' : -, UJf m BULLETIN DK LA * r SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE C 2^ BULLETIN DE LA Soc* Nationale l'Acclimatation de France FONDEE LE 10 FEVRIER 1854 RECONNUE ETABLISSEMENT D'UTILITÉ PUBLIQUE Par Décret du 26 Février 1855 ANNEE 1915 SOIXANTE-DEUXIÈME ANNÉE • t.MHN * i- pfcW YtWt PARIS AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ 33, RUE DE BUFFON , 33 1915 JJiUi If/à Indice décimal S06 5$l-52 591-52 BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 62e ANNÉE N 1 - JANVIER 1915 SOMMAIRE F. E. Blaauw. — Une journée à Pottenberg 1 Pierre-Amédée Pichot. — La Loutre de Mer H Le « 4 de chiffre » simplifié C. Rweeet-Wattel. — Pisciculture dans l'Alaska 18 Extraits des procès-verbaux des Séances de la Société. Séance générale du '34 décembre 1914 ~3 ' Chronique générale et faits divers 28 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin, est interdite. Un numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. AU SIÈGE SOCIAL DE, LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION DE FRANCE 38, rue de Buffon (près du Jardin des Plantes) , PARIS LE BULLETIN PARAIT DEUX FOIS PAR MOIS iiriç I JVI DnDT A IMT Des cartes annuelles d'entrée au Jardin AVfO liTlf UJ\1 ATl 1 d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets sont délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : 33, rue de Buffon. ___ Pendant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondée le 10 Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1855 33, RUE DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 Président, M. Edmond Peurier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice-Présidenti. i Maurice db Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger) . H. Hua, Directenr adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard saint- Secrétaire*. I Germain, Paris (Conseil). Crepin, 82, rue de Grenelle, Paris (Séances). Gh. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sebillotte, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samôis (Seine-et-Marne;. Membres du Conseil M. Le Myre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalme, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. • D' P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprinc», 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris. Pendant l'année 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bimensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril 22 Mai Novembre Décembre 14 ! 18 18 11 11 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Socs-Section d'Ornithologie (Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les personnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANGE UB**ft* BOT A NIC Ak UNE JOURNÉE A POTTENBERG EN AFRIQUE AUSTRALE Par F. E. BLAAUW. J'avais visité le fameux troupeau deBontebokken (Damaliscus pygargus) de M. Albertyn à Nachtwacht et ce dernier m'avait proposé d'aller voir sa ferme de Pottenberg, éloignée d'environ 10 milles anglais de Bredasdorp, dans le sud de la colonie du Cap. L'excursion se ferait en automobile et un neveu de M. Albertyn me servirait de guide. J'avais accepté la proposition avec enthousiasme, et le matin du 6 avril 1914, à 9 heures, nous nous mîmes en route. Le chemin était bon, et bientôt nous nous enfonçâmes dan- les ondulations sans fin de cette solitude qu'on nomme l'Afrique australe. Ce qui me frappa surtout, ce fut l'aspect général du pays. Je m'étais imaginé, sachant que toute la région était surtout un pays d'élevage, que j'allais traverser des pâturages plus ou moins fertiles, selon la quantité d'eau disponible; mais, en réa- lité, on ne rencontre presque pas d'herbe mais des bruyères qui ne sont pas des bruyères à proprement parler, mais de petits buissons à feuilles minuscules et charnues plusou moins vertes ou des terrains presque complètement dénudés de toute végétation apparente. Des hommes, on n'en voit pas ou pres- que pas. De distance en distance, on découvre une ferme com- posée de deux ou trois corps de bâtiments ayant assez pauvre apparence et entourée de quelques Eucalyptus. Par contre, on voit partout des Autruches qui pâturent une végétation maigre, mais pourtant suffisante pour les rendre fortes et robustes. BULL. SOC. NAT. \CCl.. FR. 1915. — 1 2 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION On les voit par paires, on les voit par douzaines, on les voit par groupe de cinquante, on les voit adultes, on les voit semi- adultes, on voit les petits en bandes sous la conduite de leurs parents. Il y en a qui vous regardent passer sans s'émouvoir et il y en a qui s'enfuient à l'approche de l'automobile, de toute la vitesse de leurs jambes en échasses comme de véritables ani- maux sauvages. L'Autruche, le mâle surtout, dans sa livrée de noir et blanc, dans toute la splendeur de sa force, est un bien bel animal et tout à fait différent des Oiseaux au plumage élimé et terne qu'on voit dans les ménageries d'Europe ! On croise aussi des trou- peaux de Moutons mérinos, des bandes de Mules et de Chevaux, mais on ne voit presque pas de Vaches. De loin en loin, des montagnes grises et rousses, grises sur- tout, bornent l'horizon. De loin elles paraissent presque dénudées, mais, en réalité, elles sont couvertes de tous les trésors de la flore sud-africaine! Après une course d'une heure environ, nous abordâmes une vallée toute remplie d'Aloès arborescents, hauts quelques-uns de 4 à 5 mètres. Dans cette région, on a dû autrefois se servir de ces végétaux étranges pour former des clôtures de kraals et mettre le bétail, la nuit, à l'abri des Lions et des Panthères, car plus d'une maison en ruines est attenante à un enclos défendu par des haies de ces Aloès à épines formidables. Tout le long de la route, les petits Oiseaux étaient nombreux et partout le magnifique Canari du Cap [Crilhagra sulfurata), avec sa belle poitrine jaune, s'envolait à notre approche. Sous les buissons, se cachait le beau « Klass Pierewit » aussi nommé « bacbakcri » {Laniarius gutturalis) et qui faisait résonner le pays de ses appels étranges. De temps en temps, un bel Oiseau brun, de la taille d'une Grive, mais ayant plutôt les formes d'une Alouette élancée, avec la gorge couleur de sang, se perchait sur une bruyère. C'est le « petit Dindon » des Boers (Macromjx capensis). Un peu plus loin, une magnifique Outarde à poitrine noire et à oreillons blancs {Olis afra) s'éloigne en courant, à notre approche. Enfin, mon jeune guide me fait remarquer dans le lointain quelques bâtiments adossés contre une montagne rocheuse. UNE JOURNÉE A POTTENBERG 3 «C'est Pottenberg», me dit-il, et au bout d'un quart d'heure nous sommes devant l'habitation. Nous mettons pied à terre, heureux de pouvoir nous dégour- dir les jambes après deux heures d'automobile, et, avant d'entrer dans la maison où nous irons déjeuner, nous allons faire le tour de l'établissement. Tout d'abord, sur la pelouse, nous rencon- trons une femelle d'Antilope Blesbok (Bamaliscus albifrons) accompagnée d'un jeune, âgé de trois mois. Le petit, me dit-on, a pour père un Bontebok ( Damaliscus pygargus) car sa mère a cohabité avec quelques mâles de cette espèce dans le même enclos. Derrière l'habitation se trouve un ravin assez profond, dans le fond duquel coule un petit cours d'eau. Les pentes sont couvertes de buissons divers, dont plusieurs sont en fleurs et de quelques pieds d'Eucalyptus globulus; toute cette végétation est remplie d'Oiseaux. Tout d'abord j'entends les appels bien connus des petits Astrilds à bec rouge (Estrelda astrild), le « roodbek » des Boers. En bandes nom- breuses, ils passent de buisson en buisson où ils se cachent tout de suite sous la feuillée. Puis trois Oiseaux-Souris à face rouge (Colius eryihromelon) s'envolent, l'un après l'autre, d'un massif d'Opuntias pour aller se percher dans un Mimosa où je puis les examiner à mon aise et je m'étonne de leurs jambes disloquées et de leurs poses excentriques. Le vol de ces Oiseaux est une série de battements d'ailes répétés jusqu'à quelques mètres de l'endroit où ils veulent se percher et ils achèvent le parcours en vol plané, glissant comme des parachutes jusqu'à l'arbre qu'ils veulent atteindre. Quelques Etourneaux à ventre blanc (Spreo bicolor) volent par-dessus le ravin et partout on entend chanter les Passereaux à poitrine jaune [Crithagra sulfurata). Enfin, on vient me dire que le déjeuner m'attend et je m'arrachai à la contemplation des Oiseaux pour entrer dans la maison. Après le déjeuner, nous allons explorer la montagne. D'abord, nous suivons le cours du torrent et, plus nous avançons, plus hauts et plus sauvages deviennent les rochers. Par-ci, par-là, des masses d'Aloès forment des groupes très pittoresques et, pendant que je les observe, je vois de petits animaux de la taille de Lapins sautiller le long des rochers et se cacher dans les crevasses. Ce sont des Damans (Hyrax capensis), curieux petits Mammifères dont l'organisation se '( BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION rapproche de celle des Rhinocéros, au dire des anatomistes, mais que l'on a fini par placer dans un genre à part. Quand je m'arrête pour les observer de près, à l'aide de mes jumelles, j'en découvre encore d'autres qui se tiennent immo- biles sur les rochers et j'en vois un qui grimpe après un buisson avec une grande agilité pour rejoindre sa demeure rocheuse; au bout de quelques minutes, tout ce petit monde a disparu et j'attendis un quart d'heure sans en voir reparaître un seul. I^ous quittons le lit du torrent et, en faisant un détour, nous escaladons la montagne. L'ascension dure deux heures et, plus nous montons, plus la flore devient magnifique. Ce sont des variétés de Bruyères à fleurs rouges, roses, jaunes et blanches, des fleurs de plantes bulbeuses de toutes couleurs, des buissons de l'arbre à sucre (Protea) dont les fleurs plus grandes que celles du Philocactus, mais à peu près de la même forme, sont remplies d'une eau sucrée. On n'a qu'à cueillir une de ces fleurs et à la renverser dans le creux de sa main pour obtenir au moins une cuillerée de ce doux breuvage qu'adorent les Soui-maugas ou Petits-sucriers (Cinnyris) et les horribles Singes papions. Et dire que cette richesse de fleurs se voit dans une saison « où il n'y a presque pas de fleurs », disent les habitants, Que ioit-être la saison des fleurs? A notre gauche se trouve une vallée profonde; à notre droite s'étend la plaine avec la mer à l'horizon; devant nous des rochers et encore des rochers ! Tout autour de nous planent une douzaine de Vautours (Gyps Kolbiï) décrivant leurs cercles. Tantôt ils sont au-dessus de nous, tantôt ils descendent au-dessous de nous sur la plaine. On peut donc, à son aise, voir leur plumage par-dessus et par- dessous. Non loin de nous, une crevasse coupe la montagne. « C'est là qu'ils couchent » me dit mon jeune guide, « c'est la crevasse aux Vautours ». Nous continuons encore à gravir quelques sommets et nous dérangeons une petite Antilope rousse qui s'éloigne en courant. « C'est un « Steenbok (Raphiceros campestris) », me dil mon guide. Après avoir admiré la vue qui, surtout du côté de la mer, est magnifique, il faut se décider à reprendre le chemin de la ferme et mon jeune ami me propose de suivre le lit du torrent qui UNE JOURNÉE A POTTENBERG prend sa source dans le voisinage. « Cela nous conduira à la ferme par le chemin le plus direct », me dit-il, « et il y a si peu d'eau que cela ne nous gênera pas beaucoup et nous passerons près d'une grotte ». J'acceptai sa proposition et je m'aventure à sa suite dans une espèce d'escalier de rochers creusé par les eaux depuis, Dieu sait! combien de siècles! Le chemin était très direct, en effet, mais je "ne puis pas dire que cette descente, qui dura plus d'une heure, fut très agréable La fameuse grotte n'était qu'un trou de minime impor tance ; mais, quand enfin je crus toucher au terme de ce voyage le torrent se déversait en cascade d'une vingtaine de mètres de haut au moins. Cela nous arrêta net, car des deux côtés d'énormes rochers encadrant la chute d'eau nous empêchaient d'en faire le tour. Pour un instant mon jeune guide se montra embarrassé, mais, reprenant sa route, il se glissa à plat ventre sur le rebord des rochers, et disparut dans une fissure à gauche de l'excavation. J'eus beau lui enjoindre de nepasrisquer de se casser le cou, il n'en continua pas moins à avancer à plat ventre, et au bout de quelques instants il me cria triomphalement d'en bas : « C'est très facile! Grimpez par la crevasse, vous trouverez un endroit où, en vous aidant d'un jeune arbre, vous pourrez vous laisser glisser jusqu'au bas ». Jesuivis ces instructions et franchis heu- reusement ce passage difficile, large de cinquante centimètres, avec le vide à droite et des pierres glissantes à gauche! Arrivés en bas, sains et saufs, nous nous assîmes sur un rocher pour admirer la cascade. C'était un endroit charmant. Dans les fissures des rochers croissaient des buissons et l'un d'eux qui surplombait le cours d'eau avait au bout de chaque branche comme un petit panier suspendu en forme de boule avec une petite ouverture circu- laire dans la partie supérieure. C'était une colonie de nids de Tisserins jaunes du Cap (Hyphantornis olivaceus). A gauche de la cascade, il y avait, dans le rocher, une fissure à peu près semblable à celle qui nous avait servi de chemin au côté droit mais qui n'aboutissait pas en haut. Dans cette fissure se trouvait l'énorme nid d'une paire de Hammerkops (Scopus umbretta), curieux Oiseau gris-brun de la taille d'un Ibis, avec la tête ornée d'une huppe couchée et qui a la forme d'une petite Cigogne. Le Hammerkop est assez répandu dans l'Afrique australe et rarement on voit un cours d'eau sans l'y rencon- 6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION trer. Gravement, il se promène dans les endroits où l'eau a peu de profondeur et si on ne l'inquiète pas il ne se dérange pas et se laisse observer de tout près. J'étais heureux de la découverte de ce nid qui formait une masse énorme de bois mort avec une entrée circulaire. Malheu- reusement l'endroit était inaccessible, de sorte que je ne pus m'assurer si le nid contenait quelque chose, ce qui était peu probable, du reste, vu la saison avancée. Pendant que j'admirais mon nid, un petit Soui-manga ou Sucrier à double bande (Ginnyris chalïbeus), véritable bijou vivant, vint ajouter son charme à l'attraction de cet endroit ravissant, en sautillant dans les buissons fleuris à la recherche de nectar et d'insectes. Les petits Sucriers de l'Afrique sont, pour ainsi dire, les représentants des Colibris du Nouveau Monde ; j'avais vu ces derniers au Chili et j'étais curieux de comparer leurs habi- tudes. Leurs allures sont très différentes. On ne voit le Colibri que perché ou au vol, mais il ne sautille pas. Il vole avec une si grande rapidité que l'œil a de la peine à le suivre. On entend de petits cris aigus et on le voit suspendu dans l'air devant le calice d'une fleur où il plonge son bec et surtout sa langue, puis il disparaît d'un trait pour revenir de la même manière quelques instants plus tard. Les petits Sucriers de l'Afrique ont les pattes bien dévelop- pées et généralement ils s'approchent de la fleur qu'ils veulent examiner en suivant la branche en sautillant et ils introduisent leur bec de côté dans la fleur, entre les pétales. Si la fleur est de forme tubulaire et que l'Oiseau ne puisse l'atteindre de côté, alors il se suspend en l'air devant le calice, mais cela est exceptionnel. Près d'Oudthsoorn, dans lesZwarte Bergen, il y a un arbuste au port élancé et grêle que les habitants nomment le Tabac sauvage. Cet arbuste a des fleurs jaune pâle tubulées et devant ces fleurs, suspendu dans l'air comme un Colibri, j'ai maintes fois pu admirer le superbe Sucrier malachite, Nectarinia famosa. Le vol des Sucriers n'est pas si rapide que celui des Colibris et le vol de l'un d'eux, l'incomparable Sucrier améthyste, res- semble beaucoup à celui du Martin-pêcheur. 11 file en ligne droite en poussant des cris aigus. Mais revenons à la cascade : Le petit Sucrier à double bande vert doré avec sa poitrine UNE JOURNEE A POTTENBERG 7 barrée d'une bande bleue qui surmonte une autre bande rouge carmin m'intéressa si vivement que mon compagnon dut me rappeler que l'heure s'avançait et qu'il fallait partir, ce que je fis avec regret. Nous repassâmes par l'endroit où nous avions vu les Hijrax qui de nouveau se retirèrent dans leurs terriers à notre approche, et à cinq heures nous nous retrouvâmes à la ferme. Après un repos pendant lequel l'inévitable café fut servi par notre hôte, nous remontâmes en automobile à six heures moins le quart, très satisfaits de notre journée. Si notre course du matin avait été belle, celle qui nousramena à Bredasdorp le fut bien davantage. Le soleil commençait à éteindre ses rayons et c'était avec une espèce de stupeur que je subissais le charme de ce beau et immense pays d'Afrique, si désolé et si plein de vie, que nous parcourions de toute la vitesse de notre véhicule. Tour à tour passèrent sous nos yeux des nuages dorés par le soleil, des montagnes bleues se détachant sur un fond jaune, puis la lumière indécise prêta aux Aloès des silhouettes de fantômes, surgissant dans une vallée mystérieuse. Quand l'ho- rizon se fut tout à fait assombri, la lune vint percer un instant les nuages, éclairant tout le mystère qui nous environnait, et lorsqu'elle se voila en nous laissant dans une obscurité complète je ne vis plus que la route blanche éclairée par nos lanternes. Un Lièvre, ébloui par nos réflecteurs, vint se jeter sous notre voiture et passa entre les roues sans se blesser, tandis qu'une petite Antilope qui broutait le long du chemin s'échappait en bondissant par la traverse. Quand tout à coup une panne, enrayant notre moteur, nous arrêta en plein désert ! La lune s'était cachée et des rafales violentes, accompagnées de pluie, nous firent craindre une fâcheuse terminaison de notre excursion. Heureusement un quart d'heure d'efforts remit en mouvement la machine qui nous ramenaà Bredasdorp sans autre accident. Le Blesbok et le Bontebok, dont parle M. Blaauw dans la relation ci-dessus, sont deux espèces d'Antilopes très voisines qui ne diffèrent que par l'étendue des taches blanches dont leur pelage, d'un fauve pourpre, est marqué. Ces espèces, 8 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION localisées dans certaines régions de la colonie du Cap et qui comptaient autrefois des bandes de plusieurs milliers de têtes, ont été tellement pourchassées par les premiers colons hollandais, qu'il n'en reste guère plus en dehors des enceintes réservées où quelques fermiers intelligents leur ont ménagé une protection efficace. En 1864, M. Alexandre Vander Byl réussit à chasser tous les Bontebok des plaines qui entouraient sa ferme de Nachtwacht, dans une immense enceinte de fils de fer de son domaine africain. Ce troupeau comptait alors 300 ani- maux. M. Selous, qui le visita en 1895, estime que ce nombre avait plutôt diminué qu'augmenté. Un voisinde M. Vander Byl, le D' Albertyn, a suivi son exemple et c'est là tout ce qui reste des Bontebok dans la colonie du Cap. Le Blesbok s'est mieux maintenu à l'état libre, dans l'Orange et le Transvaal. malgré les milliers de peaux qui, il y a vingt-cinq ou trente ans, étaient, chaque année, expédiées en Angleterre pour le com- merce des cuirs. On estime qu'il peut bien y en avoir encore aujourd'hui de 2.000 à 3.000 têtes dans le Transvaal. La perle du dernier Bontebok que possédait le Jardin zoologique de Londres, où l'animal vient de succomber en présentant des symptômes de tuberculose, est donc très regrettable. C'était le dernier survivant d'un couple que le Jardin avait acheté en 1909. Des spécimens de Blesbok sont plus fréquents dans les Jardins zoologiques. Les Damans sont de petits Mammifères ayant l'aspect de gros Cochons d'Inde, mais dont l'organisation, très spéciale, les distingue complètement des Rongeurs. La forme de leurs dents les avait fait placer par Cuvier dans le voisinage des Rhino- céros; Milne-Edwards et Huxley en ont fait un ordre à part (Hyraciens). Habitant les montagnes et les rochers de la Syrie et de l'Afrique, il est probable que le Daman est le Saphan de l'Écriture, dont Moïse avait défendu de manger la chair, et non le Lapin, comme on a traduit incorrectement le nom israélite, puisque le Lapin n'existe pas dans la région visée. L'Ombrette est un petit Echassier de la grosseur d'une Cor- neille. On n'en connaît qu'une espèce, trouvée au Sénégal par Adamson. Sa huppe épaisse, portée horizontalement, donne à sa tête l'aspect d'un marteau, d'où son nom anglais de Hammer headed Stork, Cigogne à tête de marteau. M. Seth-Smith a UNE JOURNEE A POTTENBERG 9 1. Bontebok, Damaliscus pygargns. — 2, Blesbok, D. albifrons. — 3, Ombrette, Scopus umbretla. — 4, Oiseau-Souris, Colins erythro- melon. — 5, Daman, Hyrax capensis. 10 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION rencontré cet Oiseau dans l'Uganda, où il a vu son nid construit en forme de boule dans la fourche d'un arbre. L'entrée de ce nid est par un trou sur le côté. Ces curieux Echassiers se sont reproduits au Jardin zoologique de Londres où on a pu les voir construire leur nid avec une accumulation de branchages. Les Colious ou Oiseaux-Souris, « Muys-voogel » des colons hollandais du Cap, doivent leur nom à la texture très fine et très compacte de leur plumage gris, comme celui du petit Ron- geur, qui leur donne l'apparence d'être revêtus de poils. Ce sont des Passereaux à allures étranges, à démarche lourde et embarrassée, tenant un peu de celle du Perroquet, presque reptilienne, en un mot, surtout à terre. Leur doigt de derrière, articulé du côté interne du tarse, peut être dirigé en avant comme celui des Martinets. Très arboricoles, les Colious ne se trouvent qu'en Afrique, en Asie et en Australie. Ils vivent en famille, et se nourrissent de fruits et d'insectes. Pour dormir, ils se suspendent sous les branches, par petits groupes, comme les Chauves-Souris, mais ne laissent pas pendre leur tête qu'ils replient sur leur poitrine à la hauteur des doigts. Le major Uorsbrugh, qui a rapporté tant d'Oiseaux curieux vivants de ses voyages, dit qu'il a trouvé le Coliou à face rouge, en très grand nombre, dans le Transvaal et dans l'Orange. Les Cafres lui en apportaient beaucoup, mais c'étaient des Oiseaux si gourmands et si sales que ce n'étaient pas des hôtes très dési- rables pour ses volières. La peau de ces Oiseaux est très coriace et très épaisse, mais leur chair est bonne à manger. Le Coliou strié et le Coliou à face rouge sont les deux espèces qu'on a eu le plus souvent occasion de voir dans les collections des Jardins zoologiques. (.V. de la EL) ANIMAUX A FOURRURE LA LOUTRE DE MER (ENHYDRE MARINE) Par PIERRE-AMÉDÉE PIGHOT. Depuis que l'humanité s'est avisée de suppléer à l'insuffi- sance du costume qui lui a été départi par la nature en employant la fourrure des animaux pour se vêtir, il semblerait que les bêtes qui ont si largement contribué à nous garantir du froid et des intempéries dussent nous être familières. Cependant, lorsqu'on cherche leur histoire dans les écrits des auteurs qui ont traité de ce sujet, on s'aperçoit que les écrivainsse sont repassé les uns aux autres une foule de légendes qu'ils ne se sont pas donné la peine de contrôler. Cela tient sans doute à ce que beaucoup des espèces qui ont fait l'objet d'un commerce si considérable habitent des régions lointaines et d'un accès difficile, et les noms différents qui leur ont été donnés par des chasseurs peu versés dans les nomenclatures d'histoire natu- relle et par des commerçants qui n'avaient pas à se piquer d'exactitude scientifique ont été la cause d'erreurs et de confu- sions qui n'ont pas peu contribué à obscurcir la connaissance d'animaux sur lesquels nous voudrions être correctement renseignés. On s'étonne pourtant de trouver sous la plume de certains auteurs des énormités contre lesquelles auraient dû les mettre en garde les plus simples notions de biologie. Ainsi, dans un ouvrage spécialement consacré à l'Histoire des animaux à four- rure par un membre de la Société zoologique de Londres, M. Poland, il est dit qu'une espèce de Viscache, le Lagotis Cuvieri, provient du croisement du Chinchilla et du Lapin ; que le Didelphe ou Sarigue de Virginie mâle a une poche marsu- piale comme la femelle et partage avec elle le soin de porter ses petits; que l'Opossum ou Phalanger d'Australie se croise avec le Koala et le Kangurou pénicillé ; que lesjeunes Ornitho- rynques ont le bec mou pour leur permettre de tôter; que les Skunk's d'Amérique se croisent avec l'Ecureuil gris; que le Raton contracte alliance avec la Sarigue; que le Rat d'eau ressemble tellement à l'Ondatra que ce pourrait être le même 12 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION animal ; enfin que le Gnou, Antilope indomptable, peut être dressé au labour. Certaines maisons de fourrures, lorsqu'elles se mêlent de donner des renseignements sur les pelleteries qu'elles exploitent, ne nous communiquent pas des notions moins fantaisistes que le croisement du rongeur et du Carnivore dont parle M. Poland. Tel voulant représenter des Panthères dans les illustrations de son catalogue, fait figurer sous ce nom des Guépards; l'Ecureuil gris d'Amérique est présenté à la clientèle comme l'Ecureuil de Sibérie qui fournit le Petit-gris ; une Musaraigne perchée sur une pomme est censée être le por- trait de l'Ondatra ou Rat musqué et l'Opossum du Nouveau- Monde est qualifié : une des plus grandes espèces de Marsu- piaux. De tous les animaux à fourrure qui ont été décrits ou figurés d'une façon inexacte par les auteurs et par les dessinateurs, aucun n'a donné lieu à des assertions plus contradictoires que la Loutre de mer, car, en dehors des chasseurs indigènes, peu d'observateurs compétents ont eu occasion de la voir dans les parages qu'elle fréquente. Steller, en 1774, fut le premier naturaliste qui ait fourni sur cet animal des renseignements assez étendus. Pallas, Linné, Buffon, Brisson, Pennant, Lesson, pour ne citer que ceux-là, en ont ensuite parlé en termes dont il est assez difficile d'établir la concordance. Martens, dans les Proceedings, en 1836, et Gervais, dans le Journal de zoologie, en 1875, furent les premiers à nous faire connaître son ostéologie. Mais, récem- ment, il a paru en Angleterre deux ouvrages où la Loutre de mer est décrite d'après l'expérience personnelle de leurs auteurs qui en ont fait la chasse; ce sont : Dans les Mers interdites, par M. Snow, et la Chasse de la Loutre de mer, par M. Allan. Ces deux navigateurs, qui ont surtout exploré les mers du Japon, ont ajouté d'intéressantes observations à celles que M. Elliott, en 1875, avait insérées dans son rapport au gouvernement de Washington sur le territoire de l'Alaska et que M. Coues avait reproduites dans son Histoire des Mustélidés des Etats-Unis. La belle fourrure de la Loutre de mer était depuis longtemps appréciée des Chinois qui se la procuraient en trafiquant avec les insulaires du nord du Japon. Elle rivalisait avec la fourrure de la Zibeline pour garnir les vêtements des mandarins et au Kamchatka, avant d'en connaître la valeur, les habitants l'em-' ANIMAUX A FOURRURE 13 ployaient communément comme une fourrure courante. Les Loutres de mer avaient été en effet très nombreuses dans la mer d'Okhotsk; mais lorsque le cosaque Atlasoff, en 1697, péné- tra jusqu'au Kamchatka avec une centaine de compagnons d'aventure, il rapporta parmi les nombreuses fourrures, qu'il avait prélevées comme tribut sur les indigènes de la région, 17 peaux de Loutre de mer qui attirèrent l'attention sur la fructueuse exploitation qu'on en pouvait faire dans la pénin- sule Kamchadale, et les trafiquants suivant la voie qu'il leur avait ouverte ne tardèrent pas à épuiser cette source de profits. Lorsque les navigateurs Lukannon et Kaiechow abordèrent pour la première fois aux îles Prybilow, ils avaient pu se pro- curer 5.000 peaux de Loutre de mer; l'année suivante c'est à peine s'ils en purent avoir un millier, et au bout de six ans tout avait été détruit sur cet autre point du globe. La découverte des îles Aléoutiennes et de l'Alaska, en 1728, ouvrit un nouveau terrain de chasse aux trafiquants en four- rures. On y trouva des Loutres de mer en très grande abon- dance. Les expéditions de Behring firent reconnaître que l'habitat de la Loutre de mer s'étendait sur les îles Aléou- tiennes et descendait le long des côtes de l'Amérique du Nord jusqu'à l'Orégon. En 1745, Michel Navidoskoff signalait qu'il en existait encore beaucoup dans les Kouriles. C'est par mil- liers, depuis cette époque, que les compagnies de fourrures rapportèrent de leurs expéditions des peaux de Loutre de mer et, de 1814 à 1841, les Russes n'en exportèrent pas moins de 80.000. Habitant la zone la plus orageuse du Grand Océan, la Loutre de mer est un animal marin par excellence, admirablement organisé pour lutter contre les tempêtes et pour braver la tem- pérature glaciale de ces eaux où viennent fondre les glaces du pôle quand elles ne l'obstruent pas. C'est sur ces flots agités qu'elle passe sa vie, se nourrissant de mollusques qu'elle va chercher au fond des abîmes et dont ses fortes mâchoires, armées de canines puissantes et de larges molaires à couronne tuberculeuses, lui permettent de broyer facilement les coquilles. C'est sur la crête des vagues qu'elle s'endort et qu'elle berce son petit qu'elle allaite étendue sur le dos et qu'elle sert entre ses bras pendant ses plongées pro- fondes et dans ses fuites précipitées. De grande taille, mesu- 14 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION rant de 1 mètre à lm50 de longueur, le corps de la Loutre de mer est cylindrique et d'une seule venue ; sa peau est tellement flottante que, dépouillée, elle a 30 centimètres de plus qu'à l'état naturel ; ses pattes de devant, très courtes, ressemblent à des moignons, et celles de derrière très largement palmées, encadrant une queue courte, ont beaucoup d'analogie avec les membres abdominaux des Pinnipèdes. Dans ces conditions, on comprend qu'elle ait de la difficulté à se mouvoir sur terre où elle avance par bonds comme les Phoques et les Otaries, et ses membres postérieurs sont alors repliés sous le ventre comme chez les Morses et les Otaries. Mais elle n'aborde la côte que dans des circonstances exceptionnelles, lorsqu'elle est blessée ou qu'elle est chassée du large par les ouragans. Même alors, c'est de préférence sur les bancs de longues algues flottantes formant radeau qu'elle cherche un refuge, et on ne la voit plus à terre comme Steller l'avait constaté. Peut-être que la pour- . suite continuelle dont elle a été l'objet lui a fait abandonner les grèves, et cela, d'autant plus facilement que son organisation lui permet de mener une existence purement aquatique. Ses allures et ses formes ont une telle ressemblance avec celles des Otaries que l'on serait tenté de voir dans la Loutre de mer un type de transition entre les Loutres ordinaires et les Pinni- pèdes qui fréquentent les mêmes parages, ce qui l'avait fait classer par certains parmi les Phoques. Se tenant donc loin des côtes, c'est à 2 ou 3 kilomètres au large que MM. Snow et Allan ont dû aller chercher les Loutres de mer, pour les chasser. Trois canots sont au moins nécessaires pour celte poursuite. Chacun est monté par de vigou- reux rameurs et le chasseur, armé d'une carabine, se tient debout à l'avant du canot. Dès qu'une Loutre a été signalée, le chef de file dirige rapidement son embarcation sur l'animal. Si, comme cela arrive fréquemment, la Loutre flotte tranquille- ment sur le dos, on peut l'approcher à une centaine de mètres, sans lui donner l'éveil, et alors un seul coup de carabine, bien dirigé, peut en avoir raison; mais, si elle a vu venir l'agresseur, elle plonge rapidement au coup de fusil. La barque du tireur doit se porter alors sur le point où l'animal a disparu, tandis que les autres embarcations pren- nent position en arrière, se plaçant en triangle. C'est dans l'es- pace de ce triangle que la Loutre reparaît pour respirer, en doublant ses voies. Dès qu'elle montre la tête au-dessus de ANIMAUX A FOURRURE 15 l'eau, un nouveau coup de fusil la force à replonger et on recommence la même manœuvre, jusqu'à ce que l'animal épuisé, raccourcissant ses plongées, se laisse approcher à bonne portée pour recevoir le coup fatal. Parfois, lorsqu'elle est très effrayée, la Loutre, au lieu de revenir en arrière de l'agresseur, fuit en ligne droite, en faisant des bonds à la surface comme les Otaries et les Dauphins et, par temps calme, le seul qui soit favorable à ce genre de chasse, on peut suivre la direction de sa course par les bulles d'air qui se dégagent de son pelage lorsqu'elle file sous l'eau. Comme on voit, nous sommes loin du temps où, n'ayant pas encore appris à craindre l'homme et ses armes perfectionnées, les Loutres de mer se laissaient assommer à coups de bàlon sur la grève par Steller et Behring, dont les équipages se nourrissaient de leur chair qu'ils disaient excellente. Aujourd'hui, il n'en est plus de même. La poursuite de la Loutre de mer, qui se prolonge quelquefois pendant trois ou quatre heures, entraîne les canots loin de leur port d'attache, c'est-à-dire loin du vaisseau que les chasseurs ont laissé à l'ancre dans quelque repli des côtes, et la rapidité avec laquelle les coups de vent, les orages et les brouillards intenses s'abat- tent sur cette mer inhospitalière rend cette chasse très péril- leuse. Sous ces latitudes, les prodromes des convulsions atmosphériques laissent à peine aux navigateurs le temps de se mettre à l'abri de la tourmente, et les lamentables épaves de naufragés que l'on rencontre sur les récifs et les bancs de sable seraient pour décourager les chasseurs les plus auda- cieux si la recherche de la Toison d'or n'avait de tout temps fait surgir des Argonautes. LE « 4 DE CHIFFRE » SIMPLIFIÉ Le « 4 de chiffre » classique, qui est très employé par les gardes pour la reprise des Faisans sous les mues, est relative- ment compliqué, et assez difficile à tendre. En outre, une grande partie du dispositif formant saillie en dehors de la mue, le piège se trouve, par suite, détendu fré- quemment par le passage d'un animal quelconque. Ainsi que le montre le schéma ci-contre (fi g. 1), le « 4 de chiffre », se compose de 3 lattes, d'inégales longueurs, ABC qui représentent assez bien, une fois en place, le chiffre 4, d'où lui est venu son nom. La plus longue latte, A, se place, aux deux tiers de sa lon- gueur, environ, sous la mue, à 3 ou 5 centimètres au-dessus du sol. Sur un des petits côtés de cette latte sont creusées deux encoches disposées en sens opposé : 0 et 0'. L'une, 0, reçoit la latte B, placée sur son petit côté perpendiculairement à la latte A; l'autre, 0', reçoit la latte C, placée sur son petit côté, obli- quement de façon à rencontrer en X la latte B, qui s'y arrête dans une encoche D. La mue, relevée de ce côté, est posée, en équilibre, sur l'extrémité de la latte C, entre X et Y. Ces lattes, dont la bonne largeur est de 2 centimètres, sont souvent remplacées par des baguettes. Je crois que ce dispositif peut être heureusement simplifié par celui-ci (fig. 2) : Une latte A, large d'environ 4 centimètres, est fixée à son extrémité Z, par un fil de fer ou une ficelle, au cercle infé- rieur de la mue ; cette attache peu serrée forme une sorte de charnière ; à la partie diamétralement opposée et immédia- tement devant la mue est enfoncée en terre, légèrement en oblique extérieurement, une baguette B, fourchue du haut, élevée de 30 centimètres environ au-dessus du sol; dans la fourche, est posée la partie E G d'une baguette C, légèrement incurvée en dedans; l'autre partie E F de cette baguette, dont l'extrémité G est taillée en pointe, est amenée sur la latte A, un peu soulevée, et sa pointe légèrement engagée dans un trou ménagé en Y. La mue relevée est posée en équilibre sur la partie E F de la baguette C. LE « 4 DE CHIFFRE » SIMPLIFIÉ 17 La latte placée à quelques centimètres du sol est recouverte de grain et de menue paille et les Faisans, montant dessus sans méfiance, déclanchent facilement l'appareil. Uj- FiG- i. — Le « 4 de chiffre ». Fig. 2. Le « 4 de chiffre » simplifié. Pour faire tomber la mue plus rapidement, on peut fixer une brique sur le dessus. Ce dispositif simplifié peut servir également dans d'autres circonstances, par exemple pour reprendre les Oiseaux qui s'écbappent des volières. Plus l'Oiseau à prendre est petit, plus il faut engager légèrement la pointe G dans le trou Y de la latte A; on peut ainsi capturer des Oiseaux de la taille d'un Moineau. BULL. SOC. NAT. ACCL. l'R . 1915. — 2 PISCICULTURE DANS L'ALASKA Par C. RAVERET WATTEL. Le rapport récemment publié par le Bureau des Pêches de Washington (1) sur l'activité de la pêche fluviale et du commerce des fourrures dans l'Alaska pendant l'année dernière contient quelques détails assez intéressants sur les opérations d'élevage du Saumon, travaux nécessaires pour maintenir l'abondance de ce Poisson dans les cours d'eau de la région, que les formi- dables captures périodiquement faites pour l'approvisionne- ments des « canneries », ou fabriques de conserves de Saumon en boîtes, auraient tôt fait de dépeupler. Nous en donnerons une idée en disant qu'en 1911, année où, il est vrai, les circons- tances atmosphériques ont été particulièrement favorables à la pêche, le .chiffre des Saumons fournis à ces établissements industriels s'est élevé à 43.973.800, représentant 207.636.000 « pounds », c'est-à-dire environ 103.318.000 kilogrammes de Poisson. Les autres années, le nombre de Saumons capturés est, en moyenne, d'une trentaine de millions. Le Saumon sur lequel porte surtout l'élevage est une espèce très voisine du Saumon de Californie, Y Onchorhijnchus nerka Walbaum. généralement désigné sous le nom de Sokeye Sal- mon (2). Ce Poisson, qui se rencontre depuis la rivière Colombia jusqu'à la partie extrême-nord de l'Amérique septen- trionale, n'atteint pas une très forte taille : les sujets de 15 livres sont rares, et la plupart de ceux que l'on capture pèsent de 6 à 8 livres. La chair en est très estimée et convient particulièrement pour la préparation des conserves. Sept établissements, dont deux créés par le Gouvernement et cinq appartenant à des compagnies, mais surveillés par l'Administration, s'occupent de la production de l'alevin de Saumon pour l'empoissonnement des cours d'eau. En 1911, ces établissements n'ont pas recueilli moins de 211.398.500 (1) Alaska Fisheries and Fur industries. Washington, 1913. (2) D'autres appellations lui sont aussi données : « Red Salmon », par allusion à la couleur rouge très foncé de la chair du Poisson, « Blueback Salmon », à cause des teintes bleu d'acier de la région dorsale, chez cette espèce, etc. PISCICULTURE DANS L'ALASKA 19 œufs, qui ont permis de déverser 188.0(14.500 alevins en rivière. Les quantités énormes de Poissons sur lesquelles on opère obligent à simplifier le plus possible les procédés opératoires. C'est ainsi qu'au lieu de récolter les œufs suivant la méthode habituelle, par de légères pressions exercées sur le ventre, on assomme tout d'abord le Poisson par un coup appliqué, avec une sorte de maillet, sur la partie arrière de la tête, puis, à l'aide d'un couteau très tranchant, on incise la paroi abdomi- nale du Poisson depuis les nageoires pectorales jusqu'au pore anal. La récolle se fait ainsi beaucoup plus rapidement que lorsqu'on avait à lutter avec des Poissons vivants pour recueillir les œufs, et il n'y a aucun inconvénient à sacrifier ainsi les femelles, attendu qu'on sait aujourd'hui que la plu- part de ces Poissons ne remontent qu'une seule fois en rivière pour frayer. De plus, on ne récolte de la sorte que des œufs de choix et parfaitement mûrs; tandis que, lorsque Ion compri- mait l'abdomen pour en expulser les œufs, beaucoup de ceux-ci ne présentaient pas le degré de maturité convenable, étaient, par suite, mal fécondés, et allaient en pure perte prendre place dans les appareils d'incubation, car ils ne tardaient pas à y périr, et devaient alors être retirés un à un des appareils, ce qui occasionnait de grands frais de main-d'œuvre, aujourd'hui évités. On estime à environ 10 p. 100 la réduction de déchets que permet de réaliser la nouvelle méthode d'opérer. Pour n'endommager aucun œuf, en pratiquant l'incision ven- trale dont nous venons de parler, on se sert d'un couteau très effilé, portant une sorte de crochet transversal, qui ne permet pas de l'introduire de plus de 15 millimètres environ dans l'ab- domen du Poisson Certains opérateurs, très exercés, savent ne pas faire pénétrer davantage la lame en tenant simplement celle-ci, serrée en bon endroit, entre le pouce et l'index. Aussitôt l'incision faite, jaillit presque toute la masse des œufs, qui tombent dans une cuvette placée sous le Poisson pour servira la fécondation artificielle. L'opérateur facilite d'ailleurs la chute, en faisant, avec ses doigts, tomber les œufs qui reste- raient logés entre les organes abdominaux ou collés à la paroi interne du ventre. La fécondation est ensuite pratiquée d'après la méthode habituelle. Lors des premiers essais de ce mode de récolte des œufs, on croyait utile, après avoir assommé le Poisson, de le saigner en lui 20 .BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION coupant la tète ou la queue. Mais l'expérience a montré que c'était une précaution inutile, les quelques gouttes de sang qui, de l'incision faite à l'abdomen, tombent parfois dans la cuvette où sont reçus les œufs ne nuisent nullement à ceux-ci. On s'épargne donc, aujourd'hui, la peine de saigner le Poisson. Mais on attache une importance très grande à laisser les œufs longtemps en repos après la fécondation. L'expérience a fait connaître que, quand la température est très froide, les œufs sont longs à se remplir complètement d'eau après la fécondation, et à devenir tout à fait durs, par suite de l'absorption qu'ils font du liquide ambiant. Ce n'est souvent qu'au bout de deux heures que cette absorption est achevée, que les œufs ont pris tout leur volume, et qu'ils peuvent être remués sans aucun inconvénient. Pour compter les œufs, on se sert de mesures qui en con- tiennent chacune 4.000, ou, plus exactement, 4.400 environ au moment où la récolte vient d'être faite. Il a été reconnu que les œufs du « Red-Salmon », qui gonflent beaucoup, en se rem- plissant d'eau, après la fécondation, continuent à grossir pen- dant près de deux mois, évidemment toujours par absorption d'eau, dans les appareils d'incubation. Les mesures employées au comptage, qui, ainsi que nous venons de le dire, reçoivent aisément quatre mille et quelques centaines d'œufs tout récemment fécondés, ne peuvent loger que 4.150 œufs récoltés depuis cinq semaines, et 4.000 seulement récoltés depuis huit semaines. Le volume s'est donc augmenté, peu à peu, de 10 p. 100 environ. Pendant la durée de l'incubation, pour retirer ceux des œufs qui viennent à périr, on ne se sert plus, comme autrefois, de longues pinces à branches grêles. C'était là, en raison de la quantité formidable d'œufs sur laquelle on opère, un travail très long, causant une forte dépense de main-d'œuvre. On se sert aujourd'hui de bains d'eau salée, système basé sur ce fait que les œufs gâtés sont plus légers que les œufs sains. Voici comment on opère. Les œufs sont mis en incubation, par lots de 4.000, sur des plateaux formés d'une claie métallique qu'entoure un haut rebord. Ces plateaux prennent place dans de longues auges peu profondes, qu'alimente une eau abon- dante et qui forment comme autant de ruisseaux. Quand on veut .procéder au triage des œufs, on retire de l'eau un des plateaux chargés d'œufs et on le dépose très doucement dans. PISCICULTURE DANS L'ALASKA 21 une cuvette rectangulaire, à fond plat, remplie d'eau salée. En vertu de leur poids, les œufs sains restent en place sur la claie, tandis que les œufs morts, moins denses, viennent, d'eux- mêmes, flotter à la surface de l'eau salée, où il est facile de les recueillir, pour en débarrasser la claie, qui est ensuite remise immédiatement en eau courante. Grâce à cette façon de pro- céder, deux hommes suffisent pour soigner l'incubation d'une quantité d'œufs qui exigerait le travail de vingt hommes avec l'ancien système de triage, c'est-à-dire par l'emploi de pinces. Deux hommes, en effet, arrivent parfaitement, dans une journée, à soumettre 10.000.000 d'œufs au bain d'eau salée. Mais une certaine habitude est nécessaire pour bien opérer, c'est-à-dire pour maintenir l'eau juste au degré de salure conve- nable ; si la salure est trop forte, tous les œufs, les bons comme les mauvais, deviennent flottants ; si, au contraire, elle est insuffisante, tous restent au fond. Or, il arrivé très souvent que la fort petite quantité d'eau douce que l'on introduit dans la cuvette d'eau salée, par l'apport des claies chargées d'œufs, suffit pour affaiblir le bain au point de ne plus permettre au liquide de produire le triage des œufs. L'opérateur est, par suite, obligé de renforcer, presque à chaque instant, la salure de ce bain (1) par l'addition d'une petite quantité de saumure. Loin d'être nuisible aux œufs en bon état, ces bains d'eau salée leur sont, au contraire, très profitables, paraît-il, aussi bien dès le début de l'incubation qu'à une époque très avancée du développement des embryons. L'apparition de moisissures (Saprolégniées) sur les œufs ainsi traités est très rare, et les bains salins paraissent exercer une action tonique et stimulante sur les embryons. D'assez grosses pertes sont ainsi évitées, car il arrivait bien souvent, quand on se servait de pinces pour les triages, que beaucoup d'œufs se gâtaient, faute d'enlèvementsassez fréquents des œufs morts, et, d'un autre côté, les hommes employés aux nettoyages, s'ils se hâtaient un peu dans leur travail, ou s'ils manquaient d'adresse, blessaient souvent beaucoup d'œufs sains en enlevant les mauvais. Le succès des bains salins pour le traitement des œufs de (1) Le document officiel auquel sont empruntés ces renseignements ne fait malheureusement pas connaître quel est le degré de salure conve- nable pour obtenir un bon fonctionnement du système. 22 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Saumon a fait, tout récemment, étendre le système au triage des œufs de Truite, dans les stations piscicoles des Etats du Michigan et du Minnesota, et il ne paraît pas y avoir de raison pour que la méthode ne puisse être appliquée aux œufs de toute espèce de Salmonidés. Des essais vont être entrepris dans ce sens. Les alevins de Saumon obtenus dans les pisci factures de l'Alaska sont généralement mis en liberté de très bonne heure, soit une dizaine de jours avant la complète résorption de la vésicule vitelline. C'est toujours sur des fonds plus ou moins pierreux que se font les déversements, et dans des endroits bien garnis de plantes aquatiques submergées, au milieu des- quelles ils trouvent facilement nourriture et abri contre les attaques des Poissons déprédateurs. On choisit de préférence, pour effectuer ces déversements, les jours où les eaux ont été troublées par quelque forte pluie, afin que les petits Poissons échappent plus facilement à la vue de leurs ennemis. On recourt même, parfois, à quelque moyen artificiel pour troubler momentanément les eaux : par exemple, à des jets fréquents de terre argileuse en amont des endroits où sont placés les alevins ; on prend soin aussi de réduire autant que possible, sur ces points, par des pêches faites à la senne, l'abondance des Truites, qui sont surtout à craindre pour les tout jeunes Saumons. Quand on élève en bassin une certaine quantité d'alevins avant de les mettre en liberté dans les rivières, on les nourrit généralement avec des œufs de Hareng, du Poisson cru haché, des déchets de viande, etc. Pour éviter les pertes qui se produisent toujours dans de grandes surfaces d'eau, on n'utilise que de très petits bassins d'alevinage, n'ayant pas plus de 5 mètres de large sur 10 ou 12 mètres de longueur. Dans de plus grands viviers, les distributions de nourriture sontsouvent mal réparties; vers le milieu du bassin, les petits Poissons ne reçoivent pas suffisamment de matière alimentaire et se développent mal ou s'enlre-dévorent ; de là des pertes consi- dérables. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ r * SEANCE GENERALE DU 24 DECEMBRE 1914 Présidence de M. Trouessart, membre du Conseil. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. GÉNÉRALITÉS. Lecture est donnée d'une lettre adressée par M. Edmond Perrier à S. E. Myron Herrick, ambassadeur des Etats-Unis, qui avait donné à notre Société de nombreuses marques de son bienveillant intérêt, ainsi que de la réponse que lui envoya l'ambassadeur avant de quitter la France. Paris, le 26 novembre 1914. A Son Excellence M. Myron Herrick, Ambassadeur des États-Unis d'Amérique près la République française, 5, rue François- i'v, à Paris, Monsieur l'Ambassadeur, Au moment où vous allez quitter la France à qui vous avez rendu tant de services qui ont illustré votre nom, permettez-moi de me rappeler l'accueil cordial que j'ai reçu auprès de vous soil comme Président de la Société d'Acclimatation, soit comme Directeur du Muséum national d'histoire naturelle, soit comme simple particulier, et de vous adresser tout à la fois l'expression de mon admiration et lous mes vœux pour votre heureuse traversée ainsi que pour le succès de la cause que vous défendez. Les circonstances si graves pour l'avenir du Monde civilisé que nous subissons, et qui n'ont pas d'équivalent dans l'histoire, ne me permettent pas de réunir le Conseil de la Société d'Acclimatation, mais je suis assuré d'être l'interprète de tous mes collègues en vous adressant l'hommage de nos sentiments de profond dévouement et en disant que nous gardons de Votre Excellence un souvenir ému. Je vous serais reconnaissant de faire partager àMme Myron Herrick, 24 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION de qui nous avons reçu un si gracieux accueil naguère, l'assurance de notre respect. [Signé] : Edmond Perrier, Vice-Président de l'Académie des Sciences, Membre de l'Académie de Médecine, Président de la Société d'Acclimatation de France, Directeur du Muséum national d'Histoire naturelle. Paris, 27 novembre 1914. M. Edmond Perrier, Président de la Société d'Acclimatation de France, Paris. Cher Monsieur, Je suis profondément touché des sentiments que vous voulez bien m'exprimer et, si l'heure de mon départ n'était si proche, j'aurais aimé aller vous dire de vive voix combien j'ai été heureux de faire votre connaissance et combien j'espère vous revoir lorsque le calme et le bonheur seront de retour dans votre beau pays. J'emporte avec moi tous les livres et publications que vous avez eu l'obligeance de m'adresser et que je placerai dans ma biblio- thèque en souvenir de la Société d'Acclimatation et de son éminent Président. Mme Herrick est très sensible à votre gracieux souvenir et se joint à moi pour vous adresser l'expression de notre plus vive sympathie. (Signé) : Myron Herrick. M. Raveret-Wattel annonce en ces termes la mort de M. le professeur Léon Vaillant, vice-président honoraire de la Société : « Si, depuis quelques années, M. le professeur Léon Vaillant était, par son âge et l'état de sa santé, tenu éloigné de nos tra- vaux, il fut pendant fort longtemps un des membres les plus dévoués de la Société nationale d'Acclimatation de France, dont il faisait partie depuis 1876, et aux séances de laquelle il se montrait très assidu. Vice-président de la Société de 1889 à 1896, il fut, en outre, appelé, pendant onze années consécu- tives, de 1881 à 1891, à la présidence de notre troisième section, où il exerçait, en même temps, les fonctions de délégué du Conseil. « Il apportait dans cette situation, avec la haute autorité de son savoir, un tact et un zèle qui ne se démentaient jamais. La Société conservera le souvenir de M. Léon Vaillant comme celui d'un de ses collaborateurs les plus distingués et les plus regrettés. » EXTRAITS DES PROCÈS- VERBAUX DES SEANCES DE LA SOCIÉTÉ 25 M. de Southoff avait attiré l'attention de la Société sur l'inop- portunité de se fournir d'animaux vivants chez Hagenbeck et autres marchands allemands. Voici une nouvelle lettre de lui, que nous croyons utile d'insérer au procès-verbal : « Monsieur et cher collègue, je vous suis très reconnaissant des renseignements que vous me communiquez. Toutes mes félicitations au Conseil de notre Société pour la radiation des membres allemands et autrichiens... « La guerre est. une question de temps, et ce que nous ferons pour après la guerre, dès à présent, sera autant de gagné. C'est pourquoi j'envisage la préparation de cette après- guerre comme un devoir pour les non-combattants, notamment pour les gens d'un certain âge ou les malades. Que chacun travaille dans sa spécialité, que les cordonniers s'organisent comme les naturalistes ou n'importe quel état! Quand je pense à tout ce dont les naturalistes étaient redevables au commerce allemand, je souris, car je crois quaprès cela ne sera plus. Restante Leysin tout l'hiver encore, au moins, je ne peux guère écrire d'articles sur mes pauvres animaux, qui s'étiolent à Florence, malgré tous les soins de leur gardien, qui est, du reste, très bon. Que sont devenus, outre le Jardin d'Anvers, que j'ai visité en 1913, les collections zoologiques de nos amis belges? Les barbares auront tout détruit, comme ils ont détruit, chez nous en Pologne russe, les magnifiques élevages impériaux et particuliers. Veuillez agréer, etc. » « Leysin (Suisse), villa Mont-Blanc, 19 décembre 1914. » A propos de la fin de cette lettre, M. Trouessart fait la remarque suivante : M. Lhœst, directeur du Jardin zoologique d'Anvers, qui s'était réfugié à Rotterdam pendant quelque temps, a dit que, malgré son avis, l'Administration du jardin avait décidé de détruire tous les Mammifères carnassiers et les Serpents qui, dans l'état actuel des choses, pouvaient présenter de gros dan- gers pour les populations. Jusqu'aux dernières nouvelles, il semble que les dégâts causés parles Allemands soient insigni- fiants. Mais l'état financier du Jardin a beaucoup souffert, et l'on en est réduit à la portion congrue. M. Pichot nous apprend que les animaux féroces d'Hagenbeck à Hambourg ont beaucoup également à souffrir de la faim. On 26 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION ne les a pas détruits, mais on a dû, pour les nourrir, employer beaucoup de Mammifères rares qui vivaient dans le même éta- blissement. Mammifères. Notre collègue, M. Pays-Mellier, nous écrit de la Pataudière (Indre-et-Loire), que, malgré les difficultés actuelles, mobilisa- tion du personnel, réquisition des chevaux, rareté de la nour- riture, etc., il ne peut se résoudre à restreindre sa ménagerie : « Jamais, dit-il, je ne pourrai faire tuer mes pauvres amis, qui m'aiment et que j'aime tant! En ce moment, tout près de moi, sur une chaise, pendant que j'écris ces lignes, je vois ma jolie Chatte (Chat-tigre) qui me regarde et qui me demande grâce. Oh! qu'elle est merveilleuse, cette bête admirable, si familière, si caressante, si douce, alors que tous ses pareils sont si féroces, toujours indomptables! Et mon Hyène, si curieuse, si apprivoisée, qui me suit partout en liberté, ne touchant à rien, ne mordant personne : obéissante, mignonne au possible ! Et mon Ourse du Caucase, si drôle, si comique, grotesque, mais bien amusante et si intelligente! Et tous ces autres Cerfs, Anti- lopes, Singes, qui tous arrivent au moindre appel, me témoi- gnant leur affection, leur soumission! Jamais je ne pourrai m'en séparer ; jamais, surtout, je ne me résoudrai à les détruire, je les soignerai moi-même jusqu'au bout de mes forces. Envers et contre tout, je conserverai tous les animaux de mon jardin. » Au sujet de cette lettre, M. Trouessart fait remarquer que l'Hyène (notons en passant que dans le mot Hyène, Yh n'est pas aspirée; si l'on dit parfois, mais à tort la Hyène, c'est par un abus de langage analogue à celui qui consiste à dire de la ouate pour de l'ouate), M. Trouessart, disons-nous, fait remarquer que l'Hyène, lorsqu'elle est nourrie de viande saine, ne sent pas mauvais. M. Butikofer, à Rotterdam, possède des Hyènes qui ne présentent aucune odeur désagréable. D'autre part, il arrive fréquemment que les Chats de Siam, lorsqu'ils sont jeunes, et qu'ils n'ont jamais vécu à l'état sauvage, restent assez doux, et sont faciles à apprivoiser, mais la condition essentielle est qu'ils soient jeunes, et qu'on évite de les contra- rier. M. Capitaine fait observer qu'il se rencontre parfois d'heureuses exceptions : il connaît un Chat siamois déjà vieux, qui a toujours été très doux, mais là, comme ailleurs, l'excep- EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 27 tion confirme la règle. Enfin, il semble que le caractère doux de ces animaux soil assez prompt à changer à l'égard des étrangers, et qu'ils ne soient vraiment sociables qu'avec les personnes qui vivent avec eux continuellement. Chez ces ani- maux, les rayures reparaissent dans certaines circonstances, et sous certains effets de lumière. Quant au cri, il est très diffé- rent du miaulement ordinaire du Chat. Ornithologie. Notre collègue, M. J. Delacour, actuellement mobilisé à Sainte-Menehould, nous dit avoir reçu des nouvelles de ses élevages de Villers-Bretonneux. Les Allemands ont brisé les œufs d'Autruches qui étaient en incubation dans une couveuse artificielle; on ne sait pas si ces œufs étaient fécondés. Parmi les élèves les plus intéressants de l'année, il cite : un mâle Satyre, une femelle Lophophore, six couples Mikado X Eliott, cinq Nothures. Le jeune Touraco est mort avec les premiers froids. Tous les autres animaux sont en bon état. Ces nouvelles sont du 10 décembre dernier. M. J. Delacour envoie d'autre part une note sur quelques Colombidés exotiques, tenus en captivité, et qui sera publiée in extenso dans le Bulletin. Cette note ayant été lue en séance, M. le Président fait remarquer que ces Pigeons indiens et poly- nésiens, qui ont de très belles couleurs, ne rappellent en rien, par leur plumage, celui des Perruches ou des Perroquets, dont le coloris est toujours écaillé. M. Pichot nous dit qu'il a reçu une lettre de M. de Najac, au sujet de la ferme d'Aigrettes qu'il possède près de Quimper, en Bretagne. Une quinzaine de ces Oiseaux s'acclimatent très bien, mais leur caractère est désagréable : lorsqu'un Oiseau indigène comme le Merle, par exemple, pénètre dans la volière, dont les mailles sont assez larges, il est à peu près certain qu'il n'en ressortira pas. M. de Najac espère une bonne nidifi- cation pour le prochain printemps. Ces animaux sont nourris avec du Poisson et surtout des Crevettes. M. Trouessart estime qu'on pourrait élever les Aigrettes en liberté en Europe, car au Jardin zoologique de Rotterdam on peut voir une très belle colonie de Hérons cendrés en liberté. D'autre part, la captivité présente l'avantage que l'Oiseau peut être capturé au bon 28 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION moment pour la plume; toutefois, on pourrait peut-être arriver à dresser les Oiseaux à réintégrer périodiquement les volières. Lecture est donnée d'une communication de M. S.-E. Blaauw : « Une journée à Pottenberg, en Afrique australe ». Cette note, pleine de verve et d'entrain, contient d'intéressants renseigne- ments sur la faune de ce pays; elle sera publiée in extenso au Bulletin. M. Pichot lit une note complémentaire qui contient des ren- seignements précis et des descriptions très claires sur les Bon- tebok, les Oiseaux-Souris, les Ombrettes, les Damans. On trou- vera cette note au Bulletin. M. le Président nous entretient des effets de la guerre sur les migrations des Oiseaux. On manque encore de documents précis pour formuler une opinion à ce sujet, et toutes les com- munications y relatives seront les bienvenues. On ne signale jusqu'ici qu'un vol de Cigognes près de Paris, et l'apparition de certains Oiseaux dans la région d'Arras, mais ces faits auraient besoin de confirmation. Aquiculture. Lecture est donnée d'une lettre de M. Dagry, qui vient de recevoir un Gymnote électrique, de l'Amérique du Sud. C'est un anirc» assez rare dans les collections de Poissons vivants. Le Secrétaire, Dr L. Capitaine. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS L'Exposition d'Oiseaux de cage à Londres. — La culture industrielle des Hibiscus. — Concours de ponte en Australie. — Recette pour la prépa- ration des peaux de Lapins. Une Exposition internationale d'Oiseaux de Cage a été ouverte le 26 novembre à la Salle d'Horticulture de West- minster, à Londres, et a duré trois jours. M. A. Esra y avait envoyé deux Oiseaux-Mouches qui ont fait sensation, comme CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 29 bien on pense, car c'était la première fois que ces délicates créatures paraissaient dans une exhibition. Le Sporadinus Ricordi est un Oiseau-Mouche minuscule d'un beau vert d'éme- raude; VEulampis jugularis a un plumage plus sombre, mais sa gorge et sa poitrine grenat reflètent les rayons de lumière avec tout l'éclat d'une pierre précieuse. Ces Oiseaux étaient exposés dans une cage vitrée sur le devant; on y entretenait une chaleur d'au moins 25 degrés au moyen de veilleuses placées sous un habitacle; le fond de leur cage était garni de mousse et ils pouvaient se percher sur des branches d'Orchi- dées dont on avait orné leur habitation. De temps à autre on les voyait planer en l'air, presque immobiles devant les tleurs dont ils exploraient les corolles avec leur bec filiforme, mais le fond de leur nourriture consistait en ce mélange sirupeux dont on nourrit les Soui-Mangas ; ils y plongeaient leur langue, suspendus au-dessus du réceptacle par les battements préci- pités de leurs ailes. Les Soui-Mangas et les Guit-Guit étaient nombreux à cette Exposition. En attendant que les Oiseaux-Mouches entrent dans la pratique courante des aviculteurs, ce sont ces Oiseaux des régions tropicales qui s'en rapprochent le plus par leurs formes graciles et l'éclat de leur plumage. Dans cette section on a vu le Nectarinia formosa de l'Afrique australe, les Cynniris chalybœus et afra, le Cœreba bleu ou Guit-Guit et \A£topiga Sehervv. Notre collègue, M. Delacour, a publié dans un de nos derniers Bulletins quelques renseignements sur ces Oiseaux précieux qu'il possède dans ses volières et qui n'ont été amenés en Europe que depuis quelques années. M. Esra avait exposé un beau Paradisier : le Manucode-Royal (Cicinnurus Regius) ; différents Taugaras étaient bien représentés; enfin il y avait une très nombreuse collection de Perruches et Perroquets et une série d'Oiseaux autochtones qui n'étaient pas la moins intéressante. Quelque paradoxal que cela puisse paraître, ces Expositions d'Oiseaux de cage ont un contre-coup utile pour la protection, car elles développent le goût et l'amour de l'Oiseau et il n'y a qu'à voir le bel état dans lequel tous ces captifs sont présentés pour se rendre compte des soins dont les amateurs les entourent et qui leur font complètement oublier les barreaux de leur prison. 30 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION M. Félicien Michotte a récemment entretenu la Société nationale d'Agriculture de différentes espèces d'Hibiscus, et fourni sur ces végétaux des renseignements dont il paraît inté- ressant de donner l'extrait suivant : « Parmi les Malvacées, les Hibiscus sont des plantes remar- quables au quadruple titre de plantes ornementales, médici- nales, comestibles et industrielles. « Le genre renferme au moins 60 espèces, dont le port varie de la tige buissonnante à l'arbre de grande taille ; elles croissent sous les climats tropicaux et subtropicaux. Comme plantes ornementales, elles sont connues des horticulteurs ; comme plantes médicinales, elles sont utilisées par les indi- gènes et donnent une huile utilisée par la médecine moderne ; sous le rapport comestible, le fruit de 17/. esculentus ou Gombo est consommé en Egypte, aux Indes et dans toutes nos colonies. « L7/. sabdarïffa a acquis une très grande importance aux Etats-Unis et en Australie où il donne lieu à une industrie spéciale, celle de la confiture et des sirops ; les calices colorés cuits avec du sucre donnent les confitures de Roselle, désignées aussi comme mullbemj. « Les H. elalus, tiliaceus, macro phyllus, mutabilis, vulpinus donnent des bois genre « frêne ». « Mais à coté de ces utilisations déjà très importantes, il en est une bien plus considérable, celle des fibres. « Les écorces de tous les Hibiscus donnent des libres, avec un rendement fibreux de 3 à 3,6, tandis que celui du Jute n'est que de 1 p. 100. « Alors que le Jute exige des terrainset desclimatsappropriés, les Hibiscus viennent en tous sols et climats tropicaux ; de plus, le travail du Jute ne peut être assuré que par des popu- lations indigènes dont la main-d'œuvre est à très bas prix et accepte de pratiquer le rouissage. v h' Hibiscus peut, pour donner sa filasse, être traité comme le Jute par rouissage, et en outre par un procédé spécial qu'il m'a été permis de trouver et que j'appellerai le rouissage aérien, lequel s'exécute sur tiges et sur lanières décortiquées, ou encore par décorticage en vert et traitement industriel CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 31 ensuite. Le décorticage est résolu par la machine « La Française ». « Cette culture, que nous ignorons actuellemen t, est pratiquée et exploitée aux Indes sur plus de 75.000 hectares pour les seules provinces de Bomhay et du Penjab. Ces cultures, aussi prolifiques que la Kamie et bien plus que le Jute, peuvent donner suivant les espèces : Abelmoschus . . . 1.100 kilogrammes. Cannabinus . . . 1.750 à T. 000 kilogr. suivant conditions. Ficutneus .... i.000 kilogrammes. Gossypinus.. . . . 4.000 — Rosa-sinensis. . . 6.000 — « Ce sont donc des rendements culturaux dont le plus faible est égal à celui du Jute, tandis que les autres atteignent jusqu'à sept fois ce dernier. Quant à la filasse obtenue, elle est si iden- tique au Jute qu'on la vend, aux Indes, mêlée à ce dernier et qu'il est impossible de la distinguer. Comme, d'autre part, la culture du Jute est pratiquée aux Indes sur 4. 500. 000 hectares et augmente chaque année, on voit par ce chiffre ce que l'on peut tirer de nos colonies, si l'on sait les utiliser. » M. D. F. Laurie, expert et conférencier avicole du Gouver- nement de South Àustralia, vient d'adresser au ministre de l'Agriculture de cette colonie son rapport sur les concours de ponte qui ont eu lieu dans la station avicole de l'État, à Parafield, pendant l'année 1913-1914. On sait que cet établis- sement, conçu sur des dimensions gigantesques, remplace aujourd'hui les anciennes stations avicoles de Roseworthy, de Kybybolite et de Murray Bridge et tout le travail d'expérimen- tation et de concours y est concentré. Neuf cents têtes de volailles divisées en parquets de six Poules ont pris part au dernier concours, qui a duré du Ie' avril 1913 jusqu'au 31 mars de cette année; les races concurrentes comprenaient : Leghorns blancs, 131 parquets; Orpingtons noirs, 29 parquets; Wyandottes argentés, 5 parquets; Langshans, 5 parquets; Faverolles, Leghorns fauves, Orpingtons fauves, 2 parquets de chaque espèce; Minorques noirs, Dorkings argentés et Wyan- dottes argentés, 1 parquet de chaque. Plusieurs lots ne furent pas maintenus dans le concours, jusqu'à la fin, pour diffé- rentes raisons, notamment pour ne pas avoir pondu d'œufs 32 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION pesant au moins 760 grammes la douzaine, ce qui était une clause éliminatoire. Les Leghorns blancs tiennent toujours la corde pour la prolificité; leur moyenne par Poule est de 184 œufs ; celle des Orpingtons noirs 154 ; celle des Wyandottes argentés 143. La nourriture de cette immense basse-cour a coûté environ G. 000 francs, soit environ 7 francs par tête de volaille. Le chiffre des œufs pondus monte à 160.539. Nous ne saurions suivre ici l'éminent aviculteur dans tous les minutieux détails de son rapport qui montre tout l'intérêt que le Gouvernement de South Auslralia porte au dévelop- pement de l'élevage de la volaille et à son exploitation indus- trielle dans la colonie. La sélection scientifique et les expé- riences raisonnées qui se poursuivent à Parafield ne peuvent manquer d'avoir une très grande influence sur l'amélioration des races et placeront avant peu la province d'Adélaïde au premier rang des producteurs d'Oiseaux de basse-cour. On nous communique la recette suivante : Pour la préparation des peaux de lapins : 1° Faire tremper dans un bain d'eau claire pendant vingt-quatre heures au moins; 2° Écharner ; 3° Sécher, poils en dessous ; 4° Faire fondre dans 10 litres d'eau 1 kilogramme d'alun et 0 kil. 500 de sel; faire chauffer et plonger la peau dans ce bain encore chaud, avoir soin que la peau soit entièrement submergée; remuer plusieurs fois par jour; laisser tremper pendant deux jours; 5° Étendre la peau bien tendue sur un cadre et la faire sécher à l'ombre, poils en dessous; 6° Écharner à nouveau et poncer à la pierre-ponce. Le bain peut resservir. Les peaux ainsi préparées peuvent servir à la confection de couvertures ou de vêtements chauds qui seront fort utiles à nos soldats. Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux, imprimeur, 1, rue Cassette. Dixippus morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUGHER. Sraines offertes par le Dr G. V. PEREZ. Echium Bourgxanum. — simplex. Juniperus Cedrus. — bermudiana. Statice frutescens. — arborea. — Perezii. — puberula. — brassicxfolia. — brassiez folia X imbricata. — Peresiiy^imbricata. Convolvulus floridus. EN DISTRIBUTION Crotalaria agatifolia. Cytisus filipes. — spachianus. — stenopetalus. Senecio cruentus. (Plantes de serre froide.) Graines offertes par M. MOREL. Acacia cultriformis. Acacia leiophylla. Pinus ooearpa. Asparagus plumosus. Pithecocteniurn muricatum. Angophora lanceolata D. G. — subvelutina Mull. Bauhinia purpurea Callistemon lanceolaium . Dracœna draco. Melaleuca leucadendron . Tipuania speciosa vel machœriurn tipu. Graines offertes par M. GOFFART, de Tanger. Cratxgus nitida. — persistans. — prunifolia. — succulenta. Acacia buxifolia. — celas tri folia. — falcata. — decurrens. — homalophylla. ' — lanigera. — longifolia. — myribothria. — neriifolia. — riceana. Graines offertes par M. BOIS Chenopodium amaranticolor. S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES 200 Chamxrops excelsa de 1 à 15 fr. Basset griffon tricolore, 32 cm., 2 ans, parfait sur bêtes puantes et tous gibiers, 200 francs. Basset griffon, âgé, ancien chien de tête, 25 frs. LEROUX, 2, rue Jean-V, Nantes. Poissons exotiques. Plantes aquatiques. M. LEFEBVRE, 53, rue de Saint-Quentin, Nogent- sur-Marne, Seine. Poules et coqs Orpington fauves jeunes et adultes, Oies de Toulouse, Canards de Rouen, Canes mandarins, Pintades, Lapins angoras argentés de Champagne, etc., à vendre. M. Frédéric PASSY, « Désert de Retz », Cham- bourcy ^eine-et-Oise). Offre (échange ou vente) : 1 femelle Daim mou- cheté 1912, et 2 femelles Daim moucheté 1913. Demande : Biche Sika et femelle Cervicapre. M. JOUFFRAULT, Argenton-Château (Deux-Sè- vres). A vendre : Chevreaux et chevrettes nubio-alpins, sans cornes, grosses oreilles tombantes, superbes animaux sélectionnés en vue énorme production laitière. BOUCHACOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- et-Loire). Bassets allemands noirs et feu. 40 fr. pièce. Mâle Chien esquimau, 11 mois, 400 fr. M. Charles LOYER, 28, rue Bonaparte. Chèvres laitières, 2 ans, sélectionnées, syrio-alpi- nes; Chiots Bulls français, pedigree. Une portée Chats Bleu de Perse (Angora). Lapins primée. JENNY'S FARM, Créteil (Seine). Canards de basse-cour, Poissons d'étangs, espèces nouvelles, ou peu répandues, ou améliorées; de- mande Lapins et animaux à fourrure. M. DODE, à Sorbier, par Jaligny (Allier). DEMANDES Bernache de Magellan. M. SELLIER. 59, rue Le- gendre. Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon étal. Professeur DECHAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ. Sierre (Suisse). Quantité Furets non dressés, Putois, Fouines, Belettes, etc., mâles et femelles, vigoureux M. J. GOFFART, Tanger, Maroc. Payerai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans nos Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuel de 1 Oiselier (1874 Bordeaux). — Alfr*ed Rousse : Perrucnes. M. A. Decoux, Géry, par Aix-sur-Vienne (Haute- Vienne). Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser leurs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et a mesure des disponibilités. / / SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE «MMMAAMMMnMMMMUMMM La Société Nationale d'Acclimatation poursuit un but entièrement désin- téressé ; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être génér et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Markthbdx. Le but de la Société nationale d'Acclimatation de France est de concourir : 1° à l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement, introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics qu privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). . La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paye un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solennelle, des récompenses Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeune amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture ; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800 pages illustrées de gravures. Il traite des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. Il donne des renseignements les plus variés sur les animaux et les plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle installation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc. ] Paris. — L. MAura*ux, imprimeur, 1, rue Canette. U Indice décimal •JS BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 62 « ANNÉE N° 2 - FEVRIER 1915 SOMMAIRE P. -A. Pichot. — Élevages de Colombes exotiques en liberté . 33 Jean Delacour. — Observations sur quelques Colombidés exotiques tenus en captivité. . 40 L. Roole. — Remarques sur la question du Grand Serpent de mer 43 G, Raveret-Wattel. — Ce qu'un étang à Truites peut produire de poisson par mètre do' superficie ..-.,-. 45 Extraits des procès-verbaiîx des Séances de la Société. Séance générale du 4 janvier 1915 48 — - 18 janvier 1915 52 2e section : Ornithologie. Sous-seetion : Ligue pour la protection des Oiseaux. — Séance du 24 décembre 1914 . .- • 58 Chronique générale et faits divers 60 Extrait de la Correspondance 64 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin, est interdite. Un numéro, 2 francs]; ] — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du Jardin des Plantes) , PARIS. AY/IC I/lf PfiPTÀNT Des cartes annuelles d'entrée au Jardin r\y lO lli\r\Ji\lf\n l d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets sont délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : 33, rue de Buffon. Pendant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondée le 10 Février I8S4 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février iSSS 33, RUK DE BUFFON — PARIS Vice- Présidents. BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1 9 1 5 Président, M. Edmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. G. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Étranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires, i Germain, Paris (Conseil). Crepin, 82, rue de Grenelle, Paris (Séances). Ch. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sbbillotte, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Mtre de Vilers, 3, rue Camhacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalmb, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D* P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61 rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Écoles, Paris. Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNEE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril 22 Mai 27 Novembre Décembre 14 11 H 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d'Ornithologie {Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi à 5 heures ! A 18 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les personnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances- ÉLEVAGES DE COLOMBES EXOTIQUES EN LIBERTÉ Par PIERRE-AMÉDÉE PICHOT Il n'est assurément pas de plus grande satisfaction pour un éleveur et un amateur que d'obtenir dans ses parquets et ses volières la reproduction de quelque espèce exotique, mais la satisfaction est encore plus grande, lorsque l'on a pu placer les Mammifères ou les Oiseaux dont on s'occupe dans des conditions telles qu'ils se reproduisent en liberté comme dans leur pays d'origine. Malheureusement, ces conditions se ren- contrent bien rarement en France où nous avons à lutter contre des difficultés de tout genre, notamment la division de la pro- priété et la manie qu'a tout possesseur de fusil, de tirer sur toute bête qui remue à portée de son arme. L'animal qui s'est apprivoisé dans un jardin zoologique, ou dans une propriété particulière, a besoin d'un certain temps pour reprendre les habitudes de la vie sauvage et pour trouver de lui-même sa nourriture, et il doit être lâché dans un domaine assez étendu pour ne pas risquer de s'égarer sur les héritages voisins où il est rare qu'il trouve un accueil protecteur. Ainsi, le comte Le Couteulx de Canteleu avait mis dans une forêt du Vexin un Cerf Wapiti, en vue d'augmenter le corsage et les bois des Cerfs autochtones, comme on l'a fait en Angleterre pour améliorer la race indigène. Il ne s'était pas écoulé huit jours que cet animal vint se faire tuer bêtement par un des sabotiers de la forêt, dans la hutte duquel il était venu pacifiquement s'abriter, comme s'il était encore au jardin d'Acclimatation d'où il sortait. Tel serait certainement le sort des Maras de Patagonie> qu'un de nos collègues élève avec succès, depuis une vingtaine d'années dans un petit parc aux environs de Paris et qui, régulièrement, se présentent à cer- taines heures aux portes de la cuisine, où on leur distribue du pain, que quelques uns viennent même prendre à la main. Ces élevages en pleine liberté ne peuvent réussir que dans de vastes domaines, comme ceux du comte Potocki, à Pilawin (Volhynie), ou de M. Falz-Fein, dans les steppes de la Tauride ou du duc de Bedford, en Angleterre, lequel a transformé en BULL. SOC. 1NAT. \CCL. FR. 1915. — 3 3i BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Paradis terrestre le parc de l'abbaye de Woburn, dont les habi- tants des villages voisins concourent avec le grand seigneur à assurer la sécurité de la faune exotique qui s'y est acclimatée. C'est le résultat de ses essais d'introduction de Colombes exotiques à Woburn, que le iils du duc de Bedford, le marquis de Tavistock, vient de communiquer à YAviculluml Magazine et les observations qu'il a pu faire sur la façon dont ces Oiseaux se comportent en liberté complètent celles qu'avaient re- cueillies dans leurs volières notre regretté collègue, le marquis de Brisay, dont l'excellent ouvrage publié en 1888 est malheu- reusement depuis longtemps épuisé, et miss Rosie Alderson, dont le manuel pratique a valu à son auteur, en 1912, la mé- daille d'argent de la Société d'Acclimatation. Les essais d'acclimatation de Colombes se poursuivent depuis plusieurs années à Woburn. Le marquis de Tavistock estime qu'aucun Oiseau exotique ne se prête plus facilement à ces tentatives d'introduction. Beaucoup d'espèces supportent facilement le froid, et il en est un certain nombre qui s'atta- chent naturellement à leur domicile d'élection, comme les Pigeons domestiques à leur colombier. Ce n'est pas à dire que tous les Colombidés mis en liberté à Woburn aient également réussi. Le parc n'est pas favorable à la végétation des arbres à feuilles persistantes, ce qui prive beaucoup d'Oiseaux d'un abri dont ils pourraient avoir plus particulièrement besoin pen- dant la mauvaise saison, et il y a aussi dans les alentours de grands bois dont l'attirance peut trop facilement engager les Oiseaux à s'écarter de l'endroit où on voudrait les voir se fixer. Puis, malgré que les Colombidés introduits soient moins fré- quemment atteints de maladies infectieuses que les Passereaux et les Perruches que l'on reçoit habituellement des importa- teurs, ils n'en sont pas moins susceptibles de contracter des maladies qui leur sont funestes et qu'on a d'autant moins de chance de combattre avec succès, qu'il n'est pas facile de faire suivre un traitement à un Oiseau en liberté. Ainsi deux fois les Colombes lophotes faillirent toutes succomber à une épi- démie de cette diphtérie spéciale que connaissent bien les éleveurs de Pigeons et qui se distingue de la diphtérie qui fait souvent périr les Pigeons ramiers en très grand nombre. Chez les Colombes, toute la gorge se remplit de fausses membranes, de la consistance du fromage qui leur rendent la déglutition ÉLEVAGES DE COLOMBES EXOTIQUES EN LIBERTÉ 35 très difficile, et alors elles rejettent souvent une graine qu'elles n'ont pu avaler. Si cette graine contaminée est ramassée et absorbée par une autre Colombe, elle lui communique l'infec- tion. Or, il y a quelque six uns, les Tourterelles sauvages, qui arrivent dans le parc de Woburn à chaque printemps en assez grande quantité, furent atteintes de cette forme de diphtérie que leur avait sans doute transmis quelque Pigeon domestique. La maladie se répandit d'une façon désastreuse parmi diverses espèces de Colombes déjà acclimatées dans le parc. Les Lophotes en furent atteintes comme les autres et faillirent toutes succomber, lorsqu'heureusement, à l'époque de la migration d'automne, les Tourterelles disparurent et l'épidémie fut enrayée, mais avec le retour de ces Oiseaux au printemps suivant, la maladie reprit de plus belle. On la com- baitit en répandant largement du sel sur les terrains supposés infectés, en empêchant autant que possible les Oiseaux sain^ de fréquenter les mangeoires où les Oiseaux de passage allaient picorer, et surtout en faisant tuer toutes les Tourte- relles qui paraissaient atteintes, mais il fallut plusieurs saisons pour éliminer cette épidémie qui a fini, cette année, par dispa- raître. L'hiver qui suivit la première apparition de la diphtérie, la tuberculose s'était déclarée chez les Lophotes. On put reprendre celles qui paraissaient malades et les guérir en les tenanl au chaud et en leur donnant une alimentation fortifiante. Le sel fut aussi employé comme désinfectant, et si l'on n'est pas encore complètement maître de celte affection, les cas que l'on constate ne sont plus qu'isolés et n'ont plus le caractère épidé- mique. En liberté, la Colombe lophote se reproduit tout le long de l'année, quoique les jeunes qui naissent en hiver aient peu de chance de s'élever. Lorsque les jeunes quittent le nid, on les distingue facilement des adultes, par la couleur terne de leur plumage et par leur huppe qui est beaucoup plus fournie et moins effilée que celle des vieux Oiseaux. Quoique très per- cheuse, la Lophote se tient beaucoup par terre et court avec une grande rapidité sur le sol. Son vol est également un des plus rapides que l'on connaisse, et elle fend l'air avec un siffle- ment strident; elle part en battant plusieurs fois des ailes pour se donner de l'élan, puis glisse en planant jusqu'à ce que l'impulsion diminue. Lorsqu'elle se pose, elle retrousse vive- 36 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DACCLIMATATION ment sa queue sur son dos comme pour amortir le choc et maintenir son équilibre. La roue que fait le mâle autour de la femelle est très gracieuse; il déploie sa queue verticalement et en joue comme d'un éventail, ainsi que des ailes qu'il étale, tout en saluant l'objet de ses attentions et en émettant des roucoulements gutturaux. Quoique peu batailleuse, la Lophote peut très bien tenir tête à un agresseur plus fort qu'elle et bouscule volontiers sa femelle à défaut de celle des autres. La Colombe à ailes tachetées de l'Amérique du Sud [C. ma- culoso) a été introduite à Woburn vers la même époque que la Lophote et y a prospéré, sauf pendant l'épidémie de diphtérie dont les Colombidés eurent à souffrir. La bande de ces Oiseaux, qui compte une vingtaine d'individus, se maintient d'année en année, les jeunes venant remplir les vides laissés par la mort des adultes. Le vol de cette Colombe ressemble à celui du Ramier, dont il est facile de la distinguer en plein vol, par la grosseur de sa tête et l'épaisseur de son cou. Sa nidification a lieu de bonne heure et le nid est fréquemment placé au milieu des rameaux épineux d'un Araucaria, dans lequel ces Colombes du Nouveau-Monde reconnaissent sans doute un compatriote. Pendant l'incubation, le mâle va souvent se poster au sommet de quelque arbre dénudé, d'où il lance son roucoulement rauque et si quelque autre mâle lui répond dans le voisinage, c'est le signal d'une bataille, car l'espèce est certainement querelleuse. Le frémissement des ailes de cet Oiseau pendant qu'il salue son épouse est caractéristique de son émotion amoureuse. Plus tard que les espèces précédentes, c'est-à-dire il y a environ sept ans, la Colombe à masque blanc de l'Afrique du Sud (Hàplopelia larvata) fut introduite à Woburn et, après avoir bien supporté le premier hiver, se mit à nicher dès l'été suivant et éleva ses petits. Cette Colombe est surtout terrestre et se tient sous les buissons à feuilles persistantes où on la voit courir rapidement sans jamais se montrer en terrain découvert. Le nid est construit avec des racines fibreuses et des baguettes fines dans un épais buisson à 2l"50 environ du sol et le mâle, querelleur et jaloux, en éloigne les autres Colombes et même les petits Oiseaux. Le vol est bas, rapide et silencieux et ressemble à celui de la Bécasse; cette Colombe est très insectivore mais elle mange aussi beaucoup de Maïs qu'elle semble préférer à toute autre grenaille. Pendant la première ÉLEVAGES DE COLOMBES EXOTIQUES EN LIBERTÉ 37 année beaucoup des jeunes, nés tard dans la saison, périrent à l'entrée de l'hiver, de sorte que Tannée suivante le marquis de Tavistock essaya de sauver les Oiseaux tardillons en l^s repre- nant pour leur faire passer l'hiver en volière, mais la tentative ne fut pas heureuse. On estime qu'il y a actuellement quatre ou cinq paires de Colombes à masque blanc dans le parc. Ce sont des Oiseaux d'un naturel sauv;ige qu'il est assez difficile de voir pour en faire le recensement. Ils ne paraissent pas être atteints par la diphtérie mais souffrent parfois de la tuberculose. Le beau Pigeon grivelé, Wonga-Wonga d'Australie (Leuco- sarcia /ricata), a souvent été importé à Woburn. Ce n'est que tout récemment qu'il semble s'y être acclimaté et y réussir. Des premières acquisitions, beaucoup moururent de la tuberculose et les premiers jeunes que l'on obtint furent détruits par les Ecureuils gris d'Amérique avant d'être assez forts pour se défendre. Depuis deux ans, le sol a été désinfecté et le nombre des Ecureuils gris très réduit, de sorte que lesWonga,se trou- vant dans de meilleures conditions, ont pu élever beaucoup de jeunes pendant la dernière saison. Le Wonga est surtout un Pigeon terrestre qui ne se perche que lorsqu'il est effrayé ou qu'il roucoule son chant d;amour pendant cinq à dix minutes d'affilée avec une monotonie désespérante. Le nid est générale- ment placé dans un arbre vert à une certaine hauteur; la femelle prend la faction à l'endroit choisi et c'est le mâle qui lui apporte les matériaux dont elle se sert pour le construire. Lorsqu'il arrive avec une brindille dans le bec, on le voit faire deux ou trois fois le tour de sa compagne puis se percher sur son dos et lui tendre la baguette qu'elle prend et qu'elle arrange sous elle, puis il repart chercher une nouvelle provi- sion. Les Colombes tranquilles d'Australie (Geopelia placida) n'ont pas réussi tout d'abord et divers accidents avaient réduit la petite bande à sa plus simple expression, mais sur un nou- veau départ et avec de nouvelles importations, cette jolie petite Colombe paraît devoir prendre pied à Woburn. Les Colombes rieuses (Turtur risorius^ qu'on voit si bien prospérer dans tant de jardins, n'ont jamais rien fait à Woburn. Les premières que l'on y mit en liberté ne résistèrent pas à l'hiver sans être abritées et l'épidémie de diphtérie les fit toutes périr à l'exception d'une seule. Depuis, on en a relâché qui se 38 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION montrèrent plus résistantes, mais elles ne se sont jamais bien reproduites. Les Pigeons lumachelles ou à ailes bronzées d'Australie (Phaps chalcoptera) avaient bien débuté. Ce sont des Oiseaux vigoureux, insensibles au froid, peu disposés à contracter des maladies et peu enclins à s'éloigner lorsqu'on les met en liberté ; pourtant ils disparurent progressivement et plusieurs tenta- tives de les fixer donnèrent toujours le même résultat. Les femelles, pour quelque raison inconnue, disparaissaient inva- riablement avant les mâles dont on a vu quelques-uns persister dans le parc pendant deux ans environ. Les beaux Pigeons du Thibet à queue noire (Columba leuco- nota) ont été mis en liberté à Woburn avec leur plein vol. Ils ne restèrent que peu de temps et puis abandonnèrent le pays. Le marquis de Tavistock pense qu'il aurait eu plus de chance de les "retenir s'il les avait habitués à un pigeonnier, car ces Oiseaux fréquentent naturellement les trous de rochers et, pendant leur séjour, ils se tinrent instinctivement sur les toits et les corniches des habitations qui leur rappelaient peut-être les montagnes du Cashmire. M. Newmari a publié dans ÏAvicul- tural. Magazine (avril et mai 1911) une étude très détaillée sur ce beau Pigeon, peu connu, qui s'est reproduit dans ses volières. Les Colombes talpacoti, écaillées et à calotte blanche, ne se sont pas plu davantage et n'ont fait que passer. Les Colombes lambourettes, poignardées et les Gouras se sont mieux accom- modés de leur entourage, mais ce sont des Oiseaux qu'il faut chauffer pourpasser l'hiver. Le Pigeon de Guinée à taches trian- gulaires s'est aussi montré sensible au froid. Une femelle de cette espèce s'était si bien attachée au marquis, qu'il pouvait la manier et en faire ce qu'il voulait, mais, à la suite d'une absence, cette Pigeonne ne voulut plus le voir quoiqu'elle restât très appri- voisée avec les autres personnes dont elle avait l'habitude, se montrant, en cela, plus rancunière de l'absence de son maître que la Pigeonne de La Fontaine. Depuis dix-huit mois, une nouvelle espèce de Colombi-gal- line, le Geophaps Smitlii, est l'objet des soins du marquis de Tavistock sans qu'il soit encore possible dédire ce qu'on peut en attendre. La roue amoureuse de l'Oiseau ressemble beaucoup à celle de la Lophote et les deux sexes échangent les mêmes politesses, tandis que généralement c'est le mâle seul qui fait ÉLEVAGES DE COLOMBES EXOTIQUES EN LIBERTÉ 39 les avances. Lâchées d'abord avec une aile coupée dans les parterres de la terrasse du château, ces Colombes semblent s'y être fixées et y reviennent lorsque, effarouchées par quelque in- trus, elles ont pris leur vol pardessus les toitures de la demeure seigneuriale. Il y a quelques années, le Directeur des services ornitho- logiques du Jardin zoologique de Regent's Park à Londres, M. Seth-Smilh, a essayé de mettre eu liberté, dans le jardin même, des Lumachelles, des Lophotes et des Colombes du Sénégal. Après les avoir conservées quelque temps dans les volières pour les agraîner, on leur ouvrit les portes de leur habitation. Les Lumachelles disparurent presque immédiate- ment; une ou deux revinrent seules pendant quelques jours manger sur les plateaux où était disposée leur nourriture. Les Lophotes donnèrent un résultat plus satisfaisant. Sur les qua- rante qui furent mises en liberté, trois ou quatre seulement s'enfuirent; les autres revinrent régulièrement manger au jardin et plusieurs nidifièrent dans les arbres et y élevèrent leurs jeunes pendant quelques années, mais peu à peu les rangs s'éclaircirent et il n'en reste plus aujourd'hui. Les Colombes du Sénégal prospérèrent remarquablement pen- dant trois ans; au bout de ce temps, leur nombre commença à décroître, soit qu'on les ait piégées dans les environs, soit que leurs nids aient été détruits par les Écureuils gris et, à l'heure qu'il est, les Tourterelles rieuses de Barbarie sont les seules qui se soient bien accommodées de la liberté qui leur a été généreusement octroyée dans le jardin de la Société zoolo- gique. Le Times annonçait ces jours-ci le mariage de notre informa- teur, le marquis de Tavistock, officier du régiment territorial de Middlesex, avec Mlle Jowitt Whitwell. Nous ne doutons pas que les Colombes de Woburn, reconnaissantes, n'aient fait cortège aux jeunes fiancés si, comme le dit la Juliette de Shakespeare : « the nimble pinioned doves draw Love. » (Les Colombes aux ailes agiles traînent le char de l'Amour.) OBSERVATIONS SUR QUELQUES COLOMRIDÉS EXOTIQUES TENUS EN CAPTIVITÉ Par JEAN DELACOUR. Les Colombidés exotiques ne sont généralement pas appré- ciés des amateurs comme ils le méritent. Ce sont des Oiseaux souvent fort doux, d'un entretien facile et d'un tempérament robuste. Leur tendance marquée à reproduire en captivité est encore un avantage. En juillet 1914, je possédais dans mes volières de Villers- Bretonneux les espèces suivantes : Goura coronata- Goura couronné. — Victoriœ — de Victoria. Calcenas nicobarica Pigeon de Nicobar. Stictœnas guinea — de Guinée. Chlorœnas speciosa — de Cayenne. Cohimba leuconota — du Thibet. Phlogœnas cruentata Colombe poignardée. Chalcopliaps indica — turvert. Phaps chJoroptera — lumachelle. Ocyphaps lophotes — lophote. Geophaps Smithi — de Smith. Lophophups leucogastra — plumifère. Streptopelia tigrina — tigrée. — senegalensis — du Sénégal. — hamilis — modeste. Leptoptila plumbiceps — à cou violet. Pcristera cinerea — cendrée. Chakopelia afra — africaine. Geopelia hitmeralis — humérale. — squamosa — écaillée. — Maugei de Mauge. — cuneata — diamant. — capensis — à masque de fer. — talpacoti — rousse. — placida — tranquille. — striata — zébrée. Treron curvirostris Carpophage vert. Funingus pidcherrimus — des Seychelles. Les amateurs ont pu voir des exemplaires de toutes ces SUR QUELQUES COLOMBIDÉS EXOTIQUES TENUS EN CAPTIVITÉ 41 espèces à l'Exposition qui eut lieu, en juin dernier, au Jardin d'Acclimatation. Beaucoup de ces Colombidés sont communs dans les collec- tions et je ne m'y arrêterai pas. Les Gouras couronnés et de Victoria n'ont pas encore repro- duit chez moi. Une troisième espèce, le Goura de Sclater, qui semble un Goura de Victoria avec la huppe du couronné, est très rare, et il est très difficile de se la procurer. Les Pigeons de Nicobar, après avoir été fort communs, se trouvent assez difficilement ; parmi ceux que je possède, il y a deux formes bien distinctes : les uns sont plus massifs et leurs plumes sont franchement vertes; les autres, plus petits, sont cuivrés et les parties ternes du plumage sont plus claires. Sommes-nous en présence de deux variétés? Jusqu'ici, mes Nicobar n'ont pas montré de velléités de reproduction. Les Pigeons de Guinée se rencontrent aisément sur le marché. Ce sont de beaux Oiseaux, très rustiques; ils ont pondu dans mes volières, mais leurs œufs n'étaient pas fécondés. Le Pigeon de Cayenne est un des plus beaux Pigeons grani- vores. Sa taille est celle du précédent. Son bec et ses pieds sont rouges; son manteau acajou, sa tête et sa queue gris fer; son cou et sa poitrine sont maillés noir sur blanc, d'un dessin très net. Je crois que to'est la première fois que cet Oiseau figure, vivant, dans une collection. Malheureusement, la femelle a été tuée par un Goura. Les Pigeons du Thibet, dont je possède deux couples, sont des Oiseaux calmes et inoffensifs; je pense qu'ils reproduiront volontiers, mais on distingue assez mal les sexes. Deux couples de Colombes cendrées me sont parvenus avec les Pigeons de Cayenne; elles sont, du reste, originaires du même pays. Elles sont fort rares et fort jolies. Elles sont d'une taille un peu inférieure à celle de la Tourterelle commune avec une queue plus courte. Le mâle est gris bleuté très clair, avec deux larges bandes mordorées et changeantes sur les ailes. La femelle est « café au lait » avec les mêmes bandes brillantes. Au moment de mon départ pour l'armée, les deux couples, logés dans la maison chauffée, étaient sur le point de nicher. La série des Colombes terrestres d'Océanie est fort intéres- sante. Je ne parlerai pas des Colombes poignardées, turvert et lophotes, trop connues. Ï2 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Les Colombes lumachelles deviennent plus rares, malgré leur facilité à nicher en volière. Les Colombes de Smith sont toujours peu fréquentes en Europe; elles sont tout à fait terrestres; leur robe fauve, achée de blanc et de gris perle à la poitrine et au ventre, les marques rouges de leurs yeux en font de beaux Oiseaux. Mal- heureusement, elles sont fort peu sociables, ce qui est un obstacle à leur reproduction. Il en est de même des ravissantes Colombes plumifères, à la robe bariolée et dont la tête est surmontée d'une jolie aigrette. Ces Colombes sont, d'ailleurs, à peu près introuvables, et je crains de ne pouvoir en obtenir la reproduction; heureusement, elles sont très robustes. Je n'ai aucune observation intéressante à signaler sur les divers Streptopélies et Geopélies, que chacun connaît et qu'il est facile de trouver chez les marchands et de faire reproduire en volière. J'arrive à d'autres Colombidésbien différents des précédents; ce sont les Carpophages. Je leur donne ce dernier nom, bien qu'il soit, en principe, réservé au genre « Carpophaga » pour les distinguer aisément des autres Pigeons. Us en diffèrent, du reste, très sensiblement, par leur aspect et leur genre de vie. Ils ont des mouvements encore plus lents, restant immobiles durant des heures entières. Leur caractère est fort irascible et il m'a été, jusqu'ici, impossible d'en tenir deux dans une même cage. Leur nourriture se compose de fruits coupés par mor- ceaux, de riz cuit et cru, de chènevis écrasé et de pommes de terre cuites à l'eau. Ils absorbent une quantité incroyable de nourriture. Ces Carpophages vivent parfaitement en captivité, mais leur acclimatation est très délicate. Ils arrivent souvent en France dans un tel état de malpro- preté qu'il est difficile de les nettoyer, et beaucoup meurent dans un état misérable. Sur une trentaine de Treron curvi- rostris arrivés chez moi au printemps dernier, je n'ai pu con- server que quatre Oiseaux. Ces «Treron » sont fort jolis : bec jaune et rouge, œil entouré de bleu pâle, robe vert amande, avec raies brunes et jaunes; les mâles ont-, de plus, le manteau marron. Les « Funingos » des Seychelles sont plus robustes; ils sont magnifiques avec leur tête rouge, leur col gris clair et leur REMARQUES SUR LA QUESTION DU GRAND SERPENT DE MER 43 robe bleu indigo. Quoique possédant deux couples de ces Oiseaux, je désespère de les voir reproduire, car jamais une paire n'a pu faire bon ménage et je fus obligé à chaque tenta- tive de rapprochement d'enlever la femelle que le mâle aurait fait périr. Il est cependant regrettable que les voyageurs ne rapportent pas d'autres espèces de Carpophages, parmi lesquels se trou- vent des Oiseaux aux couleurs aussi vives que celles des Per- ruches. Je terminerai ces quelques mots sur les Colombidés en disant que les Colombes rieuses sont parfaitement acclimatées en liberté à Villers. Elles nichent sous les toits des abris et volent au milieu des parcs des gros Oiseaux où elles créent une charmante animation. REMARQUES SUR LA QUESTION DU GRAND SERPENT DE MER Par LOUIS ROULE Professeur au Muséum. Les considérations présentées dans les séances précédentes par plusieurs de nos collègues m'engagent à formuler sur cette question Jes brèves remarques suivantes : 1° Il semble avéré que les mers actuelles contiennent une ou plusieurs espèces d'un être de forte taille, que l'on désigne habituellement par l'expression de « Grand Serpent de mer ». Les observations en ont été nombreuses et ont donné lieu à une volumineuse bibliographie. Mais elles se bornent à des descriptions faites à vue d'œil, à des croquis dessinés de mé- moire, et surtout à des discussions. Contrairement à ce qu'il en est de certains Céphalopodes gigantesques, dont on a pu recueillir et décrire les fragments (Prince A. de Monaco et Pro- fesseur L. Joubin), on n'a de lui aucune pièce, ni aucune partie. Cet être n'a donc point, en droit scientifique, d'existence réelle. Il est prématuré, par conséquent, de lui accorder un nom précis et de se conformer, à son égard, aux règles d'une nomenclature qui ne doit s'employer que pour des objets d'une connaissance mieux assurée; 44 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION 2° Cet être, malgré sa désignation habituelle, ne saurait se confondre avec les vrais Serpents marins. Ceux-ci, connus de façon directe et tangible, sont des Ophidiens appartenant à Tordre des Protéroglyphes et à la famille des Hydrophidés. Presque toutes leurs espèces habitent l'Océan indien et l'Océan pacifique; les plus fortes n'atteignent pas 2 mètres de longueur; 3° Les circonstances mêmes dont s'entourent les rares et brèves observations des « Grands Serpents de mer » dénotent que ces êtres ne respirent point au moyen de poumons et ne peuvent se classer, par suite, ni parmi les Cétacés, ni parmi les Pinnipèdes, ni parmi les Sirénidés, ni parmi les Reptiles et les Batraciens. Cette exclusion s'adresse aussi bien aux représen- tants actuels de ces groupes qu'aux représentants disparus. Il est donc inexact, par suite, de considérer ces êtres comme des types anciens qui se seraient conservés jusqu'à l'époque actuelle. Ils sont, selon toute évidence, des Poissons à respira- tion branchiale, à habitat abyssal et ne venant guère à la sur- face que dans des conditions spéciales de calme prolongé; ils font partie de la faune des profondeurs marines; 4° Les renseignements contradictoires donnés par les obser- vateurs ne s'accordent guère que sur la forme allongée du corps, sur la tête massive et la présence d'une longue nageoire dorsale. Les présomptions, car il ne saurait s'agir en cela d'autre chose, se dirigent donc vers plusieurs groupes qui pourraient répondre à ce signalement, mais surtout vers les Apodes, et principalement vers les Murénidés. Il est possible que ces « Grands Serpents » supposés ne soient que des grandes Murènes; les remous de l'eau, les ondulations du corps pour nager, et les illusions de la vision à distance en mer inter- venant pour donner à la bête une apparence de taille, de puis- sance, et de conformation de Ironc ou d'appendices, qu'elle ne possède pas en réalité ou qu'elle posséderait moins. On sait que certaines espèces de Murénidés peuvent acquérir des dimensions considérables et mesurer 3 à 4 mètres de longueur sur une grosseur proportionnelle. Il suffirait de doubler et de tripler ces chiffres pour obtenir un animal qui, vu à distance, pourrait passer pour un « Grand Serpent». Cequel'onconnaîtde la biologie des Apodes, de leur pullulation en certaines parties des grands fonds marins et de leur faculté de croissance, permet d'accorder à cette hypothèse une certaine créance ; 5° Cette hypothèse se corrobore de ceci, en effet, que les ce qu'un étang a truites peut produire de poisson 45 espèces de Poissons marins, capables de parvenir à une forte taille, échappent aux engins de pêche dès que leurs dimensions dépassent une certaine moyenne. On ne recueille que par hasard, et dans des circonstances fortuites, tout ou partie des très grosses pièces. Les individus de 2 à 3 mètres de longueur, parmi les Congres et les Murènes, montrent en cela l'extrême limite pêchable habituelle. Il se pourrait qu'il existe des indi- vidus beaucoup plus forts, dont les engins seraient incapables de se saisir. C'est à eux, entrevus parfois, que s'adresserait donc l'épithète de « Grand Serpent de mer ». Cette hypothèse semble la plus acceptable; mais, quoique rationnelle, elle n'a aucune autre valeur que celle d'une simple supposition. Il en sera ainsi tant que l'on n'aura point recueilli, et directement examiné, des fragments suffisants et caractérisés de ces êtres encore problématiques. CE QU'UN ÉTANG A TRUITES PEUT PRODUIRE DE POISSON PAR MÈTRE DE SUPERFICIE Par C. RAVERET-WATTEL. Le pisciculteur qui s'occupe de l'élevage intensif de la Truite en stabulation peut, s'il dispose d'une eau suffisamment fraîche et bien renouvelée, entretenir dans ses viviers une population très dense, puisquil pourvoit à l'alimentation du Poisson par des distributions quotidiennes de nourriture. Il lui suffit de ne pas pousser trop loin l'agglomération des hôtes de chaque bassin, afin d'éviter de placer ceux-ci dans des conditions hygiéniques défectueuses, qui pourraient amener de la morta- lité. Mais l'éleveur qui ne veut pas s'astreindre à nourrir artifi- ciellement le Poisson, est obligé de ne mettre dans les eaux qu'il exploite que juste le nombre de sujets qui pourront y trouver leur subsistance. Or, bien souvent, les propriétaires d'étangs à Truites sont embarrassés au sujet de la quantité de Poissons à employer pour garnir une surface d'eau de façon telle que, non seulement la nourriture ne puisse jamais faire défaut, mais qu'elle demeure, au contraire, toujours assez abondante pour que les Truites aient la possibilité de se déve- lopper rapidement. 