^,9^^//, BULLETIN nr. L\ SOCIETE DE GEOGRAPHIE. fluatrieme Serie* TOMX XV. L13TE DES PRfiSlDENTS HO.\ORAlKES DE LA SOClCxfi DEPUIS SON ORIGINE. MM. MM. MM. Marquis de Ltn.icE. l,c roiilie-aniiial Dumont I.'amir.il liaron Rocssm. Marcpiis de Pastoret. d'Urvii.i.k. I,'iiniiral laioiidc Mack*!;. V" de riiATEAi:BRi»>-D. Ddp DttA/.ES. I,e vicr-aniiriil Ham-.an. C (UiADiior, DE Vot.vic. (,'oinlt' do IMoxtai.ivet. li.iroii Wai.ckesaer. Recqih.y. Baron ilc J'aranif.. C^Morii. B°" Ai.EX. DE HuMEOLUT. I.f (jeiicial baron I'Er.ET. Jdmahd. (;" Chadhoi. DE Crousoi.. Guizot. Dumas. Baron Georgi's Cuvjer. De .Sai.vakdy. Le coiilre-aniiial Mathieu. B°° Hyde de Neuvii.le. Rarou TuriNiEr,. L« vicf-aiiiiral I .v I'i.aci. Due (le DoLDEAUvu.i.E. Baron de I. as ("A.tES. Hip. I'onTOur.. J. B. Eyries. • Vili.esiaim. LiFEm rk Durcfle. Le vicc-aiiMral de Ric.ny. Cunin-Gridai:? e. Guigkialt. LISTE DES CORRESPONDANTS fiXRANGERS DANS L'ORDRU DE LEUR NOMINATION. MM. MM. H. S. Tanner, a Philadilpliie. Le dooleur Baroffi, a Turin. W. WiioDBRiDGE, a Roslun. If c.)'onel Fr. Coti.i.o. a .Ma !rid. Le geni'ral I'.dward Sabine, .i Londrcs. Le prot'i .s\\()iiTn, a l.oiidri-.s. J.S. .\bert, colonel dts inyriiieurs to- Le colonel Long, a Louisville. Ky: piigrd|>hes des Etats-Unis. Le capitaine Maconochie, a .Sydney. Le profi-sseur Ar.EX. Baciie, surinlen- Le conseilli r de Mackdo, a Lishonne. dant dii Const-Survey, axis Elalsllnl'i, Le protVsscin- Kart. Rn ter, a Berlin. Lepsius (Ridiaid), de I'Aradeniie des Le cap. John Washingion, a Loudres. sciences de Berlin, a Berlin. P. DE Angelis , .i Buenos-Ayres. De Martiu*, .'■eciet. perpet. de I'Acad. Le diictenr Kriegk, a !• lancfoi I. . des siieu'cs de Bniere.a Miinieli, Adolplie Erman, a Berlin. KiErKRT(Heijri), a I!< rlin. Le ducteur W'ArrAiJs, a Goellinijlie. Petermann (Auguslus), a Gullia. Ferdinand DE LucA, a Naples. E. Lamansky, a Sainl-Pelersbourg. LISTE DES (:ORRESPONDANTS"tTRANGERS QUI ONT OBTENU LA GRANDE .MflOAILLE. MM. MM. t.e capit. sir J. FnArtKi.iN, a LonJres. Le ca|)il. James (^lark Ross, a I.ondrei. I.e capilame Graau, a Gopenli,iL;ue. I.e eapitaiiie R. Mac-Gi.ure, a I.onJres. Le cinilaine sir John Ross. ,i Londres Le doeteor llenii Rartii. a I," 2 1. J 858 <:0Mr()sni0iN di; iiiui ai ni: i.a socii^rrt POOR 1856-1857. President. M. DvussT, nieitibre de rinsliliit. „.„,._, I MM. D'AvE/xc. ( De i.a Koouettf. ( mm. cortambert. Scnitatetirs. < _ , i Sf.dillct. Secrftnirr. M. Ebncst Desjabdins. COMPOSITION DU BUREAU DE LA COMMISSION CENTRALF. POOR 1857. President. M. D'Avf.zac. f'ice-Pifsidents. IVIM. Jdmarh ft de Quatrefages, Je I'liistitiil. Secretaire s^eiieral. M. Alfred Maury, de l'Iii<>tilut, Secretaire adjoint. M. V. A. MAr.TK-BHurf. Section de Corresponilance. MM. A. d'Alibadio, rorr. de I'disiitut. MM. Do la Koquolle. C* d'EionyiJir de Laiiliii-e. Moriii. A. de Fruidrlonds des Fargf!.<. Noel des Vei'gei>, coir, de I'liist. de Fi oberville. Renaid. V. Oiierin. De Saiilrv, de I'liistittil. Oal)riel L.Tfond. Talabol. Section de Publication. MM. Corlambeit. MM. Loiiimatid, Daiis.iy, de I'lnslilnt. Manroy. Demoisav. Morel-Falin. Ernest Dtsjardliis. Sedillnl. Gii'giiiaiit. de I'ln^tiliil. Tremaiu. Jacob-. \i\ien d« .Saint-Mai tin. Section de Coniptahdite. MM. Allieit-Monlcnioiit. MM. Ganiiir. A. Barbie du Ki^rage, Left iivrf-DiiruQe. Alex, Bonneau. I'oulaiu de Ro5«, sur la rive droite du Svr-Daria, k 60 kilometres en amont de son embouchure, el a partir de celte ^poque, on a ouvert la navigation sur la mer. C'est an capitaine-lieutenant de la marine russe, M. BoutakolT, premier navigateur dans ces eaux, que la science est redevable de la con- naissance exacte et detaill6e de toute la mer. Pendant les deux ann6es suivantes, il a leve le plan de tons ses bords, visite toutes ses bales et sinuosit^s, d^crit ses groupes d'iles, deterrain6 la position astronomique des principanx points et mesrir^ la profondeur des eaux. De cette maniere, onposs^demaintenantune carte de cette mer aussi exacte et d^taillee qii'on puisse jamais le d^sirer, et on a eflectue depuis d'autres ti'avanx sur ses affluents. La plupart de ces importants travaux, des rela- tions des voyageurs qui ont visits r^cemment les khanats voisins des possessions russes, ont 6t6 publi(5s par la Soci^te de g^ographie de Saint-P6tersbourg. Quelques-uns de ses membres ont r6suni6 , dans des travaux sp^ciaux, les r^snltats de toutes les investiga- tions faites jusqu'a nos jours on rassenibl(5 tons les ma- (U) ' nusciits ainsi que les depositions orales des marcliands et de leurs conimis faisant le commerce avee les I^^tats de I'Aftie cpntrale. C'est hiiisi que M. Kliaiiykoffareproduit la carte de Id iupi- d'Aral, snr laqiiolle il a rt^snm^ le travail de M. Boutakofl', retrace les pays envirnimants comprls dans Ic bassin de la mer, prenant pour base tous les niat(jriaux cartographiques fournis par les voyageurs et les soumettant a une analyse critique (1). II a public en- suite la liste de tous les points de la partie nord-ouest de I'Asie centrale, dont la position a 6te d^termin^e astrononiiquement dopuis 1766 jusqu'a 1850, ct I'a accompagn^e d'un reseau g^ographique et d'une carte qui mettent en Evidence les lacunes que la science aura h combler dans I'avenir. M. N^bolsine a fait une 4tude sp6ciale sur Ic commerce do la Russie du c0t6 des stepjies d'Orenbourg avec les khanats de Kokan, Kbiva ct Boukbara, et a publi6 des notices intercssantes sur ces pays, sur les itineraircs des caravanes, en les compl6tant par scs observations judicieuses et I'opinion des bonmies initios h tous les details du commerce avec les pays asiatiques. Je vais presenter ici un court apercu g^ograpbique de la plaine duTouran, etje retracerai un tableau suc- tinct et g6n6ral des nloeurs des principaux kbanats : iJoukbara, Rbiva ct Rokan. Toute la partie nord-ouest de I'Asie centrale pr6- sente ce que les g(5ograpbcs appcllent une concavity (1) Cette carte a M i)ublieo on rrniicais, ."i Paris, par la Pocir-I^ tie geographic. ( 15 ) m^diterran^e. Enclav^e au siid dans la chatne de mon- tagnes Huulon-Kousch (Hindou-Kliou) , et k Test dans la chatne de- Bilo?; elle s'etend en pente dans la direc- tion du sud-est au nord-ouest, et s'arrete, a I'ouest des mers Caspienne et Aral, et au nord aux cotes m6- ridionales de I'Oural. Les points centraux de ses limites orientales et m^ridionales, fornixes par les montagnes s' ^levant en plusieurs endroits au-dessus de la lighe de neiges ^ternelles, ne sont pas destinies par la na- ture a servir de lieux d'habitation. Le milieu de la plaine est occup^ par la nier d'Aral, qui elle-nieme n'est entour^e a grande distance, de tous les cot^s, que par des steppes sablonneuses et arides, coupees seulement en deux endroits par le cours des fleuves Syr-Daria et Amou-Daria. Ainsi, k part les rives de ces deux affluents, il n'y a que les versants lat^raux des monts Oural, Altai', Thian-Chan, Bilor etHindou- kousch qui soient propres a recevoir une population s^dentaire et agricole. Or, la partie de la plaine rtiunis- saut ces conditions, n^cessaires au d^veloppement des soci^t^s, n'a qu'une faible 6tendue et ne forme pasnon plus une bande de terre , niais seulement uri groupe d'oasis entrecoup^es par des deserts et des sables. L'emplacement du Touran, entre I'lran ou la Perse, et rinde au sud, la Chine c'l Test, et la Russie au nord- ouest, en a fait naturelleinent la grande route histo- Hque, celle qu'ont suivie les peuples et qui a amen6 toutes les invasions d^vastatrices des races asiatiques, et en uieme temps laseule voie commerciale qui, avant la grando navigation sur I'Oc^an, a servi a mettre I'Europe en rapport avec les pays lointains de I'lnde. ( 16 ) D^s Ic xr sit^cle de notre 6rp, nous trouvons k I'cm- bouchure de W-Imnu-Dar/a un Etat indcpendant, d'une civilisation avanceeet d'line force politi(jue puissante. Le sultan de Khovarczni ^tcndit ses possessions au loin vers le sud, en conquerant Samarkand et Bou- khara, Farjab, Balkh, tout le Khorassan, le Mazende- ran et une partie du Turkestan chinois. C'est a la cour des shahs de Khovarezni que vivaient, k cette 6poque florissanto, les pi-emiers astrononie.s et geogra- phes arabes Albirouni et Avicenne ; c'est encore dans les riches bibliDtlieques de Alerve {Mnra ou .Intinchia Marginiin), alors villo iniportantc du Khovarezni, et devenue aujourd'hui un camp nomadc des Tarko- manes, que poursuivait studieusement ses recherches le cel^bre historien lakout. Mais la periode de I'influence politique du Rhova- rezni a ete aussi courte que brillante. En 1218, les Mongols, conduits par leur chef Gengis, out traverse les monts de Tliian-Clum et liilor et soul venus fon- dre sur les plaines de Khovarezni. La chute de cet empire a permis aux conqu6rants mongols de pent'trer, par la Perse et le Caucase, jusque dans la Russie. Apres la mort de Gcn^s, les discordes et les guerres intestines auxquelles se li\ r^rent ses heritiers , affai- blirent bientot et fractionnerent ses possessions im- menses. Profiiant de la faiblesse des descendants de Timour, un des chefs des Ouzbeks, tribu habitant au dela du Bilour, aconquis en 150i, a son tour, la Tran- soxiane et bientot apres une partie du Khorassan. Depuis ce temps, les Ouzbeks continucnt de dominer dans toute la plaine du Touran. Leur domination a (17) pris, (les le commencement, la forme d'un systfeme de petits I^tats, chacun avec son propre chef, reconnais- sant pourtant tons ime certaine d6pendance d'un d'entre eux, de I'^mir de Boukhara. II est vrai aussi que cette d^pendance n'6tait que purement noniinale , et qu'elle s'est effac^e avec le temps, au point que les chefs des Etats les plus ^-loign^s, tels que ceux du Kokan et de Khiva, ne s'abstinrent pas, k I'occasion, de diriger leurs attaques a main armce contre Boukhara menie. Ne reconnaissant pour lois et devoirs que leurs caprices et leurs penchants pour la domination, tons ces cliefs asiatiques vivent en discordes et guerres continuelles, et n'ont d' autre but politique que celui d'etendre leurs possessions aux d6pens de leurs voisins, ou de faire des invasions pour s'emparer des propri6tes d'autrui. Telle est encore aujourd'hui la situation peu avanc6e de la civilisation dans les diff^rents Etats disperses dans la vaste plaine du Touran. Les principaux Etats ou klianats sont : Rokan, Khiva et Boukhara ; ce sont aussi les seuls avec lesquels la Russie se trouve en rapports imm^diats, Le khanat de Kokan occupe la partie orientale du Touran. Sa limite naturelle est formee, a Test, par la grande chaine de montagnes connues sous le nom de De/oitr-Tag ou Biloiir, C'est une des branches de I'Hi- malayaqui, sous le 35°, 30' de latitude nord et 71°, 30' de longitude al'est de Greenwich, se s^pare vers Tangle droit de la chaine de Hindou-Kouch^ va perpendicu- lairement dans la direction du sud au nord, et en se ramifiant ensuite sous divers noms, atteint finalement la chaine de 1' Altai'. Le Belour-Tag est convert de XV. JANVIER ET FfiVRIER. 2, 2 (18) neige, ot on divisant le Kokan dn Kachgnr (province de Turkestan chinois), n'ouvre dans ses flancs (pi'un seul passage. Sous le 40" de latitude, le Belour- Tag lourne abniptenient h Test et entre dans le Tur- kestan de la Chine ou il porte le nom de Mousing (niontagnes de glace). Entre \ Hindou-Kouch et les sources du Syr-Daria, il se rami fie en phisieurs branches secondaires qui s'f^tendcnt, en s'abaissant, k I'ouest jusqu'a se perdre dans les plaines de Balkh et de Bonkham. Les valines fornixes par ces niontagnes constituent plusieurs provinces independantes, telles quo Karathi- giii-nc, Darrnz, Coul(if^,Schongnanet Bndakhschan. Les trois premieres liniitent les possessions du Kokan au sud , la derniere touclie imm^'diatenient a V Hindott- Kousc/i. Le klianat de Kokan confine h I'ouest avec les l^tats de Boukliara et de Khiva, ^dont il se trouve s^par6 pai' dcs sables. Enfin sa fronti^re septentrionales'6tend jusqu'a la riviere TschouT et jusqu'aux rives gauches du cours iuferieur du Syr-Daria. Au dela de ces li- mites, se trouve la ligne fronti^re des districts de Kir- ghizes d'Orenbourg et de Sib(^rie. Le khanat de Kokan se compose des provinces sui- vantes : 1° Azrcte, la plus septentrionale, et celle qui touche i\ la grande steppe du nord Bed-Pak-Daln ; '1^ Tdsc/ikeiite ; 3° Knriiriiiia, petite province surla rive droite de Syr-Daria, entre Tnsc/tkenfe et Kfiodjcntc ; h" Ount/iipa, entre Khodjente et Boukhara ; 5" h/iad- jente; 6° Nnnmnghnn, de la rive droite de Syr jus- qu'aiix monts Ala-Taou ; ct 7" province Ferghana, (19) entre la rive gauche de Syr et Karat i-^hene. La popula- tion du khanat ne s'eleve guere au dela de 300 000 ha- bitants. Le khanat de Khiva n'a pas de fronti6res d6termi- n6es. II forme une petite oasis enclavee dans les steppes du Touran et touche, d'un c6t6 a la partie sud de la mer d'Aral, d'ou il s'6tend sur les bords de I'Amou- Dara. Au sud, il est s6par6, du khanat de Boukharai par les sables, comnie a I'ouest par les steppes turko- manes, qui s'6tendent sans interruption jusqu'aux provinces septentrionales de I'lran et jusqu'a la nier Caspienne. Boukhara, entour^e de toutes parts de deserts qui la separent de ces deux khanats, forme le centre et touche au sud aux provinces de la Perse et aux autres ;fitats ind^pendants adoss^s a la chaine de I'Hindou- Rousch. Le syst^me fluvial de cette grande plaine, ou de la concavity m6diterran6e de Touran, se compose de deux grands fleuves qui donnent la vie a la vegetation et animent I'aspect triste et sauvage, par les riantes oasis groupees en partie sur leurs bords ou dispers6es dans les valines profondes des montagnes. Le plaii incline de cette contr6e nous montre d6jii la direction que les eaux doivent y prendre. C'est la mer d'Aral qui est le reservoir nature! de ces lleuves et qui communique au pays son caractfere general. A ce titre elle m6rite une mention particuli^re. La mer d'Aral est situ6e entre le 43o42'Zi'l"2 et Zi6"/i47i2"2 de latitude iiord, et entre 58»18'/i7"7 et : 61°/i6'A"48 de longitude a Test de Greenwich. Elle ' "• ( 20 ) s'^tend presqne autant en longueur ffii'en largenr, k part la partie nord-est qui penetre prolbndenient dans le continent et forme une grande bale niediterrance. Cette derni^re porte le nom de la Petite Uler, pour la distingiier de la partie principale appel6e la Grande Mer. La superficie de la derniere est de 1000 milles carr^s g^ographiques. La profondeur de la mer atteint an milieu 15 brasses marines (de 6 pieds chaque) et va en augmcntant vers le bord occidental ; pr6s des lies qui se trouvent en mer, ainsi que vers les bords nord, est et sud, la profondeur diminue graduellement. Les bords de lamer pr^sentent lavued'un triste desert. En 6t6, a part qiielques endroits sur les cotes orien- tales et meridionales, ils ne sont pas habit6s; en hiver, les Kirghizes viennent canqier de pr^f^renoe sur les bords septentrional, oriental et sur quelques-unes de ses lies. La cote septentrionale est compos^e en grande par- tie de couches argileuses et de terrain salin, qui for- nient des 6l6vations de 100 a 300 pieds anglais au- dessus du niveau de la mer, et vont, en s'amoindrissant aunord, se joindre aux grands sables Barsonki. Lac6te occidentale est nettement dessin6e par les bords du plateau Oust-Ourt. Sous le nom d'Oust-Ourt, on com- prend I'isthme qui st^pare la mer (laspienne de celle d'Aral, Get isthme a la forme d'un plateau (^lev6 dont la hauteur atteint pres de 600 pieds au-dess-s du ni- veau de ces deux mers. Sa superficie est entour6e de bords abruptes et assez elevt^s qui dessinent nettement son contour. Ses bords touchent a Test a la mer d'Aral et s'^tendent encore h 100 kilometres au sud; ,( 21 ) ensuite ils se dirigent a I'ouest, et plus loin an nord- ouest , en toiichant au golfe de la iner Caspieniie , Kaidak, dont ils forment la cote orientale, passent devant la c6te sud du golfe Mertt'oi-Koultouk, et a partir de ce point vont, dans la direction nord-est, re- joindre les monts Mougodjnr. Dans cette partie de son etendue, les bords du plateau Oust-Onrt sont bas et meme disparaissent totalement en faisant place aux sables dits Bolschie- Barsouki. Les officiers attaches k I'exp^dition du colonel Berg, MM. Anjou, Zagoskine et Dnhamel, ont fait un nivellement barom6trique entre Mertw'i-Koidtouk (mer (iaspienne) et la mer d'Aral, sur une 6tendue de 245 kilometres, en allant droit k r orient sous le 42° de latitude nord. Le r^sultat de cette operation constata que le niveau dela mer d'Aral se trouve h. 117,652 pieds anglais (pr6s de 35™, 86) au-dessus de la mer Caspienne. Le niveau de cette dernifere, corame nous le connais- sons par le beau travail des astronomes Fuss, Savitch et Sabler, de 1' Academic de Saint-P6tersbourg, se trouve a 84 pieds anglais (pr6s de 25™, 6) au-dessous du ni- veau de la mer Noire. Ainsi, la position respective de ces bassins est la suivante : Mer Noire 0 — Caspienne... — 84 — d'Aral -j-37,6 pieds angl., pri« de Il^.S?. Au sud et a Test de la mer, ses bords sont bas, sa- blonneux et converts en partie de roseaux et de brous- sailles. Chacini de ces fleuves, qui tombent dans la mer, a ( 52 ) pr^S de 500 lieues de parcours. Le Syr-Daria (laxarte des Grecs et Seihoun des Arabes) prend son origine dans la chaine des montaj^nes qui s^pare" le Kokan du Kalhgar. 11 sort de plusienrs sources et dirip;e son cours d'abord a I'ouest, puis, ^ partir de Khod- jente, il tourne an nord et va dans cette direction jusqu'i la hauteur de la ville Jzrete ou Turkestan. De ce point, il conduit ses eaux , en tenant toujours le nord-ouest juscfu'a son embouchure. La plus grande partie de son parcours se trouve dans les possessions du Kokan. En passant par Jk-Mctchet , niaintenant fort Perowskr, il se partage en trois branches : celle du nord conserve le nom de Syr, la centrale s'appelle Kom'an-Dnria, et la m^ridionale lany-Daria. Le cours inferieur du fleuve entre deja dans les limites des frontiferes I'usses. Dans la partie sup6rieure de son parcours , le Syr arrose un terrain montagneux et bois6 , et recoit une multitude de petits affluents; mais, a partir de son cpude au nord pr6s de Khodjente, il borde a gauche une vaste lande de sables, Kizil-Kaum, (\\i\ occiipent tout I'espace entre lamerd'Aral et les cours inferieurs de Syr et Anion. Au point de la division du fleuve en plusieurs branches, k sa droite, commencent les sables Kara-KoHin , qui s'6tcndent au nord-ouest. Dans la secpnde moiti6 de son parcours, le Syr Tie recoit plus aucun affluent, et, s'approchant deson embouchui'e, se partage en une multitude de bras. Les iles que ceux- ci forment et les bords du fleuve sont converts de ro- seaux qui remplissent presque toute la largeui' de la vall6e. { 23 ) Le cours sup^rieur na pas ete jusqu'ici examine par • les Europ6ens, mais on raconte que le Syr deviant dfes son origine€onsid6rablement large et profond,et reste navigable dans tout son parcours. Cette derni^re con- dition n'est jusqu'a present d'aucune utility reelle. L' importance de ce fleuve se fait sentir plutot pour I'agriculture qui, en creusant des canaux de deriva- tion, se sert de ses eaux pour arroser les champs. Les habitants de la plaine du Touran excellent aux travaux hydraidiqiies, et le systeme de leurs canaux, joint a la douceur du climat, explique la richesse de vegeta- tion et r excellence des fruits qu'ils produisent sur un sol souvent impropre a la culture. Les embouchures du f[euye sent obstruees par des bancs de sable, entre lesquels la profondeur du lit atteint rarement 3 pieds. La seconde branche du fleuve, Kouvan-Daria, tourne a I'ouest et se partage bientot en cinq nouvelles bran- ches qui se reunissent encore une fois et vont se perdre dans les sables avant d'atteindre la mer. lany-Daria ou lanya-Daria, la troisieme branche, est d'origine recente. Suivant les t6moignages de Kir- ghizes, elle s'est formee en 1760 et 1770, s'etant de- tachee du Kkoiwan-Darla. Elle tombait dans la partie sud-ouest de la mer e,t etait encore assez considerable pn. 1816. Le baron de Meyendorf, a son passage dans ces endroits, en 1'820, lors de son voyage a Boukhara, n'a trouv6 a sa place, que le lit desseche de la riviere. De- puis, en I8Z|9, on a decouvert, dans la partie sud-est dela mer, une embouchure profonde d'une riviere por- tant aussi le nom de la in- Darin. Serait-ce I'ancienne branche du fleuve Syi\ qui auraitrepris son cours, ou. ( 2A ) comme on en a fait la supposition, une nouvelle branche qui se serait tl6tach^e cln fleuve Jmon ? Cette question ne nianquera ])as d'etre r^solue par des investigations ult^rieures, vu I'iniportance de la navigation qui s'y attache. \J Jmou-Darin [Oxiis des anciens, Djeihoun des Arabes) prend son origine dans le lac Sar)-~Konl, situ6 sur le grand plateau ^lev^, Pnmir. Ce grand plateau du Turkestan de la Chine, qui s'appuie de tous c6t6s, a I'exception de celui de Test, sur les flancs neigeux du Belour-Tag, a une superficie de pr6s de 100 niilles geographiques et s'6l6ve k 15 000 pieds au-dessus du niveau de la mer. D^s son origine, r\niou tient son cours sinueux dans la direction sud-ouest et traverse le pays monta- gneux de la province howulmiz ; plus loin, pres de Balkli, il tourne au nord-ouest et va presque en ligne directe, ci travers les possessions de Boukhara et de Khiva, jusqu'i la mer Aral, qu'il atteint en se divisant en plusieurs branches, Sur tout son long parcours, qui n'est gu^re moindre de 500 lieues, le fleuve Amou arrose plusieurs petits £tats ou provinces indi^pendantes de khanats, que nous avons eu occasion de nommer plus haut. En quittant le plateau Pamir, I'Amou parcourt d'a- bord le pays montagneux et froid nomm6 Jf'ohknn ; le fleuve recoit ici cinq affluents, ce qui lui fait porter le nom de Pcndj^UnHa. De sa rive gauche il touche au sudune autre province montagneuse appel^e Badnkh- scknii, connue par son bon climat, son site pitto- resque et ses cel^bres mines de rubis. Dans cette pro- (25 ) vince, le fleuve recoit encore plusieurs petits affluents dont la riviere Badakhsclmn est le plus considerable, et c'est seulement h. partir de ce point que le fleuve commence a porter le nom d'Amou. De 1' autre c6t6 de rAmou, en face du Badakhschan , se trouve un pays sauvage, peu peupl6, connu sous le nom de Khout- tel; plus loin, au sud du fleuve, s'6tend la valine de Koundoitz , et au nord, VodiSi?, Hissar. La valine de Koundouz est arros6e par deux rivieres, sur les bords desquelles sont situ6es les deux villes Koimdouz et Talihan. Ces deux rivieres, en se joignant, ferment la riviere Jk-Sera'i^ qui porte ses eaux dans I'Amou. A I'ouest du Kourndouz, se trouve une autre petite val- ine, Hoidown, et plus loin la province Bnikh, s6par6e de I'Amou par une bande de terrain aride. A partir des provinces de Balkh et Hissar, le fleuve continue son cours jusqu'a son embouchure, a travers une plaine sablonneuse et d^serte. Du c6t6 gauche, imm6diate- ment apr^s Houloum et Balkh, il touclie aux grands sables turkomanes , qui s'^tendent de ses bords , h I'ouest, jusqu'au plateau 61ev6 d'Oust-Ourt , la mer Caspienne et jusqu'aux montagnes qui bordent les provinces septentrionales d'Iran. A sa rive droite, k partir de KalifetdQ TschardjoiU (petit fort boukharien) viennent se joindre les sables KisU-Koum, Dans cette partie de son parcours, les bords du fleuve sont bas, mais a quelque distance de I'une et de I'autre rive se trouvent d'autres bords plus 6lev6s qui, tantot s'approchant, tantot s't^loignant du lit du fleuve, for- ment ainsi une 6troite vallee coupee dans tous les sens par des canaux d'irrigation. La vegetation est riche, le ( 26) sol est convert degroupescVarbresfeiiilluSjClpouriant, dans plasicursdc CCS ciiJroits, lavallt'c rcsle inliabilee. La plus large bandc de cetlo vallee et la niieiix cultiv6e se trouve dans les possessions du klianat de hhiva. L'Auiou-Daria, avaut de recevoir du Koundouz son principal tributairc, \ Jk-Seia'i, n'a qu'une largeur do 200 et quelqiie^ lu^tres et presente des gi^^s passables ;i tout endroit; mais, a partir dt; cette jonction, die devieut jiavigable sur tout son parcours ulteneur. Les principaux points oil Ton passe le fleuve en bateaux sont les suivants : Temiez, sur la route de Samarkand a Balkh ; h'a/i/', siu' la route de Boiikliara a Balkli. A 25 kilometres a I'ouest de cette derniere , le fleuve atteint une largeur de plus de 700 metres, et sa profon- deur va de 2 a (i et nieme a plus de 8 metres. Encore plus loin, lo fleuve s'^largit jusqu'i plus de 800 metres, maximum de sa largeur dans tout son parcours. Les autres passages se trouvent encore a A //A/, sur la route de Boukhara a AnkhoiQi a T.sc/uuv/joui, sur la route de Boukhara ci Meive. L'liiver, le fleuve est con- vert de glace et les passages s'eHectuent beaucoup plus facilement. Le commerce ue tire jusqu'a present aucun profit de sa navigability. Le peu de bateaux que Ton construit dans les Etats riverains atteste reniance de I'art cbez ses habitants. La plupart de ces barques ne parcourent le fleuve que dans les possessions de Uou- kharn, I'Etat le plus avanc6 en civilisation de cette partie du Touran. L'Amou-Daria verse ses eaux dans la mer d'Aral, en se divisant en plusieurs branches dont les trois sui- vantes sont les principalcs : labranchc occiileuiale suit (27) le long du plateau Ovist-Ourt et tombe dans le golfe Kyn-Kamyss ; son embouchure n'a que deux pieds anglais de profondeur et est toute couverte de roseaux. L9.branche du milieu se jette dans le golfe Taldjk en se s^parant pr^alablement en une multitude de petits canaux dont plusieurs out 6t6 faits artificiellement par les Kirghizes pour I'irrigation de leurs champs. II n'y a qu'une seule de ces branches qui atteint la profon- deur de 3 pieds, ]es autres sont beaucoup moins pro- fondes. La branche orientate Djo.lpak entredans le golfe Kouk-Ousuk et a un courant tr^s faible. Enfin, Djany- Davia ou lany-Daria est peiit-etre la quatri^me et la plus considerable des embouchures de I'Amou. Autre- fois I'Amou-Daria versait aussi ses eaux dans un des golfes de la mer Caspienne ; on en voit encore des traces dans les steppes et Ton en trouve des t^moignages dans les livres. Quant a la question de savoir a quelle 6poque elle a abandonn6 son ancien lit, et par suite de quelles raisons, les suppositions plus ou moins ing6- nieuses qu'on a avanc6es a ce sujet, n'en rendent la solution et les recherches que plus desirables. A part ces deux grands fleuves et leurs tributaires, dont nous avons donn6 la description en traits g^ne- raux, il n'existe dans toute cette partie de I'Asie cen- trale que les riyieres moins considerables qui se per- dent dans les sables des deserts et que nous laissons ici sans luention. . Le systeme hydrographique et le caractfere orogra- phique de la plaine, ainsi que la position respective des Etats que nous avons vus, en suivant le cours des fleuves, peuvent dej5, nous donner une idee du climat ( 28 ) et des richesses naturelles du pays tout entier. La V(5'g6tation ne s'y trouve que dans les oasis dispersf^es sur les bords des flcuves ou cach^es dans la profondenr des vallees. Tonte cette plainc etant ainsi ouverte au nord-ouest, donne acc6s au souffle des vents et aux froids du nord. Les grandes chaines de montagnes qui la d^fendent au sud la pr6servent aussi des vents nuisi- bles de 1' Asie m6ridionale, et tempferent I'excfes des cha- leurs. Vu les circonstances locales et les accidents de terrain de cette contr6e, le cliniat y est trfes vari^ ; la v6g6- tation s'y concentre sur des points 6pars, les plus favora- blement dott^s par la nature, ou s'obtienta grands efforts de travail, au moyen des canaux d'irrigation, le seul art que les grossiers habitants d'aujourd'liui aient conserve du temps do la civilisation (lorissante des Arabes. Quant a la richesse uiinerale du pays, il n'y a aucun doute sur son existence dans les flancs des montagnes, qui avancent par leurs ramifications dans les valines de la plainc. On a meme constats, en plusieurs endroits, la presence d'lme grande vari6t6 de mines ; mais I'^tat arri6r6 de la civilisation ne permet pas aux habitants d'en savoir tirer profit. En parlant des relations com- merciales (ju'ils entretiennent avec la Russie, nous au- rons encore occasion de designer les produils de leur Industrie qu'ils 6changent et complt^ter par la notre aper^u physique, Passons maintenant aux habitants de ces pays , a leurs moeurs et k I'^tat de leur civilisation actuelle. Nous allons nous occuper de preference de trois prin- cipaux khanats : Boukhara, khiva et Kokan, tels que nous les connaissons par les t^moignages oculaires des (29) personnes qui les ont visiles plus d'une fois et se sont trouv^es en rapports directs avec avec leurs habitants. Nous suivrons dans cette partie du travail principale- ment les 6tudes sur le commerce de ces khanats, pu- bli6es derni^rement par M. Nebolsine, Le klianat de Boukhara, occupant le milieu de I'Asie centrale, est ime des plus riches oasis plac6es entre les petits foats ind^pendants dont il est s6par6 de tous c6t6s par les sables. II est comme un jardin florissant, d'une verdure et v^g«^tation luxuriantes, que relive la vue aride et monotone du desert. Aussi Boukhara forme-t-il le point central du commerce asiatique dans cette partie de la plaine, et pr6sente-t-il en meme temps le milieu d'une civilisation beaucoup plusavanc6e que ses voisins. Plusieurs des voyageurs qui ont visits la ville de Boukhara I'ont meme surnomm6 I'Ath^nes de I'Asie centrale. Mais gardons-nous bien de nous laisser ^blouir par cette denomination qui n'est rien moins que la v^rit^. Le sens de ce surnom pent encore etre tant soit peu juste, si nous comparons Boukhara k Khiva, Kokan ou aux Kirghizes nomades des step- pes. On se tromperait toutefois si Ton voulait juger ces pays et leurs habitants d'aprfes les id6es euro- p6ennes, et donner aux choses ext^rieures un sens beaucoup plus 6tendu qu'elles n'ont r6ellement au fond. C'est ainsi pourtant qu'on appliquait parfois k r^cole [medresse) de Boukhara le nom pompeux d'uni- versit^. On comprend mieux la comparaison de Boukhara i Ath^nes, lorsque Ton saura que, dans cette fameuse (30) 6cole qu'on gratific dii nom d' university, les etudiants aont des enl'ants degiienilles et les piofcsseurs des uioiillahs (prelres inalionj6tans). Ces deriiiers se pro- minent dans raiiditojre, le baton noueux a la main, et en appliquent genereusement des coups sur le dos de leurs auditeurs sitot que ceux-ci, fatigues de d6chirer leurs poumons a crier les versets du Koran ou les vers des chansons de Haliz ou Saadi, baissent de ton ou prononcent les paroles sacramentelles a voix enrou6e. Tout le cours de I'^ducation dans cette University se borne k apprendre k lire et k ecrire, et k reciter par cceur les prit^res on quekpies versets des poetes. C'est ainsi que doivent etre jugt^s, dans leur sens relatir, les hommes et les choses a Boakhara. 11 ne faut pas oublier surtout que les Boukliariens, comme tous ies autres peuples del'Asie, sont grossiers, sales, faux, et priv6s, par le syst^me de 1' Education asiatique, par les moeurs et les usages, de toute id6e claire de droit ou de justice. En r^alite, I'habitant de ce pays n'est gu6re plus d6velopp6 moralement que le Kirghize no- made, avec cette difl'^rence qu'il a un domicile, un vernis de civilisation ext^rieure et un savoir-vivre tout asiatique, dont il prolite dans ses rapports avec ses confreres. Les Boukliariens passent surtout pour etre aimables. lis sont plus sociables que leurs voisins et plus tolerants envers les 6trangers, a ])art toutefois les Chretiens, pour lesquels ils ont une haine prononjc6e. Mais la se borne leur sup6rioritti. Le gouvernement de ]rirn])orte lequel des Etats asiatiques nese soutient que })ar un systi^me de menace, de cruaut6 et de tra- hison. 11 u'aaucune conscieucede I'idee de droit inter- ( 31 ) national ou cles devoirs et ties obligations de trait^s et de conventions. Voila pourquoi ni rapports diplomati- ques, ni conditions par 6crit ne sauraient exister entre ces pays et leurs voisins. L'emir ou le khan signera tout ce qu'on lui iraposera, mais il n'ex^cutera aucuno des clauses tant qn'il ne se verra constainment sous la menace d'une force toujours prete a fondre sur sa tete. On ne trouve point a Boukhara une classe d'habi- tants s' occupant sp6cialement du commerce. Tout le monde y est marchand, ou, pour mieux dire, trafiquant. Chacun achate et vend tout ce qui lui tombe sons la main et promet qxielque gain.ch^tif. Les principaux capitalistes qui font le commerce plus en grand, ce sont les premiers dignitaires de Boukhara, les minis- tres, les parents de l'emir et l'emir lui-meme. Ce der- nier a ])ourtant assez de tact pour cacher ses opera- tions commerciales et ne prend part qu'en secret au commerce avec la Russie, en confiant ses int^rets aux agents qu'il choisit lui-meme. Ordinairement l'emir prfete, dans ce but, de 1' argent ^ ses sujets, en donnant a qui cent, deux cents, cinq cents et quelquefois jusqu'a mille tilla (monnaie du pays, ou pifece d'or de la valeur de 14 ^ 16 francs). L' agent qui recoit ce pret en numeraire ou en mar- chandises va lui-meme avec la caravane en Russie, et apr^s avoir 6chang6 ses produits, rend, k son retour a Boukhara, a l'emir, non-seulement tout ce qu'il a re- tire deson n6goce,mais souvent ajoute encore quelque chose de sa poche. Le but d'lm tel tharchand ou agent de l'6mir n'est pas le profit imm6diat da commerce, mais I'espoir de gagner la grace de son souverain et ( S2 ) d'obteuir de sa faveur line place pour administrer une ville ou line province. L'exercicedeses fonctions, des- quelles il ne rend compte a personne, lui perniettra alors, k son tour, de regagner bien vite les sacrifices et les pertes qu'il a fails pour les obtenir. En jouissant par la suite des prerogatives de sa place, il n'oubliera pas non plus de partager ses revenus et ses b^nt^fices avec r^mir et les hauts dignitaires qui I'environnent. L'6mir ne se contente pas toujours de ces dons volon- taires. Se basant sur les opinions orientales de son droit illimite, il prend aux capitalistes ce qui lui semble su- perflu pom* les simi)les particuliers, et, sans aucune forme de proems, confisque tout le bien d'un richard qui a I'imprudence d'excitersa cupidite. Parfois il fait annoncer a tons les marchands sans exception I'ordre de verser dans sa cassette telle sonime d'argent , sans compter les impositions ordinaires. C'est de cette ma- nifere que I'^mir a pris il y a dix ans, sur les marchands indigenes faisant le commerce avec la Russie , une somme de ZiOOOO til/a (pr6s de 000 000 francs). Le montant a 6t6 vers6 sans retard au tresor de I'^mir. Les traits g^n^raux que nous avons esquiss^s en parlant du genre de civilisation de Boukhara et de son gouvernement peuvent etre, a quelques K'g^res diffe- rences pr<^s, appliques aux deux autres khanats, Khiva et Kokan. Les gouvernements de ces derniers surpassent en- core celui de Boukhara en licence et en usurpations de tout genre. Quant i leurs habitants, ils le cWent de beaucoup aux Boukhariens sous le rapport moral , dans leur mani^re de vivre, dans la somme de leurs (33) besoins et des moyens de les satisfaire. Khiva et Rokan, aux yeux d'un hommequi ne connait pas 1' Orient, doi- vent paraltre k premiere vue comme des pays d6vast6s et dans nne position voisine de la mis6re la plus absolue. Les seals progres qu'on remarque a Khiva depuis le commencement de ce si^cle se bornent encore k tr6s peu de chose. Les habitants commencent pen a pen k sentir le besoin d'acheter des 6toffes plus solides et k appr6cier la nouveaut6 de dessins ; ils out fait meilleure counaissance des monnaies russes et de leur valeur ; leur khan a trouv6 bon d'ajouter a son bonnet pointu on peau de mouton une plume d'autniche. II a envoy6 aussi dans toutes ses villes I'ordre de ne plus acheter ni aux Kirghizes ind6pendauts ni aux Turcomans les prisonniers russes. Cette derni6re mesure, d^pechons- noLis d'ajouter, n'a pas 6t6 dictee par un sentiment philanthropique, mais par des circonst5.nces de force majeure. En 1850, le khan a form6 un bataillon de troupes reguli^res avec un certain nombre de pieces de canon. Les t^moins oculaires qui ont vu I'artillerie indigene k I'exercice assurent que, de cent artilleurs, j^as un ne pent atteindre au but k cinquante pas de distance, et ce n'est point une cible ordinaire qui leur sert de point de mire, mais une montagne isol6e. Les Khiviens sont pourtaut bons tirailleurs et se servent tr6s bien de leurs longs fusils. Quant au nombre total des troupes, on raconte que le khan de Khiva peut mettre sur pied pr6s de 25 000 cavaliers arm6s de sabres et de lances. Sur cette quantity, il n'y en a gu6re plus de 5 000 ar- XV. JANVIER ET FfeVRIER. 3. 3 ( 3/i ) m6s de fusils. Lc courage des Khivinns, cnmme rolni de tousles peuples asiatiqiios, n^ (Impend qiiechi succfes dela i)reini6re attaque, niais une seulc fusde k la cou- gr^ve siiflU pour mettrc toiite leur arm6e en fuite. Les hal)itants de Khiva vivent dans des masnres coustruites avec de la terre jjlaise, qu'on applique en monceaux sm- des lattes forniant la carcasse dea nuu"s. Toutroruement consiste, chez les pauvres, en couver- ture de feulre grossier. ou chez les riches, en ta])is qu'on 6tend par terre en guise de plancher. Les autres accessoires d'anieublenienl se composent d'un coflre en bois qui sert k contenir les v^tements, de quelques plaiiches avec la vaisselle et d'une chaudi^re sus- pendue au milieu de la chanibre. La fum^e du feu al- luni6 au-dessou8 de la chaudi^re n'a d'autre issue qu'une onverlure pratiqu6e dans la loiture plate do la maison. On se passe, dans ces ])ays, de chassis, tie portes et de fenetres et de carreaux de vitre, lesquels ne se trouvent a Khiva que par exception dans la de- meuie du khan. Toute la richesse du Khivien consiste dans son champ ou croissent le cotonnier, le colza, leriz, le bl6, I'orge et le djougnra (une esp6ce de sarrasin •, dans son jardin potager, ou il cultive les melons d'eau et cantalOus, et dans un jardin fruitier, qui lui rapporte des raisins, des prunes, des pommes et des abricots. Le costume des Khiviens ne se dislingiu' gu6re de celui des habitants des Etats voisins. lis portent une longue chemise d'une etofle grossi^reen cotoji, k man- ches larges, et un pantalon du m6me tissu, entrant dans des bottes longues et a bout pointu ; la t^te est (35) cnuverte d'nn long bonnet de feutre et d'un second en peau de mouton qu'on met snr le premier; une cein- tm'e de laine et sole, ou a sa place ime pifece de inou- clioirs de poche et un long pardessus en forme de robe de chambre complfetent la toilette. Les pardessus ne se font que de coton ou de coton et de sole mel6s, les 6tofl"esde soieetant, comme articles de luxe, defendues par le Koran. La seule grosse d6pense que fait le Khivien est un cheval de race turcomane et.tm riclie harnais, pour lesquels il ne regarde pas a I'argent. Les personnes de distinction portent un coutelas ou un poignard a leur ceinture ; les fenuiies non plus ne se permettent aucim luxe dans leur toilette. Leur costume est le m6me que celui des hommes; marines, elles portent sur la tete un turban de calicot ou d'une ceinture de soie ; les lilies ajoutent k cela un grand bonnet pointu en feutre. Les Boukhariens et les kokaniens sont faciles a dis- tinguer par la forme de leur coiifure. Au lieu du-long bonnet de feutre , les premiers portent des turbans pointus et les seconds des bonnets beaucoup moins 6lev6s et d'une forme arrondie. Les habitants de Ivliiva pr6ferent pour leiu- pardessus les 6toffes vertes, som- bres et bariol6es, ceux de Boukhara et de Kokan des couleurs marquantes, claires et ray6es. La nourriture des habitants de Rhiva est plus que modeste et tr^s peu vari6e. Le mouton au riz, auquel on ajoiitedes morceaux de graisse et des galettes cuites sur les parois d'un pot de terre chauffe presque jusqu'au rouge : voila tons les plats de la cuisine khi-i vienne. ( 36) On prepare de ces galettes pour plusieurs jours k la fois, vu la chert(^ chi combustible; les pauvresne les font menie jamais a la niaison, mais les achtJtent au bazar. Le mouton au riz n'est servi tons les jours que chez le khan et les principaux diguitaires. Chez les autres, il ne parait sur la table que le vendredi, leur jour de fete. En place decet extra, les gens moins aises se contentent, pour leur ordinaire, d'lm bouilli prepar6 de la mani^re suivante : on verse dans la chaudiere en fonte, tr6s rarement nettoy6e, de I'eau; on y ajoutede la (Ijougara en grains, quelques pois, des feuilles de betterave hach^es et du sel. Quand I'eau commence k bouillir le plat est pr6t. Les maitresses de maison pr6- parent de cette soupe en quantity sufllsante pour deux ou trois jours, et on ne la mange chaude que la pre- miere fois. On sert la soupe dans de grandes tasses ; quant a son r6sidu de mouton bouilli et k tons les in- gredients, on les mange sans cer6monie en se servant des doigts. La fourchette et la cuiller sont des objets inconmis k ces \siatiques. Apr6s le diner, on se lave les mains, et le maitre de la maison pr^sente pour les essuyer un essuie-main de calicot d'une proprete plus que douteuse, ce qu'il fait avec I'intention de prouvei* k ses h6tes qu'il recoit souvent chez lui des convives. On ne peut pr^ciser au juste I'heure ordinaire du repas. Tons les Khiviens, a comniencer par le khan et jusqu'au plus pauvre, mangent immediatement aprfes un long sommeil. Mais, il faut le dire, ces gens (lorment rarement la nuit, et ne secouchent la plupart dii temps qu';\ lapointe du jour. Lereste de la journee. (37) c'est-a-dire apr6s le diner, ils coiisacrent leurs loisirs h fumer le kalian et a prendre du th6. L'eclairage des maisons se fait au moyen de m^ches de coton tremp6es dans I'lruile de colza ou dans la graisse de mouton ; on emploie aussi des chandelles tr^s longues et tr6s minces ou Ton se con ten te quel- quefois de pale reflet du foyer allum6 au milieu de la chambre. Les Khiviens aiment beaucoup la musique. Le klian lui-meme invite souven^ dans son palais les comniis des marchands russes qui sont habiles a jouer Y har- monica,ei s'en donne a coeur joie £ entendre les chan- sons nationales qui le mettent dans une extase convul- sive difficile a calmer. On comprendra aisement les transports du khan, quand on aui-a^entendu les musiciens indigenes de Khiva ou de Boukhara. II faut les voir particuli^renient dans les moments oil, entrain^s par leur inspiration artis- tique, ilssemblent avoir oubli6 la terre et le ciel etrou- lant le blanc des yeux, arrachent des sons discordanls de leur guitare, en les accompagnant des hurlements nasillards et monotones d'une ballade orientale, Les instruments de musique usit6s dans Khiva et dans les pays voisins sont : la balala'ica, esp^ce de petite guitare ; le kobyz, instrument qui a la forme d'lm violon ou plutot d'un violoncelle grossiferement travaill^. Deux faisceaux de crins tendus au moyen de chevilles rem- placent les cordes. On en tire des sons, en promenant dessus un archet enduit de colophane; la handoure, ou guitare k trois cordes m6talliques qu'on pince avec un seul doigt au moyen d'un petit d6 muni d'un crochet ; ( 38) lo tambour ill : le var^auc, esp^ce de guinibarde ; c'est iin petit instrument de I'er en forme de tire-bouchou fcim^, dont on joue en le placant dans la bouche cntre les dents.et en faisant vibrer du doigt le petit ressort du milieu. C'est I'instniment qu'omploient exclusivement 1p9 dames khiviennes pour charmer leurs loisirs ; \liar- monicn, instrument devenu si populaire en Russie et danstoute rEnrope : et les buiteset /es tabatirres a inii- xif/iie, comine article d'importation et des objets de pri\, ne se troment que chez les plus riches des khiviens. Ni leshonmiesni les femmes de ce pays ne s'adonnent k la danse, mais ils aiment par contre beaucoup voir danser les enfants. Tout ce que nous avons tach^ d'esquisser sur la mani^re de vivre et sur les moeurs des Khiviens pent fetre k peu de chose pr^s appliqu«^ k leUrs voisius. Le klianat de Boukhara fait sous ce rapport une l^gfere exception et semble r^flechir, au moins rpiant aux conditions ext^rieures de la\ie, une civilisation plus avanc^e. C'est ainsi que flans la capitaledc ce dernier on voit des maisons a plusieurs stages semblables k nos con- stnictions europ^ennes, L'int^rieur des maisons parta- g6es enchambrespr^sentesoiiventdes ornemenls d'une certaine richesse, comme par exemple les murs et les plafonds recouverts de dessins dor«^s ou d' incrustations de lapis-lazuli ; mais ici, comme ailleurs, les chassis des portes et des fenetres, comme les carreaux de vitres, ne se trouvent que par exception dans les habitations des plus grands dignitaires. Les maisons a Boukhara sont aussi entourees. de tons c6t6s, de hauts murs en ( 39 ) lerre glaise, Le voyageur, en se proineuant dans ces rues 6troites et sombres form6es par ces murs, cher- cherait vainement un objet ou nne construction digne d'attirer son attention ou sur laquelle ilpourraitreposer ses yeux, fatigues par la nionotonie de 1' aspect g6n6ral de la ville. Une partie de I'armee de Boukl)ara est form^e par r^mir, a I'instar europ6en, c'estce qu'on appelle le ba- taillon r6gulier et 1' artillerie. Les soldats de ces batail- lons sont convenableuient habill6s, 6quip6s et arm6s. De longs bonnets pointus en fourrure de mouton, des tuniques de drap rouge et de larges pantalons noirs k bandes rentrant dans les bottes fortes : xoWk le costume de la troupe d'elite recrut6e parmi les Persans et les Ouzbeks. L' artillerie indigene n'est gu^re mieux exercee que celle de Rhiva. Les campa- gnes de I'^mir contre ses voisins et les si6ges qu'il entreprenait, ou I'artillerie, tout en dispersant g^n6reu- sement des projectiles, restait parfois des raois entiers a faire une breche dans les murs de terre glaise, peu- vent nous donner une assez bonne id6e du degie de la perfection de cette arme. Citons aussi comme un indice de civilisation a Bou- khara une certaine division de pouvoirs administratifs et judiciaires. La justice est concentree entre les mains des /cazi ou juges de la ville, ils jugent toutes les alfaires civiles suivant le Koran; leur decision estd^- fmitive dans tous les cas, car elle ne peut jamais Hre rejette par les plaignants. Le pouvoir ex6cutif ou la police de la ville est exerce par un fonctionnaire qui porte le nom de reiss. C'est lui qui veille sur I'exer- ( ^0) cice des devoirs, religienx des habitants., qui \isiie les mosquees ct les inarclnl^s de la ville, jioursuit Ics fumeurs de tabac et les voleurs, et punit liii-iueinc tous lesdejinquants a coups de baton. Le /-m-j est dans I'exercice de ses fonctions depuis le matin jusqu'au soir. Apr6s les priferes du soir il les passe k un autre fonctionnaire ajipele meiLshnb, ce qui veut dire chef pendant la nuil. Ce dernier reniplit les memes devoirs qne le reiss jusqu'au lendemain matin et ainsi de suite. L'6mir lui-niemc forme le centre de toutes les par- ties de r administration generale. 11 s'occnpe n^anmoiiis de toutes les affaires, meme de celles qui sont du res- sort du kazi ou ilu rcix.s. II aime sintout a rendre justice, et donne pour celadroita chacun de ses sujets de s'adresser directenient a lui ; mais comnie ses juge- ments impartiaux finissent toujouis par se resumer en imposition des deux parties ou en punitions corporelles inevitables ])our les pauvres, les sujets tachent autant qu'ils peuvent a ne pas importuner leur juste souve- rain. Le plus grand dignitaire du khanat est le ministre des finances, c'est le seul ministtjre qui existe a Bou- khara et dont le chift're porte le titre de koush-beghi^ ou marachor. Son pouvoir est tr^s 6tendu et embrasse les affaires les plus varices. Tel est r^tat present de la civilisation de ces Etats, telles sont les moeurs de leurs grossiers habitants. Les dons varies ([ue la nature a gentsreusement r^partis entre ces divers Etats, out donn6 naissance h. uu ^change assez considerable de produits de leur agri- (Al) culture et cle leur betail. De 1' autre cote, I'etat arriere de leur civilisation, le uianque total de fabriques indi- genes, I'absencede toute Industrie min^rale, les forcent a chercher des marches Strangers, et principalement ceux de laRussie, qui seule pent leur livrer des articles de premiere necessit6 qui r6pondent a leurs moyens mo- diques. Les seals produits qui soutienaent maintenant ce commerce et qui lui promettent im developpement k I'avenir, ce sent le coton brut, la garance, la sole, les fruits sees et les peaux de moutons que la Russie trouve de I'avantage a tirer de ces pays. Nous nous arreterons ici a ces indications, car les relations com- merciales de la Russie avec les khanats de I'Asie centrale m^ritent une description detaillee (jui dcpas- '.■ierait de beaucoup les bornes de notre travail. REMARQUES SUB l' OASIS DE SYOUAH, OU UE JLPrrER AMMON, PAR M. JOMARD, SUIVIES D'UNE relation de M. JAMES HAMILTON. Personne n' ignore qu'au d6sert de Tifrique septen- trionale il existe, a prfes de 500 kilometres de la M6di- terran6e et k 350 de I'Egypte, une de ces oasis dont r Atrique septentrionale est parsem^e, k peu pr6s comme une peau de tigre ou de leopard est orn6e de taclies ma- gnifiques : cette comparaison appartient u I'antiquit^ ( /i2 ) elle-memc. On les a aussi compar^es a des lies eparses au milieu d'unc mer de sable. Dans ces lienx beults, ou la nature tropicale reprend tous ses droits, tout sourit au voyageur alt6r6, affam^, harass^ de courses p^nibles au milieu des sables et de la desolation. Une eau fraiche et salulaire, la banane, le fruit (lu palmier. I'orange et le jujube, la iigue et la grenade, lui Iburnissent un aliment Jiourricier ou agr(^able. Enfin, Tombrage et lafralclieur lui procurent un sommeil reparateur, qui lui fait bientot oublier le d6sert. Les liibyens, habitants de ces oasis, Libycce gentes 6taient nouun6s riches, heureux par excellence, beati (Lucain, Plidrsnl III); Herodote les qualifie de m6me (liv. Ill, 26) : il appelle I'oasis, Mo'xorfwv vr,!Jo;, beato- niin i/isul((. File des Heureux (1). L' oasis de Syouah est un de ceslieu.v enchautes que les poetes se sont plu ad6crire. L'unedes plusgrandes en 6tendue (en y comprenant ses annexes) , elle est aussi la plus c^lebre de toutes et, des les temps les ])his anciens, elle a possed6 un oracle fameux, souvent cousulte, et qu' Alexandre de Mac6doine est alle inter- roger liii-meme. Le temple ou I'oracle se faisait entendre etait d6di6 a Ammon, le dieu adore a -Thebes d'Egypte : de 1^ le nom d" oasis d'Anmion (ou de Jupiter Anuuon), dontla tradition se perd dans la nuit des temps, et remonte jusqu'a la mythologie. Pers6e, Hercule, dit la fable, (1) On sail que ies oasis ont M un lieu d'exil dans les premiers sift- cles dc I'ere cbretiennc, a rociasion des cuntroverses rel gieuscs. ( AS ) avaienl \mt6 I'oracle d'Ammoii ; et c'est a leur exemple qu' Alexandre s'y i-endit, an dire de Strabon lui nieme, le plus Eminent des geographes de ranti- quite (liv. XVII, 314). Tout semble montrer I'origine des Ammouiens : la " religion, le langage, i' architecture (1) ; leur langue, dit Herodote , participait de la langue 6gyptienne ; entre les monuments de Thebes etles ruines de Syouah, on n'apercoit auciine dilKrence importante : meme style, meme construction, meme decoration. Malheu- reusement, ni la tradition, ni I'liistoire ne nous onl transrais que de faibles lunii^res, et sur I'origine de cette population, et sur sa constitution politique. On pourrait seulement admettre , comme probable , que c'est nne colonie^gyptienne, transplant(^e a cent lieues de I'Egypte a la suite de quelque revolution, et qui se sera confondue avec une population libyenne, etabliela de temps immemorial, conmie dans les autres oasis. On est presque r6duit a quelques fragments d'H^ro- dote, a des ]iassages de Diodore de Sicile, d'Arrien, de Lucain, de Pline, d'Etienne de Byzance, et de Strabon sur la geographic physique de la contree : je ne parle pas des ecrivains arabes. Le p^re de I'histoire est I'au- teur qui fournit les plus curieuses notions. (cEtearque, dit-il, roi des Ammoniens, avait recu la visite de plu- sieurs Cyreneens qui etaient venus considter I'oracle, et la ceux-ci avaient appris, du roi, des particularites (I) H6rodotc ledit lui-m^me ; « Les Aramouiens ont ^levd le temple de Jupiler Animou a !'irailatiou de celui de Jupiler th^bain. « (IV, 181.) ( hlx ) int^ressanies sur rimerieur de TAlrique, sur le grand desert, sur le fleuve qui est au dela des solitudes sa- blonneuses. » Nous voyons encore dans I'auteur (jue Canibyse parvint jusqu'a Toasis, habitue, dit-il, par des Samiens, et distante de Thebes de sepljourn6esde marche h travers des sables (III, 26). Quant a son ar- mee, on pretend quelle fut engloutie lout entifere dans les sables, a la suite d'un coup de vent parti de la re- gion du midi (III, ibid.). Syouah possede plusieurs sources qui ne tarissent jamais, de beaux jardins, beaucoup d'arl)res a fruit, tcis que le raisin, la grenade, I'abricot, laligue, 1' olive, la prune, la pomme, surtout la datte en grandc ({uan- tit6 et de plusieurs especes ; la past^que et les legumes y profitent 6galement ; mais le pays est sujet aux trem- blements de terre. La ville actuelle est d'une construction tr6s bizarre et ressemble assez a une sorte de ruche, partag6e en un grand nombred'etagestrtebas(l), sur laquelleil est dilli- cile de cheminer, tant les ruessont obscures, escarp6es, tortueuses, et de plus en escalier ; c'est au point qu'en plein jour, il faut de la lunii^re pour se guider. On a aussi compare la ville i une I'ourniilierc avcc assez de justesse. Elle est batie en sel et en natron. On sait que toute cette partiede la Libye, jusqu'a I'tgypte, abonde en sel fossile; le Fayoum poss6de des carriferes de sel gemme, que Ton exploite de temps inunemorial. Tout est curieux dans cette singulitjre localite ; la ville des morts, disposee sui' un tertre conique avec une nml- (l)Dc Iroisjusqu'ii six ctages. ( A5 ) titnde d'ouvertiires, peut aussi se comparer k une ruche : Tout se r6unit, ici poxu- exciter la curiosity flu voya- geur. Outre les temples antiques conserv(^s a Syouali, on y trouve des ruiiies et desmorceaux d^tach^s, des blocs sculpt^s, toujours dans le style 6gyptien,5,vec la repre- sentation du b6lier, 1' animal d6di6 a Ammon. L' oasis de Syouah, bien que soumise aujourd'hui au vice-roi d'lilgypte, forme une petite r6pu])lique in- d6pendante dont les chefs sont 6lus par le peuple k des 6poques plus ou moins rapprocli^es. Pour toutes les affaires, ils tiennent conseil, en presence de la popu- lation. Les assistants ont droit d'^mettre un avis : le conseil decide. Les gens de Syouah sout extremement defiants a regard des Strangers, et jalonx k I'exces; obliges de respecter ceux qui viennent de I'Egypte sous la protec- tion du vice-roi, ils se vengent, apr6s leur depart, en sacrifiant ceux de leurs compatriotes qui ont second^ les recherches des Europ6ens et satisfait aux questions dict6es par la curiosity. (Vest ce qui est arriv6 au cheik Yousouf-Abou-Aly, pour avoir facility les recherches de M. James Hamilton, Anglais, le dernier voyageur qui ait visits Syouah. Le nombre des hommes d6passe de beaucoup celui des femmes; ni les c6libataires, ni les hommes veufs ne peuvent entrer dans la ville. C'est en 1820, apr^s le voyage de M. Cailliaud, que Mohammed-Aly envoya, pour la premiere fois, un corps de troupes 6gy])tiennes conunand6 par Hassan- Bey, gouverneur de la province de Bahyr^h, pom* oc- ( 46 ) ciippr Syouah. M. ringHnimir Linaiit, alors aspiiantde niaj'nie, depuis Linaiit-Bey, diiecteiir des ])Oiits et cliausst^es on Efi;y|)te, accompaf,Miaii le clievalicr Dro- vetti qui sV'tait joint k rexpedition. Cehii-ci constata que les habitants de I'oasis ne connnnniquaiont avec les Egyptiens et lea autres 6trangeis qu'au nioyen de Ja langue arabe : entre eux , ils se servent d'un idiome particulier qui nest autre, selon moi, qu'un dialecte berbei'e (1) : le meme fait se reproduit ega- lement a Audjclah. a (lyrene et en beaucoup d'antres lieux. Les femmes, ne pouvant avoir de rappoit avec les etrangers, n'ont pas besoin de se servir de 1' arabe et ne parlent que la langue indigene. C.ette langue a et6 6crite de temps immemorial ; ce fait est de ceux qu'on ne pent plus aujonid'hui r6vo- quer endoiite; rinsciiption bilingue de Thugga aurait sulii pour le prouver. A I'oasis d'El-Gliai, il doit exis- ter des livres 6crits avec ces caractferes. \ujourd'hui comme autrefois, les Touaregs tracent cette meme ^cri- ture sur des instruments, la broilent sur des ^tolfes, et la gravent snr les rochers (2) ; on en possede maintenant de nombreu-x specimens et Ton commence meme a d6- chift'rer des inscriptions ^tendnes. Sur les rochers an voisinage de Syouah, connne ailleurs, Ton trouve ces caracteres graves, notamment sur des pierresd'un tem- ple doGharmy, appeJe J'/noudeyn (les deux colonnes). C'estparerrenrquefeu M. deBourville, consul a Ben- (1) Voycz Rccueil de memoires publics par la Soc\6l6 de ycoijraphie, in-*", tome IV, p. 132 et suivantcs. (2) On se sort mfirac aujourd'hui, pour (l(*?iiisi-r la coiTcsiioiKlaiice arabe, de ces sigoes libyques. ( 67 ) gliazi (Cyr^naique), i^egardait ces figures comine tie simples marques destinies seuleaient, par les nomades, a indiquer le passage des caravanes. Ces signes sont de veritables caract6res phon6tiques ; les Arabes s'eii servent naturellemeut comiiie de marques, ainsi que nous le faisons tous les jours avec iios lettres, qui ne cessent pas pour cela de poss6der leurvaleur alpliab6- tique. Le voyageur anglais Browne, le nieme qui le premier visita le Darlbur en 1792, est aussi le premier Euro- p6en a qui Ton doit une description de 1' oasis de Syouah, de visa ; six ans plus tard, Fr6d6ric Horne- mann, qui voyageait aussi pour I'Angleterre, et qui se trouvait au Caire precis6ment au moment ou I'arm^e francaise venait d'y entrer, obtint du g6n6ral en chef Bonaparte, par I'interm^diaire des savants francais Monge et Berthollet, toutes les facilit6s dont il avait besoin pour son voyage dans 1' in t^rieur de FAfricfue (1), et c'est du Caire qu'il partit pour aller a Syouah. Ce courageux voyageur a succomb6, mais, heureusement, sa relation sur 1' oasis nous a 6t6 conserv^e ; elle ne laisse pas d'ajouter jjeaucoup a celle de Browne. L'offi- cier du genie Boutin est aussi alle a Syouah ; sa des- cription ne nous est pas parvenue ; il avait et6 raal accueilli par les habitants (2). En 1819, le 10 d6cem- bre, M. Fr6d6ric Cailliaud, accompagne de M. Letor- zec, d'un guide, homme de Syouah servant d'interpr^te, et d'un cheik arabe, parvint heureusement a Syouah (1) Voyez la note k la fiu de ces Remarques. (2) Plus tard, il a ^t6 assassin^ par les Arabes du desert, ( w ) aprfes dix-hnil jours de niarche h travers le desert. II etait parti du Fayoiim. Pen de temps apr^s, au moisde f^vrier 1820, le vice-roi d'l^gypte envoya un corps de troupes prendre possession du pays pour le souniettre au tribut, comine on I'a dit plus haul; M. Drovetti, consul de France, et M. Linant avec deux autres Eu- rop6ens, s'^taient joints a I'cxp^dition. ('/est a I'aide des mat^riaux recueillis par M. Linant et communiques par le chevalier Drovetti, ainsi que de ceux qua pro- cures M. Cailliaud, que j'ai r6dig6 et public I'ouvrage portant potu* titre Foynge a /'oasis lie Syouah (1). Le general prussien iMinutoli est un des voyageiu's qui out fait ensuite le voyage et rapport^ de cette excursion les notions ies plus completes. On trouve dans les Nom'elles Annales dos voyages (anuses 1852 et 1854), I'analyse d'un voyage interessant, intitule : Adventures in the libyaii desert and ike oasis oj Jupiter A nwion^ 18'i9 ; cette derni^re relation est de M. Bayle Saint- John. Enlin, tout r6cemment, en 1853, un autre An- glais, M. James Hamilton, a fait cette int^ressante excursion, et nous allons rapporter tout a I'heure un extrait de sa relation. A son depart pour I'figypte, je lui avals recommande plusieurs questions , plusieurs points qui jneritent d'etre edaircis sur les monuments, sur les ma?urs et les usages, sur la langue indigene et les caract^res li- byques; c'est en partie .\ ces questions que se rap- (1) Voyage (i Voasis de Syouah, rt?dig(5 et public d'aprfes les mat^- riaiu lecucillii par le che\alicr Drovetti, consul g^n(?ral de France en £j.'ypte, el par M. Fr^dt^ric Cailliaud, en 1819. Paris, in-folio, 1823. ( A9) porte la relation sous fonne 6pistolaire, qu'il me reste k mettre sous les yeiix du lecteur et que j' insure ici textuellement : Monsieur, Je m'empresse de r^pondre aux questions que vous m'avezadress^es k I'^gard de Syouali. Je regretteque je n'aie pas ici les notes d6taill6es que j'ai faites sur les lieux et qui m'auraient fourni les renseignements que je me suis fait I'honneur de vous adresser dans une lettre 6crite du Caire au niois de juin ou de juillet 1853, et qui, k mon grand regret, ne vous est pas parvenue. Dans le long s6jour forc6 que j'ai fait a Syouah, j'ai 6t6 k meme de connaitre les indigenes mieux que qui que ce soit de mes devanciers. Bien qu'en butte aux menaces et aux attaques a main arm6e des habitants de la ville principale, j'^tais cependant appuy6 par une minority puissante, sous I'autorite du clieik Yousouf- Abu-Ali. Celui-ci avait 6t6, du temps deM6h6met-Ali, cheik El-Beled, et k mon arriv6e, quoique d6poss6d^ par 4bbas-Pacha qui avait rendu a la ville son gou- vernement aristocratique, il exercait encore une grande influence sur sa tribu. II habitait avec elle le Gam, \m des faubourgs de la ville-forteresse, et c'est la que je demeurai pendant sept semaines , dans une petite maison qu'il m' avait c6d6e vis-a-vis de la sienne. Pen- dant tout ce temps, le salon que j'avais improvis6 dans r^tage sup^rieur [leghoifa) ne d6semplissait pas de ses adhf^rents qui venaient consoler ma captivite. — Les derniers jours meme, j'ai mi un nombre consid^rabl XV. JANVIER F.T FfcVRIFK. !{. k cs ( 60) dp CPHX qui avaiciil jur»^ ma moit : car xih violent vent dii sun coiitoui'iiaui Ic \iilage |)oui- Nciiir a Oiuiu-el-Be\dali, j'avais renjanjue dans I'enceinte un paw de mur evideiunientancien. II 6tait fonii6 de pierres carrees, de diinei)sions considerables, et on y voyait une petite fenetre. Le clieik etaiil d'accord avec la foule des habitants qu'il u) avail pas de traces du mur dans I'interieur, je me suis contente de ces assu- rances et jc n'ai pas pousse plus loin une visite 6vi- demuient peu agreable aux proprietaires. Apres nion retour chez inoi, un .Maugrabin qui m'avait acconipa- gne pendant la touniee, le se\d etranger fixe a Syoiiah, est venu nie trouver. Vpres avoir exige laproniesse ({ue je ne le trahirais pas, il m'a dit qu'il y avait un grand batiment des infideles a I'endroit ou j'avais reniarqu6 le mur ancien ; quil n'avait os6 rien dire, et qu'il me fallait insister pour pouvoir rentrer dans cet endroit. Je devais diie que j'en avals trouve mention faite dans mes livres. Le lendeniain je suis retourne a Agharmy ; on a fait moins de dillicnltes que je n'avais craint, a me laisser coiUinuer inon ex])loration. Des debris consid6- rabies se trouvent probablement dans les fondements des cases modernes ; partout on voit des pierres taillees, et en penetrant dans I'interieur des maisons j'aurais pu peut-etre d«^cou\rir des restes moins infurmes. Passant par ime longue ruelle tortueuse qui fait le cir- cuit du village, je me suis trouv6 devant un mur an- tique ; une porte de style 6gyptien j etait pratiqu6e. Ce mur 6tait un des trois c6t6s d'une cour qui prticfede le batiment dont les niurs ext^rieurs sont visibles d'en ( 57 ) has. Dans cha([ue cote il y a uiie grantle porle. Toulcs soiit lerui6es avec une magonnerie grossi^re, a I'excep- tion d'une petite ouverture qui sert tie porte au pro- pri^taire actuel. On m'a permis de p6n6trer dans cette enceinte. Un niur modernela paitage en deux. La cour a eu autrefois environ vingt pas en carr6. Je n'ai pu en examiner qii'un cote ; sous lepretexte de harem on rc- fusait d'ouvrir 1' autre. A droite, en entrant dans la cour, on voit une grande porte, maintenantcondanniee, a I'exception d'une ouverture de six pieds sur deux et denii, qui est terni6e par une porte en ])lanclies. Apr^s avoir fait beaucoup de dilficultes, on a entin consenti a ouvrir cette porte. Je me trouvai dans une salle dont les murs etaient enti^rement converts d'hi^- rogly plies, noircis a un tel degre qu'il aurait fallu un long travail pour y distinguer les sujets sculpt6s sur les murs. J'ai fait apporter des branches de palmier pour servir de torches. Le mur estdivis6 en sa hauteur par un plafond moderne, forniant un second 6tage ; a dix-huit pieds du sol originel, une corniche en saillie parait avoir soutenu un plafond qui a maintenant dis- paru, le toit soul restaut a une hauteur de sept pieds ou a pen pr6s au-dessus de la coi'niche. La partie pos- terieure de la salle, denuee d'hi6roglyphes, parait avoir et6 s6par6e par une cloison. En bas, on voit dans cette partie reserv6e un couloir de deux pieds de large pra- tique dans le mur ; il n'a que six pieds de long, et pa- rait avoir 6t6 mur6 dans les temps anciens. Au-dessus de la corniche on trouve une petite chambre d'a peu pr6s six pieds Carres, pratiqu6e egalement dans I'epais- seur du mur. C'est la partie post^rieurc, en haul, qui (58) est eclaiK'C par la peiite fenStre (jui se voil dans le mur. Quiltani cr luomunem, j'ai cuiiluuine la cour, ct aprfes avoir descendu une petite rue en pente, je uie suis trouve sous une aucienue porte d'une grandeur colossalo ; de chaque c0t6 on voitdes restesdun mur. J'ai suivi ce mur pendant cpielques pas a gauche, en grimpant sur des deconibres, et ii une petite distance en bas j'ai \u le puits. N'ayant pas ici la description de Diodore de Sicile, je le cite de memoire. 11 dit querauunonium 6tait dans racro})ole, que racro])ole avait trois enceintes : dans la premiere etaient les satellites du roi ; dans la se- conde, le temple de I'oracle avcc les habitations des pretres; dans la troisi^me le palais du roi avec les appartements de ses femmes. II y avait aupr^s de I'oracle un puits ou Ton lavait les victimes. Je ne doute pas avoir decouvert ici un reste du pa- lais des rois et du imii' d'enceinte (pii le separait du temple. On ne pent imaginer ces enceintes que comme 6tant fonn6es par des cordes tirees dans 1' arc de I'ovale. Peut-6tre trouvera-t-ou plus tard des restes de 1' em- placement de I'oracle dans les maisons ou dans les d6combres pr^s du puits. Un rapprochement, au moins curieux, est qu'il se trouve, aujourd'hui encore, luie garde, la ou etait sans doute le corps de garde des satellites du roi. Omm-el-Beydah est cet aiUie anuuoniuni dont parle Diodore, pr^s tie la Ibntaine du Soleil, mais qui ne contenait pas d'oracle. Dans I'exterieur du rocher de I'acropolc, sous le ( .'>^ ) inommieiil que je vieiis de decrire, ct a une petite hauteur du sol, se trouve laie clianibre carr^e, do six pieds, taillee dans le roc. On y voit une porte nuu-^e (jui a prol)ablement communiqu6 avec le couloir dont j'ai parl(5 pour servir de poterne. J'ai pass6 une journ^e dans la montagne des niorts oil des moniies. On a fouill6 sa surface dans tons les sens, pour visiter les tonibeaux dont il tire son nom, nmis je n'en ai trouve aucun qui n'ait et6 viol6 depuis de longues ann^es. Quelques rares debris d'ossenients, quelques lambeaux de toile blanclie avec dessins en bleu et rouge, de la menie fabrique que celle qu'on trouve sur les momies de Thebes, sont tout ce que j'ai pu y voir. J'ai trouv6 un morceau de platre de deux lignes d'^paisseur, portant I'empreinte d'un niollet, envelopp6 de langes. Je suis tent6 de croire qu'on en- duisait les momies d'une mince couche de platre en guise de cercueil. Je n'ai vu nulle part des traces de cercueils •, le pays manque de bois pour en faire. On voit beaucoup d' excavations anciennes dans le lieu de Gara et quelques pierres taill6es. Dans les oasis, sur la route de Djalo a Syouah, j'ai ^galement trouve beaucoup de tombeaux creus6s dans les rochers, etl'on trouve, ace qu'on m'a assur6, dans les oasis autoui- de Syouah, de temps a autre, des tombeaux con tenant des momies et des vases. Veuillez, Monsieur, excuser les imperfections de ce petit rapport 6crit a la hate, et agreer I'hommage de ma plus haute consideration. jAMiiS Hamilton. ( ('0 ) Tel csi lerecit succinct (pic nraadrcsst' M. J. Hamil- ton, le mois dernier, et qui ni'a pani digne d'intcrfel (1) , apr^s tant de tentatives faites par des voyagenrs rc- nomui^s pour 6claircir cc que riiistoire ct la tradition ont laiss6 si obscur. II n'esl i)as douteux qu'avcc le secours de la protection egyptienne, et avec un sejour prolong^ aSyouali, de savants observateurs pourraient y fairc d'importantes decouvertes, en comparant atten- tivement les lieux avec les textes des a\iteurs, tcxtes qui presentent plus d'un problcnic a r^soudre (2). JOMAUD. (1) M. James Hamilton m'avait adressc^ d'Egyplc uae relation plus complotc : malhpurcusement ce travail ne mVst pas parvenu. (2) L'ile li' Arachyeh, au nord-ouost de Syouah, passe pour un lieu myslerifux ronfiMniant dos trdsors et des talismans : c'est pourquoi les habitants ne permirenl pas i M. Cailliaud dc s'y rendre. M. Dro- vctti reussil ii y pen^trcr; il n'y vit rien d'cxtraordinairc; mais il doit y avoir dans celte locaiilc quelque ddcouverle h faire. NOTE DE I.A PAGE 47. Je rrois devoir titer, au sujel du voyage de Fn-d. Hornemann un passage de la passage de lapr(; fis connaissance aver deux savants de leur nation, nerthollet el )< Mongc; ils me rendirent la libert(5 et me pri'sentercnt au g^n^ral en » chef, qui me recut avec toute sorle d'»5gards et de bont(^. L'inlt5r*t a qu'il prend aui sciences, et I'estime qu'il a pour les hommes in- (61 ) » struils, sont Irop connus pour que j'aie besoin de m'elendre sur » ses qualiKfs ^minenles. II me promit sa protection; il m'olTrit de u I'argent ct tout ce qu'exigeait men entreprise, el il me fit doiivrer » les passeports n^cessaires. « (Voyage de Frdd. Hoinemaun, dans TAfrique septentrioaale, lia- dull parL. Laugles, Paris, an xi. — Prdface du vojageur). i: II n'est pas inutile uon plus de rappeler ici le t^moignage rendu pai le secretaire de la Socic^teaDglalsepour lesdecouvertes en Afrique, a la lib(^ralitd dc» savaiils francais qui cHaieul an Claire eu 1798, et a la gen^rcuse protection accordee par le general eu chef au voyageur an- glais Frdderic Hornemann : I Introduciion, p. xxxv. t Je ne dois pas passer sous silence que » M. Hornemann a eu des obligations particuli^res a ce gout eclair^ et 1) liberal qui excite le gdnie des vdritableslgraiids homnies a favoriser » les sciences et les arts utiles, au milieu des horrcurs de la guerre et » qui les portc a donner des ordrcs aux armees qu'ils commaudeul, » pour leur interdire toute insulte enversles agents m6me d'une nation » ennemie, dont les intentions etles Iravauxsont dirig^s vers desobjet* » d'un int^r^t universel. » Cc fut sous la protection du general Donaparte, ct avcc son passe- » port ct sa sauve-garde sp(!eiale que Frdd^ric Hornemann atteignit » sans p^ril la karavane de la Mekke; et qu'il continua el acheva son » voyage du Caire au royaume de Fezzin, etc. » W. YODNG, MSecrctaiic de la Socictc afiicaiuf, » (Socieie pour ^teudre les d^couvertes dans les parties int^rieures de I'Afrique.; ( 02 ) VESPl'CE ET SON PUKUIER \0^ AGE Deniitvei Ic rt r.ip/oniliv/i jj/iih/Iu'c (/u go//r > [Vo\. 