré, mais son caractère général est analogue à celui du district E., en beaucoup plus riche vu l'immense développement des herbiers de tout substratum et de toute forme au milieu d'un dédale de rochers. Faunes de cuvettes et faunes de déversoirs y prennent un développement superbe en de nombreux points, Codium bursa et Diplosomoides y deviennent exubérants de même que les Annélides fouisseu- ses des herbiers et graviers. Les grottes surtout y sont plus chargées d’Ascidies et d'Eponges que dans tout ce que nous avons vu, et l’on voit apparaitre un type nouveau de grottes à Alcyo- niaires et Madréporaires au voisinage des ilots plongeant dans le chenal du Trieux, par des faces à pic encore, et richement garnies de Laminaires. Celles-ci prennent un grand développe- ment au N. à Men Gal, où réapparait le faciès ensablé, puis le type battu proprement dit du N. de Bréhat. Tirer des conclusions générales d’une étude aussi sommaire que celle que nous venons de faire peut paraitre hasardeux ; du BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 233 moins, puisque son objet est avant tout une comparaison avec la région de Roscoff, pouvons nous nous demander quelle: dif- férences et quelles ressemblances cette comparaison met en valeur et essayer d'en pressentir les causes. Que les ressem- blances prédominent, que deux points comparables comme niveau, mode et faciès soient occupés par des associations com- parables, c'est ce qui saute aux yeux d'après tout ce que nous avons dit et a beaucoup simplifié notre description. On pouvait s’y attendre, de même qu'à trouver à Bréhat un nombre de types faunistiques beaucoup plus restreint que dans la vaste « région de Roscoff » définie d’autre part. On n'y rencontre notamment pas le type des plages de sable très pur et coquillier qui s'ébauche dans le sable à Ophéliens des bancs du Loup et de l'Ile de Bas pour atteindre un magnifique développement dans le sable à Echinocardium de la région de Loquirec. Un certain nombre de formes comme les Hermelles, qui paraissent localisées au voisinage de plages de ce type, manquent du même coup. Prenons done un champ plus restreint et comparons Bréhat à la seule petite ile de Callot qui s'étend sur une longueur de 3 kilomètres entre les baies de Morlaix et de Saint-Pol-de-Léon, comme elle dans l'embouchure du Trieux. Les analogies sont marquées : le grand développement des herbiers tant sableux que vaseux, avec la formation de cuvettes et d’une riche faune associée sur les Algues et rochers voisins, spécialement d’Asci- dies, est le caractère dominant de l’une et de l’autre ; les autres faciès, sables nus, graviers, roc compact, montrent les mêmes caractères. Pourtant des différences s’affirment. Le long des flancs de Callot s'observe la transition graduelle du mode abrité au mode exposé, et à la pointe N. nous trouvons un mode très exposé, caractérisé sur les rochers par le développement des moulières, en cuvettes par celui des Oursins (Paracentrotus) qui débordent d’ailleurs dans les graviers voisins jusque près des herbiers. Ce mode manque à Bréhat totalement : les Moules y sont isolées et Paracentrotus que nous n'avons jamais trouvé - (sans vouloir exclure la possibilité d'en rencontrer un individu - égaré) n y forme en tous cas pas l'association caractéristique. [I ne suffit point qu'une côte soit très battue pour qu'il y ait des Oursins, dont la répartition dépend aussi de facteurs encore 16 23% P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI mystérieux : l'exemple de lile de Bas et de tout FW. de la région roscovite où ils manquent totalement même là où les moulières sont bien développées suffit à le prouver. Mais à Bré- hat le moindre développement des Balanes, des Algues caleai- res, ete. plaide aussi dans le sens d'une moindre évolution vers le type très exposé, que les courants ne suffisent pas à faire apparaitre ; de même la présence sporadique de Parechinus dont les limites débordent partout celles de Paracentrotus. Faut- il expliquer de la même façon la rareté ou l'absence apparente de formes telles que les Botryllus Schlosseri-smaragdus, Hete- rocarpa, Sagartia sphyrodela, Tealia, Corynactis, qui existent en des points fort calmes mais ont une exubérance spéciale sur des écueils comme Duon ? Un autre exemple d'organisme à répartition capricieuse est offert par l'Himanthalie, existant à Callot mais manquant dans tout l'E. de la région roscovite et qui à Bréhat ne forme pas zone non plus, mais est bien développée en cuvettes. Nous y ajoutons en sens inverse de nouveaux cas par les Codium adhæ- rens et bursa si abondants à Bréhat et qu’on n'a jamais trouvés près de Roscoif, et par des Algues beaucoup plus communes le long de nos côtes comme Padina pavonia et surtout Halopitys pinastroides qui paraissaient également Ÿ manquer. Mais dans l’ensemble on peut dire que le bios de Bréhat est moins « riche » ou plutôt moins complet que celui de l'ile, beaucoup plus petite de Callot, bien que chaque association présente y héberge autant de formes secondaires, parce qu'il y à moins de types d'associations, ceux des points très battus manquant. Ce fait n’est point compensé par la présence à Bréhat de deux associations très spéciales mais très pauvres en hôtes, les Fucus luturius et Zostera nana qui existent d’ailleurs à Terrénès en face Callot. Il est intéressant de se demander pourquoi celles-e1 manquent, à cette seule exception près, dans les vastes baies de Penpoull et de Morlaix. Il semble que la réponse soit, au moins pour une part, dans les conditions différentes de la sédi- mentation. L'une et l’autre exigent de la vase déposée à un niveau élevé; or dans les estuaires léonais il n'en existe que dans les rivières mêmes et les fonds de port, où le grand afflux d'eau douce et les souillures exercent sans doute sur ces asso- ciations une influence défavorable. De plus ces estuaires sont & dub de | ; : | | À 1 ww BIONOMIE DE L'ILE DE BRÉHAT 2395 largement ouverts et balayés par les flots, tandis qu'à Bréhat, malgré la violence des courants, l'enchevêtrement des écueils crée des zones mortes où la vase peut se précipiter et Les végé- taux délicats s'implanter. [ls n'y réussissent à Terrénès que grâce à la présence d'une anse très fermée, surtout son arrière- fond ; d’ailleurs la forme de lutarius y est différente car la vase reste molle et ne se raffermit pas pendant l'exondation comme le long de la côte de Bréhat. D'autre part cette multiplicité des écueils, Ia complication des courants et l'enchevêtrement des sédiments rendent les transitions entre modes et faciès, si simples à suivre Le long du chenal de l'ile de Bas ou de la côte de Callot où elles se font petit à petit de la profondeur vers Le large, extrêmement diffi- ciles à apprécier à Brébhat. Pour en retrouver les effets :l faut s'être formé par l'étude de ces cas simples, et ilest heureux que ce ne soit pas en ce point qu'on ait essayé pour la première fois de fixer leurs lois. Si les types dans les modes abrités et médiocrement battus sont aux niveaux moyens nombreux et enchevêtrés, au contraire la transition avec les zones inférieu- res et les points exposés se fait trop brusquement, toujours par l’action des courants qui rasent la côte et emportent tout au delà d’une certaine profondeur. D'où le faible développement des Laminaires accessibles à pied et autres associations du même niveau. Nous avons attribué ailleurs la richesse extraor- dinaire de Ja faune, des grottes en particulier, sur des ilots comme Duon, le Cerf et autres, au mélange qui s'y effectue entre l’eau enrichie en matières nutritives par les immenses herbiers des estuaires et l’eau pure et aérée du large ; c'est ce mélange graduel qui manque à Bréhat, de même qu'une roche formant suffisamment de fissures au niveau voulu, et c’est pour cela que nulle part on n’atteint à une pareille richesse de faune. Malgré sa complexité apparente l'ile entière n’est comparable qu à un de ces rochers qui émergent des herbiers vers le milieu de la longueur de Callot et l'abondance de formes telles que Aiptasia et surtout Diplosomoides essentiellement caractéristi- ques de tels rochers vient justifier la comparaison. 236 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI APPENDICE Nous avons rapporté de Bréhat un certain nombre de fixations en bloc de la petite faune qui sort des Algues découpées, des Eponges ou Ascidies quand on les abandonne à pourrir dans une cuvette. L'étude comparative de ces associations prises dans des conditions différentes dans la même localité, et dans des conditions analogues dans des points éloignés, n’a jamais été faite et promet d’être intéressante. Elle nécessitera de nom- breuses années de récoltes et la détermination précise des espè- ces d'une douzaine au moins de grands groupes richement représentés dans éette faune. Celle de nos matériaux de Brébat n'a encore été faite que par MM. Caevreux pour les Amphipo- des et Fauvez pour les Polychètes. Comme l'étude des autres groupes ne sera pas terminée de sitôt et devra prendre place dans un travail spécial, nous donnons ici de suite, à titre de documents, les déterminations de ces deux savants : Amphipodes Polychètes 11-VI-19. Grand herbier de Lavrec (au filet fin, dans les Zostères). Dexamine tnea Bœck, Pleonexes gammaroides Bate. A1-VIIT-19. Chenal de Lavrec, dans les Cystosires. Leucothoe spinicarpa (Abildg.). Platynereis Dumerili (Aud. et Edw.) Apherusa bispinosa (Bale). Leptonereis glauca Clap. Dexamine thea Bœck. Syllis variegata Gr.? Amphithoe imbricata (Mont.). Sphærosyllis hystrix Clap. Pleonexes gammaroides Bate. Grubea clavata Clap. Exogone gemmifera Pagenst. Dasychone bombyx Dalyell. Amphiglena mediterranea Leyd. Oria Armandi Clap. 25-VIII-19. Kerpont dans les Halopitys. Amplhilochus neapolitanus della Platynereis Dumerili (Aud. et Edw.) Valle. Nereis cultrifera Gr. Peltocoxa Marioni Catla. Eteone picta Si-Jos. ; Leucothoe Spinicarpa Abildg. : Lagisca extenuata Gr. Stenothoe monoculoides (Mont.). Autolytus pictus Eh]. Apherusa bispinosa (Bate). A. prolifer (0. F,Müller.). BIONOMIEÉ DE L'ILE DE BRÉHAT 237 Syllis prolifera Krohn. S. Krohni Ehl. S hyalina Gr.? S.armillaris OErst.? S.variegata Gr.? Odontosyllis ctenostoma Clap. Pterosyllis formosa Clap. Eurysytlis paradoæa Clap. Ehlersia cornuta Rathke. Grubea clavata Clap. Exogone gemmifera Pagenst. Polycirrus aurantiacus Gr. Amphiglena mediterranea Leyd. Oria Armandi Clap. (Bate et Nototropis redlanensis. Westw.). Aora typ'ea Kroy. Microprotopus maculatus Norman. Leptochirus pilosus Zadd. Amphithoe rubricata (Mont.). Podocerus variegatus Leach. 95-VIII-19. Déversoir du Moulin, Cystosires et Halopitys, beaucoup plus haut que le précédent. Platynereis Dumerili (Aud. et Edw.) Leptonereis glauca Clap. Odontosyllis ctenostoma Clap. Eurysyllis paradoxa Clap. Amphiglena mediterranea Leyd. Lysianasse ceratina(C. Walk.). Stenothoe monoculoides (Mont.). Dexamine thea Boeck. Microdeutopus chelifer (Bate). Leptochirus pilosus Zadd. Amphithoe rubricata (Mont.). Pleonexes gammaroides Bate. Podocerus variegatus Leach. Phthisica marina Habber. Caprella acutifrons Lat. VIII-49. Côte E,. et S. de Bréhat dans les Styelopsis. Leucothoe spinicarpa (Abildg.). Stenothoe monoculoides (Mont.). Hyale Nilssoni (Rathke). Leptonereis glauca Clap. Syllis gracilis Gr. . Oria Armandi Clap. Dexamine thea Bæœck. Microdeutopus chelifer (Bate). Jassa ocia (Bale). INDEX BIBLIOGRAPHIQUE (Cet index est limité aux ouvrages cités dans le lexte, il n'a pas la prétention de comprendre tous ceux où ont pu être cités des animaux ou des végétaux provenant de Bréhat). F 1908. Barrors (Ch.). — Légende de la feuille de Tréguier (Ann. Soc. géolog. Nord, XXXVII, p. 3-30). 191% a. Beaucuame (P. de). — Aperçu sur la répartition des êtres dans la 238 P. DE BEAUCHAMP ET R. LAMI zone des marées à Roscoff (Bull. Soc. s00olog. France, XXIX, p. 39-43). 1914 b. Beaucnamur (P. de). — Les grèves de Roscoff (Paris, L. Lhomme, un vol. in-8°). ; 1920. Beaucuame (P. de). — Sur une nouvelle espèce de Catenula (Turbel- lariés Rhabdocæles) (Bull. Soc. 500l0g. France, XEIV, p.401 09). 1914. Beaucramr (D de) et 1. 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Quelques années plus tard, un autre naturaliste de Montpellier, Ducës, auteur de plusieurs études anatomiques de grande valeur, faisait paraitre deux mémoires sur le groupe des Planariées, encore fort mal connu à l’époque. Non seulement il rendait compte, dans ces travaux, d'observations fort remarquables sur l'anatomie et la physiologie de ces animaux, mais encore il décrivait un grand nombre d'espèces nouvelles pour la science. Depuis lors, Les Planaires de cette région n'avaient plus attiré l'attention d’au- cun zoologiste et quelques-unes de ces formes, fort intéressantes au point de vue biologique, n'étaient guère connues que par les travaux de ces anciens auteurs. On avait, il est vrai, cru retrou- ver, en plusieurs points d'Europe ces diverses espèces, mais les types de Montpellier ayant été souvent déerits de façon très sommaire l'identification restait douteuse. C'est ce qui m'a engagé à entreprendre une excursion dans cette région. J'ai pu récolter, malgré la courte durée de mon séjour, les principales formes signalées par Drarannaup et Ducës (?). (t) Je tiens à remercier MM. Prcarb, Grassé et KüaNaoLrz, grâce auxquels j'ai pu circuler à travers toute la région dans les meilleures conditions ; ils m'ont fourni, d'autre part, toute une série de renseignements qui m'ont été des plus utiles. 240 A. VANDEL PLANARIA SUBTENTACULATA Draparnaud Répartition géographique. — Cette intéressante espèce a été décrite par Draparnaub dans son Tableau des Mollusques terres- tres et fluviatiles de la France, paru en 1801 (note, p. 100). Pour lui en effet, « les Planaires forment la nuance intermé- diaire entre les Vers proprement dits et les Mollusques », et c'est ce qui explique qu'il signale cette forme dans un ouvrage de pure conchyliologie. Il donne la description de cette espèce et note son grand pouvoir de régénération ainsi que sa multipli- cation par division spontanée (c’est la première mention qui, à ma connaissance, ait été faite de ce mode de reproduction chez les Triclades). Ducs donne à nouveau la description de cette Planaire (1828, p. 144) et de son mode de reproduction scis- sipare (p. 169). Depuis lors cette forme ne semble avoir été retrouvée que dans une seule station. Il s’agit d'un torrent près de Rapallo, en Ligurie, où elle a été rencontrée par Borert (1893), puis par L. Loserri-Boponi qui a fait récemment (1918) de cette espèce une étude détaillée. On a signalé, en divers points de l’Europe Centrale, de prétendues P/. subtentaculata, mais ces déterminations ont été reconnues par la suite comme étant généralement erronées. Des Mouzixs (1830) trouve aux environs de Bordeaux une Planaire qu’il assimile à la P/. sub- tentaculata de DraparNAUD, mais sa description, assez confuse d’ailleurs, se rapporte plutôt, semble-t-il, à P/. gonocephala. Sekera (1888), puis Vrsnovsky (1890) la mentionnent de Bohème, mais ce dernier auteur reconnait quelques années plus tard (1895) qu'il s'agit en réalité de P/. a/pina. Zscuoxke (1890, 1891) signale dans les montagnes du Rhätikon (Suisse) une P/. sub- tentaculata, mais, comme l'a rétabli Srenmanx (1911, p. 231), et comme M. le Professeur Zscaokkk a bien voulu me le confir- mer dans une lettre personnelle, là encore il y a eu confu- sion avec Pl. alpina. Enfin Zacuarias (1886) décrit une P/. sub- tentaculata, trouvée par lui près d’Hirschberg en Silésie ; cette Planaire se reproduirait par scission, mais la régénération des organes du second individu commencerait avant la séparation des deux zoïdes, suivant le mode existant chez les Rhabdocæles (et chez quelques Triclades exotiques : PZ. fissipara Kennel, de Sd - NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 241 la Trinidad; P/. paramensis Fuhrmann, de Colombie). Cette espèce qui n’a Jamais été revue depuis lors, et cela dans un pays où les recherches limnologiques ont été poursuivies de façon très active, ne doit être, je pense, maintenue qu'avec Fig. 4. — Planaria subtentaculata. — a. L'animal entier; b, tête de l'animal vivant; €, Lête d'un individu fixé, montrant les organes sensitifs , D auriculaires. doute (‘); en tous casles particularités très spéciales de sa repro- duction la séparerait nettement de la PZ. subtentaculata de Mont- pellier et de Rapallo, dont le mode de scission est tout autre. C'est l'opinion déjà formulée par L. Loserri-Bonoxi dans son tra- vail sur les Planaires de Rapallo, opinion à laquelle je ne peux (t) SrernmanN (1916) pense que Zacaarras a peut-être pris pour le prétendu pha- rynx du deuxième zoïde, le pénis d’un individu sexué de PI, gonocephala. 249 A. VANDEL que souscrire après l'examen des individus de Montpellier. La P{. sublentaculala typique n’est donc connue que du Lan- guedoc et le Ligurie. Il est probable qu'elle se rencontre, en outre, en quelques points des régions réunissant ces deux pays, mais, elle n'y a pas été recherchée jusqu'ici. En tous cas, comme l'a déjà mentionné Ducis (1830, p. 82), cette espèce semble spéciale à la zone méditerranéenne ; c'est ce que confirment d’ailleurs plusieurs particularités biologiques sur lesquelles je reviendrai plus loin. Description et Anatomie. — J'ai pu retrouver P/. subtenta- culata aux environs de Montpellier dans une source près de « la Paillade », ainsi que dans un petit suintement situé un peu plus au nord, sur la rive droite de la Mosson. Dans les deux cas, elle n'étaitaccompagnée d'aucune autre espèce de Planaire. L'animal est fort allongé et devient presque filiforme quand il rampe (fig. 1 &); la taille est fort variable, Les grands individus mesurent 20 mm. de long sur 2 de large. La couleur varie du brun au jaune assez clair ; la face ventrale est blanchâtre. Chez les Planaires qui ne se sont pas coupées depuis longtemps, le pharynx, par suite de l'accroissement de la région post-buccale, est situé dans la partie antérieure du corps, chez les indi- vidus récemment divisés, il est au contraire placé tout à fait en arrière. La tête est triangulaire (fig. { 4) et présente deux auri- cules qui, chez l'animal en reptation, sont fortement saillants et souvent relevés perpendiculairement à la surface du corps. Dans la région postérieure des auricules se trouvent deux pla- ges sensitives, reconnaissables en ce qu'elles sont dépourvues de pigment (fig. 1 c); elles sont ovales ou légèrement en forme de croissant. Cette Planaire possède normalement deux yeux situés sur le bord interne d’une zone dépigmentée ; mais le nom- bre des yeux, comme chez plusieurs autres espèces, est'un peu variable, et il n’est pas rare de trouver une ou deux taches oculaires supplémentaires (fig. 1 «). Le tube digestif présente 10 à 12 paires de ramifications principales sur le tronc antérieur et une vingtaine sur chaque tronc postérieur ("). {‘) L. Loserm-Bonont (1918) indique. chez les Planaires de Rapallo, 18 à 20 rami- fications sur la branche antérieure, et 46 à 49 sur la branche postérieure, mais l’auteur à compté les ramifications secondaires, tandis que suivant l'usage géné- ralement adopté, j'ai donné le nombre de ramifications primaires. ) NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 943 Reproduction scissipare. — Mes observations sur les phéno- _mènes de scission chez cette espèce sont encore peu nombreu- ses; J'ai pu cependant établir quelques points avec certitude : la scission est, comme chez Pol. cornuta et PI. alpina, un pro- cessus très rapide, résultant de lParrachement mécanique entre les deux parties antérieure et postérieure, réagissant Indépen- damment ; il n’y a aucune formation d'organes précédant la scission ; le plan de division passe généralement en arrière de la, bouche. Je reviendrai d'ailleurs avec plus de détail sur tous ces phénomènes dans un autre travail. Cependant quelques données ayant trait au rapport entre la température et la scis- sion intéressent directement cette étude ; alors que pour les Pol. cornuta des environs de Paris, que j'ai soigneusement étu- diés, le minimum auquel se produit la division est de 8 et l'op- timum de 15°, les quelques chiffres que j'ai pu établir pour P{. sublentaculata sont bien différents ; l'animal ne semble pas se couper au-dessous de 14° ; les divisions sont au contraire très fréquentes à 18-19°. Si cette espèce vivait dans Les sources de Ia région parisienne dont la température moyenne est de 9 à 13°, elle ne pourrait donc pas s’y reproduire ; ce qui confirme ce que jai dit plus haut sur lhabitat méditerranéen de cette Planaire. Conditions et genèse de l'état asexué.— Les organes génitaux font défaut, même chez les gros individus. Sur coupes, je n'ai rencontré aucune trace d’éléments-sexuels différenciés, mais j'ai remarqué le long de la ligne médiane ventrale, en avant et en arrière du pharynx, des amas allongés de grosses cellules arrondies, à noyaux volumineux et à protoplasme très réduit. Quelle est la signification de ces groupes de cellules? Repré- sentent-ils simplement des dépôts de cellules de régénération plus abondantes au niveau où se produit habituellement la scis- sion et analogues à ceux que signale Curtis (1902, p. 534) chez P/. maculata; où sont-ils l'homologue des cordons qui, chez les autres Planaires, donnent naissance aux gonades ? Je ne sais, n'ayant pas encore abordé l'étude histologique détaillée de cette Planaire. En tous cas on n’a jamais vu de façon cer- taine les individus sexués de cette espèce. DraparnauD dit que .« cette Planaire est ovipare au printemps, et gemmiparé en été » mais, étant données les connaissances encore assez rudi- LL près pes A. VANDEL mentaires que l’on possédait à cette époque sur ce groupe d’ani- maux, 11 se pourrait que l'auteur ait confondu la P/. subtenta- culata avec une autre espèce, la gonocephala, par exemple. Les individus que j'ai récoltés au printemps étaient tous asexués. Ducès (1828, p. 169) « n'a jamais pu observer aucune apparence des organes génitaux, ni de leur orifice extérieur » ; il suppose cependant que certains petits individus trouvés en automne devaient provenir d'œufs. À Rapallo, ni Borezz, ni LoBerri- Boponi n'ont trouvé d'individus sexués. Il semble donc que cette espèce soit normalement asexuée. Cette condition apparaît, d’ailleurs, comme étant assez générale dans le groupe des Pla- naires qui se reproduisent par scission. Je crois qu'on peut en fournir l’explication suivante : la régénération des glandes génitales est possible chez les Planaires (Vanpez, 1921 4), mais elle s'effectue cependant difficilement et elle se produit beau- coup plus lentement que le développement des gonades chez les individus produits par voie sexuée. Chez les formes où est apparue la reproduction scissipare, la régénération des gonades dans les fragments postérieurs devient ainsi difficile et, même chez quelques espèces, ne se produit plus que dans des cas exceptionnels. La régénération des glandes génitales se fait encore aisément chez Pol. cornuta; elle est plus difficile chez PI. alpina; certains individus de cette dernière espèce, pro- duits par voie asexuée, atteignent parfois une grande taille (jusqu'à 16 mm.) sans présenter traces d’éléments sexuels dif- férenciés ; ces exemplaires constituent une race purement asexuée, comparable biologiquement à P/. subtentaculata. Enfin chez P/. vitta cette régénération parait très difficile (voir ci-dessous) et chez P{. subtentaculata elle semble devenue tout à fait impossible. Les Planaires de l'Amérique septentrionale (les seules qui, en dehors d'Europe, aient été étudiées suffi- samment au point de vue biologique), offrent des exemples analogues. P/. maculata, Vune des espèces les plus répandues aux Etats-Unis, est représentée par plusieurs variétés (ou espèces ?) dont les unes présentent une alternance de généra- tions sexuées et asexuées (Curris, 1902), tandis que d’autres paraissent exclusivement asexuées (Hyman, 1920). P/. dorotoce- phala, forme de sources et de ruisseaux, est toujours asexuée dans la natare ; cependant Cuir (1915, p. 125) a pu obtenir au des fé, cars : 4 NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 245 laboratoire quelques animaux sexués; P/. velala, espèce de mares temporaires, est aussi toujours asexuée et Caizn (1915, p. 131) a vu seulement quelques individus avec des ovaires et des testicules, mais sans appareils copulateurs. Le cas des Pla- uaires scissipares, dont on retrouve d'ailleurs l’analogue chez beaucoup d'animaux à reproduction asexuée, ne saurait mieux se comparer qu'à celui de certaines plantes cultivées depuis longtemps par bouture et qui ont perdu la propriété de former des graines (ou au moins des graines fertiles); telles sont, par exemple, la Canne à sucre (de ViziÈLe et Borpace, 1857, p. 3 et 12), le Bananier, l'Ananas, la Patate (/pomœæa Batatas), etc. Affinités. — Une dernière question se pose ‘enfin à propos de PT. sublentaculata. Représente-t-elle une forme autonome, ou simplement une variété scissipare d’une espèce normalement sexuée ? On l’a généralement rapprochée de P/. gonocephala qui présente la même allure générale et se rencontre d’ailleurs dans les mêmes régions (Ducès, 1830, p. 83). Je me suis livré, pour tâcher de résoudre la question, à un minutieux travail de comparaison entre les P/. subtentaculata de Montpellier et des Pl. gonocephala provenant des environs de Paris (Chaville). PT. subtentaculata se reconnait facilement, au premier abord, à ce qu'elle est très mince, filiforme (rapport de la largeur à la longueur : 1 à 10), alors que la gonocephala est beaucoup plus trapue (rap. larg. long. : 1 à 5); de plus, chez la première espèce, la région post-buccale atteint souvent une longueur considérable, Mais ce sont là plutôt des particularités apparte- nant en commun à la plupart des Planaires asexuées que de véritables caractères spécifiques ; ils résultent de l'absence de glandes génitales qui, à l'ordinaire, gonflent Le corps et absor- bent les matériaux de réserve au détriment de la croissance en longueur. La forme des organes sensitifs auriculaires, le nom- bre des branches digestives, est à peu près le même dans les deux cas (*). La forme de la tête est cependant assez différente (‘) Ducës indique que chez la subtentaculala les ramifications gastriques sont infiniment plus fines et plus nombreuses que chez la gonocephala (1830, p. 84), et que dans la première espèce, le pharynx est extrêmement long, et-« ne peut rentrer dans la poche destinée à le conteuir sans se replier en zigzag » (1828, ‘p. 153). Je n'ai pas observé nettement ces deux caractères ; le plus grand nombre de branches intestinales observé chez la P{. sublentaculata lient peut-être à la dimension, souvent considérable, de la région post-buccale. 246 A. VANDEL dans les deux espèces. Chez P/. gonocephala, l'extrémité anté- rieure est pointue ; elle est plus arrondie chez subtentaculata ; les auricules, dirigés en arrière, dessinent à peu près un trian- gle rectangle chez la première espèce ; dans la seconde ils affec- tent au contraire la forme d’un triangle équilatéral. Quoique la forme de la tête ne permette guère à elle seule de caractériser une espèce (d'autant plus qu'un très grand nombre dePlanaires d'eau douce possèdent une tête triangulaire pourvue de deux auricules latéraux) on doit cependant considérer, je pense, à l'exemple de Ducis, P/. subtentaculata et Pl. qgonocephala, comme deux espèces distinctes. On pourrait aussi, vu son habi- tat méditerranéen, rapprocher P/. subtentaculala d'une espèce de la Méditerranée orientale, P/. sagitta [des îles Ioniennes (Corfou et Céphalonie) (0. Scaminr, 1861) et aussi du Pélopo- nèse, à Patras (Wicuezmi, 1908)] fort voisine d’ailleurs, comme l'a déjà fait remarquer H4zzez (1892, p. 438) de P/. gonocephala. Enfin, par la forme de la tête, le manque d'organes génitaux et l’existence d'une reproduction scissipare, P/. subtentaculata se rattache peut-être à certaines formes asiatiques décrites par Waurenouse : P/. tiberiensis (Wnirenouse, 1913 6), des environs du lac de Tibériade, et P/. aborensis (Wuirenousr, 1913 a) de l’Abor, dans l'Himalaya Oriental. Mais tant que chez toutes ces formes, les organes génitaux qui seuls, chez les Planaires, peuvent fournir de bons caractères spécifiques demeureront inconnus, ces rapprochements resteront très superficiels. PLANARIA VITTA Dugès Cette espèce à été décrite par Ducès (1830, p. 82), mais malheureusement de façon très succinte. Ducès insiste sur- tout sur les caractères extérieurs qui permettent de la dis- tinguer de Dendrocæluin lacteum, et 11 ne fait que men- tionner très rapidement les particularités de l'organisation interne. Mais cette forme extérieure n'est pas absolument caractéristique de P/. vilta (*) et en l'absence d’une bonne (‘} C'est ainsi que certaines Planaires nord-américaines, telles que PL. mor- gani et PI. velala, ont un aspect très analogue. A Eten den dé 1 |"> Ve NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 947 description des organes génitaux (1), il était possible de con- foudre plusieurs espèces possédant un faciès semblable. C'est d'ailleurs ce qui est arrivé. La P/. vitta, ou soi-disant telle a été retrouvée en de nombreux points d'Europe dont j'ai donné la liste, à peu près complète, je crois, dans un précé- dent travail (Vannez, 1920 4). Mais ne Braucaaup (1920, p.210), se fondant sur des considérations anatomiques, et moi-même (1920, p. 180) me basant sur diverses observations biologiques, étions arrivés à la conclusion que la prétendue P/. vitta de Bohême, étudiée par Vespovsky, Sekkra et MRazek, était une espèce distincte de celle que l'on rencontre dans l'Europe occi- dentale. L'étude des individus sexués que j'ai pu trouver à Montpellier (v. ci-dessous) vient renforcer cette opinion et mon- trer quil y a bien là deux espèces jusqu'ici confondues par suite de la similitude de leur forme extérieure, de la rareté des individus pourvus d'organes génitaux et de l'existence dans les deux cas d'une reproduction asexuée. Ethologie.— Ducës dit que cette Planaire « est excessivement commune au printemps, dans les ruisseaux d’eau vive des envi- rons de Montpellier ». J'ai, en effet, constaté que cette espèce qui parait ailleurs généralement fort rare, est abondante dans la région de Montpellier. Cependant je n'ai trouvé cet animal que dans les ruisseaux au nord-ouest de la ville, dans le Ver- danson, le Rimassel, et tous les petits filets d’eau des environs de Grabels. IT n'est pas sans intérèt de remarquer que tous ces ruisseaux sont Justement alimentés par une nappe aquifère unique (bassin de Grabels dont la couche imperméable est cons- tituée par les marnes éocènes). Aux environs de Paris, P/. villa ne se trouve guère, comme je l'ai montré ailleurs, qu’au printemps, lors des grandes eaux, dans des torrents plus ou moins temporaires ; elle habite en temps normal les nappes souterraines. J'ai été très frappé de rencontrer dans le bassin de Grabels des conditions tout à fait analogues. Tous les ruis- seaux mentionnés ci-dessus sont des ruisseaux inconstants, à sec en été ou du moins réduits à quelques flaques d’eau sta- gnante. Ils renferment une faune caractéristique d'eaux tempo- raires, constituée principalement par des larves d’Insectes (!) Ducès signale seulement qu'ils différent de ceux de la lactée et ressem- blent à ceux de la P{. brune (= PI. polychroa ; v. ci-dessous). [is Æ— Z A. VANDEL (Nemura, Simulium, Dixa, etc.) ; on y rencontre aussi deux Turbellariés de mares ou d'eaux peu courantes : Polycelis nigra et Mesostomum linqua. Ces ruisselets sont bien différents, comme faciès et comme milieux biologiques, des sources cons- Nat Oo (5 et (] pK Fig. 2. Planaria vilta. tantes à Po/. cornuta, que nous étudierons plus loin. Ces observations montrent qu'à Montpel- lier comme dans la région parisienne les PJ. vitia ne vivent pas normalement dans ces ruisseaux, mais dans la nappe aquifère qui les alimente. C'est seulement au printemps ou après les grandes pluies, qu'entrainées par le courant, elles apparaissent en assez grand nombre dans les eaux de surface. L'observation biologique suivante vient encore appuyer cette manière de voir : J'avais essayé d'alimenter P/. villa avec des Gammarus ; ces Crevettes consti- tuent, en effet, la nourriture de choix des Pla- naires de ruisseaux. J’ai toujours échoué avec ce procédé; c'est alors que suivant l'exemple de SekerA (1906), j'ai servi à mes animaux de petits Oligochètes (Tubificidés, principale- ment); jai constaté que les Planaires se jetaient dessus avec avidité et qu'au bout de quelques heures, leur tube digestif, gonfté de nourriture, présentait une belle coloration rouge. Or ces Oligochètes, rares dans les. ruisseaux pierreux et à courant vif sont au contraire abondants dans les nappes phréati- ques où doivent vivre normalement les P/. villa. Description des individus asexués. — La plupart des individus que j'ai récoltés à Mont- pellier sont asexués ; ils sont tout à fait sem- blables à ceux que j'avais trouvés précédem- ment aux environs de Paris. Ces Planaires sont extrêmement allongées et tout à fait filiformes (fig. 2); elles mesurent 10 à 12 mm. de long sur 1 à 1,5 de large ; la couleur est blanc de lait mais elle peut devenir grise, rose ou jaunâtre, quand l'in- testin est rempli de nourriture. La tête est arrondie (fig. 3) NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 249 et ne présente pas la pointe saillante que figure Ducis dans son croquis (PI. 2, fig. 19). Les yeux petits et rapprochés l’un de l’autre sont situés au niveau des dernières ramifications digestives. Le tronc antérieur du tube digestif porte de 10 à 12 paires de ramifications primaires, tandis que les troncs pos- térieurs donnent naissance, sur leur face externe, à 20-25 branches latérales. Le pharynx présente dans sa paroi interne des couches musculaires longitudinales et circulaires bien dis- tinctes, ce qui permet, comme l’a déjà fait remarquer Exszin (1906), de classer ces animaux, quoique asexués, dans Le genre Planaria et non parnn les Dendrocælum. à Description de l'appareil ginital. — Mais, outre ces indi- vidus asexués, j'ai eu la bonne fortune de récolter dans le Rimassel deux animaux complètement sexués (le 30 mars 1921). Jusqu'ici la ré- gion de Montpellier est donc la seule où aient été signalés (par Ducis et par moi) des individus sexués de P/. vitta ('); partout ailleurs on n'a trouvé que des animaux dépourvus de glandes génitales. Ce cas rappelle lexemple classique du Ctenodrilus serratus qui, quoique répandu sur toutes les côtes de l’Europe Occidentale, n'a été ren- A SAISIE ES contré à l’état sexué qu'une seule fois Need et en un seul point, près de Naples (Monricezr, 1906). La rareté d'individus sexués de P/. vitta est, semble-t-il, comme pour P/. sublentaculata, une conséquence de la reproduction asexuée. Les glandes génitales des deux individus sexués récoltés près de Montpellier offrent une répartition remarquable. Les ovaires, composés d’un petit nombre d'éléments, sont, comme à l'ordi- naire, situés dans la région antérieure du corps, et occupent l’espace compris entre le deuxième et le troisième diverticule intestinal. Mais les testicules et les vitellogènes, quoique fort bien développés, au lieu d’être distribués principalement dans la moitié antérieure du corps, comme chez les autres Planaires, (!} Je ne tiens pas compte des découvertes de Bohême qui se rapportent à une espèce différente. 17 250 A. VANDEL sont, dans les deux animaux que j'ai pu étudier, strictement cantonnés dans la région postérieure; les vitellogènes remon- tent tout au plus jusqu'à la base du pharynx. Cette particula- rité, si tant est qu'elle est constante, permettrait de caracté- riser d'emblée cette espèce, même si les individus étaient incomplètement sexués. J'ai représenté dans lafigure # une coupe longitudinale semi- schématique de lappareil copulateur. L'atrium génital (ag) est simple ; 1l est ftapissé par un épithélium formé de hautes cellules fortement eiliées etentouré de deux couches musculai- res (circulaire et longitudinale) très développées (#24) : l'utérus (u) est, comme à l'ordinaire, bordé de grandes cellules en mas- m1. 272 od EE 5 de K RES ! ‘4 ? P2. PSE: NEV Se Fig. 4. — Coupe longitudinale semi-schématique de l'appareil copulateur de PE. vitta. Pour l'explication des lettres, voir le texte. sue et remplies de vacuoles ; le canal utérin (cu) est large, et son épithélium très épais est constitué par de grosses cellules cubiques, très fortement ciliées. Sa double musculature, longi- tudinale et circulaire, est surtout développée du côté de l’atrium. Les oviductes se réunissent en un canal commun fort court (od) qui vient s'ouvrir dans l’atrium génital non loin du point d'abouchement du canal utérin ; Les oviductes sont entourés de très nombreuses glandes érythrophiles (glandes coquillières, ge). L'ensemble du pénis (papille et bulbe) est court et ramassé ; le bulbe pénien assez peu musculeux est bordé extérieurement par quelques faisceaux plus forts (mb). La base du pénis est occupée par une vésicule séminale (vs), piriforme, dans laquelle débouchent en se recourbant fortement les deux canaux défé- RP. es 5 NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRÉS 251 rents (vd). La vésicule séminale est bordée de hautes cellules limitées elles-mèmes par une couche de muscles circulaires (nos) ; elle débouche dans le ductus ejaculatorius !de), qui est fort court, par une papille (pap) assez semblable à celle de PI. gonocephala, mais moins allongée. La paroi externe du pénis est bordée par deux couches musculaires (longitudinale et circulaire, #2p) qui disparaissent à l'extrémité distale, tandis que vers la base elles se continuent d'une part avec les muscles de la paroi de l’atrium génital (#4), d'autre part avec la cou- che d’enveloppe du bulbe pénien{76). L'appareil copulateur qui vient d'être décrit répond au type général des Planaria. West à coup sûr très différent de celui que figure, VesnovskY (22 Bôumic, 1909) pour la P/. vita de Bohême, et qui, avec son pénis allongé, terminé par un fla- gelle (?), son organe musculo-glandulaire, rappelle bien plu- tôt un appareil de Dendrocælum que celui d'une P/anaria. M. le Professeur SekeRa m'écrit récemment quil a pu obtenir, dans les bassins de son laboratoire, quelques individus sexués de l'espèce bohémienne. Fespère qu'il en donnera prochaine- ment une description qui permettra, le type de Montpellier étantmaintenant suffisamment connu, d'établir une comparaison serrée entre ces deux formes et de conclure définitivement, soit à leur identité, soit au contraire à leur autonomie. 2 POLYCELIS CORNUTA Johnson — (POL. FELINA à | Dalyell). Les organes musculo-glanduiaires. — Cette espèce habite les ruisseaux frais de l'Europe moyenne, et semble répandue, en particulier, sur tout le territoire français (1); elle se recon- nait facilement à plusieurs caractères très saillants ; l’un des plus remarquables et dont on ne retrouve l’analogue chez aucune autre planaire d'eau douce est l'existence, en arrière de l'appareil copulateur d’une poche présentant un orifice spé- cial et renfermant un certain nombre d'organes en forme de poire ou de massue que l’on désigne sous le nom d° « organes (1) Je donnerai dans un prochain travail la répartition générale de cette espèce en France, 252 A. VANDEL musculo-glandulaires » (‘). Ces organes, encore énigmatiques, sont ainsi nommés parce qu'ils sont constitués principalement par un peloton de puissantes fibres musculaires et par des glandes qui viennent déboucher à l'extrémité libre de la papille. Leur rôle est Jusqu'ici complètement inconnu; j'ai seulement montré (Vanvez, 1920 &) qu'ils se comportent comme l'appareil copulateur et que leur développement est placé sous la dépen- dance des glandes génitales. Von Grarr (1899, p. 182), et à sa suite Burr (1912, p. 37), pense que ces organes sont les représentants très modifiés des « organes à poison » que l’on trouve chez certains. Acæles (Convoluta convoluta, C. hippar- chia, C. borealis) et qui seraient venus s’adjoindre à l'appareil : génital. Quoi qu'il en soit, cette poche à organes musculo-glan- dulaires (?) existe de façon générale chez tous les Pol. cornuta de l’Europe moyenne. Seul Ducës (1830, p. 84), ignorant d’ail- leurs les travaux de ses prédécesseurs, DaLyeLz et Jonxsow, décrivait et figurait une P/. viganensis possédant en arrière de l'appareil copulateur deux poches à 0. m. g. O. Scamipr (1860) trouvait près de Gratz une Planaire toute semblable et lui don- nait (pour la seconde fois, Jonxsox ayant déjà employé le même qualificatif) le nom de Po/. cornuta; 11 n’osait cependant l’as- similer à la P/. viganensis de Ducis, car la forme des environs de Gratz ne possédait qu'une seule à poche à 0. m. g. Tous les auteurs suivants n’ont signalé qu'une seule poche, et HaLLez (1892, p. 447) était d'avis « qu’en cette circonstance Ducës avait commis une erreur d'observation ». J'étais arrivé moi- même à une semblable conclusion, quoiqu'il me parut cepen- dant difficile d'admettre qu’un aussi bon observateur que Ducës se fut trompé à ce point. Aussi quel ne fut pas mon étonnement (‘} Voter (1896, p. 116) leur donne le nom d'organes « adénodactyles ». Von Grarr (1899, p. 179) a distingué daus un genre de Planaires terrestres (4r#0- posthia) des organes assez compliqués auxquels il a donné, suivant leur forme, le nom d’« adénodactyles » où d’« adénochires ». Ces organes se rattachent cer- : tainement aux organes musculo-glandulaires des Paludicoles, mais comme, néan- moins, il s'agit D de formations assez spéciales, il me semble préférable de réser- ver les termes d'adénodactyles et d’adénochires an cas particulier d’Artioposthia et de conserver l'appellation générale d'organes musculo-glandulaires pour les appa. reils des Planaires d’eau douce, désignation un peu vague, mais qui correspoud bien aux connaissances que nous avons actuellement de ces productions. Une - opinion analogue a été émise par A. Weiss (1910, p. 595). (?) Je désignerai dorénavant ces organes par l'abrévialion : Co. m. g. ». NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 253 quand, aux environs de Montpellier, je constatai que tous les Pol. cornuta possédaient justement deux poches à 0. m. g. La description de Ducès n’était donc point erronée, mais elle se rapportait à une variété spéciale. Pol. cornuta viganensis. — J'ai trouvé aux environs de Mont- pellier deux stations de Pol. cornuta. L'une est la source du Lez et les ruisselets voisins; l’autre une région sourcière située dans la garrigue de « la Paillade », sur la rive droite de la Mos- son. Ces sources sont permanentes et avaient, lors de mon pas- sage (30, 31 mars 1921), une température de 155 environ ("). Elles hébergent une faune d’un cachettout méridional : une petite Bythinelle, spéciale à nos départements du Midi : Belgrandia gibba Drap.; un Gammarus, G. Veneris Heller (?), propre à la région méditerranéenne:ftalie, Sicile, Syrie, Tunisie, Algérie, etc. Je propose de donner à cette forme de Pol. cornuta le nom de viganensis, utilisant ainsi pour désigner cette variété le nom spécifique créé par Ducis. Elle se caractérise, d’abord, par la présence de deux poches à 0. m. g. (fig. 5 1), et ensuite, par le nombre des organes contenus dans chacune de ces poches. Les nombreux individus que j'ai récoltés un peu partout en France, et qui se rapportent à ia forme normale à une seule poche, ne présentent d'une façon très constante que deux o. m.g. (fig. » Il), et c’est là probablement un caractère géné- ral pour les animaux de l'Europe moyenne (°); par contre pour Pol. cornuta viganensis, ce nombre varie entre 3 et 6 (généra- lement 3 ou À) pour chaque poche. [1 y à donc ici non seule- ment multiplication des poches elles-mêmes, mais encore des organes renfermés à leur intérieur. Ces caractères sont certai- nement héréditaires, car ils existent de facon constante chez tous les individus de la région de Montpellier (et du Vigan, d’après Ducis). Je n'ai pu encore m'en assurer expérimentale- {‘) Cette observation montre combien est inexacte l'hypothèse de Voter (1894, 4900) qui vent faire de cet animal un reliquat glaciaire et qui attribue la disparition des individus sexués au réchauffement du climat ayant suivi le retrait des glaciers. Les Planaires des sources de Montpellier, dont l’eau est pourtant relativement chaude, sont parfaitement sexuées. Par contre, cette espèce manque _ en Scandinavie et parait très rare dans les Hautes-Alpes. (2) Détermination de M. Ghevreux, que je remercie de sa grande obligeance. (3) O ScawimT (1860) n'a vu aussi que deux papilles; Vorcr (1896, p. 116) - signale 4 à 5 papilles, mais les observations de cet auteur laissant assez souveut à désirer, il serait nécessaire de vérifier ses assertions sur ce point. 254 A. VANDEL QE] ment ; j'ai seulement entrepris quelques expériences de-régéné- ration ; des animaux bien sexués sont sectionnés en arrière de la bouche et les parties antérieures sont mises en observation ; on constate qu'au bout de six semaines environ l'appareil copulateur etles deux poches à 0. m. g. se reforment avec tous leurs carac- tères. J'avais d’abord pensé à rapprocher cette multiplication des o. m. g., de la polvpharyngie que présente P/. alpina, à |, Fig. 5. — 1. Pol. cornuta viganensis, de Montpellier. — Il. Pol. cornuta, forme normale des environs de Paris. — II. Pol. cornuta Borellii, de Vernet. la limite méridionale de son aire de répartition. Mais des recher- ches ultérieures, loin d'étayer cette comparaison, m'ont suggéré une interprétation toute différente ; et voici comment. J'avais essayé de me rendre compte de la distribution de cette var. viganensis et de préciser les limites de son aire de répartition ; représente-t-elle une forme strictement locale, ou bien au con- traire est-elle répandue dans toute la zone méditerranéenne ? NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 255 Question à laquelle il est actuellement impossible de répondre, car la faune d’eau douce du Midi de la France (et la faune turbellarienne, en particulier) est encore à peu près complète- ment inconnue. Le seul travail ayant trait aux Planaires d’eau douce de cette région est celui de Borezzt (1905)-qui nous a fait connaître l’existence de P/, alpina et de Pol. cornuta dans les Pyrénées. Très aimablement, M.le Professeur Borezzr a bien voulu me confier les exemplaires de Pol. cornuta qu'il avait récoltés au cours de son voyage, et, si l'étude de ce riche maté- riel ne m'a pas fourni de données nouvelles sur la distribution de la var. #iganensis, 11 m'a permis, par contre, de comprendre la véritable signification de cette variété, et m'a révélé des faits extrèmement intéressants sur les races pyrénéennes de Po/. cornuta. L'examen de ces échantillons m'a amené à considérer la forme de Montpellier, non comme une forme dérivée, mais bien plutôt comme la souche primitive qui aurait donné nais- sance aux diverses variétés des Pyrénées. Mais avant de passer à l'examen de ces races, je voudrais rapidement mentionner une observation dont je n'avais pas autrefois compris la portée, mais qui vient singulièrement éclairer les considérations pré- sentes. Dans une culture de Po/. cornuta sortis de cocons recueillis près de St-Rémi-les-Chevreuse (Seine-et-Oise), j'ai observé deux individus présentant deux poches à 0. m. g.; l’un de ces animaux ne fut malheureusement pas étudié avec soin et je n'ai pas gardé de notes précises à son sujet; quant à l'autre Planaire, elle a été fixée et débitée en coupes sériées ; elle possédait, en arrière de la poche à 0. m. g. normale, une autre poche s'ouvrant par un orifice spécial, mais dépourvue de papilles m. g. Je crois pouvoir maintenant interpréter cette formation, dont la signification m'avait échappé autrefois, comme l'indication d'un retour atavique vers la forme primitive à deux poches à 0. m. g. Les variétés pyrénéennes de Pol. cornuta.— Passons mainte- nant à la description des formes pyrénéennes de Pol. cornuta récoltées par Borezr; elles présentent, au point de vue de la répartition des o. m. g., des particularités tout à fait remarqua- bles. Les échantillons trouvés dans la haute vallée du Tech (près d'Arles-sur-fech), sur le flanc sud du Canigou, correspondent à peu près au type normal, c'est-à-dire que la poche à 0. m. g. 200 A. VANDEL est unique et située en arrière de l'appareil copulateur. Cepen- dant le nombre des papilles m. £. au lieu d’être de deux, comme chez les individus de l'Europe moyenne, s’est montré réguliè- rement de quatre chez les animaux que j'ai examinés ; ce carac- tère les rapproche de la var viganensis ; mais nos connaissances sur la variabilité des 0. m. g. sont encore trop rudimentaires pour que j'ose faire de cette forme une variété spéciale. À Vernet, sur le versantnord du Canigou, dans un affluent du Têt (), se rencontre une autre variété que l'on reconnait immé- diatement à l'emplacement de la poche à 0. m. g., située tout à fait à l'extrémité postérieure du corps (fig. 5 IT). I n’y a pas là simplement, comme on pourrait le croire au premier abord, une grande variabilité dans la position de la poche à 0. m. g., car l'on ne rencontre aucun intermédiaire entre cette forme et la précédente; l'emplacement de la poche est rigoureuse- ment déterminé dans chaque cas. Je considère ces variétés comme dérivant toutes deux de la forme primitive de Montpel- lier (var. viganensis) ; la première aurait conservé la poche à 0. m. g. antérieure, la seconde la poche postérieure. Cette hypothèse me parait la plus rationnelle, quoiqu'il soit difficile d'en administrer la preuve rigoureuse, les deux poches ne se distinguant guère l’une de l’autre que par leur position. Je propose de donner à cette seconde variété le nom de Borellii, en souvenir du naturaliste qui l’a découverte. La même variété. se retrouve plus loin, dans les Pyrénées Centrales, à Gavarnie. Chez cette forme, le es des o. m. g. est de : à 4, comme dans la var. Dane à Ainsi donc, tandis que les Pol. cornuta de l'Europe moyenne ne montrent pas de variations importantes, les formes du Lan- guedoc, du Roussillon et des Pyrénées présentent un polymor- phisme remarquable. Il est particulièrement intéressant de constater que les vallées, cependant toutes proches du Têt et du Tech, hébergent des variétés différentes. Ces quelques {‘) L'envoi de M. le Professeur BorezLzr renferme aussi une collection d'indivi- dus provenant de Montlouis, dans la haute vallée du Têt; malheureusement tous ces animaux sont asexués et n'ont pu servir dans cette étude, (2) ne faudrait pas croire que le nombre des 0. m. g. dépend de l'âge. Un magnifique individu provenant de Gavarnie qui, fixé, mesure 14 mm. et qui devait atteindre sur le vivant au moins 20 mm. de long, n'a que 3 0. m. g., alors que d'autres animaux beaucoup plus petits en possèdent 4. NOTES BIOLOGIQUES SUR LES PLANAIRES 257 observations, quoique encore fort peu nombreuses, rappellent Les exemples classiques fournis par certaines espèces dont les variétés distinctes sont régulièrement réparties par vallées. Tel est Le cas de beaucoup de Mollusques habitant les îles volcani- ques du Pacifique : Achatinelles des îles Sandwich (Gulick, 1905), Partula de Tahiti (Crampton, 1916); c'est le cas aussi de beaucoup de cavernicoles (et en particulier, dans les Pyré- nées, des Silphides du genre Speonomus, étudiés par Jeannel (1911)). Il semble qu'il en soit de même pour les Planaires des Pyrénées et il serait intéressant de rechercher jusqu'à quel point les différentes variétés sont localisées par vallées ou par bassins fluviaux. AUTRES ESPÈCES En plus des trois espèces signalées ci-dessus j'ai encore trouvé aux environs de Montpellier les Planaires suivantes : PI. polychroa O. Schmidt, dans la source du Lez ; cette espèce doit correspondre, en partie fout au moins, à la P/anaire brune (PT. fusca) étudiée par Ducès. Quelques-uns de mes échan- tillons étaient abondamment parasités par une Grégarine, Lan- kesteria planariæ (Vanvez, 1921 a). | Dendrocælum lacteum Muller, et Polycelis nigra Ehrenb., en plusieurs endroits ; ces espèces banales et ubiquistes avaient été déjà signalées par Ducës. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 1920. Beaucnaue (P. pe). — Turbellariés et Hirudinées (Première Série). — Biospeologica. — Arch. Zool. Experiment. \L. 1909. BôünuiG. — Turbellaria, Tricladida. Süsswasserfauna Deutschlanis. XIX. 1893. Borezcr. — Osservazioni sulla Planaria alpina (Dana) e catalogo dei - Dendroceli d’acqua doice trovati nell’ Italia del Nord. Bol. Mus. Zool. Anat. Comp. Univ. Torino. VIE, n° 137. 1905. 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Wicnezmi. — Sinnesorgane der Auriculargegend bei Süsswassertricla- den. Zool. Ans. XXXHI. 1886. Zacnarras. — Frgebnisse einer zoologischen Exkursion in’s Glalzer-, Iser-, und Riesengebirge. — Zeit. aviss. Zool. XLHI. 1890. Zscnokke. — Faunistiche Untersuchungen an Gebirgsseen. — Verh. naturf. Gesel. Basel. IX. 1891. Zscnokke. — Die zweite zoologische Exkursion an die Seen des Rhäti- kon. /bid. D' J.-G. de MAN à IeRsEkE (Hollande). Sos dome désnst dés. dunes. | hé ts née SUR QUELQUES ANOMALIES OBSERVÉES CHEZ DEUX ESPÈCES DU GENRE PINNOTHERES LATR. DE L'ARCHIPEL INDIEN | Avec la Planche VIII ; Au mois de juin 1920, M. le Professeur Ch. PéREz ma envoyé deux Pinnothères, me priant de les déterminer. L'un | d'entre eux avait été trouvé dans une Arca, récoltée à Pile | Lombok, l’autre provenait également d'une espèce d’Arca, | mais de l'ile d'Amboine, Le Pinnothère de Lombok portait un Bopyrien sous-abdominal, le Rhopalione Pelseneert, espèce ] signalée brièvement par M. Pérez (Compt. rend. de l'Acad. des Sciences, 1920, 1* semestre, t. CLXX, n° 26, p. 1617), le | spécimen d'Amboine hébergeait un Bopyrien branchial, déerit par lui sous le nom de Onychocepon harpax (C. R Acad. Se, t. CLXXIII, 1924; p.51). Le bouclier céphalo-thoracique de l’exemplaire de Lombok est large de 6,5 mm. et long de 4,5 mm., sans l'abdomen ; sa face supérieure présente en son milieu une forte dépression dorsale, plus où moins en forme d'X, et, immédiatement en arrière des angles antéro-latéraux, les bords latéraux sont enfoncés, de sorte que ces angles sont assez aigus. En ce qui concerne cette dépression dorsale, M. Pérez croit devoir l'imputer à ce que cet exemplaire à été un peu desséché, l'alcool du tube s'étant évaporé. Ce Pinnothère porte toutes les pattes, à l'exception de la patte antérieure du côté droit. Le Bopyrien branchial qu'hébergeait le Pinnothère d’Amboine, se trouvait du côté droit et a déterminé une bosse de la cara- pace : c'est pourquoi il m'est impossible d'indiquer exactement - D US PPT i PINNOTHERES ANORMAUX 261 la largeur du bouclier céphalo-thoracique ; 1} était proba- blement large de 5,5 mm. et long de 4,8 mm. Chez celui-ci toutes Les pattes sont présentes. Les caractères utilisés pour distinguer les espèces du genre Pinnotheres sont empruntés principalement à la forme des pattes-mâchoires externes, surtout à la manière d'insertion du dernier article, le dactylus, sur l’article précédent, ainsi qu'aux dimensions des pattes, notamment à la longueur et à la forme du dactylus des quatre pattes ambulatoires ; enfin à la forme du bouclier céphalo-thoracique. Ayant étudié les pattes- mâchôires externes sous le microscope, j'ai aussitôt constaté que les deux exemplaires appartenaient à deux espèces diffé- rentes. La patte-màchoire externe de l'exemplaire de Lombok ressemblait suffisamment à celle du Pins. arcophilus Bürger (O0. BürGer, Ein Beitrag zur Kenntniss der Pinnotherinen, dans : Zoolog. Jahrbücher, Abth. f. Syst, t. VIII, 1895, pl. 10, fig. 10) et, à l'exceplion de la patte qauche de la pénultième paire, les pattes thoraciques semblaient s'accorder avec celles de cette espèce. J'ai donc rapporté cet exemplaire au Pinn. arcophalus Bürger. De même l'exemplaire provenant d’Am- boine fut déterminé comme étant le Pinn. palaensis Bürger, les pattes concordant très bien avec la description de M. Büncer, à l'exception de la patte qauche de la pénultième paire. Les pattes de la pénultième paire ont l'une et l'autre, chez les deux exemplaires, une forme et des dimensions différentes à droite et à gauche, et c’est la palle gauche qui est anormale : ce sont ces anomalies qui seront décrites dans les lignes suivantes. Nous pouvons omettre la description des carapaces, parce quelles sont défigurées. Etudions les caractères des pattes- mâchoires externes d’une manière plus précise. Comme il a été dit déjà, la patte-mâchoire externe de l’exemplaire de Lombok s'accorde très bien avec. la description et la figure du Pinn. arcoplhilus Bürger ; le dactylus styliforme (fig. 1,1 a) est inséré au bord interne du propodus, un peu plus près de son extrémité proximale que de son extrémité distale, de sorte qu'il s'étend le long du tiers médian du propodus ; celui-ci se rétrécit distinctement vers son extrémité distale obtuse. Selon M. Bürçer la portion palmaire des pinces serait plus de deux fois aussi longue que les doigts; chez Le Pinnothère de Lombok 242 J.-G. DE MAN (fig. 2) elle n'est que 1,7 fois aussi longue, je dois cependant remarquer que dans la figure 10c de cet auteur la portion palmaire ne parait pas si allongée ; près de l'articulation du doigt mobile la pince est légèrement plus haute que les doigts ne sont longs. A l'exception de la patte gauche anormale de la pénultième paire, les quatre pattes ont à peu près la même longueur. Les dactyles des 1°, 2° et 3° paires augmentent graduellement un peu de longueur, comme on le voit aussi distinctement dans la figure citée 10c, de sorte que le dactyle de la 3° ou pénultième paire (fig. 5) est environ une fois et demi aussi long que celui de la 1'° (fig. 3) ; leur forme devient aussi graduellement moins trapue, de sorte que le dactyle de la 3° paire présente une forme distinctement plus svelte ; l'extrémité de ces dactyles est légèrement courbée en dedans. Le dactyle de la dernière paire (fig. 7) est le plus long et le plus svelte des quatre pattes, presque deux fois plus long que celui de la troisième et un peu plus de deux fois plus long que les dactyles des 1° et 2° paires ; l'extrémité de ce dactyle n'est que légèrement courbée en dedans, poilue et à peu près de la même longueur que le propodus. De la patte gauche de la pénultième paire (fig. 6) le mérus, le carpus et le propodus sont légèrement plus longs et un peu plus sveltes, mais /e dactyle est presque deux fois plus long el presque deux fois plus svelle que celui de la patte droite : le dactyle est même un peu plus long et plus svelte que celui de la 4° paire, poilu comme celui-ci, à peu près aussi long que le propodus et à. extrémité légèrement courbée en dedans. Comme il a été remarqué ci-dessus, le Pinnothère de Lombok concorde dans ses autres caractères avec le Pinn. arcophilus, et, pour cette raison, la patte gauche doit être regardée comme une ano- malie. Cependant, si nous supposions que cette patte gauche fût normale et la patte droite anormale, cet exemplaire devrait être rapporté au Pinn. palaensis Bürger, du moins quant aux pattes ; mais les pattes-mâchoires externes concordent avec celles du Pinn. arcophilus et pour cette raison une telle détermination serait incorrecte. Les pattes-mâchoires externes (fig. 8,8 a) du Pinnothère d'Amboine ressemblent à celles du Pinn. palaensis Bürger. L'ischio-mérognathe est moins élargi, à bord externe moins PINNOTHERES ANORMAUX 263 fortement courbé, le dactyle est plus svelte et un peu plus rapproché de l'extrémité obtuse du propodus que chez le Pinnothère de Lombok. A l'exception de la patte gauche de la pénultième paire, les pattes ressemblent à celles du Pinn. palaensis. En ce qui à trait aux proportions entre la longueur de la portion palmaire des pinces et celle des doigts (fig. 9), cet exemplaire s'accorde avec l'autre, tandis que, selon M. Büréer, la portion palmaire serait deux fois aussi longue que les doigts ; la hauteur de la pince est cependant égale à la longueur des doigts et pour cette raison la pince présente une forme un peu plus svelte que chez l'exemplaire de Lombok. Le dactyle de la 1° paire des pattes ambulatoires (fig. 10, 10 &) à une forme trapue, un peu moins cependant que chez l’exemplaire de Lombok : celui de la 2° paire (fig. 11) présente environ la même longueur et la même largeur et ces deux pattes sont presque de longueur égale ; la patte droite de la 3° paire (fig. 12) est plus longue et plus svelte que les deux pattes précédentes, le dactyle est deux fois plus long que celui de la 2° paire, à peu près aussi long que le propodus, presque trois fois plus svelte que les dactyles des pattes des 1"°et 2° paires, à extrémité faiblement courbée en dedans, moins fortement que pour ces derniers. Dans la patte de la dernière paire (fig. 14) le mérus, Le carpus et le propodus sont distinc- tement plus courts que ceux des trois pattes précédentes, mais le dactyle n'est que légèrement plus court que celui de la 3° paire ; sa forme svelte est à peu près la même, et il est deux fois aussi long que ceux des f"° et 2 paires ; la 4° patte est donc beaucoup plus courte que celle de la 3° paire et même à peine aussi longue que celle des 1'° et 2° paires. Maintenant la patte gauche de la pénultième paire (fig. 13, 13 a) est beaucoup plus courte el beaucoup moins grèle que la patte droite et le dactyle n'est que moitié aussi long et moitié aussi svelte ; c'est pourquoi cette patte ressemble plus à celles des 17° et 2 paires et, chose remarquable, présente une grande ressemblance avec la patte droite de la pénultième paire du Pinnothère de Lombok ! Or, si nous supposions que cette patte gauche füt normale et la patte droite anormale, l'exemplaire se rappro- cherait du Pinn. arcophilus Bürger et du Pinn. modiolicola Bürger, mais chez ces deux espèces, les pattes-machoires 264 J.