"2. "7" AU ERA EN" LCL RO ho Û @ ie tete LITE] On HRISS RAD v LE és 1. » CORRE PERS MERE D Vut Ho ne DPENTEC di 4 dtibet AUTRE dé had; 1 rite « LPO DATE Tel FE El res RE UE EL Fetes. se si CLBET A. LE vrûs CN HE TS Lin Cat CET OL Met hé dat One Bols be [IE 2 e CHARTE 1e + MLPLORPTITEL TS 2 Verte En Ya te Bot ah à Lu OCOTHAETENE L LPC Uerieu LIL PR he ke À NATH LU PETER 2277 bi DELLIET PEYRE Pr st QPTETIE: dns A4 a SIA DTA LCA L Ltstohotsh bte h} stetoh 17 breelel QU LACRSS CORNE NE RDLLLRS nt te ete C4 " HA 4 ETES è : “tt RALRCT ETES TR ni ML rente AMP) AAA ETS * OP TPE Le Du des dus » de je : y ring : + Es £. + EEE + Le an LAS LOS NTITI EN LE DENT bi spu , na AA At LE nue OUTHNT FEtr tr P5FT 274 5” ni Li # L 4 : ri LE - ei ELLE LA ET r , , N RAT à + L L * Li “1 i À $ d {t è 0" 14 ; 1 APTE + À U : “+ 4 34 ver ; . (1 he 44 2a de … *% 1 4 mi Pl + , L Lenphes ï HAE TRE T 4 LA : ) te gt - * L RRA n QUOTE + | mu” R : “ ‘ , : à ht, fl ' | t : i } " L i a 47 ‘ . Î : \ Î i $ ' } : ‘ ' L : + , , | à Rp . PLDILORTR LATEX + : L : Fe jets à RRCROE | | | HT e LE tente pa ‘ue | + | | Le NE roat , Û 1. à it 15 QE : "4 : ° à . + dheteny: i ART CHARCECTIITT : CA 410 1 fe i “+ - LR 0 : w 4 a D ; ni! i FE , RLLEPTICT A 2 : : tu y $ ‘ LE 4 bis ' H ‘ , 0 = 4. | * Cr FN “st dr . | DRLCECT OCT PEN ï : 0 FRE x ‘) er : : + . û tr 4 “ + | "6, | | ' . ét f : : Leg Créer t ‘ A rate iu.s : | | à :» tu si L t… | ‘ ‘ L » CR] : : V4 L L ‘… LORS : ds» RL 1 tm dc :. : ' | , , rs : P''atbetre es je Morava it «1 » nie. à S , Pt penienEnupi x L Ù 1 F1 “+ : i k : oranent [re PTE ti 0 “\ ‘u ‘ CAE] ' ‘ e] ArHèt AREAS ARS Er" L ñ | ; : LR] LE] = ‘… i y L | | ue Cr i CCD RENTE TA TT TRE: ‘ ' du URE ñ nu rp . his rt i : * LL are À Û PYEY | rire : y 0 4 toit t Ra OC + hves i to CHR) fe : Ut Cr TT: : rbé CE LEA] En he hé ñ ÉPRETEE 0] A He | MS A } x} LEE + 4 s ÉS : = ñ 1 ; + | = < . 4 L 2 > PPS s A « 0 A : ; - - . $ L. " ÿ £ : # Lai DE E . = L £ . = 7 s co È ol e L à k > 2 £ ; … ù D “ 1 à « 0 “ z = A = : à à : * L, . à - Ÿ BULLETINS L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. É F COR LA AATT'E TU rt 14 41 OS | 14 16) s FE n “Æ - fl à 1 PR C4 ARC OS CPE CIS | 1. AT: \2 : HUIT A CRE NE ENT PA . : * . . \ se l : re | “ og A - E : Ex Æ & CP K: Se - “CC » Si l’on calcule l'erreur probable de cette température normale, — 0°,46, on trouve qu’elle est de 0°,65, et, par conséquent, moindre que pour les autres jours de Janvier. Il devient done extrêmement probable qu’il existe 1e1 une véritable anomalie périodique. | » Remarquons encore qu’en vingt années, il a gelé treize fois le 10 janvier; onze fois la température moyenne du Jour est restée au-dessous de zéro, et sept fois le maxi- mum du jour est également resté au-dessous de ce point : toute cette période de froid est très-marquée (1). » Voici les observations qui ont été recueillies sur la tem- pérature pendant le mois le plus froid; nous donnons en même temps les températures obtenues pendant le mois de janvier de cette année. Les hauteurs et les expositions des instruments ont beaucoup d'influence sur l’état du thermomètre. Ainsi, du 7 au 8, trois thermomètres différents ont donné à l’obser- vatoire, en tenant compte des corrections : à 1 mètre du sol. . . . . —19°,3 centigr. A'SmEtMes ss, sou Lin qu se AVR au haut de la tourelle . . . —17,97 » Ces grands froids ne s’observent en général, dans nos climats, que par des temps très-calmes et par des vents de NE. (1) Mémoire Sur les variations périodiques et non périodiques de la temperature, page 39, d’après les observations faites , pendant vingt ans, à l'observatoire royal de Bruxelles, tome XXVIIT des Aémoires de l Aca- demie royale de Belgique, année 1854. 4. Température du mois le plus froid de l’année. 1853-1852. 1860 - 1861. DATES. VENTS, minim, maxim. 2 dominants. moyenne. minim. | moyenne.| maxim. | minim. 29décemb,j 1592 1154 |— 850 | — 995 | — 3°3| —1155| SSE. 324 50 » 2,36 14,2 |— 9,41 — 0,9| — 0,8 | — 6,3 SE. 4,7 SA > 2,76 12,6 |—10,8 3,6 4,7 | — 1,5 0. 3,8 1 janvier.| 2,51 12,7 | — 8,1 5,3 5,9 0,6| S.-ENE 4,3 De y 1,38 11,5 |—11,7 | — 7,6 6,1! — 8,1| ENE.-E 4,3 3 » 1,26 11,5 | — 8,71 — 7,8 | — 3,5 | — 8,7 E. SEY 4 » 1,82 9,9 |— 6,7 0,7 1,6 | — 3,4| NNE.-N 3,3 LES) 1,93 10,0 |— 8,0 | — 6,7 1,6| — 6,7| NNE. 12 6» 1,76 10,4 |— 7,5 | — 6,7 | — 4,3 | — 7,7 SO. — 0,1 ED 1,24 10,5 |—10,0 | — 2,4 | — 2,0 | —10,2 NE, — 1,3 Sr 0,54 9,4 |—11,8 | —14,8 | — 5,0 | — 17,3 NE. — 9,0 gr TE 0,00 8,8 |—13,9 | —16,3 | — 9,1 | —16,3| ENE. —13,9 10 » —0,46 9,3 |—12,8 | —14,3 | — 9,7 | —15,7 E. —12,1 A4 » 0,37 10,6 | —12,9 | — 5 9 | — 5,1 | — 9,6| ENE.-N. | —12,9 42 » 1,13 10,4 | —10,5 | — 7,2 | — 4,6| — 8,5| SE.- 1,79 13,2 | —14,2 | — 8,4 | — 3,5| — 9,2| SSE. —14,2 14 2,03 13,5 | —17,31 — 8,2 | — 3,3 | — 9,9| SSE.-E. | —17,3 MEN 1,94 114,9 | —13,3 | —10,2 | — 3,8 | —1,30 E. —13,3 16 » 1,10 13,4 | —18,8 | —16,3| — 6,0 | —17,3 E. — 18,8 14..» 1,82 12,4 | —15,9 | — 5,2| — 2,2| —12,3| O.-NO. —15,9 49 » 2,27 12,7 | —16,9 | — 0,4 0,5| — 2,1] ENE. — 16,9 19 » 2,27 11,4 |—18,7 | — 2,8 | — 0,6 | — 3,6 | SO.-OSO.I —18,7 20 » 1,49 11,0 |—17,4 1 — 2,3 | — 0,2] — 3,2 SO. —17,4 2 » 1,21 12,5 | —13,6 0,2 1,4[— 0,2| OSO. —13,2 22 » 2,45 13,5 |—11,4 1,8 2,6 1,1| OSO. — 8,1 23 » 2,69 12,6 | — 8,8 454 3,1 0,5| S.-SO. — 5,6 2% » 3,26 13,0 | —12,4 | — 0,2 3,4 | — 0,6 S. —12,4 D OM 3,18 13,5 |—15,2 5,7 7,4 2,2| SSO. — 15,2 26 » 3,32 12,1 | —13,9 452 8,9 7,4 SO. —13,9 RS 3,65 13,1 | —11,2 6,4 9,2 4,9 | S.-0SO — 9,1 28 » 3,46 12,5 | —14,0 525 9,0 3,8 SO. — 5,7 29 » 3,69 12,8 |— 7,9 4,7 8,5 0,3 SO? — 6,0 30 » 3,83 10,3 | — 2,4 1,5 7,8 0,4| SSO. — 1,2 SA, 2 3,16 11,4 | — 6,4 1,6 6,1 1,4 S. — 2,3 M. Duprez a fait connaître qu’à Gand, dans la nuit du 7 au 8 Janvier, la température est descendue à — 16°,1 et, du 8 au 9, à — 17°,5. M. Florimond, de Louvain, avait écrit à M. Ad. Quetelet que, le 8 janvier, son thermomètre marquait — 18°,75 centigrades et le lendemain — 19°. (12) M. Dewalque a transmis une note qui donne les indica- tions suivantes pour Stavelot, à 288",7 de hauteur. Dates. Barom. à midi. Maximum, Minimum. Eau tombée. mm 0 nm . > 754,5 2,0 — 10,0 0,89 neige. 6 34,4 ge M SE 0,76 » 7 34; — 8,9 — 8,9 2,28 » 8 45,6 RON ON RE 0 9 43,9 Ses de 408 0 10 42,6 LAN QE 0 M. A.-J. Maas, professeur de physique au collége de la Paix, à Namur, nous a remis depuis les observations sui- vantes : TEMPÉRATURE DIRECTION nan" à — du maxim. minim. 9h. m. Midi. vent à midi. ss © er] s © sv © ” ss w” s s s s w | sw s 5 | ss 24 d,6 7,4 4,0 6,5 8,2 9,3 s s ss nn ue je SONGS ULE OA & Qt 0 © 1 D © = © ZX ND L | = SORSMGGUQONR NI ONCE OHOSTOX SO OHmONOCOA s s S. SE. !45. s s s s | Lo (e?] ss | is = CRE LA & » (15) Note sur les poudres de querre, de mine et de chasse; par M. Melsens, membre de l’Académie, examinateur per- manent à l’École militaire. I. Observations préliminaires. 1. Dans la séance du 31 mars 1860, j'ai eu l'honneur de soumettre à la classe quelques observations sur les poudres, en lui proposant une question pour le concours extraordinaire institué par l'arrêté royal du 10 décem- bre 1859. Aujourd’hui, je crois que cette question est digne de la plus sérieuse attention de ceux qui s’occupent de l'étude si difficile des poudres, et ma conviction sur l'utilité de sa solution et sur son importance s'accroît à mesure que j'étudie par l'expérience ces matières explosives. Je la re- produis donc dans les termes qui ont été admis par M. le ministre de l’intérieur et par l’Académie : « On demande si le principe de Joule (1) est applicable » aux effets de la poudre dans les bouches à feu. Dans la » négative ou dans l’affirmative, déterminer les conditions » des mouvements des gaz produits par la déflagration de » la poudre dans l'âme des bouches à feu et subsidiaire- » ment dans d’autres circonstances. » (4) Principe de Joule : « Dans tous les cas où un travail mécanique est » produit par la chaleur, il y a consommation d’une quantité de chaleur » proportionnelle au travail mécanique , et réciproquement cette quantité » de chaleur peut être reproduite au moyen d’un travail mécanique égal » au précédent, » LR J'espérais aider de mon faible concours, purement pra- tique ou expérimental, les savants qui entreprendraient l'étude de cette question. Depuis plusieurs mois, J'avais l'intention de présenter à l’Académie un mémoire sur la question des poudres ; mais les difficultés imhérentes à ces recherches et les frais considérables qu’elles entraînent m'ont empêché de terminer ce travail. Je me vois donc obligé de publier une simple note, qui n’est qu'un extrait très-succinct du mémoire; elle m'a d'autre but que de prendre date pour des faits que beau- coup de personnes ont pu voir et vérifier dans mon la- boratoire, et que j'ai communiqués à plusieurs officiers d'artillerie étrangers et belges. | Quelques observations de cette note me paraïssent de nature à permettre de poser des jalons épars qui aïderont au moins à établir un jour la véritable théorie chimique de la combustion de la poudre. IT. Théorie chimique de la combustion des poudres. 2. La théorie généralement admise aujourd'hui, mais controversée, me paraît lo d’être assise sur des faits et des expériences irrécusables; je me demande même s’il est possible de l’établir logiquement dans l’état actuel de la science. En effet, le phénomène de la combustion se passe sur un mélange très-complexe , composé de deux éléments combustibles, le soufre et le charbon, et d’un corps composé, le nitrate de potasse; la décomposition, assez facile de ce dernier, lui permet de céder la totalité du comburant au carbone, en échange du soufre, qui le transforme en sulfure de potassium; mais le soufre lui- même peut et doit devenir le comburant du charbon et de (1) l'hydrogène que celui-ci renferme toujours. La présence constante de l’eau, portée à une température très-élevée, complique le phénomène par sa décomposition et le par- tage probable de ses éléments entre les corps divers mis en contact. L’azote à l’état naissant, en présence d’une oxybase (KO), d’une sulfobase (KS), de carbone et d’hy- drogène, peut donner naissance aux composés cyaniques _ et ammoniacaux, etc. En continuant sous tous les rapports les considérations précédentes, on s'aperçoit bien vite que les causes ou les circonstances si nombreuses qui sont propres à modifier les effets de l’affinité chimique, peuvent, à la fois ou sé- parément, intervenir dans le phénomène, tels sont : les fluides impondérables, la chaleur principalement, le con- tact, la pression, les masses, l’affinité prédisposante, l’état naissant, la division, la volatilité, etc., et que toutes ces circonstances capables de modifier les réactions et de changer la nature des produits doivent réagir sur les effets dynamiques, déjà si variés de poudres de même dosage chimique; en effet des poudres qur ne se distinguent que par de légères différences dans leurs propriétés physiques, fournissent, dans certain cas, les résultats pratiques les plus variés. Qu'on ne se fasse donc pas illusion sur la valeur d'une théorie chimique quelconque : chaque poudre, peut-être chaque grain de la même poudre, exigerait sa théorie, si, pour l’établir, on tenait compte, en mesure, en nombre et en poids, des composés divers qui se font et se défont pendant l’instant très-court de la détonation. Ces eom- posés, dont l'importance pratique consiste, en définitive, à créer du travail, à produire du mouvement , se réduisent en dernière analyse, à des productions de corps volatils ou (16) gazeux portés à une très-haute température qui, dans des temps très-courts, en modifie la tension. 3. Mais quand on réfléchit aux phénomènes si terribles et si instantanés produits par la déflagration de la pou- dre, et qu'on cherche à leur appliquer les lois générales de la chimie, de la physique, de la mécanique et les idées nouvelles sur la corrélation des forces, on a quel- que peine à ne pas se laisser entrainer et on se plaît à dire que : si le principe de Joule est vrai pour la machine à vapeur, 1l doit être vrai pour le travail produit ou créé par la poudre qui brûle. | On devrait, ce me semble, attacher une importance très-grande à avoir des opinions bien fixées à ce sujet. En effet, si les principes de Carnot ou de Joule, tels qu'ils se trouvent exposés dans les travaux de MM. Clapeyron, W. Thomson, Regnault, Krônig, Clausius, Bourget, Magnus, Sondhauss, ete., sont applicables au cas de la poudre, il en résulterait évidemment que la question de la quantité de gaz produits, distendus par la chaleur énorme de la combustion, pourrait, de principale qu’elle est dans les théories actuelles, devenir une question secondaire ; car il ne s'agirait plus de produire beaucoup de fluides élastiques, mais de les produire en quantité voulue dans un temps déterminé et sous la forme la mieux appropriée pour obtenir la consommation sinon la plus considérable , du moins la plus convenable de chaleur, au profit du travail mécanique qu’on demande à la poudre. 4. À peine si j'ose citer les expériences que j'ai entre- prises dans cette direction , avec des appareils improvisés, laissant à désirer sous le rapport de l'exactitude et que je fais exécuter avec précision. Il m’a paru qu’un même poids de poudre, placé dans les mêmes conditions et dans (117) des appareils de même forme, mais de matières diffé- rentes, ne produisait plus le même travail ou recul à l’éprouvette dont je me sers; la nature de la surface (de l’âme de la bouche à feu) semble avoir une mfluence mar- quée ; car en la rendant absorbante, par exemple, et en la polissant ensuite, les résultats étaient sensiblement différents, etc. Je ferai remarquer, à l'appui de ces observations, que les poudres de chasse, qui donnent ordinairement moins de gaz que les poudres de guerre ou de mine, produisent cepen- dant des effets balistiques plus considérables. Il serait utile d'analyser complétement ce phénomène, en faisant la part de toutes les causes qui peuvent le déterminer, telles que composition, finesse du grain, lissage, température pro- duite , facilité de transmission de la flamme, vitesse de - combustion, etc. 5. Quoi qu’il en soit, la théorie chimique actuelle de la poudre admet que le phénomène se passe d’après l’équa- tion suivante : Avant l’explosiof. Après l’explosion. Nitre + charbon + soufre — sulfure de potassium -+ acide carboniq. + azote KO, AzO5 + C5 +S = KS + (C0?)5 —+- Az 48 + 54 +18 + 16 — 56 + 66 + 14 KO, AzOÿ Wire . | 08,750 | Poudre théorique donnant par { KS. . osr.412 . "4 2 CSA à 0 ,132 sa combustion . . . . . À co2. 0 494 — 980 Si ra 0 ,118 Az..0 ,103 — 892« 187,000 18r,000 33200 Soit en nombres ronds , 332 cent. cuhes d’un mélange d'azote et d’acide carbonique à 0°C. et 0,760 de pres- sion. Indépendamment des motifs que j'ai donnés plus haut (2), 2" SÉRIE, TOME XI. 7 (18) cette équation ne se réalise jamais dans la pratique, pour des raisons que tous Fes chimistes apprécieront facilement. Il suffit d’en citer quelques-unes pour les personnes peu habituées à lire nos équations. Le dosage théorique que cette équation suppose n’est adopté nulle part; la poudre est toujours humide; le char- bon n’est jamais pur; il contient de l'hydrogène, de azote, de l’oxygène et des cendres; le mélange plus ou moins intime, en un mot, les propriétés physiques des particules mises en présence, interviennent; la température qui se modifie non-seulement d’après la pression, mais aussi d’après les masses. Il n’est donc nullement étonnant ou extraordinaire de rencontrer tant de données contradictoires dans les tra- vaux des expérimentateurs différents, puisqu'il peut se former, indépendamment des produits donnés par l’équa- tion ci-dessus, une longue série de produits accessoires, tels que l'hydrogène, l’oxygène, l’oxyde de carbone, les oxydes de l’azote, les sulfures de carbone et d'hydrogène, les azotures de carbone, les composés cyaniques, sulfo- cyaniques et ammoniacaux. Proust déjà en avait signalé plusieurs dès 1810. Il me paraît que les chimistes se préoccupent trop de traduire la poudre en une question chimique simple, et que leur attention devrait se porter davantage sur la nature ét les propriétés physiques du mélange combustible. On peut, par l'équation précédente, se rendre un compte plus ou moins exact du phénomène; mais n'oublions pas que c’est une abstraction plutôt qu’une réalité, et que, dans la pratique , les produits varient à l'infini, même au point de vue chimique seulement. M. le professeur Chandelon a déjà fait remarquer la (1) diversité d’effets et de produits de poudres de nature ou de composition différentes. (Mémoires de la Société des sciences de Liége, t. VIT.) 6. Si j'insiste sur ce point particulier de la question, c’est qu’il me paraît qu’en se basant trop exclusivement sur les données de la chimie, on est détourné de la véritable voie qui doit conduire à la connaissance intime de l’ensem- ble des propérités des poudres. 7. MM. R. Bunsen et L. Schischkoff (Poggendorff's ai nalen, B. CI) rejettent l’ancienne théorie, parce que le rapport du volume de l'azote à celui de l'acide carbonique s’est constamment trouvé inférieur à 4 : 4,5 dans leurs expériences , tandis que, d’après l'équation précédente, ces gaz devraient se trouver dans les rapports de 4 : 3; parce que le résidu solide ne contient que peu de sulfure de po- tassium, et parce que la poudre (ou mieux : LEUR POUDRE) ne leur a fourni que 193,1 cent. cubes de gaz, tandis que, d’après l’ancienne théorie, elle aurait dû produire 330,9 cent. cubes. 8. Voici les passages du mémoire de ces savants ch1- mistes : « Si, par son explosion, la poudre se décomposait en » sulfure de potassium, azote et acide carbonique, comme » on l’admet d’après la théorie adoptée jusqu’ie, les deux » derniers gaz devraient se trouver dans les rapports de » 1:53; mais l'expérience montre qu’en réalité, on n’at- » teint pas une seule fois le rapport 1 : 1,5. Il résulte de » cette circonstance particulière que la décomposition de » la poudre doit reposer sur des faits tout autres que ceux » qui servent de base à l’ancienne théorie. » Ils font remarquer, plus loin, que les matières premières, mises en présence dans la poudre, se retrouvent très- (20 ) exactement dans les produits sohdes et gazeux provenant de sa combustion, et ils ajoutent : « Il résulte de ce mode de décomposition qu'un » gramme de poudre, en brülant, fournit 193,1 cent. cubes de gaz. La quantité qu’on aurait dû obtenir, » d’après la théorie admise jusqu'ici, s'élève à 330,9 cent.; » ainsi au delà d’un tiers en plus. » 9. Dans l’esprit actuel de mon examen, j’évite de faire des objections aux expériences de ces savants chimistes; J'ajoute que la plupart des poudres de mine et de guerre : m'ont donné sensiblement plus de gaz. Je mentionnerai ces expériences dans mon mémoire. Je me permettrai cependant de faire observer à ces mêmes savan{s que la somme totale de gaz que leur poudrg aurait pu fournir, n’atteint pas 230 cent. cubes; bien plus, si l’on tient compte du carbone échappé à la réaction , 1l ne pouvait s’en produire que 220 cent. cubes. J'ajoute que l'excès d'oxygène que cette poudre contient laisse de l’'oxyde de potassium libre; que celui-ci s'empare d’une partie de l'acide carbonique, et que le rapport réel de l'azote à l'acide carbonique , dans les gaz de la combustion de leur poudre, n’atteint pas théoriquement celui de 1 : 4,5. L’excès d'oxygène, le défaut de soufre et de carbone dans la poudre particulière dont ils ont fait usage, expliquent parfaitement tous les résultats de la savante analyse de MM. Bunsen et Schischkoff : une théorie ne peut changer ou altérer le poids des matières mises en présence. | 10. On expliquera sans aucun doute, par des motifs analogues, les raisons pour lesquelles certains expérimen- tateurs, et parmi eux un des plus illustres et des plus exacts, Gay-Lussac, ont trouvé plus de gaz que la théorie n’en indique; on comprendra pourquoi on a obtenu des Y NA (21) rapports différents, c’est-à-dire qui ne s'accordent pas avec la théorie, entre les volumes des gaz absorbables et non absorbables. | Les données à ce sujet varient dans des limites tout à fait extraordinaires : un volume de poudre peut fournir des quantités de gaz représentées par 200 ou 266, et même 650 volumes, mais dans des circonstances variables (Pio- bert). | 11. Imitons la réserve de MM. R. Bunsen et L. Schisch- koff, qui ne remplacent réellement pas l’ancienne.théorie par une théorie nouvelle, mais qui enregistrent des faits de l'exactitude desquels il n’est pas permis de douter, et qu'on reproduirait certainement avec leurs appareils et leur poudre : ce n’est pas leur expérience que je critique, c’est leur manière de raisonner que je ne comprends pas. ‘12. Je pense qu’on doit se borner à admettre provisoi- rement que la poudre, en brülant, est capable de produire tous les composés de potassium, d'azote, d'oxygène, de soufre, de carbone et d'hydrogène. Ceux-ci peuvent prendre naissance en grand nombre pendant la déflagration, et ré- sister aux températures très-basses relativement et aux températures les plus élevées qui se produisent dans les différentes parties d’une même charge de poudre, depuis le sulfure de potassium jusqu’au sulfocyanure de potassium. Admettons même que, dans les expériences de labora- toire, comme dans les expériences de l’industrie et de la guerre , on rencontrera des produits ou semblables ou simi- laires. Je n’en cite qu'un seul comme exemple : dans un ur, exécuté le 10 décembre 1858, j'ai constaté la présence du sulfocyanure de potassium dans les erasses du mortier- éprouvette à globe lourd. La poudre employée était au dosage de guerre six, as el as. (22) J'ajoute qu'il serait même possible de rencontrer les éléments isolés : carbone, hydrogène, soufre, oxygène, comme résultats de la décomposition de quelques composés qui naissent momentanément pendant la déflagration. Le soufre se décèle facilement, le carbone aussi; mais il reste à connaître leur origine, comme celle de l’hydrogène et de l’oxygène retrouvés par MM. Bunzen et Schischkoff. N’est-il pas remarquable en effet de retrouver ces éléments sensiblement dans les rapports qui constituent l’eau, 1 :7 au lieu de 1 : 8? | HT. Considérations et hypothèses sur la haute température de la combustion des poudres. — Conséquences que la TEMPÉRATURE BLEUE peut avoir sur la théorie. — Appli- cations pratiques probables. 13. On ne rencontre dans aucun mémoire, dans aucun livre à ma connaissance, une appréciation assez exacte et une détermination assez précise de la température pro- duite pendant la déflagration des poudres, pour qu’il soit permis de l’adopter sans hésitation comme fait incontes- table acquis à la science. On trouve dans les auteurs des températures comprises entre 900° et 1250° C., même 2500° C., température con- fondue, par erreur, avec celle de la fusion du cuivre rouge. Plusieurs auteurs admettent la température de 2400° C. Il y a souvent, dans les traités, une confusion regret- table entre la température mesurée par le changement d'état, c’est-à-dire par la fusion de certains métaux, et l’action chimique des produits de la poudre sur ces mé- taux. Tout me paraît vague et mal déterminé dans les rensei- (25) gnements que la science possède, par suite des difficultés qu’on rencontre dans la mesure des hautes températures; les auteurs ne sont même pas d’accord. (Voir Piobert, Traité d'artillerie théorique et pratique, pages 308 et 309; Paris, 1859.) Des expériences directes, faites en plongeant les mé- taux inattaquables dans de fortes flammes de poudre ou de pulvérin brülant à l'air libre, m'ont prouvé que la tem- pérature, dans ce cas, se trouve au-dessus de celle de la fusion de l’or pur, c’est-à-dire au-dessus de 1250° C., mais qu’elle est inférieure à celle de la fusion du platine. Le premier de ces métaux fond instantanément dans une flamme de pulvérin, le second résiste même lorsqu'on emploie les fils de Wollaston servant aux réticules des lunettes. J’ai fait ces expériences avec des poudres de nature, de pays, de procédés différents. 14. M. Chandelon, et, après lui, MM. R. Bunsen et L. Schischkoff ont estimé, dans ces derniers temps, la température produite par la combustion de la poudre. (Loc. cit.) ; Ces savants donnent les approximations suivantes : Composition de la poudre. KOAzO$ +S + C5 4605° C. Chandelon. Poudre théorique à charbon noir. M ne à st à 58070 C. Id. Poudre théorique à charbon roux. KOAzOS -++S +-C6 132% C. Id. Poudre de mine. (KOAzOS)S + S6 + C25 40980 C. Id. Poudre » (KOAzOS)? + SHC 925570C. Id. Poudre » MO. . « , 78,99 | 29950 C. Bunsen et Schischkoff. Soufre 2 4: .. 9,84 Pour la poudre brûlée à l'air libre. Charbon. . . . 7,69 » 35400 C. Bunsen et Schischkoff, Hydrogène. . . 0,41 Pour la poudre brülée dans un espace limité. Oxygène. . . . 35,07 100,00 227290 C. : 7 — 32460 C. Moyenne générale, (24) Ces données, rapprochées de mes expériences directes, permettent de dire que la température s’élève au delà de 1250° C., et même au delà du point de fusion des métaux usuels, fontes, aciers, fers, c’est-à-dire des plus réfrac- taires. S'il est vrai qu'on peut admettre une température rela- tive de plus de 1250° C. ou une température (moyenne générale) d'environ 3000° C., il en résulte une observation des plus importantes applicable à l’analyse des phénomènes qui se produisent dans la combustion de la poudre, c’est- à-dire à la théorie chimique de la poudre. 15. En un mot, s’il est prouvé, comme l’admet M. Sante- Claire Deville, que l’eau n’existe plus à la température de la fusion de l'argent (1000 à 1100° C.); que l’hydrate de potasse n’existe plus à une température voisine de la fusion de la fonte (1100 à 1200° C. (?), en d’autres termes, que l'hydrogène, l'oxygène et le potassium ne sont réellement pas combinés à cette température, il est très-probable que plusieurs produits de la poudre n’existent plus à l’état de combinaison, mais bien à l’état d'éléments isolés. Nous sommes amené à penser que les produits derniers que nous recueillons à l’analyse pourraient, dans certains cas, n'être que le résultat final d'actions suecessives, de combinaisons et de décompositions spontanées, d’analyses et de syn- thèses qui se succéderaient très-rapidement. La produc- tion de chaleur peut faire acquérir aux corps composés qui se forment la température de leur dissociation et le refroidissement inévitable provoquer de nouveau la eom- binaison. 16. I résulterait de ce fait que la tension des gaz de la poudre, dans l’âme des bouches à feu, par exemple, sui- vrait une loi très-compliquée par elle-même , très-difficile- (25 ) ment abordable dans l’état actuel de la seience et presque inabordable par l'expérience. | Cette loi de la tension des gaz, quelle qu’elle soit, se trouverait en défaut si, à un instant donné, la tempéra- ture de la masse était capable de désunir les éléments des composés primitivement produits, soit en entier, soit même _ partiellement. Deux volumes de vapeur d’eau deviendraient tout à coup trois volumes d’un mélange d’hydrogène et d'oxygène ; deux volumes d’acide carbonique deviendraient trois vo- lumes d’un mélange d’oxyde de carbone et d'oxygène; la tension due au sulfure de potassium serait brusque- ment remplacée par la tension de la vapeur de soit et de la vapeur de potassium, etc. Nous ignorons scientifiquement si les phénomènes se passent ainsi, mais nous sommes amené à nous poser ces questions , en réfléchissant à toutes les conditions de la dé- flagration soit à l’air libre, soit même sous les fortes pres- sions qui agissent en sens contraire de la chaleur. L'étude de la poudre est difficile, parce qu’on n’a que peu ou point de lois pour se guider, et parce que tant de circonstances, en apparence très-peu importantes, le sont cependant en réalité. Cette étude est lom d’être épuisée sous le rapport théo- rique et sous le rapport pratique; 1l nous reste encore aujourd’hui, comme le disait Proust en 1811, à renverser un colosse d'illusions. Que de faits à constater scientifiquement, que d’expé- riences avant d’oser entreprendre de poser une théorie de la combustion de la poudre! 17. En me permettant d'appeler l'attention sur cet ordre de faits, je ne suis mû que par la seule considération : (26) qu’on ne marche pas vers la vérilé en reculant devant les difficultés d’une question. Peut-être trouvera-t-on, dans les considérations que je viens d'émettre, des motifs plausibles pour expliquer les anomalies que les expérimentateurs rencontrent dans l'étude des poudres et des effets qu’elles produisent. Il me semble que ma théorie, ou mieux cette hypo- thèse, explique, jusqu’à un certain point, comment de légères modifications dans les propriétés physiques de la poudre donnent lieu à des différences notables dans les produits derniers que nous retrouvons à l’analyse, comme elles en donnent incontestablement dans leurs effets ba- listiques, comparés aux effets destructeurs sur les bouches à feu. Un mode de chargement qui étalera la poudre dans âme d’une bouche à feu, ou qui fera faire un léger mou- vement au projectile avant que le feu atteigne la masse de la charge, pourra empêcher cet accroissement subit de tension résultant de la décomposition spontanée des com- posés, puisque la chaleur excédante, au lieu d’être em- ployée à désunir les éléments, servira à dilater les gaz compris dans l’espace vide; une matière organique capa- ble de se décomposer en produits gazeux, tels que les bouchons de paille dont on fait usage, remplira le même but; une poudre très-dense pourra produire des effets destructeurs, quand la même composition, formée de grains moins denses, renfermant de l’air condensé, com- muniquant la même vitesse au projectile, ne sera cepen- dant destructive au même degré pour l'arme, l’air qui se dilate empêchant la décomposition brusque. Un mode de chargement qui diminuera le vent pour- rait même, en augmentant la pression, empêcher cette (21) décomposition spontanée capable de produire une tension irrésistible et instantanée; elle pourrait s’y opposer dans le premier moment, et l’action n'aurait lieu que plus tard, lorsque le projectile aurait déjà parcouru une partie de l’âme. Ce surcroît instantané ne serait plus aussi nuisible quand l'effort produit se répartirait sur une grande sur- face; mais il serait irrésistible dans certains cas et pro- duirait ces effets, si terribles et si puissants, observés dans l'éclatement des bouches à feu, effets qui, à ma connais- sance, sont loin d’être expliqués. Une poudre faite par les pilons, qui ne donnent jamais des galettes aussi denses et dans lesquelles le mélange est aussi intime que par le procédé des meules, sera cependant parfois d’un meilleur emploi. Une poudre chimiquement théorique pourra être détes- table dans la pratique, etc., etc. IV. — Armes rayées. — Marche et mouvement des gaz naîssants dans la déflagration de la poudre. 48. — La complication des phénomènes ne s'arrête pas à ces difficultés. Je signale dès aujourd’hui un fait qui com- plique la question, quand on considère la poudre comme produisant du mouvement ou un travail qui se transmet au projectile et à l’arme elle-même. La combustion des grains de poudre se fait par couches successives; le feu se propage dans l’inflammation d’une charge cylindrique par tranches parallèles de l'extrémité enflammée vers l’autre. Tout en admettant que les phéno- mènes se passent ainsi, on peut cependant se demander quel genre de mouvement chaque molécule gazeuse affecte au moment où elle prend naissance, et quel mouvement ( 28 ) résulte de l’ensemble du phénomène ou de la somme de ces mouvements élémentaires. 19. On trouve à ce sujet une observation remarquable dans des expériences exécutées simultanément à Stras- bourg, Douai et Toulouse, sur trois positions différentes de la lumière dans les canons : le passage du boulet, dans l’une des bouches à feu, dont la lumière se trouvait dans le prolongement de l’axe de la pièce, était marqué par une forte spirale. (Technologie des armes à feu, par Moritz- Meyer, t. IL.) Cette expérience mériterait d'être reprise et bien étu- diée, afin de rechercher toutes les causes de ce fait, qui tendrait à faire croire que la marche des gaz n’est pas aussi simple qu’on semble l’admettre, même en tenant compte des battements, etc. Nous pouvons chercher des analogies dans d’autres observations, et je eiterai d’abord une expérience des plus simples. 20. Qu'on fasse le vide dans un tube de verre efflé, après avoir introduit un peu de poussière, du lyeopode, par exemple, près de la partie effilée; au moment où on brise celle-ci l’air se précipite dans le tube, et il entraine le lyco- pode, que l’on voit souvent déposé, sous forme de spirale, le long des parois ; le pas de cette spirale s’allonge en s’éloi- gnant de la partie eflilée ou de lorigme du mouvement, en même temps la spire se divise. On peut se contenter d’insuffier brusquement de l'air dans un tube effilé : le lycopode s'attache aux parois et y laisse la trace d’une ou de plusieurs spirales qui persis- tent. Le pas de cette hélice va toujours en s’allongeant et en (29 ) s’éloignant de l’origine du mouvement, et les spires finis- sent par se diviser. Un appareil très-simple, formé de deux tubes de verre concentriques, réalise parfaitement l’expérience; le pre- mier, ayant un diamètre double ou triple du deuxième, est fermé à une extrémité; le second, ouvert d’un côté, effilé de Vautre, est garni d’un simple piston formé d’ouate et glisse dans le premier, qui sert à condenser ou à raréfier l'air. Le fusil à vent et la machine de compression servent par- faitement à cette démonstration. Ces observations mériteraient une description spéciale sur laquelle je compte revenir en détail. 21. M. Savart a montré que Pair qui vibre ou qui produit un son dans un tuyau ouvert décrit une espèce d’hélice. J'ai observé des ondulations plutôt que des spirales dans les tuyaux prismatiques. 22. M. Fermond, en analysant les phénomènes produits par l’hélicophone, pense que la production du son produit par l’air en mouvement doit être attribué exclusivement à la formation des spirales. 23. Des expériences directes m'ont prouvé que le son peut être produit, dans l’harmonica chimique, sans qu'il soit possible de constater des spirales ou des ondulations dans l'air du tube qui surmonte la flamme. La flamme de l’hydrogène, rendue éclairante par une essence, la flamme du gaz de léclairage et d’autres flammes présentent, au contraire, toujours une forme on- dulée ou des spirales aussitôt que le son est produit. On peut en apercevoir parfois plusieurs à l’œil nu, mais le phénomène est plus remarquable quand on l’ana- lyse au moyen du miroir tournant de Wheatstone; en 1so- (50 ) lant chaque flamme produite par les détonations succes- sives qui donnent lieu au phénomène de l’harmonica chi- mique , on voit parfaitement la forme ondulée de chaque flamme partielle. 24. II me parait difficile d'admettre que cette marche en spirale, que les gaz affectent dans toutes ces cireon- stances, n’ait pas quelque relation ou quelque analogie avec ce qui se passe dans la marche des gaz, qui prennent naissance dans la déflagration de la poudre, et que ces faits soient sans relation avec les armes rayées. La forme des spirales, ou le pas des hélices qu’on ob- üent par la simple insufflation de l'air dans des tubes, m'a paru changer avec la vitesse imprimée à l'air ou aux gaz. 25. Ne peut-on pas se demander si les avantages que procurent les armes rayées n’ont aucune analogie avec cette marche curviligne que les gaz comprimés, chauffés ou vibrant affectent dans toutes les circonstances que je viens de rappeler ? Je note en passant que, dans certains cas, les gaz se comportent comme s'ils étaient composés de molécules solides, opinion émise déjà par M. Krônig. Si le travail de la poudre résulte de deux facteurs, la vitesse de combustion ou la combustibilité et la force in- trinsèque, n’y a-t-il aucun rapport entre ces facteurs et le pas des hélices dans les armes carabinées ? Quoi qu'il en soit, je m'étonne de ne jamais ou rarement rencontrer l'expression de ces facteurs ou du temps de la combustion de la poudre dans les formules déterminant la forme à donner aux spirales ou rayures des armes nou- velles; si elles sont différentes chez des peuples différents, cela doit dépendre du rapport entre les deux facteurs du travail de la poudre ou, en un mot, de sa nature. (51) Si je comprends bien ce qui se passe dans les armes, on devrait tenir compte du principe suivant : Il y a une relation entre le pas des hélices et la nature de la poudre, ou, en d’autres termes, chaque poudre exige un pas particulier, comme chaque pas des hélices exige une poudre particulière. _ On admet que les poudres dites lentes sont les plus con- venables pour produire le maximum d’effet dansles canons rayés; mais les officiers distingués qui se sont occupés de la question, me permettront de demander si la relation du pas des hélices avec les calibres des bouches à feu doit con- situer à elle seule la base principale du calcul? V. — De l'épreuve des poudres. — Eprouvette nouvelle. 26. J'ai donné tousles détails qui précèdent pour prouver combien sont complexes les questions qui se rattachent à lusage pratique des poudres : c’est un aperçu des difficultés à vaincre quand il s’agit de déterminer à priori, par des théories et par des hypothèses, l'effet d’une poudre dans une circonstance donnée où elle est appelée à travailler, à produire du mouvement, à faire équilibre à une ré- sistance. Peu d’éxpérimentateurs peuvent disposer des grandes éprouvettes, les canons et les fusils à pendule, les appareils électro-balistiques; ces éprouvettes donnent, il est vrai, la résultante de l’effet utile de la poudre, mais non ses deux composantes, c’est-à-dire la combustibilité et la force intrinsèque. 27. Il a fallu me créer, en vue du travail que j'ai com- mencé sur la poudre, un appareil remplaçant les grandes (32) éprouveltes actuelles, et celui que je propose avec con- fiance me paraît mériter l'attention des militares, des industriels et même des savants. ; Mon instrument apprécie les deux facteurs du travail utile de la poudre, ou au moins 1l permet de déterminer, jusqu’à un certain point, la part qui revient à chacun d'eux dans l’appréciatioh de l'effet total produit par la poudre. En un mot, quand les grands appareils ne donnent, par exemple, que la portée, ou la vitesse initiale, mon éprou- vette m'indique pourquoi de deux poudres ayant la même portée ou communiquant la même vitesse au projectile, l’une sera plus nuisible que l’autre pour l'arme, pourquoi l’une laissera l’arme intacte, tandis que la seconde pourra la détériorer. J'ai été guidé par les nombreux essais qui ont été faits à peu près inutilement pour vérifier ces deux qualités de la poudre sur le même instrument, et surtout par le remar- quable mémoire de M. Colson, chef d’escadron d'artillerie, précédé des observations du comité d'artillerie (Mémorial de l'artillerie, t. IE). J'ai étudié la question sans préoceu- pation théorique, et jusque maintenant exclusivement par l'expérience, voie sûre mais longue et pénible. Je n’ai, en effet, eu en vue que de créer un instrument capable de signaler une poudre avec une précision telle qu’elle se distingue, sans hésitation et sans aucun doute, de toute autre qui s’en rapprocherait au point de ne pou- voir en être distinguée sans l'emploi simultané de toute les éprouvettes en usage pour l'artillerie. Un imstrument de ce genre manque à l’industrie, comme 1l manque à l’art de la guerre et au commerce. Les officiers d'artillerie les plus expérimentés, qui sont (55) les seuls savants aptes à juger d’une pareille question, pensent : qu’une éprouvelie classant les poudres dans un ordre qui ne serait démenti par aucune bouche à feu, est un appareil impossible à réaliser en pratique. Cela est vrai, si on se borne à un seul essai. Il me sera permis cependant de faire remarquer qu'une bouche à feu est, en définitive, un appareil qui utilise une fraction du travail total, c’est-à-dire théorique, et qu’un appareil de dimensions restreintes pourrait être calculé de façon à utiliser la même part proportionnelle du tra- vail théorique ou total produit par les mêmes actions. Doit-on admettre, d’un autre côté, avec presque tous les officiers d'artillerie : que la meilleure, la seule éprouvette de la poudre, est l’arme à laquelle elle est destinée, ou plus généralement, selon mes opinions : est la condition et les circonstances dans lesquelles la poudre brule, produit un travail déterminé, parce qu'une fraction seulement du travail est utilisé ? Ne puis-je pas ajouter : Quand un instrument aura caractérisé, signalé une poudre d’une manière complète, toutes choses égales d’ail- leurs, cette poudre ou une poudre identique produira tou- jours les mêmes effets dans les mêmes armes, ou plus géne- ralement dans les mêmes circonstances ? 28. Quoi qu'il en soit, je passe à la description som- maire de mon appareil, me réservant de décrire les éprou- veltes anciennes que J'ai essayées et les nouvelles que j'ai construites, mais qui ne m'ont pas satisfait. Après des nombreux essais, je suis revenu à l’éprou- vette hydrostatique de Regnier, décrite dans le Bulletin de la Société d'encouragement, t. VI, année 1807; mais 2€ SÉRIE, TOME XI. 3 (54) j'en ai changé complétement la forme, les dimensions et principalement le mortier. Les deux modèles que j'ai lhon- neur de présenter à l’Académie suflisent pour montrer toute la différence de mon instrument avec celui de Re- gnier. Indépendamment de la forme du plongeur, la modifi- cation essentielle porte sur la forme, la capacité, la lumière, les dispositions intérieures des mortiers dans lesquels on brüle la poudre qui doit produire le recul de cette espèce d'aréomètre, dont le plongeon, dans un liquide, mesure la quantité relative de mouvement produit ou de travail utilisé. La combinaison des différents mortiers et des différents organes des mortiers permet de faire produire, au même poids de la même poudre, une quantité de mouvement représentée par un où par cent et même au delà. Voici un exemple indiquant la comparaison de deux poudres : Circonstance ou / Travail utilisé ou produit. conditions Effet balistique. des ) Numéro de mérile. deux essais. Recul de l’eprouvelte exprimé en millimètres. ER MORTIERS DIVERS. DE POUDRE À. POUDRE B. N° d'ordre. — FT | PNR 2 SES ER - 175 29 260 285 3° 275 300 4° 305 310 »° 320 325 6° 350 535 Te 335 325 go 339 325 92 505 290 Somme 2,515 2,670 ( 95 ) Ces chiffres montrent que la poudre B, qu'on aurait crue beaucoup plus énergique que la poudre À, perd cette supériorité dès la 4° condition et que A l'emporte sur B à partir de la 7° condition. Nommons, par exemple : La 1'°, la 2e et la 3", circonstance ou condition de l'essai, le mortier-éprouvette à globe lourd et à globe léger; La 3°, la 4°° et la 5° : les armes portatives diffé- rentes ; La 4°, la 5°° et la 6° : l'artillerie de campagne; La 6°, la 7° et la 8° : l'artillerie des places fortes ou les forts calibres. Notre tableau nous permettra de classer les poudres À et B en vue de chacune de ces armes, qui ont été con- sultées et qui se sont prononcées. Une 3"° poudre C, essayée de la même manière, viendra se placer à côté de À ou de B, et pourra se caractériser, par rapport à À et B ou à un type quelconque, comme marquant un maximum d'effet à l’une des conditions désignées par les numéros d'ordre du tableau. 29. Tous ces chiffres, leurs sommes et une suite de colonnes verticales, telles que celles de 50 à 305, de 175 à 290, peuvent se traduire en courbes, comme celles que j'ai l’honneur de présenter à l’Académie ; elles indiquent, d’une façon frappante, comment, par exemple, la poudre de chasse, qui est la meilleure, la poudre usitée par lin- fanterie, la poudre à canon et la poudre de mine, qui est la moins vive de toutes, la moins combustible, peuvent, dans une condition déterminée, produire le même travail, ou très-sensiblement le même effet dynamique. Une fois pour toutes, une poudre, pour être d'un bon ( 56 ) service dans une circonstance voulue, devra donner une suite de nombres déterminés, et quand elle tracera une courbe voulue, on pourra prédire assez exactement ses effets dans une arme donnée; bien entendu que, dans tous les cas, l’arme elle-même (la condition elle-même) aura été chargée de se prononcer en dernier ressort. 30. Les éprouvettes analogues à celles que Je mets sous les yeux de l’Académie peuvent être rendues d’une sensi- bilité telle, que l’action de l’air humide sur une poudre se traduit de suite en une observation qui ne laisse aucun doute : en quelques heures, les reculs, dans certains eas, peuvent varier du simple au double, et même du simple au triple pour des poudres excellentes à l’état sec, mais sus- ceptibles de se détériorer facilement lorsqu'elles sont expo- sées à l'humidité pendant douze heures. 31. Je fais usage d'éprouvettes très-sensibles et de mor- üers particuliers dans l’essai de la matière qui constitue une poudre. Le pulvérin enflammé peut produire un recul et, dans ce cas, je note la durée de sa combustion : je n’ai eu à ma disposition qu'un chronographe marquant les 5° de seconde; on connaît la hauteur, la forme et le poids du pulvérin sur lequel on expérimente; on apprécie la quantité de résidu qu’il laisse. Cette expérience fournit un contrôle très-important des résultats donnés par la poudre grenée, qui produit une détonation dans le premier mode d'essai dont le tableau (28) offre un exemple. 52. Je pense que l’industrie pourra tirer parti de l’éprou- vette; elle permettra, sans aucun doute, aux fabricants de suivre toutes les phases de la fabrication. Lorsque les circonstances de température, de pression , de sécheresse et d’humidité varient, le classement d’une Fo) série de poudres reste le même, les rapports sont iden- tiques, mais les chiffres sont légèrement altérés dans leurs valeurs absolues. Les anomalies sont moins nombreuses, moins considérables qu'avec plusieurs des grandes éprou- vettes de la guerre. 33. Les personnes habituées aux essais, et qui peuvent apprécier leurs difficultés quand on n’a aucune donnée sur une poudre que l’on examine, n’admettront qu'avec res- triction ce que j'ai dit sur son signalement parfait et sur la possibilité de déterminer à priori, par un essai en petit, ses propriétés balistiques et, jusqu’à un certain point, ses propriétés brisantes ou destructives sur les armes. Je ferai remarquer que mes essais m'ont toujours nettement indi- qué le caractère brisant ou nuisible des poudres reconnues comme telles par la pratique de l’artillerie. 34. On me permettra de signaler quelques-uns des avan- tages de l’éprouvette : elle est simple, commode, d’un ma- niement si facile, que tout artisan peut apprendre à s’en servir en quelques heures; elle n’est sujette à aucun dé- rangement. Mon éprouvette principale et mes mortiers sont restés intacts après des milliers de tirs ; elle est très-facile- ment transportable; cent grammes de poudre suffisent pour donner le signalement parfait de celle-c1; l’essai est rapide; les résistances sont toujours les mêmes; aucune résistance passive n’est variable, et on peut tenir un compte rigoureux de celles qui varient. L’éprouvette donne des résultats com- parables , soit que l’on mesure, soit que l’on pèse la poudre; elle signale les deux facteurs de celle-ci par une simple comparaison de quelques plongeons ou reculs. 39. S'agit-il des poudres de guerre et des avantages qu'elle peut procurer dans ce cas spécial , je n'ose me pro: (58) noncer, et je renverrai à la discussion remarquable de M. le chef d’escadron Colson. (Mém. de l'artillerie, t. HE.) En Belgique, une commission d'officiers d'artillerie étudie mon éprouvette; j'attends, sans préoccupation et avec calme, la libre et loyale expression de l'opinion de ses membres. Je ne puis (autant qu’il m'est permis de me prononcer) qu’engager les commissaires des poudres ou les artilleurs à pousser leurs recherches dans cette direction, et peut-être, je l’espère, pourront-ils dire un jour : Que de peines, que de temps, que d'argent épargnés ! et j’ajouterai, pour exprimer toute ma pensée : Puissions-nous épargner le sang ! 56. Tel qu'il est, mon appareil m'a appris à préparer des poudres jouissant de certaines propriétés que J'impo- sais d'avance, eu égard à leur combustibilité et à leur force intrinsèque. L’instrument confirmait ou eritiquait mes pré- visions; 1l me permettait de dire si une poudre, préparée par moi, devait se ranger à côté des poudres lentes, vives ou brisantes, dont je possédais des types connus par l’ex- périence en grand. 57. On à critiqué, dans quelques pays, les procédés perfectionnés employés dans la fabrication des poudres de guerre. Tous les procédés actuellement en usage pour- raient être modifiés pour les armes rayées; mais, abstrac- tion faite de ces considérations, les poudres dites nou- velles, d’une grande vivacité de combustion, d’un effet destructeur considérable sur les bouches à feu, exposant les artilleurs aux éclatements de leurs armes, n'’offrant, de l’avis de beaucoup d’artilleurs, aucun avantage dans la production des effets utiles, ont dû amener les officiers qui s'opposent à ladmission de poudres pareilles pour le (39 ) service de la guerre, à se créer un type de la poudre par- faite. Quelques nations pensent posséder ce type. 38. Si je ne suis pas le jouet d’un hasard heureux se reproduisant dans des milliers de trs, je ne désespère pas de prouver que la simple éprouvette que je propose suffit pour résoudre le problème suivant, avec autant sinon plus de certitude que par les grands appareils de guerre. Fabriquer une poudre toujours identique; produisant plutôt une force égale, régulière, constante, qu'une grande force; donnant toujours les mêmes effets dans le même temps; jouissant au maximum de toutes les qua- lités requises pour être d’une bonne conservation; réunis- sant les bonnes qualités des poudres, dureté, résistance au transport, hygrométricité, etc.; produisant le plus grand effet sous le moindre volume ou par le moindre poids; altérant le moins les armes, possédant des rapports con- stants entre la combustibilité et la force intrinsèque, con- venable au plus grand nombre d'armes, etc. C’est la pratique ou l'expérience qui est encore aujour- d’hui maitresse absolue de la question. La mécanique, la physique et la chimie servent incontestablement, mais les théories de ces sciences sont d’une application bien difficile au cas de la poudre, principalement lorsqu'on les prend dans leur ensemble pour en déduire une conclusion générale sur des effets produisant du mouvement et de la chaleur par suite d’un phénomène chimique ou d’affinité. - Je m'explique en un mot en disant qu’une poudre chi- mique à dosage théorique réalisant l'équation (5) pourrai être une très-mauvaise poudre; et 1l doit y avoir, dans cer- tains ças, avantage à altérer le dosage dit chimiquement théorique, à remplacer une propriété physique par la com- ( 40 ) position chimique et vice versä, en vue de régulariser la puissance de la poudre dans certains rapports voulus par la résistance qu’elle doit vaincre, VI. — Classification des poudres. 39. Tout en évitant les détails, je crois pouvoir, en terminant, appeler l’attention sur la classification des poudres. Me fondant sur des expériences nombreuses, faites avec les poudres de guerre de plusieurs nations, avec de nom- breux échantillons de poudre de chasse de différentes qua- lités et des poudres de mine diverses, je crois pouvoir poser en principe que la classification des poudres en poudres vives et en poudres lentes est défectueuse. Cette classification me paraît avoir introduit, dans la pratique de lartillerie principalement, des opinions ou mieux des préjugés traînant à leur suite ce colosse d'illu- sions dont parlait Proust et qui lui faisait dire que pour bien étudier la poudre il fallait : se prêter à l'hypothèse suivante, savoir : QUE L'HOMME N’A POINT ENCORE INVENTÉ LA POUDRE, Ces paroles sont-elles encore vraies aujour- d’hui? On pourrait l’admettre en présence des diver- gences d'opinions si nombreuses de nation à nation, d’in- dividu à individu : les officiers d'artillerie d’un même pays sont loin d’être d'accord entre eux. Quelle que soit la circonspection avec laquelle J’émets mes opinions dans cette grave question, je ne puis m’em- pêcher de dire que mes expériences m'ont amené, pour la poudre d'artillerie, par exemple, à quatre chefs, types ou genres, pouvant présenter chacun leurs espèces et leurs variétés. (4) J’emploie les mots usités dans les ouvrages d'artillerie, en faisant observer toutefois que la véritable signification de ces mots n’est pas toujours aussi nette que celle des mots employés dans les sciences exactes. Mes quatre types de poudre d’artillerie seraient les sui- vants, toutes circonstances égales d’ailleurs, sauf à choisir d’autres mots plus convenables : lentes 1o Poudres ou | à combustion vive ou rapide. A. Faibles . faibles ) lentes 20 Poudres {oo à combustion lente. faibles vives à e 30 Poudres à combustion vive ou rapide. B. Fortes fortes vives 40 Poudres à combustion lente. fuites Il est bien entendu que, dans cet essai de classification , il serait tenu compte des propriétés physiques : l'apparence, la forme et le volume des grains, leur densité gravimé- trique et absolue, la composition chimique ou le dosage, la nature du charbon, leur inflammabilité et la transmis- sion plus ou moins facile de la flamme dans la masse totale d’une charge, la durée de la combustion de la matière (ga- lette ou pulvérin) dont le grain est composé, etc. | 40. Pour quiconque a réfléchi un instant au progrès que les classifications ont fait faire à certaines branches des sciences , il doit être certain qu'une bonne classification d’une série de poudres serait de la plus grande utilité. Je ne puis qu’engager les officiers qui font autorité dans la question, à porter leur attention sur une classification quelconque qui dégagerait l'étude des poudres de quelques obscurités, surtout pour les commençcants comme moi, et qui forcerait à adopter une langue et des expressions sur (42) la valeur desquelles aucun doute , aucune ambiguité ne serait possible. Que signifient les expressions : Poudre des meules, pou- dre des tonnes, poudre à charbon noir, à charbon roux, poudre de procédé anglais, de procédé français, ete., etc.? AA. J'aurais dû, en terminant, citer les personnes qui m'ont prêté leur concours dans ce travail; si je ne le fais, c’est que j'espère donner sous peu un premier mémoire plus complet, plus digne de la bienveillance qu’elles m'ont témoignée. Extension générale du procède suivi pour le développe- ment homalographique des surfaces de révolution ; par M. Ernest Lamarle, associé de l’Académie. Nous avons fait voir comment une surface de révolution peut s'appliquer avec continuité sur une surface cylin- drique et s’y transporter tout entière en changeant de forme, mais non pas d’étendue. De là résulte un mode particulier de développement qui permet de convertir en aires planes équivalentes tout une classe d’aires courbes, et qui se traduit de lui-même en un procédé graphique très-simple et très-élémentaire. Ce procédé n’est pas res- treint au cas spécial d’où nous lavons déduit comme expression directe du développement homalographique des surfaces de révolution. Il comporte une extension oénérale qui le rend applicable à toutes les surfaces, et qui, dans le cas même des surfaces de révolution, peut offrir quelquefois des facilités nouvelles. (45 ) Ë Les détails qui suivent éclairciront, au | besoin, les indications précédentes. | Considérons en premier lieu lhéliecide ——< gauche à plan directeur, dont aa est l’axe | et cc! la génératrice rectiligne. | On suppose que la droite cc! coupe Ga l’axe aa! rectangulairement, et que, dans la génération de l’hélicçoïde, elle est animée de deux mou- vements simultanés, lun de rotation qui la fait tourner autour de l’axe aa’, l’autre de translation qui la fait glisser le long de ce même axe, tout en lui restant perpendiculaire. Désignons par v la vitesse de translation du point c, par w la vitesse de rotation de la génératrice cc, et par À le pas de l’hélicoïde. On a, par hypothèse, a! U h — = =—— Const. vw 27 Soit # un point quelconque pris sur la droite ce’ à la distance x du point c : w étant la vitesse de ce point, et 6 l’angle de cette vitesse avec l’axe aa, il est visible que la vitesse « est perpendiculaire à la droite cc’, et que lon a généralement 4 ar L h° : LA DETTES 7 RES dv + X°w = w\ DONNEES kr WX 27 x 2, LV ET PEER Soit D la droite suivant laquelle est dirigée la vitesse # du point #. La droite D pouvant glisser, sans sortir du lieu qu’elle occupe, imaginons que l’hélicoïde se meuve tout entier sur lui-même et que chacune des hélices com- prises dans l'intervalle ce! communique à la droite D, qui (#7) lui correspond et qu’elle touche, la vitesse de son point de contact. On voit que l’are compris pour chaque hélice entre le point où le contact subsistait à l’origine du mou- vement et celui où il s'arrête à un instant quelconque, se irouve développé suivant la droite correspondante D, et que celle-ei a glissé sur elle-même d’une longueur préci- sément égale à cet arc. On ne peut pas ici s’en tenir à ces prémisses, m1 en déduire immédiatement les mêmes conséquences que dans le cas des surfaces de révolution. Il ne suffit pas, en effet, que les droites D soient toutes perpendiculaires à la géné- ratrice cc/; il faut, en outre, qu’elles soient parallèles entre elles pour qu’en glissant, les unes par rapport aux autres, elles ne cessent pont de comprendre une même étendue entre les mêmes segments. Cette simple remarque conduit à faire tourner les droites D autour de la généra- trice cc’, de manière à les ramener toutes dans un même plan et sans changer d’ailleurs leurs glissements res- pectifs. ÿ De la résulte, sans autre intermédiaire, le développe- ment homalographique de l’hélicoïide dont 1l s’agit. Le procédé est le même que pour les surfaces de révolution, les méridiens et les parallèles étant remplacés respective- ment, les premiers par les génératrices rectilignes, les secondes par les hélices de l’hélicoïde. Prenons pour axes coordonnés rectangulaires les droites aa’, cc’. L’hélice comprise, à partir du point "=, entre la génératrice ce/ et une génératrice quelconque inclinée sur la première de l’angle w, a pour longueur rectifiée re œ h° Q X'3- ne Lx (45 ) Il suit de là que, dans le développement homalogra- phique de l’hélicoïde gauche à plan directeur, les hélices étant rectifiées suivant des perpendiculaires à la généra- trice rectiligne prise pour base du développement, les autres génératrices rectilignes se transforment en une suite d’hyperboles, toutes comprises dans l'équation gé- nérale °h° kr (1) Du yon = Considérons en second lieu l’hyperboloïde de révolution à une nappe. ja Soit cc’ la génératrice rectiligne, er on c le point de cette génératrice situé + | 14 sur le cercle de gorge, cb une pa- NET rallèle menée par le point c à l'axe Le I de l’hyperboloïde. Des Tirons dans le plan bcc’ les deux droites aa’, ee! toutes deux passant par le point c et respectivement perpendiculaires, la première à cc’, la seconde à cb. Soit w' la vitesse angulaire avec laquelle la droite cc’ tourne autour de l’axe I dans la génération de l’hyperbo- loïde; si l'on désigne par r le rayon du cercle de gorge, l’état de mouvement de la droite ce! peut être considéré comme se composant d’une translation rw’ dirigée suivant ee! et d’une rotation w/ autour de cb. Soit « l’angle bcc’ que la génératrice de l’hyperboloïde fait avec son axe. La rotation w’' autour de cb a pour composantes : 1° une rotation w’sina autour de aa/; 2° une rotation w/ cos « autour de cc’. La translation rw! dirigée suivant ee’ peut de même être remplacée par deux (46 ) | autres, l’une rw'cos + dirigée suivant aa’, l'autre rw'sinz dirigée suivant cc’. La rotation d'une droite autour d'elle-même étant sans effet par rapport à cette droite, on peut, en ce qui con- cerne l'état de mouvement de la génératrice cc', faire abstraction complète de la rotation composante w/eosa. On peut d'ailleurs, sans changer en rien la surface engen- drée , faire glisser comme on veut sur elle-même la géné- ratrice ce/ et, par conséquent, annuler par une translation contraire la translation composante rw'simae. Il suit de là qu'il est permis de considérer l’état de mouvement de la génératrice cc', comme se composant uniquement d’une translation rw'cosx dirigée suivant la droite aa et d’une rotation w'sinx établie autour de cette même droite. Mais dès lors cet état de mouvement est identiquement le mème que si la génératrice déerivait l'héliçoïde ayant pour axe la droite aa! et pour pas la longueur À déterminée par la relation h TE. COS x ni Let: te 27 uw’. Sin & ou ce qui revient au même NU le ro À 27 FOR: Considérons en même temps cet hélicoïde et lhyperbo- loïde sur lequel nous avons raisonné. Imaginons qu'ils se meuvent tous deux, sans sortir ni l’un ni l’autre de leur lieu respectif, et qu'ils s’entraînent mutuellement de telle manière que, abstraction faite de leur glissement relatif, les deux génératrices, qui se confondent en cc’ et le long desquelles le contact s'établit, aient de part et d'autre le même état de mouvement. Si l’on désigne par © un angle PET (47) quelconque décrit par lhélicoïde dans sa rotation autour de la droite aa’, et par ©, l'angle décrit simultanément par l’hyperboloïde autour de l'axe f, on à comme équation de condition (3) = LITÉET A TRE © — &, Sin &. On voit d’ailleurs que l’hyperboloïde s'applique sur Vhélicoïde et s’y développe, comme le ferait sur un plan un cylindre qui roulerait sur ce plan en glissant suivant la génératrice de contact avec la vitesse relative men- tionnée ci-dessus. L'effet de cette vitesse relative est de convertir en hélices les parallèles de l’hyperboloïde, et cela, sans altération des aires qu’ils comprennent entre eux. Il y a ainsi développement homalographique d’une surface sur l’autre par application continue des parties successives. La conséquence relative à l’hyperboloïde est qu'au lieu de prendre pour base de son développement homalographique la courbe méridienne, on peut prendre la génératrice rectiligne, ce qui est évidemment plus sim- ple; le reste s’achève comme il suit : Soit cc! la génératrice rectiligne prise pour base du développement homalographique; c le point correspondant du cercle de gorge, autrement dit le point central de cette génératrice. Plaçons l’origine au point c, et prenons pour axe des x la droite cc’, pour axe des y la perpendiculaire ca. Celaposé, s’il s’agit d’une génératrice quelconque, cou- pant le cercle de gorge en c, et déterminée par l'angle w, que font entre eux les rayons menés du centre de l’hyper- boloïde aux deux points c, c,, on a pour développement homalographique de cette génératrice l’hyperbole repré- ( 48 ) sentée par l'équation œih ; 2 (4). . y — cix* sin°x — sin? x —= wÿrr” COS &. LT Ce résultat se déduit immédiatement de la combinaison des équations (1) (2) (3). On observera que les ordonnées correspondantes aux points de division marqués sur la génératrice par les différents parallèles constituent, rela- tivement à ces parallèles, leurs développements homalo- graphiques, avec cette circonstance particulière que leurs longueurs rectifiées sont réduites dans le rapport des vi- tesses qu'ont respectivement l’hélice et le parallèle qui passent par le même point. Soit R le rayon d’un paralièle quelconque. La vitesse de ce parallèle peut être représentée par Rw’' en même temps que celle de l’hélice correspondante est exprimée par / h2 V E Ve w V x? + PR w' sin œ V x? + DUR w" V x? sin? & + r? cos? &. T Il suit de À que, pour obtenir l’ordonnée y, qui corres- pond à l’abcisse x et qui représente le développement ho- malographique de l’arc du parallèle déterminé par cette même abeisse, 1l faut multiplier cet arc par la fraction V’x° sin? & + 7° cos? zx R Pour un écart angulaire exprimé comme ci-dessus par «,, l'arc du parallèle qui correspond à l’abcisse x a pour longueur Ro,. Il vient donc y =, V'x* sin'æ + r° cos” a, (49) et, par suite, M... Y —“w risid à —oir cos à, Ce qui confirme les déduetions précédentes. Reprenons le cas de lhyperboloïde et traitons-le direc- tement. Soit D la génératrice rectitigne; m un point quelconque de la droite D; R le rayon du parallèle mené par le point #»; I l'axe de l’hyperboloïde. La génératrice D tournant autour de l'axe I avec la vi- tesse angulaire w', la vitesse angulaire du point m» est Ruw'. Désignons par » l’angle de la vitesse Rw/ avec la droite D et par & l'angle de cette droite avec l’axe I. La vitesse Rw' se décompose en deux autres, l’une Rw'coss dirigée suivant la droite D, l’autre Ruw’sin ; nor- male à la première. La composante R’w cos » est la vitesse avec laquelle la droite D glisse tout entière sur elle-même. Elle est la même pour tous les points de cette droite et l’on peut en faire abstraction. Dès lors, 1l ne reste plus à considérer que les composantes perpendiculaires à la génératrice, et lon peut opérer sur elles comme dans le cas de lhéliçoïde, c’est-à-dire en les ramenant toutes dans un seul et même plan. De là résultent immédiatement les déductions sui- ‘vantes : La droite D étant prise pour base du développement homalographique, les parallèles se dév eloppent suivant des perpendiculaires à cette base. L’arc Ro,, qui sous-tend l'angle w, dans le parallèle mené 9me SÉRIE, TOME XI. À 7 ( 50 ) par le point », est représenté, dans le développement ho- malographique, par l’ordonnée, y = Ro, sin 7. Plaçons l’origine au point central de la génératrice D, et désignons par x l’abcisse du point m, par r le rayon du cercle de gorge. Lorsqu'on prend le point » sur ce cercle, la composante, exprimée généralement par Rw’ cos y, de- vient rw’ sin « : on à donc nécessairement (M... ist R0cos ge Mitine "Il est d’ailleurs aisé de voir que le rayon R est l’hypo- thénuse d’un triangle rectangle dont les côtés de l’angle droit sont respectivement, l’un r, l’autre x sin; de là résulte (DE LAURE, DRE ae bin ée Élevons au carré les deux termes de l'équation (5) et soustrayons-les membre à membre de l'équation (6), il vient CR sin’ y = 2° sin’ &« + r? 05° «, et, par suite, y = Ro, sin # — ©, Vx° sin? & + r° cos’ &° ou, Ce qui revient au même, (7). . . y — @ x’ sin’ « — 0 r° C0s° & L'identité des équations (4) et (7) suffirait, s’il en était besoin, pour justifier la légitimité de toutes les inductions et déductions qui précèdent. (91) Considérons , en troisième lieu , une surface quelconque héliçoïdale désignée par H. Soit M la ligne méridienne. Dans le cas particulier de l’héliçoïde traité précédem- ment, la ligne M est une droite qui coupe à angle droit l'axe de glissement et de révolution. Dans le cas général, la ligne M peut être quelconque et placée comme on veut. Rien n’est changé d’ailleurs dans le mode de généra- tion. Soient M,, M;, M, etc., une suite quelconque de po- sitions prises par la ligne M dans la génération de la sur- face H. Soient en même temps N,, N,, N, ete., plusieurs hélices décrites par différents points de la ligne M. Les hélices N,, N,, N, etc., ont toutes même axe et même pas, l’axe et le pas de l’hélicoïde H. Une même hélice coupe constamment sous un même angle les lignes M,, M,, M, etc. Cet angle varie en gé- néral d’une hélice à l’autre. On peut le rendre invariable et le déterminer comme on veut, en substituant à la ligne M une trajectoire située comme elle sur la surface R et assujettie à couper sous un angle constant les hélices No, N3, No, etc. Cela posé, il est aisé de voir comment la solution don- née tout à l’heure pour l’hyperboloïde de révolution à une nappe s'étend d'elle-même au cas général des surfaces hé- liçoidales. … On prend pour base du développement homalographique l’une quelconque des lignes M, la ligne M,, par exemple. On rectifie cette ligne en y conservant les points de divi- sion marqués par les hélices à considérer. On élève en ces points des perpendiculaires, et l’on porte sur chacune d'elles l’ordonnée y correspondante à celle des lignes M (52) dont on veut fixer la position dans le développement ho- malographique. Soit »m un point quelconque déterminé de la surface H : N l’hélice passant par ce point, « l’are de l’hélice N compris entre le point » et la ligne M,, 7 l’angle sous lequel lhélice N coupe les lignes M,, M, , M, , ete. On a, comme on l’a vu précédemment, RU: ue OC OR et tout se déduit aisément de cette équation générale. Désignons par », le point de division marqué par l’hélice N sur la base M,. La construction de l'équation (8) peut s'effectuer de la manière suivante : | On mène par le point m, une oblique inclinée de l'angle , sur la base du développement. A partir du point M,, on porte sur cette oblique une longueur À précisément égale à l'arc rectifié . Cela fait, il ne reste plus qu'a projeter orthogonale- ment l'extrémité de la longueur À sur la perpendiculaire déjà menée par le point Mm,, conformément aux indica- tions précédentes. Supposons l'angle + constant, c'est-à-dire la ligne M choisie de manière à couper sous un même angle # les hélices N,, N,, No, ete. En ce cas, l’on peut s’en tenir au tracé des obliques dont il vient d’être fait mention, et qui sont toutes parallèles entre elles. On prend pour axe des y une oblique inclinée de l’angle ; sur la base ; l’équa- tion (8) est remplacée par l'équation plus simple (9). art À El et le changement consiste en ce que le développement (55 ) homalographique , d’orthogonal qu'il était dans le premier système, devient oblique dans le second. L’angle , supposé constant, peut, en outre, être droit. Il suffit pour cela que la ligne M soit la trajectoire ortho- sonale des hélices N,, N;,, N, ete. En ce cas, l’équation (9) se substitue directement à l’équation (8), et le déve- loppement homalographique ne cesse pas d’être ortho- gonal. Reprenons l’hyperboloïde de révolution défini ci-dessus, et comparons-le à l’hélicoïde dont la génératrice est droite, normale à l’axe et distante de cet axe d’une quantité r égale au rayon du cercle de gorge de lhyperboloïde. Par le centre de l’hyperboloïde menons deux droites, l’une D’ parallèle à la génératrice D, l’autre 1” normale à la première et située dans le plan qui contient à la fois Ja droite D’ et l’axe I de révolution. La rotation w', établie autour de l’axe [, se décompose en deux autres, l’une w/ cos « (”) autour de la droite D; l’autre w/ sin + autour de la droite [’. La rotation compo- sante w/ cos « peut être transportée autour de la généra- trice D pourvu qu’on la compose avec une translation rw! cos « dirigée parallèlement à l’axe T”. Cela fait, il est visible qu’en ce qui concerne l’état de mouvement de la génératrice D, tout se réduit à la rotation composante w! sin « établie autour de l'axe F’ et à la translation rw! cos «, dirigée parallèlement à ce même axe. La con- séquence est que l’état de mouvement de cette génératrice est identiquement le même que si elle décrivait autour de a a (‘) On sait que nous avons désigné par & l'angle que l'axe L fait avec Eà génératrice D. (4) l'axe [’ l’héliçoïde ayant pour pas 2rrw'. cos & Pr Co w’. Sin « Si l’on répète ici ce que nous avons fait plus haut pour rendre sensible le développement homalographique d’un hyperboloïde sur un hélicoïde dont la génératrice recti- ligne coupait à angle droit l’axe de glissement et de révo- lution, on arrive directement à la déduction suivante : Étant donné l'hyperboloïde de révolution à une nappe, si l’on désigne par r le rayon de son cercle de gorge et par à l’angle de son axe avec la génératrice rectiligne, cet hyperboloïde est développable SANS DÉCHIRURE NI pupui- CATURE sur l’hélicoïde gauche à plan directeur dont la génératrice est droite, normale à l’axe et distante de cet axe de la quantité r, le pas de l’hélicoïde étant pris égal à 27r COS à. Indiquons une autre déduction qui s'établit avec la même facilité (*) et qu’on peut exprimer comme il suit : L’hryperboloïde défini ci-dessus est développable , sans déchirure ni duplicature, sur l’'hélicoïde qui a pour pas 2rr cota, et pour génératrice une droite menée Lil un point de l’axe sous l'angle 7 HE, () Soit c le point central de la génératrice D. On mène par le point c deux droites, l’une V’ parallèle à l'axe 1; l'autre T”’ normale à la pre- mière et siluée dans le plan des droites V’ et D. Cela fait, tout se réduit , 1° à transporter autour de l'axe V’ la rotation W' établie autour de l'axæ@æ 1; 20 à substituer à la rotation W' transportée autour de l'axe V’ la rota- tion équivalente W' tang & élablie autour de la droite I”. Le reste s'achève comme précédemment. (95 ) Considérons en dernier lieu une surface quelconque A. Pour étendre à ce cas général la solution exprimée, en ce qui concerne les héliçoïdes, par l'équation —= 0 SIN y, il suffit de prendre sur la surface À deux systèmes de lignes conjuguées, représentées respectivement, les unes par M,, M,, M , etc. ; les autres par N,, N,, N2... ete., et satisfaisant aux deux conditions suivantes : 1° Les arcs que deux quelconques des lignes N,, N,;, N2, etc., interceptent en même temps sur chacune des lignes M,, M, , M, etc., ont tous même longueur. 2 Toute ligne déterminée du système N,, N,, N, etc. coupe sous un même angle chacune des lignes M,,M,, M, etc. On observera que, dans le développement homalogra- phique de la surface quelconque À, les lignes M,, M,,M, etc., No, N;, No, etc., jouent identiquement le même rôle que les génératrices et les hélices désignées respectivement par les mêmes lettres pour le cas des héliçoïdes. On peut, en conséquence, appliquer au cas général les procédés décrits pour la construction de l'équation (8). Soient #; #,: #» €te., les angles sous lesquels chacune des lignes N,, N,, N, etc., coupe en même temps toutes les lignes M,, M,, M, etc.; on peut assujettir ces angles à rester tous égaux entre eux et à affecter telle valeur qu’on juge convenable, celle d’un angle droit, par exemple (°). () Il suffit pour cela de choisir, Comme on veut , l’une des lignes N et de prendre pour lignes M les lignes géodésiques qui partent à angle droit des différents points de la ligne choisie d’abord arbitrairement. ( 56 ) La difficulté consiste à trouver en chaque cas les deux sys- tèmes de lignes qu’il faut conjuguer entre elles pour rem- plir les conditions voulues. Cette difficulté ne se présente point dans les cas traités précédemment. Supposons les lignes M,, M,, Ma, etc., déterminées d'avance, et choisies, comme on veut, indépendamment des lignes conjuguées N,, N,, No, etc. Il s'ensuit géné- ralement qu’une seule des deux conditions énoncées tout à l'heure peut être satisfaite, la première ou la seconde indifféremment, et qu’en conséquence , il faut modifier la solution donnée pour le cas où ces deux conditions sont remplies. Le problème cesse ici d’être tout à fait élémen- taire, comme dans le cas des surfaces de révolution, Néan- moins, il est aisé de voir en quoi consistent les modifi- cations à introduire dans la solution générale exposée ci-dessus, et il suffit que nous les indiquions pour un des cas à examiner, celui où l’on prendrait pour lignes N les trajectoires orthogonales des lignes M. Soient m4, et m deux points de la ligne N situés res- pectivement, le premier sur la ligne M, prise pour base du développement homalographique; le second sur une ligne quelconque déterminée M. Soient v, et v les vitesses simultanées qui animent ces deux points sur les lignes M, et M dans la génération de la surface A par le dépla- cement continu de la ligne N. Soit encore s l’arc compris sur la bgne N entre le point » et le point m,. L’équation (8) sera remplacée, toutes choses égales d’ailleurs, par l'équation suivante : | (HD). PTS HER ER (57) On peut appliquer la formule (19) au cas des surfaces de révolution, en prenant pour lignes M les parallèles, et pour lignes N les méridiens. Il s'ensuit que les unes et les autres sont représentées par des droites dans le dévelop- pement homalographique. Considérons en particulier la sphère terrestre, et prenons pour base du développement le cerele équatorial. | En désignant par R le rayon de la sphère, et par r celui d’un parallèle quelconque N situé à la latitude À, on a : r | RE QSA U— —(CcoS 1, yo, v R de là résulte ne R fcos Ad = HET. et l’on en déduit la construction suivante : Rectifier le cercle équatorial en y conservant les points de division marqués par les méridiens. Les perpendiculaires élevées en ces points sur la base du développement représentent les méridiens. Décrire une circonférence de cercle au rayon KR et ayant son centre sur la base du développement. À partir de la base, diviser cette circonférence comme les parallèles divi- sent les méridiens à partir de l’équateur. Les droites menées, par ces points de division, parallè- lement à la base représentent les parallèles. Le développement homalographique que l’on obtient en procédant comme nous venons de l’imdiquer, est évidem- ment le plus simple de tous au point de vue du tracé. Il a malheureusement l'inconvénient grave d’altérer considérablement les formes et les distances. N ( 58 ) On observera que, dans le cas général des surfaces de révolution, R étant le rayon du parallèle pris pour base du développement homalographique, et r’ la distance du centre de gravité de l’are & à l’axe de figure, l'équation (40) peut s’écrire comme il suit : Application du développement homalographique à la déter- mination d’une série de surfaces susceptibles de s’appli- quer l’une sur l’autre sans déchirure ni duplicature. Soient À, A’ deux surfaces de révolution; M, M! leurs méridiens respectifs; C, C/ les cylindres droits, circonserits à ces surfaces le long des lignes M, M’. Revenons au procédé que nous avons décrit en premier lieu pour le développement homalographique des surfaces de révolution. Ce procédé montre qu'après avoir transporté la surface À sur le cylindre C, on peut replier celui-ci sur le cylindre C’ et reporter la surface A sur la surface A' d’une infinité de façons différentes. Considérons le cas où le cylindre C est replié sur le cylindre C’, de manière à ce que la ligne M soit appliquée sur la ligne M’. Il est visible que le transport de la sur- face À sur la surface A’ se résout généralement en un développement homalographique de la première surface sur la seconde. Pour qu'il en fût autrement; pour qu'il y eût développement sans extension ni contraction d'aucun élément linéaire ou superficiel; pour que toute ligne transportée de la surface À sur la surface A’ reprit et (99 ) conservât sa grandeur première, 1} faudrait que les géné- ratrices du cylindre C’, alors qu’elles sont entraînées par la rotation de la surface A’, glissassent avec des vitesses respectives, précisément égales à celles qui animaient ces mêmes génératrices dans le développement de la surface A sur le cylindre C. Veut-on remplir cette condition ? Il suffit de déterminer la ligne M’ de telle façon qu’étant appliquée sur la ligne M, les rayons des parallèles qui correspondent de part et d’autre aux mêmes points, conservent entre eux un rapport imvariable. Supposons, en effet, que ce rapport soit exprimé par p et qu'il s'agisse d’un point pour lequel les rayons des deux parallèles soient respectivement R et R’. On a, par hypothèse, VAN Cela posé, si, dans le transport de la surface A sur le cylindre C, la vitesse de rotation est w et qu’on la prenne égale à Le dans l'opération subséquente, c’est-à-dire lors- qu'on reporte cette même surface du cylindre C’ sur la surface À’, il est clair que la génératrice correspondante aux deux parallèles dont les rayons sont respectivement R et R’, aura, dans le premier cas, une vitesse Rw, et dans le second une vitesse “. L'égalité évidente de ces deux vitesses implique, comme conséquence, la possibilité de développer la surface A sur la surface A’, ou réciproque- ment, sans déchirure n1 duplicature. Rapportons la ligne M a deux axes coordonnés rectan- gulaires dont celui des x coïncide avec l’axe de révolution de la surface A. Désignons par # un point quelconque de cette ligne ; par x, y, les coordonnées du point m; par s l'arc de la ligne M compris entre le point » et un autre point quelconque déterminé #0. ( 60 ) La ligne M’ restant à déterminer, d’après les conditions précédentes, supposons-la rapportée aux mêmes axes et désignons par »/, m, les points de cette ligne, qui sont conjugués, par hypothèse, le premier avec le point », le second avec le point »,. Soient x’, y! les coordonnées du point »/, et s’ l’arc de la ligne M’ compris entre les points m' et mo/. Les équations du problème sont très-sim- plement DER Y = 6; u. étant une constante. De là résulte 12 dx” + dy = dx + dy = dx + p'dyf, et, par suite, (M ete res de lits Soit (ED), seeds fe UE fie): l'équation de la ligne M. On à pour équations correspon- dantes de la ligne M’ y = «y = u f(x) FE AENPONRENEE SV + (1 — à) f(x). L’équation de la ligne M étant mise sous la forme. Li, DAS ES EL in On a de même pour équation correspondante des lignes M’ sl CRT he her 1 2 —. 4 mx" — “dy! V + 9 ) (GE) Concluons que, quelle que soit la ligne M, on peut toujours trouver une série de lignes M’ conjuguées entre elles et avec la première, de telle facon que les surfaces engendrées par ces lignes dans leur rotation autour de l'axe des x soient toutes développables les unes sur les autres, sans déchirure ni duplicature. Ce résultat, très- général et très-simple, nous paraît curieux. Considérons en particulier le cas de la sphère, Ia ligne M ayant pour équation z + Yy —=7T. On déduit de là pour équation des lignes M’ y' — {I COS 9, F4 —/frd; (76 TE p. Ces équations sont précisément celles que nous avons obtenues, dans un autre travail, pour la ligne méridienne de l’héliçcoïde qui dérive de la sphère, et qui jouit de la propriété d’avoir en chacun de ses points une même cour- bure moyenne. Il est remarquable que cette même ligne, suivant qu'elle tourne sans glisser autour de l’axe des x, ou qu'elle glisse le long de ce même axe avec une vitesse dont le rapport à la vitesse de rotation est exprimé par - le produit r V’1—?, engendre, dans le premier cas, une surface développable sur la sphère; dans le second , une surface à courbure moyenne constante. On pourrait multiplier indéfiniment ces applications. Bornons-nous à en donner une seconde. Soit un ellipsoïde ayant pour ligne M, une ellipse dont le petit axe est situé sur l’axe de révolution. L’équation de la ligne M étant | + | | em (62) Si l'on désigne par c l’excentricité V/42 — «a? et qu’on attribue à la valeur 7, on trouve pour équation corres- pondante d’une des lignes conjuguées M’ à 2 ot nt èake eu nf db do DS D Dans l'hypothèse où l’on attribuerait à une valeur quelconque moindre que l'unité, on aurait pour équations générales des lignes M’ mb LAS 7 = wub cos x — afd: À ——— sin? ». y = abcos ? 1fd: is ? La solution précédente s'applique en général à toutes les surfaces de révolution : elle comporte, en outre, une extension qu'il convient d'indiquer. Soient s, s’ deux lignes planes, l’une, s, supposée quel- conque, l’autre, s’, déterminée par rapport à la première, d’après les conditions suivantes : Soit m un point mobile assujetti à décrire la ligne s; v la vitesse de ce point à un instant quelconque; © la vi- tesse angulaire simultanée de sa directrice : m! étant un second point mobile, on suppose qu’à ce même instant, il est animé d’une vitesse &' — uv et que sa directrice tourne en même temps avec une vitesse angulaire w/ — =; cela posé, la ligne s’ est la trace du point # et les posi- üons conjuguées des points m, m/ sont celles qu'ils oceu- pent simultanément, l’un sur la ligne s, l’autre sur la ligne s’. Par hypothèse M, M’ sont deux courbes planes suppo- (65 ) sées telles qu’en les prenant pour lignes méridiennes de deux surfaces de révolution, ces surfaces peuvent se déve- lopper l’une sur l’autre, comme on l’a vu tout à l’heure. Prenons la ligne s pour section droite d’un cylindre & et faisons coïnecider l’axe de la ligne M avec une généra- trice quelconque G de ce cylindre. Soit B la surface en- gendrée par la ligne M, lorsque son plan s’enroule sur la surface du cylindre k. Prenons de même la ligne s’ pour section droite d’un cylindre k’ et faisons coïncider l’axe de la ligne M’ avec la génératrice de ce cylindre, qui correspond à la précédente, c’est-à-dire qui coupe la ligne s’ en un point conjugué avec celui où la génératrice G vient couper la ligne s. Soit B’ la surface engendrée par la ligne M}, lorsque son plan s’enroule sur la surface du cylindre k’. Cela posé, il est aisé de voir et de démontrer, comme on l’a fait pour les surfaces de révolution engendrées respec- tivement par les lignes M, M’, que les surfaces B, B’ sont développables l’une sur l’autre sans déchirure ni dupli- cature. Les équations différentielles qui déterminent la ligne s’ en fonction de la ligne s s’obtiennent aisément sous forme de quadratures. On les déduit directement des équations de condition , d d 5) = C! [are ang.) : dx dx | Bornons-nous à signaler les deux résultats suivants : 1° Lorsqu'on prend pour ligne s une circonférence de cercle au rayon R, la ligne s’ est une circonférence de cer- cle au rayon #2 R. 2° Lorsqu'on prend pour ligne s la développante du ds — y ds. md [are (ang. (64) cerele au rayon R, la ligne s/ est la développante du cercle au rayon u5 R. Ces résultats n’exigent aucun calcul pour être établis directement. On voit d’ailleurs à priori que si l’on désigne par p, o! les rayons de courbure que présentent en deux points conjugués les lignes s, s’, on a généralement p —= mp: Sur la constitution du système eifelien dans le bassin an- thraxifère du Condros ; par G. Dewalque, membre de l’Académie. Il y à aujourd’hui trente ans que Dumont fit connaître la constitution géognostique du terrain anthraxifère de la province de Liége. Depuis cette grande découverte, qui a été en quelque sorte le point de départ des progrès accomplis depuis lors dans la connaissance des terrains primaires , d'importants travaux ont été consacrés à l'étude de cette grande série de couches de notre pays. Comme on pouvait s’y attendre, les conclusions n’ont pas toujours concordé : plusieurs observateurs sont arrivés à des résul- tats qui paraissent peu en harmonie avec ceux auxquels Dumont était parvenu et qu’il a résumés dans la Carte géologique de la Belgique. Ces divergences sont d'autant plus embarrassantes que nous sommes dépourvus d'un texte explicatif de la carte géologique, œuvre que la mort prématurée de Dumont a laissée fort incomplète. Je n’ai nullement l'intention de donner aujourd’hui un chapitre isolé d’une description géologique de la Belgique ; (65) mais, en présence des diverses opinions qui se sont pro- duites, je n’ai pas cru pouvoir garder le silence jusqu’au moment où je pourrai exposer avec les détails convenables la manière dont j'envisage ces questions. D'une part, des observations multipliées m’ont permis de fixer mon opi- nion à l'égard de plusieurs points controversés, et l’ensei- gnement m'oblige chaque année à la faire connaître à un nombreux auditoire ; de l’autre, les géologues étrangers à l’enseignement oral de Dumont n'ont pas toujours pu se faire une idée exacte de ses vues, et il peut être utile de réduire à leur juste valeur des contradictions qui ont pu paraître fort importantes. Je me borne aujourd’hui à ce qui concerne le système cifélien de Dumont, tel qu'il s’observe dans le bassin an- thraxifère du Condros, notamment dans l’Entre-Sambre- et-Meuse. Cette notice n’a donc d’autre but que d’exposer aussi succinctement que possible ce que je crois l’état réel des choses, et de faire apprécier les progrès que nous avons réalisés depuis la publication de la Carte géologique; J'ai hâte d'ajouter que, en perfectionnant, et, au besoin, en rectifiant les détails, 1ls laissent debout toute la partie essentielle de l’œuvre de Dumont, et je n’oublierai pas la grande part qui en revient à M. De Konmcek, le savant confrère à qui la paléontologie est redevable de tant de progrès dans notre pays. J'ai eu la bonne fortune d’avoir pour maîtres ces deux éminents professeurs à l’université de Liége : je sais com- bien Je dois à celui qui nous a été si prématurément en- levé; je suis heureux de reconnaître combien je suis rede- vable au second, dont la riche bibliothèque, les belles col- lections et les conseils m'ont été si utiles. Plus ils ont de titres à ma vénération et à ma reconnaissance, plus je me Ld 9Me SÉRIE, TOME XI. 5 ( 66 ) sens ému en m'engageant dans l’examen de questions qui les ont plus d’une fois divisés. Mais, comme eux et à leur exemple, je cherche avant tout la vérité : amicus Socrates, amicus Plato, sed magis amica veritas. En 1830, Dumont (1) divisa la grande série de cou- ches intercalées entre le terrain ardoisier et le terrain houiller de la province de Liége, en quatre étages alterna- tivement quartzo-schisteux et calcaires. Ces quatre étages, distingués par les dénominations de supérieur et d’infe- rieur, constituaient pour lui un terrain qu'il désigna sous le nom d’anthraxifère, employé depuis longtemps pour la même série par M. d'Omalius d'Halloy. Chargé plus tard de l’exécution de la carte géologique de la Belgique , de nombreuses observations le confirmèrent dans sa manière de voir; ses nouvelles recherches, portées sur un espace beaucoup plus étendu, l’amenèrent donc à conserver la classification de 1850 dans ce qu’elle avait d’essentiel ; seu- lement, il modifia la nomenclature : il fit rentrer le terrain houiller, avec le rang de système, dans le terrain anthraxi- fère, et divisa en deux sous-étages chacun des deux étages quartzo-schisteux. Ces changements , qui n’intéressent que la classification et non la stratigraphie, sont indiqués par le tableau ci-dessous , extrait de la légende de la Carte géo- logique de la Belgique (1849). — (1) Mémoire sur la constitution géologique de la province de Liége. MÉMOIRES COURONNÉS PAR L'ACADÉMIE ROYALE DE BRUXELLES, tome XI. (1839), 1832. (67) Terrain anthraxiftre. La Ampélite, psammite, schiste, houille . H calcareux . . . Calcaire à crinoïdes, dolomie, calcaire à productus, silex, anthracite . . . C7 LE Psammite grisâtre, macigno, anthracite. C2? quartzo-schisteux. 4 Schiste grisâtre, calschiste, calcaire, oli- giste SONMIQUES. 4.00 et 7 Ci LE | cnlcarete 70) OGalcaire, dolomie. 2 0.4.1 PE rien Schiste gris fossilifere, calschiste et cal- quartzo-schisteux. caire argileux, oligiste oolithique . . E? Poudingue, psammite et schiste rouges. Et Si nous voulons avoir une idée aussi exacte que pos- sible de la manière dont Dumont se représentait la consti- tution du système eifélien, il ne suffit pas d'examiner la légende qui précède, 11 faut encore étudier la disposition de ce système, telle qu’elle est figurée sur la Carte géolo- gique de la Belgique. Dans le massif qui nous occupe, on voit le terrain rhé- nan de l’Ardenne borner, au sud, une bande continue de l’assise inférieure E!, étage eifélien quartzo-schisteux rouge ou du poudingue de Burnot. Cette bande, parfaitement caractérisée, n’a donné lieu à discussion qu’au point de vue de sa classification dans le dévonien moyen ou je dévonien inférieur. Je n'ai nulle intention de traiter ce point; je continuerai à la prendre pour limite inférieure du système erfélien. Au nord de cette bande, c’est-à-dire vers l’intérieur du bassin, on rencontre ensuite une bande de l’assise moyenne E?, partie supérieure de l'étage eifélien quartzo- schisteux, schiste gris fossilifère; elle disparaît vers l’est, près de Xhoris, entre Barvaux et Aywaille. Elle est suivie d’une bande de l’assise supérieure KE5, étage calcareux du système eifélien. Cette bande se divise vers l’ouest. Près ( 68 ) de Couvin, on voit apparaître entre ses deux branches une nouvelle série de couches, coloriées comme schiste gris fossilifère, et marquées de la lettre distinctive E2. En avançant vers l’ouest, ces deux bandes calcaires E5 se re- joignent un moment à Chimay, pour se séparer de nouveau jusqu’au territoire français, où elles sont bientôt cachées sous les dépôts plus récents. Cette région de Couvin et de Chimay nous offre donc une répétition des assises E? et E5, schiste gris fossilifère et calcaire eifélien : une telle manière d’être ne peut ré- sulter que d’un plissement ou d’une faille. Or, 1l suffit presque de considérer l'allure générale des diverses bandes calcaires de notre terrain anthraxifère pour être persuadé que le cas particulier dont 1l s’agit n’est qu’un des nom- breux plissements constatés par Dumont et généralement admis. En particulier, la réunion des deux bandes calcaires à Chimay est exactement le pendant de la réunion, à Sam- son , des deux bandes de calcaire condrusien qui renfer- ment nos deux grands bassins houillers, avec cette seule différence qu’il y a voûte dans le premier cas et bassin dans le second. ‘ Si le résultat de cet examen peut laisser quelque doute sur la manière de voir de Dumont, je puis ajouter que je tiens de lui-même qu’il considérait ces deux bandes cal- caires comme contemporaines et résultant d’un plissement dans lequel le sommet d’une voûte calcaire aurait été en- levé pour laisser apparaître un retour du schiste gris fossi- lifère. Ainsi done, je considère comme parfaitement fidèle, malgré le jugement sévère qui a été porté ailleurs sur elle, la coupe qu’un de mes élèves, M. J. Vaust (1), a donnée (1) Sur les terrains primaires d’Aix-la-Chapelle et leurs rapports 609) récemment comme représentant la constitution géologique de ce pays d’après Dumont. Pour plus de clarté et de concision, nous représente- rons par la notation E!, E°, Eÿ, E;, E,, les cinq assises que l’on recoupe de bas en haut dans le système eifélien des environs de Couvin et de Chimay, lorsque l’on vient de l’'Ardenne dans l’Entre-Sambre-et-Meuse : c’est la nota- tion de la carte géologique à laquelle nous ajoutons les indices a et b, pour distinguer l’une de l’autre les assises répétées. Nous allons voir maintenant, en quelques mots, les changements que de nouvelles recherches tendent à faire apporter à la manière dont Dumont envisageait la stratigraphie de cette région; nous indiquerons ensuite jusqu'à quel point nos propres observations tendent à les faire admettre ou à les rejeter. En 1850, M. Fr.-Ad. Roemer (1) rapporta les assises E'et E° à la grauwacke ancienne du Rhin et du Hartz (je fais abstraction de son assise 2, calcaire à crinoïdes, qui n’est qu’un accident tout à fait local). Ef est pour lui le calcaire à calcéoles, qu'il subdivise en deux; Ef constitue l'étage des schistes à calcéoles , divisé en trois; enfin E; est le calcaire à stringocéphales. En deux mots, il n’admet ni plissement ni faille : pour lui, les einq termes de la série sont successifs ; il n’y à point de terme répété. M. De Koninck, qui à tant étudié notre pays, surtout dans ses terrains anciens, n’a encore fait connaître le résul- tat de ses recherches que par les listes de fossiles dont il a enrichi la Géologie de la Belgique, publiée dans l'Encyclo- avec ceux de la Belgique, d'après M. Ferd. Roemer. (REVUE UNIVERSELLE tome V, page 394 ; Liége, 1859.) (1) Bulletin de la Société géologique de France , 2e série, t. VIIT, p. 87. (70) pédie populaire, par un des hommes auxquels la géologie est le plus redevable, notre vénéré collègue M. d'Omalius d’Halloy. D’après les listes qu’il a données (1853), on voit qu’il considère également les deux bandes de caleaire eifé- lien comme bien distinctes l’une de l’autre; il admet la succession suivante : calcaire à calcéoles — E°; schiste à calcéoles — E} et calcaire à stringocéphales — E;. Nous ne savons rien de ses opinions sur les deux assises E! et E?; mais la distinction des deux calcaires E° emporte celle des deux assises de schiste gris fossilifère E*. Depuis cette époque, les opinions de M. De Koninck ont été représen- tées de la manière suivante par sir R. Murchison, dans la deuxième édition de son Séluria (1859) : 1° calcaire avec fossiles de l’Eifel ; 2° lits minces de calcaire avec calcéoles; 3° calcaire à stringocéphales. Nous ne pouvons rien dire de cette classification, dans laquelle on ne voit aueune assise schisteuse, pas même les schistes à calcéoles de 1853. Nous avons lieu de croire pourtant que M. De Koninck consi- dère la série comme formée de cinq termes successifs : son opinion concorderait donc avec celle des autres paléon- tologistes. En 1855, M. Ferd. Rœmer (1) donna une coupe sem- blable aux précédentes. Dans son travail, analysé avec soin par M. J. Vaust, pour la Revue universelle, 11 établit la série suivante : 1° grès et schistes à Spirifer cultriju- gatus — E'+ K;, rapportés à la grauwacke ancienne du Rhin; 2° calcaire à calcéoles — E,; 3° schistes à calcéoles — E}; 4° calcaire de Paffrath — E;. (1) Das ältere Gebirge um Aachen, vergleichen mit den Ferhaält- nissen in Süd-Belgien. (ZErYSCHRIFT DER DEUTSCHEN GEOLOG. GESELLSCHAFT, WE, PS7): (71) Enfin, M. J. Gosselet (1) a donné dernièrement la série suivante : 4° grès et schistes rouges — E'; 2° schistes aré- nacés noirs avec Spirifer cultrijugatus — KE; 3° calcaire à calcéoles — EF; 4° schistes à calcéoles — E;; 5° calcaire à stringocéphales — Eÿ. On voit que tous ces auteurs se sont accordés en un point : c’est que les cinq assises sont distinctes les unes des autres et se sont suivies régulièrement; par consé- quent, qu'il n’y à, ni la répétition admise par Dumont, ni le plissement qu’elle entraine. Pour mon compte, voici ce que J'ai vu dans cette série eifélienne de l’Entre-Sambre-et-Meuse : j'ai constaté, il y a longtemps (ce que j'ai enseigné à mes élèves depuis que J'ai l’honneur de remplacer mon illustre maître) que des schistes avec calcéoles se rencontrent non-seulement au- dessus du calcaire à calcéoles de Couvin, dans l’assise KE}, mais encore au-dessous, dans l’assise Ef. C’est pour moi un fait parfaitement établi, quoiqu'il paraisse en contra- diction avec les résultats auxquels sont arrivés des géolo- gues si distingués. Il est facile de voir qu'il s’accorde plus aisément avec les vues de Dumont; en d’autres termes, mes observations paléontologiques n'étaient pas de nature à m'empêcher d'admettre, avec l’auteur de la Carte géolo- gique de la Belgique, que la série E; représentait la partie supérieure au moins de la série E. Restait la question des deux calcaires. Plein de confiance dans les observations stratigraphiques de Dumont, plus réservé à l'égard des con- clusions à tirer des observations paléontologiques, j'avais (1) Mémoire sur les terrains primaires de la Belgique, des environs d’ Avesnes et du Boulonnais. Paris, 1860, (72) cru pouvoir admettre, comme lui, l'identité des séries Ef et , Eÿ et Eÿ, lorsque le mémoire de M. Gosselet ramena mon attention sur ce point. La question stratigraphique, à mon avis, n'était pas résolue : le nœud était à Chimay et à Couvin, dans la réunion des deux bandes calcaires et la manière dont elle avait lieu. Or je dois dire aujourd’hui que cette réunion n'existe pas; les deux bandes calcaires restent partout distinctes; j'en suis positivement sûr pour Chimay, et, aux environs de Couvin, j'ai constaté leur sé- paration sur un assez grand nombre de points, pour ne pas craindre de trop m’aventurer en affirmant qu’il en est ainst partout. Je suis convaincu que Dumont, involontairement séduit par ses belles découvertes de la simplicité du terrain anthraxifère, dans la province de Liége, et des plissements qui le rendent si compliqué en apparence, a été entraîné, à son insu, par des circonstances locales exceptionnelles , à le considérer comme plus simple qu’il ne l'est en réalité et à admettre un plissement où il n’y en a que lapparence. J’admets donc, avec MM. De Koninck, Rœmer et Gosselet, la distinction entre le calcaire à calcéoles, qui n’est qu'un accident, un développement local d’amas lenticulaire, et le calcaire à stringocéphales, ou de Givet, qui reste le type den otre calcaire eifélien. Si nous n’admettons pas la série de Dumont, composée de trois termes, il ne s'ensuit pas que l’opinion de ses ad- versaires sur les termes E? et E? soit complétement exacte. En effet, tous paraissent considérer le calcaire à calcéoles comme ligne de démarcation entre les schistes E° à Spi- rifer cultrijugatus et les schistes E; à calcéoles ; cela est tellement vrai qu’un observateur judicieux et attentif, comme M. Gosselet, trouvant, sur le chemin d’Olloy à Vierves , un calcaire à calcéoles qui lui présente un fossile (75) différent de ce qu'il à vu à Couvin, et qui repose sur des schistes à calcéoles, est porté à y voir une lentille calcaire subordonnée à ces schistes plutôt que la continuation de la bande de calcaire à calcéoles de Couvin, comme c’est réel- lement le cas. Cr j'ai déjà dit que j'ai reconnu depuis longtemps que cette démarcation ne correspond pas exac- tement aux faits. Je crois pouvoir conclure de nombreuses observations que le calcaire à calcéoles n’est qu’un accident des schistes à calcéoles dans lesquels il est subordonné. La partie de ces schistes qui se trouve au-dessous du cal- caire varie beaucoup de puissance, généralement en raison inverse du développement du calcaire, de manière que, à Couvin, elle est nulle o" à peu près, tandis qu’on la re- trouve manifestement à deux ou trois kilomètres plus à l'est. | Il me parait done plus conforme aux faits de conserver, pour l’étage quartzo-schisteux eifélien , la division en deux sous-étages proposée par Dumont : la série inférieure, rouge, presque sans fossiles, E!, est l’assise du poudingue de Burnot; la série supérieure est le schiste gris fossili- fère E°, dans lequel rentrera le calcaire à calcéoles Eÿ. Ce sous-étage sera lui-même divisé en deux assises , l’infé- rieure, à Spirifer cultrijugatus, la supérieure, à calcéoles , renfermant des banes calcaires subordonnés plus ou moins nombreux qui, dans la région de Couvin à Chimay, ont acquis leur plus grand développement et y constituent la bande de calcaire à calcéoles que nous avons désignée jus- qu'ici sous le signe Kÿ. Cette distinction n’est pas unique- ment paléontologique ; elle pourrait aussi se faire sur des caractères minéralogiques; mais je ne crois pas avoir à en parler 1c1. Dans cette note, je veux me borner à donner mes conclusions sur notre système eifélien; je réserve les (74) détails pour la description générale de notre terrain an- thraxifère. On voit donc que c’est à juste titre que Dumont , qui ne faisait pas cette dernière subdivision des schistes gris fossilifères, donnait la même teinte et la même signe E° aux deux bandes de ces schistes, quoique leurs véritables relations stratigraphiques lui eussent échappé; mais il en avait apprécié justement les affinités. La correction à faire c’est de distinguer par une teinte spéciale le calcaire subor- donné E*. ù Ce qui précède ne m’empêche nullement de reconnaitre la valeur des motifs que l’on pourrait apporter à l’appui d’un autre groupement de ces trois assises; par exemple, la réunion des schistes gris à Spirifer cultrijugatus aux schistes rouges plutôt qu'aux schistes gris à calcéoles. Mais je m'en tiens au massif du Condros et, tout bien considéré, l’arrangement de Dumont peut être conservé sans inconvénient. Des diverses assises qui constituent le système eifélien, la plus constante et la plus caractéristique c’est l’étage cal- careux, calcaire de Givet ou à stringocéphales, E’de la carte géologique de la Belgique (exclusis excludendis). Sur ce point, tous les auteurs sont d'accord. Il ne nous reste donc plus qu’à déterminer la limite supérieure de l'étage, et à voir jusqu’à quel point s'accordent ou se contrarient les diverses opinions qui ont été émises sur ce sujet. C’est la partie la plus difficile de notre tâche; ear, si nous croyons avoir une connaissance suffisante des idées de Dumont sur les assises dont nous venons d'examiner les rapports, 1l n’en est plus de même pour celles qui vont nous occuper. D'un autre côté, il n’y à guère là qu'une question de classification, sujet qui semble devoir être abandonné à (75) d’interminables discussions, et qui ne peut être discuté avec fruit que par la comparaison de faits observés sur la plus vaste échelle. Néanmoins, comme il s’agit de la dé- marcation entre le dévonien moyen et le supérieur , cette limite nous semble assez importante pour que nous exa- minions où elle a été placée dans notre pays. D’après la légende de la carte géologique (1849), Du- mont indique l’étage du caleaire eifélien, son calcaire infé- rieur de 1830, comme formé de calcaire et de dolomie ; l'étage quartzo-schisteux condrusien, qui le suit dans la série, se compose de schiste, de calschiste et de caleaire subordonné. En 1850, M. F. A. Roemer admet au-dessus du cal- caire à stringocéphales : 1° des schistes à Receptaculites Neptuni et à Spirifer disjunctus (S. Verneuili); 2 du cal- caire à Terebratula cuboides ; 3° des schistes à goniatites et à Cardium palmatum. En 1853, nous voyons par les listes de fossiles données dans la Géologie de la Belgique, que M. De Koninck recon- naît, au-dessus du calcaire eifélien, au moins les assises suivantes : 1° schiste et calcaire à Terebratula cuboïides ; 2° calcaire, schiste et psammite à Spirifer Verneuili. En 1855, M. Ferdinand Roemer plaçait au-dessus du même calcaire : 1° des schistes marneux à Goniatites retrorsus; 2 des schistes verdâtres à Spirifer Verneuili. Enfin, en 1860, M. Gosselet adopte la série suivante : 1° schistes à Spirifer Verneuili et à Terebratula cuboides ; 2° calcaire à Terebratula cuboides ; 3° schistes à Spirifer euryglossus ; 4 schistes à Goniatites retrorsus et à Car- dium palmatum; 5° schistes à Spirifer Verneuili et à Terebratula semilæœvis. Nous devons d’abord faire observer qu'il ne s’agit 1e1 (16) du système condrusien que pour fixer sa démarcation d'avec l'eifélien ; aussi nous nous bornons au sous-étage inférieur C”, les schistes de Famenne de M. d’'Omalius d’Halloy. Ce qui ressort de plus général de la comparaison de ces diverses classifications, c’est une subdivision presque ex- clusivement paléontologique de couches qui paraissent se rapporter à l'étage C' de Dumont, et dans lesquelles trois auteurs sur quatre reconnaissent comme assise spéciale un calcaire particulier à Terebratula cuboïdes. Si lon rapproche ces diverses assises de la légende des roches qui constituent cet étage C', il semble au premier abord que rien ne s'oppose à ce que l’on admette que les subdi- visions indiquées par la paléontologie doivent s’opérer dans cet étage C, et se concilient ainsi avec les opinions qui ont dirigé Dumont dans l'exécution de sa carte; tout au plus aurions-nous à reconnaître qu'il ne nous a rien laissé à l’égard de ces distinctions. Malheureusement, il n’en est plus de même si l’on approfondit davantage la question. Lorsque l’on suit sur la carte la bande de calcaire eïfé- lien qui longe la partie méridionale de notre massif an- thraxifère du Condros, on ne peut manquer d’être frappé de la manière différente dont elle se comporte à ses limites supérieure et inférieure : tandis que celle-ci se poursuit régulièrement, sensiblement parallèle à l’axe de la bande, la limite supérieure s’écarte à chaque instant de cette di- rection pour décrire des sinuosités considérables et former des replis plus ou moins étroits, allongés parallèlement à la bande principale, à laquelle ils se raccordent tantôt sur une grande étendue, tantôt sur une longueur fort res- treinte. Cette bande est, en outre, longée par un certain nombre de mamelons isolés, arrondis ou allongés parallè- lement à elle; enfin l’intérieur du bassin présente d’autres CAT ) ilots calcaires, irrégulièrement disséminés, dont le plus important est celui de Franchimont, près de Philippeville. Toutes ces masses calcaires sont coloriées comme caleaire elfélien et portent la lettre E. Néanmoins, ce bassin renferme encore d’autres îlots calcaires que rien ne signale sur la carte : Dumont les con- naissait , et ils constituent les calcaires que la légende in- dique comme subordonnés aux schistes de Famenne. = D'un autre côté, lorsque l’on consulte les travaux des paléontologistes que nous avons cités, il n’est pas difficile de reconnaître, dans leurs observations, qu’un certain nom- bre de ces mamelons isolés de calcaire eifélien ont été re- connus par eux pour appartenir au calcaire à Terebratula cuboides , aucun, au véritable calcaire erfélien , à stringo- céphales; et je suis porté à admettre, jusqu’à preuve du contraire, qu'il en est de même pour tous, sauf pour le grand massif de Franchimont sur lequel nous revien- drons. On peut en dire autant de ces sortes d’expansions qui sont accolées à la grande bande caleaire, qu’elles en soient _ Séparées par un peu de schiste, comme c’est ordinairement le cas (quoique cela ne soit pas représenté sur la carte, à cause, sans doute, de l’insuffisance de l'échelle), ou que les deux calcaires soient immédiatement en contact. En deux mots, les progrès récents de la paléontologie tendent à faire retirer du système eifélien les îlots calcaires, ainsi que les expansions accolées à la grande bande de calcaire de Givet. La légende de la carte n’a rien qui nous empêche d'admettre ces modifications : elles ont même l’avantage d'éliminer de l’assise en question des schistes qui, d’après la légende, ne s’y rapportent point, cette série étant indi- quée comme formée uniquement de calcaire et de dolomie. (78) Quoique la carte géologique de la Belgique soit bien lom de n’être qu’une carte minéralogique, et qu’elle ait la pré- tention de représenter par ses divisions des périodes dis- tinctes de l’histoire du sol de notre pays, 1l est évident que Dumont s’est laissé guider par des considérations pétro- graphiques dans le classement des assises qui nous oceu- pent : pour lui, le changement dans la nature de la roche, résultant d’un changement correspondant de la sédimenta- tion, indique, par conséquent, de nouvelles conditions générales susceptibles de représenter une nouvelle période d’un ordre inférieur, étage ou sous-étage. Mais on sait aussi que, lorsque deux séries de couches sont déposées consé- cutivement, sans bouleversement et sans interruption de la sédimentation, elles passent souvent l’une à l’autre d’une manière si graduelle que le géologue qui doit indi- quer une limite exacte, tranchée, se trouve fort embar- rassé et obligé de reconnaître qu'il n’y a guère plus de raisons pour placer les couches de transition dans un étage plutôt que dans un autre. C’est l'inconvénient de toute classification. Or tel est le cas pour la série placée sur la limite du calcaire de Givet et des schistes de Famenne. Je suis persuadé que Dumont l’a considérée comme telle et la rattachée au calcaire, à cause du caractère minéralogique. En effet, dans la coupe des terrains primaires de la vallée de la Meuse (1), voici comment il expose la consti- tution de ces couches à Givet. « Système eifélien. — …. On rencontre au S.0. de Givet du calcaire dans lequel on a ouvert un grand nombre de (1) Mémoire sur les terrains ardennais et rhénan, 2e partie, p. 382, MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, t. XXII: 1850, (79) carrières, et dont la direction —122° et linclinaison S. 32° E — 49°. Ce calcaire change de position à Givet, et y présente une direction — 67° et une inclinaison N, 23° 25". » On passe du calcaire au schiste de Famenne de la manière suivante : les bancs, d'abord épais et contigus, deviennent plus minces et plus argileux; du caleaire argi- leux, gris bleuâtre, fossilifère, alterne ensuite, par mas- sifs et par bancs, avec du schiste très-feuilleté, renfermant des noyaux de calcaire argileux gris de fumée; ce schiste finit par prédominer à son tour et par ne plus renfermer, à une certaine distance du massif calcareux , que deux ou trois rubans formés de noyaux de calcaire argileux grisà- tre, très-peu fossilifère. » Système condrusien. — Le schiste qui s'étend au N. de Givet est ordinairement divisible en feuillets obliques à la stratification , qui, vers la surface du sol, se réduisent, par altération, en petites écailles ou en prismes allongés, irré- guliers, d’un gris verdâtre sale. » fl renferme, à quelques centaines de mètres au N. de Heer, un petit massif isolé de marbre bigarré, formé de polypiers de couleur grise, dont la texture organique est presque entièrement effacée, de parties rouges à texture compacte, de parties blanches , lamellaires ou subcom- pactes et de parties vertes schistoïdes. » Ce qu'il faut remarquer dans cette citation, c’est que les couches de transition sont rangées dans le système eifé- lien; le système condrusien ne commence que lorsque la nature schisteuse de létage est bien décidée. En adoptant cette interprétation de la pensée de Du- mont, nous écartons la plupart des reproches que lon pourrait faire à ses observations, et nous pouvons accepter ( 80 ) les conclusions auxquelles nous ont amené les découvertes paléontologiques publiées depuis dix ans, sans modilier d’une manière essentielle les résultats que Dumont a fait connaître en 1830. Il suffit de retirer de son étage calca- reux inférieur ou eifélien les couches schisto-calcaires qui forment la transition à l’étage quartzo-schisteux supérieur ou condrusien, et qui constituent les assises à Terebratula cuboides, pour les faire rentrer dans le système condru- sien, dont elles possèdent les principaux fossiles sans avoir conservé les espèces caractéristiques de l’eifélien. Par l’adoption de ce changement , qui fait concorder notre clas- sification avec celle qui est généralement suivie, la bande de calcaire eifélien où à stringocéphales reprend toute sa régularité. Les accidents, les inégalités de puis- sance se trouvent dans les calcaires à Terebratula cu- boides, que j'appellerai calcaires de Famenne, et s’expli- quent autant par les plissements remarquables de ces petites bandes, plissements dont on peut voir de fort beaux exemples à Marche et ailleurs, que par le développement variable de la série calcaire, laquelle, bien différente du calcaire de Givet, paraît se rapprocher beaucoup des banes de polypiers que l’on observe dans les terrains plus ré- cents. Quant au marbre rouge, qui a tant occupé les géologues, et dont le petit massif de Heer, cité tantôt, est un bon exemple, je le considère comme résultant d’un réeif de polypiers, dernier terme calcaire de la série à Terebratula cuboides (espèce qui y est d’ailleurs fort rare, comme toutes les autres, à cause des modifications que la masse a subies, et qui en ont effacé presque toute trace de son origine organique). Ce sont donc des masses locales, qui s'élevaient au-dessus des dépôts contemporains des schistes (81 ) à Terebratula cuboides, qui ont été ensevelies plus tard dans les schistes de Famenne proprement dits (c’est-à-dire dans le sens restreint que M. Gosselet à attaché à cette expression, en en excluant les schistes précédents), et qui doivent, sans doute, leur coloration à la même cause qui a nuancé de violet la plus grande partie des schistes où ils sont plongés. La circonstance qu’ils donneraient une chaux blanchâtre ne nous semble pas de nature à repousser l’idée qu’ils doivent leur coloration à l’oxyde de fer, comme les schistes; cette décoloration par calcination est due à l'opa- cité de la chaux, comme la couleur, à la transparence du calcaire. Pareil phénomène se rencontre dans d’autres sub- siances minérales. Quant à la disposition irrégulière des schistes au contact de ces calcaires, ce qui a le plus attiré l'attention des géologues, l’explication que nous adoptons nous paraît pour ainsi dire la seule qui puisse en rendre compte. | Pour en revenir au calcaire eifélien, nous tenons à faire bien remarquer que le changement que nous adoptons dans la classification , changement qui doit entraîner de no- tables modifications dans la disposition des couleurs de la carte géologique de ia Belgique, est loin d’affecter au même degré les idées générales de son illustre auteur, et nous croyons pouvoir dire, au contraire, qu'il les consacre en leur donnant tout leur développement et en montrant avec quelle facilité elles se plient à suivre les inévitabies progrès de la science. Si nous faisons abstraction du calcaire à cal- céoles, il y à trente ans que Dumont démontra rigoureuse- ment que tous les calcaires anthraxifères, vrai dédale jus- qu'alors, pouvaient être rapportés à deux systèmes, l’un inférieur, autre supérieur. Si l’on veut bien se reporter à l’état de la paléontologie à cette époque etmême dix à quinze 2e SÉRIE, TOME XI. 6 (82) ans après, 1] n'aurait pu faire plus. Aujourd’hui la science a marché; la découverte de la constitution géologique de la province de Liége a été comme un type qu'on a reproduit et perfectionné ; elle a fourni à la paléontologie une base assurée, et maintenant nous sommes capables de faire plus que notre maître. Le progrès que nous avons fait consiste à reconnaître deux horizons fossilifères distincts dans l’éta- ge calcareux inférieur, et les affinités nombreuses qui rat- tachent l’horizon supérieur aux assises schisteuses qui y sont intercalées ou qui le suivent. Cette série supérieure, qui est loin d’avoir le développement et la constance de l'inférieure, n’est qu’une assise de transition que Dumont avait le droit de rattacher à la grande masse du calcaire de Givet, tandis que les découvertes des derniers temps ont fait pencher la balance de l’autre côté et nous obligent à la rattacher aux schistes de Famenne. Mais ce changement n'empêche pas de reconnaître les progrès que la géologie doit à Dumont pour avoir démontré le parti que l’on peut ürer de la statigraphie, par un exemple que l’on peut har- diment proclamer une des plus grandes découvertes stra= tigraphiques du siècle. Il nous reste à dire quelques mots du massif de Fran- chimont : quoiqu'il soit coloré comme calcaire eifélien, on n’est pas autorisé à croire que Dumont le rapportait au vrai calcaire de Givet, à stringocéphales. Il est formé d’as- sises alternativement schisteuses et calcaires qu’il est très- difficile de débrouiller. M. Gosselet le range en entier dans la série à Terebratula cuboïdes, n’y ayant pas rencontré les fossiles caractéristiques du calcaire de Givet; il en a donné une coupe idéale, destinée à expliquer cette répéti- tion d'assises par une suite de plissements; mais 1l recon- naît lui-même que plusieurs termes sont encore hypothé- (85 ) tiques et n’ont pas été observés. Sans pouvoir donner une coupe complète de ce massif, j'ai été plus heureux que mes prédécesseurs : outre une voûte de calcaire à Terebratula cuboides, j'en ai constaté une autre de cal- caire de Givet avec stringocéphales, et j'en soupçonne une seconde. C’est une question qui sera prochainement éclaircie. Le marbre rouge a pris, au midi de ce massif, un développement remarquable. Après avoir exposé les progrès qui ont été faits depuis dix ans dans la connaissance de la constitution géologique de notre pays, et que l’on doit à l’heureuse alliance de la géologie et de la paléontologie, il m’est impossible de ter- miner sans mettre les observateurs en garde contre des conclusions prématurées, tirées d’une connaissance incom- plète des fossiles d’une assise. Si le précepte n’est pas neuf, il n’en est que meilleur. Pour ma part, j'ai rencon- tré, même à propos de fossiles réputés caractéristiques, des faits qui n’ont jamais été indiqués, du moins à ma con- naissance; Je ne citerai que les deux plus saillants. J'ai parfaitement constaté, près de Couvin, le mélange des faunes des deux subdivisions du schiste gris fossilifère, ou plutôt, j'ai rencontré la calcéole associée au Spirifer cul- trijugatus. Près de Marche, j'ai trouvé le Receptaculites Neptuni associé à la calcéole et à de nombreux fossiles de cet étage, dans des schistes inférieurs au calcaire de Givet. (84) Note sur les acides fumarique et maleique et sur leurs relations avec l'acide succinique; par M. Aug. Kekulé, professeur à l’université de Gand. On sait que l'acide malique perd de l'eau, sous l’influence de la chaleur, pour se transformer en deux acides 1s0- mères, l'acide fumarique et l'acide maléique. Ces deux acides (ou l’un des deux au moins) pourraient donc être envisagés comme ayant avec l’acide malique les mêmes relations que celles qui existent entre l’acide métaphos- phorique et l’acide phosphorique ordinaire. Acide malique. Acide fuinarique. G, H;” -6, ) G,; H;7” 6: } H- | 8: H {03 Acide phosphorique. Acide metaphosphorique. PTE) PT) H $ < H | bé Cependant, dans cette manière de voir, l'acide fumarique ne pourrait être que monobasique, puisqu'il ne contient qu'un seul atome d'hydrogène typique. Le fait est, au con- traire, que cet acide est bibasique. Pour exprimer cette propriété par une formule typique, on est forcé d'admettre qu'il y a au moins deux atomes d'hydrogène dans le type, et l’on est ainsi conduit à penser que l’un des deux atomes d'hydrogène, qui s’éliminent de l'acide malique, provient du radical même de cet acide. L’aeide fumarique est alors exprimé par la formule : ( 85 ) L’acide maléique, étant aussi bibasique, doit être repré- senté par la même formule. Cette formule est l’expression de la composition des sels et des éthers de l’acide fumarique (et maléique); elle rend compte encore de la formation du chlorure de fuma- ryle et de la famaramide; elle explique de plus, si on lui applique la loi de la basicité des acides, telle que je lai établie dans une note précédente, pourquoi ces deux ato- mes d'hydrogène s’échangent avee une facilité égale contre des métaux; mais elle fait sortir l'acide fumarique du nom- bre des combinaisons organiques congénères des alcools, que j'ai réunies dans le tableau joint à cette note. L’acide famarique contient, en effet, deux atomes d'hydrogène de moins qu’il ne devrait en contenir, d’après Île principe sur la transformation des radicaux qui sert de base à ce ta- bleau. 11 vient se placer parmi ces corps, assez nombreux d’ailleurs, qui forment un groupe à part, auquel appar- tiennent l'alcool acrylique et ses dérivés, l’acide acrylique, l'acide oléique et leurs homologues, etc., et qui tous se dis- tinguent d’un corps correspondant, rangé dans le tableau des congénères des alcools, par deux atomes d'hydrogène qu'ils contiennent en moins. . La substance correspondante à l’acide fumarique dans cette série parallèle n’est autre que l’acide succinique. Acide succinique. Acide fumarique. G, He LE G,H,7 6, | UE H, AE Les deux acides appartiennent, d’après leurs propriétés chimiques, au même type (deux molécules d’eau réunies par un radical biatomique); ils contiennent quatre ato- ( 86 ) mes de carbone et deux atomes d'oxygène dans le radical, et ne diffèrent que par deux atomes d'hydrogène. Or, comme on a démontré, dans ces derniers temps, que l'acide succinique est capable de se transformer en acide malique et en acide tartrique, il m’a paru intéressant, au point de vue théorique, d'examiner quelques propriétés des acides fumarique et maléique, et de voir, surtout, si ces acides aussi , en donnant des produits de substitution , pourraient servir de point de départ pour la préparation de deux aei- des correspondant aux acides malique et tartrique, mais contenant deux atomes d'hydrogène en moins. Les expériences que je vais décrire maintenant ont prouvé que ce parallélisme de réactions n’a pas lieu, mais que l'acide fumarique se transforme avec une facilité remar- quable en acide succinique ou en un dérivé de cet acide. Acide fumarique. Quand on fait réagir, en présence de l’eau, le brome sur l'acide fumarique dans les proportions indiquées par l’é- quation : G, H, 6., +Br, = G, H, Br, 6.,, aucune réaction ne se manifeste à froid, mais il suffit de chauffer dans un tube scellé, pendant quelques minutes, à la température de l’ébullition de l’eau, pour que la réac- tion s’accomplisse. La couleur du brome disparaît et une substance blanche s’en sépare, sous forme de cristaux par- faitement nets, qui ne sont autres que l’acide bibromo- succinique. C’est à peine s’il se produit une trace d’acide bromhydrique, ainsi qu'une quantité minime de bromo- forme et d’acide carbonique, produits d’une réaction de l'excès de brome sur l’acide bibromo-suceinique déjà formé. Dans une note prochaine, je montrerai que l’on obtient (87) toujours ces produits par l’action du brome sur l'acide bibromo-succinique, ainsi que dans la préparation de l’acide succinique bibromé. L’acide bibromo-succinique préparé à l’aide de l'acide fumarique se purifie facilement par une seule cristallisation dans l’eau bouillante. Voici l’analyse de cet acide : 1° 0.4615 gr. ont donné 0.6318 gr. de bromure d'argent ; 20 0.6768 gr. —— 0.4305 gr. d'acide carboniq. et 0.0942 gr. d’eau; 3° 0.6990 gr. — 0.4490 er. — et 0.0948 gr. — On en déduit : CALCULÉ. TROUVÉ. — LE lb — ER 1 IT III G, — 48 — 17.39 — 17.55 171220 H, — 4— 1455 — 1.54 1.50 Br, — 160 — 58.00 58.22 — — 6. FE 64 SET 23.16 Tr TE x 276 L’acide bibromo-succinique, préparé à l’aide de l'acide fumarique, est identique avec le même acide obtenu par l’action du brome sur l’acide succinique. J’ai constaté, en outre, que son sel d'argent se décompose, quand on le fait bouillir avec de l’eau, en donnant de l’acide paratar- trique (1). C’est donc là le dernier anneau de cette chaîne de réactions qui permettent maintenant de transformer l’un dans l’autre les acides succinique, malique et tartrique. Mais la transformation de l'acide fumarique en acide (1) J'ai constaté depuis que l’acide, que j'avais obtenu par la décom-- position de l’acide bibromo-succinique, est de l’acide paratartrique, comme d’ailleurs le faisait soupçonner l’absence du pouvoir rotatoire. (88 ) bibromo-sueeinique me paraît encore, à un point de vue différent, mériter un intérêt tout à fait particulier. En gé- néral, on obtient par l’action du brome sur les substances organiques, et surtout sur les acides organiques, des pro- duits de substitution ; dans le cas de l’acide fumarique, nous voyons le brome se combiner par addition, et le pro- duit présenter les propriétés d’un produit de substitution d'un autre corps. L’acide fumarique est le premier corps dans lequel on à constaté une telle propriété. D'ailleurs le fait même de l'addition directe du brome n’a pas de nombreuses analogies : il n’y a guère que quelques hydro- carbures, les bases phosphorées, etc., et la chloroxéthose qui possèdent cette propriété, mais on ne connaît jusqu’à présent aucune substance oxygénée et acide qui s’addi- tionne directement au brome. La facilité avec laquelle le brome s'ajoute à l’acide fu- marique m'a fait penser que l’acide bromhydrique, et même l'hydrogène, devraient s’y combiner aussi, et que l’on de- vrait obtenir ainsi l’acide succinique monobromé et l'acide succinique. L'expérience m'a montré, en effet, que l'acide bromhy- drique agit sur l’acide fumarique. L'action est cependant très-lente, et il faut chauffer assez longtemps à la tempé- rature de 120° pour combiner une quantité appréciable des deux corps. Jai pu constater que le produit possède quelques propriétés de l’acide monobromo-succinique, mais les difficultés que présente la purification de cet acide et la quantité relativement petite de matière première que j'avais à ma disposition, m'ont forcé de remettre l’étude de cette réaction. L'action de l’hydrogène sur l'acide fumarique est beau- coup plus nette : non-seulement on réussit facilement à Pa ( 89 ) transformer l'acide famarique en acide suceinique en le chauffant dans un tube scellé avec de l'acide iodhydrique concentré; mais encore l’action de l'hydrogène naissant, c’est-à-dire l’action d’un corps capable de dégager de l’hy- drogène dans des conditions données (comme l’amalgame de sodium et le zinc), m’a permis de réaliser cette trans- formation : il suffit de mettre l’acide fumarique dissous en _ contact de l’amalgame de sodium pendant quelques heures, pour le transformer complétement en acide suceinique. L'analyse de l'acide succinique obtenu à l’aide de l'acide famarique m’a donné les résultats suivants : [. (Préparé par la réaction de lacide iodhydrique }. 0.5614 gr. ont donné 0.8344 gr. d'acide carbonique, et 0.2580 gr. d’eau. . IE (Préparé par la réaction de l’amalgame de sodium ). 0.4128 gr. ont donné 0.613536 gr. d'acide carbonique et 0.1898 gr. d’eau. On en déduit : CALCULÉ. TROUVÉ. — EE RS To — I il G, — 48 — 40.68 40.55 40.54 H, — 6— 5.08 5.10 DA D,— 64 — 5124 2 _ 118 lei encore je ferai remarquer que l'addition directe de l'hydrogène à une substance organique est un fait presque sans analogie. On sait bien que l'hydrogène, et surtout l'hydrogène naissant, réduit quelques substances organi- ques en leur enlevant de l'oxygène, on sait que les corps nitrés donnent souvent, par l’action de l'hydrogène, des corps amidés; on a trouvé encore que la belle réaction, (9) découverte par M. Melsens, peut se réaliser très-souvent , et qu'on peut ainsi remplacer le chlore ou le brome d’un produit de substitution par l'hydrogène, en lui faisant subir une substitution inverse. Mais il n’existe que très-peu de cas d’une substance organique, laquelle, se trouvant en présence de l'hydrogène réputé naissant, se combine par addition à cet hydrogène. C’est tout au plus si l’on pour- rait citer la transformation de l’isatine-en isathyde, de la quinone en hydroquinone, faits qui se répètent pour les produits de substitution de ces deux corps; la métamor- phose de l’indigo bleu en indigo blanc, et enfin, ce fait si remarquable de la transformation de l’acétylène en éthy- lène, découvert, dans ces derniers temps, par M. Berthelot. Acide maléique. L’acide maléique, l’isomère de l'acide fumarique, se comporte vis-à-vis des réactifs que j'avais mis en usage pour ce dernier, à peu près de la même manière. Ainsi, se trouvant en présence du brome et de l’eau à la température de 100° pendant quelques minutes seule- ment, l’acide maléique donne l’acide bibromo-succinique. Il m'a paru cependant que, dans le cas de l’acide maléi- que, la quantité d'acide bromhydrique formé était beau- coup plus grande qu'elle ne l’est, dans ce cas, pour l'acide fumarique. J'ai trouvé, de plus, qu’il se forme en même temps et à côté de l'acide bibromo-succinique, un autre acide beaucoup plus soluble que celui-ci et dont l'étude m'occupe encore. Je me suis contenté d’un dosage du brome de l’acide bibromo-succinique préparé de l'acide maléique. 