46 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Le Bulleiin de la Société Suisse de pisciculture, donnait récemment le compte rendu d'un essai intéressant à signaler, en ce qu'il fait connaître quelle est la quantité de chair de Salmonidés que peut produire, sans alimentation artificielle, 1 mètre carré d'étang. Dans un bassin de 10 mètres de superficie, alimenté par un mince filet d'eau, donnant de 5 à 6 litres par minute, furent placés, en avril, 15 alevins de Salmonidés, savoir : 5 Traites communes de 5 grammes, soit ensemble . . 23 gr. » 5 Truites arc-en-ciel de 3 gr. 5, soit ensemble .... H gr. 5 S Saumons de fontaine de 6 grammes, soit ensemble . 30 gr. » Total 72 gr. 5 Le fond du bassin était couvert d'une couche de vase de 2 centimètres d'épaisseur. Pendant l'hiver, du fumier d'élable avait été déposé tout autour du bassin, afin d'éviter la congé- lation de l'eau sur les bords. Une partie de ce fumier tomba dans le bassin et y resta; de sorte qu'au printemps l'eau, qui avait 0m60 de profondeur, présentait une teinte jaunâtre assez prononcée. Au fond et à la surface se développèrent beaucoup d'Algues, auxquelles se joignirent bientôt des Lentilles d'eau (Lemna minor) et des Potamots (Potamogeton densus et P. crispus). En même temps, apparurent dans le bassin de minuscules Crus- tacés (Cypris, Cyclopes et Daphnies) ainsi que des Mollusques (Limnées) et des larves d'Ephémères. La vase du fond donnait asile à de nombreux » vers de vase » (larves de Chironome plumeux). Cette faune ne prenait pas seulement sa nourriture dans le fond du bassin, mais aussi le long de ses parois verti- cales cimentées, qui étaient tapissées d'une épaisse couche d'Algues. L'apport d'Insectes aériens, par le vent, ou toute autre cause, était à peu près nul, en raison du voisinage de bâtiments très élevés. Vu son peu de profondeur et son faible renouvellement, l'eau, pendant les chaleurs de l'été, atteignait facilement une température de 22 à 23 degrés centigrades, très favorable au développement de la faune et de la flore inférieures qui y vivaient et qui constituaient les seules ressources dont disposaient les 15 alevins pour leur alimentation; jamais il ne leur fut distribué de nourriture artificielle, et jamais, non plus, on ne jeta dans l'eau de Crustacés ni de larves d'Insectes. ce qu'un étang a truites peut produire de poisson 47 Trois mois après leur installation, on pécha les alevins et on constata les plus forts accroissements chez les Truites com- munes et les Saumons de fontaine. Malgré la température rela- tivement élevée de l'eau, qui devait être favorable à leur crois- sance, les Truites arc-en-ciel ne venaient qu'en troisième ligne comme développement. Cette première pêche causa la mort de deux des Truites com- munes (précisément les deux plus beaux sujets, pesant ensemble 88 grammes), et la disparition d'une partie delà faune inférieure du bassin. Le 24 octobre eut lieu la pêche définitive, qui donna les résultats suivants : 5 Saumons de fontaine, pesant ensemble ... 201 grammes. 5 Truites arc-eu-ciel, pesant ensemble .... 181 grammes. 3 Truites communes, pesant ensemble .... 137 grammes. Total. .... 519 grammes. Si l'on ajoute à ce total le poids (88 grammes) des deux Truites ayant péri lors de la première pêche, on obtient le chiffre de 607 grammes; le poids d'accroissement atteignait donc (607 grammes — 72 gr. 5, poids initial des 15 Poissons) 534 gr. 5 ; l'étang avait, en six mois, produit, sans alimentation artifi- cielle, 534 grammes de chair de Salmonidés; soit, par mètre carré, 53 gr. 4. Il y a lieu de remarquer qu'à chaque mètre carré de la superficie du bassin, correspondait un Poisson et demi, ce qui représenterait 150 alevins pour 100 mètres carrés, chiffre précisément conseillé par plusieurs bons praticiens. D'après les résultats de cette expérience, le rendement d'un hectare d'étang peut être ainsi évalué à 530 kilogrammes de Truites, sans aucune dépense de nourriture, lorsque la tempé- rature de l'eau s'élève assez pour amener un abondant déve- loppement d'animaux inférieurs propres à l'alimentation du Poisson. J'ajouterai que ces constatations sontparfaitementconformes à celles que j'ai eu, moi-même, occasion de faire en diverses circonstances. EXTRAITS DES PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ SEANCE GENERALE DU 4 JANVIER 1915 Présidence de M. Raveret-Wattel, Vice-Président de Ja Société. La parole est donnée à M. le Secrétaire pour la lecture du procès-verbal de la précédente séance, dont la rédaction est adoptée. GÉNÉRALITÉS. M. le Président annonce que M. le professeur Edmond Perrier, président de la Société, vient d'être appelé à la prési- dence de l'Académie des Sciences, cela conformément aux usages, puisque M. Perrier est vice-président de la savante compagnie. A l'occasion du nouvel an, nos collègues Ch. Rivière, retenu loin de Paris, Jean Delacour, A. Chappellier et Dannin, ces derniers mobilisés, nous adressent leurs vœux. Mammalogie. Lecture est donnée d'une note de M. Jouffrault, dont nous résumons les passages suivants, relatifs à divers Mammifères ruminants : « Deux nouveau-nés, Cervicapre et Biche- Cochon, meurent le lendemain de leur naissance. Cet accident est dû à ce que ces animaux, ni leurs mères, n'ont pas l'ins- tinct de s'abriter et que le mauvais temps les a surpris. Les jeunes Daims sont très voraces; deux d'entre eux meurent d'avoir absorbé trop de fruits. Une Daine noire, adulte, est morte en octobre. M. Jouffrault attribue la blessure qu'elle s'était faite à la cuisse à une lutte avec un mâle, lutte suivie EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DKS SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 49 soit d'un coup de corne, soit d'une chute. A ce propos, M. Debreuil fait observer qu'il est toujours dangereux de laisser une femelle avec un ou deux mâles, surtout d'espèces différentes, dans un aussi petit espace que celui dont parle Fauteur. Un enclos d'un hectare est, en effet, notoirement insuffisant. M. Jouffrault dit, d'autre part, que dans certains cas, les vieux Daims, quoique très jaloux de leurs femelles, laissent approcher des Cerfs élaphes et l'auteur espérait déjà un croisement entre ces animaux, lorsqu'un Moufflon vint éventrer la Daine en question, pendant le repas, d'un coup de corne. Enfin il est à remarquer que les jeunes Cervicapres que l'on veut mettre sous abri, dès les premiers jours de leur naissance, cherchent à s'évader par tous les moyens possibles. Ce n'est que vers le quinzièmejour qu'ils commencent à recon- naîire l'utilité d'un abri contre le froid ou la pluie et surtout contre le vent. Ornithologie. M. Debreuil présente un hybride vivant de Canard siffleur du Chili, Mareca ckile?isis, et de Cane de la Caroline. M. P. -A . Pichot, lit une note sur les Elevages de Colombes exoti- ques en liberté. Cette note paraîtra in extenso au Bulletin. La principale difficulté qu'on rencontre est de pouvoir placer ces Oiseaux, et ceci est vrai pour toutes sortes d'animaux, dans des conditions telles qu'ils se reproduisent en liberté, comme dans leur pays d'origine. En outre, la division de la propriété, les coups de fusil auxquels ils sont en butte, l'inexpérience pour trouver leur nourriture, sont autant d'obstacles pour que les Oiseaux exotiques puissent reprendre les habitudes de la vie sauvage. Dans la note de M. Pichot, il est surtout question des élevages de Colombes exotiques du marquis de Tavistock, fils du duc de Bedford, dans les vastes domaines de l'Abbaye de Woburn. Aucun Oiseau exotique ne se prête mieux à ces ten- tatives d'introduction que les Colombidés, qui s'attachent sou- vent naturellement à leur domicile d'élection. Beaucoup cepen- dant recherchent en vain, dans nos pays, des arbres à feuilles persistantes, comme ceux qu'ils ont coutume d'habiter dans leurs pays d'origine. Enfin ils sont souvent atteints par la diphtérie, quoique moins fréquemment que les Perruches. Le mécanisme de contagion de cette maladie est assez remar- BULL. SOC. NAT. ACCL. VR. 1915. _ 4 50 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION quable : lorsqu'un Oiseau malade avale une graine, la dégluti- tion étant souvent rendue impossible par l'abondance de fausses membranes qui obstruent le gosier, il la rejette. Si un animal sain vient à la manger, il est contaminé à son tour. On peut combattre les épidémies, en répandant largement du sel sur les terrains supposés infectés, mais il faut généralement plusieurs saisons pour les enrayer. Par le même procédé, on a pu enrayer la propagation de la tuberculose. Suivent quel- ques détails sur la reproduction et le vol de ces Oiseaux, ainsi que sur leurs mœurs, détails successivement envisagés pour chacune des espèces considérées, dont les principales sont la Colombe lophote; la Colombe à ailes tachetées, de l'Amérique du Sud; la Colombe à masque blanc, du Cap; le Pigeon Wonga- Wonga, d'Australie, etc. M. Jean Delacour envoie pour la bibliothèque une aquarelle dont il est l'auteur et qui représente le Faisan Mikado, Callo- nhasis Mikado. Entomologie. M. l'abbé Foucher fait une communication sur les Phyllies. Ces curieux Orthoptères, dont il a réussi à élever un certain nombre, présentent, ainsi qu'on peut s'en rendre compte par les superbes préparations qu'il nous expose, un des cas les plus remarquables d'homochromie que l'on puisse voir. On dirait des feuilles, les unes vertes, les autres desséchées, et tout, jusqu'aux œufs de l'Insecte, participe de ce mimétisme, poussé à un rare degré de perfection. Quoique M. Morton, de Lau- sanne, ait affirmé que l'œuf de ces Insectes sort naturellement de l'oviscapte, il n'en est rien. L'auteur a pu constater qu'au moment de la ponte, l'abdomen de la $ se contracte d'une façon particulière. Après de violents efforts, l'œuf est projeté avec assez de force pour faire du bruit, en frappant la paroi de verre de la cage. La larve, qui naît rouge, devient bientôt verte. Il est à remarquer que l'Insecte, aussitôt après la mue, se hâte de dévorer sa dépouille. Lorsque l'auteur empêche l'Insecte neuf de se nourrir de son enveloppe abandonnée, il a remarqué que son développement n'est pas normal. Les ailes, en particulier, manquent de consistance, et l'Insecte peut périr. M. l'abbé Foucher, qui n'a pas encore terminé ses recher- ches sur le sujet, se propose de voir quelle est la constitution EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ ol chimique de l'enveloppe et quel est exactement son rôle dans le développement postérieur de l'Insecte qui l'a quittée et qui l'absorbe. En ce qui concerne la mortalité des Insectes qui ne mangent pas leurs dépouilles, M. Clément fait observer que cette habi- tude est assez fréquente chez les Orthoptères. M. Debreuil demande s'il n'y a pas lieu de rapprocher ce phénomène de la placentophagie, chez les herbivores, qui ont moins de lait lors- qu'on leur soustrait le placenta. Enfin, M. Capitaine suppose que l'enveloppe de ces Insectes doit posséder une grande valeur nutritive, en raison des substances chitineuses qu'elle contient. De même que les os des Vertébrés ont besoin de chaux, de même sans doute l'Insecte a besoin d'absorber de la chitine et celle-ci lui est fournie tout naturellement par la dépouille qu'il vient de quitter. Il serait fort intéressant de poursuivre les recherches de ce côté, et de voir s'il serait pos- sible d'administrer à l'Insecte une nourriture chimiquement équivalente à sa dépouille, après avoir minutieusement ana- lysé cette dernière. Pour ce qui est de la fonne des œufs, M. Clément fait observer que l'oviscapte doit posséder des sculptures internes dont la constitution physique est sans doute à rapprocher des cannelures de l'anus des chenilles. Il y aurait là une intéressante étude anatomique à poursuivre. M. Clément présente une colonie de Carausius (Dixippus) morosus. Ce sont de curieux Orthoptères qu'il est, paraît-il, aisé d'élever dans nos appartements. A propos de la communication de M. l'abbé Foucher, M. Mailles fait observer que les Batraciens anoures avalent la peau qu'ils viennent de quitter. Les Batraciens urodèles n'ont pas cette coutume gastronomique. M. Clément rappelle que beaucoup de Chenilles mangent la coque de leur œuf, aussitôt après l'éclosion. Or, comme cette coque est imprégnée de sub- stances chitineuses, nous retrouvons là un phénomène ana- logue. Le Secrétaire, Dr Louis Capitaine. 52 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION SÉANCE GÉNÉRALE DU 18 JANVIER 1915. Présidence de M. Raveret-Wattel, Vice-Président de la Société. La parole est donnée au secrétaire pour la lecture du procès- verbal de la précédente séance, dont la rédaction est adoptée. i GÉNÉRALITÉS. Il est donné lecture d'une lettre de notre collègue M. Aug\ Chevalier, président de la Section de Colonisation, actuelle- ment mobilisé. Après avoir séjourné à Domfront, puis au Mans, dans un hôpital musulman, notre collègue se trouve maintenant à Marseille, où il remplit les fonctions d'interprète des troupes noires. M. Louis Capitaine attire l'attention des membres présents sur l'utilité qu'il y a à faire suivre les noms scientifiques de leurs noms d'auteurs, chaque fois qu'une communication est imprimée au Bulletin. Sans cette précaution, toujours utile, souvent indispensable, il arrive que fréquemment, si la syno- nymie est venue embrouiller la nomenclature, on ne sait pas exactement de quoi l'on parle. Il importe donc d'engager d'une façon pressante les auteurs à ne pas négliger cette indication, et devant l'intérêt que présente cette remarque, il est convenu que M. Capitaine rédigera sur ce sujet une courte notice qui sera publiée dans le Bulletin. Mammalogie. On demande à M. le professeur Trouessart quelques éclair- cissements au sujet de l'expression vague de « Chat-Tigre » dont il a déjà été question au cours des séances précédenles. Ce mot sert, en effet, à désigner plusieurs espèces parmi les- quelles on peut citer : Felis mïtis F. Cuv., F. pardalis L., etc. Mais il est probable que le Chat de M. Pays-Mellier, auquel il a été fait allusion, est un Felis mitis, puisque son propriétaire insiste d'une façon particulière sur la douceur de son carac- tère. Au contraire, les Chats qui sont peu sociables, surtout à EXTRAITS DliS PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 53 l'égard des étrangers et que la moindre cause extérieure peut irriter sont, pour la plupart, des Ocelots. A ce propos, M. Trouessart demande à rectifier une phrase du procès-verbal de la séance générale du 24 décembre 1914 [Bull., 1er janvier 1915, p. 26), qui contient une équivoque qu'il n'est pas inutile de relever : « Il s'agit des Chats de Siam, et la phrase : lorsqu'ils n'ont jamais vécu à l'état sauvage, pourrait faire croire qu'il s'agit réellement d'une espèce à part, distincte de notre Chat domes- tique. Bien qu'on ne possède aucun document historique sur l'ori- gine de cette race intéressante, l'étude du crâne de ses repré- sentants prouve qu'elle ne constitue qu'une variété domestique de notre Chat ordinaire, dont elle se distingue seulement par son pelage dépourvu de raies ou de taches, qui reparaissent cependant sous certaines incidences de lumière. Le caractère plus ou moins doux ou sauvage de ces Chats asiatiques ne peut donc dépendre que de l'éducation qu'on leur donne, et des facilités plus ou moins grandes qu'on leur laisse de courir et de vaguer en liberté. Nés en Europe, et gardés dans la maison, ils restent généralement très doux. Au sujet des animaux à fourrure, on rappelle que les compa- gnies américaines de chemins de fer refusent de transporter les peaux de Skungs, lorsque la glande à scatol n'a pas été retirée, car les wagons gardent l'odeur spéciale de cette glande pendant un temps extrêmement long, ce qui les rend impropres à transporter d'autres marchandises. M. Diguet réussissait à désinfecter les peaux de Skungs avec une sorte de cataplasme à la moutarde, dont il entourait les peaux aux environs de la glande. Cette sorte de cataplasme était faite de farine de lin ou de graine de lin, qui jouait le rôle d'adoucis- sant, et de farine de moutarde délayée dans l'eau. En ce qui concerne les peaux des Skungs des fourreurs, qui sont noires, M. Pichot nous apprend que cela est dû à deux causes : 1° la sélection, car on arrive à obtenir des animaux dépourvus de bandes blanches; 2° la découpure des peaux dont on retire le blanc et qu'on recoud ensuite habilement. M. Diguet rappelle que le Skung qui a le plus de valeur au Mexique est celui qui possède une grande bande blanche d'un 54 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION bouta l'autre. D'ailleurs, on fait observer que depuis quelque temps la mode tend à considérer comme plus jolies les four- rures qui ne sont pas unicolores. Ornithologie. M. Magaud d'Aubusson fait une communication sur la dis- parition imminente des Sternes de Dougall, des Macareux et des Puffins, dans l'archipel d'Ouessant. Cette communication sera insérée in extenso, au Bulletin. L'incinération des varechs pour la préparation de la soude a une fâcheuse influence sur cette disparition imminente. En outre, les goémoniers détruisent souvent les couvées et leur présence inquiète les Oiseaux dont ils mangent les œufs. Suivent des renseignements sur les Sternes, les Macareux, les Puflins, et plusieurs autres espèces intéressantes. Le remède serait de faire l'acquisition de l'île ou de la louer. M. le professeur Trouessart donne lecture d'une note sur 1' « Influence de la guerre sur la migration des Oiseaux ». Notre collègue, M. Caucurte, a entendu siffler un Merle, le 5 janvier, dans la forêt de Fontainebleau. A cette époque de l'année, c'est un fait assez rare. Un Emeu couve 10 œufs, depuis le 13 décembre 1914, chez M. Debreuil; il y avait eu une première ponte de 10 œufs au mois de novembre. Les Oiseaux de cette espèce ne semblent nullement s'inquiéter du froid : quatre Emeus de trois ans continuent à se baigner, malgré le mauvais temps. Le 17 jan- vier, entre autres, à 11 heures du matin, par une température de -}- 6 degrés, on pouvait les voir se coucher et se rouler, avec un plaisir manifeste, dans leur bassin, où l'eau, renou- velée, ne marquait qu'une température de -\- 5 degrés. A ce propos, M. le professeur Trouessart émet l'hypothèse que ce besoin de se baigner est sans doute causé par la présence, dans les plumes, d'un grand nombre de parasites, à quoi il est répondu que l'abondance même de ces plumes doit causer à l'animal une gêne considérable lorsqu'elles sont imbibées d'eau, par une température aussi basse. EXTRAITS DES PROCÈS- VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 55 AQUICULTURE. M. Raveret-Wattel fait une communication sur Vadéno- carcinume de la thyroïde, chez les Salmonidés. Cette curieuse maladie, sorte de cancer s'attaquant aux glandes de la bouche des Poissons, et entraînant des déformations plus ou moins protubérantes, fut observée pour la première fois en 1883, dans un établissement de pisciculture du Tyrol. Huit ans plus tard, une épidémie, attribuable à la même cause, fut remarquée chez les Poissons des viviers de Dunedin, en Nouvelle-Zélande. Elle donna l'occasion de constater qu'il s'agissait d'un adéno- carcinome. En 1903, le Dr Jaboulay, de Lyon, fit des recherches microbiologiques sur cette maladie, qu'il rapproche du cancer de l'homme. Suivent des considérations sur l'évolution de la maladie, sa nature incontestablement contagieuse, etc. Le Dr Jaboulay a établi que la maladie est due à un Sporozoaire de la famille des Myxosporidées. Cette maladie peut être com- muniquée aux Mammifères. L'aptitude à contracter la maladie paraît augmenter à mesure que le Poisson prend de l'âge. Jusqu'à ce qu'on ait trouvé un mode de traitement simple, le mieux que l'on puisse faire est de sacrifier tous les indi- vidus qui paraissent atteints, d'employer des eaux aussi pures que possible et de désinfecter, notamment par le chaulage, tous les bacs qui pourraient être contaminés. M. Trouessart présente ensuite quelques observations sur le Serpent de mer, pour rectifier et compléter des notes sur ce sujet, parues dans le Bulletin d'octobre 1914. Le naturaliste bien connu, Oudemans, a réuni dans un gros volume tous les renseignements qu'on possédait en 1898 sur ce curieux animal. L'ouvrage est surtout intéressant par la reproduction qu'il contient des figures de cet animal fantastique, qu'aucun navigateur n'a jamais approché assez pour en capturer un individu. Oudemans cherche à déterminer la nature de cet animal. D'abord on a dit que c'était un Reptile, puis un Pinni- pède, on a pensé à le rapprocher des Phoques à cause de la ressemblance de sa tête avec celle d'un Chien et la présence de moustaches aux naseaux. La forme idéale que l'auteur donne à cet animal est plutôt celle d'un Plésiosaure ou d'une sorte de Diplodocus qui aurait des pattes de Phoque. Malgré l'autorité d'Oudemans, M. Trouessart est porté à penser que 56 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION ce n'est pas unPinnipède, car ces derniers animaux ont l'habi- tude de venir à terre pour se reproduire. Or, on n'a jamais signalé nulle part la présence du Serpent de mer, sur une terre, si lointaine et peu habitée qu'elle fût. A propos de cette question, M. le professeur Roule pense que l'animal en question est peu probablement un Serpent. Pour vivre au sein des océans, sans jamais venir à terre, pour séjourner dans l'eau durent un temps très long, on doit admettre que ce monstre possède une respiration branchiale. Ce peut donc être, soit un représentant d'un groupe inconnu, soit une forme géante d'un animal, dont on ne connaît, jusqu'alors, que des représentants moyens ou petits. Ne serait-ce pas, par exemple, un Murénidé gigantesque? Et l'on sait que dans ce groupe d'animaux la croissance est à peu près illimitée. Ces animaux apparaissent dans les mers chaudes, après les temps calmes, quand l'apauvrissement de l'eau en oxygène les fait remonter des profondeurs qu'ils habitent. Si, d'autre part, on tient compte des dessins, de sources très diverses, qui ont été donnés de l'animal, et que tous ces dessins s'accordent à lui attribuer une tête de chien, il est permis de conclure qu'il s'agit d'un Murénidé gigantesque. Sur la prière de M. le Président, M. Roule donnera une note à ce sujet, pour être publiée au Bulletin. Entomologie. M. l'abbé Foucher, continuant la série de ses communica- tions sur les Orthoptères, présente un individu adulte de Cypkocriinia gigas vivant. Il accompagne cette présentation de quelques renseignements relatifs à l'évolution de ces curieux animaux. Du 6 octobre au 15 janvier, l'auteur a obtenu 51 éclo- sions dans l'insectarium humide, dont la température ne doit pas descendre au-dessous de 25 degrés. Le Cyphocrania mesure à peine 2 centimètres et demi à sa naissance. Mais au bout de quatre mois environ, l'Insecte adulte atteint une vingtaine de centimètres de longueur. Chez ces Orthoptères, la forme de la tête est très bizarre, elle a quelque chose de simiesque. A l'extrémité de l'abdomen, deux palettes dont le rôle n'est pas bien connu, ajoutent encore à l'étrangeté de l'animal. Quoique le Cyphocrania ait besoin, pour vivre, d'une très grande humi- EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 57 dite, il est fort incommodé dans ses déplacements, s'il ren- contre des gouttes d'eau sur sa route : son abdomen semble s'y enliser, et il doit faire de violents efforts pour se dégager. La caractéristique la plus curieuse des Cyphocrania, c'est la facilité avec laquelle ils abandonnent leurs pattes à l'éleveur, au moindre attouchement; pour eux, l'autotomie semble une seconde nature. Lorsque, à sa naissance, un Cyphocrania est infirme, si peu que ce soit, il meurt toujours, quelques heures après être sorti de l'œuf. Au contraire, s'il perd une ou deux pattes dans le cours de ses mues ou de sa vie, il résiste fort bien à ces amputations. L'auteur n'a jamais pu constater d'exception à ces deux règles. Notre collègue ne sait pas encore si ces Insectes se servent de leurs ailes, car le premier individu adulte qu'il possède n'a fait sa dernière mue que depuis deux jours. Le premier jour, les ailes, brunes, remarquables par la finesse du dessin, étaient étalées. Depuis elles se sont refermées. M. le Président propose qu'un résumé soit fait de l'exposi- tion d'Insectes vivants qui a eu lieu en juin dernier. Cette pro- position est adoptée et il y sera donné suite aussi rapidement que possible. M. Mailles fait observer que les Orthoptères sauteurs sont susceptibles de perdre, par autotomie, leurs pattes sauteuses, mais seulement celles-là. Les Cyphocrania, au contraire, sont susceptibles de perdre jusqu'à la totalité de leurs pattes, qui se séparent du corps à la jointure de la cuisse, sans laisser de trochanters. Le Secrétaire, Dr L. Capitaine. 58 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION IIe SECTION. — ORNITHOLOGIE Sous-section : Ligue pour la Protection des Oiseaux. SÉANCE DU 24 DÉCEMBRE 1914 Présidence de M. Magaud d'Aubusson, Président. L'absence de procès-verbal de la précédente séance fait passer immédiatement à la lecture de la correspondance. M. le Président donne lecture d'une lettre de M. F. de Chapel, de Ledignan (Gard), dont nous extrayons le passage suivant •' « Quant à nos Hirondelles, qui nous apporteront, j'espère, à leur retour, la victoire sur leurs ailes, je ne suis pas resté inactf à leur sujet... Je suis frappé, cette année, du manque absolu de passage chez nous. Ni Rouges-gorges, ni Pigeons, ni Grives, ni Merles, ni Geais, rien ! Pas de Mésanges. En revanche, il y a beaucoup de Canards sur les marais. Je pense que, dans les circonstances actuelles, le tableau des Oiseaux utiles restera dans les placards, car quel industriel s'aventure- rait à entreprendre une publication aussi chère, avec la per- spective de ne pouvoir écouler sa marchandise?... » On nous écrit de Vallabrègues (Gard), le 27 septembre 1914 : « Je tiens à vous avertir que malgré les tristes jours que nous traversons, plusieurs indigènes d'ici se livrent à une destruction révoltante des Hirondelles. Ils se cachent dans une cabane, ayant devant eux un tilet de 30 à 40 mètres de long, se rabattant en deux parties sur les pauvres Hirondelles, attirées là par des appâts constitués par une quinzaine de leurs congénères, vivantes, attachées par la patte. J'avais, à deux pas de nos terres, deux de ces sortes d'ateliers, intallés depuis une dizaine de jours; j'attendais pour savoir combien de temps les quatre gardes de Vallabrègues supporteraient sans rien dire cette chasse, en temps prohibé, de gibier prohibé, avec des engins prohibés. Mais les gardes n'ayant rien dit, je suis allé moi-même prévenir les hommes pendant qu'ils tiraient les ficelles fermant leurs filets. Je les avertis que j'avais fait un rapport à la gendarmerie et qu'ils feraient bien de partir, s'ils ne voulaient pas risquer d'être pris. Ils ont protesté, mais je ne les ai plus revus. J'ai prévenu le maire que je trouvais honteux EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SEANCES DE LA SOCIÉTÉ 59 cette destruction, à 150 mètres de la mairie, au bord d'un chemin fréquenté, sans qu'aucun des quatre gardes s'en émût. Reçu une lettre de M. L. Comandon, qui accepte d'être délé- gué départemental, pour la Charente : « J'ai été heureux d'ap- prendre, nous dit-il, tous les précieux concours qui sont acquis à la Ligue, et que la paix rapprochera de nouveau, pour la tâche colossale qu'elle aura à remplir. Vous pouvez compter sur mon modeste dévouement, et s'il me parvenait quelques faits intéressants, je ne manquerais pas de vous les trans- mettre... » M. Beauregard, délégué départemental pour le Rhône, écrit de Chantenay, le 1er décembre : « ... Dans les pays de grande culture, comme la Bresse, où j'ai des intérêts que je puis surveiller, les travaux de semaille ont pu être effectués, mais dans notre vignoble du Beaujolais, je ne vois pas la possibilité de continuer notre culture : on taillera peut-être, mais pour piocher, pour sulfater, les bras manqueront... Je pense bien à nos petits Oiseaux; je penserai surtout à eux pendant l'hiver, mais la croisade que j'ai entreprise dans ma région va fatale- ment marquer un temps d'arrêt... » Enfin, Mlle Gardiner, secrétaire de la Société royale anglaise pour la protection des Oiseaux, nous écrit de Londres, en nous assurant qu'elle se fera un plaisir de publier notre circulaire dans le prochain numéro de son Bulletin. De Londres, également, nous avons reçu quatre brochures relatives à la protection des animaux, et où il est question des Oiseaux, du Cheval, du Chat ou du Chien. En terminant, nous rappellerons que dans son numéro du 1er décembre, le journal albigeois ce La solidarité agricole, cyné- gétique et touristique du Tarn » publie un article relatif au gibier sur le front de bataille et la suite d'une étude de M. Hugues, ancien député de l'Aisne, sur la migration des Oiseaux. Le Secrétaire par intérim, Dr Louis Capitaine. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Les Chiens aux armées. — L'élevage des Moutons d'Astrakan dans l'Afrique allemande du sud-ouest. — L'acclimatation de l'Ondatra dans le nord de la France. — Effets du bruit du canon sur les Oiseaux.— Dégâts de Microlépidoptères dans les tourteaux d'Arachides. Lorsque, dans sa communication sur les Chiens aux armées, M. Pierre-Amédée Pichot disait qu'il était peu probable que les conditions de la guerre moderne permettraient d'employer les Chiens autrement que pour des services de garde et de recherche des blessés et que l'on ne verrait pas se renouveler dans les camps les exploits cynégétiques du temps passé et notamment de la guerre péninsulaire, il n'avait pas cempté sur l'irréductible passion pour les sports de nos alliés anglais. En effet, la 2e brigade de cavalerie a emmené avec elle, dans les Flandres, sa meute de Beagles qui opère en arrière de la ligne de feu et les rendez-vous de l'équipage ont eu lieu pendant le mois de janvier aux endroits suivants : Le dimanche 3 janvier, au campement du 4e dragons; Le mardi 5 janvier au croisement des routes de Saint-Jans, Cappelle et de Berthen; Le jeudi 7 janvier, au quartier général du 7e lanciers; Le samedi 9 janvier, à Berthen; Le lundi 11 janvier, à la batterie H ; Le mercredi 13 janvier au quartier général du 18e hussards; Le vendredi 15 janvier, en face de l'église de Saint-Jans Cappelle et le dimanche 17 janvier, au quartier général du 4e dragons. Quand les Anglais se seront emparés des colonies allemandes de l'Afrique du Sud-Ouest, ils y trouveront en pleine exploitation l'élevage du Mouton qui fournit les pelleteries dites d'Astrakan ou Caracul. Ces Moutons ont été importés de Boukhara en 1907 et une ferme gouvernementale a été organisée à cet effet à Windhuk. Les plateaux de Damara et de Namaqua ont un climat très favorable à cet élevage et on a croisé ces Moutons avec les races indigènes qui ont donné de bons résultats. Les bonnes peaux d'Agneau se vendent 50 francs et même davan- CHRONIQUE GÉNÉRALE ET tAITS DIVERS 61 lagfi. C'est à tort que l'on a prétendu qu'il fallait tuer les Brebis pour avoir les belles peaux frisées avant la naissance de l'Agneau. Les peaux trop jeunes ne sont pas solides; c'est à l'âge de six ou sept semaines que l'on obtient les meilleures. Un grand éleveur de Skunks du Connecticut nous écrit à la date du 22 décembre qu'ayant pu se procurer des Martes d'Europe, il espère pouvoir cette année en essayer l'élevage. M. Seton pense qu'en France on devrait pratiquer l'élevage du Vison qui est un animal indigène : notre correspondant s'est souvent demandé, en traversant les marais qui s'étendent autour de Boulogne, pourquoi l'on n'y ferait pas l'élevage du Rat musqué ou Ondatra d'Amérique. On peut facilement fixer ces Rongeurs dans les terres marécageuses où ils peuvent trouver à se nourrir. Les peaux de ces animaux à fourrure se vendent de 1 franc à 1 fr. 50 la pièce et les peaux noires 5 francs. Des peaux noires sélectionnées feraient même davantage et on peut très bien, par sélection, fixer une race de cette couleur, ce qui donnerait un très beau revenu pour une très petite étendue de terrain : on peut avoir un rendement de cinq à vingt Onda- tras par arpent chaque année. Il est peu probable que les terrains en question rapportent autant. Si nous voulions entre- prendre cette exploitation, M. Seton pourrait nous procurer le stock nécessaire pour mettre la chose en train avant l'été. * On a remarqué que, pendant le bombardement de Scarbo- rough par la flotte allemande, tous les Faisans des chasses environnantes, vivement surexcités, avaientrépondu enchantant à chaque explosion des obus qui s'entendaient de fort loin. L'effet produit par les détonations du tonnerre et de la foudre sur les Faisans a déjà été signalée par Waterton dans ses Essais et par Knox, en 1850, lors de l'explosion de la poudrerie de Hounslow. Tel fut aussi l'effet du bruit du canon sur un Coq qui se trouvait à bord du vaisseau de l'amiral Rodney lors de son combat contre la Ville de Paris que montait le comte de Grasse, lieutenant général des flottes de Louis XVI, le 12 avri 1782. Cet Oiseau, bousculé par les manœuvres, alla se percher sur la poupe du vaisseau anglais le Sandwich et ne cessa de chanter et de battre des ailes à chaque bordée. Après la bataille, l'amiral Rodney fit rechercher ce vaillant Coq et donna des 62 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION ordres pour que l'on assurât le reste de ces jours. C'est, aujour- d'hui, le cas de rappeler que l'amiral Rodney se trouvant quelques années auparavant retenu en France par le désordre de ses finances, se plaignait de ne pouvoir aller servir sa patrie. Le maréchal, duc de Biron, l'ayant entendu dire, fit généreuse- ment payer ses dettes en disant que « les Français n'ont jamais redouté un ennemi de plus. » M. Henri Kehrig, correspondant delà Société nationale d'Agri- culture de France, a récemment fait parvenir à cette Société une note sur les dégâts causés par la chenille de très petits Papillons dans les magasins où sont entreposés des tourteaux d'Arachides. Il paraît intéressant de reproduire ici les ren- seignements fournis par celte note : « On sait que l'Arachide est une graine produite par une plante annuelle (Avachis hypogaea Linné) qui croît au Sénégal, ainsi qu'en d'autres pays chauds. Elle constitue pour notre colonie africaine une grande ressource et donne lieu à un commerce dont l'importance s'accroît chaque jour. Une seule maison de la place de Bordeaux entretient pour son transport une flotte de six vapeurs jaugeant ensemble 10.500 tonnes. « Au Sénégal, la plante atteint une hauteur variant entre 0m25 et 0m35. En d'autres pays, elle monte plus haut. Après la floraison, le jeune fruit s'incline peu à peu vers le sol et s'y enfonce, en se développant, jusqu'à une profondeur d'environ 10 centimètres. Lorsqu'on le récolte, il est formé d'une gousse oblongue, d'un jaune clair, longue de 2 à 4 centimètres, contenant deux graines, quelquefois trois. C'est la « pista- che de terre » ou « cacahuète » que l'on mange souvent rôtie ou grillée. « La place prise par l'huile d'Arachide dans la consom- mation alimentaire s'étend de plus en plus, entretenant régu- lièrement le fonctionnement de belles usines dans plusieurs villes de France, ainsi qu'à l'étranger. L'huile d'Arachide occupe également une bonne place au nombre des productions susceptibles l'atténuer les durs effets de la vie chère. « Les dérivés de cette fabrication, dont les tourteaux font partie, augmentent dans une certaine mesure l'importance de cette branche du commerce et de l'industrie. « Les tourteaux d'Arachide employés dans l'alimentation du CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 63 bétail sont donc le produit de la graine d'Arachide de laquelle on a extrait la plus grande partie de son huile. Cet aliment concentré est, par la pression, disposé en galettes, d'une teinte générale laiteuse et ayant 0m42 de côté sur Om22 d'épaisseur. « C'est dans ces tourteaux empilés en magasin que les che- nilles de Microlépidoptères commettent des ravages. Elles creusent des galeries dans les tourteaux. UCHACOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- >t-Loire). |ssets allemands noirs et feu. 40 fr. pièce. Mâle îhien esquimau, 11 mois, 400 fr. Charles LOYER, 28, rue Bonaparte. [èvres laitières, 2 ans, sélectionnées, syrio-alpi- ies; Chiots Bulls français, pedigree. Une portée ihats Bleu de Perse (Angora). Lapins primée. NNY'S FARM, Créteil (Seine). ■nards de basse-cour, Poissons d'étangs, espèces louvelles, ou peu répandues, ou améliorées ; de- mande Lapins et animaux à fourrure. I-DODE, à Sorbier, par Jaligny (Allier). !ant grandes écuries, étables, vastes prés et inclos, prendrai pension Chevaux, Vaches, Ani- laux d« luxe, Oiseaux, Chiens, etc. Bons soins ssurés. kPASSY, Professeur, École Nationale de Gri- non, « DéSert de Retz », Chambourcy (S.-et-O.). Jeunes Évoques bleus 1914, sexe non garanti, 20 fr. pièce : accepte échange. M. A. DECOUX, Géry, par Aixe-sur-Vienne (Haute- Vienne). DEMANDES Bernache de Magellan, gendre. M. SELLIER. 59, rue Le- Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon état. Professeur DECHAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ, Sierre (Suisse . Quantité Furets non dressés, Putois, Fouines, Belettes, etc., mâles et femelles, vigoureux M. J. GOFFART, Tanger, Maroc. Payerai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans nos Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuel de l'Oiselier (1874 Bordeaux). — Alfred Rousse : Perruches. M. A. Decoux, Géry, par Aix-sur-Vienne (Haute- Vienne). 3 mâles Diamants psittaculaires ; mâle Astrild à joues noires (Neisna. Dufresneï); femelle Grena- din ; femelle Diamant à gouttelettes ; mâle Mo- deste; mâle Personata ; co. Perruches à croupion rouge; co. Colombes diamants; prix modérés. M. A. DECOUX, Géry, par Aixe-sur-Vienne (Haute- yienne). .es Membres de la Société qui désirent obtenir des» cheptels sont priés d'adresser rs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après imen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à sure des disponibilités- SOCIETE NATIONALE D'iGCLIHATATION DE FRANGE Le but de la Société nationale d'Acclimatation de France est de concourir : 1° à l'introduction, à l'acclimatation et à Ja domestication des espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation' de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis* sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paye un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solenneUe, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant thé» riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeune*] amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : d° Mammalogie ; 2° Ornithologie et sa sous-section. Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture ; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation, Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et d< Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800 pages illustrées de gravures. 11 traite des questions concernant l'élevage des animaux, 1) culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en Franci et à l'Etranger. Il donne des renseignements les plus variés sur les animaux et le plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle! installation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc La Société Nationale d'Acclimatation poursuit un but entièrement désin- téressé ; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être généré et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Marbthbux. Pari a. — L. Ma*ixh*ux, imprimeur, 1, rue Canutte. IjIlm décimal S- BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) ô 2 « ANNÉE N°3- MARS 1915 SOMMAIRE J. Gbepin. — Rapport présenté à M. le Ministre de l'Agriculture au nom de la Société Nationale d'Acclimatation de France sur la protection de notre troupeau national de Chèvres, en regard du ravitaillement des troupes hindoues, et sur les profits divers à retirer d'un élevage intensif et rationnel de l'espèce caprine 65 Maoaud d'Aubusson. — A l'archipel d'Ouessant : Colonies de Sternes de Dougall, de Macareux et de Puffins; leur disparition imminente 82 Maurice L. de Vilmorin. — Deux Lardizabalées à fruits comestibles (Akebia quinata, Decaisnea Fargesii) 89 Chronique générale et faits divers 94 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par /es auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin, est interdite. Un numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du Jardin des Plante») , PARIS AI/IÇ IJVIDflDT A NT ^es cartes annuelles d'entrée au Jardin /YVlO litlr vlly. 1 J\iy * d'Acclimatation, accompagnées de 1Q tickets wni délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureau» : 33, rue de Buffon. Pendant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mç\*. SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE fondée le 10 Février 185i Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février I85& 33, RUK DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR I9I5 Président, M. Edmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice-Prétidentt. t Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Pans. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard Saint Secrétaire*. { Germain, Paris (Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Dbbreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le D' Sbbillottb, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Mtre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalmk, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Pans. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D* P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). D' E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61 rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seinc-et-Oise). Lkcomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Pans. Pendant l'année 1915., les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 hfures. •fan vier 14 Février Mars Avril Mai Novembre Décembre 11 11 22 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Socs-Section d'Ornithologie {Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi 18 18 1 15 15 1 15 15 12 26 2G 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Lé Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les gersonoes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la ociété, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Lés membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE AU -NOM DE LA SOCIÉTÉ .NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Sur la protection de notre iroupeau national de Chèvres. EN regard du ravitaillement des troupes hindoues, et sur LES PROFITS DIVERS A RETIRER D'UN ÉLEVAGE INTENSIF ET RATIONNEL DE L'ESPÈCE CAPRINE. EXPOSE Parmi les dommages que la guerre aura, si nous n'y prenons garde, causés à notre économie nationale, il en est un que l'attention publique saisit à peine, bien qu'il doive affecter profondément une industrie de luxe importante et réputée. Ce même dommage doit avoir une portée beaucoup plus considérable puisqu'il touche à la santé publique, mais nous n'en parlerons, dans ce rapport, qu'après avoir dûment exposé les raisons pour lesquelles les représentants de l'industrie menacée réclament instamment la protection officielle par l'appui et l'organe de la Société nationale d'Acclimatation. La viande de Chèvre, qui forme le fond essentiel et en quel- que sorte rituel de l'alimentation des troupes hindoues qui opèrent actuellement en France, n'a pu être procurée à celles- ci qu'en procédant à l'abat de troupeaux nombreux recherchés un peu partout, mais plus particulièrement dans le voisinage, c'est-à-dire dans nos réserves françaises. Notre population caprine, déjà bien éprouvée par l'indiffé- rence des éleveurs et de l'administration, est donc menacée de destruction complète si nous n'avisons au plus vite. L'industrie du gant de peau, à laquelle nous faisions allusion plus haut et qui représente de gros intérêts d'argent, s'est BULL. SOC. NAT. ACCL. II;. 1915. — '-J 66 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION vivement émue de cet état de choses qui la menace d'une ruine certaine. Elle ne trouve qu'en France — et à un degré d'estime un peu moindre dans les pays latins du voisinage, — la qualité de peau de Chevreau qui afaitla réputation de son produit. Le contingent français de la matière première qu'elle emploie n'atteignait pas déjà, de loin, à l'importance de ses besoins, mais avec 150. 0Û0 douzaines de peaux de Chevreaux de qualité extra, elle arrivait à maintenir au niveau indispensable la valeur de sa production de choix, recherchée par sa clientèle mondiale. Ces peaux de Chevreaux qui, par la souplesse, l'élasticité jointe à la grande solidité du tissu dermique, se prêtent aux façonnements les plus parfaits et, par une aptitude toute spéciale à prendre les teintures, aux apprêts de couleur les plus riches et les plus réussis, sont particulièrement fournies par nos races françaises du Massif central, des Pyrénées et des Alpes; et si l'Italie, l'Espagne et la Suisse sont capables de. pourvoir au complément de nos besoins industriels, c'est peut- être bien parce qu'ils possèdent ces mêmes races ou que, tout au moins, les nôtres influencent profondément les troupeaux caprins de ces mêmes pays. Il est donc grandement désirable que les prélèvements immodérés que l'on fait en ce moment sur les troupeaux de la France et de ces trois pays soient enrayés sans plus de retard. Il importe que l'Intendance militaire soit invitée d'urgence à diriger ses pourvoyeurs dans une autre direction, en Orient par exemple, ou bien mieux en Afrique du Nord et au Sénégal où ceux-ci trouveront des réserves considérables qui ont le mérite d'être bien en forme pour faire de la bonne viande de boucherie, bien mieux que ne le sont nos races françaises, maigres et efflanquées. L'Algérie, la Tunisie et le Maroc peuvent livrer de la viande de Chèvre dans toute la mesure que l'on voudra : il y existe plusieurs millions de Caprins, mais les peaux de Chevreaux provenant de ces pays, sans doute par l'influence que le régime alimentaire exerce sur la contexture du cuir, peut-être aussi par cellequ'exercent le climat, le terroir, mais pluscertainement la préparation initiale, sont, pour ainsi dire, inutilisables pour l'industrie du gant de luxe de la qualité recherchée. La Société nationale d'Acclimatation, qui, depuis plus de (rente RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 67 ans, n'a cessé d'accorder la plus grande sollicitude à la question caprine en raison du double intérêt qu'elle y attache : intérêt économique et intérêt d'hygiène, se proposait bien d'élever la voix pour protester énergiquement contre la destruction des troupeaux de Chèvres. Aussi a-t-elle accueilli avec empressement l'invitation que vient de lui adresser le Syndicat général français des Industries de la Ganterie, de joindre ses efforts à ceux de ce groupement industriel pour réclamer des Pouvoirs publics les mesures de protection immédiatement nécessaires. L'appui de cette Société semble devoir être d'autant plus efficace qu'il est affranchi de toute préoccupation étrangère à l'intérêt supérieur delà science, de l'agriculture nationale et de la santé publique. 11 doit donc avoir toute chance d'être pris en considération, après un exposé aussi précis que possible des arguments de toute nature, qui ajoutent encore à la valeur de la cause soutenue et peuvent presser l'intervention énergique du Ministre auquel ce rapport est adressé. La Chèvre, en France, a été bannie des rangs des animaux de la ferme et frustrée de tout droit à la sollicitude officielle, parce que les agronomes et les forestiers l'ont fait classer, d'office et sans enquête, parmi les animaux nuisibles à l'Agri- culture. Ses contempteurs auront, par contre, une indulgence sans réserve et prodigueront même leur faveur, lorsqu'il s'agira d'assurer la bonne tenue et la prospérité des autres animaux de la ferme, dont certains comme le Porc, le Lapin, la Poule, l'Oie et le Dindon, lâchés dans les terrains cultivés, ne se comportent pas précisément comme des modèles d'animaux utiles. On les met, c'est entendu, dans l'impossibilité de nuire, mais qui donc a jamais proposé d'en faire autant pour la Chèvre dans la bonne intention de la faire excuser? Courbée sous son anathème, elle est repoussée partout ; privée de soins, elle s'abâtardit misérablement pour mieux justifier la désaffectionpublique. Sa défaveur remonte à l'époque où l'agriculture a pris son essor en France, et la date en est déjà si lointaine qu'il nous faut marcher à l'encontre d'habi- tudes invétérées et violenter en quelque sorte les préventions et les préjugés d'une opinion publique circonvenue pour arriver à lui faire accepter, comme animal utile, la Chèvre, qui l'est cependant au premier chef. 68 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION Il est incontestable qu'abandonnée à elle-même dans les cul- tures et les plantations, elle y commettra des dégâts comme pas un autre animal, mais aussi quelle aberration poussée au super- latif que de ne vouloir laplacer pour la juger que dans les con- ditions de vie qui favorisent son instinct de déprédation. Sur- tout qu'en prenantle contrepieddu régime d'indépendance que son bien-être et sa santé n'exigent nullement, en la plaçant dans une étable bien aérée, bien claire où elle trouverait, outre les soins de propreté, une nourriture mesurée à ses besoins, elle rendrait des services qu'aucun autre auxiliaire de l'homme n'arrivera jamais à égaler. Des expériences longuement et minutieusement contrôlées par la Société nationale d'Acclimatation ont surabondamment démontré que le régime de la stabulation, si contraire à la santé de la Vache, s'adapte admirablement aux convenances de la Chèvre. Elle y prospère et y développe ses facultés de production. Elle peut même se tenir ainsi au contact en quel- que sorte immédiat de celui qui a besoin de consommer son lait dans les conditions les plus voisines de l'état naturel. Enfin elle échappe de la sorte, par sa vie de recluse, aux reproches que veulent obstinément faire peser sur sa conduite les forestiers qui ne lui prêtent d'autre aptitude que celle de saccager les bois. 11 existe, en effet, chez la Chèvre, une telle force de vie, une telle intensité de santé, qu'elle peut se contenter, sans le moindre dommage pour son bien-être physique, de conditions d'air et d'hygiène inférieures à celles exigées pour tous les autres animaux. C'est à la faveur de cette robustesse que les maladies microbiennes n'ont presque aucune prise sur elle et, en tout cas, ne l'affectent que dans une mesure qui permet à peine de s'en apercevoir, c'est dire avec quelle facilité elle les surmonte. De là sa résistance, pour ainsi dire absolue, à l'infection tuberculeuse. Elle est, par ce fait, plus qualifiée que toute autre laitière, et môme, dans bien des cas, que la propre mère du nourrisson, pour fournir, sous la forme physiologique parfaite, le lait qui doit régénérer un tempérament débile et qui opérera dans l'organisme l'épanouissement des facultés vitales que la nature y aura déposées. Notre longue expérience des troupeaux caprins en stabu- RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 69 lation, et même autrement, ne nous a jamais fait découvrir un seul cas où la Chèvre aurait contracté la tuberculose sponta- nément. Nous sommes donc fondés à croire que, bien soignée et bien nourrie, elle ne peut prendre cette redoutable maladie, mais nous supposons qu'on pourrait la lui inoculer expérimentale- ment par contage en la soumettant à un régime débilitant qui la mettrait en état normal de réceptivité. Cette considération vient confirmer notre foi dans l'immunité que doit posséder la Chèvre contre le fléau qui, au dire des savants, s'attaque bien à tous les êtres vivants, mais ne terrasse en réalité que les affaiblis. On voit par ce qui précède que nous ne prétendons pas que la Chèvre porte en elle un principe concret et spécial qui s'opposerait d'une manière radicale à toute possibilité de contamination tuberculeuse, mais nous croyons avec ISocard, Reul et Moussu que celte espèce animale renferme dans la richesse de son sang et. dans l'incomparable vigueur de son tempérament les réactions nécessaires pour lutter victorieuse- ment contre tous les microbes pathogènes, y compris surtout le bacille de Koch. « Le terrain est tout, le germe n'est rien », disait déjà Claude Bernard. Notre opinion a, d'ailleurs, obtenu une des plus hautes sanc- tions qu'elle pouvait ambitionner du monde médical, puisque l'Académie de Médecine elle-même a proclamé « la résistance de la Chèvre à l'infection tuberculeuse et l'avantage considé- rable que présenterait, au point de vue de l'hygiène publique, la création, dans Paris même, de nombreuses chèvreries ». Si, par ce qui précède et par des preuves détaillées que nous avons déjà publiées dans notre Bulletin, il peut être scientifique- ment et pratiquementétabli que nous possédons dans la Chèvre le seul animal laitier, même la seule nourrice, qui, en règle générale, ne puisse jamais être suspecte, a priori, de propager la tuberculose; la seule laitière qu'on puisse tenir habituelle- ment en lieu clos et couvert sans dommage pour sa santé; que, de plus, nous trouvions en elle, lorsqu'elle est disposée à se laisser nourrir intensivement (résultat quon obtient par un entraînement spécial), une laitière défiant, pour l'abondance et la qualité nutritive de son produit, toute comparaison; que nous soyions en mesure de présenter des races caprines 70 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION donnant un lait dont la saveur et la richesse beurrière corres- pondent aux qualités similaires que nous apprécions dans les meilleurs laits de Vache ; si, en un mot, toute cette énumération de qualités que nous prêtons à la Chèvre peuvent être vérifiées et reconnues, pourra-t-on encore nous en contester l'intérêt en mettant ces qualités en balance avec les raisons produites par les agronomes et les fonctionnaires de l'Administration des Forêts? Ces derniers jouissent à bon droit d'une influence que leur valent leur science et leur mérite, mais ce n'est pas leur faire injure que de leur contester toute compétence pour se faire les juges inexorables d'un animal qu'ils n'ont été à même de connaître que par ses défauts occasionnels. Si, par des mesures appropriées, la Chèvre cessait d'être pour eux une dévastatrice de plantations, il est hors de doute qu'ils cesseraient d'insister pour son ostracisme. Mais, dans ces conditions encore, la partie serait loin d'être gagnée : car rien n'est tenace à vaincre comme les vieux préjugés et ceux qui chargent la réputation de la Chèvre sont extraordinaires. Cependant, à force de les combattre de toute son autorité morale et scientifique, la Société d'Acclimatation a l'impression qu'ils sont à la veille de fléchir. Les médecins déjà, qui n'en savaient pas plus long que le public sur les propriétés hygiéniques des produits de la Chèvre, apportent aujourd'hui moins d'hésitation à se départir des méthodes coutumières d'allaitement qui leur avaient été enseignées à l'Ecole et qu'ils observaient pour mettre en tout état de cause leur responsabilité à couvert. Ils soupçonnent maintenant que, si dans le lait de Chèvre il y a bien du lactose, du beurre et de la caséine comme dans le lait de Vache, il pourrait bien se faire que ces éléments n'aient pas exactement les mêmes propriétés digestives dans les deux laits. De plus, les hygiénistes commencent à donner une très grande impor- tance à la forme et aux conditions sous lesquelles le lait doit être administré. Ils songent que la méthode d'allaitement doit se rapprocher le plus possible de celle que la nature a ins- tituée. Quelle analogie peut-il y avoir, en effet, entre un bon lait de Vache cuit à point pour être parfaitement stérile et le sang artisan du corps humain, dont parle Aulu-Gelle au nc siècle de l'ère chrétienne, ce sang qui se continue, palpitant de chaleur RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 71 et de vie sous les espèces et apparences du lait, pour favoriser Vacte de nutrition et de développement dans les organes du nouveau-né. Continuons donc à signaler, avec le concours de l'adminis- tration officielle, l'immunité de la Chèvre au regard de la tuberculose, ses aptitudes laitières, la qualité de son lait et la commodité de son maniement en raison de la petitesse de sa taille et de sa bonne volonté naturelle, et la cause de cet aimable et précieux animal ne peut pas tarder à être gagnée surtout si le corps médical veut bien intervenir en prêtant son concours d'influence et d'autorité. Pourvu pourtant qu'il ne veuille pas se souvenir d'une aven- ture à laquelle la Chèvre a été mêlée à propos d une épidémie de fièvre de Malte! L'indignation qu'elle a soulevée en celte occasion venait corroborer celle qu'elle avait déjà si malencon- treusement encourue de la part des forestiers, et compro- mettait ainsi, d'une façon grave, la cause devant l'opinion en défiance. Les médecins, en cette occurrence, lui sont devenus particulièrement hostiles et la Société d'Acclimatation a dû user de tous ses moyens de persuasion pour calmer l'émotion et disposer le public à écouter les excuses, du reste irrésistibles, présentées pour disculper l'accusée. D'abord, il est aujourd'hui scientifiquement établi que la fièvre de Malte n'est pas une maladie propre à l'espèce caprine. La preuve la plus évidente est qu'en France la plupart des centres caprins, et surtout les plus populeux, n'ont jamais connu cette maladie à laquelle la Chèvre n'est sujette que dans la mesure où l'homme et les autres animaux y peuvent être sujets. Les médecins la classent, du reste, parmi celles de forme typhoïde qu'ils appellent suggestivement « les maladies des mains sales ». Quand une mère cherche une Chèvre pour allaiter son enfant, il est pour elle de prudence élémentaire de s'informer de l'état de santé de la bête à laquelle elle veut confier cette fonction, et aussi de la provenance même de la Chèvre afin de ne pas accepter une bête venant, d'une région oùla fièvre mélitensienne règne à l'état endémique. Il n'y a, du reste, aucune épidémie de ce genre actuellement en France. 11 sera, dans ces condi- tions, infiniment plus facile à la mère de famille de trouver une laitière caprine de santé irréprochable qu'une nourrice humaine offrant toute garantie sur ce point. 72 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Pour nous édifier à cet égard, nous n'avons qu'à consulter les statistiques de la morbidité humaine et nous découvrons dans quelle mesure effroyable sévissent parmi nous la syphilis et la tuberculose : sur trois cas de morbidité, nous constatons que ces deux fléaux y sont intéressés deux fois. Or, une Chèvre qui serait atteinte de fièvre de Malte, et chez laquelle la maladie aurait été reconnue, serait d'abord très facile à guérir, et en peu de jours: et son lait serait rendu inoffensif en le chauffant seulement à 50 degrés, qui est la température qui tue le micrococcus melitensis. Que peut-il rester après tout cela de la phobie de la fièvre de Malte gagnée par le contact de la Chèvre ? Absolument rien. Sur le terrain économique, nous aurons aussi quelque résis- tance à vaincre pour faire admettre la mise en usage des pro- duits de la Chèvre d'une manière officielle, et cette résistance pourrait être d'autant plus opiniâtre que nous la soupçonnons intéressée : il y a des habitudes et des profits d'ordre commer- cial qu'on n'aime pas voir déranger. Nous espérons qu'il suffira de démontrer à ces oppositions qu'elles n'ont aucun risque à courir, et la réflexion les amènera peut-être à s'en convaincre d'elles-mêmes. On fait également à l'élevage industriel de la Chèvre, que la Société nationale d'Acclimatation voudrait voir instaurer en France, une assez grave objection qui mérite certainement qu'on s'y arrête un instant. La Chèvre, lorsqu'elle vit hors de la montagne et se nourrit en prairie comme la Vache et le Mouton, utilise très mal le pâturage. Elle perd, gâche énormément, ne donne dans ces conditions qu'un rendement inconstant et devient trop fré- quemment la proie d'épizooties aussi mystérieuses que meur- trières. Cela est exact; et notre Société l'a si bien compris qu'elle s'est appliquée à faire étudier de plus près les besoins et l'ins- tinct de la Chèvre afin de pouvoir d'abord expliquer et corriger son goût pour le gaspillage, et déterminer ensuite la cause des phénomènes morbides qui la déciment au grand air et en plein champ, malgré son tempérament extrêmement robuste. Or, notre Société est arrivée à faire cette constatation impor- tante, qu'on ne saurait trop signaler, à savoir que la Chèvre qui vit et prospère si bien en terrain sec, désertique et monta- RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L' AGRICULTURE 73 gneux, dépérit manifestement et très vite dès qu'elle broute dans la plaine où elle trouve un sol fertile et bien irrigué. C'est dans ce terrain particulièrement favorable au dévelop- pement des parasites qui la recherchent dans une mesure extraordinaire et dont elle absorbe les germes, que réside la cause de l'affection morbide qui doit la miner progressi- vement. 11 semble même que son instinct de conservation l'avertit du danger, car sa préféreuce marquée pour les bour- geons et les feuilles des arbustes s'expliquerait par le fait qu'elle est plus sûre de ne pas rencontrer, dans cette nour- riture placée au-dessus du sol, les embryons qu'elle doit redouter. Ces parasites entozoaires, dont les plus communs et les mieux connus sont les agents de la distomatose et de la strongylose, exercent dans l'économie de l'animal envahi les effets suivants : ils amoindrissent d'abord la faculté productrice de lait, entraî- nent progressivement l'altération de la santé en agissant per- nicieusement sur les globules du sang par des toxines qu'ils éliminent, et finissent par déterminer la cachexie, cette période de misère physiologique qui ne tarde pas de conduire à la mort la bête infestée. Comme celle-ci n'est soumise à aucune observation attentive tant qu'il lui resie de l'appétit et qu'elle ne tousse pas, on dit que celte Chèvre, qui n'a souvent que tout juste quatre ou cinq ans d'âge, se meurt de sénilité; et Ton reproche aussitôt à l'espèce sa trop courte longévité. Si, par contre, le sujet tousse et meurt d'anémie consécutive à une bronchite vermineuse, le diagnostic est encore plus vite établi et cela, même par le vétérinaire, praticien de campagne, qui a l'expérience des maladies bovines et ne s'occupe des Chèvres que très accidentellement et sans y avoir été préparé par des études spéciales. Pour celui-ci, c'est la tuberculose qui a enlevé le caprin et, si on J'oblige à faire l'autopsie, il con- firmera sa déclaration en montrant un poumon de Chèvre ravagé par une pneumonie purulente, avec des lésions caséeuses très caractéristiques qui donnent, à l'œil nu, tout à fait l'illu- sion d'une invasion de microbes pathogènes où le bacille de Koch paraît touL à fait en cause. Mais si le praticien, mis en garde, poursuit ses investigations au microscope, il reste stupéfait en constatant que les galeries creusées à travers le viscère ne peuvent être que l'œuvre des Strongles ou de 74 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION quelques autres Vers du même genre, et que les microbes qui sont intervenus sont les hôtes habituellement générateurs de l'inflammation et de la décomposition, mais qu'il n'y a parmi eux aucun vestige du bacille de Koch. Ces affections pulmo- naires de la Chèvre résultant de l'infestation parasitaire ne sont donc d'aucun danger pour l'homme et c'est là le fait intéres- sant à retenir. Pour garer la Chèvre elle-même de ces affections parasi- taires, il suffira de la nourrir à l'étable et de l'empêcher de paître en lieu suspect. Elle sera, dès lors, saine et bien por- tante pour fournir une longue carrière de laitière, dépassant sans nul doute au moins l'âge de quinze à seize ans. En la nourrissant à la mangeoire et en lui servant sa ration au détail, on arrivera, en recourant à un dispositif qui fera obstacle à sa manie de projeter à ses pieds et d'y fouler une partie de sa nourriture, à l'empêcher de ne pas utiliser à fond le fourrage qu'elle doit consommer. De cette manière elle échappera désormais au reproche d'être « une gâcheuse de bien », qualiticatif que lui adressent trop gratuitement des gens qui ne savent pas la traiter comme il lui convient. Une objection qui est à la portée des meilleurs esprits et qui touche un point fondamental du système sur lequel nous basons nos idées reste à régler, la voici : Peut-on soutenir que la Chèvre, actuellement si rustique, ne s'affaiblira pas pour devenir, avec le temps, vulnérable à la tuberculose, lorsqu'elle sera arrivée à jouer, comme la Vache, un rôle prépondérant dans notre exploitation agricole? Sera- t-elle toujours foncièrement saine lorsqu'elle devra, comme cette dernière, fournir un maximum de rendement, subir un régime générateur de lait intensif, être soumise aux mêmes méthodes de sélection et d'amélioration, et enfin porter, à travers de nombreuses générations, sa domestication au point extrême de sa perfection d'espèce? Si la Chèvre est restée jusqu'alors indemne de tuberculose, affection qui atteint la Vache dans la mesure qu'on déclare communément être, en France, de 60 p. 100 ; si elle résiste même à la généralité des maladies purement microbiennes, y compris la peste bovine, et cela au point que, si elle en est parfois effleurée, il n'y a pas d'exemple qu'elle ait été décimée, ne serait-ce pas parce qu'elle aurait joui de tout temps de conditions de vie particulièrement propres à lui maintenir RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 75 l'intégrité de sa vigueur originelle et que la rusticité elle-même ne lui aurait été conférée que par son régime rude de grand air et de liberté? En d'autres termes, n'y aurait-il pas à insinuer que sa domestication n'a été poussée ni si loin, ui si à fond que celle de la Vache, que des siècles de production intensive auraient enfin épuisée? Nous déclarons ce raisonnement non seulement spécieux, mais tout à fait faux, et voici comment nous comptons le rétorquer. La Chèvre, qui recherche particulièrement les altitudes, se porte, en effet, admirablement bien et prospère remarqua- blement sur les hauts sommets les plus arides où la provende est rare, mais l'air extrêmement vivifiant. Comme elle sait tirer parti de tout, elle ne manque de rien, même dans les parages désertiques où tout autre bétail péricliterait, faute de nourriture et malgré l'hygiène supérieure. Il convient même d'ajouter tout de suite que cette vie de grand air n'empêche pas les Vaches, qui broutent dans ces hauts parages et qui y reçoivent la ration de complément nécessaire, de devenir tuberculeuses dans une mesure encore très forte, si nous croyons la documentation très précise qui nous est fournie sur ce point particulier. D'autre part, la Chèvre ne vil pas que sur les montagnes ; nous l'avons vue en Belgique par centaines de mille en stabula- tion constante, et ce n'est même que dans ces conditions de vie que l'on peut l'épargner, en pays de plaine, contre la des- truction à laquelle l'exposent si fortement les maladies d'ordre parasitaire, dès qu'elle quitte, comme nous l'avons dit, le sol sec. poreux, calcaire, c'est-à-dire impropre au développement des embryons des Vers déjà cités. Or, en Belgique, pas plus qu'ailleurs, on ne trouvait chez la Chèvre, à notre connaissance, la moindre trace de tuberculose. Pour ce qui est de sa domestication, que veut-on entendre par là? Si l'on veut parler de l'ancienneté des services qu'elle rend à l'homme, elle peut sur ce point se placer à un rang qu'il paraît difficile de surpasser. Si, d'autre part, on fait allusion au régime d'alimentation intensive qui a pour effet d'augmenter sa production laitière au détriment des réserves physiques qui lui sont imparties, on peut citer le cas de nombreux pays où l'on use de la Chèvre de temps immémorial industriellement et où elle est traitée, par conséquent, exactement de la même 76 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION manière dont on traite la Vache pour activer son rendement. Il en est ainsi particulièrement en Suisse, en Saxe et dans toute la région nord de l'Afrique, où Ton fait rendre à la Chèvre un produit bien supérieur à celui que peut, comparati- vement à son poids, donner la meilleure Vache ; et. là encore, la Chèvre ne devient jamais spontanément tuberculeuse. Si nous voulons parler de ses droits d'ancienneté comme nourricière de l'homme, disons tout de suite que sa faveur devant la raison humaine remonte à la nuit des temps, puisqu'on trouve trace de sa domestication dans les papyrus hiératiques de Berlin que cite Maspéro et qui remontent à plus de 3.000 ans avant Jésus-Christ. Nous avons vu plus haut combien la Chèvre est estimée pour les produits qu'elle donne à l'industrie du gant. Nous avons entrevu les services qu'elle peut rendre comme nourrice de nos jeunes enfants, mais nous n'avons pas encore rappelé le prix qu'on attache à sa peau employée à une multitude d'usages qui sont, entre autres, le vêtement de fourrure, les chaussures de luxe, les travaux d'art en maroquin, enfin toutes industries qui ne peuvent se passer de la Chèvre et qui devraient disparaître sans son concours, à moins de faire de la contrefaçon, ce qui les perdrait dans l'esprit de l'amateur qui cherche le vrai dans le beau. 11 y a aussi les fervents de la Chèvre qui l'estiment surtout pour les excellents fromages qu'elle produit sous les étiquettes les plus variées. Les produits de cette nature sont très demandés aujourd'hui et manquent beaucoup sur les marchés des grandes villes. Enfin la chair de Chèvre, dont la mise en valeur aurait la plus grande influence sur l'issue de son procès en réhabilita- tion, voudrait-on nous soutenir qu'elle est inférieure à celle du Mouton? À cet égard, nous révélerons au bon public, qui ne s'en doute guère, qu'il mange de très bon appétit énormément de Chèvre sous couleur de Mouton. Nous connaissons des pays chevriers qui envoient en automne et au printemps beau- coup de viande de Chèvre à Paris. Elle est débitée sur les marchés et se vend aussi bien que le Mouton. Personne n'y voit goutte à cette, innocente supercherie qui satisfait d'ail- leurs le goût et l'intérêt de tout le monde et il est absolument juste que les choses se passent ainsi, puisque autrement il RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L AGRICULTURE 7 i v aurait des récriminations de pur caprice qui ne méritent pas d'être écoutées. iNous pouvons, du reste, affirmer avec l'autorité de notre vieille et longue expérience que la viande d'une Chèvre encore jeune vaut au moins celle d'un Mouton du même âge. S'il fallait même absolument marquer une préférence, jugée sur le goût, nos suffrages iraient probablement à la première. ÎSous nous empressons, toutefois, d'ajouter qu'entre la chair d'un vieux Bouc et celle d'un vieux Bélier, nous n'aurions pas d'hésitation à faire une distinction : chacune accuse trop net- tement son origine, mais nous serions obligés de déclarer en conscience que l'une ou l'autre de ces viandes nous est égale- ment indésirable, ce qui ne règle pas la question de préfé- rence. Quand, cependant, on considère la vogue qu'a prise la viande de Cheval, dont l'aspect est si peu engageant pour ceux chez qui les yeux règlent en partie l'appétit et pour ceux qui pensent qu'on n'abat guère que des Chevaux infirmes, hors d'âge, ou plus ou moins atteints de blessures, sinon de plaies incurables, on se demande véritablement comment pourrait se manifester ou se justifier la répugnance du public devant un étal de boucherie où seraient proprement alignés de beaux morceaux de viande de Chèvre, de tous points identiques aux plus appétissantes côtelettes et aux plus alléchants gigots de Mouton ! Pour entraîner l'acheteur, faudrait-il peut-être, pour gazer un peu le mot qui offusque et présenter la chose sous un nom déjà mieux acclimaté, parler de Chevreau? Mais nous présu- mons que la prévention tomberait à l'accoutumance de quelques jours seulement. On songerait bien un peu au mâle de l'espèce qui dégage souvent une odeur si pénétrante et si infecte, mais le boucher n'aurait qu'à l'écarter de son commerce comme il fait déjà pour les vieux Béliers, tout aussi peu appétissants. Au surplus, on n'entretient dans les Alpes pour la monte que les Boucs nés dans l'année ; ils sont castrés et engraissés avant qu'ils ne sentent mauvais et leur viande vaut, dès lors, celle de la jeune Chèvre. Du reste, à l'objection, on pourrait fournir une réplique encore plus élégante, en offrant d'introduire en France des Boucs de race laitière de premier ordre, qui sont à peu près 78 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION entièrement dépourvus de l'odeur hircine quand on prend la précaution de les tenir simplement propres. Nous espérons avoir examiné tous les griefs articulés contre la Chèvre et les avoir réfutés victorieusement. Pour conclure, il nous reste à indiquer de quelle manière nous concevons l'instauration d'une industrie caprine en France et par quels moyens nous pensons que l'on pourrait faire réussir cette œuvre qui créerait pour notre pays une nou- velle branche de richesse agricole et, pour l'élevage de nos petits enfants, une méthode d'allaitement d'une valeur hygié- nique inconnue jusqu'à ce jour. Conclusions. La Société nationale d'Acclimatation de France, en soumet- tant à M. le Ministre de l'Agriculture le présent rapport qui a pour objet la protection des troupeaux de Chèvres exis- tant sur le territoire français, a l'honneur d'émettre les vœux suivants : « I. — Qu'il soit donné suite d'urgence à la demande formée par le Syndicat général français des industries de la Ganterie, à l'effet d'obtenir que l'autorité administrative interdise sans retard, dans tous les départements chevriers de France, l'abatage en masse des Chèvres de notre troupeau national poursuivi pour pourvoir au ravitaillement des troupes hin- doues qui opèrent actuellement sur le territoire français. L'Intendance militaire devrait, en conséquence, être invitée à diriger ses pourvoyeurs dans le nord de l'Afrique où la popu- lation caprine est considérable et mieux en forme pour la bou- cherie que les Chèvres de races françaises. « IL — Qu'il plaise, en même temps, à M. le Ministre de l'Agriculture, de prendre en considération une autre demande de ce même Syndicat, qui réclame l'accroissement du troupeau caprin de France, parce que les Chevreaux de nos races indigènes fournissent une peau qui a des qualités qui la rendent inremplaçable dans la fabrication du gant de luxe de marque française, très recherché partout. & A ce propos, il importerait que l'Administration fît des instances officielles très pressantes auprès des éleveurs de RAPPORT PRÉSENTÉ A M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 79 Chèvres pour qu'ils se bornassent à sacrifier les Chevreaux mâles et qu'ils conservassent pour la reproduction toutes les Chevrettes de belle venue, dont, d'ailleurs, ils ne trouveraient pas, cette année, par l'abat, un placement avantageux. En effet, les achats de peaux pour la ganterie seront, d'après les décla- rations du Syndicat industriel, à peu près entièrement sus- pendus tant que dureront les hostilités. « La conservation de ces mêmes Chevrettes et leur mise en rapport doubleront les ressources en peaux pour l'année pro- chaine, et si la paix, comme on l'espère, est alors rétablie, la demande de matière première pour l'industrie du gant va devenir considérable. Même pour prévenir la rareté des peaux de Chevreau en 1916 et pour assurer à nos éleveurs, qui auront fait preuve de bonne volonté, un avantage compensa- teur, le Syndicat français du Gant pourrait prendre l'engage- ment de se pourvoir de préférence dans les centres de produc- tion de notre pays. a III. — Que M. le Ministre veuille bien admettre le concours de la Société nationale d'Acclimatation de France, pour mettre au point la question caprine au moyen de la riche documentation qu'elle a pu constituer sur ce sujet par vingt- cinq à trente ans de recherches, d'études et d'expériences poursuivies à son initiative et sous son contrôle scienti- fique. « IV. — Que cette Société soit admise à proposer à l'Admi- nistration les mesures qui lui paraîtraient propres à susciter la création et à déterminer la réussite d'une industrie caprine qui apporterait au pays une nouvelle source de richesse, parti- culièrement profitable aux petits propriétaires ruraux. « Dans cet ordre d'idées, il conviendrait de prescrire aux préfets d'agir sur l'esprit de la population rurale pour amener à l'élevage de la Chèvre les petits propriétaires que l'idée serait susceptible de tenter. Ceux-ci devraient se grouper sous le régime syndical à l'effet d'assurer un écoulement régulier et rémunérateur de leurs produits, comme on fait pour d'autres branches de l'industrie agricole et comme il a été fait en par- ticulier en Belgique pour l'utilisation du lait de Chèvre. Les groupements locaux auraient le siège de leur syndicat au chef-lieu du département d'où leur représentant traiterait 80 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION avec les syndicats des services de vente de l'alimentation publique résidant dans tous les grands centres. « Les syndicats d'élevage caprin seraient naturellement amenés à s'occuper de l'amélioration et de l'accroissement de leurs troupeaux. Ils trouveraient, à cet effet, tous les rensei- gnements désirables dans les instructions que le Ministère leur enverrait au moyen de la documentation fournie par la Société nationale d'Acclimatation, qui continuerait à fonctionner, tant qu'il sera nécessaire et qu'on le désirera, comme section tech- nique du Bureau administratif central, sous le nom de Section d'Etudes caprines qu'elle a porté au sein de la Société. « Le travail de détermination des races caprines et les recherches accomplies sur les maladies parasitaires de la Chèvre constituent déjà un bagage précieux que la Société mettra au point pour l'usage des groupements syndicaux d'éle- vage. Les hommes idoines pour le jugement des Chèvres aux expositions régionales pourront également être désignés parmi les spécialistes de la Section d'Etudes caprines qui ont la pratique de la sélection de cette espèce animale. « La mise en valeur de la production caprine relèvera le prix des Chèvres et permettra à celles-ci de recevoir les soins qui leur manquent pour s'améliorer physiquement et dans leurs moyens de rendement. « Relevée de sa déchéance et de sa vie vagabonde, causes de la défaveur qui pèse sur elle actuellement, la Chèvre deviendra, par les services qu'elle est capable de rendre, tant sur le domaine économique qu'au point de vue de l'hygiène publique, un animal de prix, valant son prix aux yeux de tout le monde et rémunérant largement son éleveur de ses peines. « La mise au point d'une organisation dans le genre de celle ébauchée ci-dessus nécessitera certainement quelques sacrifices au début. Mais les cotisations légères que les inté- ressés auront à fournir constitueront un fonds suffisant pour la mise en train du fonctionnement syndical. Les moyens de ce fonds croîtront avec le succès de l'œuvre, laquelle, par l'intérêt qu'elle suscitera, aura certainement un jour sa part d'encoura- gement dans la répartition des munificences de l'Etat. « Il convient de remarquer que les idées que la Société d'Acclimatation expose dans ce rapport sont mises en pratique depuis longtemps et avec succès dans différents pays d'Europe. Nous citerons en particulier la Suisse, l'Angleterre, la Saxe, la RAPPORT PRÉSENTÉ A .M. LE MINISTRE DE i/ AGRICULTURE 81 tiussie, et surtout la Belgique dont l'organisation caprine est aujourd'hui détruite et qui puisera certainement après la guerre dans les réserves françaises si celles-ci sont en mesure de lui fournir des sujets. « On ne peut s'empêcher d'être surpris que toutes ces initia- tives profitables qui se développent à l'étranger, à la grande satisfaction des intéressés, et dont la Société d'Acclimatation se flatte d'avoir été l'instigatrice, n'aient jamais pu prendre pied en France d'où elles émanent, puisque c'est chez nous qu'elles ont été conçues et étudiées. « V. — La Société nationale d'Acclimatation, constatant qu'une opinion médicale qui tend à se généraliser et a même déjà reçu en France la sanction classique, affirme que la majo- rité des adultes atteints de tuberculose ont contracté leur mal au cours de leur enfance à la faveur de l'état de plus grande réceptivité et de moindre résistance que détermine la fatigue de la croissance, « Conclut que c'est vers l'hygiène de l'enfance que doit porter le grand effort des organes du Pouvoir public qui ont charge de poursuivre la lutte contre la tuberculose. » De là l'idée de prendre acte du vœu formulé par l'Académie de Médecine, dans sa séance qui remonte déjà au 2 avril 1902, pour rechercher les moyens d'organiser, en France, l'allaite- ment parla Chèvre comme régime de prophylaxie. Dans cet esprit, la dite Société estime qu'il y aurait intérêt à rattacher cette organisation hygiénique aux dispositions qui ont pour objet de faire réussir l'industrie caprine en France et de provoquer le Gouvernement à un acte de bon exemple, en l'incitant à créer, à titre de modèle, le- plus tût possible, une œuvre d'élevage d'enfants où la Chèvre-nourrice serait appelée à fonctionner. Joseph Crepin. Février 1915. BULL SOC. NAT. ACCL. VU. 1915. — G A L'ARCHIPEL D'OUESSANT COLONIES DE STERNES DE DOUGALL, DE MACAREUX ET DE PUFFINS ." LEUR DISPARITION IMMINENTE Par MAGAÏÏD D AUBUSSON Le bateau d'Ouessant, qui part du Gonquet trois fois par semaine (1), fait escale à l'île Molènes. Si l'on excepte Ouessant, l'île de beaucoup la plus importante du petit archipel, c'est le seul endroit régulièrement habité et offrant quelque ressource. Nous avions résolu, M. le Dr Louis Bureau, directeur du Muséum d'Histoire naturelle de Nantes, et moi, de nous y établir pour quelques jours dans le dessein de visiter les îlots voisins et de fixer quelques points de leur ornithologie. Le vapeur nous y déposa, en passant, le 8 juin, et nous prîmes gîte dans l'unique auberge de la localité tenue par le maire. Molènes compte 653 habitants. Trop pauvre, la population ne paie pas d'impôts. Avec l'île de Sein et une autre île, je crois, dans la Méditerranée, c'est le seul pays de France qui jouisse d'une telle franchise. Molènes forme cependant une commune, a un curé et une église, une école de garçons et deux écoles de filles (2j. Molènes a aussi une Maison des marins, sous le nom de Cercle Saint-Michel et un bureau télégraphique au séma- phore. Le facteur vient du Conquet, et fait sa tournée les jours de bateau. Le revenu de la commune consiste dans la vente du sel, l'impôt sur les chiens et l'octroi de l'alcool. L'État consent à l'île annuellement 12 tgnnes de sel. Cette quantité est à peine suffisante pour la population, surtout depuis l'établissement de deux boulangeries. Les pêcheurs, en outre, en font une as^ez grande consommation pour saler la « boette » qui sert à appâter les casiers à Homards. Il y a quelques mois, Molènes recevait encore son pain du Conquet, apporté par le bateau avec le courrier. Quelquefois, par les gros temps, le pain, enfermé dans des sacs, arrivait si détrempé par l'eau embarquée (1) Du 1er avril au 1er octobre, deux fois seulement en hiver. (2) Celle de l'État a 1 élèves, l'école libre en compte 200. a l'archipel d'ouessant 83 pendant la traversée qu'il n'était plus mangeable. Aujourd'hui, celui qu'on fait à Molènes est excellent. L'ile s'élève de 25 mètres au-dessus du niveau de la mer. On y cultive des Pommes de terre et de l'Orge dans de petites par- celles de terre détenues par les habitants sans aucun titre de propriété et où le cadastre n'a point passé. Ces parcelles com- posent un véritable damier sur le plateau de l'ile. A la suite de ces terrains cultivés s'étend une vaste pâture où des Vaches paissent une herbe courte. De nombreuses Alouettes l'animent de leur chant et çà et là volent des Traquets motteux et des Pipits. Quelques Chèvres maigres, des Cochons et des Poules complètent la liste des animaux domestiques de l'île. L'Orge que l'on cultive sert à pétrir un pain grossier que mangent les familles pauvres et nombreuses. Un vieux moulin à vent aban- donné tournait autrefois pour moudre le grain, qu'on envoie maintenant à la « grande terre ». On est volé d'ordinaire sur la qualité et la quantité de la farine rendue et on avait songé à rétablir le moulin. Mais sa remise en état serait fort coûteuse et on y a renoncé. Naturellement, pas un arbre, comme dans tout l'archipel. On utilise les excréments des Vaches, séchés en galettes arrondies, pour faire le feu. Le bourg, que dominent le clocher de son église et la tour du sémaphore, étage ses maisons devant un petit port, abri de quelques bateaux de pèche qui vont poser surtout des casiers à Homards ou s'emploient à la coupe du Goémon. La récolte du Varech, dans le but d'en extraire la soude en le soumettant à l'incinération, intéresse au plus haut point l'avenir de la faune ornithologique de l'archipel. Les funestes conséquences qui en découlent sont, comme on le verra, les plus actifs agents de la disparition totale et prochaine dans ces îles de plusieurs espèces d'Oiseaux de mer particulièrement dignes d'être conservées, tels que les Sternes de Dougall, les Puftins et les Macareux, pour ne citer que ceux qui nous ont paru les plus précieux et les plus en danger. La production de la soude, en effet, a pris, dans ces parages, depuis quelques années, une extension considérable. Le Goémon, amené à terre par les bateauxdes coupeurs, est brûlé sur place dans des fosses appropriées et on en transporte les cendres aux usines destinées à les traiter. Il y en a deux au Conquet, une autre à l'Abervrac'h, une quatrième à Lampol- Plouarzel. Jadis, on brûlait seulement sur quelques îlots, la 84 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION plupart gardaient leur solitude inviolée. Le ramassage du Goémon ne constituait pas alors dans l'archipel une industrie bien importante. Elle avait même presque disparu pendant un temps et n'a pris une nouvelle activité que depuis la création sur la côte continentale des usines dont nous venons de parler. Avant l'exploitation en grand du Goémon, les îles n'étaient qu'accidentellement visitées par les pêcheurs, et s'ils détrui- saient des couvées, ce qui s'est toujours fait, les Oiseaux néan- moins pouvaient réparer leurs pertes. Aujourd'hui, de véritables installations sont aménagées sur les îles. Quelques-unes sont habitées par les goémoniers d'un bout de l'année à l'autre. Ailleurs, s'ils ne passent pas l'hiver, ils arrivent aux mois de mars ou d'avril pour repartir au mois d'octobre. Ils se trouvent là précisément à l'époque de la reproduction. Leur présence continue suffit à elle seule à inquiéter les Oiseaux, et de plus, ils ne se font pas faute de récolter les œufs pour les manger, ils ouvrent à coups de pioche les terriers des Macareux et des Puffins, ainsi que nous l'avons constaté en visitant les places à nids. Quant aux œufs des Sternes de Dougall et Pierre-Garins ils n'ont qu'à se baisser pour les ramasser. Il est certain que ces Oiseaux ne pourront résister longtemps à ce voisinage hostile et que ces espèces finiront par abandonner des lieux où elles sont ainsi molestées. L'industrie de la soude de Varech aura donc chas«é avant peu des îles de cet archipel les Oiseaux marins qui avaient l'habitude de s'y reproduire. Ils ont déjà beaucoup diminué. Nous avons pu cependant rencontrer encore, dans l'exploration que nous avons faite de ces îles, des représentants d'espèces intéressantes. Ainsi à Roch'ir, îlot rocheux presque entièrement dénudé, nous avons trouvé une colonie de Sternes de Dougall. Malheu- reusement les nids avaient été pillés. Deux seulement avaient échappé à la destruction, l'un contenait un œuf et l'autre deux. La Sterne de Dougall [Sterna Dougalli Montagu) a une aire de dispersion assez étendue. Elle habite le Nord de l'Europe et de l'Amérique jusqu'aux Antilles. Puis on la voit aux Açores, dans l'Afrique du Sud, en Asie, en Australie, à la Nouvelle- Calédonie. Elle se reproduisait autrefois en grand nombre sur certaines parties de notre littoral, notamment dans les îles de la Bretagne. Mais la destruction qu'on a faite des couvées a peu à peu causé la ruine de ses colonies les plus florissantes. M. le Dr Louis Bureau, qui a publié en 190o sur cette belle espèce a l'arcmipel d'ouessant 85 une monographie très documentée, estimait qu'elle était en voie de disparition. « Aujourd'hui, écrivait à cette date le savant ornithologiste, la Sterne de Dougall ne se reproduit plus, en France, que sur quelques îlots du Morbihan et du Finistère, où son existence est sérieusement menacée par les progrès constants de la civilisation. « En dehors de ces derniers refuges, l'apparition accidentelle de cette espèce est si rare qu'on aurait peine à trouver dans les collections quelques spécimens tués sur d'autres points des côtes françaises (1). » L'aride îlot de Roch'ir paraît être un de ces « derniers refuges ». En Angleterre, où cet Oiseau avait aussi presque entièrement disparu, on est arrivé, en prenant des mesures de protection à l'égard des survivants, à reconstituer l'espèce. La Dougall affectionne les lieux sauvages, et ses colonies font généralement face à la haute mer. Lorsque dans un endroit il y a des colonies de Dougalls et de Pierre-Garins, les Dougalls sont toujours du côté du large. Cette Sterne aime à nichée a l'abri des pierres (les nids que nous avons trouvés étaient dans ce cas), ce qui ne l'empêche pas de s'établir parfois à découvert comme le Pierre-Garin. Celui-ci du reste niche en des lieux très divers : rochers, dunes, pelouses, marais, il n'est pas diffi- cile. Sur Roch'ir il y avait des Pierre-Garins (Slerna hirundo Linu.) mêlés aux Dougalls, nous n'avons trouvé qu'un nid de ces Oiseaux, avpc deux œufs, les autres avaient été détruits. Il existe à Roch'ir une petite colonie de Macareux (Fratermla arctica Vieillot), d'une cinquantaine d'individus environ. Plu- sieurs de leurs terriers avaient été fouillés à la pioche. Nous avons vu des Puffins (Puffinus anglorum Boie) voler autour de l'îlot, ils y nichent, mais nous n'avons pu découvrir leurs trous. Quelques couples d'Huîtriers (Haematopus ostralegus Linn.; s'y reproduisent aussi ± . 1 Monographie de la Sterne de Dougall [Slerna Dougalli), par le Dp Louis Bureau, directeur du Muséum d'Histoire naturelle de Nantes, professeur à l'Ecole de Médecine, froin the Proceedirifjs of llie IYth International Ornilhological Congress, 1905, p. 317. (2) Les pêcheurs de Molènes avaient naguère une singulière manière de s'emparer des Huîtriers. Lorsqu'ils avaient découvert un nid, ils faisaient, à l'aide de pierres plates, une sorte d'allée couverte dans laquelle ils enfer- maient le nid. L'entrée en était libre, mais à l'autre extrémité était disposé 86 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION A mer basse on peut passer de Roch'ir à Bannec sur des cail- loux glissants tapissés de Goémon. Bannec est plus étendu que Roch'ir qui n'est, au demeurant, qu'une sorte de récif désolé, et un manteau de verdure la recouvre. Nous y vîmes des Dougalls et des Pierre-Garins. Ces derniers y ont établi des nids dont quelques-uns subsistaient encore avec chacun deux œufs. Nous y avons rencontré une petite troupe de cinq Tournepierres (Slrepsi/as interpres llliger) etd'autres isolés. CesOiseaux ne nichent pas (l).MaisBannec est surtout remarquable par sa colonie de Macareux. Cette colonie est en effet assez importante. De grands rochers sur la face ouest de l'île étaient chargés d'Oiseaux à leur sommet et il y en avait aussi un grand nombre sur l'eau. Leurs terriers sont répandus dans l'intérieur de l'île en plusieurs groupes. Sans être comparable pour le nombre des individus aux colonies de Rouzic et Malban,dans l'archipel des Sept-Iles, cette station de Macareux doit être signalée comme l'une des plus intéressantes des côtes de France (2). Nous trouvâmes à Bannec des terriers de Puffinsqui avaient été ouverts et. qui étaient vides. Il y en avait certainement d'autres encore habités. 'La colonie de Puffins, toutefois, ne paraît pas être bien consi- dérable, il serait d'autant plus nécessaire de la respecter, car c'est peut-être la seule qui existe maintenant sur nos côtes. Mais ces îles sont régulièrement ravagées tous les ans lorsque les Oiseaux viennent y nicher. Non seulement les gens de Molènes, mais aussi ceux d'Ouessant, se transportent sur les an lacet. Quand l'oiseau regagnait son nid il entrait dans cet étroit cou- loir où il ue pouvait se retourner. Obligé de sortir par l'autre issue, il se prenait dans le collet. On ne pose plus guère ces pièges, sans doute à cause de la grande diminution des Huîtriers, ou parce qu'on n'a plus les mêmes raisons de capturer ces oiseaux pour les manger. Ces pêcheurs faisaient aussi une chasse nocturne aux Cormorans. Ils arrivaient silencieusement, en canot, sur les rochers qui servaient de dortoirs aux Cormorans, rampaient avec précaution, saisissaient avec la main les oiseaux endormis qu'ils pouvaient approcher et leur tordaient le cou. Ce mode de chasse ne se pratique plus. (1) Cette espèce se reproduit dans les régions arctiques. (2) Voir Magaud d'Aubusson : Excursions ornilholorjiques à V Archipel des Sept-Iles, à Vile Tome et aux récifs des Triagoz. — Les Macareux, in Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de France (novembre 1913). — Tirage à part, 33, rue de Buffon. Figures, 22 pages. a l'archipel d'ouessant 87 places à nids pour récolter les œufs. Le dimanche, dans la saison favorable, on se réunit pour aller à Bannec dénicher les Oiseaux. C'est une pariie de plaisir (1). Le remède à cet état de choses serait de faire l'acquisition de l'île, d'en expulser les goémoniers auxquels le propriétaire la loue, et d'en interdire l'accès en tout temps, en la mettant sous la surveillance d'un gardien, ou bien, si on se heurtait à un refus de vente, la prendre à bail à la place des locataires actuels. Mais il faudrait pouvoir disposer pour cela d'une somme relativement assez forte, car les propriétaires des îles, qui, autrefois, n'en tiraient presque aucun revenu, les afferment maintenant de bons prix aux goémoniers, et ces prix iront en augmentant, car l'industrie des brûleurs est rémunératrice et ne fera que s'accroître. Dans d'autres pays on trouverait rapidement les ressources nécessaires. Nous savons ce qui s'est produit en Hollande quand il s'est agi d'acquérir dans un but de protection le lac de Naar- den. En quelques semaines l'Association néerlandaise réunit une somme de 350.000 francs. Chez nous on s'intéresse médio- crement à ces questions. Le nombre est petit de ceux qui con- sentiraient à souscrire de l'argent pour empêcher notre faune ornithologique de s'appauvrir et lui conserver des espèces curieuses par leurs mœurs, leurs habitudes et leur rareté. La Ligue française pour la Protection des Oiseaux compte bien demander à M. le préfet du Finistère de prendre un arrêté en faveur des espèces qui se reproduisent dans l'archipel d'Ouessant, comme l'ont fait, sur notre initiative, le préfet des Côles-du-Nord pour la protection des Macareux des Sept-Iles, et celui de la Loire-Inférieure, de concert avec l'autorité mari- time, pour interdire la chasse et l'enlèvement des couvées des Oiseaux de mer et de rivage qui viennent nicher sur l'îlot de Pierre-percée. Mais il ne faut pas trop compter sur l'efficacité d'une pareille mesure dans des parages où le contrôle admi- nistratif est sinon impossible, au moins très difficile. Peu à peu nos côtes maritimes deviendront désertes, car on (1) Quelques Passereaux vivent sur Bannec, Traquets motteux, Pipits farlouses, Pipits maritimes. Trois couples de Moineaux nichent dans les murs de l'unique maison de l'île. Nous prîmes à terre un jeune, voletant péniblement, il avait le fouet d'une aile cassé. La plupart de ses rémiges étaient blanches. Comme je l'ai montré à propos des Sept-lles, le Moineau suit l'homme partout. 88 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION massacre à l'envi les espèces les plus communes. Depuis que la facilité des communications amène des touristes dans les coins les plus ignorés jusqu'alors du littoral, les Oiseaux de mer et de rivage n'ont plus aucun répit. On les tire sur toutes les côtes, pendant la saison balnéaire et, à l'époque des passages, l'en- nemi s'échelonne tout le long du rivage. On vient de Paris en automobile pour prendre part à la tuerie, comme on va en Sologne pour tirer les Faisans en battue. Le 10 juin, nous visitâmes Trielen. C'est une île toute en lon- gueur, basse et sablonneuse, qui ne s'élève .que de 11 mètres au-dessus des flots. Sa largeur est à peu près de 300 mètres. Elle est bordée par un banc de roc ou de galets et a un lagon à sa pointe orientale. Une petite ferme sert à l'exploitation du Goémon. Partout se dressent et sèchent en meules vertes, rousses et noires les Varechs. Une herbe rase que paissent tris- tement les Chevaux des goémoniers tapisse, par endroits, le sol. A peine quelques sillons de terre cultivable où pousse péniblement une pauvre récolte. Une vingtaine de personnes vivent là avec un attirail de charrettes et de Chevaux, de Vaches et de Cochons. Dans un enclos ruiné, quinze levées de sable et des croix brisées rappellent l'épidémie de choléra qui ravagea, il y a une vingtaine d'années, l'archipel et faucha à Trielen des coupeurs de Goémons qui y sont restés ensevelis. Cette île où les Tadornes (Tadorna Belonii Hay) perçaient jadis leurs terriers dans le sable, où de nombreux Huitriers déposaient leurs œufs dans les galets, où les Sternes naines (Sterna minuta Linn.) aimaient à se réunir pour nicher, est aujourd'hui perdue pour la reproduction des Oiseaux marins et de rivage. Elle a vu disparaître sa faune ornithologique devant l'envahissement des brûleurs de Varech. Nous n'y avons ren- contré que quelques couples de Pluviers à collier interrompu ou GravelotdeKent (Charadrius canlianus Lalham), une Sterne naine, et nous n'avons pas vu un seul Huîtrier (1). Les Sternes naines se reproduisaient autrefois également à Lytiry, à Morgol, d'autres espèces au Lédenès de Quéménès, à Quéménès, groupe d'îlots qu'on laisse à gauche, passé le Béni- guet, quand on vient du Commet et qu'on entre dans le chenal de la H elle. (1) Comme Passereaux nous vîmes des Traqnefs motteux, des Pipits maritimes, deux Bergeronnettes printanières et des Moineaux. DEUX LA.RD1ZABALÉES A FRUITS COMESTIBLES 89 Or, le Béniguet est maintenant habité toute l'année et divisé en trois fermes. Lytiry et Morgol sont occupés par les goémo- niers durant tout l'été, et Quéménès, où est établie une ferme, a des habitants d'une manière continue. Dans cette dernière île nous n'avons trouvé qu'une bande de quatorze Courlis cendrés (Numenius arquata Linn.), Oiseaux qui ne nichent pas dans nos régions, et quelques petits Echassiers. Dans cette mauvaise mer, « la Mer maudite », on navigue de rocher en rocher. On les dirait semés par la main d'un génie malfaisant. Lorsque l'eau se retire on voit surgir, comme des cadavres à demi sortis du sable, les débris des navires qui sont venus s'y briser : chaudières renversées montrant leur dos noir, pointes de mâture qui se dressent et se tendent comme des bras de naufragés. Des courants violents, parfois formi- dables, entraînent en perdition, et le terrible Fromeveur guette sans cesse sa proie aux flots soulevés d'Ouessant « l'Ile d'Epou- vante ». Les Oiseaux marins pouvaient se croire en sûreté sur ces îlots à l'accès difficile, autour desquels veille un danger constant. Ils avaient compté sans le génie industrieux de l'homme que rien n'arrête quand il veut tirer des forces de la nature et de ses richesses les plus secrètes le profit qui provoque et récom- pense son effort. DEUX LÂRD1ZABALÉES A FRUITS COMESTIBLES (Akebia quinata — Decaisnea Fargesii) Par MAURICE L DE VILMORIN. Les deux arbustes qui font l'objet de cette courte note sont deux arbustes décoratifs ; l'un, par ses tiges grimpantes, son élégant feuillage et ses fleurs; loutre, par ses grandes feuilles pennées et ses fruits d'un beau bleu. Ces qualités sont d'ailleurs celles qui les recommandent le plus pour leur introduction dans les jardins, car, si les fruits offrent une pulpe comestible, Userait excessif de dire que c'est un régal de premier ordre. Ces deux plantes sont originaires de Chine et du Japon. 90 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION VAkebia quinata (1) est cultivé et apprécié depuis trois quarts de siècle. L'explorateur Fortune, à qui Ton doil l'introduction de très intéressantes plantes chinoises, à commencer par cette Rose de Fortune d'un si merveilleux coloris et dont la parenté botanique n'est pas complètement établie, Fortune, dis-je, avait envoyé des semences de YAkebia qmnata à la Société royale d'Horticulture d'Angleterre, et les plantes fleurirent pour la pre- mière fois dans le jardin de la Société, près de Londres, en 1847. Cette plante ne tarda pas à se répandre ; elle est, en effet, très attrayante et très rustique. Les tiges volubiles de cette liane atteignent facilement trois mèlres de hauteur. Dépourvues de vrilles, elles ne peuvent, non plus que celles du Chèvrefeuille, s'attacher à une surface plane telle qu'un mur, s'il n'est recou- vert d'un treillage. Son emploi est précisément de garnir treillage, grillage ou de s'associer à des arbustes ou petits arbres en profitant de leur support. Cette plante a été figurée dans plusieurs ouvrages; le Bota- nical Begister; les Archives du Muséum, t. I, p. 13; la Flore des Jardins et des Serres, de van Houtte, etc.; mais généralement sans la figuration du fruit, et, dans les indications de cultures, c'est le marcotage et le bouturage qui# sont donnés comme moyen de préparation. Il semble, en effet, que pendant longtemps les sujets importés en Europe n'aient pas fructifié et qu'on n'ait pu employer la multiplication par semis. Les vieux sujets de l'École de Botanique du Muséum et du jardin de l'École de Médecine sont toujours stériles, autantque je le sais. Puis on mentionna, dans lesjournaux horticoles, des fructifica- tions survenues en Italie, à Toulouse, Bordeaux, etc. Cette fruc- tification est bien faite pour attirer l'attention par les dimen- sions et la beauté du fruit; celui-ci se composed'une enveloppe charnue subcylindrique légèrement aplatie et arrondie aux extrémités. Elle s'ouvre sur une ligne médiane découvrant une pulpe blanchâtre, laissant paraître des rangées de graines noires noyées dans cette pulpe transparente. Quand le fruit est soli- taire, il pend verticalement et peut atteindre 6 à 8 centimè- tres; le coloris extérieur est d'un beau violet, se fondant en un coloris bleu-cobalt, l'enveloppe devient à l'intérieur d'un blanc laiteux; ces fruits sont de la plus grande beauté. Parfois deux (1) Akebia quinata Decaisne, Arch. Mus-. Pav., I. X1I1, 1837. DEUX LARDIZABALÉES A FRUITS COMESTIBLES 91 fruits nouent sur la même fleur et se présentent alors horizon- talement comme le montre la figure ci-dessous. (Fig. 1). Quelles sont les causes déterminantes de la fructification de Fig. 1. — Âkebia quinata Decaisne. (Échelle : rameau, 2/3; fruit, 1/3). VA kebiat II semble qu'elle devrait se produire régulièrement; les fleurs, qui sont les unes femelles, les autres mâles, sur la même grappe, semblent bien constituées. Cependant la fécon- dation efficace semble ne se produire que sur des plants déjà un peu âgés et dans une situation très éclairée. C'est dans ces conditions que des sujets grimpants sur un tuteur de 2 mètres environ fructifient régulièrement, tous les ans, aux Barres. 