50 ed. de 1553.) ( 73 ) vons qu'il 6tait en Espagne depuis l/i02 (1), onvoy^ par Lorenzo Pier Francesco de Medice pour surveiller line maison de commerce que celui-ci avait dans ce royaume (2). II se peut bien qu'une telle resolution de voyager lui iut survenue par suite du d6c6s du u6gociant Juanoto Berardi , au mois de decembre 1/195. Vespuce qui lui succ6da dans la g6rance de la maison a Seville, prit sur lui la responsabilit6 de I'engagement qu' avait fait le meme Berardi (3), au mois d'avril precedent, de fournir a I'Etat, de quatre en quatre, douze navires pour les voyages aux Indes orientales, et il ne cessa pas de s'occuper de I'^quipe- ment de quatre de ces navires jusqu'a leur sortie de San- Lucar. Ce port est, comme nous le savons, en face de Cadix, d'oii selon le r^cit de Vespuce est partie, en 1497, I'expedition justement conq:)os6e de quatre na- vires aussi, dont il nous dit qu'il a fait partie; ce qui parait tr6s probable, attendu que, pendant le temps qu'il declare avoir et6 absent, il n'y a pas de traces de la continuation de son s^jour en Espagne. Les faits qui se rencontrent dans I'ouvrage de Navarrete (II, p. 316 et 317) out 6t6 interpr^t^s et raeont^s avec beaucoup d'exactitude par Washington Irving (6d. de 18A9, vol. Ill, p. 331) ; et ils auraient 6te certaine- ment beaucoup plus avantageusement mis a profit par Humboldt, si le savant aiiteur de \ Examen criiiquc (1) BartoIozzi,p. 95. (2) Ihid. p. 80. (3) Ce Berardi avait d^jii eKS charge, I'ann^e pr^c^dcnte, d'une com- missiou analogue de la part de Colomb (Nav. Ill, p. 292 ot 31(5). ( 7/1 ) n'eut pas 6t6 pr^venu (1) de Tidc'C que ces eqiiipe- ments ne pouvaient se rappoiter qii'aux prc^paratifs du troisi^me voyage de Colomb; cc qui u'cst dit nulle part. 18. — Troisieme preitvc. — Si Vcspuce ll'avait pas rendu a I'Espagne d' autre ser\icc que d' avoir ac- compagu6 Hojcda a Paria et ii rKspanola en 1/199, il n'aurait pas recu tant de marques de consideration, de 1505 il 1512, il peine arriv6, apr6s avoir 6t6 quatreans au service du Portugal. De I'annte 1505 a 1508, il etait consult^ pour tout ce qui regardait les expedi- tions aux Indes ; il percevait des appointements ; il re^ut d'honorables lettres de naturalisation : enfm il fut 61ev6 au poste de pilote majeur, avec des attribu- tions si 6tendues, que personne ne pouvait servir de pilote pour les colonies sans son approbation. 19. — Qnntriemc pveuve. — D'apr6s le r^cit de Vespuce, dans Uout I'espace, conipris entre les 16" nord jus- qu'aux plages septentrionales, il n'avait pas tronv6 de canal de communication avec la iner des Indes orien- tales; et d'autre part nous savons que ColonUj, qui ne cherchait que cette communication, dans son quatri^me voyage, en 1502, c'est-k-dire a la premiere occasion qu'il eut apres qu'il put avoir des nouvellesdu voyage de Vespuce , au lieu d'aller essayer de le trouver en uaviguant tout droit des Antilles vers I'occident, se dirigea vers le sud-ouest, a la latitude de 16" et au cap de Higueras que nous croyons Ic parage oii Ves- (1) V(iy. Humboldt, Ex. crit., vol. IV, p. 2(57, 272, 273, 274, :?03, et t. V, p. 50. Voy. aussi le nu^iuc \o\. IV, p. 2»)8 et 2C9. ( 75 ) pu6e avait atterri. Et aulieude suivre la cote al'ouest, d6jk 6tiidi6e par Vespuce et reconnue comme iin golfe sans communication, il \mt vers Test et explora une cote qui n' avait pas encore 6t6 visit^e. 20. — Cinqiiieme prenve. — En 1494, Colomb ayant d^couvert les cotes de I'ile de Cuba, crut qu'elles appartenaient a un continent. Or, deja en 1500, on voit Cuba figur6 sur la carte comme une ile, et peu de temps apr6s, Anghiera (Dec. 1", liv. 6) nous dit : (( II ne manque pas de gens qui pr6tendent avoir navi- gu6 autour de Cuba. S'ilenest ainsi je nele decide pas , nous le saurons par le temps, vrai juge toujours vigilant (1). » Et a un autre endroit (Dec. IP, liv. 7) il ajoute : ((Vincent Yanez.... fit la circumnavigation de Cuba, jug6e par beaucoup de monde jusqu'alors un continent, a cause de sa longueur. Plusieurs au- tres se vantent aussi d'en avoir fait autant (2). » An- ghiera^ qui ^crivait ces lignes en 1514, ajoute encore, peut-etre en confondant un })eu les faits, « Vincent Yanez ayant clairement reconnu par I'exp^rience que Cuba 6tait une ile, s'avanca au dela et rencontra d'au- tres terres vers I'ouest de Cuba. » 21. — Sixieine preiwe. — Dans la c616bre carte, (1) « Neque eiiim desunt qui se t'ircuisse Cubam audeant dicerc. An 1) hiEC ita sint, an invidia tanti invenli occasiones quaerant in hunc » virum, non dijudico : temnus loquelur, in (|iio vcriis judex invigilat.j (2)" Vicentius Anuez... Cubani, a inultis ad ea usque tempora ob » suam raagnitudinem continentern pulalam, circuivit. Itideni ct alii a plures Sfe ftcisse aiunt. VicenfiuS Anncz cognitc^ jam cxpcrimento a patent! Cubam esse insulam, processii uUcrius et Icrras alias ad » occidentcm Cub® offendit, » etc. ( 76 ) Universalior cogniti orbis Tabnid, publit^e par Ruysh en 1507, et qui accoiupagne aussi Ic Ptolt'inee de Rome de 1508,onvoit marquee arouestdesAntilles(l) et a peu pr^s a une longitude de 74" ouest des Cana- ries, une 6tendue de cote dont on ne s'est pas assez occup6 encore, et oii on lit : HVC USQ NAVES FERDINADI REGIS HISPANIE (*) P.VENERVT. Cette 16gendc est un argnnient puissant en fiuenr du r6cit de Vespuce, k propos de son ])remier voyage, tel que nous le r^tablissons aujourd'hui. Dans le cap de Saint-Marc ( C. S. Mara), fiui est le nom le plus meridional de cette etendue de c6te , nous ne pou- vons voir que celui qui am-ait 6t6 d6couvert en premier dans ce voyage, au bout de 37 jours, c'est-a-dire Ic 18 juin, jour qui, d'aprfes le martyrologe romain, est pr6cisement celui oil I'^glise c6l6bre le martyre de saint Marc (2) . Peut-etre est-ce aussi a cette meme 6poque qu'on d^couvrit la bale de Natividad, attendu que I'Kglise c61ebre la Nativite de saint Jcan-Baptiste, le 2/i du menie mois (3). 22. — Cette inscription de C. S. Marci a et6 suppri- m6e dans la c6l6bre carte du Ptolemee de Stras- (1' L'ilc dc Cuba y a dt6 oubliec, mais on I'a mise sous le nom de hahda dans la carle de 1313, puisne aux m^mes sources que celle-ci. Sur ledilion de 1513 on pent voir Humboldt, IV, p. 109 et suiv. (*) Sic. (2) Ce saint devait mfime dtre cher a Vespuce, son oncle 6l«nt religicux de Saint-Marc. (Humboldt, Ex. crit. IV, p. 43 et 44.) (3) On en voit la confirmation dans le C. Doffln de ahril. \ ( 77 1 boiirg, de 1513, laqiielle est d'origineportugaise, aussi bienque lamappemondedeRuysch, de 1507. Maisau lieu du cap, ony voit des indications bien plus remar- quables : la cote y est ferm6e en golfe, faisant voir que les eaux ne communiquaient pas par I'ouest avec la mer des Indes ; et la partie septentrionale du golfe , et surtout laFloride, y sent parfaitement figur6es (1). 23. — Septieme prein>e, — Les renseignements (1) La Floride ea presqu'ile, et sur I'exlrpmitc^ dc laquelle on lit Couiello, y finiten deuxpoiates, dont la plusuccidentale est \cdil cap de la fin d'avril. Le mot couielo pourrait bien n'^tre qu'unc mauvaise lecture de cabedello, pointe de sable, ou plutot de courella, c'est-i- dire une lisiere de terre basse, une savaiie etroite et longue. En em- ployant ici le mol savane, nous saisirons rocrasion pour dire que nous ne le croyons pas d'origiue am^ricaine, comme soutieiit, avec Oviedo, son nouvel 6diteur. Nous sommes convaincu que ce nom n'est autre chose quune forme francaise du mot espagiiol Savana, qui signifie drap de lit. La m6me m^taphore du mot drap dc lit appliqud ti des plaines pr6s de la mer est encore tr^s employee au Br(^sil dans les uomi Lanpoes grandes et Lanpoes pequenos, {de aria, c'est-a-dire de sable) tout prfes du Maragnan. On sail que LariQol ou Lenfol (linceul) signifie en portugais drapsde lit. Le aom du cap de la fin d'avril indique I'e^poque de sa di^cou- verte, onze mois et demi depuis que la flotte elait partie de Cadix. Cette date est d'accord avec la position ou on 6tait un mois et demi aprfes, c'est-i-dire, selon nous, h I'entrde de la riviere Saint-Laurent. 11 est bien possible ^galement qu'au lieu du mot corveo on eiit dft lire cotovello (coude), et qu'on eftt alors appliqu^ ce nom au cap Cod qui, comme on salt, presente la forme de coude. Dans la carte de 1513, i partir de la pointe de la Floride vers le nord, les inscriptions se suivent ainsi : C. de Logo (cabo Delgado?) Ponta Roixa, R. delas Almadias, C. Santo, Riode las garlartos (pro- bablemenl Lagartos, lezards), la (sic) Cabi'as, Logo Limcor, Costa alia, C. de Bonaventiira, Caninor, C. de Litonlir (?) (C sable), C. del mar ( 78) coinniimiqiK's aux ctliteurs de Ptol6ni6e de 1508 et 15J 1 , 8iir la contimiitti de la jiouvelle tene tin iioid ail Slid, t'laient natui'ellement |es niemes dojU paile Huinl)oldt (IV, "263) , et d'apres lesquels on savait en Portugal, an uiois d'octobre 1501, que les terres du nord, cou\ertes de neiges et de glace, 6taient con- tigues aux Antilles et h. la fene dcs Pcnoquets^ nouvel- lement d^couverte. 2/i. — Et ici nous devons dire que, tout en croyant que Colomb est mort avec I'idee fixe qu'il etait ar- rive aux Indes orientales, nous ne voyons pas com- ment on pent ])i'ouver que Vespuce, h I'^poque de sa mort, en 1512, ne savait pas que les terres d^cou- vertes n'apjiartenaient pas ci I'ancienne Asie, quandce fait etait en 1507, connu de Hylacomilus, qui appelait meme le nouveau nionde une quatiienie partie de la terre (1) ; et, sans que nous voulions rien oter a la t/siono (Oceano). — De la Floride vers roucston lit les noius C. Lurcar (C. S. Lucar?), G. du Liunr, Aiiear (Areal?), riu de Como. II s'ensuit, a Test, suus le iioni de rio . ix, fol. 15 v°.) ( 79 ) gloive (le Colomb, \\ i\e spiait pag Strange de jiislifier encore pnv lea taits \e nom iVJ^iei/tfiie, sj J' on pouvait pvouvev que Vespuce a et6 le pve«uer k reconnaitre et a souteiijr que la terre decouverte n'^tait pas I'an-!- cienne Asie. 25, -.— Objectio.its ikUruites. — Nous lie passei'oiispas sous silence les arguments les plus forts qu'on pouria nous opposer et que nous connaissQiis nons-meme d'avance. C'est d'abord celui indiqu6 d6ja par Navaiv rete (HI, 330), lequel r6sulte dti silence des t6nioins qui ont de.pos6 dans le fameux procfes sur Colouib; silence accompagn6, dit-oii, de celui des histqriens. 26. — D'abord 1' argument ne peut pas avoir grande force devant tant d'autres, puisqu'il resulte d'lme preuve negative. En second lieu, nous avons un nou- Yeaw motif d'etre en garde contre les preuves negatives en remarquant que Vespuce avait navigu6 avec Hojeda, et que, malgre cela, tant de t6moins, parlant de Ho- jeda et de Cosa, ont pass6 sous silence le nom du Flo- rentin, dej^ moft, nom qui k peine nous a 6t6 conserve par Hojeda lui-meme. Or, nous voyons « priori com- bien il aurait 6t6 injuste de pretendre que Vespuce n' avait pas navigu6 avec Hojeda, si celui-ci I'avait ou- bli6, ou si nous n'avions de sa deposition, comme de tant d'autres, que des extraits (1), ou les reticences qu'on trouve dans I'ouvrage de Navarrete, bjen sou- vent quand le sujet nous promettait un grand rayon de lum-iere. D'ailleurs les t6moins, dans un proces ju- diciaire, ne devaient repondre qu'aux questions qui (I) Toutcs cellos qu'il marque d'liu *. (80) leur ^taient faites -, et ces questions g(^n6raleiiient ne se rapportaient pas k la priorite do la cl6couverte du continent de I'Am^rique, mais se bornaient k la prio- rity par I'amiral, de la d^couverte de Paria, de ce qu'on appelait Tierm fh-me (1). 27. — Quant au silence deshistoriens et des archives, il suftit de rappeler, en cequi cnncerne les expeditions au Bresil en 1501 et 1503, que nous n'avons gu^re eu connaissance des faits queparVespuce; etnousajoute- rons les mots suivants de I'illustre Humboldt (IV, 64) : « Par nn concoursde circonstances difficiles kexpliquer, bien d'autres 6v6nenients qui, par leurs nouveaut6, avaient6galement jet6 un vif6clat dansl'Europe enti^re, n'ont pas laiss6 de traces dans les archives. II n' exists, par exemple, a Barcelone, aucun document qui fasse mention de I'entr^e triomphale de Christophe (lolomb.)) Et le meme Enciso, ce pr^cieux cosmographe dont nous devrons a M. de la Roquette une traduction francaise, cet Enciso qui publiait son ouvrage en 1519, qui ^tait algttnzil mayor de Caslilla del Oro^ ignorait, ce que nous savons aujourd'hui par lepilote Ledesma (2), que d^jade son temps, on avaitexplor6 le golfe du Mexique, au dela de la cote du Yucatan. — Enciso n'en savait probablement rien de plus (pie ce qui pouvait lui avoir 6t6 communique par le pilote Alaminos, aprfes sa visite au Yucatan avec Francisco Hernandez de Cordova, en 1517, avant d'y retourner, en 1518, avec Juan de Grivalja. II ne nous d^crit la cOte du Yucatan que jus- (1) Humboldt, Ex.cril., V, 202. (2) Nav., Ill, 5&8. (81 ) qu un peu au delk du cap Catoche actuel, et il ajoute : (( D'ici s'en sont retourn6s les d^couvreurs sans avoir pass6 au dela (1). 28. — Mais ne nous plaignons pas trop des histo- riens ; ils vont nous aider eux-memes h r6tablir entiS- ' reraent le credit de Tillustre Florentin. 29. — Anghiera vient le premier a notre aide. En rendant compte de Texploration d'Honduras par Co- lomb, dans son quatri6me voyage, en 1502, il nous ap- prend qu'on disait que cette cote avait 6t6 d6ji visitee par d'autres (2). 30. — En second lieu, Gomara nous confirme dans cette croyance, en disant que, trois ans avant le qua- tri^me voyage de Colomb, la meme cote d'Honduras avait et6 dt^couverte. Le quatri^me voyage de Colomb ayant eu lieu en 1502, cela reporterait la d^couverte k I'ann^e 1A09, tandis que, selon Vespuce, elle eut lieu en 1/197. Cette leg^re difference dans le nombre des ann6es ne fait que nous confirmer dans I'id^e que ce n'6tait ni sur I'autorit^ de Vespuce ni sur celle d' Anghiera que I'liistorien espagnol nous faisait sa r6- vt^lation. II est aussi d' accord avec Anghiera quand il dit que Pinzon et Solis 6taient ci la tete de I'exp^dition de la d^couverte (3) . (1) « Desde aqui se boluieron los descubridores, que no passarou V mas. » (2) « Percurrisse quoque feruntur ca littora occidentalia Viceutius » Agnes... et Joannes quidam Diaz Solisius Nebrisseuiis, raultique » alii quorum res nonduin bene didici. » (3) 'I Dcscubrio Christoual Colon 370 leguas de costa, que poncn de rio grande de Higueras al Nombre de Dios, el aho de 1502 ; dicen XV. JANVIER ET FtVRlER. 0. 6 < 82) 31. — I.e lueme fait se Irouvo confirms; par le m6- myiable aijteur tie \ Histoire genemle e! nntweUe di-s Inilos, Goiicalo Hernandes d'Oviedo. Voici ses proprcs pai'oles : (( Qiiekjues-uns out attribue la decouverte du golfe d'Higueras au premier uniiral Don Clinst()])he Colomb, disant que ce fut lui qui le decouvrit. Etcela n'est pas vrai, car le golfe de Higueras (Honduras), ce sont les pilotes Vicente Yanes Pinzon, Johau Diaz de Soljs (1) et Pedro de Ledesma, qui I'ont d6couvert avec trois caravelles. et cela avant que Vinceute Yanez eiit d6couvert le fleuve Marafion, et Solis le fleuve de la Plata (2),n 32. — Herrera meme, si ennemi de Vespuce , nous dit (Dec. I'', liv. VI, cap. l(i) qii'il n'etait pas rest^ m^nioirc des premiers navigateurs qui etaient alles empero aigunos que trcs ahos anlps lo auiaii ntiJadu Vicente Yaiici Pincon y Juan Diez de Solis, que rueron graudissinios descubridorps.u (1) On peul soupcouner que re pilote est le meme porlugais Juan Diaz iBofes de Bagnio';, qui, ('ciiappo du Portugal, dtait passi? surdes vaisseaux fraucais, et qui, sc trouvanl eii Espagne, fut reclame par le Portugal, le 29 octobre 1495. Le fait est que Solis, apres avoir servi en Portugal, s'dtait eufui cu Kspaguc, et ca 1512 il se plaiguail que d^ji ileui fois on nc lui avail point tenu en Portugal les promesses royalei 'seus alvariis) (Nav. 11!, .'105 et 128.) 11 est bien possible (|uo Solis ait accompagud Vespute en Portugal et I'ait mime suivi au Bt6- lil en 1501 el 1503. (2)"... Aigunos atribuyeii al almiiante priraero Don Christoval Colom, diciendo que ^1 lo dpscubrii'i. Y no es assi ; porque el golfo de Higuera, lo descubrieron los pilotos Vicente Yafiez Piucon i- Johan Diaz de Solis h Pedro de Ledrima con Ires caravclas, antes que el Vicente Yanez descubriesse el rio Maranon, ui q\ic el Solis descubriesse el rio de la Plata. » (Ed. de rAraddmic de Madrid de 1851-1855, I. II, p. 140. liv. XXI, (bap. 28.) (83) du c6t6 de Paria (1). Et (dans le chapitre suivant) il ajoute, sans donner dans le texte aucune date : (( Aus- sit6t que Ton connut en Castille ce que Christophe Colomb avait d6couvert de nouveau , Juan Diaz de Solis et Vicente Yanez Pinzon r^solurent d'aller pour- suivre la nieme route (2) . n 33. — Herrera, en 6crivant ceslignes, avec une indica- tion marginale, met I'^v^nement aii nonibre de ceux dent il parle en 1506 ; mais outre rimpossiJjilite de supposer Pinzon naviguant en 1506 et 1507, nous savons par Navarrete (3) qu'il etait alors retenu en Espagne avec Vespuce occLip6 par d'autres armements. Une preuve quel' assertion de Herrera ne serapportaitpas, dans le fond, a une d^couverte de I'ann^e 1506, nous est don- n6e par le texte m6me, qui continue ainsi : « Conime ensuite il n'y a eu personne qui ait poursuivi cette d6- couverte, on n'en a pas su davantage jusqu'a ce qu'on eut d6couvert toute la Nue^'a-Esijana, kpartir de I'ile de Cuba ; et ces explorateurs tenaient surtout a d6cou- vrir de nouveaux pays par jalousie pour I'^miral et pour d6passer ce qu'il avait d^couvert (A). » (1) « No liuvo mcmoria dellos, ni aim de otros, q fueron por la -) parte de Paria. » (2) (' Sabido en Caslilla lo que aula deseubierto de nuevo el Almi- ranle, Juan Diaz dc Solis y Vicenle Yanez Pinzon determinaron de yr a proseguir el camino, cic. i (3) Coll. deViaj.,111, 294, ,'521, 322, 323. (i) t... Como despues no huuo nadic que proseguiesse aquel descu- » brimienlo no se supo mas basta que se deseubrio todo lodeNueva- > Espafia, desde la isia det'uba, y estos descubridores priufipalrneiile a pretendian dcscuhrir tierra por ciiiulacion del Almiranle, y passar » adelautc de lo que el havia descubierlo. » ( 84) Si. — Document tres important en jai'eur de lespuceet son premier voyage. — C'est seulemeilt, apr^s toutesles preuves que nous venous de donner,que nous nous hasar- dons k soumettre au lecteur le texts de la lettre 6crite de Burgos a la seigneurie de Venise, par J6rome Via- nello, le23 d^cembre.... (?) (1), lettre trouv6e i Vienne parlesavant M. Ranke, et publi6een 1839 par rillustre Alexandre de Humboldt ;\ la jiage 157 du tome V de son Exnmen critique. Voici le texte de cette lettre : « El venne qui do navili de la India de la portione del re mio sr li qualfurono a disco])rir palron Zuan Biscaino et Almerigo Fiorentino, li qual sonno passati per po- nente he garbino lige 800 di la dela insula Spagnola che he de le forze de Herculuslege 2000 et hanno disco- perto terra ferma, che chusi judicliano siche lige 200 de la de la Sp. trovorno terra e per costa scorsono lige 600, ne la qual costa trovorno un fiume largo in bocca lige AO e furono supra el fiume lige 150 nel qual sono molte isolette habitate da Indiani. Viveno general"" de pcssi mirabilissimi, erano nudi. Dopoi tornorono per la costa di detta terra lige 600, onde se scontrorno in una canoa de Indiani che a nro modo e come uno zopello de uno pezo de legno Lo Arche- piscopo (2) torna a spazar dicto do capetanii con 8 (1) On altribue a celte lettre (dont I'authenticitd n'olTrc pas lo moindrc doute pour nous) la datcde 1506. M^me en voyant cctle date dans I'original nous tiendrons pour sfir que I'autcur s'dtait tronipd. 11 faut cepcndant cxarniiiiT si TaniK^e 1408 est (^crite i cut ijc. Dana re cas la lecture Ciccc m est Ir6s farilc quatid il s'agit d'un nianusrrit en pciils cararteres. (2) Get archevfique nc pouvait ue et corrigi'c. Toutefois, les changements, qui comprennent un certain nombre de substitutions heu- reuses et un nombre plus grand d' additions utiles, n'afiectent ni le fond ni le plan ; et je m'en tiens i cette seconde Edition, Ibnnant un volume in-12 de 223 pages. Elleest d6di6e, comnie la premiere, aux petits- fils de I'autem' ; mais il ne faut pas en conclure que le livre soit ecrit pour des enfants : la dedicace n'est qu'une touchante precaution dud6vouement paternel, qui desire s' assurer d'avance I'attention flattt^e d'b^ri- tiers ch6ris ; et qui se reserve de les initier, en temps opportun, par des lecons toutes pretes, aux notions n6cessaires d'une science qu'il a reconnue indispen- sable dans des carri^res trfes diverses et surtout dans celle dont il semble leur avoir aplani la route. Un des critiques qui ont rendu de ce travail un compte bien- veillant, mais non moins exact, a meme contest^ le titre d' elements ; et je serais assez de son avis, Vous jugf^rez bienquedes enfants ne comprendraient rien, et par consequent ne s'interesseraient gu^re a des termes (07) techniques inevitables comme ceux-ci ; « alumine boro- silicat^e ferriftre;... magn6sie fluo-phosphat6e ;... chaiix carbonat^e rhomboidrique on spathique ; etc. » C'est done a des intelligences adultes ou inures que M. Le Canu s'adresse ; et, quitte k risquer I'apparence d'un jeu de mots dependant de la formation 6tymolo- gique des termes, dont tout le monde ne saisit pas les nuances, j'oserais volontiers appeler son abr6g6 la Geologic du geographe. Esquissons d'abord la division g6n6rale de I'oeuvre. L' ensemble se compose de six chapitres : le premier traite de la terre, comme corps isol6 dans I'espace ; le deuxifeme, de la temperature k differentes profondenrs ; le troisi^me, des tremblements de terre, des Eruptions volcaniques et de leurs effets ; le quatrifeme, des chan- gements produits a sa surface par les agents ext6- rieurs; le cinquifeme, des terrains primitifs, s6dimen- taires et volcaniques. La pourrait, a la rigueur, s'ar- rfeter I'^crivain. Le sixi^me chapitre est une esp^ce d'annexeconsacr6e kla France ; une esp6ce de module, j)ien choisi pour nous, des applications qui pourraient 6tre faites aux autres pays. L'objet de ce chapitre nous ram^ne k I'id^e pr6c6demment 6niise, qui va se cor- roborer par ffuelques indications de detail. Une partie du premier chapitre est employee k signaler I'^tendue compart^e des terres et des niers, les reliefs des terres, les profondenrs des mers. Dans le cinquifeme, a propos de matitires utiles de chaqueespfece de terrain, I'auteur indique « les localit^s qui les fournissent de preference et leurs principaux usages ; » par exemple, il nous montre : <( le carbone, a I'etat de giaphite ou de XY. JANVIKR FT FfiVRIER. 7 ( 98 ) mine de ploinb, ( p. 71 ) on France, dans les PyiY'- 'n6es et I'Ari^ge ; en Angleterrc, dans le Cumberland ; en Bavi^re ; en Norv^ge, prfes d'Arcndal ; en Espagne, pr6s de Saliun ; etc." - (p. 150) « le cuivre natif des assises cambrienne et silm-ienne, a Bahia, an Br^sil ; au (Ihili ; au Canada;)) — (page 151) tele fer oxyd6 de I'asslse jurassique, en Lorraine, en Franche- Comt6, dans I'Ardfeche ; n — (p. 153) « I'or en pail- lettes et en grains, dans la Colombie, le Chili, les lies de Ceylan, de Java, de Sumatra ; les gorges de rAltai, en Sib^rie ; voire dans les sables de I'Ari^ge ; prfes de Mirepoix, du Rhone prfes de I'embonchinv de I'Arve, duRhin pres de Strasbourg. )> En fin nn passage special de ce chapitre VI, appendice d'un int6r6t parti- culi^rement francais, traite des 'chances de succes que doit oflrir, dans les dilT^rentes regions du sol de la France, la recherche des ospfeces mint^ralogiques. En un mot, consider^e comnie extrait essenticl de connaissances vastes et compliqu6es ou comme texte succinct de d6veloppements 6tendus, la Geologic de M. Le Canu olVre une utility qui rend ce livi'e digne de votre estime. A.-D. LOURMANI). 1 ( 9^ ) Mission de M. G. Lejenn dans les Provinces Danubiennes. M. G. Lejean, membre de la Commission Centrale, vient d'accomplir la mission dont il avait 6te charg6 par M. le niinistie de I'instruction publique dans les Provinces Danubiennes. II en rapporte de nombreux documents sur lag^ographie historique et I'ethnologie du bassin du Danube inftrieur. II a de plus r6uni les 616ments d'une grande carte de la Moldavie au iyoVoo» qu'il se propose de faire graver prochainement. En attendant la publication de ses documents, nous croyons devoir mettre sous les yeux des lecteurs du Bulletin les fragments suivants de deux lettres qu'il a adress^es a M. Krnest Desjardins et k M. Jomard. 1" Extrait d'une lettre a M. Desjardins, Bucharest, 11 juin 1857. Je continue mes 6tudes sur la topographie de la Turquie d' Europe, et plus sp6cialement de la Bulgarie. Ce que j'ai pu tout d'abord constater, c'est que la carte de Kiepert, qui est de beaucoup sup6- rieure i\ tout ce qui existait jusqu'ici , me parait, pour toute la Turquie europ6enne proprement dite (moins laBosnie), improdigieux tissud'erreurs,comme topographie, orographic et surtout hydrographie. Ses reliefs du tei-rain sont fantastiqiies au plushaut degr(5; ( 100 ) mais, encore une fois, ce travail est si sup^rieur k tout ce qu'on avail d^jci, que ces erreurs ne diniinuent pas d'une ligne, k mes yeux, le inerite de cet eminent g6o- graphe. J'ai fait line percee en Bulgarlc, d'ou j'ai pn rap- porter, non-seulement des idees peu tiircopliilos, mais une quantity de notes, de croqnis, d'itineraires. Voici quelques-ims des r^sultats auxquels je suis arriv6. Parti de Routschouck : couc]i6 a Trsenik, village moiti6 turc etmoiti6 bvdgare, h li. 112. De Trsenik a Biela, A h. — On passe pr6s d'Obre- tenik (Obirteni des cartes), on entre dans de vastes foreis et on rencontre successivement trois kamouls (corps de garde) ; le dernier, f[iii doniine liiela, estpres d'un bean tepe. Le terrain, qni monte tonjours sensi- blement depuisRoutschouk, descend tres brusquoment de ce t6pe a Biela, trfes gros bonrg turc et bnlgare, connne presque tous ceux qni sont sur cette route. De Biela a Koschilan, 5 h. — On suit la rive droite de laJantra jusqu'augu6de Kossova (Osva des cartes) . La rivifere a, sur ce point, un pen plus de 100 metres de largeur et une profondeur de moins de 90 centi- metres. On entre dans une tr6s belle plaine bornee pai- des hauteurs en pente douce, tandis (pie sur la live droite, depuis Biela et jusqu'a Trnora, les montagnes viennent finii- brusqnement en face meme de la riviere. De Koscliilan :\ Trnova, h\\. ij'l. — Ou passe a gii6 la Roussitza (Russita des cartes) , en laissant Nikup k ZiO minutes sur la droite : la plaine, a une distance de plusieiu'S heures vers I'ouest, n'ollVe que des ondula- tions. On passe k Polykraista, gros bonrg bulgai-e. La ( 101 ) Jaiitra, qui s'est ecartee vers Test, levient par une courbe tr6s longrie rejoindre la route a Samovoda (Zavoda des cartes) . On entre dans une faille trt!S pro- fonde, 6troite, forniee par une chaine a pic, qui vient couper k angle droit la vallee de la Jantra ; de Samo- voda, on suit pendant une lieure un quart une fort belle voie romaine qui remonte la rive gauche de la rivi6re et que Ton quitte k 200 metres de Trnova. — A lui petit kilometre de Samovoda , deux beaux mo- nastferes bulgares adoss^s au rocher, a mi-pente : la Trinity, rive droite, et la Transfiguration, rive gauche. Trnova (du bulgare, tene, ronces) , aussi appel6 Ternovo, Tirnova, est une ville d' environ 20 000 ames, capitale historique et religieuse de la Bulgarie, bien qu'elle ne soit administrativement qu'un kainiakanat. Ses quartiers, au non)bre de sept, sont les suivants : Hitsar, Oteaka au sud, habites par des Turcs ; Frenk- Hissar, idem; Baiderlik, quartier mixte, riche, coni- mercant et central, avec une belle basilique bulgare changee en mosquee ; Kartal (en turc, aigles) , veritable aire d' aigles en eft'et, cornme presque toute la cite, I'une des plus pittoresques d'Orient ; Kato-Mahal6 , quartier inf^rieur, le long de la Jantra ; ce:s deux der- . niers, bulgares ; Tsiganka, au nord-est, habit6 par des Tsiganes et des Bulgares. La situation de Trnova sur la Jantra rappelle 6noriii6ment, avec plus de caractere encore, celle de M6ziferes sur la Meuse. J'ai visite le Trapesitza , qui passe pour I'ancienne ville bulgare : j'ajouterai, et romaine. J'ai pu r6tablir dans mon croquis le plan de cette place aduiirablement situ6e (avant I'invention de rartillerie, car elle est do- ( K^'-^ ) min6e de tous> c(jtes). On a dei-ni^renifnt fouilli' (1r fond en comble ce qui restait de mines visibles, peiit- etre pour y trouver des tr6sors ; on a trouv6 force m6- dailles roniaines et byzantines. La voie romaine part de Tangle nord, tr6s bien conserv6e, et passe la Jantra un peu au-dessous de la gorge qui fermelapresqu'ile. J'ai vu a Trnova quelques ui6dailles entre les mains de AI. Stephanos, bulgare; il y en a quelques-unes de Nicopniis (irpo; iffrpov) , et une de Dveltus (Bourgas ?) , COL FL PAC nEVLT. — II me parait prouv6 que Debeltos ou Develtus, cit6 par Pline, et fr^quemment par leg Byzantins jusqu'en 853, etait a Bourgas. Lesm^dailles de Dveltus sont-elles nombreuses? Je tiendrais a le savoir. Je suis retourn6 a Routschouk par Nikup, Roschi- lan, Trsenik. — De Samovoda, au lieu d'aller .au nord- nord-est joindre Polykraista, on tire au nord vers Resn6 (une lieure un quart), et une lienre plus loin, sur la Rounitza , qu'on passe k gu6 , on arrive au village d'Eski-Nikup (vieux Nikup), de dix maisons turques, au milieu duquel s'61feve un tchifflik (ferme) de trfes belle apparence. J'y ai visits rapidement les mines du iMcopolistro de la Table NiKono aic npf)C ictpdn des m6dailles. Je vous adresse im croquis des lieux. II y a des inscriptions en I'lionneur d'Adrien et de Trajan : je n'ai pas eu le temps de copier et de dessi- ner, mais j'y reviendrai. La plaine est couverte de mines. Vu nord s'^tend une ligne de ces curieux tu- midi nomuK^s tcpes, (pie Ton croit scythiques, etdont la Bulgarie est remplio; TarclK'-oIogie n"a encore pu rien apprendre de bien satisfaisant hVdessus. Je remarque- { 108 ) rai en passant (jue ces tepes soiit nonibrenx dans le voisinage des villes et des voies antiques. Pr6s du tchifllik, dans une petite coiu', j'ai vu ini tr6s beau chapiteau que j'avais commence k dessiner; mais les cris de plusieuis ferames turqnes m'ont forc6 k m'6- loigner. A une denii-lieue au nord-ouest est Novo-Nikup, vil- lage bulgare, route de Sistova. De Nikup a Trsenik, rien de nouveau a nientionner. De Trsenik, au lieu d'aller joindre le Lorn ou port de Bassaraba, je prends a gauche, je passe pr6s Pyrgos, que Kiepert appelle Bergas et qu'il place beaucoup trop pr6s du Danube. Je n'ai pas le temps de verifier s'il y avait la, comme je le pense, un de ces mono- pyrgos ou blockaus r6par6s ou 6tablis par Justinien, peut-etre bien le ca strum ISJaxenlii. Trois quarts d'heure avant Routschouk je d^convre un beau troncon de la voie cpie j'avais inutilement cherch^ : c'est la voie lat6rale au Danube, donn6e par la Table th^odosienne et I'ltin^raire d'Antonin; elle avance vers Routschouk en tenant le milieu entre le fleuve et le Lorn, et en suivant la crgte du plateau. Elle disparait a la descente, mais la direction g6n6rale pent faire supposer qu'elle passait le Lorn sur un pont qu'a remplac6 le pont turc actuel. Quelque voyageur a-t-il d6j^ signal^ ce fragment de Routschouk a Pyros? Je compte y revenir et explorer du mieux que je pour- rai cette voie importante. Voila quelques details purement topographiqnessur mon excursion. Je me suis occup6 aussi des divisions administratives dupays; mais les pachas qui, du reste, ( m ) ni'ont tres courloiseiuent accueilli, connaissent peu les circonsciiptions de leurs gouverneuients. Le defterdar de Routschouk (receveur general) , ([ui in'eut iiiieux renseign^, etait en prison j)our malversation, et son succcsseur n'6tait pas encore arriv6. En ontre, les di- visions ttnritorialcs de 1' empire sont soumises a des reuianiementslK^quents. En ce moment meme le Sultan a (lecr6te en principe le remplaceuient des anciens kasas ])ar des cercles [naliieA) , et on a appliqu6 ce changement au district de Klioudavendgiar, berceau de TEmpire ottoman. Voici la nouvelle division : Brousse, Djebel-Atiq, Kete, anciens kasas deveuus nahi^S. Chef-lieu, Brousse. Moiidanie, Guemlik, Milialitcli, idem. Ce dernier ab- SQi'be le kasa de Sindjan. Chef-lieu, Matidnnie. Kharmandjik, Kermasti, Vdianos, idem. Chef-lieu. KhariiHuidjik. I6ni-Cliehr, Ain-Gheul, idem. Le kasa de Yar-Hissar est incorpore a celui de leni-Chehr. Chef-lieu, leni- Chehr. Total, treize kasas changes en onze nahi6s, divis6s en quatre agglomerations qui prendront le nom de kasas. Quant aux autres kasas dependants jusqu'ici de Khoudavendgiar, et distants des sandjaks de Kod- jaili, de Karasi et de Kutahya, (dls y feront retour, ainsi que i'exige leur position geograi)hique. » (Hatt. de la lune de Ramazan 1273. — Mai 1857.) Les opera- tions du cadastre vont commencer dans tout Ic Khou- davendgiar; la partie lopographique sera lobjet d'un soin special, et s'ex6culera sous la direction d'un olii- cier d'etat-major, d'un mgenieur et d'un oflicier sp6- ( 105 ) cialement charg6 de la partie militaire (meme decret) . Je reviendrai a Bucharest, ou je nie reposerai un mois, pour repasser ensuite le Danube. J'achfeterai un cheval, car j'ai trop 6proiiv(^ les inconv6nients d'un voyage avec les chevaux et sur les routes de la Tu'r- quie. J'irai ainsi ou bon me semblera , et j'en serai quitte pour prendre a mon service, temporairenient, des dornestiques connaissantbien le pays. Je pousserai ainsi jusqu'ou Montenegro, ou j'esp6re pouvoir p6ne- trer et corriger sur les lieux menies la carte pr6cieuse ettr^s sou vent hypoth6tique de Karaczay. Ce quini'in- teresse le plus, ce sont d'abord les hautes vallees d'Edrobol, d'Isladi, de Javardin, des sources deTOsma, puis toute cette partie de la Bulgarie qui fait pointe vers la Serbie, Isnebol, Tcliiprovatz, etc. — Puis YJr- nnoiitlik, c'est-a-dire le pays entiemnent inconnii qui s'6tend de la Moravie bulgare a la fronti^re serbe, de Ghilan a Seskovacz, et qu'ha])itent des Albanais pres- que ind^pendants ; enfin, laRascie (de Fotscha a I'Al- banie) et le nord de I'Albanie jusqu'au Drin. De tout cela que me sera-t-il possible de voir ? Je ne le sals encore, niais je ferai ce que je pourrai. Extrait iVaiic U-ttre a 31. Jonuu-c/. Jassy, 12 aotit 1857. Monsieur, Je suis enfin en mesure de vous donner un ensetnble der^sultats de mon voyage, bien que leplus inqwrtant reste encore k faire. 1" En fait de topogmphie, j'ai un excellent ensemble de releves (russes et autres) de la Serbie orientillage iieuf)^ Etuli, N. Boudjak. Dans* le second on remarque Belgrade, Taback, Karakourt, Vaisal, Banova, Fontana Dziiiilor [fontniiw (fe fee), Yeni-Keui [viVai^e "c'f/)-> Chiterlick Kitai, Trajan Vecliiu {/r i'ienx), Pokroveni, Tachboiinar [ fontaine de pierre), Erdeck-bournoii . D()16-Keiii, Tchesm6 Vanuta {fontaine binnchie), Kairakli Bal)il, Derniandere. II y a en outre sur le lac Sasyk trois autres colonies s6par6es , Troj^oglon Eski - Polos Raragath-Nou. Enfin, sur le Yalpouck, la liniite a «^t6 arbitrairement tracee k travers le territoire des colonies bulgares, de faron que les colonies russes de Ronirat, Rirsaou et Bechtahna ont une partie de leur territoire en Moldavie, ot (pie le village nioldave de Kongas a la moiti^ du sien en Russie. Les villages bulgares tranchent vivement par la r6gularit6 de leur plan, leur pro])ret^, lein* bien-6tre, avec le reste dn pays. Leursnonis, g^n^ralement turcs, viennent des Tartares bondjak, que les Bnlgares ont reniplac6s en liessarabie : cette population, sobre et laborieuse, cultivcla vigne ets'occnpe de la production des c6r6ales et de r616ve des troupeaux. Le bois manque totalement, sauf quelques bouquets du cote d^ Valeni. I/' pays est assez bien arros^, mais les eaux ( 113 ) courantes soiit bieii inoins iiombreuses que les ravins qui ii'ont d'eau qu'en Iiiver. Bolgrad est la capitale des colonies : c'est une ville de 8 000 anies, batie sur le penchant d'lui coteau qui domine le lac Yalpouk, d'une'r^guiarite de construction toute russe, avec de jolies promenades publiques. Tabak est lui petit Bol- grad coninie regularite et confoi'table : il est situ6 a 2 kilometres au nord et suv la route de Kichenef, a mi-c6te de la hauteur qui descend a la riviere, et touchant le val de Trajan : les deux tiers de la d6pen- dance sont restes a la llussie. 2" Les domaines de FEtat, du lac de Katlabug a Bour- na Sola, comprenant vingt-deux villages habites, en gi6n6ral par des cosaques et des Russes, le territoire des salines domaniales de Touzli. Ces salines sont celles des lacs de Tchagani et d'Alibey, les autres sent abandonn6es. S6par6s de la mer par un banc de sable qui laisse fdtrer leurs eaux, ils baissent de niveau en 6t6 et recoivent alors les eaux de la mer dont le sel fmit alors par s'y d6poser et s'y cristalliser. L'ancienne production du sel dans le Boudjak avait aid6 au d^veloppement des races de b6tail qiii en fai- saient la richesse, avant que les colonies bulgares fussent venues donner un autre cours a 1' agriculture de la Bessarabie. 3' Les anciens domaines affect^s par le gouverne- nient russe aux regiments de cosaques de la nouvelle Russie, Troitza, Kicolaievka, etc., vendus I'an dernier par le domaine malgr6 les protestations des commis- saires ottomans. k" Les propri6t6s privies. XV. JANVIER ET FfiVRlER. 8. 8 ( 11^' ) 5° Le territoire de trois villes de Reni, Kilia, Ismail : ce dernier coniprend les quarliers (wtrd-riniroa des deux Nekrassovka, Kagurlui, Saftian, Broska. La population dc Rcni est de 8/1OO anies, celle de Kilia, de 6931 araes, celle d' Ismail de 50622. 6° Enfm, des terrains vagxies, niar^cageux, couverts de roseanx, s'(^tendant tout le long de la rive ganclie du Danube depuis Reni jusrpi'a la nier. Sous le gou- vernement nisse, toutes les communes de la Bessarabie avaient le droit de couper des roseaux dans ces com- munes : ce droit reste naturellement limite, actuelle- ment, a la Bessarabie moldave. Tout ce pays olTre assez d'int6r6t comme agriculture, mais peu comme antiquit^s : je ne trouve a citer qiife les deux tnurs on vnl dc Trajnn. Le premier, celui du nord, qaitte le Prouth a Leova, se dirige a I'est- nord-est, franchit le Saratzika nonloin du monastfere de la Gura, et se dirige vers Bender ; une seconde ligne qui semble avoir 6t6 destin^e a appnyer I'antre, se voit im peu plus au midi, au point de partage des eaux de Yalpouck et dc la Saratzika le long d'un bois mar6cageux qui touche a la nouvelle fronti^re ; elle parait aussi aller de L6ova vers Bender. Le mur inicrieur est le plus connu ( Valulii lui Tm- janudejos), il me parait etre la suite de la grandc ligne qui traverse toute la Valachie etla basse Moldavic, de TtirnulSei'eriii (sur le Danube) du Prouth et que Sul- zer appelle Avaresehe t^e^', route de Avars, d'ai)r6s uno tradition indigene, si je ne me lrom|)e. En Bessarabie, cette voie conunence a Trajan, un peu au sud do I'adu hii Isacu (gu pour notre tra- vers6e jusqu'a la bale I'ond. A Frederikshaab je fns fissez heureux ])oui- obienir du charbon dc terre d'Ecosse en sufTisante quantite pour completer mon approvisionnement , alnsi rpi'une bonne q^iiantitt^ de morue iVaiclie et e.xcellente, en sorto que nos soutes soiU ai)ondaiiuueut rem])lies. Mon intention estde m'arreter vme demi-journ^eii Lie- vely, de visiter ensuite la mine de cliarbon de teire du d6- troit de'W'aigal, [)uis tie me rendrea Proven eih, IJper- navik. Je saisirai toutes les occasions j)oiu- voust'crire. ^crivant GrOenland ou Griiitlaiul, ce iioin sera prononci' comine par Ips Danois, el siguifiera comme rliez eu\ lerre vertc, quo les Aiif;lais out traduit par Greenland, qui a la miuic significatiou ; tandis qu'eii pla- Oaut le tr6ma sur Vii {Gromland), alnsi qu'oii Ic fait gt'iK^raleilient cii FMtice, ce mot a une prononrintion dilTercute el ne signifle absolK- uientrieu du lout. La difdcultu n'est pas evitee si I'oii coritsaiis Ircnia Groenlund, car ou sail que dans Ions les mols frau(;ais, les doux lettres 0 e n'ont le son de I'o' ou He des Danois eu) que lorsqu'elles sont sui - vies d'une voyelle. (i)Ou plulot Godthaah, aiusi qu'ou le (rnuve dnns lous les nuvraget et dans toutes les carles des Uauois. (2) Celt le Dom que les Anglais donnent quelquefuii a I'lle Disco. ( 119 ) Toiites les personnes du bord soiii en tres lionne sant6 et dans les meilleures dispositions. J'ai 6t6 on ne peut pins heureux dans le choix de mes ofliciers et do mon equipage, et je siiis egalement I'ort content du navire. Nos provisions sont excellentes, et je ne puis vraiment manquer de quoi que ce soit. Je comple prendre a Beecliey un approvisionnement stq^plemen- taire en viandes conserv6es et en tout c6 qui peut etre utile ou contribuer a la sante et au comfort, Je pense que vous ap])roiiverez ce que j'ai fait un peu hors de mon clieruin pom* assurer le prompt retour en Angleterre du pauvre Lewis. II est d'une impor- tance vitale pour lui d'arriver dans ses foyers avant les mauvais temps de I'automne. Sa raaladie n'avait et6 aggrav^e en aucune mani^re par sa coiu'te ci'oisiere sur le Fox^ et sa doable paie lui a 6te comptee jus- qu'au 30 septembre. II paraissait sensible a tout ce qu'on avait fait pour lui, et je crois que cette preuve que leur sant6 est le premier objet de mes soins (comme c'est votre d6sir qu'il en soit aiiisi) a eteappr6ci6e par tout r6cfuipage. Ix aoiit : d6troit de Waigat. Nous avons fini d'em- barquer le charbon de terre et marchons devant {are running before) un fort beau vent sur Proven. 4.^'ant le 31 juillet nous n'avions pas atteint Lievely, ou nous sommes restes seulement quelques heures. Aucun Esquimau n'a encore visit^l'exp^dition ; maisM. Olrich m'a dit qu'il y en avait un dans le golfe de Disko qui vicndrait sans doute. .Vyant achet6 dix beaux chiens (c'^tait tout ce ([ue j'avais pu me procurer), je me suis rendu dans ce golfe, etaiconclu un arrangement a\ec { 120 ) nil indigene qui n'etait pas celui qu'on attendait. Mon liomme est ;ig6 de 22 ans, s'appelle Anton Oln-istian, est un excellent condncteur de chiens et parait une bonne creature. Pouisui\i par des calmes et des vents contraires, je n'atteignis pas les falaises de charbon avantla nuit denii6re,et niaintenani un luauvais temps a hat6 mon d(^'part: j'ai pn cepondant charger encore des charbons. Les Danois ont 1' habitude d'en deposer le long de ces falaises depuis un assez grand nonibre d'annees, de la lenom qui leur est donnede Rullbrud ou Coal seam (carri^re on veine de charbon). Je n'ai ni trouv6, ni cherch6 I'endroit oii le Pha'iiix fnt con- duit par M. Olrich, A Lievely je vis les capitaines de deux baleiniers dont les navires s'6taient perdus au mois de juin dans la bale Melville. lis pensent que je n'^prouverai aucune difficult^ pour ma travers6e jus- qu'a la bale Pond. La tablette (the tablet) est k bord; elle est tr6s grande, niais comnie elle est dans une caisse de bois, je ne I'ai point encore vue (1). (1) Cr m.iil)re (lahlel) ilont parlo iri le capitaino M' Cliiilock est Ifi meine que lady Franklin avail coulie au capitaiue ameriiain, Har- Blene, envoys a la reclienhe dii D' Kauc.pour fitre placd a I'iie Boe) ct peri pour la cause de la science ct pour le service de leur pays. 1) Cette pierre est Mgee pres du lieu oii ils ont passe leur premier hiver )- arctique, et d'oii, ils sent partis puur vaincre des difflcultes ou pour ( 121 ) 6 aoiit, 3 heures aprfes midi mis en panne devant Upernavik, et presqxie imm^diatcment poursuivi mon voyage. Je me suis procure maintenant trente cliiens, et j'ai a vous dire seulement good bye and by. Croyez-nioi toujours votre bien sinc6rement d6vou6 F. L. M' Clintock. Le capitaine M' Clintock mande, dans une courte note adress6e par lui an capitaine Collinson, k la hau- teur d'Upernavik, qu'il ne doit pas s'attendre k voir des baleiniers, d'oti 11 r6sulte qu'on ne recevra proba- blement plus cette ann6e des nouvelles du Fox, LETTRE DE M, LE COMTE DE CASTELNAU A M. LE PRESIDENT DE LA COMMISSION CENTRALE. Monsieur le President, Depuis pr^s de dix-huit mois que je reside au Cap, je cherche a me mettre au courant de I'^tat actuel des comiaissances g^ographiques sur I'Afrique australe. Vous connaissez, comme de juste, la grande explora- tion de M.Livingston ; raaisce beau voyage laisse, aussi « MOUBiR. EUe consacre le souvenir de la doiileur de leurs conciloyens » et de leurs admirateurs, et de I'anfjoisse mailrisce par la foi, decelle u (jui a perdu dans I c chef lie'ro'iquo de l' expedition, le plus dvvoue ot 0 leplus affectionnc des epoux. — Et ainsi il les conduisil an port oxt B ilsdoivent 6ire. — 1855. » ( 122 ) bien au sud cfu'au nord, de vai5tes espaces inexplores. All nord, on n'a guere que le voyage dii major Fer- reira de Tett6 au grand lac de Maravi. La relation de ce voyage, ])ubliee en Portugal, vous est probablenient parvenue; niais ce journal, fait par un liomme abso- lunieut t>tranger aux 6tudes scientifiques , bleu que manifestement tr6s exact, n'ajoute que pen de rensei- gnenients sur le lac lui-meme, si ce n'est cependant qu'il r6duit de beaucoup ses dimensions et qu'il en fait une sorte de riviere ou de boyau qui communique vers le ]iord avec d'autres du merae genre. II r6sulte aussi de ce voyage que le savant Lacerda, dont j'ai si souvent a admirer les beaux travaux dans I'interieur du Br6sil, est aussi parvenu a ce fameuxlac et liti a (111 certainement laisser, apr^s sa mort pr6ma- tur6e, d'int^ressantsrenseignements sur cette curleuse contr^e. On devrait rechercher ce qui pent en exister dans les archives de Lisbonne. Passons actuellement a ce rpii concerne la region silu(^e au sud des explorations de M. Livingstone. MM, Galton et Andersson sont parvenus, en 1851, jusqu au pays des Ovampas et out visits le village du chef Nangoro, situ6 vers le 18° de latitude sud. Dcpuis lors, pel'sonne n'a suivi cette direction, si ce n'est un missionnaire , M. Halm, qui cherche en ce moment a faire des d^couvertes de ce c6t6. Le capitaine Messam, parti de la baie des Tigres, a ete visiter la i-ixic'-re Cim6n6 et a trouve r[ue cette riviere, form^e Aers son embouchure jwr une l)arre de sable, ne se jette dans la mer qu'au bout di' quelques ann6es d'intermittence. A la suite de ce voyage, il parait que quelques habi- ( 123 ) tailts de r^tablissement du Massam(!'d6s ont p(^n6tr^ ji;squ'aii Cunen6 et ont forni6 sur ses ])ords, k environ 15° de longitude, un petit poste commercial. En 1853, M. Andersson a remonte la rivifere Tonke pendant trois semaines, mais n'ii paspii contimier, par suite du mauvais vouloir du chef du N'ganii (Lechetu- b616) ; a la fin de I'ann^e dernifere , im traitant, M. Green ^ a 6te plus heureux et est parvenu k la ville du chef de Libai)!, qu'il nomme Debab^. Get 6tablis- sement est situ6 dans une ile et parait etre situ6 a en- viron 17o,40' de latitude sud. La route qu' Andersson a ouverte, de Walvicli-Bay au lac N'gami, a 6t6 depuis suivie par deux voyageurs quiavaient pour but la recherche derivoire,M. Green, d6ja cit6, et M, Ghapman. Ge dernier, en quittant le lac, SB dirigea vers Test et d6coUvrit de vastes salines, dans la principals desquelles vient se jeter ou plutdt se perdre la rivifere de ZoUga ; mais, de m6me que pour le N'gami, Ton me parait avoir beaucoup exag6r6 I'^ten- due decette saline. Vous connaissez probablement la mort du profes- seur Wahlberg, arriv6e a la fin de I'anli^e derni^re, a environ 50 heues au nord-estdu N'gami. 1! fut tu6 par des 6l6phants qu'il 6tait alle chasser. Le chef Seshek6, repouss6 j usque sur le Zambese avec ses Betchouanas, continue k etre Tennemi mortel des Boers, tandis qu'il recoit bien les Anglais venant de Walvich-Bay. Le rev6rendM. Moffat a fait, en 185Zi, une visite au f6rou-chef Mosel6kats6 qui, egalenient repouss6 par les fermiers hollandais, est aujourd'hui 6tabli au nord de ( 124 ) Limpopo. Sa capitale parait ^tre vers longitude 29, la- titude 20. Quant au Limpopo lui-meme, on est encore k se de- mander quelle est son embouchure dans la mer? Est-ce la riviere de Sofala, celle de Sabia ou I'lnhamband? Vous etes probablement bien au courant des deux r6- publiques fornixes par les Boers au nord-ouest do la riviere d' Orange, c'est-a-dire de la riviere de la fron- ti^re du Cap. L'une, celle du Free State, a pris un grand accroissement dans ces derniers temps. L'autre, le Transi>aal, est moins avanc6e sous le rap- port de la civilisation. II y a pen de mois que les ha- bitants de cette dernifere, sous les ordres de Pr^torius (fds de celui qui a si longtemps fait la guerre aux Anglais), sont venus envahir le Free State, mais ils se sont retir6s sans combat. Le Transvaal s'^tend depuis le Vaal ou Faal river jusqu'au Limpopo, du moins cette vaste 6tendue de contr^e est r6clam6e par Pr^torius. Plusicurs villages se sont Aleves, mais la plupart des fermiers pr6f6rent vivre isol6s et campent continuellement dans leurs chariots, errants sans cesse avec leurs bestiaux, et cherchant les meillcnrs paturages. En general, ils se montrent pen sociables et ferment aux voyageurs la route du gi'and lac. Les missionnaires protestants franf ais se sont depuis quelques anuses etablis dans le pays des Bassoutos oix ils ont 6t6 fort bien re^us par le chef Mosshesh. Ils ont aujourd'hui douze 6tablissements dans cette con- tr6e qu'ils ont 6nor moment civilis6e. Mon fils parti du Cap, I'annee derni^re, a parcouru ( 125 ) le Free State et est parvenu k Natal par terre. II a aclress6 la relation de ce voyage k S. E. M. le ministre c1e r Instruction publique qui vous le conimuniquera sans doute ; quant a moi, retejiu dans la colonie par mes fonctions, je n'ai dii parcouiir que la portion ex- treme de I'Afrique du Cap a Algoa-Bay. J'ai fait sur cette route d'assez nombreuses observations geologi- ques et pris beaucoup de hauteurs barometriques. Je soUicite en ce moment de nion departement I'autorisa- tion dep6netrer dans I'int^rieur ; si je I'obtenais je suis dispos6 a faire ici ce que j'ai fait autrefois dans I'Am^- rique du Sud. Je m'occupe toujours beancoup de zoologie et ai r6uni une collection considerable des productions de I'Afrique australe. La Caflrerie est aujourd'hui tranquille et les trai- tants commencent a y retourner, mais les Caffres meurent de faim pour avoir, d'apr^s les conseils d'un pretendu prophfete, tu6 tons leurs bestiaux, dans leur superstitieuse croyance, que chaque animal tu6 devait, a un jour donn6, en produire dix. La colonie de Natal est en grande voie de prosperity, et Ton s'y occupe beaucoup de la culture de la canne a Sucre. Le pays, situ6 au nord et qui est habits par les Zoulous, est en guerre par suite de la revoke d'un des fds du chef Panda centre son pfere. La riviere Tugela a 6t6 il y a pen de mois le theatre d'un horrible massacre. Voila, monsieur le president, le r6sum6 rapide de r^tat des travaux g6ographiques dans I'Afrique aus- trale. J'aurai I'honneur de vous tenir au courant de ce ( 126 ) qui pourra s'y faire, mais je dois mentionner la carte que vient de publior ici M. Hall, et qui reiiferme beau- coup de details siir les republiques des lioers. II me semble avoir trop cherch^ a reniplir les vides conside- rables que doit contenir un travail quis'^tendjusqu'au 16" degr6 de latitude, Le seul obstacle r6el qui s'oppose au d6\ eloppeuient des recherches dont cette region est la inouclie Ts6ts6 qui tue les bestiaux et qui einj)6clie les voyages de ceux qui vont a la recherche de I'ivoire. Les Griquas (anciens Bastards) fontde grands ouvra- ges dans rinterieiu-. Une expedition de ces gens ayant dernierement p6netr6 au nord-ouest du lac de N'gami a jwrdu tous ses booufs et a et6 oblig6e d'abandonner ses chariots et son ivoire. Les Portugais explorenl rintericur dxi Congo el s'etendent a une iiniiiense distance a I'ouest du Mo- zambique. Partout M. Livingstone les a rencontres. Comte DE Castelx.au, Consul de France . NOTE SUR LES ILES DES COCOS. Ledornior iiumero de {'(h'crlaud ikiud Mdil, pui)lie a Houg»Jvung , cojitient la notilication oflicielle de la prise de possession desilesdes Cocos par I'Angleterre. C'cstle 31 mars 1857, que le capitaine GrenviUe Free- mantle, commandant de hJano/i, frigate de S. M. 13,, a arbore le pavilion anglais sui' I'ile princi])aJ.e a])pelee ( 127 ) North Keeling. Le but apparent de I'^ngleterre est d'y cr6er une station de relache pour les steamers qui font le service entre le cap de Bonne-Esp6rance et la Nou- velle-Galles du Snd. II ne sera pas sans utility de faire suivre cette nou- velle de quelques renseignements tendant a rectifier les erreurs dans lesquelles les journaux les mieux instruits tonibent toujours au sujet de ces iles qu'ils confondent avec deux autres groupes du raeme nom, situ6s : le premier, sur la c6te ouest de Sumatra, et le second, dans le golfe du Bengale arcliipel d' Andaman. Les iles des Cocos, qui font I'objet de cette note, sont un groupe de trois iles dont la principale est situ6e par 12° de lat. sud, et 98" long, est de Greenwich (100°20' de Paris). Plac6es sur la nieme ligne que Maurice, ainsi que sur le trajet direct de Ceylan a Ti- mor, elles out I'avantage de poss6der un mouillage sur pour la creation d'une station navale. Leur aspect est le meme que celui des iles de corail de la Polyn^sie centrale. La plus septentrionale des trois iles cpie le capitaineFreemantle semble avoir designee sous le nom de Preeling Island, ade 8 000 a 9 600 metres de long, sur U 800aOZi00 metres de large, avec un bon debar- cadfere sur la cote occidentale. Un canal de 3 ou 4 lieues la s6pare du groupe meridional le plus cominun6ment appel6 Cocos Islands. Conq:)ose d'une chaine d'ilots resserr^s entre eux, le groupe s'6tend en amphitheatre autour de la bale profonde de Port-Albion ou du Re- fuge qui pr^sente un bon ancragc pour les navires de fort tonnage, et dont 1' entree placee a I'extremite sep- tentrionale , a 3 "200 metres de large. L'absence de ( 128) noms malais explique I'etat d' abandon dans lequel ces lies se trouvaieiit a 17'poquo de Icur docouverte ; leur territoirc assez fertile produit une grande multitude de cocotiers, de vt^getaux de toute sorte,.et nourrit une variety remarquable d'oiseaux de terre et de mer, de tortues et de crabes. Au moment de la prise de possession de ce petit ar- chipel, File du noid ou Keeling etait habitOe par un Ecossais du uoni de Grant, (\n\ I'occiipait en vml pro- pri6taire souverain, se livrant, avec I'aide des insu- laires et de quelques Malais, au coumierce de I'huile de coco, et des fournitures failes aux navires qui vien- nent relacher dans ses petits 6tats dont I'aura d^pos- s6de I'annexion britannique. E. DE Froidefond des Farges. 18 d^cembre 1857. ( 129 ) Jkcten T. i>C i^ - /". -^^^/?- -^^ • -<^ ^tj^ /^ ' "'^ Imp.Bjneteau lils. Pan. BULLETIN DE LA SOCIETE DE GEOGRAPHIE. MARS iS58. lEeuioires, etc. EX AM EN DK QUELQUES POINTS DE l'hISTOIRE OLOGRAPH (QUE DU BRfiSIL. Par M. V. A. de VAnNiiACEX, MEsiBriE de la socikte. I. Messieurs, 1. — Quand j'ai concu, il y a deja bien des amines, ]e projet d'olTiira nies compatriotes une liistoive geii^- lale de la civilisation dc iiioii pays, et meme apr^s avoir realise en partie cette laboriense entreprise, que le savant Humboldt a ])ien voulu qualifier d'importante et belle, j'etais bien loin de m'imaginer que Touvrage auralt le nioindre succ^s en Europe. L'amour de ma patrie, le desir de faire connaitre a tons mes compa- triotes la foi'mation lente et successive de ma jeune nation, tels 6taient les sentiments qui m'animaient. Ne pou\ ant, ne devant pas ecrire en francais, memo par XV. MARS. 1. 10 ( l/iO ) ^gard pour ceux ;i (lui laoii livre etail destine, il est clair que toutes mes aiubilions de siicc^s pour I'ou- vrage, incessant objet de mes veilles dans les meilleui-es ann6es de ma vie, devaient se borner au Br6sil. J'6tais si sincfero dans ces convictions, quo j'ai coiinnenc6 par en donner la preuve dans I'envoi fjiie j'ai fait a Rio de Janeiro de toute I'^dition. 2. — Cependant j'ai appris, et je n'ai pas besoiii do ilire avec quelle agr^ablo surprise, que ce livre, dont je n'avais os6 faire liommage a aucun corps scientilique ou litt^raire, avait attir6 la bienveillante attention de quelques soci6t^s illustres (pii m'ont meme accords I'hnnneur inattendu de m'admettre dans leur sein. — Je m'estiine heureux, messieurs, de pouvoir compter dans ce nombre la Soci^te de G^ographie de Paris, grace ci rami qui, k moii insu, a pris sur lui de vous ulTiii' un exemplaire de mon premier volume. 3. — Vous avez fait davantage, messieurs : vous m'avez accord^ la haute distinction de charger un de vos membres de vous presenter un rapport sur mon travail; et joregarde cette distinction connne d'autant plus flatteuse, que le savant sur lequelest tombe votre choix est le meme que vous venez d'honorer de vos suiTrages pour la pr6sidence de vos travaux. ft. — Le rapport de M. d'Avezac a et6 public dans votre Bulletin, et vous y aurez remarqu6 combien son auteur est 61oign6 de se trouver d'accord avec moi sur le peude questions auxquelles il a bien \oulu, trfesmi- nutieusement , il est vrai , circonscrire son analyse , m' accusant meme, h^las ! de pen de sinc^rit6 etde pen de justice. J'ainie ^ declarer que ces questions sont ( 1^7 ) surtout de celles qui se rattachent k certains interets jjolilique.s d'actiialite, qui ne pouvaient qu'interesser vivenient M. d'Avezac, digne et zele cliel au uiinistfere de la marine et des colonies. 5. — Quoi qu'ii en soit, je n'ai pu qu'eti'e sensible a I'obligeance qu'il a bien voulu avoir, de mettre en relief toutes mes publications prec^dentes, failes dans le but de preparer consciencieusement le terrain, en commencant pai' debrouiller ie veritable chaos oii se trouvait I'histoire de mon pays, Surtout celle du pre- mier et du dernier si^cle, malgr6 les travaux impor- tants du celebre Soutliey dans les trois gros volumes qu'il a appel6s HUtoire du Brest/ et qui m^riteraieul plutot le titre de Memoires pour ecrire I liistoire an iire- sii et lies pays de la P/ata, etc. 6. • — Le savant rapporteur a fait plus : ii a constat^ ie grand mouvement litt^raire qui, grace a mon souve- rain, s'opere au Bresil depuis quelques aunees. Heu- reux le livre qui s'6tant propose seulement de mettre sous lai nouveau jour les fails Its plus honorables du passe d'une nation, a r6ussi, par les plus rares circonstances, a r6veler en meme temps, et par uue plume non suspecte, les faits les plus honorables de r6tat actuel de cet Empii-e du nouveau monde ! 7. — Les deux motifs dont je viens de parler m'au- raient empech6, a eux seuls, d'61ever des plaintes sur certains d6tails du rapport. Mais depuis que j'ai eu, le inois dernier, I'avantage de faire la connaissance pei- sonnelle de I'auteur, j'ai re^u de sa part des t6moi- gnages si marques de consideration, de I'estime la plus vraie et de la plus r6elle sympathie d'un confrere aifec- ( i/,8 ) tiielix, que jc crois devoir preiuire clans le mcilleur sens possi])le quelques expressions echappees a I'en- trainenient de la composition, dependant je nie reserve, messieurs, d'en feire voir la rigueur, sinon I'injustice, en vous les remettant sous lesyenx dans mon propre texte. 8. — Grace, en tons cas, a des circonstances acci- dentelles qui in'ont amene a Paris, precis6ment k cette (^poqtie, ma tache va devenir i)lus facile, plus agreable et surtout phis utile, en se bornant exclusivemcnt a I'examen calme et inqjartial des faits. Dans le cliauq) de la science, devant une Society scientifique comuic la votre, messieurs, on ne discute que la science, on ne vise qua la verite. Nous sommes arrives a une 6poque oil Ton va a la recherche de celle-ci partout oil Ton esp^re la rencontrer ; et heureusement tons les niem- bres de la famille intellectuelle repandus dans le monde, comniencent a reconnaitre pour leur veritable public ce menie monde intcllectuel. 9. — Je tacherai done de prouver que, loin d'avoir c6d6 a des preventions invet^rees, ou d'avoir connnis des erreurs regrettables, j'avais et j'ai encore, surcjuel- ques points oil mon critique ne pense pas comnie moi, des convictions trop bicn fondles pour que je puisse lomber d'accord avec lui. J'ai d'autant plus besoin de presenter ces preuves, que je dois declarer, qu'en lueme teni|)S que je livrais an pxiblic mon second volume, qui pourle moment complete I'ouvrage, en s'arretantala jMd- cliuuation de I'empire, en 1822, je revoyais d^jii la tra- duction francaise du premier volume faite par u)i ami (1) (l)tM, 1). II, ( l/li) ) et qui netardera pas a etre mise sous pr.sse, ei que je pi-^pare un auti'e travail plus resume ouje nie propose de trailer aiissidc la nouvelle bre de 1' Empire. — A la pu- blication de ces deux livres, on verra que, malgr6 toutes les corrections et ameliorations que j'y ajouterai, je ne puis pas, en conseience, me r<^soiidre a admettre celles qui me sont indiqu6es par mon habile contradicteur. 10. — Ainsi, en vous priant, messieurs, de vouloir bien ajourner votre jugement defmitif sur mon ouvrage pour le moment ou il sera publie en francais, je me boraerai a examiner a present, une a une, les princi- pales questions d'bistoire geographique sur lesquelles M. d'Avezac a cru devoir m'attaquer. Dans cebut je ne ferai parfois rien de plus que de d^velopper les menies arguments que j'avais deja pr^sentes d'une mani^n-e concise dan8 mon ouvrage. II. DccoiH'ei te dii Bivsil. 11. — A propos de la d^couverte du Bresil, je suis accuse a la fois d' avoir mis Cabral au premier plan, et d' avoir donn6 anion pays, dans I'Espagnol Hojeda, un nouveau d^couvreur avant le meme Cabral. 12. — D'aprfesl'opinion de mon critique, je me suis laiss6 entrainer h la premiere concession pour ob^ir aux prejuges de vaniles jnlouses et injustes du Portugal ; et a la seconde, par une inadi>ertance imuujeste de ma part, (( comme resultat d'une meprise dans I' eniploi inat- tcntif des rccits de Fespuce , » pendant un sommeil d'Hom^re dent il allait me r6veiller. 13. — Je yous assure, messieurs, que, en ecrivain ( 150 ) consciencieux, je n'ai song6 a flattei' aucmie vanit6 ni jalousie; et d'apr^s mes preuves touchant la naviga- tion d'llojeda, j'attcndrai votre verdict impartial sur ce sommeil patriarcal que, ])eut-6tre, je suis destin6 i gouter toute ma vie. 1/4. — II est vrai que, sans nianqiieren rien k I'his- toire, j'ai cm devoir mettre sur un plan mi pcu ])his avanc^ de mon tableau la figure sail Ian to de Cabral. Je ne faisais pas riiistoire de I'Ain^rique, messieurs; j'^crivais celle de la civilisation du Br6sil ])ar les Portugais ; et dans cette histoire , \nie des premieres questions k traiter^tait celle desavoir comment le Por- tugal a commence a connaitre cette partiedu globe qui Ini 6tait 6chne a coloniser. Or, ce fut le Portngais Le- raos, d6p6ch6 par son corapatriote Cabral, qui le pre- mier fit connaitre en Europe I'existence du Br6sil, el non pas les Espagnols Hojeda, Lepe ou Pinzon. II fal- lait dene accorder la meilleure ])lace k ce qui avait le plus d'imjiortance. 15. — Je n'ai done 6t6 que tr6s juste la o£i le s6v^,re rapporteur m'accuse d'injnstice a propos de Cabral. Si, conune bistorien, j'6tais capable de manquer a l'e([uit6 histori(|ue pour flatter les jalousies d'autrui, je me se- rais bien gard6 de mettre en avant, en opposition k la gloire de Cabral, I'Espagnol Hojeda, le decouvreur que j'ai 6t6 le premier a proclainer comme ayant precede tousles autres dans I'atterrage an Bresil. 16. — Mon argument en faveur d'une d6couverte du Bresil par Hojeda, je I'ai bien dit dans mon ouvrage, se Ibnde avant tout sur la bonne foi pret6e aux recits de Yespuce dans les deux voyages qu' il assure avoir fails [ 151 ) ponr TEspagne. A ceux qui croieiit Vespuce un faus- saire, qui croient faux les recits de ses quatre voyages, imprimis de son vivant (1 ) , en plusieurs langues raeme, je n'ai rien k dire. Mais heureusement mou critique admet comme moi la v^racite de Vespuce (2), et I'un et I'autre nousne pouvons])as nous refuser a subir ies legitimes consequences de la logique. III. Hojeda premier decouvreur ihi Bresil. 17, — Malgr6 les opinions contraires du digne cri- tique, je soutiens que Hojeda, dans son premier voyage, accompagn6 de Vespuce, a d^couvert L- Br6sil vers la fin de join 1Z|99. Voici nies preuves : 18. — Premiere preuvc. — Hojeda lui-meme declare (1) Nous tenons a bien distingner les lettres imprimeesdu vivant de Vesjiuce d'avec une autre sur le deuxi^me voyage qui a (^t^ publide pour la premiere fois en 1745, par Bandiiii (p. (ii-Sb), qui la croyait autographe. Comme il a 6t6 d(^montr6 qu'elle ne I'^tait pas, et comme d'ailleurs I'abbe Fiacchi , selon Napione [Esame crilico del primo vkiggio, etc., p. 31 h 33), y a rencoritr(? dcs differences considerables dans les chiffres et dans les phrases les plus caracl^ristiques, il faut nous mdfier de son authenticitf^, car loin d'etre d'accord avec des do- cuments provenant de sources plus pures, elle paralt avoir ^t^ forgee, depuis 1601, d'aprfes le r6c'\t infidele d'Hrrrera, et elle contienl cetie longitude absurde de 82" ^ oucst de Cariix, appliquee a la c(Jte de la Guyaue. (2) D'Avezac, Bulletin de la Societo de Ge'ogmphie, XIV, p. 155 : « II peul y avoir des variantes quant aux chiffres, il n'y en a pas quant » k la porl^e des fails. » CeUe page 1 55 repond k la page 67 du tirage apart. Ainsi, toutes nos citations dn Bulletin se rapporterout a I'excmplaire lir(5 a part, par la simple soustraction de 88. ( i'>5 ) que dans son picinicr xoyagc a Paria (I), a la suite dc la dt^couvcrtc do cette cote par Coloml) (aout I'iOS), Vespuce et Cosa etalent avec lui. (Ida est d'acxoid avec la date que Vespuce assigne a son voyage a Paria vers le milieu dc I'amiee suivante. 19. — Deiucienic piciive. — Dans son premier voyage, Hojeda avait avec Ini un certain Nicolas Perez, el nous Savons par les depositions de celui-ci (2), que ce voyage ne fut autre que celui oii Hojeda parti t d'Espagne, en l/i99, un pen avant Nino, Done il ne pent d^cid^nient etre que le second voyage de Vespuce, commence en mai 1/|99, 20. — Troisicinc pveuve. — Vespacc ne lit que deux voyages au service d'Espagne. 11 assigne au j)renuer des dates et des chifl'res de latitude et de longitude qui nous portent (3) a des 6poques et a des pays qui n'ont rien a I'aire a\ec ce que nous savons des voyages d' Hojeda. II ne reste done que son second voyage au- quel puisse etre appliqute I'assertion de Hojeda lui- meuie, d'avoii->o\ag<^ une fois avec Vespuce. 21. — QiiatricDie prciive. — En bien ^tudiaiil le r6cit de ce deuxi^me voyage de Vespuce, on le Irouve parfaitement d' accord avec celui du premier voyage (1) « Que este tcstigo cs el dicho llojoda, que \iuo :'i desculnir rl » primcro hombrc que vino a dcscubrir desi)uesquc el Aliniraiile, uelc. II est flair que cette deposition est douude en rapport avec la dcmande du FiscaU qui explicjue clairemcnt lYpoque de Tatlerragc de I'aniiral a la tierra firmf. (2) Voy. Nav., Coll., vol. IH, p. :,H et p. 545. (3) Voy. notre precddcute dissertalioa sur Vespuce ti son rrvEiiiER ▼OTIGK. ' 15;5 trHoji'da, recit I'ait [yav cc iiavigateur lui-meiu ; dans le fauieux proc6s de Colojiib, cpie Navarrete a pu])li6. 22. — Pom- nous en convaincre il suftit d'un simple rapprochement : Hojeda dit qu'apres son arrivee en Am^riquc, II suivitla cote vers le nord ; II debarqua dans File Marguerite et dans cellc des Grants [Coracdo); II trouva des perles (1) ; Enlin il alia a I'Espanola (Haiti), oii nous savons ses d6meles avec Roldan. Vespuce, de son c6t6, nous dit aussi qu'apres un certain atterrage, II suivit la cote vers le nord ; II debarqua dans une ile, evidemnient la Marguerite, oil I'eau fraiche manquait (2) et dont les habitants se nourrissaient de poissons (3) ; II fit r achat de quelques perles ; Enfin il alia a I'Antille (A), d6couverte depuis qnel- (1) Voy. Nav. Ill, 86 cl 5i'i, ct aussi p. 5il. (2) Le muuque d'eau fratche dans la Marguerite, d^jk remarque par Oviedo, quand il dit (I, 613) : « No las lienc (aguas) siuo de Xagiioys » e mala, » est conlirme par un voyagcur moderiie : « L'aridile dii >' sol et la secheresse du clinial... I,es habitants preferent boire de » I'eau de mare quoiqu'clle soil toujours trouble. » (Voyage aux ilcs Trinidad, de Tabago, de la Marguerite, par J. J. Damion Lavayssc. Paris, 1813, vol. II, p. 277 et 279.) (3) Encore aujourd'hui la p^chc y est aboadautc : « La pi^che jdit encore Lavaysse) est le principal objot du commerce de la Marguerite. » (4; Charlevoix, en disant que I'ile Espaiiola ou Haiti a 616 de toutes les Antilles celle qui a le plus allird rattention des Espagnols, noui explique comnieut Vespucc iui a appliquii par excellence le noa ( 154 ) ques ami6es par Colonib, ou, inalgr6 les tracassericR et les dangers de la i)art des Chretiens dc I'ile, il se refit pour retourner en Europe. 