-G. DE MAN externes offrent d'autres caractères. D’après M. BürGer, chez Pinn. palaensis les dactyles des 3° et 4° paires seraient à peu près trois fois aussi longs que ceux de la 2° paire, mais cette différence doit probablement être attribuée à la petite taille de l'exemplaire d'Amboine ; en eftet, selon M. Bürcer, la carapace de cette espèce atteindrait une largeur de 10,5 mm. Tels sont les faits que j'ai constatés, mais dont Je ne réussis pas à donner une explication. M. Ch. Pérez m'a écrit à ce propos : « Pour les anomalies que vous me signalez, je ne pense pas qu'elles puissent être imputées à la présence des parasites, car l'action morphogène de ces parasites ne se mani- feste généralement que dans les caractères sexuels secondaires ». Je veux cependant rappeler que la patte gauche anormale du Pinncthère de Lombok ressemble en quelque sorte à la patte droite normale de l'autre exemplaire et que la patte gauche anormale du Pinnothère d'Amboine présente une grande ressem- blance avec la patte droite normale de l’exemplaire de Lombok ; si nous prenons maintenant en considération que Penn. arco- philus et Pinn. palaensis habitent tous deux les Arca, il devient vraisemblable, me semble-t-il, que les anomalies décrites puis- sent être imputées à un métissage des deux espèces. Tableau A. — Exemplaire de Lombok. Les dimensions ont été indiquées en millimètres. Patte Patte Patte Patte Patte droite | gauche | gauche | droite | droite de la de la de la de la | de la lre paire|2e paire | 3° paire | 3° paire | # paire Longueur du merus, Largeur du merus, Rapport entre la longueur et la largeur. TIRER TS Longueur du carpus. Largeur du carpus. Rapport entre la longueur et la largeur . LU Longueur dn propodus ù Large ur du propodus . . . Rapport entre la longueur et la largeur . te Longueur du dactylus x Largeur du dactylus. Rapport entre la longueur et la largeur : ». - ? Lo 5 dti ins te De Sté + PINNOTHERES ANORMAUX É 265 . La pince gauche est longue de 3,12 mm., haute de 1,3 mm., près de l'articulation des doigts, doigts longs de 1,14 mm. Rapport entre la longueur et la hauteur de la pince, 2,4 ; rapport entre la longueur de la pince et celle des doigts, 2,7 : rapport entre la longueur de la portion palmaire et celle des doigts, 1,7. Tableau B. — Exemplaire d'Amboine. Les dimensions ont été indiquées en millimètres. Patte Patte Patte Patte Patte droite | droite | gauche | droite | droite de la de la de la de la de la lre paire! 2e paire | 3° paire | 3° paire | 4° paire ——…—"—_—_ | ———— | ——— | ———— | —_—__ _— Longueur du merus , . . : :. 2 DM 1,8 2,25 1,34 Larseur du merus, , 0,48 0,47 0,44 0,43 0,35 Rapport entre la longueur et la largeur , . RTS e 4,2 4,5 4,1 5,2 3,8 Longueur du carpus. il 1:29 4,14 1,36 0,86 Largeur du carpus. , . 0,42 0,42 0,4 0,37 0,35 Rapport entre la loneueur et la Mrs et. ee 2,4 3 2,8 Dal 2,4 Longueur du propodus. 4,2 1,3 1,28 1,42 4,4 Largeur du propodus.. 0,4 0,38 0,37 0,34 0,31 Rapport entre la longueur et la largeur 3 6) Lv33 2 350 4,2 3,5 Longueur du dactylus . 0,64 : 067 0,8 ANS 1989 Largeur du dactylus. 0,21 0,23 0,2 0,19 0,2 Rapport entre la PREMEUE et la largeur.) ERA Pa 3 3 4 8 6,7 La pince gauche est longue de 2,55 mm., haute de 0,95 mm. près de l'articulation deu doigts, doigts longs de 0,95 mm. Rapport ‘entre la longueur et la hauteur de la pince, 2,7; rapport entre la longueur de la pince et celle des doigts, 2,7; rapport entre la longueur de la portion palmaire et celle des doigts, 1,7. PEER BIBLIOGRAPHIE BERNARD (Noël). — Principes de Biologie Végétale. — Nouvelle collec- lion scientifique. — Alcan. — 1921. Prix : 8 francs. Cet ouvrage continue la série des œuvres posthumes de Noël Berxaro. Il forme la deuxième parte d'un Cours de Botanique professé par l'auteur aux Facultés de Caen et de Poitiers ; la première partie a paru précédemment sous le {itre « L’Evolution des Plantes ». Au debut de son livre, l'auteur rappelle que, en physiologie comme dans. toutes les sciences expérimentales, les phénomènes de la nature sont régis par le principe du déterminisme, et que les processus vitaux n’échappent pas à cetle loi; c'est ce qu’il essaye de montrer dans tout le cours de ces ‘« Principes de Biologie Végétale ». L'ouvrage se divise en deux parties : Dans une première partie, relative à la vie cellulaire, l’auteur étudie les phénomènes de nutrition sous leur double aspect physique et chimique, puis l’action des agents extérieurs sur la cellule. La deuxième partie est consacrée. à la « coordination dans les complexes cellulaires » ; il passe ainsi en revue les différents groupes de Végétaux infé-. rieurs (Thallophytes) el donne les principaux traits de Jeur cycle évolutif. Le livre se (ermine par deux chapitres particulièrement intéressants, car ils se rattachent directement aux travaux personnels de l’auteur ; ce sont « Un aperçu sur les théories lichéniques » et « Remarques sur l’immunité chez les Plantes ». A. VANDEL. D ———————— —————"—— LAVAL. — IMPRIMERIE L. BARNÉOUD ET C'°. PLANCHEIV FA EXPLICATION DE LA PLANCHE IV Fig. 4. — Crique à l'E. de l'amer Rosedo, due à l'érosion de deux filons de diorite injectés dans des diaclases à angle droit du granit (8-IX-1920, pleine mer). Fig. 2. — Deux colonies de Codium bursa sur les cailloux d'un déversoir d'herbier près de la R. Music (16). Echelle 1/2 environ. Planche IV Bulletin Biologique. T. LV. P. de Beauchamp, phot. v PLANCHE V EXPLICATION DE LA PLANCHE V Fig 3. — Jeunes pousses de Fucus et petits thalles dressés ; rochers sous la propriété Bourgain, à la pointe de Guersido (15-VIIE-1919:. Fig. 4 — Codium bursa.et (. adhærens sur une paroi verticale, au S. de Raguenez-meur (7), Au-dessus, C. tomentosum et Fucus serratus L. Au-dessous, Zostères dans l’eau. ŒT Fig. 5. — Plaque à fond sableux au bord W. de Lavrec 5). Deux touffes de Padina pavonia L.; entre elles, Zostères et Cyslosires, débris de coquilles, (15-IX-1919). É Bulletin Biologique. T. LY. Planche V P. de Beauchamp et R. Lami, phot. Imp. Catala frères. Paris. PLANCHE VI Fr CRE EXPLICATION DE LA PLANCHE VI Fig. 6. — Un gazon de Fucus lutarius Kütz. sur la côte E. en face le Mou- lin du Nord, couvrant la banquette de vase saillante, au second plan, au milieu des chenaux criblés de tortillons d’Arénicoles. En arrière et sur les pierres du premier plan Ascophyllum et Fucus normaux (23-VIII- 1919). é Fig. 7, — Une touffe du même gazon, vue prise verticalement sur la vase (23-VIIL-1919). Fig. 8. — Herbier à Zostera nana Roth. sur fond sableux, contre Rague- nez-meur (3). Il occupe la petite plage du second plan, au milieu des rochers à Fucacées supérieures et tout près de la zone subterrestre (10- VIII-1949). Fig. 9. — Cuvette de roche sur la côte N. Dans l’eau, plusieurs pieds d’Ai- manthalia lorea L. (noter les thaïles au bas des lanières), Cystoseira myriophylloides Sauv., Patelles. Autour Fucus vesiculosus L. et F. ser- ratus L. (10-IX-1919). Bulletin Biologique. T. LV. Planche VI Imp. Catala frères. - Paris té P. de Beauchamp, phot PLANCHE VII ?. Bulletin Biologique. T. LV. j sde LC ILE DE BRÉHAT fe 4 D Le] AT M B E delle T* AB QT At CR rs ne Set ; le Chindeleps"a &, re Répartition des sédiments et des herbiers Echelle de 4 : 24.000 environ Sable pur Gsm Blocs el roche Sable vaseux ee Zostera marina Vase pure EE Zoslera nana EE FER rat a . #8Kerrannets Î P ga" 2 ; o S : Ge Gare Pleuigis| a. e La BRoch Her Mere P Lei ar Serive Z'Gateneneu Bts a Calesquière N. > 9" Blanche À ms C Men Gam T° a ee - È e - Pt l'Arcouest 9h PLANCHE VI EXPLICATION DE LA PLANCHE VIII Fig. 1-7. — Exemplaire de Lombok (Pinnotheres arcophilus Bürger). 4 Palte-mâchoire externe droite, X 22; 1a partie antérieure de cette patte- mâchoire, X 45 ; 2 patte antérieure gauche, X 15 ; 3 patte droite de la {re paire, X 45; 3a dactyle de cette patte, X 22 ; 4 propodus et dactylus de la patte gauche de la 2° paire, X 22; 5 patte droite de la 3e ou pénul- ième paire, X 15; 5a dactyle de cette patte, X 22 : 6 patte gauche de la 3e ou pénultième paire, X 15 ; 7 patte droite de la-4e paire, X 45. Fig. 8-14.— Exemplaire d'Amboine (Pinnotheres palaensis Bürger).8 Patte- mâchoire externe droite, X 22; 8a partie antérieure de cette patte- mâchoire, X 45 ; 9 patte antérieure gauche, X 15 ; 10 patte droite de la {re paire, X 15 ; 10a dactyle de cette patte, X 22; 11 propodus et dac- tylus de la patte droite de la 2 paire, X 22; 12 patte droite de la 3e ou pénultième paire, X 145 ; 13 palte gauche de la 3e ou pénultième paire X 15; 13a dactyle de cette patte X 22 ; 14 patte droite de la 4e ou der- nière paire, X 15. 3 Bulletin Biologique. T. LV. PLancue VIII NN À NAN & ! | BULLETIN BIOLOGIQUE DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE TOME EV 1921 Comité de rédaction : L. BLARINGHEM (Paris). F. MESNIL (Paris). G. BOBN (Paris). P. PELSENEER (Bruxelles) M. CAULLERY (Paris). Cu. PÉREZ (Paris). CH. JULIN (Liège). Er. RABAUD (Paris) BULLETIN BIOLOGIQUE (Précédemment, BULLETIN SCIENTIFIQUE) DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE FONDÉ PAR ALFRED GIARD. : Tome LV CTI TL IE LIL LL PARIS Laboratoire d’Evolution des Étres organisés, 3, rue d'Ulm Léon LHOMME, rue Corneille, 3, LONDRES DULAU & C°, 34-36 Margaret str. Cavendish sq. TABLE Pages De BEAUCHAMP (P.) et LAMI (R.). — La bionomie intercoti- dale de l’île Bréhat (4 planches) ; 184 CHATTON (Epouarp) et PÉRARD (C anne) — ne Nicollel- lidæ, Infusoires intestinaux des Gondis et des Damans, et le Cycle évolutif des Ciliés (3 planches) ST LAMI (R.). — (V. DE BEAUCHAMP). LICHTENSTEIN (J.-L.) et RABAUD (Er.). — Le Comportement des Polysphincta, ichneumonides FePeites des Araignées (avec 11 figures dans le texte) UN dE 267 DE MAN (J -G.). — Sur quelques dunalies ces vées re . espèces du genre Pinnotheres de l'Archipel indien (1 planche double) A En à + à LA CARDIOCÉPHALIE 291 Dans nia note préliminaire de 1911, j'ai caractérisé lesembryons cardiocéphaliens, comme apparaissant en général sous un aspect bien normal, « sauf la région antérieure du cerveau, le cœur, et l'intestin céphalique. C'est que Les ébauches cardiaques sont ici déplacées d'une façon anormale vers l'avant, de sorte qu’elles se trouvent ex avan! de la tête de l'embryon, en la dépassant très sensiblement. L’intestin céphalique, également repoussé en avant d'une façon très accentuée, touche à peine, par son bord postérieur, le bout céphalique du cerveau. Celui-er, comme rejeté de force en arrière, montre dans sa région anté- rieure un repli anormal, remontant sur le côté dorsal, et dirigé vers l'arrière. « Sur les coupes longitudinales de tels embryons, on peut constater que l’anomalie en question consiste en une élévation inusitée vers le haut de la partie antérieure du plancher de l’en- céphale ; grâce à cela les ébauches cardiaques et l'intestin cépha- lique paraissent être repoussés passivement vers l'avant ». « Quoique, au premier coup d'œil, les embryons atteints de Cardiocéphalie paraissent ressembler à des Omphalocéphaliens, nous avons bien réellement affaire à deux types tératogé- niques tout à fait différents l’un de l’autre. Tandis que le point de départ de l'Omphalocéphalie est la croissance anormale de la tête de l'embryon dirigée à l'intérieur de son intestin, dans la Cardiocéphalie, on voit le processus plutôt contraire, à savoir l'inflexion de la partie antérieure du cerveau vers le haut et en arrière; le déplacement du cœur et de l'intestin céphalique parait être ici un phénomène secondaire ». Les embryons cardiocéphaliens qui ont servi de texte à ma note préliminaire (dont je viens de donner ici une traduction textuelle) se rapportaient tous à des stades évolutifs assez jeunes, qui ne montraient notamment que les premiers linéa- ments du cœur ct de l'intestin céphalique. Dans ces stades, qu’on devrait considérer comme les stades initiaux de la formation de la monstruosité elle-même, se dessinent les caractères les plus fondamentaux, les plus primitifs de la configuration téra- togénique essentielle. Dans Les stades plus avancés, quand nous avons affaire à la complication progressive, bien naturelle, des relations morphogéniques, due aussi bien à la différen- tiation des ébauches préalablement formées qu'à l'apparition des 299 JAN TUR nouvelles, ces configurations primitives peuvent subir même une certaine éclipse, presque un effacement, apparent au moins. Cela n'exclut point la possibilité, d'autre part, de l’appa- rition de relations nouvelles, parfois non moins caractéristi- ques, pour la monstruosité donnée et pour ces stades nouveaux, que les configurations primitives. Ceci pourrait bien se rap- porter au cas de Cardiocéphalie décrit par M. Porworowskt (8, pages 77-80 du texte français). C'était un embryon incubé pendant 61 heures; rien d'étonnant alors que, bien qu'il ne possédât que 9 paires de protosomites seulement (ce qui doit être, sans aucun doute, considéré comme lexpression d’un « arrêt de développement » spécial), — néanmoins le degré évolutifattemt par son cerveau et son cœur, — aussi bien que par son intestin céphalique — présentait beaucoup plus de compli- cations organogéniques que dans mes premiers cas de la mème anomalie. Ainsi donc, la définition de la Cardiocéphalie, donnée par Porworowski, comme celle d'une « monstruosité.… consis- tanten ce que l’æsophage s'accroit dans l'intérieur du cœur, situé d’une manière anormale en avant de l'encéphale, (L. cit.» pages 78-79) se rapporte à l'observation de stades beaucoup moins jeunes que ceux de mes observations antérieures, appuyée sur un fait nouveau et très intéressant. D'autre part, Porwo- ROWSKI n'a pas pu constater dans son cas de « courbure du bord antérieur du cerveau vers le haut et vers l'arrière, ce qui, d'après Tur, détermine la formation de la Cardiocéphalie » (Gbid., p. 79). I me semble qu'on peut envisager cette contra- diction — apparente probablement — à deux points de vue. C'est que, dans le cas de Porworowski, qui correspond à un stade évolutif beaucoup plus avancé que ceux que j'ai décrits, la courbure de l'encéphale, qui s'infléchit primitivement en haut et en arrière, a été masquée secondairement par l'accroissement de toute la tête et les plissements de l’encéphale contraint à se développer dans un espace trop restreint (vu que cet encé- phale ne pouvait pas s’accoitre vers l'intestin céphalique et le cœur, placés en avant de la tête); à moins que, ce qui me paraît être moins probable, je ne me sois trompé en prenant cette courbure anormale de l'encéphale pour un trait essentiel de ce type monstrueux. J'ajouterai que l'aspect ?n 1010 de l'embryon décrit par Porworowski (8, planche TT, microphoto- a di TT 2 ini LA CARDIOCÉPHALIE 203 graphie 17 et 18) suggère plutôt l'existence d'une telle courbure, laquelle à été ensuite masquée par d'autres plisse- ments du cerveau, jusqu'à devenir méconnaissable sur les cou- pes /ransversales, les coupes longitudinales éclaireissant beau- coup mieux les aspects de ce genre. Mais, même si l'inflexion encéphalique en question ne ouail point un rôle prépondé- rant dans le mécanisme formatif de la Cardiocéphalie, celle-ci serait une forme spéciale d’anomalie, dépendant non seu- lement d'un développement primitivement monstrueux des ébauches cérébrales, mais aussi d'une disposition également primitivement anormale de celles du cœur, de l'intestin cépha- lique, et de la transposition de la fovea cardiaca. Mais, dans ce cas même, je croirais utile de conserver le terme de « Cardiocé- phalie » que j'ai proposé, ne serait-ce que pour accentuer son analogie plus ou moins frappante avec l'Omphalocé- phalie. Au cours de ce travail, je me propose de présenter la descrip- tion des cas les plus importants que j'ai recueillis pendant les derniers dix ans, en procédant toujours par la fixation d’un très grand nombre d'œufs incubés dans les conditions normales. Le nombre de cas obtenus de la sorte indique que l’anomalie en question doit compter parmi les plus rares, ce qui nous expli- que qu'elle n'ait encore été mentionnée nulle part. L'étude de ce matériel montrera que les formes de la Cardiocépha- lie sont assez variées, que ses aspects aux stades évolutifs divers sont non moins variables, et en outre que parfois certaines configurations des embryons atteints de monstruosités ne sont justement pas comparables à la Cardiocéphalie, mais peuvent l'imiter jusqu'à provoquer une méprise complète... Ces formes « imitatrices » offrent quelquefois un intérêt appréciable, car elles contribuent à nous faire préciser mieux les caractères typi- ques de la Cardiocéphalie vraie. Nous aurons à constater aussi que la Cardiocéphalie peut bien parfois, quoique non exclusive- ment, apparaitre dans les embryons frappés d'autres anomalies, par exemple de Platyneurie, ce qui ne se répercute d'ailleurs _pas sur ses traits fondamentaux, sinon pour les rendre, au con- traire, plus explicites. Enfin, nous verrons que l’anomalie embryonnaire en question fournit des données d’une grande valeur pour l'étude du mécanisme évolutif normal des ébauches 29€ JAN TUR telles que l'intestin céphalique et la fovea cardiaca, dont les connexions intimes échappent à l'analyse des embryons nor- maux : une telle application à l'embryogénie normale pré- sente bien un des buts qu'on doit se proposer dans chaque étude tératogénique. IT Le premier cas de Cardiocéphalie a été trouvé par moi en mars 1907, dans une série d'œufs provenant de jeunes Poules primipares. D'abord, je fus porté à y voir un cas de stade très jeune d'Omphalocéphalie, mais mon excellent ami et con- frère Er. RaBaup, après avoir examiné la microphotographie in toto de cet embryon, m'indiqua que si la tête vient buter contre l'ébauche cardiaqueil s'agissait, peut être, d’un type nou- veau de monstruosité. J'ai publié alors (9) une très courte des- cription de ce monstre dans une note à la Société philomathi- que, en me réservant de revenir encore à son sujet. C'est l’étude des coupes sériées qui m'a amen+ ensuite à constater la justesse de l'observation d'Er. RaBaup. En effet, l'embryon en question s’est montré comme repré- sentant un des stades les plus précoces du développement de la Cardiocéphalie, où les caractères essentiels de cette ano- malie se précisent assez «nettement pour être strictement définis. C'est bien une phase évolutive où les ébauches car- diaques apparaissent suffisamment accentuées pour qu'on puisse saisir ses relations avec la région antérieure du cerveau, comme déjà établies et décidées. C'est pour cela que je prends ce cas pour point de départ de mes considérations ultérieures, au moins quant à la configuration principale des ébauches en jeu, laquelle peut ensuite devenir le terrain de modifications et complications multiples qui partent toutes d° ce stade initial et décisif. Notre microphotographie 1 (planche IX) représente la vue in Loto de cet embryon, à un grossissement de 18 diamètres ; sa tête et l’ébauche cardiaque sont représentées à un grossisse- ment plus fort sur la microphotographie 2. La durée de lineu- bation était de A6 heures; le diamètre total du blastoderme mesurait 27 millimètres. L'aire vasculaire avait des contours et RÉ dd hé ide ft ire. dd mn de an lite don n*: Éd LA CARDIOCÉPHALIE 295 des dimensions normaux. L’aire transparente mesurait 0 min. 506 et 0 mim. 32; dans sa région droite, on voit les ilots sanguins qui y pénètrent. La longueur du corps de l'embryon était de 3 mm. 44 ; il était pourvu de cinq paires de protosomites bien distinets et sa structure était bien normale à l'exception de la région antérieure de l'encéphale, contractant des relations inusitées avec les ébauches du cœur. Comme on le voit, sur- tout sur notre microphotographie 2, les bourrelets cérébraux, en voie de différentiation nettement accusée, sont ici — dans leur partie antérieure — brusquement courbés vers leur côté dorsal et repoussés vers l'arrière, grâce à quoi ils forment ici comme un repli fort opaque recouvrant la partie antérieure de la terminaison céphalique de l'embryon. L'ébauche cardiaque est représentée par deux germes vei- neux, s’unissant vers la région médiane, et qui adhèrent très fortement de l'avant à la tête déformée de l'embryon. L’en- semble de ces détails vus nr /oto donne l'impression que l’ébauche du cœur, placée trop à l'avant, a exercé une pres- sion mécanique sur l'encéphale, en provoquant ainsi son incur- vation vers le haut et vers l'arrière. Vu l’opacité de la pré- paration à cet endroit, due à la superposition des lames cérébrales repliées sur elles-mêmes, on n’a pu pas discerner à l'examen x /oto les contours de l'intestin céphalique ni de la fovea cardiaca. Cet embryon a été étudié ensuite sur une série de coupes longitudinales, dont les plus importantes sont représentées sur les microphotographies ?, 4 et 5 de la planche IX. La première correspond à l'endroit situé dans la partie droite de l'embryon, au niveau où la régiou céphalique s'infléchit asymétriquement à droite, en déviant suivant une étendue assez considérable de l’axe longitudinal du corps. Comme nous le voyons, cette coupe a passé par le milieu de ébauche cérébrale, dans sa région la plus avancée ; en comparant cette coupe aux voisines, on voit qu'elle correspond également à la région strictement médiane de l’ébauche de l'intestin céphalique et du pharynx, aussi bien qu'à celle de la fovea cardiaca, quoique, grâce au déplacement de la tête de l'embryon vers la droite, cette coupe n'intéresse pas les régions thoraciques du germe. L'ébauche cérébrale, non encore transformée en tube ni 296 JAN TUR vésicule, est représentée par une gouttière assez large, aux parois épaisses de 50 environ. La région du futur prosencé- phalon se présente ‘sous l'aspect d'une vaste vésicule non fermée, dont le diamètre intérieur atteint 160 w environ. Le plancher et les côtés de cette vésicule sont arrondis, son pla- fond, non fermé vers le haut, est formé par la paroi de la plaque nerveuse antérieure, anormalement infléchie vers le haut et puis vers l'arrière. Cette plaque se recourbe en arrière à angle presque droit avec sa partie élevée en haut et s'étire suivant une étendue de 160 », pour s’amincir ensuite en passant à la couche de l’ectoderme extra-neural, dont l'épaisseur diminue progressivement d’arrière en avant de 40 à à 10 y. I est à remarquer que cette couche ectodermique adhère très étroite- ment, par sa surface inférieure, à la région renversée en arrière de l’encéphale anormal. De même, elle recouvre, en y adhé- rant fortement, la partie antérieure de l’'ébauche de Pintestin céphalique. L'ensemble suggère l'idée que cette couche extra-neurale et l’ectoderme ont subi une tension mécanique assez forte, provoquée par la région antérieure de l'encéphale qui l'étire vers l'arrière. En corrélation avec cette configuration anormale de l’ébauche cérébrale, la région de l'intestin céphalique, elle aussi, a subi des déplacements et déformations, de concert avec Ia /ovea cardiaca et le pl ectodermique sous-céphalique. Tout ce com- plexe de formations embryonnaires s'est trouvé transposé anormalement vers l'avant et vers le haut, de sorte que la ligne perpendiculaire, tangente à la limite antérieure de l’encé- : phale, passe en bas, à l'arrière de l'entrée de l'intestin cépha- : lique.. Celui-ci prend, sur la coupe en question, l'aspect d'une vésicule arrondie, rétrécie à son entrée, mais dans sa partie supérieure (ou antérieure, proprement dite), fortement élargie, de sorte que le diamètre de cet élargissement vésiculiforme mesure Jusqu'à 100 v, ce qui est bien anormal, car, ordinaire- ment, cette ébauche est très fortement aplatie dans le sens dorso-ventral. Quant à sa structure, il est à signaler que la couche endodermique, dont cette ébauche est constituée, pré- sente vers son entrée dans l’invagination de l'intestin la struc- ture d'une mince lame endodermique ordinaire, composée d’une seule rangée de cellules, fasiformes sur les coupes, LA CARDIOCÉPHALIE 297 épaisse de 5 w seulement; mais, déjà à une distance de 100 u environ de la dite entrée de l'intestin, cette lame s’épaissit con- sidérablement, jusqu'à 30 u, et ses éléments se disposent en palissade, à grands axes tournés perpendiculairement au plan de la couche. L'épaisseur de cette paroi de l'intestin céphalique s’amineit ensuite-vers le niveau de la /ovea cardiaca (plus près du côté ventral de celle-c1), jusqu'à 20 » et puis repasse gra- duellement à l’endoderme ordinaire, propre aux régions péri- phériques de l'embryon. En comparaison avec la disposition et le comportement normaux de l’endoderme dans lPébauche ordinaire de l'intestin céphalique, nous sommes frappés 1e1 par un déplacement très accentué vers l'arrière du niveau où apparait l’épaississement de la couche ectodermique, typique pour les parois antérieure et ventrale de cet intestin. Car d'or- dinaire (pour nous documenter à cet égard nous n'aurons qu'à consulter les dessins si scrupuleusement exécutés de lA//as d'Embryologie bien connu de M. Duvaz (10), par exemple, fig. 203, -pl. XIIL, fig. 226, pl. XIV, fig. 235 et 236, pl. XV, aussi bien que les figures 270 et 271, pl. XVI), la couche com- posant la paroi dorsale de l'ébauche de l'intestin céphalique conserve, presque jusqu'au bout antérieur de cette Invagina- tion, la structure de l’endoderme aplati, d'un seul rang de cellules, tandis que son épaississement caractéristique ne com- mence que depuis le bout céphalique du repli, surtout dans le stade si jeune. D'autre part, toute la paroi ventrale de l'intestin céphalique a l'aspect de l’épithélium en palissade qui conserve cette structure, même en s'épaississant un peu encore, vers le niveau de la forea cardiaca, en ne ‘reprenant l'aspect d’élé- ments aplatis que passé ce niveau-là. En comparant les micro- photographies 3 et 4 avec les configurations normales de l’'ébauche pharvngienne, on a l'impression que — en corréla- tion avec l’infléchissement anormal vers l'arrière de la partie antérieure du cerveau de notre embryon — l’ébauche de lin- testin céphalique à subi un déplacement vers le haut, accom- pagné par un déplissage spécifique, de sorte que son fond s’est redressé et sa couche ventrale s’est trouvée secondairement incurvée et repoussée vers le haut... Ainsi le fond arrondi de l'intestin céphalique qui, sur les microphotographies 3 et 4, est situé presque sur le même niveau horizontal que sur la surface 298 JAN ÆŒUR supérieure de l'encéphale rejeté en arrière, correspond en réalité à la paroi aplatie, ventrale, de l'intestin ordinaire. Simultanément avec un tel déplacement et défiguration de l'intestin céphalique, sa région supérieure (ou plutôt une partie de cette région supérieure avec le fond et une partie de la région ventrale qui sont ici déplacés d'une façon anormale) adhère très étroitement à la surface inférieure de l'ébauche cérébrale. Notons que dans les embryons normaux — entre l’encéphale et la partie dorsale de l'intestin céphalique — se trouve un espace assez vaste rempli d'ordinaire par des élé- ments nombreux de mésoderme. Dans notre cas anormal, nous ne trouvons qu'une quantité -très restreinte de cellules méso- dermiques qui se disposent en une couche très mince, comme aplatie par les deux ébauches serrées l’une contre l’autre, celle du cerveau et du pharynx … En corrélation, au moins apparente, avec le déplacement de l'intestin céphalique vers l'avant et vers le haut, et avec le « déplissage » qui s'ensuit, se trouve également le déplace- ment correspondant de la /ovea cardiaca elle-même et du pli de l’ectoderme sous-céphalique. La fovea cardiaca, longue de 40 y environ, contient dans son intérieur des amas mésoder- miques, peu nombreux encore, et le pli de l’ectoderme extra- embryonnaire qui la délimite vers l'avant forme ici un angle aigu très accentué ; il est donc évident que la fovea même n’a subi aucun « déplissage » secondaire, malgré qu'elle se soit trouvée, avec tout le complexe cardiaque, dans un endroit insolite, fortement repoussé en avant du germe. On pourrait conclure de là que les processus morphogéniques localisés dans l'ébauche cardiaque comme telle — ne subissent, en général, aucune modification essentielle, ce que nous laissait entrevoir déjà l'examen #7 toto de cette région. La coupe représentée sur notre microphotographie 4 cor- respond à un niveau situé plus à gauche, c'est-à-dire qui passe par l’axe du corps de l'embryon, en laissant à droite le plan médian de la tête et du cœur, vu le déplacement de ces deux ébauches vers la droite. Nous constatons ici, en général, les mêmes relations que sur la coupe précédente, sauf que l’on voit ici, d'une façon encore plus accentuée, l'adhésion extrémement intime de l'ectoderme extra-neural, fortement | | LA CARDIOCÉPHALIE 209 épaissi dans cet endroit, et qui se prolonge vers l’avant du pli renversé de l’encéphale, à la paroi anormale de ce cerveau et à la-surface supérieure de l'intestin céphalique refoulé vers le haut. Juste en commençant à la limite entre Les deux ébau- ches vésiculeuses (de Fencéphale et de l'intestin), l'épaisseur de l’ectoderme qui les recouvre s’amincit considérablement et acquiert alors le caractère de l'ectoderme périphérique typi- que. Dans la fovea cardiaca, nous trouvons ici — comme en général sur les coupes latérales à ce stade — les amas méso- dermiques plus forts que sur la coupe précédente, et parmi eux, on peut déjà distinguer la région différenciée en veine omphalo-mésentérique. | L'ensemble des coupes décrites, relatives au stade si précoce ct bien typique du développement de FR monstruosité cardio- céphalienne, nous présente l'essence même de cette anomalie qui consiste, avant tout, en déplacement inusitée de l’ébauche cérébrale et celle du cœur. Le trait fondamental de ce processus est le déplacement du fond de la région antérieure de la gout- tière cérébrale, en un point où devrait se former le prosencé- phale en haut et en arrière. Ainsi, il se forme une sorte de plafond anormal au-dessus d’une vésicule cérébrale incapable de se fermer; ce plafond est bomologue du fond réel de la vésicule antérieure. En même temps, avec un tel repli en arrière de la partie antérieure de l’ébauche cérébrale et, selon toute évidence, en corrélation très intime avec ce processus, il se produit un déplacement très sensible vers l'avant, de tout l'intestin céphalique, accompagné par la fovea cardiaca et par le pli de l’ectoderme sous-céphalique correspondant à celle-ci. Le caractère de tout ce déplacement est tel qu'il se passe ici une sorte d'un déplissage secondaire du pli primitif de l'intestin céphalique ; à la suite de ce processus, les relations des parois de cet intestin avec lébauche cérébrale subissent des modifications assez graves, qui consistent surtout en un raccourcissement de cette partie de l'intestin, qui est formée de son côté dorsal par une mince couche endodermique. Tout en n'approfondissant point — pour le moment — les problèmes touchant le primum movens de cette anomalie spé- ciale, ni ceux du mécanisme intime des déplacements surve- nant dans la région antérieure des embryons atteints de la 21 300 JAN TUR Cardiocéphalie (surtout les corrélations entre l’anomalie du cer- veau et celle de l'intestin céphalique et du cœur), jé dois remarquer qu'à part la région où se déroule 6 processus car- diocéphalique, tout le reste de l'embryon, avec son aire Vascu- laire, se développe ici d’une façon parfaitement normale. À vrai dire, le degré général du développement de cet embryon parait être un peu en retard, eu égard à la durée de l’incüuba- tion ; mais de tels retards äppartiennent bien à la catégorie de variations individuelles assez fréquentes, tout à fait compatibles avec des régulations parfaites au cours du développement inté- rieur. C'est bien grâce au caractère en général bien normal de tout cet embryon — sauf l'anomalie spécifique de sa végion antérieure — que le type essentiel du processus tératogénique n’est pas tout à fait facile à saisir. CAr souvenons-nous que le repli cardio- céphalique de la partie antérieure de la plaque nerveuse, repli dirigé en haut et en arrière, s'est produit ici au stade où le pro- cessus de la transformation de la plaque nerveuse en gouttière . cérébro-spinale est assez avancé. D'autre part, cette transfor- mation s'accomplit; en principe, plutôt dans la région céré- brale que dans celle de la moelle — et ainsi, bien naturelle- ment, chez les einbryons par ailleurs normaux, Le processus cardiocéphalique doit être fatalement masqué, dès son origine, par le processus simultané dé la formation de la gouttière et des vésicules cérébrales normales... Car il est, à vrai dire, très difficile de se rendre compte lequel des replis des parois de l'ébauche cérébrale dépend uniquement du processus cardio- céphalique, et non de celui de la formation normale de la gouttière nerveuse... [Il est également très difficile de se pro- noncer sur la question de savoir si l’inflexion de la région antérieure du fond de la plaque nerveuse vers le haut et vers l'arrière — si caractéristique pour Ja Cardiocéphalie — est un processus survenant au cours d’une déviation dans le méca: nisme ordinaire de la fermeture de la gouttière cérébro-spinale et n’apparaissant qu'au cours de cette fermeture, comme sa modification anormale spéciale? Car on peut aussi supposer que cette inflexion cardiocéphalique est un phénomène tout à fait autonome, indépendant de la fermeture du tube nerveux ou de l'élévation vers le haut des parois de la gouttière cérébro- médullaire..….. La simultanéité de ces deux processus, à savoir LA CARDIOCÉPHALIE 301 la formation normale du cerveau et le commencement de Févo- lution cardiocéphalique complique très sensiblement Fanalyse du processus essentiel de la Cardiocéphalie, quand celui-ci sur- vient chez des embryons, d'ailleurs normalement constitués. Cette analyse devient, au contraire, beaucoup plus accessible dans les cas où l’un de ces deux processus, à savoir celui de la fermeture normale du tube cérébral, subit un arrêt complet, ce qui ne peut avoir lieu que dans un cas exceptionnellement heureux: d’une coexistence des deux anomalies à a fois (la Cardio- céphalie et la Platyneurie). L'apparition simultanée de ces deux types tératogéniques est absolument admissible à priori et — comme nous allons le constater — elle peut bien exister en réalité. Alors les tableaux qui y apparaissent jettent une lumière très instructive sur le caractère essentiel du processus cardiocéphalique. L'anomalie que j'ai désignée sous le nom de Platyneurie con- siste, comme on le sait (11, 12, 13), en une croissance de la plaque nerveuse de lembryon dans le sens transversal, per- pendiculaire à son axe céphalo-caudal. De même, à cette diffé- rentiation dans le sens transversal sont soumis les rangées de protosomites, lébauche cardiaque, aussi bien que le réseau de la circulation vitelline. La plaque nerveuse platyneurique, en s'étendant anormalement vers les côtés, ne montre d’abord ordinairement (au moins dans les périodes précédant la moitié du troisième jour d’incubation) aucune tendance à se fermer par la voie ordinaire en un tube céphalo-rachidien clos. Ainsi, tout le complexe nerveux reste, pendant de longues périodes, sous l'aspect d'une masse de matériel neuro-ectodermique largement étalée en surface, suivant toute son étendue, sans exception pour la région céphalique. Or, si une telle plaque nerveuse largement étalée pouvait compliquer dans sa par- tie antérieure l’anomalie de Cardiocéphalié, alors il ne ferait plus de doute que le point de départ de ce processus ne sau: rait être quelque modification spéciale de l'infléchissement normal des bords de la plaque nerveuse ordinaire, surve- nant au cours du développement habiluel du cerveau. Nous aurions la preuve irréfutable de l'existence d’un processus tératogénique spécial et indépendant, apparaissant sans aucun lien avec les replis ordinaires liés avec la formation du tube JU? JAN TUR encéphalique, et présentant une forme nouvelle et bien spéci- fique de la morphogenèse anormale. Nous donnons ci-dessous la description d'un embryon atteint justement à Ja fois d'une Platyneurie bien typique et d'une Car- diocéphalie non moins caractérisée. Il est à ajouter que cette dernière à apparu 161 dans sa forme la moins compliquée, et se prétant le mieux à la compréhension des caractères essen- tiels de ce type tératogénique spécial. L'embryon de Poulet platyneuro-cardiocéphalique, obtenu d'un œuf incubé pendant 33 heures, est représenté 2x lolo sur nos mcrophotographies 6 et7de la planche IX. Son blastoderme avait ses contours normaux; l'aire vasculaire, anormalement élargie — comme toujours chez les monstres platyneuriques (12) — mesurait 3 mm.6 en longueur et autant en largeur et sastructure générale conservait encorele caractère primitif, para- blastique, aux anostomoses peu nombreuses du réseau vascu- laires, malgré le sinus terminal déjà fortement accentué. L’aire transparente, aux contours piriformes, était longue de 2 mm. 8 et large de 2 mm. 1 — 1 mm.5. Dans son centre se trouvait l'embryon sensiblement platyneurique, long de 2 mm. 55, y compris sa ligne primitive très fortement épaissie. La plaque nerveuse platyneurique, largement étalée en surface, était large de 0 mm. 57 à 0 mm. 65 vers sa région antérieure et accompagnée de 5 paires de protosomites, très sensiblement élargis dans le sens transversal, quoique pas encore atteints de fragmentation schistopoiétique. Vers l'avant de la plaquenerveuse étalée, se dessine, en se prolongeant en arrière, une région fort opaque de substance de la même plaque, refoulée vers l'arrière suivant une étendue de 0 min. 23 et divisée en deux exeroissances légères, suivant la ligne médiane de sa partie postérieure. En avant de cette région, on aperçoit les contours de l'intestin céphalique qui se prolonge suivant l'axe du corps de l'embryon à 0 mm. 15. Dans les limites de cet Intestin, on voit, #n lolo, ébauche cardiaque, en forme de vésicule ovale et élargie, aux dimensions de 0 mm. OK et 0 nm. 21. Cet embryon fut débité en coupes longitudinales dont deux sont représentées sur les microphotographie 8 et 9 de la planche IX. La première se rapporte à une coupe située près du ET, 7 LA CARDIOCÉPHALIE 303 plan axial de l'embryon, la seconde à celle du bord extérieur de la plaque platyneurique, où cette plaque montrait in /0t0, des épaississements longitudinaux très prononcés. La microphotographie 8 donne un aspect très typique de la monstruosité cardiocéphalique, simplifiée par l'apparition simultanée de la Platyneurie. La plaque nerveuse étalée en surface, épaisse de 55 w environ — dans sa région céphalique — s'infléchit vers le haut et puis en arrière, en formant un pli homogène pourvu d'une fente intérieure longue de 120 w et haute de 5-8 u. La longueur de cette région de la plaque ner- veuse repliée en arrière est de 170 w. À son bout antérieur (dirigé en arrière) commence immédiatement la couche de l’ectoderme extra-neural, composé d'éléments bien typiques, et épais de 26 u à 10 u. Toute la région de l'intestin céphalique de cet embryon, avec celle de la fovea cardiaca, à subi un déplacement très typique vers l'avant, en corrélation immédiate avec l'infléchis- sement cardiocéphalique de l’'ébauche cérébrale. Ici, de même que dans le cas précédent, l'entrée de la cavité de l'intestin céphalique est située au niveau de la ligne verticale menée du coude de l'infléchissement vers l'arrière de la plaque nerveuse, de sorte que toute la région de l'intestin s’est trouvée sensible- ment ex avant du bout céphalique de l'embryon. La lumière de l'intestin céphalique ne s’élargit point vers sa partie anté- rieure, comme chez l'embryon précédent, mais consérve le caractère d’un repli en forme de poche, long de 160 u, dirigé vers l'avant et en haut à un angle de 45° environ (par rapport au niveau de la plaque nerveuse), et haut de 10u-12 4. Même dans ce cas, l’épaississement de la couche endodermique, caractéristique pour la paroi ventrale de l'ébauche du pharynx, commence vers la moitié de longueur de sa paroi dorsale, où l'épaisseur de cette couche passe assez brusquement de 4 y à 16 u, tandis que, suivant la partie ventrale de cette ébauche, son épaisseur atteint jusqu à 18 v. Sur la même coupe, nous voyons Le repli centripète de l'ecto- derme « sous-céphalique », qui s'arrête à 100 & environ en n'atteignant point Le niveau antérieur de La tête de l'embryon. Dans la fovea cardiaca on voit nettement l'ébauche du cœur. Par opposition avec l'aspect offert par l'embryon précédent, 304 JAN TUR il faut remarquer un éloignement assez considérable de la couche endodermique de la région supérieure de l'intestin céphalique de la surface ventrale de l'ébauche cérébrale, ainsi que la présence d'éléments mésodermiques nombreux, disséminés de facon normale entre ces deux ébauches. En général, à part l’adhérence étroite de la partie médiane de lec- toderme extra-neural à la région renversée de ia plaque pla- tyneurique, nous n'avons ici à souligner aucun détail qui pourrait témoigner de l'existence d’une pression ou tension mécanique quelconque, provoquée par le jure survenu dans la partie antérieure de l'encéphale. Ainsi, il n’y a pas lieu de supposer qu'il y ait eu translation purement mécanique de la région de l'intestin céphalique et du cœur vers l'avant... Enfin, surnotre microphotographie9, planche IX, nous avons la coupe longitudinale près du bord extérieur de la plaque platy- neurique du même embryon. L'aspect de ce bord est justement inverse de celui des aspects précédents, car dans Ia parte céphalique de cette plaque, on voit ici l'infléchissement vers le bas de l’ébauche nerveuse, qui pénètre, accompagné par une portion de l'ectoderme extra-neural, au-dessous de la masse principale de la plaque platyneurique. On eonçoit facilement ‘que cette disposition n'a aucun rapport immédiat avec la monstruosité cardiocéphalique ; elle ne représente qu'un détail assez intéressant et fréquent, propre au développement des Plätyneures. Car, contrairement à ce qu’on pourrait sup- poser en se basant sur l'analyse de cet embryon in toto — où l'on voit suivant les deux bords extérieurs de la plaque platy- neurique, dans sa région pré-protosomitale, les épaississements longitudinaux symétriques — ces épaississements ne représen- tent nullement de traces d'une régulation tardive du tube ner- veux (par exemple de sa ist tentée, mais non achevée), mais, au contraire, ce sont les expressions des replis bien carac- téristiques (!), formés par les bords externes de la plaque pla- (t) Cet infléchissement de la partie périphérique de la plaqne nerveuse des Platyueuriens, au-dessous de la plaque massive d'ébauches nerveuses étalées, parait bien témoigner que l’anomalie platyneurique elle-même ne saurait être aucunement le résultat de l'action d’une pression mécanique quelconque, par exemple exercée de la part de la masse vitelline sur la surface ventrale de l’em- bryon, et l'étalant ainsi en surface, comme le suppose notamment H;:sseLe (14). Cela nous fait admeltre, au contraire, que nous avons à faire ici à un dévelop- Lt. liés. bbité NET PURE 4° LA CARDIOCÉPHALIE 305 tyneurique et qui pénètrent au-dessous de la masse nerveuse centrale. Sur les coupes situées encore plus à l'extérieur que celle de la microphotographie 9, on constate que ces replis s'étendent suivant toute la moitié antérieure de l'embryon. Quant à la question soulevée du rapport de l'anomalie car- diocéphalique et des processus accompagnant la fermeture plus ou moins normale de la plaque nerveuse en un tube, le fait d'un infléchissement, en bas du bord de la plaque platyneurique, d'un embryon attemt en même temps de Cardiocéphalie nous prouve définitivement que le processus cardiocéphalique n’a rien de commun, quant à son essence même, avec les déviations simples du processus menant à la formation du cerveau et de la moëlle. Car nous voyons bien que la Cardiocéphalie peut se prononcer même dans les cas où l’ensemble des ébauches ner: veuses, non seulement ne montre ‘aucune «€ tendance » à suivre les voies normales du développement (le relèvement des bords vers le haut), mais subit des malformations dans le sens diamétralement opposé... Nous voyons ainsi que le recul en arrière de la région antérieure de l'encéphale des monstres cardiocéphaliques présente un phénomène évolutif tout à fait spécial, tout à jait indépendant des autres processus morphogé- niques qui surviennent dans la formation des ébauches ner- veuses, II Dans les deux cas de Cardiocéphalie que nous venons de décrire, nous avons relevé les caractères les plus essentiels et typiques de cette nouvelle forme tératogénique. Nous avons vu les embryons dans lesquels le type évolutif de cette ano- malie s’est accentué d'une facon précise et nette, et, en même temps, les groupes principaux d'ébauches qui entrent en jeu et n'ont pas encore subli les complications inévitables qui doivent fatalement surgir, au cours de l'organogenèse, dans les stades pement spontané, spécifique, orienté vers les côtés de l’ébauche axiale. Car, si la Platyneurie pouvait provenir réellement d’une pression extérieure quelconque, la même pression aurait également empêché l’'infféchissement en bas des bords de la plaque nerveuse s’accomplissant forcément contre l’action du facteur comprimant, quoique dans une direction opposée à celle de la fermeture nor- male du tube nerveux. 306 JAN ŒUR plus avancés. Ces deux cas nous serviront ainsi de point de départ, aussi bien dans nos recherches sur le sort ultérieur des embryons atteints de Cardiocéphalie, que dans les considé- rations sur les stades antécédents présumés du développement de celte anomalie. En partant de l'examen des stades donnés de Cardiocéphalie, on serait porté à admettre deux possibilités différentes quant au sort ultérieur de la région céphalique des embryons atteints de cette anomalie. Ainsi, dans les cas présumés d'une « tenta- tive » de formation des vésicules cérébrales normales aux dépens des régions de l'ébauche nerveuse situées en arrière de la partie renversée, antérieure, on peut admettre la possibilité d'un replissage secondaire de cette région anormale, suivi d'une régulation de tout Le complexe céphalique, jusqu’au rétablisse- ment des relations presque normales... D'autre part, la partie renversée de la plaque nerveuse peut bien garder cette position anormale. et alors elle pourrait même continuer sa croissance inusitée vers l'arrière. Dans le second cas, il ne saurait être, évidemment, question d’une régulation quelconque de la tête de l'embryon si profondément modifiée, et nous aurons plutôt à prévoir des complications très graves dans l’ensemble cépha- lique, dont l'accroissement normal et toutes les différenciations seraient définitivement entravés par la présence d’une « plaque cardiocéphalique » surplombant le reste de l'ébauche céré- brale. De ces deux alternatives, c'est bien la seconde qui se réalise dans les stades ultérieurs de Cardiocéphalie. C'est ce que nous prouve la structure d'un embryon représenté sur nos miero- photographies 10, 11, 12 et 13 de la planche X. Sur la première de ces microphotographies, nous voyons la région antérieure d’un embryon de Poule, incubé pendant 40 heures et atteint d'anomalies multiples, d'une importance secondaire, accompagnant la Cardiocéphalie bien nettement accusée. Malgré cette circonstance que la durée de l’incubation est ici plus brève que dans le premier des cas précédemment décrits, l'habitus général du corps embryonnaire, et surtout celui de son système nerveux, révèle un stade beaucoup plus avancé. L'aire vasculaire de cet embryon s’est développée d'une façon bizarrement asymétrique : elle mesurait 6 millimè- COPA ET OO LA CARDIOCÉPHALIE 307 tres en longueur du côté droit, et 4 mm. 8 seulement du côté gauche. Le sinus terminal s'est néanmoins tout à fait netfe- ment dessiné suivant les deux bords externes latéraux ; par contre, 1l faisait défaut dans la région caudale de l’aire vascu- laire. La « région didermique », située en avant de la tête de l'embryon, accusait les contours sensiblement asymétriques, grâce à l'excroissance centripète du rempart parablastique pénétrant vers le milieu de cette région de son côté gauche. Le corps même de l'embryon, y compris l'ébauche cardiaque située en avant de sa tête, était long de 3 mm. 15, dont 1 mm. 2 de la ligne primitive. La gouttière nerveuse, déjà très forte- ment prononcée suivant fout son trajet, aux bords latéraux partout surélevés, montrait dans la région moyenne du corps une largeur normale (de 0 mm. 145), en s’élargissant vers la tête jusqu'à 0 mm. 29. Les protosomites étaient, par contre, très faiblement développés : on n’en voit ici que quatre paires, à peine distinctes, comme en voie de désagrégation. Vers la région du nœud de Hexsex, c'est-à-dire dans la région anté- rieure de la ligne primitive dépourvue de gouttière, est situé un « bouchon » ectodermique opaque, long de 0 mm. 084 et large de 0 mm. 072 La tête de cet embryon accusait une Cardiocéphalie bien typique, car en avant de la gouttière médullaire fortement élargie se dessinait la masse opaque du cerveau déformé d'une façon caractéristique où déjà, à l'examen ?n toto, on pou- vait constater que sa région antérieure à subi un déplacement typique vers l'arrière. Toute cette masse sombre mesurait O0 mm. 44 en largeur et jusqu'à 0 mm. 335 en longueur. L'ébauche de l'intestin céphalique et celle du cœur étaient déplacées si loin vers l'avant qu'entre leur limite postérieure et le bord antérieur de la masse cérébrale s’est formée une fente transparente bien distincte. L'intestin céphalique avait les contours d’un croissant, aux cornes tournés vers l'arrière, long (suivant l’axe de l'embryon) de 0 mim. 6, et de 0 mm. 78 d'envergure des cornes. La largeur de la partie moyenne de cet intestin était de 0 mm. 18. Sur la série de coupes longitudinales, dont la médiane est représentée sur notre microphotographie 11, on voit que nous avons 11 affaire à un cas de Cardiocéphalie évidente, compli- 308 JAN TUR quée par un développement plus avancé (en comparaison avec les stades des cas précédents) des régions du cerveau situées en arrière de la « plaque cardiocéphalique ». Quant à cette pla- que elle-même, elle conserve exactement le même caractère que dans les deux cas précédents, sans subir aucunes modifica- tions appréciables. C'est pour cela que ce terme de « plaque cardiocéphalique », vu la constance des caractères de la région renversée en arrière du cerveau des Cardiocéphaliens, doit être proposé comme désignant une formation morpholo- gique bien déterminée et constante (dans les cas typiques, au moins). Ainsi, cette plaque cardiocéphalique conserve sur la coupe de la microphotographie 11 une position strictement horizontale, c'est-à-dire sa position primitive, comme nous le pouvons sup- poser en nous basant sur l'étude des stades plus précoces de la même anomalie. Elle va d'avant en arrière suivant une étendue de 270 y, jusqu'à la rencontre du bord antérieur de la gout- tière médullaire, avec laquelle elle ne s’unit pas, tout en la touchant. La partie inférieure de la plaque cérébrale, située au-dessous de la plaque cardiocéphalique renversée, était sépa- rée de celle-ci par une fente étroite (de 10 v de hauteur envi- ron), ce qui témoigne d'un refoulement assez fort de toute cette région vers le haut. En corrélation, dans une certaine mesure, avec ce phénomène se trouve ici un comportement inusité de l'ectoderme extraneural dans toute la partie céphalique de notre embryon : inmédiatement en arrière du bord antérieur de la partie renversée (c'est-à dire postérieure, à proprement parler) de la plaque cardiocéphalique, cet ectoderme forme un pli double, pénétrant très loin, qui longe le bord antérieur de l’ébauche cérébrale et puis s'insinue, en se dirigeant en arrière etun peu en haut, en faisant un angle insignifiant avec le niveau de l'embryon, jusqu'au bout postérieur (désigné sur la microphotographie par une croix) de la partie inférieure de la plaque nerveuse qui constitue ici le plancher de la cavité délimitée en haut par la plaque cardiocéphalique. Ainsi, ce pli ectodermique extra-neural pénètre dans la tête de l’em- bryon suivant la mème étendue que celle de la pénétration vers l'arrière de la « plaque cardiocéphalique ». Immédiatement au-dessus du bout postérieur de ce pli, nous voyons sur la LA CARDIOCÉPHALIE 309 même mierophotographie une région de la substance nerveuse désagrégée ; il est à noter qu'un tel repli ectodermique double, pénétrant si loin dans l'intérieur de l'embryon, n'apparait que sur une série bien restreinte de coupes, exclusivement vers la région médiane de l’encéphale. Vers les côtés, comme nous le voyons sur la microphotographie 12 qui correspond à un niveau plus latéral, ce repli devient moins profond, en ne s'accentuant que par une échancrure vers son niveau supérieur, en avant de la tête de l'embryon. Dans le même endroit se rétablit la continuité entre la plaque cardiocéphalique ‘et les autres par- ties du cerveau, interrompue, vers le niveau décrit, par la dis- sociation pathologique localisée. Comme on le voit sur la microphotographie d'une telle coupe latérale, l'encéphale de notre monstre commence à se transformer en vésicules, dont l'homologie avec les vésicules cérébrales normales présente des difficultés assez graves... Entre autres, l'excroissance vési- culaire arrondie, naissant du côté ventral du cerveau, ne peut avoir rien de commun avec la vésicule optique, tout en en ayant l'apparence. D'ailleurs, tout l'aspect de cet encéphale, et sur- tout sa désagrégation localisée, liée avec l’amoncellement de granulations détritiques, témoigne de l'impossibilité d'une régulation efficace des processus évolutifs, si profondément modifiés : ainsi l'homologation exacte d'une part, entre ces vésicules, ou, proprement parlant, entre les replis du cerveau cardiocéphalique, dus, probablement, à des différences individuelles possibles, survenant dans la longueur de la plaque cardiocéphalique, et d'autre part les composants d’un cerveau embryonnaire normal, reste sans aucune valeur appré- ciable. Quant à l'ébauche cardiaque et l'intestin céphalique de cet embryon, nos microphotographies des coupes confirment à tous les égards les relations que nous avons signalées d’après l'exa- men ## toto. Le déplacement de toute cette région vers l'avant et la distance entre elle et le bord antérieur de la tête de l'em- bryon sont ici encore plus accentués que dans les deux eas précédents de la même anomalie. La ligne verticale, tangente au bord frontal du système nerveux, passerait à une distance de 30 y en arrière de l'entrée de l'intestin céphalique. Ainsi, nous voyons qu'à cet égard aussi, dans les stades plus avancés du 310 JAN TUR développement de la Cardiocéphalie, on ne constate aucuns des phénomènes de régulation qui pourraient neutraliser le déplacement si prononcé de la fovea cardiaca vers l'avant. Tout au contraire : les relations anormales qui se sont établies dès le commencement se confirment de: plus en plus, en accentuant toujours leur direction tératologique… Quant à la structure des parois de l'intestin céphalique, nous trouvons sur les coupes médianes (microphotographie 11) des relations qui s'approchent assez des normales : la région dor- sale de cet intestin n'est épaisse que de 4-5 environ, tandis que son épaississement plus prononcé (jusqu'à 344) se trouve surtout vers son côté ventral. Sur les coupes latérales, où les dimensions de cette fente s’agrandissent, l'épaisseur de l’endo- derme de la paroi supérieure de l'intestin devient plus consi- dérable. Enfin, il est à remarquer que la longueur de l'intestin céphalique — qui conserve ici, comme dans les cas précédents, -Sä position anormale de 45° environ par rapport au plan hori- zontal du germe — ne dépasse pas 160 x dans la région médiane de cet ébauche. Ainsi, il ne s’est produit ici, malgré un stade évolutif assez avancé, aucun étirement de cette ébau- che en longueur ; peut-être même est-elle réduite. Il semble done que l'intestin céphalique des Cardiocéphaliens dérive déjà ab origine d'un « arrêt de développement » assez sensible. Il se peut bien, tout de même, que cet affaiblissement de la croissance en longueur de l'ébauche de l'intestin céphalique se trouve en certaine corrélation avec un phénomène particulier et inusité, que nous n'avons pas encore observé dans les cas précédents de Cardiocéphalie. Dans notre dernier embryon (à comp. la microphotographie 11) l'ectoderme situé en avant de l'intestin céphalique a sa surface dorsale parfaitement plane et comme tendue : ?ci manque totalement le pli de l'ectoderme sous-céphalique qui devrait délimiter en avant la FovEA car- DIACA. Si nous comparons ce fait avec celui de la croissance simultanée, très forte, d'un autre pli ectodermique qui délimite vers l'avant le cerveau anormal de l'embryon et pénètre à l'intérieur de ses ébauches nerveuses, justement suivant la direction de l'avant vers l'arrière, nous arriverons facilement à la conclusion bien justifiée que ce pli s'enfoncant dans la tête éd. soit at cu S LA CARDIOCÉPHALIE 311 même de l'embryon, dans une région située en arrière de l'intes- tin céphalique et de l'ébauche cardiaque Pst un homologue par- fait du pli de l'ectodrrme ssus-céphalique. Ce dernier pli, en se formant dans le cas donné à sa place normale par rapport à l'encéphale de l'embryon, s'est formé, par contre, d’une façon sensiblement hétérotopique par rapport à la YOVEA caRDIACA et à l'intestin céphalique.