0.3128 gr. ont donné 0.4280 gr. de bromure d'argent, ce qui corres- (91) pond à 58.95 p. c. de brome; le calcul exige : 58.00. De cet acide bibromo-suceinique encore, J'ai pu préparer de l'acide paratartrique. Sous l'influence de l’hydrogène naissant, c’est-à-dire en se trouvant en contact avec de l’eau et de lamalgame de sodium , l’acide maléique se transforme en acide suceiï- nique avec la même facilité que cela a lieu pour lacide fumarique. 0.4634: gr. d'acide sucemique ainsi préparé ont donné à l’analyse 0.6872 gr. d'acide carbonique et 0.2092 sr. d’eau; ce qui correspond à 40.44 p. c. de car- bone et 5.03 p. c. d'hydrogène; le calcul exige 40.68 p. c. de carbone et 5.08 p. c. d'hydrogène. La réaction est différente par l’action de l’acide iodhy- drique. Ce n’est pas que l’on ne puisse transformer l’acide maléique, par l’action de cet agent, en acide succi- nique ; mais avant de se transformer par réduction en cet acide, l’acide maléique passe d’abord, par le contact seul de l'acide iodhydrique, en acide fumarique; de sorte que c’est l’acide fumarique, formé d’abord, qui se réduit en- suite par l'acide iodhydrique. Voici l’analyse de l’acide fumarique préparé de cette manière : 0.5418 gr. ont donné 0.5178 gr. d'acide carbonique et 0.1119 gr. d’eau. On en déduit : CALCULE. TROUVÉ. Ç, — 48 — 41.58 41.32 H, — 4— 545 3.62 D Gi 4547 2 116 L’acide bromhydrique transforme l'acide maléique en (92) acide fumarique avee Ja même facilité que le fait l'acide iodhydrique. L’acide maléique se dissout dans l'acide bromhydrique concentré et distillé. Quand on chauffe jusqu’à l’ébullition, tout l'acide maiéique passe à l’état d'acide fumarique, qui se précipite. Si, au lieu d'employer lPacide 1odhydrique ou bromhydrique concentré, on prend ces acides plus étendus, la même réaction se présente’ encore, mais avee plus de lenteur. Or, comme on sait que Facide maléique, en présence de l’eau seule, se transforme en acide fuma- rique quand on le chauffe à des températures qui se rap- prochent de son point de volatilisation (160°), on ne peut guère s'étonner de voir la même transformation s’accom- plir à des températures moins élevées, s’il y a un acide minéral en présence. Les faits que je viens de décrire n’expliquent, comme on le voit, en rien la différence entre ces deux acides isomères, l'acide fumarique et l’acide maléique, mais ils jettent une lumière inattendue sur les relations que pré- sentent ces deux corps avee l'acide suceinique. Des relations semblables existent, si l’on ne compare que les formules brutes, entre beaucoup d’autres corps, par exemple, pour les suivants : — H, Alcool éthylique €, H, 6: €, H, 0: Oxy. d'éthylène(etaldéh ) Alcool propylique €; H, ©- C; H; ©- Alcool allylique. Aldéhyde propyliq. €; H,; G- C, H, -O- Acroléine. Acide propionique €; H, 6, €; H, 6, Acide acrylique. Acide stéarique G,, H: ©, €,5 H:, ©, Acide oléique. Éthylène 6: H, CAL HE Acétylène. Acide succinique €, H, 6, EC, H, O:, Acide faumariq. et maléiq. (95 ) La même relation existe encore entre l’hydrure d’éthyle et l’éthylène. Hydrure d’éthyle. . . €, UH, €, H, Éthyiène. L’analogie entre léthylène et l’acide fumarique (ou ma- léique) peut être poursuivie encore plus lom. En effet, dans les deux séries suivantes, on à non-seulement des rapports incontestables dans ïes formules, mais encore, dans 1a plupart des cas cités, de véritables analogies dans les faits. Alcool. Ethylene. | Ac. alique. Ac. fumarique. | Hi G, H:6- — H, 0-= €, H, 1G,.H,6, —4310-= €, 4,6; Bronure d’éthylene. | Ac. bibromo-succin. CE Br, — CG, H, Pr, CG; H, 0, + Br, —=G,H, Br, 6; Bromure d’éthyle. Ac. bromo-succin. SH. + Br = GC, 4, Dr C, H, 0, + BrH== €, H. BrO, Glycol. Ac. larlrique. | | CU +2H0=€,H6, | C.H,0,-+2H0—0C,H, 0, On pourrait dire que l'acide fumarique est pour Pacide malique ce que l’éthylène est pour l'alcool; pour l'acide bibromo-succinique ce que l’éthylène est pour son bromure; pour l’acide monobromo-succinique ce que léthylène est pour le bromure d’éthyte. L’acide tartrique serait pour l’acide fumarique ce que le glycol est pour l’éthylène. On l’obtient, en effet, en faisant réagir le bromure de lacide fumarique, c’est-à-dire de l'acide bibromo-succinique, sur loxyde d'argent, tout comme on obtient le glycol ou son acétate, en décomposant le bromure d’éthyiène par l’acétate d'argent. Dans les propriétés et les fonctions chimiques (94) des substances mises en parallèle, il y à une différence très-notable, ce qui se conçoit aisément par l’absence com- plète de l’oxygène dans l’une des séries, tandis que les corps de l’autre série en sont très-riches. L’analogie des réactions, cependant, ne peut pas être mise en doute. Ces analogies ne se voient guère quand on se sert de for- mules rationnelles quelconques, mais elles n’en existent pas moins; ce qui prouve, une fois de plus, que les for- mules rationnelles, même les meilleures, ne montrent pas toutes les analogies à la fois. Toutefois, en écrivant des formules typiques, on aperçoit une certaine analogie entre quelques-unes des substances mentionnées. L’acide fuma- rique, comme Je l’ai déjà fait observer plus haut, présente avec l'acide succinique le même rapport que l'alcool aily- lique avec l'alcool propylique, que l'acide acrylique avec l'acide propionique, que l'acide oléique avec l'acide stéa- rique , etc. On à : Acide succinique. €, H,/’ os 9, —H,= d’un anneau garni d'un saphir, je les rachèterai au prix » de trois cents livres. » Que mérita Pierre de Broyes par tant de complaisance? Une paire de robes que lui envoya Robert d'Artois (1). Cette même nuit peut-être , Jeanne de Divion s’enferma avec Jeanne de Charennes sa meschine, pour transposer le scel précieux qui lui avait donné tant de soucis, puis elle écrivit à monseigneur de Beaumont que les lettres de Robert II, portées hors du royaume, avaient été mises en gage chez un marchand qui en exigeait trois cents livres. Les trois cents livres furent aussitôt envoyées à Arras, mais 1l fallut y ajouter un intérêt de quatorze à quinze pour cent, pour dix ou douze jours de retard dans le payement. Le Beau-Parisis était digne d’appartenir à Fune- des familles les plus riches de cette ville d'Arras qui se plait trop à l'usure, selon le vers de Guillaume le Breton : PTE EE PE | Atrebatum fœnore gaudens. Quand Jeanne de Divion arriva à Paris avec ces lettres, Robert d'Artois demanda si elles étaient bien authentiques, et, malgré les protestations de Jeanne de Divion, il en fit (1) Déposition de Michelet Guéroult. (5°) examiner les sceaux par plusieurs hauts et doctes person- nages qui se trouvaient là, notamment par l’évêque de Comminges, le doyen de Bruxelles, les archidiacres de Tournay et d’Avranches, les sires d'Hangest et de Boville. Ils jugèrent les sceaux irréprochables, mais ils trouvaient le style de la lettre de Thierri de Hérisson « un peu sau- vage », et quand on donna lecture de la ratification de Robert Il, un lapsus calami les surprit fort. Jeanne de Divion n’avait pas remarqué que Robert l’Écrivain, dans son agitation, avait mis 1322 au lieu de 1302, et il en résultait que cette déclaration du comte Robert IT était postérieure de vingt ans à sa mort. Robert en fut frappé : « Pour rien au monde, dit-il, je ne voudrais faire usage » d’une pièce fausse (1).» Quelques voix s’élevèrent néan- moins pour faire observer que des erreurs semblables se rencontraient parfois dans des diplômes d’empereurs et de rois, et qu'il était plus sage de ne s'attacher qu'aux sceaux, qui étaient bien authentiques. Jeanne de Divion, pour mieux se justifier, crut pouvoir ajouter qu’un texte des fameuses lettres de convenances de 4281, reproduit dans une confir- mation du roi Philippe le Bel, venait d’être retrouvé et qu’elle ne tarderait pas à le produire avec tous les sceaux, parmi lesquels on remarquait ceux des douze pairs du royaume et de labbé de Saint-Denis. « Eh bien, dit » Robert d'Artois, qui semblait se méfier de ses assertions, » nous enverrons Regnaud de Soissons à l’abbaye de » Saint-Denis, pour savoir quels étaient en ce temps-là » les noms de l’abbé et des douze pairs. » Le lendemain, mademoiselle de Divion revint, après le (1) Déposition de Périot de Sains. ( 116 ) diner, au château de Reuilly. Tandis que Robert d'Ar- Lois, assis sur un lit, feuilletait un roman, madame de Beaumont causait avec elle à voix basse. Quel était le sujet de cet entretien? Il est aisé de le deviner, car ma- dame de Beaumont appela un notaire nommé Pierre Tes- son, et lui demanda s'il avait un canif. Il faut, lui dit- elle, corriger la date et mettre 1302. Mais Tesson reculait devant un acte si grave. « Ah! madame, s’éeria-t-1l en » se mettant aux genoux de la comtesse de Beaumont, » n'exigez pas cela de moi; j'ai été attaché à votre mai- » son pendant vingt-six ans : prenez pitié de mes ser- » vices. » — « Il a raison, interrompit Robert; n’insistez » pas. » Mais madame de Beaumont était bien résolue à faire ployer la résistance du notaire : elle reprocha seu- lement à Jeanne de Divion d’avoir oublié qu'il ne fallait pas parler de ces choses-là en présence de monseigneur d'Artois. Cependant la situation des choses avait bien changé depuis quelques mois. S'il est vrai que madame de Beau- mont avait eu deux fois recours au poison pour écarter l'habileté et l’adresse de Mahaut et de Jeanne de Bour- gogne, elle trouva (l’histoire est pleine de ces lecons providentielles) dans le succès même de son crime, le châtiment qui lui était réservé. Les droits de la veuve de Philippe le Long passèrent à sa fille, qui avait épousé Eudes IV, duc de Bourgogne. Or, Philippe de Valois avait lui-même pour ferame une sœur du duc de Bourgogne, et se trouvant ainsi appelé à opter entre des prétentions rivales, 1l se laissa peu à peu, malgré ses promesses à Robert, entrainer d’un côté tout opposé. La reine choisis- sait les heures où elle était seule avec le roi pour le sou- mettre à son influence, à l’imfluence que peut exercer une Dis femme jeune et belle (1). On disait communément que le roi préférait la reine à sa sœur; et en même temps que s’affaiblissait le crédit de Robert d’Artois, On voyait aussi s'éloigner de lui des hommes habitués à ne flatter que le succès et la fortune. Oursin le Borgne chargea le sire de Melun d’avertir le due de Bourgogne qu’il avait vendu un scel à Jeanne de Divion : d’autres révélations se succédè- rent. Enfin, un jugement du 50 août 1530 admit l’hom- mage du duc et de la duchesse de Bourgogne : on fixait, de plus, pour que Robert présentàt ses moyens de droit, un délai qui devait expirer dans les premiers jours du mois de décembre. Jeanne de Divion, qui était toujours le principal témoin en faveur du comte de Beaumont, semblait redouter le moment où elle devrait déposer devant la cour du roi. Elle s'était retirée près de Robert au château de Conches. « Ne craignez rien, lui disait celui-ci; pour aussi gros » d’or que ce château, personne n’oserait mettre la main » sur vous. » Grâce à ces assurances et sans doute aussi à quelques présents, Jeanne de Divion retrouva peu à peu toute son audace, et on la vit présenter au parlement, non-senlement deux confirmations de Robert II, du 28 juin et du 7 juillet 1502, mais aussi des lettres de Mahaut du 40 mars 1324, où elle déclarait reconnaitre les droits de Robert d'Artois. Le clerc qui avait écrit ces lettres ( c'était Périot de Sains) avait cru pouvoir mieux déguiser son écriture en employant une penne d’airain, ce que nous appellerions aujourd'hui une plume de fer. Cela (1) Nocturnis otiis, dit Zantfliet. (Thes. Anecd., V., col. 198). On peut voir, dans le Mémoire de Lancelot (t.X, p. 627), quels insolents discours contre la reine on attribuait à Robert d'Artois. (448 ) servit à peu de chose : l’imposture était trop évidente. On demanda à Robert s’il entendait faire usage de ces pièces; il hésita ; répondit négativement et se retira; mais Jeanne de Divion fut arrêtée et conduite prisonnière à l’hôtel de Nesle, qui rappelait d’autres crimes et d’autres hontes. Robert rentra tristement à Conches : il ne lui était plus permis d'admettre avec sincérité la valeur des documents sur lesquels il s’appuyait, mais il était arrivé à ce point fatal où la crédulité fait place au doute, où le doute même s’efface pour faire place au mensonge. Blessé de l’ingrati- tude de Philippe de Valois et résolu à rester fidèle à ses engagements vis-à-vis des alliés d'Artois, il ne se sentait plus assez fort pour secouer ce réseau de passions et d’in- trigues qui l’enveloppait. Assis près d’une fenêtre et re- gardant en silence la campagne, il laissait sa femme tramer librement, dans la salle même où il se trouvait, de nou- velles ruses et de nouvelles trahisons. Madame de Beau- mont était douée d’un esprit d'invention rare. Elle dit à l’évêque d'Évreux : « Faites-moi avoir un scel de Philippe » le Bel pour que je le compare à celui d’une de mes » chartes. » À Thibaut de Meaux, ancien chapelain de la reine Clémence de Hongrie (1), elle demanda une formule de confirmation propre à un contrat de mariage, car elle en avait besoin, disait-elle, pour son fils Jean, qui devait épouser mademoiselle de Leuze. Puis elle appela un elerc qui copiait pour elle deux traités pieux, la Passion de Notre-Seigneur et les Regrets de Notre-Dame (2), et elle (1) La reine Clémence de Hongrie s'était toujours montrée favorable aux prétentions de Robert. (2) Le poëme des Regrets de Notre-Dame se trouve à la Bibliothèque de Bourgogne : il y porte le n° 2385. ( 449 ) lui fit écrire «en bonnes lettres » ce que Thibaut de Meaux lui avait remis. Quelques jours après, Robert alla chasser dans la forêt de Conches, où vivait cachée chez son verdier la meschine de mademoiselle de Divion, Jeanne de Charennes. Pen- dant longtemps il lui avait fait demander avec une crédu- lité trop confiante si les lettres de confirmation scellées par le roi, les douze pairs et l'abbé de Saint-Denis n’arri- valent point. Ce jour-là, il était résolu à ne plus les at- tendre, car sans doute, il n’y croyait plus. Ce fut dans cette cabane, au milieu des ombrages d’une vaste forêt, que deux femmes, Jeanne de Charennes et Marie d’Orbec, attachè- rent un scel de Philippe le Bel aux fausses lettres sur lesquelles reposaient les dernières espérances de l’arrière- petit-fils du héros de la Massoure. L'expérience avait appris combien 1l était utile d’écarter des témoins trop dangereux s'ils tombaient au pouvoir des gens du roi. Jeanne de Charennes fut envoyée d’abord à Jersey, puis en Aragon, et de là à Cambray et à Namur. Marotte de Béthencourt, que le diable n’avait pas enlevée, puisque nous la retrouvons à Conches, s’éloigna aussi avec Ma- rotte la Noire, et cette fois l’on ignore ce qu'elles devin- rent. Quant à Périot de Sains que Jeanne de Divion avait signalé depuis longtemps comme faible et versatile, on l'envoya chez un baïlli qui portait le nom assez sinistre de Satanas (1). Il rêvait chaque nuit qu'il voyait des ser- gents accourir pour l'arrêter, et un jour il adressa à Robert d'Artois la lettre suivante : « Très-excellent et redouté prince, je n’ay merveille (1) Il est fait mention d’un Pierre Satanas dans une charte du comte d'Artois de 1269, ( 420 ) >» si un diable à qui je estois jour et nuit (il ne s’agit pas » de Satanas) me deceut de faire écrire, mais j’ay grand » merveille de votre grande puissance, de votre grand » sens et de votre très-grand conseil si vous avez porté les » lettres... Si vous les avez baillées, vous avez baïllé ma » mort si je suis prins, si que pour Dieu je ne sçay qui » donc réclamer que Dieu et vous. » Il était trop tard, et Périot resta chez Satanas. Ces témoins plus ou moins importuns mis de eôté, il devenait plus aisé d'expliquer l’origine des lettres de con- venances. L'un des doubles ayant été détruit par Marigny, l'autre ayant été enlevé par Mahaut, on fut réduit à sup- poser qu’un troisième texte, joint à la confirmation de Philippe le Bel, s'était trouvé entre les mains du due Jean, père de Blanche de Bretagne, qui l'aurait confié à son ami, le sire de Derval. A la mort du sire de Derval, cette charte serait passée dans quelque monastère. Quel monastère ? On songea d'abord à Fontevrault : madame de Beaumont aurait demandé à y visiter les archives et y aurait glissé avec adresse la pièce fausse cachée sous sa cotte. Une autre version fut adoptée. Une dame nommée, dans les actes du procès, tantôt madame de Livron, tantôt ma- dame de la Saussaye, écrivit qu'ayant été élevée au mo- nastère de la Joie d'Hennebon par sa tante, qui en était abbesse, elle lui avait entendu dire, un jour qu’on chan- geait de place les chartes du monastère : « Ne touchez pas » à celle qui vient de tomber à terre : ce sont les conve- » nances du mariage de Philippe d'Artois et de Blanche » de Bretagne. » Lorsque cette lettre eut assez fixé l'attention, un reli- gieux de l’ordre de Saint-Dominique, nommé frère Jean Aubry, fut chargé d'aller en Bretagne, et voiei com- ( 428 ) ment, à son retour, il rendit compte de son voyage « Après m'être rendu d’abord près du duc de Bretagne à » Chastonceaux, je visitai successivement les abbayes de » Prayères et d'Hennebon, fondées la première par le duc » Jean le Roux, la seconde par sa femme Blanche de » Navarre. Toutes mes recherches furent mutiles. J’allai » aussi au château de Derval, mais jy appris que toutes » les chartes en avaient été enlevées et portées dans un » monastère de Nantes. Là aussi elles avaient disparu. Je » m'en retournais done tristement quand le soir, dans un » lieu désert, un homme « de bon lignage, » tout vêtu de » noir, m'aborda, et après m'avoir fait jurer que je con- » sidérerais tout ce qui tenait à son nom et à sa per- » sonne comme révélé sous le secret de la confession, il » me remit un coffret de cuir. Dès que j’eus vu qu'il con- » tenait la charte du roi Philippe , je m’agenouillai en le- » vant les mains vers le ciel et j'entonnai le Te Deum, » baisant toujours la charte et pleurant de joie, et celui » qui me l’avait remise s’éloigna en me disant : Je pense » que celui qui l’a tenue si longtemps cachée a beaucoup à » souffrir dans l’autre monde. » Dès ce moment, par un misérable subterfuge, Robert d'Artois affirma, même par serment , qu’il tenait ce document d’un homme noir, mais dans sa pensée, cet homme noir n’était pas le mysté- rieux Breton, mais le moine lui-même. Il ajoutait : « Au > moins cette fois, on n’accusera pas mademoiselle de » Divion. » Ce fut dans l’assemblée du mois de mars 1331 (n. st.) que Robert fit donner lecture des convenances confirmées par le roi Philippe le Bel. Là se trouvait confondu dans la foule un clere qui, en les entendant lire, ne pouvait cacher son étonnement. C'était Thibaut de Meaux. Il sortit tout (122 ) ému, et, rencontrant au Pré Saint-Germain, le curé de Saint- André-des-Arts, il le prit à part : « Monsieur et madame » de Beaumont m'ont trompé, lui dit-il. Cette formule de » ratification, c’est moi qui la leur ai donnée, pensant » qu’elle devait servir au contrat de mariage de leur fils » messire Jean d'Artois. » Peu de jours s'étaient écoulés quand un arrêt déclara ces lettres nulles, et on les lacéra publiquement. Rien ne devait manquer à la honte de cette dernière tentative de Robert; car, malgré l'opposition de quelques théologiens, le patriarche de Jérusalem, maître Pierre de la Palu, qui était également de l’ordre de Saint-Dominique (1), déclara que rien n'indiquait dans l’aveu reçu en Bretagne une con- fession sacramentelle, et ordonna à frère Jean Aubry de s’ex- pliquer sans réserve. Jean Aubry, conduit dans les prisons de l’évêque de Paris, avoua que tout le récit de son voyage en Bretagne n’était qu’une fable, et que l’homme à qui il avait promis de ne jamais le nommer, n’était autre que Robert lui-même. « Si j'ai menti, ajouta-t-il, c'était pour » sauver l'honneur d'un prince que j'aimais beaucoup et » qui était issu du sang royal. Ce fut en quelque sorte le dénoument de ce trop célè- bre procès. Robert d'Artois avait réussi à fuir, mais il n’en fut de même ni de ses enfants encore jeunes, ni de sa femme qui, plus coupable que lui, expia son ambition par une longue captivité. Par un jeu bizarre de la fortune, ce fut dans ce même donjon de Château-Gaillard où l’une des (1) Pierre de la Palu qui est cité dans l'oraison funèbre d'Alexandre V comme l’une des lumières de l’université de Paris au XIV: siècle (univer- sitate Parisiensi stella lucidissima) a écrit plusieurs ouvrages. La biblio- thèque de Bâle possède deux manuscrits qui portent son nom. ( 123 ) _ filles de Mahaut avait été reléguée par un époux outragé, que Philippe de Valois fit enfermer sa sœur. D’impitoyables rigueurs s’appesantirent aussi sans dis- tinction sur tous les témoins, sur ceux qui avaient dé- posé dans la première enquête comme sur ceux qui avaient été les complices de tant de fraudes préméditées. Plusieurs ne sortirent jamais de leur prison; d’autres furent mis au pilori. Un châtiment plus sévère et plus ignominieux encore attendait Jeanne de Divion, qui avait pris la part la plus active à de si honteuses intrigues. Un bûcher se dressa près de la butte Saint-Honoré, au mar- ché aux Pourceaux, et ce fut là qu’au milieu d’une grande afluence de peuple, elle fut brûlée vive. Jeanne de Cha- rennes subit le même supplice. Cependant parmi les bourgeois et les hommes de com- munes, quelques voix protestaient contre la justice de l’arrêt solennel de bannissement et de forfaiture prononcé contre Robert. On se rappelait les termes dont Philippe de Valois lui-même s'était servi, lorsqu’en érigeant la terre de Beaumont en comté-pairie, il avait rendu un éclatant hommage à son courage , à sa prudence, à son zèle pour le bien de l’État; on s’affligeait de cette persécution dirigée contre le légitime héritier du comté d'Artois, et ce qui donnait plus de force à ces rumeurs, c’est que cette spo- lation commencée par Marigny s’achevait par les mains de Cugnières et de Behuchet, ces ministres de Philippe de Valois, non moins avides, non moins détestés. Robert d'Artois s'était au contraire toujours montré doux et con- cilant pour les bourgeois comme pour les chevaliers (1), (1) On attribuait à Robert retiré à Namur les paroles suivantes : « Je ( 424 ) et de nombreuses sympathies le suivirent sur la terre d’exil. Philippe de Valois l’y jugeait encore assez redou- table pour qu'il le fit chasser des bords de la Meuse, où il avait trouvé un asile à Sanson et à Argenteau, et Robert se déguisa, dit-on, en marchand pour se réfugier en An- gleterre. C'est ce même prince, naguère témoin de l’acte d’hom- mage d'Édouard IT à Philippe de Valois, qui excitera le roi d'Angleterre à revendiquer la couronne de France. Au banquet où les barons anglais sont réunis le jour de la fête de saint Georges, Robert paraît, faisant porter un héron devant lui. « Les dames chantent par doux devis : « Le héron »» est le plus timide des oiseaux, car il a peur de son »» ombre. C’est au héron à recevoir les vœux d'Édouard »» qui, bien que roi légitime de France, n'ose point »» en réclamer le noble héritage. » À ces mots le roi a » rougi; son cœur s’est irrité et il s’écrie : « Puisqu’on »» accuse mon courage, je voue au Dieu du paradis >» qu'avant qu’une année soit écoulée, je défierai le roi »» de Paris. » Le comte Robert l’entend, sourit et dit à » voix base : « J’ai réussi et mon héron fera naître une »» grande guerre. »» Le Vœu du héron fut le prologue des plus longues luttes qui aient illustré l’histoire de la chevalerie; ce fut aussi vers cette époque que les villes de Flandre atteigni- rent leur plus haut degré de puissance et de prospérité, et il me suffira de rappeler que leurs milices acceptèrent pour sçay comment il est du commun de France. J’ay bien des amis à Paris, quar il me pleurent li grand et li petit. [1 y a tels cent bourgeois qui me aideroient chascun de mille livres, se je voloye, » (429 ) capitaine ce fils d’un de leurs plus implacables ennemis, que d’étranges revers de fortune avaient réduit à être l’un des plus fidèles serviteurs du roi d'Angleterre et l’un des alliés les plus zélés des communes flamandes. La théorie du progrès indéfini. — Réponse à quelques objections; par J.-J. Thonissen, correspondant de l’Aca- démie. Dans quelques revues étrangères, mes Considérations sur la théorie du progrès indéfini, que l’Académie a dai- gné publier dans le recueil de ses Mémoires, ont été l'objet de critiques qui, tout en restant toujours bienveil- lantes pour l’auteur, n’en dénotent pas moins, à l’égard des idées sur lesquelles je me fonde, une sorte d’hostilité mêlée d’aigreur et d'inquiétude (1). Si ces critiques ne s’adressaient qu'à l’écrivamn dont le nom figure à la tête du Mémoire, je manquerais à toutes les convenances en venant entretenir la classe des lettres d’un débat où mon amour-propre serait seul en cause. Mais comme la contro- verse se présente avec des proportions beaucoup plus vastes ; comme les objections qu’on m’oppose ne tendent à rien moins qu’à faire ranger parmi les chimères de lor- gueil humain la grande loi historique du progrès continu de humanité, je crois qu’il m'est permis de prendre, dans cette enceinte, la défense d’une doctrine qui se présente (1) Je puis citer comme exemple la prétendue réfutation publiée par la Bibliographie catholique de Paris. (Novembre 1860.) (1%) en première ligne dans tous les problèmes que soulève la * philosophie de l'histoire. Avant d'aborder les reproches de fatalisme et d'impiété qu'on adresse au système considéré dans son ensemble, je me permettrai de répondre à quelques objections secon- daires et pour ainsi dire de détail, à l’aide desquelles on veut enlever à certains faits la portée que je leur attribue dans l'histoire de la civilisation européenne. Je crois avoir prouvé, à la dernière évidence, que les législateurs , les philosophes, les historiens et les poëtes de l'Inde, de l'Égypte, de la Grèce et de Rome n’ont jamais eu le pressentiment d'un progrès continu, dirigé par la raison , éclairé par la science, réalisé par le travail, dans le mouvement Imcessant des individus et des peuples. En Égypte et, plus encore, dans les contrées mystérieuses de l'Asie méridionale , on érigeait en dogme religieux et poli- - tique l’immobilité des institutions , des lois, des idées et des mœurs. À Athènes et à Rome, les intelligences les plus vigoureuses n'avaient rien aperçu au delà de ce mou- vement circulaire et fatal des choses humaines, si bien exprimé par Scipion, s'écriant à l'aspect des flammes qui dévoraient Carthage : « Les villes, les peuples, tous les em- » pires croissent et meurent comme les hommes (1).» A Rome surtout, les penseurs d'élite étaient tellement éloi- gnés de s'attendre à un avenir meïlleur, que, pendant trois siècles, leurs cris de détresse retentirent, comme une pro- testation de la conscience humaine , au milieu des orgies immondes devenues la vie journalière des maitres de luni- vers (2). (1) Polybe, Æist., 1 XXXIX , c. III. (2) Aux autorités citées dans mon Mémoire, j'ajouterai le passage sui- ondes. 5 te ares sabre. S , écho ire Te LT ia DEN RENE PT ( #27 ) Mais si les habitants de l’Inde et de l'Égypte, célébrant à l’envi les avantages de l’immobilité, repoussaient avec horreur les lumières et les coutumes des peuples étran- gers; si les maîtres de l’Académie, du Lycée et du Portique croyaient avoir trouvé le dernier mot de l’histoire dans une rotation monotone ordonnée par la fatalité; si les phi- losophes et les poëtes des bords du Tibre, égarés par l'ignorance et l’orgueil de leur siècle, subordonnaient l'avenir du monde aux idées, aux passions et aux vices des habitants de la ville éternelle; en d’autres termes, si le progrès, systématiquement repoussé en Orient, mé- connu et nié en Occident, ne trouva pas, dans le monde ancien, un philosophe pour déterminer ses conditions, un historien pour suivre ses traces, un poëte pour chanter ses merveilles, s’ensuit-il nécessairement que toutes les civi- lisations de l'Orient et de l'Occident aient été stationnaires ou rétrogrades, depuis l'origine des temps historiques jus- qu’à la chute de l'empire romain ? En aucune manière. Que de fois l’histoire n’a-t-elle pas donné le démenti le plus éclatant aux erreurs, aux préjugés, aux craintes et aux espérances des hommes d’État, des légisiateurs, des phi- losophes et des poëtes! Pour ne citer qu’un exemple, le christianisme avait-il perdu sa mission sublime de régé-- nérer l'Europe, parce que les sujets de Dioclétien , inca- pables de sonder les mystères de l'avenir, suspendaient aux autels de leurs dieux des médailles portant l'effigie de l'empereur au milieu des attributs du triomphe, avec cette vant de Sénèque : … Sive fato quodam , cujus maligna perpetuaque in omnibus rebus lex est, ut ad summum perducta, rursus ad infimum , velocius quidem quam ascenderant, relabantur. (S. R. Controversiae, LT, Praef. , p. 58 ; édit. de Paris, 1626, in-fclio.) ( 128 ) orgueilleuse légende : Nomine christianorum deleto ? Cer- tains événements, pour être exactement appréciés, ont be- soin d’être rapprochés de leurs conséquences, et celles-ci ne se manifestent pas toujours au gré de l’impatience des contemporains. Plus d’une fois, il à fallu des siècles pour que les derniers résultats des faits et des doctrines apparus- sent dans la vie des nations. Le christianisme n’allait pas périr, parce que, de l’une à l’autre extrémité de l'empire, les pontifes du paganisme célébraient ses funérailles. Le progrès de l'humanité n’était pas un vain mot, parce que Juvénal, Tacite et Sénèque annonçaient la dissolution pro- chaine d’une société minée par la luxure , le servilisme et la làcheté de leurs concitoyens. Autre chose est l'événement considéré en lui-même, autre chose le sens et la portée que lui attribue la génération qui le voit surgir dans l’his- toire. Les publicistes qui combattent mes idées oublient cette distinction si simple, si facile, si élémentaire dans les études historiques. On s'empare des pages dans lesquelles j'ai rappelé les mille cris de détresse qui s’échappaient des profondeurs de la société romaine; on y ajoute ce que j'ai dit de ce long travail de décomposition qui caractérise le règne des successeurs d’Auguste; on y mêle les réflexions que j'ai faites sur le côté incomplet et faux de la civilisa- tion païenne ; et l’on arrive ainsi à prétendre que, selon mes propres aveux, la loi du progrès n’a pas trouvé son application pendant la longue série des siècles antérieurs au christianisme. Si cette objection était fondée, le système que je défends manquerait évidemment de base; car, divisant l’histoire en*deux parties inégales, j'aurais commis l’étrange incon- séquence de mier le progrès dans la période la plus an- ( 429 :) cienne et la plus longue, pour l’admettre dans la période la plus courte et ja plus récente. Heureusement la contradiction n'existe que dans les idées incohérentes de mes adversaires. Sans doute, sous plus d’un rapport, la civilisation gréco-romaine était fausse, incomplète, immorale même, et l’on ne m'’accusera pas d’avoir ménagé les couleurs dans la peinture des vices et _des dégradations de la société païenne. Sans doute encore, à Athènes et à Rome, les intelligences les plus élevées eroyaient que la civilisation était condamnée à subir éter- nellement les mêmes alternatives de progrès et de déca- dence. Mais 1e me demande en vain comment un esprit sensé puisse s'emparer de ces faits incontestables, pour en conclure que la loi du développement historique de la civilisation ne fit pas sentir son influence dans le monde ancien! Tout homme connaissant, même très-superficiel- lement, l’histoire de lantiquité, possède le moyen de mettre un terme à cette partie de la controverse. Qu'il place les contemporains de Cécrops et de Cadmus à côté de Platon, d’Aristote, de Périclès, de Pindare, de Sopho- cle, d'Euripide et de Démosthènes. Qu'il compare le pâtre encore sauvage du Latium à Cicéron, à Virgile, à Horace, à Sénèque , à Marc-Aurèle. Qu'il se figure, d’un côté, les huttes et les idoles grossières des Hellènes primiüfs; de l’autre, les temples de l’Acropole d'Athènes remplis des chefs-d’'œuvre immortels de Praxitèle et de Phidias. Qu'il procède de la même manière sur les bords du Tibre et se représente tour à tour, ici la bourgade chétive qu’un chef d'aventuriers bâtit sur les rives d’un fleuve ignoré, là cette ville immense et somptueuse, reine du monde, centre de la vie, de la puissance et des lumières de Punivers." Il pourra se dispenser de toute recherche ultérieure! Ces QMC SÉRIE, TOME XL. 9 ( 150 ) simples rapprochements suffiront pour lui prouver que, même au sein d’une civilisation incontestablement incom- plète, un progrès immense s'était accompli sur les deux rivages de l’Adriatique. Qu'importent, au point de vue des destinées futures de l'humanité, les cris d'alarme poussés par Cicéron, Lucrèce, Horace, Juvénal, Tacite et Sénèque? Philoso- phes, historiens, orateurs, poëtes, ils se sont rencontrés pour annoncer la décadence de Rome et l'impuissance finale de la civilisation païenne. Mais ce qu'ils ne savaient pas, ce qu'un publiciste moderne ne peut ignorer sans encourir le double reproche d’aveuglement et d’ignorance, c’est que la décomposition religieuse, politique et sociale dont ils dénoncçaient les ravages était le début mystérieux d’une civilisation nouvelle : civilisation plus pure, plus généreuse, plus puissante et plus vraie que celle de Rome à l'apogée de sa splendeur et de sa puissance. Si le doute était permis aux contemporains d'Auguste, de Claude et d’Adrien, il ne l’est plus à ceux qui assument le rôle de critique au dix-neuvième siècle. Ce qu’il y avait de faux, d'incomplet, de précaire, d'immoral et de cruel dans le monde romain, devait disparaître au milieu d'un boule- versement amené par la justice de Dieu; ce qu'il y avait de beau, de bon, de pur, de grand, de durable et de vraï- ment utile, était appelé à se perpétuer sous une forme nouvelle. Sur les débris de l'empire des Césars, l'élément latin et l'élément germanique allaient se combiner avec l'élément chrétien, afin de remplacer la civilisation gréco- romaine par la civilisation immensément supérieure de l'Europe moderne. Ici encore, un simple rapprochement suffit pour mettre en évidence l’incomparable grandeur des progrès accomplis dans toutes les directions, pendant les a, a le Sr — te cames tons us us mindee: SAP au TE + ( 151 ) siècles laborieux qui suivirent l'accomplissement des tristes prophéties des philosophes de la Rome impériale. Qu'on place, d’un côté, l’Europe du temps de Constantin, de Pautre , l'Europe du quinzième siècle, et toutes les objec- tions tomberont aussitôt comme de vains et Impuissants sophismes (1)! | Mais revenons à la civilisation païenne, et, tout en res- pectant les limites naturelles d’un aperçu sommaire, de- mandons-nous de nouveau s’il est possible de mier le mouvement ascendant de la civilisation dans le monde ancien. Il semble, en effet, que cette vérité historique, devenue un axiome dans les écoles de l'Allemagne et de l'Italie, éprouve encore le besoin d’être démontrée dans quelques régions de la patrie de Pascal et de Bossuet. L'Inde se montre avec sa civilisation immobile, ses castes dérivant d’une inégalité de nature, ses sept espèces d’esclavage, son despotisme abrutissant, son peuple inerte et lâche, ses maximes cruelles et antisociales fondées sur le dogme avilissant de l’impureté des classes inférieures. Méprisant un monde où elle ne voyait que des «illusions » ; cherchant la perfection suprême dans le repos absolu; trouvant le dernier mot des récompenses divines dans lanéantissement de la personnalité humaine, la race brahmanique confondait ie bonheur avec l’indolence, le travail avec la douleur, la sagesse avec l’égoïsme. Intro- duisant une inégalité monstrueuse jusqu'au sein de la famille, le législateur divin de la presqu’ile du Gange, hésriant à admettre la femme au nombre des créatures humaines, s’écriait avec mépris : « Manou donne en par- (1) J'ai fait ce parallèle au chapitre IT de mon Mémoire. (132) > lage aux femmes... la concupiscence, la colère, les » mauvais penchants, le désir de faire du mal et la per- » versité (4). » | L'Egypte conserve les castes; mais, devenues une simt- ple institution politique à laquelle la volonté du Créateur n'a point participé, la division qu'elles maintiennent est moins profonde, moins inflexible. La femme, rétablie dans sa dignité native, y figure comme l'égale de l’homme dans les cérémonies civiles et religieuses. La polygamie , cette lèpre de la famille orientale, y est à peu près inconnne. Le respect de la vie humaine s'y manifeste dans les lois qui rendent obligatoire la défense d'autrui et punissent le meurtre de l'eselave à l'égal de celui de l'homme libre. On n'y trouve plus ce dégoüt de l'existence , cette aspiration incessante vers le repos absolu, cet amour stupide du néant, qui énervent et dégradent la race brahmanique. De mème que l'Inde, l'Égypte proclame les avantages de l'isolement et de l'immobilité ; mais , possédant le pressen- timent de la force irrésistible de la science. elle invente ce mythe sublime de Mercure (la raison) arrachant les nerfs de Typhon (principe du mal), pour en faire des cordes de la lyre divine (2). La preuve d'une civilisation supérieure à celle de l'Inde apparait jusque dans les rumes des édifices majestueux qui couvraient la vallée du Nil. Un culte abject x était , à la vérité, le partage des masses; mais, du moins, l'élite des prêtres recevait, sous le voile de l'initiation , des idées plus saines sur l'unité de Dieu et (1) Lois de Manou , VX, 17, trad. de Loiïseleur-Deslongchamps, p. 214, édit. Migne. (2; Plutarque , De Is. et Osir. €. LIII et LIV ; trad. d’Amyot, pp.651 et suiv.; édit. de 1575. | ( 153 ) l’immortalité de l'âme. Si Pythagore et Platon s'étaient contentés de visiter les temples des bords du Gange, ils n’y auraient pas trouvé les enseignements qu'ils recueilli- rent dans les sanctuaires de Thèbes et de Memphis (1). De l'Inde à l'Égypte, il y a donc un sensible progrès dans le développement de la civilisation générale. Mais ce progrès devient bien plus considérable, bien plus évident, _ lorsque, jetant un regard sur le rivage opposé de la Médi- terranée, on contemple l’admirable tableau des institu- tions, des luttes et des travaux de la race hellénique. L’esclavage existe encore dans les fières et turbulentes cités de la Grèce, un esprit d’injustice et d’orgueil y pré- side aux rapports avec les peuples étrangers; mais on n’y trouve plus ni le despotisme théocratique, ni le régime abrutissant des castes. La vie démocratique y fait surgir tout un peuple de héros, de législateurs, de philosophes, d’historiens , de poëtes, de sculpteurs et d'architectes qui feront éternellement l’orgueil de l’humanité! A la place de ces troupeaux humains qui suivent aveuglément l’impul- sion du maître sur les bords du Gange et du Nil, on aper- çoit de toutes parts une surabondance de vie et d'idées, de courage et de travail, d’ardeur guerrière et de vertus civi- ques. La triple couronne de la philosophie, de la poésie et de l’art brille au front de toute une série de générations, admirablement douées de l’instinct du beau dans tous les genres. Aujourd’hui encore, en dehors du cerele des idées religieuses , l'Europe moderne découvre le génie des Grecs au début de toutes les carrières où s’agite l’infatigable génie de ses habitants. (1) Voyez à l’Appendice de mon Mémoire (litt. €}, la dissertation rela- tive à la civilisation égyptienne. ( 454 ) Les Romains, qui recueillirent ce noble héritage, n'en firent pas un dépôt stérile entre les mains des citovens de la ville éternelle. Ils v ajoutèrent les éléments qui man- quaient au génie des Grecs : le sentiment de l'unité} la puissance d’assimilation et toutes les forces sociales que procure une législation savante. S'ils se contentent de con- server les lecons et de marcher sur les traces des vaincus dans le domaine des lettres et des arts, ils les dépassent de cent coudées sur le vaste terrain de la jurisprudence, où leurs magistrats déploient toutes les ressources d'une féconde et puissante originalité. Cruels, avides, implaca- bles dans leurs premiers rapports avec les nations étran- gères , ils finissent par substituer une politique de cohésion et de sympathie à la politique de division et de désordre qui caractérise l'histoire des compatriotes d'Aristote: Ils unissent l'Afrique, l'Asie, la Sicile, l'Italie, la Grèce, l'Espagne , la Gaule et la Grande-Bretagne, par le triple lien de l'unité d'administration, de langue et de législa- tion. Ils répandent les germes de la culture intellectuelle, depuis les colonnes d'Hercule jusqu'aux forèts de la Ger- manie, jusqu'au pied des montagnes de l'Écosse. Affran- chis de l'esprit étroit qui régnait dans les petites et tur- bulentes républiques de la Hellade, leurs proconsuls, marchant à la suite des légions, réunissent sous un même sceptre tous les peuples civilisés de l'Orient et de l'Occi- dent , œuvre immense dont la grandeur faisait tressaillir le génie de Bossuet! Tandis que les Grecs , malgré l'éclat de leur civilisation, font cesser le règne du droit et dela justice aux limites étroites de leurs cités, les Romains, pressen- tant en quelque sorte les merveilles de la politique chré- tienne, proclament ces maximes fécondes : « Le monde » que nous voyons n'est qu'un. Nous sommes les mem- ( 435 ) » bres de ce grand corps. La nature nous à rendus tous parents en nous engendrant d’une même matière et » pour une même fin. Elle nous a inspiré un amour mu- tuel et nous a tous rendus sociables (1). » Par la com- munauté de vie et d'intérêts, par l’extension successive du droit de cité, par les innombrables rapports établis sous la protection de leurs armes, par les routes indes- _tructibles partant du Capitole pour se prolonger jusqu'aux confins de l’Empire, ils forcent les Grecs eux-mêmes à s’écrier dans un enthousiasme sincère : « Le peuple de » Rome est le peuple de l’univers (2)! » Avons-nous eu tort de dire que, si l’on passe de l’Inde à l'Égypte, de l'Égypte à la Grèce, de la Grèce à l'Italie, on remarque un incontestable progrès dans les institu- tions, les lois et les idées générales, tout comme on remar- que un autre progrès, bien plus considérable encore, quand ÿ Ÿ (1) Senecæ Epist. ad Lucilium , ep. XOV, coll. Nisard, p. 779. —Je sais, et j'ai eu soin de le faire remarquer, que ces maximes sont loin d’avoir, dans la bouche d’un Romain, la portée qu’elles auraient sous la plume d’un publiciste moderne; mais, telles qu'elles sont, elles dénotent un incontes- table progrès sur les idées intolérantes et égoistes qui guidaient les Grecs dans leurs rapports avec les nations étrangères. (2) Expression du grammairien Athénée : Gxouuyéyys d'uoy, liv. I, chap. XXXVI, p. 44, édit. Dindorff (Leipzig, 1827). On comprendra sans peine que nous ayons dù nous borner ici à l'indication de quelques faits essentiels. Une démonstration complète est d’ailleurs inutile. Quel est le savant sérieux qui nie aujourd'hui le mouvement ascendant de la civilisa- tion dans le monde ancien ? Malgré l'épouvantable corruption qui distingue le règne des successeurs d’Auguste, il est permis de dire que les mœurs elles-mêmes étaient moins hideuses à Rome qu’en Grèce ; car, chez les Romains, on ne trouvait pas, dans toutes les classes de la société, ces goûts infàmes et dépravés dont les philosophes grecs prennent si chaleureusement la défense dans les dialogues de Lucien. (136) on place en regard les derniers siècles de l'antiquité et les premiers sièeles de l'ère moderne? Éclairé par une expé- rience trente fois séculaire, avons-nous eu tort d'attendre de la bonté de Dieu, de la puissance de la vérité, de la force de la science et de l’énergie des peuples, le déve- loppement des germes d’une civilisation supérieure, dissé- minés au milieu des erreurs et des vices qui règnent encore sur la majeure partie du globe? Avons-nous eu tort de porter nos regards plus haut et plus loin que les incohé- rences et les doutes de l'heure présente ? Qu'on renonce done à ces fades plaisanteries sur l’ab- sence d’une définition précise du progrès indéfini; car le progrès est évident , et sa définition n’est ni plus néces- saire, ni plus facile à fournir que celle de la civilisation elle-même (1). Qu'on ne produise plus ces objections ba- nales qui toutes découlent, plus ou moins directement, de la négation du mouvement ascendant de la civilisation dans le monde ancien. Qu'on s’épargne la peine de signaler tous ces foyers de lumière et d'art qui se sont successivement éteints sur la route des siècles. Qu'on se dispense d’invo- quer les noms de Babylone, de Ninive, de Thèbes, de Pal- myre, de Carthage et de tant d’autres capitales splendides (1) Qu'est-ce que la civilisation selon le Dictionnaire de l Académie française? C'est l’état de ce qui est civilisé. Aussi longtemps qu'on en restera là, il sera difficile de donner du progrès, qui n’est que le dévelop- pement de la civilisation , une définition précise , rigoureuse, philosophi- que. Ce n’est, d’ailleurs , qu’une querelle de mots. Le progrès indéfini est celui dont les bornes ne sont point et ne peuvent point être déterminées à priori. Toutes les sciences morales et politiques présentent le même inconvé- nient. L'économie politique, par exemple, attend encore une définition admise par tous ses adeptes. PRET EST SL nait sil sm es CCE cer car db de bo me (137) qui ne sont plus que des monceaux de décombres. Qu'on ne cherche plus un argument contre le progrès dans les ténèbres qui s'étendent encore sur la majeure partie du globe. Qu'on cesse de rappeler que tous les peuples de l'antiquité ont eu leurs périodes de croissance, de matu- rité et de décadence. Qui a jamais songé à révoquer en doute les alternatives de grandeur et de ruine qui se montrent à toutes les pages de l’histoire ? Où est l’homme sensé qui ne sache que, malgré les six mille années de tra- vaux et d'enseignements qui composent nos annales, le règne de l’erreur, de lignorance et de la barbarie n’est pas près de disparaître de la terre? Tout ce que Je prétends, c’est que, chaque fois qu'une civilisation a disparu dans le passé, elle à été remplacée, sur les lieux mêmes ou ail- leurs, par une civilisation plus belle, plus large, plus puis- sante et par conséquent moins imparfaite (1). Tout ce que j'affirme, c’est qu'il se passe dans le monde des idées quel- que chose d’analogue à cet imcessant travail de démolition et de reconstruction, qui s’accomplit dans les grandes capi- tales où affluent les richesses des peuples. Lorsque les Romains couvrirent le Forum de monuments tellement nombreux que l’archéologue moderne trouve à peine, au milieu des ruines, un espace où 1l puisse placer l'aire des temples et des basiliques cités par les historiens , ils com- menceèrent par démolir les huttes où croupissaient les des- cendants des Sabins. Telle est souvent, dans une sphère plus élevée, l’œuvre du temps au milieu des révolutions qui changent la face des empires! Je crois en avoir dit assez pour replacer les faits essen- (1) Je me suis formellement expliqué à ce sujet au début du troisième chapitre de mon Mémoire. (138 ) tels sous leur véritable jour. J'arrive aux accusations de fatalisme et d'impiété, qu'on dirige contre la théorie du progrès indéfini envisagée dans son ensemble. Iei surtout il importe d'éviter les malentendus et de placer le débat sur son véritable terrain. Le reproche de fatalisme serait fondé si, à l'exemple de Schelling et de Hegel, je faisais de l'histoire une révélation progressive et nécessaire de l’ABSOLU; si je transformais les individus et les peuples en acteurs passifs d’un drame dont toutes les scènes seraient le produit d’une impulsion fatale; si je cherchais les destinées de l'humanité dans les évolu- tions Imévitables de l'esprit universel ; si j'acceptais comme vraie la ridicule et odieuse conception d’un Dieu progressif; en un mot, si je me faisais le défenseur de l'hypothèse pan- théiste que j'a1 formellement répudiée. Le reproche serait fondé encore si, tout en rejetant le panthéisme, j'avais prétendu que , dans tous les temps et dans tous les lieux, chaque génération, à mesure qu'elle arrive sur la scène du monde, possède la certitude d’être plus éclairée, plus puissante et plus riche que les innom- brables générations qui lui ont péniblement frayé la route; si j'avais dit que le travail et l'étude sont des efforts super- flus, dans un milieu social combiné de telle manière que le progrès y devienne toujours inévitable; en d'autres termes, si javais cédé à l'esprit de système au point de dénaturer l'histoire de tous les peuples de l'Orient et de l'Occident. Mais ce reproche devient absurde lorsque, rappelant lui-même toutes les alternatives de grandeur et de déca- dence qui remplissent les annales de la plupart des na- tions, l'historien se borne à dire que, selon les décrets de la Providence, les nobles fruits des vertus et du travail (139) de l’homme ne sont jamais entièrement perdus pour ses frères ; lorsqu'il s'efforce de prouver qu’il existe au sein de l’humanité une sorte de dépôt intellectuel qui s’accroît d'âge en âge et se transmet à travers toutes les vicissi- tudes; lorsque, remontant jusqu'aux sources de la civili- sation du monde moderne, il se contente de formuler les propositions suivantes : « L'homme, être intelligent et libre, peut abuser des dons du Créateur et se révolter contre ses lois; mais les erreurs de son intelligence et les écarts de sa volonté, de même que la corruption de son cœur, trouvent nécessairement des limites dans les exigences de la nature et les décrets inflexibles de la justice divine. Une nation tout entière peut aussi, dans une certaine mesure, répudier la vertu, glorifier l’er- reur et fouler aux pieds les prescriptions de la loi natu- relle; elle peut perdre de vue ce devoir providentiel du travail et du sacrifice, dont la pratique conduit les peu- ples à des destinées supérieures : mais la torpeur, la paresse ou les iniquités de cette nation ne sauraient déranger le plan divin, ni détourner l'humanité de la perfection à laquelle elle aspire. L’individu expie ses fautes et ses crimes dans sa personne et dans sa famille; les peuples expient leurs faiblesses et leurs iniquités par des siècles d’abaissement, de misère et d’impuissanee ; mais la destinée nécessaire de notre race ne s’accomplit pas moins sous les regards de Dieu, qui ramène l’hu- manité dans ses voies et ne permet jamais au mal de franchir les bornes placées par sa providence éternelle. Le progrès, qui se manifeste toujours sur un point du globe, se réalise à l’aide du travail, du courage, du dé- vouement , de la science et de la vertu. La dégradation, la souffrance et l'anarchie sont les lots des peuples qui ( 140 ) » s’endorment et méconnaissent les lois de la nature (1). » Où est iei le fatalisme qui énerve et corrompt les popu- lations musulmanes? Est-ce professer le fatalisme que de dire aux peuples modernes : « Soyez vertueux, accomplis- » sez la loi du travail, fouillez le sol, transformez la ma- » tière et cultivez la science, si vous ne voulez pas que » le progrès inévitable de la civilisation se manifeste ail- » leurs, à votre détriment et à votre honte (2)? » En vérité, on a peine à en croire ses yeux! Affirmer que Dieu intervient dans le règlement des choses humai- nes; chercher et trouver, dans les événements accomplis depuis l’origine des temps historiques, la preuve que la Providence veille à la conservation des conquêtes légitimes de l’esprit humain ; proclamer que la recherche de la per- fection est une loi du monde politique et littéraire, comme elle est une loi du monde religieux et moral : tout cela, c’est proclamer le fatalisme! A ce compte, Bossuet et, après lui, tous les chrétiens et tous les rationalistes de quelque valeur exaltent le fatalisme, quand ils affirment que les révolutions du monde ancien étaient une prépara- tion providentielle à l'établissement du christianisme. Si l'aigle de Meaux apparaissait aujourd’hui sur la seène, il trouverait des critiques qui lui reprocheraient d’avoir mé- connu la liberté des individus et des peuples, lorsque, parvenu au terme de son admirable Discours sur l’histoire universelle, 11 s'écrie, dans ce magnifique langage dont il possédait le secret : « Le long enchainement des causes » particulières qui font et défont les empires dépend des (1) Voyez le chapitre IIT de mon Mémoire, p. 202 de la 2e édit. (2) Ibid. ( 441 ) » ordres secrets de la divine Providence. Dieu tient du » plus haut des cieux les rênes de tous les royaumes. Il » a tous les cœurs en sa main. Tantôt 1l retient les pas- » sions, tantôt il leur lâche la bride; et par là il remue > tout le genre humain. Il exerce ses redoutables juge- » ments, selon les règles de sa justice toujours infatlhible. » C’est lui qui prépare les effets dans les causes les plus » éloignées, et qui frappe ces grands coups dont le contre- » coup porte si loin. Ne parlons plus de hasard mi de » fortune; ou parlons-en seulement comme d'un mot » dont nous couvrons notre ignorance... Il n’y a pot » de puissance humaine qui ne serve malgré elle à d’au- » tres desseins que les siens. Dieu seul sait tout réduire » à sa volonté. C’est pourquoi tout est surprenant, à ne » regarder que les causes particulières, et néanmoins tout » s’avance avec une suite réglée (1). » Il serait puéril d’insister davantage sur linanité du pre- nier reproche. J'ai hâte d'aborder le second. S'il fallait en croire la critique, 1l y aurait, sous un autre rapport encore, de malheureuses affinités entre ma théo- rie et certaines rêveries extravagantes du panthéisme con- temporain. J'aurais confondu le progrès philosophique avec le progrès chrétien, le progrès littéraire avec le progrès moral. J’aurais oublié que, si nous savons plus de choses, nous n’en sommes pas plus vertueux que nos ancêtres. Il existe, en effet, une école allemande qui, transpor- tant la théorie du progrès indéfini sur le terrain des reli- gions, enseigne que tous les cultes sont des créations de l'esprit humain, des évolutions successives et toujours (14) Discours, chap. final. ( 142 ) plus brillantes de la vie universelle. Fétichisme, natura- lisme, polythéisme, monothéisme, christianisme : telles ont été les phases de cet épanouissement continu de la raison , de l’idée, de l'esprit universel, en attendant que l'humanité, qui ne possède jamais la vérité tout entière, la vérité absolue, fasse jaillir de son inépuisable sponta- néité des formes religieuses toujours moins imparfaites. Mais où donc ar-je écrit une phrase , une ligne, un mot sur lequel on puisse asseoir cette accusation si grave? Où ai-je pactisé avec les disciples de ces philosophes d’outre- Rhin , qui, sous prétexte de nous faire marcher de progrès en progrès, de clartés en clartés, aboutissent, en plein dix-neuvième siècle, au dogme brahmanique de la mé- tempsycose ? N’ar-je pas dit et prouvé que, si l’on consulte sans prévention les annales du genre humain, c’est le mo- nothéisme et non le fétichisme qu'on découvre dans le culte religieux des premières familles? N’ai-je pas eu soim de constater que le fétichisme et toutes les formes du polythéisme, examinés à la lumière de l’histoire, sont in- contestablement, au lieu d’un progrès de la raison, une corruption de la foi primordiale ? J'ai consacré un chapitre spécial à l’examen de l'étrange progrès religieux célébré par Schelling, par Hegel et par tous leurs disciples d’au delà et d’en deçà du Rhin. Jai examiné séparément les progrès réellement accomplis dans la société civile ët les progrès prétendument accom- plis dans le domaine des idées religieuses. J’ai terminé mes recherches par cette phrase significative : « Tandis » que l’histoire des institutions civiles est celle de leurs » progrès, l’histoire des religions (en dehors du christia- » nisme) est celle de leur décadence. » Et cependant on m’accuse de ne pas avoir assez nettement distingué entre ES (445 ) le progrès religieux et le progrès philosophique, politique et littéraire ! Il n’y à pas plus d'équité, plus de justice, dans le grief relatif à la confusion du développement scientifique et du développement moral. Après avoir énuméré les brillantes conquêtes du monde moderne, je me suis attaché à prou- ver que si, au milieu de ces incontestables progrès, on aperçoit le désordre à côté de l’harmonie, l'ombre à côté de la lumière, le désespoir à côté de l’espérance, cette situation anormale, si pleine de périls de toute nature, doit être uniquement attribuée à l’affaiblissement des idées religieuses et morales dans toutes les classes de la société. J'ai prouvé que, si l’on veut se débarrasser des germes d’anarchie qui fermentent dans toutes les capitales, si l’on tient à voir disparaître les plaies qui se cachent sous les vêtements splendides de l’industrie et de la science , il faut mettre un terme à la corruption morale, laquelle, ai-je dit, n’est pas incompatible avec le progrès scientifique et litté- raire (1). Est-ce assez clair, assez formel, assez explicite ? En terminant, qu'il me soit permis de répéter que le débat ne se réduit pas aux minces proportions d’une que- relle littéraire. En m’efforçant de concilier avec les dogmes catholiques la théorie du progrès indéfini samement en- tendue, je me suis proposé un but bien plus élevé que la satisfaction d’un puéril amour-propre. Il s’agit de l’un des problèmes les plus importants de la philosophie de Fhis- toire. Il s’agit d’une doctrine consolante et glorieuse pour l'humanité. Citoyen d’un pays libre, j’oppose les annales du genre humain à ceux qui, rêvant le retour d’un passé (1) Première édition , p. 145 ; deuxième édition , p. 219. ( 144 ) à Jamais évanoui, se croient assez forts pour faire reculer les peuples les plus civilisés de l’Europe. Chrétien , je pro- teste, dans la région sereine de la science, contre les folles et dangereuses tentatives de ces publicistes qui, pour me servir d’une expression de Balmès, donnent à chaque pro- grès le caractère d’une victoire remportée sur le christia- nisme. L'ordre du jour étant épuisé, le directeur remercie ses confrères du sympathique concours qu'ils n’ont cessé de lui accorder, et cède le fauteuil au directeur pour l’année 1861, M. De Ram. Celui-ci invite le nouveau vice-directeur, M. De Decker, à venir prendre place au bureau, et pro- pose à l'assemblée de voter des remerciments au directeur sortant. De vifs et unanimes applaudissements accueillent celte proposition. (14) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 10 janvier 18061. M. Baron, directeur. M. QuerTeLeT, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, De Keyzer, F.Fétis, G. Geefs, Madou, Navez, Van Hasselt, Jos. Geefs, Érin Corr, Partoes, Ed. Fétis, De Busscher, Portaels, membres ; Calamatta, associé; Bosselet, Alph. Balat et Demanet, correspondants. M. Kervyn de Lettenhove, membre de la classe des let- tres, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. M. Alvin fait hommage d’une brochure intitulée : Coup d'œil sur la situation des beaux-arts en Belgique, qu'il vient de publier à l’occasion de la dernière exposition gé- nérale. — Remerciments. — M. Génard exprime ses regrets de ce que le mauvais temps n’ait pas permis jusqu'à ce jour de photographier le triptyque de l’église Saint-Gommaire, de Lierre, sur 2e SÉRIE, TOME XI. 10 ( 146 ) lequel il a fait une notice insérée dans le bulletin de la séance précédente; il s’empressera d’en faire parvenir le plus tôt possible un exemplaire pour servir de modèle à la lithographie que l’Académie se propose de faire jomdre à sa notice. Concours quinquennal pour la gravure en taille-douce. La classe des beaux-arts avait ouvert un concours en faveur de la meilleure gravure en taille-douce exécutée en Belgique pendant l’espace de cinq ans. Cette période quinquennale avait pris cours le 4° janvier 1856 pour finir au 51 décembre 1860. Pour être admis à concourir, les artistes graveurs de- vaient être Belges ou naturalisés. Leur planche devait reproduire l'œuvre d’un peintre ou d’un sculpteur belge exécutée pendant le dix-neuvième siècle, et 1ls étaient tenus d’en adresser à l’Académie, avant le terme fatal, un exemplaire destiné à rester déposé dans les archives de la compagnie. Une médaille d’or de la valeur de six cents francs sera décernée à l’auteur de la gravure couronnée. L'Académie à reçu trois gravures : 4° Jeanne la Folle, par M. Bal, d’après un tableau de M. Gallait; 2 La Chasse au rat, par M.Meunier, d’après un tableau de M. Madou; 5° L’Archet brisé, par M. Vandersypen , d’après un ta- bleau de M. Gallait. DE 2 ( 147 ) Les juges du concours sont MM. Navez, De Keyzer, Calamatta, Erin Corr, Braemt, Alvim et De Busscher. ÉLECTIONS. La classe avait à nommer son directeur pour 1862; elle _a désigné à cet effet M. André Van Hasselt, qui est venu prendre place au bureau. La classe a confirmé ensuite, par acclamation, M. Braemt dans ses fonctions de membre de la commission adminis- trative de l’Académie pendant l’année 1861. — M. le secrétaire perpétuel propose de voter des re- merciments à M. Baron, directeur sortant, pour les soins qu'il a donnés aux intérêts de la classe pendant l’année qui vient de s’écouler. Cette proposition est accueillie par des applaudissements auxquels M. Baron répond en expri- mant sa gratitude. M. le secrétaire perpétuel fait connaître ensuite que l’état de maladie de M. Suys, directeur pour 1861, l’a empêché d'assister à la séance, et qu’il est chargé de transmettre, à cette occasion, ses regrets. Des marques de sympathie témoignent également de l'estime et de l’af- fection que les membres de la classe portent à leur hono- rable doyen d’àge. CAISSE CENTRALE DES ARTISTES BELGES. Il est rendu compte de l’état financier de la Caisse des artistes belges que la classe à fondée et dont elle admi- ( 148 ) nistre les intérêts. D’après un rapport verbal de M. Braemt, trésorier de linstitution, les fonds s'élèvent actuellement à plus de 80,000 franes, et la recette de l’année dernière monte de 10,000 à 11,000 francs. Sur la proposition de M. Fétis, secrétaire de la Caisse centrale, il est accordé un subside à la veuve d’un artiste récemment décédé. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Observations des phénomènes périodiques faites pendant l’année 1859 et recueillies par M. Ad. Quetelet. Bruxelles, 1861 ; in-4°. Bulletin du conseil supérieur d'agriculture du royaume de Belgique, tome XIII, 2° partie (situation de l’agriculture, année 1859). Bruxelles, 1861 ; 1 vol. in-4°. Recueil des ordonnances de la principauté de Liége, 3e série, 1684-1794. Second volume, contenant les ordon- nances du 10 mars 1744 au 5 juin 1794; par M. L. Polain. Bruxelles , 1860 ; 1 vol. in-fol. Compte rendu des travaux du conseil de salubrité publique de la province de Liége pendant l’année 1860 , présenté à la séance du 8 janvier 1861 ; par M. A. Spring. Liége, 1861 ; in-8°. Exposé de la situation des écoles de réforme de Ruysselede, de Wynghene et de Beernem, 1849-1858 ; par Ed. Ducpe- tiaux. Bruxelles , 1861 ; in-4°. Coup d'œil sur la situation des beaux-arts en Belgique, à propos de l’exposition générale de 1860 ; par L. Alvin. Bru- xelles, 1860 ; in-12. Examen des diverses méthodes employées pour l’établisse- ( 149 ) ment et le développement des calculs transcendants ; par A. 3. N. Paque. Liége, 1860; in-&. Essai sur les institutions scientifiques de la Grande-Bre- tagne et de l’Irlande, I, par Ed. Mailly. Bruxelles, 1861; in-12. Périodicité des grands déluges résultant du mouvement graduel de la ligne des absides de la terre; théorie prouvée par les faits géologiques ; par le capitaine Le Hon. Deuxième édition. Paris-Bruxelles, 1861 ; in-8°. | De la fièvre typhoïde et de son traitement; par Auguste Millet. Bruxelles, 1861 ; gr. in-8°. Bulletin de la Société scientifique et littéraire du Limbourg. Tome IV, 5"° fase. Tongres, 4860 ; 4 broch. in-8°. Ouverture des cours de l’Institut agricole de Gembloux, À broch. in-8°. Annuaire de l’université catholique de Louvain, 1861. XX Ve année. Louvain ; À vol. in-12. Bulletin de l’Institut archéologique liégeois, t. IV, 2° livr. Liége, 1860 ; in-8°. Revue trimestrielle, XXIX"° vol. Bruxelles, 1861 ; in-12. Annales des travaux publics de Belgique, tome XVIT, 1% cahier. Bruxelles, 1860; in-8°. Messager des sciences historiques, ou archives des arts et de la bibliographie de Belgique. Année 1860, 4° livr. Gand, 4860; in-8°. Journal historique et littéraire, tome XXVIF®*, 10° livr. Liége, 1860-1861 ; in-8°. L’Abeille, revue pédagogique, publiée par Th. Braun. VI®° année, 10% à 19e livr. Bruxelles, 1860; 5 broch. in-8°. Journal de l’imprimerie et de la librairie en Belgique, VII®e année, n° 12. Bruxelles, 1860; in-8°. Académie royale de médecine de Belgique. — Mémoires, tome IV, fase. 5; — Bulletin, 2°° série, tome IIT, n° 10 et 11. Bruxelles, 1860 ; 1 broch. in-#° et 4 broch. in-8°. (150 ) Mieuwe leerwijze van doorzigtkunde ; handleïding tot een hoogeren trap van kennis dier wetenschap, zoowel in theorie als in praktijk ten gebruike van kunstschilders en van kunst- liefhebbers ; door P. Van Schendel. Breda, 1861 ; gr. in-8°. Observations relatives à la note de M. Émile Benoît sur les terrains tertiaires entre le Jura et les Alpes ; par M. Alphonse Favre. Genève, 1860 ; in-8°. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences ; par MM. les secrétaires perpétuels, tome LE, n°% 15 à 27. Paris, 1860; 15 broch. in-4°. : Bulletin de la Société géologique de France, 2% série, tome XVI", feuilles 65 à 75 (fin). Paris, 1858-1859; in-8. Presse scientifique des deux mondes, année 1861, tome I‘ n®% { à 5. Paris, 5 broch. in-8&. L'I A ca LL journal de l’Institut historique, XXVII®°an- née, 312% à 515%: livr. Paris, 1860 ; in-8°. Journal de la Société de la morale chrétienne, tome x n° G.. Paris , 1860 ; in-&. Agronomie, chimie agricole et physiologie ; par M. Boussin- gault. 2% édition, revue et considérablement augmentée, t. 1°. Paris, 1860 ; 1 vol. in-8°. Portrait de la sœur de charité (poëme religieux), par Au- guste Galimard. Paris, 4861 ; in-12. Bulletin des travaux de la Société impériale de médecine de Marseille, IV®° année, n% 3. Marseille, 1860; 4 brochure in-8°. Kœniglich bayerischen Akademie der Wissenschaften : — Abhandlungen der mathemat -physikalischen Classe, NII Bandes, 5 Abth.; — Abhandlungen der historischen classe, VIII Bandes, 5 abth.; — Abhandlungen der philosophisch- philologischen classe, IX Bandes, 1 Abth. Munich, 1860; 3 cahiers in-4°. Verzeichniss der Mitglieder der K. B. Akademie des Wissen- schaften. Munich, 1860; 1 broch. in-#°. D (H91) Die Vegetations-verhäültnisse des bayerischen Waldes, nach den Grundsätzen der Pflanzengeographie, geschildert von Otto Sendtner ; nach dem Manuscripte des Verfassers vollendet von W. Gümbel und L. Radlkofer. Munich, 1861 ; gr. in-8°. Physicalisch-medicinischen Gesellschaft zu Würzburg : — Naturwissenschaftliche Zeitschrift, 1° Band, 3 und 4 Heft; — Medicinische Zeitschrift, 1° Band, 5-6 Bandes. Würz- bourg, 1860; 3 broch. in-8°. Rendiconti delle adunanze della R. Accademia economico- agraria dei Georgofili di Firenze. Trennio IV, anno 1, disp. 4. Florence, 1860; in-8°. Ath dell” Accademia pontificia de’ nuovi Lincei, compilati dal segretario, anno XIT, sessioni 4-7, anno XIII, sessioni 1-4. Rome, 1859-1860; 8 cahiers in-4°. Sulla legge di Mariotte sopra un congegno nuovo per dimos- trarla nelle sperimentali lezioni e su varie applicaziont di essa ; memoria del prof. Paolo Volpicelli. Rome, 1859; in-4°. Formules électrométriques , lettre de M. Volpicelli. Paris, in-4°. Monuments historiques relatifs aux règnes d’Alexis Mi- chaelowitch, Féodor III et Pierre le Grand, czars de Russie, extraits des archives du Vatican et de Naples; par Augustin Theiner. Rome, 1859; in-fol. Vetera monumenta historica Hungariam sacram illustran- ha, maximam partem nondum edita ex tabulariis Vaticanis de prompta collecta ac serie chronologica disposita ; ab Augus- tino Theiner. Tomes I (ab Honorio PP. IIT, usque ad Clemen- tem PP. VI, 1216-1352). Rome, 1859 ; in-fol. Corrispondenza scientifica in Roma. Vol. VI®, n° 25. Rome, 1860 ; 1 feuille in-4°. The annals and magazine of natural history, including zoologig, botany and geology, NX series, vol. VI, n° 31-56. Londres, 1860; 6 broch. in-8°. The Royal Institution of Great Britain. — Notices of the (132 ) proceedings atthe meetings of the members. Part X, nov. 1859 july 1860; — À List of the members, officers, etc., with the report of the visitors for the year 1859. Londres, 1860; in-8°. Bulletin de l’Institut égyptien, n° À à 5. Alexandrie d’É- gypte, 1859-1860 ; 3 cahiers in-8°. À lunar tidal wave in lake Michigan ; demonstrated by J. D. Graham. Chicago, 1860; in-8°. The american Journal of science and arts, second series, vol. XXXI, janvier 1861. New-Haven; 1 cah. in-8°. BÜLLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1861. — No 2. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 2 fevrier 4861. M. Lucre, président de l'Académie. M. An. QuErTELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Sauveur, Wesmael, Martens, Can- traine, Stas, De Koninck, Van Beneden, De Vaux, le vi- comte Du Bus, Nyst, Giuge, Duprez, Brasseur, Poelman, d’Udekem , Dewalque, membres; Schwann, Lamarle, as- sociés ; Gloesener, Montigny, correspondants. Qme SÉRIE, TOME XI. il ( 154 \ CORRESPONDANCE. M. Alexandre Vattemare annonce l’envoi des documents relatifs à l’histoire coloniale des États de New-York, les ouvrages paléontologiques de M. Holmes, et les rapports officiels sur l’état de l’agriculture et de l’industrie en Amé- rique, qui sont offerts à l’Académie. | — M. A.-J. Maas, professeur au collége de la Paix à Na- mur, adresse le manuscrit de ses observations météorolo- giques de 1860. M. Bernardin, professeur au collége de Melle près de Gand, fait parvenir également le résultat de ses observa- tions sur le règne animal pendant la même année. Des observations semblables pour Bruxelles sont com- muniquées par MM. Vincent et fils. — Remerciments. a —— ———_—_—_—_— RAPPORTS ——— Sur l’ergot du seigle et sur les SCLEROTIUM en général, consi- dérés au point de vue morphologique ; par M.T. Muenter, professeur de botanique à l’Université de Greifswald. Fapyport de M. Spring. « Depuis la brillante découverte de M. Tulasne rela- tive aux métamorphoses de l’ergot du seigle, la classe des champignons excite plus que jamais l’intérêt des botamistes (155) et des physiologistes. Les premiers y voient des classifica- tions à refaire, et les seconds y rencontrent des exemples remarquables de polymorphisme et de digenèse. Dans sa séance du 3 décembre 1859, l’Académie a reçu un travail très-intéressant de M. Eugène Coemans, sur la genèse et les métamorphoses du Peziza sclerotiorum Lib. La structure et le développement du Sclerotium des racines alimentaires et sa transformation en champignon discoïde y sont étudiés avec un soin qu’on est heureux de reconnaître, et auquel d’ailleurs les savants rapporteurs, MM. Martens et Kickx, ont déjà rendu justice. M. Muenter, professeur de botanique à l’université de Greifswald, a été déterminé, par la lecture du travail de M. Coemans, à adresser à l’Académie une observation ana- logue qu'il a faite. En plantant en terre un Sclerotium dé- veloppé dans la tige d’un Martynia fragrans, il à obtenu, au bout d’un an et demi, un discomycète appartenant, comme celui de M. Coemans , au genre Peziza Lib., et qu’il propose de nommer Peziza Antzii. L’exposé du fait est précédé d’une courte revue des travaux antérieurs, notamment de ceux, encore moins généralement connus, de Kuebn et de Baïl. La notice du professeur de Greifswald indique done assez bien l’état actuel de la question, et mérite selon nous, ainsi que les dessins qui l’accompagnent, d’être publiée dans le Bulletin de la séance. » La classe, conformément aux termes de ce rapport, appuyé par les deux autres commissaires, MM. Kickx et Maertens, ordonne l’impression de la notice de M. Muenter dans le Bulletin de la séance. (156) Sur une note de M. Florimond, concernant l'électricité atmosphérique. | HBapport de NX. Montigny. « Après l'examen de la nouvelle note de M. Florimond par MM. Duprez et Ad. Quetelet, nommés précédemment commissaires au sujet d’une première note du même au- teur sur le même objet, l’Académie a bien voulu charger M. Gloesener et moi d'examiner le nouveau travail qui est intitulé : Note 4° sur l'orage du 19 février 1860, 2° sur la génération de l'électricité et la formation des orages en gé- néral, 5° sur une fréquence des coups de foudre pendant les orages d'hiver. Dans la première partie de son travail, l’auteur traite une question difficile et délicate, l’origine de l’électricité atmosphérique. On sait combien de conjectures et d’expli- cations ont été émises au sujet de la cause des orages, un des phénomènes les plus fréquents et les plus imposants de la nature. La plupart de ces explications ont été succes- sivement délaissées. Parmi les théories les plus récentes, le dégagement de l'électricité des orages par l’évaporation des eaux des mers et du sol, paraissait d’autant mieux établie que cette explication s'appuie sur des phénomènes électro-chimiques, dont la réalisation dans les phénomènes naturels rend parfaitement compte de la production de quantités d'électricité considérables. Si les doutes que des travaux contradictoires récents ont fait naître au sujet de cette théorie restent fondés, il faudra reconnaitre avec regret que nous ne possédons, jusque maintenant, aucune explication de l’origine de lélectricité atmosphérique qui (157) se concilie avec nos expériences et avec les exigences des phénomènes naturels. Ces quelques mots suffisent pour faire pressentir les dif- ficultés qui entravent la question importante que M. Flo- rimond a abordée. D’après lui, des frottements au sein de masses d'air seraient la principale cause de électricité des orages, particulièrement en hiver. Dans le cours de son travail, il reconnaît que cette explication n’est pas nou- velle : on sait, en effet, qu’à l’époque où le frottement était la seule source d'électricité connue dans les expériences _de physique, cette cause de l'électricité atmosphérique fut en faveur. Afin de montrer, au point de vue de cette théorie, que les circonstances ont favorisé ce mode de production de l'électricité lors des effets de foudre qui occasionnèrent tant de désastres en Belgique, pendant la tempête du 19 février 1860, M. Florimond cherche d’abord à établir que les nuages orageux auraient été entraînés par un vent ex- trêmement violent. Il base ses calculs sur les distances des heux qui furent successivement foudroyés pendant l’orage du 19, en les combinant avec les intervalles de temps qui séparèrent les coups de foudre. Le passage suivant du tra- vail indique les conclusions numériques de l’auteur : « Il » est très-croyable, dit-il, que cette masse (formée de » neige et de grésil), animée d’une vitesse de 20, 30, 40 » ou D0 lieues à l’heure, ait occasionné un frottement en » rapport avec sa vitesse et dégagé, par conséquent, des » flots d'électricité. » L'auteur prévoit avec raison que des vitesses aussi excessives, et qui surpassent de beaucoup les observations des plus forts ouragans dans nos contrées, donneront prise à des objections qui seront fondées sur le très-petit nombre d’accidents que le vent seul produisit pen- ( 158 ) dant la soirée du 19 février; aussi 1l dit « que le courant » s’effectuait probablement à une hauteur moyenne en » laissant les objets terrestres sous lui. » Cette supposition me parait faite gratuitement : en effet, il est difficile d’ad- mettre que les couches inférieures n’aient point participé en partie à la vitesse excessive des courants supérieurs, surtout si celle-ci eût réellement atteint le double de la vitesse attribuée aux plus forts ouragans, ainsi que les cal- culs de l’auteur l’indiquent. Je ferai d’ailleurs remarquer que ces résultats sont inconciliables avec les variations de l’intensité du “vent observées, à Bruxelles, pendant la soirée du 19, puisque le maximum de cette intensité, à l'observatoire , n’a point dépassé 1*,90, pression notée par l’'anémomètre à 7 h. 15 m. du soir (1). Or, comme, d’une part, il serait aisé de trouver, dans les Annales de l’Obser- valoire, des exemples de vents ayant exercé, à d’autres époques, 4, à et même 6 kil. de pression; et que, d’autre part, Bruxelles s’est trouvé sur la direction suivie par la tempête et l’orage du 19 février, puisque la foudre y frappa un ou deux endroits; il faut nécessairement conclure de ces faits que l’anémomètre eût infailliblement accusé des pressions supérieures à 1°,90, le 19 au soir, si la vitesse du vent et de translation des nuages orageux avait atteint les valeurs citées plus haut. Il ne serait point nécessaire d’avoir recours à ces va- leurs extrêmes pour s'expliquer, au besoin, que les causes d'élaboration de la foudre et celles de sa chute à Nazareth près de Gand, par exemple, à sept {/: heures, se renouve- lèrent et produisirent les mêmes effets à Liége, vers neuf heures du soir; et il n’est nullement nécessaire d'admettre (1) Bulletins de l'Académie royale de Belgique, 2me sér.., t. IX, p. 275. ”“ ‘dé brsbtS RE , (159) que les éclats de foudre qui frappèrent ces deux localités aient été élaborés dans un même groupe de nuages, que l’on supposerait avoir été transporté de Nazareth à Liége en moins de deux heures. M. Florimond indique ensuite quelques objections se- condaires contre des théories de l'électricité atmosphé- rique émises antérieurement; puis il cherche à faire voir que : « 1° l'électricité des orages est due au frottement des » masses liquides ou solides se mouvant au travers de » l'air avec une certaine vitesse; 2 cette électricité ac- » quiert une haute tension par l’enroulement du nuage » sur lui-même, et ainsi elle devient capable de produire » les effets connus. » L'auteur invoque d’abord en faveur de la théorie, qu'il étend ici à tous les orages sans distinction de saison, l'électricité que dégage la machine hydro-électrique d’Armstrong. Il cite ensuite l’électrisation d’un vêtement par le frottement d’un vent violent, puis la lueur resplen- dissant dans l'air que M. Maas a observée à Namur, pen- dant l’orage du 19 février, et que, dans sa communication à l’Académie, il a attribuée à l’état électrique des flocons de neige. Je ne m’étendrai pas sur la différence des circonstances physiques qui distinguent essentiellement les causes par- ticulières du dégagement de l'électricité par le frottement dans l'air, supposé se produire selon l’auteur, et le mode d'émission de ce fluide dans l’appareil d’Armstrong : comme on le sait, celui-ci est uniquement dû au frotte- ment des globules d’eau entraînées avec la vapeur contre les parois des ajutages de sortie. D’ailleurs les causes du dégagement du fluide dans l’atmosphère ne sont qu’indi- quées par l’auteur, ainsi qu’on l’a vu plus haut. (160) Toutefois, 1} convient d'examiner, jusqu’à certain point, des faits connus qui semblent se rattacher à l’hypothèse préconisée. On sait qu'un jet d'air humide ou qui contient des poussières, lancé dans l'atmosphère, s’électrise et que, au contraire, le jet est sans indice d'électricité si l'air est sec. Du fait également connu, l'électrisation d’un tissu de soie agité dans l'air, on induit nécessairement que les parties de l’air qui ont glissé sur la soie sont aussi élec- trisées par le frottement. Ces phénomènes nous conduisent naturellement à cette question : Pourquoi deux masses d'air glissant l'une sur l'autre ne s’électriseraient-elles pas? Kæmtz, qui la pose dans son Cours de météorologie (traduc- pe L tion française, p. 555), ajoute qu'il ne peut y avoir électri- sation si la température, l'humidité, ete., des deux masses sont les mêmes, ainsi que cela a lieu pour deux bâtons de résine, parfaitement identiques, qui alors ne s’électrisent pas lorsqu'on les frotte l’un contre l’autre. Ce savant mé- téorologiste admet cependant que les masses d’air sont susceptibles de s’électriser mutuellement par frottement, à condition que leurs températures diffèrent. Il ne eroit donc pas que, dans la nature, cette cause soit compléte- ment nulle; mais il ajoute que les actions chimiques qui se passent constamment dans l'atmosphère sont des causes de production d'électricité mfiniment plus puissantes (1). (1) Quoique la conclusion de Kæmtz en faveur de la théorie de l’élec- tricité atmosphérique par les actions chimiques, ait été émise à une époque où l’on acceptait unanimement cette théorie, qui a été principalement dé- veloppée par M. Pouillet à l’aide &e ses expériences sur le dégagement de l'électricité par l’évaporation de l’eau des dissolutions salines, je ne pense pas qu'il faille refuser aujourd'hui toute valeur à cette conclusion de Kæmtz. Quelles que soient les oppositions contre la théorie de M. Pouillet que les expériences récentes de M. Gaugain ont fait naître, oppositions PC EC ts à. a ra gs 2 Cut il 2 eu PC ( 161 ) Je ne m'’arrêterai pas à examiner si, peut-être à cause de la mobilité extrême de leurs molécules et de leur faible densité, les gaz ne sont pas moins aptes que les solides à dégager par le frottement seul des quantités d'électricité aussi considérables que M. Florimond le-conçoit. Si nous consultons l’expérience, ie ferai remarquer que M. Arm- strong, ayant condensé de l’air, sous une pression de huit _atmosphères, dans un ballon de verre très-résistant, de sept litres de capacité environ, reconnut que l'influence de la vapeur d’eau mélangée à l'air du récipient était teile, que, si celui-ci est parfaitement sec et chauffé, la sortie de l’air ne produit pas d'électricité, contrairement à ce qui à lieu quand l'air est humide (1). Dans ses remarqua- bles expériences sur la machine d’Armstrong, M. Faraday, ayant surchauffé de la vapeur de manière qu’elle fat sèche, vit disparaître toute espèce d’électrisation. En la faisant passer, au contraire, avant sa sortie, dans une boîte con- tenant de l’étoupe mouillée, la vapeur se charge de gout- telettes liquides, et alors l’électrieité est très-abondante. Il a fallu nécessairement conclure de ces expériences, aux- quelles j'ai déjà fait allusion, que les gaz secs ou privés de dont M. Florimond parle dans son travail, je rappellerai ici un fait naturel très-fréquent qui s'explique fort bien dans la théorie de M. Pouiliet et qui plaide en sa faveur. Quand, le lendemain d’un orage d'été, le ciel reste découvert, nous devons nous attendre très-souvent à voir éciater un nou- vel orage ce lendemain même ou le jour suivant, tellement, pourrait-on croire , l’évaporation des pluies du premier orage aura été activée par lac- tion directe du soleil. Si, au contraire, le ciel reste couvert pendant un ou deux jours après l'orage, l’évaporation s'effectue alors lentement, et il n’y a point d'apparence d'orage si, bien entendu, toutes les traces du premier se sont entièrement dissipées dans l’air, au lieu même ou aux environs. (1) Traité de physique, considéré dans ses rapports avec la chimie et les sciences naturelles ; par Becauerel, t. 1, p. 440. ( 162 ) particules liquides ne dégagent pas d'électricité appréciable par le frottement, même quand il a lieu avec grande vitesse contre les parois solides des ajutages. Si nous revenons des expériences de cabinet aux phé- nomènes naturels, nous ne voyons point, par exemple, que la tension électrique des couches d’air voisines du sol soit plus prononcée par les vents forts que par des vents modérés, les premiers donnant lieu à beaucoup plus de frottement des couches d’air entre elles et contre la sur- face du sol. Au contraire, pour Bruxelles du moms, d’après les recherches de M. Quetelet sur les rapports de l'électricité de l’arr avec la direction des vents, 1l y a deux mazxima de l'intensité électrique par les divers vents : l’un correspond à la partie du ciel comprise entre le sud-est et l’est, l’autre, avec le nord-ouest et l’ouest-nord-ouest (1). Or les vents venant de ces deux directions sont de faible vitesse par rapport aux autres vents, à Bruxelles. L'auteur, il est vrai, voudrait aussi expliquer le dégage- ment de l'électricité « par le frottement de masses liquides » ou solides se mouvant au travers de l’air avec une cer- » taine vitesse. » Mais on se demande quelles sont ces masses? Seraient-ce les gouttes de pluie ou les parcelles de neige? Comme ces parties solides ou liquides sont entrai- nées par le vent au milieu de tourmentes atmosphériques, semblables à celles du 19 février, elles ne possèdent, par= rapport à l’air ambiant, d'autre mouvement propre ou bien accusé que celui qui leur est imprimé par la pesanteur. Or cette chute est tout à fait incapable de dégager de l'électricité en quantité notable, si même elle en produit. (1) Annales de l'Observatoire royal de Bruxelles, t. VII, p. 20. ( 163 ) Si l’on rappelait ici qu'il y à émission d’une quantité d'électricité plus ou moins appréciable quand la pluie ou la neige tombent des régions supérieures de lair; si l’on citait des exemples nombreux de gouttes de pluie, de flocons de neige et de grêlons produisant de la lumière en s’entre-choquant ou en arrivant au sol; il faudrait re- chercher, sans aucun doute, la source de cette électri- cité dans des phénomènes naturels bien plus énergiques que le frottement de minces et de légères parties de ma- tière, traversant verticalement l'air avec des vitesses par- fois très-modérées. Dans l'état actuel de nos connaissances, rien ne nous autorise à considérer la théorie du dégagement de l’élec- tricité dans l’air par le frottement seul comme étant fon- dée, quoique les orages qui éclatent parfois en hiver sur- viennent souvent au milieu de tempêtes atmosphériques. Si aucune des théories émises jusqu’à ce jour ne satisfait entièrement ni aux observations n1 aux expériences, dans l'explication des causes de l'électricité des orages qui éclatent aux diverses saisons et sous des latitudes diffé-" rentes, la théorie du frottement dans l'air est moins apte que toute autre à résoudre ces difficultés, eu égard surtout à la puissance des phénomènes de la nature. Après avoir indiqué les causes à l’appui de sa théorie, M. Florimond explique pourquoi tout ouragan n’engendre pas nécessairement un orage, en disant : « Qu'il faut, selon » la seconde partie de sa proposition (voir plus haut), » que des circonstances amènent l’enroulement de la » nappe nuageuse sur elle-même; car cette nappe, géné- » ralement peu électrisée, acquerra une tension sans cesse » croissante à mesure qu’elle s’enroulera davantage. » On connaît les expériences de physique servant à démontrer ( 164 ) l'accroissement de la tension électrique par la diminution d’étendue de Ia surface des corps électrisés, qui ont ingé- nieusement guidé ici l’auteur. Mais si lenroulement des nuages supposé parvient à se réaliser parfois dans la nature, il faut admettre que très-probablement 11 a lieu dans des circonstances exceptionnelles; l’auteur iui-même l’a pres- senti. Il est donc impossible de voir dans un phénomène si particulier et aussi restreint d’ailleurs, la cause de phé- nomènes généraux. Une difficulté plus sérieuse encore surgit quand, pre= nant pour guide les mêmes idées et le même principe, l’auteur dit que la rencontre de deux nuages chargés de la même électricité aura pour effet d'accroître la tension élec- trique, parce que la surface des deux nuages, fondus en un seul, sera moindre que la somme des surfaces primiti- vement séparées. La difficulté à prévoir était celle-ei : quelle est la force qui intervient, dans la généralité des cas, pour opérer le rapprochement de deux nuages électrisés qui se repoussent mutuellement à cause de l'identité de eurs électricités? IT fallait absolument que l’auteur fit connaitre eette force avant de pouvoir prêter au phéno- mène supposé un rôle important dans les orages. Nous sommes arrivés à la troisième partie de son tra- vail où M. Florimond émet l’opinion que, si les orages sont généralement plus désastreux en hiver qu’en été, ce n’est point parce que les nuages orageux flottent plus bas pendant la première saison, « c’est, dit-il, parce qu’en » hiver, les arbres étant dépouillés de leurs feuilles, sont » dépourvus de millions de petits paratonnerres, impar- » faits sans doute, mais efficaces par leur multiplicité, » Cette idée théorique prend encore plus d’extension dans l'esprit de l’auteur, quand il attribue l'excès de la tension { 165 ) électrique de lair, en hiver, par rapport à la tension en élé, à ce que les feuilles des plantes les plus basses, aussi bien que celles des grands végétaux, agiraient, en été, à la manière de corps aciculaires, bons conducteurs, de facon à rétablir l'équilibre électrique entre l'atmosphère et la terre. À l’insu très-probablemeni de l’auteur, l’idée émise sur le rôle des grands végétaux pendant les orages serait, me parait-il, une extension de l’opinion de certains physieiens, qui veulent que les arbres exercent une influence préser- vatrice à l'égard de la foudre pour les habitations qu'ils entourent. Arago, dans sa belle notice sur le tonnerre, a examiné cette opinion après l’avoir formulée en ces ter- mes (1): « Est-il vrai que des arbres qui dominent une maison » à de petites distances, la mettent complétement à l’abri » des atteintes de la foudre, ainsi que le prétendent beau- » coup de physiciens ? » Il importe ici de faire connaître, en substance, l’article de la notice. Les nombreuses fissures des arbres des forêts ; débités en planches, prouvent, dit Arago, qu'ils sont frappés de la foudre plus souvent qu’on ne l’imagine. Les remarques suivies d’un observateur tendent à établir qu'un orage s’affaiblit notablement quand il passe sur une forêt. « D’après ces observations, ajoute Arago, il parait incon- » testable que les arbres soutirent aux nuages orageux » une partie considérable de la matière fulminante dont > ils sont chargés. On peut donc les considérer comme un —— a — —— —_—_— (4) Notice sur le tonnerre, Œuvres d'Arago, t. 1, des Notices scien- tifiques , p. 507. Voir aussi : l'Annuaire du Bureau des longiludes, année 1858. : ( 166 ) » moyen d’atténuer la gravité des coups foudroyants. » En rapprochant cet extrait du passage, résumé plus haut, où Arago cite les fissures des arbres comme traces accusa- trices du trajet de la foudre, on éprouve le doute que voici : Dans la pensée d’Arago, les arbres affaibliraient-ils la tension électrique des nuages passant dessus, en souti- rant lentement le fluide à la manière des paratonnerres, ou bien en provoquant la décharge des nuages par des éclats de foudre dont les arbres cônserveraient les traces? Sans vouloir préciser quelle a été la pensée d’Arago, je ferai remarquer qu'il ajoute au passage rapporté plus haut cette opinion significative dans la question qui nous oc- cupe : « C’est aller au delà des limites de l'observation » que de doter les arbres d’une vertu préservatrice abso- » lue. » Afin de montrer combien ses doutes sont fondés, ce célèbre savant cite les exemples de deux habitations qui furent foudroyées en été, quoique entourées d'arbres rapprochés, et dont les sommités dépassaient de beaucoup les toits des maisons. Dans un des exemples, les nuages “orageux, avant de se trouver dans la verticale de la maï- son, avaient passé sur des arbres voisins beaucoup plus élevés que les toits et même que les cheminées, ce qui n'empêcha pas les arbres de rester intacts et la maison d’être foudroyée. La conclusion d’Arago et les faits cités laissent subsister bien des doutes, s'ils ne les augmentent pas, sur la réalité du rôle si étendu et si général que M. Florimond prête aux végétaux pendant les orages d'été. Dans la supposition que son opinion soit plus ou moins fondée, il y aurait à discuter si les effets de la foudre, en été, ne devraient pas être plus désastreux et les orages plus fréquents aujour- d'hui qu'il y a cent ans au plus, alors que de vastes forêts | pdt SC ne dre GR A déc» amie bts. jé M Les duis (167 ) recouvraient une grande partie de l’Europe. Arago a exa- miné la question si délicate de savoir s’il tonne aujourd’hui aussi souvent que dans les siècles passés ; il conclut qu’il y à une très-légère probabilité à l’idée que, depuis les temps anciens, les orages ont diminué d'intensité (Notice, p. 167). J’ajouterai qu'en ce qui concerne la Belgique, l'abbé Mann a fait des observations suivies sur la fré- _ quence des orages, à Bruxelles, pendant les années 1785, 1786 et 1787; il à trouvé que le nombre moyen annuel des orages avait été de vingt-quatre pour ces trois années. Le nombre annuel des orages étant actuellement treize en moyenne, d’après les recherches récentes de M. Que- telet dans son travail sur l’Électricité de l'air en Belgi- que (1), on est en droit de se demander, avec ce savant, si les déboisements considérables qui ont eu lieu dans les environs de Bruxelles, n’ont pas, sous le rapport de la fréquence des orages, modifié la nature du climat. Quelle que soit la circonspection avec laquelle 1} faille employer le petit nombre des observations de l’abbé Mann, certaines années étant plus orageuses que d’autres, on peut en ins duire cependant que la disparition des forêts aux environs de Bruxelles n’a pas eu pour effet d'accroître le nombre des orages. Mais voici l'argument qui est le plus décisif et tout à fait contraire à l’opinion émise par M. Florimond. Arago a voulu prouver que, conformément à l'opinion géné- rale, les orages sont plus désastreux quand ils éclatent pendant l'hiver, en formant une statistique des coups de foudre qui, à sa connaissance, ont frappé des navires dans (1) Annales de l'Observatoire royal de Bruæelles, t. VIT, p. 50. ( 168 ) l'intervalle compris entre les côtes d’Angieterre et la Mé- diterranée inclusivement. Il résulte de cette statistique que les tonnerres des mois tempérés ou froids sont plus dan- gereux en mer que les tonnerres des mois chauds. Comme l'influence préservatrice des arbres, supposée, pendant l'été ne peut être invoquée en pleine mer ni au voisinage des côtes, là où plusieurs cas de foudroiement des navires sont cités dans la statistique d’Arago, il faut en imférer nécessairement que la cause du plus grand nombre de coups de tonnerre foudroyant en hiver, relativement, ne provient aucunement de l'absence des feuilles des végé- taux pendant cette saison. Le fait s’expliquerait, comme des météorologistes le pensent , avec beaucoup d'apparence de raison, par un plus grand abaissement des nuages ora- geux près de la surface de la terre, quand ces nuages ful- minent en hiver, après avoir été produits, au sein de tem- pètes atmosphériques, par l'effet de causes qui nous sont encore inconnues. Parvenu au terme d’un rapport que l'importance des matières traitées m'a obligé d'étendre, je ne puis que me ranger à l’avis de MM. Duprez et Ad. Quetelet, en me bor- nant à demander à l’Académie de bien vouloir adresser des remerciments à M. Florimond pour sa communication. » a Rapport de M. Gloesener. « La notice de M. Florimond, sur laquelle l'Académie m'a chargé de lui faire un rapport, est divisée en trois parties : la première concerne l'orage du 19 février 1860; la seconde traite de la génération de l'électricité atmosphé- ( 169 ) rique et de celle des orages en général; la troisième à pour objet d'expliquer pourquoi la chute de la foudre est, pro- portion gardée, plus fréquente, plus dangereuse et plus terrible en hiver qu’en été ? L'auteur de la notice attribue l’origine de l'électricité de l'atmosphère et de celle qui constitue les orages exclusive- ment au frottement de l'air et à celui des particules d’eau, de neïge et de grêle qui se forment pendant les orages. Il appuie son opinion sur des considérations différentes. Il passe d’abord en revue les diverses opinions émises sur Porigine de l'électricité de l’air atmosphérique et des nuages orageux ; il trouve qu’on ne peut Imvoquer ni l’éva- poration de l’eau pure, ni la végétation. En cela, il est d'accord avec la plupart des physiciens, sinon avec tous. M. Pouillet et, après lui, MM. Peltier et Matteueci ont dé- montré que, dans la vaporisation de l’eau salée, il y avait dégagement d'électricité, et que l'électricité positive était transportée par la vapeur dans l'air. Ce fait est avéré. Mais M. Gaugain a fait récemment quelques expériences d'où il à déduit que l'électricité ne se dégageait que si la: vaporisation était accompagnée d’un phénomène de frotte- ment. Celui-ci serait produit par un mouvement rapide de rotation de l’eau disposée en globules, de lt même manière qu'il se dégage de Pélectricité dans la sortie de la vapeur humide d’une chaudière. M. Florimond embrasse cette opinion de M. Gaugain. Le frottement favorise sans doute le développement de l'électricité dans la vaporisation ; il a toujours lieu dans la vaporisation de l’eau des mers et dans plusieurs autres circonstances analogues; mais il faudra encore, croyons-nous, de nouvelles expériences avant de le regarder d’une manière générale comme la condition sine qu4 non. 2m SÉRIE, TOME XI. 12 ( 1470 ) M. Florimond ne cite pas l’opinion de M. Peltier, qu regardait la terre comme possédant en propre l'électricité négative et développant dans l'atmosphère l'électricité posi- tive. Il regarde comme non fondée l'opinion de Gay-Lussac et d’autres, qui consiste en ce que les vapeurs des nuages orageux se condensant en gouttelettes liquides, leur élec- tricité , resserrée dans les petits volumes de ces dernières, tend, par sa force expansive, à passer de molécule en mo- lécule jusqu'à la surface du nuage, et que là elle acquiert une tension très-forte et capable de produire les éclairs et les autres phénomènes que produisent les orages. Nous croyons que M. Florimond interprète mal lhypo- thèse de la condensation des vapeurs des nuages orageux. Les partisans de cette hypothèse admettent l'électricité comme existante dans les nuages orageux et comme em- pruntée à l'atmosphère. Ils cherchent à expliquer, quelle que soit son origine, comment elle fait naître les éclairs, la foudre , et de quelle manière elle agit pour produire ou con- court à produire les autres phénomènes des orages. Il se trouve, dans les Comptes rendus de l Académie des sciences de Paris, t. XII, p. 791, une notice due à M. Tessan, qui jette un grand jour sur l’état des nuages orageux, notice dont M. Florimond eût pu tirer profit et dont je crois à propos de rapporter le passage suivant : « La surface d’un nuage orageux n'étant pas rigide comme celle d’un corps solide, et l'effort exercé sur l'air par la tension élec- trique contre-balançant une partie de la pression atmo- sphérique, cette surface devra s'étendre; de plus, les particules électrisées se repoussant, le nuage se dila- tera énormément pendant que l'électricité se portera à sa surface, ce qui explique cet accroissement, cette espèce de gonflement que l’on remarque dans les nuages VW EY ON CU OV. AU 0 Cart) orageux qui se forment. Cette dilatation sera accom- pagnée d’un grand refroidissement. Alors de nouvelles vapeurs se condenseront, et les gouttelettes s’accrot- tront rapidement... » Quand un éclair vif décharge subitement une partie » de la surface du nuage, l'air la refoule et la comprime » aussitôt, puisque la force électrique qui la tenait gon- » flée, est subitement diminuée, et il y a une brusque » condensation de nouvelles vapeurs par cette compres- sion ; ce qui explique la recrudescence de la pluie après chaque violent tonnerre, ainsi que la grosseur et l’abon- dance des gouttes de pluie que certains nuages orageux fournissent. » L’honorable professeur s'étend longuement sur le mode de suspension des nuages dans l'air; nous croyons que ces développements sont étrangers à la question que nous avons à examiner. Il conclut de l'examen critique des di- verses opinions proposées pour expliquer l’origme de l’élec- tricité atmosphérique, que l'électricité des orages est due au frottement de masses liquides ou solides se mouvant au travers de l’air avec une certaine vitesse. C’est l'ouragan du 19 février 1860 qui Jui fournit une forte preuve à l’appui de son opinion. L'observation de ce phénomène extraordinaire lui a suggéré, dit-il, de nou- velles idées ; il le déerit avec détail, indique les directions qu'il a suivies, signale les localités qu’il a frappées à des heures déterminées ; il caleule sa vitesse et trouve que cette vitesse a dû être de cinquante lieues environ. | M. Florimond a constaté en même temps que l'ouragan constituait un tourbillon, formé de neige et de grésil, qui devait enrouler la nappe du nuage orageux sur elle-même, et par suite imprimer à son électricité une très-forte tension. 7 CR M ue (172) Par la simultanéité de la très-grande vitesse de l’ouragan et du grand accroissement de la tension de lélectricité, M. Florimond voit ce qu'il appelle sa théorie confirmée ; car cette théorie consiste précisément en ces deux propo- sitions, que {° l'électricité de l'atmosphère et des nuages orageux est exclusivement due au frottement; et que 2 il n’y à jamais orage, s'il n’y à pas enroulement du nuage électrique sur lui-même, enroulement produit par des cou- rants ou vents dirigés en sens divers, lesquels ne sont pas des effets, mais des causes sine qua non des orages. L'auteur de cette théorie prévient une objection, en ajoutant que, si l’on voit quelquefois les nuages se croiser avec une certaine vitesse sans qu'il v ait orage, cela pro- vient de ce que les courants n’agissent pas favorablement pour enrouler le nuage, ou que le milieu dans lequel il passe est accidentellement conducteur, ou enfin que ce nuage n’est pas convenablement limité. | M. Florimond trouve que, les deux propositions de sa théorie étant satisfaites au plus haut degré par les cireon- stances qui accompagnaient l'ouragan du 19 février der- nier, le tourbillon d'air, de neige et de grésil, animé d'une vitesse de 20, 50, 40, 50 lieues à l'heure, devait sans doute occasionner un frottement en rapport avec sa vitesse, et dégager, par conséquent, des flots d'électricité; que les nombreuses décharges ne pouvaient guère réduire la ten- sion électrique du tourbillon, puisque, dit-il, la continuité du frottement restituait constamment les pertes qu'il (le tourbillon) subissait dans sa course. Quant à la vitesse extraordinaire de l’ouragan , d’après l’estimation de M. Florimond, un météorologiste illustre, M. Kaemtz, dit, dans le premier volume de sa Météorolo- gie, p. 477, qu'il se méfie beaucoup des vitesses des orages, 2 fe il tt KG (175) des ouragans, etc., indiquées dans les ouvrages, attendu que très-souvent elles sont rapportées au même orage, tandis qu’en réalité, elles sont relatives à deux orages qui _ ont lieu en même temps ou à peu près dans des localités différentes. IT est très-possible que M. Florimond ait pris les vitesses de deux nuages orageux différents pour celle d’un seul. L'opinion qui considère le frottement comme générateur de l'électricité atmosphérique est fort ancienne et n’a Ja- mais été, que je sache, abandonnée; aussi M. Florimond le reconnaît-il en disant qu’il veut la réhabiliter. Mais, en cela même , 1l a été devancé par M. Gaugain et par M. Da- guin. Ce dernier, parlant des nuages orageux, dans son Traité de Physique, tome IT, page 468, s'exprime en ces termes : « Ne pourra-t-on pas attribuer plutôt l'électricité des nuages au frottement de deux masses d’air de tempé- » rature différente qui se rencontrent pour les former? Des » deux électricités dégagées, l’une, la positive, se porterait » sur l'air le plus froid , et l’autre, sur l'air le plus chaud; » car la chaleur donne aux corps une tendance à prendre » le fluide négatif. Ces masses d’air mêlées de vapeur con- » densée seraient ainsi, les unes électrisées positivement » et les autres négativement, etc. » Quant à la deuxième partie de la théorie de M. Florimond, nous dirons que l’enroulement des nuages orageux, ou les tourbillons, a été constaté ou du moins admis par plu- sieurs auteurs, dans les cas où il se prépare des orages con- sidérables, par exemple, par Coulvier-Gravier (Recherches sur les météores, p. 133) et par M. Daguin, en parlant de la formation de la grêle, t. Il, p. 481, de sa Physique. Mais personne, que je sache, M. Florimond excepté, n’a soutenu que l’enroulement des nuages orageux sur eux- ŸY (174) mêmes fût une condition nécessaire pour qu’un orage pût se former. Je ne puis admettre que des orages ordinaires ne puissent se produire sans qu'il y ait tourbillon ou en- roulement de nuages orageux. Il est regrettable que M. Florimond n’ait rien dit sur le mode dont se forment, d’après lui, le grésil, la grêle, ete., dans les nuages , ni sur le rôle que jouent, également d’après lui, les électricités développées par eux. Passons à la troisième partie de la notice soumise à notre examen. Il a été constaté par Arago, par M. Kæmtz et d’autres météorologistes qu’en général les orages sont plus violents et que, proportion gardée, la foudre tombe plus souvent en hiver qu’en été. Quelle est la cause de cette différence d'action des orages dans ces deux saisons opposées ? M. Florimond en trouve l'explication dans l'influence très-différente que les arbres, les herbes et les végétaux, en général, exercent sur les nuages orageux en été et en hiver. En été, les arbres, les herbes, etc., agissent comme des paratonnerres, imparfaits, à la vérité, dit-il, mais, cepen- dant très-efficaces par leur grande multitude; 1ls diminuent fortement la tension des électricités orageuses, empêchent ordinairement la foudre de tomber et atténuent, si elle tombe, son action dévastatrice. M. Florimond se rencontre, assurément à son insu, avec un physicien célèbre, Pfaff, de son vivant professeur à l’université de Kiel, qui dit (Dictionnaire de physique de Gehler, vol. 4, p. 1587) : « Les orages d’hiver sont rares et se distinguent de ceux d'été, en ce qu’ils sont plus tumul- tueux et plus passagers; aussi frappent-ils ordinairement des bâtiments et autres objets élevés, action qui pro- vient en partie de ce qu’ils marchent dans des régions m- {1 ) férieures , et en partie de ce qu’en hiver, les arbres, privés de feuilles et de séve, attirent moins l'électricité, et que celle-ci ne peut être sensiblement conduite dans la terre. » Cette explication de Pfaff, comme celle de M. Flori- mond, est inexacte. Un paratonnerre de métal n’est réelle- ment efficace que s’il communique parfaitement et métalli- _ quement avec la terre dans un endroit très-humide, avec un puits ou plutôt une eau courante. À plus forte raison, les arbres, et autres végétaux sont-ils peu efficaces, s’ils ne se trouvent pas dans des conditions de communication semblables avec la terre, conditions qui ne sont jamais aussi parfaitement remplies dans la naturé pour les arbres qu'elles le sont pour les paratonnerres proprement dits, construits expressément dans le but de protéger les objets qui les entourent. « Il importe de bien remarquer, dit M. Pouillet, dans son » rapport remarquable sur la construction des paraton- » nerres, que jamais la foudre ne s’élance sans savoir où » elle va, que jamais elle ne frappe au hasard; son point » de départ et son point d'arrivée, qu’ils soient simples ou » multiples, se trouvent marqués d’abord par un rapport » de tension électrique, et au moment de l’explosion, le » sillon de feu qui les unit, allant à la fois de l’un à l’autre, » commence en même temps par ses deux extrémités. Les » herbes, les buissons, les arbres même sont des objets » trop petits pour la foudre; ils ne peuvent pas être son » but; s'ils sont frappés, c’est parce qu'ils se trouvent sur » son chemin, c’est parce qu'il y a au-dessous d'eux des » masses conductrices plus étendues qui sont le but caché » d'attraction, qui reçoivent au large l’influence et déter- » minent l'explosion. » Dans l'opinion de M. Florimond, les orages d'hiver sur les (176) côtes des mers, où il n'y a pas d'arbres, ne devraient pas être plus terribles que ceux d'été et cependant ils le sont. Dans les contrées déboisées, contrairement à l'opinion de M. Florimond, le nombre de coups de foudre n’est pas, d’après les observations recueillies par M. Quetelet, plus grand en été qu'avant leur déboisement. Ce sont les conditions ou les circonstances et les situa- tions des lieux où se forment les orages d'hiver qui sont cause qu'ils foudroient plus souvent, occasionnent plus de dégâts et répandent plus de terreur que les orages d'été. En résumé, je suis très-porté à croire que si M. Flori- mond à émis plusieurs idées scientifiques que d’autres avaient déjà pubhées, il l'a fait sans connaître ce que la science avait déjà acquis. Sa notice atteste aussi beaucoup d'instruction, de zèle et d'aptitude pour les recherches scientifiques. Les recherches météorologiques sont très-pénibles et très-étendues. Je propose à l'Académie de remercier M. Flo- rimond de sa communication et de l’engager expressément à continuer ses recherches. » Conformément aux propositions des commissaires, des remerciments seront adressés à M. Florimond et son ma- nuscrit sera déposé aux archives à l'Académie. Sur une note de M. Ph. Gilbert, concernant la théorie des équations différentielles linéaires. Rapport de M. Timmermans. « Le but des recherches de M. Gilbert est clairement indiqué par les préliminaires placés en tête de son mé- \ (177) moire et qui sont ainsi conçus : « On sait que pour former » l’intégrale générale d'une équation différentielle linéaire » de l'ordre n à second membre nul, il suffit générale- ment d'ajouter, après les avoir multiplhiées par des con- stantes arbitraires, x intégrales particulières de cette » équation. » Ilest cependant certains cas où cette pro- priété cesse évidemment d’avoir lieu, comme lorsque l’une des intégrales particulières est la somme de deux auires, et, en y regardant avec un peu d'attention, on voit qu’il est absolument nécessaire de donner une détermination pré- cise et une démonstration suffisante des conditions dans lesquelles le nombre des constantes arbitraires se rédui- sant, on tombe dans ces cas d'exception. Si la note de M. Gilbert n’avait d'autre but que de mettre en évidence les cas où l’intégrale cesse d’avoir toute la généralité possible, je pense que le théorème connu sur le nombre de constantes arbitraires qui doivent y entrer at- teindrait le même objet d’une manière plus simple et très- directe, et Ôterait, par conséquent, à cette note le mérite de la nouveauté ; mais certains détails de calcul effectués d’après la méthode un peu longue, mais toujours élé- gante de Cauchy, et les conséquences qu'il tire de ses formules donnent à son travail une valeur réelle et suffi- sante pour que je propose à la classe de l’insérer au Bul- letin de l’Académie. » —: Ce rapport, auquel souscrit le second commissaire , M. Lamarle, est admis par la classe, et la notice de M. Gilbert sera insérée dans le Bulletin. (178) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Sur la physique du globe; par M. Ad. Quetelet, secré- taire perpétuel de l’Académie. L'Académie avait compris, dès son origine, le but élevé de son institution : elle avait aperçu, avec une admirable justesse, le point vers lequel devaient tendre tous ses efforts. Un corps savant, en effet, n’a pas pour but de fa- voriser des prérogatives individuelles, mais bien de recon- naître et de défendre les intérêts scientifiques de la nation, de les maintenir à leur véritable hauteur, et d'encourager de vastes et utiles travaux devant lesquels viendrait échouer l'activité d’un seul homme. J’ai déjà parlé, dans une de nos séances publiques, des soins que l’Académie avait mis à explorer notre pays, et à demander successivement l'étude géologique de chacune de nos provinces, en attendant qu’on pût en former le plan général; j'ai indiqué avec quelles précautions elle traçait, dans ses concours, les voies qui pouvaient tendre à éclai- rer et à servir le pays. Permettez-moi de vous entretenir d’un travail que j'avais omis de citer, peut-être parce qu'il me touche de trop près; je le fais aujourd’hui par un sentiment de re- connaissance, dans un moment où vous voulez bien vous rappeler, d’une manière si bienveillante, l'ancienneté de mes services (1). (1) Les trois classes de l’Académie ont voté une médaille, en commémo- ration du vingt-cinquième anniversaire du secrétaire perpétuel. ; SU Te D FL But : (79 3 L'Académie avait senti ce qui manquait à ses travaux : elle voyait à regret que les sciences physiques, et en par- ticulier l’astronomie, la météorologie, la physique du globe, étaient restées étrangères à l’attention générale. Le ministre éclairé qui siégeait à nos séances, M. Falck, en- couragea ces généreuses tendances ; et, sur l’invitation de nos confrères , j'acceptai hardiment le projet de répondre à leur désir et à son bienveillant appui. Ma tâche était dif- ficile ; je ne craignis pas d’entrer comme élève à l’observa- toire de Paris; je sus y mériter la confiance et l’amitié de La Place, de Bouvard, d’Arago, de Poisson et des sa- vants les plus estimés de cette époque. Je visitai successi- vement Londres, Berlin et les villes les plus recomman- dables pour les études astronomiques ; et pendant que l’on construisait l'observatoire, le gouvernement m’autorisa à demander aux plus habiles constructeurs de France et d'Angleterre leurs meilleurs instruments. C’est au milieu de la révolution de 1830 que je commençai péniblement mes premiers travaux. Je crus qu'il était de mon devoir de présenter d’abord une analyse des recherches astronomiques et météorolo- giques qui avaient été faites dans le pays, avant la créa- tion de l’observatoire. Cet essai historique a été inséré dans le tome VIIT de nos Mémoires publié en 1834. Vous avez pu juger, par cette espèce de prodrome, combien l’état des sciences d'observation laissait à désirer chez nous: plusieurs branches de la météorologie avaient à peine été effleurées; quelques-unes même, et surtout la physique du slobe, étaient totalement inexplorées. Je ne négligeai rien, dès cet instant, pour répondre aux vues de l’Académie : non-seulement j’organisai les études des phénomènes du ciel et de la terre dans le nouvel obser- ( 180 ) vatoire, que la révolution de 1830 avait failli détruire, mais je tàchai de trouver des aides intelligents pour me secon- der, je ne puis que citer avec reconnaissance l'appui que je reçus de vous, mes chers confrères; vous m'avez aidé de vos lumières et vous avez ouvert, de la manière la plus bienveillante, vos recueils à la publication de mes travaux. Si la Belgique peut figurer aujourd'hui parmi les pays qui cultivent avec soin l'étude des phénomènes de l’atmosphère et de la terre, c’est à vous particulièrement qu'on le doit. Les villes, telles que Gand, Liége, Namur, Louvain, ete., en même temps qu’elles fournissaient leurs observations météorologiques, faites avec des Instruments comparés (1), inaugurèrent, en 1840, les études de phénomènes pério- diques des animaux et des plantes, qui servirent de modèle aux travaux analogues exécutés depuis dans le reste de l'Europe. Vous avez recu les différentes parties de la Météorologie de la Belgique, dont la publication commença, dans les Annales de l'Observatoire, dès Fannée 1845, et dont la fin du deuxième volume fut publiée en 1857. Je vous présente aujourd'hui la Physique du globe, dont le volume imprimé paraîtra dans le cours de cette année. C’est, je pense, le premier ouvrage de ce genre qu’on aura publié. Je serais heureux s’il méritait votre assenti- ment; je pourrais croire que je ne me suis pas trop éloigné du but qu'avait notre ancienne Académie, en remettant le projet de ce travail entre mes mains. Permettez-moi de vous en indiquer sommairement les sujets; presque (4) Ces instruments étaient généreusement donnés par le-gouverne- ment. | | } ! | } ( 181 ) toutes les observations ont été faites dans le jardin de Pob- servatoire , qui devenait indispensable à sa composition (1). Je présente, par forme d'introduction, un résumé mé- téorologique des vingt-cinq premières années de lobserva- toire depuis sa fondation. Ce travail n'avait jusqu’à présent été donné qu’en partie, dans l’ouvrage Sur le Climat de la Belgique , dont les différentes sections ont été publiées successivement : je l’ai cru nécessaire pour former un tout avec l’ouvrage auquel il sert de préambule. Entrant ensuite en matière, je m'occupe du problème des températures de la terre. Les variations occasionnées par les saisons n’agissent guère dans nos climats à plus de vingt-quatre mètres dans l’intérieur du sol, et celles produites, dans l’espace d’un jour, à plus d’un mètre vingt centimètres. Ces observations exigent des précau- tions, parce que la température de la boule du thermo- mètre, à des profondeurs un peu grandes, est en général très-différente de celle du liquide qui s'élève dans le tube jusqu’à la surface de la terre. Le petit nombre d’observa- tions faites dans les couches intérieures du globe n'avaient Jamais été réduites avant les premiers essais d’Arago, qui démontra fort bien la nécessité de ce travail. Je crus de- (1) Je ne crois pas devoir parler en ce moment des études astronomi- ques. La nécessité de terminer les travaux de météorologie et de physique du globe, charge pénible, n'a fait confier temporairement la continua- lion de l'astronomie à mon fils. Il a organisé, sur un nouveau plan, les études que j'avais commencées sur les étoiles doubles et multiples. Déjà il vous à présenté ce plan et les premiers aperçus de son travail, qui com- prendra les positions absolues de cinq à six mille étoilés douées d’un mou- vement propre qu'il s’agit de déterminer. Nôtre trente-deuxième volume des Mémoires contient le premier essai de ce travail, qui l’occupera en- tièrement pendant une dizaine d'années. ( 182 ) voir suivre l'exemple de ce célèbre physicien; MM. Forbes et Rudberg en firent autant pour Édimbourg et Upsal en Suède. Nos résultats, corrigés des variations des tempéra- tures, ont été publiés pour ces trois lieux différents. Mal- heureusement ceux d’Arago n’ont pas subi cette correc- tion; et 1l n’en a pas été fait mention dans la série de ses travaux publiés après sa mort. Pour éviter des pertes de temps à cet habile observateur, j'avais cru devoir lui pro- poser amicalement de me charger de ce travail; mais 1l ne voulut pas y consentir, ni laisser faire par des étrangers, disait-il en riant, un travail qui ne devait s’exécuter qu'à Paris. M. Caldecott, l'observateur de Trevandrum, sur la côte de Malabar, fut moins scrupuleux. Ses précieuses observa- tions sur les températures du sol, faites de 1842 à 1845, furent imprimées avec détail dans les Mémoires de notre Académie (1), et détruisirent l'opinion généralement reçue que ces variations sont nulles dans le voisinage de l’équa- teur. Pour rendre la discussion des températures aussi com- plète que possible, j'ai cru devoir suivre les rayons de chaleur dès leur entrée dans l’atmosphère; je cherche à re- connaître, au moyen de l’actinomètre d'Herschel, ce qu'ils perdent par leur passage dans ce milieu; je détermine en- suite les valeurs qu'ils accusent au thermomètre dans le voisinage du sol, et enfin ce qu'ils deviennent dans la terre jusqu’au moment de leur complète extinction. On s’est peu occupé de rechercher ce que perd un rayon du soleil par son passage à travers l’atmosphère; je ne con- (1) Mémoires de l'Académie de Belgique, 1. XX, 1847. | f | RL (183 ) nais pas même d'observations suivies faites sur cet élé- ment, pendant les différentes saisons de l’année. M. Pouil- let à publié quelques résultats d'expériences, effectuées au moyen du périhéliomètre de son mvention; MM. Forbes et Kämtz ont également cité des valeurs trouvées sur les montagnes de Suisse et dans des circonstances particu- lières. J’ai tâché de rapprocher de mes propres recherches le peu d'observations que j'ai pu trouver à ce sujet. Les résultats calculés par plusieurs physiciens diffèrent d’une manière assez sensible : on aurait tort, sans doute, de supposer que toutes les latitudes doivent accuser une perte semblable. Quand un rayon pénètre verticalement dans notre atmosphère, il perd une partie de sa force plus ou moins grande avant d'arriver à la surface de la terre. En nommant { sa puissance à l’entrée, il ne lui reste plus dans le voisinage du sol que 0,8125 d'après Bouguer, 0,75 à 0,82 — Pouillet, 0,7500 — Leslie, 0,6850 — Forbes, 0,6290 — Quetelet, 0,5889 — Lambert. Les observations de Bruxelles ont été recucillies pen- dant l’espace de onze années, toutes les fois que la séré- nité du ciel le permettait ; et il est assez remarquable que les observations d’une année confirment très-bien celles que donnent les années qui précèdent ou qui suivent. Le second chapitre traite de l'électricité de Pair, en fai- sant la distinction entre l'électricité statique et l'électricité dynamique. Les observations, depuis le commencement de 1845, ont lieu chaque jour à l'heure de midi, et assez ( 184 ) régulièrement à toutes les heures pendant le temps des orages. | L’électricité statique a une marche généralement uni- forme, pendant les temps calmes; sa valeur en janvier vaut à peu près dix fois celle de l'été. Elle est habituellement positive; elle ne devient négative qu’exceptionnellement et pendant les pluies. Les changements de nature de lélec- tricité sont alors très-fréquents : souvent, dans un instant très-court, on voit l’électromètre passer d’une charge extrême positive à une charge extrême négative. Pendant l'hiver et par un ciel serein , l'électricité de l'air est quatre fois plus forte que par un ciel couvert; la diffé- rence devient moimdre en approchant de l'été, et l’on peut dire qu’elle reste la même au mois de juin, que le ciel soit ou couvert Ou serein. La variation diurne n’est pas moins sensible; elle pré- sente un minimum vers rois heures de l’après-midi ; et assez généralement un #naximum vers l'heure la plus froide du jour. L’électricité dynamique ne se manifeste guère d’une manière prononcée que pendant les pluies et les tempêtes. : Ses mouvements ne sont pas moins Curieux, dans ces In- stants, que ceux de l'aiguille qui marque l'électricité sla- tique de l'atmosphère. ‘ Les résultats obtenus sur le Vésuve ont donné lieu à des comparaisons extrêmement curieuses, que l'observateur M. Palmieri a faites avec les observations de Bruxelles (4). Ces sortes de recherches sont encore très-rares, et, il (1) Voyez les publications de M. Palmieri, dans les Mémoires de l'Aca- demie de Naples, et dans l'ouvrage Sur le Climat de la Belgique, chapitre de l’Hygrometrie, page 58. | | Le ns Éf ( 185 ) faut bien en convenir, elles exigent les conditions les plus difficiles pour que Paiguiile puisse fonctionner avec toute liberté. Je ne connais guère que les résultats de Kew et ceux de Munich, recueillis par M. Lamont, qui soient régulière- ment enregistrés. La marche des nombres est la même; . mais la valeur individuelle est sensiblement différente. De- puis plusieurs années, M. le professeur Duprez fait obli- geamment de pareilles observations, à Gand, avec un ap- pareil semblable au mien , et en suivant exactement la même marche qu'à Bruxelles; mais ses valeurs, quoique recueillies au sommet d’un toit, sont beaucoup moindres que les miennes, parce que ce toit est dominé par l’action des constructions voisines. L’électromèêtre , n’en doutons pas, sera de la plus grande utilité pour l'observateur, mais il faudra qu’on s'accorde sur la manière d'observer et sur la forme des instruments à employer. Un troisième chapitre de l'ouvrage traite avec détail de tout ce qui concerne le magnétisme terrestre à Bruxelles ; c'est peut-être la partie de la physique du globe qui a le plus fixé mon attention et qui a exigé le plus d’assiduité. Jusqu'en 1828, le magnétisme terrestre n'avait, pour ainsi dire, point été étudié dans nos contrées : ces sortes de recherches manquaient absolument. Au moyen d’excel- lents instruments anglais, je commencai ee genre d'étude avant même que l'observatoire füt achevé. Je déterminai d'abord avec soin, dans le jardin, la déclinaison et l’incli- naison de aiguille. Gn y construisit ensuite, pour les observations magnétiques, un cabinet tout spécial d’où l'emploi du fer fut soigneusement écarté. Fy continuai toutes mes observations sur l'intensité absolue de la force magnétique, et je profitai de plusieurs voyages pour réunir 2"€ SÉRIE, TOME XI. 15 ( 186 ) à ces mêmes recherches celles que je fis dans le reste du pays, en Allemagne, en Italie, er Suisse et en France. Je parcourus deux fois l'Italie, en 1850 et en 1839; mon fils ajouta à mes premières recherches celles qu'il fit, en 1858, en Allemagne et en Hollande; plus tard, il recueillit celles d'Athènes et de la Grèce; ces dernières n’avaient pas encore été déterminées, du moins à notre connaissance. Le cabinet magnétique du jardin de l'observatoire fut bientôt connu des physiciens; et la plupart des savants qui se sont occupés de la physique du globe , voulurent y com- parer leurs instruments. M. le général Sabine y observa, le premier, l'intensité magnétique dès l’année 1828; il y fat suivi par MM. Rudberg, d'Upsal; Forbes, d'Édimbourg; Bache, de Philadelphie; Nicollet, de Paris; Langsberg, de Christiania; Lamont de Munich; Kæmtz, de Dorpat, en Russie; Mahmoud Effendi, du Caire, en Égypte, ete.; en sorte que la position magnétique de Bruxelles est au- Jjourd'hui l’une de celles que l'on connaît le mieux. Je ne me bornai pas à déterminer les valeurs absolues du magnétisme : de 1840 à 1845, je pris part au système d'observations que les différents observatoires d’Allema- gne , à la demande du célèbre Gauss, avaient entrepris de faire à des intervalles de cinq en einq minutes, pour con- naître les variations simultanées qu'éprouve le magné- tisme (1). Presque en même temps, pour compléter nos (1) A la séance du 7 mai 1855, M. Babbage fit connaître que sir J. Her- schel avait formé le projet d'organiser un système d'observations météo- rologiques. Par une lettre écrite du cap de Bonne-Espérance, où ce dernier savant observait alors, il indiquait quatre jours (le 21 décembre, le 21 mars, le 21 juin et le 21 septembre) pendant lesquels on ferait, durant trente- six heures consécutives des observations du baromètre et du thermo- mètre, ete. Ce système fut adopté par l'observatoire de Bruxelles au mois : 187 ) travaux , je pris la résolution, en 1841 , d'accepter le plan de travail que l’illustre de Hamboldt proposait pour le monde entier. Pendant sept ans et demi, le magnétisme et les divers instruments de la physique du globe furent observés simultanément, jour et nuit, de deux en deux heures. Le nombre des stations en Europe était de cinq à six, ét il était à peu près le même pour les trois autres parties du globe. Tous ces travaux, relatifs à la re sont réunis et discutés dans le volume qui va paraître. J’y joins en même temps les remarques du célèbre Hansteen , le savant le plus profond de cette époque pour l’étude de ces sortes de phé- nomèênes. Dans le quatrième chapitre de l’ouvrage, J'ai traité sépa- rément des étoiles filantes, sujet intéressant et encore nou- veau, malgré les recherches nombreuses auxquelles 1l à donné lieu dans ces derniers temps. Jusqu’à la fin du siècle passé, il avait à peine excité la curiosité de quelques savants, qui en aväient vu les effets sans en rechercher les causes. J'eus occasion de m'en occuper, en 1822, d'une manière toute spéciale : j'essayai de déterminer la hauteur, la vitesse, la distance apparente, le nombre dé ces météores (1); je ‘de juin suivant, et successivement par plusieurs savants belges. Sir John Herschel revint ensuite en Europe, et me conseilla de poursuivre ce genre, d'observations ; ce que je fis en effet, en y joignant le magnétisme ; et près de quatre-vingts observatoires, sur différents points du globe, me firent part de leurs observations simultanées, que vous avez bien voulu imprimer dans nos Bulletins et dans nos Mémoires. Cependant, au commencement de 1844, je me vis dans l'impossibilité de continuer seul un aussi vaste travail. M. Lamont voulut bien s’en charger, mais il y renonça également l’année suivante. (1) J'étais aidé dans mes recherches par MM. Van Rees, Plateau, Le- ( 188 ) publiai en même temps le premier catalogue que lon ait donné de leurs apparitions extraordinaires, dont j’indi- quai quelques-unes peu ou point connues jusqu'alors. Ce sujet me mit en relation suivie avec Brandès, Benzenberg, de Humboldt, Olbers, Arago, Herrick et plusieurs autres savants distingués qui s’en étaient occupés les premiers. Plus tard, l’illustre Laplace, dans une des séances du bu- reau des longitudes de France, voulut bien me demander ce que l'expérience m'avait appris sur ces météores, et ses paroles ne furent pas un des moindres encouragements que je reçus de la science (1). Je ne pense pas que, dans l’état actuel de nos connais- sances sur la nature de notre atmosphère, nous puissions parvenir à une explication complète sur les étoiles filantes. Nous connaissons assez bien les faits, mais nous devrons modifier nos hypothèses sur leur origine. C’est aussi l'avis de plusieurs savants de mérite, qui, sans aucun doute, exprimeront leurs idées à cet égard, comme j’essayerai de produire les miennes. Le jardin de l’observatoire m'offre les facilités requises pour ce genre d’études, qui m'occupe depuis plus de qua- rante-cinq ans et qui me fournit la preuve la plus con- vaincante de l’insuffisance de nos lumières sur la compo- sition des régions supérieures de notre atmosphère. clercq, Jaymart et Crocq à Liége; par MM. Morren et Manderlier à Gand; par MM. Vanderlinden, Groetaers frères, De Man, de Bavay, etc., à Bruxelles. Voyez Catalogue des principales apparilions d'étoiles filantes, par Ad. Quetelet; MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BRUXELLES, t. XII, ann. 1859. (1) Voyez ma Correspondance mathématique et spécialement le £. IF, ainsi que les deux mémoires sur les étoiles filantes, insérés dans les tomes XII et XV des Mémoires de l'Académie royale de Bruxelles, années 1839 et 1842. ( 189 ) Dans un chapitre suivant, je réunis le résultat des obser- vations périodiques sur les plantes et les animaux. Ces curieuses études avaient été commencées par le célèbre Limné, et par plusieurs de ses amis; mais comme les con- ditions d’exactitude n'avaient pas été suffisamment rem- plies, ces recherches furent abandonnées après quelques années. Son illustre compatriote Berzélius voulut bien applaudir à mes premiers essais et y associer son pays (1). Le savant Robert Brown, en passant par Bruxelles, m’ap- puya également de son suffrage. C’est surtout en m'aidant de vos conseils, mes chers col- lègues, et en même temps de votre appui, que je parvins, il y a vingt-deux ans, à cultiver, dans le jardin de l’obser- vatoire, ce genre d'observations, et à en répandre le goût dans ce pays et chez les peuples voisins (2). Vers la même (1) Bulletins de l'Académie, année 1846, t. XIIF, {re partie, p. 654 : « M. Quetelet donne communication d’une lettre, dans laquelle M. Berzé- lius lui annonce que l’Académie royale de Stockholm a nommé une com- mission de quatre savants pour régulariser et étendre, en Suède, l'étude des phénomènes périodiques. etc. » (2) La note suivante, imprimée dans le programme des observations qui parut le 25 avril 1853, pourra donner une idée du succès qu'’obtint dès lors le système des observations des phénomènes périodiques. « Les observations sur la floraison ont été commencées en 1839, dans le jardin de l’observatoire royal de Bruxelles. Ces résultats, obtenus en 1859 et 1840, ont été imprimés à la suite des observations sur la météoro- logie et sur le magnétisme et les températures de la terre en 1840, dans le tome XIV des Mémoires de l'Académie royale. En 1841 ont commencé les observations simultanées auxquelles ont pris part MM. Kickx, Can- traine et J. Donkelaer, à Gand; Martens, à Louvain; Morren, V. Deville et de Selys-Longchamps, à Liége; Robyns et le docteur Gastone, à Bruxelles. » Ge système d'observations a pris depuis un nouveau développement, et s’est étendu au delà des frontières de la Belgique. Les nouveaux obser- vateurs ont été : MM. Van Beneden, Schwann, de Spoelberg, Debroe et ( 190 ) époque, l’idée de faire de pareilles recherches s’étendit en Allemagne par les soins de M. Fritsch; et dans le congrès statistique de Vienne, en 1858, il fut résolu, à la suite d’une discussion approfondie devant les savants les plus ‘illustres de vingt-six nations différentes, qu’il serait adopté un règlement d'observations uniformes, dont il ne faudrait plus se départir. M. Fritsch et moi nous fûmes désignés pour présenter au congrès de Londres le programme, qui fut aussi admis par l’Académie impériale de Vienne. C’est ce programme qu’il convient d'adopter désormais. Nève, à Louvain ; Galeotti, Gluge et Vincent, à Bruxelles; Frédérieq, Spaé el J.