23. — Mais j'entends ddjk objecter : 1(> rapiiroclic- ment n'est pas complet : il laisse a desirer dans les details du commencenient et de la fin tlu voyage. Ves- piice ])ai-le d'lin atterrage au Br6sil, et Hojeda ne nons en dit mot ; et en outre, la date du d^pait de Vespuce pour I'Europe ne s'accorde pas avecce que nous savons du retour d'Hojeda. 24. — II faut bien admettre qu'il y a entre les deux r6cits des divergences bien notaJ)les, en apparence, autrement comment s'expliquer ([ii'oii ail pu tant s'e- garei' dans les rapprochements des deux voyages de Vespuce avec ceux d'autres navigateurs. Mais nous aliens voir que ces diftlcult^s ])euvent s'expUqiier , et qu'il ne reste aucun motif pour nous empecher de croire que le second voyEige de Vespuce ne soit le premier d'Hojeda. IV. 25. — II est vrai que, dans sa deposition, Hojeda ne dit rien de 1' atterrage au Br6sil, dont Vespuce nous rend conipte ; mais aussi il est incontestable que, outre (|u'il n'6tait interrog6 que sur la d6couverte de la tierra //niifon Paria, il pourrait bieji avoir voulu {"aire, comme ])lusieurs autres t6moins (1), une deposition d'Antille. Cauovai s'esl bicii troiiipe (luaiid il ii voulu prouvci quo celte ADtille n'dtait pas I'Espanola. (1) Nicolas Perez (Nav. Ill, 559) nc nous parlc que dc la ddcou- verte depuis la poiute du Drago jusqu'au cap de Vela, de meme que ( 155 ) restreiiite , surtout quand par I'atterrage au Br6sil il avait manqa6 a ses instructions qui, d'aprfes ce qui avait 6te stipule aTordesillasentreles deux couronnes, cinq ann6es aiqiaravant, lui ordonnaient express^ment de ne i)as lonelier aux terres de la demarcation du Por- tugal (1). Et en 1515, quand il devait bien savoir que son premier atterrage s'6tait fait sur des cotes u'ap- partenant pas a I'Espagne, il devait se rappeler qu'il lui avait cout6 d6ja nne fois assez cher d' avoir montr6 qn'il faisait pen de cas de I'injonction de respectei' les domaines portugais. On salt qu'aprfes son premier voyage il avait 6t6 condamn^ pour avoir d6barqu6 dans Tile de Santiago du cap Vert (2) . 26. — Ainsi, s'il se tait sur cet atterrage, quand il ne s'agit pas d'une confession g6n6rale, cela ne veut pas dire qu'il le d6savoue. Et, selon toutes les regies de la critique, iln'y avait qu'un tel d6saveu qui put avoir la force suflisante pour d6truire 1' affirma- tive de Vespuce, d'autant plus que les lettres de celui- ci avaient et6 imprimees, a plusieurs reprises, lors de cette deposition. L' assertion de Vespuce est im argu- ment d6cisif, surtout quand on pense qu'il 6crivait li- brement en Portugal et poui- 1' Italic; et cette asser- tion se fortifie si nous admettons I'authenticite de la lettre 6crite du cap Vert le Zi juin 1501, dans laquelle, Jean Gonzalez et J. Calvo [lb. p. 553) n'avonrnt de la d^couverte de Lepe que la parlie de TAmazone vers le nord. (1) I.eUrede Roldan, Nav. Ill, 7 ; Herrera, Dec. !■', lib. IV, cap. I : « El obispo se la dio (la licencia) firmada de su nombro, y no di; Ids » reyes, con que no locasse en tierra del rey de Portugal. » (2) Nav. II, 430. ( 1''^ ) eii reudaiil coiiipte dc re\])t'(liti()ii di- Caljiul. il oi dii que latene decou^ erte par le iiavigaleur ])oitugais n'esl (|u'inic partie du pays (1) que Vespuce avail lni-niemc decouvert au])aia\aiit. Cola nous fait une cinquieme preiive eu favour du r6cit de Vespuce et de I'atterrage au Bresil par Hojeda. 27. — A part cette circonstance de I'atterrage au Brf^sil, la narration de Vespuce olTre encore un autre point de contact avec la disposition d'Hojeda. — Celui- ci declare que, quand il est arri\ e ;i Paria, il venait de parcourir la c6te pendant deu\ cents lieues (2). Cq cliillre le jiorte jiistement vers le cap d'Orange, pr6s duquel la cute se niontrc plus 61ev6e ; et c'est la que Vespuce parait aAoir atterri apres etre sorti du port de Maragnan, attendu que le nouvel atterrage eut lieu dans une baie (3) dont les habitants obtenaient des perles de leurs enneniis a I'ouest, qui les pechaient. Dei^uis cette baie il continua, comme Hojeda, a suivre la cole jusqu'en face de Tile Marguerite. Voila une siuieiNc preiH'c eu fa^eui' de rassocialion de Vespuce a Hojeda. 28. — Une autre preuve en faveur de cette premiere de- couverte du Bresil nous serait peut-etre encore fournie, (1) « Medesima terra clic io discopcrzi, » etc. — Baldclli, I, liv. MsdePier Voglienli, II" 1910. (2) Nous admcUoiis voloiitiers I'opinion de M. de I.n Roquette, qu'ci cette occasiou Hojeda « vit les embouchures des rivieres lisequibo et Orcnoque. » — Voy. {'article Hojeda daiis la Hiographic generate, publiee par MM. Didot, vol. XIX, p. j29. (3) (I Partimmo di qui, eil entrammo denlro neW insenata dove tro- » vammo, etc. * ( 157 ) 51 nous en avions besoin, par lacroix trouvee (1), evl- derament en 1500, aux bords d'nne riviere, surla cote septentrionale dii Bresil, et dans un endroitqui r6pond bien a celui de I'atterrage de Hojeda, d'aprfes le r6cit de Vespiice. Rien de plus naturelque de supposer que cette croix avait 6t6 inaugnree pour constater la d6- couverte. Et nous savonspar Vespuce que cette d6cou- verte, en iliQQ, se fit prfes d'une riviere. 29. — Mais voici deiix teuioignages d'une grande force, etrangers a Hojeda et a Vespuce, qui vont nous prouver jusqu'a I'evidence que I'un et I'autre out d6- couvert la cote du Bresil en lZi9i>. 30. — Teinoiguage eit faveiir (C Hojeda. — A I'arri- v6e de Hojeda au Haiti, Roldan, apres a^•oir visite la flotte, mandait officiellenient a C-olomb, dans unelettre qui nous a ete transraise par Las Casas et que Navar- rete (HI, 7) a reproduite, que ledit Hojeda venait de parcourir six cents lieues de cote, ce qui remet juste- ment la d6couverte au point ou nous I'^tablissons. 31. — Temoignai^e en fiivcuf de Vespuce. — Le te- nioignage en faveur du navigateur (lorentin nous est donn6 parEmpoli. Cevoyageur, qui partit de Lisbonne pour rinde, en coiupagnie d' Albuquerque, le 6 avril 1503, un mois avant le depart de Vespuce pour son quatrieme voyage, en touchant au Br6sil, nous dit que (1) Voyez la copie de la fameuse carte actuelleineut au Musde uaval de Madrid, copie publi^e par La Sagra (1837), ou mieux encore son fuc-sirnlle dans les Monuments de M. Joniard.On lit non loin do I'en- droit oil sont les deux caravclles, qui evidemnienl se rapportent h Texploratiou par Lcpe, cette inscription : lUo do se hallo una cruz (Riviere ou on a tronv6 uae croix). ( 158 ) ce pays avait 6te d^couvert par Vespuce, d'auties ibis [alire volte) (1), Par coiisequoiit l<^navigateur lloieiitiu, seloii Eiiipoli, avait (Jle au Bresil imc fois an moius avant 1501, 52. — Occupons-nous k present de I'autre detail oii le r6cit de Vespuce est en disaccord avec ce qu'on sail du premier voyage d'Hojeda. Nous voulons parler des dates du retour du navigaleur florentin. Nous croyons que, bie^ii qu'ellesne s'accordent pas aveccequon sail du I'etour d'Hojeda, on ne peut en inf6rer autie cliose sinon que Hojeda, latiguii de ses denieles aveclloldan, se serait empress^ de revenir en Espagne, tandis que "Vespuce, ami de Coloinb, serait reste pour se refaire, et qu'il revint plus tard. Ainsi nous sommes bien loin d" adopter les corrections que Canovai a faites dans les dates du retour, d'aillem's tr6s d' accord entre elles. Et cela, quoique nous soyons d'avis que les textes imprimis dii recil de ce second voyage contiennent quel((ues auires fautes typograpliiques. Pour surcroit du mal- heur de Vespuce, ses pan6gj ristes, tout occup6s a changer la oil les changements rcndaient le te\te plus obscur, n'ont pas fait attention aux fautes evidentes, dont la correction retablil I'liarmonie qui tloit regner dans la v6rit6 (2) . (1) « Ci irouamo lato uuati, p. niezo lu tcira della vera rrocf, ouer » del Bresil cosi iiomiuata, allre voUe liiscopcrta per Amerigo Vespucci. » (Ramusio, vol. i, cd. de 155i, fol. 158.) (2) Nous crojinis, par exein|)lc, que X'espuce, parti dp Cadiv au Diois de mai, n'a pu dire au niuis d'aofli, qu'il y aya'it prc^que un an qu'il ua\iguait. Nou£ croyons aussi qu'on doit lire la latitude du port des Perles 13% et uou 18° avec Baadini, ni 15" avec Cauovai ; et qua ( 159 ) 35. — Maisles moments me sont pr^cieux pour trai- terd'autres points plus importants. Je crois avoir dejk donn6 assez de preuves que ce ne fut ni par inadver- tatice vianifeate, ni pour oheir a dcs pret'enl/oris quel- conques, ni pour ne pas avoir pret6 toute 1' attention n6cessaire a I'ouvrage du savant Humboldt, que j'ai au contraire tant lu et admir6, mais seulement pour ob6ir k des convictions proibndes, sup^rieures a toutes ies raisons d'autorit^, que j'ai compt6 Hojeda au nombre des decouvreiu's du Br^sil. Done, me permettant de retourner contre mon savant critique la pointe liora- tienne qu'il s'est plu a aiguiser contre moi, ... « Quaudoqiie bonus dorniitat Homerus, » je passerai a un autre point; mais je prierai d'abord M. d'Avezac de consid^rer de nouveau Ies raisons qu'iJ a eues pour mettre sur la premiere de ses deux cartes, publi6es avec son rapport sur mon livre, cette inscrip- tion a r embouchure du Maroni : u Point le plus oriental qui puisse etre assign^ a la d^couverte d'Hojeda. » V. DecoiH'erte de Pinzon. 34, — L'injuste accusation d'une grave inadver- tance au sujet du voyage d'Hojeda a 6t6 suivie d'une Vespuce y resta nou pas 4", mais 17 jours. Et enfin, sachant qu'Ho- jeda est arrive a I'Espanola le 5 septembre 1499, et Vespuce nous disaut que son d(?parl pour I'Europe eut lieu le 22 juillet loOO, il est clair que le s^jour dans I'ile fut de 10 mois et 17 jours, et nou de 2 mois et 17 jours, comme on lit dans I'^ditiou regard^e coramepri- mitive. On aura lu dans rorigiual due pour died. ( 160 ) autre accusation plus grave encore, a savoir (juo, «'<• propos delibere (ce sont les propres expressions de M. d'Avezac) el sous Fempire cfe preoccupations etraiiges^ j'ai coniniis des solecismes (des erreurs grossieres !) k propos (111 voyage de Pinzon (1). 35. — (lette accusation , si elle 6tait fondle , se- rait la plus grave qu'on piit jamais jeter ji la face d'xm historien. Permettez done , messieurs , que fort des preuves q\ie je vais vous prt^senter, je la repousse avec toute la vigueur dont je suis capable, et ((ne je saisisse cette occasion pour declarer liauteuienl que, dans toute mon Histoire, apres avoir 6tudie les i'aits autant qu'il m'a ete possible, jen'aieu pour guide, dans leur appre- ciation, que ma conscience. Et, si je ne me tronipe, la v6rit6 historique ne pent 6tre prouvee autrement que par I'absence des erreurs ct par la sinc^rite de con- science de rhistorieu. Grace aux temoignages d'estime et de consideration que je dois au savant rapporteur, je suis heureux de ne pas voir dans ses paroles une atteinte port^e a mon caractere. Je reviens done a la question avec plaisir. 36. — En rendant compte du voyage de Pinzon en 1500, j'ai conunenc^par dire que, sansm'inquieter du fait peu important de savoir si c'^tait ou non au cap Saint- Vugustin qu'il avait pris possession de la terre, je croyais indubitable qu'il avait et6 a la cote du Br6sil sept mois apres Hojeda. 37. — .VI. d'Avezac, avec la predilection luarcpit'e qu'il montrc pour les incidents, s'est .uictr a cdui-ci, (1) Bulletin, vol. ,\IV, p. i06. ( 161 ) et il m'a gratifie de ces paroles : (( Un auteur s6- rieux ne pent plus h6siter encore sur la synonymie geographique de cet atterrage, C'est done bien an cap Saint - Augustin que Pinzon d6barqua avec les 6crivains ou commissaires royaux de ses quatre cara- velles (1). » 38. — Eh bien ! messieurs, malgr6 tout le poids de rautorit6 de notre respectable president , je soutiens que justement les auteurs serieux ne peuvent qu'h^si- ter encore beaucoup sur la synonymie geographique de r atterrage de Pinzon. 39. — Avec le texte des depositions judiciaires de plusieurs t6moins, publiees par Navarrete, et que je connaissais fort bien, depuis longtemps, M. d'Avezac croit avoir prouv6 que Pinzon atterra au cap Saint- Augustin, a 8" i sud ; mais le fait est que tons ces t6nioi- gnages ne prouvent clairement qu'une chose, c'est que Pinzon avait d6couvert un cap que Ton appelait, en 1513 et en 1515, de Santa-Cruz oil (^e Saint- Jng/isfiri. AO. — Mais etait-cele meme cap de Saint- Augustin, a 8" i sud, qui, d6couvert en 150] , fut alors appel6 de ce nom? — Voila ce qu'ont encore besoin de prouver ceux qui voudront me reprocher si pereQiptoirement la louable hesitation de ma conscience. hi. — Les motifs pour une pareille hesitation puisent une nouvelle force dans les textes des depositions des temoins elles-memes. D'apres ce que nous savons, la cote du Br^sil, de- puis le cap Saint- Augustin vers le nord , penche un (I) Bullelin,\o\. XIV, p. iCA. XV. MARS. 2. 11 ( 162 ) peu vers Test jusqu'a la pointe de Pcdms (1) au nord de Tamaraca. Or, la carte du Musee naval de Madrid (piibli6e par MM. de la Sagra, Humboldt et Jouiard) n'assigne pas cette direction a la cote au nord du rap de Pinzon, niais plutot celle de ouest ^ nord-ouest. Outre cela,quelques-uns des t^moinsdisentque depuis Je cap d(^'couvert on suivit la c6te vers le nord-ouest, et Pinzon hn-meme nous dt^clare que cc fut dans la direction de I'ouest \ nord-ouest. Vvant done d'avoir d6truit au moins 1' argument puissant tire de ces t6- moignages, on ne pent pas interdire I'h^sitation a uu ^crivaiu s^rieux. hi. — 11 est vrai que quelques-uns des tdnioins disent que depuis le point d'atterrage jusqu'a Paria, on coniptait750 ou800 lieues. Mais outre rinsufiisance de I'argument tir6 des distances, insuflisance d6j^ recon- nue par Humboldt, el outre I'absurditti d'une estime tellement exag6ree qu'elle nous porterait bien au sud du cap actuel de Saiut-Augustin , nous devcns I'aire observer que ces temoins n'etaieiit pas si bien infor- m6s, puisqu'ils confondent presque tous le cap Conso- laa'on, le i)remier decouvert par Pinzon, avec le cap de Rostra- hermnxo qui, d'apr^s la donation royale au de- couvreur, fut le second (2). Or cette indication du (I) Voyez, sur Ihydrographie de la cole de Pernambuco, rcicel- lent travail de M. M. Ant. Vital de Oliveira, officier de la marine im- p^riale brc^silicniie, public^ a rernambuoo, on 1855, sous lp litre : Descriprao da rosta do hrazil da ponla de S. Benlo a Pitimbu D'apr^s les observations de >I. d'Oliveira , le cap Saint- Auguslin est a 34°56'16"etPedras a 34'45'42" oufst de Greenwich. (2) ... •< Piinta de Sania Maria de la Consolacion siguiendo la costa ( 163 ) nombre de lieues n'est pas donn6e par Pinzon, qui s'est Lien garde de C(;iifondre les deux caps. /|3. — .?iinsi, selon moi, il reste encore a prouver que le cap (lonsolacion, qu'on noraniait egalenienl, en 'J513, de Saint-Augustin, etait le nienie cap Saint-Au- gustin, a 8" , sud, et non une des pointes que Ton ren- contre en si grand nombre (1) en decide cetle derni^re latitude. II y a nieine un argument tir6 dela deposition de trois des tt^moins, C-olmenero, Ramirez et Valdovinos {iSav., Ill, p. 5/j7, 550, 552), qui nous porte h croire que I'atterrage n'a pas pu se faire au cap Saint- Augustin. Ces temoins disent qu'apres les lies du cap Vert, les vaisseaux navigutirent au sud-stid-ouest ; et que ce fut vers le sud-ouest, nous le dit la collectio)i Vicentine de Francanzano (2). — Or, en prenant ce rhumb, il est de toute irnpossibilitr qu'ils aient jni fasta Rostro hcrmoso, e de alii toda costa que se corre al nordoucst. u Don. a Pinzon, du 5 se|)t. I.SOI, dans les Archives desli;des, aSevillc. (I) Ce sont les puinles : de Pedras i)ietas, Siiiiau linlu, Candeias, Piiia, Olinda, Rio-tapado, Uio-doce, Janga, I-cilfio, Maria Farinlia, Funil, Pedras, Megalio, Guagini, Coqueiros, Pitimbii, Binnco, Lu- cena, Trai(;ar>, Pipa, Pirangy, Negra, Giiii[iabu, Maxarauguape, Sai) Roque, Petitinga, Garcas, Toiros, Caloanliar, Cajiieiros, Tres Irmfins, Tiibarjto, Mel, P, 4o Reliro pe(iueno, P. doReliro graude,ctc., etc. Comment, sans avoir des prcnivcs, peut-oa elrc sur qu'on n'ait pas donn^ a denx caps differcnts le nom du menie saint, quaud ccia est arrive pour tanl de rivieres? ('2j /'(/esMUiovanienlc, etc , Viccucc 1507. On y lit que Pinzon parti de Palos le 18 novembre, est alle au\ lies du ca|) Vert : • Dale quale » parteiidosc c pigliaudo la via per garbino : et navigarono per que! » vento.ccc. leglic s-guendo el loro camino continuamente per gar- » binos, etc " ( 164 ) atterrir au cap Saint-Aiigiistin. Meme en supposant qu'ils eussent pris tr^s exactoment le sud-sud-ouest, ils auraient du rencontrerla terre devant leurs proues, k Pontn de Pipa, daiis la latitude de 6° 10'. Mais si Ton porta en ligne de compte dans le calcul I'influence des vents aliz6s et des courants qui devaient continuel- lement faire d^river les vaisseaux vers I'oiiest, on est forc6 de croire qu'ils n'ont vu la terre qu'au dela des C'cueils des Uteris et Lcwadciras , c'est-i-dire bien au dela du cap de Saint-Roch (1). En jetant les yeux sur une carte marine, et en y remarquant que non- seulement a I'ouest de ces 6cueils et bas-fonds du cap Saint-Roch, dont aucun des temoins ne fait mention, la cote prend franchement la direction indiqu(3e par Pinzon, I'esprit est meme tent(§ de supposer que le pre- mier atterrage de ce navigateiu- se fit vers la pointe de Mel ou de Refiro-Grandc, et que le Bostro-Herinoso fut, ou cette derniere pointe, ou celle de Mocuripc. fi6. — En tout cas, il est tr6s hasardeux de sontcnir que le premier cap decoiwert par Pinzon soit le Saint- Augustin actuel ; et il est par consequent tres injuste de blamer sur ce point le jugement de ceux qui ne veulent que des raisons com-nincnntes pour pouvoir se convaincre. VI. 47. — Maintenant que je me flattede m'etre justifie de ne pas avoir suivi tout a fait, a j)ropos des voyages (1) Nous ne faisons quo suivrc ropinioa d'uu habile ofncior de la marine inipdiiale du Brdsil, M. Secuiidiuo Gomensoro, grand cuiinais- leur de notre cdlc ot acturllemenl a Paris. ( 165 ) dc Hojeda et de Pinzon, les opinions revues, qu'il mc soil perniis de me defendre contre I'accusation de I'in- convenance de reprendre le c^lebre Navarrete. AS. — II est clair que, si les sciences doivent pro- gresser, il faut, dans leur champ, respecter avant tout la science meme. S'il est permis a un historien de dire que tel ou tel roi a failli, comment voudrait-on empe- cher de dire aussi que tel ou tel savant s'est tromp6. A9. — Eh bien ! messieurs, provoqu6 injustement, je suis forc6 de dire une triste verity. Je sais bien que Navarrete a rendu un grand service en publiant, aux frais du Depot hydiographiqne de Madrid, dont il 6tait le directeur, sa pr^cieuse Co! led ion do voyages et de dociintenis. Mais la justice demande d'abord qu'on sache que, presque dans sa totalite, cette collection a 616 puisne dans celle pr^paree par le grand historien Mufioz, que la mort a enleve avant qu'il eiit termini I'admirable ouvrage dont le I" volume nous montrela profondeur et la critique. La collection de Munoz, com- pos6e d'un grand nombre de volumes se trouve ma- nuscrite a Madrid, dans la bibliotheque de I'Acad^mie d'histoire, et chacun pourra se convaincre par soi-meme de ce que je dis. Ces memes Aoticias exactas de Jme- rico Fespiicio, donnees par Navarrete (III, 315 h 33Zi) et si vant^es par M. d'Avezac, ne sont qu'un faible resum6 des documents qui se trouvent dans la collec- tion dc Mufioz. 50. Pour ce qui regarde le texte du livre de Navar- rete, on m'accordera bien que ce n'est pas un ouvrage de genie; et je peux meme pronver qu'il contient des fautes considerables. J'ai d^ji indique dans nion { m ) li\re line corrctiiuii que M. d'ANrzac a bien voiilii agr^er an liru do nie la reprocher. J'ai dit que la ou NavarrotP, au lieu d'un certain mot innca/o a hi hkh- rajo (1), en nous expliquant que c'etait un enorme poisson qui menacait les naviies de grands dangers, il faut lire i/iacairo, c'est-a-dii-c pororoca. Et passant de I'appreciation des mots a celle des faits, il a pris pour Marnjo, si abondamment arrosee de rivieres, I'ile que Vcspuce declare tres aride et sans eau et qui n'est autre que la Marguerite. 11 dit aiissi [Hist, dc la natit., p. lZi2) que Enciso donnail au degre 17 lieues |, ce qui est con- traire a la V(^ritc, par i'a])port a la longitude. 51. — En outre, pour revenirau point sur lequel je suis accuse, cc n'est pas par I't^claircissement des ques- tions qiii se rattachenta Vespuce, que Navarrete se re- conmuvude. L'estimablc directeur du Depot liydrogra- pliiquo ne s'etait pas bicn rendu conipte des r^cits du navigateiu' florentin, ou, pour niieux dire, il n'avait pas des idees arretees sur ce qu'il en devait croiro, ui sur le credit qu'il devait accorder a Yespucc. Voulant (l-claircir Ic voyage d'Hojeda, il puise (III, ]). h et 6) dans uue narration du deuxieme voyage du Florentin, en hii pretant foi. Et api'cs avoir fait entendre (III, 118) que celui-ci n'avait navigue qu'une seule fois au service d'Espagne, il fiuit par aduiettre les deux voya- ges (p. 331), en se bornant h. les accuser d'exageration et de faussete6vidcnti' (hins plusieurs details. Et c'etait pourtant lui, Navarrete, qui. snivant le sort d'Herrera, se fourvoyait en con fondant les deux recits. (1) Vol. Ill, 548. ( K'^7 ) 52. — Mais qiiand bieii meiiie Navarrete serait un auteur comparable par exemple a Humboldt, il ne doit etre perniis qii'aux esprits vulgaires de croire que les grandes illustrations ne sent pas sujettes aux lois g6- n6rales de I'erreur ou tombe le faible esprit humain. Cependant M. d'Avezac est tellement dans les memes convictions que moi a cet 6gard, qu'il n'a pas balanc6 k s'6carter, comme je I'ai fait, quoique dans un autre sens, du grand Humboldt, au sujet du deuxi^me voyage de Vespuce. Humboldt s'est efibre^ d'6tablir que ce voyage est celui de Pinzon, et cependant M. d'Avezac veut soutenir que c'est plutot celui de Lepe. Seulement, en prt^sentant ses arguments, il s'est laiss6 lui-meme aller a des erreurs graves que, dans I'interet de ma propre justification, je me vois forc6 de relever. 53. - II a d'abord perdu de vue que Lepe, comme le rappelle Humboldt {\ ) , est parti de Palos et Ves- puce de la baie de Cadix : Lepe au niois de Janvier 1500, Vespuce sept mois auparavant, en mai 1499 ; Lepe avec deux navires, Vespuce avec trois; Lepe vit les eaux de I'Amazone ou Mar dulce, Vespuce ne nous en dit mot. Et cela, sans parler du nouvel embarras que M. d'Ave- zac s'est cr66 lui-meme, en assignant sur une de ses cartes, ce parage meridional oil il imagine que Lepe est arriv^, et qu'il ne pourrait autrement justifier par les r^cits de Vespuce, qu'il accepte. 54. — Comment done ? On me reproche d' avoir fait (1) Ex. crit., IV, 222. * ( 168 ) arriver Vespucc, au service de I'Espagnc, trop au sud, quand je le fais attenir au 5" degr6 de latitude ni^ri- dionale, et on le fait atterrir avec Lepc au dela de 14° sud ! — El comment veut-on alors concilier ce voyage avec I'un ou I'autre des deux r^cits dc Vespuce, quand on admet que le navigateur florentin a attcrri k des latitudes bien diflerentes de celle-la. 55. — Mon savant critique est encore moins heureux quand, au moment nieme ou il me rcprocheavec assez de s6v6rit6 d' avoir cru, comme je le crois encore, que la carte en parcliemin dont Toriginal se trouve au Mus6e naval de Madrid, renfenne aussi quelques indi- cations fourniesparle premier voyage d'Hojeda, il veut attribuer a Pinzon toutes celles qui se trouvent sur la cote du Br6sil; et cela seulement k cause d'lme 16- gende (1) qui contient le nom de ce navigateur, et par laqiielle M. d'Avezac s'etonne que nies yeux n'aient pas 6t6 (lessilU's (c'est son expression). Or mon critique savalt que je connaissais tres bien cette inscription, puisque je I'avais moi-meme reproduite dans une note de mon premier volume. Mais je dois dire que, pour moi, cette l^gende ne signific rien de plus que ce qui nous est indiqu6 par son contenu meme. Dans la carte, elle est tout Isolde; et I'crreur qu'elle contient dans la date d'un fait si connu ne pout aucunement la rccom- mander a mes yeux ; dc meme qua mon avis elle ne pourra aucunement se recommandor ficeux qui parta- gent I'opinion dc .M. d'Avezac relativeraentau cap Saint- (1) " Ce cap [dil la l<'gondc en rspagnol) a M docoiivcrt en liOO fon s"r5t trom|R' ; il fallail dire loOQi par Castille, Vincent Yaocz cu ^tgiil ledccouvrcur. » ( i*39 j Augustin, puisque rinscription s'y trouve sur nn cap pres diiquella cote, ni vers le nord, nivers le sud, ii'a rien qui puisse faire supposer que ce soit le cap Saint- Augustin actuel. • «56. — Cependant, si Dion savant critique avait mieux regarde cette fanieuse carte que, selon lui, je n'ai pas su observer, il aurait vu non-seulement la l^gende qui contient le noui de Pinzon, mais encore ces deux cara- velles sigiiificatives, qui ne peuvent etre que celles de Lepe, et qui temoignent que les inscriptions de la par- tie de la cote qui se trouve plus prtjs d'elles appartien- nent a I'exploration de ce navigateur. Par consequent, les inscriptions de la carte en question ne peuvent pas etJ"e toutes de Pinzon senlement, comme on nous I'as- sure, en me reprochant de croire que le cartographe avait puis6 a d'autres sources. 57. — Mais revenant a Vespuce : que mon savant critique s'enrule, a propos du premier voyage, dans le nombre de ceux qui veulent corriger la latitude de I'at- terrage en lisant 6" au lieu de 16"; qu'il s'enrole en- core avec d'autres qui, contraircment a 1' opinion de Humboldt, et rien que par la ressemblance des deux mots, s'imaginent que I'ile d'lfj doit etre celle de Haiti, quoiqne appartenant a un archipel compost d'un grand nombre d'iles, les unes habit6es, les autres d^sertes, et ou il n'est pas question de colons chr6tiens d6ja 6ta- blis, ce sont la des points sur lesquels je me suis d6ja expliqu6 dans la dissertation que j'ai eu I'honneur de lire devant cette Soci6t6 au sujet du premier voyage (1) . fl) Voy, le BuUetin du tnois de Janvier cl fcvricr de ceUc annee, p. "0. ( 1"0 ) Mais cc (lonl je ne puis aucunement m'emp6cher, pour ma propre di^fense encore, c'est de reclamer ici contre line inadvertance manifeste. En rapportant le texts ou le navigatcur florentin indicpie le point de la cote du Bresil oil il a atterri dans son second voyage, le savaTit critique a neglige d'y faire deux inipoi'tantes correc- tions, (leja indiquees par Canovai dans I'endroit cite par M. d'Avozac lui-meuif\ Mon savant critique fait dire h Vespuce que ce point de la cote etait par la lati- tude auslrale de 8° et qu'il 6tait 61oign6 de 800 lieues des lies du cap Vert. Et cependant Canovai avait d6jci formellement d6clar6 que ces chiflres ne sont que les r^sultats d'une fausse lecon de lY'dition ancienne, et qu'il fallut lire 5" sud et 500 lieues du cap Vert, et non pas 8' et 800 lieues. Et cette lecon, la seule d' ac- cord avec le texte d'Hylacomilus (1) dans son livre iniprime en 1507, est egalenicnt declaree la seule exacte par Napione (2), qiiand il nous dit : « La seule meprise de Bandini... I'ut d' avoir interprete le chiflre b tantot comme 8, tantot comme 5, quand ellectivement, dans los anciens codes, d'apres le P. Tronibelli, il vaut (1) (I Meridioualis polus se .\^ cxaltal gradibus,... distalquc eadem terra a praenominalis insulis... loucis CCCGC. » (llylacom. de 1507, fol. 38). (2) J. Franc. Galeani Napiono, /)''' pri'uo fcoprilotr, cic. Firenzc 1 808, p. 1 08 rt 1 I 3 : « L'uuico sbnglio dol liandini, non prranco allora « bastanlamente vcrsalo nella palcogratia, fii di aver interprelato la » cifra numerica J ora come sc rapprcsenlar dovesse il iiumero olio, » ora come rappresenlanlc il nunuTO cinquo, sicomc dilTati ciuque » 'e non gia otto, ne gli antichi codici, secundo il P. Troinbclli. rappre- u senta constantemenle. !■ ( i/i ) toujoiirs 5 et non pas 8. n Nous devons ajouter que, d'apres notre propre inspection d'un exemplaire de cette Edition italienne ancienne, qui existe an Miis6e britannique, nous nous sommes convaincu par nous- riienie de la m^prise de Bandini. [La suite ail prochain niiniero,) ANCIENS TfiMOIGNAGES HISTORIQUES RELATirS A LA BOUSSOLE. L'liistoire de la Boussole, digne h. tous 6gards de r^tude des geographes, est loin d'etre faite encore, et les dissertations plus ou inoins savantes qui out et6 consacr^es a cet int<^ressant siijet, si elles ont mis en lumifere quelques donn^es iniportantes , ont laiss6 b. remplir de nombreuses lacunes, a r^soudre de graves incertitudes, a 6claircir de profondes obscurit^s. Les premieres notions de la polarity de I'aimant et de la faculty de la transmettre au fer, 1' invention d'un proc6de d' observation applicable aux besoins ^ventuels de la navigation, enfin la fabrication d'un instrument commode destine a etre d^sormais perp6tuellement consult^ : voila les grandes 6poqnes de cette bistoire encore si incomplete et si vague ; et pour chacune de ces phases sous lesquelles la question veut etre ^tudidc, il faut rechereher quelle route ont suivie a travers les pays etles peuples, comme a travers les ages, les con- naissances succcssivement acquises. Dcpuis la lettre de Jules Klaproth a Alexandre de ( 172 ) Humboldt sur I'invention de la boiissole, il semble qu'on nc pnissc refuser aux Chiuois I'anti^'riorit^ d'unc notion certaine de la polarite soit de rainiant nature!, soit de I'aiguille ainiantee, et du mode (('observation de cc ph^nomeneau moyen de la superposition de I'ai- mant sur un leger llotleur nageant dans un vase d'eau : notion qui des Chinois aurait passe aux Arabes et de ceux-ci aux Europ^ens. Cependaiit , quelque bon marchd que Ton ait voulu faire des r^^erences qui attribuent a Aristote les ^non- ciations consignees k ce sujet dans les livres arabes, il faut bien reconnaltre qu'elles accuseiU dans tons les cas une source etrangere aux Arabes, et dont aucuu motif irrefragable ne refute I'origine aristot61ique, en admettant, comme cela est admis pour tant d'autres trait^s, que le nom du maitrc n'est qu'une cnseigne banale d6corant I'ccuvre de quelqu'un de scs disci])les, et que cette ccuvre n'a laiss6 de vestiges que dans la traduction qu'en out faile les Arabes. Quoi qu'il en soit, en bornant a 1' Occident Ic cercle d'investigation des origines de la boussole, il y a long- temps que, do I'amalfitain Flavio Gioia, qui peut-etre fut I'auteurde quelque perfcctionnementparticulier, au commencement du xiv° si^clc, on a remonte tout un si6cle en arrierc, en suivant d'eclielon en 6clielon les 6crivains franrais du xiii' et de la fin du xii' siecle, Vincent de Beauvais, Albert Ic Grand, Brunct Latin (ainsi qu'il s'appelait lui-meme), Jacques de Vitry , Guyot de Provins, et un clnnsonnier anonyme proba- blement contemporain de ce dernier. Sans r6p6ter les citations, d'aillcurs mediocrement ( 17S ) precises, sur la polarite de raimant, emprunt^es par Vincent de Beauvais et par Albert le Grand au pro- blt^matique traitearistotelique De Lnpidibus ; sans nous arreter non plus a la distinction que fait Jacques de Vitry entre Yadavms et le mngiies, nous pouvons du moins rapporter ici le t^moignage, aussi bref que net, du vent^rable 6veque, qui 6crivait ceci vers 1218 : Acus ferioa, polsquani adanian- lem conlifiorit, ad slellam septeii- Irionaleiii, qua* velul axis firma- inentialiis vergeiilibus non niove- tur, semperconverlilur: undfevaliK; necc.-sarius esl iia\i|,'anUl us in mari. Unc aiguille do fcr, apres avoir etii fi'oltee a la pierre d'aiinani, se flirigoloujoursversl'iitoiledu nord, laquellc, pendanl que les autrcs suivciil luui- oours, reste iinrnoliilc, coiiiini! un axe du firmameiil ; en soilo que ledil aimaiU esl ti^'s ii6- cessaire en nieraux navii^alLUis. II serait difficile de constater en termes plus concis la connaissance acquise et usuelle de la polarity ma- gn6tique transmissible, et de 1' application de cette propri6t6 aux besoins de la navigation. Mais par quel proc6d6 ? Guyot de Provins, dont la Bib/e satyrique peut avoir 6te achev6e en 1205, un cliansonnier anonyme que nous croyons du meme age, et Brunet Latin qui les a suivis, s'accordent tons les trois a nous d^crire I'ai- guille adaptive a un flotteur surnageant dans un vase d'eau. Bien qu'on ait souvent transcrit le fameux pas- sage de Guyot de Provins, nous ne craindrons pas de le r6p6ter encore, et meme, tout francais qu'il est, de le traduireen prose vulgaire, car nous avons eul' occa- sion de nous convaincre que les dissertateurs qui I'ont all^gue ne I'ont pas toujours exactement compris. De noslie I'ere rAposloilo Vo!iisisse qu'il scinlilasi I'esloilC Qui nc sr luuel -. nioull bii'n la voieiil Li iiiai iiiier qui >'i aMiit'iil ; i'ar Cilf erlode \vu', el Vliiiiicnl QuanI a nolle sainl-piVe le pape, j.' vouilrais qu'il lej-seniljjala I'eluilu pii iisif iuiuiobilc. Les niariiiiers, pii Sv'. ilii i'j( 'lit ?ur ellc, roh.-erveiii iitiiiihcniini , vont, viciinenl, tt ( 17/1 ) El lor sen^ el lor voie I'eniicnl ; lis rapiicilriil la Tri ?nioiil:\iii(". (J?Ui- esl allailiiii e! ocrlaine Tijult's lis iiulii's sc rriii()M'i!l Et lor li'iis I frhanijinl <;l movent, Mais CL'lc e&toilu iie $e niiiei. Un arl foul, cjni mcMlir \u\ piiol, Par 1.1 vi'iUi ill? la iiMiuirlo. line pieirc laiilc el bi iiin'Mi^ Oil II I'crs \otiiiirnr.< .•ii'joiiil Onl : fi cst;ariU'nl lo ilriiil imiril. Puis fin'iiiic ai'juillr Tail lotirirn'. El en un lestii I'ont lirhi ■, En I'l'vc la nii'lk'nt ?an^plu^ El li IVslu la li.nl ilo>-u?: Puis se liiriii- la pninli; Iniilo Conire ri'sluilc, s| sansdoiile, QuL'ja por licn in- law^sira, Et marlniers mil iloulm'a. Quant la nirr csl oh.-i'iiri- il liniiie Qii'on no volt esloile ne luiiP. Dune fonl a I'aiguilie aluiiie-. Puis n'dul il u'aiilc il'i'su'aier : Conti'i- I'esloile va la poinle; Par ee snni li marinicr eoinle Do la droile voie tinir. C'esl un ai I qui nu puel faillir. Moult est I'esliiile liMeet clere, Tir\ (Ipvioit eslie noslie P^i'c rt''jlenl leur illrci'lion et Iciir roule il'.iiHes celle eloile, qu'iU appelli nt la Tranionlane. Ellc est fl\e el iuniio- liile; liiutes lesauliesse ilfplaoeni, I'hani^ent el v aiiont di' posilioii ; inaii eellc-'la ne bouge point. lis einplovenl un procu'ili^ qui ne ri"ul II onipiT firaee il la proprii'te ile laitnaiil (niaiii e'eMlsonl line pierie LTOssiere et Ijionr qui alliie sponla- iienienl le fer : ils luiil alli'iiWun an point (111 sc liifiiie Taiiiuillo qu'ils y out frolteefclq^l'il^ onl ensilile lieliei; dans un fetu. ils l.t nirlleiit sinqile- inenl siir I'eau.ou le fi'lu la soulieiil a 1.1 sui Cai-e ; jiuis la i>oiiile se loiirne pi-.'eisenienl ver.s I'eliiile, avie lant lie sui'ele que cela ne niaiiquera jamais el (|iie nul ilis niariniers n'aura d'inecrtiluile. Qiiand la nier esl olisciirc el lirii- niiusi', qu'on ne voil iii la lune iii les eluiles ils font alluiner de la lii- miere pies dc raiffuille, el ne crai- gneiil plus de s'e^iarer : la poime se diii^e veis leloile. el le? niariniers soul ainsi inslruils de la vraie roulc k lenic. C'esl un \)rQc6(l6 Infaillible. 1,'eloile est lri;s belle et tr^s claire ; lei dc\rait fire le sainl-pi^ie. M. Francisque Michel avail copie, dans un manus- crit du xjv°siecle appartenanl alorsiM. liarrois et qui est depuis pass6 en An<];leterre oil il est devenu la pro- pri6t6 de lord Ashljiirnham, une chanson d'aniour que I'habile editeur fit paiaitre en 1830 dans son recueil de Lais i/K'dits, et qui contient ti'ois couplets ou la descrip- tion de la hoiissole est naturelleiuent amende par la comparaison que le trouvfere fait de sa dame k I'^loile polaire ; ces trois couplets, rc^'pcHt's en 18^0 par M. Jal dans son Jrc/ieo/o'(ie/iai'n/e, et par M. V\ lighten 1846 dans une coniinuuication de la British archcpological association, puis dc nouveau dans un beau volume rt^- cemnient publie, dont nous aliens parler tout a I'heure ; ces trois couplets, nous les transcrivons pareillenieut ( i7^ ) ici, en y joignant, conime au precedent niorceau, el pour«le laeme motif, une traduction en humble prose. L;i TreriTiontaiiie rst do lei guise Quell' e-l, el liiiiKimciit assii^e, Oil cllc luul I'! iilluinljoie. Li maionicr qui voni eii Frise En Grcsse, en Acie on en Vi nise Saveiil por li loule l;i voie. Pour uuie riens ne se desvoie, Touljouis setjenl en une muie. Tanlesl ile 11 gi-.-iiis le service Se la niei- est euflee iiu koie, Jk lie sera c'oii nc le voie Ne ijoiirt^alerne ne pour bise. Puur bise ne pour .lulre afaiie Ne laist soil dout service a faire La Ti-csiiiontaiue c!fcre ei pure; Les niai oiiiers, par ?on e.-eiaire, Jete souvent liors do coiilraii e. Et de cheiiiin les ass^ure : El quanl la nuis est iroposeiire, S'esi ele eU' or de td nature C'a I'aiman! fait le ler Iraire, Si que par I'orclie et p.n- droiliire Et par 1 uille qui toi.ljours dure Severit lo lieu de son repau'e. Son repaire sftvcnt h roulu Quanl li lans n'a di^ claile ^'oiite Ton! eliil qui foul cesle mal^tiise. Qui une aiguille di^ fcr hnule, Si qu'ele perl presque toute, Ell un pi'i de Iiet;e, 1 1 I'aliffi A la pierre d'aimaiil bise. S'eii un vaissel plain d'yi.ue est mise Si que nus liors iie la deboiTe, Si tost eomnie 1 iaiie s'aseri^e douf ([ind pail la pninle vise L'l Tre.-monlaine esl li s.ins luute. TouIk Siniblable est la Tranion- lane, (pi'on voil au lirniariiciit liiire el llanihoyer. Les inai iuiers qui vont en Frise, en Greee, a Aere ou d Ve- nise, reglent enliereineiil leiir route sur ('lie Uieii tie la fait di5vier, elle se iiiaiiilienl loiijoiirs en un uienie een- Ire. Elle rend iui ^i t;rand service, par line riiir ^rmsse on lianqiiille, qu'on ne pent manquer dcl'^piouver, mal- Kie la galeriie on la biS' . Ni la bise ni loule autre cans;! ne lieu veil I em pec her la brill ante el pure Traiiionlane de leiidre son service aeeoiilunie. Sa elarle souvent relire les niariniers d'une fausse voie, et assure leur route. El quaiid la nuil est sombre, elle est encore d'une na- luri' pareille a e -lie qui fait que I'ai- niani alliicle li r ; de niaiiJeie que foreenienf, dircclement, et par une n^'gle invariable, ils suvetit le lieu ou elle est. lis savcnt oil <:lle est pour leur route, liien que le lenips suit tout a fail sombre, tons ceux qui (niploient ee proc(5di5, de fielier une aifjuille de for en un pen de li''ge, en la laissant paraiire presi|ue cnliere, el fie la IVoller avec I.i Prune piei re d'ainiant. Si elle est [ilaeee d.ns un vase plcin d'eau el que mil ne I'm retire, aus- sil6t que I'cau est li'ani]uillei(|uelquc pail que la poinle se dirige, la cer- lainemei.t est la Tiamonlane. Enfm, a cote de ces textes nous transcrirons encore un passage de Brunet Latin, puis6,non dans son Tre- snr, mais dans une de ses lettres ecrites ant^rieure- ment, pendant son voyage d'Angleterre, a la suite d'une visite a Roger Bacon : « It rue monsira la magnate, piene laide et noire ; ob ele li fer volontirrs >■ S(! joint; Ton louche ob one aiguille!, cl en fesUi Ton fielie; puis Ion ). met en I'aiu'ue: el se lienl dessus, et la poinle se lournc conlie I'l^loile. » Quand la null fusl tenebrous el Ton i:e vuie esloiile ni Uiue, poet li ma- il I'inier lenir droilc voie » Voila bien trois descriptions distinctes d'un seul et meme proced6 pour I'observation pratique de la direc- ( 1/6 ) tion de raigullle aimantee. Nul auteur de ce tenips-Ii ne nous avait encore fourni d'indicatioiis sur quelque autre mani^re d'utiliser pour les besoins constants de la navigation cette precieuse propri6t6 directive de I'ai- inant. M. Tliomas Wriglit, qui a deja bicn merits de la Societe de geographic a plus d'un titre, vient de nous ofTrir, dans une publication toute nouvclle, deux textes jusqu'k ce jour inedits, contemporains aumoins, sinon ant^rieurs a la Bible de Guyot de Provins, et qui con- tiennent, quelle qu'en soit la bri6vet6, une importante r6v61ation sur une disposition dilTerente de I'aiguille magn^tique pour les observations usuelles a la nier. Ces textes sont extraits de deux des ouvrages d'un docte professeur en I'Uiiiversite de Paris, Alexandre Neckani, ap})el<^ aussi Alexandre de Saint-Alban, du lieu ou il avait recu le jour, au mois de septenibre 1157 (d'une ni^re qui futlanourrice du roi Richard I" d'An- gleterre, ne precisenient a la menie date que son frt;re de lait). C'est de 1180 a 1187 que Neckani sc livra ii I'enseignement en France, apr6s quoi il revint dans sa terre natale prendre la direction du college de Dun- stable, dependant de I'abbaye de Saint-Alban, devint en 1213 abb6 de Cirencester, et niourut en 1217 a Kemsey pr6s de AA'orcester, oii il fut enterr6. M, Wright lui avait d6ja consacr6 un article special dans le second volume de sa Bibliolheca Britannica litteiaria (periode anglo-noiTuande, pages /i/i9 a /i59). DdiWiwm^ Soiiu)ie on vocabulairc (}\\iY\cvii\U)e Utpiisi- lilfiis, compris dans un beau volunie d'anciens vocabu- laires recueillis parM. \V right et public's panVI. Joseph (177) Mayer en t^te de sa Library of national antiquities ^ on lit le passage suivant : « Qui ergo munil.im vult habeie navpm...., liabeat eliam ncuin jaculo )i siipi)osilam. Uolabitiir enim el ciicutiivoUcliir acus, donee cuspis aci'is 11 respicial orien(cm, sieque compnliendunl (|uo tenders debearit nautaa 11 cum Cynonisa lalcl in iii-ris liirbalione ; quamvisad occasvmmimquam 11 tendat, proiiier < iii-uli brevilulL'iii. » Dans le traite De na tun's rrrum, flu nieme auteur, M. Wright a recueilli un autre passage ^galement re- latif a la Boussole, etil a eu soin de le consigner dans une note, afin de le rapproclier du premier. Voici ce deuxi6me texte : » 'Naula^ eliam mare lofrenles, ciim beiicruiiim elaiilalis foli'f in lem- 11 pore nubile nun senliuni, aul eliam eiini calinine ruicliirnarum tenebra- 11 rum nimidus obvolviliir, et iynoranl in niu'in mundi (Mrdinem prora 11 leuda!, acum super magnetcm ponimt , quffoircubirilcr circunivolvilur II usque diim, ejus molu cessanle, lUfpis ipsias septenlrionoli ni plasjant >i respieia'. » Ainsi que M. \\ right en fait la remarque, ces deux textes, et surtont le premier, laissent beaucoup a d^si- rer sous le rapjiort de la clart6; ils nous paraissent (Svidemment alt6res par I'imperitie des copistes, et nous regrettons que I'^diteur erudit et habile qui les a mis en lumifere se soit born6 a les rapprocher sans en entreprendre une restitution qne son savoir lui eut rendue facile, et qui nous eut 6pargn6 les risques d'un essai de ce genre ; h son d^faut, cependant, nous ten- terons quelques sobres corrections, afin de mettre d' accord entre eux ces deux passages d'un meme au- teiu', et de les rendre plus aisement intelligibles. Et d'abord, comme c'est habituellement au Nord que Ton rapporte les indications deTaiguilleaimantee, que le second passage le dit express6ment, et que le pre- XV. MARS. 3. 12 ( 178 ) niier passage meme, tout en noniniant 1' Orient, ullic cette designation ii celle de la Cynosure ou Petite Ourse, la constellation caracteristique du pole Nord, il devient certain que c'est bien septrntiioncin qu'il faiit lire dans cet endroit an lieu de orieniem, qu'un scribe mal avise, se croyant habile, aura suppose preferable de niettre en opposition avec le ocrasum qui vient ensuite. Mais quant k cet occnsum lui-meme, que pent I'ai- guille aimant6e avoir i\ faire avec le couchant?... uii peu d' attention suflit pour reconnaitre que ce n'est plus de I'aiguiUe aimant6e, niais bien de la Petite Ourse qu'il est question dans cette fin de phrase, aisee des lors a r6tablir, pour peu qu'on se souvienne d'une illustre devise de chevalerie : « Nescit occasum. » De plus, il ne peut etre douteux pour personne que I'aiguiUe doit etre pos6e sur son pivot, et non dessous ; et rien n'est plus facile que de suppleer I'abreNiation qui de suppositam fera .uiperpositam. Voici done com- ment nous proposons de lire le premier et principal texte : Qui ergo niunitaiii vdlt haliero navetii.... lialioal ctiaiii acuii] ja- chIo superposilaiii; lolaliilur oiiiiii el L-irciimvolvaliir dome cuspis acils respicial svpteiitrioneni. i^ic- qiie coinprclii'iiilcnt quo tcnihMc delxjaiil iiaiila' ciiiii Cymisiira laid ill aiTis lurhaliiiiic, ipiaim is ca oc- casuiii imiiKpiaiii leneut in'opkT circuli brevilali'iii. Si (lone on \eu\ iinna\ii'e Men poiirvu lie tiHilcs cliosrs... II laiil avoir ausd iiiic aiuuillc iiioiili'c, siiir pivot, I.Kpicllc oscillcra el Idurncra ju.-^iu'a P(^ (luc la poiiilc se (liri,'e an iioril. faisaiil aiiisi coTiiiailrcain naiiloiiicis la riuite qii'ils doivciit ti'iiii', prnilaiil qui: la Pelilc Oiirsc U'ur isl cai-JLi'e par Ics viei-siuidts (le I'almo.-plu"'! 0 ; (Ml- cWv. lUMlis- parail jamais sous I horizon, a causf (U: la peUlessc du ocrcle ciu'tlle (li5- or(», etc. EBQLISSL niSrORIQUE sin LF.s GRANDES CARTES TOPOGRAPllIQUES DE LA FRANCE, Kt conipte rrntlu particulicr de la carte an ifTo'ooT B(^iluJl(! au (luarl (Ida Grainlc Carte Je I'Klal-Major. Lue a lii sciiLce de la Commission ccnliale ilii IS dcxembre 1857. Oe n'estgu6requede lafmdu xvii" etdu commence- ment (111 xviii* si6cle que datent les preniiferes cartes g6n6rales de France dans lesquelles la topographie se trouve tant soit pen d6taill6e et dont Tensemble soit assez satisfaisant. Les cartes d'mie date plus ancienne meritent a peine ce nom, etil est diflicile de reconnaitre la I'orme reelle des pays repr6sent6s comnie une masse dillbrme sm' des petites feuilles sans graduation et sans indica- tion d'6che]les. La creation de I'Academie des sciences en 1(5(5(5 avail donne une nouvelle impulsion a retudc des sciences positives et surtout de I'astronomie ; la carto- graphio eut 6galeinent part a ces progr^s, aussi les caftes de Samson, de Buache,del)e I'lsle, ded'Anville, pr6sent6rent-elles bientot de notables am(';liorations. Le comte de Cassini (1) et M. Malld dt> 1' \ca(l(''iiii(; (1) Cassini 111, dr Tliury ((A-snr-Francois}, iic h Paris en 1711, niorl v\\ 1781, nicnilirc dc I'Acaildmie dos Sciences el direclcur de rObservatoire. ( 183 ) des sciences conourent vers 1733 le projet de dresser line grande carte de France Ijas^e sur des obser- vations astronomiques et nne triangulation g6od6- siqne. Les operations commenc^rent qnelqnes ann^es phis tard sous les auspices de 1' /Vcad^niie aux frais du ' gouvernement et sous la protection sp6ciale du roi Louis XV qui aimait la g^ographie. Cette grande carte dresstec'il'^chelle de j^-f^ devait se composer de 184 feuilles de 0'",57 de hauteur, siu" 0"',90 de largeur, la reunion de ces feuilles formait une surface carr^e de 36 pieds de c6t6 (1296 pieds carr6s) . JVIais bientot le controleur des finances du roi Louis XY dut, par suite des enibarras du tr^sor, sup- primer les- fonds qui avaient- 6t6 jusqu'alors allou6s. Le roi qui aimait Cassini se chargea de lui apprendre cette facheuse nouvelle. a Sire, lui dit Cassini, que Votre Majesty dise seulement qu'elle voit avec peine la suspension de cette entreprise, et qu'elle en desire la continuation et je me charge du re^te. » Le roi y consentit, tout en jilaisantant Cassini sur I'inutilite de cette marque d'int6ret. Celui-ci , plein de z^le et de confiance dans son ceuvre, eut recours a 1' influence toute puissante de • j|m« (Je Pompadour. 11 forma une soci6t6 d'actionnaires dont trois niembres au choix del' Academic des sciences devaientremplir I'emploi de directeurs. Chaque action- -naire s'engageait a fournir une contribution annuelle de 1600 livres. Les travaux de la grande carte topo- graphique purent ainsi etre continues sous la. direc- ( 184 ) tion d eCassini et de son fils (1), L'ccuvre avanca de telle sorte, qu'en 1789 elle 6tait presque entl^reinent termin^e. La revolution \enait d'^clater, la Convention jugeant qu'il y avail trop (I'inconvenients k laisser line entre- prise aussi importante pour toutes les branches du service public entrc les mains d'une societe particu- liore, raclieta les droits des actionnaires, les indem- nisa, et en 1703 la carte de C4assini devint nne pro- priety nationale. Plusieurs reductions en avaicnt deja ete faites, les unes au point de vue de la g^ograpliie gen^rale de la France, d'autres au point de vue adininistratif. Celle qui obtint le plus de favour, fut celle de Louis Capi- taine, I'un des associ6s de Cassini. Cette carte, reduite au quart de 1' original, 6tait en 2!i feuilles, a Techelle de jj^-^-j^ on une ligne pour AOO toises. Elle parut en 1790 ; la gravure en avail 6te faite avec soin, ma is dans le genre ancien commc celle de Cassini (2). L'exactitude de la carte 6tait telle que, plus tard, apres avoir 616 revue et angmen- tee par Belleyme, elle lut acquise par le Depot de la Guerre, en 1815, puis perfcctionn^e et agrandie jus- qu'au dela duRliin et des Alpes, de 1810 a 1821. (1) Cassini IV (Jacques-Dominique), oc a Paris en 1747, mort ea 184;), nietnbre (le i'lnslilut et (iirecleur do i'Obscrvaloire. (2) Unc reduction de celte nitWne carte en qualrc feuilles rt a I'd- chelle de ,—,-7 fut en 1790 consacrec par L. Capitaine a la nouvelle division de la France en 83 deparlcments ct en districts. Elleetaitdd- dif^e a TAssemblce nationale, c'est peut-flre une des trois prenii^rei cartes qui dounereut la aouvelle division que I'un veaait d'adopter. (185) L'empereiir Napoleon qui, plusieurs ann^es aupa- ravant, pendant la memorable expedition d'Egypte , avait pu apprecier le parti que Ton pouvait tirer des jeunes ingenieurs sortis de I'l^cole poly technique, ve- nait de reorganise!' le corps des ingenieurs-g6ographes militaires. Ilpensa que Ton pourraitappliquer ce coqis special &. la redaction d'une grande carte topographique de la France avec tous les perfectionnements introduits par le temps dans les m^thodes, les calculs , le des- sin, etc. Sur son ordre, qui date du 6 f6vrier 1808, le che- valier Bonne, colonel au corps des ingenieurs g^ogra- phes militaires , fut charge de r^diger un m6moire relatif a rex^cution de ce vaste projet. Les ev6nements politiques retard^rent la realisation du plan propose par cet officier sup6rieur. II fallut encore ajourner cette grande entreprise, lorsque le 7 juin 181/i, le general Bacler d'Albe, ancien chef du cabinet topographique de I'empereur, alors directeur du d6p6t de la guerre, croyant I'Europe pacifiee, de- manda qu'il fiit donne suite au projet du colonel Bonne. Ce ne fut que sous la Restauration, le 1/i octobre 1816, que le directeur du depot de la guerre, le mar- quis d'Equevilli, proposaau ministre de ce departement, d'apr^s un m^moire du commandant Denaix, du corps des ing6nieurs-geographes, qui lui 6tait s6rieusenient recommand6 par le colonel Brossier du meme corps, de reprendre le projet de I'empereur Napol6on ; cette mesure 6tait devenue d'autant plus urgente que les cuivres de la grande carte de Cassini 6taient ou fatigues ou us6s. ( ISO ) Une coniniission, parmi les menibres dc laqiiellc on com]5tait : M.M. Laplace, Delambre, Haxo , Brossier, Bonne, Puissant, de Rossel, fiit institute par ordonnance du 11 jiiin 1817. Ell(^ proposa iin ]ilan qui fut ap- prouv6 par ordonnance du 6 aoiit de la nienie ann6e (1). Les premiers Ibnds accord^s par le budfi;ct de 1818 permirent d'en entreprendre innnc^^liatenient les ope- rations fondamentales, et I'ex^cntion commenca le i"avril 1818. Etablie a I'^chelle dc ^u^, un lailllmelre pour 80 metres, la nouvelle carte de France devait se com- poser de 258feuilles, dont KVl enti^rement pleines , 09, en partie pleines et 28 demi-feuilles avec un ta- bleau d' assemblage. Elle devait ^tre assujettie a des observatious g6od6- siqnes et astronomiques des plus precises, faites expres- s^inent dans ce but ; on adoptait la projection de Flam- steed modifK^e. (I) Un bureau spc^rial fut organise pnr le dirocteur dii D^pot dc la guerre pour diriger et surveiller {'execution des decisions de la Com- mission royale. Ce bureau qui avait pour chef M. le g^nt'rai Brossier, complait au nombrc de ses mcinbrcs MM. Dcvaux, Jacotiu. I'onne, Puissant el Corabceuf. Une autre Conunissioti, pr^sid^e par Ic ge'at^ral du genie Dode. et dont faisaieiit partie MM. les generaux Desprcz et Tholose, Arago el le chevalier de Rossel.ful chargdc de presenter un rapport sur le pro- c^d6 topographique que Ion devail adopter pour reprdsenter les hau- teurs sur le terrain; il fut d(^cid{5 que Ton emploierait le S)sl6nie dil allcinand, qui consisle u represenler les hauteurs par des hachures gradudcsen nuances d aprcs les pcntes. Aujourd'hui on prefero le sys- Ifeme des combes iqwlislantes ; la belle carte du canton de Saint- Gall envoyde a lEiposition univcrselle de Paris en 1855 en olTrait un curieui exeniple. ( 187 ) On prit poiircoordonnees fondamentales du canevas trigonom^trique : 1° la m^ridienne de Dunlcerqiie, pas- sant par robservatoire de Paris, dejk mesm^e par M^chain et Delambre ; 2" ime perpendiculaire dirig^e de Brest a Strasbourg en passant sous Paris ; et 3° une ■ parall61e a la perpendiculaire, niesur^e, comme cette derni^re, par le corps des ingenieurs-g^ographesetqui s'6tendait depuis la Tour de Cordouan jusqu'aux Alpes, en traversant la m^ridienne an nord d'Ussel (Corrfeze). Les travaux furent pousses avec une trfes grande ac- tivity, et lorsque le corps des ing^nieurs-gt^ographes eut6t6 r6uni en 1831 au corps d'6tat-major, ce furent les officiers de ce dernier corps qui restferent charges des importants travaux de la carte de France, sous la surveillance des g^n^raux Guilleminot, Lachasse de V^rigny, Pelet, Morin et du colonel Blondel, qui se sont svicc6d6, depuis 1818 jusqu'a ce jour, k la direc- tion du d6p6t de la guerre (1 ) . Nous ne pouvons dans cette rapide esquisse Iiisto- .rique nous 6tendre davantage relativement a ce qui concerne cette belle et nationale entreprise (2), qui fixa a ce point 1' attention de I'Europe, que, bientot, chacun desEtats (3), a F imitation de la France, voulut avoir sa grande carte topographique. (1) Nous ne saurions omettre les uoms de MM. les colonels Jacotiu, Puissant, Lapie, l.evict, qui dirigcrcut les travaux topographiiiues. (2) Pour plus de diJtails on pcut consuUer la Xolice sui' la grande carle topographique de la France, dile carte de I'ctat-major par le direcleur du D6p6t de la guerre, filondel, colonel au corps imperial d'Etat-ruajor. 1 vol, in-8°. Paris, deecnibre 1853. (3) Voir le tableau k la Gn de cet article. ( 188 ) Pour etre juste envers tous, nous aurions a signaler aux aniis des sciences g^ograpliiques une longue liste de nos nieilleurs ofllciers qui , tels que MM. Bonne, Delcros, Coraboouf, Servier, Montaland, Fessard, Testu, Rozet, Peytier, etc. , etc. , consacr^rent une partie de leur carrifere militaire aux travaux de la carte de France. Je rappellerai seulement avec un veritable sentiment d'orgueil que plusieurs d'entre eux firent partie de la Societu de geographie, ct que dans 1' enceinte niemede la Commission centrale, de savantes discussions qui devaient profiter ii I'execution de la grande ceuvre nationale, furent plus d'une fois soulev6es. Pour en terminer avec cette grande carte prototype de celle qui fait I'objet de ce rapport, j'ajouterai que M. le mar^chal Vaillant nous en faisait, il y a (fuelques mois a peine, remettre la vingtitme livraison, cc qui porte a d851e nombrc des feuilles jusqu'a present pn- bli6es. Onpensc qu'une dizaine d'ann6essuffiront pour completer ce grand tra^ail. Cependant I'^tcndue do cctle carte, son prix eleve, devaient enrestreindreTusage ; deplus, le souvenir du succfes qu'avait obtenu la reduction de Cassini etait dans la m^moirc de tons. M. le general Pelet, alors dirccteur du dt^pot de la guerre, songea done apublier une reduction de la grande carte topographique de r^tat-major. La nouvelle carte devait etre r6duite au quart de la grande, c'est-a-dire a rechelle de ain/oinj) ou un milli- metre pour 520 metres, ct elle devait etre composee de 32 feuilles. Les premiers essais pr^sentferent quelques dillicult^s ( 189 ) relativement a la repr(!'sentation cles talvegs ou lits cles valines dessines paries cours d'eau et des cretes ou lignes de separation des faites-; mais elles durent dis- paraitre en presence de I'habilet^ et du savoir des homines comp6tents charges de ce nouveau travail. Les premieres feuilles de la carte r^duite 6taient pnbli6es en 1852, etplusieurs figur^rent avechonnenr h I'Exposition universelle de Paris en 1855. Aujourd'hui notre bibliotlit^qne, cWyd si riche en documents g^ographiques de toute nature, a vu, grace k la munificence de M.le mareclial ministre de la guerre, sa collection de cartes s'augmenter des 1(3 feuilles deja parues de cette importante reduction. Au nombre de ces 1(5 feuilles qui embrassent pour la plupart la partie septentrionale du territoire, se trouve la carte d' assemblage, elle nous permettra de donner.une id6e du plan d' ensemble de ce travail et de son degr6 d'avancement. La carte de France reduite se composera de 32 feuilles qui couvriront une surface de 3"', 50 de hauteur siir 3"',f)0 de largeur. Ces feuilles numerot^es de gauche a droite, a partir de Tangle nord-ouest de la carte, sont disposees sur cinq de largeur pour les quatre premieres rangees horizontales superieures, et sur quatre seule- ment pour les trois rangees horizontales inf^rieures ; le tctre oocupant Tangle nord-est (/« /eiti//e 5); et la carte iT assemblage Tangle sud-est {feuille 32) (1). (I) Chaque feuille pleine comprcnd ua quaJrilalire de terrain de 36 lieucs en haulcur ct dc 38 en largeur; ellc repr^sente done une superficie de 1086 lieues carries. i I'cmlnoki'" 2 Londit's* 3 Diml'CrqiK; a i'i\uiouiir 7 Clierboiirg' 8 l.illo- 11 Bivsl Ii Heiincs 13 I'.iiis' 16 Lonont 17 Nantes l8Bimr;;e>" )i ■2i LaP.ochel c 22CIC'ririuiil ii •25 Bordi';iii\ •26 Itmltz >i 29 B.ivorihe. 30 Toulouse i Aiivcis" i 9 M^zlircs* 14 Mel 7. in Dijon ■j;; l.\on 27 Avi;inon 31 Marseille ( 100 ) EUe comprend, outre la France, unepartie de I'An- gleterre, jusqu'ii la liuuteiir do Cardigan et de Cam- bridge, etune assez large zone au dela denes fronti^res de I'Est, jusfpi'a Genes, Milan, le lac de Constance et tout le couis dii Rliin. — Ainsi que dans la grande carte topograi)hique de I'^tat-major, la Corse manque. Voici d'ailleurs la disposition et le titre de chaque feuille; celles qui ont 6te publiees sonl marquees d'un asterisque. 5 Le litre' 10 Ma.v price* 1.) Slrasbour;;' 20 Allkii'ch 2i G-Sl-BcrnaiJ 28 Nice 32 T. d'assemb. Cette carte a ete gravee avec beaucoup do soins : le trait, par M. Lorain , la lettre par M. Arnoidd, et le figur6 du terrain par .M. Dandelenx. Signalons un progrfes notable ([ue nous devons a 1' experience que Ton a acquise au depot de la guerre en gravant la grande carte ; c'est que dans celles-ci I'echelle des teintes pour les plis du terrain, les col- lines, les montagnes, est tellement ni^nagee que Ton n'aura pas a craindre d' avoir des planches trop noires ou trop charg^es pour les Alpes et les Pyrenees. Dans cette reduction, on n'a conserve que la topograj)hie generale des bois, desplaines, des landes, des marais, et non pas cette multitude de petits details topogra- phiques que Ton rencontrait sur la grande carte; te- nioignages muets de la scrupuleuse exactitude des lev^s, mais qui ne servent trop souvent qua accuser I'age de la carte, par suite de leurs fre(|uentes modifications. ( lt)i ) II en r6sulte que cette nouvelle carte se cofiservera plus longtemps exacte. La topographic g6n6rale y est indiqu6e d'aprfes la m6tliode perfectioiin6e des courbes ^quidislantes, mais ces courbes que Ton conserve quelquefois dans les cartes topograpliiquesfaitesagrand point, disparaisseni ici sous les hachures et le models du graveur. Pai'mi les feuilles d6pos6es sur le bureau de la So- ciete , la feuiUe l^-Paris pour I'ensemble d'un pays ondule et coupe de collines et de valines ; la feuille \h-Metz, qui contient les ramifications des Vosges et des Ardennes, peuvent donner une idee nette de ce que sera ce beau travail lorsqu'il sera termini. Pour I'ing^nieur, la carte au jj^'^j^donne, commela carte prototype, les voies de communication, les cours d'eau, les principales divisions de culture, de bois, de prairies, etc. , le relief du terrain fix6 par des cotes de niveau en nombre suflisant. Enfin, elle signale toute's les communes, au lieu de : tous les lieux liabit6s, an- nexes, hameaux, hearts, comme le faisait la grande carte au joToT* Les parties de la carte situ^es en dehors de nos fronti^res ne pr^sentent que le trait g6ographiqiie sans aucune topographic. Une ing^nicuse disposition de la carte d'assendjlage de cette reduction permet dc trouver imm6diatement les feuilles correspondantes de la grande carte au j~j. En effet, nous avons dit que la carte qui nous occupe 6tait la reduction au quart dc la grande carte lopographiquc ; on a dispose son canevas de fayon qu'une feuille pleine coi'ncidat avec 16 feuilles de ( 192 ) la grande carte ; et snr la carte d'assemblage on a sub- divis6 alors les 32 feuilles en autant de quadrilateres que chacune d'elles contenait de feuilles de la grande carte. (Ihacun de ces quadrilateres a enfin recu le mim^ro de la feuille de la carte au ^jj, h Inqnelle il correspondait de 1 k 258. Le cadre de chacune des feuilles porle la double division en degr^s nonagesiniaux et cent^siniaux, de demi-degr6 en deuii-degre. Enfin, des echelles ni6- triques, en lieues g^ographiqucs, marines , de poste, et en toises, plac6es au-dessous de chaque feuille, per- mettent d'6valuer les distances des lieux entre eux ; tandis que dans les marges du cadre, an nord, a Test, au sud eta.l'oucst, les feuilles de raccord sont indiqu6es par le nom de la ville qui les dt^signe dans la carte d'asseiublage. La carte au ^ ^ „^^, ^, ^ est done arri^•et• a la moitit!' de son execution totale ; on en poursuit activement les travaux ; mais , on le coraprend , elle ne pourra etre termin^e que lorsque les dernieres feuilles de la carte au 80^00 ^^iront et6 dessin^es, sinon grav6es. Cependant on peut d^jk affirmer, a I'inspection de ces 16 premieres feuilles; fpie lorsqu'elleseratermint^e on aura une excellente carte g6n^rale de la France, tr6s exacte et bien grav6e, d'une grande utility pour toutes les branches du service public, appropriee aux besoins de la guerre, du commerce et de I'industrie ; que I'electrotypie multipliera a volonte sans crainte d'user les planclu's-meres, et qui sera pbis accessible par son prix relativement tr6s niod^re que la grande carte au gooyo* ( 193 ) C'est done un grand service rendu au pays par la direction du D6pot de la Guerre , que la Soci6t6 de g^ographie qui s'est toujours, a bon droit, montr^e jalouse des progr^s des travaux cartographiques devait etre heureuse de reconnaitre en remerciant M. le mar^'chal Vaillant, ininistre de la guerre, de sa lib6ralite. V. A. Malte-Brun. NOTE ADDITIONNELLE. Nous avons dit page 87 « qu'i rimitalion de la France, cliacun des Etals avail voulu avoir sa grande carte topographique. » A I'appui de ceUe assertion, nous avons dressd le tableau sui- vant [l),dans lequel nous n'indiquous que la priucipale carte to- pographique gendrale, et la premiere en date, qui a etc ext'cut^edans chacun des pays de I'tlurope. La plupart d'entre ellcs ont doun6 lieu a des r^duclious estim(5cs, d'aulres df]h anciennes onl 616 remplacdes, depuis, par dc plus rdccnlcs; il n'cutrail pas dans noire plan d'en donner la longue nomenclature (2), nous nous en sonimes tenu a ridc^e de montrer chronologiquemcnt ijue la carle de Cassini avail donnd en Europe la premiere impulsion a la publication de carles lopographiques drcssdes par I'ordredes gouvernements. (1) M. Joraard a bien voulu nous dclairer de ses bons conseils; nous lui offrons icirexpression de notre respeclueusc grutiludu, ainsi qu'i\ noire confrfre dcla Commission centrale, M. Buisson, g(iograplic du niinisl^re des Affaires Elrangfres, qui nous a second"', dans nos rcchci clics. (2) M. de Sydow adonn6 danslcscaliicrs I el U (1857) des MUtheiltwgen du fir -4. Petermann, un article inl^rcssanl et di5taill«5 sur I'tlat de la cartographic en Europe a la fin de 1856 ; nous I'avons eonsultu en ccni- pusLiot nolle labkau. XT. MARS. h. 13 ( li'A ) M a. o ta p u w Q CO H H -Id t« H Z M OS w o D a «< es o e. O H cc u < fiS -w Z o tn u H P3 ■< O t« a i'lua.iiii'An p li'ia i 3.II)IIIOJj •s.ipnuv ; ,. "s . •§ 2 IS H 3 ©I ;.-; — 2 * 0 o c o 1 S g 2 - CO u SP K u u o 2f J: «J - "Je2' ° S,'^ uJ.~ r-* - i_ 5 ^ ^ 3 C O ^ y H HO •i X t^ u O s .- ■ — u .- S S K 3 < p < < 5 -i < 3 •ir. < 3 5 S H > •< tn U t- t-i-ocxKaooexocx36fo« xxjo M -S - ( 195 ) 2 -S s''i ■fc=te c o O CD o -T --T C> •JT- -*r o o o o o o o 00 — o o o o o o o o =; o o o o •s ''i c CO j: O g ■.a 3 Si a!' SB u J2 . so O s - ■ a ' " ' "? .' "J J! r' o CL-^ H = ..^ ^ =- ^ n = C "C t ©1 "^ " n — :3! " '- ^ ti C -:.> E " " « r - ^-' « _ aj IT a ST _ :^ ? c: 1- " o .^ "-- ^' " E — - 5, -j^ U _ , , a > i^ J "= 1"= =■ a S.2 S.!; g-" 1? = a K a i fei ^ ^ ^--i A; o V .•a 2 5 - -^ *■ 3 a a A o - o 3 ^ •a; J2 a 9 I. -J el •* L » .00 :<: ? . S i --- 3 " _a 5 u V, X - C/30 :i ~ i-( --~ o £ 9 o 5 „ i - ;-n, S - ^-a in ._'i ^ af ^ ■- ;. ". i s ^' 'S 5 £■ — -J - a *= io a ^.' - « "-1 .a rh - ^ - •■- -a ^ - - 'J- " -.•-'^ <-y.^- ' £d3 a._: p _5 is i c -ii _ J V ■3 3 ac« 2 a a :-:=;-,=^ 0; o ~ ■ J!; S ^ ^ :; c-^ ^L. S CI = " - t a "■• C o ' 'sj ^ Qj ^ _^ to_j2 O— "-- -:^~ 3 - i a = - 5 =2 I -^ g- a- 5- '- £ c aj ;. •a - ~ -5 S ; — * ^ =. a ^ w lA .2 ca 'a Jta-iTjij; i ■ . _ :i o 4. 1 „ ,, i « r, = a a* - j; -a ■S c'uX! w^c*— ;=^a^ i^ a * a, ti P' — -r - bn p," ? a Jail I a^ a - w tR - QJ 5 i >: ^^5 = - =^ ^ £ t. c aj •■« .if t : ^ cn'cj r, - -a c J. -a c «:.::' £ .S S - CJ = ^ ??, ;H ^ "^ "^ "(^ • ■' '^ ^-' ' tr. ^ " t = 0 ^s. o ? TH f- ij •a a t— tj- ik "^ n -^ ja . ■> -r "■ 5' -i a a ? cH - '-a S a; ^ a I .aJ 3 ~ - _» — :: -a .- a 5 .- I i ■ -? "?. ^ - ^ ^ r « t/, — u a; I 0 -fl 2. i a -:■ — — _^ w — w: ,^ ,y. --._. — .yt --. u c' 00 - tc-.T ^ o 5 "^ i^ ■'' O i; fc^ o o t- e; "^1 ^S =^^ &):r.»-l-3 flJ — < ; a o -a _ 5. 1- : -^ ■- a a — •- ; -^ ^ :; 0.^00 . a^ -o V- :/; u ^ "5 03 A W 'TT U z in o ui o — oa H H 3 >* P » -f! < n U " en O H E p ca lO Ci: — — O o R O .^ W 0 &» Gl -!