…. Donc, grâce au processus cardiocéphalique, se sont établies de toutes nouvelles corrélations évolutives, bien différentes des normales, et par cela mème pouvant jeter une certaine lumière sur l'essence de ces relations normales ! L'infléchissement de l'avant à l'arrière, suivant le côté ventral du cerveau de l’em- bryon, qui s'accomplit dans l’ectoderme sous-céphalique, n'est point — au cours d'une morphogenèse anormale décrite — un processus correspondant à la formation simultanée du repli endodermique de l'intestin céphalique. Ce dernier repli, dans l’ontogenèse normale, forme, comme on le sait, la /ovea cardiaca, en concurrence, apparemment nécessaire, avec le repli correspondant de l’ectoderme sous-céphalique. Dans notre cas, on voit bien que l'intestin céphalique, renfermant l'ébauche cardiaque dans son anse postérieure, peut bien se former dans tous ses détails, mème malgré l'absence complète du repli ectodermique qui devrait gagner le même endroit en poussant de l'avant. Ce pli ectodermique parait accomplir son rôle mor- phogénique dans cette région par un infléchissement vers l'arrière, après avoir contourné la partie antérieure du cerveau de l’em- bryon. Dans notre cas anormal, le pli de l’ectoderme sous- céphalique s’est croisé en divergeant — avec l'ébauche de l'intestin céphalique poussée trop loin en avant et continuant à s'accroitre vers une région tout à fait inusitée — vers l’inté- rieur du cerveau-anormalement replié et cabossé. Ce fait ne s'est néanmoins répereuté immédiatement ni sur le dévelop- pement du phaynx lui-même, ni sur celui des ébauches cardia- ques, — à ce stade au moins. Comme nous l'avons déjà remarqué, dans les régions laté- rales de la tête de notre embryon, le pli ectodermique anormal commence à se raccourcir, en ne se prononçant que par une inflexion relativement peu profonde, survenant dans la paroi dorsale de l’ectoderme. Il est à souligner que, justement à ces 312 JAN TUR niveaux, dans l’ectoderme situé en avant de l'intestin cépha- lique, commence à s’accentuer un pli spécial se dirigeant vers l'arrière, comme pour rejoindre l’ébauche de l'intestin cépha- lique. Sur la coupe représentée par la microphotographie 13, ce repli atteint jusqu à 60 & en profondeur. Sur la même coupe, nous apercevons encore le bord du repli de l’ectoderme sous- céphalique, profond de 80, de sorte que nous avons ici deux replhis à la fois, éloignés Pun de l’autre de 0 mm. 3, dont celui d'arrière représente le repli de l’ectoderme sous-céphalique pro- prement dit, formé dans un endroit hétérotopique — et celui d'avant — beaucoup moins développé, — devrait être consi- déré comme l'expression d’un effort régulateur attardé. Ce phé- nomène de nature régulatrice, provoqué par l'absence du pli normal de l’ectoderme sous-céphalique — lequel ph s'est formé à un autre endroit — tend à former, de noviter, un repli beau- coup plus petit que normalement et gwr s'oriente par rapport aux ébauches de l'intestin et du cœur, el non à celle de l'encéphale. Il est néanmoins évident que ce repli, servant de-remplaçant, ne représente qu'une formation rudimentaire, dont le sort ulté- rieur quand au développement efficace d'une fovea cardiaca et de ses annexes normales, paraît être assez douteux, Il est curieux qu'un tel pli « remplaçant » n'apparait que vers les régions latérales de la tête de l'embryon, c’est-à-dire à un endroit où, dans le cas donné, lintestin céphalique lui- même est mieux développé que dans la région médiane, et où l’'ébauche cardiaque est aussi de plus grandes dimensions. IL n'est point inadmissible qu'un certain état évolutif de l'intestin antérieur et du cœur produise une influence corrélative sur l’ectoderme périphérique, en y provoquant des différentia- tions spécifiques, comme dans les observations bien connues d’'Er. RagauD (15) sur les connexions entre lx vésicule optique se développant à un endroit anormal et la différentiation corres- pondante d’une ébauche du cristallin, naissant d’une région de lectoderme périphérique, qui s'est trouvé par hasard vis-à-vis de cette vésicule.. [ei et Là, le rôle d’un facteur morphogé- nique (« formativer Reiz ») agissant sur une couche ectodermique ordinairement inactive dans cette direction, serait joué par la formation, au sein des régions plus profondes de l'embryon, d’une telle ébauche (ou d’un complexe d’ébauches, quand il: | sé celé tte" à M tt LA CARDIOCÉPHALIE . 313 s'agit de l'intestin et du cœur des Cardiocéphales) laquelle à besoin, en général, d'intervention complémentaire du feuillet externe. Il est, d’ailleurs, bien évident, surtout après l'examen des tableaux que nous venons de décrire, que le repli sous-cépha- lique de l’ectoderme ne représente point une formation secon- daire, au caractère d’un replissement passif, provoqué méca- niquement par l'accroissement vers l'avant de la tête de l’em- bryon, s'élevant au-dessus de la surface du blastoderme. Au contraire, c'est bien le résultat d’une pénétration active de cette région de l’ectoderme, en vue du s/omodaeum, qui devra se former aux dépens de cette région. Mais, d’où vient réellement ce « facteur morphogénique » qui provoque la formation d’un repli typique de l’ectoderme sous-céphalique ? Est-ce de la région antérieure de l'encéphale, dont la surface est contournée par cette couche ectodermique avant qu'elle nese dirige vers le bas et en arrière, pour former lé pli antérieur de la fovea cardiaca? Ou est-ce bien cette dernière ébauche qui sert d’intimum movens ? Cette dernièré hypothèse parait mème être plus vraisemblable, vu que le pli _ectodernique commence à se diriger en arrière de l’ébauche cérébrale déjà avant la fermeture définitive de celle-ci en for- nation vésiculeuse close et se prolonge strictement en plan parallèle à l'ébauche endodermique de Pintestin. Les relations que nous avons constatées dans notre dernier cas dé Cardiocéphalie semblent témoigner de ce que les corré- lations de cet ordre sont de nature double, et que, justement, les deux ébauches internes, c’est-à-dire la limite antérieure de l’encéphale, et le pli endodermique de l'intestin avec le cœur puissent, quoique, peut-être, à un degré inégal, jouer le role d'un « facteur morphogénique » par rapport à l’ectoderme capable de former le pli sous-céphalique. En effet, nous avons vu que le pli ectodermique de la microphotographie 11, après avoir contourné la surface antérieure du cerveau, commence à se comporter comme $sil se dirigeait ensuite vers l'ébauche cardiaque, inexistant dans cet endroit, et en pénétrant dans une région aux caractères morphogéniques d'un tout autre ordre. Ainsi, la présence de la partie antérieure de l'encéphale parait suffire au comportement « morphesthétique » (Nori, Drisscn) 314 JAN TUÜR . du pli ectodermique, lequel s'accroit, à part cela, à l’aveugle, dans une direction tout à fait anormale et inusitée, mais corres- pondant, il est vrai, à un endroit ordinaire des différentiations qui s’accomplissent normalement au-dessous de la surface ven- trale du cerveau. Le pli antérieur, visible sur la microphotographie 13, s'est formé, comme nous l'avons indiqué plus haut, tout à fait. de nouveau, indépendamment du pli postérieur, mais en corré- lation morphogénique exclusive avec la seule ébauche de l'intes- tin céphalique et du cœur. Ce dernier complexe est donc aussi capable de provoquer des différentiations corrélatives corres- pondantes dans la couche ectodermique, et ces différentiations portent un caractère sensiblement régulateur, en apparaissant malgré la présence d'un second pli cctodermique, situé plus en arrière. Ainsi donc, la signification formative ( « Prospective Bedeutung » de H. Dnesc) de l’ectoderme qui ne donne au cours du développement ordinaire qu’un seul pli, orienté en même temps suivant le trajet du bout antérieur du cerveau et la position de l’ébauche de l'intestin et du cœur, n'épuise point toute la « puissance formative » ( « Prospective Potenz ») de toute la surface de l’ectoderme pré-céphalique. Cette dernière, comme nous l'avons vu, est bien capable de produire, en cas de besoin, provoqué par une hétérotopie anormale de l’'ébauche intestino-cardiaque, un second pli, même à un endroit où justement cette région de la couche ectodermique devrait former, au cours du développement normal, une ébauche de proam- nios. D'autre part, dans le cas où le pli principal de l'ectoderme sous-céphalique se forme en corrélation avec l’ébauche intes- tino-cardiaque — si anormalement transposée” vers l'avant que ce pli doit se trouver loin de son emplacement ordinaire — dans la région antérieure de la limite de l'encéphale peut se former encore un autre pli accessoire, plus petit que le premier. Ce sont les relations que nous voyons sur notre microphotographie 8, planche IX, où, chez le second des embryons décrits dans ce travail, l’ectoderme extra-neural, avant de contourner comme une couche mince le ph de l'intes- tin céphalique repoussé vers le haut, donne une invagination pénétrant entre cette ébauche de l'intestin et la paroi antérieure PNR Te LA CAKDIOCÉPHALIE 315 de l’encéphale et profonde de 20 y dans la direction verticale. C'est, sans aucun doute, un phénomène de même nature que le pli très profond de la microphotographie 11, mais à cette diffé- rence près, que là, le pli plus petit (en arrière) parait être une formation secondaire apparue par voie de régulation spécifique, car le plissement principal de l’ectoderme s’est ici produit dans la région pré-cardiaque. Cette faculté mdubitable de l’ectoderme pré-céphalique d'une réaction double vis-à-vis des « facteurs morphogéniques » agis- sant de la part du bout antérieur de l’encéphale et de celle de l’ébauche intestino-cardiaque, que nous avons constatée par notre analyse précédente, présente un exemple très curieux de la possibilité d'établir une telle analyse morphologique sur les phénomènes d'ordre purement tératologique. Au cours du développement normal, quand, suivant lexcellente expression d'Er. RaBaup, « chaque ébauche vient à sa place », l'enche- vètrement des facteurs morphogéniques, procédant des ébau- ches particulières, apparaissant simultanément et s’entrecom- pliquant sans fin, aboutit à un tel degré de complication quil devient très difficile — sinon impossible — de déchiffrer leurs corrélations par la voie d’une observation immédiate. Les ano- malies spontanées peuvent ainsi servir parfois — et cela a juste- ment lieu dans les cas de Cardiocéphalie — à introduire lélé- ment analytique par une disjonction, par une sorte d’espacement des ébauches qui évoluent ordinairement l’une à côté de l’autre en exerçant une influence morphogénique réciproque si difficile à saisir... Une tel isolement des ébauches voisines — spontané dans les cas tératologiques — serait bien irréalisable à l’aide de n'importe quelle méthode en usage dans l'embryologie expé- rimentale. Même en n’approfondissant point la question des causes immédiates qui engendrent l’anomalie cardiocéphali- que elle-même, et qui nous échappent, avouons-le, totalement, (car nous n'aurons à émettre à ce propos que des hypothèses plus ou moins vagues) nous devons néanmoins constater que les relations qui peuvent apparaitre au cours du développement de la région céphalique des embryons atteints de cette anomalie — et surtout les relations entre la couche ectodermique et l’'ébauche de l'intestin céphalique — présentent un exemple très instructif du fait que les conformations tératologiques prou- 22 316 JAN TUR vent l'existence d'une échelle beaucoup plus large des possi- bilités formatrices (dans les cas donnés, enfermées dans l’ectoderme pré-céphalique), que celle qui nous est révélée dans le rôle formatif ordinaire des ébauches embryonnaires. IV ; Dans les chapitres précédants, nous avons décrit les faits les plus saillants de Cardiocéphalie, nous avons caractérisé Le type tératogénique lui-même et posé quelques-uns des problèmes que soulève l'étude de ce matériel intéressant. Ces faits étaient bien les plus typiques, ceux. où l’anomalie apparait avec ses caractéristiques précises et incontestables. En examinant mon abondante collection de jeunes embryons d’Oiseaux, j'ai ren- contré plusieurs autres cas de Cardiocéphalie qui n'étaient point — au premier coup d'œil — aussi caractéristiques que ceux qui viennent d'être décrits, mais présentaient néanmoins les caractères principaux de cette forme monstrueuse. J'en men- tionnerai quelques-uns, afin de montrer, d'une part sous quelles apparences la Cardiocéphalie peutse montrer #7 loto, en affec- tant parfois un aspect bien différent des cas typiques, et d'autre part les anomalies secondaires et surajoutées à la monstruosité principale dont elles modifient l’aspect extérieur. Un des exemples d'un Cardiocéphalien dont l'identité est assez difficile à établir d’après le seulexamen #7 toto est repré- senté sur la microphotographie, 14 pl. X. Nous voyons ici, à un grossissement assez fort, la partie antérieure d’un embryon de Poule incubé pendant 48 heures environ. La cons- titution générale du blastoderme était relativement normale, celle de son aire vasculaire montrait quelques particularités d'ordre secondaire, curieuses, par elles-mêmes, mais ne sortant nullement du cadre des variations régularisables au cours du développement ultérieur du germe. Ces variations consistaient d’abord en un accroissement assez faible de l'aire vasculaire vers l'avant : les « ailes » antérieures de cette aire atteignent à peine le niveau du bout céphalique du corps embryonnaire, malgré les dimensions assez considérables de la surface vascu- laire (6 mm. et 4 mm. 5). Puis, c'est un bandeau transversal, composé d’ilots sanguins en formation, pénétrant dans l'aire LA CARDIOCÉPHALIE 347 transparente et y découpant une région spéciale, située, en arrière de la région caudale de l'embryon, longue de 1 mm.2. Enfin, dans la partie droite de l'aire transparente, on aper- çoit un fort « recessus » parablasto-vasculaire, long de 2 mm. 1 et large de 1 mm. 05 (!), ce qui est énorme pour une formation de ce genre. Toutes ces anomalies n’ont, comme telles, rien de commun avec le processus cardiocéphalique. On pourrait, d’ailleurs, supposer que le faible degré d’accroissement de la partie anté- rieure de l'aire vasculaire pourrait se répercuter sur la forma- tion des veines omphalo-mésentériques et, par conséquent, sur celle de l’ébauche cardiaque, mais il faut rappeler que, dans d’autres cas de Cardiocéphalie, cette anomalie se forme au centre d’aires vasculaires parfaitement normales. Le corps de l'embryon, long de 4 mm. 2 (dont { mm. 5 envi- ron de ligne primitive) est pourvu de 5-6 paires de protosomites et d'une plaque nerveuse assez large se fermant dans la partie céphalique en gouttière aux bords très épais. La tête, peu trans- parente et sensiblement recourbée à gauche et puis à droite, se termine par une masse sombre donnant dans l’ébauche cardiaque. Celle-ci très fortement développée, se prolonge vers les côtés et en arrière en forme d’un croissant aux contours très nets. L'ébauche de l’intestin céphalique, très peu distincte sur la pièce in (o{o, mesurait environ 0 mm. 24 d'avant en arrière. La série des coupes longitudinales de cet embryon nous a montré que malgré l'aspect peu décisif de son aspect in toto — qui pouvait même suggérer, sur certains points, l’idée d’un jeune stade de l'Omphalocéphalie — nous avons bien affaire ici à un Cardiocéphalien, masqué par quelques détails secondaires et de valeur plutôt pathologique. Une des coupes médianes, représentée sur notre miécrophotographie 15, planche X est très instructive à cet égard. On voit ici que, malgré une cer- taine prolifération exagérée des parois ventrales de la vésicule cérébrale antérieure, qui a fourni un amas excessif d'éléments désorientés et en certaine mesure tombant en désagrégation (1) À comparer : Jan Tur « Sur l’asymétrie normale dans le développement de l’aire vasculaire des embryons d'Oiseaux » Comptes Rendus de la Société des Sciences de Varsovie, vol. VII, 1915, (16). 518 JAN TÜR (ce qui a contribué largement à rendre cette région si peu transparente tn /oto), la configuration générale et les rapports réciproques des constituants de la /ovea cardiaca et du repli ectodermique sous-céphalique sont bien ceux d'un Cardio- céphalien caractérisé. L'entrée de l’ébauche du pharynx se trouve sur la verticale tangente à la surface antérieure de l'encéphale. Celui-ci, dans sa partie supérieure, présente la rétroflexion typique vers l'arrière, suivant une étendue de O mm. 2, où la « plaque cardiocéphalique » est épaisse de 50 environ. C’est justement l'unique région du cerveau à cet endroit où l’on ne voit pas d’hyperprolifération pathologique de ses parois. L’ébauche du pharynx, profonde de 0 mm. 25 est située totalement en avant de l'encéphale et se dirige en haut, sous un angle de 60° environ avec la surface plane du blasto- derme. L'invagination ectodermique se dirige presque vertica- lement vers la fovea cardiaca et son fond est éloigné de 0 mm. 15 du bout antérieur du cerveau. Aïnsi, c’est bien la Cardiocéphalie avec tous ses traits essen- tiels, mais, comme nous l'avons dit, compliquéé par l'hyper- prolifération pathologique des parois ventrales du cerveau et aussi par celle de la région dorsale de l'intestin céphalique. Grâce à cette prolifération, Les limites entre l’ectoderme et la base de l’encéphale et l’endoderme sous-jacent se confondent en une seule masse confuse. Le même processus localisé dans la région dorsale (sur la microphotographie droite) du pharynx conduit à la formation d’un fort amas cellulaire, adhérant for- tement à la surface antérieure de l’ébauche cérébrale. Ces deux amas de cellules montrent, à côté de nombreuses figures caryocinétiques, des granulations colorées fortement à l’'héma- toxyline ferrique, signe non équivoque de la désagrégation nécrotique. Ce processus pathologique n'a, d'ailleurs, rien de commun avec la Cardiocéphalie elle-même, elle n’est qu'une maladie embryonnaire localisée, surajoutée à l’anomalie prin- cipale. | Un autre cas de Cardiocéphalie, encore plus compliquée par l'accroissement pathologique du tissu ectodermo-nerveux, est représenté 2» loto sur la microphotographie 16, planche XI. LA CARDIOCÉPHALIE 319 C'est un embryon de Poule incubé pendant 48 heures dans les conditions normales, ävec un accroissement périphérique du blastoderme normale. Comme dans le cas précédent, le déve- loppement de son aire vasculaire montre une particularité inusitée, à savoir que la limite antérieure de cette aire s'arrête à un niveau trop peu poussé vers l'avant : dans le cas qui nous occupe, cette limite n’atteint même pas le bout céphalique de l'embryon, de sorte qu’à une’ distance de 0 mm. 4 de ce bout vers l'arrière s'étale à droite et à gauche, en branches horizon- tales, la limite vraie de l’area vasculosa. L'aire transparente s'étire en avant de ce niveau à { mm. 5. Les dimensions totales de cette aire sont de 5 mm. { et 2 mm. 25, tandis que celles de l'aire vasculaire ne sont que de 4 mm. 5 et 4 mm. 2. Le corps de l'embryon, de longueur totale de 3 mm. 15, est pourvu de trois paires de protosomites, et d’une ligne primi- tive longue de 1 mm.65. La plaque nerveuse, assez large, est étalée suivant tout son parcours et montre, dans sa région antérieure, deux bourrelets assez forts. Ces bourrelets abou- tissent, vers l'avant, à une formation sombre en forme de « bonnet » opaque, posé de travers et formant le bout cépha- lique de l'embryon. Ce « bonnet » est large — suivant la ligne transversale — de 0 mm. 54, et long de 0 mm. 228. Ses bords, dirigés en arrière, embrassent des deux côtés les bouts anté- rieurs des bourrelets nerveux, tout en restant indépendants de ceux-ci. L’opacité de cette formation céphalique inusitée ne permet pas de reconnaitre #7 toto des traces quelconques de l'intestin céphalique et de la fovea cardiaca. La nature cardio- céphalique de ce germe, moins caractérisée toutefois que dans les cas précédemment décrits, ne s'est révélée que sur les coupes longitudinales. L'examen de celles-ci nous montre d'abord que la formation sombre transversale, terminant le bout céphalique de cet embryon, est due à un processus spécial de prolifération exces- sive de la masse ectodermo-nerveuse, se produisant dans toute l'étendue de la région antérieure du germe, et dont est atteinte, non seulement la partie distale de l’ébauche cérébrale, mais aussi une partie très considérable de l’ectoderme extra-neural situé en avant du cerveau. Sur la coupe strictement médiane, représentée sur notre microphotographie 17, on voit que ces 320 JAN TUÜR deux ébauches (celle de l'encéphale, à droite, et celle de l'ecto- derme, à gauche) se confondent en une masse commune, com- pacte, longue de 0 mm. 4 et haute de 0 mm. 23. De cette masse, la moitié droite appartient à l'encéphale et la gauche à l'ectoderme extra-neural, comme le prouve l'examen des coupes voisines où ces deux ébauches se séparent l’une de l’autre. Le bout terminal de l’encéphale s'infléchit en arrière, en prenant la configuration cardiécéphalique, accentuée sur la microphotographie 17 par un léger promontoire de la masse nerveuse, situé vers son bord supérieur (à droite et en haut de la microphotographie). L'épaisseur inusitée de l'ectoderme extra-neural en avant de l'encéphale se prolonge encore vers l'avant où, au niveau de l’entrée de l'intestin céphalique, elle atteint jusqu'à 50 x. La position anormale de l’ébauche du pharynx, transposée fortement en avant de son emplacement ordinaire, et dirigée vers le haut sous un angle de 35° avec la surface ventrale du blastoderme, présente tous les caractères de Cardiocéphalie typique. On se rend compte, après examen des coupes, que l'aspect in toto, où les limites de l'intestin céphalique sont tout à fait invisibles, est dû à l'épaisseur anor- male de l’ectoderme du bout céphalique de l'embryon. Cet accroissement de l'ectoderme présente ici une anomalie sur- ajoutée à la Cardiocéphalie dont les traits essentiels, touchant l’infléchissement vers l'arrière du cerveau et la transposition correspondante de l'intestin, se sont prononcés d’une façon non moins typique que dans les cas modèles décrits e1-dessus. Pour en finir avec la morphologie des Cardiocéphaliens bien caractéristiques, et avant de passer à l'étude des monstruosités embryonnaires qui ne sont comparables qu'apparemment à la Cardiocéphalie véritable, nous nous arrèterons sur deux cas assez intéressants d’embryons dont l'un est atteint de malfor- mations multiples, parmi lesquelles la Cardiocéphalie n'est point des moins graves, et l’autre présente le stade le plus précoce de l’anomalie fondamentale que j'aie pu trouver dans mon matériel, quoique aussi un peu modifié par d’autres ano- malies d'ordre secondaire. Ce dernier cas, où la conformation POUR hotte ns LA CARDIOCÉPHALIE 324 du système nerveux n'est pas tout à fait typique, pourra servir de chainon de transition vers de « faux Cardiocéphaliens ». Le premier de ces germes provient d’un œuf de Poule incubé pendant #7 heures dans les conditions normales. Nous nous bornerons ici à sa seule description ?n7 {oto. Au centre du blastoderme, l'area pellucida et larea vasculosa. présentent des relations inaccoutumées : dans la moitié postérieure de l'aire transparente, le réseau vasculaire, représenté par les ilots irréguliers, s’est insinué vers les parties axiales de l’em- bryon, de sorte qu’en commençant par la moitié de la lon- gueur totale de celui-ci, l'aire transparente n'est plus recon- naissable, grâce à son envahissement par l'aire vasculaire. Par contre, ce réseau d'ilots sanguins s'est arrêté net vers l’avant, au niveau de la moitié antérieure du corps de l'embryon, e laissant l'aire transparente libre et bien délimitée dans sa partie céphalique. Les dimensions de l'aire vasculaire, forte- ment étirée de l'avant en arrière sont de 4 mm. 5 et 3 mm. 6; celles de l'aire transparente, également étirée dans la même direction, de 2 mm. 7 et 2 mm. 5. Le corps de l'embryon est composé d’abord d’une ébauche cardiaque logée sensiblement en avant du bout terminal de l’'ébauche nerveuse, puis d'une large plaque nerveuse aux contours circulaires et d'une ligne primitive sortant de cette plaque (ces détails sont représentés sur notre microphotogra- phie 18, planche IIT). La ligne primitive se termifte en arrière, par deux branches distinctes et une troisième moins nette (ce qui n'est pas visible sur la microphotographie). L'ébauche cardiaque est, à son tour, composée de la partie médiane, longue de 0 mm. 25 et large de 0 mm. 25-0 mm. 5 et de deux veines dirigées en arrière, en contournant la plaque nerveuse et en rejoignant le niveau de la limite antérieure du réseau vasculaire, qui est éloigné de 1 millimètre environ du bord antérieur de la plaque nerveuse. Ainsi, nous constatons ici le même phénomène que nous avons déjà rencontré chez d’au- tres Cardiocéphaliens, notamment un éloignement très sensible du niveau du réseau circulatoire, situé en arrière de l’ébauche cardiaque fortement déplacée en avant. La plaque nerveuse, sensiblement étalée en largeur à Ia facon des Platyneuriens caractérisés, présente laspect d’une 322 JAN ŒTUR tache sombre arrondie, mesurant 0 mm. 84 en longueur et 0 mm. 93 en largeur. C’est un cas très accentué de Platy- neurie extrême, appartenant à une catégorie plutôt rare. Contrairement à ce qu’on rencontre d'ordinaire dans de pareils cas, la plaque platyneurique étalée n’a pas une épaisseur uniforme dans toute son étendue; vers son bord antérieur, un peu à droite de la ligne médiane, le tissu de la plaque présente un épaississement spécial localisé, sous forme d'un bourrelet sombre, ayant l'aspect d'un V dirigé en avant par son sommet, ses branches mesurent 0 mm. 3 chacune et 0 mm. 09 en lar- geur. L'examen x toto, à un grossissement assez fort, suffit pour établir que cette formation correspond justement au bord céphalique de la plaque nerveuse, renversé en arrière, comme chez les Cardiocéphaliens typiques. Le cas décrit présente un intérêt spécial, vu que la configu- ration de l’ébauche cardiaque rappelle de très près celle du cœur des Omphalocéphaliens. Il est à noter qu'un des traits fondamentaux de l'Omphalocéphalie est la pénétration de la tête de l'embryon au-dessous du cœur, ce qui n'a pas lieu dans notre cas de Cardiocéphalie compliquée d’une Platyneurie excessive. Nous verrons plus loin qu'un tel déplacement anor- mal du cœur vers l'avant peut aussi avoir lieu chez les Platy- neuriens, qui ne sont d'ailleurs point atteints d’une vraie Cardio- céphalie. J'attire spécialement l'attention des tératogénistes sur ces variationstsurvenant au sein d'anomalies diverses qui peu- vent parfois gêner l'interprétation d’un embryon monstrueux, en égarant dans de multiples détails chevauchant les uns sur les autres, dans un engrenage d'anomalies difficiles à analyser. C'est bien pour cela que je me permets d'entrer dans tant de détails, apparemment secondaires, mais qui peuvent néanmoins servir à distinguer des types tératogéniques qui convergent quant à la forme extérieure, quoique parfois tout à fait diffé- rets quand à l'essence même des processus fondamentaux. Un autre embryon — Cardiocéphalien 7usqu'à un certain point — qui termine notre série de germes atteints de cette anomalie, n'a été incubé que pendant 24 heures et atteint néanmoins un degré de différenciation très élevé. Le diamètre de son blasto- derme n’est que de 12 millimètres. Son aire vasculaire, en for- mation, à l'aspect encore purement parablastique, sans îlots en dotés testés tint 24 bénsscinint LA CARDIOCÉPHALIE 323 sanguins distincts ; elle mesure 5 mm. 25 en longueur et 3 mm.2 environ en largeur. L’aire transparente, longue de 4 mm. 2 et large de 2 mm. 25-1 mm. 8, renferme un embryon long de 3 mm. 6, dont ! mm. 65 de ligne primitive, terminée en arrière par un fort « nœud caudal » de 0 mm. 45 de diamètre. Il y a trois paires de protosomites différenciés et une quatrième paire en voie de formation. L'ébauche nerveuse est représentée encore par une plaque suivant la plus grande partie de l’éten- due de l'embryon et les bourrelets nerveux ne sont prononcés que suivant 0 mm. 54 vers son extrémité céphalique Ces bour- relets, assez forts du reste, se terminent par un élargissement transversal, présentant le bout antérieur de l’encéphale en for- mation, large de 0 mm. 252. Cet élargissement (où on n’aper- cevait pas, x toto, de pli antéro-postérieur, caractéristique pour les vrais Cardiocéphaliens) adhère immédiatement à un très fort repli transversal, ayant les caractères de l'intestin céphalique, disposé en avant de la tête, long de 0 mm. 145 et large jusqu'à 0 mm. 6. La position et l’aspect général de ce repli sont, comme on le voit sur la microphotographie 19, tout à fait comparables à ceux des Cardiocéphaliens caracté- risés. Sur les coupes longitudinales, dont l’une est représentée sur la microphotographie 20, on peut constater que des deux traits essentiels de la Cardiocéphalie (le renversement en arrière du bout antérieur de l'ébauche cérébrale et la transpo- sition vers l’avant de l'intestin céphalique), le second s'est réalisé surtout, tandis que le premier est à peine prononcé. En effet, la paroi antérieure du cerveau n’est qu'assez faiblement penchée en arrière et, en même temps, l’ébauche du pharynx s’'arrondit en une forte hernie en avant de la tête de l'embryon, en faisant une saillie du fond de l’endoderme, longue de 140 et large de 30 4.40 u. La paroi endodermique antérieure (c’est-à-dire ventrale à proprement parler) de cet intestin est épaisse de 36 u, tandis que l'épaisseur de sa région adhérant à l’encéphale atteint jusqu'à 80 w et ses éléments paraissent désordonnés, au lieu de se ranger en couche épithéliale régu- lière. La direction de l'invagination pharyngienne forme un angle de 60° environ avec la surface ventrale de l'endoderme. En résumé, le dernier de nos cas devrait être considéré comme un Cardiocéphalien incomplet, ou plutôt atteint d'une 324 JAN TUR hétérochronie curieuse, où l'anomalie bien caractérisée de l'ébauche de pharynx s'est constituée sans répercussion sen- sible sur l’état correspondant de l'ébauche cérébrale. La possi- bilité de l'existence d'une telle configuration permettrait de mettre en doute la nécessité d'une corrélation intime entre ces deux malformations que nous avons jusqu'ici vu apparaître toujours de concert et simultanément dans les cas précédents de Cardiocéphalie. Il n'est, d’ailleurs, pas impossible que, vu l'âge très jeune de notre dernier embryon, la formation d'une vraie « plaque cardiocéphalique » dans la partie antérieure de son cerveau, pourrait apparaître dans les stades ultérieurs de développement. Mais, dans ce eas même, les liens corrélatifs s'établissant au cours de l’évolution de la Cardiocéphalie nous apparaissent sous un jour nouveau, que nous aurons à discuter après avoir étudié les autres cas d'embryons « imitant » les dispositions cardiocéphaliques. v Nous avons déjà remarqué que, sauf quelques rares excep- tions, le diagnostie de Cardiocéphalie, d'après le seul examen in toto des embryons monstrueux, n'est pas du tout sûr, et que les dispositions typiques pour ce genre d'anomalie embryon- naire, dans le sens’ que nous lui attribuons ici, peuvent être parfois « imitées », sans que la structure véritable de la région antérieure du germe réponde à notre schéma fondamental. Nous avons déjà constaté, dans le dernier des cas décrits, que l'anomalie en question peut s'accentuer même très forte- ment dans l'ébauche de l'intestin céphalique, en laissant le cer- veau presque tout à fait normal. Maintenant nous nous adres- serons à l'étude des « faux Cardiocéphaliens » (comme il existe de « faux Omphalocéphaliens » d'après les recherches classi- ques de Ragaup (17). Cette étude nous permettra d'élargir notre champ de recherches sur les mêmes problèmes du mécanisme évolutif de l'intestin céphalique et de la fovea cardiaca, de sorte qu’à la fin de ce travail nous pourrons traiter ces ques- tions en nous basant sur les données puisées dans le domaine de la Cardiocéphalie, aussi bien que de celui des monstres qui affectent la structure apparemment semblable à celle-ci. Car, soie tnt te SÉ n. LA CARDIOCÉPHALIÉ 325 justement, la plupart des « faux Cardiocéphaliens » montre des déviations très curieuses de la fovea cardiaca et de l'intestin dont la nature est de compléter, parfois d'une façon extrême- ment instructive, les arguments fournis par la vraie Cardiocé- phalie. D'après les matériaux que je possède, les « faux Cardiocépha- liens » ne composent point une classe uniforme de monstres. On peut y classer les cas ressemblant au dernier de ceux que nous venons de décrire ici comme représentant une Cardiocé- phalie incomplète, mais dans lesquels le cerveau reste tout à fait normal ou présente des anomalies n'ayant rien de commun avec la « plaque cardiocéphalique ». Je m'abstiendrai de donner leur description, car on n'y trouverait pas béaucoup de détails nouveaux concernant les traits essentiels du méca- nisme de déplacement du cœur, et je me bornerai à exposer les quatre cas où ce déplacement est accompagné de Platy- neurie bien caractérisée, bien que je n'attribue point à cette dernière anomalie l'influence décisive sur les relations sarve- nues dans la région de la fovea cardiaca. Nous avons déjà vu que Le développement platyneurique peut coexister avec une Cardiocéphalie des plus typiques. D'autre part, dans l'immense majorité des Platyneuriens, la conforma- tion de l’ébauche cardiaque et de l'intestin céphalique — mises à part les modifications corrélatives à la Platyneurie elle-même — ne rappelle en rien celle qui caractérise la Cardiocéphalie vraie. Ainsi, ces deux anomalies sont bien indépendantes l'une de l’autre quant à leur essence et, de même, on peut supposer que les modifications secondaires des dispositions liées avec l’une et l’autre de ces anomalies puissent surgir sans aucun lien com- mun immédiat. Nous avons constaté que, chez les embryons non platyneuriques, le déplacement du cœur en avant du bout antérieur de la tête n’entraine pas fatalement une conformation cardiocéphalique de l’ébauche cérébrale. Nous aurons même à constater plus loin que, parfois, un tel déplacement ne se réper- cute pas trop sensiblement même sur le développement de l'in- testin céphalique, mais, en même temps, nous verrons que, dans d’autres cas, un tel déplacement peut aboutir à des com- plications très graves dans la conformation de cet intestin, modi- fications liées avec une étonnante ressemblance — d'ailleurs 326 JAN TUR toute extérieure — de ces embryons avec les Platyneuriens- cardiocéphaliens. Dans cette série de Platyneuriens pseudo-cardiocéphaliens, nous aurons à distinguer d’abord trois cas de Platyneurie extrême, comprenant des anomalies multiples, parfois incompa- tibles avec le développement ultérieur plus ou moins prolongé, même monstrueux, de ces embryons; et puis un cas de Cyclocé- phalien en voie de développement « normal » (pour ce genre de monstruosité), mais atteint d'une hétérotopie curieuse de l’ébau- checardiaque.Nousverronscomment ces monstruositésembryon- naires peuvent se rattacher à la Cardiocéphalie et à ses disposi- tions spéciales, et puis nous tâcherons d'analyser l'ensemble des faits que nous fournit l'étude de ces formes diverses d'évolution anormale de la région antérieure du germe d'Oiseaux. Le premier cas de Platyneurie compliquée par la transposi- tion anormale de l’ébauche cardiaque en avant du corps embryon- naire est représenté sur la microphotographie 21, planche XI. Nous avons sous les yeux la partie antérieure d’un embryon de Poule, incubé pendant 48 heures, à l'aire vasculaire à peu près normale, à l'aire transparente longue de 4 mm. 5 et large de 3 millimètres, pourvu d’une bande forte de « parablaste sous-ger- minal » (18) traversant l'aire transparente d’un côté à l’autre au niveau de la région céphalique de l'embryon. Le corps du germe, long, ligne primitive comprise, de 3 millimètres, a l'aspect indis- cutable d'une Platyneurie caractérisée : la largeur de sa plaque nerveuse étalée mesure 0 mm. 65, ce qui démontre l'état platy- neurique indubitable. Cette plaque nerveuse se termine en avant par un épaississementsombre qui la contourne sous forme de croissant, large de 0 mm. 06 à 0 mm. 11. Cet épuississement rappelle, à l'examen n {ot0, le bord renversé en arrière de la plaque cardiocéphalique, ce qui d’ailleurs, ne correspond point à la réalité, comme l’a démontré l'étude des coupes sériées. En avant de la tête de cet embryon, et vers sa ligne médiane, se dessine, à une distance de 0 mm. 045 du bord de la plaque nerveuse, un pli double, large ensemble de 0 mm. 065 et s'éta- lant vers les côtés de 0 mm. 24. À l’exaraen ?n /oto, ce pli rap- pelait le repli « proamniotique » de beaucoup d'auteurs qui le représentent chez les embryons d'Oiseaux vers ce stade-là, ce dé deal opte ind Où LA CARDIOCÉPHALIE qui n'est à mon avis, ni constant, ni même sûr, vu que la figure d'un prétendu amnios en voie de formation peut bien être con- fondue avec la disposition spéciale du « croissant antérieur » de M. Duvas. Je compte revenir sur cette question dans un tra- vail spécial. En ce qui concerne notre embryon, l'absence d’un intestin céphalique à sa place coutumière, aussi bien que la présence de deux ébauches veineuses très distinctes (surtout du côté droit) qui débouchent de deux côtés du repli en question permettent déjà, avant l'étude des coupes, de supposer sa vraie nature et de l’assimiler à une ébauche de l'intestin cépha- lique transportée en avant de la tête. Notre microphotographie 22, planche XI montre la coupe lon- gitudinale médiane de cet embryon. Elle prouve d'abord que notre dernier cas ne saurait aucunement être rattaché à la Car- diocéphalie sensu proprio, car, non seulement le bord antérieur de la plaque nerveuse ne s’infléchit pas en haut et en arrière, mais, bien au contraire, il finit par un étirement arrondi, et l’ec- toderme extra-neural qui se différencie, s'infléchit en bas en pénétrant au-dessous du bord de la plaque platyneurique. Par contre, l'ébauche de l'intestin céphalique, comme nous l’avons déjà supposé d'après l'aspect 2x /o10, est fortement trans- posé en avant, de sorte que ses contours, de concert avec la dis- position spéciale de l'ectoderme qui la recouvre, donnaient, in toto, l'image du pli double mentionné à la place du « pro- amnios ». Cet intestin céphalique montre encore une particularité remar- quable : au lieu de former une invagination endodermique dirigée d'arrière en avant, parallèlement au plan de la plaque nerveuse, il ne forme qu'une excroissance réduite et à peine perceptible en haut, de sorte que l’ébauche de cet organe n’est discernable que grâce à l'épaississement localisé de la couche endodermique (jusqu'à 40 y), suivant une étendue de 180 y d'avant en arrière. Ainsi, l'intestin céphalique transposé en avant de la tête de l'embryon reste presque totalement étalé en surface, mais, dans cette configuration anormale, l'accroissement localisé de ses éléments s’est produit d’une façon à peu près normale. Nous ne relèverons ce fait qu'en passant, pour le moment ; nous aurons à y revenir, car c'est un phénomène constant, et ayant une signification et une valeur de tout premier ordre pour le pro- 328 JAN TUR blème de la morphogenèse de toute la région en question, que nous allens discuter à la fin de ce travail. Quant à l'ectoderme extra-neural, qui recouvre l’ébauche endodermique de l'intestin, il atteint une épaisseur de 30 u, en commençant par le repli qui s'insinue au-dessous de la plaque platyneurique; cette région de l’ectoderme épaissi s'étend de 200 y environ vers l'avant, puis, après une très légère infle- xion vers le bas, marquant à peine le pli correspondant à l'in- vagination ectodermique de la fovea cardiaca, il passe dans la couche mince de l’ectoderme extra-embryonnaire. Il est à noter a que, même dans l’ectoderme, l’épaississement correspondant à la fovea cardiaca apparäit au sein d'une couche très légère- ment arrondie, presque plate. Nous trouvons les mêmes dispositions essentielles, mais encore plus fortement accentuées, chez un autre embryon pla- tyneurique au degré extrême, dont l'aspect in /010 (de la partie antérieure seulement) estreprésenté surnotre microphotographie 23, planche XII. C'est un germe de Poule, de 30 heures environ d'incubation. L’aire vasculaire, longue de 5 mm. 1 et large de 5 mm. 4, pourvue d’un sinus terminal de deux côtés, mais non en arrière, finit en avant vers le niveau de la tête de l'embryon. Le corps embryonnaire, long de 3 mm. 3 (ligne primitive com- prise) n’est représenté que par une plaque platyneurique lon- gue de { mm. 35 et large de 0 mm. 75. Pas de traces de pro- tosomites. Une bande très forte et ramifiée de « parablaste sous-germinal » passe à travers la moitié du corps de lem- bryon. Vers la région antérieure de la plaque platyneurique, démesurément élargie, on voit un épaississement transversal très fort et opaque, large de 0 mm. 12, et qui, à l'examen in toto, ressemble à s'y méprendre à une « plaque cardiocépha- lique » renversée en arrière. Cet épaississement occupe toute l'étendue transversale de l'extrémité antérieure de la tête de l'embryon. A une distance de 0 mm. 06 de la limite antérieure de celle-ci, on aperçoit, sur le fond plus transparent du blasto- derme, une tache circulaire plus sombre de 0 mm. 18 de diamè- tre, qui n’est autre chose que l’ébauche cardiaque transposée I ET Us LA CARDIOCÉPHALIE 329 anormalement vers Favant. Des deux côtés de cette tache, les ébauches veineuses, bien qu'encore peu distinctes, accusent leurs connexions avec cette première trace d'un cœur en for- mation. En somme, tout l'aspect #7 folo de cet embryon parait correspondre à une Cardiocéphalie bien prononcée, jointe à une Platyneurie des plus accusées. L'étude des coupes longitudinales conduit, toutefois, à d’au- tres conclusions. Je dirais même que c’est un exemple typique d'un aspect #n /oto mensonger, prouvant une fois de plus la néces- sité qui s impose toujours de vérifier sur les coupes les détails si souvent insaisissables (même à de forts-grossissements) d’une préparation totale, Car, comme le prouve la microphotographie 24, ce qu'on serait volontiers porté à considérer comme une « plaque de Cardiocéphalie », c’est-à-dire Le large bandeau transversal opaque dans la tête de notre embryon, non seulement n'est pas dû à une portion du tissu nerveux renversée en arrière, mais est la doublure de ce tissu, provoqué par un infléchissement de l’ectoderme sous-céphalique au dessous de l'extrémité anté- rieure de la tête... La nature de ce repli de l'ectoderme extra- neural dans cette région du corps embryonnaire, se dirigeant en arrière et au-dessous du bord de la plaque platyneurique, sem- ble exprimer une double signification. D'abord, et d’une-manière générale, il rappelle un repli ectodermique qui apparait assez souvent chez les embryons platyneuriques et qui s’insinue au-dessous de la plaque nerveuse étalée, aussi bien en avant de celle-ci que de ses côtés (surtout suivant la partie antérieure du germe), et, d'autre part, la structure histologique de ce repli, aussi bien que son épaisseur, semblent indiquer que c’est plutôt le pli de l’ectoderme sous-céphalique ordinaire (ou son rem- plaçant, à vrai dire), destiné à priorr à fournir la partie ecto- dermique de l’ébauche de la fovea cardiaca. Ce repli s'invagine au-dessus de l’ébauche nerveuse suivant une étendue de 90 w d'avant en arrière, en atteignänt une épaisseur de 24 p, puis il s'étend vers l'avant, en conservant l'épaisseur de 22-20 sur une étendue de 0 mm. 5 environ. Ainsi, comme nous le montre notre microphotographie 24, la partie spécialement épaissie de l'ectoderme sous-céphalique s'étale ici en avant de la tête de 330 JAN TUR l'embryon en affectant une position plane, non recourbée en arrière, sauf sa très restreinte région postérieure. Cette configuration inaccoutumée de lébauche ectodermique de la fovea cardiaca, correspond exactement à la disposition encore plus anormale de l'endoderme se différenciant pour la formation de l'intestin céphalique. On chercherait en vain ici l'invagination typique pour l'ébauche du pharynx : la couche endodermique reste presque totalement plane, sauf son incur- vation légère en haut vers la moitié de l'étendue de sa partie où, seul, son caractère histologique témoigne de sa vraie signification morphologique. En commençant par l'endroit où pénètre le court repli de l’ectoderme sous-céphalique, l'endo- derme acquiert l'aspect d’une couche épaissie, jusqu'à 43 u, grâce à la disposition en palissade de ses éléments; l’ébauche du pharynx ainsi représentée se prolonge en avant suivant une étendue de 0 mm. 45. Notons donc que cette ébauche de lin- testin céphalique révèle le caractère doublement anormal : d'abord celui de sa transposition si accentuée en. avant du corps de l'embryon, et puis sa configuration en couche presque totalement étalée en surface parallèle au plan du blasto- derme. Ni l'une ni l'autre de ces circonstances, toutefois, n’ont nullement empêché la différenciation histologique de cette ébauche, c’est-à-dire l'accroissement caractéristique localisé de ses éléments, survenant dans un endroit inaccoutumé, et sans le plissement préalable de la région intéressée de l’endo- derme. Sans insister sur les conclusions théorique qui découlent des faits énoncés, nous nous arrêterons encore sur un cas de mons- truosité, comparable aux deux cas précédents, quoique encore plus compliqué. La microphotographie 25, Planche XII, montre la région cen- trale d'un blastoderme, provenant d'un œuf de Poule très jeune, primipare, incubé pendant 47 heures 1/2. Il est curieux de cons- tater que les dimensions de l’œuf lui-même étaient très sensible- ment au-dessous de la normale, c'était un véritable « œuf naïn », dont la coque mesurait 48 mm. 2 et 35 mm. 3 seulement, et qui ne pesait que 33 gr. 5. Le diamètre total du blastoderme était de 21 millimètres. L'aspect général du corps embryonnaire, aussi bien que de So le ml PE 7, LA CARDIOCÉPHALIE 331 son réseau vasculaire, révèlent au premier coup d'œil un assemblage d'anomalies multiples et graves. D'abord, c’est une Platyneurie extrême, liée à un « arrêt » très sensible de la région caudale de l'embryon, ce qui lui donne l'aspect d'un soi-disant « Céphalidien » (une monstruosité qui,. d’ailleurs, n'existe pas en réalité, comme je l'ai démontré dans mes tra- vaux sur la Platyneurie). Une telle forme de développement platyneurique est absolument incapable d'évolution prolongée, et pourrait être considérée comme un état préparatoire à la disparition plus ou moins complète des composants figurés du germe, c'est-à-dire à une forme spéciale, quoique point classi- que, de l’Anidie embryonnaire que je nommerai secondaire tar- dive. En outre, l'ébauche cardiaque et intestinale de cet embryon curieux est fortement déplacée en avant de la plaque nerveuse, ce qui lui donne les apparences d'un Cardio- céphalien. L'aire vasculaire, longue 4 mm. 35 et large de 4 mm. 5 sans sinus terminal, entoure totalement (contrairement à ce que nous venons de constater dans d’autres cas semblables) l'aire transparente aux contours vaguement triangulaires, très sensiblement rétrécie en arrière, et qui mesure 3 mm. 15 en longueur et de { mm. 95 à 0 mm. 15 en largeur. Dans la partie caudale de celle-ci, l'envahissement de son territoire par le réseau vasculaire est très accusé, comme cela arrive souvent chez les Anidiens en formation. Vers sa moitié antérieure, cette aire transparente se divise bizarrement en deux parties, séparées l’une de l’autre par une limite très nette : l’une gauche, beaucoup plus transparente, et l’autre, droite, où le mésoderme est mieux prononcé. Cette asymétrie de différenciation au sein de l'aire vasculaire s'est répereutée sur la configuration de l’ébauche cardiaque dont le côté droit est sensiblement mieux développée que le gauche. Le corps de l'embryon, dontla partie postérieure est masquée par une agglomération vitelline, ne dépasse point 1 mm. 5. La largeur de la plaque platyneurique est de 0 mm. 8. Le bord antérieur de cette plaque, aux contours très compliqués, formés d’excroissances et d’échancrures, comme entortillés, est doublé d’une bande transversale sombre et opaque, suivant tous les 23 392 JAN TUR détours de ce bord, et qui ressemble bien, ?# /o1o, à la « plaque cardiocéphalique » de la région renversée du cerveau. À une distance de 0 mm. 047 en avant du bord de lencéphale appa- rait l’'ébauche cardiaque et pharyngienne asymétrique, comme nous l’avons déjà mentionné. L'examen des coupes sériées longitudinales de cet embryon, montre que, dans ce cas même, nous avons affaire à un pseudo- cardiocéphalien, en dépit des apparences extérieures. Ces cou- pes passent perpendiculairement au bord le mieux accentué de l'intestin céphalique, en tenant compte de la torsion du corps embryonnaire. Aünsi qu'il ressort de la microphotographie 26, la configu- ration de l’'ébauche cérébrale de ce germe est bien éloignée de celle d’une vraie Cardiocéphalie ; au lieu de se rejeter en arrière, le bord antérieur de la plaque nerveuse se soulève en haut toutentière, en passant insensiblement à l'ectoderme extra- neural, très épaissi au niveau de la naissance de ce bord et qui s’infléchit immédiatement au-dessous de la plaque nerveuse. Cet infléchissement produit une véritable invagination se pro- longeant d'avant en arrière et un peu obliquement suivant une étendue de 190 p. À partir de l'endroit où, de la plaque platy- neurique se détache la partie dorsale de cette invagination . (entre celle-ci et la région soulevée de l’ébauche cardiaque) s'insinue une masse de cellules désordonnées, formant une agglomération longue de 189 u et large de 59 4. L'aspect de ces ae dont quelques-unes montrent des granulations sombres de caryorexie, permet de supposer que cette prolifération anor- male d'éléments ectodermiques est vouée à une désagrégation pathologique imminente. Ainsi, l'aspect in /oto d'une bande opaque bordant le bout antérieur de la plaque platyneurique de notre embryon s'explique comme une formation très com- plexe, due au concours de trois facteurs différents : l'épaisseur de la plaque nerveuse surélevée, celle du repli ectodermique sous-céphalique, et, enfin, celle de l’amas pathologique de cellules nées entre ces deux couches, et dont la signification mu ique reste incertaine. Dans la région qui s'étend en avant de la tête de Le (c’est-à-dire à gauche de la microphotogr. 26) on aperçoit les ébauches de l'intestin céphalique et de la Jovea cardiaca, formées, 4 LA CARDIOCÉPHALIE 333 toutes les deux, tout à fait comme chez les Cardiocéphaliens typi- ques, ce que laissait prévoir déjà l'examen ?» /o10, très expli- cite à cet égard. L’intestin céphalique se présente sous la forme d’un repli endodermique, profond de 130 y et large de 40 environ, à paroi antérieure (ventrale) épaissie jusqu à 26y, et dont le bord antérieur est éloigné de plus de 100% du niveau de celui de la plaque nerveuse. Ce repli forme un angle de 50° environ avec la surface du blastoderme, En avant de l'intestin une fovea cardiaca typique s'est instituée, grâce à la présence d’un repli ectodermique de l'ectoderme extra-neural, se dirigeant vers le coude formé par l'endoderme, profond de 120 y environ. Entre le fond de ce repli et le coude endoder- mique, on aperçoit déjà l’ébauche mésodermique du cœur, Aïnsi, nous avons tous les composants d'une vraie fovea car- diaca, quoique transposés et soulevés en haut. Il faut aussi noter que, vu les dimensions très considérables du pli de l’ectoderme extra-neural s’insinuant au-dessous de la plaque nerveuse de l'embryon, on serait porté à le considérer plu- tôt comme un repli correspondant à celui de l'ébauche ectoder- mique de la fovea cardiaca, que, comme un pli assez ordinaire dans cet endroit chez les Platyneuriens. D'autre part, nous avons vu que notre embryon est pourvu d'un second repli ectodermique, très nettement formé, à sa place normale, où devrait se former la fovra cardiaca : ainsi, nous avons af- faire à un cas rappelant de très près le troisième des monstres embryonnaires décrits dans ce travail, c’est-à-dire à la forma- tion de deux plis qui devrait également servir à constituer la fovea cardiaca, Vun s'orientant d’après l'extrémité antérieure de l’encéphale de l'embryon, et l'autre se formant en corréla- tion avec l’ébauche de l'intestin céphalique née dans un endroit inaccoutumé. Enfin, je mentionnerai encore le cas d’un embryon platy- neurique, tout à fait bien constitué comme tel, et, paraissant capable de poursuivre son développement peut-être jusqu'à l’éclosion même, et qui est, en outre, atteint d'un déplacement inusité de l’ébauche cardiaque vers l’avant, non point d’une 334 JAN TUR façon aussi frappante que dans d’autres cas de pseudo-cardio- céphalie, mais suffisante toutefois pour que des relations très curieuses se produisent dans sa /ovea cardiaca. C'est un embryon de Poule, de 50 heures d'incubation, à aire vasculaire longue de 6 mm. 2 et large de 5 mm. 7, constituée par des ilots sanguins fortement épaissis et irréguliers, con- tournée par un sinus terminal très large. Son aire transpa- rente, longue de # mm. 35 et large jusqu'à 1 mm. 5 contient un corps embryonnaire long de 2 mm. 8, y compris les contours de l’'ébauche cardiaque, dépassant le bord antérieur de la tête. La structure générale des parties figurées du germe révèle une Platyneurie bien accusée, surtout dans sa moitié antérieure. La largeur de sa plaque nerveuse étalée en surface atteint Jus- qu'à 0 mm. 624 au niveau de la tête : elle est de O0 mm. 42 vers la région des protosomites. Ceux-ci, pour la plupart fortement étirés dans le sens transversal et montrant les traces d’un dédoublement schistopoiétique, sont au nombre de 12 du côté gauche et de 9 seulement du droit. La plaque platyneurique de la tête s'arrondit dans sa partie antérieure, sans qu'il y apparaisse une zone sombre queleon- que rappelant la plaque cardiocéphalique ou le repli ectoder- mique sous-cérébral. Par contre, son contour est un peu obs- eurci par la position anormale de l’ébauche cardiaque dont plus de la moitié dépasse la limite du cerveau en se logeant en avant de celui-ci. Cette ébauche du cœur est représentée par deux veines omphalo-mésentériques très fortes, s’unissant vers la ligne médiane en une formation arrondie, dédoublée, lon- gue de 0 mm. 395 et large de 0 mm. 885. Tout ce complexe cardiaque très élargi (phénomène constant chez les Platyneu- riens) est situé de telle sorte que sa limite antérieure dépasse de 0 mm. 215 celle de la plaque cérébrale (Microphot. 27, pl. XI). Vu la structure de l'ébauche de l’encéphale, très facile à examiner tx Loto, il n’y à point lieu de supposer l'existence de Cardiocéphalie. Restent les relations anormales de la région car- diaque. La microphotographie 28 montre ces relations sous un jour intéressant. Sur les coupes longitudinales, la tête de l'embryon se termine en une plaque platyneurique ordinaire, épaisse de 54 y, dont la région antérieure supérieure émet l'ec- « PP PAPER RE “- « Er a Nr ad sé LA CARDIOCÉPHALIE 33) toderme extra-neural, de 10 4 d'épaisseur, qui s'insinue immé- diatement au-dessous de la plaque nerveuse, en y adhérant très intimément, s'étend vers l'arrière suivant une étendue de 200 x, et puis se dirige en avant, en formant ainsi un ph très étroit. Quant à l'intestin céphalique, il est représenté par une invagination endodermique relativementtrop courte (sa longueur ne dépasse point 2502), dirigée en haut suivant un angle de 40° environ avec la surface plane du reste de l’endoderme, et épaissie jusqu'à 40 y, surtout vers sa partie antérieure, c'est-à- dire ventrale. A part la poche ectodermique formée par le repli de lecto- derme extra-neutral au-dessous de la tête de l'embryon, il n'existe point d'autre pli de l'ectoderme qui soit comparable à une ébauche co-formative de la fovea cardiaca, car une faible dépression de l'ectoderme,.qu'on voit Sur la microphotogra- phie 28 en avant de la plaque cérébrale, ne saurait être prise pour une formation d’une valeur morphogénique quelconque, vu ses dimensions très restreintes, aussi bien que le carac- tère histologique de cette région, où le feuillet externe n'est _ formé que par un seul rang de cellules aplaties. Ainsi done, il n'existe point de vraie fovea cardiaca, car cette formation est, en principe, constituée par deux ébauches, l’une endodermi- que (intestin céphalique) et l'autre ectodermique (ectoderme extra-neural sous-céphalique), dont la seconde doit pénétrer au-dessous de la première, de sorte qu'il se forme dans cet endroit deux plis parallèles l’un à l’autre et qui se dirigent dans les directions opposées. Dans notre dernier cas, — même si nous attribuons au repli de l'ectoderme s'insinuant sous la pla- que platyneurique la valeur d’ectoderme sous-céphalique, des- tiné, par principe, à contribuer à la formation de la /ovea car: diaca, — même alors nous devons constater que ce pli, à dimensions d'ailleurs trop restreintes, n'a point rempli son rôle morphogénique en restant dans une région de l'embryon où sa pénétration au-dessous du cœur est devenue tout à fait impossi- ble. Est-ce bien un phénomène dépendant de la Platyneurie comme telle, vu que l'ectoderme extra-neural des monstres Platyneuriens montre toujours une tendance à se replier au- dessous des bords de la plaque nerveuse étalée ? La micro- photographie 29, pl. XII, prouve qu'il n’en est rien. En effet, 336 JAN TUR sur la coupe longitudinale médiane d'un embryon platyneuri- que ordinaire du même âge, au cœur placé dans ses rapports normaux, nous voyons que l’ectoderme extra-neural, bien qu'il longe suivant une certaine étendue la paroi ventrale de la pla- que nerveuse, s’en écarte ensuite en se dirigeant vers le bas pour y contribuer à la formation d’une /fovea cardiaca bien typique pour le futur s/omodum. Par conséquent, nous devons conclure que, chez ce Platy- neurien à cœur transposé vers l'avant, l’ébauche de la fovea cardiaca n'est point délimitée vers sa région antérieure, qui s'étend ici indéfiniment... jusqu'aux limites de la couche endo- dermique elle-même. Dans notre dernier cas, l’'anomalie cardiocéphalique se réduit à deux traits : la transposition en avant de l’'ébauche cardiaque et la configuration correspondante de l'intestin céphalique. L'absence de délimitation antérieure de la fovea cardiaca pré- sente ici un détail tout nouveau, car chez les vrais Cardiocé- phaliens nous avons parfois, au contraire, constaté une double tentative de formation du pli ectodermique de la fovea cardiaca. L'analyse des connexions morphogéniques dans notre dernier cas devient ainsi beaucoup plus difficile, car nous ne saurions invoquer ici aucune intervention mécanique de la part de la plaque nerveuse rejetée en arrière qui aurait à tirer avec elle le reste de composants ecto- et endodermiques qui constituent la région dont nous nous occupons ici. Rien ne suggère, en analysant la microphotographie 28, la moindre idée d’un agent mécanique brutal, intervenant comme facteur principal qui serait seul accusé. Tout cela prouve que la série des phé- nomènes anormaux dont nous avons abordé l'étude est beau- coup plus compliquée qu’on ne l'aurait dit après avoir examiné -les premiers cas typiques de Cardiocéphalie, décrits au début de ce travail. VI Considérations théoriques. Conclusions. Au cours de ce travail nous avons d'abord présenté un nouveau type tératogénique concernant les relations anormales spéciales + 4 ;. er LA CARDIOCÉPHALIE 937 qui peuvent s'établir entre l’'ébauche cérébrale etcelle de l'intes- tin céphalique et de la /ovea cardiaca ; puis nous avons soulevé quelques questions théoriques, touchant le mécanisme évolutif et les corrélations morphogéniques, à l'étude desquelles se prêtent les matériaux qui nous ont servi de point de départ. Il s’agit maintenant d'approfondir l'analyse des faits nouveaux que nous avons rapportés, et d'essayer de les lier ensemble en vue des problèmes que nous avons soulevés. D'abord, il parait bien indéniable que nous avons affaire à un {ype lératogénique tout à fait nouveau et bien déterminé. En eftet, dans la littérature tératologique, nous ne rencontrons aucune mention concernant des dispositions monstrueuses com- parables à celles que nous venons de décrire, ce qui s'explique assez aisément, d'ailleurs, par la rareté de cette anomalie, aussi bien que par le nombre si restreint de recherches térato- géniques suivies. Il n'y a pas, évidemment, à songer à des formes adultes, ni même d'embryons très avancés de cette monstruosité, car les traits principaux de la Cardiocéphalie la rendent incompatible avec une vie plus ou moins prolongée, tant les embryons sont atteints de troubles profonds de la con- stitution des organes importants. La ressemblance apparente de quelques jeunes Cardiocéphaliens avec les dispositions carac- térisant l’'Omphalocéphalie ne saurait nous induire en erreur, car nous savons désormais — ce qu'Er. Ragaupn a prédit d’après le seul aspect 27 /olo du premier de mes monstres — que l'adhérence du cerveau d'un Cardiocéphalien à l’ébauche du cœur situé en avant de celui-ci n'a rien de commun avec la pénétration de la tête de l'embryon au-dessous de cette ébauche et vers l'intestin, sans quoi iln’y a point d'Omphalocéphalie vraie. Nous avons bien vu, sur toute la série d’exémples, que le processus cardiocéphalien consiste en des dispositions toutes spéciales qui le caractérisent comme type tératogénique, bien distinct des autres malformations qui peuvent exister dans la même région du corps de l'embryon etaux mêmes stades. Comme nous l'avons vu, la Cardiocéphalie typique est carac- térisée par deux processus anormaux simultanés : le dépla- cement de l'ébauche cardiaque vers l'avant, au delà de la tête de l’embryon, et puis, le soulèvement spécial du bord anté- 398 JAN TUR rieur de la plaque nerveuse qui se dirige en haut et en arrière, aboutissant à la formation d'une « plaque de Cardiocépha- lie », bien typique pour les cas les mieux prononcés de cette anomalie. Ces deux processus (lun survenant au sein de l’ébau- che du cœur et l’autre dans celle de l’encéphale) se produisant simultanément même dans les stades Les plus jeunes et dans les cas les plus typiques (comme par exemple dans les deux pre- miers embryons que nous avons décrits), il est très difficile d'établir le lien causal qui les unit l'un à l’autre. En d’autres termes, la question se pose de savoir si c'est le refoulement du cerveau en arrière qui provoque, par action purement mécani- que, le déplacement vers l’avant du cœur, ou, au contraire, si c'est ce déplacement de l’ébauche cardiaque qui permet à la paroi antérieure du cerveau de poursuivre son accroissement anormal en haut et en arrière ?.. Car tels sont bien les deux processus essentiels et primaires de l’anomalie en question. Il me semble ainsi que, notamment, la formation des plis ectodermiques multiples, suppléant au stomodæum, ne sont que des phénomènes d’ordre secondaire (malgré tout l'intérêt théorique qu'ils présentent), conditionnés par la disposition primitive et rentrant dans la catégorie des formations régulatrices. Dans la seconde moitié de ce travail, nous avons démontré que, dans les cas que nous avons désignés comme ceux de la pseudo-cardiocéphalie, le déplacement du cœur en avant de la tête de l'embryon peut bien s'accomplir, sans que l’ébauche cérébrale subisse en même temps les modifications typiques pour les Cardiocéphaliens vrais, c’est-à-dire le renversement en arrière de sa partie antérieure et la formation d'une « plaque cardiocéphalique ». Aïnsi, il n’y à aucune nécessité d'admettre l'action mécanique de cette « plaque » sur les ébauches endo- dermo-cardiaques, dont le déplacement n'exige point, comme une condilio sine quä non. la présence d'une anomalie, en appa- rence corrélative, du cerveau renversé... Avouons que nos pre- miers cas de Cardiocéphalie véritable suggèrent assez forte- ment cette hypothèse d’une tension mécanique, dépendant du déplacement précoce de la région antérieure de l’encéphale ; mais l'exemple des pseudo-cardiocéphaliens prouve assez clairement le contraire. On pourrait, à la rigueur, dire que, k. LA CARDIOCÉPHALIE 399 chez les formes qui imitent la Cardiocéphalie, atteintes en même temps de Platyneurie, l’action mécanique sur les ébauches car- diaques s'exerce par Le bord antérieur de la plaque nerveuse qui s’insinue au-dessous du reste du système nerveux (contrairement à ce qui se passe dans la Cardiocéphalie typique). Grâce à un tel déplacement (à comparer les microphotographies 22, 24 et 26), tout le complexe pharyngo-cardiaque subirait une pression qui le déplacerait vers l'avant. Mais, d'autre part, une telle hypo- thèse ne s'applique aucunement au cas figuré sur les micropho- tographies 27 et 28, où le déplacement si appréciable du cœur n’a aucun correspondant dans la configuration de la région cépha- lique de la plaque nerveuse... Ainsi donc, l’action mécanique exercée par l’encéphale anor- mal ne saurait point être invoquée comme l’intimum movens de la formation déplacée du complexe pharyngo-cardiaque. L'admettre, en dépit des preuves évidentes du contraire, revien- drait à méconnaitre la justesse de la remarque d'Er. Rapaun, qu'en tératogénie..