-B. Blancquaert, à Gand; Forster, à Bruges; Mac-Leod, à Ostende; Sommé , à Anvers ; Ed. Blancquaert, à Turnhout ; Van Oyen, à S'-Trond; Spring, à Liége ; Ghaye, à Waremme ; Dewalque, à Liége et à Stayelot; Gerardi, Husson et Lesquoy, à Virton; Brabant, Bach et Bellynck, à Na- mur ; De Caisne et Dureau de la Malle, à Paris; Robert, à Meudon; Roc- quemaurel et Benoist , à Valognes; Grosbois, à Landres; Moreau et Fleu- rot, à Dijon; Lereboullet, à Strasbourg; Bravais, à Lyon; d'Hombres Firmas, à Alais; Valz, à Marseille; Costa, à Naples; Scherer, Camille Rondani, Passerini et Colla dans le Parmesan; Zantedeschi, à Venise; De Pierré, Wartmarn, Chavannes et Espérandieu, dans le canton de Vaud ; Zillner, à Salzbourg; de Martius, Lommler, Schmid, Erhard et Seitz, à Munich ; Heis, à Aix-la-Chapelle ; Brenneke, à Jever, grand-duché d'Ol- denbourg; Hess et Dohrn, à Stettin; Kupffer et Docngingu en Russie; Jenyns et Birt dans le Cambridgeshire, Couch dans le Cornouaïlles ; Black- wall dans le pays de Galles; Broun, à Makerstoun, Écosse ; Van Hall, à Gro- ningue ; Breitenstein, à Utrecht; Brants, à Deventer; Staring, à Lochem, Gueldre; Martini van Geffen, à Bois-le-Duc; et la Société d’horticulture d'Utrecht, qui à bien voulu former le point central pour les observations à recueillir dans le royaume des Pays-Bas, comme le savant conseiller de Martius a eu l'obligeance de le faire pour la Bavière et l'Allemagne en géné- ral. Les nouveaux secours qui ont été promis sur les différents points du globe , permettent d'espérer que nous serons bientôt à même de tirer les résultats les plus heureux d’une association aussi étendue. Parmi les so- ciétés qui ont promis leur appui, nous citerons en particulier l'Association ES ( 4 ) Le résumé de mes recherches et de celles de mes collè- gues en Belgique paraît annuellement dans les Mémoires de l’Académie. J'ai essayé, dans l’ouvrage Sur la physique du globe, d'en présenter les principaux résultats et de faire comprendre en même temps ce que cette étude présente d’instructif et d’utile : il est curieux de voir com- ment tout ce qui respire, comment tout ce qui porte un germe d'existence se développe et se modifie selon les sai- sons et les circonstances qui nous entourent. Parmi les phénomènes de la physique du globe, je ne britannique pour l'avancement des sciences, la Société d'agriculture et de botanique d'Utrecht; la Société géographique de Berlin ; la Société en- tomologique de Stettin ; la Société finlandaise des sciences établie à Helsing- fords; l’Académie impériale de St-Pétersbourg ; la Société impériale des naturalistes de Moscou ; la Société royale de botanique de Ratisbonne; la Société naturelle Wurtembourgeoise ; l'Association helvétique des sciences naturelles ; la Société Vaudoise établie à Lausanne ; la Société météorolo- gique de Versailles; la Société d’horticulture de Strasbourg; la Réunion scientifique italienne; l'Association météorologique établie à Florence; l’Institut national de Washington et la Société philosophique de Philadel- phie. Mais nous devons nous applaudir surtout de ce qu’un des plus illustres compatriotes de Linné, Berzelius, ait parlé naguère en faveur de notre croisade scientifique dans cette même Académie de Stockholm, où l’idée en a été conçue pour la première fois, il y a un siècle environ. » M. de Selys-Longchamps a fait naître l’idée d'observer, aux époques iixes des équinoxes et des solstices, l’état de la végétation et du règne animal : M. Schwann, pour compléter le système d’observations, avait également demandé des recherches périodiques relatives à l'homme. La liste des observateurs s’est considérablement augmentée depuis 1855 ; nous nous bornerons à citer, pour la Belgique, MM. Alfred Wesmael, à Vilvorde ; Rigouts Vexbert, à Anvers; Lejeune, à Thourout; Ed. Lanz- weert, à Ostende; Em. Rodigas, à Lierre; Emile Dewael, à Eeckeren, Bernardin, à Melle; et pour les phénomènes météorologiques, MM. Du- prez; à Gand; Maas, à Namur; Le Clercq, à Liége; Loppens, à Arlon, et J. Cavalier, à Ostende. ( 492 ) dois pas omettre de mentionner aussi celui des marées. M. Whewell, qui s’en occupait avee M. Lubbock, s'était adressé à notre gouvernement pour obtenir des observa-. tions sur nos côtes, comme on avait promis d'en recueillir en Hollande, en France et tout le long du littoral de l’Europe. Ces observations, dont la direction me fut confiée pour notre pays, et dont M. Mailly fit le calcul (1), présen- tent un grand intérêt, et elles méritaient sous tous les rapports de prendre place parmi les phénomènes observés dans notre royaume. Je ne dois pas omettre non plus, en tant qu’il con- cerne nos côtes, de parler du plan de recherches mari- times que M. Maury a développé, d’une manière si précise, à la réunion des marins des différents pays qui eut lieu à Bruxelles en 1855. Je viens d'indiquer les principales parties qui doivent composer l’ouvrage que je compte vous présenter bientôt. J'ose espérer qu’elles vous paraïîtront dignes de fixer votre attention. Ces observations méritaient, me semble-t-il, de trouver, dans ce pays comme à l'étranger, des amis des sciences qui voulussent bien s’en occuper : trop heureux si je continue à rencontrer chez eux l'appui qui m'était néces- saire pour finir ce grand travail, et autour de l’observatoire le coin de terre indispensable à mes pénibles observations. (1) Mémoires de l'Académie royale, tome XI, année 1838. (195) Considérations sur la nature des corps simples ; par M. Martens, membre de l’Académie. Lorsqu'on songe à la simplicité que met la nature dans tous ses procédés, quand on la voit produire partout un _grand nombre d'effets avec un petit nombre d'agents ou de forces, on doit naturellement se demander si elle avait besoin de soixante corps simples, de soixante substances matérielles essentiellement distinctes, pour produire la grande variété de corps connus qui composent la croûte de notre globe. Les cristallographes ne manqueront pas de ré- soudre cette question négativement , eux qui ont constaté que, quoique la forme des cristaux soit si variable et offre des diversités si nombreuses, l’analyse est parvenue à les ramener à un petit nombre de formes primitives ou fonda- mentales ; et l'illustre Haüy avait déjà proclamé cette loi remarquable, qu'avec trois molécules cristallines fonda- mentales, le prisme triangulaire, le parallélipipède et le tétraèdre , on pouvait construire cette variété presque infinie de eristaux que la nature nous présente. Les derniers tra- vaux des cristallographes modernes n’ont pas infirmé cette loi, pourvu que l’on admette une certaine variabilité des angles des molécules cristallines de Haüy, molécules qui ne sont autre chose que les particules physiques ou les groupes atomiques physiquement indivisibles des corps. Le règne végétal nous offre aussi des exemples de cette grande simplicité dans les productions naturelles. Qui ne connaît l’immense variété des couleurs des fleurs ? et ee- pendant toutes ces couleurs si diverses dérivent de deux couleurs fondamentales, un principe colorant jaune et un ( 194 ) principe colorant bleu, qui, modifiés par des agents chi- miques et parfois plus ou moins mélangés, donnent cette infinie variété de teintes qui parent les fleurs de nos champs et de nos jardins. % En présence de pareils résultats, 1l est difficile d’admet- tre la nécessité de soixante corps simples essentiellement différents en nature et qui ne pourraient dériver l’un de l’autre, même par des voies qui nous sont encore incon- nues jusqu'ici. Toutefois lorsqu'on voit des corps composés , formés des mêmes ingrédients dans les mêmes rapports de poids, con- stituer des corps tout à fait différents, on doit naturellement se demander si la même cause qui produit cette diversité dans les corps composés polymères ne pourrait pas produire un effet analogue dans les corps simples, et nous offrir ainsi deux ou plusieurs corps indécomposables, substantielle- ment identiques, et différant cependant complétement par leurs propriétés. Un exemple fera mieux saisir ma pensée. Tous les chimistes savent que l'essence de térébenthine et l'essence de citron sont deux corps parfaitement dis- tincts, quoique formés tous les deux de carbone et d'hy- drogène dans le même rapport de poids : ce sont deux substances isomères, et dont l’isomérie s'explique par là différence de poids de leur molécule chimique ou, comme on le dit, de leur équivalent, qui, dans l'essence de téré- benthine, est double de celui de l'essence de citron. Or, comme parmi les corps simples, l’hydrogène est celui dont la molécule chimique est la moins pesante, on comprend que si celle des autres corps simples était toujours un multiple exact de celle de l'hydrogène, on pourrait présu- mer qu'il n’y a entre la constitution matérielle de ces divers corps d'autre différence essentielle que celle qui existe ( 495 entre les essences de térébenthine et de citron, c’est-à-dire qu'ils sont tous formés par la même substance prise avec un équivalent plus ou moins multiple ou dont les molécules chimiques se sont plus ou moins agglomérées, de manière à produire des corps polymériques distincts par leurs pro- priétés, et dont la molécule de l'hydrogène ou bien son atome serait le point de départ. Admettre de pareilles ana- logies de composition ou de constitution entre les corps simples, c’est tout simplement transporter à ces derniers la polymérie dont l'existence a été reconnue depuis long- temps dans les corps composés. Rien ne s'oppose, au pre- mier aspect, à cette manière de voir. Elle est conforme à l’économie" des moyens que met la nature dans tous ses procédés. Mais si on l’examine dans ses conséquences, on trouve quelques difficultés à l’admettre. Remarquons, en effet, que tous les corps composés po- Iymères ont généralement des propriétés analogues ou similaires, tels sont les carbures hydriques à formule gé- nérale C° H”. La polymérie, tout en constituant des corps très-distincts, ne leur enlève pas une certaine analogie de caractères ou de propriétés fondamentales, dépendant sans doute de l'identité de leur nature intime. D’après cela, si les corps simples étaient tous des corps polymères dérivant de l’un d’eux, et possédaient aïnsi la même nature intime, ils offriraient naturellement une grande analogie de propriétés, et on pourrait nourrir l’es- poir de les transformer un jour l’un dans l’autre, comme on est parvenu à le faire pour l'essence de citron et l’es- sence de térébenthine. Mais les choses sont loin de se pré- senter sous cet aspect. Les corps simples, et bornons-nous pour le moment aux métalloïdes, sont loin d'offrir des caractères analogues ou ( 196 ) des propriétés similaires. L’hydrogène et le carbone s’éloi- gnent considérablement de l'oxygène, du soufre et du sé- lénium, et si ces trois derniers corps ont des caractères semblables qui permettraient d'en faire des corps poly- mères, il n’en est pas de même de l'hydrogène et de l'oxy- oène, de l'hydrogène et du chlore, etc. Les caractères électro-chimiques seuls suffisent pour différencier ces corps du tout au tout. Aussi le dualisme électrique, point de départ de presque toutes les réactions chimiques, est, sui- vant moi, abstraction faite des données de l'analyse, le principal obstacle à l'admission d’une matière unique ou d’une seule substance matérielle fondamentale dont les atomes, par leur condensation ou agglomération en molé- cules nouvelles indivisibles, produiraient les divers corps simples connus. Cette hypothèse, qui sourit à l'imagination des partisans de la loi de Prout , ne me paraît guère admis- sible, même à priori, en présence de l’opposition de carac- tères que présentent un trop grand nombre de corps simples. Les corps franchement ou généraïement éleetro-positifs et ceux qui sont, au contraire, le plus souvent électro- négatifs ne me paraissent pas pouvoir offrir le même point de départ ou être constitués essentiellement par la même substance. Mais si l’on prend des corps simples à qualités électriques analogues, et offrant par cela même une cer- taime similitude de propriétés chimiques, rien ne s'oppose à admettre une certaine polymérie entre ces corps. Ainsi si l’équivalent du soufre est exactement le double de celui de l'oxygène, il est possible et même vraisemblable qu'il existe entre ces deux corps une véritable polymérie; on pourra en dire autant du fluor, du chlore, du brome et de l'iode, qui ont peut-être pour point de départ une seule et même substance matérielle, dont l'atome pourrait bien : (19 ) n'être qu'une fraction simple de l’équivalent de lun d'eux, de la même manière que atome de l'hydrogène n’est que la moitié de son équivalent, ainsi que Pexige la loi de Dulong et Petit, qui assigne à tous les gaz simples peu ou point liqué- fiables le même nombre d’atomes sous le même volume, vu que ces gaz ont, à égalité de volume, la même capacité pour la chaleur, conformément aux données de l’expérience. FI n’y aurait donc rien de surprenant qu'il n’v eût qu'un petit nombre de substances matérielles essentiellement simples et distinctes, formant le point de départ de tous les corps dits simples ou indécomposabies. Pour que cette idée, qui jusqu'ici n’est qu'une simple vue de l'esprit, püt acquérir quelque probabilité scienti- lique, 1l faudrait toutefois que l’expérience démontràt que les corps simples électro-positifs ayant des propriétés ana- logues à celles de l'hydrogène, ont un équivalent multiple de celui de ce dernier, ou plutôt de son poids atomique, qui est la moitié de son équivalent, et que les autres corps simples pussent aussi se réunir en un petit nombre de groupes de corps similaires offrant un rapport numérique simple entre leurs équivalents, de manière que l’un d'eux püt former le point de départ de tous les autres corps du même groupe (1). il serait du plus haut intérêt que les recherches des chi- inistes se dirigeassent vers ce nouveau point de vue, pour voir s'il y a quelque loi simple qui permette de diviser les © —© 2 ———— ——— —— ————— ——_——— (1) Depuis la rédaction de cette notice, j'ai reconnu que lidée de l'exis- tence probable de plus d’un corps simple, servant chacur de base ou de point de départ à plusieurs autres, avait déjà été émise par M. Regnault, dans son Cours de chimie, tome [, page 386; mais ce savant chimiste n’a apporté aucune considération à l'appui de son opinion. ( 198 ) corps jusqu'ici indécomposables en un petit nombre de groupes, dans chacun desquels tous les corps dériveraient de l’un d'eux, offrant pour base l’atome de ce dernier, qui pourrait même n'être qu’une fraction simple de son équi- valent, comme dans les corps à équivalent polyatomique. Ces recherches seraient d'autant plus opportunes, que les travaux récents de notre savant collègue, M. Stas, ont fait disparaître le dernier espoir des partisans de la loi de Prout: et si, comme nous devons l'espérer, ces travaux, prenant une nouvelle extension, parviennent à embrasser les prin- cipaux corps simples, ceux surtout dont les analogies de propriétés paraissent assez bien établies, il serait intéres- sant de voir si, entre les poids atomiques ou moléculaires de ces corps, il n'existerait pas quelques relations qui per- mettraient de réduire tous les corps simples connus à un petit nombre de groupes où de séries, offrant une même base de composition ; ce qui à la loi de Prout, reconnue défectueuse, substituerait une autre loi naturelle, non moins féconde en déductions philosophiques. Notons ici, pour terminer, que ces groupes de corps st- milaires n'auraient pas besoin de renfermer des substances absolument polymériques entre elles. Car, depuis la décou- verte des radicaux multiples jouant le rôle de corps sim- ples, il est possible que plusieurs de nos corps simples ne soient que des radicaux multiples jusqu'ici mdécomposés, et dès lors il se pourrait que bon nombre de ces radicaux fussent analogues par leur composition et par leurs pro- priétés, sans offrir un rapport numérique simple entre leurs équivalents (1). On peut donc toujours espérer de voir, (1) Le groupe des radicaux C?* H?* +1 ne renferme pas de corps pols- mériques. LL (499 ) dans un avenir plus ou moins éloigné, le nombre de corps simples se réduire considérablement; et déjà, nous pou- vons le déclarer, les recherches de Pillustre chimiste M. Dumas sur les équivalents des corps simples, publiées er 1859, sont loin d’être contraires par leurs résultats aux vues spéculatives que nous venons d’émeitre. M. Van Beneden donne lecture de la note qui suit-et qui a pour objet de rectifier un des passages du discours pro- noncé par lui à la séance publique du mois de décembre : « Le discours que j'ai eu l'honneur de lire à la dernière séance publique de la classe renferme le passage suivant : « C’est une des lois principales de la zoologie géographi- » que, que les plus grands mammifères terrestres appar- » tiennent tous au plus grand continent, et qu'il existe un » rapport véritable entre la taille des mammifères et l’éten- » due du terrain qu’ils habitent. » Puis j'ajoutais : « On à » même remarqué , et je crois que c'est Agassiz qui, le pre- » mier, a fait cette observation, que, dans chaque groupe » naturel, les espèces aquatiques sont toujours supérieures » en taille aux espèces terrestres. » Cette dernière asserlion n’est pas exacte, et je demande à l’Académie la permission de la rectifier. L’honneur de ces belles observations revient non à M. Agassiz, comme je l’avais cru, mais à M. Isidore Geoffroy- Saint-Hilaire. Dans un mémoire présenté à l’Institut, en 1851 (1), et qui a été reproduit plus tard dans les Essais de zoologie géné- (1) Mémoires des savants etrangers, t. UT, p. 505; 1853. ( 200 ) rale (1), le savant professeur du Muséum y expose avec cette lucidité qui distingue tous ses travaux , mdépendam- ment des rapports des variations de la taille des mam- mifères avec leur genre de vie et le lieu d'habitation, - les rapports entre la tailie, le genre de nourriture et le climat; « tous les animaux, dit-il, qui habitent au sein des eaux où y passent une partie de leur vie, parviennent à une grande taille, comparativement avec les autres ani- maux du groupe auquel ils appartiennent; et 1l semble même que l’accroissement de leurs dimensions soit en raison directe de la durée de leur séjour dans l’eau. » On ne peut s'exprimer plus clairement. » J’ajouterai que si je n’ai pas cité le nom de M. Isidore Geoffroy-Saint-Hilaire, en parlant des rapports qui exis- tent entre la taille des mammifères et l’étendue des conti- nents, c'est qu'à mes yeux, comme aux veux de tous les zoologistes, le nom du savant professeur du Muséum est pour toujours attaché à ces brillantes études de zoologie générale. » Remarques sur la théorie des équations différentielles li- néaires; par M. Ph. Gilbert, professeur à l'Université de Louvain. On sait que, pour former l'intégrale générale d’une équation différentielle linéaire de l’ordre n, à second mem- bre nul, il suffit généralement d'ajouter, après les avoir multipliées par des constantes arbitraires, n intégrales (1) Suites à Buffon; Paris, 1841. ( 207 ) particulières de cette équation. Il est cependant certains cas où celte propriété cesse évidemment d’avoir lieu, comme lorsque l’une des intégrales particulières est la somme de deux autres, et en y regardant avec un peu d'attention, on voit qu'il est absolument nécessaire de donner une détermination précise et une démonstration suffisante des conditions sous lesquelles, le nombre des _ constantes arbitraires se réduisant, on tombe dans ces cas d'exceptions. J’ai donc pensé faire une chose utile en dé- montrant d'abord directement la forme générale de linté- grale complète d’une équation de ce genre, et en cherchant à établir exactement quelles conditions doivent remplir intégrales particulières de l'équation, prises au hasard, pour que l’on en puisse déduire l'intégrale complète par la règle citée plus haut. | Mon but étant atteint, il en résulte des rapprochements qui m'ont conduit à des résultats que j'ai jugés assez curieux pour être consignés dans cette note. ÏJ. On peut démontrer d’une manière rigoureuse que l'intégrale générale de toute équation linéaire de la forme : : D» dy : dy k 1 | TR en pra + ss + Re Xos Nu, .... X, , étant des fonctions données de x, est nécessairement de la forme : (2) SUMMER y — (US Êre Cr Secret C,Y, , Y,, Y2,.... Y, étant certaines intégrales particulières de l'équation (1), et C,, C,,.... C, des constantes arbitraires. 2€ SÉRIE, TOME XI. 14 ( 202 ) Prenons, pour plus de clarté, une équation du quatrième ordre : d° dy FRA Re pr + Xoy = 0. d'y L2 L2 L L2 ST Ç ayuiX (e) és ? da? dx dx* ‘de Comme elle a une intégrale, admettons que l’on connaisse une fonction déterminée Y, qui vérifie cette équation. Toute fonction y qui vérifie l'équation (x) peut être repré- sentée par y— Y,s, s étant une nouvelle fonction incon- nue; on ire de là : dy dY, . ds —— NS ———— dx dx ‘ dx? dy dY, ds dY, : ds RU NEC A nc — UC ES dx? dx? dx dx "de ; et en substituant les valeurs de y, _ ... dans l’équa- tion (+), le terme en s disparaîtra, parce que Y, est déjà une intégrale de l'équation, divisant tout par: Y;, faisant 2 — uw, et désignant par X,/, X;/,... de nouvelles fonc- tions connues de x, on aura de l'équation suivante en x. d’où il suit que toute intégrale de l’équation « est ren- fermée dans l’expression : nu — SA + fu dx), la fonction « étant assujettie à vérifier l'équation (6); C, la constante de l'intégrale fudx, mise en évidence. — L’équa- ( 203 ) tion (G) étant de même forme que la première, jouit de la même propriété : toute fonction % qui y satisfait est ren- fermée dans l'expression : uw — Vite + f vds), U, étant une intégrale particulière de l’équation (5), C; une constante, v une nouvelle inconnue qui vérifie l'équation du second ordre : où X,/’, X,'’ sont des fonctions connues de x. — De même, si V, est une intégrale particulière de (y), toute fonction v qui satisfait à cette équation est renfermée dans la for- mule : UN(E; + f z dx), et la fonction z doit satisfaire à l'équation du premier ordre : dz : nn ENT 12 —10, dx où X,//! est une fonction connue de x. Enfin, soit Z, une intégrale particulière de cette équation, il est clair que son intégrale générale est C, Z,, C, étant une constante arbi- traire, en sorte que la fonction inconnue z est nécessaire- ment comprise dans l'expression z —C, Z,; rapprochant ces divers résultats, on voit sans peine que toute fonc- tion y, pour vérifier l'équation (&), doit nécessairement être comprise dans celle-ci : H— CM, + CY: f U du + Ci / U de [V, dE + GE, Yi SU dx f°V, dxf Zi da ( 204 ) et que cette condition suffit d’ailleurs, quels que soient GC, GC, G, G; d'où il suit qu’en regardant C, C:, G, G comme des constantes arbitraires, l’équation précédente est bien l'intégrale générale de l’équation (x). D'ailleurs, il est évident que Y,/ Udr, YA A0e dx f Ndx, . : 2 : SON autant d’intégrales particulières de l’équation (+), que l’on peut désigner par Y,, Y:,.... donc, l’intégrale générale de équation (2) est bien de Ia forme : y = GY, + DA + CT + CV et la démonstration s'étendant à une équation d'ordre quel- conque, 1} en résulte la proposition énoncée. Remarque. — suit visiblement de cette démonstration que la connaissance d’une intégrale particulière de léqua- tion (1) permet d’abaisser d’une unité l’ordre de l'équation, et que l'équation (1) ne pourrait avoir aucune solution singulière. JL. Supposons done que l’on ait trouvé, d’une manière quelconque, » intégrales particulières y,,y:,.…. y, de l’équa- tion (1), et déterminons sous quelles conditions ces » inté- grales, multipliées par des constantes arbitraires et ajou- tées, donneront l'intégrale générale. D'abord, y, y2,.. ..y, sont comprises dans l’intégrale générale (2), puisque ce sont des intégrales particulières. On a done : V1 = Hits + UeY à = Voie set À Cf Ya —— DA, | 1 28 +- dre s lat ie + 2e À pet eu C'OECDPR PE SR PA PE PE + JTE Bis as oo à On (us De, - «+ . étant certaines constantesties ( 205 ) terminées. En multipliant ces n intégrales par des con- stantes arbitraires À,, À,,....A,, et les ajoutant, on 2 : Agir Age + + A,y, = (oi + BA +. + 2,A,) Ÿ, + (A: + BA; À os + ),A,) Y> D TE . + (a, Ai + Bo + + 2,A,) Ya, d'où il suit que, pour que À,y, + Aoy: + .... + À,y, de- vienne identique à l’intégrale générale (2), il suffit de poser: il | A, 3= BA» SÉ caoo se HA, —= C, PANDA qu enle" LA = G Re. Œ Na + D A2 Hocsns LA À —=0C,; n ? et il faut que, quelques valeurs que l’on attribue aux constantes C,, C:, .... C,, le système (4) fournisse pour A,, À:,.... AÀ,, des valeurs finies et déterminées; en d’autres termes, il est nécessaire et suffisant pour que l'expression : y = Aiyi + AY + ..... + À y, soit vraiment l'intégrale générale de l’équation (1), que le dénominateur commun des équations (4), c'est-à-dire le déterminant : y En senc s 4 9 B; CR 9 NU — CNE TOME RTS E ne soit pas égal à zéro. ( 206 ) TT. Mais cette condition peut être ramenée à des termes plus simples, car nous allons faire voir que : 1° Si le déterminant A est nul, les fonctions y, y: ,....%, satisfont nécessairement à une équation de la forme : (b) nsc sie AY: + Asy2 Ca me MP Se = = A,y, —= 0 » A,,A:,.... A, étant des constantes déterminées qui ne sont pas toutes nulles. En effet, en faisant C,, C,,....0C, nuls dans les équations (4), on à : A4 + B,A; het + AA, — 0 À, + BA» RU er de nee + A, = 0 LG ; an A + BAa + ..... + 1,4, = et l’on sait par la théorie générale des équations du pre- mier degré que, si le déterminant À — 0, il sera toujours possible de satisfaire à ce système d'équations par des va- leurs de À,, À,,.... À, qui ne soient pas toutes nulles : c’est d’ailleurs ce qu’il serait facile de démontrer directe- ment. Ces équations détermineront les rapports seuls des constantes À,, À,,.... A, qui ne sont pas nulles. — On voit donc par là que l’on pourra toujours trouver pour À,, A:,....A, des valeurs telles, que l'intégrale (2) s’éva- nouisse, x restant quelconque, ou, en d’autres termes, que l’équation (5) ait lieu, si A— 0. D'où il suit évidem- ment que, si l'équation (5) est impossible, à moins de poser À, — ÀA,—...— AÀ,— 0, le détermmantames pas nul, et, par conséquent, l'expression y — A,y, + A,y +... + À, y, est l'intégrale générale de l'équation (1), A,,... A, étant arbitraires, (20 ) 2 Réciproquement, si les fonctions y, y:, . .. y, Satis- font à une relation de la forme : , (5) notes stre AY: + Aa D NO EC + A,y, — O0, il faut nécessairement que le déterminant A soit nul. — En effet, substituant dans l’équation (5) les valeurs y,,%,..., en Ÿ,,etc., données par les équations (3), et observant que, d’après ce qui vient d’être établi, les fonctions Y,, V,, ... Y, ne peuvent satisfaire à l’équation ainsi obtenue, à moins que leurs coefficients ne soient tous nuls séparément, on aura entre les constantes À,, À,,... A,, n équations, qui ne diffèrent pas des équations (6), ou des équations (4) dans lesquelles on fait C,, C,... C, égaux à zéro. Or, il est encore évident que ces équations (6) ne peuvent être satisfaites par des valeurs de A,, A, ... À, différentes de zéro, à moins que le dénominateur commun des valeurs de À,,A,,...A,, ou le déterminant À, ne soit égal à zéro. — Ainsi, l’exis- tence d’une relation de la forme (5), entre les fonctions Yi Y2s ++ Yn entraine forcément cette conséquence, que le déterminant À — 0, et que, par suite, À, y; + A:y,+ + À, y, ne peut être l'intégrale complète de l’équation (1). Il est d’ailleurs évident que si les fonctions y,, y, ..., étaient liées entre elles par une équation de la forme (5), on pourrait éliminer l’une d’elles de l'expression : y = AY; + AY + ..... + À,y,, laquelle ne renfermerait plus alors n constantes arbitraires, et ne pourrait plus être l'intégrale générale. Donc enfin, la condition nécessaire et suffisante pour que n intégrales particulières Vi, Ya, ... Y, de l'équation (1), imullipliées par des constantes arbitraires et ajoutées, puissent former l'intégrale générale de cette équation, est ( 208 ) celle-ci : que ces fonctions ne satisfassent à aucune équa- tion de la forme : Ay, + Ace A EE a TE À Yr = O0, A,, À:,... À, désignant des constantes qui ne sont pas toutes nulles. IV. Par exemple, si l’on applique cette règle à une équation linéaire à coefficients constants, l’équation (5) serait de la forme : T - AGE EN AEe EORIE AE A, ,e" —0, Gi, 4... @, étant les x racines de l’équation auxiliaire. En les Re réelles et rangées en décroissant, on peut mettre l'équation sous la forme : ASUS POS. AS A Pa à + À, een 6, et les différences a, — a, ... a, — a,, étant négatives, si aucune racine n’est égale à a,, x peut être supposé assez grand pour que les n — 1 derniers termes soient aussi petits qu’on le veut : done À, — 0. On ferait voir de même que À, — 0,....A,— 0, à moins que l’une des différences entre les racines ne s’annule, c’est-à-dire que l’équation auxiliaire n’ait deux ou plusieurs racines égales. D’où 1l suit que, si toutes les racines a,, &, ... a, de l'équation auxiliaire sont inégales, l’intégrale générale est A, eur +... + À,em?, en regardant À,,... À, comme des constantes arbitraires; si, au contraire, deux racines sont égales, il est clair que l'équation de tantôt peut être satisfaite sans faire nulles toutes les constantes : on n’a plus l'intégrale générale. Cela s'étend facilement au cas où il y a des racines imaginaires. V. D’après les principes de la théorie des équations dif- ( 209 ) férentielles, il est une autre condition à laquelle doit satis- faire l'intégrale générale y de l’équation (1) : c’est que l’on puisse disposer des x constantes arbitraires qu’elle ren- ferme, de telle manière que, même en attribuant à x une valeur déterminée x,, la fonction y et ses (n — 1) pre- mières dérivées puissent encore recevoir des valeurs don- nées arbitrairement (‘). Or, la valeur de y, composée de x intégrales particulières, étant : y = Ag + Ah ++ Au donne : dy dy dy: di n MR A 2%. PAM ER T VA ET À, ESS dx dx b F dx dy dy le dy, = — _— À, 2) Es A, ——- dx? dx? se dx? 4 ir dx? . d'y A dy . dt (FAO n—1 1 n—1 2 A —A dx dx dx * dx ? PER ITENL cette valeur de y ne peut donc être l'intégrale générale que si, après avoir donné à x une valeur arbitraire x,, et È dy dn—1y ” , Q ur des valeurs quelconques, les n équations précédentes fournissent pour A,, AÀ,,...A, des valeurs finies et déterminées en général; ce qui exige évidemment que le dénominateur commun des valeurs de A,,A,,...A,, ou le déterminant, formé des coefficients de ces quantités, ne soit pas nul, quel que soit x,, et, par conséquent, quel que soit x. Cette condition nécessaire et suffisante, étant () Voir, par exemple, Moigno, Calcul intégral, p. 548. ( 210 ) rapprochée de celle que nous avons trouvée plus haut, nous conduit à cette conclusion : Pour que n fonctions Y,, Y:, ... y, d’une même variable x satisfassent à la condition : un - 100 NE Yn dun dys a sa x PE AOL pi En (tPdEterm. = 0 Ty) du ï d'y, da L'idetT! dx"! la variable X étant quelconque, il faut et il suffit que ces fonctions satisfassent à une équation de la forme : ENT + AY: + lise = A,y, = 0; en sorte que cette dernière équation peut être considérée, en regardant À,, A,,... A, comme arbitraires, comme une espèce d’intégrale générale de l'équation précédente (7). VI. Pour appliquer cette remarque, prenons par exem- ple : dy dy d'y Yi = Y); An Centre. …... Ya Jante l'équation (7) devient : dy d'y y TPE D de dy dy d'y re SA La “ra ge cel hrpalièo Fra ‘A 19 d"—"y d'y : "2 dz"1 dx” dx" (211 ) | et elle est de l’ordre 2n — 2. D’après ce qui précède, son intégrale générale est renfermée dans celle-ci : d (9) A;y + À : re SR re Az, À,,... À, étant des constantes arbitraires. Mais l’équa- _tion (9) est linéaire, à coefficients constants : posant donc y—=e"*, l'équation en a sera de degré n—1, et ses coefficients A,,A,,... À, étant arbitraires, on doit considérer ses n—1 racines comme des constantes arbitraires a,, @&, ... @,_;; en sorte que, d’après la théorie ci-dessus, l'intégrale gé- nérale de l'équation (9) et, par conséquent, de l’équa- tion (8), sera : POP = Che Cie ps. ou Et Coefers elle renferme effectivement 2n — 2 constantes arbitraires @, da, a; Cu, Co, . .. C1, lesquelles doivent être, pour toute généralité, considérées comme imaginaires, puisque À,, À,,... A, sont arbitraires dans l'équation (9); ce qui donnera des termes de la forme réelle : e (C” cos Br + C, sin Br), ete... — Il semble curieux que l'intégrale généralé de l’équa- tion (8) soit précisément de même forme que celle d’une équation linéaire à coefficients constants, avec cette diffé- rence que les exposants a, , @&, ... a,, qui seraient dans le cas d’une telle équation des constantes déterminées, sont dans le cas présent des constantes arbitraires ; ainsi l’équa- tion : dy (a 2 _ —0, a pour intégrale générale : y—C e"* ; dx (22) l'équation du quatrième ordre (n = 5) : ÉÉ d'y CES da FE y dy sr 1 Æ — — = + en A ie da? dax di dx Ldx? dx dx dit y ee dy / il De da? Ldx dx: dx? cri a pour intégrale : y = €" (C, cos Bx + C sin Ex), C;, G,2, B, étant des constantes arbitraires; et ainsi de suite. VII Nous remarquerons encore que les constantes Gi, Ge. 0, 1, étant arbitraires dans l'équation (10), on est libre d’en supposer deux, trois, ... égales entre elles. Mais alors la formule (10) ne représente plus l’intégrale com- plète de l'équation (9), comme on sait : ainsi, si l’on suppose successivement a; = &, 43 —= 43 — @,..., On doit donner à l’intégrale de l'équation (9) les formes successives : y = (Gi + Cr) CTP lire a (1 1) De (C, + Cr —- C;x°) er SN ris EN enr y = (CG + Cr + Cr + sos COR ce sont donc là autant d’intégrales de l’équation (8) con- venant à des relations particulières entre les constantes | arbitraires &, @,...@,_1, et Comme elles ne sont pas ren- fermées proprement dans la formule (10), on voit que les expressions (11) doivent être considérées comme autant de solutions singulières de l'équation (8), les constantes C,, Co. Cu M... 4, étant toujours arbitraires. VIT. On concoit qu'il serait facile d'imaginer d’autres applications de l’équation {7). (215) Par exemple, X étant une fonction donnée de x, si l'on 52 d: , . / . à prend y, = Xy; y: —%, l'équation (7) devient, pour x —2: dy ie y dX dy dx dd et son intégrale générale est y = C, ef Cet C, étant des constantes arbitraires. — Prenant X — 2x, l'équation différentielle deviendra : dy el y dx RAR CDI PTE us Dents dx? LE et son intégrale générale sera : Ce: Si l’on faisait : X — e”*, on aurait l'équation différen- üelle : y | dy | dy dx? dx L et son intégrale complète : — Voici une application plus remarquable du même théorème. — Soit toujours x — 2, ce qui réduit l’'équa- tion (7) à : y» dy Sr M — 19 RP mer 0. dx 1 dx VAI Désignons par X une fonction explicite de x, par Ÿ une fonction explicite de y, et prenons : xs. Ÿy dx = ee y = 0e : (214 ) ce qui donnera, en substituant dans l’équation précédente : dx? dx dx ou réduisant : Cette équation, que M. Liouville a traitée par une mé- thode fort élégante (*), aura pour intégrale première, en vertu de notre théorème : d AiYi + Aoÿ2 == O Où A; a 4 ‘As e J'Xdx (2) — 0, dx ou, en séparant, les variables : A, 6! dr dy + A, e/ 4 dy — 0; en sorte que l'intégrale générale de l’équation (12) sera, Re À . en désignant par — — C et par C; deux constantes arbi- 2 (raires : fer dy + G fe SE y = C, : c’est la formule de M. Liouville qui se présente ici comme un cas très-particulier de la nôtre. (") Journal de mathématiques pures et appliquées, t. VII, p. 134. — Moigno, Calcul intégral, p. 672. (215) Sur l’ergot du seigle et sur les SCLEROTIUM en géné- ral, considérés au point de vue morphologique; par M. J. Muenter, professeur de botanique à l’Université de Greifswald. _ Le seigle ergoté (Secale cornutum Pharmacop.) se com- pose, d’après Meyen (1), de deux portions qui, à l’état frais, sont plus distinctes qu’à l’état desséché : une portion basilaire, plus dense et violette (Sclerotium DC., Nosocarya Fée), et une portion terminale, filamenteuse, spongieuse, produisant des spores (Sphacaelia segetum Lev., Ergo- taeta abortans Queckett). La portion basilaire, qui affecte précisément d'habitude la forme de l’ergot du coq, se déve- loppe plus tard que la portion terminale. Phœbus (2) et quelques autres botanistes ont soutenu que le seigle ergoté de couleur violette n’est autre chose qu’une maladie de l'ovaire (germen) des graminées et de quelques cypéroïdées ; tandis que Meyen a démontré qu'il est réellement un champignon, auquel on attribue avec raison les noms de Sclerotium clavus Tode, ou Spermodia clavus Fr., et qui prend rang, par conséquent, dans la famille des sclérotiacées, ainsi que cela a été fait dans la Flore cryptogamique de l’Allemagne, par Rabenhorst, et dans le Traité de mycologie, par Bonorden. Mais ce n’est qu’en 1851 que l’ingénieux botaniste fran- çais, M. Tulasne (3), est parvenu à scruter plus profondé- (1) Pflanzenpathologie, p. 191, Berlin, 1841, et dans Müller’s Archiv für Anal. u. Physiologie, 1838 , p. 357. (2) Crypiogamische Giftgewaechse, t. IT, p. 97-110, 1838, in-4°. (5) Comptes rendus hebd. de l’Acad. des sciences de Paris, t,. XXXII, (: 216 ) ment la nature de ce seigle ergoté, si souvent décrit avant lui et si généralement employé. Ce qui l’a guidé, ce furent des essais de dissémination de plusieurs espèces de Sclero- tium. I a aimsi découvert le fait considérable, que sur l’ergot violet du seigle, ainsi que sur celui du Brachy- podium sylvaticum et du Calamagrostis epigeios, 11 se développe un champignon appartenant à l’ordre des Pyré- nomycètes et connue depuis Wallroth, sous le nom de Kentrosporium , alors que Fries l’a décrit plus tard comme le Cordyliceps purpurea; il s’est assuré, en outre, qu'il ne s'y développe pas comme parasite, mais comme la fleur sur une plante phanérogame. | Cette doctrine nouvelle, aussi intéressante qu’elle était hardie, d’après laquelle deux champignons très-éloignés Jun de l’autre dans le système, ne seraient que des états de développement différents d’une seule et même espèce, ne pouvait pas manquer d'attirer l'attention des mycolo- gues; mais, loin d’être contredite par les expériences ten- tées par Alexandre Braun (1), Bail (2), Kuebn (5), et d'autres, la découverte de Tulasne y trouva sa confirma- tion. En appliquant la méthode du mycologue parisien à d’au- tres Sclerotium croissant sur des feuilles et des tiges, on trouva qu'ils n'étaient que des mycélium persistants cor- respondant aux genres Claviceps Tulasne, des Pyréno- n° 25, p. 645 (8 décembre 1851), et Annales des sciences naturelles, t. HI, p. 20. (1) Botan. Zeitung, publiée par Hugo v. Mohl et Schlechtendal , p. 565, 1854. (2) System der Pilze, 1858, in-8°. (Deuxième division de Nees-Henry, System der Pilze), pp. 19, 55, 75. — Hediwigia ed. Rabenhorst, n°s 14-15. (5) Arankheilen der Kulturgewaechse, p. 115, sv. Berlin, 1858, in-8°. (217) mycètes, Agaricus L. et Typhula Fr., des Hyménomy- cètes. Les spores linéaires, filiformes du Clav. purpurea Tul., après avoir quitté l’ascus du périthèque qui les a produits, se fixent, selon Kuehn (1), à la surface du jeune ovaire du seigle, y germent et forment un stroma qui développe des acrospores, à la manière des hyphomycèêtes, et ceux-e1 se détachent du sommet du filament qui les a produits pour germer incontinent à leur tour. Les filaments (hyphae) provenant des acrospores péné- trent tant dans les ovaires déjà contaminés du seigle que dans ceux qui étaient encore sains; ils absorbent et écar- tent leurs Jeunes cellules ; et c’est ainsi qu’il reste à la fin, au lieu de l'ovaire, un Sclerotium souvent encore enve- loppé du péricarpe : l’ergot du seigle. Quand le seigle est mûr, alors le Sclerotium tombe ou spontanément ou sous le coup du faucheur; la charrue le couvre de terre, et il se repose pendant l’hiver; la chaleur du printemps le réveille ensuite, il se développe sur des points indéterminés de sa surface des pousses violettes plus ou moins droites, et à l’époque de la floraison du seigle, ces pousses sont devenues des Claviceps émergeant du sol, et dont les capitules sont garnis de périthèques tout autour. C’est ainsi que leurs spores filiformes retrou- vent ensuite le tissu qui leur est nécessaire pour se déve- lopper ultérieurement. Ce ne sont cependant pas les Sclerotium de nos céréales : froment, seigle et orge, qui produisent seules ainsi le Cla- viceps ; on doit encore citer ceux d’autres graminées à ca- (1) Loc. cit. 2€ SÉRIE, TOME XI. 15 (218) ryopses ordinairement plus petites; par exemple : le Phrag- mites communis Trin., le Molinia coerulea Mœnch., ete. ; mais les Claviceps qui en naissent n’offrent plus les carac- tères du Cl. purpurea Fr.; Tulasne a eu raison de leur donner un nom particulier, celui de Claviceps microce- phala. Le même botaniste a appelé Claviceps nigricans les formes provenant des Sclerotium des Cypéracées, telles que l’Heleocharis uniglumis, Dietr., et le Scirpus baeo- thryon L. Lie Ainsi les observations de Kuehn ont prouvé à l'évidence qu’une même espèce de Claviceps produit deux sortes de spores, les uns acrogènes (basidiospores) et les autres as- cogènes (thécospores), et qu'entre les deux se place un état de repos, comparable, jusqu'à un certain point, à l’état de chrysalide chez les insectes : c’est dans cet état de repos que le végétal porte le nom de Sclerotium. Les faits con- statés déjà antérieurement pour les Peronospora, les Aeci- dium et d’autres genres, ont donc reçu de l’extension, et Kuehn a signalé en même temps par là un exemple nou- veau d’un mode particulier de génération alternante, tel qu'on n’en trouve l’analogue dans le règne animal que parmi les infusoires. Ce mode particulier de génération alternante diffère de celui qui a été signalé par moi-même, pour la première fois en 1848, chez les fougères (1), les équisétacées, les jungermanniacées (2), etc., en ce qu'aucune des deux formes que l'espèce revêt successivement en se dévelop- pant, ne possède des organes sexuels et distincts en mâles (1) Botan. Zeitung, par M. Mohl et Schlechtendal, 1848; livr. 3, p. 45. (2) Comptes rendus de l'Académie des sciences de France, t. XX, (249 )) et femelles, et, par conséquent, l’alternance, ici, n’a pas lieu entre une forme sexuée et une forme asexuée, mais entre deux formes différentes ayant chacune des spores particuliers. Les espèces du genre Typhula Fr., obtenues en plan- tant en terre les Sclerotium développés dans des tiges et des feuilles, restaient moins bien connues, quant à leur mode de génération alternante. Bail (1) affirme, pour ce qui les concerne, que : | Le Typhula erythropus Fr. devrait être rapporté au Sclerotium crustuli- forme Rob. Le — sclerolioïdes Baïl au Sclerotium pustula DC. Le — variabilis Riess au _ semen et 5. Brassicae Fr. Le — ‘gyrans. | au — complanatum Tode. Rangeant dans un troisième groupe de Sclerotium, dont le mode de génération alternante est aussi imparfaitement connu, l’Agaricus tuberosus Bull. provenant du Sclerotium cornutum Fr., Bail s'exprime ainsi qu'il suit (2) : « Cette classification s’enrichira probablement par d’au- tres groupes, et l’on considérera peut-être comme le re- présentant de l’un de ces derniers le Sclerotium stercora- rium DC. (lacunosum Pers.), qui se rapporte au Peziza tuberosa Bull. » En laissant à des recherches ultérieures le soin de dire ce que cette supposition a de fondé, qu'il me soit permis d'exposer ici le mode de développement d’un Peziza qui, sans appartenir au Peziza tuberosa Bull., a néanmoins été obtenu à l’aide d'essais de plantation faits sur un végétal (1) Loc. cit., p. 76. (2) Ibidem. ( 220 ) appartenant au Sclerotium varium Pers., et qui, par con- séquent , démontre réellement l'existence d’une métamor- phose faisant passer des SCLEROTIUM à l’état de PezzA , donc à l’ordre des discomycètes. J'avoue cependant qu'il m'a été impossible jusqu'ici de suivre sur cette espèce la génération alternante, telle que Kuehn l’a complétement étudiée chez le Claviceps purpurea Tul. Au mois d'octobre 1857, j'ai rencontré sur un Martynia fragrans, cultivé dans le jardin botanique de l’université, de nombreux individus de Sclerotium varium Pers. Ils existaient dans la moelle, au voisinage de l’insertion des cotylédons, et les cellules médullaires étaient parcourues dans tous les sens par les filaments du champignon, et avaient pris par là une couleur un peu noirâtre. La gran- deur des Sclerotium variait depuis celle d’une lentille (Ervum lens L.) jusqu'à une longueur de 5/4 et 1 pouce; leur forme était très-variable aussi, et leur surface présen- tait des bosselures. La couche corticale, qui était noire, se composait de cellules parenchymateuses polyédriques, dont les membranes étaient d’un bleu noirâtre et dont l’aspect les rapprochait le plus du tissu subéreux. La couche médul- laire était blanche et constituée par des cellules allongées, articulées, à parois plus rigides; ces cellules se croisaient dans tous les sens à la manière du tissu feutré. Au mois de décembre de la même année, j’enfouis ces Sclerotium, à un demi-pouce de profondeur, dans le terreau d’un pot qui fut placé dans la serre froide et soigné con- stamment. Après un repos qui avait duré un an et demi, il se montra, dans les premiers jours de juillet 1859, des vé- sétations nombreuses d’un gris blanchâtre et d’une forme allongée ovoide. Leur sommet se creusa en godet, et les pé- dicules, en apparence simples, qui les supportèrent d’abord, ( 221 ) s’'épanouirent, à leur extrémité supérieure, en cupules à mesure qu’ils s’élevèrent de terre, et reproduisirent ainsi la forme d’apothècies des lichens. En enlevant la terre avec précaution, je trouvai que les Sclerotium plantés en décembre 1857 avaient développé, chacun, sur un et même sur plusieurs points, des pédicules simples et rarement bifides qui portaient, à leur sommet, les disques ou godets dont il vient d’être parlé. Je favorisai le développement ultérieur des individus restés dans le pot, et je vis que les disques de quelques- uns d’entre eux s’étendaient jusqu’à un diamètre de huit lignes, qu'ils repliaient en bas leur bord qui, jusque-là, avait été dressé, et que leurs asci, entourés de paraphyses, lançaient des spores ovales, incolores, chaque fois que le soleil y donnait ou que, par un mouvement de la main, on déplaçait l'air qui les couvrait. Je fis l’essai de faire germer les spores, et Je reconnus qu’ils poussaient des filaments à la manière connue pour les spores des champignons. Il ne resta donc aucun doute, le Sclerotium varium Pers. rencontré, en 1857, dans la moelle de la tige du Martynia, avait produit, après un repos d’un an et demi, un disco- mycète appartenant au genre Peziza L. Quant à l'espèce, ce champignon diffère entièrement du Peziza tuberosa Bull. par son pédicule et par son disque, ainsi que par sa gran- deur et sa coloration. Ne la trouvant décrite dans aucun ouvrage systématique des plus notables mycologues de l'Allemagne et de la Suède qui sont à ma disposition, je suis porté à la considérer comme nouvelle, et je la nomme Peziza Antzii, pour honorer le souvenir du docteur Antz, médecin de garnison, mycologue infatigable, décédé ré- cemment à Greifswald. EXPLICATION DES FIGURES. PEziza AxTzu, Muenter. Fig. 1-4. Le Peziza dans différents degrés de déve naturelle. — 5. Germination des spores. — 6. Un échantillon complet. a. Le Sclerotium. b. Un jeune Peziza. RAT. # D )ppemen L; £ 4 i QE 129 1e ff Tor L'r4 … c. Un Pezisa achevé dans son développement. Gran ieur n turelle. Fig. 2..." "PS Fig. 3. “ j 6 D4 BARRE . "400 : ‘| Ÿ 7 LE rar vr leur a pe e9! » SN +84 EL LP gl CLASSE DES LETTRES. Séance du # février 1861. M. pe Ra, directeur. M. An. QuereLer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Grandgagnage, Roulez, Gachard, Borgnet, le baron de Saint-Genois, De Decker, Snellaert, Haus, Bormans, Leclercq, Baguet, Ch. Faiïder, Arendt, Ducpetiaux, le baron Kervyn de Letten- hove, Chalon, membres ; Nolet de Brauwere van Steeland, associé; Théod. Juste, Defacqz, Félix Nève, Guillaume, correspondants. MM. Sauveur et Alvin, membres des deux autres classes, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur transmet une expédition de l'arrêté royal du 31 décembre dernier, portant nomination des membres du jury chargé de décerner le prix triennal pour la composition, en langue française, d’une œuvre dramatique dont le sujet devra être emprunté soit à l’his- ( 224 ) toire, soit aux mœurs nationales. Les membres du jury sont : MM. Bourson, Fuerison et Eugène Van Bemmel. Un second arrêté fait connaître la composition du jury auquel est attribuée la mission de décerner le prix quin- quennal des sciences morales et politiques, pour la période du 1‘ janvier 1856 au 51 décembre 1860. Les membres sont : MM. De Decker, Defacqz, Faider, Leclereq, Haus, De Kemmeter et Visschers. — La Société d'histoire de la Suisse romande remercie l'Académie pour l'envoi de ses dernières publications. CONCOURS DE 1861. M. le secrétaire perpétuel fait connaître que quatre des six questions du programme du concours de cette année ont reçu des réponses : Sur la deuxième question : Quelles sont les applications utiles et pratiques du principe de l'association pour l'ame- lioration du sort des classes ouvrières et indigentes, 1l est arrivé deux mémoires. Le premier porte pour devise : L’égoïsme est stérile; le second : Nulla est homini causa philosophandi, nisi ut beatus sit. (SAINT AUGUSTIN.) (Commissaires, MM. Ducpetiaux, Paul Devaux et Arendt.) La quatrième question : Faire un exposé historique de l’ancienne constitution brabanconne, connue sous le nom de JoxEusE-ENTRÉE, en indiquer les origines et en appre- cier les principes, a fait naître un travail portant la de- vise : Pour servir la patrie, il faut l'aimer ; pour l'aimer, il faut la connaître. (Commissaires, MM. David, Grandgagnage et le baron de Gerlache.) La cinquième question : Tracer un tableau historique et politique des règnes de Jean IT et de Jean III, ducs de Brabant, a produit également un mémoire portant pour devise : O navis. fortiter occupa portum. (Horace, Odes, livre Ier, x1v.) (Commissaires, MM. David, Borgnet et De Smet.) Sur la sixième question : Apprécier Philippe de Co- mines comme écrivain et comme politique, la classe a reçu un mémoire portant la devise : Oui, il y avait un autre monde, quand ces noîres ruines, blanches dans leur nou- veau mortier et dans leurs ciselures fraîches, étaient des murailles et pour la première fois ont bien vu le soleil. il y a longtemps. (CARLYLE.) (Commissaires : MM. Polain, le baron Kervyn de Let- tenhove et le baron de Saint-Genois.) ÉLECTIONS. La classe désigne MM. Roulez, Leclereq et Gachard, pour faire partie du comité de présentation qui, avec les membres du bureau, MM. de Ram, De Decker et Quetelet, fera les propositions pour les prochaines élections. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Variétés historiques (1); par M. Gachard, membre de l'Académie. XV. La translation des entrailles de Marguerite d'Autriche, en 1778. Il a paru tout récemment, en France, une intéressante collection de matériaux pour l'histoire de Marguerite d’Au- triche , fille de empereur Maximilien [° et tante de Charles- Quint (2). L'auteur de cette publication, M. le comte de Quinsonas, n'a épargné aucune recherche pour la rendre aussi complète que possible, selon le plan qu'il s'était tracé : il a fouillé dans les archives de Belgique, dans celles de l’ancienne chambre des comptes de Flandre, à Lille; 1l a exploré les dépôts littéraires de Paris, de Turin, de Chambéry, de Genève. Aux documents dont il donne le texte, 1l joint des descriptions pittoresques des résidences où vécut Marguerite, et des lieux qui reçurent ses dépouilles mortelles. Son livre est comme un monument consacré à la mémoire de l'illustre princesse dont « le caractère, si élevé (1) Voir les Bulletins, 1r° série, tome XIX, 5% partie, page 168; tome XX, {re partie, page 442 ; 22: série, tome Ir, page 135. (2) Matériaux pour servir a l'histoire de Marguerite d Autriche, du- chesse de Savoie, régente des Pays-Bas ; par le comte E. de Quinsonas ; Paris, Delaroque frères, 1860 ; 5 vol. in-8e. ( 227 ) » et si noble, la vertu si constante et le dévouement si in- » fatigable » ont excité l’admiration d’un de ses biogra- phes que notre compagnie s’honore de compter dans son sein (1). Une pièce importante a cependant échappé aux inves- tigations de M. de Quinsonas, et l’on ne saurait lui en faire un reproche, car c’est bien par hasard, et depuis peu de Jours seulement, que je l’ai découverte dans les archives dont la garde m'est confiée : je veux parler du procès-verbal de la translation qui se fit, au siècle dernier, des entrailles de l’archiduchesse. La connaissance de cette pièce lui aurait évité la double inexactitude qu'il commet, sur des rensei- gnements erronés qui lui ont été fournis à Malines, en fixant la date de la translation au 18 août 1784, et en faisant remarquer que le procès-verbal en fut rédigé en la- tin (2). Comme on le verra dans un instant, cette céré- monie eut lieu le 28 octobre 1778, et ce fut en français qu'on dressa l’acte destiné à la constater. Mais rappelons d’abord quelques faits. Par son testament daté de Bruxelles le 20 février 1508 (4509, n. st.), Marguerite avait choisi pour sa sépulture l’église du couvent de Saint-Nicolas de Tolentin près de Bourg en Bresse (le monastère de Brou) qu’elle venait de fonder (3). Dans son codicille du 28 novembre 1530, fait à Malines (4), elle n’ordonna rien de nouveau à cet égard. Cependant, et en vertu de décisions de l’empereur, son (1) M. Le Glay, Correspondance de l'empereur Maximilien Ie" et de Marguerile d'Autriche ,tome IT, page 460 ; 1839, in-8°. (2) Matériaux pour servir à l'histoire de Marguerite d'Autriche, tome [er, page 316. (5) Corps diplomatique , tome IV, partie 1re, page 90, (4) Ibid., partie IIme, page 75. ( 228 ) neveu, dont le texte n1 la date précise ne sont connus, son cœur fut déposé dans l’église du couvent des Annonciades à Bruges, dont Marguerite était également la fondatrice (1), et ses entrailles dans l’église Saint-Pierre, à Malines, où elle avait coutume d’assister aux offices, du haut d’une tri- bune qui plongeait sur le chœur, du côté de l’Épitre (2). Les entrailles furent enterrées dans le chœur, devant le grand autel, sans aucun apparat. En 1535, les exécuteurs testamentaires de la princesse proposèrent à Charles- Quint : 1° de faire ériger en cet endroit un monument où l’on verrait la statue de sa tante avec celle de sainte Mar- guerite, sa patronne, toutes deux en albâtre; 2° de faire poser, au-dessus de l’urne renfermant les entrailles, une plaque de cuivre sur laquelle serait gravée une inscription « pour perpétuelle mémoire de ladite dame (3). » Par des causes qui ne sont pas expliquées, ce fut seulement le 1% mai 1546, à Ratisbonne, que l'Empereur donna son assentiment à cette double proposition ; encore le res- treignit-il par les termes qui suivent : « Si avant que les » deniers du testament en pourront porter, et en pour- » voyant toujours, en premier lieu , le plus nécessaire (4).» Quelque grands que pussent être les besoins d’argent de Charles-Quint à cette époque, on s'étonne de cette mal- heureuse restriction mise à l’approbation du projet que les exécuteurs testamentaires de sa tante lui avaient présenté. Une telle indifférence pour la mémoire de l’auguste prin- (1) Matériaux pour servir à l'histoire de Marguerite d'Autriche, tome Ier, page 547. (2) Ibid., page 512. (5) Ibid., page 314. (4) Jbid., page 516. (229 ) cesse qui lui avait servi de mère; qui, durant sa minorité et depuis, avait consacré tant de sollicitudes , de peines et de fatigues à l'administration de ses États des Pays-Bas, ne saurait avoir d’excuse, et nous nous associons volontiers au blâme que M. de Quinsonas imflige, pour cet acte de 1546 (1), au monarque dont nous avons plus d'une fois préconisé les hauts faits. Qu’arriva-t-il en effet? Les « deniers du testament » ne suffisant pas à l'exécution de l’ouvrage projeté, on y renonca , et l’on se contenta de faire graver, sur une plaque de cuivre, enchâssée dans une médiocre pièce de marbre que l’on fixa au mur du chœur, du côté de l'Évangile, l’inseription que nous retrouverons tout à l'heure dans l'acte de 1778. L'église de Saint-Pierre tombant caducité, le gouverne- ment résolut, en 1777, de transférer cette paroisse dans l’église des Jésuites, que la suppression de la société, ac- complie quelques années auparavant, avait mise à sa dis- position. Le prince Charles de Lorraine chargea le cardinal- archevêque de Malines, le président du grand conseil et le magistrat de lui suggérer les mesures qu’il convenait de prendre en conséquence. Dans le rapport où le cardinal, le président et les communemaitres et échevins de Malines lui exposèrent leurs vues, ils demandaient que les entrailles de Marguerite d'Autriche, conservées en l’église Saint- Pierre, fussent déposées devant le maître-autel de l’église des Jésuites, et son épitaphe contre le mur latéral du chœur, du côté de l'Évangile. La pierre sépulcrale posée en 1546 avait à peine un pied et demi de diamètre ; elle était, selon leur remarque, « quelque chose d’indécent et tout sem- (1) Materiaux, ete., tome Ier, page 516. ( 230 ) » blable aux pierres des paysans qu'on voyait dans les » églises des campagnes.» Ils s’en indignaient à bon droit. « La mémoire d’une princesse aussi auguste et d’un mérite » si distingué, disaient-ils, n’exigerait-elle pas que le gou- » vernement fit attacher au mur du chœur de l’église des » ci-devant Jésuites, du côté de l'Évangile, au lieu de la » petite pierre dont nous venons de parler, une grande » plaque de marbre blanc ornée, dans laquelle on ferait » tailler, en grandes lettres dorées, telle épitaphe qu'on » trouverait convenable , en y exprimant en même temps » la translation des entrailles de la princesse (1)? » Le prince Charles s’empressa d'adopter ces vues. Il dé- signa le cardmal-archevêque, le président du grand con- seil et les conseillers fiscaux de la même compagnie pour procéder à la reconnaissance et à la translation des restes de l’archiduchesse. Cette cérémonie se fit, comme Je lai dit déjà, le 28 octobre 1778. L'acte suivant en fut dressé : Du 28 octobre 1778. Nous, soussignés, Jean-Henry, par la miséricorde de Dieu, cardinal-prêtre de la sainte Église romaine, de Franckenberg et Schellendortff, archevêque de Malines, primat des Pays-Bas, grand’eroix de l’ordre de Saint-Étienne, roi d'Hongrie, con- seiller d’État intime actuel de LL. MM. Impériales et Royale Apostolique; Goswin de Fierlant, conseiller d’État et prési- dent du grand conseil de $S. M. l’impératrice reine; Jacques- Joseph-Augustin de Stassart de Noirmont, conseiller et avocat fiscal, et Henry Diu, conseiller et procureur général de Sadite (1) Lettre du cardinal de Franckenberg, du président du grand conseil de Fierlant et des communemaîtres et échevins de Malines au prince 2 2.1 Charles de Lorraine, du .… août 1777. (Archives du royaume.) (254 ) Majesté au même conseil, nous étant transportés en l’ancienne église paroissiale de Saint-Pierre en cette ville de Malines, nous avons, en exécution des ordres de Sadite Majesté, con- tenus dans sa dépêche en date du 1* décembre 1777, visité l'endroit qu’il y a dans le chœur, entre le maïtre-autel et le mur latéral, du côté de l'Évangile, où, suivant les notices qui reposent dans les archives du grand conseil, doivent se trouver les entrailles de la sérénissime archiduchesse Marguerite d’Au- triche, renfermées dans un pot ou urne de plomb, mise en terre à côté dudit autel, vis-à-vis de la niche où reposait autrefois le saint sacrement, et de l’épitaphe de cette princesse, attachée à côté de cette niche. Nous avons vu que cette niche existoit encore dans ce mur, ainsi que l’épitaphe suivante, écrite sur une plaque de cuivre jaune , encadrée dans du marbre blane : ILLUSTRISSIMAE MARGARETAE ARCHIDUCISSAE AUSTRIAE INVICTISSIMI MAXIMILIANI IMPERATORIS NATAE AC PRINCIPIS HiISPANIARUM PRIMO DEINDE DUCIS SABBAUDIAE RELICTAE HARUMQUE INFERIORUM REGIONUM GUBERNATRICI CAROLUS QuINTUS CAESAR AUGUSTUS AMITAE POSUIT. Ayant fait lever quelques pavements dans cet endroit, nous avons trouvé, à deux pieds et sept pouces de profondeur, sous une pierre sans inscription et ne différentiant des autres qu’en ce qu’elle étoit blanchâtre et plus grande, ayant deux pieds de largeur et quatre de longueur, près de la première marche de l'autel et à six pieds du mur latéral précité, une espèce d’urne de plomb, de forme ronde, de la hauteur d’un pied et quatre pouces, ayant dix pouces de diamètre vers le haut et un pied six pouces vers sa base, fermée d’un couvercle hexagone y soudé, et surmonté d’une anse, de trois pouces de hauteur et de ( 232 ) quatre et demi de longueur. Nous n'avons découvert, sur au- cun des côtés de cette urne, la moindre trace qu'il y auroit euu ne inscription, ni, dans l’endroit où elle étoit, le moindre vestige qu'il y auroit eu un caveau dans lequel elle auroit été enfermée. Et, comme cette urne se trouvoit déjà en très-mau- vais état, et qu'à deux de ses côtés le plomb étoit tellement mangé qu'elle étoit absolument percée, nous avons fait con- struire un coffre de bois de chêne, d’un pied et neuf pouces en quarré et de la hauteur de deux pieds, à deux des côtés duquel “est une anse de cuivre jaune; dans quel coffre nous avons en- fermé cette urne, et attaché le couvercle avec des vis de même cuivre; et sur ce couvercle est une croix de velours noir, bordée d’un ruban couleur orange, et clouée avec des clous de cuivre dorés. Cela fait, nous en avons accompagné le transport en la nou- velle église paroissiale de Saint-Pierre, ayant ci-devant appar- tenu aux Jésuites, où nous l'avons fait placer dans un caveau que nous avons fait construire sous le pavement du chœur, entre la première marche du maître-autel et le mur latéral, du côté de l'Évangile, sous une pierre désignée par une croix; auquel mur, mais quelques pieds en decà, sera placée l’épi- taphe de cette princesse. Signé : + JEAN -HENRY, CARD. ARCH. DE MALINES; DE FIERLANT, DE STASSART DE NoiRmonT , H. Div (1). Le prince Charles de Lorraine avait recommandé au conseil privé de faire former et de lui soumettre le projet de l’épitaphe. Le président de Fierlant s’occupa, de son côté, du même projet ; il écrivait, le 30 octobre 1778, au ministre plénipotentiaire, prince de Starhemberg : « Jai (4) Archives du royaume, collection de l'office fiscal de Malines. ( 235 ) » donné à un dessinateur d'ici une idée pour la forme de » l’épitaphe, que je soumettrai à l'approbation de Votre » Altesse, dès que le dessin sera achevé, et que jy pourrai » Joindre le devis (4). » Quel fut le résultat des ordres du gouverneur général et des conceptions du président du grand conseil ? C’est vai- nement que j'ai compulsé, pour le savoir, la suite des actes du conseil privé et de la correspondance du président de Fierlant avec le prince de Starhemberg. Le silence de ces documents me fait supposer que des choses d’un intérêt d'actualité plus grand, selon l’expression consacrée aujour- d'hui, firent perdre de vue l’épitaphe de Marguerite d’Au- triche. Cette conjecture est confirmée par ce que je lis dans l'ouvrage de M. de Quinsonas : « Sur les indications pré- » eises de M. le chanoine Scheffer, dit-il, nous avons fini » par retrouver, dans la nouvelle église de Saint-Pierre et » Saint-Paul, à gauche du maître-autel, une modeste » croix de Malte, très-fruste par suite du passage de la » sacristie, gravée en creux et à peine reconnaissable, » sur un des carreaux de marbre qui forme le dallage. » Elle indique l'emplacement de la boîte de plomb qui » contient les restes de Marguerite. » Voilà done, dans sa bonne ville (c’est toujours M. de » Quinsonas qui parle), voilà le seul souvenir religieux » constatant l’existence des dépouilles mortelles de très- » haute et très-redoutable madame la régente des Pays- » Bas, douairière de Savoie, duchesse et comtesse de » Bourgogne, dame de Malines et autres lieux !..….. Mais la (1) Archives du royaume, collection de la secrétairerie d'Étatet de guerre. 2% SÉRIE, TOME XI. 16 ( 234 ) mémoire impérissable de la bonne duchesse n'est point effacée comme cette petite croix si humble, devenue si imperceptible, et sur laquelle l'étranger, au souvenir de la vertu et des grandeurs, vient s’agenouiller, justement ému de tant de simplicité (4). » Avouons-le : ces réflexions d’un écrivain français ren- ferment un reproche, et un reproche mérité, à l’adresse de notre pays. Elles nous avertissent qu’il serait temps, après plus de trois quarts de siècle, de réparer l'oubli dans lequel ont été laissés les restes d’une grande prin- cesse, en mettant à exécution l’idée conçue en 1777, ou tout autre plan qui répondit à la même pensée. Et, à ce sujet, je rappellerai que, dans sa séance du 5 juillet 1854, la classe des lettres, sur la proposition que j'avais eu l'honneur de lui en faire, résolut d'appeler l’at- tention et la sollicitude du gouvernement sur les mauso- lées, tombeaux, épitaphes, urnes et pierres sépulcrales des anciens souverains de nos provinces, que le temps, les révolutions et le vandalisme ont respectés. Jusqu'ici on n’a pas appris qu'une -suite quelconque ait été donnée par le gouvernement à cette résolution de la compagnie. M, VW: vw. WW XVI L'abolition du Conseil des troubles. J'ai fait beaucoup de recherches pour constater la date précise de l'abolition du conseil des troubles (2). En der- (1) Matériaux , etc., t. Ier, p. 517. (2) Voy. ma Notice sur le Conseil des troubles, dans les Bulletins de l’Académie , 1re série, t. XVI, 2me partie, p. 50. ( 235 ) nier lieu, j'avais cru pouvoir la fixer au 2 mai 1576; je me fondais sur des lettres patentes, datées de ce jour-là, par lesquelles le conseil d’État, sous le nom du roi, pro- nonçait la cassation du fameux conseil, et ordonnait le renvoi au conseil de Flandre de toutes les causes, civiles et criminelles, concernant cette province, qui étaient pen- dantes devant le tribunal exceptionnel établi par le duc d’Albe (1). Des documents restitués depuis peu à nos Archives m'ont appris que l’acte du 2 mai 1576 n’eut pas immédia- tement les effets qu’il était naturel de lui attribuer, et que le conseil des troubles exista quelque temps encore; ils m'ont fourni, sur la date véritable et les circonstances de sa suppression, des renseignements assez Curieux pour mériter que je les fasse connaître. Dans une des premières lettres que le conseil d’État avait écrites à Philippe IE, après la mort du grand com- mandeur de Castille, il demandait que le conseil des trou- bles fût aboli : « Ce conseil, disait-il au roi, est coûteux » et de plus inutile; il ne sert qu’à irriter les sujets et à » consommer, pour ses propres gages, les deniers qui » proviennent des confiscations; enfin 1l ne paye pas les » créditeurs des biens confisqués, ce qui exceite des plain- » tes, non-seulement dans le pays, mais encore dans les » contrées voisines, plaintes qui remontent jusqu’à la per- » sonne de Votre Majesté, du su et ordonnance de la- » quelle on croit que ce payement est dénié..….. » La lettre que je viens de citer est du 2 avril 1576. Le 8 mai, le conseil revint à la charge : « Comme nous voyons, (1) Voy. le n° VII de ces Variétés. ( 256 } » mandait-il au roi, que les plainctes des subjectz, pour » le regard du conseil des troubles, continuent de plus » en plus, et davantaige que les commissions de ceulx » qui se meslent dudict conseil cessent par la mort du feu » grand commandeur, tellement que, par faulte de povoir, » tout ce qu'ils font et feroient seroit nul et de nulle va- » leur, comme mesmes entend très-bien le poeuple, pour » oster tel descontentement général et faire ce qui est de » raison, nous a samblé bon et. avons résolu leur com- » mander, de la part de Vostre Majesté, qu'ilz n’ayent plus » à s’assambler, ains à serrer les portes de leur chambre, » et que toutes les causes qui pendent encore indécises » s'ayent à renvoyer par-devant les consaulx de Vostre » Majesté, chascun en sa province, affin mesmes que les » subjectz puissent veoir comme on leur tient parole de ce » que on leur a promis par Vostre Majesté... (1). » C'était six jours auparavant que le conseil d’État avait fait expédier les lettres patentes qui assuraient aux quatre membres de Flandre la cassation du conseil des troubles, et, le même jour, 2 mai, il avait enjoint au trésorier gé- néral des confiscations, Antonio del Rio, de lui délivrer incontinent « déclaration et estat de tout ce qu'il avont » receu et payé depuis le décès du grand commandeur, » en Jui prescrivant de tenir en surséance, jusques à autre » ordre, toute recepte et payement. » Le conseil hésitait pourtant à donner suite à la mesure qu'il avait résolue en principe et annoncée au roi. Il n’y avait pas sur ce point unanimité entre ses membres; plu- (1) On trouvera les lettrés des 2 avril et 8 mai dans le tome IV de la Correspondance de Philippe IL sur les affaires des Pays-Bas. (21) sieurs d’entre eux craignaient d’excéder les bornes de leur autorité; ils se préoccupaient du jugement qu’on porterait de leur conduite à Madrid. Le 19 mai, le conseil tint une séance extraordinaire, à laquelle furent convoqués le con- seil privé et le conseil des finances. La grande majorité des conseillers opina pour la suppression sans aucun dé- lai; le comte de Mansfelt, le président Sasbout et le tré- sorier général Schetz y furent seuls contraires. Leur op- position ne laissa pas que de prolonger, pendant plusieurs semaines, l’indécision du conseil. Enfin, le 14 juin 1576, voyant qu'il ne recevait pas de réponse du roi, 1l ne vou- lut plus différer de donner satisfaction à l'opinion publi- que ; il fit signifier aux membres du conseil des troubles l'arrêt de suppression dont la teneur suit : Sur ce que a esté mis en délibération de conseil quelle chose se debvroit faire du conseil des troubles et confiscations, consi- déré la mort de feu le grand commandeur de Castille, naguères lieutenant, gouverneur et capitaine général des pays de par decà, duquel ceulx dudict conseil estoyent assesseurs en ma- tière desdicts troubles et confiscations, à sçavoir si leur seroit donné quelque nouvelle commission ou continuation, ou bien si ledict conseil seroit cassé ou aboly, selon que a esté promis aux estatz, à la proposition faite des aydes, au mois de juing de l'an LXXIIIT, messeigneurs du conseil d'Estat, commis au gouvernement des pays de par decà, appellez et oyz ceulx du conseil privé et des finances, attendu que les commissions du- dict conseil des troubles sont estainctes par le décès de feue Son Excellence, et que la pluspart des causes touchant lesdictes confiscations sont renvoyées, et pour aultres bons respectz, ont résolu de non donner nouvelle commission ni continuation d’assesseurs ny aulire pouvoir ausdicts du conseil des troubles; tant et jusques à ce que par Sa Majesté ou par mesdicts sei- ( 238 ) gneurs aultrement en soit ordonné, et que cependant la cham- bre dudict conseil soit close et serrée ; et s’il survient quelque affaire pour lesdicts négoces de troubles et confiscations, en estans mesdicts seigneurs advertis, y ordonneront comme ilz trouveront convenir pour le service de Sa Majesté et bien des affaires... Ainsy faict à Bruxelles, le xun”° jour de juing 1576. A Madrid, la conduite du conseil d’État fut trouvée hardie, même téméraire (1); Philippe II n’en fit toutefois paraître aucun mécontentement. Il avait en ce moment-là bien d’autres soucis : la révolution dans les Pays-Bas faisait des progrès rapides, et le jour n’était pas éloigné où le conseil d'État lui-même serait supprimé par un mouvement populaire, comme suspect de trop de condescendance et de soumission envers l'autorité royale. X VIT. La princesse d’Épinoy. Il est question d’élever une statue, à Tournay, à la prin- cesse d'Épinoy, Philippe-Chrétienne de Lalaing. Je ne viens pas ici approuver ni critiquer ce projet : c’est une affaire (1) Le secrétaire d'État Gabriel de Çayas écrivit, en marge de la lettre du conseil d'État du 8 mai : « Esto ha parescido mucho atrevimiento, sin » consulta, sabiduria ni 6rden de S. M.; y aunque Hopperus los escusa » Quanto puede, preguntandole su parescer, respondié que él no lo » hiciera ni viniera en ello, sin dar primero cuenta de ello à S.M. » ( Faire cela sans le su et l'ordre de Sa Majesté, a paru une grande hardiesse; et quoique Hopperus les excuse autant qu'il peut, quand on lui a demande son avis, il a répondu qu'il ne l'aurait pas fait et n’y aurait pas donné les mains, sans en rendre compte préalablement à Sa Majesté). ( 239 } qui regarde la ville de Tournay et le gouvernement; je dé- sire seulement, au point de vue et dans l’intérêt de la vérité one; présenter quelques pe sur les faits qu’on à avancés à cette occasion. On dit que la princesse d’ Épinoy, en A oe de son mari, Pierre de Melun, à qui les états généraux avaient confié le gouvernement de Tournay, défendit cette ville contre les Espagnols. Cela n’est pas parfaitement exact. D'abord, les documents authentiques qui ont été publiés (1) font foi que la défense de Tournay fut dirigée, comme elle devait l’être, par le lieutenant du gouverneur, François de Divion , seigneur d’Estrayelles. Ensuite, il n’y avait pas un seul Espagnol dans l’armée du prince de Parme : les états des provinces wallonnes, en traitant avec le roi, avaient expressément stipulé que les gens de guerre de cette na- tion demeureraient exclus des Pays-Bas, suivant les dispo- sitions de.la Pacification de Gand et du traité de Marche-en- Famène. Les troupes d'Alexandre Farnèse se composaient, pour la plus grande partie, de Wallons; le reste était des Allemands. Leurs chefs étaient belges: c’étaient Maximilien Vilain, baron de Rassenghien, Robert de Melun, marquis de Roubaix, beau-frère de la princesse d’Épinoy, Emma- nuel de Lalaing, baron de Montigny, son frère, Gilles de Lens, baron d’Aubigny, Maximilien de Longueval, seigneur de Vaulx, dont le fils se rendit depuis si fameux sous le nom de comte de Buquoy, etc., etc. Alexandre, en mettant le siége devant Tournay, n’avait même fait que céder aux (1) Voy. Extraits des registres des consaux de Tournay, dans les Bulletins de la Commission royale d'histoire, 1re série, t. X[, p.327, et les Mémoires sur le siége de Tournay en 1581, de Philippe Warny de Wisen- pière, publiés par M. A. G. Chotin, 1860, in-8e. / ( 240 ) pressantes instances des états de Hainaut, des villes de Valenciennes, de Douay et de Lille, et des seigneurs belges qui servaient dans son armée ; il y était peu disposé de lui- même, ainsi qu'il le déclare à Philippe If dans une lettre du 47 novembre 1581 que j'ai sous les yeux : « Je savais » fort bien, dit-il au roi, quoique tous cherchassent à me » persuader le contraire, que cette entreprise rencontre- > rait une foule de difficultés et d’embarras qui la ren- » draient plus longue qu'ils ne se l’imaginaient, car ils » étaient généralement d'opinion que ce serait une affaire » de huit ou dix jours au plus. Je leur en fis l'observation, » non pas une, mais plusieurs fois, en leur représentant » combien peu j'étais en mesure d'exécuter une telle en- » treprise, non-seulement parce que je ne pouvais guère » faire de fond sur les gens de guerre de leur propre na- » tion, Mais encore parce que je me trouvais sans argent, » sans artillerie, sans munitions de guerre ni provisions » de bouche, enfin sans aucune des choses nécessaires » pour en assurer le succès. (1). » L’armée de Farnèse (1) «.... Vine 4 esta plaza, no solamente de mi motivo, pero movido : y casi forzado de la continua instancia que me hacian estas provincias y villas convecinas, à las cuales juzgué darles esta satisfacion , por aquie- tarlas de la alteracion con que quedaban à causa de la venida de los Fran- ceses : que à no estar esto de por medio, mal lo emprendiera yo, sabiendo, como sabia muy bien (por mucho que todos me persuadian lo contrario), que no faltarian dificultades ni embarazos que harian la empresa mas larga de lo que ellos se imaginaban, que comunemente eran de opinion que fuese negocio de ocho 6 diez dias y no mas; y assi selo dixe y representé, no una sino muchas vezes, poniéndoles delante el poco 6 ninguno apareio que para ello habia, assi por el poco valor y confianza de la gente de guerra de su misma nacCion , COMO por hallarme sin dinero, sin artilleria, municiones y pertrechos, y sin cosa de las necesarias para el efecto que pretendian . » (Archives de Simancas, Estado, leg. 584.) ( 241 ) était bien loin d’ailleurs d’être aussi considérable que les historiens le prétendent. On dit encore que la princesse d'Épinoy, animant les assiégés par ses discours et par son exemple, et combat- tant à leur tête, reçut sur les remparts un coup d’arque- buse dans le bras. Ici l’on s'appuie sur l'autorité de Jean- François Le Petit, de Van Meteren, de Strada. Le fait a toujours été regardé comme constant en Hollande, et à pris place parmi les traditions nationales de ce pays. On a pendant longtemps représenté, sur les théâtres des Pro- vinces-Unies, un drame dont la princesse d’Épinoy était l'héroïne; il s’y débitait force tirades contre l’Église ro- maine et contre le despotisme espagnol : cela servait à ré- chauffer à la fois l'esprit national et la ferveur religieuse des sectateurs de Calvin. Je me rappelle avoir vu jouer à Tournay, dans ma jeunesse, une traduction ou plutôt une imitation de cette pièce (4). La chose est-elle bien avérée pourtant, je veux dire le coup d’arquebuse reçu par la princesse d’'Épinoy sur les remparts de Tournay? Je me permets d’avoir quelques doutes à cet égard. Il est à remarquer que Le Petit, contemporain de la ré- volution, et qui y joua même un rôle, mais très-subalterne, ne se trouvait pas sur les lieux, qu’il a donc écrit d’après des oui-dire; que Van Meteren était hors du pays; que Strada, en citant le témoignage de la comtesse d’Egmont, fille du baron d’Aubigny, ne dit pas que le fait ait été rap- porté à la comtesse par son père (2). (1) Elle était l'œuvre du directeur du théâtre, M. Berteché, décédé depuis de longues années. (2) Voici ses expressions : «, . .. Quam toto illo obsidionis tempore, ( 242 ) D'un autre côté, il n’est parlé de cette blessure de la princesse d'Epinoy, ni dans les dépêches adressées à Phi- lhippe II par Alexandre Farnèse (1), qui, à ce qu’il semble, n'aurait point passé sous silence un fait aussi marquant; ni dans le récit que donne du siége de Tournay Pierre Cohns, seigneur d'Heetfelde, lequel y servait sous les ordres du prince de Parme (2); ni enfin, et ceci est particulièrement notable, dans la relation de ce siége par Philippe Warny de Wisenpière, que M. Chotin a récemment publiée (5), relation d'un témoin oculaire, où sont enregistrées, jour par jour, heure par heure, avec un détail minutieux, toutes les particularités de la défense, et qui a un cachet incontes- table de véracité et d’exactitude, quoique le narrateur s'y montre avec passion catholique et royaliste. Philippe Warny ne laisse pourtant pas échapper les occasions de parler de «la princesse ; il fait mention d’elle en deux passages diffé- rents de sa relation : il rapporte que, lorsque les notables de la ville allèrent lui demander de pouvoir traiter avec le prince de Parme, elle répondit « qu’elle se feroit plustost » couper par pièces que de se rendre aux estrangers (4). » » munia ducis induisse, cives, milites, operas animasse, ac bellatoribus » immistam brachio vulnus accepisse, ego ex comite Egmontia, cujus » tunc parens Obignyus urbem obsidebat , exploratum habeo. » (1) Il y en a quatre, sur le siége de Tournay, dans les archives de Si- mancas; elles sont datées des 9 octobre, 17, 21 novembre et 7 décembre 1581. (2) Histoire des choses les plus mémorables advenues depuis l'an onze cens XXX jusques à nostre siecle, digérées selon le temps et ordre qu'ont dominé les seigneurs d Enghien, etc., par Pierre Colins, chevalier et seigneur d'Heetfelde ; Mens, 1654 ; in-4°, p. 540. (5) Mémoires sur le siége de Tournay, 1581, par Philippe Warny de Wisenpiere, avec notice et annotations, par À. G. Chotin; Bruxelles, So- ciété de l'histoire de Belgique, 1860 , in-8e. (4) Page 11 des Mémoires. ( 245 ) Il dit ailleurs « qu’elle avoit bouté le feu au canon sur les » remparts du chasteau , » où elle tenait sa résidence (1). Ce qui augmente mes doutes, c'est une circonstance restée jusqu'ici ignorée des historiens. Deux années avant le siége de Tournay, la princesse d’Épinoy avait été, par accident, blessée au bras, et précisément d’un coup d’ar- quebuse. Voici comment le fait est raconté dans ane lettre _ conservée en original aux Archives impériales de France (2), lettre qui est datée du mois d’octobre 1579, et écrite à don Juan de Vargas Mexia, ambassadeur d’Espagne à Paris, par Guillaume le Vasseur, seigneur de Waïlhuon, l’un des négociateurs du traité de réconciliation des provinces wal- lonnes : « La femme dudiet prince (d’Épinoy), à une salve » que faisoit la garde du chasteau dudiet Tournay, passant » devant elle, a receu un coup de balle au bras, quy la » touché jusques à l’och. C’est un maulvais présage! » Le Vasseur faisait probablement allusion, par ces dernières paroles , à la charge dont le prince d’Épinoy venait d’être revêtu (3), de superintendant général des villes de Valen- ciennes, Landrecies, Bouchain, de la citadelle de Cam- bray, et de toutes les autres villes, places et forteresses des pays d'Artois, de Hamaut, de Lille, Douay et Orchies qui voudraient se ranger sous l’autorité de l’archiduc Mathias. Une lettre de l’archiduc à la princesse d’Épinoy, dont la minute repose dans nos propres Archives, confirme pleine- (1) Page 52 des Mémoires. (2) Collection de Simancas, B 49. (5) Par lettres patentes de l’archiduc Mathias, du 13 septembre 1579, que les états généraux confirmèrent le 23 octobre suivant. Voy. les Bulletins de la Commission royale d'histoire, ire série, t. XI, pp. 440 et 441. ( 244 ) ment la nouvelie transmise par le seigneur de Walhuon à don Juan de Vargas. Elle est ainsi conçue : « Ma bonne cousine, j'ay esté mary d'entendre que par meschief avez esté blessé d'ung cop d'arquebuze en vostre bras, me faisantz tant de mal les adversitez qui à vous ou à mon bon cousin, vostre mary, pourroint succéder, comme si advenissent à moy-mesme, et ce pour l'obhigation qu'ay à vostrediet mari, à l’occasion de la prompte volunté et affection qu'il monstre journèlement, par effect, de porter à l'avancement de nostre bien en particulier et de ceily du pays et cause commune , laquelle me est tant recomman- dée comme la charge que je porte en ces pays me le eom- mande, ensemble à tous bien affectionnez à la patrie, au nombre desque!z mondict cousin vostre mary monstre bien par effect estre des premiers, comme ses œuvres en don- nent tesmoignage. En quoy je ne doubte et confie en vostre prudence et magnanimité que le secondez très-bien, et le contirmerez en si noble et vertueulx propos. Sur ce, ele. Anvers, 16% d'octobre 1579 (1). » On sait que la princesse d'Épinoy mourut l’année qui suivit la reddition de Tournay (2). Ne peut-on pas infé- rer des pièces dont nous venons de donner connaissance qu'après sa mort, on aura exploité, dans un intérêt de parti, la blessure qu'elle avait reçue « par meschief » en 1579, en en reculant la date de deux années ? Ce genre de supercheries politiques ne serait pas sans exemple , surtout aux époques de révolutions et de guerres civiles. (1) Archives du royaume, collect. de l'audience : Dépêches des rebelles, t. 11, ann. 1579, fol. 165 bis. (2) A Anvers, où elle fut inhumée à l’abbaye de Saint-Michel. (Van Me- teren , liv. X, fol. 210 vw, de l'édition de 1618.) ( 245 ) X VIT. Joseph I et la franc-maconnerie belge. On ne sait pas bien précisément l’origine et les com- mencements de la franc-maçonnerie en Belgique; mais il _est certain qu’elle s'était considérablement propagée dans nos provinces sous le règne de Marie-Thérèse. Des docu- ments authentiques nous font connaître le nombre des loges qui y existaient lorsque Joseph If monta sur le trône : Bruxelles et Gand en comptaient cinq; Anvers et Mons, deux; Tournav, Malines, Namur, Alost, Ostende, Luxembourg, Marche, une. La plus considérable était l’Heureuse rencontre, à Bruxelles, qui se composait de cinquante-deux membres; la moins nombreuse, la Con- stante fidélité, à Malines, où 1l n’y en avait que treize. Aux vingt et une loges civiles il faut ajouter trois loges mili- iaires, savoir : celles du régiment de Murray, du régiment de Wurtemberg et du régiment d’'Arberg dragons, qui tenaient leurs séances dans les villes où ces corps étaient en garnison. Toutes les classes de la société étaient représentées dans le personnel des loges. Ainsi, tandis qu’à Gand, la Constante union, la Parfaite amitié, la Candeur étaient presque en- tièrement formées de marchands et d'artisans, l’Heureuse rencontre, à Bruxelles, comprenait, parmi ses membres, les dues d’Arenberg, d’Ursel, de Beaufort, les princes de Ligne et de Gavre, les marquis du Chasteier, de Wemmel, de Preud’homme d’Aïlly, les comtes de Duras, d'Oultre- mont, de Lichtervelde, de Lannoy, de Pestre, les minis- tres plénipotentiaires de France et des Provinces-Unies ; ( 246 ) et, à côté d'eux, figuraient des avocats, des négociants, des artistes. Les loges civiles, de même que les loges militaires, dé- pendaient de la loge provinciale, composée des grands officiers de l’ordre et de délégués de toutes les loges. La loge provimeiale avait à sa tête un grand maitre, lequel veillait à l'observation des statuts et règlements de l'ordre. Il appartenait au grand maître d'accorder des constitutions ou octrois pour ériger des loges nouvelles , comme de sup- primer les loges établies, lorsqu'elles s’écartaient de leurs statuts. Le grand maïtre était en ce temps le marquis de Gages, chambellan de l'empereur et membre de l’état noble de Hainaut (1). Marie-Thérèse n’aimait pas la franc-maçonnerie, et son beau-frère le prince Charles de Lorraine, qui, en son nom, gouverna les Pays-Bas durant près de quarante années, ne l’aimait guère davantage : cependant, sous leur admi- nistration douce et paternelle, il ne fut pris aucune mesure législative pour interdire ou entraver les assemblées des francs-maçons; le ministère, en deux ou trois occasions, se borna à user de moyens persuasifs, pour tâcher d'amener sans éclat la cessation de certaines loges (2). (1) Tous les détails que nous donnons ici sont tirés de pièces officielles reposant dans les archives du conseil privé et de la chancellerie des Pays- Bas à Vienne, les unes et les autres conservées aux Archives du royaume. (2) Voici ce que le prince de Starhemberg, ministre plénipotentiaire pour le gouvernement des Pays-Bas, écrivait, le 25 avril 1779, à M. de Fierlant , président du grand conseil de Malines : « Il me revient, monsieur, que les loges des francs-maçons se sont élen- dues aussi à Malines, et qu’on y tient assez fréquemment des loges, sans y apporter même du ménagement. » Sa Majesté a bien voulu ne pas proscrire publiquement, ou par une ( 247 ) Joseph IT n’eut pas les mêmes ménagements. Ce mo- narque avait la manie de vouloir tout réglementer, les kermesses, les processions, les jubilés, les confréries , et jusqu’à la longueur du voile que portaient les chanoinesses : il ne pouvait pas oublier les francs-maçons. A la fin de l'année 1785, il fit transmettre l’ordre au gouvermement des Pays-Bas de ne tolérer plus à l'avenir de loges que dans la seule ville de Bruxelles. Le ministère belge crut pouvoir ne pas exécuter cette instruction au pied de la letire; il étendit aux capitales des provinces l'exception loi, ces sortes d'assemblées : mais, indépendamment de ee que la raison gé- nérale de police peut dire sur des associations dont le mystère, quel qu’il soit, est contraire aux bonnes règles, Sa Majesté a manifesté assez souvent qu’elles lui déplaisoient , pour qu’elle dût s'attendre que son opinion et l’ex- pression de son mécontentement dans des cas particuliers les proscriroient mieux que toute autre défense. » Il convient donc absolument , monsieur, qu’on trouve un moyen de les faire cesser sans éclat à Malines : je dis sans éclat , parce que l'éclat qu'on y donneroit feroit peut-être un effet contraire à l'intention, et que d’ail- leurs Sa Majesté ne veut pas d'éclat ; et le meilleur moyen pour cela me paroît être que vous préveniez, comme de vous-même, que des personnes accréditées ne se rendent à ces associations ou ne s’y fassent admettre, et que vous répandiez, dans les occasions , que vous savez que ces sortes d’assemblées déplaisent à Sa Majesté; qu’il est donc de la prudence de ne pas s’exposer à déplaire à une souveraine dont les seuls désirs devoient être une loi sacrée pour tout le monde. Il me paroît au moins que ces sortes de choses répandues à propos, suivant les circonstances, et répandues surtout a Malines de votre part , feront une impression assez forte pour espérer que Sa Majesté n’apprendra point et qu’on n’entendra plus parler de contraven- tions qui auroient lieu à Malines. Si cependant vous connoissiez quel- qu'autre expédient, je vous prie de me le suggérer. » (Archives du roy., collect. de la secrétairerie d’État : carton Malines , affaires générales.) Le prince de Starhemberg écrivit, le même jour, dans le même sens, au conseiller fiscal de Flandre , au sujet de la loge de francs-maçons qui s'était établie à Alost. ( 248 ) que l’empereur avait réservée pour la seule capitale du pays. De là l’édit du 9 janvier 1786. Cet édit statuait qu'il ne pourrait plus y avoir qu’une seule loge de francs-maçons dans chaque province, et qu'elle se tiendrait dans la ville capitale; que, chaque fois qu'elle s’assemblerait, elle devrait donner avis au chef- officier de justice et de police , du lieu , du jour et de l'heure de cette réunion ; que si, dans les grandes capitales, une seule loge ne pouvait pas contenir tous les frères, il y en aurait une seconde et tout au plus une troisième, mais que celles-ci seraient à tous égards dépendantes de la loge prin- cipale et soumises aux mêmes règles; que les chefs des loges seraient.tenus, sur leur honneur, de consigner, dans une liste qu'ils remettraient au tribunal supérieur de la province , les noms de tous les membres de leurs loges, et de donner avis au même tribunal de toutes les mutations qui y arriveraient. Chaque contravention à ces dispositions était passible d’une amende de 300 ducats, outre une pu- nition personnelle. « Les sociétés ou loges de frances- maçons — disait l'Empereur dans le préambule de l’or- donnance du 9 janvier 1786 — se multipliant, depuis quelque temps, au point qu'il s’en forme jusque dans les plus petites villes, nous avons jugé convenable au bien de l’État d'y mettre des bornes, et de prescrire, pour les assemblées de ces sociétés, des règles qui, en légitimant celles des vrais et honnêtes francs-macçons, desquelles 11 nous suffit de savoir qu’il résulte quelque bien pour le prochain, pour les pauvres et pour lin- struction, écartent et préviennent en même temps les inconvénients et les désordres que peuvent entrainer, au au SE CPL SRE Ce CV QT et déréglées. » préjudice de la religion et des mœurs, les loges bâtardes ( 249 ) Le marquis de Gages fit des représentations contre cette ordonnance. Î! demanda que la plupart des loges existantes fussent conservées , et que le gouvernement nommât un commissaire avec qui il pût traiter de tout ce qui concer- nerait la franc-maçonnerie des Pays-Bas. Le conseil privé et le ministre plénipotentiaire, qui était en ce temps le comte de Belgiojoso, se montrèrent assez favorables à ces demandes ; mais le chancelier de cour et d’État les accueillit autrement. Le prince de Kaunitz trouva qu'il ne convenait point d'accorder, sans des raisons ma- jeures, des dispenses d’une loi à peine promulguée, et celles qu’alléguait le marquis de Gages étaient à ses yeux insuffisantes. Quant à la nomination d’un commissaire spécial du gouvernement, 1l lui parut « que ce serait at- » tacher trop d'importance aux affaires de la frane-maçon- » nerie », et que les loges, dans leurs rapports avec l’au- torité supérieure, devaient suivre les formes qui étaient prescrites à toutes les corporations du pays (1). Joseph IT apostilla le rapport du prince chancelier dans les termes suivants : « J’approuve entièrement ce que vous proposés Ici sur la voye par laquelle les loges auront à porter le tout à la connoissance du gouvernement; et, pour ne point se dé- parür en rien de l’édit émané, la franc-maçonnerie aux Païs-Bas sera confinée dans la seule ville de Bruxelles : cependant 1l pourra ÿ en avoir deux ou même trois loges. Toute autre association et assemblée des maçons dans quelconque autre ville ou endroit hors la capitale sera donc censée un conventicule, qui doit être puni confor- (4) Rapport à l'Empereur, du 44 mars 1786. 2° SÉRIE, TOME XI. 17 ( 250 ) mément à la loi nouvellement prescrite, à l'exécution de laquelle le gouvernement aura à veiller avec la plus grande exactitude, et à punir toute contravention, sans aucune considération personnelle, et sans employer aucune forme judiciaire. Les listes des frères doivent être envoyées ici, pour être portées à ma connoissance. Quant aux trois loges militaires , je fais passer les ordres au conseil de guerre, pour qu'elles soient levées entièrement. > JOSEPH. » Le gouvernement des Pays-Bas promulgua, le 15 mai 1786, une déclaration conforme à cette nouvelle décision de l'Empereur. C'était une véritable révolution dans l’ordre de la franc-maçonnerie. Il ne paraît pas néanmoins qu'elle ait rencontré la même opposition n1 soulevé les mêmes résistances que la plupart des autres réformes de Jo- seph IL. Le baron de Seckendorff vint aux Pays-Bas comme dé- légué de la grande loge nationale de la monarchie autri- chienne établie à Vienne, pour régler l'exécution des or- donnances des 9 janvier et 15 mai 1786. Toutes les loges des provinces furent supprimées; celles de Bruxelles furent réduites à trois : l'Heureuse rencontre, l'Union, les Vrais Amis de l'Union. Douze délégués, savoir : quatre de cha- cune de ces dernières loges, constituèrent un comité directeur de toutes les affaires de la franc-maçonnerie belge. Le comité élut le baron de Seckendorff pour son président. Un acte du 28 août 1786 donna à ces arrangements la sanction de l'autorité souveraine. XIX. Projet d'enlèvement de Vander Noot, en 1789. On sait que, lors des premiers mouvements insurrec- tionnels contre l'autorité de Joseph IT, au mois d'octobre 1789, une troupe d’insurgés alla enlever le chancelier de Brabant, Joseph de Crumpipen, qui était à sa maison de - Campagne à Tamise, et que les étais généraux, sur le ter- ritoire desquels Crumpipen fut transporté, le firent mettre en liberté, en lui donnant une escorte pour le reconduire jusqu’à Bruxelles. Parmi les militaires qui composaient cette escorte, était un jeune officier, Savoisien de nation, qui, après avoir servi dans la marine francaise, était entré dans l’armée de la république, où il occupait le grade de premier lieute- nant. Guillaume de Joubert (c'était son nom), soit qu'il fût excité par le désir de rendre un service signalé à l’'Empe- reur, soit que l'espoir d’une brillante récompense fût son mobile, offrit au général comte d’Alton de se saisir de la personne de Vander Noot et des papiers du comité de Breda. D’Alton, lui trouvant de la résolution et de l'intelligence, accueillit son projet, auquel le ministre plénipotentiaire, comte de Trauttmansdorff, donna aussi son assentiment. Un nommé Adriane, établi à Maestricht, devait prêter son concours à Joubert dans l’exécution du plan qu'il avait conçu. Il paraît que, au moment décisif, Adriane recula de- vant les dangers de l’entreprise, et que Joubert se vit par là obligé d’y renoncer. Sur ces entrefaites, le comte Phi- lippe de Cobenzl arriva à Luxembourg avec la mission de pacifier les Pays-Bas, Craignant, de la part de Joubert, des (232) indiserétions qui, dans les circonstances , auraient produit un fàcheux effet, il le fit partir pour Vienne, en demandant qu'il fût placé dans un des régiments impériaux : ear il avait donné sa démission du service de Hollande. Joseph II crut reconnaître assez le dévouement de Joubert, en lui offrant le grade de lieutenant dans sa marine. Mais Joubert préféra une indemnité pour se retirer dans sa patrie, et une somme de 200 ducats lui fut comptée par ordre de l'Empereur (1). SAINT BERNARD. Documents inédits; par M. le baron Kervyn de Lettenhove, membre de l’Académie. Au moment où l’un de nos plus illustres associés se prépare, par d'éloquentes études sur la vie religieuse dans l'Occident, à tracer le mémorable tableau de la vie de saint Bernard, il n’est peut-être pas sans intérêt de signaler, parmi les manuscrits de la bibliothèque de Bourgogne, un codex du XIF** siècle, qui renferme de précieux docu- ments restés inconnus à Mabillon. On ne peut guère dou- ter que ce codex ne provienne de l’abbaye d’Éberbach, dont les moines correspondaient avec sainte Hildegarde, et il est aisé de comprendre avec quel som ils ont recueilli les traces de l’apostolat de l'abbé de Clairvaux, dont la pieuse bénédictine de Bingen avait, la première, proclamé la sainteté. (1) Lettre du comte de Cobenzl au prince de Kaunitz, du 28 décembre 1789 ; rapports de Kaunitz à l'Empereur, des 8 et 15 janvier 1790; lettre du mème à Cobenzl, du 16 janvier. (Archives du royaume.) d: ms Éd a. SE D ue Parmi les pièces sur lesquelles nous appelons latten- tion, figure un éloge de l’abbé Bernard, de célèbre mé- moire (celebris memoriae Bernardi), composé peu de jours après sa mort et lu en présence de ses amis éplorés. C’est un touchant commentaire du chapitre qui, dans le récit de Geoffroi d'Auxerre, porte le titre : De felicissima sed fratribus tristissima beati viri morte. Si Bernard n’a pas encore reçu du jugement solennel de l’Église l’éclatante récompense de son zèle, 1l est déjà l’objet d’une vénération unanime, et à côté de l’hommage le plus pompeux rendu à ses vertus, nous trouvons ici, sur sa mort et ses funé- railles, un récit plus complet, plus respectable par sa date et par sa source que tous ceux qui appartiennent à des compilations postérieures. Lorsque, dans ce discours, on rappelait la modestie, l'humilité du religieux qui avait fui, pendant toute sa vie, les honneurs et les dignités, lorsqu'on ajoutait qu’on l'avait vu puissant par la charité et la persuasion , se faire crain- dre des princes les plus orgueilleux et se faire écouter par les peuples les plus séditieux et les plus turbulents, impo- sant ainsi la paix à un siècle qui ne connaissait que Îa colère et la haine, tous ceux qui se pressaient autour de la chaire, avaient déjà reconnu l’abbé Bernard avant que son nom eût été prononcé (1). Quand, quelques instants (1) Non est inventus similis ill, cujus fama viventis, mundi capacis longe lateque tetigerit ambitum.. In vita ejus, si despectum mundi quae- ris, reperis. Electus fuit in episcopum et non acquievit, in archiepiscopum et respuit. Inde Lingonensis, hinc Remensis cathedra testis accedit. Elegit semper abjectus esse in domo Dei magis quam habitare in palatiis populorum., Si fructum quaesieris, regiones quas ipse sevit albae sunt ad messem. Et messis mulla et operarii multi constituti ab eo principes super terram et in insulis quae procul sunt.… Si furens discordia tumidos principes (254) plus tard, l’auteur de ce discours peignit sa mort au milieu des sept cents moines de Clairvaux, et ces glo- rieuses obsèques où la foule se précipitait en désordre, impatiente de contempler, une dernière fois, le front serein et rayonnant de l’apôtre, ceint de palmes et souriant à la mort plus qu'à la vie, il se sentit lui-même dominé par son émotion, et quel que fût son enthousiasme en retra- çant les miracles dont il avait été le témoin comme ceux qui l’écoutaient (1), il ne put s'empêcher de s’écrier : « Pourquoi, au moment où le ciel le couronne de joie, » faut-il qu’il nous laisse ici bas la douleur ! Que de pleurs, » que de gémissements, quand ses restes disparurent dans » les froides ombres du tombeau! Moi-même je restai afflabat, si populos fulminans labefactabat dissensio, ipse murus, ipse in tempore iracundiae factus est reconciliatio, et in verbis suis monstra placa- bat. Terribilis enim erat etiam apud reges terrae ; et audito eo, multa facie- bant. Disertus in sermone, in concione facundus , efficax ad persuaden- dum, ad inquirendum acutus. Verba ejus spiritus et vita erant. Inde tot producimus testes quot auditores. Puto jam ad nomen ejus sine nomina- tione auditor prosilit, ab actis agentem comperiens. Hic est ille celeber- rimus et maximus patrum tam mirandus quam est memorandus, Bernardus Claraevallis, bonor magis praelationis quam praelatione honorificus. (4) Cujus cum appropinquaret ad exitum, immo ad introitum, erat cer- nere faciem quasi lineae nativi ruboris lacteum tenuatim vermiculantis ebur.. Et sicut gaudium recepit in cœælis, ita saevam moestitudinem sevit in terris... Vixit Bernardus et nardus ejus dedit odorem suum etiam in morte. Qui enim fecit mirabilia in vita sua (fecit enim magna), non defecit facere et in morte. Altera nempe die expoliationis secundum carnem, dum in ecclesia jaceret margarita coelestis, gratiosam faciem et duplices retec- tam palmas, accessit post horam orationis nonam aridus recurvam manum ad humerum ; et tacto eo, sanatus est, et secuta est ab astantibus gratiarum actio et vox laudis. Superveniente nocte allatus est alius toto corpore de- bilis; procubuit Jloculo et coram psallentibus erectus est et deductus ad altare... (Cf. Exordium magnum Cisterciense, ap. Migne, col. 448.) ( 255 ) >. frappé de stupeur à ce triste spectacle. Jour de triomphe » pour la foi, jour de deuil pour l’amitié (4)! » Il est sans doute réservé à M. le comte de Montalembert de nous apprendre quel est cet orateur anonyme, ami et premier panégyriste de saint Bernard (2). Immédiatement après on rencontre, dans notre manu- scrit, un sermon inédit de l’abbé de Clairvaux qui rappelle l’une des périodes les plus remarquables de sa vie, quoique ce soit celle qui ait été le plus inexactement racontée jus- qu’à ce jour (3). Suger avait convoqué à Chartres une as- (1) Quo vero privilegio amoris meruerit amari, et cursus populorum, patrum, episcoporum, principum, singultus et luctus stetere pro testibus.. Nam cum auriflua conderetur ypogeo lugubris sepulturae, tune visceribus motis vox audita est, ploratus et ululatus multus. Conticuit officium se- pulturae, quatiebat inclusum aerem querela tristis et gemitus, et erat planctus magnus valde. Spectaculo tristi, tristi aeque stupore defixus haerebam, felicem me reputans videntem diem, diem quidem festum fidei, sed infestum affectui… Gloriae porro congaudendum super omne quod colit oculus aut affectat carneus amor. (2) Je me borne à faire observer que ce panégyrique, comme la lettre de Geoffroi d'Auxerre publiée par Mabillon (ed. Migne , IV, col. 395), aura probablement été envoyé à Herman, évêque de Constance. Il sera arrivé ainsi dans le diocèse de Worms. Herman, évèque de Constance, avait accompagné saint Bernard à Worms. (5) Mabillon et Baronius pensent que le concile de Chartres eut lieu immé- diatement après les fêtes de Pâques 1146, ce qui est précisément la date de assemblée de Vézelay. Bien que Dom Bouquet ait proposé de le placer quatre ans plus tard, la même erreur se trouve reproduite dans tous les travaux modernes. La véritable date est 4151. Suger, en convoquant le concile de Chartres, raconte les périls qui menaçaient Antioche vers le mois d’août 1150 (V. G. de Nangis, éd. de M. Géraud, t. f,p. 46), et annonce la réunion du concile après les fêtes de Pàques. Pierre le Vénérable, en s’excusant de son absence au concile de Chartres, rappelle aussi la retraite du roi de Jé- rusalem avec Ja relique de la sainte croix à Antioche. Déjà une assemblée avait été tenue à Laon, et un diplôme cité par Bréquigny (t. HI, p.170) la fixe en 1150. La 256me lettre de saint Bernard nous apprend, en termes ( 256 ) semblée des grands et des prélats du royaume : il voulait, malgré sa vieillesse, se placer à la tête d’une expédition dont le but était la délivrance de la sainte croix déposée à Antioche et menacée par les infidèles; mais quand las- semblée de Chartres se réunit, les infirmités de Suger l'empêchèrent de donner suite à son projet, et ce fut saint Bernard qui fut proclamé le chef de la croisade. Saint Bernard, prêt à descendre lui-même au tombeau, en té- moigna sa surprise et son étonnement, dans une lettre au pape Eugène, à qui il avait adressé, l’année précédente, son livre De consideratione, où il insistait sur les périls et les désastres de l'Orient (1). Saint Bernard avait voulu prononcer à Chartres un ser- mon comme il avait coutume de le faire, soit dans les conciles, soit dans les chapitres de Citeaux. Il s'était efforcé de montrer tour à tour ce qu'était devant Dieu le mariage chrétien et comment il était l’image de l'union du Seigneur et de l'Église, du Seigneur triomphant dans l'éternité de sa gloire, de l’Église condamnée aux épreuves des persécutions et chaque jour livrée à d’autres tourments et à d’autres supplices (2). Mais ce sermon fut interrompu : nous ne savons toutefois par quelle cause, et nous pouvons précis, que l’expédition de Louis VIT en Syrie (prior exercitus) avait déjà échoué. Deux lettres du pape Eugène, du 25 avril et du 11 juin 1150, établissent aussi qu’en ce moment rien n’était décidé pour une nouvelle croisade. Le concile de Chartres ne put donc avoir lieu qu'après les fêtes de Pàques 1151, et telle est aussi la date indiquée par la chronique de Guillaume de Nangis (I, p. 47 ). En ce moment, Suger venait d’être saisi par la fièvre qui le conduisit au tombeau, et tout explique comment il fut remplacé comme chef de la croisade par l'abbé de Clairvaux. (1) Opera S. Bernardi, ed. Migne, 1, coll. 463, 569 et 741. (2) Pro Christo mortificatur cottidie ecclesia, propter Christum aestima- {ur quasi ovis OCCIsiOnis. D LL ( 257 ) nous demander si ce ne fut point par les clameurs des préiats, des grands et du peuple, qui, en présence de ce nouveau gémissement qui avait retenti sous les palmiers de l’Idumée, saluaient l'abbé de Clairvaux du titre glorieux de chef de la croisade. Quoi qu’il en soit, saint Bernard écrivit plus tard ce ser- mon, tel qu’il l'avait commencé, tel qu'il se proposait de le poursuivre, en le modifiant toutefois sur plusieurs points; et c’est ce texte que nous avons sous les yeux (1). On y voit que l’abbé de Clairvaux corrigeait habituellement ses dis- cours afin de donner au style plus d'élégance et plus d'éclat, et il est intéressant de remarquer la distinction qu’il fait lut- même entre le flot abondant de l'improvisation et le travail plus pénible de la rédaction destinée à la postérité (2). (1) Sermonem, quem in Carnotensi concilio coeptum terminari super- veniens causa prohibuit, ut ad minorem eruditionem exarare gravarer, nonnullos confidentium postulasse recordor. Quod vos, fratres dilectissimi, flagitantes adjecistis plurima , quibus stili mei sono laetitiam excitari posse credidistis, scilicet oportere episcopum sic vivere ut etiam sepultus exemplo . vivat omnibus aut verbo ; esse apud Deum inferiorem populo sacerdotem, cujus nec doctrina in benedictione , nec vita. Ex habundanti, fratres, hoc aut similia addidistis, scientes quod pepigerim vos mecum honorare , vos diligere in Christo, vobis in omnibus morigerari, quae vel amicos postulare conveniat, vel facere possim postulatus. Unde et votis vestris affuturum me promisi, quod utinam minime promisissem! Siquidem mendacii reus arguar, nisi solvam quod spopondi. Si stilo indulgeam, ridiculus seriptor inveniar. In silentio itaque delictum est , in pagina confusio. Malui tamen ingenium defectu quam sacerdotem mendacio accusari. Hine est quod operi manum apposui, rogans ipsum procul fieri ab oculis hominum, si senseritis ipsum linguas hominum formidare. In quo si forte inveniar ad- didisse aliquid vel dempsisse, si non eundem tenuissem ordinem , scitole quod scribere decrevimus, non praejudicare , et scripto corrigere, si quid fuit peccatum in sermone. (2) Une lettre de saint Bernard (la 17m) nous apprend que des reli- gieux recueillaient ses sermons et que parfois il revoyait leur travail pour (258) A la fin du codex se trouve un recueil de lettres de saint Bernard. Bien que les premiers feuillets aient été lacérés (1), il nous offre cinq lettres inédites. L'importance de ces documents, objet de recherches si actives et si persévé- rantes dans la plupart des bibliothèques de l’Europe, m'engage à publier ces lettres à la suite de cette notice. Je me bornerai à y joindre quelques rapides observations. La première de ces lettres (1) est adressée au comte Guil- laume de Nevers. C’est la seule que l’on connaisse de saint Bernard à ce prince dont il fait ailleurs l'éloge et qui ter- mina ses jours dans un couvent de chartreux. Nous croyons même qu'il y est fait allusion à cette résolution. La seconde (IT) est également écrite à un prince sou- vent loué par l’abbé de Clairvaux, à ce comte Thibaud de Champagne que l’on honorait, comme il le déclarait à l'empereur Manuel Comnène, parmi les princes les plus distingués par leur clémence et leur zèle pour la justice et la vérité (2). Dans la troisième (TI), saint Bernard rappelle la charité d'Atton, évêque de Troyes, qui distribua tous ses biens aux pauvres pour se retirer à Cluny. | Dans la quatrième (IV), saint Bernard exhorte Conrad, roi des Romains, à lui accorder son appui dans une ques- tion qui intéresse la cause de Dieu. Rien n'indique sil s’agit de la croisade ou de la défense du Saint-Siége. corriger le style (Si quid nostro posse adhuc elaborari studio visum fuerit). Le document que nous publions en offre une nouvelle preuve. (1) A la première page se trouve un fragment de lettre qui se termine par ces mots : Litteras has sigillatas et diligenter exponere et fideliter studeas commendare. Esto pro me ad dominum tuum ut et ego sim pro te ad Dominum omnium. Vale. (2) Oper. S. Bernardi, éd. Migne, t. I, col. 675. (259) La einquième (VE) est une réponse à deux messages assez vifs de l’évêque de Worms (V et Vi). Saint Bernard y déclare que malgré ses occupations qui s’aecroissent de jour en jour, il n’a jamais laissé sans réponse les lettres que lui écrivent les personnes placées dans la position la plus humble, qu’à plus forte raison il n’a pu accueillir avec dédain celles qui lui ont été adressées par une des colonnes de l'Église, mais il ne croit pas moins devoir refuser à l’évêque de Worms un jeune religieux que celui-ci a demandé pour un monastère de son diocèse, parce qu'il redoute pour lui son retour dans un pays où il pourrait, au milieu de ses parents et de ses amis, oublier qu’il n’ap- partient plus qu’à Dieu. I. Pio Nivernersium comiti G., B. Abbas de Clara Valle, salutem et orationem. Die et loco a vobis constituto, voluntas quidem mihi est occurrendi vobis, sed causa est quae impedit; et talis causa quam vos, nisi fallor, cum cognoscetis, justam ac rationabilem judicabitis. Gaudeo autem quod salubre consilium ab exiguis licet, vilibusque personis vobis datum non contempnendum putastis, nec oblivioni tradidistis. Per salutem ergo quam desi- deratis, monemus vos et obsecramus quatinus abbatem Pon- tiniacensem, sapientem utique virum ac religiosum, vobisque amicum fidelissimum , nichilominus, sicut constituistis, adeatis, et tam per eum quam per alios consilii viros, quos ad hoc ipsum convocare utile putabitis, rem propositam ad finem perdu- catis. Nos vero interim orabimus pro vobis et confido in Do- mino Jhesu quod etiam absque nobis ipse et adesse vestro consilio et suam vobis de vobis voluntatem per servos suos revelare dignabitur. Vale. Fidel, ut putamus, Dei ministro comiti T., B. abbas de Clara Valle, si quid potest peccatoris oratio. Huic regulari precor ut praebeatis aurem ac feratis opem. Cujus petitioni propter hoc ego nostram quoque curavi jungere precem, quia novi necessitatem; siquidem abbas, a quo iste missus est, noster amicus est et valde familiaris mihi propter religionem suam. Longum est vobis audire de homine illo quis sit, et unde et qua necessitate ad locum illum, in quo modo est, pervenerit; sed, licet breviter atque veraciter, vobis dico quia, quicquid vestrae liberalitati transmittere plaeuerit, ut vere Christi servo ac perlicet ipsi Christo vos transmisisse confidatis. Vale. III. Domino ac venerabili Trecensium Dei gratia episcopo, fra- ter B., fratrum qui in Clara Valle sunt inutilis servus, si quid potest peccatoris oratio. Revisentem nos frequenter vestram caritatem et nune per carissimum fratrem G. libenter suscepimus, mirantes episcopi et dignationem in pauperes et devotionem in extraneos. Nove- ritis autem vos hoc actitare etsi immeritis, non tamen ingra- Us, quamquam non a nobis gratiam, sed a Deo requiratis, qui ubi vos sapientibus et insipientibus, ibi se vobis debitorem constituit, cum sibi videlicet accipit factum quicquid suis pro se fieri praecepit. De caetero, quia juxta Scripturam filius sapiens gloria est patris, optamus praedictum filium vestrum G. bene semper de vestra paternitate mereri, qui utique, si talis est intus qualis foris apparet, vobis vos retinere credimus quic- quid ei bence feceritis. Vale. LS li eheer-cotht ( 261 ) IV, C. Dei gratia illustri et glorioso Romanorum regi, B. Clarae Vallis vocatus abbas, suas et suorum devotas orationes. Etsi longius a vobis positi simus, diligimus tamen vos, et honorem vestrum toto desideramus affectu. Cujus conscientiae testimonio audemus et fiduciam habemus in his maxime re- bus, quas honorem ad vestrum et ad salutem vestram novimus pertinere. Nune quoque precem habemus ad vos pro negotio quodam , non tam nostro quam ipsius, a quo est omnis potestas et cujus munere longe lateque dilatata est vestra magnificentia super terram. Verumtamen ut occupatis auribus verbum facia- mus abbreviatum, commisimus negotium ipsum venerabili fratri et coabbati nostro de Eberbach et obsecramus regiam majestatem vestram quatinus precem ipsius, immo nostram per ipsum benigne exaudiat clementia vestra. V: B. reverendo abbati de Clara Valle, B. Dei gratia Worma- tiensis ecclesiae episcopus, devotum cum oratione obsequium. Saepius jam pulsando ad aures vestrae benignitatis, nullum habui responsum, dubius an hoc negligentia provenerit legato- rum an ex occupatione negociorum vestrorum. Verum cum iterum pulsemus, propter importunitatem meam surgite et moram praecidendo desiderium meum complete. Inter vos et abbatem de Eberbach sit dispositio spiritalium de ordina- tione (1) cum ego materiam subministraverim temporalium ad recipiendos fratres ordinis vestri. Porro si ego dignus non sum apud quem passeres coeli nidificent, ille dignus est cujus vicem quamvis indigni gerimus, eujus vestigia secuntur cet amplectuntur. (1) Lisez : Sit dispositio de ordinatione spiritalium. B. Deco digno abbati de Clara Valle, B. Wormatiensis eccle- siae humilis minister spiritum pietatis. Miramur et aegre ferimus quod totiens aures vestrae pater- nitatis appellavimus, nec saltim adhuc responsum meruimus; et merito peccatis nostris asseribimus quod ostium vestrae pie- tatis aliis ultro aperitis et nobis clauditis etiam pulsantibus. Ut enim melius nostis, ad novellam illam plantationem, quam ad laudem divinae majestatis aedificare coepimus, abbatem diu a vestra paternitate incassum quaesivimus et expeclavimus; quippe qui spe et desiderio omnino frustrati sumus. Abbatem tamen et conventum habemus. Verum, ut ita dixerim, quia soror nostra parvula est et ubera non habet, quod minus habet in se, suppleri desideramus vestrae largitatis munere. Rogamus igitur vos et obnixe petimus ut, semota omni contradictione, E. dilectum ecclesiae nostrae filium nobis mittere curetis. VIL Domino venerabili et patri dilectissimo, B. Wormatiensi Dei gratia episcopo, B. Clarae Vallis vocatus abbas, videre bona Domini in terra viventium. Littcras dignationis tuae, reverende pater, debita venera- tione suscepi et a verbis tuis formidavit cor meum. Dicis enim te mirari et aegre ferre et tuis asscribis peccatis quod, jam saepenumero mihi scribens, non solum non optinueris quod postulabas, sed nec verbum responsionis acceperis. Quod si ita est, ut tibi verba tua restituam , miror et aegre fero et meis peccatis asscribo. Si enim haec feci sciens et prudens, superbia est et contemptus in Christum Dominum. Non fuit meae con- suetudinis hactenus nolle respondere hominibus etiam pusillis ; quanto magis his, qui videntur esse columpnae in ecclesia Dei? ( 263 ) Credo propter quod et loquor (1). . . . . . . . . respondendi vobis propter sucerescentia negocia per singulos dies m. .... sum vel sine litteris voce vobis viva per nuneium respondisse, eujus lin (2). . . . . apud vos quam calamus scribae velociter seribentis. Nam exceptis his duabus. . . . . . . . . tertiam invenio eausam in conscientia mea. Super fratre E. breviter vobis (3)... . . quia bonae spei frater est; sed quum adhuc quasi inplumis avicula in n. . (4). . . .... .. non videtur nobis tutum ut remittamus eum inter affines et notos, ne tam 114) PRESS . tio aliquo turbine commoveatur. Cum autem edoctae fuerint manus ejus ad praelium et dextera ad bellum, sicut fuerit voluntas in coelo, sic fiat. De fratre autem A. si vobis durum videbatur quod non habuistis eum, ecce quam erat nobis necessarius. VIIL (6). Quod vestra de vobis locuntur scripta, quod ubique de vobis praedicat fama, in memet ipso nunc comprobari gestio. In seriptis quidem vestris invenimus vos cum apostolo profi- tentem insipientibus vos esse debitorem : si insipientibus, et mihi. Quid de fama dixerim ? cum constet nullum in necessitate frustra consilium quaerere a vestra paternitate. Unde et ego nunce, pater amande, licet ignotus, in meis angustiis ad vos re- spicio et in tribulationibus quae invenerunt me nimis, consilium et consolationem a vestra sanctitate requiro. Ut enim imprae- (1) Un coin du feuillet est déchiré : de là quelques lacunes à l’extrémité des lignes. * (2) Peut-être : cujus lingua tam valuit apud vos. (3) Probablement : vobis dicam. (4) Lisez : in nido sit. (5) Novitius ? (6) Bien que cette lettre ne porte ni le nom de celui qui l’a écrite, ni le nom de celui à qui elle est envoyée, elle est évidemment adressée à saint Bernard. Elle m'a paru mériter d’être recueillie. ( 264 ) sentiarum taceam de aliis plurimis quae meam perturbant pu- sillanimitatém, pondus mihi impositi regiminis, per omnia quidem meis inpar viribus, maxime in hac parte premit me, quod nec ordini nec professioni valeo satisfaccre. Nam ut ver- bis illius ewangelii utar, homo sum sub potestate constitutus , habens sub me non solum monachos, sed quod gravius est, etiam milites, et huic dico : vade, et miles promtior est ire in expeditionem quam monachus, proh dolor, ad regularem obser- vationem. Super his, Deo propicio et vita comite, in proxima quadragesima decrevi sanctitatem vestram adire, super his vestrae prudentiae responsa facie ad faciem, aure ad aurem audire, sperans per vestrae discretionis consilium, meum refri- gerari desiderium. Quia igitur vereor frustrari, si ex insperato veniam et vos domi forte non inveniam, rogo ut, si quid negotii usquam in partibus nostris ubi vobis occurrere pos- sim, habeatis, sin autem, quando vel ubi vos invenire valeam, per praesentium latorem litteris mihi mandare curetis. Valete et id ipsum nobis sanctis vestris precibus obtinete. —— ) Cu —— ( 265 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 7 février 1801. M. Van HAssELT, vice-directeur. M. QueTELeT, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, De Keyzer, F. Fétis, Leys, Navez, Roelandt, Jos. Geefs, Érin Corr, Partoes, Éd. Fe- tis, De Busscher, Portaels, membres; Calamatta, associé; Balat et Siret, correspondants. MM. le baron de Sant-Genois, le baron Kervyn de Let- tenhove et Nolet de Brauwere van Steeland, membres de la classe des lettres, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur fait connaître qu'il est dis- posé à faire imprimer, aux frais de l’État, la traduction des œuvres didactiques de Tinctoris, due à la plume savante de M. Féts. Cet ouvrage lui semble, toutefois, ne pouvoir prendre place dans la collection des œuvres des anciens compositeurs belges, dont le format in-folio ne se prête guère à la publication de ce genre de travaux. « Il y aurait donc lieu, dit M. le Ministre, d’en faire l’objet d’une publi- cation spéciale et séparée, se rattachant d’ailleurs par sa 2e SÉRIE, TOME XI. 18 (266 ) matière à la collection dont il s’agit. Avant que cette pu- blication s’effectue, je désire connaître les mesures d’exé- eution que l’on se propose de prendre et d’être fixé sur la quotité de subside nécessaire. » Sur la demande de la classe, M. Fétis veut bien promet- tre de donner les renseignements nécessaires à ce sujet. a] — L'Université de Christiania, en faisant hommage à l’Académie d’un exemplaire de la monographie de la cathé- drale de Drontheim, avait demandé que la classe voulût bien donner son avis sur le projet de restauration pro- posé pour ce monument; une commission, composée de MM. Suys, Roelandt et Balat, fut nommée pour répondre à cette invitation, et le dernier de ces trois artistes rédigea un rapport qui fut approuvé par la classe. M. le secrétaire perpétuel communique la réponse suivante qu'il vient de recevoir à ce sujet : « Le Sénat académique de l’Université royale de Norwége s’empresse d'adresser à l’Académie royale de Belgique ses remerciments pour l'intérêt avec lequel l’Académie a bien voulu examiner la description de la cathédrale de Drontheim. Cet examen a pour nous une valeur d'autant plus grande qu’il contribuera aux pré- paratifs tendants vers la restauration de cette cathédrale, et, à cet égard, l'attention des sociétés savantes et des autorités compétentes nous est fort précieuse. » CONCOURS QUINQUENNAL DE GRAVURE EN TAILLE-DOUCE. M. Alvin fait connaître que le jury chargé de décerner le prix de gravure fondé par la classe, s’est réuni dans la (267) matinée, et qu'il n’a pas cru devoir prendre encore de décision définitive, à cause de l’absence d’un de ses membres. COMMUNICATIONS ET LECTURES. —— Note sur la decouverte récente des plus anciens monu- ments de la typographie musicale, et, par occasion, sur les compositeurs belges du XV siècle; par M.F. Fétis, membre de l’Académie. Les musicographes savent que l'invention de l’impres- sion de la musique en caractères métalliques mobiles appartient à Ottaviano Petrucei, né à Fossombrone, petite ville de l’État de l’Église, le 18 juin 4466, et qui établit les premiers ateliers de son industrie à Venise, en vertu d’un privileqium invictissimi domini Venetiarum quod nullus possit cantum figuratum imprimere. M. François Caffi croit que ce privilége ne fut concédé à Petrucci que dans l’année 1502 (1), parce que le plus ancien produit de . ses presses, connu jusqu’à ce moment, était un recueil de trente-trois motets à trois voix, achevé d'imprimer le 9 mai de cette même année, avec la mention du privilége. De ces trente-trois motets, cinq appartiennent à Josquin Deprès, né dans le Hainaut; neuf à Gaspard Van Veerbeke, d’Audenarde, qui fut maitre de chapelle du duc de Milan, Jean-Galéas-Marie Sforce, antérieurement à 1490; huit à Jean Ghiselin, du Hainaut; deux à Alexandre Agricola, (1) Storia della Musica sacra nella già Cappella ducale di San Marco di Venezia, dal 1318 al 1797, tome IT, page 205. ( 268 ) chantre et chapelain de Philippe le Beau ; deux à Compère, élève d'Ockeghem, et qui mourut chanoine de Saint- Quentin; un à Antoine Brumel, également élève d’Ocke- ghem, et six à Pinarol, dont l’origine n’est pas connue jusqu’à ce jour. Vingt-sept compositions de ce recueil ap- partiennent donc, de toute évidence, à l’école belge; on ne peut se prononcer quant aux six autres. Dans la même année, Petrucei mit au jour trois livres des messes à quatre voix, composées par Josquin Deprès, avec la même mention du privilége; mais ce n’est pas à dire, comme l’a eru M. Caffi, que ce privilége n'ait été accordé qu'en 1502, car le savant conservateur de la Bibliothèque impériale de Vienne, Antoine Schmid, de regrettable mémoire, a démontré, dans son excellente mo- nographie de Petrucei (1), d'après un acte authentique extrait d’un registre de l’ancienne chancellerie ducale de Venise (2), que la première concession du privilége de- mandé par Petrucei lui fut accordée le 25 mai 1498. A la suite de la demande de l’imprimeur, rapportée tex- tuellement dans le registre, on trouve en effet la résolu- tion du conseil exprimée de cette manière : 1198. Die xxY maii quod suprascripto supplicanti conceditur prout petilur. CONSILIARII : Ser Marinus Leono. Ser Jeronimus Vandrameno. Ser Laurentius Venerio. Ser Dominicus Bollani. (1) Ottaviano dei Petrucci da Fossombrone , der erste Erfinder des Musik Notendruckes mit beweglichen Metalltypen, etc. Vienne, 1845, 1 vol. gr. in-8°, p. 11. (2) Registro marcato notatorio 1489-1499, fol. 170. ( 269 ) Quatre années semblaient donc s'être écoulées entre la date du privilége et la, première publication faite par le célèbre inventeur de la typographie musicale. Il existe, parmi les richesses de la Bibliothèque impériale de Vienne, un exemplaire unique et complet d’un recueil imprimé par Petrucei, lequel a pour titre : L Canti C. n° cento Cinquanta. On y hit à la dernière page ces mots : Impressum Vene- tiis per Octavianum Petrutium Forosemproniensem, 1505, die 10 februarii. Cum privilegio, etc. Antoine Schmid a donné une description exacte de ce recueil (1), qui contient cent cmquante motets et chansons à trois, quatre et cinq voix , dont soixante-cinq n’ont pas en tête de noms d'auteurs; mais la plupart des autres ap- parüiennent aux célèbres musiciens belges du quinzième siècle : Busnois, Ockeghem, Obrecht, Josquin Deprès, Alexandre Agricola, Pierre de Larue, Dujardin (De Orto), Le Roy (Regis), Ghiselin, Jean Japart, Crispinus de Stap- pen , Jean Stokem , Grégoire Reingot (de Mons), Molinet, Nicolas Craen, Corneille de Wilder, Jean Tadinghem, Hancart, Brumel et Compère, ces derniers élèves d’Ocke- ghem. Un seul nom allemand, celui du célèbre musicien Isaac, ou Yzac, paraît dans la liste de ces auteurs : deux autres noms, d’origine inconnue, s’y trouvent aussi : le premier, Lapicida, n'indique peut-être qu’une profession (tailleur de pierres) exercée par l'artiste dans sa jeunesse ; l’autre, Fortuila, ne se rapporte, par sa construction, à (1) -Oftaviano dei Petrucci, etc., p. 56-45. ( 270 ) aucune nationalité déterminable. Pas un nom italien ne parait dans cette longue liste. Le titre du recueil, Canti C, indiquait par lui-même que d’autres recueils, portant vraisemblablement les lettres A et B, appartenaient à la même collection; cependant on ne les connaissait pas. On supposait qu’ils devaient être d'une date plus ancienne que 1505, et probablement être plus rapprochés de celle du privilége de 1498 que le recueil des trente-trois motets et les messes de Josquin Deprès publiés en 1502; tontefois ce n’était qu’une conjecture. A la vérité, on trouve dans les Pandectes de Conrad Gesner l'indication et les titres de trois livres de chants marqués A,B,C, mais sans date, de cette manière : Harmonicae musices Odhecaton, impressum Venetiis. Pour le premier livre, le même auteur écrit : Cantus centum signati. A. Zacconi dit aussi (1) : Odhecaton, volume cosi chia- mato, che contiene assai bellissime cose de musica di quel tempo. Enfin le second livre est indiqué ainsi par Conrad Gesner : Canti quinquaginta signati B ; et le troisième : Cantus C. numero 150, Venetiis, per Octavianum Petru- tium excusi. C’est ce troisième livre, dont l’exemplaire unique se trouve à la Bibliothèque impériale de Vienne. L'existence des deux autres livres a été pendant long- temps le sujet de vaines recherches : leur découverte ré- cente et inespérée est l’objet de cette note. Elle est due à M. Gaétan Gaspari, maître de chapelle de la cathédrale de Bologne, bibliothécaire du lycée musical de cette ville, l’un des plus savants et des plus exacts biographes et bibliographes de l'époque actuelle. Nous sommes redeva- (1) Pratica di musica; Venezia, 1502, fol. 84. (27 ) bles d’une très-bonne notice sur la découverte en elle- même et sur la valeur des deux recueils, à M. Angelo Catelani, de Guastalla, maître de chapelle de la cour et de la cathédrale de Modène, et conservateur adjoint de la Bibliothèque palatine de cette ville, connue autrefois sous le nom de Bibliothèque Estense. Auteur de morceaux très- distingués concernant divers points de l’histoire de la musique, M. Catelani est un des rédacteurs principaux de la Gazzetta musicale de Milan. C’est dans ce recueil périodique qu’il a publié sa notice concernant la découverte de M. Gaspari, sous ce titre : Da due Stampe ignote di Ottaviano Petrucci da Fossombrone, en l’accompagnant de fac-simile des titres des recueils, de la notation et de la marque de l’imprimeur. La présente note ayant pour objet principal le rôle im- portant des compositeurs belges au quinzième siècle, je n’entrerai pas ici dans tous les détails bibliographiques donnés par M. Catelani sur les deux premiers livres de l’'Harmonicae Musices Odhecaton (1) : j'en prendrai seu- lement les traits les plus importants. Le titre Harmonicae Musices Odhecaton ne se trouve qu’au premier livre, marqué par un grand A. L’épitre dédi- catoire adressée à Jérôme Donato, noble vénitien, la seule que Petrucci ait faite, est datée de Venise, le 15 mai 1501, tandis qu'on à à la dernière page du second livre, signé B, la souscription suivante : Impressum Venetiis per Octavianum Petrutium Foro- semproniensem die à februarii salutis anno 1501, cum privileqio inuictissimi Domini Venetiarum q. nullus possit (1) Guide de l'harmonie musicale. (272) cañntum figuralum imprimere sub pena in ipso privilegio contenta. Il semble donc que ce second livre, dont le titre est simplement Canti. B. numero cinquanta, a dù paraître avant le premier, puisqu'il était achevé d'imprimer depuis le 5 février 1501, tandis que la dédicace de l’autre porte la date du 15 mai de la même année. En considérant l'étendue du premier livre À, et voyant que, seul, il a le titre de l'ouvrage, M. Catelani tire l'induction qu'il a dû ètre imprimé dès l’année 1500, et que le livre B n’a été vraisemblablement publié que plusieurs mois après la date de l'impression et après la mise en vente du recueil A. Le savant auteur de cette dissertalion n’aurait eu aucune peine à concilier les dates, qui paraissent contradictoires an pre- mier coup d'œil, s'il se fût souvenu qu'à l’époque où fu- rent imprimés ces premiers monuments de la typographie musicale, le renouvellement de l'année, à Venise, comme dans une grande partie de l'Europe, avait lieu, non le 1“ janvier, comme aujourd'hui, mais la veille de Pâques, im- médiatement après la cérémonie de la bénédiction du cierge paseal. En 1501, l'année a commencé le 11 avril; elle a fini le 26 mars suivant (1) : le 15 mai 1501 a donc précédé le 5 février d'environ neuf mois; d’où il suit que le volume B de l'Odhecaton ne fut achevé que neuf mois environ après la signature de la dédicace du livre A. Le format des deux livres est petit in-quarto oblong. Le papier est de la meilleure qualité, et l'impression magni- fique; car Petrucei porta, dès ses premiers essais, son art (1) Voyez la Table chronologique de V'Art de vérifier les dates, p. 51, édition de 1770. Rs à (245 ) à la perfection : ses types sont d’une forme très-élégante et bien proportionnée. Malheureusement l’exemplaire unique découvert par M. Gaspari est imparfait de quelques pages, qui rendent incomplets dix morceaux du premier livre. Comme le troisième livre, ceux-e1 ne présentent, dans la liste des auteurs, que des noms de l’école belge, à l’ex- ception d’Isaac, Allemand, et de Vaqueras, Espagnol. Ce sont encore Busnois, Obrecht, Ockeghem (écrit Okenghen), Josquin Desprès, Pierre de Larue, Agricola, De Orto (Dujardin), Brumel, Compère, Ghiselin, J. Tadinghem, Stokem et Japart. Deux musiciens de cette école, dont les compositions sont rares, quoiqu'’ils aient été placés au rang des plus célèbres de leur temps, Caron et Tinctoris, s’y trouvent, le premier, par la chanson française à quatre voix : Hélas! que pourra devenir; l’autre, par une chanson à trois voix sur les mêmes paroles. Quelques noms nouveaux apparaissent dans cette liste. En premier lieu, celui de Hayne se fait remarquer par deux chansons, la première à quatre voix, l’autre à trois, dans le livre À, et par une autre chanson à trois voix, dans le livre B. Naguère ce nom était absolument in- connu : M. Stéphen Morelot, ancien élève de l'École des Chartres, aujourd’hui prêtre à Dijon , est le premier qui a fait connaître l'artiste auquel il appartient, par la publi- cation de sa chanson à trois voix, De tous biens plaine est ma maistresse, qui se trouve dans un manuscrit de la bibliothèque de Dijon, lequel provient de la cour des ducs de Bourgogne (1). Postérieurement quelques renseigne- ments positifs sur cet artiste ont été trouvés par l’exact (1) Notice sur un manuscrit de la Bibliothèque de Dijon, etc., Appendice (musique), n° V. ( 274 ) et laborieux M. Pinchart, aux Archives du royaume de Belgique : il en résulte que Hayne, ou Heyne, était chan- tre et valet de chambre de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, en 1468, et que son nom de famille était Van Ghizeghem : Hayne ou Heyne était, au moyen âge, la forme flamande de Henri, son prénom. Bulkyn, qui figure dans la liste des auteurs de ce re- cueil, par la chanson à trois voix : Or sus, or sus, Bovier, et dont on trouve aussi un motet à quatre voix (Ave vir- ginum gemma Catharina) dans le quatrième livre publié en 1505, par Petrucci; Bulkyn, dis-je, est, sans aucun doute, un nom des Pays-Bas. Il en est de même d’Over- beek, écrit Uuerbach dans le livre À. À légard de Nünot, de Bourdon et de Vincinet, dont on trouve une chanson de chacun dans le même livre, je ne les ai vus cités en aucun autre recueil, ni dans aucun manuscrit. Ainsi donc, alors que l’art d'imprimer la musique nais- sait en Italie, à Venise, centre d'intelligence, d’opulence et de prospérité des arts du dessin, pas un nom italien n'apparaît parmi les œuvres musicales destinées aux jouis- sances du monde aristocratique : c'est aux Pays-Bas, c’est à la Belgique surtout, que la reine de l’Adriatique a re- cours pour lui faire goûter les charmes de l’harmomie. L’étonnement qu’inspire un pareil fait redouble en consi- dérant ce qui se passe pour la musique d'église pendant tout le premier quart du XVI"*° siècle. Jetons un coup d'œil rapide sur une succession de faits si glorieux pour notre patrie, et tirons du passé un enseignement pour l'avenir. Le 27 septembre 1502, Petrucei achève l’impression de la première édition des messes de Josquin Deprès. Le 27 décembre de la même année, il réimprime le livre [° de L: (275 ) ces messes : ces publications et le livre des trente-trois motets des compositeurs dont il à été parlé plus haut, complètent les travaux du célèbre typographe pénilit cette année 1502. En 1503, Petrucei met au jour les livres H et TI de la seconde édition améliorée des messes de Josquin Deprès; le livre C de lOdhecaton; le 24 mars, il achève l’impres- sion d’un livre de cinq messes de Jacques Obrecht; le 17 juin , 1l publie cinq messes de Brumel : le 15 juillet, cinq messes de Ghiselan, et le 31 octobre, cinq messes de Pierre de Larue. Dans tout cela, pas autre chose que de la musique belge. Le 25 mars 1504, Petrucei met au jour cinq messes d'Alexandre Agricola; trois livres de motets à quatre voix A,B,C, de maîtres belges, suivent cette publication. En 1505, les mêmes presses produisent un livre de cinq messes de Dujardin (De Orto), un livre de motets à-cinq voix des maitres flamands, et le quatrième livre des motets à quatre. En 1506 paraissent deux livres de Lamentations de Jéré- mie, dont les principaux auteurs sont Tinctoris, Bernard Ycart, Dujardin, Agricola et Gaspard. En 1508, Petrucci met au jour un recueil de messes d’Obrecht, de Philippe Bassiron, de Brumel, de Gaspard et de Pierre de Larue. En 1509 , un livre de cinq messes de Gaspard Van Veer- beeke, et un livre de nombreux fragments de messes de Le Roy (Regis), de Josquin Deprès et des autres maîtres célèbres de l’école belge, sortent des mêmes presses. En 15153, Petrucci retourne à Fossombrone et obtient du pape Léon X un privilége pour l'impression de la mu- sique dans les États de l’Église : son début dans cette position est une nouvelle édition des trois livres de messes de Josquin Desprès, laquelle paraît dans les années 1514 ( 276 ) 1515 et 1516, et une série de quatre livres de motets, dits Motetti de la Corona, où l’on retrouve encore les noms de Josquin Deprès et de Brumel; mais beaucoup de noms auparavant inconnus prouvent qu’une génération nouvelle de compositeurs s’est formée : la grande école belge du quinzième siècle à fait son temps de vogue : une école plus Jeune s'élève à son tour; mais les noms belges y dominent. Jusqu’en 1550 environ, la typographie allemande de Nu- remberg et d’Augsbourg, les imprimeries musicales de Paris et de Lyon, enfin les presses d'Anvers et de Lou- vain, reproduisent encore les œuvres d’Obrecht, d’Ocke- ghem , de Pierre de Larue, de Josquin Deprès; de ce der- nier surtout, le maître sans égal de son temps; mais ces œuvres, mêlées à beaucoup d’autres plus modernes, sem- blent plutôt des objets d'étude pour les artistes, que des sources d'agrément pour le monde. La Belgique ne perd pas, au seizième siècle, sa haute position dans l’art musical : ses grands musiciens sont recherchés dans toutes les cours et y occupent les places les plus honorables ; mais l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne, la France et l'Angleterre produisent aussi d'illustres artis- tes. Il n’en a pas été de même pendant toute la durée du quinzième siècle ; car alors, les maîtres belges n’ont de rivaux en aucun lieu. Leurs noms remplissent seuls toute l’histoire de la musique : leur doctrine est la source où puisent toutes les autres nations pour s'instruire dans l’art qu’ils semblent avoir créé. D'où pouvaient venir cet avancement de l'art et cette supériorité des artistes dans un seul pays de l’Europe, dont l’étendue était plus limitée que d’autres? Quelle était la cause de l’état d’'infériorité des autres nations dans la culture du même art à cette époque? Questions souvent (277) agitées par les historiens de la musique, et dont la solution ne peut se trouver que dans l’institution des écoles atta- chées aux cathédrales et collégiales des Pays-Bas, anté- rieurement au douzième siècle. Toutes ces églises avaient un chœur de musique, des enfants pour chanter les parties aiguës de cette musique et des maîtres pour les intruire. Ce n’est point ici le lieu de faire l’histoire de ces institutions : quelques faits suff- sent pour mettre hors de doute la réalité de leur existence. Un document que j'ai cité dans la notice de Binchois (1) nous fait connaître qu’un chapelain-chantre de la chapelle de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, nommé Jehan de la Tour, était maître des enfants de chœur dès 14927 : il avait succédé à d’autres maîtres qui avaient occupé le même poste sous Philippe le Hardi, dans la seconde moitié du quatorzième siècle. C’est dans une des maïtrises plus anciennes encore que Guillaume Dufay s'était instruit dans les principes de la musique. Les collégiales d'Anvers, de Malines, de Soignies et de Nivelles, et les cathédrales de Bruges, de Gand, de Tournai, avaient des institutions semblables. Les archives de l’église Notre-Dame d'Anvers ont fourni à M. Léon de Burbure les moyens de suivre les progrès et les développements de la maîtrise et du chœur de cette collégiale, depuis le douzième siècle jusqu’à la fin du dix-huitième. Ainsi Jacques Barbireau, ou Barbiriau (2), qui ensei- (1) Voyez la Biographie universelle des musiciens, 2e édition , tome [er, page 418. (2) Appelé Barbyrianus, dans un manuscrit de la Bibliothèque impé- riale de Vienne; Barbingant, par Tinctoris; et Barbinguant, dans un manuscrit de la Bibliothèque de Dijon. [ 218 ) gnait déjà à la maïtrise de cette église en 1436, et fut nommé définitivement maître des enfants de chœur, en 1448, avait eu pour élève Jean Ockeghem et beaucoup d’autres célèbres musiciens belges. Plus tard, Ockeghem, admis comme chantre au chœur de gauche (1), à la même collégiale, commença à recevoir ses jetons de présence à la Saint-Jean (24 juin 1443), et se retira à la même épo- que, en 1444, pour aller en France fonder l’école célèbre d’où sont sortis Guillaume Crespel, Josquin Deprès, An- toine Brumel, Pierre de Larue (Pierchon), Louis Compère, Alexandre Agricola, Gaspard Van Veerbeeke, Verhonet et Prioris. Après le départ de ce grand maître, Barbireau continua d'enseigner jusqu'en 1488 et forma plusieurs grands musi- ciens qui S'illustrèrent dans la suite. Obligé de se retirer alors , à cause de son grand âge, quoiqu'il n’ait cessé de vivre que le 8 août 1491, il eut pour successeur, dans la place de maître des enfants de chœur, Jacques Obrecht, grand artiste qui, après avoir dirigé le chœur de la cathé- drale d’Utrecht., depuis 1467, abandonna cette position pour venir continuer la tradition d’un savant enseigne- ment, jusqu'en 1504 : il mourut deux ans après. Plus ancien que Josquin Deprès d'environ quinze à vingt ans, Obrecht fut l’homme le plus habile de son temps dans l’art d'écrire avec élégance et correction. D'une autre école, vraisemblablement de la maîtrise de Soignies, sortit Tinctoris, qui ne paraît avoir connu per- sonnellement ni Barbireau, ni Ockeghem, ni Obrecht, ses (1) On voit dans les registres de l'église Notre-Dame d’Anvers que les chanteurs étaient divisés en deux chœurs : celui de droite était composé de vingt-six voix, et celui de gauche, de vingt-cinq. (249 contemporains, et qui, conséquemment, n'a pas fait ses études dans le même lieu. Tinctoris, vaste intelligence, homme de profond savoir, esprit encyclopédique, fut une des plus grandes illustrations musicales de la Belgique au quinzième siècle. C’est à lui qu’appartient la gloire d’avoir porté en Italie toute la doctrine musicale développée en- suite par les écrivains de ce pays, depuis 1480 jusqu'à Zarlino. Tinctoris est le complément nécessaire de la série des célèbres musiciens belges du quinzième siècle : ses travaux couronnent leur œuvre. Nul doute, l’art nouveau importé dans toute l’Europe par ces artistes; cet art, dis-je, ne fut possédé que par eux dans le quinzième siècle, parce qu'il n’y avait qu’en Belgique de bonnes écoles où l’on enseignât à la fois la théorie et la pratique. Le génie italien se manifeste dès les premières années du seizième siècle par ces Frottoles, ces Strambottes, qui sortirent des presses de Petrucei, de 1504 à 1508. Ces pièces ne sont, à vrai dire, que des chants populaires, harmonisés dans le système syllabi- que. Les auteurs principaux de chants de cette espèce, François Anna, organiste de Venise; Antoine Caprioli, de Brescia; Antoine Rosseti, Michel Pesenti, Bartholomé Tromboncino , tous trois de Vérone; Philippe de Luprano, et Nicolo Pifaro, de Padoue, n’ont pas l’esprit de combi- naison harmonique des maîtres belges du quinzième siècle; mais ils ont la puissance du rhythme , absente des œuvres de ces maîtres; car chez les Flamands, le rhythme n’exis- tait alors que dans le chant du peuple. Le génie italien, qui, plus tard, devait produire de si belleschoses musicales, n’était, au quinzième siècle, que de l'instinct sans culture; or rien ne se fait de solide sans l'étude, et l’étude est im- possible sans la direction imprimée par les écoles. ( 280 ) Résumons cette note, et disons que la musique à l’état d'art (art vu sous une seule face, à la vérité) n’exista au quinzième siècle que par les travaux des musiciens belges, et que cet état de choses fut le résultat de l’éducation pro- gressive donnée dans les maîtrises des cours, des cathé- drales et des collégiales d’un pays qui était alors le plus avancé de l’Europe en organisation sociale, en culture intellectuelle et en industrie. C’est un point important de l’histoire de cet art qui me paraît mis hors de toute con- testation. M. Ad. Siret fait connaître que quelques renseignements inédits, concernant le fameux peintre Memlinc, viennent d’être trouvés aux archives de Bruges, par M. Weale, archéologue anglais, et qu'ils ne tarderont pas à être pu- bliés. Il résulterait entre autres de ces documents que Memline possédait une spacieuse maison à Bruges; qu'il avait eu trois enfants; et même qu’il avait été dans le cas de prêter de l’argent à la commune de Bruges. Ces renseignements historiques détruisent entièrement les hypothèses romanesques accréditées et qui composaient presque exclusivement la biographie de l’admirable peintre brugeois. ( 281 ) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Glossarium op Maecrlants Rymbybel ; vervolg en slot van het derde deel, door J. David. Bruxelles, 1861 ; gr. in-8°. Collection Jean Rousseau. Monnaies féodales françaises décrites par Benjamin Fillon, etc.; par R. Chfalon|. Bruxelles, 1861 ; in-8°. Histoire de la Lithuanie et de la Ruthénie, jusqu'à leur union définitive avec la Pologne, conclue à Lublin en 1569 ; par Joachim Lelewel, traduite par E. Rykaczewski, avec les notes du traducteur. Paris, 14861 ; 1 vol. in-8°. Histoire du congrès national de Belgique, ou de la fonda- tion de la monarchie belge ; par Théodore Juste. Nouvelle édi- tion. Bruxelles, 1861 ; 2 vol. in-12. Appréciation, analyse et estimation des mines, usines et biens-fonds de Son Excellence M. Nikita de Wsevolojsky {Russie, gouvernement de Perm) ; par MM. le vicomte A. Le Hardy de Beaulieu, R. Ludwig et H. Goldschmidt. 