* C: 0 O •^ «* '«»' ••^ GOOD cr> » — -~ — K ■» 00 CC 00 ( 196 ) RAPPORT «UB I.'otVB/tiE I.NXntLE : HISTOIRE d'aTTILLA ET DE SES SL'CCESSEURS, Jusqu'i I'etalilisscment des Hongrois en Europe, siiiric de Ir'gemlrs rt tia'UlioDt P A B M. A M K I> K E T H I E K 11 Y. Paris, 1836,2 vol. iii-8». L'ethnologie puise des donii6es d'un intt^ret tout par- ticulier etd'uiie inappreciable valeur dans I'histoire des grandes migrations accomplies, du second au sixitjme si^cle de notre 6re, et que Ton appelle I'invasion des Barbares. La marche de ces hordes asiatiqnes a 6t6 si rapide, leurs destinies si vite accomplies, qu'on a peine a saisir rinfluence exercee par elles sur les populations del'Europe actuelle et a renouer le lieu de filiation qui nous y rattache. ("est seulement enprenant soin de re- cueillir les t»^moignages epars qui restent sur ces nations contpierantes, que Ton parvieut a se faire une idee moins confuse de leur histoire, et plus arret6e de leur carac- t^re ethuologique. Entre ces barbares, les Huns, taut par les effets terribles de leiu- invasion, que par la ce- 16brit6 de leur chef, occupent une des premieres places. Raconter les \icissitudes de leur 6tablissement en Europe, 6lait uno a'uvre dillicile, tentee plusieiu's fois mais toujours d'unc niani^re incomplete, etqu'un his- torien du m^rite de AI. Amed^e Thierry })ouvait seul r^aliser. Sa vie d'Atlila int(5resse done autant la g6o- graphie que T histoire. La marche triouq)hale de ce conquerant a demande si ])eu d'ann^es, que faire con- naitre les coiitrees dans les({uelles il etablit passagere- ( 197 ) nientsa domination, c'est tracer la description g^o- graphique d'une partie de 1' Europe au v<= sifecle. M. Amed6e Thierry prend les Huns a leur origine, au moment ou ils envahissent 1' Europe orientale; il nous trace leur portrait, puis nous fait connaitre chacune des populations baibares que les Huns, les plus barbares de tous, chassent devant eux, ou s'assimilent : les Visigoths, les Slaves (Antes , Vendes , Slovenes) les Bulgares, les Gepides, les Lombards, les Avars enfin. Le r6cit des ^v6nements, que I'auteur sait habile- ment d^rouler, fait le fond du livre ; mais sous Attila, comme sous ses successeurs, jamais la physionomie des peuples, a la mel^e desquels il nous fait assister, n'estneglig(^e. De tous ces barbares, les Huns sont ceux qui conserventle plus longtemps leur caractere national; ils se fondirent a la fin avec d'autres populations pour donner naissance a des nations nouvelles, les Hunugars chasses de la L6b6die par les Petchenfegues, les Khazars d'oii sortent les Magyars. C'est ainsi que nait la nation hongroise, aussi barbare a son origine que les peuples dont elle est sortie. M. Am6d6e Thierry a tire des It^-gendes latines, ger- maniques et hongroises, dont Attila a 6t6 I'objet, un heureux parti, et fait de ce faisceau de documents, ou I'obscurit^ se mele, il est vrai, bien souvent h la lumi^re, un flambeau dontil 6claire ce qu'on pourrait appeler I'interieur de son r^cit. La grande figure d' Attila, tour a tour enlaidie ou glorifit^e, resume des instincts de nationality et de race dont il est curieux d'etudier les dilT^rentes formes dans la quatri^nie partie de I'ouvrage. ( :h.fi ) ' Lea Huns constitueient, dans le piincipe, une de ces tribus finnoises ou (inniffiies qui peuplent toute la region boreale depnis le nord dii golfe de Bolhnie jusque sur les deux rives du d6troit de Behring. Nous les trou- vons d'abord design^'S, cliez les auteurs des a" et VI' Slides, sous les nonis de Xouvoi, XoOwot, Ouwoe^ Jiuniti, Cluiniti. lis occupaienl alors les deux veisants de la cliaine ouralienne et la valine du A'olga, ct cela d6s le 11"= siecle de notre ere , ])uisfpi'un geogra})lic Ae, cette epoque, Ptol^niee nous signale I'apparition d'une tribu de Hounn ou K/toiiiin, panui les Slaves du Dni6j)er, et (]uc Denis le Pt'riegete nous les montre .campes entre la nier (Kas])icnne et le Caucase, d'ou leur brigandage s'^tendait en Perse et en Asi;' Mineure. •Ces Hounn, ou, comme nous les appellerons pour nous conformer a I'usage, ces Huns se divisaient en deux grandes ])ranclies ; le ramcau oriental caspien est appelc par Procope les Huns blancs, par opposition au rameau occidental ou oitralicn dont les tribus nous sont representees comme noires, ou plutot coninie basan^es. Ces deux branches de lam^me confederation n'avaient entre elles, aux iv'et v^siedes, que des liens tres laches et presqne J)rises. Al. Amedee Thierry emet I'opinion que la domination hunnique renfermait, a rOrient, des races turques et des Finnois a I'Occi- dent ; il ajoule qu'une ti'ibu dominanle de race nion- gole olTrait un caractere physique asiaticpie jilus pro- nonce que cclui des Finnois. Et en eflet c'est avec I'exa- geration du type calmouk, ([ue Sidoine A])olIiii;iire nous point Attilaet une portion de la nation des Huns. Ceite hypothese de I'habile historicn a certainement ( lt^9 ) bd'.iucoup de vi-aisein))lance; il lie faudrait pas cepeii- dant donner trop d' importance a toutes les distinc- tions de races qu'il prend soin d'etablir. La ligne de demarcation entre la souche mongole et la souclie iin- noise est loin d'etre aussi trancli^e qu'on est tente de I'admettre, si Ton compare les deux extr6mit6s oppo- s6esdes rameaux qui ensont sortis. Quand on se transports au sud de la Sib6rie, dans ces contr6es qui s'6tendent du lac Balkasch jusqu'au deladu lac Baikal, et sont comprises depuis le cours sup6rieur del'Irtischjusqu'aux sources de I'Ainour, on rencontre des populations qui peuvent, presque avec un meme droit, etre reclam6es par la race tchoude ou fnnioise et par la race mongole. Les Tongouses nous lournis- sent un type saisissant de cette race intermediaire au sein de laquelle s'opfere la bifurcation que Jornandfes signalait d6ja chez les Huns. Ce nest qu'en se melant a des populations blanches, en descendant sous un climat tempere ou moins in6gal, que les -races finnoises out perdu quelques-iins des traits qui se sont au con- traire plus prononc6s chez les habitants des steppes tour a tour brulantes ou glac6es de I'Asie centrale. Les Huns vivaient de chasse, de vol et du produit de leurs troupeaux. Les Huns blancs d^troussaient les marchands dout les caravanes se rendaient dans rinde ou en revenaient. Les Huns noirs chassaient la martre, le renard et Fours dans les forets de laSiberie et faisaient le commerce des pelleteries sous de grandes lialles en bois, construites pres du Jaik ou du Volga, et frequentees par des trafiquants de la PerSe ou de I'empire roinain, ou les fourrures etaieiit tr6s reclier- ( 200 ) ch^es. Telle 6tait la frayeur que ces hordes barbares inspiraient aiix anciens qu'il ne voyaient en eux ([ue des b6tes f^roces a tete humaiiie. « Los Huns, ecrit Ammien Marcellin, depassent en ferocite et en barbaric tout ce qu'on peut iniaginer de barbare et de sauvage. Us sillonnent prolbndenient avec le fer les joues de leiu's enfants nouveau-nes, afni (jue les poils de la barbe soient etoulTes sous les cicatrices ; aussi ont-ils jusque dans leur vicillesse le menton lisse et dt^garni, couime des euniiques. Leur corps trapu avec des niembres sup^rieurs 6normes et une tete demesure- mcMit grosse, leur donne uiie appareiice nionstrueuse : Yous dirioz des betes a deux pieds , ou (juelqu'une de ces figures en bois nial cliarpcnte dont on orne les parapets des pouts. Au denieurant, ce sont des etres qni, sous une forme hiimaine, vivent dans l'6tat des aniuiaux. lis ne connaissent pour leurs aliments, ni les assaisonnements, ni lo feu : des racines de plantes sauvages, de la viande uiortifif^e entre leurs cuisses et le dos de leurs chevaux, voilii ce qui fait leur nour- riture. » Tons les autres details que nous donnent les anciens et que M. Vni. Thierry a rcproduits, sont du nienie genre et ach^vent de nous faire reconnaitre dans les Huns des populations toutes seniblables k ce qu'6taient les hordes sib6riennes et tartares, il y a quelques si6cles. On retrouvait chez eux juscfu'a ce ce chanianisuie, cette sorcellerie qui fait le fond de la religion de toutes les ])opulations boreales, et des races finnoises en particulier. On n'a qu'a reprendre le tableau que les auteurs byzantins , slavons ou russes tracent des populations ( 201 ) qui plus tard pen6tr6rent par I'Oural et les steppes de la Caspienne, dans I'Europe orientale, les Khazars, les Petchen^gues, les Conians, les Tartares du Kiptchak ; on retrouve toujours les niemes traits; c'est la meme barbarie, ce sont les memes ravages. Mais le contact de ces races avec les populations europeennes adoucit peu a pen leur f6rocit6 ; les empires d'Orientet d'Occident exercent sur eux une influence civilisatrice qui les pre- pare a une fusion avec les peuples dont ils etaient d'abord la terrenr. Et cette influence, on la saisit d6ja dans la vie d'Attila. Ce prince qui inaugura sonregne en faisant crucifier deux augustes otages livr6s en exe- cution du traits de Margus, qui avait tous les traits d'un Mongol, qui ne mangeait que dans des plats de bois, qui s'enivrait, trainait autour de lui une troupe de feninaes et de sorciers, ce prince ou plutot ce chef, asiatique par les goiits et par les instincts, eut adopts la vie aisee et le luxe des Occidentaux, si luie niort iniprevue n'6tait venue le frapper dans lo lit nuptial oil il allait s'^tendre prbs de la fdle d'un roi. D6ja ses funerailles ne sont plus celles d'un chef de hordes : une tente de sole est dress^e dans une grande plaine et Ton y depose son cadavre sur un lit magnifique. Des cavaliers d'dite, choisis avec soin dans toute la nation, ex6cutent a I'entour des courses et des jeux compa- rables aux combats simul6s des cirques romains. Et tandis qu'Attila ou, conime les Huns I'appellent, Athel (Etzel) laisse en Occident un nom abhorre, ildevient le h^ros par excellence de la nation hunnique. Aux chants de deuil qui se font entendre d'abord a ses fun6railles et dans la Strai'a ou repas fun^bre qui se ( 202 ) celebre a celte occasion, succ6tlcni jjIus tard d'autres cliaiils (|ui rcdiseiit la grandeur et Ics hauls fails dii lils dc Moundzoukii. Cos chants se peri)6tnerent en quelque soitc jiisqii'a nous ; ils sont devemis, cliez les Allemands et los IIongrois,ie siijet do traditions cu- rieusesque M. Ani6dee Tliieny a etudiees dans la qiia- trieme partie de son ouvi'age, cclle qui novis oll're lo plus d"interet et d'originalite. La tradition gerinanique sur Vtlila a piis naissancc cliez les Genuains orientanx. Ilien dans le vasselage de cespeuples, fiers sous le loi des Huns, n'avait 6t(!;de nature a blesser Icnr orgueil et a Icui- inqioser I'oubli. Attila avait entour6 de distinctions les chefs des grandes tribus germaniques. Ardaric, loi des G6pides, Valamir et Theodemir , rois des Ostrogoths , 6taient plac6s dans ses conseils et a la tete de ses annees ; Attila les traitait plutot en amis et en allies qu'en sujets. Odoacre, le chef des Herules d'ltnlie, avait 6t6,selon toute appa- rence, son soldat, et Theodoric 6tait le fds d'un de ses capitaines. Attila ne fut done pas pour les Germains ce qu'il etait pour I'Eglise, ce qu on le represente dans les legendes et les traditions latines, le fleaudeDicu ; c'est un prince sage, mognifupio, hospitaller. Le noni d' Attila, sous la forme Atli, p6netre jusque chez les Scandinaves. Qui le croirait? c'est au milieu des frimas du pole, en Islande et en Scandinavie, que les traditions sur le grand roi des Huns furont recueillies avec le })lus d'empresse- nient peut-etrc et decuriosilc. Ge sont des Scaldesqui nous en onl iransniis les sou\ enirs les phis lideles dans deux ])oemes intitules yitla-Mdl et Ada-Qttida (r6cit ct chant d' Attila) , que d'autres niorcoau.x pocli([ucs non ( 203 ) iiioins precieux cl6veloppent et conipleteiU. Les chants scaiidinaves, ou il est question d'Attila, entrent pour plus du tiers dans I'Edda de Sa?niund, et nous savons qu'ils existaient d6j;\, sons leurs formes actuelles, dans la premiere moitie du ix'= et probablement k la fin du VIII" siecle. Le souvenir des Huns, qui ne firent pour- tant qu'une courte apparition an bord de la Baltique, etait vivace en Scandinavie. On y appela longtenips Hunalaiit (terres des Huns) les contr^es situ6es a Test de cette nier, et aujourd'luii encore les paysans alle- niands donnent le noui de Hiinnenheit aux tumuli que Ton trouve, en assez grande quantity, dans les plaines de la Pologne et de la Lithuanie. Atli est un des h6ros du poeme de Gudi-una. II demande la main de cette fiUe de Crimliilde et de Ghibil qui pleure son epoux Sigurd assas- sine par ses fr6res. Mais Crimliilde donne a Gudruna le breuvage du L6th6 ; celle-ci oublie enfin Sigurd et part pour le royaume des Huns. Leur roi a de cette nouvelle Spouse deux fils, Erpe et Eitille. Toute une I6gende po6tique serattache a I'histoire de cet hyuu^n^e, dont les traits 6pars se retrouvent tout a tour dans le poeme de JSicbelnugen et dans celui de Walter d'Aquitaine. L'^veque Pilegrin, qui baptisait, en 973, le chef des Hongrois Geiza et (fui, durant vingt annt'es, precha r^vangile, s'etait delasse de ses travaux apostoliques .par des compositions dont Attila etait un des h6ros, et oil des traditions antiques se trouvent melees a la I6gende chretienne. Les Hongrois ont aussi leur l^gende d'Attila. Hs avaient recu I'li^ritage des Avars , derniers re])re- sentants de la nation Imniiique et foriue dej^ ii deiui ( 20/i ) civilis^e de ces barbares asiatiqucs. Les mceurs des Avars, 6crit M. Am. Thierry, 6taient m\ melange de grossieret6 et de luxe ; ils recherchaient les beaux habits, la vaisselle d'argent et d'or, et leurs kliakans s'6tendaient sur des lits d'or cisele ganiis d'^tolTes de soie et qui leur servaient de couche et de trone ; au- dessus de ces lits ou divans etaient places quelquefois des dais ou pavilions etincolants de pierreries. La nation avare s'^tait grossie des alluvions d'unc foule d'autres nationalites ; ils absorberent en cux des Bulgares, des Slaves, des Koudiigours. Ils gardaient cependant encore tousles vices des Huns; le contact des nations chretien- nes n'avaitquefaiblenient adouci leurs ma'urs. Lesvic- toires de Charlemagne devaient faire pen6trer dans leur sein cette civilisation encore barbare elle-meme du grand empereur franc qui avaitabattuWitikind,et qui, malgre son origine germanique, faisait predominer graduelle- ment dans tous ses 6tats les fonnes de la soci6t6 latine. Toutelbis les Avars avaient fait des progr^s dans I'art de la guerre, et la disposition de leurs villes annoncait un peuple toujours pret au combat. Le moine de Saint- Gall nous apprend qu'ils se defendaient dans des enceintes que les Germains d6signent sous le noni de lii-ings ou rings. lis enfoucaieut, a la distance de vingt j)ieds I'un de I'autre, deux rang^es parallelesde pieux dont la liauteur 6tait aussi de vingt pieds; ils remplis- saient I'intervalleparune pierre tr6s dure, ouunesorte de craie qui, en se liant, ne formait rpi'une masse; le tout etait revetu de terre sem6e de gazon et plantee d'arbustes serr6s ({ui. par leur entrolacement, pr6sen- taient une haie impenetrable. La zone laissec enlre deux ( 205 ) remparts contenait les villes eties villages, disposes de facon que la voix humaine put se faire entendre de Tun k I'autre pour la transmission des signanx. Ces rings, ainsi disposes en cercles concentriques , consti- tuaient conime des r^duils successifs de bastions. Leur diamfetre allait en se r6tr6cissant, a mesure qii'on se rapprochait dii centre ou se trouvait le ring royal ou camp. Les enceintes, qui longeaient d' ordinaire le lit des fleuves et les pentes des montagnes, 6taient perches, de loin en loin par des portes servant de passage aux habitants, line enceinte prise, on se r6fugiait dans la suivante avec les meubles et les troupeaux, et ainsi de suite. La distance d'un ring a I'autre 6tait parfois de trente a quarante milles germaniques. Tels etaientles ancetres des Hongrois ; leur genre de vie s'61oignait peu, comme on voit, de celui des Huns d' Attila ; et les Magyars ont fort bien pu recueillir cliez les populations avec lesquelles ils se melerent, dans les plaines de la Theiss et du Maros, des traditions remontant au fils de Moundzoukli. C.e nouveau peuple, 6tabli delinitivement en Europe a la fin du ix" siecle, avait k un liaut degr^ le gout de la poesie et celui des vieilles traditions paiennes. Le christianisme n'en eut pas bon march6; I'histoire nous parle d'une r^volte paienne qui 6clatait encore en 1061, sous le r6gne du roi B61a I". Le peuple soulev6 d^terrales idoles, profana les 6glises, 6gorgea tout cequi portait un habit eccl6- siastique, tandis que les pretres paiens, grimp^s sur des 6chafauds, appelaient les insurg^s a retablir le culte des dieux. Decette lutte du christianisme avec la poesie populairc, sunt nees les chroni(pies hongroises, ( ^00 ) (\\\e M. Am. Tliierry a lonill6os et qn'il a r^sumt^es k la (ill (If son livro. II tonnine ])ar iin coiiit apercn des traditions orientales sur Attila, roides Magyars, tradi- tions qui vivaient encore en Transylvania et aux confins de I'Asie, il y a moins d'un demi-si^cle. Je n'ai pu entrer dans le detail du r6cit histo- riquo qiii remplit la phis gi-ande partie de I'ouvragp de M. Thicriy. Tant d'ev^neinents, i-acontes avcc une concision qui n'exclut ni I'^l^gance ni TinterSt, ne sauraicnt trouver place dans un rappoit tel que celui- ci, o(i lec6t6ethnologif|iie doitnatnrellement ])re(lomi- ner. M. Anied^e Thierry, (pii porte si dignemenl tni nom grand dans les lettrescontemporaines, aretronv6, ])our ecrire I'histoire d' Attila et de ses snccesseurs, tout le raotivenient et la cotdeur f|ii'il avail i-epandus dans ses deux iiistoires de la Gaule. II reussit k nier- veille k peindre la vie etles actes des populations har- ))ares, et a les opposer k la civilisation d'nn empire en dteadence. (Vest la ce qui fait surtout I'int^ret ethno- logique de son travail, puisque I'histoire des po])ula1ions harhares, c'est le tableau des mtuurs i)i'iinilives, c'est le jiortrait des races telles qu'elles a))paraissent k celni {jui les etudie an point de vue physique, et ne chei-clie en elles (pie ce qu'elles licnncnl directemeiit de la nature. Alfrkd Mairv. ( 207 ) KXTRAITS DES PROGlilS- VERP.AUX DBS STANCES. Seance da '\d /ih'n'er 1858. « M. C^sai'Daly, architecte, est admisaii nombre des membres de la Soci{^t(^, sur la proposition de MM. de Quatrefages et Jomard, M. le president aniionce que M. le D' Rup])ell, lo doyen des voyageurs en Afriqne, et M. le capitaine Stokes, I'nn des laur6ats de la Soci6t6 pour son voyage en Australie, sent presents k la stance, et il leur adresse les felicitations de la Soci6te. M. de La Roquette termine la lecture d'un m^moire de M. de Saussure sur les ruines d'une ancienne ville mexicaine d^couverte par Ini sur le plateau de I'Ana- Iniac. — Renvoi au Bitlletin. M. Jomard annonce qu'un savant russe, M. Seva- . stianoff, conseiller de I'empereur de Russie, mainte- nant a Paris, a visite r^cennnent les monast^res du Mont Athos et les biblioth^quesde cesGouvents,oii Ton savait depuis longtemi)s qu'il e.xistait des mannscrits prteieux. L'un des plus importants est une g(^ographie de Ptolem^e, accompagnee de cartes, et qui date du xiir si6cle : levoyageur en a ex6cut6une reproduction photographique. Ces cartes different beaucoup de celles de nos plus anciens nianuscrits, notannnent de celui qui porte a la Bibliotlieque imp6riale le n" :1/|01 : La nomenclature en est trfes riche, niais le dessin a ete fait sans r^gle ni conqias. Mallieuieusenient la iiiappe- ( $08 ) monde qui devait &tre en tete des 27 cartes, n'exlste plus ; il en est de meme de la carte de la Bretagnc. Le texte n'apas dt^ copi6 en entier, mais dans un procliain voyage, M. SevastianofT se propose de recueillir par le meme proc6d6, non-seulcment la totalite du texte, mais aussi des fragments d'Arrien et de Strabon. La nettet6 de la reproduction ne laisse rien a dt^sircr. M. de La Roquette rappelle k cette occasion des re- cherclies analogues faites par des voyageurs qui ont pr6c6d6 M. Sevastianoll au Mont Vthos. M. le chevalier da Silva commence la lecture d'un long travail intitul6 VOyapoc, ayant pour butd'appro- fondir la question de la delimitation des Guyanes fran- caise et br6silienne. M. d'.ivezac lit une note sur les anciens t(^moignages historiques relatifs a la boussole. — Renvoi au Bulletin. M. Soyer soumet a la Societe la boussole a propos de laquelle il lui avait 6crit h la deraiere stance, et il lui donne (juelques explications sur les moyens qu'il propose pour se diriger d'un point t\ un autre. L'assembl^e ecoute cette counnunication avec atten- tion, et engage son auteur a y apporter de nouveaux perfectionnements. Seance dti 6 mars 1858. Son Fa. M. le marechal ministre de la guerre, an- nonce qu'il a re^u avec beaucoup d'int^ret les dix exem- plaires de la 1" livraison de la carte hypsograpliiqiie de I'Europe ceiitrale de M. le major Papen, que la So- ciety lui a transmis de la part de I'auteur, ( 200 ) M. le ininislre de I'instruction publique transmet ^la Soci(^t6 le coniple rendu quo lui a adress6 M. Barbier, d'un voyage en Alg^rie. M. C6sar Daly, admis recemment dans la Soci6t6, lui adresse ses remerciments et promet^de concouiir a ses travaux.' M. Malte-Brun met sous les jeux de la Commission centrale les deux feuilles de I'itin^raire de i\I. Lejean, de Routscliouk a Philippopolis, et il donne lecture de la lettre que celui-ci lui a adress^e. La route de M. Lejean enibrasse un espace triangulaire dont la base est la rive droite du Danube de Routscliouk a Sistova et le sora- metse trouve plac6 a Philippopolis (Mac6doine). Ce voyageur s' est rendu de Routscbouk a Philippopolis par Tarnova, H616na, Eski-Sagra, Tchirpan et Papasti , et il a elTectu^ son retour par Carlova, Trojan et Lovatz. M. Lejean appelle surtout 1' attention de la Societe sur la belle ligne de communes bulgares qui s'(itend, le long du versant septentrional du Balkan, etdont la structure physique a beaucoup de rapports avec celle des valines du nord des Pyr6n6es : politiquement parlant, le rap- port etait tout aussi frappant entre ces selos et les val- ines b^arnaises et gascones avant 1789. La Commission centrale accueille avec int6ret la nouvelle communication de M. Lejean et decide que Ton attendra son prochain retour aParisJ)Our insurer au Bulletin sa note et la partie la plus importante de sa (^arte itin^raire. M. le secretaire comnuuiique la liste des ouvrages d6- pos6ssur le bureau. M. Jomard oll're en outre, au nom de I'auteur, le voyage de M. le D' Livingstone dansl' Afrique XV. MARS. 5. \lx ( 210 ) australe ; M. Treniaux prd'senU; ciisuit'.! les '2b' eL 2(r livraisons de son parallele des Edifices anciens et nio- dernesdu continent africain, ainsi que les 27' et28' li- vraisons de son voyage an Soudan oriental. MM. Morel Fatio et S6dillQt sont pries de rendre conipte, le pre- mier, du voyage du D' Livingstone, et le second, de la Geographic du nioyen jige, de M. Joachim Lelewcl. MM. Daussy, d'Avezac, Jomard , Malte-Brun et A. Maury, sont nomm^s, au scrutin, membres de la Com- mission sp6ciale du concours au prix annuel pour la d^converte la plus importante en geographic. M. le comte d'Escayrac dit quclques mots au siijet du depart de plusieurs voyageurs europ6ens qui se proposent de gagner le Dar-Four et le Waday. M. le chevalier da Silva lit la suite de son travail sur rOyapoc. M. de Sevastianoff, dont M. Jomard avait entretenu la Society a la pr6c6dente stance, met sous les yeux de rassenibl6e les copies photographiques qu'il a faites, a peu pr6s de la grandem- de I'original, de 8 pages de te.xte et de la collection complete des cartes annex^es k la geographic de Ptolemee dont le manuscrit existe dans la Bibliothe(|ue de Vatop^de, un des vingt nionast^rcs du Mont Athos. 11 entre dans quelqucs details sur ce ma- nuscrit qui contientla geographic de Ptolemee, 17 cha- pitres de Strabon et les P^riples d'Arrien : en tout 285 feuilles ou 590 pages. ( 211 ) OUVUAGES OFFEUTS A LA SOCIETE. STANCES DE JANVIER ET FE VRIER 1858. 'Hires lies ouvraijes. DunaCeuis. Al-RIQUE. Missionary Travels aud Researches in Suuth Africa ; including a Sketch of sixteen years' residence in the interior of Africa, and a Journej from the cape of Good Hope to Loaiida on the west coast; thence across the continent, down the river Zambesi, to the eastern Ocean. By David Livingstone. London, 1857, 1 vol. in-8°. M. D. Livingstone. Die Vegetation und der Canal auf dem Isthmus von Suez. Eice Skizze von Theodor Kotschy. Wieu, 1858, br. in-i". M. T. Kotscuv. Voyages au Soudan oriental, dans I'Afrique seplentrionale et dans I'Asie Mineure, etc., par P. Tr^niaux, laur^at de I'lnslitut. Atlas, 25», 26% 27' et 28^ livraisons. M. Tbemaux. OUVRAGES GENERAUX, MELANGES. Geographic du moyen age, accompaguee d'atlas et de cartes dans chaque volume. Epilogue. Bruxelles, 1838, 1 vol. in-8° M. Joachim Lelewel. Almauaque uautico para 1859, calculado de orden de S. M. en el ob- servatorio de marina de la ciudad de San-Fernando. Cadix, 1857, 1 vol. in. 8°. L'Observatoire de San-Fernando. CARTES. i^arte du Danemark, de la Su6de et de la Norv^ge, u" 26 de I'atlas degeographie uuiverselle, par H. Dufour, ct public par M.\l. Paulin el Lc Chevalier, avec une feuille de tcxtc. MM. Paulin et Le Chevalier. luuere Kaiserl. Kouigl.Haupl und Residenz-StadtWicn, l?58.Verfasst im KK. Minislerium des Inneru. 4 fcuilles. — hinere Kais. Kon. Haupt-uud Rcsideuz-Sladl Wicii mil der Inondalionsliiiic voni Jalire 1830 den Niveaulinicn uud Nivcaukotcn, 1858. i, I'euillcs } 1 212 ) Tilres des ouvrages. Donaleurs. — Profile von iloii Inncren Siadt nach deu Vorsliidton Wieus, i fcuilles. — Uebprsichts-Plan sUminlliclicr Souterrains iu den Umrassungsmauern Wiens, 9 feuillrs. Soc. guogr. de Vienne. MEMOIRES DES ACADEMIES ET SOClfilES SAVANTES, RECUEll.S PERIODIQUES. Journal of the Franklin lustilule, f^vricr. — Handbuch der Gcogra- pliie und Stalistili; far die gebildeten Stande, 7' nuinero. Amerlka von prof. D' Wappaiis. — Mitthcilungcn iiber wichtige neue Erforscbungen auf dem Gesamintgebiete der Gcographie, von D' A. Petermanu. Janvier. — Annaies du commerce ext^rieur, d(^cerabre 1857 et Janvier 1858. — Noiuelles annaies des voyages, fevrier. — Revue colonialo, mars. — Revne de i'Oricnt, fdvrier. — liulle- tin dela Soci6l6 gf^ologique de France, fevrier. — Annuaire de la Sociele mdtdorologique de France, fevrier. — Bulletin de la Socield zoologique d"acclimatation, Janvier et fdvrier. — Nouveau journal des connaissances utiles, mars. — Journal des missions dvangdli- qucs, fevrier. — L'Ingdnieur, revue scientiOque et critique des travaux publics et de I'industrie, mars. — Mdmoires de la Socidld d'agricullure, des sciences, arts et belles-lettres du ddparlcment do I'Anbe, 3' et 4° trimestres, 1857. — L'Esperance, journal grec, n" 78 et 79. BULLETIN DE LA SOGIETE DE GEOGRAPHIE. AVRIL 1858. ISeiiioircsi, elc. EX AMEN DE QUELQLIES POINTS DE LIIISTOIRE GfiOGRAPHlQUE DU BRfiSIL. PaK M. F. a. DE VaIINUAGEN, MEMBBE DE LA SOCIETE. {Suite.) VII. I.i^nc de demarcation, 56. _ Nous savons comment rEspagiie, ayantadopte les plans de Colomb, fill recompensee par le tlon (jue leciel liii lit d'uii noLiveau monde , qu'elle crut avec raisou hu apparlenir de droit. On reconmience lieureu- senient a regarder comme serieuse la sanction de ce droit dcinand6e par les rois catholiqnes au Pere conmnni des lideles. On se rappelle que, au xy'= si6cle, toutes les nations europeennes 6taient encore catholiqnes romaines et que le plus souvent elles avaient recours au pape comme arbitre dans leurs differends. XV. AVRIL, 1. 15 ( 21/1 ) 57. - Nous savons 6galenient que, j)ar espiit d'6quite et i)our assurer la paix dans les uouveaux doniaines d'outrc-nier, les irteiues rois catholiques, par la ratifi- cation donn6e autrait6deTordesillas, en 1404, d6cla- r^rent solennellement que I'Espagne ne se r6serverait que les terres (ju'on trouverail a I'onest de la ligne m^ridienne passant a 370 lieues an dela de rarcliipel du cap Vert, et qu'elle respecterait coninie appartenant au Portugal toutes les terres d6couvertes ou a d^couvrir h Test de cette ligne m^ridienne. Voila an juste le droit 6tabli, en 1494, entre I'Espagne et le Portugal. 58. — Mais quelle 6tait la valeur de ces 370 lieues? — II est bieu clair qu'il ne s'agissait que de prendre 370 fois la valeur de la lieue commune en usage dans la P6ninsule en 1494, valeur dontnous nous occupcrons plus tard. 59. — Mais passant dii droit a son application, choses qu'il ne faut pas confondre, comment tracer sur les eaux et meme sur la terrc accident^e cette ligne droite ou plutot cette m6ridienne? Comment savoir par oil cette ligne irait passer sur le globe terrestre? 60. — Ce fut dans lesdifTicult^s de I'application du principe 6tabli par le droit que les discussions prirent naissance. On indiquait plusieurs moyens, et celui de r^duire les lieues en degres de longitude fut toujours le plus suivi, comme le plus simple de tons. 61. — Quant a moi, desirant savoir tout d'abortl a qui avaient du apparlenir les Moluques, et connaitre en meme temps la superficie de chacune des premieres donations de terres au Br6sil, j'ai cru essentiel de f.omuiencer par cherclier sur quels parages de la terre ( 215 ) cette ligne m^ridienne allait passer. J'ai consults les deux g^ographes dc I'^poque, Eiiciso (1) et Falleiro (2) , I'un de 1519, Taiitre de 1535, I'un Castillan, Tauti-e Portugais ; et j'ai troiiv6 que tous deux donnaient h chaque degT6 16 | lieues. Et j'ai cru trouver une con- firmation pour la preference de ces lieues dans le fait qu'elles r6pondent justement a la valeur de celles de 3000 brasses ^le craveim, introduites au Br6sil du temps de la colonisation primitive, et encore en usage pour les mesures agraires dans les grandes 6tendues : et j'avoue que j'ai 6t6 heureux de reconnaitre que ce r6sultat donn6 au calcul dans I'hypothfese des lieues de 16 I au degr6, ne s'^loignait pasde celui d'Enciso, si on le cherche dans son livre et non dans la citation incomplete de M. d'Avezac. 62. — Le savant critique assure qu'Enciso place son m6ridien entre le Turyuacu et le Gurupy ; et cependant il est incontestable que le g^ographe espagnol le fait passer par I'ile de Marajo, dans 1' embouchure de I'Amazone ; et 1' honorable rapporteur s'en serait con-' (1) On lit dans Enciso uue fois (fol. 7) 16 ^ et ^ (ou 16 \), et une autre fois (fol. 3) 16 \, ^viderament par faute lypographique ; car, eu parlant du voyage de Magaihaes, Enciso dit que 1700 lieues faisaient 102degr6s,et queTOO enfaisaient 42 : celadonue clairemcnt nos 16 1. (2) « ... Se ha de tener que uu grado por quaiquiera meridiauo o » circulo mayor tiene 16 leguas y dos tercios de legua... epor paralelo )i menor no seguarda esta proporcion. » (Del tratado de la espheray del arte del marear; con el regimiento de las alturas : con algunas reglas nucvamente escrilas muy necesarias. MDXXXV. Su auctor Francisco Falero, natural del reino de Portugal.) Voy. le chap. VII : « De la conveuiencia de los grados y leguas por los rumbos conforme a 16 leguas y dos tercios cada grado por meridiaao. » ( 216 ) vaiiicu s'il n'avait pas iuterrompii la citation (1) juste- meat au point ou Enciso s'e.xpliquait encore mieux par ces mots : « V. A. doit saMilr ([ii<' dc cette liniite pres de la iiicr Z^«//C6' commence la repartition selon la capi- tulation (2). » — M. d' Vvezac a prisleAlarafiond' Enciso pour le Maragnan actuel, tandis que Enciso hii-menie n'api)liquait le noin de Maranoii qii'a la riviere actuelle du Para ; car il nous dit que c'etait une riviC;re situee a 25 lieues a Test de la mer Douce, c'est-a-dire de TAmazone (3), Nous devons faire observer que le me- ridieu d'Enciso passerait encore plus a I'ouest si le g6ographe n'avait pris ponrpointdedepartriledeFogo. Mil. 63. — En ])oursuivant sa taciie de deuiolir les pierres angulaires de I'edifice de mon histoire, le savant criticpie ne ni'accorde rien a propos de ma ligne de demarcation. 11 dit que mes calcals de siiperfivie des capitaiueries, Ibndes sur la i)osition de cette ligne, cni le dnabU- de- fant de tiuuKi'ier d'e.rnc/idide el de n\ivoir januiis en d'application possible. Et il ajoute (ju'ici encore je me suis Inisse iiiduire par les ancieiuies traditions portugaisen a resoudre le probleine dans n/t sens beaucoiip I rap large. (Ml. — Heureusement tout de suite mon s6v6re con- (1) Bulleluu\o\. XIV, p. 187. (2) « ... llatlc suher \'. A. que desdc I'slc limile q jsla ccrca de »> la mar Dulcc a do comi«V,a la parliei" segu lu tapituiacin, clc. n (3) " Desdc el labo do Sauclo-Agusliii fasta ol rio Marano ay »> 800 Ipguas ... desd"' Cbtc rio Mara"" fasta el rio que dizeu la vtat » Duke ay 25 Icguas, clc. )■ (Enciso, Sumade Ceografia.) ( 217 ) tradicteur veut aussi batir, oi il me doniic roccasion de connaitre la profondeur des fondements de sa construc- tion. M. d'Avezac fait passer sa ligne de demarcation tr6s al'esfde la mienne; et apres m' avoir rendu dans son texte la justice de regarder celle-ci comme un r6sultat du calcul , il parait s'en etre repenti bientot, car snr cette carte oii, a I'exemplede Ferrer (1) et d'Olmedilla, il a rassemblepliisieurs lignes de demarcation, il n'ac- corde plus au resultatdu calcul ])^v les lieues de 16 1 au degr6 que le titre de : Supposition dc T'^nnihagen, re- servant pour sa ligne seulement celui de ; Determina- tion resullant du calcul exact. 65. — Eh bien ! messieurs, si nous contemplons r^chafaudage de 1' edifice de ce calc/il cinct, nous nous convaincrons que dans son apparoil si eblouissant d' erudition, il n'est pas acconipagne de la solidit6 n6cessaire. 66. — Mais avant d'exarniner la base sur laquelle le savant architecte a voulu batir I'^difice de son calcid exact, destine a s'elever sur les mines de ce qui a 6t6 appele supposition de Faruhageu, arretous nos regards sur I'anachronisme flagrant de la croyance que les lieues du traite de Tordesillas etaientdel7| audegr6. Or, des autorit(^s qui ne peuvent etre suspectes au savant critique 6tablissent tout le contraire. 67. — Martyr d'./Vnghiera, en rendant compte de la navigation de Magalhaes et de ses compagnons, dit clairement qu'ils allaient contre I'opinion g^nt^rale quand ils pr^tendaient que le degre contenait (1) Voy. Nav., Coll., II, 98. ( 218 ) J 7 lieues ^ (1). Ainsi il ost bien clair que c'6tait alors eu Espagne iine innovation introduite par Magalhaea et ses compagiions, emigi'6s du Portugal. Or c'est justement ce qui nous est conllrm^ par un rapport des astronomes de Badajoz du 31 mai 1524, oh nous lisons ceslignes : (cEt les memes Portugais... depuis quelquo temps graduent leurs cartes... en donnant ci chaque degr6 dix-sept lieues et demie (2) . » 68. — Done en Espagne I'usage de compter dans chaque degre 17 lieues \ 6tait en 1524 une inno- vation ffue Ton blamait, et qui par consequent n'y 6tait pas encore en pratique en lZi9Zi. Et si nous devons en croire Pimentel, cet usage n'aurait 6t6 introduit qu'apres que la frequence des rapports du Portugal avec les autres nations d'Europe, k cause du commerce de I'lnde, eutfait naitreTidee d'une division moyenne entre celle dont se servaient les Hollandais (t)«Ipsi vero contra omnia opinionem aiuntgradumcontinere Icucas seplemdecim cum dimidia. » (Dec. V, cap. VII.) (2) '< Y los dichos Portugueses... de cierto tiempo a csla parte ban » graduado sus carta,* . . daudo ITleguasy media por grade. » (Nav., Co//., IV, 352.) L'iiitroduclioii s'elait dt\j5 r^alisee dans cette m6me ann^e, etie traits deSaragossc la sauctidnna. Falleyro, eu 1535, tout en admeltant la lieue de 1G ^ au degr6, reconnaissait que I'on com- menfait d(?ji li la fairc dp 17 otde 17 ^; ce qui prouve tr6s clairement contre les opinions dp M. dWvczac, quand il pretend que la lieue ne changeait pas. Medina (liv. Ill, cap. 15), en 1545, cmployait df'jj'l exclu- sivement les lieues de 17 \ au degrdj^ mais Nonius (Pedro Nunez) en Portugal, en I'ann^e 1566, disait que quelques-uns continuaient A adniPltrp la lieue de 10 ' au degrc' : « Et quoniam inter llispaiios » sunt qui leucas 17 cum'dimidio uul gradui maximi circuli iribuaut ; a alii vero 16 cum duobus tertiis. » ( 219 ) et les Allemancls, de 15 lieues an degr6, et celle de 20 au degr6 qu'employaient alors les Fran^ais et les Anglais. 69. — Je siiis le premier a declarer que ranacluo- nisme sur I'emploi des lieues de 17 | au degr6 doit etre bien excusable chez mon savant critique; puisqu'il s'est tromp6 en bonne compagnie, avec plusieurs ecri- vains renommes, quoique moins bien inform6s de ce detail, Ces 6crivains sont: Gomara, Galvao, Gabriel Soares, UUoa et Navarrete lui-uieme (IV, 55, et V, 6). 70. — Avant cette introduction, aussi arbitraire que le fut plus tard 1' adoption en Portugal de la lieue de 18 au degr6, proposee par Pimentel et encore em- ployee auiourd'hui, on ne faisait usage, dans ce royaume et dans celui de Castillo, que de la lieue de 16 | au degr6, quoique les astronomes en admissent en th6o- rie une autre telle qu'il en faudrait 15 i pour con- stituer un degr6, mais que dans la pratique les marins qui s'en servaient, peut-etre a I'imitationdes Italiens, faisaient un peu plus grande, donnant a chaque degr6 la valeur de 15 lieues tout juste. C'est ce que nous declare formellement ce texte de Martyr d'Angliiera : (( Si nous faisons le calcul des lieues a la manifere des luarins espagnols, chaque degr6 con tient 15 lieues (1) . » Et ce texte est confirm6 par un passage du r6cit de Ves- puce sur son premier voyage commente par Navarrete, qui nous dit cpie les lieues dont parle le navigateur Ho- (1) « Si computationem Icuearum sumpserimus nautarum Hispa- r> nomm more, quindecim coiUinet quisque gradus leucas. » (Dec. V, cap, 7.) ( 220 ) rentin sont des lieues de 15 au dcgie « alors en usage (1497) (1). » IX. 71. — II est done evident qii'appuyt^sur cos aiitori- t6s, j'aurais pn r^soudre dans un sons bien pins large I'impoi-tant piol)16me de la ligncdo dd'marcalion, sans encourir avoc justice le reproche qui lu'a ote fall |)ar mon savant contradictonr, d' avoir r6solu cc probleme dans nn sens hcancoup trap lavi^e. Car il est Evident fpie si j'avais admis pour base que chaqne degr6 6tail do quinze lieues, j'aurais pnrto lo nu'ridien beaucoup Plus il I'ouest, au dola du cap Nord, ot a poii pi'('!S la ou I'a mis le cosmograplie Diogo Ribeiro (2). , 72. — Je dis plus. Si des considerations quelcon- ques, 6trang6res a la justice et a requite, agissaient assez tristenient dans raon esprit pour me fairc sacri- fier la premiere des qualites de tout historien, cello de ne fl6chir devant aucime consideration, rion n(3 m'6tait plus facile que de trouver une ligne tout a fait favorable au Bresil dans cet/e (jiirslion //'{■k/iui/iU'' quo, dans I'ardeur do Fabordor sous toutes ses faces, M. d'Avezac a essay6 de iuiner memo par les bases de la lignc do demarcation de Tordesillas. Je n'aurais eu qu'adonnor la preference a lalioue de lb ^ au degr6 que M. d'Avezac, d' accord avec Ferdinand (lolomb, croit fetre celle dont se servait le lit-ros genois ; ce f[ui du (I) '( Las Icgnas de quo liabla (Vcspucc) erao dc 15 al grado que » sc iisnban onlonccs. " [Coll., Ill, 199.) (?) Voy. Ic § 79. ( 221 ) reste est aussi confonne (1) a ane ties notes 6ci-ites de sa propre main dans rexeinplairej(2) de X Imago nuuidi de Pierre d'Ailly, qui se trouve a Seville, note dans laquelle Colomb dit qiie, par ses propres o])serva- tions (3), d' accord avec celles dii Magister J^sephus, fisicus el astrologus, et d'autres, le cercle de la terre avait 20, 400 milles, ce qui rt^pond a 5,100 lieiies, et donne bien a cliaque degr6 llx lienes i. Or, en em- ployant ce compte des milles arabes, la ligne de demar- cation irait a I'Oyapoc. 73. — Et rien de plus facile que de justifier encore la preference de i'emploi des milles arabes pour la determination dece meridien de demarcation. D'abord tout le monde connait I'influence que les Arabes avaient exercee en Espagne sur tout ce qui regardait la geographic et la navigation. Cette inlluence a 6t6 meme trt!s judicieusement mise en relief par le savant Humboldt (/i). On sait que le roi \lonzo le Sage a beaucoup protege les astronomes arabes et hebreux , et que les astrolabes qui nous restent, fabriqu^s en Espagne depuis le xr jusqu'au xiv^ siecle (5), portent des inscriptions arabes. Or si Ton employait quelque- fois les lieues arabes, si C-olomb s'en servait aussi, ce (1) Voyez ccpendant ce qircii dil Humboldt, II, 326. (2) Get exeinplaire est de la ni6me edition de ful. qu'on croit de J. de Westplialie, de Louvain, en 1 i83. (3) Voy. ce passage dans le Bulletin de jauvier el fiivrier de cette annee, planche joinle h la page 71. {i) Ex. crit., IV, 314. (5j Voy. unc notice sur quelqucs-uns de ces astrolabes dans la note 43, p. iiCt du premier volume de noire Hist, gen, du Dresil. ( 222 ) meme Coloml) cfui avail 6t6 conseiller des rois catho- liques pour robtenlion de la bulle des cent lienes et pour la nouvelle cession faitc a Tordesillas jusqu'k un m^ridion fjui laissait hien a convert les Antilles, on pourrait avoir soutenu avcc apparence de v6rit6 que ces lieues arabes devaient etre celles qui sent sous- entendues dans la redaction du trait6 de Tordesillas, X. 74. — A present que je crois avoir assez prouv6 qu'en admettant de pr6f6rence la lieuo^le 16 |au degr6, je n'ai fait qu' adopter, ])armi les trois seuls calculs acceptables qui donnaient la solution du probl6me, justement celui dont les r6sultats 6taient les inoins larges, je vais ui'occuper de la ni6tliode directe pro- pos6e par mon savant critique comme pr6f6rable dans r^tat actuel de la science, 75. •— La lieue en 1494, dit tr^s bien M. d'Avezac, 6tait de quatre milles ; ce qui veut dire quelle 6tait de 4000 pas, ou 20,000 pieds, ou encore, si on I'airae mieux, de 32 stades, puisque Isidore de Seville (J) (1) « Stadium octava pars milliarii est, constans passibus 123, « (Isidonis liispal, Originum sive elymologiarum lib. X, cap. IC.) Le stadc nYtail pas unc mesurc invariable. C'est ce que nous assure M. Jomard {Mdm.sur le syslememelrifjuc desancicns ligyplietis, p. 104) dans ces mots : « Parnii les (^rrivains, soil anciens, soil mo- dernes, les uns ont prdtcndu (piil ii y avail eu qu'uuc seule espiee destade; cette idee suppose des erreurs grossieres el presque in- croyables, .. On ne peut plus ri'voquer en doulc niaintcnanl que les Grecs, ou vojageurs ou gdographes, se sonl servis dc cinq ou six esp6ccs de stades employees dans les diffdrentes rdgions de rancieu moude, » ( 223 ) assigne nettement a chaque stade 125 pas. Jusque-la je ne me trouve que tr6s d'accord avec le savant cri- tique. Je suis cependant bien loin d'avoir cet avan- tage .'i propos des v6ritables valeurs du mille et du pied dans la ineme ann6e 149Zi. Je ne puis pas ad- mettre que ces valeurs fussent celles dont les anciens Remains faisaient usage plusieurs siteles aupara- vant. 76. — ■ D'abord, meme en admettant, centre toutes les notions que nous poss6dons par les documents his- toi'iques, cette permanence effective de I'^talon remain pour les mesures d'6tendue dans les deux royaumes p6ninsulaires, apr^s la domination des Arabes et des barbares du Nord, il t'allait commencer par connaitre an juste quel avait 6t6 le pied remain dans les anciennes colonies des pays ib^riens et lusitaniens. Dans les Gaules, et meme dans les colonies de I'ltalie, la valeur du pied remain a du n' avoir pas 6t6 assez uniforme : c'est ce que nous apprenons, non-seule- ment par ces moyens approximatifs et insuffisants de la mesure de plusieurs distances entre les bornes mil- liaires, mais surtout par plusieurs 6talons qui nous restent du pied romain (1). Ainsi nous n'h^sitons pas k assurer que, dans I'^tat actuel de la science, on ne pourrait regarder comme calcul exact celui qui serai t (1) Oa voit au Louvre iin ^talon de O^'ageS; et Ton en a trouvd 5 Maulevrier un autre, decrit par M. Jomard, qui n'avait que 0"',292ri. Nous Savons aussi que Letronue Consider, gen. sur les valeurs des monnaies, etc.) a cru le pied romain de 0°',295 ; que Gosselin {Mem. del'lnsl.. Inscriptions, VI, 44) lui assigna 0"", 296296; et que les me- sures des millcs prises sur les marais Pontius lui donneraient a peiuo ( 22Zi ) fail sur la supposition gratuitc (fiio le pied romain 6tait admis en Espagne en 1/|9/|. Et, nieme dans ce cas, 11 serait de toute inipossibilite d'admettre conime veritable valour de cette niesuie la moyenne trouv^e pour le pied romain en France et en Italie. Du reste, a propos du ]Med romain, rappelons-nous ce que nous (lit notre respectable confrere, I'illustre M. Joniard : (I Aucuu sujet n'a dtd plus controvers6 que la valeur du pied romain. . . Les recherches des savants remon- tent a plus de trois slides, et elles n'ont pas encore trouv6 leur terme, tant sont delicats les elements d'oii depend la solution. » 77. — Ayant prouv6 combien a et6 arbitraire rid6e de prendre le pied romain pour la mesure cpie nous devons accepter aujourd'hui pour la determination de la valeur des 370 lieues, nous ajouterons qu'a cette 6poque on n'a pu se rapporter qu'a la lieue commune par laquelle on indiquait alors les distances dans les grands chemins. En Portugal, I'ancienne lieue com- mune 6tait celle (1) en usage encore au Br6sil (2) , de 3000 brasses era e5 ) etait de 3039,65 brasses (1). Or, chaque brasse cra- veira de deux i>aias oil 80 pouces, d'apr6s I'^talon le mieiix conserv6 (2), pent etre })our la pratique (S) consideree de 2"%*2, quoique rigoureusement sa valeur fut un peu plus grande. Par consequent chaque pied geometrique portugais de 12 pouces se r6duit a 0™,33. Cela nous donne pour la lieue portugaise ancienne et actuellement en pratique au Br6sil, 2Zi6Zi'",200, lesquels divises par J06/i,37, selon la m^thode de notre cri- tique, nous donnent plus de 23 \ et ce r6sultat serait encore i)lus favorable, si Ton n'avait pas n6glig6 cette fraction dans revaluation de brasses elfectivement plus grande que 2'°, 2, et si nous avions pr6f6r6 la valeur de cette lieue commune d'Espagne, de 39,65, brasses de plus. Tel est I'accord des sciences mathematiques, que les voles nouvelles ne peuvent servir qu'a donner de nouvelles preiives en faveur d'un r^sultat, quand il avait 6te d6duit de principes l)ien exacts. La solidite du calcul par les lieues de 16 1, etant ainsi complete ment justifi6e, qu'il me soit permis de dire que, meme en admettant les premisses arbitraires de (3) Voy. Mem. so6re pesos e )»edjdas, por Fortuuato JosdtSarreiros, (Lisbon, 1838, iu-4"), page 64. (i) L'^talou de Lisbonne declare legal par le roi D. Manuel (Ord. Manuel, liv. I'', lit. 15, §§ 24a 29;, 6tant moins bieu conserve actuel- lement, on s'est servi dc celui dc Thoniar, qui est en bon dtal de conservation. (3) I-a commission de 1815, a laquelle appartenaieut Mendo Trigoso et le malh(5maticien Valente dc Coulo (nd au Para), a trouvd que 1 10 metres faisaicnt presque 10 varas ou 50 brafas. ( 226 ) cette lieuecl(> 592i metres (de 18 -fapeupr^s audegr^), mon savant critique doit s'etrc troinp6 dans les opera- tions arithm6tiques, car le calcul donne un arc un peu moindre de 20° 3(5'. Tout done nous autorise h de- clarer d6chu des honneurs dp resuhat de calcul exact, celui de la ligne de demarcation marquee dans la carte qui accompagne le rapport, et h nommer cette ligne ( h I'exemple encore une fois de mon digne con- tradicteur ) du titre plus modeste et bien plus exact, de « supposition de d^Avezacn. XI. 78. — Je ue m'arreterai pas k d6montrer comment le savant critique s'est abuse sur la maniere dont on comptait les latitudes, pour j ustifier ce qu'il veut prouver a propos des longitudes, quand on sait que quelques auteurs ont api)liqu6 le degre de 17 | a la latitude, avantque dcl'admettre pour la longitude (1). 79. — Je m'arreterai encore moins ici, dans mon texte, k relever une autre inexactitude echapp6e k M. d'Avezac, quand il pense qu'en 152/1 on I'ut d' accord d'admettre la reduction des 370 lieues a 20° 13' (2) ; (1) Outre Tautorit^ du m^me Euciso et des coiumissaircs astro- nomes, nous avuiis cello d'Ovicdo (i>e la natural hysloria, etc., 1526, c. 10, f° 12 v"), qui distingue les « gradosde poloa polo; » etd"Andr(5 Pires(Bibi. imp. de Paris, ms. 7108, 3, 3), quaud il dit: « Sabe que M ograo de N. S. he de 17 ^ (fol. 21)... na espera de cirqulo mayor » que partem onorte hoc sul... venograo k; leguas he ' (fol. 32V"). « (2) D'abord iescommissai res portugaisnecouviurciitderien.Et pour cequi regarde les Castillans, en employant les lieues de 17 i qui les favorisaient davautage.ils admireul que c'^tait 22* et presque 9 milles. { 227 ) etquand il^assigne dans sa carte une fausse position k la ligne qui r6snlte du calcul convenu en lOSl. Cette ligne, pour etre k sa veritable place, devrait setrouve entre celle que le faraeux Magalhaesa calcul6e, et celle qui r^sulte de 1' admission des lieues de 16 | au degr6. Ainsi dans la carte de M. d'Avezac sont niarqu6es d'une mani^re indue, non-seulement cette ligne con- venue en 1081, mais encore celle du cosmographe Diogo Ribeiro, qui dans 1' original est beaucoup plus k I'ouest. Et nous y aurions eu une troisi6nie ligne mal plac6e, si M. d'Avezac ne s'^tait pas abstenu d'y faire ligurer celle d'Enciso, d'apr^s son interpretation. 80. — II m'est impossible de ne pas ajouter quel- ques mots : 1° surun passage de Gabriel Soares trans- critpar M. d'Avezac ; 2° sur la place ou Ton a 6crit le nom cap Nord, dans le premier tirage de ma carte du Br6sil ; 3' sur la mani^re dont j'ai toujours envisage la question de I'Oyapoc en g6n6ral. Ce ne fut qu'en 1681 que les cosmographes des deux c6t^s s'accor- d^rent sur une m^me mesure, qui fut celle de 22* 13', k compter de rile Saint-Nicolas. Le dernier calcul fut eusuiie porti^ par Ulloa ti 22° li', reduction admise par Humboldt (IV, 442) probableaieut sur la foi de I'academicieu espagnol, qui malheurcuseraent ecrivait sur cette question en 1749,quand on s'occupait a Madrid desuegociatious du traits sur les limites du Brc^sil, traits coriclu eu Janvier 1750. II avait par coiis(?quent pour but principal de scrvir exclusivement la cause de son pays. Nous en dirons autant des deux lignes dessin6es dans la niaguifliiue carte d'Olmedilla, d'une desquelles s'approche beaucoup celle tpii r('sulte ties suppositious de M. d'Avezac. I. a carte de Cauo y Olmedilla fut publi^c par le gonveriiement espagnol cu 1773, quand on nc^gociait aussi sur les limites, avec le Portugal, quoique les n^gociatious a'aieut Gni qu'avec le traits de 1777. ( 228 ) 81. — Pour ce qui regards Ic ])iviiiier point, on edi- leuretcoiiuiientateurdc ce jjiecieux ouvrage de Gabriel Scares, quejemeflalte d'avoir beaucoup restaur^sous tous les rapports, je regretle que uioii savant critique ait pret'6r6 I'^dition de •1825, executee snr mi manu- scrit tout aussi imparfait que colui de la l)ll)rn)lhe([uc imptriale de Paris, pour le passage inijjortaut qu'il a transcrit a i)ropos de la riviere deViucentPinzon, fausse- nient placee sur la ligne 6qiiino.\iale par la m6prise d'un copiste qui a r6pet6 qiiel([ucs juots. Sur ce point je me bornerai a prier M. d'.Vvezac de vouloir bicn me faire I'honneur de jeter les yeux sur le texle de I'edition que j'ai publi6e 6tant premier secretaire de I'lnstitut de Rio, siu'tout avec les explications que j'ai cru devoir y ajouter, a la fm dela note 10% p. A/O de mon second vo lunie. 82. — A propos de I'endroit oii Ton avait d'abord grav6 sur la planche d'acierle nom du cap Nord sur la carte du Bresil que j'ai dessinee, c'est-a-dirc la ou I'etablirent le Hollandais Laet et le Francais Corneille, et oil ce nom pourrait bien mieux se justifier ffu'a la pointe Magoary tie File Marajo, ou M. d'Avezac croit poii\ oil" admettre ce nicnsongc gcogntphiqite ( pour me servir de sa ])ropre expression), j'espere que mon cri- tique me rcndra la justice de se rappeler qu'avant d'imprimer sou rapport, ila\ait reni directement, dela main (I'liii de nos collegues, Ycrfa/n surce detail, qui a paru avec le second noIiiiih'. luais qui dans I'exem- plaire de la Soci6te de geographic est colle a la fm du premier. 83. — Quant a la question de I'Oyapoc, je ne m'en ( 229 ) occuperai pas a present ici. Je n'aurai qu'a gagner en la laissant intacte a notre savant confrere, M. Da Sih'a, qui ni'a devanc6, en voiis annoncant nn tra^ ail sur ce sujet important de I'liistoire g6ograpliique, Mais je me trouve flatt6 qu'mi simple accident, qui comprend a peine deux lignes de raon livre, ait sufii a remplir la plus grande partie des 268 pages du rapport de M. d'Avezac, le i)ortant meme a produire des testes de traites et a etudier les protocoles des negociations entaniees apres la pidjlication de mon livre ; et je crois devoir declarer que, malgre ma quality de diplo- mate bresilien, j'ai 6t6 to uj ours, comme historien, si eloign6 de penser aux questions d'actualite, que, con- vaincu que I'as^ociation de deux noms se fit avec toute raison, puisque je ne pouvais pas m'occuper d'en donner les preuves, j'ai pr6f6r6 dc passer la- dessus comme j' avals fait a propos du cap Saint- Augustin; et je me suis boni^ a indiquer par une. simple phrase que je savais tres bien que c'etait une ({uestion a discuter et a 6claircir. S/i. — Je dois ajouter que dans ccttc question j"ai eu de tout temps I'idee que le droit du Bresil (5tait clair par la simple lettre des traites, et qu'il sufllrait d'en laisser la decision a I'arbitrage d'une troisi6ine puissance ; puisque dans les questions du droit public, comme dans celles de droit prive et de droit cano- nique, le vrai droit depend surtout de la lettre des traites et de celle des lois et des canons de I'Kglise. Et les trait^'s, et les lois, et les canons de I'Eglise se sont trouv6s c{uelquefois en d6saccor(] avec la verity historique, decouverte apres leur i)romulgation : et XV. AVRIL. 2. 16 ( 230 ) mal^r6 cela ils sont restes valides. Ainsi j't'tais con- vaiiicu que clans cette nouvelle question, cfuand nienie la v6rit6 historique eut pu paraitre tloiiteuse, el elle ne retail pas pour inoi, le droit 6crit 6tait manifeste- ment en faveur dii Br6sil. 85. — Or ayant ces convictions, les ayant toujours manifestoes, les ayant meme enoncOes publiqueiiient par la presse (I) , il est bien clair que je ne pouvais pas croire n6cessaire, quand mOrae je n'aurais pas 6t6 ini honime de conscience, de me servir de cette occa- sion, poui- favoriser la cause du BrOsil, en disant une fois de plus la grande v0rit6, que le nom de Vin- cent Pinzon, avec ou sans raison, a ^te quelque temps associe a TOyapoc (2). (1) Voy., entre autres publications, noire Memorial org anico (2) Le nom de riviere de Vincent Pinzon est donne a lOyapoc actuel, non-seulement dans un grand nombre de cartes espagnoles et porlu- gaises inedites du xvi' siecle, amis aussi dans les hollandalses inipii- ini!es d'Ortelius ct do Van Langren. CcUe deruierc, on le sail, a ac- compagne I'ouvragc bicn ronnu de I.ioschot. Le mSmc nom fut encore solennellcment consacr6 pour la ni^me riviere, en 1637, dans la do- nation royale a Brnto Marie! Parcntc, et de uouveau dans la confir- mation au fils de cclui-ci, appel6 du nifinie nom, le 9 juillel 1045. Ces documents auihenliciues se irouvent dans les archives rojales h Lisbonne. Ladite riviere n'a commencd ti ^tre connue en Europe sous le nom indigene de Wiapoc ou d'Oyapoc qu'apres la fin du x\i' siicle, par les cartes anslaiscsct hollandaises. Sans doute, pour plus dcclar(6, on a pens^ enfin A associer les diMix nnms dans le lrait(' provisionnel de 1700 (voy. QOlTclIisl. du Bresil, vol.11, p. 4C8). Le fait d'associalions seniblablesdes noms europeens aux noms indiens dtait frequent a pro- posd'autres rivieres du Ikcsil. Par exeniple : R, Grande, lu Polengy; R. Parahiba, ou de S.-Domingos; R. de S.-Matheus, ou Cricare, etc. ( 231 ) XII. Explorations primitives. 86. — Au sujet des expeditions de 1501 et 1503, quoique j'aie aussi, comme M. d'Avezac, et depuis longtemps, des motifs pour imaginer que Gon^alo Coelho a pu avoir 6t6 le chef de toutes les deux, ay ant avec lui Vespuce, et j'ajoute meme Solis, j'h6sitais et j'h^site encore surce point. Cependant, ne croyant pas ce detail d'une grande importance dans une histoire g6n6rale, j'ai mieux aim6parler dans mon texte de ces deux expeditions, sans m'occuper de leur chef, me contentant de dire que Vespuce avait fait partie de I'lme et de 1' autre. 87. — M. d'Avezac, au lieu de regarder ce silence comme un scrupule de ma conscience d'historien et comme une preuve que je ne me suis pas plac6 an point de vue exclusif et jaloux de I'ancienne m^tropole, attendu qu'en supprimant le nom du chef portugais, je laissais au premier plan le pilote florentin, me reproche mon silence ; et tout de suite ind6cis lui- mSme, et tent6 d'admettre D. Nuno Manuel comme chef d'une de ces expeditions, d'aprfes une indication qu'il m'a fait I'honncur de m'emprunter, il me re- proche mon indecision. Voici ses propres paroles : f ]^ar respect sans doiite pour les conjectures du P. Ca- zal... qui attribue a Goncalve Coelho le conimande- ment de r expedition de 1501, et d Christophe Jaques celui deV expedition de 1503, M. de Varnhagen garde ( 232 ) sitr ce noi/it, duns son teatc, tin silence (tbsolii, cl dans line note (p. /I'iA, note 8 ) nne complete indecision. » 88. — Je n'ose rieii cUrc-de plus contre 1' accusation sur inon silence el niou indecision, quand je metrouve devant une accusation encore plus grave et pliisimm6- rit6e. 89. — Oui, messieurs, il est iiijuste dc dire que, ii propns de Christovao Jacques, je nicsuis laisseguider, en 185/i, par les conjectures de Cazal, qui 6crivait en j 8 1 7. \pres avoii' tant travaille dans les archives, aprte avoir ecrit ces Reflexions critiques {Be/lexOes crin'cas), accueillies dans les M6inoires de 1' Academic des sciences de Lisbonne, oi'i j"ai I'ait coniiaitre Gabriel Soares, ap- prenant meuie a le designer par son veritable nom (1), etle restaurant, sons tons losi'ap])orls.(l;Mi.s l;i noiivelle edition que j'en ai doniiee, etant premier secretaire de rinstitut'de Rio; apres avoir publie Pero Lopes avec des notes dans lesquelles j'ai fixe an juste les dates de la d6couverte des principaux jiarages de la cote du Bresil ; et apres avoir pidjlie un travail sur les [)re- niieres negociations diplomatiques relatives an Bresil [Primeinis negociaroes diplonuiticas), Oil j'ai |>r()uv6 que I'expeditiou de Cliristoviio Jacques a\ait eii lien en 152(i et non en 1503, conune le croyait Cazal, je ne pouvais [)as ui'attendre a celte humiliation litteraire... (1) Avaiil que lAcudcniic royalc des sciences dc Lisbonne cill ac- cueilli dans ses in('nio|rcs d'outre-mcr (.We»J. para a hisloria CQCOijr. das narors nllramariiuis] nics /it'/?e,cio»s critiques siir rouvrngo de Soares, publiees dans le volume \' desdils rnenioires, en \H?>'.), on croyait, par ccrlaines inductions dc Cazal, (|ue r.mlcur dc I'ouvrage, jusqu'alors auonynie, clait un certain Francisco da Vunha. ( 233 ) 90. - Qiiaiil a rexp6dition au sad dii Bresil, qui nous a 6t6 revel^e par la l)rocliiu-e allemaiide de la bibllolhtiqae de Dresde, je suis bien aise de voir que M. d'Avezac acceptemon interpretation de la rapporter a la rivit^re de la Plata ; et qu'il accepte aussi ma pro- position de la reculer de plusieurs ann6es de la date conjectur6e par I'illustre Humboldt. 91. — Je dois ]irofiter de cette occasion pour dire que je commence a siqiposer (fu'elle pent avoir ete la meme qni, d'apr^s certains renseignements (1), fut en- treprise par le Portugal en I'annee 1500, ayant pour pilotes Vasco Gallego de Carvalho et Joao de Lisboa ; et que ce .dernier marin, tr6s c6le])re en Portugal, liit celui des deux qui retourna le premier. L'annee de I'expedition, ni la date de I'impression de la brochure, ne peuvent en tout cas etre cellescfui furent assignees par Humboldt : nous en avons une nouvelle preuve dans la description de la terre de Sclioner (2) , publi6e en 1515, qni donne d6ja en latin des indications 6videm- ment extraites de cette broclun-e. (1) Voy. nos notes an Diario de Pcro Lupes, p. 8". ~ (2) Loculentissima qucedam Icrnv tolius desvriptio. Noreinberg., Joan. Stuchssen, 65 fcuillets, -i<>. — Voy. f" CI et 61 v", oi'i il traile de BasUiie regio : « C.ircuuavigaruiit ilaq. Portugalien. eaiu regioueen : u coniperierunt Irajisituin fore tonfoniu'in uostia EaropiB... E\ altero » insuper latere etia terra visa est, et penes cai)ut liiifus regiouis eirca 1) miliaria. 60. covilez modo : no si qiiis navignret orientem versus, el M transitum sive strictum Gibelterra; aut Sibilias iiavigaret : et Barba- » riam.. . iiitueret. Etc. n (234) XIII. Exploits des Fran en is an B re si I. 92. — Je crois toiijours que la d(5teniiination de la date prt^cise du voyage auquel se rapporle I'opuscule de Dresde est tr^s impoitante encore, ])aice que c'est le document ancien le plus autheiUique ou il soit fait mention des navigations primitives des marins francais au Br6sil. Les conjectures d'aprfes lesquelles on admet- tait leur presence sur nos plages d6j5, en 1503 et l50/i 6taient fondees sur le fait du combat naval oil Christo- plie Jacques prit quelques vaisseaux francais ; etcomme on croyait, meme en Portugal et au Bresil, que I'exp^- dition de Jacques avait eulieu en 1503 et 150/i, il6tait bien clair qu'on devait admettre aussi deja les vais- seaux francais au Br.6sil a une telle 6poque. Ainsi. M. d'Avezac n'est pas fond6 a se servir, comme argu- ment, de r information de 1584 que j'ai fournie a I'ln- stitut de Rio. 93. — Quant au voyage francais de 1539, dans la collection de Ramusio, oil il est question de Denys* d'Honfleur, je suissi loin delerejeter, que M. d'Avezac se sera sans doute apergu que je I'ai moi-m6me extrait dans une note de mes lieflexions critiques (p. 75) : seu- lement M. d'Avezac me permettra de m'6tonner que. scru]nileux comme il est, il n'ait pas rendu exactement dans sa traductioji le texte de Ramnsio. Dans le texts italien, le grand capitaino dieppois (Pierre Crignon, se- lon les judicieuses conjectures de M. Gu6nn et de M. d'Avezac Ini-m6me') dit formellement qu'unc partie ( 236 ) cki Br6sil avait 6t6 cl6couverte par les Portugais depiiis trente-cinq ans, et cpie 1' autre partie avait 6t6 d6cou- verte par Deays de Honileur depuis vingt ans. Ainsi Crignon, qui 6crivait en 1539, pensaitqu'une partie du Brt^sil avait 6t6 d6coiiverte en 150/i par les Portugais, et non par les Francais (1) , comme M. d' Avezac a com- pris. II ne place la premiere d6couverte des Francais qu'kl'ann6e 1519. Qlx, .i—. Je suis si loin d'abriter, a propos de la prio- rity ou de I'importance des anciennes navigations iVan- caises au Br6sil, des id6es de jalousie ou d'injastice, que Ik-dessus je puis bien m'enorgueillir de pouvoir r^pondre avec le grand nonibre de faits et de documents que j'ai fait connaitre moi-nieme, donnant plus de re- lief et d' importance aux navigations fran^aises auBr6- sil ; et je dois aj outer que quelques-uns de ces faits, en faveur des exploits de I'ancienne marine francaise, out 6t6 fournis par des documents originaux de ma propre collection, que j'aurais bien pu conserver par-deveis moi, et que je me suis faitun plaisir de publier. 95. — Et je respecte tant les aspirations des peuples a garder leurs gloires historiques, meme un peu hasar- deuses, quejene puis que louer lesDieppois quand ils pretendent avoir d6couvert I'Am^rique avant Colomb, (1) « Questa terra del Bresil fii primamente scoperta da Portoghesi » inqualcheparip, e soao circa trentacinque aimi. L'altra parte fiisco- 1- perta per VQodi Honfleur chiamatoDionisio di Honileur daventi aniii » in qua... Etc. » — Nous savons bien que M. Estanceliu s'est aussi trompc dans sa traduction ; mais M. d'Avezac cite en premier lieu les pages du texte de Uamusio lui-ini^me, qui est du resle la seule source qui puisse nous guider sur la vf^ritable ponctuation. ( 236 ) en 1/188, (le nitjino que certaines families du Br6sil pi'^tendent encore que Ic Portii.a;ais Joao Uamalho etait all6 k Saint-Paul a pen prfes a la nienie ej)nqae, egale- ment avant la decouvertc de I'Anierique par (lolouib. 9(\ — Et il est encore vrai que, Brd'silien, (jcii\ant une histoire de la civilisation du Br6sil par les Poitu- gais, c'est-a-dire paries ancetres de la niajorite des citoyens bresiliens actuels, je ne pourrais jamais me placer au point de vue francais, ni hollandais, ni an- glais, ni espagnol. Par la meme raison, je ne pourrais pas non plus me placer au point de vue negre on in- dien. Et M. d'Avezac, qui donne tant d'imporlance a un travail de M. Martins, aura remarque que sur ce point comme sur bien d'autres, je me suis trouv6 pai- ma propre inspiration tr6s d' accord avec nioii ami le savant Bavarois (p. 391) (1). En bien des cas, u /'cm- p/'re fie preoccupations on de traditions.. . de /'orgiieil national portugais (1) » , est aussi pour le Br6sil actuel r empire des pr6jug6s salutaires do sa nationalit(^, ou au moins des int6rets nationaux, comme jiar excinple dans la question de I'Oyapoc. XIV. Nationalite /tisloritpie. 97. — Mais M. d'Avezac, 6nonfant son opinion, ' (1) « 0 periodu da dcscoberta c colonisacrio priiniliva do Brazil, nao 11 podc ser compreliciidido scuSo em sen iiexocuin as fiiganlias niarili- ,• mas, roinmeiciacs, e gucirciras porlu^iuczas . .Klc. • — n 0 Porlusucz » que dcuascoiidii.-ocs c garaiitias muiacs e pliysicas para um rciiiu iii- dppeiidanle. .. sc aprcsenla cuino o mais podcruso r csseiicial mutor." (I I D'Avezac, p. 1531 (daus le volume XIV du Uullelin). ( 237 ) dit qxte je ne me suis pas « /n'ncv a/t point de vne hve- silien n. La proposition, pr6sent6e clans cette niulit6,'f pourrait etre moins bien comprise par quelques lec- teurs : cependant je suis le premier a reconnaitre que mon courtois critique n'a pas eul' intention de me dire un mot pen gracieux. Mon critique entend naturelle- ment par <( point de vue proprement br6silien » celui oil devrait se placer un ludien Tupi pur sang, et il faut que je lui laisse toute la responsabilite d'une telle appreciation. 98. — Et en convenant que, meme parmi mes coni- patriotes, il y en a qui, oul)liant que le nom de Bresil n'est pas meme delMmerique, partagent de bonne foi, sans bien s'apercevoir de leur gravity, de semblables opinions et d'autres plus extravagantes encore, je ne peux que beaucoup ' regretter, dans I'int^ret de la marche et du developpement de la civilisation de ma patrie, de cette premiere nation de I'Amerique m^ridionale, que M. d'Avezac, Europeen, soit venu leur preter tout son appui, en prechant aussi une th^orie qui, tout innocente qu'elle est en apparence, fmit par etre radicalement subversive de notre veri- table nationalite, representee dans I'ecusson des amies de 1' Empire par la ci'oix de I'ordre portugais du Christ, sous le patronage duquel la colonisation eut lieu, et par la sphere armillaire , symbole du roi Emmanuel regnant en Portugal a I'epoque de la decouvcrte. Cette nationalite est representee encore par une dynastie portugaise, etpar la religion, la lan- gue, les usages,, les mceurs, une grande partie de la legislation, et enlin par toute cette belle litterature ( 238 ) portugaise avec son Camoens, son Vieira etson Filinlo, riclies h6ritages qnele Br6sil ne saurait jamais renier. 99. — La nation br6silienne, ayant accept^ de la m6re patrie des legs si importants, en a pris aussi la responsabilit6 qu'ils imposent. En dehors de ce principe, tout est ingratitude et tout est logiquement faux. Un historien national ne pourrait 6crire qu'en historien national, a moins de se rendre absurdc. II ])eut blen no pas se trouver d' accord dans quelques d6tails ou dans certaines id(Jes avec un parti ou ['autre du pays ; niais en 6crivant avec des convictions, en lionnete liomme, il trouve, nienie dans les orages qui se Ifevent pour bouleverser son oauvre, I'occasion de mieux rairerniir, Qu'il me soit done perniis de repoussei' avec un bien excusable sentiment de dignity, et au nom de ceuxqui dans mon pays partagent mes opinions, ces nouveaux cris de guerre en faveur des exa gyrations des membres de ce nouveau parti anti-europ(Vn, (|ui connuencent par m6connaitro le merite et les services d(3 leurs propres aieux. XV. 100. — La question de la nationality liistorique, je I'ai toujours regard^e comme la plus delicate pour un historien br6silien : je I'ai longtemps m^dit^e avanlde commencer la redaction de mon histoire. Enfin je snis arriv6 k la voir bien clairement, non sans reconnaitre tout ce qu'elle contenait d'6pineux quand il fallaitdire toute la v6rit6. Le r6sultat de mes meditations sur ce point est le discours que j'ai hi a 1' Aca<16raie de riiisioiie de Madrid, et que j'ai publi6 avec mon second volume ( 239 ) sous le titre de : « Les Indiens (du Br6sil) par rapport k la nationality br^silienne. » 101. — J'ai prouv6 dans ce discours : Que les Indiens qui parcouraient le territoire actual du Br6sil k I'arriv^e des Europ^ens n'en etaient point les propri6taires (comme , par exemple , les anciens Gaulois r^taient du sol de la France), mais qu'ils en 6taient uniquement les derniers envahisseurs noinades ; Que, sans compter qu'il leur manquait la vraie reli- gion, ils 6taient dans un 6tat social pitoyable, se tuant et se mangeant les uns les autres, sans lois, sans mo- rale, et par consequent sans id6e de la punition du crime ni de la recompense des vertus ; Que ceux qui restent encore dans I'^tat sauvage, sans s'ameiiorer depuis trois si6cles et demi, nous prouvent que, par eux-memes et sans I'inflLience europ6enne, leurs compagnons n'auraient pas pu se civiliser; Que cette influence ne pouvait se faire sentir sans I'emploi de la force, car sans celle-ci on n'a pas de moyen de faire respecter la loi, meme au centre de la plus grande civilisation : les moyens doux employes pour obtenir la civilisation des Indiens, par exemple celui deleur faire des cadeaux, viennent encore d'etre proclam6s comme insufilsants aux Etats-Unis meme, dans le dernier message du president (1) ; Que plusieurs eccl6siastiques sinc6res, par exc^s de pi6t6, et quelques philosophes demolisseurs, pour s'en servir coumie d'un instrument, ont exag^r^ I'abus qu'on (1) « The present system of making them (^the Indians) valuable pre- » sents to influence them to remain at peace has proved ineffertn.il. „ (Mess, of J. Buchanan, 8 decemb. 1857.) ( no ) laisait des moyens coercitifs dont la civilisation s'est servie ; Que (les trois 6l^nients de population qui entrent aujonrd'lnii dans la composition de toutes les nations americaines, a savoir, I'ein'opeen, le n6gre et I'indien, ail Br^sil c'est surtout I'element europ6en, i)ortugais dans sa plus grrOide niajorite, qui doniine ; Et enfin que, s'il est \Tai que cet element civilisatenr est celui qui predoinine encore, I'histoire nationale, et siirlont une histoire de la civilisation du pays , ne pourrait aucunement s'empecher d'etre plus on nioins d'accord avec lui, quand nieme riiistorien national serait assez ingrat pour mi^connaitre les bienfaits des civilisateurs, et trop pen pieux i)our ne pas respecter non plus la m6nioire de ses ancetres. 102. — La question ainsi consid6r^e, c'est le plus grand eloge qu'onpuisse faire de 1' esprit patriotique que respire nion histoire, que de dire quelle est 6crite plus dans le sens des colons d'Europe que dans celui des nfegres ou des Indiens. Si ceux-ci, sortant des forfets vierges, avaient envalii les villes ou les premiers comptoirs de la civilisation ; s'ils s'6taient de nouveau empares de tout le pays ; si encore actuellement ils y dominaient, I'histoire nationale devrait bien considerer au premier plan les Indiens. De meme si les negres ix^\ ol- t6s avaient par hasardrt^ussi a s'emparer dn pouvoir, a devenir predominants dans la nation, comme k Haiti, I'histoire nationale ne pourrait aucunement s'einp6cher demettre au premier plan I'element nfegre. Cependant, a Haiti meme , I'historicn haitien ne pourra jamais renier la France, ni dans sa languo, ni dans ses codes, ni dans sa religion, ni enlin dans toute sa civilisation. ( 2M ) XVI. Ethnogvaphie indigene. 103. ■ — Tout en ayant des id^es arret^es qui m'ont porte a niettre aii premier plan dans mon liistoire ce qui est au premier plan, dans ma nation, mon critique me rend toute justice en reconnaissant que je n'ai pas m6prise 1' element africain, et beaucoup moins encore r61ement indien, auquel j'ai consacr6 exclusivement trois sections de mon ouvrage, en arrivant a la con- clusion que les Tupis se trouvaient dans le meme etat que les, sauvages de tons les pays, en y comprenant ceux de I'ancienne Asie et meme de 1' Europe d' autre- fois, se devorant les uns les autres. J'ai ajout^ que r etude de I'^tat de nos Indiens ne faisait que jeter une nouvelle lumifere surbien des usages barbaresracontes par Strabon et Herodote. lOZi. — Voue pendant longtemps a des Etudes se- rieuses sur I'ethnographie indienne, ayant meme pro- clame dans mon pays le besoin de I'enseignement des langues indigenes, me flattant d' avoir 6t6 1'initiateur de la creation, a I'lnstitut de Rio, d'une troisi6me classe qui s'occupe exclusivement d'etudes etlniographiques, je me felicite en meme temps d'avoir, par des apercus gen6ralisateurs, fait faire aui etudes qui se rattachent a I'ethnographie indico-br6silienne, despas tres grands, peut-etre meme hardis, mais qui pourront beaucoup aider Ix simpliiier ces etudes. 105. — En bien etudiant tous les grands groupes des peuplades du Bresil, je suis arrive a la conviction ^ Ai.>») .n<}\; .Mil- iiniliifU.' ( 242 ) que dans leur plus grande masse, c'^taient des Tupis, c'est-a-dire que, a de tr^ rares exceptions pr6s, comme je I'ai reniarqu6 (1), les Tupis y constituaient tine m6nie nationality ctlmique. Et qiiand, h. d6faut d'un autre mot,j'aiemploy6 celui de nationality, j'6tais fort loin de vouloir 6mettre, comme je I'ai dit bien claire- ment (5), I'id^e d'un corps social sounds au meme regime : au contraire, je savais bien qiie dans ce sens ii y avait parmi les Tupis, des centaines dc toutes petites nations, puisqu'ils se trouvaient en g6n6ral dans I'^tat primitif du gouvernement de laraille ou tribu. 