… « explication positive n’est pas la même chose qu'explication simpliste, mécanique au sens étroit du mot » (19, p. 14). Comme dans tant d'autres formes monstrueu- ses, la cause première de la Cardiocéphalie nous échappe — actuellement, du moins. La relation de cette monstruosité avec les modifications appréciables du milieu {les Cardiocéphaliens apparaissent dans les conditions bien normales de l’incuba- tion), aussi bien que les corrélations intimes entre les ébauches qui yentrent en jeu, restent inconnues, et nous n'avons qu à nous borner, pour le moment, au côté purement descriptif de cette forme monstrueuse. Nous possédons une indication, légère, au sujet de la corrélation possible entre la Cardiocéphalie et l’état de l'aire vasculaire ; nous avons constaté, dans quelques cas de cette anomalie, un certain arrêt de développement de l'aire vasculaire, s'étendant trop faiblement vers l'avant du blastoderme... Mais d’une part, ce phénomène n'est point constant ni nécessaire dans la formation de la Cardiocéphalie, et d'autre part, un tel raccourcissement du réseau de la cireu- lation vitelline aboutirait plutôt à la formation d'un cœur situé trop en arrière qu'en avant... Nous ne signalons ce détail qu'en vertu de «l'idée qu'il n’y à pas, en tératologie, de petits faits négligeables (Er. RapauD, 17, p. 2). 340 JAN TUR Tout de même, notre « résignation purement morphologique » n'exclut pas quelques applications des faits étudiés aux problè- mes d’embryologie normale, Les conformations inusitées du cerveau et de la région pharyngo-cardiaqué des Cardiocépha- liens ont créé des conditions nouvelles pour le comportement morphogénique de l'ectoderme extra-céphalique et de l’endo- derme pharyngien. Nous avons constaté que la première de ces ébauches, ne formant chez les embryons normaux qu'un seul pli sous-céphalique, corrélativement à la fois à la formation de la fovea cardiaca et à la terminaison céphalique du cerveau, est capable, dans les cas de la disjonction anormale de ces deux foyers organogéniques, de produire deux plis séparés, s'orien- tant suivant la position de ces foyers... Je crois que ce fait (si évident par exemple chez l'embryon des microphotographies 10-13) pourrait servir de preuve irréfutable contre toute idée de la formation passive des plis fournissant la fovea cardiaca et le pharynx, due simplement {trop simplement, en effet !) à la seule conséquence mécanique de l'accroissement du corps embryonnaire s’élevantau-dessus du blastoderme... Nous avons ici encore un exemple bien frappant d'une corrélation « mor- phesthétique » (je me permets d'employer ce terme, sans lui attribuer, d'ailleurs, une signification par trop métaphysique) entre les ébauches dont les unes se forment « à la rencontre » des autres, ou en contact avec elles. Un autre fait, non moins curieux à mon avis, nous est fourni par les dispositions comparables à celles des microphotogra- phies 22 et surtout 24. Cette différenciation histologique de l’ébauche pharyngienne in plano, sans plissement préalable de la couche endodermique (et même, dans le second de ces cas, sans corrélation avec le repli correspondant de l’ectoderme), présente un exemple bien typique de l'indépendance assez large de la morphogenèse constructive et de celle d’histogenèse. La construction d'un repli ou d’un tube ne parait point être la condition nécessaire pour qu'une ébauche évolue histogénéti- quement dans sa direction habituelle. C'est un phénomène comparable à la différenciation du tissu nerveux aux dépens de la plaque cérébrale étalée des Cyclocéphaliens. Pour terminer, il-nous reste à établir la position systéma- tique de la Cardiocéphalie, et des formes qui s’y rapprochent; LA CARDIOCÉPHALIE : 341 dans les cadres du système tératogénique. Même, à la simple analyse superficielle de cette forme monstrueuse, il est facile de se rendre compte que la doctrine classique de « l'arrêt » et de « l'excès » de développement ne saurait y être appliquée. Par contre, en nous adressant à la terminologie d'Er. Rapaup (20) nous pourrons assigner à la Cardiocéphalie la position parmi les formations déplacées, comme par exemple la Plagiencé- phalie. D'autre part, dans les cas où la « plaque cardiocépha- lique » se forme aux dépens de la région antérieure du cerveau, nous aurons aussi à faire à la végétahion désorientée, au même titre que chez les Omphalocéphaliens. Car n'oublions pas que divers processus tératogéniques primaires peuvent se rencon- trer sur le même terrain embryonnaire, n'étant que « des caté- gories propres à faciliter la recherche » (Er. Rasau). Institut d'Analomie comparée de l'Université de Varsovie. Novembre 1990. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 1. B. Lworr. — La formation des feuillets germinatifs et l'origine de la corde et du mésoderme chez les Vertebrés, Moscou, 1893 (en russe. Le même travail a paru en allemand dans le Bulletin de la Soc. Impér. des Naturalistes, Moscou, 1891). 2. E. Scawauge. — Die Morphologie der Missbildungen des Menschen und der Tiere. I Teil. 2 et 11 Liefer, 1909-1913. 3. Er. RaBaun. — Etude embryologique de l'Ourentérie et de la Corden- térie, types monstrueux nouveaux se rallachant à lOmphalocéphalie, Journal de l'Anatomie et de la Physiologie, 1900. 4. J. Tur — Un type nouveau de monstruosité : l'Entérotélie, €. 2. de la Societé des Sciences de Varsovie, 1915: D. GC. Hizz. — Developmental history of primary segments of the Verte- brate head, Zoo!. Jahrb., Abt. f. Anat. u. Ontog., 1900. 6. W.-A. Locy. — Meltameric segmentation in the medullary folds and embryonic rim, Anat. Anzeiger, 1894. 7. J. Tur. — Une forme nouvelle de monstruosité embryonnaire : la Cardiocéphalie, C. À. du XIe Congrès des médecins et naturalistes polonais à Cracovie, 1911 (en polonais). 8. G. Porworowskr., — Etudes tératogéniques, Travaux de la Société des Sciences de Varsovie, 1917. 342 9. JAN TUR J. Tur. — Sur une série d'embryons monstrueux provenant de poules primipares, Bull. de la Soc Philomathique de Paris, \907. [0. M. Duvaz — Atlas d'Embryologie, Paris, 1889. 11. J. Tur. — Les débuts de la Cyclocéphalie (Platyneurie embryonnaire) et les formations dissociées, Bull. de La Soc. Philomat. de Paris, 1906. 12. J. Ter. — Sur l'accroissement de l'aire vasculaire des embryons d'Oiseaux normaux et platyneuriques, C. 2. de la Soc. des Sciences de Var- sovie, 1910. 43. J. Tur. — Nouvelles recherches sur le développement du système ner- veux des monstres platyneuriques, Travaux de la Soc. des Sciences de Varsovie, 1915. 14. Karoz Hessek — Die Bedeutung der normalen Lage der Keimscheibe für die Entwicklung des Hühnereies, Bulletin de l'Académie des Sciences de Cracovie, 1914. 45. Er. Ragaur. — Sur la nature des relations entre la rétine et le cristallin, Zoologischer Anzeiger, 1907. 16 J. Tur. — Sur l’asymétrie normale dans le développement de Paire vasculaire des embryons d'Oiseaux, C. À. de la Soc. des Sciences de Varsovie, 1915. 47. Er. Ragaun. — Essai de Tératologie. Embryologie des poulets omphalo- céphales, Journal de l'Anatomie et de la Physiologie, 1898. 1892 Tux: Sur le développement anormal du parablaste dans les embryons de Poule (Parablaste sous-germinal}, Bull. de la Soc. Philomat. de Paris, 1966. 19. Er. Ragauo. — Discussion sur le mode de formation de l'Omphalo- céphalie, Anatomischer Anseiger, 1907. 20. Er. RaBaun. — La tératogénèse. Etude des variations de l'organisme, Encyclopédie Scientifique, Paris, 1914. . se où à ni ie Gin 6h A. VANDEL Préparateur à la Sorbonne. ‘RECHERCHES EXPÉRIMENTALES SUR LES MODES DE REPRODUCTION des PLANAIRES TRICLADES PALUDICOLES SOMMAIRE Pages PROD DS EN AUS RO ut VITE TRUE) PAIN: one UE INÉROBUGTION::4 7 LAS Er A0 CHAPITRE I. MATÉRIEL ET MÉTHODES. Sn Espèces ee p. 351. — a. Polycelis cornuta : b. Planaria alpina; c. PL. subten- taculata; d. PL. vitta. — 2. Méthodes de culture, p. 362. — 3. Sec- tions, p. 363. — 4. Technique . . . né DD CHAPITRE II. LA REPRODUCTION ASEXUÉE. — L. rue de nos connaissances sur la reproduction asexuée des Triclades, p. 36%. — 2, Liste des Planaires présentant un mode de reproduction asexué, p. 370.— 3. Description du processus de scission, p. 375.— 4. Frag- mentations anormales et pathologiques, p. 378. — 5. Niveau du plan de scission, p.381. — Taille des individus se divisant, p. 385. — 7. Inlervalles d'une scission à l’autre, p. 386. — 8. La nature du processus de scission chez les Planaires paludicoles. Autotomie ou formation de zoïdes, p. 386.— 9. Action des facteurs externes sur la scission, p. 391. — 10. Le mécanisme de la scission. Expériences de décapitation, p. 397. — 11. Origine de la reproduction asexuée, p.410. — 12. Comparaison avec d’autres modes de reproduction SSI TR CO Er DE TR EN PONS 5 15 CHAPITRE IIL LA RÉGÉNÉRATION. — |. Régénération des frag- ments postérieurs de Planaires. Etude morphologique, p. 420. — 2. Etude histologique de la régénération et de la dédifférenciation, p. 425. — a. Dédifférenciation des glandes génitales. — D. Dédif- férenciation des organes copulateurs. — c. Epigenèse ou préfor- . malion. CHAPITRE IV. LA REPRODUCTION SEXUÉE. — [. Phénomènes de reproduction, p. 435. 1. Accouplement. 2. Cocons. 3. Epoques de ponte. 4. Développement.— If. La Régénération des glandes géni- tales, p. 444. 1. Historique. 2. Expériences. 3. Question du A. VANDEL CE = = soma et du germen. 4. Le développement des gonades dans l’on- togenèse el la régénération. 5. Genèse de l’état asexué. 6. Action des facteurs externes sur le développement des gonades. — IT. Le déterminisme du développement de l'appareil copulateur, p. 453. {. Introduëtion. 2. Evolution des glandes génitales. 3. Le dévelop- pement des organes copulateurs. 4. Premières expériences de régénération. 5. Expériences de castration. 6. Quelles sont les glandes qui interviennent? 7 Rapport entre le nombre et l’état des testicules el le développement des organes copulaleurs. 8. Quel est le mode d'action des testicules ? 9. Conclusions. CHAPITRE V. COMPARAISON ET RAPPORTS ENTRE LES' DEUX MODES DE REPRODUCTION.— 1, Introduction, p. 477, — 2. Héré- dité du mode de reproduction, p. 478. — 3. Cycle évolutif, p. 483. 4. Comparaison entre les deux catégories de jeunes, p. 484. — 5. Opposition des deux modes de reproduction, p. 485. — 6 Action des facteurs externes sur le cycle évolutif, p. 488. — 7. Significa- tion et rôle de la fécondation, p.493.— 8. Vieillissement el rajeu- nissément LL I an RE sr VENT TES JNCEE RÉSUMÉ . . . pesée FRÉNT LES RES INDEX BIBLIOGRAPHIQUE + : + + + + + . + . +. : 506 AVANT-PROPOS Les recherches qui font l'objet de la présente étude ont été poursuivies pendant les années 1918-1921 au Laboratoire d'Evolution des Etres organisés. M. le Professeur Caurzery a bien voulu, pendant tout le cours de ce travail, me prodiguer ses conseils et ses avertisse- ments et me faire profiter des observations que lui avait sug- gérées uné longue expérience des études biologiques, De plus, en In'aBreant comme préparateur au Laboratoire d’Evolution, il m'a permis de poursuivre ces recherches dans les meilleures conditions de travail et de documentation. Je tiens à lui en exprimer ici ma profonde gratitude. M. le Professeur Rapaup m'a témoigné, depuis le début de nes études, une profonde et constante bienveillance ; je ne saurais trop l’assurer de ma sincère reconnaissance. D'autre part, en m’enseignant à me méfier des explications verbales et à ne point accepter les théories les plus en vogue sans les sou- mettre à une critique serrée, il m'a rendu le plus utile service ; j'ai commencé par appliquer à moi-même cette sage méthode, matins ae oh De de ot DEN Le + REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 349 ., et l’on verra, au cours de ce travail que, plus d’une fois, j'ai été amené à reviser complètement mes premières opinions. M. le Professeur Cu. Prrez, avec une extrème obligeance, sest bien souvent mis à ma disposition pour me fournir des renseignements tant théoriques que pratiques qui m'ont été des plus précieux. Je tiens à l’assurer ici de toute ma gratitude. J'adresse aussi tous mes remerciements à M. Epuonn BorpaGe ‘dont j'ai, plus d'une fois, mis à contribution la vaste érudition et les profondes connaissances biologiques, tout particulière- ment en ce qui a trait à la régénération. Au début de ce travail, je ne saurais oublier M. R. DE La Vaurx, à qui je suis lié par une amitié de longue date ; c’est au cours de conversations et de discussions surgies presque chaque jour entre nous que se sont dégagées et élaborées bien des idées, que l’on trouvera dans le présent travail. Enfin, je ne voudrais pas manquer de rendre hommage aux talents du garçon de laboratoire, Joseea GarTezuier, dont l’ingé- niosité est appréciée par tous ceux qui Font employé; J'ai pu établir, grâce à lui, plusieurs installations délicates : glacières, étuves, appareils d'aération, ete,, qui ont permis de mener à bien des expériences difficiles. J'adresse aussi mes remerciements à la Dmecriox pt Bulletin Biologique, qui a bien voulu accepter, dans son périodique, le présent travail. : INTRODUCTION « On sait que les phénomènes naturels paraissent de plus en plus compliqués à mesure qu'on les étudie davantage ». E. G. Conrus : L’Hérédité et le Milieu, trad. HERLANT, 1920, p. 151. Certaines Planaires d'eau douce se reproduisent non seule- ment par œufs et la voie sexuée normale, mais encore plus simplement, par division transversale. Au cours de recherches purement faunistiques, j'avais été frappé par les rapports qui existent chez ces animaux entre les conditions de milieu et le mode de reproduction (Vanpez, 1919 a). Ces observations sont le point de départ du présent travail. Je m'étais proposé, au début de cette étude, un double but : d’une part, chercher à préciser le déterminisme de chaque mode de reproduction ; d'autre part, essayer, par une comparaison minutieuse entre individus sexués et scissipares, de metire en évidence la signi- fication profonde de la fécondation. En ce qui concerne le premier point, les observations que j'avais faites dans la nature (et il en est toujours ainsi, quand on se contente de simples observations, sans y adjoindre l'expé- périmentation et les cultures méthodiques) semblaient fournir la solution du problème : les agents externes (nourriture, tem- pérature, etc.) constituaient, très vraisemblablement les causes fondamentales déterminant le mode de reproduction : il ne res- tait plus qu'à préciser les détails de cette action. Mais comme l'a dit un philosophe moderne : « Dans la science, le vraisem- blable n’est pas souvent le vrai » ("}. Je suis arrivé, au cours de ce travail à une conception toute différente, qui s'est Impo- sée à moi, d'autant plus fortement que mes expériences se multipliaient. {‘) Lévy-Brauuc. La Morale et la' Science des mœurs, p. 126. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 947 Les facteurs externes, auxquels j'ai toujours accordé la plus grande attention, ne remplissent pas dans le déterminisme du cycle et du mode de reproduction le rôle capital qu'on a voulu leur faire jouer. Les facteurs externes (et tout spécialement la température) accélèrent, retardent ou même imhibent certaines phases du eyele (de mème que bien d’autres réactions vitales). Mais à cela se borne leur action; la réaction elle-même, son mode et ses particularités, sont déterminés par la constitution héréditaire de l'individu, par son génotype, comme disent les généticiens modernes. Cette conception ressortira clairement, je l'espère, de la présente étude. Le fait que Le cycle évolutif est déterminé fon- damentalement par des facteurs héréditaires et n’est influencé que superficiellement par les conditions de milieu, constitue, à mon avis, l’un des résultats les plus importants de ce travail. Et, je crois, que l'étude consciencieuse des cycles de reproduc- tion (où se succèdent des générations sexuées et asexuées, ou à œufs fécondables et parthénogénétiques) conduirait, et nous y reviendrons plus loin, à des conclusions analogues. Quant au second problème, celui de la signification de la fécondation, il est d'une importance capitale. La fécondation a un double rôle : d’une part, une fonction dynamique : l’exci- tation qui déclanche la segmentation de l'œuf ; le mécanisme de cette action, encore mystérieux il y a peu d'années, à été singu- lièrement éclairci par les recherches récentes de parthénoge- nèse expérimentale, de mérogonie, de polyspermie, etc. ; d'autre part, un rôle beaucoup moins connu dans une série de phéno- mènes d'ordre très général : hérédité, variabilité, rajeunisse- ment, etc. Je comptais pouvoir, à la suite d’études compara- tives entre planaires sexuées et scissipares, jeter quelque lumière sur cette seconde fonction encore si obscure. J'avais cru, à un moment donné, en fournir une solution, tout au moins partielle, et voir dans la fécondation une source de rajeunisse- ment, nécessaire au maintien de l'espèce. Mais des observa- tions ultérieures n'ont pas confirmé ce que les premières sem- blaient avoir établi. Dans beaucoup de cas, et en particulier chez plusieurs Planaires, la fécondation ne parait pas indispen- sable à la conservation de l'espèce, et ne semble même pas la favoriser en quelque manière. Le rajeunissement peut se pro- 24 245 A. VANDEL duire très vraisemblablement, ainsi que nous le verrons à la fin de ce travail, tout à fait imdépendamment de la reproduction sexuée ef même de toute reproduction. Plusieurs théories ont cherché à expliquer le rôle de Ja fécondation, mais, encore que chacune renferme probablement une part de vérité, elles exigent toute la nécessité et l’universalité de la reproduction sexuée et ne rendent pas compte des exceptions si nombreuses et si variées que présente ce processus. Nous devons avouer qu'à l'heure actuelle, nous ignorons à peu près tout du déter- minisme et du rôle de la fécondation. Il parait cependant difficile de dénier toute importance à un phénomène aussi général qui constitue le processus fonda- mental de la sexualité, et qui se retrouve dans l’ensemble des deux règnes organiques, sous les aspects les plus divers, il est vrai, Mais qui, néanmoins, conserve toujours ses caractéris- tiques essentielles. On comprend mal comment un processus aussi compliqué qui ne peut se réaliser parfois que par des voies si extraordinairement détournées, et qui n'est même pas lié essentiellement à la reproduction (comme cela se voit nette- ment chez les êtres unicellulaires) n'eut pas été éliminé depuis longtemps par la sélection, s'il ne se rattachait à quelque phénomène capital ; mais la signification de ce phénomène nous échappe encore. D'ailleurs, je pense maintenant que ce ne sont point les orga- nismes supérieurs, Métazoaires où Phanérogames, qui nous livreront la solution du problème ; il ÿ a chez eux trop de processus accessoires, secondaires : parthénogenèse, auto- fécondation, reproduction asexuée, ete., qui viennent masquer le rôle primordial de la fécondation. Ce sont les organismes les plus simples, ceux qui présentent les premières manifesta- tions de la sexualité (les Thallophytes, en particulier), qui nous permettront, peut-être, de discerner non seulement le rôle, mais encore, et ce qui est aussi important, le déterminisme de ce phénomène. Cette opinion ne trouverait, peut-être, pas meilleure confir- mation qu'en l'examen de l’œuvre d'Emile Mxwras et des con- clusions qui s'en dégagent. Ce chercheur modeste dont tous Les travaux font preuve du plus grand sens biologique, à été con- stamment préoccupé par le grand problème de la fécondation. OEMITT PV EN REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 34) Amené par l'étude des Infusoires à reprendre la question de Ia conjugaison chez ces organismes, il à été conduit à émettre la théorie du rajeunissement karyogamique que l’on connait : la conjugaison est un processus qui assure lé rajeunissement des cellules germinales et leur permet ainsi d'échapper à la mort, à laquelle sont voués tous les autres éléments (1). Mauras s’est efforcé, par la suite, d'étendre à d’autres organismes, cette hypothèse fondée sur l'étude des seuls Infusoires. Ces recherches n’ont, en général, apporté aucune solution nette du problème de la fécondation, et c'est ce qui explique que plusieurs de ces travaux, dont quelques-uns cependant considérables, soient restés inédits (?). En 1889, au moment où son grand mémoire sur la conjugai- son des Ciliés venait de paraitre, Mauras mettait en culture plusieurs espèces de Rotifères ; ses recherches sur Hydatina senta ont, seules, fait l’objet de courtes notes. Mais, dans le même moment, 1l élevait un Bdelloïde, Adineta Vaga qu'il arrivait à maintenir en cultures parthénogénétiques du 15 mars 1889 jusqu’en septembre 1893 (c’est-à-dire pendant 4 ans 1/2); et cela, sans voir apparaitre, à aucun moment, de formes sexuées (*). La parthénogenèse peut donc se maintenir, chez certaines espèces, tout au moins, de façon pratiquement indé- “finie. En 1891, il étudiait la multiplication asexuée des oligochètes limicoles (œuvre posthume, 1919), et arrivait à conserver pen- dant cinq ans des Naës elinquis, se reproduisant exclusivement par bourgeonnement. Là encore, la fécondation semble inutile à la conservation de l'espèce. Enfin, en 1900, il publiait son beau travail sur Les Modes et formes de reproduction des Nématodes où il signalait que chez (} Les études récentes, et tout particulièrement celles de Wooprurr et ERDMANN (1914) ont montré que les Infusoires sont loin de représenter des organismes simples et primitifs, et, que les phénomènes d’ « endomixie », comparables à une sorte de parthénogenèse (HerrwiG, 191%; CaLxixs, 1915) peuvent remplacer complètement la conjugaison. L'endomixie peut assurer le maintien indéfini de l'espèce ; les cultures de Wooprurr ont atteint, aux dernières nouvelles (1921), 8.400 générations (2 Je tiens à remercier tout particulièrement M. le Professeur CauLLerY qui m'a permis de prendre connaissance des notes de travail de Maupas et d'y retrou- ver plusieurs études inédites. (5) On sait, en effet, que les S' de Bdelloïdes sont jusqu'ici inconnus, 300 A: VANDEL plusieurs Rhabditis, Vautofécondation semble être la règle générale. Ainsi donc, ia parthénogenèse, le bourgeonnemert, lauto- gamie, tout aussi bien que la fécondation croisée, permettent à certaines espèces de se maintenir et de se perpétuer indéfini- ment dans de bonnes conditions. La signification de la féconda- tion croisée reste obscure. Et cette série de recherches amenait le savant biologiste d'Alger à formuler en 1899 (œuvre pos- thume, 1919, p. 151) une conclusion bien différente de celle que lui avait suggérée dix ans plus tôt l'étude des Infusoires : « La fécondation ne répond nullement, dit-il, à un besoin universel et absolu de la vie. Beaucoup d'êtres vivent et se reproduisent sans que la fécondation intervienne dans leur existence. Certains, même, d'origine gamogénétique indiscutable, peuvent se main- tenir et se multiplier indéfiniment par agamogenèse. La karyo- gamie fécondatrice est donc un processus surajouté à la multi- plication; elle n’est qu'un cas particulier de cette propriété universelle de la matière vivante. Son rôle et sa signification ne sont pas encore complètement connus. Comme la sexualité, elle n’est évidemment qu'une adaptation spéciale et limitée ». Conduit par l'étude des divers modes de reproduction des Planaires à examiner le problème de la fécondation, je suis arrivé, comme Maupas, à un résultat négatif. La solution du problème ne nous sera pas fournie, je crois, par l’étude des animaux supérieurs, mais, c'est, comme Je l'ai dit plus haut, chez les formes les plus simples qu'il la faudrait chercher. Si aucune conclusion positive sur la signification de la fécon- dation ne ressort de cette étude (et ce résultat négatif n’est peut- être pas complètement dépourvu d'intérêt), par contre, d’autres questions qui ne faisaient point partie de mon plan primitif, ont surgi au cours de ce travail ; elles ont fait l'objet de recher- ches détaillées et m'ont permis d'apporter sur les problèmes de la régénération, de la dédifférenciation, des caractères sexuels secondaires, etc., des données nouvelles et intéressantes. Cette étude n'aurait d’ailleurs pas été inutile r:ème si elle n'avait servi qu'à mieux nous faire sentir l’effroyable complexité des phénomènes biologiques et la vanité des théories qui préten- dent ramener toutes Les manifestations de la vie à quelques lois simples et schématiques. 'amelt // tone ins dé DS, dé Ab fa éd, l'AC CE hu à M CHAPITRE I MATÉRIEL et MÉTHODES SOMMAIRE. — 1. Espèces étudiées : a, Polycelis cornuta. b. Planaria alpina. c. Pl. subtentaculata. d. PI, vitta. — 2. Méthodes de culture. — 3. Sections. — 4. Technique. 1. Espèces étudiées. Ainsi que nous le préciserons au chapitre IT, quatre espèces de Planaires triclades paludicoles présentent en Europe, un mode de reproduction asexué ; ce sont Polycelis cornuta, Planaria alpina, PL. subtentaculata et PI. vitta. V'aipu étudier ces quatre espèces, mais de façon diversement approfondie. Polycelis cornuta a été mon principal objet de travail, tout d'abord en raison de la facilité avec laquelle je pouvais me procurer cet animal, et ensuite, à cause de la coexistence des deux modes de reproduction, sexué et asexué, qui fait de cet organisme un sujet de choix pour l’étude que je m'étais proposée. Planaria alpina qui se multiplie moins fréquemment par scission, et qui est d'un élevage plus délicat, est moins favorable que Po/. cofnuta pour ce genre de recher- ches ; cette planaire m'a servi surtout à vérifier et à étendre les résultats obtenus avec l'espèce précédente. J'ai pu me procurer P{. subtentaculata au cours de la dernière année de ce travail : elle se multiplie exclusivement par division transversale et ne fournit donc aucune donnée sur les rapports entre les deux modes de reproduction, sexué et agame. Enfin j'ai pu faire, à diverses reprises, quelques observations et expériences sur PI. vitta. IL est nécessaire, avant d'entreprendre l'étude des modes de reproduction de ces animaux, de donner quelques indications sur leur anatomie et leur répartition géographique ; nous aurons à faire usage de ces données au cours de ce travail, 302 À. VANDEL a. Polycelis cornuta Johnson. Cette espèce doit porter, comme l'ont fait remarquer Joxxson (1885), OEnsren (1844), Zacnarias (1886), ne Braucnawe (1909), le nom de Polycelis felina qui lui à été attribué par DaLzvezz en 1814. Le nom de Po/. cornuta donné d’abord par Jounson en 1822, puis par O. Scaminr en 1860, est donc postérieur, mais il est si umiversellement répandu, surtout depuis les travaux de Voicr, que son changement entrainerait, peut-être, plus de con- fusion que de profit. On trouvera une description de cette planaire dans les mono- graphies de O. Scamibr (1860) et de Bünmis (1909). Comme toutes Les espèces du genre Polycelis, cet animal possède un grand nombre d’yeux répartis sur les bords antérieur et laté- raux de la tête. La région céphalique présente des tentacules saillants qui lui ont fait donner le nom de cornuta ou de felina (par ce dernier terme, DaLyeLs avait voulu rappeler la ressem- blance avec une tête de chat). L'une des particularités les plus caractéristiques de cette forme, et dont on ne retrouve l'ana- logue chez aucune planaire d’eau douce, est l'existence d’une poche spéciale, située derrière l'appareil copulateur, s’ouvrant par un orifice indépendant et contenant des organes dits « mus- culo-glandulaires ». La nature et le rôle de ces organes sont encore inconnus ; j'ai résumé nos connaissances sur ce point dans un autre travail (Vanpez, 1921 d.). L'appareil génital présente aussi quelques particularités intéressantes : l'atrium génital est nettement séparé en deux régions : l’atrium genitale commune, et V'atrium genitale masculinum ; nous verrons plus loin (p. 458) que ces deux parties ont une origine différente ; elles naissent d'ébauches distinctes qui ne se réunissent que secondairement. La base du canal utérin présente un sphincter musculaire considérable qui est indiqué dès les premiers stades du développement. Pol. cornuta présente une grande variabilité dans le nombre des poches et organes musculo-glandulaires ; j'ai pu distinguer un certain nombre de variétés (var. viganensis, Borellu, etc.) pour l'étude desquelles je renvoie à mon précédent travail VANDEL, 1921 d). Je compte d’ailleurs prochainement reprendre en détail cette question. NON TOUR, PI EP A NP UP EN SE TN IT TO TS REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 303 Répartition géographique. — À la suite des travaux de Voter (1894 6, p. 162, 1900, p. 1 ; 19016, p. 225 ; 1901, p. 110 ; 1905, p- 181; 1907, p. 67) on a voulu considérer Po/. cornuta comme un animal arctico-alpin et en faire un reliquat glaciaire. Or, rien nest plus inexact. Cette espèce fait précisément défaut dans le nord de l'Europe et dans les hautes montagnes ; elle est, par contre, répandue dans toutes les régions tempérées de l'Europe moyenne ; elle ne parait même pas rare dans la zone méditerranéenne, etje l'ai trouvée aux environs de Montpellier qui est justement la ville de France où l’on a enregistré les températures les plus élevées. : Passons maintenant rapidement en revue les diverses stations où cette espèce à été signalée ; la carte ci-jointe (fig. 1) per- mettra de suivre plus aisément cette énumération ; elle donne, d'ailleurs une représentation partiellement inexacte de la répartition de cet animal, du fait que certaines régions ont été beaucoup mieux explorées que d’autres; c’est ainsi que la faune turbellarienne de la Suisse est bien connue, alors que nous ne possédons que des documents encore très vagues sur les pla- naires de l'ouest et du midi de la France. Dans les Alpes, cette espèce parait peu commune, au moins dans les hautes régions. M. le Professeur Lécer, que je remercie de son extrême obligeance, a bien voulu me donner quelques renseignements sur la répartition de cette Planaire dans les Alpes françaises : « Cette espèce, m'écrit-il, paraît répandue dans les Alpes du Dauphiné, mais elle remonte beaucoup moins haut que P/. alpina ; un de mes élèves la signale comme fréquente vers 1.000 mètres ». Borezzt (1893) la rencontre en quelques points des Alpes-Maritimes. R. Mori (1904) la trouve au lac de Zyole, dans la vallée du Vertosan (à 2.521 mètres d'altitude ; c'est Ia station la plus élevée connue, mais il s’agit ici d’un lac et non d'un ruisseau). Z encontrée en plusieurs Jar dans cette r ) Dans les Pyrénées, BoRELLt (1905 points ; elle présente, d'ailleurs, variétés remarquables que rie de n une série j'ai étudiées ailleurs (VanDEL, , églo REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 39) 1921 d). ne Beaucaawp (1920) la signale également aux environs de Saint-Girons, dans l'Ariège. Mais son véritable domaine semble être, bien plus que les hautes chaines, les régions de moyennes montagnes et de colli- nes. La var. viganensis a été, tout d'abord, trouvée par Ducis (1830) au Vigan, dans les Cévennes; elle descend de là jusqu'à Montpellier (Vanoez, 1921 d). Elle ne parait pas rare en Auver- gne (BruyanT, 1908). Dans le Jura, la répartition de cette espèce est fort bien connue grâce aux travaux de FunRmanx (1894), de Durzessis (1897), de Vozz (1900), de Srerxmanx (1906, 1907, 1911), de Taiésaup (1908), de Virieux (1911, 1912), de Bornaauser (1912) et aux observations de l’auteur. Pol. cornuta existe dans la « Haute-Chaîne », mais ne semble pas dépasser 1.000 mètres (la station la plus élevée que je connaisse est la source du Doubs, près Mouthe, à 937 mètres d'altitude). Elle descend, par contre, dans la zone du vignoble et dans la plaine, et cela, sur les deux versants de la chaîne : en Suisse, elle a été signalée à Orbe, Cossonay, Auvernier, Saint-Blaise, Aarberg, Soleure, Olten, aux environs de Bâle, ete.; en France on l'a rencontrée à Champagnole, Syam, Fioget, Chambly, Chalin, etc. etc. Dans les Vosges, elle ne parait pas rare non plus (LAUTERBORN, 1904; Bressau, 1910 ; Burr, 1912; Mercier, 1912). On la ren- contre également dans la Forêt-Noire (Srrusecz, 2n Voir, 1894 D, p: 165; Zscnokke, 1902; LamperT, 1904; STEINMANN, 1906 ; Scauckmanx, 1910). Elle parait d'ailleurs très répandue dans toutes les moyennes montagnes de l'Europe centrale : Haardt (Voicr, 1896). Pfälzerwald (Laurersorn, 1904), Taunus (Voicr, 1901 &, 1901 b), Hundsrück (Vorcr, 1892 b, 1896, 1905), Eifel (Voicr, 1896, 1907), Siebengebirge ( Vorier, 1901 a), Hautes- Fagnes (!) (Voir, 1905, Frépérico, 1904), Sauerland (Tniexe- MANN, 1912), Meissner (Vorcr, 1896), Rhôün (Voir, 1896), Thü- ringer Wald (S. Scauzrze in O. Scawinr, 1860, p- 26; Vouicr, 1896 ; Taiexemanx, 1908), en Würtenberg eten Bavière (LamPEerT, () M. Boxprorr, préparateur à l'Université de Liège, a eu la grande amabilité de récolter à mon intention des llanaires dans les Hautes-Fagnes belges. Comme l'avait déjà remarqué Frépérico, Pol. cornula parait commune dans les petits ruisseaux de cette région ; elle se rencontre jusqu'aux environs de Liège, à Beaufays. 356 A. VANDEL 1904; Exsin, 1907), Bô‘hmerwald {Vesmovsky, 1895), Isergebirge (ZAcHARIAS, 1886). Elle est donc extrèmement commune dans les régions acei- dentées de l'Europe moyenne ; elle est également très répandue dans les pays de plaine. On Fa signalée en bien des points du nord et de l’est de la France : à Wimereux (Giarp, 1879 ; Hacez, 1890-1893), à Roisin, en Belgique (Hazcez, 1890-1893), à Neufchatel, dans le pays de Bray (ne Beaucaawp, 1918), aux environs de Paris, où elle est très commune (Grarp, 1879 ; pe Beaucaamp, 1909; Vanpez, 1919 c), près de Caen (MERCIER, 1921). Elle paraît très commune en Normandie, autant qu j'ai pu en juger au cours d'une rapide excursion ; J'ai trouvé cette planaire près de Sées (Orne) ainsi qu'aux environs d'Alençon, dans la forêt d'Ecouves (Orne) et dans la forêt de Perseigne (Sarthe). Elle est probablement très répandue en Bretagne, dont les forêts d'Ecouves et de Perseigne constituent d’ailleurs les premiers promontoires, mais elle n'y a pas été recherchée jusqu'ici. Elle est commune dans l’est de la France : elle existe dans les départements de l'Aube (ne B£aucaamp, 1918), de la Haute-Marne (observations personnelles), de la Côte-d'Or (Paris, 1918), de la Haute-Saône (Virieux, 1912, et observations personnelles). La répartition de Pal. cornuta dans Fouest et le midi de la France est encore fort mal connue ; cette espèce ne paraît cepen- dant pas y être rare comme l'indiquent les quelques jalons que nous possédons. Elle a été signalée près de Bordeaux par Des Mou- LiNs (1830) ; M. Grassé m'a envoyé des exemplaires de cette espèce provenant d'un affluent de la rive gauche de la Dordogne, non loin de Bergerac ; quelques individus étaient parfaitement sexués. Enfin, nous avons vu plus haut que cette planaire exis- tait sous une variété spéciale {var. viganensis) en Languedoc. En dehors de France, cette espèce a été encore signalée en Hollande (Wegser, 1907), en Angleterre (Jouxson, 1822, 1825 ; Joansrox, 1865), en Irlande {Jauesox, 1897), en Ecosse (DALYELL, 1814), et en Russie, près de Moscou (Rossixsky, 1892). Elle manque, par contre, en Scandinavie {von Horsren, 1908, p. 9). Cette revue que je crois à peu près complète, montre avec la plus grande évidence que cette planaire n'est pas une espèce arctico-alpine ; elle est très répandue dans toute la zone tem- RE di | 1 REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 307 pérée de l'Europe moyenne, et fait, au contraire, défaut dans les régions très élevées ou boréales. b. Planaria alpina Dana (= P. arethusa Dalyell = P. abcissa Tjima — P. montana Chichkoff). L’anatomie de cet animal est Bien connue ; elle se reconnait facilement au premier abord à ses deux petits tentacules cépha- liques et à ses yeux, au nombre de deux, assez éloignés du bord antérieur de la tête, et rapprochés le long de la ligne médiane ; de plus, son appareil copulateur est tout à fait carac- téristique ; il se distingue par sa forme globuleuse et la mus- culature exceptionnellement développée de la gaine du pénis ; il a été décrit en détail par Kexnez (1889), Cnicaxorr (1892), STOPPENBRINK (1905), MicocerzkY (1907), Bogamie (1909). Répartition géographique. — À l'encontre de l'espèce pré- cédente, cette planaire est franchement montagnarde et arcti- que : aussi l'hypothèse qui veut en faire un reliquat glaciaire est fort soutenable {cette hypothèse a été développée, à main- tes reprises, en particulier par KENNEL (1889); Vorcr (1891, 1894 5, 1896, 1901 », 1904, 1905, 1907), Zscnokke (1908), etc.). Comme l'indique son nom, elle est extrêmement répandue dans les Alpes (fig. 2). Elle a été trouvée, pour la première fois, par Dana en 1762, dans les Alpes-Maritimes, près de Gares- sio. Plus récemment, Borezut (1893), note qu'elle est fort com- mune dans ces régions (Ormea, Boves, Limone, Valdieri, etc.). Dans les Alpes françaises, où elle est certainement fort répan- due, sa présence a été rarement signalée : BLaxcHaRD et Richard (1897) signalent au lac de Gimont, près de Briançon, une Pla- paire qui, d'après Zscaokke (1990, p. 82) serait P/. alpina. M. le Professeur Lécer à eu la grande amabilité de me com- muniquer les renseignements suivants, d'autant plus précieux que les documents relatifs à ces régions sont d’une extrème pénurie : « P/. alpina — m'écrit-il — existe de façon con- stante et en grand nombre à peu près dans tous les ruisseaux de montagne du Dauphiné. de l'ai trouvée à peu près partout jusqu'à la limite de l’eau liquide... P/. alpina est très com- mune dans tous les ruisseaux de la chaîne de Belledone... ; 358 A. VANDEL elle existe aussi dans quelques sources du Vercors ». Enfin, M. le Professeur Léérr voulait bien m'envoyer quelques exem- FA o . e S Er Ë = & < 5 ‘= Ü SIDE SR 2 = as < a > CARE £ è © © Lo) s) cd 0 S ce ÉÈNO Es (e + E a £ [EE Æ À) S cs] ° Z d Z S) a 6\® © N e [e] e < = 2 < e 5 > 9 & n e e > Es eZ Z a 1 > < EE £ É Z > à mn 2 \ ù R2 = ô a a n EE < CAS 2 e RE à en x 5 K 1 4 e o eo ee &ie = D 8 0 E à Eu @ = a 9 LC à © e Ce] 0 0 A = D — © — e G de) 5 2 Q = £ (EE < Et Z K D e] us = C2 € < lu “o £o d s 29

: . n0 346. L. Lorerri-Bopoxi (1918, pp. 9-10) a constaté des divisions post et prépharyngiennes D'après mes observations, le niveau du plan de seission est assez variable ; la séparation à lieu soit en avant, soit en arrière de la bouche ; dans deux cas, j'ai même observé une scission en avant de la base du pharynx. Pour P. vitta, Vervovsky figure (1895, pl. X, fig. 56) un plan | .* à Lotlimdtét ae V , REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 383 de scission postpharyngien ; STeINMaNN (1916, p. 3255) décrit également une scission postpharyngienne ; tous les animaux que j'ai observés se sont coupés aussi en arrière de la bouche ; seul, Boraauser (1912, p. 17, en note) signale que la scission est prépharyngienne. La conclusion qui ressort de cette étude est que le niveau du plan de scission est très variable : il passe tantôt en avant, tantôt en arrière, tantôt au milieu de la cavité pharyngienne ; les rapports de taille entre les deux fragments sont très diffé- rents suivant Les cas, ainsi que je l'ai montré pour Po/. cornuta. J'ai cherché à préciser, pour cette espèce, le déterminisme du niveau de scission, et, en particulier, à établir le déterminisme des scissions prépharyngiennes. Cette question est difficile ; la division des Planaires est, en effet, comme nous le remarquerons encore maintes fois, un phénomène encore mal fixé et capri- cieux, très variable d’allure, et s'il n'est plus unc simple auto- tomie, ce n'est pas encore un phénomène de reproduction rigoureusement déterminé. C'est pour cela qu'il est impossible de rendre compte de ces phénomènes à l’aide de quelques lois précises et rigides. D'une scission à l’autre, le niveau de scission peut être très variable ; c’est ainsi que dans l’une de mes cultu- res, un animal classé comme n° 17, se coupe pour la onzième fois, Le 20 septembre; le fragment postérieur est tout petit et ne mesure que 0 mm. 5, alors que la souche a 6 mm. de long (rapport des fragments : 1/12). Le 26 septembre, le même animal se recoupe pour la douzième fois, et en avant du pha- rynx, de telle sorte que les deux fragments sont à peu près égaux (rapport des fragments : 1/1). Cet exemple fera com- prendre l'impossibilité de formuler, dans l'étude des processus de scissiparité, des conclusions rigoureuses ; on doit se conten- ter d'indiquer les grandes lignes, l'allure générale du phéno- mène, sans chercher à rendre compte de toutes exceptions que présentent Les lois les mieux établies. | Ceci dit, examinons les résultats généraux que l’on peut, néanmoins, mettre en évidence. Si l’on examine le tableau ci-contre (tableau 1), où ont été enregistrées les scissions de plu- sieurs cultures pendant plus d’une année, on constate que, pro- portionnellement, les scissions prépharyngiennes sont beaucoup plus fréquentes en été qu'en hiver; c’est ainsi que le pourcen- Tableau I Nombre total de scissions Température moyenne 1920 Mars Avril Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre 1921 Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Nombre de scissions pré- pharyngiennes 0/0 REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 335 tage des scissions prépharyngiennes tombe à 0 en hiver, tandis qu'il dépasse 50 0/0 en août 1921. Voici, je crois, l'explication que l’on peut donner de ce fait : nous verrons, dans un para- graphe ultérieur, que la température accélère le rythme de la scission de façon bien plus considérable qu'elle n’active Les pro- cessus de régénération. Il en résulte que l'intervalle d’une seis- sion à la suivante est, de façon générale, très raccourci et ne permet plus la régénération complète de l'individu ; le plan de scission gagne ainsi proportionnellement de plus en plus vers la région antérieure et finit par passer en avant de la base du pha- rynx. La scission prépharyngienne doit être considérée comme une conséquence de l'accélération du rythme de la division. Voir (18914 &, p. 749-750) avait déjà noté que dans les périodes de division active, le plan de scission, au lieu d’être situé en arrière de la bouche, passait en avant. Les observations moins poussées que j'ai faites sur P/, subten- taculata conduiraient à des conclusions semblables, 6. Taille des individus se divisant La taille des individus se multipliant par division est fort variable. Les individus scissipares, étant asexués, sont, en géné- ral, de petite taille. Chez Pol. cornuta que j'ai spécialement étudié (!), la taille minima que j'ai observée est 2 mm. 5 (souche: 2 mm ; fragment : 0 mm. 5; observé dans deux cas), Au delà de 9 à 10 mm., les animaux ne se divisent plus ; ils devien- nent, d’ailleurs, généralement sexués quand ils ont atteint cette taille. Comme l’a déjà remarqué Voier (1900), les animaux qui se coupent activement sont en général de très petite taille ; Les cultures d’été où les scissions sont très fréquentes et les indi- vidus de petite dimension, contrastent fortement avec les cultu- res d'hiver, où les divisions sont rares et les individus de grande taille. C’est là un exemple qui illustre de façon remarquable la théorie de Srencer sur l’antagonisme entre la croissance et la: genèse agamique. (1) La dimension des sexués varie entre 42 et 18 mm. 386 A. VANDEL 7. Intervalles d’une scission à l'autre La scission des Planaires paludicoles n’est plus une simple autotomie, provoquée par un excitant extérieur. C'est un phéno- mène spontané qui, comme beaucoup d’autres phénomènes vitaux, se reproduit de façon rythmique et périodique. Mais ici, la périodicité n'est pas encore établie de facon régulière et varie dans des limites très étendues. La multiplication scissi- pare des Paludicoles constitue un stade de passage entre l’auto- tomie simple et un mode normal de reproduction asexuée. J'ai spécialement étudié à ce point de vue Pol. cornuta. Sur le grand tableau (tableau Il) qui résume la généalogie de la cul- ture issue de l'individu n° 3, on peut se rendre compte combien les mtervalles d’une scission à l’autre sont variables. Cependant, il existe toujours un certain intervalle entre une scission et la suivante, et un animal qui vient de se diviser ne se recoupe jamais que quelques jours plus tard. L'intervalle d’une scission à l’autre dépend, comme nous le verrons plus loin, de la tempé- rature. J'ai observé, comme minimum de äurée entre une seis- sion et une autre, un intervalle de trois jours (observé dans deux cas) ; le maximum observé ‘est de 77 jours (n° 5. VIIL 1, du 24 janvier au 11 avril). La moyenne varie entre 1 et 4 semai- nes. | Chez P[. alpina, les conditions sont les mêmes ; mais les scis- sions sont moins fréquentes que chez Po/. cornuta,.et les inter- valles d’une division à la suivante sont plus considérables ; la moyenne est un mois environ, et Les limites extrêmes observées, 4 et 59 jours. 8. La nature du procéssus de scission chez les Planaires. Autotomie ou formation de zoides. DazveLz (1814, p. 52) avait déjà noté que la scission de Po/. cornuta se produisait sans qu'il y ait auparavant aucune modi- fication préalable de l’organisme. Curris (1902, p. 522) qui a fait une étude histologique soignée du processus de scission chez PL. maculata dit : « The examination of à large number of Tableau 11. — Explication. — Ce lableau résume une cullure de Pol. auta, issue d'un seul fragment de Teri . é ; RE : “ À 3.5 n de g. scissiparité (ne 3) el cullivée pendant 13 générations. Voici l'explication détaillée du début du tableau qui permettra | | SEX. 2 d'en comprendre facilement la suite : L'individu n° 3 a donné un fragment de scissiparité qui a donné la planaire 3.5. dl FE Celle-ci s'est coupée 51 jours après avoir été détachée de la souche, et à don n fragment classé comme n° 8.5,1, ; CIS ; #2 - puis 48 jours après elle s'est recoupée ; le fragment est supprimé (+): elle se recoupe une troisième fois 42 jours après ; | 3.5.1. | 18 + 42 + A6 + 22 + A0 16 + 29 + 36 4 18 + 2 + £ L-10 = . 8 : tt Fr le fragment est supprimé (+) ; et ainsi de suite. Finalement elle devient sexuée (Sex.). 4 g. . | Le) > Sex. | u | De, | è 5 g ; 12 Er a = H g. | 354144 | 554 13| ni [usa folssin: | ñ — Sex. 1 | Je 35 | | [ L | Ni DR ee — 2 UT ETS SES | TRE SU | PET = | CES jasassafo]ssrus wfssanss ir 3.54.1.104 | 454 41 EMI 92 + 60 + A7 + 28 + 24 + 32 Æ 16 + 19 + 29 + 19 2 + 10 + pass [olssiases LÉ HAL + 24 + 24 + 3 + l : | L > Sex. ] Ÿ | re I X 45 30 D 40 | Las | es PSS —— | | 1m 5.VII.2 | —— 21 — 5. NIL.4. | 38 HA + 5. VILA. | il 5.VIL.3 | 26 + A5 + 18 + 36 + + 5.VILS5 | 12 +47 + 39 + 7° g, a 1Ess l > Sex. I > Sex. L > Sex. T OX: - i [ | | pa 19 32 47 A | | il | | E | REVPRÉ | cet 5.VIIL.2 | 18 + 40 + = 5.VIILA | T + 82 + 21 + 5.VIN.3 | 24 + 30 & + A6 + 42 + 38 E 43 2 90 + A + 85 + S HA + | L [ Ju 1 Sex. j _ k x l | 5 és Aûl | —_ PR. me es —— < ne on RE | vs | 11 Æ A8 + 30, + 18 Æ 45 + 19 + 13 + 14 + 45 + | 5.1X.1 pa] 5.IX.4 | | S:1X:2 = —— 34 ——— 5. © a PACE RON PNEUS SNS IEEE ERREES | [ | : | | 55 | $ | L —_— r SA dE rm ï Fe : : : = 10 g. [ao + 19 € 96 À 49 € 49 € 16 + 40 + 9 + | Fe on ju Sex. [is 5.X.3 | 2: 27 UT | ss + 86 4 24 + 16 +49 SU HAN NS || FX me es | RAS | 20 RENDAIT AUS Ï ï Ft ER AIR RE Z + . | [ J l J 47 | de db 37 | | S | ee eP. | Gi. L. | 5.X03 [3 FOIE A3 26 PS0 EM | 5.X1L4 Erreurs NÉS TENTE | 5,X15 | AT + 43 + M4 + 14 + IS + | SX pu] “XI. [asie +18 + 10 HUE E 15 + HAT A OS ESS &: EE — En | © È ———— — — = I m —_—— | | [ | | ( 37 . | ue | | | 42 | | l 4 | | . se | ER | 15: 2 | | SX | TIRE | 4 + s-XILG Ë SxXILT | + | 5. XI bol 5.XIRS | ut | 5.X11.4 | + 12 + 11 + 13 + A1 + L LS [ | Î Ei | 25 —_—_"* — ————_———— 13" g | 5x | 20 | 5 x11.2 | REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 387 whole worms at the season when the fission is at its height did not show any with signs of new organs developing as a forerunner of fission. Serial sections of tail pieces killed soon after the division also show no trace of the new pharynx, or brain, nor any change in the gut. » L. Lorerri-Bonont, pour PI. suhtentaculata fait des remarques analogues (1918, p. 10) : « La scissione in questi esemplari non 6 mai preceduta dalla comparsa di un solco trasversale o da processi preparatori dei vari organi, interni od esterni, quali li osservo Zacnarras negli esemplari della Slesia. Ho potuto assicuramene esaminando sotto 1l microscopio parecchi esemplari, che avevo ucciso men- tre presentavano 1 segni di una prossima seissione. » Pour ces auteurs, il n'y a donc aucune modification qui pré- cède la scission. CniLp, au contraire, dans ses importants tra- vaux sur la reproduction asexuée des Planaires (1906 ; 1910 a) a soutenu une opinion tout autre. Ayant tout d'abord fait porter ses recherches sur les Sfenostomum, il a voulu retrouver chez les Triclades qu'il à pris ensuite comme sujets d'études, le même mode de scission et de bourgeonnement que chez les Rhabdocæles ; c’est ainsi qu'il décrit, chez les Paludicoles, une série de zoïdes arrivant à former, chez les exemplaires de grande taille, une chaine de quatre individus. Il reconnait que chez P/. maculata, dorotocephala et velata, 1 n'existe aucune modification anatomique qui permette de distinguer les diffé- rents zoïdes, mais, par toute une série de procédés variés, il a cru pouvoir mettre en évidence une différenciation physiologi- que entre les zoïdes successifs. Il m'est impossible d'entrer dans la discussion détaillée (*) des méthodes employées par Caizo pour démontrer l'existence de multiples zoïdes : régéné- “ration (1906, 1910 &, 1911), méthode des anesthésiques (1910 4), méthode au cyanure (1913 &, 1914 b), etc. Je renvoie pour les détails aux mémoires originaux de l’auteur ; d’ailleurs, toutes ces expériences n'entrainent guère la conviction ; il semble que l'opinion de Caisp soit faite d'avance et que toutes les expérien- ces n'en sont que des vérifications a posteriori. . I faut examiner maintenant comment mes expériences per- (1) Srevens (1907, p. 362) et SreINmaNN (1916) ont déjà critiqué les résultats de Cure, pour le cas spécial des Planaires. 388 A. VANDEL mettent de faire le partage entre ces deux opinions différentes : simple autotomie sans aucune modification préalable, ou, au contraire, formation de zoïdes nettement délimités, Je crois qu'il y a lieu d'étudier séparément le côté morphologique puis le côté physiologique de la question. a) Point de vue morphologique, — Mes observations s'accor- dent avec celles de tous les auteurs qui ont étudié histologique- ment la scission des Paludicoles ; il n'y a, chez les Triclades (en exceptant toujours le cas de P/. fissipara et Pl. paramen- sis), aucune modification anatomique ou histologique précédant la scission. C’est ce que démontre l'étude des coupes sériées de fragments fixés aussitôt après la scission. La division résulte, comme je l’ai décrit plus haut, d’une déchirure qui se produit au hasard entre la partie antérieure et la partie postérieure, dans la région d’étirement ; il n'y a aucune zone strictement prédéterminée, et le niveau du plan de scission est des plus variables. D'ailleurs, si l’on dérange un animal présentant la position de scission, il reprend sa forme normale et plus rien ne trahit cette tentative avortée. La division résulte d’un simple arrachement mécanique; elle n'a pas besoin, pour se produire, d'aucune zone de moindre résistance préformée à l'avance. Il est assez suggestif, je crois, de rapprocher ces processus de division, du comportement des Planaires bi- ou tricéphales. IL est relativement facile d'obtenir de telles monstruosités ; 11 suffit de pratiquer une incision lon- gitudinale dans la région antérieure et d’empêcher le rappro- chement des deux lèvres de la blessure. Les anciens naturalis- tes, Dazyezz et Jonnsox en particulier, avaient déjà obtenu des planaires bicéphales ; les formes doubles ont fait, de la part des biologistes modernes, l’objet d’un grand nombre de recherches, parmi lesquelles il faut citer, tout spécialement, celles de Van Duyxe (1896), de Voir (1899), de Moncan (1901 b), de SererA (1906), de Srevexs (1909), de SreiNmanx (1909- 1910), etc. Ces expérimentateurs ont constaté qu'une incision suffisamment profonde est toujours suivie d'autotomie, et d'un arrachement isolant les deux parties l'une de l'autre. j Mes expériences confirment ces résultats : je décrirai avec détail seulement l’une d'elles, les autres reproduisant, à quel- ques variantes près, les mêmes particularités. Le 31 janvier, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 389 Je fais des incisions longitudinales dans plusieurs Pol. cornuta asexués. La plupart des animaux, trop profondément incisés, se séparent, les jours suivants, en deux moitiés. Cependant l’un d'eux ne se divise pas et régénère deux têtes ; en voulant approfondir l'incision entre les deux têtes, je fais in faux mou- vement et ne réussis qu'à pratiquer une encoche dans la tête droite. A la suite de cette nouvelle blessure, il se forme une troisième petite tête, Le # mars, l'animal devenu tricéphale wi 7 a. J €. fa Fig. 7. — Comportement d'une Planaire (Pol. cornuta) tricéphale. présente l’aspect représenté sur la figure 74. Le 15 mars, cet individu se coupe normalement (fig. 76). Le 26 avril, il se recoupe, mais lors de la scission, l’une des têtes se détache (fig. 7c). L'animal redevenu bicéphale se recoupe enfin le 5 mai, et se sépare en deux moitiés (fig. 74) qui redonnent, chacune, une Planaire normale. Tous les animaux rendus polycéphales se sont ainsi coupés tôt ou tard, et ont redonné des Planaires normales. Dans ce cas, la division est évidemment le résultat d’un simple arra- chement mécanique ; elle est due à la traction exercée par les deux têtes qui se dirigent en sens inverses. Îl ne peut être ici question de zone de scission préétablie puisque la coupure se produit dans la partie médiane commune de l'individu primi- tif. Il en est, je crois, exactement de même dans les processus de division normale ; la scission résulte de l’arrachement sur- venu entre les deux parties, antérieure et postérieure, sans qu'il y ait dans la région médiane aucune zone de moindre résistance. 