1 vol. in-4°. Nouvelle étude sur les caisses d'épargne ; par M. Aug. Vis- schers. Bruxelles, 1861 ; 1 broch. in-8°. Fleurs des vieux poëtes liégeois /1550-1650), avec une in- troduction historique par N. Peetermans, recueil publié et ac- compagné de notices biographiques, par H. Helbig. Liége. 1859 ; 1 vol. in-12. Le prince de Ligne, ou un écrivain grand seigneur à la fin du XVIII" siècle; par N. Pectermans. Deuxième édition. Liége, 1861 ; 1 vol. in-12. Lettres sur les expositions d'objets d’art, les curiosités his- toriques et les musées, adressées à ses savants collègues les fondateurs de l’Institut archéologique liégeois; par M. Albert d’Otreppe de Bouvette. Liége, 1860; in-12. 9me SÉRIE, TOME XI. 19 ( 282 ) Fragments d'un voyage en Hollande ; par Alb. d'Otreppe de Bouvette. Liége, 1860; 2 vol. in-12. Essai de tablettes liégeoises, 30%° et 531% livr., par le même. Liége, 1860; 2 broch. in-8°. Examen des principales classifications adoptées par les z00- logistes ; par Léon-Henri-Marie Carlier. Bruxelles, 1861; gr. in-8°. Les terrains primaires de la Belgique, d’après M. J. Gos- selet ; par J. Vaust. Liége, 1860 ; in-8°, Sur la nécessité d’isoler les maternités ; par le docteur Henri de Ceuleneer Van Bouwel. Anvers, 1861 ; in-8°. Nécrologe liégeois pour 1857. Liége, 1861 ; 1 vol. in-12. Revue universelle des arts, publiée par M. Paul Lacroix (Bibliophile Jacob) et M. C. Marsuzi de Aguirre, 4r° à 6° an- nées, 1 à XIIe vol. Bruxelles, 1855-1861 ; 12 vol. in-8°. Annales de médecine vétérinaire, X®° année, janvier à mars. Bruxelles, 1861 ; 35 broch. in-8°. Annales de la Société anatomo-pathologique de Bruxelles , Bulletin ne IV. Bruxelles, 1861 ; in-8°. De Achille ejusque ira in Iliade obviis ; tentabat Johannes de Jonghe. Amsterdam, 1856 ; gr. in-8°. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences ; par MM. les secrétaires perpétuels, tome LIT, n° 4 à 7. Paris, 1861 ; 7 broch. in-4°. Mémoires de l’Académie impériale de médecine , tome XXIV, 1" et 2e parties. Paris, 1860 ; 2 vol. in-°. Bulletin de l’Académie impériale de médecine, tome XXV, Paris, 1859-1860; 1 vol. in-8°. : Revue de l’instruction publique en France, XX°®° année, n*% 46 à 52. Paris, 1861 ; 7 doubles feuilles in-4°. Bulletin de la Société des antiquaires de Picardie, année 1860 , n° 4. Amiens; 1 broch. in-8, Revue agricole, industrielle et littéraire de Valenciennes, AI®< année, n° 3 et 4, septembre-octobre. Valenciennes, 1860 ; 1 broch. in-8?°. CS ER ( 283 ) Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus re- culés jusqu'à nos jours, publiée par MM. Firmin Didot frères, sous la direction de M. le docteur Hoefer, tome XXXIII®°. Paris, 4861 ; 1 vol. in-8°. Sur les silex taillés trouvés dans le diluvium du départe- ment de la Somme ; remarques de M. Boucher de Perthes, à lFoccasion d'une communication récente sur les pierres tra- vaillées par les habitants primitifs des Gaules. Paris, 1861 ; in-4°, Traité théorique et pratique sur l’épuisement de l’économie lrumaine, ainsi que sur les maladies chroniques qui ont cette origine ; par feu le docteur Sallenave. Bordeaux, 1860; 1 vol. In-8°. ; Les femmes ; par Ferdinand Teinturier. Paris, 1860; { vol. in-12. Les hommes ; par Ferdinand Teinturier. Paris, 1860 ; 1 vol. in-12. La cathédrale de Trèves du 1V"* au XLX”"* siècle ; par M. le baron Ferdinand de Roisin. Paris, 1861 ; 4 vol in-4°. Discours de M. Garcin de Tassy, membre de l’Institut, à l'ouverture du cours d’Hindoustani à l'Ecole impériale et spéciale des langues orientales vivantes près la Bibliothèque impériale , le 7 février 1861. Paris, 1861 ; in-8°. Études et expériences synthétiques sur le mélamorphisme et sur la formation des roches cristallines ; par M. Daubrée. Paris, 1859; 4 vol. in-8°. Bericht über die Thätigkeit der S' Gailischen naturwissen- schafilichen Gesellschaft während der Vereinsjahre 1858- 1860. S'-Gallen, 1860 ; in-8. Verhandlungen des naturhistorischen Vereines der Preus- sischen Rheinlande und Westphalens ; herausgegeben von prof. dr. C, O. Weber. XVI" Jahrg. 1-2 Hälftes. Bonn, 1860 ; in-8°. Archiv der Mathematik und Physik; herausgegeben von ( 284) Johann August Grunert, XXXV Theil, 4 Heft. Greifswald. 1860; 1 broch. in-fol. Heïdelberger Jahrbücher der Literatur, unter mitwirkung der vier Facultäten, LIIIS® Jahrgang, 10-12 Heftes. Heidel- berg, 1860 ; 3 broch. in-8°. Grenzen und Grengebiete der phariol agéseh For schung ; Festrede von D" E. Harless. Munich, 1860; in-4°. Gedächtnissrede auf Friedrich von Thiersch ; von Georg Martin Thomas. Munich, 1860; in-4°. j Rede auf sir Thomas Babington Macaulay; von D' Georg Thomas von Rudhart. Munich, 1860 ; in-#4°. Denkrede auf Alexander von Humboldt; von Carl Fried. Phil. v. Martius. Munich, 1860; in-4°. Einleitende Worte zur Feier des allerhüchsten Geburisfestes Sr. M. des K. Maximilian IT, gesprochen am 28 nov. 1859 und 28 nov. 1860 ; von I. F. von Liebig et prof. M. J. Müller. Munich , 4859-1860; 9 broch.in-4. Æaiserlichen Akademie der Wissenschaften zu Wien : — Sitzungsberichte : — Math.-naturw. Classe, 4860 , n°° 20-99: —— Philosophisch.-histor. Classe, XXXV Band, 2 Heft; — A7r- chiv fur Kunde üsterreichischer Geschits- ue XXV Band, 4 und II Hälfte. Vienne , 1860 ; in-8°. Notice historique et critique sur les machines à compression d'air du mont Cénis ; par le marquis Anatole de Caligny. Turin, 4860 ; in-4°. Corrispondenza scientifica in Roma, vol. VI®, n° 27. Rome, 4861 ; in-4°. Resumen de las observaciones meteorologicas hechas en el Real observatorio de Madrid en el mes de noviembre de 1860. Jn-8°. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1861. — No 3. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 2 mars 1861. M. Lucre, président de l’Académie. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius d'Halloy, Sauveur, Tim- mermans, Wesmael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, De Koninck, Van Beneden, Ad. De Vaux, de Selys-Long- champs, le vicomte B. du Bus, Gluge, Nerenburger, Schaar, Duprez, Brasseur, Poelman, d’'Udekem, Dewalque, membres; Lamarle, Schwann, associés; Gloesener, cor- respondant. M. Kervyn de Lettenhove, membre de la classe des let- tres, assiste à la séance. 2e SÉRIE, TOME XI. 20 ( 286 ) CORRESPONDANCE. Il est donné connaissance de la mort de M. Tiedeman, associé de l’Académie. — Des remerciments sont adressés par l’Académie de la Nouvelle-Orléans pour lenvoi des dernières publica- tions. — M. Dewalque présente le résultat des observations faites à Stavelot, pendant l’année précédente, sur les phénomènes météorologiques et sur les phénomènes des plantes et des animaux. — M. le secrétaire perpétuel dépose l'Annuaire de l’Académie royale de Belgique pour l’année 1861, ainsi que le compte rendu des travaux du conseil de salubrité publique de la province de Liége pour 1860, rédigé par M. Spring, associé de la classe. — Remerciments. — M. H. Bergé de Jamez, dit Masson, soumet à la classe un mémoire manuscrit sur le Dosage du nickel, ou Analyse d’un alliage de cuivre et de nickel. MM. Stas et Melsens sont nommés commissaires pour examiner ce travail. (287) COMMUNICATIONS ET LECTURES. ne Sur une letire relative au concours extraordinaire des sciences mathématiques remplaçant le prix quinquen- nal pour la période de 1854 à 1858; par M. Timmer- mans, membre de l’Académie. « Une lettre adressée à l’Académie le mois dernier, et qui m'a été communiquée par M. le secrétaire perpétuel, fait remarquer que l’une des questions pour le concours quin- quennal, celle relative à l’extension du théorème de Sturm, a été traitée, en 1852 et 1853, par M. Hermite, dans les comptes rendus de l’Académie des sciences de Paris, et l’auteur de cette lettre demande quelques explications sur le sens que notre Académie attache à la question proposée. Je ferai d’abord remarquer qu'il est bien vrai que M. Her- mite à présenté un mémoire sur une question analogue à celle du concours; mais son travail complet n’a été publié nulle part, du moins je ne puis considérer comme tel ce qui à été publié au Bulletin, et, malgré toutes mes recher- ches, je ne suis pas parvenu à le découvrir. L’extrait qu'il en donne dans le Bulletin est mcomplet et ne doit être envisagé que comme une indication utile pour celui qui entreprendrait de répondre à cette question délicate et difficile. Je ne puis donc hésiter, après neuf ans de silence, à la considérer comme étant restée dans le domaine public. Quant au sens que l’Académie attache à la question, 1l me semble qu'il ne peut y avoir équivoque à cet égard. Sturm, dans le célèbre théorème qui a illustré son nom, ( 255 ) a fait autre chose que résoudre le problème de la déter- mination du nombre de racines réelles comprises entre des limites données; il a fait dépendre la solution de ce problème des propriétés de certaines fonctions qui portent son nom, et ce sont les formes de ces fonctions et les pro- priétés qu’elles possèdent qui constituent, par leur énoncé, le théorème en question. Une solution différente de celle de Sturm, et il y en a plusieurs, entre autres celles de MM. Sylvester et de Brioschi, qui ferait dépendre la solu- tion de certaines propriétés de fonctions essentiellement distinctes des fonctions sturmiennes, ne pourrait plus s’ap- peler théorème de Sturm, et leur application à un système de plusieurs équations ne serait plus une extension de ce théorème. Cette distinction n’est pas sans iniérêt au point de vue des progrès de la science; car de toutes les solu- tions qui ont été données de la question qui nous occupe, la plus simple et la seule élémentaire est encore celle don- née par l’auteur de la découverte, et qui se trouve aujour- d’hui dans tous les traités d’algèbre. Il est donc de la plus haute importance de pouvoir faire suivre le théorème pri- mitif d’un théorème plus général, empruntant ses raison- nements et sa marche didactique au premier et présen- tant les qualités nécessaires pour entrer dans un traité classique d’algèbre. Celui qui parviendrait à combler cette lacune rendrait un bien grand service, et s’il parvenait à généraliser la méthode de Sturm de manière à l’étendre à un nombre quelconque d'équations, rendrait un service plus grand encore; cependant je m’empresse d'ajouter que, pour conserver des chances de recevoir une ou plusieurs réponses à la question proposée, il serait imprudent d’en trop restremdre le sens, et qu’à mon avis, tout travail qui ferait faire un pas en avant à cette importante théorie (: 289 ) devrait être favorablement accueilli, et l’auteur aurait bien mérité de la science. Il est bien entendu qu'un procédé fondé sur l’élimina- tion des inconnues entre les deux équations ne consti- tuerait qu’un moyen d'éluder la difficulté et ne saurait être considéré comme une extension du théorème, puisque la solution consisterait dans une application répétée iden- tiquement de la méthode de Sturm. » ‘Observations de l’occultation des pléiades et du passage au méridien de la lune et des étoiles de même culmi- nation, le 17 février 1861. Notice de M. A. Quetelet, secrétaire perpétuel de l’Académie. Les astronomes, et particulièrement ceux qui se sont occupés de la géodésie, ont cherché à obtenir, avec une précision toujours croissante, les éléments de position qu'ils avaient à déterminer. Parmi ces éléments, il n’en est guère qui exigent une attention plus soutenue que la détermination des longitudes. Tout récemment, la méthode des télégraphes électriques s’est occupée avec le plus grand succès de celte même ap- préciation ; elle a servi à obtenir plusieurs mesures impor- tantes, et spécialement en Europe. La ligne la plus longue qui ait été déterminée, sous le rapport des longitudes, est celle qui passe par les observatoires de Kœnigsberg, Ber- lin, Bruxelles, Londres et Édimbourg. Espérons que ces premiers essais ne tarderont pas à être exécutés par toute - l'Europe et qu’ils permettront d’en faire la carte générale : c’est à une pareille entreprise que reviendra plus spécia- ( 290 ) lement le nom de triangulation de premier ordre. Mais il serait nécessaire de lier les points d'observation de trois en trois, et non de deux en deux, comme on le fait habituel- lement. Les points d'observation seraient en général près des capitales des différents pays et formeraient les som- mets de vastes triangles dont on pourrait relever avec soin les positions respectives. Une idée semblable s'était présentée à M. Airy, le savant directeur de l’observatoire royal de Greenwich; mais cet essai important n’a pu s'exé- cuter jusqu'à présent, malgré les invitations faites aux observatoires voisins. Chaque observatoire, en effet, a ses travaux particuliers, et l’on ne peut s'attendre à ee que tous les regards se portent en même temps d’un même côté. Quelle que soit, du reste, l'excellence de la méthode télé- graphique, on est forcé de recourir encore aux méthodes anciennes, lorsque les lieux qui désirent se comparer, sous le rapport des longitudes, ne sont pas liés entre eux par des fils métalliques qui puissent donner passage au courant * électrique. Ainsi, pour déterminer la différence des longi- tudes de Bruxelles et de Washington, M. Bache, chargé de la triangulation des États-Unis, nous a demandé d’ob- server l’occultation des pléiades par la lune, toutes les fois que l’état du ciel le permettrait. Il a même l’obligeance de faire calculer d'avance une carte, qui donne, chaque fois, l'indication du temps et l’ordre des occultations. Mais ce genre de phénomènes, comme on sait, ne peut se produire qu’une fois par lunaïson, et encore n’arrive-t-il qu’acci- dentellement que la lune passe au milieu de cette petite constellation et que l’état du ciel permette d’observer les étoiles qui la composent. Le 17 février dernier, le ciel était très-favorable à l’ob- ( 291 ) servation du phénomène attendu : à partir de 10 heures du soir jusqu’à minuit et demi, la fune avait à traverser la constellation des pléiades. J’observai pendant la première partie du phénomène; mais l’état de ma santé ne me permit pas de suivre la dernière partie des occultations. Mon fils était à l’équatorial, tandis que je me trouvais sur la ter- rasse : et il a pu observer les principales étoiles depuis le commencement jusqu’à la fin du phénomène (1). Le même jour, vers 5 heures de l’après-midi, mon fils put observer le passage au méridien de la lune et des étoiles de même culmination, pour répondre à d’autres demandes qui nous avaient été faites par des savants étrangers, et, entre autres, par M. Robert J. Ellery, directeur de l'observatoire de Williamstown à Victoria, dans l’Aus- tralie (2). Nous reproduisons ici les observations qui ont été faites ce même jour, à la demande de deux savants qui se trouvent Sur des points du globe très-éloignés. Cette correspondance simultanée sur des lieux aussi distants n’est certes pas une des parties les moins intéressantes de l’astronomie. (1) Voyez, dans les Bulletins de l’Académie, les observations du même phénomène faites le 30 avril 1858, p. 265, 5me volume de la 2me série; le.8 décembre 1859, p. 11, 9me volume; le 6 septembre 1860, p. 495, 10me volume. (2) L'observation de la lune et des étoiles de même culmination a géné- ralement été poursuivie depuis l’origine de l’observatoire. Les observations de 1855 à 1840 ont été publiées dans le tome [er, page 478 de la 2e série des Bulletins de l’Académie royale; celles de 1855 à 1856, dans le tome IT, page 18; celles de 1857 à 1858, dans le tome VII, page 558. Mon fils a publié la série des observations faites en 1859 , pages 120 et suivantes du tome IX du même recueil. La demande de M. Ellery fut communiquée à l’Académie, dans sa séance du 4 juin 1859. (292 ) Occultalion des pléiades par la lune, observée à Bruxelles, le 17 février 1861. HEURE SIDÉRALE de la | des étoiles d’après | DISPARITION DES ETOILES | NUMÉROS | Observateurs. | Bessel. | Eu | bord sombre de la lune. | 1 | l - 1 | | | 17 | sh 15m 1551 Ad. Quetelet. | » ? »? FES | Ern. » | 25 | » 21 59,5 Ad. L il | : | » | » » 58,7 | Ern. » | 28 Lie. 30: 483% LT ARE , | e ( » » 12,0 | Ern. » | | 32 | » 53 #1,0 | Ad. » | ë | »y » 40,0 | Ern » | 51 | » 39 4,1/(*) | Ad. » 6 | » | V'LAIGSA ! Ern. » 35 Lea A8 de | » » 21 | » 44% 492,8 faible. | : » | 40 * Mes ‘e » , 47 PP RSS TS ; ; 51 » 45 58,2 > | (*) La minute a été diminuée Le unite. Observations du passage au méridien de la lune et des étoiles de culmination lunaire, faites à Bruxelles, le 17 février 1861; par M. Ernest Quetelet. £ Arielis. 2h 51m 17559 £ Arielis. 1 6 “ES € L . 35 28. 51,11 27 Tauri . 3 40 55,19 A! Tauri . 3 56 50,55 th ns ball. «de lAcaid. hoy om NL. 2% ser, page 292 a Arr er een ae PME PT Ven Beceñes at. rat del Lit par CE. Severegrs là delAcad ( 295 ) L À Sur le développement de la queue des poissons plagio- stomes ; par M. Van Beneden , membre de l’Académie. Quand un certain nombre de faits se groupent entre eux par un lien commun et que l’on découvre le principe qui les unit, on réalise toujours un véritable progrès. D’autres faits viennent ensuite ou renforcer ce prineipe ou bien l’atténuer. Dans tous les cas, c’est uh devoir du naturaliste, surtout quand ne | sujet le ré- clame ou qu'un grand nom s’y attache, signaler aussi bien les nouveaux faits qui viennent corroborer les vues nouvelles que ceux qui ne lui sont pas favorables. Il est reconnu que plusieurs groupes naturels forment des séries correspondant à des âges embryonnaires, que les formes de têtards ou de larves, par exemple, sont réa- lisées dans des animaux adultes. L’axolotl est véritable- ment, dans ce sens, un arrêt de développement dans le groupe des batraciens; mais en est-il ainsi aux divers àges du globe, et les formes les plus aneiennes correspon- dent-elles à des formes embryonnaires ? Est-ce avec raison que MM. Vogt et Agassiz ont prétendu que les poissons des terrains anciens ne sont que des états embryonnaires qui reçoivent leur évolution complète dans des couches plus récentes? En d’autres termes, la loi du développe- ment successif des organismes, répondant à des types em- bryonnaires, est-elle fondée quant aux poissons ? C’est à l’examen de cette question que la présente no- tice est consacrée, Tous les poissons antérieurs à la période jurassique sont hétérocerques, d'après Agassiz; l’hétérocercie est donc une ( 294 ) forme embryonnaire. M. Huxley (i) a répondu déjà, au sujet des poissons osseux, et ses observations le conduisent à un résultat tout opposé. Nous avons à faire connaître les embryons de poissons plagiostomes, qui sont des hétéro- cerques par excelience et qui devraient être hétérocerques dès leur jeune âge, si la théorie d’Agassiz était vraie. C’eût été, nous semble-t-il, la première question à exa- miner. L’a-t-on fait? Nous l’ignorons ; mais ce qui est hors de tout doute, c’est que les embryons de plagiostomes sont d’abord parfaitement homocerques et qu’il serait dif- ficile, pour ne pas dire impossible, de distinguer au début leur côté dorsal de leur côté inférieur. Ce simple fait vient donc renverser complétement la grande pensée d'un développement parallélique, et c’est vraiment à regret que nous voyons s’écrouler cet écha- faudage, qui semblait avoir une tout autre destinée. Exposons d’abord simplement les faits, et pour qu'il ne reste point de doute, nous reproduirons les dessins que nous avons faits sur nature, d’après de fort jeunes em- bryons. Nos observations portent sur des embryons de Spinax acanthias. Elles sont faites à Louvain et à Ostende, pen- dant le mois de mai. A l’époque où le lophioderme du dos, ou les nageoires dorsales, commencent à surgir, la corde dorsale se termine en arrière par un léger renfle- ment de la plus parfaite symétrie. La peau recouvre im- médiatement le tubercule de la corde, et il n’y a pas l'ombre d’une disposition hétérocercique. Nous avons porté (1) Huxley, Sur le développement de la queue des poissons Téléos- téens, dans le Quarterly Journal of micr. science ; octobre 1858. — Bi- bliothèque universelle de Genève, 1850, page 77. ( 295 ) l'embryon entre deux lames de verre sur le porte-objet du microscope, avec l'intention de nous assurer de cette dis- position , si elle existait ; mais n1 à l'œil nu, ni à la loupe, ni’ au microscope, nous n'avons rien pu remarquer qui justi- fiât l'opinion de ceux qui ne voient qu'un âge embryon- naire dans les poissons hétérocerques. L’organogénie, ou l’évolution embryonnaire, n’est pas plus une anatomie comparée transitoire, comme on la prétendu, que les poissons des diverses périodes géolo- giques ne représentent une organogénie permanente. Ces hypothèses sont évidemment le fruit de fausses apprécia- tions et de comparaisons erronées : 1l ne faut pas les laisser plus longtemps conserver pied dans les sciences. Voici comment cette erreur a été introduite : L’illustre de Baer a signalé, le premier, il y a quelques années déjà, que la corde dorsale, ou la colonne verté- brale des poissons osseux, ne se termine point, pendant l’âge embryonnaire, d’une manière symétrique. Quelques années plus tard, MM. Vogt et Agassiz s'emparent de ce fait, et, trouvant tous les poissons des premières époques géologiques à queue non symétrique ou hétérocerques, ils considérèrent tous ces poissons anciens comme repré- sentant le premier âge où l’âge embryonnaire. Cette pensée a été ensuite diversement formulée, et les faits qui lui servent surtout de base sont, indépendamment de l’hétérocercie, la persistance de la corde dorsale chez quelques-uns et la continuité des lophiodermes. Depuis, des recherches faites sur d’autres classes sont venues donner une certaine sanction à cette théorie. Ainsi, d’après Heer, il n’y a que des insectes amétaboliques pen- dant la période carbonifère, et les anciennes couches du globe ne renfermeraient que des insectes représentant des ( 296 ) formes larvaires ou des embryons permanents. Ces obser- vations ont été confirmées récemment par M. Czech (1). Nous ne nous occupons ici que des poissons. Or, aux yeux de M. Huxley, qui, comme nous venons de le voir, s’est occupé de cette question, il y a peu de temps, il n'ya même pas de poissons homocerques à l’état adulte, et les téléostéi, qui sont prétendüment tous homocerques, sont au contraire, d’après ce savant, plus hétérocerques que les ganoïdes et les plagiostomes. M. Kôlliker, qui s’est occupé en dernier lieu de cette question, va même plus loin. Non-seulement tous les pois- sons sont, au fond, hétérocerques, et l’homocercie n’est Jamais qu'apparente, mais il n'existe pas, d’après le sa- vant professeur de Würzburg , de nageoiïre caudale véri- table, dans ce sens, que les rayons de cette nageoire sont ou dorsaux ou bien ventraux quand lhétérocereie semble être complète. M. Külliker (2) ne considère pas moins que Pordre d’ap- parilion géologique des poissons coïncide avec une série de degrés de léchelle de développement; mais nous ne comprenons pas trop comment il peut coneilier les faits avec cette théorie. Avant les ganoïdes et les plagiostomes, on devrait trouver le règne de l’homocereie, et l’existence de ce règne est contestée par Agassiz lui-même. J'ajoute ici, pour la comparaison, la description d’une corde dorsale d’un embryon d’anguille ordinaire et de sole commune. (1) Czech, Ueber die Enivichelung des Insectentypus in den zoologi- schen Perioden; in-8°. 1858. — Troschel's Archiv, 1859, page 540. (2) Kôlliker, Ucber das Ende der Wirbelsäule des Ganoïden und eini- ger Teleostier, Leipzig. 1860.— Bibliothèque universelle de Genève, 1860. ( 297 ) La corde dorsale de Panguille (fig. 1) est parfaitement sy- RARES métrique; non- 22 M seulement ellese Les SN | termine par une ne nc fo) V7") pomte Mousse pbs PE # 4/ non recourbée, DAS AC LC mais les rayons rate mêmes qui doi- vent soutenir le lophioderme caudal, sont parfaitement réguliers en dessus et en dessous. L’homocercie ne nous semble pas pouvoir se montrer plus complétement. La jeune sole (fig. 2) montre une disposition bien diffé- 5 rente. La corde est assez for- & tement relevée en arrière, et, au lieu de se terminer simplement en bouton ar- rondi, se bifurque, et ter- mine ainsi la colonne ver- tébrale par une véritable échancrure. Cette dernière portion de la colonne est aussi notablement plus al- longée que la précédente. Lei les rayons du lophio- derme caudal présentent une disposition plus irrégulière en- core. Il y a d’abord quatre rayons assez gros, dont un seul est supérieur ; mais il ne correspond même pas avec la vertèbre terminale. Gn peut dire qu'il y a deux rayons postérieurs, puisqu'ils correspondent à l’échancrure; le quatrième gros rayon est infère et se trouve accolé à seize rayons fort grêles et inférieurs qui complètent la région caudale. Fig 4. Fig. 2. ( 298 ) Trouvera-t-on, par la suite, des représentants de cette première époque avee des queues vraiment embryonnaires et homocerques ? Cela n’est pas impossible, mais, pour le moment, la proposition de MM. Vogt et Agassiz ne repose pas sur l'observation. Il résulte donc de l’examen rigoureux des faits, que si les poissons des divers âges géologiques correspondaient à des degrés divers d'évolution, au lieu de poissons hétéro- cerques, les premières couches ne devraient renfermer que des poissons à type homocercique, puisque les poissons hétérocerques par excellence sont primitivement homo- cerques. Les ganoïdes et les plagiostomes font leur appa- rition trop tôt, si cette théorie était vraie. EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fig. 1. Embryon vivant de Spinax acanthias, en place sur une masse vitelline , montrant ses vaisseaux omphalo-mésentériques. . Le même embryon isolé, pour montrer la disposition des troncs principaux des vaisseaux omphalo-mésentériques, à leur en- trée dans le pédicule et vers la circonférence. — 5. L'extrémité caudale du même embryon, montrant l'apparition du lophioderme. — 4. La même un peu plus grossie : la corde dorsale est terminée en bouton symétrique placé dans l’axe du corps, et le lophioderme est également développé en dessus comme en dessous. — 5. La même extrémité caudale vue au microscope composé. ( 299 ) CLASSE DES LETTRES. Séance du 4 mars 1861. M. DE Ra, directeur. M. An. Querecer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Grandgagnage, Roulez, Moke, Nothomb, Gachard, Borgnet, David, De Decker, Snel- laert, Haus, Bormans, Leclereq, Faider, Arendt, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres ; Nolet de Brauwere Van Steeland, associé; Th. Juste, Wauters, correspondants. M. Alvin, membre de la classe des beaux-arts, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l’intérieur fait connaître qu’il a lu avec intérêt la lettre de l’Académie relative à la publication des Anciens Monuments de la littérature française en Belgique; il demande en même temps quelles sont les mesures d’exé- cution du travail dont la classe des lettres a reconnu l’op- portunité et dont elle a adopté le plan général. — M. Lelewel, associé de l’Académie, et M. Th. Juste, ( 300 ) correspondant, présentent des ouvrages de leur composi- tion. — Remerciments. — La classe reçoit les deux ouvrages manuserits sui- vants : | Plinii historia naturalis, ete., mémoire sur un manuscrit sur vélin, grand in-folio, de la fin du onzième siècle, déposé à la bibliothèque de l’athénée de Luxembourg; par M. le docteur A. Namur. (Commissaires : MM. Roulez et Baguet.) Étude sur la signification du mot BALrART dans les chartes de la Flandre au moyen âge; par M. A.-E. Ghel- dolf. (Commissaires : MM. Kervyn de Lettenhove, De Smet et Snellaert.) RAPPORTS. M. Kervyn de Lettenhove est invité à revoir la note qu’il a rédigée pour tracer le cadre dans lequel se renfermera la collection des anciens monuments de la littérature fran- caise en Belgique. Cette note sera imprimée et distribuée aux membres de la classe. La commission de présentation dépose la liste qu'elle a rédigée, pour les candidats aux places vacantes dans le sein de la classe. nf are Pod sertie = PE M S'en 2 ae OT D né sus 43 cm6" à Mt ANT india sb a" - Ball.de l'Acad.2"Ser. t AT p.801. { 301 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Tombeau romain ou gallo-romain, découvert à Schaer- beek, lez-Bruxelles. Notice de M. Chalon, membre de l'Académie. La découverte dont nous croyons devoir entretenir l'Académie n'offre pas un bien grand intérêt sous le rap- port des objets trouvés, mais c’est un point de repère de plus pour la confection de la Carie archéologique de notre pays, et, à ce titre, 1l peut être utile d’en tenir note. Ce tombeau a été exhumé en déblayant le terrain pour bâtir une maison, vieille chaussée de Haecht, à gauche, en venant de Bruxelles, à dix-huit mètres au delà de la borne kilométrique et à six mètres de la route actuelle. Les objets qu'il contenait et dont nous allons donner la no- menclature étaient entourés et garantis par des parois formées de pierres brutes, dites pierres de sable, qu’on trouve partout en cet endroit. Malheureusement, les ouvriers, dans la pensée qu'ils avaient mis la main sur un trésor, s’empressèrent de bou- leverser le terrain et de briser la plupart des vases pour voir ce qu’ils contenaient : c’est le sort ordinaire des dé- couvertes archéologiques. Voici ce qu’un propriétaire voisin , M. O’Connel, est par- venu à réunir de ces débris; et dont il a bien voulu nous permettre de prendre inspection : 1° Des fragments de quatre ou cinq urnes de terre blanche et grise, à deux anses, à une anse et sans anse, 2e SÉRIE, TOME XI. 21 ( 502 ) dont l’une, assez grande, a dû contenir les cendres du mort. Ces fragments sont fort incomplets, et il serait impossible d’en retrouver de quoi refaire une urne en- tière ; 2° Des fragments d’assiettes, patères ou soucoupes, également de terre blanchâtre ; 9° Une soucoupe entière de terre grise de dix-huit centi- mètres de diamètre ; (Fig. 1.) 4° Un Joli petit vase de terre noire luisante, d’une belle fabrication et d’une pâte très-fine, de la forme de ceux que M. l’abbé Cochet, dans sa Normandie souterraine, appelle vases aux libations ou à parfums. Ce vase a neuf centi- mètres de hauteur. Il a été brisé en deux pièces qu’on peut facilement réunir ; (Fig 2.) 9° Une petite soucoupe de terre rouge à glaçure bril- lante, de neuf centimètres de diamètre. (Fig. 3.) Cette pièce est entière ; 6° Un petit pot de verre noir, presque opaque, ayant une forme très-élégante et qui se rapproche de celle de nos modernes pots au lait. Ce petit vase, qui est sans doute l’objet le plus curieux de la trouvaille, est parfai- tement intact. Sa hauteur est de neuf centimètres et demi; (Fig. À.) 7° Une fiole de verre, dite /iole lacrymatoire, ou plutôt lecythus, qui servait à contenir de l’huile ou des par- fums ; 8° Deux fibules de bronze, parfaitement pareilles, en forme de disque , ornées d’un cercle central entouré de six cercles remplis d’un émail ou plutôt d’une pâte rouge, avec un point métallique au centre. L’une de ces fibules a con- servé son ardillon; (Fig. 5.) | 9° Deux médailles de grand bronze d’une conservation ( 305 ) passable, l’une de Sabine, femme de l’empereur Adrien, l’autre de Faustine mère ; 10° Deux tubes d’os, de neuf centimètres et demi de lon- gueur, arrondis et polis, et ornés à chaque extrémité d'un cercle en creux. L’un de ces tubes a été fracturé. On serait tenté de voir, dans ces objets, des manches de poi- gnards ou de couteaux; mais, comme on ne remarque, dans l’intérieur, aucune trace d'oxyde métallique, cette explication semble devoir être abandonnée. Le savant ar- chéologue anglais, sir Roach Smith, dans ses Tllustrations of roman London, a décrit quelques objets du même genre. « On les trouve, dit-il, fréquemment dans les ruines ro- > maines; ce qui doit faire supposer que c'était quelque » instrument d’un usage domestique ; » (Fig. 6.) 11° Enfin, une clef de fer, et quelques clous de forte dimension et très-oxydés. Ces clous font présumer qu’une caisse ou plusieurs caisses de bois avaient protégé le dépôt funéraire; circonstance qui, d’après l’abbé Cochet, ne devient fréquente que dans le quatrième siècle de notre ère, mais qui peut cependant, à ce que nous croyons, se présenter pour une époque plus reculée. La découverte de ce tombeau semble venir à l'appui de l'opinion émise par M. Vander Riet et par notre savant confrère, M. Wauters, que l’ancienne chaussée de Haecht a remplacé une voie romaine. La vérité du dicton popu- laire « vieux comme les chemins » trouve, encore une fois ici, Sa Confirmation. À quelques cents pas de l’emplace- ment du tombeau, nous avons remarqué , dans un déblai , des fragments nombreux de tuiles à rebords; preuve évi- dente qu’il a dû exister, sur la colline qui sépare la vallée de la Senne de celle du Maelbeek, une ou plusieurs ha- bitations romaines. Comme tout ce terrain, destiné à Îa = ( 304 ) bâtisse, doit être considérablement abaissé, il est à croire qu'on ne tardera pas à y faire de nouvelles exhumations. M. Kervyn de Lettenhove lit une notice intitulée : Jean sans Peur et l'apologie des tyrannicides. C’est une espèce d'enquête que l’auteur s’est attaché à présenter, en consul- tant les documents inédits de la bibliothèque de Bourgogne. Nous nous bornons à signaler ici le vif intérêt qu'il a su donner à ce travail, dont il a bien voulu, sur la demande expresse de ses confrères, ajourner la publication jusqu'à la séance publique du mois de mai. (305 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 6 mars 1861. M. Van HasseLr, vice-directeur, occupe le fauteuil. M. An. QueTELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Braemt, De Keyzer, F.Fétis, G. Geefs, Navez, Roelandt, Jos. Geefs, Érin Corr, Frai- kin, Baron, Edm. Fétis, De Busscher, membres; Cala- matia, Daussoigne-Méhui, associés; Balat, correspon- dant. MM. Kervyn de Lettenhove et Nolet de Brauwere van Steeland, de la classe des lettres, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. M. le secrétaire perpétuel donne lecture du passage suivant d’une lettre qu'il a reçue de M. le Ministre de l’intérieur, relative au concours biennal de composition musicale : « Arr. 1%. Il sera donné un prix de trois cents francs, ou une médaille d’or de la même valeur, à l’auteur du poëme ( 306 ) dont 11 sera fait choix pour le concours de composition musicale de 1861. » ART. 2. Le poëme devra être écrit en francais, et il ne contiendra pas plus de trois morceaux de musique de carac- tères différents, entrecoupés de récitatifs. Le choix du sujet est abandonné à l'inspiration de l’auteur, qui pourra, à son gré, écrire un monologue ou introduire divers personnages en scène. » ArT. 5. Les écrivains belges qui voudront concourir pour l'obtention du prix institué par le présent arrêté, adresseront, avant le 15 avril 4861, leur travail au secrétaire perpétuel de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Le manuscrit ne portera aucune indication qui puisse faire connaitre l’auteur; mais il sera accompagné d’un billet cacheté contenant le nom de celui-ci. » Il est interdit, sous peine d’être déchu du prix, de faire usage d’un pseudonyme. Dans ce cas, le prix serait dévolu au poëme qui suivrait immédiatement dans l’ordre du mérite. » AnrT.4. Le jugement des poëmes se fera par une commis- sion à désigner par la classe des beaux-arts de l’Académie, im- médiatement avant l'époque qui sera indiquée par notre Minis- tre de l’intérieur pour l’ouverture du concours de composition musicale. Le poëme couronné sera envoyé, au moins six jours d'avance, au Ministre de l’intérieur, qui adressera au président du jury du concours les copies nécessaires aux concurrents. Le billet cacheté ne sera ouvert que lorsque les concurrents se- ront entrés en loge. » . — Par deux autres lettres, M. le Ministre de l’intérieur transmet : 1° une somme de 2,783 fr. 40 c., provenant des retenues opérées au profit de la Caisse centrale des ar- ustes belges, sur le prix des œuvres d'art vendues par son intermédiaire et conformément à l’article 40 du règlement de l'exposition générale des beaux-arts de 1860; 2° l’annonce ( 307 ) d’un arrêté du 28 janvier, accordant, sur le budget de l’année courante, un subside de einq cents franes au co- mité directeur de la Caisse centrale des artistes belges afin d'aider au développement de cette imstitution. CONCOURS QUINQUENNAL DE GRAVURE. M. Alvin présente, au nom de ses collègues, le rapport suivant : « La commission que vous avez désignée à l'effet de juger le concours de gravure a porté son jugement dans la séance de ce jour. Tous les membres étaient présents. Trois gravures avaient été adressées au secrétariat de l'Académie avant l’expiration du délai fixé par le pro- gramme arrêté dans la séance du 8 octobre 1857, savoir : Jeanne la Folle, gravée par M. Bal, d’après le tableau de M. L. Gallait; La Chasse au rat, gravée par M. Meunier, d’après le tableau de M. Madou; L’Archet brisé, gravé par M. Vandersypen, d’après le tableau de M. L. Gallait. La commission , à l'unanimité, a d'abord résolu affirma- tivement la question posée en ces termes par le président : Y a-t-1l lieu de décerner le prix? Elle à ensuite décerné le prix, par six voix contre une, à la gravure de M. Bal. Elle propose à la classe des beaux-arts de ratifier ce Jugement. La classe, conformément à ces conclusions, décerne la médaille d’or à M. Bal. (308) CAISSE CENTRALE DES ARTISTES BELGES. M. Ed. Fétis présente son rapport annuel sur l’état de la Caisse centrale des artistes belges , qui comptait, au com- mencement de l’année, plus de 80,000 francs. Ce rapport sera imprimé et inséré dans l'Annuaire de l’Académie. Ilest, en outre, convenu qu’on séparera désormais les membres de l’association en deux catégories, les membres effectifs et les membres honoraires. Ces derniers se bornent à souscrire en faveur du déve- loppement de l'institution; les membres effectifs souseri- vent également, mais, en vue de certains avantages, soit pour eux-mêmes , soit pour leurs veuves. | Des remerciments sont adressés à la commission de la Caisse centrale et particulièrement à MM. Ed. Fétis et Braemt, le secrétaire et le trésorier de l'association. COMMUNICATIONS ET LECTURES. M. Ed. Fétis donne lecture d'un fragment du cours d'esthétique, qu’il professe publiquement à l’hôtel de ville de Bruxelles. Ce fragment traite particulièrement du réalisme dans les arts du dessin. Comme l’auteur se propose de faire une publication spéciale de ses leçons, il n’a pas cru de- voir en faire l’objet d’une publication spéciale au Bulletin. ( 309 ) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Procès-verbaux des séances de la Commission royale pour la publication des anciennes lois et ordonnances de la Belgique, Im vol., 4e cah. Bruxelles, 1859 ; in-8°. Bulletin de la fédération des sociétés d’horticulture de Bel- gique, 1860. Liége , 1861; in-8°. Collection de mémoires sur l’histoire de Belgique : — Mé- moires de Pontus Payen, avec notice et annotations; par Alex. Henne. Tome I“. Bruxelles, 1860; in-8°. Mémoires sur le siége de Tournay, 1581; par Philippe Warny de Wisempière, avec notice et annotations; par A.-G. Chotin. Bruxelles, 1860 ; in-8°. Revue universelle des arts, VI®* année, février et mars, 42% vol., n° 5 à 6. Bruxelles, 1861 ; 2 broch. in-&°. dd de la société ar chéologique de Namur , tome VI, 4ue livr. Namur, 1860; gr. in-8e. La révolution des Pays-Bas au X VI" siècle; par John Lo- throp Motley; traduit de l’anglais par Gustave Jottrand et Albert Lacroix, tome IV (fin). Bruxelles, 1861 ; in-8°. Nederduitsch letterkundig jaerboekje voor 1860 en AS: Gand ; 2 vol. in-8°. Mémoire sur Charles-Martel, duc d'Austrasie et maire du palais de Neustrie (694-741); par M. Edmond Croissant. Nieu- port, 1861; in-8°. Causeries littéraires ou Recueil de récits, anecdotes, frag- ments d'histoire, impressions de voyages et pensées détachées ; par Alb. d’Otreppe de Bouvette. Premier volume. Liége, 1861; in-12. Mémoires et publications de la Société des sciences, des arts et des lettres du Hainaut, 2% série, tome VII": (1858-1859). Mons, 1860; 1 vol. in-8°. 2e SÉRIE, TOME XI. 29 ( 310 ) Bulletin de la Société liégeoise de littérature wallonne, IIIe année. Liége, 1860; 1 vol. in-8°. Consolation, pensée musicale pour harmonium ou piano; composée par Édouard Gregoir. Bruxelles, 1861 ; in-4°. Prière, pour l’harmonium ; composée par Édouard Gregoir. Bruxelles, 1861 ; in-4°. Revue populaire des sciences, rédigée par M. Husson, IVe années, n° 1 à 35. Bruxelles, 1861; 5 broch. in-8°. Revue de l'instruction publique en Belgique, IX"° année, n°*% 4 à 5. Bruges, 1861; 5 broch. in-8°. Journal historique et littéraire, tome XXVII, livr. 2. Liége , 1861 ; 1 broch. in-8°. Revue de l’administration et du droit administratif de la Belgique, VIII®* année, tome VIN, 1-5 livr. Liége, 1861 ; gr. in-8°. Journal des beaux-arts, publié sous la direction de M. Ad. Siret, HI année, n°° 4 à 5. Anvers , 1861 ; 5 feuilles in-4°. Journal de médecine, de chirurgie et de pharmacologie, XIXe année, 52% vol., janvier à mars. Bruxelles, 1861; 5 broch. in-8°. La Presse médicale belge, XITI*° année, n° 1 à 15, 1861; Bruxelles, 1861 ; 13 feuilles in-4°. Annales d’oculistique, fondées par le D' Florent Cunier , XXIV®° année, 1'° et 2° livr. Bruxelles, 1861; 1 broch: in-8°. Annales de la Société de médecine d’Anvers, XXIH"° année, livraisons de janvier à février. Anvers, 1861 ; 2 broch. in-8°. Journal de pharmacie, publié par la Société de pharmacie d'Anvers, XVII"° année, janvier à mars. Anvers 1861; 5 broch. in-8°. Annales de la Société médico-chirurgicale de Bruges, 2° sé- rie, tome VIII, 12° livr. Bruges, 1860 ; in-8°. | Le Scalpel, XHI° année, n° 14 à 24. Liége, 1860; 11 feuilles in-#°. (311) Journal d'horticulture pratique de la Belgique, V** année, janvier à mars. Bruxelles, 1861; 3 broch. in-8°. La Belgique horticole, journal des jardins, rédigé par Édouard Morren, année 1861, 4me à 6m livr., janvier à mars. Liége, 1861 ; 2 broch. in-8°. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences ; par MM. les secrétaires perpétuels, tome LIT, n® 8 à 15. Paris, 14861; 6 broch. in-4°. Collection de figurines en argile de l’époque gallo-romaine, avec les noms des céramistes qui les ont exécutées ; recueillies, dessinées et décrites par Edmond Tudot. Paris, 1859; in-4°. Notice sur la vie et les travaux de M. Pierre Daussy; par M. de la Roquette. Paris, 1861 ; in-8°. Notice sur la vie et les travaux de M. le baron À. de Hum- bold; par M. de la Roquette. Paris, 1860; in-4°. Nouvelles observations et considérations sur l’utilité des oiseaux et principalement du moineau; par Victor Chatel. Pa- ris , 1861 ; in-8°. Études médicales sur les serpents de la Vendée et de la Loire-Inférieure ; par le D° A. Viaud-Grand-Marais. Nantes, 1860 ; in-8°. Mémoires de la Société académique de Maine-et-Loire, VIII vol. : — Travaux divers, VIII®e vol.; Travaux de la sec- ion des sciences physiques et naturelles. Angers, 1860, 2 vol. in-8°. … Mémoire sur le calendrier musulman et sur le calendrier hébraïque; par Martin (René), Ir° partie. Paris, 1857; 1 vol. in-8°. Bulletin de la Société géologique de France, 2% série, tome XVIII, feuilles 4-6. Paris, 1860-1861; 1 broch. in-8°. Journal de la Société de la morale chrétienne, tome XI, n° 1. Paris 1861; in-8°. | Revue et magasin de zoologie pure et appliquée ; par F.-E. Guérin-Méneville, n°° 4 et 2. Paris, 1861 ; 2 broch. in-8°. (312) Bulletin de la Société des Sciences naturelles de Neufchätel , tome V, 2° cahier. Neufchâtel, 1860. in-8°. Mittheilungen aus Justus Perthes” geographischer Anstalt. 1861 , I-IIL. Gotha, 3 broch. in-4°. Continuazione degli atti della R. Accademia economico- agraria dei Georgofili di Firenze. Nuova serie, vol. VI Flo- rence, 4859; in-8°. L' Oracolo d° Esculapio d' Epidauro sulla lebbra d'Italia (pièces diverses); seritto nel 1845, dal presid. commend. Feni- cia. Naples , 1861; in-8°. Memorie dell osservatorio del collegio romano D. C. D. G.; pubblicate dal direttore P.-A. Secchi; dal! sie 1856 al 1859. Rome. 1857-1859; in-4°. Misura della base trigonometrica eseguita sulla via Ap- pia; per ordine del governo pontificio nel 1854-1855; dal P.-A. Secchi. Rome, 1858; in-4°. The mathematical works of Isaac Barrow ; edited for Tri- nity College, by W. Whewell. Cambridge , 1860; in-8°. The quarterly Journal of the chemical Society, vol. XIE, n° 4 à 52. Londres, 1861; in-8°. The natural history review of Dublin, n° 1, janvier 4861. Londres; in-8°. Documents relative to the colonial history of the state of New-York; by John Romevn Brodhead, esq., vol. IE et X. Albany, 1858 ; 2 vol. in-4°. Patent office report : — Mechanics , 1857 et 1858; — Agri- culture, 1857 à 1859. Washington, 1857-1859; 9 ol. in-8?. . CPR DUR TT Sas dés oi: BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1861. — Ne 4. CLASSE DES SCIENCES. a Séance du 6 avril 1861. M. Liacre, président de l’Académie. M. An. QuerTEeLer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius d'Halloy, Sauveur, Tim- mermans, Wesmael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, De Koninck, Van Beneden, Ad. de Vaux, B. du Bus, Nyst, Nerenburger, Schaar, Duprez, d'Udekem, Dewalque, membres; Schwann, Lamarle, associés ; Ernest Quetelet, Montigny, correspondants. 2€ SÉRIE, TOME XI, 25 (314) CORRESPONDANCE. Une lettre du Ministre de l’intérieur fait connaître que M. le Ministre de la guerre accorde à MM. De Konineck et Van Beneden, membres de l’Académie, l'autorisation de visiter les travaux de terrassement en voie d'exécution à Anvers. Le même Ministre consent à ce que les objets d'histoire naturelle, « découverts dans les fouilles, soient remis à MM. du Bus, Belval et Nyst, qui seront autorisés à faire un choix parmi ces objets et à les faire enlever immédiatement. » MM. les officiers du génie chargés de la surveillance des travaux ont reçu des instructions dans ce sens; ils sont invités, en même temps, à réserver tous les objets d’his- toire naturelle pour le Musée de l’État et à ne permettre, sous aucun prétexte, qu'une pièce soit détournée de sa destination sans le consentement du directeur de cet éta- blissement. » Les frais qui résulteront de ces différentes mesures seront imputés sur le crédit ordinaire du budget du dépar- tement de l’intérieur. » — M. le Ministre de l'intérieur fait parvenir, pour la bi- bliothèque de l’Académie, trois exemplaires de la deuxième partie du tome XIII du Bulletin du conseil supérieur d’agri- culture. — Le bureau de Association anglaise pour l’avance- ment des sciences fait connaître que la prochaine réunion de l’Association aura lieu à Manchester, le mercredi 4 sep- tembre prochain. ( 515 ) — La Société géologique de Londres etla Réunion dhis- toire naturelle de la Prusse rhénane remercient l’Académie pour l’envoi de ses publications. — L'Académie impériale de médecine de Paris envoie les tomes XXIV de ses mémoires et XXV de ses bulletins qui viennent de paraître. — M. Alexandre Vattemare fait parvenir, de son côté, neuf volumes composés de rapports sur l’agriculture et la mécanique publiés par les Etats-Unis d'Amérique. — Les ouvrages manuscrits suivants sont présentés à la classe : 1° Des recherches sur la cause de l’influence des vents sur la pression atmosphérique; par M. Montigny, correspondant de l’Académie. (Commissaires : MM. Duprez et Ad. Quetelet.) 2° Note sur les appareils servant à faciliter l'étude de la ihéorie des ondes lumineuses ou de la théorie des ondes sonores; par M. Ernest Rousseau, répétiteur à l’École mi- litaire. (Commissaires : MM. Plateau et Duprez.) 5° Deux notes de M. le marquis Anatole de Caligny, sur la disposition des vannes cylindriques et sur les effets de la chaleur dans les siphons renversés à trois branches de son invention qui fonctionnent à Bordonèche. (Commis- saires : MM. Lamarle et Ad. De Vaux. 4 Notice sur les aérolithes; par M. L. Gallardo-Bastant de Barcelone. (Commissaires : MM. Duprez et Ad. Quetelet.) La classe reçoit, sur les phénomènes de la végétation, les observations faites le 21 mars dernier, à Bruxelles, par M. Quetelet; à Liége, par M. Dewalque; à Jemeppe, par M. Alfred de Borre, et à Melle, près de Gand, par M. Ber- nardin. (O0 ) COMMUNICATIONS ET LECTURES. Note sur l’inclinaison et la déclinaison de l'aiguille ai- mantée en 1860 et 1861. Les résultats suivants de la déclinaison absolue de Pai- guille magnétique et de l’inclinaison, ont été obtenus dans le jardin de l'Observatoire royal, à la fin de mars et au com- mencement d'avril de cette année. Ces observations régu- lièrement faites, d'année en année, par M. Ad. Quetelet, à commencer de 1827 jusqu’en 1857, ont été continuées depuis par son fils, M. Ernest Quetelet; elles forment une des séries les plus complètes qu’on ait aujourd’hui pour des éléments qui n'avaient point été déterminés précédem- ment en Belgique. Le 21 mars 1861, par deux observations , l’inclinaison de l'aiguille est . . . 67027’,9 Les 27 mars, 2 et 5 avril 1860, par pra denes tions, l’inclinaison de l'aiguille est . . . . . 670508. Le 25 mars 1861, par deux observations, la déelinai- son de l'aiguille est . . . . .. 4902752” Le 4 avril 1860, par trois nuire es la pere son de l'aiguille est. . … . 2 "ONCE Ces nombres sont donnés tels qu’ils résultent de l’obser- vation immédiate; il est seulement à remarquer que les jours d'observation, les instruments magnétiques fixes n’in- diquaient pas de perturbation sensible. (317) Note sur une aurore boréale observée le 9 mars 1861; par M. Ad. Quetelet; directeur de l'Observatoire. Le samedi, 9 mars, à 8 h. 50 m. du soir, M. Ernest Quetelet aperçut de l'Observatoire , une assez belle aurore boréale et prit aussitôt soin de m’en prévenir. Dans le nord-ouest, s’étendaient des vapeurs en forme de nuage diffus, d’un rouge sombre, au milieu desquelles on a remarqué un Jet assez élevé d’une couleur blanchâtre. La coloration à disparu par degrés après un quart d'heure; mais le ciel, particulièrement vers le nord, est demeuré voilé le reste de la soirée. Quelques personnes assurent que la coloration rouge à reparu après 10 heures. Voici quel- ques nombres observés aux barreaux magnétiques : INTENSITÉ HAURESS, Déelinaison (1). magnétique. Température Fabr. :] a a 0 De... 60,59 12,75 48,7 Die NeLE ET vel Le 66,66 11,51 47,7 A cn. « 64,50 10,41 47,1 “170 AC QAR TENNETATEENT ET" 8,75 47,5 MAO UE Lu ln . 65,41 8,89 47,4 Cette aurore boréale a été aperçue également sur plu- sieurs autres points de la Belgique, et, comme on l’a vu par les journaux, dans quelques pays voisins. Une lettre de M. E. Wouwermans m'a fait connaître qu'il a vu très- distinctement le phénomène à Verviers, vers 10 heures (1) On sait que la déclinaison dans son état normal ne varie guère de plus d’un tiers de degré par jour; la variation a été ici de près de sept degrés. (318 ) du soir; une autre lettre de M. Florimond annonce qu'il l’a observé à Louvain également entre 8 et 10 heures. Note sur l’orage du 28 mars 1861 ; par le même. La matinée du 28 avait été fort belle, mais la tempéra- ture était un peu élevée pour la saison; le thermomètre abrité, au nord, avait indiqué jusqu’à 18°,9 C. Vers 3 h. de l’après-midi, le ciel s’est couvert, et à 4 h., il est tombé quelques gouttes d’eau. A 7h., on a remarqué un brouillard assez peu épais, mais légèrement odorant. Vers 7 !/2 h., à l’ouest, ont commencé des éclairs violents suivis de roulements de tonnerre lointains qui suecédaient à l'éclair après un intervalle de temps de 45 à 55° au moins. C’est probablement au grand éloignement de l'orage qu'il faut attribuer qu'aucune déviation sensible n’a été observée dans le galvanomètre pour l'électricité dynamique, dont cependant la sensibilité avait été éprouvée peu de jours auparavant (1). Le baromètre qui avait atteint un minimum la nuit pré- cédente avait une marche ascendante (2). (1) Plusieurs observations que je fis avec mon fils me montrèrent qu’il s’écoulait à peu près 50 secondes de temps entre l’apparition de l'éclair et le bruit du tonnerre; ce qui suppose un peu moins de vingt kilomètres ou de quatre lieues. L’orage était vers l’ouest-nord-ouest et, conséquem- ment, de ce cûté-ci de l'Escaut. (2) Un autre orage avait éclaté à Louvain, le oui 21 mars, à 5 {2 heures du soir; il était accompagné d’une chute de grêle dont les fragments (349 ) De l’état de la feuillaison et de la floraison, au commen- cement de 1861 ; par le même. Pour me faire une idée de l’état d'avancement de la feuillaison et de la floraison, au commencement de cette année, j'ai cru devoir comparer, pour quelques plantes seu- lement, l’état de végétation à ce qu'il a été pendant les vingt années précédentes. On pourra voir de cette manière que, pour les plantes les plus précoces, le Philadelphus coronarius, le Ribes rubrum et le Syringa vulgaris, qui commencent à donner leurs feuilles du 20 au 22 mars, la feuillaison à commencé, cette année, environ et moyenne- ment vingt Jours plus tôt. Pour l’Æsculus hippocastanum, qui présente ses feuilles plus tard, ainsi que pour la flo- raison du Crocus jaune, du Galanthus nivalis et du Ribes ribrum, l'avance a été de neuf jours environ. L’Amygdalus persica à présenté une exception : cette plante à fleuri trois jours plus tard que d'ordinaire. Cette exception peut provenir du froid très-intense qui a régné, pendant une dizaine de jours, au mois de janvier, et cette plante a souf- fert sans doute des froids rigoureux. La température est descendue, à Bruxelles, de dix-sept à dix-huit degrés centi- grades au-dessous de zéro. Depuis plus de trente ans qu’on observe régulièrement à l'Observatoire, la température n'est descendue qu’une seule fois un peu plus bas : c'était pendant l'hiver de 1839; le thermomètre a donné alors étaient considérables : ils pesaient de trois à cinq grammes, d’après ce que M. Florimond a bien voulu m'en écrire, et ressemblaient à ceux que j'ai fait reproduire, dans le Bulletin du 3 mars 1849, d’après M. Mac Leod, d'Ostende, (320 ) | moins de dix-huit degrés centigrades. Plusieurs pêchers _sont morts de ce froid excessif pour nos climats et qui semble affecter plus spécialement cet arbuste. PHILADEL,. coronarius. 21 mars 12: » 19 » 2avril. 1357 "72 23 fevr. 97 mars.! 22 15 avril. 14mars. A1avril. 5 mars. 22 » 4 avril. 25 fevr. 7 avril. 1840-1860. 1861.70 5 » Avance de “151 0 MAP 20 mars. 15 jours. FEUILLAISON. RIBES rubrum. 18 mars. AE tn 49 n » 8 avril. 25 févr. 26 mars. 20 15avril. 27 mars. 15avril. 8 mars. 21 mars. 29 févr. 29 jours. | SYRINGA vulgaris, 25 fevr. 23 mars. 1avril. 25 Mars. 21 » 13 avril. 14mars. 15 avril. 5 mars, 15 7 avril. 22 mars, D. » 17 jours. | AESCULUS | hippocast. l 27 mars. 2 avril. 29 mars. 4avril. Li ddr 27 mars. 20 avril. 50 mars. 15 avril, 9 avril. 21 y» 7 jours. CROCUS jaune. 5 fevr. 7 mars. 12 fevr. 15-25 mars. 29 » 26 janv. 21 févr. 12 fevr. 22 » 15 mars. 20 févr. 15 mars. 26fevr. 17 » 9 jours. FLORAISON. EEE 5 — | GALANTE. |AMYGDALUS nivalis. 14 févr. 7 mars. 15 févr. 2 mars. 27 févr. 25 mars. 23 janv. 9mars. 25 fevr. 17 9mars, 26 févr. 16 mars. 25 fevr. 23 5% 15 mars. 15 févr. 15 mars. 27 fevr. 16 » ose persica. Gavril. 18 mars. 12 18 8 avril. 27 fevr. 27 mars. 1avril. 14mars. RIBES rubrum. 26 mars. ! » 7 avril. B . 18 mars.: 412 avril. 31 mars, 3avril. 29 » 27 mars. 23 avril. - M 51 mars. 14avril. 16 mars. il.| 25 avril. .| 6 avril. 26 mars. {1 jours. ( 521 ) Note sur la détermination géométrique des hélicoïdes gauches susceptibles de s'appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature ; par M. E. Lamarle, associé de l’Académie. 1. Le problème que nous allons résoudre peut s’énoncer de la manière suivante : Étant donné un hélicoïde gauche quelconque, déter- miner la série des hélicoïdes qui comprennent l’hélicoide donné et qui peuvent s'appliquer l’un sur l’autre sans dé- chirure ni duplicature. Soit D la génératrice rectiligne supposée commune aux hélicoïdes cherchés. Ainsi qu’on l’a vu dans notre note (") sur le développement homalographique des surfaces de révolution, et, plus particulièrement, dans la partie de cette note où nous avons défini deux des hélicoïdes sur lesquels l’hyperboloïde de révolution à une nappe est ap- plicable sans déchirure ni duplicature, tout se réduit à déterminer, par rapport à la droite D, la série des axes instantanés glissants qui correspondent à un même état de mouvement de cette droite, et qu’on peut ainsi substi- tuer l’un à l’autre, sans altérer en rien les conditions du déplacement initial. Deux moyens se présentent ei natu- rellement pour atteindre ce but. Le premier consisterait à suivre, en le généralisant de manière à lui donner toute l'extension qu'il comporte, le procédé déerit dans la note () Voir les Bulletins de l'Académie royale de Belgique, 2»e série, tome X,n° 11, et tome Xf,n°1. (32 ) mentionnée ci-dessus; le second se trouve déjà tout ex- posé dans notre Théorie géométrique des centres et axes instantanés de rotation. Nous donnerons la préférence à ce second moyen, qui se résout en une construction géométrique très-simple et, pensons-nous, très-satisfai- sante sous tous les rapports. 2. Représentons par oA (fig. 1) la position actuelle de la génératrice D et dé- signons par D' l'axe in- stantané non glissant qui correspond à la position 0A. Il existe, en général ("), un hyperboloïde de révolution compris, comme cas parti- culier, dans la série des hé- licoides cherchés; la droite D' est l’axe de cet hyper- boloïde. Les vitesses des diffé- rents points de la droite D sont les mêmes que si cette droite tournait autour de l'axe D’ avec une certaine vitesse angulaire W/. Il en résulte que, parmi ces points, celui qui est situé sur la plus courte distance des droites D,D’, se distingue des autres en ce que sa vitesse est la moindre en grandeur. Soit o ce point, nommé point central; oa sa vitesse; Q le plan qui contient à la fois cette vitesse et la droite oA. On observera que le point o est le point de la droite oA Fig. 1. () On verra plus loin comment la solution donnée s'étend d'elle-même au cas exceptionnel où cet hyperboloïde s'évanouirait, | (325) situé sur le cerele de gorge de l’hyperboloïde mentionné ci-dessus. : L’axe D’ est parallèle au plan Q. La plus courte distance des droites D,D’ se projette en o sur ce plan. Par le point o, concevons une droite parallèle à D' et, autour de cette droite, deux rotations simultanées, l’une de même sens et de même grandeur que la rotation de la droite D autour de la droite D’, l’autre égale à la première et de sens inverse. Ces deux rotations, qui s’entre-détrui- sent, peuvent se composer avec la rotation de la droite D autour de la droite D’, et cela, sans modifier en rien l’état de mouvement de la droite D. Il s’ensuit que cet état de mouvement peut être considéré comme résultant : 1° D’un couple de rotation équivalent à une transia- tion rendue commune à tous les points de la droite D et représentée par o0a ; 2 De la rotation W/, cette rotation étant transportée autour d’un axe mené, par le point o, parallèlement à D’, ou, ce qui revient au même, perpendiculairement à la vi- tesse oa. Cela posé, si l’on observe que la rotation transportée en o autour d’un axe parallèle à D’ est décomposable en deux rotations simultanées, l’une autour de la droite D et dont il est permis de faire abstraction, l’autre autour de la droite oa/ située dans le plan Q et perpendiculaire à oA, lon peut conclure immédiatement que l’état de mouve- ment de la droite D se résout en une translation repré- sentée par 0à, et en une rotation simultanée représentée par ob sur la droite oa!. Sur la droite o«, prise pour diamètre, construisons une circonférence de cercle ohaf, et par le point b élevons sur oa' une perpendiculaire BbB", (324 ) On ne change pas l’état de mouvement de la droite D en composant sa rotation ob avec une rotation quelconque autour de oA. La conséquence est que, sans altérer en rien cet état de mouvement, on peut substituer à la rota- {ion ob une rotation quelconque oi, représentée par un segment de droite partant du point o et aboutissant à la droite BoB'. Transportons la rotation ot, parallèlement à elle-même, en faisant glisser le point o, de o en n, sur la plus courte distance des droites D,D’, et en avant du plan Q. Pour que cette rotation produise, après ce transport, le même effet que dans sa position première, il faut qu’elle se compose avec une translation dirigée perpendiculairement au plan not, Où, ce qui revient au même , parallèlement à la corde am menée du point «a au point », où la droite ot vient couper la circonférence okaf. Supposons que cette transla- tion , dirigée de a vers m, soit précisément égale à la corde am. Il s’ensuit que, se composant avec la vitesse 0a, elle donne pour résultante une translation totale représentée par om. Concluons que l’état de mouvement de la droite D peut étre considéré comme résultant d’une rotation autour d’un axe parallèle à oi et d’un glissement simultané le long de ce même axe. Concluons, en outre, que cette rotation et ce glissement sont représentés en direction, sens et grandeur, l’une par Oi, l’autre par om. L’axe dont il s’agit prend le nom d’axe instantané glis- sant. Pour en fixer la position, il suffit de déterminer la distance on. Or, par hypothèse, am est la translation due au transport en x de la rotation oi. On doit donc avoir (1, CROMROM PURIONES on NE (325 ) De là résulte Eu Le mes Par les points »# et « menons deux droites respective ment parallèles, l’une, me, à oa, l’autre, ae, à oA. Les triangles rectangles ame, iob sont semblables et donnent ant ac ur te © Il vient donc en substituant eur on = 2 ob Observons que la longueur ob représente la rotation de la droite D autour de la droite oa’ et qu’elle reste la même pour toutes les positions que la droite oi peut prendre autour du point o. La conséquence est que, pour chacune de ces positions, la distance correspondante on est pro- portionnelle à la projection de la corde am sur la droite oA. 3. Soient d et m/ les extrémités des cordes menées par les points a et # parallèlement à oa'; h et f les extrémités du diamètre parallèle à oA. I! est visible que la droite ok est la bissectrice de l’angle mom' et qu'aux points k et f correspondent les valeurs extrêmes de la distance on. » Cela posé, voici les conséquences qui résultent immé- diatement de la simple inspection de la figure (1), n° 2. 1° Il existe pour chaque position d’une droite mobile une infinité d’axes instantanés glissants, chacun d'eux étant tel que l’état actuel de mouvement de la droite peut etre considéré comme résultant d’une rotation autour de cet axe et d'un glissement le long de ce même axe. ( 326 ) 2 Soit D la droite mobile, considérée dans une posi- tion quelconque ; D' l'axe instantané non glissant qui cor- respond à cette position; N la plus courte distance des droites D,D' : les axes instantanés glissant coupent tous la droite N et lui sont perpendiculaires. 5° Soit q la projection du point a sur-le diamètre fh, et Op, op’ deux longueurs prises sur la droite N, à partir ; = | : , , jh » du point o, l’une en avant du plan Q et égale à cp l'autre . : les axes instan- tanés glissants sont répartis de p en p' sur la dis- tance pp’. - 4 A chaque point de la droite pp' correspondent en général deux axes instantanés glissants, dits AXES GLIS- SANTS CONJUGUÉS. Les axes glissants conjugués, pris deux à deux, sont également inclinés, les uns sur la bissectrice oh de l'angle Aoa, les autres sur la bissectrice of du sup- plément de ce même angle. en arrière de ce même plan et égale à o° Les axes instantanés glissants qui correspondent aux points extrémes p, p' sont uniques et rectangulaires entre eux. L'un est parallèle à la droite oh, l’autre à la droite of. 6° L’angle aigu que font entre eux deux axes glissants conjugués varie de 0 à 90°. Il est nul aux extrémités de l'intervalle pp'. Il est droit au milieu de ce méme inter- valle. 7° Soit © la moitié de l'angle Aoa : on a très-simpte- ment 0p 7 (35 tang* 6 — () Imaginons qu’on ait tiré les deux cordes ah, af. On peut prendre “+ « (327) el en meme tenps H oœ 5 Cp pes 8° Parmi les axes instantanés glissants figurent, d’une part, l'axe instantané non glissant D' perpendiculaire à où et roue avec l’axe instantané glissant ob à une dis- tance © du point o en arrière du plan Q ; d’autre part, la Mots D conjuguée, dans le plan Q, avec l’axe instan- tané glissant dirigé suivant oa. 9 Étant donnée une droite quelconque parallèle au plan À, l’axe instantané glissant parallèle à cette droite se détermine de la manière suivante : Soit om la corde menée par le point o parallèlement à la droite donnée; 1 le point de rencontre de cette corde avec la droite BbB'; ae la projection de la corde am sur le diamètre fh. L’axe cherché est situé en avant du plan À. Il coupe la droite N au point n à une distance du point 0 égale à = ; pour l'angle 6€ son égal hag, ou son égal afq. Dans le premier cas, on a immédiatement hq 0p. ob lang 6 — 2 ag aq Dans le second cas, on a de même a a tang © — 01 — nr. qf 0p’.0 b De là résulte évidemment 0p tang? 6 = _ , op ( 328 ) La vitesse de rotation autour de cet axe est représentée par O1. | La vitesse de glissement le long de ce mème axe est représentée par OM. 10° Selon que l'extrémité m de la corde om est située au-dessus ou au-dessous de la droite ad, l’axe instantané glissant parallèle à cette corde est situe en avant ou en arrière du plan Q. Dans le cas particulier où la vitesse du point central o (fig. 2) est perpendiculaire à la droite mobile D, l'axe instantané non glissant se confond avec cette droite, et cesse ainsi d'exister. Ce cas se réalise (*) lorsque le point o glisse avec la vitesse oa dirigée perpendiculairement à la droite D et que cette droite tourne en même temps autour du point o avec la vitesse ob. Les triangles rectangles semblables 04b, oam donnent alors Fig. 2. oi.om — 04. ob — cons". Cette équation exprime une propriété remarquable qu'on peut énoncer comme il suit : Lorsque la droite mobile ne comporte pas d’axe instan- () Ilest bien entendu que nous laissons à l'écart le cas où les vitesses des différents points de la droite D seraient toutes dirigées dans un seul et mème plan. L'examen de ce cas conduirait à reconnaitre que les surfaces cylindriques et coniques sont toutes développables, soit sur un plan, soit les unes sur les autres. | ( 329 ) tane non glissant, le produit des vitesses de glissement et de rotation est constant pour tous les axes instantanes ghissants. 4. Les axes instantanés glissants qui correspondent à un même état de mouvement d’une droite mobile D, s'identifient, comme nous l’avons dit plus haut, avec les axes des hélicoïdes engendrés par cette droite et sus- ceptibles de s'appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature. Il suit de là que, pour avoir la solution complète du problème proposé, il suffit de traduire, au point de vue des hélicoïdes, les résultats formulés dans les deux numéros qui précèdent. Voici d’ailleurs les con- séquences : Soit 0A (fig. 1) la génératrice D de l’hélicoïde donné; 0 le point de cette génératrice situé sur l’hélice de gorge; «. l'angle que la droite D fait avec l’axe I de l’hélicoïde; À la plus courte distance des droites D et TI; w la rotation de la droite D autour de l’axe I; © la vitesse de glissement de la droite D parallèlement à ce même axe. À partir du point o, menons la droite om de manière à ce qu'elle représente la vitesse v en grandeur, sens et direction. La droite om sera parallèle à l'axe [, et l’on aura Aom = &,..0m =. À partir du point o, portons sur om» le segment oi, de manière à ce que ce segment représente en grandeur, sens et direction, la vitesse w, on aura OÙ — Ww. Par les points à et o, menons deux droites, l’une, BiB?, parallèle à la génératrice oA , l’autre, oa’, perpendiculaire 2° SÉRIE, TOME XI. 24 (330) à la première. Soit b le point de rencontre de ces deux droites, on a OA SEE ob SRE Elevons en m sur om une perpendiculaire, et, sur cette perpendiculaire, prenons la longueur ma déterminée par l'équation (1) du n° 2 : QU nait. Cf Etot. NE Tirons la droite oa et sur cette droite, prise pour dia- mètre, construisons la circonférence de cercle ohaf. On observera que cette circonférence passe nécessairement par le point ". On voit par la construction précédente comment, un hélicoïde gauche quelconque étant donné, on en déduit la figure très-simple au moyen de laquelle se détermine la série des hélicoïdes qui comprennent l’hélicoïde donné et qui peuvent s'appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature. Distinguons, parmi ces hélicoïdes, celui qui est à plan directeur et, pour plus de facilité, choisissons-le de préférence pour y rapporter tous les autres. Soit Æ cet hélicoïde. La droite oA étant supposée la génératrice commune aux hélicoïdes cherchés, on suppose, en outre, que le plan Aom désigné par la lettre Q les touche tous au point o de cette génératrice. IT s’ensuit que, dans la position qu'ils affectent, les axes de ces hélicoïdes sont tous parallèles au plan Q et qu'ils rencontrent tous à angle droit la perpen- diculaire à ce plan menée par le pont 0. L’axe de l’hélicoïde k est parallèle à la droite oa/; 1l est situé en arrière du plan Q à la distance _ Le glissement suivant cet axe est représenté par la corde oa'; la rotation ( 351 ) autour du même axe est représentée par 06. Tout est donc déterminé dans cet hélicoïde. On a, d’ailleurs , en désignant par 9 l'angle moa : G) : ma } æ à 0 . . . an = — == — SP om “His om v 0h SOUP TOUR _ : cos y COS 9 sin (x + ER 1-00 — 04. c0S 404 —%. dar) COS 9 k cos (x + ad — 00 sin aon —= ©. ou re) COS 9? M aa v cos (æ+ 0) v CosS(æx+o) £ | ob ob cos » w Sin æ& COS 9 (8) + . . ma — omsin + = v sin #. Ces relations, jointes aux précédentes, complètent, au point de vue du calcul, la détermination de l’hélicoïde & en fonction de l’hélicoïide gauche quelconque supposé donné a priori. On peut dès lors substituer l’un à l’autre, et rapporter à l’hélicoïde k la série générale des hélicoïdes cherchés. En opérant ainsi, on doit prendre pour données celles qui déterminent l’hélicoïde k. Ce sont : 1° le rayon r du cylindre droit à base circulaire sur lequel est située l’hé- lice de gorge; 2° la rotation « représentée par ob; 5° le glis- sement w représenté par oa/. De là résulte en premier lieu RER EME Lu © aa — Ta, et si l’on désigne par e l'angle aoa/ 10} . : tng e = — — (10) ang € = (332) S'agit-il ensuite d'un quelconque des hélicoides cher- chés ? Il est visible qu’à chaque position du point » sur la circonférence ohkaf correspond un de ces hélicoïdes, et qu'il est permis d'étendre à tous les autres la construction qui s'applique à l’un quelconque d’entre eux, soit, par exem- ple, à celui que nous avons pris d’abord comme étant donné & priori et que nous considérerons actuellement comme dérivant de l’hélicoïde k. Eu égard à ce qui pré- cède, on a évidemment (11). eZ —(a+e) De là résulte (12) . . sin(æx+g)—cose, cos (++) —=sine, ct, suivant que la corde om est déterminée par l'angle z qu’elle fait avec la droite oA, ou par l'angle o qu'elle fait avec le diamètre oa, et qu’en conséquence, on veut éli- miner le dernier ou le premier de ces deux angles, 0 DO ee 1 ia (e'CER ou bien (14) . . . . sin &« = cos(s + y). La combinaison des équations qui précèdent conduit très-simplement aux déductions suivantes : cos © sin(æ+e) =U —=U ——— COS € COS € re) @ 5 W — = = (è) sin x cos (:+ 9)” r Sin g Sin & sin € w COS € u Sin © SIN > (333 ) Formulées en langage ordinaire, ces déductions peuvent s'énoncer comme il suit : À chaque position du point m sur la circonférence ohaf correspond un des hélicoides cherchés. L’axe de cet hélicoïde est parallèle à la corde om; il est situé en avant ou en arrière du plan Q, suivant que le point m est au-dessus ou au-dessous de la droite ad menée par le point a parallèlement à la droite oa’. La distance de cet axe au plan Q a pour expression générale ae rsinssinæ 4% Sin» sin c — — —— — ———————_—— — —— == ob Sin € & COS € Le glissement suivant cet axe est exprimé par COS ? sin (æ +6) Vv—=—=M=UuUu—- EU ——:° COS € COS € La rotation autour du même axe est représentée par oi et a pour expression (A) o NOT NE EN sin z cos (€ + &) Soit N la perpendiculaire élevée en 0 sur le plan Q; q la projection du point à sur le diamètre fh parallèle à la génératrice OA ; op, op' deux longueurs prises sur la droite + eme N, lune en avant du plan Q et à égale SF ), l’autre en ar- (") On a généralement L— a +6 1 (7 CS ON LS q SES — Ie Dire = tg L[— —e}), et par suite ( 554 ) riere de ce même plan et égale à L: les axes des héli- coïdes cherchés sont répartis de p en p' sur la distance pp'. À chaque point de la droite pp! correspondent en géne- ral deux axes distincts, dits AXES CONJUGUÉS. Les axes conjugués, pris deux à deux, sont également inclinés sur les bissectrices oh, of des angles que les droites 0A, oa font , entre elles. Les axes des helicoïdes qui correspondent aux points extrèemes P, p' sont uniques et rectangulaires entre eux : l’un est parallèle à la droite oh, l’autre à la droite of. Parmi ces hélicoïdes, il en est trois, en general, qu'il convient de distinguer particulièrement : l’un est lhéli- coide dont l'axe dirigé suivant oa coupe la génératrice au point 0 et pour lequel on a, l'angle © étant nul, le second est l'hélicoïde gauche à plan directeur que nous avons déjà defini et que nous avons désigné par la lettre k; le troisième est un hyperboloïde de révolu- 1 zx sea gœu| 2 +ues (5 —e)| On peut écrire aussi r 4 gf= aneot ST = agen 4 (T—<) =5 ot 4 (7 —<), ce qui donne | 21 — P Re tang* 5 ile = —— et op.0p TE ( 335 ) tion (‘), conjugué avec l’hélicoïde k, et ayant son axe di- rigé parallèlement à la droîte qui touche en 0 la circonfé- rence ohaf. Pour cet hyperboloïde, l’angle © est égal à — 7 et l’angle à à m-€, ce qui donne : (7 v=0, We =, 1 = — langer. 0) Dans le cas particulier (”) où l’hélicoïde gauche à plan directeur , représenté par K, a son axe situé dans le planQ, l’hyperboloïde s’évanouit, les longueurs op, op’ sont égales et l’on a généralement DU — ISIN, DIS sin « u Sin & COS x a, DU = QU. (@) 5. Il résulte des considérations précédentes que le lieu des axes des hélicoïdes gauches susceptibles de s’appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature, est un co- noïde. L’équation de ce lieu s'obtient très-aisément en plaçant l’origine au point p’ et prenant pour axe des y la (") L'existence de cet hyperboloïde et des hélicoïdes sur lesquels il peut se développer sans glissement, fournit un moyen pratique de trans- former le mouvement circulaire en un double mouvement de translation rectiligne et de rotation simultanée autour de l’axe de translation. (”) Ce cas réalise lorsque les données qui déterminent l’un quelconque des hélicoïdes cherchés satisfont à la relation A0 — — tang 9 — cot «. v On voit, d’ailleurs, aisément qu’en ce cas, cette même relation subsiste pour tous les hélicoïdes susceptibles de s'appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature, .( 336 ) droite N, pour axes des z et des x des droites respective- ment parallèles aux deux cordes 0, of. Soit om (fig. 5) une corde quel- conque; 5 l'angle de cette corde avec la corde oh; ms la perpendi- culaire abaissée du point #» sur le diamètre fh parallèle à oA : l’une des équations de l’axe parallèle à la corde om est évidemment Z 1 mel. * CRE — On à d’ailleurs (2) ET Mo Em vie ii = (=) En ta? {5 mf } Soit n le point où l’axe parallèle à om vient couper la droite N : cet axe à pour deuxième équation œ 2 Ge... pme = ou, tenant compte de l'équation (2), remplaçant As par la différence oa—fs, et désignant par 2 la distance pp! * Bbuiia cts y (it) = La combinaison des équations (1) et (4) donne pour l’équa- tion du conoïde cherché (5). she re fs x? + 7° — 9] (337) Les sections faites dans ce conoïde parallèlement au plan des xz sont les axes conjugués deux à deux, comme nous l’avons indiqué au n° 4. Les sections faites par des plans menés par l’axe des x sont des ellipses. La génération du conoïde résulte du mouvement d’une droite qui s’appuie sur l’une quelconque de ces ellipses et sur l’axe des y en restant perpendiculaire à cet axe. Considérons la section faite dans le conoïde par un plan at parallèle au plan des xy. Cette ligne à pour équation - Ah? EUR: (6). . An et let #11 Un Elle est comprise entre l’axe des x qui lui est assymp- totique et une parallèle à cet axe menée à la distance 2, tangentiellement à son sommet. La forme qu’elle affecte à une grande analogie avec l’une des branches de la con- choïde de Nicomède, celle qui n’a ni nœud ni rebrousse- ment. En prenant pour directrice la ligne qui vient d’être définie et pour génératrice une droite assujettie à s’ap- puyer sur l’axe des y en restant perpendiculaire à cet axe, on se représente plus aisément et mieux que par tout autre moyen la forme affectée par le conoïde. ( 338 ) CLASSE DES LETTRES. a ———— Séance du 8 avril 1861. M. DE Raw, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Roulez, Moke, Gachard, Borgnet, le baron J. de Saint-Genois, David, De Decker, Snellaert, Carton, Haus, Bormans, M.-N.-J. Leclercq, Polain, Baguet, Ch. Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres ; Nolet de Brauwere Van Steeland, associé; Th, Juste, Félix Nève, Alph. Wauters, correspondants. M. Alvin , membre de la classe des beaux-arts , et M. Stas, membre de la classe des sciences, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. M. le Ministre de la justice fait parvenir, pour la biblio-= thèque , le quatrième cahier du troisième volume des procès-verbaux des séances de la commission des an- ciennes lois et ordonnances de la Belgique. M. Alph. Wauters, correspondant de la classe, fait hom- ( 339 ) mage de la seconde livraison de la Belgique ancienne et moderne. — Remercimentis. — M. Ducpetiaux présente un mémoire manuscrit, in- titulé : Mission de l’État, ses règles et ses limites. (Com- missaires : MM. De Decker, Faider et Arendt. — MM. Arendt et Faider rendent successivement compte de ce qui s’est passé dans la commission chargée de rédi- ger le programme des concours fondés par feu M. le baron de Stassart ; le donateur avait exprimé le désir que « tous les six ans, à la suite d’un concours ouvert deux années d'avance, un prix soit décerné, par la classe des lettres, à l’auteur d’une notice sur un Belge célèbre, pris alterna- tivement parmi les historiens ou les littérateurs, les sa- vants et les artistes. Lorsqu'il s’agira d’un savant, la classe des sciences, et lorsqu'il s’agira d’un artiste, la classe des beaux-arts sera priée d’adjoindre deux de ses membres aux commissaires de la classe des lettres pour l'examen des pièces. » Il a été décidé, en conséquence, que la classe des sciences sera invitée à désigner deux de ses membres, afin de s’entendre avec les commissaires de la classe des lettres pour la rédaction du programme. — La classe avait à nommer les cinq membres qui formeront la commission chargée de la publication des anciens monuments de la littérature francaise, en Bel- gique. Cette commission a été définitivement constituée comme suit : MM. le baron de Gerlache, Kervyn de Let- tenhove, Polain, le baron J. de Saint-Genois, André Van Hasselt. ee ( 340 ) RAPPORTS. Sur un mémoire de M. Gheldolf, relatif au mot BALFART. Rapport de M. Kertyn de Letltenhore, « Dans les temps obscurs et reculés où nous décou- vrons les origines du mouvement communal appelé, en Flandre, à un si remarquable développement, à cette époque de transition où la féodalité dominait encore sur le sol qu’elle avait défendu et protégé, une plainte vive et profonde nous frappe dans le récit de tous les historiens, comme l'explication, comme la justification de la résistance qui se manifestait surtout chez les populations d’origine saxonne. « Nous sommes libres, nous le serons toujours, » disaient-elles, par la voix de Bertulf, à Charles le Bon, et on les vit repousser constamment avec la même énergie le tribut de la servitude qu’on avait voulu leur imposer : Inconsueta, inaudita, indebita tributa, quae nec ipsi, nec praedecessores sui umquam dare consueverant (1). Lambert d’Ardres ajoute que ce tribut consistait en une taxe perçue par feu ou par habitation, et, dans une charte de 1265, la comtesse Marguerite de Flandre nous apprend que cet impôt annuel de douze deniers par feu, levé à rai- son de la servitude, portait le nom de balfart : ratione cujusdam servitutis quae BALFARDUM vulgariter appellatur ; (4) Lambert d'Ardres, édition de M. de Godefroy, pages 67 et 381. ( 941 ) ce qui est traduit par Oudegherst : « Une servitude que » lés contes de Flandre souloyent lever, nommée le bal- » faert, et qui estoit de chascune maison douze deniers > par an. » S'il ne s'agissait que d’un simple droit de fouage, fort commun dans le monde féodal et assez souvent réclamé des hommes libres eux-mêmes, on ne comprendrait pas ces récits où Lambert d’Ardres, le fidèle historien des races saxonnes dans le comté de Guines, flétrit si vivement cette taxe en l’appelant terrae dedecus et opprobrium, et en nous racontant que quiconque s’y soumettait se reléguait ainsi dans la condition des serfs (sub servilis conditionis jugo). Dans ce tribut qui souleva trois siècles de luttes en Flan- dre, et qui parut un grief suffisant pour légitimer l’usur- pation de Robert le Frison, il y a quelque chose de plus considérable, de plus grave (1), et les recherches qui ten- dent à éclaircir cette question difficile offrent le même intérêt, soit qu’on étudie l’histoire, soit qu'on considère les mœurs, soit que l’on approfondisse le droit politique du moyen âge. Dans le mémoire que la classe à bien voulu renvoyer à (1) M. de Godefroy dit fort bien, dans la préface de son excellente édition de Lambert d’Ardres : « Lorsqu'en 1070, le gouvernement arbitraire de » Richilde de Hainaut soulève la Flandre et suscite cette grande guerre » civile dont la sanglante bataille de Cassel fut le dénoûment, quel est, » aux yeux de Lambert, le grief populaire contre la veuve du bon comte » Baudouin VI? Sont-ce ses injustices, ses violences? Les nombreuses » têtes qu’elle fait tomber ? Le chapitre est intitulé : Que Richilde voulait » réduire la Flandre en servitude. Et comment? Elle osait, dit-il, récla- » mer des tributs inaccoutumés, inouïs.. Et ensuite il caractérise le succès » et l'élévation illégitime de Robert le Frison par ces mots : De libertatis » Flandriae acquisilione. » ( 342) mon examen, M. Gheldolf s’est proposé de faire connaître la source et le caractère du balfart. Il a voulu, comme il nous l’apprend lui-même, « relever, à l’aide d’investiga- » tions patientes et laborieuses, les divers textes et cher- » Cher, par leur comparaison, à se former une notion » exacte de chaque droit, en déterminant son origine et » ses développements. » Cette tâche était digne de l’éru- dition de M. Gheldolf. Nous le remercions de l’avoir abordée dans une notice que distinguent un travail persévérant et une critique consciencieuse, et il nous permettra d’en signaler tout l’intérêt, en venant à la fois en exposer et en discuter les conclusions. Le savant auteur du mémoire que nous avons sous les yeux à cru qu'il était surtout important d'étudier et de suivre dans l’ordre des temps , en remontant jusqu’à Sué- tone, certains impôts établis par les Césars romains, puis conservés par les rois francs, et il est arrivé ainsi à ne voir dans le balfart que la paraveredorum praebitio, si amplement expliquée dans le code de Théodose. A ses yeux , les mots balfart et paraveredus ont la même éty- mologie et présentent le même sens : « Le mot palefredus » (palefredus pour paraveredus) est devenu balfart… Le » même mot, légèrement altéré (paraveredus, balfart), ser- » vant à désigner les mêmes choses, en conserve précieu- » sement l’histoire et la généalogie. » Aïnsi, sans parler de cette étymologie qui, d’après M. Gheldolf, n’est que légèrement altérée, le mémoire qui nous occupe tend à démontrer qu'il faut considérer tous les impôts établis en Flandre, dans les temps les plus reculés du moyen âge, comme étant d’origine romaine. Cette solution, dont l’application à divers pays a formé (345 ) l’objet de tant de dissertations modernes, mérite de fixer l'attention. Conçue dans des termes généraux, est-elle fondée? Nous ne le croyons pas. Certes, les lois romaines, et celles qui se rapportaient à la levée des impôts aussi bien que celles qui régissaient les conventions et les con- trats, continuërent à être appliquées sous les rois francs, qui, à plus d’un titre, se posèrent comme les successeurs des empereurs romains; cependant on ne saurait confondre ces royaumes, fondés, à la vérité, par l’invasion , mais où les Gallo- Romains restèrent toutefois en majorité, avec ces contrées longtemps désertes où s'était établie une race rude et indomptable, en dehors de toute fusion et de toute transaction. Lisez les historiens, et voyez comme ils par- lent de ce peuple : Gens cujus indomitam barbariem. .. Intractabile vulgqus… Genus hominum atrocitaiem semper gestiens… Pacem nullus hominum attentare quibat, sive rex, sive comes reformare. Étudiez les lois et les coutumes, et dites-nous si la barbarie seule, étrangère à toute in- fluence romaine, n’a pas dicté ces keures d’Arques et de Saint-Omer, où, à côté du harop (dans nos coutumes fla- mandes helpe gheroup), du dotslaga, du wapeldrinc, figure la blessure, que l’on punit en rendant à la victime membre pour membre, œil pour œil, dent pour dent. Pour rester fidèle à la méthode que M. Gheldoif avait tracée lui-même , 1l semblait qu'il düt tenir compte de l’ori- gine du balfart et faire remarquer qu’on le rencontre uni- quement en Flandre et en Zélande, et principalement aux bords de la mer, parmi les populations d’origine saxonne. Il était important de ne pas perdre de vue que c’est dans le pays d’Ardres et de Furnes, au milieu des Colvekerli et des Blaeuvoets, qu'il souleva cette longue résistance qui ( 9544 ) déchirait encore le sein de la Flandre, alors que ses pèlerins allaient fonder, sur des rives éloignées, l'empire de Bau- douin de Constantinople. Soit qu’il fallût étudier la valeur juridique du balfart, soit qu’il y eût lieu de fixer l’étymo- logie du nom, la langue, les mœurs, les usages des lieux où 1l se percevait ,offraient de précieux éléments de al ches et de comparaisons. Nous constatons avec regret que M. Gheldolf, si profon- dément versé dans l’histoire des institutions de la Flandre, n’admet pas dans toute son influence la colonisation anglo- saxonne du Fleanderland, et se ferme ainsi une source féconde de solutions pour les interprétations de textes, qui ne peuvent s'expliquer que par des assimulations emprun- tées aux lois et aux usages des Anglo-Saxons de la Grande- Bretagne. Il paraît assez étrange, même avant de descendre sur le terrain de la discussion, que cet impôt, qui pèse prin- cipalement sur les populations des bords de la mer, puisse reposer sur l'obligation de livrer des chevaux pour le transport des dépêches, pour le service des courriers. Ce nom si redouté de balfart n'aurait donc représenté, selon M. Gheldolf, qu’une redevance qui devait être assez rare, et ne frapper qu'un petit nombre de personnes. Le balfart n'aurait consisté, en effet, qu’à fournir des palefrois pour le service du prince (paraveredus s'était modifié en pale- fredus, qui ne signifie pas autre chose). Si nous passons à la forme, à l’étymologie du nom (nous y reviendrons plus tard), d’autres objections se pré- sentent immédiatement. Düût-on remonter aux lois du Code théodosien pour voir simplement des chevaux de poste dans les paraveredi et dans les parhippi, nous ne nous ( 545 ) croirions pas moins autorisé à soutenir que n1 le mot latin paraveredus, ni le mot français palefroi, ne peuvent expliquer une dénomination qui n’était pas d’origine ro- maine, guod teutonice dicitur balquard. Peut-être nous serait-il permis d'emprunter une phrase par laquelle M. Gheldolf a jugé, dans ce mémoire même, une interprétation que nous avions proposée; peut-être aurions-nous le droit d’insister « sur l’inanité de ces con- jectures étymologiques ; » mais la question est si impor- tante, elle est encore, malgré les conjectures étymologiques bieu plus injustifiables de Vredius , de Schilterus et de feu M. Willems, enveloppée de ténèbres si profondes, que nous avons surtout à remercier M. Gheldoif de nous avoir donné l’occasion de développer et de confirmer par de nouvelles preuves l’opinion que nous avons émise. Il faut prendre la question un peu plus haut que les usages Juridiques et que les formes étymologiques. Com- ment pourrait-on se laisser aller à croire que cette obli- gation de fournir des chevaux, obligation qui, il est impor- tant de le faire remarquer, incombait aux hommes nobles eux-mêmes, ait pu être considérée, dans un temps où la féodalité traversait ses plus mauvais jours d’oppression, comme la plus rude et la plus avilissante de toutes? Une taxe avait succédé, nous objecte M. Gheldolf, à la prae- bitio paraveredoruim ; mais pourquoi eût-elle été plus dés- honorante que toute autre, par exemple, que celle qui eût remplacé l'obligation de livrer des chariots ? Dans la double catégorie des charges réelles ou person- nelles qui existèrent au moyen âge, les dernières parurent toujours les plus pesantes, les plus honteuses. Il semble, en effet, que l’homme, lorsqu'il subit malgré lui la servi- 2% SÉRIE , TOME XI. 25 ( 346 ) tude manuelle, manuale servitium, comme s'expriment les capitulaires, soit en quelque sorte ravalé au niveau de la bête de somme. Non-seulement cette charge inonde son front de sueur, mais elle est plus accablante encore par la dégradation morale qui s’y attache, car elle confisque sa liberté. C’est ce travail qui n’est ni volontaire, ni spontané, qui constitue seul la servitude. Qu’à une époque plus civi- lisée, où l'argent valait plus que la prestation de la corvée, il ait été remplacé par un rachat, par une taxe qui repré- sentait la charge du travail, c’est ce qu'il est aisé de comprendre; mais le rachat même qui rappelait une con- dition ignominieuse devait être impatiemment supporté par ces populations qui, étrangères aux serfs gallo-romains, étaient venues, comme les nobles francs eux-mêmes, occu- per des territoires déserts et abandonnés. Tel fut le bal- fart, réclamé et levé à raison de servitude. Quel était ce travail? quelle était cette servitude? quelle est la valeur du mot balfart ou balquard dans la langue et dans les institutions? Selon nous, il faut, sans hésitation, le traduire par munitio civitatum, vallum, fossatum, et nous justifierons le sens étymologique du mot avant de l'étudier dans les lois et dans les usages. Si, à l'exemple de M. Gheldolf, nous voulions faire re- monter un peu haut dans l'antiquité classique l’étymologie que nous proposons, 1l nous serait facile de chercher dans les lexiques grecs le mot Bwloc, gleba, cespes ; et, sans aller : Aux Saumaises futurs préparer des tortures, nous invoquerions le témoignage de Claude Saumaise lui- même (in Ælium Spartianum, p. 139) : Muri cespititii valli proprie dicuntur Bchepoy apud Nicetam. Puis, passant à la langue latine, nous pourrions démontrer que le mot ( 947 ) bolus fut employé dans le même sens. Bolus est cespes, dit Octaviano Ferrari, nam propugnacula castrensia a ces- pite (De orig. linguae italicae, p. 35). Au moyen âge, de bolus on fit ballum et ballium, et de là balles. Gauthier de Nanteuil, s’engageant à ne pas élever de mur autour de son château, s'exprime aimsi en 1218 : In circuitu ballii non licebit mihi operari de petra, et on lit dans le roman de Garin le Loherain : Il font lor bailles et lor chastiax garnir. De ballum, rempart, est venu le mot ballum, tutela, et de là bajulus, bail, tuteur. Quoi qu’il en soit, et sans nous arrêter aux rapports si remarquables des langues du nord et de celles du midi, qui révèlent souvent une origine commune, nous croyons devoir, à propos de ce tribut qui a été connu sous le nom de balfart chez les Flamings d’ori- gine saxonne, consulter exclusivement les idiomes septen- trionaux. Le radical bo semble, dès l’époque la plus reculée, avoir désigné, d’abord la terre, puis la patrie, puis le foyer do- mestique, puis la ville formée de la réunion de divers foyers, puis le rempart qui protégeait la ville (1). Ce radi- cal, dont on a fait tour à tour bod, bot, bol, bala, bal (2), se retrouve chez tous les peuples d’origine septentrionale. (1) En Angleterre, de l’anglo-saxon bycgan, cultiver, on a fait to buile, bâtir. On emploie encore indifféremment en flamand le verbe bouivwen pour bâtir et cultiver: een huys boutwen, een landbouwer, etc. (2) Le mot bal, rempart, paraît, dans le pays où le balfart fut le plus impitoyablement réclamé, expliquer les noms de plusieurs villages ou chà- teaux, par exemple, Balinghem, Belinghem, Belkin, Boulinghen. À Bruges, une rue qui touchait à l’ancien rempart, à l’est de la ville, porte encore le nom de Bal-straete. ( 948 ) De là aussi viennent les mots flamands boel, aedes, domi- cilium, et balie, vallum, septum (Kilian). En ajoutant au mot bal, ville, résidence, le mot anglo- SaXON faerten, murus, munimentum (de là faertnian, mu- nire), on trouve pour balfart, villae munimentum. Nous aimons mieux toutefois, puisqu'on dit indifféremment bal- fart ou balquard, faire dériver l'interprétation de la seconde syllabe, du mot saxon warda ou quarda. De là les verbes veardian où quardian, reproduits dans le verbe allemand warten et dans le verbe français garder. Balquard devrait donc être traduit, aussi bien que balfart, par munitio civi- tatis. De là aussi les mots bolvetus, bolevardus dans la lati- nité du moyen àge, boulevard en français, baloardo en italien, ete. | De même que nous rappelions un peu plus haut les rap- ports fondés sur l'assimilation des langues du nord et du midi, nous pourrions également les retrouver dans ceux qu'offrent les institutions. Si nous ouvrons le Code théo- dosien au titre : De cursu publico, nous y remarquons que, parmi les charges qui y sont énumérées, le législateur romain place en première ligne les travaux à exécuter aux remparts; mais, cette fois encore, nous aimons mieux chercher les traditions primitives du balfart dans le monde germanique que dans le monde romain. Nous savons que, tandis que les chefs germains, à la tête des hommes libres, ne jugeaient le combat glorieux qu'en pleme campagne et à découvert, ils laissaient à leurs esclaves, à leurs prisonniers, le soin de travailler, avec les vieillards et ceux que l’âge ou la maladie retenaient chez eux, à la construction des remparts de terre et des palis- sades de troncs d'arbres qui protégaient leurs villes, ou plutôt leurs chariots et leurs tentes errantes. (349 ) Chez les Francs, les hommes libres sont aussi tenus, par l’heriban, de prendre part aux nombreuses expédi- tions organisées par Charlemagne et ses successeurs; mais Charles le Chauve admet, en 859, que ceux qui, pour des motifs valables, n’auront pu s’y rendre, gardent les villes selon l’ancien usage, ut illi qui in hostem pergere non potuerunt, juxia antiquam et aliarum gentium consuetu- dinem ad civitates novas operentur el in civitaie wactas faciant. Un capitulaire de 812 avait déjà placé au même rang que le wacta, le warda; et si le wacta représente le guet militaire, le mot warda semble désigner le travail nécessaire pour assurer la défense des villes (ut juxta an- tiquam et aliarum gentium consuetudinem ad civitales novas operentur). Si Charles le Chauve avait imposé la charge de la mu- nitio civitatum à Ceux qui ne pouvaient se rendre à l’hé- riban, c’est-à-dire, pour emprunter le langage de Tacite : senibus et infirmissimo cuique ex familia, il faut observer que les comtes cherchaient à faire peser ce travail indis- tinctement sur tous les hommes libres, et que, sauf des raisons exceptionnelles fondées, comme cela arriva du temps de Charles le Chauve, sur les nécessités de la dé- fense de l’État, ce travail était, au contraire, considéré comme la tâche des serfs. Nous lisons, en effet, dans le capitulaire de 793 : Placuit nobis ut illos liberos homiines comites nostri ad eorum opus servile non opprimant, et, d'autre part, nous voyons les servi casati (qui intra casam serviunt, porte le glossaire de Pithou), chargés d’abord de ce qu’on appela en français « le travail de besche, » puis, s'ils passent sous une juridiction pius douce, sous celle de l'Église, se rachetant par une redevance de douze deniers par habitation : De unaquaque casata, lit-on dans les capi- (350) tulaires, duodecim denarii ad ecclesiam reddantur. Or nous retrouverons tout ceci dans le balfart. C’est une taxe qui est de douze deniers, et qui est levée par feu, comme l’observe M. Gheldolf. Mais que l’on n’oublie pas que l’on a voulu assimiler aux casati ces laboureurs dont la mam se pose tour à tour sur l’épée et sur le soc de la charrue, ces rustici ou vavassorii (1), qui sont, dans le Fleander- land, les karls saxons. C’est la femme d’un vavassorius, c’est Hawide de Fiennes, qui proteste, comme étant d’origine libre, contre ceux qui veulent, par le balfart, la réduire , elle et tous ceux qui sont libres au même titre, à l’état de servitude, in servitutis conditionem. L’édit de Charles le Chauve nous convie à rechercher quelles étaient ces nations étrangères qui connaissaient également le warda, et nous nous bornerons à remarquer que, en Allemagne et en Angleterre, le warda, que les Allemands appelaient burgward, puis, par corruption, burgwerk (on disait balverk en suédois), et les Anglo- Saxons, burghard ou burghiard, représente exactement ce que nos Flamings nommaient le bal warda, c’est-à-dire d’abord le travail, puis la redevance servile remplaçant le travail servile. Henri de Saxe rappelle l’édit de Charles le Chauve quand :1l dit : expeditiones sequantur et burg- werk operentur; mais Du Cange explique le balfart même du Fleanderland, quand il interprète en ces termes le burghiard des Anglo-Saxons : Yard Anglis est chors, unde burghyard burgi chors, clausura seu tributum quod pro clausura exsolvitur. Si le mot balfart fut primitivement connu dans le Flean- (4) Voyez Lambert d’Ardres, ( 351 ) derland et ne s’étendit guère au delà de ses limites, un mot latin qui en est la traduction fut bien plus généralement employé dans les chartes. Burgwerk, dit Du Cange, idem est quod fossata; et ici le fossatum n’est pas le fossé, mais le rempart. Fossatum , dit un célèbre lexicographe italien, recentiores vocaverunt castra quia fossa cingi solerent (1). Il nous serait aisé de citer de nombreux extraits de chartes relatives au fossatum. Tantôt, en souvenir des capitulaires, on rapproche le warda de le wacta, comme dans cet article de la charte de saint Riquier, a fossis et ab excubiis liberos; tantôt on l'appelle operatio vallorum, et presque toujours ce travail, en s’adoucissant, se réduit à une corvée de trois jours. Du Cange, que M. Gheldolf, sans doute par respect pour sa science, à placé inexactement dans l’ordre de Saint- Benoît, Du Cange, qui eut dix enfants de la femme pieuse et dévouée avec laquelle il vécut cinquante ans, offre ici de nouveau la source la plus précieuse de documents et d’interprétations à laquelle nous puissions recourir. Il ap- pelle le warda : custodia oppidorum vel castellorum ad quam tenentur incolae et tenentes; item, tributum quod ab is pensilatur, ut ab hac servitute immunes sint. Et voici comment il définit le fossatum : obligatio qua fossatis urbium reficiendis tenentur cives. El ajoute au mot fossa- mentum : obligatio quae interdum pecunia redimebatur, unde inter exactiones recensita. Du Cange ajoute : a qua obligatione qui exempti erant dicebantur non debere « service de besche et de pele, » et il cite à l’appui ces lignes de la charte de Calais, de 1304 : (1) Octav. Ferrari. Du Cange dit aussi : Fossatum , castra vallo et fossis circumducta. ( 352 ) « Li bourgois de Calais ne doivent nul service à leur sei- » gneur ne de besche ne de pele, se ce ne soit encontre » la défense de la mer. » Or c'est exactement ce que nous trouvons dans une charte de l’abbaye d'Hasnon et dans la keure des Quatre-Métiers. Dans la charte de l'abbaye d’'Hasnon, de 1218, il est fait remise, par la comtesse jeanne, des droits de balfart, de keureie (corvée) et de spadewerk (travail à la bêche). La keure des Quatre-Métiers porte : Nos universis homi- nibus nostris balphardum quod nobis singulis annis debe- bant quitamus ; mais on ajoute dans deux autres articles : De diken, delven, potest placitari quando necesse fuerit coram scabinis et praecone sine comite et castellano. Si destructo littore mare terras inundatverit, debent casati cum fossoriis suis tribus diebus illic laborare. Dans la première de ces citations, le balfart est placé à côté de la corvée et du service de bêche. Dans la seconde, nous voyons les hommes affranchis du balfart, comme ceux qui sont affranchis du fossaitum, rester également tenus de l'entretien et de la réparation des digues. Mais il y à un élément bien plus complet et bien plus péremptoire de preuve dans la comparaison de ces deux textes, em- pruntés, l’un aux chartes de Furnes et de Bourbourg, l’autre, à la charte d'Arras : Balphardum nostrum quittamus , hoc solum nobis re- tento, quod si forteritias novas facere vellemus, vel veteres reparare, illi nobis facere tenerentur qui balphardum sol- vere consuverant (1). (1) Le texte flamand porte : « Onsen balphaerd eewelike 1wvie hebben quite ghescolden , behouden alleenlike tons waert dat wilden wi nieuwe vesten maken of d'oude vermaken, die den balphaer waren ghewonnen ( 555 }) Qui fossare debent, ad fossatum veniant sicut debent. Lors même que le texte de la charte d'Arras n’explique- rait pas celui des chartes de Furnes et de Bourbourg, cette disposition, qui rétablit au moins fictivement l’ancien état de choses, et remplace une redevance fréquente et oné- reuse par un travail devenu sans doute fort rare, est tel- lement précise, que nous ne comprenons point qu’elle n'ait pas arrêté le savant auteur du mémoire. Néanmoins de cette phrase si claire : forteritias novas (les novas civitates des capitulaires), {li nobis facere tenerentur qui balphar- dum solvere consueverant, M. Gheldolf a voulu en faire deux, et il est arrivé à dire qu'il y avait là non pas l’obli- gation future du travail du fossatum imposée à ceux qui payaient précédemment la redevance pécuniaire du balfart, mais deux services différents, le balfart qu’on abolissait, le fossatum qui était maintenu. « Ceux-là , dit-il, qui jus- » que-là payaient le balfart, étaient, en outre, tenus de » travailler à la bêche, /odere, pour la construction et la » restauration des fortifications. » Ainsi M. Gheldolf avoue que les mêmes personnes étaient tenues du fossatum et du balfart; mais, malgré les termes précis du texte qu'il avait sous les yeux , il persiste à ne pas reconnaître l’iden- tité de la même servitude, identité justifiée à la fois par l’étymologie et les usages. Sans doute, comme le fait observer M. Gheldolf, le bal- fart était un droit réservé au seigneur; mais ceci est encore bien plus vrai pour le fossatwm que pour la praebitio para- veredorum. En ce qui touche la protection du pays, la munilio civitatum n'est-elle pas plus importante que la te gheldene warense ons schuldich te delvene. » (MS. de la bibliothèque de Bourgogne, n° 16770 ) ( 904 ) praebitio paraveredorum ? Voyez la charte de l’abbaye de Saint-Bavon, de 1319. Pourquoi y mentionne-t-on le bal- fart de l’avoué? Parce que l’avoué est le chef militaire chargé de la défense de l’abbaye. N'est-ce point par le même motif que , dans la charte relative au balfart à Loo, on rappelle également que l’on a concédé aux moines, en même temps que le balfart, les droits de comté et d’avouerie ? Qu'on nous permette, à ce sujet, de citer un texte iné- dit. On lit dans un compte fort ancien, présenté au seigneur d’Audenarde : de barfarda de erpanine vin v. x. s. (1). Ne faut-il pas reconnaître, sans hésitation, le wardpeni des Anglo-Saxons : Denarii vicecomiti vel aliis castellanis per- solvi soliti, ob castrorum wardas seu custodias; tallage pur warde? Tei encore, pour éclaireir l’histoire du Flean- derland, il faut recourir à ces lois anglo-saxonnes où se rencontrent à chaque page le warda et les wardpeni. Nous admettons assurément, comme M. Gheldolf, que le balfart se percevait par feu, et que dès lors il était im- portant que la maison ne restàt pas déserte ; mais tout ceci indique l’habitation du pauvre laboureur : tectum nihilo- minus sine culcitra, comme s'exprime Lambert d’Ardres. La keure des Quatre-Métiers en offre un frappant exem- ple, quand elle impose la charge de réparer les digues rompues par la mer aux casati, id est qui in eodem officio terram non habent. Or qu’étaient ces casati que nous trou- (1) MS. de la bibliothèque de Bourgogne, n° 1175. Ce manuscrit, fort intéressant , de la fin du treizième siècle , où une main contemporaine a dessiné les armes, les instruments aratoires, les moulins à eau et à vent, etc., a déjà été signalé dans les Bulletins de la Commission royale d'histoire . Nous lui emprunterons ailleurs d’autres citations. ( 355 ) vons déjà dans les capitulaires et qui sont ici chargés du travail à la bêche, toujours uni au balfart, comme le dé- clare M. Gheldolf lui-même? De pauvres laboureurs à qui, dans cette même keure, l’on accorde un droit de pêche, sans doute pour les aider à vivre. Si le système de M. Gheldolf était fondé, la paravere- dorum praebitio eût dû peser, soit qu’elle fût exigée en _ nature, soit qu’elle füt remplacée par une redevance pécu- niaire, sur des hommes placés beaucoup au-dessus des casati. En effet, si, d’après la loi romaine, les hommes illustres en étaient affranchis, cette exemption ne s’appli- quait pas aux hommes nobles qu’un capitulaire de Charles le Chauve appelle Franci homines. Dans tous les cas, la paraveredorum praebitio ne pouvait atteindre que ceux qui possédaient des chevaux. Il n’en est point ainsi dans la keure des Quatre-Métiers, et si l’on veut bien ne pas perdre de vue l’aveu de M. Gheldolf, que « le travail de besche » était imposé à ceux qui devaient le balfart, on ne comprend pas que l’on ait pu demander la paraveredorum praebitio à des hommes qui assurément n'avaient pas le moindre paraveredus. N’est-il pas évident que l’homme à qui l’on impose le travail à la bêche, ne peut être celui à qui l’on empruntera le palefroi, non plus le cheval de poste des parangariae romaines, mais le robuste destrier des chevauchées chevaleresques ? Il faut ajouter que, dans un document relatif à la sup- pression du balfart dans le métier de Bruges, il est dit expressément quod pauperes solum in solutione balfardi gravabantur (Vredius, Flandria ethnica, p. 576). Tout ceci ne peut s'expliquer qu’en assimilant le balfart au fos- satum, et en y voyant un manuale servitium. On ne peut oublier qu’il y eut, après l’invasion des Nor- ( 356 ) mands, une période historique où il n'était pas un petit seigneur, pas un arrière-feudataire , qui ne tint à honneur d'avoir son château et son rempart. « Tous les seigneurs, dit Brussel (De l’usuge des fiefs, 1727, 1, p. 409), faisaient travailler aux forteresses à titre de corvée. » Certes, en se représentant les laboureurs et les habitants des bourgs con- traints à creuser des fossés, à élever des remparts sous la verge du maître, comme l'historien des Colvekerli le ra- conte à propos du fossatum d'Ardres, 1l est aisé de com- prendre les tristes souvenirs que réveillait l'origine du balfart; mais comment s’expliqueraient-ils par la parave- redorum praebitio, qui se réduit, pour toute l'avouerie de Saint-Bavon, à fournir deux palefrois (duos palefredos )? Nous devons aussi faire remarquer que M. Gheldolf, en citant avec soin les textes où se trouve mentionné le bal- fart (1), s'est attaché à la place qu'il y occupe et aux mots qui le précèdent, en subissant trop vivement la préoccupa- tion de justifier son système. Ainsi il y a une charte de 1218, où le mot balfart est placé après waguenward, et 1l faudrait en conclure , d’après M. Gheldolf, que le rédac- teur a voulu y faire figurer les paraveredi après les car- ricaturae. Nous verrions plutôt dans le texte de 1218 une traduction de cette formule employée dans d’autres chartes du temps, notamment dans une charte du monastère de Longpont, consuetudinarium carretum et fossatum, et, mieux encore, dans une charte anglo-saxonne, carriagium et burghyard. De plus, dans cette même charte de 1218, (1) Cette énumération n'est toutefois pas complète. Parmi les chartes relatives au balfart, négligées par M. Gheldolf, je citerai celle qui est indiquée à l’année 1259, dans l'/nventaire des archives d'Ypres, par M. Diegerick. ( 997 ) le mot balfart est suivi immédiatement du mot herscot, ce qui nous parait répondre aux termes d’une charte de 1148, expeditionem et castelli relevationem, ou d’une autre charte de 1247, qui porte que les hostes d’'Herzeele seront exempts de balfart et d'expédition. Nous lisons aussi dans une charte de Charles le Bon, de 1193 : expeditionis retinendae liber- latem et quod dicitur balquard, ce qui assimile de nouveau le balfart aux redevances relatives à un service militaire. Si la paraveredorum praebitio à été une exactio, il ne s'ensuit pas que toute exactio soit la paraveredorum prae- bitio. À notre avis, 1! y en à eu de plus graves, et nous ne pouvons admettre que le balfart et la paraveredorum prae- bilio soient synonymes, par ce seul motif que, dans la charte de Saint-Bavon de 1285, on appelle exactio le balfart (bal- fart, corweide, omnemque exactionem). Du Cange ne nous a-t-1l pas dit que le /ossatum était aussi une exactio, et ne pourrions-nous pas interpréter la charte de Saint-Bavon par une autre charte bien antérieure du comte de Guines, qui porte : liber ab omni exactione praeter fossatum ? (Car- tulaire de Saint- Bertin, édition Guérard, p. 229.) Aux portes mêmes de Furnes, où fut aboli le balfart, ne lisons- nous pas, dans les priviléges de l’abbaye des Dunes, que parmi les exactions dont elle est affranchie, se trouve celle qui était réclamée pro munilione castrorum (1)? Si, en terminant cette trop longue discussion du fond de la question, nous nous arrêtions encore un instant sur la forme, sur l’étymologie même du nom, nous demande- rions à M. Gheldolf comment ce mot, toujours cité comme (1) Voyez l'inventaire des chartes de l'abbaye des Dunes, publié par la Société d'Emulation de Bruges. ( 358 ) emprunté à la langue teutonique, à la langue du pays, teutonice, vulgariter dictum balfart vel balgquard, pour- rait n’être qu'une corruption d’un mot latin que personne ne comprenait plus. Quoi! l’on aurait tiré bal de parave- redus, et ce mot bal, que d’autres érudits ont voulu tra- duire par criminel ou par traître, n’imdiquerait plus qu'un palefroi; mais quand ce mot bal a-t-1l été ainsi interprété en Flandre? Il faut aller plus loin : si la paraveredorum praebitio avait eu plus d'importance dans nos guerres, où les milices à cheval ne remplirent toujours qu’un rôle fort secondaire, comment eût-on appelé cette obligation de fournir des palefrois pour les expéditions militaires? Le glossaire de Césaire d’Hesterbach, cité par Du Cange, va nous l’apprendre : Dare parafredum seniori meditanti ex- peditionem herripertum vulgo nuncupabant. Quel rapport y a-t-il, même dans l’étymologie, même dans la langue, entre le balfart et l’accomodatio equi qui vulgariter ap- pellatur herpert? Selon notre opinion, le balfart fut une véritable corvée personnelle, rachetable, il est vrai, mais toujours em- preinte du sceau de la servitude. Que n’a-t-on pas écrit contre la corvée depuis sept ou huit siècles, et qu'il est aisé de comprendre que parmi les karls du Fleanderland , aussi bien que parmi les bourgeois des villes, elle ait ren- contré une longue et persévérante opposition! Cette corvée, qui consistait, dans l’origine, à élever les remparts des chà- teaux , ne devait-elle pas être la plus impopulaire de toutes, puisque ces remparts étaient l'élément même de la puis- sance féodale vivement repoussée, violemment combattue? Ne vit-on pas les Blaeuvoets de Furnes assiéger, au trei- zième siècle, ce même burg auquel ils avaient travaillé par droit de balfart? : ( 359 ) Nous regrettons que M. Gheldolf ait voulu rattacher à une cause sans portée sérieuse, sans influence historique, le mouvement qui, sous Richilde de Hainaut aussi bien que sous Mathilde de Portugal, agita ces populations intrépides et profondément attachées à leurs libertés, au milieu des- quelles s’élevèrent tour à tour les Herbert de Wulfringhem et les Nicolas Zannequin. Nous ne nous croyons toutefois pas moins tenu de reconnaître que le mémoire de M. Ghel- dolf, dont nous ne pouvons adopter les conclusions, offre de longues et patientes recherches, et, à ce titre, nous n’hésitons point à en proposer l’impression dans le recueil . des Mémoires de l'Académie. » ÆHapport de MH. De Smet. « Il est assurément d’une haute importance de pouvoir s'expliquer d’une manière nette et précise les termes de l’ancienne langue juridique : l'appréciation d’un grand nombre de faits et l'intelligence des causes qui les ont amenés dépendent presque exclusivement de l’interpréta- tion exacte de ces vocables. Cependant, si l’on excepte l'Angleterre, où le judicieux Henri Spelman et quelques autres écrivains avaient porté la lumière dans le vocabu- laire des lois anglo-saxonnes, on s'était peu occupé de ces matières en Europe, jusqu’à ce que le Glossarium mediae et infimae latinitatis de Du Cange (1) vint donner l'éveil (1) Du Cange était trésorier de France à Amiens et excellent père de famille, comme chacun sait : par quelle distraction M. Gheldolf en a-t-il fait un bénédictin? Le vaste savoir de l’auteur du Glossarium l’a peut- être trompé. ( 560 ) aux savants. Cet ouvrage, d’une érudition réellement pro- digieuse, acquit une valeur plus grande encore par les suppléments des bénédictins Toustain, d’Antine et Car- pentier, et provoqua des travaux également remarqua- bles, surtout en Allemagne. Pour la Belgique, nous ne connaissons guère que M. Raepsaet qui se soit occupé de ces matières d'une manière spéciale, dans son Analyse de l’origine et des progres des droits civils, etc., des Belges et des Gaulois. Mais , quels que fussent le savoir et le zèle de ces éeri- vains, ils ont dü laisser beaucoup de ces problèmes sans so- lution et avouer, comme Terentianus Maurus : Haec sunt viribus quoniam altiora nostris. Car autant l’exacte interprétation des termes juridiques du moyen àge est importante, autant elle est obscure et pénible. On sait que, afin de combler, en particulier pour la Flandre, une lacune aussi regrettable dans la science, notre honorable associé, M. le D' Warnkænig, ainsi que M. A. Gheldolf, se sont livrés à des études longues et conscien- cieuses, dont les fruits heureux ont été déposés dans leur Histoire de Flandre et de ses institutions civiles et politi- ques, et rendus plus utiles encore par suite d’investigations nouvelles. Parmi les termes que ces savants ont expliqués d'une manière très-plausible, se trouve la redevance ou taille appelée balfart ou balphart, souvent citée par nos his- toriens et expliquée d’une manière peu satisfaisante par OI. de Vrée, le D' Leo, Dieriex et d’autres encore (1). Peu (1) Hist. de la Flandré, t. Il, pp. 61 et suiv. ( 861 ) content de leur interprétation, et même de celle qu'il avait cru devoir préférer, M. Gheldolf a fait sur ce terme un travail particulier, qui est une preuve nouvelle de sa saga- cité comme de son érudition. C’est ce travail qu'il com- munique à l’Académie sous le nom modeste d'Étude et que la classe accueillera sans doute volontiers dans ses Bulletins. Peu confiant, avec raison, dans les étymologies diverses du mot balfart, qui a donné lieu à tant de conjectures plus bizarres les unes que les autres, notre auteur à cherché dans les chartes mêmes la solution du problème qu’il s'était posé et en a trouvé l’origine dans l’histoire de limpôt romain, évidemment maintenu sous la période franque et féodale, bien que sous d’autres dénominations et avec des modifications inévitables. Ayant vu le mot waguenvard, dont le sens n’est pas douteux, accolé à celui de balphart, il en conclut que ces termes répon- dent à ceux de carricaturae et paraveredi, dont il est question dans plusieurs diplômes de l’époque carlovin- sienne et dont l’origine remonte jusqu’au cursus publicus des Romains. Cette thèse est prouvée par une multitude d'extraits de chartes de la Flandre au moyen âge, où l’on nous dispensera sans doute de suivre le savant écrivain. Le balfart, était done une redevance pour les chevaux à employer dans les chemins de traverse et militaires. Nous ne pensons pas le moins du monde être au nombre de ces hommes compétents dont parle M. Gheldoïf; une lecture attentive des preuves qu'il a accumulées nous porte toutefois à partager son opinion. Cependant, sans attacher plus d'importance que lui-même aux étymologies, nous devrions hésiter si le mot s’écrivait balguard ou balward, parce que cette dernière syllabe implique le 9e SÉRIE, TOME XI. 26 ( 362 ) plus souvent l’idée de garde et de conservation; mais un des auteurs du supplément du Glossaire de Du Cange nous rassure : Retinendam esse vocem BALFART, dit-il (1), sua- dent leges et consuetudines Furnenses MSS. M. Kervyn de Lettenhove, qui est, à mon avis, le plus compétent des trois commissaires nommés par la classe, croit que l'opinion de M. Gheldolf est erronée. Malheureu- sement, il n’a pu nous communiquer son rapport, comme cela se fait d'ordinaire , et nous nous trouvons dans lim- possibilité de peser ses raisons. » Rapport de M. Snellaert. « Le mémoire de M. Gheldolf traite un sujet qui de- puis longtemps excite la curiosité de ceux qui se livrent à l'étude de l’histoire de Flandre. Dans ces dernières an- nées, la signification du mot balfart attira surtout l’atten- tion de MM. Gheldolf et Kervyn de Lettenhove. Déjà en 1851, le premier de ces deux savants le caractérisa sous le nom de faille réelle ou justicière établie pour le cas de guerre. Notre honorable confrère, par contre, fut conduit à’ y voir une taxe devant servir à la construction des retran- chements militaires (2). Plus tard, il crut y reconnaître une charge militaire, la garde des retranchements ou rem- parts (5). Selon la première de ces deux définitions, bal- fart ne serait autre chose que boelfart, en français boule- vard ; selon la seconde, il faudrait écrire balquard, composé (1) Glossaire Du Cange, v. Balgard , éd. Didot. (2) Messager des sciences historiques , 1852, pag. 75. (5) 1bid., 1855, pag. 224 et sui. ( 365 }) de bal, maison, demeure, enceinte, rempart, et de ward, quard, garde. Dans le présent mémoire, le savant traducteur et conti- nuateur de ouvrage de Warnkônig sur la Flandre, pous- sant plus loin ses investigations, croit pouvoir retrouver le balfart jusque sous le régime des empereurs romains. Le service d’estafettes et de courriers, organisé par l’em- pereur Auguste, prit, sous Trajan ou sous Adrien, le déve- loppement d’une administration publique. « Les postes, » dit-il « s’il est permis d'employer ce nom relativement » moderne, furent organisés et les relais formés aux frais » du trésor publie, et les habitants des provinces, au lieu » de se voir obligés de fournir instantanément des animaux » de transport aux courriers, furent soumis à une contri- » bution pour lachat et l'entretien des chevaux de relaï. » Cet impôt qu'Antonin le Pieux, dans la vue d'acquérir » de la popularité, eut soin de rendre plus léger, paraît » avoir été supprimé sous l’empereur Sévère, mais pour » revenir bientôt après. » Cet impôt, en traversant les siècles barbares, serait de- venu, en Flandre, le balfart, la dette des stations de relai, une redevance pécuniaire pour les chevaux à em- ployer dans les chemins de traverse et militaires; il fut substitué par le comte dans ses terres au waguenvard, le service des charrois, servitium curruum, carricaturae. Cette redevance, odieuse au peuple, fut abolie par la comtesse Jeanne et ses époux respectifs dans le métier de Lederzeele, au mois d'août 1232, dans les terres de Furnes, Bergues et Bourbourg, en juillet 1240, en août de la même année dans le métier de Bruges, etc. Le travail de M. Gheldolf témoigne d’une profonde érudition et de beaucoup de sagacité. Ne sachant résoudre ( 364 ) la question au moyen de l’étymologie, l’auteur a suivi la seule route praticable dans ce cas : il a cherché la sigmifi- cation du mot dans les actes officiels qui l’emploient. Qu'il me soit permis toutefois de constater que, dans la citation où le véritable sens du balfart devrait se révéler, le terme même fait défaut et ne nous apparaît que par une supposition de l’auteur: c’est dans l’acte d’abandon précité de l’année 1252. La comtesse et son époux y désignent des stations de relai, stationarias mansiones. « C’est évi- » demment une expression empruntée à la langue du » Code Théodosien, et . . . elle ne peut désigner que le » balfart. » Telle est la conclusion de l’auteur. La question reste donc bien obscure. C’est une raison: pour nous de voir si réellement le mot ne trouve pas son explication en lui-même, si l’étymologie est ici tout à fait impuissante à l’interpréter. L'auteur, lui aussi, n’a pas dédaigné complétement cette voie : « Si l’on veut rechercher l’étymologie de ce nom dans » la langue flamande (teutonique du temps de Charles le » Bon), » dit-il dans une note, « je crois qu’elle peut s’ex- » pliquer par cette observation que le peuple, qui ne saisit » pas facilement les sons étrangers ni leur signification » originale, accommode le plus souvent à ses organes et » à ses habitudes le mot étranger, lui attribuant ainsi faus- » sement une étymologie indigène puisée dans des sons » analogues, palafridus devint balfart, sans qu’on songeût » à paerd, el balfurt, composé faussement de pal ou bal, » méchant, mauvais, injuste, et de furt, voyage, route, » course, répondit à l’idée populaire de corvée injuste. » C’est la signification que, selon l’auteur, le peuple aurait donnée à cette redevance. « Nous avons cité plus haut l’étymologie du mot expli- ( 365 ) qué par notre estimable confrère M. Kervyn de Lettenhove, d’après les chartes de Charles le Bon (1125) et de Thierry d'Alsace (1130). « Quelques-uns, » dit Warnkônig (Histoire de la Flan- dre, t. H, p. 61), « prétendent le faire dériver d’une an- » cienne monnaie du pays, appelée blaffart, qui valait » douze deniers. » En effet, un droit de douze deniers était levé annuellement, dans le métier de Sysseele, sur chaque maison comme redevance du balfart (Histoire de la Flan- dre, t. Il, p. 459, pièces justificatives). On serait tenté d’y voir l'inverse et de prendre blaffart pour une transposi- tion de balfart. Dans une note éerite, que M. Gheldolf reproduit, Wil- lems prit le balfart pour un droit sur l'enterrement : « bal- » fart, » dit-il « est la contraction de balgfart. — Balg est » ventre, et balgvaren, c’est retourner dans le ventre de » notre mère commune, la terre. Dans nos anciens poëtes, » la mort est communément nommée de groote vaert, de » leste vaert, de lange vaert, etc. » | C’est là, sans contredit, une explication peu rationnelle. D’après un tel système, on pourrait prendre le mot tout aussi bien pour la contraction de baldvart, ce qui signifie- rait course rapide, bald se rencontrant parfois dans les écrits du moyen âge dans le sens de vite. Cela simplifierait singulièrement la thèse, si savamment soutenue par l’au- teur du mémoire. Malgré ce défaut qui lui ôte jusqu'au moindre mérite d'autorité, l'explication de Willems est celle qui se rap- proche le plus du véritable sens du mot balfart. Les con- sidérations suivantes le prouveront, je l'espère. . Dans l’Edda de Snorre Sturlassén se trouve le passage suivant : ( 366 ) Thôkk mun grata Thurrum tarum . Baildrs balfarar. Ce que les commentateurs ont expliqué par : Thacca flebit siccis lacrymis bustum Balderi. Ce passage se traduit litté- ralement en flamand moderne : « Thakka zal [be]krijten met dorre tranen Balders uitvaart. Sveinbjôrn Egilson, dans son Lexicon poeticum antiquae linguae septentrio- nalis, explique le mot balfôr, pluriel balfarar, par depor- tatio ad rogum, exsequiae. Dans la langue des Edda, bal signifie également bûcher funéraire et feu, flamme; mais les commentateurs ne savent à laquelle des deux signifi- cations accorder le droit d'ancienneté. Il en est de même de l’anglo-saxon bæl ou beel, qui veut dire bûcher funéraire et feu destiné à brüler un corps mort. C’est, à mon avis, la véritable étymologie, le vrai sens de balfart, le terme païen de l’uitvaart, introduit en Flandre à la suite des hommes du Nord. Il s’est perdu avec l'usage dont il représentait la signification , et, comme taxe ou taille, il a pu être doublement odieux aux Fla- mands, une fois que le pays s'était fait définitivement chrétien. On peut objecter contre cette étymologie que le mot s’écrivait de différentes manières. On rencontre, d’un côté, balfart, balphard (1218), d’un autre, balchfard, balgfart (1125), ce qui ferait supposer des racines différentes. Balg ou balch le gagnerait en ancienneté encore d’un siècle sur bal. Mais on sait que f et ch se substituent régulièrement dans les langues teutoniques. On rencontre dans les écrits - thiois du moyen âge indifféremment ocht et of. Dans les ouvrages du dix-septième siècle, le f se présente encore ( 367 ) parfois là où déjà anciennement la prononciation de ck était fixée, par exemple, dans le mot gracht (fossé), que Hooft écrit graft, à la manière des Allemands. Nos ancé- tres préférèrent de très-bonne heure le ch à la fin de la syllabe. Si done, en 1193, le mot bal, dans le sens de feu ou de bûcher, était étranger aux clercs de nos princes, on comprend que, ne se rendant pas compte de l’étymologie du mot, ils aient pu se le figurer composé de balf et fart. Dès lors, le voulant rendre plus moderne et flamand, on orthographia balchfart. Une particularité analogue se présente dans la pronon- ciation d’un nom de localité qui pourrait elle-même ne pas être tout à fait étrangère au sujet qui nous occupe. La ville d'Ecloo possède un hameau désigné dans le Diction- naire de Van der Maelen et sur la carte de Gérard, sous le nom de Balgerhoeke, mais qui est ordinairement prononcé par le peuple Balverhoeke, tel qu’on le trouve écrit sur la Carte de la province de Flandre de Louis de Vreese (1792), sur la Carte routière du royaume des Pays-Bas, par Herisson (1831), et sur la Nieuwe Kaerte der provintie van Oost-Vlaenderen de D. Vanderhaeghen, publiée vers 1830. Balverhoeke serait donc l'endroit du balfart, le lieu où l’on brülait solennement les corps humains. La position topographique de l'endroit vient à l’appui de cette propo- sition, Balverhoeke se ‘trouvant à quelques minutes de ‘ancien oppidum Raveschot, détruit au douzième siècle par les partisans du comte Charles le Bon, et qui, par cette circonstance, à fait place à l’Ecloo moderne. Je n'étendrai pas mes investigations sur les traces que peut avoir laissées dans les noms de certaines de nos loca- lhités, ainsi que dans nos mœurs et usages, la coutume, chez nos ancêtres, de brüler les cadavres : biens des noms (368) s’y prêtent (1). Il me suffit, pour le moment, de constater la vraie signification du mot balfart. » | La classe, après avoir entendu ses trois commissaires , ordonne que le mémoire de M. Gheldolf et les trois rapports qui précèdent seront insérés au Bulletin. Notice sur un manuscrit de l'Histoire naturelle de Pline; par M. Namur. Happort de M. Roulez. « Le manuserit de Pline existant à la bibliothèque de Luxembourg et dont M. Namur veut bien entretenir l’Aca- démie, provient de l’ancienne abbaye d’Orval. Il a déjà été signalé, il y aura bientôt dix ans, à l’attention des philo- logues, par M. le professeur Waitz, de Güttingue. Ce savant, qui, à son passage par le Luxembourg en 1840, avait examiné ce manuscrit eten avait collationné quelques paragraphes, en donna plus tard (1852) une notice dans le Journal philologique de Schneidewin. Lorsque son article parut, la grande édition de Sillig, qui, comme on sait, ouvre une nouvelle ère pour la critique du texte de Pline, était trop avancée pour que ce savant pût en aucun cas faire usage du manuscrit de Luxembourg. Mais telle n’a pas été la position de M. von Jan, qui est en train de pu- blier une nouvelle édition pour la collection Teubner. Le professeur de Schweinfurt, quoique connaissant l’existence du manuscrit en question (il cite l'article de Waiïtz, p. x (1) Tels que Baelen, Baelegem, Balenfer, Belle, Bellegem, ete. (369 ) de sa préface), loin de témoigner le moindre regret de ne pas l'avoir consulté, n’en dit pas même un mot. La con- clusion rationnelle à tirer de son silence, c’est qu’il a cru pouvoir, sans détriment pour son œuvre, s’épargner la peine de se procurer les variantes d’un codex s’accordant la plupart du temps avec celles d’autres manuscrits colla- tionnés par Sillig. La notice de M. Namur est un travail analogue à celui de M. Waitz, mais plus étendu et aussi plus diffus. Elle se compose de trois chapitres. Dans le premier, l’auteur décrit le manuscrit et en fixe la date. Sa description est très- détaillée ; elle s'étend même à des particularités qui mté- ressent le bibliophile plutôt que le philologue. M. Waitz, guidé par la connaissance pratique des anciennes écritures, avait, sur simple inspection, attribué sans hésiter le ma- nuserit au douzième siècle, M. Namur cherche à établir, au moyen d’une série de preuves, qu'il appartient à la fin du onzième. Je n’oserais, quant à moi, adopter l’une plu- tôt que l’autre opinion; car, pour des époques aussi rap- prochées, les eriterium perdent de leur certitude. 