AcA O/VV HARVARD UNIVERSITY. L I H R A H Y MUSEUM OP COMPARATIVE ZOÔLOGY. XckajyvOL \IVjj. IQ BULLETINS DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES , DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 46™ ANNÉE, 2me SÉRIE, T. XLIV. 1877. BRUXELLES, F. RAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. MDCCCLXXVII BULLETINS L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. BULLETINS DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. QUARANTE-SIXIÈME ANNÉE. — 2me SÉR., T. XLIV. BRUXELLES, F. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DE RELGIQUE. 1877 BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE. 1877. — N° 7. CLASSE DES SCIENCES. Séance du 7 juillet i811 ' . M. Maus, directeur. M. Liagre, secrétaire perpétuel. Sont présents : MM. J.-C. Houzeau , vice - directeur ; L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Long- champs, H. Nysl, Gluge, F. Duprez, Ern. Quetelet, Ern. Candèze, Ch. Monligny, A. Brialmont, Éd. Dupont, Éd. Morren, C. Malaise, F. Folie, F. Plateau, F. Crépin et Éd. Mailly, membres; Th. Schwann et E. Catalan, associés; H. Valerius, F.-L. Cornet, G. Yan der Mens- brugghe et M. Mourlon, correspondants. 2me SÉRIE, TOME XLIV. I (2) CORRESPONDANCE. M. le Ministre de l'Intérieur transmet, pour la biblio- thèque de l'Académie, un exemplaire : 1° des Annales de la Société scientifique de Bruxelles, lre année, 1875-1 876; 2° de la Revue des questions scientifiques, publiée par la môme Société, lre année, lre et 2e livr., janvier et avril 1877; gr. in-8°. — M. le baron Greindl, secrétaire général de l'asso- ciation internationale africaine, remercie pour la somme de 515 francs, formant une partie de la souscription de l'Académie à l'œuvre civilisatrice de l'Afrique. — M. le docteur A. Houzé prie la classe d'accepter pour les archives un billet cacheté portant la date du 16 juin dernier. — Ce dépôt est accepté, après contre- seing du directeur et du secrétaire perpétuel. — L'Institut canadien à Toronto exprime le désir d'entrer en relation d'échange de publications. — Renvoi à la Commission administrative. — Les Établissements scientifiques dont les noms suivent font parvenir leurs dernières publications : La Société néerlandaise de zoologie à Rotterdam, l'Académie des sciences de Cracovie , la « Naturforscher Gesellschaft » de Dorpat, « l'Accademia dei Nuovi Lincei » de Rome, l'Académie des sciences de Munich, l'Institut géologique de Vienne , l'Académie des sciences de S'-Péters- bourg et le Musée public de Buenos-Ayres. (3 ) — La Société des arts et des sciences de Batavia, la « Provinciaal Genootschap van kunsten en wetenschappen » àBois-]e-Ducetla«Smithsonian institution of Washington» remercient pour les dernières publications académiques. — M. le comte G. deSaporta remercie pour la décision d'impression prise à l'égard de son mémoire sur la Révi- sion de la flore heer sienne de Gelinden, écrit en collabora- tion avec M. le docteur Marion. — M. P.-J. Van Beneden fait hommage de la première partie de sa Description des ossements fossiles des envi- rons d'Anvers, qui forme le tome 1er des Annales du Musée royal d'histoire naturelle de Belgique. Cette partie, dont l'atlas, composé de 18 planches in-plano, a été offert dans la séance du 7 avril dernier, a pour sujet la descrip- tion des Pinnipèdes ou Amphithèriens. M. Van Beneden offre ensuite de la part de M. le profes- seur G. Capellini de Bologne un exemplaire de l'ouvrage intitulé: Délia Balena di Taranto confrontata con quelle délia nuova Zelanda e con lalune fossili del Delgio e délia Toscana. Con tre tavole. In-4°. « Ce travail, dit-il, se rapporte à la Baleine faisant l'objet de la note que j'ai publiée dans le Bulletin du mois de juin dernier. » M. F.-L. Cornet fait hommage d'une brochure intitulée : Sur un gisement de combustible dans les Alpes transylva- niennes. Extr. in-8° des Ann. de la Soc. géol de Belgique. Des remerciments sont votés pour ces dons qui seront déposés dans la bibliothèque de l'Académie. ( 4) — La classe renvoie à l'examen de commissaires les travaux manuscrits suivants : 1° Mémoire sur un compteur électrique, par M. Achille Brachet. — Commissaires : MM. Montigny et Duprez; 2° Sur les sous-normales polaires et la courbure des surfaces , par M. Emile Ghysens. — Commissaires : MM. Catalan, De Tilly et Folie. CONCOURS DE 4877. M. le secrétaire perpétuel annonce qu'il a reçu, à la date du 50 juin dernier, un mémoire, avec billet cacheté, en réponse à la question suivante du programme de concours de 1877, dont le terme fatal n'expire que le 1er août prochain : On demande de nouvelles recherches pour établir la com- position et les rapports mutuels des substances albumi- uoïdes. Le billet cacheté porte comme devise les deux vers de Lucrèce (De Natura rerum) : Aliud ex alio reficit natura, nec ullani Rem gigni patitur, îiisi morte adjuta aliéna. Les commissaires chargés de faire l'examen de ce travail seront nommés lorsque le concours sera clos. ( o ) RAPPORTS. De l'influence de la forme des corps sur l'attraction qu'ils exercent; par M. C. Lagrangc, ancien élève de l'École militaire de Bruxelles. ttap/jot'l tic M. d. !'«»• de»' Jtlcnsbfugyhv. « On démontre en statique qu'un corps sphérique homo- gène ou composé de couches concentriques homogènes attire un point matériel extérieur, comme si toute la masse du corps était réunie à son centre d'inertie ; pour un corps de forme quelconque, ce théorème n'est vrai que d'une manière approchée, et encore faut-il que le point matériel soit à une distance suffisamment grande du corps attirant. D'après cela, il semblait naturel de rechercher les varia- tions qu'éprouve l'attraction exercée par un corps, quand on fait varier non-seulement la quantité de matière atti- rante, mais encore la façon dont cette matière est distri- buée dans l'espace, c'est-à-dire la forme du corps. Feu le major Brùck avait entrevu la solution de ce problème, mais ses idées, d'ailleurs fort incomplètes et demeurées inédites, attendaient toujours un travailleur qui pût les développer et surtout en montrer toute la fécondité. Ce travailleur apparaît aujourd'hui; dans le Mémoire qu'il a soumis au jugement de l'Académie, M. Lagrange, ancien élève de l'École militaire, présente une esquisse très-remarquable, selon moi, des lois suivant lesquelles varie l'attraction avec la forme du corps. (0) Le Mémoire se compose de deux parties, l'une purement théorique et rigoureuse, l'autre, plus ou moins hypothé- tique, où l'auteur cherche à appliquer les résultats de ses calculs; comme il a manifesté le désir de revoir et de com- pléter la seconde partie, je ne m'occuperai ici que de la première. M. Lagrange débute par la remarque suivante: si une masse quelconque se trouve à l'intérieur d'une surface fermée, l'attraction exercée par la masse en question sur un point matériel situé sur cette surface, n'est pas la même quelle que soit la position du point ; car l'attraction est une fonction du potentiel du corps considéré par rap- port au point pris sur la surface, et devient ainsi suscep- tible de passer par un maximum et par un minimum. Si le point matériel est pris sur l'une des surfaces repré- sentées par l'équation ? {x, y,z,a)=0, dans laquelle a est un paramètre variable, et qu'on cherche sur chacune d'elles les points où l'attraction atteint des valeurs extrêmes, le lieu géométrique de ces points se composera d'un certain nombre de lignes que l'auteur nomme, en général, lignes d'attraction maximum et lignes d'attraction minimum relativement à la famille de surfaces considérée, et d'une façon absolue, lignes d'attraction maximum ou minimum, si elles se rapportent à une série de sphères concentriques ayant pour centre le centre d'inertie du corps. L'auteur se pose ensuite le problème suivant: étant donnée une quantité de matière de forme quelconque, chercher l'attraction qu'elle exerce sur un point matériel situé à une distance d du centre d'inertie du corps. (7) Dans l'hypothèse où l'on peut négliger^, il arrive aux conclusions suivantes : 1° Pour un point quelconque de la surface sphérique de rayon d, l'attraction est dirigée suivant une droite qui ne coïncide pas avec le rayon de la sphère. 2° La force d'attraction passe, au contraire, par le centre d'inertie, quand la droite qui joint celui-ci au point matériel coïncide avec l'un des axes principaux d'inertie du corps. 5° Aégaliléde distance du centre d'inertie, l'attraction est un maximum sur l'axe d'inertie minimum, et un mini- mum sur l'axe d'inertie maximum. 4° Enfin quand l'attraction passe par son maximum, elle est plus grande que si toute la masse était concentrée au centre d'inertie; au contraire, elle est plus petite que si toute la masse était réunie au centre d'inertie, quand s'opère le passage par le minimum. M. Lagrange examine ensuite le cas où les axes d'inertie principaux du corps sont en même temps des axes de symé- trie, et signale un exemple à l'appui de ce fait curieux que l'inertie minimum ne répond pas toujours à l'attraction maximum , à quelque distance que ce soit du centre d'inertie. Après avoir obtenu ces résultats fort intéressants, l'au- teur démontre qu'à égalité de distance du centre d'inertie, le potentiel est respectivement maximum ou minimum sur les axes d'inertie minimum et maximum du corps; il trouve, en outre, que, dans l'hypothèse où il s'est placé, les surfaces d'égal potentiel ont la forme de sphéroïdes dont les grands axes, les axes moyens et les petits axes coïncident respectivement avec les axes d'inertie mini- mum, moyen et maximum du corps attirant; de plus, ces sphéroïdes admettent des sections circulaires passant par l'axe moyen d'inertie. (S) Restait à faire voir l'importance de la propriété concer- nant la direction de la force attractive exercée sur un point matériel appartenant à une sphère du rayon d ; dans ce but, M. Lagrange fait passer par le point attiré une surface d'égal potentiel, et prouve, d'une manière bien simple, que le point en question non-seulement tend à se rapprocher du centre d'inertie, mais possède encore un mouvement angulaire autour de ce centre. Il suit de là, d'après l'auteur, que 1° si le point attiré se meut sur la sphère, il sera, en général, sollicité vers le point d'intersection le plus voisin de la sphère avec l'axe d'inertie minimum ; les deux points d'intersection de cet axe sont donc des positions d'équilibre stable. 2° Si le point est situé dans le plan des axes d'inertie maximum et moyen, il sera sollicité vers l'intersection la plus voisine de la sphère avec l'axe moyen ; les deux points d'intersection de ce dernier sont des positions d'équilibre stable, dans le plan dont il s'agit, d'équilibre instable, dans le plan des axes maximum et minimum, et d'équilibre indifférent, dans les plans des sections cir- culaires des surfaces d'égal potentiel. 5° Si le point attiré est libre, il y a à la fois mouvement direct vers le centre d'inertie, mouvement angulaire du rayon vecteur vers l'axe d'attraction maximum, et mouve- ment angulaire du plan de cet axe et du rayon vecteur vers le plan des axes d'inertie moyen et minimum. L'auteur termine l'exposé de ces diverses déductions en démontrant que, si l'on peut négliger ys, une masse quel- conque agit comme si elle était symétrique par rapport aux trois plans déterminés par les trois axes principaux d'inertie, et imagine une distribution fort simple de matière pouvant tenir lieu de la masse donnée. (9) M. Lagrange aborde alors le cas général de l'attraction réciproque de deux masses quelconques. Il cherche d'abord comment, étant donnée la distance des centres d'inertie des deux masses, celles-ci doivent être placées l'une par rapport à l'autre, pour que l'action réciproque soit un maximum ou un minimum ; il trouve que l'attraction mutuelle est respectivement maximum ou minimum, quand les axes d'inertie minimum ou maximum des deux masses coïncident, les autres axes d'inertie étant parallèles deux à deux. Comme on pouvait le prévoir d'après les résultats expo- sés précédemment, quand l'action atteint son maximum, elle est plus grande que si les masses étaient condensées en leurs centres d'inertie; elle est moindre dans le cas du minimum. L'auteur établit ensuite les moments de rotation de l'une des masses qu'il suppose douée d'un point fixe ; il fait remarquer que ces moments de rotation ne dépendent pas de la forme des deux masses considérées, mais uniquement de celle de la masse douée dsun point fixe. Il passe enfin au cas où le mouvement de chacune des deux masses est libre, et arrive à conclure qu'elles tour- nent sur elles-mêmes, avec une tendance constante à ame- ner en coïncidence leurs axes d'inertie minimum. Je n'insisterai pas sur les applications que l'auteur se propose de faire à la mécanique céleste et à la mécanique moléculaire ; j'estime toutefois qu'il faut attendre avec quelque impatience le moment où il aura mis la dernière main au travail qu'il nous promet à cet égard. On voit, d'après l'analyse succincte qui précède, que le Mémoire de M. Lagrange présente un puissant intérêt en lui-même; j'ajouterai que les applications auxquelles il ( K» ) donnera lieu, ne pourront manquer d'en augmenter encore la valeur. C'est assez dire que, de même que mon savant confrère M. Folie (1), je regarde le Mémoire de M. Lagrange comme pouvant occuper une place très-honorable dans l'un des Recueils de l'Académie; en conséquence, j'ai l'honneur de proposer à la classe d'ordonner l'impression de la partie théorique (la seule dont je me suis occupé) au Bulletin delà séance, et d'adresser des remercîments à l'auteur pour son importante communication. » Rappoft tle M. Calatat*. « Après le lumineux rapport que Ton vient de lire, je n'ai rien de mieux à faire qu'à me rallier aux conclusions de notre honorable confrère, M. Van der Mensbrugghe. Cependant, je poserai une objection, ou plutôt une simple question, à l'intelligent auteur du Mémoire. Après avoir mis la valeur de u sous la forme 1/
5 ) Les valeurs de 9 et 9' peuvent s'écrire b) ?= 2/iMp, hv+d) ïïv-j) ) :j 6\« a!) 1 b,y- 4/»»^ Pour de très-grandes valeurs de d,^ devient négligeable devant l'unité et l'on a On peut donc affirmer que pour de très-grandes valeurs de cl, 9'<9, c'est-à-dire que l'axe d'inertie maximum est axe d'attraction minimum, ce qu'on savait déjà par les formules générales. Il n'en est plus de même pour de petites valeurs de d et l'on peut mettre le fait en évidence en posant ^ = a et donnant à a des valeurs décroissantes. Voici un tableau des valeurs à très-peu près exactes de 9 et 9' pour différentes valeurs de a : a
0 pour a = 1 et^< 0 pour a = 2;
c'est-à-dire que 9 atteint un maximum entre d = b et
d = 26.
On voit également qu'à de faibles dislances l'attraction
peut croître bien plus rapidement que l'inverse du carré
de la distance au centre d'inertie. Sur l'axe d'inertie maxi-
mum, en effet, quand d passe de 106 à 26, c'est-à-dire
devient cinq fois moindre, l'attraction cp', au lieu d'être
vingt-cinq fois plus grande, le devient cent fois plus.
&. Il existe des corps dont deux moments d'inertie
principaux sont égaux, d'autres dont les trois moments
sont égaux.
Pour les premiers, en employant l'approximation précé-
dente, on voit que l'attraction est indépendante de la direc-
tion autour du centre d'inertie, dans le plan des axes
d'inertie égale.
Dans ce pian sur une droite qui passe par le centre
d'inertie, elle augmente plus rapidement que l'inverse du
carré de la distance, mais elle augmente également, quelle
que soit celte droite.
Pour les seconds, si l'on décrit du centre d'inertie une
série de sphères concentriques, d'une sphère à la sphère
immédiatement intérieure, sur un rayon donné, l'attrac-
tion augmente plus rapidement que l'inverse du carré de
( 3S )
la distance, mais de la même quantité, quel que soit le
rayon.
Quand il faudra tenir compte des puissances — 5" de la
distance 8, on cherchera à placer les axes coordonnés de
telle sorte que les coefficients de -^ dans X et Y soient nuls
et que le terme en^ clans Z soit maximum ou minimum.
Si ces trois conditions sont compatibles , les lignes
d'attraction extrême seront des droites dirigées vers le cen-
tre d'inertie.
S'il existe dans le corps des axes de symétrie, les con-
ditions précédentes seront toujours satisfaites par la coïnci-
dence de l'axe des z avec chacun de ces axes de symétrie.
Si ces conditions ne sont pas compatibles, l'attraction
maximum ou minimum ne sera pas dirigée vers le centre
d'inertie. La condition générale Rc/R = 0, où la différen-
tiation ne concernera que les termes en js, donnera sur la
sphère de rayon d les points de maximum et de minimum
d'attraction.
Si les coefficients des termes entêtaient nuls ou con-
stants, il faudrait appliquer la même méthode à ceux des
termes en ^, et ainsi de suite.
L'influence de la forme sur la distribution de l'attraction
s'exercera à des distances d'autant moindres que l'exposant
de d dans les termes que l'on doit considérer sera plus
grand en valeur absolue.
9. Les surfaces d'égal potentiel sont déterminées par la
condition qu'en tous leurs points le potentiel ait une valeur
constante.
Si l'on fait varier ce potentiel d'une manière continue, de
la valeur qu'il a à la surface du corps jusqu'à zéro, on
obtient une série de surfaces fermées extérieures au corps,
qui deviennent des sphères de rayon infini quand le poten-
tiel est nul, c'est-à-dire des plans.
(36)
On sait que la direction de l'attraction en un point est
normale à la surface d'égal potentiel qui passe en ce
point.
La trajectoire d'un point librement attiré par un corps
est donc orthogonale aux surfaces d'égal potentiel de ce
corps.
Cherchons à donner une idée de la forme de ces sur-
faces. Sans entrer dans des développements de calcul faciles
à retrouver, nous dirons qu'en partant de la valeur du po-
tentiel T donnée au § 5, on trouve
y. étant le moment d'inertie du corps autour de la droite
qui joint le point attiré au centre d'inertie.
On reconnaît facilement que cette valeur approchée du
potentiel est celle dont la différentiation reproduit les com-
posantes de l'attraction avec l'approximation précédemment
employée.
L'équation (1) montre qu'à égalité de distance du centre
d'inertie, le potentiel est maximum et minimum sur les axes
d'inertie minimum et maximum et que ses variations sont
proportionnelles à celles du moment d'inertie p.
De plus, sur l'axe d'inertie minimum le potentiel est plus
grand que si la masse entière du corps existait au centre
d'inertie; le contraire a lieu sur l'axe d'inertie maximum.
En remplaçant T par une constante 0 dans l'équation (1),
on a pour la surface d'égal potentiel 0 l'équation
(2) .... 1=1 + j—
( 37 )
La différen dation donne
2 '
Mo- h- ô I / pam y- I
tf est donc maximum et minimum quand u est minimum
et maximum.
On en conclut immédiatement que les surfaces d'égal
potentiel ont la forme de sphéroïdes dont les grands axes,
les axes moyens et les petits axes coïncident respectivement
avec les axes d'inertie minimum, moyen et maximum du
corps.
Si l'on veut confirmer cette conclusion, qu'on cherche
les intersections de la surface d'égal potentiel 0 avec des
sphères de rayon 8. L'équation (2) montre que ces inter-
sections sont les mêmes que celles de ces sphères avec les
surfaces u = constantc = u, , ou encore avec des ellipsoïdes
concentriques dont les axes sont proportionnels à ceux de
l'ellipsoïde des moments d'inertie de Poinsot.
On trouvera pour projection des intersections sur les
trois plans coordonnés des courbes du second degré (ellipse
et arcs d'hyperbole).
On verra aussi que toute surface d'égal potentiel a deux
sections planes circulaires dont les plans sont normaux au
plan des axes d'inertie maximum et minimum, font des
angles égaux avec le plan des axes d'inertie moyen et mini-
mum et se coupent suivant Taxe moyen.
Les plans de ces sections circulaires sont les mêmes
pour toutes les surfaces d'égal potentiel. ïls forment le lieu
géométrique des axes autour desquels le moment d'inertie
du corps attirant égale le moment d'inertie moyenne I'.
(38 )
Les plans des axes d'inertie principaux sont plans de
symétrie des surfaces d'égal potentiel.
10. Par un point attiré extérieur faisons passer une
surface d'égal potentiel et une sphère ayant pour centre le
centre d'inertie.
L'attraction est normale à la surface d'égal potentiel et
peut être décomposée suivant le rayon de la sphère et dans
le plan tangent à cette sphère au point considéré. Cette se-
conde composante est dirigée suivant l'intersection du plan
tangent à la sphère et du plan du rayon et de la normale
à la surface d'égal potentiel, ou normale à l'intersection
des plans tangents à cette surface et à la sphère au point
considéré.
La composante suivant le rayon ne donne lieu qu'à un
rapprochement vers le centre d'inertie; la composante lan-
gentielle produit un mouvement angulaire du point autour
de ce centre.
Quand le point est dans l'un des trois plans principaux
cette composante y est également comprise. En outre elle
est nulle sur les trois axes principaux.
11. La composante de l'attraction dans une direction
donnée égale la dérivée du potentiel par rapport à cette
direction.
La composante de l'attraction suivant le plan tangent à
une surface au point attiré est dirigée, on le sait, dans le
sens où la variation positive du potentiel est la plus grande
sur la surface. Il résulte de là que les points de potentiel
maximum peuvent être considérés comme des centres atti-
rants situés sur la surface.
Dans le cas qui nous occupe, il est facile de reconnaître
que si l'on suppose le point attiré assujetti à se mouvoir
sur la sphère :
( 50 )
1° II sera, en général, sollicité vers l'intersection la plus
voisine de la sphère avec Taxe d'inertie minimum. Ces deux
points d'intersection sont des positions d'équilibre slable;
2° Si le point est situé dans le plan des axes d'inertie
maximum et moyen, il sera sollicité vers l'intersection la
plus voisine de la sphère avec ce dernier axe; ces deux
points d'intersection sont des positions d'équilibre slable
quand le dépincement a lieu dans le plan précédent. Ce
sont des positions d'équilibre instable dans le plan des axes
moyen et minimum. Ce sont des positions d'équilibre indif-
férent suivant les deux plans des sections circulaires des
surfaces d'égal potentiel (§ 9).
Les points d'intersection de Taxe d'inertie maximum et
de la sphère sont des positions d'équilibre instable dans
toutes les directions ;
5° Les plans des axes maximum et minimum et des
axes maximum et moyen sont d'équilibre instable.
Le plan des axes minimum et moyen est d'équilibre
stable.
12. Il résulte clairement de là que la trajectoire décrite
par un point librement attiré se rapproche du plan des axes
minimum et moyen et de l'axe minimum d'inertie.
On peut caractériser le mouvement du point comme
suit :
Mouvement direct vers le centre d'inertie;
Mouvement angulaire du rayon vecteur du point vers
l'axe d'attraction maximum;
Mouvement angulaire du plan de cet axe et du rayon
vecteur vers le plan des axes d'inertie moyen et minimum,
ou plan d'attraction maximum.
Si le point est situé dans l'un des plans principaux, sa
trajectoire est plane.
Dans le cas général cette trajectoire est h double cour-
( *> )
bure et tend à devenir plane et même rectiligne suivant
l'axe d'inertie minimum.
la. Si au lieu de supposer la masse attirante fixe et le
point attiré mobile, on fixait ce dernier point, il est facile de
conclure de ce qui précède que l'axe d'inertie minimum se
déplacerait jusqu'à ce qu'il passât par le point fixe et que
dans cette position seulement la rotation de la masse serait
nulle et l'équilibre de rotation stable.
Nous allons d'ailleurs examiner le cas de l'attraction
réciproque de deux masses quelconques.
14. Il résulte des considérations émises jusqu'ici, qu'à
des dislances de son centre d'inertie telles que l'on puisse
négliger l'inverse de leur cinquième puissance, une masse
quelconque agit comme si elle était symétrique par rap-
port aux trois plans perpendiculaires entre eux déterminés
par ses trois axes principaux d'inertie.
Fig. 2.
E
P
f"
/"
P
jy
p.
A /A
d—
C
>
4'
0
f
p
j
p
B
Pour se représenter simplement les choses, on peut ima-
giner la masse donnée remplacée par le système régulier
de points matériels suivant :
Une masse m centrale (fig. 2) au centre d'inertie 0, et
( u )
sur chacun tics axes d'inertie ÀB, CD et EF, de part el
d'autre et également distantes de 0 deux masses exié-
rieures p., la somme des masses m -+• 6p. étant égale à la
masse totale M donnée.
Il est très-facile de déterminer quelles doivent être sur
les trois axes les distances p, p', p" d'une masse p. à la masse
centrale m, pour qu'en conservant l'approximation em-
ployée l'attraction exercée par ce système égale en tout
point extérieur l'attraction de la masse donnée.
Il suffît que l'expression du potentiel soit la même.
AB, CD et EF étant respectivement les axes d'inertie
maximum, moyen et minimum et I, 1, I" les moments
d'inertie correspondants, on trouve facilement
V1'-1"-'
c2 ▼ «
La distance des masses extérieures à la masse centrale est
donc maximum moyen et minimum sur les axes d'inertie
minimum moyen et maximum.
Les distances p, p', p" sont d'autant plus grandes que
les masses extérieures sont plus faibles.
m et a étant liées seulement par la relation m -+- 6u=M,
masse totale donnée, on peut prendre m = p..
Dans ce cas les distances p, p', p" sont inverses de la
racine carrée de la masse totale.