106. — De m6nie, faute d'un meilletu' mot, j'ai ex- prim6 encore la m6me id(^e, en disant qu'en g(^n6ral tous ces peuples envahisseurs 6taient d'une meme race. M. d'Avezac, k cause de I'emploi du mot, se r^crie contre le fait, sous pr6texte de ce qu'en France, tout le ponple parle la m^me langue, on ne pent pas en induire que tous lesFran^aissoientdelam^merace. Acceptant la comparaison , je r^ponds : Ce qui distingue le plus les Francais des autres peuples, c'est leur langue ; et cependant, quoique la France ait 6prouv6 des invasions (1) A U page 99 nous avons dit : « Salvando poiscomo cxcepcao o » facto de algumas tribus de iiacionalidade difTerente eque no grande u terreno que nos occupa formavum, permitln-sra PX()rossno, conic pe- » quenos oasis ilhados c sobre si, em que se haviam estabclecido caia- -1 vanas refugiadas... Efcn — *De mdniei la page 120 on lit : « Tudo « quanto dissemos se applica a generalidade ; pois sabido € que havia e u ha ainda Indios que passani loda a vida em canoas... Etc. » (2) 0 Nao couslituiani, ueni haviam couslitui'lo atehi uma nngrio, » neni mesmo pcquenas na^oes ua aecepQao em que mais geralmenlc, a em direito universal , se toma hoje esla palavra. Formavam antes » inuitas cabildas... Etc. » {Hiit. gen. doBraz., vol. I, p. 132.) ( 243 ) des Roniains, des Francs, des Huns, des Maures et des Normands, on est convenu en France meme de regarder les Francais en g6n6ral comme de race gauloise ou celtique. El Ton oserait encore moins anjourd'hui s' op- poser a admettre ce principe g^n^ral seiilement par la raison que parmi les Francais, il pent s'en trouver quelques-uns d'origine li6braique, africaine, ou ni^me calmouke. C'est justement dans le sens primitif , et bien diffei'ent de celui oii je I'ai employ^, que le mot race commence a etre banni, grace k la philosophie et a notre religion, qui nous enseigne que nous venous tous de la meme souche, 107. — Mais, non content d' avoir ni6 I'unit^ en ge- neral d'une nationality ethnique, au Bresil, k I'^poque de la d^couverte, caus6e par les invasions des Tupis, grace, selon moi, aleur marine de canots de guerre et a leur connaissance d'une agriculture primitive, mon critique porte encore son opposition an point de ne pas permettre de croire que les peuples vaincus par les Tupis, les Tapuyas, fussent des gens de diff^rentes races ou nationalites, en employant le mot dans le sens que je lui ai donn6. Or, justement les debris de plu- sieurs tribus de langues tout k fait 6trang6res les unes aux autres et k celle des Tupis, qu'on a rencontr6es, sous le nom g6n6ral de Tapuyas, comme des caravanes ^parses au milieu des peuples envahisseurs, prouvent tr^s clairement que ces Tapuyas 6taient bien de diff^- rentes nations ou races ethniques, non d'une seule. 108. — Mais passant de ces faits, de la plus haute importance, aux dt^'tails, je laisserai mon savant contra- dicteur se plaire a ne pas admettre mes etymologies ( 244 ) d6fiuitives de Pctigumcs , 'rabajaics et Timbirus, Ct nieme a me faire uiueprocliedem'etreabstenu,autant qii'il m'a 6t6 possible, d'iutrodiiire daiis mon texle, a rexcinplc de ceiix qui jii'ont precede, toute cette no- menclature baibaie des sobriquets des tribus indiennes, lesquels, le plus sonvent, ne servaient pas meme a les distiuguer par une qnalite particuli^re qui les dt^ta- cliat des autres. Je me bornerai a repeter ici cequej'ai declare dans une note, c'est-a-dire queje I'avais fait a dessein ; et je vous epargnerai de uouveau I'oreille, messieurs, me gardant bien de faire une longue liste de tous ces noms qui iinissaienl par n'avoir pas de signi- fication, tantils etaient arbitraiics. 109. — M. d'Avezac me critique aussi pour ne pas avoir place dans mon texte ma note sur mes conjectures a propos de la possibility d'une navigation, })eut-etre reculee de quatre mille ans, entre I'ancicn continent et le nouveau, qui, a cause des invasions sinmltanees de la metropole et des colonies, ponirait bien s'etre ])erdue, comme s'etait perdue celle qui avait jadis existe entre la Mediterranee et les Canaries. J 10. — Et il nie reprocbe encore ({ue, a ces conjec- tm*es,ouje meflattaisd'ouvrli- ([uelques ideesnouvelles, je n'en ai pas ajout6 d' autres sur los emigrations par laRussie asiatique. Puisquele dernier fait me futconnu d6ja sur les bancs du college, oiil'onm'apprenait quele d6troit de Behring avait ete le pont au uKf^^en dufpiel les filsde No6 ont du pcui)ler le nou\ can monde, j'avone que j'ai crupouvoir bien ne pas m'en occu])er, comme je le fais de nouveau a present, ne disanl rien sur ce siijet. ( 245 ) 111. — Quant au conseil d'introduire dans le texte cette longue note sur rnes conjectures a propos des probabilites d'une navigation recul6e entre les deux continents, je ne puis que remercier beaucoup M. d'Avezac, en ajoutant que les lois de I'histoire, que j'ai tache de suivre, me disent tout au contraire qu'ii ne faut pas interrompre le fd de la narration par ur sujet qui lui est etranger, et surtout quand ce sujet est presque conjectural. XVII. Point de depart de Vhistoire du Bresil, Ml. — Mais M. d'Avezac ajoute encore, a propos de monlivre : « Ce n'est point au Br^sil que s'ouvre-son recit, c'est en Europe. » Et il explique sa pens(^e en disant qu'il aurait prefere que nion bistoire eiit com- mence par la description du pays et celle des Indiens, ses babitants, laissant ensuite a ceux-ci le temps de voir arriver les Europeens, comptant dans ce nombre, en dernier lieu, les conquerants portugais. llo.. — D'abord, que le digne r^ipporteur me j)ar- donne, mais evidemraent nion recit ne s'ouvre qu'au Bi'esil : il s'ouvre a I'arrivee de Cabral a Porto-Seguro. Le cbapitre precedent n'est que d'introduction, et il n'aurait ]")as 6t6 facile de bien le placer au milieu de la narration, sans trop en interrompre le fd. Mais, en second lieu, mon critique savait que j'avais eu nioi- meme Ja pensee de mettre au commencement de I'ou- vrage la description du pays- et celle des Indiens, et que j'avais eu mes raisons pour abandonnei- ce XV. AVRIL. 3. 17 ( 2/jO ) piojet. Voici mes propres paroles dans la note 4A : « La section septienie et les trois snivantes (ce sont justenient celles ou il est question de la description du pays et de ses anciens habitants ) pourraient bien etre placees au commencement del'ouvrage, sans nuire a son arrangement total ; mais il nous a pani qu'avec la methode que nous avons suivie, au moins dans cette (Edition, nous reussirions mieux a la lier a I'histoire de I'humanite en general, etc. (1). » liZi. — J'ajouterai encore qu'apr^s toutes mes hesitations prealables sur ce point, je me f^licite de nouveau d'avoir sui\i un terme moyen. Et quand meme mon point de d6part n'aurait pas ete I'Ame- rique, je ne serais que tvhs Qatt6 de me trouver la- dessus d' accord avec le savant Americain Bancroft, auteiU' de XlHstoire t/es Ktats-Unis, qui conunence son premier chapitre par ces mots : « L'entreprise de Colouib, etc, (I). ') XVIII. 115. — Apres avoir traite le plus rapidement qu'il m'a 6t6 possible des points principaux dont s'occupele rapport, ayant n6glig6 plusieurs details poui' nc pas (I) « A spct'io 7", hoiri onmo as Iros scguiiitcs podrriam passar ao 1) principio da obra scm prejudicar o arraujo total della, Pareccu-no$ !' por^ra que com o inelhodo que nesta edifao, pelo menos, adoptanios, » a ligamos mellior ;i histori;i da hninanidade eui geral. » Or, si moo tavaut critique a cru cetle note Ic lesuitat d'uu rej^icl, il aiirait litd plus juste s'il en avait fait mention. (1) ('The enterprise of Columbus, (he most momurahle maritime u enterprise in the history of the world, formed between fcluropa aud I) America the communication... Etc, » ( 247 ) abuser de votre indulgence, messieurs, il est temps de ra'arreter. — Avant de le faire, permettez-moi cepen- dant de dire encore quelques mots sur les observations du savant critique ^I'egard de ma description g6n6- rale du Br6sil. Selon M. d'Avezac, cette description laisse au moins deux choses k d6sirer : d'etre plus scien- tifique, et d'etre plus 6tendue, car elle est tout enti^re renferm6e dans huit pages : le savant critique s'est donne la peine de les compter. 116. — En remerciant M. d'Avezac de ses beinveil- lants conseils, et en admirant .en meme temps ses belles pages, orn6es de tout I'appareil scientifique, k propos des 6poques g^ologiques de mon pays, je me bornerai ci dire quece cliapitre de mon livre est juste- ment celui que j'ai le plus travaill^, surtout pour y r6ussir k la fois a etre bref sans devenir obscur ni insuffisant, et k etre exact sans faire parade de la moindre ostentation des termes techniques d'aucune des sciences , soit math^matiques , soit physiques, soit naturelles, que j'ai moi-meme tant 6tudi^es, et qne je cultive encore comme un des charmes de ma vie. 117.— J'avais 15,-dessus des id6es bien arret^es, qui me faisaient voir qu'on ne peut aucunement juger par son 6tendue de la bont6, ni de la justesse, ni de.la clart6 d'une description g^ographique dans I'histoire 5 et que, bien au contraire, les meilleurs tableaux des pays, dans les ouvrages historiques, sont ceux que Ton fait k grands traits, avec plus de nerf, et oil, par des artifices litt6raires, I'auteur sait le mieux cacher sous des apparences agr6ables toute la profondeur des f 248 ) sciences dont la noiiienclatuic a ({uelqiielbis des sons Hop barl)arcs ]ioiir se plieraux regies dugout. 'J 18. — Ainsi, dans jiui description g6n6rale du Bresil, loin de m'arreter tiop a la g(!^ologic, ou a la phytologie, ou a la zoolngie dans toutes ses classes, j'ai au contraire fait ce qui dependait de moi pour ne pas toniber dans I'exageration scientiri([ue. En par- lant rapidement ties dill'erentes formations, j'ai tach6 de d^guiser les aperrus gd'ologiques, avec la peinture pittoresque ; j'ai fait le possible pour r^duire tons les renseignements phytologiques aux arbres qui donnent les bois de construction , les produits du commerce et les fraits savoureux de la table. J'ai parle des animaux et des oiseaux du pays principalementsous le point de vue (1c l'agi"ement et de la chasse ; et enfm je me suis meme occupe des tigres et des serpents, en adoucis- sant la terreur ([u'ils inspirent par le rapproclieinent patilotique de ce quefut jadis, sous ce rapport, I'Eu- rope elle-meme, quand elle etait encore plong^e dans Jla barbarie. 119. — J'ai pense (ju'en ecrivant unc histoirc de la civilisation de mon pays, je n'etais aucuuement tenu de lacommenccr |)aries epoques geologiques, et qu'au contraire tous ccs details rentraient plutot dans le ressort d'une autre bianclie des connaissances hu- maines : je mv. proposals d'ecrire Yhixtoire civile du Bresil et non })as son histoirc nutnrelle. 120. — Ainsi, avantd'oseradmettre, pouranujUorer mon ouvrage dans une nouvelle edition, le conseil de d^buter par I'histoire des grandes revolutions du Sol, j'aimerais a \oir d'abord son syst6me mis en pra- ( 2/|9 ) tique par un grand liistorieii d' Europe. Si nn noii- vel historien tie France veut snivre les conseils de M. d'Avezac, il commencera ])ai' nous mettre devant les yeux cette ceinture jurassique, avec les deux bou- cles en forme duchiffre 8, qui, d'apres MM. Dufrenoy et Elie de Beaumont, fornient le principal horizon g^ognostique du pays. Nous verrons dans la nouvelle histoire les cinq massifs on iles de roclies anciennes, a savoir, le noyau du Var, les ^rrains granitiques des Vosges, le massif des Ardennes, Ixi presqu'ile de la Bretagne et les montagnes du centre. Le novateur nous expliquera ensuite les bouleversements survenus a des 6poques plus r6centes, les grandes assises des terrains stratifies superposees chronologiquement, les b^-saltes du Cantal et da Mezfene, et enfin les sols de Paris, d'Orlean^ et de Bordeaux, classes humblement entre les terrains tertiaires et les alluvions, etc. 121. — Sans etre prealablement encourag6 par uu example de ce genre, je ne saurais jamais me departir de mes principes en 6crivant 1' histoire de la civilisa- tion de mon pays. XIX. 122. — Mais je vous ai promis de linir, Messieurs, et je le fais, en vous rendant mille graces de votre extreme bienveillance, et en vous priant d'agr6er ce travail comme une nouvelle preuve de mon d6voue- ment, et a la science que vous cultivez avec tantd'6clat, et a cette Soci6te elle-meme. Mon respect pour vous, messieurs, m'a inspir6 le desir de traiter ici outes CCS questions, si bien agit^es pr ■ notre digne ( 250 ) president actuel qui, j'en suis sur, pour les voird^bai- tues, a eu la g(^nerosit6 de vous proposer mon admis- sion dans cet lionorable champ clos ou la science gagne toujour? aux combats, oil 11 n'y a jamais ni vainqueur ni vaincu, et ou le seul d6fi est df^jk par lui-oaeme un grand service rendu au progr^s. NOTE SUPPLfiMENTAIRE. Nous sonunes heureux do pouvoir encore ajouter k cp travail quelques mots, grace aux nouvelles 6tudes que nous venous de faire sur Vespuce, dans les biblioth^ques Riccardiana et 31ai>/!nbechinna, D'apr6s nos propres examens faits assez scnipuleu- sement, nous n'hdsilons ])lns a d6clai-er fausse cette lettre dii niois de jiiillet 1500, attribuf^e k Vespuce, sur son second voyage, et dont I'authenticit^ avait 6t6 d6ji d6clar6e suspecte par Napione. II y a dans la biblio- th^que Riccardiana deux exemplaires manuscrils de cette lettre ; I'un dans le volume n* 1910 de la col- lection de Pier Voglienti (de fol. /il a /i7), sans autre pr6tention que d'en etre une copie ancienne, au milieu d'autres copies faites .'i la meme (^poque d'autres do- cuments geogra])liiques, parmi lesquels on peut citer le Milione de Marco Polo, et cette lettre de Vespuce 6crite du cap Vert, que Baldelli a publi6e. Ainsi, cet exem- plaire n'est. selon nous, que la copie de I'autre, avec pretentions et apparcnce d'original, qu'on trouve vers la fm du manuscrit n" 2112 de la m6me bibliotlitjque, en quatre feuilles, suiviea de trois autres 6crites de la ( 251 ) tnfime main, er*contenant, sous le titre tie CopUt do h-u del re di Portogallo, ces monies inforiiiations que Bnn- (lini a jmbliees dans son livre, pages 87 a 99. Quoique cette lettre contienne d6jc\«dans son propre texte des phrases cpii la rendaient suspecte, et entre autres, conune nous I'avions dit, cette longitude de 82" I et 84° ouest de Cadix, nous trouvons dans le manuscrit meme les indices de sa faussete. D'aljord il a, comnie nous disions, toute la pretention de pa- raitre original, au lieu d'etre 6crit de mani^re a vou- loir faire croire qu'il ne s'agissait que d'une copie, comme onle dit dans les informations qui sontjointes. Encore de nos jours on tralique sur des faux autogra- plies. L'6criture parait contrefaite pour indiquer plus d' antiquity, et nieuie I'encre est trop pale et trop in6- gale dans sapaleur, cequi fait croire qu'on lapreparait expres comme cela pour la faire passer poiu' plus an- cienne. Puis le papier est evidemment florentin : il a meme pour filagramme une fleur, embl^me de cette ville. Mais en admettant encore que Vespuce a Seville eut tout de suite aprtis ses voyages du papier fabriqii6 a Florence pour 6crire, ou meme que le papier ne soit pas florentin, nous avbns un argument sans r^plique pour prouver la non-autlienticit6 de la lettre dans la signature meme. On y lit Jinerigho nespucci, avec un A majuscule, des ee allemands, un it en initial poui* Vespucci, \ui h. et sans aucun (I'ait avant ni aprfes le nom, ce qui n'est aucunemeut d' accord avec la ma- ni^re dont Vespuce signait, conmie on peut le voir dans \q fac-simile que nous avons pul)li6 da'ns le premier volume de notre histoire, page hlU. ( 252 ) Dans la bibliotlitjqup I\J(ig/inbec/ii(uia nous avona trouv^ (cod. 201), cl. xxxvii, n" 15) manuscrite (eiij^cii- tiire du xvir siecle) unc copie de la graiide lettre adies- s6eaSoderini e» l&O/i, et impriin^e eii latin par Hyla- comilus en 1507, avoc quelques pelites variantes de I'ancienne edition reproduite par Bandini. Elle porte la date du 10 septeuibre (non ftvrier, conune on lit dans le catalogue) , et nous nous r^servons de nous en occu- per dans une autre occasion. Nous r6servons aussi pournne meilleure occasion de traiter des deux volumes [cl. xiii, iV" 81 (non pas 21) Sh] que Baldelli a fait connaltre {Sfnria /Id Milioue, p. xxxiij), dans lesquels se trouvent des feuilles de I't^dition vicentine de 1507, avec des additions nianu- scrites. Nous devons ajouter que, grace a la bienveillance de I'erudit marquis Gino Capponi, nous avons eu oc- casion de voirl'exemplaire de la lettre ;\Soderini, avec le nom de son ancien proprietaire Baccio Valori, et dont Bandini s'est servi. II est de la meme edition de I'exemplaire 6535 de Grenville au Brttisk Museum. ( 253 ) L'OYAPOC. Par Mr. J. C. da Silva, Munil*! c lie la Sociflc'. Messieurs, 1. Me proposant d' appro foiidir une question s^- rieuse, qui occupe nos deux pays depuis 180 ans, je me vois avec bonheur au sein de la Soci6t6 de G(^ogra- phie de Paris, et je vous rends grace del'avantageque vous m'avez accorde de parler devant vous. Rompus aux travaux les plus sev6res, vous savez concentrer toiite votre attention, sans avoir besoin de I'attrait de la forme ; et dou6s de cette liauteur de raison qui plane au-dessus des intt^rets les plus cbers, quelque part que vous aperceviez la v6rite, vous lui tendez noble- men t les bras. , 2. Ma faiblesse est encore soutenue, Messiem-s, par des circonstances personnelles, qui m'ont permis d'6carter les preventions les plus s6duisantes, et de n'envisager qu'en elle-meme cette question delicate. 3. Elev6 en France pendant onze ans sous des maitres que je v6n6re ; bonor6 d'un diplome de docteur parl'Universitede France; lie en France, depuis trente et un ans, a des amis que j'estime de plus en plus ; marie en France a une digne enfant de la France, qui fait depuis plus de vingt ans le cbarme de ma vie : je suis trop habitue a respecter la France, trop habitu6 k la cb^rir, pour me rendre coupable envers elle de la moindre iniquity. f 254 ) fi. Me f^licitant chaqiie jour dcs l/iPiifaits que je dois a celte grande nation, il ni'6tait done impossible de prendre pom- point de depart rien (|ui lui fut liostile; et si je tiens a 6claircir la question de rOyaiwc, c'est qu'elle ne m'oppresse d'aucune idee qui vienne con- trister mon ame. 5. Je suis assez heureux , Messieurs, pour vous apporter k la fois, "et la demonstration du bon droit tin Br6sil, et I'explication de Tinsistance croissante de la France k lui contester ce bon droit. Je me complairai a mettre hors de doute que, si la France el6ve de ])lus en plus des pretentions contraires au Br^sil, c'est qu'elle a pour elle les apjmrences les plus sp6cieuses. 6. Voil;\, Messieurs , le caract^re distinctifdu tra- vail que j'ai I'honneur de vous soumettre. 7. II sera divis6 en quatre parties. Je rappellcrai d'abord, en quelques mots, ce que c'est que TOyapoc, Je d6roulerai ensuite I'histoire curieuse, non encore faite, de la question renferm^e sous ce nom ; car elle edaire singuli^rement cette question t^nebreuse. Puis je m'arreterai a faire ressortir, dans toute leur puis- sance, les motifs que la France alR'gue en sa fav(nu\ Puis enfni, je d6montrerai que ces motifs, quel(|u(' forraidables qu'ilsparaissent, perdent toute leur vertu devant des considerations qui les expliquent, el (|ui etablissent entre rap])arence et la reality une liarinonie jusqu'ici m6connue. 8. Si vousdaignez me suivre avcc I'attention que le sujet reclame de nous tons; si, indulgents pour les fautes contre le beau, vous r6sprvez toute voire rigueur pour rappreciatioD du vrai : j'ose csp6rer. Messieurs, ( 255 ) que vons ne repousserez pas le consciencieux expos6 doHt vous fait hommage un ami. PREMlfeRE PARTIE. Quest-ceque I'Oyapoc? 9. II VOUS est parfaitement connu, Messieurs, que rOyapoc, malgr6 la grande distance qui s6pare les deux rivieres, n'est en r6alit6 que lalimfteseptentrionale du bassin de I'Amazone. 10. Vous avez accueilli dans voire pr^cieux Bul- letin un beau m6moire ou ce fait est mis dans tout son jour. En inontrant que la rive gauche de I'Oyapoc est form6e d'6l6vations granitiques qui s'avancent jusqu'i la mer, tandis qu'entre ce fleuve et celui des Amazones s'6tend une bande de terrains alluviaux de six k sept lieues de large, M. Reynaud a prouv6 de la manifere la plus incontestable que le delta primitif de I'Amazone allait juscpi'au cap d'Orange. 11. Cet aspect amazonien des terres comprises enti-e I'Amazone et FOyapoc est tellement frappant qu'il n'a pas 6chapp6 k Jean de Laet, il y a plus de deux si^cles. Ce judicieux auteur, d6crivant les re^^ions et proi'inces qu'il donne k I'Amazone, leur assigne for- mellement pour terme septentrional le cap d'Orange. 12. L'illustre Hollandais ajoute un detail, qui, sans qu'il en eut I'intention, confirms avec une grande force la mani6re dont il envisage ces terrrains d'alhi- vion marine. II nous r6v61e que ses compatriotes don- naient souvent au cap d'Orange le nom de Cap de Nord. Bien longtemps plus tard, en 1708, ce fait curieux 6tait r6p6t6 pai' le fran^ais Corneille. Et, ce qui plus ( -256 ) est, en 1700. Ic iVancais Martineau dii Plessis, sans I'aire aucune allusion a I'usage linllandais, donnait abso- hnnentpoursynonymes Caj) dn Aorrl et Cap tV Orange. 13. Comment nn paieil nsage a-t-il ])ii s'inlro- (luire ? — C'cst qu'en traitanl de I'Ani^rique, on a ton- jonrs entendu par Cap de Nord la borne septentrionalo (111 lleuve des Amazones, prlsdans saplus grande 6ten- due. Si Ton s'en tient k nne mio superficielle, conune on le fait generalement, cette borne, situep d'ordinaire surle continent, par la latitude de i''Ix'l' nord, ne pent pas s'6tendre au dela de la pointe nord de I'ile de Ma- raca. iVIais, qnand on p^n^^tre dans le fond des choses, comme de Laet et M. Reynaud, on acquiert la convic- tion que la veritable borne septentrionale del'Amazone, le veritable Capde Nord,devrait etre le cap d'Orange. le cap de I'Oyapoc. DEUXltME PARTIE. Hisloire de la question de V Oyapoc. 14. La diversit6 de nature des deux rives de rOyapoc a exerc6 sur les bommes un eflet n^cessaire. Les terres limoneuses qui se continuent depuis I'Ama- zone jusqu'a ce fleuve, demeur^rent delaiss6es pen- dant fort longtemps, et Ton recbercba toujours le sol ferme et 61ev6 de la rive gauche. D6s r6poque la plus reculee, les indigenes s'y pressaient en foule; ils y avaient un grand village h. rembonchure de la rivi6re. Et les Europeens, exploitant cette circonstance dans I'int^ret de leur commerce, sc portaient avec tant de predilection sur I'Oyapoc, que dans rann6e 1(513, un Anglais qui coimaissait bicn la Guyane par bii-meme, ( 257 ) iiiipniuait que cette riviere « 6tait le seul rendez-vous pour les navires qui frequentaient cette c6t6. » J 5. Avant qu'^clatassent les pretentions opposees cles Francais et des Portugais, la rive gauche de I'Oya- l)oc avait meme recn a plusieurs reprises des colonies europeennes ; et d'abord, de I'Angleterre. 16. Du 22 mai 1(304 ou 31 mai 160(3, pendant deux ans et neuf jours, la rive gauche de I'Oyapoc f'ut occup6e par une colonie anglaise, qui y avait 6t6 me- n6e par Charles Leigh. 17. Une seconde colonie anglaise, sous les ordres de Robert Harcourt, occupa egaleuient la rive gauche de I'Oyapoc, pendant trois ans ct trois mois et denii, du 17 mai 1608 {\ la fin d'aoiit 161 1. 18. Aux Anglais succ6dferent leurs rivaux d'alors. 19. A la fin du mois de mai 1625, quarante-six Hollandais, fuyant devant les Portugais, avaient abaii- donn6 la region amazonienne sous la conduite de Pie- ter de Bmyne, et ils etaient all6s se mettre a I'abri sia- la rive gauche de I'Oyapoc. 20. Le 5 mars 1627, le contre-amiral Lucijer mouille dans I'Oyapoc; il batit un fort. sur la rive gauche du fleuve, et y laisse une colonie hollandaise ayant pour gouverneur Jan van Ryen. 21. L' existence de ces quatre colonies ne rebta jamais ignor6e. La presse la divulgua aussitdt par de nombreuses publications, qui firent connaitre partout le prix que les Anglais et les Hollandais attachaient a la Guyane, et en particufier a I'Oyapoc. 22. Pour les Francais, ils ne se ilecid^rent a co- loniser la Guyane qua delaut de mieux ; et ils ne com- ( 258 ) mencferent k s'^tablir sur I'Oyapoc, sur ce rempart de I'Amazone, qu'en 166i. 23. A peine Colonib venait-il d'enrichir I'Espagne de ce nouveau monde que la France avait refus6 ; a peine Gama et Cabral avaient-ils procur6 au Portugal le splendide agrandissement dont il s'6tait rendu si digne : d^jci les marins frangais faisaient Hotter le pa- vilion de France devant les lointaines d^couvertes des Portugais et des Espagnols. L'Afrique, I'Asie, I'Am^- rique, tout fut assailli par eux ; inais sp6cialement I'Am^rique, et tout sp6cialement le Br6sil. 2!i. D6s les premieres ann^es de la prise de pos- session par les Portugais, les Francais avaient com- mence sur le beau pays de Cabral cette lougue suite d'entreprises qu'un Br^silien a eu la noblesse d'ame de faire valoir le [)remier, — notre illustre confrere AI. de Varnliagen. 25. Les hardis navigateurs ne s'6taient pas bor- n6s k traficpier avec les naturels du pays ; ils avaient form6 le projet de s'emparer du Br6sil, et ils le dispu- tferent aux Portugais pas k pas. 26. Ind^pendamment de ces continuels essais de factoreries, oii ils n'^taient forts que par les Indiens; ind(^pendamment de ce chateau eph^mSre 6lev6 en 1532 sur les bords du Biberibe, ils avaient, a deux reprises, tent6 k main arm6e une colonisation en grand. 27. Au milieu du xvi* sifecle, sous Villegaignon, les Franfais avaient occup6 pendant quatre ans et quatre mois la magnifique baie de Rio de Janeiro ; et dn haut de la petite ile ou ils s'6taient fortifies, ils avaient pr^tendu prolonger leur domination jusqu'a ( 259 ) la rive m^iidionale de la Plata, imposant d^jk au pays interai^diaire le nom de France Antarctique. Mais il leur avait fallu abandonner le fort Coligny a Men de Sd. 28. A.U commencement du xvir si6cle, sous La Ravardi^re, ils avaient occup6 pendant deux ans et trois mois la baie de Maragnan ; et, encore cette fois fortifit^s dans une ile, ils s'6taient flatt^s de touts'assu- jetir jusqu'au bord septentrional de I'Amazone, faisant dej^ sonnerle nom de France Fqnino.iia/e, Mais il leur avait fallu remettre le fort Saint-Louis a Albuquerque et a Moura. 29. Partout, et toujours, pendant plus d'un si^cle, ils avaient du c6der la place aux Portugais, et quelque- fois aux Indiens eux-memes. 30. L'echec essuy6 au Maragnan, oil, pleins de confiance en leur bravoure et en leur nombre, ils s'6- taient crus assures a jamais, les d^couragea enfin ; et ils dirent adieu k ces plages enchanteresses d'entre I'Amazone etla Plata, 31. Pendant onze ans, ils ne se basard^rent plus sur aucun point de 1' Am^rique m^ridionale. lis y revin- rent toutefois apr6s cette longue disparition ; mais, pour ne plus s'exposer a de cruels m^comptes, ils all^rent tenter une meilleure fortune dans d'autres parages. 32. Ils gagnferent k leur tour la Guyane. 33. Ce n'est pjffe qu'ils n'eussent d6ji eux aussi jete leurs regards de ce c6t6. 34. A r^poque du discredit du Canada, cememe La Ravardifere du Maragnan, aprfes avoir fait, en 1604, un voyage a la Guyane, avait obtenu, au mois de juil- et 1605, des iettres patentes I'^tablissant u lieutenant ( 2(50 ) I) g6nL'i;il (111 Roi es contrt'es de rAmen([ue, depiiis la » riviere des Amazoycs jiis({ucs ii IMsle dela Trinite. » Mais tout de suite, charge d'allcr vei-iliersur les lieux les r6cits entliousiastes que Des Idnx f;u>>;iii dn Ma- ragnan, La Ravardit;re apprit a appivcier la su[)i'noiite de ce pays; il se desistadesa concession de laCiuane, et il sollicita d'autres lettres [)atcntes, pour aller fon- der une colonic on.sud dc lii'itcz-vous? — Nai^imiez bieii /|{). Depuis quelques annees, ils avaient pris pied dans r.Vniazone, et ils y avaient deux forts, a I'abri desquels ils cultivaient a leur aise de riches plantations de tabac. Seulement, ils se croyaient slu- le tronc de I'Amazone et du cote de la Guyane, tandis que c'etait en realitc la rive occidentale du Xingii, afiluent meri- dional du grand fleuve. C'est la qu'ils occupaient le fort Nassau et le fort Orange. hi. Puis, en 1616, pr6cisement a I'^poque ou dal- deira so niontrait sur I'Aniazone pour en prendre pos- session, les Hollandais construisaient encore un troi- sieme fort, a Guriipa , ])lus pres de I'etablissement XV. AVlllL. h. 18 ( 262 ) portugais. Lcur iiombie ^tait alors de 250 a 300. li'2. Caldeira iie maiiqua pas de leur laiie seiitir innii6diatement ses intentions. Cest ainsi que Pedro Teixeini leur d6truisit un batiment de guerre niouille de\ant TAniazono, et que I'artillerie liollandaise alia garnir le fort du Para. i3. Mais aussitOt, a 1' instigation dcs Hollandais sans doute, les indigenes absorberent tonte I'attention des Portugais, et les enipecli^rent d'allerchercher leurs nombreux voisins d' Europe dans les enceintes qui les prot6geaient. hh. AuA Hollandais s'ajout6rent les Anglais : en juin lO'iO, au nonibre de 120; en avril 1(528, an nonibre de 200 ; en octobre 1029, an nonibre de 100. /|5. Avec leur tact exquis pour se choisir des posi- tions, les Anglais s'arret^rent ati bras occidental de TAraazone, qui, par sa direction , est la bonne I'oute pom- prnotrer dans le tronc du lleuve, et qui, tout en olliant beaucoup plus de largem- que quelques portions trop retrecies du bras oriental, est cependant assez etroite pour etre parfaitenient d^l'endue. Us s'y forti- fiferent, et sur le bord lorm6 par des lies, et sur le continent de la Guyane. Zi6. Cependant, les Poiiugais da Para, grace a l^edro Tcixcira et a Bento Maciei Parente, avaient r6ussi i inspirer iiiix indigenes on I'ainiti^ ou la terreur. lis purent alors tourner leurs armes centre les intrus ; et de victoire en victoire, ils rccul^rent de la nianiiire I a plus glorieuse les borncs du Brt^'sil. hi. Au niois de juillet 1623, Bento Maciel Parente chasse les Hollandais de la position de Gurupii, et il y ( 265 ) fonde, le garnissant de cinqnante hommes, tin fort qui dure encore. II poursuit les fugitifs jusque dans le bras guyanais de I'Amazone, oiiils avaient 6t6 serefu- gier chez les Anglais : a 1' aspect des Portugais, tout est abandonn6. AS. Au mois de mai 1625, Pedro Teixeira enl6ve aux Hollandais les deux forts du Xingii. lis se r6fu- gient encore chez les Anglais, dans lebras guyanais de I'Amazone. Mais le Portugais y porte la mort aux uns et aux autres : trois forts sont pris ; le chef hollandais, le chef anglais restent parnii les tu6s ; quelques Anglais, un grand nombre de Hollandais, sont men^s au Para ; d' autres s'enfuient 6pouvant6s au-delade I'Oyapoc. /19. Les Hollandais disparaissent. C'est le tour des Anglais. 50. Le 24 octobre 1629, ce meme vaillant Teixeira leur enl6ve le fortde Taurege, bati sur le continent de la Guyane, k rembouchure de la petite riviere de Ma- rack.. 51. Le 1" mars 1631, Jacome Raimundo de Ao- ronha leur emporte le fort de Philippe, construit ^gale- ment sur le continent de la Guyane, un peu au nord du premier. 52. Le 9 juillet 1632, Feliciano Coelho de Cai- vnlho arrache h. Roger Frey leur dernier retranchement, le fort de Cumau, 6galement situ6 sur le continent de la Guyane, k la pointe de Macapi. 53. D6sormais les deux rives de I'Amazone de- meurent aux habitants du Para ; et je suis heureux de proclamer que I'un des braves les plus m^ritants, dans cette h^roique legion cpii a assur6 au Br^sil la posses* ( 2()Zi ) sioii (III grand lleuve, cc fut constanimeiit iiii Bresilicii, Pedro da Costa Fa vella , ne a Fcrnainboiic. 5/i. Mais, Hop peu nouibreuv encore pourse par- tager sans s'aflaiblir, les vainqueurs sc contentferent de rester les seuls maitres partoiit. Us raserent les deux forts du Xingi'i et tous ceux dii bras occidental de rAmazonc; ct ils sc postferent a Gurupa, surveillant de la ces lerres' de la Gin ane ou ils venaient d'exercer tant d'actes de domination. 55. Debarrasses des HoUandais et des Anglais, (|ui s'eloignerent vers I'Or^nocpie, les Br6siliens n'eu- reiit plus a se pr6occuper (jne des Francais, redevenus ainsi leurs voisins les plus proches. 56. Au lieu de rechercher I'Amazone, les Frau- «;;us-s'en etaieiit d'abord eloignes davantage. Lne cea- lainc de nouveaux colons, debarques en '1()30 et en 1(533, avaient etc se fixer six lieues plus loin que Ic Si- namari, — sur les bords du Conaniana. 57. .Alais la charge de d grand uiaitre chel'et sur- )) intend ant general de la navigation et conunercc de » France » venait d'etre creee pour le cardinal de Ri- chelieu ; et le grand ministre, vouldnt tirer parti dc la Guyane d'une nianierepenuaneiite, I'orma une conipa- gnie (jui devait exploiter ce pays dans les limites na- turellesdu Maronia I'Oyapoc. Ellefut 6tablie le27juin 1633, ay ant a sa tete les sieurs Rosee et Robin. 58. Dans ce document la Guyane I'ut designee sous le nom de C(tp de No id. 59. Ge n'6tait pas une meprise. — Tout cojiuno on a\ ait donne quehpielbis le nom de Cnj) I <:ri an gi'oui)e d'iles situees devant ce cap ; (out connue le ( ?-<'-^ ) )iom de Coj) Sniiii-.-liigiisiiii avaii qnelquefois indiqii6 le Br6sil tout entier : de ineine, on etendit pendant longtemps le nova de Cajj de Nard au tout dont il n'est que la partie avancee, • — a la totality de la Guyane. Et cet usage n'6tait pas exclusif aux Espagnols et aux Portugais ; il etait commun chez les Francais eux- menies. En voic] la preuve : (iO. On salt que dans les malheureuses tentatives - de colonisation de 16Zi3 et 1652, ni Br6tigny ni les compagnons de Royville ne toucherent au sud de Tile de Cayenne, si eloigneedu Cap de Nord. Et cependant les historiens de ces deux expeditions ne donnent au pays alors visite que le nom de Cap de Nord. Ouvrons Boyer, Daigremont, Biet, lalettre anonyme de Cayenne, et nous y trouverons de nombreux tc^smoignages de cette v6i"it6. 61 . Mais il suffit du passage suivant d'une Relntinn de la Giiinne imprim^e a Paris en liSlh. » La Guiane » est un grand pais dans la terre ferme de I'lme- » rique, qui s'6tend en latitude depuis la ligne Equi- » noctiale, jusqu'au dixifenie degr6 du coste du Pole » Arctique, et en longitude depuis la Riviere desAma- )) zones jusqiies a celle d'Orenocque... Nos naviga- » teurs Francois ont accoustum^ dedonner a la Guiane » le nom de Cap de Nort, a cause qu'il est le plus re- )) niarquable de toute cette coste. » * 62. Malgre le nom de Cap de Nord, il est done bien certain. Messieurs, que la riviere la plus meri- dionale de la concession francaise de 1633 6tait I'Oya- poc, la riviere du cap d'Orange. 63. Le bassin de I'Amazone elait respects : le ( 266 ) Bresil n' avail qu'k se louer de la Fiance. Aussine put- il pas s'alarmer de voir lesFrancais passer enfin au sud dn Sinamari, et s'^tablir k Cayenne en 1634. lU. -Vlais en 1035, la France d6clara k I'Espagne (de qui relevait le Br6sil) cette guerre f[ui ne devait finir cpie par le trait6 des Pyr6n6es. 65. La cour de Madrid craignil alors ])our I'Ania- zone. En temps de paix, k peine k la t6le du ininist^re de^ colonies, Richelieu avait debute parnn acte d' hos- tility contre I'Espagne, en s'empressant de creer, en 1626, la ("iOnipagnie des lies do I'Am^rique. C'6taiten pleine paix que Richelieu avait empi6t6 sur les do- maines espagnols du continent am6ricain, en cr6ant en 1633 la compagnie du Cap de Nord. La guerre ouverte, que n'avait-on pas a redouter de ce g6nie en- treprenant ! 66. II fallait de grandes mesures; elles furent prises. 67. Pour sauvegarder la portion de la Guyane contigue k I'Amazone, a ce facile chemin des tr6sors du P6rou, le roi d'Espagne et de Portugal incorpora dticidi^ment au Bresil cette portion de ses domaines, sur qu'il 6tait du zele que d6ploiraient k sa defense, en cas de besoin, les d6fenseurs 6prouv6s de I'Amazone, les Br6siliens du ParA. 68. A^la compagnie I'rancaise du Cap de Nord, c'est-h,-dire de la Guyane, Philippe IV opposa une ca- pitainerie br6silienne du Cap de Nord, c'est-k-dire de la Guyane 6galement. Et il la conc6da, par donation per- p6tuelle, au plusancien v6t6ran de I'Amazone, k ce- lui qui avait fond^ Gurupa sur les niines hollandaises, ( 267 ) et qui , le premier , 6tait all6 braver sur le l)ras guyanais du grand fleuve les Hollandais et les Anglais ensemble : — a Bento Maciel Parente; = 69. La nouvelle capitainerie , cr66e le li juin 1637, renfermait la partie de la Guyana imm^dia- tement attenante h celle que la France s'appro- priait ; elle s'^tendait depuis la riviere de Parii, sur le Jjord septentrional de I'Amazone, jusqu'^ I'Oyapoc, sous le nom de rivi6re de Vincent Pincon, alors g6-- n6ralement employ^ par les Espagnols et par les Por- tugais. 70. R6sultat d'une exacte coimaissance du pays, elle occupait toutes les terres basses de la region sep- tentrionale de I'Amazone; car c'est pr6cis6ment k la rive droite du Pari que la chaine de ce nom 6tablit la barrifere entre les terres basses et les terres hautes. Et (chose remarquablel) I'embouchure du Para se trouve k peu pr6s dans la meme longitude que celle de I'Oya- poc. La geologic et I'astronomie s'6taient donn6 les mains pour tracer des limites parfaitement naturelles, 71, Pour laisser au nouveau doriataire toute sa liberty d' action, Philippe IV le mit k la tete du gou- vernement dont devait dt^pendre sa capitainerie, — ce- luidu Maragnan. 72. Install^ dans le gouvernernent g6n6ral le •17 Janvier 1638, Maciel Parente fit elever nnm^diate- ment, a I'extr^mit^ amazonienne de sa concession, ]k oh est maintenant le village d'Almeiriin, ini fori (fu'il nomma du Dcsieno, et que le p6re d'Acuna, au mois d'octobre 1639, trouva garni de 30 soldats et de qriel- ques canous. ( ^08 ) 73. Ayant ainsi poin\u a la defense de reinbou- DOncliiire de 1' Vmazone, Philippe IV fit plus encore, 74. A cette 6pof[ue, et jusqu'a ce que La Conda- mine eiit propag6 la certitude de la communication de I'Amazone avec I'Orenofpic, on donnait i\ la Guyane pour borne occidentale rien moins que le P6rou. II convenait done d'etendre jusqne-la le patronage bre- silien de la rive guyanaisc de 1' Vmazone. , 75. Philippe IV fit donner ses ordres dans ce sens au gouverneur du Para, qui 6tait alors ce raeme No- ronha cpie nous avons vu se distinguant aux depens des Anglais; et celui-ci, saisissant une occasion favo- rable, confia cette grande entreprise k Pedro Teixeira, cet autre v6t6rande I'Amazone, quiavait donn^le coup de grace aux Hollandais et entame les Anglais. 76. Avec 45 pirogues portant 1000 Indiens et 70 Portugais, parmi lesquels on remarffuait le Pernam- bucain Favella et un autre Bresilien, If colonel Bento Rodrigues d'O/n'eira , (|ui lendit en cette occasion les services les plus importants, — Teixeira remonta I'Amazone jusqii'au Napo, affluent tr^s recule du bord septentrional du grand fleiivc. P(^netrant dans le Napo mftme, il fit iialte sur sa rive orientale, a cent lieues de I'embouchure ; il y posta le capitaine Favella avec 40 Portugais et plus de 300 Indiens ; et il se rendit i Quito, oil I'avait pr6ced6 le commandant de son avant- garde, le Colonel Oliveira. Apr6s s'6tre concert^ avec les autorit6s du P6rOu, il rejoignit Favella, qui, conti- nuellement on lutte avec les indigenes de la localite, et constamment victorieux, avait attendu son gen6i-al de pied ferme pendant onze mois. Et \h, le 16 aout ( 269 ) 1639, — a la distance de plus de 20 degres de longi- tude de rOyapOC, — par ardrc dii gouveiueiir de VFAat du Maragtiaii, et d'ajjies les /nstnicliuns (jiie ledit goit- i'erneiir oi'ait recites de Sn iMaJeste, Pedro Teixeira prit solennellement possession du terrain pour fn conronne da Porluqal , an nom du Hoi Philippe IV , 11. Le roi d'Espagne et de Portugal, qui n'avait nullement a s'inquieter de la demarcation de Torde- sillas, adjugea done au Br6sil toute la partie m^ridio- nale de la Guyane, depuis la rive droite de I'Oyapoc jusqu'a la rive gauche du Napo. 78. Bientot, dans la memorable journ6e du 1"' d6- cembre 1640, le Portugal secoua le joug de I'Espagne, et le 13 juin 'I6/1I, Jean de Bragance etait proclam6 roi dans la ville du Para. 79. Les possessions portugaises de I'Asie, theatre glorieux des Albuquerque et des Castro, avaient 6t6 douloureusement morcelees pendant la domination espagnole; mais le Br^sil n'avait fait que gagner a la reunion des deux couronnes. Son territoire avait recu vers I'ouest un prodigieux accroissement, grace aux JM'aves habitants du Para, et grace a leurs dignes 6nudes, les braves habitants de Saint -Paul. 80. Ce magnifique heritage ne fut pas neglig^ par le roi legitime. 81. Le 9 juillet 16/i5, Jean IV confinnait dans la personnc du fds ain6 de Bento Maciel Parento, du meme nom que feu sonp^re, la capitainerie br^silienne de la Guyane. 82. Pes avant '1645, le Piio Negro etait frequent^ par les Portugais du Para. ( 270 ) 83. En,165Zi, les Portugais du Pari remontaient le Jary, et domptaient les Indiens de cette riviere. 84. Vers 1660, 1'illustre br^silien Favella, doiit j'ai pu ](' plaisir deprnnoncer pliis d'nne fois le iiom, avail 61ev6 line fortification sur les bords de I'Araguaii ; et a I'abri de cette fortification, les religienx portugais 6tablis sur les lies de reniboucluire de I'Amazone, allaient chaqne ann^e cat^cliiser les Indiens de cette partie de la Gu\ ane Br^silienne. 85. Pendant ce temps, ffue se passait-il dans la Guyane Francaise? — De grandes aspirations et de petits r6sultats. 86. La compagnie ^/// Caj) de Ao/Y/cr66e en 1633, n'avait pu r6ussir. Meme, les Hollandais s'6taient em- par6s de Cayenne, d'ou ils ne furent chassis que par les Indiens. 87. Seconde compagnie dn Cap de Nord le 26 mai 1640, ayant asatSte Jacob Bontemps, etmunie du pri- vilege de s'6tendre sur « toutes les terres qui sont situ6es » aux Indes Occidentales, entre les rivieres des Ama- )) zones etd'0r6noque,les dites rivieres y comprises. » — Trois cents Fran^ais arrivent h Cayenne le 25 no- vembre 1643, An bout d'un an, il n'en survivait que quelques-uns. 88. Nouvelle compagnie en septembre 165 J, ton- jours avec le privilege d'occuper la Guyane tont en- tifere, y compris I'/Vmazone et rOr^noqiie ; ])ortant le litre significatif de Franee Equinoxi(de, ot ayant pom- principal associ6 le secretaire general de la marine. Prfes de 800 Francais d6barquent a Cayenne lo 29 septembre 1652, Dans uioins de deux ans, fiap- ( 271 ) p6s par la famine et par les Indiens, il n'en restait que tie tristes debris, qui 6taient all6s demander iin asile aux Eiirop6ens de Surinam. 89. Les HoUandais se hatent d'aller s'installer dans I'ile de Cayenne abandonn6e pas leurs li6tes. 90. Pasun Francais ne se niontrait dans la Guyane ; et encore, au mois dejuillet 1655, Louis XIV octroyait au due d'Ampvillela charge device-roi del'Am^rique, avec la totality de la Guyane depuis I'Amazone jus- qu'a rOr6noque. — Cela n'ernpficha pas les HoUandais de garder encore neuf ans la Guyane Francaise. 91. Les HoUandais ne furent d^log^s que le 15 mars 166/1, par le capitaine de vaisseau Le Febvre • de la Barre. 92. La Barre venait d'arriver k Cayenne comme lieutenant-g^n^ral du roi , k la t6te d'une seconde compagnie de la France Equinoxiale , cr.66e au mois d'octobre 1663 — et toujours n'ayant pour bornes que I'Amazone et I'Or^noque. 93. Cependant, sans attendredes nouvelles de cette expedition, Louis XIV, a I'imitationdece qui avait 6t6 fait pour les Pays-Bas et pour la Su^de, avait trouv6 bon de supprimer les compagnies am6ricaines d6tacli6es, et de les fondre toutes dans une seule; et il avait cr66, par 6dit du 28 mai 166Zi, une compagnie dee Indes oc- cidentales, — ne manquant pas de lui attribuer toute la Guyane (( depuis la Riviere des Amazones jusqu'a » celle d'Orenoque. » 9/i. La compagnie g6n6rale continua au meme gouverneur ses pouvoirs dans la Guyane. La Barre fit k Cayenne un s6jour de treize mois, 6tudiant soignen- ( 272 ) ement le pays. Et, i-evenu en France en cong6, il s'enipressa de publiei- un ouvrage oil il rendit coiiipte de I'elaldo la Guyane Francaise le dernier aout 1(505. 95. Eh bien, Messieurs, 6coutons ce que nous dit ce grave personuage, rpii, lorsqu'il ecrivait, 6tait en- core investi de la charge de lieutenant-general dii roi dans la France Equinoxiale, — c'est-a-dire dans la France born6e par I'^quateur, par I'Ainazone. 0(3. En depit de tant de chartes de ses rois, en d^pit du litre pompeux qu'il portait lui-nieme, il ne balance pas a reconnaitre que les limites v^ritables de la Guyane Francaise 6taient celles rfui lui avaient ^te assignees par le cardinal de Richelieu, les limites na- turelles du Maroni a rOyapoc. 07. Je transcris les paroles de La Barre : (( La Guyane Francoise, proprement France Eqni- )) noctiale, qui contient quelques quatre-vingts lieues » Francoises de coste, commttnce par le Cap d' Orange, )) qui est nne pointe de Terre basse qui se jettc k la » Mer, et dont I'onprendconnoissancepartrois petites )) Montagues que Ton voit par dessus, et rpii soul an )) dela de la Riviere Yapoco, qui se jette a la Mer sous )) ce Cap. » — Et plus loin : a L'on pent a la Riviere de » Marony mettre les bornes de la Guyane Francoise. » 08. Pour ce qui regarde les Portugais, lesqiiels, dit-il, (( habilent le fort de Stierro, assis a la Bande du )) Nord dela Riviere des .\jnazones, » La Barre fait icr- niiner leur domination a la pointe de Macap.^i ; et il appelle Guyane indienue, Guyane independante, les lerrcs comprises entre la pointe de Macapa et le cap d' Orange. ( 273 ) 99. D'accortl avec la ^conviction qu'il avail sur r^tendue de son gouvernement, le lieutenant-general dii loi dans la Guyane Francaise fit occuper la Mon- tagne d' Argent, la pointe occidentale dela bale d'Oya- poc ; niais il se garda de francliir la riviere. •100. Cayenne et son ressort prosperaient eniin ; niais cette quietude ne dura gu6re. Pendant 1' absence de La Barre, les Anglais s'empar^rent de la Guyane Francaise en octobre 1(767. 101. Reconquise au mois de d^cembre de la menie ann6e, elle offrit en 1674 un nouvel example du respect que Ton y professait pour la delimitation du grand Richelieu. Deux missionnaires de Cayenne, les pferes Grillet et Bechamel, de la compagnie de Jesus, font un voyage sur le continent, dans le but de u de- » couvrir les nations 61oignees de la mer. » lis pt^ne- trent dans le sud; mais ils s'arretent au Caniopi, affluent de la rive gauche de I'Oyapoc. 102. Quelques jours plus tard, il leur eiit ete im- possible d'ex6cuter leur voyage, meme dans'l'espace oil ils s'etaient circonscrits ; car a la fin de 1674 la Guyane Francaise 6tait redevenue Hollandaise. 103. Maitres de Cayenne une fois de plus , les • Hollandais pens^rent au fleuve oii ils avaient eu un Ibrt un demi-sifecle auparavant. Le 20juillet 1675, les etats g^neraux d^cident d'envoyer a I'Oyapoc unenou- velle colonic. Trois cent cinquante Hollandais y arri- vent le li mars 1677, sous lesordres de Johannes Apri' ciiis; etils comniencent aussitot sur la rive gauche, et sur le meme emplacement autrefois choisi par Lucifer, une ville fortifiee, a laquelle ils dojment le nom do Stadt Orange, ville d' Orange. (274) lO/i. En definitive, iVlessieurs : 105. Les Brt^siliens, dfes qii'ils eurent pris pos- session de la partie amazonienne de la Guyane,- s'y 6taient raaintenus constamment, de plus en plus con- solidt's. lis avaient fait acte de domination snr la rive ganche dn Napo : ils fr^qnentaient le Rio Negro depuis plus de trenle-deux ans : ils avaient depuis trente-neuf ans le fort du Para, depuis dix-sept aiTS le fort de I'Araguari : et ils all6giiaient des droits ^ la rive orien- talede I'Oyapoc. 106. Les Fran^ais, de Icnr c6t6, avaient souvent 6tendu leurs pretentions jusqu'a la rive gauche de I'Amazone, voire jusqu'k la rive droite, — mais seu- lement sur le papier. Dans le fait, ils n' avaient ja- mais mis le pied k Test de I'Oyapoc ; ils n'y avaient pas meme song^. Tout au contraire, un gouverneur de la colonie, homnie d'importance, — un lieutenant general du roi, - avait dementi par la presse les exa- g6rations de la m^tropole. 107. Les Francais ne s'6taient jamais 6tablis ([u'a I'ouest de I'Oyapoc ; et meme 1^, ils avaient souvent cede toute la place k des envahisseurs. Pendant dix ans, de 165 A k 166A, ils n'avaient rien possede dans la Guyane : une seconds fois, pendant deux mois de I'an- nee 1667, rien : une troisieme fois encore, pendant plus de deux ans, de 1674 k 1676, rien. 108. Lk en etait la qiiestion , lorsque se dressa dans Cayenne, la grande figure du marquis de Ferrolles. (La suite a tin prochnin niiinern,) ( 276 ) DfiCOUVERTE DBS RUINES IVUNE ANCIENNE VILLE MEXIOAINE, SITUfiE 6UR LE PLATEAU DE l'aNAHUAC, Par M. H. de Sacssure. Les voyageurs qui vont en Am^rique, a la recherche (le vestiges inconiius laiss^s par la civilisation ancienne et niyst6rieuse des peuples primitifs de ce continent, n'ont pas I'habitude de diriger leurs pas vers le' centre du Mexique, au milieu des provinces les plus popu- lenses. C'est dans les regions sauvages dn Yucatan et du Chiapas, que leur instinct les entraine, dans le Gua- temala et dans tons ces pays oii d'immenses forets cou- vrent encore de leur rideau jmp6n6trable des contrees entiferes. La, s'enfoncant dans des lieux inexplor^s, ils poursuivent seuls des d^couvertes qu'un sol trop par- couru semble refuser a I'investigateur. Telle est sans doute la cause de I'oubli complet dans lequel a 6t6 laiss6 un grand nombre d'antiquites remarquables. Si bien des ruines sont rest^es enti^rement inconnues, c'est que I'erreur s'^tait trop accr<^dit6e qu'au Mexique tout est d6couvert, et personne ne se donnait plus la peine d'entreprendre des rccherches qui semblaient inu- tiles. En efi'et, comment pouvait-on se douter qu'au milieu d'un pays sillonne de I'outes, cultive dans une grande partie de son 6tendue et parsem6 de villes po- ( 276 ) puleuses, il existat des vestiges du vieiix Mexiqiie en- core ignores, et en grand nonibre. Je ne me flattais pas, en abordant dans ces contr^es, d'etre plus heiireux que tant d'autres voyageurs, niais, poussant le doute plus loin qu'on ne Ic pousse en g6- ut^ral, j'6piais tons les indices, j'ocoutais tous les ren- seignenients et je ne renoncais a nies reclierclies, que lorsque j'avais la preiive'dc I'inanite des foits ([ui in'e- taient avanc6s. Alalheureusenient le voyageur au Mexiqiie doit essuyer de si nides deceptions, qu'il se lasse vite a ce jeu-la, et Ic {)liis soiiveiU il se donne pour battu, apres quclques tcnlatives infructueuses. La populatioji abrutie et niat^rielle du pays nc I'avertit pas du voisinage des curiosit^s, ou, si a force de (jues- tions, il extonjue un renseignement, on lui exagere la valeur de details insignifiants. II ni'est aniv6 de fairc plus de vingt licues a travers des niontagnes tr^s difll- cilcs, par mi temps allroux, a la recherche de ruines imaginaires. Des Indien* me les avaienl depeintes coninie Tort curieuses, et elles se resiimaient en (piel- ques amas de ])ieiTes iiiformes. 11 suflit (I'lni petit nombre de ces deceptions pour rendre le voyageur fort sceptique et circonspect k I'e- gard de cc (]ue racon tent les Iiidiens, et il nc se laisse plus tenter ni engager par eiix dans aucune expedition chanceiise. Ce n'est pas, du reste, au\ Inthens seuls qu'il doit ces m6comptes; le Mexicain blanc lui-menie, occupe presque exclusivement asatisfjiire les plus pres- sants bcsohis de la vie aniiliale, se iiieiil dans un cer- cle d'id6es a pen pres aussirestreiiil (pic la po])ulatioii cuivree. On ne peut, se ligurer en Europe, I'iucptie ( 277 ) inentale de ces campagnards et leur incapacite absolue a donner uii renseignemeiit precis , ou a d^crire approximativement les objets qu'ils ont vus. Mais la j)lus grande diflicult^ centre laquelle on ait k lutter, est peiit-etre la tradition snperstitieiise que I'lndien attache a ces restes antiques d'une^poque qu'ilv6n6re comme I'age d'or de sa race opprim^e etdont il attend le retour avec une confiance aveugle. Derobant avec soin aux regards de la race dominatrice tout ce que ses p6resont pu recueillirdu naufrage g^n^ral del' em- pire de Montezuma, il ensevelit au fond des cavernes les idoles et les statues 6chapp(^es au vandalisme Chre- tien, II se rend de nuit a travers d'6paisses forets vers ces pierres mysterieuses, derniers t6moins de la gran- deur americaine. La il execute en cachette les rites de sa devotion et ces sacrifices traditionnels dont la pra- tique plutot que la pens6e se perpetue parmi les tribus indiennes. Les horribles persecutions, auxquelles les Castillans ont soumis durant des sifecles entiers les peuples indigenes du Mexique, ont developp6 chez ces derniers une mefiance extreme qui se transmet de ge- neration en generation, sans que le temps I'ait attenuee en rien. Aussi le secret des traditions est-il chez ces peuples d'ane inviolabilite a toute epreuve. Jamais on ne parvient a le leur arracher, pas nieme au milieu des souffrances de la torture. Ce n'est done pas de guides pareils que le voyageur peut obtenir aucun secours; I'lndien, au contraire , cherchera a lui faire faire fausse route, a lasser sa pa- tience et a le degoiiter de ses recherches par mille moyens ingenieux. Lc fait suivant donnera une idee XV. AVRIL. 5. 19 ( 278 ) de I'esprit qui les aiiime. Quelques indigenes, ayant appris nn jour que des blancs allaient chercher a enle- ver une pierre hi^rogh pliique qui gisait au sein des bois, s'empresserent de la briser et de la d6truire en- ti^i-einent de peur qu'elle ne tombat entre les mains des Gentils. Ce fut a Puebla, au print^'iups de 1855, que j'enten- dis parler de I'exislcnce des ruines d'une ancienne \ille niexiofline dans les environs de P^rote ; mais la personne qui me donnait cette infonuation n'avait ni visits ces mines, ni recueilli de details precis au sujet de leur emplacement. J'avais pr^c^dennnent s^jouni^ a Pi'rote, mais mal- gr6 le soin que j'ai toujours mis k ne rien n^gliger de ce qui pouvait olVrir quelque int^ret, je n'avais pas eu vent de cette circonstance. Les renseignements que je lis aussitot prendre aupres du'gouverneur de cette ville, aupres du clerge et des habitants les mieux inform^s, lie donnerent aucim r^sultat favorable ; personne n'a- vait la jnoindre connaissance de ces ruines. Cependant les vagues indications qui m'avaient ete fournies, me iaisaient supposer qu'elles devaient 6tre consid(?rables ; on me les avait m6me d^peintes conune ensevelies sous un courant de lave, ce qui ^tait bien fait pour pousser ^bout ma curiosity. D'un c6t(^, I'espoir detrouver une nouvelle Herculanum nic stimulait vivement-, et de I'autre, je redoutais qu'une aflreuse dece])tion et une perte de temps regrettal)le ne fussent les fruits amers des rechcrches longues et incertaines que n6cessitait la d^couverte de ces lieux. Ne croyant pas que les plaines nues du plateau dc P6rote pussent rec61er des ruines ( 279 ) qui eussent (^cliapp6 a la cUriosite dcs investigateul's, JB siipposai, non sans quelque raison, qu'il fallaitaller les chercher sur le versant de la Cordilli^re, peul- etre in^me a vingt on tfeilte lieues de P^iote, car a la mesiire du langage vague et figiir6 du peuple niexi- cain, cette marge n'6tait pas exag6r6e. Viissi, apr^s avoir parcouru les for6ts de Pcapantla, je vouliis iue di- riger siir le district de Misantla qui passe pour rec^ler des ciu'iosit^s arch^ologiqiies, etde la reiuonter la Cor- dilli^re jusqu'^ P^rote, en prenant sur tout ce long parcours les plus minutieuses informations. Mais un pays inond^ par des pluies extfaordinaires et un sol, d^trempe; an point de rendre tout trajet impossible, m'oblig^rent a renoncer k ce projet, et a m' Clever sur les pentes nioins argileuses et plus praticables des mon- tagncs. Nous nous dirigeames alors sur Zacapoaxtla, et nous allions I'atteindre, lorsqu'un pronunciaineniu vint bouleverser cette bourgade. La revolution s'v trouvait toute pr^par^e par une guei're de race qui depuis quel- 'ques semaines d^solait la province et semait Tanarchie sur son passage. Nous n'eilmes que le temps de d6- caniper avec amies et bagage;^ pour ^cliapper a la guerilla r^volutionnaire qui battait la camp&gne eil d6troussant les voyageurs, et de nous rejeter a tout hasard sur Tesuitlan, petite ville qui borde le i)lateau et couronne le sommet dn versant de la Cordilliere. Cependant, il m'eiit beauconp convenu d'explorer le district de Zacapoaxtla dans lequel j'esp6rais trouvef ces mines rayst6rieuses, et, faute de mieux, j'exp^diai un honnne a pied au cur6 de cette localite que je croyais bien renseigne ; celui-ci me renvoya au cure de Te- ( 2S0 ) peyahiialco, village situ6 a seize lieues plus loin , et au dela de P^rote, qu'il nous fallut encore traverser. C'estainsi qu'aprfes avoir fait un immense circuit, nous venions retomber a notre point de depart. Deux jours aprfes nous atteignimes Tcpeyahualco qui est situ6 ^ sept lieues de Perote an pied du volcan qu'on nomme le Pizarro, et dont la forme aussi r^guliere que gracieuse a frapp6 tons les ^ oyageurs. Je vous {^pargne le recit des nouvelles dilTicnltes qui nous attendaient sur la route. Nous venions enfm d'atteindreces mines myst6- rieuses, elles n'^taient plus une chim6re, mais quoi- qu'elles fusseut dans I'extreme voisinage du bourg, 11 me fut difficile de trouver des guides qiii en connus- sent I'emplacement avec precision (1). La description des mines dont il est question exige •la connaissance de la nature du sol des environs, je vais done en donner un bref apercu. Le village de Tepeya- hualco s'616ve au milieu d'une vaste plaiiie de cendres volcaniques qui forme le plateau de P6rote, et dont le niveau atteint a pres de 2 700 metres d' altitude. De loin en loiu les cretes des montagnes calcaires sous-ja- centes percent cette surface unie et dessinent des col- lines rocailleuses ou ondul6es qui s'^levent du sein de cette merde sable a la mani^re des ilots de I'Ocean. Toutes ces plaines sont extremement fertiles durant (1) II n'cst pas inutile dc dire que le village de Tepeyahualco esl tilud sur la grande route de Vera-Cruz a Mexico. Celte iudiration per- mcttra aux voyageurs de tomber k coup silr, sur remplaccmcnt de I'ancienue ville, sans perdre des scmaincs emigres h de longs tAlonne- nients, et i! est vraiment extraordinaire qu'une curiosild aussi voisioe de la grande route n'ait pas encore etd sigual(5c. ( 281 ) la saison des pluies, mais elles se desstehent a fond pendant I'liiver et se chargent dans les lieux has d'ef- florescences salines qui rendent certaines regions assez. ai'ides. Au sud de la route de Mexico est une lagune qui, soit dit en passant, figure sur toutes les cartes comme si elle 6tait au nord de Tepeyahualco, tandis qu'il n'existe de ce cote que des rochers et des collines. Le Pizarro s'(5;leve a une demi-lieue a Test du village, et tout le pays qui s'^tend au nord et a 1' orient est inond6 d'immenses d^bordements de laves basaltiques. Ces depots volcaniques, trfes r^cents, ont fait Eruption h travers des fentes considerables qui se sont produites dans le sol autour du pied de cette niontagne en s'6ten- dant au loin dans les plaines environnantes. Une pro- digieuse masse de lave, aprfes avoir ete vomie a travers ces larges orifices brants, s'est 6tal6e en forme de nappe h une immense distance et a reconvert le pays d'nne ve- ritable mer de basalte dont les bords, ramifies et d^cou- p6s de mille maniferes, dessinentdansla plaine comme autant degolfes et de promontoires rocailleux jusqu'aux derniferes limites ou I'uiil peut atteindre. Cette nappe de lave lithoide forme une couche d'une faible 6pais- seur, et se termine subitement par des bords escarp6s de 30 a hO metres de hauteur, a I'extremite nord de Tepeyahualco. Sa surface oifre un aspect infmiment raboteux dont il est difficile de donner une juste id^e par une simple description. C'est une s6rie de col- lines et d'enfoncements qui ne sont pas sans analo- gic avec les vagues de la mer. Partout des entasse- ments de blocs aigus, de larges et i)rofondes crevasses, coupant le sol dans tons les sens, des amas de scories ( 282 ) et (les trous s'ouvrant I'l pic rendent la marche im- possible. T.a nature tr^s nignieiise et presqtie impra- ticable Ue ces mers de laves qui abondent au Mexique, ne ]>eTit etre cojupar^e qu'k celle dun glacier, et elle rappelle assez I'aspect si singulier de la raer de glace de Chaiuouuix. Au nopal ])ies, aucuiie plante ne germe sur cesiochersingrats, si ce n'est quelques pins rabougiis donl les racines vont se cramponner dans les rentes reuiplies de cendres volcaniques Q\,dr. pous- si^re. L' aspect inhospitalier et de9ol6 de ces nappes de basaltc leuiavalu le nom de inalpays, que M. de Hum- boldt leur a conserve, et leur structure exclusivement pieireuse leur a fait donner celui de pcdregnl qui en expriine mieux encore la nature. J. im et I'autre sent tr^s r^pandus dans tout lo Mexique et s'appliqneni toujoLirs au ph6noniene d'un sol tapiss6 de lave, (.'.'est au milieu du nialpays de Tepeyahualco qut' s'6levent les ruines, a la recherche desquellesj"a\ais si longtenq)s err(3 a I'aventure, mais il est juste d'ajouter qu'elles ne sont pas facilesiidecouvrir, car le nialpays est presque iiupraticable dans une grande portion de son ^tendue, et il serait Tort dangereux de s'y aventu- versans 6tre accompagnede guides qui en connaissent lea detours. Le voyageur im])rudent qui s y hasarde- vaittout seul, se verrait bientOt perdu an milieu de ces vagues de lave qui s'etendenta plusieurs lieues en tous sens ; il se trouverait aussitot engage dans lui labyrinthe sans fin de crevasses, de rochers k pic et fie scories aigues dont il aurait de la ])eine a se tirer. Pour atteimlre les antiquit^s, il faut roloyer le Pi- ( 283 ) zarro an nord, en le laissant entre soi et la route de P6rote, d6passer cette montagne et marclier droit vers une coUine qu'onreconnaitra a premiere vue a sa forme aplatie et a ses pans taill6s a pic (1) ; puis, a une lieue de Tepeyalmalco, on se jette a droite sur le p6dr6gal dans lequel on s'enfonce tr6s avant. Ce parcours se fait en nioins de deux heures. Pour le voyageur qui clierche nioins a r^jouir ses yeux qu'a faire revivre le souvenir du pass6, les mines du pedr6gal sont une des plus grandes curiosites ar- ch6ologiques du plateau mexicain. Ici I'ceil n'est pas frapp6, il est vrai,par ces vastes constructions, par ces pyramides, produitd'un art architectural siremarqua- ble dans tant d'autres localit^s. Pas de formes savantes, pas de sculptures, pas de monuments gigantesqnes, mais pour I'imagination du voyageur et de I'historien, ■quel vaste champ ouvert aux hypotheses ! - Sur ce terrain raboteux, au milieu de ces collmes et de ces enfoncements h6riss6s de rocailles et de sco- ries, s'61evait jadisune ville6tendueet populeuse. Tout le sol est couvert de debris, informes sans doute, mais 6tonnants par leur 6tendue. Les murailles encore de- bout dans leurs parties infeirieures, dessinent tr6s net- tement les rues et les maisons, et des debris conside- rables de magonnerie jonchent a perte de vue les rudes ondulations de la mer de lave. ^1) Cetle colline, espece de pile volcaniquc, passe pour avoir une caverne dans laquelle est enfoui un trdsor. I.e p(^dregal lui-meme en recfele un bon nonibre et quelques-uns ont niAme di^j^ 616 ddcuuverts. Ces trt^sors datent de la guerre de I'lnd^pendance, (^poque h laquelle les families espagnoies fugitives cnsevelissaient leurs fortUDes poor lei d^robcra la cupidity des soldals de liusurrection. ( ZSh ) Un fait tr6s remarquable, c'est que cette ville forme une exception unique parmi celles du vieux Mexiqiic. Les rues ne sont ni larges, ni align^es de faron k se couper a angle droit. Elles sont au contraire 6troites ct tortueuses a la nianiere des ruelles des villes les ])lus anciennes de I'Europe. On n'auraitdu reste pas trouv6 moyen de les 6tablir autrenient sur un sol aussi tour- inent6 ; il fallait suivre la courbure des violentes ondu- lations du terrain, et c'est k peine s'il 6tait possible de rencontrer k plat I'espace n^cessaire pour circulcr, Conime le p6dr6gal est tout entier de lave litlioidc, d^pourvu de terre, on n'aurait gu6re })u en nlveler les in^galit^s, meme pour I'^tablissement des ruelles, aussi celles-ci n'ont-elles que deux ou trois metres de large ur. Elles 6taient bord^es, chose toute exception- nelle, non par des 6difices Isolds, niais par une suite de maisons tenant les unes aux autres et ayant un mur commun, comme dans nos villes modernes. La struc- ture de ces maisons se reconnait fort bien, car le#rs murailles sont intactes jusqu'a luie hauteur de un ou deux metres ; elles entourentdes carr^s dedixiquinze metres de c6t6, avec entree sur la rue. Ces construc- tions sont 6tablies imm6diatement sur le rocher, sans fondements souterrains, ce qui du reste n'6tait gu6re n6cessaire avec une base pareille. Elles sont exclusive- ment forai^es de morceaux de basalte et de scories cas- s6s assez r^gulitjrement et assembles k sec sans aucun niortier, mais avec un artparfait. Les rues sont pavees avec des morceaux de lave, bris6s k cet effet et grossi^rement assembles. On rencontre k plusieurs endroits de singuliers ou- ( 285 ) vrages faits pour profiter des in6galit6s du sol. Ainsi Ton peut voir des terrasses etablies en avant de certaines maisons, qui couronnaient des bosselures a pentes roides et doiit une des faces donnait sur un ravin. La terrasse batie a partir du fond du ravin venait augrnenter I'espace qu'offrait le somuiet de la coUine. Les murs de soutfenenient de ces ouvrages sont tous 6tablis en pierres seches comme les murailles des maisons. On voit d'autres terrasses plus grandes qui bordent les collines en surplombant les rues basses, et qui me pa- raissent avoir 6t6 des ouvrages plutot de defense que d'agr6ment. Une pyramide allong^e en forme de toit s'6l6ve entre ces terrasses. Elle pr6sente dans la regu- larity de la cassure des Elements qui la composent et dans la maniere dont ils se joignent de facon a former des surfaces planes quoique sans taille aucune, un re- marquable exemple de cet art de batir sans mortier. Gette ville deserte au milieu des ondulations d'une lave noire, ces murs d'une couleur sombre et toujours uniforme, ces rues 6troites et tortueuses , tout cela . forme un ensemble des plus lugubres ; on dirait la ville des morts. Dans toutes les directions oii nous nous promenions, les ruines se continuaient au loin ; on rencontre des en- droits dont elles ont disparu ; mais bien au dela j'en retrouvais les traces, ce qui me montrait que nulle part je n'en atteignais les limites extremes. La crainte de me perdre au milieu de ces dangereu- ses solitudes combattit le d6sir de pousser I'explora- . tion jusqu'aux confins de-la cit6. D'ailleurs toutes ses parties me paraissaient ^tre assez semblables. ( 286 ) Les rues et I'espace qu'occupaient les maisons 5»ont jonch^sde debris d'obsidienne, depointesde Heches et de lances fabriqu6es avec celte pierre et pour la phi- part bris^es. On rencontre aiissi l)eanconp de dalles en trachyte que les habitants allnient sans doute extraire des flancs du Pizarro, parce (pie la roche qui le fonne 86 lend et se taille plus facilement quo la lave basal- tique du pedrt^gal. Ces pieires sont les seules que les habitants aienttransport(5es des environs. On rencontre aussi beaucoup de pierres trachytiques taill^es h. sur- face courbe, et qui servaient de nieubles et d'ustensiles divers. Des recherclies actives ne pourraient manquer de mettre au jour de nonibreuses antiquites, dignes d'etre conservt^es. Le cur6de Tepeyahualco possMe un grand vase de basalte k base carr^e reconvert d'une large coupe de lave pore use. 11 est probable que cet objet servait k con ten ir I'eau k boire que les peuples azt^ques avaient d^jk I'habitude de rafratchir par lY- vaporation en la faisant toniber goutte a goutte d'un vase dans un autre. Le court espace de temps qu'un voyageur pent con- sacrer a I'examen des antiquites, ne lui perniet gu6re d'entreprendre des fouilles. D'ailleui-s au Mexique les instnnnents les plus (^-l^mentaires , tels que pelles et pioches, sont entiferement inconnus , et il est bien dilTicile de faire ex6cuter les moindres ti-avaux. Nous essayames n^annioins de d^foncer le sol d'une maison au moyen d'un levier de fer, seul outil en nit^tal que nous eussions trouv(^ au village, et suilout avec la points de nos sabres, niais sans aucun succ^s. La fai- ble couche de terre qui recouvre le rocher sur I'em- ( 287 ) placen^nt ties >naisons est le r^sultai du nivellement (leleur sol fait par les aiiciens habitants, et de Taccu- mulation des d6conibres de la ville ; elle est si mince qu'on n'aura aucune peine a la remuer de fond en comble, et ilmesemble imjx)ssible qu'on n'y d^couvre pas de nombreux ustensiles. EnfiQ, outre lesmaisons, les plates-formes, les pyi-a- mides, on trouve encore des puits qui sont d'un tr6s grand int^rfet. Ces reservoirs ne servaient sans doute qu'k rassembler I'eau de pluie ou celle qu'on apportait d'une distance de deux ou trois lieues, car le p6dr6gal est une nappe de pierre a travers laquelle aucune soui'ce ne saurait jaillir etqui repose elle-mtoiesur un sol de sable poreux dans lequel toutes les eaux se per- dent. (les puits ont I'air d' avoir 6t6 tallies dans le roc. lis ont un orifice 6troit, raais ils s'61argissent ensuite en foruie de bcuteille, et atteignent une certaine pro- fondeur. Je fus assez heureux pour d^couvrir I'un de ces puits dans ini bon 6tat de conservation ; son int^- rieur etait en partie obstru6 de pierres et de d6bris ter- reux ; ses parois arrondies se rapprochaient vers I'ori- fice superieur qui n'avait qu'un pied d'ouverture et elles 6taient revetues de pierres s6ches parfaitement assemblies. 