390 A. VANDEL La question, du point de vue morphologique, me semble donc résolue : il n’y a aucune disposition ou modification qui précède la scission. b) Point de vue physiologique. — Si n'y à aucune disposi- tion morphologique précédant la scission n'y a-t-1l pas quel- que modification physiologique qui prélude à l'acte de la scis- sion ? Nous avons vu, dans un paragraphe précédent, que la scis- sion est un phénomène rythmique et périodique; un certain intervalle sépare toujours une division de la suivante. Envisa- gée sous cet angle, la question se présente de tout autre facon ; la scission est précédée d'une certaine période de pré-, paration ; c'est pendant cette période que s'établit l'autonomie et l'individualité de la région postérieure. Cette conclusion n'autorise cependant nullement à accepter intégralement la théorie de Cuirp. Si les Triclades présentaient une série de zoïdes bien délimités, le niveau du plan de seis- sion serait rigoureusement déterminé, et non pas essentielle- ment variable, comme :ïl l’est en réalité ; s'il s'agissait d’un bourgeonnement de zoïdes, analogue à celui des Rhabdocæles et des Oligochètes, on assisterait à un phénomène très régu- lier, lié à une croissance continue, alors que la scission des Planaires est un processus tout à fait irrégulier, survenant à des intervalles extrêmement différents. Enfin, nous verrons plus loin, que la température agit de façon très dissemblable sur les processus de croissance et de scission, et décèle, par là, la nature différente de ces deux phénomènes. in résumé, on doit admettre que la division des Planaires est précédée d’une série de processus qui assurent l’autôno- mie et l’individualité de la région postérieure, mais qui sont fort différents d’un bourgeonnement régulier de zoïdes ; cette autonomie n'intéresse d’ailleurs pas une partie strictement déterminée, mais une région aux limites vagues et impréci- ses (!); c'est un peu au hasard que se produit larrachement entre les deux parties, antérieure et postérieure. (:) Cuizo, dans son premier travail (1906, p. 122) dit que « this condition — propriétés spéciales de la r'gion postérieure — is not sharply centralized or localized in the region, but extends more or less completely throughout ‘its lenght » ; cette manière d'envisager la question me parait beaucoup plus juste que l'opinion intransigeante soutenue par l'auteur dans ses derniers travaux. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADLES 391 Nous assistons dans la division des Triclades, à la transition entre un phénomène d’autotomie accidentel, et un mode de reproduction normal ; c'est ce qui rend très délicate l'étude de ce processus encore mal fixé et par suite irrégulier et peu précis. 9. Action des facteurs externes sur la scission. 1) Température : On a signalé, à plusieurs reprises, que l'élévation de tempé- rature accélère la scission, mais cette action n'avait fait jus- qu'ici l'objet d'aucune étude précise. Cette étude est, en effet, difficile : la scission étant, comme nous l'avons vu, un phénomène tout à fait irrégulier. l’obser- vation d’un seul individu ne peut conduire à aucun résuitat. Il est nécessaire pour dégager les lois générales, d'opérer sur des séries considérables et pendant une période relativement longue ; c’est le seul moyen d'éliminer, partiellement tout au moins, les innombrables fluctuations de détail. Mes observations se rapportent principalement à une longue culture de Pol. cornuta, suivie pendant 13 générations, du 10 janvier 1920 au 31 août 1921 (c'est-à-dire pendant 18 mois environ); le tableau IT donne la généalogie de cette culture. On remarquera qu'elle est issue d'un fragment unique; le patrimoine héréditaire était donc aussi semblable que possible dans tous les individus. Pendant un an, d'août 1920 à août 1921, la température a été notée chaque jour ; comme cette culture était soumise, suivant les saisons, à des conditions assez diverses, les résultats sont également variés ; ils ont été consi- gnés dans le tableau IT (les deux dernières colonnes du tableau se rapportent à une question qui sera étudiée ultérieurement). Ce tableau à permis d'établir la courbe représentée dans la fig. 8. | Cette courbe montre que le rythme de la scission s'accélère avec l'élévation de température jusqu'à un maximum qui se place entre 14 et 15°. Au delà, la courbe descend très brus- quement, et à 20°, toute division cesse, et les individus pré- 392 A. VANDEL sentent des altérations pathologiques. Quand la température baisse, le rythme de la scission sé ralentit; je n'ai jamais Tableau III. Pour- centage d’indi- vidus deve- nant sexués Nombre d'indi- vidus deve- nant sexu6s Nombre Nombre Pour- Tempé- | d'indi- . | centage rature vidus moyenne de la culture de 1920 Août Septembre Octobre Novembre Décembre Janvier Février Mars Avril Mai Juin Juillet Août observé, pour Pol. cornuta, de scission au-dessous de &. En somme, cette courbe ressemble à celles qui ont été éta- REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 393 blies pour traduire le rapport entre la température et différents phénomènes physiologiques ; au-dessous d’une certaine tem- pérature, les processus sont arrêtés ; au delà, ils s’accélèrent avec l'élévation de température, atteignent un maximum, puis la courbe redescend brusquement jusqu'au moment où elle atteint la température mortelle pour l'espèce. EE E SI Wal . FREE st LE SRE ae in Ale IR. |) or See NEIQE AN EM SET Sr ñ + etai dl NC 6. LUS ANE CSP MR ANES : Ro Tr eee NN Resa 2 EN D IE IE ER EU ATEN cp Porn RER SR PRE AR Et PP On ARE) ES DE ES Se ER RS ES Re RO re PNR SMEAINASIRI BE SIREN Hs IRAN SARA He Re ee ee) 80 EP En PEN EN PT Te IE 2 DS A EE EN ES IPN AM ENOMOMI INTENSE EN EU III 90: Temp éretures. Fig.8. — Courbe traduisant l’action de la température sur la scission. Mais un autre point doit nous arrêter dans l'examen de cette courbe : sa marche ascendante est extrêmement rapide. On a appliqué aux organismes la loi que Van'r Horr et ARRHÉNIUS avaient établie pour les réactions chimiques ; elle indique que, pour toute élévation de température de 10°, la vitesse d’une réaction devient environ double ou triple. Loœs donne comme moyenne, pour le développement des organismes, le chiffre 394 A. VANDEL de 2,8 qui représente l'augmentation de la vitesse de crois- sance pour une élévation de 10° (ce que l’on désigne en géné- ral par Q,,). Gette loi a été appliquée aux phénomènes les plus divers : battements du cœur, conduction des nerfs, phénomè- nes de locomotion, développement des œufs, croissance, régé- nération, etc. À. par yux corps à - Sa Bapport ; 10 APE NON NE OL AONNTS VIENT LPC 6 CNRS Températures. Fig. 9. — Courbe traduisant l'action de la température sur la régénération. J'ai moi-même repris l'étude de Ia régénération du pharynx chez Pol. cornuta, en fonction de la température. Mes expé- riences sont résumées dans le tableau IV et dans la courbe de la figure 9. Elles confirment ce que d’autres biologistes avaient établi pour des organismes différents. Si l'on calcule le coeffi- cient d'augmentation de la vitesse de régénération par 10°, à l’aide de la formule : TT EL REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 395 on trouve qu'entre 13°26 et 1896, Q,, — 2,83, chiffre presque identique au nombre 2,8 indiqué par Los comme moyenne pour l'augmentation de croissance en fonction de la tempé- rature. Ceci dit, si l’on examine la courbe représentant l’augmenta- tion du nombre de scissions en fonction de la température, on Tableau IV Dirnere Tempé- | Nombre port : pharynx e STE R: l'expé- rature d'indi- ap corps rience moyenne vidus ramené en 0/0 17,9 — 30,0 — 29,6 3010297 00-1926 20,4 — 21,6 — 18,2 — 20,5 16,5 — 18,5 — 20,0 — 14,0 16,5 — 17,0 12,6 — 16,0 — 13,2 17,6 — 19,4 — 14,2 = 16,6 — 18,7 A9 9 4959 ne pourra manquer d'être frappé de la façon dont elle monte rapidement au voisinage de l’optimum. Et si l’on calcule le Q,, entre 1397 et 1405 (optimum) on le trouve égal à 26,3, c'est-à-dire dix fois plus grand que le chiffre précédemment obtenu pour la régénération. L'élévation de température accélère donc de façon très diffé- rente la scission et la régénération. Ces observations nous per- mettent de comprendre, comment, ainsi que nous l'avons exposé plus haut (p. 385), l’élévation de température augmente le pour- centage des scissions prépharyngiennes. Elles nous montrent aussi que la régénération et la scission sont des phénomènes de 27 396 A. VANDEÏ nature très différente : cette conclusion vient encore renforcer les critiques que j'avais formulées plus haut au sujet de la théorie de Cm: la scission des Planaires ne saurait être la simple conséquence de phénomènes de croissance et ne peut résulter, par conséquent, de la différenciation de zoïdes suc- cessifs. Ces deux phénomènes diffèrent, d’ailleurs, non seule- Mmbre dotal desci5Sèons Ka [en 90 20 30 40 72 Jntervelles de JEUTS E --2-- Affomes. Nourris . Fig. 10. — Courbe traduisant l’action de la faim sur la scission. ment par l’allure générale de la courbe d'accélération en fonc- tion de la température, mais encore par beaucoup d’autres points : le: minimum de température auquel se produit la seis- sion est, comme nous l'avons vu, de 8°, alors que les processus de régénération se continuent jusqu'à 3-4° environ. L'optimum de température pour la scission se place entre 14 et 15° parait être de 18° environ pour la régénération. Ces deux phé- nomènes ne sont done nullement assimilables. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 397 Les chiffres précédents ne valent que pour Pol. cornuta. Us varient avec chaque espèce. C’est ainsi que P/. subtentaculata, espèce méditerranéenne, ne se coupe pas au-dessous de 14°; j'ai conservé une collection d'individus pendant plusieurs mois, à une température inférieure à 14°, sans observer aucune SCIS- sion. L'optimum que des observations en nombre insuffisant ne me permettent pas de préciser, se place certainement au-des- sus de 20°. 2, Nourriture Si l'excès de nourriture n’accélère pas la fréquence des scis- sions, l’inanition, par contre, arrête toute multiplication. C'est ce que montre l'expérience 20, résumée par le graphi- que ci-contre (fig. 10). Vingt Po/. cornuta, asexués, provenant des environs de Paris, sont répartis en deux lots : dix sont nourris, et dix conservés dans un bocal, sans aucune nourri- ture. Pendant les trois premières semaines, le nombre de scissions est à peu près le même dans les deux cultures. Mais, à partir de ce moment, les individus affamés cessent complète- ment de se diviser, tandis que les exemplaires alimentés conti- nuent à se couper comme précédemment (assez lentement, d’ailleurs, car la température, lors de cette expérience, était relativement basse). L'inanition suspend donc la reproduction séissipare. 10. Le mécanisme de la scission. Expériences de décapitation. 1. La méthode de décapitation Nous avons étudié jusqu'ici le processus de scission lui-même et ses différentes modalités. Le phénomène étant connu, il faut rechercher s'il est possible de Le provoquer expérimentalement. Jusqu'ici, Caizo est le seul auteur qui se soit attaqué à ce difficile problème. Si plusieurs points de l'œuvre du zoologiste améri- cain sont passibles de sérieuses critiques, on doit reconnaitre néanmoins qu'il est le seul biologiste qui se soit efforcé d’abor- 298 A. VANDEL der la question de façon vraiment sérieuse et par la voie expé- rimentale. Pour Cmirp (1910 &; 1912: 1915), la scission des Planaires résulterait de l'isolement physiologique du second zoïde (nous avons rappelé plus haut que, pour Cuir, les Planaires seis- sipares sont formés d'une chaine de zoïdes comprenant de 2 à 4 individus). Dans les conditions normales, le zoïde antérieur commande le zoïde postérieur et le tient sous sa dépendance ; mais lorsque le zoïde postérieur à atteint une taille déterminée, il acquiert une certaine autonomie et tend à se libérer de la tutelle du premier zoïde; les deux parties finissent par réagir indépendamment, ce quiest la cause de l'arrachement se pro- duisant entre les deux régions. 7 On peut accepter, dans son ensemble, la théorie de Cri, quitte, bien entendu, à ne pas tenir compte de l'hypothèse, tout à fait inutile d’ailleurs ici, de l'existence de plusieurs zoïdes ; cette hypothèse comme nous l'avons vu, ne s'accorde pas avec l’ensemble des faits observés. Le processus de scission est le résultat des réactions autonomes et indépendantes des deux parties, antérieure et postérieure ; 1] reconnait pour origine la disparition des corrélations normales entre ces deux parties. Cette conception n'est, d'ailleurs, pas à proprement parler, une hypothèse ; ce n’est que l'interprétation rigoureuse du phéno- mène de scission tel que nous l'avons décrit précédemment. On peut réaliser une expérience qui imite les modalités de l'isolement physiologique. Si l'on sectionne profondément une Planaire par une incision transversale, mais tout en laissant subsister un pont reliant les deux moitiés, on constate que les deux parties réagissent indépendamment : la partie antérieure rampe normalement, tandis que la partie postérieure se fixe au substratum : si l’'échancrure est assez profonde, 1l se produit presque toujours un arrachement entre les deux parties. Cet isolement physique est, en somme, comparable à l'isolement physiologique qui provoque le processus normal de scission. Si la division des Planaires reconnait pour cause un manque de corrélations entre les différentes parties de lanimal, 1l suffira, pour provoquer le phénomène, de supprimer le sys- tème de commande, c’est-à-dire la tête et les ganglions céré- broïdes ; on obtient ce résultat par la décapitalion. . | LP REPRODUCTION DES PLANAIRES ‘TRICLADES 399 C'est à Crizp (1910 &) que revient le mérite d’avoir découvert cette élégante méthode; il a opéré sur P/. dorotocephala, et les résultats de ses expériences paraissent très concluants (”). Cuizp à fort bien vu la façon dont agissait la décapitation (1910 à, p. 167): « Fission never occurs immediately after the operation and at ordinary room temperatures usually not for several days. With higher temperatures it oceurs somewhat earlier, with lower somewhat later. It is in no sense the result of shock connected with the operation. As a matter of fact, its occurrence is determined by the stage of development of the new head which forms in place of that removed. Fission never oceurs until this head has attained a stage of development suffi- cient to permit of active, well coordinated and sustained loco- motion ; that this must be the case is evident from the preceding description of the act of fission. Moreover, unless food is given, fission never occurs after the new head, 1. e. the nervous sys- tem, has attained a certain later stage of development in which it controls the reactions of the posterior region more comple- tely. In short, fission may occur during a certain period, begin- ning when the new head is so far advanced to control fully the reactions of the posterior region, andending when the new head has attained the later stage which permits more cem- plete subordination of the posterior region. » Je ne peux que confirmer ces observations; et c'est en cela, d’ailleurs, que réside le point faible de la méthode. Chez cer- taines espèces, et en particulier chez Pol. cornuta, l'intervalle qui sépare le moment où la régénération est suffisante pour permettre à l'animal de ramper normalement, et celui où la régénération de la tête est complètement achevée, est fort court; et c'est seulement dans ce petit intervalle que la décapitation peut influer sur la fréquence des scissions; comme, d'autre part, la scission est fréquente chez cette espèce et que les témoins se coupent activement, les résultats qui ressortent de la compa- (1) Si l’effet de la décapitation paraît réel, l'action des autres facteurs invoqués par Caro semble beaucoup plus douteuse ; on a l'impression que les résultats des expériences, quelle que soit leur nature, vérifient toujours la théorie : si l’on nourrit l’animal, la taille augmente, le dewxième zoïde s’accroit, et la scission se produit ; si, au contraire, on affame le sujet, le premier zoide étant plus sensi- ble que le second, s'affaiblit aussi plus rapidement, ce qui provoque la scission. Cette théorie qui interprète ainsi, avec une égale facilité, les résullats les plus opposés, ne peut manquer d'entraîner un certain sceplicisme, 400 À, VANDEN raison entre individus décapités et animaux intacts sont souvent peu suggestifs. Les résultats obtenus varient suivant les espèces, Nous allons les passer successivement en revue, 2. Polycelis cornuta J'ai fait une dizaine d'expériences portant sur un total de près de 200 individus. Comme je viens de le dire, Les résultats obtenus avec cette espèce sont peu nets, et, en général, les Nombre de Scusstons. Intervolles de 3 JovrS. PRES Témoins. ER Décapi tés. Fig. 11. — Expérience de décapitation sur Pol. cornuta. Exp. 6. 5. témoins se coupent tout autant que les décapités. Cependant, l’abondance des positions de scission chez les décapités s'oppo- sant à leur rareté chez les témoins, semble indiquer que la décapitation déclanche le réflexe de la scission, mais que des facteurs accessoires (apathie générale et lenteur des mouve- ments dues à la décapitalion) empêchent l'achèvement du pro- cessus. I m'est impossible de donner le détail de toutes Les expé- riences entreprises, ce qui entrainerait des répétitions fasti- dieuses. Je résume seulement, pour deux séries, les notes de mon cahier d'expériences, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 401 Expérience 6. 3. — 19 août 1920. — 20 individus asexués de Pol. cor- nuta sont triés dans une récolte faite aux environs de Pontarlier, et choisis de tailles à peu près égales ; 10 sont décapités et 10 conservés comme témoins, 22 août. — Témoins : 1 scission. Décapités : J'assiste à une position de scission, mais elle ne s'achève pas. û 23 août, — Décapites : 2 positions de scission qui ne s’achèvent pas. 24 août. — Témoins : 1 scission. Décapités : plusieurs positions de scission qui ne s’achèvent pas. 25 août. - Décapités : plusieurs positions de scission qui ne s’achèvent pas! 26 août. — Témoins : | scission. Décapités : J'assiste à une position de scission qui s'achève et sépare les deux moitiés de l'individu. 27 août. — Décapités : positions de scission qui ne s'achèvent pas. 28 août. — Décapites : id. id. 29 août. — Temoins : 1 scission. 31 août. — Décapités : positions de scission très nettes mais qui ne s’achèvent pas. 4er septembre. — Décapités : Un animal se coupe; d’autres présentent des poStons de scission, mais elles ne s’achèvent pas. 2 septembre. — Deécapités : Les individus commencent à avancer norma- lement. J’observe quelques positions de scission. 3 septembre. — Décapités : Un individu coupé. De plus j'’assiste à la scis- sion d’un autre individu. 4 septembre. — Deécapités : Positions de scission qui nes’achèvent pas. 5 septembre. — Décapités : J'assiste à une scission. 6 septembre — La régénération des têtes des décapités étant terminée, je clos l'expérience. Si l’on traduit cette expérience par un graphique, l’on obtient les courbes représentées figure 11. Les résultats sont, en somme, assez peu nets, quoique les décapités semblent présenter une recrudescence de scissions entre 15 et 18 jours après l’opéra- tion. Mais si les résultats bruts ne sont pas très convaineants, le fait que les positions de scission sont très fréquentes chez les décapités et se déclanchent comme des réflexes dès que l’on stimule l'animal, indique l’influence indéniable de l'opération ; seules des conditions accessoires et secondaires empéchent l'achèvement des scissions. Expérience 6. 4. — 13 septembre 1920. — Je récolte aux environs de Pontarlier des Pol. cornuta asexués et les nourris. 14 septembre. — Je choisis 20 individus, de tailles à peu près égales ; 10 sont décapités et 10 gardés comme témoins. 17 septembre. — Décapites : observe une position de scission qui ne s'achève pas. #02 A. VANDEL 18 seplembre. — Témoins : 2 scissions. 19 septembre. — Décapités : Une position de scission bien nette. mais qui ne s'achève pas. 20 septembre. — Témoins : 2 scissions. Décapités : Quelques positions de scission qui ne s’achè- vent pas. ?1 septembre. — Décapités : Nombreuses positions de scission qui ne s'achèvent pas. NomÂre de 3ciSStONS, CNET 7: Întervalles de à jours. -- Témoins. Decapites. Fig. 12. — Expérience de décapitation sur Pol. cornuta. Exp. 6. 4. 22 septembre. — Décapités : Nombreuses positions de scission qui ne s’achèvent pas. 23 septembre. — Décapités : Nombreuses positions de scission qui ne s’achèvent pas. 24 septembre. — Témoins : i scission. Décapités : Nombreuses positions de scission. 25 septembre. — Décapités : J'observe 6 positions de scission très nettes, dont une s’achève. 27 seplembre. — Décapités : Nombreuses positions de scission très nettes. 28 septembre. - Décapités : Nombreuses positions de scission très nettes. 29 septembre. — Témoins : 1 scission. (RE Décapités : 2? individus coupés ; de plus j'assiste à une division. RL RS NUS LL ES Éd REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 403 30 septembre. — Décapites : 2 individus coupés ; de plus, j’assiste à une position de scission très nette qui ne s'achève pas. 1er octobre. — Décapités : À individu coupé; de plus, j’assiste à deux posi- tions de scission très nelte qui ne s'achèvent pas. 2 octobre. — Décapités : 4 individu coupé ; de plus, j’assiste à une scission complète. Ê 3 octobre. — Décapités : le dernier individu présente une position de scis- sion très nelle qui ne s'achève pas. 5 octobre — Decapités : le dernier individu présente deux positions de scission qui ne s'achèvent pas. 8 octobre. — Témoins : 1 scission. 13 octobre. — Je clos l'expérience. Le nombre des scissions chez les décapités et les témoins n'est donc pas extrêmement différent (7 chez les témoins ; 9 chez les décapités), mais la courbe qui résume l'expérience (fig. 12) montre qu'entre 15 et 21 jours après l'opération, les individus décapités présentent une recrudescence de scissions ; ce maximum serait encore bien plus accentué si l’on avait tenu compte de toutes les positions de scission qui s’'ébauchent mais ne s'achèvent pas. 3. Planaria alpina. Les résultats que J'ai obtenus avec P/. alpina sont remarqua- blement nets ; cela est dû, en partie, tout au moins, à ce que la scission est peu fréquente chez cette espèce ; les témoins ne se coupent pas ou presque pas et font ainsi mieux ressortir l'influence de la décapitation chez les individus opérés. J'ai effectué 6 séries d'expériences sur cette espèce; je don- nerai seulement ici Le détail de l’une d'elles. Expérience 7. 5. — 20 septembre 1920. — Je récolte aux environs de Pontarlier des individus asexués de P{. alpina et les nourris. 21 septembre. — Je choisis 30 individus de tailles égales et les répartis en deux lots : 15 sont décapités ; 15 conservés comme témoins. 23 septembre. — Décapités : observe quelques positions de scission. 25 septembre. — Décapités : 1 scission. 26 septembre. — Décapités : 3 scissions. 27 septembre. — Deécapités : 4 scissions. 28 septembre. — Décapites : 2 scissions. 29 septembre. — Décapités : À scission. 1er octobre. — Décapitées : 1 scission. 3 oclobre. — Décapites : 1 scission. 4 octobre. — Décapiles : À scission. ; 404 A. VANDEL 8 octobre. — Decapités : il ne reste plus qu'un individu qui ne se coupe pas et qui sera supprimé le 13 oclobre. Témoins : aucun des témoins ne s’est coupé ; je les ali- mente (1). 9 octobre. — Je décapite les 15 témoins. 13 octobre. — 2 scissions. 14 octobre. — 6 scissions. 15 octobre, — Les animaux sont transportés à Paris, ce qui trouble évi- demment quelque peu l'expérience ; deux individus malades sont supprimés à l’arrivée. Nomlre de scissions. _ = : De 7h 20 Jntervelles de 5 Jours. CT Tenoirs TT Decapilég. Fig. 13. — Expérience de décapitation sur P{. alpina. Exp. 7. 5. 18 octobre — 1 scission. 19 octobre. — 1 scission. 20 octobre. — À scission. 21 octobre. — À scission. \ 24 octobre. — 1 scission. Tous les animaux s'étant coupés, l'expérience est close. (:) Il est indispensable de toujours alimenter les individus avant l'opération ; sans cela l'inanition arrêfe la reproduction scissipare, comme nous l'avons vu au paragraphe précédent, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 405 Cette expérience résumée par le graphique ci-contre (fig. 13) est remarquablement nette ; Les témoins dont pas un ne s'est coupé dans la première partie de l'expérience, se sont, au con- traire, {ous divisés, après avoir subi la décapitation. %. Planaria subtentaculata. J'ai fait avec cette espèce plusieurs séries d'expériences qui m'ont fourni des résultats positifs. Je donne le détail de deux séries : Nombre de 3ci351a73 2 le cap ’ 10 18 25 30 Jntervelles de 5 Jours. == 7 ém0iRS. TJécipiles. Fig. 14. — Expérience de décapitation sur PL, subtentaculata. Exp. 12. 1. Expérience 12. 1. — 27 mai 1921. — Des PL. subtentaculata, pro- venant de Montpellier, sont alimentées. 28 mai. — Je choisis 20 individus de tailles égales, 10 sont décapités, 10 conservés comme témoins. 3 juin. — Décapités : 1 scission. De plus, j’assiste à une position de scission qui ne s’achève pas. 406 A. VANDEL 4 juin. — Décapités : 2 scissions. 6 juin. — Décapités : 4 scissions. & juin. — Décapites : À scission. 11 juin. — Décapités : 1 scission. à" a F Nombre de sciS5i0n3. o ee CA \s Décape la \ \ \ \ ---- 720125 Deczpil8s Fig. 15. — Expérience de décapitation sur PL. subtentaculata. Exp. 12.2. 15 juin. — Décapités : le dernier individu ne se cou pant pas, je le sup-. prime. Témoins : 1 scission. Je nourris les autres témoins. 14 juin. — Je décapite les témoins. 20 juin. — 5 scissions. : 21 juin. — 3 scissions. 22 juin - — 1 scission. Tous les individus se sont coupés. Cette expérience montre nettement l'influence de la décapi- tation (voir le graphique de la fig. 14) sur la scission, aussi bien dans la série du début que dans la série témoin. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 407 Expérience 12. 2. — 22 juin 1921 — 90 PI. subtentaculata prove- nant de Montpellier sont alimentées ; puis 10 individus sont décapités ; les 10 autres servent de témoins. 24 juin. — Témoins : 1 scission. 27 juin. — Témoins : 2 scissions. Décapités : 2 scissions, et plusieurs positions de scission qui ne s'’achèvent pas 28 juin. -— Décapites : 3 scissions. 29 juin. — Témoins : 1 scission Décapités : 3 scissions. 30 juin. — Décapités : 1 scission. 1er juillet. — Je nourris les témoins. 2 juillet. — Le dernier animal décapité ne se coupant pas, Je le supprime. Je décapite les témoins; j'en abîme un : il en reste cinq. 3 juillet. — Une position de scission très nette. 4 juillet. — 1 scission. 5 juillet. — | scission. 6 juillet. — 1 scission. 10 juillet. — 1 scission. Tous les individus se sont coupés Les résultats de cette expérience, résumés par les courbes de la figure 15, sont, en ce qui a trait à la série témoin, un peu moins nets que ceux de l’expérience précédente ; l'allure géné- rale est cependant la même. 5. Planaria vitta. J'ai aussi fait quelques expériences sur cette espèce. Je donne ci-dessous le détail de l’une d'elles. Expérience 36. 1. — 21 juin 1921. — J'alimente des P{. vitta prove- nant de Montpellier. 22 juin. — Je répartis 12 individus en 2 lots: 6 sont décapités et 6 con- servés comme témoins. 24 juin. — Décapites : À scission. 25 juin. — Décapités : 1 scission, et plusieurs positions de scission qui ne s’achèvent pas. 27 juin. — Décapités : 1 scission. 28 juin. — Témoins : 1 scission. Décapités : 2 scissions. 30 juin — Décapités : 1 scission. Tous les individus se sont coupés. 1er juillet. — Je décapite les témoins. 2 juillet. — A scission. 3 juillet. — 1 scission. 5 juillet. — 1 scission. 6 juillet. — 1 scission. 10 juillet. — 1 scission. Tous les individus se sont coupés. 408 A. VANDEL La figure 16 résume cette expérience remarquablement nette. | GHLOZS. CG) Nombre de53, {ntervelles de S J'aUTSE. —---- TPDOI7S. DeCSp 1/23. Fig. 16. — Expérience de décapitation sur PL. vitta. Exp. 36. 1. 6. Interprétation de la méthode de décapitation. Les expériences précédentes montrent donc nettement, et cela, en dépit de quelques irrégularités, que la décapitation détermine une recrudescence de scissions. En affaiblissant le système de commandes de l'animal, on provoque une rupture. des corrélations entre les deux régions, antérieure et posté- rieure, qui entraine, en général un arrachement entre ces deux partes. Sommes-nous en droit, après ces expériences, d'affirmer que nous avons découvert les secrets les plus cachés du mécanisme de la scission, et que nous avons atteint l’essence même du processus ? Je ne le crois pas ; et l’on aurait une idée fausse de l’action de la décapitation si l’on s’en tenait aux seules expérien- ces précédentes, En effet, ces expériences ont porté, exclusive- ment, sur des espèces et des individus susceptibles de se cou- per dans les conditions ordinaires. Mais si l’on opère sur des espèces ou des individus qui ne se divisent pas normalement, la décapitation est sans aucun effet. J'ai entrepris, en particulier, plusieurs expériences sur nt une nn REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 409 PI. gonacephala ; cette espèce se reproduirait, au dire de cer- tains auteurs, par voie asexuée ; d'autre part, elle ressemble beaucoup à PL. subtentaculata qui se multiplie exclusivement par division. Pour toutes ces raisons, P/. gonocephala s'offrait comme un bon sujet d’expérimentation. J'ai d’abord décapité des individus sexués; je n'ai constaté aucune scission ou ébau- che de scission; ce résultat négatif n'a, d'ailleurs, rien d’éton- nant, car nous verrons plus loin que les individus sexués ne se coupent jamais. J'ai ensuite expérimenté sur de jeunes indivi- dus dépourvus d'organes copulateurs ("); mais le résultat fut le même que précédemment; jene constatai aucune scission. J'ai décapité également des individus sexués de Pol. cornuta et de P{. alpina ; dans aucun cas, il n’y a eu de division; dans les conditions normales, les animaux sexués ne se multiplient jamais par scission. Mais il ya mieux. Nous verrons plus loin (p. 478) que dans certaines stations renfermant exclusivement des sexués (catégo- rie 1), les jeunes individus de Pol. cornuta et de P/. alpina, sortis récemment de cocons et encore dépourvus d'organes copulateurs, ne se coupent pas. J’ai décapité, à maintes reprises, de telsindividus, sans constater par la suite aucune scission. Si, par contre, l’on opère sur des jeunes susceptibles de se couper dans les conditions normales (catégorie 2; p.478), la décapita- tion provoque une recrudescence de scissions comme dans les expériences relatées au début de ce paragraphe. En résumé, la décapitation ne détermine la scission que chez des animaux qui sont déjà susceptibles de se couper dans les conditions normales. Elle accélère — comme la température, quoique par une autre voie — la fréquence des divisions; mais elle n'atteint pas l'essence du processus. La scission n’est pas un mécanisme physiologique, commun à toutes Les Planaires, qui serait spontané chez lesunes et que l’on pourrait provoquer chez les autres par un artifice expérimental ; c’est une propriété spécifique, héréditaire, propre à certaines espèces ou à certai- nes catégories d'individus. La décapitation accélère l'allure du processus chez ces individus, mais c'est à cela que se borne son action. Il en est probablement de même de l'action des (1) PI. gonocephaia étant une pondeuse d'été, c’est à cette saison qu'il convient de rechercher les jeunes individus. 410 A. VANDEL facteurs externes sur la plupart des phénomènes physiologiques; ces agents accélèrent, retardent ou même inhibent les proces- sus vitaux, mais la forme de la réaction n’est pas déterminée par le stimulus externe, mais par la constitution particulière de l'individu, par son patrimoine héréditaire, par son génotype. 11. Origine de la reproduction asexuée. On à fréquemment attribué l'origine de la reproduction asexuée à l'intervention de facteurs externes, en particulier à des changements de température ou à de mauvaises conditions. Les deux Planaires scissipares les mieux connues et les plus répandues en Europe sont P/. alpina et Pol. cornuta. Ainsique je l'ai dit dans le premier chapitre, on a considéré (à tort pour l'une, avec raison pour l’autre) ces deux espèces comme étant des «reliquats glaciaires ». Plusieurs naturalistes ont voulu voir entre ces deux faits, reproduction asexuée et origine glaciaire, une relation de cause à effet : les changements de température survenus depuis l’époque glaciaire seraient responsables de l'apparition de la multiplication scissipare. Cette hypothèse a été surtout développée à propos de P/. alpina; on la trouvera exposée dans les études de TaieNemanx (1906) et de STEINMANN (1906 ; 1907). Une opinion légèrement différente est soutenue par Cuizp. Pour lui (1915, p. 259), la reproduction asexuée des Planaires (et de tous les organismes, en général) esten rapport avec l'iso- lement physiologique de certaines parties (voir ce que jen ai dit, p. 398) ; cet isolement physiologique est lui-même une con- séquence de la diminution des processus métaboliques et le résultat des phénomènes de sénescence. J'étais arrivé, moi- même (1920 b), sous l'influence des idées de Cnicp, à une opi- nion analogue ; je considérais la scission comme résultant d'un affaiblissement plrysiologique de l'individu (!). Un examen plus approfondi de la question ne me permet plus de conserver cette interprétation. Toutes les théories précédens tes prêtent le flanc à de sérieuses critiques : (1) Au point de vue général, une idée semblable est exprimée par Gebpes et Tuouson (4889, p. 213) : « Alternalion of generations is, in fine, à rythm belween a relatively anabolic and katabolic preponderance ». REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 411 1) L'étude des organismes faite seulement. dans la nature, quand elle ne se complète point par des élevages méthodiques et longuement poursuivis, conduit toujours à attribuer au milieu un rôle prépondérant dans Ia formation des espèces ou des différents caractères individuels. Mais celui qui à cultivé des organismes avec persévérance et en variant, autant que possi- ble, les conditions environnantes, ne tarde pas à s’apercevoir du rôle accessoire, superficiel des agents externes, et de l’in- fluence fondamentale et primordiale de la constitution hérédi- taire et spécilique des individus. Attribuer l'origine de la scissiparité des Planaires à une élé- vation de température est une idée que suggère l'étude dans la nature, mais qui ne résiste pas aux résultats fournis par les cultures etles expériences. L'élévation de température accélère, comme nous l'avons vu, le rythme de la scission, mais cela seu- lement chez les individus qui se multiplient asexuellement dans les conditions ordinaires ; pas plus que la décapitation, elle ne provoque de division chez les animaux qui ne sont pas suscep- tibles de se couper normalement. J'ai fait sur P/. gonocephala et sur des jeunes Po/. cornuta sortis de cocons, des expériences qui n'ont donné que des résultats négatifs. D'ailleurs le seul examen du mode de vie des Planaires à reproduction agame ne permet pas d'attribuer au milieu le rôle prépondérant qu'on a voulu lui faire jouer. Toutes les spécula- tions de ce genre ont été presque exclusivement établies sur PI. alpina et Pol. cornuta qui sont, toutes deux, des espèces de ruisseaux froids. Mais, en fait, les Planaires scissipares présen- tent les habitats les plus variés : PZ. alpina estune espèce de hau- tes montagnes et de pays arctiques ; P/. subtentaculata n'existe que dans la région méditerranéenne; P/. maculata se rencontre dans les étangs et Les eaux stagnantes ; P{. velata est une forme de mares temporaires; P/. mitta est un animal presque caverni- cole, habitant les nappes d’eau souterraine ; enfin les T'erricoles ont un mode de vie très spécial. Par contre, P/. gonocephala qui se plait dans les ruisseaux frais et qui accompagne fré- quemment Pol. cornuta, ne se reproduit pas par voie asexuée ; et deux Planaires japonaises, Planaria vivida et Polycelis karafto qui vivent dans les ruisseaux froids de montagnes et jouent, dans les iles nippones, le rôle de nos P{. alpina et Pol. cornuta 28 412 A. VANDEL (lima et KaBuraki, 1916) ne se reproduisent pas, semble-t-il, par voie agame. Cette revue rapide montre que la scissiparité apparait chez un certain nombre d'espèces, mais tout à fait indépendamment des conditions de milieu et d'habitat. D'autre part, les mauvaises conditions ne peuvent pas être la cause de la reproduction asexuée; en fait, un milieu défavora- ble arrête tout mode de reproduction ; 1l n’en détermine aucun. Les animaux scissipares ont besoin, pour se reproduire, de bonnes conditions de vie; s'ils sont placés dans des eaux de mauvaise qualité, ou trop chaudes, peu aérées, en putréfaction, ou contenant des anesthésiques, etc., les sujets deviennent malades et finissent par se décomposer, mais ne se divisentnul- lement. J'ai tenté autrefois beaucoup d'expériences de ce genre qu'il serait fastidieux d’énumérer 1c1 ; je suis toujours arrivé au même résultat négatif. Si l'on a considéré souvent la reproduc- tion asexuée comme le résultat de mauvaises conditions, c’est que l’on a, maintes fois, confondu, comme je l'ai dit plus haut, les processus de scissiparité normaux avec des lacérations d'or- dre pathologique. 2) La théorie de Caizp qui voit dans la reproduction scissipare une conséquence de la sénescence, ne résiste pas non plus à un examen consciencieux et impartial des faits. Les individus qui se coupent, comme nous le montrerons à la fin de ce tra- vail (p. 498) sont des animaux jeunes, peu différenciés et qui ne présentent certainement aucune trace de sénilité. Ce sont, au contraire, les individus sexués qui doivent être considérés comme des animaux âgés. C'est, d'ailleurs, cette erreur qui provoque dans l'œuvre de Cao des contradictions telles que celles-ci : dans son ouvrage général de 1915 où, fort heureusement pour le lecteur, il à ras- semblé et condensé les résultats de ses précédentes études, dis- persés dans de nombreux articles, on lit, p.259 : « Itis possible therefore, that agamic reproduction with the accompanymg rejuvenescence may occur simply as the result of senescence. The fragmentation of Planaria velata is undoubtelly à case of this sort, and it is probable that this relation between senes- cence and reproduction is very general ». — On nest pas peu étonné, après cette déclaration, de lire quelques pages plus lom REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 413 (p. 460) : « In general, the vegetative forms of agamic repro- duction oecurin relatively young organisms ». Ainsi, tour à tour suivant les besoins du moment, la reproduction asexuée est un résultat de la sénescence, ou, au contraire, un caractère d’'or- ganismes jeunes. Cette théorie ne s'accorde donc pas avec les faits et ne peut ètre conservée. L'hypothèse que j'avais formulée autrefois et qui considère la scissiparité comme le résultat de l’affaiblissement physiolo- gique de l'individu, est aussi une idée théorique qui ne corres- pond guère à la réalité. Trop souvent, d’ailleurs, les termes vagues de « métabolisme », d’«état physiologique », ne servent qu'à dissimuler notre ignorance, et à masquer la complexité des phénomènes par une explication toute verbale. En fait, les animaux sCissipares sont des individus jeunes, peu différenciés, présentant une grande résistance aux agents externes; leur mortalité est très faible ; ils manifestent une grande activité et un pouvoir de régénération très étendu. [ls ne peuvent done pas être assimilés, à aucun point de vue, à des animaux âgés ou affaiblis. Il est donc impossible, je crois, d'attribuer aux conditions de milieu ou à un certain état physiologique, l’origine de la reproduction asexuée. | Je considère que cette propriété est une mutation qui s’est produite chez plusieurs espèces de Planaires ; j'entends expri- mer par ce terme de mutation quil s'agit d'une variation apparue indépendamment du milieu, et affectant les cellules germinales et par suite héréditaire. J'ai discuté la première proposition au début de ce paragraphe; je reviendrai sur la seconde dans le dernier chapitre de ce travail. Cette mutation qui a porté sur le système de corrélations de l'individu, n'est devenue que, très accessoirement, avantageuse pour l'espèce ; elle aurait même pu devenir néfaste, si le grand pouvoir de régénération présenté par les Planaires n'avait transformé cette propriété en un mode de multiplication qui peut parfois rem- placer complètement la reproduction sexuée (!). () Cette question soulève un important problème que je ne peux que signaler rapidement ici, Il existe certainement un-rapport entre la fréquence de l’autoto- mie «t la puissance de régénération : les animaux qui s’autotomisent ont, en 414 A. VANDEL Il semble qu'il y ait dans les espèces du genre Planaria, une tendance (") vers ce mode de reproduction. Nous avons vu, dans un varagraphe précédent que la multi- plication agame existait chez de nombreuses espèces de Plana- ria, mais que parmi les Paludicoles, ce mode de reproduction était spécial à ce genre (seule, Po/ycelis cornuta fait exception). La multiplication scissipare paraît d’ailleurs diversement éta- blie suivant les espèces. Chez P/. sublentaculata, PL. vilta, PL. velala, Pl. dorotocephala, c'est à peu près le mode exclusif de reproduction. Chez P{. alpina, au contraire, la reproduction par division semble être installée depuis peu; elle ne parait point exister dans toutes les colonies : c'est ainsi, qu'en Alle- magne,aux environs de Bonn, elle semble faire défaut, quoique Voicr (1892 a; 1894 a) et SroPpexBriNK (1904) aient spéciale- ment porté leur attention sur ce point. Aux environs de Paris, au plateau de Langres, je n'ai pas observé de reproduction général, un grand pouvoir de régénération, Le fait se vérifie, en particulier, pour les Planaires : toutes les espèces à reprodu-tion scissipare ont un grand pouvoir de régénération ; au contraire Dendrocælum lacteum et les Planaires marines qui, justement, ne se multiplient pas par division, ont un pouvoir de régénéralion relativement faible. On a expliqué ce rapport, d’une portée très générale, de deux façons : la fréquence des mutilations — disent les uns (Les- NONA, Gianb, BorbaGe) — a développé, augmenté le pouvoir de régénération ; pour d'autres, au contraire (MorGan, 1901 d, p. 1#6), le pouvoir de régénération a dû préexister à l’autotomie ; c'est la condition sine qua non pour que l’auto- tomie n'anéanlisse pas définitivement l'espèce ; c’est une « préadaptation » indis- pensable. Je n'ai pas recueilli chez les Planaires, d'arguments qui puissent tran- cher la question dans un sens ou dans l’autre. (!) Plusieurs auteurs réprouvent l'emploi du terme de « tendance » en bioiogie qui implique, selon eux, une idée téléologique ou mystique, Je crois qu'il n’en est rien, L'enseignement profond qui ressort de l'étude soigneuse de toutes les lignées paléontologiques est justement celui des séries de formes (Formenreihen de Neumayr), séries parallèles qui évoluent, toutes, dans le même sens, et, cela indépendamment des conditions de milieu ou de l'utilité. Si cette orthogenèse parait indéniable, ses causes en sont encore mal connues; elle résulte probable- ment d’nne sorte de vieillissement des lignées, L'orthogenèse implique simple- ment qu'une forme donnée n'évolue pas dans n'importe quel sens, qu'elle ne peut donner qu’un certain nombre de combinaisons définies (ce qui parait, d'ail- leurs, assez probable a priori), et que les organismes voisins possédant un même potentiel évolutif, varient suivant des directions parallèles, Tout cela n’a rien de mystérieux ou de mystique et relève de processus, cerles très com- plexes, mais qui ne diffèrent pas fondamentalement des autres phénomènes vitaux, Et l’on ne saurait mieux conclure qu'avec Gran (1905) : « L'orfhogenèse n’est qu’une apparence si l’on entend derrière ce mot, faire intervenir un prin- cipe directeur agissant suivant un plan préconçu. Elle est l'expression de phéno- mènes très réels et de tendances parfaitement démontrables, si l’on donne à celte dernière appellation le même sens que les chimistes ou les physiciens attachent aux rapports de séquence ou de causalité qu'ils observent dans l'étude des corps bruts », REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 415 scissipare ; tous les individus récoltés étaient sexués. Par contre, dans le Jura, la multiplication agame est très fréquente et c'est le mode de reproduction exclusif dans certaines stations ; il semble en être de même à Rügen (THiENEMaANN, 1906). Ainsi, suivant les différentes espèces, la multiplication scissi- pare est, soit le mode normal de reproduction, soit, au con- traire, une propriété récente qui se manifeste dans certaines colonies et fait défaut dans d’autres. 12. Comparaison avec d'autres modes de reproduction asexuée Après avoir étudié en eux-mêmes les phénomènes de scissi- parité des Planaires triclades paludicoles, il nous faut les com- parer avec quelques autres modes de reproduction asexuée ; nous rechercherons si l’on en rencontre l’analogue chez des organismes différents, etnous examinerons si l’on en peut retrou- ver les états ancestraux et dérivés dans d’autres groupes. Nous passerons successivement en revue les divers modes de multiplication asexuée, d'abord dans l’ensemble des Turbella- riés, puis dans l’ordre des Oligochètes qui offre des faits paral- lèles à ceux du premier groupe. Le mode de division le plus primitif qui semble exister chez les Turbellariés est celui des Terricoles. Il s'agit là probable- ment d'une simple autotomie qui n'est devenue reproductrice que grâce au grand pouvoir de régénération de ces animaux. Malheureusement, je n'ai pas eu l’occasion d'étudier ces Pla- naires par moi-même, et les recherches des naturalistes qui Les ont observées sont encore fort incomplètes. Ni Leanerr (1894, p. 328), ni BerGexpaL (1892, p. 37) qui ont eu pour sujet d’étu- des Bipalium kewense, l'espèce la plus répandue dans les serres d'Europe, n’ont pu observer le processus de scission. Se fait- elle par contraction des muscles circulaires, ou par disparition des corrélations et arrachement consécutif, comme chez les Paludicoles? On ne sait. Cette division se produit-elle sponta- nément ou seulement à la suite d’une excitation externe ? Tous les fragments régénèrent-ils de façon parfaite, ou, au contraire, leur mortalité est-elle fort grande ? Toutes choses qui sont discutées et ne sont point complètement résolues. 416 A. VANDEL Il semble donc aventureux, en l'absence de données pré- cises, de considérer, comme l'ont soutenu plusieurs auteurs, la multiplication des Terricoles comme un stade primitif d'où dériveraient les modes de reproduction asexuée des autres Pla- naires. L'autotomie des Terricoles est, peut-être, toute diffé- rente du processus très spécial que nous avons décrit chez les Paludicoles. Des recherches précises sont encore nécessaires pour établir les rapports de ces deux phénomènes. Chez la majorité des Paludicoles, la scissiparité, comme nous l’avons vu, est un processus mal fixé en certains points : il n’y a aucune modification morphologique préalable (architomie de von Wacner); le plan de division n’est pas rigoureusement déterminé; l'intervalle d'une scission à l’autre est des plus variables ; mais 11 se produit de façon automatique et pério- dique. Ce n’est pas une simple autotomie, mais un mode nor- mal de reproduction. Enfin, il existe un groupe de Planaires où la reproduction asexuée prend un caractère très spécial : la division est lente et progressive, et la régénération des deux individus commence avant leur séparation (paratomie de von Wacner). Ce mode de reproduction n'a été signalé jusqu'ici que chez trois espèces PI. subtentaculata de Zacnarias (1888) qui est une forme dou- teuse et ne devra probablement pas être maintenue ; P/. fissi- para Kennel (1883, 1889) de l'ile de la Trinidad, et P/. para- mensis Fuhrmann (1914) de la Colombie. à Chez PJ. fissipara le plan de division est situé en arrière du pharynx, et la réorganisation du second zoïde (en particulier, la formation du cerveau, du pharynx et l'adaptation des bran- ches intestinales) a lieu avant la séparation des deux indi- vidus. PI. paramensis offre des particularités remarquables que Funkman (1914, p. 801) résume ainsi : 1) le plan de division transversal se trouve en avant du pharynx ; 2) l'animal, avant de se diviser, forme un nouveau pharynx, si bien que les indi- vidus en voie de division présentent deux pharynx l’un devant l’autre ; 3) la division peut se faire pendant que les organes sexuels sont complètement développés, probablement paree que le plan de division se trouve en avant du pharynx. Le mode de reproduction de P/. paramensis et surtout eclui REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES . 417 de PI. fissipara rappellent de façon remarquable celui des Rhabdocæles. Chez ces derniers, comme l'a fort bien montré von Wacxer (1890), il y à primitivement un phénomène de division (ainsi que l'indique la formation d’un septum qui est la première manifestation du processus), puis régénération ultérieure des deux parties ; ce n’est pas un simple bourgeon- nement comme on l'avait cru tout d’abord. On a souvent imaginé que le mode de reproduction des Palu- dicoles précités et des Rhabdocæles constituait un stade secon- daire plus évolué que celui de la généralité des Paludicoles et en dérivant. Pans ce cas, l'isolement physiologique des parties s’accompagnerait de modifications morphologiques précédant la seission. En vérité, cette hypothèse séduisante ne repose pas sur des faits assez nombreux et bien établis pour pouvoir être acceptée de façon définitive. Nous avons vu précédemment que la scission des Paludicoles et la croissance régulière de zoïdes étaient deux phénomènes certainement différents; on ne voit pas du tout, à l'heure actuelle, comment il est possible de pas- ser de l’un à l’autre. Il s’agit peut-être de phénomènes ayant une origine commune mais qui ont divergé, de façon précoce, suivant des directions différentes Les Oligochètes présentent, comme les Turbellariés, divers modes de multiplication asexuée, depuis la simple autotomie jusqu'à des processus de bourgeonnement fort complexes. Les Lumbriculus (et en particulier le L. varieqatus d'Europe) se reproduisent habituellement par voie agame. Le fait avait été déjà signalé jadis par Boxer et O. F. Müzzer ; 1l à été étu- dié plus récemment par vox Bürow (1883 4), von Wacner (1900 ; 1905), C. Müzcer (1908), Mnazek (1913). La division de Lumbriculus est une simple autotomie suivie de régénération des deux fragments ; c’est un cas typique d’autotomie reproduc- trice (Gran, 1887 b). Cette autotomie est-elle spontanée ou se produit-elle sous l’action d'un excitant externe ? La chose est discutée et parait d'ailleurs malaisée à élucider. En tous cas, j'ai pu, chez cet animal, provoquer la scission expérimentalement et à coup sûr par l’action de chocs électriques (produits par une bobine de Ruhmkorff). La division est due à une constric- tion extrêmement forte des muscles circulaires qui provoque la rupture de la paroi du corps; parfois les deux fragments 418 A. VANDEL restent encore réunis par des bribes du tube digestif que les mouvements de l'animal ne tardent pas à rompre. Parfois, si la secousse n’est pas assez forte, ou si l'animal fatigué ne réa- git plus avec la même vigueur, des contractures se produisent en plusieurs points du corps mais ne provoquent pas la rupture ; ces contractures subsistent quelques heures puis qis- paraissent. Les animaux de grande taille peuvent se briser en trois ou quatre morceaux. L'autotomie et les contractures ne semblent pas se produire dans les premiers segments (jusqu'au quinzième segment, environ), ni dans la partie postérieure ; elles n'intéressent que la région moyenne du corps. Cette loca - lisation est en rapport avec le peu de dévelcppements des muscles circulaires dans les régions antérieure et postérieure (von BüLow, 1883 4, p. 72). Ce processus d’autotomie n'a aucun rapport avec la scissiparité des Paludicoles ; le choc électrique sur les Planaires ne sert qu’à les faire diffuser; le mécanisme de la scissiparité est tout différent. Le Ctenodrilus monostylos étudié par ZeppeziN (1883) semble se multiplier d'une façon assez analogue. Il n’y à pas, chez cette espèce, bourgeonnement comme chez C. pardalis, mas division et séparation des deux zoïdes antérieurement à toute régénération. La multiplication des Naïdidés rappelle beaucoup celle des Rhabdocæles; comme l’a signalé Sonurrze (1849), puis établi L. Denorxe (1916), il y a d’abord division marquée par l’appa- rition d’un plan de scissiparité, puis régénération et bourgeon- nement de chaque côté de ce plan. A-t-on le droit de ranger ces divers modes dans une série de complication croissante allant de Lumbriculus aux Naïdidés ? Comme l’a déjà remarqué Morçan (1901 4, p. 148) cette sériation est tout à fait hypothétique et rapproche arbitrairement des phénomènes probablement très différents. Les Turbellariés et les Oligochètes présentent donc des modes de multiplication agame assez variés, mais comparables dans les deux séries; l'étude approfondie des formes de reprodue- tion fait sentir que la filiation que l’on a voulu établir entre elles reste des plus douteuses; elle montre aussi que la scissiparité des Planaires paludicoles qui est le résultat de la rupture des corrélations entre les deux régions, antérieure et postérieure, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 419 est un processus très spécial dont'on ne retrouve pas l’analogue dans les deux groupes étudiés. Le seul phénomène qui paraisse comparable est la /acération pédale de certaines Actinies : cette lacération à été décrite bien des fois, en particulier par l’aBsé Dicquemare (1775), Dazyezr (1848), Anpres (1882), R. Scnopouyx (1909), Lewis R. Gary (1911), A. Micor (1919). Une partie de la base du pied se fixe au substrat, tandis que le -reste de l'animal continue à avancer. Il en résulte un étirement suivi d’arrachement qui détache finalement un petit fragment du pied; ce fragment régénère une petite Actinie. Ce processus est, en somme, très comparable à la scissiparité des Planaires ; il est seulement plus lent en raison de la plus grande lenteur de mouvements des Actinies. C’est, à ma connaissance, le seul phénomène qui soit rigoureusement comparable à Ja scission des Planaires. CHAPITRE II LA REGENÉRATION SommaiRE, — 1. Régénération des fragments postérieurs de Planaires. Etude morphologique. — 2. Etude histologique de la régénération et de la dédif- férenciation : à) dédifférenciation. des glandes génitales ; 6) dédifféren- ciation des organes copulaleurs ; c) épigenèse ou préformation. Les processus de régénération et de dédifférenciation sont intimement liés à de multiples questions traitées au cours de ce travail, et, il est nécessairé d'en examiner tout au moins quelques aspects. La régénération est d’ailleurs un phénomène si intéressant, si profondément instructif pour la compréhen- sion de l'organisme qu'il y est difficile, quand on y touche, de ne pas essayer d'aller plus avant et de chercher à en étudier les diverses modalités. F 1. Régénération des fragments postérieurs de Planaires. Etude morphologique. Les fragments postérieurs de Planaires qu’ils Soient produits par division spontanée ou par section expérimentale, réagissent de la même façon. La régénération de tels fragments a déjà été étudiée par de nombreux biologistes, tant au pont de vue histologique que morphologique. Je voudrais seulement ie attirer l'attention sur un point spécial : la différence du mode de régénération entre les fragments postérieurs de Pol. cornuta et ceux de P/. alpina. Morean (1901 4, p. 23) a distingué deux principaux modes de régénération : dans l’un, la formation de nouveaux organes résulte de la multiplication intense de certaines cellules, en repos à l’état normal : c’est l’épimorphose ; dans l’autre, les ne cit dé dt À tnt sms +6. hsh cube: tte mt. à 421 REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES anciennes parties se transforment pour redonner un organisme complet, sans qu'il y ait multiplication des éléments : t la L ces ‘(007 & sanof gg) ‘opeurou ouuo} ef smbot.e peunue/T : “(opp à simof gp ‘097 & sinol y) ‘uonuedde amet }1e7 juo xn94.so[ J9 sopnoequo} So ‘{ o94oq98 Saad nod & ajuopoy ‘(00p à simol #y { 097 & Sol $) Ÿ — ‘qjuousei} np Juowasuor|y ‘sIxe[peqdiou 8] op }nq9( “(97 & sinof 9) ‘ouuarsu4regd ayoneqe j op uorueddv : ‘(091 & sanol 3) ‘onort -pque onede] equessreedde uorergu?$91 2p aue[q u0951n04 * “UOISSI9S E[ Sade JQJISSn8 JUAMELIA -DINUAOD ‘J0{ 9P SINXOSE S}UOUUSEIF 9P UONPIQUIION — 27 A7 717 VA D ie suivant les espè- I0ON var . { ’ énéLra ég morphallaxis. Le mode der XIS s de morphalla sont très intenses et assurent à eux seuls la formation du nouvel ocessu ces : chez Bipalium kewense (1), les pr (;) Et aussi, de façon typique, chez l'Hydre d’eau douce. A. VANDEL (007 samol 08 ‘097 & sanof 0) onbedo Jo opquomuBid sou} ‘snssi} XN9IA 9p opuw07 aanon9sod oned ef 79 ‘JASo5p aqn} o[ aouoredsuer} 184 JUOUOTIO, AIOA juessre ‘ogquouusid nod ‘oitefo ‘onomoque uoISpA e[ Juotuoyjou en$8ursip U0,[ 39 ‘9Je[du09 9479, UIO[ 210909 789 SNSSI} XNOIA S9P 9JUOJAI BE SIBU ‘QUO JUOS 9J[NPE, 9p SoUEFIO S9 SnOL ‘A — ‘(097 er sinol y) oinomgque onaed ej 9p juotu -28uoppy ‘xnof sop uorneddy ‘AJ — ‘(097 & Sinof O7) a1nomgque UuOIS9I BJ 9p UOTEUNON ‘JII — (09 R sinol €) uorjeigup$#9i op uoo8imoq np }nq9( ‘I — ‘UOISSIOS E] sgide J0}ISSn JUoLUSCIA | puadD ‘14 2P SPUXOSE SJUOUBEIT 9P UOEIQUPSOY -- ‘SZ ‘Dix 277 ÿ 1 à Z (Monçaw, 1900 4). Chez PL. lugubris ( = PL. simpli- urris — 2/. foremantii Ginanb), il y à, au contraire; à D dl À 0 cisstma { Oorganisnie les inter- cornula et tous Pol. ? il en est de même chez de plus, ation . , a) iste, si égénér 51901 IL ex ème ar deux types différents. Dans les deux N je extr à o 1907 1 diaires entre ces deux € Or, au point de vue de 1 PI. alpina appartiennent 4 » + surtout épimorphose (Morca PT. morgant (STEVENS me LE Lo Co REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES cas, il ya bien, au début, épimorphose et formation d’un bour- geon de régénération ; mais chez Pol. cornuta, à partir d'une époque relativement précoce qui varie avec la température (8 Jours à 16°; 14 jours à 10°), des processus de refonte, de remodelage, de morphallaxis, transforment les parties ancien- nes, et, quelques jours plus tard, le fragment est devenu une petite planarre de forme absolument normale (fig. 17). Chez P/. alpina, les processus de morphallaxis sont, au contraire, extrêmement réduits; pendant longtemps l'animal “est constitué par deux parties juxtaposées : une partie ancienne, à peine modifiée, et une région antérieure de néoformation (Hig. 18). La partie postérieure contient du pigment, alors que la partie régénérée en est dépourvue et ne l'acquiert que très lentement; les individus produits par voie asexuée sont ainsi bicolores, blancs en avant, noirs en arrière. Gette particularité permet de reconnaitre, à première vue, les colonies scissipares; non seulement elles se distinguent par la petite taille des indi- vidus et la présence d'exemplaires tronçonnés, mais encore par l'abondance d'animaux bicolores, noirs et blancs, d'un aspect très caractéristique. Dans les colonies sexuées, les jeunes sortis de cocons sont blancs au début; ultérieurement le pigment apparait mais de facon uniforme sur tout le corps, en sorte que ces Jeunes individus ne présentent jamais l'aspect bariolé des pièces en régénération. Cette différence dans le mode de régénération relève direc- tement de la constitution spécifique et héréditaire de chaque forme, et, par suite, 1l est difficile d’en fournir une explication complète. On peut attribuer, cependant, la diversité des modes de régénération à une plus ou moins grande aptitude des élé- ments à se dédifférencier. C'est ce qu'indiquent les observations suivantes. Dans une même espèce, la régénération ne suit pas toujours exactement le mème mode; celui-ci dépend de l'état et de la taille des fragments; quand le fragment provient d’un animal de grande taille, la refonte des anciennes parties est beaucoup plus lente ; chez Pol. cornuta, la régénération de ces gros mor- ceaux tend à suivre le type a/pina. Mais ce changement est particulièrement frappant dans la régénération de parties très différenciées, telles que les régions 424 A. VANDEL postérieures de Planaires sexuées; ces parties contiennent en effet, l'ensemble de l'appareil copulateur et ses annexes (!). Monçan (1900 D), Srevens (1901), Taacuer (1902) avaient déjà remarqué que dans de tels fragments, la présence des organes copulateurs retarde la formation des nouveaux organes, et que l’'ébauche du pharynx apparait beaucoup plus tard que dans Fig. 19. — Fragment postérieur de Pol. cornuta sexuée (n° 384), 28 jours après l'opération. « Régénéralion » presque achevée, mais « morphallaxis » très incompiète. On notera le contraste entre la partie antérieure de néoformation, sans pigment, et la partie postérieure pigmentée, peu modifiée. À comparer avec les figures précédentes relalives à la régénération de frag- ments asexués de P/, alpina. les pièces asexuées; Baroeex (1902) avait aussi noté que le nou- veau pharynx se formait plus en avant que dans les fragments agames. Jai observé chez Pol. cornuta les mêmes particulari- tés ; mais il est surtout remarquable de constater que le mode de régénération n’est pas identique à celui des fragments asexués. Dans ces pièces extrêmement différenciées, la refonte des anciens tissus, et tout particulièrement, la disparition des parties hautement spécialisées de l’appareil copulateur ne se fait qu'avec une grande lenteur; et, longtemps, la partie ancienne conserve sa forme primitive tandis que la région anté- (:) Ces fragments sont oblenus par séctions artificielles, car les individus sexués ne se divisent pas de façon normale. ob > à ae, 2. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 425 rieure de. néoformation est déjà entièrement constituée, La figure 19 qui représente un fragment postérieur sexué de Pol. cornuta, 38 jours après la section, rappelle tout à fait la fig. 18V, relalive à la régénération d'un fragment asexué de P/. alpina. Un retard dans la dédifférenciation des anciens éléments causé par la présence d'organes remarquablement compliqués, a modi- fié le mode de régénération habituel de Pol. cornuta et Va rapproché du type a/pina. Le mode de régénération parait done lié, dans une espèce donnée à l'état de différenciation de l’or- ganisme, et dans un groupe d'espèces à l'aptitude: plus ou moins grande que possède chaque forme à se dédifférencier. 2. Etude histologique de la régénération et de la dédifférenciation Mon intention n'est pas d'entrer dans l'étude détaillée des processus histologiques de la régénération chez les Planaires ; ils ont déjà fait l'objet de recherches fort nombreuses et appro- fondies. Je ne considérerai ici qu'un côté spécial de la question. Les histologistes se sont attachés presque exclusivement à l'étude de la formation et de la différenciation des organes ; ils ont établi que les nouveaux tissus s’édifient presque complè- tement à partir de cellules que l’on appelle « cellules de régé- nération » (Regeneralionszellen des auteurs allemands), nom d'ailleurs peut-être inutile, car ces « cellules de régénération » paraissent identiques aux cellules libres du parenchyme. On a pu suivre à partir de ces cellules la formation détaillée de chaque organe. Ces éléments dérivent de cellules indifférenciées du paren- chyvme, les « cellules souches » (S/ammzellen de Kezrer) qui se divisent activement après la blessure ; ces cellules souches sont des cellules de réserve qui dérivent directement des cel- lules embryonnaires (KezLer, 1894; Curtis, 1902; Prexanr, 1922). Mais il est probable que nombre de « cellules de régé- nération » proviennent aussi de cellules dédifférenciées ayant fait précédemment partie intégrante de divers organes. Et ce sont justement ces processus de dédifférenciation qui seront le sujet des paragraphes suivants. Ces phénomènes 426 A. VANDEL n'ont pas seulement un grand intérêt pour l'étude spéciale que je poursuis, mais ils ont encore une portée très générale : ils permettent d'aborder le problème de l’organisation intime de l'être vivant et d'apporter des faits nouveaux dans la dis- cussion des questions si controversées de la préformation et de l’épigenèse; enfin, ainsi que nous le verrons dans le dernier paragraphe de ce travail, ce sont les processus de différencia- tion et de réduction qui sont à la base d’une des théories les plus modernes et les plus séduisantes du vieillissement et du rajeunissement. Les phénomènes de dédifférenciation ont été déjà étudiés chez les Planaires par E. Scauzrz (190%) ; en affamant des indi- vidus adultes, il a pu suivre la réduction de l'appareil copu- lateur, son retour à l’état embryonnaire et enfin sa disparition totale. Paul Lane (1912) a observé également, dans ses minu- tieuses études sur la régénération, la dédifférenciation de divers éléments : vitellogène, cellules glandulaires, etc. La dédifférenciation semble jouer un rôle très important chez les Planaires. Mais l'interprétation de ces processus est toujours difficile et exige une extrême prudence. J’en ai étudié quelques cas en sectionnant de diverses façons des Planaires entièrement sexuées ; ces animaux hautement différenciés se prêtent mieux que les individus jeunes à l’étude des processus de réduction. Il ne faudrait cependant pas croire que tous les organes et tous les tissus fussent capables de dédifférenciation ; un certain nombre d'éléments dégénèrent purement et simplement. Il est bon de noter, à ce propos, que les processus de phagocytose sont extrèmement réduits chez les Planaires ; c’est l'opinion de STOPPENBRINK (1905), de SreiNmanN (1908), de Bernincer (1911), de PRENANT (1922) que je ne peux que confirmer ; seul Liyon (1914) signale des processus de phagocytose chez Gunda ulvæ, mais ni sa description ni ses figures n'entrainent la con- viction. a). Dédifférenciation des glandes génitales é 1) Vrtellogène. -— P. Lac (1912) décrit une dédifférenciation du vittellogène. Je n'ai pas observé ce: processus, mais avec REPKODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 427 STEVENS (1901) et Sreixuaxx (1908) j'ai constaté que, lors de la réduction, le vitellogène devient granuleux, se charge de masses arrondies se colorant fortement par l'hématoxyline et se fragmente en masses plus ou moins irrégulières qui, fina- lement, sont absorbées par les cellules intestinales. Fig. 20. — Testicules en train de se disloquer et de se dédifférencier (no 497), 4 semaines après l’opération. Il) Testicules. — Sreinmanx (1908, p. 535) décrit une dégé- nérescence des testicules, au cours des processus de régénéra- tion. Dans mes préparations, les phénomènes de dégénéres- cence sont, au contraire, limités et n’atteignent que les éléments en voie de croissance. Les spermatozoïdes mûrs résistent très longtemps, et, on les retrouve, formant des masses compactes dans le parenchyme, alors que les testicules ou les canaux déférents qui les contenaient ont disparu depuis longtemps (fig. 22-81. Quant aux spermatogonies, elles subsistent; elles se rassemblent d'abord en masses pleines, analogues aux testi- 29 4258 A, VANDEL cules en formation ; puis ces masses se disloquent (ce qui sur- vient à une époque variable suivant l’état de maturité des glan- des génitales, l'intensité des phénomènes de réduction, la tem- pérature, ete. ; en général, 2 à 4 semaines après la section), et les spermatogonies revenues à l’état de cellules indifférentes se dispersent dans le parenchyme (fig. 20) où elles devien- dront probablement aptes à édifier de nouveaux organes. IT) Ovaires. — Je n'ai pas recueilli assez de documents sur les transformations de ces organes pour en tracer une histoire complète. Die Déd fférencration des organes copulateurs La dédifférenciation des organes copulateurs est particuliè- rement intéressante ; elle permet, en effet, de constater avec la plus grande netteté et plus aisément que dans la réduction des gonades, l’évolution d'appareils hautement différenciés, leur retour à l’état embryonnaire et leur transformation ulté- rieure en des organes tout différents. E. Scauzrz est le seul biologiste qui semble avoir clairement observé et compris les processus de dédifférenciation de l’appa- reil copulateur ; dans ses remarquables études (1904) sur les transformations régressives des Planaires à la suite de privation de nourriture, il a pu suivre les phases successives de la dédiffé- renciation de l'appareil copulateur; pour lui, la dédifférenciation suit exactement l’ordre inverse de la différenciation telle qu'il l’avait étudiée précédemment dans les processus de régénération (1902). C'est là réduire des phénomènes très complexes à une vue un peu trop schématique ; il est, en réalité, toujours facile de distinguer les stades de régression (fig. 21, 22, 23) de ceux de développement (fig. 25 à 33). Mais, dans son travail, Scaurz ne dit rien dusort des cellules dédifférenciées qui résultent de la pulvérisation de l'appareil copulateur. La destinée de ces cellules est d’ailleurs difficile à préciser chez les animaux affamés ; elle est beaucoup plus aisée à suivre dans les frag- ments de régénération. D.-J. Livon (1914) a constaté que, chez Gunda ulvæ, les processus de réduction et de régénération sont étroitement liés l’un à l’autre et varient proportionnelle- ment. Il à aussi noté que les « cellules de régénération » des- REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 429 tinées à former les nouveaux organes proviennent plutôt de la migration de cellules dédifférenciées que de divisions de cellu- les de réserve. J'ai fait une étude de ces processus de réduction chez Pol. cornuta. Les principaux résultats en ont été consignés dans une note préliminaire (Vanpez, 1921 6). Le mode opératoire est des plus simples : je sectionne des-individus sexués en arrière de La bouche et engavant de l'appareil copulateur ; puis, je fixe les parties postérieures au bout de 1, 2, 3, 4 semaines. La durée du temps de régénération ne fournit, d'ailleurs, pas une échelle rigoureuse de l’évolution du processus ; Les différents stades se rencontrent à des époques variables qui dépendent de l’état de développement initial de l'organe copulateur, de la taille de l'animal, de la température, etc. C'est, générale- ment, entre 18 et 28 jours après la section que l’on observe les images les plus instructives. Nous allons étudier successivement la disparition des anciens organes et la formation des nouveaux. 4) Disparition des anciens organes. — Les anciens organes disparaissent de diverses manières : les uns dégénèrent et sont absorbés par l'intestin ; d’autres se dédifférencient. La dédifférenciation est le processus qui, à l'inverse de la différenciation, ramène des cellules hautement spécialisées à un état simple, embryonnaire. Ces processus s’observent faci- lement sur les cellules épithélales et musculaires qui forment la plus grande partie des organes copulateurs et musculo- glandulaires. Les premières se transforment en cellules fusi- formes généralement bipolaires, à gros noyau et à protoplasme réduit mais très colorable, semblables aux «cellules de régéné- ration », décrites par les auteurs. Quant aux éléments mus- culaires, on sait depuis les recherches de BLocamann, de Bert- TENDORF, de Janper, de Boœnmie, etc., qu'ils sont formés de deux constituants bien distincts : d'une part, de fibres musculaires, “d'autre part de « myoblastes » contenant le noyau, ces deux parties n'étant réunies que par quelques prolongements proto- plasmiques. Dans les préparations en question, les fibres mus- culaires qui se coloraient primitivement de façon intense par l'hématoxyline, s'altèrent et deviennent franchement éosino- 0 430 A. VANDEL philes (!) ; puis elles forment des masses amorphes et finissent par disparaitre ; quant aux myoblastes, ils se transforment, 7 /O 6. Le Fig. 21. — No 580. Fragment postérieur sexué de Pol. cornuta, 20 jours après la section. Début de la dégénérescence de l'appareil copulateur. — 1. Poche avec les deux papilles musculo glandulaires encore presque nor- males. — 2. Renflement musculaire de la base du canal utérin. — 3. Canal utérin, encore bordé de cellules. — 4. Utérus. — 5. Oviducte. — 6. Atrium genitale commune, en voie de disparition. — 7. Péniscomplèie- ment désorganisé. — 8. Cellules migratrices allant de l'appareil copulateur au pharynx. — 9. Pharynx en formation. — 10. Emplacement de l'orifice génital. — 11. Tube digestif. Fig. 22. — No 494. Fragment postérieur sexué de Pol. cornuta. 25 jours après la section. — 1. Organes musculo-glandulaires se vidant de leurs cellules. La cavité de la poche a presque complètement disparu à ce stade. — 2. Renflement du canal utérin, dont il ne reste plus que la trame estompée. — 3. Emplacement du canal utérin qui n’est plus marqué que par quelques fibres musculaires déginérées, les cellules ayant disparu. — 4. Utérus en dégénérescence. — à. Oviducle. — 6. Atrium génital en voie de disparition. — 7. Emplacement du péuis ; il ne reste plus que quelques fibres musculaires dégénérées. — 8. Masse de spermatozoïdes primitive- ment contenue dans les vésicules séminales, maintenant à même dans le parenchyme. — 9. Pharynx en coupe transversale. — 10. Emplacement de l'orifice génital. — 11. Tube digestif. comme les cellules épithéliales, en « cellules de régéné- ration ». | (‘) Cu. Perez à observé des faits analogues dans la métamorphose des Musci- des (1910). REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 431 Les causes de la dédifférenciation de ces organes ayant perdu leurs corrélations ordinaires sont encore fort mal connues ; on pourrait peut-être comparer cette dédifférenciation aux phé- nomènes de retour à l'état embryonnaire qui se manifestent dans les tissus cultivés en dehors de l'organisme (Cnampy) (*). 8) Développement des nouveaux organes. — Dans le déve- loppement des nouveaux organes, et, en particulier, dans celui du pharynx qui se forme juste en avant de l'appareil 1 Fig. 23. — No 437. Fragment postérieur sexué de Pol. cornuta, 26 jours après la section. Processus de dégénérescence très avancés. — 1. Organes musculo-glandulaires, en voie de disparition. mais encore reconnaissa- bles. — 2. Appareil copulateur formé d’une trame de fibres musculaires dégénérées, dans laquelle il n’est plus guère possible de distinguer les différentes parties. — 3. Bouche. — 4. Pharynx complètement formé. — 5. Tube digestif. — 6. Cerveau. copulateur, on est frappé de la rareté des caryocinèses ; dans les préparations de régénération de fragments asexués, les mitoses sont, au contraire, relativement fréquentes. STEvENS (1907) a déjà noté que, chez les espèces où la « dédifférencia- tion » est très accentuée, les mitoses sont beaucoup moins nombreuses que chez celles où prédomine la « régénération » (ou épimorphose). Par contre,'on remarque, dans les préparations, des amas de cellules disposées en files et qui émigrent vers la région antérieure. Sur des coupes, on ne peut assister à la migration effective de ces cellules, mais on peut s’en rendre compte du fait qu'elles sont toutes nettement orientées vers les régions de néoformation. La migration des cellules libres du parenchyme a, d'ailleurs, été déjà signalée par de nombreux auteurs : () La dédifférenciation des testicules éludiée récemment par Caampy (1920) rappelle singulièrement la réduction des mêmes organes, chez les Planaires, lors de la régénération, 432 A. VANDEL Tuacuer (1902), Srevens (1901, 1907), P. Lan (1912), Livop (1914), Prenant (1922). Les nouvelles parties s'édifient principalement, non à partir de cellules embryonnaires du parenchyme, mais aux dépens de cellules dédifférenciées de l'appareil copulateur. Le pha- rynx en formation aspire, en quelque sorte, les cellules des organes voisins; les organes copulateurs sont ainsi progressi- vement vidés de tous leurs éléments cellulaires; il ne reste plus sur leur emplacement qu'un canevas formé par des fibres musculaires, mais dépourvu de noyaux ; puis cette trame elle- même s’estompe et finit par s'évanouir. Les organes situés le plus près de la région de formation du pharynx sont les pre- miers à disparaître ; c’est ainsi que le pénis, organe de taille cependant considérable, n’est plus qu'un rudiment amorphe, alors que les organes musculo-glandulaires, situés à la partie postérieure du corps, sont encore presque intacts (fig. 21) ; puis le canal utérin s’efface (fig. 21 et 22). Enfin, plus tard, les organes musculo-glandulaires disparaissent à leur tour (fig. 23). Les figures 21, 22 et 23 permettent de se rendre compte de la disparition progressive des organes qui procède, comme Je l'ai dit, d'avant en arrière. c) Epigenèse ou préformation. De l'étude précédente se dégage donc avec netteté Le fait sui- vant : les mêmes cellules qui ont servi à former l’appareil copu- lateur peuvent, après un retour momentané à l'état embryon- naire, donner naissance à un pharynx (‘). Ces cellules ne sont donc pas prédestinées par leur nature même à former un organe déterminé ; il semble que, chez les Planaires tout au moins, ce sont bien plutôt les rapports des cellules entre elles que la structure de chaque cellule en particulier qui détermi- nent leur évolution; les cellules constituent un matériel plas- tique, apte à former les productions les plus variées ; cette totipentence des éléments va de pair avec le grand pouvoir de (1 Iest à remarquer que pharynx et appareil copulateur ont une constitution analogue, et, sont, tous deux, principalement formés de cellules épithéliales et musculaires. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 433 régénération de ces animaux. Et l’on peut répéter, avec Ci (1915, p. 58) : « As the sand-bar formed in the stream under certain conditions may under others be removed and its place taken by à deep channel, and again the channel may give place to a mud flat or a beach, so the original morphological differentiation of the all may disappear and give place to other kinds of differentiation as the physiological conditions change. » | Ces observations touchent directement à l’un des plus gra- ves problèmes que pose la constitution de l'organisme. Sans entrer dans la discussion détaillée de cette question, d'ailleurs fort complexe, rappelons seulement que les processus de la différenciation cellulaire, de même que ceux du développe- ment ontogénique auxquels ils font suite, ont été mterprétés de deux façons différentes : les uns admettent que l'ontogenèse n'est que le déroulement d’un plan qui existe déjà plus ou moins tracé dans Pœuf, et la destinée de chaque blastomère, et de chaque cellule en particulier, est irrévocablement déter- minée : c'est là l’idée maitresse des théories corpusculaires de Nzæceu, de ne Vies, de Weismanx, ete. D’autres, au contraire (Driescu, O. Herrwie, Los, Cnirp, etc.) considèrent le dévelop- pement conme étant une épigenèse, c'est-à-dire la production d'une structure diversifiée (Mannichfaltigkeit des auteurs alle- mands) à partir d'un tout primitivement homogène : les cellu- les se différencient, non en raison de leur constitution initiale, mais suivant leur emplacement et les rapports réciproques qui s'établissent entre elles. Les faits de régénération sont une des preuves Les plus fortes en faveur du second groupe de théories, et les observations que J'ai rapportées plus haut en sont un nouvel exemple parti- culièrement net. Les Planaires (et surtout les formes où prédo- mine la #0rphallaxis) constituent un « système harmonique équipotentiel» au sens de Drisscu, et chaque partie isolée peut redonner un tout complet, mais de plus petites dimensions ('). (‘} Nous n'avons considéré ici que le côté purement histologique de la ques- tion, et n'avons envisagé que l’évolution et les transformations successives des cellules. Mais le problème des régulations organiques soulève bien d’autres ques- tions qui sont loin d’être résolues. C’est en se basant sur les processus de régu- lation {soit dans là régénération, soit dans l’ovotomie) que Driescn à établi son 13 À. VANDEL” Cet exemple montre que les théories dela préformation sont trop rigoureuses et absolues et ne sauraient S'appliques à tous les cas ; 11 serait, par contre, tout aussi fâcheux de généraliser les résultats obtenus sur les Planaires ; il est toujours dange- reux d'étendre une conclusion tirée de l'étude d’un seul groupe à l’ensemble des êtres vivants ;: des cas de prédétermination et de spécificité cellulaire très étroite existent de façon indéniable ; là, comme en bien d’autres questions de biologie, il semble difficile d'établir une loi absolument générale ; il n’est guère possible que de préciser les limites extrèmes d’une série qui comprend tous les intermédiaires. C’est là d’ailleurs également l'opinion de plusieurs biologistes de grande valeur qui ont exa- miné de façon approfondie les divers aspects de la question; je citerai, en particulier, Decace (1903, p.355) et Bracaer (1917, pp. 508-309). idée du « système harmonique équipotentiel » considérée par lui comme une des preuves du vitalisme. Sans suivre l’auteur sur ceterrain, nous devons reconnaître que les phénomènes si curieux de refonte, de remodelage, de morphallaxis n'ont encore reçu aucune explication suffisante. Les actions osmotiques mises en évidence par Lors, STEINMANN, Livop, sont les moyens mais non les causes du phénomène. CHAPITRE IV La reproduction sexuée Sommaire. — [. Phénomènes de reproduction. 4. Accouplement 2. Cocons. 3. Epoques de ponte. 4. Développement. — IT. La Régénération des glandes génitales. 1. Historique. 2. Expériences. 3. Question du soma et du germen. 4. Le développement des gonades dans l'ontogenèse et la régénération. 5. Genèse de l’état asexué. 6. Action des facteurs externes sur le développement des gonades. — IH. Le déterminisme du développe- ment des organes copulateurs. 1. Introduction. 2. Evolution des glandes génitales. 3. Le développement des organes copulateurs. 4. Premières expériences de régénération. 5. Expériences de castration. 6. Quelles sont les glandes qui interviennent ? 7. Rapport entre le nombre et l’état des testicules et le développement des organes copulateurs. 8. Quel est le mode d’action des testicules ? 9. Conclusions. Un précédent chapitre a traité de la multiplication agame des Planaires; celui-ci a pour objet les phénomènes de la reproduction sexuée. Ce chapitre se divise en trois parties : un premier paragraphe est consacré à l'examen de quelques pro- cessus de reproduction : formation des cocons, époques de ponte, etc.; un second traite du développement et de la régé- nération des éléments germinaux ; enfin la troisième partie a pour objet l'étude des rapports qui existententre les gonades et l'appareil copulateur. I. Phénomènes de reproduction 1. Accouplement L'accouplement des Planaires a été observé depuis long- temps : vox Baër (1827) ct Ducës (1828) le décrivaient déjà dans leurs travaux. Il a été récemment bien étudié par Burr (1912). 36 A. VANDEL J'ai observé plusieurs fois l’accouplement de P/. alpina ; mes observations sont conformes à la description qu'en donne Kew- NEL (1889, p 462). Les deux individus sont placés ventre à ventre, l’un sur le dos, l’autre sur le ventre, et les têtes diri- gées en sens inverses ; l'accouplement est réciproque. Je n'ai, par contre, jamais observé l’accouplement de Pol. cornuta qui n'a, d’ailleurs, été décrit par aucun naturaliste. J'ai obtenu de nombreux cocons en aquariums et j'ai observé, dans la nature, des milliers d'individus de cette espèce, sans jamais assister à une copulation; j'aurais cependant été heu- reux d'étudier ce processus, n'eut été que pour observer le rôle, dans l'accouplement, des organes musculo-glandulaires dont la fonction est encore totalement inconnue. Il est possible qu'il y ait aulofécondation chez cette espèce. L'autoféconda- tion à été signalée chez plusieurs Turbellariés : chez des Mari- coles [ Procerodes lobata et Pr. dohrni, d'après Wicaecur (1909, p. 105)}, et chez divers Rhabdocæles (Sekera, 1906 6). Jai tenté, sur Pol. cornuta, des expériences qui n’ont pas donné de résultats : des jeunes ont été isolés dès la sortie du cocon, et cultivés dans des cristallisoirs séparés (de manière à éliminer toute possibilité de fécondation prématurée); ces animaux sont devenus sexués, mais n’ont jamais donné de cocons, quoiqu'ils aient été gardés pendant une année entière Il faut ajouter que, réunis ultérieuremertt ensemble, ils sont demeurés également stériles. Cette expérience négative ne fournit donc aucune preuve certaine pour ou contre l'existence de l’autofécondation chez cette espèce. 2; -Cocons Le lieu et le mode de formation du cocon ont fait l'objet de nombreuses discussions. Parmi les auteurs qui ont récem- ment étudié la question, les uns comme Bunr (1912) admet- tent que chez foules les espèces, le cocon se forme dans l’atrium génital, et que l'utérus n'est, en réalité, qu'une Bursa copulatrir ; pour d'autres, au contraire (Tocprmanx, 1913), le lieu où se forme le cocon varie suivant les espèces : chez Dendrocælum lacteum, le cocon se constituerait exclusive- ment dans l’atrium génital, tandis que chez les Planaria et les REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 437 Polycelis, la formation du cocon débuterait dans l'utérus et s'achèverait dans l’atrium génital. Je n'ai pas repris l'étude détaillée de cette question, dans l’ensemble des Paludicoles. Je mentionnerai simplement que chez les individus gravides de Pol. cornuta que j'ai étudiés sur coupes, le cocon était toujours situé dans l'atrium génital (fig. 24) ce qui confirme l'opinion de Burr. Cy ee EU. 0.1.9 Cac. ad. Fig. 24. — Pol. cornuta. Imdividu gravide (n° 396). Coc., cocon ; od., ovi- ducte. — 0. g., orifice génital. — 0. m. g., organe musculo-glandulaire. — m. c. u., renflement musculaire du canal utérin. — pen., pénis, — ph., pharynx. — ut., utérus. : | O. Scamipr (1860, p. 33) avait déjà observé les cocons de Pol. cornuta, mais il se contente d’en faire mention ; ils ressem- blent, dit-il, à ceux des autres Planaires. Voigr (1900) décrit à nouveau les cocons de cette espèce; il rapporte qu'ils sont libres dans la vase et non collés au substratum. Cette erreur à été depuis répétée par tous les auteurs qui ont omis de vérifier le fait par eux-mêmes : Büxmic (1909), Sreinmanx (1911), Burr (1912). En réalité, ainsi que j'ai pu l’observer maintes fois, soit dans la nature, soit dans mes cultures, le cocon de Pol. cornuta est /iré au substratum par une goutte de sécrétion, comme chez les autres Planaires. La plupart des cocons pondus en aquarium étaient collés contre la paroi verticale du vase; il n'y a donc aucun doute à ce sujet. Ces cocons sont ellipsoïdaux et ressemblent beaucoup à ceux de Pol. nigra ; ils mesurent 4 mm, 5 à 2 millimètres suivant leur grand axe. La couleur de 438 A. VANDEL la coque (et le fait est d'ailleurs général chez les Triclades) varie profondément au moment de la ponte. Le cocon qui vient d'être pondu ainsi que celui qui est encore contenu dans le corps de la mère, est d’un blanc de lait. Environ douze heures après la ponte, il prend une belle teinte rouge orange ; au bout de quelques jours la teinte fonce, passe au brun-acajou et devient finalement noirâtre. Le cocon de Pol. cornuta con- tient de 1 à 25 œufs; l’éclosion a lieu5 à 10 semaines après la ponte. J'ai égalementeu l’occasion d'observer plusieurs fois le cocon de P/. alpina. 1 est fixé au substrat, et, non libre, comme le prétend Voir (1892) ; ce cocon.est brun ou acajou ; il est à peu près sphérique et mesure 2 millimètres de diamètre ; il ren- ferme de 7 à 40 œufs; l’éclosion à lieu 10 semaines environ après la ponte ; Voicr (1892) indique de 8 à 14 semaines. 3. Epoques de ponte La ponte a-t-elle lieu toute l’année ou ne se produit-elle qu’à certaines époques déterminées ? C'est une question qui a été fort discutée, surtout à propos des « reliquats glaciaires ». Elle com- prend, je crois, deux problèmes distincts ; il y a lieu d'étudier, séparément, la périodicité de la ponte d'abord dans l'espèce en général, puis dans l'individu en particulier. a) Cycle de reproduction de l'espèce. — NVorcr, dans son pre- mier travail sur P/. alpina (1892) admettait que la ponte n’est liée à aucune saison déterminée. Mais, dans ses études ultérieures, il prétend au contraire, que la ponte n'a lieu qu’en hiver et au printemps (18944, p. 170; 1901 &,p. 224); le fait que l'animal dépose ses cocons exclusivement en hiver serait un caractère de « reliquat glaciaire ». Pour Pol. cornuta, Voicr (1900) admet que la reproduction sexuelle cesse pendant l'été. | Mes observations conduisent à des conclusions toutes diffé- rentes; en fait, les deux Planaires se reproduisent toute l’année, ce qui parait d’ailleurs assez probable a priori, si l’on se rap- pelle que ces espèces vivent dans des sources ou ruisseaux dont COR REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 439 la température est relativement très constante dans tout le cours de l’année. | Le tableau V donne le résumé de mes observations sur 24. alpina. Tableau V. — Planaria alpina. Stations "Dates Accouplements | Cocons Source de la Ferme de l’Etang près Pontarlier (Doubs). 11 août 1919 communs communs id. 13 août 1919 communs id. ; 4 avril 1920 | 4 accouplement Source près Ste-Colombe (Doubs).|24 août 1919 1 cocon id. 5 avril 4920 1 cocon id. 20 août 1920 8 COCons Source p. Granges-Narboz (Doubs).|13 sept. 1920 | 1 accouplement | 2 cocons Source près Maibuisson (Doubs), |16 août 1920| 1 accouplement Source de Boujeons (Doubs). 8 sept. 1920 2 Cocons Source près du Brassus (Suisse). |30 août 1920 | 1 accouplement Source p. de Poiseul (Hte-Marne).|20 sept. 1921 | 2 accouplements Ces observations se rapportent presque exclusivement aux mois d'été, Les seuls où j'ai eu l'occasion d'observer P/. alpina dans le Jura. En tous cas, elles indiquent nettement que cette forme ne cesse pas de pondre et de se reproduire sexuellement pendant l'été; c’est d'ailleurs, ce qu'avaient déjà indiqué Caicu- KOFF € ZSCHOKKE. Le tableau VI est relatif à Pol. cornuta. Il montre que Pol. cornuta peut se reproduire sexuellement dans tous les mois de l’année. Sur le tableau, il semble que le nombre des cocons soit plus abondant. l'hiver, aux environs de Paris, et l'été, dans le Jura ; cette différence ne correspond à aucune diversité réelle; elle tient simple- ment à ce que mes recherches n'ont pas été poursuivies à la même époque dans les deux régions. La ponte de Pol. cornuta n'est certainement pas liée à la saison froide : les exemplaires que j'ai observés le 9 juillet 1921 dans la forêt de Perseigne (Sarthe) étaient parfaitement sexués et pondaient des cocons, alors que la température de l’eau du ruisseau était relativement élevée (15°). 5) Cycle de reproduction de l'espèce. — La maturation des gonades se produit, chez les Planaires, à intervalles réguliers, 440 A. VANDEL Tableau VI. — Polycelis cornuta. Stations Dates Cocons Aquarium 5 fév. 1919 1 cocon » 5 mars 1919 » » 7 mars 1919 » » 16 mai 1919 » » 6 juin 1919 » » 21 nov. 1919 » » À 5 fév. 1920 » » A1 fév. 1920 » » 26 oct. 1920 » » 145 nov. 1920 » » 20 nov. 1920 » » 96 nov. 1920 » » 29 nov. 1920 » » 2 déc. 1920 » » 3 déc. 1920 » » 9 déc. 1920 » » 13 déc. 1920 » » 3 janv. 1921 » » 4 janv. 1921 » » 11 oct. 1921 » Environs de Paris. Chaville 4 fév. 1919 » » 17 fév. 1920 » » 25 janv. 1921 » » 7 fév. 1921 » Saint-Rémy-lès-Chevreuse 2 mars 1919 » » 30 mars 1920 5 cocons » 17 avril 1920 3 — » 15 mars 1921 1 — Normandie. Forêt de Perseigne (Sarthe) 9 juil. 1921 1 1— Jura. Fontaine Baudry (Doubs) 10 août 1920 1 Granges-Narboz (Doubs) 12 sept. 1920 2 — Longeville (Doubs) 8 oct. 1920 1 suivant un cycle périodique. Ce cycle a été signalé par von Grarr chez les Planaires terrestres (1899, p. 148), mais il a été REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 441 surtout bien mis en évidence par Caicakorr (1892) chez Plana- ra alpina, et par SToPPeN8RiNk (1904, 1905) chez Dendrocælum lacteum, Planaria alpina, Pl. gonocephala et Polycelis cornuta. Curris (1902) décrit, chez P/. maculata, un eyele de reproduc- tion qui amènerait, à un certain moment la disparition otale des organes génitaux (y compris l'appareil copulateur). Chez aucune Planaire d'Europe, les modifications ne sont aussi profondes ; seuls, les testicules et le vitellogène, après une période d'activité, reviennent à un état embryonnaire et peu différencié, pour rentrer à nouveau en activité à la période sui- vante. Ce cycle découle de 13 constitution et de l’état des gonades et se présente comme un exemple de ces phénomènes rythmi- ques et périodiques qui sont si fréquents chez les êtres vivants. Ce cycle n’est pas du fout déterminé par les facteurs externes, mais, en général, dans la nature, il s'accorde plus ou moins avec les saisons. C'est ainsi que P/. gonocephala est une pon- deuse d'été; Dendrocæwlum lacteum est, suivant les localités, une pondeuse d'hiver (Inima, 1884; SroPPeNBriNK, 1904) ou une pondeuse d'été (Marriesex, 1904). Chez P/. alpina et Pol. cor- nuta qui vivent dans des sources de température constante, il y à un cycle de reproduction pour chaque individu en particu- * lier, mais, pour l'ensemble de l'espèce, la ponte a lieu toute l’année, comme nous l'avons vu précédemment. Tableau VII. Cycle de reproduction de Planaria polychroa. (Nombre de cocons pondus). É D Lu i=) « = d Lors en d u 2 individus seulement 42 442 A. VANDEL J'ai conservé, en aquarium, pendant plusieurs années, quatre individus de P/. polychroa, récoltés aux environs de Paris; j'ai soigneusement compté, pendant deux ans, le nombre de cocons pondus. Le tableau VIT donne les chiffres obtenus. Ce tableau montre que la ponte commence en hiver, attemt son maximum en juin, décroit en juillet et en août, et cesse complètement en automne; 1l montre aussi de la façon la plus nette l'existence d’un cycle interne de reproduction qui n’est que très vaguement en rapport avec la température (tout au plus, celle-ci accélère peut-être la ponte pendant les mois chauds). 4. Développement. Je n'ai pas repris l'étude du développement embryonnaire des Planaires qui est, en somme, bien connu gràce aux recher- ches de Mercanixorr (1883), Lsima (1881), Hazzez (1887), Bar- DEEN (1902), Curtis (1902), Srevens (1904), Marrtesenx (1904), Fuunski (1916). Je donnerai seulement quelques indications sur le dévelop- pement postembryonnaire encore mal connu. On n'avait guère suivi jusqu'ici l’évolution complète d’un individu depuis sa sor- tie du cocon jusqu'au moment où il est capable de donner lui- : même des cocons (!). J'ai pu obtenir, en aquarium, plusieurs générations successives de Pol. cornuta etsuivre ainsi tout leur développement. 1 La taille des jeunes vers sortant du cocon est extrèmement variable ; parfois ils n’atteignent que 1 mm. de long et res- semblent à de petits fils blancs à peine visibles à l'œil nu; d'autres fois, ils mesurent 2-3 mm., et, il est aisé de les distin- guer. D'ailleurs, dansune mêmeponte,ily a souventdes différen- ces très considérables entre les mdividus jumeaux. En général, plus le nombre de jeunes sortis d’un cocon est considérable, plus leur taille est minime, et inversement. Ces faits expli- quent que l’évolution des différents individus, mêmes jumeaux, n'est pas synchrone ; les exemplaires de grande taille arri- () Seul, Sekera indique (1909) qu’il a pu observer l’évolution complète de tou: Les les Planaires indigènes, saut celle de P{. vita; il ne donne malheureusement aucun détail sur ces cultures, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 445 vent plus rapidementque les petits à l’état de maturité génitale. Les jeunes, à leur sortie du cocon, sont encore dépourvus d'éléments génitaux reconnaissables. [ls présentent les caractè- res suivants : grande disproportion entre le tube digestif dont les diverticules remplissent presque tout le corps et le paren- chyme très réduit qui ne forme que quelques travées entre les anses intestinales; abondance des « cellules souches » (PRE- NANT. 1922) ; absence ou du moins rareté des granules pigmen- taires. L'apparition d'amas de « cellules souches », premières ébau- ches des testicules (!) qui estsuivie de près par la formation des organes copulateurs, a lieu, en général, de facon précoce; on peut noter le moment exact de cette apparition sans recourir aux coupes ; il suffit de remarquer, en arrière de la bouche, la formation d'une petite tache blanche qui indique l’ébauche de l'appareil copulateur. Ces ébauches se montrent de façon plus ou moins précoce, suivant les individus. En voici quelques exemples : un cocon, récolté à Saint-Remy-lès-Chevreuse, le 17 avril, s'ouvre le 27 mai, il en sort 5 jeunes; deux individus mesurent, le 24 juin, 8 mm. de long ; étudiés sur coupes, ils présentent déjà des ébauches d’ovaires, de testicules, d'organes copulateurs et musculo-glandulaires ; cela, moins d'un mois, après l’éclosion. Mais il s’en faut que le développement soit toujours aussi rapide : un cocon pondu, en aquarium, le 26 octobre 1920, s'ou- vre le 29 décembre et met en liberté 6 jeunes. Ces exemplaires ne présentent les premières ébauches d'organes copulateurs que le 18 avril 1921, c'est à-dire 3 mois et demi après l’éclo- sion. Ces différences, exagérées par Les conditions de tempéra- ture, sont liées à des particularités constitutionnelles et hérédi- taires qu'il est difficile de préciser. L'apparition des gonades, et de l'appareil copulateur n’indi- que pas que la reproduction sexuée va commencer aussitôt. La période de maturation des gonades, et, en particulier, du vitel- logène qui ne se développe que fort tard, dure longtemps ; ce (') Le « cell lineage » est très difficile à suivre chez les Planaires, et, même impossible chez les Triclades. La généalogie des cellules sexuelles n’a même pas pu être établie chez les Polyclades où, cependant, la segmentation est régulière (Surrace, 1907). 30 144 A. VANDEL uestque 6 mois, environ, après l'éclosion que commence la ponte des premiers cocons. Nous avons vu que chez plusieurs Planaires, et en particulier chez Pl. polychroa, 1 4 à un cycle périodique de reproduc- tion, se renouvellant chaque année. Po/. cornuta n'a jamais présenté, en aquarium, qu'un seul cycle de reproduction ; tous les individus sont morts après la ponte (voir p. 497). En est-il de même dans la nature ? Je ne sais. IT. — La Régénération des glandes génitales. La régénération des glandes génitales, outre sa très grande portée générale, intéresse directement le problème des rap- ports entre les deux modes de reproduction sexué et asexué. Aussi la place de ce chapitre est-elle tout indiquée dans le pré- sent travail. 1. Historique. T. H. Morcan (1901 a, p. 185-186) sectionne, en arrière des yeux quelques individus de P/. luqubris (il s’agit, en réalité d’une espèce américaine : P/. simplicissima Curtis — Pl. fore- mantii Girarp). Il cultive les fragments antérieurs dépourvus ainsi complètement de glandes génitales, et, constate qu’au bout de quelques mois, elles ont donné des Planaires entière- ment sexuées et capables de donner des cocons. Il en conclut que «new germ-cells can develop from the somatic tissues, or at least from cells not included in the old reproductive organs ». C’est là la seule expérience cruciale qui ait été faite sur la régénération des glandes génitales chez les Planaires. Plusieurs auteurs ont constaté la régénération de glandes génitales dans des fragments contenant encore des gonades, de telle sorte que l'origine des nouvelles glandes n'est pas précisée. C’est ainsi que E. Scauzrz (1902) a observé la régénération des testicules dans des Planaires (Dendrocælum lacteum, PL. torva) section- nées par le milieu du corps. La régénération des ovaires à été ES VS PPS CP REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 445 étudiée, chez P{. torva par À. Moxr: (1912 4) et chez Pol. nigra ‘par Zweisaun (1915). | J'ai cru utile de reprendre les expériences que Morgan n'avait entreprises qu en petit nombre, et en quelque sorte, en marge du vaste programme qu'il s'était tracé. J'ai tenu à établir, de façon définitive, la possibilité de la régénération des glandes génitales chez les Planaires. Mes résultats ont été consignés dans une note préliminaire (Vanne, 1921 b). où Expériences. Mes expériences ont porté sur deux espèces : Polycelis cor- nuta et Planaria alpina. Les animaux sont sectionnés en avant des ovaires, et les parties céphaliques, dépourvues de glandes génitales sont cultivées et nourries. Pour être certain que les. ovaires n'étaient pas contenus dans les parties céphaliques, j'ai fixé et débité en coupes sériées les parties postérieures, de manière à m'assurer qu'elles renfermaient bien toutes les glan- des génitales. Je n’ai pas tenu compte des pièces céphaliques où il pouvait subsister des fragments d'ovaires. 2. Expériences sur Pol. cornuta. — Une première expérience, commencée le 5 août, a porté sur 10 individus. Les fragments céphaliques qui ne mesurent guère que 0 mm. 5 à 2 mm. sont cultivés et nourris; 5 fragments antérieurs régénèrent. Le 26 septembre, l’un des individus est fixé; il possède deux petits ovaires, mais pas encore de testicules. Les quatre autres Pla- naires sont fixées le 21 décembre (4 mois 1/2 après l'opération). Chez toutes, 1l existait des ovaires (‘), des testicules assez nom- breux et des ébauches plus ou moins avancées d’organes copu- lateurs et musculo-glandulaires. Une autre expérience, commencée le 26 octobre, a fourni des résultats moins nets, car plusieurs morceaux antérieurs devaient contenir des fragments d'ovaires (ainsi que je m'en suis assuré en débitant en coupes les parties postérieures), et je n'ai pu en tenir compte. Cependant un fragment certaine- ment asexué a donné un individu normal qui, fixé le 11 avril (} Ces observations sont en contradiction avec celles de Zwermaum (1915) qui prétend que les fragments mesurant moins de 3 min, ne régènèrent pas d'ovaires. 446 A. VANDEL de l’année suivante (5 mois 1/2 après l'opération) présentait 4 des ovaires, des testicules et des ébauches d'organes copula-. teurs. Ces expériences sont encore complétées par les observations que nous rapporterons au chapitre V (p. 479) : des fragments postérieurs de Planaires produits par scissiparité, et ne conte- nant pas d'éléments génitaux, sont capables de donner des Pla- naires complètement sexuées. 6. Lrpériences sur PL. alpina. — PI. alpina semble, au pre- mier abord, plus favorable que l'espèce précédente, pour ce genre d'expériences. Les ovaires se trouvent, en effet, assez loin de l’extrêmité antérieure, et, il est possible d'obtenir des frag- ments antérieurs asexués de taille relativement considérable ; malheureusement la mortalité de ces fragments est fort grande et contrebalance les avantages que présente par ailleurs cette espèce. Cependant, j'ai pu observer un cas bien net de régénéra- tion des gonades : un fragment antérieur isolé le 24 août a donné une petite planaire qui, fixée le 13 décembre (3 mois et demi après l'opération) possédait des ovaires, des testicules et un appareil copulateur assez différencié. 3. Question du soma et du germen Les expériences de T.-H. Mona et les miennes montrent que, chez les Planaires, la régénération des glandes génitales peut se produire à partir d'éléments non différenciés sexuel- lement. Mais quels sont ces éléments ? Toutes les recherches sur l'embryogénie et la régénération des Planaires ont établi que, chez ces organismes, la plupart des organes, y compris les gonades, proviennent de cellules souches où « Stammzellen » (uma, Keuzen, Curris, E. Scauzrz, MarriEsen, P. Lane, Zwermaum, M. Prenant, etc.). Mais on avait confondu jusqu'ici, sous le nom de S/ammzel- len, deux catégories d'éléments que M. Prexawr a le premier distinguées dans son travail sur le parenchyme des Plathel- minthes (1922). Il distingue deux sortes de cellules libres du parenchyme que l’on reconnait à leur chondriome : les unes possédant un petit nombre de grosses mitochondries sont les REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 447 cellules souches proprement dites ; elles dérivent directement des blastomères et représentent des cellules embryonnaires, indifférenciées, capables d'évoluer dans des sens divers ; ce sont elles, en particulier, qui donnent naissance aux éléments génitaux. Les autres, caractérisées par de nombreux chondrio- conthes, fins et courts, sont des cellules différenciées dans le sens somatique, incapables de revenir à l'état sexuel. Les cel- lules souches ont donc conservé la totalité du « plasma germi- natif » au sens de Weismanxn. Ainsi la régénération des gona- des, chez les Planaires, n'a pas lieu à partir de tissus somati- ques mais à partir d'éléments indifférenciés ayant conservé leurs caractères et leurs potantielités embryonnaires. Ces expé- riences de régénération qui, au premier abord semblent infir- mer la théorie de Wegiswanx, la confirment au contraire quand on les interprète soigneusement. Ceci dit, je crois, cependant, que la régénération des glan- des génitales ne constitue pas un processus absolument spé- cial et tout à fait à part; ce n’est qu'un cas particulier du phé- nomène très général de la régénération. Là, où il existe des tissus indifférenciés et à caractères embryonnaires (quelle que soit leur origine précise), le pouvoir de régénération est, en général, très étendu, et dans certains cas, la régénération des glandes génitales est alors possible. La régénération des gona- des marque seulement le point le plus élevé du pouvoir de régénération, mais elle ne constitue pas un processus spécial. Cette conclusion ressort, non seulement de l'étude des Pla- naires, mais de l'examen des autres groupes du règne animal. Les Cælentérés ont servi à Weisuaxx (1883) à établir sa théorie du plasma germinatif, et, il a cru que, chez ces orga- nismes, la lignée germinale s'isolait de façon très précoce, et était reconnaissable pendant tout le cours du développement. Mais les recherches récentes, loin de confirmer cette théorie, ont apporté contre elle des arguments extrêmement forts. La théorie de Weismanx ne peut plus guère être défendue qu'à propos de quelques formes possédant des « cellules intersti- tielles », cellules indifférenciées, à caractères embryonnaires et dont dérivent les différents éléments, y compris les gona- 448 A. VANDEL des : telles sont l'Hydre d’eau douce [d'après les travaux de SCHNEIDER (1890), de Brauer (1891), de Tannreuruer (1908), de WaGer (1909), et Cordylophora (MoncexsreRN, 1901). Mais chez les autres Hydrozoaires, les études récentes et très approfon- dies de Goerre (1907) et de Hancrrr (1913-1919) ont montré — de façon définitive, semble-t-11 — que les éléments sexuels ne se forment que fort tard, et à partir de cellules déjà différen- ciées, tantôt ectodermiques, tantôt endodermiques. Il semble que, chez les Cœlentérés, Fa différence entre soma et germen, ne soit pas nettement établie. C’est ce qui explique que la régé- nération des gonades soit possible, comme Pa constaté Driesca (1896, p. 434) chez Tubularia. Chez les Platodes, les conditions sont, en général, à peu près les mêmes que chez les Planaires : les glandes génitales dérivent de cellules embryonnaires du parenchyme, comme l'ont, en particulier, établi Ricaarps (1911) et R.-T. Younc (1919) pour les Cestodes. Cnizn (1907) à décrit la formation de cellules germinales, chez les Cestodes, à partir de cellules musculaires dédifférenciées, mais le fait parait discutable (R.-T. Youxe, 1919). Chez les Annélides, la régénération des glandes génitales est possible, dans certains cas : chez Criodrilus (Java, 1912, 1918 ; Tiraza, 1912) et probablement aussi chez Lumbriculus. Dans ce cas également, les glandes génitales dérivent des cel- lules péritonéales qui, à l'instar des « cellules souches » des Planaires sont probablement des cellules indifférenciées, em- bryonnaires. Enfin, chez les Tuniciers, E. Scauzrz à décrit (1907, p. 518) la régénération des gonades chez Clavellina à partir de cellu- les du mésenchyme. Tous ces cas sont, comme on le voit, très analogues. Dans tous les groupes ci-dessus mentionnés (en exceptant les Cœlen- térés pro parte), il existe une réserve d'éléments plus ou moins indifférenciés, à caractères embryonnaires (cellules intersti- tielles, péritonéales, mésenchymateuses, Stammzellen, etc.) qui sont capables de donner les éléments les plus divers, y compris les glandes génitales. La présence de ces tissus indif- férenciés et totipotents est, en général, corrélative d’un grand pouvoir de régénération, Quand ce pouvoir de régénération REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 449 est très étendu, la régénération des gonades est possible ; elle ne constitue qu'une manifestation particulière du phénomène très général de la régénération et non un processus spécial. Dans les phylums plus spécialisés, les Arthropodes ("), et les Vertébrés, en particulier, la différenciation des tissus est pous- sée beaucoup plus loin, et le pouvoir de régénération très limité ; aussi la régénération des gonades est-elle impossible, même si la castration a été pratiquée à un âge très précoce, chez la larve (Ounemaxs, Kezroc, MeiseNHEIMER, Kopec) où même dans l'œuf (HeGxer). IL semble donc qu’en passant en revue les différents orga- nismes, depuis les Cœlentérés (et, mieux encore, depuis les Protistes, où soma et germen sont forcément confondus) jus- qu'aux Arthropodes, on puisse établir une série continue où la distinction entre soma et germen (et la possibilité de la régé- nération des gonades qui n’en est que le corollaire) peu nette et imprécise au début, s'accentue de plus en plus Jusqu'à ce que les deux constituants deviennent presque totalement indé- pendants et apparaissent comme deux organismes différents emboîtés l’un dans l’autre (°). Cette conception éclectique me parait préférable aux théo- ries intransigeantes de Weismanx et de Hecxer (1914) qui retrouvent dans tous les organismes un plasma germinatif indépendant et autonome, ou à celle de Harçrrr (1919, p. 48) qui prétend, au contraire, qu'il n'y à jamais aucune différence entre soma et germen. Comme l'étude de la spécificité cellulaire nous l'avait déjà fait sentir, cet exemple nous montre à nouveau qu'il est diffi- cile au biologiste de formuler des lois rigoureuses s'appliquant à tous les groupes, et qu'il ne lui est guère permis que d'éta- blir Les limites d’une longue série comprenant tous les inter- médiaires. FRE (!} Cependant, chez le très curieux Copépode parasite, Xenocæloma brumpti, Cauzzery et Mesniz (1919, p. 230), pensent que les testiculés se forment à partir de tissus purement somatiques. ( Le cas le plus remarquable, à cet égard, est celui des Cobayes à qui l’on à greffé des ovaires d’une variété différente et qui donnent des jeunes du type germinal et non somatique (Gasrze et Paizzres, 1911, 1913). 450 A. VANDEL ES développement des gonades dans l'ontogenèse el la régénération Au point de vue histologique, il semble bien établi que les gonades proviennent, aussi bien dans l'ontogenèse que dans la régénération, de certaines cellules du parenchyme, les cellu- les souches ou S/ammzellen. L'évolution de ces Stammzellen en cellules germinales a été bien étudiée par M. Prenanr (1922). Je n’y reviendrai pas. Mais, au point de vue physiologique, il n’est pas sans intérêt de remarquer que la régénération des glandes génitales se fait beaucoup plus lentement (4 à 5 mois) que le développement de celles-ci chez des individus produits par voie sexuée (1 à 3 mois). Et, non seulement, la régénération des glandes géni- tales est fort lente, mais, encore, elle n'aboutit pas toujours à la production d'organes entièrement achevés et capables de fonc- tionner. MorGan a constaté que des P/. lugubris ayant entière- ment régénéré leurs glandes génitales ont pondu des cocons. Je n'ai jamais pu obtenir ce résultat avec Pol. cornuta et PI. alpina. Les Planaires issues de fragments agames et devenant ultérieurement sexuées n'ont jamais donné de cocons (voir, p. 481, en note). Les Planaires marquent donc le point où la régénération des gonades est encore possible, mais où elle devient déjà lente et difficile, et, parfois incomplète. 5. Genèse de l'état asexue Les observations précédentes permettent de rendre compte d'une particularité très répandue chez les Planaires scissipa- res. De façon très générale, Les espèces qui se multiplient par division sont normalement asexuées et ne possèdent que rare- ment des organes génitaux. Ce fait doit être considéré comme une conséquence de la reproduction agame et s'explique de la façon suivante : chez les formes où est apparue la multiplica- tion par division, la régénération des gonades dans les frag- ments postérieurs devient difficile, dans quelques cas impos- sible, La régénération des glandes génitales est encore assez éétale as nd + à NT. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 451 aisée chez Pol. cornuta. Elle est plus difficile chez P/. alpina ; j'ai obtenu, dans mes cultures, des individus de cette espèce, produits par multiplication asexuée, atteignant parfois une fort grande taille (jusqu'à 16 mm.) mais dépourvus de tout élé- ment sexuel différencié ; ces exemplaires constituent une race complètement asexuée et comparable biologiquement à certai- nes espèces comme P/. subtentaculata où les sexués sont mcon- nus. Chez Pl. vitta, cette régénération parait très difficile, et les individus sexués sont d'une grande rareté (Vannez, 1921 d). Chez PI. subtentacuiata, la régénération des gonades semble devenue tout à fait impossible, et, les organes sexuels sont encore inconnus chez cette espèce (Vanpez, 1921 d). Les Pla- naires de l'Amérique septentrionale (les seules qui, en dehors d'Europe, aient été étudiées suffisamment au point de vue bio- logique) offrent des exemples analogues : P/. maculata est représentée par plusieurs variétés (ou espèces ?) dont les unes présentent une alternance de générations sexuées et asexuées (Curris, 1902), tandis que d’autres p&raissent exclusivement asexuées (Hvman, 1920). PZ. dorotocephala est toujours asexuée dans la nature ; cependant Caico (1915, p. 125) a pu obtenir, au laboratoire, quelques animaux sexués. P/. velala est aussi toujours asexuée, et, Cairn (1915, p. 131) a vu seulement quel- ques individus avec des ovaires et des testicules, mais sans appareils copulateurs. Le cas des Planaires scissipares dont on retrouve, d'ailleurs l’analogue chez beaucoup d'animaux à reproduction agame (Lumbriculus, Ctenodrilus, ete.) ne saurait mieux se comparer qu'à celui de certaines plantes cultivées depuis longtemps par bouture et qui ont perdu la propriété de former des graines (ou, au moins, des graines fertiles) ; telles sont, par exemple, la Canne à sucre (ne Vicièce et Borpace, 1897, p. 3 et 12), le Bananier, l'Ananas, la Patate (/pomæa Batatas) (‘), ete. Nous ne croyons plus, à l'exemple de BervaRbiN DE SaiNT-PierRe (°), que si les ananas, les bananes, le fruit à pain, sont dépourvus de semences, c'est par un effet de la complaisance de la nature qui n’a pour objet aue le bonheur de l'homme et qui à voulu (*) Et aussi, parait-il, la Powme de terre (Solanum tuberosum) dans certaines régions. @) Etudes de la Nature. Etude VT. 452 A: VANDEL produire ainsi en ces fruits une surabondance d'aliments au détriment de leurs graines. Chez ces plantes, comme chez les Planaires, l’état asexué est une conséquence de la reproduc- tion agame qui a rendu très difficile ou même parfois impossi- ble la régénération des éléments germinaux. 6. Ac/ion des facteurs externes sur le développement des glandes génitales On a souvent attribué à la température un rôle important dans le développement des glandes génitales. La température déterminerait, d’après Voir (1900), le mode de reproduction, sexué où asexué, de Pol. cornuta. SreiNmanN (1906) indique comme température optima de reproduction : pour P£. alpina, 5 à 6°, comme limites extrèmes, 4%5 à 9°; pour P/. gonoce- phala, 13-179. Tuienemanx (1912) admet comme limites pour la reproduction sexuelle : 0-24° pour P/. gonocephala, 0 à 15° pour Pol, cornuta, 3 à@2° pour P/. alpina. Moi-même, dans une note préliminaire (1919 D), j'annonçais qu'entre 5 et 10°, Pol. cornuta devenait sexuée, tandis qu'entre 10 et 16°,le déve- loppement des glandes génitales était arrêté, et que l'espèce se reproduisait par division. En réalité, les faits sont loin d'être aussi simples que Je l'avais cru lors de mes premières expériences. L'évolution des gonades est avant tout déterminée par des facteurs héréditaires. De jeunes individus deviennent très rapidement sexués, même à une température de 17 à 18°, presqu’à la limite où se produisent les phénomènes pathologiques, tandis que chez d’autres (et, c'est le cas, en particulier, pour les individus produits par voie scissipare) le développement des glandes génitales est extrêmement lent et difficile, alors même qu'ils sont cultivés aux températures les plus favorables. Nous reviendrons, d'ailleurs, sur cette question dans le dernier chapitre de ce travail. L'action de la température sur le développement des gona- des est, en fait, très difficile à mettre en évidence. Comme nous l'avons vu, les jeunes sortant du même cocon et par conséquent jumeaux sont très différents les uns des autres, et leur évolu- tion particulière varie considérablement. IL est impossible, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 453 dans ces conditions, d'obtenir des résultats concluants ; on ne peut savoir, au juste, si un développement plus rapide recon- nait pour cause une influence externe ou n'estque la manifes- tation d'une particularité héréditaire. Aussi n’ai-je pu obtenir de conclusions nettes sur ce sujet. Zweisaux soutient dans un travail récent (1915), que certains corps, tels que CaClP, FeCF, HCL accélèrent la régénération des gonades, alors que d’autres, comme le sublimé la retar- dent. J'ai repris ces expériences, en particulier avec le chlorure de calcium, mais sans obtenir de résultats positifs. Il serait nécessaire de reprendre ces expériences sur une très vaste échelle, afin d'éliminer les idiosyncrasies et les particularités héréditaires qui troublent complètement les résultats des obser- vations. D'ailleurs, il est infiniment probable que l'action des facteurs externes n'exerce 161, comme dans tous les phénomènes vitaux (et comme nous l'avons montré, en particulier, pour la scis- sion) qu'une action accélératrice ou inhibitrice, mais que la nature même de la réaction est déterminée par la constitution de l'individu. III. Le déterminisme du développement des organes copulateurs - 1. Introduction La plupart des biologistes (CauzzerY, 1913; Goopaze, 1916, etc.) distinguent, en général, trois catégories de caractères sexuels : 1) les caractères sexuels primaires représentés par Les gonades, testicules ou ovaires, et qui sont la caractéristique essentielle et fondamentale du sexe ; 2) les caractères sexuels accessoires représentés par les organes annexes des glandes génitales, conduits évacuateurs, glandes diverses, etc; 3) les caractères sexuels secondaires proprement dits, qui comprennent tous les autres caractères sexuels. Les Planaires, animaux hermaphrodites, ne possèdent natu- rellement pas de caractères appartenant à la troisième catégo- rie. Mais les organes copulateurs (et musculo-glandulaires, 454 A. VANDEL chez Pol. cornuta)(") se forment, comme nous le verrons plus loin, tout à fait indépendamment des gonades, et ce n’est que plus tard que s'établissent les connexions entre les deux grou- pes d'organes. On peut done les considérer, chez les Planaires tout au moins, comme de véritables caractères sexuels secon- daires. C’est, d'ailleurs le nom que leur donne déjà E. Scauzrz (1904, p. 566). Y a-t-il chez les Planaires un rapportcausal entre les gonades et le développement de ces organes, analogue à celui qui existe entre les glandes génitales et les caractères sexuels secondaires des Vertébrés ? Question à laquelle les expériences relatées ci-dessous apporteront, j'espère, quelque lumière. On ne trouve dans la bibliographie aucune donnée précise sur le rapport entre gonades et organes copulateurs chez les Planaires. Mais l’on y rencontre quelques indications qui, éclai- rées et interprétées à l’aide des expériences que j'ai entreprises, prennent quelque signification. 