15. Les positions d'équilibre d'un point matériel attiré
( m )
par un corps et assujetti à se mouvoir sur une surface, sont
les points de langence de cette surface avec les surfaces
d'égal potentiel du corps. Si aux environs d'un de ces points
les rayons vecteurs de la surface d'égal potentiel sont
moindres que ceux de la surface donnée, l'équilibre est
stable; s'ils sont plus grands, l'équilibre est instable.
Autrement dit, l'équilibre est stable ou instable suivant
que le potentiel est maximum ou minimum au point con-
sidéré.
Si l'on rechercbe les positions d'équilibre stable ou in-
stable sur une série de spbères décrites du centre d'inertie,
on obtient des lignes desquelles un point matériel attiré
tend à se rapprocher ou à s'éloigner tandis qu'il gravite
vers le corps.
Lorsque les trois moments principaux d'inertie du corps
ne sont pas égaux, ces lignes sont (aux limites de distances
considérées précédemment) les axes principaux d'inertie;
si ces trois moments étaient égaux, il faudrait considérer
successivement les termes en ^, p, etc., dans l'expression
du potentiel et chercher les coordonnées du point attiré
qui, pour une valeur connue de <$, rendent ces termes
maximum ou minimum.
16. Abordons le cas général de l'attraction réciproque
de deux masses quelconques. Quand deux masses s'attirent,
chacune exerce une attraction sur chacun des points de
l'autre. La résultante de ces attractions élémentaires trans-
portées parallèlement à elles-mêmes au centre d'inertie de
l'une des masses attirées, donne le mouvement de ce centre,
en y supposant condensée la masse totale. Les mêmes at-
tractions élémentaires donnent lieu à un mouvement de
rotation.
Cherchons d'abord comment, étant connue la distance
( 45 )
des centres d'inertie des deux masses, ii faut les placer
l'une par rapport à l'autre pour que l'action exercée sur
Fio. 3 chacun de ces centres soit un
z maximum ou un minimum.
Soient M, M' les (Umx masses
de formes quelconques .placées
comme on voudra dans l'espace,
— D la distance de leurs centres
d'inertie 0 et 0' (fig. 5).
Prenons pour axe des z la droite
00' et pour axes des x et des y
deux axes rectangulaires passant
par 0, dans un plan perpendicu-
laire à 00'.
Si nous imaginons par 0' deux
axes O'x', O'y' parallèles à Ox
et Oy et que x'y'z' soient les coor-
données d'un point de M' par rapport à ces axes, nous au-
y =y
z' = z — D.
On a aussi à cause du choix des origines 0 et 0'
(A)
f xdm = 0 , Pydm = 0 , /* z
jx'dm'=0, fy'dm'=0, Cz'd)
dm ■= 0
Soient : d la distance du centre d'inertie 0 de M à l'élé-
ment dm' (x'y'z') de M' ;
p' le rayon vecteur de dm' par rapport à l'origine 0' ;
( 44)
p le rayon vecteur d'un élément dm de M par rapport à
l'origine 0 ;
9 l'angle de p' avec sa projection sur le plan x'Oy' ;
aX, a Y, vZ les composantes parallèles aux axes coor-
donnés de l'attraction de M sur l'élément dm'.
Les valeurs de aX, a Y, aZ ont été données § 5. Il suf-
fira de remplacer a (3 et X par x'y' et D -+- z', On aura ainsi,
par exemple
Mx'dm'
AX= c?3
'dm'f\ xx'+yy'+(D+z')z p2 dm— 3/1 xx'+yy'-+-(D-t-z')z— -f \zdm
et de valeurs analogues pour a Y et aZ.
En transportant chacune des composantes ~ parallèle-
ment à elle-même au centre d'inertie de M', on aura en
étendant les intégrales à toute la masse M', la valeur X de
la composante parallèle aux x de l'attraction exercée au
centre 0; sur cette masse M' tout entière.
Donc
Mx'dW
r Mx'i
/x'dm'fYx'+yy'+{X)+z')z-^ Alm-f\ xx'+yy'+{T)+z)z- - ,
T/
Y et Z composantes parallèles à O'y' et Q'z' auraient
des expressions analogues. Or on voit facilement par la
figure que
§* = D2 -+- p'2 4- 2DP' sin ? = D2 h- p'2 + Dz'
\zdm
(48)
et, en posant
P,2-+-2D:'=K,
£2= D* -f- K ;
On en déduit :
1 _ 1 5 K 5.5 1.2
S" = D^ _ 2 D* "*" 2^2 "Ô7 _
1__L 9 K
^_ D4~~ ET6"*" "'
E.
±_J_ 5 A ^2 li?
ss — D« g " D7 "*" 2~2 ' D9
etc.
Remplaçant -75,^4,^... par ces valeurs en série clans
les expressions de AX, AY, AZ, X, Y, Z, on obtient toutes
réductions faites, en négligeant les termes en p comme
plus haut :
Mx'dm' ô(Mz'x'dm' ■+■ dm' fzxdm)
(B)
aX= D3 D4
My'dm' o(Mz'y'dm' ■+- dm' J'zydm)
Y==_ Di D4
f m Mdm' mz'dm' 8 . . , , ■ „ . ,
\ D2 D3 D4 « ^ r r
-+- 2Mp'2rfm' — 5(x'2 -+- y")tfm'.M j
^ étant le moment d'inertie de M autour de la droite 00'.
X = — —^ifz'x'dm' -4- M' fzxdm)
Y = — — (M fz'y'dm' -+- M' J'zydm)
(c ) D
I **
1 z==—z-i — : J2M,yp2rfm-t-2My,p'Vm'-ô(fAM'-t-fA,M)|
(46)
en tenant compte des conditions (A) et appelant p.' !e mo-
ment d'inertie de M' autour de la droite 00'.
Il est facile de reconnaître que ces formules renferment
le cas particulier où Tune des masses se réduit à un point et
reproduisent alors celles qui ont été données plus haut.
Les formules (c) prouvent qu'à des distances D telles
que l'on puisse négliger les termes en ^, les composantes
X et Y sont nulles quand deux des axes d'inertie princi-
paux de M et M' coïncident et que les deux autres sont
parallèles. Dans ce cas les deux masses graviteront l'une
vers l'autre de façon que la trajectoire décrite par leurs
centres d'inertie soit une ligne droite.
En même temps, la valeur de Z est maximum quand p.
et fj.' sont les moments d'inertie minimum des masses Met
M' et minimum quand ce sont les moments d'inertie
maximum. En supposant donc D constant, on aura
rfZ = 0.
Mais les conditions X = 0, Y = 0, dZ = 0 entraînent
la nullité de la différentielle de l'attraction résultante
R = Vx1 -+- xf + z*.
Ainsi l'attraction réciproque exercée aux centres d'iner-
tie des masses est maximum ou minimum, quand leurs
axes d'inertie minimum ou maximum coïncident, les autres
axes étant parallèles.
Dans le premier cas elle est plus grande que si les
masses étaient condensées en leurs centres d'inertie, dans
le second elle est plus faible.
17. Passons maintenant à ce qui concerne la rotation.
Supposons la masse M' douée d'un point fixe que nous
prendrons pour origine des coordonnées, 0', et soient L,
( *} )
K, IX les moments de rotation de cette masse autour des
axes respectifs des %', des y' et des z' . Ou aura
L= f\7..y' — aY.z'
K= fàX.z' — àZ.x'
N = J^ aY.x' — aX.?/' •
les intégrales s'étendant à toute la masse M'.
On trouve facilement à l'aide des valeurs (B) du § pré-
cédent :
3
M f u'dm' 5M fz'y'dm' 2 r ^ ^
-+- 2 fzydm Jz'dm' — M f{xn-v- yn)y'dm -\- 4M Cz'^y'dmfX
— M.fx'dm' 5M fz'x'dm' "2 ' r - „ , v /,
K = ^ + - J-^ — [[%ffdm - 3K.) /Vil*'
-+- 2 / zxdm J \ 'dm' — Uj^{x'i ■+■ y'2)x'dm' -+- 4M /VVdm']
N = —jCCzxdm fy'dm — fzydm fx'dm'Y
On voit que le moment autour de la droite 00' qui joint
le centre d'inertie de M au point fixe de M', est d'ordre
inférieur aux moments autour d'axes perpendiculaires à
cette droite.
Lorsque deux des axes d'inertie principaux de M et M'
coïncident entre eux, suivant 00', les autres axes étant
parallèles, on a
fzxdm = 0 , fzydm = 0 , fz'y'dm' = 0 , J*z'x'dm'= 0.
Alors N = 0 et les deux centres d'inertie gravitent l'un
vers l'autre en ligne droite comme on l'a vu.
(48)
18. Si le point fixe 0' est le centre d'inertie de M', les
moments deviennent, en remarquant que l'on a alors
fx'clm' = 0 , J" y' dm' = 0 , J z'ihri = 0 ,
r - M
+ ITT L4 fz*ydm' -J (x'-+ y 2)y'dm'
Da D4
(C)
K = y p3 -^ [4/V-xV/m' -/ (x 2 -*- 1/ ")x dm J
N = 0.
Dans ce cas le moment autour de 00' est toujours
nul.
Les numérateurs des termes en ^ dans L et K sont
toujours très-petits, car chacune des intégrales qui les
composent renferment des parties alternativement positives
et négatives qui se détruisent à peu près. En remplaçant
M' par une masse régulière qui aux distances considérées
exerce la même attraction qu'elle (§ 14), ces numérateurs
seront nuls exactement et les moments de rotation autour
des axes O'x' et O'y' se réduiront à
— 3>I f z'y'dm'
5 M / z'x'dm'
D3
Ils seront nuls et l'équilibre établi quand la droite 00'
coïncidera avec l'un des axes d'inertie principaux de M'.
L'équilibre sera stable quand l'axe d'inertie minimum
de M' passera par le centre d'inertie de M.
(49)
Ce qu'il importe de remarquer ici c'est que les moments
de rotation de M' ne dépendent plus que de sa forme et
nullement de celle de M. Ces moments sont proportionnels
à cette dernière masse et d'autant plus faibles que la dis-
tance D des centres d'inertie de M et M' est plus grande.
19. La rotation de la masse M' autour de son centre
d'inertie est la même, que ce centre soit fixe ou que la
masse soit libre dans l'espace. Il n'en est pas de même
quand on considère la rotation de la masse libre, autour
d'un point quelconque. Il faut pour l'obtenir appliquer à
tous les points de la masse une force égale et contraire à
la force accélératrice qui sollicite le point en question.
Toutes les forces égales et parallèles ainsi appliquées se
composent en une seule, appliquée au centre d'inertie de
la masse et donnant lieu autour des trois axes coordonnés
à trois moments de rotation qu'il faut ajouter algébri-
quement aux moments L, K et N pour obtenir la rotation
de M'.
En prenant pour origine des coordonnées le point autour
duquel se fait la rotation, on aura les composantes AXt,
aY,, aZ,, de la force accélératrice appliquée en ce point
en faisant x' = 0, y' = 0, z' = 0 dans les valeurs (B)
données au § 16. On obtient ainsi :
aX,=
aY,
/ ZX(I)
D4
5 / zydm
o
2
1 D2 D* v J v J
2me SÉRIE, TOME XLIV.
(80)
Les composantes de la force motrice qui agit au centre
d'inertie sont donc
oM'y zxdm
aX,- =
aY,.
D4
5M' Jzydm
D4
MM' ^M '/ -, m .
Les coordonnées ac.y.z.du centre d'inertie étant
T x'rfm' / î/'f/m' / z'dm'
M' Jl M' M'
les moments de cette force motrice pour faire tourner le
corps M' autour des trois axes OV, O'y', OV sont res-
pectivement
L, = tJLfli — aY^z,-
Mfy'dnï faff(lm ~ Wfy'dm'+lSfzydmfz'dm'
= D1 D4
M /Vdm' \^ffdm " ^f^àm+ofzxdmfz'dm'
Ni = -j( fx'dm' fzydin — fy'dm'fzxdni).
Les moments de rotation de M' autour des trois axes
sont
L' = L-+-L,, K^K-t-K^, N' = N + N„
(SI )
Il vient ainsi :
-ai f > , i > S M f(x^+y'2)x'dm'
** -^5 "*" ^< „ , / ^ 2-
N'=0.
On remarquera que ces valeurs (D) ont exactement la
même forme que les valeurs (C) (§ 18) des moments de
rotation relatifs au centre d'inertie du corps M', fixe ou
libre, mais elles ne sont pas identiques avec celles-là,
l'origine des coordonnées ayant changé.
Ainsi les numérateurs des termes en g-4 pouvaient être
négligés dans les valeurs (C), tandis qu'ils peuvent être
très-grands dans (D).
On remarquera également que lorsque la masse attirée
M' est libre, les moments L', K' sont proportionnels à
la masse attirante M et indépendants de la forme de
celle-ci.
A une distance du centre de M assez grande pour que
l'on puisse négliger l'inverse de sa quatrième puissance,
L' et K' seront nuls et l'équilibre de rotation sera satisfait
quand l'un des axes d'inertie principaux de M' passera par
le centre d'inertie de M.
L'équilibre sera stable quand l'axe d'inertie minimum
de M' passera par le centre d'inertie de M. Il tendra donc
toujours à s'établir ainsi.
Si l'on ne peut négliger les termes en ^, le résultat
précédent sera le plus près d'être exact quand le point
(52)
autour duquel s'effectue la rotation sera le centre d'inertie
de M'. On sait qu'en négligeant les termes en j^, la masse
M' agit comme un système matériel symétrique par rap-
port à ses trois axes d'inertie principaux.
En substituant ce système régulier à M', la rotation
s'effectue de manière que l'axe d'inertie minimum aille
passer par le centre d'inertie de M et que pour cette posi-
tion l'équilibre stable soit atteint. (C'est ce que prouvent
les valeurs de L' et K' en supposant le centre d'inertie de
M' à l'origine des coordonnées.)
20. En résumé, quand deux masses de formes quel-
conques s'attirent, le centre d'inertie de chacune d'elles
décrit une trajectoire, qu'on peut, dans une première
approximation, considérer comme normale en chaque
instant à la surface d'égal potentiel de l'autre masse qui
passe en ce point; en effet, le plan tangent à cette surface
a une position moyenne entre celles des plans tangents
aux surfaces d'égal potentiel qui passent par les autres
points de la masse considérée, et l'on obtient la force mo-
trice qui agit au centre d'inertie en y transportant parallèle-
ment à elles-mêmes les forces motrices, agissant en ces
autres points, forces motrices qui sont normales aux sur-
faces d'égal potentiel.
En même temps, les masses tournent sur elles-mêmes,
les axes d'inertie minima coïncident en atteignant une
position d'équilibre stable, puis oscillent autour de cette
position. Dans la position d'équilibre précédente, les sur-
faces d'égal potentiel sont normales à la ligne des centres
d'inertie. Ces centres se meuvent donc dès lors en ligne
droite l'un vers l'autre ou, plus exactement, décrivent une
trajectoire sinueuse dont cette ligne est l'axe.
21. Les calculs qui précèdent constituent, je le crois, la
( 53 )
première esquisse des lois générales de la distribution de
l'attraction autour d'une masse de forme quelconque.
Grâce à la forme des masses, l'attraction réciproque n'est
pas seulement un principe de rapprochement, mais un
principe de groupement des masses, un principe détermi-
nant leurs positions relatives. — Les applications de ce
principe sont immenses dans le monde physique. Il se
présente d'une façon évidente dans la cristallisation. Brùck,
qui a laissé en germe tant d'idées fécondes, n'a pas man-
qué d'indiquer celle-là dans ses notes manuscrites. Pour
lui la différence d'attraction des masses dans différentes
directions est la cause déterminante de la dureté, qui con-
siste, en effet, essentiellement dans la résistance au dépla-
cement relatif des éléments des corps, les distances des
centres pouvant rester constantes. Dans la cristallisation,
un axe de cristallisation n'est-il pas visiblement la ligne sur
laquelle les axes d'attraction maximum des éléments sont
en coïncidence? — Un fluide matériel élastique, tel que
l'élher, ne serait-il pas condensé à des pressions diffé-
rentes suivant les axes de maximum et de minimum d'at-
traction et n'en résulterait-il pas des réactions plus ou
moins grandes qui équilibreraient les pouvoirs attractifs des
éléments?
Brùck n'a rien précisé relativement à la formation des
cristaux. Si l'influence des axes d'attraction des éléments
est en évidence dans les cristaux à un et à deux axes, la
question des formes des cristaux eux-mêmes subsiste tout
entière. Les recherches que j'ai faites sur ce point m'ont
conduit à une explication de la formation des différents
systèmes cristallins qui permettra, je l'espère, de ramener
toute la cristallisation à un simple problème de mécanique
rationnelle.
(54)
Une autre question qui ne semble pas, au premier
abord, se rattacher aussi directement à l'influence de la
forme des masses attirantes, est celle de rétablissement des
mouvements astronomiques (rotations et révolutions). Dès
1847, dans un mémoire présenté à l'Académie des sciences
de Bruxelles, Brùck disait: « Des éléments dispersés dans
» les espaces doivent y former un ou plusieurs systèmes
» planétaires composés: 1° D'un globe central ou soleil
» avec mouvement de rotation; 2° d'autres globes (pla-
» nètes) distancés, se mouvant autour du globe central à
» peu près dans un même plan et tournant autour d'un
» axe; 5° d'autres globes (satellites) tournant autour
» d'eux-mêmes, décrivant des orbites autour des planètes
» et accompagnant celles-ci autour du globe central ou
» soleil. » Cependant, ni l'explication qu'il donne dans ses
notes manuscrites de l'établissement du mouvement de
rotation de l'astre central (soleil) sous l'influence du sys-
tème attractif des astres extérieurs (planètes), ni celle de
la rotation de ces dernières, ne sont exactes.
Le problème général qui se présente ici est le suivant :
Une masse déformable (c'est-à-dire un système matériel
dont les parties sont soumises à des forces réciproques
d'attraction et de répulsion, et dont les distances mutuelles
peuvent être augmentées ou diminuées sous l'action de forces
extérieures), — peut-elle sous l'influence attractive d'un autre
système matériel, prendre sur elle-même un mouvement
accéléré de rotation? — J'ai trouvé que l'établissement de
ce mouvement de rotation est possible ; c'est ainsi que sous
l'attraction du système des planètes le soleil a pris son
mouvement de rotation sur lui-même. La forme ellipsoï-
dale de cet astre résultant de sa rotation, le plan de son
équateur est plan d'inertie minima, c'est-à-dire d'attraction
( 55 )
maximum; de là vient le rassemblement des orbites plané-
taires dans le plan de cet équateur. Par la rotation même
du soleil et aux dépens de la vitesse de rotation, les pla-
nètes sont déviées normalement aux rayons vecteurs qui
joignent leurs centres au centre solaire, dans le sens de la
rotation de cet astre. Les forces déviatrices agissant d'une
façon constante, les vitesses normales aux rayons vecteurs
peuvent devenir considérables et en se composant avec les
vitesses de chute vers le centre solaire elles donnent lieu à
des vitesses résultantes obliques aux rayons vecteurs et
qu'on peut traiter comme vitesses initiales, quand les forces
déviatrices, par suite même de la condensation et de la
solidification des globes, deviennent insensibles. La rota-
tion des planètes s'est établie par suite de la rotation du
soleil elle-même. Il serait trop long d'en donner ici l'expli-
cation. Pour certaines planètes éloignées du centre solaire,
la rotation a pu s'établir par l'attraction des satellites,
comme celle du soleil par l'attraction des planètes. C'est ce
qui est vraisemblablement arrivé pour Uranus , et cette
considération explique la rétrogradation des satellites de
cette planète.
Les notions, nécessairement incomplètes, énoncées dans
ce dernier paragraphe sont susceptibles de développements
aussi étendus qu'intéressants, qui seront la suite naturelle
de ce petit travail. J'ai voulu seulement faire entrevoir la
possibilité de déduire du simple et unique principe de l'at-
traction réciproque quelques faits capitaux encore inexpli-
qués, et aussi confirmer dans leur généralité les idées d'un
homme de génie dont les travaux ont ouvert une voie nou-
velle dans l'étude du monde matériel.
(36)
Recherches sur la coagulation du sang (première partie);
par M. Léon Fredericq, docteur en sciences et docteur
en médecine, préparateur à l'Université de Gand.
CHAPITRE PREMIER.
INTRODUCTION.
Le sang soustrait à l'organisme ne tarde pas à se coa-
guler spontanément, par suite de la prise en masse d'une
substance qui, depuis Fourcroy (1), porte le nom de
fibrine (2). La lymphe, le chyle, un grand nombre d'exsu-
dats pathologiques partagent celte propriété; et des chan-
gements analogues s'observent dans plusieurs solides de
l'organisme ; c'est ainsi que les muscles, les cartilages, cer-
tains parenchymes glandulaires (le foie) éprouvent après
la mort une augmentation de consistance des plus remar-
quables (rigidité cadavérique).
Il est peu de problèmes , en physiologie , qui aient été
l'objet d'études aussi nombreuses et aussi variées que le
phénomène de la coagulation du sang; il en est assuré-
ment peu qui aient mis la patience des expérimentateurs
à une plus rude épreuve, et qui se soient montrés aussi
rebelles à toute investigation. On pourrait écrire des vo-
(1) Fourcroy. Système des connaissances chimiques, t. IX, p. 157.
An IX de la République.
(2) D'après Boll, le sang n'acquiert la propriété de se coaguler sponta-
nément qu'à une période assez avancée du développement. C'est vers
le 13e au Uc jour de l'incubation qu'elle apparaît chez l'embryon du
poulet.
Boll. Ein Beilrag zur Kenntniss der Blutgerinnung. Archiv fur Anato-
mie, Physiologie, etc., 1870, p. 721.
( 57)
lûmes, rien qu'en exposant chronologiquement les hypo-
thèses et les erreurs qui, tour à tour, ont régné dans la
science à ce sujet. Mon intention n'est pas de refaire ici
l'histoire de ces tentatives avortées; je me contenterai de
passer rapidement en revue les principaux travaux qui ont
contribué réellement à étendre nos connaissances sur la
coagulation spontanée, et dont j'ai personnellement pu
apprécier les résultats (1).
Malpighi (2) fut le premier à reconnaître l'identité de la
substance qui constitue la trame du caillot sanguin avec
les filaments fibrineux, qu'on trouve si souvent à l'autop-
sie dans le cœur et dans les gros vaisseaux de l'homme.
Bientôt Ruysch (5) parvint à séparer cette substance par
le battage du sang : la fibrine enlevée, ce liquide ne se
coagula plus.
Il semble naturel de rechercher la cause de la coagula-
tion chez Tune des circonstances nouvelles, dans lesquelles
se trouve placé le sang au moment de la saignée. Soustrait
(1) On trouvera un grand nombre d'indications bibliographiques dans
les ouvrages suivants :
Hamburger. Dissertatio experimentorum circa sanguinis coagulationem
spécimen primum. Borolini 1839.
Richardson. The cause of Ihe coagulation of the blood, being Ihe Aslley
Cooper Prize Essay for 1856. London 1858, page 460.
Milne Edwards. Leçons sur la physiologie et l'anatomie comparée, etc.
Article sang. Tome Ier.
Schmidfs Jahrbùcher.
CannslaWs Jahresbericht ùber die Forlschritte in der gesammten
Medicin.
Renie u. Meismer. Jahresberichle ùber die Fortschrille der Anatomie
u. Physiologie.
Schwalbe u. Hofmann. Jahresberichte ùber die Forlschritte der Ana-
tomie und Physiologie 1873-1876.
("2) Malpighi. Opéra omnia. De polypo cordis dissertatio 1666.
(3) Ruysch. Thésaurus anatomicus seplimus. Amstel. 1707, in-l°, p. 1 1.
(58)
à l'organisme, il se refroidit; il subit le contact de l'air; il
n'est plus animé du mouvement de la circulation. Ces trois
facteurs du problème, le froid, l'air et le repos, ont été de
la part des physiologistes de la fin du siècle dernier et du
commencement de celui-ci, le sujet d'expériences nom-
breuses. La conclusion générale qui se dégage des tra-
vaux de Hewson (1), Thackrah (2), Scudamore (5), Hun-
ter (4), etc., c'est qu'aucune de ces conditions nouvelles
ne peut être considérée comme cause de la coagulation , et
que la réunion de ces trois agents est-elle même impuis-
sante à expliquer le phénomène.
Le repos et le froid , loin d'accélérer la séparation de la
fibrine, exercent une action défavorable sur sa produc-
tion. On savait depuis Ruysch que le sang qu'on agite se
coagule plus vite que celui qu'on abandonne au repos.
Quant au refroidissement, le fait que le sang des reptiles
et des poissons se coagule tout comme celui des animaux
à sang chaud, rend déjà son intervention fort improbable.
D'ailleurs le sang des mammifères et des oiseaux qu'on
empêche de se refroidir, ne s'en coagule pas moins.
Hewson démontra, il y a plus d'un siècle, qu'une tempé-
rature suffisamment basse suspend complètement le phé-
nomène de la coagulation du sang. Il reste fluide pendant
(1) Hewson. Expérimental Inquiry into the properties of the bloocl.
Chap. I, Exp. III (de 1770), London 1827, p. 76. Sydenham Society
Edition.
(2) Tarner Thackrah. An inquiry into the nature and the properties of
the blood in health and disease, !.•' édition. London 1819, p. 29.
(S) (Sir Charles) Scudamore. An essay on the blood London 1824.
Ein Versuch ùber das Blut. Wùrzburg 1826.
(4) John Hunter. Works edited by Palmer. On the blood, vol. III.