11 ni'a paru que le proc6d6 suivi dans 1*6- tablissement de ces citernes consistait a creuser d'abord un large trou qu'on 6vasait vers le bas; puis on enr6- tr^cissait I'ouverture au nioyen de ce mur en pierres stiches jusqu'a ne plus laisser de libre que I'espace necessaire pour passer les vases servant apuiser I'eau, 11 serait inleressant de faire nettoyer et vider un puits afin de couslater I'^tat du fond qui, je presume, devait ( 288 ) se r6trecir beaucoup, de facon a rassembler dans un espace 6troit la plus petite quantity d'ean et k la ren- di'Q facile a puiser. Comme on le voit, ces reservoirs etaient parfaitenient combines ])Our enipecher 1' Evapo- ration et pour entretenir I'ean dans un etat defraicheur parfaite en la prot6geant centre les influences exU'i- rieures. L'ouverture 6tait en outre fermee par une grande dalle qu'on placait sur son orifice ; cette dalle se voit encore sur le puits que je viens de decrire et elle est perc6e d'un trou rond qui sei-vait sans nul doute a recevoir le tuyau ou chenal par lequel les eaux de pluie se d6versaient. Les puits sont assez nombreux dans I'enceinte de la ville, mais la plus grande partie d'entre eux sont compl6tement obstru6s. Apr6s avok'decrit bri^venient les mines dont il vient d'etre question » il me reste a indiquer les reflexions que leur examen suggfere. D'abord la singuli^re asser- tion, avancEe par les rares Mexicains qui ont vu la ville du pedr6gal, cpie cette ville aurait 6t6 ensevelie dans la lave, toiube a la premiere inspection de la lo- calit6, et doit etre aussitot rel6gu6e parnii ces nom- breuses fables dont I'imagination inexp^rimentee du vulgaire est trop souvent I'auteur, et qu'une observa- tion 6l6mentaire suffit a refuter. Les ruines sont simplement 6tablies sur la lave li- thoide, et les materiaux dont elle est batie sont exclu- sivement empruntes k cette meme lave que la tradition du voisinage suppose avoir jailli post6rieurement i r^tablissement de la ville. Le p6dr6gal, il est vrai, est d'une origine trt;s rccente ; sa masse a d6bord6 a I'etat ign6 ti uue 6poque geologiquc peu recuI6e ; peut-etre ( 289 ) nienie seulement aprfes I'apparition du genre humain a la surface du globe, maisentous cas longtemps avant les temps liistoriques du nouveau continent. Sans vouloir 6noncer aucune opinion arret^e relati- vement a I'age de la ville qui vient d'etre d^crite, sans oser formuler aucune date,il nous parait certain qu'elle ne saurait reinonter k une bien haute antiquity. Tout dans ces mines annonce leur r6cente existence ; les murailles out I'air d'etre renvers^es d'hier; les ter- rasses, les pyramides sont encore intactes. Les Indiens des environs I'appellent la Ciitdad de ou del Canton. Or, il n'est dans la contr«^e environnante aucun lieu qui porte le nom de Canton auquel les mines auraient pu I'empmnter. Je ne pense meme pas qu'il se rencontre ailleurs au Mexique. Ce serait ici le seul exemple de mines mexicaines dont le nom n'aurait pas 6t6 Du- blin. vPartout ailleurs un pass6 recul6 a couvert de son voile impenetrable et I'histoire et le nom des lieux dont r antique c6iebrite est attest^e par la grandeur des monuments ou par I'^tendue de leurs debris ; c'est le village le plus voisin qui sert a les designer. II n'est done pas probable qu' ici le nom primitif ait pr^valu en depit de celui des villages environnants. Je suppose done que le nom de notre ville a simplement ete donne par les Espagnols et qu'il doit se formuler Ciudad del Canton (ville du coin, du tournant). II me serait du reste impossible de rien dire de positif k ce sujet. J'avais d'abord esp^re que la tradition des lieux ne se bornerait pas a la simple conservation du nom (si toutefois Canton est bien un nom ancien) , mais toutes les demarches pour en apprendre davantage furent ( 290 ) inutiles, soit que les Indiens t'eignisspnt de Vignorer, soit qu'ils n'eussent conserve aiicune donn6e de lenr histoire. II n'est cppendant pas rare de trouver chez les Mexicains certains souvenirs des guerres que les boiirgadcs se faisaient outre elles dans les ann^es qui pr6c6d6rent la conqu^te , comme je me propose de le niontrer dans une autre publication. Les ruines de Canton ouvrent aux speculations de r esprit un champ presque sans limites ; divers ^rudits mexicains auxquels j'en parlai , se basant surtout sur le fait de 1' irregularity de la ville del Canton, et sur I'absence de t^ocallis, fiirent d'avis qu'elle ne ponvait avoir appartenu ni anx Tolt^ques, ni aux Aztfeques, peuples chez lesquels la r^gularit6 dans les construc- tions 6tait un trait distinctif autant que le teocalli ^tait le monument le plus constant et le moins sujet h man- quer. Mais une pareille deduction nous paralt beaucoup trop bardie. (Vest en se tenant k cheval sur des prin- cipes aussi absolus qu'on atant augmente le chaos his- torique des temps recul^s. Voyons plut6t dans cettc ville extraordinaire, batie dans im lieu si singulier et si peu favorable k la satisfaction de tous les besoins de la vie, le refuge et la forteresse d'lin peuple vaincu et harcel6par d'infatigables ennemis. En effet, quelle raison, si ce n'est une n6cessit6 absohie, aurait pu engager une nation a fixer ses p6- nates au milieu des rochers les plus ingrats ? Le p6dr6- gal est un sol si raboteux que la marche m^me y est un labeur ; il n'offre qu'une s^rie de rochers noirs et scoriac^s ou aucune plante utile ne pent gcrmer, tan- dis que, tout k I'entour, des campagnesfertiles invitaienl ( 501 ) . rhonime a s'y 6tablir. Pe)Klantsix uiois del'annee, des averses lr6quentes venaient remplir les citernes de la ville, mais, pendant six moisd'Iiiver, nn del toujours serein obligeait les habitants a chercher an loin une ean saumatre qu'ils cliarriaient a grand'peine sur leur dos ; car, ovant la conqiiete, le pays ne poss^dait aucune bete de sonime. En iin mot, il est evident que l'agr6ment de la vie etait saci-i(i6 a une imp6rieuse n6cessite, celle de la defense. A ce point de vue, le p6dr(^gal 6tait un en- droit sup6rieurement choisi. Impraticable a une ami6e, ii oflVait line retraite tout aussi inexpugnable que des rochers escarpes, tout en pr^sentant un espace suffi- saut k r6tablissement d'une nation populeuse, tandis qu'aux alentours, des champs fertiles et peu 61oign^s suffisaient a la subsistance de la ville. On peut supposer, sans trop accorder au domaine de r imagination, qu'une tribu battue et pourchass^epar un ennemi plus fort, s'est refugi^e au milieu de la nier de la^ e et a eleve a la hate la dudad del Canton dans le but d'y chercher un abri momentan6 plutot qu'avec I'intention de prolonger son s^jour dans ces lieux in- grats plus que ne I'exigeait sa s6cunt6, Ainsi s'explique cette ville batie sans mortier, con- struite sans art, sans t^ocallis, sans monuments publics, Les nombreuses terrasses dont elle est remplie ^taient des fortifications defensives du haut desquelles on lancait sur Tennemi des javelots et des pierres. Des investiga- tions plus detainees mettraient peut-6tre meme en Evi- dence les restes d'un mur d'enceinte. Cette cit6 tout exceptionnelle, batie au milieu d'un ( 292 ) desert, dans uiie locality tout autre que celles choi- sies pour cela par les peuples du Mexique, ces habita- tions serr6es les unes contre les autres, enfin la struc- ture particulit-re iiuprinid'e au ])lan general par la nature dusol, tout cela n'indique-t-il pas qiielque analogic d'originc eiitre la C/iudad de C.antou et unc ville d'Eu- rope, exceptionnelle aussi et unique dans son genre? Ce fut le besoin de la defense qui fit biitir Yenise au milieu des lagunes, et cettc position n^cessit^e par la force des choses, entraina aussi des rues et des niai- sons comme on n'en retrouve pas ailleurs. Seulement Venise apr6s s'etre d6fendue ([uelque temps derrifere ses murailles et ses marais fut a son tour conquerante ; elle finit par devenir la reine de I'Adriatique ct la ville des palais, tandis que la cite am^ricaine ne parait pas avoir surv6cu a Tepoque ou elle eut a prot^gcr ses habitants contre les invasions ou contre de puissants Yoisins. La nation a probablement liabit6 assez longtenips cette ville provisoire, puisque entre les niaisons s'616- vent des pyramides qui servaient sans doute de tom- Jjeaux aux chefs ; niais dans leur d6tresse et leur mi- sfere les habitants ne songeaient guere au luxe, la d6fense et la crainte dd'ennemi absorbanttoutesleurs /acultes. On pent encore se demander si la a illc de Canton a 6t6 detruite ou seulement delaissee. Je ne crois pas qu'il soit possible de rien preciser i cct egard. 4Jn ennemi apr^s avoir pris d'assaut une ville, la ra- vage souvent moins que le temps et I'aliandon. Les murs en pierres stclies etaient faciles h. rcnverser, ct comme la plus grandc partie de la ville est ras6e au ( 293 ] point de n' avoir laiss6 que cles traces vagues, on pent a Yolonte croire a Taction prosaique des ann6es ou enibellir le tableau de sieges et de combats. 11 faiit dire toutefois que le temps n'exerce qu'une influence bien minime sur des murs sans mortier, dans les interstices desquels aucune v6g6tation ne germe (1). Les murailles Ires inclinees des pyramides et des ter- rasses sont restees debout, tandis que la majeure par- tie de la ville est comme rasee. Des fouilles assidues feraient peut-etre decouvrir une abondance de cranes comme dans le sol d'un champ de bataille, mais on ose a peine sen flatter, car la population, eut-elle meme 6t6 6gorg6e dans 1' enceinte de la ville, les cadavres exposes sur le rochcr auraient disparu sans laisser de traces. Les vautours et les coyotes en auraient fait une abondante curee, et les meteores auraient rapidement detruit ce qui aurait 6chapp6 a la dent vorace de ces animaux. La ciudad de Canton n'est pas le seul vestige arch^o- logique du plateau de Pei'ote. On m'a dit qu'on en (1) Les picrrcs doiit nous batissons uos iiiaisons se delitcnt a I'air; cllcs se dctruiscnt ct lombcnt, ou en se d^Iitaut ellcs crccnt dans leuis iulcrsticesuueleircqui alinienlc bieulfit desplanlesdestructrices, mais Ic basalte, subslaiicedurc cl inall(!rablc, ne sc dcililc pas; les pierrcs des liavcs cl des niurs sonl aussi uucs et aussi fraichcs que si elles etaient asscmblees d liicr, el leuis aretes soul aussi vives ct aussi tranchaulcs que si ou venait de les biiscr. La gelee pas plus que la degradation n'a de prise sur des murailles toujours scclu^s, et sous un climal oil il ne gele que pendant une saison de setliercsse extri^nie. L'action dislocantc est nuUe. Apres des sieeles, ou rctrouvcra les murs pres- que intacls, lels qu'on les abatis, en uccuniulant des pierres les uues lur les aulrcs. XV. ATUIL. 6. 20 ( 294 ) voyait encore a quelques lieues de cette villc, dans les forets qiu tapissent le versant du Cofl're (l), mais jc n'ai ])as cu le loisir de les visiter, et d'aprte les ren- iseignenients qui m'ont 6t6 fournis, je les ai jug^es i tort ou a raison assez insignifiantes. Je les signale tou- tefois a I'attention des voyageurs, car c'est souvent la oil les apparenccs sent le nioiiis iavorables, ([ue les recherclies atlentivcs obtiennent le resnltat Ic plus inaltendu. (1) Daus un mdmoire geologitiiic siir Ic colTrc dc Pciotp, Galeotti parlc de ruincsqu'il prdtend existcr sur ce volcau, ct qui seraieut, eii- sevelies sous une coulee de lave. Je suppose que les iiidiralions crro- neesdonlcet auleur fail mcutiou, doiveut se rapportcr i laCiudad de Caotou. ( 595 ) iloiivellefS et eopuitiifliiicationfii. Notice siir M, le baron 3feh'ill de Canibee , Membie de la Soci^t6. Je n'ai pudonner, dans moii dernier rapport annuel, de details biograpliiques sur M. le baron Melvill de Gamble, que la Society avait I'honneur de compter parmi ses menibres, et qu'elle a receunnent perdu. Je m'empresse de r^parer cette omission, grace a un re- cueil allemand dans lequel il m'a 6te perniis de puiser les faits dont je n'6tais qu'imparfaitement inform^, il ^ a quatre mois. Le baron Pierre Melvill de Carnb6e, g6ographe et hydiographe eminent, 6tait n6 a la Haye, le 20 mai 1816. Apr6s avoir fait de solides 6tudes classiques, il entra en 1831, al'Institut de MMemblik, pour s'y pre- parer a servir dans la marine. II fit ensuite, avec le grade d' aspirant {adelborst), de 1835 k 1837, son pre- mier voyage aux Indes orientales, dont il rapporta de nombreuses observations hydrographiques. Ueretour, en 1838, dans sa patrie, il fut elev6 au grade de lieu- tenant de seconde classe, et cette meme ann6e, il repar- tait pour les Indes orientales, oii il obtint bientot un emploi dans le bureau hydrographique de Batavia. Les mat6riau\ qu'il avait a sa disposition, lui permirent d6s lors d'ex^cuter les premieres oeuvres qui fond^rent sa reputation : Un Guide nautiqiie {Zeeinansglds) pour toutes les parties de rOc6anindien (Amsterdam, 18A2; 1" edition, 18A9) et une carte des cotes de Java en cinq leuilles. Ces publications furenl suivies d'un grand travail cartograpliique sur la mer de Chine, sur Kio, ( 296 ) Singajjorc, Lingga, cx6ciit6 en grantle parlie d'apres ses observations' ct ses propres nicsnres; ce travail i'eniporte clebeaucoup surcelui de I'amiraut^ anglaisc. En inenie temps, il fournissait au Tijihclirift voor l\e- derlandsck Indie , d'int6ressantes observations astro- nomiqiies, orographiques et statistif{ues. II consigiia, dans la Cmie Inpaomeiricjiie de T arc! u pel Indieii^ Ics resultats de ses detcrniination's geodesiques. Lc baron jMclvill de C.arnb6e op6ra son retour en Europe par Ics possessions anglaises de I'lnde, et s'associa bientot a M. Siebold pour la publication du Moniteur dcs hides orienlnles et occidentales (3 vol. ,in-fol. la Haye 18/|7-/j9) , recueil plein d'iiit6ret, dans lequel il lit paraitre un grand nojubre de notices. Le merite de ces notices tient surtout anx excellentes cartes des iles ou de provinces des Indes neerlandaises dont elles sont accompagnees. Le Tidjschrift voor A ederlnndsch Indie fit paraitre en outre du menie auteur, en 18/iO, une carte statistiquc generale des possessions neerlandaises d'ontre-mer. Au printemps 1850, le baron Melvill repartit pourBatavia, avec le grade de lieutenant sup6rieur et I'ut attacli6 comnie adjudant a I'amiral de Bosch ct charg6 de la direction du bureau liydrograj)hiqueT Distingue d'une uianiere speciale parlegouverneinentde sa patrie pour son intelligence et son activity, il fut charge de I'ex^- cution d'un ai/as cample t dcs Indes orientalcs qu'il nc put iiialheureusemcnt achever. II niourut i)r6matur6- ment, le 24 octobre 1850, a I'hopital de Veltvredena Ba- tavia. Les dernieres cartes qu'il avail dress^es pendant son s6jour aux Indes, a savoir celles de la nier de Java et des cotes de Celebes, sout encore inedites. A. M, ( 297 ) r:\'M!.\irs df.s pnocks-vKHBAUK oks skaiscivS. Seance dii 19 nuns 1858. La Society apprend avec donleurla mort de M. Adrien Cochelet, st^nateur, I'un de ses membres les plus aii- ciens, et decide que I'expression de ses regrets sera consignee au proces-ver])a]. Son Exc. M. le ministre de 1' instruction publique. annonce a la Society cju'il vient dc lui accorder une subvention de 600 fr. pour I'annec 1858, en echangc de 50 exemplaires de son BuUeiin. Des remercinients sont adress6s a M. le ministre pour ce nouveau til'moi- gnage d'int<5ret. M. Foetterle, premier secretaire de la Soci6te de G6o- graphiede Viennc, adresse des diploraes de membres ho- noraires et de membres correspondauts a MM. Daussy, d'Avezac et Jomard (1), et il joint a cet envoi, pour la ])iblioth6qiic de la Soci6te, une collection de plans relatifs f\ I'agrandissement de la ville de Vienne, et publies par le gouvernement autrichien. M. Foetterle promet d'envoyer a la Societe la suite de cette publi- cation, ett^moigne ledesir de recevoir en ^change des plans analogues relatifs aux agrandissements de la ville de Paris. La commission centrale vote des remercinients a la Soci6te de G6ographie de Vienne pour cette gra- cieuse o'ffrande et pour les lionorables t6moignages de (1) Dcpuis, des diplijmcs tie mombrcs correspondauts soiU parvenus i la Society, pour MM. A. Maury et V. A. Mallc-r>ruu. ( SOS ) confratornite quelle viontdaccorder a plusieursde ses membres. Kile deride en nieine temps qu'elle adresse a la Soci^te de Vieime la k' serie de son linllctin en ^change de ses int^ressantes publications. M. Joniard, aunom de M. de Martius, secretaire per- petuel de rAcademie royale des sciences de Baviere, fait honimage d'un opuscule relatif au\ noms des vfl-g^taiLN du lir^sil, en kngue tupi. M. le comte de Coss6-Brissac et M. Robert Schlagint- weit sont pr^sent^s conmie candidats pour faire partie de la Soci6t^, le premier, par M. le baron d'Avril el M. (le la Roquette, et le second, par MM. de la !\o- quette et Joniard. La coumiission centrale precede ensuite k I'dection de deux membres corraspondants. par suite des deux vacaiices qui ont^t(^declarees. M. Hermann Sclilagint- weit, k Berlin, et M. Beaudouin, chef d'escadron d'etat- major, en Algerie, obtiennent la majoritt' des suflVages. M. le secretaire donne lecture de la lisle des ouM-ages oflcrts k la Soci6t6. M. Malle-Brun pr^sente, au nom de M. Ernest Des- jardins, un opuscule intilul<^ : Le Pcron avant la con- qiiete espogno/e , (I'dprrs Ie.v historiciis origi/iaa.)', et (juehjiies dociii/ie/its inedit.s sitr ce pays. II ajoute ({lie cet ouvrage est divis^ en quatre parlies : 1" les tiadi- tions religieuses et l^gendaires sur I'origine du Pernu ; 2" I'histoire critique des Incas: 8" les institutions; /i" les monuments. M. Malte-Bnm signale cette derniere partie conune I'enfermant des documents entierement nouveaux, fournis a I'auteur par M. Leonce Angrand, consul general de France en Amerique, qui a s^jouiut' ( 209 ) pendant plusieiu's annees au Pt^roii, et qui a g6n6reii- sement contribn6 a la formation Aw Mus6e des antiqui- t6s americaines du LouM-e. M. L6once Angrand a pris en outre des dessins tres exacts, avec les plans et les inesares des monuments les plus importants de I'epoque anterieure a la conquete, et entre autres des ruines si importantes de Tyahuanaco, d'Ollantai-Tambo, de Choccequirao, de Cuncacha, du Cuzco, etc. Le resul- tat nouveau de ce travail est d'6tablir que la civilisation anterieure a I'epoque des Incas, etait tr6s sup6rieure k cette derni^re. 11 est donn6 lecture de la relation, adress6e par M. Barbier, de son voyage en Alg6rie. Les parties les plus intt^ressantes de ce travail pourront 6tre extraites pour le DiiUetin. M. de Quatrefages appelle F attention de la Soci^le sur les passages suivants extraitsde Gomara, et qui lni paraissent avoir 6te trop oublies par la plupart des au- teursqui se sont occup6s derethnolgieam^ricaine (1). (( II (Valua) trouua aucuns esclaues noirs ; il demanda » a ceux du pays d'oii estaient cos noirs, mais il n'en » pent autre chose scauoir, sinon qu'il y aurait aupr^s » des gens de ceste couleur, auec lesquels ils auaient » ordinairement la gnerre. (le furent 1^ les premiers 1) noirs qui aient 6t6 veuz aux hides, et si ie croi qu'il (1) Hisloire g^ndrale des ludcs occidentales el terres ueuues qui iusques ii prdsont ont esld decoiiiicrtcs, augniciitee eu ceste ciu- quiesrae edilion de la description de la Nouuellc Espagne et de la grande villc do Mexicque aulrenient nominee Tenuctilan. Composde en espagnol par Franfois Lopez de Gomara el IraJuilc en Francois par le S. de Genille Marl. Fumee. Paris, 1G06. ( 300 ) li n'enapoint (^te veuz d'autrcs (livrelll, cli. i.xii) (I). )) Les Indiens de Daiien et de loute la coste dn goulle « d'Vraba et nonibre de Dios, sont de couleur enlre n iaune et tannee, encore qu'il ii'en soient tiouez, comnie n nous avons diet, en Careca d'aussi noirs que les ha- » bilans de Guint^e (livre 111, cli. xvjii). » Nos gens virent de siir la coste de la mer desnauires » qui auaient les antennes dorees et les proues argen- » tees, chargees de marchandises ; on ])ensait qu'elles » fussent de Catay on de la Sina, parce rpie ceux de » dedans faisaient signe d'auoir ja flotte parTespace de » trente iours (livre VI, cli. xviij). » Des observations sont faites a ce sujet par plnsieui'S membres, MM. Jomard, Gnigniant, A. Maury et Trt;- maux. M. Jomard presente ses propres vues sur I'origine des populations araericaines. II emet I'opinion qu'on doit avant tout, dans cette question difficile, dis- cerner trois choses essentiellenient distinctes : 1° la population primitive du continent am^ricain; 2° les "communications qui ont [)u exister entre les di- verses parties de rAmerique et de I'ancien conti- nent; 3- I'etat et le degre de civilisation des races indigenes avant le xv" si6cle. II n'est pas douteux, ajoute-l-il, que des causes naturelles aient pu acciden- tellement, dans les temps recules, transporter des na- vires d'Afrique ou d'Europe jusque sin- les cotes ame- ricaines orientales. Les vents alizes, de tout tem])s, ont du Jeter, sur les cotes, des d6bris de naufrages ou (1)11 faut lire chap. XII. . ( 301 ) de barques desemparees. Uiie autre cause, telle que les courants, fait arriver, encore de nos jours, sur la c6te occidentale, des matures et des d6bris de navires venant de 1' ocean Pacifique, peut-etre meme des cotes de I'Asie. Mais il faudrait se garder de conclure, de cette possibilit6 de communication entre I'ancien et le nouveau continent, au fait meme de I'arrivee des tribus airicaines ou asiatiques, peuplant I'AnK^rique pour la premiere fois. L'liistoire, a cet 6gard, se tait aljsolu- ment : le champ est seulement ouvert aux conjectures. Les savants qui ont admis la possibilite du passage de certaines tribus des cotes N.-E. de I'Asie a la cote N.-O. d'Am6rique, ne pouvant apporter aucun texte positif a I'appui de cette hypoth^se, ont expos6 leur opinion avec reserve, et la question reste intacte avec toutes ses difficult^s. Quant au degre de civilisation, plus on moins avan- c6e, auquel etaient parvenus les indigenes avant I'ar- rivee des Espagnols, il faut d'abord remarquer que les habitants des dillerentes contr6es, au sud et au nord du nouveau continent (1) , ont cr66, pour chacune d'elles, un style particulier. M. Jomard parle ici des monu- ments. Et, en outre, aucun de ces styles ne represente ceux de I'Asie ou de I'lfrique septentrionale. L'archi- tecture, sous le triple rapport de la constiiiction, de la disposition, de la decoration, diflere absolument de celle des nations de I'ancien continent ; cela suffirait pour ])rou\ev V nii/uclii/ion/e des Am6ricains. D'ailleurs, (1) Le Chili, le P6rou, la Nouvelie-Grenade, rAm^rique cenlrale, r Yucatan, le Meiique, etc. ( 302 ) rfii'y a-t-il d't'tonnaiit que les fanilt<^'* propres h I'liomme, quelle qiie solt sa lace, I'aiont poi'te, par toiite la terre, k cr^er les arts n^cessaires k IVxistcnce et aux besolns socianx ? Pourqiioi empniiiterail-il a (Vautres races lo^ arts pi-iinilifs, (juc sou inlelligenco et la n^cessit6 lui out fait promptement inventer? Jiis- qn'k ceijiinti (16raontre formelleinent I'identit^ de Ian- gage, ridentit6 de inoeurs et ridentite de caract^res physiques entre rAmerique ot le vieiix monde, il sera sage de s'abstenir. M. Guigniaut appnie les observations de M. Jomard, et fait reinarquor qii'il faut bien dislingtier la question dn peiiplenieiit priiuitifdc rAnicM'iquc, et celle de I'ar- riv^e danscette partiedu monde depopulations venues de I'ancien continent. M. Alfred Maury declare que, tout on reservant la question do I'origine des premieres peuplades qi:i ont habits le noiivoau monde, il tiont pour incontestable le fait d' Emigrations ayanteulieu dii nord-estde I'Asie en Amerique. Les recherches linguistiques et arch^o- logiques ont d6montr6 qu'une partie des races du Mexique se rattachait ci la famille des Indiensde TAuk^- rique du Nord, qui se lient eux-memesaux populations sib^riennes par ime chaine continue donl on a retrouve divers anneaux. Toutefois, la ci^'ilisation de 1' Ame- rique centrale presenteuncaractere d'autoclithonie qui n'a 6chapp('^. k aucun de ceux qui en ont fait I'objet de leurs Etudes. A la suite des observations faites par ses collegues, M. de Quatrcfages declare que les deux passages qii'il a citEs lui paraissent dEmontrci" deux choses : 1" qn'a ( 303 ) r^poque de la conquete, il existait en Am^rique des lioninies parfaitement noirs et tr6s probablement de vrais n6gres (Orientaux on Occidentaux); 2° qu'a la mSmeepoque, il y avait entre la cOte d'Asie et rAm6- I'ique, des relalions plus ou moins actives. M. de Qua- trefages n'entend d'ailleurs tirer de ces passages, an moins quant a present, aucune autre consequence. En particulier, il ne pense pas que le dernier vienne con- firnier 1' opinion qui attribue le developpement des so- ci6t6s americaines uniquementou presque uniquement k des emprunts faits t'l I'Asie, les civilisations ameri- caines lui paraissant presenter k un haut degre des caracttjres originaux et spontan6s. M. de Quatrefages reserve egalement la question du peuplement du con- tinent americain, question k ses yeux plus coniplexe que ne I'admettent plusieurs ethnologistes. La Soci6t6 fixe au 23 avril sa premiere assendjlee g^n^rale de 1858. Seance du 9 m>ril 1858. La Society royale de Londres adresse a la Society la suite de ses Transactions, et la remercie de I'envoi de son Bulletin. M. Beaudouin,chef d'escadron au corps d'6tat-majoi', remercie la Soci6t6 du titre de correspondant qu'elle vient de lui accorder. Appeie par ses fonctions dans la province d'Oran, il se ])ro])ose d'tHudier plus particu- li6reuient la g6ographie de cette region de I'Algerie, et de r6pondre k toutes les questions qui lui seraient faites sur les points qui restent a 6claircir. Hi. MaltP-Brun annonce qu'il a refu ime leltre de la ( 30Zi ) Guyane, ot qn'il en donnera locinro h. l"assonil)lee si I'ordre du joiir de la stance le permet. M. le president si^iialo a la Soci^'t6 la presence de M. Diaz qui a le projet d'entreprendre mi voyage dans Ics provinces interieures du Br^sil. M. Joinard met sous les yeux de I'assembl^e, qui I'examine avec beaucoup d'int6iet, le dessin a grande 6chelle do la carte itineraire du voyage de M. de Cour- val, de Bender sur le Nil .'i Massouah sur lamer Rouge. Le mOme raembre pr6sente au nom de I'auteur , M. Jean Miani, une nouvelle carte du bassin du Nil, indiquant la commune origine de ce fleuve avec les ri- vieres du Zanguebar. M. d'Avezac ollVe, au nom des auteurs, un ouvrage intitide : J. a Ivgishtiion li'mdour, traduite du tamil a Pondichery, par M. F. E. de Sice ; xme notice de M. Delarbre sur In Umlte des possessions porlugaises au sud de I'eqnatenr ; et uu Essai snr les oiira^a/is et les tempetes, par M. le capitaine de vais- seau Lartigue. M. de La Roquette fait horn mage de sa I\otice biograpJuqne sur M. J. J. A. fJuot. M. Bouillet annonce qu'il a recu de riionoiahle P. J. 0. Chauveau, directeur de 1' instruction publique au (Canada, mi exemplaire de TAnnuaire du Canada [Canada directory, 1858), ouvrage qui lui paraltde na- ture a,int6resser la Society ace double titre, qu'il ii.iilo d'un pays colonis6 et longtemps possed6 par la France , et f{u'il renferme sur ce pays une foule de renseigne- ments Jiutlientiques que Ton chercherait vainemcut ailleurs. Onytrouve, en elTet : 1" une carte du Canada, drcss6e sur une grande echelle ; 2°un vocabulaire alplia- b^tiquc do toutcs les localit6s du Canada, avec une descr.ption abr6g6e de cliacune d'elles et 1' indication ( 305 ) des distances; 3" les renseignenients statistiqiies les plus complets sur les objets les plus int^ressants : I'a- griculture, le commerce, I'industrie, les banques, les cultes, les ecoles; radministration, la justice, I'armee, les finances ; les routes, les canaux et les chemins de fer; la population et son origine, soit franraise, soit anglaise, et le nouiljre comparatif des habitants issus de I'une ou de 1' autre nation. M. Bouilletmet Fouvrage a la disposition de la Societe pour ceux de ses menibres qui voudraient le consulter. La Societe admet au nombre de ses membres M. Coss6- Brissac et M. Robert Schlagintweit. MM. le general Daumas, s6nateur; Ch. Sainte-Claire Deville, membre de I'lnstitut ; Edouard de Bykovski, citoyen et proprietaire en Lithuanie, et Jean Miani, voyageur en Egypte, sont prt^sent^s pour etre admis dans la Soci6t6, le premier par MM. Lefebvre-Durufl6 et Daussy, le second par MM. de Quatrefages et Daussy, le troisi^me par MM. Dally et Jomard, et le quatrifeme par MM. Jomard et Gamier. La Commission du concours au prix annuel pour la decouverte la plus importante en g^ograpliie, annonce quelle vient de decider que lagrande m^daille d'or de la Societ6 serait d^cern^e k la m6moire du D' Kane pour son voyage dans les regions arctiques. M. Albert Montemont rend compte des deux voyages de M""' Ida Pfeifl'er autoar du monde. — Renvoi au Bulletin. M. le chevalier da Silva lit la suite de sa notice sur rOyapoc, qui est egalement renvoy^e au Bulletin. ( S0« ) OUVRAGES OFFERTS A LA SOCI^Tfi. SEANCES DU MOIS D'A^R1L 1858. TUres des ouvrages. • Donateurs. EUROPE. Histoiredu sol de I'Europc, par J. C. Houzeau, aiuicn aide a I'Obser- vatoire de Bruxellcs, membrede PAcaddmie de Belgique. l!ruxelles, 1857, 1 vol. m-S". M- Hoitzeai'. ASIE. Legislation hindoue publide sous le litre do Vyavahara-fara-san- graha ou Abr^gd substantiel de droit par Madiira-Kaudasvami-Pu- lavar, professeur du coll(^ge de Madras, Iraduite du taniil , par b.-E. Sic6,sous-commissaire de mariue. Pondichery, 1857, 1 \o\. ia-8°. M. r.-E. Sice. AFRIUliE. De la liiulte des possessions portugaises au sud de I'Equateur ; br. iu-8". Paris 1858. (Extrait de la Revue coloniale.) M. Delahbre. Observations gdndrales sur le mcraoirc sur le Soudan do M. le comte d'Escayrac dc I.auture, par M. Ch. Cuny. Paris, 1838, br. in-8'. (Extrait de« Nouvelles Annates des Voyages.) M, le comtc d'EscATRAC. OUVRAGES GfiNERAUX, MfiLANGES. Es»ai sur les ouragans et Ics tcnipcHcs et prescriptions nautiquespyur en soulTrir le nioins de dommages possible, par M. Lartiguc, capi- laine dc vaisseau. Paris ISSS, 1 vol. in-8* avec planches. M. I.AIITIGUE. Repartition gdographique dcruni>ersalit(' des mdtrorcs en zones tcr- restres, atniosphdriqucs, solaires ou iunuires; et dc leurs rapports entre tiles. Paris 1858, br. in-8'\ — Analyse des hypotheses an- ciennes el modernes qui onl die Praises sur les tonnerres sans dclairs par un ciel parfaiteracnt serein ou dans le sein des nuogcs, 1857, ( 307 ) litres des ouvrages. Donateurs. br. in-8". — Coukur des (5toiles el des globes Giants observf's en ADgicteric de 1841 ii 185."), (Extrait des Comples rendus des seauces de I'Academie des sciences.) In-4°. M. A. Poet. Notice biogra|)hique et litt^raire sur Pierre - Augustin Guys, de rAcademie de Marseille, associ^ de I'lnstitut de France, citoyeii d'Atheiies, etc., par M. Henri Guys, consul de 1" classe en re- Iraile, etc Marseille 1858, br. in-8". M. H. Guys. Notice hislorique sur M. Huot, par M. de la Roquette. (Extrait de la Biographic unii^erselle.) M.de la Roquette. CARTES. Carte topographique et mililaire des Pays-Bas, par Ic depot lopogra- phique, a rcchelie du 50 000^ Feuilles 37 ct 46. Rotterdam et Vicrlingsbeek. I e Ministre de la guerre de la Have. Par la Sociele de geographic de Vienne : Unrathskanale Wasser u. Gasrohrenleitung der Kais. Kiin Haupt-und Residenz-Stadt Wieu, 1858. 5 feuilles. Societe de geographie de Vienne. Nouvelle carle du bassiii du Nil, indiquant la commune origine de C8 fleuve avec Ics rivieres de Zanguebar, dcdi^e a la colonic europ^enue d'Orient, par J. J. Miani. Paris 1858. 1 feuille M. J. J. Miaki. MEMOIRES DES ACADEMIES ET SOCIETES SAVANTES, RECUEILS PERIODIQUES. Philosophical transactions of the royal Society of London, for the year 1857, part. I, II. — Proceedings of the Royal Society, vol. VIII, n"' 27, 28 et 29. — Address of the right honourable the lord Wrottesley, the President, delivered at the anniversary mee- ting of the Royal Society , on monday, november 30, 1857. — Report on the adjudication of the Copley , Rumford , and royal medals and appoinlemeut of the Bakerian, Croonian, and Fairrliild Lectures. Compiled from the original Documents in the Archives of the Royal Society, by James Hudson, assistant-secre- tary and librarian. London, 1834. — The report of the twcnty- siith meeting of the British association for the advancement of science, held at Cheltenham, in august 1856. 1 vol. in-8". — Pro- ceedings of the royal geographical Society of London, vol. II, n* 1. ( 308 ) Tilres des ouvragcs. Donaleurs. — Miltheilungeii iiber wicliligc ucuc l>for.>rluin2Pn auf dcm Ge- sammlgebif tc dcr Geographic voii D' A Pi'lcrmaim, u" 2. — Zeit- schrift fur Allgoincirip Knlkunde, Janvier. — I3il)liolhoi)(ic uiiiver- selle de Geneve, cl archives des sciences physiques el iiaturclles, noveiubrc el d(5ceinbrc 1837. — Aiiiiales du commerce exl^rieur, fevrier. — Nouvciies annalcs des voyjigcs, mars. — Bulletin de la Socielc geologiquc do France, mars. — Bulletin de la Soriet(^ zou- iogique d'accliraalation, mars. — Revue de I'Orieiil, de I'Algerie el des colonies , novembre eldecembre 1857, mars 1858. — Journal d^ducation populaire, fevrier. — Bulletin de la Socit'te industrielle d'.Vugers, aim(5e 1857. — L'Ing('nieur, revue scicnlilique cl cri- tique des travaux publics el dc i'lnduslrie, avril. — L'E.'perance, journal grec. I.es Auti.lus et Lditelhs. BULLETIN DE LA SOCIETfi DE GEOGRAPHIE. MAI ET JUIN 1858. IBeuioireis, etc. AsxemblQC gmerale du 23 avril 1858. DISCOURS DE M. D\USSY, President de la Soci^t^, membre de I'lustitut. Messieurs, La Soci6t6 de Geographie, dans sa premiere stance g^n^rale de cliaque ann^e, d6cerne le prix qu'elle oflre tous les ans a la d6couverte la plus importante, et re- nouvelle son bureau. Je viens done aujourd'hui r^si- gner les fonctions dont vous avez bien voulu m'honorer. Je regrette que nia position solitaire ne m'aitpas per- mis de rendre a la Soci6te tons les services qu'elle attendait de son president. Simple travailleur, je n'ai pu que suivre attentivement les progr^s de la science XV. MAI ET JUIN. 1. 21 ( 310 ^ en assistant aussi assidumpnt qu'il in'a 6t6 po<5sible aux s6ance3 de votre commission centrale, veritable foyer ou viennent se r^unir tous les rayons qui ^clairent la science. C'estdans des reunions semblables, entre per- soniiss qu'un meme gout attache a nne science parti- culifere, que chacun trouve Ic moyen de se tenir au courant des progr^s qui se font. On y contracte en meme temps une esptee de confraternite qui tend k assurer les pas de chaque menibre, et une discussion amicale fait souvent jaillir de nouvelles id^cs Ces So- cif^t^s r6unissent k la foisles avantages de I'association qiii doujjle les forces des individus en les r^unissant en faisceau, et ceux de la sp6cialit6 qui circonscrit les elforts sur un petit norabre de points. La g^ographie, pl;is que toute autre science, a besoin de ces counuunications fr^quentes pour avancer plus rapidenient vers le but qu'elle se propose, qui est la connaissance du globe que nous habitons. Chacun de nous laisant connaitre a ses confreres les uouvelles qu'il a recues, les obsen'ations qu'il a pu faire sur les points qui fontl'objet special de sesrecherches, r^pand ainsi parmi eux les r^sultats de ses investigations par- tic ulieres. Je ne puis done mietix faire en terminant ma pr6si- dence que d'engager les membresqui font partie de la, Soci6t^ dc Geographie a assister assidiiuicnt aux stances dela Commission centrale et a prendre part a. ses tra- vai!\ ; il en resultera certainement avantage pour eux et pour la, science qui fait Vobjctdf! no,s etudes de pre- diUxVioH. I 311 ) RAPPORT SUR LE CONCOURS AU PRIX ANNUEL POUR LA DfeCOUVERTE LA PLUS IMPORTANTE EN GfiOGRAPHlE. Commissaires : MM. d'Avczac, Joraard, Malle-BruD, Alfred Maurj el Daussy, rapporteur. La Soci6t6 de G^ographie, moins sans doute pour encourager les efforts des voyageurs que pour t6moi- gner sa syinpathie envers ceux qui consacrent leur existence a 6tendre le domaine de la science et pour couronner leiu's succ6s , d6cerne chaqiie ann6e une grande m^daille a I'auteur de la d^couverte la plus importante. Pour assurer la parfaite connaissance des travaux auxquels elle accorde cette distinction, elle recule de trois ans I'appr^ciation qu'elle fait des d^cotivertes qui ont droit k cet honneur. C'festdonc seulement parmi les voyages ex6cut6s en tout ou en partie en 1855, que votre commission a du chercher celni qui lui paraissait m^riter cette honorable recompense ; elle vient aujour- d'hui, Messieurs, vons communiquer le r^sultat de ses investigations. Deux regions, depuis plusieurs annees, ont (5t6 le theatre des recherches et des d6couvertes les plus im- portantes, et malheureus:'ment aussi elles ont compt6 parmi leurs explorateurs i)lus d'une victime de la science ; voiis avez nomni6, Messieurs, Tinterieur de I'Afrique et les regions polaires arctiques. Les recherches dans I'interieur de I'Afrique sont sti- ( 312 ) mul6es non-seulement par la curiositt^ qui nous porte h explorer des ])ajs inconnus, mais aussi par le dt-sir bien naturt'l d'etendre les relations coinnicrciales et de trouver de nouveaux dd^bouchd'S pour les produits de rindustrie. Deja en 1856 et 1857, vous avez couronn6 les travaux dii I)' Bartli etdu r^v6rend Livingstone qui, parleurs voyages executes en 1853 el 1854, ont ajout6 des donnees tr^s pr6cieuses t\nos connaissances surles contr6es de I'int^rieur de rAfrique. L'ann6e 1855a vu aussi un voyageur plein de talent et de z61e porter hardinient ses pas dans ces contr6es aussi dangereuses par I'ardeur de la temperature que par la barbaric des peuples qui les habitent. Le D'Vo- gel, donl iious avons tons sui\ i les excursions avec le ])lus vif interet, paraissait devoir nous rapporter des r6sultats d'une haute importance, lorsqii'il a ^t^ arret6 par la jalousie d'un des chefs qui dominent dans ces contrees, et Ton a Ueu de craindre qu'il aitp^ri victime de son z6le et de son courage. L'on aime encore ce- pendant a conserver des doutes sur Tissue funesle qui nous avait 6t6 annonc6e, et Ton esp^re encore, quoique faiblement, que nous ne serons pas r6duils a chercher seulement h sauver du naufrage les papiers qui doivent nous donner une connaissance exacle de ses travaux Ton neconnaitjusqu'ace jour que tr6s superficiellement. Ce manfjuc de documents et surtout I'espoir devoir vevonir eiilin M. Vogel a porte votre commission k re- mettre a une autre ann6e I'examen des litres de ce voyageur a la m^daille de la Soci6t6. Dans les regions arctiques, la Soci6t6, en 1855, a couronn^ les travaux du rapitaine Mac-C.lure qui le pre- ': 313 ) mier a franchi I'espace qui s6pare le Grand Ocean de I'oc^an Atlantique, etquiaparcouruce fameux passage au nord-ouest, objet de tant de tentatives, et on peut le dire aussi, qui pri^sente bien plus d'int6ret pour notre curiosite que d' utility pour I'avenir. C'est a la recherche d'une illustre victime de la science, que le capitaine Mac-Clure et beaucoupd'au- tres navigateurs avaient 6t6 explorer ces pays bloques par des glaces ^ternelles sous la pression desquelles il n'est que trop probable qu'ont 6te ensevelis les (Equi- pages de \ Erebus et de la Terror avec leur intr6pide commandant sir John Franklin. C'est encore pour tenter de nouvelles recherches sur Jeur sort, que le D' Kane qui d6ja, en 1850, avail fait partie d'une expedition envoy^e par M. Grinnel sous la direction du capitaine de Haven a la recherche de Franklin, s'est 61ance encore une fois dans cette car- rifere p6rilleuse. Cette fois c'^tait lui qui ^tait charge de la direction de 1' expedition fr^tee comme la pr6c6- centepar M. Grinnel. Les observations qu'il avait faites dans son premier voyage et I'exploration du capitaine Inglefield au fond dela baiede BafTm, lui persuadaient que, de menie que le detroit de Lancaster explore plus attentivement avait donn^ entree dans des mers int^- rieures qui s6parent en nombreuses iles les terres qui s'etendent jusqu'a I'ocean Arctique, led6troit de Smith dans lequel le capitaine Inglefield avait d6ja p6netre assez avant devait communiquer avec la mer Polaire et faire du Greenland un groupe d'iles s'avancant au loin vers le pole. L' opinion mise en avant del'existence sous le pole meme d'un vaste bassin dans lequel Frnn- klin iuiraii ]>ii pt'iii'iicr, lui d(iiinai( encore I'espoir de trouver ses traces clans ces parages inexplor^s, et peut- ttve meme le sauver. Ge fut le 30 mai 1853 que le D' Kane partit de New- York sur le brick ryidvance qui avait6t6 dispose pour supporter autant que possible le choc des glaces. Le premier juillet il atterrissait sur la cote du Groen- land k Fiskernocss apr^s y avoir piis quelques pro- visions et embarqu6 un Esquimau qui pouvait leur 6tre d'une grande utilitt^ par I'habitude qu'il avait de ces coiitr6es, on longea la cote occidentale de ces terres au milieu, demontagnesde* glaces. \ la fin de juillet I'exp^- dition atteignait la baie Melville , et entrait le 7 aout dans le d6troitde Smith ou Ton visitaitl'ile Littleton et le cap Hatterton, derniers points d^termin^s par le capi- taine Inglefield par des observations directes. Aprfes avoir lutt6 p^niblement contre les courants et les glaces qui encombrentle d6troit qu'il voulait remon- ter, apr6s avoir fait lui-meme une excursion en trai- neau jusque par 78° 50' de latitude afmde s'assiirer de I'impossibilit^ de conduire plus avant son batiment, le D' Kane fut enfin oblig6 a chercher un abri ou il put passer avec s6curit6 I'hlver qui s'avancait rapidenient. Ce fut dans le fond de la baie Rensselaer qu'il le con- duisit ; Ici, par 78" 37' de latitude V y^ilvtuicf lutenfer- m6e dans les glaces dont elle ne devait plus se d^gager. Nous ne chercherons pas a vous (aire connaitre toutes les souffrances qu'eurent h. endurer nos voya- geurs dans un cliniat aussi affreux, et pendant une absence du soleil (pii dura pr^s de trois mois, nous n'oublierons pas que noussommes ici une Society s'oc- ( 31ft ) cupant sp^cialeiiieiit des ]M-ogT6s de 'U^ g^ogta phif . l.aissant done de c6t6 tout ce qui dans le r6cit dit D' Kane pourrait 6moiivoir la sensibility, nousne nous occuperons que des travaux scientifiques qui ont 6t6 ex6cut6s pendant cette expedition et qui tendent k aug- menter nos connaissances de ces climats glac6s. L' absence de la lumi^re n'interrompit point les ob- servations journalieres, et un observatoire magn6tique etabli a peu de distance du navire permit de suivre as- sidument les ph^nom^nes magn^tiques et m6t6orolo- giques. Aussit5t que le retour du soleil sur 1' horizon et une temperature moins apre permit de penser a poursuivre les recherches, des expeditions furent organis^es pour visiter, aumoyen detraineaux conduits par des chiens, les cotes que Ton voyait dans I'ouest et dans le nord. Joignant toujours k leurs investigations pour tacher de decouvrir quelques traces de I'expedition de Franklin, tout ce qui pouvait donner les moyens de determiner d'lme maniere aussi exacte que possible la delineation des cotes qu'ils parcouraient, nos voyageurs enipor- taient soigneuseivent avec eux les instruments ueces- saires pour determiner leur position et pour obtf nir des reievements exacts sur les points en vue dont ils ne pouvaienl pas approcber. (Vest ainsi qu'on a des ob- servations de latitude faites au 'sextant et a I'borizon artificial jusque par 80° 4-1 ' nord. La determination precise, tant en latitude qu'en lon- gitude, du point oil \ Jdvnine a pass6 deux hivers a ete obtenue par de nombreuses observations quine lais- sent aucun doute sur son exactitude. Les derniers points ( 316) observes au nord par 82" 30' de latitude ne pr6sentent sans doute pas la meine certitude, mais ils n'en sout pas moins, dans la limite des erreurs possibles, mie acquisition tr^s importante pour la coniiaissance de cette partie du globe. La remarque qui parait la plus int(''iessante dans cette exploration , c'est sans doute Texistence d'une mer libre de glaces dans ces hautes latitudes, telle qu'elle a etc'. constat6e par I'expedition conduite par M. Morton qui parvint le 25 juin lS5Zi au cap Consti' tucion par la latitude de 81° 22' d'oii Ton apercevait k toute distance dans le nord une mer lii)re dans laquelle la vague paraissait venir du nord et tiaverser le canal comme si elle provenait d'une ouverture situ6e vers le nord-est. Cette ouverture du canal auquel les g6ogra- phes se sont plu a donner le noni de mer de Kane, et qui est situ6 entre Iiextr6mit6 nord du Greenland et les terres d'Amerique que Kane a appelees Victoria et Albert^ est encore corroboree par le f\iit d'un courant tr6s fort qui a 6t6 observe dans ce canal et qu'on estirae fetre de 4 a 5 noeuds. Api'iis le retour de cette expedition a bord de \ Ad- vance^ une autre fut dirigee vers I'ouest et le sud-ouest, pour voir s'il ne seraitpas possible degagner led^troit de Jones et celui de Lancaster, mais apr^s les plus grands efforts, on dut encore renonceracet espoir et se r6signer i passer un second hiver dans le^ glaces. Pour adoucir un peu leur position on entraen relations avec un t^tablissement d'Esquimaux, situ6 un peu plus au sud, chez lesquels on put sc procurer quelques vivres. En 185.5. an retour du prinff^nips, si toutefois on ( 317 ) pent donner ce nom a une saison dans laqnelle le so- leil se fait voir, il est vrai , mais ou la temperature encore de beaucoup aii-dessous de z6ro, ne peut arri- ver a s6parer les 6normes masses de glaces qui obstruent tous les passages, de nouvelles tentatives furent faites pour d6gager le brick, mais inutilement. II n'6tait pas possible de songer a passer un troisifeme hiver dans les glaces, le combustible conimencait a s'6puiser et plu- sieurs malades etaient dans un etat dangereux. 11 n'y avait done d' autre ressource pour gagner le sud que de trainer sur la glace les embarcationsquel'on devait remettre a I'eau aussitot que Ton serait parvenu a la limite des glaces fixes. Ce fut le 20 niai 1855 que Ton abandonna enfin le brick. Le 19 juin on quittait les glaces et Ton s'em- barquait dans trois petites embarcations pour gagner les 6tab]issements danois dont on atteignait le plus septentrional, Uppernavick, le li aoiit, apr^sune navi- gation p6rilleuse de quarante-cinq joui's. L'n batiment danois cpii s'y trouvait, recutuos voya- geurs et les condnisit a Godhavn ouLievely surl'ile de Disco; apres un s6jour de pr6s d'un mois dans celieu, ils 6taient sur le point de s'enibarquer sur le meme batiment qui retournait en Europe, lorsque la barque He/ease et le vapeur Jrtic, envoy^s par le gouverne- nement des Etats-Unis a la recherche de Kane et de ses compagnons, etqui s' Etaient avanc^s au milieu des glaces jusqu'au cap Hatterton, parurent a I'entree du port, et nos intr6pides voyageurs, heureux de rencontrer des couipatriotes, s'embarqucrent sur cesbatiments pour revenir a New- York ou ils arriverent Ic 11 octobro. ' 31« ) Tel est en ])eu de mots le resume de rexpi^dition du D' Kane dans les mers arctiques ; entreprise dans une intention hunianitaire que nous apprecions tous, et pour venir au secours s'il 6tait possible d'une graude infortime k laqiielle la J^oci6t6et le monde tout entier a pris un si grand int<^ret, elle a failli elle-meme 6tre victime de son d6vouement et de I'apret^ des regions qu'eile allait explorer ; mais 6chapp6e a cet aflVeux niallieur ei n'ayant perdu qu'iin petit nombre de ses membres, elle a rapporte des travaux importants sur des points dont on ne peut gui're esp^rer obtenir de fr6quentes relations. Les i^echerches sci^ntiiiqiicsn'ont 6te negligees en rien, et la g(^ographie aussi bien que la physique du globe trouvenl dans la relation qui en a 6t6 publiee , des documents d'un graud int^rfit. L'existence pemianente d'une jpier libre dans ces pa- rages ne doit sans doute pas etre adopt6e sans un exa- men plus appro fondi, puisque Kane lui-meme rcmarque que le capitaine Inglefield avail annono6 un bassin po- laire enti6rement libre de glaces, la ou des glaces fixes avaient I'annt^e suivante arr^t^ la marche de 1' . ulvnuce^ et nous citerons ^galement que vers le p6le sud le ca- pitaine "N\ cddel avait p^netr^ en 1823 jusqu'c^ 74" de latitude, tandis qu'en 1838 Dumont-D'Urville tron^'ait une barri^re de glaces infrancliissable par 6.'°. Mais on peut conclure siirement de la que les glaces se d6- placent en grandes masses, et laissent quelquefois nn libre passage \k ou h. quelques ann6es de difli6rence on ne trouve qu'une immense 6tendue de glaces solides. Les travaux du D' Kane ne son! pas moins d'une grande imporlanco en nous faisant connaitre une par- ( 319 ) tie tr^s notable de la cote noixl tlu Greenland et des terres qui liii font face dans I'ouest. Aussi votre com- mission n'a-t-elle pas h6sit6 a lui d^cerner le prix pour la d^couverte la plus importante pour I'ann^e 1855. Malheureusement, Messieurs, c'est sur une tombe que nous d6poserons cette couronne ! Les souffrances que le D"^ Kane avait 6prouv6es dans ces regions inhos- pitaliferes, avaient attaqu6 chez lui les sources de la vie, et il a succonib^ le 16 f6\rier 1856, a I'age de trente-cinq ans. Mais la Soci(^t6 de Geographic ne doit paslaisser dans I'oubliles beaux travaux qu'ila dirig6s d'une mani^re si intr^pide, et si nous n'avons pas la satis'"action de lui donner a lui-meme la m^daille d'hon- neur, du nioins nous la consacrerons a sa m^moire, Apr^s la lecture de ce rapport qui avait 6t6 com- munique pr6alaljlement a la Commission du prix, M. le rapporteur ajoute les observations suivantes : Messieurs, Le rapport que je viens d'avoir I'honneur de vous lire etait enti^rement termini, et il en avait 6t6 donn6 connaissance a la commission du prix, lorsque j'ai re9U kmdi dernier un journal anglais dans lequel se trouve un extrait de la seance de la Soci6t6 de G6ograpliie de Londi'es de lundi 12 de ce mois. Dans cette s6ance il a ete donn6 lecture d'lm memoire du D' Rink, Danois qui a reside huitans au Greenland, dans lequel lesd6- couvertes du D' Kane sont vivement attaqu^es. II r6- sulte de la discussion qui a en lieu dans la Soci6t6 et h laquelle ont pris part sir George Back et le capitaine ( 320 ) CoUhison, qui oiU tous deux explore les regions arcti- ques, que l'intr6pidite, la perseverance et la veracil6 du Dr Kane ne peuvent soufTrir aucune esp6ce de doute, mais on pense que les observations de M. Morton qui s'est 61ev6 jusqu'au cap Constitucion qu'il place par 81° 22' de latitude, pourraient bien n'etre pas certaines, et le D' Rink regarde comnie erron6e 1' assertion qu'il ait vu la cote nord du Groenland et reconnu une nier polaire libre de glaces. Nous n'avons vu (ju'un Ires court extrait du m6iuoiro du D"" Rink, par consc-quent nous ne pouvons pas ju- ger des arguments qu'il a fait valoir, niais nous n'avons pas voulu changer un seul mot k notre rapport ; d'abordparceque le courage etl'intrepiditeduD' Kane ne sont point suspectes et que tr^s certainement il a 6t6 plus loin qu'aucun de ses pred^cesseurs, et de plus parce que nous#ne voyons pas comment on peut suppo- ser que les observations de AI. Morton sont inexactes sans leur en opposer d'autres. On a fait remarquer que M. Morton 6tait stea'art, c'est-a-direcommisaux vivres du batiment du D"" Kane, cela n'entraine nullement qu'il fut hors d'etat de faire de bonnes obsenations de latitude; il n'a pu, dit-on voir la cote d'Amerique oppos6e au Groenland, parce qu'il en 6taitbeaucoup trop loin. On pourrait peut-etre dire qu'il aestim6 trop forte la distance qui le s6parait des points qu'il a relev^s vers I'ouest, maisilire qu'il n'a pas vu les terres dont il donne les rel^vements, c'est une assertion purement gratuite et qui ne repose sur aucun fondement. Quant ;i la nier lii)re de glaces, on a vu dans men rapport que sans aduiettre I'existence permanente d'une ( S21 ) mer polaire enti6rement libre, ce que plnsieurs g6o- graplies ont soutenu, je ne crois pas que Ton puisse se refuser k croire k 1' existence au moins teniporaire d'une vaste ^tendue d'eau entiferement d6gag6e de glaces dans ces hauteg latitudes -, il me semble done que rien ne pent porter a suspecter la v'6racit6 de M. Morton, tout en reconnaissantque la determination des derniers points relev6s au nord peut certainement presenter des doutes que nous serious heureux de voir Iev6s par d'autres voyageurs aussi intr^pides que le T)' Kane. P. D, NOTICE sun l^BOUARD VOGEL Et si/r son exploration dans V Ajrique centrale, Luc a la stance g(«n^rale du 23 avril 1858 (l). Trois ann6es s'6taient ecoulees depuis le depart de Barth et de ses compagnons pour leur grande explora- tion de r Afrique centrale, et Ton avait pu, grace aux renseignements empresses du Foreing-Office et aux int^ressantes communications d'un savant g^ographe, le D' Augustus Petermann (de Gotha) , suivre pour ainsi dire .pas a pas les voyageurs dans leur grande traver- s6e de Tripoli au lac Tchad, lorsque la triste nouvelle de la mort du chef de 1' expedition James Richardson (Ij Cette ledum est exlraite d'un travail plus considerable que je me reserve de publier dans qiielques mois avec une carte, des notes, el les principales observatiouj scieoliOques que Vogel a fait parvenif ca Europe. V. A. M.-B. ( 3i22 ) se i^pandit en Europe, el fit un instant (^vanouir les grandes et Jegitimes osp6raiiccs rpie le dc^bui si heu- reux de rexplocation avait fait concfvoir. Les lettres du D' Barth vinrent confumer ces tristes nouvelles , inais du meme couj) elles calm^rent les sinistres appreheusions qu'avait fait uaitre leur pre- miere impression. En eflet, Barth et Overweg se mon- tr^rent a la hauteur des circonstances : leur courage ne se dementit pas ; ils resolurent de donner suite k la grande eutreprise daus laquelle ils se trouvaient en- gagt^s et de pousser en avant. On sait comment ces deux courageux explorateurs surent lenir leur parole ! Cependant le doctciir Barth apr6s avoir dansune de ses lettres, en date du 13 juillet 1852, expos6 le plan qu'il se proposait d6sormais de suivre avec son com- pagnon, laissait 6chapper cette reflexion : « Mais que sont les travaiix de deux liimines pour ce monde in- connu! » II avait plusieurs ibis reclame I'adjonction a I'exp^dition d'un astrononie poiirvu de bons instru- ments propres a la determination math6matique des Ueux qu'on allait explorer et qui put se livrer aux expe- riences m6teorologif{ues, magn6tiqiies et autres. Le gouveraement anglais, resolude donner a I'exploration qui etait en si bonne voie mic extension plus conside- rable, d6cida alors de remj>lacer le regrettable James Richardson par un homnie qui put reinplir toutes les conditions que signalait le D' Barth. Cest alors qu'a la sollicitation du ministre de Prusse, M, dp B onsen, et du D' Barth, le choix se fixa sur Edouard Vogel qui entrait a peine dans sa vingt-troisieme annee. ^ouard Vogel est n6 le 7 mars J 829, il est fils du D'Ch. Vogel, directeur del'Observatoire de Leipzig, el bieu connu en Allemagne par ses importants travaux. Le jetine Vogel a recu sous les yeux de son p6re, qui le destinait a le suppleer, une excellente Education. Docteur en pliilosophie, c'est non-seulement uu boii math6maticien et un habile astronome , mais encore un botaniste et un g^ologue experiuiente. II se trou- vait alors k Londres, adjoint au c616bre astronome Y. R. Hind. Plusieurs Ibis il avail manifesto le d6sir de s'en aller aU( loin visiter quelque contr6e inconnue ; nialgr^ I'ho- norable position que lui assuraient dans le monde ses 6tudes et ses relations, il 6tait pret, avait-il dit, k tout quitter pour satisfaire cet immense besoin de voir et 4e savoir qid le d6vorait, Une fois meme il faillit par- tii- pour accompagner le capitaine Inglefield dans son voyage au pole pendant I'automne de 1852. Aussi lors- qiiie le D' Barth, son ami et son compatriote, lui eut, dans une de ses lettres, fait la proposition de venir le rejoindre au lac Tchad, saisit-il avecjoiel' occasion qui s'offrait a lui. Sur la demande formelle du D" Barth, et alarecom- mandationdeM.de Bunsen, del'amiral Smith, ducolohel Sabine, de sir William Jackson Hooker, de sir Robert Brown, le ministre des affaires 6trang6res de la Grande- Bretagne, lord John Russell, coniia a Edouard Vogel la mission de rejoindre, au lac Tchad, Barth et Overweg ; il devaitetre pourvu d' instruments de precision de toute sorte, et il eimiienait avec lui, pour le seconder dans ses observations, deux aapeurs-mineurs du corps royal du g^nie. ( 324 ) Les pr^paraiils (In depart furent, comme on le pense bien, pousst^s avec la plus grande activity, et le 19 f6- vrier 1853, Kdoiianl Vogel et sesdeuxcompagnons,le caporal Cluirch et le soldat Swenncy quittaient Londres pour se rendre ii Southampton, oil ils mettaient k la voile le lendemain sur le paquebot de Alalto. Par une triste coincidence on recevait k Londres, le nieine jour, une lettre du D' Barth annonrant la mort de son com- pagnon et ami le D' Overweg ; de plus, le D"^ Barth y exprimait sa resolution formelle de se rendre a Tem- bouctou. II y avait k craindre que Vogel nc le rencon- trat pas immediatement a, son arrivee dans le Soudan, et il devenait d6s lors n^cessaire de modifier ses instruc- tions. II fut done convenu qn'il explorerait les environs du lac Tchad, recueillant sur la position astronomique doslieux, sur la geologic, I'histoire naturelle, la meteo- rologie, le plus d' observations possible et qu'ensuito il attendiait le retour de son compatriote pour de li revenir avec lui par le Baghenni, le Waday et I'oc^an Indien. fidouard Vogel arriva a Tripoli dans les premiers jonrs de mars, et il fut retenu trois mois dans cette ville par des retards dans 1' envoi des caisses de provi- sions qu'il attendait de Malte. Pendant ce s6jour forc6, il mit le temps a profit pour so familiariser avec la languc arabe, le manioment des armes a feu, la pre- paration des articles d'liistoire naturelle, enfin, il fit de nombreuses observations pour regler et verifier ses instruments, et il en apprit I'usage aux deux sapeurs- mineurs qui allaient partager ses travaux. Vogel rencontra a Tripoli le cousin du sultan du ( 325 ) Bornou, homine tr6s civilis6 qui parlait parfaitement i'arabe ; on le iiommait Hadj-Achem, fl revenait pour la troisi^nie fois du p61eriiiage de la Mecque, avail au- trefois vOyag6 avec Clapj)erlon et sen retournait au Bornon. Le docteur kii oilVit avec empressement de I'admettre dans sa caravane ; il devait etre k la fois un pi'6cieux gage de surelti el unc source in^piiisable d' utiles renseignemenls. Ce ful le 28 juin 1853 que le D' Vogelquitta Tripoli se dirigeanl sur Mourzouk par Bondjeni et Sokna; sa caravane sc composait de.' trente-trois chameaux, d'un . cheval pour lui et d'un dromadaire pour son premier domestique. On emporlait des provisions pour trois ou ou quali'e anuses, el surtout des presents, car dans I'Afrique centrale on ne peut avancer qu'^ la condition d'avoir pour ainsi dire toujours un cadeau k la main. Vogel destinait au sultan du Bornou : un casque, une cuirasse, un sabre, une montre a r6p^lition, etc., etc.; c'^tait bien la le moins qu'il put faire pour un prince qui avail si bien accueilli le docteur Barth el qui, tout recemment encore, adressail a la reine d' Anglelerre une queue dVdepiiant et de girafe en tt^moignage de sa haute eslime. A^ogel allait enlreprendre la traver*6e du grand dt^- sert au cceur de I'^t^, dans une saison oii jusqu'alors aiicun Europ6enne I'avait tent«5e, car ordinairement ce voyage se fail en mars. Nous ne suivrons pas la caravane d'^tape en ^lape dans cette region ; nous ne nous arreterons avec le J)' Vogel qu'aux points principaux, \k oh il aura re- cueilli des observations nouvelles ; d'ailleurs la route XV. MAI r.T JUiN. 2. 22 qu'il prit pour serendre au lac Tchad nous est connue, c'est celle de Denham et Clapperton dans leur memo- rable expedition de 1823. Notre explorateur fit, le 7 aoiit, son entree h Mour- zouk apr^s une travers^e de quarante jours dans le desert, pendant laquelle il eiit a supporter une chaleur de 34 a 38 degrees centi;^rades a I'ombre et d'environ AS au soleil. L'eau 6tait rare et mauvaise, et dans I'es- pace de quinze jours on ne rencontra que trois puits ; aussi fut-on r^duit a boire celle qui depuis cinq jours 6tait renferm6e etballott6e dans les outres, « II n'y a, dit le docteur Vogel, dans une de ses lettres, que celui qui a gout6 de catte eau qui puisse dire quelle affreuse chose est alors ce liquide. » Notre voyageur avait pu faire en outre un grand nombre d'observations de toutes esp^ces, determinant la position g6ographique des lieux ainsi (pie les elevations au-dessus du niveau de la mer, recueiUant des renseigneinents met6orologiques et des echantillons d'histoire naturelle. A son arrivee a Mourzouk, Vogel fut parfailement accueilli par le gouverneur et le consul anglais, M. Ga- liuffi. Nous ne nous 6tendrons pas sur les details du s6jour de plus de deux mois qu'il lit dans cette ville, non plus que sw sa description a laquelle le D' Barth ■a consacre un chapitre interessant dans le premier vo- lume de sa belle relation. Nousdirons seulement (pi'at- teignant le but de sa mission, il lixa par ses travaux scientifujues plusicurs des points que ses devanciers avaiont laisses saus solution. 11 recueillit aussi s: r le Kezzan des documents dunl les geographes ne devront pas rnanquer de faire leur profit. ( 327 ^ Pendant son sSjour dans cette ville, nne de ses courses le conduisit aux lacs de Natron, du Fezzan ; Oudney et Clapperton ne les avaient pas visit6s,,ils s'^taient cn- tent6s de les signaler comme 6tant renferm^sau milieu d'infranchissables montagnes de sable. Ces lacs se trouvent en elTet au milieu d'nn d^'sert d'un horrible aspect, pr6sentant ini assemblage confus de collines (dont qiielqnes-unes atteignent plus de 500 pieds), et de valines dt^icliirees forai6es par des sables mouvants, dans lesquels betes et gens enfoncent jusqu'tl mi-corps ; on n'y trouve pas un pied de sol uni. II ne fallut pas moins d? cinq chameaux au D' Vogel, pour y transporter sa tente et quelqiies objets indis- pensables d» campement pesant environ 3f.O livres anglaises; encore ne fit-on gufereplusde ncufmillesen dix-huit heures. Les lacs de Natron, I'une: des principales curiosit^s du Fezzan, sont au nombre de cinq : ils sont situ6s au nord-ouest de Mourzouk, dans le d(^sert qui est imm6- diatement au norddu M ady-Gharbi (^^'ady occidental) et du \Vady-Chergui (Wady oriental). On les avait re- pr(^sentc^s comiue tHant d'une prodigieuse profondeur et engloutissant ceux qui avaient la hardiesse d'y entrer. En d^pitde ces assertions, Vogel, a la grand e fray eur des gens qui I'y avaieut accompagn6, p6n6tra dans le Ba'hr-el-Dud, le principal d'entre eox, et aprfes plusieurs Bondages, trouva que les eaux n'avaient pas plus de 18 k 24 pieds de profondeur ; leur couleur fonc6e fai- sait, en effet, paraitre ce lac beaucoup plus profond qu'il ne Test en r6alit6. Les plus curi! 11X des botes qu'il nourrit sont ces ( 328 ) faineux \ers dn Fezzan [/htemia d'Oiidney), dont les habitants savent faiir la baso d'un mets delicieux. lis sont fort jolis, d'un roup;e brillant conime celui de la dorade, ont environ 7 millimetres de longueur ; leur gout est sale : ils nagent en serpentant, munis de onze a douze paires de pattes ; ils les font niouvoir avec une grande vitesse; leur tete, ornee d'antennes, est beau- coup plus grosse que leur corps. Pendant la grande clialeur du jour, ils se retirent au fond du lac ; le matin et le soir, ils apparaissent k sa surface ; ils ont alors pour ennemisnaturels des mouches qui s'en emparent avec une dexturito remarquable. On prend le ver du Fezzan avec des filets de colon, et avec lui une6norme quantity de larjes de mouches dontle laciest convert ; on fait du tout, en y ajoutant une sorte de datte rouge, une pate qui a une odeur de hareng et le gout sale que les habitants mangent en guise deviande. Al'ouesl du Bahr-el-I)ud sont les lacs Mandra et Om-el-me, et au nord-ouest les lacs Om-el-Hassan et Trona. Vogel determina ])ar experience la position des trois premiers qu'il visila, et par induction celle des deux derniers. Le D' ^'ogel niit trente-cinq jours a se rendre deMour- zouk au lac Tchad par (lertiului, Tegherry, Bihna et Aghadcm. A (Icrtruhn, le Gatrone de Denham, il se rencontra avec la caravane de Bornou qui emmenait quatreou cinq cents esclaves; prcs(pie tous6taient des jeunesfillos et des jeunes garcons au-dessous de douze ans. Les Tibbous leiu's conducteurs. les obligent ;i por- ter sur leur tete des fardeaux de 25 livres, ce qui leur (ipargne I'emploi d'un grand nombre de chameaux ; aussi dans toute la caravane il n'y avait gu^re que ( 8*29 ) trente-cinq de ces animaiix. Celle triste condition de betes de sonnne impos6e aux esclaves leur fait perdre tons leurs clieveux ; quelques-uns avaient meme le cuir chevelu entam6 par le frottement continuel des far- deaux. Ces esclaves sont tons enchain^s par le cou, et unc lani^re qui part du collier vient se rattacher k leur main droite. lis etaient presque entiferement nus, mais une loi du pacha force lesniaiTliands d'esclaves a leur donner, a lein* entr6e a Mourzouk, tin bonnet et une chemise. Aux fatigues d'une marche de soixante et di.\ journees a-travers le desert, se joignent encore pour eux les mauvais traitements ; plusieurs en portaieiit les traces. A peine arriv6 au lieu de campement, on d6charge les chameaux, les esclaves sont obliges de piler le gassoub et-le gafuli dans des mortiers en bois pour les convertir en farine; ce travail dure trois ou quatre heures ; ils font ensuite avec de I'eau et du sel une bouillie qui s'epaissit sur le feu, et c'est 1^ toute la nourriture qu'ils recoivent. Conmie les esclaves sont a tres bon compte dans le Bornou, rindill'erence pour la vie d'un horame passe toute croyance. Apres le depart de la caravane, 1^ D' Vogel trouva au pied d'un arbre un etre humain d6charn6 et mourant de faim ; un pen de bouillon remit ce malheureux qui i)utalors racont^r, phitot par signes que par paroles, qu'il 6tait abandonn6 d6jk de- puis trois jours sans nourriture, ne pouvant plus mar- cher a cause des blessures de ses pieds ; ses bourreaUx, 1,1a vt^rite, avaient essayedele gu6rir a coups de baton. Le D' \!) livre? de tabac. Jusqu'alors les rapports dii I)' \o^"\ avec le sultan Ab:l-el-llahtnan avaient 6te alt6r6s par la mifiapce de ce prince; mSfiance qui fiit surtout excit6e an plus haul point lor.^qu'il apprit a n'en pouvoir plus douter que les deux ca npagnons du docteur 6taieiit deux sol- dats, et de v6ritab!es soklals europ^ens (1). Son ima- gination soupconnease se laissait alleraux suppositions les plus lacheiises pour la security de notrc explora- teur, surtout lorsijuil ch^rchait h approfon lir la vi^ri- table cause de sa pr6sence dan^ son empire, aussi ne lui perniettait-il pas de pouss^'r trop au loin ses excur- sions. C'estainsiqii'il lui avail refus6 de le laisserpar- tir pour le Mandara ou pour Logg6ne. Mais pendant rexp6dition au Musgo, Vogel par\iiit a capter enti6re- ment sa bienveillance. Convaincu des intentions paci- fiques de son licMe, no voyant en bii qu'un lionnne curieux de {> rcourir le pays et de recueillir quelques plantes, h. peine rentr^ dans sa capitalo, il lui iitsavoir que d^sormais il pourrait aller ou bou lui soniblerait. Le docteur Vogel resohit de [jrofiter de ces bonnes dispositions pour se rendre a ^acoba (2), point vers lequel s'6tait dirig^ Overweg, en mars 1852, sans pouvoii'l'atteindre. Tout ce qu'il entendait raconterde cette grande ville des Follatahs excitait au plus liaut (I) Le caporal Churdt, trop mnl.ulp pour sui\rc IVxpc^ditinn, I'.ivait quilK^p h Mourzouk. el il avail cu- rciiiiilaci' par le capural Mac^uire qui ^lail \cnu relrmivpr E Vogpl au lac Tcl.aii. (2, CettP villp est qiicli|UPrHis de.-ign(?(» sons le nnm do Baulshi qui est cclui (If la proviivo dnnl olle est Ih capilale. ( 339 ) degr6 sa curiosity. Mais dans I'intervalle qui s6pare son retour du pays des Masgo, de son depart pour Yakoba, il fit ptusieurs excursions dans les villes du Bornou, et c'est dans une de ces courses que suivant la route de Kano 11 eut la joie de rencontrer le 1 " d6cerabre 1854, au milieu de la vaste Ibret de Boundi, le D"" Barth, revenant de sa grande exploration de Tendjouctou et que Ton croyait mort depuis de ix ans ; c'est alors qu'il 6crivit k la hats au crayon cette bonne nouvelle au consul de Tripoli, Hermann ; on sait avec quelle joie elle fut accueillie en Europe. Cefut le 20 Janvier 1855 qu'il quitta Ivouka accompagn6 du caporal Macguire et de quatre serviteurs ; il prit la nmt^ de Gomb6 fau sud-ouest d? Kouka) , ville situi^e sur une grande riviere tributaire du Binue et qu'on appelle Gongola. Cette rivi6re sort d'un district montagneux a ZiU milles au sud-ouest de Yakoba ; ellese diriged'abordde I'ouest- sud-ouest vers I'est-nord-est dans une direction paral- l61e, mais contraire a celle du Binu6, ^galement paral- I61e a celle du Y6ou, dont elle est separ^e par un plateau d' environ 300 pieds de hauteur et /|U milles de largeur. A 15 milles a I'ouest-sud-ouest de la petite ville bor- nouenne de Gobb6, le Gongola fait brusquement un coude vers le sud, et, apr6s une course d' environ 100 milles, se jette dans le Binu6. Le sultan de Gombe accueillit parfaitement notre exploratear, et de cette ville il lui fallut quatre jours pour atteindre Yakoba. II eut a gravir un grand pla- teau graniti([ue d' environ 2500 pieds d'elevation ; la population est enti^rement sauvage, et parait conside- rable ; les deux sexes vont 6galement nus. Sayanni, le ( 340 ) sultan de Vakoba, guerroyait a trois jouru^es au nord- nord-ouest de sa capitale contre les Sonoma. Vogel, laissant Macguire k "^'acoba, alia Ic trouvor dans son camp, eten futbienrecu*; ccpendant, ])ar une defiance qui paralt comminie i tons les petits princes de 1' Afiique centrale, pour lesquels un etrangcr ne pcut etrequ'un marchand ou iin espion, il retint le doctcur quarante jonrs auprt?s do lui, pendant les([uels ce doniier faijlit devenir victime de la malignite duclimat. Ce fut meme fnriivement qu'il quitta le camp, et il etait si faible qu'il dut se faire attaclier siirla selle de sonclieval. De retour a Vakoba il y retrou\a Macguire qui avait ter- mini'' ie^ j^reparatif^; du voyage a 1' \damawa, ct dans les derniers jours d'a^ril, il arrivail sur les bords du Binue, en un point (pii avail ete visits par le steamer ia Pleiadi', au mois do septembre de I'ann^e pr6c(5- dente, ainsi que i'attestaient los bouteilles et les debris d'objets d'origine anglaise qui jonchaient la rive. Le sultaji d'Hainarnia (ju'il trouva an petit village de Tin- dang, k une journ^e de I'autre cote du fleuvf , se sou- venait de ses promesses an D' B. Baikie, anssi accueil- lit-il Vogel avec de grandes demonstrations d'amiti6 ; mais celui-ci ne put p6netrer plus avant dans le pays, parce que le sultan et Mohamed-el-Amuel d'Yola fai- saieut alors la guerre aux Bashama, a travers le pays desquels passe la scule route praticable pour se rendre a cheval de Tindang dans rAdaniavva. II parait m6me que le clieik du Bornou protege ouvertement toutes les tribus pillardes qui infcstent le Soudan, et que celles-ci, pour prix de cette protection int6ress6e, lui payent un tribu de trente esclaves pour cliaque expe- dition qui leur reussit. f old ) Apr^s un s6joLir d'lm mois a Tindaiig,Vogel, voyant qu'il ne pourrait de sitot prendre la route do Yola, re- vint a Goinb6 en traversant le pays des Tangale et des Yem-Yem antliropophages. Cescontr^essont tresnion- tagneuses, on n'y avance que fort p6niblement et elles paraissent n'etre visit6es que tr6s rarement meme par les habitants des Etats voisins. Laissant Macsuire k la garde de ses bagages, Vogcl se rendit a Salia, a deux journees de Yakoba ; il eut a traverser le Yeou a sa source et a trois journ6es de Salia deux petites riviferes coidant vers I'ouest et qui se jettent'dans le Niger. Salia, le point le plus occidental atteint par Vogel, est situ6 par 11° li' [i&' de latitude nord, et 5" 3' 10" de longitude orientale du m6ridien de Paris; c'est, au dire de Vogel, laplusgrande derint6rieurderAfrique, elle a environ 16 kilometres de tour. Elle est prot6g6e par un fosse et lui excellent niur d'environ 15 piedsde liAut, le nombre de ses hajjitants ne d6passe pas 30 000 ; a I'interieur de ses murailles sont des champs cultives. Laville a trois noms difT^rents, Seg-Seg, Sa- lia et Sansan : le premier nom est celui de la peuplade payenne sur laquelle elle fut conquise en 1807 jiar les Fellatahs, le second est son nom Fellatah, et le troi- sifeme nom est la denomination sous laquelle la ville est connue dans le Baulshi et en meme temps celle de toutela province. Clapperton en 1826, Lander en 1827, avaient visit(^ Salia qu'ils appellent Zaraya ou Zarya. La contr^e entre Yakoba et Salia est accident6e, cou- ple de vallees et de montagnes ; ses habitants sont sauvages et idohttres. Dans les premiers jours d'aoilt, Vogel quitta Salia XV. MAI ET JUIN. 3. 