92 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION Le second arbuste, le Decaisnea Fargesii (4) a eu sa première fructification aux Barres, en 1898, de graines que j'avais reçues du Sé-Tchuèn oriental, en 1895. Cette introduction a été mentionnée dans le Bulletin même de notre Société en 1910, p. 477. Je ne reviens pas sur sa description, mais insère de nouveau la figure qui le représente, en observant que les Fig. 2. — Decaisnea Fargesii Franchet. liges atteignent 3 mètres (fig. 2) et le fruit de 8 à 9 centimè- tres (fig. 3). VAkebia demande une bonne terre saine : il ne semble re- douter que l'humidité stagnante. Le Decaisnea se contente, comme lui, de toute bonne terre de jardin ; il ne redoute pas le froid, mais le gel, au printemps, de ses fleurs très précoces; et (1) Decaisnea Fargesii Franchet, Journal de botanique, 1892, p. 234. DEUX LARDIZABALÉKS A FRUITS COMESTIBLES 93 encore, après une gelée qui aura grillé les premières fleurs, donne-t-il souvent une nouvelle floraison. Il convient de le planter dans la partie haute du jardin, là où les gelées de prin- temps sont moins à craindre. Dans ces conditions, il fructifie tous les ans. L'un et l'autre ont, comme partie comestible, la pulpe blan- châtre qui environne les graines : elle est demi-consistante, légèrement sucrée, plus aromatisée dans YAkebia que dans le Fig. 3. — Fruit de Decaisnea Fargesii Franchet. Decaisnea : c'est assez bon pour les Chinois qui, suivant Naudin, mangent de tout et pour les enfants qui font de même, au jardin, quitte à ne pas manger leur soupe à table. Pour l'amateur, je conseillerais d'admettre ces fruits à la salle à manger pour les mélanger, en automne, dans les compotiers aux fruits dorés et aux raisins de toute nuance et faire de beaux contrastes de coloris. VAkeUa présente ses belles couleurs au commencement d'octobre et le Decaisnea vers la fin du même mois dans notre région parisienne. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Les Girafes du Jardin de Regent's Park. — La culture du Ver de farine. — Le commerce de fourrure et la guerre. — La furonculose des Salmonidés. Depuis 1902, le Jardin zoologique de Londres possède un couple de Girafes du Kordofan qui s'y est déjà reproduit quatre fois. La femelle, qui porte pendant quatorze mois et quatorze jours, éleva bien le premier jeune, mais refusa, par la suite, d'allaiter le second, puis le troisième; ils moururent malgré les tentatives que l'on fit pour les élever au biberon. Craignant cette fois encore un échec, car la femelle était pleine et mit bas en août 1914, l'administration du Jardin de Londres s'était prémunie d'une Vache laitière très douce. Celle-ci, montée sur une plate-forme, put présenter ses mamelles au nouveau-né qui, de cette façon, pouvait téter sa nourrice sans être obligé de se baisser. Cette fois pourtant la mère se chargea elle-même du soin d'allaiter son nourrisson, mais il est malheureusement mort de broncho-pneumonie à l'âge de quatre mois et demi. * Beaucoup d'industries ont à souffrir de l'état de guerre dans lequel est plongée l'Europe. Ainsi c'est de l'Allemagne que l'on tirait les produits du goudron de houille servant à la teinture. En Angleterre et en France, on se préoccupe vivement de rem- placer les fabriques allemandes auxquelles on ne peut plus s'adresser; mais il y a, dans la production de ces matières premières, un tour de main que l'on sera quelque temps à acquérir. Il y a aussi un autre produit allemand qui fait singu- lièrement défaut aux amateurs d'Oiseaux, surtout en Angle- terre où la consommation en était considérable. C'est le Ver de farine. Ces larves du Tenebrio molitor sont, en Allemagne, multipliées dans des établissements spéciaux munis de hangars chauffés où le Ténébrion est élevé dans de grandes caisses entre des couches de toile d'emballage et de gros papier, garnies de son et de farine. La production est réglée de façon à avoir, par roulement, des Vers livrables dans toutes les gros- seurs. L'exportation de ces larves pour les jardins zoologiques CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 95 et les amateurs d'Oiseaux insectivores était assez importante pour que son arrêt soit vivement ressenti dans différents pays où l'élevage des consommateurs de ces Insectes est bien plus considérable qu'en France. A Paris, on peut se procurer des Vers de farine au marché de la Cité et chez quelques fournis- seurs de nourriture d'Oiseaux de cage, mais le prix en est relativement élevé et la consommation restreinte. Le commerce des fourrures a été très sérieusement affecté par la guerre. Il y a environ deux ans, son importance avait été évaluée par les statisticiens à 475 millions de francs, dont l'Amérique du Nord fournissait pour 120 millions. Aujourd'hui, les grands marchés : Londres, Leipzig, Paris et Saint-Péters- bourg n'achètent plus et les Compagnies de fourrures du Canada ont, de leur côté, arrêté leurs achats. L'année dernière, les bons Renards croisés et argentés se vendaient de 500 à 600 francs, aujourd'hui c'est à peine si l'on en donne 250 francs. Le Renard rouge d'Amérique, qui valait de 25 à 50 francs, ne trouve plus preneurs qu'à 5 francs; le Castor, de 50 à 75 francs, est tombé à 12 francs. Alors qu'on payait l'Ondatra 3 fr. 75, maintenant on en a 6 pour 1 fr. 25 et le Renard noir, qui valait 2.500 à 3.500 francs, est cher à 500 francs. Les fermes à fourrure ont eu de leur côté à supporter le contre-coup de la guerre. On avait vendu, pour la reproduc- tion, de jeunes Renards noirs jusqu'à 50.000 francs la paire et les reproducteurs d'espèces moins recherchées faisaient couram- ment 5.000 francs. Au début de l'année 1914, ces prix avaient déjà beaucoup baissé, vu la concurrence; un couple de jeunes Renards noirs ne valait plus que 6.250 francs. Actuelle- ment, il n'y a plus de demandes et les spéculateurs seuls, profitant de la baisse, achètent lorsqu'ils ont les reins assez forts pour attendre une reprise des affaires. F.-J. Dickie (Field). Presque tous les expérimentateurs qui ont étudié le bacille de la furonculose des Salmonidés (Bacterium salmonicida) ont signalé l'existence de variétés de cet agent pathogène. C'est ainsi que Marianne Plehn, qui désigne la forme étudiée par 96 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Emmerich el Weibel sous l'appellation de Bact. salmonicida A, en a isolé un autre qu'elle désigne sous la forme B. De son côté, Marsh, sous la désignation de Bact. Truttse, en a décrit une autre se rapprochant des formes A et B. Enfin, Fehlmann, en étudiant une Bactérie immobile provenant d'une Truite furonculeuse, s'est demandé s'il ne se trouvait pas en présence d'une nouvelle forme C, attendu que cultivée, sur un agar au bouillon de Truite, cette Bactérie devient mobile. Dans le courant de l'été dernier, M. Bornand, du laboratoire cantonal du service sanitaire de Lausanne, a eu occasion d'exa- miner des Truites furonculeuses provenant principalement de la Venoge (canton de Yaud) et de l'Ara (canton de Berne), et il a isolé de ces Poissons une Bactérie qui se présentait sous la forme de petits bâtonnets trapus, assez épais et immobiles. Cultivée sur agar au bouillon de Liebig, cette Bactérie changeait complètement de forme : elle se raccourcissait au point de n'être guère plus longue que large et de ressembler à un Micro- coque ; cultivée ensuite sur agar au bouillon de Truite, elle reprenait la forme de bâtonnets allongés, assez semblables à ceux que l'on trouve dans les furoncles, et elle devenait mobile. Ayant fait une série d'inoculations de cette Bactérie dans la région exsudale de Truites communes, M. Bornand a constaté que, dès le lendemain, se manifestait un commencement d'enflure ; le troisième jour, le furoncle était formé et bientôt on en voyait d'autres apparaître. Le Poisson, qui respirait rapidement, se tenait dans un coin de l'aquarium, el se lais- sait facilement prendre avec la main. En général, la mort sur- venait au bout de trois à six jours. A l'autopsie, il sortait des furoncles un pus sanguinolent et les muscles se montraient remplis de Bactéries. M. Bornand en conclut : 1° que la Bactérie qu'il a isolée des Truites furonculeuses était bien le Bact. salmo- nicida', 2° que ce Bacterium se montre très variable de forme, suivant le milieu de culture. Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux. imprimeur, 1, rue Cassette. Dixippus morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUGHER. Graines offertes par le Dr G. V. PEREZ. Echium Bourgaeanum. — simplex. Juniperus Cedrus. — bermudiana . Statice frutescens. — arborea. — Perezii. — brassicsefolia. brassicxfolia X imbricata. Perezii X imbricata. EN DISTRIBUTION Convolvulus floridu». Crotalaria agatifolia . Cytisus filipes. — spachianus. — stenopetalus. (Plantes de serre froide.) Graines offertes par M. MOREL. Acacia cultrilormis. Acacia leiophylla. Pinus oocarpa. Aspnmgus plumosus. Pithecoctenium muricatum. Anyophora lanceolata D. G. — subvelutina Mail. Bauhinia purpurea Callistemon lanceolatum. Dracœna draco. Melaleuca leucadendron . Graines offertes par M. GOFFART, de Tanger. Cratxgus nitida. — prunifolia. — succulenta. Acacia. falcata. decurrens. longifolia. Greines offertes par M. BOIS. Chenopodiwn amaranticolor. S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES 200 Chamserops excelsa de 1 à 15 fr. Basset griffon tricolore, 32 cm., 2 ans, parfait sur bêtes puantes et tous gibiers, 200 francs. Basset griffon, âgé, ancien chien de tête, 25 frs. LEROUX, 2, rue Jean-V, Nantes. Poissons exotiques. 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Les Membres de la Société qui désirent obtenir de» cheptels sont priés d'adresser leurs demandes au Secrétariat, 3a, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, près examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à mesure des disponibilités- SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondée le 10 Février iS54 Reconnue d'utilité publique par décret en date du H Février ISSS 33, RUE DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 résident, M. Edmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice- Présidents. ( Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. G. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard Saint- Seerétaires. I Germain, Paris (Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sbbillotte, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Myre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalmk, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1,'rue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D' P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue do Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). 1> E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturello, 61 rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris. Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bimensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Févrie» Mars Avril 22 Mai Novembre Décembre 1 14 11 11 2"! 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d'Ornithologie (Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi ; * 18 18 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les personnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. BONTEBOK ET BLESBOK (1 Par F. BLAAUW. La famille Van der Byl avait, autrefois, enfermé les Bon- tebokken qui se trouvaient sur son domaine, près de Bredas- dorp, dans une clôture; mais M. Albertyn n'a pas suivi son exemple. Les Antilopes de M. Albertyn sont bien les mêmes que ceux de son prédécesseur. Après la mort du dernier Van der Byl, les héritiers vendirent toute la propriété. Deux MM. Albertyn, deux cousins, achetèrent chacun une partie de l'immense domaine Van der Byl et ils se sont partagé le trou- peau de Bontebokken. Le M. Albertyn que je connais, et chez qui j'ai passé une si charmante journée, m'a raconté qu'il s'était rendu acquéreur de la ferme de Nachtwacht dont le nom signifiant « veillée nocturne » rappelle une nuit pleine d'angoisses que les premiers colons hollandais passèrent en cet endroit, entourés qu'ils étaient d'indigènes hostiles. A son cousin, échut la ferme de Lukœ Vieil, c'est-à-dire « Lac aux Hippopotames ». Chacun de ces messieurs se trouva ainsi possesseur d'environ 150 têtes de Bonteboks. En plus de ces deux troupeaux, il y a encore quelques-uns de ces Antilopes près de Swellendam. A Nachtwacht, les Bonteboks se tiennent sur un terrain plat, assez bas et dont le sol est humide en certaines saisons. L'herbe y est rare, mais la végétation se compose de petites broussailles n'ayant pas plus de 30 centimètres de hauteur et dont les feuilles sont mangées par ces Antilopes. Le troupeau se divise en deux ou trois bandes qui vivent chacune de sa vie propre. J'en ai vu une de soixante-dix têtes, et une autre qui n'en comptait guère plus de trente à quarante, sans parler de celles qu'il y avait ailleurs. M. Albertyn se plaignait du nombre excessif des mâles dans le troupeau et de la presque impossibilité de les capturer. On n'avait pas d'autre moyen d'en réduire le nombre que de les tuer au fusil; mais, par ce procédé, on risquait d'abattre (1) Notre collègue M. Blaauw nous envoie quelques renseignements qui complètent utilement ce que nous avions dit des animaux qu'il a rencontrés dans soh excursion à la ferme de Pottenberg, dans l'Afrique australe (V. Bulletin, n° 1, janvier 1915). BULL. SOC. NAT. ACCL. l'R . 1915. — 7 98 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION une femelle, vu le peu de différence qu'il y a entre les sexes. De plus, dès qu'on approchait du troupeau, les Antilopes se massaient en se serrant les uns contre les autres, ce qui augmentait la difficulté de les distinguer. En conséquence, les naissances étaient peu nombreuses et on pensait que le trop grand nombre de mâles en était la cause. C'est un admirable spectacle que celui d'un troupeau de ces Bonteboks. Le blanc pur et le brun pourpré de leur pelage forment un singulier contraste. Il est très difficile de les appro- cher de près et c'est en vain que j'ai essayé d'en prendre des photographies à bonne distance. Au milieu du troupeau, il y avait deux ou trois douzaines de Springboks (Gazella euchore) qui m'ont donné l'occasion d'admirer les bonds prodigieux de ces animaux lorsqu'ils prennent la fuite. J'ai acheté, à Port-Elisabeth, une paire de Bonteboks qui provenaient de Nachtwacht; malheureusement, la femelle est morte avant d'avoir pu être expédiée en Europe; le mâle a vécu et fait aujourd'hui partie de ma ménagerie de Goïlust. C'est un superbe animal. La différence du pelage des Bonte- boks et des Blesboks est très sensible et tout à l'avantage des premiers. Les parties brunes du pelage des Blesboks ont beau- coup plus d'éclat et le blanc est beaucoup plus vif. De plus, le Bontebok a un écusson blanc à la naissanee de la queue et ses quatre jambes sont blanches uniformément, depuis le genou jusqu'au pli du jarret, sauf pour les jambes de devant où une tache brune se détache sur la partie antérieure. Chez le Bles- bok, le pelage brun se prolonge jusqu'aux sabots, sauf sur la face interne des cuisses généralement, mais le blanc s'étend de la même manière sur le front et le chanfrein des deux espèces, quoi qu'on en dise. Les variations sur ces points sont purement individuelles. J'ai, dans ce moment, quatre Bles- boks et un Bontebok. La distribution du blanc sur le front et le museau des Blesboks n'est pas pareille et la ligne blanche médiane chez le Bontebok n'ayant que quelques millimètres de largeur disparaît lorsque le poil est hérissé. Quant à l'Oiseau-Souris, c'est un peu exagéré de dire qu'il a la démarche d'un perroquet; à mon avis, ces volatiles n'ont pas de démarche du tout, car on ne les voit que rarement par terre où ils procèdent par petits sauts. Dans les branches, on les voit suspendus ou assis et appuyant sur toute la longueur NOTE SUR L'ASTRILD BLEU 99 du tarse; jamais, on ne les voit se tenir debout. Pour manger les fruits du Poivrier, ils se suspendent à la grappe par leurs pattes, comme un gymnaste par ses bras à un trapèze, et le bec fonctionne à la hauteur des pieds. J'imagine qu'ils doivent dormir dans cette même position, la tête enfoncée dans leurs plumes; somme toute, leurs jambes paraissent disloquées et susceptibles d'affecter les attitudes les plus bizarres. NOTE SUR L'ASTRILD RLEU {UR.EGINTHUS BENGALUS ANGOLENSIS L.) Par A. DECOUX Voici quelques détails complémentaires sur la reproduction en captivité de YUrseginthus bengalus angolensis L. dont il a été question dans un des précédents numéros du Rulletin (1). J'ai reçu ces Astrilds à la fin de l'été 1913 ; ils me furent cédés par un amateur étranger qui [les avait gardés pendant cinq mois en volière sans obtenir d'eux autre chose que des œufs clairs. A leur arrivée ici, ils furent logés dans une grande cage où ils passèrent l'hiver. A la fin de février, je lâchai les Oiseaux dans ma volière chauffée (20 à 22 degrés centigr.) et, peu de jours après leur installation, j'eus la satisfaction d'assister à un accouplement. Le mâle, un long brin de paille au bec, chante devant sa femelle en exécutant une série de petits saluts, sans quitter le perchoir, et en inclinant fortement la queue par côté ; puis il laisse tomber le brin de paille à terre, et l'accouplement a lieu. A ce moment, ces Oiseaux, d'un naturel très vif, étaient extrêmement agités. Mais ils sont très doux, et leurs querelles avec d'autres Oiseaux de leur famille, Cordons-Bleus, Grenadins, n'ont jamais été inquié- tantes. Leur nid ressemble absolument à celui du Cordon-Bleu : sur quelques brins de gros foin, négligemment posés dans un buisson, ils construisent avec des fibres végétales un nid de forme sphérique, dont l'intérieur est tissé avec soin et molle- ment doublé de plumes; l'entrée très étroite est placée sur le (1) Ihilletin, n° 15, août 1914. 100 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION noté un peu en haut. Des cinq nids construits dans ma volière, quatre étaient placés dans un buisson épais, le cinquième était plus exposé à la vue; j'en conclus qu'en liberté ces Astrilds doivent les dissimuler avec soin. Ils sont placés aune hauteur moyenne de lmS0 à 2m50 environ. Le travail est exécuté surtout par le mâle qui s'occupe souvent d"un nouveau nid alors que les jeunes n'ont pas encore quitté l'ancien. La première couvée eut lieu en mars, et elle ne réussit pas : les jeunes moururent avant d'éclore. Les œufs sont semblables à ceux des Cordons-Bleus. J'éloignai le nid et les œufs, et, quel- ques jours plus tard, les Astrilds bleus se remirent à l'œuvre : la femelle pondit de nouveau trois œufs que les deux Oiseaux couvèrent alternativement pendant douze ou treize jours. Le mâle couve ordinairement dans les premières heures de la matinée ; il ne rentre pas au nid pendant la nuit, mais se perche pour dormir non loin de sa femelle. A ma grande satisfaction, je constatai que les parents nourrissaient bien leurs jeunes. Ils s'acquittèrent avec grand soin de ce devoir pendant douze jours... au bout desquels ils abandonnèrent leurs petits. N'entendant plus pépier les jeunes, je me décidai à jeter un coup d'œil dans le nid, et j'y trouvai les cadavres de trois oiselets ayant déjà des plumes sur le dos et sur la tête. Il y a lieu de remarquer qu'à cette époque de l'année (avril), il m'était impossible de distribuer aux reproducteurs les œufs de Fourmis frais qu'emploient presque exclusivement les diverses variétés d'Astrilds pour la nourriture de leurs petits pendant les premiers jours qui suivent l'éclosion. J'étais donc réduit à la pâtée d'œufs durs et de larves de Fourmis sèches et aux graines de millet gonflées dans l'eau. Ce régime eût peut- être suffi à mener les jeunes à bien, — j'ai élevé, en effet, il y a quelques années, des petits Cordons-Bleus uniquement avec celte nourriture, — et il ne me paraît pas impossible que le décès prématuré des oisillons soit dû à l'abus des vers de farine dont les reproducteurs faisaient alors une grande consom- mation. J'ai remarqué, à maintes reprises, que ces insectes sont nuisibles à l'organisme délicat de certains jeunes Oiseaux. La troisième ponte donna cinq œufs que je confiai à un couple de Moineaux japonais dans l'espoir d'obtenir enfin un succès. Les Munies japonaises remplissent parfaitement le rôle de « remplaçantes » pour bon nombre de Plocéidés, pour la NOTE SUR L'aSTRILD BLEU 101 plupart des Diamanls, par exemple. Pour les Àstrildiens, ce mode d'élevage — qui m'a donné cependant parfois de bons résultats — ne réussit ordinairement pas : il y a disproportion entre le bec des nouveau-nés et celui de leurs parents adoptifs; d'autre part, les Âstrilds sont surtout insectivores dans les premiers jours de leur vie, et les Munies, qui s'habituent pourtant à la larve de fourmi fraîche, nourrissent surtout leurs petits de graines ramollies dans leur jabot. Pour toutes ces raisons, ce mode d'élevage donne de médiocres résultats pour les Astrildiens; cette nouvelle expérience en est une nouvelle preuve : les petits Astrilds bleus naquirent, mais ne furent pas nourris par leurs parents adoptifs. Il est impossible, à leur éclosion, de les distinguer des jeunes Cordons-Bleus. Pendant que les Munies couvaient, les Astrilds bleus faisaient une quatrième ponte de trois œufs. Cette couvée fut encore malheureuse; les trois petits, dont j'ai parlé ici, furent élevés parfaitement grâce aux larves de fourmis fraîches, mais à leur sortie du nid — à l'âge de vingt et un jours — ils furent pré- maturément abandonnés par leurs parents et moururent après que j'eus vainement essayé de les nourrir à la brochette. Ils n'ouvraient pas le bec, et 'il me fallait les alimenter malgré eux. Bref, cette fois encore, mes élèves furent perdus. Une cinquième couvée eut lieu en juillet, qui réussit à peu près : sur cinq œufs pondus, cinq jeunes naquirent et furent élevés jusqu'à la sortie du nid, mais deux seulement, deux femelles, devinrent adultes. Le mâle et la femelle nourrissent leurs petits par régurgita- tion; ils les abecquent très fréquemment; c'est le mâle qui se charge de la plus grosse part du travail. Ils vont et viennent, visitant tous les coins de la volière en quête d'un insecte, petite sauterelle, petite mouche ou autre. Mais c'est l'œuf de fourmi et la pâtée dont j'ai précédemment parlé qui forment l'élément principal de la nourriture des jeunes. A leur sortie du nid, les cinq petits étaient tous très vigou- reux; le lendemain, deux d'entre eux cessaient de voleter et mouraient peu après. Sur ces entrefaites, je découvre un nouveau nid à peine ébauché. Pour éviter un désastre complet, j'enlevai la femelle de la volière et je laissai au mâle le soin des trois jeunes survivants; l'un d'eux mourut encore, mais les deux autres furent nourris par le père et furent sauvés. 102 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Huit jours après avoir pris leur vol les oisillons mangent seuls et peuvent se passer de leurs parents. Les jeunes ressemblent aux adultes, mais les parties bleues de leur plumage sont plus pâles et surtout moins étendues; le ventre est blanc; le bec noir est orné aux commissures de deux petites verrues bleues et brillantes. Quand ils quittent le nid, leur sexe est déjà caractérisé : les mâles se distinguent par la couleur plus vive des joues et de la poitrine. La prise complète .du plumage d'adulte a lieu très rapidement. Je ne puis malheu- reusement donner aucun détail précis sur ce point, ayant été éloigné de mon élevage au moment où cette transformation eut lieu. J'en suis réduit aux remarques du domestique chargé du soin des Oiseaux, — et elles manquent de précision. J'espère pouvoir réunir mes reproducteurs en avril prochain et obtenir cette année un meilleur résultat. Quoique ces Oiseaux soient délicats, ils sont dignes d'intérêt à cause de leur grande beauté. Leur chant diffère peu de celui du Cordon-Bleu : il est plus pur, plus étendu et plus soutenu. Les femelles chantent aussi, mais moins bien et moins souvent que les mâles (1). Reichenow dislingue deux variétés ou races locales de cette forme d'Urseginthus. 1° Urseginthus bengalus angolmsis L., originaire du Sud-Est africain. Son habitat s'étend du lac Nyassa jusqu'au Natal, d'une part, et jusqu'à l'Angola, de l'autre. C'est la variété qui ressemble le plus au Cordon-Bleu; elle s'en distingue surtout par l'absence de tache rouge à la joue. Le bleu du plumage est plus éclatant. Paupière jaune; 2° Urœginthus bengalus damarensis Rchw., qui habite le Damaraland. Le plumage de la face supérieure du corps est gris brun très clair et ne tire pas sur le brun chamois comme celui de la variété précédente ou du Cordon-Bleu commun. Sous une certaine lumière, le bleu de la face inférieure a des reflets verts très remarquables. Le bas-ventre est presque blanc pur; la paupière presque blanche; le bec, plus pâle que celui des deux autres, a la pointe et le bord des mandibules noirâtres. (1) Cette remarque avait déjà été faite par Stark et Sclater sur des Oiseaux à l'état libre. NOTE SUR L'ASTRILD BLEU 103 C'est à celte dernière variété qu'appartiennent mes Oiseaux. Leur taille me semble être un peu plus forte que celle des Cordons-Bleus. Stark et Sclater (1) ont fait, sur ces Astrilds à l'état libre, quelques observations que je résume ci-après. Leurs mœurs, comme celles de beaucoup d'Oiseaux de l'Afrique du Sud, sont d'ailleurs encore à peine connues. Ils vivent ordinairement en petits groupes et se réunissent en troupes nombreuses à l'automne, quand l'éducation des jeunes est achevée. Ils semblent préférer les lieux découverts parsemés d'arbustes et surtout de buissons de Mimosas où ils se réfugient, quand ils sont effrayés, en poussant des cris aigus. Ils se nour- rissent de graines de Graminées qu'ils ramassent sur le sol. Leur nid est invariablement bâti dans un petit buisson, dans un Mimosa, à une hauteur de 3 à 8 ou 9 pieds; il a l'appa- rence d'une touffe d'herbe desséchée jetée sans soin dans un buisson; l'entrée latérale est dissimulée par les extrémités en saillie des herbes qui le forment. La ponte se compose de trois à quatre œufs blancs de forme arrondie. M. Andersson trouva, le 2 février 1867, un nid contenant cinq œufs, construit uniquement d'herbes, sans garniture intérieure. Les nids sont ordinairement tapissés de plumes. A l'éclosion, les jeunes sont nourris de vermisseaux et d'insectes. Comme tous les Oiseaux de l'Afrique du Sud, ces Astrilds sont rares sur les marchés européens. La Société zoologique de Londres reçut les premiers spécimens de cette espèce en janvier 1890. Depuis cette époque, les importateurs anglais et allemands ont mis, de temps en temps, en vente quelques sujets isolés. Ce n'est que dans ces dernières années, depuis 1910, que des collections importantes de ces Oiseaux arrivent en Europe. Je n'ai jamais rencontré ces Astrilds chez nos marchands fran- çais, et j'ai pu m'assurer qu'ils ne les connaissent pas. (1) Birds of South Africa, vol. I, p. 103-104. I/ADÉNO-CARCINOME DE LA THYROÏDE CHEZ LES SALMONIDÉS Par C. RA.VERET-WATTEL Divers Poissons delà famille des Salmonidés, mais principa- lement le Salvelinus fontinalis, vulgairement désigné par nos pisciculteurs sous le nom de « Saumon de fontaine », sont sujets aune maladie caractérisée par la présence d'une tumeur volumineuse, siégeant en arrière de la mâchoire inférieure, à l'intérieur de la cavité bucco-branchiale, vers la base des bran- chies; son développement entraîne des formations variables, suivant le sens dans lequel il s'effectue; mais il finit très sou- vent par déterminer la mort du Poisson, soit directement, soit indirectement. Une anémie, parfois extrême, accompagne d'ordinaire la maladie; mais elle peut, toutefois, manquer complètement. En Europe, c'est en 1883, dans un établissement de piscicul- ture du Tyrol (1), que cette affection fut observée pour la pre- mière fois; elle y sévit avec une réelle intensité, car, du milieu de février à la fin de juin, la mortalité ne s'éleva pas à moins de 3.000 jeunes Truites des lacs. Mais la nature des tumeurs que présentaient les Poissons ne fut pas alors déterminée. C'est seulement en 1891 qu'une semblable épidémie, survenue à Opoha, dans un des viviers de la Société d'Acclimatation de Dunedin (Nouvelle-Zélande), où l'on entretenait des Salvelinus fontinalis, donna l'occasion de constater qu'il s'agissait d'un adéno-carcinome (2), c'est-à-dire d'une maladie de nature can- céreuse attaquant la glande thyroïde, gagnant de proche en proche les muscles voisins, et susceptible de se généraliser (3). Bientôt, des observations analogues étaient faites dans d'autres établissements piscicoles de la Nouvelle-Zélande, où des Truites communes {Salmo fario), des Truites du Loch- Leven {S. levenensis) et des Truites Arc-en-ciel (S. irideus) (1) Celui de Torbole, au bord du lac de Garde. (2) De à'/()v, glande ; y.apxivoç, cancer; c'est-à-dire cancer s'attaquant aux glandes. (3) Scott. Note on the occurence of cancer in fish. Transactions and proceedings of the New-Zealand Institut, Wellington, N. Z., vol. XXIV, p. 201. l'aDÉNO-CARCINOME DE LA THYROÏliE 105 succombaient en grand nombre, principalement les sujets âgés de trois ou quatre ans (1). En 1903, le Dr Jaboulay, professeur de clinique chirurgicale à la Faculté de Médecine de Lyon, publiait un travail (2) sur les observations que lui avaient permis de faire des Salmo- nidés provenant de l'établissement de pisciculture de Thonon (Haute-Savoie), où, pendant trois années consécutives (1906- 1908), la population des bassins fut fortement éprouvée par la même maladie (3). L'année suivante (1909), plusieurs communications étaient faites à l'Association américaine pour l'étude du cancer (4) sur les très nombreux cas de tumeurs malignes constatés dans les établissements piscicoles des États-Unis, sur des Salvelinus fontinalis. Des sujets de tout âge, mais principalement les jeunes Poissons de 6 à 8 centimètres de longueur, étaient frappés et périssaient, pour la plupart, dans un espace de temps assez court. Tous ces faits conduisirent M. Harvey R. Gaylord, directeur du Laboratoire de Gratwick (à Buffalo, N.-Y.), pour l'étude du cancer chez l'homme, à entreprendre, avec le concours du Bureau des Pêches de Washington, une série de recherches sur les tumeurs de la glande thyroïde observées chez les Poissons, et le compte rendu de ces recherches a été récemment publié par les soins dudit Bureau (5). Ce travail fait connaître tout ce que l'on sait actuellement de la question (6). (1) J. A. Gilruth. Epithelioma affecting the branchial arches of Salmon and Trout. Report of the New-Zealand Department of Agriculture Division of Veterinary Science, 1902. (2) Jaboulay. Poissons atteints de goitres malins héréditaires et conta- gieux. Journal de Médecine et de Chirurgie pratiques, t. LXXIX, p. 239. (3) Les Poissons atteints étaient surtout des Ombles-Chevaliers {Salve- linus umbla), ainsi que des hybrides de cette espèce et de Truite commune, hybrides que M. l'inspecteur des Eaux et Forêts Crettiez, directeur de rétablissement de Thonon, avait obtenus par la fécondation d'œufs de Truites avec de la laitance d'Ombles-Chevaliers, et qu'il désignait sous le nom de Salmo thononensis. (4) American Association for cancer Research, metting of Nov. 21, 1909. Journal American Médical Association, Jan. 15, 1910. (5) Harvey R. Gaylord and Millard C. Marsh, Carcinoma of the thyroid in the Salmonoid Fishes. Bulletin of the Bureau of Fisheries, vol. XXXII, Washington, avril 1914. (6) On consultera aussi avec intérêt un mémoire de M. Marsh : Thyroid tumor in Salmonoids, dans les Transactions American Fisheries Society, 1910, p. 377, 1 pi. 106 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION La maladie est aujourd'hui très répandue aux Etats-Unis; on la trouve à peu près partout où est pratiqué l'élevage intensif des Salmonidés. Elle se rencontre également dans la plupart des établissements piscicoles de la Nouvelle-Zélande. Mais cette affection paraît être assez rare chez les Poissons vivant en liberté dans les rivières; encore ne la trouve-t-on, pour ainsi dire, que dans la partie inférieure des cours d'eau, là, sans doute, où la pureté de l'eau est le plus fréquemment altérée. Dans les établissements de pisciculture, les espèces et variétés suivantes de Salmonidés se montrent les plus sujettes à la maladie : Salmo salar, S. fario, S. levenensis, Salvelinus umbla et Cristivomer naymacush. Le Saumon dit « de Californie » (Onchorhynchus quinnat vel tschawytscha Walbaum), ainsi que les hybrides obtenus du croisement de ce Saumon avec les autres espèces fréquentant, comme lui, les cours d'eau tribu- taires de l'océan Pacifique (1), sont, de même, très fréquem- ment atteints. D'autres Salmonidés, notamment la Truite de mer (Salmo trutla), montrent, au contraire, une résistance presque complète à la maladie. Celle-ci est généralement endémique, rarement épidémique. Elle sévit dans n'importe quel genre de viviers, c'est-à dire aussi bien dans les bassins qui, tout simplement creusés dans le sol, se montrent pourvus d'une abondante végétation aqua- tique, que dans ceux à fond cimenté ou bien à parois recou- vertes de panneaux en bois, etc. L'analogie de cette maladie avec le goitre observé chez l'homme et dont le développement paraît être lié à certaines conditions hygiéniques défectueuses (absence d'iode dans l'air, constitution des eaux potables, soit trop crues, soit trop chargées de sels calcaires ou magnésiens, soit privées d'oxygène, etc.), les pisciculteurs américains se sont trouvés conduits à recher- cher si la nature des terrains et la qualité des eaux qui en pro- viennent, leur degré d'aération, etc., n'auraient pas une influence quelconque sur l'affection qui nous occupe; mais cette étude a établi qu'il n'en était rien. C'est ainsi qu'on a constaté, par exemple, que, dans d'excellentes eaux à Truites, les cas de tumeurs de la glande thyroïde se montraient tout aussi fréquents que dans des eaux manquant d'aération ou bien contenant de la magnésie en dissolution, eaux bien (1) Ce sont les Onchorhynchus Kisutch, gorbuscha et nerka. l'àDÉNO-CARCINOME DE LA THYROÏDtS 107 connues comme étant très défavorables à tous les Salmonidés. D'ordinaire, la maladie débute par un afflux sanguin, une hyperhémie, se produisant sur un point du plancher de la bouche ; puis, c'est à la jonction des arcs branchiaux qu'appa- raissent les premières traces de la tumeur cancéreuse, laquelle peut s'étendre de chaque côté des ouies. Parfois, des tumeurs indépendantes se montrent aussi dans la fosse jugulaire, où peuvent exister des dépôts de tissu thyroïdien normal. La tumeur principale, qui, tout d'abord, se développe vers les points où elle rencontre le moins de résistance, s'étend ensuite avec facilité, et elle peut prendra un fort volume (1) attendu que muscles, cartilages, os, tout est envahi. V Salvelinus fontinalis atteint d'adéno-carcinome de la thyroïde (2). Quand la maladie est endémique, le cours en est lent et le pourcentage de la mortalité est difticile à établir, en raison de complications, toujours possibles, résultant d'infections secon- daires, qui peuvent, elles aussi, déterminer la mort. Des Poissons parfaitement sains, introduits dans des viviers où la maladie existe à l'état endémique, l'y contractent faci- lement; tout comme l'apport de sujets malades au milieu d'une population saine peut contaminer celle-ci au point de déter- miner de véritables épidémies. D'après les observations faites, l'utilisation de matières ani- males crues, dans l'alimentation du Poisson, paraît favoriser l'apparition et un développement rapide de l'adéno-carcinome; (1) On voit parfois de ces tumeurs atteindre le volume d'une grosse châtaigne. (2) Gravure extraite de l'ouvrage de Bt. Raveret-Wattel : La Pisciculture industrielle. Ce cliché est dû à l'obligeance de l'éditeur. 108 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DACCLIMATATIOiN tandis que l'emploi exclusif d'aliments cuits ralentit, au con- traire, l'évolution de cette tumeur cancéreuse (1). Mais il est certain que l'influence nocive du genre de nourriture, dans le premier cas, se borne à faciliter l'invasion de la maladie, très probablement due à un micro-organisme, que le docteur Jaboulay (2) croyait être un sporozoaire de la famille des Myxosporidies, mais qui n'a pas encore été nettement déter- miné. Ce micro-organisme peut communiquer la maladie à des Mammifères. En administrant à des Chiens de la boue et de l'eau provenant de boissons où le carcinome régnait à l'état endémique, on a constaté, au bout de quelque temps, chez ces animaux, des modifications déjà très marquées dans l'état de la thyroïde. Les mêmes effets furent produits par des raclures des parois en ciment ou en bois d'anciens viviers, dans les- quels avait sévi la maladie. Ayant, pendant six mois, fait boire à quatre Chiens de l'eau dans laquelle une certaine quantité de ces raclures avaient macéré, on observa chez tous une hypergénèse de la matière colloïde et, chez trois d'entre eux, un développement anormal de la thyroïde (3). Chez trois autres sujets de contrôle, auxquels on donna de la même eau, après l'avoir fait bouillir, la thyroïde resta de dimension normale. Une température de 100 degrés centigrades fait donc périr l'agent pathogène. Des Poissons placés dans des conditions hygiéniques défec- tueuses, entretenus, par exemple, dans une eau que rend plus ou moins malsaine l'existence, au fond des viviers, de dépôts de matières organiques en décomposition, de restes de nourri- ture, etc., se montrent beaucoup plus sujets que d'autres à contracter la maladie, laquelle, en outre, évolue toujours plus rapidement que chez des Poissons vivant dans un milieu par- faitement sain (4). Il semble être également établi qu'une cer- (1) On a même constaté, chez de nombreux sujets, une marche rétro- grade de la maladie au bout de deux années de ce régime. (2) Loc. cit. (3) Des observations analogues ont été faites sur des Rats; mais l'action de l'agent pathogène paraissait moins vive. (4) Pendant dix-neuf années que nous dirigeâmes la Station aquicole du Nid-de-Verdier, sur les quantités considérables de Poissons qui peu- plaient les bassins, nous n'eûmes occasion de relever qu'un seul cas d'adéno-carcinome. 11 portait sur une Truite Arc-en-ciel de trois ans, l'adéno-carginome de la thyroïde 109 taine régression de la tumeur cancéreuse se produit parfois quand des soins viennent améliorer les conditions hygiéniques dans lesquelles vit le Poisson. Enfin, des cas assez nombreux de guérison spontanée ont aussi, paraît-il, été observés, prin- cipalement quand la maladie n'est qu'à son début; ces cas de guérison seraient très rares, au contraire, chez les sujets atteints depuis longtemps. L'aptitude à contracter la maladie paraît augmenter à mesure que le Poisson prend de l'âge, au moins jusqu'à ce qu'il ait atteint sa cinquième année. Les très jeunes sujets restent généralement indemnes; jamais on n'a constaté l'existence de tumeurs chez des Poissons de moins de cinq mois. Différents modes de traitement ont été essayés contre cette affection. L'emploi, sous diverses formes, du mercure, de l'arsenic et de l'iode donnant de bons résultats contre le goitre, l'utilisation de ces mêmes substances semblait tout indiquée pour combattre l'adéno-carcinome et, en effet, l'introduction d'une certaine quantité de ces substances dans l'eau de bacs, où se trouvaient placés des Poissons malades, a constamment paru agir dans un sens favorable, c'est-à-dire enrayer plus ou moins le développement de la tumeur cancéreuse. L'action du médicament se manifeste même très promptement : souvent au bout d'une période de quelques jours seulement. Le mercure et l'iode agissent même quand ils sont dilués dans des millions de parties d'eau, et l'iode se montre également efficace quand on l'introduit dans l'appareil digestif (1). Les principales recherches sur ce mode de traitement sont dues à MM. David Marine et G. -H. Lenhart, qui y ont consacré deux années d'études, et dont les travaux, publiés en 1910 chez laquelle on vit la tumeur acquérir, en quelques mois, le volume d'une petite noisette. C'était à une époque (1805) où la maladie n'avait pas encore attiré l'attention des pisciculteurs français, et nous n'en con- naissions pas la nature. Néanmoins, par précaution, le Poisson ne tarda pas à être sacrifié. C'est, sans doute, à la pureté de l'eau d'alimentation des bassins et à la propreté entretenue dans ces viviers qu'il faut attri- buer l'immunité à peu près complète dont se trouvaient jouir les Salmo- nidés entretenus dans l'établissement. (1) Essayé des deux façons, l'emploi du thymol n'a donné que des résultats négatifs. 110 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION et 191 1, présentent un sérieux intérêt (1). Malheureusement, il ne s'agit là <[ue d'expériences de laboratoire, qui, jusqu'à présent, ne semblent guère pouvoir trouver une application vraiment pratique pour le traitement de grandes quantités de Poissons, dans un établissement d'élevage industriel. Extrêmement éner- giques, les substances médicamenteuses utilisées ne peuvent être employées qu'avec de minutieuses précautions, auxquelles beaucoup de praticiens ne s'astreindraient que difficilement. Au cours des recherches ci-dessus mentionnées, on a vu des Truites des lacs succomber en peu d'heures dans une eau qui ne contenait cependant qu'une très faible proportion (1/400.000) d'iode. Des solutions à 1 millionième sont généra- lement bien supportées; mais, dans une eau à 1/600.000, des Salvelinus fontinalis périssaient au bout de trois jours. Il se produisait, sous l'action du médicament, une coagulation du mucus recouvrant le corps du Poisson. Des essais faits avec le mercure et l'arsenic, même à très faible dose, ont, très souvent aussi, causé des accidents mortels, et leur action paraît être très irrégùlière, sans que l'on ait pu en découvrir la cause. En attendant qu'un traitement euratif, pratiquement appli- cable, ait été indiqué, il convient d'agir préventivement, c'est-à-dire de mettre, le plus possible, les Poissons à l'abri des attaques de la maladie. Dans ce but, les précautions à prendre sont les suivantes : Entretenir les Poissons dans de bonnes conditions d'existence. Maintenir constamment une propreté absolue des bassins. Veiller à ce que l'eau d'alimentation de ces viviers n'y arrive pas souillée par des déchets organiques en putréfaction, après avoir coulé sur des fonds malpropres. Sacrifier immédiatement tout poisson qui vient à être atteint de la maladie, et l'enfouir profondément, loin des bassins. Désinfecter tout bassin dans lequel des cas de maladie se (1) D. Marine et C.-H. Lenhart. On the occurrence of goitre (active thyroid hyperplasia) in fish. Johns Hopkins Hospital Bulletin, vol. XXI, n° 229, avril 1910, p. 95. — Observations and experiments on the so-called thyroid carcinome of brook trout (Salvelinus fontinalis' and its relation to ordinary goitre. Journal of Expérimental Médecine, vol. XII, p. 311, 1911. — Further observations and experiments on the so-called thyroid par intérim, D' Louis Capitaine. EXTRAITS ET ANALYSES NOTE SUR L'ADAPTATION AU MILIEU CHEZ LES LÉZARDS DE LA FAMILLE « LAGERTII) L » Par Gr DE SOUTHOFF 1 . La famille des Lacertidx est une des plus nombreuses parmi les Sauriens. Certains genres, comme celui de Lacer ta, comptent un grand nombre d'espèces présentant une richesse extraordi- naire de variétés et de formes, ces dernières souvent locales. C'est de ce genre plus particulièrement que nous nous occu- perons. L'orientation de la Zoologie moderne est éminemment biolo- gique. Renonçant à se borner aux données de la systématique, et n'exagérant pas la tendance d'étudier les animaux unique- ment à l'aide du microscope, on commence à comprendre la nécessité de les étudier vivants. L'étude des animaux post mor- tem présente, en effet, des lacunes que, ni le elassiiîcateur le plus averti, ni le micrographe ne peuvent combler. Sans admettre que l'on ne puisse avec profit étudier les animaux morts, nous croyons que l'avenir de la science dont nous nous occupons demande impérieusement de les étudier vivants. Les nombreux Jardins Zoologiques et laboratoires de Zoologie s'y rattachant, qui ont été créés ces dernières années, prouvent que cette idée commence à être générale parmi les naturalistes. Étudier les Lacertidésdans un laboratoire, installés dans des (1) Extrait des Procès-Vrrbau.r de la Société lÀnnéenne de Bordeaux, Séance du 18 mars 1914. EXTRAITS ET ANALYSES 123 Terrariums construits ad hoc, voire même dans un Reptiliarium, est très bien. Mais cette étude serait fort incomplète si on ne tenait compte, avant tout, de la façon dont ces Sauriens vivent en liberté. Car il est inexact de croire que les Lézards en capti- vité vivent d'autant mieux que leurs conditions de vie à l'état libre ont été reproduites dans leur cage. Comme presque tous les animaux, ils doivent être traités en captivité différemment de ce qu'ils le sont par la nature à l'état sauvage. Des précau- tions hygiéniques et diététiques sont nécessaires pour les conserver prisonniers en bonne santé. Les directeurs de Jardins zoologiques et les amateurs d'animaux le savent bien. Ceci dit, on comprendra aisément que les expériences que l'on peut réussir avec des Lézards dans un terrarium ne corres- pondent pas toujours à ce qui se produit pour les mêmes dans la nature et que l'on tente de reproduire. C'est pourquoi nous négligerons de les prendre en considération. Les phénomènes de Mimétisme défensif si communs dans certaines classes d'animaux semblent être, à première vue, également l'apanage de ces Reptiles. Leur coloration poly- chrome, la diversité très grande des détails, tout en gardant un aspect général uniforme, la variabilité de la taille semblent être autant d'arguments à l'appui de cette thèse. Mais dans la généralité des cas il en est tout autrement. Peu d'animaux s'adaptent moins que les Lézards à l'endroit où ils vivent. Quoique leurs moditications s'obtiennent avec une facilité dépassant les limites ordinaires pour les autres familles, elles sont en contraste avec les règles même élémentaires du Mimétisme. Généralement, ils ne présentent pas les modifica- tions qui seraient aptes à les mieux cacher aux yeux de l'en- nemi et leur corps ne se transforme pas selon les besoins que leur crée un nouveau milieu. Pour ce qui est de la coloration, facteur important entre tous en fait de Mimétisme, il est hors de contestation que les cou- leurs les plus ordinaires chez ces Reptiles sont les mêmes que celles des endroits où ils habitent (sols, murs, rochers, ar- bres, etc.) . Mais les Lézards d'une couleur ne vivent pas dans un endroit ayant la même couleur. Si leur coloration est d'une teinte choisie parmi celles qu'emploie la nature pour parer les endroits habités par eux, elle n'est pas cette même teinte. Des Lézards bruns vivent sur des murs gris, des Lézards verts sur des terres brunes, des Lézards gris dans des prairies vertes et 124 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION ainsi de suite. En disant brun, gris, vert, etc., nous entendons parler de la coloration des parties du corps visibles à l'œil d'un observateur. Les autres parties présentent souvent d'autres couleurs aussi curieuses qu'imprévues, leur étude n'est pas du ressortissant de ces notes. 11 résulte de ce que nous avons dit que, dans la généralité des cas, les Lézards se détachent nettement du fond sur lequel ils se trouvent habituellement. Il n'y a donc pas, tout au moins, d'Homochromisme. Il n'y a pas non plus de Mimétisme puisque apparemment l'animal est, de par le contraste que nous venons d'expliquer, exposé aux regards de tous, amis et ennemis. Et pourtant il se dérobe à nos yeux. Mais comment? Parce que le contraste net, violent parfois de sa coloration avec celle du milieu où il se trouve n'est pas un heurt; en d'autres mots, s'il est visible, il n'est pas voyant, et s'harmonise avec celui-ci. Cette remarque, qui fait loi dans la catégorie d'animaux dont nous nous occupons, peut être sans doute généralisée à beau- coup d'autres. Elle est le renversement du phénomène le plus ordinaire du Mimétisme : l'adaptation de la couleur. Nous verrons plus loin que les facteurs nécessaires à la réussite des autres cas sont également renversés ou inexistants. Mais, si les moyens diffèrent, le but obtenu, vis-à-vis de l'homme tout au moins, est le même; car dissimulé ou harmonisé, l'animal se dérobe à nos yeux. On pourrait seulement faire observer que, dans le cas de l'harmonisation, une règle d'esthétique natu- relle — et inconsciente — préside aux efforts scrutateurs de l'oeil. C'est intentionnellement que nous ne tenterons pas ici d'expliquer les différentes théories émises jusqu'à ce jour sur ce sujet. Cela sortirait des limites de ces notes et n'aurait aucun but pratique. Qu'il nous suffise de relever une chose : c'est que ce renversement dont nous avons fait mention semble n'avoir pas été noté par ceux qui se sont occupés de la question. Peut- être est-ce parce que les théories du Mimétisme, dans leur ingénieuse logique, semblaient appuyées aux faits d'une façon indéniable. Pourtant la vérité se dégage d'une généralité de faits et non pas de quelques observations, souvent inductives, qui peuvent viser des cas particuliers ou des propriétés diffé- rentes. Ceci dit surtout en vue de parer l'objection très juste que l'on pourrait nous faire en citant les phénomènes plus ou moins rapides de changement de couleur si communs, entre EXTRAITS ET ANALYSES 125 autres, parmi quelques espèces de Geckonidés (qui ne sont, du reste, pas de la famille dont nous nous occupons). Cette remarque est si simple qu'elle n'exige aucun corollaire. Que Ton renverse, si on le veut, les énoncés habituels du Mimétisme, et on pourra les appliquer avec succès aux Lézards de la famille Lacer tidse. Quelques exemples suffiront à en pré- ciser la clarté. Le groupe Lacerta mVich's Laurenti, aux vives couleurs, où le vert brillant prédomine, semblerait devoir habiter de préfé- rence les prairies, les talus verdoyants. Il n'est pas rare, en effet, de rencontrer un Lézard vert, dans un champ, occupé à courir derrière quelque Insecte. Mais où habite-t-il, où se tient-il immobile sous les rayons bienfaisants du soleil? Presque tou- jours sur des tas de pierres, sur un sol nu, quelquefois sur de vieux troncs d'arbres, c'est-à-dire dans des endroits où sa cou- leur tranche nettement sur le fond naturel. Les Lézards verts des Pouilles, particulièrement beaux comme couleur, habitent des landes dénudées de toute végétation, comme les Lacerta ocellata Daudin, dont le vert est tout aussi magnifique, dans les campagnes de la péninsule Ibérique. On dit que les Lacerta viridis habitent en Dalmatie parmi les rochers rougeâtres si caractéristiques de cette contrée. Dans les pays de l'Europe centrale, neuf fois sur dix, la demeure d'un Lézard vert se trouve loin des prairies, dans des endroits rocailleux, sur un fond gris ou brun. Un petit Lézard dont la couleur ne le cède en rien, comme vert brillant, aux Lac. viridis, Lac. taurica Pallas, var. jonica Lehrs, habite, à Corfou, parmi les sombres feuillages de lierre qui recouvrent les vieux murs, ou encore sur le sable jaunâtre de la côte. Et pourtant sa coloration d'un vert clair aux tons éblouissants s'accommoderait mieux du voisinage de la végétation quasi-tropicale de cette île. Les Lézards de la Subsp. neapolitana Bedriaga, du groupe muralis, présentent presque tous une coloration verte, plus ou moins étendue, du dos. Mais il est bien rare que les variétés de cette sous-espèce se trouvent dans les champs. Leur vie se passe à côté de ceux-ci, où elles ne vont même pas pour se cacher mais seulement pour y poursuivre leur proie si l'occasion s'en présente. Leur habitat est généralement dans les landes sablonneuses, le long des chemins, aux bords des rivières et de la mer. Certaines formes mélaniques, comme les Lézards des 126 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D 'ACCLIMATATION Faraglioni, près de Capri, vivent sur des rochers grisâtres où elles sont très visibles à l'œil nu. Il est évident que l'adaptation au milieu par la coloration n'existe pas dans ces cas. Il faudrait peut-être rechercher des raisons climatériquespour se rendre compte de la variation de cette dernière. Algiroides nigropunctatus D. et B., dans sa forme de Corfou, est brun foncé sur le dos, et vit habituellement sur les murs blanchâtres et les claires constructions de cette île. Par contre, le même Lézard, en Istrie, se trouve souvent parmi les rochers rougeâtresde cette région dans sa forme grise. Son congénère, Algiroides Fitzingeri Wiegmann, habite, en Sardaigne, de pré- férence dans les fentes des vieux arbres; sa couleur brune se confond avec l'écorce de ceux-ci. Dans ce cas, l'adaptation semble parfaite. Mais ce petit Lézard se trouve le plus souvent au pied des arbres où il a son habitation, sur des pierres grises, parfaitement visibles. Les exemples pourraient se multiplier pour Lacerta muralis Laur., dans ses variétés lilfordi Giinther (forme noire de l'île del Aire, près Minorque, et autres îlots des Baléares); quadrilineata Gray, de Corse et de Sardaigne; fïumtma Werner, de Dalmatie (la forme olivacea si commune, prèsdeZara en particulier); nigriventris Bonaparte, des environs de Rome; adrialica Werner, de Pelagosa piccola et de l'îlot Susac (près de Lissa) ; pityasensis Boscà, des îles Pityuses (si toutefois on regarde ce Lézard comme appartenant à l'espèce L. muralis Laur.), pour Lacerta agilis WolfF., dans ses variétés orientales; Lacerta oxycphala D. et B.; Lacerta êugesi Milne- Edwards, de Madère. Les Lézards des îles Canaries (L. galloii D. et B., L. simonyi Steindachner, L. allantica Pelers et Doria) semblent présenter le même cas, mais nous n'avons pas assez de données sur les endroits qu'ils habitent pour pouvoir l'affirmer. Nous avons dit que les Lézards de la famille Lacertidsc pré- sentaient une très grande variété dans la conformation de leurs membres. C'est, en effet, vrai et il semblerait que les modifica- tions dans la forme des doigts, de la queue, du ventre devraient être en rapport direct avec le lieu de leur habitation. Pourtant, ces modifications sont souvent d'ordre pathologique ou parasi- tologique, et se produisent sans que Yhahilat y influe même de façon indirecte. Dans ce second cas également, nous ne croyons pas que ce soit, chez ces animaux, l'espèce qui s'adapte EXTRAITS ET ANALYSES 127 au milieu. Peut-être un coefficient plus sérieux pour l'obtention de ces modifications est la nourriture. Par la chasse de tel plutôt que de tel autre gibier, les Lézards contractent des défor- mations, tout comme les hommes sont sujets aux maladies dites professionnelles. Mais leur caractère n'étant jamais héré- ditaire, elles ne semblent pas être prises en considération pour affirmer l'existence d'un phénomène de Mimétisme définitif par adaptation, même si, par suite de ces modifications, l'animal pouvait mieux se cacher ou, en général, mieux vivre dans un certain milieu donné. Au nombre de ces modifications, je cite- rai les mutilations que présentent souvent aux doigts les adultes (les o* plus que les 9) de certaines variétés de L. muralis et quelquefois L. viridis et L. ocellata(l), le ventre exagéré- ment large et plat de beaucoup de Lézards insulaires, le renfle- ment caractéristique de la queue, le plus souvent vers son milieu, de ces derniers. Nous excluons naturellement les mala- dies épidémiques dont sont atteints certains Lacertidés. Le troisième moyen dont dispose la nature pour varier l'aspect des Lézards est leur taille. Celle-ci est des plus contradictoires. Les animaux de la faune des îles passent, à juste titre, pour avoir une taille plus petite que ceux du continent. Pourtant les Lézards des îles ont souvent une taille supérieure à celle de leurs confrères en espèce et en variété du continent. Quelquefois, le contraire arrive. Ainsi, par exemple, la Subsp. neapolitana Bedr. compte des représentants de très grande taille dans le sud-ouest de l'Italie, tandis que les mêmes des îles Lipari sont remarquables par leur petite taille. Sans vouloir tirer une conclusion définitive de nos observa- tions il semble impossible, toutefois, de ne pas douter sérieu- sement des théories du Mimétisme chez les Lacertidés devant une quantité de faits absolument contraires aux affirmations courantes de celui-ci. Ainsi que nous l'avons dit, cette classe d'animaux est réputée pour sa variabilité. Même en excluant, pour les raisons énoncées, les expériences que l'on a pu réussir en tenant captifs les Lézards et en se bornant à la constatation de ce qui se produit en liberté, on ne peut nier que les moyens 1) On a dit que, pour les petites espèces vivant sur des îlots, les Crabes étaient des ennemis en tant qu'ils leur mangeaient les doigts. Nous ue le croyons absolument pas. Les éboulis continuels des pierres sous lesquelles les Lézards se cachent en sont plus vraisemblablement la cause. 128 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION d'adaptation défensive n'existent pas chez ces animaux. Tout au plus pourrait-on objecter que ce que nous avons appelé règle d'harmonie entre les Lézards et leur habitat a le même but. C'est là encore une chose à prouver et qui dépend évidemment de facteurs tels qu'il nous est impossible de les apprécier à leur juste valeur. Cette règle, en effet, se base sur le sentiment esthé- tique — même inconscient — du sens visuel de l'homme; nul ne nous assure qu'il soit le même chez les animaux qui forment le groupe très nombreux des ennemis naturels de la famille Lacer lidx . A PROPOS DE LA LUTTE CONTRE LA FURONCULOSE DES SALMONIDÉS Le Bulletin de pêche et pisciculture, publié à Neufchâtel, conseille les moyens suivants pour combattre cette redoutable affection des Salmonidés : « Exploiter dune façon aussi intensive que possible les eaux dans lesquelles sévit la maladie. Tous les Poissons morts que l'on vient à découvrir doivent être recouverts de chaux et enterrés profondément. « Les engins de pêche ayant servi dans les eaux contaminées sont à désinfecter soigneusement avant nouvel emploi. « Dans les étangs, on peut employer le procédé de désinfection suivant : faire dissoudre 7 grammes de permanganate dépotasse par mètre cube d'eau. Une solution aussi diluée ne peut nuire aux Poissons, mais elle tue les Bactéries qui déterminent la furonculose. Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux, imprimeur, 1, rue Cassette. EN DISTRIBUTION Dixippus morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUCHER. iraines offertes par le Dr G. V. PERBZ. Echium Bourgxanum, — simplex. funiperus Cedrus. — bermudiana. Statice frutescens. — arborea. — Perezii. — brassicxfolia. — brassicsefoliaXimbricata. Statice PeresiiX.imbrica.ia. Convolvulus floridus . Crotalaria agatifolia. Cytisus filipes. — spachianus. — stenope talus. (Plantes de serre froide.) Graines offertes par M. MOREL. Acacia cul tri for mi s. Acacia leiophylla. Pinus oocarpa. Pithecoctenium muricatum. Angophora lanceolata D. C. — subvelutina Mull, Bauhinia purpurea Callistemon lanceolalum. Dracœna draco. Graines offertes par M. GOFFART, de Tanger. Cratxgus nitida. — prunifolia. — succulenta. Acacia. — falcala. Graines offertes par M. BOIS. i Chenopodium amaranticolor. S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES 200 Cliamxrops excelsa de 1 à 15 fr. Basset griffon I tricolore, 3-2 cm., 2 ans, parfait sur bêtes puantes ï et tous gibiers, 200 francs. Basset griffon, âgé, ancien chien de tète, 25 frs. LEROUX, 2, rue Jean-V, Nantes. Poissons exotiques. Plantes aquatiques. M. LEFEBVRE, 53, rue de Saint-Quentin, Nogent- sur-Marne (Seine). Offre (échange ou vente) : 1 femelle Daim mou- cheté 1912, et 2 femelles Daim moucheté 1913. Demande : Biche Sika et femelle Gervicapre. M. JOUFFRAULT, Argenton -Château (Deux-Sè- vres). A vendre : Chevreaux et chevrettes nubio-alpins, ; sans cornes, grosses oreilles tombantes, superbes animaux sélectionnés, en vue énorme production 1 îl 1 \ 1 f* î1 A BOUCHACOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- et-Loire). Chèvres laitières, 2 ans, sélectionnées, syrio-alpi- nes; Chiots Bulls français, pedigree. Une portée | Chats Bleu de Perse (Angora). 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Les Membres de la Société qui désirent obtenir des, cheptels sont priés d'adresser leurs demandes au Secrétariat, 38, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et a mesure des disponibilités- SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondée le iO Février {864 Reconnue d'utilité publique par décret en date du Si Février i856 33, RUE DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 Président, M. Edmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice- Présidents. ( Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Pans. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires. t Germain, Paris (Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Gh. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sbbillottb, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-etrMarne). Membres du Conseil M. Lb Mtre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. "Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilty-sur-Seine. _ Achalmb, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andneux, Pans. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D' P. Marchai,, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du - Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61 rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-BuissoD (Seine-et-Oise). Lbcomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris. Pendant Tannée. 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril Mai Novembre Décembre 14 11 11 22 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d' Ornithologie (Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi , 4 i 18 18 1 15 i :; 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les >ersonnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Jôciété, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres dujjour mensuels des séances. L'ACCLIMATATION DANS L'ARCHIPEL DE LA MANCHE Par PIERRE-AMÉDÉE PICHOT. Tout le monde connaît les îles de la Manche, sinon pour avoir visité ce curieux archipel détaché des côtes de la France, du moins pour en avoir entendu parler. En dehors des grandes îles d'Aurigny, de Guernesey, de Sercq et de Jersey, il y a une foule de petits îlots de moindre importance groupés autour de ces sentinelles avancées du Cotentin, comme des poussins autour de leurs mères. Pour être moins fréquentés, ces îlots n'en sont que plus intéressants pour le naturaliste, car ils ser- vent de refuge à une foule d'Oiseaux qui y trouvent, dans des rochers inaccessibles et des falaises abruptes, une protection efficace, autant contre les tourmentes d'une région orageuse que contre les entreprises dévastatrices de l'homme. De celles- ci, cependant, les Oiseaux n'ont guère à souffrir ; la population laborieuse des îles de la Manche, entièrement absorbée par les soins d'une culture avancée et d'un élevage perfectionné, a mieux à faire que de disputer aux volatiles les roches stériles qu'ils occupent sans ravager les champs cultivés. Nous retrou- vons, chez ces intelligents insulaires anglo-normands, ce large esprit de tolérance à l'égard de la faune ailée, si louable chez les habitants de la Grande-Bretagne et grâce auquel nous voyons, dans les îles de la Manche, comme dans tant de cam- pagnes anglaises, les Oiseaux vivre avec les habitants sur un pied d'intimité que l'on ne constate malheureusement pas sur le Continent. « Soigneusement protégés par la loi et, mieux encore, par les mœurs des habitants, a dit un historien des îles de la Manche (A. et C. Frémines), les Oiseaux sont presque familiers. Mille chanteurs, Pinsons, Roitelets, Merles, Alouettes, Chardonne- rets, prennent leurs ébats dans la campagne et rien n'est char- mant comme de voir dans les havres et sur les bassins des ports, les Mauves, les Mouettes, les Goélands voler, picorer, nager, au milieu des navires où travaillent les calfats et les matelots. » Le climat des îles de la Manche est très particulier et de nature à favoriser l'acclimatation de plantes et d'animaux exotiques. Si les tempêtes parfois y font rage et lancent contre BULL. SOC. NAT. ACCL. PR. 1915. — 9 130 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION les falaises et les rochers ces lames furieuses qui ont violem- ment arraché l'archipel à la mère-patrie, le tiède courant des eaux du Gulf Stream, partant des Antilles pour venir mourir le long des côtes de la Norvège, y apporte quelque chose des chaleurs des régions tropicales et fait oublier les accès de colère de l'Océan. L'action de ce courant, combinée avec la fertilité d'un sol granitique sur lequel les brumes maritimes viennent se condenser, donne aux terres de l'archipel une fécondité merveilleuse qui a permis aux arbres et aux plantes des pays méridionaux de prendre racine dans les îles et d'y progresser. Les Orangers et les Citronniers y croissent en pleine terre ; des haies de Géraniums, de Rhododendrons et de Fuchsias entourent les habitations ; les Eucalyptus, les Aloës, les Figuiers, les Mûriers, les Myrtes, les Chênes-verts peuvent être comparés aux plus belles végétations de la côte méditer- ranéenne. On conçoit que l'horticulture ait profité de conditions aussi favorables pour prendre dans les îles un très grand développe- ment. La culture maraîchère et la production de primeurs trouvent un débouché avantageux sur le marché de Londres, desservi par un service régulier et rapide de steamers. D'abon- dantes fumures augmentent la fertilité du sol et sur de grands espaces, des châssis et des serres dont les premières furent construites à Guernesey en 1792, hâtent la maturité de tomates et de raisins dont les grappes colossales pourraient rivaliser avec celles que les envoyés de Moïse rapportèrent du torrent d'Escol, dans la terre de Chanaan. Si l'industrie humaine a puissamment contribué à enrichir la flore des îles de la Manche, c'est le hasard qui a doté Guer- nesey d'une de ses plus belles fleurs. Il y a deux siècles envi- ron, un navire venant du Japon fit naufrage sur ses côtes. Il y avait, dans la cargaison de ce vaisseau, un certain nombre de bulbes d'un beau Lys de l'Extrême-Orient. Ces bulbes furent jetés sur le sable de la grève avec les épaves du navire et ils y prirent racine. Le fils du gouverneur de l'île pour le roi Charles II, l'Honorable Charles Hatton, se trouvait être un grand amateur de jardins; il fut frappé de la beauté des fleurs inconnues qui surgirent inopinément sur la plage. Il recueillit les naufragées et le sol et le climat convinrent tellement à la nouvelle plante qu'elle prit un développement inusité et se modifia au point de mériter une appellation spéciale. Aujour- ACCLIMATATION DANS L'ARCHIPEL DE LA MANCHE 131 d'hui Y Amaryllis Sarmiensis ou Lys de Guernesey est l'objet d'un commerce qui n'est pas sans importance. On en voit des champs entiers, comme de Tulipes et de Jacinthes en Hollande, et de juin en août, les horticulteurs en exportent les bulbes en Angleterre et sur le Continent. Ces bulbes sont plantés en pots pour fleurir en septembre; mais, ailleurs que dans les îles, il ne faut pas compter en obtenir une seconde floraison ; même à Jersey, ce bel Amaryllis dégénère rapidement et ne donne plus d'aussi belles fleurs que dans sa patrie d'adoption. Je ne parlerai que pour mémoire des races bovines des îles de la Manche ; elles en constituent une des principales richesses. Isolées sans doute du Continent par le cataclysme géologique qui sépara les îles de la terre ferme, ces races ont une grande analogie avec nos petites races de Bretagne; sous l'influence du climat, elles se sont spécialisées comme le Lys du Japon. Elles ont acquis des caractères propres de con- struction, de couleur et de lactation, jalousement conservés par les éleveurs qui n'admettent même pas le croisement des types distincts, localisés dans les différentes îles. Mais, pour complé- ter le tableau des acquisitions exotiques de l'archipel de la Manche, il faut y ajouter l'acclimatation sur l'île de Herm d'un Kangurou d'Australie. Comme la plupart de ses grandes voisines, Herm est un plateau ondulé reposant sur une base granitique à 3 kilo- mètres à l'est de Guernesey ; elle n'a que 3 kilomètres de long sur un peu moins de 1 kilomètre de large. L'île fut achetée il y a quelque trente ans par une société financière, la West Bank Cie et le concessionnaire de la chasse, le prince Bliicher, qui passait quelques mois d'été dans le vieux ma- noir y introduisit des Wallabies d'Australie ou Kangurous de Bennett; trois couples d'abord, puis trois autres, à quelques années d'intervalle. Ces Marsupiaux ont tellement multiplié, qu'il a fallu, il y a trois ans, en diminuer considérablement le nombre, tant pour protéger les récoltes que pour les empêcher de déranger le gibier. Dans leurs courses nocturnes, il leur arrivait de bondir au beau milieu des compagnies de Per- dreaux. Les Oiseaux affolés par cette interruption subite de leur sommeil, s'envolaient, vu le peu de largeur de l'île, au- dessus de la mer et se noyaient. Aujourd'hui, le troupeau de Kaugurous de Herm se compose d'une cinquantaine d'animaux ; ils vivent absolument à l'état 132 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION sauvage, sans qu'il soit besoin de pourvoir à leur nourriture. Ils se reproduisent avec une régularité parfaite. Les accouple- ments ont lieu vers le mois d'octobre, et en mars les jeunes sont déjà gros dans la poche de la mère où ils ont subi l'évolu- tion commune à tous les Marsupiaux. Ils sont assez farouches et se dissimulent le jour dans les fourrés où il est assez dif- ficile de les voir et ce n'est pas sans peine, qu'il y a trois ans, on en captura un certain nombre qu'on voulait mettre en par- quet pour les avoir sous la main. On sait que diverses espèces de Kangurous ornent certains grands parcs des résidences seigneuriales anglaises, comme chez le Duc de Bedford, Sir Ed. Loder et Lord Rothschild mais aucune de ces colonies n'a l'importance de celle de Herm qui complète si heureusement la série des acclimatations dont les îles de la Manche ont bénéficié. Le comte Lothaire Bliîcher de Wahlstatt qui habite aujourd'hui la résidence seigneuriale est un descendant du fameux maréchal des guerres du siècle dernier. Il est né dans l'île et y a acquis la nationalité anglaise. Son beau-frère, le prince Nicolas Radziwill a été tué glorieuse- ment dans les rangs de l'armée Russe au mois de novembre dernier, en emportant d'assaut une position prussienne. De sorte que si l'on se rappelle que des éléments anglais et fran- çais ont contribué à former la population des îles delà Manche, on reconnaît que l'acclimatation des races humaines n'y a pas trouvé des conditions moins favorables à son développement que celle des êtres inférieurs. LA GUERRE ET LE GIBIER Par LOUIS TERNIER. Tous ceux qui se sont occupés d'observer les Oiseaux ont souvent remarqué que ce sont généralement les espèces les plus farouches et sauvages quand elles sont en liberté qu'on parvient à familiariser le plus rapidement lorsqu'on les tient en captivité. Des Oiseaux inabordables à l'état sauvage viennent, au bout de très peu de temps, manger dans la main de celui qui est chargé de les soigner et de les nourrir. LA GUERRE ET LE GIBIER 133 Toutefois, cette tendance à la familiarité se remarque surtout chez les Oiseaux migrateurs et plus particulièrement chez les Oiseaux d'eau, de marais, de rivage, chez ceux surtout qui naissent loin des lieux habités par l'homme. Les Oiseaux sédentaires demeurent toujours plus farouches, quand ils sont pris à l'état adulte. Les observations que j'ai pu faire au cours de la guerre ont, pour moi, confirmé cette règle, je ne dirai pas d'une façon générale, car avec les Oiseaux, dont les espèces sont ni nombreuses, il est toujours difficile de généraliser, mais d'une façon assez régulière. J'ai déjà indiqué dans une notice, parue il y a deux ou trois ans dans ce Bulletin, combien les Oiseaux migrateurs qui arri- vent sur nos marais et sur nos côtes sont peu farouches quand ils n'ont pas encore été chassés et quand ils viennent de pays où ils n'ont pas encore fait la rencontre de l'homme, rencontre où ils sont généralement accueillis à coups de fusil. Les Echassiers et les Palmipèdes se laissent alors très facilement approcher le premier jour, que dis-je la première heure, car toute démons- tration hostile les fixe une fois pour toutes sur les dangers d'une trop grande familiarité avec l'espèce humaine. L'année dernière, la chasse n'a pas été autorisée en France, pas plus sur les marais que sur les bords de la mer. Jusqu'au 1er août, on avait, en réalité, pu chasser un peu sur les grèves et sur les marais, mais dès le 1er août, le gibier qui est arrivé en France, accomplissant sa migration, y a joui, pendant quelque temps, d'une absolue sécurité; plus tard, d'une sécu- rité seulement relative. J'ai pu alors constater, comme tous ceux qui ont, comme moi, cherché à observer les Oiseaux sur les marais et au bord de la mer, que tous étaient d'une familia- rité surprenante. Les Courlis, si farouches en temps ordinaire, se laissaient approcher à quelques pas et venaient même se poser devant moi. Ils allaient picorer sur le sable, presque aux pieds de la sentinelle d'un poste militaire établi à un point stratégique de la côte. Les Chevaliers, Pluviers et autres petits Echassiers ne partaient que quand on les y forçait, pour ainsi dire, et se reposaient quelques pas plus loin. Sur les marais, les Bécassines ne se levaient que sous mes pieds. Quant aux Canards sauvages et aux Sarcelles, sur les bancs d'alluvions de la Basse-Seine, ils ne s'enlevaient des mares des gabions, où ils venaient s'abattre en plein jour, que très près des arrivants, qui auraient pu en tuer en leur jetant un bâton; leurs bandes 134 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ .NATIONALE D ACCLIMATATION étaient en effet très serrées. Actuellement (mars), sur un marais dont j'ai la chasse et où on n'a pas tiré un coup de fusil depuis la guerre, des Canards sauvages cantonnés ne semblent pas plus farouches que des Canards domestiques. Ils déambulent tranquillement, sans se presser, devant ceux qui font le simu- lacre de vouloir les approcher pour les saisir. Par contre, partout où j'ai parcouru les plaines, puis dans les vergers et les jardins, les Oiseaux sédentaires m'ont paru aussi sauvages que par le passé. Les Perdreaux m'ont même semblé partir plus loin qu'à l'ordinaire vers les mois de septembre et octobre. Quant aux Merles et Oiseaux similaires ils ont été tout l'hiver extrêmement sauvages dans la localité que j'habite. Je dois noter cependant que les Etourneaux, innombrables sur les marais et qui sont venus régulièrement s'abattre dans les grands arbres des routes voisines de ces marais et dans ceux de mon verger, ont été très familiers ; leurs bandes immenses couvraient les arbres et quand je frappais dans mes mains pour les faire partir ils faisaient une courte randonnée autour de moi, me frôlant presque et m'assourdissant par le bruit de leurs ailes, puis venaient se poser de nouveau au-dessus de ma tête sur les arbres qu'ils venaient de quitter. Mais les Etourneaux ne sont pas, à proprement parler, des Oiseaux sédentaires. Ce qu'il était très intéressant de con- stater c'est que les migrateurs, et surtout les Oiseaux d'eau, ont été, pendant la guerre, très familiers, alors que le gibier sédentaire a été à peu près aussi sauvage, du moins d'après mes observations personnelles, qu'en temps normal. J'en ai conclu que l'atavisme a une plus grande influence sur les espèces sédentaires que sur les espèces migratrices. Ces der- nières naissent, du reste, généralement loin de l'homme. Les espèces sédentaires sont, au contraire, élevées à ses côtés. Elles le connaissent par suite mieux et apprennent vite à s'en défier. Les observations qui précèdent peuvent ne pas concorder, peut-être, avec celles qu'auront faites d'autres observateurs. Elles sont locales, mais je n'ai pas été seul à les recueillir ici. Diverses modifications ont pu être apportées, aussi, comme elles l'ont été en divers endroits que je connais, aux habitudes des migrateurs par des infractions à la défense de chasser. On ne se prive guère, sur certains marais et sur certaines pro- priétés, du plaisir de la chasse, car la surveillance s'est bien LA RIPOSTE DU PLUMASSIER 135 relâchée depuis le début des hostilités. Cependant, la très grande familiarité des Oiseaux de passage, à la fin de Tannée 1914, est indiscutable, elle a été déjà signalée et cette particularité vient pour moi confirmer l'assertion de Toussenel qui soutenait que FOiseau ne demande qu'à se rallier à l'homme. Malheureusement, l'homme en a décidé autrement. Il est, en effet, regrettable de le constater c'est seulement quand nous sommes en guerre avec nos semblables que nous consentons à faire la paix avec les Oiseaux. LA RIPOSTE DU PLUMASSIER Par R. de NAJAG L'approbation donnée par la Société nationale d'Acclimatation de France à toutes les mesures prises par les Gouvernements de différents pays pour assurer la protection des Oiseaux, notamment l'interdiction de l'importation des plumes d'Oiseaux sauvages aux Etats-Unis et la loi en discussion au Parlement anglais qui doit avoir le même effet pour la Grande-Bretagne, a soulevé dans le commerce de la plumasserie des protestations intéressées qui ont été formulées dans deux brochures que la corporation a abondam- ment répandues dans le public. Les faits présentés d'une façon incomplète et inexacte avaient été si complètement discutés et élucidés dans les séances de la Société d'Acclimatation que nous avions trouvé inutile de revenir sur une question épuisée, mais nos collègues ne seront peut-être pas fâchés de lire la spirituelle critique d'une des brochures ci-dessus qu'un de nos collègues, M. de Najac, a publiée dans Le Chenil, l'organe officiel du Jardin d'Acclimatation. C'est ce qui nous a décidé, à la demande de plusieurs de nos membres, à reproduire la réponse de M. de Najac à la riposte du plumassier. Cette réponse peut s'appliquer aussi bien à La P lame des Oiseaux et l'Industrie plumassière qu'à l'Emploi rationnel de la plume des Oiseaux sauvages que le collaborateur du Chenil a eu spéciale- ment en vue. Le premier de ces manifestes se réfute d'ailleurs de lui-même, car, tandis qu'il insiste particulièrement sur le tort que ferait à l'industrie plumassière l'interdiction d'employer la plume d'Oiseaux sauvages dans les Modes, l'auteur n'en cite pas moins, avec photo- graphies à l'appui, toutes les imitations que l'on peut fabriquer avec la plume d'Oiseaux domestiques, ce qui ne serait pas pour retirer le 136 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION pain de la bouche des nombreuses ouvrières, jeunes filles et enfants qu'une des illustrations du volume nous montre sortant d'un atelier de plumasserie pour faire appel à notre sensibilité. Les illustrations de ce volume sont d'ailleurs habilement combinées pour nous donner une haule idée de l'importance de la Corporation, notam- ment la vue du Siège social de la Chambre syndicale des fabricants de plumes fantaisies pour modes, et l'on pourrait mettre sur le portail de ce somptueux hôtel, en le modifiant légèrement, le distique que Scribe avait placé sur la porte de sa villa de Séricourt : « Le Théâtre (Commerce) a payé cet asile champêtre; « Vous qui passez (volez), merci, je vous le dois peut-être. » P. A. P. Au printemps dernier, je reçus une brochure qui essaie de réfuter les accusations de barbarie que le monde ornitholo- gique formule, depuis quelques années, contre les négociants en plumes. L'un d'eux est l'auteur de cette brochure. Analy- sons sa riposte. Notre plumassier est un lettré. Afin que nul ne l'ignore, il commence par citer Voltaire, Victor Hugo, Schiller, Waldeck- Rousseau et la reine de Saba. Noire plumassier est un diplomate, et en celte qualité il avertit l'Angleterre que, si elle interdit l'importation des plumes de luxe, une « terrible révolte » la menace dans les Indes. Notre plumassier est un philanthrope. Il veut assurer le pain de cinquante mille (?) ouvriers des deux sexes, qui crèveraient de faim, si l'on réfrénait le commerce des plumes. Les chemins de fer ont-ils tué tout le personnel que les diligences faisaient vivre? Mais oui. Les automobiles ont-elles obligé les cochers, les palefreniers, les selliers, les maquignons à se suicider? Certainement. Notre plumassier est un organisateur de premier ordre. Avec un aplomb qui me remplit d'admiration, il décrète ce qu'il faut faire dans chaque pays pour l'exploitation des Oiseaux : par exemple, en France, établir des réserves, offrir des primes aux éleveurs, poursuivre des essais d'élevage méthodique ; en Autriche, fonder un groupement scientifique; en Hongrie, encourager les élevages de Dindes et de Coqs; au Japon, imposer une surveillance attentive; aux Etats-Unis, abroger la loi de 1913 qui, prohibant l'entrée de toutes plumes sauf celles de l'Autruche et des Oiseaux de basse-cour, embête LA RIPOSTE DU PLUMASSIER 137 furieusement les plumassiers. Le nôtre ne consacre pas moins de treize pages compactes à indiquer leur devoir aux Gouver- nements des cinq parties du monde. Les Gouvernements l'écou- teront — nous n'en doutons pas un instant — quand la guerre sera terminée. Notre plumassier est un observateur profond. Il a remarqué que les chasseurs — ceux qui alimentent son commerce — sont les véritables pionniers de la civilisation : « S'ils vont chercher plumes et fourrures, n'apportent-ils pas en même temps aux indigènes un bien-être inconnu? » En effet, c'est un bien-être inconnu que de disparaître de la surface du globe comme les Peaux-Rouges. Notre plumassier est spirituel. A propos des Oiseaux de Paradis, il fait cette réflexion charmante : « Si l'on s'apitoie sur cet Oiseau, c'est peut-être beaucoup à cause de son nom. Sup- primer le Paradis!... Quel crime! » Qu'il ne s'occupe donc pas du Paradis. Il doit lui manquer quelque chose — une toute petite chose, il est vrai — pour y entrer. Enfin, notre plumassier est un brillant héritier du fameux Joseph Prudhomme, au répertoire duquel on pourrait ajouter cette phrase : « Bien difficile de dire où finit la nécessité et où commence le luxe. » Et c'est du bon Calino que ce français bizarre : « La situation est différente pour l'Europe que pour l'Amérique, puisque justement les Oiseaux dits exotiques ne s > rencontrent presque pas. » Notre plumassier accuse de vénalité ses adversaires, les défenseurs des Oiseaux. D'après lui, la campagne contre la plume est « soutenue par des subsides provenant d'industries rivales ». Je l'avoue : pour critiquer son œuvre littéraire el scientifique j'ai reçu cent sous du syndicat des fleuristes. Si je les ai acceptés, c'est que je ne suis pas un ornithologue « bien appointé ». Notre plumassier nous reproche d'être atteints « d'une sen- timentalité maladive... de pitié exacerbée profondément ridi- cule et risible... d'une insanité de fanatiques ». Il nous insulte. Mais il le fait si maladroitement qu'il faut l'excuser. Le pauvre homme craint de voir diminuer ses bénéfices exorbitants, et il s'affole. J'ai, convenez-en, reconnu beaucoup de qualités à notre plu- massier. Je suis obligé de constater sa complète ignorance en ornithologie. Enumérant les différents Oiseaux utilisés par son 138 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION industrie, il cite le Toucan qui « ravage les nids des petits Oiseaux »>. C'est faux. Pendant deux ans, j'ai possédé un grand Toucan, qui refusait toute nourriture animale et ne mangeait que des fruits et des pommes de terre cuites. Notre plumassier cite encore les Sansonnets qui « endom- magent tous les arbres fruitiers ». C'est faux. D'autre part, il reproduit un tableau des Oiseaux reconnus utiles par la Con- vention internationale de 1902, où figurent les Etourneaux. Depuis quand les Sansonnets et les Etourneaux ne sont-ils plus les mêmes Oiseaux? Notre plumassier classe la Mouette parmi les Oiseaux nui- sibles. « En Cornouailles, dit-il, les pêcheurs sont obligés de faire une chasse à outrance à la Mouette, parce qu'elle détruit totalement le poisson. » C'est archi-faux. En Cornouailles il n'y a que des touristes imbéciles qui chassent la Mouette. Cet Oiseau ne fait aucun tort aux pêcheurs. Ne plongeant pas, il ne peut attraper que de très petits Poissons, les seuls que l'étroi- tesse de son œsophage lui permette d'avaler. Quand la mer se retire, sur les herbiers et les bancs de vase, il cherche des Vers, des petits Crustacés, de minuscules Anguilles. A l'époque des semailles il vient en bande s'abattre sur les terres qu'on retourne et manger les Insectes que la charrue met à découvert, ren- dant ainsi de grands services aux cultivateurs. Enfin, d'après le Temps du 13 novembre 1913, les pêcheurs de Camaret — en Cornouailles — ont demandé au préfet du Finistère de protéger les Goélands et les Mouettes. Mais pourquoi notre plumassier ne travestirait-il pas la vérité, puisqu'il aime mieux ajouter foi aux assertions d'un agent consulaire allemand que de s'incliner devant les témoi- gnages, essentiellement désintéressés, des Sociétés protectrices d'Oiseaux fondées en Amérique et en Angleterre ? Faut-il répondre aux arguments fantaisistes que nous sert notre plumassier et sur lesquels s'appuient ses confrères pour justifier leur œuvre de destruction? Puisqu'on a domestiqué l'Autruche, il est bien facile de domestiquer les autres espèces. Massacrer les Aigrettes et les Paradisiers est le meilleur moyen de les conserver. Plus on sacrifie d'Oiseaux, plus ils se reproduisent. Plus un plumage a de la valeur, moins on chasse son propriétaire. Si l'on protégeait les Aigrettes, elles seraient « infailliblement victimes de la cruauté inconsciente de l'in- digène. » (Textuel.) Ce qui diffère donc l'indigène du mar- LA RIPOSTE DU PLUMASSIEK 189 chand de peaux d'Oiseaux, c'est que celui-ci a une cruauté consciente... et qu'il nous prend pour des idiots. L'industrie plumassière nous a fait connaître la beauté du Paradisier : « Sans elle, cet Oiseau ne serait aperçu que de quelques sauvages Papous véritablement inaptes à éprouver la moindre émotion esthétique. » Notre auteur est sévère poul- ies Papous. « La mode est un art », ajoute-t-il. Je le veux bien, mais au même titre que la caricature. L'art qui consiste à emplumer des têtes de jeunes grues et de vieilles dindes n'est pas un art très relevé. L'esthétisme de notre plumassier ne lui permet pas de sup- porter la vue d'une Aigrette, car son cri est « loin d'être har- monieux ; et. sa silhouette « disgracieuse et même ridicule». Je reconnais que l'Aigrette n'a pas un cri harmonieux; mais elle le fait rarement entendre, et il est faible. Notre plumassier chante sans doute la romance avec succès; il n'admet pas qu'on ait une vilaine voix. Quant à la silhouette de l'Aigrette, elle n'est ni disgracieuse, ni ridicule. Les nôtres, monsieur, le sont bien davantage. L'Aigrette, au contraire, est un très bel Oiseau. Grande ou petite, elle a un plumage d'un blanc pur. Perchée au sommet d'un arbre, elle paraît un énorme lis. Ses mouvements sont originaux, imprévus. Notre plumassier nous déclare que « ses plumes (celles des coiffures féminines) sont à peine vues, lorsque l'Oiseau est vivant ». C'est absolument faux. Enfin, l'Aigrette est un Oiseau des plus utiles. Elle détruit beaucoup d'Insectes. La petite — Candidissima ou Garzetta — poursuit les Mouches avec acharnement. La grande gobe un petit Rongeur comme on avale un œuf cru et j'ai tout lieu de croire qu'elle ne crache pas sur les Serpents. D'après notre plumassier, « les statistiques concernant l'in- dustrie des plumes sont forcément erronées ». Je le lui accorde volontiers. Dans ce cas, pourquoi nous en donne-t-il une sur les plumes d'Aigrette, laquelle nous apprend .qu'en LS'.iï on récoltait 90 p. 100 de plumes sur l'Oiseau tué et 10 p. 100 de plumes ramassées, tandis que pendant les quatre premiers mois de 1914 — si nous en croyons notre plumassier qui s'est révélé grand écrivain vers le mois de mai, à la pousse des feuilles — les plumes ramassées furent de 90 p. 100? D'abord, je doute fort que la plume tombée ou « morte » arrive sur nos marchés. Elle est trop difficile à recueillir et trop 140 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION défectueuse pour procurer des bénéfices. La plume qu'on nous présente comme provenant de la mue doit être de la plume usagée ou bien abimée dans les fréquents combats que se livrent les Aigrettes. Mais j'admets que je me trompe. Il n'y a que les plumassiers qui ne se trompent jamais. Alors les chiffres du nôtre s'expli- quent aisément. En 1894, la fureuç de la plume d'Aigrette ne sévissait pas encore parmi les femmes. Seules en portaient les élégantes qui se fournissaient chez les grandes modistes. Or, la plume provenant de la mue étant bien inférieure à celle prise sur l'Oiseau tué, les modistes ne donnaient que cette der- nière à leurs riches clientes et n'employaient pas la plume ramassée, la plume de rebut. Mais peu à peu les plumets, les « colonels » se démocratisèrent, envahirent les magasins de nouveautés, puis les bazars. Il en fallut à tout prix et pour tous les prix. Désormais, la fameuse plume ramassée avait son pla- cement. En 1900, on en récoltait, paraît-il, 30 p. 100, 70 en 1910, pour arriver au chiffre actuel. Si l'on accepte cette ver- sion, cela signifierait que l'usage de la plume ramassée a augmenté et non que le nombre des Aigrettes tuées a diminué. Mais cette plume, la ramasse-t-on ? Notre plumassier affirme que pour avoir de belles plumes il n'est pas nécessaire de tuer les Aigrettes au moment de la couvée. Moi, je crois qu'on ne peut se les procurer que sur les Oiseaux tués pendant la saison des nids, c'est-à-dire en sacri- fiant les petits avec les parents, et nous trouvons cela révol- tant, monstrueux, stupide..., allemand! Des «commerçants français qui n'oublient pas les intérêts de leur pays », selon les termes pompeux de notre auteur, ont eu — comme on dit dans le grand monde — le culot d'ofl'rir une prime de 10.000 francs à l'éleveur qui, au bout de deux ans, « aura le premier réussi à produire commercialement des plumes dWigrette sur le territoire français », à la condition que la première génération sera de cinq cents individus et la sui- vante de mille. Soyez tranquilles, messieurs : vous n'aurez jamais à débourser vos maigres 10.000 francs. Je suppose que vous avez voulu nous divertir, et nous vous en remercions. Les gens qui vivent, qui s'enrichissent de la plume ignorent l'Oiseau. Ce n'est pas avec de l'argent qu'on empêchera la très prochaine disparition de l'Aigrette. Pour en conserver l'espèce, il faut que les femmes veuillent bien renoncer à se piquer sur LES CUÉTODONTIDÉS ACCLIMATÉS COMME POISSONS d'OKNEMEXT 141 la tèle des petits balais de W. C. et que les marchands mettent un frein à leur âpreté au gain. Cette dernière hypothèse est invraisemblable. A la fin de sa brochure, le plumassier-auteur nous déclare que sa corporation « se refuse à se soumettre à toute mesure de prohibition dont la justification ne serait pas dûment éta- blie ». Et il adresse aux pouvoirs publics cet ultimatum éner- gique et concis : « Réglementation, oui! Prohibition, non! » Il prendra les armes. Nous le connaissons homme de lettres. Nous allons le connaître homme de guerre. Ce futur général aura un dolman bordé de duvet de Cygne, un casque dont la pointe sera faite d'un bec de Marabout; il enfermera son plan de campagne dans la poche buccale d'un Pélican, et, quand il passera en revue ses avions, ce sera sur le dos d'un Aigle. LES CHËTODONTIDÉS ACCLIMATÉS COMME POISSONS D'ORNEMENT Par LOUIS ROULE Professeur au Muséum. La famille des Chétodontidés est une des plus curieuses de l'ichthyologie. Sa situation systématique, quelque peu indé- cise, la place parmi les Perciformes, non loin des Plectognathes. Ses représentants se reconnaissent aisément, du moins la grande majorité d'entre eux, à leur corps élevé, comprimé latéralement, ovalaire et aplati sur les flancs; à leurs nageoires impaires couvertes d'écaillés sur leur région basilaire, d'où le terme Squamipennes qui leur est souvent accordé; à leurs dents maxillaires et mandibulaires en brosse, ne comportant ni incisives ni canines. Les écailles sont finement pectinées. Ces Poissons se confinent dans les régions intertropicales. Ils appartiennent à la faune littorale, et contribuent pour beaucoup à donner une physionomie caractéristique aux asso- ciations animales qui peuplent les récifs de Coraux. Ils se font remarquer, en effet, par leurs couleurs vives, voyantes, variées, souvent fort belles. Certaines de leurs espèces, sem- blables en cela aux Muges de nos pays, fréquentent les embou- chures des fleuves, entrent en eau saumâtre, et remontent 142 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION même dans les eaux douces. Omnivores et volontiers copro- phages, ils se nourrissent de toutes sortes de débris et de détritus d'origine animale. Cette famille contient plusieurs tribus, distinguées entre elles selon l'absence ou la présence, et, dans ce dernier cas, la dis- position des dents vomériennes et palatines. La plus impor- tante de ces tribus, celle des Cbétodontidés, qui renferme le genre type de la famille, se caractérise par la privation de ces dents. C'est dans cette tribu que s'incorpore le genre Scato- phagus C. V., récemment importé en Europe et acclimaté comme Poisson d'ornement. La diagnose générique de Scatophagus C. V. est la suivante : « Corps très comprimé et élevé; deux dorsales unies, la pre- mière épineuse à 10-11 rayons, la seconde molle avec base écailleuse ; anale à quatre rayons antérieurs épineux; préoper- cule inerme; écailles petites. » Ces Poissons habitent les eaux salées, saumâtres, et même douces. Leur habitat comprend l'Extrême-Orient intertropical, l'Insulinde, et l'Australie. L'espèce acclimatée, qui est aussi la mieux connue, est Scato- phagus argus L. (Chetodon argus L.). Cuvier et Valenciennes ont donné d'elle une excellente description (Hist. nat. des Poissons, t. VII, p. 138), que les auteurs subséquents se sont bornés à reprendre. Il n'est de modification à y introduire qu'au sujet des taches de teinte foncée dont le corps est cou- vert. Les deux auteurs précités notent que leur diamètre est inférieur à celui de l'œil, alors qu'on en voit parfois de dia- mètre égal, ou supérieur. On rencontre même des individus dont plusieurs taches se confondent en bandes sinueuses, tantôt isolées, tantôt anastomosées, qui rappellent ainsi l'ornementa- tion d'une espèce voisine, Se. ornalus C.V. Scatophagus argus possède un vaste habitat, qui s'étend à l'Inde, l'Indo-Chine, l'Insulinde, la Chine méridionale. Il peut parvenir à une taille assez forte, et mesurer, chez les belles pièces, 25 à 30 centimètres de longueur; la plupart des indi- vidus importés mesurent 10 à 15 centimètres. Le début de son importation remonte à 1906. L'acclimatation réussit le mieux dans une eau légèrement saumâtre, et maintenue pour la cha- leur à 20-25 degrés centigrades. Elle n'est pas complète, car on n'a pas encore obtenu la reproduction en stabulation ; les indi- vidus gardés en aquarium ont été péchés dans leurs localités d'origine, et amenés en Europe. LA PISCICULTURE DANS LES RIZIÈRES Par C. RAVERET-WATTEL. Ce sont les Japonais qui ont, les premiers, songé à élever du Poisson (des Carpes), dans les rizières. Depuis environ cent cinquante ans, ils pratiquent, avec de sérieux profits, ce sys- tème d'élevage (1), sur lequel nous avons donné quelques détails dans le Bulletin (2), d'après un travail adressé au Rureau des Pêches de Washington par M. Shinnosuke Matsu- bara, directeur de l'Institut impérial de pisciculture de Tokio. Une communication faite sur le même sujet, par M. Matsubara, au Congrès international de Vienne, en 1905, ayant attiré l'attention de riziculteurs italiens, quelques essais d'élevage en rizière, tant de Carpes, que de quelques autres Poissons, furent entrepris dans la région de Rologne, notamment dans l'impor- tante exploitation rizicole de Mazzalora, d'après les conseils d'un éleveur de Carpes silésien, M. A. Gas-ch (3), et sous la direction d'un ingénieur du pays, M. Certani. Une autre raison que la pensée d'augmenter le produit tiré des rizières engageait, d'ailleurs, à entreprendre ces essais. Chacun sait que, en Lombardie comme aux colonies, les rizières favorisent une pullulation formidable de Moustiques inoculateurs de la « malaria ». Pour détruire les larves de ces Insectes, sans porter atteinte à la riziculture, qui est d'un gros revenu dans l'Italie du Nord, des naturalistes préconisaient fort judicieusement l'utilisation des Poissons. Terni, qui fut le premier à indiquer cet expédient (4), s'y était trouvé conduit par l'examen fait de petites Tanches pêchées dans des rizières; il avait constaté que l'estomac de chacun de ces jeunes Poissons ne contenait pas moins de 80 larves, tant d'Anophèles que (1) Au Japon, les rizières se prêtent d'autant mieux à l'élevage du Poisson, qu'elles sont permanentes, au lieu d'être soumises à l'assolement, comme le sont les rizières italiennes ; elles restent, en outre, couvertes d'eau pendaut toute l'année, et, par suite, constituent presque de véri- tables étangs. (2) Raveret-Wattel. L'élevage de la Carpe et de divers Poissons d'orne- ment au Japon. Bulle/in, 1911, p. 566. (3) A. Gasch. Ueber Ivarpfenzucht in Reisfeldern. Allg. Fischerei-Zeitung. no* 3-4, i9ii. (4) Terni. La Piscicoltura nella lotta contra la malaria. J \ \ BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION d'autres Moustiques ; aussi, dès 1906, conseillait-il de déverser dans les rizières des Tanches, des Carpes ou des Anguilles, tous Poissons ayant une valeur alimentaire, en même temps qu'ils sont d'excellents destructeurs de larves. Dès les premiers essais d'empoissonnement, les résultats furent très encourageants. Il est vrai que l'on opérait dans des conditions particulièrement favorables au développement du Poisson, attendu qu'on avait fait choix de rizières dites « de colmatage » (risaia de colomata), ainsi nommées parce qu'elles sont établies sur des terrains en voie de colmatage; or, ces terrains ne se rencontrent guère que dans certaines régions, notamment le Ravennais et la Romagne, où les rizières sont irriguées avec les eaux limoneuses de torrents descendant des' Apennins. Pour rendre les essais tout à fait démonstratifs, il convenait de les transporter sur des points présentant les conditions habituelles de la plupart des rizières, et de faire en sorte que l'éleveur n'eût pas d'installations spéciales à réaliser pour obtenir du Poisson, ni aucun changement à apporter dans la méthode courante de culture du Riz. Il s'agissait, en outre, de s'assurer que l'élevage du Poisson ne portait aucun préjudice à la production de cette céréale. Comme en 1909, les nouvelles expériences donnèrent immé- diatement les résultats les plus satisfaisants; si bien que l'exemple fut contagieux et que l'élevage de la Carpe dans les rizières tend aujourd'hui à devenir une pratique courante (1). Le mérite en revient principalement à la Société agricole de Lombardie qui, tout de suite frappée des avantages à tirer de cette innovation, se mit d'accord avec la station hydrobiolo- gique de Milan pour organiser des applications de la méthode et décerner des récompenses aux riziculteurs qui obtiennent les meilleurs résultats piscicoles. Ces applications doivent être faites dans des fractions de rizières d'une surface d'au moins un hectare ; les riziculteurs reçoivent gratuitement les jeunes Carpes à élever (2), et ils sont tenus de se conformer ponctuel- lement aux instructions qui leur sont données. Déjà des appli- cations ont été faites et dans des conditions très variées, quant à la nature du sol, dans les provinces de Milan, de Pavie, de 1) F. Supino. La Carpa. Cenni biologie! e pratici. Milan, 1913. (2 laid. LA PISCICULTURE DANS LES RIZIÈRES 145 Bergame, de Crémone et de Mantoue, et, chaque année, depuis 1910, des rapports rédigés par M. le professeur Felice Soupino, directeur de la Station hydrobiologique de Milan, et par le Dr Ernesto Lanzi, secrétaire de la Société agronomique de Lombardie, fournissent des détails complets sur la marche des essais, ainsi que sur les observations recueillies (1). La race de Carpe généralement employée est la Carpe-miroir de Galicie. qui possède sur la Carpe commune l'avantage d'une croissance plus rapide. Sous l'influence d'une nourriture abon- dante et choisie, le système musculaire du Poisson s'est con- sidérablement développé, amenant une modification de la forme du corps, surtout dans la région dorsale, qui est très élevée ; aussi le Poisson semble-t-il relativement court, la hau- teur du tronc atteignant à peu près le tiers de la longueur totale. La tête est proportionnellement petite, en même temps que les nageoires sont peu développées. Comme les diverses races de Carpes améliorées, la Carpe galicienne ne fraie géné- ralement pas avant l'âge de trois ans (alors que nos Carpes communes se reproduisent souvent une année plus tôt, au détriment de leur valeur marchande) ; mais c'est un Poisson qui ne se développe réellement bien que dans les eaux un peu chaudes et riches en éléments nutritifs; or, ce sont précisé- ment les conditions que lui offrent les rizières, où sa croissance se montre, par suite, très rapide. En fait, cette Carpe convient très bien au rôle que les riziculteurs italiens la chargent de remplir. On obtient très facilement une multiplication abondante de ce Poisson . Un petit bassin à fraie de 80 mètres carrés de super- ficie et de 0m50 de profondeur, avec des bords en pente, convient parfaitement pour cet usage. Ce bassin est d'abord cultivé en prairie, pour que le fond en soit bien garni d'herbes ; puis on y introduit l'eau et l'on y place, en petites bottes, des rameaux de Pin ou de Genévrier, que les Carpes recherchent pour déposer leurs œufs. Quand, au printemps, l'eau atteint une tempéra- ture d'environ 20 degrés centigrades, on y introduit les repro- ducteurs (généralement "1 mâles et 1 femelle), que l'on a tenus jusque-là en eau fraîche pour les empêcher de frayer. C'est généralement de la fin de mai au commencement de juillet qu'a (1) Voy. F. Supino. La carpicoltura nelle risaie. Milan, 1909, 1910 et 1911. — Le même : Allevamentl di pesci in risaia. Milan, 1912. BULL. SOC. NAT. ACCL. II;. l'Jlo. _ 10 146 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION lieu la fraie et, si le bassin a été convenablement installé, il est rare que la ponte ne se produise pas dans les trois ou quatre premiers jours qui suivent l'introduction des sujets repro- ducteurs. De grandes quantités d'œufs sont fixées par les Carpes sur les herbes du fond et sur les rameaux d'arbres verts disposés comme il a été dit ci-dessus. Une femelle du poids d'un kilo- gramme pond, en moyenne, 100.000 œufs; des sujets plus gros peuvent donner jusqu'à 250.000 œufs, et même plus encore. Le développement de ces œufs est plus ou moins rapide, sui- vant la température de l'eau ; mais, généralement, tous sont éclos au bout d'une dizaine de jours, au plus. On obtient ainsi une multitude d'alevins, qui servent à peupler les rizières, à raison de 2.000 à 4.000 par hectare, selon la qualité du fond que l'on empoissonne, c'est-à-dire suivant l'abondance de nour- riture que les jeunes Poissons paraissent devoir y trouver. La seule précaution à prendre avant l'apport de ces alevins, c'est de fixer des grilles en toile métallique aux bouches d'amenée et de sortie de l'eau, pour que les petites Carpes ne puissent s'échapper et d'ouvrir au milieu'du compartiment de rizière dans lequel on les place un sillon profond de 0U125, où le Poisson puisse se réfugier pendant les journées très chaudes (1). Au moment de leur mise en rizière, dans le commencement de juin, les alevins ne pèsent guère que 30 milligrammes environ chacun ; mais, comme ils trouvent dans le milieu qui leur est attribué des conditions extrêmement favorables à leur développement, tant au point de vue de la température de l'eau qu'à celui de la nourriture qu'ils y trouvent, ils se développent si bien que, à l'époque de la recolle du Riz, soit trois mois envi- ron après leur introduction dans la rizière, ils pèsent de 100 à 200 grammes, parfois plus encore. On les pêche la veille de la récolte du Riz, qui se fait à sec, et on les place dans des bassins d'hivernage, où l'on peut se dispenser, pour ainsi dire, de leur donner de la nourriture, attendu que la Carpe ne mange guère pendant la saison froide. Des déchets de cuisine leur sont cependant donnés, quand la température se maintient (1) Du reste, dès avant l'introduction de la pisciculture, beaucoup de rizières présentaient déjà de semblables sillons, espacés entre eux de 4 à 6 mèti-es, pour permettre un assèchement rapide du terrain, lorsque les circonstances viennent à l'exiger. LA PISCICULTURE DANS LES RIZIÈRES 147 exceptionnellement douce (1). La respiration de ces Poissons étant peu active, on admet généralement qu'un bassin d'hiver- nage peut recevoir 50 kilogrammes de Carpes par mètre cube d'eau. D'ordinaire, ces bassins consistent en de simples fosses en terre battue, profondes de 0m50 à 1 mètre ; elles sont donc peu coûteuses à établir. L'été suivant, quand le plant de Riz est bien fixé dans le sol, on introduit de nouveau les Carpes dans la rizière, à raison de 200 par hectare, et on les y maintient jusqu'à l'époque de la récolte du Riz (fin d'août ou commencement de septembre). A ce moment, ces Poissons de deuxième année, qui ne comptent, en réalité, que seize mois, ont considérablement grossi; ils atteignent « un poids moyen de 600 à 700 grammes », m'écri- vait dernièrement M. le professeur Supino. On ne pousse pas plus loin l'élevage, attendu que des Poissons de forte taille ne pourraient guère se contenter d'une couche d'eau ne dépassant guère 0U120 d'épaisseur (0m25 au grand maximum i comme celle qui recouvre les rizières. D'ailleurs, ils n'y trouveraient pas suffisamment de nourriture, à moins de n'être qu'en très faible nombre; et, de plus, on sait que, passé l'âge de trois ans, la Carpe grossit proportionnellement beaucoup moins que les sujets plus jeunes, eu égard à la consommation faite de matière alimentaire. La perte sur les alevins se montre assez forte : elle s'élève, pendant le cours de l'été, à 80 p. 100 environ de la population ; mais le déchet devient très faible, au contraire, quand il s'agit des sujets de seconde année, qui sont très résistants, et qui échappent à une foule d'accidents, de dangers de toute sorte, auxquels sont naturellement exposés de tout jeunes Poissons. L'emploi des sujets de seconde année est, par suite, celui qu'on doit conseiller aux riziculteurs désireux de limiter au minimum de travail possible les opérations d'élevage. « En achetant au printemps, dit M. Supino (2), des Carpillons de (1) D'après les observations faites par M. Supino, quand la tempéra- ture de l'eau s'abaisse au-dessous de 7 degrés centigrades, les Carpes cessent de s'alimenter et perdent un peu de poids; mais, au-dessus de 1 degrés, elles acceptent de la nourriture et peuvent continuer à grossir. 