London 1837. — Idem. OEuvres complètes, trad. Richelot. Paris 1845,
t. III.
(59 )
plusieurs heures et même plusieurs jours, si l'on a soin de
le recevoir au sortir de la veine dans un vase entouré
de mélanges réfrigérants, de façon que sa température
s'abaisse brusquement au-dessous de 0°. La coagulation
n'est pas abolie : il suffit d'une élévation de température
d'un petit nombre de degrés pour que le phénomène appa-
raisse de nouveau.
Le contact de l'air n'est pas nécessaire non plus.
Thackrah put injecter de l'air dans la carotide d'une
chienne (1) sans produire de caillots. Scudamore, ayant
rec.u du sang dans le vide pneumatique, constata sa coagu-
lation. Il en est de même du sang que l'on fait passer di-
rectement sous le mercure au sortir de la veine.
Le sang possède donc en lui-même tous les éléments de
la coagulation : celle-ci ne peut s'expliquer ni par addi-
tion, ni par soustraction de quelque chose de matériel;
et c'est à tort qu'on a voulu la rapporter tantôt à la vola-
tilisation de l'ammoniaque (Richardson, op. cit.) ou au
départ de l'acide carbonique du sang (Scudamore, op. cit.),
tantôt à l'action de l'un des gaz de l'air (Hevvson, op. cit.),
Virchow (2), Eichwald (5), Mathieu et Urbain (4).
(1) II existe d'ailleurs un moyen de provoquer la formation de bulles
gazeuses à l'intérieur même du système circulatoire clos : c'est de sou-
mettre un animal, lapin ou cobaye, à une décompression brusque sous le
récipient de la machine pneumatique. Si l'on ouvre rapidement la poitrine
de l'animal, on aperçoit par transparence une écume sanguinolente à l'in-
térieur des oreillettes
(2) Virchow. Archiv fur palholog. Anatomie. Bd. I.
(3) Eichwald. S'-Petersburg Med.Zeilschrift XV, Hft. A, p. 259. Ueber
die eiweissarligen Sloffe der Blulflùssigkeit und des Herzbeutelwassers.
Vorlf. Miltheil.
(1) Mathieu et Urbain. Expériences sur le rôle des gaz dans les phéno-
mènes de coagulation. Causes et mécanisme de la coagulation du sang.
Paris 1875.
(60)
On fut naturellement conduit à se demander pourquoi
le sang reste fluide chez l'animal vivant, quel est ici l'agent
qui s'oppose à la coagulation à l'intérieur des vaisseaux.
Hewson avait remarqué que le sang compris entre deux
ligatures dans un segment vasculaire ne se coagule qu'au
bout d'un temps fort long. Scudamore était allé plus loin :
il avait extrait sur un cheval vivant, la veine jugulaire liée
à ses extrémités et y avait retrouvé le sang encore liquide
au bout de 40 minutes. Mais c'est surtout Brùcke (1) qui
s'efforça de mettre en lumière l'action anticoagulante de la
paroi vasculaire. De nombreuses expériences sur des tor-
tues, des grenouilles et des mammifères le conduisirent à
formuler cette proposition que le sang demeure fluide
aussi longtemps qu'il reste en contact avec la paroi vascu-
laire vivante et intacte, qu'il se coagule dans tous les cas
où on le soustrait à cette influence. Ayant misa nu chez
une tortue vivante les gros troncs vasculaires qui partent
du cœur, il pratiqua sur quelques-uns la ligature simple.
Chez d'autres, il introduisit au préalable de petits bouts de
tubes de verre destinés à s'appliquer contre la paroi vas-
culaire et à empêcher ainsi son contact avec le sang. Par-
tout où les tubes de verre avaient été introduits, le sang
fut trouvé coagulé, partout où il était directement en con-
tact avec la paroi vasculaire, il resta liquide, mais se coa-
gula ensuite au sortir du vaisseau.
Bien que l'influence de la paroi vasculaire sur le main-
(1) Ernst. Brùcke. Ueber die Ursache der Gerinnung des Blules. Vir-
chow's Archiv fur pathologische Anatomie, Bd. XII, 1857, pp. 81-100.
Ibid.,pp 172-196.
Vorlesungen ùber Physiologie. Wien 1875. Bd. I , p. 82.
Virchow. Gesammelte Abhandlungeu zur Wissenschaftliche Medicin ,
p. 104 Erste Hàlfte.
(61 )
lien de la fluidité du sang soil un fait fort probable, il
n'en est pas moins certain que les tubes de verre que
Briïcke introduisait dans les vaisseaux de la tortue avaient
encore une autre action que celle qu'il leur attribuait :
avant tout c'étaient des corps étrangers. Nous savons de-
puis les expériences de Yirchow que des gouttelettes de
mercure injectées dans les veines, des fragments de caout-
cbouc ou de tout autre corps inerte introduits dans le
système circulatoire ne tardent pas à se recouvrir de dé-
pôts fibrineux et à agir comme centres de coagulation.
Je reviendrai plus loin sur les expériences analogues de
Glénard (1) avec lequel je termine cette liste, que j'aurais
pu rendre dix fois plus longue.
Ainsi les efforts persévérants de plusieurs générations
d'expérimentateurs n'ont servi qu'à établir ces deux
points :
1° Le sang reste liquide tant qu'il est contenu à l'inté-
rieur des vaisseaux ;
2° Il se coagule dès qu'il en sort, et qu'il est mis en
contact avec des corps étrangers.
Il faut l'avouer, les résultats fournis par l'expérimenta-
tion physiologique pure sont ceux qu'on aurait pu obtenir
en s'adressant au premier garçon d'abattoir venu.
Mais autant les procédés physiques d'investigation se
sont montrés impuissants à nous révéler quelque chose
de positif sur la nature de le coagulation, autant les re-
cherches chimiques ont été fructueuses. On peut dire sans
exagération que les seuls travaux de Denis et d'Alexandre
(1) Frantz Glénard. Contributions à l'étude des causes de la coagula-
tion spontanée du sang à son issue de l'organisme. Paris 1875. Comptes-
rendus, t. LXXXI, n° 2, et Gazette des Hôpitaux, n° 153, 1875.
( 62 )
Schmidt ont plus fait progresser la science sur ce point
difficile, que les centaines de publications accumulées de-
puis plus d'un siècle.
Cette voie nouvelle fut brillamment inaugurée vers le
milieu du siècle dernier par Hewson (loc. cit.). Devançant
tous ses contemporains par la netteté de ses vues, il dé-
montra, le premier, que c'est dans la partie liquide et non
dans les globules que résident les éléments de la coagula-
tion. 11 suspendit cette propriété en mélangeant le sang
immédiatement au sortir de la veine avec une solution de
sulfate de sodium. Ayant attendu que les globules se
fussent précipités parleur propre poids, il put décanter la
partie liquide surnageant. Ce liquide étendu d'eau se prit
spontanément en un caillot transparent.
Cette belle expérience n'eut pas tout le succès qu'elle
méritait. Elle était à peu près tombée dans l'oubli et la
théorie tout opposée de Prévost et Dumas (1), qui faisait
jouer aux globules rouges le rôle principal dans le phéno-
mène qui nous occupe, était adoptée par la plupart des
physiologistes, quand J. Millier (2), par une expérience
calquée sur celle de Hewson, parvint à dissiper définitive-
ment l'erreur. Il employa une solution de sucre pour re-
larder la coagulation du sang de grenouille, et en sépara
le plasma par hltralion. Le liquide clair privé de ses glo-
(1) Prévost et Dumas. Examen du sang.. Bibliothèque universelle,
Genève, 1821, t. XVII.
Heynsius soutient encore aujourd'hui une opinion analogue. Voir :
A. Heynsius. Der direkte Beweiss dass die Blutkorperchen Fibrin liefern.
Arohiv. f. d. gesammt. Physiologie. Bd. III, 1870, p. 414.
(2) /. MiiUer. Beobachtungen zur Analyse der Lymphe, des Blutes und
des Chylus. Poggendorffs Annalen fur Physik 1852. t. XXV, p 514; trad.
française dans les Annales des sciences naturelles, 26 série, t. I, p. 559.
(65)
bulcs ne tarda pas à se coaguler. Millier restitua ainsi au
plasma sanguin sa principale propriété, celle de fournir
la fibrine (1).
C'est vers la même époque que Denis (2) commençait
ses remarquables études sur le sang, qui ont jeté une si
vive lumière sur le phénomène de la coagulation, et qui
l'ont conduit à la découverte de la substance qui se trans-
forme en fibrine. Il donna le nom de plasmine à ce corps
nouveau. Voici sa préparation (Mémoire sur le sang, pp. 50
et suiv.) :
Denis utilise la méthode de Hewson pour se procurer
du plasma sanguin. 11 remplit de sang, lors de la saignée,
un vase dont le septième de la capacité est occupé par une
solution saturée de sulfate de sodium, ayant soin qu'elle
se mêle complètement au fluide sanguin à mesure qu'il
arrive dans le vase. Après quelques heures, les globules
sont tous précipités et le plasma, sans traces de coagula-
tion, se trouve en entier placé au-dessus de ces corpus-
cules, de sorte qu'il est facile de le décanter ou de l'aspirer
au moyen d'une pipette. Sa transparence est encore trou-
blée par une foule de particules solides et par les globules
blancs : les uns et les autres peuvent être retenus par le
filtre. Dans le liquide parfaitement clair qu'il obtient ainsi,
Denis fait apparaître par l'addition de chlorure de sodium
en poudre, un précipité floconneux d'une substance ap-
(1) La dénomination de plasma est due à Schultz (Das System der Cir-
culation 1856, p. 7).
(2) Denis (de Commercij). Études chimiques sur les matières albumi-
neuses 1842.
Nouvelles études chimiques 1856.
Mémoire sur le sang, etc. Paris 1859, pp. 50 et suivantes.
Comptes- rendus, XLII, XLVII, LU.
(64)
partenant au groupe des albuminoïdes. Celte substance,
la p las mine (\), recueillie sur un filtre, puis redissoute
dans l'eau, lui fournit une solution limpide qui se coagula
spontanément, lui donnant d'une part de la fibrine {con-
crète), de l'autre un liquide séreux contenant une seconde
substance albuminoïde, qu'il appela fibrine solnble. Pour
Denis la coagulation est donc un phénomène de dédouble-
ment d'une substance préexistant dans leszngjaplasmine,
en deux autres corps albuminoïdes : fibrine concrète,
fibrine dissoute.
Cette expérience, l'une des plus belles et des plus fécondes
de la physiologie du sang, inaugure une période nouvelle
dans l'étude de la coagulation. Elle replace le phénomène
sur son véritable terrain, les seules lois de la chimie.
Nous tenons enfin le générateur de la fibrine; nous pou-
vons étudier sur lui l'action des réactifs et reproduire à
volonté le phénomène que nous dominons. 11 ne reste
plus qu'à le pénétrer dans ses détails.
C'est la tâche qu'Alexandre Schmidt (2) a entreprise. De-
(1) Comme on le verra plus loin, la plasmine est un mélange de deux
ou trois substances différentes.
(-2) Alexander Schmidt. Ueher den Faserstoff unddie Ursachen seiner
Gerinnung. Reichert u. Du Bois's Archiv.,p. 545, 1861 , ibid., pp. 675-721.
— Idem. Weiteres ùber Faserstofï und die Ursachen seiner Gerinnung.
Reichert u. Du Bois's Archiv., pp. 428-469, 1862, ibid., pp. 553-564. —
Idem. Ueberdie Fasersloffgerinimng.Vorlàuf.Milthei!ung.Pfluger''s Archiv.
Bd. V, p. 481, 25 Februar 1872. — Idem. Neue Untersuchungen uber die
Faserstoffgerinnung. Pûiïger's Archiv. Bd. VI , pp. 413-538, 1872. — Idem.
TJeber die Beziehung lier Faserstoiïgerinnung zu den KôrpeiiichenElemen-
ten des Blutes. Pflùger's Archiv. Bd. XI, pp. 291-370 et 515-577. — Idem.
Comptes-rendus LXXXIV, pp. 78 et 112. — Idem. Ueber die Beziehung
des Kochsalzes zu einigen thierischen Fermentationsprocessen. Pflùger's
Archiv. Bd. XIII , p. 95.
(63 )
puis quinze ans , il a fouillé ce terrain avec une ardeur infati-
gable et un rare succès. Son point de départ fut différent de
celui de Denis. Buchanan avait publié en 1848 (1) une ob-
servation fort curieuse : le liquide obtenu par la ponction
de l'hydrocèle qui d'ordinaire ne se coagule pas spontané-
ment, peut donner un caillot de fibriue au bout de quel-
ques heures, si l'on a soin d'y ajouter du sang défibriné.
Alexandre Schmidt démontra que dans celle expérience
la substance active du sang défibriné est contenue dans le
sérum, d'où on peut l'extraire à condition de l'étendre de
plusieurs fois son volume d'eau et de le soumettre ensuite
à un courant d'anhydride carbonique. Le chlorure de so-
dium ajouté au sérum de façon à le saturer de sel, la fait
également passer à l'étal insoluble. Les précipités granu-
leux qu'on obtient ainsi provoquent la coagulation dans
le liquide d'hydrocèle. Cette substance qu'A. Schmidt
appela fibrinoplastique , était la même que Panum (2)
venait de décrire sous le nom de caséine du sérum,
que Stas (3) , Guillot et Leblanc (4) avaient extraite du
sang. Enfin, la paraglobuline et Y albu minute de potas-
sium décrits par Kùhne (5) dans le sérum sanguin, sont
toujours le même corps : les dénominations de paraglo-
(1) Buchanan. On the coagulation of the blood and olher fibriniferous
liquids. Proceedings of the Glasgow Phil. Soc. Febr. 1848.
(2) Panum. Virchow's Archiv. 1851, p. 251, ibid. 1852, pp. 17 et 419.
(5) Stas. Note sur le liquide de l'amnios et de l'allantoïde.
Comptes-rendus, XXXI, p. 629. 28 oct. 1850.
(4) Guillot et Leblanc. Voir aussi Melsens. Note sur les matières albu-
minoïdes. Bulletin Acad. Belgique, p. 17, 1851, vol. XVIII, 2e partie.
(5) Kiihne. Untersuchungen liber das Protoplasma und die Conlracli-
litàt Leipzig 1864.
2me SÉRIE, TOME XLIV. S
( 66)
buline et de s. fibrinoplas tique sont même devenues syno-
nymes (1 ).
A. Schmidt retrouva cette substance dans une série
assez nombreuse de tissus et de liquides organiques : la
salive, le pus, l'humeur aqueuse, la synovie, le liquide
allantoïdien, l'albumine de l'œuf, le corps vitré, l'extrait
aqueux de la cornée, le tissu conjonclif, les globules
blancs du sang etc. Par ses propriétés la substance fibri-
noplastique appartient au groupe des Globulines établi par
Hoppe-Seyler (2). Elle est insoluble dans l'eau mais peut
s'y dissoudre à la faveur des alcalis libres, des sels des
métaux alcalins. On peut la précipiter de ces dissolutions
par une simple dilution, par un courant d'anhydride carbo-
nique, par une petite quantité d'acide acétique dilué, par
le chlorure de sodium en exès. Ce sont, comme on le voit,
à peu près les propriétés de la myosine et de la globuline
extraite du cristallin.
A. Schmidt parvint également à isoler la substance qui
dans le liquide d'hydrocèle fournit les matériaux de la
fibrine. Il adopta pour elle le nom de fibrinoyène que
Virchow et Denis avaient déjà employé, mais dans un
sens légèrement différent.
Comme le fibrinoplastique, le fibrinogène s'obtient en
étendant le liquide d'hydrocèle (ou celui du péricarde) avec
plusieurs fois son volume d'eau, et en le soumettant à
un courant d'anhydride carbonique. Il se dépose égale-
(1) Weyl vient de donner à cette substance le nom de Sérumglobuline.
Voir Weyl. Beitrâge zur Kenntniss thierischer und pflanzliclier Eiweiss-
kôrper. Zeitsehrif't fur physiologische Chemie I.
(2) Hoppe-Seyler. Handbueh der physiologïsch-und pathologisch-che-
mischen Analyse, 187S, p. 229.
( 67 )
ment, quand on sature le liquide à l'aide de chlorure de
sodium; il est insoluble dans l'eau distillée, mais il peut
s'y dissoudre à la faveur d'une petite quantité d'hydrate
alcalin ou de sel de métal alcalin. II en est précipité par
l'acide acétique dilué, l'anhydride carbonique, etc. Ses
propriétés correspondent donc entièrement à celles du
tibrinoplastique, et jusqu'ici on n'était guère parvenu à les
distinguer l'un de l'autre que parce que le iibrinogène se
coagule par addition de tibrinoplastique, et que récipro-
quement ce dernier fournit de la fibrine quand on le
mélange avec le Iibrinogène (Hoppe-Seyler, loc cit., p. 257.)
A. Schmidt admet que ces deux substances existent
concurremment dans le plasma sanguin avant sa coagu-
lation et produisent de la fibrine par leur réaction réci-
proque (1). Si l'on retrouve encore du fibrinoplaslique dans
le sérum sanguin alors que la coagulation est terminée,
c'est que cette substance existe en grand excès par rapport
au fibrinogène, et qu'il s'en forme encore au moment de
la coagulation, par suite de la destruction des leucocytes.
D'après Schmidt, il faudrait pour la formation de la fibrine
une dissolution aqueuse contenant: 1° du fibrinogène;
2° du fibrinoplastique ; 5° un minimum de sels et 4-° peut-
être une certaine quantité d'oxygène. Le sang qui circule
contient tout cela. La présence de l'hémoglobine natu-
relle (non cristallisée) et en général les substances qui
catalysent l'eau oxygénée (mousse de platine, charbon
animal) favoriseraient la réaction, mais celle-ci ne s'établi-
rait que sous l'influence d'un ferment spécial. Ce ferment
(1) On a cru assez généralement que Schmidt avait voulu parler d'une
combinaison directe entre fibrinogène et fibrinoplaslique. Il s'en est vive-
ment défendu tout récemment. Pflùger's Archiv. Bd. XIII, p. 146.
(68)
qui dérive des globules blancs se forme au moment où le
sang est soustrait à l'organisme. ïl agit par sa seule pré-
sence et se retrouve intact lorsque la coagulation est ter-
minée: il existe donc dans le sérum sanguin. Comme la
pepsine, il est soluble dans l'eau, mais il se laisse facile-
ment entraîner par les précipités qui se forment dans ses
dissolutions. Si l'on coagule les substances albuminoïdes
du sérum par un grand excès d'alcool fort, le ferment de
la fibrine se précipite en même temps. En reprenant le
coagulum par l'eau au bout de plusieurs semaines ou
mieux de plusieurs mois, on obtient une dissolution
aqueuse de ferment.
Cette théorie de la coagulation à laquelle A. Schimdt
travaille depuis plusieurs années, a été accueillie en
Allemagne avec faveur par un grand nombre de physio-
logistes, mais aussi violemment attaquée par quelques-
uns. En France les idées de Denis ont généralement
prévalu.
Olof Hammarsten (1) a récemment publié sur le même
sujet des recherches fort intéressantes. Des deux généra-
teurs de la fibrine admis par Schmidt, le fibrinogène seul
interviendrait dans la production matérielle de la fibrine :
au moment de la coagulation , il se transformerait en partie
en fibrine, en partie en fibrinoplastique (fibrine soluble de
Denis).
Le tableau suivant est destiné à résumer les théories de
Denis, d'Alex. Schmidt et de Hammarsten.
(1) Olof Hammarsten. Unlersuchungen ùber die Faserstoffgerinnung.
Nov. Act. Soc. scient. Upsal. Ser. III, vol. X, pp. 1-150. 1876. — Idem.
Zur Lehre von (1er Faserstoflgerinnung. Pfliiger's Arebiv. 1876, pp. 211-
274. Dd. XIV.
( M )
Théorie de Denis.
Plasma avant la coagulation : Plasma après la coagulation :
Plasmine j Fibrine concrète,
( Fibrine dissoute (paraglobuline).
Serine (albumine) | Serine (albumine du sérum).
Théorie d'Alex. Schmidt (fermentation).
Fibrinogène l
Fibrinoplastique (du plasma l. . . ) ' nne'
et des globules blancs) ..(... Fibrinoplastique (paraglobuline).
Albumine | Albumine.
Théorie de 0. Hammarsten (fermentation).
Fibrinogène ( Fibrim
( Fibrinoplastique (paraglobuline).
Fibrinoplastique? I Fibrinoplastique (paraglobuline).
Albumine | Albumine.
Ce tableau est des plus instructifs. La première chose
qui saute aux yeux, c'est que Denis, Schmidt et Ham-
marsten sont complètement d'accord sur les produits de la
coagulation. Les noms seuls sont différents. Il n'en pouvait
être autrement, puisque c'est un résultat de l'analyse du
sang coagulé, qui peut aujourd'hui se faire avec une
grande précision.
Quant au sang avant et pendant sa coagulation, on n'a
jusqu'ici pu l'aire que des essais qualitatifs. L'identité de
propriétés entre le fibrinogène et le fibrinoplastique ,
rendait leur dosage séparé impossible, et l'analyse quanti-
tative du sang avant sa coagulation restait à l'état de desi-
deratum. Grâce à une méthode que j'ai imaginée et qui est
basée sur une propriété nouvelle du fibrinogène, il est
facile de doser cette substance séparément et d'effectuer une
( 70 )
analyse complète de sang avant sa coagulation. La simple
comparaison avec les chiffres de l'analyse du sang après la
coagulation permet de suivre les transformations des sub-
stances albuminoïdes du plasma dans leurs moindres dé-
tails, et de retracer un tableau complet de ce phénomène.
L'accord qui existe dans la seconde colonne du tableau
précédent finira également par s'établir entre les termes
de la première colonne, grâce à l'emploi de la balance , cet
auxiliaire indispensable des recherches chimiques.
CHAPITRE II.
LE FIBRINOGÈNE DU SANG.
La difficulté que l'on éprouve à se procurer du plasma
sanguin est la principale cause des nombreuses lacunes
que présente l'histoire de ce liquide : je décrirai donc
avec quelques détails les procédés que j'ai employés pour
sa préparation.
Le sang des vertébrés étant un mélange de plasma et
de globules, le problème consiste à séparer ces derniers
avant que la coagulation survienne. Il ne faut pas son-
ger à la filtration : les globules rouges sont des corps telle-
ment mous qu'ils se glissent à travers les pores du papier
le plus fin (1). C'est par décantation qu'on doit les séparer.
En effet, grâce à leur densité plus grande, les hématies
tendent à se rassembler au fond du vase. Ils se déposent
avec une rapidité très-variable chez les diverses espèces
(1) On réussit, paraît-il, à séparer les globules en filtrant le sang par
différence de pression à travers une cloison poreuse de biscuit. Voir: de
Gorup-Besanez. Traité d'analyse zoochimique. Paris, 1875, pp. 13 et 14.
( 71 )
animales (1). Tandis que le sang de bœuf ne donnerait,
après plusieurs jours d'attente, qu'une couche de liquide
clair à peine perceptible, le sang des solipèdes, celui du
cheval en particulier, commence au bout de quelques mi-
nutes à se séparer en un liquide jaunâtre qui surnage
(plasma) et en une bouillie de globules gagnant les par-
ties inférieures. Mais la coagulation le saisit en général au
moment où cette stratification ne fait que commencer, de
sorte qu'il est à peu près indispensable de suspendre la
production de la fibrine par l'un des moyens dont il a été
question dans l'introduction. J'ai employé successivement
le froid, les sels alcalins et la conservation du fluide san-
guin dans son réceptacle naturel, un gros vaisseau lié à ses
extrémités.
Pour soumettre le sang de cheval à un refroidissement
rapide, j'ai fait confectionner, d'après un modèle que j'ai
trouvé dans le Handbook for the physiological Laboratory
de Burdon-Sandcrson, Londres, fS75,p. 168, un appareil
composé de trois vases cylindriques en zinc (2) de gran-
deur décroissante. Les cylindres sont placés les uns dans
les autres : je remplis de glace le plus petit ainsi que l'in-
tervalle qui sépare le cylindre extérieur du moyen. Je reçois
alors le sang qui arrive directement de la veine dans l'es-
pace en forme de manchon, qui reste libre entre le cylin-
dre intérieur et le moyen. La couche de sang n'a dans mon
(1) G. Bunge a eu l'idée d'exagérer celte vitesse en soumettant le sang
à une rotation rapide dans un appareil à force centrifuge.
G. Bunge. Zeitschrift fur Biologie. Zur quantilativen Analvse des
Blutes, XII, pp. 191-216. — Voir aussi Gautier. Chimie appliquée, etc.,
1871, Paris, p. 488,1.
(2) Le choix du zinc est loin d'être heureux. J'ignorais à celte époque
l'action spéciale que ce métal exerce sur le sang.
( 72)
appareil qu'un centimètre d'épaisseur, elle se trouve re-
froidie par ses deux surfaces. Ce procédé permet d'obtenir
d'assez grandes quantités de plasma et de les conserver
pendant plusieurs heures à l'abri de toute coagulation. Il
suffit d'attendre le dépôt des hématies et d'aspirer à l'aide
d'une pipette refroidie le liquide surnageant. Le plasma
ainsi obtenu est souillé d'un peu de matière colorante du
sang. Il est en effet impossible, pendant qu'on achève de
remplir le cylindre de sang, d'empêcher qu'il ne se mélange
avec quelques gouttelettes d'eau condensées sur les parois
métalliques refroidies. Cette eau dissout une petite quantité
d'hémoglobine qui donne au plasma une teinte légèrement
rosée. Je n'ai pu utiliser ce procédé aussi souvent que je
l'aurais désiré, l'abattage des chevaux se faisant à Gand à
une heure assez matinale.