1 me paraîtrait préférable de laisser la question indécise, en se bornant à dire que le manuscrit est du onzième ou du dou- zième siècle. C’est, du reste, le parti auquel on s’est arrêté pour d’autres manuscrits de Pline lui-même. Ainsi nous voyons citer le manuscrit de Bamberg comme étant du dixième ou du onzième siècle, le Codex Vossianus Lei- densis comme étant du neuvième ou du dixième, et celui de Paris 6795 comme étant du huitième ou du neuvième. Le deuxième chapitre donne le contenu du manuscrit. L'auteur indique le feuillet où commence et celui où finit chacun des livres, et signale les lacunes qu’il y a remar- quées. Ces lacunes sont peu considérables et en petit nom- ( 370 ) bre. Mais le livre trente-septième et dernier manque tout entier. Ce même livre ne se trouve pas non plus dans le manuserit de Tolède (1), et dans celui de Paris 6797 il a été ajouté par une seconde main. Le codex de Luxem- bourg paraissant appartenir à la même famille que ces deux derniers, cette coïncidence n’est pas sans impor- tance, et aurait mérité de faire l’objet d’une remarque dans la Notice. | Le troizième chapitre est consacré à établir la parenté du manuscrit. M. Namur montre qu’il concorde le plus souvent avec les Codices Parisiensis 6797, Riccardianus, Toletanus et Parisiensis 6796 À. Si l’on en excepte le der- nier, ce sont les mêmes qu'a notés M. Waitz, qui y ajoute le Vossianus et l'extrait de Robertus Canutus. Pour arri- ver à ce résultat, l’auteur a comparé avec le texte de la grande édition de Sillig et avec les variantes qui l’accom- pagnent, quelques paragraphes des livres I, IT, XIIE, XV, XXV et XXXV. Le relevé des variantes est joint à la no- tice sous forme d’annexe, mais il en constitue, à mon avis, le complément nécessaire. L'auteur, toutefois, eût pu l’abréger de beaucoup, en s’abstenant de transerire les mots qui, dans le manuscrit, sont conformes au texte de l'édition prise pour terme de comparaison. En outre, j’au- rais voulu ne pas y voir tenir compte des différences résultant simplement du système d'orthographe suivi par (1) Un philologue hollandais , M. Halbertsma, qui à collationné de nou- veau le Codex Toletanus, estd’avis qu’il doit être placé à la fin du trei- zième siècle; son opinion est adoptée par M. Detlefsen, Epilegomena zur Sillischen Ausgabe von Plinius Nat. Historia, dans le Rhein. Museum für Philologie, N. F., Bd. XV, Heft IT, p. 285. Le manuscrit de Luxem- bourg se trouverait donc être beaucoup plus ancien que celui de Tolède et que celui de Paris 6797 et gagnerait par là en valeur. ( 371 ) Sillig. Ainsi ce savant a adopté la désinence en is pour l’accusatif pluriel des noms qui se terminent au génitif en ium, et il en à prévenu les lecteurs dans sa préface. Malgré cela, M. Namur note comme des variantes véritables ces accusatifs terminés en es dans son manuscrit. À la fin de la notice, on lit cette phrase : « Dès que la » conviction de l’importance de ce trésor littéraire sera » confirmée par le jugement des hommes compétents, je » continuerai volontiers le travail sur une échelle plus » étendue »; ce qui veut dire, je pense, que l’auteur en- treprendra la collation du manuscrit en entier. Je ne fais aucune difficulté de proposer à la classe de faire un accueil bienveillant à la notice de M. Namur et d’en ordonner l'impression; mais il sera bien entendu que la compagnie ne se trouvera nullement engagée par ce vote à imprimer plus tard le volume des variantes du manuscrit entier que l'honorable professeur de Luxembourg pourrait juger con- venable de lui adresser comme continuation. M. Namur déclare n’attendre, pour se mettre à l’œuvre, que le juge- ment des hommes compétents ; mais il doit connaître déjà le sentiment de deux des philologues vivants qui ont fait les études les plus approfondies sur le texte du naturaliste romain. Voici, en effet, ce qu'il écrit dans le préambule de sa notice : « Un travail critique sur notre Pline serait pro- » bablement aussi riche en heureux résultats que l’exa- » men d’un codex de Prague fait par le docteur Haræus » et publié dans le Philologus (t. VI, 5, p. 572). L’utilité » d’un tel travail est généralement reconnue, et je suis” > convaincu que l’entreprendre serait rendre un service » aux études philologiques. Moi-même comme étant à la » source, J'ai été engagé par quelques savants de l’Alle- magne à m'y livrer. » Si ces paroles rendent exactement ( 372) la pensée de l’auteur, MM. Urlichs et von Jan, car c’est d'eux qu'il s’agit, auraient conseillé à l’honorable biblio- thécaire de Luxembourg d'entreprendre, à l’aide du ma- nuscrit confié à sa garde, un travail sur Pline, en prenant pour modèle Particle du docteur Haræus. Or, cet article a une valeur scientifique : c’est une œuvre de critique dans laquelle l’auteur veut prouver que le texte de Sillig pourrait être amélioré, dans un certain nombre d’endroits, au moyen des lecons du manuscrit de Prague. M. Namur, au contraire, n’a donné et semble avoir l'intention de ne donner que le dépouillement des variantes de son manu- scrit sans appréciation aucune. » Happor't de M. Baguel. « Pour répondre au désir de M. Namur, relativement au travail qu'il soumet à lappréciation de la classe , il y a deux questions à examiner. La première est celle-ci : les preuves au moyen desquelles l’auteur de la notice cherche à établir, contrairement à l'opinion de M. Waitz, que le manuscrit de Pline appartient à la fin du onzième siècle plutôt qu’au douzième, sont-elles suflisantes ? Notre savant confrère M. Roulez n’a pas osé se prononcer sur ce point. I n’y aura done pas lieu de s'étonner si, de mon côté, je me déclare imcompétent. D'ailleurs, la différence entre l'opinion de M. Waitz et celle de M. Namur doit paraître peu importante, puisque, après tout, les deux époques signalées sont fort rapprochées l’une de l’autre et qu’en outre il existe des manuserits plus anciens que celui de la bibliothèque de Luxembourg. ( 976 } Quant à la seconde question qui est de savoir si les variantes du .manuserit ont assez de valeur pour être publiées en entier, la classe se eroira sans doute assez éclairée par les observations judicieuses que M. Roulez vient de lui présenter. Toutefois, s’il m'était permis de donner un conseil à M. Namur, je l’engagerais à entre- prendre un travail qui ne serait peut-être pas sans utilité. Mettant à profit les leçons du manuscrit qu’il a sous la main, il apprécierait, dans une dissertation critique, les variantes qu’il aurait jugées propres à améliorer, s’il y a lieu, le texte que M. von Jan à préparé pour la collection Teubner et dont la publication est maintenant complète. Au reste, je me joins au premier commissaire pour demander à la classe d'accueillir dans ses Bulletins la no- tice de M. Namur. » / La elasse a décidé que la notice de M. Namur et les rap- ports des deux commissaires seront imprimés dans le Bulletin. COMMUNICATION ET LECTURES. ——— Sur des fouilles faites récemment à Schaerbeek. Note de M. Chalon, membre de l’Académie. « Dans la dernière séance, dit M. Chalon, en entrete- nant la classe d’un tombeau anglo-romain , trouvé récem- ment à Schaerbeek, j'ai exprimé l'opinion qu'il était pro- bable que cette découverte ne tarderait pas à être suivie ( 314 ) d’autres découvertes semblables. Cette prévision s’est réa- lisée. Un second tombeau a été exhumé à un mètre de distance du premier et dans la même direction, c’est-à-dire parallèlement à la route. Ce second tombeau, déterré avec plus de précaution, contenait une urne avec des os caleinés et divers vases de terre et de verre du même genre que ceux trouvés dans le premier. Ces objets sont resté en la possession de M. O’Connel, propriétaire du terrain où ils ont été découverts. » Étude sur la signification du mot BaLrart dans les chartes de la Flandre; par M. Gheldolf. L'interprétation exacte des mots de la langue juridique du moyen âge peut devenir une source féconde d’ensei- gnements sur la véritable nature de ses institutions, leur origine et leur transformation successive. C’est ainsi que l'explication donnée par M. Champion- nière, dans son savant Traité de la propriété des eaux courantes (Paris, Ch. Hingray, 1846, un vol. in-8°), n° 32, de la signification originaire des mots forêts et garennes, comme exprimant l'interdiction ou la défense qui privait du droit de chasse et de pêche les populations vaincues, et qui frappait également sur les terres et les eaux, objets de leur possession, est de nature à jeter quelque lumière sur le caractère encore si obscur de ces forestiers, que toutes nos traditions s'accordent à désigner comme ayant précédé dans le gouvernement de la Flandre notre pre- mier comte, Baudouin Bras de fer. C’est encore ainsi que le sens primitif du droit de com- ( 379 ) mune, dans ie vocabulaire du moyen âge, tel que nous espérons l’établir bientôt dans le cinquième volume de notre Histoire de la Flandre, pourra lever bien des doutes et mettre fin à de longues controverses sur la nature propre de cette institution. Malheureusement la véritable interprétation des termes juridiques du moyen âge est bien souvent entourée d’ob- scurité : ce sont surtout les divers droits seigneuriaux, les charges fiscales levées par le seigneur justicier sur les terres ou les personnes de ses hommes ou sujets, qui pré- sentent des problèmes en apparence msolubles. Telles sont, par exemple, les redevances multiples que le connétable de Flandre, Michel de Harnes, acquit à Lederzeele, Vol- kerinkhove , Rubrouck, Broxeele, Bollezeele, et dans une partie de Noord-Peene et Zuyt-Peene, de la comtesse Jeanne, en échange de ce qu’il possédait lui-même dans la ville et la châtellenie de Cassel; redevances qui se trou- vent énumérées dans un acte de renonciation consentie par lui en faveur du prieuré de chanoines réguliers de Watten, par un acte du mois de mars 1218, v. st., im- primé dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de la Morinie, IV, 198. (L'acte d'approbation de la comtesse Jeanne, de même date, publié par M. Warnkœnig, Ft. St. u. Rechtsgeschichte, HI, 1, 28-29, est moins expli- cite.) Il y fait remise (pour le passé) de tout le voudermout, du waguenvart, du balphard, de l’herscot, du dincoorn, du fronecoorn, des waspenegehe, des widepenegehe, des winpenegehe, dés poules et des œufs et de tous dus et services que le prieuré de Watten et les hôtes et censiers de ce prieuré lui devaient à raison des terres et posses- sions des chanoines dans le comté (ou la justice) des vil- ( 576 }) lages susnommés, soit qu'ils les fassent valoir par leurs propres dépenses et travaux, soit qu’ils les aient concédées à d’autres pour les posséder au nom du prieuré à charge d'un cens annuel. Il concède en outre que ledit prieuré, ou ses hôtes demeurant sur la terre du prieuré, soient affranchis à l’avenir de cette exaction que l’on nomme vulgairement Uthland, et de toute taille, prière et exaction. Sur cette longue nomenclature de droits, affectant le sol même ou la personne de ses possesseurs, aucun éclair- cissement ne se rencontre chez les commentateurs de nos coutumes : la cause de leur silence complet à cet égard doit sans doute être cherchée dans la direction exelusive- ment pratique de leurs études. À l’époque de la rédaction des coutumes, ces droits avaient presque généralement disparu par suite d’affranchissements parfois accordés gra- tuitement, plus souvent vendus à prix d'argent. Ce qui en était resté avait été transformé en rentes ou redevances annuelles d'argent ou de denrées, et l’on n’etait guère soucieux d'en rechercher les éléments primitifs, qui ne pouvaient plus exercer aucune influence pratique sur l'exécution des conventions, par lesquelles ils avaient été complétement dénaturés. Pour se faire aujourd’hui une idée précise de ces droits ou exactions, pour en découvrir le vrai caractère, 1l n'existe, à notre avis, pas d'autre moyen que de commencer par reconnaître toutes leurs conditions d'existence. A cette fin il s’agit tout d’abord de faire, à l’aide d’investigations pa- tentes et laborieuses, un relevé des divers textes où ces droits se trouvent mentionnés, et ensuite de chercher, par la comparaison de ces différents textes et des aperçus qu’ils nous ouvrent, à nous former une notion exacte de chaque droit et à reconnaître son origine et sa formation. (ON. ) C’est la méthode que suivit autrefois le savant bénédictin , dom Du Cange, dans son Glossarium mediae et infimae latinitatis, et qui lui a permis de révéler tant de causes de l’histoire du moyen âge, méconnues jusqu’à lui. Pour un grand nombre de ces droits 1l est à regretter qu'on en soit encore réduit à des textes isolés, dans les- quels il est impossible de puisér une notion certaine et complète de la nature des redevances, et qui ne peuvent dès lors autoriser que des conjectures plus ou moins pro- bables. C’est ainsi que M. Warnkœnig, dans sa Flan- drische Siaats- und Rechtsgeschichte, 1, 360, et moi-même, dans l'Histoire de la Flandre, I, 254, nous avons essayé diverses explications plausibles des dénominations qui se rencontrent dans l’acte prérappelé du mois de mars 1218 V. SL. Depuis la publication de ces ouvrages, l'esprit d’investi- gation excité par les travaux de M. Warnkænig a porté ses fruits, la recherche des origines juridiques de notre histoire à fait des progrès, la découverte ou la compa- raison de nouveaux textes a mis en lumière d’une manière plus nette le caractère de quelques-uns de ces droits. Grâce à ces efforts nous pouvons déjà rectifier les con- Jjectures de M. Warnkænig et les nôtres au sujet de la redevance connue sous le nom de Voudermout et de l’exac- tion dite Uthland. La première qui se rencontre encore dans l’acte de dota- tion de l’église Saint-Pierre à Cassel, par Robert le Frison, en 1085 (Miræus, II, 1137), et qui s'y trouve orthogra- phiée Fodermalt, ne peut évidemment signifier que du malt destiné au fourrage. Comme le maltage constitue une préparation du grain pour la brasserie, le fodermalt ou voudermout se trouve désigné sous le nom de brais d’avaine, QE SÉRIE, TOME XI. PAT ( 578 ) dans l’énumération des revenus de la terre de Warneton, à Kemmel, Estaires et Steenwerck, de l’an 1320. (Pièce n° 1559 de l’Inventaire analytique des chartes de Rupel- monde, par le baron Jules de Saint-Genois.) Quant à l’Uthland, bien que l’acte de donation du comte Charles le Bon, du 17 juillet 1119, en faveur de l’abbaye d'Oudenbourg (imprimé dans le Factum Lootyns, 83-84, où il faut lire peut-être Unlant, ailleurs Onlende, ce qui n’est pas de la terre productive) fasse d’utlant un syno- nyme de solitude, désert ou wastine, nous croyons que dans l’acception qui nous occupe, il désigne l’expédition militaire au dehors du pays de Flandre, énoncée sous la dénomination plus complète d’Utlandes-banwere par oppo- sition à la landwere, ou défense intérieure du pays, dans la charte du comte Robert de Jérusalem, concernant Pope- ringhe, de l’an 1110 (publiée par M. Warnkænig, ouvr. cité, Il, Urk., cLxxIx ). Au sujet du Balphard, également mentionné dans l'acte cité du mois de mars 1218, nous avons émis nos conjec- tures au tome II de l'Histoire de la Flandre, pages 61-65, et au tome IV du même ouvrage, pages 184-187, où nous avons cru pouvoir le caractériser comme une faille réelle ou justicière établie pour le cas de guerre. Depuis lors ce même droit a fait l’objet d’une question formulée dans le Messager des sciences historiques, de l’année 1851 , p. 507, à laquelle M. Kervyn de Lettenhove a fourni une première réponse dans le même recueil, année 1852, p. 75, et une seconde, année 1855, p. 224. Le savant académicien, s'appuyant sur les chartes consultées par lui, a été amené, dans sa première réponse, à voir dans le Balfart une taxe devant servir à la construction des retranchements mili- taires, ct dont l’origine remonterait aux guerres contre Com) les Normands. Ce serait, dans cetie opinion, la même chose que boelfart ou boulevard, étymologie reproduite dans la deuxième édition de son Histoire de Flandre, in-18, [, 137, à la note. Dans sa deuxième réponse, M. Kervyn, modifiant quelque peu sa première interpré- tation du miot balfard, croit y reconnaitre une charge militaire, dont l’origine se retrouve dans les capitulaires, et dont il déduit l’étymologie de bal, maison, demeure, enceinte, rempart, et de ward, quard, garde : le balfard, qu’il faudrait, avec les chartes de l’abbaye de Loo, écrire balguard, serait ainsi la garde des retranchements ou rem- partis. S'il ne suffisait pas de cette incertitude d'appréciation chez un historien aussi érudit pour démontrer toute l’ina- nité des conjectures purement étymologiques, nous rap- pellerions (outre les tentatives tout aussi infructueuses citées pages 61 et 62 du tome IT de notre traduction de l'Histoire de la Flandre de M. Warnkœnig, et celle que nous avons hasardée nous-même au tome IV, p. 187 du même ouvrage), l'explication de Schilterus, pour lequel, au témoignage d’Adelung, le balfart n’était autre que la juridiction répressive, la garde des méchants ou malfai- teurs, de bal, mauvais, méchant, et gard, garde, et celle que proposait notre grand linguiste flamand, feu M. J.-F. Willems, dans une note que nous avons sous les yeux : « C’est évidemment, dit-il, un droit sur l'enterrement; » balg est ventre, et balgfaren c’est retourner dans le » ventre de notre mère commune, la terre. Dans nos an- » ciens poëtes, la mort est communément nommée de » groote vaert, de leste vaert, de lange vaert, etc., balvart 5 est la contraction de balgvart. » En présence de tant d’étymologies divergentes, subtile- ( 980 ) ment recherchées, la plupart contraires à l'évidence des faits, 1l doit nous être permis de ne leur reconnaître qu'une bien mince valeur, et de chercher le mot de l'énigme par une voie moins hasardée et moins douteuse. C’est, selon nous, dans les chartes mêmes qui traitent du balfard que peut et doit se trouver la solution du pro- blème : toute interprétation proposée doit, pour se faire accepter, être conciliable avec les divers documents où le mot se rencontre. Dès l’année 1851 l'étude des actes m'avait conduit à voir dans le Balfard une véritable taille justicière, et j'ai consigné ce résultat au quatrième volume de l'Histoire de la Flandre, en traitant spécialement du Franc-de-Bruges (page 187). Récemment, en m’occupant de l’histoire de la Châtellenie de Cassel, destinée à figurer dans un ein- quième volume du même ouvrage, je dus revoir la charte de l’ancien châtelain de Cassel du mois de mai 1218, dont il a été question au commencement de cette étude, et mon attention se trouva vivement frappée du rapprochement des mots waguenvard et balphard, qui se suivent immé- diatement dans cet acte de manière à se correspondre. Ce rapprochement me rappelle celui des carricaturae et des paraveredi, dans la lettre des évêques des provinces de Reims et de Rouen à Louis le Germanique , du mois de novembre 858 (dans Baluze, IT, 101 et suiv.) Le waguen- vard de 1218 répondait évidemment aux carricaturae de S08, et dès lors il me parut raisonnable d'admettre la même corrélation entre le balphard et les paraveredi. Craignant de précipiter ma décision, je voulus avant tout me rendre un compte exact de l’origine juridique de ces carricaturae etparaveredi, en usage sous les Carlovin- giens ; pour la retrouver, je dus remonter jusqu’au cursus (384 ) publicus de l'empire romain, dont je constatai les diverses transformations jusqu'au waguenvart et au balphard des chartes de la Flandre au moyen âge. Ce travail ne m'a laissé aucun doute sur la justesse de mon aperçu; je viens le soumettre à l’appréciation de juges plus compétents ‘que moi, et je m’estimerai heureux si je puis leur faire partager ma conviction. On sait que l’empereur Auguste organisa le premier (au rapport de Suétone, in Augusto, c. 45) un service d’estafettes et de courriers sur les voies militaires de l’em- pire romain : « pour être plus tôt informé et se tenir » continuellement au courant de ce qui se passait dans » chaque province, il commença par distribuer des jeunes » gens à de légères distances sur ces routes, mais bientôt » il y disposa des voitures, dont l’usage parut plus com- » mode, puisqu'il donnait la faculté d'interroger sur lexi- » gence des cas les porteurs de messages, venant directe- » ment des lieux mêmes. » Jacques Godefroy, dans son commentaire sur la loi 1° du livre VIIT, titre V du code Théodosien, estime que sous Auguste les magistrats municipaux furent chargés du soin de faire fournir par les habitants des provinces les chevaux nécessaires à ces courriers. L'empereur Nerva (année 90 de l’ère chrét.) déchargea de ce soin les magistrats munici- paux de l'Italie. Bientôt Trajan ou Adrien {années 110 à 139 ap. I. C.) érigea ce service en administration publique : les postes, s’il est permis d'employer ce nom relativement moderne, furent organisées et les relais formés aux frais du trésor public, et les habitants des provinces, au lieu de se voir obligés de fournir instantanément des animaux de trans- port aux courriers, furent soumis à une contribution pour ( 382 ) l'achat et l’entretien des chevaux de relai. Cet impôt, qu'Antonin le Pieux, dans la vue d'acquérir de la popula- rité, eut soin de rendre plus léger (années 140 à 161 ap. J. C.), paraît avoir été supprimé sous l’empereur Sévère (années 195 à 212), mais pour revivre bientôt après. Sous les empereurs qui suivirent, l'institution des cour- riers et des stations de poste se développa de plus en plus. Par la suite des temps, elle fut, ensemble avec le service des transports militaires et publics, comprise sous le nom générique de Cursus publicus. Les titres de cursu publico, angariis et parangartiis des codes de Théodose et de Justinien renferment un grand nombre de lois romaines, concernant ces divers services , et ont fourni à Jacques Godefroy les moyens de tracer un tableau assez complet de cette institution sous les empe- reurs romains. Nous y voyons que des relais, stationes, mansiones, étaient établis de distance en distance sur les grands che- mins de l'empire. Des chevaux, des mulets, des bœufs, des voitures de divers genres, entretenus par le trésor publie à l’aide de contributions levées sur la province, ser- vaient au transport des officiers et des messagers publics, et, en général, de tout ce qui était expédié au nom de l’empereur. Il existait un service accéléré (velox cursus) pour le transport des personnes, auquel étaient employés des chevaux de monture /veredi) (1), de bagage (parhippi), de porte-malles favertarii), des voitures à deux roues (bi- rotae), des calèches (redae cursuales), des carrosses (car- penta), ces deux espèces trainées par quatre chevaux ou (1) Ce mot ne viendrait-il pas du sanscrit Bharat, portant? ( 383 ) par huit ou dix mulets, et d’autres voitures /vehicula). Sur les rivières il existait un service de bateaux. Le service ordinaire, ainsi que le transport des matières pesantes, s’effectuait au moyen de voitures de toute espèce, notamment de chariots et charrettes /carrus) et de voi- tures à caisse en osier (clabulae), d'où ce genre de trans- port recut le nom de cursus clabularis. Si les relais n'étaient pas suffisamment fournis pour le service, on y suppléait au moyen de réquisitions à charge des provinciaux, connues sous le nom d’angariae, em- prunté à la langue perse, et adopté tant par les Grecs que par les Latins (1). Des réquisitions de transport extraordinaire étaient dé- signées sous le nom de parangariae, (de la particule Tapx, au delà, outre), soit parce que les voitures étaient em- ployées sur des routes n’ayant pas le caractère de grands chemins publics, soit à raison de ce qu’elles étaient as- treintes au service au delà des intervalles ordinaires des relais. La première circonstance a été reconnue par Jacques Godefroy; la seconde semble n’en être qu’une suite néces- saire. Par analogie les chevaux de bagage, accordés outre ceux de monture, portaient le nom de réperra, ou bien de pa- raveredi. Néanmoins le caractère propre et la destination de ces derniers sont assez incertains. On les appelait aussi equi agminales. C’étaient, d’après Jacques Godefroy (ad L. EE ——_— _— — (1) Si l’on tient compte de l'identité des racines des langues perse et sans- crite, cette dernière donnerait peut-être l’étymologie du grec 4y y œpétoy et de notre hangar, dans le verbe gahr, saisir, enfermer, augmenté de la particule 4 ou anu; hangar serait un enclos servant de station aux courriers. ( 384 ) 3. C. Theod., De cursu publ.) des chevaux fournis par les provinciaux sur les chemins de traverse et placés en troupe (agmen) plus ou moins considérable près des villes, dans des pàturages procurés par la province. Cujas, au contraire, (Ad rubric. C. Just. de cursu publ.) n’y voyait que des che- vaux suivant l’armée fagmen), et destinés au transport des bagages. Quoi qu'il en soit, il est hors de doute que ce nom de paraveredus donna naissance à l'italien palafreno, à l'espagnol palafren, au provençal palafrei et au français palefroi (Fried. Diez, Etymologisches Würterbuch der Ro- manischen Sprachen, Bonn, 1855, page 249), au haut-alle- mand pferd, anciennement pfaerit, pfaret, pfart, pharit (Jac. Grimm, Deutsche Gramm.,3° ausg., I, 151 etIIT, 528), au bas-allemand paerd, hollandais paard, flamand peerd. On sait que la dénomination germanique primitive était ros , d'où l'anglais horse. Nul n’était admis à se servir du cursus publicus, s’il n’était muni d’une autorisation émanée de l’empereur lui- même ou du préfet du prétoire, et qui portait le nom d’evectio. Pour exposer tout le système de cette institution, nous n'avons guère eu qu'à copier le travail de Jacques Gode- froy, dans son Paratitlon sur le titre V, livre VIIT du code de Théodose, De cursu publico, angariis et parangariis. Aux charges dont étaient grevés les provinciaux dans l’ordre civil par le cursus publicus, venaient s’ajouter celles que faisait peser sur eux l’organisation militaire, et que nous rencontrons dans l'exposé préliminaire du livre VIT du code précité, par le même auteur. Nous distinguons, 1) la construction et l'entretien des remparts {imnuri) des burgi et des civitates; 2) la garde des murs et des portes; 3) la fourniture des vivres (annona militaris); 4) le transport ( 385 ) des vivres et munitions, au moyen des parangariae et paraveredi, et enfin 5) la livraison de chevaux de remonte (equorum oblatio ou conlatio). Mentionnons encore deux institutions, qui tenaient en quelque sorte à la fois de l'ordre civil et de l’organisation militaire. Nous voulons parler des Tractoriae, espèces de feuilles de route, contenant, outre l’autorisation de faire usage du cursus publicus, une fixation d'étapes (stativae ou stativa), et un règlement de vivres; et du Munus hos- pitis recipiendi, la charge des logements (loi 3, $ 14, Dig. De muner. et honor. 50,4), désignée aussi sous le nom de Metata. Ces deux charges font l’objet du titre VI, livre VIII du code Théodosien, De tractoris et stativis, et du titre VITE, livre VII du même code, De metatis. Le bénéfice de ces in- stitutions, comme aussi celui de la fourniture des vivres (annona), n’était pas exclusivement réservé aux militaires, il était commun à divers fonctionnaires de l’ordre civil. (Loi dern. C. Théod., De off. jud. omn. 1, 9; lois 17,32 et 3b du même code, De erog. milit. ann. T, À). Les institutions que nous venons de rappeler, durent nécessairement subir dans les Gaules un changement no- table par suite de linvasion et de la conquête franque; mais il serait erroné d'attribuer à ces événements une des- truction absolue des principes de la domination impériale. La perpétuité du droit romain après la chute de l'empire est aujourd’hui, gràce aux savantes recherches de Savigny, un fait acquis à l’histoire. Les provinciaux des Gaules, subissant sous le nom de Romains la condition des vaincus, continuèrent d’être régis par la loi romaine. Les Francs ne changèrent rien à administration des provinces, sur les- quelles continuèrent à peser toutes les charges fiscales de la domination impériale. Aussi retrouve-t-on dans les capi- ( 386 ) | tulaires et les actes des rois Francs de la première et de la deuxième race : Les angariae et parangariae (Capit. incerti anni, c.7.; Excerpta ex L. Longob., €. 20; Epist. Episc. ad Lud. reg. Germ., c. 14; Baluze, I, 153, 552; II, 116); Les veredi et paraveredi (Epist. imp. ad Pippin. reg. Ital.; Capitul. ann. 825, c. 16; App. 5° D. Lud. Aug. et Lothar. Ceæs., €. 10; Capit. Car. Calc. tit. V, e. 6; Epist. Episc. ad Lud. reg. Germ., ce. 14; Edict. Pistens., c. 26 et 27; Cap. ap. Tusiac., €. 8; Epist. Hincmari ad cler. et pop. Laudun; €. 2; Baluze, I, 461,637, 800; IT, 24, 28, 116,186, 198, 624); Les evectiones (Lud. pit praec. pro Hispan., c. 1, Marculf. formul. 1, 11 ; Baluze, I, 550; IT, 581); La charge de la construction et de l’entretien-des castella (Edict. Pistense, c. 27, Baluze, IT, 187), des routes (Pip- pini reg. tal. Capit. an. 795, c. 9; ejusdem Capit.ej. anni, €. 20 ; Baluze, I, 557, 545), des ponts (Carol. Mag. Capit. 5 a. 815, c. 57, Ludov. pii Capit. 4 a. 819, c. 8; ejusd. Capit. 5 ej. anni, ©. 17, ejusd. Capit. Worm. a. 829, c. 11, Lothar. I Capit., tit. V, c. 32; Baluze, I, 514, 612, 617, 668; II, 558), et des écluses (Carol. Mag. Capit. 3 a. 815, c. 35; Baluze, I, 514); La garde ou le guet (Caroli Mag. Capit. a. 808, c. 9, Capit. 2 a. 812, c. 2, Capit. 3 a. 815, c. 34, Ludov. pit praecept. pro Hispan., €. 2; Baluze, 1, 465, 493, 514, D49); L’annona, également désignée sous le nom d’origine germanique de fodrum (Sirmondi notae ad Capitul.; Ba- luze , IL, 769); Les transports militaires (Capit. 2 a. 813, c. 10; Baluze, I, 509); ( 387 ) La livraison de chevaux pour l’armée, déguisée sous le titre de don comme beaucoup d’autres impôts (Pippin. Capit. a. 755, Caroli m. Cap. 5 a. 805, c. 20, Lud. pi praec. de inst. episc. Hammab. a. 834; Baluze, 1, 171, 399, 684); Les tractoriae (Ludovici pii Capit. 1 a. 819, c. 16; ejusd. Cap. 5 a. 819, c. 26; Marculfi formul. I, 11; Baluze, I, 605, 618,11, 381); Et enfin la charge de fournir le logement et la nourri- ture, qui reçut les noms de Mansio, Mansionaticum, Heri- bergium, Parata, Conjectus, (Capit. 3. an. 803, c. 17; Epist. Imp. ad Pippin. reg. Ital.; Capüi. 2. an. 812, c. 2; Ludov. pit praec. pro Hispanis, c.1; Capit. an. 823. c. 17; Capit. an. 829, c. 1; Baluze, I, 394, 461 , 494, 549, 638, 671). Ces diverses impositions ont été soigneusement relevées par K. D. Hüllmann, dans son Histoire des finances de l'Allemagne au moyen âge (Deutsche Finanz-Geschichte des Mittelalters, Berlin, 1805), pages 78 à 97, mais cet auteur à négligé d’en indiquer l’origine romaine, omission qui aété réparée par Eichhorn (Deutsche Staats-und Rechts- geschichte), 4° édition, $ 88. En France, M. Guérard, dans ses prolégomènes du Polyptyque de l’abbé Irminon (Paris, imprimerie royale, 1844), pages 793 à 829, a mis cette filiation hors de doute quant à la matière spéciale des an- gariae et des paraveredi; et M. Championnière (De la pro- priété des eaux courantes, Paris, 1846, n° 142 à 150) a étendu cette démonstration à toutes les autres obligations fiscales romaines, comme étant devenues les charges justi- cières du moyen âge. C'est en prenant pour principal guide cet auteur, que j'essaierai d'indiquer brièvement les transformations que ( 388 ) subit la paraveredorum praebitio et la collatio ou oblatio equorum pour devenir le balphard dont il est fait mention dans les documents de la Flandre. J'ai montré plus haut les expressions consacrées par la loi romaine au service des transports publics reparaissant, sous les rois Francs des deux premières races, pour dési- gner une partie des impôts qui continuent de grever les sujets et le sol romains. L'identité des noms indique déjà la persistance du même régime, mais pour rendre la dé- monstration plus complète, il ne sera pas inutile d'exposer également l'identité d'objet, de redevables, d’exacteurs, de règles et d’exceptions, qui se manifeste d’une manière frappante entre le cursus publicus des derniers temps de l'empire et les paraveredi des deux premières races. Les obligations du cursus publicus avaient le caractère d'impôts, éntributiones, de charges publiques, onera, mu- nera; à travers les personnes elles atteignaient la propriété, possessoribus, patrimontiis indicuntur.(L.6,$$ 4et5;L. 18, $$ et 21. D. de muner. et hon. (50, 4) Lois 10 et 11. D. De vacat. et exc. mun. (50, 5).) Les angariae des rois Francs sont considérées comme l'impôt en argent, indictio, ou en nature, exactio (Leg. Wisig. XIT, 1,2, pag. 208, édition de Lindenbrog, Franc- fort 1615); les paraveredi sont regardés comme les an- ciennes impositions romaines, census (Ludov. püi praec. I pro Hispan., €. 1; Capit. de Tusey, ce. 8; Baluze, FI, 550; I, 198); ils pèsent sur les hommes libres, franci homines (Baluze, 11, 198), les peuples, populos, par opposition à plebes (Loi des Visig.), à raison des manses qu’ils possèdent (Guérard, Polypt. d’Irmin., TV, 820). La langue administrative de l'empire désignait sous le nom générique de judices les administrateurs des pro- ( 589 ) vinces, chargés de pourvoir au recouvrement de limpôt (Cujas sur la loi 11 du code de Justinien, de annonis et tri- butis (10, 16), ); c’est encore le judex ou actor publicus qui exige les angariae vers lan 744 (Capit. incerti anni, c. 7; Baluze, 1, 155), le juge fiscal que l’on appelle comte, d’après la loi des Ripuaires, titre 55 (Baluze, I, 39). La coutume, l'usage local est sous la domination des empereurs la règle générale de l'impôt, quant à son mode et à son étendue. (Lois 4, $ 2, et 9, $ 6, D. de publicanis; 89, 4; loi 7, C. Just. de exactor. trib., 10, 19; EL. 1, C. Just. de censibus, 11, 57); sous les rois de la première et de la seconde race, les populations ne cessent de réclamer contre toute exaction nouvelle et non usitée, comme con- tre une oppression illégitime. (Edict. Chlotharii, I, e. 8; Capit. Pippin. regis Ital. à. 795, c. 6; Capit. KE, an. 805, c. 13; Capit. V, an. 819, c. 4; Capit. an. 820, c. 4; Capit. Caroli Calvi, üit. 4, ce. 5; Baluze, I, 25, 537, 426, 615, 622-695; II, 21). La loi romaine exemptait des services malpropres, sor- dida munera, sordidae functiones, les illustres personae (L. 16, C. Just., de excus. muner. 10, 47), et elle rangeait parmi ces services celui des paraveredi ou des parangariae (L. 12, même titre, et loi 1, C. Just., ne rusticani, 11, 54); elle exemptait au même titre les églises de la translatio- num sollicitudo (L. 5, C. Just., de Sacros. Eccl. 1, 2); enfin elle remettait aux militaires la prestation des angariae et la nécessité de recevoir des logements, tout en mainte- nant à leur charge le tribut foncier, vectigal (L. 10, $ 2, D., de vac. et excus. muner. 50, 5). La règle générale signalée plus haut, qui mdiquait l'usage comme la seule base légitime de l'impôt, doit faire supposer que ces exemptions de la loi romaine, en tant (390 ) qu'elles avaient, au moment de la conquête franque, eu pour effet l’affranchissement des biens des privilégiés ro- mains, durent continuer à les faire considérer comme libérés des diverses charges que nous venons d’énumérer. Mais 1l ne se rencontre dans les capitulaires des deux pre- mières races aucune reconnaissance ou Confirmation géné- rale des immunités romaines à titre d’exemption person- nelle. Vainement le synode d'Orléans de lan 511 , can. 5, sol- licita-t-1l la reconnaissance de l’immunité des églises; celui de Clermont, Arverni, de 555, avouait encore expressé- ment leur obligation aux charges publiques (Eichhorn, $ 114). Le capitulaire de Clotaire If, qui régna de 6153 à 628, chap. II (dans Baluze, [, 8, qui le place par erreur sous l’année 560; Montesquieu, Esprit des lois, XXXI, 2) ne contient pas une concession d’immunité, mais seule- ment un abandon en faveur de l’Église de droits de ter- rage ou champart, et de rétributions pour dépaissance ou glandée, considérés comme revenus de domaines royaux. (L. Wisigoth. VI, 5, lois 1 à 4.) Les immunités dont parlent le 2"° capitulaire de 814, c. 4 (Baluze, !, 520-521), et le capitulaire 1° de 819, ch. 6 (ibid., 1, 599-600) n’ont trait qu’à l'exclusion des officiers royaux : les charges publiques restent les mêmes; seulement les églises peuvent les lever elles-mêmes sous l'obligation de les verser aux administrateurs chargés du recouvrement. Les biens acquis par les églises postérieurement à lin- vasion franque durent donc continuer d’acquitter les charges publiques, dont ils étaient tenus sous leurs pré- cédents propriétaires ; les donations faites aux églises étaient même déclarées nulles, si le nouveau possesseur ( 394 ) se refusait au service des impôts (Capit. 5, an. 812, c. 11; Cap. 4, an. 819, c. 2; Caroli Calvi Capit., tit. 36, c. 28: Lotharii imp. Capit., tit. 35, c. 22; Baluze, I, 498, GH ; IT, 187, 524). La seule immunité, au sens romain, qui soit maintenue est celle que la loi 15 C., Just. de excus. mun. 10, AT, reconnaît aux fonds appartenant au patrimoine du prince : les biens du fisc royal, tant ceux compris dans les villae regiae, que ceux donnés par le roi en pleine propriété ou même en bénéfice à ses leudes ou aux églises, sont seuls exempts. Régulièrement les autres possessions territoriales sont soumises à toutes les charges publiques accoutumées, même les terres que le possesseur transportait au roi, sous réserve du domaine utile et transformait ainsi en une es- pèce de bénéfice (Lud. pii Capit. 4, an. 819, c. 4; Baluze, I, 611). Il n’y a d'exception à cette règle que pour ceux qui peuvent invoquer une charte royale qui leur ait fait remise de l'impôt. (Même capitulaire, e. 2.) Nous venons de mentionner les deux principales voies de dépérissement du pouvoir central sous la royauté franque : la concession des terres du fisc, et la remise des impôts. Ce double ordre de faits amena la disparition de l’autorité royale et son remplacement par l'anarchie féodale. | L’mvasion franque trouva le sol gaulois partagé en terres fiscales, patrimoine de l’empereur, et en posses- sions particulières, dans le produit desquelles la loi ro- maine avait fait la part de l’État, et celle du possesseur. La loi 20, C. Just., de agricolis, A1, AT, indiquait la pre- mière sous le nom de publicae functiones, la seconde sous celui de reditus. Les provinciaux campagnards étaient en outre soumis à une taxe personnelle appelée tributum ( 392 ) capitis, dans la loi 8,$ T7, D. de censibus, 50, 15. Une partie des impôts était attribuée aux administrateurs qui en soignaient le recouvrement : (L. un. C. Just., de ann. et capit. admin., 1, 52.) Ils en augmentaient les profits par l’abus et la concussion. (Loi 2, cod. Just. ne rusticani, 11, 54.) | L'objet de la convoitise des Frances était, non un pillage momentané, mais un établissement permanent; leurs chefs, se substituant à la domination romaine qu'ils avaient vue fonctionner, s’emparèrent de l’ensemble des droits et profits du fisc, c’est-à-dire des tributs, tant réels que per- sonnels, et des terres fiscales qui abondaient dans la Gaule dépeuplée ; tout en se réservant la plus forte part de ce butin , ils se virent forcés d’en abandonner une partie à l’avidité de leurs compagnons de guerre. Le Gaulois avait été exploité au nom et au profit d’un maitre unique, le peuple romain, personnifié dans les empereurs ; le Gallo-Romain le fut par des chefs de bande, barbares, agissant individuellement pour eux ou les leurs, sans autre lien commun que l'intérêt du moment ou lin- fluence toute matérielle du plus puissant. Les résultats de la conquête romaine avaient convergé tous vers l’accrois- sement de l’empire; ceux de l'établissement franc ten- dirent uniquement à l'appropriation personnelle. Les terres fiscales passées, à titre de part du butin, dans le lot des Francs inférieurs au roi, chef de l’envahis- sement, furent les premiers francs-alleux; les impôts qui leur furent attribués formèrent les premières justices seigneuriales. La rapacité grossière des guerriers francs ne se con- tenta pas de ces premiers fruits dé l’invasion. Le roi, pour les attacher à son service et les retenir dans sa foi, ( 393 ) se vit forcé de donner ou de récompenser sans cesse; 1l commença par leur concéder, d’une manière révocable, des biens fiscaux à titre de bénéfice : ce fut l’origine des fiefs dé domaines ou de terres; il les pourvut aussi tem- porairement des charges de comes ou de judex, ayant pour mission principale le recouvrement des impôts, dont une partie (ordinairement un tiers) leur était laissée comme traitement, le reste devant être versé au trésor royal, comme formant la pars regia. La possession des bénéfices et des charges fut l’objet des luttes qui renversèrent les rois de la première et de la seconde race. Les grands se les disputèrent, et leur dis- position fit la puissance des maires du palais. Tous les efforts des bénéficiers et des judices tendirent constam- ment vers l’inamovibilité viagère d’abord, ensuite vers l’hérédité et la libre disposition de leur bénéfice ou de leur charge. Leur but fut atteint dès qu’ils eurent arraché _à Ja faiblesse de Charles le Chauve le capitulaire de Quierzy de l’an 877. (Baluze, II, 259 et suiv.) En même temps, la part d'impôt réservée au trésor royal, la pars regia s'était continuellement amoindrie, soit par l'abandon aux églises et abbayes de tout ou partie des produits fiscaux qu’elles auraient dû rapporter au trésor, soit par l'attribution aux grands, à titre d'honneur (fief de dignité), de lintégralité ou d’une portion des revenus fiscaux de certaines localités. Les charges des comtes et autres collecteurs de l'impôt étaient déjà presque toutes devenues des fiefs d'honneur, de dignité ou de justice lorsqu'ils en obtinrent l’hérédité. Ainsi, l’autorité royale dépouillée, non-seulement des revenus des terres fiscales données en bénéfice et des produits de l’impôt concédés à titre d’honneur, mais encore du pouvoir d’en disposer, se 2% SÉRIE, TOME XI. 28 ( 594 ) trouva réduite aux domaines du fise qu’elle n'avait pas aliénés, et aux impôts dont elle s'était réservé la percep- tion directe. Son royaume ne fut plus qu’un grand alleu, sa puissance fut de même nature que celle des comtes inférieurs. Le développement historique des institutions franques, tel que nous venons de l’esquisser, explique assez com- ment il s’est fait que le pouvoir d’exiger les paraveredi et les angariae se trouve en Flandre aux mains du comte et de certaines abbayes. Nous avons vu, en effet, la charge du cursus publicus, après s'être formée sous la domination romaine avec le caractère d'utilité publique, se maintenir pendant quelque temps avec ce même carac- tère en présence de l'invasion franque, pour tomber en- suite dans la possession privée, dans laquelle nous allons la voir se perpétuer sous le régime féodal. Des charges et des services exigés originairement pour les nécessités d’une administration publique de ce colosse qui s'appelait l'empire romain, devaient nécessairement se modifier pour s'approprier aux besoins du comte de Flandre. Les abbés, qui n'avaient garde de laisser périr les obligations fiscales dont le profit était attribué à leurs monastères, devaient en changer la nature pour les faire servir à l’usage des moines. Les services justiciers dus au comte de Flandre, et les redevances perçues par les abbayes, sont expliqués par cette observation, et en même temps la confirment. Tous deux comprennent, en effet, tous les impôts romains con- vertis en redevances; par exemple : les obligations de faire des charroiïs, angariae, de fournir des chevaux, parave- redorum praebitio, equorum oblatio, d’héberger, munus hospitis recipiendi, de fournir des vivres, annona, enfin ( 395 ) celle du service militaire s’y rencontrent très-exactement, mais appropriées aux besoins et à l’usage du nouveau pos- sesseur. Les sujets du comte, homines comitis, font à son profit personnel le service des charroïs, carricaturae, servitium curruum dans la keure des IV métiers de l’an 1249, waguenvard dans l'acte de 1218 v. s.; le comte, qui n’a plus besoin pour son service des chevaux des particuliers, substitue au devoir de les fournir, une redevance pécu- maire, appelée dans le flamand du temps balfard, bal- Phard, balgvart où balchfard (1), d’après le bas latin palefridus pour paraveredus ; Vannona devient le victus comitis, s Gravenlyfneere; le service militaire est borné à la défense du pays et des droits du comte. Les hôtes de l’abbaye, hospites ecclesiae, font les trans- ports et les corvées de charrois pour les besoins et l'utilité du monastère; ils fournissent, pour l’expédition du comte à l’avoué de Saint-Bavon, deux chevaux, duos palefridos ( cartul. de Saint-Bavon, n° 14, vers 1070 ); à celui de Saint-Pierre, quatre juments, quatuor jumenta ( Acte de 11922, charta de capitalibus sancti Petri in advocatià (1) Si l’on veut rechercher l’étymologie de ce nom dans la langue fla- mande (teutonique du temps de Charles le Bon), je crois qu'elle peut s'expliquer par cette observation, que le peuple qui ne saisit pas facilement les sons étrangers ni leur signification originale, accommode le plus sou- vent à ses organes et à ses habitudes le mot étranger, lui attribuant ainsi faussement une étymologie indigène puisée dans des sons analogues. Palafredus devint balfart sans qu’on songeût à paerd, et balfart com- posé faussement de pal ou bal, méchant, mauvais, injuste, et de fart, voyage, route, course, répondit à l’idée populaire de corvée injuste. C’est ainsi que les Grecs firent de Jerouschalaïim leur ‘Tepoco)}üua , d’après l’idée de sainteté attachée à cette ville. ( 596 ) Bracbantensi, Arch. de la FI. or.); il en est qui doivent . héberger le prévôt et l'abbé, leur fournir des objets de couchage, culcitra sua in adventu praepositi vel abbatis praestare(Liber censualis Sancti Petri, ineunte saeculo13", f° 16, mêmes Archives); d’autres payent par concession, pour la dette annuelle de l’annona, huit mares en argent (Instrum. de annona……. Sancti Petri, anno 1195, mêmes Archives). La plupart des keuren accordées aux habitants des villes ou des campagnes, des priviléges concédés aux monastères dans les onzième, douzième et treizième siècles, n’ont d'autre objet que de déterminer, de limiter ou de faire cesser les redevances et services justiciers, ou de les abandonner aux couvents nouvellement établis. J'ai rappelé ailleurs (Hist. de la Flandre, KW, 65, note), une charte de Saint-Bavon de l’an 1519, imprimée depuis par extrait dans l’Histoire de l’abbaye de Saint-Bavon, par A. Van Lokeren, Gand, 1855, p. 222; le vicomte (ancien châtelain) de Gand, y cède à l’abbaye toute la seigneurie, haute et basse à Wippelghem (dépendance d’Everghem), et le balfart de l’avoué avec tout ce qui y appartient de mises en contravention, achtinghen, prises de gages, pandinghen et d’amendes à prononcer de ce chef. Je dois mentionner encore, pour compléter les notions recueillies sur le balfard des avoués, une sentence arbi- trale du 5 mai 1952 (imprimée dans Diericx, Gends char- terboekje, p. 10-11), entre l’abbaye de Saint-Bavon et son écoutète dans les paroisses d’Houthem-Saint-Lievin, Vlierzeele et Baveghem, déterminant que : « De chaque > balchfart (sans doute : chaque fois que le balfart est » exigé), le droit de l’écoutète est deux sous, et moyen- » nant ce, il doit siéger auprès du receveur (des amendes, (397 ) » ou de la redevance remplaçant la fourniture?) avec les » échevins et examiner l'argent; et s’il l’accepte non » coursable, il est tenu de le bonifier. » La charte d’abandon du balfart à l’abbaye de Loo, par Charles le Bon, en 1195, mérite de fixer l'attention (Mirœus, 1, 375). Dès l’an 1093, Philippe, fils de Robert le Frison, avait, dans une charte donnée à l’abbaye (Mirœus, 1, 269), dont le style décèle une rédaction monacale, déclaré que possédant en entier sous sa sei- gneurie , ditio, l'endroit appelé Loo, où les chanoines du lieu réclamaient quelques manants, mansionarii, bien qu'il eût sur ceux-ci les droits de comté et d’avouerie et qu'il levât sur eux la redevance due (reditus debitus), ïl lui avait plu, pour offrir ce qu'il pouvait à la maison de Dieu, de concéder auxdits chanoines, le comté et l’avoue- rie, l’étalage et le tonlieu, et tout ce qui était de droit séculier sur la terre et les manants (des chanoines) de Saint-Pierre; il avait de plus invité à cette donation son frère Robert, marquis de Flandre, afin que tous sachent, « dit-il, que nous faisons ensemble cette con- > Cession. » Cependant il ne conste nullement que Robert de Jéru- salem ait déféré à l'invitation de son frère, et dès lors la validité d’un acte par lequel Philippe avait disposé d’une manière absolue, d’une partie de son apanage, sans le concours du souverain de la Flandre, auquel appartenait la haute justice (charte de Gui de Dampierre de 1269 (Miræus, [, 208) et la suivante), n’était pas à l’abri de péril. On conjura le danger par la charte de Charles le Bon, évidemment calquée sur la première, à laquelle cependant elle apporta quelques additions et modifications. On y sup- ( 398 ) pose le concours du comte Robert à l’acte de son frère, et le successeur de Robert non-seulement loue la belle action de Philippe, mais l'amplifie dans la mesure de son pouvoir. « Renouvelant ce qu’a fait celui-ci, j'ai concédé, » dit-il, «entièrement et de bon gré la terre de l’amman (nous » distinguons les additions de 1125), le comté, l’étalage, > et le tonlieu de toute la villa, l'host, et ce qu’on nomme » en flamand Balgvart, le droit de prison et celui de » prendre des ôtages (? tensura et creditio) et toute taille, » toute espèce de droit séculier sur la terre et les manants » de Saint-Pierre. » Il ne retient que le tiers des compo- sitions pour crimes réservés à la haute justice. EH invite à la confirmation de ce don son cousin Guillaume, fils de Philippe; « et que tous sachent, » ajoute-t-il, « tant dans » l’avenir que dans le présent, que nous faisons ensemble » cette concession, et que nous la munissons de l’em- > preinte de nos sceaux. » Ces deux actes nous font voir le Balfard compris au nombre des droits de comté et d’avouerie, des dettes jus- ticières, et donné en apanage à un fils du comte à titre de part de la succession paternelle, sous la suprématie du successeur au comté de Flandre, dont la ratification est nécessaire pour valider et le démembrement de l’apanage, et l’immunité qui doit en résulter pour l’abhaye de Loo. Le second nous offre encore spécialement un exemple de l'abandon d’une partie des compositions pécuniaires, qui sont un des produits de la puissance judiciaire. L'acte déjà souvent cité, du mois de mars 1218 v.s., nous montre le Balphard aux mains de Michel de Harnes par suite de cession de la comtesse de Flandre, compris de même parmi les droits de comté ou de justice, dû au comte ou justicier par le propriétaire des terres situées dans son ( 399 ) territoire et se levant sur les occupeurs de ces terres, et abandonné par le justicier à l’église ou prieuré de Watten. La comtesse de Flandre donna son assentiment à cet abandon par un acte de même date. (Cartulaire de Wat- ten : Arch. de la Flandre orientale.) Les biens et droits donnés en échange à Michel de Harnes rentrèrent successivement et à divers titres aux mains de la comtesse, et ainsi s'explique comment elle put disposer, ensemble avec son époux, le comte Ferrand, au mois d'août 12392, du Balfard dans le métier de Leder- zeele et dans sa terre à Bollezeele, bien que ce droit eût été compris dans l’échange autrefois consenti à Michel de Harnes (Arch. du Département du Nord, 1‘ cartulaire de Flandre, pièce n° 558 et n° 618.) « Tous ceux du métier de Lederzeele, « y disent-ils, » et ceux qui nous doivent le cens et le fourrage, fura- gium (c’est le voedermalt), comme aussi notre terre dans la paroisse de Bollezeele et nos hommes y demeu- rants, ou tous autres qui soient venus y demeurer, excepté de notre domaine, nous les proclamons quittes à perpétuité envers nous et nos héritiers de toute taille, exaction, demande d’aide et subside, et de toute contra- vention, et des forfaitures passées des masures vacantes, grevées des stations de relai, debentium stationarias mansiones, comme aussi de toutes forfaitures qui aient pu arriver dans notre terre jusqu’à notre délivrance (celle de Ferrand de la captivité), excepté l'incendie, la violence faite aux femmes, le meurtre et le vol, et que » nous devons traiter à perpétuité tous les susnommés » d’après les droits, lois et coutumes, et l’échevinage, ap- » prouvés et conservés aux temps de feu le comte Philippe. » Nous n’aurons, nous et nos successeurs, de nos hommes Ve 29, Or AE EE QU EU r VE AN IC ( 400 ) » susdits, que les services d’host et de chevauchée, expe- » ditiones et resiae (dans Froissart Rèse et Rèze : c’est le » flamand reise, voyage) qu'ils avaient coutume de faire > au temps du prince susnommé. » C’est avec le census et l'annona, avec les droits justi- ciers de taille, exaction, d’aide et subside, avec les amendes pour contraventions et délits que nous voyons apparaître ici la dette des stations de relai. On la distingue du service d’host et de chevauchée. Elle persiste malgré la désertion ou la non-habitation des maisons grevées. C’est évidem- ment une expression empruntée à la langue du Code Théo- dosien, et comme elle ne peut désigner que le Balfart , elle nous révèle un nouveau trait de conformité avec l'impôt romain du Cursus publicus, où l’on voyait aussi parfois les solvables payant pour les insolvables et pour les mé- tairies abandonnées. (Si... desertorum praediorum damna sustineant, dit la Loi 18, $ 27. D., De mun. et hon., 50,4, Defectorum levamen dans la Loi 4 C. Just., De cens., 11,57. C’est à cette obligation que se rapporte le titre du même Code, De omni agro deserto, 11,58.) Par un acte du 27 mai 1219, connu seulement par l'analyse qu’en donnent les Monuments anciens, par le comte de Saimt-Genois, p. 505, la comtesse Jeanne remit à l’abbaye d’Hasnon, pour ses possessions en Flandre, les droits des tailles, Balphard, Keure (Keureweide, corvée?) et Spadewerck. Je conjecture que cette remise s’appliquait surtout aux 7 arpents de terre que cette abbaye acquit la même année à Velsicque, au pays d’Alost (Le + Came- rac. christ., p. 217). Ici encore le Balphard est mis sur la même ligne que les tailles, les corvées et le travail à la bêche (spadewerck) dus au seigneur haut-justicier. ( 401 ) La Keure donnée en juillet 1240, par la même com- tesse, et son second époux Thomas de Savoie aux châtel- lenies de Furnes, de Bergues et de Bourbourg, et dont un original repose aux Archives du Département du Nord, contient la disposition finale suivante : « En outre nous, » Thomas, comte et Jeanne, comtesse susdits, nous avons > remis à perpétuité notre Balfard dans la terre de Furnes » (Bergues, Bourbourg), et nous le proclamons quitte » pour le futur, nous réservant seulement que si nous vou- > lions faire de nouvelles fortifications dans la terre de » Furnes (Bergues, Bourbourg), ou réparer les anciennes, » ceux-là seraient tenus de creuser (fodere) pour nous, > qui auparavant avaient coutume de payer le Balfard. » Ce n’est pas la substitution d’un service à un autre, mais bien la permanence de l’un et labolition de l’autre que consacre cette charte. Ceux qui, jusque-là, payaient le Balfard étaient en outre tenus de travailler à la bêche, fodere, creuser, pour la construction ou la restauration des fortifications, dont un autre article de la charte fixe la hauteur à 6 pieds (1 mètre 668 millimètres), et la largeur des fossés à 40 pieds (11 mètres 12 centimètres) au plus- La loi 12 C. Just., De excus. mun., 10,47 rangeait égale- ment parmi les sordida munera, la paraveredorum aut parangariarum praebitio et les publicae vel sacrae aedes construendae atque reparandae; et l'Édit de Piîtres, après avoir parlé des debili paraveredi, au ch. 26, s'occupe au chapitre suivant du travail ad civitates novas. (Baluze, IT, 187.) Au mois d'août 1240, les mêmes princes proclamèrent leurs hommes du métier de Bruges quittes et libres à per- pétuité, purement et simplement, du service qu’ils appe- laient vulgairement Balfard, et en vertu duquel ceux-ci (402) leur payaient annuellement, au gré du souverain, douze deniers monnaie de Flandre par chaque feu vif, pourvu que celui qui faisait ainsi résidence dans le métier eût à lui une valeur de cent sous. Les hommes du métier de Bruges se sentalent grevés par ce service, et soutenaient en outre que ce Balfard était une véritable exaction, ne provenant pas du sentier du droit (des voies coutumières). Nous voyons en outre, dans une attestation de plusieurs grands seigneurs flamands que la comtesse et son époux avaient considéré que « les pauvres seulement étaient » grevés par le payement du Balfard » (Voir notre Hist. de la F1., IV, 184 et 421, et Vredius, pages 576-577). Remarquons d’abord que d’après cet acte le Balfard a perdu son caractère primitif de fourniture de chevaux, et se trouve transformé en un payement en argent; la même modification semble avoir eu lieu dans les châtel- lenies de Furnes, Bergues et Bourbourg , antérieurement aux chartes du mois de juillet précédent : c’est du moins ce que l’on peut induire de l’emploi du mot payer, sol- vere, dans ces actes, pour désigner l’acquittement de ser- vice. Une autre circonstance digne de fixer notre attention, c'est qu’en 1240 le payement du Balfart grevait seulement les pauvres, tandis que cette charge, imposée primitive- ment aux possesseurs à raison de leur fonds, aurait dû, d’après sa nature, être supportée principalement par les riches, aux mains desquels avait passé la plus grande partie des terres. Cette contradiction apparente s’explique facilement si l’on tient compte de l’interversion d'obligations qui fut l’une des conséquences du développement de la féodalité. Les riches propriétaires d’alleux s'étaient casés dans la ( 403 ) hiérarchie féodale à côté des grands vassaux, comme sei- gneurs suzerains ; les petits possesseurs de terres allo- diales s'étaient vus, presque tous, forcés tant par les vexations que le comte leur faisait subir à l’occasion du service militaire, tel qu'il avait été organisé par Charle- magne, que par l’oppression qui les menaçait de toutes parts, de chercher un refuge et un appui dans le lien féodal (fiefs de reprise ou d’oblation); les mêmes causes contraignirent les autres hommes libres des capitulaires, servant sous le comte, qui, dans les désordres de la pé- riode de naïssance du régime féodal, avaient perdu leur part de propriété du sol et n’avaient conservé que la liberté de leurs personnes, à s’abriter sous l’avouerie de l’un ou l'autre seigneur laïque ou ecclésiastique (recommanda- tions), comme le firent du reste un petit nombre d’hommes libres, possesseurs d’alleux roturiers. Entre les deux classes de ces hommes libres, il y eut cette différence que les premiers, en se soumettant aux services et redevances de vassal à suzerain, échappèrent aux obligations de l’ancien impôt romain, et que les autres ne cessèrent pas d’en être chargés , que même ils restèrent seuls pour les supporter, les possesseurs de fiefs , soit de concession, soit de reprise ou d’oblation, les ayant rem- placées par les charges féodales convenues lors de l’inves- titure, et les seigneurs et propriétaires de franes-alleux s’y étant soustraits par l’immunité. Il est vrai que pour ces hommes libres, devenus hommes d’avouerie, la charge accablante du service militaire de l’armée franque, sanc- tionné par l’heribannum, devint tout à fait rare et excep- tionnelle par suite de la nouvelle organisation militaire féodale, mais il importe de ne pas perdre de vue que les sei- gneurs, auxquels ils s'étaient recommandés, considérèrent ( 404 ) cet allégement comme une raison suffisante pour se croire autorisés à transformer à leur égard les anciens services justiciers, réglés par la loi ou la coutume, en services per- manents, arbitrairement exigibles. Cette substitution de l'arbitraire à la coutume, d’une part, et de l’autre l’interversion des contributions, levées généralement sur tous pour les besoms de la chose pu- blique, en redevances privées, exigées des seuls hommes de poste ou d’avouerie dans l'intérêt patrimonial des sei- gneurs, donnaient aux services justiciers une couleur d’as- servissement, un caractère d’exaction, qui les faisait ap- paraître aux yeux des populations comme sortant des voies de l’équité et du droit (non ex juris tramite procedere, comme dit l'acte du mois d'août 1240). La charte ou keure des IV métiers, donnée et jurée par Thomas et Jeanne en 1242 (imprimée dans Warn- kônig, F1. St.-und R.-geschichte, , 2° Abth., Urk. p.186, et HIT, 4° Abth., Urk. p. 85, dont nous suivons la distri- bution par articles) maintient à charge des possesseurs le cens libre de la terre (art. 1), et l'expédition navale, sans solidarité entre les métiers (art. 2); le métier d’Assenede doit le service avec deux hercogghen (mot composé de her, armée, guerre, et cogghe, dans Froissart coque, sorte de navire profond et léger, peut-être le même que le Koff actuel, vaisseau de charge rond de l'avant et de l'arrière, à deux mâts, sans mât d’artimon sur le gaillard d’arrière); celui de Bochaute avec une hercogghe; Botersande (en- clave de Bochaute) avec une Zeilscoude (de zeil, voile, et scoude actuellement schouw, prame, sorte de navire à un seul pont, d’un faible tirant d’eau, allant à rames et à voile); le métier d’Axel avec deux hercogghen ; Zamslag, (enclave d’Axel) avec une hercogghe; le métier de Hulst ( 405 ) avec une hercogghe et une zeilscoude. Elle distingue, pour l’ancien Acribannum, le lantman (homme libre, posses- seur d’alleu roturier) du cossatus ou casatus, homme libre qui ne possède aucune terre dans le métier (art. 5); elle astreint ce dernier à trois jours de corvée de travail à la bêche par an, pour la réparation des ouvrages de défense contre l’inondation, et lui accorde comme indemnité la Jouissance exclusive de la pêche dans les eaux publiques et de la pâture des voies militaires (art. 69) ; enfin elle remet à perpétuité aux hommes de la comtesse, dans les Quatre-Métiers, le Balfart qu'ils lui devaient annuelle- ment, faisant également remise à ceux des métiers d’Asse- nede et de Bochaute du service de chariots, servitium curruum, wagendienst dans l’ancienne version flamande (le waguenvart, de l'acte de 1218), qu'ils lui devaient tous les lundis (art. 70). On le voit, l’ensemble de ces dispositions ne fait que confirmer les explications essayées plus haut. Le jugement arbitral du 25 août 1247 entre la comtesse Marguerite et l’évêque de Térouane, Pierre de Douy, au sujet de la terre de Herzeele, châtellenie de Bergues, (dans de Saint-Genois, Mon. anc., p. 564), portant que _« l’évêque pourra choisir dans sa terre 13 hôtes, qui seront > libres de la taille appelée Balphard, et exempts de toute » expédition, excepté lorsque les hôtes des autres églises » iront à l’armée, » nous montre le Balfart expressément qualifié de taille, distingué de l’expédition ; 1l légitime une exemption, fondée peut-être sur le chap. 4 du capitul. 1, an. 812 (Baluze, !, 491), et de la nature de celles qui avaient provoqué les plaintes des chapitres 3, 4, 5et8 du capitulare 5"° de l’an 811 (Baluze, [, 485 et 486); il prouve au surplus que l’immunité des églises n'avait nulle- ( 406 ) ment pour elfet de décharger leurs hommes ou hôtes du service militaire. La charte concernant le rachat du balfart dans le Métier de Zysseele, près de Bruges, du 5 mars 1265, vieux style, publiée dans notre Hist. de la F1. IT, 459, ne nous ap- prenant rien de plus que la charte d’abolhtion du même droit dans le Métier de Bruges, il n’y a pas lieu de nous y arrêter. M. Van Lokeren, dans son Hist. de l’abbaye de Saint- Bavon, Gand, 1855, p. 218, nous a le premier fait con- naître une charte de Rase, dit Mulard, et de Folcwide, son épouse , seigneurs d’Exaerde , du mois de février 1285, vieux style, portant remise du balfart et de toutes les autres charges de l’ancien impôt romain en faveur d’une terre à Exaerde, acquise pour la pitance de l’abbaye de Saint-Bavon. Les termes de l’acte ne permettent pas le moindre doute que dans l'opinion de son rédacteur, toutes les obligations publiques des derniers temps de lempire avaient passé dans le domaine particulier des seigneurs. Nous remettons », leur fait-il dire, « moyennant dix livres de Flandre à nous payées, le service vulgairement dit balfart, la corvée, et toute exaction ou taille, ainsi que tous les munera, sordida, non sordida, lindictum, le tribut, le cens, l’annona, la capitation , le vectigal, les angariae, les parangariae, et tous autres services, et tous droits auxquels ladite terre, ou son possesseur, à raison de la terre, étaient jusqu’ores, pouvaient où devaient être obligés. » Rase Mulard était de la famille de Gavre et tenait la seigneurie d'Exaerde comme héritier médiat de Rasse de Gavre et de Clarice son épouse, qui avaient obtenu des terres à Exaerde, alors encore sous la paroisse de Lokeren, LR CR CS CS ee 2 ( 407 ) par don du comte Ferrand et de la comtesse Jeanne (Car- tulaire de Baudeloo, À, fol. 259 recto, Arch. de la F1. or.) Il est donc probable que, de même que Michel de Harnes dans les paroisses de la châtellenie de Cassel, c'était comme investi des droits du comte que le seigneur d’Exaerde percevait à son profit les droits justiciers. Il en était aussi de même dans la seigneurie d’'Elver- . dinghe et Vlamertinghe près d’Ypres, dont le terrier formé en l’année 1449 (Arch. du royaume, rég. des chambres de comptes, n° 1084), indique encore sous la paroisse de Boesinghe , à l’ouest du chemin de Reninghe, sept parties de terre, dont trois doivent annuellement deux balfarts (une de ces parties contenant près d’un hectare et demi, ou trois arpents soixante-cinq verges, une autre environ quatre-vingt-dix ares ou deux arpents), les quatre autres n’en doivent qu’un seul, le tout à titre de landscult ou dette du pays. Cette seigneurie appartenait encore en 1274 et 1276 au comte Gui de Dampierre (Arch. de Rupelm., à Gand, n° 185 et 204); elle fut plus tard attribuée à une branche bâtarde de Flandre (Sanderus , 2° édit., IT, 126) et relevait à ce titre de la chambre légale ( Arch. du royaume, rég. des chambres de comptes, n° 1063), en laquelle (d’après D'Oudegherst, chap. 173), sortissaient immédiatement tous partaiges de Flandre. Nous venons de passer en revue tous les documents de la Flandre, connus jusqu’à ce jour, où le balfart se trouve mentionné. Partout il nous est apparu comme une branche de l’impôt romain enrichissant le seigneur et perçu à son profit. Depuis l'invasion franque jusqu’en 1449, le même mot, légèrement altéré (paraveredus, balfart ) servant à désigner les mêmes choses, en conserve précieusement ( 408 ) l’histoire et la généalogie. J’ose donc terminer ce travail en concluant avec M. Championnière (des eaux courantes, n° 281) : « Le maintien de l'impôt romain sous la domi- » nation barbare n’est plus un fait à démontrer; sa per- sistance ressort manifeste de tout ce qui précède dans ces études, et peut-être n'est-il pas un texte, pas une citation d'acte ou de document historique où elle ne soit écrite en termes décisifs. » We 9: © Sur un manuscrit de PLINI HISTORIA NATURALIS, de la fin du onzième siècle, conservé à la bibliothèque de l’Athénée de Luxembourg; notice par M. A. Namur, professeur- bibliothécaire de cet établissement. L'ouvrage de Pline est un des monuments les plus précieux que l’antiquite nous a laissés. (Cuvier, Biographie universelle, t. XXXW.) Il existe à la bibliothèque de l’athénée de Luxembourg, section : bibliothèque de la ville, un grand volume ma- nuscrit sur vélin, d’une conservation parfaite. C’est une copie de l’histoire naturelle de Pline, écrite d’un bout à l’autre par une main habile. Sous le rapport des études philologiques et sous celui de l'histoire de l’art calligraphique au moyen âge, ce volume me semble digne de l'attention du monde savant. Il pro- vient de la bibliothèque de feu M. de Neünheüser, en son vivant vicaire général à Luxembourg. Auparavant il avait fait partie de la bibliothèque de l’abbaye d’Orval (1), où (4) Une note manuscrite insérée au bas du verso du dernier feuillet le prouve : « Liber beate Marie Auree Vallis ; qui eum abstulerit anathema sil. » ( 409 ) peut-être aussi la copie a été faite (1). Après la mort de M. de Neünheüser, feu M. le docteur Clasen l’a acquis pour la somme minime de 12 florins, en sa qualité de bibliothé- caire de la ville (2). Je ne parlerai pas de l'importance des ouvrages de Pline sous le rapport scientifique et littéraire. Cette importance est généralement appréciée et se résume dans les paroles ci-dessus rappelées de l’immortel Cuvier. Il existe un grand nombre de copies de cet intéressant ouvrage. Sillig en a consulté 47 pour son édition de Pline de 1851, et malgré ce nombre, notre exemplaire ne me semble pas sans importance, puisque la plupart des copies connues sont peu correctes, et les meilleures éditions ne sont pas exemptes de passages plus ou moins obscurs. Notre codex n’a jamais été consulté par les éditeurs de Pline. Sillig, qui a résumé les investigations faites à ce sujet dans son excellente édition de 1851, n’en fait aucune mention. Quelques savants l’ont superficiellement par- couru à leur passage par Luxembourg, et en ont parlé dans des publications périodiques, en émettant quelques con- jectures sur l’époque à laquelle il semble appartenir, et sur sa parenté avec d’autres exemplaires. M. le docteur Waitz a publié dans le Philologus, VIT, 5, p. 569, un petit article, dans lequel 1l résume les observations qu’il a fates à Luxembourg en 1840. Il attribue le codex au (1) Nous savons que, de bonne heure, l’abbaye d’Orval avait d’habiles calligraphes. La bibliothèque du séminaire de Luxembourg possède une bible qui a été écrite à Orval à cette époque. (2) Les héritiers de M de Neünheüser avaient la généreuse intention de donner le volume à la bibliothèque de Luxembourg; mais comme il y avais des cohéritiers mineurs, l’ouvrage a dù être mis en vente. 2e SÉRIE, TOME XI. 29 ( MO ) douzième siècle. Comparant avec l'édition de Sillig, les passages du quatrième livre, qui ont rapport à l’ancienne Germanie, il indique les manuscrits connus avec lesquels le nôtre a la plus grande analogie. Je reviendrai plus tard sur cet objet. M. Waiïtz pense que la copie de Luxembourg est digne d’être examinée et étudiée. Notre codex est encore mentionné dans l’ouvrage inti- tulé : Archiv für ältere deutsche Geschichtskunde heraus- gegeben von Pertz, VIII, Hannover, 1845. Un travail critique sur notre Pline serait probablement aussi riche en heureux résultats que l’examen d’un codex de Prague, fait par le docteur Heräus et publié dans le même numéro du Philologus précité, sous le titre : Die Handschrifien und Kritik des Plinius. L’utilité d’un tel travail est généralement reconnue, et je suis convaincu que l’entreprendre serait rendre un ser- vice aux études philologiques. Moi-même, comme étant à la source, j'ai été engagé par quelques savants de l’Alle- magne à m'y livrer (1). Pour obtempérer partiellement aux vœux exprimés par ces messieurs, j’essaierai de faire la description du volume, d'émettre quelques conjectures sur le siècle auquel 1l me semble appartenir, et d'établir ap- proximativement la parenté de notre codex avec les ma- nuscrits connus et indiqués par Sillig et surtout de faire connaître le contenu du volume. E — Description du volume et fixation de la date. C’est un grand in-fol. de 172 feuillets; haut de 0,52 (4) MM. le Dr Urlichs, professeur à l’université de Würtzburg, et le Dr Jan, professeur à Schweinfurt. ( 411 ) sur 0",55 de large. Le vélin, sur lequel il est écrit, est pas- sablement épais, le plus souvent rigide, et d’une couleur bise. Cela répond au caractère que prit le vélin au milieu du onzième siècle. Les feuillets se divisent en deux colonnes, séparées par un espace blanc de 0,022 de largeur. Chaque page com- prend 65 ou 66 lignes. Chaque demi-ligne se compose de 45 à 50 lettres. On voit encore les lignes en mine de plomb, sur lesquelles le texte est écrit; des lignes verti- cales limitent les espaces assez larges (0",038) des deux côtés du texte, ainsi que le blanc au haut et au bas des pages. On voit de même les traces du compas, dont on s’est servi pour marquer la distance respective des lignes. La plupart des plus anciens manuscrits de Pline sont de grand format et écrits en deux colonnes. J'en citerai quel- ques-uns d’après l'édition publiée par Sillig : codex Lei- densis (saec. IX, v. X}); cod. Vossianus; cod. Riccardianus (saec. IX); cod. Toletanus (saec. XI-XIIT); cod. Parisiensis a (saec. VIIT-IX); cod. Vaticanus. Tout le volume est écrit en minuscules capétiennes, dont les rondeurs commencent à se perdre pour laisser dominer les angles qui, plus tard, constituèrent le gothique. Cette transition insensible se fait surtout remarquer dans les lettres e, &, u, m, n. Sous le rapport des caractères notre Pline a une frappante analogie avec le célèbre ma- nuscrit de Virgile, copie du onzième siècle, n° 7950, à la bibliothèque impériale de Paris (1). Non-seulement la forme des lettres, mais aussi l’ortho- graphe surtout e avec cédille pour ae et les abréviations ne —t—— ru (1) Champollion, Paléographie des auieurs latins, p. 56. ( 412 ) semblent prouver que les deux manuscrits appartiennent à peu près à une même époque. je trouve de même une grande ressemblance avec le fragment de la bible du ear- dinal Mazarin, n° 50, P. Lacroix, le Moyen Age et la Re- naissance. Chaque chapitre commence par une majuscule rouge ou bleue; souvent les deux couleurs sont réunies dans une même lettre. On ne trouve d’alinéa qu’au commencement des chapi- tres; souvent aussi un nouveau chapitre commence au mi- leu de la ligne. Les alinéa au commencement des cha- pitres sont saillants. Les entêtes des chapitres et des divers livres sont écrits en mêmes caractères que le texte, mais en encre rouge. Au commencement de chaque nouveau livre se trou- vent de grandes capitales richement, mais grotesquement ornementées et le plus souvent rehaussées d’or. Ces capitales me semblent dignes de fixer pour un mo- ment notre attention. Leur examen nous reporte à une époque où la plupart des arts éprouvant l'influence des désastres qui désolèrent l'Europe, rétrogradèrent vers ja plus grotesque barbarie, et la calligraphie et l’enluminure des manuscrits ressentirent le contre-coup d’une cerise fatale. Cette époque est le onzième siècle et surtout la fin de ce siècle. Les formes bizarres continuèrent au douzième siècle; mais alors on commenca à sentir l’influence des croisades sur les sciences et les arts; on vit paraître l'emploi des belles temtes bleues d’outremeret l'or artistement appliqué. Dans notre Pline, nous voyons à la vérité le bleu et l'or, mais le bleu n’a pas la beauté du bleu d’outremer, ni l'or l'éclat d’une époque postérieure. (413) Je passe à la description de quelques-unes de ces capi- tales. | Lettre P. La tête présente sur un fond d’or des entre- lacs fleuronnés de couleurs bleue, rouge et jaunâtre. Sa longue queue est terminée par une figure monstrueuse re- tournée, à tête humaine portant une couronne; le corps ailé, muni de deux pattes d'animaux se rétrécit en une queue mince par laquelle ii tient à la partie inférieure de la lettre. Lettre FE. Au milieu une colonne dont la base représente une tête humaine renversée et grotesque. Les deux jam- bages extérieurs formés par des ares opposés représentent des corps de volatiles à deux têtes, dont l’une se plonge dans la colonne verticale du milieu, l'autre formant la base des jambages extérieurs de la lettre. L'intérieur re- présente sur un fond d’or mat, des arabesques fleuronnées, qui prennent leur origine au bec des volatiles, mêmes cou- leurs que dans la lettre qui précède. Lettre T. La tête est formée par une bande horizontale à fond d’or, bordée de bleu et de blanc. Du milieu de cette bande descend une ornementation rubannée. Le tout est traversé horizontalement par un monstre ailé, espèce de dragon , à la gueule duquel vient aboutir l’ornementation rubannée. Le fond est d’or. Lettre À. Le jambage droit est une bande d’or de lar- geur uniforme. Le jambage gauche est formé par un vola- tile de forme très-mince et allongée; entre ces jambages il y à sur un fond bleu des ornementations semblables à celles décrites ci-dessus ; mêmes couleurs. Lettre R. Contre une bande d’or, de largeur uniforme, est appliquée à droite une tête monstrueuse. De la bouche de cette tête sortent les deux courbes en or, qui consti- ( 414 ) tuent le corps de la lettre; dans l’intérieur sur fond bleu même genre d'ornementation que ci-dessus. Ces quelques exemples suffisent pour donner une idée de ce genre d’enluminure. Examinons maintenant les autres signes paléographiques qui peuvent servir à fixer une date. La lettre à simple ne porte ni accent ni point. Le double #; est parfois écrit &, lorsque le second à figure comme consonne, P. E. dijudicarunt; mais nous trouvons : « insidus ». Cet usage introduit au dixième siècle s’affermit par degré pendant le onzième siècle et devint commun, presque général, au douzième. La lettre y a ordinairement un point au milieu. A la fin des lignes on trouve, surtout dans la deuxième moitié du volume, parfois un signe semblable à un accent aigu, pour marquer que le mot n’est pas terminé; ce qui arriva généralement au onzième siècle et plus tard. Les abréviations sont moins fréquentes qu’au douzième et au treizième siècle et ne rendent pas, comme plus tard, le texte difficile à lire. La ponctuation est simple et négligée. Le point est le seul signe employé et souvent même il l’est abusive- ment. Parfois nous trouvons un point surmonté d’un crochet _p. e. accidit > signe qui, d’après dom de Vaines, apparaît au dixième et au onzième siècle. Les détails qui précèdent me permettent d'admettre pour date de notre codex le commencement du douzième ou la fin du onzième siècle. L’orthographe généralement suivie dans le volume semble faire pencher la balance pour la fin du onzième siècle. Je me bornerai à faire valoir un seul exemple. Du com- ( 415 ) mencement à la fin du codex nous rencontrons e avec cédille placée pour ae. Ceite manière d'écrire, continuée avec constance, sem- ble dénoter le onzième siècle. Je citerai d’abord à l'appui de cette assertion le manuscrit précité de Virgile, n° 7930 de la bibliothèque impériale de Paris, qui est sans con- tredit du onzième siècle. Nous y lisons : eneas, que, etc. D’après Champollion (Paléographie des classiques latins ), on écrivait généralement ae et non e ou e au neuvième siècle. Il cite pour exemple le manuscrit de Térence, 7899 de la bibliothèque impériale de Paris.‘Au douzième siècle on écrivait également ae; dans le manuscrit de Quinti- lien 7800 de la même bibliothèque impériale nous lisons : quae, caecu, praestari. Au treizième siècle nous trouvons e pour ae, mais sans cédille. La lettre e avec cédille pour ae paraît donc caractériser le onzième siècle. Mabillon, De re diplomatica, p.367, vient à l'appui de cette thèse. Il nous montre déjà ç pour ae au dixième siècle, p. e. sue pour suae, ex sacramentario Ratoldi, n° 587. Mais il nous montre aussi que cet usage n'est pas encore général et cite Galliae, ex ms. codice Remigio. Ses citations de fragments du onzième siècle contiennent généralement e pour ae. « Ex codice nostro S. Germani, 527 : sapie pour sapientiae. » Dans le dou- zième siècle le même savant nous fait voir e pour oe, tandis que e sans cédille est placé pour ae. « Ex Floro Corb. n°“ 488 et 489 , pena pour poena (commencement du dou- zième siècle); dicte ecclesie pour dictae ecclesiae. » Les chartes me fournissent les arguments les plus pé- remptoires et semblent prouver que e avec cédille placé pour ae dénote, lorsque l'emploi est général, le onzième siècle. (M6) Je prends pour point de départ les chartes originales de la fondation et de la confirmation des priviléges de l’abbaye de Münster près de Luxembourg, déposées au musée de la Société archéologique du grand duché de ce nom. Ces chartes sont des comtes de Luxembourg Conrad (1085); Guillaume (1122); Henri (1182); Walram (1295) et Char- les IV (1349). La charte de fondation par le comte Conrad (1083) porte généralement e pour ae et e pour 0e, p. e. humane, ec- clesi, advocatie, aplice {apostolicae), dnice (dominicae), MAIS cepi pour coepi. Dans la confirmation des priviléges par le comte Guil- laume (1122) nous trouvons quelquefois encore e pour ae, mais e simple pour la même diphthongue domine : que ou que pour quae; nous trouvons même e avec cédille em- ployé abusivement pour ae dans ecclesie, p. e.; ce qui prouve que déjà au commencement du douzième siècle, c’est-à-dire en 1122 l'usage de e pour ae commençait à disparaitre. À la fin du même douzième siècle, d’après la charte du comte Henri, de l’an 1182, nous ne trouvons plus que le simple e pour ae : eterne, Marie, memorie, que, ville, annone, hec, dnice et d’autres. Je n’ai pas craint d’abuser de la patience de mes lec- teurs en m'arrêtant aussi longtemps sur ce point de ma thèse, qui est l’argument principal que je puisse faire valoir pour fixer la date de notre codex à la fin du onzième siècle. II. — Contenu du codex et indication des lacunes. Au premier feuillet, au commencement de la première colonne, il y a en quinze lignes une note biographique sur ( AT ) Pline. Le docteur Waitz a copié cette note en 1840 et l’a publiée dans le Philologus VIT, 3, p. 570. Je ne transerirai pas cette note pour examiner si les critères qu’elle nous offre ne s’opposent en rien à l’admis- sion de la date précitée. Je me bornerai à faire remarquer que sous le rapport paléographique, elle ne diffère en rien de tout le texte du eodex. Les abréviations, la ponctuation, la forme des lettres, l’enluminure de la capitale P, l’orthographe et sur- tout l'emploi de e pour ae sont les mêmes. Il n’est donc pas possible que la note soit postérieure à la copie de l’ou- vrage lui-même. La dédicace à Vespasien commence à la 16° ligne, fol. 1°", et finit au bas de la 1° colonne, même feuillet verso. Au-dessous nous lisons en lettres rouges : incipit hys- toriarum mundi elenchorum omnium librorum XXXVII. Liber unus qui primus libro secundo continetur. Cette table des matières de tous les livres, y compris le trente-septième, s'étend jusqu’au verso du huitième feuillet. Ces huit premiers feuillets ne sont pas numérotés. L’indi- cation des feuillets faite par une main moderne ne com- mence qu’au deuxième livre. Lib. IL — fol. 1 recto. — fol. 8 verso. Complet. Lib. IL. — fol. 9 recto. — fol. 12 verso. — Lib. IV. — fol. 12 verso. — fol. 16 verso. — Lib. V. — fol. 16 verso. — fol. 20 verso. — Lib. VI. — fol. 21 recto. — fol. 27 recto. — Dans ce livre il y à quelques omissions d’un ou de deux mots. Liber VIE. — fol. 27, recto. — fol. 33 recto. — Com- plet, sauf quelques petites lacunes. (H8) Lib. VII — fol. 35 recto. — fol. 39 recto. Complet. Lib. IX. — fol. 39 recto. — fol. 44 recto. Lib. X. — fol. 44 recto. — fol. 49 verso. Lib. XI. — fol. 49 verso. — fol. 56 verso. Lib. XII. — fol. 56 verso. — fol. 59 verso. Lib. XIIL — fol. 59 verso. — fol. 62 verso. Lib. XIV. — fol. 62 verso. — fol. 65 verso. Lib. XV. — fol. 65 verso. — fol. 69 recto. (quelques lacunes). Lib. XVI — fol. 69 recto. — fol. 74 verso. Lib. XVII. — fol. 74 verso. — fol. 81 recto. Lib. XVIII. — fol. 81 recto. — fol. 89 recto. Lib. XIX. — fol. 89 verso. — fol. 95 verso. Lib. XX. — fol. 95 verso. — fol. 100 recto. — Plusieurs mots d’une écriture plus petite comblent les lacunes laissées par le calligraphe. Lib. XXI. — fol. 100 recto. — fol. 105 recto. — Assez complet malgré une note inscrite par une autre main au bas du fol. 104 verso : ex fine hujus libri parum deest et sequentis XXII libri magna pars. Lib. XXII. — fol. 105 recto. — fol. 109 verso. — Au commencement une lacune de quelques lignes, le titre manque, au verso du fol. 106, il y a vingt-sept lignes lais- sées en blanc, mais rien du texte donné par Sillig ne manque. Ïl y a encore quelques autres petites lacunes comblées le plus souvent en plus petits caractères. Lib. XXIIL — fol. 109 verso. — fol. 113 verso. — Complet. Au verso du fol. 110, il y a une lacune, laissant huit lignes en blanc sans omission dans le texte. Lib. XXIV. — fol. 114 recto. — fol. 118 verso. — A la place qui devait recevoir l’entête du livre nous lisons en lettres rouges : deest initium hujus XXIV libri ex ( 419 ) tribus sententiis. Il ne manque que l'entête du livre. il y a encore fol. 112 une lacune de treize lignes, mais le texte est complet. Lib. XXV. — fol. 118 verso. — fol. 123 recto. — Au fol. 122, verso, sept lignes en blanc, sans omission dans le texte. Lib. XXVIL. — fol. 193 verso. — fol. 128 recto. — Au verso du fol. 195 il y a vingt lignes en blanc. Il y manque d’après l'édition de Sillig, vol. IV, p. 184, 50, depuis : habet vetus nucleum jusqu’à aut strangaria hordeo inspersa succurrit. Lib. XXVIL. — fol. 128 recto. — ïol. 131 recto. — Complet. Lib. XXVIIL — fol. 131 recto. — fol. 135 verso. — Au recto du fol. 133, col. B., la vingtième ligne est restée en blanc. En marge se trouve la note suivante : quod hic per negligentiam interceptum est require in fine libri sub tali signo +. Le passage omis est compris dans Sillig, p. 977, Lib. XXVIIT, cap. VIT, sect. 13 : « multa diximus de hac violentia » jusqu’à Lib. XXVITE, cap. IX, sect. 49 : « medetur dentibus et fabrile glutinum in aqua decoc- tum. » Le passage omis se trouve transcrit après le trente- sixième livre au recto du fol. 171 et se termine fol. 172 verso; de sorte que le vingt-huitième livre est complet, sauf quelques petites lacunes. Lib. XXIX. — fol. 135 verso. — fol. 139 verso. — Complet. Lib. XXX. — fol. 139 verso. — fol. 143 verso. — Complet. Lib. XXXI. — fol. 143 verso. — fol. 147 verso. -—- { 420 ) Au fol. 145 il y a 45 lignes laissées en blanc, sans omis- sion dans le texte. Lib. XXXEHI. — fol. 147 verso. — fol. 151 verso. — Presque complet, ii n’y a que queiques mots qui manquent. Lib. XXXHEE. — fol. 151 verso. — fol. 455 verso. — Complet. Lib. XXXIV. — fol. 155 verso. — fol. 160 recto. — Complet. Lib. XXXV. — fol. 160 recto. — fol. 165 verso. — Complet. Lib. XXXVI. — fol. 165 verso. — fol. 170 verso. — Complet. | Le livre trente-septième manque tout entier. La table de ce livre est cependant comprise avec celle des trente-six autres, au premier livre qui contient la table générale. IT, — Résultat d’un essai comparatif fait pour fixer ap- proximativement la parenté du codex luxembourgeois. Pour faire connaître approximativement le degré de pa- renté de ce codex avec les plus renommés connus et utilisés par Sillig, j'ai comparé les passages indiqués ci-après avec l'édition publiée par ce savant et les variantes que donnent les autres manuscrits connus, d’après le même auteur. L Table des matières du deuxième livre. IL. Lib. II, cap. 5, sect. 4, $$ 22-26. IT. Lib. XIIT, cap. 12, $S 23-26. IV. Lib. XV. V. Lib. XXV, cap. 4, sect. 2, $$ 30-38. VI. Lib. XXXV, cap. 2, sect. 2, $$ 10-14. (Les détails de cette comparaison sont transcrits dans la pièce jointe : annexe.) ( 424 ) I me semble résulter de cette comparaison que notre manuscrit n’est pas sans importance pour les études phi- lologiques. Il concorde souvent avec le texte de l’édition de Sillig ; il offre le plus d’analogie avec les manuscrits suivants : d. (parisiensis regius) ; R. (Riccardianus) ; à. (parisiensis reqius) ; T. (Toletanus) et b. (parisiensis regius). Ce résultat confirme les analogies constatées par le doc- teur Waitz, qui a fait le même travail sur quelques passages du quatrième livre, qui ont trait à l’ancienne Germanie. Voici comment ce savant s'exprime à ce sujet : (Philolo- gus, VIE, 5, p. 570.) « Von dem Texte habe ich die beiden Stellen des IV Bu- ches verglichen, welche sich auf das alte Germanien bezie- hen. Sillig ’s Ausgabe zeigt dass die Lesarten dieses Codex am nächsten übereinstimmen mit den von ihm benutzten Handschriften : d. (parisiensis regius 6797); R. (Riccar- dianus) und À. (Leid. Vossianus) mit unter auch T. (Tole- tanus), die er sämmilich nach dem Bambergischen zu den bessern zühlt, einige male auch mit dem Auszug des Ro- bertus. Vielleicht dürfte deshalb die Handschrift noch eine weitere Benutzung verdienen. » Je crois devoir faire remarquer de plus que notre codex paraît être l’œuvre d’un ealligraphe non lettré, qui n’a pas compris le texte qu’il était appelé à copier ; que le degré d’exactitude de la copie n’est pas partout le même, et que notre codex ne paraît être dans son ensemble la copie d'aucun des manuscrits connus et examinés jusqu’à pré- sent. Dès que la conviction de l’importance de ce trésor litté- raire sera confirmée par le jugement des hommes compé- tents,.Je continuerai volontiers le travail sur une échelle ( 422 ) plus étendue, parce qu’à raison de ma position comme conservateur je suis plus à même de me livrer à un travail de cette espèce que bien des savants étrangers, qui certes, dans ma position, obtiendraient un résultat plus satis- faisant. Toutefois j’accueillerai avec la plus grande satisfaction toutes les observations dont on voudra m’honorer, et je ferai tout mon possible pour répondre aux demandes de communications qui pourront m'être adressées. ANNEXE. I. TABLE DES MATIÈRES DU 1% LIVRE. L’entête correspond au codex R. An finitus mundus et an unus ; finitus R. finitus sit. b. Sillig. De forma ejus. k De motu. Cur mundus dicatur, R. omittunt dicatur b. d. De elementis. De Deo. De errantium syderum natura. Siderum errantium Sill. R. T. a. b. d. De lunae et solis de defectibus ; solis defectibus, Sill, De nocte R. T,. a. b. d. De magnitudine siderum. Quae quis invenerit in observatione coelesti. De lunae motu , pone vocem coelesti Sillig collocat guando recurrant solis ac Lunae defectus, omit R. T. Errantium motus et luminum canonica. Quae eadem altiora alias priora videantur, quae T. b, d.; quare R., Sill. ( 425 ) Catholica siderum errantium R. T. b. d. Quae ratio colores eorum mutet. Solis motus. Dierum inaequalitatis ratio. Quare fulmina Jovi assignentur. Intervalla syderum. De siderum musica, de sideribus musica, Sillig. De mundo geometrica. De repentinis sideribus. De cometis, de R. b.; et de T. d. Natura et situs et-genera (1) eorum ; (1) generatim R. Hyparchia de sideribus agnoscendis; hipparchea b., Sill., hipparchia R.T. d.; agnoscendis b. d.; adgnoscendis, R., Sill. De coelestibus prodigiis per exempla hisiorica. Lampades, R. d.; faces lumpades , Sill. Bolides. Trabes coelestes. Casma coeli ; casma R. T.; chasma , Sill. De coeli coloribus. De flamma coelesti ; de R. b. De coronis coelestibus. De cireulis repentinis. Plures soles. Plures lunae. Dierum noctibus lux, R. T. b. d.; dierum lux nocübus, Sill. Clipei ardentes. Ostentum coeli semel notatum. De discursu stellarum. De stellis quae Castores vocantur. De aere, Sill. addit et quare lapidibus pluat. De estatis tempestatibus, estatis b., de statis T., d., Sil. De caniculae ortu ; ortu, R.T.b d.; exortu, 7. Vis temporum anni statuta ; statuta, r; stata, Sill. ( 424 ) De incertis tempestatibus. De imbribus R. b.r.; et imbribus T. d. Quare lapidibus pluat R. T. b. d. r.; quae transjecit Brote- rius pone verba de aere. De tonitribus et fulguris, fulguris, b; fulgetris, Sill. Qua ratione equo (1) reddatur; (1) echo, Sill.; quae rationes echo reddant T. d, Ventorum genera; ventorum genera naturae, Sill.; et na- turae T. d. Naturae observationes , Sill. transposuit naturae. Lenefias, eenephias, Sill. Typhon. Turbines, presteres, vertices. Alia prodigiosa genera tempestatum, tempestivorum R. De fulminibus quibus in terris non cadant et quare; ca- dunt, a. b. Genera fulminum (4) et miracula; (1), fulgurum, Sill, Etrusca observatio et romana; observatio in his, Sill. Catholica fulgurum de fulminibus evocandis R. T..; de ful- minibus evocandis Catholica fulgurum, Sill. Quae nunquam feriantur. Lacte pluvisse sanguine carne ferro lana lateribus cocti frumento ; frumento addunt R. T. b. d. De coelo armorum crepitus et tubarum sonitus auditos, omitt. Sill. De lapidibus coelo cadentibus. Anaxagorea de his. Arcus coelestis. Natura grandinis nivis pruinae nebulue roris. Nubium imagines. Proprietates coeli in locis. Natura terrae. De forma ejus. An sint antipodes. ( 425 ) Quomodo aqua terrue innexa b.; addunt quue ratio flumi- num R.T. d. An cireumdatur terra oceanus , terrae, Sill. Quae porcio terrae habitetur. Mediam esse mundi terram. De obliquitate undarum, a. b; zonarum, Sill. De inaequalitate luminum ; climatum , Sill.; liminum , a. b. Ubi eclipsis non appareat et quare ; eclipsis, R. a.; eclipses non adpareant, Sill. Quae ratio diurnae lucis in terris. Gnomica de ea re ; gnomica, a; gnomonica , R.T. d., Sill. Ubi et quando nullae umbrae. Ubi bis anno ; in anno T. Ubi in contrarium umbrae feruntur; ferantur R, Sill. Ubi longissümi dies ubi brevissimi ; ubi brevissimi omittit R. De primo orologio; horologio, Sill. Quomodo observentur dies ; observantur R. Differentia gentium ad rationem mundi ; et ratio, R. De terrae motibus. De terrae hiatibus. Signa motus futuri. Auxilia contra motus futuros. Portenta terraruim semel tradita. Miracula terrae motus. Quibus locis maria recesserunt; recesserunt T, recesserint R. Sill. Insularum enascentium ratio. | Quae (1) et quibus temporibus enatae sint ; (1), et quae T. Quas terras interruperunt maria; interruperint b, Sill. Quae insulae continenti ajunctae sunt ; adjunctae, Sill. Quae terrae in totum mari permutatae. Quae terrue ipsae seminaverint, b, d.; se sorbuerint, Silf. Urbes haustae mari. De praculis, R. b. d.; spiraculis T, Sill. 2me SÉRIE, TOME XI. 30 ( 426 ) De terris semper trementibus. Quibus locis non pluat; pluat T. b.; impluat R. a. d., Süll. De insulis semper fluctuantibus; quae Sill. collocat pone trementibus ; Fluctuantibus, R. a. b. ; omittunt T. d. Acervata terrarum miracula. Qua ratione aestus maris accedant et recedant. Ubi aestus extra rutionem idem faciat; faciat, b; faciant, SilL, Miracula maris. Quae potentia (1) lunae et terrena et (2) marina (5) quae solis. (1) potestas R; (2) ad, Sill. (3) marina R. b., Sill; maria T: di Quare salsum mare. Ubi altissimum mare. | Mirabilia fontium et fluminum ; fluminum et fontium T. Tqnium et aquarum functa (1) miracula; (4) juneta, Sill. De maltha. De napta ; naphtha, Sill. Quae loca semper ardeant. Ignium per se miracula. Terrae universae mensura ; mensurae T. b. Harmonica mundi ratio. Suimma res et hystoriae et (1) observationes CCCCX VII; (1) et omitt. T. Ce premier passage concorde assez avec le texte publié par Sill. et a le plus de ressemblance avec les manuscrits b.R.T. d. IT. — Laser ui, car. 5, sEcTio 4, $S 22-26. Post eos quo dicitur ordine intus recedentes (4). Radice pyrenei ansetant. [tani. (2) Lacetani. perque pyrenewm Cere- tani (3) dein Wascones (4). 1 ( 427 ) (1) Pone recedentes punctum omittit Sill. (2) Itani Lacetani, d; omitt. Itani R., Sill (5) Ceretani R. d.; Cerretani À (4); Vas- cones, Sill. In ora autem colonia Barcine (1) cognomine faventia ; (1). Barcine R. Oppida civium romanorum vetulo (1) irulo (2); (1) Baetulo, SilL. ; (2) irulo, R. T. d.; iluro, À., Sill. Flumen arnon (1) blanbee (2); (1) Larnum , Sill.; (2) Blan- _ bae, R; Blandae, Sill. Flumen albae (1) emporia(2) egeminum(3).(1) albe R. d.; alba À, Sill. (2) emporiae, Sill. (5) geminum, Sill. Hoc veterum incolarum et graecorum qui foceensium (1) fuere soboles (2). (1) phoceensium , Sill. ; (2) suboles A. Flumen Ticher (1) ab eo pyrenea venus; (1) Ticher R.T. d. In latere promontorii (1) altero (2) quadraginta (3). (1) pro- montori, Sill. (2) alteri d (3) XL. M. Sillig. Nunc per singulos conventus redduntur (1) insignia (2). (1) redduntur À; reddentur , Sill.; (2) pone #nsignia Sill. non collocat punctum. Praeter supradicta Tarracone disceptant (1) populi qua- draginta tres. quorum celeberrimi civium romanorum Den- tosant (2). Bisgargitani, latinorum Ausetani. Cerretani (3) qui Julitani (4) cognominantur. et qui Augusiani ac (5) Deiani. Gessorienses (6). Gerudenses (7). Teari qui julien- ses. Siipendiariorum aquicaldenses. Onenses (8). Baculonen- ses (9). (1) disceptant, A; discertant R. T. d.;(2) Dertusani, À, Sill.;(3) cerretani, A; (4) Julitani, R.T. d.; juliani A . Sill.; (5) ac detani, d. edetani, R. Sill.; (6) Gerudenses gessorienses, Sill.;(7) ge- rudenses, À. d.; gerundenses , Sill.; (8) Onenses R. d., Sill. (9). Baeculonenses, R. a. T. d., Sill. Caesar Augusta colonia inmunis amne (1) libero adfusa ubr (2) oppidum antea vocabatur salduvia (5) regionis rede- taniae(k) recipit (5) populos quinquaginta quinque; (1) Ibero, ( 428 ) Sill.; (2) oppidum ubi, d., (5) Salduvia, d.; salduba, Sill. ; (4) redetaniae, d.; (5) recepit R. Ex his civium romanorum. Bellitanos (1). Celsenses (2). ex colonia gala (5) curritanos qui nasici (4) cognominantur. ilernensi (5) Surdaonum (6) gentis juxta quos (7) choris (8) fluvius ostensis (9). (1) Bellitanos R. d.; (2) celsensis, Sill.; (3) calagurritanos R. a.T. d. Sill.; (4) nasici, R. d.; nassici, T. Sill.; (5) Ilerdensis, Sill. ; (6) urdaonum, A; (7) quos d.; (8) Sicoris, Sill ; (9) ostensis R. d. oscensis, Sill. ; | Regionis suesselaniae (1) turias (2) sonorisus. latinorum velerum cascanteses (5). Ergavicenses (4) gracurritanos (5). Leonicenses (6). Ossigerdenses (7). (1) Vescitaniae, Sill. ; (2) turias senorises, d.; turiasonenses, Sill. ; (5) cascantensis, Sill.; (4) ergavicensis, Sill.; (à) graceuri- tanos R. d. y; gruccurritanos, A. Sill. (6). Leonicenses, A; Leo- nicensis, Sill.; omittunt R. T.d.;(7) ossigerdenses A. £. ; osicer- densis Sill.; omittunt R. T. d. Foederatos (1) Tarragenses (2) stipendiarios arcobrienses (5). Andolegenses (4). Arocelitanos (5) Burranenses (6). Cala- corritanos (7) qui fibularenses (8) cognominantur. (1) Focderatos A, omitt. R. T. d.; (2) Tarragensis, Sill.; (3) arcobrigensis, Sill.; (4) andolegenses, d.; andolegensis, Sill.; (5) arocelitanos, d. oc. B. +.; aracelitanos, Sill.; (6) Bursao- nensis, Sill. ; (7) calagurritanos, Sill. ; (8) fibularenses, R. A.T., Sill. | | Complutenses (1). Carenses (2). Cincenses (3). Cortoenses. (4) Damanitanos (5). Spalenses (6). Larnenses (7). Lursenses. (8). Ilimberitanos (9). Lacetanos. tubienses (10). Pompolen- ses (11) resigienses (12). (1) Complutensis, Sill.; (2) carenses , A. 0. c.; (5) cincensis, Sill. (4) Cortoenses, As; Cortonenses, Sill. (3). Damanitanos, R. A, Sill.; (6) spallenses, A; omitt. Sill. (7). Larnensis, Sill.; (8) Lursenses, T. d; Lursensis, Sill.; (9). llumberita- ( 429 ) nos R. d.; Lumberitanos, Sill; (10) iubienses R. d. oc; Lu- bienses, Sill.; (11) Pompolenses À ; Pompelonensis, Sill. (12) Segienses , Sill. Karthaginent conveniunt populi sexaginta (1) quinque ex- ceptis insularum incolis (1). 65 KATY; 72,8. Ex colonia acitana (1) gemmelenses (2) et Libisosona (3) cognomine foro Augustana (4). Quibus duabus jus Italiae datur. (1) Accitana, Sill., (2) gemellenses, Sill.; (5) Libisosona RAdr; (4) fore augustana, A. Ex colonia salariense (1) oppidani lati (2) veteres castulo- nenses qui Cuesarti venales appellantur. (1) Saleniense, R; (2) lati, R; in codice Luxemburgensi ni suprasceriptum. Setabitani (1) qui Augustani valerienses ; (1) Saetabitani, Rd, Sill.; setabitani, A. Stipendiariorum autem celeberrimi labanenses (1). Basti- tani (2). Consaburrenses (3). Dianenses. Gelestanit (4). Lorci- tani(5). Laminitani Mentesani (6). qui et oritani. Mentephani (7). Qui et bastuli. oretani. qui et Germani cognominantur. Caputque(8) Celtiberiae segrobigenses (9). Capetani (10) Tole- tani tago flumini impositi. dein viacienses (11) et virgilienses in glutinensem conventum (12). (1) Labanenses AK ; alabanenses R. ?, Sill., (2) bastitani R. d'; (3) consaburrenses, RAS; (4) gelastanii R; Egelestani, Sill. (5) Iorcitani, Sill.; lorcitani 65; lorcitarii, R; (6) mentesani, A, Sill.; (7) mentephani cod. luxbg.; mentesani, Sill., (8) caput quae, A; (9) segobrienses, R ; (10) carpetaniae AT, Sill., (11) viatienses , R.T.6., Sill.; (12) in cluniensem conventum collo- cant in initio IT, LIT, 4, 26. A et Sill. Vuardiuli (1) ducunt populos quatuordecim ex quibus iabanenses (2) tantuin nominare libeat. Turmogildi (3) qua- tuor. in quibus segisammonenses(k) et segissamaiulienses (5). (4) Vardiuli, R.; varduli, À, Sill.; (2) iabanenses, R. d., alba- ( 430 ) nensis , Sill. (3). Turmodigi RA, Sill.; Turmogidi «. +. (4). Segi- samonenses , Sill. (5). Sigisamajulienses, R. a., Sill. In eundem conventum carietes et vennesi (1) quinque civi- tatibus vadunt (1). Vennenses, Sill.; vennese quinque, A. Quarum sunt velienses. Eidem Pelleodeones (4). Celtibe- rum (2) quatuor populis quorum numentini (3) fuere clari. Sicut in vacceorum (4) decem et octo civitatibus. Intercanti- nienses (5). Palantini (6). Lacobrigenses (7). Caucenses (8). (1) Pelleodeones , d., Pelendones, Sill.; (2) celtiberum RA5; (5) numantini , Sill.; (4) vaccaeorum, Sill.; (5) intercatinienses R. T.8. s.; intercatienses, À, Sill.; (6) Palantini, R; Pallantini, Sill.; (7) lacobrigenses R. 8. .; (8) caucenses, R. A. III, — LiBer x, cap. xu1, 25-26. Praeparatur (1) ex eo carta (2) divisa (3) acu in praetenues (4)sed quam latissimas philuras(5). De VIIII cartarum gene- ribus (rubrica) (6). Principatus medio atque (7) indiscissurae (8) ordine hieratica appellatur antiquitus religiosis tantum voluminibus dicata. quae ab lucione (9) Augusti (10) nomen accepit. Sicut secunda Liviae a conjuge est. Ita descendit iheratica in tercium nomen. Proximum (11) amphitheatricae datum fuerat a confecturae loco. (1) Praeparatur a. r.; praeparantur, Sill. ; (2) charta R.; char- tae, Sill. (3) diviso, Sill.; (4) praetenuis, Sill.; (5) philuras, a. d.; (6) omit. Sill. et caeteri codd ; (7) atque a. 4.; (8) indiscis- surae a. d.; (9) ab lucione, #; adulatione, R, Sill.; (10) Augusti R. T. a. d.; (11) proxumum , Sill. Excepit hanc Romae fauni (1) sagax officina tenuatamque curiosa interpolatione (2) principalem fecit pleucia (3) et nomen ei dedit quae non esset. Ita recurata in sua (4) reman- sit amphitheatrica. (1) Fauni, a. Sill.; (2) interpolatione, ad.; (3) e plebeia. Sul.; (4) sua, a; suo, Sillig. ( 431 ) Post hanc saitica ab oppido ubi maxima fertilitas (1) ra- mentis propiorque etiamnum et cortica (2). Leneotica a vicino loco pondere jam haec non bonitate venalis. (1) Pone fertilitas Sil. collocat ex vilioribus (2) cortici taeniotica, & Sill.; cortica leneotica , S. T. &. d, y. Nam emportica (1) inutilis scribendo involucris cartarum segestrium quae (2) mercibus (5) usum praebet et ideo a (4) mercatoribus cognominata. (1) Emporetica, Sill.; (2) segestriumque R. T:Sill.; (3) mer- cibus R; et ideo a, a; ideo a; R. Sill. Post hanc (1) papyrum est extremumque ejus (2) scirpo simile ac ne funibus quidem (5) nisi in humore (4) utile. Quo- modo cortae fiant (rubrica) (5). (41) Post hanc, R. a. d.; (2) ejus Ra.; (3) funibus quidem, a. d; (4) umore, Sill. ; (5) omitt. Sill. et caet. codd. Texuntur omnes (1) mandante(2) tabula nili acua turbidus liquor (3) in glutinis praebet in re eum (4) primo supina tabula (5) sceda (6) allinitur (7) longitudine papyri q potuit esse resigniminibus (8) amputatis utrumque (9) transversae (10) postea crates peragit (11) premitur deinde (12) et siccan- tur sole plagulae atque inter se junguntur. (1) Texuntur omnes, By; texitur omnis, T Sill. ; (2) madente tabula, R.T. x. 9, Sill. (3) liquor in, a; liquor vim, R. Sill.; (4) in rectum, R. Sill. ; (5) tabula, ad By; tabulae, R. Sill.; (6) sceda, a; scheda, d'Sill.; (7) adlinitur , Sill.; (8) resigminibus a. d., Sill. ; (9) utrimque amputatis, Sill.; (10) transversa, Sill.; (11) pe- ragit, adr ; (12) deinde prelis , Sill. Proximorum (1) semper bonitatis diminutione(2) ad te- lerrimas (5) nunquam plures scopo (4) quam vicenae(5). (1) Proximarum, Sill.; (2) diminutione, ad By; deminutione ; R; (5) deterrimas, Sill.; (4) scapo, Sill.; (5) vicenae, Sill., vicinae, d, Magna in latitudine earum differentia XIIT digitorum optimis (1) duo detrahuntur heraticae (2). Fanniaca denos ( 432 ) habet et uno minus amphytheatria. Pauciores saittica nec alio (5) sufficit. Nam emporeticae brevitas sex digitos non ex- cedit. (1) Optumis, Sill. ; (2) hieraticae, Sill.; (3) nec malleo, Sill. alio, «. De probatione cartari et. (rubrica). Praeterea spectantur (1) in cartis (2) tenuitas densitas (5) livor (4). Primatum (5) mutuavit claudius caesar nimia quippe angustae (6) tenuitas temperandis (7) non sufficiciebat calamis. Ad hoc tramittens (8) litteras littere (9) metum affe- rebat ex adversis (10) et alias in decore (11) visu pertra- lucida (12). (1) Spectatur, Sill.; (2) chartis, Sill.; (3) densitas candor, Sill.; (4) levor, a Sill.; (5) mutuavit, a. d; mutavit, Sill.; (6) Augustae, Sill.; (7) temperandis, S; tollerandis, Sill., R; (8) tramittens, a; transmittens, Sill. (9) liturae, Sill. (10) ex ad- versis T.R. d.; ex aversis RSur, Sill.; (11) indecoro, Sill.; (12) pertralucida, «a ; pertranslueida , Sill. Igitur secundo corio statumina (1) facta sunt. et primo optemina (2) auxit et latitudinem. Pedalis erat mensura (3) et cubitalis macrocollis (4). Sed ratio deprehendit vicium unius cede (5) revolsione plures (6) infestantis (7) paginas. Ob haec praelata omnibus claudiae (8) Augustae in epistolis auctoritas relicta. Laviana (9) suam tenuit. Cui nichil primum (10) erat sed omnia secunda (11). | (1) Statumina RST. a. d. ;(2) subtemina, R. d.Sill.; soptemina, « (3) erat mensura By; mensura erat, Ra. d. Sill.; (4) macrocollis, R. T. a. d. r. Sill.; (5)schedae, a Sill.; (6) pluris, Sill.; (7) infes- tante, Sill.; (8) claudia, Sill. (9) Liviana, Sill.; (10) primum, Sr; e prima, Sill. ; (11) secunda RST. a. d.r., Sill. Scabricia levigatur (1) dente concavo (2). Sed caducae litte- rae fiunt, minus sorbet politura. Cartha magis splendet. Rebellat saepe humor (5) incuriose datus primo malleo (4) qui et (5) deprehenditur a vi (6) etiam odoris (7) cum fuit (8) indiligentior. ( 435 ) (1) Levigatur, a; (2) conchave, Sill.; (5) umor, Sill.; (4) primo malleoque, Sill.; (5) et omitt. Sill.; (6) a vi, S; aut, d. Sill.; (7) odoris Sr; odore, «d Sill.; (8) fuit de; fuerit, T Sill. Deprehenditur et (1) oculos. Sed inserta mediis glutina- mentis tenea (2) iunco (3) papiri bibula (4) vix nisi (5) littera findente (6) se tantum inest fraudis. Alius igitur iterum ten- dentis (7) labor. glutinum vulgare (8) et Apollinis (9) sole (10) temperatur fervente. quan (11) minimo aceti aspersu. Nam fabrile commiscuae (12) fragilia sunt.. (1) Et lentigo, Sill. ; (2) tenea, R. «. d.; (5) iunco, Kr; fungo, R. d.; (4) bibula R. a. d. Sill.; (5) vix nisi, R. a. d.; (6) fundente, Sill.; (7) texendis, R. Sill. ; (8) volgare, Sill.; (9) e pollinis, Sill.; (10) flore, Sill. ; (11) aqua, Sill.; (12) commiscuae, a. Diligentior cura mollis panis fermentata aqua colata fer- vente minimum hoc modo intergeri (1) atque etiam lenitas (2) superatur. Omne autem glutinum nec vetustius uno die (3) esse debet nec postea malleo recentius tenuatur glutino per- currit (4) tterumque cum scripta (5) erugat (6) atçue exten- ditur malleo. Ita sunt (7) longinqua monimenta tiberica (8) veroque gracheorum (9) manus (10) apud Poimponium secun- dum altem (11) civemque clarissimum vidi annos fere post ducentos. Jam vero Cyceronis ac divi Augusti Virgiliique(12) saepe numero videmus. (1) Intergeri, T. a; intergerivi, Sill. ; (2) Lini lenitas, Sill. ; in nostro cod. lini omittitur (3). Nec vetustius esse debet uno die, SilL. ; (4) percurritur , Sill. ; (5) conscripta, Sill.; (6) erugatur, Sill.; (7) sint, Sill.; (8) Tiberi caïique, Sill.; (9) gracchorum, Sill.; (410) manus, R. a.; manus quae, Sill.; (11) altem a. d., vatem, Sill.; (12) Vergilique, Sill. IV. — LiBer xv. Colitur ficus arbor in foro ipso ac comitio romae nata sacro (1) fulgoribus (2) ibi conditis. magisque ob memoriam (434) ejus quae nutrix (3) romuli ac remi appellata quoniam sub ea inventa est lupa infantibus praebens rumen (4). (4) Sacro, a. d.; sacra, Sill.; (2) fulgoribus, a; fulguribus, Sill.; (3) nutrix D. a.; nutrix fuit, dB; (4) rumenita, 893 ru- mine, Sill. Tia vocabant mammam miraculo ex acre juxta dicato. tan- quam in comitium sponte transisset. acto (1) navigio üilico arescit. rursusque cura Sacerdotum seritur. fuit et ante Sa- turni aedem. urbis anno (2)... sublata sacro a vestalibus facto. Cum Silvani (5) isi simulacrum subveret (4) eadem. fortuitu (5) autem vivit in medio foro quasi dantia imperii funda- menta (6). Ostento fatali curetus (7) maximis bonis hoc est viriutle ac pietate ac morte praeclara expleverat aeque (8). (1) Atto navio augurante nec sine praesagio aliquo arescit, D. Sill. acto navigio, dos; (2) anno CCIX, Sill.; numerum omitt. a. d.; (3) Silvani isi, a; Silvani, d.; Silvani et isidis , r (4). Subverteret, a; subverteretur, T. d.; (5) fortuito saltu ivit, d. Sill,; autem fortuitu vivit, r. (6) qua sidentia imperi funda- menta, Sill.; Curtius, Sill. (8) aeque omitt. Sill. qui pone ex- pleverat punctum collocat. Fortuita eodem loco est vitis atque olea wmbrae gratia sed utilitate (1) plebeia satae. ara (2) inde sublata (3) gladiatorio mrunere divi juli quod novissime pugnawvit in foro. (1) Sedulitate, d. Sill.; sed utilitate, r ; (2) ara, a. d. (3) su- blato 8. Admirabilis est pomi hujusce festinatio unius in cunctis ad maturitatem properantis arte naturae. V. — Lier xXV. CAPUT 1v. SECT. 11 SÇ 50-38. Panaces ipso nomine omnium morborum remedia promittit numerosum et diis (1) immortalibus (2) ascripsit (3) unum quippe asclepion cognominatur. Quoniam (4) is filiam pano- ciam (5) appellavit. 