2 Pour l'achat de petites Carpes galiciennes de première année, ainsi que pour obtenir des renseignements sur l'utilisation de ces Poissons, on peut s'adresser à la Société agronomique de Lombardie, 2, place Fontana, à Milan. Le prix varie de 5 à 10 francs le cent, suivant les circonstances. 148 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION semence (carpette di semenza), pesant de 15 à 20 grammes chacun, il est possible de recueillir en septembre, lors de la récolle du Riz, des Poissons de taille marchande (600 à 700 grammes). « On obtient donc, rien qu'en l'espace de trois mois seulement, un développement très satisfaisant. Quant au rendement, les expériences faites jusqu'à ce jour montrent que 1 hectare de rizière peut donner 100 kilogrammes de Carpes et même davan- tage (1). » La rapide croissance de la Carpe dans les rizières s'explique par la température élevée de l'eau (2), très favorable au déve- loppement de la faune aquatique inférieure dont se nourrit le Poisson. On avait craint, tout d'abord, que la présence du Poisson ne fût nuisible à la croissance du Riz; mais c'est précisément le contraire qui se produit; en se déplaçant, en fouillant presque sans cesse, comme elles le font, la surface du sol, les Carpes assurent une bonne répartition des engrais donnés à la rizière (3). Elles se rendent également utiles en entravant beau- coup le développement des herbes qui infestent d'ordinaire les cultures de Riz et disputent à la précieuse Graminée l'espace, l'air et les éléments fertilisants. Sans deux sarclages très soignés, qui sont donnés, l'un vers la mi-juin, l'autre vingt ou vingt- cinq jours plus tard, et qui représentent l'une des plus fortes dépenses de l'exploitation des rizières, le Riz succomberait dans la lutte (4). En enrayant l'invasion des herbes nuisibles, la présence des Carpes fait réaliser aux riziculteurs une forte (1) F. Supino. VAUevamento délia Carpa nelle risaie italiane. Hoirie. 1913. (2) Dans le courant de juillet, la température de Teau dans les rizières oscille généralement entre 24 et 30 degrés centigrades. En août et sep- tembre, la moyenne est ordinairement de 23 degrés. Ce sont là des condi- tions qui conviennent parfaitement à la Carpe, pour laquelle la température optima serait de 22 à 23 degrés, suivant Knauthe, et de 28 degrés, d'après Zuntz. (3) Ces engrais sont principalement des superphosphates et de la corne torréfiée. Celle-ci (parfois falsifiée avec de la poudre de noyau de Coco) est répandue, à la main, à raison de 130 kilogrammes par hectare. (4) Les herbes particulièrement nuisibles dans les rizières sont une Graminée (le Panicum Crus-yalli) et diverses Cypéracées, notamment le Çyperus glomeralus, ainsi que les Scirpus mucronatus et maritimus. LA PISCICULTURE DANS LES RIZIÈRES 149 économie de main-d'œuvre, car elle leur permet de supprimer complètement le second sarclage. Enfin, les Poissons, qui rendent un service considérable en détruisant les Anophèles propagateurs de la malaria, font dis- paraître, en même temps, beaucoup de Mollusques (Limaces, Physes, etc.) et d'Insectes (.Nèpes, etc.) nuisibles au Riz; ils réduisent aussi l'abondance d'un Crustacé Phyllopode dépréda- teur, VApus cancriformis, vulgairement désigné en Italie sous le nom d'Ecrevisse de rizière, Gambero di risaia. Bien que vivant surtout de proies, ce Crustacé, paraît-il, se rend très nuisible en arrachant les jeunes pieds de Riz; les dégâts qu'il commet sont parfois considérables. L'élevage du Poisson dans les rizières, loin de porter préju- dice à la culture, se trouve donc, au contraire, la favoriser et augmenter la production de la céréale. C'est ainsi que, dans certains essais, on a vu le rendement en Riz être supérieur de 2 à 6 quintaux par hectare à celui de rizières non empoisson- nées. La chair des Poissons élevés en rizière est généralement de bon goût. Quand, par hasard, il lui arrive de sentir un peu la vase, il suffit, pour faire disparaître toute trace de saveur désa- gréable, de tenir les Carpes pendant quelques jours en eau courante, dans des récipients à claire-voie, tels que, par exemple, des tonneaux dont les douves ont été percées de trous en grand nombre. Dans quelques expériences, on a essayé l'emploi de la Tanche, comparativement à celui de la Carpe. Les résultats n'ont pas été aussi satisfaisants, parce qu'on opérait sur un Poisson à croissance moins rapide, et qui a, de plus, l'incon- vénient de fouiller davantage le sol. Mais des tentatives très intéressantes sont celles qui ont porté sur le Black-Bass à grande bouche (Microplerus sal- moides Lacépède), Poisson qui paraît accepter parfaitement l'existence en rizière, où son robuste tempérament s'accommode parfaitement des variations de température de l'eau et de la chaleur très forte qu'il a parfois à supporter dans ce milieu. Son développement s'y montre très rapide, comme en témoi- gnent les exemples ci-après. Dans une rizière du Milanais, de 11.000 mètres de superficie, furent placés le 13 juin 1912, 1.500 tout jeunes Black-Bass de 22 millimètres de longueur, pesant, en moyenne, 8 centigrammes chacun. Lors de la 150 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION pêche, le l,r octobre, on retrouva 1.000 Poissons du poids moyen de 36 grammes, avec un maximum de 55 grammes. Le *28 mai de la même année, avaient été déversés dans 4.350 mètres carrés de rizière, 50 Black-Bass d'un an, pesant, en moyenne, 80 grammes. Le 1er octobre, on retrouvait 35 Poissons du poids moyen de 278 grammes, avec un maximum de 435 grammes. Dans une autre rizière, on. avait fait un mélange de Black-Bass d'un an et de Carpettes également d'une année, dans la proportion de 10 Black-Bass pour 100 Carpes. Au 1er octobre, ces dernières atteignaient un poids moyen de 1 kil. 096 grammes, et les Black-Bass pesaient, en moyenne, 305 grammes (1). — Les deux espèces peuvent donc être avantageusement élevées ensemble; elles ne se nuisent en aucune façon, pourvu que les Poissons aient tous au moins un an; des sujets plus jeunes pourraient se porter mutuellement préjudice (2). Ces observations sont très intéressantes en ce qu'elles éta- blissent la possibilité d'élever en rizière des Poissons d'une valeur marchande supérieure à celle de la Carpe, et il importe de signaler que, bien que l'expérience ait eu lieu dans une eau à peu près stagnante, la chair des Black-Bass n'avait pas con- tracté le moindre goût de vase. Un autre fait méritant aussi d'être tout particulièrement signalé, c'est celui de la reproduction spontanée de la Carpe en rizière. Le 6 mai 1912, M. de Vecchi, propriétaire d'importantes rizières à Daullo-Ladigiano, plaça dans une portion de rizière de deux tiers d'hectare environ, 45 Carpes de trois à quatre ans, pesant, en moyenne, 1.750 grammes chacune. Le 15 mai, dans une autre rizière, une surface d'un tiers d'hectare environ reçut 30 Carpes de trois ans, du poids moyen de 1.350 grammes. Enfin, le 18 mai, dans une autre rizière d'environ un tiers d'hectare, furent immergées 15 Carpes de trois et quatre ans, pesant chacune, en moyenne, 1.500 grammes. Tous ces Pois- sons étaient des Carpes de race galicienne, provenant d'éle- vages faits en rizière. On ne prit d'autre précaution que d'aug- menter un peu l'épaisseur habituelle de la nappe d'eau sur le (1) F. Supiuo. La piscicoltura ruelle regimic rizicoèe. Vercelli, 1913. (2) 11 a été constaté que, dans les rizières, les Black-Bass trouvaient parfaitement à se nourrir; ils faisaient notamment une guerre à outrance aux Grenouilles, taut aux individus complètement développés qu'aux têtards de toute grosseur. LA PISCICULTURE DANS LES RIZIÈRES loi sol, c'est-à-dire de la porter à 0m30 environ. A l'automne, lors de la récolte du Riz, voici quels furent les résultats de la pêche : Dans la première rizière, on retrouva 30 des Carpes adultes, qui avaient atteint le poids moyen de 3 kil. 500, et environ 100.000 Carpillons pesant, en moyenne, 50 grammes. Dans la seconde rizière, restaient 28 Carpes adultes, deve- nues des sujets de 2 kil. 450, en moyenne, plus 80.000 Carpil- lons, du même poids que ceux ci-dessus mentionnés. Enfin, dans la troisième rizière, les 15 Carpes adultes avaient atteint un poids moyen de 2 kil. 500 et l'on recueillit, avec elles, 20.000 Carpillons pesant, comme ceux des autres rizières, environ 50 grammes chacun (1). Mous avons cru devoir entrer dans quelques détails sur ces différents essais, en raison de l'intérêt qu'ils peuvent présenter pour nos colonies rizicoles, où l'on aurait évidemment grand avantage, comme dans l'Italie du nord, à utiliser les Poissons pour la destruction des Moustiques propagateurs des fièvres, et à ajouter au produit habituel des rizières celui d'un lucratif élevage piscicole. 11 serait tout indiqué, du reste, d'introduire aussi cet ingé- nieux système dans notre pays même, en Camargue, où, chaque année, près de 1.000 hectares sont livrés à la culture du Riz (2), moins pour le produit que l'on en tire que comme moyen de dessaler les terres improductives et de les mettre en valeur (3). (1) F. Sopino. La riproduzione delta carpa a specchi nette risaie. Milan, 1913. — Le même. Ancora sulla riproduzione délia carpa a specc//.. risaie. Milan, 1914. (2) E. de Laroque. La culture du Riz en Italie et en Camargue, Mar- seille, 1907. (3) « Envisagée sous cet aspect, « dit M. de Laroque, directeur des services agricoles des Bouches-du-tthône (dans un très remarquable rapport pré- senté au nom de la délégation qui avait été chargée, par le Conseil général, d'aller étudier les procédés et les méthodes de riziculture en usage en Italie), la rizière apparaît comme la clef de la transformation future de la terre salée; et son rôle se présente, en quelque sorte, comme providentiel, puisqu'elle permet de mettre en valeur les surfaces impro- ductives de chaque domaine, sans qu'il soit nécessaire d'immobiliser des capitaux... « Les herbages salés, qui ne peuvent être utilisés que pour la dépais- sance des moutons, occupent, dans la Camargue et le Plan-du-Bourg, une surface qui n'est pas évaluée à moins de 30.000 hectares. C'est, à coup sur, la rizière qui en réalisera la transformation. » 152 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION rsous nous tiendrons donc au courant des expériences qui se poursuivent actuellement en Lombardie, sur la pisciculture dans les rizières, et nous ne manquerons pas de faire part à nos collègues des résultats obtenus, résultats qui, s'ils conti- nuaient à être satisfaisants, présenteraient une très réelle importance. LA GRAISSE OU MALADIE DES TACHES DES POMMES Par D. BOIS On désigne sous ce nom une affection dont les causes ne sont pas encore absolument certaines, qui déprécie considéra- blement les fruits de plusieurs variétés de Pommes classées au premier rang parmi les meilleures : Reinette du Canada, Calville, etc. L'altération est caractérisée par de petites masses de tissu spongieux, brunâtre, disséminées au-dessous de la peau du fruit et qui pénètrent dans la chair sur une profondeur qui peut atteindre jusqu'à 1 centimètre. Elles correspondent géné- ralement à des taches qui forment, sur la peau du fruit, de petites dépressions de couleur grisâtre, de 1 à 5 millimètres de diamètre. Dans la séance du 8 février 1915, notre excellent collègue, M. Debreuil, présenta quelques Pommes de Reinette du Canada ainsi atteintes, en demandant s'il existait un moyen de protéger les fruits contre cette altération, désignée, paraît-il, sous le nom de maladie du bouchon, probablement en raison de la consistance des taches qui rappelle celle du liège. Elle est aussi désignée parfois sous le nom de maladie des taches des Pommes. M. Mangin, professeur de Cryptogamie au Muséum, dans une note parue en 1901 dans la Revue horticole, p. 163, attribue la Graisse des Pommes à des piqûres d'Insectes qui auraient déversé dans les plaies produites un liquide capable d'irriter et de mortifier les tissus. Il a provoqué des altérations analogues en piquant des fruits pour y faire des injections d'acide formique, substance généralement sécrétée par les Insectes déprédateurs. C'est dans le fruitier que les piqûres doivent se produire, car LA GRAISSE OU MALADIE DES TACI1ES DES POMMES 153 des fruits récoltés parfaitement sains ne présentent ces taches caractéristiques qu'après y avoir fait un assez long séjour. Dans une note également parue dans la Revue horticole, 1906, p. 456, sous le titre : Altération des Pommes de Crimée, M. Gallaud traite d'une altération qu'il considère comme distincte de la Graisse des Pommes, mais qui semble au contraire très comparable. Comme M. Mangin, il n'a trouvé dans les masses de tissu mortifié aucune trace de Cryptogame ou d'Insecte capables de les avoir produites. On lit dans certains ouvrages d'Horticulture que la Graisse da Pommes ou maladie des taches des Pommes pourrait avoir une origine microbienne ; s'il en était ainsi, les altérations ne seraient pas localisées comme on le constate toujours; aussi, croyons-nous que la vérité réside dans l'opinion de M. Mangin. M. le Dr Trouessant pense que les auteurs de ce mal pourraient être des Acariens. Quoi qu'il en soit, il est un moyen d'en préserver les fruits comme d'ailleurs de la pourriture qui cause tant de dégâts et qui est produite par divers Champignons ou moisissures ; c'est la désinfection du fruitier avant la rentrée des récoltes, de manière à détruire les Insectes et les spores qui pourraient exister aussi bien dans les parois des murs que dans le matériel du fruitier et même, dans l'air atmosphérique. Contre la « Graisse », M. Mangin conseille de traiter les claies avec une pulvérisation qui éloigne les Insectes, décoction de Quassia amara, par exemple, et d'aseptiser le fruitier; soit avec des vapeurs de sulfure de carbone, soit avec celles d'aldéhyde formique, pendant vingt-quatre heures, en prenant les pré- cautions nécessaires pour l'emploi de ces produits d'un manie- ment dangereux. M. A. Truelle, dont la compétence est si grande en ces matières, montre, dans la Revue horticole, 1914, p. 408, l'uti- lité de la désinfection du fruitier et indique les moyens de la pratiquer : badigeonnages à la chaux vive, pulvérisation de sulfate de cuivre, fumigation par les vapeurs d'acide sulfureux. L'auteur recommande ces antiseptiques parce qu'ils sont dépourvus d'odeur désagréable, les fruits, et plus particu- lièrement les pommes et les poires, s'imprégnant facilement d'odeurs qu'ils ne perdent ensuite que très lentement. Voici une formule pour chacun de ces procédés : 154 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION « Badigeonnage. — Chaux vive, 1 kilogramme; fleur de soufre, 200 grammes; sulfate de cuivre, 500 grammes ; eau com- mune, 10 litres. On prépare d'abord le lait de chaux. On met la chaux dans un récipient de bois et on l'asperge d'eau chaude en quantité suffisante pour la mouiller. Elle s'échauffe peu à peu et se fendille, on continue alors d'ajouter de l'eau juscpi'à ce qu'elle en ait absorbé 1 litre et demi environ. Lorsque la chaux paraît bien fusée, on la laisse refroidir; on la délaie ensuite peu à peu, à froid, avec 7 à 8 litres d'eau et l'on abandonne le tout au repos durant quelques heures, en agitant une ou deux fois. On passe ce lait de chaux à travers un large tamis à mailles de 1 millimètre, placé au-dessus d'un autre récipient et, avec une palette en bois, on écrase les particules solides, de façon à n'entraîner que celles qui ont la même ténuité. On y incorpore ensuite la fleur de soufre, puis le sulfate de cuivre, qu'on a fait dissoudre séparément dans deux fois son poids d'eau très chaude. On a soin de ne verser la solution que peu à la fois, en brassant fortement pour obtenir un mélange homogène. « Pulvérisation. — Sulfate de cuivre, 500 grammes. Eau com- mune, 10 litres. On dissout le sulfate dans quatre fois son poids d'eau froide ou deux fois son poids d'eau bouillante. « Fumigation. — On mesure le volume du local servant de fruitier, et l'on pèse autant de fois 2 grammes de soufre qu'il contient de mètres cubes. Le soufre en fleur ou en très petits morceaux doit être préféré aux mèches soufrées, parce que l'on ignore avec celles-ci la quantité de soufre employé. On le répand dans un ou plusieurs récipients en poterie ou en grès que l'on prend soin de placer à une assez grande hauteur, attendu que les vapeurs d'acide sulfureux étant plus denses que l'air tombent sur le sol où elles forment une couche sus- ceptible d'arrêter la combustion du soufre. Il va de soi que l'on prend toutes les précautions nécessaires pour empêcher Yui- flammation des substances combustibles qui se trouvent dans le Jocal. « Aussitôt que la combustion du soufre commence, on quitte rapidement le fruitier, on en calfeutre soigneusement toutes les issues, on colle même des bandes de papier sur les fissures des portes, des fenêtres et on y laisse réagir le gaz sulfureux durant vingt-quatre à trente-six heures. Ce temps écoulé, on aère complètement pendant deux jours et l'on dispose alors les EXTRAITS ET ANALYSES 155 fruits dans le fruitier que Ton peut considérer comme désin- fecté. « Mais, pour que cette antisepsie conserve longtemps ses bons effets, il importe de n'emmagasiner que des fruits secs aussi aseptiques que possible, c'est-à-dire qu'un triage sévère devra rejeter tous ceux qui sont piqués ou plus ou moins lésés, de même que ceux atteints de tavelure ou de toute autre maladie cryptogamique. » EXTRAITS ET ANALYSES LE JARDIN DE M. L. PETIT BERGONZ A EZE (1) Par le Dr A. ROBERTSON PROSCHOWSKY J'ai fait, un de ces jours, une visite à un jardin fort inté- ressant, celui de M. L. Petit Bergonz, avoué à Paris, qui possède une propriété, la villa Marguerite, à Eze, près de Nice. Ce que j'y ai vu m'a confirmé, sous tous les rapports, en mes opinions au sujet des possibilités de cultures sur les points les plus abrités de la Côte d'Azur. M. Bergonz qui, malgré ses soixante-douze ans, est vigou- reux, actif et alerte comme un jeune homme, m'a conduit partout jusqu'aux moindres coins de son jardin bien escarpé, car, partout, il y avait des choses à voir. Il a lui-même conçu le plan de ce jardin, d'une étendue de 12.000 mètres, ainsi que de sa villa, construite de façon originale et pratique, avec de vastes pièces donnant de magnifiques vues en toutes directions. Malheureusement, M. Bergonz ne passe qu'une quinzaine de jours par an dans sa propriété d'Eze, et, comme il le dit, ses plantes s'en ressentent. Il est évident, en tout cas, que l'amateur passionné des plantes qu'est M. Bergonz peut beaucoup faire pour obtenir les meilleurs résultats, s'il se trouve sur les lieux. Il faut donc espérer que lorsque M. Ber- gonz jugera qu'il est arrivé à l'âge de se reposer, il viendra passer le reste de sa vie dans sa propriété d'Eze, où il pourra continuer ses intéressantes expériences d'acclimatation d'une manière plus directe. (1) Extrait de la Petite Revue agricole et horticole, 24 mai 1914. 156 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION J'ai publié dans ce journal une série d'articles : Les Fruitiers exotiques sur la Côte d'Azur, où j'ai continuellement insisté sur les grandes possibilités de ce genre de cultures dans les localités les plus abritées de la Côte d'Azur. Je ne connaissais s, à cette époque, l'existence du jardin de M. Bergonz, situé justement dans une de ces localités où j'aurais pu préciser davantage mes indications, car M. Bergonz s'intéresse surtout aux fruitiers exotiques, dont il a cultivé et cultive un grand nombre. Des espèces que je n'ai pu, au moins jusqu'à présent, cultiver dans mon jardin, bien moins abrité et surtout mal exposé à Nice, réussissent parfaitement dans le jardin de M. Bergonz, à Eze, comme Ach7*as sapota, dont j'ai vu un exemplaire bien développé, de toute vigueur, et qui fructifiera sans doute. C'est une espèce qui. même dans son pays, les Antilles, est de croissance lente et demande assez longtemps pour arriver à l'âge de fleurir. Musa Cavendishii Lamb. L'espèce, presque uniquement cultivée aux Iles Canaries, de préférence à d'autres à cause de ses excellents fruits exportés en grande quantité en Europe, réussit parfaitement chez M. Bergonz, protégée seulement par une légère toile étendue au-dessus, pendant les mois d'hiver. 11 va sans dire que les variétés, ordinairement cultivées sur la Côte d'Azur, réussissent parfaitement sans aucun abri et produisent d'excellents fruits en abondance. Psidium Guyava L., avec ses variétés et d'autres espèces de Psidium, sont parfaitement rustiques et productifs. Passiflora quadrangularis L., si peu rustique dans mon jardin à Nice, où à peine cette espèce peut vivre, est parfaite- ment rustique à Eze et produit beaucoup de fruits. Plusieurs espèces de Flacourtia également tout à fait rustiques, tandis qu'ici, à Nice, ces espèces peuvent à peine vivre. JL'ges Marmelos L., qui n'a jamais pu passer un hiver dans mon jardin, est rustique à Eze. Je pourrais continuer ainsi en nommant des espèces que j'ai mentionnées dans mes articles sur les fruitiers exotiques parus dans ce journal, mais M. Bergonz a cultivé et cultive aussi quelques espèces, que je n'ai pu me procurer ou dont je n'avais jamais entendu parler. Une espèce qu'il a achetée sous le nom de Chrysophyllum antioquiense (nom que je ne trouve dans EXTRAITS ET ANALYSES 157 aucun ouvrage à ma disposition), mais qui, à en juger par ses jolies et grandes feuilles, est bien un Chrysophyllum, est rus- tique, n'a pas encore fleuri, mais est dit à fruits comestibles. Une magnifique touffe de Saccharum officinarum L., la Canne à sucre, n'avait aucunement souffert; tandis que dans la Louisiane, aux Etats-Unis, où la Canne à sucre est cultivée industriellement, cette plante ne résiste pas aux bivers, et doit être plantée de nouveau, chaque année, par boutures. Encore faut-il se rappeler que l'hiver passé a été plus rigou- reux que d'habitude sur la Côte d'Azur, ce qui prouve la grande douceur du climat d'Eze et des localités similaires aussi abritées et donne une idée des possibilités très grandes en ce qui concerne le jardinage dans des localités si favorisées. Mais le fait le plus étonnant qui m'était, jusque-là, resté absolument inconnu, c'est que le Cocos nucifera L. peut vivre à l'air libre à Eze. M. Bergonz, ainsi que son jardinier, ont, pendant des années, connu ce Palmier, le plus utile et célèbre de toutes les espèces de Palmiers, dans un jardin, situé tout près, et qui n'est pas même un jardin d'amateur. On avait eu la curiosité de mettre en pleine terre une noix de coco, qui a germé et s'est bien développée, mais plus lentement que dans les pays où le Cocotier est cultivé industriellement, car, à l'âge de dix ans, la plante avait à peine 2 mètres et demi de haut. Cette croissance relativement lente a pu dépendre du terrain pauvre et sec plutôt que du climat. Ce Cocotier est mort, non pas tué par le froid, mais probablement à cause du manque de soins, faute d'arrosage. M. Bergonz n'a pu se procurer aucun exemplaire de Cocos nucifera, et il dit que les noix, si ordinaires dans le commerce, ne lèvent pas, ce qui résulte aussi de mon expérience person- nelle, jusqu'à présent, mais n'ayant jamais eu le moindre espoir de pouvoir cultiver cette espèce à l'air libre ici à Nice, il faut dire que je n'en ai guère fait de semis. Puisqu'une noix a levé dans ce jardin à Eze, d'autres pourraient lever, et je conseille beaucoup à tout amateur, ou simplement curieux de plantes, qui possède un jardin situé dans les localités les plus abritées de la Côte d'Azur, d'essayer le semis de quelques noix de coco, si faciles à obtenir dans le commerce, mais il faudrait les semer, non nettoyées, c'est-à-dire sans que l'épaisse couverture de fibres ait été enlevée. Du reste, le Cocos nucifera L. n'est pas si réfractaire aux températures 158 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION basses qu'on le pense généralement; car, dans la partie extrême sud de la Floride, aux Etats-Unis, où de temps en temps il gèle légèrement, de grandes plantations de Cocotiers existent dans un but industriel. M. Bergonz cultive bien d'autres plantes que des fruitiers exotiques et possède plusieurs espèces devenues rares dans les jardins de la Côte d'Azur. J'aurai, peut-être, l'occasion d'y revenir lorsque, dans quelques articles, je traiterai le sujet des meilleures plantes ornementales pour les jardins de la Côte d'Azur. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS La fin des Pêcheries de Comacchio. — A propos du Chetodon. Une nouvelle alimentation artificielle pour les Truites. Les célèbres pêcheries d'Anguilles de Comacchio, situées à l'embouchure du Pô, sont à la veille de disparaître, en grande partie. Sur tous les points où la lagune ne présente que peu de profondeur, le rendement de la pêche est devenu aujourd'hui insuffisant pour couvrir les frais d'exploitation, très augmentés par suite du renchérissement de la main-d'œuvre; à tel point que la commune de Comacchio, qui exerçait la pêche, pour son propre compte, sur une étendue d'environ .39,000 hectares, a peu à peu accumulé un déficit s'élevant à 2.500.000 lires envi- ron. Le Gouvernement italien a, par suite, décidé l'assèchement de toute la partie nord de la lagune, qui n'est couverte que d'une faible couche d'eau, et voté un crédit de 9.792.000 lires pour l'exécution de ce travail, lequel restituera à l'agriculture des terrains se prêtant admirablement à des exploitations culturales très productives (1). La population de Comacchio, qui compte environ 13.000 âmes, devra donc abandonner beau- coup la pèche pour se vouer aux travaux des champs. Bientôt, il ne subsistera plus qu'un certain nombre d'exploitations piscicoles, installées dans les parties les plus profondes de la lagune, où les bassins {valli) présentent assez d'eau pour que les Poissons n'aient point à souffrir de l'excès de chaleur, pen- dant l'été, ni des trop grands froids, dans les hivers rigoureux. (1) Voy. M. Loyer, les Bonifichi de la province de Ferrare. Bulletin, 1913, p. lui. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 15 Quelques journaux ont raillé la municipalité de Berlin pour avoir fait distribuer à la population un Poisson qui n'entre pas généralement dans la consommation courante et qui s'appelle le Chetodon. Si cette information est exacte, on peut se demander comment les Allemands ont pu se procurer ces Poissons dont toutes les espèces habitent exclusivement les mers tropicales. Ces Squammipennes ou Chétodontidés, comprennent toute une série de Poissons aux couleurs brillantes, et variées à l'infini, aux formes élégantes et bizarres. Les Berlinois ne sont donc pas à plaindre. Du reste, ces Squammipennes fréquentent les mers de l'Asie tropicale, cer- taines espèces sont scatophages et semblent rechercher plus particulièrement les matières en décomposition. On les voit, dans les ports, rôder autour des bateaux guettant les détritus organiques qui en tombent. La chair de ces Poissons scato- phages ou coprophagesdoit s'associer fort bien avec le pain KK sur la table des Berlinois. A l'Exposition nationale suisse, qui a eu lieu en 1914 (du 15 mai au 15 octobre) à Berne, on remarquait, dans le pavillon de la Pêche et de la Pisciculture, divers échantillons d'une nourriture artificielle essayée pour l'alimentation de la Truite par M. P. Jodok Rigert, professeur à l'Ecole cantonale de Sarnen vcanton d'Unterwald). Les renseignements suivants ont été fournis sur ces essais, par l'exposant, dans une lettre adressée à la Société suisse de Pisciculture : « Depuis l'au- tomne dernier, je nourris dans un bassin une centaine de Truites Arc-en-ciel ; ce sont des sujets d'une année qui m'ont été remis, au mois de septembre, par M. Fricker, pisciculteur à Brunnen. J'utilise comme nourriture pour ces Poissons le mélange ci-après : parties égales de farine animale et de farine de seigle, pétries ensemble, après addition d'une quan- tité d'eau suffisante pour permettre d'obtenir une pâte épaisse. La farine animale, que je prépare moi-même et que je conserve en magasin pour être employée, est ainsi composée : farine de Poisson de mer, 1 partie; sang d'abattoir desséché, 1 partie; plus une très petite quantité (un vingtième environ) de terre végétale sèche et réduite en poudre line. 160 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION « Jusqu'au mois de juillet, j'ai distribué, chaque jour, à mes jeunes Poissons une ration dans la préparation de laquelle entrait un décilitre environ de ladite farine animale; puis, à partir de juillet, la dose a été augmentée de moitié à peu près. Jusqu'à ce jour, cette nourriture a parfaitement réussi au Poisson, qui l'accepte sans difficulté et qui a si bien profité à ce régime, que M. Fricker était surpris du rapide développe- ment pris par mes Truitelles. Il est vrai que celles-ci doivent trouver passablement de nourriture naturelle dans le bassin, qui, profond de 2 mètres, présente une surface de 150 mètres carrés, environ, et est alimenté par une prise d'eau, d'à peu près 25 litres à la seconde, faite à un ruisseau voisin. Le mois prochain, je pécherai mes Poissons, et je les remplacerai par environ 500 sujets d'un été, que je nourrirai de la même façon que les premiers. » Aux renseignements qui précèdent, M. J. Rigert a ajouté les suivants : « J'ai péché mon vivier le 21 septembre; il restait 84 Truites Arc-en-ciel pesant ensemble 12 kilogrammes, ce qui représente une moyenne de 140 grammes par Poisson ; mais plusieurs sujets atteignaient 300 grammes. On trouva, en outre, une certaine quantité de petites Truites communes, de Perches, d'Ablettes, de Goujons et de Vairons, venus probablement d'un étang voisin par le petit ruisseau auquel est empruntée l'eau d'alimentation de mon bassin. Toujours est-il que, pendant les quelques mois de leur élevage, mes Truites Arc-en-ciel avaient largement dépassé le poids moyen de 100 grammes auquel je m'attendais, d'après les indications qui m'avaient été données par M. Fricker, et je crois pouvoir, sans erreur, attribuer la belle croissance de mes Truites Arc-en-ciel au choix de la nourriture artificielle que je leur distribuais. « Aussi, en octobre, d'après le conseil de M. Fricker, mettrai-je dans mon vivier 100 sujets d'un été (au lieu de 500, comme j'en avais d'abord l'intention); je les nourrirai de la môme façon que les premiers et, en évitant, autant que pos- sible, l'invasion d'autres Poissons par le conduit d'arrivage le l'eau, je ne serais nullement surpris de récolter, à la tin de septembre de l'année prochaine, une quarantaine de kilo- grammes de belles Truites. » Le Gérant : A. Mauetheux. Paris. — L. Maretheux, imprimeur, 1, rue Cassette. Dix-ippus morosus vivants (Or- hoptères), offerts par M. l'abbé ?OUCHER. rraines offertes par la Dr G. V. PERBZ. Vchium Bourgxanum. — simplex. 'uniperus Cedrus. — bermudiana. Uatice frutescens. — arborea. — Perezii. — brassicxfolia. — - brassicxfolia X imbricata. EN DISTRIBUTION Stalice Perezii X imbricata. Convolvulus /loridus. Crotalaria agatifolia. Cyiisxis filipes. — spachianus. — stenope talus. (Plantes de serre froide.) Graines offertes par M. MOREL. Acacia cultriformis. Acacia leiophylla. Pinus oocarpa. Pithecoctenium muricatum . Angophora lanceolata D. C. — subvelutina Mull. Bauhinia purpurea Callistemon lanceolatum. Draccena draco. Graines offertes par M. GOFFART, de Tanger. Cratsgus nitida, — prunifolia. — succulenta. Acacia. — falcata. Graines offertes par M. BOIS. Chenopodium amaraniicolor. Graines offertes par M. RO-. BERTSON PROSCHOWSKY. Cocos capitala. S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES 00 Chamêerops excelsa de 1 à- 15 fr. Basset griffon tricolore, 3*2 cm., 2 ans, parfait sur bêtes puantes • et tous gibiers, 200 francs. (asset griffon, âgé, ancien chien de tête, 25 frs. ifEROUX, 2, rue Jean-V, Nantes. 'oissons exotiques. Plantes aquatiques. I. LEFEBVRE, 53, rue de Saint-Quentin, Nogent- sur-Marne (Seine). )ffre (échange ou vente) : 1 femelle Daim mou- cheté 1912, et 2 femelles Daim moucheté 1913. [Demande : Biche Sika et femelle Gervicapre. i. JOUFFRAULT, Argenton-Château (Deux-Sè- fcvres). | vendre : Chevreaux et chevrettes nubio-alpins, sans cornes, grosses oreilles tombantes, superbes r animaux sélectionnés en vue énorme production 1 Al 1 1 Àr*P iOUCHACOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- et-Loire). Ihèvres laitières, 2 ans, sélectionnées, syrio-alpi- .nes; Chiots Bulls français, pedigree. Une portée Chats Bleu de Perse (Angora). Lapins primés. ENNY'S FARM, Créteil (Seine). îanards de basse-cour, Poissons d'étangs, espèces nouvelles, ou peu répandues, ou améliorées; de- mande Lapins et animaux à fourrure. i. DODE, à Sorbior, par Jaligny (Allier). Lyîint grandes écuries, étables, vastes prés et. enclos, prendrai pension Chevaux, Vaches, Ani- ■ maux de luxe, Oiseaux, Chiens, etc. Bons soins assurés. i. PASSY, Professeur, École Nationale de Gri- . gnon, « Désert de Retz », Chambourcy (S.-et-O.). «unes Évêques bleus 1914, sexe non garanti, 20 fr. pièce: accepte échange. d. A. DECOUX, Géry, par Aixe-sur-Vienne (Haute- Vienne). Race des Gaulois Dorés. La vraie race Nationale, sélectionnée depuis 10 ans à l'Élevage des Cour- bes-Vaux. Race absolument pratique, rustique et décorative : ponte abondante et chair très fine. 10 premiers prix à Paris, 1911, 1912, 1913, 1914. Œufs à couver, prix réduit pendant la guerre, 5 fr. les 12 franco, au lieu de 6 fr. Encore aussi quelques coqs 1913. Aussi race Gâtinaise blanche type G. C. F., la grande race blanche française: oeufs, 3 fr. 50 la douzaine pendant la guerre. Phœnix blanc : pur œufs, 5 fr. la douzaine et quelques sujets adultes. S'adresser à M. IBOT, basse-courier de M. de SAIN VILLE, aux Courbes -Vaux, par Saint- Germain-des-Prés (Loiret). DEMANDES Bernache de Magellan. M. SELLIER, 59, rue Le- gendre. Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon état. Professeur DECHAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ, Sierre (Suisse). Payerai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans nos Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuer de l'Oiselier (187i Bordeaux). — Alfred Rousse : Perruches. M. A. Decoux, Géry, par Aix-sur-Vienne (Haute- Vienne). 3 mâles Diamants psittaeulaires ; mâle Astrild à joues noires (.Ycisna Dit/remet); femelle Grena- din ; femelle Diamant à gouttelettes ; mâle Mo- deste; mâle Personata ; co. Perruches" à croupion rouge; co. Colombes diamants; prix modérés. M. A. D10COUX, Géry, par Aixe-sur-Vienne (Haute- Vienne). Chien jeune, de garde. M. G. CONTE, 26, boule- vard du Collège, Narb.onnc (Aude). Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser eurs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après xamen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à oesur© des disponibilités. SOCIÉTÉ NATIONAL! D'ACCLIMATATION DE FRANCS fondée le fO Février 1854 - nue d'utiliK publique par décret en date du 26 Février IS5S 33, nui de Buffon — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 M. Edmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du; Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice- Présidents. ( Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Étranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes Etudes, 254, boulevard Saint- Secritaires. i Germain, Paris (Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Gh. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sbbillotte, 11, rue CroiK-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin delà Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Mvre de Vilers, 3, rue Gambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalme, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Paris.- Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D' P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61 rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-èt-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris. Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 du Conskil. le Jeudi à 4 heures. Janvit'i' Février • Mars • Avril 22 Mai Novembre Décembre 14 11 11 27 18 8 22 22 * -. 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sot - Ornithologie (Ligue pour la i n des oiseaux) le lundi 1 4 18 18 1 15 l.'i 1 l.'i 12 26 26 3 17 17 6 | 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les >ersonnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. LA GUERRE ET LA MIGRATION DES OISEAUX Par LOUIS TERNIER. Le Bulletin de janvier 1915 mentionne que M. le Président a entretenu les assistants, à la séance du 24 décembre dernier, des effets de la guerre sur les migrations des Oiseaux. On manque, parait-il, de documents précis pour formuler une opinion sur ce sujet et M. le Secrétaire demande qu'on lui envoie des renseignements. J'ai suivi les diverses phases de la migration à l'embouchure de la Seine, mais sans cependant pouvoir les étudier aussi complètement que je le fais ordinairement quand la chasse est permise sur les marais et au bord de la mer. Au mois d'août, la migration s'est faite d'une façon normale et le gibier, qui n'a pas été pourchassé, a stationné assez longtemps sur nos marais etsurnos grèves où il s'est montré d'une extrême fami- liarité. Je reviendrai un jour sur cette particularité fort intéressante ; aujourd'hui, je me bornerai à dire ce que j'ai constaté dans les environs de l'endroit que j'habite. En août, les Chevaliers, Pluviers, Courlis, Alouettes de mer et autres Ëchassiers analogues ont été très nombreux et, sur les bancs de l'embouchure de la Seine, rive gauche, on a observé des Spatules blanches. Puis les Canards et les Sarcelles, et plus tard les Oies sauvages, ont stationné longtemps dans l'estuaire, très peu farouches, en compagnie d'une multitude de Mouettes, de Goélands et de Courlis. Peu à peu, le nombre de ces Oiseaux a diminué, et les gelées de novembre et de janvier n'ont pas, à ma connaissance, donné lieu à un mouvement de sauvagine aussi important que dans certaines occasions semblables. Je n'ai pas entendu, la nuit, de grands passages comme j'en entends habituellement au moment des froids. Sur les marais, avec les Canards, on a rencontré beaucoup de Bécassines au moment du passage. Il paraît que, dans le Centre, les Canards sauvages ont été très nombreux sur tous les étangs, mais, en Basse-Seine, du moins sur la rive gauche, il n'y a pas eu de passage exception- nellement abondant. On a vu beaucoup de gibier parce que tout le gibier arrivé sur les marais y est resté, se trouvant très BULL. SOC. NAT. ACCL. FIS. 1915. — 11 i62 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION tranquille et en sécurité, mais je n'ai pas constaté person- nellement de forte migration au moment du froid. La vraie migration s'est faite, je crois, dans des conditions normales. En certains endroits, toutefois, les Grives et les Merles de pas- sage ont fait défaut alors qu'ils étaient très abondants sur d'autres. Les Étourneaux, sur les bancs d'alluvions de la Basse-Seine, ont évolué par millions pendant presque tout l'hiver. Ils étaient d'une familiarité surprenante. En résumé, les conditions accidentelles au milieu desquelles s'est effectuée la migration ne me paraissent pas, dans le rayon où j'ai pu l'observer, l'avoir sensiblement modifiée. L'interdiction de chasser, plus ou moins bien observée, mais, en tout cas, générale, a, par contre, profondément modifié les habitudes du gibier migrateur, alors qu'elle n*a eu aucune influence sur celles du gibier sédentaire que j'ai rencontré. Cette différence a ses raisons qu'il sera intéressant d'examiner. C'est ce que je ferai dans une prochaine notice. LA PRÉPARATION DES PEAUX DE LAPINS Par THÉODORE FORTIN. Notre Bulletin a publié récemment une méthode pour la préparation des peaux de lapins. Cette méthode, vraie théori- quement, donnera, je crois, quelque désillusion, à ceux qui l'emploieront, comme elle m'en a donné à moi-même. Les peaux seront bien tannées, mais manqueront de cette souplesse qui en fait le charme et la chaleur. Je propose ici une métbode dont on pourra expérimenter la valeur. Si cependant les lec- teurs du Bulletin éprouvaient encore quelque difficulté dans cette préparation, je serais heureux de leur venir en aide dans la mesure où mon expérience me le permettrait. Préparation des peaux en poil. 1° La peau sèche ou fraîche est mise à dessaigner dans un bassin plein d'eau, que l'on renouvelle au besoin, jusqu'à ce que la peau soit bien blanche. Dans l'eau, la peau sèche rede- vient molle et reprend toutes les apparences d'une peau fraîche. LA PRÉPARATION DES PEAUX DE LAPINS 163 2° On a préparé un bain d'alun et de sel, composé d'eau tenant en dissolution 10 p. 100 d'alun ordinaire et 5 p. 100 de sel de cuisine. Les peaux, bien essorées, sont mises à tremper dans ce bain. Il faut s'assurer qu'elles sont complètement immergées dans le bain et les lever plusieurs fois par jour, afin que le bain les pénètre bien dans toutes leurs parties. 3° Au bout de quatre jours au plus tôt, on peut sortir les peaux du bain et continuer la préparation. Cependant les peaux ne souffriront pas à demeurer plus longtemps dans le bain de tannage. Elles pourraient même y rester plusieurs semaines. Il faudrait alors veiller à ce qu'elles trempent bien complète- ment, sinon les parties qui émergeraient pourraient moisir. 4° Les peaux sont rincées avec le plus grand soin. Il suffit de faire le rinçage avec une eau calcaire. L'alun y fera un louche blanchâtre. La peau sera rincée quand l'eau demeurera com- plètement limpide. A ce moment seulement se fait l'écharnage. 5° Echarnage. — Toute peau est doublée d'un muscle auquel elle adhère. Ce muscle est le muscle peaussier. L'enlever de la peau s'appelle écharner. Quelques-uns écharnent avant le tan- nage. L'opération semble plus facile après le bain d'alun. J'écharne toujours les peaux sans instrument. Je commence par le bas de la peau. On trouve toujours un endroit où le muscle quitte facilement et franchement la peau. On tient la peau d'une main et le muscle de l'autre. Le pouce qui tient le muscle fait pression et l'arrache doucement. Les deux pouces sont toujours en contact et s'appuient l'un sur l'autre. Il faut prendre garde de faire des efforts considérables. Presque toujours ils causent une déchirure. Quand le muscle résiste, je l'abandonne. C'est que j'ai rencontré un tendon, une aponévrose qui ne cédera pas. Je continue l'enlèvement partout où il se fait facilement et j'arrive tout doucement à contourner le point difficile. Il n'y a plus maintenant qu'un fil dont le moindre effort a raison ou qui se détache au moyen du cou- teau. On arrive ainsi à enlever tout le muscle sans avoir fait une déchirure, ni à la peau, ni même au muscle. 6° La peau, bien rincée et écharnée, est égouttée et essorée. Elle est roulée successivement dans plusieurs serviettes spon- gieuses; le poil est essuyé de façon que la peau soit aussi assé- chée que possible. Jusqu'ici il n'y a aucune difficulté. Toute la beauté de la préparation dépendra des temps qui vont suivre. 164 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION 7° La peau, étendue à plat, côté chair en dessus, est enduite d'une légère couche] d'huile. Toutes les huiles sont bonnes, à l'exception des huiles minérales. 8° La peau, enduite d'huile, est repliée sur elle-même, chair contre chair; de façon qu'on ne voie plus que le côté poil. Elle est ainsi enveloppée dans une serviette légèrement humide et mise au repos pendant quarante-huit heures, dans un appar- tement frais, ni froid, ni chaud. 9° Au bout de quarante-huit heures, la peau est ouverte et mise à sécher. On la met à sécher à plat, côté poil en dessous. Tout, maintenant, va dépendre du soin avec lequel on fera sécher la peau. Il faut qu'elle sèche le plus lentement possible. Donc pas de courant d'air, ni de soleil. Je mets bien quarante- huit heures à sécher une peau ainsi préparée, toujours en la maintenant dans un appartement frais. 10° Quant la peau est sèche, mais non durcie, on l'ouvre. A ce moment, la peau offre l'aspect parcheminé, corné, momifié. Cependant si on la manie, on la sent encore souple et légère- ment humide. Du reste, le poil qui n'a pas séché, donne encore à la main une sensation d'humidité. Si la peau était trop sèche, elle ne s'ouvrirait pas. On pourrait essayer de la ramollir en l'enveloppant quelque temps dans une serviette mouillée. 11° La peau est très grasse et l'huile brille sur la chair. Il faut se garder d'essuyer cette huile, que la peau doit absorber. Le novice, pour apprendre à ouvrir la peau, pourra commencer par les pattes qui sont moins épaisses et dont la déchirure a peu d'importance puisque la peau en est ordinairement inuti- lisable. Donc, pour ouvrir la peau, on l'étiré en long et en large. Sous l'effort que l'on fait, on voit la peau qui s'était racornie, s'allonger, s'assouplir et blanchir en même temps que l'huile absorbée disparaît comme par enchantement. Si la peau étirée ne blanchit pas, c'est qu'elle n'est pas encore assez sèche. On continue de travailler ainsi la peau dans toute son étendue, et, en même temps que la peau s'ouvre et s'allonge comme un tricot, on constate qu'elle épaissit et prend une remarquable souplesse. 12° Quand la peau a été ainsi ouverte partout, il y a avan- tage à lui faire subir un commencement de nettoyage. Les manipulations suivantes en sont rendues plus commodes et moins désagréables. La peau est retournée, côté chair en dessous, et le poil est largement saupoudré de plâtre frais. Il LA PRÉPARATION DES PEAUX DE LAPINS 16.") faut employer le plâtre en abondance et le faire pénétrer jus- qu'à la racine des poils. La peau est secouée et battue pour en extraire le plus possible de plâtre. 13° La peau achève de sécher complètement. On la surveille pour s'assurer qu'elle ne durcit dans aucune de ses parties. Si cela arrivait, il suffirait de l'étirer pour l'ouvrir. On peut encore briser et ouvrir les fibres en faisant avec la peau le mouvement de savonnage des blanchisseuses. A ce temps de la préparation, je mets la peau à sécher sur une claie afin que le poil sèche en même temps que la peau. Il peut se faire que la peau ne soit pas complètement sèche à la fin de la journée et qu'il lui faille passer la nuit sans sur- veillance. On pourrait alors la retrouver le lendemain matin complètement sèche, mais un peu dure. Le mieux serait de plier la peau, chair contre chair, et de l'envelopper dans une serviette. On la retrouverait le lendemain matin encore souple et on pourrait continuer à en surveiller le séchage. 14° La peau a désormais toute sa souplesse. Elle demeure cependant imprégnée de l'huile qui a servi à sa préparation, qu'elle a absorbée et qu'il faut lui enlever. On le fait au moyen de l'essence minérale. La peau est trempée dans l'essence qui dissout l'huile; et immédiatement, avant que l'essence ne com- mence à sécher, la peau est abondamment saupoudrée de plâtre frais, dessus et dessous. On frotte, on enlève le plâtre et l'on recommence à saupoudrer jusqu'à ce que le plâtre n'absorbe plus l'essence. La peau est secouée et battue pour enlever les derniers vestiges de plâtre. Si l'on trouvait que le poil n'est pas suffisamment dégraissé, on pourrait recommencer le lavage à l'essence (1). Si la quantité d'huile dont on a enduit la peau a été bien mesurée, il pourrait arriver que la peau finie, ne parût pas grasse au toucher. Dans ce cas, je ne la passe pas à l'essence et me- contente d'un nettoyage soigné au plâtre. Il me semble que toutes les peaux qui n'ont pas subi le contact de l'essence sont demeurées incontestablement plus souples, sans aucune tendance à durcir. (1) C'est à M. Piedallu que je dois tous ces renseignements pratiques. Avec une bonne grâce inlassable, il a bien voulu entrer clans les plus petits détails et je suis heureux de lui témoigner aujourd'hui publique- ment toute ma gratitude. LE PUCERON LANIGERE (Schizoneura Lanigera Hausmann) FORMULE DE M. CÉLESTIN DUVAL POUR SA DESTRUCTION Par A.-L. CLÉMENT. Le Puceron lanigère est certainement un des fléaux les plus redoutés des arboriculteurs, et sa destruction est générale- ment considérée comme des plus difficiles, à tort pensons-nous, car les insuccès nombreux constatés dans sa destruction sont dus, la plupart du temps, à ce que dans l'emploi des insecti- cides on ne tient pas suffisamment compte des mœurs de l'Insecte, pas plus d'ailleurs que des recommandations des auteurs. Le Puceron lanigère, dont nous croyons utile de retracer l'évolution, se présente sous trois formes : 1° Forme aptère asexuée ; 2° Forme ailée asexuée ; 3° Forme aptère sexuée. Sous la première forme, il se multiplie pendant la belle saison par parthénogenèse, et une dizaine de générations (sou- vent même plus) se succèdent ainsi; il atteint 2 millim. 1/2, est d'abord jaune, puis devient brun, et sécrète une sorte de duvet cireux blanc bien connu, qui le rend extrêmement visible. Le développement ne demande qu'une quinzaine de jours et chaque femelle peut pondre 35 à 50 petits vivants (1). L'Insecte attaque d'abord les jeunes branches des Pommiers en dessous, à l'abri du vent et du soleil, déterminant par sa présence la formation de chancres; bientôt l'écorce éclate et les jeunes sucent avidement la sève qui s'en écoule. Ces sortes de galles se développent au fur et à mesure que les généra- tions se multiplient et ne sont abandonnées que lorsque, au bout de quelques années, elles se dessèchent. Cette première forme se rencontre aussi sur les racines surtout près du collet de l'arbre. A la fin de l'été et en automne, quelques individus pré- (1) Mûlberg et Kraft estiment que huit générations de 30 petits seule- ment donneraient à la fin de Tannée 636.100. 000 Pucerons. LE PUCERON LANIGERE 167 sentent des fourreaux alaires ; ce sont des nymphes dont bientôt sortiront des femelles ailées, qui pondront à la face inférieure des feuilles chacune 3 à 6 petits, présentant deux tailles diffé- rentes; des uns, plus gros et jaunes, sortiront des femelles con- tenant chacune un seul œuf qui remplit tout leur corps, c'est Y œuf d'automne; des autres, plus petits et vert olive, sortiront des mâles. Ces mâles et ces femelles sont dépourvus de rostre et d'appareil digestif, ils ne prennent par conséquent pas de nourriture, mais ils s'accouplent. Après la fécondation, les femelles déposent leur œuf dans les crevasses de l'écorce, près du collet de l'arbre générale- ment, ce qui explique que l'infection de l'arbre se fait ordinai- rement de bas en haut ; cet œuf ne tarde pas à éclore et c'est la larve qui en sort qui hiverne pour donner au printemps une femelle parthénogénétique . D'autre part, des larves provenant de la dernière génération d'aptères de la précédente année hiver- nent aussi et donnent également au printemps des femelles par- thénogénétiqueset le cycle évolutif recommence, ce que le pro- fesseur Keller, de Zurich, a résumé dans une formule que l'on peut traduire de la façon suivante : Les femelles agames de mai donnent une dizaine de généra- tions aptères parthénogénéliques. Puis les larves de la génération suivante donnent : Et, d'autre part, des femelles aptères, qui, au printemps, seront également devenues des mères de deuxième année. D'une part, des femelles ailées qui donneront naissance à des mâles et des femelles, lesquelles pondront un œuf unique d'où sortira une larve qui, au prin- temps, deviendra mère parthéno- génélique de deuxième année. Beaucoup de ces mères hivernantes mourront pendant les froids qui les atteignent dans les places où elles se sont réfu- giées, mais celles qui auront survécu recommenceront dès le printemps à pulluler, étendant rapidement sur place le fléau pendant que les femelles ailées se chargent de le répandre sur les arbres environnants. En présence d'un Insecte dont la pullulation est si bien assurée, tous les procédés de destruction doivent être bien accueillis et c'est pour cela que nous avons cru utile de faire connaître celui de M. Célestin Duval, procédé dont une corn- 168 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION mission nommée par la Société nationale d'Horticulture de France a pu constater l'efficacité, et qui est basé sur l'em- ploi de trois formules contenant de l'huile soluble de soude ou sulforicinate de soude, produit obtenu en traitant l'huile de ricin par l'acide sulfurique à froid et en saturant par la soude. La formule I que M. Duval appelle solution de carbonate de potasse A se compose de : Eau de pluie 1 litre. Carbonate de potasse 4 grammes. Huile soluble de soude (sulforicinate de soude) 40 grammes. Alcool à brûler 20 grammes. Jus de tabac riche (c'est-à-dire à 100 gr. de nicotine par litre) 10 grammes. Ce liquide s'emploie pendant le cours de la végétation sur toules les parties de l'arbre, même sur les pousses nouvelles en pulvérisations. Pendant les deux ou trois dernières semaines de la végéta- tion on emploie, s'il reste encore des pucerons, la formule II, ou solution de potasse d'Amérique A, qui est plus énergique, et composée de : Eau de pluie 1 litre. Potasse d'Amérique 10 à 12 grammes. Huile de soude (sulforicinate de soude) . 40 grammes. Jus de tabac riche 20 grammes. Alcool à brûler 20 grammes. Cette deuxième formule s'emploie comme la formule I. A partir de la fin d'octobre on emploie la formule III en applicpuant le liquide au pinceau efMe faisant pénétrer dans les trous et les fissures de l'écorce pour y détruir l'œuf d'automne, elle est composée de : Eau de pluie 1 litre. Savon noir 3o0 grammes. Huile soluble de soude (sulforicinate de soude) 50 grammes. e>* Enfin pour les individus qui sont sur les racines, voici ce que dit M. Duval : « Ouvrir à l'entour du pied de chaque arbre, un trou en forme de cuvette, de façon à mettre à jour les pucerons fixés sur les racines; arroser alors suffisamment avec la formule I ou, s'il en esi besoin, la formule II; les insectes ne tarderont pas à périr; après l'avoir constaté, combler la cuvette. » EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 169 Ce procédé nous semble d'un emploi facile, et il a l'avantage de s'attaquer à l'Insecte à toutes les phases de son évolution. 11 n'est pas douteux qu'une entente entre les arboriculteurs pour son application donnerait les meilleurs résultats, surtout si, conformément au désir de M. Duval, on pouvait obtenir en même temps le concours des Pouvoirs publics; en tout cas nous avons cru bien faire en faisant connaître ce procédé, per- suadé que son emploi soigneusement fait doit donner de bons résultats. EXTRAITS DES PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ SEANCE GENERALE DU 15 FEVRIER 1915 Présidence de M. Itaveret-Wattel, Vice-Président de la Société. La parole est donnée à M. le Secrétaire, pour la lecture du procès-verbal de la précédente séance, dont la rédaction est adoptée. Mammalogie. Notre président, M. Edmond Perrier, a reçu une lettre du Syndicat général français des industries de la ganterie de peau, attirant l'attention de la Société sur l'opportunité qu'il y a à protéger notre troupeau national de Chèvres, dont la peau présente des qualités très remarquables au point de vue de l'industrie gantière. Le président du Syndicat prie la Société de vouloir bien appuyer de son autorité la demande adressée au ministre de l'Agriculture, et tendant à enrayer la destruction irréfléchie de nos Chèvres pour la nourriture des troupes indiennes actuellement sur le front. En conséquence, notre collègue M. Crepin a rédigé une lettre au ministre de l'Agri- culture, au nom de la Société d'Acclimatation, lettre qui se termine par un vœu tendant à protéger le troupeau caprin français. Ce vœu, mis aux voix, est adopté à l'unanimité. 170 bulletin de la société nationale d' acclimatation Ornithologie. M. Louis Ternier nous adresse sur La guerre et la migration des oiseaux une note qu'on trouvera reproduite au Bulletin et dans laquelle l'auteur donne quelques renseignements nouveaux sur la présence des Oiseaux dans les marais de la Basse-Seine, aux mois d'août et de septembre. Il n'y a pas eu, dans cette partie de la Normandie, de passages d'Oiseaux anormalement abondants. M. Magaud d'Aubusson dépose sur le bureau un numéro d'une brochure russe qui lui a été adressée par M. de Gont- charolï, président de la Société impériale d'Aviculture rurale de Bussie, chambellan de S. M. l'Empereur de Bussie. Entomologie. M. Diguet expose les nouvelles observations qu'il a faites sur le mosquero ou nid d'Araignées, employé au Mexique comme piège à Mouches. Bien que les premiers nids recueillis par l'auteur l'aient été en 1909, on n'a pas pu, jusqu'ici, trouver le moyen de les conserver, en Europe, et de les utiliser, comme au Mexique, pour la capture des Mouches. Et cependant l'usage de ces nids serait très précieux, surtout dans les endroits où les Mouches sont abondantes, comme les étables, les fabriques de confiserie, etc. Dans leur pays d'origine, ces nids exigent trois conditions sine qua non : 1° de l'ombre, 2° une grande humidité, 3° un arbre vivant. Les deux premières conditions sont faciles à respecter, lorsqu'au Mexique on transporte ces nids ou une partie de ces nids — car ils peuvent atteindre un volume énorme, 1 mètre cube par exemple — dans l'intérieur des habitations. On peut les placer sur une corde ou tout autre support isolé, dans le milieu de la pièce, et on entrelient l'humidité en vaporisant de l'eau. L'Araignée qui habite ce nid est très petite, 2 millimètres environ. Elle vit en commensale avec une autre Araignée plus grosse, et on trouve souvent dans le nid d'autres Insectes, notamment de petits Coléoptères, dont le rôle est sans doute de tenir le nid en parfait état de propreté, en faisant disparaître les cadavres des Mouches que la petite Araignée s'est contentée de sucer. La structure du nid est comparable à celle d'une éponge. L'emploi de ces nids comme pièges à mouches est des plus aisés, mais il importe de EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 171 ne pas fumer au voisinage, car l'odeur du tabac est détestée par les Araignées qui s'en vont au dehors ou qui ne tardent pas à mourir empoisonnées. Les nids qu'on a essayé d'envoyer en Europe n'ont pas bien réussi jusqu'à ce jour, sans doute par défaut d'humidité pendant le voyage. On avait pu installer un nid dans un des laboratoires du Muséum, il y a quelque temps, mais les Araignées qui se trouvaient respirer sans cesse des odeurs qui n'étaient pas de leur goût, telles que celles de l'acide phénique ou de la naphtaline, disparurent un jour subitement. Elles avaient profité d'une fenêtre ouverte pour gagner les jardins, et jamais on n'en a retrouvé de traces. M. Diguet donnera sur ce sujet une note complémentaire de celle qu'il a publiée en 1909, et qui, comme la précédente, paraîtra au Bulletin. Botanique. M. D. Bois présente des pommes de Reinette du Canada, provenant du fruitier de M. Debreuil et atteintes d'une maladie connue sous le nom de graisse des pommes. Cette maladie est caractérisée par des taches de 2 à 5 millimètres de diamètre. En coupe, on voit sous la peau des parties de tissu mortifié radiales, qui peuvent atteindre 1 ou 2 centimètres de longueur. Ce n'est probablement pas une affection cryptogamique, car on n'a trouvé jusqu'ici aucun parasite. Il est possible que, par un processus analogue au développement des gales, on se trouve là en présence de la réaction des tissus de la pomme contre la piqûre d'un Insecte, dont la salive acide peut amener une décomposition partielle du mésocarpe. MM. Louis Mangin, en 1901, et Gallaucl, en 1906, ont publié des mémoires sur ce sujet dans la Revue Horticole. Il est pos- sible que cette piqûre d'Insecte se produise dans le fruitier. On pourrait donc désinfecter. M. Magaud d'Aubusson propose aussi, pour protéger les fruits, de faire emploi de cloches ou de sacs comme ceux qui servent au raisin. C'est aussi l'avis de M. le professeur Trouessart et de la plu- part des membres présents. Toutefois, il est possible que l'In- secte, que l'on ne connaît pas encore, soit de si petite taille, qu'il puisse quand même traverser la gaze des sacs protecteurs. Et à ce propos, M. Trouessart pense que l'on pourrait peut-être 172 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION incriminer des Acariens, dont quelques-uns ont une trompe très longue, malgré leur petite taille. M. Debreuil croit que si, cette année, la maladie s'est déve- loppée dans son fruitier avec une assez grande extension, cela est dû à ce que les événements actuels l'ont détourné de mettre dans le fruitier de la chaux vive, comme il en avait l'habitude. Et alors on est en droit de se demander si l'humidité favo- rise le développement de la maladie. M. D. Bois rédigera, sur ce sujet, une notice qui paraîtra au Bulletin. Colonisation. M. le Président signale que la Société nationale d'Agriculture vient de décerner un prix de mille francs à notre collègue, M. Auguste Chevalier, pour ses recherches et ses travaux sur les cultures coloniales. Le Secrétaire, Dr Louis Capitaine. SEANCE GENERALE DU 4" MARS 1915 Présidence de M. Raveret-Wattel, Vice-Président de la Société. La parole est donnée à M. le Secrétaire pour la lecture du procès-verbal de la dernière séance, dont la rédaction est adoptée. M. le Secrétaire avait laissé passer une phrase du procès- verbal de la séance générale du 18 janvier dernier (Bulletin de février, p. 53), d'après laquelle le D1 Jaboulay aurait établi que radéno-carcinome de la thyroïde chez les Salmonidés était due à un Sporozoaire de la famille des Myxosporidés. 11 ne s'agit là, en réalité, que d'une opinion toute personnelle, dont l'exacti- tude n'a pas été reconnue. Nous apprenons avec regret que M. Henry Chauvaux, ainsi que l'un des fils de notre collègue, M. A. Cordonnier, ont été faits prisonniers. Par contre, l'important établissement de M. A. Cordonnier « les Grapperies du Nord », à Bailleul, a très peu souffert de l'occupation momentanée des Allemands. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 173 Un décret vient de changer le titre de la Société nationale d'Agriculture, qui s'appellera désormais : Académie d'Agri- culture. Mammalogie. M. Blaauw envoie, sous forme de liste, une note sur l'état actuel de sa ménagerie (janvier 1915), à Gooilust, Hollande. Ornithologie. M. Debreuil lit une réponse de notre collègue, M. de Najac, aux brochures publiées par certains plumassiers, au sujet de la protection des Oiseaux. A propos de la migration des Oiseaux, M. Pichot signale que l'Oiseau, dénommé Gros-bec, n'habite l'Angleterre que depuis 1870. Aquiculture. M. Raveret-Wattel fait une communication sur la piscicul- ture dans les rizières du Piémont et de la Lombardie. Celte communication sera insérée in extenso au Bulletin. Les Poissons étant très friands de larves, il était tout indiqué de chercher à élever des Poissons dans les rizières, dont l'eau, à moitié stagnante, surchauffée par le soleil du jour, favorise étrange- ment la pullulation des larves de Moustiques, propagatrices de la mararia. Naturellement l'attention s'est portée sur des Poissons comestibles et surtout sur la Carpe. Les premières expériences ont été faites dans le Ravennais. Il fallait voir si les soins que Ton devait donner aux Poissons n'étaient pas de nature à porter préjudice aux cultures. Il n'en est rien. On emploie généralement la Carpe miroir de Galicie. L'empoissonnement, la première année, se fait à raison de 4.000 jeunes par hectare. On les pêche, la veille de la récolte du riz, et on les met en réserve dans des bassins d'hivernage, qui peuvent sans inconvénient contenir 50 kilogrammes de Carpes par mètre cube d'eau. La deuxième année, on met seule- ment 200 Poissons par hectare, car ils ont beaucoup grossi. On ne dépasse guère cette taille, car la nourriture que les Poissons trouvent dans les rizières serait insuffisante, et l'eau serait aussi en trop faible quantité. Le déchet d'alevins est de J 74 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION 80 p. 100 environ. 1 hectare de rizière peut donner 100 kilo- grammes de Carpes. Ces Poissons sont utiles, non seulement parce qu'ils détruisent, en les mangeant, nombre d'herbes, qu'il fallait auparavant faire enlever à la main, mais encore et surtout parce qu'ils se nourrissent des larves d'Anophèles, propagateurs de la mal'aria. Les résultats n'ont pas été aussi bons avec les Tanches qu'avec les Carpes. Ces dernières ont, en effet, une croissance particulièrement rapide, lorsqu'elles sont jeunes. On a aussi essayé avec succès d'introduire dans les rizières le Black-Bass à grande bouche. Ce Poisson supporte sans inconvénient la température souvent élevée de l'eau des rizières. Et sa pré- sence ne nuit pas au développement de la Carpe, surtout après un an. La Carpe se reproduit spontanément en rizière. Il serait intéressant d'appliquer ces méthodes d'empoisson- nement des rizières dans nos colonies rizicoles, pour détruire sans frais et parfaitement les larves des Insectes nuisibles, propagateurs de maladies. On pourrait faire de même en Camargue. Et, en outre, la vente du Poisson serait rému- nératrice. À ce sujet, M. le professeur Roule rappelle que des Carpes très rustiques vivent fort bien dans les mares saumâtres de la Camargue. Entomologie. M. Clément fait une communication sur le Puceron lanigère (Schizoneiira lanigera Hausmann) et les formules de Célestin Duval, relatives à sa destruction. Il y aura plusieurs formules, car il faudra tenir compte du degré de l'évolution de l'Insecte. Au printemps des $ aptères se reproduisent parthénogénique- ment pendant 10, 12 et même 14 générations. Les larves de la dernière génération évoluent de façon multiple donnant des $ ailées, et d'autres aptères. Les 9 ailées pondent moins d'ceufs que les $ aptères, mais ils sont de deux sortes : les plus petits donneront des q-*, les plus gros des $. La génération sexuée apparaît donc. Suivent quelques considérations sur les dégâts causés par le Puceron au Pommier. Il se produit une espèce de chancre, à la base, près du collet, puis l'envahissement se propage, de EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 175 proche en proche, jusqu'au sommet. Il serait facile de détruire le Puceron, si on opérait méthodiquement, mais c'est rarement le cas. Célestin Duval a proposé trois formules différentes, à employer au printemps, en été et en automne. Elles sont toutes à base de sulforicinate de Na. Ce sulforicinate s'obtient par action de SO*H* concentré sur l'huile de ricin, et neutra- lisation de l'acide en excès par la NaOH. — Il faut avoir soin de désinfecter la racine, comme les branches, car la première ponte se produisant près du collet, les Insectes peuvent envahir l'appareil radiculaire. M. Diguet rappelle à ce propos que l'on pourrait peut-être employer le cyanure de potassium en solution, mais ce sel, éminemment toxique, se décompose vite à l'air, en solution. Il signale qu'au Mexique, aux environs d'une usine où l'on pra- tiquait la cyanuration, il avait remarqué que la végétation était d'un beau vert partout où passaient les eaux résiduelles de lavage. Mais en France la vente du cyanure de potassium n'est pas libre. Enfin, M. le professeur Roule fait observer que le Puceron étant protégé par un feutrage laineux, une simple solution aqueuse, quelque toxique qu'elle fût, ne saurait pénétrer jusqu'à l'animal. Il est donc bon de noter que dans toutes les formules de Célestin Duval figure un alcali destiné à faciliter la pénétration de la liqueur toxique. M. Poisson demande si le Pommier à cidre est atteint, en Normandie. Il est probable que tous les Pommiers sont susceptibles d'être attaqués, mais on manque de documents pour répondre à M. Poisson de façon précise. Botanique. M. Diguet fait une communication sur la culture de deux Cereus à fruits comestibles, au Mexique. Vers 1.200 mètres d'altitude, on cultive, sans aucun soin, deux espèces surtout : Cereus quereiarensis Web., et C. tricos- tatus R. R. G. Le C. quereiarensis Web. donne ses fruits en mai et juin, pendant la période de sécheresse. La fructification dure environ un mois. On peut envoyer les fruits jusqu'à Mexico. Le feutrage épineux qui les recouvre favorise leur 176 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION emballage. Il y en a de quatre sortes : blancs, rouges, violacés et jaunes. Les rouges sont les plus communs. On recherche de préférence les fruits à épidémie fin, mais ils sont difficiles à transporter. Il en existe d'excellents, dans un endroit célèbre pour cela, à trois lieues de Guadalajara, mais lorsqu'ils sont mûrs, il faut les transporter avant le lever du soleil, sans quoi le fruit éclate. Cette espèce se plante par bouturage, car la crois- sance étant extrêmement lente (2 ou 3 centimètres par an), le semis ne donnerait aucun résultat. Le C. iricostatus R.R.G., à croissance beaucoup plus rapide, donne ses fruits dans la saison des pluies. Le mieux est de placer ces plantes sur un mur ou sur un toit en tuiles, où on les fixe avec un peu d'argile. Au bout d'un ou de deux ans, la plante a repris. Ce Cereus a très bien réussi en Provence, près de Nice, chez M. Rolland-Gosselin ; le Cereus souvent épiphyte, au Mexique, est d'un port toujours décombant. Il en existe plusieurs variétés. La plus remarquable est celle qui possède de très grosses fleurs qui peuvent atteindre 30 centimètres de longueur, mais dont les fruits sont très petits. On peut pro- voquer des hybridations pour accentuer le goût formique et très agréable des fruits. On fait souvent grimper le C. tri- costatus, sur le C. queretarensis , de façon à avoir toujours des fruits au même endroit, tantôt avec l'une, tantôt avec l'autre espèce. La fécondation ne se fait bien qu'avec le con- cours des Hyménoptères. A ce propos, l'auteur énonce quelques considérations sur les Abeilles et le miel, au Mexique. La communication de M. Diguet sera insérée in extenso au Bulletin. Le Secrétaire, D' L. Capitaine. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 177 SÉANCE GÉNÉRALE DU 15 MARS 191S Présidence de M. R avère tWat tel, Vice-Président de la Société. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. GÉNÉRALITÉS. M. de Gonlcharoff écrit de Petrograd à la date du i fé- vrier 1913 : « Arrivé en Russie, j'ai convoqué une assemblée de la Société impériale d'Aviculture rurale de Russie, au cours de laquelle les sujets allemands et autrichiens ont été exclus de la Société. « Le journal de la Société, Ptizevodrogé Chosiaistvo, paraît sans interruption et nos travaux sont en pleine activité. » Le Dr Loisel, médecin-major de lre classe, annonce son pro- chain départ pour la Serbie où il va, en compagnie d'un cer- tain nombre de médecins français, apporter le secours de sa science à nos alliés. Nous recevons de bonnes nouvelles de nos collègues le D' Pierre Vincent, Dannin, Jean Delacour et Louis Rousseau qui nous envoient du front des observations qu'ils ont faites sur les Mammifères et les Oiseaux des régions où se battent nos armées. Dans le même ordre didées, M. Louis Ternier nous adresse une note sur « la guerre et le gibier », qui sera publiée dans le Bulletin. Mammalogie. M. le ministre de l'Agriculture, en réponse au vœu émis par notre Société lors de la précédente séance générale, en faveur de la protection de notre troupeau de Chèvres, a envoyé à notre président, M. Ed. Perrier, la lettre suivante : « Paris, 5 mars 1915. « Vous avez bien voulu appeler mon attention sur un vœu émis par la Société Nationale d'Acclimatation de France, en BULL. SOC. NAT. ACCL. FK. 1915. 12 1TS BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION vue d'obtenir que les mesures nécessaires soient prises pour protéger notre troupeau de Chèvres. « J'ai l'honneur de vous informer que j'ai signalé ce vœu à toute la bienveillance de M. le ministre de la Guerre. Dès qu'une solution sera intervenue, je m'empresserai de vous en aviser. » Souhaitons que ce vœu soit exaucé par le ministre de la Guerre et que les conclusions du rapport présenté au nom de la Société par M. Crepin soient adoptées pour la sauvegarde de nos races de Chèvres françaises. M. P. A. Pichot, poursuivant la série de ses études sur les Mammifères à fourrure, fait une communication sur l'élevage des Skunks en captivité, communication qui sera insérée in extenso dans le Bulletin. A propos de l'expression de « cheptel » dont il est souvent fait usage dans nos discussions, un de nos collègues fait remarquer que ce mot est souvent employé dans une mauvaise acception, soit par des éleveurs, soit, ce qui est plus grave, dans des documents officiels. C'est à tort, en effet, que l'on donne à ce mot le sens de troupeau en général ; on ne doit pas dire, par exemple, le cheptel caprin, le cheptel bovin, etc., de telle ou telle région, et à plus forte raison, le cheptel national. Cheptel, que l'on prononce « chètel », n'est pas synonyme de troupeau. Un cheptel est un contrat par lequel on donne des bestiaux à garder, à nourrir, à soigner, moyennant une part dans les pro- fits; par extension, on donne aussi ce nom à ces bestiaux eux- mêmes, mais c'est commettre une faute de français que de le donner à l'ensemble d'un troupeau quelconque. Ornithologie. M Xavier Raspail fait hommage d'une note dont il est l'au- teur sur « l'origine et la formation de l'œuf nain sans vitelius », vulgairement appelé œuf de coq. Les conclusions de l'auteur sont les suivantes : « Il peut arriver que sous l'influence d'une excitation quelconque, la muqueuse de l'oviducte exsude, soit avant, soit après le passage de l'œuf, une certaine quantité EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 179 d'albumine qui, prenant la forme ovoïde ou sphérique par l'impulsion rotative qu'elle reçoit, joue le rôle d'un œuf ordi- naire. Arrivée dans la partie rétrécie de l'oviducte, appelée l'isthme, cette petite masse appelle autour d'elle la formation de la membrane coquillière, sur laquelle, à son tour, se dépose la couche calcaire et la matière colorante comme sur l'œuf normal Ces œufs nains ne contiennent donc rien de l'ovaire; ils ne sont qu'un produit accidentel émanant directement de l'oviducte. » M. Louis Rousseau nous écrit du front, sans doute de la région de Verdun, le 3 mars 1915 : " Je tiens à vous signaler le retour des Cigognes, des Grues et des Oies. Il en est passé plusieurs troupes, d'environ dix individus, dans la matinée, direction du vol N. N.-E., la canon- nade incessante ne les effraie pas et leur vol est assez bas. Depuis quelques jours, les Etourneaux et les Alouettes remontent au N.-O.; le matin surtout, assez beau passage. » M. Magaud d'Aubusson recommande à ses collègues la lec- ture d'un article de M. P.-A.. Pichot, paru dans le journal Le Chenil, sur l'élevage des Oiseaux-Mouches. Ces Oiseaux si brillants, ajoute notre collègue, ne le sont qu'au repos. Quand ils volent, le mouvement de leurs ailes est si rapide, qu'ils n'offrent plus aux regards qu'une vision nuageuse comme nous apparaissent dans leur vol les Sphinx de nos jardins. Ce sont des Oiseaux insectivores et l'on s'est trompé quand on les a considérés comme vivant uniquement de nectar. En captivité, ils dépérissent si l'on ne leur donne pas d'insectes à manger; il leur faut une nourriture animale. La question de la température est secondaire. Certaines espèces vivent dans l'Amérique du Nord et l'une d'elles remonte jusqu'au Canada et est commune dans l'Est des Etats-Unis. Aquiculture. M. le professeur Roule fait une communication sur les Che- lodons et leur acclimatation en France, elle sera publiée dans le Bulletin. M. le Dr Robertson-Proschowsky nous adresse le résultat de ISO BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DACCLIMATATION ses observations sur la reproduction, à Nice, en eau close, du Pomoxys annularis et du Scardinius erithrophtalmus (Rotengle). Entomologie. M. l'abbé Foucher présente un couple de Cyphoerania gigas. Ce couple est adulte, le mâle est beaucoup plus petit que la femelle qui mesure 28 centimètres de longueur. Ces Orthop- tères méritent à plus d'un titre de fixer l'attention des entomo- logistes; c'est la première fois que cet élevage réussit en Europe et qu'il est permis de suivre leur développement depuis l'éclosion jusqu'à l'âge adulte. Botanique. Notre collègue, M. le professeur Giorgio Roster (de Florence), nous adresse, pour la bibliothèque, un volume dont il est l'au- teur, sur les Palmiers cultivés en plein air, en Italie. Il sera donné ultérieurement, dans le Bulletin, une analyse de cet inté- ressant travail qui est tout à fait en rapport avec les recherches q;ie nous poursuivons. Pou?' le Secrétaire empêché, Maurice Loyer. SEANCE GENERALE DU 12 AVRIL 191 5 Présidence de M. Trouessart, membre du Conseil. M. le Secrétaire général annonce le décès du prince Ernest d'Arenberg, mort des suites des blessures qu'il avait reçues au cours des combats du mois de septembre dernier. Il fait l'éloge de notre collègue et adresse à son frère, le prince Pierre d'Arenberg, l'expression des regrets unanimes que cette perte cause à notre Société. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. A propos du procès-verbal du Ie' février, M. Debreuil fait re- marquer que l'observation concernant la note de M. Lapicque EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 181 sur l'élevage des Bengalis laisse supposer que ces Oiseaux ont besoin, toute l'année, de prolonger la durée de leur repas fort avant dans la nuit; or cela n'est utile que pendant la saison froide, où l'augmentation de nourriture est nécessaire, car elle correspond, pour ces Oiseaux, à un besoin de chaleur. Les Bengalis ne sont voraces que lorsqu'ils ont froid. Mammalogie. M. le ministre de l'Agriculture, dans une lettre du 26 mars 1915, adressée au président de notre Société, M. Edmond Per- rier, nous apprend qu'en vue de protéger nos Chèvres fran- çaises, menacées de disparition par suite de trop forts prélèvements opérés pour la nourriture des troupes hindoues, le ministre de la Guerre a invité le Directeur de l'Intendance de la Mission française attachée au corps expéditionnaire britannique, à rechercher, de concert avec l'autorité anglaise, les moyens de nature à donner satisfaction aux desiderata exprimés par notre Société. Dans une seconde lettre, en date du 9 avril, le ministre de l'Agriculture nous annonce qu'il a pris connaissance du rapport que notre Société lui a adressé sur la situation et l'avenir de l'élevage de la Chèvre en France et nous confirme son désir de sauvegarder, dans la mesure du possible, les intérêts des éleveurs et des manufacturiers en gants de peau. C'est dans ce but, qu'il a attiré l'attention du ministre de la Guerre sur l'intérêt qu'il y aurait à faire contribuer nos possessions nord- africaines au ravitaillement en Chèvres des troupes hindoues. Ornithologie. M. Magaud d'Aubusson fait une communication sur « les Oiseaux du Bled marocain ». Cette communication sera publiée dans le Bulletin. M. le Dr Pierre Vincent nous écrit du front, à la date du 29 mars : « Les mœurs du gibier en temps de guerre sont assez intéressantes à observer sur la ligne même du feu. Les pariades de Perdrix se sont faites en huit jours, à la fin de février et durant les tout premiers jours de mars. Dans les poches à feu que forment, à certains endroits, les tranchées de 182 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION première ligne, on a pu voir les coqs en surnombre se battre avec acharnement; les hommes les tirent à balle et cette déto- nation sèche n'interrompt pas le combat. L'Oiseau visé, man- qué ou tué net, les autres ne se dérangent en rien. Mais qu'une Perdrix soit blessée et gigote à terre, c'est la panique. Un couple de Crécerelles a élu domicile dans les quelques pans de mur d'une grande ferme, diminués de jour en jour par les obus allemands; il faut que le projectile frappe le mur pour que les deux Oiseaux s'envolent, ils reviennent dès que le tir cesse! Tsous avons eu, dans les sapins, pendant ces deux der- nières semaines, des passages de grandes bandes de Tarins. Avant-hier 27 mars, j'ai vu la première Hirondelle rasant le sol, au cours d'une promenade à cheval; elle paraissait seule et est passée plusieurs fois auprès de moi. Hier, à travers champs, j'ai levé, à bonne portée, trois Outardes canepetières, ainsi que de nombreuses Perdrix et pas mal de Lièvres. Lorsque ces derniers se trouvent pris entre les tranchées boches et les nôtres, ils sont infailliblement détruits à balles. Il y a même eu des hommes qui se sont faits tuer pour aller ramasser un Lièvre. » Aquiculture. M. Lefebvre nous donne quelques renseignements sur ses élevages de Poissons exotiques. Les pontes et les naissances se font de jour en jour plus nombreuses dans ses aquariums. Parmi les plus intéressantes, notre collègue nous signale celle des Rivulus, Aplcchilus fasciatus, A. rubrostigma ainsi que des Gamhusia, Pœcilia et Xipho. A noter également qu'un couple de Pantodon fait son nid, signe d'une prochaine reproduction. Toutes ces espèces se reproduisent avec assez de facilité. Les Poissons télescopes, au contraire, qui sont depuis long- temps connus en France, sont toujours difficiles à élever. Sur un millier de naissances, il reste à peine, en fin d'élevage, une cinquantaine de beaux sujets, le reste est mort ou a produit des Poissons défectueux sur lesquels on peut compter que 200 sont revenus au type ancestral du Carassius auratus. M. Lefebvre ajoute quelques renseignements sur les soins qu'il donne à ses Poissons télescopes, qui sont, plus que les autres, sujets aux maladies. Beaucoup d'entre eux succombent à des affections de l'intestin auxquels on peut remédier en les purgeant, c'est-à-dire EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 18:> en leur donnant des bains de sel à raison de 10 grammes par litre d'eau. Entomologie. M. P. -A. Pichot nous apprend que la pénurie des Vers de farine a suggéré aux amateurs d'Oiseaux insectivores, en Angleterre, l'idée d'offrir à leurs pensionnaires des Carausius morosus, Orthoptères dont l'élevage a été tenté l'an dernier, en France, par notre collègue M. l'abbé Foucher et qui a si bien réussi. Les Oiseaux semblent très bien se trouver de ce nouvel aliment qui leur est offert. L'introduction de ces Insectes est donc à encourager, puisqu'ils joignent à l'attrait que présente leur mimétisme, une utilisation fort appréciable, étant données la grande facilité et la régularité avec lesquelles ils se repro- duisent. Botanique. M. le Dr Robertson Proschowsky nous adresse, de Nice, une notice bibliographique consacrée à l'ouvrage que vient de publier notre collègue le professeur Giulio Roster, sut- les Pal- miers cultivés en plein air dans les jardins d'Italie. Cette notice est complétée par une série d'observations personnelles que M. Proschowsky a faites, au cours de sa longue carrière de botaniste et d'acclimateur, sur les diverses espèce de Palmiers qui vivent sur la Côte d'Azur. M. Lefebvre met à la disposition de ses collègues un certain nombre de pieds de Passiflora cœrulœa qu'il a élevés dans sa pro- priété de Nogent-sur- Marne. l'our le Secrétaire empêché, Maurice Loyer. 1 S 4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION IIe SECTION. — ORNITHOLOGIE Sous-section: Ligue française pour la protection des Oiseaux. SÉANCE DU 15 FÉVRIER 1915 Présidence de M. Magnud d'Aubussoii, président. La parole est donnée à M. le Secrétaire pour la lecture du procès-verbal de la précédente séance, dont la rédaction est adoptée. M. Geoffroy-Saint-Hilaire, président honoraire de la Société, nous écrit de Bourgogne que, dans la région qu'il habite, les petits Oiseaux, les Moineaux eux-mêmes, ont presque complè- tement disparu. Il avait, dans son jardin, trois nids de Rossi- gnols. Il n'en a plus qu'un maintenant, et il estime que les dégâts sont causés par les Pies. Mmo Lehmann (du Havre) nous écrit : « Ici, dans Pavant- port, on attrape les Mouettes à l'hameçon. Pauvres beaux Oiseaux inoffensifs! J'espère qu'après la guerre, on aura le droit de défendre cette stupide chasse. » L'ordre du jour se trouve modifié par l'absence d'un mémoire dont le manuscrit ne nous est pas parvenu à temps. M. le Pré- sident nous donne, en échange, connaissance de certains pas- sages du numéro d'octobre de la revue allemande Kosmos, trouvé sur un soldat ennemi. L'un est intitulé : « Chasse et guerre. » C'est une courte note d'une page où l'auteur examine ce que doivent faire les chasseurs allemands, restés au logis, tandis que leurs jeunes confrères « combattent, sous les dra- peaux victorieux, pour l'honneur du pays ». « Abandonner la chasse à l'heure actuelle, dit l'auteur alle- mand, serait une faute économique. Il faut chasser, si les cir- constances le permettent, autant qu'en temps de paix; pas plus, lias moins! Il ne faut pas laisser inutilisée cette source de nourriture, et les chasseurs doivent considérer la chasse comme une tâche et un service qu'ils rendent à la patrie. La valeur nutritive annuelle du gibier allemand se chiffre par EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 185 millions de mark, et bien des propriétaires donneront certai- nement une grande part de leur chasse pour améliorer l'ordi- naire des hôpitaux. « La chasse procurera travail et pain à beaucoup de paysans sans ressources, et bien des corps de métier en tireront profit. D'autre part, le gibier non chassé commettrait des dégâts dans les champs, chose d'autant plus à éviter que la longue durée de la guerre va nous forcer à une sévère économie ménagère et à utiliser avec grand soin la moindre parcelle de terre pour y cultiver des légumes à croissance rapide. « On doit donc s'entendre pour chasser le plus possible, en évitant le braconnage et en prenant soin de ménager le gibier pour l'avenir. Même en temps de guerre, dit l'auteur en termi- nant, le disciple de Saint Hubert doit être protecteur en même temps que chasseur. » — On voit, par cette note que, contrairement à ce qui se passe chez nous, la chasse est non seulement permise, mais encouragée, pendant la guerre, chez nos ennemis. Ce qui a poussé l'Allemagne à prendre cette mesure, c'est certainement les raisons données par l'auteur : grande quantité de gibier, dégâts possibles et aussi cette crainte, qu'il ne cache pas dans un article destiné à des compatriotes : crainte de famine si la guerre se prolonge. L'Allemagne devra utiliser ses moindres ressources, elle fera tout pour durer; et, dans l'article du Kosmos, nous voyons apparaître un moyen de prolonger et d'augmenter les provisions, moyen qui, croyons-nous, n'a pas été envisagé par ceux qui comptent sur la famine pour triom- pher de nos ennemis : nous voulons parler des « iégumes à croissance rapide ». Nos. collègues de la section de Botanique voudront certaine- ment nous aider à dresser la liste de ceux que vont pouvoir employer les Allemands. Le second article est signé d'un nom que nous étions habi- tués à voir sous des études ornithologiques et qui, maintenant, rédige les chroniques guerrières. Ici le Dr Flœricke traite de « l'élevage des petits animaux et la guerre ». Parmi les ani- maux de basse-cour, seront très demandés la Poule et ses œufs et les Pigeons : le poulailler aura à fournir un gros appoint au printemps prochain. Mais Flœricke insiste surtout sur le Lapin « dont la viande, mal connue des Allemands, serait 186 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION très appréciée des prisonniers belges et français ». Les paysans allemands, dit l'auteur, doivent pousser l'élevage du Lapin et offrir leurs produits aux administrateurs des camps de prison- niers d'où économie pour les autorités militaires et bien-être pour les prisonniers qui « de temps à autre recevront un plat favori de leur pays ». Nous savons, hélas! combien la réalité est loin de ce civet prometteur. Aux sociétés scientifiques qui s'occupent de l'élevage des petits animaux « de luxe », Flœricke conseille de ne pas cesser leurs travaux, mais de se préparer, dès maintenant, pour un avenir meilleur. On voit qu'ici nous sommes pleinement d'ac- cord avec l'auteur allemand. Les amateurs de Poissons d'orne- ment pourraient installer leurs aquariums dans les hôpitaux pour distraire les malades et pour « purifier l'air »? Cela ferait également de la bonne propagande. Les Serins seraient, au contraire, à exclure, pour raisons contraires à l'hygiène. Du reste, la guerre a déjà bien touché le commerce et l'élevage des Serins et des Oiseaux de cage, le transport d'Oiseaux vivants est devenu presque impossible dans le pays même. Quant aux importations, il n'y faut plus penser. Peu après la déclaration de guerre, arriva à Marseille un navire venant d'Afrique et qui portait plusieurs milliers d'Oiseaux à desti- nation d'Allemagne. La cargaisou fut saisie, les Oiseaux relâ- chés, et Flœricke se demande si quelques espèces plus résis- tantes ne vont pas s'adapter à notre climat du Midi. Flœricke envisage le sort que doivent réserver les éleveurs aux Serins qu'ils ne peuvent plus nourrir. Il conclurait à un essai en grand d'acclimatation en liberté : les Oiseaux, surtout ceux de race verte, seraient confiés à un amateur qui les hiver- nerait dans des chambres non chauffées ou dans des volières, puis les lâcherait au printemps dans des endroits choisis. Un de nos collègues présents rappelle à ce sujet qu'étant à Marseille à cette époque, il a pu voir, pendant quelques jours, tous les arbres des squares couverts d'Oiseaux exotiques de toutes sortes qui n'ont pas tardé, sans doute, à périr. M. le Président dépose sur le bureau le numéro de janvier 1915 de la Société zoologique de New-York, où se trouve un article intéressant pour nous : « L'acclimatation des Oiseaux de Paradis, dans la petite île de Tobago. » Ces Oiseaux (Para- disea apoda) ont été introduits, en 1909, par William Ingram. EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 187 Cette espèce, très recherchée pour les touffes de plumes de ses ailes, est la plus menacée d'anéantissement. Rien entendu, pour une tentative de ce genre, il faut attendre au moins dix ans pour avoir un résultat. Bien qu'il n'y ait pas d'animaux destructeurs, dans l'île précitée, bien qu'on n'y rencontre ni Rats ni Serpents, la principale difficulté que ren- contre l'acclimatation réside dans ce fait qu'on ignore les enne- mis des Oiseaux en traitement et aussi leurs habitudes, au point de vue de la nourriture. Sur les quarante-sept Oiseaux introduits en 1909, il reste, en août 1914, quatre mâles, dix femelles et un jeune. Le Secrétaire par intérim, Dr Louis Capitaine. IIe SECTION. — ORNITHOLOGIE Ligue française pour la protection des Oiseaux. SÉANCE DU 15 MARS 1915 Présidence de M. Magaucl d'Aubusson, président. Le procès-verbal de la précédente séance est lu et adopté. M. Jean Delacour nous écrit du front, le II mars : « Jusqu'ici j'ai constaté, en Argonne et en Champagne, que les migrations étaient très normales. Sauf sur la ligne de feu même, les Oiseaux sont très abondants en Champagne. Je voyage beau- coup sur les routes en voiture et je croise des bandes de Chardonnerets, Linots, Pinsons, etc. , beaucoup plus nombreuses qu'en Picardie habituellement. Énormément de Corbeaux freux. J'ai croisé aujourd'hui une bande de deux cents Vanneaux qui ne se sont pas sauvés à plus de 20 mètres de moi. J'ai vu fréquemment des Pinsons des Ardennes, des Pies-Grièches écorcheurs et quelques Hérons. » D'une lettre de M. Burdet, qui passa l'hiver en Engadine, nous extrayons le passage suivant : « J'ai protité de mon séjour en Suisse pour donner trois conférences ornithologiques à 188 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION Lausanne, Genève et Neufchâtel. J'ai eu le grand plaisir de retrouver mon public habituel, qui semble s'intéresser de plus en plus à la cause de la Protection des Oiseaux. » M. André Godard nous écrit, de Tigné Maine-et-Loire), le 27 février 1915 : « Ici, le braconnage est presque nul et assez sévèrement réprimé. Quoique je circule souvent en automo- bile, je ne crois pas avoir entendu trois coups de fusil depuis le début de la guerre. Il me semble que le braconnage nocturne des petits Oiseaux, ordinairement si terrible dans nos contrées, a aussi diminué. Enfin, je constate l'heureux effet des cam- pagnes de presse, surtout celle du Petit Journal en faveur des Oiseaux insectivores. Les enfants tendent moins de pièges et dérobent moins de nids. Malheureusement, ces bons résultats sont compensés et au delà, je le crains, parla disparition crois- sante des espèces, victimes des progrès (?) industriels. Au premier rang, citons la faucheuse mécanique qui extermine tous les humicoles : Traquets, Pipits, Bergeronnettes, etc., ont à peu près disparu. « Ensuite, les fils électriques à haute tension... J'ai entrepris une enquête à ce sujet et ai recueilli les renseignements les plus contradictoires. Je serai reconnaissant à ceux de nos col- lègues qui pourraient me transmettre des faits précis à cet égard. Il ne me semble pas que les fils télégraphiques causent grand mal. Mais les fils téléphoniques et surtout les fils d'éclai- rage électrique, si multipliés dans nos campagnes depuis deux ans, me semblent la cause principale de la disparition d'espèces percheuses, comme les Bruants, les Verdiers et les Chardon- nerets. Le Moineau semble plus méfiant. « Quoi qu'il en soit, je constate la quasi-disparition des Frin- gilles, sauf les Pinsons. Peut-être faut-il attribuer cela aux drogues agricoles utilisées dans certains départements. « Autre question: Nepourrait-onpasprofiterdescirconstances actuelles pour obtenir le monopole de l'État pour la fabrication des armes à feu? Entin, l'élévation des amendes dans les procès de chasse a produit un bien incontestable. Ne pourrait-on en obtenir le maintien en temps normal ainsi que l'élévation de la prime aux agents répressifs dans tous les procès-verbaux pour destruction d'Oiseaux utiles » ? M. Viton nous communique un jugement du tribunal correc- EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 189 tionnel d'Agen du 17 février 1915 condamnant un chasseur au lacet à huit jours de prison. M. Kehrig nous adresse le numéro du 25 février 1915 de la Feuille vinicole de la Gironde qui contient un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, en date du 20 no- vembre 1914, fixant définitivement la jurisprudence dans le sens de la protection des Oiseaux et dont voici les termes : La Cour : Vu les appels réguliers relevés par les inculpés D..., B..., S... contre le jugement du 31 janvier 1914. Vu également l'appel régulier formé contre le même jugement par M. Cluzeau, partie civile agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de président de la Société des chasseurs au fusil de la Gironde et propriétaires du Sud-Sud-Ouest de la France. Au fond : Attendu qu'il est constant que les 12 et 16 octobre 1913, un grand nombre d'Oiseaux, Pipits des prés et Bergeronnettes visés à l'inter- diction par l'article 7 de l'arrêté préfectoral de la Gironde du 28 juil- let 1913, ontété vendus aux halles de Bordeaux par D..., B... et S..., facteurs à la criée. Que les deux premiers prévenus ne l'ont à aucun moment dénié et que S..., à l'audience de la Cour du 18 mars courant, l'a reconnu, prétendant que c'était par inadvertance que furent vendues à sa tribune des brochettes d'Oiseaux prohibés. Attendu que les trois appelants se réclament aujourd'hui de la tolérance émanant d'un avis préfectoral du 8 août 1913; mais qu'il est à dire qu'ils n'ignoraieutpas, en raison notamment d'un commu- niqué antérieur de la partie civile, que cette tolérance administra- tive ne pouvait tenir en échec un arrêté ayant force de loi. Que les prévenus demeurent donc convaincus d'avoir commis l'infraction prévue et punie par les articles li, paragraphe 3 de la loi du 3 mai 1844 et 7 de l'arrêté préfectoral du 28 juillet 1913. Sur la recevabilité de l'intervention de la partie civile. Attendu que l'action en réparation du préjudice causé par un délit appartient à tous ceux qui en ont souffert, qu'à ce titre M. Cluzeau intervient d'abord en la cause en son nom personnel comme propriétaire en Gironde. Mais attendu qu'il ne justifie point d'un dommage qui lui soit propre et qui serait le résultat direct des infractions retenues contre les inculpés; qu'il y a lieu par suite de déclarer irrecevable son action personnelle. Mais attendu, d'autre part, que M. Cluzeau intervient en sa qualité de président de la Société des chasseurs au fusil de la Gironde et 190 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIM. TION propriétaires du Sud-Sud-Ouest de la France, dont :, statuts ont été régulièrement déposés et publiés, en conformité e la loi de droit commun du 1er juillet 1901. Attendu que, tout comme les syndicats professiom -réis par la loi spéciale de 1884. une association légalement déck qualité pour défendre en justice les intérêts qu'elle a en vue ue' grouper ; que l'exercice de ce droit n'a d'autre limite que celles tracées par les statuts eux-mêmes. Attendu que, pour fonder la recevabilité de l'intervention de la société représentée par M. Gluzeau, il suffit d'établir : 1° L'existence d'un intérêt collectif direct ; 2° La possibilité d'un préjudice ou dommage éventuel. Or, attendu qu'il ressort des statuts de l'association dont s'agit, que cette association a pour but l'intérêt des cbasseurs et celui à la fois des propriétaires, agriculteurs ou non. Qu'elle s'est constituée tant pour la défense du gibier par la répression du braconnage, que pour celle de leurs propriétés par la protection des petits Oiseaux incontestablement utiles à l'agri- culture. Attendu qu'il y a bien là, avec la possibilité d'un dommage, un intérêt collectif et direct ; que cet intérêt résulte tant de la compo- sition de la société formée de chasseurs du Sud-Sud-Ouest de la France, que du but qu'elle poursuit et qui est sa véritable raison d'être; que, par suite, c'est le cas de déclarer bien fondée l'inter- vention de M. Cluzeau en tant qu'il agit comme représentant de l'association en question. Attendu d'ailleurs que les intérêts généraux de cette Société ont réellement subi un préjudice direct, non seulement moral, mais encore matériel, du fait des infractions commises par les inculpés. Qu'en effet la vente des Oiseaux interdits par l'arrêté préfectoral a été de nature à favoriser le braconnage et à porter atteinte à la propriété ; qu'elle a certainement lésé la propriété défendue par l'association en aidant le braconnage à la destruction des petits Oiseaux utiles à l'agriculture. Attendu que la Cour possède, pour la réparation de l'entier préju- dice causé, les éléments d'appréciation nécessaires. Adoptant au surplus les motifs du jugement attaqué en ce qu'ils n'ont rien de contraire au présent arrêt. Par ces motifs, la Cour, après en avoir délibéré, déclare recevables en la forme les appels réguliers relevés tant par les prévenus D..., B..., et S..., que par la partie civile. Au fond : déclare les appels des inculpés mal fondés ; confirme en conséquence le jugement en tant qu'il a retenu leur culpabilité. Le confirme également au point de vue de l'application de la peine. EXTRAITS I PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 191 Maintien1 mende de 50 francs prononcée contre chacun d'eux. D'autre p '. déboute M. Cluzeau de son appel, en tant qu'il pré- tendait in air en son nom personnel et qu'il réclamait de plus amples <' ersonnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Jociété, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du.'jour mensuels des séances. NOTE SUR L'ÉTAT ACTUEL DU MARCHÉ DES ANIMAUX EXOTIQUES VIVANTS EN EUROPE Par G. de SOUTHOFF. La vente des animaux exotiques vivants est un commerce assez lucratif et fort intéressant. Malheureusement, il n'est pas encore organisé en France et bon nombre de naturalistes et d'acclimateurs ont quelque difficulté à se procurer les exem- plaires qu'ils désirent, même en offrant de les payer à un prix élevé. Comme on a pu le lire à différentes reprises dans ce même Bulletin, c'est l'Allemagne et l'Angleterre qui détiennent pres- que exclusivement ce marché. Nous allons résumer dans ses grandes lignes et passer en revue ses conditions actuelles, dans l'espoir que leur connaissance facilitera et encouragera les marchands des pays alliés à développer cette branche com- merciale non indifférente, à leur plus grand avantage et à celui de leurs clients. En Allemagne, les marchands d'animaux exotiques sont très nombreux. On croit généralement que c'est Hagenbeck, de Stellingen, près de Hambourg, qui est le plus important, et c'est vrai dans une certaine mesure. Hagenbeck est le plus grand et le plus connu des marchands de bêtes féroces; mais d'autres, tels que Ruhe, à Alfeld, qui a une succursale à New- York, Auguste Fockelmann et Kuntzschman à Hambourg, Doren- dorf à Halle et beaucoup d'autres vendent des animaux sau- vages et leurs importations de petits Mammifères, notamment, sont tout aussi nombreuses. Lorsque le vieux Charles Hagen- beck vivait, il tenait à la primauté de sa maison et lui avait fait prendre une envergure commerciale « américaine », comme aiment à le dire les marchands teutons modernes. Il avait même attaché à son établissement un naturaliste chargé de déterminer et d'étudier scientifiquement les animaux nouveaux qu'il recevait. Mais ses fils ont une autre idée de leur com- merce, plus pratique peut-être et à coup sûr plus rémunéra- ratrice. Le marché des Oiseaux avait atteint, en Allemagne, son apogée, il y a quelque vingt ans, grâce à l'oisellerie que' tenait, à Hambourg, la sœur d'Hagenbeck et qui a fait, recon- BULL. SOC. NAT. ACCL. FR. 1915. 