J'ai au contraire fréquemment employé des dissolutions
salines pour suspendre la coagulation du sang. Comme je
le montrerai plus loin, ces solutions ne modifient guère
les propriétés des substances albuminoïdes du plasma. Le
sulfate de magnésium m'ayant donné des résultats bien
supérieurs à ceux obtenus par le sulfate de sodium, je n'ai
pas tardé à me servir exclusivement du premier. Alexan-
dre Schmidl et Olof Hammarsten lui donnent également
la préférence. Le vase dans lequel je reçois le sang con-
tient un poids connu d'une solution concentrée de sulfate
de magnésium (une partie de Mg.SOi pour trois parties
d'eau) correspondant environ au tiers du volume de sang
à recevoir. J'achève de le remplir avec le sang que je laisse
couler directement du vaisseau. La séparation en globules
et plasma s'effectue ici comme pour le sang soumis au
froid, mais plus lentement. Ce plasma, recueilli au bout
de quelques heures et filtré, constitue un liquide cilrin
( 73 )
d'une transparence parfaite et qui se prèle admirablement
au dosage du fîbrinogène.
Si l'on veut rapporter les chiffres trouvés, à 100 de
plasma non dilué, il faut au préalable déterminer le degré
de dilution du mélange magnésien, ce qui peut se faire en
dosant les substances albuminoïdes en bloc par l'ébullition
en présence d'une petite quantité d'acide acétique et com-
parant le poids ainsi trouvé avec le poids obtenu en effec-
tuant une détermination quantitative du même genre dans
une petite portion de plasma non dilué, conservé à l'inté-
rieur d'une veine, d'après le procédé suivant.
Ce sont les expériences récentes de Glénard (1) qui
m'ont donner l'idée d'utiliser pour l'analyse du plasma la
propriété qu'offre le sang de cheval de rester pendant long-
temps liquide dans une veine extraite du corps, et de s'y
séparer en peu de temps en plasma et en magma globu-
laire (2).
Le cheval n'a qu'une veine jugulaire de chaque côté (3).
Ce volumineux vaisseau est situé sur les parties latérales
de l'encolure, au niveau du sillon profond très-visible à
l'extérieur (gouttière jugulaire) qui s'étend du poitrail à la
base de l'oreille, près de l'articulation de la mâchoire. 11
est recouvert par la peau, le tissu cellulaire sous-cutané,
le peaucier et les rameaux du plexus cervical.
Voici le procédé que j'ai trouvé le plus commode pour
utiliser les chevaux sacrifiés dans les abattoirs et extraire
(1) Glénard. Loc. cit.
(2) Celte séparation s'effectue parfois sur ranimai vivant. Voir : Cl. Ber-
nard. Leçons sur les propriétés physiologiques et les altérations patholo-
giques des liquides de l'organisme, 1859, 1, p. 433.
(3) Voir : Chauvcau. Traité d'anatomie comparée des animaux domes-
tiques.
( 74 )
les deux jugulaires par la même incision : le cheval est
assommé par un vigoureux coup de marteau asséné sur la
région frontale. 11 tombe comme une masse, exécutant
parfois quelques mouvements convulsifs des extrémités.
Sans perdre un instant, je fais sur la ligne médiane au-
devant de la trachée, à la partie inférieure du cou, une
incision longitudinale comprenant la peau, le tissu cellu-
laire sous-cutané et le peaucier. Je dissèque la peau aussi
rapidement que possible, rencontrant le muscle sterno-
maxillaire que je dépasse. J'arrive ainsi fatalement sur la
veine jugulaire; je l'isole sur une petite étendue en me
servant autant des doigts que du scalpel. Je glisse un bout
de ficelle sous la veine et je la lie dans sa partie la plus
déclive, à l'aide d'un nœud fortement serré. Je passe en-
suite à l'autre côté où j'en fais autant. L'opération doit
s'exécuter avec célérité, de façon que l'animal puisse en-
core être soigné comme d'habitude. L'abatteur plonge im-
médiatement son long couteau au niveau de la fourchette
du sternum dans la direction du cœur. Un flot de sang
noirâtre s'échappe de la plaie. C'est le moment de remplir
les vases contenant le liquide au sulfate de magnésium et
do recueillir des échantillons de sang pour les dosages de
fibrine et pour l'analyse du sérum.
L'animal une fois saigné, je puis extraire à loisir les
veines jugulaires. Je prolonge l'incision sur la ligne mé-
diane jusqu'à la tête , je procède à la ligature d'une dizaine
de collatérales et j'isole complètement la veine jusqu'au
niveau de sa bifurcation supérieure où je glisse une liga-
lure sous elle. Mais avant de la serrer, j'ai soin, par des
frictions pratiquées à travers la peau, de faire refluer le
plus de sang possible clans le segment veineux que j'en-
lève. Je suspends le vaisseau verticalement, en ayant égard
( 75 )
à la direction des valvules qui d'ailleurs sont incomplètes
ou nulles. La veine de l'autre côté est extraite avec les
mêmes précautions. Il est fort commode pour cette se-
conde extraction que l'animal soit changé de position. Les
vaisseaux extraits de cette façon peuvent atteindre (10 cen-
timètres de long et contenir plusieurs centaines de
grammes de sang. Au bout d'un petit nombre de minutes,
le sang commence à s'y séparer en deux couches, l'une
inférieure, rouge sombre, globulaire, l'autre hyaline,
plasmatique. Une ligature intermédiaire permet d'isoler la
partie plasmatique. Dans celle opération, l'hémorrhagie
est tout à fait insignifiante, le cœur cessant presque in-
stantanément de battre après le coup d'assommoir. Les
seuls instruments à employer sont un ou deux bistouris
bien affilés et un peloton de ficelle. Un aide est tout à fait
superflu (1).
C'est sur du plasma obtenu à l'aide du troisième pro-
cédé, que j'ai découvert la propriété qu'offre le fibrinogène
de se coaguler par la chaleur à une température relative-
ment basse (-f- 56° C). Avant moi, Kùhne (2) avait em-
ployé la méthode des coagulations successives pour séparer
les substances albuminoïdes du plasma musculaire : il y
avait trouvé de cette façon deux albumines, l'une devenant
insoluble à -f- 47°, l'autre à -+- 75°. Si personne après lui
n'a songé à l'appliquer au plasma sanguin, il faut l'attri-
buer en partie à la difficulté d'élever la température de ce
(1) Grâce à la bienveillance de M. le professeur Thiernesse, directeur
de l'École de médecine vétérinaire , j'ai pu pratiquer à Curegem cette opé-
ration sur un cheval vivant. Je prie M. Thiernesse de recevoir ici l'expres-
sion de ma gratitude.
(2) Kïihne. Unteisuchungen ùber das Protoplasma und die Contracti-
lilàl. Leipzig, 1864.
( 76 )
dernier tout en empêchant la production de la fibrine, et
surtout aux résultats décourageants que donne ia même
méthode avec le sérum sanguin.
Si je chauffe graduellement au bain d'eau un échantillon
de sérum de cheval, il reste parfaitement limpide jusque
vers -h 65° C. A ce moment il commence à présenter une
opalescence manifeste qui s'accentue à mesure que la tem-
pérature s'élève. En même temps, il s'épaissit graduelle-
ment, de sorte que vers -4- 72° C à -+- 73° G, il a la con-
sistance d'une gelée de fruits. Le liquide que j'en extrais
par expression est encore fortement opalescent et conti-
nue à se troubler si j'échauffe davantage. 11 est ici mani-
festement impossible de séparer par coagulation les deux
substances albuminoïdes que contient le sérum sanguin.
Les températures correspondant au début et à la fin de la
coagulation se trouvent fort éloignées l'une de l'autre. Il
n'est donc pas étonnant que la même méthode n'ait pas été
tentée sur le plasma sanguin.
C'est par hasard que j'ai découvert le point de coagula-
tion du lîbrinogène du sang, dans le cours d'expériences
entreprises primitivement dans le but de déterminer exac-
tement la limite supérieure de température que le sang
peut supporter sans perdre la propriété de se coaguler
spontanément par production de fibrine. Je renferme un
segment de veine jugulaire de cheval gonflée de plasma
dans un tube de verre à parois minces à côté d'un thermo-
mètre. Le tube, convenablement bouché, plonge dans un
bain d'eau dont un second thermomètre indique la tempé-
rature. Il faut chauffer lentement, de façon que le thermo-
mètre intérieur ne soit jamais en relard de plus d'un ou
deux dixièmes de degré sur le thermomètre plongé dans
l'eau. Si je retire la veine et si je l'ouvre avant d'avoir
( 77 )
atteint le premier point de coagulation , le liquide qui s'en
écoule n'a pas changé d'aspect et ne tarde pas à se prendre
en caillot à la façon du sang. J'ai pu chauffer ainsi un seg-
ment veineux à •+■ 55°,5C; le plasma qui avait été soumis
à cette température pendant plusieurs minutes se coagula
presque instantanément à son issue du vaisseau. Un second
segment emprunté à la même veine, et qui avait été sou-
mis à une température de -h 56° C fut également ouvert,
mais fournit un liquide qui fut conservé pendant plusieurs
jours sans donner la moindre trace de fibrine.
Cette expérience fut répétée au moins sur une douzaine
de veines et donna chaque fois des résultats identiques.
Une température supérieure à h- 56° fait brusquement et
irrévocablement perdre au sang ses propriétés librino-
gènes. Une addition de sérum est même incapable de les
rappeler.
Mais en même temps que le liquide perd la faculté de se
coaguler spontanément, il change d'aspect par suite de la
formation d'un précipité grumeleux. Les granules de ce
précipité s'agrègent pour former des flocons qui se laissent
facilement séparer par filtration : le liquide filtré passe
parfaitement clair. Je puis le chauffer jusqu'à ■+■ 65° à
-4- 66° sans que sa limpidité subisse la moindre atteinte.
Privé de la substance qui se coagule à -+- 56°, il se com-
porte comme le sérum, devenant opalescent vers -+- 56° et
se coagulant ensuite complètement si l'on élève davantage
la température. Comme le sérum, il contient deux sub-
stances albuminoïdes en solution : l'albumine ordinaire et
la paraglobuline. L'addition de chlorure de sodium en excès
précipite celle dernière substance. On peut également l'ex-
traire en diluant le liquide de 10 à 15 fois son volume
d'eau et en le soumettant à un courant d'acide carbonique.
( 78 )
La paraglobuline se dépose alors sous forme d'un précipité
finement granuleux.
La substance qui se coagule à -+- 56° n'existe pas dans
le sérum : elle disparaît donc complètement par le fait de
la coagulation de la fibrine, et diffère notablement de l'al-
bumine et du librinoplastique par son point de coagu-
lation.
Sans aucun doute, c'est le corps albuminoïde dont
Alex. Schmidt admit l'existence dans le sang, et qui cor-
respond au fibrinogène du liquide d'hydrocèle. Comme ce
dernier, la substance qui se coagule à + 36° appartient au
groupe des globulines de Hoppe-Seyler ; elle est précipitée
par le chlorure de sodium en excès. Si je sature à l'aide
de sel ordinaire, du plasma naturel ou mélangé au sulfate
de magnésium, j'obtiens le précipité floconneux qui con-
stitue la plasmine de Denis, dont le fibrinogène représente
une partie. Je recueille la plasmine sur un filtre, et je la lave
complètement avec une solution saturée de chlorure de
sodium. J'exprime ensuite le filtre avec le précipité entre
plusieurs doubles de papierà filtrer, de façon à le débarras-
ser de l'excès de chlorure de sodium. Je recueille le précipité
à l'aide d'une spatule et je le dissous dans l'eau distillée;
ou mieux encore, je divise le filtre auquel le précipité est
resté adhérent en petits fragments que je fais macérer
pendant quelques minutes dans l'eau distillée. Les gru-
meaux de plasmine se dissolvent complètement grâce à la
petite quantité de sel qui leur est restée adhérente. Le
liquide ainsi obtenu est filtré pouren séparer les morceaux
du filtre. Une portion de ce liquide chauffé au bain d'eau
donne à h- 56° C, 5 une coagulation toute semblable à celle
que présentait le plasma sanguin. Une seconde portion
du même liquide est abandonnée dans un gobelet, à la lem-
( 79 )
pérature ordinaire du laboratoire. Au bout d'un temps qui
varie entre quelques minutes, une demi-heure, une heure
ou plus longtemps, il se prend spontanément en une gelée
compacte, hyaline. Le caillot ainsi formé se rétracte par-
fois en laissant suinter un sérum aqueux; d'autres fois il
reste adhérent aux parois du vase dans lequel il s'est
formé. Dans tous les cas, on peut en exprimer un liquide
qui contient de la paraglobuline.
Pour Denis, la plasmine s'est dédoublée en fibrine con-
crète et fibrine soluble. Mais il m'a été facile de prouver
que la fibrine soluble ou paraglobuline existe déjà dans la
plasmine avant sa coagulation, et que cette dernière est
réellement un mélange de deux substances comme l'admet
Schmidt. Reprenons en effet notre solution de plasmine
quia été soumise à la température de -f- o7° C; séparons-en
le précipité qui s'y est formé et examinons le liquide qui
filtre. Ce liquide renferme encore une substance albumi-
noïde dont toutes les propriétés correspondent à celles de
Ja paraglobuline: il précipite par l'acide carbonique, par le
chlorure de sodium, etc. Si nous remplaçons ce liquide
filtré, dans le bain d'eau, et si nous continuons à élever la
température, nous pourrons monter jusqu'à + 75° avant
que les premiers signes d'une seconde coagulalation,
celle de la paraglobuline ou fibrinoplaslique apparaissent.
La substance qui se coagule à -+- 56° existe donc dans
le plasma sanguin alors qu'il est encore contenu dans les
vaisseaux; elle disparait complètement pour faire place à
la fibrine pendant la coagulation spontanée; elle peut être
précipitée en compagnie de la paraglobuline par le chlo-
rure de sodium en excès. Le mélange de ces deux sub-
stances (plasmine de Denis) se coagule spontanément
comme le plasma. La plasmine chauffée offre une première
(80)
coagulation à -h 56° et perd en même temps la propriété
de fournir de la fibrine. Il en est de même du sang privé
de cette substance. Toutes ses propriétés se rapportent
au fibrinogène dont Alexandre Scbmidt admit l'existence
dans le plasma sanguin. Le doute n'est donc guère possi-
ble. Il se présente cependant une difficulté. A côté du fibri-
nogène hypothétique du sang que Schmidt n'a jamais
obtenu à l'état de pureté, qu'on n'a jamais pu y déterminer
quantitativement, il existe un fibrinogène réel, dont
A. Schmidt a étudié les propriétés et qu'il a extrait du
liquide d'hydrocèle. Le fibrinogène du liquide d'hydrocèle
et celui du sang sont assurément des substances très-voi-
sines puisqu'elles appartiennent toutes deux au groupe
des globulines ; mais est-il bien prouvé qu'ils soient identi-
ques. Deux propriétés me semblent les différencier nette-
ment : 1° Leur point de coagulation par la chaleur est trop
différent; le fibrinogène du sang se coagule à -+- 56° C;
celui des transsudats devient insoluble à une température
voisine de celle de la coagulation de l'albumine. Cette
seule propriété suffirait pour les séparer et permettrait de
les doser isolément, s'ils pouvaient se trouver réunis dans
un môme liquide de l'économie. 2° le liquide d'hydrocèle
chauffé vers -+- 60° perd radicalement la propriété de
fournir de la fibrine, mais il ne subit aucun changement
apparent :
« Dagegen verlor jede fibrinbse Flùssigkeit ein mal auf
-h 60° erwàrmt ihre Gerinnbarkeit ganz und zwar ohne
zich dabei âusserlich sichtbar zu verândern, » dit Alex.
Schmidt. Au contraire, le fibrinogène du sang peut être
chauffé impunément jusqu'à quelques dixièmes de degré
au-dessous de son point de coagulation sans que ses pro-
priétés fibrinogènes semblent affaiblies. Il ne les perd que
(81 )
si on le précipite par la chaleur. Alexandre Schmidt a donc
probablement confondu sous le nom de fibrinogène deux
globulines différentes^ Mais la nomenclature des sub-
stances albuminoïdes du sang et des liquides qui en
dérivent est déjà si compliquée, que je n'ai pas voulu
donner au fibrinogène du sang un nom [hémo fibrinogène)
permettant de le distinguer de celui du liquide d'hydrocèle
(hydrofibrinogène) aussi longtemps que je ne me serai pas
convaincu irrévocablement que ce sont des substances
différentes. L'occasion ne s'en est pas encore présentée.
Je compte, dès que je pourrai me procurer du liquide
d'hydrocèle en quantité suffisante, en extraire le fibrino-
gène pour en étudier comparativement les propriétés. Je le
dissoudrai dans du plasma sanguin , pour voir si , placé dans
les mêmes conditions que le fibrinogène du sang, il se
coagule par la chaleur à une température différente.
Le fait de la coagulation par la chaleur du fibrinogène
à l'intérieur même d'une portion du système circulatoire
me semble de la plus haute importance. Il ruine définiti-
vement l'idée qui a été souvent émise, d'après laquelle le
plasma sanguin ne contiendrait qu'une seule substance al-
buminoïde d'où dériveraient au moment de la mort du
sang, la fibrine, l'albumine, etc. Brûcke (1) soutient une opi-
nion de ce genre. Cet illustre physiologiste avait découvert
que du plasma de cheval dont la coagulation spontanée a
été empêchée pendant quelques heures par l'addition
d'acide acétique ou tartrique, ne donne plus de fibrine,
même après neutralisation par l'ammoniaque. Ayant
chauffé graduellement ce plasma, il trouva qu'il se com-
portait comme une solution d'albumine, devenant opales-
Ci) Bruche. Vorlesungen uber Physiologie, p. 100. Wien, 1873.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 6
(82 )
cent enlre -+- 60° et -f- 65° et prenant vers -+■ 70° un
aspect laiteux dû à la coagulation de l'albumine. 11 en con-
clut que la fibrine se forme dans le sang aux dépens d'une
partie de l'albumine ordinaire, et ne dérive pas d'un corps
préformé différent de celle-ci. Vulpian (1) lui aussi n'ad-
met dans le plasma sanguin qu'une seule matière albumi-
noïde, qui se dédoublerait en albumine et plasmine; la
plasmine elle-même donnerait ensuite de la fibrine et de
la paraglobuline.
Comme je l'ai démontré, l'étude de la coagulation du
plasma par la chaleur, faite dans les meilleures conditions,
à l'intérieur même de la veine, conduit à des conclusions
diamétralement opposées. Le plasma contient bien réelle-
ment trois substances albuminoïdes nettement caractéri-
sées. L'objection qu'on faisait à Denis, d'après laquelle le
plasma serait un produit artificiel résultant d'une altération
du sang sous l'action des réactifs, tombe complètement à
faux. Enfin , il n'est plus permis de considérer la fibrine
comme provenant de l'agrégation de particules solides
préexistantes, microzymas ou autres qui se trouveraient
primitivement à l'état de suspension dans le fluide san-
guin (Béchamp).
Revenons à la coagulation du fibrinogène par la chaleur.
On sait que le point de coagulation de l'albumine peut
être notablement abaissé si la solution est acide et si l'on
y introduit des sels neutres. Les alcalis , la dilution élèvent
au contraire la température à laquelle l'albumine devient
insoluble. Comme la quantité de sels contenus dans le
sang et son degré d'alcalinité sont sujets à varier dans des
limites assez larges, il est naturel que le point de coagu-
(1) Vulpian. Leçons do pathologie expérimentale.
( 83 )
lalion du ûbrinogène s'en ressente. En effet, le plasma
provenant de chevaux différents offre, sous ce rapport, des
variations légères restant toujours comprises entre les li-
mites extrêmes -+- 55° C et-h 57° C. Mais pour un même
sang, le passage du fibrinogène à l'état insoluble s'obtient
dans des limites de température fort étroites, ne dépas-
sant certainement pas 2 à 5 dixièmes de degré. Sous ce
rapport, cette substance se comporte donc d'une façon
toute différente de l'albumine.
Le mélange de plasma avec moitié de son volume de la
solution magnésienne abaisse le point de coagulation de
1 à 2 degrés, il se coagule alors entre -+- 54° et -h 55°. Si
l'on introduit graduellement du chlorure de sodium dans
du plasma où Ton a suspendu la production de fibrine à
l'aide de la solution magnésienne, le fibrinogène et la
paraglobuline se séparent à l'état de flocons qui donnent
au liquide l'aspect crémeux. Mais une partie de ces globu-
lines reste en solution. En mélangeant ainsi des volumes
égaux de plasma au sulfate de magnésium et de solution
de chlorure de sodium saturée à la température ordinaire
et en séparant Je précipité par iiltration, on obtient un
liquide qui renferme un peu de iibrinogène. Une solution
ainsi saturée à moitié de sel marin s'est coagulée entre
-i- 45° et -+- 48°.
Enfin du plasma au sulfate de magnésium à peu près
saturé de sel marin contient encore une minime quan-
tité de fibrinogène en dissolution. Je l'ai vu se coaguler
alors à -+- 28°. J'avais ainsi l'exemple curieux d'une sub-
stance albuminoïde que la chaleur de la main suffît à faire
passer à l'état insoluble. Dans ces liquides saturés de sel,
l'albumine se coagule également à une température anor-
male (entre -h 4o° et -+- 50°).
(84)
Si l'on cherche à démontrer la coagulation du librino-
gène dans le plasma obtenu par le froid, ou dans celui
qu'on vient d'extraire de la veine, on réussira le plus sou-
vent, surtout si l'on opère sur de petites quantités de
liquide que l'on échauffe rapidement. D'autres fois la
fibrine se formera avant que le plasma ait atteint -+- 56°.
Il est très-facile de distinguer à la simple vue la produc-
tion spontanée de fibrine de la coagulation par la chaleur
du fibrinogène. Le plasma en train de se coaguler sponta-
nément devient fortement opalescent dans toute sa masse
à la fois et se transforme en une gelée compacte. La coa-
gulation par la chaleur du fibrinogène suit une tout autre
marche. Supposons un tube de verre mince, rempli à
moitié de plasma filtré et plongeant dans un bain d'eau
chauffée entre ■+- 56° et -+- 60°. La coagulation du fibrino-
gène commencera toujours dans le voisinage de la surface
libre du liquide. Il se forme là un trouble laiteux qui se
propage de haut en bas, mais qui dans sa partie inférieure
n'occupe que le centre du tube. A un certain moment, les
parties coagulées représentent un cône à sommet inférieur.
Ce cône s'agrandit de plus en plus et le phénomène finit
par envahir toute la masse du liquide. La matière ainsi
coagulée se présente à l'état de grumeaux rassemblés en
flocons qui nagent dans un liquide clair et se laissent assez
rapidement séparer par le filtre.
J'ai retrouvé le fibrinogène dans le sang des différentes
espèces de mammifères que j'ai pu examiner : sang d'un
grand nombre de chevaux, puisé dans la veine jugulaire et
dans le cœur; sang de la carotide d'un lapin jeune adulte ;
sang des vaisseaux du cou de l'agneau; sang humain
puisé dans l'oreillette droite d'une femme qui s'était sui-
cidée par strangulation 48 heures auparavant. Les échan-
( 85 )
tillons de sang furent chaque fois reçus dans la moitié de
leur volume de solution magnésienne. On laissa aux glo-
bules le temps de se déposer et le fibrinogène fut recher-
ché par la chaleur dans le liquide surnageant filtré au
préalable. Il se coagula pour chacun de ces sangs à une
température voisine de h- 55°. Du sang de grenouille verte
se comporta de la même façon (1).
Grâce à sa coagulation précoce, le fibrinogène peut être
dosé seul à l'état coagulé avec la plus grande facilité. On
pèsera dans un large tube fermé une cinquantaine de
grammes de plasma filtré à une basse température (2) et
(1) J'ai relrouvé également le fibrinogène du sang dans un liquide
d'épanchemenl pleurétique extrait à l'autopsie 36 heures après la mort
Il se troubla à -t- 56° C Le précipité granuleux ayant été séparé par fillra-
tion, le filtrat put être chauffé jusque vers -+- 66° avant de changer une
seconde fois d'aspect. Au bout de deux heures, la partie qui n'avait pas été
chauffée se coagula spontanément.
Un liquide extrait d'une ampoule de vésicatoire resta parfaitement clair
quoiqu'il eût été chauffe u plusieurs degrés au-dessus de -4- 60°. Jl ne
contenait probablement que le fibrinogène de Schmidl, car l'addition de
quelques gouttes de sang de lapin défibriné y détermina au bout de quel-
ques heures la formation d'un petit caillot fibrineux.
(2) On filtrera le plasma sur une série de petits entonnoirs entourés de
glace saupoudrée de quelques grains de sel. Mais il faut soigneusement
éviter que la température descende au-dessous de — 4° C à — 5« C
point auquel le plasma commence à se congeler. Car les cristaux, une fois
formés, fondent lentement et doivent alors être réchauffés jusqu'à 0°: ils
n'ont pas la même composition que le liquide dans lequel ils nagent Dans
une expérience ôsr,808 de cristaux desséchés entre du papier à filtre re-
froidi ont donné Usr,241 de matières albuminoïdes coagulées par l'alcool,
soit 6sr,55 p. °/o. Le liquide plus riche en albuminoïdes fut soumis de
nouveau à un mélange de glace et de sel et donna une seconde récolte de
cristaux dont 5?r,333 fournirent Os',475 de matières albuminoïdes, soit
8s--,404 p. °/o. Enfin, le liquide obtenu finalement s'était notablement ap-
(80)
on le plongera dans un bain d'eau chauffée au préalable à
une température qui ne doit pas dépasser -+- 64° C. Il peut
être avantageux d'ajouter au liquide une certaine quantité
de solution magnésienne pour éviter que la coagulation
spontanée delà fibrine ne vienne faire manquer l'analyse.