23 ( 342 ) pour se rendre a Babetji, d'ou il revint h Yakoba. Sur I'appel du sultan d'Hamarnia, il se rendit de nouveau k Tindang ; ce prince lui fit de grands presents, niais Vogel ne put encore r6ussir k atteindre Yola ; renvoyaut Macguire a Kouka avec le gros de ses bagages, il sor- tit de Vacoba, le 21 septenibre, et se dirigea vers le Binu6, k travers de hantes cliaines de montagnes. Ces montagnes cessent atroisjourn6es de la riviere, mais dans cette saison de I'annee la plaine etait niar6- cageuse et couverte dehautes herbes, et ce ne fut qu'a grand'peine cpi'iUput faire^5 milles par jour. Apr6s avoir pass6 le Binu6 dans un mauvais canot, le voyageur atteignit Chubbini , ville des lluna. L'inondation du pays ne Uii permit pas de se rendre, ainsiqu'ilen avait le projet, a Ukali, situ6e a 15 milles dans I'inti^rieur. Vogel visita la tribu des Rona qui liabite dans de misdrables liuttes en paille ; il cliassa avec elle Yayou/i, animal curieux sur leqtiel on raconte de nombreuses fables dans tout le Soudan ; c'est une esp6ce de la- mentin ; il a 10 pieds de long , et est herbi-vore ; il quitte la riviere k I't^poque des basses eaux. Vogel eut beaucoup ci souflrir de Thumidite, il n' avait pour toute nourriture que de la farine de mais delay^e dans de I'eau, et de temps en temps un pen de chair d'hippo- potame. A la fin d'octobre il regagna Yacoba, il reprit ensuite la route de Kouka oii il arriva le 1" d6cembre, apr6s une absence de dix mois et douze jours. Son premier soin, en arrivant k Kouka, fut de inet- tre enordre les documents de toute nature qu'il rappor- tait de cette longue et pt^-nible excursion. 11 adressait h lord Clarendon, a la date duiid6cembrel855, une lettre, ( ZliZ ) la derni^re que Ton ait recue de lui en Europe, dans laquelle il r6sumait succinctement son voyage a Yacoba. « Quand mes observations seront suftisamihent mises en ordre, ajoutait-il , je les enverrai.... Je partirai aussitot pour le Fittr6 et j'essaierai de me rendre a Wara. Si k mon retour, au commencement de mai, je ne trouve pas de d^peches de Mourzouk, je me rendrai vers la cote occidentale d'Afrique par la route de I'Ada- mawa, etj'esp^re, avec le secours de Dieu, revenirau commencement de 1857, soit a 1' embouchure de la ri- viere de Camerones , soit par la route de Salia a Ebo ; j'espfere trouver un batiment pour me conduire a Fer- nando-Po. » A dater de ce point cesse toute information certaine : il paraitrait que le D'' Vogel se serait rendu comme il ea avait form6 leprojet, a Mas3na, capitale du Baghermi, dans les premiers jours de Janvier 1856, laissant son compagnon Macguire k Rouka, avec ses papiers et ses collections. Le long sejour du D' Bartli k Maseiia, les bonnes dispositions du sultan de ce pays en faveur des Europ^ens lui auront assur6 une cordiale reception dans cette ville. Son s6jour dans le Baghermi se serait prolonge juscpx'au mois d'aout. A cette 6poque seule- ment il aurait pu prendre le chemin du Waday, apr^s le retour d'un expr6s, que le D' Barth lui avait con- seill6 d'envoyer au sultan dece pays, le prince Cherif, afm d'etre autoris6 a p6n6trer dans ses Etats. Aprfes avoir visit6 les provinces de Fittr6 et de Medogo (Ma- dagu), Vogel se serait rendu au AVady Oradlia, au nord du Waday, ou le sultan Cherif lui aurait e)»- voye une escorte pour le conduire dans sa capitale. II ( 3/./i ) aiirait fait son enti'^'e t\ "N\ ara dans le conrant de 1856, 6tant ainsi le premier des Europeans qui aurait pen6tr6 dans cette partie de I'Afrique. « Waraii , dit le D"" Perron , dans sa relation du voyaf^e du cheikli Mohammed-El-Tounsy (p. 262), est encaissee dans une sorte d'ellipse iorm^e par desnion- tagnes distingu6es en trois groupes. La ville est plus longue que large, sa longueur d'au moins deux kilo- metres est dans le sens du nord au sud, c'est-a-dire dans le sens des raonts qui la ceignent et en font une sorte de citadelle naturelle. Ces monts sont appelt^s monts Warah ; ils ont donne leur nom k la ville. » Le palais du sultan et la grande mosquee qui est pr6s de I'entr^e de celui-ci, sur la place publique El Fac/ier, sont les seuls Edifices construits en pierre, Toutes les autres habitations ne sont que des huttes de forme cir- culaire formees de murs en pis6 et couvertes d'un toit conique ; elles sont gt^niiralement au milieu d'une cour que protege une haie d'arbustes epineux. La ville est travers^e^par une grande nie qui conduit de la porte du nord k celle du sud ; c'est dans la par- tie orientale que se trouve la demeure du sultan ; on n'y parvient qu'en franchissant rpiatre portes succes- sives. Le /iasr ou appartement particulier du sultan est sur une (^16vation , 11 tlomine toute la ville. Cette cons- truction n'a guere qu'un 6tage au-dessus du rcz-de- chauss6e, et trois fenetres a cet 6tage; I'une de ces fe- netres regarde a I'ouest, sur la place du Facher ; la se- conde au nord ; la troisi^mc au midi. Devant le palais s'arrondit la grande place d'El Fac/ier; on y voit qnel- ques aibies de I'especc seyal (Mimosa Seyiil). Au fond ( 3/i5 ) de cette place, a rOccident, et devant la porte du ))a- lais, on voit une colline Isolde, le niont Toraya, au sommet de laquelle se trouve une luitte dans laquelle on conserve les cuivres ou tinibales du sultan. La jio- pulation de la ville est d' environ !iO 000 habitants dont 8000 sont en 6tat de prendre les amies k la premiere r^'quisition du sultan. On ignore les details du sejour de Vogel dans cette ville, on sait seulenient que dans les premiers mois de 1857, la nouvelle se repandit au Bornou, et de la, par une lettre de Macguire, rest6, comme nousl'avons dit, k Kouka, que Vogel avait 6t6 mis a mort par les ordres du sultan Ch6rif du Waday, et cela, disait-on, en re- pr6sailles de la confiscation qui avait 6t6 op6r6e par I'agent anglais de Tripoli sur Iss niarchandises reve- nant du Waday (1). Quelque temps aprfes, cette mort fatale 6tait aussi annonc6e au Caire, par un envoy^ (Sidi Mohammed-el- Chingueti) du sultan du Darfonr, mais on lui attribuait une autre cause. A son entree dans le Borgou ou "Wa- day, Abdul-Wahed, nom arabe pris par le D' Vogel, aurait 6t6 tr6s bien accueilli par le visir Simalek qui (1) Macguire paratt avoir alteodii le retour de Vogel a Kouka. Sur le bruit persistant de sa mort dans le Boraou, il aurait voulu, sans profiter de Toccasion du depart d'unc caravanc, se renietlrc ca route pour Mourzouk et Tripoli ; mais a six journees aunord-ouestde Kouka, il aurait die attaqu(5 par les TouAregs Kclouis prfes du puits ou des sources de Bel-Kachi-Farri, et aurait succomb^ en defendant vaillani- ment sa vie. Macguire rapportait eu Europe les papicrs et les collec- tions de Vogel et principalenient ce qui avait rapport a son voyage h Yacoba. II scrait bien h di^sirer qu'on piit ravoir les journam du voyage et lei esquisses drs cartes itindraires. ( 3/i6 ) lui avait foiirni les moyens de se rendre a A\"ara. II aurait fait son entrt»e dans cette ville en grande ponipe, 6galemcnt bien recii par le sultan Mohammed Cli6rif, que les Fouriens s'accordent ci repr6senter comme un homme defiant, avide et cruel, souvent irrit6 par ses soufTrances physiques. Mais que Vogel, dans une de ses excursions aux environs de la ville, s'6tant dirig6 vers line montagne sacr6e, dont I'acc^s 6tait interdit aux musulmans eux-memes, aurait 6t6, pour ce fait, ai'r6t6, conduit devant ce prince et imm6diatement mis & mort. La premiere de ces versions ne saurait etre accept6e par ceuxqui connaissent I'avidit^ et la rapacitedu sul- tan du Waday. Ce prince avait en elTet tout int6ret ci chercher a tirer parti de son prisonnier et k le retenir en gage, pour obtenir une forte rancon, plutot que de le mettre h mort. Quant a la seconde, son origine est suspecte, lors- qu'on songe aux rapports qui existent entre les deux princes rivaux du Darfour et du ^^'aday, lorsque sur- tout on a lu la relation du voyage au Vaday du cheikh- el-Tounsy, publi6e par le D' P6ron et la savante intro- duction de M. Jomard cpii I'accompagne. Mais voici un fait plus positif : un savant bavarois, le baron Neiman, dans son dernier voyage fait k la cote d'jVrabie de juin a novembre JS57, se rendit i Djedda au moment du pfelerinage de la Mecque, vetu en arabe; il se faisait passer pour un pelerin tunisicn, 11 interrogea des honimes du Waday et des pays voisins, leur faisant croire qu'il voulait regagner sa patrie, par Souakin, le Darfour, Ic AVaday, leBurnou etMuurzouk. ( S/!7 ) Un Massalit, le cheikh Abclallah' Ainvad, Ini apprit qii' Abdul- Vahed, c'est-a-dire Vogel, avait en effet 6t6 arrets pour avoir tent6 I'ascension d'une montagne sa- cr6e ; mais que, jet6 en prison, il n' avait pas du etre mis k morU Deux n6gres du Waday confirmferent ce r6cit. A son retour au Caire, le baron Neiman obtint de I'envoye du Darfour Seid Mohammed-el-Chingueti un rapport plus explicite : il nomme la montagne sacrde Djcbel-it'Driu, il existe 5, son sommet une grande goubba en pieires blanches autour de laquelle sont 6ri- g(^s trois batiments plus petits, et de meme forme. La montagne et la goubba qui la couronne, constamment d^sertes, ne sont visit^es que lors d'un cliangement de r6gne, par le nouveau sultan qui doit y rester un nom- bre d'heures d6termin6 jusqu'au lever on au coucher d'une certaine 6toile, et alors se rendre avec une pom- peuse escorte a la ville de Wara, pour y etre recu so- lennellement , comme souverain legitime. Personne autre que le prince n'a jamais vu I'int^rieur de la Goubba; trois cheiks, les premiers du pays, en possfe- dent seuls les clefs. La montagne et une certaine par- tie du territoire qui I'environne sont d6clar6s sacr6s. L'arriv6e du chr6tien Abdul-Vahed avait caus6 du d^plaisir aux habitants de AA'ara qui sont pen civilises, violents et fanatiques ; les promenades de I'infortun^ docteur avaient excit6 leur defiance au plus haut degr6 ; on I'avait 6pi6 un matin, comme il se rendait dans le voisinage de la montagne ; on sen 6tait empar6 pour Ic tuer (]). Mais ici I'informateur du baron Neiman (I) A la soaucc de l.i Sociole royale geographiqup de Loudros, du It deccnibre 1857, a propos du rapport do rcuvoye dn sultan du ( 3/iS ) n'^tait pas tl'accord iiisur les moyens employes, iii sur le lieu tie rexecution, et Ton pout, avec le savant "ba- varols, en incUiiie que la premiere partie du rappnrt de I'envoye dn Darfour est la seule vraie, c'est-a-dire que le D"^ Vogel a et6 retenu a la suite d'une de ses excursions au pied du I)jcbel-i(-I)riat, mais qu'il doit etre encore vivant, et que c'est en haine du prince du ^Vaday, et pour lui attiuer la culere des Anglais, que le prince du Darlbnr a r^pandu la fa])le de sa mort, que sans doute il est d6tenu, mais que, mieux avis6, le sultan Mohammed Cherif, en le dt-robant au fanatisme de ses sujets, n'a d'autre pensee que de s' assurer en meme temps une rancon convenable, tout en ne man- quant pas a la parole qu'il a\ait donnee h Vogel de Ic prot^ger. Toutes ces considerations deciderent le baron de Neiman a tenter *de penetrer dans le ■\\aday, par la vole de Khartoum et du Darfour; il allait entreprendre ce hardi voyage, pour d6livrer Vogel ou sauver au Darfour, Ic D' Bartli s'cst cxprime ainsi : « II y a ccrtainemont uiip montagnc sacrde i Wira la capita le du Widay, juste au-dessus du Palais. Wi\ra est cnferni6 entre deux chuhies de collines i I'ouest cl a I'est, ne laissant que deux (^trolls passages I'un au nord, I'autre au niidi; le palais du sultan est sur le vcrsanl de la diaine orientale, ct on dit qu'il y a sur le sommet une huttc sacrde oil cbaque nouveau roi est oblige de rdsider pendant sept jours. Qu'il soil vrai que Vogel ait cherch^ a pendlrer dans ce lieu pour en rctonnattre la nature et qu'il etit6l6 ex^cutd pour cctte tentative, 'comme on le prdtcnd, je n'en sais rien, maisje ne crols pas la chose probable, lout en coufes- sant que moi-nK^nie i present, j'ai fort peu d'espoir que le courageux voyageursoit encore vivant. » — Voir le n" II dcs Pcocediiiys vf U.e royal geoiiraphical Society, mars 1858, p. 81. ( 3/i9 ) moins ses papiers, mais a la veille dc son depart qui avait 6t6 f\x6 apr^s Noel, il tomba malade etmourut au Cairo le 15 mars dernier. Le D' Henri Brugsch de Berlin, savant Egyptologue, d^clarait, il y a qiielques jours encore, h son retour d'l^gypte, que de son c6t6 il avait interrog6 plnsieurs musulmans venus du Waday ; tons etaient unanimes pour dire que Vogel avait 6t6 emprisonnE mais non pas ex6cut6. Qu'il nous soit done permis de partager cette der- ni^re esp6rance : le D' Vogel vit encore, c'est au gou- vernement anglais, qui a toujours accord^ une si libe- rale protection a ses explorateurs, de faire d' actives demarches pour arracher I'infortune voyageur a sa triste position, et de lui donner un aide et une protec- tion sur lesq'uels il a le droit de compter (1) . En attendant la realisation d'un va3u qui est celui de tons les ccpurs g6n6reux, nous terminerons cette notice en faisant remarquer que, dans I'^tat actuel des clioses, les r^sultats acquis a la science par les explorations du D' l^douard Vogel sont d6j^ d'une notable importance. (1) Le gouvernement anglais a donne rordre h ses consuls 'a Tripoli, a Mourzouk, au Cairc, h Khartoum, de faire toutcs les dcniarclies n(5- cessaires pour parvenir a la d6livrancc de Vogel ou a la reruperation de ses papiers et notes dc voyage dans le cas oil la certitude de sa mort serait acquise. Au moment ou nous revoyions nos i^preuves, notre honorable con- frere, M. le comle d'Escayrac nous a communique des lettros datdcs Dongolah en Nubie, dans lesqueiles le D'Cuny, medecin fran^ais ^lablidepuis longtempsi Siout, lui annoncjait qu'il iStait en route pour le DArfour; peut-6tre obtiendrons-nous par lui quelqucs nouvelles in- formations sur la destiniSc ddfinitive d'Edouard Vogel. ( 550 ) II a fait parveiiir en Europe les notes relatives a ses observations scientifiqiies sur riiypsom^trie, la gigolo- gie, riiistoire naturelle, la g6ographie, rethnologie chi desert et du Bornou. II a d6termin6 la position de plu- sieui's \ illes importantes, de nianifere k nous pennettre de baser nos cartes sur un r6seau de points astronomi- quement d(§termin6s. II a visit6 les lacs de Natron, dii Fezzan, atteint au sud du Bornou, vers le lac Tuljori, une latitude plus meridionale que celle oil s'6taitarret6e le D' Barth. II a vu Yacoba la grande capitale des Fellatalis, dt^couvert le Gongola, bel affluent du Binu6; rectifiela position des sources du Yeoii que I'on placait a tort au sud de Yacoba, tandis qu'elles sont au nord; il a explore le pays montagneux et sauvage des Tangale et des Yem-Yem, anthropophages qu'aucun Europ6en n'avait visit6s avant lui. II a enfin v6cu au milieu des mar6cages form6s par les inondations du Binn6, avec cette tribu auiphibie des Rona sur laquelle on debite tant de 16gendes dans le Soudan musulnian, et qui est probablement la meme que celle que le D"" Balfour Baikie visita a Dulti lors du voyage de la Pleiade. Voilci certainement plus qu'il n'en faut pour recom- mander Edouard Vogel aux yeux de la post^rite, et placer d6sormais son nom ix c6t6 de ceux des Denham, des Clapperton, des Barth... Faisons des vcpux pour qu'il n'ait pas achet6 cette gloire au prix de sa vie, corame Tout fait le major Laing, Richardson, Ic chef de la grande expedition dans I'Afrique centrale, et Adolphc Overweg, son infortun6 compatriote. V. A. Maltl-Brun. ( 351 ) ^ L'OYAPOC. Par M. J. C. Da Silva, Membrc tie la Sociele. {Suite.) 109. Pierre £l6onor de La Ville, seigneur de Fer- rolles, parut a Cayenne le 18 d^cembre 1076, avec le vice-amiral comte d'Estr^es, a qui Louis XIV avait confix I'entreprise de reconqii6rir sur les HoUandais la Guyane Fran^aise, ixnie aux domaines de la couronne par 6dit du mois de d6cembre 167Zi, et qui s'acquitta de cette tache de la mani^re la plus honorable. 110. Laiss6 par d'Estrees, aide-major de Cayenne, et promu aussitot au rang de major de la place, Fer- rolles fut d6s ce moment I'ame de la colonie, 111. Voyant la France Eqninoxiale sous la direc- tion immediate de son roi, il se fit un point d'lionneur de faire respecter les limites que le roi lui avait assi- gnees. 112. Deja au mois de juin 1677, avec une poi- gn6e d'hommes, il d6loge les HoUandais de la rive gauche de FOyapoc. 113. Presque en meme temps ils sont renvoy^s ci Touest du Maroni. 114. Mais le 10 aoiit 1678, le traits de Nimfegue empecha tout agrandissement des Francais aux d6pens des HoUandais. Ne pouvant s'6tendre vers I'Or^noque-, il ne leur restait qu'^ envahir la region de rAmazone, aux d6pens des Portugais. ( 352 ) 115. Des la meme ann6e 1678, I'Oyapoc est fran- chi. Les Francais de Cayenne pen^trent par terre jus- qa'k la rive gauche de I'Amazone. 11(5. Les Portugais les arretent. On hesite ; mais bientot I'honnenr fiit press6 par I'aiguillon de I'int^r^t. 117. Le 15 juillet 1682, on finit d'iniprimer i Paris la traduction francaise que Tacadeniicien Gom- berville avait faitede I'appetissante Relation de VAmn- zone par le p6re espagiiol d'Acuna, compagnon de Pedro Teixeira i\ son retonr du Perou. 118. On eut alorsa Cayenne une id6e juste de la valeur de I'Amazone ; et toute indecision disparut. 119. A partir de cette meme ann6e 1682, les co- lons francais envaliirent continuellenient le bassin de I'Amazone. 120. Arret6s une seconde fois en 1685, ils pous- s^rent 1' assurance jusqu'i intervertir les r61es. lis se plaignirent. 121. Pour toute r^ponse, le roi de Portugal or- donna au gouverneur de I'Etat du Maragnan de cou- vrir par de nouvellcs fortifications la rive guyanaise de I'Amazone. 122. En avril 1688, les Portugais poss6daient sur cette rive quatre forts : I'ancien fort de Desterro, ^ rembouclmre du Paru : un fort sur 1' embouchure du Toher6, encore plusprts de la bifurcation de I'Amazone : le fort de Macapa , sur 1' admirable emplacement de celui de Cumau, qu'ils avaient pris aux Anglais : et le fort d'Araguari, nouvellcment relev6 des mines cau- 86es par la pororoca. 123. Aussitot, le 30 juin 1688, p6n6trant par le • ( 553 ) Mayacar6 et par les savanes inond6es, Ferrolles se pr6sente devant le fort d'Araguari; et il signifie au commandant portugais qu'il ait k abandonner cette position, « attendu, disait-il, que toute la rive septen- » trionale de I'Amazone appartenait de droit a Sa Ma- » jest6 Tvbs Chr^tienne. » llh. La r^ponse de I'ofilcier portugais est memo- rable. II d6clara a Ferrolles qtie, « en vertu de la do- » nation faite a Bento Maciel Parente, les limites des » possessions portugaises 6taient a la rii'iere du cap 1) iVOrangc^ appelee par les Portugais Riviere de Vin- )) cent Pificoii, et paries Francais Oynpoc. » 125. Ferrolles, qui n'6tait encore qu'un simple subordonnt^ de La Barre, h qui il avait su inspirer ses opinions, mais non pas sa hardiesse, se borna a mena- cer le Portugais de revenir le chasser de vive force, s'il ne prenait pas le parti de regagner de lui-meme la rive droite de I'Amazone; et, apr^s lui avoir remisune lettre de La Barre pour le gouverneur du Para, il battit en retraite, sortant par I'Amazone. 126. Mais Ferrolles n'6tait pas homme h bravades. II se rend en France ; et le voila gouverneur et mar- quis. 127. De retour a Cayenne, en Janvier 1691, il s'empressad'6crire au gouverneur de I'Etat du Mara- gnan, en lui repr6sentant la n6cessit6 de fixer a I'Ama- zone les limites communes des deux colonies. 128. Le gouverneur de I'Etat du Maragnan 6tait Albuquerque, nom de bon augure en Am6rique ainsi qu'en Asie ; il r^pondit i Ferrolles : — Qu'il appartenait ileurs deux souverainsde regler ensemble une pareille ( 354 ) question; que pour lui, ii etaii dans I'obligation de conserver les limites de son gouvernement telles qu'il les avail recvues. 129. Fils d'un gouverneurde I'Etat du Maragnan ne au Bresil, petit-lils d'un gouverneur du nierne Etat, c'6tait Antonio d' Albuquerque qui, 6tant gouverneur du Para, avait presid6 a la construction de trois nou- yeaux forts. C'6tait a lui qu' avait 6t6 adress6e la lettre de La Barre, remise par Ferrolles au commandant d'Araguari. Ferrolles savait done bien a qui il avait affaire, et 11 donna a savaleur le renfort de la prudence. 180. II se tut; — mais en secret il s'occupa d'op- poser h son adversaire un argument sans replique. II fit percer a travers les bois vierges un chemin de la ri- viere d'Oyac a celle du Paru, pour lumber k I'improviste sur les fortifications portugaises. 131. Tout en activant ce long et penible travail, Ferrolles 6tait cependant tourmcnt6 par la declaration que lui avait faite le commandant d'Araguari ; ct, a force de chercher, il imagina ini moyen artificieux pour tacher d'iufirmer I'importance de la donation faite a Bento iVlaciel Parente. 132. Exploitant le mot Ouepo, qui dans la langue des Galibis signifie une He, et qui a tres bien pu etre appliqu6 par excellence k I'ile de Marajo, incompara- blement plus grande que toutes les autres iles de 1' em- bouchure de I'Amazone , — Ferrolles se hasarda a 6crii'e en lOOi au ministre de la marine et des colonies, que le nom iii'Oynpoc 6taitceluide cette ile, et aqu'elle » devait faire la separation des dependances de France » et de Portugal. » ( 355 ) 133. C'^tait aller phis loin qu'il n'en avait d'abord eu rid6e. Jusque-l.'i il n' avait r6clain6 que la rive guyanaise de TAmazone; il voulait maintenant y ajou- ter les iles de Caviana et Mexiana. 134. II dut se laisser aller d'autant plus volontiers k cette tentation, que sa trouvaille' s'oflVait a lui avec le caractfere distinctifdes bonnes inspirations, — la f^con- dit6. Elle ne se bornait pas ci refouler I'inqui^tant docu- ment de 1637 ; elle lui procurait en sus un avantage extremement pr6cieux, qu'il 6tait impossible d'obtenir autrement. 135. Dans 1' ignorance oh 6taient les Francais sur la navigation de 1' Amazone, et se r^glant sur la routeque les Portugais du Para avaientl' habitude de suivre, Fer- rolles pensait que la bouche occidentale du fleuve, entre le continent de la Guyane et I'ile de Caviana, n'6tait accessible qu'a des canots, et que les gros batiments ne pouvaient p6n6trer que par les deux autres bouches, entre le continent du Para et I'ile de Marajo, et entre cette grande ile et les iles de Mexiana et Caviana. En reportant a Marajo le nom d'Oyapoc, il se flattait de procurer a la France I'usage de la bouche centrale de r Amazone. 136. II soumit au cabinet de Versailles son double plan, et on le laissa faire. 137. A sa bravoure et a sa finesse d' esprit Fer- rolles savait joindre une longue patience. II attendit cinq ans que son chemin a travers les bois fiit prati- cable. 138. Le moment arriva enfm. Au mois d'avril 1697, FerroUes se met en route pour les forts portu- ( 356 ) gais de la rive giiyanaise de I'Amazone, que la pororoca avait r6duits a trois, cii lenversant de nou- veau celui d'Araguaii. II emniene avec lui 58 soldats, 10 ofticiers, 12 habitants de sa colonie, et plusieurs centaincs d'Indiens. Parvenu sur les bords du Paru au mois de niai, il descend cet affluent de I'Auiazone dans des canots que les Indiens avaient pcfrt^s, — et il ap- parait sur le grand fleuve. II fond sur sa proic avec I'imp^tuosite francaise, et avec sa faimdevingt ans. — On n'ose pas meme lui opposer de resistance ; il eniporte les trois forts portugais sans coup ferir. II rase celui de Desterro et celui du Tober6 : mais sentant le prix de la position de celui de Macapa, il met dans ce fort une garnison de 35 soldats et quelques officiers, avec un grand uombre d'Indiens; et il rentre k Cayenne, pleinement assouvi, et avec la satisfaction d' avoir servi son roi mieux que d'un bon conseil, — d'une bonne execution. 139. Louis XIV n'attendait que I'occupation de la rive gujanaise de TAmazoue par les Francais, pour appuyer du droit de possession les reclamations qu'il se proposait de faire par la voie diplomatique. 140. Au moment meme que Ferrolles descendait le Paru, — le 18 mai 1697, — le roi de France nom- mait son ambassadeur extraordinaire aupr^s de dom Pedro II de Portugal un grand personnage, M. Louis- RoUin de Boiiille Marbeuf; seigneur des Loges, presi- dent au grand conseil de Sa Majeste. 141. Le 28 juillet, le comte de Pontcliartrain, ministre de la marine et des colonies, donna a M. de llouille des instructions dans lesquelles il lui etait or- ( 357) donn^ de r^clamer contrc I'etablissement des Portu- gais au nord de I'Amazone, comme etant une usurpa- tion des droits de Sa Majeste Tres Chr6tienne. ili'2. Le 6 aoiit, Louis XIV signait les lettres de creance de M. de Rouille ; et celui-ci debarqua a Lis- bonnele 2 septembre 1697. 143. Pour faire avec plus d'elTet son entree pu- blique , I'ambassadeur extraordinaire de Louis XIV attendit la nouvelle du sneers du gouverneur de Cayenne. 1/14. Une frt^gate I'apporta enfin a Rdchefort le 6 noverabre. — Mais elle apport?.it en meme temps quelque chose d'inattendu... : la reprise de Macapapar les Portugais du Br6sil. 4/i5. Lorsqu'^//^^/;/o d' Albuquerque eut connais- sance de la perte de ces trois forts, dont le plus im- portant avait (^t6 fonde par lui-meme et se trouvait sons r invocation de son propre patron — S. Jntonio de Macapa, — il revenait de les visiter tons les trois, dans un voyage qu'il avait fait au Rio Negro, et il se trouvait encore a Gurupa, en convalescence d'une raa- ladie grave. Son indignation fut grande, en apprenant que les Cayennais maitrisaient enfin, et presque a sa face , cette ri\ e guyanaise de I'Amazone , que le Br6sil avait achetee aux Anglais et aux HoUandais au prix de son sang, et que lui et tous ses pr6d6cesseurs avaient toujours soignee avec tant de sollicitude. Mais il aimait mieux la vengeance que la plainte. Mx'o. 11 expedie inimediatement Francisco de Sousa Fundao et Joao Moniz de Mendof a ; et le 28 juin 1697 le fort de Macapa etait rentr6 aupouvoir dcsPor- IV. MAI ET JUIN, li. 24 ( 35S ) tugais. — Les Franrais ne Tavaient occnp6 qu'un mois. Ili7. Ce contre-temps n6cessita un nouveau d6lai dans la presentation des lettres de creance de Tam- bassadeur, 1/iS. Prive du grand argument sur lequel il avait comptt^, — le droit de possession de la rive guyanaise de I'Aniazone, — Louis XIV jugea convenable de demaader beaucoup plus, pour obtenir quelque chose. II chargea M. de Rouill6 de r6clamer jusqu'a I'ile du Maragnan, ajoutant a la France Equinoxiale de Fer- roUes la France Equinoxiale de La Ravarditire. 149. Ainsi pr6par6, I'ambassadeur de Louis XIV fit son entree publique a Lisbonne, le 6 fevrier 1698 ; et il remit h dom Pedro II ses lettres de cr6ance. 150. Tout 6tait grand dans I'ambassade de M. de Rouill6, except^ seulement le bagage pol^niique. — Ilneconsistaitqu'en deux pieces, envoyees de Cayenne h Versailles par FerroUes, 151. C't^tait, en premiere ligne, un plaidoyer re- montant au commencement de I'ann^e 1688, et ayant pour titre : a M6moire contenant les droits de la France » sur les pays situ6s entre la riviere des Amazones et » celle d'Or^noo); et puis, la lettre de 1694 que nous connaissons, inetamorpbosant la livi^re d'Oyapoc en I'ile de Marajo. 15'2. L'ambassadeur entama la nt^gociation en en- voyant au jninistre portugais, Roque Monteiro Paim, une copie pure ct simple du memoirc de 1688; et il rcserva pour ses repliqucs la leltre de 169/i. 153. Or, voici. Messieurs, quels ^(aient les argu- ments faisant la force du memoire fondamental. ■ 11 y a ( 359 ) plus de cent ans que les Francais ont commence i faire le commerce avec les Indiens de la Guyane, ainsi que le montre Keymis cil6 par De Laet. — En 160^, La Ravardifere trafiqua avec les Indiens de I'Oyapoc et avec ceux de Cayenne, comme le temoigne Mocquet. — D6s 1626 les Francais ont colonist la Guyane. Le sieur de Chantail, et le sieur de Chambaut, son lieute- nant, men^rent cette ann6e-la une colonic de vingt-six hommes sur les bords da Sinamari. — En 1633, le cardinal do Richelieu cr6a une compagnie, qui, sous le noiii de Cap de Nord, n'avait d'autres bornes que 1' Ama- zone et I'Or^noque ; et depuis lors le roi de France a souvent assigne a la Guyane Fran^aise ces memes li- mites. — En 16Zi3, en 1651, en 166Zi, les Francais sent all6s s'6tablir a Cayenne, sous Rretigny, sousRoy- ville, sous La Barre ; et, sauf quelques interruptions, ilsonttoujours gard6 Cayenne. — uDurant un si grand » nombre d'ann6es, les Francais ont exerc6 {a Cayenne) t> tous les actes de v6ritables et legitimes possesseurs; » ils ont fait commerce avec tous les peuples indiens » des environs, chass6 dans leurs terres. pech6 sur » toutes les cotes, et meme dans 1' embouchure de la » rivifere des Amazones. » — « Ils ont voyag6 librement ))de tous cotes dans les terres ; et, entre autres, les » peres Grillet et B6chamel, jesuites francais, p6n6- » trferent en 1674 plus de cent lieues dans les pays qui » sont au midi de Cayenne, jusque chez les Acoquas, » qui habitent a I'ouest du Cap Nord, et oii jamais au- » cun Portugais n'avait mis le pied. » — « Les Portugais » ne peuvent pas s'excuser sur ce qu'ils ont les deux )) habitations de Corrupa et Destierro, sur le rivage ( SCO ) » septentrional de la riviere des Anicazones ; car on pent » Icur repondre, preniieremcnt, que ccs habitations )) sont de beaiicoup posterieures a nos etablissenients » dans la Guyane ; secondefiient, que leur habitation » de Corrupa est a plus de cent licues du Cap Nord, et )) celle de Destierro a plus de cent vingt ; et que la ri- » viere des Amazones ayant douze cents lieuos de lon- )) gueur, deux petites habitations ne sufllsent pas pour » occuper tout cc rivage, et encore nioins toute la ri- » vi^re, d'autant plus que uous habitons pkis pres » qu'eux du Cap Nord. » — Enfin, les Francais ont oc- cupy avant les Portugais, non-seulement la Guyane, niais encore le .Maragnan. 1 54. Le uiinistre portugais, voulant proc(^der avec toute maturite, consulta deux juges conipetents : — le general d'artillerie Gomes Freire d'Andrada, qui avail ete gouverneurdel'Etat de Maragnan au debut de I'en- vahissement dc la region de I'Auiazone par les Fran- cais, et a I'incitation duquel avait 6t6 ordonnee la con- struction des nouveaux forts sur la rive guyanaise de ce fleuve : — et le jeune comte d'Ericeira, Francisco Xavior de Mcnezes, litterateur extremenient 6clairt', parfaitement au courant de toutes les ])ublications francaiscs, fils de I'ecrivain qui dans son llistoiic de la liestanidtiiin dn I'oi ti:i;nl avait traite avec un grand soin ce qui regardait le Bresil, neveu de cehii qui avait traduit en latin cettc liistoirc si bresilienne, et descen- dant du gouverneur general du Bresil qui le premier avait fait sentir a sa coiir I'importance de la partie sep- tenlrionale de ce grand empire. 155. Dans deux uKimoires savamment 61abor6s, Audrada ot Ericeira demontrerent :' ( 3ni ) 156. Que la presque totality des allegations de I'ambassadeur de France ne rcgardait que la partie de la Guyane situ^e en dehors de la region de TAmazone; tandis que les Portugais du Br^sil n'avaient jamais pre^ tendu s'6tendre au dela de cette region, au dela de la rive droite de I'Oyapoc : et que dans ces limites, entre I'Amazone et TOyapoc, la pretention de la France n'a- vait aucun autre fondement que la seule envie de jouir de la navigation de I'Amazone, sans connaitre ce fleuve autrement que par sa reputation : — 157. Qu'avant le premier (Jtablissement des Fran- fais dans la Guyane, — qui n'avait 6t6 forme qu'en 1626, et a plus de cent lieues de I'Amazone, — d6ja les Portugais du Br^sil avaient fait acte de domination sur la branclie guyanaise de I'Amazone : en 1623 Bento Maciel Parente, en 1625 Pedro Teixeira. — 158. Qu'avant le premier (^tablissement des Fran- cais a Cayenne,- — qui n'avait eu lieu qu'en l63Zi, — d6ja les Portugais du Bresil avaient fait acte de domination sur la rive amazonienne du continent de la Guyane : en 1629 Pedro Teixeira, en 1631 Jacome Raimundo de Noronha, en 1632 Feliciano Coelho de Carvalho. — ■ 1 59. Que les Francais avaient 6te obliges d'aban- donner Cayenne, lorscpie les Bresiliens 61ev6rent eu 1638, sur le bord amazonien du continent de la Guyane, le fort de Desterro, qui n'avait cess6 d'exister qu'en 1697, par le m6fait du marquis de Ferrolles ; et lors- qu'en 1639 ils firent acte de domination jusque sur le Napo. — 160. Que, bien qu'en l67/i les j^suites francais Grillet et Bechamel eussent penetr6 libreraent jusqu'a ( 362 ) I'ouest du Cap de Nord, an midi de rcmboucliure de rOyapoc, ccla n'infirmait point les droits du Portugal; — puisfpie les deux P6res, comme onle savait parleur relation imprimt^e, s'6taient arr6t6s k I'lnipi, adluent du Caniopi, adluent lui-meme de la rive gauche de rOyapoc; et que, si I'lnipi se trouvait au sud du cap d'Orange, cela provenait de ce que I'Oyapoc ne coulait pas de Touest k Test, mais bien du sud au nord. — 161. Que leslirnites attributes par I'ambassadeur h. la concession francaise de 1633 (^taient inexactes, — puisque d'un livre francais iraprim6 deux fois, celui du p6re Fournier, il r6sultait que ces limites n'etaient autres que le Maroni et TOyapoc. — 162. Que ces limites, quant a TOyapoc, se trou- vaient parfaitement d' accord avec la donation portu- gaise faite en 1637 k Bento Maciel Parente, dont on pouvait exhiber a I'anibassadeur I'enregistrement offi- ciel, dans les archives royales de Lisbonne. — 163. Que le Roi Tr6s Chretien, en pennettant a sea sujets, par d' autres actes que celui de 1633, de s'6ten- dre de I'Amazone a I'Or^noque, avait toujours except^ les endroits d6ji occup6s par" des princes clir^ticns allies de la France, comme on le voyait explicitement d6clar6 dans les lettres de provisions de la charge de vice-roi del'Am^rique accord^es en 1655 au due d'Amp- ville, et dans I'^dit de creation de la compagnie des Indes occidentals en 166/j ; — et que des I'ann^e 1641 , imm6diatement aprfes le glorieux av6nement' de la maison de Bragance, le Portugal avait le bonheur de se trouver li6 k la France, non-seulement par un trait6, ( 363 ) mais encore par les preuves les plus eclatantes de I'aaiitie la plus cor di ale. — IG'j. Qu'il etait evident que, en assignant a ses sujets toutes les cotes de la Guyane, le I'oi de France n'avait pas entendu leur assurer la possession de la totality de ces cotes quand nieme; niais uniquement sa protection pour les 6tablissements effectifs que les Fran- cais r^ussiraient a y faire : — car I'^dit du mois de mai 1664 avait conc6d6 a la Compagniedeslndesocci- dentales, non-seulement toute la Guyane depuis I'Ama- zone jus(ju'a I'Orenoque, mais encore toute TAm^rique septentrionale depuis le Canada jusqu'a la Floride, et encore toute I'Afrique depuis le cap Vert jusqu'au cap de Bonne-Esp6rance ; et cependant, sans que la dignite de Sa Majesty Tr6s Chr6tienne en reciit la moindre atteinte, la France 6tait bien loin de posseder toute la cote de I'Afrique depuis le cap Vert jusqu'au cap de Bonne-Esperance , bien loin de posseder toute la cote de I'Am^rique septentrionale depuis le Canada jusqu'a la Floride, et bien loin aussi de posseder toute la cote de la Guyane. Elle n'avait rien, elle ne r6clamait rien a I'ouest du Maroni; et pourtant il y avait du Maroni h rOr^noque une etendue de cote incomparablement plus grande que de I'Oyapoc k I'Amazone. — 165, Qu'il 6tait si manifestement incontestable que le roi de France n'avait entendu assurer a ses su- jets que les endroits elTectivement occup^s par eux, qu'ua lieutenant g^n6ral du roi dans la Guyane Fran- caise, Lefcbvre de l.a Barre, dans un livre iniprim6 a Paris en 1666, avait d(^clar6 que la Guyane Francaise se renfermait entre le Maroni et I'Oyapoc. — ■ ( 36/j ) 166. Que dans ce m6me livre de 16G6, ce mCme lieutenant-g(^iieral du roi dans la Ouyane Francaise, avail public que le rivagc amazonien de la Guyane de- puis le Cap de Nord jusqu'a la pointe de Macapa 6tait presqiie incoiinii mix Fraiicnis : ce qui inipliquait I'aveu qu'en dedans de Macapa cc rivagc Icur etait tout a fait inconnu.— 167. Que dans un autre livre francais, publie un mois seulemont avant la presentation des lettres do cr^ance de I'ambassadeur, I'ingenieur Froger, qui ve- nait de passer vingt-cinq jours a Cayenne, s'enflam- mant auprfes de Ferrolles de I'amazonomanie, — tout en ajoutant a son ouvrage une <( carle du gouveme- » ment de Cayenne ou France /Equinoctiale » , dans la- quelle les bornes de la Guyane Franraise etaient por- tees k la rive septentrionale del'Aniazone, avait^bruile dans son texte que « le gouvernement de Cayenne n'a- ») vait point encore paru sous le noni de France Aequi- » noctiale avec I'^tendue ct les limites qu'il lui don- )) nait » : ce qui equivalait a une condauniation du zele indiscret du marquis de Ferrolles. — 168. Que I'ambassadeur lui-meme, en alli^guant que les Francais de Cayenne avaient i)ech6 meme dans V embouchure de In riviere des .-huazoiies, avouaitnette- ment quel'int^rieurde I'Amazone leur 6tait inconnu. — 169. Que Tambassadeur lui-meme ajoutait encore une preuve palpable de cette ignorance, en plarant le fort de Gurupa sur la rive septentrionale de, I'Amazone, tandis que ce fort, depuis sa fondation, depuis soixante-quinze ans, avait toujours et6 sur la rive me- ridional e. ( 365 ) 170. Aid6 par ses deux habiles coUaboraleurs, el par ses propres rechercbes, leministreportugaispressa rambassadeur si vigoiireusement, quele ininistre fran- fais de la marine et des colonies se vit dans la n6ces- sit6d'6crire au gouverneur de Cayenne, le2septenibre 1699, lui ordonnant « de s'infornier dans le plus grand » detail des litres qu'avaient les Francais pour pouvoir » naviguer sur I'Amazone, afin que Ton piit les oppo- )) ser aux Portugais, qui disputaient a la France le droit » de naviguer sur ce fleuve, prutendant reduire ses li- » mites a I'Oyapoc. » 171. Malgr6 toute sa bonne volonte, Ferrolles ne put fournir au comte de Pontcbartrain qu'un docu- ment, contenant les d(^clarations des principaux etplus anciens babitants de Cayenne ay ant fait le commerce dans la riviere des Amazones, — lesquels disaient aque » de temps imm6morial et par tradition continuelle ils » savaient par eux et leurs auteurs qu'il y avait, dans » le milieu del'emboucbure de la rivitjre des Amazones, » une lie beaucoiip plus grande que celle de Cayejiue, » que les Portugais, les Indiens Arouas babitants do » cette lie, les Francais, les autres voisins, et aussi les » Galibis sous la domination du Roi, avaient toujours » nomm6e Hyapoc , oil tons les Indiens de Cayenne » avaient perp6tuellement avec les naturels Indiens » dudit Hyapoc traits et trafique ; et que les naturels » de ladite contr6e d' Hyapoc de la riviere des Amazones )) avaient de tout temps sans difficult^ eu commerce )) avec les babitants de Cayenne et les Indiens qui en 1) dependaient. » 172. Cette pi6ce presentait un uouvel ecbantillon de I'adresse de Ferrolles. Sf ( S66 ) 173. Comme le nom iiidiir^ne de la riviere du cap d' Orange sedisait indillt*reinment, ou bien Oynpoc ou bien Y'npoc, Ferrolles, qui en 1694 avail os6 appli- quer kl'ile de Marajo la premiere de ces deux formes, eut encore le courage de lui ajipliquer en 1699 la se- conde, esp6rant ^luder ainsi tout a fait la pretention du Portugal ; d'autant que c'6tait \k un point rpii ne pou- vait etre eclairci que sur les lieux. 17Zi. Mais ce me i.e document p6chait par des vices que Ton ne pouvait pas se risquer a Staler devant le gouvernement de dom Pedro II. 175. On y afiirmait que les colons de Cayenne allaient trafiqiier dans I'ile de Marajo de temps imme- morial, ce qui sembJait vouloir faire entendre que c'6- tait bienavant I'^tablissement desPortugais surl'Ama- zone. Mais les Portugais 6tai'^nt fix6s sur cette riviere a huit lieues seulement de I'ile de Maraj6, depuis le mois de Janvier 1616; et sans compter les interruptions que nous savons, le m^moire prt^liminaire de I'ambassa- deur de France avail rappel6 que IcsFrancais n'avaient commence a habiler la Guyane qu'en 1626, et a plus de cent cinquante lieues de I'ile de Marajo. 176. II y avait autre chose dans ce nouveau do- cument. C'est que Ferrolles s'y faisait encore prendre en flagrant d61it d' ignorance sur 1' embouchure mfime de I'Amazone, quoique moins materiellement que la premiere fois. Dans sa lettre de 1694, I'ile immense de Marajo, plus de trois fois plus grande que la Corse, avait 6t6 qualifiee par lui (X Hoi. II ne r6p6tait plus cette etrange enormity ; mais il ne caract^risait encore Marajo que comme une He beaucoup plus ^innde que celle de Cayenne; — tandis que, s il avait connu Marajo ( 367 ) aiitrement que par les rapports toujours vagues des Indieiis, il se serait gard6 delui faire I'injure d'unepa- reille comparaison : il aurait su que, pour d^passerde beaucoup Tile de Cayenne, il n'6tait meme pas besoin del'ile de Caviana, et qu'ilsuffisait amplement de celle de Mexiana, plus de cinq fois plus grande que Cayenne. 177. Dans ce d^nument de raisons acceptables, le cabinet de Versailles, apr^s une insistance de plus de deux ans, se trouva fort heureux de pouvoir ajourner la question avec dignity. 178, Le !i mars 1700, Tambassadeur de France signa a Lisbonne un trait6 provisionnel et suspensif. \ 79. Voici, Messieurs, les stipulations de ce trait6, dent r original fut r6dig6 en portugais : 180. De la part de I'une et de 1' autre couronne on recherchera, et on fera venir jusques a la fin de I'ann^e prochaine 1701 tons les litres et eii^eigne- nients all6gu6s dans les conferences, pour servir a Ten- tier tJclaircissement de la possession des terres du Cap de Noi'd sitttees enl/e Cnyenne et la riviere des Ama- zon es ; etles pouvoirs donnes paries deux rois demeu- rent en leur force, pour que le difY^rend dont il est question soit termini d6finitivement dans ledit temps, et jusques a la fin de Tannee prochaine 1701. — 181. Provisoirement, demeure ind^cise entre les deux couronnes la possession de la partie desdites terres s'6tendant lelong de la riviere des Amazones depuis le fort du Cumaii ou Macapa jusques au Gap de Nord, et le long de la cote de la nier depuis ce meme cap jus- qu'a la rivifere ^ Oyapoc qvl Vincent Pincon. — 182. Cons6quemment , le roi de Portugal fera ( 308 ) 6vacuer et demolir le fort de Macapa ct tons les autrcs forts qu'il pourra y avoir dans cette 6tendue de lerres dont la possession denienre provisoirement indecise. — J 83. Enfin les Francais et les Portugais ponrront s'6tendre provisoirement dans lesdites terres, mais a ces conditions : Que ni les uns ni les autres ne ponrront y faire aucune habitation, ni y 6tabliraucnn comptoir de quelque qnalit6 que ce soit : Que les Portugais ne ponr- ront y entrer que par les terres qui sont le long de la riviere des Aniazoncs, et non autrement, — et qu'ils s'arreteront ala rive droitede I'Oyapoc : Que les Fran- cais ne pourront non phis y entrer que par les terres qui sont du cole de Cayenne, et non autrement^ et qu'ils s'arreteront h la portion de la rive gauche de I'Ama- zone comprise entre Macapa et le Cap de Nord : et que « tant les uns que les autres se contiendront respecti- » vement entre lesdites rivieres cy-dessus marquees et » exprim^es, (pii font les bornes, les lignes et les li- » mites des Terres qui demeurent indt^cises entre les » deux Couronnes. » 18A. Etudions bien, Messieurs, cc traite fonda- mental. 185. 11 declare que le dilT6rend entre la France et le Portugal roulait sur la possession des terres du Cap de Nord sitnees entre Cayenne et la riviere des Aviazones. — Done Louis XIV avail reconnu que sa pretention il'ile du Maragnan 6tait trop insoutenable, et il I'avait retiree. 486. Autre consideration. Les Francais ne pou- vaient entrer daus le territoire ind6cis que par les terres qui sont du cote dc Cayenne, et nun (uttrcnieni ; et ils de- ( 369 ) vaient s'arrfiter h la rive gauche de TAmazone, et en- core tout k son commencement. — Done le traits de 1700 interdisait totalement a la France la navigation de la riviere des Araazones. 187. Troisi^me consideration. Nous savions d6ji qu'acette epoque les Francais etles Portugais s'accor- daient a donner le noin de Cap de Nord a toute la Guyane ; et le trait6 de 1700 nous en fournit une preuve de plus. II se serait abstenu de nommer I'ile de Cayenne, s'il n'avait pas employ^ le mot de Cap de Nord dans son sens le plus large. 188. La phrase — siliiecs enire Cayenne et la ri- viere ties JniazDnes — est ce qu'on appelle en termes de grammaire un complement restrictif. Le differend 6tait done sur la partie de la Guyane siUi6e au midi de Cayenne ; et comme le P6rou etait alors la borne occi- dentale de la Guyane, le differend comprenait tout le rivage septentrional de I'Amazone jusqu'au P^rou. 189. Stir la parlie de la Gujane situee on /nidi de Cayenne... II le fallait ainsi pour la France. Bien que le Portugal n'eiit jamais articule la pretention de s'6tendre plus loin que I'Oyapoc, la France pouvaitle craindj-e ; car , depviis I'etablissement 6phem6re que La Barre avait fait en 106/i sur la pointe occidentale de la bale d'Oyapoc, les Francais n' avaient jamais rien eu au midi de Cayenne. Lorsqu'en 1677 Ferrolles d61ogea les Hollandais de la rive gauche de I'Oyapoc, il s'6tait contentc de demolir toutes les constructions qu'ils y avaient baties, et il s'etait retire immediatement k Cayenne, sans rien laisser a leur place. J 90. Quatrieme consideration. Le trait6 assigna pour limite septentrionale des terres dont la possession ( 370 ) deraeurait provisoirpmentincl^cisp, la ri\i^re d'Oynpnc on fi/ice/it Pinro/i. — Pourrai(-il v avoir, sur le vrai sens de cette designation, I'ombre du nioindre donte? 191. Le nom indigene d'Oyiapor, r(^tabli par les Anglais, et popularise par eux et par les Hollandais, etait notoirement et exclnsivement applique depuis plus d'un siede a la riviere du cap d'Orange, — nieme par les Francais, chez lesquels il 6tait devenu aussi le seul en usage. Deux ans k peine avant la conclusion du traite de 1700, an debut nienie de la n^gociation dont il futler6sultat,ringenieur francais Froger, I'ami de Ferrolles, avait inscrit a reniboucliure de la riviere du cap d'Orange le titre d'Oja/joc B., — precisement comme dans le trait6. 192. Hors de Ik, le nom d'Oyapoc n'avalt jamais ete applique h aucun autre lieu que par Ferrolles, — k I'ile de Maraj6, dans sa lettre de 1694 restee enfouie dans les archives du niinistere de la marine et des co- lonies. Mais le traite ne donnait pas ce nom k une i7e ; il le donnait k une riviere, et k un riviere debouchant sur la cole de la, iner, entre le Capde Nord et Cayenne, tandis que I'ile de Marajo est-au midi du Cap de Nord et en dedans de I'Amazone. 193. Le nom de Rlinere de Vincent Pincon, sub- stitue par les Espagnols au nom indigene, selon leur mauvaisc habitude, etait le seul employe par eux et par les Portugais pour indiquer le fleuve du cap d'Orange. La donation ^Bento Maciel Parcnte en 1(537, en faisait foi. Get acte, qnoique non imprime, etait bicn conuu ii Versailles : le ministre portugais I'avait all6- gue a I'ambassadeur de Louis XIV dans la longue dis- cussion qui preceda le traite ; et d6s 168S il avait ete ( 371 ) oppos6 k Ferrolles par le commandant portugais du fort d'Araguari. 194. Dans cette meme notification faite h Fer- rolles douze ans avant la conclusion du trait6 de 1700, les Francais avaient d6j^ vu la double denomination d'Oyapoc ou Finceiii A*///rr)r/ employee cumulativement, comme dans le trait6, pour marquer avec toute preci- sion la rivifere du cap d'Oiange. (c Les limites des pos- » sessions portugaises sonta la riviere du cap d' Orange, » appeiee par les Portugais Bivieie de Finceni Pi neon, » et par les Francais Oyapoc. » Ainsi s'6tait exprim6 le commandant portugais du fort d'Araguari; et cette declaration avait 6te portee aussitot par le goiiverneur de Cayenne ci la connaissance du cabinet de Versailles. 195. Vous le voyez, Messieurs : la riviere stipu- lee par la France et par le Portugal dans le trait6 pri- mordial de 1700, pour la limite septentrionale des terres dont la possession demeurait provisoirement indecise, etait celle du cap d'Orange, celle qui porte aujourd'hui, comme alors, le nom A' Oyapoc. 196. Si nous nous rappelons que la limite m^ri- dionale de ces memes terres etait le fort de Macapd, une remarquable coincidence nous frappe aussitot : — c'est que les negociateurs du traite de 1 700 se r^gl^rent sur le livre public par La Barre depuis trente-quatre ans seulement, sur ce livre ou, comme nous I'avons vu, le gouverneur de la Guyane Francaise avait declare in- dependante, n'appartenant a aucune puissance euro- peenne, la partie de la Guyane comprise entre la pointe de Macapa et le cap d'Orange. 197. Maintenant , Messieurs , permettez-moi une cinqui^me et derniere consideration. — Louis XIV r6- ( 372 ) clama d'abord, non-spulement lesdeux rives de I'Ama- zone, mais encore tout le pays ([ui s'etcnd iUe de San-Nicolao , dont nous ignorons le nom, est a 3 milles de ce port et dans Tin- t6rieur. Sur la meme c6te de Tile , on rencontre 6galement le Porto-Velho ou bale de San -Jorge. 11 y cxiste quel- ques habitations et un fort. Entre le port de Preguizo et le Porto-Velho , il y a encore les deux petites bales de Lupa et de Carical, qui sont peu fr6quent6es, h. cause du voisinage des deux autres. Sur la cote Sud-ouest de I'ile , la bale de Tanafal offre un bon mouillage dans toutes les saisons, les vents de Sud-ouest ^tant refoul^'s par les hautes terres de I'ile. On y trouve de bonne eau , et la ville principale , la meme dont je viens de parler, est i 9 milles environ de cette bale. Le chemin qui y conduit est fort mauvais : aussi ne peut-on se procurer de provisions, qu'en se rendant i des cabanes de bergers voisines de la baic, 11 y existe une maison de douane. Quand on est en vue de San-Nicolao, dont la c6le ( 383 ) Nord n'est pas frequent^e , on pourra se procurer un pilote, en hissant le pavilion convenable et tirant «n coup de canon. lie lie SaL — L'ile de Sal prodiiit beaucoiip de sel, et , bien que son sol fournisse a peine asgez d'herbe pour nourrir quelques chevaux , des bceufs et des ch^vres , on peut dire que c'est une des plus riches de I'archipel. On y recueille annuellement de 350,000 a 450,000 ian^gues de sel, qui valent en moyenne 600,000 ou 700,000 r6aux. Ce sel est port6 sur les marches du Br6sil, de la Plata et a la cote d'Afrique. On a ^tabli entre les salines et la nier, un chemin de fer dit k I'am^ricaine, sur lequel les voitures sont trai- nees par des mules. Le seul village de l'ile, celui de Santa-Maria, est situ6 dans la bale du meme noni, an Sud de l'ile de Sal. On a etabli dans cette bale trois moles commodes. II est tres-difficile de s'y procurer des vivres frais , car on les tire des autres iles. L'6tablissemeiit de Santa- Maria augmente chaque jour d' importance. La meilleure bale de l'ile est celle de Mordeira, situ6e sur la cote ouest. Dans I'hivernage, on 6vite de mouil- ler ou de sojourner a l'ile de Sal, dont tons les mouil- lages sont en g6n6ral d^yigereux dans cette saison. lie de boa-Vista. — L'ile de Boa-Vista produit 6gale- meni du sel. On en exporte chaque ann6e de 150,000 a 200,000 fanfegues qui valent, taux raoyen, quatre duros les soixante fan^gues. On exporte encore quel- ques peaux de chfevres et des cuirs. Dans la ville principale, 6tablie au fond de la rade anglaise, il y a quelqueS grandes maisons de commerce. ( 38Zi ) On trouve dans cettc bale un boii mOle. Les inar- chands sont etablis au bord de la mer et le sel est port6 au mule a dos de mulct. Dans I'ile de Sal, conmie a Boa-Vista, le sel s'obtient, en mettant I'eau des salines oudespuits dans des vases de petite dimension qu'on laisse exposes a Taction du soleil et de I'air (1). Des que le sel est d6pos6, on le tire des vases et on le met en vente. Les n^gociants en sel sont les m«mes pour les deux iles. Le meilieur sel de Boa- Vista se tire de la partie Nord de I'ile ; mais comuie les lois de douane empeclient les navires Stran- gers de traiter ailleurs qu'aux ports d6sign6s, les pau- vres habitants se voient priv6s des profits de la vente directe et sont forces de c6der leur sel aux nSgociants etablis dans la rade anglaise ; cette baie est a pen pr6s la seule frequentSe. On pent cependant mouiller sur la cote Sud de File, dans 1j\ baie nomm6e Portuarativement. Le principal port de l'ile est celui de Furna. La ville est situee dans une position tr's agreable a 3 milles du port. Chaque maison possede un jardin. Snr le bord de la mer, il y a des agasins et un mole ( ?>S6 ) avec 6clielle qui permet de cl61)arquer facileraenl. Si on \e\\t un pilote pour entrer dans le port, situ6 pr^s de la pointe Sud de I'ile, il suflua de tirer un coup de canon en hissant le pavilion convenable. II existe dans le port trois chaloupes pour aider a I'entr^e et a la sortie. Sur la c6te Snd-ouest de Brava, on trouve encore les moiiillagesd'Ansiao, deTorreiros etsurlacoteNordcelui de Feijao de Agna. Cesmouillages sont fort petits et peu stirs. Le dernier n' est fr^quent^ que pendant I'hivernage. L'ile de Brava produit en abondance des fruits, des legumes et des grains. On en exporte pour Lisbonne de I'huile de palme et du caf6. Les aulres iles de I'ar- chipel on tirenl des grains. On en transporte quelquefois a Mad6rc. Les droits d' exportation qui se payaient en ^856, dans I'archipel des iles du Cap Vert, 6taient fix6s couime il suit: Orcliilla Huile de palrne {, 700 reis par quintal, pour Lisbonne. 400 reis id. pour les porls Strangers. 3000 reis par nioyo, pour Lisbonno. 6000 reis id. pour les ports etraugcrs. En r6sum6, il y a dans cet archipel une grande misfere'etnne mauvaise administration locale. On pour- rait comjjattre la premiere, en modifiant profond^ment laseconde et en I'^purant. Les habitants ais(5s sont d'un caractere fort g6n6reux, tr6s hospitaliers, et ils accueil- lent avec empressement les Strangers. Les cultures pourraient prendre dans ces iles un grand accroisse- ment, si Ton y pratiquait un syst^me d'irrigation bien entendu. Avecles cultures, onparviendraitciaugmenter ( 387 ) consid^rablement le b6tail et le nombre des animaux domestiques. Toutefois, il fautledire, les travaux agri- coles sont fort difliciles pour les Earop6ens, sous ce climat brulant et raalsain. Les nfegres paressenx par nature, esclaves la plnpart , ne peuveut fournir des travailleurs intelligents et actifs. II y a done bien peu d'espoir d' amelioration dans I'etat g6n6ral de I'archi- pel, d'autant queFa-rgent manque pour tous les travaux d' utility g^n^rale que Ton pourrait entreprendre. Ce- pendant les iles du Cap Vert, si on les compare au con- tinent en face duquel elles sont situ^es, sont encore , une bonne relache pour les navires qui ont besoin de vivres frais, elles offrent en r(^alit6 bien plus de res- sources de tous genres. C. Ph. de Rerhallet. ( 888 ) 4iialy!>»ef9, KttpporiM, etc. RAPPORT Sur I'ouvrage iiltiUil6 : Hlstoire des nations rh'i/isces (la i\Iexi([ue et de r .'iineiiqiie cent idle, /liirant les siecles anterieiirs a Christophe Culoniby eciite sni des docu- ments oiiginanx ct cntihrement inedits , piiises mix nnciennes nrc/iives des indigenes, par M. I'abbe Bras- seur (Ic Rourbourg. Tom. 1 et II. Paris 1857-58, in- 8, La Soci6le de Geographie comiait cli'ja I'aJ^be Rras- seiir de Rourbourg, doiit elle a enteiidu, avec ini vif int6r6t, une commiiiiication sur le Guatemala. Ce n'6- tail la qu'un specimen des travaux auxquels ce savant voyageur se livre depuis plusieurs annees, et la j)iibli- cation que je vous fais connaitre peut seiile donncr une id6e des nombreux et imi)ortants mat6riaux que cet eccl6siastique a recueillis dans deux voyages faits au Nouveau-Monde. Le z61e et 1' intelligence de M. Rras- seur nous promettaientsurrAmeriquecentraleun livre d'une veritable valeur, puisque nous savions qu'iLs'est livr6 k I'etude des idiomesdecepays, ct qu'il a explore les antiquitesetles peuplades indiennes. Aussidevons- nous dire a I'avance que, malgr6 les critiques de detail que son estimable publication peut soulever, elle n'en demeurcra pas moinsde la plus grande importance pour I'histoire am(jricaine ; et tous ceux qui voudront s'en occuper, ne sauraientse dispenser de la consultcr. ( SS9 ) L'auteur a donii^ la liste de tons les documents im- primis oil manuscrits dont il a fait usage, et cette liste seule est la meilleure confirmation du jugement que je viens de porter. Comme 1' intelligence de la langue et de I'^criture mexicaines etait une condition n6cessaire ]iour pouvoir |)en6trer dans la nuitdes origines du Nouveau monde, M. rabbeBra^seurafaitprecederson livred'un apercu sur cette langue, accompagn6 de dessins des hierogly- phes mexicains. Afin d'inspirer plus de confiance au lecteur, il s'est mis en rapport avec la persojine qui est, sans contredit, le plus versee dans ces inati^res, M. Aubin, dont la science attend depuis longtemps un monument elev6 a la philologie am^ricaine. Cette introduction embrasse tout le livre 1". II est a regretter que l'auteur n'ait point apport6 jilus de re- serve dans ce qu'il dit des traditions primitives ; que meme il ne nous ait pas toujours avertis de ce qui pcut etre consid6re comme probable ou de ce qui ne se pr6- sente ciu'avec des caracteres purement mythiques ou l(^gendaires. Ainsi' que tons les hommes qui abordent les premiers ime terre encore inconnue, il s't^gare facile- ment et se laisse aller aux illusions des rapprochements et des Etymologies. Lamani^redont fut peuplc^e I'AmE- rique, ou paraissent s'etrc melees des races fort diverses, est encore environn^e de trop d'obscurit6s, pour qu'il soit possible d'Emettre une opinion definitive. Un fait demeure cependant 6tabli, fait que M. Tabbfj Brasseura savamment mis en lumifere, c'est le grand d6placement des tribus americaiues du nord an sud. Presque toutes les peuplades indicnnes de la portie septcnti'ionale du XV. MAI ET JUIN. 0. 20 ( 390 ) Nonvcau monde pretondent 6tre arriv^es del'ouest, en passant le Mississipi. Suivant los iMuskoges, le grand peuple dont ils sont sortis,demeure encore dans I'ouest. Leur arrives ne parait daler que du x vi' si^cle. Les Chip- pewayssont les seuls dont les traditions indiquentjus- qu'inn certain point, leur sortie del' Asie. Usliabitaient, disaient-ils, une contr^e furt recul^e vers I'ouest, d'ofi une nation m6cliante les avait chassis ; ils travers^rent nn long lac rempli d'iles et de glacons. L'liiver regnait partout sur leur passage, lis debarqu6rent prfes la ri- viere du cuivre. Ces circonstances ne sauraient s'ap- pliquer, remarque M. Brasseur, qu' a la migration d' une peuplade sib^rienne qui aurait pass6 le d^troit de Behring, ou long6 les lies Al^outiennes. Les /in/in/i qni sont r6pandustout le long dela valine du Mississipi, ot qui ont 6t6 explores par M. Davis et Squier, semblent . fetre les t6moins de cette antique migration. Tons ces monuments sont de forme conique, de proportion co- lossale ; ils constituent d'immenses enceintes , con- struites de terre melt^e de pierres, et adectant tour h tour une disposition parallelogramique, elliptique, po- lygonale, ou tout k fait irr^guliere. De pareilles con- structions d(5notent un 6tat de civilisation relatif, sup6- rieur a celui des Indiens actuels, et qui s'adapte assez bien au genre de soci6t6 que pouvaient presenter les populations conqu(^rantes de rAnaliuac. Ces tribus in- connues paralssent avoir et6 agricoles ; jnais I'agricul- ture n'a pu Otrochoz eu\ le r6sultat d'une importation puisqu'ellcs ne connaissaient d'autres c6r6ales que le mais, dont Torigin^ est exclusivement am6ricaine. La civilisation primitive de TAm^riquc septentrio- ( 391 ) nale semble avoir ^tendu ses bienfaits, dans les pre- miers temps de son existence, aux diverses contr6es connues aiijom'd'liui sous les noms d'Eltats de Tabasco, de Chiapas, d'Oaxaca et d'Yucatan, ainsi qn'aiix r6- publiques actuelles de Guatemala, de San-Salvador et de Honduras. Cette partie de rAm6riquedoit a son sol volcanique et a ses nombrenx cours d'ean, une singu- li^re fertility. La partie septentrionale du Honduras, les regions centrales du P6tenetduLacandon, au nord de Guatemala, et les provinces de Chiapas et de Ta- basco, sont arros6es par les plus grandes rivieres qui coulent entre le Mexique proprement dit et I'isthme de Panama. Au dire de Ramon de Ordonez, dont I'ou- vrage a 6t6 souvent mis a contribution par M. Bras- seur, les bords du Tabasco et de FUzumacinta sont re- present^s, dans la tradition tzendale, comme ayant 6t& le th6atre des merveilles op6r6es par Votan, Ce Votan joue un trfes grand role dans la mythologie de I'A'm^- riquecentrale, et ilse rattache au souvenir d'un deluge qui rep^rait dans toiites les traditions des peuplades de I'Am^rique septentrionale. C'estl^un fait fort digne de remarque. Car, meme en d^gageant de ce qu'ont rapport6 les missionnaires, les rapprochements qu'ils ne manqtient pas de faire avec le deluge biblique, il n'en reste pas moins constant que le souvenir d'un grand cataclysme existait chez* des peuplades am^ri- cahies fort 6loign6es les unes des autres. Si de pareilles traditions subsistaient chez tons les peuples de I'Asie et de rOc6anie, elles serviraient en quelque sorte de fil condiicteur pour suivre lesmigrjftions qui s'op6r6rent de I'Ancien au Nonveau monde, Mais la tradition du ( nof! ) deluge lie se rotrouvc pas clicz une foule do populations asialiques cependant fort anciennes. Les Cdiinois ne la connaissent pas , car ce q'u'ils rapi)ortent de Yao a ^videmment trait au d6bordement du llcuve Jaune. Uien ne I'indiquc cliez les anciens Egyptiens, non plus que cliez les Tartares. On n'est done point certain que ce cataclysme americain ne se lie pas k quelque grand ph6nomene dont les bords de I'Oc^aii auraient 6t6 le tli&itre, ou meme que ce soient lades importations des colonies scandinaves, si tant est que de seuiblables co- lonies se soient jamais fondees dans rAmcriqup, plu- sieurs sieclesavantl'aiTiv^e de Colonil). Ona])lasicurs fois, et avec une certaine vraiseniblance, emis I'avis que des Jaj)onais ont pu venir aborder sur la cote du Mexique, et Ton a prodult en faveur de cette opinion des rapprochements ing6nieux. Mais la race jaune n'au- rait point importe dans le Nouveau monde et laiss6 si vives des traditions dont on ne trouve chez elle au- jourd'liui aucunes traces et qui ne sont pas mention- ii6es dans les annales cliinoises. L'6tat actuol de nos connaissances ne permet done de tirer aucune don- n6e historiqiie de ces I6gendes ; elles ont 6t6 d'ail- leurs singuli6rement raetamoriilios^es par les mission- naires, toujours prets a reconnaitre des vestiges do leurs croyances dans des contes d'unc extreme 6lasticit6, et qui s'imaginaient lin^ gur les momnnents mexicains la preiive que saint Thomas a\ait pouss6 jusqu'aux Grandes Indes sa predication. Du rcste, rendons la justice a M. Brasseur, de dire (pril est lui meme assez r6serv6 surce chapitre, retnde deslieux lui ayantmon- tr6 la possibilite de vastes inondations locales. Ador6 ( 593 ) chez plusieurs nations sous le litre de Ca-ur dnpeuplc, ou de Ccjcnr ilii royaiime, Votan apparait, 6crit notre auteur , tantot conime une creation mythique elev^e au-dessiis de Fhiijiianite, tantot coumieun prince elnn Idigislateur. Quelqiies personnes ont voulu I'econnaitre dans ce Votan le Bouddha indien, que le pros6lytisme des premiers missionnaires de Cakya-Mouni aiu'ait port6 jusqu'au dela des niers. llien n'autorise encore de pareils rapprochements. Je me bornerai a dire qu'on reconnait ici un de ces personnages analogues a Ma- nou, a Minos, a Tlioth, a Odin, a Zoroastre menie, places a la tete d'autant de mythologies. L'analogie que Ton d^convre entre les traditions tzendales , quichees et me.xicaines, entre les personnages pr^sen- t6s sous les noms divers de Votan, Gukmnatz, Caikul- can et Quetzacohuatl, fait croire que leg diflerentes mythologies des tribus de I'Amerique centrale d6cou- laient d'une source commune. Peut-etre . les premiers Espagnols ont-ils prete a la th6ologie mexicaine un spiritualisme et une puret6 plus grande quelle ne les oflrait en r^alite etqueneTadmet M. Brasseur. L'6tude compar^e des mythologies sauvages m'a mis fort en garde centre cette m^taphysique theologique, intro- duite sous 1' influence du christianisme par les derniers r6dacteurs des traditions am^ricaines. M. Brasseiu* com- bine les tt^moignages tiri^s des manuscrits 6crits en nahuatl,enquich6eten kakchiquel. Ces idiomes consti- tuaient les trois langues litt^raires principales du pays. Le nahuatl ou mexicain proprement dit est I'idiome dans lequel est compos6 le co<(ex clduialpopoca^ un des plus importants que 1' auteur ait eu a sa disposition. ( 394 ) C'est riiistoire des royaumes de Culhuacaii et de Mexico, ^crite au milieu du xvrsit;cle. Elle renfprnie, ann6epar aniK^e, les annales de ces pays jnsqu'en I'an 751. La langue quich6e 6tait parlt^e par une population qui pa- rait SB rattacher au.x Tolt^ques. Le principal nianus- crit de cet idiome consult^ par I'auteur a et([' decou- vert a Santo-Tomas Chichicastenango, autrement dit Chuili, bourgade considerable du Quicli6, oii habitent les descendants d'une grande partie de I'ancienne no- blesse de ce royaume. II raconte les origines des Indiens de la province de Guatemala. Le memorial de Tecpau- Atitlan, qui comprend une g6n6alogie des princes de la famille royale de Cakchiquel, est le principal docu- ment (^crit dans la langue de ce nom dont M. Brasseur ait profits ; il date de la fin du xvi" sitele. Le meme auteur a aussi fait usage de vocabulaires et de diction- naires des autres idiomes de I'Am^rique centrale r6di- g6spar des Espagnols. L'lm des plus importants entre ces idiomes est le tzendal, parlt^ encore aujourd'hui par un grand nombre d' Indiens de I'Etat de Chiapas, et qui est de la meme famille que le maya, la langue du Yucatan. La priority du tzendal et du maya est une preuve non Equivoque de 1' antiquity des nations chez les- quelles ces langues 6taient en usage. Aussi fait-on g^n^ralement des cotes du Yucatan et des provinces riveraines de I'Uzumacinta , le premier si^ge de la civilisation en ces pays. L' Yucatan forme, comma on salt, une presqu'ile qui se di^tache nettement du continent dont elle est s6par6e k I'ouest par la lagnne de Termiiios, au sud, par les plateaux mari^cagoux du ( 395 ) P6ten-Itza, et a Test par le golie Dulce. Par sa consti- tution g^ologiqiie, I'Yucatan annonce un sol emerg^ des eaux, a luie 6poque comparativement r^cente. L'Yucatan proprement dit n'a point de rivieres, i r exception de celle de Charapoton, qui coule directe- ment de I'est^l'ouest, dans la partie m6ridionale de la p6ninsule. On y voit encore plusieurs cours d'eau peu consid6ra])les, mais qui se dess^chent apr^s la saison des pluies. En revanche, on y trouve un grand nombre de lacs et d'6tangs, quelques-uns reraarquai^les par leur 6tendue et lexu' limpidite, et surtout une multitude de puits naturels, situes g6neraleinent a une grande pro- fondeur, dans des grottes d'une forme extraordinaire, oil on les croirait aliment^s par des rivieres souter- raines. Toutefois le sol de I'Yucatan est uni, il est per- p^tuellement convert d'une v6g6tation vigoureuse, ce qui n'empeche pas I'air d'etre extremement salubre. D'aprfes les traditions, lepays 6tait^ dans leprincipe, habile par les Qiunam6s, race de grants, line legende, recneillie par Lizana, fait venir les premiers habitants du pays de I'ile de Haiti, d'oii ils seraient passes en- suite dans celle de (-u])a. On a cru reconnaitre cette dernifere He dans le Valum-Votan, d'oii les historiens tzendals font arriver Votan, qui seralt venu s'^tablir sur le cours de I'Uzumacinta, aprfes avoir d^barqu^ an voisinage de la lagune de Terminos. Le livre II de I'ouvrage de M. Brasseurest consacr6 a I'histoire prunitive du Mexique et a celle de la r^pu- blique th^ocratique de ToUan. L'auteur poursuit I'his- toire des Tolt^ques ou habitants de cette republique au.