13 194 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION naissons-le, nombre d'importations fort intéressantes. A l'heure actuelle, il existe à Hambourg, Berlin, Leipsick, Ulm, etc., des marchands d'Oiseaux en gros très bien achalandés et dont les prix sont des plus abordables. C'est, en outre, à Hambourg et à Altona qu'arrivent d'énormes quantités de Poissons vivants et autres animaux d'aquarium dont la vente fait l'objet du commerce de très nombreuses maisons. Celles-ci importaient chaque année de nouvelles espèces, d'Asie et de l'Amérique équatoriale pour la plupart, dont quelques-unes très rares. Quant au commerce des Reptiles et des Batraciens, depuis les Pythons jusqu'aux petits Bacertidés et depuis les Salamandres géantes (Mégalo batrachus) jusqu'aux Rainettes [Hylae) exo- tiques, il était l'apanage presque exclusif des marchands alle- mands et autrichiens. C'est par dizaines qu'ils se comptent et des mieux installés, fournissant à leurs clients des prix cou- rants très complets, avec noms latins à l'appui. Les plus importants sont Scholze et Poetzschke, à Berlin, dont le ma- gasin occupe deux étages d'un immeuble, avec ascenseur, et dont le catalogue de luxe contient des photogravures que beau- coup d'ouvrages d'erpétologie lui envieraient. Ces maisons vendaient plus particulièrement des Reptiles et des Batraciens exotiques, mais aussi ceux d'Europe, à des prix d'un incroyable bon marché. Quelques-unes faisaient, en plus de leur com- merce habituel, celui des Insectes et autres Invertébrés et fournissaient à vil prix des Orthoptères, Coléoptères, Myria- podes, Arachnides, Gastéropodes, etc., des pays chauds. En Angleterre, où la passion des animaux vivants est si répandue, depuis l'animal favori de la jeune miss jusqu'à la Ménagerie ou au Jardin zoologique du riche lord, le commerce des animaux a été de tous temps très florissant. La vieille renommée de Cross, à Liverpool, dépasse peut-être, ajuste titre, celle d'Hagenbeck. Je citerai encore, à Londres, les Jamrach etle plus grand importateur de Singes en Europe, J. D. Hamlyn. Le commerce des Oiseaux est des plus développés chez nos amis d'outre-Manche et il suffit de jeter un coup d'œil sur les collections de YAvicultural Magazine ou sur celles de l'hebdo- madaire populaire The Cage Birds pour s'en convaincre. Les Anglais importent non seulement les Oiseaux les plus rares par l'intermédiaire de leurs marchands, mais des amateurs éclairés ne craignent pas d'entreprendre des voyages très longs pour s'en procurer, ou bien encore ils chargent des personnes com- ÉTAT ACTUEL DU MARCHÉ DES ANIMAUX . EXOTIQUES 195 pétentes d'aller chercher dans leur pays d'origine les hôtes de leurs volières. Les amateurs de Mammifères exotiques sont également nombreux et le « Amateur Ménagerie Club » s'est fondé pour réunir plus spécialement ces derniers. On peut se réjouir de constater que l'Angleterre importe autant et même plus d'animaux que nos ennemis, ce qui a l'avantage de nous permettre de nous fournir chez elle, en attendant. La France, qui venait en tète des pays important les habi- tants à plume et à poil des contrées exotiques durant les siècles passés, n'est malheureusement plus au même rang. Les mar- chands d'animaux de Marseille, Bordeaux et du Havre sont peu nombreux et souvent la concurrence allemande les a découragés. Toutefois, durant ces dernières années, plusieurs importations intéressantes ont eu lieu au Havre, parmi les- quelles je citerai de très nombreux Poissons d'aquarium, peu rares à vrai dire, et quelques animaux sauvages tels que Chats- Tigres du Brésil (Felis mitis), des Ours de Russie (Ursus arctos), etc.. Mais, en général, les arrivages se font moins nombreux. C'est une lacune qui vaut d'être comblée, car c'est en France que les oiseliers italiens et espagnols achètent leur marchandise; les ports de Gênes et de Barcelone n'important que très peu, et la langue étant un obstacle entre eux et les marchands allemands. Cet état de chose était, du reste, sur le point de changer peu avant la guerre, car les oiseliers d'outre- Rhin commençaient à envoyer en Italie et en Espagne des prix courants dans la langue du pays. Au cours de cette revue nous ne nous sommes occupés des maisons allemandes que pour montrer combien leur place était forte et bien établie sur le marché dont il est question. Il va sans dire que la guerre changera tout cela, mais nous devons, dès à présent, envisager ce qui est à faire pour que notre clien- tèle les abandonne après la conclusion de la paix, pour n'avoir recours qu'aux marchands nationaux. Lps Allemands sont tenaces dans leurs marchandages. En voici un exemple. On a pu lire dernièrement que les consuls britanniques en Hollande ont été chargés par leur Gouvernement de bien s'assurer que les Canaris exportés en Angleterre de ce pays étaient des pro- duits d'élevages hollandais et n'étaient pas importés d'Alle- magne pour être réexportés ! Le fait semble minime à première vue, mais nos ennemis ne doivent pas empocher notre argent et, d'autre part, les importations de Serins de la Hollande dans 196 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION le Royaume-Uni s'élèvent à une valeur d'environ 3.000 francs par semaine, malgré la guerre et le blocus des sous-marins, Quels sont les animaux qui forment la base du commerce dont nous nous occupons? En principe, tous les Vertébrés, à l'exclusion de quelques familles et, parmi les Invertébrés, les Insectes et quelques autres animaux inférieurs terrestres et aquatiques, si intéressants à observer en captivité. De ces der- niers, rappelons ceux qu'offraient le plus souvent en vente les maisons allemandes : les Roses de Mer (Actinies), les Étoiles de Mer (Astéries), les Oursins (Echinides), les Lymnées et les Planorbes, parmi ceux de Mer ou d'eau douce; les Mille-pieds et les Escargots des régions tropicales, parmi les terrestres. Les Mammifères que l'on importe offrent une grande diver- sité de formes et de taille, depuis les petits Rongeurs, gros comme une Souris, jusqu'aux Eléphants. Les lois restrictives à leur exportation qui existent dans certaines colonies, lois que l'on ne peut, du reste, qu'approuver, attendu qu'elles ont pour but la protection des espèces rares, empêchent certaines importations qui ne sont permises qu'à titre exceptionnel pour les Jardins zoologiques. La fragilité de certains animaux est un empêchement sérieux à leur introduction sur les marchés européens; ainsi, par exemple, certains Edentés et Insectivores et beaucoup de Singes platyrrhiniens sont rarement offerts en vente. Laissant de côté les animaux que leur taille rend inabor- dables à la plupart des amateurs et à un grand nombre de naturalistes, nous ne nous occuperons que des autres. Nom- mons, en passant, parmi ceux qui ne sont pas assez connus et appréciés au double point de vue scientifique et curieux, beau- coup de petits Carnassiers : Chats-sauvages tels que Felismitis, Felis Geo/fruyi; les Caracals {Felis Caracal) ; les Coatis (Nasua); les Genettes (Genetta); des Marsupiaux : Opossums [Tricho- surus) et Kangurous (Macropus); une quantité de Singes, allant des vulgaires Macaques et Bonnets chinois (M. cyno- molgus et sinicus) aux élégants Mangabés {Cercocebus) et Gue- nons (Cercofrithecus) et aux espèces américaines dont trois ou quatre seulement, les Capucins ou Sapajous (Cebus), les Atèles (A teles) et les Ouistitis divers (ffapale, Midas), font leur appari- tion dans nos ports, mais qui sont des plus communs sur les marchés de Liverpool et de Londres. Là encore, ce sont nos amis les Anglais qui importent le ÉTAT ACTUEL DU MARCHÉ DES ANIMAUX EXOTIQUES 197 plus. Ongulés, Ruminants, Carnassiers, Singes, Lémuriens, Marsupiaux, Rongeurs et même Chéiroptères se trouvent, chaque année, en bon nombre, chez leurs marchands. Certaines espèces nouvelles sont venues remplacer celles devenues plus rares pour une raison ou pour une autre. Les arrivages se font de plus en plus réguliers. L'immense empire colonial anglais, à lui seul, fournit la plus grande partie de ces animaux. Les nombreuses et intéressantes espèces propres à l'Australie arrivent par grandes quantités et sont vendues à des prix très doux. Le marché aux Singes est, aussi, bien fourni et ce n'est qu'en Angleterre que l'on peut se procurer certains Quadru- manes américains et les Guenons rares de l'Afrique équatoriale et insulaire. Les Singes anthropomorphes sont fréquents chez les marchands anglais, plus fréquents que nulle part ailleurs, sauf peut-être en ce qui concerne les Orang-Oulangs et les Gibbons que les Hollandais importent de leurs possessions des Indes Néerlandaises, avec quelques autres espèces de leurs colonies. Les animaux de l'Asie centrale et de la Sibérie sont plus rares. Ils étaient généralement communs chez les mar- chands autrichiens et allemands de Trieste et de Hambourg. En revanche, les Ruminants asiatiques et africains, Antilopes, Gazelles, Chèvres et Mouflons sont fréquents sur les marchés anglais, ainsi que les Mammifères de l'Amérique du Nord. En France, les Mammifères ne sont importés, si l'on excepte quelques Singes, Tatous (Dasypus), Ecureuils et autres petits animaux assez communs, que très irrégulièrement et en petite quantité. Il est regrettable que les animaux des Colonies fran- çaises ne soient pas importés ou l'étaient par des marchands allemands ! C'est là une source de bénéfices pour les nationaux que l'on aurait tort de négliger plus longtemps. En Belgique, on importait des animaux à Anvers, mais le plus souvent seulement en transit pour l'Allemagne... Le Jar- din zoologique de cette ville tenait annuellement une vente d'animaux exotiques très fréquentée. En Italie comme en Espagi , les marchands n'achètent qu'occasionnellement aux matelots les Singes et autres ani- maux que ceux-ci ramènent de leurs voyages. Quelques négo- ciants anglais reçoivent leur marchandise à Gênes et la con- voyent ensuite en Angleterre, après un court repos. Je signalerai, à titre de curiosité, le marché aux Singes de Constantinople qui fournit les Babouins (Papio) que l'on trouve 198 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION souvent dans les harems turcs, où ils amusent par leurs gri- maces les dernières désenchantées. C'est également à Constan- tinople que Tziganes et Romanichels achètent leurs Cynocé- phales, tout comme les petits Italiens des rues de Paris — il y a quelque trente ans — achetaient les leurs à Parme. Presque tous les Ours des Romanichels sont des Ours syriens (U. arctos syriacus), plus doux que ceux d'Europe, achetés à Trieste où ils sont importés d'Asie-Mineure. De tous les animaux exotiques, ce sont les Oiseaux qui arrivent le plus régulièrement par grandes quantités en France. Non seulement les petits Passereaux, mais bon nombre de Palmipèdes, de Grimpeurs, de Colombidés et de Gallinacés et même des Oiseaux de proie et des Autruches sont offerts, chaque année, en vente dans les différents ports de l'Atlan- tique et de la Méditerranée. Parmi les amateurs d'animaux vivants, ce sont surtout ceux qui s'occupent d'Ornithologie qui sont nombreux en France et plus d'un d'entre nos collègues possède des collections d'Oiseaux remarquables à tous les points de vue. Les Oiseaux que nous rapportent, chaque prin- temps, les grands transatlantiques, par quantités fort impor- tantes, portent dans tous les pays le nom de « Collections du Sénégal » car ils sont généralement composés d'Oiseaux afri- cains, embarqués dans un port de ce pays, tout comme les arrivages d'Oiseaux sud-américains, rares, hélas, de nos jours, étaient désignés au temps de Mme de Pompadour du nom de « Collections du Brésil » ou « Collections d'Oiseaux des Iles ». Les Oiseaux de Java, de l'Indochine et de l'Inde sont aussi communément offerts. Il y a quelques années encore, beau- coup d'Oiseaux australiens, notamment certains Diamants [Poephila), arrivaient souvent à Marseille, mais ils se font de moins en moins communs, comme les petites Perruches insé- parables à tête rouge (Ayapornis pullaria), que les oiseliers français appelaient aussi Moineaux de Guinée, et qui ne sont plus guère importés qu'en Angleterre. Les marchands italiens, espagnols et portugais ne reçoivent directement que quelques « Collections du Sénégal » composées d'Oiseaux bien connus et de peu de valeur. Nous sommes donc redevables aux Anglais de tous les Oiseaux rares ou peut s'en faut. Plusieurs espèces nouvelles de l'Inde septentrionale ont fait leur apparition, ces dernières années, sur ce marché. Presque tous les Perroquets et Per- ÉTAT ACTUEL DU MARCI1É DES ANIMAUX EXOTIQUES 199 ruches sont également importés dans les Iles Britanniques. Les Cacatoès, les Perroquets à courte queue, quelques Aras, les petites Perruches de l'Amérique des genres Brotoqerys et Conurus, les Palxornis figurent parmi les plus abondants. Les Aras, toutefois, arrivent moins souvent qu'auparavant et cer- tains d'entre eux [Ara leari, A. maracana, Cyanopsittacus spixi) font complètement défaut. Parmi les Perroquets pro- prement dits, notons les Perroquets gris ou Jaco (P. erythacus) de l'Afrique, importés par grandes quantités que la fièvre sep- tique décime pendant les premiers mois de leur séjour en Europe. Ils ne sont plus guère importés en France, surtout ceux à plumage gris-cendré clair, provenant de la côte méridionale de l'Afrique équatoriale occidentale et qui sont connus sous le nom marchand de « South-Coast » et passent pour mieux doués. Certaines Perruches australiennes du genre Platycercus se trouvent être moins fréquentes sur le marché qu'autrefois. On importe en Angleterre bon nombre d'Oiseaux de la Scandi- navie, du Nord de la Russie et de la Sibérie, dont quelques-uns ne sont que les formes septentrionales, de taille plus forte et de coloration plus vive, de nos Oiseaux indigènes ^Bouvreuils, Chardonnerets, Tarins, Sizerins) et d'autres sont propres à ces régions, comme les Roselins cramoisis (Carminé Finch, Angl., Carpodacus erythrinus), les Jaseurs de Bohême (Waxwing, Angl., Ampelis garrulus) et quelques autres. Malheureusement c'est par l'intermédiaire des Allemands que se faisaient ces importations, ce qu'il y aura lieu d'éviter à l'avenir. Le commerce des Poissons d'Aquarium est assez répandu en Angleterre, tout en étant de beaucoup inférieur à celui des pays ennemis. Quant aux Insectes, leur introduction, en Angleterre comme en France, ne fait pas l'objet d'un com- merce, la même chose peut se dire des Invertébrés, alors qu'à Hambourg, Vienne, etc., comme nous l'avons dit, les uns et les autres avaient leur cote. Sauf quelques espèces que les marchands anglais importent assez souvent, le marché des Reptiles et des Batraciens est minime. Il est vrai qu'ils trouvent peu d'acheteurs. Ces ani- maux sont pourtant assez faciles à garder en captivité et certai- nement plus intéressants que beaucoup d'autres. La répulsion instinctive qu'éprouvent généralement les personnes à leur égard explique peut-être davantage ce fait. Il n'a pas été notre intention en rédigeant cette note d'entrer 200 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION dans des particularités de statistique ni de citer des espèces. Les personnes que cette question intéresse trouveront un sûr appui auprès de la Société Nationale d'Acclimatation de France qui sera heureuse de leur fournir tous les détails complémen- taires. Nous voudrions plutôt avoir esquissé une image plus claire des conditions contemporaines de ce marché, afin que les importateurs des pays alliés songent à concurrencer avanta- geusement leurs ennemis sur ce terrain. 11 leur serait facile de se procurer les animaux de leurs colonies, autant dire de la moitié de la totalité des pays tropicaux. Outre l'Europe, les deux Amériques leur fourniraient une clientèle nombreuse et excellente. Une plus étroite collaboration d'affaires entre les marchands anglais et français serait aussi désirable, ils pour- raient s'entr'aider mutuellement avec succès et rendre par là des services appréciables aux acclimateurs et aux savants, contribuant en même temps au bien-être général et à la pros- périté de leurs pays. L'ACCLIMATATION DE L'ÉCUREUIL GRIS D'AMÉRIQUE EN ANGLETERRE Par PIERRE AMÉDÉE-PICHOT L'Écureuil gris d'Amérique, qu'il ne faut pas confondre avec l'Écureuil de Sibérie qui fournit la fourrure dite Petit gris dans le commerce, et qui n'est qu'une variété climatérique de l'Écu- reuil ordinaire, est une espèce bien caractérisée par une taille plus forte, des formes plus massives et l'absence de ces pin- ceaux aux oreilles qui donnent à notre Écureuil une physio- nomie si éveillée. Son poil est aussi moins fin, et il reste gris toute l'année, tandis que le Petit gris prend une fourrure rouge pendant la belle saison, changement de couleur, analogue aux modifications que subissent le Renard isatis, l'Hermine et autres animaux de la faune polaire. Son habitat s'étend sur toute l'Amérique du Nord et les États de l'Est; il est particuliè- rement abondant dans les régions montagneuses et boisées de la Pensylvanie, mais ne descend pas plus au sud que la partie septentrionale de la Virginie. Sa prolificité est telle que le Dr Harlan, dans sa Faune américaine, dit qu'en 1749 les L'ACCLIMATATION DE L'ÉCUREUIL GRIS D'AMÉRIQUE 201 ravages que commettait ce petit Rongeur dans les récoltes, ayant déterminé le Gouvernement à mettre sa tête à prix, on eut à payer en une seule année la somme de 200.000 francs de primes représentant une destruction de 1.180.000 individus. Aujourd'hui le nombre des Écureuils gris a tellement diminué dans certaines localités que pour empêcher l'extermi- nation totale de cet animal qui, malgré ses défauts, fait l'orne- ment des forêts et des parcs, on a dû le protéger par des lois, qui n'autorisent la capture de l'Écureuil gris que du 16 sep- tembre au 31 octobre, et dans Long Island du 1er novembre au 31 décembre. Il est fait défense absolue de chasser ces Ron- geurs sur toute l'étendue des circonscriptions urbaines, et le nombre des prises est limité à cinq individus par jour, pour chaque chasseur. La vivacité de l'Écureuil gris qui, malgré ses formes plus lourdes, ne le cède en rien à l'agilité de notre Écureuil, et la facilité avec laquelle il se familiarise, avaient engagé plusieurs amateurs de la Grande-Bretagne à l'introduire dans leurs parcs. Lorsque nous visitâmes le domaine du duc de Bedford, à Woburn, nous y trouvâmes l'Écureuil gris complètement acclimaté et animant le paysage par ses exercices de voltige dans les branches des arbres et ses courses désordonnées sur les pelouses de ce beau parc. En quelque dix ans l'Écureuil gris s'était tellement multiplié qu'il fallut en réduire le nombre et pendant un des derniers hivers il en fut tué un millier, trois cents, dit-on, en une seule semaine. Dans le journal Le Field, M. Hugh Boyd Watt a publié un relevé intéressant des diffé- rentes phases de l'acclimatation de l'Écureuil gris en Angle- terre, et nous emprunterons à ce travail les renseignements suivants : Il y a eu plusieurs centres de dispersion de l'Écureuil gris en Angleterre. En 1889, M. Georges Shepherd Page, de >Jew-York, lâcha cinq Écureuils gris dans le Middlesex à Bushy Park; cet essai ne semble pas avoir réussi et les Écureuils qu'on voit maintenant dans le parc de Richmond, qui se trouve dans le voisinage, ont une autre origine. A Woburn, l'acclimatation de ces exotiques a eu un succès étonnant, et ils se sont répandus dans tout le Bedfordshire. On les signale couime assez com- muns dans le Buckinghamshire, et il en a été pris à Tring, dans le Ilertfordshire, chez lord Rothschild. En 1905, un certain nombre des Ecureuils de Woburn furent 202 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION envoyés au Jardin zoologique de Londres et lâchés dans ce jardin situé au milieu de Regent's Park, aussi ne tardèrent-ils pas à prendre possession de cette promenade urbaine, où ils captivèrent la faveur du public par leur gentillesse et leur familiarité. Ils viennent maintenant prendre du pain dans la main même des promeneurs comme les Moineaux et les Ramiers de nos Jardins publics. De Regent's Park, les Ecureuils gris passèrent sur le terri- toire de Hampstead où on en vit pour la première fois il y a environ sept ans, et ils ont colonisé dans tous les jardins où ils ont trouvé des arbres à leur convenance. A Ken Wood, M. Whiting en a vu une douzaine venir tous ensemble deman- der du pain à un des postes de gardiens. Deux couples prove- nant de Woburn furent lâchés, il y a une dizaine d'années, dans le Jardin botanique de Kew où ils multiplièrent rapide- ment et se cantonnèrent, notamment autour du Cottage de la Reine. On dit qu'ils ont chassé du Jardin les Ecureuils rouges qui en avaient été les premiers occupants, mais on a vu partout dans ces derniers temps diminuer le nombre des Ecureuils rouges, même dans des endroits où l'Ecureuil gris n'a pas encore pénétré. A Kew ils font peu de ravages parmi les plantes et les arbres, si ce n'est qu'ils mangent volontiers des fruits et les cônes des arbres verts et arrachent aux Séquoia sempervirens quelques bandelettes de leurs vieilles écorces flottantes pour garnir leurs nids. Dans le parc de Richemond, où ils ont fait leur apparition il y a deux ou trois ans, ils se sont montrés très friands d'un Champignon qui y pousse au printemps sous le vocable de Saint-Georges, au grand dommage des amateurs qui en fai- saient chaque année la cueillette. C'est encore les Ecureuils de Woburn qui fournirent la colo- nie que M. Saint-Quintin installa chez lui à Scampston hall, dans le Yorkshire; ce grand amateur d'Oiseaux n'eut pas à se louer de cette introduction et les nouveaux venus firent chez lui tant de ravages qu'il dut finir par les éliminer presque complètement. Entre temps, ils avaient rayonné sur tout le voisinage, sur une étendue de sept milles environ. Dans le nord des Iles Britanniques, M. John Paterson attribue leur introduction à un couple qui fut lâché il y a une vingtaine d'années, à Finnart, sur le Loch Long et dont les descendants ont couvert une étendue de vingt milles sur cinq. Il est possible NOS OISEAUX SUR LE FRONT 203 qu'il y ait eu sur ce point plusieurs importations successives, vu les nombreuses relations de ce pays avec l'Amérique dont les navires fréquentent la Clyde et les rives de l'Atlantique, de ce côté. Somme toute nous trouvons l'Ecureuil gris fixé dans les loca- lités suivantes : Londres et voisinage : Regent's Park, Hampstead, Highgate. Surrey : Les jardins de Kew, le parc de Richemond, Molesley. Buckingham : Aylesbury, lvinghoe, Ilalton. Bedford : Woburn et environs. Yorkshire : Scampston hall, Rillington. Dwmbarton : Loch Lomond, Loch Long, Luss, Row, etc. Kent : Chiselhurst. Sussex : Leonarslee, où sirEdmund Loder, très jaloux de ses belles cultures de plantes exotiques, lésa empêchés de prendre pied. En effet, quoique moins destructeur que l'Ecureuil ordinaire, l'Ecureuil gris a été accusé, non sans raison, par les horticul- teurs et les aviculteurs, de certains méfaits incompatibles avec l'objet de leurs soins; mais pour ce rongeur, comme pour tout autre animal regardé comme nuisible, il est sage de ne pas généraliser, les mœurs et les instincts des animaux étant com- mandés par les circonstances qui varient avec les localités. NOS OISEAUX SUR LE FRONT Par LOUIS ROUSSEAU. Sergent-mitrailleur. En Woëvre, où ma résidence a été fixée depuis janvier par ordre supérieur, j'ai eu tout le loisir de contempler nos chers protégés ailés, tant migrateurs que sédentaires. Avant de parler de quelques-uns d'entre eux en particulier, je tiens à leur adresser à tous le témoignage de mon admiration pour la bravoure avec laquelle ils se moquent des coups de feu et de la canonnade. Cela étonnera nombre d'observateurs et de chasseurs qui ont pu remarquer avec quelle ardeur toujours croissante les Perdreaux fuient les coups de feu après le premier jour d'où- 20-4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION verture. Ici, rien de tel ; deux d'entre eux affectionnent le voi- sinage des marmites, ils se plaisent à venir rechercher quelques graines germées ainsi que des vers mis à l'air dans les mottes glaiseuses projetées par l'explosion des obus ; can- tonné dans le coin où m'appelle ma fonction de sergent mitrailleur-observateur, il ne se passe de journée où je ne rencontre ce couple dans les environs. Malgré notre chien « mitraille » qui les évente, ils affectionnent notre région, et leur vol de départ a toujours comme point de direction la fusillade des « boches ». Les grands migrateurs dont nous avons eu la visite ont tra- versé nos lignes, et non comme les « Zeppelin », eux sont allés porter, au delà des mers, l'annonce du renouveau, du printemps, de la vie éternelle et de l'amour. En mars, aux environs des trop fameuses communes de Bernecourt et de Flirey, nous voyons des bandes de Grues, de Cigognes et d'Oies sauvages, leur vol a pour direction le N.-E.; le canon gronde, la fusillade crépite: sans se soucier du bruit, nos migrateurs traversent le bois de Mortmare à faible hauteur; seul, le pilote est relevé fréquemment. Pendant tout le mois, à chaque journée de vent de Sud, même passage et même bra- voure dans les troupes ailées; seules, les Oies sauvages témoignent de quelque inquiétude et les zigzags s'accentuent, tels nos aéros repérant les batteries boches. Les Vanneaux, eux, ne jouent plus et, gravement, ils gra- vitent vers le jNord. Moins soucieux des raids aériens sont nos Oiseaux de pays; plus connus des braves que je coudoie chaque jour, ils font leur joie et leur bonheur. Le Coucou lance son réveil, bien après celui de nos « poilus » ; mais sa note gaie ranime chez eux l'esprit gaulois et les chansons. L'Alouette, elle, attire leurs regards; elle papille, gazouille, et monte, monte, vers le ciel relativement bleu qui, pour eux, évoque la liberté prochaine; les paris s'engagent sur la hau- teur du vol et la descente en vol piqué vers le grain ou le ver convoité, les glace d'effroi; quelle force dans ces petites ailes, cela les émerveille autant que les prouesses accomplies par nos meilleurs pilotes. Les Mésanges amusent jeunes et vieux par leurs acrobaties à la recherche des Insectes cachés dans l'écorce des arbres. NOS OISEAUX SUR LE FRONT 205 Les Moineaux sonl peu nombreux, même dans les villages; les multiples croûtes de pain, qui feraient les délices des Boches, les laissent indifférents. Par contre, les Roitelets, Troglodytes, Rossignols de murailles, trouvent une ample moisson de Mouches diverses dans les environs des cabanes construites à l'orée des bois; tous ces petits « porte-bonheur » amènent la joie de vivre et une diversion salutaire aux heures du repos. Les Ramiers sillonnent le ciel et, comme dans les jardins publics de nos grandes villes, construisent leurs nids de bran- chage à proximité des lignes. Les Buses, telles les « Tauben » au bec crochu et à la queue pennée, évoquent un sentiment de profonde horreur, elles doivent se terrer près des Boches ! et ne viennent qu'aux heures sinistres. Les Chouettes, elles, glapissent au crépuscule, mais les anciennes croyances qui les déshonorent semblent être tom- bées en vétusté; plus aucune superstition à leur sujet, tous savent que les boules de pain et les vivres de réserve seront préservés des nombreux rongeurs, grâce à leur police nocturne. Je déplore néanmoins le braconnage du gibier à poil; le Lièvre est, à l'égal du Boche, traqué de toutes parts et les col- lets trop nombreux n'épargnent pas les Chevreuils. Les San- gliers attirent les balles des chasseurs aventureux et créent un réel danger pour ceux qui sont obligés de rester à proximité des bois. J'ignore si, de l'autre côté du front, nos Oiseaux sont aussi heureux qu'avec les troupes alliées, ils ne reviennent pas nous le dire, mais il est fort probable que la « Kultur » intensive de nos ennemis est loin de leur être favorable. La charmante Hirondelle est venue nous donner l'espoir de jours meilleurs, elle a fait revivre dans tous les cœurs de bien doux souvenirs d'antan que chacun égraine sans forfanterie. L'image de la Victoire et de la Paix, au milieu même des tristes horreurs de la guerre, nos Oiseaux nous l'ont apportée jusque sur le front. OBSERVATIONS SUR LES NICHOIRS NICHOIRS IMPROVISÉS Par M. D ANNE. Depuis une vingtaine d'années, je fais mettre de côté toutes les bûches creuses trouvées dans les exploitations. On les tronçonne de façon à former avec la partie creuse un nichoir grossier, et on les place sur le premier arbre venu, tant bien que mal, presque toujours horizontalement ou à peu près, coincées dans une enfourchure. Quelques-unes ne sont jamais occupées : ce sont celles dont les dimensions et agencements de l'entrée ou de la cavité sont défectueux. Mais la plupart, dont quelques-unes ne sont cependant pas orientées suivant les règles, sont toujours plus ou moins régu- lièrement occupées par les Mésanges, Sitelles, Rouges-queues, Sansonnets, etc. J'en surveille spécialement depuis trois ans une cinquan- taine, bien placées dans des endroits intéressants (vergers, jeunes peupleraies, reboisements, elc). Elles sont uniformé- ment habitées, malgré même le voisinage des nichoirs propre- ment dits de Berlepsch. Je crois cependant que ceux-ci auraient la préférence des Oiseaux. Cette expérience toutefois permet des conclusions intéres- santes : 1° Les nichoirs grossiers, faits de bûches creuses et em- ployées telles qu'on les trouve en abattant les arbres, sont certainement efficaces. 2° A défaut de nichoirs proprement dits, ils suffisent. 3° Ils ont pour eux d'être d'un prix absolument nul. •4° Ils ne remplacent pas les nichoirs proprement dits, mais peuvent s'employer simultanément. 5° L'Oiseau n'est pas du-tout difficile pour l'agencement (et même jusqu'à un certain point pour l'exposition) de ces bûches et des nichoirs en général. 6° Notamment la position horizontale, au lieu de la verticale, est absolument sans inconvénient pour les nichoirs. (De vrais nichoirs ainsi placés ont autant de succès que les autres.) OBSERVATIONS SUR LES NICHOIRS 207 7° Beaucoup de mes bûches présentent, en outre du trou latéral, — trou de vol, proprement dit — un orifice à l'une des extrémités sectionnées, ou aux deux extrémités. Or, si par ailleurs les orifices sont suffisants, l'oiseau en conserve et en utilise volontiers deux : le trou de vol latéral et le trou d'extré- mité correspondant au tronçon le plus court de la cavité inté- rieure. Les troisièmes orifices, les orifices insuffisants, ceux qui correspondent à des galeries intérieures trop longues, ou au tronçon le plus long, sont maçonnés par les Sitelles, ou bouchés par les autres Oiseaux avec des mousses, lichens, crins, etc. Bref, s'il a toujours trop de trois trous d'entrée, l'Oiseau se trouve très bien d'en utiliser deux. 8° Si un petit perchoir est cloué à la bûche, près de l'entrée, ou si une branche se trouve à portée, l'Oiseau semble s'en trouver très bien dans les allées et venues, et s'y pose cons- tamment. 9° Dans certains parages de mes terrains, particulièrement favorables aux Oiseaux, il est vrai (vergers, jeunes plantations, coupes récentes, jardins, bordures de cultures et bois), des quantités de nichoirs, parfaits ou improvisés, sont étroitement groupés, contrairement aux principes en la matière. Cepen- dant, tous sont occupés; non pas, il est vrai, par une seule espèce, mais par des espèces différentes. Une fois que la popu- lation d'une espèce atteint une certaine densité sur un terrain, les nichoirs restants sont partagés entre d'autres espèces. Il n'y a donc aucun inconvénient, il n'y a même que des avantages, à multiplier beaucoup les nichoirs sur certains espaces, sans craindre de les voir inoccupés. 10° Les Moineaux francs et Friquets sont des fléaux poul- ies nichoirs. EXTRAITS DES PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ SÉANCE GENERALE DU 26 AVRIL 1915 Présidence de M. Magaud d'Aubusson, Membre du Conseil. Le procès-verbal de ia séance précédente est lu et adopté. Mammalogie. M. Carié fait une communication sur les Mammifères accli- matés à l'île Maurice. Cette communication sera insérée in extenso dans le Bulletin. Ornithologie. M. Debreuil présente quelques observations sur l'arrivage des Oiseaux migrateurs aux environs de Melun. Les Hiron- delles n'ont été aperçues par notre collègue que le 17 avril, où une vingtaine d'entre elles (H. rustica et H. urbica) ont été observées par lui à Courance (Seine-et-Oise), à une vingtaine de kilomètres de Melun. Ces Oiseaux semblent être arrivés tardivement, cette année, et en plus petit nombre qu'en 1914. M. Mailles a vu, le 2 avril, des Hirondelles rustiques; elles arrivent à la même époque qu'autrefois, mais elles arrivent de plus en plus en petit nombre. Aquiculture. M. Raveret-Wattel donne lecture d'un mémoire sur les Argules dans les étangs et sur les moyens de défense contre ces ennemis des Poissons. [Cette communication sera publiée dans le Bul- letin. Botanique. M. Bois présente une notice bibliographique sur un ouvrage de MUe Yvonne Trouard-Riolle, qui a pour titre : Recherches morphologique et biologiques sur les Radis cultivés. Pour le Secrétaire empêché, Maurice Loyer. SÉANCE GÉNÉRALE DU 3 MAI 1915 Présidence de M.' Bois, vice-président de la Société. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. GÉNÉRALITÉS. M. Loyer présente, au nom de M. G. de Southoff, un mémoire sur « l'état actuel du marché des animaux exotiques vivants en Europe », qui sera inséré dans le Bulletin. Mammalogie. Il est donné lecture d'une note sur la domestication et l'éle- vage des Yacks dans le Pamir. A propos des Ondatras qui se seraient acclimatés à l'état sauvage en grande quantité en Bohême, d'après des rensei- gnements parvenus avant la guerre, et dont il avait été ques- tion au cours d'une séance de la section de Mammalogie, un de nos collègues pense que cette acclimatation est bien extra- ordinaire, et jusqu'à preuve du contraire, il n'y croit pas. Si le fait était vrai, dit-il, au lieu de se plaindre de cette invasion, on eût tiré parti de la fourrure de ce Rongeur, qu'on achète fort cher en Amérique; rien n'est plus facile que de piéger ces ani- maux et la quantité de Poissons qu'ils peuvent détruire est insignifiante ; M. Pichot n'a jamais pu obtenir, ni des jardins zoologiques, ni des marchands, un Rat musqué pris sauvage en Bohême. Ornithologie. M. Xavier Raspail nous envoie un article, extrait de la Revue française d' Ornithologie : « Les Oiseaux et le choléra », dont il est l'auteur. Dans cette note notre collègue attire l'at- tention des observateurs et des ornithologistes sur le phéno- mène de la disparition des Oiseaux précédant l'explosion d'une épidémie de choléra, phénomène signalé par le Corriere délie Puglie, de Bari (Italie), le 24 août 1910. M™ Vernière, de Saint-Farme (Gironde), envoie la photo- graphie du couple de Faisans Ho-ki, dont le mâle lui a été confié en cheptel et donne quelques détails sur l'habitation de BULL. SOC. NAT. ACCL. KR . 1915. — li 210 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION ses Oiseaux : volière couverte et fermée sur trois côtés, de 3 mètres de longueur sur 2 mètres de largeur, précédée d'un parquet de 3 mètres sur 7 mètres ; le tout exposé au midi, abrité des vents du nord et de l'ouest, planté d'arbustes et convenablement sablé. Comme nourriture, mie de pain rassis, verdure, Sarrazin et Chénevis. Ce dernier pourrait être remplacé par du Blé. M. Rollinat (d'Argenton-sur-Creuse) nous communique ses notes zoologiqites, résumé de ses observations et de celles qui lui ont été adressées par des soldats sur la ligne du front, du 6 février au 20 avril 1915. Toutes font remarquer combien les animaux, Mammifères et Oiseaux, semblent s'être accoutumés au fracas des obus, à la détonation des mitrailleuses et des fusils. Ces notes seront insérées dans le Bulletin. Aquiculture. M. Raveret-Wattel donne lecture d'une note sur les recher- ches faites à la Station agricole de Woods-Hole (Massachusetts), par M. Ch. H. Parker, professeur de zoologie à l'Harward University, concernant l'odorat chez l'Emissole au « Dogfish » (Mustelus vulgaris Mull. et Ilenl.). D'après les observations qu'il a recueillies, et qui font l'objet d'un mémoire récemment publié dans le Bulletin du Bureau des Pêcheries des États-Unis, M. Parker estime que l'Emissole se sert de l'odorat pour trouver sa nourriture, tout comme le font les animaux à respiration aérienne. M. le professeur Roule fait observer que le travail de M. Par- ker ne mentionne point ce qui a été fait en Europe où la ques- tion de l'odorat des Poissons a été étudiée avec beaucoup de soins. Le Poisson perçoit les émanations sapides et gustatives; il ne sent pas au sens propre du mot, il éprouve seulement une sensation de gustation à distance. Ce ne sont donc pas les termes d'olfaction, ni dégustation qu'il conviendrait d'employer quand on parle de l'odorat chez les Poissons, car ces termes ne peuvent s'appliquer qu'aux impressions ressenties par des animaux vivants dans l'air. Chez les animaux aquatiques il s'agit d'une combinaison mixte, nommée olfacto- gustation. Les Sélaciens, auxquels EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 211 appartient l'Emissole ou Chien de mer, présentent, à ce sujet, un cas particulier. Les terminaisons des nerfs olfacto-gustatifs de ces Poissons sont surtout localisées et très développées dans les fosses nasales, ce qui expliquerait, suivant les tra- vaux d'Edinger que l'on ait pu croire à l'odorat chez les Chiens de mer. Ces questions sont, du reste, très difficiles à trancher, car l'étude des sensations chez les Poissons présente de grandes difficultés expérimentales. Les travaux de physiologie sur ces sujets sont très rares à cause des conditions secondaires et annexes qui peuvent troubler les résultats des expériences. La question de la vision chez les Poissons est également fort complexe. Ces animaux vivent dans un milieu presque privé de lumière, ils voient très mal, cependant il semble certain que les appâts de pêche (cuiller, mouches artificielles, etc.) ne les attirent que parce qu'ils exercent sur eux une impression visuelle. La sensibilité auditive réside dans les nerfs de la ligne laté- rale. C'est sur cette ligne que les sensations de bruit ou de choc, que les vibrations de l'eau viennent affecter la sensibilité du Poisson et lui font percevoir l'approche d'un corps étranger. M. Mailles a remarqué que les Carpes et les Carassins dorés mangent les têtards d'Alyte et de Grenouille et ne touchent pas à ceux des Crapauds. Elles perçoivent donc une sensation de goût qui diffère lorsqu'elles saisissent l'un ou l'autre de ces Batraciens. EXTOMOLOGIE. M. l'abbé Toucher annonce que les larves de Cyphocrania gigas meurent depuis quelques jours succombant à une maladie qui les dessèche complètement. Cette mortalité par dessicca- tion est-elle d'origine microbienne ou doit-elle être attribuée à la sécheresse de l'atmosphère ambiante, c'est ce que notre collègue n'a pu encore déterminer. Le père Pantel, de Gemert (Hollande), écrivait qu'à Amsterdam les Cyphocrania vivent dans des cages ruisselantes d'eau. M. Clément a fait la même observation en ce qui concerne son élevage de Carausius morosus. Mme Vernière possède un rucher modèle d'une quarantaine de ruches, système Dadant, très pratique dans le Sud-Ouest. Le matériel se compose de tout ce qui est indispensable à un rucher moderne, y compris deux extracteurs. 212 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Notre collègue a été récompensé pour son rucher par la Société d'Agriculture de la Gironde, qui lui a décerné une médaille à l'effigie d'Olivier de Serres. Mme Yernière se ferait un plaisir de faire visiter son rucher aux membres de la Société d'Acclimatation, elle propose éga- lement des spécimens d'Insectes rares ou curieux. Botanique. M. Debreuil recommande comme engrais aussi bien pour la grande culture que pour l'Horticulture le « Guano de Poissons français » fabriqué à la Rochelle. Cet engrais lui a donné d'excel- lents résultats; grâce à lui il a pu sauver des Rosiers et des arbres fruitiers et le rendement de certaines Pommes de terre en a été très augmenté. Pour le Secrétaire, Maurice Loyer. IIe SECTION. — ORNITHOLOGIE Sous-section: Ligue française pour la Protection des Oiseaux. Séance du 26 avril 1915. Présidence de M. Magaud «l'Aubusson, Président. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. le président annonce le décès du prince Ernest d'Aren- berg, mort des suites des blessures reçues sur le champ de bataille. Le prince d Arenberg était un ornithologiste fervent et un des bienfaiteurs de la Ligue, aux travaux de laquelle il portait un bienveillant intérêt. Nous nous inclinons devant la tombe glorieuse de ce vaillant défenseur de la Patrie, et nous adressons à son frère, M. le prince Pierre d'Arenberg, l'hommage de nos sincères condo- léances. Nous recevons des nouvelles delà santé du secrétaire adjoint de notre Ligue, M. Albert Chappellier, qui a été atteint d'une EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ 213 pneumonie contractée sur le front et qui est en convalescence à l'hôpital de Saint-Julien (Aube). Mme de Gourcuff signale que, dans divers magasins de nou- veautés de Paris, on vend des brochettes d'Hirondelles prépa- rées pour la mode. Ces dépouilles d'Oiseaux devraient être saisies, car la loi est formelle à cet égard. Du journal Fxcelsior, numéro du 26 avril 1915, nous extrayons ce qui suit d'une lettre d'un de ses élèves, soldat, au peintre Cormon : « Ils sont bien sages, ce matin, les Boches. Sans aucun doute, le brouillard les gêne. « Quoi qu'il en soit, je regrette le soleil, le gai soleil revenu de loin et qui, ces jours derniers, jouait sur ma visière et amu- sait les alouettes. « Que d'Alouettes j'ai autour de moi et que je les aime ! Elles sont familières ; elles comprennent bien qu'on ne chasse, cette année, que le gros et que les marmites ne sont pas pour les petits Oiseaux. La chasse en serait-elle permise que je n'aurais point la sauvagerie de me priver, au profit de mon estomac, de ces petites amies qui ravissent mon cœur et mes yeux. « Magie de nos sens ! Une Alouette qui plane dans un rayon nous fait oublier la guerre, et sa frêle chanson couvre le hulu- lement des obus. Jamais je ne mangerai plus d'Alouettes. » M. Kehrig écrit, de Bordeaux, à la date du 16 mars 1915, dans la Feuille vinicole de la Gironde : « A propos des petits Oiseaux, ajoutons que les essais de nichage artificiel commencés en 1913 ont été plus nombreux en 1914. On ne peut que féliciter leurs auteurs d'avoir ainsi pratiqué un moyen si simple de repeupler nos campagnes de la foule emplumée qui les protège et en même temps les pare. » Pour le Secrétaire mobilisé, Maurice Loyer. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Les migrations des Oiseaux à travers l'Amérique du Nord. — Élevage de Daphnies pour la nourriture des jeunes Salmonidés. — Enquête anglaise sur le rôle de la Mouche tsé-tsé et du gros gibier africain. — Coqs sauvages de Tlnde et de Ceylan. Le bureau d'Etudes biologiques du Ministère de l'Agriculture aux Etats-Unis vient de publier un travail très minutieux sur la migration des Oiseaux à travers l'Amérique du Nord. M. Wells Cooke y recherche les causes de la migration et éludie les différents problèmes que soulève ce va-et-vient des Oiseaux entre le pôle et les régions tropicales ou simplement tempérées. Nous ne pouvons pas dire que le mystère soit encore élucidé malgré les observations très intéressantes que M. Cooke a recueillies. L'auteur le reconnaît lui-même et cite parmi les faits qui échappent jusqu'ici à notre contrôle, la dis- parition subite des Hirondelles de la Caroline, dont les bandes descendant lentement vers le Sud finissent par se rejoindre en troupes innombrables sur la côte nord du Golfe du Mexique, après quoi on ne voit plus un seul de ces Oiseaux avant que le printemps ne les ramène sur ces mêmes côtes mexicaines. Où ont-ils été passer les cinq mois de leur disparition qui a été aussi complète que si ces Hirondelles avaient été hiberner dans la vase des étangs comme on le supposait autrefois? Les chan- gements de température semblent avoir beaucoup moins d'in- fluence qu'on ne suppose sur la mise en marche des migra- teurs et on en est encore réduit, pour expliquer ces déplacements périodiques de l'avifaune de certaines régions, à des hypothèses qui, quelque séduisantes qu'elles puissent être, sont loin d'entraîner la conviction. Dans son numéro de mars dernier, le Bulletin suisse de Pêche et Pisciculture donnait un intéressant compte rendu d'expé- riences faites sur l'élevage des Daphnies pour l'alimentation des alevins de Salmonidés. L'emploi de ce genre de nourriture a souvent été préconisé, et diverses méthodes ont été indiquées pour l'élevage des minuscules Crustacés; mais il faut recon- CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 215 naître que le système ne s'est guère répandu jusqu'à présent, la production obtenue des bassins à Daphnies se montrant fort irrégulière et, de plus, presque toujours très tardive. Très rarement, en effet, on réussit à obtenir en temps utile, c'est-à-dire de janvier à mars, une multiplication suffisamment abondante de Daphnies, dans des bassins exposés à toutes les intempéries atmosphériques. Ces petits animaux ne se multi- plient en abondance que quand l'eau peut s'échauffer suffisam- ment. Il en résulte que le pisciculteur est obligé de renoncer à l'emploi de cette nourriture pour ses alevins, précisément à l'époque où elle présenterait le plus d'utilité, soit en janvier, février et mars. On a conseillé, il est vrai, d'élever les Daphnies dans des tonneaux tenus à l'abri du froid, dans des écuries; mais le système est à peu près irréalisable dans la pratique. De sorte que, pour le plus souvent, ce n'est guère qu'en mai que l'on commence à obtenir une multiplication vraiment abondante de ces petits Crustacés. Encore n'est-il pas rare que, même pendant les mois les plus chauds de l'année, les bassins ou étangs à Daphnies ne produisent pas tout ce qu'ils devraient donner parce que l'eau en est refroidie par quelque source de fond, demeurée inaperçue. De tels bassins doivent donc être rendus parfaitement étanches, à l'aide d'une couche d'argile bien tassée. Mais, ce qui importe avant tout, c'est de savoir quelle espèce de Daphnie on introduit dans l'étang. Se procure-t-on les sujets reproducteurs dans un grand étang à Carpes, dans un ruisseau ou dans un lac, il arrive fréquemment que les étangs ainsi peuplés ne produisent rien. Les Daphnies introduites subsistent pendant quelque temps, mais se multiplient à peine et finissent par disparaître. Récolte-t-on, au contraire, les Daphnies dans des mares ou dans des étangs de village, les résultats sont généralement bien meilleurs. L'année dernière on fit, à la station d'essais de Wielenbach, une série d'observations pratiques à l'aide de quarante petits bassins, de 4 mètres carrés de surface chacun. Le fond en était recouvert d'une couche de fumier de 10 centimètres d'épaisseur, recouvert, lui-même, de terre fortement pressée. Il s'agissait de savoir quelles espèces de Daphnies prospéraient le mieux dans de telles conditions. On constata bientôt que les Daphnies provemmt de ruisseaux et d'étangs alimentés par des sources n'étaient plus représentées, au bout de quelque temps, dans 216 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION les bassins d'essai, que par quelques individus isolés, qui ne se multipliaient pas; tandis que celles qui provenaient de mares ou d'étangs sans affluent s'étaient multipliées d'une façon prodigieuse. Elles formaient une véritable famille animale qui se faisait remarquer de loin par la coloration rouge de l'eau. Il fut ainsi possible de distribuer régu- lièrement à des alevins de Truite arc-en-ciel une nourriture excellente, dont on put même faire profiter des étangs à Carpes pauvres en Daphnies. Quelle était la raison de ce résultat complètement négatif des essais faits avec des Daphnies provenant d'eaux fraîches, alors que les Daphnies tirées d'étangs formés par les eaux de pluie donnaient des résultats si satisfaisants? L'explication suivante en est donnée. L'eau des étangs fortement chargés de matières organiques est très pauvre en oxygène, à cause de la putréfaction de ces substances. Dans une telle eau, les Infusoires flagellés, notam- ment YEnglena viridis, pullulent en quantités énormes, et les Daphnies, qui peuvent vivre dans ce milieu, y trouvent une nourriture extrêmement abondante. Les étangs contenant, au contraire, des plantes aquatiques et recevant de l'eau courante, sont un milieu très favorable au développement des Algues vertes, dont se nourrissent les Daphnies vivant dans l'eau fraîche. Les bassins d'essai, par suite de la quantité d'engrais qu'ils contenaient, étaient très pauvres en oxygène, mais riches, au contraire, en Infusoires flagellés; de sorte que les Daphnies d'eau fraîche n'y trouvaient pas les conditions néces- saires à leur développement; mais les Daphnies provenant de mares de village y prospéraient admirablement. Il paraît donc être hors de doute que l'origine des Daphnies introduites dans les étangs d'élevage est loin d'être indifférente au bon rendement de ces étangs. 11 ne faut attendre un résultat favorable que lorsque l'on emploie les espèces voulues, c'est-à- dire les suivantes : Daphnia pulex, D. magna et Moina rectiros- tris. L'éleveur, qui ne dispose pas d'un microscope pour déter- miner exactement les espèces, peut se contenter des renseigne- ments qui précèdent. En ne recueillant que des Daphnies de mares, il est certain de se procurer les bonnes espèces. Il est facile d'en récolter pour garnir des bassins d'élevage : on traîne un filet fin dans la mare, et l'on verse la récolte dans un réci- pient contenant de l'eau propre. Les Daphnies se reconnaissent immédiatement à leur mode particulier de locomotion qui leur CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 217 a valu le nom vulgaire de « Puces d'eau ». Au moment du trans- fert de ces petits Crustacés dans le bassin qui leur est destiné, il est prudent d'éviter de trop grandes différences de tem- pérature. Dans son rapport pour l'exercice 1914, la Société zoologique de Londres fait état du résultat de l'enquête instituée pour vérifier quel rôle jouent la Mouche tsé-tsé et le gros gibier de l'Afrique dans la propagation de la « maladie du sommeil » parmi les êtres humains. Le Secrétaire d'Etat des Colonies avait, à cet effet, nommé un comité de seize membres parmi lesquels figuraient quelques-uns des membres les plus émi- nents de la Société zoologique. Ce comité a tenu des réunions fréquentes, sous la présidence du comte de Desart, et a reçu de nombreuses dépositions orales et écrites émanant des personnes les plus compétentes d'où il résulte que, dans l'Uganda, l'homme est lui-même un réservoir de trypano- somes et qu'il n'y a aucune raison de croire qu'en détrui- sant le gros gibier on anéantirait toute source d'infection. Dans le Nyassaland et la Rhodésie, l'accusation portée contre le gros gibier d'être un important réservoir de trypanosomes est loin d'être prouvé, et dans ces régions d'ailleurs la maladie est en décroissance. Sans doute, jusqu'à ce qu'on ait trouvé un moyen de détruire la Mouche pernicieuse, il peut être prudent de supprimer les animaux sauvages autour des centres habités et le long des routes de commerce, mais rien ne pourrait justifier la destruction générale de tous les animaux sauvages comme on l'a légèrement proposé. Les Coqs sauvages, écrit M. Trévor-Battye à Y Aviculture Magazine, fréquentent volontiers les volailles domestiques. Un matin, passant à travers un village cingalais dont tous les habitants étaient encore plongés dans le sommeil, je vis un lot de Poules retournant avec ardeur un tas de paille qui était tombée sur la route. Lorsque je m'en approchai, trois de ces Oiseaux prirent la fuite, les ailes étendues et s'envolèrent dans la jungle. C'étaient des Coqs sauvages de l'espèce Lafayette que l'on ne trouve qu'à Ceylan. Les autres volailles continuèrent 218 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d'aCCLIJL. lATI0I sans se déranger leur travail. On rencontre sou\ 'in s Coqs sauvages à Ceylan et quand le soleil donne sur 1er nage, l'or et la pourpre de leur livrée étincelle d'une face perbe. Ce sont des Oiseaux timides plutôt que sauvages et. ous les suivez dans la brousse, il leur arrive parfois de monter dans un arbre et de vous regarder passer. J'ai vu très peu de Coqs sauvages dans l'Inde; les deux espèces que l'on y rencontre sont le Coq rouge de Bankiva et le Coq de Sonnerat. Je n'ai rencontré les premiers que trois fois. Un jour, c'était sur la roule de Khalsi à Chakrata, à l'endroit où des rochers abrupts forment un tournant resserré, je tombai subitement à ce coude sur deux Coqs sauvages et deux Faisans de Wallich, qui étaient fort occupés à piocher une racine de Navet qu'une charrette avait laissé tomber. Les Oiseaux s'enfuirent en me voyant, les Coqs courant les ailes mi-ouvertes et les Faisans de Wallich après avoir pris leur élan se laissèrent glisser vers la jungle en vol plané. Il est rare de trouver les Wallich à une si faible altitude; c'est généralement à 6 ou 7.000 pieds dans la montagne qu'ils se cantonnent. Le même jour, un autre Faisan de Wallich se mit à courir devant ma voiture et essaya plusieurs fois de s'envoler sans y réussir. Je n'ai jamais ren- contré les autres Phasianidés de l'Inde à l'état sauvage. Le Maharadja du Nepaul en a une belle collection où l'on voit des Lophophores, des Euplocomes et des Tragopans. Les Euplo- comes sont l'espèce à huppe noire (leucomelanus). On ne voit guère les Perdrix chukor que dans des cages, mais on les entend rappeler le soir. Le matin, quand je chassais dans le Népal Terai, il arrivait souvent à mon Eléphant de faire lever un Francolin. Ce Gallinacé n'allait jamais bien loin avant de se poser, mais je n'ai jamais pu le faire relever dans ce pays de broussailles, de hautes herbes et de petits cours d'eau, où il aime particulièrement à se cacher. Jamais on ne rencontre les Francolins dans les parties boisées de la jungle. icçji v EXTRAITS ET ANALYSES 219 EXTRAITS ET ANALYSES AIGRi S DE L'ORÉNOQUE ET COLIBRIS DE LA TRINITÉ Par PAUL SERRE (1). Ainsi qu'on le sait déjà, la capitale de La Trinité est le port de transit des régions de l'Orénoque, les navires à grand tirant d'eau ne pouvant remonter ce fleuve qu'à l'époque des crues, de mai à septembre. Chaque vapeur à fond plat de la ligne vénézuélienne qui relie la ville de Ciudad-Bolivar à la capitale de La Trinité transporte donc, non seulement de la gomme balata, des fèves de Tonka, des peaux, etc., destinées à être transbordées ici sur les longs courriers se rendant en Europe ou aux États-Unis, mais aussi des caisses de plumes d'Aigrettes provenant des districts du Haut-Orénoque. Certains envois atteignent une valeur de 150.000 francs. On a exporté du Venezuela, au cours d'une seule année, les plumes de 2.500.000 Oiseaux sauvages, et il n'est pas exact de dire qu'une partie d'entre elles furent simplement ramassées sur le sol au moment de la mue, comme essayèrent de le faire croire les gens qui vivent du commerce des plumes. Les rares plumes tombées naturellement (plumas muerlas) n'ont, le plus souvent, aucune valeur commerciale. Bien au contraire, dans les pays perdus, sans lois ni police, où l'on tue pour le plaisir, par divertissement, les chasseurs locaux, semblant croire que l'Aigrette a été créée uniquement pour les marchands de plumes, procèdent, le fusil à la main, à de véritables héca- tombes d'Oiseaux. Et, que de fois les plumes sont brutalement arrachées quand l'animal se débat encore sur le sol où il est appelé, d'ailleurs, à mourir de faim ou à être dévoré vivant par les terribles Fourmis rouges qui s'attaquent tout d'abord aux yeux. D'après VAnuario estadistico du Venezuela, la valeur des plumes d'Aigrettes exportées du Venezuela au cours de l'année économique 1912-1913 n'aurait été que de 1.420.235 francs et, d'après les statistiques de la douane trinidadienne, la valeur des mêmes plumes de Héron réexportées de La Trinité aurait (1) Extraits des Comptes rendus des séances de V Académie d'Agricul- ture de France. 220 BULLETIN' DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLlMAfATIOTN été, en 1913, de 300. 0S0 francs (300.00Q francs à desJin-ation de la France) et, en 1914, de 250.475 francs (232.900 francs à des- tination de la France et 17.575 francs à destination de l'Angle- terre). Mais, antérieurement à l'état de guerre qui a privé les chasseurs de l'Orénoque de leurs principaux débouchés, on expédiait chaque année, de Bolivar, pour une valeur de trois à quatre millions de francs de plumes d'Aigrettes. Or, il faut tuer non moins de 870 Oiseaux pour obtenir un kilo de petites plumes, et 215 pour avoir un kilo de grandes plumes. On assure cependant qu'une femelle Aigrette passant à proximité d'un nid déjeunes Oiseaux, dont la mère est tombée sous le plomb des chasseurs, les adopte volontiers. C'est fort heureux pour la conservation de l'espèce. A La Trinité on a enfin compris, mais peut-être un peu tard, que la mission donnée aux Oiseaux de maintenir la balance entre différentes forces de la nature, comme l'a écrit Buckland, ne peut être remplie par aucune autre classe d'animaux. Et après avoir laissé exporter, dans le cours d'une seule année, quelques centaines de mille de Colibris en peau, appartenant, notamment, à des espèces aujourd'hui éteintes, le Gouvernement trinidadien a multiplié les ordonnances, en vue de protéger farouchement les Oiseaux et même certains animaux sauvages (ivild birds and ivild animais), car une espèce disparue est, dans l'œuvre de la nature, une lacune qu'aucun surhomme ne pourra jamais combler. Cette protection tardive est devenue tellement effective (j'entends administrativement) qu'après avoir échangé une longue correspondance avec la secrétairerie coloniale à Port- d'Espagne, dans l'intérêt de M. le comte de Ségur, je n'ai été autorisé à capturer ici, dans un intérêt scientifique, que trois paires de Colibris vivants. Il est bon d'ajouter que certains contrebandiers sont encore à même de livrer de grandes quantités de ces Oiseaux aux amateurs généreux et que j'ai toujours rencontré, au cours de mes chasses, des gosselots noirs ou mulâtres occupés à enduire, de la sève gluante fournie par l'Arbre à pin, les bran- chettes qui leur servent à capturer les plus gracieux hôtes des « grands bois ». BIBLIOGRAPHIE 221 Or, l'acclimatement en cage de ces Oiseaux délicats et batailleurs, en les nourrissant d'un sirop préparé chaque matin avec du lait condensé, du miel et du « mellin's food », en parties égales délayées dans un peu d'eau bouillante, puis refroidie, et aussi de zestes d'oranges et de grains de raisins coupés en deux et saupoudrés de sucre, expose à trop d'aléas, sans compter ceux résultant de l'expédition en France dans des cages très grandes contenant des buissons de brindilles seulement. Il me manquait d'ailleurs ici un «professeur », c'est-à-dire un Colibri savant, habitué déjà à aller humer le sirop déposé au fond de fleurs fraîches d'Hibiscus ou dans un vase à long col, afin de protéger contre toute souillure, parfois mortelle, la poitrine délicate de l'Oiseau-abeille, et que ses congénères eussent volontiers imité. BIBLIOGRAPHIE Recherches morphologiques et biologiques sur les Radis cul- tivés, par Mlle Yvonne Trouard-Riolle, docteur es sciences naturelles. 1 vol. in-8° de 244 p. et 155 fig. noires. Nancy, Berger-Levrault, 1914. Cet ouvrage constitue une excellente contribution à l'étude de l'origine des plantes de jardins, si délicate et si complexe lorsqu'il s'agit de végétaux utilisés et cultivés depuis un temps immémorial, comme c'est le cas pour le Radis. Pendant trois ans, l'auteur a cultivé, à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon, la plupart des espèces du genre Raphanus et 119 variétés horticoles, ce qui lui a permis de disposer, pour ses recherches, d'un matériel d'étude important et dûment contrôlé. Dans le chapitre consacré à l'histoire du Radis, Mlle Trouard- Riolle établit que cette plante était mentionnée en Egypte des milliers d'années avant notre ère, en Chine, 450 ans avant J.-C. et qu'elle fut connue également par les anciens Grecs et les anciens Latins. Les progrès de sa culture en Europe peuvent être suivis d'une façon très certaine au moins depuis le xve siècle. 222 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Les recherches morphologiques et botaniques qu'elle a pour- suivies l'ont amenée à conclure que toutes les variétés de Radis cultivés semblent se rapporter à deux types distincts : 1° Le Raphanus satious Linné, à silique globuleuse, avec un mésocarpe spongieux, ne portant pas d'étranglements pro- noncés à l'extérieur; forme qui peut être divisée en quatre types secondaires : Radis chinois et tonkinois, à feuilles entières, qui a traversé plus de mille années sans se modifier; Radis noir, dont on retrouve l'existence depuis le xvr9 siècle au moins: Radis blanc, qui semble plus ancien encore; Radis rouije ou rose. 2° Le Raphanus sativus Linné, forme raphanistroides Makino (R. acanthiforniis Morel), type des Radis japonais, à silique étranglée plus ou moins à l'extérieur et qui, tout en restant globuleuse, est formée, à l'intérieur, d'un mésocarpe à la fois spongieux et résistant. Le Raphanus sativus vrai ne semble pas avoir de représen- tants à l'état tout à fait spontané; mais l'étude des herbiers a permis à l'auteur de retrouver la plante à l'état subspontané depuis le Caucase jusqu'à l'île de Ténériffe, ce qui lui fait adopter l'opinion de De Canclolle, en la modifiant un peu, et dire que cette plante semble dériver d'une forme particulière à siliques globuleuses aujourd'hui peut-être disparue, originaire de l'Asie occidentale entre la Palestine, l'Auatolie et le Caucase, peut-être même la Grèce. Sa culture l'aurait répandue à l'Est jusque vers la Chine méridionale et le Tonkin, à l'Ouest dans toute l'Europe, depuis les temps les plus reculés. Le R. sativus forme raphanistroides, est spontané en Chine et au Japon. A la suite de ses recherches biologiques, MUe Trouard-Riolle conclut de la manière suivante en ce qui concerne la théorie très discutée de Carrière (1) et d'Hoffmann (2), consistant à considérer le Raphanus sativus comme dérivant directement du R. Raphanistrum ou Ravenelle de nos champs : 1° Il est impossible, en quelques générations, de transformer le R. Raphanistrum en R. satious, si l'on a soin de se servir uniquement de graines provenant d'autofécondation pour effectuer les semis successifs. (1) Voir Journal de la Soc. centrale d'Horticulture, 1869, p. 257 et 329 ; et Revue horticole, 1812, p. 143 et 2S3; 1879, p. 341. (2) Revue horticole, 1873, p. 172. BIBLIOGRAPHIE 223 2° Cette transformation est parfaitement possible si Ton ne se met pas à l'abri du pollen étranger et les plantes ainsi obtenues ont tous les caractères d'hybrides entre R. sativus et R. Raphanistrum. C'est à cette même constatation que les expériences de Decaisne, auxquelles nous avons pris part, avaient jadis abouti. D. Bois. Les Palmiers de la Côte d'Azur, par B. Chabaud , ancien chargé des cours de botanique pratique à l'École de méde- cine navale et directeur des cultures du Jardin botanique de Sainl-Mandrier, près de Toulon. Librairie de la Maison rustique, 26, rue Jacob. Prix : 5 francs. L'hommage que notre Société a rendu à M. Chabaud (Vroir Balletin , 1er août 1911), en lui décernant une médaille de pre- mière classe, a été bien mérité, car il y a maintenant plus de soixante ans que cet homme de bien consacre ses efforts à enseigner aux autres comment il faut profiter des conditions tout à fait exceptionnelles du climat doux de cette partie de la France où il est né et où il a passé toute sa vie. Dans tout ce que M. Chabaud a publié brille ce feu sacré qui. seul, permet à l'bomme de garder toujours son enthou- siasme. Il est vraiment regrettable que M. Chabaud soit toujours resté clans l'ancien Jardin botanique de Saint- Mandrier. Un jardin botanique et d'acclimatation, qui l'aurait eu comme directeur, eût acquis sans aucun doute un attrait exceptionnel et il y eut été, comme disent les Américains, « the right man in the right place ». M. Chabaud s'est appliqué non seulement à introduire et répandre nombre de végétaux exotiques, mais il est encore l'homme qui a le plus fait pour améliorer les races d'OEillets, qui jouent un si grand rôle dans la culture des fleurs à couper pour l'exportation. Dans son dernier ouvrage, terminé déjà en 1913, mais publié plus tard, M. Chabaud donne la description des Palmiers cultivés sur la Côte d'Azur et toutes sortes de renseignements à leur sujet. Soin livre contient trente planches d'illustrations d'après photographies, et l'auteur a eu raison de donner la pré- férence aux plantes adultes, même si ces illustrations ne repré- sentent pas toujours des exemplaires tirés des jardins de la 224 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Côte d'Azur; car il est évident que pour pouvoir planter en connaissance il faut savoir quel aspect présente une plante arrivée à un bon développement, ce qui, pour les Palmiers, n'a souvent lieu qu'à un âge que les exemplaires de la Côte d'Azur n'ont pas encore atteint. Lorsqu'il s'agit d'un livre, qui a surtout un but esthétique, on ne peut exagérer l'importance des photographies, mais ceci est peut-être encore plus vrai pour un ouvrage traitant des Palmiers. E. Blatter, dans son important ouvrage : The Palms of British India and Ceijlon, dit : « There is scarcely a better way of conveying correct notions regarding the habit of palms than by means of photographie illustrations. Even the most elaborale description and detailed analysis will never in that respect come up to a tolerably good photograph. » Si toutes les descriptions des Palmiers, qui ont servi comme types d'espèce avaient été accompagnées de photographies, comme heureusement ceci devient la règle depuis quelque temps, la confusion dans la nomenclature des Palmiers, plus grande peut-être qu'ailleurs, eût sans doute bien diminué. Quand le palmographe le plus autorisé à l'heure actuelle, le professeur 0. Beccari, peut s'exprimer comme il le fait {Le Palme americane délia Tribii délie Corypheœ), en parlant des Thrinax, dont la littérature, selon lui, est si embrouillée qu'une revision critique en serait presque impossible, il faut alors admettre que les difficultés que rencontre l'amateur, quand il veut nommer correctement ses Palmiers, sont explicables. Mais en plantant en groupes les espèces douteuses d'un même genre, l'amateur peut ainsi faciliter la comparaison entre les divers Palmiers et rendre plus facile leur détermination, car, comme me l'a écrit autrefois feu le professeur B. Rodriguez, le directeur du Jardin botanique de Rio-Janeiro, la description et la détermination des Palmiers ne peuvent guère se faire que sur les plantes vivantes. Dr A. Robehtson-Proscbowskv. Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux imprimeur, 1, rue Cassette. EN DISTRIBUTION Dixippxts morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUCHER. Graines offertes par le Dr G. V. PERBZ. Echium Bourgxanum. — simplex. Juniperus Cedrus. — bermudiana. Statice frutescens. — arborea. — Perezii. Statice brasiicsefolia. — brassicsefolia X imbricata. — Perezii X imbricata. Convolvulus floridns. Crotalaria agatifolia. Cytisus filipes. — spachianns. — • stenopetalus. (Plantes de serre froide.) Graines offertes par M. MOREL. Acacia cultriformit. Acacia leiophylla. Pinics oocarpa. Pithecoctenium muricatum. Angophora tanceolatn D. G. — subvelutina Mail. Bauhinia purpurea Callistemon lanceolalwn. Dracœna draco. Graines offertes par M. BOIS. Chenopodium Umaranlicàlor. Graines offertes par M. RO- BERTSON PROSCHOWSKV Cocos capitula. Graines offertes par M. GOF- FART, do Tanger. Acacia fàlcata. — decurrens. — stenophylla. — verficillata. — pychantha. — armata. — 'taligna. — podaliriîefolia. linifo cultriformis. — netiifotia. slrieta. — baleiana. 'ïctila/a iccaiia. — mûcraden. .. -- braehy folia. — wanhii. — hybrides de retinôde S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES 200 Chamxrops excelsa de 1 à 15 fr. Bassetgriffon tricolore, 32 cm., 2 ans, parfait sur bêtes puantes et tous gibiers, 200 francs. Basset griffon, âgé, ancien chien de tête, 25 frs. LEROUX, 2, rue Jean-V, Nantes. Poissons exotiques. Plantes aquatiques. M. LEFEBVRÉ, 53, rue de Saint-Quentin, Nogent- sur-Marne (Seine). ■ Offre (échange ou vente) : 1 femelle Daim mou- cheté 1912, et 2 femelles Daim moucheté 1913. Demande : Biche Sika et femelle Cervicapre. M. JOUFFRAULT, Argenton-Château (Deux-Sè- vres). A vendre : Chevreaux et chevrettes nubio-alpins, sans cornes, grosses oreilles tombantes, superbes animaux sélectionnés en vue énorme production laitière. BOUCHAGOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- et-Loire). Canards de basse-cour, Poissons d'étants, espèces nouvelles, ou peu répandues, ou améliorées; de- mande Lapins et animaux à fourrure. M. DODE, à Sorbier, par Jaligny (Allier). Ayant grandes écuries, étables, vastes prés et enclos, prendrai pension Chevaux, Vaches, Ani- maux de luxe, Oiseaux, Chiens, etc. Bons sains assurés. M. PASSY, Professeur, École Nationale de Gri- gnon, « Désert de Retz », Chambourcy (S.-et-O.). « JENNY'S FARM », Créteil (Seine). Elevage d'amateur primé. Prix de guerre. — Splendide Bouc syrio-alpin, sans cornes, repro- ducteur premier ordre pour améliorer races, vaut 150 fr.; faire offre raisonnable. — Toujours : Chiens : bergers ; bulls français; Chats bleus de Perse, siamois. Lapins argentés. Champagne. — Géants Flandres. (Écrire). Quelques sujets disponibles. Race des Gaulois Dorés. La vraie race Nationale sélectionnée depuis 10 ans à l'Elevage des Cour- bes-Vaux. Race absolument pratique, rustique et décorative : ponte abondante e( chair très fine. 10 premiers prix à Paris, 1911, 1912, 1913, 1914. Œufs à couver, prix réduit pendant la guerre, • 5 fr. les 12 franco, au lieu de 6 fr. Encore aussi quelques coqs 1913. Aussi race Gâtinaise blanche type G. C. F., la grande race blanche française : (uufs, 3 fr. 50 la douzaine pendant la guerre. Phœnix blanc pur : œufs, 5 fr. la douzaine et quelques sujets adultes. S'adresser à M. IBOT, basse-courier de M. de S AIN VILLE, aux Courbes -Vaux, par Saint- Germain-des-Prés (Loiret). DEMANDES Bernache de Magellan. M. gendre.. SELLIER, 59, rue Le- Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon état. Professeur DECIIAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ, Sierre (Suisse). Paierai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marijuis de lîrisay , Dans nos Volières. — Marquis île Bfisay : Colombes exotiques. — Cliia- pella : Manuel de l'Oiselier Is7i. Bordeaux). — Alfred Rousse : Perrucnes. M. A. DECOUX, Géry, par Aix-sur-Vienno (Haute- Vienne). 3 mâles Diamants psittaculaires : mâle Astrild à joues noires (Neisna Dùfresnei) ; femelle Grena- < 1 in ; femelle Diamant à gouttelettes; mâle Mo- deste; mâle Personata ; co. Perruches a croupion rouge; co. Colombes diamants; prix modérés. M. A. DECOUX, Géry, par AixesurVienne Haute- Vienne). Chien jeune, de garde. M. G. GONTE, ?•'. vard du Collège, Narbonne (Aude). boule- Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser leurs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à mesure des disponibilités SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Le but de I iété Nationale d'Acclimatation de France est de concourir : jo à j'intn i'acclimataliou et à la domestication des espèces d'animaux utiles ei d ornement.; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétons utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui-qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; 6on nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solennelle, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo- riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeuner amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie ; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture ; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800 pages illustrées de gravures. Il traite des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. 11 donne des renseignements les plus variés sur les animaux et les plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle : installation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc. La Société Nationale d'Acclimatation poursuit un but entièrement désin- téressé ; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce; adhérer à pes statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être général et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Marbthhux. Paris. — L. Marethiîux, imprimeur, 1, rue Cassetle. Indice décimai 506 531-52 591-52 BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 02° ANNÉE N° 8 - AOUT 1915 SOMMAIRE Actes de la Société 225 Pierre Amédée-Pichot. — Le rôle économique du Gibier sauvage 229 G. Raveret-Wattel. — Les Argules et leurs méfaits dans les étangs 233 Léon Diguet. — Nouvelles observations sur le Mosquero ou nid d'Araignées sociales. . 240 Maurice Loyer. — Boîte à raisin "-'50 Chronique générale et faits divers 253 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin est interdite. NWWMMWWMWMMMM Un numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société 1 fr. 50. •♦o AU SIÈGE. SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du ;Jardin des Plantes) , PARIS AVIS IMPORTANT Des cartes annuelles d'entrée an Jardin d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets •sont délivrées au prix" de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : 33, rue de Buffon. ■ ■■.■■^ Pendant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. r r SOCIETE MOMI D'ACCLIMATATION DE FRANCE Fondée le 10 Février (864 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février IS5S 33, RUE DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 Président, M. Edmond Perrier, membre de l'Insiitut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle. Professeur à l'Ëcoie coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice-Présidents. I Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Pans. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires. { Germain, Paris (Conseil) Grepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sebillottb, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Gaucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Mtre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalme, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Pa Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. Dr P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique. 89, rue Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris, ris. du Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bimensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février 31a rs Avril 22 Mai Novembre. Décembre 14 ! 18 18 M 11 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Socs-Section d'Ornithologie (Ligue pour la proU des oiseaux) le lundi à 5 heure*- - — , . 1 15 la 1 15 15 12 26 • 26 3 r 17 n 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les. personnes qui désireraient l'entretenir qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Bjffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres dujiour mensuels des séances. ACTES DE LÀ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Le Conseil, dans sa séance du 27 mai 1915, a décidé qu'une plaque de marbre, portant gravés les noms de nos collègues et des fils de nos collègues morts au champ d'honneur, serait placée dans la Salle des Séances. Les noms de ces glorieux disparus seront, en outre, inscrits en tête de la liste des membres. Le Conseil a enfin décidé que le Bulletin ferait connaître les citations et les récompenses obtenues pour faits de guerre par les membres de la Société ou par leurs fils. En conséquence, nous prions les familles de nos collègues de nous faire parvenir, dès maintenant, les noms, prénoms, âge, titres militaires et tous autres renseignements nous per- mettant, aussi complètement que possible, de rendre hommage au courage de nos collègues et à celui de leurs enfants. Dans la séance du 27 mai 1915, le Conseil, désireux de mani- fester la joie patriotique que causait à notre Société la partici- pation de l'Italie à la lutte entreprise par les Alliés contre les Austro-Allemands, décidait d'adresser à nos collègues italiens la lettre suivante : 3 juin 1915. Monsieur et cher Collègue, L'Italie tout entière s'est levée pour la défense des droits sacrés de l'Humanité et de la Civilisation. Le Conseil de la Société nationale d'Acclimatation de France me charge de l'agréable mission de vous adresser, en son nom et au nom de tous nos collègues, français, russes, anglais et belges, l'expression des vœux ardents que nous formons tous pour le succès des armes de notre Sœur latine dans la lutte du Droit et de l'Hon- neur contre la barbarie. Gloire à la plus Grande Italie ! Vivent Trente et Trieste italiens ! Veuillez agréer, Monsieur et cher Collègue, l'expression de mes sentiments bien dévoués. Pour le Conseil : Le secrétaire général, Maurice Loyer. bull. soc. nat. accl. fr. 1915. — 1> 226 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE ©ACCLIMATATION Nous sommes heureux de communiquer aux membres de la Société les réponses qui nous furent adressées : Milan, le 10 juin 1915. Monsieur et cher Collègue, Je vous remercie vivement pour les expressions amicales pour l'Italie et pour les vœux que vous et tous nos collègues français, russes, anglais et belges, vous formez pour le succès de nos armes. Permettez que de mon côté, je souhaite à la chère France, notre Alliée, victoires et bonheurs. Le sort de nos bien-aimés pays- est dorénavant uni. Vive la France ! Vivent les Alliés ! Veuillez agréer, Monsieur et cher Collègue, l'expression de mes sentiments bien dévoués. Comte Giberto Borromeo. Firenze, le 11 juin 1915. Très honoré et cher Confrère, Profondément ému et reconnaissant des paroles que vous venez d'adresser à l'Italie, de la part du Conseil de notre Société et des collègues français, belges, anglais et russes, je vous prie de vous- faire l'interprète de mes sentiments personnels et de la reconnais- sance de mes compatriotes, pour ces hautes et nobles expressions, dans ce moment solennel, où les Nations les plus civilisées luttent pour l'indépendance et le bon droit. La Sœur latine vous remercie de vos sentiments de fraternité et renouvelle le cri d'aulrefois : Vive la France! Permettez-moi, cher Confrère, de vous embrasser. Votre dévoué, Dr G. Roster. Torino, 16 juin 1915. Monsieur et cher Collègue, Votre noble lettre m'est parvenue avec quelques jours d'inévi- tables retards, et je ne saurai vous dire combien j'ai été touché et ému par les vœux si chaleureux pour le succès de nos armes que ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 227 vous m'adressez au nom de tous mes collègues français, russes, belges et anglais. L'Italie était de cœur et de fait avec la France et ses Alliés, qui sont maintenant les nôtres, depuis le jour même de l'agression allemande. Pour témoigner à la France et à ses Alliés toute notre sympathie fraternelle, après avoir déclaré notre neutralité, nous avons, dans la quinzaine même qui suivit l'entrée en guerre de l'Allemagne, dégarni et désarmé notre frontière occidentale, donnant ainsi à la France la garantie absolue que la frontière italienne était une fron- tière amie en attendant de devenir une frontière alliée. Mais maintenant il ne suffit plus de vaincre, il faut écraser le militarisme féodal prussien et l'outrecuidance allemande et il faut démolir l'Autriche pour empêcher à l'avenir tout nouvel attentat criminel contre la civilisation latine et anglo-saxonne afin de pou- voir relever pour longtemps l'ancienne Ara pacis de nos communs ancêtres les Romains. Que l'Italie et la France soient à l'avenir unies de cœur envers et contre tous, mettant en pratique une fraternité absolue vraiment chrétienne, exempte de toute mesquine rivalité et la Civilisation latine alliée aux Russes et aux Anglais triomphera longtemps encore de la barbarie allemande. Veuillez agréer, mon cher Collègue et Ami, mes remerciements sincères pour les vœux fraternels que vous venez de m'adresser et recevoir une cordiale poignée de mains de votre bien dévoué, Dr Comte Peracca. Milan, 21 juin 1915. Monsieur et cher Collègue, Les paroles si aimables que vous m'adressez au nom du Conseil et 4e tous nos collègues de la Société nationale d'Acclimatation de France me touchent profondément. Je les ai saisies à mon passage ici et les emporterai avec moi au front de combat comme un heu- reux présage. Français et Italiens, frères de race et d'âme, en ce moment décisif pour la liberté et le droit des peuples, n'ont qu'un seul cœur : le grand cœur latin, battant à l'unisson avec ceux de nos nobles et braves Alliés. Commandant de cavalerie, je suis heu- reux et fier de me battre à vos côtés contre la barbarie pour la grande cause commune. Vive notre grande et bien-aimée sœur, la France ! Vivent l'Alsace et la Lorraine françaises ! Vivent nos braves Alliés ! Veuillez agréer, Monsieur et cher Collègue, l'expression de mes sentiments dévoués. Comte Crivelli-Serbellom. 228 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Torino, le 15 juin 1915. Mon cher Ami, En vous remerciant très cordialement des vœux et des sentiments que vous avez voulu, au nom de la Société d'Acclimatation de France, exprimer à mon pays et desquels nous vous sommes bien recon- naissants, je tiens à vous dire que l'Italie est fière de servir avec la France, la cause de la liberté et de la justice, de défendre les droits de notre ancienne et brillante civilisation latine, contre la brutale imposition du germanisme à outrance ! La besogne sera lourde, mais les difficultés augmenteront l'im- portance de la victoire, de laquelle dépend l'avenir de l'Europe. Que Dieu protège la France et l'Italie ! et que le sang de nos sol- dats féconde l'amour et l'union des sœurs latines faites pour s'en- tendre toujours sur les champs de l'honneur, de la gloire et du progrès ! Veuillez, mon cher Ami, agréer et faire agréer aux membres du Conseil de la Société nationale d'Acclimatation de France les salu- tations les plus empressées et l'expression des sentiments dévoués de votre Professeur 0. Mattirolo, Directeur du Jardin royal botanique de Turin. Asinara (Erythrée), li 9 luglio 1915. Illustre Signore e Collega, Vi sono infinitamente grato délia vostra lettera. L'Italia ha sempre sentito fortemente la fratellanza colla nobile vostra nazione ed io sono convinto che il vivo entusiasmo suscitato negli italiani dalla guerra oltre che alla certezza di realizzare le aspirazioni nazionali sia dovuto anche allagioia di poter manifestare un più vasto e più nobile sentimento di fratellanza col popolo francese. Unisco i voti mieiai vostri ed a quelli di tutta l'umanità civile per la finale decisiva vittoria contro l'infatuazione barbanca e vi prego di «radire le attestazioni délia mia più distinta considerazione. Devotissimo. J. Baldrati, Directeur de la Colonisation en Erythrée. LE ROLE ÉCONOMIQUE DU GIBIER SAUVAGE Par PIERRE AMÉDÉE-PICHOT. Dans le nouveau volume où il a réuni ses conférences depro- pagande pour la protection et l'exploitation raisonnée des ani- maux sauvages, ( Wild life conservation in theory and practice), le Dr Hornaday démontre que l'État et les particuliers trouve- raient une source de richesse dans le repeuplement en certains gibiers de régions dont la faune naturelle a été entièrement détruite par l'intempérance des chasseurs. Ceux-ci n'ont eu d'autre objectif que de satisfaire leurs instincts de destruction et ont compromis l'avenir pour leur simple plaisir ou leur besoin de lucre. Le Dr Hornaday estime à des millions d'hectares les terres des États-Unis, impropres à toute autre chose que l'élevage du gibier, et si on voulait bien repeupler ces terres inutilisables et donner au gibier, par une fermeture de lâchasse pendant une quinzaine d'années, le temps de se multiplier, on aurait ensuite, en ne tuant que les jeunes mâles, un approvi- sionnement annuel qui fournirait mieux qu'un appoint au ren- dement des animaux domestiques. Les forêts des États-Unis actuellement inexploitées, pourraient verser tous les ans dans la consommation, au moins deux millions de Cerfs adultes qui n'auraient pas coûté à produire plus de 250.000 francs. On voit le profit d'une pareille opération en estimant à 50 francs en moyenne le prix de chaque animal abattu. Ce qui a été fait dans l'État de Yermont doit servir d'exemple. Les habitants de cette région avaient fini par détruire les Cerfs à queue blanche ou Cariacous qui y avaient été extrême- ment abondants, si bien qu'en 1870 il n'en restait plus pour ainsi dire. En 1875 quelques hommes d'affaires de Rutland se mirent en tête de4 repeupler les forêts voisines, et y lâchèrent 7 biches et 6 cerfs à queue blanche provenant des Adirondacks. Ces animaux se plurent dans l'endroit et s'y multiplièrent. Pen- dant vingt-deux ans il n'en fut pas tué un seul à part quelques- uns qui furent braconnes malgré la loi. En 1897 on jugea que les cerfs de Vermont s'étant bien implantés dans la localité on pourrait recommencer à les chas- ser en ne tuant que les mâles. Cette année-là on en tua 150 et 230 BULLETIN DE «LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION autant les trois années suivantes ; en 1901, on alla jusqu'à 211 ; en 1902 à 561 ; en 1905 à 791 ; puis successivement on en tua en 1907, 1600; en 1908, 2208; et en 1909, 5261. Cette dernière année la moyenne du poids de chaque bête fut de 155 livres, un peu moins que les années précédentes, mais cela résulte peut-être d'une erreur de calcul. Toujours est-il que les ani- maux tués représentaient 716.358 livres de venaison. Au prix de 60 centimes la livre, le rendement a donc été pour cette année de 429.810 francs. Maintenant il importe de faire entrer en ligne de compte les dommages que les Cerfs peuvent causer aux cultures. L'État de Vermont a précisément solutionné la question. Il faut savoir que chaque comté de l'État de Vermon s'administre d'une façon indépendante et a son budget parti- culier. Les Cerfs qui s'étaient répandus dans tout l'État faisaient nécessairement des incursions fréquentes sur les fermes et dans les jardins où certaines récoltes sur pied étaient pour les tenter. L'État refusa très sagement de laisser tuer les délin- quants, mais il décida que les dégâts seraient payés argent comptant et comme les comtés fréquentés par ces Cerfs étaient précisément ceux qui en tiraient profit, chaque comté fut invité à payer les indemnités dont ses Cerfs étaient responsables. Dès qu'un dégât était constaté, le fermier s'abouchait avec le tréso- rier du comté et trois personnes étaient désignées pour vérifier la plainte. Ces experts, ayant à défendre ces intérêts généraux, avaient soin de ne pas surestimer les dégâts qui, répartis sur la totalité des contribuables, représentaient pour chacun une bien petite somme, que tous les fermiers payaient très volon- tiers, puisque, profitant du droit de chasse, ils avaient avantage à assurer la conservation du gibier. Pendant les années 1908 et 1909, on a payé 311 indemnités pour la somme totale de 24.325 francs. Sur ces indemnités, il y en eut 102 d'une valeur de 25 à 50 francs; et 80 de moins de 25 francs. Quatre seulement dépassèrent 500 francs; une seule dépassa 1000 francs et atteignit le chiffre de 1.630 francs. Pen- dant ces deux années, en dehors de quelques centaines de Cerfs qui furent tués illégalement, ou qui périrent par accident, le nombre des animaux abattus fut de 7186 qui, à raison de 75 francs par carcasse, représentèrent pour les citoyens de Vermont 538.950 francs contre 24.325 francs d'indemnités. On voit que la spéculation n'était pas mauvaise. LE ROLE ÉCONOMIQUE DU GIBTER SAUVAGE 231 Ainsi, en vingt-deux ans, avec 13 animaux seulement pour point de départ, l'État de Vermont était arrivé à obtenir un très notable rendement annuel de venaison. Les frais de garde et de surveillance, furent, d'autre part, très largement couverts par le prix des permis de chasse. Si l'introduction des Cerfs avait été faite simultanément sur plusieurs points, on aurait pu recueillir le bénéfice de l'opération beaucoup plus tôt. « Nos compatriotes, ajoute M. Hornaday, laissent échapper chaque année l'occasion de s'assurer un abondant et précieux approvisionnement de viande de gibier sauvage qui ne leur coûterait rien. Dans l'État du Maine, où les Cerfs et les Élans sont soigneusement protégés, sans compter les animaux consommés sur place, on peut estimer à 5 millions ce que les chasseurs non résidents dépensent chaque année dans le pays. Or, qu'est-ce qui empêche qu'il en soit de même dans tous les États avec les 2 millions de Cerfs qui seraient versés chaque année dans la consommation? Disons-le nettement : c'est l'esprit de lucre, l'ignorance et une conception tout à fait fausse de la liberté individuelle qui caractérisent la masse des Américains. Le rôle social du sport et de la chasse est encore très mal compris aux Etats-Unis où on exploite l'un et l'autre selon le bon plaisir d'un chacun en dehors de tous principes économiques. 95 p. 100 des tireurs de gibier n'ont d'autre idée que d'abattre des pièces dans les limites que leur assigne la loi, au hasard de la rencontre, avant que d'autres chasseurs ne s'en emparent. Mais les lois sont mal faites, et la plupart des États n'ont pas protégé les faons et les femelles, ni les mâles dont les bois ont moins douze de centimètres de longueur. « D'ailleurs qu'entend-on par liberté individuelle? Ne serait- ce que la licence pour l'individu de faire tout ce qui lui plaît? Cette tournure d'esprit fait le malheur des animaux sauvages en Amérique et est la cause directe des formidables destructions qu'on y opère. Aujourd'hui notre vaste territoire de montagnes boisées, de collines et de vallées se trouve dépouillé de tous les êtres sauvages qui auraient quelque valeur, sauf sur quelques points exceptionnels qu'il serait facile d'énumérer. Nous y per- dons beaucoup, faute de lois, et lorsque des lois existent on ne les prend pas au sérieux. Une loi imprudemment libérale est pire que s'il n'y en avait pas du tout. Nous gaspillons les incal- culables richesses de la Nature lorsqu'il n'y a pas un fonction- naire ou une association pour nous les faire respecter. 232 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Les États qui contiennent les plus grandes surfaces de terres sauvages ont une faible population, et par conséquent peu de revenus publics; pas un de ces États n'est assez riche pour salarier la moitié de ce qu'il faudrait de gardes pour empêcher le braconnage de son gibier; or, le pionnier de la frontière, qui n'admet pas les droits divins des rois, a une foi inébranlable dans les droits divins du colon à puiser tout ce qui lui plaît et tout ce dont il a envie dans le trésor de la Nature. C'est pour cela que les citoyens de ce pays ne bénéficient pas d'un stock de 2 millions de Cerfs valant 10 millions et plus qui devrait leur revenir. N'est-il donc pas possible d'amener le sentiment public à ce point de moralité, de jugement droit et de conduite équitable qui permette l'applicalion d'un système d'élevage de Cerfs sur les terres inutilisées et l'exploitation rationnelle de ces animaux? « Sans doute ce serait une campagne d'éducation et de pro- pagande considérable à entreprendre, mais dans quelque temps, lorsque la question de la production de la viande s'imposera, cet effort sera digne de tout ce qu'il pourrait coûter et si tous les hommes influents dans chaque État et dans chaque Comté vo.ulaient prendre la chose en mains, on devraforcément réussir. Faudra-t-il attendre que la nécessité impose Je fermage du Cerf dans un intérêt national alors qu'il serait facile de le réaliser dès maintenant dans de si nombreuses régions? » Les conclusions du Dr Hornaday s'imposent à l'attention des législateurs et des économistes de l'Ancien aussi bien que du Nouveau Monde, surtout en France où la culture du gibier est si mal comprise et où la chasse n'est guère considérée que comme un sport et un plaisir. Nombreuses sont les localités qui ont été dépeuplées en France de gibier gros et petit autant par le braconnier que par le chasseur régulier et où une régle- mentation rationnelle pourrait ramener l'abondance. Il n'est plus permis aujourd'hui, devant le coût excessif de la vie maté - rielle, de négliger des sources de revenus qui pourraient avoir tant d'importance, mais pour en tirer parti et pour engager les communes ou les particuliers à mettre dehors les fonds néces- saires au repeuplement, il faudrait que le gibier fût envisagé LES ARGULES ET LEURS MÉFAITS DANS LES ÉTANGS 233 dune toute autre façon qu'il ne Test par le statut légal, qui le proclame res nullius et le livre sans défense à la convoitise du premier qui peut s'en emparer. LES ARGULES ET LEURS MÉFAITS DANS LES ÉTANGS MOYENS DE DÉFENSE CONTRE CES ENNEMIS DES POISSONS Par C. RAVERET WATTEL. Parmi les ennemis, si nombreux, des Poissons, il en est qui, bien que ne se montrant pas constamment très redoutables, parce que dans les conditions ordinaires l'abondance en est restreinte, peuvent, principalement sous l'influence de cer- taines circonstances atmosphériques, se mettre subitement à pulluler d'une façon prodigieuse, et causer alors aux piscicul- teurs de sérieux préjudices. De ce nombre est l'Argule foliacé [Argulus foliaceus L.), vulgairement désigné par les pêcheurs sous le nom de Pou des Poissons ou Pou des Carpes. « C'est un curieux petit Cruslacé aplati en forme de bouclier, qui se colle étroitement à la peau des Poissons, se nourrit de leur sang, et détermine ainsi, lorsqu'il est en grand nombre, une anémie rapide avec ulcération de la peau. » (Prof. Louis Léger.) A peine plus épais qu'une feuille de papier et presque trans- parent, il varie de dimension, depuis celle d'une petite lentille jusqu'à la largeur d'un ongle. Cette espèce, dont l'aire de dispersion est très étendue, se rencontre chez nous principalement dans les rivières à cou- rant peu rapide. Elle ne s'attaque pas qu'aux Poissons : on la trouve souvent sur les têtards des Grenouilles et des Crapauds; toutefois, ce sont les Cyprinidés qui paraissent être leë plus fréquemment envahis par ce parasite. Dans l'Europe centrale, une espèce de taille plus forte, Y Argulus coregoni Thorell, a été observée sur l'Ombre, la Truite, la Fera, etc., et des travaux récents ont fait connaître l'existence d'un assez grand nombre d'autres espèces d'Argules, dont certaines appartiennent aux eaux salées. Il en est qui se fixent de préférence à l'intérieur des ouïes des Poissons et ne se rencontrent même guère que là. D'autres, et c'est précisément le cas pour l'Argule foliacé, 234 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION s'installent principalement à la naissance des nageoires, parce que c'est dans cette région que la peau du Poisson présente le moins d'épaisseur. C'est là aussi que les Argules se trouvent le plus en sûreté, le Poisson ne pouvant se frotter, en cet endroit, contre les herbes et le gravier, comme il le fait, en ce qui con- cerne les autres parties du corps, pour se débarrasser de ses parasites. Les Argules, qui constituent une famille du groupe des Crus- tacés Branchiures (celle des Argulides), ne se fixent pas d'une façon permanente sur leur hôte, qu'il leur est possible de quitter momentanément pour errer un certain temps en liberté. Ils sont même remarquables par leur agilité et la fré- quence de leurs changements de résidence. La conformation de leur tube digestif permet, en effet, aux Argules d'emmaga- siner, dans de nombreux caecums ramifiés, de véritables réserves de nourriture; si bien que, après une période de copieuse alimentation passée sur le corps d'un Poisson, ils peuvent supporter un assez long jeûne, sans que leur énergie vitale ait à en souffrir. Parfois ce jeûne s'étend au delà d'une semaine, pendant laquelle le minuscule Crustacé peut, soit effectuer une de ces mues auxquelles il est soumis, comme tous les Invertébrés de la classe dont il fait partie , soit s'occuper de se reproduire. Il se fixe ensuite, de nouveau, sur un Poisson et recommence à remplir consciencieusement de substance alimentaire les nombreux appendices de son intestin. Chez lui, du reste, tout l'organisme se prête admira- blement à une rapide et copieuse absorption de nourriture. Deux puissantes ventouses (voy. Sg fig. ci-contre) lui permet- tent de se fixer instantanément et d'une façon très solide sur son hôte. L'ouverture buccale est munie d'une forte trompe dans laquelle sont situées des mandibules finement dentelées, ainsi que des mâchoires styliformes, et, au-dessus de cet organe, un long tube cylindrique, terminé par un stylet rétractile, renferme le conduit excréteur d'une paire de glandes à venin. Le tout constitue un merveilleux appareil pour per- forer la peau du Poisson, puis aspirer le sang, dont le parasite se gorge, tout en instillant de son venin dans la plaie faite. Chez les Argules, les mâles, plus petits et plus agiles que les femelles, sont de beaucoup les moins nombreux. Les femelles ne portent pas leurs œufs dans des poches ovifères comme le LES ARGULES ET LEURS MÉFAITS DANS LES ÉTANGS 23: font les Cyclopes, les Caliges et autres Crustacés très voisins des Argules; elles les collent, au nombre de plusieurs cen- taines, sur les pierres ou les plantes aquatiques, et, environ un mois après la ponte, les larves éclosent. A peine longues de trois quarts de millimètre, elles possèdent déjà les antennes extérieures et les crochets qui se voient chez l'adulte. Le stylet de la trompe existe également; mais, à la place des deux ven- Màle jeune d'Argulus foliaceus. A', antennes antérieures; Sg, ventouses (pattes-mâchoires antérieures); Kf, pattes-mâchoires, Sf, pattes natatoires ; fi, rostre ; St, aiguillon ; D, canal digestif ; T, testicule. touses qui n'apparaîtront que plus tard, elles ont une paire de pattes terminées par des crochets, qui leur servent à se fixer. Six jours environ après l'éclosion, survient une première mue, pendant laquelle l'animal perd les pieds en forme de soies qui lui servent à se mouvoir dans l'eau, et il les remplace par quatre paires de pattes natatoires munies de longues soies (Sf), consti- tuant de puissantes rames. Lors d'autres mues, qui se succèdent assez rapidement, la forme du corps devient de plus en plus 236 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION semblable à celle de l'animal adulte (1). A l'âge de six semaines environ, lesArgules sont déjà aptes à se reproduire; aussi, dans des conditions favorables, peuvent-ils pulluler rapidement, d'autant plus qu'une même femelle fait souvent jusqu'à trois pontes dans le courant de la belle saison. Néanmoins, comme il est dit ci-dessus, ces Crustacés ne se montrent pas habituel- lement en très grande abondance. D'ordinaire, sur des Poissons bien portants, placés dans de bonnes conditions hygiéniques, on n'en trouve guère plus de quelques-uns sur chaque Poisson et celui-ci, écrit un naturaliste américain, auteur de recherches sur les Argules (2), « ne paraît pas en être plus incommodé qu'un Chien ne l'est de ses puces. D'ailleurs, comme tous les êtres, ces parasites comptent d'assez nombreux ennemis qui, parfois, en détruisent beaucoup et empêchent une multiplication exces- sive. Mais il peut aussi en être tout autrement. Que, par suite d'une circonstance quelconque, un Poisson se trouve affaibli, débilité, immédiatement le parasite devient beaucoup plus , nuisible pour son hôte ; il peut l'empêcher de se rétablir et même contribuer à le faire périr. « La grande majorité des Argules recherchent, pour se fixer, des Poissons sains et vigoureux ; mais il est des espèces qui, au contraire, se rencontrent principalement sur des sujets malades. Ceci s'applique notamment à une espèce marine, Y A rgulus mela- nops. Aussi bien en hiver qu'en été, il est rare de pêcher un Flet atteint d'une affection quelconque, sans qu'on ne le trouve couvert de ces Argules. Or, il a été constaté que, en pareil cas, la maladie du Poisson était précisément la cause et non, comme on serait porté à le croire, la conséquence de la présence du parasite. « Mais, lorsque des Poissons viennent à se trouver placés dans des conditions d'existence défavorables, n'ayant point prise toutefois sur le parasite, celui-ci devient tout de suite plus redoutable. C'est ce qui se produit notamment lorsque des Poissons migrateurs abandonnent la mer pour venir frayer en eau douce, emportant sur eux des Argules marins; ceux-ci résistent très bien au changement de milieu et n'en paraissent nullement incommodés. Le Poisson, au contraire, affaibli par (1) C. Claus. Traité de zoologie, édition française. Paris, 1884. (2) Charles B. Wilson. The fish-parasites of the genus Argulus found in theWoodsHole région [Bulletin oflhe Bureau of Fis/ieries. Washington, 1905. t LES ARGULES ET LEURS MÉFAITS DANS LES ÉTANGS 237 les faligues du voyage et l'abstention de nourriture, peut souffrir notablement de la présence de ses parasites, dont le nombre augmente d'ailleurs bientôt. En effet, les Argules, désertant les Poissons qui viennent à périr, se portent immé- diatement sur ceux encore vivants, dont ils aggravent la situation. » Mais ce sont surtout les Poissons d'étang pour lesquels les Argules arrivent à être très dangereux. En été, quand, sous l'action des rayons solaires, l'eau des étangs s'échauffe for- tement, la haute température, très favorable à la pullulation et au rapide développement des Argules, affaiblit, au contraire, beaucoup le Poisson, qui devient languissant et peu capable de se défendre. C'est alors qu'il est envahi par de véritables légions du redoutable parasite; criblée de piqûres, sa peau se montre déchirée et sanglante par places, décolorée en d'autres. Les nageoires sont toutes déchiquetées, et la queue est, elle- même, très souvent fort endommagée. Une mortalité considé- rable peut alors se produire. Les Tanches et les Goujons montrent d'ordinaire une certaine résistance; mais les Gardons et surtout les Carpes, plus spécialement envahis, périssent en grand nombre. Les pertes sont particulièrement sérieuses dans les pièces d'eau contenant, outre des Cyprinidés, une certaine quantité de Truites. Celles-ci, très éprouvées par la chaleur qui leur est contraire, sont particulièrement l'objet des attaques de l'Argule et succombent en masse. Il n'y a pas qu'en Europe que les pisciculteurs aient à souffrir des méfaits des Argules. M. Charles B. Wilson nous apprend (1) qu'aux Etats-Unis, dans les nombreuses stations aquicoles créées par le Bureau fédéral des Pêcheries, on est fréquemment obligé, pendant la saison chaude, de mettre les Poissons à l'abri des attaques de ces parasites, par des nettoyages réitérés des bassins, ou, mieux encore, par leur mise à sec momentanée. Cette mesure est, en effet, le meilleur moyen, d'exterminer en bloc tous les Argules, que le manque de fraîcheur de l'eau a fait pulluler d'une façon excessive. L'Argulas americanus est l'espèce qui envahit le plus souvent ainsi les établissements d'élevage. Les grandes surfaces d'eau elles-mêmes peuvent ne pas rester indemnes, M. Wilson en cite des exemples et mentionne (1) Loc. cit. 238 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION notamment le lac Mille (Minnesota), dont les eaux, peu pro- fondes, s'échauffent souvent beaucoup en juillet et août; on voit alors survenir de grandes mortalités parmi les Poissons, qui sont envahis par des quantités prodigieuses d'Argules de l'espèce dite Argulus slizostethii Hellicott (1). Dans les lacs et les étangs où des sources de fond empêchent Peau de trop s'échauffer, la pullulation du parasite est beau- coup moins abondante. Aussi, un des moyens de protection à employer contre les Argules est-il de veiller à ce que les viviers soient toujours suffisamment garnis de plantes aquatiques, flottantes ou submergées, pour que la température de l'eau ne s'y élève pas à l'excès. M. Wilson signale aussi que l'absence de certaines espèces de Poissons dans une pièce d'eau peut y faciliter une dange- reuse multiplication des Crustacées parasites. Il cite comme exemple un étang où une espèce particulière d'Argule (V Ar- gulus castotomi), s'étant mise subitement à pulluler, causait une mortalité très grande parmi les Poissons. Recherche faite, on constata que l'abondance des Argules résultait de la dispa- rition de tous les petits Poissons de surface qu'on avait captu- rés à la senne et vendus comme appât pour la pêche à la ligne. Les Poissons de surface se nourrissent, en effet, de larves d'Ar- gules nouvellement écloses, dont ils détruisent de grandes quantités. Aussi, quand on en eut remis dans l'étang, on vit l'abondance des Argules diminuer rapidement et cesser d'être nuisible. Il convient d'ajouter que le Poisson peut être conduit par la faim à s'attaquer même aux Argules adultes. M. Wilson rap- porte que, désirant, pour les étudier, conserver vivants pen- dant quelque temps neuf Argulus catostomi, les avait fait se fixer sur deux Fundules (Fundulus heteroclitus) logés dans un petit aquarium d'eau de mer. Comme, pour vicier cette eau le moins possible, la nourriture n'était donnée qu'avec parci- monie aux deux Poissons, ceux-ci, pendant une nuit où ils (1) Le « blue-pike » ou Brochet bleu {Stizosledion vitreum) la » yellow perch » ou Perche jaune (Perça flavescens), le Rock-bass (Amblopliles rupestris) les Black-Bass, le Poisson-chat, les Pomoxys annularis et spa- roides, un Corégone (V Argyrosomum artedi), la Lola maculosa et le Brochet commun (Esox lucius) sont, parait-il, les Poissons qu'attaquent de préférence les Argules. 