Le précipité est lavé à l'eau, ou mieux avec une solution
de chlorure de sodium à 1/2 p. °/0 (pour éviter qu'une par-
tie de la paraglobuline ne se dépose.) On le laisse se ras-
sembler au fond du vase avant de le recueillir sur un petit
filtre de papier de Suède, taré avec le plus grand soin
(desséché à -+- 110° et pesé entre deux verres de montre).
On l'épuisé sur le filtre à l'eau distillée, puis a l'alcool
bouillant pour éloigner les graisses et la lécilhine. On le
dessèche ensuite pendant plusieurs heures dans un courant
d'air chauffé entre -h 110° et -h 120°. On le laisse refroi-
dir dans un exsiccaleur et l'on pèse à différentes reprises
entre les verres de montre. On n'admet comme vrai le
chiffre du poids que lorsqu'on s'est assuré qu'il ne subit
plus de diminution.
Pour faire un dosage comparatif de fibrine, je me sers
avec avantage du petit appareil de Hoppe-Seyler, qui se
compose d'un gobelet recouvert d'une coiffe de caoutchouc
à travers laquelle passe la baguette de baleine qui sert à
défibriner. Son poids ayant été déterminé exactement, on
y introduit une cinquantaine de grammes de plasma filtré.
Ordinairement on a tout le temps de peser avant que la
coagulation commence. On s'en assurera par un essai
préalable sur une petite portion de substance. On réchauffe
pauvri en eau. 6sr,-25ô donnèrent 0sr,575 de substances albuniinoïdes, soit
9«',211 P- %•
( 87 )
ensuite le gobelet en le plongeant dans de l'eau à -+- 45°,
pour activer la coagulation et l'on procède activement au
battage du liquide. La fibrine ainsi obtenue (1) est lavée
avec une dissolution étendue de chlorure de sodium jus-
qu'à ce qu'elle soit d'une blancheur parfaite. On la recueille
sur un très-petit filtre taré, on l'épuisé par l'eau, l'alcool
bouillant, etc. Dans les deux cas, on doit ensuite calciner
Ja substance et le filtre pour pouvoir tenir compte du poids
des cendres. Naturellement le papier dont on fait usage
ne doit laisser à la calcinalion qu'une trace imperceptible
de résidu non volatil.
Je ne donnerai ici qu'un seul exemple d'analyse (la pre-
mière que j'ai faite). Je publierai les chiffres des autres
quand j'en aurai une série nombreuse.
Analyse comparative de la fibrine et du iibrinogène.
Cheval abattu à 6 heures du matin. Les deux veines ju-
gulaires sont, immédiatement après leur extraction, sus-
pendues verticalement dans un long bocal de verre dont
les parois intérieures sont maintenues humides. A 5 heures
après midi, j'isole sur chacune des veines à l'aide d'une
ligature la portion supérieure gorgée de plasma.
Les deux segments plasmatiques, renfermés dans un
tube de verre, sont plongés dans de la glace pendant
quinze minutes. On les ouvre d'un coup de ciseaux, le li-
quide citrin qui s'écoule est reçu dans un gobelet refroidi
au préalable et distribué sur trois petits filtres maintenus
(1) Ce procédé est le seul qui permette de préparer de la fibrine du
sang absolument pure. Avec de la patience on peut, il est vrai, l'obtenir
à peu près au-si blanche par le battage du sang, mais dans ce cas elle est
encore toujours souillée de débris de globules blancs ou rouges. Voir :
Melsens. Ann. de chim. et de phys.
La fibrine qui dérive de la plasmineest aussi très-pure.
(88)
à 0°. Au bout d'une heure, les liquides filtrés sont réunis,
intimement mélangés, puis divisés en deux portions
A etB.
A. — Dosage du fibrinogène.
Poids du vase et du plasma . . 157g>\270
seul 11 9sr.240
38sr.030 de plasma.
On chauffe à -t- 62° C.
Poids des verres de montre, du liltre et du précipité 22sr.432
— et du filtre seuls. . . 22b*.266d
0er.lG55 de fibrinoç
Poids du creuset et des cendres 17sr.1o5
— seul 17ê"\l53
0sr.002 de cendres.
38sr.030 de plasma donnent Oer.1635 — Oer.002 = 0sr.163o de fibrino-
gène, soit Ob'r.4299 pr. et.
B. — Dosage de fibrine.
Poids de l'appareil Hoppe-Seyler et du plasma. 83s>\520 de plasma,
seul 43sr.515
40s'.205
Poids des verres de montre , filtre et fibrine. 22sr.51 1
seuls. . . 22sr.355
0«r.156 de fibrine.
Poids du creuset et des cendres 17sr.156
— seul 176M51
0sr.00o de cendres.
40gr,205 de plasma contenaient doncOgr,156 — 0gr,005 =
0gr,151 de fibrine, soit 0gr,575 p. °/0.
Le plasma qui contenait 0gr,4299 p. % de fibrinogène
ne fournit que 0gr,375 de fibrine, et les autres analyses ont
( 89 j
donné des résultats analogues (1). Une partie du poids du
librinogène s'est donc converti en une autre substance que
de la fibrine. C'est un point que j'exposerai en détail dans
une publication qui fera suite à celle-ci.
Pour déterminer jusqu'où pouvait aller l'erreur dans le
dosage du librinogène, je dosai cette substance dans trois
portions d'un même liquide en opérant un peu différem-
ment dans chacune des opérations. 674gr,2 de sang de
cheval furent reçus dans585gl,5 de solution magnésienne.
Au bout de deux jours, le plasma magnésien fut décanté
et filtré. Une première portion de 52gr,808 fut chauffée
à -i- 6o°. Déduction faite des cendres (0gr,002), elle fournit
0gr,152 de librinogène, soit 0gr,2878 p. %. Une deuxième
portion de 45g,,184 fut chauffée à -+- 6l°5; elle fournit
0sr,1355 de librinogène, soit 0gr,29o p. °/0. Une troisième
portion de 59sr,795 fut additionnée de la moitié de sou
volume de solution magnésienne, puis chauffée à -h 56°;
elle fournit 0sr,1595 du précipité, soit 0gr,26675 p. °/0. Une
quatrième portion du même plasma dilué servit cinq jours
plus tard à déterminer la proportion de fibrinogène qui
passe dans la plasmine de Denis. 11 lsr,54 de liquide furent
traités par le chlorure de sodium en substance. Le préci-
pité de plasmine, délayé dans une grande quantité de solu-
tion saturée de Nage, puis recueilli et lavé sur un filtre
jusqu'à ce que les eaux de lavage additionnées d'acide
acétique dilué ne coagulent plus par la chaleur. Le fil tre
fut divisé en fragments et délayé avec le précipité dans
une petite quantité d'eau distillée qu'on décanta et rem-
plaça plusieurs fois par de nouvelles portions d'eau dis-
(1) A. Schmidtet Hammarsten sont arrivés à des résultats semblables,
mais en employant des méthodes différentes.
v 0(1 )
tillée en ayant chaque l'ois soin de bien exprimer les frag-
ments du filtre. Les liquides furent passés à travers un
second filtre qui fut lavé avec soin. Ces liquides réunis
furent soumis à une température de -+- 60° C pour préci-
piter le fibrinogène. On obtint 0gr,269 de fibrinogène,
soit 0"r,241 p. °/0. Les liquides filtrés additionnés d'acide
acétique dilué furent versés par petites portions dans un
gobelet chauffé au bain de sable et contenant de l'eau en
pleine ébullition. Le précipité recueilli pesait 0sr,157 (tou-
jours déduction faite du poids des cendres), soit 0gr,122
p. °/0. Les 0gr,565 p. °/0 de plasmine se composaient donc
de 0sr,241 de fibrinogène et de 0sr,422 de paraglobuline.
Dans une cinquième portion de 20sr,091 je déterminai le
poids total des substances albuminoïdes réunies, par
l'ébullition en présence de quelques gouttes d'acide acé-
tique dilué. Les 20gr,091 donnèrent 0gr,643, soit 3gr,2004
p. °/0 de substances albuminoïdes.
Ce plasma dilué contenait donc p. % :
Fibrinogène I Ogr.2878 II 0sr.29o III 0sr.267
Plasmine 0sr.3G3 se décomposant en :
Fibrinogène 0sr.2-il ) chiffres trop faibles.
Paraglobuline 0«r.122 J
Substances albuminoïdes 5sr.2004
CHAPITRE III.
LA TRANSFORMATION DU FIBRINOGÈNE EN FIBRINE.
« Le temps que la plasmine dissoute met à se coaguler
» varie de 5 minutes à un quart d'heure, à une heure et
» plus encore, selon la quantité de sel qu'elle a con-
» servée et la dose de l'eau employée. Si elle retient trop
» de sel et si elle est trop étendue d'eau, la coagulation
(91 )
» est retardée. » Ainsi s'exprime Denis dans son Mémoire
sur le sang (page 54. Paris 1859), et j'ai maintes ibis pu
vérifier l'exactitude de celte assertion; mais il est un point
qui semble avoir complètement échappé à l'illustre méde-
cin de Toul, c'est que le temps que met le fibrinogène ob-
tenu par précipitation à se transformer en fibrine, dépend
surtout de la façon dont le mélange de sang avec la solu-
tion saline s'est effectué. Dans mes premières expériences
je ne recevais pas directement le sang dans la solution
magnésienne. Les grandes dimensions de mes bocaux s'y
opposaient, la saignée se faisant dans l'échaudoir au ras
du sol. Je faisais couler le liquide dans un gobelet ou toul
autre récipient de petites dimensions dont je déversais
ensuite le contenu dans la solution magnésienne et je répé-
tais cette manœuvre un certain nombre de fois. Il s'écou-
lait ainsi quelque temps entre le moment où le sang était
soustrait à l'organisme et celui où le sulfate de magné-
sium venait à agir sur lui. Dans ces circonstances, j'obte-
nais à l'aide du sel marin dans le plasma filtré des préci-
pités de fibrinogène et de paraglobuline qui redissous dans
l'eau, se coagulaient avec la plus grande rapidité. Je pou-
vais répéter la belle expérience de Denis et en démontrer
les résultats en quelques minutes. Je fus un jour fort sur-
pris d'obtenir un mélange qui trompa mon attente et ne
fut retrouvé coagulé que le iendemain. Je me rappelai ne
pas avoir employé mon procédé habituel à l'abattoir. Le
jet de sang avait été reçu directement dans le liquide ma-
gnésien. Depuis j'ai toujours opéré ainsi. De cette façon ,
l'on obtient des mélanges où la coagulation se trouve ex-
trêmement retardée et qui se laissent facilement manier
dans l'intervalle. La seule explication possible de ce fait,
c'est que le sang, dès son issue de l'organisme, subit avant
(92)
même que la coagulation soit survenue, des changements
qui favorisent cette dernière. Le phénomène est précédé de
ce que j'appellerai la période latente de la coagulation.
Cette période latente ne peut dépendre de changements
survenus dans le fibrinogène, puisque cette substance
existe dans le sang et dans la plasmine avec des propriétés
absolument identiques. Il devenait fort probable que la
transformation du fibrinogène en fibrine s'opère sous l'in-
fluence d'un agent qui prend naissance pendant la période
latente de la coagulation. Je songeai immédiatement au
ferment de la fibrine de Schmidt. J'en préparai quelques
échantillons à l'aide de sang et de sérum de bœuf, de
cheval, etc., précipitant chaque fois 50 à 75 centimètres
cubes de sérum ou de sang exprimé du caillot , avec un
litre d'alcool fort. Je ne commençai à faire usage qu'au
bout de quinze jours des premières préparations ainsi
obtenues. Celles dont je me sers actuellement (mai 1877)
datent du commencement de décembre 1876. Le précipité
produit par l'alcool, reçu sur un filtre, desséché d'abord à
l'air libre, puis sur l'acide sulfurique, délayé dans un peu
d'eau et filtré, me fournit une solution qui ne contient
plus que des traces de substances albuminoïdes (globuline)
coagulable par la chaleur et précipitable par un courant
d'acide carbonique. Celte solution, absolument neutre au
papier, servit à faire une série d'expériences qui me con-
vainquirent pleinement de son activité. Elle contient la
substance qui manque à mes solutions de plasmine à
coagulation tardive.
Expérience : Six petits verres à pied cylindriques sont
placés dans une étuve chauffée à -+- 5o°. Les trois premiers
contiennent 1, 2, 3 centimètres cubes d'une solution à
coagulation tardive additionnés respectivement de 2, 4,
( 93 )
6 gouttes de la préparation de ferment. Les trois derniers
contiennent également \, % 5 centimètres cubes de la so-
lution de plasmine, mais au lieu de ferment, j'y ajoute 2,
4, 6 gouttes d'eau distillée.
Au bout de 40 minutes, le liquide est pris en gelée
dans les trois premiers verres, les autres n'ont subi aucun
changement. Ils sont encore dans le même état au bout de
plusieurs heures. Je laisse le tout dans l'étuve jusqu'au len-
demain. Je retrouve alors les trois verres coagulés éga-
lement. Cette expérience a été répétée assez souvent pour
ne laisser aucun doute. Comme je l'ai dit, la solution de
ferment était exactement neutre. La réaction n'avait d'ail-
leurs pas changé pendant la coagulation. Je m'en assurai
de la façon suivante. Au lieu de délayer la plasmine dans
l'eau distillée, j'employai une solution neutre de tournesol
bleu virant au vineux et je répétai l'expérience précédente.
Six petits verres furent remplis de cette solution bleue.
Trois reçurent quelques gouttes de ferment, les autres, le
même nombre de gouttes d'eau distillée. Au bout de peu
de temps, les premiers furent trouvés coagulés, les autres
restèrent liquides pendant plusieurs heures. Mais il fut im-
possible de constater la moindre différence de teinte entre
les verres où la coagulation s'était effectuée et les autres.
Il semble donc que les changements dans le degré d'alca-
linité du sang qui s'observent au moment de sa coagula-
tion spontanée, soit un phénomène indépendant de la
transformation du fibrinogène en fibrine.
J'ai souvent constaté également l'activité de la prépara-
tion de ferment sur les liquides pathologiques ne se coa-
gulant pas spontanément ou se coagulant tardivement.
Nous ignorons complètement la nature chimique de la
( 94 )
substance que Schmidt appelle ferment de la fibrine (1)
(Fibrin ferment); il n'est même pas prouvé que la coagula-
lion du sang appartienne au groupe des fermentations,
quoiqu'elle offre avec ces phénomènes de grands points de
ressemblance. Je continuerai provisoirement à me servir
du terme de ferment sans pour cela rien vouloir préjuger
sur la nature du corps en question.
Quel est le lieu de sa production au moment où le sang
quille l'organisme? il n'est guère probable qu'il se forme au
sein même du liquide : j'ai pu observer quelques faits qui
me paraissent parler en faveur de l'opinion d'Alexandre
Schmidl, d'après laquelle les globules blancs fourniraient
le ferment.
Si, à l'exemple de Glénard et de Scudamore, j'extrais la
veine jugulaire du cheval et que je la suspende verticale-
ment, le sang ne tarde pas à s'y séparer en plasma et glo-
bules. D'après Glénard, il ne s'y coagule pas : sa fluidité
est indéfinie et n'a pour limites que la dessiccation de la
veine exposée à l'air. Cela est vrai, mais dans une certaine
mesure seulement: ainsi un, deux, trois, même cinq et
six jours après l'extraction de la veine, j'y ai retrouvé du
sang liquide et susceptible encore de se coaguler. Mais
fort souvent aussi j'y ai rencontré les témoins d'une coa-
gulation incomplète. Presque constamment, en y regardant
avec attention , on trouvera un petit caillot à forme de len-
(1) J'ai constaté que le mélange de ubrinogène, de paraglobuline et de
ferment (plasmine de Denis) obtenu par le chlorure de sodium et desséché,
peut être chauffé jusque bien au delà de cent degrés sans perdre la pro-
priété de se coaguler spontanément lorsqu'on le redissout dans l'eau. La
pepsine sèche supporte également la température d'ébullition de l'eau
sans perdre ses propriétés digestives.
( 9o )
tille biconvexe situé transversalement et occupant exacte-
ment la limite entre la couche plasmatique et la couche
globulaire. Or c'est là que les globules blancs se rassem-
blent de préférence en vertu de leur poids spécifique lé-
gèrement supérieur à celui du plasma, mais inférieur à
celui des globules rouges. La zone des leucocytes m'a tou-
jours semblé le point de départ des coagulations qui sur-
viennent spontanément à l'intérieur de la veine isolée. Le
caillot en contient alors un nombre prodigieux emprisonnés
dans un réseau de fibrine.
Mais si les leucocytes tendent en vertu de leur densité à
se déposer à la surface de la couche globulaire, ce phéno-
mène s'effectue avec une lenteur extrême, et même après
plusieurs jours, les parties tout à fait supérieures du
plasma en contiennent un grand nombre. Aussi ce plasma
se coagule-t-il d'ordinaire au sortir de la veine. J'ai cepen-
dant noté une expérience extrêmement intéressante dans
laquelle une veine ouverte le cinquième jour m'a dans sa
partie supérieure fourni un liquide qui ne s'est plus coa-
gulé spontanément; je le tins en observation pendant deux
fois 24 heures, puis je le jetai parce qu'il commençait à
présenter des signes de putréfaction. Le fibrinogène ne lui
faisait cependant pas défaut : une portion additionnée de
sérum fut trouvée entièrement coagulée au bout de quel-
que temps.
Enfin je rappellerai ici que j'ai pu constater, comme
Alexandre Schmidl, que la fillration du plasma à une
basse température retarde notablement la coagulation du
liquide filtré, ce qui s'explique encore par ce fait que fort
peu de leucocytes traversent dans ces conditions les pores
du papier à filtre.
Les expériences suivantes prouvent que si le sang reste
( 96 )
liquide presque indéfiniment dans une veine de cheval ex-
traite du corps, ce n'est pas que la paroi exerce une action
prohibitive sur le phénomène, mais bien parce que le fer-
ment n'y préexiste pas.
Expérience : Un long segment vasculaire de cheval
gorgé de sang fut vidé en partie par une ponction prati-
quée à sa partie inférieure. Une seconde ouverture à l'ex-
trémitée opposée servit à introduire le bec d'un petit en-
tonnoir par lequel je versai environ 40 centimètres cubes
de sérum provenant du même cheval. Je liai la veine, puis
je la retournai à différentes reprises pour opérer le mé-
lange des liquides à son intérieur. Le sang qui s'était
écoulé par la première ponction fut abandonné dans un
verre et commença à se coaguler au bout d'une heure. J'at-
tendis encore une heure : le caillot dans le verre était
ferme et résistant, la coagulation y semblait terminée.
J'ouvris alors la veine et je la trouvai remplie d'un caillot
de consistance semblable. Cette expérience ne fut répétée
qu'une fois.
Je la variai ensuite de la façon suivante :
Expérience : Une volumineuse veine de cheval fut
divisée en trois segments à l'aide de ligatures. J'opérai sur
chacun de ces segments à peu près comme pour l'expé-
rience précédente, introduisant une petite quantité d'eau
distillée dans la partie moyenne (environ 5 centimètres
cubes), et une quantité à peu près égale de solution de
ferment dans chacune des portions supérieure et infé-
rieure. Le lendemain, à l'ouverture des segments supé-
rieur et inférieur, je trouvai deux caillots volumineux et
résistants, occupant toute la capacité du vaisseau. La par-
tie moyenne qui correspondait justement à la limite de sé-
paration entre le plasma et le cruor ne contenait que le petit
caillot lenticulaire dont il a été question précédemment.
(97 )
Expériexce : Je prépare une assez grande quantité (au
moins un demi-litre) d'une dissolution de fibrinogène, de
paraglobuline et de ferment (plasmine à coagulation ra-
pide). Je laisse complètement écouler par ponction le con-
tenu de deux veines de cheval. Je les lave à plusieurs
reprises en y faisant passer un courant du liquide plas-
mique, je les remplis ensuite de la même solution et j'ap-
pose des ligatures. Une partie du liquide abandonnée dans
un verre à expérience se prend au bout de lo minutes en
un caillot hyalin. Trois quarts d'heure plus tard, les deux
veines sont ouvertes : le liquide s'y trouve complètement
coagulé.
L'absence de coagulation dans les veines extraites du
corps ne me paraît donc pas dépendre d'une action que la
paroi exercerait sur le contenu, mais bien à l'absence de
l'un des éléments du phénomène, le ferment. La coagula-
tion a été complète chaque fois que j'y ai introduit soit du
sérum (paraglobuline et ferment), soit une solution de
ferment, soit une préparation de plasmine (fibrinogène,
paraglobuline et ferment).
Dans l'organisme vivant, les choses se passent un peu
différemment. On peut impunément injecter à un animal
du sang défibriné qui pourtant contient des quantités con-
sidérables de ferment et de paraglobuline. L'opération de
la transfusion en est un exemple. Il semble qu'il y ait ici
des dispositions spéciales, ayant pour résultat de détruire
le ferment ou d'annihiler son action quand on l'introduit
du dehors dans le système circulatoire (1).
Il me reste pour le moment à rechercher quel est le pri-
(1) Peut-être la coagulation n'est-elle nullement empêchée, les caillots
formés étant redissous plus tard.
2nic SÉRIE , TOME XLIV. 7
( 98 )
mum movens de la coagulation, l'influence extérieure qui
provoque la formation du ferment de la fibrine. D'après
ce qui a été dit dans l'introduction , nous aurons surtout à
prendre en considération l'influence des corps étrangers.
Glénard (\) a récemment mis cette influence en relief par
des expériences fort démonstratives sur des veines de
cheval extraites du corps. II y a vu survenir la coagulation
chaque fois qu'il y introduisait un corps étranger : aiguille
d'or ou d'acier.
Yoici une expérience calquée sur celle de Glénard et des-
tinée en outre à empêcher l'entrée simultanée de germes de
l'atmosphère à la surface du corps étranger que j'emploie.
Expérience : Une énorme veine de cheval est divisée
en cinq segments à l'aide de quatre ligatures. Dans trois
de ces segments , j'introduis avec précaution à travers la
paroi, de minces stylets de verre bien aigus que je viens
de fabriquer en étirant une baguette de verre dans la
flamme d'un brûleur de Bunsen. Les deux segments res-
tants qui alternent avec les autres, serviront de témoins.
Au bout de douze heures (le lendemain matin) j'ouvre
successivement les cinq segments. Chaque stylet de verre
est enveloppé complètement d'un caillot fibrineux, mais
la coagulation ne s'est pas étendue à tout l'intérieur du
segment veineux. A côté de chaque caillot se trouve une
portion restée liquide : ce n'est pas du sérum , il se coagule
spontanément après son extraction. Le liquide des seg-
ments témoins n'offre pas de traces de fibrine et se coagule
quelque temps après son extraction. Cette expérience fut
répétée plusieurs fois avec des résultats semblables. D'au-
tres expériences sur des lapins vivants conduisirent aux
mêmes conclusions.
(1) Glénard. Loc. cit.
( 99 )
Expérience. 12 novembre 1876, midi moins quinze.
Lapin de 1720 grammes fixé sur le support de Czermak.
Je dénude la veine jugulaire externe droite et j'y insinue
avec précaution un petit stylet de verre très-aigu, sans
faire de ligature et sans répandre une goutte de sang. Je
laisse l'animal fixé sur la table d'opération jusqu'à I h. 20,
mais je le place près du poêle pour empêcher qu'il ne se
refroidisse. A 1 h, 20 double ligature de la veine en deçà
et au delà du stylet et résection du segment compris entre
les ligatures. J'ouvre la veine sous l'eau dans une cuvette
à dissection, et je la trouve remplie d'un caillot résistant
dont le stylet occupe le centre.
Expérience. 17 novembre 1876. Lapin de 2850 gram-
mes. J'incise l'abdomen sur la ligne blanche, je déjette le
paquet intestinal et j'isole la veine cave inférieure en amont
de la veine rénale. Un segment de la veine cave est com-
pris entre deux serre-fines, j'y pratique une boutonnière
par laquelle j'introduis un bout de tendon vivant emprunté
aux muscles de la jambe du même lapin. Je referme la
boutonnière à l'aide d'une petite pince à pression et je
lève les deux serre-fines pour rétablir la circulation. Au
bout de 20 minutes, je résèque la veine et je l'ouvre avec
les mêmes précautions que dans l'expérience précédente,
je trouve un caillot à la surface du tendon.
Chez un autre lapin j'observai un caillot à la surface
d'une esquille osseuse vivante, enlevée aux os de la patte
et introduite pareillement dans la veine cave inférieure.
Ainsi les corps étrangers solides, morts ou vivants in-
troduits dans le sang qui circule ou dans celui qui est con-
tenu à l'intérieur d'une veine isolée agissent comme cen-
tres de coagulation.
En terminant, je relaierai quelques expériences qui
prouvent surabondamment que le sang ne se coagule pas
( 400 )
parce qu'il s'en échappe un principe volatil ou parce qu'il
subit le contact de l'un des gaz de l'atmosphère.
Expérience : Un segment veineux de cheval , gorgé de
plasma, est placé pendant six heures sous l'huile d'olives,
puis ouvert sans être retiré du liquide : il laisse échapper
un plasma qui se coagule sous l'huile en moins de 20 mi-
nutes.