0) : (1) Dis, Sill. ; (2) inventoribus, Sill.; (3) adseripsit; a; ad- seriptum, Sill. (4) quoniam is, « (5) panociam V. d.; Panaciam, DSL. Succus est coactus qualem (1) ferule diximus. radix (2) est multi corticis et salsi. (1) Ferulae qualem, Sill. (2) radice, Sill. . Hac evulsa (1) scrobem repleri vario genere frugum religio * (2) «c (3) terrae piamentum (4) est. (1) Evolsa, Sill. ; (2) religio est, Sill.; (3) ac, a; hac V. d. (4) piametum V. Ubi et quo (1) fieret modo aut (2) quale maxime (3) proba- relur inter peregrina docuimus. (1) Quonam T. a. d. ; Sill.; quo L. (2) aut, 6. V.R. a. d. et By; (5) maxume, Sill. Id quod (1) Macedonia affertur to (2) vocant ar- mentariis (3) sponte erumpentem sucum exciprentibus. (1) Qudod Macedonia, a; quod e Macedonia, Sill.; (2) buco- licon , Sill. (3) armentari, a. Hoc celerrime (1) evanescit (2) et in autem generibus impro- batur. (5) maxime nigrum et molle. id enim argumento (4) cera adulterati (5). (1) Celeberrime V. d.; (2) vanescit, VR. Sill. ; evanescit a. d. By (5) improbatur a.; inprobatur, Sill. (4) argumento est, Sill.; argumento 8. V.R. a. d. (5) adulterati, R. «a. Sill. De panace heracleon (rubrica). Alterum genus heracleon (1) vocant et ab (2) Hercule inventum tradunt. Ali origanum heraclyoticum (3) sylvestre (4) quoniam est origano simile. radice inutile (5) de (6) origano diximus. (1) Heracleon , Ra. d. ; (2) et ab, Ra, (5) heracleoticum aut Td Sill. ; omisso aut, 28). silvestre, Sill. (5) inutili, Sill. (6) de quo, "Sill. De panace chyronion (rubrica). Tertium (1) panaces chyro- . nion (2) cognominatur ab inventore. folium ejus lapato (5) Simile, maius tamen et hirsutius. Flos aureus radice parva. ( 436 ) nascitur pinguibus locis. hujus flos efficacissimus eoque am- plius quam supradicta prodest. (1) Tertium V.R. «.; tertium genus, T. d.; (2) chironium, Sill. (3). lapatho, Sill. VI. — Liper xxxv, CAP. 11, SECT, 2 ÇS 10-14. Asinii (1) Pollinis (2) romae hoc inventum. qui primus bibliothecam (5) magno certamine instituit (4). dicando in- genia hominuin rempublice (5) fecit. an priores coeperint (6) Alexandri (7) et Pergami (8) qui bibliothecas magno certa- mine instituere non facile dixerim(9). ymaginum (10) amore (11) flagrasse quondam (12) testes sunt Atticus (13) ille Cice- ronis edito (14) de his (15) volumine. m. Varro benignissimo (16) invento inserto (17) voluminibus (18) suorum (19) fecun- ditatum (20) septingentorum (21) illustrium (22) aliquo modo imaginibus. non passum (25) intercidere figuras aut vetus- tatem aevi (24) valere inventur mu (25) quis etiam (26) dis (27) invidiosi (28). quando immortalitatem non solum dedit. sed (29) etiam in omnes terras misit. ut praesentes esse ubique dii (50) possent. et hoc quidem alienis (51) praestitit. (1) Asini, Sill.; (2) Pollionis, B. Sill. ; (3) bibliothecam, Sill.; (4) instituit rasum in cod. nostro; omitt. Sill. et Codd. (5) rem- publicam , Sill.; B.; rempublicae Vr; publice Rdh; (6) coepe- runt, R; (7) Alexandreae, B. Sill. (8) Pergami reges, Sill.; (9) omitt. punetum cod. noster; (10) imaginum , Sill.; (11) amorem BN. Sill.; amore VRdATPy (12). Quondam BVRdh; (15) Atticus, Bd ; et Atticus VRANBy (14) editis et voluminibus, N; (15) de his, VNd.8y; de ïüis, R;(16) benignissimo B. d.; benignissime, VRP; (17) inserto, P ; insertis, Sill.; (18) voluminibus VR4P ; voluminum, B (19) suorum, BVRdhpP; (20) fecunditatum, hp; (21) septingentorum BVRPN; (22) inlustrium, Sill.; (25) passus , Sill.; (24) pone aevi collocat Sill. contra homines (25) inventor muneris, Sill, ; (26) etiam , Sill. omisso quis (27) dis, ( 431 ) Sill.; (28) invidiosis N ; (29) verum, Sill.; (30) et eludi, Sill.; (31) alienis ille , Sill. Quorum (1) clyppeos in sacro vel publico dicare (2) primus privatim instituit ut reperio appius claudius, qui consul cum servilio fuit anno urbis CCLVIIT (3). Posuit enim in Bellonae aede majores suos. placuitque in excelso spectari. et titulos honorum legi. decora res utique si liberum (4) par- vulis (5) imaginibus ceu nidum aliquem sobolis pariter os- tendant (6). quales clyppeos nemo non gaudens favensque aspicit. (1) Verum, B. Sill.; (2) dicare primus privatim, d.; dicare privatim primus, BVR Sill. (5) CCLIX, BVRA Sill. (4) Fes turba, VR Sill.; (5) parvulis T. d. >; parvolis, Sill. (6) ostendant VRdr; ostendat Bh, Sill. Post eum m. D. collega in consulatu nee Lutati (1) non in basilica modo aemilia verum domui (2) suae posuit id quoque marcio exemplo. scutis enim qualibus apud Troiam pugnatum est continebantur yinagines (3). unde et nomen habuere clypeorum non ut perversa grammaticorum subtilitas voluit a cluendo (4). origo plenam (5) virtutis faciem reddi a scuto cujusque qui fuerit usus illo. (4) Lutati, BR ; (2) domi, Sill. (3) imagines, Sill. (4) eluendo, BVRdA (5) plena, Bk Sill.; plenam VRd. Poeni ex auro factitavere et clyppeos et ymagines secumque in castris venere (1). Certe captis (2) talem hasdrubalis in- venit Marcius (5) Cypionum (4) in hispania ultor isque (5) clippeus supra fores (6) capitolinae aedis usque ad incendium primum fuit. (1) Vexere, BP Sill., venere VRd; (2) captis, VRd; (5) martius, T; marcius, Sill.; (4) scipionum, Sill.; (5) ultor isque, d. Sill.; (6) foris, Sill. Majorum (1) quidem nostroruin (2) tanta (5) securilas in ea re (4) annotatur ut L. manilio (5) fulino (6) consulibus anno urbis DLXXV. M. aufidius tutelae capitoli (7) re- ( 458 ) demptor docuerit patres argenteos esse clyppeos qui pro aereis (8) per aliquod jam lustra assignabantur (9). (1) Majorum, Bd. Sill.; (2) nostrorum , d. Sill.; (5) tanta. Sill.; omitt. » (4) ea re, Bdh;(5) manilio, VRdh: manlio, Sill.; (6) Q. fulvio d. Sill.; (7) Capitolii, VRdh£y(8). Aereis Bd; Sill. (9) adsignabantur , Sill. ( 439 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 4 avril 1861. f M. Van Hassezr, vice-directeur, occupe le fauteuil. M. An. QueTeLer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, De Keyzer, Fr. Fétis, Leys, Navez, Roelandt, Jos. Geefs, Érin Corr, Fraikin, Partoes, Baron, Éd. Fétis, De Busscher, membres ; Calamatta, Daus- soigne-Méhul , associés ; Balat, correspondant. M. Ducpetiaux, membre de la classe des lettres, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. Il est donné lecture d’une lettre de M. le Ministre de l’intérieur, faisant connaître qu’un prix de trois cents 2 francs, ou une médaille d’or de même valeur, sera décerné à l’auteur du poëme dont il sera fait choix pour le concours de composition musicale de 1861 : « Le poëme devra être écrit en français. ( 440 ) » Les écrivains belges, qui voudront concourir pour l'obtention du prix, adresseront, avant le 15 avril 1861, leur travail au secrétaire perpétuel de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. Le manuscrit ne portera aucune indication qui puisse faire connaître l’auteur. Il sera accompagné d’un billet cacheté contenant le nom de celui-ci. » Il est interdit, sous peine d’être déchu du prix, de faire usage d’un pseudonyme. Dans ce cas, le prix serait dévolu au poëme qui suivrait immédiatement dans l’ordre du mérite. » M. le secrétaire perpétuel fait connaître qu’il a reçu jus- qu'à présent dix-huit poëmes; deux ne satisfont pont aux conditions prescrites : ils ne sont pas accompagnés d’un billet cacheté contenant , comme il est demandé, le nom de l’auteur. Ces poëmes sont intitulés {a Gerbaude et la Mort d’Homère; les auteurs sont invités à transmettre le plus tôt possible le billet cacheté nécessaire au secrétariat de l’Académie, et ils auront soi d'indiquer leurs poèmes, en reproduisant les vers qui en forment le commencement ou la fin. — M. F. Fétis fait hommage du second volume de sa Biographie universelle des musiciens. — Remerciments. — M. Braemt, trésorier de la caisse centrale des artistes belges, fait connaître qu’il a reçu du gouvernement une somme de cinq cents francs pour cette institution. — M. le secrétaire perpétuel fait connaître qu’il a reçu de M"° Snel une lettre annonçant la mort de son époux, M. Joseph-François Snel, membre de la classe des beaux- arts. Il est chargé d'exprimer, au nom de ses collègues, ( 441 ) les regrets que leur à fait éprouver cette perte doulou- reuse. M. Fr. Fétis communique le discours qu'il a bien voulu prononcer sur la tombe du défunt, et il promet, sur M. Snel, une notice qui sera insérée dans le prochain An- nuaire et accompagnée d’un portrait gravé par les soms de M. Calamatta. — M. Ducpetiaux, membre de la classe des lettres de lAcadémié, présente un travail manuscrit Sur la Construc- tion des prisons cellulaires, accompagnée de deux plans. . MM. Roelandt, Partoes et Balat sont nommés commis- saires pour examiner ce travail. RAPPORTS. Sur une messe solennelle de M. Pierre Benoît, lauréat du grand concours de composition. Rapport de M. Dauussoigne-Bleéhaul. « La messe à deux chœurs avec accompagnement d’or- chestre, envoyée au Gouvernement, en 1860, par M. Pierre Benoit, est une œuvre de longue haleine et mérite l’exa- men le plus approfondi. Persuadé que notre illustre con- frère, M. François Fétis, a pris le soin d’en détailler la valeur, je n’abuserai pas des instants de la classe en appuyant sur les beautés que renferme cette partition. Le QMe SÉRIE, TOME XI. 51 ( 442 ) style en est large, élevé et généralement approprié à la gravité du sujet. Ce n’est plus l’œuvre d’un élève distin- gué, mais l'expression d’un talent sérieux. La seule obser- vation que je me permettrai d'offrir à son auteur repose sur l'extrême étendue de la plupart de ses morceaux. Dans son ensemble, une messe en musique ne doit pas dépasser certaines dimensions, sous peine de fatiguer l’auditoire. Telle est, pour n’en citer qu’un exemple, la fugue du Credo, page 157 à 181. » Somme toute, cette composition fait le plus grand honneur à M. Pierre Benoît. » Bapport de M. Fr. Félis. « M. Pierre Benoît, satisfaisant aux prescriptions du règlement du grand concours de composition, a envoyé, en témoignage de l’activité de ses travaux à l'étranger, pour l’année 1860, la partition d’une messe solennelle à deux chœurs, laquelle a été soumise à l’examen de la sec- tion permanente des grands concours de composition mu- sicale. Mes honorables confrères et collègues, MM. Daussoigne- Méhul et Snel, ont bien voulu se charger de voir cet ou- vrage avant moi que d’autres travaux préoceupaient. M. Daussoigne -Méhul à exprimé son opinion favorable dans le rapport qui accompagne celui-ci; mais M. Snel, retenu au lit par une douloureuse et longue maladie, m'a fait renvoyer la partition, et m’a fait écrire que ses souf- frances ne lui ont pas permis de se livrer à l’examen de Pouvrage de M. Benoît, et lont mis dans l’impossi- ( 443 ) bilité d'exprimer une opinion quelconque sur un fouvrage d'art. La messe de M. Benoît est une grande composition, digne de fixer l'attention sous les deux points de vue qui embrassent toute la valeur d’une œuvre d'art, à savoir, la pensée et sa réalisation. Dans la musique instrumentale, la pensée, le sentiment, jouissent d’une indépendance, d’une _ liberté illimitées qui vont jusqu’à l'idéal pur; mais lorsque V'art à un objet déterminé, comme celui de la musique re- ligieuse ou de la musique dramatique, le sentiment, la pensée se subordonnent aux exigences du sujet, et l’inspi- ration est d'autant meilleure que son caractère est plus conforme à ce sujet. Ce qui frappe au premier abord, dans l'examen de la partition de M. Benoît, c’est précisément l'accord du style avec l’objet religieux de son œuvre : ce style est grave; mais ce n’est pas à dire que ce soit celui de la musique d’'Église des maîtres qui ont écrit dans la seconde moitié du dix-hurtième siècle, ni dans la première du dix-neu- vième; car le jeune artiste marche dans une voie qui est la sienne et n'accepte pas l’autorité de la tradition. Il use des ressources de l’instrumentation, mais il n’en abuse pas; il en fait un accompagnement des voix et non une symphonie luttant avee celles-e1. Il ne craint même pas de faire taire son orchestre pour laisser à découvert l'intérêt sentimental qu'il à su mettre dans l’expression du texte sacré par les ressources vocales. L'ouvrage de M. Benoit est écrit pour un grand chœur et un petit qui dialoguent et quelquefois se réunissent : cette combimaison lui appartient; il en a fait le premier essai dans sa cantate couronnée au grand concours de composition musicale. Le Kyrie, écrit de cette manière (44%) avec une grande simplicité, est néanmoins riche d’har- monie, neuf et varié dans ses effets. Par une hardiesse fort rare aujourd'hui, ce Kyrie, et le Gloria dont il est suivi, commencent sans aucune ritournelle, et les voix entrent immédiatement sans avoir été mises dans le ton par un seul accord. Le Gloria, d’un caractère solennel, est néanmoins em- preint de la jubilation des paroles. Le dialogue des chœurs y est heureusement employé pour la marche rapide de la composition jusqu'au Qui Tollis peccata mundi. De cette partie du texte, le compositeur a fait un andante pour deux chœurs sans aucun instrument, et même sans l’accom- pagnement de l’orgue. Ce morceau , d’un genre neuf, pro- duira une profonde impression s’il est chanté avec justesse et sans que les voix baissent l’intonation, écueil ordinaire des morceaux de musique vocale non-soutenus par l’ac- compagnement. Le retour au premier mouvement sur les paroles Quoniam tu solus sanctus, termine avec éclat et sans longueurs cette partie de l’œuvre. L'observation de mon savant et honorable confrère, M. Daussoigne-Méhul, sur l’excès de développement de la messe de M. Pierre Benoît, trouve sa très-juste application au Credo. Le compositeur, qui n’a point fait de ritournelle aux autres morceaux, en fait ici une fort longue, dans un mouvement lent, et dans un sentiment contenu qu'un - crescendo amène enfin à la profession de for. Il y a là quelque chose de vague, d’incertain, qui ne me paraît pas répondre aux beautés répandues dans le reste de lou- vrage, et dont le motif m’échappe. Là où commence le chœur, sur les paroies Credo in unum Deum, l'arliste rentre dans le caractère qui convient à ce texte : ce caractère est majestueux comme lintonation st belle du plain-chant, ( 445 ) dont Cherubini à fait un heureux emploi dans son adnu- rable messe à trois voix. Les anciens compositeurs italiens ne répétaient pas les paroles dites par le célébrant : ils commencaient le Gloria à Et in terra pax, et le Credo à Patrem omnipotentem : cet usage paraît plus convenable, au point de vue litur- gique, que celui des maîtres des écoles allemande et fran- çaise qui commencent les Gloria et Credo des messes solennelles par les phrases initiales. Cherubini à introduit une nouveauté dans les Credo de ses messes, en y faisant intervenir une forme dramatique par la répétition du mot Credo, après chaque période du symbole des apôtres, comme une exclamation semblable au Kyrie eleison répété à chaque instant par le peuple, dans les messes grecques des premiers siècles. M. Benoît va plus loin, car, après la phrase Descendit de coelis, il recommence tout le Credo jusqu’à Factorem coeli et terrae, pour passer immédiate- ment à Et incarnatus est. J'avoue que je ne saurais ap- prouver ce bouleversement du texte sacré. À ne consi- dérer le premier morceau de cette partie de la messe de M. Benoît qu’au point de vue musical, on y trouve de fort belles choses et une originalité de pensée et de formes très-remarquable; mais, ainsi que je l’ai dit, en commen- çant ce rapport, 1l s’agit ici d’un ouvrage dont l’objet est déterminé, et l’imagination doit se soumettre aux exi- gences du sujet. Le mouvement lent sur les paroles Et incarnatus est, Jusques et y compris Passus eë sepultus est, ne mérite que des éloges; le sentiment en est exquis et la forme est d’une grande simplicité. M. Benoît, qui, avec raison, a évité les inouvements rapides dans toute sa messe, parce qu'ils font toujours naître la confusion dans les églises, à cause de la ( 446 ) répercussion des voûtes, a pris le contre-pied de la plupart des compositeurs dans le Resurrexil tertia die, où il a écrit par erreur tertia Dei : au lieu du mouvement de joie que tous ses devanciers ont cherché à exprimer sur ces paroles, il en à fait une introduction large pour la fugue magistrale qui se développe sur le texte depuis Et in Spiritum sanc- tum Dominum, jusqu'à Amen, et cette fugue est aussi d'un mouvement très-modéré. M. Daussoigue-Méhul a re- marqué avec raison que cette fugue est excessivement lon- gue; Je crois qu'il faut attribuer ce défaut à la grande quantité de paroles sur lesquelles le compositeur a établi ce morceau. L'obligation de se soumettre aux conditions scolastiques de ce genre de morceaux à toujours déterminé les auteurs de messes en musique à écrire leurs fugues de Credo sur les dernières paroles Et vitam venturi seculi. Amen ; M. Benoit, au contraire, s’est créé des embarras et des difficultés par la nécessité de soumettre aux exigences de la fugue de longues suites de paroles, sans nuire à la clarté d’articulation de celles-ci : c’est ce qui l’a entraîné dans les dévetoppements qui font de sa fugue une des plus longues qu’on puisse citer. Toutefois, sauf cet imconvé- nient, la fugue du jeune artiste est une œuvre de maître où l’on remarque partout une force de conception très-rare. Dans le Sanctus, 11 v a une erreur de disposition du texte à signaler à M. Benoît : elle consiste en ce que, après Sanctus, Sanctus, Sanctus, Dominus Deus Sabaoth, 1 y a une longue interruption par une ritournelle, avant Pleni sunt coeli et terra, gloria tua; ces paroles sont traitées en mouvement vif, et forment un morceau séparé avec l’'Hosanna in excelsis ; tandis que ces mêmes paroles Pleni sunt coeli, etc., sont le complément du commencement du Sanctus et ne doivent jamais en être séparées Il en ré- (447) sulte qu'après le Benedictus , au lieu de revenir à Hosanna, M. Benoît fait recommencer Pleni sunt coeli, ete., ce qui n’a point de sens. Je viens de parler de Benedictus, dont l’auteur à fait un chant de ténor accompagné par le chœur, et par une imstru- mentation délicate : ce morceau se fait remarquer par la suavité et par l’origmalité de la forme. On y sent une in- spiration douce qui arrive par degrés jusqu’à l’exaltation. L’Agnus Dei est aussi digne de beaucoup d’éloges : le chant et l’harmonie y sont empreints d’un caractère de douce mélancolie et de componetion dont l’âme est émue : malheureusement l'artiste s’y est encore abandonné sans réserve au développement de sa pensée, et a trop oublié les limites de durée établies pour le service divin. Les Jeunes compositeurs se laissent égarer sous ce rapport par l'étendue de la messe en si mineur de Jean Sébastien Bach et de la messe solennelle en ré de Beethoven : ces grands ouvrages, souvent exécutés dans les festivals de l’Allema- gne, sont des messes de concert : il serait à peu près im- possible de les introduire dans le service de l’Église, En terminant ce rapport, je crois devoir dire que les progrès de M. Benoît dans ses compositions, le sentiment intime qu'on y remarque, l'originalité de sa pensée et son habileté dans l’art d'écrire, me font espérer que la Belgique comptera parmi ses enfants un grand musicien de plus. » Les rapports de MM. Fétis et Daussoigne-Méhul ont été approuvés par la classe. — La classe procède ensuite à la nomination des mem- bres de la commission chargée de juger les cantates pour le ( 448 ) concours de Composilion musicale de cette année. MM. Fr. Fétis, Daussoigne-Méhul, Hanssens, Alvin, Van Hasselt et Baron sont désignés pour remplir ces fonetions. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Biographie universelle des musiciens et bibliographie géné- rale de la musique ; par F.-J. Fétis. 2"° édit., tome IL. Paris, 1861; 1 vol. gr. in-8°. Géographie et histoire des communes belges ; par Jules Tar- lier et Alphonse Wauters. Province de Brabant (canton de Ni- velles), Bruxelles, 1860; gr. in-8°. | Revue générale de l’état et des progrès de l’horticulture belge en 1859 et 1860; par Ed. Morren. 1860, in-8e. Notices bibliographiques diverses, relatives à des manu- scrits ou incunables conservés dans les bibliothèques publiques ou privées de Luxembourg ; par le D' A. Namur. Bruxelles, 1861 ; in-8°. Portefeuille de John Cockerill, 63% à 67%: livr. Liége, 1860, in-fol. Rapport sur les travaux de la Société libre d’Émulation de Liège, présenté, à la séance publique du 8 mai 1860, par Ulysse Capitaine. Liége, 1860; in-8°. Revue trimestrielle, XXX*%° vol. Bruxelles, 4861; in-12. Journal historique et littéraire, tome XXVIT, liv. 42. Liége, 1861; in-8. Journal des beaux-arts, IIT"° année, n°* 6 et 7. Anvers, 1861; 2 feuilles in-4°. La Belgique contemporaine, revue mensuelle, tome 1°, 4-3 livr. Liége , 1861 ; 3 broch. in-8°. ( 449 ) L' Abeille , revue pédagogique publiée par Th: Braun, VII": année , 4° à 5° livr. Bruxelles, 1861 ; 5 broch. in-8°. Annales de la Société médico-chirurgicale de Bruges, XXWU*:° année, 1% et 2% livr. Bruges, 1861 ; in-8°. L’Illustration horticole, rédigée par Ch. Lemaire, VIH: vol. 1re à 5% liv. Gand, 1861 ; 5 broch. in-8°. Publications de la Société pour la recherche et la conserva- tion des monuments historiques dans le grand-duchéde Luxem- bourg, tome XV, année 1859. Luxembourg, 1860; 1 vol. in-4°. Recherches astronomiques de l’observatoire d’Utrecht, pu- bliées par M. Hoek, {°° livr. La Haye, 1861; in-4°. Notes sur un manuscrit sur l’état de la France et de ses provinces vers la fin du X VIT" siècle; par L. A. N. 1 broch. in-8°. | Presse scientifique des Deux-Mondes , 1861, n°4 à 8. Paris, 4 broch. in-8°. L’Investigateur, journal de l’Institut historique, XXVIII** année , 314% et 315% livr. Paris, 1861 ; in-8°. Extraits des procès-verbaux des séances de la Société philo- matique de Paris, pendant l’année 1860. Paris, 1860; 1 vol. in-8°. Bulletin de la Société géologique de France, 2% série, tome XVIIT, feuilles 7-12. Paris, 1860 à 1861; 4 broch. in-8°. Bulletin de la Société industrielle d’Angers et du départe- ment de Maine-et-Loire, XXXI"° année. Angers, 1860; 1 vol. in-8°. Bulletin historique de la Société des antiquaires de lu Mo- rime, IX® année, 34° à 36° livr. Saint-Omer, 1860; in-8&. Revue agricole, industrielle et littéraire de la Société impé- riale d'agriculture de Valenciennes; XTI*° année, n° 5 et 6. Valenciennes, 1860; in-8°. Nouvelle biographie générale, depuis les temps les plus ré- culés jusqu’à nos jours, publiée par MM. Firmin Didot frères, 27€ SÉRIE, TOME xl. o2 ( 450 ) sous la direction de M. le D' Hoefer, tome XXXVr°, Panis, 1861 ; in-8°. Les libres échangistes et les protectionnistes conciliés, ou solution complète des principales questions économiques ; par J. du Mesnil-Marigny. 2"° édition. Paris, 1860; in-8&. Théorie de M. du Mesnil-Marigny sur la richesse des na- tions (séance de la Société d'économie politique). Paris, 1860; in-8°. De l’avenir financier des expositions nationales des beaux- arts, sous le règne de Napoléon LIT; par J. Maret-Leriche. Paris, 1861 ;in-12. Bulletin de la Société vaudoise des sciences naturelles, tome VI, bulletin n° 47. Lausanne, 1860 ; in-8°. Mémoires et documents publiés par la Société d'histoire de la Suisse romande, tome XVII. Lausanne, 14860; 4 vol. in-8°. Verhandlungen des naturhistorisch-medizinischen Vereins zu Heidelberg, Band IT, n° 3. Heidelberg , 1861 ; in-8°. Schrifien der küniglichen physikalisch-ôkonomischen Gesell- schaft zu Künigsberg, 1 Jahrg, 15° Abth. Kônigsberg, 1860: in-4°. Die Metamorphose des Caryoborus (Bruchus) gonagra Fbr.; von H. L. Elditt. Kôünigsberg, 1860; in-8°. Magnetische und meteorologische Beobachtungen zu Prag.. XXI Jahrg. Prague, 1861 ; in-4°. Verhandlungen der kaiserlichen-koniglichen zoologisch- botanischen Gesellschaft in Wien; X Band. Vienne, 1860; in-8°. Würzburger medicinische Zeitschrift ; KBand , 1 Heft. Wurz- bourg, 1861 ; in-8°. Bulletino nautico e geografico ; appendice alla Corrispon- denza scientifica di Roma, vol. 4, n° 4. Rome, 1861 ; in-4°. Noticia dos trabalhos magneticos executados no observatorio meteorologico do infante don Luiz na Escola polytechnica ; (451 ) apresentada à Academia real das sciencias pelo socio effectiva Joaquim Antonio da Silva. Lisbonne, 1860; in-4°. The report of the british Association for the advancement of science ; held at Aberdeen in september 1859. Londres, 1860: 1 vol. in-8°. j The numismatic chronicle, and Journal of the numismatie Society. New-Series, n° 4. Londres, 1861 ; 1 broch. in-8°. The Radcliffe catalogue of 6517 stars, chiefly circumpolar reduced to the epoch 1845-0. Oxford, 1860 ; in-8°. BÜLLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1861. — No 5. “hf > nr — CLASSE DES SCIENCES. ne — Séance du 14 mai 1861. M. Liacre, président de l’Académie. . M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d’Omalius d’Halloy, Sauveur, Wes- mael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, De Koninck, Van Beneden , À. De Vaux, de Selys-Longchamps, le vicomte B. du Bus, Gluge, Nerenburger, Melsens, Schaar, Duprez, Brasseur, Poelman, Dewalque, d’Udekem, membres ; Mine Edwards, Schwann, Spring, Lacordaire, associés ; Gloesener, Candèze, correspondants. M. Borgnet, membre de la classe des lettres, assiste à la séance. QC SÉRIE, TOME XL. 39 (454 ) CORRESPONDANCE. M. le président annonce que M. Milne Edwards, Pun des associés les plus distingués de l’Académie, assiste à la séance. — La Société des sciences d’Utrecht remercie l Académie pour l’envoi de ses dernières publications. — M. de Selys-Longchamps dépose le résultat des obser- vations faites, en 1860, sur les phénomènes périodiques des animaux, et M. Rigouts Verbert fait la même présen- tation par l'intermédiaire du secrétaire perpétuel, pour les phénomènes périodiques des plantes, observés au Jardin botanique d'Anvers à cette même époque. M. de Selys-Longchamps communique, de plus, l'état de la végétation à Waremme, observé aux deux dates fixes du 21 mars et du 21 avril, selon le programme dressé par l'Académie. Des observations semblables sont déposées, en même temps, par M. Ad. Quetelet, pour Bruxelles, par M. Borre pour Jemeppe et par M. Bernardin pour Melle près de Gand. Ces résultats seront publiés dans les Phénomènes pério- diques pour 1860. — Le comité général et les secrétaires de l’Association britannique pour l'avancement des sciences font connaître que la réunion annuelle aura lieu à Manchester le 4 sep- tembre prochain. _( 455 ) — La classe reçoit communication des ouvrages ma- nuserits suivants : 1° Observations sur la carte du Nil de M. G.-G. Miani, par M. le professeur Ph. Gilbert, de l’université de Louvain. (Commissaires : MM. Nerenburger et Ad. Quetelet.) 2 Sur quelques cryptogames nouvelles ou inédites pour la flore belge, 7*° notice, par M. G.-D. Westendorp, méde- _cin de bataillon, à Termonde (Commissaires : MM. Kickx et Martens.); 3° Observations sur la structure anomale des silicules dans le DRABA VERNA, par M. le professeur À. Wesmael, à Vilvorde (Commissaires : MM. Kickx et Martens); 4° Monographie du genre Pirogocus Tope avec plan- ches, par M. Eugène Coomans, de Gand (Commissaires : MM. Spring et Kickx.); | 9° Des observations sur la lumière zodiacale, les étoiles filantes, etc., par M. le professeur Heis, à Munster. (Com- missaires : MM. Ad. Quetelet et Duprez.) a a —————— RAPPORTS. —— MM. Plateau et Duprez avaient été nommés commis- saires, dans la séance précédente, pour l’examen d’une notice de M. Ernest Rousseau, répétiteur à l’École mili- taire, concernant l'Étude des ondes lumineuses ou de la théorie des ondes sonores. « Bien que l'appareil imaginé par M. Rousseau, disent MM. les commissaires, ne puisse montrer qu'une petite partie des phénomènes vibratoires ( 46 ) de la lumière et de ceux de l’air, cet appareil est fort simple, 1l est ingénieux, et nous ne voyons aucun in- convénient à ce que la note soit imprimée dans les Bulle- tins. » La classe adopte l'avis de ses commissaires, et décide que la notice de M. Ernest Rousseau sera imprimée dans le Bulletin. — M. Montigny, correspondant de l’Académie, avait également présenté, dans la précédente séance, des Recher- ches sur la cause de l'influence du vent sur la pression atmosphérique, et la classe avait renvoyé son travail à l'examen de MM. Duprez et Ad. Quetelet. Ces deux mem- bres ont fait connaître que, sans partager entièrement les idées de l’auteur, ils ne peuvent disconvenir que son travail ne renferme des résultats intéressants et utiles à connaitre ; ils n’hésitent donc pas à en demander lim- pression. Cet avis est adopté. — MM. Duprez et Ad. Quetelet présentent ensuite leur rapport sur un écrit qui a été adressé à l’Académie par un physicien de Barcelone. « Dans sa note, M. Gallardo- Bastant, disent MM. les commissaires, examine quelques- unes des causes qu’on a assignées à l’origine des aérolithes, et présente une nouvelle théorie de la formation de ces corps; 1l termine son travail par les résultats que lui à fournis l’analyse chimique d’une pierre météorique, sans faire connaître soit le lieu où cette pierre est tombée, soit les circonstances qui ont accompagné sa chute. Nous devons avouer ne pas bien comprendre la théorie de l’au- teur ; elle nous à paru d’ailleurs en désaccord avec les ( 457 ) principes de la physique et peu propre à soutenir une discussion sérieuse. En conséquence, nous proposons à l'Académie de ne point donner de publicité à la commu- nication, mais de remercier simplement l’auteur. » Ces conclusions sont adoptées. ——— COMMUNICATIONS ET LECTURES. Sur la mesure de l’arc de parallèle européen de plus grand développement; par M. le général Nerenburger, membre de l’Académie. QD Les géomètres savent que le procédé le plus propre faire connaître les dimensions de notre globe consiste comparer un arc de parallèle avec un arc de méridien. Cependant, lorsqu'on parcourt l’histoire des travaux géodé- siques accomplis dans toutes les parties du monde pour déterminer la figure et les dimensions de la terre, on est surpris d'y trouver à peine quelques mesures d’arcs de parallèles, tandis que de nombreux exemples de mesures d’ares de méridiens s’y rencontrent. En effet, sans remonter jusqu’à l'antiquité, qui nous à transmis avec plus ou moins de certitude diverses me- sures géodésiques, dont les principales étaient l’œuvre d’Aristote, d'Érathostènes et de Possidonius, si l’on prend pour point de départ l’époque à laquelle les perfectionne- ments apportés aux instruments de précision ont permis d'opérer avec quelque exactitude, c’est-à-dire à 1669, on LE ( 458 ) trouve un premier exemple de détermination géodésique digne de fixer l'attention dans la mesure du degré terrestre faite par Picard, en France, entre Sourdon et Malvoisine. Dix ou douze ans après, cette mesure ayant été jugée insuffisante, La Hire et Dominique Cassini entreprirent de la prolonger au nord et au sud, dans toute l'étendue de la France, jusqu’à Dunkerque au nord et jusqu’à Co- lioure au midi. Cette importante opération ne fut ter- minée qu'en 1734, après de fréquentes interruptions. Vers cette dernière époque, une discussion très-vive sur la véritable forme de la terre s'étant engagée au sein de l’Académie des sciences, celle-ci décida que trois de ses membres iraient mesurer le degré de méridien au Pérou, tandis que d’autres s’acquitteraient d’une mission semblable en Laponie, sous le cercle polaire. Le résultat de ces expéditions fut de confirmer pour la première fois, et d’une manière éclatante, l'opinion de Newton sur la forme générale du globe, qui, selon lui, devait être aplatie aux pôles en vertu des lois de la gravitation universelle et de la force centrifuge. Afin d'établir plus sûrement encore cette vérité, Cassini, de Thury et l'abbé De la Caille furent chargés, en 1739, de vérifier la méridienne de France, méridienne que Cassini, Méchain et Legendre rattachè- ent plus tard, en 1787, à la triangulation anglaise. Le résultat de cette opération fut de déterminer la position relative des observatoires de Paris et de Greenwich (1). (1) En 1787, Cassini, Méchain et Legendre, d’une part, le général Roy, d'autre part, procédèrent à la jonction des triangles de France et d’An- gleterre, dans le but de relier l’observatoire de Paris à l'observatoire de Greenwich. Dans cette opération, deux points de la côte anglaise, Dou- vres et Fairligt-Dower, purent être rattachés, par le général Roy, à travers ( 458 ) En 1792, malgré les efforts déployés jusque-là par les astronomes français, la possibilité de faire mieux encore, surtout depuis l’invention du cercle répétiteur par Borda, détermina l’Académie des sciences à charger deux de ses plus illustres membres, Delambre et Mécham, de procé- der à la mesure de l'arc terrestre compris entre Dunker- que et Barcelone. Cette opération, qui s’étendait sur une longueur de 9° 40’ en latitude, a été prolongée, au commencement du siècle suivant, par Biot et Arago, jus- qu'à l’île de Formentera, la plus australe des Baléares, ce qui à porté à 12° 22’ l'amplitude de l’arc du méridien de France, qui, antérieurement, avait été relié, ainsi qu’on la dit plus haut, à Greenwich et aux mesures anglaises. L'ensemble des travaux français et anglais embrasse au- jourd’hui un arc de 22° environ, de Formentera à l’ex- trémité nord des îles Shetland, dont 12 40’ jusqu’à Greenwich. Dans le cours des opérations relatives au prolongement de la méridienne de Paris, Arago mesura, incidentelle- ment, un premier arc de parallèle de Formentera à Majorque. la Manche, à trois points de la côte française, Calais, le cap Blancnez et le mont Lambert. Les savants français qui avaient des cercles répétiteurs armés de lunettes moins puissantes que celle du cercle de Ramsden, dont le général Roy disposait, ne réussirent à rattacher aux trois mêmes points de la côte française qu’un seul point de la côte opposée, Douvres. Malheu- reusement cette importante opération fut exécutée à une époque avancée de l’année, et, par conséquent, dans des conditions atmosphériques très- peu favorables. Commencée le 20 septembre, elle fut terminée vers le 16 novembre. Cette circonstance est de nature à inspirer quelques doutes sur l'exactitude des résultats obtenus à cette époque déjà reculée et depuis laquelle, d’ailleurs, les instruments et les méthodes géodésiques ont recu d'importants perfectionnements. ( 460 ) On sait que depuis, cette même méridienne a servi de base à la nouvelle triangulation dela France, et que celle-ci, d’après les instructions formulées par Laplace à l’origme du travail, se compose de chaînes parallèles à la méri- dienne et d’autres qui lui sont perpendiculaires. L’une de ces dernières a été utilisée par Brousseaud et Nicollet, pour la mesure de l’arc du parallèle moyen qui s'étend de Bordeaux à Fiume en Illvrie. Tandis que ces grandes opérations s'exécutaient en France depuis le commencement du siècle, des travaux géodésiques étaient entrepris ou se poursuivaient, non- seulement dans la plupart des États de l'Europe, mais en Asie et en Amérique; et lorsque Bessel, en 1840, repre- nant les principales mesures obtenues jusque-là, voulut dé- terminer à l’aide de ces données l’aplatissement du globe, il put comprendre dans ses caleuls les arcs suivants : Amplitude. Latitude moyenne. L'are du Pérou ou de l'Équateur . . . 3% 7’ —æ LT Le petit arc des Indes orientales . . . 1 55 + 12 52 Le grand arc des Indes . . . . . . 15 58 + 16 8 ARC HG FREE TENNIS UE + 44 51 L’arc oriental de l'Angleterre . . . . 2 50 + 2 2 L’arc hanovrien . pad. : + 52 52 L'arc danois . 1 52 + 54 8 ne Erese 2) 22e 1 50 + d4 58 Maseide Bussie.. Li NS ETES + 56 4 L'arc suédois ou du cercle polaire. . . 1 57 + 66 20 Depuis 1840, le grand arc des Indes, l’are oriental de l'Angleterre et l’arc de Russie ont été portés à une étendue beaucoup plus considérable. Le premier, qui n'avait, en (461) 1840, que 15° 58/, comprend aujourd’hui une longueur de 20° 21’; le deuxième a recu un accroissement de 7° 8’, ce qui lui donne une étendue de 10°; le troisième enfin, qui était de 8° 2’, a été plus que triplé, puisqu'il s'étend aujourd’hui d’Ismaïl, près des bouches du Danube, à la mer Glaciale, mesurant une longueur de 25° 20/. De plus, un second arc de 10° à été mesuré en Angle- terre du côté de l’oecident. On voit par ce rapide aperçu des mesures géodésiques principales obtenues jusqu’à nos jours, dans les diverses parties de l’ancien continent, combien peu se rapportent à des ares de parallèles. Le résultat que la science a déduit de toutes ces opéra- tions a été sans doute une détermination très-exacte du sphéroïde terrestre, dans la supposition qu'il y ait identité parfaite entre les méridiens réduits à la surface des mers; mais quelle que soit l’exactitude de la solution du pro- blème ainsi obtenue, elle peut être rendue plus grande encore, en faisant concourir à cette solution des arcs de parallèles combinés avec des ares de méridiens. Si ce moyen n’a pas été employé plus fréquemment, cette circonstance me paraît devoir être attribuée à la diffi- culté que présentait autrefois la détermination des longi- tudes. | Aujourd’hui, depuis les perfectionnements apportés à la construction des chronomètres, et surtout depuis l’in- vention de la télégraphie électrique, elle est devenue plus facile et peut être rendue presque aussi exacte que celle des latitudes. Dès lors, le principal obstacle qui entravait ces sortes d'opérations a disparu, et plus rien ne s’oppose à ce qu'on les multiplie à l’égal des autres. En effet, grâce aux travaux géodésiques accomplis dans ( 462 ) le siècle actuel, l'Europe se prête admirablement à des mesures d’ares de parallèles ; car depuis soixante ans, sur- tout depuis 1815, de grandes triangulations ont été faites dans tous les pays qui composent cette partie du monde; elles ont été entreprises dans un double but : d’abord l’éta- blissement des cartes de ces pays, puis la détermination de la figure et des dimensions de la terre. Vers l'occident, l'Angleterre, la France, l'Espagne, le Portugal, la Hol- lande et la Belgique sont triangulés en tout ou en partie; au centre, la Prusse, les États autrichiens, la Suisse, le Piémont et l'Italie; vers l’orient, la Russie. Des chaînes de triangles s'étendent donc sans interruption depuis l'océan Atlantique jusqu'à l’Oural. Or, en utilisant ces triangulations , 1l devient possible de mesurer, en Europe, des arcs de parallèles de très-grande étendue. Si l’on considère que le grand are de méridien russe, qui comprend aujourd’hui déjà 25° 20’, peut être prolongé à travers la Turquie d'Europe et l’Archipel jusqu’à l’île de Candie, ce qui porterait son amplitude à 37°, la plus grande qu'il soit possible d'obtenir en Europe, on reconnaîtra que ces deux lignes géodésiques constituent les plus magnifi- ques éléments à mettre en œuvre pour la résolution du pro- blème sur lequel s’est exercée la sagacité humaine depuis les temps les plus reculés. En ce qui concerne la partie astronomique de la me- sure d’arcs de parallèles en Europe, notamment les dé- terminations de longitudes, on sait que de nombreuses expéditions chronométriques ont été exécutées en Russie avec au moins quarante chronomètres des plus parfaits; que la différence de longitude entre Greenwich et Astra- kan, sur le rivage de la mer Caspienne, a été obtenue à une petite fraction de seconde en temps, et qu'il ne man- ( 463 ) querait pour pouvoir relier astronomiquement le point le plus occidental de la côte d'Irlande au point le plus orien- tal de la frontière de Russie, que les différences de longi- tudes du premier de ces points à Greenwich et du second à Astrakan. D'autre part, il faudrait, pour atteindre le même but, subdiviser l’arc total en arcs partiels, ce qui s’obtiendrait par les méridiennes des observatoires convenablement situés et qui sont reliés géodésiquement à la triangulation du parallèle. Il faudrait encore déterminer les longitudes relatives de ces divers observatoires (1). Toutes les considérations qui précèdent ont inspiré à l'un des plus illustres astronomes de notre époque la pensée d'introduire dans le domaine des faits une concep- tion qui semblerait chimérique, si le spectacle des pro- diges accomplis de nos jours dans toutes les branches des connaissances humaines, n’avait habitué notre généra- tion à voir avec admiration, mais sans étonnement, les merveilleuses productions de la science au dix-neuvième siècle. | C’est pour donner un corps à cette pensée que le direc- teur de l’observatoire impérial de Pulkowa, M. le conseiller d'État W. Struve, entreprit, en 1857, un voyage vers l’Eu- rope occidentale. Préalablement, il soumit à la sanction de son gouverne- ment le projet à l’exécution duquel il fallait associer divers États, et qui consistait à utiliser les matériaux existants (1) L’honneur de l'initiative, dans cette partie du travail , reviendrait au directeur de l'observatoire de Bruxelles, notre honorable secrétaire per- pétuel, qui a rattaché, par le moyen de la télégraphie électrique , Bruxelles à Greenwich et à Berlin. ( 464 ) en Russie, en Prusse, en Belgique et en France, à les compléter et à les perfectionner, st c'était nécessaire, afin d’avoir la partie géodésique propre à mesurer un arc de 99° qui s’'étendrait d’Astrakan à Brest. Ce projet, ayant été approuvé par le gouvernement russe, M. Struve entre- prit son voyage dans le but de solliciter les gouvernements de Prusse, de Belgique et de France à coopérer d’une ma- nière active à l’œuvre internationale projetée. L’itinéraire que lillustre astronome avait à suivre le conduisit en premier lieu à Berlin, où il communiqua ses vues sur la mesure de l’arc de parallèle à de Humboldt, au général Baeyer, chef du bureau trigonométrique, et au chef de l'état-major général de l’armée prussienne. Tous trois y donnèrent leur assentiment, en exprimant toutefois le désir qu'avant de conclure une convention formelle avec le gouvernement impérial, ils fussent mis en possession d’une déclaration de la France et de la Belgique, par la- quelle l’une et l’autre s’engageraient à prendre une part active à l’entreprise. En France, M. Struve obtint de M. le maréchal Vaillant, alors ministre de la guerre, non-seulement l’assurance d’une coopération empressée, mais aussi un témoignage publie du vif intérêt que le gouvernement et l’Académie des sciences portaient à l’opération conçue par lui. A Bruxelles, M. le ministre de l’intérieur et M. le mi- nistre de la guerre accédèrent avec le même empressement au désir que vint leur exprimer M. Struve : ils s’engagè- rent à mettre à sa disposition tous les documents astro- nomiques et géodésiques existants à l'observatoire et au dépôt de la guerre, comme aussi à concourir activement aux travaux. Le but que s'était proposé M. Struve se trouvait ainsi ( 409 ) complétement atteint ,et il ne s’agissait plus, pour procéder à l'édification de l’œuvre, que de mettre à profit les bonnes dispositions des États intéressés, lorsque le savant direc- teur de l'observatoire de Pulkowa, à peine rentré chez lui, tomba sérieusement malade, atteint d’une affection grave dont la science n’a pu encore triompher. Cette dé- plorable circonstance eut pour effet d’ajourner indéfini- ment l’exécution de la belle conception de ce grand astro- nome. Heureusement pour la science, M. Struve avait un fils qui marchait dignement sur ses traces : M. Otto Struve, qui lui succéda dans les fonctions de directeur de l’obser- vatoire central de Russie. À peine installé, son premier soin fut-de reprendre l’idée de la mesure d’un grand arcde parallèle européen; mais 1l voulut que cet arc fût le plus grand possible, qu’il s’étendit non plus d’Astrakan à Brest, mais du point le plus oriental de l'empire de Russie au point le plus occidental de lrlande, c’est-à-dire qu'il embrassät 69°, de la forteresse d’Orsk, située au pied de l’Oural, à l’île Valentia, devenue célèbre depuis qu’elle a servi de point de départ à une autre entreprise gigantesque dont le but était de relier télégraphiquement l’ancien monde au nouveau. Modifié dans ce sens, le projet ne pouvait recevoir d'exécution sans la participation d’un cinquième État, la Grande-Bretagne. Ce fut pour solliciter cette participation que M. Otto Struve se rendit, l’année dernière, en Angle- terre. L’ayant obtenue, 1l fit part du projet nouveau aux États intéressés, qui le sanctionnèrent en s’engageant à concourir à son exécution avec l’empressement dont ils avaient donné l’assurance à M. Struve père en 1857. En passant par Bruxelles pour retourner en Russie, ( 466 ) M. Otto Struve insista tout particulièrement pour que la Belgique terminât le plus tôt possible la chaîne de triangles qui traverse lé-pays de l’est à l’ouest, et qu’on raccordât cette chaîne avec les triangulations des pays li- mitrophes. | Le vœu de M. Struve sera exaucé cette année même, qui ne se terminera pas sans que nous nous soyons rac- cordés, d’une part, avec la France et l’Angleterre, de l’autre avec l’Allemagne. Toutes les dispositions ont été prises pour attendre ce but, et déjà les opérations sur le terrain sont commen- cées. Ainsi à l’ouest, le colonel James, directeur des travaux géodésiques en Angleterre, ayant sous ses ordres le capi- taine Clark et le lieutenant French, deux sections d’offi- ciers non commissionnés et un personnel appartenant au corps royal des ingénieurs, est en ce moment à l’œuvre pour rattacher la triangulation anglaise à la nôtre, en empruntant à la France les sommets géodésiques de Dun- kerque et de Hondschoote, et à la Belgique, le mont- Kemmel. A l’est, le général Baeyer, ayant sous ses ordres les lieu- tenants Von Schlippenbach et Lôwe, au service de S. M. le roi de Prusse, procédera, dès la fin du mois, à des travaux analogues, en empruntant quelques points au ter- ritoire du Limbourg hollandais. Le directeur du dépôt de la guerre en Belgique, assisté du lieutenant-colonel d'état-major Diedenhoven et de notre savant directeur, le major du génie Liagre, coopére- ront à ces raccordements aussitôt que la chaîne trigono- métrique qui doit réunir nos deux bases sera complétée. Les jonctions achevées, une chaîne continue de trian- ( 467 ) gles, tous déterminés par les méthodes et avec les instru- ments les plus perfectionnés de l’époque moderne, s’éten- dra sans interruption à travers l’Europe, d’orient en occident, entre les deux saillies extrêmes du contour de cette partie du globe; on possédera alors l'élément pure- ment trigonométrique du travail. Mais il restera, pour avoir résolu le grand problème international conçu et pro- posé par M. W. Struve, à compléter les déterminations astronomiques existantes, à rassembler, à coordonner et à contrôler les matériaux très-nombreux qu’il faudra mettre en œuvre, puis, enfin, à y appliquer le calcul, tâche consi- dérable, pour en déduire le résultat grandiose qui doit répondre à ce simple énoncé : Déterminer le nombre de mètres courants contenu dans le développement de l'arc du cinquante-deuxième parallèle nord, dont l'amplitude mesure soixante-neuf degrés. Recherches sur la cause de l’influence du vent sur la pres- sion atmosphérique; par M. Montigny, correspondant de l’Académie L'importance des services que l’observation de fortes dépressions du baromètre a déjà pu rendre à la navigation du littoral en pronostiquant de violentes tempêtes, contre lesquelles elle se serait prémunie à temps, grâce à la rapi- dité des dépêches électriques, suffirait, au besoin, pour susciter l'intérêt sur une question qui a pour objet la liai- son de l’état du baromètre avec l’intensité du vent. Le tra- vail que j'ai l’honneur de présenter à la classe, et qui n’est qu'une suite de mes études antérieures sur le même ( 468 ) sujet ("), a pour but de rechercher quel est le mode de liaison des deux phénomènes et, s’il est possible, de ré- soudre la question suivante : Les dépressions barométriques, qui sont généralement d'autant plus prononcées que la vitesse du vent est plus grande, résultent-elles d’une action du vent directe sur le baromètre, ou bien la dépendance des deux phénomènes ne serait-elle qu'apparente, et faudrait-il rapporter cette liai- son aux effets d’une méme cause qui agit de facon à aug- menter simullanéement la vitesse du vent et la dépression barométrique ? La solution de cette question intéresse tout à la fois la météorologie et la dynamique des gaz; car s’il est prouvé, d'abord par les faits, qu’un courant atmosphérique exerce en réalité une moindre action sur le baromètre que si la même masse d’air était en repos, il y aura évidemment intérêt pour la science à rechercher quelle est la cause mécanique de cette diminution de pression. Si plusieurs physiciens ont admis qu’un courant d’ar diminue la pression des couches atmosphériques sur le baromètre, ils n’ont point, sans doute, justifié rigoureu- sement l'hypothèse si vraisemblable qu'ils proposaient. À défaut de renseignements plus étendus sur l’état de la question, cette présomption se fonderait, pour moi, sur la concision avec laquelle M. Kæmtz parle de ces hypothèses dans son Cours complet de météorologie (”), où 1l se borne à dire que toutes ces hypothèses supposent que lair en mouvement doit exercer une moindre pression que l'air () Mémoires de l'Académie royale de Belgique, t. XXVI, et Bulletins, 2me série, t. X. (”) Traduction de M. C. Martins, p. 286. ( 469 ) calme. Bien certainement, ce savant météorologiste se serait arrêté à celle de ces théories qui lui eût paru la mieux établie; et, si elle avait été suffisamment justifiée à ses yeux, il aurait nécessairement accordé une part à l’ac- tion directe du vent dans les phénomènes barométriques. Cette considération éloigne aussi de mon esprit toute appréhension de renouveler ici la mise en œuvre de l’un ou l’autre moyen de solution de la question, qui aurait été employé dans des travaux antérieurs en vue d'atteindre au même but. Je puis dire, dès maintenant, que les résul- tats auxquels j’arriverai me paraissent tellement concluants et décisifs en faveur de l’action du vent directe sur le baro- mètre, idée qui m'a guidé dès mes premières recherches sur cette question, que, si des moyens de solution iden- tiques avaient été mis en œuvre pour établir positivement le fait supposé, je suis persuadé que la question formulée plus haut eût été tranchée depuis longtemps. Le premier moyen de solution que j’emploierai consiste à calculer l'altitude de la localité près de Namur où j'ai fait des observations suivies, par rapport à l'observatoire de Bruxelles, à l’aide des hauteurs barométriques mesurées aux mêmes instants dans les deux localités, et sous l'influence de vents successivement faibles et plus ou moins forts. On sait que les météorologistes ont déjà fait servir les hauteurs barométriques correspondantes au calcul de l’al- titude de différentes stations; mais aucun, je pense, n’a cherché à montrer que les différences signalées entre l’alti- tude vraie de deux stations et les résultats calculés, ont en grande partie pour cause l'influence des vents hori- zontaux (”). () 1! n’est point question dans ce travail de l'influence perturbatrice 2% SÉRIE, TOME XI. 54 ( 470 ) Les observations météorologiques que j'ai continuées, à Namur et aux environs, pendant six années à partir de 1849, eurent lieu, depuis le 1° septembre de cette année jusqu'au 1% juin 1854, dans une habitation du faubourg d’Heuvy. La position de ce site a permis au vent d'exercer toute sa plénitude d’action sur le baromètre qui y était observé; car cette demeure est bâtie sur une éminence au nord de la ville, à soixante mètres environ au-dessus de la vaste et belle plaine où Namur est assis, à deux mulle mètres de distance environ de la montagne de la citadelle qui domine toutes les sommités d’alentour. Au loin, s’ou- vrent, au sud et au sud-ouest, les vallées si pittoresques où coulent la Meuse et la Sambre; enfin, au nord de l’ha- bitation, s'étend un vaste plateau qui s'élève en pente insensible sans présenter de sommité dominante. D'après les données qui sont indiquées dans les Meé- moires de l’Académie (*), l'altitude de la cuvette du baro- mètre observé dans cette localité était 149,58 par rapport à la mer moyenne. À l'observatoire de Bruxelles, qui est bâti sur l’un des points les plus élevés de la capitale, le baromètre se trouve à 56",56 au-dessus de la mer moyenne. Ainsi, l'altitude vraie du lieu des observations près de Namur, par rapport à l'observatoire de Bruxelles, est 93,02. Quant à la distance géodésique de Bruxelles et Namur, calculée à l’aide des longitudes et des latitudes de ces villes, elle est égale à 55,08 kilomètres. des courants verticaux ascendants ou descendants, dus à la chaleur du jour, sur les altitudes barométriques, influence que Ramond a See dans son mémoire publié en l’an XIII. () Phénomènes périodiques, t. XXIX. ( 47 ) Passons rapidement à quelques considérations qui sont ici nécessaires, sur la détermination de l'altitude près de Namur, par rapport à Bruxelles, d’après des observations barométriques correspondantes. Si l’on désigne par D la distance verticale de deux cou ches atmosphériques non par trop éloignées, pour lesquelles H, T représentent la hauteur barométrique et la tempé- rature à la station inférieure, et h, t, les mêmes éléments à la station supérieure, observés les uns et les autres par un temps calme et presque au même moment, la distance D peut être calculée au moyen de la formule : (T +i)? Mere D mi Il — log h|]. (1) 18395 | +2 | Los H — 108 h] Cette formule, qui sert à la mesure des montagnes au moyen du baromètre, se présente ici sous la forme qui con- vient à notre latitude et au cas où D ne dépasse point les limites au delà desquelles 11 faut avoir égard aux variations de la pesanteur. Les observations nombreuses de Ramond ont prouvé l'exactitude de cette formule de Laplace, quand les mesures sont prises par des temps calmes et en des points peu distants en projection horizontale. Mais peut-on compter sur la même exactitude quand les deux stations sont séparées par une distance de plu- sieurs lieues en projection sur le sphéroïde terrestre? Si, par un temps parfaitement calme, on considère la couche d'air sphéroïdale passant à la hauteur du baromètre près de Namur et prolongée jusqu’au-dessus de Bruxelles, cette couche, qui s’élèvera à 93",02 au-dessus de l’observatoire, possédera à très-peu près la même force élastique À en ce point élevé que près de Namur, à moins que les tranches su- périeures à la couche considérée n’exercent pas absolument ( 472 ) la même pression ici et à 95,02 au-dessus de l’observa- toire, par suite d’influences météorologiques différentes dont les couches supérieures seraient accidentellement le lieu. Quelles que soient ces différences, 1l est à prévoir que souvent leurs effets se compenseront à très-peu près, si l'on choisit une série de hauteurs barométriques observées, dans les deux localités, par des temps de calme et en l’absence de pluie ou même de toute apparence de pluie; si l’on dé- duit donc l'altitude barométrique de l’habitation près de Namur par rapport à l'observatoire, au moyen de semblable série, très-probablement elle s’écartera peu de laltitude vraie. Avant de donner à cette supposition l'appui des faits eux-mêmes, il importe de remarquer que la hauteur D, cal- culée de cette manière, sera très-peu influencée par la pe- tite différence des températures de la couche d’air consi- dérée plus haut, qui est presque contiguë au sol près Namur, et qui, à Bruxelles, se trouve élevée de 93",02 au-dessus de l'observatoire. En effet, si t est la température de la couche, à Heuvy près Namur, elle sera {+ 0 au même moment à 95",02 au- dessus de l’observatoire; mais la différence inconnue 8 étant généralement très-petite, et son influence se réduisant à _— dans la formule (1), il est évident qu’en introduisant dans cette formule t observé à Namur, au lieu de la tempé- rature réelle £ + 0 de la couche d’air à 95",02 au-dessus de l’observatoire, on ne peut commettre une grave erreur dans la détermination de D. J'ai trouvé dans le recueil de mes observations météoro- logiques à Namur, une série de quatre jours, du 10 au 15 mars 1855, où je n’ai noté ni indication du vent d’après une girouette, ni la présence de nuages, à neuf heures du (473) matin, midi et trois heures du soir. Pendant cette période, l'intensité du vent à été très-faible et souvent nulle à Bruxelles, d’après les Annales de l'observatoire où la sérénité du ciel correspondant à ces Jours est indiquée presque constamment par le maximum 10. Cette période de calme atmosphérique se prête au calcul de l'altitude de l'habitation près de Namur au moyen des observations barométriques et thermométriques recueillies, pendant les quatre jours, en ce lieu et à Bruxelles. Dans le tableau suivant, j'ai réuni à ces observations, les indications concernant le vent à Bruxelles, soit à l’heure précise ou aux deux heures paires précédente et suivante (*). Il importe de remarquer, et cela pour tous les tableaux où figureront ici des observations barométriques extraites des Annales de l’observatoire de Bruxelles, queles hauteurs qui s’y trouvent réduites à 0°, ont été ramenées à des valeurs absolues en les augmentant de + 0"",46, cor- rection qui n’a pu être faite dans les Annales ("”). Les obser- vations barométriques à Namur ont subi une correction — 0"",2 qui était nécessaire pour les ramener à des va- leurs absolues. Dans tout ce travail, les altitudes sont cal- culées au moyen des tables d’Oltmans. (” Les observations à neuf heures du soir ne figurent pas dans le ta- bleau, parce que la direction du vent n’ayant pas été relevée le soir à Namur, le baromètre aurait pu être affecté par un vent non indiqué. Les observations du 11 mars , à trois heures du soir, n’ont pas eu lieu à Namur. (”) Annales, t. VITIwe, {re partie, pp. 3 et 4. (474) Altitude calculée par des vents très-faibles. HAUTEUR 2 barométrique TEMPÉRATURE DATE. CR. VENT A BRUXELLES, Direction.| Intensité. a Bruxelles.| Namur. Bruxelles. Namur, | Mars 1855. mm. | mm. SR Le 10, 9h. m. | 765,28 | 756,90 | 323 025 SE. |0,00-0,10 | » midi. .| 65,17 | 56,60] 8,5 7,2 | SE. | 0,10 » 3h.s. | 64,75 | 56,50 | 9,1 8,8 SSE. |0,10-0,03 Le 11, 9h. m. un | 55,70 | 3,5 3,3 SSE. |0,00-0,03 » midi. .| 63,58 | 54,40 | 7,7 7,6 SE. 0,08 Le 12, 9h. m. | 60,81 | 52,10 | 4,6 3,5 | £ESE. |0,08-0,10 » midi, .| 60,11 | 51,50} 9,5 9,8 | SSE. 0,05 » _3h.s. | 59,35 | 50,60 | 11,2 | 12,4 Îsse-oxo.|0,10-0,03 Le 13,9h.m. | 56,46 | 48,20 | 7,2 4,4 SO. |0,03-0,10 »n midi. .} 55,65 | 47,10 | 12,2 | 13,5 | OSO. 0,10 » 3h.s. | 54,22 | 46,50 | 13,2 | 14,4 | OSO. |0,10-0,10) 88,74 Moyenne. . | 760,88 | 752,55 | 8,16 | a 1 [ep] Conformément à la prévision précédente, la moyenne des altitudes diffère seulement de — 0",61 de l’altitude vraie 95",02. Quant aux altitudes particulières, qui tantôt surpassent 93°,02, tantôt lui sont inférieures, sans toute- fois s'en écarter beaucoup, elles ne s'expliquent ni par l’in- tensité du vent, qui n’a pas excédé 0*,10 contre la plaque de l’anémomètre d’un pied anglais de superficie, ni par l'influence de la température de l’air. Il importe de remar- quer, en effet, et cela pour tous les calculs qui suivront, ( 479 ) que chaque valeur de D a subi, autant que possible, la cor- rection dépendant de la température des couches d’air, puisque l'expression analytique de D, d’où les tables d’Olt- mans dérivent, renferme un terme qui dépend de la tem- pérature de ces couches. Les écarts des altitudes particu- lières, dont le plus prononcé atteint 4",69 par rapport à l'altitude vraie, proviennent incontestablement de petites différences de pression qui avaient lieu simultanément, aux deux localités, dans les couches d’air supérieures à la couche passant à 93",02 au-dessus de l’observatoire de Bruxelles. Aïnsi, quand la hauteur barométrique me- surée près de Namur, s’est trouvée un peu plus faible que ne l'était la tension de l’air à 95",02 au-dessus de l'observatoire au même instant, D a pris alors une valeur un peu trop forte. Lorsqu’au contraire A surpassa, à Namur, la force élastique de la même couche au-dessus de Bruxelles au moment de la mesure de H en cette localité, l'altitude D déduite de H et k à dû nécessairement pa- raître un peu plus faible que 93",02. J'ai montré que les matima barométriques ont lieu le plus souvent quand le vent est nul ou très-faible (”). Si l’on caleule altitude au moyen de hauteurs barométriques maxima observées, à Bruxelles et à Namur, aux mêmes instants et par des vents de même direction, s’il en régnait, il est présumable que la moyenne des résultats obtenus différera peu de l'altitude vraie. Cette prévision est justifiée par les résultats du tableau suivant, où j'ai réuni les maxima barométriques qui se sont présentés aux deux localités, à la même heure et par un vent de même direction ou de directions très-peu différentes. Ces conditions importantes (”) Mémoires de l'Académie , t. XXVT, pp. 24 et 95. (476) de coïncidence en temps et en direction ont été satis- faites six fois seulement sur les cmquante-sept maxima mensuels qui ont été observés du 1‘ septembre 1849 au 1 juin 1854. Altitude calculée d’après des MAXIMA barométriques. HAUTEUR TEMPÉRATURE us Jarométrique DATE. DIRE INTENSITÉ PR. St Re. te = À s i : ) à calculée. à à à à à Bruxelles.| Namur. fPruxelles.| Namur. Namur. |Bruxelles. Bruxelles. | | 1855. mm. mm. k. ». 11 mai, 9h. m.} 761,17 | 752,50 | 855 796 ESE. | ESE. 0,05 94,19 1850. | 23 déc., 9h. m.| 75,99 | 65,00] 0,2 |—o,3 | EN. | ENE. | 0,05 | 93,10 1851. | 10 fevr., 9h. m.{! 68,64! 60,30) 2,3 1,2 SE. | ESE. |0,05-0,00 1 87,50 1852. | 19 octob., midi.| 70,19 | 62,20 | 11,7 | 12,5 N. N. 0,00 | 87,07 | 1852. | 5 juillet, 9h.m.! 63,71 | 56,00 À 19,3 | 19,1 » OS0. | 0,00 86,86 1850. | 29 avril, 9h.m.|] 64,81 | 56,90] 7,0 7,0 » | ENE. |0,15-0,50 | 85,07 Moyenne. . . | 766,93 | 758,54 | 9,39 9,21 » » 0,100 88,96 L’altitude moyenne différerait de 3",28 de l’altitude vraie, s’il n’était pas tenu compte de l'altitude 85",07 du 29 avril 1850 qui correspond à une observation baromé- trique effectuée, à Bruxelles, sous l’influence d’un vent d'intensité prononcée. Je crois important de montrer ici que l’élévation de la ville de Stavelot, par rapport à Bruxelles, calculée à laide (TT ) des maxima qui ont été relevés, aux deux localités, préci- sément aux dates précédentes, se rapproche beaucoup de l’altitude vraie, quoique Stavelot soit plus élevé et plus éloigné par rapport à Bruxelles que ne l’est Namur. La cuvette du baromètre qui sert aux observations de M. Dewalque, à Stavelot, étant placée à 285",8 au-dessus de la mer moyenne (‘), l'altitude de ce point, par rapport à l'observatoire de Bruxelles, est à très-peu près 229",24. La distance des deux localités, déduite de leurs positions géographiques et supposée projetée sur le sphéroïde ter- restre , est égale à 118,10 kilomètres environ. M. G. Dewalque, membre de l’Académie, a eu l’extrême obligeance de me communiquer, entre autres, les observa- tions barométriques et thermométriques qui ont été faites à Stavelot, aux heures des maxima du tableau précédent. J'ai calculé, à l’aide de ces données et de celles de Bruxelles, les altitudes du tableau suivant où les résultats du 29 avril 1850 ne figurent point, parce que les observations baro- métriques n'avaient pas encore lieu à Stavelot. La direction du vent étant prise dans cette ville d’après les nuages, j'ai indiqué la direction du vent, à Bruxelles, aux mêmes mo- ments, également d’après les nuages. () Mémoires de l'Académie royale de Bruxelles, t. XXIX. (478) Altitude de Stavelot par rapport à Bruxelles, calculée d’après des maxima barométriques. DIRECTION DU VENT INTENSITÉ STE d’après les nuages ALTITUDE barométrique = —_ tm du vent x 1 lot à à x ÿT calculée. Stavelot. à Stavelot. Stavelot IErasdiies ruxelles. HAUTEUR TEMPÉRA- 1853. mm. ; M. 11 mai, 9h.m.| 741,42 à : 216,04 1850. | 93 déc.,9h.m.| 51,75 232,32 1851. 10 févr.,9h.m.| 47,03 228,68 1852. 19 octob., midi. 48,93 À ; 232,83 1852. 3 juillet,9 h. m. 44,03 dr) , 224,00 | Moyenne. . .| 746,65 | 7,20 » | » 0,023 ii L’altitude moyenne diffère de 2",47 seulement de l’éléva- tion vraie 229,24. L’altitude qui s’écarte le plus de cette va- leur réelle est celle du 11 mai 1853 ; mais il est à remarquer que les vents qui régnaient dans les régions supérieures, à Bruxelles et à Stavelot, ce même jour à neuf heures du matin, sont de directions opposées. Il est présumable qu’au niveau du sol, à Stavelot, la direction du vent n’était pont l’'ESE., direction du courant près du sol à Bruxelles et à Namur, le 41 mai à neuf heures du matin, moment auquel correspond une altitude de Namur peu différente de l'altitude vraie. Cet écart, si prononcé pour Sta- velot, est une preuve de l’importance qu’il y a de choisir des observations correspondantes qui ont été effectuées ( 479 ) tout à la fois au même moment et sous l'influence du même vent dans deux localités, si l’on veut obtenir des résultats qui puissent justifier des prévisions fondées. Les altitudes de Stavelot, calculées à l’aide des observa- tions recueillies dans cette localité et à Bruxelles, pendant la période de calme du 10 au 13 mars 1853, période qui nous a donné une altitude moyenne, à Namur, si rap- prochée de la véritable, conduisent à une moyenne de 215",63 seulement, d’après les données météorologiques concernant cette période de calme que M. Dewalque a bien voulu me communiquer. L'influence des couches su- périeures à Stavelot, pendant ces jours de sérénité, y maintint sans doute le baromètre plus élevé que ne l’eût comporté la force élastique de la couche d’air passant au niveau de Stavelot, et considérée à 229",24 au-dessus de l'observatoire de Bruxelles. Je montrerai actuellement que le vent exerce une in- fluence d'autant plus prononcée sur l'altitude de deux sta- tions météorologiques, que son intensité est plus grande. Depuis le 15 jusqu’au 18 décembre 1850, un vent par- fois très-violent et accompagné de pluie se fit sentir à Bruxelles et à Namur. Le 18, vers trois heures du soir, le vent était entièrement apaisé. J'ai réuni, dans le tableau suivant, les variations barométriques , thermométriques et anémométriques, celles-ci d’après la girouette, qui ont été recueillies aux deux localités. Je ferai observer que la direc- tion du vent, à Namur, ayant toujours été rapportée aux huit vents principaux, la direction qui se trouvera indi- quée, Ouest, par exemple, peut très-bien avoir été en réa- lité celle d’un vent de l'OSO. ( 480 ) Altitude calculée par des vents forts. HAUTEUR b: tr TEMPÉRATURE DIRECTION INTENSITÉ Jarométrique ALTITUDE DATE. A À me © | me 2 — — à : cal . à à à à à à Bruxelles. Free Bruxelles.| Namur. ÉBruxelles. Bruxelles. Namur. à Namur. Décembre 1850.7 sm. hi 4 nn Le15,9h.m. | 747,44 | 741,00) 63 | 69 | SO. | OSO. | 1,05-1,80 | 70,33 » midi, . | 46,39 | 40,10! 8,5 9,0 O0. | OS0.T 1,30 | 69,71 » 9h.s. | 36,06 | 30,70 | 10,9 | 11,0 » OS0. | 2,85-5,20 | 60,74 Le 16,9h.m. | 41,96 | 34,30] 6,5 6,5 0. | OS0. | 0,20-0,35 | 76,76 » midi. . | 42,02 | 34,60] 8,1 8,8 O0. | 0S0. | 0,40 | 82,71 » 3h.s. | 40,38| 3410] 7,8 8,7 0. | OS0. | 0,35-0,40 | 69,37 » 9h. s. |! 33,09 | 29,20) 7,5 8,5 » OS0. | 2,55-3,20 | 66,00 Le17,9h.m. | 42,11 | 35,30] 4,4 4,6 0. SO. |1,25-0,70 | 74,76 » midi. . | 41,68 | 35,40] 6,0 6,7 | SO. | SO. 2,55 | 69,81 » 3 h.s. | 39,19 | 33,50] 5,7 | 6,2 | SO. | SO. |1,50-1,80 | 65,12 Le18,3h.s. | 44,24 | 35,70) 5,0 | 45 0. | 050. | 0,15-0,05 | 93,67 Movgnne. . . | 741,44 | 734,90 | 6,92 | 7,12 » p 1,455 | 72,45 Le lecteur aura d’abord remarqué que les hauteurs baro- métriques varient assez régulièrement en sens inverse de l'intensité du vent aux deux localités, et que deux minima barométriques coïnecident avec les plus fortes intensités du vent. Dans l'intervalle de ces fluctuations extrêmes, les ac- croissements de la pression atmosphérique ont lieu quand le vent diminue notablement d’intensité ("). Ce qu’il importe (*) J'ai signalé des exemples marquants de l’inversité des courbes baro- ( 481 ) de remarquer ici ce sont les valeurs de l'altitude à Namur, par rapport à Bruxelles, qui diminuent d'autant plus que le vent est plus fort. Aïnsi, le 15 et le 16, à neuf heures du soir, l'altitude calculée a pour valeurs respectives 60",74 et 66 mûtres, le vent ayant une intensité comprise entre 2°,85 et 5*, 20 au premier minima, et une valeur voisine de 5°,20 au second minima d'altitude. Dans le but de res- treindre l'étendue du tableau, j'ai montré que dans l’après- midi du 18, au moment où le vent était presque tombé à Bruxelles, l'altitude calculée ou barométrique revint à l’élé- vation vraie. Les minima barométriques se manifestant le plus sou- vent sous l'influence des vents forts, j'ai réuni, dans le tableau suivant, ceux de ces minima qui ont eu lieu à Bruxelles et à Namur simultanément ou presque au même instant, et sous l'influence du même vent. La concordance des directions du vent s’est présentée six fois seulement pendant la période indiquée. Quand linstant du minima à Bruxelles a précédé ou suivi d’une heure le moment du même minima à Namur, j'ai pris pour hauteur baromé- trique à Bruxelles celle qui avait été observée à l’heure de Namur. métriques pendant les tempêtes, dans le mémoire déjà cité (tome XXVI des Mémoires de l'Académie). ( 482 ) Altitude calculée d’après les minima barométriques. HAUTEUR S CRE RE barométrique CRMPÉRATE ALTITUDE DIRECTION : INTENSITÉ Re. PR Ce CR TR , à calculée. à à à à à we à à Bruxelles! Namur. IBruxelles.| Namur. Namur. Pr Bruxelles, 1855. mm. mm. m. | 47 janv., 9 h. m. | 754,25 | 727,90 : () | 70,81 1854. so 18 févr., 9 h.m. | 40,49 | 54,15 . |1,05-0,65] 68,20 1852. 19 sept., 9h, m. 33,90 . . |1,42-1,40] 66,58 1851. 22 mars, 9 h.s. 31,00 ! . |1,40-2,45] 65,11 1850. , 50 sept., 9 h. m. 36,00 : : . |1,00-2,901 52,22 1853. 25 avril, 9 h. m. 31,90 ; . |2,15-4,10] 50,29 Moyenne. . | 738,07 | 752,47 | 8,45 1,852 | 62,16 (‘) I n’y a pas d’indications de l’intensité du vent dans les Annales, aux premières heures de la journée du 17 janvier, ni la veille l’après-midi; seulement, il est dit, en note, que, depuis Le 16, le vent pouvait avoir agi avec assez d'intensité. Les altitudes étant rangées suivant l’ordre des valeurs décroiassntes dans la dernière colonne, les intensités du vent correspondantes se trouvent en ordre inverse dans la colonne précédente : l'élévation calculée ou barométrique est donc d’autant plus faible que le vent se montre plus fort. En présence de résultats qui concordent si bien avec les variations des altitudes en sens inverse de l’intensité du vent pendant une période continue de vents forts, il ( 485 ) est impossible de méconnaître l'influence directe de leur vitesse sur les hauteurs barométriques, comme cause pre- mière des différences si prononcées que présentent les altitudes, selon qu’elles sont calculées par des vents forts ou faibles. Sans nous étendre ici sur cette action et sans nous attacher à en découvrir la cause même, bornons nous maintenant, à montrer comment les valeurs de H et h, observées respectivement à Bruxelles et à Namur, varient pour donner des valeurs de D ou des altitudes barométri- ques trop faibles, lorsque ces mesures sont affectées par l'influence du vent. On sait que, dans l’état d'équilibre ordinaire des cou- ches atmosphériques superposées, la température étant supposée constante, leurs forces élastiques décroissent en progression géométrique pour des hauteurs croissant en progression arithmétique : c’est sur cette loi que la for- mule (1) est particulièrement fondée. Les altitudes baro- métriques à Namur, par rapport à Bruxelles, déterminées d’après des observations faites en temps calme diffèrent peu de l’altitude vraie 93,02; il faut en conclure que les forces élastiques des couches d’air superposées entre les couches passant par les deux localités, varient, à très-peu près, suivant la loi énoncée quand il ne règne nulle part aucun vent sensible, quoique les points d’observation ne se trouvent pas sur la même verticale. Alors, les logarithmes des hauteurs barométriques H et , observées respective- ment à Bruxelles et à Namur, étant introduits dans le fac- teur (log H— log 2), conduisent à une valeur de D qui est très-rapprochée de l’altitude vraie. Mais les élévations cal- culées sous l'influence du vent s’écartant d’autant plus de 95,02 que le vent est plus fort, il faut admettre qu’alors la loi de superposition des couches n’est plus la même que ( 454 ) par un temps calme. Les valeurs trop faibles des altitudes calculées sous l'influence des vents forts indiquent que la diminution de la force élastique de ces couches avec leur élévation, diminution que représente le rapport = est re- lativement plus rapide par un temps calme que sous cette influence. En effet, désignons par H! et 2’ les hauteurs ba- rométriques, à Bruxelles et à Namur, par un vent violent; le facteur (log H’ — log k!) donne à l'altitude D’ une va- leur trop faible relativement aux altitudes déterminées par un temps calme, parce que ce facteur est mom que (log H — log 2); or, cela implique nécessairement + A L'inégalité (log H'— log k') < (log H— log À) ne FA pro- duit évidemment que par suite d’une valeur trop petite de H’ mesurée, à Bruxelles, sous l’influence du vent; car on a pu remarquer, dans les derniers exemples cités, que les hauteurs barométriques mesurées, à Namur, sous l’action du vent, sont moindres que les valeurs de » observées au même lieu par un temps calme. Ainsi, non-seulement l’in- fluence d’un vent fort diminue à la fois H’ et 2! dans les deux localités, mais, comme on peut le reconnaître, la diminution de H’, à Bruxelles, est relativement plus forte qu’à Namur. L’inégalité (log H’ — log L') < (log H— log L) est d'autant plus prononcée d’ailleurs, que la vitesse du vent est plus grande. Je reviendrai sur les conséquences de ces considérations après avoir repris l'exposé de nouveaux résultats de l’observation. Les altitudes de Stavelot, par rapport à Bruxelles, dé- duites des mesures barométriques et thermométriques prises sous l'influence de vents forts, ont aussi des valeurs trop faibles comparativement à l'élévation vraie. Je me bor- nerai à indiquer ici celles de ces altitudes qui correspondent aux instants où le vent a été le plus fort et le plus faible, ( 485 ) pendant la période de vent du 15 au 17 décembre 1850 dont il a été question plus haut : INTENSITÉ ALTITUDE du vent à Bruxelles. calculée de StaveloL. K. k. m. Le 15 décembre, 9 heures du matin . 1,05—1,80 191,64 — 9 — soir . . 2,85—5,20 176,22 Le 16 _— 9 — matin . 0,20—0,55 212,82 — 9 — soir . . 2,55—3,20 195,78 Le 17 — 9 — matin . 1,25—0,70 211,26 La moyenne générale de toutes les altitudes barométri- ques pendant cette période, est 198",68. J'ai également calculé, à l’aide des données de M. Dewalque, les altitudes barométriques de Stavelot, qui correspondent à emq des minima cités plus haut, toutes les observations n'ayant pas encore lieu à Stavelot en septembre 1850. Voici ces résultats : INTENSITÉ ALTITUDE du vent à Bruxelles. calculée de Stavelot. Le 17 janvier 1855, 9 h. du matin. . . . . . 203,88 Le 18 février 1854, 9 h. du matin. . 1.030,65 206,80 Le 19 sept. 1852, 9 h. du matin. . 1,42—1,40 206,54 Le 22 mars 1851, 9 h. du soir . . 1,40—92,45 188,97 Le 25 avril 1855, 9 h. du-matin. . 2,15—4,40 166,17 MoyENNE. . . . 194,87 Les altitudes décroissent donc pour Stavelot aux divers minima à très-peu près selon la vitesse du vent, comme nous lavons vu pour les altitudes de Namur, aux mêmes époques. | J'ai fait aussi servir la série de mes observations près de Namur au calcul de l’élévation de cette localité sous l’in- 2m SÉRIE, TOME XI. 59 ( 486 ) fluence des divers vents. A cet effet, j'ai inscrit dans des tableaux comprenant chacune des colonnes verticales cor- respondant aux huit vents principaux , les hauteurs baro- métriques et les températures qui ont été simultanément observées à Bruxelles et à Namur, à neuf heures du matin, à midi et à trois heures du soir, quand la direction du vent était sensiblement la même aux deux localités. Les coïncidences de vents de même direction se sont présen- tées 1379 fois sur les 3084 indications du vent que jai relevées à Heuvy, pendant près de cinq années. Le rapport du premier nombre au second étant 0,447, on peut dire qu’en général, la direction du vent coïncide au même moment, à Bruxelles et à Namur, quarante-cinq fois sur cent (‘). Le tableau suivant nous présente, à l’égard de chaque vent, les résultats obtenus qui ont servi à caleuler les altitudes correspondantes. A côté de celles-ci figurent les intensités moyennes du vent, à Bruxelles, que J'ai dé- duites des intensités qui sont inscrites dans les Annales, précisément aux moments des coïnecidences des vents de même direction dans les deux villes. (") Les coïncidences qui sont le plus fréquentes pour les vents de la région australe comprise entre le SO. et le NE., le sont moins pour les autres vents. Ainsi, le rapport des coïncidences au nombre des indications recueillies atteint le maximum % — 0,671 par les vents de la région SO., et le minimum 22 — 0,264 par ceux du nord. Remarquons que les pre- miers étant des vents de vitesse beaucoup plus grande, il n'est pas éton- nant qu'ils règnent simultanément dans les deux localités plus souvent que les autres vents. means, 1 ane TEMPÉRATURE Intensité barométrique ALTITUDE à à à calculée. Bruxelles. Namur. Bruxelles. Namur. mm mm. . et NNE. | 759,35 | 751,40 . et ENE. 60,24 | 52,19 et ESE. 58,65 | 50,57 . et SSE. 54,58 | 47,16 et SSO. 52,38 45,43 . et OSO. 52,20 | 45,33 et ONO. 55.05 | 47,82 . et NNO. 86,63 | 49,03 Moyenne. . 156,13 | 748,62 En général, l'altitude barométrique est d'autant moin- dre, que l’intensité du vent correspondant est plus grande ; à partir du SO., direction avec laquelle coïneident le mini- mum d'altitude et le maximum d'intensité du vent, les accroissements d'altitude répondent à des diminutions de force du vent. La région E. et SSE. est la seule qui pré- sente deux anomalies à ce résultat général, qui concorde si bien avec tout ce qui précède ("). (‘) Des différences très-explicables caractérisent les hauteurs baromé- triques , les températures et les intensités du vent, à Bruxelles, dans le tableau précédent, par rapport aux données semblables concernant les seize vents principaux que j'ai calculées également pour Bruxelles, et, qui figu- rent au tableau de la page 197 du t. X. des Bull. de l'Acad. (deuxième série). Dans le travail actuel, j'ai augmenté toutes les hauteurs barométriques ( 458 ) Dans son Cours de météorologie, page 292, M. Kæmtz, après semblables recherches de Brandès, Ramond et au- tres, s’est occupé de la question des différences de niveau de plusieurs villes par rapport à Halle, en déduisant ces différences de l’état du baromètre dans ces localités sui- vant la direction du vent. M. Kæmtz attribue à l’influence de la température les Inégalités marquées que présentent ces altitudes. IT est impossible de voir des effets de cette cause dans les résultats si prononcés obtenus à l'égard de Bruxelles et de Namur, selon les divers vents. La liaison entre ces résultats et les intensités de presque tous les vents, leur concordance avec les résultats généraux et par- ticuliers signalée dans tout ce travail me portent à consi- concernant Bruxelles de + Omm,46 afin de lesramener aux hauteurs abso- lues, ce qui n'avait pas eu lieu dans le précédent travail. Ensuite, les pre- miers résultats avaient été déduits des séries d'observations à dix heures du matin et deux heures du soir, tandis que les résultats actuels dé- pendent des coïncidences des vents de même direction, à Bruxelles et à Namur, à d’autres heures, entre autres à midi. Celle-ci étant l'heure où l'intensité du vent atteint généralement son maximun diurne à Bruxelles, elle a certainement exercé une influence marquée sur l'intensité des vents de la région australe particulièrement , et par suite sur les hauteurs barométriques. N'oublions pas d’ailleurs que les coïncidences sont plus fréquentes par les vents les plus forts. Si l’on a égard à ces considéra- tions, on s’expliquera aisément les différences que présentent les deux tableaux, la coïncidence du minimum barométrique avec le vent du SO., et l'écart des maxzima et minima barométriques, qui atteint ici 8mm,04, tandis qu'il s'élevait seulement à 5"w,71 pour les premiers ré- sultats. Je dois rectifier ici une erreur qui affecte la hauteur barométrique moyenne correspondant au vent de SSE., dans le tableau de la page 197 du tome X des Bulletins. Sa valeur, déduite des deux séries du matin et du soir, est en réalité 755,21 et non 755,21. Cette correction fait disparaître l'irrégularité de la courbe des pressions barométriques au point du SSE, dans la planche insérée à la fin du travail. ( 489 ) dérer l’influence de la vitesse du vent comme étant ici la cause prépondérante sur les différences d'altitude entre Bruxelles et Namur, selon les divers vents. Il ne faut point, d’ailleurs, perdre de vue, comme je lai déjà fait remarquer, que la correction qui peut dépendre de l’influence de la température, se trouve pour ainsi dire effectuée dans le calcul des résultats par l’introduction des températures observées à Bruxelles et à Namur dans la formule (1). Comment serait-il possible, après cette correction, d'expliquer par des effets de la chaleur sur l'air la différence de 12",04 entre les altitudes qui cor- respondent aux vents de NE. et de S0O., lorsque les tem- pératures de ces vents aux deux localités sont les mêmes à un degré près? N’est-il pas beaucoup plus rationnel, après tout ce qui précède, d'attribuer ces 12",04 de différence à la supériorité d'intensité 0,538 du vent de SO. par rap- port au vent d’E .? J’ai la conviction que l'influence du vent sur les hau- teurs barométriques correspondantes, prises en des lieux non par trop éloignés, est une des principales causes des différences que présentent les altitudes calculées à l’aide de ces mesures ; et que cette même influence affecte aussi les mesures barométriques prises sur la même verticale, à tel point que les écarts des altitudes calculées, par rapport à l'élévation vraie, seront d’autant plus sensibles que l’ac- tion du vent aura été plus prononcée. J’aurai l’occasion de citer plus loin une coïncidence remarquable qui viendrait à l’appui de ce que j’avance ici. Nous trouvons une confirmation générale des consé- quences et des faits signalés précédemment dans le tableau suivant, où figurent les moyennes générales concernant les données météorologiques observées à Bruxelles, et les ( 490 ) altitudes de Namur et de Stavelot qui ont été obtenues dans les tableaux précédents. J'ai introduit les moyennes an- nuelles que j'ai déduites des heures d’observations diurnes, pendant les quatre années 1850-1853 à l’égard de Namur, et pour les neuf années 1851-1859, à Stavelot. Sur la même ligne figurent les moyennes annuelles concernant Bruxelles qui correspondent à ces deux périodes. MOYENNE MOYENNE À BRUXELLES des altitudes calculées EE — INDICATIONS. de la = de la de pression : dé +. à à atmosphéri- temperature intensité que. de l'air. duvent, | Namur. | Stavelot. | mm. k. m. m. | Par un temps calme . . . . .|] 760,88 8516 0,068 | 92,41 | 215,00 | D'après les maxima barométriques. 66,93 9,39 0,100 |! 88,96 | 226,77 | Par les divers vents. . . . . . 56,13 11,92 0,235 83,41 » | Par les moyennes annuelles . . , |756,01-756,5S] 10,63-11,10 | 0,248-0,219| 82,69 | 214,85 | Par des vents forts . . . . . . 41,44 6,92 1,455 72,45 | 198,68 | D'après les minima barométriques. 38,07 8,43 1,852 62,16 | 194,87 La concordance de ces résultats particuliers entre eux méritait d’être signalée. Si l’on prend, pour chacune des localités, les excès de l’altitude vraie sur les différentes moyennes des altitudes calculées, ces excédants croissent assez régulièrement en valeur avec l'intensité du vent, par- ticulièrement à l'égard de Namur. Voyons actuellement le parti que nous avons à tirer de tout cet ensemble de résultats pour résoudre la question posée. J'ai montré précédemment que, si par des temps calmes, ( 491 ) les forces élastiques des couches d’air superposées sui- vent souvent la loi de progression décroissante indiquée, quand bien même les points d'observation sont aussi éloignés en projection horizontale que Namur et Stavelot le sont de Bruxelles, il n’en est plus ainsi lorsqu'un même vent plus ou moins fort règne aux stations météorolo- giques. Nous avons vu que, dans ce cas, l'altitude D’ cal- - culée au moyen de la formule : (T’ +?) D We REA 18593 É + 2 nn |Uogn log h’], qui renferme les mesures barométriques H’, 2! et thermo- métriques T’, t’, déterminées respectivement à Bruxelles et à Namur sous l'influence du vent, est moindre que Pal- titude déduite des mesures H et prises par un temps calme, et que, plus le vent est fort, plus D’ diminue. Nous avons été également conduit, par les faits seuls, à cette autre conclusion : le facteur (log H—log ) qui convient aux observations faites en l'absence du vent, est supérieur au facteur (log H'— log’) parce que la diminution de H”, par rapport à H à Bruxelles, est plus forte que ne l’est celle de h’ relativement à À observé à Namur. Ces conséquences qui dérivent exclusivement des faits observés, s'expliquent avec la plus grande facilité, si l’on admet que l'influence du vent diminue la pression de chaque tranche d’air du courant sur celle qui lui est immé- diatement inférieure. En effet, que l’on concède momen- tanément cette Influence de la vitesse V du vent sur la pression de chaque tranche du courant d'épaisseur infi- niment petite, et que, sans rechercher ici ni la cause mé- canique de cette influence, ni son expression analytique ( 492 ) complète, on désigne simplement cette influence dans la couche considérée par la fonction © (V), il faudra néces- sairement introduire © (V) dans l'expression de la difié- rentielle de la pression de la tranche d'air sur la couche immédiatement inférieure. Si l’on désigne par 2 la densité d’une tranche d’air d'épaisseur infiniment petite dx, située à une hauteur x où la pesanteur est g', on sait que la dif- férentielle de la pression p de cette couche par un temps calme, a pour expression : (RPM ES. SUR ET EST re Lorsqu'un vent de vitesse V entraîne la couche, d’après le postulata, la pression de celle-ci sur la couche inférieure diminue, et elle devient p! - 2 L'd 2 , SU él 4 v< à L x . + … Le 4 à Le, 2 E ‘ il Li de Sémonaz ct Toovey ( O1 ) lame mobile que j'ai jointe à l'appareil sert à montrer le mouvement de l’air dans un tuyau ouvert. Enfin on pourrait diversifier à l’infini les apparences produites, soit en changeant la forme des découpures faites dans le papier qui recouvre la lame fixe ou la lame mobile, soit en colorant artificiellement quelques-uns des points que la première permet d’apercevoir, soit enfin en donnant _à la lame mobile un mouvement de rotation, au lieu du mouvement de translation qu’elle prend dans les deux ap- pareils que je viens de décrire. Il me semble qu’un kaléi- doscope construit d’après ces idées serait susceptible d'effets assez agréables. — M. Melsens a fait ensuite une communication verbale concernant un appareil destiné à inscrire sur un tableau les reculs ou plongeons de l’éprouvette qu’il à présentée dans une précédente séance, et il donne quelques détails sur les courbes qui sont tracées par la combinaison du mouvement vertical de l’instrument et du mouvement hori- zontal du tableau. — M. le vicomte Du Bus communique à l’Académie quelques observations sur les récentes découvertes paléon- tologiques faites à Anvers. Il met sous les yeux de la classe deux dents fossiles ayant appartenu, vraisemblablement, à un genre de cétacé voisin des Ziphius. Ces objets ont été trouvés à Borgerhout, dans les fouilles faites pour la con- struction de l'enceinte, sous les ordres du capitaine Duvwelz. Une dent de la mâchoire supérieure d’un mammouth y a été également recueillie. Les ossements de cétacés, notamment les vertèbres, se ( 512) rencontrent en assez grand nombre dans la plupart des endroits où les travaux de ereusement sont parvenus à une certaine profondeur. Les coquilles sont très-abondantes partout. Le contraire aura lieu sur les points les plus rapprochés de l’Escaut, notamment au camp retranché, où il existe des couches de tourbe fort épaisses dont le fond est quelque- fois inférieur à celui des fossés. Cependant les points qui promettent la plus riche mois- son de débris fossiles, sont les environs de Deurne et de Wyneghem. La construction du fort de Wyneghem, établi sur une crête, obligera probablement à fouiller plus avant dans les couches paléozoïques, vu la nécessité, pour le génie militaire, d’avoir partout, dans les fossés, un mini- muin de deux mètres d’eau. M. Du Bus fait remarquer ensuite que les travaux en cours d'exécution en ce moment autour d'Anvers permet- traient de tracer une coupe géologique complète des en- virons de cette ville, sur la rive droite de l’Escaut. Les circonstances actuelles sont extrêmement favorables et ne se représenteront peut-être jamais. Il propose à l’Académie d'appeler sur ce point l'attention du Gouvernement, et de le prier de fournir à un géologue les moyens d’exécution de ce travail. Il émet l'opinion que M. Dewalque, qui va entreprendre une grande publication sur la carte géolo- gique du pays, pourrait en être chargé. La classe accueille la proposition de M. Du Bus et charge le secrétaire perpétuel de la transmettre, en son nom, à M. le Ministre de l’intérieur. (513) CLASSE DES LETTRES. —————— Séance du 13 mar 1861. M. DE Rau, directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Grandga- gnage, De Smet, Roulez, Gachard, Borgnet, le baron Jules de Saint-Genois, David, Paul Devaux, De Decker, Snellaert, Carton, Haus, Bormans, Leclercq, Polain , Ba- guet, le baron de Witte, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres ; Nolet de Brau- were van Steeland , associe; Blommaert, Guillaume, cor- respondants. M. Alvin, membre de la classe des beaux-arts, assiste à la séance. CORRESPONDANCE. — S. À. R. Monseigneur le Due de Brabant exprime ses regrets de ne pouvoir, par des motifs de santé, assister à la séance publique , où l’Académie compte donner à son secrétaire perpétuel un témoignage de ses sentiments d’es- time, après vingt-cinq années d'exercice dans ses fonc- ( 914 ) tons actuelles; «il aurait été charmé, dit-il, de lui témoi- gner une fois de plus les sentiments d'affection et de haute considération qu’il lui a voués. » S. À. R. Monseigneur le Comte de Flandre témoigne également ses regrets de ne pouvoir assister à la séance publique. — M. le Ministre de l’intérieur fait connaître que le jury pour le prix quinquennal d'histoire n’a pas cru devoir dé- cerner la récompense proposée au concours. « Son inten- tion, dit ce haut fonctionnaire, est de proposer au Roi de réserver la somme de cinq mille francs, qui reste sans emploi par suite de cette décision, pour former le prix quinquennal qu'il y aura lieu de décerner en 1866, et de porter ainsi au double la somme affectée à ce prix. » — L'Institut impérial de France, la Société des anti- quaires de Londres et la Société historique d’Utrecht re- mercient l’Académie pour l’envoi de ses dernières publi- cations. — M. le baron de Witte, membre de-la classe, fait hommage de plusieurs de ses écrits, ainsi que d’un ouvrage de M. Francois Lenormant, fils d’un de ses associés de la compagnie récemment décédé. CONCOURS DE 1361. La classe des lettres avait mis au concours six questions sur différents sujets : il a été répondu à quatre d'entre elles. (515) DEUXIÈME QUESTION. Quelles sont les applications utiles et pratiques du prin- cipe de l’association pour l’amélioration du sort des classes ouvrières et indigentes ? Rapport de M. Ducpetiaux. « La question posée ci-dessus avait été portée une pre- mière fois au programme du concours pour l’année 1860. L’Académie n’a pas jugé à propos de décerner de prix aux mémoires qui lui ont été présentés à cetle époque, mais l’importance de la question l’a déterminée à l’inscrire de nouveau à son programme pour 1861. Cet appel réitéré a provoqué l’envoi de deux mémoires. L’un porte pour devise : L’égoisme est stérile ; l’autre pour épigraphe : Nulla est homini causa philosophandi, nisi ut beatus sit. (Saint Augustin.) Le premier de ces écrits n’est, à proprement parler, qu'un recueil de préceptes et de conseils. Son style fami- lier, tend parfois, dans son irrégularité, à s'élever à la poésie pour retomber brusquement dans l'expression la plus prosaïque ; il décèle un véritable amour de l’huma- nité, joint malheureusement à une grande inexpérience. L’auteur préconise l’union fraternelle des ouvriers en petits groupes pour le ménage; il établit un parallèle entre la famille du travailleur, isolée, réduite à ses seules ressources, et l'association de plusieurs familles qui s’en- tr’aident, et réduisent ainsi leurs dépenses tout en amé- liorant leur position. C’est là une idée élémentaire qui se retrouve, mais développée et étayée de nombreux exem- ples, dans le mémoire n° 2. A cette idée l’auteur rat- ( 916 ) tache un petit traité d'hygiène, un recueil de recettes do- mestiques, et une digression sur l'éducation des enfants, tous objets parfaitement étrangers à la question princi- pale. En résumé, ce travail n’a guère d'autre valeur que les excellentes intentions qui l'ont dicté. S'il était convenable- ment remanié, abrégé d’une part et complété de l’autre, si le style en était revu et châtié, on en ferait peut-être un livre de lecture assez attrayant et qui pourrait être mis utilement entre les mains des ouvriers. Tel qu'il est, il ne nous parait nullement répondre aux conditions du con- COUrS. Le mémoire n° 2 à une tout autre portée. EH prend la question de haut, et, comme nous le verrons plus loin, bien qu’il ne l’envisage que sous un de ses aspects, et qu'il la restreigne en quelque sorte dans les limites de la sphère agricole, il présente une série de faits et d'arguments qui méritent de fixer sérieusement l’attention. Et d’abord il établit la différence essentielle qui existe entre la communauté proprement dite et l’association : l'une soumet ses membres à un régime uniforme qui exclut la liberté des actes et la propriété individuelle; l’autre est libre et volontaire, ses formes et ses applica- tions sont variées, et elle ne porte nulle atteinte à la con- sitution de la propriété. L'origine de l’association remonte aux temps les plus reculés : la famille en constitue le germe pour ainsi dire; lesclave est associé dans la famille , les familles sont asso- ciées dans le servage. Les colléges des Romains, les agapes des chrétiens, les ghildes des Germains ne sont que des applications du même principe. La commune est une véri- table association pour la satisfaction de certains besoins LA ( 17) communs. Les corps de métiers, les jurandes , les compa- gnonnages , les confréries du moyen âge, qui se sont per- pétués jusqu’à la fin du siècle dernier et dont on retrouve encore aujourd’hui de nombreux vestiges, témoignent de la vitalité de l'esprit d'association et du besoin qu’éprou- vaient nos ancêtres d’unir leurs forces et leurs ressources, soit pour défendre leurs intérêts, soit pour assurer et amé- liorer leur position. Les monastères, les abbayes qui s’élevèrent successive- ment sur toute la surface de l’Europe reproduisent le même type sous une forme religieuse. Le bel ouvrage de M. le comte de Montalembert sur les Moines-d’Occident, nous dit leur origine, leur constitution, leurs progrès et leur développement, et retrace avec de vives couleurs le tableau des services qu'ils ont rendus à l’humamnité. L'exemple donné par les fondateurs de ces remarquables - institutions n’est pas étranger sans doute à la formation des associations de serfs et de cultivateurs, qui n'étaient, à proprement parler, que des couvents laïques ; seulement elles n’admettaient pas la règle monastique relative à la communauté des biens , et observaient généralement celle de la proportionnalité des bénéfices aux apports. L'auteur du mémoire que nous examinons cite de nom- breux extraits d'anciennes coutumes qui attestent l’exis- tence et l’importance de ces associations rurales qui cou- vraient jadis le sol de la France. «Ce n’est pas d’aujourd’hui » que l'association est en honneur, » dit M. Troplong (1). « Les Romains en ont parlé avec enthousiasme; ils l’ont » pratiquée avec grandeur. Mais c’est surtout le moyen a —————— © (1) Commentaire des sociétés civiles ; préface, VII, 35, 47. 2e SÉRIE, TOME XI. 97 Y VW iVv vw VW v v V4 v Vv Vu. VV _Frv., V (518 ) àge qui fut une époque prodigieuse d'association : c'est lui qui forma ces nombreuses sociétés de serfs et d'agriculteurs qui couvrirent et fécondèrent le sol de la France; c'est lui qui multiplia ces congrégations reli- gieuses, dont les bienfaits ont été si grands par leurs travaux de défrichement et leurs établissements au sein des campagnes abandonnées. Probablement alors on parlait moins qu'aujourd'hui de l'esprit d'association, mais cet esprit agissalt avec énergie. » L'association de tous les membres de la famille sous un méme toit, sur un même domaine, dans le but de mettre en commun leur travail et leur profit, est le fait général, caractéristique, depuis le midi de la France jusqu'aux extrémités opposées. » C’est surtout dans les villages et dans les campagnes que ces sociétés taisibles ou tacites étaient fréquentes. La géographie coutumière en conserve les traces dans les provinces les plus opposées d'usages et de mœurs ; elles règnent dans les pays de droit écrit comme dans les pays de coutume, dans ceux où les habitudes im- posent la dot au ménage comme dans ceux où domine la communauté conjugale. » Dans le ressort du parlement de Toulouse, dans. la Saintonge, l'Angoumois, la Bretagne, l'Anjou, le Poi- tou, la Touraine, la Marche, le Berry , le Nivernais, le. Bourbonnais, les deux Bourgognes, l'Orléanais, le pays chartrain, la Normandie, la Champagne, le -Bassi- guy, etc., les populations affectionnent ce genre-d'asso- cation, et les statuts locaux le favorisent. » | L'association telle qu'elle existait alors ne portait at- teinte ni à la propriété, n1 à la famille, que les partages et le morcellement excessif ont depuis sérieusement ébran- 3 | ( 919 ) lées. « Ces associations, » dit encore M. Troplong (4), «que » les auteurs du seizième siècle appellent quelquefois des » fraternités pour peindre le sentiment de famille qui les » anime, furent très-utiles aux progrès de la race servile; » elles montrent surtout la direction de l’esprit de famille » vers la communauté et l’association… » Et puis voyez comme la communauté est dans les » instincts de la famille ! Non-seulement 1! y a les com- » munautés et fraternités de ménages rustiques; non-seu- » lement il y a les communautés taisibles entre frères et » entre époux, mais 1l y a aussi la communauté des enfants » avec celui de leurs auteurs qui survit après la dissolu- » tion du mariage; celle du gendre ou celle de la bru » avec son beau-père et sa belle-mère, après l’an et jour » de demeure en commun. N'est-ce pas là un système com- » plet,expression d’un même esprit, fruit du même besoin » et de dispositions pareilles ? » L'association, la communauté, voilà la combinaison » populaire : elle prenait sa place entre les époux par la » puissance de la coutume, qui la mettait partout. » Quels étaient le but et la forme de ces associations rurales ? Si leur but principal était la protection mutuelle de leurs membres, elles avaient aussi pour objet l’assis- tance mutuelle pour le travail et le ménage. Un auteur ancien, Guy Coquille (2), nous décrit, dans son naïf lan- gage, l'existence toute charitable et évangélique de ces humbles communautés. « Selon l’ancien établissement du » ménage des champs en ce pays de Nivernais, plusieurs >» personnes doivent être assemblées en une famille pour (1) Contrat de mariage : préface, p. cxrx. (2) Sur Nivernais : Des bordelages. ( 220 }) démener un ménage qui est fort laborieux, et consiste en plusieurs fonctions en ce pays, qui de soi est de eul- ture malasée. Les uns servent pour labourer et pour toucher les bœufs, animaux tardifs, et communément faut que les charrettes soient tirées de six bœufs; les autres pour mener les vaches et les jeunes juments aux champs, les autres pour mener les brebis et les moutons, les autres pour conduire les porcs. Ces familles ainsi com- posées de plusieurs personnes, qui toutes sont employées selon leur âge, sexe et moyens, sont régies par un seul, qui se nomme maitre de communauté, élu à cette charge par les autres, lequel commande à tous les autres, va aux affaires qui se présentent ès villes et foires et ailleurs: a pouvoir d'obliger ses parsonniers en choses mobi- liaires qui concernent le fait de la communauté, et lui seul est nommé ès rôles des tailles et subsides. Par ces arguments, se peut connaître que ces communautés sont vraies familles et colléges qui, par considératjon de l'intellect, sont comme un corps composé de plusieurs membres, combien que les membres soient séparés l’un de l’autre; mais, par fraternité, amitié et liaison écono- mique, font un seul corps (1). » En ces communautés on fait compte des enfants qui ne savent encore rien faire, par l'espérance qu'on à qu’à l'avenir ils feront; on fait compte de ceux qui sont en vigueur d'âge, pour ce qu'ils font; on fait compte des vieux, et pour le conseil et pour la souvenance (1) Dans un autre passage de son commentaire , l'auteur s'exprime ainsi : « Ces communautés sont vraies familles qui font corps et université » » et s’entretiennent par subrogation de personnes qui naissent en icelles ou y sont appelées d’ailleurs. » k » qu'on à qu'ils ont bien fait. Et amsi de tout âge et de » toutes façons, ils s’entretiennent comme un corps poli- » tique qui, par subrogation, doit durer toujours. Or, » parce que la vraie et certaine ruine de ces maisons de » village, est quand elles se partagent et se séparent, par » les anciennes lois de ce pays, tant ès ménages et familles » de gens serfs, qu’ès ménages dont les héritages sont » tenus à bordelage, a été constitué pour les retenir en » communauté, que ceux qui ne seraient en la com- » munauté ne succéderaient aux autres, et on ne leur » succéderait aussi. » | On le voit, la division du travail était jadis parfaitement usitée dans ces communautés rurales, qui savaient utiliser toutes les forces en employant chacun « selon son âge, » sexe et moyens, » non-seulement aux travaux des champs, mais, ainsi que l’établit le président Bouhier (1), « à une imfinité de différents ouvrages dont le détail serait » trop long. » L'association en effet était complète : elle était domestique, mdustrielle et agricole. C’est ce qu’atteste Legrand d’Aussy (2), qui visita, en Auvergne, plusieurs de ces communautés dans l’année qui précéda la prise de la Bastille. On nous permettra de reproduire encore ici, d’après l’auteur du mémoire, un extrait de la description du voyageur français; 1l nous mettra au courant du ca- ractère et de l’organisation des associations dont il s’agit, qui, à son époque, étaient encore nombreuses en France, où elles avaient résisté et survécu aux événements et aux perturbations de la monarchie. (1) Sur la coutume de Bourgogne, IT, 506. (2) Voyage en Auvergne, 1, pp. 455-495, passim. 2 (NE 4000 ON De NN . (52) « Autour de Thiers (en Auvergne), et en pleine cam- pagne, sont des maisons éparses habitées par des so- ciétés de paysans dont les uns s’occupent de coutellerie , tandis que les autres se livrent au travail de la terre. Outre ces habitations particulières et isolées, il en est d'autres plus peuplées dont la réunion forme un petit hameau et dans lesquelles la communauté est plus in- time encore. Le hameau est habité par les diverses branches d’une même famille qui, livrée uniquement à l’agriculture, ne contracte ordinairement de mariage qu'entre ses différents membres, qui vit en communauté de biens, a ses lois, ses coutumes et qui, sous la con- duite d’un chef qu’elle se donne et qu'elle peut déposer, forme une sorte de république où tous les travaux sont communs, parce que tous les mdividus sont égaux. » Il y a dans les environs de Thiers plusieurs de ces familles républicaines, Tarante , Baritel, Terme, Guit- tard, Bourgade, Beaujeu, etc. Les deux premières sont les plus nombreuses, mais la plus ancienne, ainsi que la plus célèbre, est celle des Guittard. La hameau qui forme et qu'habite la famille des Guittard est au nord- ouest de Thiers et à une demi-lieue de la ville. Il s'appelle Pinon; ce dernier nom a même, dans ce pays, prévalu sur le leur propre, et on les nomme les Pinon. Au mois de juillet 1788, quand je les ai visités, ils formaient quatre branches ou quatre ménages, en tout dix-neuf personnes, tant hommes que femmes et enfants. Mais le nombre des hommes ne suffisant pas pour l’exploita- tion des terres et des autres travaux, ils avaient avec eux treize domestiques, ce qui portait la population à trente-deux personnes. On ignore l’époque précise où le hameau fut fondé. La tradition en fait remonter l'éta- ( 523 ) blissement au douzième siècle. L'administration des » Pinon est paternelle, mais élective. Tous les membres » » de la communauté s’assemblent ; à Ia pluralité des voix, ils se choisissent un chef qui prend le titre de maître, et qui, devenu père de toute la famille, est obligé de veiller à tout ce qui la concerne. » Tous travaillent en commun à la chose publique: logés et nourris ensemble, habillés et entretenus de la même manière, et aux dépens du revenu général, ils ne sont plus, en quelque sorte, que les enfants de la maison. Le maître, en qualité de chef, perçoit l’argent, vend et achète, ordonne lés réparations, dispense à chacun son travail, règle tout ce qui concerne les mai- sons, la vendange, les troupeaux; en un mot, il est là ce qu'est un père dans sa famille. Mais°ce père diffère des autres en ce que, n'ayant qu'une autorité de dépôt et de confiance, il en est responsable envers ceux dont il la tient, et qu’il peut la perdre de même qu’il l’a reçue. S'il abuse de sa place, s’il administre mal, la commu- nauté s’assemble de nouveau, on le juge, on le dépose, et il y a des exemples de cette justice sévère. » Les détails intérieurs de la maison sont confiés à une femme. Le département de celle-ci embrasse la basse- cour, la cuisine, le linge, les habillements, etc. : elle porte le titre de maîtresse. Elle commande aux femmes, comme le maître commande aux hommes; ainsi que lui, on la choisit à la pluralité des suffrages , et ainsi que lui on peut la déposer. Mais le bon sens naturel a dit à ces simples paysans que si la maîtresse se trouvait être femme ou sœur du maître, et que ces deux préposés manquassent de la probité nécessaire à leur gestion, tous deux réunis auraient trop d'avantage pour nuire à ( 524 ) la chose publique. En conséquence, pour prévenir ees abus, par une des lois constitutives de ce petit État, il est réglé que jamais la maitresse ne sera prise dans le même ménage que le maître (1). Celui-ci, comme son titre l'annonce, a l'inspection générale, et jouit du droit de conseil et de réprimande. Partout il occupe la place d'honneur; s’il marie son fils, la communauté donne une fête à laquelle sont invitées les communes voisines; mais ce fils n’est, comme les autres, qu'un membre de la république; il ne jouit d’aucun privilége particulier, et quand son père meurt, il ne succède point à sa dignité, à moins qu'on ne l'en trouve digne et qu'il ne mérite d'être élu à son tour. | » Une autre loi fondamentale observée avec la plus grande rigueur, parce que d'elle dépend la conservation de la société, est celle qui regarde les biens. Jamais, dans aucun cas, ils ne sont partagés; tout reste en masse, personne n'hérite, et, ni par mariage, ni autre- ment, rien ne se divise. Une Guittard sort-elle de Pinon pour se marier, on lui donne six cents livres en argent; mais elle renonce à tout, et ainsi le patrimoine général subsiste en entier comme auparavant. Il en serait de même pour les garcons, si quelqu'un d'eux allait s’éta- blir ailleurs... » Tout ce qui leur sert, tout ce qu'ils portent, linge, meubles, habits, chaussures, est fait par eux ou par leurs femmes. Faut-il construire un bâtiment, couvrir un toit, fabriquer des instruments d'agriculture, des (1) Il n’est pas sans intérêt de faire observer que la même particularité se rencontre dans les communautés de frères moraves. e » » » » » » » » » (525 ) tonneaux de vendange, etc.? Ils n’est recouru à personne. Eux seuls, avec ieurs domestiques, exercent les diffé- rents métiers qui leur sont nécessaires. En un mot, ils n’emploient aueun ouvrier du dehors , et n’achètent guère que du fer et du sel. » Toutes les fois que leur ouvrage n’exige pas qu'ils soient séparés, ils travaillent ensemble; il y a pour les repas un lieu commun : c’est une grande et vaste cuisine tenue très-proprement... On y a pratiqué une niche qui forme, en quelque facon, chapelle, et qui contient un christ et une vierge. Là, tous les soirs, après le sour er, on fait la prière en commun, mais cette prière n’a lieu que le soir. Le matin, chacun fait la sienne en particu- lier, parce que la plupart des travaux étant différents, les heures du lever le sont aussi. « Indépendamment de la propriété du hameau, les Guit- tard possèdent encore un bois, un jardin, des terres, des vignobles, et beaucoup de châtaigniers. Mais outre que leurs terres sont pauvres et qu’elles ne produisent que du seigle, les trente-deux bouches qu'ils ont à nourrir consomment toute leur récolte et ne leur per- mettent pas d’en vendre. D'ailleurs ces cultivateurs res- pectables par leurs mœurs et par leur vie laborieuse, font encore, dans le lieu de leur séjour, des charités immenses. Jamais pauvre ne se présente chez eux sans y être reçu, jamais il n’en sort sans avoir été nourri; on lui donne de la soupe et du pain. S’il veut passer la nuit, il trouve à coucher; il y a même dans la ferme une cham- bre particulière destinée à cet usage. En hiver, on pousse l'humanité plus lom encore : les pauvres alors sont logés dans le fournil, et, en les nourrissant, on leur procure de plus une sorte de chauffoir qui les garantit du froid. » ( 526 ) On rencontre à peu près les mêmes détails dans l’inté- ressante notice publiée naguère par M. Dupin, sur la com- munauté des Jault dans le Nivernaïs, qui a prolongé son existence jusque dans ces derniers temps. Ce n’est pas en France seulement que s’est réalisé ee type d’associa- tion; on le retrouve dans les communautés de frères mo- raves, qui existent encore en Allemagne et en Hollande. En Angleterre aussi, Walter Scott, dans le premier chapitre du Monastère, fait mention de ces associations laïques , créées à l’instar et sous l’influence des commu- nautés religieuses. « La résidence de ces vassaux de » l'Église était ordinairement un petit village ou hameau » formé par trente ou quarante familles, qui se servaient » mutuellement d’aide et de protection. Les habitants pos- » sédaient ordinairement le terrain en commun , bien qu'à » proportions variées, Suivant la diversité des concessions. » Toute la corporation participait indistinctement aux tra- » vaux, et le produit était distribué, après la récolte, selon » les droits respectifs de chacun. » | Nous pourrions multiplier ces citations, mais ce serait reproduire en quelque sorte le mémoire dont nous de- vons nous borner à présenter l'analyse. Tous les auteurs contemporains sont d'accord pour attester les avantages de ces associations assises à peu près toutes sur le même principe. C’est sous l'empire de ce régime que l’agriculture a fait les plus grands progrès, et l’on se demande si l’es- pèce de mammorte qu'il consacrait n’y trouve pas son explication et sa justification, en opposant une barrière au morcellement indéfini des propriétés et des cultures dont on se plaint aujourd’hui. Les communautés laïques ont disparu dans la tour- mente révolutionnaire avee les communautés religieuses ( 927 ) qui les avaient suscitées. Cependant on retrouve encore çà et là des souvenirs et des traces de l'esprit qui les animait, dans les communaux, les pâtures communes, l’affouage, les moulins et les fours banaux, et particulièrement dans les fruitières du Jura et de la Suisse dont nous avons en- tretenu l’Académie à l’occasion du concours précédent. Ces faits conservent leur valeur, et l'exemple des ancé- tres ne doit pas être perdu pour les descendants. Aussi est-ce en s'étayant sur ces précédents que l’auteur du mémoire fait ressortir les inconvénients de l’isolement, du morcellement, de l’mdividualisme, en leur opposant les bienfaits de l’association pour tout ce qui se rapporte au ménage et à l’organisation des travaux. Cette apologie fait l'objet de la deuxième partie du mémoire. Elle répond à la question posée par l’Académie, que les applications utiles et pratiques du principe de l’association pour l’amé- lioration du sort des classes ouvrières et indigentes se bornent à une seule qui les contient toutes : l’associa- tion des communautés rurales du moyen âge, modifiées et élargies par l'esprit nouveau ; l’association décrite par Guy Coquille et Legrand d’Aussy; l'association domestique, agricole et industrielle, établie par voie d’essai libre et volontaire. L'auteur s'étend longuement sur les conditions d'application de ce principe, et rencontre et réfute les ob- jections qu’on peut lui opposer. Mais tout en admettant les bienfaits ou tout au moins l’innocuité de l'association libre et volontaire pour tout ce qui se rapporte au ménage et au travail, on se demande si le problème peut être considéré comme complétement résolu. Nous ne le pensons pas. Le cercle dans lequel est forcément circonscrit ce mode d’association est plus étroit qu'on ne le pense. Dans la constitution actuelle de la so- ( 528 ) ciété, de l’agriculture et de l’industrie, il y a des obstacles, des relations, des intérêts et des besoins dont il faut tenir compte, et qui doivent nécessairement influer sur le choix des moyens destinés à l'améliorer. Les réformes ne s’in- troduisent pas tout d’une pièce, pour ainsi dire; il convient de les varier en ménageant les transitions, et de ne pas oublier le mal présent et le remède immédiat, pour pour- suivre exclusivement un idéal qui peut nous échapper encore longtemps. On ne pourrait certainement trop applaudir à la renais- sance de cet esprit de fraternité, de ces communautés d'agriculteurs et d'artisans, dont les siècles écoulés nous ont laissé de si remarquables exemples, et les hommes convaincus et dévoués qui se mettraient à la tête de ce mouvement salutaire, rendraient un immense service à l'humanité, Mais, à côté de cette réforme, dont la propa- gation peut être lente et difficile et dont le succès est éloigné , il en est une autre non moins utile, plus actuelle, dont j'ai résumé à larges traits les applications variées dans le travail que j'ai soumis l’an dernier à l’Académie (1). L'auteur du mémoire n’en dit mot, et semble ignorer les institutions si nombreuses et si bienfaisantes qui, dans les divers pays d'Europe et d'Amérique, doivent leur origme aux idées d'association et de solidarité dont elles attestent la vitalité. L'intérêt que présente son travail est aussi beaucoup plus grand et plus soutenu dans la première partie, dans la partie purement historique, que dans la (1) De l'Association dans ses rapports avec l'amélioration du sort de la classe ouvrière, mémoire lu à la séance publique de la classe des lettres de l’Académie royale de Belgique, le 11 mai 1860, (Tome X du Recueil des Mémoires , etc., colleetion in-8°, 1860.) ( 529 ) seconde, dans la partie organique, où, à côté d’incontes- tables vérités, on trouve des assertions plus ou moins hasardées. Il s’y rencontre aussi des longueurs, des redites, el une certaine confusion qui ne permet pas toujours de suivre le fil du raisonnement, et qui déroute parfois le lecteur qui voudrait aboutir à une conclusion plus prompte et plus nette. En outre, dans l’apologie par trop exclusive qu’il fait de l’association rurale, l’auteur méconnaît, selon nous, les services rendus par les moines qui en ont été bien réellement les promoteurs et que, contrairement aux documents qu’il a réunis lui-même dans la première partie de son travail, et au témoignage unanime de l’histoire et des écrivains impartiaux, il représente comme des parasites et des oisifs (p. 97). C’est là une injustice et une tache qui dépare une démonstration qui a pour principal mérite de rappeler les faits et les leçons d’un autre âge, trop oubliés aujourd’hui. En résumé, le mémoire que nous avons été appelé à examiner et que nous avons lu avec une attention soute- nue, à exigé des recherches longues et patientes dont il faut savoir gré à l’auteur qui les a entreprises. Les rensei- gnements y abondent, et l’on ne pouvait mieux prouver, selon nous, la nécessité de renouer le lien brisé entre les temps anciens et les temps nouveaux, et de remettre en lumière et en honneur la pratique de l'association et de la solidarité dont la tradition nous a légué l'exemple. Mais son travail, presque complet à cet égard, laisse malheu- reusement, d’un autre côté, subsister des lacunes qui lui enlèvent une grande partie de son utilité. En envisageant la question posée d’un point de vue trop restreint et trop exclusif, il ne l’a résolue que d’une manière très-incom- plète. Il s’est aussi laissé entraîner par des réminiscences ( 90 ) empruntées aux doctrines de Fourrier, qui ouvrent la porte à de nombreuses et graves objections que nous pou- vons nous dispenser de passer en revue. | Il nous paraît donc que le mémoire n° 2 n’a pas satisfait aux conditions du concours, et qu’on ne peut lui attribuer le prix. Mais il mérite, selon nous, un encouragement et une distinction qui pourrait consister en une médaille d'argent. Cet encouragement déciderait peut-être l’auteur à revoir son travail, à en éliminer les détails superflus, les assertions douteuses ou inexactes, et à le compléter par l'étude des faits nouveaux que nous avons signalés. La publication pourrait en être alors vraiment utile, et nous aimons à croire que l’Académie s’empresserait de la faciliter, dans la mesure des réssources dont elle dispose. » Bapport de M. Paul Devaux. « Je n’ai reçu les deux mémoires que le 9 avril, dans un moment où je suis fort occupé. Ces mémoires devant être transmis au troisième commissaire ,avec mon rapport, en temps utile, pour qu’il en puisse prendre connaissance à son tour, je me borne à consigner ici mon appréciation dans les termes les plus sommaires. Le mémoire ayant pour devise : L’égoisme est stérile, a trop peu de valeur pour qu'il puisse s’agir de lui décerner un prix ou une distinction quelconque. | Le second mémoire : Nulla est homini, etc., se compose de deux parties : le passé et l’avenir. La première est principalement consacrée à des extraits d’un petit nombre d'auteurs français (Guy Coquille, Legrand d’Aussy, Trop- { 961 ) long) concernant d'anciennes .associations rurales en France. C’est dans la seconde partie que l’auteur avait à répondre à la question mise au concours. En la posant, l'Académie avait en vue, les termes de la question le mon- trent, une solution pratique qui dissipàt les nuages et les dangers des utopies : une académie belge ne pouvait vou- loir autre chose. C’est ce que l’auteur, qui ne parait pas écrire pour la Belgique, n’a pas compris. Toute la partie du mémoire où il devait résoudre la question du concours, ne se compose guère que de redites des écrivains de l’école de Fourrier et de Saint-Simon : c’est l'éloge des associa- tions de travailleurs, à peu près dans les termes où où l’a lu dans tant d'ouvrages français avant 1848. Nulle vue pratique nouvelle , nulle discussion sérieuse des objections. L'auteur ne- paraît pas même éclairé sur les dangers des utopies par l’expérience que son pays a faite. Loin qu'il les redoute, il y convie en quelque sorte et en méprise les adversaires. « Une seule chose est importante, » dit-il, « l’association. C’est le grand desideratum vers lequel il » faut tendre de toutes nos forces et de tous nos moyens. » Et si ce n’est rien qu'une utopie sociale, marchons vers » elle comme nous marchons vers l'Évangile, ce royaume » de Dieu, cette utopie divine qui n’est pas réalisée en- » core après dix-huit siècles et demi, et n’est pas près de » lêtre. » | Ailleurs il s’écrie : « Rêverie, utopie, impossibilité, » quel sens accorder désormais à ces mots, boucliers, » éphémères de l'ignorance et de la stupidité? » Voiei la félicité que l’auteur promet aux campagnards associés de cette ère nouvelle. « Les lots sont ainsi faits à » cette heure : aux improductifs et aux oisifs les plaisirs, » les excès, la satiété;- aux travailleurs un labeur. sans : ( 592 ) relàche ou quelques rares plaisirs qu’on leur reproche. Il est de l’intérêt de tous, riches ou prolétaires, que les bénéfices et les charges de la société soient répartis plus équitablement. » Le travail ne demandant plus tout le temps de la classe la plus nombreuse au profit de la classe privilé- giée, des loisirs seront laissés à chacun, le flambeau, éteint de l'intelligence se rallumera dans ces cerveaux rétrécis et courbés si longtemps sous le joug pesant de la misère. La vie sociale aura pour tous ses charmes et ses bienfaits, et dans la commune associée, à côté de l’Église, dont les tours dominent l'édifice et portent vers le ciel la reconnaissance et les joies sans mélange de l’homme réconcilié avec Dieu et avec la nature, s’élar- gira le cercle avec ses lectures et ses causeries du soir, la salle des concerts, le théâtre même; le théâtre, la plus sublime expression du génie humain qui résume et appelle à son aide tous les arts, qui séduit le cœur, l'in- telligence et les sens; temple que larchitecture et la statuaire élèvent à la poésie et à la musique, à la pein- ture , à la gymnastique, à la danse et à la déclamation. Alors, on le comprend, le paysan ne désertera plus le village pour la ville, alors l'ouvrier pourra quitter la cité, ses vices et ses misères, pour le séjour enivrant de la campagne régénérée. » Je suis d'opinion avec le premier commissaire qu'il n’y a pas lieu de décerner le prix à ce mémoire, qui n’a pas résolu la question mise au concours et n’est pas entré dans les intentions qui l’ont fait adopter. Mais je ne puis me rallier aux conclusions qui tendent à accorder à cet écrit une médaille d'argent et l'impression aux frais de lAca- démie. Nous avons vu, par l’exemple d’autres pays, quel ( 999 ) mal peut faire la propagation de ces vagues théories de réformes sociales, auxquelles manque toute espèce d’es- prit pratique et de discussion précise. L’Académie n’a pu mettre la question au concours que pour combaitre l’in- fluence de pareils écrits. Elle manquerait à ses devoirs si elle en relevait elle-même le crédit en leur accordant des distinctions. » ÆHapport de MF. Arendit. « Je partage l'avis de nos savants confrères, MM. Duc- petiaux et Devaux, sur le mémoire n° 4, ayant pour di- vise : L’égoïsme est stérile. L'auteur de ce travail ne s’est évidemment pas rendu compte des conditions que doit présenter une réponse sérieuse à la question posée par la classe. Des sentiments sympathiques pour les classes ou- vrières, l’intention de leur être utile, quelques vues plus ou moins pratiques sur le mode d'application du principe d'association, newsuffisent pas pour résoudre l’important problème économique qui forme l’objet du concours. Quant au mémoire n° 2, l’honorable M. Ducpetiaux en a parfaitement exposé les défauts et les qualités, et je me rallie, dans tous les points essentiels, au jugement qu’il en porte. Ce travail est loin d’embrasser tous les côtés de la question, et je doute beaucoup que la méthode employée par lauteur obtienne l'approbation des économistes. A mes yeux, ce qui donne à ce mémoire une certaine valeur, ce sont les recherches qu’il renferme sur les associations agricoles en France avant la révolution. Je ne pense pas que l’auteur ait épuisé le sujet, mais ce qu'il en dit suffit pour en montrer l’importance. Toutefois, quelque inté- 9MC SÉRIE, TOME XL. 98 ( 054 ) ressante que soit cette partie de son travail, elle ne peut point, à mon sentiment, constituer à elle seule un titre à l'obtention du prix. J’accorderai volontiers une mention honorable; mais, en présence des imperfections de la se- conde partie du mémoire que vos deux premiers com- missaires sont unanimes à signaler, j'hésite à aller jusqu'à la médaille de vermeil, et je ne puis, beaucoup moins encore, proposer l’impression du travail, tel qu'il nous a élé présenté. » Après avoir entendu ses trois commissaires, la classe décide que la médaille d’or ne sera pas décernée. QUATRIÈME QUESTION. Faire un exposé historique de l’ancienne constitution brabanconne, connue sous le nom de JoYEUSE-ENTRÉE, en indiquer les origines et en apprécier les principes. Il a été reçu une réponse portant la devise : Pour ser- vir la patrie, il faut l'aimer; pour l'aimer, il faut la con- naître. HBapport de M. Darvid. « L'auteur du travail que nous avons eu à examiner a fort bien saisi la question et l’a traitée avec ordre et mé- thode. Après une introduction de quatre pages, inspirées par un vif sentiment de patriotisme, il entre en matière et commence par rechercher la cause première des libertés et priviléges successivement octroyés par les dues de Bra- bant à leurs sujets. Cette cause première, l’auteur la trouve ( 539 ) dans le travail, base, selon lui, de l’ordre social, et il dé- veloppe sa thèse dans ce qu’on peut appeler un premier chapitre, quoique le travail ne soit pas divisé en chapitres ou paragraphes, et qu’on y remarque seulement, par-ci par-là, des espaces blancs comme signes de partage ou de transition. À mon avis, la thèse de l’auteur est contestable. Certes, dans un État bien constitué, le travail est la source, non- seulement de la richesse individuelle, mais de Ia fortune publique, et on peut le considérer comme un élément et une condition de tout progrès ; mais il n’en est pas moins vrai que l’on rencontre le travail, même le plus actif, à côté du plus dur esclavage, et cela dans des États d’ail- leurs réguliers et civilisés. L'auteur eût donc été plus exact en indiquant comme base et comme source de toutes les libertés brabanconnes, les services rendus par les sujets à leurs princes. Lui-même, du reste, le prouve longuement dans un deuxième chapitre, où il cite les chartes d’affran- chissement et les keures accordées aux villes du Brabant par les ducs Henri I‘, Henri IT et Henri IIT. En tête de presque tous leurs diplômes, ces princes mentionnent avec éloge les secours de toute espèce que leur ont fournis les communes du pays, et ils témoignent leur reconnaissance par des bienfaits. Il est donc vrai de dire que les libertés, les franchises , les exemptions de corvées ou d’autres ser- vices, le renoncement aux impôts arbitraires, la réduction des donatifs obligatoires, en un mot, que toutes les faveurs accordées aux bourgeoisies, ont été achetées par des ser- vices rendus , plutôt que données spontanément et libéra- lement par les ducs de Brabant. Ces anciennes chartes communales, l’auteur les considère, à bon droit, comme un acheminement aux constitutions ( 290 ) politiques octroyées plus tard. Depuis le diplôme de 1192, par lequel Henri 1 règle l'administration de la justice dans la commune de Vilvorde, jusqu’à la charte de Cortenberg de 1512 et la charte wallonne de 1514, l’auteur analyse avec soin ces divers monuments, et prouve que, dans l’en- semble de leurs dispositions, ils contiennent tous les élé- ments de la Joyeuse-Entrée. Cette première partie, qui forme à peu près la moitié du mémoire, n’est pas exempte de défauts. D’abord lPau- teur n'indique jamais la source de ses textes; il ne fait aucune citation, si ce n’est lorsqu'il emprunte un passage ou une assertion à l’un ou l’autre écrivain , dont il se con- tente d'exprimer le nom. Ensuite il ne distingue par aucun signe les textes flamands et latins insérés dans son mé- moire, ce qui en rend la lecture assez difficile. II n’inter- prète pas toujours exactement les dispositions des chartes qu'il analyse, et n’en donne pas toujours une traduction lidèle. Enfin son style est souvent incorrect, ses déduc- tions quelquefois hasardées et ses redites trop nombreuses. On voit clairement que l’auteur est jeune et n’a pas lha- bitude d'écrire sur des sujets aussi sérieux. Les mêmes défauts se rencontrent dans la seconde par- ue du travail. fl s’agit là d’abord de la Joyeuse-Entrée de Jeanne et Wenceslas. L'auteur consacre une cinquantaine de pages à l’examen détaillé de ectte première constitution du Brabant. Il en traduit tous les articles et compare ceux-e1 avec les dispositions des chartes plus anciennes, qui s’y trouvent confirmées ou développées et rendues applicables au pays tout entier. C’est la partie la plus im- portante , et on peut dire la mieux réussie du mémoire. Après la constitution de Jeanne et Wenceslas, l’auteur passe en revue les Joyeuses-Entrées plus récentes accor- ( 91 ) dées par Antoine de Bourgogne, par Sean IV, par Philippe de Saint-Pol et par leurs successeurs au duché de Bra- bant, jusqu’à Philippe 1. Ces différentes chartes, il les compare tour à tour avec la première et avec les suivantes, en indiquant les changements et les additions qui y furent apportés, ainsi que les articles successivement supprimés, parce qu'ils étaient devenus imutiles ou sans application. Là aussi il n’est pas toujours exact et, en général, il est trop long dans ses raisonnements. Et puis, il n’a pas eu le temps de terminer son travail : lui-même le déclare à la page 192 du mémoire, où il énumère les parties qui y man- quent encore, et qu’il n’a pu adresser à la classe parce que le jour fatal était arrivé. Il n’y a peut-être pas grand mal à cela. Le mémoire renferme tous les éléments d’un bon travail; mais tel qu'il est, il ne saurait, à mon avis, être couronné. Si l’auteur veut reprendre sa tâche, revoir son ouvrage, le corriger plutôt que l’augmenter, il pourra espérer plus de succès. Nous pensons qu’il pourrait faire plus d'usage des Études sur les constitutions nationales, par notre honorable confrère, M. Faider, de l’ouvrage de Loovens, et de ceux, imprimés ou manuscrits, de De Pape et du conseiller Wynants. Un autre soin à prendre par l’au- teur concerne les textes des chartes et des Joyeuses-Entrées qu'il a insérés, soit en entier, soit par extraits, dans son mémoire, mais qui sont loin d’être purs. C’est ainsi qu'il disserte assez longuement sur un article de la première constitution brabançonne, sans parvenir à en établir le sens. En effet, l’article est inexplicable; mais toute la dif- ficulté tient à l’inexactitude ou plutôt à la négligence avec laquelle cette pièce a été publiée dans la collection des Placards de Brabant et dans le Luyster van Brabant. Le texte original est parfaitement clair; il est conservé, avec ( 538 ) celui de toutes les autres Joyeuses-Entrées, aux archives de la ville de Louvain , où l’auteur peut en prendre copie. Il en est de même de la charte de Cortenberg et d’autres antérieures, qui s’y trouvent en original. Or, dans un tra- vail sur l’ancien droit brabancon, travail destiné à être inséré aux Mémoires de l’Académie, il convient à tous égards de rencontrer des textes purs et authentiques aux- quels on puisse se fier. J'aime à croire que ces quelques remarques ne seront pas inutiles à l’auteur du mémoire, s'il veut rentrer en hce. J'ajouterai encore qu'il pourra retrancher l’appendice ajouté à son travail, et qui est une espèce de dissertation sur l'origine de la souveraineté et sur le droit d’insurrec- tion. Ce sujet, outre qu'il est en dehors du cadre de la question académique , exige des connaissances très-solides et une grande maturité de Jugement, qu'un concurrent encore jeune aurait tort de s’attribuer. » Rapport de M, Grandgagnage. « Je partage l'avis de notre honorable confrère, M. Da- vid , premier rapporteur, sur le mémoire relatif à la Joyeuse- Entrée. C'est à juste titre qu'il critique le style de l’auteur qui, faute de temps ou de soin, délaye sa pensée, ne sait pas la concentrer, ni surtout trouver l'expression heureuse qui la mette en relief : art difficile, J'en conviens, et un peu trop négligé dans la plupart des mémoires qui sont adressés à l’Académie. A cette remarque sur la forme, M. David ajoute quelques solides observations sur le fond; mais il en est une à laquelle on à quelque peine à se ral- ( 959 } lier; elle porte sur une thèse que soutient l’auteur du mémoire et que l’on peut formuler en ces termes : « Les » peuples les plus laborieux sont les peuples les plus » libres. » Le premier rapporteur trouve cette thèse con- testable, en faisant observer que l’on rencontre, dans des États réguliers et civilisés, le travail le plus actif à côté du plus dur esclavage. A-t-il voulu parler des États améri- cains à esclaves ? Je douterais en ce cas de la solidité de l’objection , vu que, dans ces États très-laborieux , le peuple est très-libre, que les esclaves n’y figurent pas comme peuple et, par une aberration monstrueuse, ne sont con- sidérés que comme instruments de travail. Ces Américains, très-industrieux, ont voulu et ont su se rendre très-libres, très-libres eux-mêmes, mais non point les esclaves qui ne sont rien. L’honorable rapporteur trouve plutôt la source des anciennes franchises brabançconnes dans les services rendus par les sujets à leurs princes reconnaissants. Sans doute, plusieurs chartes des ducs de Brabant parlent de libertés accordées en échange de services reçus; mais, je ne sais s'il n’en était pas généralement de ces chartes comme de ce que l’histoire de Liége appelle énergiquement des paix, et si les formes honnêtes du langage ne dégui- saient pas, sous le nom de faveurs, de bienfaits octroyés, des institutions libres que le prince n’aurait ni pu ni osé refuser. Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons qu’adopter les conclusions du premier rapporteur, en laissant la question au Concours, et en permettant ainsi à l’auteur du mémoire d'achever son travail, lequel, modifié, amendé et rendu complet, pourra répondre dignement à l’appel de lAca- démie. » 1 ( 540 ) Rapport de M. le baron de Gerlache. « Je suis d'avis, comme mes honorables confrères, qu'il y a lieu de remettre au concours la question proposée sur l'ancienne Constitution brabanconne. M. le chanoine David dit que le travail qui vous est soumis trahit la jeunesse et l’inexpérience de l’auteur. Quant à l’inexpérience, elle res- sort évidemment de toutes les pages de son mémoire. Il semble être l'essai d’un homme qui a lu à la hâte et qui écrit à la hâte. Il y a des recherches, mais, je erois, assez mal digérées; et l’auteur juge trop le passé d’après des idées modernes plus ou moins contestables ; ce qui est une source féconde d'erreurs. Par exemple, il entame, à la fin de son travail, une longue dissertation à propos du fameux article cinquante-neuf de la Joyeuse-Entrée (qui permet le refus de service aux sujets quand il y a in- fraction de la part du prince); il soutient que le droit de résistance dérive de la souveraineté populaire. Or ce fa- meux principe date, si je ne me trompe, dans la pratique du moins, de l’époque de la réforme; il n’en était nulle- ment question auparavant dans les luttes des communes avec leur prince. Qu’arrivait-il quand les priviléges étaient violés? Les sujets, se fondant sur ce que le souverain avait manqué à la foi jurée et méconnu le contrat synallagma- tique , refusaient le service; alors un accommodement s’en- suivait, ou bien une guerre, et la force en décidait. Si l’auteur avait lu attentivement Raepsaet, il y aurait trouvé la solution toute simple et toute naturelle de cette grosse question. Cet article cinquante-neuf est évidemment copié de notre ancien droit féodal; et ce n’est pas, pour le dire en passant, un paradoxe, que de soutenir qu'il est impos- (54 ) sible de bien démêler les origines du droit communal sans remonter au droit féodal (1). Les idées ont leur filiation comme les faits. En cherchant l'explication de l’article cin- quante-neuf de la Joyeuse-Entrée, qui lui semble consacrer le droit d’insurrection, dans le principe de la souveraineté populaire, l’auteur se trompe à mon avis. Cependant il serait Curieux , en prenant les choses d’un peu plus haut, de comparer notre ancien système de droit public avec le système constitutionnel sous lequel vivent actuellement les peuples qui ont adopté les principes de 89. Tout est changé dans la vie des gouvernements et des nations depuis que tout part du peuple et que tout aboutit au peuple. Les corps intermédiaires , placés jadis entre le roi et les masses populaires, ont disparu au nom de l’éga- lité; la royauté elle-même a changé de nature et de prin- cipes : une royauté de nos jours dégénère facilement en domination absolue, ou bien en simple présidence de ré- publique (2). Ce contraste entre le passé et le présent s'offre tout naturellement à l'esprit du publiciste et de l’historien ; et J'insiste particulièrement sur cette considération, qu’il faut bien se garder de confondre le point de départ de nos anciennes et de nos modernes institutions, sans quoi l’histoire se trouve complétement faussée. La Joyeuse-Entrée, « œuvre du temps, comme je l'ai dit » ailleurs (3), respire d’un bout à l’autre l’esprit de l’an- (1) Je crois avoir établi ceci de la manière la plus péremptoire dans le sixième volume de mes CEuvres complètes, 1re partie, pp. 116 et suiv. : De la Féodalité , de la Chevalerie et des Communes. (2) Dans l’espace de quatre années (1848-1852), la France à passé de la monarchie constitutionnelle à la république, et de la république à l’em- pire. (5) Introduction à l'Histoire du royaiime des Pays-Pas, t. Ver, p. 551. ( 542 ) » cienne commune belge, et consacre le plus large système » de liberté civile. » C’est un beau sujet pour un ami de son pays. Il est impossible de ne pas se reporter avec cu- riosité, avec amour vers cette époque qui a procuré à nos pères plus de liberté véritable, solide et paisible, que n’en ont connu les plus grandes et les plus fameuses nations. On en à peu parlé dans l’histoire, parce que notre petit pays en jouissait sans bruit. Nos pères avaient trouvé le moyen d'accorder deux choses que l’on ne voit plus guère marcher de concert, et que les hommes ne cesseront ja- mais de réclamer, la liberté et l’autorité; la liberté, qui est la vie de la société, et l'autorité, qui en est le point d’ap- pui. Je crois qu’il eût été convenable de dire ici quelques mots, en commençant, des origines de notre ancien droit communal, que l’on trouve pour ainsi dire, condensé dans l’ancienne constitution brabanconne. L'auteur du mémoire l’a essayé. Il regarde comme une des causes premières des libertés civiles le travail qui produit la richesse. Je pense que cette thèse, présentée en termes généraux, est trop absolue. Sans doute l’industrie et la richesse sont des moyens d'indépendance pour les peuples comme pour les particuliers; mais ce ne sont point les seuls. En fait, les causes qui ont amené l'émancipation des communes ont été très-diverses; pour rester dans le positif et dans le vrai, il faut les prendre telles que l’histoire nous les pré- sente, en laissant de côté les théories métaphysiques. Or, ces libertés, ces franchises, ou, comme on disait alors, ces privilèges, étaient souvent accordés par le prince à prix d’ar- gent ou pour services rendus; ou bien obtenus par force à la suite de guerres heureuses contre le suzerain ; ou bien, ils étaient gratuitement concédés par celui-ci pour favo- riser le commerce et l’industrie des villes et en augmenter Er (945) la population en y attirant des étrangers; ou bien enfin pour se créer des auxiliaires en coalisant le peuple contre une aristocratie trop puissante. [l me serait facile de prou- ver ces assertions en rappelant une foule de chartes, de traités et de paix que vous connaissez. L'histoire de Liége notamment jette un grand jour sur tous ces points (1). Pour bien comprendre le moyen âge il faut le voir tel qu'il est, avec les besoins, les mœurs et les idées du temps, et non tel qu’il nous apparaît sous la plume de certains philoso- phes qui l’accommodent volontiers à leurs principes de prédilection. En résumé, je pense, Messieurs, que l’auteur du mé- moire soumis à notre examen aurait besoin de faire de nouvelles et de plus profondes études pour se mettre au niveau d’un sujet difficile et important. Il y a des parties fort estimables dans son travail, mais il n’est point com- plet. Il est vague, incorrect, diffus, plein de répétitions. Et vous devez, ce me semble, vous montrer d'autant plus exigeants à l’avenir que vous vous êtes plaints déjà, à di- verses reprises, de la forme négligée des travaux qui vous sont envoyés. Une chose que ne devraient jamais oublier ceux qui écrivent, même des mémoires, c’est qu'il ne suffit plus aujourd’hui d’être savant et de dire des choses utiles, quoique ce soit sans doute déjà beaucoup; 1l faut encore savoir se faire lire; il faut captiver l'attention du lecteur. (1) Voyez Histoire de Liège, 2me édition, tome IV, de mes OEuvres complètes : notamment le Règne d'Albert de Cuyck, et les différentes chartes qui y sont analysées; le Règne d’Adolphe de la Marck, pages 157 et suivantes, et le serment prêté par Ernest de Bavière, lors de son inau- guration, qui est comme le résumé du droit public liégeois au seizième siècle, pages 340 et suivantes. (544) C'est un talent que la nature donne et que le travail et l'art perfectionnent. » Adoptant les conclusions de ses commissaires, la elasse décide que la médaille d’or ne sera pas décernée. CINQUIÈME QUESTION. Tracer un tableau historique et politique des régnes de Jean IT et de Jean LIT, ducs de Brabant. Happort de M. David. « Dans son introduction, l’auteur du mémoire portant pour épigraphe ces mots d’'Horace : O navis, fortiter occupa portum, donne un aperçu sommaire de l’histoire de Bra- bant, depuis le démembrement de l'empire carlovingien jusqu’à la fin du règne du duc Jean I‘. Cette partie a peu de mérite; elle ne présente rien de neuf, et il s’y rencon- tre plus d’une fausse appréciation. Passant au règne de Jean IT, qu’il partage en deux par- ties, l’auteur expose l’état des villes, ensuite celui du commerce et de l’industrie, sous ce prince. Les ouvrages de M. Piot et de notre honorable confrère M. Moke lui servent généralement de guides, et je reconnais qu’il en a fait un bon usage. Sans doute, il aurait pu étendre ses recherches et donner plus de détails sur cette importante matière; mais le cadre de son travail ne le permettait pas. Après cela, l’auteur rapporte les événements de l’époque; mais 101 1l oublie que le programme lui demandait un ta- bleau historique et politique des règnes de Jean IT et de f A2 à ( 945 ) Jean HI; c’est-à-dire qu'il fallait considérer, lun après l’autre, ces deux règnes dans leur ensemble et dans leurs rapports avec les règnes des autres princes, voisins ou étrangers, tandis que l’auteur reproduit au long des récits d’autres historiens qui sont à la portée de tout le monde, et ne songe pas même à résumer ou à caractériser la poli- tique de nos ducs de Brabant. Un des faits les plus inté- ressants qui se rattachent à celte époque, c’est la réunion de la seigneurie de Malines au Brabant, et les querelles qu'elle suseita entre les évêques de Liége et le duc Jean IF, puis entre Jean HE et les comtes de Flandre. L'auteur les rapporte en détail, ce qui n’était pas nécessaire. Il aurait mieux fait d'indiquer brièvement l’origine de cette sei- gneurie liégeoise, et de prouver comment le territoire de Malines ne pouvait, au quatorzième siècle, continuer d’appartenir à l’Église de Liége sans être menacé chaque jour par la puissance brabançonne, ni appartenir à -la Flandre sans devenir un danger continuel pour le Bra- bant : d’où 1l suit que l'intérêt même des Malinois les poussait fatalement à se réunir au duché dont leur terri- toire format une enclave, comme unique moyen d’échap- per à leur ruine. La deuxième partie du règne de Jean Il est intitulée : Insurrection des communes. L'auteur n’a pas des idées bien exactes sur lPorigine et sur l’affranchissement suc- cessif des communes : aussi ne caractérise-t-il qu’impar- faitement les révoltes des villes principales du Brabant sur lesquelles il donne une foule de détails historiques, tous empruntés à des ouvrages très-connus. Dans la suite de cette deuxième partie, l’auteur s'étend sur les querelles qu'eut Jean il avec plusieurs princes voisins ou avec l’em- pereur, sur la suppression des Templiers et sur la charte ( 546 ) de Cortenberg, qu'il analyse et dont il montre assez bien l'importance. Le règne de Jean IIT est, à son tour, divisé en trois parties, dans lesquelles l’auteur consacre cent trente-cinq pages in-quarto bien remplies au récit de tous les événe- ments de l’époque et des guerres sans cesse renouvelées que le due de Brabant eut à soutenir. Par ses nombreuses citations , il prouve qu'il a lu tous les historiens nationaux, tant anciens que modernes. [Il semble même les avoir com- pulsés avec beaucoup de soin : aussi, comme livre, son ouvrage n'est certainement pas sans mérite; mais Comme mémoire, on ne peut pas dire qu’il réponde à l’attente de la classe. Celle-e1 avait demandé un tableau historique et politique des règnes de Jean IT et de Jean IT, et elle a reçu une histoire détaillée de ces deux règnes qui formerait un volume d’au moins quatre cents pages d’impression in-octavo. L'auteur, évidemment, n’a pas bien saisi la question portée au programme. Il a beaucoup lu, mais il n’a pas assez étudié. Après avoir recueilli ses matériaux, en d’autres termes, après avoir acquis la connaissance des faits qu’il avait à apprécier, et après s’être rendu compte de la politique de la France, de l'Angleterre, de l’Empire à la même époque, il aurait dû établir les rapports des événements qui se sont passés en Brabant sous les deux règnes indiqués, avec l’histoire de ces différents États au quatorzième siècle. De cette manière l’auteur aurait pu produire un travail, non-seulement conforme aux inten- tions de la classe, mais très-utile et très-important en soi. Mes conclusions ne sauraient donc être favorables. Je le dis à regret, car le concurrent a fait preuve d’une activité et d’un zèle dignes d’éloges. Il déclare d’ailleurs lui-même, dans une note finale, que tout son avenir dépendra du ( 47 ) bon ou du mauvais succès de ce travail; mais 1l ne peut s’en prendre qu’à lui-même, s’il n’a pas mieux compris la portée de la question à laquelle il avait à répondre, et si, par conséquent, la classe ne peut lui décerner le prix, comme je ne pense pas qu'il y ait lieu de le faire. Si mon honorable confrère M. Borgnet partage mon avis, conforme à celui de M. le chanoine De Smet, la classe aura à examiner s’il faut remettre la question au concours. Pour moi, je ne m’y sens pas très-porté. La question, pour être bien traitée, demande, de la part des concurrents, des connaissances si étendues et si variées, qu'il est presque impossible de les rencontrer parmi les jeunes gens qui, communément, prennent part à nos con- cours. Nous avons éprouvé les mêmes déceptions et les mêmes regrets pour une question analogue sur le règne de Jean I°'. Cette question a été maintenue sur notre programme pendant plusieurs années, et plusieurs fois aussi la classe n’a pu couronner les mémoires des con- currents. À la longue seulement la médaille a été enfin décernée au travail d’un homme connaissant à fond l’histoire générale du treizième siècle, et que la classe s’honore de compter aujourd’hui parmi ses membres. » a Happori de M. J. J. De Smet. « Il était aussi simple que rationnel, nous paraît-il, de commencer un mémoire historique et politique sur les rè- ones des ducs Jean IT et Jean ITT, par un exposé clair et précis de la situation intérieure du Brabant et de ses rela- tions extérieures, à l’avénement du premier de ces princes. ( 048 ) L'auteur du travail qui est soumis à notre examen n’en a pas toutefois jugé ainsi. Dans son introduction, 1l remonte à la création du duché de la basse Lorraine pour nous conduire à l'assemblée de Cortenberg, où l’on reconnut le prince Jean comme successeur de Henri IE, et nous donner sur l’état du pays à cette époque quelques notions assez incomplètes, qui se terminent par l’analyse plus im- portante des landkeuren de Jean le Victorieux. Là finit l'introduction, dit l’auteur; mais quand il aborde le règne de Jean IT, il trace un exposé nouveau du progrès de Ja civilisation, de l’état des villes, du commerce et de l’in- dustrie dans le duché. S'il y a quelque vérité dans l’ancien axiome : Dimidium facti qui bene cœpil habet, on doit avouer que ce début n’est pas d’un augure heu- reux. L'auteur semble n’avoir pas suffisamment étudié son sujet, ou réfléchi au plan à suivre avant de commencer son travail; de là cette sorte d’hésitation et de tàtonne- ment. Il faudrait, à notre avis, refondre en une seule cette triple exposition; retrancher la première partie comme inutile, et éloigner des autres plusieurs faits qui ne sont pas propres au Brabant, mais plus où moins communs à toutes nos provinces. Suivant de près les Trophées du Brabant de Butkens, ouvrage assez exact en général, mais où l’on a signalé plus d’une méprise, l’auteur raconte les querelles qui ont agité le règne de Jean le Pacifique et les guerres qu'il a entreprises contre ses voisins : l'archevêque de Cologne, les comtes de Hainaut et de Hollande, les Malinois, ete. Quelques-uns des événements qui figurent dans ce récit pourraient sans grand inconvénient en disparaître, parce ( 49 | que Jean II y eut peu ou point de part; telles sont la guerre entre Adolphe de Nassau et Albert d'Autriche, en Allemagne, l’insurrection des communes flamandes contre Philippe le Bel et la guerre des Awans et des Waroux. D’autres faits sont présentés sous un Jour qui n’est pas admis par tous les historiens, comme l’emprisonnement du comte Florent V de Hollande à Biervliet (1), ou, d'une manière incomplète, comme la guerre que fit en Zélande Gui de Namur, appelé sire de Peteghem par l’auteur. Dans ce qu’il nomme Deuxième partie, 1l passe à l’éta- blissement des communes et le décrit trop longuement; car elles existaient bien longtemps avant Jean IT et n'étaient pas particulières au Brabant. Mais il revient mieux à son sujet par le récit des insurrections qui éclatèrent presque simultanément à Anvers, Malines, Bruxelles et Louvain, contre les patriciens qui opprimaient le peuple, sous la protection du prince, et par la rétrocession de Malines à l’Église de Liége. Il eût été très-permis, au contraire, de garder le silence sur un démêlé relatif à la seigneurie de Mirwart, les désordres d’Aix-la-Chapelle et la suppression des Templiers. L'auteur s'arrête avec complaisance, et non sans raison, à l'assemblée de Cortenberg, en 13512, et à la charte cé- lèbre qui y fut promulguée : 1l donne une analyse qui nous à paru satisfaisante de cet important document. Il nous montre ensuite le duc occupé à redresser les torts qu'il avait eus envers les monastères de ses États et cher- chant, à Paris, des remèdes qui devaient hâter sa mort. Quoique le règne de Jean ITT ait été beaucoup plus fé- (4) Voir le Chronicon Egmondanum et Kluit, Excurs., VIL Qme SÉRIE, TOME XI. 39 ( 90 ) cond en événements remarquables que celui de son père, notre concurrent y à placé encore plus d’un fait qui ne s'y rattache que bien indirectement. Il nous raconte ainsi la longue lutte de Louis de Bavière contre Frédéric d’Au- triche, qu’il aurait suffi d'indiquer en quelques mots; la guerre de Louis le Hutin contre les Flamands, racontée encore trop longuement, sans parler de la famine de 1316, qui désola une grande partie de l’Europe, et de la guerre civile de Liége sous Adolphe de la Marek. Ce qui est dit des Bogards (sic) et des Béguines, à la fin du mémoire, aurait dù être supprimé et comme inutile el comme par- faitement inexact. Du reste, il expose en général avec fidélité les actions glorieuses de Jean le Triomphant. Cette revue assez vague d’un ouvrage diflicile à analy- ser, montre que l'écrivain a eu particulièrement à cœur de faire un mémoire très-complet sous le rapport des faits, mais sans y mettre tout le discernement et toute la pro- portion nécessaires. En vain y chercherait-on les riches aperçus et les recherches neuves que l’on pouvait se pro- mettre cependant de l'étude approfondie de l'époque. La cause en est sans doute dans le sens trop restreint que l’auteur paraît avoir donné au mot politique de la ques- tion proposée. Il parle des changements introduits dans la législation, des progrès du commerce et de l’industrie, des finances et bien superficiellement des mœurs : mais com- bien de points importants auxquels il ne touche pas! Rien de l’état de l’agriculture, rien des sciences et des arts : Jean III donna, en 1320, un règlement pour les écoles de Bruxelles, qui n’est pas sans importance historique; nous n'en avons trouvé aucune mention dans le mémoire. Dans tel endroit le style n’est pas exempt de préten- ( oo1 ) tion, dans tel autre il est incorrect, mais en général clair et convenable. Le mémoire nous paraît trop imparfait pour mériter la médaille d’or. Les recherches que l’auteur a faites seraient assez nombreuses pour mériter nne médaille d'argent, si elles avaient été mieux dirigées. L'école historique ac- tuelle regarde comme un premier devoir, et elle a parfai- tement raison, que l'écrivain consulte les sources les plus sûres et les plus anciennes. Notre auteur a tenu trop rare- ment compte de ce précepte : il eite le plus souvent But- kens, Haræus, Loyens, Gramaye, Des Roches, Dewez,etc., écrivains très-estimables sans doute, mais quelquefois peu sûrs, parce qu’une foule de documents nécessaires leur manquaient. Il ne nous donne ainsi le plus souvent qu’une érudition de seconde main et ne connaît pas même, pa- raît-1l, les publications de la Commission royale d'histoire. Ainsi n’a-t-il pas lu la chronique de De Dynter, qui était d'une importance majeure pour la question qu'il avait à traiter. Il la cite une fois comme manuscrite (pag. 109), bien qu’elle ait paru depuis plus de trois ans, et le vo- lume IT, où le consciencieux secrétaire des ducs de Bra- bant à consigné les faits et gestes de Jean IT et de Jean IT, depuis près de sept cents ans : Nous proposons d'accorder à l’auteur, qui paraît encore jeune, tout au plus une mention honorable, et de remettre la question au concours. » Rapport de M, Forgnet, « Je partage entièrement, sur le mérite du travail sou- mis à notre appréciation, la manière de voir de mes deux ( 992 }) honorables confrères. Au lieu d’un tableau historique et politique des règnes de Jean IT et de Jean 1IT, la classe n’a obtenu qu’une espèce de chronique suivant, année par an- née , les événements qu'il s'agissait beaucoup moins de ra- conter longuement que d'apprécier et de juger. Avec un système semblable, je ne comprends pas pourquoi l’auteur a donné à ces règnes des subdivisions : deux à celui de Jean 1], trois à celui de Jean III; elles n’ont réellement au- cune raison d’être, et supposent une distribution plus mé- thodique des matériaux employés. Le style ne manque pas de clarté, mais la correction fait souvent défaut, et l’en- semble du mémoire accuse une assez grande inexpérience. Après cela je reconnais volontiers les recherches étendues que l’auteur a faites, tout en regrettant avec M. De Smet qu’elles n’aient pas été mieux dirigées, et qu’on ait négligé les véritables sources, pour ne faire qu’un travail de se- conde main. Mes deux collègues ne sont pas du même avis sur le maintien de la question au concours. Je suis disposé à voter avec M. De Smet pour laffirmative. » Conformément à l’avis des commissaires, la classe re- srette de ne pouvoir accorder la médaille au concurrent. SIXIÈME QUESTION. PRIX D'ÉLOQUENCE FRANÇAISE. — Apprécier Philippe de Commines comme écrivain et comme polilique. Rapport de M. le baron Kervyn de Lettenhote. « Les commissaires que vous avez chargés d'examiner le mémoire relatif à Philippe de Commines sont unanime- ( 995 ) ment d'avis qu’il n’y a pas lieu de décerner le prix. Ils le regrettent d'autant plus que, sur ce sujet fécond et pi- quant, la classe eût été heureuse de distinguer, en accor- dant un prix d’éloquence, l'élégance de la forme unie à la vivacité de la pensée, à la finesse des appréciations. Com- mines devait, semble-t-il, communiquer à ceux qui auraient étudié ses écrits, quelques-unes des qualités qui le pla- çaient si haut dans le jugement de Montaigne. Vos com- missaires se sont démandé s’il n’y avait pas lieu d’insister sur une opinion déjà fréquemment énoncée, qui ferait coincider l'élévation des prix avec la réduction du nombre des questions proposées. Ils croient devoir aussi appeler, messieurs, toute votre attention sur cette funeste négli- gence, sur cette coupable paresse qui écarte les intelligences Jeunes et fortes de cette voie ouverte sous vos auspices où vous voulez associer la science et le goût, ce plaisir déhi- cat, comme l’appelle Montesquieu, plus rare peut-être que la science et sans lequel il ne peut y avoir de littérature. » La classe a adopté l’avis de ses commissaires, et le prix n’a pas été décerné. M. Kervyn de Lettenhove fait connaitre que la commis- sion pour la publication des anciens monuments de la littérature française, publiés en Belgique, s’est constituée avant la séance, qu’elle a nommé pour président M. le baron de Gerlache, et qu’elle l’a désigné lui-même pour remplir les fonctions de secrétaire. (554) NOMINATIONS. La classe avait à nommer trois associés parmi les sa- vants étrangers : dès le premier tour de scrutin, les noms suivants ont fixé les suffrages : MM. Wixpiscamanx, membre de l'Académie de Munich ; Berxarp De Koeuxe, conseiller d'État à Saint-Pétersbourg; Cart, membre et secrétaire de l'Institut de Milan. Séance publique du 15 mai 1861. M. DE Ram, directeur de la classe. M. ne Decker, vice-directeur. M. An. QuETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. le baron de Gerlache, Grandga- gnage, Roulez , Gachard, Borgnet, le baron Jules de Saint- Genois, Paul Devaux, Carton, Haus, Bormans, Leclercq, Polain, De Witte, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Chalon, membres; Nolet de Brauwere van Steeland, associé; Guillaume, Wauters, Blommaert, cor- respondants. Assistaient à la séance : Classe des sciences. — MM. Liagre, président de l’Aca- démie; De Koninck, vice-directeur; d’Omalius d’Halloy, Sauveur, Wesmael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, Van Beneden, le vicomte Du Bus, Nyst, Gluge, Nerenburger, Melsens, Schaar, F. Duprez, Brasseur, Poelman, Jules d'Udekem, Dewalque, membres ; Lacordaire, associé ; Maus, Ernest Quetelet, Montigny, Candèze, correspon- dants. Classe des beaux-arts. — MM. Van Hasselt, vice-direc- teur, Alvin, Fétis, Madou, Navez, Roelandt, Jos. Geefs, Érin Corr, Édouard Fétis, De Busscher, membres ; Cala- matta, Daussoigne-Méhul, associés; Balat, Demanet, cor- respondants. Un public nombreux remplit la salle académique. ( 596 ) Avant l'ouverture de la séance, M. Liagre , président de l’Académie, prend place au fauteuil et adresse à l’audi- toire les paroles suivantes : MESSIEURS , ’ Depuis vingt-cinq ans, un de nos confrères s’est dévoué tout entier à la prospérité de l’Académie : dans les fonc- tions pénibles et souvent délicates de secrétaire perpétuel, il a su, par l’élévation de son caractère et la facilité de ses relations, se concilier l'estime et la sympathie de tous ses collègues. Hautement apprécié à l'étranger pour l’éten- due , la solidité et la variété de ses connaissances, il a fait rejaillir sur le pays en général, et sur l’Académie en par- ticulier, la brillante renommée dont il jouit. Grâce à lui, nous sommes entrés en rapports de confra- ternité avec les plus grandes illustrations de l’époque, et nous opérons, avec presque toutes les sociétés savantes du monde, un fructueux échange d'idées et de travaux. Pro- clamons-le ouvertement, si l'Académie royale de Belgique, secondant les vues d’un gouvernement éclairé, s’est con- stituée d’une manière large et solide; si, rayonnant à l'extérieur, elle à vu sa réputation franchir rapidement les limites étroites du pays, c'est au zèle, à l’activité, à l’auto- rité scientifique de son secrétaire perpétuel, c’est à M. Que- telet qu’en reviennent, en grande partie, et le mérite et l'honneur. La reconnaissance est le plus doux des sentiments, et l’Académie est heureuse de pouvoir montrer aujourd'hui qu’elle n’est pas ingrate : par un vote unanime, elle a dé- cidé qu’une médaille commémorative. serait frappée, et offerte, dans cette séance publique, à M. Quetelet, à l’occa- Sonñaitsé > ( 991 ) sion du vingt-cinquième anniversaire de son entrée en fonctions comme secrétaire perpétuel. S’assoctant à cette manifestation , le Gouvernement s’est empressé de donner un nouveau témoignage de sa sollicitude pour les arts, les lettres et les sciences , et de la haute estime qu’il professe pour un de leurs plus illustres représentants : par une dé- marche spontanée, il a exprimé le désir de contribuer pour moitié à l'offre et à la dépense de la médaille. L'Académie a accueilli avec gratitude cette proposition, honorable à la fois pour le pouvoir de qui elle émane et pour le savant qui en est lobjet. CHER ET VÉNÉRÉ CONFRÈRE, Je blesserais vos sentiments bien connus, si, en vous remettant cette médaille au nom de Académie, j’osais de- vancer la postérité, et rappeler au publie vos nombreux et brillants travaux, ainsi que l'impulsion imprimée par vous aux seiences dans la Belgique régénérée. Ce n’est pas non plus le lieu de parler ici des éminents services que vous avez rendus au pays comme professeur ; les deux généra- tons d'élèves qui ont reçu de vous les principes de Îa science, qui ont puisé dans vos leçons et votre exemple le goût et l’amour de l'étude, trouveront bientôt, je l’es- père, l’occasion de vous ouvrir leur cœur : dans quelques années, nous aurons à célébrer votre demi-siècle de profes- sorat. Aujourd'hui, vos collègues, dont l'estime, l’amitié et le respect sont à vos yeux, je le sais, votre plus pré- cieux titre de gloire, vous offrent avec bonheur ce simple souvenir de bronze, sur lequel est gravée l'expression sin- cère de leurs sentiments : (556 ) ADOLPHO QUETELET VIRO DE ACADEMIA EGREGIE MERITO QUINQUE LUSTRA IN ACTUARII PERPETUI MUNERE FELICITER PERACTA CONGRATULANTES HUNC NUMMUM PIETATIS ET REVERENTIAE TESTEM CUDENDUM CURAVERUNT ACADEMIAE REGIAE BELGICAE SOCII. ANN. MDCCCLX. De nombreux applaudissements accueillent ces paroles. M. le président présente en même temps au secrétaire perpétuel la médaille qui lui a été décernée et qui a été gravée par M. Braemt, l’un des membres de la classe des beaux-arts. Le secrétaire perpétuel la reçoit avec une vive reconnaissance, et il exprime, à M. le président et à M. le directeur de la classe, le regret qu'il éprouve de ne pas avoir la force, dans un pareil instant, de pouvoir témoi- gner publiquement ses remerciments à ses amis et collè- gues, pour un témoignage aussi affectueux, qu’il croyait devoir rester renfermé dans l’enceinte de l’Académie. (Nou- veaux applaudissements.) Le directeur de la classe, M. de Ram, accorde ensuite la parole à M. Kervyn de Lettenhove, qui donne lecture de la notice suivante : Jean sans Peur et l’Apologie du tyrannicide. Les chroniqueurs du quinzième siècle nous offrent le triste récit du meurtre du duc d'Orléans, et s'ils ne nous ont fait connaître que des extraits assez incomplets de la ( 599 ) harangue du cordelier Jean Petit, qui accepta la tâche de tout excuser, de tout glorifier, ce qu'ils en ont reproduit suffit pour que l’apologie du crime nous paraisse aussi hideuse que le crime même. A côté de ces faits et de ces citations, quelque chose nous manque, et c’est préci- sément ce qui donne aux tableaux de l’histoire leurs cou- leurs et leur vérité. Nous nous demandons comment les hommes de ce temps jugeaient ce qui nous indigne si légitimement, et jusqu’à quel point les passions voilèrent et obscurcirent leur conscience. Nous savons que, selon les traditions populaires, Jean sans Peur se cacha la figure sous un grand chaperon rouge pour contempler sa victime qui gisait à terre, et qu’il osa, deux jours après, porter la main sur son linceul, d’où le sang jaillit aussitôt, comme pour accuser le meurtrier. À cette heure-là, il niait son crime, et lorsqu'il se vit réduit à l’avouer, il en accusa du moins le démon qui l'avait tenté (1). Mais quelle fut l’'émo- tion du sentiment public quand il assuma avec audace la responsabilité de tout ce qui s'était accompli! Quelle fut l’agitation de cette assemblée de princes où Jean sans Peur fit exposer que le commandement divin : Non occides, ne s’appliquait pas aux princes, et qu’il était permis, sous le plus léger prétexte, de mettre les princes « hors de ce monde! » Quel fut l’aspect, quels furent les incidents et les détails de cette séance mémorable d’où s’éleva , en pré- sence de celui qui avait fait répandre le sang, l’infâme (1) Voyez le beau récit de M. de Barante. — Je lis dans un traité écrit au commencement du quinzième siècle : « Le diable peut savoir la disposi- » tion et ordonnance et le gouvernement des royalmes et des seigneurs » temporels, conspirations el traysons, quar de telles choses souvent 1l » se mesle.» Faut-il ajouter que ce traité est dédié à Jean sans Peur? (MS. de Ia Bibl, de Bourgogne, n° 11216.) ( 260 ) doctrine du tyrannicide qui troubla l'Église et la société pendant un demi-siècle? Sur tous ces points, l’histoire garde le silence, et si, par hasard, la relation de quelque témoin oculaire est parvenue jusqu’à nous, nous l’inter- rogerons pour lui demander ce que les chroniqueurs, dans leurs froides narrations, ont dédaigné de nous apprendre. La duchesse de Bourgogne, issue de la maison de Ba- vière à laquelle appartenait la reine Isabeau , était restée à Gand (1), mais elle avait chargé un avocat de Lille, nommé Thierri le Roy, de lui rendre compte de tout ce qui se serait passé à Paris. Cette précieuse relation mérite d’être ana- lysée avec quelque soin. | Que l'on veuille bien d’abord se représenter l’état de la France si violemment troublée depuis quelques mois, la lutte sanglante remplacant de jalouses rivalités, le fléau des discordes civiles déchainé par le plus horrible attentat. Le duc de Bourgogne qui a armé le bras de Raoulet d’Au- quetonville (2) contre un prince, comme lui petit-fils du (1) Monstrelet ; Comptes du conseil de Flandre, n° 21788, aux Archives générales du royaume (5 mars et 28 mars 1407, v. st). (2) Raoulet d’Acquetonville, d’Auquetonville ou d'Octonville était écuyer de Charles VI quand il remit à Richard II, le 4 novembre 1597, la dot de la reine d'Angleterre (Rymer, III, 4, p. 159). Il était déjà passé au service de Jean sans Peur comme écuyer d'écurie quand on lui paya, le 2 mai 1406, une somme de trente-sept francs pour frais d'un voyage (Acquits de la chambre des comptes aux Archives générales du royaume). Entre ces deux dates se place un document du mois d'août 1405, conservé au Trésor des chartes à Paris. On y voit que Raoulet d’Auquetonville cherchait à cette epoque à acheter une charge de trésorier, Ce qui ne s'était jamais vu et ce qui donna lieu à de vives réclamations. Il est utile de remarquer que Raoulet d'Auquetonville, déjà fameux avant son crime par ses dilapida- tions, avait voulu, l'un des premiers, introduire le triste exemple de la xenalité des offices. LS ( 61 ) roi Jean , et de plus unique frère de Charles VE, lui a fait compter cinq cents francs d’or « pour les agréables ser- » vices par lui rendus (1) ». Tandis que Valentine de Milan s’abandonne à la douleur qui la conduira au tombeau (2), Jean sans Peur réunit à Amiens quatre docteurs de l’uni- versité de Paris. Le premier est Pierre de Marigny, héri- tier d’un nom trop fameux qui, ce jour-là, approuva le duc de Bourgogne d’avoir fait assasiner son cousin comme il félicitera plus tard en plein parlement Charles VI d’avoir dépouillé son fils (3). Les autres se nommaient frère Pierre aux Bœufs, maître André Cottin et maître Jean Petit. Ce dernier, Normand de naissance (4), passait pour un esprit facile et heureusement doué de l’art de bien dire. Il avait composé plus de vingt mille vers, les uns pour décrire la Disputoison des Pastourelles, d'autres, plus péniblement forgés sur son enclume poétique, qu’il appela le Livre des trois marteaux (5). Son éloquence, non moins féconde ou (1) Mém. sur l'hist. de Bourgogne, p. 147. (2) Elle mourut « de courroux et de deuil » dit Juvénal des Ursins. (5) Mém. sur l'hist. de Bourgogne, p. 156. Cf. Chastelain, 59; Mons- trelet, I, 248; Juvénal des Ursins, 4420. Un fils de Jeanne de Marigny épousa, en 1430, une fille de Guillemette d’Octonville. P. Anselme, Dict. généal., t. IX, p. 76. (4) Natione normanus. Rel. de Saint-Denis, XXVIF, 1. (5) La Bibliothèque impériale de Paris possède les poëmes manuscrits de Jean Petit. Ils comprennent la Complainte de l'Église, écrite en 1392, la Dispuloison des Pastourelles qu'il composa en 1408, « ou temps que » les escoliers de Paris s’en allèrent hors de Paris pour la mortalité; » le Livre du miracle de Basqueville ; et le Livre des trois nobles marteaux. Peut-être eüt-il été de quelque intérêt de citer certains vers de ce poëme, où l’auteur s’est efforcé de développer des maximes chevaleresques fort opposées à la doctrine qu'il défendit plus tard; mais on peut juger du mérite poétique de Jean Petit par les vers qu'il glissa dans sa trop célèbre ( 262 ) vlutôt non moins diffuse, avait aussi répandu quelque éclat (1), et il était l’un des officiers du duc au parlement de Paris au titre de conseiller-avocat, fonction honorifique qui ne lui rapportait annuellement que vingt franes de gages (2); mais cette fois les trois semaines qu’il emploie « à conseiller monseigneur d’aulcunes choses secrettes » grandement touchant son honneur » lui sont comptées cent écus (3). Aussi maître Jean Petit pourra-t-1l dire pour justifier son zèle : « Je suis obligé à servir monseigneur de » Bourgogne... Il m'a donné bonne et grande pension. » Le travail des seribes achevé, Jean sans Peur se dirige avec ses gens d'armes vers Paris. Il sait bien qu'il y dis- pose de la plèbe de Caboche et de Capeluche, mais il y redoute ce que Marcel lui-même appelait le bon peuple, les bons marchands, les bons bourgeois; et le lendemain du jour où il a fait son entrée dans la capitale la lance Apologie, et je ne veux point, à propos du Livre des trois marteaux, renouveler l’épigramme de Boileau : Maudit soit l’auteur dur, dont l’äpre et rude verve, Son cerveau tenaillant, rima malgré Minerve, Et, de son lourd marteau martelant le bon sens, A fait de méchants vers douze fois douze cents. Au moins chez Chapelain, l’homme valait mieux que le poëte. Je n'ose- rais l’aflirmer de Jean Petit. — Un écrivain de l’ordre de Saint-François a cherché à démontrer que Jean Petit n’avait jamais été cordelier. Cette discussion, que je me borne à mentionner, doit rester étrangère à cette notice. (1) Le Religieux de Saint-Denis dit qu’il passait pour éloquent (XXVII, 22 et XXVIIT, 20); mais il ajoute ailleurs : plus libera loquentia quam eleganti commendandus (XXVIIT , 34). (2) Mém. sur l'hist. de Bourgogne, p. 157. (3) 1b., p. 102. ns ( 63 ) au poing (1),il s’enferme à l'hôtel d'Artois, dans une tour de pierre bâtie tout exprès, que l'on montrait encore au quatorzième siècle (2). Iei commence la relation de Thierri le Roy (5). Le duc a demandé aux royaux, c’est-à-dire aux con- seillers de Charles VI, qu'il lui soit permis de proposer « aulcuns articles justes et raisonnables. » Le conseil du roi le supplie de renoncer à ce projet, mais 1l n’ose toute- fois s’y opposer. On offre au duc, pour faire entendre sa justification, le vieux palais royal de la cité avec sa grand” salle « qui estoit bien large, » ou bien la grand'salle du Louvre; mais Jean sans Peur ne veut pas du palais du Louvre, où , autour du logement du roi, se trouve celui des douze pairs (4); car ce ne sont pas les pairs qu’il accepte pour juges. Il veut encore moins de la grand’salle du Palais de la cité, longue de cent vingt pieds, large de cinquante. Ne craimdrait-il pas d’y voir les froides images des rois ses aieux se lever pour le maudire? La table de marbre (1) {n apparatu bellico , velut de hostibus regni feliciter triumphasset, vallatus octingentis militibus et armigeris loricatis ad unguem. Reli- gieux de Saint-Denis, XXVIII, 54. (2) Monstrelet, 1, 38 ; Félibien. (35) Cette relation ne se trouve pas mentionnée dans le catalogue des manuscrits de la Bibliothèque de Bourgogne, mais M. de Reiffenberg l’a indiquée, sans l’analyser, Bulletins de l'Académie, t. X, p. 487. Elle fait suite au n° 14840. En voici le titre : « C’est le rapport faict par M° Thery le Roy, advocat demourant à Lille, à madame la ducesse de Bourgongne, le merquedy xuuie jour de mars mil IfIe et VIT, sur le faict de la proposi- . tion faicte en la ville de Paris, par Me Jeban Petit, maistre en théologie, et pour et au nom de mondict seigneur par-devant les royaulx de France sur la mort du duc d'Orléans, le jeudi paravant ledict jour, vue jour des- dicts mois etan. (4) Le chastel du Louvre, où il a logis pour le roy et les xn pers. Gilbert de Metz. ( 64 ) ne lui rappellerait-elle pas les formes les plus solennelles de la justice royale armée pour punir le coupable (1)? Jean sans Peur tient d’ailleurs à s'éloigner de la cité où dominent ses adversaires déjà prêts à se grouper autour de Gerson, et 1] choisit l'hôtel Saint-Paul, plus rapproché de l'hôtel d'Artois et de la Bastille. Le duc de Guyenne, qui doit remplacer le roi toujours malade dans cette séance solennelle, s’enrhumerait, représente-t-1l, s'il quittait l'hôtel Saint-Paul : « Le mois de mars est un mois chan- » geable en temps, en pleuves et en neiges, ce que tost » seroit à monseigneur le Dauphin une froideur. » La cour inquiète fait demander au duc de Bourgogne quels sont les noms, quel sera le nombre de ceux qu'il compte amener avec lui. Jean sans Peur eite des noms, fixe un nombre, et en même temps il fait inviter les sei- gneurs les plus illustres qui se trouvent à Paris « à lui » tenir compaignie. » La plupart obéissent par crainte ou par ambition, mais le duc de Bretagne, gendre du roi, a le courage de répondre : « Dites à monseigneur de Bour- » gogne que je suis venu 1e au service du roi et non pas » au sien. » Le jeudi 8 mars 1407 (v. st.), jour fixé pour la justifica- tion du duc de Bourgogne, le duc de Guyenne, suivi du rot Louis de Sicile, des ducs de Berry, de Bourbon, de Bre- tagne et de Bar et d’autres seigneurs, prit place dans la grand'salle de l'hôtel Saint-Paul, entre six et sept heures du matin. Toutes les précautions que légitimaient la mé- fiance et une secrète terreur avaient été prises. Les portes (4) Là est la table de marbre de neuf pièces; là sont les ymages des rois qui ont regné en France. Description de Paris, par Gilbert de Metz. ( 265 ) étaient fermées et lon ne pouvait entrer où sorlir que par une fenêtre si étroite qu’une seule personne y passait à la fois. Le duc de Guyenne attendit deux à trois heures. Enfin, quand le duc de Bourgogne eut réuni toute son escorte, il sortit de l’hôtel d'Artois. À sa droite se trou- vaient le duc de Lorraine, le cardinal de Bar et messire Jean de Bar; à sa gauche, les comtes de Clèves, de Nevers, d'Eu et de Penthièvre. Devant et derrière lui marchaient les plus nobles chevaliers de ses États, eux-mêmes entourés de leurs vassaux. Le sire d’Antoing était accompagné de trois chevaliers et de vingt écuyers; Oste de Lalaing, de trois chevaliers et de onze écuyers; Arnould de Gavre, de quatorze chevaliers et de neuf écuyers. Le nombre des chevaliers, des écuyers, des hommes d’armes était si con- sidérable que les derniers n’avaient pas quitté l’hôtel d'Artois lorsque les premiers pénétraient déjà dans l'hôtel * Saint-Paul. Au milieu de cette armée, le duc de Bourgo- gne saluait sans cesse ses partisans qui se pressaient aux fenêtres, « petits et grands ,» et ceux-ci (il y en avait sans doute plus de petits que de grands) lui répondaient : « Que » Dieu vous aide à parvenir à votre vraye et juste inten- » tion! » Cependant les Bourguignons, qui étaient à cheval, oc- cupèrent toutes les rues qui entouraient l'hôtel Saint-Paul. Les autres entrèrent lentement dans la grand’salle; mais il en vint beaucoup plus que Jean sans Peur ne l’avait an- noncé , et un grand nombre de ses partisans de la faction des Bouchers pénétrèrent à leur suite (1). Enfin, Jean sans (4) Soubz umbre de mondict seigneur et disoient estre ses gens. Relation , fol. 119 vo. 2e SÉRIE, TOME XI. 40 ( 566 ) Peur parut le dernier et seul (1), et l’on se hâta de fermer la fenêtre, unique issue de la grand’salle de l'hôtel Saint- Paul (2). Le duc de Bourgogne était vêtu de veluyel vermeil, semé de feuilles d’or et fourré de gris, à manches ouvertes. Sur sa tête, il portait un grand chaperon que recouvrait à demi une aumusse de velours. Il salua le duc de Guyenne et les princes, en se contentant d'ôter son aumusse, et l’on re- marqua, quand il inclina la tête en haussant le bras (3), qu’il portait une armure sous sa robe, un casque de fer sous son chaperon. Le meurtrier du due d'Orléans voyait déjà se dresser devant lui, suscitée par le remords, la mena- çante image du châtiment qui l’attendait à Montereau (4). Lorsque le duc de Bourgogne s’avança au milieu des siens (5) pour aller s'asseoir sur le banc des princes, à la gauche du duc de Guyenne, entre le duc de Berry et le duc de Bretagne, celui-ci fit un mouvement et recula. « Le « » duc de Bretagne, porte notre relation, ne fut pas trop » bien content. ». II croyait, sans doute, voir quelque tache de sang sur cette robe vermeille aux feuilles d’or. C'était du même côté de la salle, sur un échafaud haut de six degrés, que s'était placé maître Jean Petit. Sur ces six degrés étaient assis l’évêque de Tournay, le chancelier (1) En la fin monseigneur, qui estoit tout seul, y entra. /bid., fol. 419 we. (2) Et lors incontinent on frema la fenestre. Jbid., fol. 119 ve. (3) Et veoit-on à haulchier le bras. Zbid., fol. 120 re. (4) Ciel et terre sont transitoires , mais la sainte parole divine ne peut estre enfrainte. De glaive fiert, de glaive sera féru.. Le duc Jehan, si tost qu'il avoit féru, povoit douter qu'il le seroit par cette parole... Sa con- science l’accusoit. Chastelain, p. 11. (5) Ceulx qui estoient venus en la compaignie de mondict seigneur se assirent derrière et environ mondict seigneur. Relation, fol. 120 re. ( 367) de Bourgogne, les conseillers du due et ses avocats au parlement. À droite et à gauche se trouvaient les sires de Saint-Georges, de Courtamble et d’autres chevaliers ar- més. « Ils estoient là, dit Thierri le Roy, pour ledit propo- » sant introduire, se mestier eust esté. » Vis-à-vis, sur un autre échafaud (douloureux et remarquable contraste) sié- geait, à côté du chancelier de France, le prévôt de Paris, messire Guillaume de Tignonville, le docte ami de Chris- tine de Pisan , l’auteur du traité des Dits moraux, où sont retracées les lois de l’honneur et de la chevalerie; enfin d’autres bancs étaient occupés par les clercs de l’univer- sité réunis autour de leur régent, maître Henri Baker, de la nation d'Angleterre. Jean Petit prit la parole et sa harangue dura quatre heures. Pendant tout ce temps, sa voix glapissante et mo- notone resta étrangère à toute émotion (1). Seulement, 1l se mit trois fois à genoux, en déclarant qu'il espérait bien que personne ne lui saurait mauvais gré de son discours. Du reste, pas un mot de douleur, pas un mot de regret dans cette longue amplification de textes bibliques et pro- fanes, où le meurtre est égalé au triomphe, la ruse à la sagesse, la perfidie à la vertu. Il semble que l’orateur soit enivré des vapeurs du sang quand il veut associer à son sauvage enthousiasme tous les princes, et surtout le rot qui a perdu son frère, « le dit criminel », comme l'appelle Jean Petit (2) : « Sire, resjoissiez-vous de che que vous estes (4) Ledit proposant ne mua oncques sa voix. 1bid., fol. 125. (2) Depuis qu'il eust dit une fois le duc d’Orliens en sa proposition, jusques en fin il le appela le criminel d’Orliens. Relation, p. 121. Ceci n'a pas été observé par les éditeurs des textes imprimés de la harangue de Jean Petit ; mais je remarque qu'il en est ainsi dans le précieux ma- ( 268 ) » vengé (1). » Cependant jean Petit n'oublie pas les liens qui unissent son maitre au parti de Caboche, et après avoir eu soin de rappeler que le due d'Orléans n’était pas aimé du peuple, qu'il pillait et accablait de tailles (2), il termme sa harangue par un appel au peuple : « Resjoissiez-vous, » commun peuple, de la délivranche d’ycheluy qui vo gar- » doit comme le leup fait les brebis, et voeuilliez donner » faveur, aide et confort au vaillant prinche qui s’est mis » en péril pour vous en délivrer, et luy assister en sa justi- » fication (5). » Cette leçon donnée par un prince ne sera point perdue, et les tours du Temple, qui ont vu un des- cendant de saint Louis violer Impunément le respect dû à son propre sang (4), seront un jour témoins de l’appliea- mi nuscrit de la Bibliothèque de Bourgogne, 10419, qui paraît contenir le texte remis le 8 mars à Charles VI. | (1) Pour ce que partie adverse voeult vous commouvoir à plourer la mort dudit criminel d'Orléans, je vous voeul montrer que vous ne la devez pas plourer.. Sire, plourés le péchié, malice et trayson de votre germain frère, mais resjoissiez-vous de che que vous en estes vengée. Plourez, très-noble royne , de che que vous véés votre seigneur en si grant tourment, et vous resjoissiez de che que vous estes délivré de chely qui che faisoit.…; resjoissiez-vous, prinches du royaume de France, car le malfacteur est pugny telement que tous les autres y prenderont exemple. Texte du MS. 10419, fol. 94 vo. Au commencement de son discours, Jean Petit avait déjà dit : Sy devés bien avoir grant joye d’avoir un tel sub- giet, vassal et parent à vous si prochain comme il est et qui vous aïme si loyalment de vraye amour, tousjours prest de vous obéir, servir et hon- norer de tout son pooir. Même texte, fol. 3 v°. (2) Item qu'il avoit fait mettre sus tailles et emprunts intollérables sur le peuple du royaume, ledit criminel estoit hay du peuple. Il donnoit à des gens d'armes lettres de vivre sur le pays. Texte du MS. 10419, folios 72 , 75. | (3) Texte du MS. 10419, fol. 95 r°. (4) Délinquant en son propre sang, dit énergiquement Chastelain. Jean sans Peur, lent et astucieux, ne rappelle en rien son père, si bouillant et ( 569 ) tion de la doctrine du tyrannicide descendue au sein: du peuple. | « Monseigneur, ajouta Jean Petit en s'adressant à son » maître, qu’il vous plaise à dire si ce que j'ai proposé est » à votre commandement et au proufit de votre que- » relle (1). — « Et lors monseigneur de Bourgogne se leva » et osta son aumuche et dist ainsy à haulte voix : Je vous » advoue. » On vit en même temps se lever le duc de Guyenne, pauvre enfant de douze ans, qui, en entendant raconter par Jean Petit que le due d'Orléans avait fait percer Charles VI par les épées des diables Hermas et Astramon, n'avait pu s'empêcher de demander tout haut à Charles de Savoisy : « Est-ce bien beaulx oncles d’Or- » léans qui voloit faire mourir le roy? (2) » Avec le duc de Guyenne tous les autres princes quittèrent leurs siéges, car parmi les conseillers du roi au parlement, il n’y en avait aucun qui osàt, en présence de cet appareil de me- nace et de violence, revendiquer les droits imprescripti- bles de la justice et de la vérité (3). si valeureux. Sur le livre d'heures de Philippe le Hardi, conservé à la Bibliothèque de Bourgogne (n° 10392), on lit une pièce adressée à saint Georges pendant les revers (ceux de la captivité d'Angleterre ?), in tribu- lationibus, et tout à côté cette invocation incomplète : O Georgi miles hostem vincens armis. Jean sans Peur n’était pas chevalier, et sans doute, même à Nicopoli, il n’invoqua jamais saint Georges. (1) Il est à remarquer que Jeaa Petit avait dit, au commencement de sa proposition : « Je proteste que je n’entengs à injurier quelque personne que ce soit, vivant ou trespassée, et s’il avient que je dye aucunes paroles sentans injures, je ne les diray pas de moy ne en mon nom, mais pour et o nom de monseigneur de Bourgogne et par son commandement. » Texte du MS. 10419, fol. 4 vo. (2) Relation, fol. 125 r°. (5) Relation, fol. 425 ro; Juvénal des Ursins ; Religieux de Saint-Denis. ( 10 ) Cela ne suflisait pas à Jean sans Peur. Le lendemain il fit répandre le bruit qu’aussitôt après la harangue de Jean Petit, le roi Charles VI avait inopinément recouvré la santé (1). Jean Petit fut donc mandé pour lui répéter son discours de la veille, et l’on fit signer au roi des lettres où il dé- clara qu'il ne gardait aucune déplaisance à son très-cher et très-amé cousin le duc de Bourgogne et qu'il le conser- vait « en singulier amour (2). » Le même soir, pour dé- montrer davantage que Charles VF, au moment où il signait ces lettres, était bien revenu à la raison, on rappela près de lui Isabeau de Bavière. De là, un nouvel accès de fureur. Trois jours après, la reine et le due de Guyenne fuyaient de Paris (3). La reine voulait, disait-on, se sous- traire au triste honneur de partager la couche royale. Quant au duc de Guyenne, il n’avait pu résister aux émotions de la longue séance de l’hôtel Saint-Paul. Son esprit doux et gracieux cherchait en vain à se dérober aux tristes images des malheurs de la France. Né l’année même de la déroute de Nicopoli, il devait mourir quelques semaines après la bataille d’Azincourt. Un dernier mot sur Jean Petit, sur Henri Baker et sur Thierri le Roy. La vie de Jean Petit s'acheva assez tôt pour qu'il ne vit pas ses propositions brülées au parvis Notre- Dame; mais lorsque, quelques années plus tard , sa doctrine fut déférée au concile de Constance, nous trouvons parmi ceux qui la combattirent ou la soutinrent, d'une part, Henri Baker, député de l’université de Paris (4), de l’autre, (1) Le roy devint en bonne santé. Relation, fol. 125 ro. (2) Archives de Lille. (5) Juvénal des Ursins; Religieux de Saint-Denis, XXVIIT, 55. (4) Duboulay, Hist. de l'université de Paris, V,p. 881. ( 911 ) Thierri le Roy, qui, depuis la relation qu’il avait adressée à madame dé Bourgogne, était devenu successivement bailli de Lens et de Douay, maître des requêtes et con- seiller du grand conseil (1). Rapport du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, adressé à M. le Ministre de l’in- térieur.— (Période du 1” janvier 1856 au 31 décembre 1860). MonsIEUR LE MINISTRE, Il y a cinq ans, à pareille époque, nous vous avons signalé le mouvement des sciences morales et politiques en Belgique; nous avons constaté l’activité croissante et féconde de nos écrivains; nous avons applaudi à leurs nobles efforts, et annoncé que les bons livres se multiplie- raient chez nous et arriveraient abondants entre nos mains. Nous ne nous sommes pas trompés : nous croyons pouvoir dire que, pendant la dernière période quinquen- nale, les travaux se rapportant aux sciences morales et politiques ont donné d'excellents et de remarquables ré- sultats, et si nous avions pu, comme il y à cinq ans, par- tager le prix, nous aurions certainement appelé plusieurs écrivains à y participer. Mais, d'accord avec les trois classes de l’Académie, le Gouvernement a pensé qu'il fallait interdire le partage des prix quinquennaux, et qu'il était plus convenable, plus conforme à la pensée qui a présidé à leur création, de (1) Mém. sur l'hist. de Bourgogne , pp. 108, 113,181 , 194, ( 872 ) choisir parmi les ouvrages celui qui offrait des titres su- ._périeurs, des qualités d’érudition, d'utilité et de style suffisantes pour mériter le prix entier sans division. Ce prix, le Jury l’a décerné à M. Prosper de Haullewille, docteur en droit, pour son Histoire des communes lom- bardes depuis leur origine jusqu'à la fin du treizième siecle. Le jury avait porté son attention sur plus de trente ouvrages, parmi lesquels 1! en est de très-importants et de très-remarquables. Quelques-uns ont dù être écartés du concours, parce qu'ils ne rentrent pas dans le cadre des sciences morales et politiques, tel qu'il est tracé par les arrêtés organiques de l’Académie royale et des prix quin- quennaux : nous voulons parler de livres publiés par d'éminents théologiens, qui ont voulu, dans de savants écrits, ajouter la démonstration des dogmes catholiques à celle qu'ils répandent avec éclat soit par la prédication , soit par l’enseignement ; d'ouvrages de dogmatique ou de controverse, composés uniquement pour lexposition, la preuve el la défense des dogmes révélés qui forment les- sence du catholicisme; d'ouvrages d’apologétique, qui trai- tent les sujets de l’ordre surnaturel, basés sur la foi et sur la révélation divine. Le prix quinquennal est institué pour les ouvrages de philosophie, de morale, d'économie politique, d'histoire générale, de législation ancienne et moderne : tout cela se rapporte aux sciences de l’ordre de raison. nullement à l’ordre de foi. H n’est pas entré dans l’intention de l’auteur de l'arrêté d'appeler la classe des lettres de l’Académie à s'occuper de controverse théologique, pas plus que de mé- decine ou d'art militaire. Le jury a donc écarté quatre ouvrages qui sont, sous la forme polémique ou didactique, ( 579 ) la défense ou l'exposition de la foi catholique basée sur la parole divine révélée et sur la tradition apostolique per- pétuée et immuable. Le jury a cru que les ouvrages historiques qui ne sont pas relatifs à l’histoire du pays devaient être examinés par lui. Des membres pensaient que l’histoire générale ne peut être rangée au nombre des seiences morales et poli- tiques; d’autres exprimaient l’opinion que lhistoire poli- tique seule devait nous occuper; d’autres enfin ont soutenu que, suivant les termes mêmes du rapport à la suite duquel le Roi à signé l'arrêté du 29 novembre 1851, l’histoire générale faisait essentiellement partie des attributions du jury; qu'un prix spécial ayant été institué pour l’histoire du pays, les ouvrages historiques qui ne s’occupaient pas par- ticulièrement de la Belgique devaient figurer dans le pro- gramme des sciences morales et politiques. Le jury à dé- cidé que quelques ouvrages historiques seraient examinés par lui. Il y a lieu de se féliciter de cette résolution, car nous avons pu apprécier le mérite réel d’intéressants tra- vaux retraçant la vie, le caractère et les talents de deux grands capitaines, et nous avons rencontré dans l’œuvre aujourd’hui couronnée des mérites supérieurs qu'il était juste de récompenser. Plusieurs ouvrages de longue haleine, compositions en quelque sorte monumentales , ont du être écartés du con- cours , par le motif péremptoire et légal qu’ils ne peuvent être considérés comme achevés. Le doute à cet égard n’a pas paru possible en présence du texte exprès de l'arrêté organique, et le jury n’a pas pu s'arrêter à de judicieuses observations qui lui ont été soumises. Ainsi, un immense travail sur la eivilisation, prenant, suivant le plan tracé par l'auteur, pour point de départ les origines de lhis- ( 514 ) loire, parcourant la ligne ascendante du progrès, cher- chant à travers les tempêtes du monde la formule de la liberté moderne, un tel travail, pour pouvoir être jugé par nous, aurait dû donner son dernier mot, aurait dù être apprécié dans son ensemble. Nous en dirons autant d’un répertoire d'administration et de jurisprudence, collection de travaux, de dissertations et d’études dont les premiers volumes jouissent déjà d’une grande autorité. Ces œuvres si considérables, auxquelles le prix quinquennal ne peut être décerné qu'après leur complet achèvement, sont évi- demment comprises dans les termes généraux de l'arrêté organique. Mais les hommes éminents qui y ont voué leurs forces et leur existence, trouvent dans les distinc- tions qui accompagnent une brillante carrière la reconnais- sance de leurs travaux et de leur mérite : ainsi se concihie la rigueur nécessaire d’un règlement avec certaines con- venances que créent de grandes conceptions scientifiques ou littéraires. Toutefois, nous nous proposons d'appeler l'attention du Gouvernement sur la possibilité, dans certains cas, de se départir de ce qu’il y a de trop absolu ou de trop rigoureux dans la disposition à laquelle nous venons de faire allusion. Les ouvrages achevés que le jury a examinés représen- tent l’ensemble des sciences morales. et politiques. L’éco- nomie politique, la science sociale, la philosophie histo- rique, le droit administratif, le droit politique, le droit civil, l’organisation du crédit, l'administration charitable, l’histoire générale, ont fourni leur contingent. Quelques ouvrages offrent d’estimable$ résumés d’une utilité pra- tique; d’autres sont empreimts d’un caractère polémique, d’autres donnent de bons abrégés qu’on est heureux de voir entre les mains des gens du monde. Une partie im- ( 919 portante de notre législation civile, notre nouveau régime hypothécaire, a fait le sujet d’un important ouvrage, bien écrit, et qui atteste de la sagacité, de l’érudition, des études sérieuses. Le tableau des travaux législatifs de notre parlement, depuis 1831 jusqu’à 1848, a été tracé avec pa- triotisme. Les principes de l’économie politique ont été exposés avec habileté par plusieurs de nos publicistes. Un savant professeur, excellent écrivain, a dit sa pensée sur la théorie du progrès dans des pages déjà populaires. La législation des mines et de l’expropriation forcée nous a valu divers travaux méthodiques et pratiques très-recom- mandables. L'ensemble des principes, des travaux et des lois relatifs à la propriété littéraire a été résumé avec beaucoup de talent par l’un de nos plus intelligents admi- nistrateurs. Nous signalons les ingénieuses combinaisons présentées dans le but de répandre partout en Belgique l’action du crédit. Les principes relatifs à l'administration de la charité ont été profondément discutés dans des dis- sertations devenues célèbres chez nous. Ces indications sommaires font bien voir que le mouve- ment de notre littérature sérieuse est loin de se ralentir. Ne pouvant disposer que d’un prix, le jurv a dü, comme le disait M. Villemain en 1840, prononcer plus d’une exclusion qui n’est pas un blème, et refuser la cou- ronne à des écrits remarquables d’ailleurs. Le jury, en retraçant il y à cinq ans le mouvement des sciences morales et politiques dans notre pays, rencon- trait partout une activité féconde et d’utiles travaux; il rappelait les publications de plusieurs commissions perma- nentes ou temporaires, et notamment une œuvre capitale, le nouveau Code pénal. Nous ne devons pas omettre de faire remarquer que ce code, savamment élaboré, vous le ( 276 ) savez, par un éminent professeur (1) et discuté par une commission aussi éclairée que dévouée, vient d’être voté par la Chambre des représentants, après des rapports pré- paratoires qui font le plus grand honneur à leurs auteurs et à la commission spéciale de la Chambre : nous aurons enfin ce nouveau Code pénal, annoncé dès 1831 par la Constitution, précédé de quelques lois spéciales qui avaient amélioré la législation de 1810, consacrant les progrès récents de la répression, et conciliant cette répression avec ce qui caractérise les lois de notre époque : l’humanité. Nous le répétons : la période quinquennale qui se ferme aujourd’hui a été féconde; elle l'emporte évidemment sur la précédente : en parlant ainsi, nous n’avons pas seule- ment en vue les ouvrages spéciaux et dont les auteurs sont connus; nous tenons compte, comme nous l’avons déjà fait, de tous les modes de publicité que possède notre libre pays, et qui répandent partout et chaque jour une foule de notions utiles. Les rapports et les mémoires des corps savants, des assemblées politiques et des commissions oflicielles, de nombreuses brochures, les publications de la presse quotidienne, les conférences publiques si fré- quentes, tout cela forme un ensemble des plus remarqua- bles, des plus satisfaisants : la vie est partout, partout la fécondité et les fruits. | Nous revenons au livre de M. de Haulleville. Nous devons ce livre à institution du concours universitaire. Au nombre des questions à traiter à domicile pour le concours de 1856, figurait la suivante : « Exposer l’histoire de l’origine et du » développement successif des institutions et franchises (1) M. Haus, qui vient de terminer la publication d’un Cours classique de droit criminel. (ST ) » communales des grandes villes de la Lombardie, à partir » du onzième siècle jusqu’à la fin du treizième. » Pour répondre à cette vaste et importante question, M. de Haulleville a entrepris de longues et sérieuses re- cherches, et, après un travail assidu , il à soumis au jury du concours le mémoire qu'il venait d'achever. Le jury, après en avoir pris connaissance, lui à accordé son suf- frage. Il résulte du procès-verbal que « l’auteur ayant » obtenu, pour son travail à domicile, plus de la moitié » du nombre des points fixés pour représenter une réponse » parfaite, fut déclaré admissible aux deux dernières » épreuves, » à savoir, le concours en loge et la défense publique du mémoire rédigé à domicile. Malgré des critiques sérieuses, l'ouvrage de M. de Haul- leville était donc sorti avec succès de la première épreuve, et si l’auteur n’a pas été admis aux deux autres épreuves, cela tient à ce qu’il avait dépassé l’âge (25 ans) auquel, en vertu de l’arrêté organique du 15 octobre 1841, 1l est permis à un candidat en droit de prendre part à un con- cours dans la faculté de philosophie et lettres. Privé par cette circonstance des chances favorables que lui offrait, dès 1856, le suffrage du jury, encouragé d’ail- leurs par ce premier succès, M. de Haulleville a mis la dernière main à son œuvre, l’a complétée et perfectionnée, et l’a fait paraître en 1857-1858. De prime abord, comme tous les livres qui traitent un sujet important, qui exigent un long labeur, qui remuent de graves questions, qui accusent des convictions tran- chées, l’histoire des communes lombardes attira l'attention de la presse de divers pays; et en Belgique, en France, en Italie, en Allemagne surtout, il fut approuvé ou combattu par d’éminents critiques. ( 78 ) Cet ouvrage, sur lequel s’est portée notre plus scrupu- leuse attention, a été très-sérieusement examiné et discuté par nous. L'auteur, a-t-on dit, d’une part, manque d’origi- nalité; il n’est pas révélateur, 1! ne se place pas, du coup, au premier rang des historiens : une érudition trop pro- digue nuit au charme de la narration et à la partie drama- tique de l'œuvre. D'ailleurs, a-t-on ajouté, l'écrivam se laisse souvent entrainer à accorder de trop vives sympa- thies à la papauté dans sa lutte avec l'Empire, à préconiser les doctrines théocratiques, à dissimuler les abus d’un ultramontanisme que ne saurait approuver la critique his- torique. On a répondu que, sans accepter la solidarité de toutes les opinions de l’auteur, il faut reconnaître que, certainement dans bien des cas, au milieu de ces temps encore à demi barbares, l'influence de la papauté et de l'Église a été favorable; que, de nos jours, l’organisation êt l’action politiques de l'Église, telles qu’elles ont existé alors, ne sont plus en harmonie avec les institutions mo- dernes et ne sont pas admissibles dans l’état présent de la civilisation ; mais, a-t-on observé, l’ouvrage discuté à une valeur réelle ; 1l accuse des qualités supérieures; l'auteur n'est resté étranger à aucune recherche, à aucun ouvrage de quelque valeur; il a, comme c'était son droit et comme il l'annonce lui-même, largement utilisé d'importants et célè- bres ouvrages publiés en Allemagne et en Italie. Si des idées préconcues ont engendré des erreurs d'appréciation, ces er- reurs doivent, pour les lecteurs sérieux auxquels s'adresse un tel livre, être contrôlées et rectifiées par la lecture d’éeri- vains inspirés par d’autres croyances. Si, par l’ensemble des mérites qui signalent un ouvrage à l'attention publique, cet ouvrage acquiert une notoriété incontestable et attire l'attention des critiques les plus capables de corriger les ( 549 ) erreurs ou de fortifier des inductions, on doit dire qu'il oceupe dans la hiérarchie des lettres une place supérieure. Le jury, par une vue d’ensemble , tout en faisant de for- melles réserves quant à de certaines doctrmes, tenant compte des précédents qui se rattachent au travail discuté, a cru pouvoir accorder le prix à M. de Haulleville. Il n’est pas possible de nier la valeur de l’histoire des communes lombardes en présence du vaste cadre tracé par l’auteur et des abondantes notions qu'il y a répandues? Nous allons indiquer sommairement ce que renferme ce cadre. L'ouvrage est divisé en trois livres : le premier traite des origines des communes lombardes et nous conduit jusqu’au commencement du douzième siècle; le deuxième expose le développement des franchises communales jus- qu'à la fin du douzième siècle; le troisième nous apprend ce que sont devenues les communes lombardes au treizème siècle. On le voit, cette époque de l’histoire offre un im= mense intérêt : ce n’est pas seulement des communes lombardes qu’il est ici question, il est question des plus grandes luttes dont on ait gardé le souvenir au sein d’une civilisation encore empreinte de barbarie, dans lesquelles viennent se répandre, pour tout transformer dans une alliance laborieusement accomplie, le germanisme, le christianisme et le romanisme, par l'influence successive ou combinée des traditions barbares, des lois civiles et des préceptes de l’Église. Les communes, l'Empereur, le Pape luttant, combattant, poursuivant à travers mille chances diverses une suprématie toujours contestée et jamais affermie, ont laissé à la civilisation qui s’est perfectionnée jusqu’à nous, la triple influence, la triple formule où se retrouve la constitution fondamentale des peuplé : Pmdi- vidualisme , la loi civile, les dogmes chrétiens. ( 980 ) Si, après celte vue générale de l’époque, nous suivons l’auteur dans les subdivisions de son ouvrage, nous ver- rons qu'il à résolüment et savamment abordé un grand nombre de questions importantes et exposé une multitude de faits intéressants. Cherchant d’abord à caractériser les communes lombardes, l’auteur nous donne une disserta- tion devenue célèbre sur la perpétuité des municipes ro- mains ; 1] expose toutes les opinions et se rallie, par des raisons longuement déduites , à la thèse récemment établie par les adversaires de Savigny, et qui tient pour histori- quement vrai « que les municipes et les communes sont » deux genres différents d'institutions locales. » Pour ar- river à cette conclusion, l’auteur a exposé les effets de la conquête lombarde, le caractère des lois, l’état des per- sonnes, l’organisation des villes. Arrivant à Charlemagne, il trace la fusion et le tableau des institutions lombardes et franques. Le caractère et les progrès des immunités et des souverainetés ecclésiastiques, la position des évêques dans le gouvernement de la commune, celle des officiers royaux et des seigneurs laïques sont ensuite exposés avec détail. Un beau chapitre est consacré à l’état intellectuel et industriel, et notamment à la renaissance du droit ro- main en Lombardie. Vient ensuite l’histoire des villes lom- bardes pendant le onzième siècle, et particulièrement de: la ville de Milan, offerte comme type des luttes, des pas- sions et des intérêts de cette époque orageuse et corrom- pue. La papauté y apparaît avec un rôle puissamment régénérateur, mais aussi avec cette théorie de souveraineté universelle que l’histoire impartiale a condamnée et qu’ap- prouve trop absolument l’auteur. Nous assistons à l’action des individualités puissantes qui ont surgi au milieu de luttes sanglantes, surtout de saint Bernard et d’Arnaud de ( 81 } Brescia, deux types célèbres, dignes d’être étudiés dans leurs écrits et dans leur prodigieuse propagande. L’exposé de l’organisation communale et du développement des communes lombardes précède l’histoire de la lutte célèbre et obstinée des communes avec Frédéric Barberousse. Les causes de cette lutte à outrance et de l'alliance des com- munes avec la papauté, les phases diverses de cette alliance souvent troublée ou trahie, les expéditions, les succès et les revers de l'Empereur, la destruction de Milan, les ligues lombardes, la fondation d'Alexandrie, la défaite définiuve de Frédéric, la paix de Constance, monument capital de cette époque : voilà ce qui remplit le second livre, tableau mouvant, offrant des tentes sanglantes, montrant l’achar- nement des passions et les grands résultats d’un triomphe qui assure aux villes la possession de leurs franchises et une prospérité Imouïe, sans leur donner toutefois la con- corde et la sécurité. Le dernier livre nous retrace, par l’his- toire politique et détaillée de trois villes importantes (Bo- logne, Vérone et Milan), pendant le treizième siècle, les dissensions terribles qui déchirèrent les communes livrées à elles-mêmes au milieu de la lutte des factions, et qui les conduisirent à ce qu’on peut appeler la suppression de leur individualité communaie. Comme l’ont observé les histo- riens, les communes épuisées finissent par demander à une autorité forte et presque absolue ce qui leur avait fait défaut : la sécurité. Il est difficile, croyons-nous, de traiter un sujet plus intéressant : lutte de la Papauté et de l’Empire, lutte des Guelfes et des Gibelins, lutte du despotisme et de la liberté, lutte des défenseurs et des réformateurs du clergé, luttes intestines des classes nobles et populaires, lutte du droit romain et du droit barbare, lutte des légistes et de la féo- 28e SÉRIE, TOME XI. 41 ( 282 } dalité. Tout est lutte dans ces temps de transformation, tout est triomphes et défaites successifs; mais c’est pour aboutir, nous l’avons vu, au triomphe du droit sur la force, au triomphe de l’ordre sur l'anarchie, au triomphe de la liberté sur le despotisme : certes, ce n’est pas au treizième siècle que le droit, que l’ordre, que la liberté règnent sans trouble; loin de là : il faut traverser de terribles siècles de transition pour arriver à la formule moderne du droit. Mais dès cette époque les idées, les besoins et les ten- dances se manifestent; l’histoire des communes lombardes, pendant ces temps orageux, est comme un spécimen des temps modernes offert sur le théâtre où ont apparu pour la première fois les hommes ct les doctrines qui devaient enfin dominer et prévaloir de nos jours. Comme l'ont fait remarquer plusieurs écrivains, dès le douzième siècle, l’ancien despotisme, le despotisme grec, était devenu impossible en présence du pouvoir papal et de la commune lombarde. Dans cette lutte, le despotismé écrasant de l'antiquité à suecombé. Les légistes romains des écoles du moyen âge ont, il est vrai, préconisé le pou- voir absolu des rois; mais si ces théories triomphèrent au profit du principe d'unité, on ne peut nier toutefois l’exis- tence, dans plusieurs contrées, d’un contre-poids résultant des aspirations populaires et des théories de liberté. Ce caractère des derniers siècles, signalé partout, incontes- table, évident, vient de ces luttes mêmes, où, du côté de l’Église, comme du côté de l’Empire, du côté du peuple comme du côté des grands, tout fut extrême et excessif : l'ambition, le despotisme, la corruption, la cruauté. On a vu apparaître enfin à travers la féodalité, à côté des pré- ceptes chrétiens, sur les ruines du despotisme, avee l’aide de la raison écrite de l’ancienne Rome, le règne de la loi, ( 585 ) la monarchie tempérée et la liberté du citoyen, attribut, gloire et force des temps modernes. | M. de Haulieville ne nous semble pas avoir assez tenu compte de ces grandes et diverses influences; en se ran- geant toujours, par une tendance peu réfléchie de ses con- victions , du côté de la papauté, il à omis de faire la part du vice humain et de lPambition personnelle de quelques pontifes. Nous regrettons cette éclipse de l’impartialité d’un écrivain si laborieux, si instruit et si honnête; nous aurions pu craindre de rencontrer chez lui des convictions peu compatibles avec l’ordre politique et libéral qui règne incommutablement en Belgique; mais si les croyances de l'auteur se reflètent dans les doctrines de son livre, nous savons que le jugement qu'il a porté sur les siècles passés n’a pu engendrer chez lui des doctrines ultramontaines et des théories absolutistes que tout Belge devrait condamner, que nous tous, membres du jury, nous condamnerions hautement, si elles se manifestaient. Non, M. de Haulle- ville comprend son sièele mieux peut-être qu’il n’a compris le douzième, et nous sommes heureux, nos réserves faites, d’avoir pu récompenser, dans ce jeune écrivain, de vastes études, une modestie de bon goût, une conscience hon- nète, un remarquable talent d'écrivain. À certains mo- ments, il est vrai, surtout dans le second volume, l’auteur fablit : l’érudition est parfois confuse, les appréciations parfois hasardées, le style parfois inégal; mais l’ouvrage porte l’empreinte d’un esprit supérieur; il a une valeur réelle qui a été appréciée par tous les critiques; il a donné la preuve de recherches considérables et de connaissances étendues. Nous ne regretterons jamais d’avoir décerné une récompense nationale à M. Prosper de Haulleville. Que cet honorable triomphe serve de stimulant à notre ( 284 ) jeunesse studieuse , qu'il soutienne les efforts de nos tra- vailleurs érudits; mais nous nous permettrons ici d’expri- mer un VŒœu : que nos écrivains, quelle que soit leur école, s'abstiennent de vouloir revenir au temps passé; qu'ils soient bien et dûment de leur temps; qu'ils n’oublient ja- mais que la conquête des libertés modernes est définitive, | irrévocable et sacrée; que les titres en sont écrits dans l'histoire de nos pères et confiés par eux à nous, leurs descendants ; que surtout en Belgique, où nous retrouvons dans nos vieilles franchises les rudiments de notre régime fondamental, personne tenant plume ou bannière n’aspire à ce qu'il y a de féodal, d’ultramontain ou de démago- gique dans les siècles ensevelis : il ne peut sortir de leur tombeau que des fantômes ou de la poussière que dis- sipe le souffle puissant de la vraie liberté. C’est ainsi que la Belgique forüfiera de plus en plus sa puissante indivi- dualité morale; c’est ainsi que se maintiendra l’étroite alliance qui s’est formée entre la nation et le Roi, notre paternel souverain. Nous vous offrons, Monsieur le Ministre, l’expression d’une haute considération. Bruxelles, le 15 mai 1861. Le Jury : M.-N.-J. LecLERCQ, président. Auc. VisscuErs, secrétaire. P. DE Decker. E. Deracoz. FRÉD. DE KEMMETER. Haus. Cu. FAIDER, rapporteur. ( 585 ) — M. le secrétaire perpétuel donne ensuite lecture d’un arrêté royal du 14 mai dernier, qui accorde le prix (cinq mille francs) dés sciences morales et politiques, pour la période quinquennale révolue le 31 décembre 1860, à M. Prosper de Haulleville, auteur de louvrage intitulé : Histoire des communes lombardes. Un second arrêté royal du même jour, dont il est égale- ment donné lecture, décerne le prix triennal de littérature dramatique française pour la période de 1858 à 1860, à M. Charles Potvin, auteur du drame historique : Jacques d’Arteveld. — M. le secrétaire perpétuel fait connaître que, sur les six questions du programme de concours de cette année, il a été recu des réponses à quatre de ces questions; mais la classe a regretté de ne pouvoir accorder la médaille d’or à aucun des mémoires qui lui sont parvenus. Il à proclamé ensuite les noms des trois nouveaux asso- clés élrangers, nommés en remplacement de MM. Macaulay , Le Bas et le duc d’Ursel que la classe à perdus précédem- ment (Voir page 554). ( 586 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS. Séance du 15 mai 1861. M. Van Hassezr, vice-directeur. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Alvin, Fr. Fétis, Navez, Roelandt, Jos. Geefs, Érin Corr, Fraikin, Édouard Fétis, De Bus- scher, membres; Calamatta, Daussoigne-Méhul, associés ; Balat, correspondant. MM. d'Omalius, de Ram, Haus et Polain, membres des deux autres classes, assistent à la séance. ee CORRESPONDANCE. M. Th. Donaldson, associé de l’Académie, remercie la classe pour l'envoi de ses Bulletins, « qui me rendent compte, dit-il, de ce qui se fait chez vous en faveur de l'art, et de vos efforts pour en répandre le goût, en inspi- rant un vif intérêt pour ses progrès. » Le savant archi- tecte anglais fait connaître, en même temps, que les arts ont perdu récemment sir Charles Barry, l’un des associés de l’Académie royale. (587 ) — M. le secrétaire perpétuel annonce qu'il a reçu les ouvrages mañuscrits suivants, qui Sont Soumis au juge- ment de la classe : | 1° Des morceaux de chant des maîtres belges, français, espagnols, italiens et allemands, arrangés pour orgue et piano ; par M. Émile Biard, professeur de musique à An- vers (Commissaires : MM. Fr. Fétis et Daussoigne-Méhul.) ; 2 La Fille de Jephté, épisode lyrique en un acte, pa- roles de M. Denis Sotiau, musique de M. J.-Th. Radoux. (Commissaires : MM. Fétis, Daussoigne-Méhul et Bosselet.) Concours ouvert par le gouvernement pour le poëme dont il sera fait choix pour le grand concours de composition musicale de 1861. M. le Ministre de l’intérieur avait annoncé, dans la séance précédente, qu'il avait ouvert un concours pour la meilleure cantate destinée à être mise en musique, et que le terme fatal expirait le 15 avril dernier. M. le secrétaire perpétuel annonce qu’il a reçu les poèmes suivants : 1. L’Orage, épigraphe : L’Orage. 2. Le Départ des Croisés, épig. : Le Départ des Croisés. 3. Le Naufrage, épig. : Venez, épouse , tendre mère, Reconnaître un fils, un époux, etc. 4. Ambiorix, épig. : La liberté, pour faire le tour du monde, n’a pas besoin de passer par chez nous, car l’in- dépendance naquit chez les Belges. mn px jen OLA 15. 14. 15. 10. 1H ( 588 ) . L’Enfance, épig. : Si latet ars, prodest. . L'Age viril, épig. : Spes tamen in dubio est. L'Age mur, épig. : Si latet ars, prodest. La Vieillesse, épig. : Spes tamen in dubio est. Le Jugement dernier, épig. : Quos ego. Installation du Roi des Belges, épig. : N° 4. La Gerbaude, sans billet et sans devise. La Mort d’Homère, sans billet, avec l’épig. : Phébus. La Mort du Chrétien, épig.: Mortalia facta peribunt. La Mort d’'Ossian, épig. : Réveille-toi, ma harpe. La Druidesse, épig. : La Druidesse. La Fille de Jephté, épig. : La Fille de Jephté. La Sortie d'Égypte, épig. : Gloire à Dieu ! un peuple est délivré. 18. Amour, devoir el vengeance, épig. : Je l'accorde , il est véritable, Je devrais bien moins désirer : Mais mon humeur est d'espérer Où la gloire est indubitable. (MALHERBE.) 19. Elie, cantate, épig. : Occidit autem ignis Domini. 20. Judas Iscariote, épig. : Eternité. 2: Saül, cantate, épig. : Spiritus autem Domini recessil a Sal. 22. Un Refrain métallique, épig. : Dans ses moindres écrits, un auteur estimable Sait donner au lecteur une sage leçon, etc. 23. Les Chefs belges, épig. : Belgique. 24 9 26 . Les Moissonneurs (sans devise). 25. Le Dernier Jour, épig. : Judicabit vivos et mortuos. . Les Remords de Caïn (sans devise). ( 589 ) 27. La Mort d'OŒEdipe, épig. : Poëme pour le concours musical de 1861. 28. Jacques Molay (pas de billet cacheté), épig. : On ne sait S'il n'y eut pas plus d’aisance et de vengeance dans cette exécution que de justice. (BossuET.) 29. L’Escaut, épig. : La nature est bien aise d’être ho- norée et respectée, etc. 30. Le Retour du Croisé, épig. : Salve patria. 31. La Tempête ou le Départ du navire, épig. : Ponto nox incubat atra, etc. 52. Les Jeunes Nerviens aux champs de Presles, épig. : Mortem servituti anteposuerunt. 33. Le Laboureur, épig. : La pitié est utile à tous. 84. Mazeppa, épig. : Premier essai. 35. La Princesse d’Épinoy (billet sans épigraphe). 96. Samson, épig. : Ayant fortement ébranlé les colonnes du temple, elles s’écroulèrent, et les grands et le peuple furent écrasés (Juges, chap. XII). 31. Le Serment de Jephté, épig. : Multi vocati, pauci electi. 58. L’Expiation, épig. : Les pas du vrai croyant ne sont jamais solitaires , etc. 39. La Prédiction, épig. : Ille ego qui quondam gracili modulatus avena…. 40. Le Poëte des Flandres, épig. : Aux grands hommes la patrie reconnaissante. AA. Le Sacrifice d'Abraham, épig. : L'effet de la mu- sique est en raison de la régularité du rhythme. 42. La Moisson, épig. : Ceres humanis usibus apta. 43. Esther, épig. : B. 8 C. 44. Pierre l’'Ermite aux Croisés, épig. : Dieu le veut ! ( 590 ) 45. Les Faneurs, épig. : Utile dulci. 46. Le 5 Juin 1568, épig. : Seizième siècle. 47. Le Jugement dernier, épig. : Le jugement dernier. 48. Didon, épig. : Magno miserae delectus amore (VirG.). 49. Les trois Dames de Bouvignes, épig. : Les trois dames de Bouvignes. 90. La Victoire de David, épig. : Quand donc nos libret- tistes comprendront-ils qu'outre l’hémistiche, le musicien a besoin d’un vers rhythmé et cadencé ?.. o1. Le Festin de Damoclès, épig. : Qui croit les posséder, les voit s'évanouir, El la peur de les perdre empéche d'en jouir. 92. Belge et Batave, épig. : Soyez compatissant et Dieu vous bénira. D3. Chœur des Beaux-Arts, épig. : Au travail, au tra- vail, à l’œuvre, aux ateliers, etc. 94. Agar dans le désert, épig. : Et elle dit : Que je ne voie pas mourir l'enfant, etc. 99. Larmes de la fille de Jephté, épig. : Apres les deux mois , elle revient trouver son père, etc. 36. Moïse, épig. : Maintenant donc, viens, et je l'enver- rai vers Pharaon, etc. k | 97 La fin du monde (sans devise). 98. Les Belges illustres (sans devise). 99. La Noël à Alost 1487, épig. : Amor vincit. 60. Ambiorix et Indutiomar, épig. : Patrie et liberté. M. Alvin rend compte du travail du jury chargé de l’exa- . men de ces poëmes. Le jury à eu à examiner soixante morceaux, parmi lesquels il en est cinq ou six qui sont remarquables sous le rapport littéraire. Il a constaté avec (591) plaisir qu'il y a progrès notable dans l’art de construire le vers, c’est-à-dire sous le rapport du rhythme. Le morceau sur lequel s’est arrêté le choix du jury se distingue, à Ja fois, comme composition littéraire et comme poëme répondant aux conditions exigées par la musique. Cette pièce a été transmise à M. le Ministre de l’intérieur avec le billet cacheté contenant le nom de l’auteur. COMMUNICATIONS ET LECTURES. ———— M. Édouard Fétis donne lecture d’un travail intitulé : De l’imitation et de l'illusion dans l’art. Ces considérations étant destinées à faire partie d’un ouvrage spécial sur l'esthétique, l’auteur a cru qu’il n’avait point lieu de les insérer au Bulletin. Séance générale des trois classes. (14 mai 1860, à 2 heures.) M. LiaGrE, président de l’Académie. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. Sont présents : Classe des sciences : MM. De Koninek, vice-directeur; d’'Omalius d’'Halloy, Sauveur, Wesmael, Martens, Cantraine, Kickx, Stas, Van Beneden, A. De Vaux, de Selys-Longchamps, le vicomte du Bus, Gluge, Neren- burger, Melsens, Schaar, Duprez, Brasseur, Poelman, d’Udekem, Dewalque, membres ; Schwann, associé. Classe des lettres : MM. de Ram, directeur; De Decker, vice-directeur; le baron de Gerlache, Grandgagnage, De Smet, Roulez, Gachard, Borgnet, le baron de Saint-Genois, Carton, Haus, Bormans, Leclercq, Polain, le baron de Witte, Ch. Faider, Arendt, Ducpetiaux, Chalon, membres; Nolet de Brauwere van Steeland , associe. Classe des beaux-arts : MM. Van Hasselt, vice-directeur ; Alvin, F. Fétis, Navez, Roelandt, Érin Corr, Jos. Geefs, Ed. Fétis, membres; Calamatta, Daussoigne-Mehul, as- sociés. L'ordre du jour de la séance générale comprenait, im- dépendamment de plusieurs questions d’ordre intérieur, la lecture du rapport présenté par M. Éd. Fétis, au nom de la commission de la Biographie nationale. L'assemblée { 595 ) décide que ce rapport sera inséré au Bulletin et com- muniqué à M. le Ministre de l’intérieur, ainsi que le preserit l’article 7 de l’arrêté royal du 29 mai 1860, décrétant les mesures d'exécution de la Biographie. COMMISSION DE LA BIOGRAPHIE NATIONALE. Rapport annuel de 1861. « Demeurée longtemps à l'état de projet vague, la Bio- graphie nationale, comprise par le gouvernement dans le programme des travaux de l’Académie, est enfin entrée dans une phase nouvelle, dans une phase d'exécution. L'Académie, dans sa séance générale tenue au mois de mai dernier, avait décidé qu'une commission spéciale , formée de quinze membres fournis en nombre égal par chacune des trois classes, serait chargée de diriger la pu- blication de la Bigraphie nationale. Cette résolution, sou- mise à la sanction de M. le Ministre de l’intérieur, fut approuvée par lui. Les autres dispositions réglementaires, adoptées également en séance générale, obtinrent l’assen- timent du Gouvernement. Il fut procédé dans chaque elasse à la nomination des membres appelés à former la commission de la Biographie nationale. Ces membres furent : 1° Pour la classe des sciences : MM. Dewalque, Kickx, Quetelet , Stas et Van Beneden; 2 Pour la classe des lettres : MM. de Ram, Gachard, Kervyn de Lettenhove, Polain et de Saint-Genois ; 9° Pour la classe des beaux-arts : MM. De Busscher, Fétis père, Éd. Fétis, Siret et Van Hasselt. ( 594 ) La commission tint sa première séance le 6 octobre 1860; Elle fut installée par M. Gachard, président de lAca- démie, qui lui donna communication de larrêté ministé- riel en vertu duquel elle était constituée, et développa des considérations générales sur l’importance de la mission qu'elle est appelée à remplir. La première chose que la commission avait à faire, était de former son bureau. Elle procéda à cette opération par la voie du serutin et nomma : ; Président, M. de Saint-Genois; vice-président, M. Stas ; secrétaire, M. Éd. Fétis. Il fut décidé, en outre, que M. Stappaerts serait invité à remplir les fonctions de secrétaire adjoint. Après avoir pris place au fauteuil de la présidence, M. de Saint-Genois donna lecture d’un projet de règlement dé- terminant, sous la forme de questions qu’il proposait de mettre successivement en délibération, la manière dont serait conçu et exécuté le plan de la Biographie nationale. On proposa de faire imprimer le projet de règlement communiqué par M. de Saint-Genois pour l'usage des membres de la commission, afin qu'ils pussent y réfléchir avant d’en aborder la discussion. Suivant un membre, il y avait des questions préalables à examiner, lesquelles étaient relatives à la forme même de la Biographie nationale. Serait-ce une œuvre de style ou d’érudition, un ouvrage comme l'Histoire littéraire de France, dans lequel l’ordre chronologique serait observé, ou bien un recueil de notices avec tables comme les Mémoires de Paquot, ou bien en- core un dictionnaire dans le genre de la Biographie Mi- chaud ? Ces questions devant se présenter lors de la discussion de lavant-projet de règlement de M. de Saint-Genois, il ( 295 ) fut décidé que la commission en ajournait l'examen à sa deuxième séance. | Le mode de publicité à donner aux travaux de ia com- mission parut, à plusieurs membres, être un point qu'il fallait régler. On proposa la création d’un bulletin spécial, mais la majorité de la commission ne pensa point qu'il y eût lieu d'adopter cet avis; elle décida qu'il suffirait des comptes rendus des séances publiés dans le Moniteur. Dans l'intervalle de la première à la deuxième séance, l'impression du programme présenté par M. de Saint-Ge- nois avait eu lieu, conformément à la décision prise, et quand la commission vint à se réunir de nouveau, elle put entreprendre la discussion des questions importantes qui y étaient soulevées, et dont l'examen devait employer plu- sieurs séances. La première question était ainsi conçue : « Par les mots » Biographie nationale, la commission comprend-elle la » composition d’un dictionnaire biographique rédigé dans » l’ordre alphabétique général ? ou bien entend-elle former » un recueil de biographies où les hommes remarquables » seront groupés soit d’après l’ordre de leur profession, » soit d’après l’ordre chronologique? » Une longue discussion s’engagea sur cette question, et il ne faut pas s’en étonner, car elle était capitale. De sa solution dépendait toute l’économie du plan de la publi- cation. Des opinions très-diverses furent exprimées sur la forme qu'il convenait d'adopter pour la Biographie natio- nale, et il faut dire que des arguments de grande valeur furent mis en avant de part et d'autre. L'ordre alphabétique fut appuyé par des membres qui pensèrent que celte forme répondait plus que toute autre à la pensée qui avait fait adopter en principe la publication ( 596 ) d'une Biographie nationale à la portée de tous, qu’elle faci- litait les recherches et faisait éviter les difficultés qui naï- traient infailliblement d’une division par catégories, pour le classement de certains personnages dintingués à diffé- rents titres. Il faut que, dans un pareil ouvrage, chacun puisse trouver à l'instant le personnage sur lequel il désire avoir des renseignements, et l’ordre alphabétique donne seul ce moyen. L'ordre méthodique eut des partisans. Ils firent valoir en sa faveur cet avantage que chaque subdivision du tra- vail, correspondant à une même profession , pourrait être traitée par un écrivain spécial, ce qui donnerait plus d’en- semble aux vues qui s’y trouveraient exprimées, relative- ment à la partie de la science ou de l’art à laquelle cette subdivision serait consacrée. On à dit également qu'il faut présenter au pays et à l’étranger un faisceau remarquable des hommes qui se sont distingués dans tous les genres; qu’on ne saurait, en con- séquence, les séparer les uns des autres; enfin que, pour se rendre compte de la valeur de tels ou tels hommes, on a besoin de les comparer avec leurs prédécesseurs et avec leurs successeurs, ce qui ne serait pas possible si l’on adoptait l’ordre alphabétique. Un troisième système a été développé. Il consistait à diviser la Biographie nationale en périodes historiques, dans lesquelles on eût groupé tous les hommes célèbres . qui ont vécu à une même époque. L'idée d’un fractionnement de l'ouvrage par provinces a été également mise en avant. La question ayant été mise aux voix après une discus- sion approfondie, la forme du dictionnaire alphabétique a été adoptée. ( 897 } La deuxième question à l’ordre du jour était ainsi con- çuEe : « La commission admettra-t-elle dans la liste provi- » soire tous les personnages qui ont obtenu quelque no- » toriété, ou se bornera-t-elle à réunir des illustrations » reconnues, des célébrités consacrées par l’histoire? En » d’autres termes, la future Biographie nationale sera-t-elle » un dictionnaire complet ou un ensemble de notices qui » ne comprendra que des grands hommes? » En adoptant la forme du dictionnaire alphabétique pour la publication de la Biographie nationale, la commission avait résolu d'avance cette question. Elle vota sans discus- sion la disposition réglementaire suivante, proposée par M. de Saint-Genois : « Tous les personnages qui ont une notoriété quelconque seront admis dans les listes provisoires. L’élimimation de ceux qu’on jugerait inutile de faire figurer dans la Biogra- phie aura lieu plus tard. La formation des listes provisoires était un des premiers points qui devaient fixer l’attention de la commission. Ce travail demandait un temps considérable, et l’on devait souhaiter qu’il fût entrepris sans retard, afin qu’il püt être terminé vers le moment où les autres questions relatives au plan de la publication auraient été examinées et réso- lues, de manière qu’on mit dès lors la main à l’œuvre. Différents systèmes furent proposés pour former les listes provisoires. Après les avoir examinés et discutés, la com- mission décida que ce travail serait fait sous la surveil- lance du président, qui était autorisé à y employer une personne choisie et dirigée par lui. Il restait à déterminer quelles étaient les indications biographiques que renfermeraient les listes provisoires. 2" SÉRIE, TOME XI. 42 ( 598 ) Voici, relativement à cette question, le projet de solution qui fut adopté : « On consignera dans la liste provisoire les noms, pré- » noms, profession ou qualité, lieu et date de naissance, » date de décès du personnage, autant que possible. On » citera, à la suite de chaque nom, les ouvrages spéciaux » et les monographies où il ést fait mention des person- » nages; mais il semble inutile d'indiquer les biographies » générales, les dictionnaires historiques et les encyclo- >» pédies qui contiennent des notices sur ces mêmes per- » SOnnages. » Avant de poursuivre la discussion des artieles contenus dans le projet de programme présenté par M. de Saint- Genois, la commission eut à délibérer sur une dépêche de M. le Ministre de l’intérieur à laquelle une prompte ré- ponse devait être donnée, et qui soulevait une question nouvelle dont la solution pouvait influer d’une manière très-directe sur des détails importants du plan qu’il s'agis- sait d'élaborer pour la publication projetée. « On demande, disait la dépêche ministérielle, qu'mdé- » pendamment de la version en langue française, la Bio- » graphie nationale paraisse aussi en langue flamande. » « En ce qui me concerne, « ajoutait le ministre, » je » serais très-disposé à accorder satisfaction à ce vœu. On » pourrait faire traduire du français en flamand les arti- » cles originaux écrits dans la première de ces deux lan- » gues et réciproquement. » Cette question fut mürement examinée et longuement discutée. D'un côté, l’on fit remarquer qu'il était impossible de former, au moyen des traductions réciproques un ouvrage qui eût quelque unité. Il fallait choisir entre la langue ( 599 ) française et la langue flamande; or, le but qu'on s'était proposé d'atteindre, en publiant une Biographie nationale, était de faire connaître ce que la Belgique a produit d'hommes remarquables, et ce but serait manqué si l’ou- vrage n’était pas écrit dans une langue répandue. D'un autre côté, on assura que les notices biographiques des personnages flamands ne pouvaient être bien faites que par des auteurs flamands. On trouvait injuste d’ex- clure les écrivains qui sont les représentants naturels de plusieurs provinces considérables du pays, d’une partici- patiôn à l’œuvre commune de la Biographie nationale. Il fut répondu à cela qu’il ne s’agissait d’exelure per- sonne, attendu que l’Académie ne se propose pas de faire publiquement appel à la collaboration de personnes prises en dehors de la liste de ses membres, mais d’user seule- ment, quand elle le jugera utile, du droit qui lui a été donné de s'attacher des collaborateurs étrangers, ce qu’elle fera directement en s'adressant aux personnes qu’elle sait remplir les conditions requises pour participer à la rédac- tion d’un ouvrage écrit en langue francaise; et il n’en manque pas qui soient dans ce cas, même dans les pro- vinces flamandes. | Les provinces flamandes ont à l’Académie plusieurs représentants qui peuvent fournir sur les Flamands célè- bres, pour la Biographie nationale, tous les renseigne- ments désirables. La meilleure histoire de la Flandre qui existe est écrite en français par un membre de l’Académie, et l’on peut, pour la même raison, faire en français d’ex- cellentes notices sur des personnages flamands. L’impor- tant est que ceux-ci ne soient pas oubliés et qu’on répande leur nom et leur gloire partout où pénétrera un ouvrage écrit dans une langue généralement comprise. ( 600 ) Tels sont les arguments qui ont été produits de part et d'autre. Quoi qu’il en soit, s’il y avait divergence sur la possibilité de faire concurremment deux ouvrages com- posés d’articles originaux et de traductions, tout le monde fut d'accord sur ce point, que la Biographie nationale doit populariser dans toutes les provinces du pays les noms des hommes remarquables auxquels la Belgique s’honore d’avoir donné le jour. En conséquence, voici la résolution qui fut adoptée, comme devant servir de base à la ré- ponse qui devait être faite à la dépêche de M. le Ministre de l’intérieur : « La Biographie nationale sera publiée en français. La » commission émet le vœu qu’il en soit donné une édition » en langue flamande. » Quand la commission vint à reprendre la discussion du programme présenté par M. de Saint-Genois, la première question à l’ordre du jour fut celle-ci : « S'en tiendra-t-on, pour les lieux de naissance, à la eir- conscription géographique actuelle, ou bien comprendra- t-on aussi, parmi les nationaux, les personnages nés dans les localités voisines qui ont fait partie de la Belgique, mais qui en ont été successivement été détachées? » Cette question était plus épineuse et plus difficile à ré- soudre qu’on ne le supposerait au premier abord. On aurait voulu pouvoir accueillir dans la Biographie nationale tous les hommes distingués nés dans des localités anciennement et actuellement belges; mais il ne faut pas s’exposer au reproche d’une usurpation de nationalité! Qu’aurait dit la Hollande, si, par une interprétation conforme à nos désirs et, en apparence, à l’équité, nous avions été amenés à lui prendre ses grands hommes durant près d’un siècle et demi ? |- D re | ( 601 ) Comme on l’a fait observer au sein de la commission, il faut considérer que la Belgique, homogène depuis peu de temps seulement, formait jadis un faisceau de provinces, et l’on doit pouvoir refaire l’histoire de chaque province à l’aide de la Biographie nationale. En conséquence, la réso- lution suivante a été adoptée : « La Biographie nationale comprendra tous les hommes » qui se sont distingués à des titres divers, soit dans l’his- » toire politique du pays, soit dans la carrière des lettres, » des arts, des sciences, etc., nés en Belgique ou dans des » territoires qui, à l’époque de leur naissance, dépendaient » des provinces formant la Belgique actuelle. » Cette question résolue, il s’en présenta une autre non moins délicate. Elle était posée en ces termes : « Admettra-t-on dans la liste provisoire de la Biogra- » phie nationale des étrangers éminents qui ont passé leur » vie en Belgique et qui ont rendu, pendant la durée de » leur carrière , des services signalés à notre pays ? » _ Si l’on eût cédé à un premier mouvement, si l’on n’eût écouté que l'instinct du cœur, tout le monde eût répondu affirmativement à cette question; mais on est parfois obligé de faire taire le cœur pour laisser parler la raison. Des voix éloquentes et convaincues se sont élevées au sein de la commission pour plaider en faveur de l’admission dans la Biographie nationale des étrangers qui ont vécu en Belgique et s’y sont distingués à des titres divers. Suivant un des membres qui ont le plus chaudement plaidé la cause de ces derniers, il ne faut pas toujours considérer un homme comme n'ayant qu’une seule patrie. Par ses occupations, par ses travaux, il peut se rattacher à un autre pays que celui où il est né. Dans toutes les histoires littéraires, dans celles des sciences et des beaux-arts, et ( 602 ) même dans l’histoire politique, on voit des hommes se créer une patrie d'adoption. On a dit encore que la Belgique ferait preuve d’ingra- titude, si elle ne donnait point place dans sa Biographie aux personnages qui ont passé chez elle la plus grande partie de leur carrière et qui lont servie de corps ou d’esprit. Ces arguments ne sont pas restés sans réplique. Il a été répondu que le titre même de Biographie nationale indique que les nationaux seuls y doivent trouver place, qu’une biographie n’est pas une histoire, et que si, dans ce dernier ouvrage, il est juste de faire mention des étrangers qui ont pris part aux événements politiques du pays et à son mouvement intellectuel , 1l n’y a pas lieu de les faire : figurer dans le premier; enfin qu’il y aurait de l’inconsé- quence à prendre aux étrangers leurs nationaux qui ont vécu en Belgique, tandis que nous leur reprochons de s'approprier ceux de nos artistes qui ont travaillé chez eux. Il a été décidé que la Biographie nationale ne contien- drait que des Belges; mais, pour échapper au reproche d’ingratitude, la commission a décidé qu’un supplément serait consacré aux notices des personnages étrangers qui ont vécu en Belgique et qui ont bien mérité de notre pays. Les bases sur lesquelles devait reposer la publication de la Biographie nationale se trouvaient fixées par les résolu- tions que je viens d’avoir l'honneur de faire connaître à l’assemblée. Il ne restait plus à régler que des questions de détail. Une de ces questions, dont la commission a cru devoir s'occuper à l’une de ses dernières réunions, con- cernait la fixation des principes généraux qui serviront à guider les rédacteurs des articles destinés à figurer dans ( 605 ) la Biographie nationale. Un programme renfermant l’ex- posé de ces principes à été arrêté et sera communiqué à tous les collaborateurs. On avait demandé s’il y aurait ici d'associer, dès à pré- sent, aux travaux de la Biographie nationale, des écri- vains pris en dehors du sein de l’Académie. Il a été décidé qu'il ne serait pas fait appel à la collaboration étrangère avant qu’on fût informé, par les membres de l’Académie, du choix des articles dont ils désirent se réserver la ré- daction. Pendant que la commission diseutait les règles fonda- mentales qui devaient présider à l’exécution de l’entreprise nationale dont la direction lui est attribuée, les listes pro- visoires se formaient à Gand sous la surveillance de son président. À différentes reprises, M. de Saint-Genois dé- posa sur le bureau les bulletins relevés par les soins de la personne dont il avait fait choix. A la séance du mois de janvier, il avait été décidé qu’une première liste des noms commençant par la lettre À serait imprimée pour l’usage des membres de la commission, afin qu’on püt y faire choix d’un certain nombre d'articles dont la rédaction serait im- médiatement entreprise. Cette mesure reçut son exécution. Dans la séance de février, les membres de la commission passèrent en revue les personnages inscrits sur la première liste et se partagèrent les travaux relatifs à la rédaction d'environ cent trente notices. Depuis lors, les relevés ont continué d’être faits pour les autres lettres ‘ l'alphabet, et l’on est arrivé à un total de neuf mille bulletins. Les ou- vrages dépouillés pour former les listes provisoires sont au nombre de soixante-quatre, formant environ trois cents volumes. Il a été décidé que les listes seraient, avant leur insertion au Moniteur, communiquées en épreuves à tous ( 604 ) les membres de l’Académie, avec prière de combler les lacunes qu’ils y auraient remarquées. Il ne me reste plus qu’à parler des moyens matériels d'exécution. Pour la première année, M. le Ministre de l’intérieur a bien voulu mettre à la disposition de la com- mission , afin de subvenir aux dépenses occasionnées par les travaux préparatoires, une somme de quatre mille francs, dont l'emploi a été réglé de la manière suivante : 1° Jetons de présence des membres. . . fr. 1,800 » 20 Indemnité à M. Stappaerts, pour ses travaux de secrétaire adjoint . . . . . € . .!" "600" 5° Pour le travail des listes provisoires . . . 1,000 » 4° Impression des bulletins destinés au relevé ; des noms. ., . 4. + 2)..." ONE De" Frais de bafeau "57 LT SOS G° Indemnité à M. Chokier, pour les écritures courantes et le classement des archives. . 150 » 7° Dépenses imprévues. . . + + . . . . 450: Francs. 4,000 » M. le Ministre de l’intérieur ayant exprimé le désir d’être informé, dès à présent, de l’importance de la somme qui devrait être portée au budget de 1862 pour la continua- tion des travaux de la Biographie nationale, la commis- sion a répondu à cette demande, par l’organe de M. le secrétaire perpétuel de l’Académie, qu’un subside de cinq . mille francs lui paraissait devoir suflire pour l’année pro- * chaine. Nous comptons bien être en mesure de commencer l'impression du premier volume en 1862, et nous croyons pouvoir faire face aux dépenses qui résulteront de la mise en œuvre typographique, au moyen de ce subside; mais nous avons fait observer à M. le Ministre de l’intérieur que le chiffre de cinq mille francs n’était qu’approximatif et ( 605 ) que nous ne pouvions pas préciser aussi longtemps d’avance les détails d’un budget définitif. Tels ont été, Messieurs, nos travaux jusqu’à ce jour. Quelques personnes ont mis en doute la possibilité de con- duire à bonne fin une entreprise littéraire telle que celle dont la direction nous a été confiée. Nous espérons bien donner un démenti à cette prédiction de mauvais augure. La Biographie nationale est un monument de reconnais- sance que la Belgique élève à la mémoire de ceux de ses enfants qui l'ont servie ou qui l'ont illustrée. Présider à l'édification d’un’ pareil monument est une noble tâche, et si nous ne parvenons pas à la bien remplir, ce ne sera ni faute de zèle, ni faute d’efforts persévérants. La commission se fait un devoir de déclarer que s’il lui est donné de poursuivre jusqu’au bout l’accomplissement de la mission qu’elle a reçue, elle en sera surtout rede- vable à l’activité déployée par son président, dont les soins incessants et la sagacité ont aplani les difficultés de l’en- treprise et préparé son succès. Le secrétaire rapporteur, En. Féris. OUVRAGES PRÉSENTÉS. Monographie des Élatérides ; par M. E. Candèze. Tome Ill, Liége , 1860 ; in-8°. Grammaire moderne des écrivains francais ; par G. H. Au- bertin. Bruxelles-Paris, 4861 ; in-8°. ( 606 ) Des Sociétés savantes et des Congrès; par Alb. d'Otreppe de Bouvette. Liége, 1861; in-12. La vie et la croissance des palmiers ; par M. Engel, de Mé- rida (Vénézuéla); traduit de l'allemand par Alfred De Borre. Gand, 1861; in-8°. État de la question de l’inoculation de la pleuropneumonie exsudative de l’espèce bovine en 1861; par le docteur Willems. Hasselt, 1861 ; in-8°. Statistique de l’hôpital Sainte-Élisabeth d'Anvers au 31 dé- .cembre 1860 ; par C. Broeckx. Anvers, 1861; in-8°. Collection de mémoires sur l’histoire de Belgique, X VT"siè- cle : Mémoire de Pontus Payen, avec notice et annotations; par Alex. Henne. Tome second. Bruxelles, 1861; in-8°. Annales des travaux publics de Belgique , tome XVIIT, 2° et 3° cahiers. Bruxelles, 1861 ; in-8°. | Journal des beaux-arts, IT" année, n°° 9 et 10. Anvers, 1861 ; 2 feuilles in-8°. à Messager des sciences historiques, ou archives des arts et de la bibliographie de Belgique. Année 1861; 1"° livraison. Gand, 1861; in-8°. Mémoires de la Société libre d’émulation de Liége. Nouvelle série, tome 1°, Liége, 1861 ; in-8°. Bulletin de l’Académie royale de médecine de Belgique, deuxième série, tome IV, n° 2 et 5. Bruxelles, 1861; 2 broch. in-8°. Handelingen der jaarlijksche algemeene vergadering van de Maatschappij der nederlandsche letterkunde te Leiden, gehou- den den 21° junij 1860. Leiden, 1860; 1 vol. in-8°. Natuurkundig tijdschrift voor nederlandsche Indië, deelen XX, XXI, XXIL Batavia, 1860; 3 vol. in-8°. Ethnogénie gauloise, ou mémoires critiques sur l’origine et la parenté des Cimmériens, des Cimbres, des Ombres, des Belges, des Ligures et des anciens Celtes; par Roget, baron de Belloguet. Introduction. — Preuves physiologiques, types ( 607 ) gaulois et celto-bretons. Paris, 1858-1861; 1 vol. in-8°. Description des monuments de Dehli, en 1852, d’après le texte hindoustani de Sayid Ahmad Khan; par M. Garcin de Tassy. Paris, 1861 ; in-8°. La Minerve du Parthénon; par Francois Lenormant. Paris, 1860; 1 broch. in-8°, Discours historique sur les loteries, prononcé le 2 décem- bre 1860, dans la grande salle de l’hôtel de ville d’Amiens; par M. l’abbé J. Corblet. Amiens, 1861; in-12. Bauduin de Fer, comte de Flandre, et les pierres d’Acq; par M. le comte A. d’'Héricourt. Arras, 1861 ; in-8°. Nouvelles recherches sur la pomme de terre [n° 21); par Victor Chatel (de Vire). Caen, 1861 ; in-8°. Bulletin de la Société géologique de France , deuxième série, tome XVIIe, feuilles 15-24. Paris, 4860 à 1861; in-8°. Revue de l'instruction publique en France, XXI"° année, n® À à 15. Paris, 1861; 15 doubles feuilles in-4°, Presse scientifique des deux mondes, revue universelle des sciences de l’industrie, année 1861, tome IT, n° 9-10. Paris, 1861 ; 2 broch. in-8°. Revue numismatique, publiée par J. de Witte et Adrien de Longpérier. Nouvelle série, tome V, n° 3 à 6; tome IV, n° 1 à 3. Paris, 1860-1861 ; 5 broch. in-8°, Journal de la Société de la morale chrétienne, tome XI, n° 2. Paris, 1861 ; in-8°. Annuaire de l’Institut des provinces , des sociétés savantes et des congrès scientifiques , 1861. Paris; 1 vol. in-8°. Mémoire de la Société impériale d'agriculture, de sciences et d'arts, séant à Douai, centrale du département du Nord, deuxième série, tome V. Douai, 4860; in-8°. Bulletin historique de la Société des antiquaires de la Mo- rinie, Xe année, 57° livr. Saint-Omer, 1861 ; in-8°. Carte des anciens glaciers du versant italien des Alpes ; par Gabriel de Mortillet. Milan, 1860; in-8°. ( 608 ) Monatsberichte der küniglichen preuss. Akademie der Wis- senschaften zu Berlin, aus dem Jahre 1860. Berlin, 4861; 4 vol. in-8°. Register für die Monatsberichte der küniglichen preuss. Akademie der Wissenschaften zu Berlin, vom Jahre 1856 bis 1858. Berlin, 1860; 4 vol in-8°. Novus Codex diplomaticus Brandenburgensis ; vom Dr.A.-F. Riedel. III“ Band, 5 Hauptth.; XX'* Band, 1" Hauptth. Berlin, 1861 ; 2 vol. in-4°. Statut der Humboldt-Stiftung für Naturforschung und Reisen Berlin, 1861 ; in-4°. Recht und Rechtspflege in Preussen, betrachtet an einem Beispiele; von Julius Freese. Berlin, 1858; in-12. Jahresbericht des physikalischen Vereins zu Frankfurt am Main für das Rechnungsjahr 1859-1860. Francfort-sur-Main. 1861 ; in-8°. Gôüttingische gelehrte Anzeigen, unter der Aussicht der künigl. gesellschaft der Wissenschaften. Jahre 1860. Gottin- gue, 5 vol. in-12. Nachrichten von der Georg-Augusts-Universität, und der künigl. Gesellschaft der Wissenschaften zu Gôttingue, vom Jahre 1860. Gottingue, 1 vol. in-12. Heidelberger Jahrbücher der Literatur, unter Mitwirkung der vier Facultäten. LIV Jahrg., 1-5 Heftes. Janv. à mars. Hei- delberg, 1861 ; 5 broch. in 8°. Neues Jahrbuch für Pharmacie und verwandte Fächer. Band XV, Heft. 1-5. Heidelberg, 1861 ; 3 broch. in-8°. Jahresbericht der Wetterauer Gesellschaft für die gesammte Naturkunde zu Hanau, über die Gesellschaftsjahre von Au- gust 1858 bis dahin 1859 und von August 1859 bis dahin 1860. Hanau, 1861; 1 vol. in-12. Sitzungsberichte der konigl. bayer. Akademie der Wissen- schaften zu München, 1860, Heftes IV-V. Munich; 2 broch. in-8°. { 609 ) Anzeiger für Kundeder deutschen Vorzeit. Neue Folge, VII Jahrgr., n° 5 et 4. Nuremberg, 1861; in-4°. Nachlese zur Schillerlitteratur als Festgrufs der Universität Tübingen, zum vierhundertstentJahrestag der Stiftung der Universität Basel ; herausgegeben von Adelbert von Keller. Tubingue, 1860; in-4°. Würzburger medicinische Zeitschrift; herausgegeben von der physikalisch- medicinischen Gesellschaft. Zweiter Band, 2 Heft. Wurtzbourg, 1861 ; in-8°. Antiquarisk Tidsskrift, udgivet af det kongelige nordiske Oldskrift-Selskab, 1852-1854, 1855-1857. Copenhague, 1854- 1859 ; 2 vol. in-8°. Séance annuelle du 14 mai 1859 de la Société royale des antiquaires du Nord. Copenhague, 1859; in-8° Nyt Magazin for Naturvidenskaberne, XI Binds, 24 Heft. Christiania, 1860; in-8°. Det kongelige norske Videnskabers- -Sclskabs Skrifter à det 19% Aarkundrede, IV® Binds, 2% Heft. Throndhjem, 1859; p. in-4°. Forhandlingar à Videnskabs-Selskabet à Christiania Aar 1859. Christiania, 1860; in-8°. Diplomatarium norvegicum ; Samlede og Udgivne af Chr. C.-A. Lange og Carl R. Unger. V'* Samling, 1° Halvdel. Chris- tiania, 14860; in-8°. Foreningen til norske Fortidsmindesmerkers Bevaring. Aarsberetning for 1859 Afgiven 1 Generalforsamling, den 26 Juni 4860. Christiania , 1860; in-8°. Beretning om Bodsfoengslets Virksomhed à Aaret 1859. Christiania, 1860; in-8°. Statistiske Tabeller for kongeriget Norge, udgivne efter Fo- ranstaltuing af Departementet for det Indre, XIX*% Raeckke. Christiania, 1859; in-4° oblong. Ceremoniel ved deres majestaeter Kong Carl den Femtendes og Dronning Wilhelmine-Frederikke-Alexandra-Anna-Loui- (610 ) | ses Kroning, à Trondhjem. Aar 1860. Christiania, 1860; in-4°. De vi logicae rationis in describenda philosophiae historia ad Eduardum Zellerüum ; epistola quam seripsit Mareus-Jaco- bus Monrad. Christiania , 1860 ; in-8°. Tagttagelser over den Postpliocene eller glaciale Formation à en del af det sydlige Norge ; af M. Sars og Th. Kjerulf. Chris- tiania, 1860 ; in-4°. Chronica regum Manniae et insularum. The Chronicle of man and the sudreys ; edited from the manuscript Codex in the British museum, and with historical notes ; by P. À. Munch. Christiania, 1860; in-8°. | Norges Mynter à Middelalderen, samlede og beskrevne af C. I. Schive, med Indledning af C.-A. Holmboe. 1°-IIfie Heftes. Christiania, 1858-1860 ; in-foi. Cantateved H.-M. Kong Carl den Femtendes og H.-M. Dron- ning, Withelmine-Frederikke-Alexandra-Anna- Louises.Kro- ning à Throndjems Domkirke, den 5 August 1860 ; in-4°. Norske bygninger fra fortiden (norwegian buildings from former times), i tegninger og med text, udgivne af foreningen til norske fortidsmindesmerkers Bevaring. I‘ Hefte (pl. I-IV). Christiania, 1859 ; in-4°. Index scholarum in universitate regia Fredericiana, fra 1860. Christiana, 1860; in 4°. I. R. Istituto veneto di scienze, lettere ed arti de Venezia : Memorie, vol. VII, parte 2; vol. IX, part. 1-2, Venise, 1860- 1861 ; in-4°. | Ati, serie terza, tomo V®, disp. 9*-10*; tomo VI‘, disp. 1°-5°, Venise, 1859-1861 ; in-8°. Sulla tubercolosi dell” utero e degli organi ad esso attinenti; memoria seconda del Dott. Giacinto Namias. Venise, 1861 ; in-4°. Nuovo metodo crittografico per corrispondenze segrete ; del professore Pietro Giusti. Siena, 1861; p. in-8°. Al commendatore Benedetto Trompeo in Torino, onorevole (611) corrispondente de’ vecchi Lincei questa laudazione di Giachino Taddei chimico distintissimo Catterina Scarpellini dal Campi- dogli intitola. Turin, 1860; in-12. Almanaque nautico para 1862, calculado de 6rden de S. M. en el observatorio de marina de la ciudad de San Fer- nando. Câdiz, 1860; gr. in-8°. Observations météorologiques faites à l’observatoire de l’in- fant don Ferdinand, à Lisbonne , sous la direction de M. Pe- dago, pendant les mois de janvier à mars 1861 ; in-fol. The quarterly Journal of the chemical Society , n° 55. Lon- dres, 1861 ; 1 broch. in-8°. Transactions of the Royal Society of Edinburgh; vol. XXI, part. 2. Edimbourg, 1860; in-4°. Proceedings of the Royal Society of Edinburgh; vol. IV, n° 50. Edimbourg, 1860 ; in-8°. On the arrangement of the muscular fibres of tho ventri- cular portion of the heart of the mammal ; by James Petti- grew. Edimbourg, 1860; in-8°. Appendix to the Makerstoun magnetical and meteorological observations, being a supplement to volume XXII, of the Royal Society of Edinburgh (continued from vol. XIX); reduced and edity by Balfour Stewart. Edimbourg, 1860; in-4°. Praefationes et epistolae, editionibus principibus auctorum veterum praepositae; curante Beriah Botfield. Cambridge, 4861 ; 1 vol. in-4°. The american Journal of science and arts, second series, vol. XXXI, n° 92. New-Haven, 1861; in-8. Memori of Robert Troup Paine, by his parents. New-York, 1852; 1 vol. in-#. Boletino de la Sociedad de naturalistas de Neogranadinos, tome 1%, pp. 11 à 106. Bogota, 1860; in-12. Anales de la universidad de Chile, año 1859. Santiago; 1 vol. in-8°. Tratado de Ensayes , tanto por la via seca como por la via ( 612 ) humeda, de toda elase de minerales y pastas de cobre, plomo, plata, oro, mercurio, etc.; por Ygnacio Domeyko. Segunda edicion. Valparaiso, 1858; in-8°. Chile desde la batalla de Chacabuco hasta la de Maipo ; me- moria por D. Salvador Sanfuentes. Santiago, 1850 ; in-8°. Las campañas de Chiloëé (1820-1826); mémoria histérica por Diego Barros Arana. Santiago , 1856; in-8°. La Semana, revista noticiosa, literaria i cientifica. Año ï, 1859-1860. Santiago; in-4°. Estadistica comercial dela republica de Chile, correspon- diente al año de 1859. Valparaiso, 1860; in-4°. Anuario estadistico dela republica de Chile, Entrega pri- mera. Movimiento de poblacion dela repüblica de 1848 à 1858 inclusive. — Sus deducciones. Santiago, 1860; in-4°. BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. | 1861. — Ne 6. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 1” juin 1861. M. De Koniex, vice-directeur, occupe le fauteuil. M. An. Querecer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. d'Omalius d’Halloy, Wesmael , Mar- tens, Cantraine, Kickx, Stas, Van Beneden, À. De Vaux, de Selys-Longchamps, le vicomte B. du Bus, Gluge, Ne- renburger, Schaar, Melsens, Duprez, Poelman, d'Udekem, Dewalque, #embres. 