'LES ARGULES ET LEURS MÉFAITS DANS LES ÉTANGS 23!) étaient plus en appétit que de coutume, firent disparaître les neuf Argules. Des observations qu'il a recueillies, M. Wilson croit pouvoir tirer les conclusions suivantes : 1° Dans les conditions normales, les Arguies sont peu nui- sibles, parce que leurs ennemis naturels en limitent le nombre et que les Poissons se trouvent de temps en temps débarrassés de ces parasites, qui les quittent momentanément pour effec- tuer une mue ou pour se reproduire ; 2° Mais, lorsque le Poisson vient à être affaibli, soit par quelque maladie, soit par des circonstances atmosphériques défavorables, la nocuité des Argules a plus de prise sur lui ; elle peut contribuer à le faire périr ou hâter sa fin ; 3° Pendant les migrations qu'accomplissent certaines espèces, le Poisson, éprouvé par la fatigue, devient plus accessible à l'action nuisible des Argules et peut avoir beaucoup à en souffrir; 4° Lors des chaleurs estivales, principalement dans les étangs peu profonds, les Poissons, déprimés par la haute température de l'eau, sont facilement envahis d'une façon grave par leurs parasites, et peuvent succomber en grand nombre; 5° Dans les viviers garnis d'une population très dense, les conditions hygiéniques laissent facilement à désirer pour les Poissons; mais les Argules trouvent, au contraire, à se multi- plier abondamment et deviennent très vite fort nuisibles, si l'on ne veille pas à les détruire ; 6° Ces Crustacés parasites ont surtout pour ennemis les Pois- sons de surface (Vandoises, Gardons, etc.), qui font une chasse active aux larves et empêchent une trop abondante multipli- cation ; 7° La protection de ces Poissons de surface, et leur introduc- tion dans les eaux qui n'en renferment pas, sont donc deux mesures à recommander contre une pullulation excessive des Argules. Comme, suivant une remarque fort juste de M. le professeur Léger, les Argules sont, parmi les ennemis des Poissons, du nombre de ceux qu'il est plus facile d'éviter que de combattre, les propriétaires d'étangs ou de bassin d'élevage ne doivent jamais rien négliger pour se mettre à l'abri de l'invasion para- sitaire. Conséquemment lorsque, dans une pièce d'eau quel- conque, des Salmonidés doivent être mélangés avec des Cypri- 240 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION nidés, un examen préalable de ceux-ci s'impose, afin que, en les brossant légèrement, on les débarrasse des Argules qu'ils auraient sur le corps; sans quoi, par leurs pontes abondantes, ces Crustacés pourraient se multiplier bientôt dans la pièce d'eau d'une façon dangereuse pour les Salmonidés, moins résistant que les Cyprinidés aux attaques du parasite. Quand la présence d'Argulesest constatée dans un vivier, on peut jeter utilement dans l'eau des branchages, contre lesquels les Poissons manquent rarement de venir se frotter pour se débarrasser de leurs parasites. Mais, comme moyen de des- truction de ceux-ci, la mise à sec de la pièce d'eau, principa- lement pendant les froids de l'hiver est le seul à recommander. Inutile de procéder, en outre, à un chaulage, les Argules ne résistant pas à l'assèchement. NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE MOSQUERO OU NID D'ARAIGNÉES SOCIALES EMPLOYÉ COMME PIÈGE A MOUCHES DANS CERTAINES LOCALITÉS DU MEXIQUE Par LÉON DIGUET. Dans une communication à la Société d'Acclimatation, faite en 1909 (1), j'ai présenté le nid d'une Araignée sociale, le Cœno- tele gregalis E. Simon, que, dans certains villages du plateau central mexicain, on emploie avec succès comme piège à mou- ches pendant la saison des pluies. Ayant depuis fait un séjour de deux années au Mexique, j'ai pu réaliser de nouvelles observations, sur l'étiologie de cet intéressant Arachnide, dont les nids cette fois ont été alors récoltés dans une région différente, mais soumise cependant à des conditions climatériques et altimétriques identiques. Les nids et leur colonie qui font l'objet de cette nouvelle étude ont été récoltés à une altitude voisine de 2.000 mètres (1) Le Mosquero. Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de France. Octobre 1909, p. 368. NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE MOSQUERO 241 sur des Chênes au Cerro Viejo de Cuyutlan dans les dépen- dances de l'hacienda de Huejotitan (Jalisco). Les premiers nids que j'avais étudiés en 1908 provenaient de la sierra de Tlalpujahua (Michoacan) , ils renfermaient comme commensaux de la population : une Araignée errante de la famille des Drassidées, le Pœcilocroa convictrix E. Simon et un minuscule Coléoptère latridide, le Corticaria nidicola A. Gruv., dont le rôle dans la colonie consistait à entretenir la propreté de la demeure en procédant à l'élimination des reliefs du repas ; ce dernier faisait complètement défaut dans les nou- veaux nids soumis à l'observation, mais son rôle était alors Fig. 1. — Cœnotele gregalis p , grossie environ à 4 diamètres. rempli par des Fourmis errantes, bien connues dans la région et dont les coutumes sont de visiter en troupe les habitations rurales, à certaines époques de l'année, pour se repaître des chrysalides et en général de tous les insectes qui se sont établis dans les interstices des murailles et des toitures. Quant au Pœcilocroa convictrix, cette Araignée se rencontrait toujours dans chaque département du nid, représentée par un exemplaire ou par une paire lorsque c'était l'époque de la pariade; le rôle de cette Araignée est donc constant et paraît bien même être indispensable à l'action biologique de la colonie du Cœnotele. Les faits que j'ai pu observer sur des « mosqueros » placés en expérience ont démontré qu'en outre d'une alimentation abondante, les Cœnotele réclament pour leur évolution régu- lière trois conditions indispensables : 1° l'eau sous forme de BULL. SOC. NAT. ACCL. KF. 1915. — 16 242 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION rosée; 2° l'ombre, et 3° mais dans la nature seulement, l'abri d*un arbre à feuillage persistant. Si une de ces trois conditions vient à manquer, on ne tarde pas à voir le nid se dépeupler et les habitants aller se réunir en essaim dans un endroit convenablement disposé. Le fait de l'abri et de l'ombre a été vérifié sur un nid entier récolté avec son abri et support consistant en un ample rameau de Chêne qui fut placé en plein air. Lorsque les feuilles commencèrent à se flétrir, toute la colonie peu à peu s'échappa et alla émigrer sous le couvert permanent d'un Oranger et d'un Troëne , arbres sur lequels, on constata l'année suivante deux nidifications importantes. Sur une série de fragments de nids que l'on ne soumit pas à une pulvérisation d'eau quotidienne et que l'on suspendit dans un endroit recouvert, on constata bientôt le départ complet des Cœnotele gregalis qui alors vinrent nidifier sur la frondaison touffue d'un Tecoma radicans , bordant extérieurement la galerie sous laquelle avaient été disposés les fragments de nids. L'objet de la troisième condition qui est celle de l'influence de l'arbre à frondaison perenne, s'explique facilement : les feuilles forment une toiture sous laquelle les jeunes Cœnotele peuvent en toute sécurité élaborer et fixer les rudiments de leur premier réseau qui doivent dans la sui^e en s'étendant de proche en proche, couvrir une notable partie des rameaux. De plus le feuillage donnant asile à des Pucerons et à nombre d'Insectes infimes, la nouvelle génération d'araignée trouve, à son berceau, une première alimentation en rapport avec ses faibles moyens. Enfin un essai exécuté dans les conditions requises, lorsque l'on emploie les nids comme piège à mouches, fut pratiquée avec deux fragments provenant d'un même nid récolté sur les Chênes. Ces fragments furent suspendus à une corde dans un maga- sin d'approvisionnement alimentaire, au début de la saison des pluies, c'est-à-dire au commencement de juillet ; on eut soin dé les arroser chaque jour par une copieuse pulvérisation d'eau, peu à peu les fragments de nids s'accrurent concentriquement, les Cœnotele déposant au fur et à mesure des captures de mou- che une enveloppe de toile. Au commencement d'octobre, les, deux fragments de nids avaient atteint le développement, que l'on peut aujourd'hui NOUVELLES ORSERVATIONS SUR MOSQUERO 243 cd cd ^ P T3 3 O * T3 5— CD a .2 Si «S en o — -eu *© +-- Si p - a, .2 ce o <^o 3 w oj o ■o S- en Sm °>-3 eu en o »*Ni -ï ei eu O "" ' O S eu *Ô3 53 "° 1-3 r^ a (D Q} C£ ' -° cS (4 en -H a. t3 ,c3 -eu •F^ 3 a ai e- ea CD •-. * S. g m — eu o o S °< -» a es — ' se '- C' ei b£) IZZ £ ° O x "S 3 ^ p 214 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION constatera la galerie d'entomologie appliquée du Muséum, où ce « mosquero » est maintenant exposé et dont la figure jointe à ce mémoire représente à peu près la réduction au dixième (1). Pendant la période active les deux fragments de nids s'accru- rent indépendamment et ce n'est que tout à fait en fin de saison qu'ils furent réunis par les traînées de fils qui recou- vrirent entièrement la corde de suspension, comme on le voit sur la photographie du nid qui fut prise lors de son arrivée au Muséum. Ces filaments longitudinaux servirent à l'exode des Araignées adultes, ces dernières devenues trop massives pour pouvoir s'échapper, comme le font les jeunes en lançant verticalement des filaments aériens leur permettant de se faire transporter dans l'espace avec l'aide des courants aériens. Dans ces deux nids employés comme « mosqueros », les Coenolele ne paraissent pas s'être reproduites, car après le départ des adultes on ne constata pas à la surface de la toile la présence de jeunes, comme l'on observe alors dans la nature sur les nids recueillis au mois de septembre. Ces nids, comme on peut le constater sur la photographie que représente la figure 3, sont encombrés d'une quantité considé- rable de cadavres de mouches, ces derniers n'ayant pu être éliminés par suite de l'absence des commensaux sarcophages auxquels incombent le travail de propreté de la demeure, sont restés à leur place de capture et témoignent ainsi clairement de l'efficacité du piège. Les nids qui furent récoltés sur les chênes à la fin de juin, et qui servirent ensuite aux expériences, avaient subi, de la part des jeunes Cœnotélés, un certain aménagement en vue de l'hivernation ; toute la périphérie avait été capitonnée de façon à constituer une mince couverture pelliculaire qui préservait la masse spongieuse de l'intérieur contre les brusques écarts de la température et aussi contre une trop forte humidité. Enfin, dans ce nid où les habitants avaient à cette époque presque atteint leur état adulte, il y avait parmi la colonie une forte proportion de mâles, ces derniers faisaient défaut dans la collectivité qui fut examinée en septembre aussi bien sur le (1) M. L. Berland. Utilisation, pour la capture des Mouches, des nids de l'Araignée mexicaine Çœnotele gregalis, E. Simon. Bulletin du Muséum nationale d'Histoire naturelle, 1913, n° 7, p. 432. NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE MOSQUERO 245 246 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION nid employé comme « Mosquero » que sur ceux qui avaient été récoltés en 1908 à la sierra de Tlalpujahna. Les nids placés en observation ont permis de faire quelques constatations sur les mœurs des commensaux et sur leur rôle plus ou moins indispensable dans la communauté. Pour le Pœcilocroa convictrix, son rôle paraît bien en évidence au sein de la population de recluses, étant d'une taille au moins le double de son collègue, c'est à lui, comme il est facile de le constater qu'incombe l'attaque lorsqu'une proie un peu forte est venue se prendre au piège. De plus, par ses allées et venues contiuelles à travers les méandres du nid et par le peu de soie qu'elle peut semer sur son passage ainsi que l'a constaté M. Semichon sur un spécimen conservé en captivité pendant une saison (1), l'Araignée com- mensale de la Cœnotele gregalis doit collaborer efficacement au fonctionnement et à l'entretien des couloirs dont le repaire est amplement pourvu. Si pour la colonie de Cœnotele le concours d'un Arachnide étranger est nécessaire, il n'y a pas réciprocité pour ce dernier, car comme l'ont montré les fragments de nids abandonnés faute de pulvérisation d'eau, le Pœcilocroa en fin de saison con- tinuait à vivre dans la solitude des nids abandonnés de leurs constructeurs. Quant aux commensaux observés, la Fourmi et le petit Coléoptère lathridide, leur action ne semble avoir comme objet que des soins de propreté, leurs opérations n'ont réellement d'importance que dans la nature, car les nids servant comme « mosqueros » sont rejetés à la fin de la saison. Le premier de ces commensaux de rôle secondaire a été observé sur les nids mis en observation à l'hacienda de Huejo- titan peu avant le début de la saison des pluies et le second à la sierra de Tlalpujahna (Michoacan) en septembre. Il est même probable que ce dernier, qui appartient à un groupe d'Insectes reconnus jusqu'ici comme phytophage, ne collaborait dans son œuvre d'élimination qu'avec le concours de végétations cryptogamiques qui envahissaient les cadavres de Mouches, n'ayant pu me procurer de nids de Cœnotélés en septembre au Cerro Viego de Curjutlan, il ne m'a pas été pos- (1) Semichon. Observations sur une femelle de Pœcilocroa convic- rix E. S. Bulletin de la Société entomologiaue de France, 1911, p. 226. NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE MOSQUERO 247 sible d'établir si cet infime commensal était vraiment aborigène du nid dans n'importe quelle contrée où il se trouve, ou bien, si sa présence dans les premiers nids observés était fortuite. En tous cas les deux commensaux opéraient en parfaite har- monie avec les habitants de la communauté et la Fourmi visi- teuse qui est essentiellement carnassière ne s'en prenait qu'aux débris encombrant la masse spongieuse de la nidification et ne s'attaquait jamais aux hôtes. L'emploi des nids d'Araignées pour la capture des Mouches a été de tout temps en usage chez les populations rurales de n'importe quel pays, très souvent on a coutume de laisser pen- dant l'été, les araignées établir librement leur toile dans les métairies et les étables, afin de préserver le plus possible le bétail des tracasseries exaspérantes des Mouches. Les Araignées auxquelles on a recours pour ce service ne réalisent qu'imparfaitement le but que Ion se propose, car vivant toujours solitaires sur leur domaine, il en résulte que les captures et les destructions d'Insectes nuisibles sont forcé- ment limitées, de plus leurs toiles tendues habituellement dans les recoins constituent toujours un réceptacle pour les pous- sières et les immondices atmosphériques, lequel peut devenir un foyer d'infection en temps d'épidémie. Rien de semblable n'est à redouter avec le Cœnotele gregalis dont la colonie se compose souvent de plus d'une centaine d'individus vivant sous le même gite. Cette Araignée, de taille relativement réduite, puisque sa dimension n'atteint à peine que 4 millimètres, vit toujours cachée dans les profondeurs de son repaire et n'apparaît à l'extérieur que le temps de maîtriser et d'ensevelir sa proie, la surface du nid se conserve toujours très propre car elle se trouve après chaque capture en partie renouvelée. Au moment où l'on s'occupe sérieusement d'examiner tous les moyens pratiques pour la destruction des Mouches et des Insectes nuisibles, le nid de Cœnotele paraît digne d'être pris en considération, comme réalisant tout ce que l'on a pu jus- qu'ici rencontrer de mieux conditionné. En outre des vulgaires Mouches, le mosquero mexicain se prête aussi à nombre d'autres captures assez volumineuses. Sur des nids qui avaient été placés dans des endroits où les condi- tions étaient particulièrement favorables au pullulement d'une faune des plus désagréables, on a constaté parmi les prises : la 248 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION présence cTOEstres, de Tabanides, de Guêpes, de Moustiques, de Microlépidoptères, etc. Cet Arachnide, vivant dans son pays d'origine sous un climat habituellement tempéré, mais parfois assez froid pour présenter des gelées persistantes pendant plusieurs journées du début de l'année, pourrait bien s'adapter à notre climat européen en ayant soin, dans les régions où l'hiver serait trop rigoureux, de Fig. 4. — Rameaux de Tecoma radicans, à l'extrémité desquels se voient des rendements de nids de Cœnolete gregalis. placer momentanément le nid et l'arbre qui le supporte dans une orangerie ou un endroit où la température ne descende pas trop bas. Comme on l'a vu, la nature de l'arbre à feuillage persistant est indifférente, l'Oranger, le Troëne, le Tecoma ont remplacé le Chêne à feuilles pérennantes dans un endroit où cet arbre, propre aux régions élevées des Cordillères, faisait défaut. C'est vers le mois de juillet que l'on doit faire le prélèvement de fragments de nids destinés à remplir le rôle de mosqueros. A cet effet, on choisit l'extrémité des rameaux qui ont des renflements de toile et on les suspend à l'aide d'une corde au NOUVELLES OBSERVATIONS SUR LE MOSQUERO 249 centre du logement que l'on veut défendre contre l'envahisse- ment des Mouches, une copieuse pulvérisation d'eau est alors donnée à ce bouquet afin d'en prévenir l'abandon par les jeunes. D'après ce qui a été observé sur les nids de Cœnotele déve- loppés à la suite d'un essaimage sur un arbre nouveau, il résulterait que ces derniers ne commencent à être en bonnes conditions pour être détachés qu'après leur deuxième année sous l'abri tutélaire. A cette époque une nouvelle génération est venue compléter le nid et a produit aux extrémités des rameaux, ces pelotonne- ments de toile qui pourront alors fournir le noyau originaire d'un piège à mouches. Les nids destinés à être transportés en Europe doivent être récoltés pendant la période de sécheresse (février à mai), c'est- à-dire à l'époque où les jeunes Araignées étant en hivernalion sont en mesure de supporter sans inconvénient un long voyage. Un nid de Cœnotele emballé dans une caisse fut expédié du Mexique en février 1910, il parvint au Muséum de Paris dans d'excellentes conditions où il fut soumis de la part de M. Semichon à une étude sérieuse exécutée au laboratoire d'anatomie comparée (1). Ce nid, pour lequel on ne connaissait pas encore les précautions à prendre au début, perdit en très peu de temps la majeure partie de sa population qui s'échappa alors au dehors. Le peu qui resta et que l'on parvint à établir sur un Evo- minus continua à se réduire par la mortalité, mais les survi- vants poursuivirent avec acharnement leur travail en commun jusqu'à la fin de la saison. Cette première expérience, quoique exécutée dans de très mauvaises conditions, n'en donna pas moins un résultat concluant et démontra la possibilité, en se conformant aux conditions exigées par la nature, de conserver et de faire prospérer le Cœnotele gregalis sous notre climat. (1) Semichon. Observation sur une Araignée mexicaine transportée en France {Cœnotele gregalis E. S.) Bulletin de lu Société ent ontologique de France, 1910, p. 338. 250 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION BOITE \ RAISIN Par MAURICE LOYER. La préservation du raisin de treille contre les Mouches, les Oiseaux et les Rongeurs est souvent fort difficile. Il y a quelques années, M. Debreuil avait préconisé l'emploi d'une boite cylindrique en toile métallique. Nous donnons, ci-dessous, la description détaillée de cette boîte dont notre collègue se sert depuis près de 20 ans, à son entière satisfaction. Son prix de revient est un peu plus élevé que celui des sacs ordinaires, mais bien plus efficacement que ces derniers, dont les Rongeurs ont vite fait de couper le fil ouïe crin, elle protège les grappes non seulement contre les Mouches et les Oiseaux, mais contre les Rats, Lérots, Mulots, Souris, etc. ; sa durée, en outre, est indéfinie. Elle a, aussi, l'avantage de favoriser la formation de la jolie teinte dorée du Chasselas, si appréciée des gourmets; enfin, elle ne froisse jamais les grains, qu'elle ne touche pas. DÉTAIL. Cette boîte (fig. 1) se compose de deux disques en bois, coupés par le milieu, de deux lattes et d'une toile métallique (toile galvanisée de garde-manger) ; on emploie, en général, du bois mince, d'une épaisseur d'environ 7 millimètres. Construction. — Scier deux disques de 10 centimètres de diamètre; les couper par le milieu (figure 1 = AA'), les aplanir sur une longueur de 25 millimètres en X et Y pour y clouer les lattes B. B' (fig. 2). Ces disques forment le haut et le bas de la boîte. Dans la partie droite de la portion de disque A', ménager à environ 25 millimètres de la latte une encoche F, pour le passage facile de la queue de la grappe. Scier deux lattes en bois de 25 millimètres de largeur sur 25 centimètres de longueur chacune; les clouer à leurs extrémités en X et Y sur les portions des disques. BOITE A RAISIN 251 Rapprocher les lattes B. B' et, partant de l'une d'elles, clouer avec de la semence sur son épaisseur libre, puis autour des disques (haut et bas) une toile métallique G. x t Fig. 1. — Ensemble de la boîte fermée, vue de derrière. Une boîte cylindrinque se trouvera ainsi constituée; la partie de la toile métallique à l'opposé des lattes, formant charnière et les lattes composeront la fermeture (fig. 2). Avant de clouer la latte sur le côté du disque A', partie supé- rieure de la boîte, il est bon de fixer, à quelques centimètres en haut de cette latte (côté intérieur), un fil de fer galvanisé n° 10 252 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION (D, fig. 2) qui se trouvera ainsi serré entre la latte et le disque. Ce fil de fer, long d'environ 30 centimètres, sert à supporter £ w Fig. 2. — Lattes formant fermeture de la boite. Fig. 3. — Boîte ouverte, vue de derrière. la boîte sur la treille, en le fixant soit à un sarment, soit à un fil de palissage. Il ne faut pas, en effet, que la boîte appuie sur la grappe dont la queue doit passer librement dans l'encoche F. La boîte sera fermée par un crochet en fil de fer E fixé par un clou en U et reliant les deux'lattes (fig. 3). CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 253 Cette partie forme le derrière; elle sera tournée vers le mur. Pour aller plus vite, on scie une demi-douzaine de disques et de lattes à la fois. Cette boîte, que l'on peut facilement confectionner soi-même, ne revient pas à plus de 25 centimes. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Le nid du Semotillus bullaris. — La respiration chez les Mollusques la- mellibranches. — Les naissances au parc de Gooilust. — La reproduc- tion de la Mésange à moustaches en captivité. Des observations nouvelles viennent, très fréquemment, augmenter la liste des Poissons qui abritent, dans des sortes de nids, les produits de leur ponte. Dans un récent travail sur la faune ichtyologique de la région du lac Sunapee (New-Hampshire), M. William C. Kendall (i), assistant de zoologie au Bureau fédéral des Pêcheries,' à Washington, mentionne qu'un Cyprinidé, très voisin de la Carpe et de notre Gardon d'Europe, établit des lits de cailloux pour recevoir ses œufs. Il s'agit du Semotillus bullaris Jord. et Gilb., vulgairement désigné aux États-Unis sous le nom de « Chub ». Ce Poisson qui atteint, en moyenne, unelongueurde Om.50, avec un poids de deux à trois livres, a le corps robuste et la tête volumineuse ; la bouche est munie de deux petits barbillons. C'est une espèce vorace, qui vit principalement d'Insectes, de frai et de petits Poissons. Parfois, on trouve des sujets qui sont gorgés de jeunes Brochets de 8 à 10 centimètres de longueur. Les habi- tudes du mâle sont très curieuses à l'époque de la reproduction, où ce Poisson amasse des quantités de cailloux, qu'il transporte dans sa bouche pour constituer son « nid ». Certains de ces cailloux atteignent jusqu'à un quart de livre environ. La quan- tité ainsi amassée représenterait presque le chargement d'une charrette, et elle forme un tas ayant souvent beaucoup plus d'un mètre de diamètre, avec une hauteur de Om.30 dans la partie centrale. Ces nids sont généralement établis dans des (1) W. C. Kendall. Fiskes and Fishing in Sunapee La/ce, Washington. 254 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION endroits peu profonds ; de sorte qu'en été, quand le niveau des rivières vient à baisser, le sommet des tas de cailloux émerge de l'eau, formant autant de petits îlots. Pendant qu'il travaille à son nid, le mâle ne tolère pas d'autres Poissons dans son voisinage. Les renseignements font encore aujourd'hui défaut sur l'époque exacte de la ponte, sur l'abondance des œufs, la durée de leur incubation, etc. * * * Jusqu'à ce jour, on ne possédait, pour ainsi dire, aucune observation sur les échanges respiratoires chez les Mollusques lamellibranches. Un naturaliste des Etats-Unis, M. Philippe H. Mitchell, a récemment entrepris, sur la respiration, chez divers bivalves comestibles, une série de recherches (1) inté- ressant particulièrement l'industrie ostréicole. Il peut arriver parfois, en effet, que des dépôts d'Huîtres soient établis dans des endroits exposés à être salis par des eaux provenant soit d'égouts, soit d'établissements industriels. Or, les matières organiques charriées par ces eaux, brûlant forcément une certaine quantité d'oxygène aux dépens de l'eau qui baigne les Huîtres, on pouvait se demander si la respiration et, par suite, l'état de santé de ces Mollusques ne se trouveraient pas en souffrir. Par des expériences très délicates et dont la technique est passablement compliquée, M. Mitchell s'est donc occupé de déterminer quelle est la quantité d'oxygène que consomme la respiration de l'Huître et celle d'autres Lamellibranches (Myes et Venus) utilisés dans l'alimentation. En opérant sur des centaines d'individus, il a constaté que l'Huître américaine (Ostrea virginica) de taille moyenne ne consommé, suivant la température (de 19 à 28 degrés centigrades) de l'eau qui la baigne, que de 7 à 35 dixièmes de milligramme d'oxygène, par heure et par 100 grammes de son propre poids (coquille non comprise, bien entendu). La consommation se montre d'autant moindre que l'eau est plus fraîche et que le Mollusque est de taille plus forte. L'absorption d'oxygène, qui augmente quand l'Huître tient sa coquille très largement ouverte, devient pres- que nulle quand elle est close. Le Mollusque présente une (1) P. H. Mitchell. The oxygen requiremenls of Lkellfish [Bull, of the- V. S. Bureau of Fisheries, vol. XXXII, p. 207). CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 25-> résistance considérable au manque d'oxygène ; c'est seulement quand l'Huître est tenue pendant plus d'une semaine dans de l'eau contenant à peine d'oxygène que ce séjour peut lui devenir funeste. Ceci montre, dit M. Mitchell, que des circonstances qui amènent une réduction momentanée de la quantité d'oxy- gène en dissolution dans l'eau ne sauraient avoir de consé- quences fâcheuses pour le Mollusque. Chez la Mye des sables (Mya arenaria), sur laquelle l'expéri- mentateur a fait également porter ses investigations, les besoins respiratoires sont plus grands que chez l'Huître, ce qui peut surprendre, étant donné que ce Mollusque se rencontre très souvent sur des fonds vaseux, chargés de matières organiques en putréfaction, qui brûlent beaucoup d'oxygène. La consom- mation est, au contraire, très faible chez la Venus mercenaria et aucune absorption n'a lieu quand ce Mollusque tient sa coquille fermée. * ■» * Notre collègue M. Blaauw nous écrit à la date du 17 juin : « Hier un jeune Bison d'Amérique est né à Gooilust, ce qui porte le chiffre du troupeau à 7 animaux. Il y a deux jeunes Kangurous géants et beaucoup de jeunes Kangurous de Bennet. Les Antilopes oryx du Cap sont en magnifique état. Le temps sec que nous avons depuis beaucoup de semaines leur convient à merveille. « Il y a une dizaine d'années, j'avais un Nandou blanc mâle qui, ayant reproduit avec des femelles grises ordinaires, n'a donné que des produits gris. Une de ses filles, appariée avec un mâle gris, vient de me donner des produits dont deux sont blancs. « J'ai une couvée de cinq jeunes Oies Empereur {Philacte canagica); des Bernaches à tête grise et à tête rousse ; quatre jeunes Cygnes buccinateurs et deux jeunes Cygnes à cou noir. Je crois aussi avoir une couvée de jeunes de mes Perruches à long bec que je rapportai du Chili en 1911 (1), et une couvée de Perruches de Stanley (Icterotis.) Je dis, je crois, car je crains de les déranger en regardant dans la bûche. « Une paire de Canards à bec jaune [A. xanthorhyncha) que (1) Voir Bulletin de la Soc. d'Accl., 1" septembre 1913. 256 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION j'achetai à Port-Elisabeth, Tan passé, a pondu cinq œufs qui sont en incubation sous une poule. Les Anas sponsa n'ont pas pondu. « L'année dernière, par hasard, j'ai élevé quatre métis (2 coqs et 2 poules) de Sonnerat et de Poule domestique. Une de ces Poules métis a niché dans le parc mais les œufs étaient clairs. Il y a quelques années, d'autres métis de même croise- ment n'ont rien donné non plus; je suis donc autorisé à con- clure que les métis de Sonnerat et de Poule domestique ne sont pas fertiles. Les métis de Paon spicifère et nigripenne, au contraire, sont parfaitement fertiles. J'en ai une couvée dans ce moment. « Les Pigeons wonga pondent des œufs mais ne veulent pas nicher. Le mâle roucoule sans discontinuer un chant dont la monotonie est exaspérante. » * * Le Dr Lovell-Keays, le distingué ornithologiste de Park- Lodge, East Hoathley (Angleterre), a réussi à faire reproduire le Panure à Moustaches (Panurus biarmicus). C'est la première fois que cette jolie Mésange se reproduit en captivité ea Angleterre. Le Dr Lovell-Keays a obtenu une nichée de trojs jeunes qui ont été élevés par leurs parents. ERRATUM Page 199, ligne 30, au lieu de : « la même chose peut se dire des Invertébrés », lire : « la même chose peut se dire des autres Inver- tébrés. » Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux imprimeur, 1, rue Cassette. Dixippus morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUGHER. Graines offertes par le Dr G. V. PEREZ. Echium Bourgxanum. — simplex. Juniperus Cedrus. — berniudiana. Statice frutescens. — arborea. — Perezii. Statice brasticxfolia. — brassicxfolia X imbrieata. — Perezii Xinibricala. Convolvuhis floridus. Crotalaria agalifolia. 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Élevage d'amateur primé. Prix de guerre. — Splendide Bouc syrio-alpin, sans cornes, repro- ducteur premier ordre pour améliorer races, vaut 150 fr.; faire offre raisonnable. —Toujours : Chiens : bergers ; bulls français; Chats bleus de Perse, siamois. Lapins argentés. Champagne. — Géants Flandres. (Ecrire.) Quelques sujets disponibles. Race des Gaulois Dorés. La vraie race Nationale • sélectionnée depuis 10 ans à l'Élevage des Cour- bes-Vaux. Race absolument pratique, rustique et décorative : ponte abondante et chair très fine. 10 premiers prix à Paris, 1911, 1912, 1913, 191 i. Œufs à couver, prix réduit pendant la guerre, 5 fr. les 12 franco, au lieu do 6 fr. Encore aussi quelques coqs 1913. Aussi race Gâtinaise blanche type G. C. F., la grande race blanche française: (liifs, 3 fr. 50 la douzaine pendant la guerre. Ph.onix blanc pur : œufs, 5 fr. la douzaine et quelques sujets adultes. S'adresser à M. IBOT, basse-courier do M. de SA INVILLE, aux Courbes -Vaux, par Saint- Germain-des-Prés (Loiret). DEMANDES Bernache de Magellan. M. SELLIER, 59, rue Lo- gendre. Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon état. Professeur DECIIAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ, Sicrre (Suisse). Paierai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans tios Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuel de l'Oiselier (1874, Bordeaux). — Alfred Rousse : Perruches. M. A. DECOUX.Géry. par Aix-sur-Vienne (Haute- Vienne). 3 mâles Diamants psitlaculaires ; mille Astrild à joues noires Veitna Dufresnei); femelle Grena- din : femelle Diamant à gouttelettes ; mâle Mo- deste; mâle Porsonata ; co. Perrucbesà croupion rouge; co. Colombes ts; prix modérés. M- A. DECOUX, Giry,par Aixc-sur-Vienne (Haute- Vienne). (.lnon jeune, de garde. M. G. CONTE, 26, boule- vard' du Collège, Narbonne (Aude). Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d adresser leurs demandes au Secrétariat, 38, rue de Buffon; les cheptels seront consentis après examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et a mesure des disponibilités- SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Le but de îa Société Nationale d'Acclimatation de France est de concourir 1° à l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solennelle, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo- riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeuner amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie ; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men-i suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800 pages illustrées de gravures. Il traité des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. Il donne des renseignements les plus variés sur les animaux et Jet plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle installation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), elc, etc La Société "Nationale d'Acclimatation poursuit, un but entièrement désin- téressé; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce; adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être générjj et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Màhbthbox. Paris. — L. Maretheox, imprimeur, 1, rue Cassette. Indiee décimal 506 531-52 591-52 BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 62' ANNÉE N° 9 - SEPTEMBRE 1915 SOMMAIRE Liste supplémentaire des Membres 257 Actes de la Société - 267 Magaud d'Aubusson. — Au Maroc : Les Oiseaux du Bled . . .' 203 Pierre Amédée-Pichot. — Les Hérons el les Cigognes de Gooïlusl 2T73 Maurice L. de Vilmorin. — Gorydalis chçilanthifolia 277 Extraits de la Correspondance 279 Chronique générale et fais divers 282 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin est interdite. Un numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. il aw ii AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE DACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du 'Jardin des Plantes) , PARIS * A\/IQ IMPODT A MX ^es cartes annuelles d'entrée au Jardin /\V 13 IIYlr V/I\l /Vli * d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets sont délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : 33, rue de Buffon. Pendant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. r r SOCIETE NATIOEALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE fondée le fO Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février (85S 33, RUE DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR I9I5 Président, M. Edmond Perribr, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice- Présidents. t Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Pansf. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes- Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires. < Germain, Paris (Conseil). Grepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Sbbillottb, 11, rue Groix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Gaucurte, Moulin delà Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Myre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Ghappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalme, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. Dr P. Marchal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mait-i.es, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). (Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Ecoles, Paris. Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE .1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures.- Janvier Février Mars Avril Mai Novembre Décembre 14 11 11 22 2"! 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d'Ornithologie [Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi à S heures 18 1 15 15 1 15 15 12 26 * 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les personnes qui désireraient 1 entretenir, qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Bufifon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membies de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du|jour mensuels des séances. LISTE SUPPLEMENTAIRE DES MEMBRES ARRÊTÉE AU 1er AOUT 1915 Carié Mme Paul), 40, boulevard de Courcelles, à Paris (XVIIe), pré- sentée par MM. Perrier, Debreuil et Maurice Loyer. Vernière (Mme Berthe), aviculteur, domaine de Cholles à Saint- Serme (Gironde \ présentée par MM. Debreuil, Perrier et Loyer. MM. Dufresne (Oscar, propriétaire, à Maisonneuve, Montréal (Canada), présenté par MM. Perrier, Crepin et Loyer. Faivre (Pierre), 17, rue du Cygne, à Paris, présenté par MM. Sebil- lotte, Debreuil et Maurice Loyer. Marnier-Lapostolle, propriétaire, villa Africaine, chemin de Fabron, à Nice (Alpes-Maritimes) et 18, avenue de la Bourdonnais, à Paris, présenté par MM. Robertson-Proschowsky, D. Bois et Maurice Loyer. Marret (Charles , 5, boulevard Montmartre, à Paris, et château de Theix, par Saint-Sésier-Champanelle Puy-de-Dôme;, présenté par MM. Hermenier, Debreuil et Perrier. Syndicat général français des industries delà ganterie de peau (Le), 10, rue de Lancry, à Paris, présenté par MM. Crepin, Perrier et Debreuil. ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Au 15 septembre, nous connaissions la mort de cinq de nos collègues, tombés glorieusement pour la défense de la Patrie : MM. Raymond Morgan, Garreta, André Vuiilet, tués au début de la guerre ; Le prince Ernest d'Arenberg, lieutenant d'infanterie, blessé grièvement en septembre 191i, décédé des suites de ses bles- sures; M. Henri Delacour, fils de notre collègue, Mme Th. Delacour, et frère de M. Jean Delacour, secrétaire de la section d'Ornitho- logie, soldat au 72e régiment d'infanterie, tué aux Eparges, le 20 avril 1915, à l'âge de trente-quatre ans. A cette liste, nous devons ajouter : M. André Marcual, iils de notre collègue, M. le professeur Marchai, soldat au 51° régiment d'infanterie, tué à l'ennemi au bois de Villers-la-Loue, près de Virton, le 2-2 août 1914, à l'âge de vingt et un ans. BULL. SOC NAT. AC3L. l'K. 1915. — 17 258 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION M. Vaillant, fils de notre collègue, M. le professeur Vaillant; M. René Costantin, fils de notre collègue, M. le professeur Costautin. Ancien élève de l'École Normale supérieure, agrégé des sciences physiques, soldat au 45e régiment d'infanterie, René Costantin est tombé au combat de Marne tz (Somme), le 18 décembre 1914, à l'âge de vingt-quatre ans. M. Hua, fils de notre collègue, M. Hua, membre du Conseil; M. Achalme, fils de notre collègue, M.'lè Dr Achalme, membre du Conseil; M. Jean d'Hébrard de Saint-Sulpice, fils de notre collègue, M. d'Hébrard de Saint-Sulpice; M. .1. d'Hébrard de Saint-Sul- pice, sous-lieutenant au 53e bataillon de chasseurs alpins, avait vingt ans ; il commandait les éclaireurs du bataillon et a été cité à l'ordre de l'armée avec la mention suivante : « Le 18 juin, a entraîné d'un élan magnifique sa section à l'assaut d'une position fortement organisée ; mortellement frappé, a donné à ceux qui l'entouraient un exemple sublime de courage, de résignation et de confiance. » Le 8 juillet, son capitaine écrivait à M. d'Hébrard de Saint- Sulpice : « Monsieur, « Je m'empresse de vous confirmer les détails au sujet de la fin glorieuse de votre cher enfant. « Le 18 juin, vers 8 heures du matin, après être parti bravement à l'assaut en tête de la T section de la 8e compagnie, votre fils, qui faisait l'admiration de ses camarades et de ses hommes par son calme et son mépris du danger, élait frappé d'une balle à l'épaule. Il voulut aussitôt se mettre à l'abri dans une excavation produite par un obus, mais avant d'avoir pu se dissimuler complètement, une autre balle l'atteignit à la hanche. Son transport vers l'arrière était impos- sible par suite du feu violent qui interdisait à nos hommes le moindre mouvement. Il fut entouré et soigné par de braves et dévoués chasseurs, auxquels il continua à montrer le calme et le mépris de la souffrance, dignes du héros qu'il était. Il ne proféra aucune plainte jusqu'au moment où il entra dans le coma, vers 14 h. 50 ; à 15 heures il avait cessé de vivre. « Son corps fut rapporté dans la nuit près de l'emplacement où il devait être inhumé. La cérémonie eut lieu cà 17 heures, notre sergent-brancardier récita les dernières prières sur ses restes et sur eux des braves camarades tombés avec lui. Il ne m'a pas été pos- sible de faire confectionner les cercueils nécessaires, chose que ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 259 nous faisons toujours lorsque les circonstances et les moyens matériels nous le permettent. Une croix a été placée sur sa tombe, soigneusement entretenue comme celles de ses camarades. « Permettez-moi, Monsieur, de m'incliner respectueusement, devant la douleur immense d'un père et d'une mère, auxquels la Patrie et le Devoir ont ravi ce qu'ils avaient de plus cher. Combien de fois, hélas! depuis onze mois, ai-je eu la triste mission de présider à de douloureuses cérémonies ; combien de fois mon devoir de chef m'a-t-il obligé de refouler les sanglots causés par la perte d'excellents camarades. « Je suis ému profondément à la pensée que vous avez donné à la France votre fils unique. Il ne peut y avoir pour vous qu'un seul motif d'adoucissement à votre peine : c'est de savoir que le sous- lieutenant d'Hébrard de Saint-Sulpice s'est comporté devant le devoir et devant la mort comme le plus accompli des héros, et s'est montré jusqu'au bout digne des parents qui l'ont formé. « Capitaine C... ». Le 12 juillet, son commandant ajoutait : « Monsieur, « Je n'ai aucun détail sur la mort de votre fils, le sous-lieutenant d'Hébrard de Saint-Sulpice. « Le capitaine C... du 53e me l'avait présenté comme le type accompli de l'officier sans peur et sans reproche. « Nul doute qu'il ne soit tombé en vaillant soldat, le sourire aux lèvres, tel que je l'avais vu le 27 mai. « Il était chargé de commander les éclaireurs du bataillon, c'est- à-dire les meilleurs d'entre les meilleurs, et il avait acquis sur cette élite un remarquable ascendant. « Je vois très bien d'ici l'endroit où il a été frappé, au lieu dit les Epauletles, et j'ai pu suivre le 18 juin l'action du 53e sur cette posi- tion, mais combien j'étais loin de penser que votre fils avait payé de son sang le beau succès de son bataillon ! « Veuillez, Monsieur, agréer l'expression de mes sentiments les plus distingués et l'assurance de ma bien vive et bien douloureuse sympathie. < Le commandant d'A... « Je m'empresserai de vous adresser tous les détails que me don- nera le capitaine C...; je lui demanderai également de me faire con- naître si votre fils a été proposé pour une citation. Votre douleur est, hélas! aussi la nôtre, et c'est par le deuil et l'affliction que nous payons toujours nos plus beaux succès. » 260 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION + Nous avons, en outre, été informés que notre collègue M. Lucien Sedillqn, lieutenant au 31e d'infanterie, avait été blessé et fait prisonnier. Sont également prisonniers : notre collègue, M. Henry Chau- vaux; le deuxième fils de notre collègue, M. Hua et un fils de notre collègue, M. A. Cordonnier. C'est avec fierté que nous avons lu la citation suivante, méritée par notre collègue, M. René Quinton : Citation a l'ordre de l'armée. « Quinton (René), capitaine au 29e d'art., officier de la plus rare intrépidité, dont il est impossible de résumer les actes de bravoure. Ne cesse de donner le plus bel exemple de sang-froid, d'énergie et d'entrain. A été blessé à trois reprises différentes dont une fois assez sérieusement. « Chevalier de l'Ordre de Léopold, pour le courage et le dévoue- ment dont il a fait preuve en sauvant des archives et des objets de valeur à Ypres et à Nieupcrt. » Médaille de vermeil des épidémies. Nous apprenons également que le ministre de la Guerre vient de décernera notre collègue, le Dr Loisel, médecin-major de -2e classe, chargé du secteur de Belgrade (Serbie), la médaille d'honneur des Épidémies, pour sa belle conduite au cours de l'épidémie de typhus exanthématique qui a sévi, celte année, en Serbie. Honneur à tous ces b aves dont les noms resteront à jamais inscrits dans nos Annale^ ! Des omissions, hélas ! peuvent exister dans la liste ci-dessus ; nous voudrions, également, pouvoir donner plus de délails sur la fin glorieuse ou la bravoure de nos collègues, et des fils de ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION ' C2(U nos collègues, aussi nous prions instamment à nouveau les familles de nos membres, leurs parents, leurs amis de nous adresser tous les renseignements pouvant nous aider dans notre pieux devoir de reconnaissance. Notre collègue, M. le professeur E. Bugnion, de l'Université de Lausanne, nous écrit qu'il est de cœur avec la France et qu'il souhaite ardemment la victoire des Alliés. « C'est, dit-il, dans les circonstances actuelles, un état très pénible que d'être neutre », et il termine par : « Vive la France, et bon espoir! » Notre président, M. Ed. Perrier, ayant félicité, au nom de la Société d'Acclimatation, l'ambassadeur de la Grande-Bretagne à Paris, qui venait d'être créé pair d'Angleterre avec le titre de baron, sir Francis Bertie, en ami de notre Société, a répondu parla lettre autographe suivante : « Monsieur le Président, « J'ai été très touché par la manifestation de sympathie que la Société nationale d'Acclimatation a bien voulu, par voire entremise, me faire parvenir et je vous prie d'être auprès d'Elle l'interprète de mes sentiments de vive reconnaissance. « J'ai gardé un souvenir fort agréable de la conférence organisée parla Société à laquelle j'ai eu le plaisir d'assister. « En vous remerciant personnellement des aimables paroles par lesquelles vous avez bien voulu me transmettre la communication de votre Société, je vous prie, Monsieur le Président, d'agréer ^expression de mes sentiments les plus distingués. « Francis Bertie. » C'est avec juste raison que nous avons applaudi à la distinc- tion conférée par S. M. Georges V à son représentant en France. Cette haute dignité est la récompense des services que rémi- nent diplomate a rendus à son pays au cours de sa longue et brillante carrière, pendant laquelle il a été un des principaux artisans de l'alliance dont nous recueillons, aujourd'hui, les fruits. Sir Francis Bertie a pris le titre de baron Bertie de Thame. 262 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION BIBLIOTHEQUE Nous sommes heureux de porter à la connaissance des membres de la Société que la Bibliothèque vient d'être entière- ment réorganisée. Dès le début de la guerre, le bibliothécaire, M. Caucurte, fut mobilisé pour le dressage des Chiens destinés aux ambulances et à l'armée; le soin de cette réorganisation fut confié à M. Vautier, de la Bibliothèque du Muséum. Grâce à son zèle, ce travail fort long et souvent délicat a été mené à bien et le classement des fiches, au nombre de plus de 5.000, par ordre de matières, est aujourd'hui terminé. Des dons récents, dont les plus importants ont été faits par Mme la baronne de Guerne et M. Ch. Rivière, sont venus augmenter nos collections. Nos collègues trouveront à la Bibliothèque tous les rensei- gnements de nature à faciliter leurs recherches et leurs études, car, en dehors de la collection du Bulletin, véritable encyclo- pédie des Sciences Naturelles appliquées, nous possédons désormais une importante collection de livres, tirés à part, documents, etc., se rapportant à la Mammalogie, l'Ornithologie, l'Entomologie, l'Aquiculture, la Botanique, la Colonisation, l'Elevage, la Culture, etc., etc. Les lecteurs y pourront consulter aussi les nombreux périodiques français et étrangers qui sont régulièrement adressés à la Société. Enfin, la Table générale du Bulletin, de 185Ï à 1915, viendra heureusement faciliter les recherches des auteurs ; cette table, rédigée par les soins de notre agent, M. Ch. Ballereau, sera publiée dès que les événements le permettront. Nous recevons avec reconnaissance tous les dons de livres et nous rappelons aux auteurs et éditeurs, que le Bulletin donnera une analyse des ouvrages se rapportant à nos travaux, dont deux exemplaires auront été adressés au secrétariat. Le secrétaire général, M. Loyer, AU MAROC LES OISEAUX DU BLED Par MAGAUD D'AUBUSSON. AVERTISSEMENT On se tromperait si l'on cherchait dans ces notes rapides, prises au jour le jour, en courant dans le Bled marocain, autre chose qu'une physionomie imparfaite de la faune ornitliolo- gique d'une région relativement très limitée, durant les deux mois les plus chauds de Tannée : juillet et août. On s'étonnera sans doute de ne pas voir mentionnées des espèces que l'on sait être assez communément répandues au Maroc. J'ai cru ne devoir citer que celles que j'ai eu l'occasion de rencontrer au cours de mes excursions clans la Chaouia et plus au sud jusqu'à Marrakech. Ce n'est donc point ici une vue d'ensemble — encore moins un catalogue — de l'avifaune de ce vaste pays. Les Oiseaux du Maroc offrent peu de types caractéristiques. Us appartiennent en effet à la sous-région méditerranéenne de la région paléarctique qui comprend, avec l'Europe et le nord de l'Asie, le nord de l'Afrique jusqu'au Sahara inclusivement. Presque tous les Oiseaux sédentaires qu'on y trouve, on les a vus déjà en France. A peine vient-il s'y mêler quelques espèces nettement africaines. Il en est de même pour les Oiseaux migrateurs qui visitent, deux fois l'an, ces contrées. Les uns, Echassiers et Palmipèdes surtout, hivernent dans le pays, d'autres poussent plus loin dans le Sud, mais tous repartent au printemps pour aller nicher en Europe. En été, la population ornithologique qui anime le Bled est donc beaucoup moins nombreuse. L'ornithologie du Maroc n'a pas encore été étudiée d'une manière spéciale et méthodique. Quand on la connaîtra mieux, on constatera, je pense, en ce qui concerne les formes simi- laires qui vivent en Europe et représentent l'espèce vraie, « la bonne espèce », des variations dérivant du climat et des con- ditions de vie qui pourront donner lieu à rétablissement de sous-espèces, races locales ou variétés géographiques comme on disait autrefois, différant du type spécifique sous le rapport 264 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION de la taille, du plumage et des proportions. C'est ce que des observations trop superficielles m'ont permis d'entrevoir. Sur une côte basse une ville toute blanche: Casablanca, en arabe Dar-el-Beida. Le bateau mouille en rade, et on débarque dans des « bar- casses » aux rameurs à demi vêtus de haillons éclatants et sordides. On entre dans la ville, ceinturée de murailles, parla porte de la Marine que forcèrent glorieusement l'enseigne Ballande et ses marins aux premiers jours de la conquête. La vieille ville! sur laquelle tourbillonnent dans le ciel des bandes désordonnées et bruyantes de Martinets, avec les Hirondelles rustiques et les Moineaux francs, les premiers Oiseaux qui nous accueillent sur la terre marocaine. Au-dessus des eaux tranquilles de la cale de débarquement et loin au large, on ne voit voler en cette saison (29 juin) ni Goélands, ni Mouettes. Nous pénétrons dans le dédale des rues étroites de la cité arabe avec ses maisons à terrasse et ses portes ogivales entourées d'ornements en festons. Dans les principales artères, plus larges, s'ouvrent des comptoirs, des magasins et des cafés. Des ruelles tortueuses conduisent aux souks, succession de petites niches où des marchands accroupis, en apparence insouciants des acheteurs, étalent des étoffes, des cuirs, des tapis, des sparteries peinturlurées, fouillis multicolores devant lesquels s'immobilisent la blancheur des burnous, les couleurs vives des djellabas, et grouille perpétuellement une foule pauvre, drapée de laine grise. Puis, quand on a franchi Bab-es-Souk, surgit la ville nou- velle, la ville européenne qui grandit de mois en mois. Ville commerçante et militaire, animée dune vie intense, où se croisent les automobiles et les voitures à chevaux, les camions chargés de marchandises, les Chameaux et les Mules, les petits Anes robustes portant des paysans du Bled, secs et bruns, assis entre deux paniers, où se hâtent des colons affairés, des soldats de toutes armes, où circulent silencieusement des Marocains au visage fermé, indifférents à toute cette agitation, AU MAROC : LES OISEAUX DU BLED 265 où passent des juifs en longue robe et en calotte noires cou- rant à des trafics ignorés. Au delà commence le Bled. Le Bled, c'est la campagne maro- caine qui varie d'aspect suivant les régions et les saisons, plate, vallonnée, pierreuse, ravinée, humide et même maréca- geuse par endroits, aride ou fertile. Parfois un horizon de montagnes. En la saison estivale, le Bled est à peu près par- tout jaune et grillé, mais, quand les pluies l'ont revivifié, il revêt un manteau de verdure émaillé de fleurs. Tout pousse alors avec une vigueur et une rapidité étonnantes. Les rayons adoucis du soleil printanier lui apportent une vie nouvelle. Au mois de juillet, au contraire, tout est sec, brûlé et mort. On n'a plus que le vert sans grâce des Palmiers nains, dont les feuilles rigides se dressent entre les herbes rousses, ou le bleu pâle et cendré des Aloès (Agave americana). Les fleurs du Bled, doucement odorantes, ont un charme incomparable : grandes Mauves roses, Iris violets, Marguerites blanches et jaunes, petites rosaces d'or des Soucis, Liserons bleus et roses, quenouilles blanches des Asphodèles, et çà et là de grands Glaïeuls rouges. Aussi loin que s'étend la vue, elle ne rencontre que des tapis de fleurs diaprant de leur frais coloris le vert éclatant de l'immense prairie. Sur les collines, des Lavandes aux tons violets, dans les oueds des Lauriers- roses. Près des petits ruisseaux clairs, des Myosotis, des Ané- mones, des Narcisses. J'ai vu dans le Bled des régions cultivées qui rappellent les plaines de la Beauce, des gorges boisées, comme dans l'Oued- Ghérat, où on aurait pu se croire dans quelque pittoresque vallée des montagnes de France, et surtout un pays inculte, laissé à l'état primitif, dont l'horizon s'élargit démesurément, où le désert le prolonge à l'infini, sans presque jamais un arbre, ni même une broussaille, et durant des lieues et des lieues sans un vestige humain. Aucune route, seulement des pistes tracées par le passage des caravanes. De loin en loin, des douars aux tentes mobiles. Les Oiseaux qui caractérisent ces vastes solitudes appar- tiennent presque tous à l'ordre des Coureurs, car les animaux d'un pays s'adaptent à sa configuration géographique et à la nature de son sol. Tels ici la Grande Outarde, la Canepetière, l'OEdicnème, le Courvite, les Glaréoles, puis un Gallinacé I>66 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION aberrant, le Ganga, l'Oiseau le plus caractéristique peut-être des steppes, et dans les parties voisines des oueds et des cul- tures, des Perdrix gambras. Quelques Passereaux humicoles enrichissent cette faune ornithologique spéciale, à laquelle il faut ajouter les Cigognes fort nombreuses dans les Bleds coupés de « daias » humides, et qui viennent nicher sur les monuments des villes, les mosquées, les tours et les mara- bouts. Les indigènes les entourent d'une sorte de respect reli- gieux, jamais ils ne les inquiètent. Familières et confiantes, elles bâtissent même leurs nids sur les toits des gourbis en terre séchée, bas et recouverts de roseaux. La Grande Outarde ou Outarde barbue (Otis tarda Linn.) n'est pas commune au Maroc. Elle se montre, d'ailleurs, peu en été. On la voit plus souvent en automne et en hiver. Cependant j'ai trouvé une femelle le 18 juillet dans la plaine de Ben- Guerir en allant à Marrakech. Mais, m'a-t-on dit, le cas est presque exceptionnel. Tous les témoignages s'accordent pour affirmer que cet Oiseau disparaît, au printemps, de la région dont il est ici question pour revenir, après la période de repro- duction, vers la fin de Pété, et toujours en petit nombre. Je n'ai pas rencontré dans la partie du pays que j'ai visitée la Houbara ondulée {Hovbara undulaia G. R. Gray), dont Paire de dispersion s'étend aux régions du sud de la Méditerranée, depuis l'Arabie jusqu'aux îles Canaries. Elle existe cependant au Maroc, comme en Algérie et en Tunisie. La Canepetière champêtre (Tetrax campestris Leach) est très répandue dans le Bled, ou au moins dans certaines parties du Bled. Pendant mon séjour à la ferme de Bsibça, sur le terri- toire des Beni-Oura, j'en ai vu une grande quantité. On en fai- sait lever tout près de la ferme, au milieu de longues herbes parsemées de Chardons et d'Artichauts sauvages. Le 13 juillet, j'ai trouvé dans une « daia » un nid de cet Oiseau. Les œufs reposaient dans une petite dépression du sol. Il y en avait trois et, à côté, les débris d'un quatrième. Ce nid avait dû être aban- donné. Je cassai un œuf, le blanc et le jaune étaient coagulés, comme si le tout avait été cuit par le soleil. La saison, d'ail- leurs, était avancée, on rencontrait des jeunes à la suite de leurs parents et d'autres déjà forts. Je fis lever, le même jour, dans une vaste étendue d'herbes sèches, neuf individus qui montèrent ensemble à l'essor avec des battements d'ailes rapides et bruyants. Ils volaient en ligne droite et à une U MAROC : LES OISEAUX DL* BLEÎ) 26' médiocre hauteur. Un peu plus loin des Oiseaux isolés prirent aussi leur vol, mais généralement la Ganepetière, quand elle est surprise, cherche à se cacher en se tapissant contre la terre. L'estomac des sujets que nous avons tués contenait très peu de matières végétales, il était empli d'Insectes et de larves indéterminées, de Coléoptères et de Sauterelles. Les jeunes ne mangent que des Insectes. Nous étions partis de Casablanca le 11, nous dirigeant sur Camp-Boulhaut et Bsibça qui en est à 12 kilomètres. La route jusqu'à Fedhala traverse un pays en partie cultivé où l'on ren- contre des fermes et des douais. À partir du pont Blondin, jeté sur l'oued Nefifikr, elle parcourt un bled semé de touffes de Lentisques, ici basses et peu rapprochées, ailleurs plus pressées et plus hautes, où se mêlent des Palmiers nains, par- fois coupé de cultures, car les colons ont commencé à défricher ce plateau légèrement vallonné, puis animé de douars avec des troupeaux de Moutons et de Chèvres, des Bêtes à cornes et des Chameaux. Devant nous courent des Cochevis (Galerida cristata Boie), des Chardonnerets [Cardiielis elegans Steph.) s'envolent d'un champ de Maïs, des Tariers (Pratincola rubetra Koch) se perchent sur les buissons, et dans un endroit où les Lentisques de plus haute taille forment comme un bois, des Pies-grièches méridionales [Lanius meridionalis Temm.) se tiennent à la cime des branches. Sur le cadavre à demi putréfié d'un jeune Cha- meau, deux Cathartes (Neophron percnopierus Savig.) nous regardent passer. La vue et le ronflement de l'automobile n'ont pas l'air de les émouvoir. Près de Camp-Boulhaut nous faisons partir des Glaréoles ( Glareola pratincola Leach) qui circulaient sur la route. On sait que ces curieux Echassiers, qui rappellent par leurs formes, la souplesse de leur vol et leur manière de chasser les Insectes, les Hirondelles, si bien que dans quelques pays on les nomme vulgairement Hirondelles de marais — il est vrai qu'on les appelle ailleurs Perdrix de mer et Poule des sables — fré- quentent les plaines arides et sablonneuses. Ils se plaisent aussi au voisinage de l'eau, qu'elle soit douce ou salée et aiment à nicher au bord des lacs et des marécages. J'ai ren- contré ces Oiseaux, au Maroc, dans les endroits les plus divers, sur le rivage de la mer et dans le steppe, et même près des 208 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION lieux habités, car un soir, à Fedhala, une quinzaine de Glaréoles volaient au crépuscule, en poursuivant des Insectes, devant la maison. On entendait le bruit sec des mandibules lorsqu'elles se refermaient sur une bestiole happée le bec ouvert comme l'Engoulevent. Leur vol avait de gracieux détours et des cro- chets brusques. Celles que je voyais courir devant moi sur la piste de Camp-Boulhautle faisaient avec rapidité, par saccades et en hochant la queue. Camp-Boulhaut forme un site pittoresque avec ses maisons blanches logées dans les brèches d'une roche grise. En le quit- tant, nous arrivons à la lisière d'un bois de Chênes-liège tout bruissant de Cigales où une fâcheuse panne nous retient une demi-heure. Nous sommes à l'extrémité d'une forêt importante qui se relie' aux collines boisées du pays des Zaers. Notre pneumatique remplacé, nous continuons dans le steppe, sans même trace de piste, nous confiant à de vagues renseigne- ments d'indigènes. A chaque instant, nous rencontrons des Cigognes, et un peu avant d'arriver à Bsibça, nous assistons à une magnifique envolée de quinze Oiseaux dans la lumière dorée du soleil déclinant. Nous apercevons enfin les toits bas de la ferme. Nous y sommes accueillis avec une touchante cordialité parles deux Français qui l'ont créée (1), il y a à peine deux ans, et dont l'intelligent effort a obtenu déjà de très heureux résul- tats. Le lendemain, nous montons à cheval à 6 heures du malin pour aller chasser la Perdrix gambra (Perdix petrosa Lalh.) sur les bords de l'oued Aïn-Safrou. En sortant de la cour de la ferme, dans un champ de Maïs qui lui est attenant, nous faisons partir une multitude de Tourterelles {Turlur auritus Ray); dans de longues herbes desséchées, des Canepetières, quelques Glaréoles et derrière un monticule, près d'un puits où un berger fait boire ses Moutons, des Cailles. On trouve, au Maroc, des Cailles toute l'année. Les troupes émigrantes qui, à des époques déterminées, passent d'Europe en Afrique et réciproquement, laissent derrière elles un certain nombre de ces Oiseaux. Ces Cailles s'accouplent au printemps et nichent soit dans les touffes de Palmiers nains, soit dans les Orges lorsqu'elles ont monté. J'ai vu, chez mon hôte, de (1) MM. Faye et Alphand. AU MAROC : LES OISEAIX DU BLED 269 jeunes Oiseaux capturés au moment de la moisson (1). Des Cailles s'installent donc dans le Bled, modifient leurs mœurs et deviennent sédentaires, car on les voit en toute saison. Le fait est déjà assez remarquable. Des recherches précises mon- treraient sans doute que des particularités de taille et de plu- mage résultent de cette accomodation à un nouveau milieu. Nous tuâmes des Perdrix sur les revers de l'oued, la plupart de jeunes pouillards que marquait seulement de quelques plumes d'un roux foncé, semées de points blancs, le large col- lier qui occupe le bas du cou chez les adultes, et nous vîmes plusieurs Lièvres. Les Perdrix gambras se tiennent de préfé- rence sur les plateaux et les pentes qui avoisinent les oueds, où elles trouvent de l'eau, et aux environs des champs de Céréales qui leur fournissent du grain. Cependant, on trouve aussi des Gambras dans des endroits absolument privés d'eau une parlie de l'année et dans des plaines complètement incultes. On a donné à ces Oiseaux le nom de Perdrix de roche, je ne sais jusqu'à quel point il est justifié, car, au Maroc, je n'en ai vu que dans les plaines et sur les collines et quelquefois dans les bas-fonds. Les Gambras vivent en société, après la saison des amours, mais ces compagnies ne paraissent pas offrir entre leurs membres une union aussi intime que celle qui rapproche les Perdrix grises ou rouges. Quand on les chasse, elles partent rarement en troupe, chacune s'envole de son côté. Lorsque la compagnie est dispersée, les individus qui la composent ne mettent pas beaucoup d'empressement à se réunir de nouveau, 'car de longtemps on ne les entend réclamer, comme font, dans le même cas, nos Perdrix, qui poussent presque aussitôt leur cri de rappel et qu'on peut voir accourir les unes vers les autres. Cette partie du Bled est assez bien cultivée. Les indigènes y ont des champs de Maïs, de Blé, d'Orge, et des jardins dont ils prennent grand soin. Il y a des marchés importants, comme celui de Camp-Boulhaut, qui se tiennent aux environs. (1) Lorsque je voyageais en Egypte, on m'avait affirmé que des Cailles, arrêtées dans leur migration, niellaient. J'en doutais beaucoup, et je me suis expliqué ailleurs à ce sujet. Ici le doute n'est point permis. M. Trilles de Warren m'écrit de Casablauca (21 avril 1915) : « Nous avons levé le 19 avril, à 30 kilomètres de Casablanca, i petits Cailieteaux dont nous avons trouvé le nid. Ils etaieut gros con me des Moineaux et volaient à peine. » 270 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION Nous voyons des Chevêches perchées sur les hampes des Aloès, d'autres sur des pierres. Ce petit Rapace nocturne, qui pourtant ne redoute pas l'éclat de la lumière, paraît ici très répandu. C'est une variété de la Chevêche commune [Nociua inor Briss.), la Chevêche de Perse (N oc tua persica Yieill.), si commune en Egypte. Elle vit par paires et se montre en plein jour. Au fond de l'oued, un Laurier rose en fleurs est couvert de Chardonnerets. En hiver, dans les « daias », dépressions du sol où l'eau des pluies s'accumule, on trouve une grande variété de Sauvagine. En cette saison, la plupart de ces daias sont complètement à sec. Les aspects du Bled offrent parfois, comme je l'ai dit, de très vifs contrastes. Je n'en ai eu nulle part une impression plus pénétrante que dans l'Oued-Chérat, à quelques kilomètres de Bsibça. On passe presque sans transition d'un territoire sec et inculte, à peine marqué de quelques bouquets d'Aloès, à la verdure fraîche de gorges boisées. Une cascade dont l'eau claire tombe d'une hauteur de i3 mètres ajoute à la beauté et à la physionomie européenne du paysage. Les pentes raides sont chargées de Chênes-liège et d'Ar'ar (Juniperus phœnicea), le fond de l'oued, arrosé par un ruisseau murmurant, est tapissé d'herbe, et un petit bois de Figuiers, peuplé de Merles, en annonce l'en.trée. Des Tourterelles traversaient l'air d'un vol rapide et de petits Passereaux, semblables à ceux de chez nous, égayaient de leur doux ramage ces sites pittoresques. D'épais fourrés de Lentisques recèlent les bauges des Sangliers qui parcourent les ravins les plus sauvages. Ces animaux' vivent là en grand nombre et ravagent la nuit les pauvres cultures d'un douar dont les tentes se dressent à l'orée de la forêt. Nous décidâmes de venir le lendemain nous mettre à l'affût de ces voisins incommodes. Nos hôtes de Bsibça nous four- nirent tout un matériel de campement, transporté à dos de Mulets, et nous nous établîmes sur le plateau à proximité du douar. A la nuit tombante, sous la direction de chasseurs indi- gènes, nous descendîmes dans la gorge et prîmes les postes qui nous furent assignés. C'est ordinairement un peu après la nuit close que les Sangliers commencent à sortir de leurs retraites et se mettent en route. La nuit était claire et un grand silence planait sur la contrée. Les Chiens du douar eux-mêmes se taisaient. L'oreille et l'œil aux aguets, chacun de nous exer- AU MAKOC : LES OISEAUX DU BLED 271 çait autour desoi une surveillance attentive. De l'endroit que j'occupais, j'entendis tout à coup un bruit de branches frois- sées et un grognement. Le Marocain qui m'accompagnait me pressa le coude. Je m'attendais à voir sortir la bête et je tenais mon fusil préparé. Quelques secondes d'attente, rien, tout retomba dans un absolu silence. Nous avions été éventés, l'affût était manqué, les Sangliers méfiants ne se montre- raient plus. La nuit d'ailleurs s'obscurcissait, nous n'avions qu'à rentrer au douar et regagner nos tentes. Nos hommes passèrent une partie de la nuit à boire du thé à la menthe, laissant couler les heures, comme font les Arabes, en d'inter- minables conversations. Au lever du soleil, nous suivîmes un des bords de l'oued à la recherche des Perdrix gambras. Une brume légère, estompait les sommets et en adoucissait les contours. Les Merles chan- taient (1), les Tourterelles roucoulaient, des Chardonnerets passaient au vol en poussant leur petit cri si caractéristique. On se serait cru dans un pays de France. En retournant à la ferme j'observai un couple de Corbeaux (Corvus corax Linn.) (2), et je comptai une trentaine de Cigognes dans une « daia » encore un peu humide. Elles montèrent à l'essor toutes ensemble et se mirent à tourner en planant avant de s'abattre de nouveau. Le jour suivant nous rentrâmes à Casablanca. Aux environs de la ville les cultures alternent avec un Bled sec et pierreux. La moisson est terminée et les champs se con- fondent maintenant avec les terrains arides. Quelques points, cependant, de végétation verdoyante, comme au marais de la Nive, interrompent cette monotonie attristante. Ce marais situé au pied dune colline rocheuse, à peu de distance de la mer, .est un fourré presque impénétrable de roseaux, au milieu desquels vit une population d'Oiseaux aquatiques. On y entend continuellement crier les Foulques; des Canards sauvages s'envolent, font des randonnées dans l'air et viennent retomber à l'endroit d'où ils étaient partis. En hiver, une grande quan- tité de Palmipèdes et d Échassiers cherchent un refuge sous (1) Turdus merula Linn. — Plusieurs colons m'ont dit avoir remarqué que les oiseaux sonl plus silencieux au Maroc qu'en France, ils chantent moins fréquemment et un peu différemment que leurs représentants européens. On cite le Merle noir comme faisant peu entendre sa voix. 2 Corvus cotax tingitanus Irby .' 272 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE ^ACCLIMATATION ces abris touffus. En cette saison on n'y trouve que des Foulques (Fulica atra Linn.), des Poules d'eau (Gallinula chlo- ropus Lath.) et des Canards (Anas boschas Linn.) qui s'y repro- duisent. On y voit aussi des Rousserolles {Calamoherpe tur- doides Boie), et sur les bords des Cisticoles (Cisticola schœni- cola Bp.), des Hippolaïs i ' H ip palais polyglotta Vieill.), des Hochequeues grises [Motacilla alba Linn.) et des Bergeronnettes printanières (Budyles flâna Bp.). Une bande d'Étourneaux (Sturnus vulgaris Linn.) passe en tourbillon de la colline aux dunes qui ourlent la plage maritime, retourne à la colline et couvre d'Oiseaux gazouillants les têtes de trois Figuiers. Des Buzards harpayes (Circus aeruginosus Savig.) rasent d'un vol lent les pointes des Roseaux ou tournent en l'air en cercles élargis. Tout le long du jour des Busards rôdent ainsi au- dessus de la Nive. Au nord de Casablanca, à une douzaine de kilomètres, s'étendent les bas-fonds de Zenata, vastes marécages de Joncs et de Roseaux, en partie à sec durant l'été, emplis d'eau en hiver, et offrant alors un refuge à toutes sortes de sauvagine. Je n'y ai vu que des Cochevis, courant sur la piste et sur les bords desséchés, des Tariers, des Chardonnerets, sur une ondulation du sol fendillé de sécheresse un couple de Cor- beaux et en l'air une Cresserelle (Falco tinnunculus Linn). Les Gangas étaient naguère communs dans le Bled de Casa- blanca. On en trouvait presque aux portes de la ville, mais depuis qu'on a pris possession de ces terrains pour les exploiter, ces Oiseaux ont disparu. Ils sont refoulés peu à peu dans les parties désertes et, au fur et à mesure que le Bled sera défriché, disparaîtront. Partout les progrès de l'agriculture appauvrissent de certaines espèces la faune ornithologique d'un pays. Par contre, il est possible qu'un nouvel aménage- ment du sol et surtout la plantation d'arbres dans des régions qui en sont actuellement dépourvues puissent retenir et multi- plier les espèces arboricoles. Le jour même de mon arrivée, je vis quelques Martinets à croupion blanc (Cypselus cafer Licht.), espèce, africaine que je devais retrouver plus tard à Marrakech. Ce Martinet est par- ticulièrement propre à l'Afrique orientale et méridionale, et je ne croyais pas qu'il remontât jusqu'à la latitude de Casablanca. 11 y est du reste peu nombreux. L'espèce commune d'Europe niche par centaines dans les LES HERONS ET LES CIGOGNES DE GOOÏLUST 273 trous des murailles qui enferment la vieille cité. Le soir leurs troupes agiles se livrent à des courses effrénées dans l'air en poussant des cris stridents. Parfois une Cresserelle logée dans la Tour de Bab-es-Souk croise leur vol rapide et bruyant. Aux abords de la ville, planent quelques Milans noirs (Milvus nigef Briss. ) si répandus ailleurs au Maroc. D'innombrables Hirondelles rustiques (Hirundo rustica Linn.) rasent les mai- sons, et dans les méandres de leur vol souple et bas frôlent presque de leur aile les sayons de laine brune des paysans du Bled ou les outres poilues des marchands d'eau. Je n'ai ren- contré nulle part, en cette saison, des Chélidons de fenêtre [Chelidon urbica Boie). (A suivre.) LES HÉRONS ET LES CIGOGNES DE GOOÏLUST Par PIERRE AMÉDÉE-PICHOT. Les Hérons gris qui reviennent tous les ans nicher sur les grands Hêtres du parc de Gooïlust ne sont pas les hôtes les moins intéressants de la résidence où notre collègue, M. Blaauw, a réuni une si belle collection de Mammifères et d'Oiseaux exotiques. La héronnière de Gooïlust avait été autrefois très florissante, mais le prédécesseur de M. Blaauw, qu'importunait le vacarme que les Echassiers faisaient autour de sa demeure pendant la saison de la nidification, avait fini par les chasser et pendant plusieurs années les Hérons avaient complètement abandonné les futaies qu'affectionnaient leurs ancêtres. La seconde année qui suivit l'installation de notre collègue à Gooïlust, une paire de Hérons vint visiter la demeure familiale et. soit que l'aspect des lieux ait réveillé chez ces Oiseaux d'an- ciens souvenirs, soit qu'ils aient été tentés de s'établir dans des arbres si favorables à abriter leurs amours, ils se mirent à construire timidement un nid dans les plus hautes branches, mais ils restèrent si sauvages et se montrèrent si effarouchés de la moindre intrusion sur leur domaine, que pour ne pas les mettre en fuite, le nouveau propriétaire interdit toute circula- tion dans le voisinage de l'arbre où les Hérons laissés à eux- mêmes réussirent à élever leur couvée. Le bruit de la sécurité retrouvée à Gooïlust se répandit rapi- BLLL. SOC. NAT. ACCL. VU. 1915, — 18 *274 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION dément parmi la gent héronnière, car Tannée suivante trois nids furent construits dans les arbres du parc et maintenant il y en a plusieurs centaines qui constituent probablement une des lu ronnières les plus importantes de la Hollande. Il y a trois ou quatre ans, une cinquantaine de paires de Cormorans, ayant appris la nouvelle, envabirent subitement les hautes futaies de Gooïlust et se mirent à construire leurs nids sur les mêmes arbres que les Hérons. Tout alla bien d'abord et le spectacle de cette nouvelle colonisation était vraiment intéressant, mais les Cormorans abusèrent de l'hospitalité et au bout de deux ;uis il fallut leur signifier leur congé. En effet, au lieu d'aller chercher au loin des matériaux pour construire leurs nids, les Cormorans trouvèrent plus commode d'épointer toutes les branches des arbres sur lesquels ils avaient élu domicile. Cela aurait fini par les dénuder complètement et par faire périr les Hêtres qui ne peuvent pas s'accommoder de ce genre d'éla- gage. Puis, poussant à l'extrême leur manque de tact et leur paresse, au lieu d'aller pêcher en mer, les Cormorans éven- trèrent tous les petits Hérons qu'ils pouvaient surprendre pen- dant l'absence de leurs parents. On trouvait des quantités de ces pauvres mutilés gisant sous les nids dont ils avaient été arrachés. Les Hérons, eux, ne font pas beaucoup de tort aux arbres dans lesquels ils nichent. Ils cassent bien, par-ci par-là, quelques baguettes dans les branches mais ne dénudent pas l'arbre systématiquement comme le font les Cormorans. Leurs excréments brûlent à la rigueur les feuilles sur lesquelles ils sont projetés autour et au-dessous du nid, mais ce dommage momentané est très circonscrit. Cependant M. Blaauw se voit obligé de maintenir l'extension. de la héronnière dans de cer- taines limites, sans quoi tout le parc finirait par être envahi et la cohabitation tumultueuse d'un si grand nombre d'Oiseaux à certaines époques de l'année manquerait de charme. Celte année, par suite de l'absence des grands vents qui sou- vent précipitent les nids à terre avec les jeunes, toutes les couvées 'es Hérons sont venues à bien. D'autre part, nous apprenons que la fameuse héronnière du parc du château royal du Loo n'existe plus, les Échassiers l'ayant abandonnée, soit par suite de changements dans la configuration des marais qui entouraient cette résidence, soit pour quelque autre cause. Cette LES HÉRONS ET LES CIGOGNES DE GOOÏLUST 275 héronnière avait été rendue fameuse par ces vols qu'y prati- quèrent les membres d'un célèbre club de Fauconnerie qui s'y réunissait tous les ans sous la présidence du prince Alexandre des Pays-Bas du 15 mai au 10 juillet et qui, organisé en 1838 par une association internationale d'amateurs de haute volerie, se signala par ses exploits jusqu'en 1852. L'équipage composé de Faucons pèlerins et de Gerfauts avait effectué les prises suivantes : 1840 138 Hérons, avec 22 Faucons. 1841 287 avec 44 — 1842 148 avec 44 1843 200 avec 40 1844 100 — avec 36 1849 128 — avec 14 1850 138 avec 16 1S51 ■. 130 avec 18 18S2 297 — avec 36 Lorsque le Héron étaitabattu sans blessure, ce qui arrivait le plus souvent, les fauconniers le relâchaient après lui avoir mis à la patte une bague de cuivre portant le nom du club et la date de la capture. C'est ainsi que leDr Campanyo, dans son Histoire naturelle des Pyrénées-Orientales, a pu signaler en avril 1845 la reprise d'un vieux Héron mâle sur la ferme de M. Lacombe, aux environs de Perpignan, lequel portait à la patte une plaque disant qu'il avait été pris deux ans auparavant par un Faucon du club du Loo et en 1856 on en tua un autre sur la plage d'Abuya dans la même région qui portait depuis sept ans une même plaque indicatrice (1). L'histoire des Cigognes de Gooïlust n'est pas moins intéres- sante que celle des Hérons. Tous les ans, un couple vient s'éta- blir dans le parc et faire son nid sur la roue que, selon l'habi- tude hollandaise, on a fixé au bout d'un poteau pour servir de base à la construction du nid de ces Échassiers. Mais ce qu'il y a de singulier, c'est que ces Cigognes ont suivi d'elles-mêmes le déplacement de M. Blaauw lorsqu'il quitta sa résidence de (1) Le portrait d'un des plus fameux FaucoDS du club, Sultan, par le peintre Souderlaud, a été récemment publié en fac-similé en couleurs par la maison Goupil, Mangin et Cic. Voir Bulletin de la Société d'.Acclima- lalion, avril 1909. 276 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Westerveld pour venir à Gooïlust en 1896. Naturellement, en y arrivant, son premier soin avait été d'y faire dresser une plate forme à Cigognes, mais en 1897, les Cigognes nichèrent à Westerveld comme de coutume, se contentant de venir quel- quefois pendant leurs randonnées aux environs, se poser sur la roue préparée à Gooïlust, à quelques kilomètres de distance de leur ancienne habitation. Ce ne fut qu'au printemps de 1898 qu'elles se décidèrent à déménager à leur tour pour s'établir dans le nouveau domicile où elles avaient sans doute retrouvé d'anciennes connaissances et le nid de Westerveld fut aban- donné pour de bon. Cette année une seule Cigogne était arrivée à Gooïlust vers la fin de mars. Elle prit aussitôt possession du plateau et se mit à réparer le vieux nid et à remettre les choses en bon état. Le travail était complètement achevé lorsque la seconde Cigogne vint rejoindre la première. Ces Oiseaux s'étaient évi- demment donné rendez-vous et la première arrivée comptait bien sur la seconde puisqu'elle s'était mise à faire le logement et à préparer le nid où la couvée de cette année va faire son entrée dans le monde. ERRATUM Dans la note sur les Blesbok et Bontebok communiquée par M. Blaauw et que le Bulletin a publiée en avril, une erreur d'impression a défiguré le nom de la ferme de M. Albertyn au Transvaal. C'est Zeekûë Vlei qu'il faut lire, Zeekoë, c'est-à-dire Vache de mer, étant le nom boër de l'Hippo- potame qui fréquentait autrefois cet endroit. CORYDALIS CHEILANTIJIFOUA HEMSLEY Par MAURICE L. DE VILMORIN. Des plantes présenlantcertainesqualitésdécorativesmodestes peuventêtre intéressantes pour l'amateur de jardins quand elles y joignent la précocité, un tempérament très robuste et de très petites exigences. Tel est le cas d'une Corydale chinoise nommée par Hemsley Corydalis cheilanthifolia et qui a germé dans mes semis en 1899. Celte petite Papaveracée est une plante t^-. Corydalis Che liant h if'olia . haute, au plus, de 30 centimètres, à hampes portant des épis très fournis de petites fleurs tubuleuses, jaune soufre, émer- geant d'un feuillage extrêmement divisé d'une jolie nuance un peu blonde de vert, rappelant plus les frondes de certaines Fougères qu'autre chose ; aussi lui donne-t-on parfois, et à juste titre, le nom de Corydale à feuilles de Fougères, ce qui n'est pas la traduction du latin, qui la compare, d'une façon probablement très juste, au Cheilanlhos, Labiée de notoriété un peu restreinte. Dès mars, et même février, son joli feuillage a mis dans les plaies-bandes, ou dans les coins du jardin alpin ou du jardin sauvage, la gaieté d'un renouveau bienvenu. Les gelées 278 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION surviennent souvent à cette date. Après un abaissement de température sous zéro, le feuillage a pris un aspect transparent et affaissé; mais, sitôt le dégel venu, il reprend toute sa fraî- cheur. La fleur s'épanouit vers la mi-mars pour soutenir une floraison abondante jusqu'au 15 avril; mais elle ne disparaît pas complètement : le bout des hampes est encore fleuri à la fin de mai, mais pauvrement; le moment le plus beau est passé! Le plein de la floraison est donc au moins aussi précoce que celui de la Primevère à grande fleur, à laquelle il est assimilable pour ses besoins culturaux. Ceux-ci sont d'ailleurs élémentaires. En mai, les siliques minces commencent à s'ouvrir par déhis- cence de la base; elles se contournent et laissent voir quatre rangées de minuscules graines noires. Si on ne les récolte pas, elles tombent à terre ou elles sont transportées par un processus qui m'échappe, car il ne semble pas que l'élasticité y inter- vienne. Toujours est-il qu'auprès des plantes adultes, il se fait un abondant semis naturel et parfois à plusieurs mètres de distance. J'ai mis, il y a cinq ou six ans, deux ou trois de ces plantes dans des plates-bandes sommairement tenues et conte- nant des grandes plantes vivaces. Aujourd'hui presque tout l'intervalle est peuplé de Corydale à feuille de Fougère. Récoller la graine nette serait bien minutieux, il serait plus pratique de cueillir des siliques en instance de déhiscence et de les jeter au lieu où l'on veut installer la plante. Ces lieux peuvent être des endroits ombragés par des arbres élevés, laissant suffisamment de lumière, diverses plates-bandes, des talus pas trop envahis par l'herbe, en un mot l'habitat de la Primevère acaule. La jeune plante germera toute seule, fleurira la seconde année, puis prendra de la force et s'entourera de descendance. En été elle gardera son joli feuillage et quelques fleurs, puis dispa- raîtra en automne pour reparaître dès la fin de l'hiver avec des proportions plus amples. Les pieds semblent durer fort long- temps puisque mes plantes d'origine sont encore en bel état. EXTRAIT DE LA CORRESPONDANCE A PROPOS DES SERVICES RENDUS PAR LES OISEAUX Notre collègue, M. Xavier Raspail, nous ayant signalé, dans une lettre du mois de novembre 1913, la tendance de certains naturalistes à nier l'utilité des Oiseaux, il nous avait paru inté- ressant de provoquer les remarques et d'enregistrer les obser- vations que les amis des Oiseaux pourraient faire à ce sujet. M. Xavier Raspail, à qui nous avions fait part de cette inten- tion, nous répondit : « Je suis très satisfait que vous vous proposiez d'attirer l'attention de nos collègues sur cette tendance que manifestent certains naturalistes, et même des ornithologistes, à se préoc- cuper de combattre les Insectes par les Insectes, et par suite d'amoindrir le rôle prépondérant que joue l'Oiseau pour la défense de notre richesse territoriale. « Certes, nul n'ignore qu'il y a des Insectes très utiles, mais ils seraient impuissants à réagir contre l'action des Insectes nui- sibles s'ils étaient seuls aies combattre; et en ce qui concerne leur destruction possible par les Oiseaux, il- est à supposer que l'odeur très forte et très caractéristique qu'ils exhalent, comme par exemple les Carabes et les Coccinelles, leur sert de palladium « J'ai signalé, il y a une vingtaine d'années, un Acare du genre Oribate que j'ai découvert détruisant les œufs du Liparù dispar, dans l'épais feutrage que la femelle de ce nuisible Lépi- doptère produit au fur et à mesure de sa ponte. Or, sans le Coucou, ce ne serait pas cet Acare qui arriverait à protéger les Chênes de nos forêts contre la reproduction du Liparis dispar. « S'il était besoin de prouver l'utilité de l'Oiseau, il suffirait de montrer nos vignobles de plus en plus ravagés par la Pyrale, la Cochylis, l'Eudémis (Lépidoptères), l'Eumolpe (Coléoptèivi, depuis que les Oiseaux, dont l'absence y est totale, ainsi que le disait encore tout récemment un propriétaire de Libourne, ne viennent plus pondérer ces Insectes non seulement en détrui- sant l'imago, mais en épluchant sans relâche les œufs, les larves, les chrysalides, sur les ceps et les échalas où ds sont déposés. » 280 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION L'intéressante lettre de notre collègue formait une excellente préface à l'enquête projetée, et nous comptons la reprendre avec plus d'ampleur. Nous avons groupé déjà quelques notes et, parmi elles, les observations suivantes de deux de nos correspondants. Unelettrede M. Foulongne, adressée de la Haye-de-Calleville au Journal de Rouen, le 5 mai 1913 : « Plusieurs articles concernant la protection des petits Oiseaux m'engagent à donner un conseil à tous ceux qui s'y intéressent. « Il y a quinze ans, j'étais membre du jury à Saint-Pierre- du-Vauvray; ayant observé dans beaucoup de vergers des petites boîtes carrées de 20 centimètres dans l'intersection des branches, j'en ai demandé l'explication au dévoué président du syndical, M. Bertin. Il m'a donné une leçon d'élevage. « De retour à ma ferme, ayant une très grande exploitation fruitière, j'ai fait confectionner une certaine quantité d'habita- tions à bon marché qui m'ont rendu des services inappré- ciables. 20 boîtes sur 24 étaient habitées l'année suivante par des Mésanges, Rouges-Gorges, Grimparts; tous ces petits Oiseaux se chargent de nettoyer mes Pommiers des chenilles et autres insectes dans des plants de deux mille pieds. « Les incrédules peuvent venir juger sur place, ils seront les bienvenus. Les instituteurs pourraient préconiser ce système peu dispendieux, ils rendraient de grands services à l'agriculture. « Les boîtes sont de 20 centimètres avec un trou de 4 centi- mètres à la base. En dessous, une petite baguette permettant un point d'appui pour y pénétrer. Peindre de la couleur de l'arbre, gris foncé. » Dans une longue lettre du 15 octobre 1913, M. Tisseyre, directeur d'école à Toulonges (Pyrénées-Orientales), après avoir donné des détails sur son action prolectrice à l'école, rapporte les deux faits suivants : « 1° Dans un grand vignoble, la Cochylis et l'Eudémis firent de grands ravages, surtout la dernière ponte. Une partie du vignoble, située à proximité de la ferme, était très fréquentée par des bandes de Moineaux qui y passaient presque toute la journée. On se figurait qu'ils mangeaient des raisins. Or, qu'ar- riva-t-il au moment des vendanges? Le propriétaire constata, avec stupéfaction, que tout le reste du vignoble avait été fort EXTRAIT DE LA CORRESPONDANCE iSl maltraité par la Cochylis et l'Eudémis, tandis que les raisins qui se trouvaient dans la partie fréquentée par les Moineaux étaient tout à fait indemnes. Au lieu de manger des grains de raisins, ces pétulants Oiseaux avaient dévoré les larves et les papillons de Cochylis et d'Eudémis et sauvé la récolte. « Le propriétaire s'empressa de faire établir de nombreux nids artificiels, et défendit très sévèrement à tous ses ouvriers de toucher aux Moineaux ou môme de les effrayer. « 2° Dans un groupe de jardinets et de maisons de la banlieue de Perpignan, à quelques kilomètres de Toulonges, il y avait de nombreux arbres fruitiers qui, tous les ans, donnaient de superbes fruits et abritaient de nombreuses couvées. L'année dernière, au commencement du printemps, un nouveau loca- taire vint s'installer dans une de ces maisons, et le passe-temps favori de ce monsieur consistait à tuer avec le fusil tous les petits Oiseaux qui venaient sur les arbres de son jardin. Quels furent les résultats de ces beaux exploits? Les arbres de tous- les jardins avoisinants furent envahis par les chenilles: les fruits et même les feuilles furent dévorés. Tous les voisins étaient furieux contre ce chasseur de pacotille, mais il s'agissait d'un jardin clôturé, et il était impossible de sévir. Cependant on le surveillait, et s'il avait eu le malheur d'emporter des Oiseaux tués hors de sa maison, on ne l'aurait pas raté. » Nous avons reproduit ces notes en songeant à nos gentils petits protégés qui, cette année encore, insoucieux du canon et du deuil des hommes, ont, comme par le passé, combattu l'Insecte destructeur et en ont purgé nos récoltes, pendant que nos vaillants soldats, défenseurs de nos foyers, répandent leur éang et dépensent leurs efforts pour purger aussi du Barbare dévastateur le sol sacré de la Patrie. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Les Yaks dans le Pamir. — Répartition des taches blanches chez les Animaux domestiques. — La croissance de la Carpe. Il y a aujourd'hui une soixantaine d'années que les fameux Bœufs à queue de cheval, les Yaks du Thibet, furent amenés en France par les soins de M. de Montigny, auquel nous devons tant d'introductions intéressantes et à la suggestion de la Société d'Acclimatation. On peut retrouver dans la collection du Bulle- tin de la Société et dans l'ouvrage de notre président, Isidore- Geoffroy Saint-Hilaire : les Animaux utiles, tout le détail de cette importation et des premières reproductions de ce Buminant, soit à la ménagerie du Muséum, soit chez les particuliers auxquels avaient été confiés les animaux rapportés par M. de Montigny pour en essayer l'acclimatation et l'utilisation sous notre climat, mais il y a longtemps qu'il n'en a plus été question et il a fallu les récentes explorations des hauts plateaux du Thibet pour remettre en évidence ces utiles auxiliaires de l'homme. Isidore-Geoffroy Saint-IIilaire rappelait que Sonnini avait adressé un pressant appel aux voyageurs qui seraient à même d'enrichir de nouveaux faits l'histoire si incomplète de ce Buminant ; la difficulté d'accès des régions où il se trouve natu- rellement n'a pas permis d'ajouter grand'chose aux notions que l'on possédait déjà. Cependant, le capitaine Hingston vient de communiquer au Journal de la Société d'Histoire naturelle de Bombay une note sur le Yak de Pamir, qu'il a été à même d'observer sur place et qui ajoute certains détails à ceux que nous connaissons déjà : « De tous les animaux domestiques du plateau du Pamir, dit cet officier, aucun n'est plus intéressant que le Yak que les indigènes désignent sous le nom de Khushgao. C'est un animal fort et rustique, à jambes courtes, à corsage descendu, portant la tète penchée vers le sol, chaudement vêtu d'une longue et épaisse toison avec une grande queue touffue. Il y a deux variétés de Yaks domestiques qui paraissent complètement dis- tinctes, celle à cornes et celle sans cornes. Chacune de ces variétés, m'a-t-on dit, se reproduit avec une grande fixité; les animaux cornus donnent des jeunes à cornes et ceux qui ne le CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 283 sont pas ne mettent bas que des jeunes semblables à eux- mêmes, mais Tidée de rechercher quel pourrait être le produit du croisement de ces deux types dépasse de beaucoup l'intel- ligence obtuse des nomades du Pamir. On pratique la castra- tion sur beaucoup de Yaks à l'âge d'un an environ, mais cela n'a rien à faire avec la question des cornes. La longueur de ces cornes est assez variable ; elles mesurent en moyenne 66 centimètres. La plupart des Yaks sont à pelage noir uni- forme et on en voit quelques-uns qui sont brun clair ou bistre. Si les Yaks noirs ont parfois une tendance à modifier leur livrée, ce sera toujours pour prendre des taches blanches et on peut regarder comme une loi, à laquelle je n'ai jamais vu d'exception, que s'il y a du blanc sur le pelage de l'animal, sa face est toujours en partie ou complètement blanche. 11 est très fréquent d'en voir avec la figure blanche, la queue blanche et du blanc sur les jambes. Très souvent le blanc court le long de l'épine dorsale, reliant le blanc de la tête à celui de la queue, tandis que le ventre est blanc. Ces maculatures se retrouvent avec la même disposition sur les animaux bruns, mais jamais le noir et le brun ne sont réunis sur le même individu. « Le corps du Yak est recouvert d'une épaisse et chaude toi- son composée de poils de deux espèces et varie considérablement en hiver et en été. Les poils du dessus sont longs, épais et droits et pendent verticalement sur la plus grande partie du corps. Frisés sur la partie inférieure des membres ils restent particulièrement longs sur le dos, à l'angle de la mâchoire, sur la queue et les flancs; ils forment un bouquet touffu entre les cornes et descendent sur le cou en crinière. Quelque impor- tance que semble avoir cette partie du pelage, ce n'est pas elle qui garantit le mieux l'animal contre les rigueurs du climat de son habitat, mais bien une couche épaisse de duvet fin qui se feutre sous les grands poils et maintient la chaleur du corps comme le ferait une couverture de laine. On peut considérer la couche superficielle de grands poils comme un vêlement per- manent, en ce sens que son épaisseur est la même en toutes saisons, tandis que le sous-poil, qui, en hiver est très serré et fourni, tombe dans les mois de mars et d'avril, et au commen- cement de Fêté on le voit former de grandes plaques feutrées, complètement détachées de la peau et qu'on peut enlever par poignée. Le Yak n'est pas le seul animal du Pamir qui mue son vêtement d'hiver aussi complètement. Le Chameau, en hiver, a 284 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION une toison des plus épaisses et des plus chaudes et se dénude complètement en été, et j'ai vu les Chiens domestiques couverts de grosses masses de laine qui leur pendaient sur le corps et qui étaient le reliquat de leur toison d'hiver. Le jeune Yak n'a pas les longs poils caractéristiques de ses parents; ils ne poussent sur les Veaux qu'à l'âge de deux ou trois mois. Les nomades utilisent ces deux sortes de poils de diverses manières. Avec les longs poils ils tressent des cordes et ils tissent des tapis avec le duvet fin. « Les mœurs du Yak ont quelques particularités intéressantes à signaler. Comme les autres Bovidés, les Yaks aiment à s'im- merger, à moitié corps, dans l'eau courante et on les voit sou- vent se vautrer clans les eaux glaciales qui descendent des glaciers. Le Yak monte à quelques mille pieds dans la montagne en quête de pâturages nouveaux, et, malgré son aspect gauche, son habileté et son agilité dans les escalades de rochers est merveilleuse. C'est un animal remarquablement patient, on le voit rester sur place pendant une demi-heure sans bouger. Un habile écuyer peut obtenir de cette lourde bête une allure d'amble soutenue et même la mettre au galop, et c*est assez curieux de voir que cet être lourd et endormi, tantôt prend peur d'un objet inaccoutumé et s'emballe comme un Cheval ombrageux, tantôt s'endort et se couche sous son cavalier. La portion postérieure de l'épine dorsale de ces animaux est très sensible ; les indigènes en tirent un cruel avantage en bourrant continuellement leur monture sur cette zone délicate avec un gros bâton, si bien qu'au bout d'une longue route les pauvres bêtes ont le dos saignant et ulcéré. « Les Yaks aiment la compagnie; en troupeau, ils marchent d'un pas assez rapide, mais, si l'on en sépare un de ses cama- rades, celui-ci fera tous ses efforts pour les rejoindre ou pour aller trouver d'autres animaux de son espèce qu'il aura aperçus sur une colline voisine. Enfin, lorsque le Yak s'est mis dans la tête de ne pas avancer, et cela lui arrive souvent devant une pente un peu raide, il baisse la tête à toucher le sol, tire sur la corde passée dans ses naseaux, et, quoi qu'on puisse dire ou faire, il se retourne et dévale dans la descente. Les Yaks dans la neige sont dans leur élément. Un troupeau avance généralement en file indienne, chaque animal ayant soin de placer ses pieds dans l'empreinte laissée par celui qui le précède. CHRONIQUE GÉNÉRALE KT FAITS DIVERS 285 a J'ai observé une fois, chez un de ces animaux, une monstruo- sité assez singulière. Sur la ligne médiane de la face, à trois pouces au-dessus des naseaux, il avait une troisième corne dirigée en avant. Elle était de forme ovale mesurant deux pouces sur un pouce de travers et quelques pouces de longueur, mais le bout en avait été cassé. Inclinée en avant, l'extrémité libre avait une tendance à se retrousser. « Le Yak aime à lécher la neige et, dans les vallées, on le voit souvent manger beaucoup de terre, sans doute à cause des efflorescences salines qui couvrent le sol. « Quoique employé comme bète de somme par les nomades, on ne peut pas dire que le Yak soit un animal complètement domestique. Il cherche sa nourriture comme il peut et aux hasards de l'aventure. Les jeunes ne naissent pas d'une façon irrégulière, indépendante des saisons, car la mise bas n'a lieu qu'au commencement du printemps vers le mois de mars. Beau- coup périssent de froid et de famine et un nomade m'a dit avoir perdu une vingtaine d'animaux l'hiver précédent. Ces Rumi- nants n'ont pas à compter sur les soins de leurs maîtres et leur vie dépend de l'abondance de nourriture qu'ils peuvent trouver d'eux-mêmes et de l'inclémence des saisons. Dans les altitudes silencieuses qu'ils habitent, ils ont continuellement à lutter contre les forces les plus rigoureuses de la Nature dans un climat glacial. » Il est intéressant de rapprocher des observations faites par le capitaine Kingston sur la localisation des taches blanches chez le Yak, animal semi-domestiqué, les observations analogues du professeur Rouillier, de Moscou, sur la marche de la déco- loration chez un certain nombre d'animaux domestiques. Ce savant a constaté que le Cheval commence à blanchir par les pattes de derrière dans le plus grand nombre des cas. Par un pointage régulier des Chevaux qui passaient sous ses fenêtres, il a vu que le pied droit arrière était plus souvent blanc que le gauche, que les pieds de devant ne sont ordinairement blancs que lorsque ceux de derrière le sont aussi et que le pied gauche de devant est plus souvent blanc que le droit chez les Chevaux pies. M. Rouillier s'est assuré que certaines parties du corps sont plus fréquemment blanches que les autres. C'est d'abord 286 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION le front de l'animal, puis le devant et le bas de la tête avec les lèvres, puis le milieu de la crinière et enfin la queue. Les côtés de l'abdomen, immédiatement en avant des jambes de derrière et le bas de la poitrine, entre les jambes de devant, sont les points que l'on voit blanchir le plus rarement et la poitrine conserve sa couleur normale même lorsque le reste du corps est complètement envahi. Le professeur Rouillier a désigné respectivement ces points : places débilicolores et places résis- tantes. Des places débilicolores, la plus fréquente à se manifester est l'espace entre le garrot et le milieu de la crinière ; vient ensuite une tache blanche sur la partie antérieure du ventre, immédiatement derrière les pieds de devant. Ces deux taches s'étendent, se rejoignent et forment une ceinture blanche qui va de la partie postérieure du cou, à travers l'épaule et jus- qu'au-devant du ventre et cette ceinture se transmet héréditai- rement, gagnant toujours de proche en proche jusqu'à occuper tout le devant du tronc. Une autre place très sujette à blanchir sur le tronc du Cheval, c'est la partie lombaire du dos, immédiatement au- devant de la croupe et des pieds de derrière. Donc, il est, sur le corps du Cheval, trois points de départ des taches blanches qui, de ces trois points, gagnent toute la surface et se réunissent, la robe de l'animal ne gardant sa couleur primitive qu'aux places résistantes, à savoir : les côtés de l'abdomen devant les pieds de derrière, les côtés de la tête et le haut du cou. Les progrès de l'albinisme suivent ainsi une marche inverse sur les membres et sur le tronc; pour les membres ce sont les pieds de derrière qui commencent, tandis que pour le tronc c'est la partie antérieure qui blanchit la première. Autre remarque : les taches blanches du tronc ne s'étendent pas en long, mais en travers, formant des ceintures blanches plus ou moins larges et irrégulières. Chez d'autres animaux, comme la Vache, le Chien, le Chat et le Lapin, le blanchiment suit une marche régulière comme chez le Cheval, mais cette marche est différente. Chez le Chien et le Chat, les parties le plus souvent blanches sont les pattes et la poitrine, mais les pieds de derrière n'ont pas normalement plus de blanc que les pieds de devant comme chez le Cheval et la poitrine peut blanchir sans que le reste CHRONIQUE GÉNKRAE.E ET FAITS DIVERS 287 du corps change de couleur, ce qui serait anormal chez le Cheval. Chez le Chien et le Chat, la tète est une des parties les plus résistantes-dû corps, mais Le cou du Chien blanchit avec- facilité et au bas du sacrum, à l'origine de la queue, il a un espace qui est presque le dernier à perdre la couleur foncée Chez la Vache, l'ordre d'apparition des taches blanches est encore différent. Chez ce Ruminant, le blanc se montre d'abord au front, à la base des cornes et au pis. *Du pis, la tache blanche s'étend en long sous le ventre en remontant vers la poitrine. La tache blanche de la tête s'étend le long du cou et du dos en strie horizontale jusqu'à la queue. On voit souvent une Vache à tête blanche, mais un Cheval à tète blanche, jamais. Lorsque la couleur blanche gagne le tronc de la Vache, elle part du devant des pieds de derrière et de l'arrière des pieds de devant, couvrant tout le corps entre les épaules et Les cuisses qui conservent leur couleur foncée. Il en est de même chez le Lapin. » Enfin les taches blanches, chez certains individus, conservent souvent un semis de maculatures de la couleur foncée originale. Cette bigarrure, très fréquente chez les Chevaux pies du Hol- stein et du Schleswig, est désignée par les Allemands par le terme Tigerpferde, c'est-à-dire Chevaux-Tigres ou mieux Léo- pards et constitue la robe dite bleue chez les Chiens. M. G. Besana, président de la Société lombarde de Piscicul- ture, qui s'est occupé avec grand succès de l'empoissonnement du lac de Varano (1), a publié dernièrement d'intéressants ren- seignements sur la croissance de la Carpe. Le lac de Varano ne contenait primitivement aucune Carpe; en décembre 1899, M. Besana y introduisit là Carpes-miroir de race galicienne, âgées de quatre ans et d'un poids moyen de 2 kil. 200 qui y frayèrent dès le mois de mai 1900, et qui continuèrent à se reproduire pendant les années suivantes. Bien que les retours de froid, qui surviennent fréquemment en mai dans cette région élevée, tuent parfois beaucoup d'alevins, et qu'un grand nombre de ceux-ci soient également détruits par les Perches, on peut considérer la Carpe comme étant aujourd'hui acquise (I) Belle nappe d'eau de 380 hectares, voisine du lac Majeur. 