Dans une expérience calquée sur la précédente, la coa-
gulation s'effectua sous le mercure.
Je poursuis actuellement ces recherches au laboratoire
de physiologie de M. le professeur Boddaert. Je le prie de
recevoir ici l'expression de ma profonde gratitude pour la
bienveillance qu'il n'a cessé de me témoigner.
J'ai également de vifs remercîmenls à adresser à M. le
médecin vétérinaire Remy, directeur de l'abattoir de
Gand, qui a bien voulu m'assister dans plusieurs de mes
expériences.
RÉSUMÉ.
Les principaux résultats acquis par ce travail sont les
suivants :
Le sang renfermé à l'intérieur du système circulatoire
contient dans le plasma, au moins trois substances albu-
minoïdes :
1° Le fibrinogène se coagulant par la chaleur à -+- 56°;
2° La paraglobuline id. id. à -+- 75°;
5° L 'albumine du sérum dont la coagulation commence
à -h 65°.
La substance qui se coagule à h- 56° (fibrinogène) dis-
paraît complètement par le fait de la coagulation spontanée
du sang. Le sang et le plasma privés de cette substance
( 101 )
ne sont pins capables de donner de la fibrine. La quantité
de fibrine produite est intérieure à celle du fibrinogène
employé.
Le fibrinogène peut être chauffé jusque tout près de
son point de coagulation sans perdre la propriété de don-
ner de la fibrine. A l'inverse de l'albumine, la coagulalion
par la chaleur du fibrinogène s'effectue brusquement et
complètement dans l'espacede quelques dixièmes de degré.
De -+- 56°, ce point de coagulalion peut être successive-
ment abaissé jusqu'à -+- 28°.
La plasmine de Denis est le plus souvent un mélange
de fibrinogène, de paraglobuline et du ferment de Schmidt.
La coagulation spontanée du sang est précédée d'une
période latente, pendant laquelle se produit la substance
qui préside à la transformation du fibrinogène. Cette sub-
stance dérive probablement des globules blancs. Le point
de départ de sa formation, c'est le contact avec des corps
étrangers, morts ou vivants.
La fluidité persistante du sang à l'intérieur d'un seg-
ment veineux isolé doit être attribuée à l'absence de cette
substance. La paroi d'une veine isolée n'a pas d'action an-
ticoagulalrice ; quand les éléments de la coagulation sont
réunis, le contact de cette paroi n'empêche nullement
celle-ci de s'effectuer.
P. S. Le point de coagulation du fibrinogène se trouve
indiqué dans un travail de Hammarsten intitulé: « Under-
sôkingar af de s. k. iibringeneratorerna , » etc., qui a paru
en 1876dans les « Upsala LàkarefôreningsFôrhandligar. »
Je n'en ai eu connaissance que pendant l'impression de ce
travail , ce qui s'explique par ce fait que le même auteur
ayant publié plusieurs mémoires en langue allemande sur
( 102 )
la coagulation, je pouvais me croire dispensé de me pro-
curer le mémoire suédois. C'est à l'obligeance de M. le
professeur Hammarsten que j'en dois un exemplaire ainsi
qu'un résumé du contenu.
Sur un effet singulier du courant électrique; par M. H. Ya-
lerius, correspondant de l'Académie.
Ayant eu dernièrement, dans mon cours, à répéter
l'expérience des empreintes électriques , j'avais, à cet effet,
disposé entre deux lames de verre de forme carrée, d'envi-
ron 6 centimètres de côté et de 6 millimètres d'épaisseur,
une feuille d'or, un portrait de Franklin découpé à jour
dans une feuille de papier et une feuille de papier destinée
à recevoir les empreintes. Le tout ayant été assujetti dans
une petite presse en bois, placée sur la table d'un excita-
teur universel, j'avais fait passer à travers la feuille d'or
la décharge d'une batterie électrique composée de quatre
grandes bouteilles de Leyde. Après le passage de cette
décharge, j'ai constaté que l'expérience avait parfaitement
réussi, mais que l'une des deux lames de verre, à savoir
celle sur laquelle la feuille d'or avait été appliquée, s'était
brisée dans toute sa longueur, suivant la direction du
mouvement des fluides électriques. La cassure était à peu
près recliligne, à surface inégale et traversée par des stries
saillantes, parallèles aux faces de la lame.
J'avais d'abord pensé que cet effet était dû tout simple-
ment à une action mécanique de la presse. Pour m'en
assurer, j'ai placé l'un des deux morceaux de la lame, à
faux, entre les deux tables de la presse, et je l'ai cassé en
serrant les vis de celle-ci. Le verre s'est brisé en plusieurs
( 103 )
fragments , mais les cassures obtenues étaient unies et d'un
aspect complètement différent de celui de la cassure précé-
dente.
Le phénomène observé ne saurait donc être attribué à
une simple action mécanique. Il n'est pas dû, non plus, au
passage de l'électricité à travers la lame , car les morceaux
dans lesquels celle-ci a été divisée ne polarisent pas la
lumière. D'ailleurs, la dimension de la lame, parallèlement
à la direction de la décharge, était trop grande pour per-
mettre le passage du fluide électrique.
Il ne reste donc, me semble-t-il', qu'un moyen d'expli-
quer le phénomène dont il s'agit : c'est d'admettre que
lorsque le courant électrique passe entre deux lames de
verre, dans les conditions indiquées ci-dessus, il détermine
non-seulement de fortes pressions dans tous les sens, mais
encore des mouvements moléculaires, probablement de
nature vibratoire, et que c'est sous l'action combinée de
ces deux causes que la lame de verre s'est brisée. Ce qui
semble militer en faveur de cette explication c'est que la
lame brisée a été précisément celle qui, par son contact
avec la feuille d'or, a dû éprouver les mouvements molécu-
laires les plus étendus.
Quoi qu'il en soit, il est rare que dans l'expérience des
empreintes électriques une lame de verre soit brisée.
En effet, la lame sur laquelle j'ai observé ce phénomène
avait déjà servi plus de dix fois à cette expérience sans
être endommagée.
( 104
CLASSE DES LETTRES
Séance du 2 juillet 1811 .
M. Alph. Wauters, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Érn. de Laveleye, vice -directeur ;
J. Roulez, Gachard, P. De Decker, M.-N.-J. Leclercq , le
baron J. de Witte, Ch. Faider, R. Chalon, Th. Juste ,
le baron Guillaume, G. Nypels, Alp. Le Roy, Ëm. de
Borchgrave, J. Heremans, membres; Aug. Scheler, Alph.
Rivier, E. Arntz, associés; Edm. Poullet, Ferd. Loise,
Stan. Bormans, Ch. Piot, Ch. Potvin, J. Stecher, Eug. Van
Bemmel, correspondants.
M. Alvin, président de l'Académie, et M. Éd. Mailly,
membre de la classe des sciences, assistent à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur adresse, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire de l'ouvrage de
M. Gustave Van Hoorebeke, docteur en droit intitulé:
Études sur l'origine des noms patronymiques flamands ,
vol. in-8°.
( 105 )
M. F. Loise fait hommage d'un exemplaire de sa confé-
rence intitulée : De la formation des nationalités modernes,
donnée au Cercle artistique d'Anvers le 28 décembre 1874;
broch. in-8°.
M. Stanislas Bormans offre, de la part de l'auteur, M. E.
Richardson , le 1er volume de son livre intitulé : Geschichte
der Famille Mcrode, publié à Prague en 1877 ; in-8°.
Des remerciments sont votés pour ces dons.
— L'Académie des lettres, sciences, arts et agriculture
de Metz envoie son programme des concours ouverts pen-
dant l'année 1877-1878.
— Le Verein fur Geschichte de Kiel envoie ses der-
nières publications.
PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1879.
La classe fait choix des questions suivantes pour le con-
cours de 1879. Le délai pour la remise des mémoires expi-
rera le 1er février de la dite année :
PREMIÈRE QUESTION.
Les encyclopédistes français essayèrent, dans la seconde
moitié du XVIIIe siècle, de faire de la principauté de Liège
le foyer principal de leur propagande.
Faire connaître les moyens qu'ils employèrent et les
résultats de leurs tentatives, au point de vue de l'influence
qu'ils exercèrent sur la presse périodique et sur le mouve-
ment littéraire en général.
Les concurrents trouveront d'utiles documents sur ce
( 106 )
sujet dans la Bibliothèque d'Ulysse Capitaine, léguée à la
ville de Liège.
DEUXIÈME QUESTION.
Écrire l'histoire de Jacqueline de Bavière, comtesse de
H ainant, de Hollande et de Zèlande, et dame de Frise.
Dans leur travail, les concurrents doivent s'attacher,
d'une manière toute particulière, aux événements princi-
paux de la vie et du règne de celte princesse; ils utilise-
ront, sans les suivre servilement, les travaux qui ont été
publiés, pour cette époque, tant à l'étranger qu'en Bel-
gique.
TROISIÈME QUESTION.
Faire l'histoire des finances publiques de la Belgique,
depuis 1S50, en appréciant , dans leurs principes et dans
leurs résultats, les diverses parties de la législation et les
principales mesures administratives qui s'y rapportent.
Le travail s'étendra d'une manière sommaire aux
finances des provinces et des communes.
QUATRIÈME QUESTION.
Faire connaître l'influence de la poésie néerlandaise
(flamande et hollandaise) sur la poésie allemande, et
réciproquement, de la poésie allemande sur la poésie néer-
landaise au moyen âge.
CINQUIÈME QUESTION.
Faire l'histoire de l'échevinage dans les anciennes pro-
vinces belgiques et la principauté de Liège. Rappeler à
grands traits, ses origines, ses caractères, son organisa-
( 107)
(ion, son influence et ses transformations jusqu'à la chute
de l'ancien régime.
Le prix de la première, de la deuxième et de la qua-
trième question sera une médaille d'or de la valeur de six
cents francs; ce prix est porté à mille francs pour la troi-
sième et pour la cinquième question.
Les mémoires devront être écrits lisiblement, et pour-
ront être rédigés en français, en flamand ou en latin. Ils
devront être adressés, francs de port, au palais des Acadé-
mies, à M. J. Liagre, secrétaire perpétuel.
L'Académie exige la plus grande exactitude dans les
citations ; les auteurs auront soin , par conséquent, d'indi-
quer les éditions et les pages des ouvrages cités. On
n'admettra que des planches manuscrites.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage:
ils y inscriront seulement une devise, qu'ils reproduiront
dans un billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse.
Faute par eux de satisfaire à cette formalité, le prix ne
pourra leur être accordé. Les mémoires remis après le
temps prescrit, ou ceux dont les auteurs se feront con-
naître, de quelque manière que ce soit seront exclus du
concours.
L'Académie croit devoir rappeler aux concurrents que
tous les mémoires soumis à son jugement sont et restent
déposés dans ses archives. Toutefois, les auteurs peuvent
en faire prendre des copies à leurs frais, en s'adressant,
à cet effet, au secrétaire perpétuel.
( 108)
PRIX TEIRLINGK POUR UNE QUESTION DE LITTÉRATURE
FLAMANDE.
Feu M. Auguste Teirlinck, greffier de la justice de paix
du canton de Ouyshautem (Flandre orientale), domicilié
à Elseghem et décédé en cette commune le 7 avril 1875,
avait inscrit la disposition suivante dans son testament:
« Vijf duizend franks te betalen tôt het slichten van
eenen vlaamschen prijs bij de Akademie van kunsten en
letteren te Brussel. »
Ce legs a été accepté, au nom de l'Académie, par arrêté
royal du 12 mars 4875.
La classe, interprétant les intentions du donateur, à
décidé que cette fondation avait un caractère de perpé-
tuité, qu'en conséquence le capital de 5,000 francs devait
être placé de façon à former tous les cinq ans un prix de
MILLE FRANCS.
Conformément à la volonté du donateur et à ses géné-
reuses dispositions, la classe a mis au concours pour la
première période (1877-1882), la question suivante :
Faire l'histoire de la prose néerlandaise avant Marnix
de Sainte- Aldegonde.
Le terme fatal pour la remise des manuscrits, qui
peuvent être rédigés en français, en flamand ou en latin,
expirera le 1er février 1882.
Les concurrents se conformeront aux règles habituelles
des concours de la classe.
( 409 )
CLASSE DES BEAIX-ARTS.
Séance du 5 juillet 1877 .
M. Alvin, directeur, président de l'Académie.
M. Lfagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Porlaels, vice-directeur; N. De
Keyser, Guil. Geefs, Jos. Geefs, C.-A.Fraikin, Éd. Fétis,
Edm. De Busscher, Alph. Balat, le chevalier L. de Bur-
bure, J. Franck, Gust. De Man, Ad. Siret, Julien Le-
clercq, Ern. Slingeneyer, Alex. Bobert, F.-A. Gevaert,
Ad. Samuel, Ad. Pauli, membres; Ed. de Biefve et
Alexandre Pinchart, correspondants.
MM. Éd. Mailly et Montigny, membres de la classe des
sciences, et M. B.Chalon, membre de la classe des lettres,
assistent à la séance.
COBRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur informe la classe : 1° « que
le jury chargé de juger le concours institué pour la com-
position d'un poème français et d'un poëme flamand des-
tinés à être mis en musique au concours de composition
musicale de cette année, a couronné l'œuvre française in-
titulée: Samson et Dalila, ayant pour auteur M. Clément
Michaels, littérateur à Schaerbeek, et l'œuvre flamande
( no )
intitulée : De Klokke Roeland, ayant pour auteur M. Jules
Sabbe , professeur à l'athénée royal de Bruges ; 2° « que
M. Meynne, compositeur de musique à Bruxelles, a été
nommé membre du jury du grand concours de composition
musicale de 1877, en remplacement de M. Joseph Dupont,
qui a renoncé à remplir ces fonctions pour des motifs de
santé. »
— La Commission centrale organisatrice du congrès
artistique d'Anvers remercie la classe d'avoir bien voulu
désigner M. Alvin pour représenter l'Académie auprès du
congrès.
— M. le secrétaire perpétuel présente, à titre d'hom-
mage de la part du rajah Sourindo Mohun Tagore, prési-
dent de l'école de musique, à Calcutta, et récemment élu
associé de la classe, trois nouveaux ouvrages de sa compo-
sition : 1° Victoria Samrajyan, or Sanskrit Stanzas (with
a translation) on the various dependencies of the British
Crown, in-8°; 2° Bhugola-0-Itihasa ghalita brittanta.
Part 1. Europe. Second édition. In-12; 3° Muktabali Na~
tika, a bengali drama, written by the author al the âge of
sixleen (original). In-12, en bengali.
Des remercîments sont votés pour ce don.
ÉLECTIONS.
La classe désigne M. Ad. Pauli pour remplacer M. Au-
guste Payen comme membre de la Commission chargée de
tout ce qui concerne les grands concours artistiques du
Gouvernement.
(III)
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
MM. Alvin et De Keyser donnent des explications sur
le tableau de Rubens qui vient d'être légué par testament
au Musée d'Anvers. D'après le dessin de cette œuvre, que
possède le Louvre et dont M. Armand Baschet a donné une
reproduction, il y a une dizaine d'années, dans la Gazette
des beaux-arts, de Paris, c'est un des trois tableaux peints
pour l'église de Mantoue, pendant le séjour de Rubens
dans cette ville.
— M. Alvin a donné ensuite quelques détails sur les gra-
vures que l'on se propose d'exposer à Anvers à l'occasion
du troisième centenaire de la naissance de Rubens.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Cornet (F.-L.). — Sur un gisement de combustible dans les
Alpes transylvaniennes. Liège, 1877; br. in-8°.
Loise (F.). — De la formation des nationalités modernes.
Conférence. Anvers, 1876; br. in-8°.
Goffinet (le P. Hipp.). — Cartulaire de Clairefontaine.
Arlon, 1877; vol. in-8°.
Le Paige (C). — Notes d'analyse. — Remarques sur la
tbéorie des fractions continues périodiques. — Note sur la
multiplication des déterminants. — Note sur une équation
aux différences finies. Bruxelles, 1877; 4 extraits in-8°.
( 112 )
Félix {Jules). — Considérations sur l'attelage du cheval et
du chien. — Des embaumements et de la conservation des
cadavres. Bruxelles, 1877, 1876; br. in-8° et hr. in-12.
Ministère de l'Intérieur. — Cinq rapports des jurés et
délégués belges à l'Exposition internationale de Philadelphie
en 1 876 : 1 ° sur la pharmacie, par Jonas ; 2° sur les armements
militaires et ustensiles de chasse, par Lesne; 5° sur l'industrie
et le commerce des verres à vitre, par Aug. Gobert etP.Marlin;
4° sur les cuirs, peaux, etc., par Marlin ; 5° sur l'amidon et
les produits similaires, par le même. Bruxelles, 1877; 5 br.
in-8°.
Commission internationale de V association africaine. —
Session de 1877; Bruxelles; br. in-4°.
Cercle archéologique du pays de Waes. — Annales;
tome VI, 4e livraison, juin 1877. Saint-Nicolas; broch. in-4°.
Musée royal d'histoire naturelle de Belgique. — Annales,
tome I, description des ossements fossiles des environs
d'Anvers, 1re part. Pinnipèdes ou Amphithériens. Bruxelles,
1877; vol. in-4°.
Allemagne, Autriche-Hongrie.
Société mathématique à Prague. — Archiv Mathematikv a
Fysiky, tome 1, nos 1-4. — Casopis, tomes III, IV et V. Prague,
1876; in-8°.
Entomologischer Verein zu Slettin. — Entomologische Zei-
tung, 56e et 57e années. Stettin, 1875-1876; 2 vol. in-8°.
Société d'histoire naturelle de Colmar. — Bulletin, 16e et
17e années, 1875-1876. Colmar, 1877; vol. in-8°.
K. Slernuarle bei Mùnchen. — Annalen, tome XXI.
Meteorologische und magnetisebe Beobachtungen , 1876.
Munich ; in-8°.
Oberlausitzische Gesellschaft der Wissensehaflen zu Gorlitz.
— Neucs Magazin, LUI. Bd. 1. Ileft. Gorlitz, 1877; br. in-8°.
( "3 )
Xalurliistorisclies Landes- Muséum von Kârnlen. — Jahr-
buch, XIF. Heft. Klagenfurt, 1876; vol. in-8n.
Nuturforschende Gesellschaft in Danzig. — Schriftcn ,
lome IV, lre livraison. Dantzig, 1876; in-8°.
Gesellschaft der Wissenschaften in Prag. — Sitzungs-
berichte, 1875, 1876. — Jahresbericht, I876. — Abhand-
uogen, 6e série, tome VIII. Prague; 5 broeb. in-8° et 1 vol.
n-4°.
Sternwarte zu Prag. — Astronomische Bcobacbtungcn im
Jahre 1876; broch. in-4°.
Naturivissenschaftliclier Verein fur Steiermark. — Mitlhei-
lungen, 1876. Gratz; br. in-8°.
Kon. preuss. geodàtisches Institut. — Vcrbandlungen der
in Briissel (1876) vereinigten permanenten Commission der
Europaeiscben Gradmessung. Berlin, 1877; in-4G.
Université de Leipzig. — Vingt-cinq thèses in-8° et dix-
buit in-4° des années 1875-1877.
Physik.-medicin. Gesellschaft in Wûrzburg. — Verhand-
lungen, neue Folge, XI. Bd. I. u. 2. Heft. Wurzbourg, 1877;
br. in-8°.
Richardson (E.). — Gcsehichte der Familie Mcrode, tome I,
Prague, 1877; vol. in-8°.
Amérique.
Musée public de Bnenas-Ayres — Description physique
de la République Argentine, tomes I et II. Paris, 1876;
2 vol. in-8°. — Acta de la Academia nacional de ciencias
exactas, tome I. Buenos-Ayrcs, 1875; in-4°. — Los caballos
fosiles de la Pampa Argentina por Dr Burmcister. Buenos-
Ayres, 1875; cab. in-folio.
ïnstituto historico do Brasil. — Rcvista trimensal, tome
XXXVIII, 4e trimestre; tome XXXIX, 1er trimestre. Bio-de-
Janciro, 1875, 1876; 2 vol. in-8°.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 8
( 114 )
Republica Mexkana. — Anales dcl ministerio de Fomente-
tome I, mars. Mexico, 4877; vol. in-8°.
U. S. entomological commission. — Bulletin, nos 1 et 2-
Washington, 1877; 2 broch. in-8°.
Smith [Lawrence). — Examination of american minerais,
n° 6; broch. in -8°.
France.
Barrai (J.-A.). — Discours sur les irrigations du déparle-
ment de Vaucluse. Paris; extrait in-8°.
Castan (Auguste). — Note sur J.-B. Bésard de Besançon,
célèbre luthiste. Besançon; extr. in-8°.
Quel serait le véritable nom de la place Labourey à
Besançon? Extrait in-8°.
Les évoques auxiliaires du siège métropolitain de Besançon.
Besançon, 1877; broch. in-8n.
Lejeune (Th.). — Les édifices religieux de Lobbes. Arias,
1877; br. in-8".
Delesse et De Lapparent. — Extraits de géologie pour les
années 1875 et 1876, tome X, volume in-8°.
Brcton(P.). — Notice sur les débats de priorité auxquels
a donné lieu l'ouvrage de M. Chaslcs sur les porismes
d'Euclide. — Partie complémentaire de l'ouvrage précédent.
Paris, 1866, 1872; 2 br. in-S°.
Delesse. — Sur les gisements de chaux phosphatée de
l'Estramadure. Paris, 1877; extrait in- 8°.
Lenormant (François). — Les dieux de Babylone et de
l'Assyrie. Paris, 1877; br. in-8°.
Delisle (Lèopold). — Inventaire général et méthodique des
manuscrits français de la Bibliothèque nationale, t. I. Théo-
logie. Paris, 1876; vol. in -8°.
Ministère de l'Instruction publique. — Négociations diplo-
( us )
maliques de la France avec la Toscane, documents recueillis
par Giuseppe Canestrini et publiés par Abel Desjardins,
tome V. — Recueil des lettres missives de Henri IV, tome IX
(1 567-1(1 10), supplément, publié parGuadet. — Recueil des
chartes de l'abbaye de Cluny, formé par Aug. Bernard; com-
plété, revisé et publié par Alexandre Rruel , tome I (802-954).
— Recueil de diplômes militaires, publié par Léon Rémi,
I,e livraison. Paris, 1875-1876; 4 vol. in-4°. — Archives des
missions scientifiques et littéraires, 5e série, tome III, 2e livr.
Paris, 1876; vol. in-8°.
Société d'agriculture, des sciences et arts de Douai. —
Souvenirs de la Flandre wallonne, recherches historiques et
documents relatifs à Douai et aux anciennes provinces; t. XVI.
Douai, 1876; br. in-8°.
Société des sciences physiques et naturelles de Bordeaux.
— Mémoires, 2e série, tome II. Bordeaux, 1877; broch. in -8°.
Société d'émulation du Doubs. — Mémoires, 4e série,
tomes VIII et IX. Besançon, 1874 et 1875; 2 vol. in-8°.
Société linnéenne de Bordeaux. — Actes. 4e série, tome I,
Bordeaux, 1877; broch. in-8°.
Société nationale des sciences naturelles de Cherbourq. —
Mémoires, tome XIX. Paris, Cherbourg, 1875; vol. in-8°. —
Compte rendu de la séance du 50 décembre 1876. Cherbourg
1877; broch. in-8°.
Société archéologique et historique du Limousin. — Tables
générales des Bulletins, tomes I-XXII (1845-1873). —
Bulletin, tome XXII, lrc livraison. Limoges, 1875-1876; 2 br.
in-8°.
Revue des questions historiques, 43e livraison, juillet 1877.
Paris; vol. in-8°.
Société des antiquaires de Picardie. — Mémoires, 5e série,
tome V. Amiens, 1876; vol. in-8°.
Congrès archéologique de France, XLIIe session tenue à
Chàlons-sur-Marne. Paris, 1876; vol. in-8°.
( 146 )
Société des antiquaires de la Morinie. — Bulletin, livrai-
sons 97 et 99. Saint-Omer, 1876; 2. br. in-8°.
Société archéologique, historique et scientifique de Soissons.
— Bulletin, 2e série, tome V. Soissons, 1875; vol. in -8°.
Société des études historiques. — L'Investigateur, novembre-
décembre de 1 876, janvier-avril de 1877. Paris; in-8°.
A cadémie des sciences et lettres de Montpellier. — Mémoires :
section des lettres, tome VI, Ier fasc, section des sciences,
tome VIII, 5e et 4e fascicules. Montpellier, 1876; in-4°.
Journal de l'agriculture, tomes I et II de 1877. Paris;
2 vol. in-8°.
Société des sciences de Lille. — Mémoires, 1874. Paris,
Lille; vol. in-4°.
Société linnéenne du nord de la France. — Bulletin, avril-
juin de 1877. Amiens; in-8°.
Giiande-Bretagne-Iklande et Colonies.
Sourindro Mohun Tagore (le Rajah). — Victoria Sainrajyan,
or sanskrit slanzas. — Muktabali Natika :a bengali draina,
written by tbe aulbor at tbe âge of sixteen. — Bhugola-O-
itihasa, part. 1. Europe. Calcutta, 1876-1877; I vol. in-8° et
2 br. in-I2.
Pbaraob's daugbter, draina, Irc et 2r éditions. Londres,
1868,1874; 2 vol. in-12.
Royal irish Acadeing. — Procecdings, 2r série, tome 1,
n° II ; tome II, nnS 4-6. — Transactions, sciences, tome XXV,
n° 20; tome XXVI, nos 1-5. Dublin, 1874-1876; 4 br. in-8°et
6 in-4°.