2" SÉRIE, TOME XI. | 45 (614) CORRESPONDANCE. L'Académie des sciences de Paris, l’École polytechnique de France, la légation d’Espagne à Bruxelles, etc., remer- cient l’Académie pour l'envoi de ses publications. — L'université de Christiania fait hommage de deux médailles d'argent frappées en l'honneur du roi de Suède et de Norwége. — M. le docteur Benoît Trompeo annonce que le gou- vernement vient de créer, à Turin, un observatoire ma- gnético-électrique , et de nommer une commission chargée de diriger, en Italie, les travaux qui en dépendent; il exprime le désir de connaître à cet égard la marche suivie en Belgique. « Le rapport, dit-il, sera probablement ré- duit en projet de loi et sera soumis ensuite à la sanction du parlement. » — M. Husson, premier professeur à l’école moyenne de l'Etat à Spa, communique ses observations sur les phé- nomènes périodiques des plantes observés en 1860. — M. A. De Vaux, membre de FAcadémie, fait hom- mage de deux ouvrages de sa composition sur les lampes de süreté et sur les appareils de translation des mineurs dans les puits. — Remerciments. — M. le professeur Gilbert, de Louvain , demande de pou- voir déposer un paquet cacheté. — Ce dépôt est accepté. — M. le marquis Anatole de Caligny, de Versailles, fait L4 ( 615 ) parvenir une notice manuscrite Sur les tiroirs équilibrés par les machines hydrauliques. (Commissaires : MM. La- marle et A. De Vaux.) — Le secrétaire perpétuel adresse à ses confrères ses remerciments pour la médaille qui lui a été décernée par l’Académie ; il s'exprime en ces termes : MEs cHErs COLLÈGUES, « Dans la séance publique du 15 mai dernier, vous avez bien voulu me donner un témoignage de bienveillante amitié : malheureusement les convenances ne m'ont pas permis de répondre dans le moment même aux paroles trop flatteuses de votre digne président, M. le major Liagre. Permettez-moi de vous exprimer aujourd’hui toute ma re- connaissance et de vous dire le prix que j'attache à cette preuve de souvenir affectueux. » Depuis plus de quarante et un ans, je suis membre de l’Académie royale. Vous avez bien voulu me confier la pré- sidence de cette compagnie, pendant les premières années de la fondation de notre royaume, et vous venez de me donner encore un témoignage d'affection pour les vingt- cinq années suivantes , pendant lesquelles vous m'avez confié le poste important de secrétaire perpétuel (1). Je (1) Nommé membre de l’Académie , le 1er février 1820, M. Quetelet à été désigné comme directeur le 5 mai 1832, et il a présidé la compagnie depuis cette époque jusqu’au 17 janvier 1835. Le 7 février suivant, il est entré én fonction comme secrétaire perpétuel. Il est aujourd’hui le membre le plus ancien de la compagnie, à l'exception de son honorable collègue M. d'Omalius-d’Halloy, dont l'élection, faite par le gouvernement, date depuis la réorganisation de l’Académie en 1816. ( 616 ) vous remercie pour tant de bienveillance : elle me permet de croire que mes efforts pour mériter vos suffrages dans ces fonctions délicates ne m'ont pas trompé. » Je puis vous assurer, du reste, que, dès mon entrée dans cette assemblée, dont je suis aujourd’hui l’un des plus anciens membres, j'ai compris les devoirs qui m'étaient imposés , surtout ceux que j'ai contractés en osant accepter les fonctions de secrétaire perpétuel. Mon existence devait désormais être dévouée à mes collègues; je me suis mis en- tièrement à leur disposition ; et, grâce à leur bienveillance, nous avons commencé ensemble des travaux que n’auraient pu exécuter des savants isolés : je citerai en particulier les observations des phénomènes périodiques, qui occu- pent.aujourd’hui leur rang dans la science. Notre Acadé- mie à plus d’une fois donné l’exemple d’une activité qui lui a mérité les suffrages de nos compatriotes et ceux de l'étranger. » C’est l’Académie royale même, et l'honorable M. Falck à sa tête, qui ont senti, dès l’origine, ce qu'il fallait faire pour les sciences et pour les lettres, si négligées sous les gouvernements précédents ; c’est cet homme d’État éclairé qui créa l’observatoire, le seul établissement pour les sciences physiques que nous ayons dans ce royaume (1). (1) La création d’un observatoire fut demandée à l’État par l’Acadé- mie. Ce corps savant en fit l’objet d’un rapport spécial que le président de l'assemblée fut chargé de présenter à S. M. le Roi, en l’appuyant de son nom. (Voy. p. xvin du Journal des séances, t. II des Nouveaux mémoires de l'Académie royale , année 1826.) L'organisation de l’observatoire suivit immédiatement. Quelques voix, après 1830, demandèrent sa suppression ; mais le digne M. Rouppe, alors bourgmestre de Bruxelles, soutint l’éta- blissement avec énergie et assura son existence. (Voyez la lettre à M. le bourgmestre de la ville de Bruxelles sur la construction de l'obser- (617) Un moment, les secousses de la révolution de 1830 failli- rent le détruire. L'Académie courut le même danger, mais elle sut se maintenir avec prudence; elle sut même prendre une position supérieure à celle qu’elle avait eue jusque-là, et réunir dans un même cercle ce qui forme l’honneur et la gloire d’un pays. Le Belge à senti ce qu'il doit aux lumières, et, loin de détruire, 1l à su agrandir ce qu'il avait créé avec courage et dignité. | » Je tiens à honneur, mes chers Confrères, d’avoir par- couru ces instants difficiles, et je remercie le Ciel d’être parvenu avec vous à une époque où les sciences, les lettres et les beaux-arts n’ont plus qu’à gagner et à fleurir parmi nous. Je me trouverai toujours honoré de vos suffrages. Nous n’avons plus à craindre, je pense, que des mains maladroites renversent l'édifice qui s'élève, cet édifice dont les étrangers ont salué l’origine avec fraternité, et que nos compatriotes voient se développer avec une noble confiance (1). » M. de Selys-Longchamps demande que les paroles pro- noncées par M. Quetelet soient insérées au Bulletin de la séance. | . Cette proposition, appuyée par M. le directeur, est adoptée. valoire, dans le premier Annuaire de l'Observatoire pour 1834, pages 274 à 289.) (1) La médaille offerte à M. Ad. Quetelet a été gravée par M. Braemt, membre de l’Académie, et doit être considérée comme un des plus remar- quables ouvrages de cet habile artiste. es (618) : RAPPORTS. es Sur quelques cryptogames nouvelles ou inédites pour la flore belge, 7" notice; par M. Westendorp, médecin de bataillon. Rapport de M, Kickæx. « M. Westendorp, qui continue avec zèle à explorer la végétation cryptogamique indigène, a adressé à la classe une notice dans laquelle sont résumées les découvertes qu'il à faites depuis la publication de celle présentée à la séance du 9 avril 1859. | Les ouvrages purement descriptifs comportent peu l’ana- lyse : les analyser c’est en quelque sorte les refaire. Nous nous contenterons done de signaler parmi les espèces mentionnées par l’auteur, l'Empusa muscae, l'Isaria um- brina, le Diachea elegans, la Pannaria hypnorum , la Nec- tria inaurata et plusieurs algues marines remarquables, telles que Gastroclonium ovale, Trichothamnion cocci- neum, Phyllacantha granulata, Codium tomentosum, ete. On peut cependant se demander si ces thalassiophytes appartiennent à la flore de notre pays? Nous en doutons, et nous les envisageons plutôt comme ayant été accidentel- lement amenées sur notre plage des côtes de la Normandie et de la Bretagne, où nous savons qu’elles croissent. De ce que nous ne sommes guère séparés des côtés 0c- cidentales de la France par une distance très-considérable, il ne faudrait pas conclure, en effet, à l'identité de la flore marine. Si le climat est peut-être peu différent, les autres conditions d'existence sont loin d’être les mêmes de part ( 619 ) et d'autre : au lieu d’un terrain rocailleux et varié, nous avons partout sur notre littoral un sol léger et presque uni- forme; au lieu d’être abruptes et accidentées, nos côtes s'inclinent partout graduellement sous la mer; et telle est l'influence de ces causes et d’autres qui s’y rattachent, qu’une notable différence existe également entre les faunes marines des deux localités. Nous avons l’hommeur de proposer à la classe l’impres- sion dans le Bulletin de la séance de la notice de M. Wes- tendorp et de la planche qui l'accompagne. » Ce rapport, appuyé par M. Martens, second commis- saire, est adopté par la classe, qui en ordonne l'insertion au Bulletin. Observations sur la structure anormale des silicules dans le Drara VERNA, L.; par M. Alfred Wesmael. Rapport de MI, Kickx. « La note de M. Alfred Wesmael à pour objet de faire connaître une anomalie carpologique qu’il a observée chez le Draba verna. Au lieu d’être comprimées et d’avoir leur cavité partagée en deux par la membrane qui unit les cordons placentaires , les silicules dont il s’agit sont tri- gones et triloculaires par suite de la présence de trois valves et de trois médiastins, ceux-ci partant chacun d’un des trophospermes pour se réunir entre eux au centre du fruit. M. Moquin Tandon (1) a constaté la même chose sur (1) Élém. de tératologie, page 276. ( 620 ) un Îberis, et nous nous souvenons d’avoir vu des fruits du Cochlearia officinalis modifiés de la même manière. On peut, nous semble-t-1l, se rendre compte de ce phé- nomène tératologique, qui se‘reproduit d’ailleurs parfois aussi en dehors des erucifères (1), en supposant qu’au moment où s’est formée la fleur, 1! y ait eu formation et soudure de deux ovaires bicarpellaires, dont un des car- pelles s’est avorté. Sans l’intervention de cet avortement, le gynécée aurait fait un pas dans le sens de la structure symétrique de la fleur, le verticille staminaire étant con- sidéré comme composé de huit étamines accidentellement réduites à six ou même à quatre, ainsi que nous les avons trouvées quelquefois dans le Cheiranthus Cheiri spontané et à fleurs simples. Mais telles que se présentent les choses, l’'anomalie observée est plutôt une altération nouvelle ap- portée à la symétrie florale qu’un retour passager vers la règle, puisque les deux verticilles stamimaire et pulillaire y sont organisés l’un et l’autre d’après le type ternaire, plus éloigné encore que le type quaternaire de celui qui domine chez les plantes dicotylédones. Nous proposons à la classe d'imprimer dans ses Bulle- tins intéressante notice de M. Alfr ed Wesmael, avec les trois figures qu’il y a jointes. » Happort de M, Martens. « D’après une ingénieuse remarque de M. Aug. de Saint- Hilaire, la monstruosité peut être considérée comme une (1) Élém. de tératologie, page 554. ( 62 ) organisation déplacée, c’est-à-dire comme lapplication insolite à un individu ou à un ensemble d’organes, de la structure normale d’un autre ensemble d'organes ou d’un autre individu. Le cas que M. Alfred Wesmael à soumis à notre appréciation me paraît surtout intéressant, parce qu'il confirme une fois de plus les vues du savant mor- phologiste. De quoi s’agit-il en effet? D'une fleur de Draba verna présentant tous les caractères qui appartiennent à l’es- pèce, sauf que l’ovaire est composé de trois carpelles au lieu de deux et renferme trois placentas pariétaux et trois fausses cloisons qui se rencontrent dans l’axe de l’ovaire. Or, la famille des crucifères renferme un genre remar- quable auquel l’organisation exceptionnelle de son fruit à fait donner le nom de Tetrapoma. Ce fruit est une capsule quadrangulaire composée de quatre carpelles, s’ouvrant en quatre valves et présentant quatre placentas pariétaux et quatre fausses cloisons disposées en croix, mais incom- plètes. La fleur du Tetrapoma est, quant à ses autres ca- ractères, conformée exactement d’après le type général de la famille. D’après cela, on est tenté de croire que l’anomalie ob-: servée par M. Alfred Wesmael dans le Draba verna, n’est qu’un acheminement vers l’organisation régulière du genre Tetrapoma, d'autant plus que le Tetrapoma barbareaefo- lium se présente quelquefois avec un fruit tricarpellaire , et que dans le Roripa camelinae, qui est très- voisin de cette espèce, mais dont le fruit est normalement une silique, on à parfois observé également une capsule à trois carpelles. ; La tératologie des crucifères nous offre plusieurs autres exemples analogues. Indépendamment de ceux signalés ( 622 ) par mon honorable collègue M. Kickx, Pres! a observé des fruits quadrangulaires dans le Cheiranthus Cheiri, et Bernhardi en a vu dans le Lunaria rediviva et le Octadenia lybica (4). Dans le Ricotia aegyptiaca, dont la silique, sui- vant la remarque de De Candolle, manque souvent de cloison, Bernhardi a observé également des fruits à quatre carpelles, mais à une seule loge. Or, ces trois dernières espèces ont également fourni à Bernhardi des échantillons à fruits tricarpellaires. I semble donc que, dans ces espèces et, par analogie, dans les autres qui présentent accidentellement des ovaires trilo- culaires, ces ovaires sont l’expression incomplète d’une tendance vers la formation d’un fruit à quatre loges. Aussi Bernhardi, qui ne connaissait pas l’organisation du fruit du Tetrapoma, n’a-t-il pas hésité à considérer l'ovaire quadriloculaire comme un caractère type de la famille des crucifères. | Pour en revenir à l’observation de M. Wesmael, nous devons faire observer qu’elle n’est pas nouvelle. Schkubr avait déjà signalé, il y a soixante ans, la présence aeci- dentelle de fruits triloculaires dans le Draba verna, et il en avait figuré un à la planche 179 de sa Flore d'Allemagne. Toutefois la rareté de cette anomalie et le désir d’encou- rager nos jeunes botanistes à l'étude si féconde de la térato- logie me portent à me rallier à la proposition de mon savant collègue M. Kickx, tendante à faire imprimer dans les Bul- letins de la compagnie la courte notice de M. Wesmael. » La classe décide que la notice de M. Alfred Wesmael sera insérée au Bulletin. (1) Flora, 1858, page 199. (623 ) — La classe entend ensuite les rapports de ses commis- saires sur les mémoires suivants, dont elle ordonne l’in- sertion au Bulletin : 4° Sur les effets de la chaleur dans le siphon renversé à trois branches, de mon invention, qui fonctionne à Bar- donèche, etc., par M. le marquis Anatole de Caligny (Com- missaires : MM. Lamarle et Ad. De Vaux.): 2 Sur la lumière zodiacale et les étoiles filantes, par M. le professeur Heis, de Münster (Commissaires : MM. Du- prez et Quetelet.) — M. Stas présente au nom de M. Kékulé une notice . Sur les acides itaconique et pyrotartrique ; il fait verbale- ment une analyse de ce travail et en demande l'impression au Bulletin. L’impression est ordonnée. Le même membre présente également une notice de M. Liefmann. Cette notice, qui a pour objet des recherches chimiques, est renvoyée à l’examen de deux commissaires, MM. Stas et Martens. COMMUNICATIONS ET LECTURES. Notice sur quelques recherches paléontologiques faites aux environs d'Anvers; par M. H. Nyst, membre de l’Aca- démie. Le gouvernement ayant bien voulu nous désigner, MM. Du Bus, Belval et moi, pour recueillir les objets d’his- toire naturelle qui pourraient intéresser la science et être ( 624 ) mis à découvert dans les nombreux travaux qui s’exé- cutent aux environs d'Anvers , j'ai l'honneur d'informer l'Académie, que je me suis rendu à différentes reprises sur ces gigantesques travaux et qu’en dernier lieu, M. Du Bus et moi, nous avons visité ensemble, le 13 de ce mois, la veille de la dernière séance de lassemblée à laquelle je n'ai pu assister, ainsi que je me l’étais proposé, une partie des travaux de l'enceinte et ceux des forts avancés de Wommelghem et de Borsbeek. Mon honorable confrère, M. le vicomte Du Bus, ayant entretenu l’Académie des découvertes qui ont été faites dans ces endroits, et mis sous les veux de la classe les deux dents fossiles appartenant probablement à un genre de cétacé souffleur, qui nous ont été remises par le capitaine du génie Duwelz, je pense qu’il sera su- perflu d’entrer en ce moment dans de nouveaux détails à ce sujet. M'occupant plus spécialement de l’étude des mollusques, j'ai l'honneur de communiquer à l’Académie la découverte que je viens de faire de la belle couche à Terebratula perforans Du]., à laquelle les auteurs rapportent aujour- d’hui la Terebratula variabilis Sow. et notre Terebratula Sowerbyana. C’est surtout dans les travaux exécutés à l’en- ceinte par M. le capitaine Duwelz, qui a bien voulu me seconder dans mes recherches, que J'ai fait la découverte de ce gîte important sous le rapport géologique; aussi le prions-nous d’en agréer ici toute notre gratitude et notre reconnaissance. C’est, disons-nous, dans cette partie des travaux de l’enceinte qui longent la droite de la chaussée de Borgerhout à Borsbeek, vis-à-vis du cimetière, que L4 nous reconnümes la position géologique de cette belle be. à ( 625 ) térébratule, si difficile à obtenir entière et l’une des plus grandes espèces du genre. Nous avons aussi pu constater que c’est immédiatement au-dessus du crag noir (système Distien, Dum.) que se trouve son horizon géologique. Cette couche ne semble avoir que quinze à vingt centimètres d'épaisseur. Poussant plus loin nos investigations, nous reconnümes encore qu’elle était précédée ou recouverte d’une couche compacte de sable blanc grisàtre, fortement agglutiné, identique à deux gros blocs recueillis à Bors- beek, lesquels renferment des vertèbres de cétacés. Ces deux blocs sont de forts beaux spécimens géologiques que nous ferons parvenir au Musée royal de Bruxelles. Cest, comme l’on sait, au-dessous de la couche à térébratules que se trouve la couche si compacte des pectoncles du CTag noir. Si à l’ensemble de ces observations nous réunissons les différents documents que nous possédons aujourd’hui sur l'étendue de la mer Scaldisienne en Belgique, il ne faut plus s'étonner que la térébratule découverte dans les grès ferrugineux des environs de Kesseloo, près de Louvain, par notre savant confrère, M. Van Beneden, se rapporte à l'espèce qui nous occupe, et confirme l’opinion que nous avions déjà exprimée en 1845, que tous les moules de coquilles fossiles recueillis aux environs de Kesseloo ap- partiennent à l’époque scaldisienne. N'ayant encore bien pu déterminer l’horizon géologique de la couche à polypiers et à bryozoaires, nous espérons y parvenir sous peu et acquérir la certitude qu’elle occupe, comme près de Kesseloo, où malheureusement nous n’avons pu, M. Lyell et moi, recueillir, en 1851 , que quelques moules de polypiers que nous rapporlàmes avec doute (626 ) | au genre Turbinolia (1), un horizon plus bas que celui de la térébratule en question, qui se rencontre aussi en An- gleterre dans le crag rouge et corallien, à Rahmsholt et Sutton ; en France, à Saint-Georges de Bohon, près de Carenton en Normandie; à la Grésille près de Doué, Bou- grié et Layon. Je saisis encore, messieurs, cette occasion pour vous informer que je viens de recevoir du fort de Borsbeek, où je me suis rendu mercredi dernier, le rostre fossile d’un cétacé, probablement du genre Dioplodon (Van Beneden), et que je viens de faire expédier au Musée royal d'histoire naturelle de Bruxelles : Ce rostre est identique avec le moule du Choneziphius planirostris que M. Van Beneden a bien voulu offrir à la Société paléontologique d'Anvers. J'ai aussi appris qu’un second rostre, identique avec le Dioplodon Hemixemii a été recueilli à l’un des autres forts; et pour ma part, je viens de trouver au fort de Wommel- ghem un fragment de dent que je suppose appartenir à un genre de cétacé avoisinant les Xiphius, lequel mesure plus de dix-neuf centimètres de longueur sur au moins six de largeur. Son alvéole devait aussi mesurer plus de sept centimètres. M. Du Bus étant venu me voir ce matin, je lui ai remis cette pièce, qui sera probablement mise demain sous les yeux de l’Académie. (1) Lyell, On the terliary strata of Belgium and French Flandres, p. 294 In-8°, 1852. M ak J (627) Observations sur les effets de la chaleur dans les siphons renversés à trois branches, qui fonctionnent à Bardo- mèche, au mont Cénis et du côté de Modane; par M. le marquis Anatole de Caligny, de Versailles. M. le général Poncelet a fait remarquer, dans la séance de l’Académie des sciences de Paris du 49 janvier 1857, que divers phénomènes, tels que la chaleur, Pélectricité, jouent, dans les effets de la percussion, un rôle néces- saire, jusqu'ici encore fort mal apprécié et défini. (Voir les Comptes rendus, t. XLIV, p. 86.) | Il se présente une belle occasion d'étudier ces effets sur une grande échelle au mont Cénis, quant à l’action des colonnes liquides en mouvement sur l'air qu’elles com- priment, dans les siphons renversés à trois branches qui fonctionnent depuis quelque temps dans cette localité. Les résultats publiés jusqu’à ce jour, sans être sufi- sants pour éclairer complétement la question, me ser- viront du moins à bien exposer ma pensée sur la manière de contrôler ces observations au moyen d'expériences de physique connues, et de contrôler, en même temps, ces dernières au moyen de ces résultats. Si l'effet utile en air comprimé au moyen d’une chute d’eau est mesuré, il suffit de connaître la partie du déchet provenant des pertes d’eau, des frottements, en un mot, des effets mécaniques suscepübles d’être plus facilement étudiés et mesurés dans l’état actuel de la science, pour connaître, par voie d'exclusion, là partie du déchet pro- venant des phénomènes moins connus dont il s’agit. Il n’est donc pas absolument indispensable pour cela de ( 628 ) prendre les précautions qui pourraient être difficiles à con- cilier avec les besoins du service. Il ne faut pas, en eflet, dans cette hypothèse, chercher ce que les phénomènes dont il est question deviendraient après un certain temps, mais resserrer, au moins dans certaines limites, la partie du déchet auquel ils donnent lieu. Pour ne considérer ici que les effets de la chaleur sur l'air comprimé, l'essentiel est de mesurer le degré d'échauf- fement de cet air au-dessus de la température de l'air extérieur, dans les tuyaux qui font communiquer chaque machine comprimante avec le grand récipient d'air com- primé. Or, d’après les expériences faites à Saint-Pierre d’Arena , cette observation est facile, et, s’il y a chance d'erreur quant à ce degré d'échauffement, ce sera plutôt en moins qu'en plus. Supposant ce degré d'échauffement connu, et l'effet utile mesuré en air comprimé refroidi à peu près à la tempéra- ture de l'air extérieur, on a déjà une base pour l'étude dont il s’agit, même avant d'avoir déterminé complétement, comme je lai mdiqué ci-dessus, le reste du déchet prove- nant de causes mieux connues. On trouve dans le Traité de physique de l'École pols- technique, par M. Jamin, professeur à cette école, t. HE, 1859, pp. 452 à 440, les résultats de diverses expériences sur la chaleur développée par le travail perdu. On sait que M. Seguin était parvenu à des chiffres analogues à ceux qu'on trouve dans cet ouvrage. (Voir le compte rendu de la séance de l'Académie des sciences du 20 septem- bre 1847.) Une partie des expériences rapportées par M. Jamin, avant précisement été faites avec de l'air comprime, il est intéressant de voir à quel déchet on serait conduit en cher- Si … « ( 629 ) chant à les appliquer, sans prendre d’ailleurs aucun parti relativement à la question générale rappelée dans ce cha- pitre de son ouvrage et sur laquelle les académies ne se sont pas, je crois, encore prononcées. Le rapport imtitulé : Relazioni techniche iniorno al per- foramento delle Alpi, renferme précisément des observa- tions faites sur l’échauffement de l'air sur le tuyau; dans ce travail il sera facile d’étudier d’une manière plus com- plète, au mont Cénis, ce phénomène dont j'ai parlé déjà ci-dessus. Si l’on appliquait à ces observations les résul- {ais précités, en tenant compte des différences des capa- cités calorifiques de l'air et de l’eau, on trouverait que la quantité de travail absorbé par la production de cha- leur, observée dans l'air comprimé à une tension de six atmosphères, ne paraîtrait pas différer beaucoup du quart du travail théoriquement nécessaire pour comprimer, à cette tension, l’air extérieur et le faire entrer dans le récipient. Sans attacher d’ailleurs beaucoup d'importance à ce chiffre , 1l était utile de le présenter provisoirement comme un moyen de préciser ma pensée. La commission qui a fait le rapport précité a mesuré un effet utile d'environ cin- quante pour cent en air comprimé à une tension de six atmosphères; mais elle à mesuré aussi des causes de déchet faciles à éviter, et elle a conclu que l’effet utile définitif devait être au moins de soixante pour cent du travail dé- pensé par la chute d’eau motrice. J'ai remarqué que, dans ces premieres expériences, faites à Saint-Pierre d’Arena, on n’avait pas utilisé, comme on peut le faire au moyen d’une oscillation descendante, le travail disponible de la colonne d’eau qui doit sorür à chaque période, après avoir comprimé et refoulé l'air. 2€ SÉRIE, TOME XI. 44 ( 630 ) Si, d’après cela, on porte l'effet utile à au moins soixante- quatre pour cent en nombre rond, d’après l’hypothèse ei- dessus, seize pour cent seront absorbés par la produetion de chaleur dans l'air comprimé. Il restera vingt pour cent pour expliquer le reste du déchet, ce qui ne paraît pas devoir s'éloigner beaucoup de la vérité, même en tenant compte de quelques défauts d'exécution que je soumettrai plus tard à l’Académie. Mais il y à un point intéressant sur lequel la commis- sion ne s’est pas suffisamment expliquée. L'effet utile étant mesuré en volume d’air comprimé à une tension de six atmosphères, ce volume est-il, en air échauffé ou refroidi, à peu près à la température de l'air extérieur ? Les précautions mêmes que l’on à prises pour mesurer l’échauffement de l’air dans le tuyau de communication dont j'ai parlé, en entourant ce tuyau de draps en plu- sieurs doubles, montrent que l'air comprimé dans le réci- pient ne devait pas déjà être à une température aussi élevée que dans ce tuyau. Mais il y a heureusement un fait, qui avait été pris pour une anomalie provenant sur- tout, à ce qu’on croyait, de ce qu’il était plus sûr de faire les lectures sur le tube indicateur quand l’appareil était à l’état de repos, avant et après les expériences. Ce fait semble permettre de fixer les idées. Dans deux expériences faites entre ces deux états de repos, on à remarqué, en divisant l’expérience en quatre séries d'observations, que, dans la dernière série, le vo- lume d’air comprimé, à chaque période de: la machine, était notablement moindre que dans les trois premières. Aussi la commission {pages 48 et 49 du rapport précité) calculant successivement l'effet utile au moyen des trois premières observations, à partir de l’état de repos, et au ( 631 ) moyen des quatre observations entre les deux états de repos , a trouvé pour le premier cas un effet utile plus grand que pour le second; elle s’y est arrêtée par pru- dence, mais sans donner la raison suivante et sans pa- raître attacher beaucoup d'importance à des questions relatives à la chaleur. Il à fallu attendre un certain temps pour que l’appareil füt revenu à l’état de repos. L'air comprimé a donc eu du temps pour se refroidir. D'ailleurs la commission ne serait probablement point partie avant*de s'être aperçue d’un changement, s’il avait pu se manifester encore quelque mouvement, par suite du refroidissement qui aurait dû précisément occasionner des mouvements dans le tube indicateur, si ce refroidissement n’avait pas encore été stable. Il n’est donc pas étonnant que, par suite du refroidisse- ment, le volume d’air comprimé ait été sensiblement di- minué; de plus, comme cet effet s’est présenté dans le même sens pour deux expériences consécutives, faites l’une et l’autre entre les deux états de repos, c’est-à-dire pour chaque expérience la machine partant du repos et y reve- nant, cette remarque ne doit point porter sur une simple anomalie. D'ailleurs il y a une différence de plus d’un cin- quième, d’après les calculs de la commission , entre le volume d’air comprimé pendant la période de la machine dans chaque avant-dernière série d'observation et dans chaque dernière série, ce qui ne peut guère provenir en entier d’une faute d'observation. Il résulte de ce qui précède que les observations faites à Saint-Pierre d’Arena semblent mieux faites que la com- mission dont il s’agit ne le croyait elle-même, d’autant plus qu’en essayant d’y appliquer le calcul au moyen des expé- (632) riences de M. Regnault, sur les effets de la dilatation de l'air et sur ceux de la vapeur d’eau mêlée avec de l'air, on est conduit à un résultat satisfaisant, qui tend à confirmer l'explication ci-dessus, d’une prétendue anomalie par un refroidissement convenable, relativement à l'air extérieur. En résumé, ces expériences semblent venir à l'appui des résultats précités, recueillis dans le Traité de physique de M. Jamin. Mais si l'effet utile était assez notablement plus grand ; si, par exemple, il était de soixante et douze pour cent, on trouverait qu'il ne resterait que dix pour cent, afin d'expliquer les autres causes de déchet; et comme ce serait probablement trop peu, il en résulterait qu’on devrait probablement diminuer le chiffre admis par hypo- thèse pour expliquer la partie du déchet provenant de la production de chaleur. D’après un journal allemand du 21 février dernier, l'effet utile serait aujourd'hui d'au moins soixante et dix pour cent en air comprimé disponible, mais seulement à cinq atmosphères. Les températures n'étant pas indiquées , 1l est difficile d’en tirer des conséquences sur l'objet de cette note. On sait que, dans le bélier hydraulique, le déchet aug- mente, toutes choses égales d’ailleurs, avec les hauteurs de versement; les considérations précédentes paraissent en indiquer une des causes. Dans mon Mémoire sur les oscillations de l’eau dans les tuyaux de conduite, couronné par l’Académie des sciences de l'Institut de Mance, j'ai étudié, par l'expérience et le calcul , la quantité dont on pourrait varier le diamètre de la partie du tuyau où l’eau monte alternativement, sans: trop diminuer l'effet utile. Mais comme or ne sait pas selon quelle loi un élargissement, en diminuant les vitesses (655) d’ascension, diminuerait la production de chaleur, si le travail perdu par cette production est encore moindre que d’après l'hypothèse ci-dessus, ce sera une raison de plus pour penser qu’on à judicieusement agi en conservant, au moins dans les premières constructions, une section con- stante, comme je l'ai fait autant que possible dans mes divers appareils à colonnes liquides oscillantes. On voit, du reste, d’après cela, comment cette question de phy- sique peut jeter du jour, même sur les proportions d’une partie de la machine. Note sur l’invention et la disposition des vannes cylfn- driques dans les siphons renversés à trois branches qui fonctionnent à Bardonèche; par le même. Le tube où l’eau s'élève alternativement dans ce système en, comprimant l’air, est mis chaque fois en communica- tion avec celui qui amène l’eau du réservoir d’amont, et celui qui la verse au bief d’aval par une oscillation des- cendante dans la troisième branche du siphon renversé, plongée au-dessous du niveau de ce bief. Dans les appa- reils de ce genre, les communications alternatives peu- vent être établies de diverses manières. J'en ai exécuté plusieurs , et j’ai recommandé en général, l’emploi des tuyaux-soupapes dans les circonstances où cela se peut. (Voir l'extrait du procès-verbal de la séance de la Société Philomatique de Paris, du 1* décembre 1849, dans le journal l’Institut). Mais si les ingénieurs sardes ont fait un choix judicieux parmi ces moyens, en employant les fuyaux-soupapes ou (634) vannes cylindriques, je dois faire diverses observations sur quelques détails intéressants. Je ne m'étais pas prononcé dans mes mémoires sur le choix à faire entre les vannes cylindriques et les soupapes annulaires ou de Cornwall. Le choix entre ces tuyaux- soupapes ne pouvait être indiqué que par l'expérience, pour les grandes chutes. Les ingénieurs sardes, après avoir, à ce qu'il paraît, essayé les soupapes de Cornwall, ont adopté les vannes cylindriques. Si un long usage con- firme leur choix, il y aura lieu d'examiner si un système plus analogue à la combinaison du tiroir et de la vanne cylindrique, sur lequel, en 1857, j'ai répété des expé- riences très-régulières à l'École des mines de Paris, en présence d’une commission de l’Institut de France, ne sera pas, en définitive, ce qu'il y a de plus simple, avec quel- ques légères modifications. Les trois orifices fonetionnaiïent au moyen d’une seule pièce mobile, mise en jeu par un sys- tème de déclics automatiques à flotteur, tandis que les in- génieurs sardes emploient pour faire mouvoir deux vannes cylindriques une petite machine à air comprimé agissant sur des cames. Mais le but de cette note est surtout de montrer com- ment on peut tirer le parti possible de ce qui est déjà fait au mont Cénis. Je crois utile de formuler plus spéciale- ment, à cette occasion, une propriété des surfaces con- centriques, analogues à des pavillons de trompette rentrant les uns dans les autres, autour d’un cône central à généra- trice curviligne, que j'ai eu l'honneur de communiquer à l’Académie des sciences de Paris, et dont la description est dans les Comptes rendus, tome XLI, page 328. Ce système permettant de diminuer considérablement la résistance de l’eau dans l’espèce de coude annulaire résultant de la dis- ( 635 ) position d’une vanne cylindrique, à l’intérieur d’un tuyau dont on doit alternativement boucher la section transver- sale, il en résulte qu’on peut diminuer beaucoup la course ou levée de cette vanne, sans augmenter la résistance plus qu’on ne le ferait, si l’on se croyait obligé de conserver une levée assez grande pour donner de plus grands rayons aux courbures destinées à diminuer cette résistance. On peut diminuer ainsi cette levée d'environ la moitié, et lon pourrait probablement la diminuer davantage en employant plus de trois surfaces concentriques entre les parois existantes, parce qu'il paraït qu'il existe au mont Cénis des eaux de sources qui ne gèlent jamais et qui ne charrient point d'herbes, etc. Pour bien expliquer ma pensée, je dois dire que Îles ingénieurs sardes qui n’ont pas encore employé ces sur- faces concentriques, ont du moins employé le cône à gé- nératrice curviligne concave qui doit être disposé au centre. Le rayon de courbure de cette génératrice est ce qu’il doit être pour offrir une résistance parfaitement analogue, au- tant qu’on peut le calculer, à celle que l’eau éprouverait dans un tuyau coudé ordinaire, dont le rayon de courbure extérieure serait égal au double de son diamètre, si le rayon intérieur du coude était égal à ce diamètre. Je ferai observer que, dans ces conditions, je n’ai pas trouvé de différence assez sensible dans la résistance de l’eau en y introduisant trois lames concentriques fixes, pour conseiller l'addition de ces surfaces dans cette pièce, telle qu’elle est fondue. Mais je dois faire remarquer que si l’on avait diminué de moitié l’ouverture de la vanne, de manière à lui donner seulement une section égale à celle du tuyau, on aurait pu compter à peu près sur la même résistance de l’eau, au moyen de trois surfaces concentriques dont ( 636 ) | j'ai parlé , et, par conséquent, on aurait eu plus de facilité pour faire fonctionner cette vanne très-vite, le centre des rayons de courbure des génératrices de ces surfaces étant sur la paroi du tuyau ordinaire. On va voir qu’il est encore possible de faire cette modi- fication à la vanne cylindrique d’évaeuation de l’eau. Mais il est intéressant d’abord de signaler l’espèce de poupe, et l'écoulement par un bout de tuyau annulaire, qui se pré- sentent pour la précédente; parce qu’il n’y aura pas lieu de s’en occuper pour celle-ci. Le disque horizontal sur lequel est établi le eône.précité porte, à Bardonèche, sur sa face inférieure, une sorte de poupe, formée d’un cône plus allongé dont la génératrice est à double courbure, afin que le bout de tuyau annulaire qui l'enveloppe puisse conserver une forme convenable avec une section constante. La pièce centrale formée de ces deux cônes opposés par la base étant fixe, rien n’a em- pêché de conserver ainsi la section d'écoulement constante sans flexion brusque. Le mode d'écoulement est d’ailleurs du même genre que celui que rai employé pour un tuyau de quarante centimètres de diamètre, dans mes expé- riences, faites en 1842 et 1843, sur le moteur hydraulique à flotteur oscillant, qui ont été l’objet d’un rapport favo- rable présenté à l’Institut et rédigé par M. Lamé, tant en son nom qu'en celui de MM. Cordier et Poncelet, le 7 octobre . 1844. Dans ce système le flotteur était alternativement fixé au haut de sa courbe et présentait précisément à l’eau, sor- tant du bief supérieur par la vanne cylindrique, un tuyau annulaire d'écoulement, formé de l’intervalle restant entre ses parois et celles du tuyau toujours fixe de l'appareil. La partie mférieure du flotteur en repos pendant cet écoule- ment présentait aussi précisément une poupe conique. ( 637 ) Je passe maintenant à la vanne cylindrique d’évacua- üon , telle qu’elle est construite au mont Cénis. Elle se lève dans l’intérieur d’une sorte de chapeau de fonte qui la recouvre, et qui est composé d’un bout de tuyau ouvert au bas et fermé par le sommet, au travers duquel passe la tige destiné à la faire fonctionner. Il est évident qu'il y à une cause de perte de force vive résultant de la liberté laissée à l’eau dans cette pièce, et qu’on aurait pu l’éviter en dispo- sant un cône analogue à celui de la vanne d'admission , mais en renversant ce cône, parce que l’écoulement au bief d’aval se fait au sommet d’un bout de tuyau vertical plongé dans l’eau de ce bief. Il paraît d’ailleurs qu’on a ménagé les moyens d'établir ultérieurement ce cône; de sorte que c'est une raison de plus pour signaler l’habileté des sur- faces concentriques qui pourront être disposées autour de lui sans nuire aux mouvements de la vanne cylindrique. Voier en quoi consisterait l'avantage de pouvoir ouvrir très-vite cette vanne. Quand la colonne comprimante et refoulante à produit son effet sur l'air dans la chambre de compression, elle descend suivie par l'air extérieur entrant au-dessus d'elle par des soupapes à air. Or, ces soupapes peuvent être disposées de façon à ne point permettre à cet air de ressortir, à moins d'entrer dans le récipient où la tension doit être d'environ six atmosphères. Par consé- quent, si la vanne d'évacuation de l’eau ne se referme pas aussi vite qu'on pourrait le désirer, l’eau sortie au bief d’aval pourra, il est vrai, rentrer en partie dans la branche de décharge; mais sa courbe y sera limitée par la résis- tance de l’air contenu dans la chambre de compression, produisant alors, jusqu’à un certain point, un effet analogue à celui d’une cloche à plongeur ; et même le commence- ment de compression de l’air qui en résultera ne sera point ( 638 ) perdu pour l'effet qu'on veut produire. On conçoit que si la vanne dont il s’agit tardait trop à se fermer, il pourrait en résulter des oscillations secondaires dont 1l serait facile de se rendre compte. Mais ce qui précède suffit pour mon- trer que, si la hauteur de la chambre de compression ne dépasse pas certaines limites relativement à la pression atmosphérique, il est évident que, sans l'addition d'aucun clapet de retenue, le ressort de l'air offrira un moven d'avoir le temps de fermer la vanne d'évacuation ; de sorte qu'il sera, en définitive, plus intéressant d'étudier les moyens de la faire ouvrir vite que de la faire fermer vite. Les modifications à faire pour cela sont trop faciles pour qu'il soit nécessaire d’entrer ici dans ces détails. Sans doute l’oscillation de vidange serait plus utile à étudier si les chutes motrices étaient moins grandes qu'à Bardonèche. Si donc elle a été un peu trop négligée, selon moi, si même il y a quelque difficulté à l’étudier complé- tement dans cette localité, à cause du peu de longueur donnée à la troisième branche du siphon renversé, les résultats déjà obtenus n’en paraissent pas moms assez In- téressants pour être signalés à l’Académie royale des sciences, qui y verra, j'espère, une nouvelle preuve de l’uti- lité des principes que l'Institut de France m'a fait l'honneur de couronner le 30 décembre 1839, dont il a depuis ap- prouvé plusieurs conséquences, et que le gouvernement sarde a honoré d’une grande médaille d’or, il y a plus de seize ans, le 51 juillet 1844. Dans les expériences que je fis au Jardin des plantes, en 1838 et 1839, l’orifice d'introduction et celui d'évacua- tion étaient entr'ouverts en même temps, pendant un in- stant très-court. Cela est sans inconvénient quand les tuyaux d'arrivée et d'évacuation sont très-longs par rap- ( 639 ) port à la chute motrice; mais s'ils sont aussi courts qu’à Bardonèche, il est prudent de ne pas trop compter sur linertie des colônnes liquides pour avoir le temps de faire convenablement fonctionner ces orifices. J'avais eu égard à cette dernière circonstance dans les expériences répétées, en 1837, à l'École des mines de Paris, devant une com- mission de l’Institut de France. Le tiroir-vanne cylindrique précité était un bout de tuyau fermé par le fond, ouvert par le sommet, et percé d’un orifice latéral qui venait suc- cessivement se poser devant les tuyaux d'arrivée et de décharge, disposé horizontalement l’un au-dessus de l'autre, perpendiculairement à ce tiroir disposé dans le bas d’un tuyau où l’eau montait alternativement. Or ces deux tuyaux horizontaux ne communiquaient jamais en- semble, parce qu'ils étaient à une distance l’un de l’autre plus grande que leur diamètre. Les pressions de l’eau sur le fond du tiroir étaient combinées avec un contre-poids suspendu à une poulie à axe fixe, de manière à faire fonc- tionner cette pièce quand elle était lâchée aux instants convenables par un déclic à flotteur. Il est d’ailleurs d'autant plus intéressant de rappeler que les pressions latérales de l’eau étaient contre-balancées au moyen de la circulation tout autour de cette pièce, c’est-à-dire dans une retraite annulaire, qu'à l'exemple de cet appareil, on a depuis appliqué le même système de circulation dans une retraite annulaire pour la vapeur, dans une machine à vapeur signalée par la Société d'encouragement pour l’in- dustrie française, dans son bulletin de 1858, plus de vingt ans aprés. ( 640 ) Suite des observations de la lumière zodiacale faites, à Münster (Westphalie), par M. le professeur Heis (1). Avril 7, 1860. La lumière zodiacale est très-faible. Bord supérieur : 500-400, 4004400, 6004360. Sommet : 820+ 240 Bord inférieur : 800-220, 700418, G0o4+150, D00 + 120 » : 5 RQ La lumière zodiacale est très-faible; on l’apercçoit jusqu’à 10 h. put TES) = La lumière zodiacale est très-faible et diffuse; on l'observe jusqu’à 114 h. Mai 44, » 102h. On observe des traces de la lumière dans les constellations des Gemeaux, du Lion et de l'Écrevisse. Janvier 1, 1861. La lumière zodiacale n’est pas très-distincte, malgré un ciel très-clair. Bord supérieur : 35000 — 5°, 3100 — 26°, 3200— 10, 5500 + O0, 5400 + Oo, Sommet : 5470 — 00,5 | Bord inférieur : 5459 — 100, 540° — 16°, 3300 — 9230, » Dit D (Température de l'air : — 20°,0C.). Bord supé- rieur : 3100+ 100, 32004100, 3300+ 905, 3400 +90, 3500 + 80, Sommet : 59590 + 5°. Bord inférieur : 5500— 40, 53400—119, 53300—-1 70, 5330 — 200, 35100 — 2% » + PAL 9h, (Température : -— 220,0C.). Le ciel est très- clair. Bord supérieur : 550048, 34004100, 5500+ 12%,5, 04145, 100415. Sommet : 210 + 149. ; Bord inférieur : 10°+-4°, O°—4%49, 3500—100, (1) Voyez les Bulletins de l'Académie , 2me série , t, IX, p. 559 (1860). Février Mars Avril D) 2, 1861. 10, 9, 12, » (641) Bord supérieur : 350° + 1305, 3540°+ 13°, 5500415, 0°+150, 1004125, 2004110. Sommet : 24° + 80,5. Bord inférieur : 200+2°,5, 100—7°, O0—1105, 330° — 16°. La lumière zodiacale est très-claire. Bord supérieur : 54004159, 0°+18°, 100-920, 2004210, 500421, 400 +18. Sommet : 44° + 170 Bord inférieur : 40° + 15°, 3045, 20°—5o, 10°—100. Bord supérieur : 0o+350°, 10°+500, 20°+29p, 900428, 40°+270, 50°+ 260 Sommet : 58° + 242. Bord inférieur : 50°+18°, 40°+10°, 350043, 200 — 50. . Bord supérieur : 04-280, 20°+ 29, 40458, 500 + 50°, 60° + 53500. Sommet : 68° + 28°. Bord inférieur : 6004-12, 500410, 40°+5, 50020, 20010, 10°— 4e. La lumière zodiacale est très-diffuse. La lumiere zodiacale est très-claire. Bord supérieur : 50°+400, 50°+358, 6G0°-+56, 10°+ 55°, 80° + 5300 Sommet : 90° + 13°. Bord inférieur : 80°+ 100, 70°+70, 60° + 4, D00 + 07, 400— 5, 8h,pms, La lumière zodiacale est très-claire. Bord supérieur : 10°+400, 50°+42, 50°+40, G0 + 57°, 7004352, 80° + 290, Sommet : 90° + 25°. Bord inférieur : 800190, 700+16° G0:+120, 900 + Oo. ( 64 ) Observations des éloiles filantes périodiques du mois d'aout et du mois de novembre 1860, faites en Allemagne et recueillies par M. le professeur Heis, de Münster (). + MOIS D'AOÛT, Grandeur TEMPS. NOMBRE. —{ Trainée, ire, | qme, | jme. Licatrensere, près de Berlin. (1 observateur.) D'om: N nr Juillet 17. 10 45-12 0 5) » 2 2 » RS | 10 50-12 0 11 » » 11 1 no “90 10 0-11 0 7 » d 2 UM 5 9 45-11 0 11 » 4 7 1 Aoùt 8, 9 0-9 50 d 1 2 » 1 » 9 9 0-10 45 20 d 6 9 5) RE à 9 0-10 50 10 4 d 9 À Dune TE 9 0-10 0 6 » D 1 1 HN À 9 0-10 0 7 1 d 9 » Naüearp. (1 observateur.) Août 8 9143-40 50 | 41 | 1 | 1 | 9 | 1 » o. 9 10-10 38 15 1 d A ( Drespe. (4 observateurs.) BA bUANNAS Abnd-H sd VAE | Elus | 7 | DRE É 9 58-10 56 14 D 5 PraGuE. (1 observateur.) M im. .17,92 — _. Hi — 06 1,75 1,98 104 — — Ag, = 216 62,45 _ = » 62,19 62,00 0,—= 64 18,50 = EEE = 346 100,00 Les faits qui précèdent établissent : 1° qué l'acide ita- conique se combine directement au brome, comme le fait l'acide fumarique; 2° qu'il se combine directement à l’hy- drogène naissant pour donner un acide homologue de Vacide succinique. Ils démontrent de plus que cet acide est identique avec l’acide pyrotartrique préparé par la dis- tillation de l'acide tartrique. L’acide bromé, obtenu par l'addition du brome à l’acide itaconique , est donc un dérivé de substitution de l’acide pyrotartrique : c’est l’acide pyro- tartrique bibromé. En présence d’une analogie tellement parfaite, il n’y a plus de doute que l’acide itaconique ne soit véritablement homologue de l'acide fumarique, et l’acide pyrotartrique l’homologue de l’acide sucemique. Je me suis dispensé, dans la description des corps que ( 672 ) je viens d'étudier, d'exprimer leurs relations génériques par des formules typiques. On sait, en effet, que ces for- mules sont spécialement destinées à représenter le double échange, qui, d’après Gerhardt, était la seule réaction chi- mique possible. Il ne m'a donc pas paru hors de propos de tirer des faits d’addition que je viens de décrire quelques déduetions théoriques sur ces phénomènes. L’acide fumarique se combine, comme je l’a montré dans ma note précédente, par addition à l’hydrogène, ou, pour s'exprimer plus correctement, 1l se combine au so- dium pour donner le suceinate de soude, qui ensuite échange le métal contre l'hydrogène en produisant de l’acide succinique. L’acide fumarique se comporte donc, dans cette réaction, comme un radical dans le sens de la théorie des hydracides : Acide fumarique. Succinate sodique. Acide succinique. €, H, ©, €, H, ©. Na, €, H, 6.4. H D'un autre côté, l'acide famarique se combine directe- ment et par addition au brome. Le produit est identique avec l'acide bibromo-succinique, dérivé par substitution de l'acide succinique. Il se comporte, dans de certaines limites, comme l'acide normal; mais dans d’autres circon- stances, il élimine le brome, en l’échangeant contre le groupe H4#- de l’eau, et en produisant de l'acide tartrique. Dans ces réactions, l'acide fumarique joue done le rôle d’un radical dans le sens de la théorie des radicaux pro- prement dits et dans le sens de la théorie des types. ruse (675) Acide fumarique. Acide succinique bibromé. Acide tartrique. V7 24 Ge LLA Les mêmes remarques s'appliquent à lacide itaconique et à sa transformation en acide pyrotartrique et acide py- rotartrique bibromé. L'ensemble de ces réactions permet d'établir un parallèle entre l'acide fumarique et ses dérivés, d’un côté, et les dérivés du gaz oléfiant de l’autre : Éihylène, : : . . CH; €, H,6, ac, fumarique. Hydrure d’éthyle. . 6, H, . H,; C, H, 6, H, ac. succinique. H, . Br,; G, H, 6, Br, ac. bibromo-succiniq. Bromure d’éthylène. C, Glycol . : DOME CE de G, H, De H, H +, ac. tartrique. 4 Mais 1l existe entre les termes correspondants des deux séries une différence notable dont les formules ne tien- nent aucun compte. Cette différence se voit déjà pour le premier terme; elle consiste en ce que le gaz oléfiant se comporte comme un groupe unique d’atomes, tandis que l'acide fumarique élimine facilement la moitié de son oxy- sène et de son hydrogène, de manière que l’on doit le re- présenter par la formule : c, H, 0] He 19 Si l’on cherche des formules rationnelies qui permettent de représenter tous les liens de parenté rattachant l'acide fumarique, succinique, malique et tartrique, on trouve des difficultés considérables. J'ai essayé de faire ressortir ces liens de parenté dans le tableau suivant : Ac. fumarique. €, H, ; à ; Mt H, 6 H ; € ‘lo, cn, ain 2 2 Fe L L 15 | H Ac. succinique. Ç,H,4, €,H,6:, v, G, H, 6, 2 are ) H, 0: 4 H, 7 H, H, ï 6. : . 111 1, \ H IV ( H Ac. malique .G,H, 4 6G,H,6, 9 6, H, 6, GC; He 0 H, 3 H}# H; 9; Ac. lartrique . C,H, 6, €, H, 6, €, H, #6, €, H, 6, * 21e, je} ©: ne} 9% Aux formules brutes dela première colonne on a ajouté, dans la deuxième, les formules typiques actuellement en usage. Ces formules, tout en exprimant les fonctions prin- cipales des corps qu’elles représentent , donnent encore les relations des trois derniers acides, mais elles placent l’acide fumarique en dehors de la série. Pour exprimer la trans- formation de cet acide en acide succinique, etc., on devrait représenter les quatre corps par des formules dans le genre de la troisième colonne. Mais, dans ces formules, on devrait introduire encore la formule rationnelle de l’acide fuma- rique lui-même , et on arriverait ainsi à un système d’em- + boitement qui, pour l’acide tartrique, par exemple, con- duirait à la formule suivante : nées : n. | ; Lo H, } Le Les mêmes relations pourraient encore être exprimées par les formules de la quatrième colonne, qui admettent pour tous ces corps le même radical. On ne contestera pas que ces formules expriment, dans le langage de la théorie des types, les relations que pré- sentent les corps en question , mais on ne peut pas se dis- SENTE ({ 67 } simuler non plus qu’elles ne possèdent ni la netteté ni la clarté qui caractérisent en général les formules typiques : on en comprend d’ailleurs la raison. La notation de nos formules est une affaire de conven- tion. La plupart des chimistes sont convenus de se servir de la notation typique , excepté toutefois quelques-uns qui, par des raisons quelconques, préfèrent de représenter les mêmes idées par une forme différente, Quand de nouveaux faits sont découverts, il suffit de leur appliquer les prin- cipes de la notation en usage, pouxavoir des formules qui résument ces faits. Mais il peut arriver qu’un fait nouveau se trouve en dehors de la limite des cas prévus par le prin- cipe théorique qui sert de base à cette notation : c’est alors qu’elle ne s'applique pas d’une manière naturelle aux faits. L’addition de l'hydrogène et du brome à l'acide fumarique et itaconique est dans ce cas. Certes, on trouvera toujours plus avantageux de résu- mer les propriétés et les relations des corps par de courtes formules symboliques que de les énumérer par de longues descriptions. Cependant on devrait se rappeler non-seule- ment que les formules ne font qu’exprimer les idées sans pouvoir y suppléer, mais encore qu’il peut arriver des cas où, par la nature même du principe qui leur sert de base, elles ne sauraient être qu’une expression incomplète des faits qu'elles doivent représenter. Aussi ne sera-t-1l pas hors de propos de résumer encore une fois les idées qui, dans mon opinion, doivent trouver leur expression dans la notation des formules. Quand une substance organique contient de l'oxygène, lié au groupe du carbone par une seule des deux unités d'attraction que possède son atome, cet oxygène se sépare plus facilement de ce groupe que celui qui se trouve combiné au carbone ( 676 ) par ses deux afüinités. D'autre part, l'hydrogène d’une mo- lécule organique , qui n’est en relation avec le carbone que d’une manière indirecte, se sépare et se remplace plus fa- cilement que les autres atomes d'hydrogène directement combinés au carbone. Du reste, la nature de cet hydro- gène combiné médiatement, ou plutôt la nature de la place qu'il occupe, dépend de la nature des éléments qui l'entourent. Il est remplacé facilement par les métaux, quand il se trouve près de deux atomes d'oxygène; 1l ne possède pas cette propriété quand il n’y a qu’un seul atome d'oxygène dans le voisinage. Les mêmes idées théoriques sur l’atomicité du carbone et sur la saturation relative et quelquefois incomplète des affinités des atomes qui constituent la molécule, etc., nous expliquent encore pourquoi c’est précisément l'acide fu- marique et itaconique, ainsi que d’autres corps de consti- tution analogue, qui possède la propriété de se combiner par addition. En terminant cette note, je dois encore attirer l’atten- üon sur un fait d’un ordre différent. On vient de voir que l'acide fumarique et taconique se combinent au brome par addition et que l’on n'obtient pas de produit de substitu- tion de ces acides. De tels produits se forment cependant, comme j'aurai l’occasion de le montrer dans une pro- chaine note, par la décomposition de quelques dérivés des acides obtenus par addition. Mais on obtient encore des produits de substitution quand on fait réagir le brome sur les anhydrides qui se forment dans la distillation de l'acide fumarique et itaconique. C’est ainsi que j'ai préparé l’anhydride citraconique mo- nobromé, en faisant réagir à 140° le brome sur l’anhy- ( 077) dride citraconique. Cette substance est volatile vers 225, solide à la température ordinaire et cristallise de léther ou du sulfure de carbone sous forme de grandes paillettes parfaitement incolores. L’analyse m’a donné les résultats suivants : 0,6824 gr. ont donné : 0.7940 gr. d’acide carbonique, 0,1044 gr. d’eau. 0,4516 — 0.4405 gr. de bromure d'argent. Le calcul exige pour la formule : €, H, Br 6: : CALCULÉ. TROUVÉ. Pr En. 4 G; — 60 91,41 51,72 = 1,57 1,70 Pr St 41,89 41,91 0— 48 25,15 _— 191 100,00 00 - 9e SÉRIE, TOME xI. 47 (678 ) CLASSE DES LETTRES. Em Séance du 5 juin 1861. M. pe Ram, directeur. M. An. QueTELer, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. Gachard, David, Leclercq, Baguet, Faider, Arendt, Ducpetiaux, Kervyn de Lettenhove, Cha- lon, membres; Th. Juste, Wauters, correspondants. MM. Alvin et Éd. Fétis, membres de la classe des beaux- arts, assistent à la séance. CORRESPONDANCE. Il est donné connaissance du décès de M. Lelewel, as- socié de l’Académie, mort à Paris, à la fin de mai 1861. — M. le Ministre de l’intérieur fait connaître qu'il a reçu du jury chargé de décerner le prix quinquennal des sciences morales et politiques, deux propositions sur les- quelles il désire connaître l’avis de l’Académie. La demande est renvoyée à l'examen d’une commission mixte qui sera composée de trois membres de la classe des lettres et de trois membres que la classe des seiences sera invitée a vouloir bien désigner. Les membres élus par la classe des lettres sont MM. Gachard, Leclercq et de Ram. (67 ) — M. Bernard de Koene, de Saint-Pétersbourg, et M. Frédéric Windischmann, de Munich, remercient lAca- _démie pour leur nomination d’associé de la classe. — L'Académie royale d'Amsterdam et la Société pro- vinciale d'Utrecht transmettent respectivement le pro- gramme de leur dernier concours. — M. Th. Juste, correspondant de la classe, présente un opuscule imprimé de sa composition sur Catherine de Lalamg, princesse d’Epinoy. — Remerciments. — M. Ad. Quetelet adresse à la classe des remerciments pour la médaille qui lui a été remise dans la séance pu- blique du 15 mai dernier, à l’occasion de la vingt-cin- quième année de ses fonctions de secrétaire perpétuel de l’Académie. M. le directeur répond affectueusement au nom de ses collègues, et demande linsertion au Bulletin des paroles prononcées par le secrétaire perpétuel. Cette insertion est ordonnée. (Voyez la séance de la classe des sciences.) = — COMMUNICATIONS ET LECTURES. as M Gachard fait connaître qu’on a découvert, aux Ar- chives du royaume, dans la collection de l'office fiscal de Brabant, différents papiers concernant le savant Des Ro- ches, qui fut secrétaire perpétuel de l’Académie sous les rè- gnes de Marie-Thérèse et de Joseph IT, et.parmi ces papiers ( 680 ) les quatre registres suivants, dont il est persuadé que M. le Ministre de l'intérieur voudra bien autoriser la restitution aux archives de la compagnie, si elle en fait la demande : 1° Un registre aux recettes et dépenses de l'Académie, de 1778 à 1787; 2° Un registre de comptes de l'imprimerie académique, du 25 octobre 1779 au dernier décembre 1779; 9° Un livre aux débours journaliers pour l'imprimerie académique, du mois d'octobre 1777 au mois de juillet 1780; 4 Un livre de banque, appartenant à l'imprimerie aca- démique, commençant le 5 janvier 1778 et finissant le 17 juin 1780. M. Gachard est remercié pour sa communication bien- veillante. La demande qu'il indique sera faite à M. le Mi- nistre. — M. Kervyn de Lettenhove annonce la publication pro- chaine d’un grand nombre de documents inédits qui ré- pandront la plus vive lumière sur Jacques d’Artevelde et son époque. Il saisit cette occasion pour entretenir la classe de diverses sources historiques qu'il a consultées dans son récent voyage à Paris. PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1862. PREMIÈRE QUESTION. A Faire un mémoire historique et critique sur la vie et les ouvrages d’Aubert Le Mire (Aubertus Miraeus). rh ( 681 ) DEUXIÈME QUESTION. Faire l’histoire du système monétaire établi par les Carlovingiens, jusqu’à la fin du règne de Charlemagne, tant sous le rapport de la valeur des monnaies que sous celui de leurs types. TROISIÈME QUESTION. Faire l’histoire de l’ordre des Templiers en Belgique. QUATRIÈME QUESTION. Faire un exposé historique de l’ancienne constitution brabanconne connue sous le nom de Joyeuse-Entrée, en indiquer les origines et en apprécier les principes. CINQUIÈME QUESTION. Prix D'ÉLOQUENCE FRANÇAISE. — Apprécier Philippe de Commines comme écrivain et comme politique. SIXIÈME QUESTION. Comparer, particulièrement en Belgique, la condition physique, morale et intellectuelle des classes laborieuses sous le régime des corporations et à l’époque actuelle. Le prix pour chacune de ces questions sera une mé- daille d’or de la valeur de six cents francs. Les mémoires devront être écrits lisiblement, rédigés en latin, en fran- çais ou en flamand, et adressés, franes de port, à M. A. Que- telet, secrétaire perpétuel, avant le 1°" février 1862. L'Académie exige la plus grande exactitude dans les citations, et demande, à cet effet, que les auteurs indi- quent les éditions et les pages des livres qu’ils citeront. ( 682 ) On n’admettra que des planches manuserites. Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage ; ils y inscriront seulement une devise, qu'ils répéteront sur un billet cacheté, renfermant leur nom et leur adresse : faute par eux de satisfaire à cette formalité, le prix ne leur sera point accordé. Les ouvrages remis après le temps prescrit ou ceux dont les auteurs se feront connaître, de quelque manière que ce soit, seront exclus du concours. L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que, . dès que les mémoires ont été soumis à son jugement, ils sont déposés dans les archives, comme étant devenus sa propriété. Toutefois, les auteurs peuvent en faire tirer des copies à leurs frais, en s’adressant, à cet effet, au secré- taire perpétuel. CONCOURS EXTRAORDINAIRE POUR 1862. Sur la proposition d'une personne qui désiré garder l’anonyme, la classe des lettres a accepté de juger les mémoires qui lui seront adressés en réponse à la question suivante : Exposer l’origine belge des Carlovingiens. Discuter les faits de leur histoire qui se rattachent à la Belgique Le prix institué pour cette question se compose d’un capital de six mille six cents francs, inscrit au grand-livre de la dette publique à 2 12 p. 1/0, avec la jouissance des intérêts à partir du 1‘ juillet 1856. —————— (683) 7 CONCOURS DE 1863 ET DE 1864. (Prix de Stassart.) ——— Conformément à la volonté du donateur et aux géné- reuses dispositions prises par lui, la classe a ouvert deux concours extraordinaires dont les prix seront décernés en - 1863 et en 1864 : 1° Un prix de six cents francs à donner, en 1863, à l’auteur de la meilleure notice inédite, consacrée à la vie et aux travaux d’un savant belge (1). Les concurrents auront à se conformer, pour cette no- _tice, aux formalités et aux règles ordinairement suivies dans les concours annuels de l’Académie. 2° Un prix de trois mille francs, à l’auteur du meilleur ouvrage traitant l'un des points de notre histoire nationale et publié durant la periode sexennale, ouverle le 1” jan- vier 1858 et close le 1°" janvier 1864. Les dispositions réglementaires adoptées pour les prix quinquennaux fondés par le gouvernement seront , à l’ex- ception de eelles qui concernent la formation du jury, applicables à ce deïnier concours. a ——— (1) Le savant qui fera l’objet de cette notice sera ultérieurement dési- gné par la commission mixte, formée , conformément au vœu du testateur de trois membres de la classe des lettres et de deux de la classe des sciences. ( 684 ) CLASSE DES BEAUX-ARTS, a — Séance du 6 juin 1861. M. Van HAssELrT, vice-directeur. M. An. QUETELET, secrétaire perpétuel. : Sont présents : MM. Alvin, Braemt, Fr. Fétis, G. Geefs , Hanssens, Navez, Jos. Geefs, Érin Corr, Éd. Fétis, De Busscher, Portaels, membres; Calamatta, associé; Balat, Bosselet, correspondants. CORRESPONDANCE. MM. le bourgmestre d'Anvers et les membres de la com- mission organisatrice du Congrès artistique de cette ville invitent l’Académie à assister, par ses délégués, à la réu- nion solennelle qui aura lieu le 19 et le 20 août prochain. « L'Académie royale de Belgique apprécie, comme nous, dit la lettre d'invitation, l’importance du débat que nous avons provoqué. Nous espérons qu’elle voudra bien nous accorder une marque de sa haute approbation en nous envoyant des délégués qui prendront part aux travaux du Congrès et qui contribueront par leurs lumières à l'éclat d’une discussion d’un si grand intérêt pour l’art. » La elasse 2 (68 ) désigne son vice-directeur et son secrétaire perpétuel, ainsi que M. Éd. Fétis, pour la représenter au Congrès. La lettre d'invitation sera communiquée aux deux autres classes, pour qu’elles puissent nommer également leurs représen- tants. — M. le secrétaire perpétuel fait connaître qu’il a pré- senté par erreur un ouvrage sur La symphonie dans la mu- sique des Grecs, à la classe des heaux-arts au lieu de le soumettre à la classe des lettres, comme l’auteur le désirait et l’a fait connaître depuis, il demande, en conséquence, s’il y aurait quelque difficulté à faire la restitution demandée. Un membre fait observer qu'il n'existe à cet égard au- cun obstacle; qu’au contraire, MM. Fr. Fétis et Van Hasselt, désignés comme commissaires pour examiner le mémoire de M. Wageneer sur la symphonie, ont décliné cette mis- sion, par le motif que ce mémoire est en grande partie la critique d’un travail de M. Fétis sur le même sujet, le- quel a été approuvé par la classe, qui en a voté l’impres- sion dans les Mémoires de l’Académie, sur le rapport de MM. Van Hasselt et Baron. La elasse émet collectivement la même opinion. Considérant aussi, qu’il résulte des lettres de M. Wageneer à M. le secrétaire perpétuel de l’Acadé- mie, qu'il demande que son mémoire soit soumis à l’exa- men de la classe des lettres, la classe accepte la récusation de MM. Fétis et Van Hasselt : elle décide, en outre, qu'il n’y à pas lieu de nommer d’autres commissaires dans son sein, et se déclare dessaisie du mémoire de M. Wageneer. — Le 1° juin était le terme fatal pour l'envoi des mé- moires destinés au çoncours de cette année. M. le secré- taire perpétuel fait connaître qu'il ne lui est parvenu aucun travail en réponse aux questions proposées. ( 686 ) La rédaction du programme de concours pour 1862 est remis à l’ordre du jour de la prochaine séance. — M. Ad. Quetelet exprime ses remerciments pour l'hon- neur que lui a fait la classe des beaux-arts, en s’associant aux deux autres classes de l’Académie pour lui offrir une médaille en commémoration de la vingt-cinquième année de son secrétariat. COMMUNICATIONS ET LECTURES. —— Les artistes belges à l'étranger : PaiziPpE ET NicoLas VLEu- GELS; par M. Éd. Fétis, membre de l’Académie. Les deux artistes dont la biographie va suivre ne font point partie de la glorieuse pléiade des maitres flamands. Ce sont de modestes étoiles qui n’ont jeté que de faibles lueurs ; mais leur place n’en est pas moins marquée dans le firmament de l’école nationale, où, pour être juste et faire à chacun la part qui lui revient, il faut admettre jus- qu'aux nébuleuses. On en serait réduit aux renseignements les plus va- gues sur Philippe Vleugels, si Nicolas Vleugels, son fils, n'avait répondu par une lettre très-curieuse à la demande que lui avait adressée Dubois de Saint-Gelais, historiogra- phe de l’ancienne Académie de Paris, à l'effet d'obtenir des matériaux pour l'éloge du peintre.d’Anvers, et si cette lettre ne s’était retrouvée dans la bibliothèque de l’École des beaux-arts, d’où l’ont tirée les éditeurs des Mémoires Ke st en a Éue v5 æ I ( 687 ) inédits sur la vie et les ouvrages des membres de l Acadé- mie royale de peinture et de sculpture, pour l’insérer dans ce recueil. Suivant les indications fournies par Nicolas Vleugels dans la lettre dont il s’agit, Philippe Vleugels, né à An- vers, appartenait à une bonne famille de la bourgeoisie. Sa mère, nommée Catherine Gérard , était alliée d’assez près à Rubens. Le premier renseignement qu’on cherche dans les notes de Nicolas Vleugels, c’est la date de la nais- sance de son père. Il ne l’indique point, par la raison qu’il l’ignore. Tout ce qu’il peut dire, c’est que Philippe arriva à Paris vers l’époque de la mort du cardinal de Richelieu, et qu'il avait alors vingt-deux ans. Si cela était exact, Philippe Vleugels serait né vers 1620 , attendu que Riche- lieu mourut en 1642. Cette indication s’accorderait avec celle que donne Mariette dans ses annotations de l’Abece- dario, où il dit que notre artiste mourut le 22 mars 1694, étant âgé de soixante-quatorze ans. Une communication dont nous sommes redevable à M. Génard, sous-bibliothé- caire à Anvers, nous renseigne positivement sur la date de la naissance de notre artiste, qui fut baptisé à Notre- Dame le 2 juillet 1619. L'acte de baptême nous apprend, en outre, que la mère de Philippe Vleugels s'appelait Geerts et non, pas Gérard, et 1l nous permet enfin de rectifier l'orthographe du nom de nos artistes qu’on écrit générale- ment : Vleughels ou Wleughels. Quoi qu’il en soit, Nicolas Vleugels nous apprend que son père eut deux maïtres : le premier, dont il à oublié le nom, avait étudié, en Italie, auprès de l’Albane et mourut jeune, peu de temps après son retour à Anvers. Le second fut Corneille Schut. I fit des progrès sous la direction de cet excellent artiste; mais ee qui influa surtout favorablement sur le développement ( 688 ) de son talent, c’est que, par des relations de parenté avec Rubens, il obtint l’accès de l'atelier de lillustre maître, où la vue des chefs-d'œuvre qui naissaient chaque jour sous son pinceau magique, lui fournissait les plus précieuses occasions de s’instruire dans la pratique de son art. C'est ainsi qu’il fit un portrait de sa mère, à limitation de celui d’une dame du même âge, que Rubens avait peinte, et réussit de manière à fixer, quoique très-jeune encore, lat- tention des artistes anversois. Le portrait lui parut être sa vocation. Désirant obtenir les conseils du maître par excellence pour ce genre de peinture, de Van Dyck, il partit pour Londres. Malheureu- sement l'artiste favori de Charles I‘ venait de mourir. C'était donc en 1641 ; et cette date concorde encore par- faitement, tant avec celle de la naissance de Philippe Vleugels qu'avec celle de son arrivée à Paris. Notre ar- tiste ne fit qu'un assez court séjour en Angleterre; s’il faut en croire son fils, 1l y fit des portraits qui obtinrent du succès et furent mis en comparaison avec ceux de Lely; mais il voulait aller poursuivre ses études en Italie, et c’est avec l'intention de donner suite à ce projet qu'il se rendit à Paris, d’où il comptait se diriger vers les Alpes en traversant la France. Mariette dit que Philippe Vleu- gels fut attiré à Paris par Philippe de Champagne, son compatriote; mais Nicolas Vleugels ne fait aucune men- tion de cette'circonstance, qu’il n'aurait sans doute pas ignorée. Philippe Vleugels arriva à Paris en compagnie d’un certain Wolfart, comme il est dit dans la lettre d’où nous tirons nos renseignements, « fils d’un célèbre peintre d’An- vers, » qui se dirigeait également vers l'Italie. Ïl s’agit sans doute ici du fils d’Artus Wolffaerts, pein- ( 689 ) tre d'histoire et de genre, mort en 1687, à un âge avancé. Nos jeunes gens avaient une lettre de recommandation pour Pierre Van Mol, artiste anversois comme eux, de l’école de Rubens, qui s'était fixé à Paris, où il avait le ütre et les fonctions de peintre du roi. Van Mol, dont ils parvinrent, non sans peine, à décou- vrir la demeure, fit bon accueil à ses compatriotes et les aida à se procurer un logement; car des voleurs les avaient, sur la route, dépouillés de leur modeste bagage, et ils n'osaient se présenter nulle part. Ce fut un doreur fla- mand, nommé Gérard Locreman , qui fut chargé par Van Mol de leur trouver un gite. Il les conduisit dans une mai- son du faubourg Saint-Germain, connue sous le nom de la Chasse, et qui, selon l'expression de Nicolas Vleugels, était une espèce de refuge des peintres de leur pays. C'était l'heure du souper, quand nos voyageurs firent leur entrée dans la colonie flamande. Nous citerons tex- tuellement le passage de la lettre de Nicolas Vleugels, où la cordiale réception qu’ils reçurent, conforme aux mœurs du temps, est racontée avec une bonhomie pleme de charme : « On était à table : on fit caresse aux nou- veaux venus, on leur fit prendre place et là ils trouvèrent des amis, le couvert, bon visage et bonne chère. Mon père était fort en peine de savoir qui payerait cette dépense; un qui était auprès de lui, et qui s’en apercçut, lui dit de manger et de ne pas s’en mettre en peine. La plupart des peintres qui se trouvaient là étaient habiles. Il y avait Nica- sus, Van Boucle, Fouquières, C. Kalf, etc. Ce fut ce der- nier qui dit à mon père de se tranquilliser et qui lui prêta du linge pour sortir le lendemain. » Voici quelques indications sur les artistes cités par Nicolas Vleugels dans ce passage. ( 690 ) Van Boucle, dont aucun des biographes des artistes fla- mands ne fait mention, était, suivant Félibien, disciple de Sneyders. Il excellait dans la peinture des animaux et gagnait tout ce qu'il voulait. Cependant tel était son genre de vie, qu'il resta pauvre et mourut à l’Hôtel-Dieu. Nicasius n’était pas Hollandais, comme le disent les biographes, car on trouve la note suivante dans les regis- tres de l’Académie de peinture de Paris, dont 1l fut mem- bre : « Bernaert Nicasius , né à Anvers, peintre d'animaux, reçu académicien le 17 octobre 1663. » Guillaume Kalf était bien réellement Hollandais. C’était un habile peintre de nature morte. Quant à Jacques Fouquières, le paysa- giste anversois, il nous est bien connu; nous lui avons précédemment consacré une notice. | Kalf avait pris Philippe Vleugels en affection. Il se char- gea de lui trouver de l’ouvrage et le conduisit chez Jean- Michel Picart, peintre de fleurs et marchand de tableaux, qui avait un atelier où il employait des jeunes gens de talent, mais pauvres, à faire des copies qu’il vendait, sans doute, pour des originaux, car ce genre de spéculation a toujours été en usage. Ce Picart n’est pas mentionné par les historiens de la peinture flamande. Il paraît cependant n’avoir pas été sans mérite. Philippe Vleugels fut pris par lui à l’essai. Ses appointements furent vraisemblablement fort médiocres d’abord; mais il avait le logement et la table, ce qui était quelque chose pour un homme dans sa posi- ton. Il fit done des copies et il en fit de bonnes, car son patron eut le bon esprit de l’employer particulièrement à reproduire des œuvres de maîtres de l’école flamande, dont il avait les traditions. On remarqua une Descente de croix qu’il peignit d’après un original de Van Dyck et qui fut placée dans une chapelle de l’église Saint-Sulpice. tsar brossé és Éd Svegnh À à ( 691 ) Philippe Vleugels trouva deux avantages chez Michel Picart, outre ceux d’être assuré du gîte et de la pitance. C'était, 1° de voir de beaux tableaux ; 2° d’être à la source d'occasions qui pouvaient s'offrir d’avoir des travaux à faire chez des particuliers , car on s’adressait souvent à son pairon , lorsqu'il y avait quelque château à décorer. Il fut, en effet, mandé chez un conseiller au parlement, nommé Brisard, qui l’occupa longtemps et qui lui fit l'offre, ac- ceptée avec reconnaissance , de l’héberger au lieu et place du sieur Picart, avec addition d’émoluments très-supé- rieurs à ceux qu'il recevait chez celui-ci. Il peignit une chapelle entière à Clignancourt, près de Paris, où le con- seiller avait un bénéfice, et décora son hôtel de nombreux tableaux, parmi lesquels son portrait parfaitement réussir. Pendant son séjour chez le conseiller Brisard, Philippe Vleugels fit la connaissance de M"° de Brienne, dont la protection lui fut avantageuse, car elle lui valut d’abord la commande de quarante tableaux pour l’église du cou- vent des Carmélites de Saint-Denis, puis celle d’un Christ sur la croix, qu'il fit, par ordre de la reine mère, pour une des salles de l'Hôtel-Dieu. Philippe Vleugels avait pour voisin un compatriote ap- pelé Matthieu Van Platenberg, qui avait francisé son nom en celui de Platemontagne, réduit plus tard en Montagne. Il était peintre de marine; mais ce n’avait pas été sa pre- mière profession. Lorsqu'il arriva à Paris venant d’Anvers, sa ville natale, il était brodeur. A cette époque, les bro- deurs étaient de vrais artistes qui peignaient avec l’ai- guille Comme on fait avec le pinceau, se servant de laines teintes au lieu de couleurs. Son habileté lui avait procuré une nombreuse clientèle, quand une circonstance aussi fâcheuse qu’inattendue vint ruiner son industrie. Nicolas ( 692 ) Vleugels dit, sans autre explication, que la broderie fut défendue. Ces sortes d’atteintes à la liberté sont si peu dans nos lois et dans nos mœurs, qu’on serait tenté de croire à une méprise de la part de celui qui avance un tel fait. Rien n’était plus exact cependant. Nous trouvons la confirma- tion du dire de notre artiste dans les ordonnances somp- tuaires rendues en France de 1613 à 1636. Ces ordonnances défendaient l’application des broderies d’or, d'argent ou de soie aux vêtements d'hommes et de femmes. Elles étaient rendues, disait-on dans les considérants, parce que les dépenses superflues où chacun s’engageait par émulation, ruinaient les familles. Les excès du luxe ne sont donc point une invention de notre temps; mais il y a cette dif- férence, que les gouvernements ont le bon esprit de lais- ser les gens qui veulent se ruiner, satisfaire librement cette sotte fantaisie. Matthieu Van Platenberg avait un fils et deux filles. Le fils avait suivi la même carrière que son père, et acquit une sorte de célébrité. Philippe Vleugels demanda une des filles en mariage et l’obtint. Il s’était fait, par son talent et par ses relations, une position qui lui permettait de vivre honorablement, avec sa famille, du produit de ses travaux. Van Mol, avec qui il avait conservé des relations d'amitié, lui faisait de fréquentes visites, l’aidait de ses conseils, et l’empêchait de céder aux entraînements d’une facilité dont 1l était toujours tenté d’abuser. La mort de cet excellent artiste le priva d’un guide qui lui était fort né- cessaire. Il multiphait ses productions, sans trop se sou- cier de l’état d’imperfection où étaient encore celles qu'il laissait sortir de son atelier. On voyait un grand nombre de tableaux de lui dans les églises de Paris, et notamment dans celles des Feuillantines, des Célestins, de Notre- ( 693 ) Dame de Lyesse et de Saint-Jacques du Haut-Pas. Ils avaient pour qualité un reflet du coloris flamand, dont il n'avait point perdu le sentiment, et, pour défaut, une né- gligence extrême dans l'exécution. Nicolas Vieugels est obligé d’avouer lui-même ce côté faible de son père. «Il y à, dit-il, de la couleur dans ses ouvrages , une grande union et un beau pinceau. Le tableau qu’il a donné à l’Aca- démie est très-bien peint; mais comme il n’avait pas fait grande étude, qu’il avait voulu gagner de l'argent et qu'il en avait trouvé l’occasion, il en avait profité sans songer qu’il abandonnaïit ce qui devait le soutenir. fl fit quantité de portraits qui sont ressemblants, bien entendus et bien colorés, mais peu étudiés. » Mariette dit aussi que « le portrait était son principal talent. » * Philippe Vleugels fut élu membre de l’Académie le 28 mai 1665. Il mourut, comme nous l’avons dit, le 22 mars 1694. Son fils assure qu’il n'avait jamais pu bien apprendre le français durant un séjour de plus de cmquante ans à Paris, mais qu’il « se piquaitde savoir et de parler correc- tement son flamand. » — « Mon père était grand, beau et bien fait, ajoute Nicolas Vleugels; il était bien venu chez les gens de qualité qui l’honoraient de leur amitié ; il avait beaucoup de familiarité avec eux ; son langage ne déplaisait pas, et 1l contait en méchant français de petites histoires assez joliment. » Dans les dernières années de sa vie, Phi- lippe Vleugels, ayant perdu sa femme, quitta sa maison et la peinture, pour aller s'établir chez sa fille, où il resta Jusqu'à sa mort. Nicolas Vleugels, dans la lettre adressée à Dubois de Saint-Gelais pour fournir les renseignements qui lui sont demandés sur la vie de son père, donne quelques lignes sur lui-même, sur ses études et sur ses premiers travaux. Il 2€ SÉRIE, TOME XI. 48 ( 694 ) nous apprend d’abord qu'il était le troisième enfant de Phi- lippe Vleugels, qui avait eu de Catherine Van Platenberg, sa femme, deux fils et une fille. Son frère aîné avait com- mencé également par cultiver la peinture et n’avait pas mal réussi dans le paysage ; mais l’affaiblissement de sa vue l’obligea à changer de carrière et à solliciter un emploi dans les fermes qui lui fut accordé. Quant à lui, Nicolas Vleugels, il dit lui-même qu’il était né avec des disposi- üons pour la peinture; mais que son père étant déjà vieux à l’époque où il commença ses études d'artiste, ne put pas les diriger avec toute l’attention nécessaire, ce qui l’em- pêcha de s'élever jusqu'où il croit qu’il aurait pu atteindre. Il ne nous apprend pas quel fut son maître, après qu’il eut perdu son père; mais, suivant Mariette, il s’attacha à Pierre Mignard qui, pendant quelque temps, lui donna des leçons. Nicolas Vleugels dit qu'ayant obtenu un prix à l’Académie, il fit le voyage de Rome et de Venise où, l’âge lui étant venu, il étudia plus sérieusement et revint ensuite à Paris, après être resté plus de deux ans en Italie, un peu moms ignorant qu'il était parti. » Il y a une apparence de modestie dans la manière dont cette note est conçue ; mais elle ten- drait cependant à faire supposer que notre artiste obtint le premier prix, celui qui procurait au lauréat l’avantage de faire le voyage d'Italie avec une pension du roi, or ce n’est pas ce qui eut lieu. Nicolas Vleugels concourut en 1694, l’année même de la mort de son père; le sujet était Loth et ses filles sortant de la ville de Sodome; il n’obtint que le second prix, le premier ayant été partagé entre Neveu et Fremin , et il ne se présenta plus de nouveau au concours. C’est done à ses frais qu’il fit le voyage d'Italie. Le bien qu’il reçut en héritage de son père, lui permettait de con- sacrer cette dépense à son désir d'instruction. AS mage «ju ( 695 ) Mariette ne juge pas ausst favorablement que Nicolas Vleugels le fait lui-même, Îes résultats qu’eut le voyage d'Italie pour ses progrès dans la peinture : « El passa en Italie, dit le célèbre iconophile, et il y fit un assez long séjour, tant à Rome qu’à Venise; mais apparemment que ses dispositions pour l’art qu’il avait embrassé n’étaient pas aussi décidées que celles de l’esprit, qui devaient lui acqué- rir de la considération dans le monde. Il ne parut pas, à son retour, que sa manière se fût enrichie, ni perfectionnée. » Suivant Mariette, Nicolas Vleugels savait à peine des- siner et ne peignait guère mieux. Le critique ajoute que, pourtant, il avait le secret de faire de petits tableaux qui plaisaient, parce qu’il ne traitait que des sujets agréables, et que ses figures, ainsi que ses compositions , avaient quel- que chose de flatteur. Nous n’accuserions pas le critique français de s'être montré trop sévère pour notre artiste, si nous jugions celui-ci d’une manière absolue, au point de vue d’une rigoureuse application des principes de la forme; mais si nous le comparons à la plupart des peintres qui, de son temps, jouissaient d’un certain crédit à Paris, nous dirons qu'il ne leur était pas inférieur. Les bons des- sinateurs étaient rares alors, si même il y en avait. Mariette lance contre Nicolas Vleugels une accusation plus grave que celle de manquer de dessin. Cette accusa- tion est celle de plagiat. Après avoir dit que ses composi- tions avaient quelque chose de flatteur, il poursuit en ces termes : « Tout le monde n’était pas obligé de savoir qu'il les avait pillées dans les œuvres des grands maîtres qui l'avaient précédé. I] ne faisait aucune difficulté d’en copier des morceaux entiers et de les reporter dans ses tableaux. On le trouvait continuellement entouré d’estampes où il fourrageait,et personne ne lui en demandait aucun compte. ( 696 ) Ses confrères le craignaient; les gens de lettres le consi- déraient. Un certain ton qu'il avait pris faisait imaginer qu'il avait de l’érudition, qui pourtant était des plus minces; mais que ne fait-on pas, armé d’un peu de char- latanerie ? » | Nous ne pouvons pas dire qu'en ceci Mariette ait tout à fait tort. Il est certain que l’origmalité n’est pas la qua- lité dominante de Nicolas Vleugels; il est certain qu’on retrouve souvent d'anciennes connaissances parmi les ligures qu'il a fait entrer dans ses compositions. Au nombre des gravures dont il s’entourait, à ce que nous assure le critique, et où il ne se faisait faute de puiser, celles qui reproduisaient les compositions de Rubens n'étaient sans doute pas en minorité, car on trouve dans ses types, no- tamment dans ses types de femmes, des réminiscences du chef de l’école d'Anvers. Nicolas Vleugels fut élu membre de l’Académie de pein- ture le 51 décembre 1716. Pour son tableau de réception, il représenta : Alexandre faisant peindre par Apelle sa maîtresse Campaspe. Ce tableau fut gravé par Surrugue sous le titre de : l’Amour indiscret. I donna pour pendant à cette composition : l’Amitié généreuse, dont le sujet était Alexandre cédant la belle Campaspe à son peintre, lorsqu'il apprend que celui-ci est amoureux d'elle. En 1724, Nicolas Vieugels eut l'honneur d’être choisi pour aller prendre à Rome la direction de l’Académie fran- caise. C’est, nous semble-t-il, un témoignage de la con- sidération dont il jouissait. Mariette, qui ne lui a pas épargné les critiques, ainsi qu’on l’a vu, reconnait qu’il remplit ses fonctions de manière à justifier le choix dont il avait été lobjet. Voici comment il s'exprime à cet égard : ( 697 ) « Vleughels partit de Paris, le 24 mai 1724, pour aller à Rome, et remplit ce poste important (celui de directeur de l’Académie) avec beaucoup de dignité, faisant parfaite- ment les honneurs de la nation. » Gersaint rend également justice à son caractère ainsi qu’à son talent, dans une note du catalogue descriptif de ® M. Quentin de l’Orengère : « Ses compositions, dit-il, sont fort agréables, et il y a beaucoup cherché le goût de Paul Véronèse. Il ne peignait guère que de petits tableaux de chevalet, où il réussissait. Il avait beaucoup d'esprit, et il possédait tous les agréments de la bonne société. Ses ta- lents et son mérite personnel lui procurèrent la place de directeur de l’Académie royale de Saint-Luc, établie à Rome, que le roi lui donna, et dans laquelle il est mort, il y à quelques années. Il s'était attiré à Rome une estime universelle, même des savants et des gens de lettres avec lesquels il avait été souvent en relations. » Nicolas Vleugels fut nommé par le roi, pendant son séjour à Rome, chevalier de Saint-Michel, ce qui, de- puis lors, le fit désigner sous le nom du chevalier Vleu- gels. Notre artiste avait été intimement lié avec Watteau. Ils étaient presque compatriotes; Valenciennes, la patrie du peintre des Fêtes galantes, bien qu’elle fût incorporée à la France, n’en était pas moins restée une ville flamande : € Il était l’ami de Watteau, dit Mariette, et pendant quel- que temps, 1ls hébergèrent ensemble dans la même mai- son. » Cette maison appartenait au neveu de Le Brun. M. Arthur Dinaux, en parlant de l’inconstance de Watteau et de lhumeur qui le portait à changer constamment de résidence et de relation, en donne pour preuve qu’il ne put pas même rester chez Vleugels, son ami. ( 698 ) Les petits tableaux de Nicolas Vleugels étaient très- recherchés des amateurs français au siècle dernier. La comtesse de Verrue, célèbre par son goût pour les arts non moins que par ses aventures romanesques, avait dans sa collection sept morceaux de lui, parmi lesquels on remarquait : Télémaque dans l’île de Calypso; le Triom- phe de Galathée et Diane découvrant la faute de Calisto. ” La première de ces compositions a été gravée par Edme Jeaurat. Vleugels à traité des sujets différents, empruntés tour à tour à l’histoire sante, à la mythologie et à l'histoire profane, sans compter des sujets de fantaisie et des études rapportées d'Italie. Ce n’est pas dans les compositions reli- gieuses qu'il se fait juger le plus favorablement. Le style qui convient pour ce genre de peinture lui manquait, comme il manquait à bien d’autres. Cependant on ne peut nier qu'il n’ait montré un certain goût d’arrangement dans. quelques pages tirées de l’Écriture , par exemple dans celle qui représente Abigaïl se prosternant devant David. On louerait avec justice les groupes de femmes qui animent la partie gauche de cette composition, si les types et les attitudes des figures n'étaient des réminiscences trop mani- festes de Rubens. Dans les sujets de l’histoire profane et dans les allégo- ries mythologiques, comme les Quatre Éléments et les Quatre Saisons, Vleugels est tombé dans la grâce ma- niérée qui caractérise les peintres de son époque. Ce n’est pas chez lui un défaut individuel, c’est celui de toute une école. Nous trouvons la preuve du cas que l’on faisait du talent de notre artiste dans le grand nombre de gravures exécu- tées d’après ses compositions. Les meilleurs burms, ceux RE me lan he Gmtnt ( 699 ) de Cochin, de Drevet, d’Edelinck, de Haussart, d’Edme Jeaurat, de Larmessin, de Le Bas, de Pitau, de Surrugue, de Tardieu, de Thomassin, ont donné des interprétations de ses œuvres. Il existe de Nicolas Vleugels une eau-forte, essai de sa jeunesse. C’est une femme nue, couchée dans un jardin et vue de dos. Cette estampe est de forme ovale, en tra- vers : elle est signée au bas, à droite, Vleugels. Après l’avoir décrite dans son ouvrage, un peintre-graveur fran- çais, M. Robert Dumesnil, ajoute : « Cet artiste, en signant la seule estampe qu’il à gravée, a écrit son nom comme nous le faisons ici (Vleugels); mais la plupart des auteurs qui en ont parlé, et presque tous les graveurs qui ont reproduit ses compositions, ont écrit Vleughels, en sacri- fiant l’orthographe au mérite de la prononciation. » La forme graphique donné par Nicolas Vleugels à la signa- ture mise par lui sous son estampe, ne serait pas seule un témoignage suffisant de sa véritable orthographe, Dans la lettre qu’il adressa à Dubois de Saint-Gelais, et que nous avons mise à contribution pour cette notice, il écrit le nom de son père Wleughels, tandis qu’il signe cette même pièce Vleughels. Le texte de sa lettre est rempli de fantaisies orthographiques, bien qu’il nous apprenne que son père avait voulu lui faire faire ses humanités. Nous avons dit que Nicolas Vleugels s'était fait, par son caractère, une position personnelle très-honorable à Rome, à l’époque où 1l remplissait les fonctions de direc- teur de l’Académie de France. Il paraît qu’il éprouva , dans les dernières années de sa vie, un grand chagrin, dont la cause n’est pas connue. Voici dans quels termes il écrivait à M. de Saint-Gelais : « J’attends une réponse à la lettre que je vous écrivis dernièrement. Je ne suis point encore ( 700 ) à moi; je suis dans les douleurs. La personne qui vous ren- dra ce paquet a été en partie témoin de mon malheur, et elle a eu assez de bonté pour y prendre part. » On indique partout la date de 1737 comme celle de la mort de Nicolas Vleughels. C’est une erreur : c’est en 1732 qu'il a cessé de vivre. La preuve en est donnée par l’épi- taphe du tombeau qui lui fut élevé dans Péglise Saint- Louis des Français, et qui existe encore. Voiei cette épi- taphe : D. ©, NI. NICOLAO VLEUGHELS PARISINO REGII ORDINIS S. MicnaELis EQUITI TORQUATO VITAE INTEGRITATE MORUMQUE SUAVITATE INSIGNI LIBERALIUM ARTIUM STUDIIS PICTURA PRAESERTIM ECCELENTI QUI REGIAM GALLIARUM IN URBE ACADEMICAN SINGULARI CURA ET LAUDE MODERATUS OBIIT V ID. DECEMBRIS ANNO MDCCXXXII AETATIS SUAE LXVIII Mania THERESA GOSSET Ux0R ET BERNARDINUS FILIUS MAETISS. PP. Le monument qui surmontait la tombe de Nicolas Vleu- gels était l’œuvre du sculpteur et Michel-Ange Slodtz. Il se composait d’un petit génie tenant de la main gauche une palette et de la droite recouvrant d’un voile le mé- daillon du vieux peintre. Ce monument à été gravé, en 1744, par Claude Galimard. L'inscription tumulaire que nous venons de transerire (701 ) est intéressante à plusieurs titres pour la biographie de notre artiste. Elle permet de rétablir, comme nous lavons dit, la date de sa mort jusqu'ici mal indiquée. Elle nous apprend en même temps celle de sa naissance, qui n’est renseignée nulle part. Agé de 58 ans en 1752, Nicolas Vleugels était né en 1674. De plus, nous voyons qu’il était marié et qu’il avait un fils, circonstances de sa vie privée, dont ses biographes ne font pas mention. Marie-Thérèse Gosset, sa femme, était, à ce que nous apprend Mariette, belle-sœur du peintre Jean-Paul Pannini. Il existe à la Bibliothèque royale un exemplaire d’une traduction française du dialogue sur la peinture de Ludo- vico Dolce, imprimé à Florence en 1733. Sur le titre de ce volume, on lit : Ex libris P.-J. Mariette, 1740. Van Hul- them, qui l’a signé à son tour, en inscrivant la date de 1799 comme celle de l’acquisition qu'il en avait faite, y a mis cette note : Traduit par Nicolas Vleughels, né à Anvers en 1669, mort en 1757, directeur de l’Académie francaise à Rome. Il y à dans cette note à peu près autant d’erreurs que de mots. On à vu que notre artiste n’est pas né à An- vers, qu'il n’est pas né en 1669, et qu’il n’est pas mort en 1757. Ces erreurs ne sont rien auprès de celle qui fait attribuer, par Van Hulthem, à Nicolas Vleugels, la traduc- tion du livre de Ludovico Dolce. Où le bibliophile avait-il pris ce renseignement ? Cest ce qu’il ne prend pas la peine de nous dire. Il aurait évité de faire cette fausse attribu- tion , s’il avait lu la note mise par l’auteur de la traduction au bas de la page 35, laquelle est ainsi coneue : « Je me souviens que du temps que j'étais à Rome, on me disait que la villa d'Ostia était toute peinte de paysages de Pierre de Cortone. » Du temps que j'étais à Rome : or on sait que Vleugels n’a pas quitté cette ville de 1724, époque (702 ) de son entrée en fonctions comme directeur de l’Académie de France, jusqu'en 1732, époque de la mort. Le tradue- teur écrit à Florence où Vleugels n’a jamais résidé. Nous ajouterons qu'il n'existait plus en 1755, quand le livre dont il est censé être l'interprète fut imprimé. Nous avons eru devoir relever l'étrange assertion de Van Hulthem et en démontrer le peu de fondement, parce qu'elle aurait pu induire en erreur les futurs auteurs de notre histoire littéraire. Les petits tableaux de Nicolas Vleugels sont dispersés dans les cabinets d'amateurs, qui leur accordent sans doute une part de la faveur dont jouissent aujourd'hui les pro- ductions de l’école du dix-septième et du dix-huitième siècle. On n’en trouve guère dans les collections publiques. Nous citerons seulement deux petits cadres : Le Lever et la Toilette, qui font partie du musée de Valenciennes, et dont M. le comte Clément de Ris dit, dans son livre sur les musées de province, qu'ils sont précieux à cause de larareté | des œuvres de l'artiste; et Apelle peignant la maîtresse d'Alexandre, morceau de réception de Vleugels à l’Aca- démie, qui se trouve actuellement au château de Compiè- gne. Nous avons des portraits des deux Vleugels. Celui de Philippe est gravé par Larmessin d’après Phil. de Cham- paigne; celui de Nicolas fut peint par Ant. Pesne et gravé par E. Jeaurat. Tous deux font partie de la chalcographie du Louvre. (703 ) OUVRAGES PRÉSENTÉS. Notice sur les appareils de translation des mineurs dans Les puits ; par M. A. De Vaux. Bruxelles, 1861 ; in-8°. Note sur la théorie des lampes de sureté; par M. A. De Vaux. Bruxelles, 1861 ; in-8°. Christine de Lalaing, princesse d’Espinoy; par Théodore Juste. Bruxelles, 4861 ; in-12. Collection de mémoires sur l’histoire de Belgique, XNI®° siècle : — Mémoires anonymes sur les troubles des Pays- Bas, 1565-1580, avec notice et annotations; par J.-B. Blaes. Tome III". Bruxelles, 1861 ; 1 vol. in-8°. Exposé historique de l’industrie du fer dans la province de Liège; par André Warzée. Liége, 1861 ; in-8°. Floralies de Liége. — Exposition et concours d’horticulture qui ont eu lieu les 28, 29 et 50 octobre 1860, dans la grande salle de la Société libre d’émulation. Liége, 1861; brochure in-12. Causeries littéraires et impressions de voyage; par AÏb. d'Otreppe de Bouvette. II"° volume. Liége, 1861; in-12. Études sur la fièvre puerpérale ; par le docteur Henri de Ceuleneer van Bouwel. Bruges, 1861 ; in-8°. Revue de la numismatique belge, 5"° série, tome V, 2° li- vraison. Bruxelles, 1861; in-8°. | _ Revue universelle des arts, VII"° année, n° 4 à 5. Bruxelles, 1861 ; 5 broch. in-8°. Revue populaire des sciences, rédigée par J.-B.-E. Husson, IV" année, n° 4 à 6. Bruxelles, 1861 ; 2 broch. in-8°. Journal des beaux-arts, IT"° année, n° 414 et 12. Anvers, 1861 ; 2 feuilles in-4°. ( 704 ) | Revue de l'instruction publique en Belgique, IX"° année, n® 4 à 6. Bruges, 1861 ; 5 broch. in-8°. Annuaire de la Société libre d’émulation de Liège pour l’année 1861. Liége, 1861 ; in-12. Revue de l’administration et du droit administratif de la Belgique; par R.-J. Bonjean, J.-B. Bivort et J.-J. Cloes, tome VIIT, 4e à Ge livr. Liége, 1861 ; gr. in-&°. Journal historique et littéraire, tome XXVIIE, livr. 1-5. Liége, 1861; 5 broch. in-8°. La Belgique contemporaine, revue mensuelle, tome I”, 4-6" liv. Liége, 1861 ; 5 broch. in-8°. Journal de médecine, de chirurgie et de pharmacologie, 49% année, avril à juin. Bruxelles, 1861 ; 5 broch. in-8°. Annales d’oculistique, XXIV®° année, 5° et 6" livraisons. Bruxelles, 1861 ; 4 broch. in-8°. ; Annales de médecine vétérinaire, X"° année, 4° à 6me cahiers. Bruxelles, 4861 ; 5 broch. in-8°. Annales de la Société de médecine d'Anvers , XXIHM° année, avril à juin 1861. Anvers; 3 broch. in-8°. Journal de pharmacie, publié par la Société de pharmacie d'Anvers, 17" année, avril à juin. Anvers, 1861; 5 broch. in-8°. Journal d'horticulture pratique de la Belgique, V”* année, avril à juin. Bruxelles , 1861 ; 5 broch. in-8°. La Belgique horticole; rédigée par Édouard Morren, 1861 , 7me à 9e livr. Liége; 5 broch. in-8°. Levensbericht van M. A.-C. Holtius; door H.-J. Kocnen. Amsterdam, 1861 ; in-8°. Explication du zodiaque de Denderah, des Pyramides et de la Genèse; par Justin Boblin. Caen, 1861 ; in-8°. Notice sur les archives de l’abbaye de Bourbourg; par E. de Coussemaker. Dunkerque, 1839; in-8°. Documents relatifs à la Flandre maritime, extraits du car- tulaire de l'abbaye de Watten; par E. de Coussemaker. Lille, 1860; in-8°. ( 705 ) Quelques épiluphes des églises de Comines, Cambrui, Condé, Esne, Estaires, Halluin, Sotre-le-Chäteau et Valenciennes ; par E. de Coussemaker. Lille; 1860 ; in-8°. Vitraux peints et incolores des églises de la Flandre mari- lime; par E. de Coussemaker. Lille, 1860; in-8°. Keure de Berques, Bourbourg et Furnes ; traduite et anno- tée par E. de Coussemaker. Lille, 4860 ; in-8°. Réponse de M. Boucher de Perthes aux observations faites par M. E. Robert, sur le diluvium du département de la Somme. Paris, 1861; in-4°. Nouvelle biographie générale, depuis les temps les plus re- culés jusqu’à nos jours, publiée par MM. Firmin-Didot frères, sous la direction de M. le d'. Hoefer, tome XXXVI®%, Paris, 1861 ; in-8°. Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences ; par MM. les secrétaires perpétuels, tome LIL, n° 44 à 26. Table du tome LE. Paris, 1861 ; 14 broch. in-4°. Bulletin de la Société géologique de France , deuxième série, tome XVIF, feuilles 45-52, 53-57 (fin). Paris, 1859 à 18060; 2 broch. in-8°. Presse scientifique des Deux-Mondes , 1861, tome IE, n°° 11 et 12. Paris, 1861 ; 2 broch. in-&°. L’Investigateur, journal de l'Institut historique, XXVIIE"< année, 516%°-517% livre. Paris, 4861 ; in-8°. Journal de la Société de la morale chrétienne, t. XI, n° 3 Paris, 1861 ; in-8°. Précis analytique des travaux de l’Académie impériale des sciences, belles-lettres et arts de Rouen, pendant l’année 1859- 60. Rouen, 1860; in-8°. Revue agricole, industrielle et littéraire de Valenciennes. XII" année, n°* 9 et 10, mars et avril 1861. Valenciennes; 1 broch. in-8e. Leçon d'ouverture d'un cours sur la haute antiquité, fait à l’Académie de Lausanne, en novembre et décembre 1860; par A. Morlot. Lausanne, 1861 ; in-12, ( 706 ) De generalibus, et infinite tenuibus luminis fascibus, prae- cipue in crystallis ; par Rudolfus Meibauer. Berlin, 1861; in-4°, | Verhandlungen der Kaiserlichen Leopoldinisch-Carolinis- che deutschen Akademie der Naturforscher, XXNIIF'* Band. Jena, 1861 ; 4 vol. in-4°. Schrifien der küniglichen physikalisch-ükonomischen Ge- sellschaft zu Künigberg, L'% Jahrg., 2° Abth. Kônigberg, 1861 : in-°. Tubinger Universitätschriften aus dem Jahre 1860. Tu- bingue, 1861 ; 1 vol. in-#. VII. Zuwachsverzeichnis der küniglichen Universitäts Bi- bliothek zu Tübingen, 1859-1860 ; in-4. Beitrag zur Behandlung der Brüche des Oberschenkels und der Kniescheibe, in augural Abhandlung von Wilhelm Theodor Renz. Tubingen, 1860 ; in-4°. Ein beitrag zur chirurgischen Behandlung der Strumen ; ein Dissertation von Adolf Klein. Tubingue, 1860; in-4°. Beiträge zur Lehre von den wahren Ankylosen des Hüftge- lenkes ; in augural Abhandlung von Gustav Emil Majer. Tubin- gue, 1860; in-4°. Die Contracturen der Fusswurzel und ihre Behandlung, von D: Heinrisch Ebner. Stuttgart, 1860; in-8°. Ueber die function der Leber ; ein inaugural Dissertation von Rudolph Andler. Stuttgart, 1860; in-12. Zur casuistik der Leukämie ; augural Abhandlung von Lud- wig Sontheimer. Tubingue, 1860; in-12. Zur Casuistik des Heus ; inaugural Dissertation von Gustav Hafner. Tubingue, 1860; in-12. Beiträge zur Urophysiologie über die Aufsaugung von Harnbestandtheilen in der Blase ; inaugural Abhandlung von Wilhelm Kaupp. Tubingue, 1860 ; in-12. Sitzungsberichte der Kaïserlichen Akademie der Wissen- schaften zu Wien : —Math.-Naturwissens. Classe, XLII Band, @ritre Jahg. 1860, n°° 925 à 28; — Philosophisch-Historische Classe, XXV Band, Jahg. 1860, n° 8 à 10. Vienne; 7 broch. in-8e. Fontes rerum austriacarum. Oesterreichische Geschits- Quellen, 11 Abth., XIX Band. Vienne, 1860; in-8°. Jahrbücher der K. K. Central-Anstalt für Meteorologie und Erdmagnetimus; von Karl Kreiïl, VIT Band, Jahrg. 1855. Vienne, 1860; 1 vol. in-4°. Reise der oesterreichischen Fregaite Novara um die Erde, in den Jahren 1857, 1858, 1859, unter den Befehlen des Comodore B. von Wüllerstorf-Arbair, [It Band. Vienne, 1861 ; in-8°. Memorie dell” osservatorio del Collegio romano, nuova serie, pp. 169 à 248. Rome, 1859; in-4°. Misura della base trigonometrica esequita suila via Appia; per ordine del Governo pontificio nel 1854-55, dal P.-A. Secchi. Rome, 1858; in-4°. Relazione delle osservazionti futte in Spagna durante l’ec- clisse totale del 48 luglio 1860 ; dal P. Angelo Secchi. Rome, 1860; in-8°. The transactions of the royal irish Academy, volume XXIV, part. 1. — Science. Dublin, 1860 ; in-4°. The Journal of the royal Dublin Society, n°° XVIII et XIX. Dublin, 1860; in-8°. The american Journal of science and arts, second series, vol. XXXI, n° 93. New-Haren, 1861; in-8°. FIN DU TOME XI DE LA 2% SÉRIE, L VE Û LR Let C2 . : PT F LM Lis vi w 2 t ba L , x y f i mi 0. A EE" : | Ü \ \ rit : , CPE" Ê ti ; ni L * À le rs fit +. è } L 1 . ot7 ) “ Li ÿ d à | P {[E° 5 11 ç i di F p « { | b « 1 \ ss , s h } = PE , : L- ni Nr AC L 1 . MATE a ordres BULLETINS DE L'AGADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. TABLES ALPHABÉTIQUES DU TOME ONZIÈME DE LA BEUXIÈME SÉRIE. 1861. TABLE DES AUTEURS. A. Académie royale des sciences, à Amsterdam. — Envoi de son programme de concours , 679. Alvin. — Hommage d’un ouvrage, 145; membre du jury pour le prix quinquennal de gravure en taille-douce, 147 ; annonce de la réunion de la commission chargée de décerner le prix quinquennal de gravure, 266 ; rapport fait au nom de cette commission, 507 ; membre du jury pour le concours des cantates, 447; compte rendu de la décision de ce jury, 590. Arendt. — Commissaire pour un mémoire de concours, 224; rapport sur ce mémoire, 533; commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux, 999 ; compte rendu de la décision de la commission pour les prix de Stassart, 339. Association britannique pour l'avancement des sciences. — Annonce de sa réunion à Manchester en septembre 1861, 514. 2" SÉRIE, TOME XI. 49 D: 710 TABLE DES AUTEURS. B. Baguet. — Commissaire pour une notice de M. Namur, 300 ; rapport sur cette notice, 572. Bal, — Auteur d’une gravure présentée au concours quinquennal de gra- vure en taille-douce , 146, 507; lauréat de ce concours, 307. Balat. — Commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux , 441. Baron. -—— Membre du jury pour le concours des cantates, 447. Barry (Charles). — Annonce de sa mort, 586. Bellynck (Aug.). — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Namur en 1860, 2. Belval. — Notices sur l’/xodes Poortmani et sur le Semiotus sanguinicol- lis et le S. saturalis, 95; lecture des rapports de MM. Wesmael et Can- dèze sur ces notices, 4; autorisé à recueillir les fossiles découverts dans les travaux d'Anvers , 514. Benoît (Pierre). — Rapports de MM. Daussoigne-Méhul et F. Fétis sur sa messe solennelle , 441 , 442. | Bergé de Jamez, dit Masson. — Mémoire sur le dosage du nickel, 286. Bernardin.— Dépôt des phénomènes périodiques observés à Melle en 1860 et 1861, 154, 515, 454. Biard (Émile). — Envoi de morceaux de chant des maîtres belges , fran- çais, etc., arrangés pour orgue, 287. Borgnet. — Commissaire pour un mémoire de concours, 225; rapport sur ce mémoire, 591. x Bosselet. — Commissaire pour une œuvre musicale de M. Radoux, 587. Bourson. — Membre du jury pour le prix triennal de littérature drama- tique française, 224. Braemt. — Membre du jury pour le prix quinquennal de gravure en taille-douce , 147 ; réélu membre de la commission administrative pour 1862, 147; situation de la Caisse centrale des artistes belges, 147; annonce la réception d’une somme destinée à cette Caisse, 440. C. Calamatta. — Membre du jury pour le concours quinquennal de gravure en taille-douce, 147. Candèze. — Lecture de son rapport sur deux notices de M. Belval, 4. Cantù. — Élu associé, 554. Cavalier (J.). — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Ostende en 1860, 2. TABLE DES AUTEURS, 711 Chälon. — Tombeau romain ou gallo-romain, découvert à Scharbeek lez-Bruxelles, 301; sur des fouilles faites récemment à Scharbeek, 575. Coemans.— Monographie du genre Pilobolus Tode, 455. Comte de Flandre (S. À. R. le). — Exprime ses regrets de ne pouvoir assister à la séance publique de la classe des lettres, 514. Congrès artistique d'Anvers. — Invite l’Académie à envoyer des délégués à sa prochaine réunion, 684. Corr. — Membre du jury pour le concours quinquennal de gravure en taille-douce, 147. D. Daussoigne-Méhul. — Rapport sur une messe solennelle de M. Benoit, 441; membre du jury pour le concours des cantates, 447 ; commissaire pour un mémoire de M. Biard, 587; commissaire pour un mémoire de M. Radoux, 587. David. — Commissaire pour un mémoire de concours, 225; rapport sur ce mémoire , 544. De Borre (Alfred). — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Jemeppe en 1860 et 1861 , 2, 515, 454. De Busscher. — Membre du jury pour le prix quinquennal de gravure en taille-douce, 147. De Caligny (le marquis Anatole). — Notes sur la disposition des vannes cylindriques et sur les effets de la chaleur dans les siphons renversés à trois branches qui fonctionnent à Bardonèche, 315, 627, 655; lecture des rapports de MM. Lamarle et De Vaux sur ces notices , 622; notice sur les tiroirs équilibrés pour les machines hydrauliques, 614. De Decker. — Élu directeur pour 1862, 107; membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224; commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux, 559. Defacqz. — Membre du jury pour le prix quinquennal des sciences mo- rales et politiques, 224. De Gerlache (le baron). — Commissaire pour un mémoire de concours, 295; rapport sur ce mémoire, 540 ; membre de la commission chargée de la publication des monuments de la littérature française en Bel- gique , 559 ; nommé président de cette commission, 553. De Haulleville. — Lauréat du concours quinquennal des sciences morales et politiques, 585. De Keyser. — Membre du jury pour le concours quinquennal de gravure en taille-douce, 147. 112 TABLE DES AUTEURS. De Kemmeter. — Membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224. De Koehne (Bernard). — Élu associé, 554; remerciments pour son élec- tion, 679. De Koninck. — Élu directeur pour 1862, 105 ; autorisé à visiter oficielle- ment les travaux d'Anvers , 314. De Ram. — Hommage d’un ouvrage, 105; commissaire pour des modifica- tions à apporter aux concours quinquennaux , 678. De Saint-Genois (le baron). — Commissaire pour un mémoire de concours, 225; membre de la commission pour la publication des monuments de la littérature française en Belgique, 559. | De Sanquivico (le chevalier Ch.). — Envoi des observations météorolo- giques faites à Quito de 1859 à 1860, 5. De Selys-Longchamps. — Dépose les phénomènes périodiques observés à Waremme en 1860, 454. De Smet. — Commissaire pour un mémoire de concours , 225; rapport sur ce mémoire, 47; commissaire pour une notice de M. Gheldolf, 500; rapport sur cette notice , 559. De Vaux (Ad.).— Commissaire pour deux notes de M. le marquis de Ca- ligny, 511 ; lecture de son rapport sur ces notes, 625; hommage d’ou- vrages, 614; commissaire pour une notice de M. de Caligny, 614. Devaux (Paul). — Commissaire pour deux mémoires de concours, 224; rapport sur ces mémoires , 90. Dewalque. — Température à Stavelot du 5 au 10 janvier 1861, 12; sur la constitution du système eifélien dans le bassin anthraxifère du Condros, 64; dépôt des phénomènes périodiques observés en 1861 à Stavelot, 915, 286 ; proposé par l’Académie pour faire la carte géologique d’An- vers, 212. De Witte (le baron). — Hommage d'ouvrages, 514. Donaldson. — Remerciments pour l'envoi des Bulletins , 586. Du Bus (le vicomte), — Autorisé à recueillir les fossiles découverts dans les travaux d'Anvers , 514; observations sur ces découvertes, 511. Duc de Brabant (S. 4. R. le). — Exprime ses regrets de ne pouvoir assister à la séance publique de la classe des lettres, 515. à Ducpetiaux.— Hommage d’un ouvrage, 105; commissaire pour un mé- moire de concours, 224; rapport sur ce mémoire, 515; sur la mission de.l'État, ses règles, ses limites, 539 ; sur la construction des prisons cellulaires, 441. Duprez. — Température à Gand du 7 au 8 janvier 1861, 11 ; commissaire pour une notice de M. Montigny, 515; rapport sur celte notice, 456; TABLE DES AUTEURS. 715 commissaire pour une note de M. Rousseau, 315; rapport sur cette note, 455; cornmissaire pour une note de M. Gallardo-Bastant, 315 ; rapport verbal sur cette note, 456; commissaire pour une notice de M. Heis, 455; lecture de son rapport sur cette note, 623. E. Ediwards (Henri Milne). — Assiste à une séance académique, 454. F. Faider. — Membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224; rapport fait au nom de ce jury, 571 ; commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux, 539; compte rendu de la commission pour les prix de Stassart, 359. Fétis (Ed.). — Propose d'accorder un subside, par la Caisse centrale, à la veuve d’un artiste, 148 ; rapport annuel sur la Caisse des artistes, 308 ; lecture de fragments de son cours d'esthétique, 308, 591 ; rapport an- nuel de 1861 , au nom de la commission de la biographie nationale, 595; délégué au congrès artistique d'Anvers, 685; les artistes belges à l'étranger : Philippe et Nicolas Vleugels, 686. Fétis (Fr.). — Promet des renseignements pour l'impression des œuvres de Tinctoris, 266; note sur la découverte récente des plus anciens mo- numents de la typographie musicale, et, par occasion, sur les composi- teurs belges du quinzième siècle, 267; hommage d’un ouvrage, 440 ; promet une notice biographique sur Snel, 440 ; rapport sur une messe solennelle de M. Benoît, 441; membre du jury pour le concours des cantates , 447; commissaire pour un mémoire de M. Biard, 587; com- missaire pour une œuvre musicale de M. Radoux, 587. Florimond.— Température à Louvain le 8 janvier 1861, 11 ; rapports de MM. Montigny et Gloesener, sur sa note relative à l'électricité atmosphé- rique, 196, 168. Fuerison. — Membre du jury pour le prix triennal de littérature drama- tique française, 224. G. Gachard.— Discours adressé au Roi, le premier jour de l’an, 105; membre du comité chargé de la présentation aux places vacantes dans la classe des lettres, 295; variétés historiques, XV à XIX, 226; commissaire pour des modifications à apporter aux concours quinquennaux , 678 ; an- 714 TABLE DES AUTEURS, nonce la découverte de papiers académiques aux archives générales, 679. Gallardo-Bastant. — Notice sur les aérolithes, 315; lecture des rapports de MM. Duprez et Ad. Quetelet sur cette notice, 456. Génard. — S'excuse de n'avoir pu faire exécuter déjà la photographie des- tinée à reproduire le triptyque de l’église de Saint-Gommaire à Lierre , 145. Gheldolf. — Étude sur la signification du mot Balfart , 300, 374; rapports de MM. Kervyn de Lettenhove, De Smet et Snellaert sur cette notice, 540 , 559, 562. Gilbert. — Remarques sur la théorie des équations différentielles linéaires , 200; rapport de M. Timmermans sur cette note, 176; observations sur la carte du Nil de M. Miani, 455; dépôt d'un billet cacheté, 614. Gloesener.— Rapport sur une note de M. Florimond, 168. Grandgagnage. — Commissaire pour un mémoire de concours , 225; rap- port sur ce mémoire , 538. H. Hanssens. — Membre du jury pour le concours des cantates, 447. Haus. — Membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224. Heis. — Observations sur la lumière zodiacale, les étoiles filantes, etc., 455 , 640 ; lecture des rapports de MM. Duprez et Quetelet sur cette note, 625. Husson. — Dépôt des observations des phénomènes périodiques observés à Spa, en 1860, 614. J. Juste (Th.). — Hommage d'ouvrages , 299, 679. K. Kekulé (Aug.). — Note sur les acides fumarique et maléique et sur leurs relations avec l'acide succinique , 84; notice sur les acides itaconique et pyrotartrique , 623, 662. Kervyn de Lettenhove. — Le procès de Robert d'Artois, 107 ; commis- saire pour un mémoire de concours, 225; rapport sur Ce mémoire, 552; Saint Bernard, documents inédits, 252; commissaire pour une notice de M. Gheldolf, 300 ; rapport sur cette notice, 340; est invité, par la classe, à revoir son travail sur le projet de publication des mo- numents de la littérature française, 300 ; lecture de sa notice sur Jean sans Peur, 504; membre de la commission chargée de la publication des TABLE DES AUTEURS, 715 monuments de la littérature française en Belgique, 359 ; nommé secré- taire de cette commission, 553 ; Jean sans Peur et l'apologie du tyran- nicide, 558 ; annonce la publication de documents inédits sur Jacques d’Artevelde , 680. Kickz. — Commissaire pour une notice de M. Muenter, 4; rapport sur une notice de M. A. Wesmael, 5; commissaire pour une notice de M. Wes- tendorp , 455; rapport sur cette notice, 618; commissaire pour une no- tice de M. A. Wesmael, 455; rapport sur cette notice, 619; commissaire pour une notice de M. Coemans, 455. L. Lamarle. — Lecture de son rapport sur un mémoire de M. Plateau, 4; extension générale du procédé suivi pour le développement homalogra- phique des surfaces de révolution, 42 ; commissaire pour deux notes de M. le marquis de Caligny, 315; lecture de son rapport sur ces notes, 625 ; note sur la détermination géométrique des hélicoïdes gauches suscep- tibles de s’appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature, 321 ; commissaire pour une notice de M. de Caligny, 614. Landzweert. — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Ostende en 1860, 2. Leclercq (D.). — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Liége en 1860, 2. Leclercq (M. N. J.). — Réélu membre de la commission administrative, 107; membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224; élu membre du comité de présentation pour les places vacantes dans la classe des iettres, 225; commissaire pour des modi- fications à apporter aux concours quinquennaux, 678. Lelewel. — Hommage d’un ouvrage, 299 ; annonce de sa mort, 678. Lenormant (François). — Hommage d’un ouvrage, 514. Liagre. — Nommé président pour 1861, 2; remerciments au directeur sortant , 103; paroles adressées , comme président, à M. A. Quetelet, à l’occasion de la médaille commémorative offerte par l’Académie, 556. Liefman. — Recherches chimiques, 625. _ M. Maas. — Température à Namur, du 1er au 16 janvier 1861, 12; dépôt des phénomènes périodiques observés à Namur en 1860, 154. Mailly (Ed.). — Hommage d’un ouvrage, 53. Martens. — Commissaire pour une notice de M. Muenter, 4: considéra- 716 TABLE DES AUTEURS. tions sur la nature des corps simples, 1953; commissaire pour une notice de M. Westendorp, 455; commissaire pour une notice de M. A. Wesmael, 455; rapport sur cette notice, 620; commissaire pour une notice de M. Liefman, 625. Melsens. — Note sur les poudres de guerre, de mine et de chasse, 13; commissaire pour un mémoire de M. Bergé, 286; communication ver- bale sur une éprouvette , 511. Meunier. — Auteur d’une planche pour le concours quinquennal de gra- vure en taille-douce, 146. Ministre de la justice (M. le). — Hommage d’un ouvrage, 338. Ministre de l'intérieur (M. le). — Communique un arrêté royal nommant M. Liagre président pour 1861, 2; annonce la formation du jury chargé de décerner le prix quinquennal d'histoire, 104; communique l'arrêté royal nommant les jurys pour le prix triennal de littérature dramatique française et pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques , 225; annonce l'impression des œuvres de Tinctoris , 265; demande les mesures d'exécution pour la publication des monuments de la littéra- ture française, 290; lettres relatives au concours triennal de composi- tion musicale, 505, 459 ; envoi d’une somme prélevée au profit de la caisse des artistes sur l'exposition des beaux-arts de 1860, 306; lettre autori- sant quelques membres de l’Académie à visiter les travaux d'Anvers et à y recueillir les objets fossiles qui y seront découverts, 314; hommage d’un ouvrage, 314; lettre relative à la décision du jury pour le prix quinquennal d'histoire , 514; annonce que le jury pour le concours quin- quennal des sciences morales et politiques propose des modifications au programme , 678. Montigny. — Rapport sur une note de M. Florimond , 156; recherches sur la cause de l'influence des vents sur la pression atmosphérique , 315, 467 ; rapports de MM. Quetelet et Duprez sur cette notice, 456. Muenter (J.). — Sur l’ergot du seigle et sur le Sclerotium en général, 4, 215; rapport de M. Spring sur cette notice, 154. N. Namur. — Notice sur un manuscrit de Pline, 500, 408; rapports de MM. Roulez et Baguet sur cette notice, 568, 372. Navez.— Membre du jury pour le concours quinquennal de gravure en taille-douce , 147. Nerenburger. — Commissaire pour une notice de M. Gilbert, 455; sur la mesure de l'arc de parallèle européen de plus grand développement, 457. TABLE DES AUTEURS. 717 Nyst.— Autorisé à recueillir les fossiles découverts dans les travaux d’An- vers, 514; notice sur quelques recherches paléontologiques faites aux environs d'Anvers, 625. P. Parioes. — Commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux, 441. Plateau. — Lecture des rapports de MM. Lamarle et Quetelet sur son mé- moire relatif aux figures d'équilibre d'une masse liquide sans pesanteur ome série, 4; commissaire pour une note de M. Rousseau, 315 ; rapport sur Cette nole, 455. Polain. — Commissaire pour un mémoire de concours, 225; membre de la commission pour la publication des monuments de la littérature fran- çaise en Belgique , 339. Potvin. — Lauréat du concours triennal de littérature dramatique fran- çaise, 585. Q. Quetelet (Ad.).— Dépôt des’ phénomènes périodiques observés à Bruxelles, en 1860 et 1861, 515, 454; dépôt du trente-deuxième volume des mé- moires de l’Académie, 2; hommage d’un ouvrage, 5; sur le minimum de température observé à Bruxelles, 9; sur la physique du globe, 178; observations de l’occultation des Pléïades et du passage au méridien de la lune et des étoiles de même culmination, le 17 février 1861, 289 ; com- missaire pour une notice de M. Montigny, 515; rapport sur cette notice, 456; commissaire pour une note de M. Gallardo-Bastant, 5315; rapport sur cette note, 456; note sur l’inclinaison et la déclinaison de l’aiguille aimantée en 1860 et 1861, 516; note sur une aurore boréale observée le 9 mars 1861, 517; note sur l'orage du 28 mars 1861, 518; de l’état de la feuillaison et de la floraison au commencement de 1861, 519; com- missaire pour une notice de M. Gilbert, 455; commissaire pour une notice de M. Heïs, 455; remerciments pour la médaille qui lui a été décernée par l’Académie , 615, 679, 686; délégué au congrès artistique d'Anvers, 685. LE Radoux. — La fille de Jephté, épisode lyrique, paroles de Denis Sotiau, 587. Rigouts-Verbert. — Dépose les phénomènes périodiques observés à An- vers en 4860, 454. 718 TABLE DES AUTEURS. Roelandt. — Commissaire pour un mémoire de M. Ducpetiaux , 441. Roulez. — Membre du comité de présentation pour les places vacantes dans la classe des lettres, 225; commissaire pour une notice de M. Na- mur, 500; rapport sur cette notice, 568. Rousseau. — Note sur les appareils servant à faciliter l'étude de la théorie des ondes lumineuses ou de la théorie des ondes sonores, 515, 507; rapports de MM. Plateau et Duprez sur cette note, 455. S. Siret. — Annonce la découverte de documents relatifs à Memline, 280. Snel. — Annonce de sa mort, 440. Snellaert. — Commissaire pour une notice de M. Gheldolf, 500; rapport sur cette notice, 562. Société provinciale d'Utrecht. — Envoi de son programme de concours ;, 679. Spring. — Commissaire pour une notice de M. Muenter, 4; rapport sur cette notice, 154; hommage d’un ouvrage, 286 ; commissaire pour une notice de M Coemans , 455. Stas. — Réélu membre de la commission administrative pour 1861, 105; commissaire pour un mémoire de M. Bergé, 286; rapport sur une notice de M. Kekulé, 625; commissaire pour une notice de M. Liefman , 625. T. Theiner (Augustin). — Remercîments pour son élection d’associé, 104. Thonissen. — La théorie du progrès indéfini, réponse à quelques objec- tions , 125. Tiedemann. — Annonce de sa mort, 286. Timmermans. — Rapport sur une note de M. Gilbert, 176; sur une lettre relative au concours extraordinaire des sciences mathématiques rem- plaçant le prix quinquennal pour la période de 1854 à 1858, 287. Trompeo (B.). — Annonce la création d’un observatoire magnétique à Turin, 614. U. Université de Christiania. — Remerciments pour les rapports faits sur l'ouvrage relatif à la restauration de la cathédrale de Drontheim, 266; hommage de deux médailles d'argent, 614. Dr D TABLE DES AUTEURS. 719 V: Van Bemmel. — Membre du jury pour le prix triennal de littérature dra- matique française , 224. - Van Beneden. — Note rectificative du discours prononcé à la séance pu- blique du mois de décembre dernier, 199; sur le développement de la queue des poissons plagiostomes , 293; autorisé à visiter officiellement les travaux d'Anvers, 314. - Vandersypen. — Auteur d’une planche pour le prix quinquennal de gra- vure en taille-douce, 146. Van Hasselt. — Élu directeur pour 1862, 147; membre de la commission pour la publication des monuments de la littérature française en Bel- gique, 559; membre du jury pour le concours des cantates, 448 ; délégué au congrès artistique d'Anvers , 684. Vattemare. — Annonce un envoi d'ouvrages de l'Amérique, 154, 315. Vincent et fils. — Dépôt des phénomènes périodiques observés à Bruxelles en 1860, 154. Visschers. — Membre du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques, 224. Vrolik ( W.). — Remerciments pour son élection d’associé, 2. VE Wagner. — Mémoire sur la symphonie, 685. Wauters (A.). — Hommage d’un ouvrage, 538. | Wesmael (A.).— Notice sur un Circium hybride, 101 ; rapport de M. Kickx sur cette notice , 15; observations sur la structure anormale des silicules dans le Draba verna, 455, 660 ; rapport de MM. Kickx et Martens sur cette notice, 619. Wesmael (C.). — Lecture de son rapport sur les notices de M. Belval, 4. Westendorp (G. D.). — Septième notice sur quelques cryptogames nou- velles ou inédites pour la flore belge, 455, 644; rapport de M. Kickx sur cette notice, 618. Windischmann. — Élu associé, 334; remerciments pour son élection, 679. TABLE DES MATIÈRES. A. Anatomie comparée. — Voir Zoologie. Antiquités el archéologie. — Tombeau romain ou gallo-romain, décou- vert à Schaerbeek lez - Bruxelles, par M. Chalon, 501 ; sur des fouilles faites récemment à Schaerbeek, note de M. Chalon, 575. Arrétés royaux et ministériels. — Nommant M. Liagre président de l’Académie pour 1861 , 2; nommant le jury chargé de décerner le prix quinquennal d'histoire, 104; nommant le jury chargé de décerner le prix triennal de littérature dramatique française , 225 ; nommant le jury chargé de décerner le prix quinquennal pour les sciences morales et politiques, 224 ; réglant le programme pour le concours biennal de com- position musicale, 305; accordant à MM. De Koninck, Van Beneden, Du Bus, Nyst et Belval, l'autorisation de visiter les travaux de terras- sements faits à Anvers et d’y recueillir les fossiles découverts, 314; accordant un prix pour le concours des poëmes , 459. Astronomie. — Observations de l’occultation des Pléiades et du passage au méridien de la lune et des étoiles de même culmination, le 17 février 1861, par M. Ad. Quetelet, 289 ; sur la mesure de l’arc de parallèle européen de plus grand développement , par M. Nerenburger, 457. B. Bibliographie. — Sur un manuscrit de Plinü Historia naluralis, de la fin du onzième siècle, conservé à la bibliothèque de l’athénée du Luxembourg, par M. Namur, 408; rapports de MM. Roulez et Baguet sur cette notice, 568, 572; annonce de la découverte de documents relatifs à l'ancienne Académie, par M. Gachard, 679. Billets cachetés. — Dépôt par M. Gilbert, 614. Biographie. — Annonce, par M. Ad. Siret, de la découverte de documents dede 0 - méchbé dde TABLE DES MATIÈRES. 721 inédits concernant le peintre Memlinc, 280; M. F. Fétis promet une notice sur M. Snel, 441; les artistes belges à l'étranger : Philippe et Nicolas Vleugels; par M. Ed. Fétis, 686. Botanique. — Notice sur un Cirsium hybride, par M. A. Wesmael, 101; rapport de M. Kickx sur cette notice, 5: sur l’ergot du seigle et sur les Sclerotium en général, considérés au point de vue morphologique, par M. J. Muenter, 215; rapport de M. Spring sur cette notice, 154; de l’état de la feuillaison et de la floraison au commencement de 1861, par M. Âd. Quetelet, 319; sur quelques cryptogames nouvelles ou inédites pour la Flore belge, septième notice, par M. Westendorp, 644 ; rapport de M. Kickx sur cette notice, 618 ; observations sur la structure anomale des silicules dans le Draba verna, par M. À. Wesmael , 660; rapports de MM. Kickx et Martens sur cette notice, 619, 621. C. Caisse centrale des artistes belges. — Situation au 1° janvier 1861, 147; somme provenant des retenues opérées sur le prix de vente des œuvres d’arts vendues à l'exposition générale de 1860 et subside accordé par le gouvernement , 506; rapport annuel présenté par M. Fétis sur la situa- tion de la caisse pendant l’année 1860, 508 ; réception, par le trésorier, d’une somme de cinq cents francs , 440. Chimie. — Note sur la poudre de guerre , de mine et de chasse, par M. Melsens, 13; note sur les acides fumarique et maléique et sur leurs relations avec l'acide succinique, par M. A. Kekulé, 84; considérations sur la nature des corps simples, par M. Martens , 195; communication verbale relative aux éprouvettes à poudre, par M. Melsens, 511 ; note sur les acides itaconique et pyrotartrique, par M. A. Kekulé, 662. Commissions. — Chargée de la présentation de candidats aux places va- cantes dans la classe des lettres, 225 ; rapport de la commission chargée de décerner le prix quinquennal pour la gravure en taille douce, 507 ; chargée de recueillir les objets d'histoire naturelle découverts dans les travaux de terrassements effectués à Anvers, 514; chargée de la rédac- tion du programme pour les prix de Stassart, 559 ; chargée de la publi- cation des anciens monuments de la littérature française en Belgique, 999 ; chargée de juger les cantates pour le concours biennal de compo- sition musicale, de 1861, 447 ; chargée de juger les modifications à ap- _porter aux concours pour les prix quinquennaux, 678. Commission de la Biographie nationale. — Rapport annuel de 1861, par M. Éd. Fétis, 595. 722 . TABLE DES MATIÈRES. Concours de la classe des beaux-arts. — Résultats du concours quin- quennal pour la gravure en taille-douce et nomination des commissaires , 146 ; décision prise à l'égard de ce concours, 507 ; résultats négatif du concours de 1861, 685. Concours de la classe des lettres. — Résultats du concours de 1861 et nomination des commissaires , 224; rapports de MM. Ducpetiaux, P. Devaux et Arendt sur les mémoires envoyés en réponse à la deu- xième question, 515, 550,555; rapports de MM. David, Grandgagnage et le baron de Gerlache sur le memoire envoyé en réponse à la qua- trième question, 254, 558, 540 ; rapports de MM. David, De Smet et Borgnet sur le mémoire envoyé en réponse à la cinquième question, 54, 547, 591 ; rapport de M. Kervyn de Lettenhove sur le mémoire envoyé en réponse à la sixième question , 552 ; programme de concours pour 1862, 680. Concours de la classe des sciences. — Programme pour 1861, 6; ques- tion pour 1862 et 1865, 7. Concours de composition musicale (grands). — Programme de concours pour les poëmes, 505, 459; nomination des commissaires , 487; résultats de ce concours et poëme couronné, 587. Concours extraordinaires. — Arrêté royal nommant les membres du jury chargé de décerner le prix triennal de littérature dramatique française , 295 ; résultats de ce concours, 585; programme du concours pour l'ori- gine belge des Carlovingiens, 682. Concours pour les prix de Stassart. — Décision prise par la commission, 359 ; programme pour les prix à décerner en 1865 et 1864, 685. Congres. — Invitation adressée par le congrès artistique d'Anvers, 654. D. Discours. — Adressé à Sa Majesté le Roi, le premier jour de l'an par le président de l'Académie, M. Gachard, 105; paroles adressées par le président de l'Académie, M. le major Liagre, à M. Ad. Quetelet, à l'oc- casion de la médaille commémorative offerte par la compagnie, 556 ; remerciments aux trois classes de l'Académie, par M. Quetelet , pour cet hommage, 625. Dons. — Hommage d'ouvrages par M. Ad. Quetelet, 3,105; par M. Maïlly, 5; par M. de Ram, 105; par M. Ducpetiaux , 105; par M. Alvin, 145; par M. Vattemare, 154; par M. Spring, 286 ; par MM. Lelewel et Th. Juste, 299; par M. le Ministre de l’intérieur, 514; par M. le Ministre de la Jus- tice, 558; par M. Wauters, 558 ; par M. Fr. Fétis, 449; par MM. De Witte D TABLE DES MATIÈRES. ” 7235 et Fr. Lenormant, 514; de deux médailles par l’université de Chris- tiania , 614. E. } Élections. — M. Liagre nommé président de l’Académie pour 1861, 2; M. Sias, réélu membre de la commission administrative pour 1861 , 1053; M. De Koninck élu directeur pour 1862, 105; M. De Decker élu direc- teur pour 1862, 107; M. Leclercq, réélu membre de la commission ad- ministrative pour 1861, 107 ; M. Van Hasselt élu directeur pour 1862, 147 ; M. Braemt réélu membre de la commission administrative pour 1861, 147, MM. Roulez, Leclercq et Gachard élus membre du comité de présentation pour les places vacantes dans la classe des lettres, 225 ; MM. le baron de Gerlache, Kervyn de Lettenhove, Polain, le baron de Saint-Genois et Van Hasselt élus membres de la commission pour la pu- blication des monuments de la littérature française, en Belgique, 339 ; commission chargée de juger les cantates pour le concours de composi- tion musicale, 447 ; MM. Windischmann , De Koehne et Cantü élus as- sociés de la classe des lettres, 554. Épigraphie. — Inscription pour la médaille offerte à M. Ad. Quetelet, 538. G. Géologie.— Sur la constitution du système eifélien dans le bassin anthraxi- fère du Condros, par M. G. Dewalque, 64. H. Histoire. — Le proces de Robert d'Artois, par M. Kervyn de Lettenhove, 107; variétés historiques, XV à XIX, par M. Gachard, 226; Saint Ber- nard, documents inédits par M. Kervyn de Lettenhove, 252; étude sur la signification du mot Balfart, dans les chartes de la Flandre, par M. Gheldolf, 374; rapports de MM. Kervyn de Lettenhove, De Smet et Snellaert sur cette notice, 540,359, 562; rapports de MM. David , Grand- gagnage et le baron de Gerlache sur un mémoire de concours relatif à l’ancienne institution brabanconne connue sous le nom de Joyeuse- _ Entrée, 554, 538, 340 ; rapports de MM. David, De Smet et Borgnet sur un mémoire de concours relatif aux règnes de Jean IT et de Jean IIT, ducs de Brabant, 544, 547, 551 ; Jean L. Peur et l'apologie du tyran- nicide , par M. Kervyn de Lettenhove, 558. 724 TABLE DES MATIÈRES. L. Liiérature française. — Rapport de M. Kervyn de Lettenhove sur un mémoire relatif à Philippe de Commines considéré comme écrivain et comme politique, 592. M. Mathématiques. — Extension générale du procédé suivi pour le dévelop- pement homalographique des surfaces de révolution, par M. E. Lamarle, 42; remarques sur la théorie des équations différentielles linéaires, par M. Ph. Gilbert, 200 ; rapport de M. Timmermans sur cette note, 176; note sur la détermination géométrique des hélicoïdes gauches suscep- tibles de s'appliquer l’un sur l’autre sans déchirure ni duplicature, par M. Lamarle, 321. Mécanique. — Observations sur les effets de la chaleur dans les siphons renversés à trois branches, qui fonctionnent à Bardonêche, au mont Cénis et du côté de Modane, par M. le marquis de Caligny, 627; note sur l'invention et la disposition des vannes cylindriques dans les siphons renversés à trois branches qui fonctionnent à Bardonêche, par le même, 655. Météorologie et physique du globe. — Sur le minimum de température à Bruxelles, par M. Ad. Quetelet, 9; sur le froid de janvier 1861, à Gand par M. Duprez, à Louvain par M. Florimond, à Stavelot par M. Dewalque, et à Namur par M. Maas, 11 ; rapports de MM. Montigny et Gloesener sur une note de M. Florimond, concernant l'électricité atmosphérique, 156, 168 ; sur la physique du globe, par M. Ad. Que- telet, 178; note sur l'inclinaison et la déclinaison de laiguille aimantée en 1860 et 1861 à l'observatoire royal de Bruxelles, par M. Ad. Que- telet, 516; note sur une aurore boréale observée à Bruxelles le 9 mars 1861, par le même, 517 ; note sur l'orage du 28 mars 1861, par le même, 318; recherches sur la cause de l'influence des vents sur la pres- sion atmosphérique, par M. Montigny, 467 ; annonce de la création d’un observatoire magnétique à Turin, par M. Trompeo, 614; suite des ob- servations de la lumière zodiacale faites à Münster (Westphalie), par M. Heis, 640; observations des étoiles filantes périodiques du mois d'août et du mois de novembre 1860, faites en Allemagne et recueillies par le même, 642; aurores boréales en 1860 et 1861, observations re- cueillies par le même, 644. Musique. — Résolution prise par le Ministre de l’intérieur de faire im- TABLE DES MATIÈRES. 795 primer les œuvres de Tinctoris, éditées par M. Fr. Fétis, 265; note sur la découverte récente des plus anciens monuments de la typographie musicale , et, par occasion, sur les compositeurs belges du quinzième siècle, par M. Fr. Fétis, 267; rapports de MM. Daussoigne-Méhul et Fr. Fétis sur une messe solennelle de M. Pierre Benoît, 441. N. Nécrologie. — Annonce de la mort de M. Tiedeman, 286; de M. Snel, 440; de M. Barry, 586 ; de M. Lelewel, 678. 0. Ouvrages présentés. — 148 ; 281 ; 509 ; 448 ; 605 ; 702. BP. Paléontologie. — Observations par M. le vicomte Du Bus sur les décou- vertes faites dans les travaux de terrassement à Anvers, 511; notice sur quelques recherches paléontologiques faites aux environs d'Anvers, par M. H. Nyst, 6253. Phénomènes périodiques. — Dépôt des observations faites, 2, 5, 154, 286, 5315, 454, 614. Physique. — Note sur des appareils servant à faciliter l’étude de la théorie des ondes lumineuses ou de la théorie des ondes sonores, par M.E. Rous- seau, 507. Prix quinquennaux. — Membres du jury chargé de décerner le prix quinquennal d'histoire, 134; sur une lettre relative au concours extraor- dinaire des sciences mathématiques remplaçant le prix quinquennal pour la période de 1854 à 1858, par M. Timmermans, 287; annonce, par M. le Ministre de l’intérieur, que le prix quinquennal d'histoire pour la troisième période ne sera pas décerné , 514; rapport du jury pour le prix quinquennal des sciences morales et politiques (période de 1856 à 1860), par M. Ch. Faider, 571; annonce de la proposition de modifica- tions au règlement pour les prix quinquennaux, faites par le jury, pour les sciences morales et politiques, 678. K. Rapports. — De MM. Lamarle et A. Quetelet sur un mémoire de M. Pla- 2e SÉRIE, TOME XI. 90 726 TABLE DES MATIÈRES. teau relatif aux recherches expérimentales et théoriques sur les figures d'équilibre d’une masse liquide sans pesanteur (cinquième série), 4; de MM. Wesmael et Candèze sur deux notices de M. Belval, relatives à l’Ixodes Poortmani et sur le Semiotus sanguinicollis et le S. Suturalis , 4; de M. Kickx sur une notice de M. Alf. Wesmael, concernant le Cir- sium hybride, 5; de M. Spring sur une notice de M. J. Muenter, rela- tive à l’ergot du seigle et sur les Sclerotium en général, considérés au point de vue morphologique, 154; de MM. Montigny et Gloesener sur une note de M. Florimond, concernant l’électricité atmosphérique, 156, 168; de M. Timmermans sur une note de M. Ph. Gilbert, concernant la théorie des équations différentielles linéaires, 176; de MM. Kervyn de Lettenhove, De Smet et Snellaert sur une notice de M. Gheldolf, relative au mot Balfart, 540, 559, 362; de MM. Daussoigne-Mébul et Fr. Fétis sur une messe solennelle de M. Pierre Benoît, 441 , 442; âe MM. Pla- teau et Duprez sur un mémoire de M. E. Rousseau, concernant l’étude des ondes lumineuses ou de la théorie des ondes sonores, 455; de MM. Duprez et A. Quetelet sur une notice de M. Montigny, relative aux causes de l'influence du vent sur la pression barométrique, 456 ; de MM. Duprez et A. Quetelet sur une note de M. Gallardo-Bastant , relative aux aérolithes, 456; de MM. Ducpetiaux, P. Devaux, Arendt, David, Grandgagnage, le baron de Gerlache, De Smet, Borgnet et Kervyn de Lettenhove sur les mémoires envoyés en réponse au programme de con- cours de la classe des lettres pour 1861, 515, 530, 533, 534, 558, 540, 344, 547, 551, 552; de M. Kickx sur une notice de M. Westendorp, concernant quelques cryptogames nouvelles pour la flore belge (septième série), 618; de MM. Kickx et Martens sur des observations botaniques de M. A. Wesmael, 619, 621. S. Sciences morales et politiques. — La théorie du progrès indéfini. Réponse à quelques objections, par J.-J. Thonissen , 125; rapports de MM. Duc- petiaux, P. Devaux et Arendt sur deux mémoires de concours relatifs aux applications les plus utiles et pratiques du principe de l’association pour l’amélioration des classes ouvrières et indigentes, 515, 550, 533 ; rapport fait par M. Ch. Faider, au nom du jury chargé de décerner le prix quinquennal des sciences morales et politiques pour la période de 1856 à 1860, 571. TABLE DES MATIÈRES. 727 Z. Zoologie. — Note sur une variété de Semiotus , établissant la transition entre le Sem. sanguinicollis et le Sem. suturalis, par M. Th. Belval, 95; note sur l’Ixodes Poortmani (Lucas), par le même, 97; note rectifica- tive du discours prononcé par M. Van Beneden, à la séance publique du mois de décembre , et relative à la taille des mammifères, 199 ; sur le développement de la queue des poissons plagiostomes, par M. Van Beneden , 295. ERRAT A. TouE XI. Page 315, ligne 22 (notice de M. de Caligny), au lieu de : Bordonèche , hsez : Bardonèche. Page 344, ligne 10 (notice de M. Kervyn de Lettenhove), au lieu de : colonisa- tion anglo-saxonne , lisez : colonisation saxonne. Page 489, ligne 17 (notice de M. Montigny), au lieu de : vent d’E., lisez : vent de NE. spa LOUE Han je ge té a ONE QUELS LT NON TRUE L'ANPE cut e6x PE PAL LOT LC TI NT MAN EPETT EN CT 14 Me At pa RES. 3 9088 01300 2191