288 Bl'LLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION à la faune du lac, et, depuis 1907, lors des pèches annuelles, on capture presque toujours quelques magnifiques sujets pro- venant des premières reproductions obtenues. Voici la liste des plus belles pièces capturées : En 1907, une Carpe delOkil. 500. En 1908, 5 pièces pesant de 10 kil. 500 à 14 kil. 500. En 1910, un sujet de 16 kilogrammes. En 1911, 2 sujets de 11 kil. 500 et 15 kilogrammes. En 1912, un sujet de 11 kilogrammes. En 1*913, 2 sujets de 12 kilogrammes et 15 kilogrammes. Enfin, en 1914, 3 sujets, dont 2 de 13 kilogrammes et 1 de 19 kil. 100. Les dimensions de quelques-unes de ces Carpes étaient les suivantes : Tune, de 15 kilogrammes, avait 93 centimètres de longueur. Un mâle, de 16 kilogrammes, mesurait 1 mètre de long. Enfin, celle de 19 kil. 100, qui était une femelle, avait 98 centimètres de longueur, et le corps mesurait 96 centimètres de tour dans sa partie la plus volumineuse. Or, aucun de ces Poissons ne pouvait avoir plus de dix-neuf ans, puisque les sujets reproducteurs introduits dans le lac, il y a quinze ans, n'étaient alors âgés que de quatre années. On voit par ces chiffres combien est rapide la croissance des Carpes de race sélectionnée. Le Gérant : A. Marethelw. Paris. — L. Marktheux, imprimeur, 1, rue Cassette. Dixippus morosus vivants (Or- hoptères), offerts par M. l'abbé rOUCHER._ Iraines offertes par le Dr G. V. PBRBZ. ïchium Bourgxanum. — simplex. 'uniperus Cedrus. — bermudiana. ttatice frutescens. — arborea. — Perezii. 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Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser eurs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après «amen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à uesure des disponibilités. / / SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Le but de la Société Nationale d'Acclimatation de France est de concourir 1° à l'introduction, *à l'acclimatation et à la domestication des e^èces d'animaux utiles el d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la -Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solennelle, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo- riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeuner amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie ; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont îégulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800 pages illustrées de gravures. Il traite des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. 11 donne des renseignements les plus variés sur les animaux et les plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle : installation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc. La Société Nationale d'Acclimatation poursuit un but entièrement désin- téressé; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce; adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être général et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Màrbthbcx. Paris. — L. Marktheux, imprimeur, 1, rue Cassette. kdiH tistnal b06 531-52 591-52 BULLETIN DE LA Société Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 62» ANNÉE P w H IM° 10. - OCTOBRE 1915 p SOMMAIRE «WMMIMMMWM o»c «I AU SIÈGE ^SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D* ACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du Jardin dea Plantes), PARIS AI/IC I JVIDnDT AWT Des cartes annuelles d'entrée au Jardin nLVIij HYlr l/Iy, 1 /\il 1 d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets lont délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : tô, rue de Buffon. >endant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. H Actes de la Société d'Acclimatation 289 ^ Situation des Membres de la Société pendant la guerre 290 K Louis Ternier. — Le Fou de Bassan 292 — Magaud d'Aubusson. — Les Oiseaux dû Bled (suite et fin) 'i98 Chronique générale et faits divers 307 Bibliographie : Raveret-Wattel. — La défense contre l'Ophidisme, par le D'' Bra/i'l 309 M M. Loyer. — Les Poissons exotiques : Le Télescope, par L. Lefebvre 320 ^ La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises M par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. «^ La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, [des articles publiés dans le Bulletin est interdite. (il Du numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. r r SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE fondée le fO Février 1864 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février 1856 33, RUE DE BUFFON — PARIS Vice- Présidents. BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 Président, M. Kdmond Perrier, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecin*; JJirecteu- du Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires. { Germain, Paris (Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Dbbreuil, 25, rue de Chateaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Skbillotte, 11, rue Croix-des-Petits-Ghamps, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Gaucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Myre dk Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. WuraiON, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seioe. Achalmb, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, ltrue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D' P. Marchai,, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. D' Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-BuissoD (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle, 14, rue des Écoles Paris Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril Mai Novembre Décembre 14 11 M : 22 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d' Ornithologie [Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi à 5 heures ■ ! 18 ' 18 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les' personnes qui désireraient l'entretenir, qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. ACTES DE LÀ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION S. E. le baron K. Ishii, ambassadeur du Japon à Paris, venant d'être nommé ministre des Affaires Étrangères dans le nouveau cabinet japonais, présidé par le comte Okuma, notre Président M. Ed. Perrier lui a adressé, avec toutes ses félicita- tions, l'expiession des regrets que lui cause son départ. Son Excellence, qui en toutes circonstances a toujours marqué à notre Société ses sentiments de haute bienveillance et qui, à la séance solennelle du 19 février 1913, est venue recevoir notre grande médaille hors classe décernée au comte Okuma, a répondu par la lettre suivante : Paris, le 23 août 1915. Ambassade Impériale du Japon. Monsieur Edmond Perrier Membre de l'Institut Président de la Société d'Acclimatation. Mon cher Président, Je m'empresse de vous remercier des très gracieuses félicitations qu'au moment où je me rends à d'autres fonctions, vous voulez bien m'adresser au nom de la Société Nationale d'Acclimatation de France. J'emporte de mon second séjour en France bien des souvenirs si agréables que je fais déjà le rêve d'y revenir une troisième fois. Veuillez, je vous prie, être auprès de la Société, que vous prési- dez avec tant de distinction, l'interprète de mes plus vifs remercie- ments, de même que de mes meilleurs souvenirs et agréer, mon cher Président, l'assurance de mes sentiments les plus dévoués. K. Ishii (1). (1) A la page 194, Bulletin, 1913, voir la photographie de S. E. le baron Ishii, causant avec S. E. Myron Herrick, ambassadeur des Etats- Unis. BULL. SOC. NAT. ACCL. Mi. 1915. — 19 SITUATION DES MEMBRES DE LA SOCIETE PENDANT LA GUERRE Pour répondre au désir exprimé par plusieurs de nos collè- gues, nous indiquerons au fur et à mesure que les renseigne- ments nous parviendront, la situation des membres de la Société qui prennent part à la défense de la Patrie, soit comme combattants, soit comme auxiliaires de l'armée. MM. Achalme (Dr), médecin à l'hôpital du Jardin colonial, à Nogent-sur- Marne (Seine). Anthony (Dr R.), médecin-major de 2e classe, médecin-chef des trains sanitaires, à Creil. Arenberg (prince Pierre d'), capitaine d'état-major au ministère de la Guerre. Aron (Armand), lieutenant au 22e régiment d'artillerie. Blanchard (professeur R.), inspecteur général des services médi- caux de l'Association des Dames françaises (civil). Bonaparte (prince Roland), attaché au service topographique de l'armée (civil). Brumpt (professeur agrégé F.), médecin aide-major de 2e classe, préparateur de vaccin, service antityphoïdique de l'armée, au Val-de-Grâce. Caucurte (René), directeur du chenil militaire de Vulaines-sur- Seine (civil). Chappellier (Albert), caporal à la 10e section, photographie aérienne, secteur postal 17. Chevalier (Auguste), officier d'administration, versé aux formations sanitaires de l'armée coloniale. Coutière (professeur H.), pharmacien en chef de l'hôpital 104, à Moulins (Allier). Dagry (Charles), maréchal-des-logis au 12e régiment d'artillerie. Dagry (Marcel), brigadier au Ue régiment d'artillerie à pied, h Verdun (Meuse). Dechambre (professeur P.), vétérinaire-inspecteur de la division du frigorifique du camp retranché de Paris. Delacour (Jean), officier d'administration du service de santé, à Verdun. Dulignier (J.), chef de bataillon à l'état-major du général comman- dant la place de Besançon. Foucher (abbé G.), aumônier de l'hôpital de l'Académie française, rue Saint-Georges, à Paris. SITUATION DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ PENDANT LA GUERRE 291 Ganay (marquise de), directrice de l'hôpital auxiliaire n° 21, à Cou- rances (Seine-et-Oise). Ganay (sous-lieutenant H. de), officier de liaison auprès d'une bri- gade de cavalerie indienne. Ganay (Bernard de), maréchal des logis au 9e régiment de cuiras- siers. Geoffroy-Saint-Hilaire (Henri), aide-vétérinaire de lre classe aux chasseurs d'Afrique. Joubin (professeur Louis), préposé à la vaccination, à l'Institut océanographique (civil). Kollmann (Max), secrétaire d'état-major à la place de Paris. Kusel (M.), observateur d'artillerie, à l'escadrille M. F. 44, à Toul. Le Barazer (Daniel), délégué du service de santé par le ministère de la Guerre, 18e région. Le Fort (Baymond), médecin auxiliaire, hôpital temporaire, n° 4, à Orléans (Loiret). Lepel-Cointet, président de la société nationale du chien sanitaire. Loisel (Dr Gustave), médecin-major de lre classe, mission sanitaire française à Pojarevatz (Serbie). Loyer (Charles), maréchal des logis au 19e escadron du train des équipages. Marchal (professeur Paul), chef de section au service des parcs et abattoirs de Paris (civil). Mirman, préfet de Meurthe-et-Moselle. ' Poulard (Dr), directeur du service ophtalmologique de la 15e région, à Marseille. Quinton (René), capitaine au 29e régiment d'artillerie. Ricois (Ernest), administrateur de l'hôpital militaire de Vernon (Eure). * Rollinat (Raymond), trésorier-comptable à l'infirmerie de la gare d'Argenton-sur- Creuse. Rousseau (Louis), sergent au 33e régiment territorial d'infanterie, lre section de mitrailleuses, secteur postal 123. Sebillotte (Dr R.), médecin traitant à l'Hôpital auxiliaire n° 62, Palais-Boyal, à Paris. Tinardon (Maurice), chef de bataillon au 5e régiment du génie, détaché à Bourges. Tolet (Léon), capitaine au train des équipages, section de C. V. A.D. de corps d'armée, secteur postal 98. Vincent (Dr Pierre), médecin aide-major de 2e classe. Willard (Mme B.), infirmière à l'hôpital militaire Buffon, complé- mentaire du Val-de-Gràce, V. G. 1, 16, boulevard Pasteur, à Paris. N. B. — Nous prions instamment nos collègues de nous adresser tous renseignements nous permettant de compléter et tenir à jour la liste ci-dessus. LE FOU DE BASSAN Par LOUIS TERNIER. S'il est un Oiseau pouvant se prévaloir de la qualité « d'An- glais », c'est assurément le Fou de Bassan {Sida Bassana), le « Gannet » de nos voisins et Alliés. Le Fou de Bassan, hôte assidu des côtes anglaises, ne niche plus, en effet, que dans quinze localités, dont neuf sont situées en Grande-Bretagne et deux au Canada, qui est une possession anglaise. De tout temps, le Fou de Bassan a donc été l'objet d'une attention particulière de la part des auteurs de son pays d'ori- gine, même les plus anciens, et un ornithologiste moderne anglais, M. J.-H. Gurney, savant très érudit, en même temps qu'excellent observateur, vient de publier sur le Fou de Bassan une monographie qui constitue l'étude la plus complète ayant jamais été faite, je crois, sur une espèce d'Oiseau purement pélagique. C'est dans un intéressant et gros ouvrage de 560 pages que M. Gurney nous fait connaître le Fou de Bassan et son histoire depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours (1). Le « Gannet » est, en effet, nous l'apprend M. Gurney, un Oiseau qui a une Histoire. Moins heureux que les peuples qui n'en ont pas, le Fou de Bassan a payé son tribut aux convoi- tises et à l'esprit de conquête des hommes. Il a perdu des territoires, et les rangs de son espèce se sont éclaircis. Néanmoins, il a résisté, et l'armée qu'il peut mettre en ligne reste encore formidable. M. Gurney n'a pas reculé devant l'éva- luation du nombre des Fous de Bassan existant encore, et l'un des chapitres les plus curieux de son livre est peut-être celui où il suppute le nombre approximatif des diverses espèces d'Oiseaux qui peuplent notre globe et où il arrive à déter- miner, à quelques individus près, celui des Fous de Bassan cantonnés dans chacune do leurs slations. Le Fou de Bassan est un bel Oiseau. De la taille de l'Oie, il a (1) The Gannet, a bird with a Ili&tory. by J. II. Gurney. F.Z.S-. Witheiby and C° 326. Iligh Holborn. Londoti. LE FOU DE BASSAN 293 cependant le corps plus allongé et son envergure est considé- rable. Entièrement blanc, à l'exception des grandes pennes de l'aile, qui sont noires, et du derrière de la tète, qui est jaunâtre, le Fou de Bassan a le bec sensiblement différent de celui des Goélands et des Cormorans. Ce bec, de couleur verdàtre, res- semble plus à une pioche qu'à un crochet. Les yeux du Fou de Bassan, qui sont blancs ou jaune clair, sont entourés d'une Le Fou de Bassan (1). peau bleuâtre qui rejoint la base du bec. Le Fou de Bassan, on le sait, est un toti palme, ses quatre doigts sont réunis par une membrane. Les jeunes sujets diffèrent des adultes. Leur plumage est brunâtre, tacheté de blanc. Le Fou de Bassan a une foule de noms scientifiques et vul- gaires. Il ne convient, parmi les premiers, de retenir que celui de Sula Bassana (Brisson"», et parmi les seconds ceux de Gannet et de Soland Goose (Oie de Soland) en anglais et de Fou de Bassan (1) Les clichés qui illustrent cet article nous ont été obligeamment prêtés par M. Gurney. 294 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION en français. Notons cependant que M Gurney indique que dans le Pas-de-Calais on nomme aussi le Fou « Margot ». En réalité, on le désigne, en effet, quelquefois en France sous la dénomination de Margas,. mais ce terme s'emploie plus parti- culièrement pour désigner toutes les espèces de Goélands. Comme la plupart des Oiseaux de mer, le Fou de Bassan a une distribution géographique différente en hiver et en été. En hiver, il se cantonne dans toute la partie de l'océan Atlantique comprise entre le Labrador, le Canada et le golfe du Mexique d'un côté et l'Islande, le Danemark et les Canaries de l'autre. En été, l'aire de dispersion se rétrécit, elle remonte, à l'Ouest, du golfe du Mexique à la hauteur environ de New-York, s'étend un peu au Nord sur les côtes du Groenland et, à l'Est, elle monte des Canaries à la hauteur des côtes de France pour atteindre à peu près le milieu des côtes de Norwège. Ainsi que je l'ai indiqué, le Fou de Bassan n'a plus que quinze stations de nidification. On doit remarquer que ces stations sont toutes sur des îles ou rochers séparés de la terre ferme. Elles sont situées, dans les îles Britanniques, sur les côtes ouest, à l'exception du Bass-Bock. En Grande-Bretagne, ces stations sont les suivantes : Lundy Island, sur la côte nord du Devonshire (elle est à peu près abandonnée à présent), Grasholm, sur la côte du Pembrokeshire (P. de Galles). En Irlande, The Bull-Bock et The Skelligs. En Ecosse : le Bass-Bock, Ailsa craigs, les îles de Saint- Kilda; Sulisgeir, The Stack of Stack and Skerry. e Les autres stations de nidification hors de la Grande-Bre- tagne sont, sur les îles Feroë, aux Mygganaes, en Islande, à Sulusker, à Eldey et Grimsey. Au Canada, le Fou de Bassan niche aux Bird-Bocks et Bona- venture. M. Gurney étudie scrupuleusement chacune de ces stations et en fait l'historique en remontant jusqu'à l'an 1200. Nous ne le suivrons pas aussi loin et je me bornerai à con- stater combien est intéressante pour les ornithologistes cette histoire rétrospective qui suit, étape par étape, les progrès de l'ornithologie à travers les âges. Nos ancêtres vivaient beau- coup plus que nous dans l'intimité des Oiseaux, si je puis m'exprimer ainsi, mais ils les connaissaient moins et leurs artistes semblaient ignorer la façon de rendre fidèlement ceux dont ils prétendaient copier la forme et l'apparence. D'anciens LE FOU DE BASSAN 29> a ai en ta cq 3 o fa d o a o '5 ^3 o a; a P 296 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION dessins, reproduits dans le livre de M. Gurney, nous montrent des « Gannets » figurés dans les ouvrages de Martin, de Pon- toppidan et de Gesner, à la vue desquels on serait bien embar- rassé de se prononcer sur la question de savoir si les uns représentent un Goéland et les autres un Cormoran. Et quand on compare ces grossières ébauches aux photographies si par- faites illustrant le savant ouvrage de Fauteur moderne, on en arrive à regretter presque le progrès et à s'étonner qu'alors que les hommes ont pu progresser aussi complètement dans l'étude et la conquête des secrets de la nature, certains d'entre eux n'aient point hésité à se servir du progrès pour ramener le monde civilisé à un brusque retour en arrière et à un état de barbarie dont s'étaient déjà affranchis en partie les contem- porains des primitifs zoologistes du temps passé. La civilisation ne semble, en effet, avoir eu d'autre résultat que de permettre, sur une plus grande échelle, la destruction de tous les êtres animés, celle des Oiseaux, des animaux et hélas ! surtout, celle des hommes. La destruction des Oiseaux m'amène tout naturellement à parler de la statistique faite par M. Gurney à propos du nombre des Oiseaux. Quelle est l'espèce la plus nombreuse? C'est assez difficile à déterminer. Quelques-uns prétendent que c'est celle du Moineau {Passer domesticus), d'autres, celle de l'Alouette (Alauda arvensis), Darwin pensait que c'était celle du Pétrel fulmar (Fulmarus glucialis), d'autres du Mergule nain (Mergul- lus aile), de la Mouette tridactyle (Rissa tridactyla), du Guillemot commun (Uria troile). Mais les plus grandes probabilités sont en faveur du Macareux [Fratercula arclica) qui peut être con- sidéré comme l'Oiseau le plus nombreux d'Europe, bien qu'il ne ponde qu'un œuf. Dans l'hémisphère austral, l'espèce dominante serait le « Jac- kass Penguin » (Spheniscus demersus). Le Fou de Bassan, lui, représente, d'après les données de M. Gurney, un total de 101.000 individus adultes cantonnés dans chacune des stations de nidification. La plus célèbre de ces stations, celle d'où l'oiseau tire son nom, le Bass-Rock, ne compte plus que 6.500 habitants, alors que Saint-Kilda en abrite près de 30.000. Le Bass-Rock reste cependant la plus connue des stations du Fou de Bassan qui jouit, du reste, en Grande-Bretagne, d'une protection qui, je regrette d'être forcé de le dire, ne lui serait pas LE FOU DE BASSAN 297 assurée sur les eûtes françaises. Ce n'est pas que la présence des Fous de Bassan soit envisagée avec bienveillance par cer- tains riverains. Je me souviens avoir entendu au Congrès ornithologiste de Londres en 1905 un des membres de cette assemblée se plaindre du nombre des Fous de Bassan can- tonnés sur le Bass-Bock, qui souillent les rochers et détruisent une quantité considérable de poisson. Ces Oiseaux sont, en effet, très voraces et, contrairement aux Goélands, ils ne se nourrissent que de Poisson. Ce sont des plongeurs émérites qui consomment dans leur journée une quantité respectable de livres d'aliments. M. Gurney ne pense pas cependant qu'ils puissent être considérés comme nuisibles ; il leur attribue sur les mers le même rôle que celui imparti par la nature aux Oiseau*, de proie sur terre, chargés de main- tenir l'équilibre entre la surproduction de certaines espèces et leur destruction nécessaire. Le Fou de Bassan se prête volontiers à la domestication. M. Gurney en a gardé plusieurs sur son étang. A la condition de les nourrir suffisamment, il n'est pas difficile de les main- tenir en bonne santé ; on n'a à craindre, comme pour tous les Palmipèdes, que l'enflure des pieds auxquels ils sont très sujets en captivité. Ceux qu'a conservés M. Gurney se contentaient de huit pièces de Poisson de bonne taille par jour, Maquereaux ou Harengs pendant l'été; leur appétit croît avec le froid et, en hiver, il leur fallait au moins une dizaine de Poissons par jour. Ils attrapent aussi parfois des Oiseaux. Le Fou de Bassan se reproduit quelquefois en captivité. Il ne pond qu'un œuf. Cependant, on a trouvé quelquefois deux œufs dans certains nids. Dans plusieurs des stations de Fous de Bass;m on prend un certain nombre de leurs œufs, quelquefois pour les manger, plus souvent pour les vendre aux visiteurs. Autrefois on man- geait des Fous de Bassan, en Ecosse surtout, et Walter Scott, dans un de ses romans, nous a appris que dans les classes pauvres, les jours de fête, on mettait à la broche un Fou de Bassan qu'on désignait alors sous la pompeuse dénomination « d'Oie de Soland » (Soland goose). La chair de cet Oiseau sent cependant fortement le musc et on ne la considère plus main- tenant comme propre à l'alimentation. Bien que très protégés en Angleterre, pendant une certaine période où leur chasse est interdite, les Fous de Bassan paient 298 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION encore leur tribut aux chasseurs de mer amateurs du coup de feu et qui tirent les Fous de Bassan uniquement pour la triste satisfaction de tuer une créature qui vole ou qui souvent se laisse simplement aller au gré des flots. Combien il est plus intéressant d'observer les mœurs de ces oiseaux et de visiter les endroits sauvages, les îlots déserts où ils cherchent l'isole- ment et la tranquillité ! J'ai moi-même visité en Angleterre quelques-unes des stations où nichent les Oiseaux de mer. Je n'ai pas eu l'occasion d'y voir des Fous de Bassan, mais j'avais déjà lu avec beaucoup d'in- térêt ce qu'avaient écrit de ces Oiseaux MM. Kearton. Aussi, en étudiant l'ouvrage de M. Gurney, je me suis trouvé de nouveau transporté au milieu decesrochers isolés, battus parles vagues, que la mer semble avoir fait émerger de son sein uni- quement pour servir d'escale aux beaux Oiseaux qui sillonnent sa surface, inaccessibles en apparence à toutes les créatures qui n'ont point d'ailes, mais que savent cependant si bien escalader les « Cliff-Climbers », ces audacieux grimpeurs de rochers que j'ai pu voir à l'œuvre il y a quelques années. Et le temps a passé vite à lire un ouvrage considérable, fruit de longues et patientes recherches scientifiques et historiques, puisque le Fou de Bassan est un Oiseau « qui a une Histoire » : « The Gannet a bird ivith a History. » AU MAROC LES OISEAUX DU BLED Par MAGAUD DAUBUSSON. Suite et fin (1). Le 18 juillet, à 6 heures du matin, nous partîmes pour Marrakech qui est à 2G0 kilomètres de Casablanca. Une brume épaisse s'étendait sur le Bled. Au sortir de la ville, la route était encombrée de Chameaux, d'Anes et de Mules avec leur chargement ; car il se fait, par cette voie, un trafic très actif avec les régions du Sud. Notre automobile jeta quelque trouble (1) Voir Bulletin, page 265. AU MAROC : LES OISEAUX DU BLED 299 dans ces troupes d'animaux qui se mirent à fuir en désordre aux cris aigus et injurieux de leurs maîtres courant en tout sens pour les rattraper. Mais nous laissons bientôt derrière nous bêtes et gens affolés et filons à bonne allure, sans voir grand'chose du paysage à cause du brouillard, jusqu'à la casbah de Mediouna. Le soleil sort enfin des bruines matinales. De Mediouna à Ber-Rechid, centre agricole, nous traversons les cultures de fermes arabes importantes, des champs d'Orge dont la moisson est terminée et des champs de Maïs. Nous sortons des plaines d'Orge pour entrer dans une contrée plus accidentée, et après avoir franchi une ligne de collines nous arrivons à Settat. Settat est la seule agglomération, à l'intérieur de laChaouia, qui mérite le nom de ville. Elle doit son importance à sa situa- tion sur la grande route de Casablanca à Marrakech, en un point où convergent toutes les routes venant du Sud et du Sud-est, et son origine à la source qui existe dans la ville elle- même. Settat a de l'eau en abondance, soit par cette source, soit par deux autres assez rapprochées pour être employées à son alimentation et de nombreux puits. Quant à l'oued qui la traverse, il est presque toujours à sec, les pluies d'hiver le font parfois démesurément grossir et le rendent infranchis- sable, mais ces crues sont irrégulières et de courte durée. Ayant de l'eau, Settat a des jardins, arrosés au moyen de seguias ou norias actionnées par des manèges à Chameaux qui montent l'eau dans des bassins. Les arbres toutefois sont très rares, on en trouve quelques-uns dans les jardins et autour des sources. Ce sont surtout des Figuiers et des Grenadiers, puis des Oli- viers, des Caroubiers et quelques Palmiers. Autour de Settat il n'y a pour ainsi dire pas d'arbres, les grandes étendues culti- vées n'y sont même pas coupées de buissons. La campagne de Settat fait songer à la Beauce, et sa richesse agricole donne l'im- pression qu'elle est aussi bien cultivée qu'on pourrait le faire en Europe. Cependant l'indigène ne se donne pas grand mal, mais les qualités exceptionnelles de ces terres noires, les « tirs », qui conservent l'humidité, affirment une fertilité presque iné- puisable. La faune ornithologique des environs de Settat est pauvre, quelques compagnies de Perdrix et, à certaines époques, des Oiseaux de passage. Le manque de remise ne permet guère au gibier de se développer abondamment. Les Rapaces sont rares. 300 BULLETIN" DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION Quand on quitte les grasses plaines de Settat, on entre dans une région aride, accidentée, dont le sol rouge est tapissé d'herbes rares et d*une brousse courte et clairsemée. Une troupe de Gaugas s'envole à notre approche. Nous faisons halte à Mechra-ben-Ahbnu où il y a un camp militaire et une sorte d'auberge. Dans le camp habitent des tirailleurs sénégalais avec leurs femmes, comme de coutume. Nous déjeunons dans l'auberge, baraque en planches recou- verte en tôle ondulée où il fait une température de +44 degrés centigrades. De très petits œufs qu'on aurait pu certainement ce jour-là faire cuire au soleil et des morceaux d'une viande coriace, une boisson tiède, conslituent notre repas. En dépit de la chaleur accablante, nous nous remettons en route. Nous faillîmes être les victimes de notre imprudence. Assaillis par un coup de siroco d'une extrême violence, la cha- leur devint terrible, et un de nos compagnons fut frappé d'une insolation pendant que nous remplacions un pneumatique qui venait d'éclater. Des kilomètres et des kilomètres dans un massif montagneux désolé pour prendre l'interminable plaine de Ben-Guérir. C'est dans ce trajet que j'ai vu la Grande Outarde dont j'ai parlé plus haut. Nous arrivons enfin au camp de Ben-Guérir et nous pouvons transporter notre malade à l'ambulance où les soins empressés d'un jeune médecin-major lui sauvèrent la vie. Impossible d'aller plus loin. Le siroco continue de souffler avec impétuosité et nous brûle. Le thermomètre marque -f- 57 degrés à l'ombre. Nous décidons de passer la nuit à la cantine. Au déclin du jour, je vois passer des Gangas qui vont à l'abreuvoir, des Courvites et des OEdicnèmes. La nuit, dont l'intolérable chaleur éloigne le sommeil, j'entends crier les OEdicnèmes (1) de toute part. A pointe d'aube, il en passe au-dessus de l'étroite bicoque en planches où j'ai si mal dormi. Au moment du départ, deux Courvites viennent s'abattre à quelques mètres de moi et se mettent à courir de côté et d'autre avec une vélocité affairée, dans un terrain caillouteux. On a peine à croire que cette terre sèche et nue se couvrira (1) Œdicnemus c?'epitci7is Temm. L'OEdicoème criard est plus commun en France dans le midi que dans le nord. Cependant, je l'ai rencontré plus d'une fois dans les dunes de Picardie où il niche. AU MAROC : LES OISEAUX DU BLED 301 de verdure et de fleurs au printemps. On médit, d'ailleurs, que la plaine de Ben-Guérir garde, lorsque le bled s'épanouit par- tout en floraisons, un peu de son aspect dur et aride. Sur de grands espaces, c'est à peine si l'herbe reverdit et rien ne fleurit. Quand nous la traversons, en juillet, elle est tristement dénudée, pas même des Palmiers nains, mais en revanche des cailloux et des chardons. Tout le long de la piste, nous faisons lever des Gangas et des Courvites. 11 y a, au Maroc, deux espèces de Gangas : le Ganga cata (Pterocles alchata Licht.) et le Ganga unibande (Pterocles arenarius Temm ). Le Courvite (Cursorius gallicus Bp.), au plumage d'une belle couleur isabelle, se trouve dans tout le nord de l'Afrique, de la mer Rouge aux îles Canaries. Je l'ai rencontré maintes fois en Egypte, courant sur le sable du désert dont la teinte s'harmonise avec celle de sa livrée. Au Maroc, il se tient dans les parties les plus arides du Bled. Devant nous, se déroule une plaine à n'en plus finir, d'une désolation sans bornes, venant mourir au pied du Djebilet qui ferme l'horizon. Cette petite chaîne de montagnes ne nous paraît pas lointaine et nous croyons l'atteindre bientôt, mais elle semble fuir à mesure que nous approchons comme les visions des mirages. Enfin nous la franchissons au col de Sidi- bou-Othmane, et de l'autre versant nous apercevons Marrakech. Marrakech ou Maroc, la capitale du Sud, s'étend sur la rive gauche et à quelques kilomètres du Tensif, au milieu d'une immense palmeraie, dans une plaine fertile, limitée par les chaînes du Haut-Atlas. Les historiens arabes rapportent qu'au début de l'an 454 de l'hégire (1062 de l'ère chrétienne) Yousef ben Tachefine, le premier des Almoravides, fonda la ville sur un emplacement acheté aux Meçamda, une des plus puissantes tribus de l'époque. Yousef y installa ses tentes en poil de chameaux, fit construire une mosquée et une petite casbah pour y enfermer ses trésors et le butin qu'il rapportait du Sahara. Ce lieu s'ap- pelait Marrakeck et ce nom signifiait dans le langage des Meçamda « Marche vite ». L'endroit était en effet un repaire de brigands et ceux qui le traversaient disaient à leurs com- pagnons déroule de se hâter : Marrakech. Yousef ben Tachefine fit élever plus t;»rd de superbes palais, dont, d'ailleurs, il ne reste aucune trace, mais ce fut son fils 302 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION qui entoura la ville cTuDe enceinte fortifiée. La dynastie des Almoravides s'éteignit en 1144. Celle des Almohades, qui lui succéda durant près d'un siècle, fit construire la célèbre mos- quée de la Koutoubia, contemporaine de la Giralda de Séville et de la tour Hassan de Rabat. Résidence des sultans du Maroc, comme Fez et Meknès, capitale politique et religieuse du Sud marocain, entrepôt des marchandises de l'extrême sud et du Tafilet, Marrakech fut à son apogée sous le règne de Mouley Hassan, de 1872 à 1894, qui la dota de palais magni- fiques et y aménagea des parcs somptueux, tandis que les grands féodaux, les puissants seigneurs du Sud y bâtissaient des demeures plus opulentes encore, telles que la Baia de Ba Amed, son grand vizir. Aujourd'hui, Marrakech est déchue de son ancienne splen- deur. Ses monuments sont décrépits ou en ruines. Mais, quand on la voit de l'extérieur et dans son ensemble, comme à la sortie du Djebilet, sa masse imposante assise dans sa vaste palmeraie et son enceinte de murs crénelés lui donnent encore un abord grandiose. Ses maisons bâties en terre rouge, son aspect soudanais, en font la ville la plus curieuse peut-être du Maroc. Marrakech est la ville rouge comme Casablanca est la ville blanche. La porte Doukala par laquelle nous entrons sert d'habitation . à une nombreuse colonie de Martinets à croupion blanc. Ici, ils nichent dans les trous des murs, à l'intérieur de la porte. Je n'en ai pas vu dans d'autres endroits de la ville, mais je n'ai pas suivi tout le développement des murailles qui serpentent sur près de 15 kilomètres. Des Milans noirs planent en grand nombre aux abords de Bab Doukala. Un vol de Hérons garde- bœufs (Bubulcus ibis Bp.) longe la palmeraie, une bande d'Etourneaux flotte dans l'air comme une banderole agitée par le vent. Les jardins qui avoisinent Marrakech sont plantés d'Oliviers, de Grenadiers, de Figuiers, d'Orangers, où s'entrelacent les Vignes, les Jasmins et les Roses, vergers peuplés de Merles, de Tourterelles et de petits Passereaux représentant des races locales de nos Passereaux d'Europe. En allant visiter l'Aguedal, ancien palais du sultan, aujour- d'hui hôpital militaire, nous photographions un nid de Cigo- gnes placé au sommet d'une tour. Deux jeunes se dressent dans le nid, puis les parents apparaissent. L'Aguedal a de beaux AU MAROC : LES OISEAUX DU BLED 303 jardins un peu tristes. Sur un grand bassin, qui donne une impression d'abandon et de délaissement, nagent des Grèbes huppés (Podiceps cristatus Lath.) et des Grèbes castagneux (Podiceps minor Lath.) qui plongent à notre approche. Une Mouette tourne au-dessus de ce petit lac endormi. Au retour nous voyons passer un vol de Garde-bœufs. La blancheur de leur plumage semble bleuir en frôlant la tête des Palmiers. C'est le soir, de tous les chemins débouchent des troupeaux de Chèvres et de Vaches aux mamelles gonflées, qui entrent dans la ville conduits par des Arabes au teint basané montés sur de petits Anes. D'autres, à pied, poussent devant eux quel- que animal entêté. Bêtes et gens s'engouffrent comme un flot sous l'arche de la porte Doukala. Près de nous, sur une petite éminence, un Arabe prie. Aux derniers rayons du soleil la ville apparaît toute rose, d'un rose fané, et les montagnes de l'horizon sont mauves. Des Milans planent encore à la chute du jour. Le lendemain nous nous rendîmes à la Baia, résidence géné- rale actuelle, dont les salles rappellent celles de. l'Alhambra, puis au petit l'Aguedal, verger d'Orangers, de Citronniers, de Figuiers, d'Amandiers, de Pêchers, d'Abricotiers. Des Milans tournent dans l'air, des Tourterelles roucoulent doucement, des Merles traversent les massifs, un Chanteur aux sons de flûte, si bien caché dans la verdure que je n'ai pu l'y découvrir, égrène ses notes de cristal (1). Malgré les fleurs et la musique des Oiseaux, ce jardin est d'une indicible mélancolie comme tous les jardins du Moghreb. Vers le soir j'erre dans la palmeraie. J'y Rencontre des Garde-bœufs et une Cigogne dans un endroit humide où coule un peu d'eau, d'autres Hérons dans une sorte de petit marécage où paissent des Vaches, des Chardonnerets, des Corneilles et des Rolliers (Coracias garrula Linn.). Ces jolis Oiseaux dont le costume s'orne des couleurs de l'aigue-marine, de violet et de bleu sont assez communs dans cette palmeraie. J'ai photogra- phié deux jeunes pris au nid appartenant au propriétaire de l'hôtel où nous sommes descendus. Dans un jardin d'Oliviers, de Coignassiers, de Figuiers et de Vignes soutenues par des toits de Roseaux, j'ai trouvé une (î) Cet admirable chanteur était peut-être le Téléphone tschagra {Tele- phonus tschagra Bp.) assez commun au Maroc. 304 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION grande quantité de Chardonnerets et de Linottes {Cannabina linota G. R. Gray). Le Chardonneret est très répandu au Maroc. A Marrakech, comme à Casablanca,, on le voit souvent prisonnier dans de très petites cages suspendues à l'entrée des maisons indi- gènes. Cet Oiseau appartient à une sous-espèce un peu diffé- rente du Chardonneret de France et qu'il faut rapporter sans doute à la variété Africona décrite par Harterl. Cette sous- espèce est d'ailleurs donnée comme propre au Sud de l'Espagne, à l'Algérie, à la Tunisie et au Maroc. Ces variations se mani- festent aussi, comme je l'ai dit, chez la plupart des Passereaux qui représentent nos espèces d'Europe. Parmi ces Passereaux il en est un que l'on connaît dans tout le Maroc sous le nom d'Oiseau de Marrakech. Il est à peu près de la grosseur d'un Pinson, m'avait-on dit à Casablanca, il a le haut du corps bleu et le dos roux. Il fréquente les. cours et les jardins des maisons, se mêle aux Moineaux et comme eux se montre très familier. Le matin il chante sur les terrasses une phrase couute et claire, et son cri d'appel est vibrant et un peu aigu. En entrant dans le petit jardin qui précède l'hôtel où nous venions chercher un gîte, au milieu des Moineaux, je vis sur un mur l'Oiseau bleu de Marrakech. C'est une sorte de Bruant (Emberiza sfriolata LichL), la Fringillaire striolée (Fringillaria slriolata Swains.). Cet Oiseau a, en effet, la tète, le cou et la poi- trine d'un cendré bleuâtre, variés détaches longitudinales noires et les partie supérieures du corps d'un roux rougeâtre. On dit' qu'il se montre fréquemment dans le sud de l'Espagne. Formes de transition, les Fringillaires semblent marquer le passage des Embériziens aux Frigilliens. Nou« quittâmes Marrakech un matin, à l'aube, et assistâmes au merveilleux spectacle du lever du soleil dans la palmeraie incendiée de ses rayons. Des vols de lierons croisèrent notre route, un Rollier matinal nous regarda passer du haut de la tête d'un Palmier, des Milans planaient et d'innombrables Tourterelles sillonnaient les airs. Quand nous eûmes retrouvé la plaine de Ben-Guérir, nous retrouvâmes aussi les Gangas et les Courvites. A gauche et à droite de la piste de petites troupes de ces Oiseaux, arrêtées parmi les herbes sèches, se confondaient si complètement avec la couleur du sol qu'il était presque. impossible de les voir, les AU MAROC : LES OISEAUX DU BLED 305 Gangas surtout, on ne s'apercevait de leur présence que lors- qu'ils s'envolaient. Dans la soirée, nous étions - de retour à Casablanca, et en traversant un terrain complètement dénudé avoisinant la plage nous rencontrâmes une grande bande de Gravelots de Kent {Charadrius cantianus Lath,)qui venaient sans doute d'arriver (30 juillet). On nous attendait à Fedhala aux premiers jours d'août. Entre temps, nous fimes une excursion à la casbah de Man- souria, à 35 kilomètres de Casablanca, sur la route de Rabat. La casbah de Mansouria tombe en ruines, mais il reste encore des débris assez importants pour témoigner de sa gran- deur passée. Des Cigognes qui ont bâti leurs nids au sommet du donjon et sur une tourelle à demi écroulée, des Chevêches sur les murs en sont aujourd'hui les seuls habitants. Plus loin, dans les Jujubiers, des Merles; dans les dunes de la côte, des Glaréoles et une Huppe (Upupa epops Linn.) arrivée récem- ment d'Europe. J'avais fait lever une de ces voyageuses le matin même à Casablanca, à peu de distance de la mer (1). Mansouria est bordée de rochers, et dans des grottes où les lames se pré- cipitent avec fracas des colonies de Bisets (Columba livia Briss.) se sont établies. On voit ces Oiseaux aller et venir des rochers à l'intérieur des terres. Au retour, nous rencontrâmes des vols de Hérons et à l'em- bouchure de l'oued une Cigogne sur le sable. Le 8 août, nous arrivâmes à Fedhala qui est à 25 kilomètres environ de Casablanca, sur le bord de la mer. Une Compagnie française y construit en ce moment un port. Je passai là une huitaine de jours chez l'administrateur de la Compagnie, M. Montagne, que je remercie ici très chaleureusement de son aimable hospitalité. Les premiers Oiseaux que je vis furent des Garde-bo'ufs, décidément très communs en certains endroits du Maroc. A l'entrée de Fedhala un vol considérable de ces Oiseaux s'abattit au milieu d'un troupeau de Bœufs, quelques- uns se perchèrent sur le dos de ces animaux, les autres se posèrent à terre autour d'eux. On voyait leur tête et leur cou blanc se dresser parmi les Palmiers nains. Le soir, les Hérons viennent sur les bords verdoyants de l'oued Mellah qui est (1) La Huppe niche cependant au Maroc. BULL. soc. n.\t. accl. fr. 1913. — 20 306 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION proche, volent par groupes le long des bras de l'oued et dispa- raissent entre les berges (1). Les abords de cet oued forment un marécage couvert d'herbe et coupé d'arroyos, que les eaux envahissent partout en hiver. On y trouve alors beaucoup d'Échassiers et de Palmipèdes. Dans la première quinzaine d'août et même à la fin de juillet apparaissent déjà les pointes d'avant-garde des migrateurs. C'est à l'embouchure de l'oued Mellah que l'on observe le mieux ces Echassiers. Le 9 août, je constate la présence de Guignettes (Actitis hypoleucos Boie), de Tournepierres (Strep- silas interpres 111.), de Chevaliers gambettes (Tolanus calidris Bechs.), de Courlis (Numenius arquata Lath.), de Gravelots de Kent. Le lendemain, je rencontre au même lieu ces mêmes espèces, sans que le nombre des individus ait sensiblement varié, et en plus une Huppe dans la dune et un Martin- Pêcheur (Alcedo ispida Linn.) qui file au ras de l'eau. Le 11, au matin, dans la brume épaisse qui couvre la mer, dont les lames brisent avec violence contre les rochers, j'entends le cri si reconnaissable des Sternes Pierre-Garins ou Hirondelles {Sterna hirundo Linn.). Je les retrouve dans l'après-midi volant au-dessus de l'oued Mellah et de la côte. De rares Goélands commencent à se montrer. Le 12, une bande considérable de Chevaliers gambettes, le 13, une petite troupe d'Huîtriers (Hcnnalopus oslralegus Linn.) et encore des Sternes, le 14 nou- veau passage de Chevaliers gambettes, Sternes tournant dans l'air en criant. Trois Cresserelles posées à terre dans un endroit caillouteux. Le mouvement d'Oiseaux qui s'accentue à cette époque en Europe voit des têtes de colonnes arriver au Maroc. Fedhala possède comme Mansouria des grottes à Bisets. La mer y déferle avec un bruit de canon, et les Pigeons qui entrent et sortent sont éclaboussés par l'eau des vagues qui retombe en pluie. Lorsque je rentrai à Casablanca le soir du quinzième jour d'août, à l'heure où le soleil s'abîme au-dessous de l'horizon, (1) Un éleveur de Mazagan me dit qu'il a dans sa ferme six Garde-bœufs apprivoisés. Non seulement ils accompagnent les Bœufs au pâturage, mais ils se tienuent aussi dans l'étable, et depuis le bétail n'est plus inquiété par les Insectes qui, avant, le tourmentaient. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS 307 des nuées de Martinets, aux cris inapaisés, volaient en tour- billons noirs d'ans un ciel rose. Je revins en France, à la fin d'août. L'état de guerre dans lequel nous nous trouvons, qui a eu sa répercussion au Maroc, m'a forcé d'interrompre mon voyage et les recherches ornitho- logiques que j'avais entreprises. Juillet et août 1914. CHRONIQUE GÉNÉRALE ET FAITS DIVERS Notre collègue, Mme Th. Delacour, en l'absence de son fils, mobilisé dès le premier jour de la guerre, continue à s'occuper de l'importante collection d'Oiseaux de Villers-Bretonneux. Grâce à ses soins, malgré les difficultés de tous genres, dans une région qui a été envahie et est encore très rapprochée du front, les volières sont en parfait état; bien peu d'Oiseaux sont morts, beaucoup ont reproduit. Parmi ces derniers, il convient de signaler particulièrement des naissances qui font le plus grand honneur à Mu"" Th. Dela- cour, celles de deux Touracous (Turacus Buffoni). L'un est né le 10 août, l'autre le 12; le plus vieux est très vigoureux et est sorti du nid le o septembre; il était encore couvert de duvet noir; actuellement (24 septembre), il a des plumes noires ou très foncées et on commence à voir les plumes vertes de la tête ainsi que les plumes cerise des ailes ; il vole très bien. Il rentre le soir au nid auprès de son frère et la mère les couve tous les deux. Le plus jeune doit être estropié ; il est beaucoup plus petit et ne se tient pas sur ses pattes; il n'a pas l'air malade, mais il ne peut, cependant, sortir du nid. Déjà l'an dernier les Touracous avaient élevé un jeune jus- qu'à l'âge de deux mois ; mais à cause de la saison trop avancée, il n'avait jamais été vigoureux ; il était estropié et finit par mourir. Les Touracous ont fait trois autres couvées en 1914 et en 1915, qui ne réussirent pas, les parents tuant les jeunes au bout d'une dizaine de jours pour reproduire aussitôt. 308 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Nous croyons que c'est la première fois que des Touracous sont nés en Europe et nous félicitons bien vivement Mme Dela- cour, « la lady aux Oiseaux » comme l'appellent les officiers anglais, qui a obtenu ce succès en pleine guerre. * Nous avons reçu des nouvelles du comte Joseph Potocki, datées de Wolhynie. Au 20 août dernier, notre collègue et la comtesse Potocka, étaient en bonne santé dans leur résidence d'Antoniny. A Pilawin (1), les grandes réserves d'animaux étaient en pleine prospérité. Jusqu'à présent, toute cette région n'a pas subi les horreurs de l'invasion ; par contre, le palais du comte J. Potocki, à Varsovie, est aux mains de l'ennemi. C'est avec une douloureuse émotion que nous suivons les péripéties de la lutte en Pologne; notre anxiété se double aux souvenirs laissés par le bienveillant accueil, qu'en 1910, le comte J. Potocki avait réservé à la délégation de la Société d'Acclimatation. Là où nous avions vu le calme et la richesse, rien n'existe plus ; les champs fertiles sont bouleversés ; les villes et les villages incendiés; ce malheureux pays, qui depuis douze mois supporte le fardeau de cette formidable lutte est réduit à l'état de dévastation ; la pauvre Pologne, presque entière, n'est plus qu'un cimetière. Heureusement, les nouvelles nous arrivent plus favorables et nos valeureux alliés semblent devoir reprendre une vigou- reuse offensive. Puisse la fière devise des Potocki : « Scutum opponebat scutis », qui s'affirme si vaillamment aujourd'hui porter, à nouveau, bonheur à notre collègue et lui donner, après la définitive victoire, toutes les joies solennellement pro- mises. * La Station entomologique de la Faculté des Sciences de Rennes fournit gratuitement tous les renseignements concer- nant les moyens à employer pour détruire les insectes nui- sibles. (1) Pilawin et les Réserves du comte J. Potocki, par M. Loyer, Bulletin, 1911, p. 33 et suivantes. BIBLIOGRAPHIE 309 Écrire à M. F. Guitel, professeur à la Faculté des Sciences de Rennes en lui envoyant le nom ou un échantillon de l'insecte à détruire. BIBLIOGRAPHIE La défense contre l'Ophidisme, par le Dr Brazîl, directeur de l'Institut sérothérapique de Butantan. Sous le titre qui précède, M. le Dr Victor Brazil, fondateur et directeur de l'Institut sérothérapique de Butantan, a récem- ment publié, à Sâo-Paulo (Brésil), un important ouvrage sur les Serpents venimeux et sur la lutte contre ces redoutables Ophidiens, ouvrage dont il vient d'offrir un exemplaire à la bibliothèque de notre Société. Il paraît intéressant de donner ici une analyse de ce très remarquable travail, qui abonde en renseignements d'une haute valeur scientifique et pratique, et qui est certainement appelé à rendre de très grands ser- vices (1). Le Brésil est une des régions du globe les plus infestées de Serpents venimeux. On n'évalue pas à moins d'une vingtaine de mille le nombre annuel des accidents causés par ces Ophi- diens, accidents sur lesquels près de o.OOO (i.800 en moyenne) entraînent la mort des personnes atteintes. D'après les relevés faits, la plupart des victimes sont des individus vigoureux, en pleine activité productive. Or, si, comme le signale M. Brazil, « on fixe à 5.000 contos (environ 8.333 francs), le prix de la vie de chaque individu, c'est au chiure de 24.000 contos (soit envi- ron 40 millions de francs) que, s'élève au Brésil, le préjudice matériel causé annuellement par l'ophidisme; et cela pour ne parler que des vies humaines, c'est-à-dire sans compter les pertes que représentent les accidents portant sur les animaux, pertes qui doivent être énormes. » C'est l'agriculture qui paie le plus lourd tribut, attendu que les victimes sont presque toujours d'humbles travailleurs des (1) Le Bulletin (année 1912, p. 113) a déjà enregistré quelques rensei- gnements fournis sur l'Institut de Butantan, par M. Ad. Rivière, dans une lettre adressée à M. Magaud d'Aubusson. 310 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION champs (1). Il en résulte que les accidents qui surviennent passent pour ainsi dire inaperçus, et n'impressionnent pas l'opinion publique; ce qui explique comment, pendant long- temps, rien ne fut fait pour la défense contre les Serpents. C'est seulement il y a dix-huit ans à peine que de sérieuses études ont été entreprises sur cette si importante question, à laquelle le créateur de l'Institut de-Butantan s'est consacré, avec un zèle digne des plus grands éloges. L'établissement, admirable- ment installé, et pourvu de très beaux laboratoires, possède plusieurs parcs à Serpents, qui, permettant de loger, en grand nombre, des sujets des différentes espèces contre lesquelles il s'agit de combattre, fournissent le moyen de récolter les quan- tités de venin nécessaires à la préparation des sérums anti- venimeux. Grâce à son active propagande, l'Institut a déjà obtenu une diminution notable de la mortalité par ophidisme. Rares, en effet, sont aujourd'hui les fazende-iros (propriétaires d'établissements agricoles) qui n'ont pas entendu parler du traitement sérothérapique des morsures de Serpents, et rares également sont les fazendas (fermes) qui ne possèdent pas de sérum accompagné d'une seringue à injections pour porter les premiers secours en cas d'accident. Un service est d'ailleurs organisé à l'Institut pour l'envoi gratuit de sérum et de seringues, en échange des Serpents adressés à l'établissement. Celui-ci envoie, de plus, à tous les fazendeiros qui désirent prendre part à ces échanges, des lacets spéciaux pour la capture des Serpents, des caisses pour le transport de ces Reptiles, et des étiquettes officielles qui, apposées sur les caisses, donnent droit à l'expédition gratuite par les chemins de fer. Les lacets employés consistent en une lanière de cuir, montée sur un manche en bois qui, au moyen d'un anneau métallique dont il est muni, peut se fixer à un bâton quelconque, au moment même où l'on a à s'en servir. Pour capturer un Ser- (1) « Il y aurait, dit le Dr Brazil, une diminution sensible dans le nom- bre des accidents ophidiens, si l'on pouvait convaincre les travailleurs des champs de l'utilité du soulier et de jambières primitives, faites tout simplement d'un morceau de toile d'emballage ». Ce moyen de protec- tion suffirait pour éviter beaucoup de morsures. La statistique montre, en. effet, que, sur 75 p. 100 des cas, c'est aux pieds ou aux jambes que la victime est atteinte. Dans une plantation où les accidents n'étaient pas rares, il ne s'est pas produit un seul cas depuis quatre ans, le propriétaire veillant maintenant à ce que tous les travailleurs portent des chaussures. BIBLIOGRAPHIE 311 pent, on saisit celui-ci en arrière de la tête, avec la lanière de cuir; le Reptile se débat bien un peu; mais, quand on élève le lacet, il laisse pendre le corps, qu'on introduit alors sans peine dans la caisse de transport. L'opération peut être exécutée sans le moindre danger, attendu que le Serpent venimeux ne bondit pas, comme le croient beaucoup de personnes. Pour attaquer ou se défendre, il a besoin de s'enrouler et de s'appuyer sur la partie postérieure de son corps; de sorte que, quand il lutte, il ne peut atteindre avec sa tête qu'à une distance tout au plus égale à la moitié de sa longueur totale. Le nombre des agriculteurs qui se sont mis en relations avec l'Institut, ne dépassait pas une demi-douzaine, au début; il atteint actuellement 2.000. La quantité de Serpents reçus par l'établissement, très faible tout d'abord, s'est élevée, dans ces derniers temps, à un peu plus de 5.000 par an, ce qui fournit d'abondants matériaux pour les travaux des labora- toires, et représente la distribution d'au moins 5.000 ampoules de venin, entre les mains de personnes probablement appelées à s'en servir. Le volume du Dr Brazil (de 302 pages grand in-octavo) com- prend trois parties, dont la première, qui traite des Serpents en général, consacre un chapitre à la biologie de ces Ophi- diens, à leurs moyens d'attaque et de défense, etc., et signale, chemin faisant, les nombreuses erreurs et superstitions qui ont longtemps existé et subsistent même encore aujourd'hui, dans beaucoup de régions, sur les mœurs de ces Reptiles, sur leur genre de vie, etc. Le chapitre suivant s'occupe de la classifica- •tion des Serpents, en exposant les caractères distinclifs des principales familles, et en donnant, avec une description détaillée, des renseignements sur les habitudes particulières et le degré de nocuité des espèces brésiliennes les plus dange- reuses, dont la plupart appartiennent au genre Lachesis. Une autre espèce, très redoutable, elle aussi, appartient au genre Crotale, c'est-à-dire au groupe des Serpents à sonnettes, dont dix espèces habitent l'Amérique du Nord, et une autre l'Amé- rique du Sud. Il s'agit du Crotalus terrifiais Linn., qui abonde partout au Brésil, principalement dans quelques États du Nord; c'est l'espèce dont il est le plus souvent fait envoi à l'Institut de Butantan : sur un total de 4.744 Serpents expédiés à l'éta- blissement pendant l'année 1912, 1.737 étaient des Serpents à sonnettes. 312 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION L'étude des venins de Serpents, des caractères physiques et chimiques de ces substances, de leur mode d'action sur le sang, du degré de susceptibilité des diverses espèces animales à l'empoisonnement ophidique, etc., font l'objet d'un troisième chapitre, qui n'est pas le moins intéressant du volume. La deuxième partie de l'ouvrage traite de la prophylaxie de l'ophidisme, c'est-à-dire des moyens d'éviter ou de diminuer le nombre des accidents ophidiques. Enfin, la troisième partie, principalement consacrée au trai- tement des morsures de Serpents venimeux, décrit la prépara- tion des sérums antiophidiques, établit la valeur préventive et curative du traitement sérothérapique, et rapporte un grand nombre d'observations qui font ressortir l'importance des résultats pratiques obtenus. On y trouve, en outre, indiqué, d'une façon détaillée, comment il convient de traiter les cas de morsure de Serpent. Une excellente bibliographie, fort intéressante à consulter, termine le volume, qu'illustrent 28 planches hors texte, exécu- tées avec le plus grand soin ; la plupart d'entre elles, représen- tant les Serpents décrits dans le texte, sont en couleurs. Comme le fait très judicieusement remarquer l'éminent directeur de l'Institut de Butantan, ce n'est que par l'étude complète de la biologie des Serpents qu'il est possible d'arriver à découvrir les meilleurs moyens d'éviter les accidents causés par ces animaux. S'il importe de savoir distinguer, au premier coup d'œil, d'après leurs caractères extérieurs, les espèces venimeuses de celles qui ne le sont pas, ou qu'il peut même être utile de protéger (car certains Serpents font une chasse active aux espèces dangereuses), il est non moins nécessaire de connaître exactement l'habitat de tous ces différents Ophidiens, et d'être complètement renseigné sur leur genre de nourriture, sur leurs ennemis naturels, etc. « Plus seront avancées nos connaissances sur la biologie des Serpents, dit le Dr Brazil, plus grande sera notre victoire dans la défense prophylactique. » C'est une étude approfondie des venins « qui a ouvert de nou- veaux horizons à la thérapeutique de l'empoisonnement ophi- dique, en établissant, sur des bases scientifiques, le traitement demeuré longtemps à la merci du charlatanisme et de la croyance populaire ». Malgré les recherches activement poursuivies à Butantan, il reste encore beaucoup à apprendre sur le compte des Serpents BIBLIOGRAPHIE 313 brésiliens, dont on ne relève pas moins de 34 espèces, et qui diffèrent beaucoup entre eux par leurs babitudes, leurs allures, etc. La plupart des non venimeux se meuvent avec rapidité, et il est parfois difficile de s'en saisir. Quand ils sont menacés, ils cherchent à fuir et à se cacher le plus vite possible au milieu du feuillage, ou bien cherchent à mordre pour se défendre (1). Bien moins vifs que les autres, les Serpents venimeux ne se meuvent qu'avec une certaine lenteur. S'ils sont surpris pen- dant qu'ils se déplacent, et s'ils pressentent quelque danger, on les voit d'ordinaire s'arrêter et s'enrouler en attitude de défense. « Ces animaux, dit le Dr Brazil, ont été dotés par la nature d'un appareil inoculateur de venin, non pour faire du mal à l'homme ni aux grands animaux, mais pour tuer les petits Mammifères dont ils se nourrissent. Comme ce sont des animaux lents et peu rapides, ils ne pourraient pas pourvoir à leur nourriture ; la nuit, ils quittent doucement et avec pré- caution leur cachette pour aller à la recherche des endroits où ils pourront rencontrer leurs victimes, lesquelles sont d'ordi- naire des Rats (2) ou des Préas (espèce de Rongeurs ressem- blant au Cobaye). Après avoir observé prudemment, ils se placent en position convenable, en s'enroulant au bord du che- min ou du passage que doivent suivre les proies. Au moment où la victime passe, le Serpent s'élance et atteint le petit Ron- (1) Il en est, toutefois, qui ne mordent jamais, même quand ils sont maltraités. Vient-on à les saisir avec la main, comme unique moyen de défense, ils cherchent à cacher la tête. Plusieurs Serpents brésiliens qui se nourrissent exclusivement d'autres Ophidiens, t'attaquent principale- ment aux espèces venimeuses. Tel est, en particulier, le Mussurana (Oxyrhopus cloelia), qui, d'après les observations faites à Butantan, est absolument insensible à la morsure des Crotales et des Lachésis, et qui ne craint pas de s'attaquer à des sujets même beaucoup plus gros que lui. « 11 s'agit, dit le D%Brazil, d'une espèce extrêmement utile à l'homme et destinée à jouer un rôle important dans la défense contre l'ophidisme. Elle devra être rigoureusement protégée par tous les propriétaires ruraux qui, après l'avoir fait connaître à leurs travailleurs, devront défendre énergiquement, sous peine d'amende, de donner la mort aux individus qu'on rencontrera par hasard. » (2) On sait que les Rats abondent et se multiplient d'une façon extraor- dinaire autour des habitations où des restes d'aliments sont jetés sans précaution, et c'est précisément une des causes qui attirent parfois les Serpents dans les plantations. Il importe donc de soustraire aux Rats tout ce qui peut leur servir de nourriture. « Faire la guerre aux Rats, dit le Dr Brazil, c'est la faire également aux Serpents. » 314 BULLETIN DE LA SOCIETE NATIONALE D ACCLIMATATION geur en lui inoculant une dose de venin presque toujours fou- droyante pour un animal d'aussi petite taille. Quelques moments après, sûr de l'efficacité de ses armes, et tâlant avec sa langue bifide, il recherche sa victime, qu'il rencontre morte ou dans les dernières convulsions de l'agonie, .et en commence la déglutition. » Nous n'avons pas à rappeler ici que, contrairement à ce que croient encore beaucoup de personnes peu instruites, la langue ne sert nullement au Serpent pour produire des blessures et inoculer du venin ; elle n'est, chez ce Reptile, qu'un organe du toucher. C'est pour reconnaître le terrain sur lequel il glisse doucement, ou pour se rendre compte d'un danger qui le menace ou de la proie qu'il épie, que le Serpent darde conti- nuellement sa langue bifide. Celle-ci est extraordinairement flexible ou extensible, de manière que l'animal peut la projeter, dans toutes les directions, à quelque distance en dehors de la bouche. Ce sont des dents d'une conformation toute particulière qui permettent aux Serpents venimeux d'utiliser le redoutable moyen d'attaque ou de défense dont la nature les a pourvus. Chez certaines espèces (qui constituent le groupe dit des Opi- sthoglyphes), de chaque côté de la bouche, se trouve une dent, plus développée que les autres, qui présente à sa face anté- rieure un sillon ou canal ouvert, par lequel, au moment où se produit la morsure, vient s'écouler, dans la blessure faite, une certaine quantité de venin qui provient d'une glande spéciale, en forme d'amande, et dont le canal excréteur débouche au sommet de la dent. Bien que disposant ainsi d'un appareil ino- culateur de venin, les Serpents de ce groupe ne doivent pas être considérés comme dangereux pour l'homme et les grands animaux, attendu que la position même de l'appareil ne per- met pas au Reptile de faire fonctionner efficacement cette arme au moment où il mord avec rapidité, par instinct naturel de défense. Le venin qui ne s'écoule que très lentement, à cause de sa grande densité, est ordinairement laiteux et ne peut que très rarement être inoculé à une victime quelconque, si ce n'est pendant la déglutition. Tout indique que, chez les Opisthoglyphes l'appareil inoculateur n'est destiné à maîtriser ou à tuer leur proie qu'au moment même de la déglutition. Les Serpents réellement dangereux, c'est-à-dire, pouvant déterminer des accidents graves ou mortels chez l'homme ou BIBLIOGRAPHIE 315 les grands animaux, sont rangés en deux groupes : les Proté- roglyphes et les Solénoglyphes. Chez les premiers, les dents inoeulatrices ne présentent qu'un léger sillon, formant, à la partie antérieure,- un conduit par lequel passe le venin et fonc- tionnant à la manière d'un tube, tant les bords en sont rap- prochés. C'est à ce groupe qu'appartiennent les Elaps, et aussi les Serpents les plus dangereux de l'Inde : les Najas {Naja tri- pudians, N. bungarus, etc.) Les Elaps brésiliens [Elaps coral- linus et E. frontalis), au venin très actif, sont remarquables par l'élégance et la vivacité de leurs couleurs, qui leur ont valu le nom de « Serpents corail ». LE. corallinus ne dépasse pas 0 m. 90 de longueur; le frontalis peut atteindre 1 mètre. Chez les Serpents Solénoglyphes, les dents inoeulatrices sont longues et très perfectionnées; elles présentent, à leur base, une échancrure où vient déboucher le canal excréteur de la glande à venin, et elles sont parcourues, dans toute leur lon- gueur, par un canal complet qui s'ouvre à la pointe en une fente longitudinale. Ces dents sont mobiles et peuvent se cou- cher sous la voûte du palais, où elles demeurent logées dans un repli de la muqueuse buccale tant que le Serpent n'a pas à s'en servir. Mais, dès qu'il se met en état d'agression, les dents se dressent dans la position verticale et sont prêtes à frapper. Elles laissent, quand l'animal a mordu, deux blessures, peu distantes l'une de l'autre, et dont le diamètre ne dépasse guère celui d'une tête d'épingle. C'est au groupe des Solénoglyphes qu'appartiennent les Lachésis et les Crotales, Serpents les plus redoutables du Brésil. D'assez forte taille, ils dépassent souvent 1 m. 50 de longueur. L'Institut de Butantan a même possédé un exemplaire de Lachésis mutus Linn, qui mesurait 2 m. 40 de longueur et qui pesait 5 kilog. 600; ce sujet provenait des environs de Bahia. Comme on l'observe, du reste, pour toutes les fonctions orga- niques chez les animaux à sang froid, la fonction secrétoire de la glande à venin ne s'exerce qu'avec beaucoup de lenteur. Lorsqu'on a recueilli le venin d'un Serpent, il faut environ quinze jours pendant la saison chaude, et jusqu'à un mois en hiver, pour qu'une quantité de la redoutable substance égale à celle que l'on a extraite (1) s'accumule de nouveau dans (!) Même chez les Serpents où la glande est le plus active et «Je grande capacité, comme, par exemple, le Lachésis jararacuçu Lacerda, — espèce dont la morsure est particulièrement grave, — on ne trouve guère 316 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION la glande. Ce fait est précisément une des causes qui rendent très variable la gravité de la morsure des Serpents venimeux. Quand l'animal a déjà mordu depuis peu, la blessure qu'il fait est naturellement beaucoup moins dangereuse que quand il dépose dans celle-ci une forte quantité de venin. D'autres facteurs interviennent aussi dans le degré de gra- vité de la morsure ; ce sont notamment : l'espèce du venin; la région où la blessure a été faite; enfin, la sensibilité de la victime. Le Dr Brazil groupe en trois types distincts les venins des diverses espèces de Serpents venimeux brésiliens, savoir : le type crotalique, fourni par le Crotalus terrifiais, ou Serpent à sonnettes sud-américain; le type bothropique (1), comprenant le venin de presque tous les Lachésis de l'Amérique du Sud ; enfin, le type élapiné, c'est-à-dire les venins des Elaps sud- américains. L'empoisonnement crotalique diffère essentiellement de celui que causent les Lachésis ; beaucoup plus violent, il porte prin- cipalement sur le système nerveux, et l'un des premiers sym- ptômes qu'il détermine est une perturbation de la fonction visuelle, pouvant aller jusqu'à une cécité complète. Parfois, dans des cas non mortels, la perte de la vue persiste pendant plusieurs mois après que tous les autres désordres causés par l'empoisonnement ont disparu. Les perturbations de l'appareil locomoteur sont également considérables : la victime succombe presque toujours à une paralysie générale, portant principale- ment sur les muscles qui desservent les fonctions respiratoires. Les venins des Lachésis se caractérisent principalement par une action locale très intense, et par des hémorragies abon- dantes. Introduits dans le système veineux, les venins de ce type déterminent tout d'abord des phénomènes analogues à ceux de l'ivresse; puis les mouvements respiratoires s'accé- lèrent rapidement et la mort survient bientôt, presque toujours au milieu de violentes convulsions. — Dans les cas moins graves, les phénomènes locaux se limitent à une partie ou à la à recueillir, à chaque extraction, que 1 centimètre cube de venin liquide. Chez un autre Lachésis, le L. itapetininyae Boulenger, de petite taille, cette quantité ne dépasse pas 5 centièmes de centimètre cube. (1) Cette appellation est tirée du nom {Bothrops) sous lequel étaient autrefois désignés divers Serpents classés aujourd'hui dans le genre Lachésis (L. lanceolalus, L. alternatus, L. alrox). BIBLIOGRAPHIE 317 totalité du membre offensé. Parfois, ils disparaissent peu à peu, sans qu'il en reste de vestiges, mais, bien plus fréquem- ment, à l'endroit où l'inoculation s'est produite, survient de la gangrène, qui amène une décomposition des tissus mous. Le processus nécrotique peut même s'étendre jusqu'aux os; M. Brazil mentionne, à ce sujet, des faits extrêmement curieux. Une des planches de son ouvrage représente une pièce anato- mique fort intéressante, qu'avait conservée, à l'hôpital de Curityba, le Dr Espinola, directeur de cet établissement. Il s'agissait d'un pied humain, complètement momifié, qui avait été éliminé par processus de gangrène sèche, consécutive à une morsure de Serpent. Un pauvre paysan avait été conduit à l'hôpital, portant dans sa poche le pied, qui s'était séparé de sa jambe, à la suite de ladite morsure. Le venin des Elaps ne produit pas de réaction locale. L'ab- sorption du poison est extrêmement rapide, beaucoup plus rapide que pour tous les autres venins. L'action produite est très douloureuse et comparable à celle du Scorpion, elle déter- mine de la cécité, une salivation abondante, du larmoiement, de la diarrhée. Ensuite apparaît du tremblement, avec de la fatigue musculaire ; puis survient de la paralysie qui, en deve- nant générale, ne tarde pas à mettre un terme aux souffrances de la victime. Il n'y a pas encore bien longtemps, la médecine était com- plètement désarmée contre de tels accidents (1). La possibilité d'immuniser les petits animaux de laboratoire contre le venin des Serpents établie par Sewal (1887) et par Kaufmann (1889) était, en effet, demeurée sans application utile jusqu'aux beaux (1) Tous les traitements, en général plus ou moins absurdes, prescrits par les prétendus « guérisseurs » (sorciers nègres pour la plupart) qui abondent encore au Brésil, et auxquels s'adressent malheureusement beaucoup de pauvres blessés, sont naturellement sans effet utile. Il est souvent recouru aussi à la succion de la blessure, en vue d'extraire le venin inoculé. Mais cette pratique reste sans résultat, à cause de la rapidité avec laquelle le venin se fixe dans les tissus. Une ligature pra- tiquée au-dessus du point mordu, quand il s'agit d'un membre, n'em- pêche pas non plus la pénétration du venin, dont elle ne fait, tout au plus, que retarder un peu l'action. Quant à l'application du fer rouge, souvent préconisée pour détruire le venin, elle ne réussit pas davantage, attendu que la plus grande partie de celui-ci ne se trouve déjà plus au point d'inocula- tion si la cautérisation n'est pas laite immédiatement après la morsure, ce qui est naturellement impossible dans la plupart des cas. 318 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION travaux de Calmette, à l'Institut Pasteur de Paris (1892) et de Phisalix et Bertrand au Muséum d'Histoire naturelle (1894), lesquels ont établi : 1° la possibilité de vacciner des animaux et de les mettre à l'abri des conséquences d'une morsure de Ser- pent, en leur conférant une immunité suffisante contre le venin; 2° l'existence, dans le sérum des animaux vaccinés, de substances antitoxiques capables de transmettre l'immunité à des animaux non préparés. Le Dr V. Brazil qui, lorsque ces travaux furent publiés, s'occupait déjà de l'ophidisme, tant au point de vue de l'action toxicologique du venin qu'à celui de de la thérapeutique, orienta ses expériences dans la voie indi- quée et parvint à préparer des sérums antivenimeux permet- tant dé lutter efficacement contre les accidents causés par les Serpents brésiliens. Théoriquement, il conviendrait de posséder autant de sé- rums qu'il y a d'espèces venimeuses, le venin différant d'action suivant les espèces. Mais, dans la pratique, on se heurterait à beaucoup de difficultés d'application, tant à cause du grand nombre des espèces venimeuses qu'en raison de l'in- certitude où l'on se trouve bien souvent au sujet de l'espèce à laquelle appartient le Serpent, auteur de l'accident. M. Brazil a, par suite, limité à quatre, le nombre des sérums préparés à Butantan : il y en a un pour les morsures de Crotal ; un autre, employé contre les morsures de Lachésis, est fourni par des animaux qui ont été immunisés à l'aide d'un mélange de venins pris sur diverses espèces de Lachésis; enfin, un troi- sième, fourni par des animaux immunisés contre les venins de YElaps frontalis et de YElaps corallinus, sert dans les cas de morsure d'Elaps. Outre ces trois sérums spécifiques, utilisables quand on sait quel est le Serpent qui a fait la blessure, il en fallait un autre pour les cas où ce renseignement fait défaut. L'Institut prépare donc un quatrième sérum, obtenu à l'aide d'un mélange dans lequel entre, en plus des venins des prin- cipaux Lachésis de la région, celui du Crotalus terrificus. Pour recueillir les quantités de venins nécessaires à la pré- paration de ces divers sérums, on opère de la façon suivante : avec un lacet de cuir, un aide saisit le Serpent immédiatement en arrière de la tête, puis le retire de ce lacet en le serrant entre le pouce et l'index de la main droite; il maintient de la main gauche le corps de l'animal et, avec la droite, présente la tête à l'opérateur; celui-ci, après avoir fixé avec une pince BIBLIOGRAPHIE 319 le maxillaire supérieur, introduit dans la bouche, sous les dents à venin, une plaque de verre où vient s'écouler le venin aussitôt que le Serpent cherche à mordre. Ce venin est un liquide épais, légèrement acide, jaune chez les Lachésis, incolore ou d'apparence laiteuse chez le Crotalus terrificus. Après l'avoir filtré au papier Berzélius, on sèche le venin dans une étuve chauffée à 37 degrés, jusqu'à ce qu'il soit passé à l'état de paillettes brillantes, que Ton fait dissoudre dans leur propre poids de glycérine. C'est cette préparation qui sert à l'immu- nisation des animaux (Chevaux ou Mulets) sur lesquels sera recueilli le sérum. Elle est employée en injections sous-cuta- nées, que l'on commence à des doses excessivement faibles (5 centièmes de milligramme par exemple) et que l'on renou- velle tous les quatre ou cinq jours. Il faut un an environ pour obtenir une immunisation complète, permettant de récolter sur l'animal du sérum utilisable contre les morsures des Ser- pents. Pour les distributions qui en sont faites, les sérums sont mis dans des ampoules de 10 centimètres cubes, qu'ac- compagne une instruction détaillée sur le mode d'emploi. Les injections de sérum aux victimes de morsures de Ser- pents se font généralement à la dose de 20 cent, cubes, et doi- vent être renouvelées à quelques heures d'intervalle, quand les symptômes alarmants ne disparaissent pas assez vite. Le plus généralement, ces injections sont hypodermiques; maison les fait intraveineuses dans les cas particulièrement graves, où il importe d'obtenir une action excessivement rapide. D'ordi- naire, de l'amélioration ne tarde pas à se produire, surtout quand le traitement est appliqué assez tôt. La promptitude des soins donnés est, en effet, un des principaux facteurs du succès; plus vite on agit, plus sont grandes les chances d'une réussite rapide et complète. Comme, même en l'absence de tout soin rationnel, la mort, par suite de morsure, ne survient, en général, qu'au bout d'environ quarante-huit heures, le trai- tement sérothérapique, opérant très promptement, peut, il est vrai, être encore utilement entrepris, plusieurs heures après que l'accident s'est produit; mais on conçoit sans peine qu'il importe d'y recourir toujours le plus tôt possible. Depuis quelques années, les victimes de l'ophidisme, sont, comme à Butantan, soignés, par les hôpitaux de la capitale et de l'intérieur du pays ; or, toutes les personnes ayant eu recours au traitement en temps opportun ont été sauvées; le 320 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION nombre en dépasse déjà un millier. De pareils résultats se passent de commentaires. Raveret-Wattel. * Les Poissons exotiques. Première série : Le Télescope, par L. Lefebvre, Paris, imprimerie Pairault, 1915. Tous ceux qui s'intéressent à l'étude et à l'élevage des Pois- sons exotiques d'ornement connaissent les belles collections réunies par M. Lefebvre dans sa villa de NTogent-sur-Marne. Là, dans une longue série d'aquariums disposés au milieu d'une vaste serre, vivent et se reproduisent une foule de Poissons exotiques de petite taille, remarquables les uns par l'élégance ou l'étrangeté de leurs formes, les autres par la richesse de leur parure ou la bizarerie de leurs mu?urs. Notre collègue a voulu faire bénéficier le public de ses re- cherches et développer en France le goût de l'élevage de ces jolis et intéressants animaux. 11 a rédigé dans ce but une série d'études sur les Poissons exotiques d'ornement. La première vient de paraître; elle est consacrée au plus décoratif, sinon au plus rare, le Télescope. Dans ce petit livre, où sont condensées toutes ses observa- tions acquises au prix de patientes études consacrées par le succès, M. Lefebvre a réuni tout ce qu'il faut savoir pour élever, soigner et faire reproduire ces Télescopes dont les vives couleurs, les formes étranges rivalisent avec celles des fleurs exotiques au milieu desquelles on a coutume de les placer. Ce sera le guide sûr et éclairé que voudront posséder tous les amateurs soucieux de conserver en bel état et en bonne santé le plus brillant des hôtes de l'aquarium : le Poisson- Télescope. M. LOYfcR. Le Gérant : A. Maretheux. Paris. — L. Maretheux, imprimeur, I, rue Cassette. Dixippus morosus vivants (Or- thoptères), offerts par M. l'abbé FOUCHER. Graines oflertes par le Dr G. V. ;- PEREZ. Echium Bourgxanum. — simplex. Juniperus Cedrus. — bermudiana. Statice frutescens. — arborea. — Perezii. Statice brassicsefolia. — brassiez foliaXimbricata. — Peresiiy.imbricata. Convolvulus floridus. Crotalaria agatifolia . Cytisus filipes. — spachianns. — stenopetalus. Graines offertes par M. MOREL. Decaisnea Fargesi Franch. Galtonia candieans Denc. Polemonium cœruleum L. EN DISTRIBUTION Rhubarbe Victoria. Agathea amelloides (Composée). Coreopsiè Grandiflora (Compo- ■e). Cytisus srhip/csensis (Papillona- cée des Balkans). Esch.scholtzia Stauntoni (Papa- vi- racée). Lythrum atropurpureum (Ly- tlirariée). Physostegia virginiana (Labiée). Vvronica Guernesey (Scrophula- rinée). Veronic". Tmversi l'Scrophulari- née de la Nouvelle-Zélande). Pour pays chauds ou serre tempérée : A>ii/opliorn lanceolata. ' — subvelutina. Ilemifortia denissata. CalUstemon fanceolatum. 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Champagne. — Géanls Flandres. (Ecrire.) Quelques sujets disponibles. Race des Gaulois Dorés. La vraie race Nationale, sélectionnée depuis 10 ans à l'Élevage des Cour- bes-Vaux. Race absolument pratique, rustique et décorative : ponte abondante et chair très fine. 10 premiers prix à Paris, 1911, 1912, 1913, 1914. Œufs à couver, prix réduit pendant la guerre, 5 fr. les 12 franco, au lieu de 6 fr. Encore aussi quelques coqs 1913. Aussi race Gâtinaise blanche type G. C. F., la grande race blanche française: œufs, 3 fr. 50 la douzaine pendant la guerre. Phienix blanc pur : oeufs, 5 fr. la douzaine et quelques sujets adultes. S'adresser à M. IBOT, basse-couricr de M. de SAINVILLE, aux Courbes-Vaux, par Saint- Germain-des-Prés (Loiret). DEMANDES Bernache de Magellan. M. SELLIER, 59, rue Le- gendre. Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon étal. Professeur DECHAMBRE, Ecole d'Alfort. Oiseaux pour grandes volières ou animaux pour parc clôturé. Prix modérés ou échange couple Marmottes. M. R. VORUZ, Sierre (Suisse). Paierai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans nos Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuel do l'Oiselier 1^71, Bordeaux). — Alfred Rousse : Perrucùes. M . A . DECOUX, Géry, par Ai x-sur-Vienne (Haute- Vienne). 3 mâles Diamants psiltaculaires ; mâle Aslrild à joues noires (.Xaisna Dufvesnei); femelle Grena- din ; femelle Diamant à gouttelettes ; mâle Mo- deste; mâle Personata ; co. Perruches à croupion rouge; co. Colombes diamants; prix modérés. M. A. "DECOUX, Géry, par Aixo-sur-Vienne (Hauto. Vienne). Chien jeune, de garde. M. G. CONTE, 26, boule- vard du Collège, Narbonne (Aude). Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser leurs demandes au Secrétariat, 33, rue de Buffon; les cheptels seront consentis, après examen de la Commission compétente, suivant le rang d'inscription et au fur et à mesure des disponibilités- SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE IMIMIWMIMMWMMM Le but de la Société Nationale d'Acclimatation de France est de concourir : 1° à l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solennelle, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo- riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeuner amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture ; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un vqlume d'environ 800 pages illustrées de gravures. Il traite des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. Il donne des renseignements les plus variés sur les animaux et les plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle : inttallatim, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc. La Société Nationale d'Acclimatation poursuit un but entièrement désin- téressé ; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce ; adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est contribuer au bien-être général et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Ma.rbthkdx. Pixti. — Li. UàBJktuMBX, Imprimeur, 1, rue CaftMtto. ■dit* tittn&l i)06 331-59 5W-52 BULLETIN DE LA ocîété Nationale d'Acclimatation DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) ô<2« ANNÉE IM° 11. - NOVEMBRE 1915 SOMMAIRE Actes de la Société 321 II. Geoffroy Saint-Hilaire. — L'Exposition de Casablanca au Maroc. 326 Louis Rousseau. — Observations zoologiques faites sur le front G. Raveret-Wattejl. — Nouveaux renseignements sur la pisciculluro eu rizière 33ô Extraits des Proçès-i es dé fa Société. Séance générale du 17 mai 1915 342 Extraits i'I Analyses. L. Vignal. — Quelques observations sur les Glo.rt.dina guttala ' 344 Bibliographie. Em. Perrot. — Les grands produits végétaux des Colonies françaises. Etat actuel. Avenir, par M. Loyer 349 H. Jumelle et H. Perrier db la Bathie. — Palmiers de Madagascar, par D. Bois. . . • 351 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles publiés dans le Bulletin est interdite. Un numéro, 2 francs ; — Pour les Membres de la Société, 1 fr. 50. Il OU AU SIÈGE SOCIAL DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE 88, rue de Buffon (près du Jardin des Plantes) , PARIS (il -- P % H VlC I/VIDODT A NT Des cartes annuelles d'entrée au Jardin tVlo liYlr V/IV I -rin I d'Acclimatation, accompagnées de 10 tickets nt délivrées au prix de 5 fr. aux membres de la Société, dans nos bureaux : V rue de Buffon. © < © a o -3 m H (il P H H P < P < M * ri ~ 'i S © ri s< +j> ri a o eu ri CD X © © 03 -O u* O © O 60 ^ ri 'O u ri O en ai © 5 ^ ri ri © © d o © m © ndant la durée de la guerre, le Bulletin ne paraîtra qu'une fois par mois. r r SOCIETE NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE fondée le 10 Février 1854 Reconnue d'utilité publique par décret en date du 26 Février I8S5 33, RUK DE BUFFON — PARIS BUREAU ET CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR 1915 Président, M. Edmond Pbrribr, membre de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Direeteir d Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ec&ii coloniale, 15, rue Kaidherbe, Saint-Mandé (Seine). Vice- Présidents. ( Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint-Germain, 238, Paris. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Secrétaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Le Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint Secrétaires, t Germain, Paris {Conseil). Crepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Dbbreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Skbillottb, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Gaucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Myre de Vilers, 3, rue Cambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalmr, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Pari Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D' P. Marchai,, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue i Cherche-Midi, Paris. D* Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). *, Dr E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-Buisson (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle 14 rue des Ecoles, Paris. Pendant Tannée 1915, les Séances hebdomadaires des Sections ' sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril Mai Novembre Décembr 14 11 11 22 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d'Ornithologie (Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi ; 4 < 18 18 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et h irsonnes qui désireraient l'entretenir, qu'il se tient à leur disposition, au siège de i tersonnes qui ■ lociété, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevra sur leur demande les ordres du jour mensuels des séances. ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Nous recevons les renseignements suivants concernant les fils de nos collègues, morts au champ d'honneur ou prison- niers, et complétant ceux que nous avions publiés dans le Bulletin de septembre 1915 : Marcel Hua, lieutenant au 25e régiment d'artillerie, ancien élève de l'École polytechnique, mort pour la patrie, à Villers- les-Chèvres, le 25 août 1915. Parti de Châlons, le 1er août, le 2e régiment d'artillerie s'était porté vers l'Est et, lentement, remontait vers le Nord à travers le Woèvre. Le 25 août, il se trouvait entre Longwy et Longuyon, en contact avec l'ennemi dont le feu très violent balayait le plateau où l'artillerie française cherchait sa position. La situa- tion était intenable; la 9e batterie, à laquelle était attaché Marcel Hua, fut désignée pour couvrir la retraite. Un obus alle- mand tombant sur le caisson de la première pièce, détermina une explosion. Le lieutenant Hua et trois servants en furent les victimes, les premières et, croit-on, les seules du régiment, ce jour-là ! Le colonel du 25e régiment d'artillerie a tenu à rendre hom- mage à la mémoire du premier des officiers de son régiment tués à l'ennemi en le proposant pour la citation à l'ordre de l'armée, dont voici le texte : ORDRE GÉNÉRAL, n° 207. Au Q. G. A., le 9 juillet 1915. Première armée. — VIe corps d'armée. <• IIoa (Marcel-Marie-Louis), lieutenant au 25e régiment d'artillerie, glorieusement tué à l'ennemi, à son poste de combat, au moment où sa batterie venait de se mettre en batterie sous un feu violent d'artillerie lourde. » Cette citation entraîne la nomination à la croix de guerre, qui sera pour sa famille un précieux souvenir. BULL. SOC. NAT. ACOL. Kh. 1915. — 21 322 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION Georges Hua, son frère cadet, caporal au 74e de ligne, était, le même jour, à la gauche du front, sous Charleroi. Après s'être battu avec ardeur, chargeant par trois fois, le même jour, à la baïonnette, il cherchait à rejoindre son régi- ment, quand il fut blessé au bras droit a 10 kilomètres environ en arrière du lieu du combat. Obligé de s'arrêter, il fat pris par les Allemands. Après trois mois de soins dévoués dans les ambu- lances de Charleroi, complètement remis, il fut transféré à Westzlar, à la fin de novembre. Depuis la fin d'août, il esta Limbourg-sur-Lahn. André Marchal accomplissait son service militaire au 51e ré- giment d'infanterie, à Beauvais, au moment de la déclaration de guerre ; il est parti avec le régiment d'activé pour la Belgique au début du mois d'août. Il est tombé à son premier contact avec l'ennemi, à la sortie du bois de Yillers-la-Loue, au milieu d'une rafale d'artillerie. Aucune identification n'a été possible, de sorte que sa famille, restée longtemps dans l'incertitude, conservait un peu d'espoir. Mais trop de récits précis et concordants nont plus permis de douter de sa mort dont la confirmation officielle est venue en novembre. Nous savons qu'André Marchal s'est vaillam- ment conduit et que son âme n'a pas faibli au moment de sa première marche en avant sous la pluie de fer qui devait faire tant de victimes dans son régiment ! Nous extrayons de la Revue scientifique, la notice suivante, consacrée à Bené Costantin. René Costantin, né le 30 juin 1890, élève sortant de l'École Nor- male Supérieure, Agrégé des Sciences physiques, a été tué, à Mametz, dans la Somme, le 18 décembre 1914, le premier jour où il combat- tait. 11 était le fils de M. J. Costantin, Membre de l'Institut, Profes- seur au Muséum d'Histoire Naturelle et le petit -fils de Pb. Van Tiegbem. > Esprit d'élite, apprécié par tous ceux qui ont su le connaître, aimé ACTES DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION 323 de ses condisciples au Lycée Henri IV comme à l'École Normale, René Costantin était, comme il l'avait déjà prouvé par ses pre- mières recherches de physique, un jeune savant plein d'avenir. Je ne saurais mieux faire que de citer ce qu'écrit un de ses cama- rades, un ami qui l'a connu depuis la classe de sixième : « Il n'a pas eu le temps de faire ressortir toute l'originalité de son esprit si fin qui l'avait fait remarquer pendanttoutes les années de Lycée que nous avons passées côte à côte, et à cette Ecole Nor- male qu'il a tant aimée. Mais son caractère s'était déjà affirmé si généreux, si embalb-, si profondément doué à tous les points de vue..., si jeune qu'il en était charmant. « Je peux dire que tous ceux qui l'ont fréquenté ont été ses cama- rades, et pourtant bien peu ont été ses véritables amis, car sous ses dehors très ouverts, il ne se livrait que très difficilement. C'était alors un véritable régal de voir à nu une àme aussi chaude, qui avait devancé son temps de nombreuses années, combinaison magni- fique de la culture ancienne et des aspirations modernes. Cette âme-là n'a pas disparu avec celui qui l'incarnait, ou plutôt elle survit avec lui à notre côté, et ceux qui ont véritablement connu notre cher René en ont gardé un souvenir impérissable... » René Costantin s'était épris avec ardeur des questions sociales, mais cette ardeur, si grande qu'elle fût, était encore dominée chez lui par l'amour de la science; c'est ainsi qu'à son grand cœur, il joignait une intelligence supérieure. Et voici quelques lignes copiées sur l'un de ses cahiers de noies : « Vastes, trop vastes projets, trop grandes, trop belles idées. 11 est bon de les concevoir, il est bon de les réaliser en pensée dans l'avenir, cet avenir qui est soumis à tant de chances diverses. Mais l'illusion en est réconfortante. Quand la pensée scientifique s'im- pose à vous, elle accapare entièrement le domaine de la conscience et vous enlève dans son essor éperdu. » Mon confrère, M. Violle, lorsqu'il a présenté la première note de René Costantin à l'Académie des Sciences, m'avait dit combien il avait été frappé de l'originalité et de la précision de son esprit; il a dit plus tard à son père : « Votre fils a un grand avenir. » Le Diplôme d'Études Supérieures de Physique présenté à la Faculté des Sciences de Paris par René Costantin, en 1914, avait été très remarqué, et la soutenance en fut brillante. C'est un Iravail intitulé : Sur la compressibilité osmotique des émulsions, et qui trait'- aussi de l'influence qu'exerce le voisinage des parois sur l'activité du mou- vement brownien.. Par deux séries d'expériences d'ardre différent l'auteur démontre que la loi de Van der Waals s'applique aux émul- sions concentrées. 11 fait voir aussi que la loi de Stokes,qui suppose le milieu indéfiniment visqueux, ne peut pas s'appliquer à un' sphé- rule situé dans le voisinage d'une ou deux parois, et il 'ludie la 324 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION variation du parcours d'un grain, en un temps donné, avec la dis- tance aux parois. Ce travail a été l'ait au Laboratoire de M. Perrin et René Gostantin y avait abordé des recherches dans lebutde calculer la constante d'Avogadro; il avait commencé à établir des mesures précises en ce sens. Je n'ai pas besoin de dire quelle fut la douleur de M. Perrin en apprenant la mort d'un élève pour lequel il avait une réelle amitié; mais je cite les lignes suivantes de M. Brillouin, Professeur au Collège de France, dans une lettre adressée aux parents du jeune physicien : « Perrin m'avait dit, au fur et à mesure des résultats acquis, tout ce que votre fils montrait d'initiative. Il était de ceux qui, dans la mesure où le permet un premier travail, montrent leur originalité ; aussi, je vous assure, ce n'est pas seulement comme ami que je déplore sa mort, c'est comme physicien que je le regrette plus encore. Votre fils donnait l'impression qu'il deviendrait l'égal des meilleurs. » G. B. Charles Van Kempen, le second fils de notre collègue de Saint- Omer, quoique réformé à la suite d'une grave maladie, tinlà s'engager dès la déclaration de guerre. Il fut envoyé comme automobiliste à Maubeuge et employé au ravitaillement des forts pendant leur bombardement. Fait prisonnier lors de la reddition de la place le 8 septembre 1914, il est interné depuis lors à Munster (Westphalie). Nous sommes heureux d'apprendre que Maurice Leprince, docteur en pharmacie, pharmacien aide-major de lre classe, fils de notre collègue, le Dr Leprince, a été cité à l'ordre du jour de sa division « pour avoir apporté la plus grande activité, un grand dévouement et une extrême ingéniosité dans l'installa- tion de nombreux blessés provenant de plusieurs combats ». M. Maurice Leprince, qui est au front depuis le 13 août 1914, est titulaire de la croix de guerre. SITUATION DES MEMBRES DE LA SOCIETE PENDANT LA GUERRE (Suite). Ballereau (Ch.), caporal à l'hôpital militaire Broussais, à Nantes (Loire-Inférieure). Bouchacourt (Antoine), chef d'escadrons, commandant le dépôt de remonte d'Arles. Clément (A. L.), aide-volontaire au service de préparation du vac- cin antityphoïdiqae du Val-de-Gràce. Cligny (A.), chef de poste des G. V. C., à Boulogne-sur-Mer (Pas- de-Calais). Dannin ( Renéj, à l'hôpital temporaire, à Chenonceaux (Indre-et-Loire). Jardel (Eugène), sergent au 126e territorial, à Épinal (Vosges). Landowski (Henri), préparateur au laboratoire antityphique de l'armée, au Val-de-Gràce. Louart (DrF.), médecin-major, camp de la Valbonne (Ain). Moussu (professeur G.