1) Dans l’ontogenèse, l'appareil copulateur se développe tou- jours après l'apparition des premières ébauches des gonades. Mais, on sait que le post hoc, propter hoc n a pas grande valeur au point de vue scientifique. 2) Chez des animaux privés de nourriture depuis longtemps, on constate (E. ScauLrz, SropPeNBRINK, BERNINGER, LLyon) que les organes copulateurs disparaissent assez rapidement, tandis que les gonades persistent longtemps, presque jusqu’au moment de la mort. Mais ilest difficile de séparer, dans ce cas, l'action de la faim et l’influence de la dégénérescence des gonades. 3) Les faits, peut-être Les plus suggestifs, sont ceux que rap- porte Curris (1902) à propos du cycle évolutif de P/. maculata. Cette espèce américaine présente une alternance de générations sexuées et asexuées qui s'accompagne d'une disparition pério- dique de la lotalité des glandes génitales. La disparition des gonades est suivie de près par celle de l'appareil copulateur ; dans l’évolution inverse, la formation des gonades précède au contraire l'apparition de l'appareil copulateur. Une Planaire (1) Les organes musculo-glandulaires de Pol, cornuta dont le rôle et la signifi- calion sont encore énigmatiques (voir Vanpez, 1921 d) se comportent absolument comme l'appareil copulateur, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 455 australienne, P{. graffi (A. Wriss, 1910} semble présenter un cycle analogue, mais il est encore mal connu. Ces faits sont intéressants, mais à eux seuls, ils ne suffisent pas à établir Le rapport causal qui existe entre les gonades cet l’appareil copulateur, relation qui n'avait, d'ailleurs, été nulle- ment soupconnée par aucun des auteurs précités. Je me suis efforcé de mettre en évidence ce rapport par quelques expériences démonstratives. L'étude de chaque orga- nisme, comme celle de chaque problème biologique requiert des méthodes spéciales ; les procédés employés généralement pour étudier la question des caractères sexuels secondaires chez les Vertébrés (castration, transplantations, injections, etc.), ne peuvent guère être employés pour les Planaires. Par contre, le pouvoir de régénération très développé des Turbellariés, m'a permis d'aborder cette question par une toute autre voie. Mes expériences ont porté sur Po/. cornuta et PI. alpina. Les premiers résultats de ces recherches ont été consignés dans une note préliminaire (Vanvez, 1920 a). Ils ont été complétés depuis. Avant d'aborder le problème principal, je donnerai quelques indications sur l'évolution des gonades et le développement de l'appareil copulateur qui sont nécessaires à l'intelligence de ce qui va suivre. 2. Evolution des glandes génitales L'évolution des glandes génitales a été déjà souvent étudiée (voir en particulier SroppenBRiNk, 1904, 1905). Je n'en dirai 1et que quelques mots. | Ce sont les ovaires et Les testicules qui apparaissent en pre- mier lieu. Les testicules jeunes, constitués tout d’abord exelu- sivement par des spermatogonies, forment des masses pleines sans aucune cavité; ces « testicules pleins » correspondent soit à des stades jeunes, soit à des stades de repos sexuel ; ultérieu- rement, ils entrent en activité, et l’on trouve, en allant de la périphérie vers le centre, les différents stades caractéristiques de la spermatogenèse. Le vitellogène ne se développe que beaucoup plus tard ; il forme d’abord des cordons cellulaires pleins ; les éléments cellulaires se chargent ensuite de réserves 456 A. VANDEL et augmentent de volume; le développement du vitellogène marque l’époque de la maturité sexuelle et le moment où com- mence la ponte. Le vitellogène disparait presque complètement lors des périodes de repos sexuel. 5 2 développement des organes copulateurs J'ai été amené à reprendre en détail l'étude du déveioppe- ment des organes copulateurs de Pol. cornuta et de PJ. alpina. Les stades successifs de ce développement m'ont, en effet, servi d'échelle pour mesurer l’action des différents facteurs sur l’évo- lution de ces organes. : Le développement de l'appareil copulateur avait déjà fait l’objet de quelques recherches. Isima (1884) reconnait l’origine indépendante et autonome de l'appareil copulateur et signale que la première cavité qui apparait représente l’atrium génital. Curris (1902), chez P/. maculata, insiste également sur lori- gine tout à fait indépendante des gonades et de l'appareil copu- lateur et sur leur réunion tardive. E. Scauzrz (1902) étudie la régénération de l'appareil copulateur de D. lacteum ; il décrit la formation indépendante des trois ébauches de l'appareil copulateur (atrium, utérus, pénis) qui ne se réunissent que plus tard. Marmiesex (1904) donne quelques indications sur l’ontoge- nèse de l'appareil copulateur de P/. polychroa; 1 n’admet pas, comme ScauLTz, la formation indépendante de cavités qui ne se réunissent qu'ultérieurement, mais 1l décrit des formations pleines qui bourgeonnent à partir d’un massif central (atrium) et qui se creusent ultérieurement (pour donner le pénis et l'utérus). Ces quelques indications n'étaient pas suffisamment précises et détaillées pour remplir le but que je me proposais, d'autant qu'elles se rapportaient à des espèces différentes de celles sur lesquelles portaient mes recherches. Aussi j'ai repris l'étude de ce développement chez Pol. cornuta et PT. alpina. H n'y à pas de différences marquées dans l’évolution de ces organes, qu'on l’étudie, soit dans la régénération, soit dans l’ontogenèse. Cependant ce processus est assez variable dans les détails, et les stades équivalents ne sont pas toujours exactement sem- blables, REPRODUCTION DÉS PLANAIRES TRICLADES 457 Poiycelis cornuta. J'ai distingué pour la facilité de l'étude, 8 stades successifs. Stade I. — 11 existe, en arrière de la bouche, une région qui sur les coupes présente un aspect triangulaire : elle est limitée, en avant, par la cavité pharyngienne, latéralement par les troncs digestifs postérieurs. C’est dans cette zone remplie de parenchyme, et, dépourvue de ramifications digestives qu'apparaissent les organes copulateurs. Des cellules souches se Fig. 25. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. Stade £. rassemblent dans cette région, et, constituent une masse de prolifération à peu près sphérique (fig. 25). Stade IT. — Au milieu de ce massif cellulaire, primitivement plein, apparaît une cavité (fig. 26); elle résulte de la délamination qui se produit entre les cellules situées au centre du massif; ces cellules se disposent de manière à former un épithélium autour de la cavité; cette cavité représente l'atrium masculinum (am ; on sait que chez Pol. cornuta, l'atrium génital se divise nettement en un afrium masculinum et un atrium genitale com- mune). En même temps, le massif cellulaire, d'abord sphérique, prend une 22272 27] Fig. 26. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta, Stade Il. forme allongée. Quelque peu en arrière, apparaît un autre massif cellulaire (22. g.), comparable à celui qua nous avons décrit au stade I, mais plus pelit; c’est la première ébauche de la poche à organes musculo-glandu- laires (!). Stade IIT. — Ce stade comprend deux étapes. (1) Que je désignerai dorénavant par l’abréviation 0. m. g. 458 A. VANDEL a) Du massif cellulaire se détache une prolifération pleine qui se dirige vers le haut el en avant (fig. 27). b) La prolifération pleine s'individualise et n'est plus réunie au massif central que par un cordon cellulaire plein. Le massif central est creusé d'une cavité qui, comme nous Favons vu, représente l'afrium masculinum Fig. 27. — Développement de Fappareil copulateur de Pol. cornuta. Stade IL @. {am.): dans l'autre massif cellulaire apparaît aussi une pelile cavité (fig. 28, a. €) qui deviendra. par la suite, l'atrium genitale commune. Les deux régions de l’atrium ont ainsi une origine distincte. art. mq Fig. 28. — Développement de lappareil copulateur de Pol. cornuta. Stade I 4. Le massif #1. g. se fissure et à son intérieur apparaît une cavité. . Stade IV. — Ge stade est caractérisé par les deux processus suivants : 1) Les cellules embiyonnaires qui forment l'appareil copulateur commen- cent à se différencier; les cellules qui limitent les cavités se disposent en épithéliums, tandis que les cellules situées plus profondément se translor- ment en éléments musculaires qui donneront les couches musculaires de l'appareil copulaleur : les fibres musculaires encore peu ditférenciées se colorent, sur les préparations, en rose par l’éosine, et non en noir par l'hé- maloxyline, comme les fibres adultes. 2) Ce stade est, en outre, caractérisé par l'apparition de deux nouveaux diverticules : l’un représente l'ébauche du canal ulérin (fig. 29, u£.);il se creuse d’une cavité qui se mel en relation avec l'atrium genitale commune; l’autre est l’oviducte (fig 29, od.) dans lequel se forme, par délamination un canal qui débouche aussi dans l’atrium genitale commune. PT REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 459 La cavité de la poche à 0. m. g. s'élargit, se borde d'un épithélium, et, : acquiert une couche musculaire en fer à cheval. Stade V. — L'ébauche de l'organe copulateur s’allonge dans le sens antéro-postérieur; le canal utérin s’accroit dans la même direction. od Fig. 29. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. Stade IV. Ce stade est caractérisé par l'apparition, en avant de l’atrium masculi- num d’une pelite cavité sphérique ; c'est l’ébauche de la cavité pénienne (fig. 30, p.). C’est une formation autonome, ainsi que l'a bien décrit Scuurrz, Sans rapport initial avec les autres cavités. Fig. 30. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. Stade V. / En même temps, un bourrelet musculaire (fig. 30 b) vient rélrécir le point d’abouchement du canal utérin avec latrium genitale commune. C'est Fig. 31. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. Stade VI &. 31 460 A. VANDEL l’ébauche du sphincler musculaire qui se trouve à la base du canal utérin et . qui constitue, comme nous l’avons vu, une des caractéristiques de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. La poche à 0. m. g.s’esl peu modifiée à ce stade. Stade VI. — Ce stade peut être subdivisé en deux élapes : a) Ce stade est caractérisé par la forme en T que prend l'atrium masculi- num (lg. 31, am.) el qui est due au refoulement qu’exerce sur lui le massif pénien (p.) situé juste en avant. L'afrium genilate commune (ac.) se mel alors en communication avec l'atrium masculinum(am.). b) Un peu plus tard, l'ébauche pénienne continuant à s'accroitre, l'atrium masculinum prend la forme d’un croissant (fig. 32). La cavité pénienne [#4 P ain Fig. 32, — Développement de l’appareil copulateur de Pol. cornuta Stade VI D. s'agrandit ; le canal utérin s’est considérablement allongé et s’est renflé à son extrémité en une petite vésicule qui deviendra ultérieurement l'uté- PSN (2Z)E La poche à 0. m g s'agrandit et devient triangulaire. Stade VII. — Ce stadeest essentiellement caractérisé par la différencia- tion du pénis (fig. 33 p.), et l'ouverture de la cavité pénienne dans l'afrium masculinum. - P 220) Fig. 33. — Développement de l'appareil copulateur de Pol. cornuta. Stade VI. À La poche à o.m. g. acquiert les deux papilles caractéristiques de cet organe. ; Stade VIII. — L'orifice génital se perce et les différentes parties acquiè- isolé REPRODUCTION DES PLANAÏRES TRICLADES 461 rent l’aspect définitif qu'elles présentent chez l'adulte (que lon peut consi- dérer comme représentant un stade IX).. Les gonades.et l'appareil copulateur dont l’évolution était jusqu'ici tout à fait indépendante, se meltent en relation par les oviductes el les canaux déférents. Cette formation autonome des deux parties de l’appareil génital nous permet d'assimiler, comme nous l’avons fait plus haut, lappareil copulaleur (et museulo-glandulaire) à un véritable caractère sexuel secon- daire. Planaria alpina.— J'ai distingué six stades successifs : Stade [. — I est très comparable à celui de Pol. cornuta. Une accumu- lation de cellules souches vient former un amas sphérique dans l'espace parenchymateux, situé en arrière de la bouche (fig. 34). Fig. 31. — Développement de l’appareil copulateur de PL. alpina. Stade 1. Stade IT. -— Au milieu de cet amas cellulaire, apparaît une cavité (fig.35); les cellules qui bordent la cavité se disposent en épithélium. Cette cavité représente la première ébauche de l'atrium génital (la division de Fatrium Fig. 35. — Développement de l'appareil copulateur de PL. alpina. Stade IF. génital de Pl. alpina n’est qu'une formation secondaire et ne. correspond pas, comme chez Pol. cornuta, à une dualilé primordiale). Fig. 36. — Développement de l'appareil copulateur de PL. alpina. Stade HI, 462 A. VANDEL Stade III. — Une couche musculaire en forme de croissant (fig. 36 m) se différencie en avant de la cavité alriale : les fibres musculaires embryonnai- res se colorent en rose par l'éosine. Stade IV. — Une prolifération cellulaire (fg.37 p.) fait saillie à la partie antérieure de la cavilé atriale ; elle représente lébauche de la papille pénienne: la couche musculaire forme autour de Ja cavité atriale, la puissante gaine du pénis, caractéristique de cette espèce (fig 37 #n.). Fig. 37. — Développement de l'appareil copulateur de PE. a/pina Siade IV. Stade V.— La bande musculaire de la gaine du pénis (fig. 38 m.) s’est encore renforcée: sur coupe elle présente un aspect d'asters. La papille pénienne s’allonge (fig 38 p.). Un cordon cellulaire, d’abord plein, mais qui se creusera ultérieurement, se forme dans la région dorsale de l’ébauche copulatrice (fig. 38 ut.), c'est le futur canal utérin. Une autre prolifération pleine réunit, à ce moment, l’atrium et la paroi du corps; c’est l'ébauche du canal génital et de son orifice (fig. 38 g.). rl ut Fig. 38. — Développement de Pappareil copulaleur de PL. alpina. Stade V. Stade VI. — Ce stade est caractérisé par l'allongement et le creusement de la papille pénienne, et, l'achèvement des différentes parties de l'appareil copulateur. a pd à, REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 463 4. Premicres expériences de régénération. Le procédé employé dans mes premières expériences est le suivant : je choisis des individus sexués et je les sectionne en arrière de la bouche, et en avant de l'appareil copulateur. J'étudie ensuite la régénération dans les deux fragments, anté- rieur et postérieur (‘). J'ai décrit plus haut (p. 42#) la régénéra- tion des fragments postérieurs. Je n’ajouterai ici que quelques mots ; la disparition rapide des organes copulateurs est due, principalement, aux phénomènes de régulation, de remode- lage, de morphallazis qui ont lieu dans ces parties ; mais elle est encore, peut être, activée par l’absence complète de glan- des génitales et de stimuli qu'elles peuvent fournir. C'est ce qu indique l’observation suivante : un très gros individu de Pol. cornuta, en pleine maturité génitale, est sectionné le 15 janvier, suivant le procédé indiqué plus haut. A l'opposé de ce qui a lieu d'ordinaire, le fragment postérieur détaché de cet individu, conserve ses organes copulateurs et musculo-glandu- laires, et redonne directement une Planaire parfaitement sexuée. Je fixe cet individu le 21 mars (65 jours après l'opéra- tion) et je constate, sur coupes, qu’il renferme de nombreux testicules en pleine activité. Cette anomalie est amsi facile à expliquer : ce fragment postérieur de taille considérable conte- nait des gonades (ce qui n’a pas lieu d'ordinaire) et les réser- ves cellulaires étant abondantes, les nouveaux organes ont pu se former sans que tous les testicules fussent détruits; les testicules subsistant, l'appareil copulateur a, lui aussi, per- sisté. Mais l'examen du tronçon antérieur est particulièrement instructif. La régénération des organes copulateurs (et musculo- glandulaires dans le cas de Pol. cirnuta) à l'intérieur de la par- tie postérieure du corps nouvellement reformée est très rapide. Le développement de ces appareils est déjà ébauché au bout de quinze jours ; il est presque terminé un mois environ après l'opération. Le tableau VIT résume les principaux résul- tats des expériences. (*) La régénération de tels fragments a déjà été étudiée par STEINMANN (1908). chez Procerodes segmentata et par Livov (1914) chez Gunda ulvæ, mais ils n’en ont tiré aucune conelusion relative au sujet qui nous occupe, 164 A. VANDEL Tableau VII]. : PU Re ae Tempéra- Etat Etat de n N° Espèce ration ture ee SE A ration de (en jours) D l'ap. copul. 129 | P. cornuta 49 16-18° Mürs Jeune VII 433 — NETSs 10-120 — Le + DE 438 — — = — — VIT 439 —- 1 — Jeunes 0 VI 410 — PC ee Très jeunes —— 0 th — 15 — Mûrs Mûr I 142 CAES DE 18 —— F de, En Le AE Er sen | MEDION Fége ARS TO TARN IE EE RE RS Re NON NS DUR TA DEAN ERRS Te PR Ar A RER ARE CE CE ARE STE Es e E VI SL — 2 Rp TNT — Jeunes () IT à Eg7e = = — Très mürs| Très mûr | NI 578 — — — Müûrs Jeune VI b F7 — — — Jeunes |Très jeune Nu TS — _—— — Mûrs Müûr — 576 — AMEN — — Très jeune — A PI. alpina 22 12-130 — Jeune III 157 — 29 - Jeunes (l Il HRArRRRe 2 ë Ê Æ I La rapidité de cette évolution est remarquable quand on la compare à la lenteur de la croissance de ces mêmes organes chez des jeunes animaux, ou mieux encore chez des individus passant de l'état asexué à l’état sexué. Ces observations m'ont conduit à admettre que les glandes (ITS REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 46 génitales contenues dans la partie antérieure de l'ani- mal jouent un rôle important dans [a régénération et le déve- loppement des organes copulateurs. 9. Expériences de castration. La castration qui fournit, chez les Vertébrés, des résultats si intéressants, ne peut être pratiquée chez les Planaires, de façon directe, tout au moins ; la dispersion de très nombreuses gona- des dans tout le corps rend vaines toutes tentatives de ce genre. La castration serait à essayer chez des Planaires possé- dant un très petit nombre de testicules, telles que certaines Ter- ricoles: Rhynchodemus disrchis Fuhrmann (1914 a), du Tessin, qui n'a que deux testicules, et Wicroplana humicola Vej- dovsky (1890), de Bohème, qui n'en possède que quatre. Je n'ai, malheureusement, pas eu l’occasion de rencontrer ces espèces. J'ai pensé que l’on pourrait peut-être castrer l’animal en uti- lisant des parasites attaquant les gonades; mais, jusqu'ici les parasites signalés chez les Planaires [qui comprennent des représentants des groupes suivants : Coccidies, Grégarines, Trypanosomes, Infusoires, Trématodes, Cestodes, Nématodes! et ceux que j'ai pu étudier (Vanoez, 1921 a) ne provoquent aucune altération des gonades (1). D'ailleurs, on sait, combien l'interprétation des faits de «cas- tration parasitaire » est délicate et commentelle a induit, plus d’une fois, en erreur les meilleurs biologistes. En particulier, les modifications des caractères sexuels secondaires des Arthro- podes sont dues à l’action directe des parasites sur l’hôte, etnon pas à la destruction et à l'altération des gonades, comme le croyait Giarp (1887 a). C’est ce qu'ont nettement démontré les travaux de G. Suira (1911, 1913) et de R. Courrier (1921) sur les Crabes sacculinisés, et ceux de Kornaauser (1919) sur les Thelia bimaculata, parasités par Aphelopus theliæ. (:) Seule, A. Monrr (1912 b) signale une Caidosporidie qui provoquerait la disper- sion des ovaires de PI. torva; mais, comme je lai déjà mdiqué (Vanpez, 1921 a, en note), il semble, autant qu'on en puisse juger par les dessins de l'auteur, que les prétendus ovules, épars dans le parenchyme, représentent simplement les stades végétatifs d’une Grégarine, 466 A. VANDEL La castration parasitaire n’a donc pu être utilisée chez les Planaires. Heureusement, une expérience naturelle m'a mis sur la voie d'une autre méthode indirecte de castration. Voici le résumé de cette expérience : le 24 novembre, trois individus sexués de Pol. cornuta sont opérés suivant la méthode décrite précédem- ment; deux individus se comportent normalement et régénè- rent rapidement leurs organes copulateurs ; ils sont fixés res- pectivement 15 et 18 jours après l'opération ; ce sont les n°°141 et 142 du tableau précédent. Mais le troisième individu, quoi- qu'ayant régénéré sa partie postérieure, ne présente dans celle-ci aucune ébauche d'organes copulateurs. Je constate, sur coupes que la partie postérieure régénérée ne contient effecti- vement que du parenchyme, et quelques branches intestinales ; mais surtout, je suis frappé du fait que les glandes génitales sont ou détruites ou en voie de dégénérescence (je n'ai pu pré- ciser la cause de cette dégénérescence) : seuls, subsistent encore par-ici, par-là, quelques fragments plus ou moins reconnaissa- bles de testicules et de vitellogène. Cette observation constitue une expérience cruciale; elle montre que la destruction acei- dentelle des gonades a permis la régénération normale de la partie postérieure, mais a empêché le développement de l’appa- reil copulateur. J'ai essayé de reproduire cette expérience naturelle et j'ai utilisé pour cela l’observation suivante : quand on soumet à des températures élevées (20-21° pour Po/. cornuta) des Planaires sexuées, les gonades dégénèrent rapidement et ne sont plus reconnaissables au bout de peu de temps. C’est, en somme, un mode de castration indirect. Pour observer l'action de cette castration sur le développement de l'appareil copulateur, j'opère comme précédemment (section entre la bouche et l’ap- pareil copulateur), mais au lieu de laisser les parties antérieu- res dans les conditions normales, je les place dans un ther- mostat réglé à 20°, Cette. expérience est d'une réalisation délicate ; si l’on place directement les animaux opérés dans le thermostat, ils se décomposent tous, sans exception; il est indispensable, si l’on ne veut courir à un échec certain, d'habi- tuer progressivement les individus en expérience, à des tempé- ratures de plus en plus élevées ; on les laisse 24 heures à 15°, CS | REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 46 puis 24 heures à 17°, 24 heures à 19%, et ainsi de suite. En pre- nant cette précaution, ledéchet n'est pas trop considérable. Or, on constate, qu'au bout d’un mois environ, les animaux opérés et soumis à ces conditions ont régénéré leur partie postérieure, mais qu'ils ne présentent plus ou presque plus de gonades, et que l'appareil copulateur ne s'est pas déve- loppé. Je donne, à titre d'exemple, le détail de l’une de ces expé- riences : Huit individus sexués de Pol. cornuta sont opérés le 1er mars; quatre exemplaires se déeomposent au cours de l’expérience; les quatre autres sujets résistent et régénèrent leur partie postérieure ; ils sont fixés le25 mars (c’est-à dire 25 jours après le début de l'expérience). Le résultat de l'examen des coupes est le suivant : N° 560. Plus de gonades Pas traces d'organes copulateurs. N° 561. Restes d'ovaires. Organes copulateurs au stade I. N° 562. Restes indistincts de testicules: ovaires; organes copulateurs au stade IE. N° 563. Testicules dégénérés. Pas d'organes copulateurs. Pour donner à ces résultats toute leur valeur, il faut les comparer auxcas des n0s 567 à 576, consigné dans le tableau VIIT : ces individus opérés suivant un procédé identique, sectionnés et fixés aux mêmes jours que les précé- dents, ont été seulement cultivés à une température de 9 à 130; chez les individus de la culture froide. l'organe copulateur est partout (sauf dans un cas) au stade VTou VI b, tandis que chez les exemplaires élevés dans le thermostat, l'appareil copulateur n’est pas développé ou n’est qu'à un stade extrêmement jeune (ceci quand la castration n’est pas complète). Il est, je crois, légitime d'attribuer le défaut de régénération de l'appareil copulateur à la dégénérescence des gonades pro- voquée par une température élevée. Il ne faut point cependant dissimuler que ce mode détourné de castration est moins satis- faisant que la méthode directe ; il est passible de critiques; on peut, en effet, objecter que la température élevée agit plus ou moins directement sur Le développement de l'appareil copula- teur, et non indirectement par la disparition des gonades. 6. Quelles sont les glandes qui interviennent ? Il est douce très probable, ainsi que semblent l'établir les expériences précédentes, que les glandes génitales exercent une action sur le développement des organes copulateurs. Mais quelles sont les glandes qui interviennent ? 4G8 A. VANDEL Les gonades des Planaires se répartissent, comme on le sait, en trois catégories : testicules, ovaires et vitellogène. On peut tout d’abord éliminer de la discussion le vitello- gène ; il nexerce aucune action sur le développement de l'appareil copulateur. En effet, dans les expériences de régé- nération précitées, le vitellogène peut être tout à fait mûr, ou, au contraire, extrêmement jeune et non fonctionnel, et cepen- ® 5 Fig. 39. — Figure schématique Æig. 40. — Croquis représentant le destinée à montrer le mode opé- n° 391, juste avant sa fixation (25 ratoire de l'expérience ci-jointe. jours après le début de l’opéra- La partie céphalique (1) qui con- tion). Les parties, antérieure et tient les ovaires (ow.) est fixée et postérieure, nouvellement régéné- étudiée sur coupes. La partie rées sont claires (encore dépour- moyenne (2) est cultivée pour étu- vues de pigment). Dans la région dier la régénveration. Enfin la postérieure régénérée, on aperçoit partie (3) qui contient les organes l'ébauche de lappareil copula- copulateurs et musculo-glandu- teur (æ.). laires, est supprimée ou sert à d'autres expériences. dant, dans les deux cas, le stade de régénération de l'appareil copulateur est le même ; c'est ainsi que sur le tableau VIT, on voit que les n° 572 et 574, dont le vitellogène est à des états bien différents, ont régénéré de semblable façon. D'ailleurs, dans le développement embryonnaire, les organes copula- teurs font leur apparition bien avant que le vitellogène soit développé. On peut donc admettre que le vitellogène ne joue REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 469 pas un rôle important dans le développement des organes copulateurs. IL reste donc à examiner l’action respective des testicules et des ovaires. Les ovaires, à l'inverse des testicules nombreux et épars dans tout Le corps, sont seulement au nombre de deux et localisés dans la région céphalique. Il est donc facile de les éliminer. J’opère de la façon suivante (fig. 39). a) Je choisis des individus complètement sexués de Pol. cor- nuta et les sectionne en arrière de la tête, de manière à enle- ver les ovaires (ov.). Les parties céphaliques sont fixées et débitées en coupes ;: je peux ainsi vérifier que les ovaires sont bien contenus dans le fragment enlevé, et je m’assure en même temps de l'état initial des gonades dans l'individu opéré. b) L'animal est ensuite coupé entre la bouche et l'appareil copulateur, comme précédemment. Je cultive ensuite les parties moyennes (fig. 39-2). Or, on constate que ces fragments, tout en régénérant leur région céphalique, développent aussi une partie postérieure dans laquelle ne tarde pas à apparaitre l'ébauche de l'appareil copulateur (fig. 40, x). La présence des ovaires n’est donc pas nécessaire à la régénération de l'appareil copulateur. IL y a intérêt à fixer et à étudier de facon précoce les frag- ments qui régénèrent ; en effet, ces individus largement sec- tionnés sont le siège de processus de régulation, de morphal- laxis qui, comme nous l'avons vu, font disparaitre les glandes génitales, Les testicules en particulier, et peuvent ainsi troubler les résultats de l'expérience (!). Le tableau IX donne le résumé des expériences. Si le développement de l’appareil copulateur n’est pas sous la dépendance des ovaires, 1l faut reporter sur les testicules la responsabilité de cette action. Nous allons maintenant exami- ner cette action de plus près et essayer d'en préciser le méca- nisme. {') C'est, d'ailleurs, ce qui explique que, dans le cas présent, l'appareil copu- lateur soit, au bout du même temps, à un stade moins avancé que dans les expériences simples de régénération, résumées dans le tableau VIT. 470 A. VANDEL Tableau IX. Etat initial des gonades ÿ à Durée de Etat NS À TION OT re NN rl reil Ovaires |Vitellosène| Testicules (en jours) | copulateur 391 Présents Mûr Müûrs 8-110 25 IT à PTE — Très mûr Mürs — — : VI 308 — Jeune — 5-110 39 HIT 301. — Très jeune — — D V 403 ï — 0 Jeunes REA = \' 308 — Jeune Müûrs — — HT b FR RE DA lee tous il 146 — Très jeune — ME I Qus — Jeune Paru = — IT a 250 — He Jeunes LS — 0 432 — Mûr Müûrs = — IV 454 — Jeune — — A TTAU Il 56 — Mür — => _ — 488 —- — — — — TT à 460 — Jeune TE — — 0 462 — UMR — — _ I 66 — _ - — — IT à 366. - 0 Jeunes — STE II 468 - Très jenne — _ — | IT 6 70 TOR Jeune Müûrs —— — Il rss 1 = REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 7. Rapport eutre le nombre et l'état des testicules et le développement des organes copulateurs Il est difficile d'établir un rapport précis entre le nombre et l’état des testicules et le développement de l'appareil copu- lateur. Cependant, chez les animaux jeunes où les testicules sont en petit nombre et peu développés, la régénération de l'appareil copulateur est lente et moins complète que chez les individus adultes. C’est ce qui ressort, par exemple, de la comparaison des n% 139 et 140 (tableau VII) opérés et cultivés dans les mêmes conditions ; le n° 140 dont les testicules sont peu nom- breux et peu développés n'a pas régénéré d'appareil copula- teur, tandis que le n° 139 possédant de nombreuses glandes mâles à régénéré un organe copulateur qui est au stade VI, 37 jours après l'opération. La comparaison du n° 571 et des individus de la même série (567 à 576) conduirait à des remar- ques analogues. Mais chez l'individu adulte, il semble que Le stade auquel se trouvent les testicules (masses pleines constituées par des sper- matogonies, ou vésicules creuses avec les divers stades de spermatogenèse) ait peu d'importance sur le développement de l’appareil copulateur. Quel que soit l'état des testicules, le résultat est à peu près le même (exemples : tableau VII, n° 572 à 576; tableau IX, n° 464 à 468). 8. Quel est le mode d'action des testicules ? Les testicules semblent donc jouer un rôle des plus impor- tants dans le développement de l'appareil copulateur. Le cas bien étudié des Vertébrés conduit tout naturellement à admèëttre que cette action est due à l'effet d’une sécrétion interne, d'une hormone. Mais la preuve en est difficile à admi- nistrer chez les Planaires. Et la théorie hormonique n'est encore, dans le cas présent, qu’une hypothèse basée plus sur les analogies avec ce qui a lieu dans d’autres groupes que sur des preuves directes. En effet, si les Planaires sont des ani- maux admirables pour l'étude des phénomènes de régénéra- > =? LT A. VANDEL tion, elles se prêtent, par contre, très mal à l’expérimentation physiologique. J'ai d'abord essayé d'employer Ia méthode des injections ; je me suis efforcé d'inoculer à des individus asexués une solu- tion résultant du broyage de Planaires sexuées dans de l'eau physiologique : je n’ai obtenu aucun résultat par ce procédé. Les injections, comme l’a déjà remarqué M. PrExanT (1922) ne pénètrent pas dans les tissus parenchymateux et compacts de ces Organismes. J'ai ensuite pensé que les méthodes histo-physiologiques pourraient fournir d’utiles indications. On sait que, chez les Oiseaux (comme chez les Planaires) le testicule est dépourvu de cellules interstitielles, et, l'on est obligé d'admettre que la sécrétion interne est produite directement par les cellules ger- minales (BorinG et Prearz, 191%). Loisez (1902) à montré que chez le Foudia madagascariensis, les cellules germinales se chargent de globules graisseux pendant la période de présper- matogenèse ; ce dépôt graisseux est probablement en rapport avec la sécrétion du testicule déterminant les caractères sexuels à l'époque du rut. J'ai recherché si lon ne trouverait pas, chez les Planaires, des faits de même ordre. Pour cela, j'ai fixé au liquide de Flemming (de manière à mettre les graisses en évidence) des individus de P/. alpina à différents stades de développement, depuis la sortie du cocon jusqu’à l’état adulte. L'étude de ces préparations n'apporte aucune preuve positive en faveur de la théorie hormonique. Chez certains individus, la graisse fait complètement défaut dans les testicules; dans d'autres, au contraire, elle y est abondante, et cela, aussi bien dans les testicules très jeunes que dans ceux où la spermato- genèse a débuté; d’ailleurs cette graisse se présente bien plu- tot comme un banal dépôt de réserves que comme une sécré- tion spéciale ; il s'agit là très probablement de substances de réserve qui, chez les animaux bien alimentés envahissent tout le parenchyme et les organes voisins, alors qu'elles font défaut chez les individus nourris plus sobrement. Cette graisse n’indi- que nullement qu’il y ait sécrétion d'une substance spéciale. Jusqu'à présent, l'hypothèse des hormones génitales repose done, chez les Planaires, plutôt sur des présomptions que sur des preuves définitives. PES ©S REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 47 9. Conclusions Les expériences et observations précédentes conduisent done à admettre que le développement de l'appareil copulateur des Planaires est sous la dépendance des testicules ; cette action est probablement de nature hormonique. Cette conclusion m'amène à formuler quelques remarques générales. De nombreuses expériences faites dans les différents groupes de Vertébrés (Mammifères, Oiseaux, Batraciens et même Poissons) ont établi avec certitude l’action des gonades ou des cellules interstitielles sur les caractères sexuels secon- daires. Chez les Invertébrés, les recherches n’ont guère porté que sur l'enbranchement des Arthropodes (et principalement sur les Insectes). Toutes les expériences réalisées chez ces ani- maux : castration, transplantation des gonades, transfusion du sang, régénération des organes sexuels secondaires chez des individus châtrés, observations récentes sur la castration para- sitare, etc., démontrent, de façon définitive, qu’il n'y a aucun rapport entre les gonades et le développement des caractères sexuels secondaires (!). -Mais 1l ne faudrait pas généraliser les conclusions tirées des Arthropodes, et les appliquer d'emblée à tous les Invertébrés ; il existe certainement, dans plusieurs groupes d’Invertébrés un rapport entre les gonades et Les autres caractères sexuels. Le cas des Planaires en est un premier exemple ; et l’on en connaît d’autres : SoLLas (1911), en disséquant des Lombrics de grande taille, observe plusieurs individus dépourvus de clitellum ; il remar- que que chez ces animaux, les vésicules séminales sont le siège d'une infection bactérienne ; la castration parasitaire qui en résulte a provoqué, par contre-coup, la disparition du clitel- lum. Cette observation n’est pas, à elle seule, concluante, car nous avons vu (p. 465) que la castration parasitaire était sus- ceptible d'entrainer des interprétations erronées. Mais, un autre biologiste, Harms (1912) à pu confirmer expérimentale- {‘) Dans quelques cas, cependant, il semble exister des hormones chez les Arthropodes ; ne La Vauzx (1921) admet que, très probablement, la formation de l'éphippie des Daphnies est déclanchée par une sécrétion de l'œuf de durée, F 1 + A. VANDEL ment ces observations ; 1l à établi que le clitellum des Lom- brics est un véritable caractère sexuel secondaire mndle ; 11 dis- parait quand on enlève les testicules ; il persiste, au contraire, quand on détruit les ovaires [y a done, chez les Lombrics, une action des glandes mâles qui provoque le développement du clitellum. Chez les Mollusques, les glandes génitales paraissent, comme chez les Planaires, déternuner le développement de certains appareils sexuels. C'est ce qui résulte, semble-t1l, des obser- vations de Gouzv (1917) sur Crepidula plana, quoiqu'il n'ait pas effectué à cet égard d'expériences absolument démonstratives. Ce Gastéropode présente un hermaphrodisme protandre très prononcé, et, les stades mâle et femeile sont nettement sépa- rés. Les testicules se développent d'abord, ainsi que les orga- nes copulateurs mâles ; ultérieurement les testicules dégénè- rent, et concurremment les organes annexes (le pénis, en parti- culier) disparaissent ; les ovaires se développent alors, ainsi que les organes copulateurs femelles. Cette évolution semble indiquer (quoiqu'il serait très souhaitable que des expériences précises fussent entreprises sur ce sujet) qu'il existe un rap- port entre la présence des glandes génitales et le développe- ment de certains appareils copulateurs, (le développement de certains organes, comme l'utérus, apparait cependant indépendant des gonades). Les Paludines où les sexes sont séparés seraient, je crois, de bons sujets d'expériences pour l'étude de cette question. CEerny (1907) a observé la régénéra- tion, chez les Paludines mâles, du tentacule droit modifié en organe copulateur, mais il n’a pas étudié les rapports qui peu- vent exister entre cette régénération et la présence et l’état des testicules Ces quelques exemples rendenttrès vraisemblable l'existence d'hormones génitales chez plusieurs groupes d’'Invertébrés. Quand nous serons mieux fixés sur ces phénomènes dans l’en- semble du règne animal, il est probable que l’on pourra établir une série continue allant des Arthropodes où les caractères sexuels sont complètement indépendants des gonades, jusqu'aux Vertébrés où il existe une relation étroite et causale entre ces deux groupes d'organes. Là encore, il est difficile de formuler Æ REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES une loi absolument générale; on ne peut guère que préciser les limites de la série ("). IL est permis, néanmoins, de se demander quelle est la condition primordiale et foncamentale du rapport entre gonades et caractères sexuels secondaires : y a-t-il autonomie et indépendance primordiales des caractères sexuels ? C'est-à- dire, le soma est-il, de même que les gonades, différencié sexuellement (Somageschlecht de Môgius) ? Ou bien, au con- traire, y a-t-1l un rapport fondamental entre les gonades et les caractères sexuels secondaires ? C'est-à-dire le soma est-il une forme neutre, asexuelle (Lipscaurz, 1921) à laquelle la pré- sence des gonades imprime seule, un sexe déterminé ? Sans vouloir entrer dans une discussion détaillée de cette question qui dépasserait le cadre de ce travail, il apparait que la première opinion est de beaucoup la plusvraisemblable. Les caractères sexuels secondaires sont tout à fait comparables aux caractères spécifiques; ce nest que dans certains groupes et dans certains cas que quelques caractères spécifiques se sont transformés en caractères sexuels, et, que leur développement a été favorisé par une sécrétion des gona- des; on a d'ailleurs pu transformer un caractère spécifique indifférent en caractère sexuel et inversement (on en trouvera de nombreux exemples dans les excellentes mises au point de Kaumerer, 1912, et de Doxcaster, 1914). Et même, chez Les Ver- tébrés, où l’existence d'hormones génitales est le mieux établie, bien des faits seraientcomplètement inexplicables si l’on admet- tait que le soma n'est pas déterminé sexuellement par lui- même : tel est le cas des gynandromorphes chez les Oiseaux (Bouvreuil de Pozz, Pinson de- Weger, Faisans, etc.), celui de la persistance des instincts sexuels chez les eunuques, etc. IL semble donc logique d'admettre la première hypothèse : la différenciation sexuelle intéresse tout Le corps, gonades et soma; cette différenciation est déterminée depuis l'œuf, mais à des degrés divers, suivant les groupes: dans certains cas, où la sexualité est fortement marquée, les caractères sexuels se {'} Il en est, d’ailleurs, de même pour le sexe qui est loin d'être également déterminé pour tous les groupes, irrémédiablement fixé ches les Insectes, il paraît beaucoup plus labile chez les Batraciens et les Végétaux chez qui on a pu le modifier expérimentalement. 32 476 A. VANDEL développent de façon autonome et indépendamment des glan- des génitales ; dans d’autres, au contraire, un stimulus (!) pro- duit en général par les gonades est nécessaire pour provoquer leur développement. (1) D'ailleurs, la substance sécrétée par les :onades (ou les cellules interstitiel- les) n’est probablement pas une substance spécifique, mais une sécrétion banale qui agit comme excitant sur le développement de certains organes. C’est ce que montrent nettement les expériences de MeiseNnetmER (1911) qui à réussi à faire apparaître la callosité du pouce chez les grenouilles mâles châtrées, en leur greffant, soit des fragments de testicules, soit des fragments d'ovaires. Ce sont encore les expériences de KozLman (1919) qui montrent que la fhyroïdine est capable de remplacer, pro parte, les sécrétions des glandes génitales dans l'évo- lution de la crête dorsale des Tritons. Ces expériences ne permettent guère de conserver la distinction établie par GLey (1911) entre hormones substances provo- quant l'excitation d’un organe, et harmozsones ou substances déterminant une forme. Dans tous les cas, il n’y à jamais qu’un excitant général, et la théorie de l’excitant spécifique soutenue par Lipsenurz (1921) ne résiste pas à un exa- men serré des faits. CHAPITRE V Comparaison et rapports entre les deux modes de reproduction. SOMMAIRE. — 1. Introduction ; — 2. Hérédilé du mode de reproduction. — 3. Cycie évolutif. — 4. Comparaison entre les deux catégories de jeunes. — 5. Opposition des deux modes de reproduction. — 6 Action des fac- teurs externes sur le cycle évolutif. — 7. Signification et rôle de la fécon- dation. — 8. Vieillissement et rajeunissement. 1. Introduction. Nous avons étudié dans les chapitres précédents les condi- tions et les particularités des deux modes de reproduction, sexué et asexué. [1 nous reste maintenant à rechercher les rap- ports que présentent entre eux ces deux modes de reprodue- tion, et nous efforcer d’en dégager leur signification générale. J'avais cru pouvoir établir (Vaxvez, 1920 D) que la fécondation déterminait un rajeunissement indispensable au maintien de l'espèce ; 11 ne m'est plus possible de maintenir mes précéden- tes conclusions, non que mes premières observations fussent inexactes, mais elles étaient incomplètes ; des expériences ulté- rieures m'ont amené à une interprétation différente : elles m'ont montré, à la fois, et l'importance des facteurs héréditaires dans le déterminisme du mode de reproduction et la possibilité d'une reproduction asexuée indéfinie. Nous serons, d’ailleurs, conduits, dans le dernier paragraphe de ce chapitre, à admet- tre l'existence très générale des processus de rajeunissement, non seulement indépendants de la reproduction sexuée, mais même de toute reproduction. 4178 + A. VANDEL 2..Hérédité du mode de reproduction. Nous distinguerons trois cas : a) Certaines stations de Pol. cornuta où de P/. alpina renfer- ment exclusivement des individus sexués. Si l'on récolte des cocons dans ces localités, on constate que les jeunes qui en sortent, deviennent très rapidement sexués (etcela quelle quesoit la température) et présentent bientôt des ébauches d'organes copulateurs (parfois en moins d'un mois ; voir p. 443). Ces indi- vidus ne présentent à aucun moment de leur existence de repro- duction asexuée. C'est le cas, pour citer un exemple, des Pol. cornuta d'un ruisseau près de Saint-Remy-lès-Chevreuse (Seine- et-Oise) qui m'ont fourn de noinbreux cocons pour mes cultu- res. Ces conditions sont héréditaires ainsi que j'ai pu m'en assurer par des cultures qui ont porté sur trois générations successives. Il en est de même pour plusieurs colonies de PL. alpina habitant les sources du Jura (voir p. 489). b) Dans d'autres localités, on trouve mélangés, en proportions diverses, des individus sexués et d'autres à multiplication scissipare. Si l’on cultive des cocons récoltés dans ces stations, les résultats seront très différents des précédents. Je donnerai d'abord le détail d'une culture tout à fait typique à cet égard, et qui n'a obligé à reviser mes conclusions pre- mières. — Le 20 août 1920, je récoltai dans une source située à Sainte-Colombe, près Pontarlier (Dcubs), 8 cocons de P/. alpina, dont 6 furent mis en culture. Ces 6 cocons donnèrent un total de 125 jeunes. La plupart des individus évoluèrent directement vers la sexualité; 50 à 70 jours après l’éclosion, les premières ébauches des organes copulateurs faisaient leur apparition. Mais 16 exemplaires encore dépourvus d'organes copulateurs se coupèrent, et cela, de facon tout à fait normale (ce qui représente 13 0/0 du nombre total). Ces exemplaires -ont été isolés ; ils ont alors évolué vers la sexualité et ont pré- senté des ébauches reconnaissables d'organes copulateurs, 60 à 70 jours après la scission. Ces individus ne proviennent pas d'un seul cocon, mais il s'en est trouvé quelques uns dans Ja descen- dance de chacun des 6 cocons. Ces animaux ne diffèrent, en somme, des autres individus de la même ponte qu'en ce qu'ils + 1 REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES se sont coupés une fois avant de devenir sexués. Cette culture montre que, dans les stations mixtes, et c'est le cas pour la source signalée plus haut, une certaine proportion de jeunes se coupent avant de devenir sexués. Mes observations sur Pol. cornuta sont moins nombreuses, mais elles conduisent aux mêmes résultats. Un cocon de Pol. cornula est récolté le 12 septembre 1920 dans un ruisseau des Granges-Narboz, près Pontarlier (Doubs), station où se rencon- trent les deux modes de reproduction. L'éclosion du ‘cocon a lieu le 21 octobre ; il en sort quatre jeunes. L'un d’eux se coupe de façon normale le 15 décembre (55 jours après l’éclosion), puis devient sexué. c) Si l'on élève des individus produits par scissiparité, on constate qu'ils se coupent toujours ; j'ai observé le fait sans aucune erceplion (mes observations portent sur plus de 60 cas relatifs à Po/. cornuta). Ces exemplaires se coupent souvent de facon très précoce : le n° 5. VIT. 4 (voir tableau IT) s'est coupé 19 jours seulement après qu'il ait été séparé de la sou- che; ce temps dépend d’ailleurs de la vitesse de régénération et par suite de la température ; en hiver, il est beaucoup plus long : Le n° 5. VIIT.3 ne s'est coupé que 101 jours après son iso- lement de la souche (du 2 octobre 1920 au 11 janvier 1921). — Les individus produits par voie asexuée se coupent done, en général, de façon précoce; et d'ordinaire, la scission se répète un grand nombre de fois (maximum observé : 19 fois, chez l'individu 3.5.1.1.2; pour le détail, voir tableau [1). Mais, tôt ou tard, ces exemplaires finissent par évoluer vers la sexualité. C'est ce que montre nettement le tableau IT qui résume une longue eulture de Pol. cornuta, et aussi le tableau X: ce dernier relate l’évolution de 23 Pol. cornuta récoltés le 17 février 1920 dans une petite source à Chaville (Seine-et-Oise); tous ces individus étaient primitivement asexués, et se sont coupés un plus où moins grand nombre de fois, puis ont finalement tous évolué vers la sexualité; les indivi- dus dont les organes copulateurs devenaient visibles à l'œil nu, ont été fixés et étudiés sur coupes, afin de vérifier l'état de Pap- pareil génital. | D'autres petites cultures dont je n’ai pas reproduit Le détail fournissent des résultats analogues : les animaux produits par A+ VANDEH Tableau X Coupé 2 fois (2 et 30 mars), puis devient serué Fixé le 4 mai. Coupé 4 fois (8 et 18 mars, 10 et 29 avril}, devient semué. Fixé le 31 mai. Coupé 1 fois (23 février), puis mort le 15 mars. Coupé 4 fois (23 février, 8 et 26 mars, 14 avril}, devient sexué Fixé le 27 mai. Coupé 2 fois (15 mars et 14 avril), devient sexœué, Fixé le 31 mai. Mort le 2 mars. Coupé 1 fois (20 février), puis mort le 8 mars. Coupé 3 fois (8 mars, 14 avril, 12 mai), devient sexué. Fixé. le 28 juin. Coupé 4 fois (26 février, 16 et 31 mars, 20 avril), devient seæuë. Fixé le 31 mai. Coupé 3 fois (25 février, 10 et 18 mars), devient serué. Fixé le 4 mai. Coupé 3 fois (6 mars, 14 avril, 11 mai), devient sexué. Fixé le 10 juin. Coupé 1 fois (24 février), mort le 15 mars. Mort le 6 mars. Mort le 2 mars. Coupé % fois (16 mars, 14 et29 avril, 2 juin), devient sexué. Fixé le 13 juillet. Coupé 16 fois (2, 16 et 31 mars, 20 avril. 18 et 31 mai, 3, 12 et 28 juin, 14 et 28 juillet, 16 août. 6 et 26 septembre, 26 octobre, 29 novembre), devient sexué le 24 janvier de l’année snivante. Coupé 15 fois (26 février, 20 mars, 10 et 96 avril, 25 mai, 2 et 21 juin, 20 juillet, 9 et 22 août, 20 et 26 septembre, 2 et 29 novembre, 12 jan- vier}, devient sexué le 17 mars de l’année suivante. Coupé 8 fois (25 février, 9 et 20 mars, 20 avril, 4 et 18 mai, 8 et 21 juin), devient sexué. Fixé le 9 août. Coupé 2 fois (3 et 18 mars), puis perdu accidentellement. : Coupé 4 fois (8 et 29 mars, 10 avril, 5 mai}, devient seæué. Fixé le 10 juin. Coupé 3 fois (15 el 20 mars, {0 avril), devient semué. Fixé le 15 juin. 22 [Coupé 5 fois (24 février, 15 mars, 10 et 29 avril, 28 mai}, devient sexué. Fixé le 3 juillet. 23 |Coupé 4 fois (3 et 20 mars, 10 avril, 8 mai}, devient seæué. Fixé le 3 juillet. £ » CP RTE CT RHPRODUCTION DES PLANAIRES* TRICLADES 481 scissiparité se reproduisent d'abord activement par scission, puis évoluent tôt ou tard vers la sexualité (1). IL est encore un point sur lequel je voudrais dire quelques mots : c'est la facon dont se fait le passage de l’état asexué à l'état sexué. Voricr (1900) admet qu'il y a chez Pol. cornuta, d'abord, arrêt de la reproduction scissipare, puis développe- ment des organes génitaux. C'est Jà une simple vue de l'esprit qui ne correspond nullement à la réalité. La multiplication asexuée ne s’arrète pas pour permettre le développement des organes génitaux ; les deux processus s'intriquent intimement l’un dans l’autre; les gonades se développent pendant que l’animal continue à se couper ; il est rare, d’ailleurs, qu'en étudiant sur coupes minces un individu en reproduction scissi- pare, l’on ne trouve, au moins des ébauches d’ovaires et de testicules. Les glandes génitales étant suffisamment dévelop- pées, la croissance des organes copulateurs (et musculo-glan- dulaires) se produit, dans la partie régénérée, exactement de la même facon que dans les expériences de section artificielle relatées plus haut (p.463). L'animal étant devenu complètement sexué, la reproduction scissipare cesse. Cependant, chez les animaux produits par voie asexuée, Le réflexe de scission sub- siste très longtemps, et 1l n’est pas rare d'observer des divi- sions chez des animaux pourvus d'ébauches déjà assez avan- eées d'organes copulateurs. La scission se produit alors, soit en arrière des organes copulateurs et isole un tout petit frag- ment (n° 347; fig. 4A1-1), soit, en avant de la base du pharynx (n° 415 ; fig. 41-2), soit encore de façon tout à fait normale, en arrière du pharvnx eten avant de l'appareil copulateur (n° 608 ; fig. 41-3). Ces observations sont intéressantes, car elles mon- treut : 1) que si Les deux modes de reproduction sexué et asexué (:) Chez les individus qui évoluent vers la sexualité ; l'appareil génital arrive- t-il à complet développement et devient-il capable de donner des cocons ? J'ai essayé de m'en assurer par des cultures. Le schéma de l'expérience à faire se présentait de la façou suivante : élever des individus asexués et à reproduction scissipare, attendre qu'ils évoluent vers la sexualité, et chercher à obtenir des cocons de ces animaux et aussi étudier le comportement des jeunes qui en sor- tent, J'ai tenté plusieurs fois cette longue expérience mais je n’ai jamais réussi à la mener à terme, J'ai obtenu souvent à partir d'individus scissipares des ani- maux complètement sexués, mais ils n’ont jamais pondu de cocons. 7 à 11 mois après le débat de la culture, tous les individus se lacéraient ou se décomposaient (v. p. 48). Il ést possible que cet échec soit en rapport avec les conditions de culture qui ne sont pas aussi favorables que l’habitat naturel, + L . ‘2 A. VANDEL ne coexistent pas, ce n'est point en raison de la présence des glandes génitales ou de l'appareil copulateur, mais du fait que le réflexe de la scission, pour des causes qui nous sont encore mal connues (voir paragraphe 5), est suspendu chez les indi- vidus sexués ; 2) que, contrairement aux animaux des catégo- ries précédentes, le réflexe de la scission persiste iei très long- 2 3. Fig. 41. — Pol. cornuta divisés et possédant des ébauches d'organes copu- lateurs. — 1. La scission a lieu en arrière de l'appareil copulateur. n° 347. — 9. La scission a lieu en avant du pharynx. n0 415. - 3. La scission se produit entre le pharynx etl'appareil copulateur ; celui-ci est complète- ment développé ; on reconnaît le pénis, les vésieules séminales et les organes musculo glandulaires. n° 608. temps, et subsiste chez des individus possédant déjà des orga- nes génitaux presque complètement formés (le cas du n° 608, où les organes copulateurs sont complètement développés, est particulièrement remarquable à cet égard). Ce fait montre la grande importance des facteurs héréditaires dans le détermi- nisme du mode de reproduction. RE PRODUCTION DES. PLANAIRES TRICLADES 483 3. Cycle évolutif. Les différents cas décrits dans le paragraphe précédent et s'appliquant spécialement à Po/. cornuta peuvent se rattacher à un même cycle évolutif; il n'y a qu'une différence de degré dans la vitesse d'évolution, différence qui relève de facteurs héréditaires. Pour les individus de la première catégorie, la vitesse d'évolution est très grande: la phase de reproduction asexuée est supprimée, et les animaux évoluent directement vers la sexualité (la durée de vie paraît assez courte ; cf. para- graphe 8). Chez ceux de la seconde catégorie, l’évolution est ralentie ; certains individus se coupent avant de devenir sexués (1); les organes génitaux se développent moins rapide- ment. Enfin, chez ceux de la troisième catégorie, la phase asexuée est très longue, et la sexualité ne se manifeste que fort tardivement. Ce cycle évolutif n’est entièrement valable que pour Pol. cornuta (et partiellement, pour P/. alpina, car les individus produits par voie agame, ne doivent donner que très rarement, chez cette espèce, des animaux sexués). Il n'y à pas d’alter- nances de générations, et les animaux qui ont donné des cocons, meurent mais ne repassent point par une phase asexuée (voir, paragraphe 8). Mais le cycle évolutif parait différent pour chaque espèce de Planaire, et il est impossible de formuler une règle générale. PI. maculata, bien étudiée par Curris (1902) présente, au con- traire, une alternance de générations sexuées et asexuées. Il semble qu'il en soit de même pour P/. aquis et PI. morgani, des Etats-Unis (SrriN6er, 1918) et pour P/. graffi, d'Australie (Wuiss, 1910). (t} C'est le cycle indiqué par von Grarr (1899, p 242) pour Dolichoplana feil- deni. et par Curris (1902, p. 516) pour ?/. maculata; je l'ai vérifié pour 21. alpina el Pol. cornuta. Je ne peux donc maintenir les conclusions que j'avais émises précédemment (1920 b ; paragraphe 8). 484 A. VANDEL 4. Comparaison entre les deux catégories de jeunes. J'ai recherché s’il existait entre les deux catégories de jeunes produits par voie asexuée et sexuée quelques différences d'ordre morphologique où physiologique, corrélatives de leurs diver- gences évolutives. Au point de vue morphologique, les jeunes sortis de cocons et les jeunes produits par scissiparité, se ressemblent beau- coup; ils sont caractérisés par l'extrême développement des branches intestinales qui remplissent presque tout le corps, et par la faible quantité de parenchyme qui ne forme que quelques minces travées entre Les ramifications digestives. Chez les individus âgés, au contraire, le tube digestif est pro- portionnellement beaucoup moins développé ; les espaces situés entre les ramifications intestinales sont remplies par un paren- chyme abondant ou par les gonades quand l'animal est sexué. L'opposition existe entre individus jeunes et âgés, non entre les deux catégories de jeunes. J'ai fait aussi une étude comparative des graisses et du gly- cogène chez les deux catégories de jeunes sans constater de dif- férences appréciables ; le glycogène est seulement plus abon- dant chez les animaux complètement sexués ; il se dépose en particulier dans le vitellogène (où il se transformera ultérieu- rement pour donner la substance chitineuse qui entoure le cocon). Caicb (1913 a, p. 190-191; 19144, p. 424) et son élève Miss Hyman (1919, p. 400-401) qui ont étudié par diverses méthodes physiologiques une Planaire à deux modes de reproduction, Pl. maculata, n'ont constaté aucune différence entre les jeu- nes produits par voie sexuée et asexuée. n'y a donc pas une opposition absolue entre les deux caté- gories de jeunes ; il n'existe pas enñtre elles une différence de nature, mais seulement de degré, portant sur la vitesse d’évo- lution. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 485 5. Opposition des deux modes de reproduction. D'une façon très générale, les deux modes de reproduction, sexué et asexué, s'excluent réciproquement. Îl n’a été signalé, à ma connaissance, que deux cas faisant exception, et encore l'un d'eux est-il douteux (‘). Vox Grarr (1899, p. 244) admet (sans, d'ailleurs, l'avoir observé directement) que, chez un Terricole, Placocephalus semperi, les deux modes de reprodue- tion, sexué et asexué, peuvent coexister. D'autre part, P/. para mensis pourrait, d’après Fuanmanx (1914), se couper tout en étant sexuée. Ces faits demanderaient à être soigneusement étudiés, ear, d'une façon très générale, non pas seulement chez les Planai- res, mais dans tout le règne animal, il est extrêmement rare de voir coexister la reproduction sexuée et un mode de multipli- cation par division ou bourgeonnement. La seule exception ayant quelque généralité se rapporte aux phénomènes d’épito- quie où épiqamie, dont la signification est un peu spéciale. Quelle est la raison de cette opposition entre les deux modes de reproduction ? Quelle est la cause qui les détermine à s'exclure réciproquement? La solution de ce problème est encore mal débrouillée ; il se ramène, en somme, à la question suivante : pourquoi les individus sexués ne se coupent-ils pas? J'avais dans une note préliminaire (Vaxoez, 19196) attribué l’absence de scission chez les sexués à la présence des orga- nes copulateurs dans le plan habituel de scission ; ces organes muscuiaires et résistants se seraient opposés à la rupture qui se produit habituellement dans cette région. J'avais cru en trouver une confirmation dans le fait que chez P{. paramensis qui se coupe, tout en étant sexuée, le plan de division passe en avant du pharynx, et non en arrière (et, par suite au milieu de la région copulatrice) comme chez les autres Planaires. En fait, cette hypothèse simpliste ne résiste pas à une analyse quelque peu approfondie, et voici pourquoi (:) I ne faut pas, bieo entendu, comprendre dans cette catégorie les déchiru- res pathologiques qui se produisent chez les individus sexués et que j'ai signa- lées précédemment (p.378); nous avons vu qu'elles n'avaient aucun rapport avec la reproduction asexuée normale. 