Philosophical Society. — Procecdings, lomcX, n° 2, 1876-
1877. Glasgow; vol. in-8°.
BULLETIN
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1877. — N° 8.
CLASSE DES SCIENCES.
Séance du 4 août 4871 .
M. J.-C. Houzeau, vice-directeur, occupe le fauteuil.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. L. de Koninck, P.-J. Van Beneden,
Ed. de Sel) s Longchamps, H. Nyst,Gluge, Melsens, F.Du-
prez, Ern. Quelelet, Ern. Candèze, F. Donny, Ch. Monti-
gny, Éd. Morren, C. Malaise, F. Folie, Aib. Briart, F. Pla-
teau et F. Crépin, membres; E. Catalan associé; G. Van
der Mensbrugghe,Alf. Gilkinet et M. Mourlon, correspon-
dants.
2mc SÉRIE, TOME XLIV. 9
( 118)
CORRESPONDANCE.
M. le Minisire de l'Intérieur transmet une expédition de
l'arrêté royal, en date du 19 juillet dernier, qui décerne à
M. Edouard Van Beneden le prix quinquennal des sciences
naturelles pour la période de 1872-1876.
Les cinquante exemplaires du rapport du jury, joints à
la lettre du Ministre, ont été distribués aux membres de la
classe.
— Le même baut fonctionnaire adresse les six premiers
rapports des jurés et délégués belges à l'Exposition inter-
nationale de Pbiladelpbie en 1876. — Remerciements et
dépôt à la bibliothèque.
— L'Université de l'État de îowa, à Iowa City (E. IL),
accuse réception du dernier envoi annuel des publica-
tions.
— M. Liagre fait hommage, au nom de M.J. Graindorge,
professeur à l'Université de Liège, d'un exemplaire des
Éléments cï algèbre, à l'usage des établissements d'ensei-
gnement moyen du second degré, ouvrage publié en colla-
boration avec M. le professeur Falisse.
M. Crépin fait hommage, au nom des auteurs, des deux
ouvrages suivants:
1° Klimatischer Charakter (1er Pflanzengeographischen
Regionen Hochasiens, von H. vonSchlaginlweit, in-4°;
2° Diagnoses de cucurbitacées nouvelles, 2e fascicule,
par M. Alfred Cogniaux, in-8°.
( H9 )
îommage
Manifestation en l'honneur de M. le professeur P.-J. Van
Beneden. — Louvain, 18 juin 1877. Compte rendu publié
au nom de la Commission organisatrice. Gand; in-8°.
Des remerciments sont votés pour ces dons.
— La classe renvoie à l'examen de MM. Folie et Catalan
une note manuscrite de M. C. Le Paige, intitulée : Sur
quelques points de géométrie supérieure.
RESULTATS DU CONCOURS POUR 1877.
La classe a reçu les mémoires manuscrits suivants en
réponse aux questions du programme de concours pour
l'année actuelle dont le terme fatal pour la remise des
manuscrits expirait le 1er août :
1. Un mémoire portant pour devise :
Aliud ex alio reficil natura, ncc ullam
Rem gigni patitur nisi morte adjula aliéna.
Lucrèce (De Natura rerum).
En réponse à la troisième question :
On demande de nouvelles recherches pour établir la
composition et les rapports mutuels des substances albumi-
noïdes.
Commissaires : MM. Melsens, Donny et Stas.
2. Un mémoire portant pour devise :
Trop souvent l'esprit, avide de généralisation ou enclin à former des
associations, oublie les faits qui le gênent sans s'apercevoir qu'en les
oubliant il ne les détruit pas et qu'ils subsistent pour le convaincre tôt
( 120 )
ou tard d'erreur. II n'y a pour moi qu'un moyen d'échapper à ce péril :
c'est d'épuiser patiemment l'élude des faits avant de généraliser et de
former des associations sous l'influence d'idées théoriques.
J. Décaisse.
En réponse à la sixième question :
On demande l'étude du cycle d'évolution d'un groupe de
la classe des algues.
Commissaires: MM. Morren, Crépin et Gilkinet.
RAPPORTS.
Note sur une équation de Jacobi; par M. Mansion.
Mtapport rie M. Catalan.
\.
Tous les Géomètres connaissent l'équation
(Aie -+- By -4- C) [xdy — ydx) — (A'x -t- B'y + C) dy
-*-(A"x-t-B"y-t-C")cfo = 0, . . . . (1)
traitée par Jacobi, dans le tome XXIV du Journal de
Crelle. L'illustre auteur forme l'intégrale générale de la
proposée, au moyen des racines de l'équation caractéris-
tique
A' — s, A", A,
B', B"-.s,B, =0, . . |
(*) Cette équation est celle que l'on rencontre dans la discussion des
surfaces du second degré, et dans d'autres questions.
( 121 )
ces racines étant supposées inégales. MM. Moigno el Serret,
qui ont reproduit la méthode imaginée par Jacobi, n'exa-
minent guère, plus que lui , les cas où l'équation (2) aurait
des racines égales. En outre, comme Jacobi lui-même, ils
admettent qu'un certain déterminant R est différent de
zéro (*). Dans le Mémoire présenté à la Classe, M. Mansion
a simplitié le procédé de Jacobi, el il discute, avec saga-
cité, les cas d'exception laissés de côté par le Géomètre
allemand.
II.
Ce qui frappe tout d'abord, dans l'équation (1), c'est le
défaut de symétrie : a priori, on ne comprend pas com-
ment l'illustre auteur a pu y être conduit, ni comment il a
trouvé les transformations, très-peu naturelles, qui lui ont
permis d'en former l'intégrale (**).
Quant au premier point, M. Mansion a été heureuse-
ment inspiré: il introduit, dans le calcul, outre les varia-
bles x, y, une variable fictive z, égale à I ; ce qui lui
permet d'écrire ainsi l'équation proposée :
(Ax -4- By -+- Ce) [xdy — ydx) -+- [A'x -4- R'y ■+- C'z) (ydz — zdy)
-f-(A"x-+-B"?/-+-C"r) (zdx — zdx) = 0', (3) ("**)
puis, suivant à peu près la marche indiquée par Jacobi,
(*) Ecrivant ce Rapport à Paris, je suis obligé de m'en rapporter aux
indications et aux affirmations de l'auteur du Mémoire.
(**) Encore une fois, n'ayant pas sous les yeux le Mémoire de Jacobi, je
n'écris ceci que sous toutes réserves.
(***) L'honorable auteur emploie d'autres notations; mais, pour plus
de clarté, nous continuons à nous servir des précédentes.
( m )
il retrouve (*), au moyen de la théorie des déterminants ,
l'intégrale connue :
-4- (S2— S,) 1m, -+- (S3 — S,) Im-2 -+- (S, — S2)l«3 = const ; (4)
dans laquelle Si, S2, S5 sont les racines de l'équation (2),
supposées inégales.
III.
Les équations entre x, y, z et ui} u2, w3, sont :
ccyx -+- Bii/ -+- n~ = Mu «2 3c -+- fay/tZ = w2,
a3x-+- p3r/-+-r3« = «3; (S)
a,, [3,,... étant des quantités qui dépendent des données
du problème. Ces équations deviendraient incompatibles
ou indéterminées si
R =
était nul.
M. Mansion prouve que R est différent de zéro, si les
racines S it S2, S3, sont inégales. La démonstration em-
ployée par le jeune professeur me paraît exacte; mais,
outre l'inconvénient de la longueur, elle a celui d'être peu
naturelle; en effet, elle consiste en une réduction à l'ab-
surde (**).
(*) Dans Yhistorique du problème, M. Mansion dil , expressément:
« Notre premier numéro est donc une reproduction du travail de Jacobi,
sous une forme plus élégante. »
(**) Encore un mot sur ce sujet.
Pour le succès de son analyse, M. Mansion multiplie, par R, les deux
membres de l'équation (3). Évidemment, celte transformation ne condui-
rait à rien, si R était nul. C'est donc a priori, et non a posteriori, semble-
t— il, que l'auteur devrait démontrer la proposition dont il s'agit.
( 123 )
IV.
Après ces généralités, M. Mansion examine les cas où
l'équation (2) aurait une racine double ou une racine
triple. Comme M. Serret (*) , procédant d'abord par induc-
tion, il conclut, de la formule générale (4), les formes
particulières de l'intégrale; mais, de plus, il vérifie que
ces intégrales satisfont à la proposée; ce qu'aucun Géo-
mètre n'avait fait. M. Mansion a donc complété, utilement,
le travail de Jacobi.
Le Mémoire est terminé par des généralisations, toutes
naturelles, de l'équation (1).
V.
Aussitôt après avoir reçu le Mémoire, je me suis rappelé
une intéressante communication sur l'équation de Jacobi,
présentée au Congrès de Clermont-Ferrand, par M. Allé-
gret. Sur ma demande, le savant Professeur m'a transmis
une note inédite et manuscrite, dont voici l'analyse (**).
Soient les équations, simultanées et homogènes :
du du du
(6]
A'u + B'v-+-C'w \"u -+- B"v -+- C"tv AM + Bu-f-Cw;
Si l'on pose
u = wx, v = wy,
(*) « M. Serret s'occupe superficiellement des cas où l'équation en S
» n'a pas trois racines inégales, cas dont Jacobi n'a pas parlé. » (Note
de l'auteur.)
(**) J'ai introduit, dans l'ingénieuse méthode imaginée par M. Allégret
quelques simplifications de détail.
( m )
on en conclut, à cause de
du — ivdx = xdiv, dv — wdtj = ydiv :
dx
(\'x -+- B'tj -h C) — (Ax -+- B// -+- C)x~
% ?
(A"x h- B"?/ -t- C") — (Ax -i- By -h %) '
équation qui est précisément celle de Jacobi (*). Ainsi,
grâce à l'heureuse idée de M. Allégret, toute la question
se réduit à l'intégration des équations (6). Ce problème
auxiliaire peut, on le sait, être résolu de diverses ma-
nières; par exemple, au moyen de la méthode que j'ai
donnée dans les Bulletins de l'Académie et dans les Annali
di Matemalica. Du reste, dans sa Note manuscrite, le Pro-
fesseur de Clermont-Ferrand s'énonce ainsi : « Cette nou-
» velle méthode d'intégration dispense, on le voit, de
» toute discussion relative au cas des racines égales
» Quelle que soit la forme des équations (6), tout est ra-
» mené à un procédé connu, sur lequel il n'y a pas lieu
» de revenir (**). »
(*) On peut se demander sii ce n'est pas ainsi que cette équation a été
rencontrée par l'illustre Géomètre.
(**) Voici un exemple très-simple, qui nous paraît probant. Il serait
facile d'en former d'autres. Dans l'équation de Jacobi, supposons
A = A' = A" = B = B = B' = B" = 1 .
L'équation en s devient
(t -s) [(1 -s)*-l] + 2[l-(l -s)] = 0,
ou
s5 — 5s2=0 :
elle a deux racines nulles. En même temps, les équations (6) se ré-
( 125 )
Ainsi que je l'ai dit à la Classe, il y a quelque temps,
cette méthode, si simple et si élégante, rend, sinon inutile,
au moins surabondant, le travail de M. Mansion. Naturel-
lement, notre jeune et savant Collègue de Gand ne partage
pas cette opinion; et, comme il en avait le droit, il a ré-
pondu, à mes observations, par une courte Note intitulée :
Défense de mon petit Mémoire sur V équation de Jacobi,
Note que je dépose sur le bureau.
VI.
CONCLUSIONS.
Le Mémoire de M. Mansion me semble un peu long, un
peu compliqué, surtout si on le compare à la Note pré-
sentée, par M. Allégret, au Congrès de Clermont-Ferrand.
Néanmoins, comme ce travail est exact, qu'il complète
celui de Jacobi, et que d'ailleurs il est l'œuvre d'un jeune
Géomètre très-honorablement connu, j'ai l'honneur d'en
proposer l'insertion au Bulletin.
duisent à
du = dv=dw,
dont les intégrales sont
u=w -h g, v=w-\-h.
11 résulte, de celles-ci,
y-l=k(x-\),
k étant la constante arbitraire.
( 126 )
Mtapjtot't de !tl. Folie.
« FI est superflu que je revienne sur l'analyse du travail
de M. P. Mansion, après celle que vient d'en faire, d'une
manière si complète, notre savant confrère.
Je suis loin, toutefois, de penser avec lui que la méthode
de M. Allégrel, dont il nous a donné le résumé, rende
surabondant le travail du savant professeur de Gand.
Il n'y a aucun rapport, en effet, entre la méthode de
M. Allégret et celle de Jacobi; tandis que le travail de
M. P. Mansion s'occupe de cette dernière méthode elle-
même, pour lui donner à la fois plus d'élégance et plus de
généralité.
De plus, comme le fait voir M. Mansion dans la note
qu'il a jointe à son Mémoire, la méthode de M. Allégret ne
dispense nullement delà discussion des cas de deux ou de
trois racines égales.
Enfin, l'historique très-complet de la question, par
lequel M. Mansion termine son travail, témoigne de l'in-
térêt qu'elle a excité, et de celui que ne manquera pas
d'éveiller le procédé ingénieux et élégant du savant pro-
fesseur.
Afin de mettre cet historique au courant des derniers
progrès réalisés dans l'élude de cette question, il pourrait
y ajouter l'analyse de la méthode, très-ingénieuse égale-
ment, du professeur de Clermont-Ferrand.
Par les différentes raisons que je viens d'exposer, j'ai
l'honneur de proposera la classe de voter l'impression du
travail de M. Mansion, et en même temps des remercî-
ments à l'auteur. »
( 127 )
Rapport
parfois , après le séjour dans l'acide osmique, l'immersion
durant vingt-quatre ou quarante-huit heures dans le picro-
carmin très-élendu. Non-seulement, j'ai obtenu à très-peu
près les mêmes résultats que par la glycérine étendue et
acidifiée, mais, prévenu et dirigé par ces expériences, j'ai
pu vérifier l'exactitude de mes observations sur des cœcums
soustraits à l'action de tout réactif.
Voici, en résumé, la structure de l'épithélium : Il forme
à la partie interne de la tunique propre, une seule couche
de longues cellules cylindriques quelque peu renflées (cel-
lules en massues) dirigées de la périphérie vers l'axe
(fig. 50 et 51). Ces cellules dilfèrenl surtout de celles des
cœcums de la glande analogue des Crustacés décapodes,
en ce qu'elles ne sont point serrées et rendues polygonales
par compression mutuelle. Elles sont nettement distantes
les unes des autres, ce qui est d'autant plus facile à voir
que chaque cœcuin n'en renferme pas un grand nombre.
Entre elles n'existe qu'nne matière finement granuleuse et
c'est inutilement que l'on cherche entre leurs bases des
éléments histologiques de forme quelconque.
Le contenu des cellules est constitué par un protoplasme
incolore tenant en suspension : 1° de très-petits globules
transparents formant une fine poussière (fig. 55a, pi. 1);
2° de nombreux globules graisseux à peu près sphériques,
plus volumineux, dont la coloration varie beaucoup, sui-
( 172 )
vant les espèces et même parfois les individus, lis sont en
général jaunes ou jaunâtres chez les Tégénaires. Sous l'in-
fluence de l'acide osmique, on dislingue deux variétés de
ces globules graisseux, les uns, jeunes, sont jaunes, pâles,
transparents (fig. 53, b) et se colorent encore, à la longue,
faiblement en rose par le picrocarmin étendu; les autres
plus vieux, plus volumineux, sont brunâtres et ont une
mince pellicule d'enveloppe, parfois un peu ratatinée
(fig. 55, g), incontestable parce qu'elle n'est que rarement
visible tout autour du globule et se montre comme un
petit sac renfermant un globule ayant subi un léger re-
trait. Enfin, 5°, il n'est pas rare d'observer, chez les Ara-
néides, des cellules épilhéliales contenant, en outre, des
concrétions plus ou moins irrégulières d'un brun foncé,
produisant, dans les cœcums observés à un très-faible
grossissement, un pointillé tout spécial.
Quant au noyau des cellules à sécrétion, l'accumulation
de tous ces globules ne permet de le voir que dans des
cellules isolées après l'action successive de l'acide osmique
et du picrocarmin. Tandis que les globules graisseux se
colorent peu ou point, le noyau prend une teinte d'un rose
vif (fig. 52, pi. 1). Il est circulaire, mit, petit, situé vers la
base de la cellule et contient un petit nucléole.
Faute d'employer les précautions spécifiées ci-dessus,
on n'arrive qu'à un résultat absurde; ainsi si l'on se borne
à examiner la glande dans l'eau, les cellules se détachent
et deviennent sphériques, se rompent pour un rien et
flottent dans une accumulation de granules et de globules
rendant tout examen sérieux impossible.
Schlemm a découvert que les cœcums de la glande de
PÉcrevisse ont une intima qui en limite la cavité inté-
( 175 )
rieure (1). Karslen (2) et H. Mcckcl (3) l'ont décrite et
figurée à leur tour. M. Leydig a retrouvé la même cuticule
dans les cœcums des Argulus , Gammarus, Oniscus (4);
enfin j'en ai constaté la présence chez le Carcinus mœnas.
Je crois pouvoir assurer que rien de semblable ne s'ob-
serve chez les Aranéides; fait qui est, du reste, d'accord
avec l'absence de cuticule dans l'intestin moyen.
Si maintenant on compare la description que je viens
de donner de la texture de la glande abdominale des
araignées à celle que j'ai publiée de la composition des
cœcums de l'appareil digestif des Phalangides (5), on ne
pourra s'empêcher de reconnaître la grande analogie qui
existe entre ces organes. De part et d'autre, des cœcums
sans tunique musculaire, sans intima, même contenu des
cellules, mêmes concrétions, etc. La glande abdominale
des Aranéides peut être regardée comme répondant aux
cœcums des Phalangides ramifiés et subdivisés.
Il nous reste, à propos de celte glande, à revenir sur
un détail signalé plus haut. J'ai rappelé , en effet , que la
surface de l'organe est fréquemment granitée de petits
points blancs. Dugès avait considéré leur ensemble comme
constituant une couche spéciale; mais Wasmann a parfai-
(1) De Hepale ac Bile cruslaccorum et molluscorum. Berlin, 1844,
p. 15.
(2) Disquisilio microscopica et chemica hepalis et bilis cruslaceorum
et molluscorum [Nova acta Acad. Cœsar. Leop. Carol. naturae curioso-
rum, t. XXI ,1" parlie, 1845., p. 500).
(3) Micrographie einiger Drusenapparate der niederen Thicre (An-
chiv. de Muller, 1846, p. 36 , pi. Lfig 13).
(4) Traité d'histologie , traduction française , p. 411, fig. 196 et p. 412.
(5) Note sur les phénomènes de la digestion et sur la structure de
l'appareil digestif chez les Phalangides (Bcllet. de i/Acad. roy. de Bel-
gique, <2* série, t. XLI1 , 1876, p. 730, fig. 16 et 17).
( 174 )
tement montré qu'ils sont dus à ce fait qu'un grand nom-
bre des cœcums superficiels ont, à l'intérieur, leur som-
met occupé par un amas granuleux d'une substance
graisseuse soluble dans l'éther, blanche à la lumière,
réfléchie et presque noire à la lumière transmise (1).
j'ai pu aisément vérifier l'exactitude de cette observa-
lion : l'extrémité des cœcums superficiels est remplie par
une matière grasse incolore, très-finement divisée, et
nous verrons, en traitant des Épéires, que des cœcums
entiers peuvent être remplis de celte substance.
§ VIT.
INTESTIN TERMINAL.
Poche stercoralc. — L'intestin terminal serait réduit, à
fort peu de chose, s'il n'offrait dorsalement une volumi-
neuse poche de dépôt ou poche stercorale signalée par
tous les auteurs depuis Randohr et comparée, avec raison,
par Straus-Durckheim au cœcum rectal des Nèpes et des
Dytiques parmi les Insectes (2).
Les rapports entre l'intestin et son cœcum n'ont jamais
été bien élucidés jusqu'à présent; on en a même donné
des figures parfois très-fautives. De plus, personne à ce
que je sache, ne s'est occupé de la texture histologique ,
cependant très-intéressante de cette portion du canal
alimentaire.
Le cœcum est toujours situé dorsalement par rapport à
(1) Beitrtige zur Anatomie der Spinnen, op. cit., p. 148, pi XIII
fig. 22.
(2) Considérations générales sur Vanalomie comparée des animaux
articulés. Paris, 1828, p. 243.
( 178 )
l'intestin. Ce n'est point, comme le feraient supposer cer-
taines figures, une dilatation interposée sur le trajet du
tube digestif à l'une des extrémités de laquelle aboutirait
l'intestin pour en naître de nouveau à l'autre bout, mais
une véritable annexe surajoutée. Chez les Aranéides, l'in-
testin intact suit la face inférieure de la poche stercorale
en s'incurvant vers le bas et fournit, en cet endroit, un
petit tronc court vertical qui s'ouvre dans la poche en ques-
tion (fig. 55, pi. I). Ainsi que nous le montrerons, c'est là
que commence l'intestin terminal proprement dit. Ce der-
nier, fort court, aboutit à l'anus percé en forme de fente
tranversale au-dessus de la paire de libères supérieures
(fig.i.0-)-
La forme de la poche stercorale varie beaucoup; tantôt
elle est presque sphérique, tantôt allongée; nous parlerons
de ces formes en décrivant spécialement quelques espèces.
Disons seulement ici que, chez les Tégénaires, c'est un
sac oblong, arrondi vers son extrémité postérieure, pointu
en avant.
La région terminale de l'intestin est la seule où l'on
observe un revêtement musculaire prononcé. L'intestin
terminal et toute la poche stercorale nous offrent, en effet,
une musculature fort belle, déjà signalée par Wasmann,et
qui contraste avec la faiblesse de la tunique musculaire de
l'intestin moyen; elle est composée de cylindres muscu-
laires espacés, finement striés, les uns longitudinaux, les
autres transversaux et fréquemment bifurques, consti-
tuant un réseau à mailles assez larges (fig. 58, pi. I). Aux
faibles grossissements, on ne voit bien que les cylind
l'es
longitudinaux (fig. o,
L'épilhélium qui diffère de celui de l'intestin moyen se
compose dans l'intestin terminal proprement dit, de petites
( '76 )
cellules allongées, presque plates(fig. 56), qui passent gra-
duellement dans la poche stercorale,à l'état de cellules
cylindriques volumineuses chargées de granulations fines
d'un jaune intense (Tégénaires), très-différentes d'aspect
des granulations réfringentes, incolores ou obscures des
tubes de Malpighi (fig. 57) et donnant à la poche vide une
coloration qui peut aller jusqu'au jaune serin chez cer-
taines espèces (Argyronète).
Tubes de Malpighi. — Comme ceux des Insectes et des
Myriapodes, ils ont été successivement regardés comme
biliaires et comme urinaires. Nous reviendrons sur cette
partiedu sujet dans la portion physiologique de ce travail.
Au point de vue lopographique, le point d'insertion des
tubes Malpighiens a une très-grande importance , parce
qu'il marque toujours la limite de l'intestin moyen et
l'origine de l'intestin terminal. En passant en revue toutes
les ligures qui ont été données à cet égard , on ne trouve
guère que celle de la Cteniza cœmentaria de Dugès qui
soit exacte. Chaque fois qu'on y fera suffisamment atten-
tion, on verra les tubes de Malpighi s'ouvrir dans la poche
stercorale au point où celle-ci se met réellement en rap-
port avec l'intestin proprement dit (fig. 55 et 56, pi. I).
On sait que ces tubes se ramifient à l'infini entre les
cœcums de la glande abdominale et même entre les sac-
cules de la surface, ainsi que nous le montrerons à propos
des Épéires. Wasmann avait indiqué leurs extrémités
closes comme étant renflées en utricules allongés (1). J'ai
pu vérifier l'exactitude de cette observation (fig. 41). Les
différentes branches de ces canaux qui présentent de
(1) Beitr&ge zur Anatomie der Spinnen, op. cit., p. 149, pi. XIII,
fig. 23.
( 177)
nombreux renflements et des inégalités fréquentes de
diamètre, finissent par aboutir à deux troncs communs
représentés presque partout et qui s'ouvrent finalement
dans la poche stercorale au point indiqué pins haut. Mais
j'ajouterai, comme observation personnelle, que ces deux
troncs communs, environ quatre fois aussi larges que les
ramifications ordinaires, marchent toujours parallèlement
à l'intestin moyen, à droite et à gauche, sur toute leur
longueur; ils n'en sont écartés qu'artificiellement, par
une dissection faite sans soins (fig. 2).
La structure histologique des tubes de Malpighi a été
esquissée, pour YEpeira diadema, par H. Meckel (1), et,
pour les Aranéidesen général, par M. Leydig (2). Ces tubes
comprennent une tunique propre transparente et des
cellules à sécrétion polyédriques munies de noyaux aplatis,
comme le dit Meckel (fig. 39); mais j'ajouterai que la
régularité géométrique de l'épithélium est remarquable ,
lorsqu'on compare ce dernier à celui des Myriapodes et de la
plupart des Insectes. Les cellules sont, par elles-mêmes,
incolores, ne renfermant que de petits corps arrondis jau-
nâtres; on ne les voit nettement que dans les tubes Mal-
pighiens parfaitement frais. L'acide osmique faible, suivi de
l'action du picrocarmin étendu, décèle admirablement les
noyaux qui se colorent seuls (fig. 40, pi. I) et l'on s'assure
alors très-bien , par l'aspect des noyaux vus de champ , que
ceux-ci sont effectivement aplatis.