\ livres 111 et IV. Je nc peux le suivre dans ses ( 396 ) longs d6veloppemcnts, on il est bieii (lilTicile au reste tie faire la part de la realite et de la fable. Trois races atlirent, avec lesTolteqiics, plusparlicnlierenientnotre attention : les 01ni6(jues ({ui s'etablirent sur le |)lateau de Huitzilapan ; les Totonaques et les Otliomis. Les Totonaques s'attribuent, dans leurs annales, I'^rection des pyramides de Teotihuacan. lis ^talent descend us dans la vallec d'Anahuac, apr6s avoir laisse derriere eux les Xalpaneqties, quis'6taient arret^ssur lesbords du lac de Xaltocan. L' extreme dill'erence qui separc I'idiome des Totonaques de la langue nalniatl, son alFi- nit6 an contraire avec le niaya, sont une preuve de son antirpiite. Les Othoniis s'6loignent encore plus des Mexicains. Gomara les fait venir du nienie pays que les Olnieqnes et que les Mixtecas, lesquels habitaient le Tlalocan, on pays de I'abondance ; c'est I'ancien noni quel'on donnait aux contr6es situ^es entre Oaxaca et Chiapas. Les Otliomis occupaient les montagnes et les valines de I'Anahuac, assez longtemps avant les Nahoas et les tribus qui furent ensuite connues sous le nom de Tolteques. lis s'^tendaient dans tout le royaume du Tula, ou Tollan. ilndes et grossiers aujounriuii, les Otliomis ont C'ie de tout tnitps agriculteurs. lis avaient une religion a part , dont M. Brasseur nous donne un apercu. Leur principal dieu etait Okha, et entre les dilft^rents heros auxquels ils rendaient un culte, se plarait en premiere ligne Otomitl. Ce peuple difl'erait du reste assez peu des Mexicains par les usages, mais sen distinguait en ce qu'il se rasait la t6te, ne laissait croitre simplement qu'une petite toulle de clie- veux au sommet de I'occiput, cQiume Ic font les Clii- ( 397 ) nois. Asservis tour h tour par les Tolt^ques, les Chi- chiia^ques et les Aztt;ques, les Othomis 6taient uit^pri- ses des autres peuples de rAnahuac, chez lesquels leur nom 6tait une sorte d' injure. Le livre V est consacr6 a I'histoire des Quiches et des Mayas. L'auteur nous y donne sur les mceurs et la religion du Yucatan, des details d'un grand int^ret, pulsus, il est vrai, en partie, dans Herrera, Lizana, Cogolludo et Torquemada. Je voudrais pouvoir en re- produire ici quelques-uns. II y a la des donn^es ethno- logiques fort importantes. Le livre VI s'ouvre par des considerations sur la civilisation am6ricaine et les in- vasions barbares, et se continue par I'histoire de- taill6e des Chichimeques ; il se tennine avec les pre- miers temps de I'histoire du i\Iexique propretnent dit. Le livre VII embrasse I'histoire des Teo-Chichimtiques, celle des rois de Culhuacan, de Tetzcuco, et fmit par la vie d'Acamapichtli II. Le livre VIII, qui est le dernier du tome second, embrasse I'histoire des rois quiches. On y trouv6 de curieux details sur la puissance cakchi- quele. Les d6sastres de I'Yucatan terminent le tome. Ce que l'auteur nous dit des moeurs et de la religion des Quiches fait le pendant de ce qu'il a rapporte de I'Yu- catan. Les Quicli(5's habitaient une r(^gion oi^i M. Bras- seur a reside lui-meme, au milieu des Indiens, et il a 6t6 parfaitement plac6 pour recueillir les documents qu'il nous fait connaitre. Toutefois, il semble se lais- ser aller un peu au desir de retrouver chez eux des institutions analogues a celles des S6iiiites, entrain^ qu'il est d'ailleurs par les rapprochements que se plai- saient a faire ses devanciers. Pourquoi. en efTet, va-t-il chercher des souvenirs do la niaison dc la Cahba chez ( 39S ) un pcuple qui est si eloign^ des Arabcs par les lieux, la langue et I'liistoire? Je regrette d'autant plus ces rapprochements hasardcs qu'ilspeuvent couipromettre aux yeux du ciitique la valeur tr^s r^elle des docu- ments rasseml)16s par Vauteur. L'ouvrage de M. Brassenr se lit avee un int^ret sou- tenu et est heureusement compost. Le troisitjme volume trouvera certainement, cliez Ic public instruitjememe accueil qu'ont rencontr6 les deux premiers. Ce qu'on pourrait peut-etre reprocher aceux-ci, c' est d' avoir trop niultiplie les details et donn6 parfolsl'apparence dela certitude liistorique a ce qui n'est qu'une induction ou une conjecture. Maisje laisse auleclcur le soindefaire la part de I'entrainement bien naturel qu'^prouve tout explorateur d'un champ nouveau, tout pionnier qui ouvre une route nouvelle ; la critique n'est possible que quand la voie est 6clairee, et le savant missionnaire aura le merile de 1' avoir tracee ci travers un terrain uon- seulement en friches, mais encore de difficile acc6s. Dans le troisi^me volume, qui nous reporteraau temps de la conquete espagnole, il entrera ailleurs sur un terrain moins mouvant. Ces reserves faites, je ne puis donner que des 61oges au travail de I'abbe Brasseur, accomjili dans des cir- Constances souvent difliciles, avec un d6sinteressement et une tenacitt^louables, fruit de labours prolong^squi ne reiicontraient, dans le principe, ni ajipui suffisant, ni curiosite empressee. La Society de G6ographie se doit a clle-meme de porter t^moignage en faveur d'une ccuvre aussi mcritoire, el pour I'auteur duquel elle professc une juste estime. Alfued Malrv. ( 399 ) VOYAGES d'uNE FEMME AUTOUR DU MONDE, Par M"" Ida Pfeiffeu ; Traduits de rallemand par W. de Suckau, 2 vol. in-12. Paris, 1837 et 1858. La Soci6t6 de G^ographie ayant d6sii"6 qu'nn rap- port lui fut fait sur les voyages d'line femme c6l6bre quelle s'lionore de compter parmi ses membres , M'"" Ida Pfeifler, je renfermerai dans line meme analyse les deux voyages autour du monde quelle a ex6cut6s, et qui embrassent, le premier , une p^riode de deux amines, de 18/i6al8Zi8; et le second, une de trois ami6es, de 1851 a 185Zi. Disons d'abord un mot de I'auteur. M""= Ida Pfeifler cette courageuse touriste qui assis- tait, il y a deux annees, a une de nos stances, est n6e en 1795 a Vienne, capitale de rAutriche. Elle s'ymaria vers 1820, et eut deux fds. — Aprfes la mort de son mari et I'^tablissement de ses enfants, se voyant libre, elle put disposer d'elle-meme et satisfaire 1' extreme d6sir qu'elle avait de voyager, D6s 1842, elle parcourut la Turquie, la Palestine et I'Egypte, et visita les pays scandinaves ; puis elle fit ses pr6paratifs pour tenter son premier voyage autour du monde. Ses dispositions prises, elle se rendit de Vienne a Hambourg, oii elle s'embarquapour le Br6sil. Elle resta quelque temps a Rio-de-Janeiro, d'ou elle repartit pour doubler le cap Horn et remonter I'oc^an Pacifique afin de toucher a Valparaiso. Be ce port du Chili, elle ( ZiOO ) sp dirigea vers Taiti, station fraiiraise de I'Oc^aiiie, d'ou elle se rendit h Canton. De ce point de la Chine, trop comm pour qu'il soit n^cessaire de nousyarreter, elle gagna les Indes orientalcs pour visiter ot d(^crire suc- cessivemcnt Calcutta, Benares, Delliy, et passera Bom- bay, puis h Mascate et a Bagdad, puis a Mosoul, a Tau- ris, ville fronti^re de la Perse, etenfin k Constantinople et Athfenes, sur son retour vers sa patrie, ou elle ren- trait en 1SA8. Ce premier voyage ne parut que deux ans apr6s que M"* Pieiller I'avait accompli. En 1851 elle se remit en route, et Londres devint son premier lieu de rehlche. Partie ensuite de la m6- tropole britannique pour le cap de Bonne-Esp6rance , elle y arriva en ligne directe, puis elle fit voile pour Singapore, d'ou elle allait passer a Borneo, Java et Sumatra; ensuite dans d'autres iles, pour repartir de Batavia, traverser le grand Oct'an et atteindre la cote occidentale de I'Am^rique du nord , en Californie; cingler ensuite de San-Francisco a Panama, pour faire une pointe a Guyaquil et Lima et revenir k Panama, pour franchiren chemin de ferristhmeamericain, etgagner la Nouvelle-Orl^ans, afin de remonter les fleuves des Etats-Unis et visiter les fameuses chutes du Niagara, redescendre a New-York, repasser 1' ocean Atlantique, aboider a Liverpool, et retourner h Vienne , apr6s une excursion en Portugal. Tels sonl les deux voyages autour du monde exe- cutes par M"" Pfeiller. C'cst a la suite de leur accom- plisscment et de la publication du second en 1856, qu'elle est venue a Paris, ou la Soci6t6 de Geographic, a qui elle 6tait specialemenl recomuiandec par le doyen ( 401 ) actuel de la science, le ct^l^bre Vlexandre de Hum- boldt, I'a recue an nombre de ses membres et lui a d6- cern6 une ni6daille d'honneur. Les r^cits de cette courageuse exploratrice des regions lointaines sont empreints d' abandon et de simplicity ; elle cheiche a etre naturelle et vraie, sans exag^rer les perils quelle a eu a courir, ni cbarger la couleur de ses tableaux. Le pen d'espace que le BuUeiin reserve aux analyses d'ouvrages, ne nous permettrait pas de suivre I'auteur dans ses diverses peregrinations ; nous rapporterons seulement quelques-uns des faits nou- veaux qu'elles peuvent oiTrir sous le rapport g^ogra- pbique ou celui des mceurs et coutumes. Dans le premier voyage, nous trouvons quelques details int^ressants sui- les indigenes de Taiti et des iles voisines. Les indigenes ont et6 convertis au christia- nisme, mais engardant leursbabitudesrelach^es. Ainsi qu'au temps ou Bougainville se trouvait dans cette ile, et il y a de cela pr6s d'un sitele, les femmes et les fdles continuent de se livrer aux Strangers ; plus une jeune fdle a de courtisans, plus elle s'en glorifie. Les maris, 6tant de leur nature tr6s paresseux, laissent leurs compagnes trafiquer de leurs charmes, et se dis- pensent de travailler, vivant ainsi de ce trafic bonteux. L'ile de Taiti est une station qui acquiert cbaque jour une nouvelle importance, comme point de relache pour aller de rAm^rique en Australie. M""' Pfeiffer la quitta le 17 mai, et etait le 3 septembre suivant a Sin- gapore, ile transform6e en colonic anglaise, et dont la mangouste passe pour le fruit le plus ddicat de I'uni- vers. ( /i02 ) Les villes des Indes orientales visit4es et dt^crites par M"* PfeilTcr, n'^taient pas de nature h liii oflVir des notions nouvelles, apr^s r6veque Heber et le francais Victor Jacquemont, qui en avaient trac6 une peinture fiddle ; aussi passe-t-elle vite k Bombay et a Bagdad. Cette derni^re cit6, aiix maisons d'un 6tage, rTa de fengtres que du c6t6 du Tigre, fleuve surles bordsdu- quelelle repose avec ses 60,000 babitants, qui, c\ cause d'une chaleur de 30 a /4O" ceiitigrades, se tiennent le jour dans les appartenients, pourn'en sortirque le soir et se rendre sur les terrasses, ou ils passent une partie de la nuit. Dans le second voyage de M"" Pfeifler, nous avons reraarqu6 les details qn'elle pr6sentesurlesDayaks ou sauvages indigenes de Borneo, et les Battaks ou can- nibales de Sumatra. Les Dayaks habitent des huttes baties sur pilotis, et oh I'on monte par des 6chelles que Ton retire la nuit. Ces indigenes ont I'os du nez aplati, les narines trfes larges, une grande bouche et des machoires saillantes. Ils liment leurs dents comme iGs' Malais et se les tei- gnent en noir. Leur pliysionomie cxprime g('^n6rale- nient la patience et la bonhomie, parfois meme la betise, •ce qui tient en partie k I'habitiide qu'ils ont d'avoir la bouche tonjours ouverte. Ils ont les cheveux noirs ; les hommes les portent courts, et les femmes longs, en les laissant tomber sans les nouer en tresses. Pour costume, les hommes ont une ceinture autour du corps, et pas de coifluio ; ils portent g6n6ralement des perles de verre et un couteau appel6 parang. Les femmes ont une petite jnpe et une ceinture qu'elles ne quittent que ( A05 ) ]a nuit.Cette ceintiire est en cercles de laiton ou d'can- neaux iioirs de bamliou, et elle pt!se souvent plus de quinze livres. Sa forme rappelle les crinolines aiijour- d'hui b. la mode, et nos belles dames ne se doutent gu6re qu'elles aient ainsi emprimt6 un de leurs atours h des sauvages de Boriieo, aux oreilles perches de trous, et aux ongles teints en brun rouge. Les Dayaks out 1' horrible habitude de conserver comrae trophies de guerre des tetes humaines qu'ils ont couples ; tous ont chacun un panier orn6 de co- quillages, auquel on ajoute un feston de cheveux d'hommes, la premiere fois qu'ils ont tranche unetete. Ces sauvages peuvent avoir autant d'^pouses qu'ils veulent, et ils les traitent convenablement. lis ne se m6langent pas avec d'autres indigenes, et vivent tou- jours entre eux. lis n'ont ni 6criture, ni temples, et pas meme de culte ; ils brulent leurs morts et en gar- dent les cendres dans des arbres creux ; ou bien ils les enterrent ou les attachent a des troncs d' arbres, les pieds en haut et la tete en bas. Quant aux farouches Dattahs de Sumatra, ils n'ont, pas plus que les Dayaks, de pretres ni de temples; mais ils croient aux bons et aux mauvais g^nies : ils n'en adniettent qu'un petit nombre de bons, mais ils en ont une grande quantity de mauvais. Si un homme est malade, ils disent que le mauvais g6nie est en lui ; ils attribuent tous les malheurs a ce d(^mon. Quelquelbis aussi, selon eux, le mauvais g6nie entre dans un homme sans le rendre malade. Celui qui en est pos- s6d6 devient k I'instantmeme I'objet d'un profond res- pect, car on a peur alors d'olTenscr le genie ; tout ce ( 404 ) qu'il dit est regard^ comme oracle et ex^cut<^ fidfele- ment. Les baptenies, les mariages et les enterrements des Battaks se font sans aucune cOremonie : senlemcnt, si iin rajah on chef considt'rable vient n nmiirir, on in- vite a ses fnnerailles les chefs des environs, et ils y ^iennent avec une suite nombrcnse, en amenant avec * eux un jeune biiflle qui est imniole sur place et niangt'; par les assistants; et pendant plusiein-s jours, souvent meme pendant des seniaines entif'n'os, on nc fait que manger, danser et boirc du shi, liqueur ferment6e qu'on tire de I'arenga on areng, sorte de palmier. Lechef de la communaut6 n'est gu^re que I'^gal des autres Battaks ; mais a sa mort, son fils ain6 devient son ht^ritier ; il prend toutes les femmes de son p6re, qu'il r^imit aux siennes propres. Quant aux hommes ordinaires, ils doivent acheter toutes leurs compagnes, et ils les achetent jeunes. Celui qui est trop pauvre pour s' acheter une epouse, va s't^tablir dans la famille de celle qu'il desire posseder, et il y travaille comme esclave, jusqu'a ce qu'il I'ait obtenue de ses parents. Bien qu'anthropophages, les Battaks passent pour un peuple g6n6ralement humain et juste. Souuiis au gou- vernement hollaudais, ils tiennent envers lui tous leurs engagements. Les hommes n'ont pas de barbe, et les deux sexes portent Icv^z/v;//;', sorte deceinlure, absolu- • ment de la meme mani6re autour du corps. Les femmes vont ordinairement uues jusqu'aux reins , mais les jeunes fdles tiennent la gorge couverte. Dans les fetes, on immole toujours un bunie et Ton execute des danses jusqu'5, epiusement. Les Battaks ont les memes brace- ( hOo ) lets tie coquillages blaiics, les monies cerceaux on cii- uolines, les iiiemes sortes de tambours et les memes etolTesd'6corce que les Dayaks, ce qui prouverait que les deux peuples out une nieme origine ou une cer- taine affinite. Les maisons des Battaks sont 6galement baties sur pilotis, comme celles des Dayaks, niais plus grandes, plus belles et plus solides. Les Battaks por- tent constamment une lance et un couteau ou pnrang ; ils ne cessent de uiacher soit du siri, soit du tabac, et les femmes les imitent, de m6me que leurs enfants : on voit souvent, en eflet, de petits enfants quitter le sein de leurs m^res pour fumer, ainsi qu'elles, le ci- gare du pays. Tout le monde se regale an mSme plat, et n'a pour seules fourchettes que des mains sales qu'on ne lave jamais. C'est aprfes avoir explor6 I'int^rieur de Sumatra que M"" PfeifTer, de retour a Batavia, en repartit bientol pour franchir le grand Oce^an et gagner les cotes de I'Amt^rique duNord, puis celles de I'Amerique du Sud, pour enfin , par I'isthme de Panama, rentrer dans I'oc^an Atlantique et reparaitre en Europe, ainsi que nous I'avons d^ja dit. Mais nous le r6p6tons, les seuls details un peu nouveaux que renferment ses deux voyages concernentles sauvages dont nous avons parl6 ; le reste se confond avec les relations d'autres voya- geurs qui avaient devance notre heroine p^r^grinante, laquelle vient d' explorer, comme on salt, la coteorien- tale de Madagascar. " Albert-Mont£mont. XT. MAI ET JUIN. 7. S7 ( 400 ) RAPPORT Sur le m^moire intitul6 : Le Perou avnnt la conqnete espagnnle, par M. Ernest Desjardiug. Paris 1S58 ; A. Bertrand. In-8°, Les origines de la civilisation am6ricaine commen- cent i sc d^gager des fables dont les premiers histo- riens du nouveau monde les avaient obscurcies ; mais elles n'en demeiirent pas moins environn^es de t6n6- bres dont la science pai'viendra difficilement k dissiper r^paisseur. Les monuments seuls peuvent 6clairer qiielques-unes de ces obscurit^s. Les nombreuses d6- couvertes arch6ologiques, dont le Mexique et I'Am^- rique centrale ont 6t6, dans ces derni^res ann6es, le theatre, les textes hi^roglj phiques dont on d^chiflre graduellement le contenu, font esp6rer que I'histoire de ces contr6es avant la conquete pourra etre recon- strnite avec quelque exactitude. Mais on ne pourra re- monter que par induction aux 6poques qui piquent davantage notre curiosity, les premiers sifecles oil le Nouveau monde fut peupl6, et ou les tribus 6migr6es de I'Asie et de rOc6anie se divisfereut en nationalit6s distinctes et donnt;rent naissance ti des centres de po- pulation. Le P6rou est encore moins bien partag6 que le Mexique, et les monuments Merits y font d6fauti nos investigations. Ant^rieurement ci I'arriv^e des Espa- gnols, les habitants de ce paysue faiaaieut usage, pour ( Zi07 ) conserver le souvenir cles faits, cfue dequipos, c*est-S,- dire de fils dont les nceuds et les coiileiirs suffisaient, par leur association, k I'expression d'id6es simples et k la constatatioD. d'ev6nements g^n^raux. Ces quipos ont naturellement p6ri, et eussent-ils meme 6t6 con- serves , nous n'en pourrions d6brouiller I'^cheveau. On en est done r6duit a prendre pour informateurs les premiers 6crivains espagnols qui firent des antiquit^s du P^rou I'objet de leurs r6cits. Et ces 6crivains ne sont pas tous faits, il faut en convenir, pour nous in- spirer une grande confiance. Quelques monuments sem- blent cependantde nature a jalonner notre marche sur ce terrain mouvant, et un voyageur francais, M, An- grand, a r^cemment rapports de ces monuments, des plans, des dessins et des descriptions qui fournissent de pr^Cieux elements de critique. C'est ce que nous a montr6 M. Ernest Desjardins. Dans un m6moire int6- ressant, il a fait servir le r6sultat des d^couvertes de notre compatriote a 6clairer les traditions sur I'histoire du P6rou que nous ont transmises Garcilaso, Balboa et Montesinos, c'est-k-dire les 6crivains les niieux infor- m6s sur les antiquit6s p^ruviennes, et a controler les donn^es moins authentiques de Herrera, Acosta, Go- mara, Betancos, Pedro de C4ieca, Calancha, Avendano et Garcia. Le m^moire de M. E. Desjardins est compost avec m6thode et dispos6 avec clart6. C'est assur^ment un des meilleurs morceaux qui aient paru sur les origines de la civilisation de rAm^rique, et s'il ne r^tablit pas totalement une succession de faits qu'il est impos- sible de renouer, du moins il restaure dans ses lin^a- ( /|08 ) inents principaux une histoire ii peine ^tiidiee parmi nous. Son travail se divise en six parties : 1° traditions in- diennes sur I'origine du P6rou ; 2° Manco-Capac , ou age h^roique de I'histoire p6ruvienne ; S" les Incas ; /jo institutions du P6rou ; 5° monuments du P^rou ; (io conclusion. 3e m'6tendrai pen sur ce que M. Desjardins nous dit des origines du P^rou. Les questions qu'il souleve sont encore si Ii6riss6es de diflicultes, qu'il serait uial- ais6 meme de discuter simplement les 6l6ments du problfeme. Des races indigenes ont-elles t't6 autoch- thones en Am6rique? La mani^re dont dautres con- lr6es, mieux connues dans leur premiere histoire, se sont peiiplees, rend le fait im])robable. iMais il I faudrait connaitre les ri^volutions g^ologiques qui I se sont accomplics dans le dernier des ages ant6- historiques, pour hasardcrune r(;-])onse vraisemblable ; et nous ne savons rien des conditions dans lesquelles la faime am^ricaine , si difftl'rente de la faune de I'An- cien monde, a pris naissance. Qu'il y ait eu des mi- grations, le fait est a peu pr6s certain ; mais ces colons 6taient-ils les premiers honnnes qui foulerent le sol am6ricain ? La est la ([uestion insoluble , au moins dans r^tat actuel de nns connaissances. Toutefois, la faible population qu'avait le Nouveau-Monde, au mo- ment de I'arriv^e des Europ6ens, ne me semblepas, comnie incline h le croire notre confrere , une preuve dupeud'anciennet6dcson penplement. IN'est-cepasun des faits les mieux d(^montres de rcconomie politique, que. la population des ^tats est constamuieut propor- tionnelle a I'abondance de leurs produits.? Tel n'est-il pas le motif qui fait que les populations esclaves s'af- faiblissent au lieu de s'accroitre? L' extreme misfere egt une cause de stagnation ou de diminution de I'ospece humaine. Les enfants peuvent naitre en grand nombre, mais ils ne vivent pas. Voil^i pourquoi le Greenland voit le chilTre de ses habitants toujours stationnaire ; pourquoi c'est seulement chez les nations aisles et la- borieuses que la population croit rapidement. La faible population du Nouveau-Monde avant la conquete, ne prouvait done rien autre chose que la misfere de ses habitants. L'l^gypte est habitue depuis plus de six mille ans, et le chiffre de sa population ne s'61tjvepas, tandis qu'en France, dans 1' Italic septentrionale , en Angleterre, en Allemagne, la population double en moins d'un siecle. Je m'en tiens done encore a 1' opi- nion de M. de Humboldt , que M. Desjardins combat a tort, selon moi. Le rapprochement des traditions et I'examen des monuments conduisent M. E. Desjardins k admettre que la civilisation qui a pr6c6d6 I'^poque des Incas 6tait tr6s-sup6rieure a celle de ces derniers conque- rants indigenes, Cette opinion , notre savant confrere I'a soutenue par des arguments qui ne manquent ni de force ni de vraisemblance , ou, pour mieux dire, il I'a fait ressortir de I'expos^ meme des traditions. En cela il vient appuyer la th6se de M. de Martius , qui considfere les nations am^ricaines comme tomb^es d'un haut 6tat de culture intellectuelle dans la bar- barie ou elles g^missent aujourd'hui , thfese qui me semble, du veste, fort sujettc a contestation. -Quant aux ( ilO ; res?pmblaTices qu'il a crn saisir entre les institutions tie I'Egypte et du Perou, je suis moins frapp6 de leur realit6 et je m'imposerai ci leur 6gard une extreme re- serve. Ces ressemblances ne sont ni assez d6cisives, ni assez particuli^res, pour qu'on puisse rien inf6rer sur I'origine d'une civilisation que nous ne connaissons qu'c\ travers des t^moignages incomplets et parfois contradictoires. II existe une foule de peuples de I'Asie chez lesquels on d6couvre de pareilles analogies avec les institutions de la terre des Pliaraons, sans qu'on soit pour celaen droit d'inf^rer que les habitants des bords du Nil qui n'etaient ni navigateurs, ni comniunicatifs, eussent port6 dans des contr^es lointaincs leurs usages et leur croyance. Le niieuxmesemble de rester la-des- sus dans une prudente indecision, et M. Desjardins est trop familiarise avec les precedes de la critique, pour ne pas comprendre que cette voie est la plus r6elle- ment scientifique. Les premiers historiens du P6rou, m6me Garcilaso et Balboa ont une tendance marqu6e k rapprocherce que les traditions leuravaient transniis sur I'ancienne society p6ruvienne, des id6es et des croyances qu'ils tenaient du Christianisme, et cette ten- dance rend toujours leurs assimilations suspectes. II sulTit de parcourir ces auteurs pour se convaincre qu'ils 6taient domines par I9, pens^e que les peuples de rAm^rique 6taient des enfants ^gar^s d'Israel, des Gentils jadis evang61is6s par saint Thomas, des colons de la Grece ou de Rorae_, et ces preoccupations les ont entrahies a des rapprochements forces que M. Desjar- dins reconnait lui-meme. Quand on songe a toutes les opinions ridicules ([ui r^gnaient encore au xvir et au ( HI ) xviir sitele, Siir la iiiytliologie grecqueet romaine, on lie peut se d^fendre de la pens6e que les auteurs espa- gnols n'ont 6t6, sur le terrain des l^geudes am^ricaines, ni plus perspicaces, ni mieux inspires. M. Desjardins nous a doiin6 une description tr6s int6ressante des fetes religieuses des anciens P^ruviens, ces fetes sont toutes du meme ordre que celles des po- pulations vou6es a 1' adoration des ph6nonT&nes natu- rels et des agents physiques, religion qui fut celle de tous ies hommes, avant que le d6veloppement des idees, le progrfes de 1' intelligence les eussent conduits a des notions plus pures sur la divinity et les rapports qui nous lient a elle. Je ne trouve rien , dans la religion p^ruviennt, qui denote des influences de I'Egypte, de rinde ou de la Chine. Ce qui donne une valeur toute particuliere au tra- vail de notre confrere, c'est la description exacte et precise qu'il y a consignee des principaux monuments encore subsistants de I'ancienne soci6t6 p6ruvienne, le Cuzco, la pierre de Concacha, le palais de I'lnca k Villca- Huaman, la ruine de Chocequirao, la forteresse d'Ol- lantai-Tambo, les trois Edifices de la valine de Tyahua- naco. M. Desjardins a fait suivre cet apercu arch^olo- gique de quelques mots sur les routes et les sepultures chez les P6ruviens. Je ne dirai rien des autres chapitres du memoirs qui devront etre lus m extenso par tous ceux qui s'occupent de I'histoire du Nouveau-Monde, et qui ne se pretent pas d'ailleurs a 1' analyse. On y retrouve la nettet6 et Ici concision qui ne sont pas un des moin- dres merites de ce travail ou sont seniles a chaque ( hi2 ) page de pr6cieuses indications sur les a;itiquites d'un pays qui appdle toutes les recherches des 6rudits et des voyageurs. 11 me suflit de signaler k la Soci6le 1' im- portance et la valeur (I'lui menioire qu'elle considtera avec fruit dans sa bibliotli^que, et cpii pourrait deve- nir le point de depart d'un livre digne de servir de pen- dant a celui de M. I'abbo Brasseur de Bourbourg, sur le Mexique, que je vous ai fait pr6cedeinment connaitre. Alfkei) Maury. ( as ) PVouvclles et coMiiuuiiicatioiis. LE BALKAN CENTRAL. J'ai public, il y a quatre niois,le journal d'uiie pre- miere excursion du Danube kTirnova, I'ancienne capi- tale des Bulgares : la carte ci-jointc, les details topo- graphiques d'une partie de cette relation et les notes suivantes, fornient un itin^raire qui relie Tirnova k la Toundja, affluent de I'Hfebre, et par consequent a la Thrace, J'avais passe la Toundja a gu6 prfes du village de lakenli , cherchant vainement celui de Tzirkva qui figure sur presque toutes les cartes, a pen pr^s en cet endroit. Tzirkva (Tzrkva) est un mot bulgare qui signifie e^lise^ etle voyageur qui le premier I'aura recueilli aura pris I'indication vague d'un guide bulgare pour un nombien determine. Je suivis pendant quatre on cinq lieures le pied des Balkans dont le versant sud forme un mur majestueux paralieie a la Toundja et au Kaiadja-Dagh, autre chaine qui ferme au midi cette magnifiqne valiee et va finir pres de leni-Zahra. Les villages et les vi- gnobles abondent dans cette zone plantureuse et fertile, et la population turque y est dominante ; ce qui se re- marque dans une grande partie de la Bulgarie, lescon- querants ayant eu soin de s'etablir dans les meilleurs terrains. Deux passes ou boghaz s'ofl'raient a nous : le Hai'n ( hU ) et le Ferdjisch, tous deux connus des gens du pays, qui par hahie des corv6es de logements railitaires et autres, ont la plus grande repugnance a les niontrer aux voyageurs et aux agents dn gouvernement. Mais k Eski Zalira, oil Ton voulait nie faire passer par la Tschipka, passage le plus connu du Balkan, j'avais exig6 que Ton m'indicpiat les routes lesmoins fr6quen- t6es, et comnie on me prenait pour un ateck araba- meheiuliss (ing6nieur des chars de feu) on avait sup- pose que j'etudiais une ligne de cheniin de fer de la Maritza au Danube, ce qui me rendait tout le monde assez favorable. Mes Zapdi's (gendarmes turcs) d6ci- d^rent que nous passerions par le Ferdjisch, et je n'y vis pas d'inconv^nient, d'autant plus que j'ai su plus tard que les olliciers de I'^tat-major russc ont releve vers 1829, la passe et le massif du Ham. Je m'arretai au ^illage bulgare de Ferdjisch, aprfes avoir relev6 le pat6 isol«^ du mont Imourtcha, ombrag6 d'une 6paisse forfet , et coup6 du Balkan par une jolie rivifere appel6e Cheluer, qu'on passe 6, trente pas en aval d'un pont de bois ; car en Turquie, les routes l^assent aussi souvent k c6t6 des pouts que dessus. A neuf heures du matin, j'entrai dans le boghaz, et apr6s avoir escalad6 pendant vingt minutes une cr^te pel^e d'oii xm faux pas cut pu me faire rouler dans le tor- rent de Ferdjisch deressi (Tvarditzka), j'atteignais la region des futaies, pour n'on sortir fpi'au pied uieme de la montagne, un peu au-dessus de la Tanoarka. Cette portion des Balkans est relativement peu elev^e, et je n'y trouvai pas cette plate-forme nue que j'avais remarqutie dans le Tourianda Balkan, vers les sources (415) de rOsma, et qiii existe un peu j^lus a I'Est, dans la Tschipska. Je n'6tais pas k plus de i 900 mfetres de hauteur absolue. Quant a 1' aspect physique de ce de- sert, aucune description ne peut en rendre la solen- nelle et majestueuse splendeur. A midi et demi, je d6passais la ligne de falte, et trois heures plus tard, j'atteignais Helena aprfes avoir d6pass6 trois ou quatre knlibas 6parpill6s aux flancs de la montagne. J'ai dit ailleurs que la ligne des Bal- kans est occup6e par une s6rie de communes bulgares, vraies petites r^publiques qui, a part I'impot et la sur- veillance d'un petit chef de district assist(5 de quelques zapti^s , s'administrent patriarcalement elles-memes. Le chef-lieu s'appelle modestement selo (village) et les hearts, kolibas (hauieaux). Les simples villages de la plaine sont des agglomerations sans hearts : ils attei- gnent rarement le chifTre de 800 ames, tandis que les selns de la montagne, y cdmprisleshameaux, ont par- fois jusqu'a 25 000 ames. Les Russes ont relev6 les s6- los de Gabrova et Drenova : j'en ai fait autant pour Helena et une partie de Trojan. Helena (Iliana des cartes) est une jojie petite ville commercante, qui a la pretention de dater de Timp^- ratrice Helfene, ce qui parait assez douteux. Les seules ruines que j'y ai vues sont celles d'une forteresse pro- bablementbyzantine, sur la hauteur appelee Kal6-Bair (colline du chateau). Le d6nombrenient officiel donne pour Helena lO'/O maisons, environ 9000 ames : le sou- baschi (chef de canton, un peu moins que sous-prefet) et ses gens etaient les seuls Turcs de toute la valiee. La configuration generale des environs est bien ren- { M6 ) due dans la carte de Kiepert et dans le croquis du g6- n6ral Jockmus : niais ils ont tons deux comiiiis une grosse erreur, en figurant deux \ illages du nom de Pla- kova : celui du pied de la montagne est k sup])rimer, et son existence sur les cartes ne s'explique que par des itin^raires mal compris. Le g^n^ral Jockmus ve- nait de Test, par Stararjeka et Bebrova : a partir d'Hel^na, son itintiraire etlo mien se confondent tipeu pres jiisqu'a Kutsclmk-TcliifHik (/« petite J'emie). Je me fais un devoir de signaler son voyage, publi(5 dans le Bulletin de In Societe de Geographic de Londres (1 854) comme le meilleur que j'aie lu poiu'laBulgarie orientale. D'Ht^l6na ^Tirnova (1) , 11 y a deux routes : I'une, plus longue, par Zlataritza, 1' autre par le monastfere de Saint- Nicolas. Je pris cette dernifere et je descendis par une pente douce vers la petite plaine de Sjenokos, qui a donn6 quelqiiefois son nom k la Drcnska (Sienokor, par erreur, dans Kiepert). A partir de Krestula, je con- statais le trac6 d'une voie romaine que je ne perdais de vue que deux heures plus loin, et aprfes avoir gravi et descendu I'extremite d'un petit plateau autour duquel tourne la riviere, je m'engageais dans la gorge de Ka- pinova, faille profonde entre deux rameaux du Balkan qui ferment a la gorge la vall6e d'H6l6na. Je ne d^cri- rai pas cette gorge admirable qui a excite I'enthou- siasme de M. Jockmus lui-m6me : je dirai seulement qu'aud6bouch6, je me trouvai en face dumonast^re de Saint-Nicolas Kapinovski, grand 6difice k demi fortifi6 centre r6ventualit6 d'un coup de main des bandits du (1) Lrs I ulgarcs «criveiil : Ulcna, Trnova, ( M7 ) voisJnage, et orn6 de belles fresqiies l)yzantines qui con tras talent bizarrement avec les illustrations dont quelque badigeonneur avait enrich! les longues mu- railles blanches du convent. J'aurais pu, selon I'usage, y demander line hospita- lit6 qui m'eiit 6t6 accord6e avec empressement : mais quand on a des znpiie.,^- pour escorte, il pent y avoir k cette hospitality des inconv^nients resultant des inimi- ti6s religieuses, et je pr6ferais fort gagner une heure ou deux en poussant jusqu'a Kutschuk Tchifflik. Je niarchai une demi-heure environ le long de la Drenska, suivant un de ces lits singuliers que les rivieres de la Bulgarie se creusent dans les profondes masses d'ar- gile alluvienne qui forment le sol fertile de leurs val- ines. C'6tait un sillon de quarante a cinquante pas de large, avec des berges a pic de moins de li metres de haut ; dans ce sillon serpentait assez capricieusement le vrai lit de la riviere, large de 6 metres au plus. Apr^s le Petit-Tchifllik, je d6passai successivement deux petites villes d'une certaine importance comraer- ciale, et surtout agricole, le haut et bas Rahovitza : arriv6 au sommet de la colline qui les domine toutes deux, j'eus dans le superbe village d'Arnaut-Keui ou Arvanitochoria, un curieux specimen de I'aptitude co- lonisatrice des Albanais d'Epire. Amends sur ce rocher par quelque pacha de Tirnova, a ce qu'il parait, ces Arnautes y avaient form6 xme colonic agricole devenue auS'si florissante que les colonies bulgares de la Bessa- rabie. Ces maisons 616gantes et propres resseuiblaient plus a des habitations de la banlieue de Constanti- nople, qu'iun village du Balkan, et tranchaient singu- ( as ) liferement avec les huttes des paysani? bulgares des environs. A Arnaut-Keui, on ne paile que grec : la population est de 800 ames, bien qu'elle ait diminu6 par des immigrations nombreuses en Moldo-Valachie, oil les Grecs rtjussissent gen6ralement comme agricul- teurs et fermiers des boyards. A la descente du torrent d' Arnaut-Keui, je me trou- v&i en face de Tirnova, dont je n'ai pas km'occuper ici, I'ayant deja d6crite dans la notice cit6e au commence- ment de cet article. G, Le;ean, SDR UNE, NOUVELLE CARTE DU CAJJADA. Notre honorable collogue, M. Bouillet, a pr6sent6 a la Soci6t6 dans la stance dn 9 avril, un volumineux ouvrage ayant pour titre : Cartdda Directory, et vous a fait connaitre les importants et nombreux renseigne- ments qu'il renferme, tant sous le ra])port commercial que sous les rapports statistique et g6ograpbique. Cet ouvrage est orn6 d'une tr^s.grande carte qui est, je crois, digne d' attention. En g6n6ral, les cartes accompagnant les publications de cette nature, et meme les dictionnaircs de geogra- phic, cons';d6r6s comnie un accessoire oblig6, comme illustrations^ olTrent pen d'int6ret; il n'en est point de mfime de celle-ci, dont voici le titre : Map of tlie province of Canada , from la ke Superior to the gulf of St. Lii wrence. Cette carte a 6t6 dress6e h. I'tschelle de jtst^st* *""- ( 419 ) viron, par M, Thomas C. Reefer, qui I'a 'gracieuse- ment offerte a I'^diteur afin de donner plus d'int6ret k son ceuvre, et ex6cut6e dans I'^tablissement de M. George Matthews , a Montreal. M, Reefer I'a com- pl6t6e k I'aide des informations fournies par le grand travail g6ologique ex6cut6 sous la direction de Sir "Wil- liam E. Logan, directeur du d^partement g6ologique au Canada, et I'un des laur^ats les plus distingu6s de I'exposition iiniverselle de Paris. Sa richesse en nomen- clature et en traces de detail n'a point permis d'y figu- rer les routes ni I'orographie. L'auteur parait avoir eu pour but principal de faire connaitre la division terri- toriale da pays. L'on voit d'abord le Canada divis6 en deux parties, Canada West et Canada East, que Ton nomme aussi Upper Canada Lower Canada, et s^par^es par la rivi6re Ottawa dans la plus grande partie de son cours; puis la* subdivision de ces parties en comt6s, et des comt6s en communes ou townships. Ces divi- sions sont trfes nettement indiqu6es. Les Canadiens ont eu I'heureuse id6e d'appliquer aux subdivisions territoriales de leur pays, des noms d'hommes cel^bres soit dans la politique, soit dans la guerre, soit dans la science : c'est ainsi que Ton voit dans les parties les plus avanc^es vers I'int^rieur, c'est- a-dire les plus r6cemment arpent6es, les noms de Claren- don, Palmerston, Aberdeen, Gladstone, Raglan, Camp- bell, Murchison, Airy, Sabine, Herschell, Wollaston et tant d'autres. Mentionnons aussi le nom glorieux de S^bastopol. Les Francais n'ont point 6t6 oublii^s, nous citerons seulement dans le comt6 de 1' Islet, au bas Canada , deux noms illustres places cote a cote , dans une fraternitu touchante : Arago et Le Verrier. ( 420 ) L'on conserve au Canada les anciennes appellations francaises ; nous voyons avec plaisir que sur la carte dont.nous parlons elles sont 6critcs plus correctement que sur quekiues autres. Nous avons renconlrf^ quehpies endroits portant un infime nom ; cette habitude, qui a de s6rieux inconv6- nients, est en usage surtout aux ttats-Unis, oii Ton tro'uve frequeninient une ineme denomination dix, vingt, cent fois r6p6t6e; il serait regrettable de la voir s'in- troduire au (-anada. On trouve aussi sur cette carte, outre les nonis d'un grand nombre de rivieres et de lacs ainsi que de toutes les lies qui se trouvent dans la partie inferieure de Saint- Laurent et dans les grands lacs, le trace des canaux qui servent a anieliorer et completer la navigation , et les * voies ferries actuellement cxistantes et cellos en projet; Ton y trouve ^galement, sur le rivage septentrional du lac Huron, la position des mines de cuivre dites Bruce- Mines, propri6t6 de la ^lontrenl Mining Company. En r6sum6, cette carte pr^sente un grand nombre de renseignements nouveaux , sur un pays trfes int6- ressant. P. Blisson. ( A21 ) GtoGRApiHE ANCIENNE UU DtPARTEMENT DE l'YONNE, ParM. A. Dkt. II est k regretter, dit M. Ern. Desjardins, en offrant ce livre h laSoci6t6, que I'auteur n'offre au public, dans cette brochure, qu'un tableau exprimant le r6sultat de son travail, et qu'il n' ait encore public ni la discussion ni I'expose des preuves. L'auteur annonce qu'il n'est qu'un sommaire d'un travail plus 6tendu. (I'est en eflet une s6rie de noms g6ographiques anciens du d^parte- mentde I'Yonne avec les noms modernes correspon- dants; mais Ton ne peut rien dire sur ce r6sultat tant que les preuves ne I'accompagneront pas. La carte qui y est jointe donne, avec des signes clairement difTe - renci6s par les couleurs rouge et noire des caract^res : 1" Les positions anciennes ou du moyen age avec la date, pour chacune d'elles, de la plus ancienne men- tion connue dans les anteurs ou dans les chartes ; 2° la locality moderne correspondante. En rt^servant son ju- gement sur I'ensemble du travail et sur la solidite des r6sultats, M. E. Desjardins attend la publication in extenso annonc6e par l'auteur. II s'^tonne toutefois, quant k present, de rencontrer sur cette carte des li- mites aussi pr6cises assignees a chacun des pagi ro- uiains. M. D6y ne peut ignorer que les anciennes divisions des dioceses ont vari6, et que celles qui exis- taient avant la revolution sont loin de donner exacte- ment les pngi des cit^s romaines. II est bien vrai que les Barbares ont laiss6 su])s!sterfi(''n6ralonient les divi- XIV. MA[ F.T JUIW S. 28 ( /I22 ) sions territoriales des cit6s et des i)n>:;i; mais avons- noQS r^tat de ces divisions apr6s la conquele et I'lita- blissenient? II n'est pas impossible d'arriver t\ trouver les vica rials du moyen age qui correspondent 6videm- ment avec les pni^i, les dioc6ses qui r6pon(lent aux cites, les dioceses metropolitains meme qui repondent aux anciennes provinces ; mais il faut pour cela des chartriers bien complets, bien classes, bien compris et 6tudi6s avec le plus grand soin. Quoi qu'il en soit, des tentalives de cette nature et des travaux aussi difiiciles ne sauraient UK^iriter trop d'attention et d'encouragement. ( 423 ) ilcteii «le la Society. EXTRAITS DES PROCftS- VERBAUX DES SlilAINGES. Assemblee generale du 23 airil 1858. Pr^sidence de M. Daussy, membre de I'lnstitut, M. Daussy prend place au fauteuil k huit heures et demie et, en quelques paroles, rappelle aux membres de la Commission centrale et de la Soci6t6, de quel avantage sont pour les sciences g6ographiques des reunions telles quecelle qu'il a I'honneur de pr^sider, oil chacun apporte le fruit de ses travaux, de ses obser- vations ou les r6sultats de ses voyages. U termine son allocution, en engageant les membres k se montrer assidus aux stances. Le secretaire de la Soci6t6 lit le proc6s-verbal de la dernifere stance semestrielle de la Soci6t6. 11 donne ensuite lecture de la correspondance dans laquelle figure : 1" une lettre de M. de Paravey surl'i- dentit6 qu'il croit avoir constat^e entre les monts Kaj des Arabes et les montagnes d6sign6es sous les noms de Koueii-Liin par les Chinois ; 2° Une lettre de M. le chef de la division des beaux- arts au minist^re d'Etat, annongant que M. le ministre souscrit pour vingt exemplaires au Bulletin de la Soci6t6. 3" Une lettre de M. le comted'Escayrac de Lauture, accompagn^e d'un fragment de lettre de M. Cuny, Tun et I'autre documents informant la Soci6t6 de la ( im ) marche que conipte suivre M. Cuny pour p(^n6trer dans le Dar-Four. M. le president donne lecture de la liste des meui- bres admis dans la Soci6t6 , et des correspondants , depuis la s6ance g6n6rale du 27 novembre 1857. Quatre nouveaux candidats sont admis dans cette s6ance : M. le general de division Daumas, s^nateur, directeur des affaires de I'Alg^ric, M. Ch. de Sainte- Ciairc Deville, menibre de I'lnstitut, M. l^ldouard de Bykovski, et M. Jean Miani. M. le president lit ensuite le Rapport de la Commis- sion sur le concours an prix annuel pour la dccoitverte la plus imporlante en Geographie. (Ins6r6 in exteaso au Bulletin. ) D'apr^s les conclusions de ce rapport, la Soci6t6 d6cerne sa grande m^daille d'or k la m6moire de iM. le D' Kane pour les explorations de ce navigateur dans les regions arctiques. M. Noel des Vergers, correspondant de I'lnstitut et membre dela commission centrale,lit unfragment sur les Marenimes toscnnes, extrait d'un memoirc actuelloment sous presse, sur I'histoire et les anliquiti^'s de I'lJltrurie. M. Maltc-Brun, secr6taire-adjoint de la Commis- sion centrale, donne lecture d'une Notice sur Edouard Fogel et stir sou exploration dcuis V Afri(pie centrale. La Soci6t6 precede ensuite au renouvellement de son bureau pour I'ann^e 1858-59. Sont nomm6s : President : M. le g6n6ral Daumas. Fice-presidcnts : MM. de La Roquette, Poulain de Bossay Scrutateurs : MM. de Quatrefages, Bouillet. Si-rrrfnire : M. riiiisson. ( /|25 ) Sca/ice ilu 7 iiini 185y. M. le secretaire de la Soci6t6 communique le proc^s- verbal de Vassembl^e g6n6rale du 23 avril. M. le g6n6ral Daumas, s6nateur, directeur des affaires de TAlg^rie, adresse ses remerciments a la Society, pour r avoir admis au nombre de ses membres , et nomm6 en meme temps son president pour I'annte 1858-1859. M. le g^n^ral Daumas annonce qu'il fera ses efforts pour seconder laSoci6t6 dans I'accomplisse- ment de la tache quelle s'impose dans I'int^ret des sciences g6ographiques. M. le D"" Kriegk, correspondant de la Soci6t6, lui offre un ouvrage qu'il vient de publier sur la plaine de Thessalie et dans lequel il pr^sente un examen cri- tique de tous les renseignements anciens et modernes qu'il a pu se procurer sur ce point de geographic an- cienne. M. Vattemare adresse klaSoci6t6, par suite de son systfeme d'6clianges internationaux, le grand ouvrage des Regents de 1' University de New- York sur le recen- sement de cet fitat, ainsi que de nouvelles cartes pu- bliees par M. le commandant Page et par le lieutenant Maury de la marine des Etats-Unis. M. Malte-Brun communique une lettre de M. le baron H. Aucapitaine, contenant les nouveaux renseigne- ments qu'il a recueillis sur les pr6tendus hommes h. queue de I'Afrique. M. de La Roquette communique des lettres de New - ( 426 ) York, dans losquellcs on lui aniionce que rexp^dition envoy 6e au mois d'octobre dernier par le gouvernement des 6tats-Unis, sous le comniandement du lieutenant dc marine Craven, pour visiter tons les lieux sur les- quels M. Relley se propose de falre passer un canal maritime sans ^cluses entre les deux oceans, par la voie des rivieres Atrato et Truando, a termini ses ope- rations avec le succfes le plus complet et sans perdre un seul homme. Le lieutenant Craven, commandant Toxpedition, le lieutenant Michler du corps des ing6- nieurs topographes et toutes les personnes qui en fai- saicnt partie doivent etre arrives en ce moment aux 6tats-Unis. Les r^sultats de leurs travaux pendant cette exploration , qui a dur6 six mois , ne tarderont pas k etre mis sous les yenx du public. M. le secretaire communique la liste des ouvrages ofTerts k la Soci6t6, et M. Ernest Desjardins pr^sente, au nom des auteurs, trois brochures : 1° une Biogra- phie de F. X, Laire, biblioth6caire et professeur de I'Ecole centrale de 1' Yonne ; 2° Une Gengmphie nnciume du (lepartctuent de F Yonne, par M. D6y (fo/rp. Zl21); 3" une brochure intitul^e : La Inglaterm y los Estados- Unrdos en Cen(ro- America, par Maimel Ortiz Urniela. M. de La Roquette est pri6 de rendre compte de ce dernier travail au point de vue g^ographique seide- ment. En attendant, M. Ernest Desjarditis fait remar- quer que I'auteur de cette brochure est un homme trfes consciencieux, et que cette quality est rare et pr6- cieuse quand il s'agit do TAm^rique centrale. M. Cortambert lit un fragment du m^moire de M, Sardou sur quelques points dc la gd'ographie an- ( /<27 ) cieniie d'unepiu'tie de ia Gaule narbonnaise, qui r6pond aujourd'liiii au sud de rarrondissementde Grassedans le d^partejiieiit du Var. Ce m^moire, accompagn6 d'une esquisse de carte, est renvoy6 au Btilletin. M. le chevalier Da Silva conthme la lecture de sa notice sur I'Oyapoc. — Renvoi par extrait au Bulletin. M. Lejean entretient 1' assemble de son voyage dans les provinces Danubiennes, et il annonce que, pour se conformer au voeu exprim6 par la Commission centrale dans I'une de ses pr6cedentes stances, il redigera une notice h I'appui de la carte qu'il avait fait presenter par M. le secretaire adjoint. Seance du 21 inni J858. M.le D"" Norton-Shaw, secretaire de la Soci6t6 royale g^ographique de Londres, adresse , avec une lettre d' envoi, le XXYII volume du journal dela Society royale de geographic. MM. Hermann etRobert Schlagintweit adressent leurs remerciments h la Societ6 pour les avoir admis , I'un au nombre de ses correspondants, 1' autre au nombre de ses membres ; tons deux temoignent de leur vif desir de contribuer aux travaux de la Society. M. Eugene Arnoult, directeur du journal V lust Hut, adresse lenum^ro de Janvier de ce journal, et demande a obtenir en ^change un exemplaire du Bulletin. « 11 rendrait, dit-il, compte, sinon r6guli6rement, du moins ( his ) Co 1. 114)8 en l-,'nip: , ixs In vaux do la Sociotc. » Cetle proposition est rciivoyee, avec la Icttre a I'appui, a la section de cf)iiiptabilitt'. .AI. (le La Roquette anjionce qu'il a ip^-ii, dc Ncw- \ork, de la part de M. Kelley, plusieurs docmuents relatifs au Canal maritime interoc6anique, par la voie des rivieres Atrato etl'ruando; parmi ceux-ci setronve un rapport de I'ingenieur toj)ogi-aphe cliarg6 de concourir avec le lieutenant Ci'aven, de la marine des fitats-Unis, h I'exploration des contr6es k travers les- quelles M. Kelley propose de faire passer le canal pro- jet6. II est probable qu'on ne tardera pas k recevoir le rapport g6n^ral de ce dernier officier, qui commandait en chef I'expedition, et parait s'etre attache plus sp6- cialement a I'hydrographie. Lememe membre comniu- niqtie une lettre du secretaire de 1' University royale de Christiania, annoncant I'envoi .\laSoci6te de plusieurs ouvrages scientifiques. M. de La Roquette a pris la peine de traduire les titres dc ces ouvrages ecrits en norv(^gien et en allemand, ])our qu'ils pussent etre plus I'acileaieut catalogues. M, Jomarddonne lecture d'une lettre deM. le colonel " Faidhcrbe, gouverneur du Senegal, et membre de la Societe ; il ollVede sapart \' Annuaire du Senegal ct tle- pciiddfices, pour Tann^e 1858. M. Jomard appelle I'at- tention de I'assemblee sur I'interet de cette publication f{ui, en outre des details administratifs et statistiqucs que Ton y rencontre, contient une notice de 70 pages sur la colonie et sur les pays qui sont en relation avec elle. Le nieme u^.embre pri-sente au nom de iMabmoud- lilTcndi , I'uu des anciens eicjves distingues de la ( Zl59 ) mission egyptienne en France, im ouvrage iniitule: Llcclifrcfics siir le cdlemhicr arabe avatit \Fhl/iiin\siiic. II fait ressortir particnliferement I'esprit cle critique dont I'auteiir a fait preuve, en discutant les autorit^s, les manuscrits et les passages des divers auteurs qui ont 6crit sur cette question, savoir: si I'ancienne an- n6e des Arabes 6tait luni-solaire, ou simplement una ann^e lunaire, comniede nos jours ; c'est cette dernifere opinion qu'il cherche a (^tablir, et il se fonde principa- lement sur le calcul des Eclipses qui ont 6t6 observ6es dans ces lemps recul6s. M. le secretaire communique la liste des ouvrages offerts. M. d'Avezac depose sur le bureau, au nom de leurs auteurs, les ouvrages suivants : Resume des oiii'/aj^'es et eupiomt/ons (fans les rivieres dela Guyaiie, par le lieutenant de vaisseau Carpentier, capitaine de XOyapok [Ex trait de la revue coloniale). — Exlnnts des Sailings directions du lieutenant Maury , par M. Tricault, capitaine de frigate. M. de La Roquette depose sur le bureau les ouvra- ges de r University de Christiania, annonc6s dans la lettre dont il a 6t6 fait mention ci-dessus. M. Malte-Brun olTre au nom de leurs auteurs, les ouvrages suivants : Cinq cents lieuessurleAil,U'o\s\^me partie du voyage de M. Charles Didier, en Orient ; cet ouvrage renferme d'int^ressanjs details sur Khartoun, la capitale du Soudan ^gyptien, et sur les travaux de la mission catholique autricbienne au fleuve Blanc. — Suez ft f'erif/i, rcponse a I' article du Times, par V.-A. Barbi6 du Bocage, membredela commission centrale; on trouve dans le travail de M. Barbie du Bocage une i /i30 ) bonne description do I'ilc dc Perlni. — I'deki. Home, rt^sultats d'unc deuxit;uip mission en Italic, par M. Ernest Desjardins, niembre de la commission cen- trale. A propos de la presentation de ce dernier ou- vrage, M. Jomard insiste sur I'lmportance dn cliapitre consacr6 aux Aquce apollinares , dans leqiiel I'auteur est arriv6 k determiner plusienrs positions g6ographi- ques anciennes. M. de La Roquette fait un rapport verbal sur la bro- chure espagnole intitul6e : V Jng/eterre et les P^tqfs- Uiiis dans I' Amerique ceiitrale ; il est prl6 de vouloir bien remettre une note pom- le bulletin. M. Jomard, d'aprfes un journal recent qu'il a re^u d'Am^rique, fait une communication au sujet de I'ex- p^dition de Williamson, du Mississipi a I'ocean Paci- fique. Ce dernier 6tait charg6 d'une mission scientifique dont I'objet 6tait.de d6couvrir la meilleurc voie h sui- vre pour I'etablissement d'un chemin de fer jusqu'au Grand Oc^an. Le lieutenant "Williamson a fait connaitre cette route qui doit aboutir a rcmbouchure du Rio- Gila. M. Malte-Rrnn communique un passage d'une lettre 6crite de la riviere d'Akarouany dans la Guyane fran- faise. Cette lettre esf relative a quelques points de la g^ographie physique de cette contr6e. M. Barbie du Bocage lit une Notice geograpliique sur I'ilede Madagascar, dont la lecture est ecout6eavec int6ret. Cette notice est renvoy^e au Bulletin. ( 431 ) Sentice dii h jidil 1858. M. L. Ewald, secretaire de la Soci6te de G6ographie de Darmstadt, annonce 1' envoi des cahiers de 2 i 16 dii Bulletin de cette Soci6t6. M. Jomard rappelle, an sujet de la grande m^daille d'or accord6e k fea M. le D" E. K. Kane, que sur I'avis de la Commission centrale , cette m^daille avait 6t6 transmise k M. le ministre des Etats-Unis k Paris, avec une lettre le priant de la faire parvenir k la famille de ce courageux voyageur; M. J. Y. Mason, dans une lettre adress6e k M. d'Avezac, president de la Soci6t6, en date du 22 niai 1858, tout en remerciant la Soci6t6 de G6ographie de la haute distinction quelle a bien voulu conf^rer k son concitoyen, annonce que le D' E. Kane est inort, non mari6, laissant survivants son p6re et d'autres membres de sa famille, et que la m^daille sera remise par les soins de la legation am^ricaine entre les mains de ceux aujourd'hui vivants, qui 6taient les plus chers au D"" Kane. M. Jomard annonce qu'il a recu d'Am^rique des nouvelle^ concernant rintroduction r^cente des cha- meaux en Californie. Au mois de Janvier dernier , \k chameaux, conduits par le comte Beale, sont arri- ves k los Angelos et ont donn6 k cette ville 1' aspect d'une ville d'Orient; ces animaux 6tant sell6s, sont tons en 6tat de servir au transport des hommes et des fardeaux. lis ont ^t^ priv69 d'eau pendant six et meme dix jours, sans soulTrir aucunement, marchant ( /|32 ) ;>0 ;i /|() liiilles pai' iour, Pt ])ortani imc charge dc 1000 livreschacun. A la date iIli21 Janvier, ilsretoin- naient a la riviere de Colorado, portant des provisions au d^tachement qui parait devoir p6n6trer aussi loin que possible dans le pays des Mormons. Le nieme menibre ajoute qu'^ la demande du cjou- vernement br6silien, la Soci^te d'acclimatation a de- mand6 en figypteun certain nombrede cliameauxetde dromadaires, pour etre transport's k Rio-Janeiro. II est done probable que ce pr6cieux animal, commebete de somme et comme monture, sera bientot acclimat6 dans les deux Am6riques. M. Daussy annonce a Tassembl^e la perte regret- table que viennent de faire les sciences hydrographiques et geographiques en la personne de M. Vincendon-I)u- moulin qui depuis longtemps s'6tait fait connaitre par d'importants et honorables travaux, etpar la partqu'il avait prise aux d'couvertes de Dumont-d'Urville dans lesmers australes; la Commission decide que 1' expres- sion de ses regrets sera consign6e au proc6s-verbal. M. Daussy depose sur le bureau sa table des posi- tions geographiques des principaux lieux du Globe, extraite de la Connaissance des temps pour I'ann'e 1860; il pr'sente au nom de M. de Kerhallet le Manuel de la navigation dans le detroit de Gibraltar, par M. Vincen- don-Dumoulin et M, C. P. de Kerhallet, membra de la ^oci6t6. Le meme membre depose sur le bureau, au nom de M. de Kerhallet, des notes sur les iles du cap Vert, redigees par cet oflicier, d'apres celles qui lui oni 6t6 communiqu'es principalcment par M. le capi- taine dc fregate D. Miguel Lobo. — Renvoi i la sec- ( /iS5 ) tion de publication pour I'insertion au ButUtin. M. Malte-Biun d6pose surle bureau : ^oune carte de I'ile de P6rim et du d^troit de Bab-el-Mandeb, d'aprfes la carte anglaise de Moresby ; 2" nne carte des Etats du Mexique au temps dela conquete en 1521, dress^e par Ini, sous la direction de M: I'abb^ Brasseur de Bourboui'g. Cette carte, qui est destin6e k accompagner le troisitjme volume de I'ouvrage de ce dernier, intitule : Histoire des nations cii'i Usees du Mexique et de CJnte- rique centrale, durant les siecles anterieurs a Christophe Colombo a 6t6 dress6e a I'^chelle de ^fooooo t^'^P^'^s les anciens documents de la vice-royaut6, les cartes de la Soci6t6 g^ographique de Mexico, et pour la topogra- phie, d'aprfes lestravaux les plus r^cents. M. Buisson donne lecture d'une note sur la carte qui accompagne VAnnuairedu Canada, pour 1858, d6pos6 en communication sur le bureau, par M. Bouillet , membre adjoint de la Commission centrale. Renvoi au Bulletin. M. Lejean annonce a I'assembl^e qu'il se propose de lui faire une nouvelle communication sur la geogra- phic physique dela Moldavie, dans une des prochaines stances, et il luipr^sente M. Ralleti,ancienministrede I'instruction publique en Moldavie, auprfes duquel il a trouv6 le plus complet appui pour ses recherches, pen- dant son dernier voyage dans les princi]iaut6s danu- biennes. M. le president, au nom de laSoci6tede Geo- graphie, remercie M. Ralleti du concours empre^6 qu'il a bien voulu preter a notre confrere. M. le chevalier Da Silva continue la lecture de son travail sur I'Oyapok. ( hZk ) M. Elis6e Recluslit un fragment d'un m^moiresur le Mississipi. Cette lecture, qui eslsuivie par I'assembl^e avec un int6ret marqu6, sera continu^e a nne des pro- chaines reunions de la Commission centrale. Seance du 18 juin 1858. Le proc6s-verbal de la derni^re stance est lu et adopts. M. Joniard depose sur le bureau une notice que lui a adress6e M. de Courval k I'appui de sa carte manu- scrite d'une partie presque enti^rement inconnue des pays situ6s entre Berber sur le Nil et Messawah sur la mer Rouge, et parcouruspar ce voyageur dans le cou- rant de I'ann^e 1857. — Renvoi de ce document au Bulletin, avec une reduction de la carte. M. le secretaire communique la liste des ouvrages d6pos6s sur le bureau. M.'Eraile Isambert, docteur en m^decine, est pr6- sent6, comme candidat, par MM. Maury etMalte-Brun. M. Alfred Maury fait un rapport verbal sur le neu- vi6me recensement d6cennal op6r6 en 1851 de I'em- pire russe, et publie par M. Koeppen. M. Lejean lit la ])iennere partie de son travail sni- la g6ograpliie physique de laMolduvie. ■* M. de La Roquette lit une notice de M. Paul Cbaix sur les lies de I'archipel grec, et sur les cartes de cet arcliipel, publi^es par ramiraut6 anglaise. MM. d'Avezac, Victor Guerin, Bouillet, A. Maury, ( 455 ) font sur divers points de ce travail quelques observa- tions, M. Reclus continue la lecture de sa notice sur le Mississipi. Toutes ces communications sont 6cout6es avec int6- ret et renvoy^es au Bulletin. ( m ) ouvRVGES OFFEi\TS A LV sor-iivrii:. STANCES I)E MAI ET JUIN 1858. Titres des ouvrages. Donateufs. EUROPE. Ueber die Ihessalische Ebcue, von professor D' Kriegk. Frankfurt am Main, 1858, br. in-4°. M. Krikgk. Veleia. Rome. 1. Table aiimenlairc. — Excursion a Veleia. II. Voic appienne. — Calaconibcs. — Aqua; apollinares. Par Ernest Des- jardiiis, Paris, 1858, br. in-8°. M. E. Desiardins. G^ograpliie aucienne du d^partemcnt de I'Yonne, par M. Wy. Sens, 1858, br. in-8°. " M. Dey. Statislique de la Norv^ge, par M. Braun Tvethe, Christiania, 1848; i vol. in 8°. — Tableaux stalisti(iues de la population de la Nor- vdge, au 31 d(5cembre 185,'l, aiiisi que des niariages, naissances et Aicks de 1846 h 1855. Christiania, 1857; 1 vol. in-4'' oblong. L'Universite rotale de Christiania. ASIE. Werkenvan het koninklijk Insiitut voor Taal-laiid-cn Volkenkunde van Nederlandsclu Indie. Twcede Afdeeling. Ueize naar Japan in 1643 vanMrt.Gerr. Vries. Uitgegeven met hijiagen door P. A. I.eupc. Met aanteekeningcn van P. F. von Siebold. Amsterdam, 1858. 1 vol. in-S". Institut orient.m. ni:s Pays-15as. AFRIOUE. Cinq cents lieues sur le Nil, par M. Charles Didier, Paris 1858, 1 vol in-18. M. Cii. DiDiER. Suez el Piirim. Rcponse a rarlicic du Times du 7 avril 1858, par V. A. Barbiddu Bocage. Paris, 1838; br. in-8°. M. V. A. Barbie du Bocacr, Annuaire (ill Sdndgal el dependanres pour Fannt'e 185S, fuivi (I'mie notice sur la rolonie et sur Ics pays (pii sont en rehilion a\ec ellc, ( /i37 ) Tares des ouvrages. Donateurs. par L. Faidherbe, licuteuaut-colonel du g6nie, gouvcrncur du Sd- n(^gal. Saint-Louis, 1858. In-12. M. Faidherbe. AMERIQUE. Ceasus of the Stale of New-York for 1855, prepared from the originals returns, under the direction of hou. Joel T. Headley, secretary of State, by Franklin B. Hough, superintendent of the Census. Albany, 1857. 1 vol. in-fol. Gouvernem. des Etats-Unis. La Inglaterra y los Estados-Uuidos en Centro-America, u observa- cioncs sobre las revoluciouesdeesta republics y el origen de la dis- puta cyie, sobre su poseslon, sostienen aquellasnacionesrivales, por Manuel Ortiz Urruela. Paris, 1856; br. in-8°. M. Ortiz Urruela. Rdsum6 des voyages et explorations dans les rivieres de la Guyane, par le lieutenant de vaisscau Carpenlier, capitainc de I'Oyapock. Paris 1857 ; br. iu-8°. M. Carpektier. CARTES. Track survey of the river Paraguay, surveyed by commander Th. Page U. S. S. Water Witch, 1855. feuilles 10, 14 et 15. M. Pace. Ship Golden Racer from New-York to San-Francisco 1855-56, and barometric Curves at sea, by lieutenant F. Maury. 2 feuilles. M. F. Maorv. Grundriss der Uaupt-u. Residenz-Stadt Wicn mit sammtlichen Vor- stadten, nach den besten Hiilfsquellcn bearbeitet im K. K. Minis- terium des Innern, 1858 ; 4 feuilles. Soc. Geogr. de Vienne. France. Carte des chemins de fer, n" 16 de I'Atlas universel, par A. H. Dufour, avecl feuillede texte. MM. PauunetLe Chevalier. Carte de I'lle de P^rim et d^troit de Bab-el-Mandcb, d'aprfes la carte de Moresby, par V. A. M., 1858; 1 feuille. M. iMalte-Hhun. XV. MAI ET JUIN. 9. 29 ( /i2S ) Titres eft's ouiru[/es. Donateurs. Carletles Klats du Mfiitiueuu leinps de la coiiqui^lc cu 1521, drcssdc suus Li dircclion de M. I'abbci* nrasseur de Hoiirlmur^', dupr6s les aiicioiis dociimeiiU do la vicc-royauli, Ics carles de la Soeidtd dr geogi.ipliie et de stalisllque de Mexico, etc., par V. A. Mallc-Bruii, 18:i8 I leuille. M. Mai,tk-Biils. OUVRAGES GlilNEUAUX, MELANGES. Mi'inoirc sur le caleiidrier urabe avaal rislamijrue, cl siir la uaissaiicc el rigc d;i propliete Muliaimnail, par Maliiiioiid-En'ciidi, aslronoine ^gyplleu. Paris 1858, br. ii>-8". M. Maiimoud-Effendi. Table des positions g^ographiqucs des principaux lieux du globe; par M. Daussy Exlrait dc la Coimaissance des temps, pour ISo'O), br. iii-8". M. Dausst. ^lanuel de la iiavigalion dms le d^troit dc Gibraltar, par C. A. Vin- cendoii Duiiioulii), iuyenicur-hydrographe, cl C. 1' de Kcrliallct, capitaiiic de vaisseau. i'aris, 1857; I vul. iu-8". M. DEKKP.iiALLiiT. Navigatiou lraiisallanti(iuc niixle. Des Uiiicraircs culrc la France, les Antilles, ie Br^sil et Ic S^nc^gal ; br. iu-8". — Explication et usage du ^\'illd aitd Ciinent Charts. — Consequences pbysiqu(s de la coMipilaiion des documents nauliquos. Vc ralmosphtre. De la iner (Extrails des Sailing Directions du lieutenant Maury), Iroisbr. in-S". — Extrails de la Geographic physique de la mer, du lieulenaul Maury, par M. K. Tricaull, capitaiue de fregate; br. iu-8>'. M. E. 'J'lUCAULT. ijur Id coiislruclion des sallcs dites des Geanls, par S. M. le roi Fre- deric VII de Daucmark. Copenhague 1857; br. in 8". SOCltTt H0Y.\LE niiS ANTIOUAlRIiS. R(^sunie des observations recueillies cu 1857 days le bassin de la Sa(jnc, par les soins dc la commission hydronieirique de I. you ; iu-S". Quelques observations dc morphologic vegi^-lalc failes au jardiu bota. ni(pie de Glirisliania, par I. M. Nornian, avor 2 lithographic*, cl ( /i;5o ) Titixs dss cuvragrs. Ihiuile-ins. publides par H. II. Riisdi. lir. iii-4". — Oliservatioiis 5nr !ps |)hf'- nom^nos d'orosion on NoI■^(*g(•, rrrucillirs |,ar J. C. Hoiliyo, r(, pn- hli^cs parB. M. Krilliau, nvcc irois carlrs, rlcnxplanclies, br. ia-4". — UechPiTlics chimico-};(*ognosliqucs sur Ic bassin silurion dc Christiani.i, jiar Tliiodore Kjcnilf, publiecs par Adolplie Strecker, avecune planclie; br. in-4o. — Rcmarques snr la faunc du lilto- ral de la Meditcrran^^e ppiidant iin \oy.'ig(^ on Italie, par M. Sars; hr. in- 80 avec deux planches. — P.c'pnnse a la qnesiion propo.«de Ir 23 mai 1S54, par le college academique de Chrisliania : « ?oi!- mcttre a iin cxDiiien scientifiquc, en les comparant les tiiies avec les aiUres, les difi'erentes theories qui ont i>t^ exposc^es sur le mode df formation desmiru^raux dansle t(^ zoologique d"ucc!iniatnti(m, a\ril et mai. — Annual re de la So- ( hhO ) ciM mt'l^orologiquc de France, avril et mai. — L'Invcstigatcur, journal di^ I'lnslitut hislorique, janTier et T^vrier. — Journal dV- ducation jiopulaire, mars, avril et mai. — Journal des connaissances utiles, avril, mai et juin. — Annates de la propagation dc la foi, mai. — L'lDgdnieur, revue scientifique et critique des travaux pu- blics etde Pindustrie, mai et juin. — Mf'moires dc la Soci6t(5 aca- d^mique de Maine-et-I-oire, 2'^ vol., IS.jS. — Memoires de la Soci^t6 d'agricullure, commerce, sciences et arts du d^partemcnt de la Marne, 1857. — Memoires de T Academic impdriale des sciences, arts el belles-lettres de Caen, ISTiS. — Journal de I'lsthme deSuez, n" 40 a 48. — L'Esp^rance, journal grec, n"" 85 h 91. — Chicago Dailj, journal, 1 num^ro. Les Autrdrs et Kditeuri. ( hh\ ) ERRATA I)U TOME XV. Page 48, lig. 17, an lieu de ike, Usez : the. — ib. lig. 25, mcUez une virgule npR^'s le mot ^claircls. — 52, — 30, au lieu de : Deriie, Uses : Derne. — 60, — 9, a fine (note), effaccz les mots de /a passctg'tf. _ — 61, — 10, au lieu de : auglais, lisez ; anglais. — 88, — 14, au lieu de Chiente, lisez : Chichete, ce uom corros- pond h celui de Chairah de la carte de la Commission. — 91, — 2, aulieude : Gcbel Rast, Usez: Gchel Raft. — 1 18, note 2, au lieu de : C'est le nom que ies Anglais donneiit quelquefoisi I'lle Disca, lisez : c'cst le nom que Ies Anglais donnent qiiclquefois au port mi-ridional de rile Disco, que Ies Danois appellent Godhavn (boii port). — ISO. Dans la notice de M. de Varnhagen, on a mis en note que rarlicle dc M. de La Roquette, sur Hojeda, dtait extrait de la Biographie gcnerale Didot, tandis que c'est dans la 2' (Edition de la Biographie universelle Michaud que se trouvc la notice sur Hojeda. — 186, a la note, an lieude courbes dquidistantcs, Usez : courbes horizontalcs equidistantes. — 189, a la nole, an Urn dc : 1086, lisez : 2088. — 19.'), au bas du lableau, qiiatriemc avant-derni^re lignc,.(7r( (icu de : au dep6t des carles parliculiercs, lisez : an dcp6t par- ticulicr dcs carles. Mt^nic |)ngc, ligne suivante, aw lieu dc : 17 fcuillcs publices sur 104, lisez sculement 104 feuilles. Au moment de la campagne de Russie, Ic gouvernement francais en piiblia unc r(?(luc- lion en 17 feuilles. ( h'li ) TABLE DES MxVTlERES CO.NI EMTS DANS LE TOME XV'DE LA A' SfiRIE. N"' S.") a 90. (Janvier a Juiti 18^i8.) «E'.!«IIIES. KTC. il 62 Esqtiisse gdographique ilu t>assin de la mer d'Aral, el qiielfiiifs trails (ips nicpiirs des habitants du BoiiUlinra, Khiva rlKnkan, par M. E. Lamansky.. Rcniarques siir Toasis de Syouali, on do Jupiter Anirnnn, par M. Joiiiard, suivies d'une relation de M. James Hamilton. . Vrspiic'c et son premier voyage. Deconvcrlc ct pjiilnration pri- mitive dn gulfe (ki Mexique et dcs cotes des Elals-Unis (1 197- 1498), parM. V. A. de Varnhagen, memhre de la Soci^t6. . Texle de trois iiote.> atlribuees a Chrislophe Co\om]i(pla>tche U- Ihographiee). l-"\anicu dc (jiielques points de lliisloire geogra|)hiqHe du Br('5il, par .M. K.-A. dc Varnhagen, meir.bre de la Society. ... 1 Ij et 21 3 .^nciens t<5moignages relalifs h la Boussole, par M. d'Avezac. . . ITt LOyapec, par M J. C. da Silva, raembre de la Socldt6. . 2S3 et 331 Decouverte di^s mines d'u:ie ancienne ville mcxicaine situde sur It; plateau de TAnahuac, par M- H. de Sanssnre 27.% Assemblee gendrale du 23 avril 185S. — Discours de M. Daussy, president de la Socleld, membre de rinstitul 300 Rapport siir le roncours nu pri\ annuel, pour la dctouverte la plus inipurtanle en gdo;,'rapliie 311 ( /J/i3 ) Notice sill- E louarJ Vo^cl et sur sou cxiiloratiuii diiiis I'AfiiiiUi' ccutrale, par M. V. A. Maltc-liruii 3JI Notice tlcsSlfs du cap Vert, par M. C. I'll, di' licrliallet i^:^ AKXI.YSKS, UAPPOllTS, IITC. Cartes hydiographiqurs de la Basse, de la Ju'jeiir.e et dc la partie icptentrioiiaie de la llaule-Egyptc a rcciiidlc de i-g-jifg-y (4 millimetres par kilometre), par M l,iiia:!t-!iey de Belle- foods ; rarporl par M. V -A. Malte-Briiii 87 Rapport del\l. AllVcd Maury, sur deux oin rages iutiuilci : Inlro- duelion a I'clvdc de la languc japonaise, par M. Ldon de Rostiy. Dictionnaire Japonais - Fran^^ais- Anglais, par le memc 92 Happen sur les dlome^ots de gdologie de M. I.c Casiu, par M. A.-D. Lourmand 95 Esquisse historiqne sur les graudes cartes topographiques de la France et eompte reudu particulierde la carte au 3^0^, re- r^duite au quart de la grande carte de retat-major; par M. V.-A. Maltc-Brun 182 Tableau cumparatif des cartes geiierales topographiques des difl'e- rents Etats dc TEurope, par M. V.-A Mallc-Brun 195-19.'> Ra[)port dcM. -Alfred Maury, sur I'ouvrdge \uulu\6 : Histoire d'AUila el de ses successeurs, jusqu'd I'etabtissement des IJon- (jrois en Europe, suivic de l^gendcs et traditions, par M. ^m6- dec Thierry 190 Rapport de M. Alfred Maury sur I'ouvrage intitiild : llisloire des iialions civilisees du Mexique et de V Amcrique centrale, durant les siccles anlcrieurs a Christophe Colornb, ecrile sni- des documents orininaux et entieretnenl inedits, puiscs aux anciennes arrives des indiijcues, par M. I'abbd Brasseur do Bourbourg ; tomes I et 11 SSS Rapport de M. Albert Alonldmont sur louvrage iiilitulii : Voyagesd'une femme autour dtDiwnde, par M"' Ida PfeitTer; traduits de rallemand par W. de Suckau .SO;) Rapport de M. Alfred "Muury, sur le mcraoire iulitule : Le Perou avant la cmiqucle cspagnolc, |iar M. Ernest Dcsjurdiiis. . . . 408 ( /iM ) MJUVEI.LES UT CO M ULMC ATIONS. Mission (Ic M. G. Lejeaii duns les P^o^ilU'e$ danubieunes 99 Uc'gions nrcliiiucs. — lU'chcrches de Franklin. Leltrc ccrile ii lady Franklin, |iar Ic capitaine M' (Miiitock, commandatil I3 iiavire Ic Fu.r, envoyd a la reclienhe dc sir John Franklin cl dc ses conipagnons ; cornmuniquee a M. dc La Roqucttc, iraduile par lui, et liio ti las(^ancede la Commissioo ceulra'c dc la Sociclc de Geographic dn 20 novenil)re 1857 117 Leltrc dc M. le coiiite dc Casiclnuu i M. le president de la Commission centrale, sur Fetal actuel des connaissanccs g^ographiques dans FAfrique australc 121 Note sur les ilcs desCocos, par NL E. de Froidcfonds des Fargcs. 120 Notice sur M. Ic baron Melvill de Carnbcc, uienibre dc la So- ci6l6 295 Le Balkan central, par M. G. Lejean 413 Sur une nouvclle carle du Canada, par M. V. Buissou 418 Geographic ancieuneduddpartemenlde FYonne, parM. A. D6y. 421 ACTES DE l,\ SOCIETi:. P'xlraits des procfes-verbaux des sdances de la Commission cen- trale 129, 207, 297, 42.3 Ouvrages ofTcrts 141,211,300,435 Errata du tome XV 441 I'able des matieres du XIV' volume 4 42 PLAKCUE. C.iilc dune partic du Liva de Trnova (Bulgaric), |iar M. G. Lejean. « Wiiikk /^/>/^. /'iiirifari f> f.f/iU>iii,- Pit/mt /■