486 A. VANDEL a) J'ai décapité des individus sexués de Pol. cornuta et de Pl. alpina, et, comme je lai dit plus haut, je n'ai obtenu aucun résultat ; lon n'assiste, méme pas à l'ébauche d'une position de scission : si l'absence de scission était une simple conséquence de la résistance des tissus chez les individus sexués, l’on devrait assister à des positions de scission, desti- nées à avorter, mais cependant plus ou moins nettement ébau- chées ; la position de scission ne serait pas suivie de division, en raison de la résistance de la région intermédiaire. En fait, le réflere de la scission ne se produit pas chez les individus sexués et décapités ; 2/ a disparu chez les individus sexués. b) Les jeunes sortis de cocons, et encore dépourvus d’orga- nes copulateurs, se comportent, comme nous l’avons vu, de facons assez différentes : les uns se coupent ; d’autres (et, c’est la majorité) ne se divisent jamais, quoiqu'à ce moment la résistance des tissus soit très faible et tout à fait comparable à celle des animaux asexués scissipares. D'autre part, nous avons mentionné au paragraphe 2 de ce chapitre, la persistance du réfiexe de scission chez les indivi- dus issus de fragments de scissiparité et devenant sexués ; des individus possédant des organes copulateurs déjà très déve- loppés continuent à se couper (le cas du n° 608 (fig. 41) est particulièrement remarquable à cet égard). | La raison qui empêche les individus sexués de se couper n'est donc pas la plus grande résistance des tissus n1 la pré- sence d'organes copulateurs. La véritable cause qui oppose les deux modes de reproduc- tion est, d’ailleurs, mal connue jusqu'ici. Nous ne pouvons guère formuler, de facon précise, que les deux conclusions suivantes : a) La reproduction asexuée est liée à une structure indiffé- renciée: la reproduction sexuée est corrélative d'un maximum de différenciation. b) L'état sexué ne fait pas disparaïtre, de façon définitive, le réflexe de scission : il ne fait que l'inhiber provisoirement. Ce réflexe persiste toujours à l'état latent, et, on peut le mettre, à nouveau, en évidence par divers artifices. Le cycle évolutif de P/. maculata [Curris (1902) et Can (1915, p. 386)}, avec ses alternances de générations sexuées et REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 487 asexuées constitue une preuve très nette des propositions énon- cées ci-dessus. Mais même, Po/. cornuta qui ne présente pas normalement d'alternances de génération m'a fourni aussi des faits intéressants. Nous avons vu au chapitre I, qu'un petit fragment de Pla- naire sexuée subissait des processus de régulation, de refonte qui provoquaient la disparition des gonades ; le fragment ainsi transformé donne une petite Planaire complètement asexuée ; or, de telles Planaires sont capables de se couper. J'en ai observé des exemples très nets au cours d'une expérience qui se proposait, d’ailleurs, un tout autre but ; il s'agit d'une expé- rience de régénération des glandes génitales que j'ai déjà signalée précédemment (p. 45). Le 5 août, je coupe 10 indivi- dus sezués de Pol. cornuta juste en avant des ovaires, et je mets en culture les parties céphaliques ; 6 pièces régénérent et donnent de petites Planaires complètement asexuées. Le 26 septembre ane Planaire, classée no 0, se coupe : elle est fixée. Le 25 octobre — no 1, _ : devient sexuee le 10 décembre. Le 25 octobre _ n° 2, — ; selecoupe une se- conde fois le 10 novembre devient sexueée le 143 décembre. Le 27 oclobre — n° 3, — _; se recoupe une se- conde fois Île -0 octobre ; de- vient sexuée le 13 décembre. Le 28 octobre — n° 4, — . ; morte le 3 décem- bre. Le 4 novembre — n° à, — ; devient sexuee le 10 décembre. Ces observations montrent que des animaux sexués et qui ne se coupent pas, peuvent se diviser, si par un artifice quelcon- que (en l'occurrence, régulation suivant la régénération) on les ramène à un état indifférencié. On a pu, artificiellement, faire parcourir à ces animaux qui, normalement, étaient au bout de leur cycle, un nouveau cycle évolutif comprenant une phase asexuée et une phase sexuée. 188 A. VANDEL Voici encore un autre exemple analogue : un individu complètement sexué de Pol. cornulta est sectionné, le 24 novem- bre 1919, entre la bouche et l'appareil copulateur; le frag- ment postérieur est cultivé; les organes copulateurs dégénè- rent, comme nous l'avons décrit en détail au chapitre III. Ce fragment donne ainsi une petite Planaire complètement asexuée ; elle se coupe, de façon normale, le 10 janvier 1920. Là encore, on à fait réapparaitre le processus de scission qui était masqué chez l'individu sexué. J'ai essayé aussi d'obtenir des résultats analogues en affa- mant les animaux ; la faim, comme l’ont montré les expérien- ces de E. Scaurrz, SToPPENBRINK, BERNINGER, fait disparaitre, à l'exemple de la régulation, les gonades et ramène les animaux à un état asexué et peu différencié. Je n'ai pas obtenu de résultats par cette méthode : les animaux affamés pendant plusieurs mois, puis nourris à nouveau sont redevenus lente- ment sexués, sans s'être coupés. Cet échec tient peut-être au trop petit nombre de cultures et à la durée insuffisante de la privation de nourriture ; il ne paraît pas impossible d'obtenir un résultat positif en reprenant des expériences sur une plus vaste échelle. Quoiqu'il en soit, il parait bien établi que le réflexe de la scission est foncièrement établi chez l'espèce ; il est masqué chez les individus sexués, mais persiste cependant à l’état latent, et il peut se manifester si, par un détour, on ramène l'individu à un état indifférencié. Ce que nous ignorons jus- qu'ici, c'est pourquoi, au juste, le réflexe de la scission (réflexe rythmique et périodique, comme nous l'avons vu) est suspendu quand l'animal devient sexué. On ne peut mvoquer une action des gonades, car la plupart des animaux «asexués » qui se coupent, po sèdent, comme nous l'avons dit, des ébauches plus ou moins développées d’ovaires et de testicules. S. Action des facteurs externes sur le cycle évolutif. L'étude, dans la nature, des Planaires et de leurs modes de reproduction différents suivant les stations, conduit presque inévitablement à attribuer aux facteurs externes, la tempéra- ture en particulier, une action prépondérante dans le détermi- REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 489 nisme des différents phases du cycle évolutif. Une température basse permettrait la reproduction sexuée ; une température plus élevée déterminerait la multiplication asexuée. C’est l'opinion formulée par Taienemanx (1906) pour P/. alpina, par Voir (1900) pour Pol. cornuta, et celle que J'avais, moi-même, sou- tenue dans une note préliminaire (Vanvez, 1919 D). En fait, cette hypothèse n'est que le résultat d’une concep- tion un peu simpliste et superficielle de ces phénomènes si pro- fondément complexes. Le mode de reproduction est déterminé fondamentalement, comme nous l'avons vu, par des facteurs héréditaires ; les facteurs externes, comme la température, ne font qu'influencer le cycle évolutif en accélérant ou en retar- dant telle ou telle phase ; mais ils ne le déterminent essentiel- lement en aucune façon. Nous allons montrer, à la lumière des résultats précédem- ment acquis, comment il est possible de rendre compte des diverses modalités qui se rencontrent dans la nature. Mes observations ont été faites principalement dans le Jura, acces- soirement dans d'autres régions. Plusieurs sources très froidesont une température, qui même en été, ne dépasse pas 7 à 8°. Or, nous-avons vu qu'au-dessous de cette température, les processus de scission sont suspendus ; on ne trouvera done dans ces sources que des individus se reproduisant par voie sexuée. Telles sont plusieurs sources des environs de Pontarlier qui renferment des colonies exclusive- ment sexuées de P{. alpina : source de la ferme de l'Etang (8-8°5), Malbuisson (7-8°), Boujeons (6°5), Jougne (6°), Le Brassus, en Suisse (5°), etc. : et pour Pol. cornuta, Vaux (5-T°), Mouthe (6-7°), etc. Mais l’eau, tout en étant très froide dans la source elle-même, se réchauffe généralement, en été, vers le bas du ruisseau. Les processus de scission peuvent alors se manifester dans la région aval; de ces conditions variées, résulte une stratification dans le mode de reproduction que j'avais déjà signalée dans mon premier travail (Vanpez, 1919 a); dans la source elle- même, il n'existe que des sexués; plus bas, on rencontre des individus à reproduction scissipare ; cet échelonnement est bien net dans certains ruisseaux de Malbuisson peuplés de P2Z. alpina. 490 A. VANDEL De nombreuses sources du Jura ont été partiellement captées pour alimenter des abreuvoirs. L'eau, avant de s'écouler dans le ruisseau, séjourne dans un bassin où elle se réchauffe forte- ment en été. Ces transformations entrainent corrélativement un changement du mode de reproduction; la multiplication asexuée prédomine dans les sources ainsi modifiées. Il sera pos- sible à chacun de faire des observations analogues dans des régions différentes. Quand la multiplication asexuée est très active (comme cela a lieu vers la température optima de scission), l’évolution vers là sexualité est généralement suspendue; cet antagonisme que j'ai pu constater très nettement dans plusieurs cultures, s'explique aisément. Les individus qui se divisent fréquemment (et surtout ceux qui se coupent en avant du pharynx, comme cela a juste- ment lieu quand la scission est fréquente; voir p. 385) sont le siège de phénomènes de régénération considérables ; mais la régénération s'accompagne comme nous l’avons au chapitre I, de phénomènes de réduction, d'autant plus intenses que la régénération est elle-même plus étendue et plus fréquente ; ces processus de réduction ont pour conséquence d'empêcher le développement des gonades. Chez les individus qui ne se divi- sentqu à de longs intervalles (comme cela a lieu à basse tempéra- ture), les glandes génitales peuvent au contraire se développer aisément. Aussi les individus asexués qui évoluent vers la sexua- lité sont-ils beaucoup moins nombreux en été qu’en hiver (voir les deux dernières colonnes du tableau IT) ; il ne faut pas voir là une action directe de la température sur le développement des gonades, mais simplement une résultante de l'accélération du rythme de la scission et des processus de régulation qui en sont une conséquence. Cette observation constitue, à mon avis, un excellent exemple de la façon dont on peut comprendre l’action des facteurs exter- nes sur les phénomènes vitaux : Les facteurs externes accélèrent, retardent ou même inhibent complètementles réactions physio- logique; ils créent par là, ainsi que par l'interaction des diffé- rents processus entre eux, des aspects divers; mais ceux-ci ne sont pas réellement leur œuvre; les conditions externes ne font que déclancher des réactions déterminées fondamentalement par la constitution héréditaire de l'individu, par son génotype. REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 491 D'ailleurs la seule étude dans la nature, si tant est qu'on la poursuive de façon quelque peu approfondie, conduit à des conclusions identiques. De nombreux cas seraient tout à fait inexplicables par la seule intervention des facteurs externes ; il faut toujours avoir recours aux facteurs héréditaires. Un ruisseau près de Saint-Remy-lès-Chevreuse (Seine-et- Oise) qui, en été, à une température de 14° à 15°, ne renferme exclusivement que des sexués; il en en est de mème d'un ruis- seau de la forêt de Perseigne (Sarthe) où le 9 juillet 1921, par une température de 15°, je n’ai trouvé que des sexués. Il s’agit là de colonies sexuées, chez qui le processus de scission ne semble pas s'être installé ou du moins ne joue qu'un rôle secon- daire. Pol. cornuta viganensis, de Montpellier, qui vit dans les ruisseaux chauds, ne se reproduit pas non plus, semble-t-il, par division; ni Ducës, ni moi n'avons constaté de scission chez cette variété. Ce nest donc pas évidemment la tempé- rature qui détermine la seission ; 1l faut que le réflexe de scission soit inscrit dans le patrimoine héréditaire de f’indi- dividu. D’autres cas très nets se rapportent à P/. alpina chez qui, comme nous l’avons vu, la régénération des glandes génitales parait difficile. J'ai observé dans le Jura, de nombreuses colo- nies entièrement asexuées et quisont comparables à celles que Taienemanx (1906) à observées à Rügen. Ces colonies se reconnais- sent, d'emblée, au très grand nombre d'individus {'), à leur petite taille, à leur partie postérieure souvent tronconnée, et à l'aspect bicolore de beaucoup d’entre eux (voir p. 423). Ces colonies restent asexuées toute l’année, et ne renferment pas de sexués, même en hiver où la température est très basse. Je citerai à titre d'exemple la région aval d'un ruisseau près de Malbuisson (Doubs); je donne ei-dessous le résumé de mes observations : 30 mars 1918. Temp. 50. Très nombreux individus ; tous asexués. 1er août 1918. — 100. — 26 sept. 1918. — 70. — 31 oct. 1918. — Sy _ 6 avril 1920. — 60. — 16 aout 1920. — 1920. ee (1) La multiplication asexuée produit des animaux aptes à se reproduire très rapidement; l’évolution des sexuës est, au contraire, beaucoup plus longue. De là, la différence numérique entre les colonies sexuées et asexuées. 33 492 A. VANDEL Ainsi pendant toute l’année, et quelle que soit la température cette colonie reste complètement asexuée. L'action des condi- tions externes ne suffit pas à expliquer l'asexualité permanente de ces colonies; pour en rendre compte, il faut se rappeler ce que nous avons dit plus haut sur les facteurs héréditaires et la difficulté de la régénération des gonades chez cette espèce. L'interprétation que je viens de donner de l’action des fac- teurs externes ne vaut pas que pour les Planaires. Elle s’ap- plique, je crois, à tous les cycles où se succèdent des généra- tions sexuées et asexuées, à œufs parthénogénétiques ou fécondables, etc. Je n'en veux citer que deux exemples : Les représentants des deux familles de Rhabdocæles : Cate- nulidæ et Microstomidzæ se reproduisent, à l'ordinaire, par voie asexuée, et, les individus pourvus de glandes génitales n’appa- raissent qu'assez rarement. Le déterminisme du mode de repro- duction parait fort compliqué. E. Sekera qui est, à l'heure actuelle l’un des meilleurs connaisseurs de Turbellariés, et, qui depuis près de quarante ans n'a cessé d'observer ces animaux, vient, dans un travail récent (1917) de nous apporter des don- nées tout à fait intéressantes sur ce difficile problème. Il a mon- tré, en particulier, que chez Microstomum lineare et M. gigan- teum, Va formation des organes génitaux est tout à fait indépendante des conditions climatériques et se produit régu- lièrement chez les individus bien nourris. Les Annélides du genre Salmacina présentent également un double mode de reproduction, sexué et asexué. Dans une note récente (1920), Maraquix qui étudie depuis fort longtemps ces : animaux, constate que les deux modes de reproduction se mani- festent et évoluent chez dés individus différents, mais à la même époque et chez des vers habitant les mêmes toulfes de tubes, et par suite soumis à des conditions identiques. « Il résulte de ces faits — conclut l’auteur — que le déterminisme des deux modes de reproduction n’est pas lié aussi étroitement qu'on le sup- pose, soit à la composition du milieu, soit à l'influence de l’ali-. mentation, soit enfin à la température. Les conditions généra- les : milieu, alimentation, température, influencent à la fois les reproductions asexuées et sexuées, mais on doit rechercher ailleurs les causes déterminantes de l’un ou de l’autre mode di dé REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 493 de la reproduction, et ces causes résident vraisemblablement, chez les Annélides en question, dans des corrélations fonction- nelles de l’organisme ». 7. Signification et rôle de la fécondation. Il est probable que plusieurs espèces de Planaires peuvent se multiplier indéfiniment par scission. J'ai cultivé pendant 18 mois et 13 générations des Po/. cornula exclusivement seis- sipares, sans remarquer le moindre signe de dégénérescence. Ce nombre de générations est relativement restreint; mais, il existe des stations où Po/. cornuta et PI. alpina se reproduisent exclusivement par voie asexuée, et cela, très probablement, depuis fort longtemps. Enfin, P/. sublentaculata, en Europe, PI. dorotocephala et velata, en Amérique (et probablement, beaucoup d'autres espèces exotiques encore mal connues) ont perdu totalement, ou à peu près, la faculté de se reproduire sexuellement. Le nombre des organismes qui se multiplient exclusivement par voie asexuée estassez considérable. Les phénomènes sexuels sont inconnus chez beaucoup d'algues : Chrysomonadines (Chro- mulinacæ, Hymenomonadacæ, Ochromonadacx), les Scenedes- macæ, les Botrydacæ, les Caulerpa ete. M. HarTuanx (1917) à cultivé pendant deux ans et demi et 550 générations des Eudo- rinae legans exclusivement par voie asexuée et pense qu'on peut cultiver indéfiniment cette algue de cette façon. Parmi les Phanérogames, les exemples ne manquent pas non plus: Wo/- fia arhiza ne fleurit jamais en Europe, et se reproduit exclusi- vement par voie asexuée ; beaucoup de plantes nese multiplient guère que par boutures : Vigne, Houblon, Saules, Peu- pliers, Canne à Sucre, Roseau (Aruno phragmites), Bananier, Ananas, Arbre à pain (Arlocarpus incisa), Patate [Ipomæa batatas) etc. On peut aussi en citer plusieurs cas dans le règle animal. Cer- tains polypiers se reproduisent presque exclusivement par voie asexuée : Schisocyalhus fissilis (Gnavier, 1915). Maupras (œuvres posthüumes, 1919), a cultivé pendant plusieurs années, et exelu- sivement par voie agame, des Oligochètes limicoles. sans voir 414 A. VANDEL apparaitre n1 phénomènes sexuels, ni dégénérescence. Les Lum- briculus et les Ctenodrilus semblent bien aussi pouvoir se reproduire indéfiniment par voie asexuée. Il semble donc que la reproduction par agomogenèse puisse; dans certains cas, se perpétuer indéfiniment. Ces observations auxquelles il faudrait joindre les faits d’auto- fécondation, de consanguimité, de parthénogenèse, etc., mon- trent que la fécondation croisée n'est pas une condition indis- pensable au maintien de l'espèce. Elles ne permettent pas d'accepter, dans leur entier tout au moins, les théories de la fécondation proposées jusqu'ici : soit que l'on voit en celle-ci une cause de rajeunissement (Bürscazr, ENGELMANN, VAN BENEDEN, Maupas, Cazkixs), soit, au contraire, un processus qui assure la combinaison des caractères héréditaires et constitue ainsi la source de la variation, et rend possible l'adaptation aux nou- _velles conditions de vie (Darwix, Weismann, CASTLE, JEN- NINGS) ('). La signification totale et complète de la fécondation nous échappe donc jusqu'ici. Cependant, comme je l'ai dit dans l'introduction, il me parait difficile d'admettre que ce proces- sus si général ne correspondit pas à quelque réalité profonde et fondamentale. Si la fécondation qui n'est même pas en rapport direct avec la multiplication (comme cela se voit nettement chez les Protistes) était simplement un processus inutile, voire nuisible, il y aurait longtemps qu'elle aurait été éliminée par la sélection. Mais, bien au contraire, la fécondation se retrouve dans toute la série des organismes, se présentant sous des aspects divers, mais conservant néanmoins ses caractères fon- damentaux ; et la nature, loin de l’éliminer, emploie pour la faire aboutir des moyens parfois extraordinairement compli- qués. Le déterminisme et le rôle de la fécondation nous sont encore inconnus. Ils sont masqués chez les organismes supé- rieurs par toutes sortes de processus accessoires, et ce sont (1) La fécondation est souvent une source certaine de variation ; mais elle n'est pas la seule. On connait des variations importantes dans les lignées purement parthénogénétiques : Æieracium, Taraxacum, Alchemilla (BLarNGnem, 1909), Daphnies et Bosmines pélagiques, Difflugia (JexnixGs, 1916), etc. Quelques auteurs prétendent, au contraire, que l’amphimixie, loin de provoquer la varia- tion, la réduit considérablement et assure la stabilité de l'espère (voir en parti- culier, Wazron, 1915), PP NE [ta REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 495 peut-être les Protistes les plus inférieurs, chez qui la sexualité se présente avec ses caractères les plus simples, qui nous four- niront, mieux que les organismes compliqués, la solution du problème, 8. Vieillissement et rajeunissement La fécondation n'est donc pas indispensable au maintien de l'espèce ; il faut, en conséquence, que dans les autres modes de reproduction, dans la multiplication asexuée, en particu- lier, il y ait, dans la suite des générations, un mécanisme qui assure le rajeunissement des organismes et les préserve de la sénilité et de la mort. Nous sommes ainsi amenés tout naturel- lement à étudier les questions de rajeunissement et de vieillis- sement (de sénescence, comme disent les Américains). Nous arriverons à la conclusion que le mécanisme du rajeunissement peutse produire, non seulement en dehors de la reproduction sexuée, mais en dehors de toute reproduction. Si nous avons quelques données sur le vieillissement des Vertébrés, et surtout des Vertébrés supérieurs, nos connais- sances sont à peu près nulles en ce qui concerne celui des Invertébrés. Nous savons fort peu de choses sur la durée de vie de ces organismes, et encore moins sur les conditions et les causes de la sénescence ; conditions qui doivent être très diver- ses et à coup sûr très différentes de celles que l’on rencontre chez les Vertébrés. Relativement à la première question, on trouvera quelques indications dans les études de WEismaxn (1881), de Korscuezr (1906), de Cuéxor (1921,p 544); on consta- tera dans ces listes l'absence totale de renseignements relatifs aux Planaires. Wicuezw1 (1999, p. 95) avoue : « Über die nor- male Lebensdauer der See - (und Süsswasser-) tricladen liegen keine Untersuchungen vor..…..darf,aber, eine immerhin betræcht- liche Lebensdauer der Sectricladen (von mindestens einigen Jahren) angenommen werden. » Caro a publié de nombreux articles et un volume de plus de 400 pages sur Les processus de rajeunissement et de sénescence ; ses recherches ont porté spé- cialement sur les Planaires; cependant, on cherchera en vain dans ses travaux quelque renseignement positif sur les proces- sus de sénilité dans ce groupe d'animaux, 496 A. VANDEL Les données que je possède sur la durée de vie et le vieil- lissement des Planaires se rapportent à trois séries de cul- tures : a) Le 14 janvier 1919, je récoltai dans un ruisseau du bois de Boulogne, près Paris, un lot de P/. polychroa, déjà adultes, et qui se sont mis à pondre aussitôt des cocons. Au bout de quel- que temps, il ne restait plus que quatre individus, répartis en deux paires : une paire comprenait des animaux colorés en noir foncé ; l’autre était formée d'individus un peu plus grands et de couleur jaune clair ; ces individus appartenaient, je crois, à la même espèce ; il faut cependant noter que les individus de même couleur s'accouplèrent toujours entre eux et non avec ceux de l’autre paire. Ces animaux ont pondu de nombreux cocons dont la liste a été consignée dans Le tableau VIT Arri- vons en juillet 1921 (c'est-à-dire 2 ans 1/2 après le début de la. culture) ; les individus noirs et jaunes pondent les uns et les autres de nombreux cocons ; le 14 juillet, je note que les individus noirs ont pondu un cocon et sont accouplés ; le 16 juillet, au matin, ces deux exemplaires paraissent malades ; le pigment noir, au lieu d'être réparti uniformément se dispose en trainées longitudinales, ce qui donne à l'animal un aspect rayé des plus curieux ; à midi, l’un des animaux est complète- ment décomposé ; quant à l’autre qui commence à diffluer par sa partie postérieure, je Le fixe. Je constate des phénomènes de dégénérescence assez intenses, en particulier dans le vitello- gène. S'agit-il là d'une mort naturelle, se produisant donc en pleine activité sexuelle, ou cette décomposition est-elle due à une cause externe, par exemple la trop haute température qui régnait alors dans l'aquarium ? Je ne sais. Quant aux individus jaunes, l’un s’est décomposé le 21 octo- bre 19921 ; l’autre vit encore au moment où j'écris ces lignes (novembre 1921). Ces données sont évidemment assez incom- plètes puisque l’âge des animaux au moment de la capture était totalement inconnu, et, que d'autre part, il se peut que la mort soit due à de mauvaises conditions de culture. Ces observations montrent, en tout cas, que ces Planaires peuvent vivre plusieurs années, et présentent un cycle annuel de reproduction que nous avons signalé précédemment. b) Le second exemple se rapporte à une culture de Pol. cor- nd tte ste chat REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 497 nula. Plusieurs cocons sont récoltés en mars-avril 1920 près de Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Seine-et-Oise); 4cocons font éclo- sion respectivement les 17 avril, 11, 18 et 27 mai. Il en sort, au total, uné cinquantaine de jeunes. Ces individus présentent les premières ébauches des organes copulateurs en juin-juil- let. Par suite de la haute température, un assez grand nombre d'individus se décomposent ; le 19 août, il ne reste plus que 21 individus. Deux mois plus tard, commence la ponte des cocons ; le premier cocon est pondu le 26 octobre. Du 26 octo- bre 1920 au 4 janvier 1921, cette culture me donne 12 £ocons. Mais, à partir du 5 novembre, les animaux de cette culture pré- sentent un grand nombre de déchirures pathologiques tout à fait analogues à celles que j'ai décrites, p. 378. Tantôt un orifice se perce au milieu du corps, s’élargit et sépare deux fragments qui dégénèrent ; tantôt c'est une encoche latérale qui se creuse et aboutit au même résultat. Ces processus intéressent aussi bien la tête que la partie postérieure, ou le milieu du corps. Tous les individus de la culture se sont ainsi successiverent lacérés, et le 20 janvier, il ne restait plus qu'un individu intact que j'ai fixé pour l'étude : il était complètement sexué, mais sans altération pathologique reconnaissable. Il est impossible d'attribuer ces phénomènes à de mauvaises conditions, car ils se sont produits justement à un moment où la température était basse (8 à 11°) et l'aération très suffisante. Des individus asexués cultivés exactement dans les mêmes con- ditions n'ont nullement présenté de telles altérations. Je vois dans ces lacérations ou déchirures suivies, en général, de décomposition, une manifestation de la sénescence ; nous ver- rons plus loin qu’elle est corrélative d’un état d'extrême difté- renciation. Au premier abord, cette assimilation de ces déchi- rures ou lacérations à des marques de sénilité péut paraitre bizarre ; cela tient à ce que, malgré nous, nous nous représen- tons la vieillesse par les caractères qu'elle présente chez les Vertébrés, l Homme en particulier, alors qu'en fait, les proces- sus de sénescence sont certainement extrêmement différents chez les Invertébrés. Il parait bien établi par ces observations que le cycle sexuel de Pol. cornuta ne dure qu'une année ; et il semble qu'il ne se produit qu'une seule fois, et non plusieurs comme chez P/. poly- LUS A. VANDEL chroa (p 442), PE gonocephala (Sroprexerink, 1904, 1905), et Pl torca (Marmesex, 190%). IE semble qu'après avoir pondu un petit nombre de cocons (un ou deux) l'animal meurt.Ilen serait de même pour Dendrocwlum lacteum d’après Lima (1884). Les conditions sont-elles les mêmes dans la nature ? H est difficile de le prouver. c) Les conclusions précédentes sont renforcées par les obser- vations suivantes : j'ai déjà dit (p. 481, en note) qu'il m'a été im- possible d'obtenir des cocons à partir d'individus primitivement asexués et qui ont évolué ultérieurement vers la sexualité. Et, voici pourquoi : les individus asexués sont extrêmement résis- tants, et, pendant la phase agamogénétique, la mortalité est pres- que nulle ; mais dès qu ils ont atteint la maturité génitale, ils présentent pour la plupart des lacérations et déchirures analo- gues à celles que j'ai signalées précédemment. J'en citerai deux exemples. J'isole le 10 janvier 1920, un fragment produit par scissiparité (n° 3.1). Ce fragment se transforme en une petite Planaire asexuée qui se coupe 12 fois (la première fois le 25 février, la dernière le 16 septembre). Lors de la dernière scission l'animal présente déjà des ébauches d'organes copula- teurs. Fin septembre, il est nettement sexué. Le 6 décembre, il présente une échancrure à la partie supérieure du corps, elle s'élargit, les jours suivants, et le 10 décembre l'animal est presque complètement séparé en deux parties. Je le fixe, et constate qu'il est parfaitement sexué et bourré de vitellogène. Le cas du n° 3.5 est très analogue; cet individu est produit par scissiparité le 10 janvier. Il se transforme en une Planaire asexuée qui se divise 12 fois (la première fois le 1* mars, la dernière le 13 septembre) ; Le 16 octobre, je note que cet ani- mal évolue vers la sexualité; le 6 décembre cet individu paraît malade, se lacère et je le trouve décomposé le 9 décembre. Je pourrais encore signaler plusieurs cas semblables, mais ce serait allonger une liste fastidieuse sans apporter aucun fait . nouveau. | Je considère donc comme bien établis les faits suivants : les Planaires asexuées sont très résistantes ; la mortalité dans les : cultures est extrêmement faible; quand ces animaux meurent (par suite d’une trop grande élévation de température, par exemple), ils se’ décomposent rapidement, mais ne présentent REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 499 pas de lacérations ou échancrures d'aucune sorte. Lorsque ces animaux deviennent sexués, la plupart sont le siège de déchi- rures qui provoquent, en général, la mort de l'individu. Je con- sidère que ces lacérations représentent des processus de vieil- lissement: ils sont en rapport avec l'état très différencié de l'organisme, et en particulier avec l'élaboration du vitello- gène. Il est, en effet, très remarquable de constater que tous les individus qui se lacèrent sont abondamment bourrés de vitellogène ; je note cette corrélation sans qu'il me soit possible de préciser, au juste, quel est le rapport entre ces deux phé- nomènes. S'agitillà de quelque transformation interne, ou cette accumulation de vitellogène rend-elle l'animal plus sensible aux actions extérieures ? Je ne sais. Les cas de lacération signalés chez les Planaires par nombre d'auteurs (voir p. 378) ne sont probablement que des cas de sénescence qu'ils n'ont pas su interpréter. Ces processus qui sont activés par les mauvaises conditions (haute température, aération insuffisante, etc.) sont d'une nature si spéciale qu'il est difficile d’en comprendre la signification au premier abord ; et ce n'est qu'à la suite de longues cultures que je suis arrivé à l'interprétation précédente qui me paraît la plus satisfaisante. Le début de ce paragraphe à été consacré aux faits et expé- riences ; il nous faut maintenant les interpréter, et examiner la façon dont ils s'accordent avec les diverses théories propo- sées ; il faudra aussi nous efforcer de comprendre en quoi con- siste le rajeunissement et rechercher s’il est lié ou non à un mode spécial de reproduction, ou même à toute reproduction. Les théories relatives au vieillissement et à la mort sont nombreuses, et je n'ai pas l'intention de les discuter ici en détail : Weismann (1881) considère la mort comme un phénomène d'adaptation, et suppose que la durée de la vie est réglée par les conditions de vie et de reproduction. Les théories ulté- rieures se sont placées généralement sur un terrain plus phy- siologique : Mercaxikorr (4902) se fondant, d'ailleurs, presque exclusivement sur des recherches ayant trait aux Vertébrés, admet que la sénilité est une conséquence des processus d’into- xication résultant principalement des toxines mises en liberté par les innombrables bactéries du gros intestin. Lorr (1908) 500 A. VANDEL rejette Les théories généralement adoptées et leur adresse des critiques peu justifiées, semble-t-il. Des expériences sur des œufs d’'Oursins soumis à des températures élevées Le condui- sent à supposer que la mort résulte de la destruction de cer- taines substances spécifiques ; mais ses observations sont assez peu probantes [voir, en particulier, la critique de Cup (1915, p. 309)|, et sa théorie montre surtout le besoin qu'éprouve le grand physiologiste américain de donner pour tous les phéno- mènes vitaux une explication purement chimique. Enfin, il est une dernière théorie sur laquelle j'insisterai un peu plus longuement, car elle me semble de beaucoup la plus satisfaisante, et que les faits que j'ai observés chez les Planai- res la confirment entièrement. Elle voit dans le vieillissement une conséquence de la différenciation ; inversement, le rajeu- nissement pourrait se produirequand il y aurait dédifférenciation de l’organisme. Cette théorie n’est pas nouvelle : elle a déjà été nettement exprimé en 1851 par Le botaniste Alexander BRAUN ; il est, le premier, je crois, qui ait établi que le rajeunissement des organismes était possible en dehors de toute reproduc- tion, et était une conséquence de la dédifférenciation ; 1l Vex- prime en ces termes à la page 5 de son travail : « Die Verjün- gung erscheint uns zunächst als ein Zurückgehen auf einen früheren Lebenszustand, wodurch ein Ausgangspunkt erneuer- ten Fortschrittes gewonnen wird ». Cette théorie a été appliquée au règne animal et complétée et amplifiée par Goerre (1883), E. Scauzrz (1905), Minor (1908) et récemment par Cuir (voir, en particulier son ouvrage d'ensemble paru en 1915). La sénes- cence est une conséquence de la différenciation ; chez les ami- maux supérieurs, elle aboutit fatalement à la mort, par suite du faible pouvoir de réversion des cellules; chez nombre d'Invertébrés, au contraire, la dédifférenciation peut être pous- sée fort loin; elle provoque alors un rajeunissement de l'orga- nisme. Cette théorie rend fort bien compte des faits observés chez des Planaires : grande résistance des individus asexués peu différenciés ; décomposition des animaux sexués parvenus au maximum de différenciation. Elle permet de comprendre com- ment, chez les Planaires, et chez d’autres groupes, la repro- duction asexuée peut se maintenir indéfiniment, sans qu'il y ait he tot nn — : REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 501 . Jamais intervention de la fécondation. L'une des conséquences. les plus intéressantes de la théorie, mais qui est encore loin d'avoir été mise en pleine lumière, est de montrer que le rajeu- nissement est parfois indépendant de toute reproduction. Cairn a établi que l'inanition qui, chez les Planaires fait disparaitre les gonades et ramène l'animal à un état asexué, peu différen- cié, s'accompagnait d’un véritable rajeunissement et permet- tait à l'animal de parcourir à nouveau un autre eycle; un individu partiellement affamé serait pour ainsi dire immortel. Les quelques expériences que j'ai faites confirment ces conclu- sions ; les Planaires affamées sont beaucoup plus résistantes que les témoins sexués. L'enkystement de P/. velata, étudié par Ci (1913 D, 1914 a) est tout à fait indépendant de la reproduction, mais il provoque un rajeunissement de l'organisme. | Quand Pattention aura été.attirée sur ces phénomènes, il est probable qu'on en trouvera beaucoup d’autres exemples; les queiques faits que je signale ci-dessous semblent bien mdiquer qu'ils ne doivent pas être rares. J. Murray (1907) a décrit avec soin l’enkystement d'un Tar- digrade, Macrobiotus dispar ; cet enkystement s'accompagne d'une régression de tous les organes ; au bout d'une semaine, l'animal est transformé en une masse amorphe, sans structure ; il s'édifie ensuite à partir de cette masse, un nouvel animal qui émergera ultérieurement du kyste. Il s’agit là d’un proces- sus de dédifférenciation qui est peut-être accompagné de rajeu- nissement, quoique l’auteur n'ait point porté son attention sur ce point (1). HickerneLz (1914, 1917) à étudié l'enkystement d'un Rotifère, Philodina roseola ; l'enkystement qui se produit sous l’action de la dessiccation, provoque des changements notables dans la structure des noyaux (disparition du caryosome, épaississement de la membrane nucléaire, etc.); l’enkystement est suivi d’un accroissement de la reproduction ; il y a là très probablement (1) Des phénomènes de dédifférenciation analogues, mais d’une signification probablement différente sont connus chez la nymphe hypopiale de certains Aca- riens, du genre Tyroglyphus (MicuaeL, 1901, p. 168-170), chez les nymphes des mâles de Coccides (0. Scampr, 1885 ; Wirrcacziz, 1886), le nauplins des Monstril- lides (MazaouiIN, 1901), la larve kentrogone de la Sacculine (DELAGE, 1884). 502 A. VANDEL un processus de rajeunissement indépendant de la reproduc- tion. Cackixs (1916) voit aussi dans lenkystement des Infusoires, un mode de rajeunissement. Ces processus ne sont pas non plus inconnus chez les Végé- taux; sans reprendre les vieux exemples d’A. Braun, on peut citer le Myxomycète, Badhamia utricularis, étudié récemment par JanN (1920), qui se rajeunit périodiquement par dessiccation. Quoique ces faits soient encore peu nombreux et que leur signification profonde n'ait presque jamais été dégagée ils ren- dent vraisemblable l'existence très générale des processus de rajeunissement; ce rajeunissement se produit par les moyens les plus variés, mais il est toujours en rapport avec une dédif- férenciation, un retour de l'organisme à un état plus simple. Cette théorie qui voit dans la différenciation une cause de sénescence, et dans la dédifférenciation un moyen de rajeunis- sement, me parait donc renfermer une très grande part de vérité. Elle nous permet, encore que nous soyons mal fixés sur le mécanisme intime des processus mis en jeu, d'expliquer les phénomènes de rajeunissement qui se produisent chez les Invertébrés, et qui bouleversent toutes les anciennes concep- tions établies sur l'étude des seuls Vertébrés. Elle montre que la mort n’est ni nécessaire ni générale dans le règne animal, et qu’il est possible de prolonger indéfiniment la vie de certains animaux, autres que les organismes unicellulaires. Si cette théorie n’entraine pas d'applications directes pour l'Homme, et s’il ne faut pas espérer y trouver le panacée universel qui préservera l'humanité de la vieillesse et de la mort, on ne peut lui dénier son extrême fécondité et son grand intérêt phi- losophique. sn cms enr RÉSUMÉ 1) Quatre espèces de Planaires triclades paludicoles se repro- duisent par division, en Europe. Ce sont : Polycelis cornuta, Planaria alpina, PL vitta et PL. subtentaculata. La distribution géographique de ces espèces est étudiée dans le Chap. [. er 2) Les Planaires triclades paludicoles qui se reproduisent par division sont assez nombreuses. J'en donne la liste, p: 370. 3) La scission est un phénomène très rapide ; elle résulte de l'arrachement qui se produit entre la partie antérieure et la par- te postérieure réagissant indépendamment. La division normale est très différente des lacérations patho- logiques qui affectent les Planaires soumises à de mauvaises conditions, ou malades ou âgées. | 4) Le plan de scission n’est pas strictement déterminé ; 1l peut passer, soit en arrière, soit au milieu, soit en avant de la cavité pharyngienne. La scission prépharyngienne doit être considé- rée comme une conséquence de l'accélération du rythme de la division. 5) La scission est un phénomène spontané, rythmique et périodique ; l'intervalle d’une fission à la suivante varie dans de très larges limites. 6) La scission est le résultat d'un simple arrachement méca- nique ; elle n'est pas due à la formation de zoïdes successifs, comme le prétend Caivo. La scission des Planaires n'est pas un phénomène de repro- duction absolument fixé et rigoureusement établi ; mais ce n’est pas non plus une simple autotomie ; c'est un phénomène inter- médiaire. 7) La température accélère Le rythme de la scission, mais de facon beaucoup plus intense que la croissance ; scission et crois- sance sont des phénomènes de nature très différente. 8) La division reconnait pour causes un manque de corréla- 2304 A. VANDEL ions entre les différentes parties de Findividu. La décapitation, en supprimant le système de commande de l’animal, accélère la scission. Mais la décapitation n'a d'action que sur Les individus qui sont déjà capables de se diviser spontanément dans les con- ditions normales. 9) Il est impossible d'attribuer la scission des Planaires à l'action des facteurs externes. La scission est probablement apparue par mutation dans une série d'espèces appartenant tout tes (sauf Polycelis cornula) au genre Planaria. 10) La scission des Planaires est un phénomène très spécial qui n’a guère d'analogues dans le règne animal ; le seul pro- cessus dont on puisse la rapprocher est la lacération pédale de certaines Actinies. 11) Beaucoup d'éléments sont capables, chez les Planaires, de se dédifférencier, de revenir à l’état embryonnaire, et d'évo- luer ensuite dans une nouvelle direction. C’est ainsi que les cel- lules qui ont servi à former l'appareil copulateur peuvent redonner ultérieurement naissance à un pharynx. 12) La régénération des glandes génitales est possible chez les Planaires ; elle se produit à partir de « cellules souches » qui dérivent directement des blastomères et qui ont conservé leurs caractères et leurs potentialités embryonnaires. La régé- nération des gonades n’est pas un processus spécial, maïs un cas limite du phénomène très général de régénération. La régéné- ration des glandes génitales est cependant plus difficile que le développement de celles-ci dans le jeune animal sorti de l'œuf ; c'est ce qui explique que les Planaires scissipares sont généra- lement asexuées. 13) Les testicules tiennent sous leur dépendance l’évolution des organes copulateurs ; leur action est probablement de nature hormonique. 14) Le mode de reproduction, sexué ou asexué, est déterminé essentiellement par des facteurs héréditaires. Les conditions externes accélèrent ou retardent telle ou telle phase du cycle, mais n'ont pas le rôle déterminant qu’on leur a souvent attribué. Les deux modes de reproduction s’excluentréciproquement ; la cause de cet antagonisme est encore mal connue. Tout ce que l'on peut dire, c'est que : a) La reproduction asexuée est liée à une structure indifférenciée ; la reproduction sexuée est cor- 7 REPRODUCTION DES PLANAIRES TRICLADES 505 rélative d’un maximum de différenciation. b) L'état sexué ne fait pas disparaitre, de façon définitive, le réflexe de scission, il ne fait que l’inhiber provisoirement. Ce réflexe persiste tou- Jours à l’état latent, et on peut le mettre, à nouveau, en évi- dence par divers artifices. 15) Le déterminisme et le rôle de La fécondation sont encore inconnus. 16) La théorie qui voit dans la différenciation une cause de vieillissement, et dans la dédifférenciation une source de rajeu- nissement, rend fort bien compte des faits observés chez les Planaires. 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Aussi l’ouvrage de M. Brachel sera-t-il un guide également efficace pour l'étudiant, qui y trouvera une synthèse claire et y séntira la solidité de la construction résultant d’un demi-siècle de recherches faites sous l’ins- piralion transformiste et pour le chercheur qui voudra s'initier sur la réalité à l'étude des embryons. L'auteur a su condenser, dans un espace relativement restreint, une documentation considérable, en se limitant au domaine propre de l'embrvologie, sans entrer dans des détails qui relèvent plutôt de l'histogénèse et de l'anatomie comparée. La formation des gamètes et la fécondalion, la segmlation, la gastrulation, la différenciation des feuil- lets et la constitution des régions de l'embryon, l’évolution générale du mésoblaste et du mésenchyme constituent la première partie du livre. La seconde (embryogénie spéciale) est divisée en deux grands chapitres l’un consacré à la têle, l’autre au trone et aux principaux systèmes d'organes qu'il renferme. On appréciera aussi, surtout en ce moment, l'exécution matérielle du livre. Capita Zoologica. Verhandelingen op systematisch-zoologisch Gebiede. La Haye (Martinus Nijhoff, éditeur). Grand in-4. Les Capita Zoologica constituent une nouvelle publication de mémoires zoologiques et surtout d'ordre systématique, sous la direction de M. le prof. Van Oort, directeur du Musée d'Histoire naturelle de Leyde. L’ampleur du format se prèle bien à l'élendue du texte el aux dimensions des planches que comporte souvent ce genre de travaux. Deux premiers fascicules ont paru : 1. J. G. ne MAN. Nouvelles recherches sur les Nématodes libres terricoles de la Hollande (62 p . 14 pl., Prix 40 florins). On y trouvera la description de 41 espèces, dont 14 nouvelles (6 genres nouveaux). 2. G. STIASNY. Studien über Rhizostomeen (179 p., 5 pl., prix 16 florins). C’est une étude d'ensemble de ce grand groupe de Méduses, comprenant une partie générale (p. 1-60, consacrée à l’analromie comparée. à la biologie et à la réparktion géographique, et une parlie descriptive (p. 61-178) étudiant successivement sous les genres et espèces d'une façon descriptive et criti- que. L'auteur a disposé pour cela des riches matériaux du Musée de Leyde et de lexpédition du Siboga. 520 OUVRAGES REÇUS M. CAULLERY. — Le parasitisme et la symbiose. Paris {Encyclopédie scientifique, G. Doin, éditeur), 1921, 1 vol., 400 p., 53 fig., 14 fr. cart). L'auteur à passé en revue, dans ce livre, les principaux aspects du parasi- tisme, du point de vue de la Biologie générale. Du commensalisme le plus lâche à la symbiose la plus étroite, les faits s'enchaïnent sans autre disconti- nuité que celle introduite par notre esprit pour les besoins d'ordre et de classement. C’est ce que ce livre essaie de montrer. Le parasitisme y est considéré aussi comme une des manifestations les plus tangibles de l'Evolu- tion ; l'ampleur et la diversité des effets qu'il produit attestent la réalité et la complexité de celle-ci. Un certain nombre d'exemples particuliers per- mettent au lecteur de s’en rendre compte. Les migrations des parasites, les conditions particulières de leur reproduction, la spécificité parasitaire, les actions réciproques des parasites et de leurs hôtes sont l'objet de chapitres spéciaux ; les exemples, destinés à rendre cette étude toujours strictement concrète, sont choisis de préférence parmi les travaux récents. Dans les derniers chapitres consacrés à la symbiose, on trouvera également un résumé des recherches et discussions nombreuses et importantes qui ont eu lieu pendant ces dernières années et sont encore en cours, MOLLIARD M. — Nutrition de la plante. I. Echanges d’eau et de sub- stances minérales. Il, Formation des substances ternaires. 2 vol. (Ency- clopédie scientifique, G. Doin, éditeur), 395 et 438 p. (chaque volume, 14 francs cartonné). Ces deux volumes commencent une série, dont l’ensemble couvrira la Physiologie végétale entendue dans son sens le plus large, et dont la partie essentielle est l’élude de la nutrition de la plante, c'est-à-dire de la synthèse par celle ci, à partir des éléments minéraux du milieu extérieur, de ses constituants fondamentaux et de l'élimination des excreta. - Le premier volume porte sur les échanges d'eau et de substances minéra- les : il passe en revue d'abord les éléments minéraux que l'analyse révèle dans le végé{al et dont Ja culture synthétique montre, par ailleurs, la néces- sité. Il aborde ensuite le’ mécanisme par lequel ces substances arrivent jusqu’à la cellule et le phénomène fondamental de l'osmose. Puis il étudie les mouvements de l’eau, son absorption, son rejet par la transpiration et l'aspiration de la sève brule qui en est la conséquence. La troisième partie est consacrée à l'absorption des substances minérales et à l'étude générale de Ja nutrition minérale par le sol, Avec le second volume, l'auteur arrive à l'examen des produits de synthèse élaborés par la plante, et en premier lieu des substances (cernaires. Il passe en revue d’abord les hydrates de carbone c’est-à-dire les sucres simples ou complexes avec les corps qui s’y rattachent directement (amidon, dextrine, celluloses, etc.). Ici encore se pose le problème du mécanisme de leur for- mation; la pièce essentielle en est la fonction chlorophyllienne dont l’étude s'étend sur une bonne partie du volume (p. 60-226). Vient ensuite une revue des principaux corps non azotés élaborés par la plante (résines, sucres, glu- cosides, tannins, acides organiques, corps gras, lipoïdes, cires, essences, résines, latex). Le volume se lermine par l'étude des faits de nulrilion indé- pendants de l’action chlorophyllienne : la nutrition carbonée organique des végélaux dépourvus de chlorophylle (bactéries et champignons) et la nutrition carbonée organique des plantes vertes. Les volumes ultérieurs seront consacrés à l’utilisation des substances ler- OUVRAGES REÇUS 521 naires par la plante, au cyele de l’azote, et aux échanges d'énergie chez les végétaux. e2) RABAUD (Enenxe). — Eléments de Biologie générale. 1 vol. in- 444 p., Paris, 1920 (Alcan, Bibl. de Philos. contemp.). 21 fr. L'auteur a voulu essentiellement coordonner, pour le public éclairé qui désire se meltre au courant de l’orientation actuelle des idées, médecins, philosophes, étudiants en sciences et en médecine, les documents de plus en plus nombreux relalifs aux problèmes généraux de la Biologie, en examinant leur valeur relative : il a voulu mettre en évidence les relations de continuité entre les divers phénomènes vitaux, leur unité. I part de la conslilution de la substance vivante et de ses propriétés, telles que les révè- lent les recherches les plus récentes. Ces propriétés elles-mêmes lui appa- raissent avant tout comme le résultat de la liaison de la substance vivante avec le milieu extérieur. De ce point de vue, il considère successivement la formation des organismes pluricellulaires et l'individu, l'accroissement et le fonctionnement de cet individu, ainsi que la sexualité, l'adaptation, la variation, l’hérédité, la notion d'espèce, l’activité normale des organismes, leur répartition, la persistance et la disparition des espèces, enfin l’évo- lution. » RABAUD (Emexxe). — L'Hérédité. { vol. in-16, 190 p. Paris, 1921 (Coll. Arm. Colin). 5 francs. Ce petit livre expose, sous une forme plus abrégée et avee les rappels nécessaires en vue d’un publie étendu, l’ensemble du problème de lHérédité, que l’auteur avait déjà traité dans le Supplément 1 de ce Bulletin (Recher- ches sur l'Hérédité et la Variation), comme conclusion de ses recherches personnelles. Nos lecteurs connaissent donc ses idées dominantes, qui diffè- rent souvent beaucoup de celles qui sont le plus en faveur à l'heure pré- sente. Cela assure l'originalité de ce livre, où s’affirme une doctrine et dont la lecture ne peut qu’éveiller la réflexion et l'esprit critique. RICHET (Cnarves) et RICHET (Crarzes, fils). — Traité de Physiologie médico-chirurgicale. 2 vol. in-8 (1452 p ). Paris. Alcan. 75 fr. La physiologie, née au contact immédiat de la médecine, dont elle est trop longtemps restée l’humble servante, suivant l'expression de CI. Bernard, s’en est graduellement émancipée au cours du xix° siècle et est devenue une science indépendante, cherchant à déterminer, sur des bases physico-chimi- ques, les lois générales de la vie, en dehors de toute préoccupation anthropo- centrique. Le vrai domaine de la physiologie générale à l'heure présente est la cellule, unité véritable de la vie organique. La physiologie est pourtant, aujourd'hui plus que jamais, la base solide et immédiate de toute médecine ; la connaissance approfondie des fonctions normales est la base de la pathologie. Mais la physiologie générale actuelle, malgré toute son importance et ses progrès, devient un.peu trop lointaine de l'organisme humain pour les besoins de l'étudiant en médecine ou du médecin et du chirurgien. Il faut à ceux-ci, pour leurs besoins journaliers, une étude directe et spéciale des mécanismes du corps humain, une physio- logie anthropocentrique. C’est ce que MM. Richet ont eu en vue de réaliser. Tout en étant inspiré par ces préoccupations, leur ouvrage pourra être uti- lisé par les biologistes, quand ils auront à expérimenter sur les animaux supérieurs. LAVAL. — IMPRIMERIE BARNÉOUD, EXPLICATION DE LA PLANCHE IX Toutes les microphotographies in toto représentent les embryons vus du côté dorsal, sauf les microphotographies 2, planche IX, et microphotogra- phie 27, planche XII. Dans les microphotographies représentant les coupes longitudinales, l'extrémité céphalique de l'embryon est désignée par la lettre A. 1. Embryon de Poule, atteint de Cardiocéphalie. Stade jeune et {rès typique. 46 heures d'incubation. Microsummar de Lerz 42 millimètres. Grossi 18 fois. 2. La région céphalique du même embryon vue du côté ventral. Objec- tif aa de Zeiss. Grossi 50 fois. 3. Coupe longitudinale de la tête et du cœur de l'embryon précédent, au niveau de l’inflexion des bourrelels nerveux vers la droite. Objectif B de Zeiss. Grossi 150 fois. 4. Coupe longitudinale médiane du même embryon. L'ectoderme extra- neural adhère très fortement à la plaque cérébrale renversée. Même grossis- sement. 5 Coupe longitudinale latérale du même embryon. On voit une portion de la « plaque cardiocéphalique » refoulée très loin en arrière. Dans la fovea cardiaca apparaît l'ébauche du cœur. Même grossissement. 6, Embryon de Poule alleint à la fois de Platyneurie et de Cardio- céphalie. 33 heures d’incubation. Grossi 18 fois. 7. La région antérieure de l’embryon précédent à un grossissement de 50 fois. 8. Coupe longitudinale médiane du même embryon, montrant la forma- tion typique de la « plaque de cardiocéphalie ». Objectif B de Zeiss. Grossi 150 fois. 9. Coupe longitudinale médiane du même embryon. On voit l’infléchisse- ment de la plaque nerveuse vers le bas, caractéristique pour la Platyneurie. L’ébauche cardiaque reste à sa place anormale vers l'avant. Même grossis- sement. LE EM CHI STEP LANTA OMG Link Ave tua MOIGIQNaemelun 14, odunniqus ADRESTEAUULEE ter 2ût ferai alu @olodüoiciar ében ang Auger: re doing | 8h snuñrrnun VIE HIS -ounar huile sjiamoibies Re : Î 4 CIE Ampli 24 res ous Li =prut ages} din. bio lb ; MIE . | su Du + cr! TO “ri 1" L 11,75 NÉ “PER PER DES COTTEU DE 1 A LT CPR LIEN TE MNT EPICELE CA) PURE 5e: 2ù Better nf: ANDY Le UT rPiénh} pe MN Muréhuer Sur Lu he (at à so re su va it LR) sfr ee RSA LE DIE Age A 00 | » BP igfras pit au gébie va: NOTE tIC É ul EN Li | + shptr pe Fer Mb ut ne | Hibigee Aa RES Mate FT sb Le Mind vb ee # d'ini aus st 6h nue Lost Qi RETIRE) à (CITE UENTET ÉOENE CC: ET Pos CODIRSARETEUTIN ner Le sgbann LU UEE #b et abus de] ï , rc ON bot: #N Wie, 26 cadre varéeer arr Mir bnibu} tro 245008 ho: Ne A Éd # dei 1 4 ere” a! HN qupigot ndlr. LA pv “ao De hi dvesdue matin ddl 1 Mat gr pe. ÉHPCLEET eRe E est, See D dinRE à À fé ph CS FORTan pulg:rf ’. Su M Etagtineti Bulletin Biologique. T. LV. Planche IX anche Auctor, phot Phototypie Catala frères - Pari Cardlotéphalie. EXPLICATION DE LA PLANCHE X 10. Vue in toto d'un Cardiocéphalien de 40 heures d'incubation. Région céphalo-cardiaque. Objectif a de Zriss. Grossi 50 fois. 11. Coupe longitudinale médiane de l'embryon précédent. Plaque « car- diocéphalique » bien typique. L’ectoderme extra-neural pénètre très profon- dément au-dessous du repli antérieur du cerveau. Fovea cardiaca trans- portée vers l’avant, Objectif B de Zeiss. Grossi 150 fois. 12. Même embryon. Coupe passée plus à gauche. L'ectoderme extra-neural forme deux plis, dont l'un (X) s’insinue entre la lèle de l'embryon et l'endoderme du pharynx anormal, et l’autre (XX) se forme plus loin vers la périphérie, en se dirigeant vers l'extrémité antérieure de l'intestin cépha- lique. Même grossissement. 43. Même embryon. Coupe longitudinale latérale. Le pli ectodermique péri-céphalique (X) fortement raccourci. Par contre, le second pli (XX) con- tribuant à la formation de la fovea cardiaca, gagne sensiblement en pro- fondeur. Même grossissement. 14. Région antérieure d’un Poulet cardiocéphale de 48 heures. Objectif aa de Zeiss. Grossi 50 fois. 15. Coupe longitudinale médiane de l'embryon précédent. Objectif B de Zeiss. Grossi 150 fois. ; 2 A | LE NTET ne, à Etre {3,2% 0e h} Th TTAE LES AAA ANT " my" (n 2 rê Bulletin Biologique. T. LV. Planche X Phototypie Catalu frères - Paris Cardibcéphalle. EXPLICATION DE LA PLANCHE XI 16. Région antérieure d'un embryon de Poule, incubé pendant 48 heures, à lêle anormale : Cardiocéphalie masquée îx toto par l’épaississement anormal des bourrelets cérébraux. Objectif aa de Zeiss. Grossi 50 fois. 17. Coupe longiludinale de l’embryon précédent. Objectif B de Zeiss. Grossi 150 fois. 18. Vue èn toto d'un embryon de 47 heures, atteint de Platyneurie extrême et de Cardiocéphalie. Grossi 50 fois. 19. Tête d’un embryon de Poule de 24 heures. Forme légère mais accen- tuée de Cardiocéphalie. Grossi 50 fois. 20. Coupe longitudinale médiane de l'embryon Re Grossi )0 fois. 21. Embryon de Poule de 48 heures. Platyneurie avec transposition de l'ébauche cardiaque en avant de la tête. Bandeau du « parablaste sous- germinal ». Grossi 50 fois. 22. Coupe longitudinale médiane de l'embryon précédent. La disposition des ébauches d'un « faux Cardiocéphale ». Différencialion histologique du pharynx étalé. Grossi 150 fois. VAT LeruX FRE All: D eb H lil, tn | h « ‘ ! ; à 4 é .—, RIR 2 AIR ET 4! bay: £ CTREARM ETES SP EILIES #1 4 A Ar dur La (69740 7.1 7 a mbPinotonul roiiefigumsntint DÉC N RTIEL PSE ES TERRE CAN : Ci n RrRe ï ï > w “tu Û ; ii P 5 te 0 ‘ £11 s i Le 10 ; ; st «ter Je à, { h 1 LE { at Nr ‘ CAL PL \ 4547 all « k €” DNUUPATTEE nn , ' - U tome. ÿ Es MMS Alu MOT IERGAU LS è Bulletin Biologique. T. LY. Planche XI 20 Phototypie Catalu frères = Paris Cardiocéphlie. EXPLICATION DE LA PLANCHE XII 23. Embryon de Poule. 30 heures d’incubation. Platyneurie extrême, accompagnée d'une translation anormale de lébauche pharyngienne vers l'avant. Vers l'arrière, parablaste sous-germinal, Objectif aa de Zeiss. Grossi 50 fois. 24. Coupe longitudinale médiane de l'embryon précédent. Différencia- tion de l'intestin céphalique largement étalé en surface. Objectif B de Zuiss. Grossi 150 fois. 25. Embryon de Poule, atteint d'anomalies multiples. Platyneurie extrême, ébauche pharyngo-cardiaque transférée en avant de la tête. Dans la partie droite de l'aire transparente (X) le mésoderme est beaucoup mieux prononcé que dans la gauche. 47 h. 1/2. Grossi 50 fois. 26. Coupe longitudinale du même embryon Grossi 150 fois. 27. Vue du côté ventral d'un embryon platyneurique de 50 heures d’incu- bation — au cœur anormalement déplacé vers l'avant. Objectif de Zeiss. Grossi 40 fois. 28. Coupe médiane longitudinale de l'embryon précédent. Absence de pli ectodermique contribuant à la formation de la fovea cardiaca. Objectif B de Zeiss Grossi 150 fois. 29. Coupe longitudinale d'un embryon platyneurique ordinaire, de même âge que le précédent, à ébauche cardiaque bien conformée. On voit que l’ectoderme sous-céphalique pénètre loin en arrière, en formant unc fovea cardiaca à peu près normale. Objectif B de Zeiss. Grossi 75 fois. Bulletin Biologique. T. LV. Planche XII 26 Auctor, phot a Cardiocépialie, Phototypie Catala frères - Pari J Il 2... +22. _ ‘ te 1» LE, de #40 — 0 _. CRCRORE RS] Je te + CRC RE] +... +4 de ne de = « PRET L °s oO + La t'e + e* . s+- y 54 CAO A7 fu on s 0 0 SES ERA) o Pt ns LA + nn de = LE ds le 1e 0 à C2 $ “ KR …*.. (3 * =! + tete s'est ee + “ 4 + K: de , { es * + + Fig ed du Te pe + - K) F4 ds . 752 LL ns pe + L: site L2 se 32 Ra + GE tele etat etptet à rte nant : : Te 7. . etats x Te re æ 5: Res r LP rietis 3 4 se pt . AN : È LAC x ; Tr'atet | : trente SOS ue ne le .! eu! . 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