-L.), vétérinaire-inspecteur du Service des parcs du camp retranché de Paris. Napoléon (S. A. I. le prince Louis), général russe, en mission en Italie. Passy (Frédéric), canonnier au 82e régiment d'artillerie lourde. Pellegrin (Dr J.), médecin aide-major de lre classe, 16e ambulance, 5e corps d'armée, hôpital de Lavoye (Meuse), secteur postal 7. Perbot (professeur E.), pharmacien aide-major, directeur du labo- ratoire régional de bactériologie du Service de Santé, à Neufchà- teau (Vosges). Voitellier (Ch.), chef de groupes à la division des parcs et abattoirs du camp retranché de Paris. Weinberg (Dr), médecin aide-major à l'hôpital d'Issy. JV. D. — L'adresse du Dr Pierre Vincent doit être complétée ainsi : aide-major au 327e régiment d'infanterie, 5e bataillon, secteur postal 134. L'EXPOSITION DE CASABLANCA AU MAROC Par H. GEOFFROY-SAINT HILAIRE. Lors de la déclaration de guerre, le 2 août 1914, la situa- tion du Maroc se trouvait fort embarrassée. Les nouvelles conquêtes (Taza, juin 1914; Kénifra, avril 1914), augmentant sensiblement le territoire à pacifier et à garder, occupaient une masse de troupes assez considérables. Devant l'appel de la France, qui demandait au Résident général l'envoi immédiat de la majeure partie de ses meilleures troupes, quelle allait être la conduite à tenir pour ne pas perdre le bénéfice des efforts fournis par notre armée marocaine depuis 1907 et, plus particulièrement, au cours des sanglantes années marquées par les affaires de Fez, 1912, l'occupation de Marrakech, 1913, l'extension de notre protectorat jusqu'aux confins de l'Atlas, et la jonction du Maroc occidental avec le Maroc Oriental par la trouée de Taza? La mobilisation générale fut décrétée, le 4 août, par le gou- vernement du Protectorat et aussitôt l'échange se pratiqua entre la Métropole qui envoyait des bataillons de territoriaux et le Maroc qui lui envoyait ses meilleures troupes actives : tirailleurs algériens, zouaves, spahis, tirailleurs marocains et chasseurs d'Afrique. En dehors de ces mouvements militaires, la vie, sur la déci- sion du général Lyautey se maintenait normale partout, les affaires continuaient, les travaux en cours s'achevaient, des travaux nouveaux s'amorçaient comme si la situation de la Mère patrie ne devait avoir aucune répercussion sur celle du Maroc. La seule différence avec la vie antérieure au 4 août était que tous les civils, commerçants, industriels, entrepreneurs et fonctionnaires mobilisés, mais les uns mis en sursis d'appel, les autres hors cadres ou permissionnaires, faisaient leur métier et, en même temps, leur devoir sous l'habit militaire. Cette manière de faire frappa profondément les indigènes étonnés de cette militarisation générale et subite; beaucoup, L'EXPOSITION DE CASABLANCA AU MAROC 327 et des mieux avertis, virent là l'objet d'un froissement : a Tous ces roumis, tous ces tadjers (civils) s'étaient présentés comme tels pour les tromper alors qu'ils étaient réellement des soldats déguisés! » Devant cette quiétude apparente du gouvernement du Protectorat français au Maroc, devant l'activité tranquille de toutes ses classes sociales et travailleuses, les indigènes ne purent que se convaincre de la force et de la vitalité de cette France, pour eux, encore problématique. La grave décision, prise par le général Lyautey aux heures les plus angoissantes du début de la grande guerre, de mainte- nir intégralement tout ce qui avait été conquis au Maroc par le seul fait de montrer une confiance absolue dans les hommes, les choses et l'avenir, donnait les meilleurs résultats; aujour- d'hui, plus que jamais, les temps permettent d'en confirmer le bien fondé. Garder le Maroc, au cours de la guerre, dans son intégrité, n'était pas pour le Résident général une tâche suffisante pour satisfaire son activité inlassable. Le Maroc avait fourni le meilleur de lui-même à la France pour l'aider, ses soldats, sa jeunesse, ses céréales, ses peaux et ses laines exportés en masse ; il allait encore se lancer personnellement dans la guerre, mais cette fois dans la guerre économique. Aucune colonie française plus que le Maroc n'avait été con- voitée par l'Allemagne. A plusieurs reprises, les marques de son ambition ne nous avaient pas été ménagées : visite de l'empereur à Tanger, 1905, le « Panther » à Agadir en 1911, et surtout et à tous les instants de la vie, le brutal rappel des conditions de l'Acte d'Algésiras, qui paralysaient entièrement le développement des idées, de l'industrie et du commerce français dans l'empire du Maghreb. Au Maroc, les Allemands étaient chez eux, le commerce extérieur était dans leurs mains dans la proportion de 13 p. 100 et dans les mains des autres pays étrangers pour 40 p. 100. Détruire le commerce allemand, donner de l'exten- sion au commerce français fut l'idée directrice qui amena le gouvernement du Protectorat à décider qu'une Exposition s'ouvrirait au cours de l'été 1915 à Casablanca, au cœur même de ce Maroc encore étonné de la manifestation gran- diose des forces vives de cette France que l'Allemagne avait 328 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION tant décriée et qu'elle s'était efforcée de montrer aux indigènes comme un pays qui ne subsistait que du fait de sa condescen- dance. Cette Exposition de Casablanca, par ses palais féeriques, son étalage de richesses diverses et insoupçonnées, a construit au cœur même du grand port marocain une ville nouvelle, gra- cieuse, élégante et lumineuse. C'est une réalisation de rêve aussi ingénieuse qu'elle est hardie, aussi bien à l'éloge du magnifique caractère français qu'à celui de l'homme admirable qui l'a conçue. L'Exposition de Casablanca n'est pas un de ces concours généraux des produits locaux comme presque chaque année l'Algérie ou la Tunisie nous en a montrés. C'est une vaste surface de six hectares couverte de 92 pavillons ou stands rivalisant de luxe, de richesse et de raffinements d'architec- ture orientale; c'est une grande Exposition! A tout seigneur, tout honneur; parlons de ce qui vient des autres, de l'importation : trois grands pavillons au centre même de l'Exposition où viennent s'accumuler les produits français les plus divers, pour beaucoup inconnus jusqu'ici au Maroc si ce n'est sous la rubrique Made in Germania ou Auslria. Ënumérer tout ce que le commerce français a envoyé à Casablanca de produits serait publier un véritable catalogue; tout y est; mais la section industrielle doit avoir une mention spéciale pour son importance et sa richesse. Aucune section ne pouvait mieux répondre aux besoins actuels de ce Maroc encore dans l'enfance. Les chemins de fer sont encore à l'étude, les routes pour la plupart en projets, les aménagements d'eaux sont inexistants, les carrières à peine ouvertes, les industries sont naissantes. La section industrielle a apporté avec profusion les modèles les plus variés de l'outillage le plus perfectionné et, de toutes ces machines, aucune sans doute, ne repassera la mer, les besoins et l'appétit des industries marocaines étant grands. Les automobiles usées, cassées, jalonnent depuis plusieurs années les pistes du Maroc, car les voitures à moteur ont de beaucoup précédé la route et la voie ferrée. Peu de pays ont consommé autant d'automobiles avant même que leur organi- sation ne fût établie; ici on explore et dès le début on explora en automobile. Aussi l'Exposition possède-t-elle un stand L'EXPOSITION DE CASABLANCA AU MAROC 329 important des mieux aménagé et des mieux fourni par les plus grandes marques. De l'importation aussi dépend le stand des machines agri- coles où les constructeurs ont accumulé tous les instruments susceptibles d'être employés à la mise en valeur de ce magni- fique pays agricole, déjà si florissant du fait de ses produc- tions obtenues avec les moyens primitifs dont disposent les indigènes. Que ne pourra-t-on obtenir dans un avenir prochain ! L'Algérie et la Tunisie n'ont pas été sans répondre à l'appel de leur voisin de l'Afrique du Nord et, dans un vaste palais, elles lui montrent ce qu'il peut attendre de ses deux sœurs aînées dans leur attachement à la France : tissus, carrosserie, fournitures pour constructions, vins, etc. Au long de deux grandes allées principales s'échelonnent les pavillons particuliers des grandes villes et des régions. Pavil- lons de Casablanca et de la Chaouia, pavillons de Rabat, de Fez, de Meknès, de Tanger; pavillons des Doukkala, de Maza- gan, des Abda et de Safi ; de Mogador et du Sous ; de Marrakech et des confins du Grand Atlas; pavillons des industries spéciales indigènes, des industries européennes déjà existantes, tous ont rivalisé de goût et d'élégance ; les palais arabes succèdent aux mosquées, aux minarets et aux souks. Dans chacun des pavillons des villes ou des régions, on trouve la production locale, artistique, décorative, Commerciale et agricole. Tapis de Rabat; broderies de Salé; cuirs tailladés et armes de Marrakech; poignards ciselés du Sous; broderies de Fez; tabletterie, bois ouvragés et cuirs brodés de Meknès, etc. Et des tissus, des dentelles, des selles lamées d'or ou d'argent, des babouches et des bottes multicolores, garnies des broderies les plus brillantes; rien ne manque, tout abonde. Le Marocain excelle à travailler le cuir et le démontre surabondamment. M. Greffuhle, vétérinaire-major, chef du service zootechnique et sanitaire du Maroc Orient;il, a fait une présentation très heureuse et très documentée de toutes les productions de sa région. Au point de vue commercial, appliquant à la lettre l'esprit qui a motivé l'Exposition, exposition de combat comme elle fut très heureusement qualifiée par le général Lyautey, M. Greffuhle a réuni des échanlillous de tous les objets d'im- portation étrangère et particulièrement austro-allemande qui pénètrent au Maroc Oriental. Cette collection est présentée avec des indications sur leur provenance, leur débit et leur 330 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION prix afin de suggérer aux importateurs les places que la guerre iaisse disponibles. Cette manière de faire a donné au pavillon du Maroc Oriental un intérêt tout particulier. Tout ce qui appartient aux villes ou aux régions est suscep- tible d'exportation, mais celle-ci ne comporte guère que les produits agricoles. Tous ceux-ci, présentés dans chaque région, se trouvent exposés comparativement, avec méthode, dans le vaste et magnifique pavillon de l'Agriculture. De toutes parts, le directeur de l'Agriculture, du Commerce et de la Colonisa- tion sut, par son ascendant, sa valeur et sa science, faire venir les collections les plus complètes des diverses productions. Cinq mille échantillons de céréales furent recueillis, tous triés, catalogués, formant la collection la plus complète que l'on puisse voir et répondant bien au besoin de documentation nécessaire pour la bonne exploitation de ce Maroc encore mal connu économiquement. Dans ce pavillon de l'Agriculture, deux immenses salles séparées par une large baie au-dessus de laquelle, en entrant, on admire une fresque allégorique due au pinceau du peintre, au talent fécond et remarquable, S. de la Nézière. En haut de la fresque, une phrase est écrite en gros caractères qui pour être lapidaire n'en est pas moins saisissante : « Sur 43.400.000 francs d'exportations, le Maroc exporte 42.700.000 francs de produits agricoles ! » On est fixé. Dans une des salles, classées par régions, abondamment pourvues d'échantillons, les céréales, les graines diverses, blés, orges, avoines, fenugrec, lentilles, fèves, alpiste, mil, sorgho, maïs, pois chiches, etc., le tout surmonté par catégorie, par pays, de tableaux donnant les résultats de meunerie pour chaque variété, les cartes thermométriques, pluviométriques alternent avec celles des différents assolements et des compo- sitions de fourrages. A côté de cette salle, qui pourrait être qualifiée de salle des grandes cultures, se trouvent les produits de la culture expéri- mentale, de la culture annexe et de la petite culture : le coton, dont les essais ont si bien réussi au Maroc et qui est appelé à prendre une grande extension ; le lin, cultivé principalement pour la graine et dont Mazagan, à lui seul, exporte chaque année pour 1.500.000 francs en moyenne. Les plantes textiles, chanvre, lin, diss, roseaux, soie végé- L'EXPOSITION DE CASABLANCA AU MAROC 331 taie, etc., sont largement représentés, ainsi que les plantes et graines oléagineuses, olives, origan, coton, lin, ricin. Par ailleurs, ce sont les plantes industrielles, plantes médicinales, à parfum, aromatiques et tinctoriales : graines de raifort, de cresson, cumin, carvi, coriandre, safran, menthe, henné, origan, essences de roses et de géranium. L'apiculture apporte son contingent de cires et de miels, et à côté, les plantes ou produits tannants : galles de Pistachier, Zakaout (ealle de Thuya), les écorces de Grenadier, etc. Pour épuiser les produits végétaux, il faut citer encore les gommes : gommes sandaraque pour faire les vernis, gomme arabique pour la pharmacie, gomme ammoniaque pour la fabrication du diachylon, gomme d'Euphorbe pour faire les vésicatoires, etc. Que de produits insoupçonnés et ignorés fournit ce Maroc, lui-même si mal connu. Ce n'est pas tout, le pavillon de l'Agriculture est largement pourvu, et l'on ne sait ce qui doit le plus étonner, de la variété des produits ou des chiffres parfois fantastiques auxquels atteignent leurs exportations : les œufs de volaille, pour 4.869.760 francs, les peaux, pour 7.000.000 de francs, les laines, pour 5.000.000 de francs, etc., par année moyenne! Au centre du pavillon, l'Exposition séricicole : cocons blancs et dodus, tissus de soie que certains prennent pour du bon « Lyon » et qui proviennent des métiers de Fez, travaillant la soie locale. La sériciculture était connue au Maroc, particuliè- rement à Fez, il y a cinquante ans, mais à la suite des maladies qui ruinèrent l'élevage, celui-ci fut abandonné complètement. L'administration du Protectorat fit reprendre l'essai de l'éle- vage du Ver à soie en 1914; on obtint 400 kilogrammes de cocons en même temps qu'on retrouvait de vieilles femmes qui avaient autrefois filé la soie ; elles firent des élèves, on pour- suivit les essais et en 1915 on obtint une tonne et demie de cocons. La zootechnie n'est pas sans occuper une large place dans la partie agricole de l'Exposition de Casablanca, présentant ses études pour combattre les maladies contagieuses du pays, les types des différentes races animales et des géniteurs qui parti- cipent à leur amélioration. A côté de celte exhibition figurent les produits de l'autru- cherie de Meknès, qui comprend une vingtaine d'Oiseaux. Les résultats sont peu brillants; des œufs, quelques plumes, mais 332 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION il ne faut pas se décourager, les Autruches de Meknès n'ont pas été heureuses jusqu'ici; seulement, depuis cette année, elles jouissent d'un peu de quiétude dans leur grande prairie de l'Aguedal où jusqu'ici elles avaient voisiné avec les tabors chérifiens qui semblaient éprouver un malin plaisir à faire un bruyant usage de leurs armes à feu, fusils et canons, sans compter le camp d'aviation dont les appareils survolaient à tout instant les Oiseaux affolés. Les tabors et l'aviation sont déplacés depuis 1914, les Autruches commencent, dans le calme, à reprendre confiance et celte année déjà quelques naissances l'ont entrevoir une ère de prospérité que le passé n'avait pas permis d'espérer. Ce qu'il faut noter dans cette très remarquable présentation du Pavillon de l'Agriculture, qui certainement est le clou de l'Exposition franco-marocaine, c'est le légitime souci du clas- sement méthodique. Plus de 4.000 échantillons des produits du sol y sont réunis, constituant un inventaire précis des possibi- lités du Maroc, au moment même de sa réelle mise en valeur. Le souci qui dirigea les organisateurs de l'Exposition fut non seulement d'amener l'Européen et plus particulièrement le Français à connaître le Maroc, ses productions et ses ressources, mais aussi à intéresser l'indigène, à lui montrer ce que l'on fait de ses produits, quelle en est la valeur et lui apprendre en même temps ce que fait le voisin. Dans tous les pavillons, tous les échantillons sont étiquetés, classés, expliqués en français et en arabe ; alors qu'on aurait négligé cette manière d'agir, les indigènes l'auraient exigée. En effet, loin d'avoir cette indifférence et cette apathie des peuples musulmans plus orientaux, les Marocains sont curieux, intel- ligents, avides de savoir et d'apprendre, pressés de s'assimiler les méthodes européennes qu'ils savent supérieures aux leurs. Dans chacun des stands, c'est à toute heure du jour, ou la nuit sous les rampes électriques qui font de l'Exposition un décor de féerie, un fourmillement d'Arabes intéressés par les spec- tacles qui leur sont offerts, discutant, questionnant sur chaque chose. Sa Majesté le Sultan qui, à trois reprises dilférentes, visita l'Exposition et qui se montra particulièrement intéressée par le pavillon de l'Agriculture, exprima son étonnement qui résume bien celui de tous les visiteurs tant étrangers qu'indigènes par OBSERVATIONS ZOOLOGIQUES FAITES SUR LE FRONT 333 ces simples paroles : « Je ne croyais pas que mon pays pût pro- duire tant de richesses. » L'Exposition franco-marocaine est le digne couronnement de la volonté du général Lyautey qui, dès les premiers jours de la guerre, en août 1914, ne vit qu'une ligne de conduite à tenir dans ce pays exposé à toutes les tempêtes : Donner à la Mère patrie le maximum des forces disponibles, hommes et produc- tions agricoles, conserver le terrain conquis par tous les moyens et, à défaut d'armes matérielles, se servir des armes naturelles que tout Français possède, le calme digne dans les circonstances les plus critiques, et faire participer directement le Maroc à la Grande guerre en augmentant l'industrie et le commerce métropolitains en prenant les places que les ennemis laissaient disponibles derrière eux. OBSERVATIONS ZOOLOGIQUES FAITES SUR LE FRONT Par LOUIS ROUSSEAU. Sergent-mitrailleur. Ma vie actuelle, toute faite d'observations, m'a permis des constatations très curieuses qui, certes, auront pu être faites par d'autres plus autorisés que moi et même dans d'autres régions. Mon poste d'observation est dissimulé à l'orée d'un bois, dans un maigre plant de Sapins; l'horizon est vaste de tous côtés; je vois plaines, bois, vallées, tranchées ennemies, nos aéroplanes, les leurs que je canarde souvent, l'éclatement des obus de différentes sortes, mais aussi nos Oiseaux et tous les êtres vivants qui circulent alentour! Fort heureusement, de longues années de paix ne nous avaient pas permis d'apprécier quelle serait, pendant la guerre, la vie des êtres vivants qui évoluent en liberté dans notre belle France : Nos Oiseaux. Les Passereaux vaquent à leurs occupa- tions habituelles, ils sont cependant bien dérangés par les allées et venues de tous nos soldats, mais ne s'en soucient guère; ils se sont accoutumés au bruit, à la circulation, sans crainte du danger. Le danger, oui, car je dois dénoncer une 334 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION pratique venue du Midi qui les menace inutilement et sans profit. Il m'a été donné de trouver dans les friches, dans les plants environnants (sapinières, saules, peupliers) des lacets très ingénieusement faits pour la destruction de nos Oiseaux utiles. Le crin de cheval abonde, car les Chevaux se reposent, pour la plupart, dans les environs; leurs crinières et leurs queues sont bien épilées. Des experts dans l'art du piégeur en confectionnent des lacets, même des collets qui, tendus dans toutes les positions et dans tous les coins, constituent un réseau d'où l'Oiseau ne peut plus s'échapper. Cette destruction infâme n'est, du reste, d'aucun profit pour ceux qui s'}' livrent. Nous avons dans notre région des « gars du Midi » ; chacun avec soi a emporté sa mentalité ; les pas- sionnés de la « Chasse à la casquette » et aux « papillons » sont émerveillés de la quantité de « gibier » de nos régions, et pourtant les Oiseaux n'y sont pas très nombreux. Le gibier, c'est le petit Oiseau, notre charmant protégé. Quand les pièges sont fabriqués et posés, il est bien rare que celui qui les a tendus puisse relever ses victimes, car les séjours au repos sont de courte durée. Les malheureux capturés restent à pourrir dans les lacets, s'ils sont pris par le cou, sinon, leur agonie est terrible, maintenus qu'ils sont par l'aile ou la patte. Mes hommes sont devenus de véritables protecteurs, ils détruisent tous les pièges et mettent en fuite les rôdeurs sinistres; mais mon périmètre de protection est limité et ce qui se passe bien près doit se passer plus loin. Tous les auteurs de ces méfaits sont originaires de la vallée du Rhône et des côtes méditerranéennes. Les Ramiers, Tourterelles sauvages, Coucous, Grives, Cor- beaux, Pies, Geais, vivent leur vie sans crainte, le bruit des explosions multiples de jour et de nuit ne les incommode nul- lement; les nids ont été construits dans un endroit choisi d'après les lois de la nature, les couvées menées à bien ; quant au ravitaillement des jeunes, il a eu lieu comme en temps nor- mal, mais avec un plus grand nombre de mets divers. Le séjour des troupes en rase campagne laisse toujours des détritus, des reliefs de repas, viande, conserves, croûtes et mies de pain, etc.. ; il m'a été possible d'observer des Étour- neaux qui, en temps ordinaire, ne trouvent jamais de pain, le rechercher dans nos environs. J'ai retrouvé sous un de leurs nids, construit dans le trou d'une branche de Chêne mort, des OBSERVATIONS ZOOLOGIQUES FAITES SUR LE FRONT 335 morceaux de pain gros comme une noisette; puis deux couples viennent, au petit jour, fouiller la place où, à dessein, nous déposons les restes des repas. Les Ramiers vont à tire-d'aile dans la direction des tran- chées ennemies et l'éclatement des obus ne les trouble pas, ils se posent dans les champs puis reviennent. Aucun de nos Oiseaux ne se soucie du bruit des explosions pas plus que des aéroplanes (il en passe une moyenne de dix par jour dans notre coin). Notre ballon captif, malgré sa forme curieuse, une saucisse et son train de cerfs-volants, n'a pas le don de les épouvanter; qu'il monte, qu'il redescende, que les toiles claquent au vent, personne ne se dérange. J'ai vu des Buses, comme le- font les Goélands, monter en spirale autour de lui et surtout à la fin de la journée ; c'est alors une ronde folle qui semble réjouissante pour les danseurs aériens, puis la descente en vol plané, en arc de cercle. Le couple de Perdreaux qui habitait nos environs a disparu : il aura, sans doute, été capturé par quelque trop fameux braconnier des alentours; mais, par contre, une charmante petite Caille m'égaie de son chant; elle a établi son nid dans une luzerne à 20 mètres de ma cabane, elle n'est pas farouche et circule bien à l'aise autour de nous. Les migrateurs sont passés, on m'a signalé quelques Canards, Poules d'eau, Râles, sur des étangs avoisinants en avant sur les lignes, mais je ne peux quitter l'emplacement qui m'est assigné, pour y aller voir. Au point de vue du gibier à poil et des fauves, il est incon- testable que l'invasion allemande les a rejetés chez nous. Nous avons quantité de Lièvres et, malgré les braconniers trop nom- breux, ils circulent à l'orée des bois ainsi que les Chevreuils abreuvés de sève enivrante. Pas de Garennes, même isolés. Les Sangliers abondent, c'est l'époque des Marcassins et, dans les environs, plusieurs jeunes ont été pris à la main et une tentative d'élevage en résulte; je doute fort qu'elle réussisse, car le lait est bien rare. Les jeunes Renards font l'amusement du personnel des ambulances établies dans les bois. Une portée de quatre Louveteaux a été découverte, il y a une quinzaine, par des territoriaux, affectés à la réfection des routes voisines; ils étaient bien vivants dans un fossé en bordure de la route et ne sont sûrement pas les seuls dans la région. Deux Loutres ont été tuées à coup de pelles dans des fossés marécageux. 336 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION mais loin du maigre cours d'eau qui passe à plus de 1500 mètres de l'endroit où elles se trouvaient. Les Martres, Fouines et Putois sont rares ainsi que les Belettes, mais, par contre, les Rats et les Souris abondent dans les cantonnements. Quant aux Insectes, il y en a des quantités et surtout des Mouches, Moucherons, Moustiques et Taons que nous serions bien heu- reux de pouvoir expédier aux Boches. Mai 1915. NOUVEAUX RENSEIGNEMENTS SUR LA PISCICULTURE EN RIZIÈRE Par C. RAVERET-WATTEL. A propos de la note que j'ai eu l'honneur de soumetlre à la Société (séance du 1er mars dernier) sur la pisciculture en rizière, notre collègue M. Debreuil a bien voulu nous faire con- naître que, ayant eu occasion de causer de cette même question avec des riziculteurs italiens, ceux-ci lui avaient paru attacher peu d'intérêt aux essais d'élevage de Carpe entrepris, sur divers points, dans le nord de l'Italie. J'ai tenu, par suite, à recueillir des informations complémentaires sur les résultats desdits essais d'élevage, en faisant, de nouveau, appel à l'obligeance de personnes en mesure de fournir des renseignements abso- lument exacts, et ce sont les réponses faites à mes demandes que je viens aujourd'hui communiquer à notre Société. Voici, tout d'abord, une lettre qui m'a été adressée de Milan, à la date du 30 mars, par M. l'Ingénieur Joseph Besana, prési- dent de la Société lombarde de Pisciculture : « Notre Société s'occupe de recueillir le plus possible de renseignements sur les résultats donnés par l'élevage de la Carpe dans les rizières, élevage qui porte sur la race galicienne. Il y a des résultats qui sont très bons, comme il se produit aussi des insuccès. Le professeur F. Supino, qui a beaucoup fait pour la reprise de ces essais (inaugurés, ii y a quelques années, par le pisciculteur autrichien Adolphe Gasch), a malheureusement conseillé, pour l'empoissonnement, l'emploi de très jeunes NOUVEAUX RENSEIGNEMENTS SUR LA PISCICULTURE EN RIZIÈRE 337 alevins parce que ces tout petits Poissons coûtent moins cher que des Carpettes d'une ou de deux années. 11 a aussi conseillé de faire frayer les Carpes dans les rizières. C'est également un tort, à mon avis, attendu que l'éleveur, en opé- rant ainsi, ignore, jusqu'au moment de la pêche du poisson, en automne, quel a été le rendement de la ponte. Or, il peut arri- ver que celle-ci ait fort bien réussi; que, par conséquent, les alevins soient très nombreux, trop nombreux même et ne trouvent pas, dans la rizière, suffisamment de nourriture pour se bien développer. Si, au contraire, il n'a été produit qu'une très petite quantilé d'alevins, ceux-ci, ayant copieusement à se nourrir, croissent très bien, il est vrai, mais la récolte n'en est pas moins trop faible, relativement à la quantité d'éléments nutritifs qu'offrait le champ d'expérience. D'un autre côté, on ne peut raisonnablement pas espérer faire de tout riziculteur un pisciculteur habile. Mais je n'en suis pas moins convaincu que le système, intelligemment appliqué, peut réussir tout aussi bien qu'au Japon. Il suffira d'opérer d'une façon simple et vraiment pratique. La première chose à faire, c'est de recher- cher ce que, pour l'empoissonnement, il est préférable d'em- ployer: des sujets de première année? ou de seconde? On mettra cesjeunes Poissons en rizière au printemps, pour les repêcher en automne, et je crois que, dans ces conditions, il sera possible de compter sur un rendement de 100 kilos de Carpes à l'hec- tare. « Il y a déjà des propriétaires qui mettent, dans leurs rizières, des Black-Bass en mélange avec les Carpes, ce qui donne de bons résultats, les Black-Bass dévorant les Grenouilles et les têtards, auxquels les Carpes ne touchent pas. « Parfois, le Black-Bass peut avoir un goût peu agréable, qu'il emprunte aux proies dont il se nourrit; le même fait, d'ailleurs, se produit aussi pour la Perche. Mais, dans les rizières, où il n'y a pas de vase et qu'on assèche en hiver, le Poisson ne con- tracte pas de mauvais goût; c'est plutôt le Poisson élevé dans les tourbières qui prend une saveur désagréable. » Presque en même temps que me parvenait cette lettre, je recevais de notre collègue M. le comte Crivelli Serbelloni, pré- sident honoraire de la Société de Pêche et d'Aquiculture de Lombardie, toute une série de numéros du Bulletin mensuel de cette Société, fournissant des renseignements sur les questions BL'CL. SOC. NAT. ACCL. FR. 1915. — 22 338 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION qui nous occupent. J'y relève notamment, dans le numéro d'avril 1913, une note (1) dans laquelle l'auteur, qui signe sim- plement des initiales E. S., donne un intéressant exposé des espérances que permettent de concevoir les essais entrepris, des difficultés que doivent inévitablement rencontrer, au début, de pareilles tentatives, enfin des dispositions à prendre pour assurer, le mieux possible, la réussite d'une entreprise qui mérite la plus sérieuse attention. Dans le numéro de décembre, un article de M. Besana (2) traite également de ce sujet, que le même auteur aborde, de nouveau (3), avec la compétence d'un praticien émérite, dans le numéro de juillet 191-4. Les renseignements fournis, tant par ces divers articles que par d'autres, de moindre importance, également publiés dans le recueil mensuel de la Société de Pêche et d'Aquiculture, nous font connaître que les résultats obtenus des essais de pisciculture en rizière varient beaucoup suivant les conditions dans lesquelles sont pratiqués ces essais. Le rendement, très sérieux quand les opérations ont été bien conduites, se montre à peu près nul, au contraire, si l'on ne sait pas apporter à l'élevage les soins qui lui sont nécessaires. Absolument comme lorsqu'il s'agit de l'exploitation d'étangs ordinaires, les sujets reproducteurs ne doivent pas être main- tenus, après la fraie, dans les surfaces d'eau où seront élevés les alevins. Ceux-ci ne paraissent prospérer réellement en rizière que quand on utilise pour l'empoissonnement des sujets âgés au moins d'une année. Le peu de profondeur de l'eau dans les rizières rendant le braconnage très aisé, l'élevage du Pois- son ne peut être utilement pratiqué que sur des points où la surveillance est facile à exercer. Dans beaucoup de localités, où la Carpe réussissait fort bien, les vols de Poisson se sont mul- tipliés au point de décourager totalement les éleveurs; aussi le besoin d'une répression sévère de ces actes de brigandage se fait-il impérieusement sentir. L'emploi de la dynamite et du chlorure de chaux sont les deux procédés de braconnage les plus fréquemment employés. Aussi le Dr A. Rusconi a-t-il signalé, dans un mémoire qu'a publié la Revue de Pêche et 1, Alcune considerazioni su/la carpicoltura in risaia. [2 G. Besana, Coltivazione de la Carpa in risaia. (3) Nota sulla coltivazione délie Carpe. NOUVEAUX RENSEIGNEMENTS SUR LA PISCICULTURE EN RIZIÈRE 339 d'Hydrobiologie (1), les différents caractères auxquels se recon- naît le Poisson tué par le chlorure de chaux, afin d'empêcher autant que possible la vente de ce Poisson sur les marchés (2). Si le choix de la Carpe galicienne pour les essais d'élevage se recommande par la rapidité de croissance de cette race amé- liorée, qui trouve généralement dans les rizières une nourri- ture abondante, en rapport avec ses besoins, l'aspect particulier du Poisson rend parfois difficile la vente de celui-ci sur les marchés, où beaucoup de consommateurs hésitent à acheter des Carpes-miroir, craignant qu'il ne s'agisse de sujets malades. C'est ainsi que, aux halles de Milan, le prix des Carpes gali- ciennes provenant des élevages en rizière n'a guère dépassé, jusqu'à ce jour, 1 fr. 50 le kilogramme, ce qui semble avoir semé un certain découragement parmi les éleveurs, lesquels s'attendaient à vendre plus avantageusement leurs produits. D'autre part, la difficulté que rencontrent les riziculteurs à se procurer des alevins à des prix raisonnables, pour l'empoisson- nement de leurs surfaces d'eau, contribue beaucoup à entraver le développement de l'élevage de la Carpe. Mais il y a lieu d'es- pérer, croit-on, que, d'ici à quelque temps, la situation se modifiera et que des établissements producteurs ne tarderont pas beaucoup à être en mesure de livrer des Carpettes de pre- mière ou de seconde année à un taux réellement abordable pour les riziculteurs. Divers comptes rendus d'essais de pisciculture en rizière sont donnés dans les numéros du Bulletin qui m'ont été envoyés. Le plus remarquable, par les résultats obtenus, est le suivant, qui fut fait, l'année dernière, par un riziculteur du nom de Carlo Tagliabue (3), sur l'élevage simultané de la Carpe, de la Tanche et du Blac-Bass. Dans une partie de rizière d'environ i hectare 1/2, furent placés, à la fin d'avril : 150 Carpettes de 2e année, du poids de . 3o kil. Poids moy. 233 gr. 70 Black-Bass, du poids de 2 kil. — 30 gr. 150 petites Tanches 5 kil. — 33 gr. (1) Dr Àrnoldo Rusconi. Intorno di caratteridi raconoscîmenta u Muséum d'Histoire naturelle, Paris. MM. D. Bois, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle, Professeur à l'Ecole coloniale, 15, rue Faidherbe, Saint-Mandé (Seine). Maurice de Vilmorin, 13, quai d'Orsay, Paris. Comte de Pontbriand, Sénateur, boulevard Saint- Germain, 238, Paris. C. Raveret-Wattel, 20, rue des Acacias, Paris. Ssentaire général, M. Maurice Loyer, 12, rue du Four, Paris. MM. R. Lb Fort, 89, boulevard Malesherbes, Paris (Etranger). H. Hua, Directeur adjoint à l'Ecole des Hautes-Etudes, 254, boulevard Saint- Secrétaires. ( Germain, Paris (Conseil). Grepin, 18, rue Lhomond, Paris (Séances). Ch. Debreuil, 25, rue de Châteaudun, Paris (Intérieur). Trésorier, M. le Dr Skbillottb, 11, rue Croix-des-Petits-Champs, Paris. Archiviste-Bibliothécaire, M. Caucurte, Moulin de la Madeleine, à Samois (Seine-et-Marne). Membres du Conseil M. Le Myre de Vilers, 3, rue Gambacérès, Paris. A. Chappellier, 6, place Saint-Michel, Paris. Wuirion, 7, rue Théophile-Gautier, Neuilly-sur-Seine. Achalme, directeur du Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle, 1, rue Andrieux, Paris. Magaud d'Aubusson, 66, rue Mozart, Paris. D* P. Marghal, Membre de l'Institut, Professeur à l'Institut National Agronomique, 89, rue du Cherche-Midi, Paris. Dr Leprince, 62, rue de la Tour, Paris. Mailles, rue de l'Union, La Varenne-Saint-Hilaire (Seine). D' E. Trouessart, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle, 61, rue Cuvier, Paris. Ph. de Vilmorin, Verrières-le-BuissoD (Seine-et-Oise). Lecomte, professeur de botanique au Muséum d'Histoire naturelle 14 rue des Ecoles, Paris Pendant l'année 1915, les Séances hebdomadaires des Sections sont remplacées par des Séances Générales bi-mensuelles Dates des Séances Générales et du Conseil POUR L'ANNÉE 1915 Séances du Conseil, le Jeudi à 4 heures. Janvier Février Mars Avril Mai Novembre Décembre 14 11 11 22 27 18 16 Séances générales, le lundi à 3 heures. Sous-Section d'Ornithologie (Ligue pour la protection des oiseaux) le lundi à 5 heures 1 4 18 18 1 15 15 1 15 15 12 26 26 3 17 17 8 22 . 22 6 20 20 Le Secrétaire général a l'honneur d'informer MM. les Membres de la Société et les personnes qui désireraient l'entretenir, qu'il se tient à leur disposition, au siège de la Société, 33, rue de Buffon, tous les Lundis, de 4 à 7 heures. Les membres de la Société qui désirent assister aux séances des Sections recevront sup leur demande les ordres du jour mensuels des séances. ACTES DE LÀ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION Le Conseil de la Société, dans sa séance du 18 novembre 1915, a décidé, à l'unanimité, de raver de ses listes les noms des membres bulgares. Le Conseil, flétrissant la félonie de Ferdinand Ier a, en outre, décidé que le don de 1.000 francs, fait autrefois à la Société par le tsar de Bulgarie, serait remis à une œuvre serbe. En conséquence, MM. Ed. Perrier, président, M. Loyer, secrétaire général, et C. Debreuil, délégués par le Conseil, ont porté, le 25 novembre, au nom de la Société, à M. Vesnitch, ministre plénipotentiaire du royaume de Serbie en France, une somme de 1.000 francs, pour être affectée à l'œuvre des Enfants serbes. Pendant cette visite, que les circonstances rendaient fort émouvante, M. Ed. Perrier a remis une lettre priant le ministre de transmettre, au nom de la Société, à S. M. le Roi, avec ses vœux les plus ardents, l'expression de son profond respect et de son admiration émue pour l'héroïsme magnifique de son peuple. M. Vesnitch a répondu en disant combien, dans un pareil moment, il était sensible au geste de la Société lui apportant son concours pour l'œuvre qui lui tenait le plus au cœur. M. le ministre de Serbie a fait, en outre, parvenir la lettre suivante à notre Président : LÉGATION ROYALE DE SERBIE EN FRANCE ET EN BELGIQUE, 7, rue Léonce-Reynaud. Paris, le 26 novembre 1915. A Monsieur Edmond Perrier, membre de l'Institut, Président de la Société nationale d'Acclimatation de France. Monsieur le Président, J'ai l'honneur dé vous accuser réception de votre honorée lettre du 25 courant, par laquelle vous avez bien voulu m'informer de la décision du Conseil de la Société nationale d'Acclimatation de France, d'offrir 1.000 francs à l'œuvre pour sauver les enfants serbes. Je vous prie de bien vouloir être l'interprète de ma profonde reconnaissance auprès des honorables membres de la Société BULL. SOC. NAT. ACCL. lil. 1915. — 23 354 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D' ACCLIMATATION d'Acclimatation de France et d'accepter, personnellement, mes plus vifs remerciements pour l'intérêt que vous portez à la cause de mes petits compatriotes. Signé : Vesnitch. Les six fils de notre collègue M. Charles Janet sont partis sur le front dès le début de la guerre. L'aîné, Edmond, parti comme sous-lieutenant, nommé lieute- nant à la bataille de la Marne, commandant actuellement l'artillerie de tranchées d'un secteur, plusieurs fois blessé légèrement, a été cité à l'ordre de l'armée .- « Chargé du tir des mortiers, a fait preuve, en toutes circonstances, de courage et de sang-froid. Le 23 décembre 1914, en particulier, est allé, sous un feu très violent d'infanterie, avec un absolu mépris du danger, installer un mortier à 80 mètres d'un poste ennemi sur lequel il a lancé des bombes. » Le second, André, sous-lieutenant d'artillerie de campagne, blessé à Thann, le 22 janvier 1915, n'a pas encore pu rejoindre son régiment. Il commande actuellement une section automo- bile. Le cinquième, Louis, caporal au 51e régiment d'infanterie, proposé pour sergent pour sa belle conduite dans un combat d'arrière-garde à Dommartin-sur-Yèvre, a été tué à la bataille de la Marne, entre Blesme et Maurupt-le-Montoy, le 10 sep- tembre 1914, sur la limite extrême atteinte par notre retraite, au moment même où allait commencer la déroute allemande qui a été terrible dans cette région. Aux dires concordants des habitants qui ont aidé à la recherche de la tombe de Louis Janet, retrouvée sur le champ de bataille, les Allemands « se battaient entre eux, dans les rues des villages, à qui passerait le premier, tant les nôtres les harcelaient par derrière ». Le plus jeune, Pierre, engagé volontaire, à dix-huit ans, dans l'artillerie de montagne, parti comme maître-pointeur, nommé brigadier, puis maréchal des logis en Alsace où il a fait campagne pendant quinze mois, est actuellement en Serbie. Il a été cité à l'ordre de l'artillerie divisionnaire du 25 août 1915 avec le motif suivant : « Chef de pièce, s'est parti- culièrement distingué en conduisant sa pièce à la hauteur des premières lignes de l'infanterie. » L'EXPOSITION INTERNATIONALE DTNSECTES VIVANTS, DE POISSONS D'ORNEMENT ET D'OISEAUX DE [VOLIÈRE, EN 1914 Par MAURICE LOYER. •■■-7 Juin AUX GALERIES D'EXPOSITION DU JARDIN D'ACCLIMATATION ET SOUS LE HAUT PATRONAGE DE M. LE MINISTRE DE L'AGRICULTURE 1* EXPOSITION D'INSECTES VIVANTS DE POISSONS D'ORNEMENT ET D'OISEAUX DE VOLIÈRE 1ATATION f^ FRùNCR US SOCIÉTÉ ZOOLOftIOUE 08 FRANCE VTO-OLOCIQUE Ot fRAHCï LA SOCtÉTt AQUAHIA LA .'.ÛCIETE D AOUICULTURL Ô OS BEtME S D OCMfHOLOOlE Ot BCLO . iNÇAl&E PWJR LA t»*-OT£CTïON OES OISEAUX etC Cette photographie, due à l'amabililé de M. A. Targis, est la repro- duction de l'affiche en couleur d'A. Barrère, annonçant l'Exposition.. 3o6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ .NATIONALE D ACCLIMATATION Cétait quelque temps avant la guerre, en juin 1914, que dans le cadre élégant du jardin zoologique d Acclimatation, une réunion de zoologistes et d'amateurs avait organisé la première Exposition internationale d'Insectes vivants, de Poissons d'ornement et d'Oiseaux de volière. Bien que, depuis cette époque qui nous paraît aujourd'hui si lointaine, des événements considérables aient relégué dans l'ombre tout ce qui, jadis, pouvait nous intéresser, il nous sera permis, cependant, d'évoquer ici le souvenir de celte première manifestation zoologique qui était destinée, dans la pensée de ses organisateurs, à donner aux Français, et plus particulièrement aux Parisiens, le goût des études zoologiques et également celui de l'élevage des animaux d'ornement autres que ceux qui figurent chaque année dans les Expositions avicoles. Malgré les rigueurs d'un printemps hivernal, malgré des défections nombreuses et, à cette époque, inexplicables de cer- tains étrangers, l'Exposition eut un réel succès. Tout ce que Paris comptait de notabilités scientifiques, artistiques ou mondaines y vint admirer ces Oiseaux, ces Insectes et ces Poissons exotiques qui unissaient, dans un harmonieux ensemble, toutes les ri- chesses du coloris à la beauté des formes élégantes ou inat- tendues. L'organisation de cette intéressante et utile Exposition n'avait pas été œuvre facile. Tout le mérite en revenait au Comité dont le président était le prince Pierre d'Arenberg et à ses collaborateurs, parmi lesquels nous devons citer: MM. l'abbé Foucher et Clément pour les Insectes, Lefebvre pour les Pois- sons, le regretté prince Ernest d'Arenberg, R. Pauwels et Jean Delacour pour les Oiseaux, sans oublier M. Porte, directeur du Jardin zoologique d'Acclimatation. Dès la première heure, les Français et les Étrangers avaient répondu avec empressement à l'appel du Comité; les envois de ces derniers s'annonçaient comme devant être fort nombreux, mais quelque temps avant la date fixée pour l'inauguration les Allemands et les Autrichiens se dérobaient, .déclaraient renoncer à participer à l'Exposition mais offraient néanmoins d'envoyer, contre remboursement, les animaux dont ils avaient fourni précédemment la liste. Les Germains savaient déjà, à n'en point douter, dès le mois de juin, qu'ils allaient nous l'exposition internationale d'insectes vivants 357 déclarer la guerre et prenaient leurs précautions. Malgré leur abstention, l'Exposition ouvrit ses portes et son succès répondit largement aux espérances de ses organisateurs. Pouvons-nous rapidement passer en revue les sujets si divers exposés dans les trois sections : Insectes, Poissons et Oiseaux? Il faudrait s'arrêter devant chaque insectarium, chaque volière, chaque aquarium, et décrire par le menu cha- cun des individus exposés, car tous présentent un intérêt scientifique ou artistique : l'un brille de mille couleurs, l'autre a des formes ou des mœurs étranges, un troisième s'impose à notre admiration par l'élégance de son attitude; quelquefois, les sujets présentés réunissaient toutes les qualités; mais il faut savoir se limiter et nous nous bornerons à citer les plu^ remarquables parmi les hôtes de cette brillante et trop brève Exposition. Les Oiseaux occupaient toute la galerie consacrée ordinaire- ment par l'Administration du Jardin zoologique à l'Exposition permanente du matériel agricole et avicole. Les exposants y étaient fort nombreux. .Nous citerons, parmi eux, les Sociétés ornithologiques de la Belgique qui, ainsi que de nombreux amateurs belges, présentaient une précieuse collection d'Oi- seaux indigènes en cage, tandis que M. Ivan Braconnier, l'amateur belge bien connu, confiait au Comité d'organisation toute une série d'Oiseaux exotiques remarquables par leur rareté et l'éclat de leur plumage, ainsi qu'une collection fort intéressante d'hybrides entre Passereaux exotiques ou indi- gènes. Que sont devenues toutes ces merveilles? La malheureuse Belgique possédait des Sociétés avicoles florissantes, rivalisant d'ardeur avec les nombreux amateurs pour protéger l'avifaune indigène, développer le goût de l'élevage et de l'acclimatation des espèces exotiques. Toutes ces utiles entreprises, tous ces efforts généreux sont maintenant anéantis. Les Oiseaux que nous avons admirés ont dû subir le sort de cet infortuné pays, et ce sont des victimes ailées à ajouter aux autres! La Société ornithologique de l'Est de la Belgique, entre autres, réunissait dans ses volières les espèces suivantes, toutes indigènes, et dont plusieurs fort difficiles à conserver en cages : Roitelet; Troglodyte; Mésanges (huppée, bleue, des 358 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION marais, charbonnière, noire) ; Molteux cendré ; Bergeron- nettes (grise et printanière); Grives (mauvis, lilorne, musi- cienne, à plastron) ; Petrocincle de roche ; Rouge-gorge ; Rouge-queue; Rossignol ; Fauvettes (babillarde et à tête noire); Otocorys alpestre; Alouettes (cochevis, lulu, calandre, des champs) ; Pitpits (des arbres, des prés, des champs); Sizerins (boréal et roussâtre); Cini; Tarin ; Bruants (des roseaux, fou, ortolan, jaune); Bec-croisé et Dur-Bec. A cette énumération qui prouve l'activité de cette Société et l'habileté de ses membres, nous devons ajouter encore quelques exemplaires rarement vus en captivité parmi les espèces de Picidés indi- gènes : Pic- Vert, Pic-épeiche, Grimpereau et Epeichette. Tous ces Oiseaux étaient en superbe état; ils semblaient depuis longtemps habitués à leur cage et leurs divers proprié- taires, qui les avaient accompagnés à Paris, leur prodiguaient des soins assidus qui prouvent en quel honneur l'élevage des Oiseaux est tenu en Belgique. Une intéressante collection de nids et d'œufs de toutes les espèces indigènes dans le Nord de la France et la Belgique complétait ce remarquable ensemble. Tout à côté, notre Ligue pour la Protection des Oiseaux pré- sentait toute une série de nichoirs artificiels, ainsi que bon nombre d'appareils destinés à assurer à nos Oiseaux une pro- tection efficace. De nombreux exemplaires de son Bulletin, ainsi que des publications ornithologiques traitant de la pro- tection, étaient distribués aux visiteurs et contribuaient ainsi à répandre dans le public les idées préconisées par notre Société. A elle s'étaient joints le ministère de la Marine du Royaume des Pays-Bas, la Royal Society for the Protection of Birds, d'An- gleterre et les Sociétés d'Agriculture de la Gironde et du Lot-et- Garonne. Mais, les visiteurs étaient attirés bientôt d'un autre côté. Non loin des Oiseaux indigènes se trouvait l'Exposition des Oiseaux exotiques au plumage éclatant de mille couleurs, formant contraste avec la teinte plus discrète des hôtes de nos bois et de nos champs. Parmi . les exposants, deux surtout avaient réuni de remarquables collections, je veux parler de MM. Ivan Braconnier et Jean Delacour. Le premier est le distingué amateur belge connu de tous les ornitholo- gistes. Nous avons tout spécialement remarqué, parmi les sujets les plus intéressants de sa belle collection, une série de Tangaras en fort bel état; ces Oiseaux des contrées l/EXPOSITION INTERNATIONAL!.; D'iNSECTES VIVANTS 359 chaudes de l'Amérique comprenaient les espèces suivantes : Tanagra barbadensis, T. brasilia, tout rouge, avec les ailes et la queue noires, T. coronata, d'un beau noir de jais, T, cana, de couleur olive, T. cyanocephala, T. septicolor et enfin T, sataca, de couleur bleu pâle. A côté d'eux se trouvait le Phyl- lornis Hardwicki, qui figure rarement dans les collections. Cet Oiseau est fort remarquable par l'éclat de son plumage. Son bec recourbé est noir, ainsi que ses yeux; il a les joues et la gorge bleues, les commissures de ses mandibules sont ornées de plumes d'un violet brillant en forme de fer à cheval; son front, le dessus de sa tête et son cou sont d'un vert bronzé; le dos et les couvertures de ses ailes sont vert clair; les rémiges de la queue sont d'un vert bleuâtre et les plumes du croupion sont jaune roussâtre. Cet Oiseau si brillamment paré excitait l'admiration de tous les visiteurs. Nous devons terminer là l'énumération trop succincte de cette riche collection qui comprenait une centaine d'Oiseaux; toutefois nous avons remarqué encore la présence d'un lot fort rare d'hybrides entre les Passereaux indigènes ou exotiques, qui n'était pas un des moindres attraits de l'exposition pré- sentée par M. Ivan Braconnier; c'étaient des hybrides entre Serin de Mozambique et Serin des Canaries; Tarin rouge et Canari ; Bouvreuil et Chardonneret; Chanteur d'Afrique et Canari; Bouvreuil et Verdier; Pinson d'Ardenne et Pinson commun. Notons encore quelques cas curieux d'aberration de couleur, tels que : Pinson commun entièrement blanc et Car- dinal dominicain noir. M. Jean Delacour,le dévoué secrétaire de notre Section d'Or- nithologie, avait dépouillé ses volières de Yillers-Bretonneux, en ^faveur de l'Exposition. C'étaient d'abord des Oiseaux de grande taille, tels que Gouras de Victoria et couronnés, Aigrettes des Antilles, Faisans Mikado nouvellement importés du Japon et les hybrides entre Mikado et Faisan d'Elliott. Puis un lot fort intéressant de Colombes exotiques telles que Peris- lera cinerea de la Colombie; Geophaps scripta, la Colombe peinte d'Australie; Lophophaps InicogasterAa Colombe huppée d'Australie, puis une Colombigalline des îles Seychelles, au plumage hérissé, Alectrœnas pulcherrima ; des Pigeons verts de Java, Osmotreron griscicauda ; une belle série de Tangaras; des Pies exotiques, parmi lesquelles la Pie vaga- bonde de l'Inde, Dendrocitta rufa ; un Geai d'Indochine, 360 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION Garrulax alèigularis et le Toucan des Prairies, Aulaçoramphus prasinus. Nous ne pouvons citer ici toutes les autres espèces que présentait M. Jean Delacour, nous avons voulu seule- ment, en signalant les noms de quelques-unes parmi les plus rares ou les plus admirées du public, donner une faible idée de l'importance et de la richesse de cette précieuse collection. Qui eut pensé qu'à deux mois de là, les Allemands allaient envahir la Belgique et la France et que les volières de MM. Bra- connier et Delacour subiraient la visite de nos ennemis ! Nous ignorons ce que sont devenus les Oiseaux de nos amis de Belgique, mais nous sommes heureux de penser que ceux que M. Delacour avait pris tant de soins à réunir sont maintenant hors de danger, et que, grâce à nos soldats qui ont repoussé l'envahisseur qui avait stupidement ouvert les portes des volières de Villers-Bretonneux pour en chasser les Oiseaux, notre collègue a pu conserver la plus grande partie de ses col- lections. L'Exposition des Poissons exotiques d'aquarium fut l'œuvre de M. Lefebvre. Remarquable par le choix des espèces, elle l'était également parle souci de l'esthétique qui avait présidé à son installation. Le public ne ménagea pas à son organisateur les marques de son approbation et l'affluence fut telle aux abords de cette Section que l'on dut installer un service d'ordre pour faire cir- culer les visiteurs qui s'étouffaient littéralement à l'entrée. Les Poissons n'étaient pas présentés dans des aquariums isolés, ou plutôt ceux-ci étaient dissimulés entre les piliers supportant la voûte d'une sorte de grotte en fer à cheval ayant une centaine de mètres de longueur. Le visiteur se trouvait donc dans une demi-obscurité et n'était éclairé que par la lumière filtrant à travers les glaces des aquariums qui faisaient corps avec les parois de la galerie. Les Poissons nageaient au milieu de la lumière dans un cadre de ro- chers, parmi le feuillage des plantes aquatiques indigènes et exotiques plantées dans le sable ou le gravier qui garnissait le fond des aquariums. Une cinquantaine d'espèces exotiques de petite taille étaient présentées aux visiteurs pour lesquels la vue de ces jolis Pois- sons aux formes étranges, au coloris brillant était un spectacle L'EXPOSITION INTEBNATIONÀLE D'INSECTES VIVANTS 361 nouveau; car c'était bien la première fois que le public pari- sien, peu au courant de l'ichtyologie, était convié à une Expo- sition de cette sorte, à la fois esthétique et instructive, où le zoologiste et l'artiste trouvaient à satisfaire également leur curiosité et leur goût. Cependant, nous devons constater que les plus rares d'entre ces Poissons n'étaient pas les plus admirés. Le public s'arrê- tait plus longuement devant la série des Poissons télescopes, car il reconnaissait en eux ces êtres aux formes bizarres, popu- larisées par les estampes et les laques japonaises. Ceux qui étaient exposés étaient sans conteste de fort beaux spécimens de cette race éminemment décorative. Parmi eux les « Queues en voiles »aux nageoires caudales démesurées, les « Tigres » aux écailles dorées, tachetées de points noirs, et les « Uranoscopes », dont les yeux sont disposés verticalement sur la tête; tous excitaient l'admiration des visiteurs*. A côté d'eux l'on pouvait voir des Macropodes de la Chine, Ma- cropodus viridiauratus, les Combattants des Indes, Beltapugnax, plusieurs espèces de Callichthy s, des Platypœcilus miculalus du Mexique, des Rivulus Poeyi du Brésil, les curieux Pantodon Buchholzi, ces Poissons volants des eaux douces africaines; de nombreux Xiphophorus fJelleri, les jolis Poissons porte-épée, puis pour ne citer que les plus rares : les G'/strope/ecus stella- tuselfasciatus, les Le/iorinus affinisàu Brésil et enfin, \esP'ern- phyllum scalare, au corps bizarrement zébré de ravures noires, aux nageoires si longues, dont les pectorales ressemblent à de longs pédoncules sur lesquels ils paraissent se porter. En quittant à regret cette Section si attrayante, tant par la diversité des espèces que par la beauté des sujets exposés, le visiteur arrivait enfin dans la galerie des Insectes. C était, sans nul doute, la partie la plus importante de l'Exposition, c'était aussi celle dont l'organisation avait coûté le plus de soucis à ceux qui en avaient assumé la charge, MM. Clément et l'abbé Foucher. En effet, s'il est relativement facile de conserver vivants el en bon état des Oiseaux ou des Poissons, il est beaucoup plus délicat de faire vivre, dans un insectarium,des Insectes, même les plus communs. 11 y a là de multiples conditions à réunir et seul un biologiste au courant des mœurs de ces êtres peut les réaliser. Tous les Insectes exigent de la chaleur, certains vivent 3(52 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION dans l'obscurité, d'autres à la lumière; la nourriture diffère avec chaque espèce; les unes ont une durée éphémère, d'autres vivent plus longtemps ; chacune exige, pour sa conservation dans l'espace exigu d'un insectarium, des soins minutieux et quotidiens. La section des Insectes comprenait à la fois des indigènes et des exotiques groupés suivant l'ordre zoologique. Nous cite- rons aussi brièvement que possible les espèces les plus remar- quables parmi celles qui étaient exposées. Parmi les Coléoptères, l'on pouvait reconnaître toute une série d'Insectes vivant dans nos champs et dans nos bois : Cicindela campestris ; Carabus auratus, C. monilis, C. lolharingus, C ca- tenulatus, C. violaeeus, C. glabratus, C. cancellatus, C. nemo- ralis et C. splendens, tous Insectes utiles chassant à la course Chenilles, Limaces et Colimaçons; Aptinus displosor, qui dégagent des gaz explosifs et caustiques pour protéger leur retraite lorsqu'ils sont poursuivis; puis ceux qui vivent ou se nourrissent de cadavres, comme les Staphylinus cœsareus et Philonthua œneus; les fossoyeurs, tels que les Aecrophorus fossor qui enterrent les petits cadavres pour nourrir leurs larves; enfin les Bousiers coprophages : Copris anthenor; C. hispana; Ateuchus sacer, le Bousier sacré des Egyptiens; A. semi-punclatus ; A. longicollis. Puis des Insectes nuisibles, Hanneton commun, Hanneton de la Saint-Jean, Hanneton des jardins ; les Cétoines : Cetonia aurata, C. florentina, C. spe- ciosissima ; les Anthonomus pomorum, dont les larves dévorent les bourgeons du Poirier; le Grand Capricorne, Cerambyx héros, le Capricorne noir, Lamia textor, le Cly te arqué, Clytus arcuatus, le Lucane cerf-volant, Lucanus cervus, dont les larves vivent dans le tronc des arbres; Brachycerus puganus, le Charançon géant qui se nourrit de plantes bulbeuses ; puis ce sont les Coléoptères aux brillantes couleurs employés pour la parure, tels que la Chrysomèle de la Menthe, Chrysomela menthaslri, d'un beau vert brillant et doré, et l'Hoplie bleue, Hoplia cœrulea d'un bleu clair aux reflets argentins; les Insectes lumineux, Pyrophora noctiluca de la Guyane et Lampyris noctiluca, notre Ver-luisant; enfin les Aquatiques: Hydrophile brun, Hydrophilus piceus ; Dytique bordé, Dytiscus marginatus et leurs larves. l'exposition internationale d'insectes vivants 363 Dans l'ordre des Orthoptères on remarquait, outre des espèces communes comme les Forfîcules perce-oreilles, Blattes, Gril- lons et Courtilières, quelques Mantes religieuses, Insectes car- nassiers, si bien étudiés par le grand entomologiste J. Fabre; de curieux Carausius morosus, au corps verdâtre, allongé en forme de tige d'arbrisseau et dont le mimétisme est tel que ces Orthoptères s'identifiaient avec les pédoncules des feuilles de lierre qu'on leur avait distribué comme nourriture; plus étranges encore étaient les Phyllies-feuilles dont quelques exemplaires encore jeunes figuraient à l'Exposition, véritables feuilles animées, se confondant avec celles des arbustes sur lesquelles elles vivent. Les Névroptères étaient représentés par quelques Libellules et leurs larves si carnassières, et par quelques larves de Phryganes, logées dans leurs fourreaux faits de parcelles de bois agglutinées. Mais le public était surtout intéressé par la vue des ma- nœuvres des larves du Fourmilion, Myrmileo formicarius, qui, cachées au fond des entonnoirs qu'elles avaient creusés dans le sable de l'insectarium, capturaient les Fourmis qui s'aventu- raient sur les bords après les avoir étourdies en leur jetant des grains de sable. La Fourmi roulait au fond, était saisie aussitôt et entraînée sous le sable par son ennemi qui la dévorait ou plutôt en suçait les parties molles et bientôt la victime vidée était rejetée sur les parois de l'entonnoir par le Fourmilion qui se mettait aussitôt à l'affût d'une proie nouvelle. Parmi les Hymnoptères figuraient des Abeilles de diverses races : commune, italienne, carniolienne, chypriote et leurs croisements, accompagnées de présentation de ruches, rayons avec couvain, miel, pollen, etc., puis des Fourmis : For- mica rufa, dans leur fourmilière et Lasius flavus dans une four- milière artificielle en plâtre, disposée pour faciliter l'étude de ces intelligents Insectes. Les Lépidoptères étaient fort nombreux, soit à l'état d'In- sectes parfaits, soit sous forme de chenilles, pupes et cocons. De nombreuses éclosions, survenues durant l'Exposition, eurent lieu sous les regards des visiteurs étonnés. C'étaient Philosa- mia cynthia; Antherea Pernyi et A. yamamai ; Callosamia pro- 364 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION methea; Samia cecropia; Caligula japonica; Attacus orizaba, et divers autres Séricigènes, élevés pour l'étude de leur soie. Une mention spéciale doit être faite pour le stand où le Dr Rous- seau, directeur de l'École coloniale du Parangon, à Joinville- le-Pont, présentait un fort complet et intéressant élevage de Sericaria Mori, œufs, vers à soie, cocons, insecte* parfaits, avec les échantillons de soie récoltée à la magnanerie de l'école. Il faut signaler également dans les insectariums toute une série de Chenilles nuisibles : Abraxas grossulariata qui vit sur le Groseiller ; Yponomeuta evonymella, parasite du Fusain ; Bombyx neustria, Liparis dispar et Portheria auriflua qui vivent sur les arbres fruitiers et forestiers. A cette liste il fau- drait ajouter encore des Papillons, représentants des genres Papilio et Vanessa, desSésies à forme deGuêpes, des Orgyes an- tiques, dont les femelles n'ont que des moignons d'ailes et enfin des Ptérophores dont les ailes sont découpées comme des plumes et se replient ainsi que le font les branches d'un éventail. Parmi les Diptères, citons les Glossina palpalis, Mouches de l'Afrique équatoriale dont les piqûres transmettent à l'homme la terrible Maladie du sommeil. Ces Insectes avaient été gracieu- sement mis à la disposition des organisateurs de l'Exposition par le docteur Roubaud, de l'Institut Pasteur, et le public ne pouvait les apercevoir qu'à travers les vitres et les mailles d'un triple insectarium. L'ordre des Myriapodes comprenait quelques Iules exotiques et des Lithobies à tenailles qui détruisent les Chenilles et les Limaces. Enfin les Arachnides étaient représentés par des Mygales Je forte taille du nord de l'Afrique qui font des nids fermés par un couvercle à charnière, par quelques Araignées indigènes, des Trombidions et des Scorpions d'Europe et d'Afrique. Cette intéressante Exposition était complétée par une série de cadres renfermant des collections de Papillons exotiques de toute beauté et d'Insectes de France servant à la démonstration du cours d'Entomologie appliquée du Luxembourg, des planches ANIMAUX A Hil.'RItURK 365 murales du cours de Parasitologie de l'École de Médecine et de nombreuses- préparations d'Insectes servant à l'art décoratif et à la parure. Parmi les zoologistes et les amateurs qui s'étaient momentanément dépouillés de leurs richesses pour contribuer au succès de l'Exposition nous devons citer les noms de MM. R. Blanchard et P. Marchai, Brown, Clément, Diguel, l'abbé Foucher, Gallet, Labitte, Lhoste, Le Moult, Ruaux et Séraphin. En résumé, cette première Exposition fut, dans son ensemble, couronnée de succès, elle nous fait bien augurer de la seconde, que nous souhaitons prochaine et qui aura lieu aussitôt après la Victoire des Alliés. ANIMAUX A FOURRURE LES FERMES DE SKUNKS EN AMÉRIQUE Par PIERRE AMÉDÉE-PICHOT Une des premières pièces que Ton réclame de l'individu dans les diverses circonstances de la vie sociale est son acte de naissance; avant l'établissement de l'état civil, c'était son acte de baptême. Dans le cas de l'animal dont je viens vous entretenir, je serais bien embarrassé pour vous fournir l'un ou l'autre; son origine se perd dans la nuit des temps et pour ce qui est de son nom, je lui ai trouvé tant d'appellations diffé- rentes que je ne saurais dire quelle est la bonne. Je laisse à nos savants collègues le soin de tirer au clair une nomen- clature si variée que le Skunk n'est pas désigné sous moins d'une vingtaine de noms par les naturalistes, et que ses di- verses espèces ne sont pas moins riches en synonymie. Le plus ancien auteur qui en ait parlé est un moine récollet de la province de Paris, le Père Gabriel Sagard Théodat qui, dans une Histoire du Cadana, publiée en 1036, le nomme « Enfant du Diable » et dit qu'il porte chez les Hurons lappel- lation de Scangaresse. « Cet animal, dit-il, outre qu'il est de fort mauvaise odeur, est très malicieux et d'un laid regard; il est de la grosseur d'un Chat ou d'un jeune Renard; sa peau est 3()6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE q'aCCLIMATATION couverte d'un poil rude et enfumé et sa grosse queue retroussée, de même; il se cache en hiver sous la neige et ne sort point qu'au commencement de la lune du mois de mars. » En ces quelques lignes se trouvent condensés les traits carac- téristiques de cette famille des Mustélidés du Nouveau-Monde, auxquels Bufïbn a appliqué le nom général de Mouffettes, par analogie avec le gaz asphyxiant auquel le parfum suigeneris de ces animaux fait songer. Ils nous sont plus familiers sous le nom de Skunks, adopté par nos fourreurs, mot dérivé du nom de Seecawk que lui donne certaine tribu de Peaux-Rouges et qui a la même signification. Les Skunks sont les Mustélidés les plus répandus sur le continent américain. Ils diffèrent considérablement de tous les animaux de la même famille et se rapprochent des Blaireaux par leurs allures. Leur démarche n'a pas la vivacité de celle des Fouines, des Martes et des Belettes ; ils vont d'un pas tran- quille à travers la prairie et les bois; rien ne les émeut ni ne les dérange et c'est sans doute la confiance qu'ils ont dans l'efficacité de leurs moyens de défense qui leur inspire le mépris du danger. Lorsqu'il voit l'adversaire, le Skunk ne fuit pas; il s'arrête, se retourne pour l'attendre venir et arbore son pavillon sous la forme d'une queue touffue dont les longues soies flottantes retombent sur son dos et l'enveloppent comme les plis d'un drapeau. Son sang-froid rappelle le calme avec lequel le colonel du régiment de Créqui-dragons, dans une de ces belles batailles du xvme siècle qui ressemblaient si peu aux brutales tueries de notre époque, disait à ses sous-officiers : <« Messieurs les maîtres, faites serrer les rubans de queue et assurer les chapeaux ; nous allons avoir l'honneur de charger ! » Mais le Skunk ne charge pas; il décharge, et ce ne sont pas les rubans de queue qu'il serre. En effet, ses armes ne sont ni les fortes canines dont ses mâchoires sont munies, ni les ongles aigus de ses pattes, mais bien des glandes anales qui sécrètent dans des poches muscu- leuses une liqueur infecte que cet animal peut projeter en pulvérisation jusqu'à trois mètres de distance et dont l'odeur est telle etl'âcreté si irritante qu'il suffît de quelques décharges pour mettre en fuite l'agresseur le plus audacieux. Malheureu- sement pour notre animal, il est revêtu d'une fourrure que l'homme, dans sa nudité, lui a enviée et malgré la persistance de son parfum répulsif, que l'on a été longtemps sans pouvoir ANIMAUX A FOURRURE 367 éliminer, les peaux de Skunks sont devenues l'objet d'un commerce si important que, de 1,265 peaux que la Compagnie de la baie d'Hudson vendit en Europe en 1849, nous voyons l'importation passer à 12.583 en 1890 pour cette Compagnie seule. D'autres Compagnies américaines, qui, toutes ensemble, en mettaient 10.136 peaux sur le marché en 1858, en livraient 678.199 dix ans plus tard. Malgré sa dispersion sur toute l'étendue des États-Unis et les parties méridionales du Canada, malgré son extrême proli- tîcité qui va jusqu'à donner une douzaine de jeunes à chaque portée, le Skunk est donc, comme la plupart des animaux à fourrure, comme les Oiseaux dont le plumage est employé par la mode, menacé d'extermination. L'idée est venue naturelle- ment de l'exploiter d'une façon économique et rationnelle par la domestication. Le caractère de l'animal s'y prête : non seulement, il n'est pas farouche comme je viens de le dire mais encore sa hardiesse le porte à se rapprocher des habita- tions humaines et on a remarqué qu'il se plaît particulièrement dans les pays de culture où il creuse volontiers son terrier sous les constructions et les hangars de la ferme ce qui, rapport à son odeur, n'est pas toujours très bien vu des habitants. La proximité des poulaillers et l'abandon des détritus de tous 368 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION genres autour des maisons est sans doute pour quelque chose dans cette partialité, car n'ayant pas l'activité et les mouve- ments rapides de la plupart des Mustélidés, le Skunk fait sa nourriture de souris, d'insectes, de larves, de fruits et des œufs des Oiseaux qui nichent à terre, de ce qui lui donne, en un mot, le moindre mal à se procurer. Il y a donc plusieurs années déjà que l'on a commencé à élever des Skunks en captivité aux États-Unis. Une autre raison que celle de la diminution des animaux à l'état sauvage militait en faveur de ces tentatives. On pouvait espérer obtenir, par l'élevage, des produits supérieurs pour la qualité et la couleur à ceux que fournissait la chasse du trappeur. L'animal n'étant pas exposé aux intempéries, aux jeûnes et autres vicis- situdes de la vie libre, fournirait des pelleteries beaucoup plus belles et de nature à satisfaire aux demandes du commerce. Les premiers essais ne semblent pas tous avoir donné de bons résultats faute d'expérience dans le traitement qu'il convenait d'appliquer aux animaux captifs et tel établissement monté sur un grand pied, il y a une vingtaine d'années, en Pensylvanie, se liquida d'une façon lamentable, mais depuis cette époque les méthodes se sont perfectionnées et une des principales autorités dans la question des animaux à fourrure, M. Seton, du Connecticut, estime que le fermage du Skunk est celui qui est le plus susceptible d'être l'objet d'une rémuné- rative exploitation. On compte aujourd'hui plusieurs fermes à Skunks qui opèrent sur deux ou trois cents animaux. Les fermes de Skunks sont établies à peu près sur le même plan que les fermes de Renards dont nous vous avons déjà entretenu, c'est-à-dire que, tout en restant sous la domination de l'éleveur, les animaux ont la jouissance d'enclos assez étendus. Ces enclos sont placés autant que possible sur des terrains secs, sablonneux ou granitiques, mais non crayeux; le sol doit être perméable à l'eau pour éviter les stagnations humides, mais il y a avantage à ce qu'il soit arrosé par un ruis- seau d'eau courante et garni de buissons, de bruyères, et d'une végétation d'arbrisseaux peu élevés. L'enclos est entouré d'une clôture dé grillages ou de planches dont la base est enfoncée dans le sol pour empêcher les animaux de creuser dessous et dont le sommet est garni d'un bavolet pour arrêter les évasions par escalade. L'enclos est divisé en plusieurs compar- timents pour accommoder les mâles, les femelles et les jeunes ANIMAUX A FOURRURE '369 aux époques où il convient de les tenir séparés et enfin chaque compartiment est muni d'un jeu de cabanes dans le genre des cabanes à Lapin où les mères se retirent pour mettre bas et élever leurs portées quand elles ne creusent pas elles-mêmes leurs terriers dans le sol. On nourrit les Skunks, qui sont naturellement omnivores, avec de la viande sèche, bouillie ou crue, des abatis de volaille, des déchets de boucherie, des pâtées de farine d'avoine ou autres, des pommes de terre cuites, du lait, du pain, des fruits, et les insectes qu'ils trouvent sur l'étendue de leur parcours sont pour beaucoup dans leur régime hygiénique. Une alimentation purement de viande crue leur serait aussi fatale qu'une alimentation exclusivement végétale. En novembre et décembre, on donne, à chaque mâle, de cinq à douze femelles et les accouplements ont lieu de février jusqu'au milieu de mars. Au 1er avril, chaque femelle est installée dans une cabane ou cage séparée. Les jeunes naissent dans la première semaine du mois de mai. Les portées des jeunes femelles sont de quatre à six petits, mais elles sont plus prolifiques en vieillissant et on en a vu donner jusqu'à seize jeunes. Ceux-ci naissent aveugles et sans poils comme les Furets mais aux teintes de la peau rose et bleuâtre on peut déjà prévoir de quelle façon ils seront marqués. Leurs yeux s'ouvrent au dix-septième jour, et, à l'âge d'un mois, ils commencent à circuler ; alors on leur donne à boire du lait. A six mois, ils ont atteint toute leur croissance. i L'odeur méphitique de la liqueur sécrétée par les glandes anales du Skunk en a fait un animal légendaire en Amérique où on lui attribue les effets les plus désastreux. Voyez plutôt ce qu'en dit Hudson, un naturaliste qui a exploré les pampas et y a fréquenté toutes les bêtes sauvages. Selon ce voyageur, l'odeur de l'ail est de l'ambroisie en comparaison. Ce parfum pestilentiel agit tellement sur le système nerveux que les nausées du mal de mer causent moins de souffrance et sa persistance est telle que les vêtements qui en ont été imprégnés sont pour longtemps inutilisables. De plus, la liqueur sécrétée par le Skunk a une action corrosive qui peut faire perdre la vue, au moins momentanément, à ceux qui en reçoivent quelques gouttes dans les yeux. Coues cite le cas de plusieurs Indiens devenus aveugles après avoir été atteints de cette manière et Audubon et Backman parlent de Chiens qui furent plus d'une BULL. SOC. NAT. ACCL. KR . 1915. — 24 370 BULLETIN DE LA SOCIÉTK NATIONALE D'ACCLIMATATION semaine à se remettre d'une émission de cette terrible sécré- tion qu'ils avaient reçue dans la face. L'animal cependant ne fait pas jouer sa batterie sans des raisons sérieuses et les Skunks apprivoisés, qui n'ont rien à craindre des personnes qui les soignent, peuvent être maniés sans inconvénient. Les Compagnies de transport aux États-Unis et au Canada refusent cependant de se charger de Skunks vivants s'ils n'ont pas été désarmés par une opération qui est maintenant une pratique courante pour empêcher les animaux de polluer les marchan- dises avec lesquelles ils pourraient se trouver en contact. On a longtemps cru que l'émission odoriférante du Skunk était une émission d'urine, mais on a fini par reconnaître qu'elle n'était que le produit de glandes spéciales dont presque tous les Mustélidés sont pourvus et qui, chez le Skunk prennent un développement considérable. Ces glandes qui, à propre- ment parler, sont de petites poches, sont au nombre de deux, placées de chaque côté de l'anus et débouchent dans le rectum par un petit mamelon rouge qui, à l'état de repos, est caché derrière le sphincter. Lorsque le Skunk veut s'en servir, il retrousse sa queue sur son dos et les mamelons sont projetés en dehors, pointés vers l'ennemi comme un canon de 75 à travers une embrasure. L'enveloppe musculeuse des poches se contracte et le liquide est lancé en pluie fine avec une telle force qu'il couvre une zone de trois ou quatre mètres tandis que son parfum se répand à une bien plus grande distance. Les poches pleines, qui peuvent fonctionner indépendamment l'une de l'autre, peuvent fournir chacune au moins une demi- douzaine de décharges. Il y a plusieurs manières de réduire cette batterie à l'impuis- sance. On peut simplement couper le mamelon avec des ciseaux ou faire la section du conduit entre la poche et le mamelon. La cicatrisation ferme l'issue du liquide. L'énu- cléation des poches est une mesure plus radicale, mais le procédé opératoire est plus délicat, et en détachant la poche de son enveloppe musculaire par la boutonnière qu'on y pratique, il faut avoir soin de ne pas intéresser le rectum auquel tout l'appareil est accolé. Après quelques lotions antiseptiques, la blessure se ferme en quelques jours, mais il faut opérer sur des animaux très jeunes, âgés environ de trois semaines, c'est- à-dire au moment où ils ouvrent les yeux et n'ont pas encore de poil. Sur des animaux adultes, ayant plus d'un an, l'opé- ANIMAUX A FOURRL'KE 371 ration peut avoir des suites fâcheuses et un tiers seulement des animaux s'en remettent. Quelques éleveurs ne sont pas partisans de l'opération du désarmement qu'ils trouvent inutile, étant donné qu'un Skunk élevé en captivité et familiarisé avec son entourage ne projette jamais sa liqueur méphitique à moins qu'il ne soit effraye par un Chien ou qu'il ne craigne quelque danger et les hommes des fermes peuvent soulever leurs élèves par la queue sans qu'ils manifestent le moindre ressentiment. J'ai même, sous les yeux, la photographie d'une jolie Américaine tenant un Skunk sur ses genoux, mais sa physionomie n'indique pas précisément la confiance. Lorsque les Skunks ont pris tout leur développement il s'agit de récolter les fourrures qui ont été l'objet de tant de soins machiavéliques. C'est de novembre à mars que le poil est dans toute sa beauté et c'està cette époquequel'on tue les animaux, soit par asphyxie en les enfermant dans une caisse où l'on fait arriver du gaz d'éclairage ou des vapeurs d'éther et de chloro- forme, soit en les noyant, en se souvenant que toute souffrance aiguë et prolongée peut compromettre la beauté de la nappe. Puis il faut dépouiller l'animal en procédant d'une façon régu- lière pour satisfaire aux exigences du commerce. La section de la peau se fait d'une patte de derrière à l'autre, en suivant la face inférieure de la queue et on rabat la peau vers la tête, ce qui donne un manchon qu'on met sécher, le poil en dedans, sur une forme ou embauchoir fait d'une planche taillée de manière à ne pas distendre la dépouille, ce qui éclaireirait la fourrure. Le poil du Skunk des Etats-Unis est d'un beau noir plus ou moins intense ; il a une lice blanche qui lui descend sur le milieu du museau et se relie à une large calotte blanche d'où partent deux bandes blanches qui se prolongent plus ou moins en fourche sur les reins, parfois jusqu'à la naissance de la queue qui se termine par un bouquet blanc. L'importance de ces marques blanches est très variable; tantôt elles sont à peine indiquées, tantôt elles se rejoignent à la naissance de la queue ou s'y continuent en fusionnant l'une dans l'autre- tantôt toutes ces marques se rejoignent presque à partir de leur naissance et l'animal a le dos et toute la queue complètement blanc. La demande du commerce étant surtout pour les four- rures noires, tous les efforts de l'éleveur tendent à éliminer le 372 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D ACCLIMATATION blanc de son élevage, par une sélection rigoureuse, en ne livrant à la reproduction que les animaux les plus foncés. On est arrivé à obtenir ainsi des fourrures toutes noires ou imper- ceptiblement marquées. L'éleveur classe ces fourrures sous quatre types que le Bureau commercial pour l'encouragement de l'élevage du Skunk désigne par les lettres de l'alphabet A, B, C, D. Les peaux toutes noires, excessivement rares, ainsi que celles qui ne sont marquées que d'une petite étoile au front, sont désignées sous le nom de peaux étoilées et consti- tuent les catégories A 1er. et A bis : celles où le blanc domine sont classées sous la dénomination de D et D bis. Les fourreurs font disparaître les bandes blanches en les excisant et en recousant fort habilement les unes contre les autres les parties noires. Les bandes blanches servent alors à faire des garnitures moins estimées. Notre collègue, M. Diguet, nous a dit qu'au Mexique ce sont les Skunks à dos et à queue blancs qui sont le plus recherchés, mais ces animaux sont d'une espèce distincte des Skunks de l'Amérique du Nord et sont du genre Concpale dont M. Chatin a étudié l'appareil méphitique lequel est, du reste, absolument semblable à celui du Skunk des États-Unis. Dans toute exploitation industrielle il y a des déchets ou sous- produits dont l'utilisation n'est pas à négliger, car ils peuvent être l'objet d'une sage économie. De même que dans un grand chenil, les matières fécales sont soigneusement recueillies pour être utilisées dans la peausserie, de même dans une ferme de Skunks un peu importante les matières fécales de ces Mustélidés forment un bon engrais. La chair des Skunks fournirait un aliment sain, comme on le voit par l'usage qu'en font les Peaux-Bouges, si un préjugé n'en empêchait pas la vente sur les marchés des villes, mais les animaux en bonne condition étant très gras, on en extrait une huile très demandée pour la fabrication des savons et qui passe même pour être un excellent remède contre les rhumatismes. La fibre musculeuse, dont toute la graisse a été extraite en la faisant bouillir, est séchée au four et entre dans la composition de biscuits pour les Chiens et de nourriture pour la volaille. Bien entendu, si les Skunks ainsi traités n'ont pas été désarmés de leur vivant, il faut soigneusement extraire les glandes anales avant toute autre opération, sans quoi elles communiqueraient leur odeur fétide aux matières auxquelles elles auraient été mélangées. En commençant l'exploitation d'une ferme à Skunks avec ANIMAUX A FOURRURE 373 cinq mâles et vingt femelles, M. Seton a établi que, la cinquième année, on peut être possesseur d'un troupeau de 800 femelles et 200 mâles reproducteurs dont la production devra laisser, déduction faite de l'amortissement du capital, des dépenses de premier établissement, des frais de gardiennage et de nourriture, un profit de 14.000 dollars soit 70.000 francs. M. Seton, qui a dressé ce budget dans le détail duquel je ne saurais entrer ici, reconnaît qu'il n'a pas tenu compte des possibilités d'épidémies, de la baisse de la valeur des fourrures et il avoue que l'exploitation du Skunk n'a jamais encore été entreprise sur une aussi vaste échelle, mais il a basé ses calculs sur les résultais de son expérience obtenus par le fermage du Renard et celui du Skunk dans des proportions plus modestes. La ferme à fourrures de M. Seton, à Greenwich, dans le Connec- ticut, ne couvre encore qu'une superficie de 2 000 mètres carrés environ, mais il possède assez de terrain tout autour pour pouvoir prendre de l'extension, et Fêté prochain plusieurs enclos de 2.000 mètres viendront l'agrandir. L'enclos actuel est entouré d'une palissade de 2 m. 50 de hauteur ; le sol est sec comme il convient et complanté d'aï bres qui donneront l'ombre nécessaire pendant les grandes chaleurs. Soixante-cinq Skunks adultes sont installés sur cette ferme dont cinquante femelles qui, selon toutes probabilités ne produiront pas moins de 200 jeunes pendant le prochain exercice. C'est de la ferme à Skunks de M. Seton que provenaient les quatre Skunks vivants que l'on a pu voir au commencement de l'année dernière à la devanture du grand magasin de four- rures de M. Ruzé, au coin de la rue de la Chaussée-d'Antin et du boulevard Ilaussmann. Après avoir vivement excité la curio- sité des passants, ces animaux furent offerls par M. Ruzé au Jardin d'Acclimatation où l'on n'en a malheureusement pas obtenu jusqu'ici la reproduction. L'année dernière, M. Seton ayant été obligé de s'absenter, les gardiens nourrirent les animaux exclusivement de viande, de sorte qu'au printemps ils se trouvèrent en très mauvais état et beaucoup de mères, au moment de la mise bas, dévorèrent leurs portées. Nous savons qu'une alimentation défectueuse dispose de même les Lapines à manger leurs petits. La même mésaventure est arrivée aussi en Angleterre à quelques per- sonnes auxquelles M. Séton avait envoyé des Skunks en vue d'introduire cet élevage de fourrures dans la Grande-Bretagne. 374 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Ces déboires seraient certainement évités par les éleveurs qui suivraient les instructions pratiques que M. Seton vient d'exposer dans la remarquable série d'articles qu'il a publiés dans la revue américaine Field and Stream. L'auteur, qui nous avait déjà donné, dans deux beaux volumes, Y Histoire des ani- maux du Nord, entre, par ces nouvelles études, dans les détails les plus minutieux sur la manière de construire les enclos et la façon de soigner les animaux doDt l'exploitation industrielle a pris un tel essor depuis quelques années qu'il faut s'attendre à voir les dépouilles des animaux à fourrure élevés en domes- ticité concurrencer dans le commerce des pelleteries les pro- duits de la cbasse des animaux sauvages dont le nombre diminue chaque jour. L'odeur fétide de la sécrétion des glandes anales du Skunk n'est pas la seule chose qu'on lui ait reprochée. On a prétendu que sa morsure communiquait la rage et, en 1874-75, plusieurs médecins américains relevèrent un certain nombre de cas d'hydrophobie en Virginie, dans le Michigan, dans l'Illinois, le Kansas, le Missouri, le Colorado et le Texas qu'ils attribuèrent à des morsures de notre animal. Cependant, comme ces cas d'hydrophobie ne se manifestèrent pas avec les mêmes symp- tômes que ceux qui caractérisent la rage canine, les praticiens qui avaient signalé cette nouvelle maladie la nommèrent rabies mephitica et pensèrent qu'il y avait une certaine corrélation entre la sécrétion anale du Skunk et le virus de sa salive. Ces observations que Coues a racontées dans sa monographie des Mustélidés, en leur donnant beaucoup d'importance, ne nous ont pas paru solidement établies et, à ce propos, M. Seton nous écrit : « Les Skunks se comportent exactement comme les autres animaux par rapport à l'hydrophobie, c'est-à-dire que lorsqu'un Chien enragé parcourt la région qu'ils habitent, ils sont plus exposés à être mordus que toute autre bête à cause de la len- teur de leurs mouvements et de la répugnance qu'ils ont à prendre la fuite. C'est ainsi que plusieurs épidémies d'hydro- phobie ont pu éclater sur certains points, mais elles sont restées localisées dans les régions contaminées. Je n'ai jamais constaté cette maladie chez les Skunks des contrées où elle aurait pu se déclarer spontanément et je considère comme absurde qu'elle puisse être communiquée par un Skunk en bonne santé. J'ai été plusieurs fois mordu très profondément ERRATUM '*7.r) par des Skunks et je me suis contenté de laver la blessure avec une solution de peroxyde. Beaucoup de mes amis ont été éga- lement mordus et aucun n'a contracté la rage. » Enfin, pour terminer sur ce sujet nauséabond, j'ajouterai que la sécrétion du Skunk a été employée avec succès, paraît-il, contre l'asthme. On cite un pasteur qui avait l'habitude de combattre ses crises en respirant les effluves des glandes de Skunks qu'il conservait dans un flacon. Un jour qu'étant en chaire, il eut recours à ce remède, l'odeur qui se répandit dans la chapelle, lorsqu'il déboucha sa bouteille, fut si intolérable que ses ouailles s'empressèrent de fuir et le pauvre homme resta seul pour terminer son homélie. M'est avis que les glandes du Skunk trouveraient une utile application dans certaines réunions parlementaires. « Par arrêté en date du 27 janvier 1914 le Ministère de l'Instruc- tion publique a accordé à la Société une subvention de cent francs. » ERRATUM Dans le Bulletin, numéro de novembre 1915, p. 321, 7e ligne, au lieu de : 25 août 1915, lire : 25 août 1914. Page 352, dans la note bibliographique sur l'ouvrage de MM. Jumelle et Perrier de la Bâtie, Les Palmiers de Madagascar, des mots tombés à l'im- pression rendent incompréhensible la deruière phrase qui doit être ainsi rétablie : « ... bien davantage oléifères. Citons aussi le Raphia Eu/fia Martius (et non Martins)... » Même note p. 351 : au lieu de : Neophloga mananarensis, lire : N.manan- jarensis; au lieu de : Borassus samboratteiisis, lire : B. sambiranensis. ETAT DES DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE PENDANT LES ANNÉES 1914-1915. NOMS DES DONATEURS MM. Ministère de l'Agriculture . . Ministère i>e l'Instruction pu- blique Boullet (Eug.) Debreuil (Ch.) Ganat (Mm- la marquise de) . . Le Fort (R.) Mailles (Ch.) Périac (Mme) Vilmorin M. de) Barrachin (Ed.) , Debreuil (Ch.) Delacour (J.) Foucher (Abbé G.) Hermenier (G.) Bois (D.) - Coëz (E.) Debreuil (Ch.) Gage, directeur du jardin bota Dique de Calcutta Goffart Hollier Jennisson, directeur du jardin zoologique de Manchester . Lefèvre Loder (sir Edmund Giles) . . Morel Muséum d'histoire naturelle . Pérez (D<- G.-V.) Proschowsky (Dr R.) . . . . Vilmorin (M. de) Bugnion (professeur E.) . . . Chappellier (Al.). Clément Debreuil (Ch.) Etats-Unis (Agriculture Départ ment Fouchbr (Abbé G.) OBJETS DONNÉS 1° Dons en espèces. Subvention de 1.380 fr. Subvention de 100 fr. Pour la bibliothèque, don de .... 50 fr. En plusieurs dons 550 fr. Don de (en 2 dons) 375 fr. Pour tickets, don de 25 fr Pour loyer des nouveaux locaux . . 100 fr. Pour la Bibliothèque 200 fr. Pour la Bibliothèque 100 fr. 2° Animaux vivants. Moutons d'Ouessant. Nandous, Faisans, Poules, Colombes. Faisans et Colombes. Insectes exotiques. Nandous et Faisans. 3° Végétaux : Plantes et graines. Graines diverses. Graines et plantes alpines. Graines et plantes diverses. Graines diverses. Graines diverses. Fruits. Graines diverses. Plantes aquatiques. Graines diverses. Graines diverses. Graines diverses et plantes. Graines diverses. Graines diverses. Graines diverses. 4° Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. ÉTAT DES DONS FAITS A LA SOCIÉTÉ EN 1014 ET 1915 377 NOMS DES DONATEURS MM. Perrot (professeur) . . . Haveret- Wattel Rivière (G.) Roule (professeur L.) . . Vital-Brazil (Dr) . . . . Blanchet (M.) Bois(D.) Coëz (E.) Delacour (J.) Debrelil (Ch.) Decha.mbre (professeur) . DlGlET GURXEY LoUART (Dr) Loyer (M.) Llcet (A.) Mattirolo (professeur). Richot (P. -A.) Raveret- Wattel Brumpt (Mme) Debreiil (Ch.) Fontaine (Aug.) Hermenier (G.) PlCHOT (P. -A.) Sansinexa (Cie) Trolessart (professeur) . OBJETS DONNÉS Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. Livres pour la Bibliothèque. 5° Clichés typographiques et Dessins. Clichés. Clichés. Clichés. Dessins et aquarelles. Clichés. Clichés. Clichés. Clichés. Clichés. Dessins. Clichés. Clichés. Clichés et dessins. Clichés. 6° Objets divers. Pâte de Goyave. Animaux naturalisés. Coquilles d'œufs. Liqueurs et vins chinois. Coquilles d'œufs. Coquilles d'œufs. Tatous frigorifiés. Préparations microscopiques. Le Conseil renouvelle ses sincères remerciements aux Donateurs ; il adresse, également, ses sentiments de vive gratitude à tous les collaborateurs du Bulletin qui, par leur science et leur désintéressement, contribuent si puissamment à la diffusion de l'œuvre de la Société. TABLE DES MATIÈRES TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS DONT LES ARTICLES SONT PUBLIÉS DANS CE VOLUME Anne (M. d'). Observations sur les nichoirs, 206. Aubusson (Magâud d'). A l'Archipel d'Ouessant : colonies de Sternes de Dougall, de Macareux et de Puffîns; leur disparition immi- nente, 82. Aubusson (Magaud d'). Au Maroc : Les Oiseaux du Bled, 263, 298. Blaauvv (F.-E.). Une journée à Pot- tenberg, 1. Blaauw (F.-E.). Bontebok et Bles- bok, 97. Bois (D.). La graisse ou maladie des Pommes, 132. Clément (A. -L.). Le Puceron lanigère, 166. Crepix (J.). Rapport présenté à M. le Ministre de l'Agriculture au nom de la Société Nationale d'Ac- climatation de France, sur la pro- tection de notre troupeau natio- nal de Chèvres, en regard du ravitaillement des troupes hin- doues, et sur les profits divers à retirer d'un élevage intensif et rationnel de l'espèce caprine, 65. Decoux (A.). Note sur l'Astrild bleu, 99. Delacour (Jean). Observations sur quelques Colombidés exotiques tenus en captivité, 40. Diguet (Léon). Nouvelles observa- tions sur le Mosquero ou nid d'Araignées sociales, 240. Fortin (Théodore). La préparation des peaux de Lapins, 162. Geoffroy-Saint-Hilaire (H.). L'Ex- position de Casablanca, au Maroc, 326. Loyer (Maurice). Boîte à raisin, 250. Loyer (Maurice). L'Exposition inter- nationale d'Insectes vivants, de Poissons d'ornement et d'Oiseaux de volière, eu 1914, 355. Najac (Raoul de). La riposte du plumassier, 135. Pichot (P. -A). La Loutre de mer, 11. Pichot (P.-A.). Élevages de Colombes exotiques en liberté, 33. Pichot (P. -A.). L'AcHimatation dans l'archipel de la Manche, 129. Pichot (P. -A.) L'Acclimatation de l'Écureuil gris en Angleterre, 200. Pichot ^P.-A.). Le rôle économique du Gibier sauvage, 229. Pichot (P. -A.). Les fermes de Skunks en Amérique, 365. Pichot (P.-A.). Les Hérons et les Cigognes de Gooïlust, 273. Raspail (Xavier). A propos des ser- vices rendus parlas Oiseaux, 279. Bayeret-Wattel (C.) Pisciculture dans l'Alaska, 18. Baveret-Wattel (C). Ce qu'un étang à Truites peut produire de Poisson par mètre de superficie. 45. Raveret-Wattel (C). L'adéno-car- cinome de la Thyroïde chez les Salmonidés, 104. Raveret-Wattel (C). La piscicul- ture dans les rizières, 143. Raveret-Wattel (C). Nouveaux ren- seignements sur la pisciculture en rizière, 336. Raveret-Wattel (C). Les Argules et leurs méfaits dans les étangs, 233. Robertson-Proschowsky (D-r A.). A propos de la germination des graines, 64. Robertson-Proschowsky (Dr A.) Le Jardin de M. Petit Berconz à Eze, 155. INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX 379 Roule \L.). Remarques sur la ques- tion du Grand Serpent de mer. 43. Roule (L.). Les Chétodontidés accli- matés comme Poissons d'orne- ment, 141. Rousseau (Louis). Nos Oiseaux sur le front, 203. Rouëseau (Louis). Observations zoo- logiques faites sur le front, 333. Serre (Paul). Aigrettes de l'Oré- noque et Colibris de la Trinité, 219. Southoff (G. de). Note sur L'adap- tation au milieu chez les Lézards de la famille « Lacertidse », 122. Southoff (G. de). Note sur l'état actuel du marché des animaux exotiques vivants en Europe, 19:;. Ternier (Louis). La Guerre et le Gibier, 132. Tebnier (Louis). La Guerre et la migration des Oiseaux, 161. ïernier (Louis . Le Fou de Bassan. 292. Yji.xal (L.). Quelques observations sur les Glandina gultata, 344. Vilmorix (Maurice L. de) Deux Lar- dizabalées à fruits comestibles (Akebia quinata, Decaisnea Fur- gesii), 89. Vilmorin (Maurice L. de). Corgdalis cheilanthifolia, 277. INDEX ALPHABÉTIQUE DES ANIMAUX MENTIONNÉS DANS CE VOLUME Aigrette, 27, 138, 219. Alouette, 204, 213, 296. Anguille, 158. Animaux exotiques, 193. A user cinereus, 114. Apus canwiformis, 149. Araignée, 110. Araignée sociale, 240. ArguLus americanus, 237. — Castotomi, 238. — coregoni, 233. — f'oliaceus, 233. — melanops, 236. — stizostetliii, 238. Astrild bleu, 113. Autruche, 1. Bacterium salmonicida, 95. Bécassine, 133. Bengali, 113, 181, Black-bass, 337. Blesbok, 98. Bontebok, 97. Buse, 205. Cachalot. 114. Caille, 268. Canard sauvage, 133. Canari du Cap, 2. Caraasius morosus, 183, 211. Carpe, 144, 287, 336. Carpe galicienne, 339. Carpe miroir, 145, 173. 339. Carpophage, 42. Cerf à queue blanche, 229. Chardonneret, 304. Chat de Siam, 26, 5:;. Chat Tigre, 52. Chetodon, 189. Cheval, 285. Chevalier, 133. Chevêche de Perse, 270. Chèvre, 65, 169, 181. Chevreuil, 205. Chien, 60. Chouette, 205. Cigogne, 20 i, 277». Cinnyris chalibeus, 6. Cœnotele gregalis. 240. Colibri, 220. ' ('olius erythromelon, 3. Colombe cendrée, 41. — lophote, 31. — pluinifère. \1. — du Sénégal, 39. — de Smith, 42. Columba leuconota, 38. — livia, 305. 380 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION Columba maculosa, 36. Coq, 61. Coq sauvage, 211. Coracias garrula, 303. Cordon bleu, 99. Cormoran, 274. Corticaria nidicola, 241. Coucou, 204. Courli, 133. Courli cendré, 89. Courvite, 300. Crécerelle, 182. Crithagra sulfurata, 3. Cyphocrania gigas, 56, 116, 180, 211. Cypselus cafer, 212. Da?naliscus albifrons, 3, 1. — py g argus, 3, 7. Daphnie, 214. Écureuil gris d'Amérique, 200. Emeu, 54. Epheslia elutella, 63. Eslrelda astrild, 3. Étourneau, 134, 138, 302. Faisan, 61. Faisan Ho-Ki, 209. Fou de Bassan, 292. Ganga, 272, 300. Geopelia placida, 37. Geophaps Smilhi,-3%. Girafe, 94. Glandina guttata, 344. Glareola pralincola , 267. Gravelot de Kent. 305. Grèbe castagneux, 303. Grèbe huppé, 303. Gros bec, 173. Grue, 204. Guillemot commun, 296. Guit-Guit, 29. Haplopelia larvata, 36. #e/w;,340. Héron, 302. Héron gris, 273. Hibiscus esculenlus, 30. — sabdariffa, 30. Hirondelle, 58, 205, 208, 213, 214. Houbara ondulée, 266. Huître américaine, 254. Huîtrier, 85. Hyrax capensis, 3. Hyène, 26. Insectes, 355. Jackass Penguin, 296. Kangurous de Bennett, 131. Laniarius gutturalis, 2. Lapin, 32-162. Leucosarcia picata, 37. Lézard, 122. Lièvre, 205. Loutre de mer, 11. Macareux, 85, 296. Macronyx capensis, 2. Mara, 33. Martinet à croupion blanc, 302. Mergule nain, 296. Merle, 54. Mésange, 204. Micropterus salmoides, 149. Milan, 302. Moineau, 205. 280. 296. Moineau Japonais, 100. Mouche Tsé-Tsé, 217. Mouette, 138, 192, 296. Mouton, 60. Murène, 113. Mustelus vulgaris, 210. Mye des sables, 255. Nandou blanc, 255. OEdicnème, 300. Oie sauvage, 204. Oiseaux, 117, 161. Oiseau de Marrakech, 304. Oiseau-Mouche, 29, 179. Oiseau de Paradis, 186. Oiseau-Souris, 98. Oiseaux de volière, 355. Onchorynchus nerka, 18. Ondatra, 61, 209. Otis afra, 2. Outarde barbue, 266. Panure à moustaches, 236. Perdrix, 181. Perdrix gambra, 268. Pétrel fulmar, 296. Pfiaps chalcoptera, 38. Phyllie, 50. Pierre-Garin, 85. Pigeon de Cayenne, 41. — de Guinée, 38, 41. — nicobar, 41. — du Thibet, 41. Pluvier, 133. Pœcilocroa conviclrix, 241. Poissons d'ornem>nt, 355. Poisson Télescope, 182, 361. Poule de Sonnerat, 236. Puceron lanigère, 166, 171. Puflïn, 85. Ramier, 205. Rat musqué, 61. Roitelet, 205. Rossignol, 205. TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES 381 Salvelinus fontinalis, 104. Sanglier, 205, 270.- Sarcelle, 133. Saumon, 18. Scatophagus argus, 142. Scopus umbretta, 5. Semotillus bullaris, 253. Serin, 186. Serpent marin, 114. Serpent de mer (Grand), 43, 55, 114. Serpents veuimeux, 309. Skunk, 53, 365. Soui-Manga, 29. Spreo bicolor, 3. Sterne de Dougall, 84. Sterne naine, 88. Tadorne, 88. Tanche, 149, 33!». Tetiax campestris, 266. Toucan, 138. Touracou, 301. Tournepierre, 86. Troglodyte, 205. Truite, 45, 104. Truite Arc-en-ciel, 159. Turlur risorius, 37. Upupa epops, 305. Urœginthus bengalus angolensis, 99. — damarensis, 102. Vache, 287. Vanneau, 204. Ver de farine, 94. Volaille, 31. Yak, 282. INDEX ALPHABÉTIQUE DES VÉGÉTAUX MENTIONNÉS DANS CE VOLUME Achras sapota, 156. Mges Marmelos, 156. Akebia qubuta, 90. Albizzia lophanta, 64. Amaryllis sarmiensis, 131. Arachis hypogsea, 62. Arbre à sucre, 4. Csesalpinia Bonduc, 64. Cereus queretarensis, 175. Cereus Iricoslatus, 17G. Chrysophyllum anlioquiense, 150 Cocos nucifera, 157. Corydalis cheilanthifolia, 277. Decaisnea Fargesii, 92. Eriodendron anfracluosum, 192. Kapok, 192. Musa Cavendishii, 156. Palmier, 223. Passiflora quadrangularis, 156. Pomme, 152, 171. Pommier, 166. Psidium Guyava, 156. Raphanus sativus, 222. — — forme raphanis- Iroides, 222. Saccharum officinarum, 157. TABLE ALPHABÉTIQUE DES ARTICLES PUBLIÉS DANS CE VOLUME Acclimatation de l'Écureuil gris d'Amérique en Angleterre (L'). . . 200 Aileno-carcinome (L') de la thyroïde chez les Salmonidés . . • . . 104 Aigrettes de l'Orénoque et Colibris de la Trinité 219 Animaux exotiques vivants (Note sur l'état actuel du marché des) en Europe, 193 193 382 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE d' ACCLIMATATION Argules (Les) et leurs méfaits dans les étaugs 233 Astrild bleu (Note sur 1') 99 Boîte à raisin 250 Bontebok et Blesbok 97 Chétodontidés (Les) acclimatés comme Poissons d'ornement. . . . 141 Chiffre (Le 4 de) simplifié 16 Chronique générale et faits divers. . . 28, 60, 94, 158, 214.253, 282. 307 Colombes exotiques en liberté (Élevage de) 3.3 Colombidés exotiques tenus en captivité (Observations sur quelques . 40 Corydalis cheilanthifolia 277 Étang à Truites (Ce qu'un) peut produire de poisson par mètre de superficie l'. Etats des dons faits à la Société pendant les années lui 4-1915. . . 376 Exposition (L') de Casablanca, au Maroc 326 Exposition (L') internationale d'Insectes vivants, de Poissons d'or- nement et d'Oiseaux de volière, en 1914 353 Fou de Bassan (Le) 292 Furonculose des Salmonidés (A propos de la lutte contre la). . . . 128 Germination des grains (A propos de la) 64 Gibier sauvage (Le rôle économique du) 229 Gooïlust (Les Hérons et les Cigognes de) 273 Guerre (La) et le Gibier , 132 Guerre (La) et la migration des Oiseaux 161 Jardin (Le) de M. Petit-Bergonz à Eze 155 Lapins (La préparation des peaux de) 162 Lardizabalées à fruits comestibles (Deux) (Akebia quinata, Decaisnea Farfiesii) 89 Lézards delà famille « Lacertidaê « (Note sur l'adaptation au milieu chez les) 122 Loutre de mer (La) 1] Manche (L'acclimatation dans l'Archipel de la) 129 Membres (Liste supplémentaires des) 257 Membres (Situation des) de la Société pendant la guerre 290 Mosquero ou nid d'Araignées sociales (Nouvelles observations sur le). 240 Nichoirs (Observations sur les) 206 Observations zoologiques faites sur le front 333 Oiseaux du front (Nos) 203 Oiseaux du Bled (Au Maroc : les) 263, 298 Oiseaux (A propos des services rendus par les) 279 Ouessant (A l'archipel d') : Colonies de Sternes de Dotigall, de Maca- reux et de Puffins: leur disparition imminente 82 Pisciculture dans l'Alaska 18 Pisciculture (La) dans les rizières 143 Pisciculiure (Nouveaux renseignements sur la) en rizière 336 Plumassier (La riposte du) 135 Pommes (La graisse, ou maladie des taches des; 152 Pottenberg (Une journée à) 1 Puceron lanigère (Le) 166 Bapport présenté à M. le Ministre de l'Agriculture au nom de la Société nationale d'Acclimatation de France sur la protection de notre troupeau national de Chèvres, en regard du ravitaillement des Troupes hindoues, et sur les profits divers à retirer d'un éle- vage intensif et rationnel de l'espèce caprine 65 Serpent de mer (Bemarques sur la question du Grand) 43 Skunks (Les fermes de) en Amérique S65 Société d'Acclimatation (Actes de la) 225, 257, 289, 321, 353 BIBLIOGRAPHIE 38 3 TABLE DES GRAVURES Akebia quinata Decaisne, 91. Argulus foliaceus Ma le jeune d'), 235. Huile à raisin. Enremble de la boîte fermée vue de derrière, 251. lioîte à raisin. Lattes formant fer- meture de la boîte. Boite ouverte vue de derrière, 252. Chiffre (Le 4 de), 17. ('unotele gregalis Ç>, grossie envi- ron à 4 diamètres, 241. Cœnotele gregalis (Deux fragments de nids de), transformés eu piège à mouches, 243. Cœnotele gregalis ( Rameaux de Tecoma radieans à l'extrémité desquels se voient des renfle- ments de nids de), 248. Colius ergtliromelon (Oiseau-souris1), 9. Corydalis cheilanti/olia, 277. Damaliscus albifrons, 9. Damaliscas pggargus, 9. Decaisnea Fargesii Franchet, 92. Decaisnea Fargesii. Franchet 'Fruit de), 93. Fou de Bassan (Le), 293. Fou de Bassan (Une station de nidi- fication dm, 295. lîyrax capensis, 9. « Mosquero » (un des) de la figure précédente, montrant la grande quantité de Mouches prises à la fin de la saison, 245. Salvelinus fontinalis atteint d'adéno- carcinome de la thyroïde, 107. Scopus umbrella, 9. Skunk, 367. BIBLIOGRAPHIE Bois (D.). — Palmiers de Madagascar, par H. Jumelle et H. Perrier de la Bathie • • 351 Bois (D.). — Recherches morphologiques et biologiques sur les Radis cultivés, par M1Ie Yvonne Trouard-Riotle 221 Loyer (M.). — Les grands produits végétaux des Colonies françaises. État actuel, Avenir, par Em. Perrot 349 Loyer (M.). — Les Poissons exotiques : le Télescope, parL. Lefebvre. 320 Ravebet -Wattel (G.). — La défense contre l'Ophidisme, par le Dr Brazil 309 Uobertson-Proschowsky (Dr S.). — Les Palmiers de la Côte-d'Azur, par B. Chabaud 223 384 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES GÉNÉRALES ET DES SECTIONS A. — Séances générales. Séance du 24 décembre 1914 23 Séance du 15 mars 1915 177 — 4 janvier 1915 48 — 12 avril — 180 — 18 janvier — 52 26 avril — 208 — 1er février — 111 — 3 mai — 209 — 15 février — 169 — 17 mai — 342 — 1er mars — 172 B. — Séances des sections. Sons-Section tV Ornithologie. Séance du 24 décembre 1914 58 — 14 janvier 1915 110 — 15 février — 184 Séance du 15 mars — 26 avril 191: 187 212 Le Gérant : A. Mabetheix. Paris. — L. Marutheux, imprimeur, 1, rue Cassette. Les auteurs sont informés que, les prix des tirages à part subissant des variation» fréquentes du fait de la guerre, le tableau publié sur la couverture du Bulletin cesse d'être applicable; il sera fait désormais un prix spécial pour chaque tirage à part. Graines offertes par M. PROS- CHOWKY. Martinezia caryottefolia. Livistona chinensis. Roystona (Orcodoxa regia). Tassonia mollissima. Hedychium sp. 'Corayline sp. Albiszia lophanla v. speciosa. Sabal Palmetto. Pittosporum floribundum. — lob ira. Grewia occidentalis. CsBsalpinia (Poinciana) regia. Sophora tetraptera. Genisla monosperma. Agapanthus umbellatus. Laurus nobilis. Graines offertes par M. MOREL. Deeaisnea Fargesi Franch. GaHonia candicans Dcne. Polemonium cœruleum L. EN DISTRIBUTION Rhubarbe Victoria. Agathea amelloides (Composée). Coreopsis Grandiflora (Compo- sée). Cytisus schipkxnsis (Papillona- cée des Balkans). Eschscholtzia Stauntoni (Papa- véracée). Lythrum atropurpureum (Ly- thrariée). ■ Physostegia virginiana (Labiée). Veronica Guernesey (Scrophula- rinée) . Veronica Traversi (Scrophulari- née de la Nouvelle-Zélande). Pour pays chauds ou serre tempérée : Angophora lanceolata. — subvelutina. Beau for tia denissata. CallUtemqn Umceolatum. Calothamnus guadrifides. Grevillea robusta. Afeloteuca acuminata. — armillarit. — diosmafolia. — * nesophila. — leucodendron. GOF- Graines offertes par M. FART, de Tanger. Acacia falcata. — aecurrens. — stenophylla. — verticiltata. — pychantha. — armata. — saligna. — podalirixfolia. — linifolia. — cultriformis. — neriifolia. — stricta. — baleiana. — verticillata iccana. — macraden. — brachy folia. — wanhii. — hybrides de retinode. S'adresser au Secrétariat. OFFRES, DEMANDES, ANNONCES OFFRES Quelques Bankivas, race pure importée et cultivée en Hollande. M..R. HOUWINCK, à Meppel (Hollande). Canards pilets et Siffleurs du Chili 1914 et 1915. M"» DULIGNIEB, à St-Gérand-le-Puy (Allier). Poissons exotiques. Plantes aquatiques. M. LEFEBVRE, 53, rue de Saint-Quentin, Nogent- sur-Marne (Seine). Offre (échange ou vente) : 1 femelle Daim mou- cheté 1912, et 2 femelles Daim moucheté 1913. Demande : Biche Sika et femelle Corvicapre M. JOUFFBAULT, Argenton-Château (Deux-Sè- vres). A vendre : Chevreaux et chevrettes nubio-alpins, sans cornes, grosses oreilles tombantes, superbes animaux sélectionnés en vue énorme production laitière. BOUCHACOURT, les Thinons, par Sologny (Saône- et-Loire). Canards de basse-cour, Poissons d'étangs, espèces nouvelles, ou peu répandues, ou améliorées; de- mande Lapins et animaux à fourrure. M. DODE, à Sorbier, par Jaligny (Allier). Oies de Toulouse, race pure et de concours, la pièce, 20 fr., mâle ou femelle. - Canards sau- vages cols-verts, la pi<-ce,5 fr., sexe au choix — Canards de Rouen, mâle ou femelle, 5 fr. — Lapins Angora blancs, 5 fr. la pièce. Frédéric PASSY, Désert de Retz, Chambourcv (S.-et-O.). * ___ < JENNY'S FARM », Créteil (Seine). (.levage d'amateur primé. Prix de guerre. — Splendide Bouc syrio-alpin, sans cornes, repro- ducteur premier ordre puni- améliorer races, vaut 150 fr.jfaire offre raisonnable. — Toujours : Chiens : bergers ; bulls français ; Chats bleus de Perse, siamois. Lapins argentés. Champagne. — Géants Flandres. (Ecrire.) Quelques sujets disponibles. •' » Race des Gaulois Dorés. La vraie race Nationale sélectionnée depuis 10 ans à l'Élevage des Cour- bes-Vaux. Race absolument pratique, rustique et décorative : ponte abondante et chair très âne 10 premiers prix à Paris, 1911, 1912, 1913, 1914 Œufs à couver, prix réduit pendant la guerre, 5 fr. les 12 franco, au lieu de 6 fr. Encore aussi quelques coqs 1913. Aussi race Gâtinaise blanche type oS "• la &rande race blanche française: œufs, 3 fr. 50 la douzaine pendant la guerre Phœmx blanc pur : œufs, 5 fr. la douzaine et quelques sujets adultes. S'adresser à. M. IBOT, basse-courier de M de *AINVILLE, aux Courbes -Vaux, par Saint- Germain-des-Prés (Loiret). DEMANDES Poules sauvages, telles que Gallus furcatus, G. Sonnerait . M. R. HOUWINCK, à Meppel (Hollande). Dépouilles de volailles de race pure, même mortes de maladie, si le plumage est en bon état Professeur DECHAMBRE, Ecole d'Alfort. Paierai haut prix les ouvrages suivants épuisés en librairie : Marquis de Brisay ; Dans nos Volières. — Marquis de Brisay : Colombes exotiques. — Chia- pella : Manuel de l'Oiselier (1874, Bordeaux). — Alfred Rousse : Perruciies. M. A. DECOUX, Géry, par Aix-sur-Vienne (Haute "V ienne). Chien jeune, de garde. M. G. CONTE, 26, boule- vard du Collège, Narbonne (Aude). Les Membres de la Société qui désirent obtenir des cheptels sont priés d'adresser XamenKer„a^wé,ariat* 3VUe de Buffonî les cheP^ls seront consentisses Desu^des'disponibUités11 COmpétente' suivant le ran* description et au fur It à SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE Le but de la Société Nationale d'Acclimatation de France est de concourir : 1° à l'introduction, à l'acclimatation et à la domestication des espèces d'animaux utiles et d'ornement; 2° au perfectionnement et à la multiplication des races nouvellement introduites ou domestiquées; 3° à l'introduction et à la propagation de végétaux utiles ou d'ornement. Le nombre des Membres de la Société est illimité : les Etrangers et les Dames peuvent en faire partie, ainsi que les Personnes civiles, les Associations, les Etablis- sements publics ou privés (Laboratoires, Jardins zoologiques ou botaniques, Musées, Sociétés commerciales, etc.). La Société se compose, de membres Titulaires, membres à Vie, membres Donateurs, membres Bienfaiteurs. Le membre Titulaire est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et une cotisation annuelle de 25 francs. Le membre à Vie est celui qui paie un droit d'entrée de 10 francs et qui s'affran- chit de la cotisation annuelle par un versement de 250 francs. Le membre Donateur est celui qui verse une somme d'au moins 500 francs. Le membre Bienfaiteur est celui qui verse une somme d'au moins 1.000 francs; son nom est inscrit, *à perpétuité, en tête de la liste des membres. La Société décerne, chaque année, en Séance solenneUe, des récompenses. Ces récompenses sont attribuées aux personnes qui, par leurs travaux, tant théo- riques que pratiques, ont aidé à la vulgarisation des idées de la Société. En outre de la Séance solennelle et publique des récompenses et du Déjeuner amical annuel, exclusivement réservé à ses membres, la Société tient chaque mois des séances spéciales de Sections : 1° Mammalogie; 2° Ornithologie et sa sous-section, Protection des Oiseaux; 3° Aquiculture ; 4° Entomologie; 5° Botanique, et 6° Colonisation. Tous les membres peuvent assister à ces séances dont les ordres du jour men- suels leur sont régulièrement adressés sur leur demande. La Société encourage d'une manière toute spéciale les études de Zoologie et de Botanique appliquées en distribuant des graines et en confiant des cheptels d'ani- maux à ses membres. Le Bulletin bimensuel forme, chaque année, un volume d'environ 800, pages illustrées de gravures. 11 traite des questions concernant l'élevage des animaux, la culture des plantes et particulièrement des faits d'acclimatation survenus en France et à l'Etranger. Il donne des renseignements les plus variés sur les animaux et les plantes utiles ou d'ornement d'introduction nouvelle. On y trouve des articles de fond relatifs aux applications de l'histoire naturelle : inttallation, éducation des animaux, culture des plantes, usages, introduction), etc., etc. La Société Nationale d'Ac climatation poursuit un but entièrement désin» téressé ; elle ne sert aucun intérêt particulier, ne se livre à aucun commerce; adhérer à ses statuts, l'aider dans ses efforts, c'est .contribuer au bien-être général et à la prospérité du pays. Le Gérant : A. Maretheux, Parla. — u Muimn, Imprimaur, 1, me Caaaatta. -7 w, New York Botanical Garden Library 3 5185 00259 8983 2*T ^CsL \\V|