M. Leydig s'est borné à signaler une matière pulvéru-
lente obscure entourant les noyaux. Ce fait ne s'observe
que lorsque les tubes Malpighiens sont chargés de leur
(1) Mikrographie einiger Drilsenapparate , op. cit. p. 42.
(2) Zum feineren Bau dur Arthropoden , op. cit., p. 166.
( 178 )
produit de sécrétion qui se compose, en effet, d'un liquide
tenant en suspension de fines granulations opaques à la
lumière transmise. Dans les tubes Malpighiens en partie
vidés, on ne voit plus celte substance que sous forme de
traînées s'insinuant entre les cellules. Dans la troisième
partie, je traiterai de la nature physique et chimique de
cette sécrétion.
Nota. — Un résumé anatomique général termine la
deuxième partie.
EXPLICATION DE LA PLANCHE
Sauf indications contraires, les figures se rapportent à la Teyenaria
dômes tica.
Fig 1. Coupe verticale et longitudinale du corps dessinée d'après des
coupes effectuées sur des individus durcis suivant le procédé
décrit page 164. Les organes qui ne font point parlie du tube
digestif sont omis ou simplement indiqués au trait. Les
cœcums céphalolhoraciques de l'intestin moyen ont été sup-
primés, afin de conserver à la figure toute sa clarté, a. région
pharyngienne; b. région œsophagienne; c. organe de succion;
d. origine céphalothoracique de l'intestin moyen abdominal;
e. portion élargie de l'intestin moyen abdominal; f. poche
stercorale ; g. anus ; h. coupe de la glande abdominale ; i. mus-
cles rétracteurs du pharynx; k muscles dilatateurs de l'organe
de succion, /. saillie tergaleà laquelle ils s'insèrent, x 8.
Fig 2. Tégénaire ouverte par la face dorsale. On n'a représenté avec
détails que les organes composant l'appareil digestif a. Muscles
réfracteurs du pharynx; 6. muscles dilatateurs de l'organe de
succion ; c. cœcum antérieur (un peu déformé par la dissec-
tion, voyez fig. Ibis), de l'intestin moyen céphalothoracique;
(kl. les cœcums latéraux; c. portion élargie de l'intestin moyen
abdominal et troncs terminaux des canaux excréteurs de la
R ri Jm
I
W È m
■
' m
:'$>(
:
( «79 )
glande abdominale ; f. poche slercorale; g. lubes de Malpighi;
/(. portions latérales de la glande abdominale, x 8.
Fig. 26/s. Cœcum antérieur intact d'un autre individu (l'orme normale),
x 8
Fig. 3. Pièces buccales et pharyngiennes légèrement écartées, a. Lèvre
supérieure (on observe dans sa cavité un reste de la glande
pharyngienne), b. lame pharyngienne antérieure; c. lame pha-
ryngienne postérieure; ci lèvre inférieure. X 30.
Fig. 4. Lèvre supérieure vue par-dessus, x 50.
Fig. 5. Tronçon de l'œsophage. X 200.
Fig. 6. Pièces buccales et pharyngiennes dans leurs rapports relatifs
lorsque la bouche est fermée. La glande pharyngienne intacte
a été écartée de la lame pharyngienne antérieure ; on voit son
canal excréteur court aboutir au fond du pharynx, pies de
l'origine de l'œsophage {Amaurubius atrox). x 20.
Fig. 7. Glande pharyngienne de V Amaurobius atrox entièrement isolée.
X 20.
Fig 8. Portion de la même glande de V Amaurobius atrox montrant la
tunique et les faisceaux de libres regardées comme muscu-
laires, x 300.
Fig. 9. Cellules épilheliales en place de la glande pharyngienne de
Y Amaurobius atrox X 300.
Fig 10. Cellules de la même glande de la Tegenaria domestica isolées
par rupture de l'enveloppe et devenues ellipsoïdales arrondies.
X 300.
Fig. 11. Cloison chitineuse horizontale du céphalothorax, vue par-dessus.
C'est sur celte lame que repose l'organe de succion, x 20.
Fig. 12. Organe de succion. On y voit la terminaison de l'œsophage, la
poche membraneuse, le bouclier chitineux ei une partie des
muscles compresseurs du côté droit (Amaurobius atrox).
X 200.
Fig. 13. Muscles de l'organe de succion de la Tegenaria domestica. On y
voit les dilatateurs et les compresseurs avec leurs insertions
réelles. X 200.
Fig. 14. Organe de succion et intestin moyen céphalothoracique , avec les
origines des cœcums antérieur et latéraux (Tegenaria civilis,
grand individu). X 50.
Fig 15. Extrémité isolée d'un cœcum latéral.
Fig. 16. Extrémité terminale d'un cœcum latéral dans le coxopodite de la
première patte droite d'un jeune éclos depuis peu. X 200.
( d80 )
Fig. 17. Portion céphalothoracique de l'intestin moyen chez un jeune
éclos depuis quelque jours. X 50.
Fig. 18. Cellules épithéliales d'un cœcum céphalothoracique latéral (Clu-
biona Itolosericea). X 500.
Fig. 19. Extrémité d'un cœcum latéral renfermant des groupes de cor-
puscules graisseux colorés (Agelena labyrinthica). x 250.
Fig. 20. Face sternale du céphalothorax de la Tegenaria domestica:
a. Chelicère; 6. lèvre inférieure ; c. coxopodites des pattes-
màchoires, d. tissu adipeux slernal mis à nu par enlèvement
du plastron slernal et laissant entrevoir par transparence le
système nerveux. X 8.
Fig 21. Cellules du tissu adipeux sternal frais (Jmaurobius atrox).
X 300.
Fig. 22. Cellules du même tissu frais chez la Tegenaria domeslica ; elles
sont accompagnées de globules sanguins. X 500.
Fig 23. Portion dilatée de l'intestin moyen abdominal et les quatre
entonnoirs où aboutissent les canaux excréteurs de la glande
abdominale. Stries indiquant probablement une tunique mus-
culaire délicate, x 500.
Fig. 24. Revêlement musculaire de l'intestin moyen abdominal dans la
portion qui commence à s'incurver autour de la poche sterco-
rale. X 300.
Fig. 25. Epithélium de l'intestin moyen abdominal, x 300.
Fig. 26. Fragment de la glande abdominale montrant le réseau formé par
les tubes de Malpighi. x 50.
Fig. 27. Fragment de la glande abdominale très-légèrement comprimé
(Tegenaria civilis). x 50.
Fig. 28. Cœcum de la glande abdominale ouvert. Cellules épithéliales en
place , un peu allongées et contractées (Glycérine étendue et
acidifiée) (Tegenaria civilis). x 200.
Fig. 29. Cœcum de la glande abdominale intact. Cellules vues par trans-
parence. Même réactif (Tegenaria civilis). y 200.
Fig. 50. Cœcums intacts, cellules vues par transparence (Acide osmique
à Vio °/o) (T. domeslica jeune). X 40.
Fig. 31. Cellules sécrétoires de la glande abdominale (Acide osmique
à V, %). X 200.
Fig. 32. Cellules isolées (Acide osmique à */10 % et picrocarmin). x 500.
Fig. ôô. Globules, etc., observés dans les cellules de la glande abdomi-
nale (Acide osmique à i/l0 %). o Petits globules transparents
constituant une iine poussière; b. globules graisseux jaunes
( 181 )
pâles; c. globules brunâtres à pellicule enveloppante : d. noyaux
de cellules, x 500.
Fig- 34. Dessin au trait de la glande abdominale vue par la face dor-
sale, x 3.
Fig. 33. Fin de l'intestin moyen , intestin terminal et poche stercorale
vide. Couche musculaire à direction longitudinale, x 30.
Fig. 3G. Intestin terminal, poche stercorale vidée et relevée vers le haut,
insertion d'un tronc terminal des tubes de Malpighi. x 200.
Fig. 37. Épithélium delà poche stercorale vu par transparence, x 200.
Ftg, 38. Réseau de cylindres musculaires bifides et entre-croisés à la sur-
face de la poche stercorale. X 300.
Fig. 39. Fragment d'un tronc terminal des tubes de Malpighi non chargé
de produits sécrétés (Clubiona holosericea). x 300.
Fig. 40. Noyaux aplatis des cellules d'un tube de Malpighi (Tegenaria
domeslica). (Acide osmique et picrocarmin). x 200.
Fig. 41. Terminaison périphérique légèrement renflée d'un tube de Mal-
pighi (Epeira apociisa). x 300.
Rectification à la Note sur /'évolution insérée au Bulletin
de mai 1877 (1); par M. F. Folie, membre de l'Aca-
démie.
Une inadvertance nous a fait donner, des relations de
l'évolution dans les hexagones inscrits ou circoncrits à
une conique, un énoncé qui n'est pas exact. On trouvera
les vraies relations dans le numéro actuel du Bulletin.
L'impression tardive du Bulletin de mai ne nous a pas
permis de faire plus tôt cette rectification.
(1) Voir Bulletins, 2e série, tome XLIII, page 300.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 13
( «2 )
Suite à la note précédente sur /'évolution. — I. Synthèse
des théorèmes de Pascal et de Brianchon. — II. Nou-
velles extensions de ces théorèmes. — III. De /'évolu-
tion dans l'hexagone inscrit ou circonscrit à une coni-
que; par M. F. Folie, membre de l'Académie.
En cherchant à étendre à l'hexagone la propriété que
nous avons énoncée, sous le nom d'ÉvoLUTioN, relative-
ment à deux triangles, l'un inscrit à une conique, l'autre
circonscrit à la même courbe par les sommets du premier,
nous avons dû tout d'abord tâcher démettre l'équation de
la conique, rapportée à l'hexagone, sous une forme ana-
logue à celle que nous avions trouvée en la rapportant
aux deux triangles, et qui nous avait donné l'idée de cette
propriété.
Or nous avons été étonné de rencontrer, dans le cours
de cette recherche, une propriété fort curieuse, et tout à fait
inattendue, en ce sens que nous n'en avions, pas plus que
nos maîtres, prédécesseurs ou contemporains, nul pres-
sentiment, il faut bien le reconnaître.
Et pourtant, cette propriété appartient, presque dans
ses propres termes, à Desargues.
Pascal, s'il avait pensé à combiner la proposition de
Desargues avec l'hexagramme mystique, fût arrivé bien
certainement au théorème de Brianchon.
El il est vraiment surprenant que ce dernier surtout,
et les grands géomètres qui lui ont succédé, n'aient
( 183 )
pas trouvé le lien étroit qui unissait la proposition de
Desargues à celles de Pascal et de Brianchon.
C'est bien ici le lieu d'appliquer ces paroles si profon-
dément vraies de M. Paul Serret (1), et qui, dans le cas
présent, s'appliquent plus encore à lui-même qu'à tout
autre, puisqu'il a rencontré cette propriété sur son
chemin, et qu'il s'est arrêté au moment où il n'avait plus
qu'un pas à faire pour la saisir :
« Mais il est présumable qu'il y faudra surtout infini-
» ment de bonheur; et c'est ce que la plus profonde
» géométrie ne donne pas toujours. »
Afin de mettre notre énoncé sous une forme aussi con-
cise que possible, nous rappellerons les définitions sui-
vantes , que nous avons données dans nos Fondements
d'une géométrie supérieure cartésienne , et dont on trou-
vera la justification dans ce Mémoire. Cette justification
ressortira au surplus, à l'évidence, des pages qui suivent.
« Nous appellerons polygones conjugués de n côtés,
» inscrits à une courbe du wm' ordre, deux polygones tels
» que chaque côté de l'un passe par l'un des points d'in-
» tersection de chaque côté de l'autre avec la courbe.
» De même, nous appellerons polygones conjugués de
» n -4- 1 côtés, inscrits à une courbe du «""ordre, deux
» polygones tels que chaque côté de l'un passe par l'un
» des points d'intersection de chaque côté de l'autre,
» un seul excepté, avec la courbe; les côtés opposés dans
» ces deux polygones seront ceux qui n'auront pas de
» point commun sur la courbe.
» Ainsi, deux triangles conjugués inscrits à une
(i) Géométrie de direction, p. 518.
( m )
» conique sont, par exemple, deux triangles de côtés
» respectifs A, B, C, et a, b, c, tels que A passe par l'un
» des deux points d'intersection de b et c avec la conique;
» B par l'autre intersection de c et par l'une de celles de
» a; et enfin C par l'autre intersection de a et de b; et les
» côtés opposés, dans ces deux triangles, sont A et a , B
» et 6, C et c, parce qu'ils ne se coupent pas deux à deux
» sur la courbe.
» Pour tracer ces deux triangles, on commencera par
» former le premier au moyen de trois côtés A, B, C, qui
» coupent chacun la courbe en deux points; le second se
» formera en joignant ces points deux à deux par des
» droites distinctes de A, B, C, ce qui pourra se faire de
b huit manières différentes.
» Les deux triangles A, B, C, a, b, c, forment évidem-
» ment un hexagone inscrit; mais on verra que la dénomi-
b nation de triangles conjugués inscrits se prête immé-
» diatement à une généralisation que ne comporte pas
b la dénomination d'hexagone inscrit (1). b
Cela posé, nous pourrons dire que :
(1). Dans deux triangles conjugués inscrits aune coni-
que, les droites de jonction des sommets opposés, pris deux
à deux, concourent en un même point; c'est-à-dire que
les six sommets, qu'on obtient par les intersections succes-
(1) Voir Fondements d'une géométrie supérieure cartésienne, pp. 5
et 6. Peut-être un autre terme que conjugués eût-il été préférable, parce
que celui de polygone conjugué à une conique existait déjà ; mais on
doit éviter, autant que possible, les néologismes; et la confusion est ici
d'autant moins à craindre, qu'elle ne pourrait avoir lieu que pour les
coniques, et qu'ensuite, dans notre définition, il s'agit toujours, non d'un
polygone conjugué à la courbe , mais de deux polygones conjugués
inscrits ou circonscrits à la courbe.
( iSo )
sives des côtés alternants d'un hexagone inscrit à une
conique, forment ceux d'un hexagone circonscrit à une
autre conique.
Le corrélatif, qui n'est autre chose, au fond, que la
réciproque de ce théorème, est également vrai; on peut
donc énoncer cette propriété :
(II). Dans deux triangles conjugues circonscrits à une
conique, les points d'intersection des côtés opposés, pris
deux à deux, sont en ligne droite; c'est-à-dire que les six
côtés, qu'on obtient par les jonctions successives des som-
mets alternants d'un hexagone circonscrit à une conique,
forment ceux d'un hexagone inscrit à une autre conique.
Soient, par exemple, 1, 2, 5, 4, 5, 6, les côtés successifs
d'un hexagone inscrit à une conique; de sorte que 1, 5, o
et 2,4, 6 sont les côtés des deux triangles conjugués; et
que 1 et 4, 2 et 5, 5 et 6 sont les côtés, respectivement
opposés, de ces deux triangles.
Désignons par I, III, V et II, IV, VI les sommets,
opposés aux côtés de même nom, dans ces triangles.
On voit que les sommets, respectivement opposés, des
deux triangles sont I et IV, II et V, III et VI; et l'énoncé (I)
dit que les droites de jonction (I, IV), (II, V), (III, VI)
concourent en un même point.
Réciproquement, I , II , III, IV, V, VI sont les sommets
successifs d'un hexagone circonscrit à une conique; de
sorte que I, III, V et II, IV, VI sont les sommets des deux
triangles conjugués circoncrits, et que I et IV, II et V,
III et VI sont les sommets, respectivement opposés, de
ces deux triangles.
\ , 5, 5 et 2, 4, 6, seront les côtés, opposés aux sommets
de même nom, dans ces triangles.
On voit que les côtés respectivement opposés des deux
• ( i§6 )
triangles sont 1 et 4, 2 et 5, 5 et 6, et l'énoncé (II) dit que
les points d'intersections (1 , 4), (2, 5), (5, 6), sont situés
en ligne droite.
Il résulte de là que :
Les intersections successives des côtés alternants d'un
hexagone de Pascal forment les sommets successifs d'un
hexagone de Brianchon ; de même que :
Les jonctions successives des sommets alternants d'un
hexagone de Brianchon forment les côtés successifs d'un
hexagone de Pascal ;
Et, enfin, que ces deux propriétés se retrouvent, au
fond, dans la suivante, découverte par Desargues :
Si deux triangles sont tels, que leurs côtés se coupent,
deux à deux respectivement, en trois points situés en ligne
droite, les droites de jonction des sommets opposés, pris
deux à deux, concourent en un même point; et récipro-
quement.
11 suffit, pour se convaincre immédiatement de l'identité
de ces propriétés, de se rappeler :
1° Qu'un hexagone inscrit à une conique est un système
de deux triangles tels que leurs côtés opposés se coupent
en trois points situés en ligne droite; ou
2° Qu'un hexagone circonscrit est un système de deux
triangles tels que les droites de jonction des sommets
opposés concourent en un même point.
Appliquant le théorème de Desargues au premier cas,
on voit que les droites de jonction des sommets opposés
des deux triangles concourent en un même point, et
que ces sommets sont, par suite, ceux d'un hexagone
de Brianchon, comme le dit l'énoncé (I).
Dans le second cas, on appliquera la réciproque du
théorème de Desargues, et l'on verra que les points
( 187 )
d'intersection des côlés opposés des deux triangles sont
situés en ligne droite, et que ces côtés sont, par suite, ceux
d'un hexagone de Pascal, comme le dit l'énoncé (II) (I).
(1) Plus d'un lecteur se demandera certainement s'il est bien possible
que cette liaison si évidente, entre trois des théorèmes les plus fonda-
mentaux de la géométrie supérieure, n'ait été aperçue par aucun géo-
mètre.
Nous nous sommes également posé cette question; et, après avoir
vérifié scrupuleusement dans la plupart des traités connus, si nous ne trou-
verions aucune trace de cette liaison, nous croyons pouvoir répondre
hardiment par la négative.
Drianchon, Steiner, Poncelel. Hesse, etc., ont bien cherché les pro-
priétés des hexagones dont l'un est le polaire réciproque de l'autre;
mais ils ne semblent pas s'être doutés que l'hexagone, dont les sommets
successifs sont les intersections des côtés alternants d'un hexagone de
Pascal, peut être considéré comme le polaire réciproque de ce dernier.
(V. Traité des propriétés projectives, édition de 1865, t. I, n"* 227-228
et 570-57-2. — Steiner-Schroter , Vorlesungen , p. 150. — Hesse, article
cité dans la note suivante.)
C'est grâce à notre définition des couples de triangles conjugués
inscrits ou circonscrits à une conique, que cette liaison apparaît de la
manière la plus manifeste; et l'on y verra une nouvelle justification,
surabondante du reste, de cette définition, sans laquelle il nous eût été
difficile d'étendre, aux courbes et aux surfaces supérieures, les théorèmes
de Pascal et de Brianchon.
Peut-être n'est-il pas inutile que nous donnions ici. dans des termes
aussi analogues que possible à ceux de notre énoncé, celui qu'on trouve
dans les passages cités plus haut, de Steiner-Schroter et de Hesse, afin
qu'on puisse juger de la différence qui existe entre ces deux énoncés :
Les intersections successives des côlés alternants d'un hexagone de
Brianchon sont les sommets successifs d'un hexagone de Pascal; et
réciproquement :
Les jonctions successives des sommets alternants d'un hexagone de
Pascal sont les côtés successifs d'un hexagone de Drianchon.
Nous ferons remarquer que ces énoncés peuvent se traduire en un
théorème analogue à celui de Desargues, que nous avons mentionné; et
que leur combinaison avec les nôtres donnera naissance à une série indé-
finie d'hexagones alternants de Pascal et de Brianchon.
( 188)
Ce théorème donne donc, à ceux de Pascal et de
Brianchon, un complément auquel on pouvait d'autant
moins s'attendre, que les développements de ces théo-
rèmes ont été l'objet des études des géomètres contempo-
rains les plus distingués, les Steiner, les Chasles, les
Kirkman, les Cayley, les Salmo.i, les Hesse (1). Il est, en
outre, un trait d'union aussi remarquable, à un certain
point de vue, que celui que fournit le principe de dualité,
entre ces deux théorèmes si fameux dans l'histoire de la
Géométrie, en ce qu'il les montre, non pas séparément,
comme le principe de dualité, dans deux figures diffé-
rentes, mais simultanément, dans une seule et même
figure. Enfin il pourra devenir quelque jour, grâce aux
méditations d'un profond esprit, le germe d'un nouveau
principe, comme le théorème de Brianchon a été le germe
du principe de dualité.
Peut -on appliquer ce théorème aux courbes supé-
rieures? Nous avons trouvé, dans le Mémoire cité plus
haut (2), l'extension des théorèmes de Pascal et de Brian-
chon aux courbes planes, et nous avons démontré qu'elle
est tout à fait générale jusqu'au 5e ordre ou à la oe classe.
11 est donc certain que le théorème précédent pourra
s'étendre, comme ces derniers, dont il est la synthèse, aux
courbes supérieures. Mais ici surgira, tout naturellement,
une difficulté qu'il faudra surmonter d'abord.
(1) Nous ne voulons pas insister ici sur les nombreux développe-
ments que ce théorème va produire dans les propriétés des points et des
droites de Steiner, Kirkman, Cayley et Salmon. Voir, au sujet de ces
propriétés, Hesse, Ueber das Hexayrammum mysticum. Journal de
Grelle-Borchardt.tomeLXVHI, page 193, année 1868, et Bauer, Ueber
das Pascal'sche Thcorem, Mém. de l'Acad. de Munich, tome XI, 1874.
(2) Voir Fondements dune géométrie supérieure cartésienne, pp. 1 8 à 59.
( 189 )
Les coniques, en effet, étant tout à la fois du second
ordre et de seconde classe, on conçoit, pour ces courbes,
la synthèse des théorèmes de Pascal et de Brianchon dans
une seule et même figure. Faudra-t-il, pour que cette
synthèse puisse avoir lieu dans les courbes supérieures,
que leur classe soit aussi la même que leur ordre, c'est
présumable. Toutefois, nous n'avons pas encore pu vérifier
ce point important.
Si ces prévisions se confirmaient, la synthèse des théo-
rèmes analogues à celui de Pascal pour les courbes du
troisième ordre (1), et à celui de Brianchon pour celles de
la troisième classe (2), s'énoncerait :
Les sommets de deux quadrilatères conjugués , inscrits
à une courbe du troisième ordre et de la troisième classe ,
sont ceux de deux tétragones conjugués circonscrits à une
autre courbe du troisième ordre et de la troisième classe,
les sommets opposés de ces deux tétragones étant les
intersections respectives des côtés opposés des deux qua-
drilatères ;
Et réciproquement :
Les côtés de deux tétragones conjugués, circonscrits à
une courbe du troisième ordre et de la troisième classe,
sont ceux de deux quadrilatères conjugués inscrits à une
autre courbe du troisième ordre et de la troisième classe, les
(1) Voici l'énoncé de ce théorème : Dans un système de deux quadri-
latères conjugués inscrits à une courbe du troisième ordre, les côtés
opposés se coupent en quatre points situés en ligne droite. Fonde-
ments, etc., p. 22.
(2) Voici l'énoncé de ce théorème : Dans un système de deux quadri-
latères conjugués circoncrits à une courbe de la troisième classe, les
droites qui relient les quatre couples de sommets opposés concourent en
un même point. Fondements, etc., p. 44.
( 190 )
côtés opposés de ces deux quadrilatères étant les jonctions
respectives des sommets opposés des deux tétragones (1).
Cet énoncé pourrait s'étendre avec la plus grande faci-
lité aux courbes supérieures et, probablement aussi, aux
surfaces du troisième ordre et de la troisième classe (2),
ainsi qu'aux courbes gauches.
On voit surgir, dans ce qui précède, l'idée d'un lien, à
peine entrevu jusqu'à ce jour, entre les deux grandes
divisions que le principe de dualité a créées dans les
ligures géométriques.
Cette idée deviendra, sans doute, quelque jour, féconde
en applications.
§ H.
En appliquant aux courbes du troisième ordre, quelle
que soit leur classe, la méthode dont nous avons fait
usage dans le cas de l'hexagone inscrit à une conique,
nous sommes arrivé également à des résultats intéres-
sants.
JNous mentionnerons le suivant, que le lecteur traduira
(1) Depuis que ces lignes ont été écrites, nous avons pu vérifier que
notre théorème sur Y évolution, dans deux triangles, l'un inscrit, l'autre
circonscrit à une conique, est applicable également à deux triangles, l'un
inscrit, l'autre circonscrit à une cubique (courbe du 3rae ordre et de la
5me classe); et nous présumons que cette propriété caractérise toutes les
courbes planes dont l'ordre est le même que la classe. (13 août 1877.)
(2) Voici les énoncés des théorèmes relatifs à chacune de ces caté-
gories de surfaces : Dans un système de deux tétraèdres conjugués
inscrits à une surface du troisième ordre, les faces opposées se
coupent suivant quatre droites situées dans un même plan.
Dans un système de deux tétragones conjugués inscrits à une surface
de la troisième classe, les droites qui unissent deux à deux les sommets
opposés concourent en un même point. Fondements, etc., pp. 101 et 118.
( M )
aisément en son corrélatif, pour les courbes de la troi-
sième classe :
Théorème. Si l'on combine trois à trois, dans un ordre
quelconque, les couples de côtés opposés de deux quadrila-
tères conjugués inscrits à une courbe du troisième ordre,
on obtient un hexagone inscrit à une conique, propriété
presque évidente du reste, puisque, dans cet hexagone,
les côtés opposés se coupent en trois points situés en
ligne droite.
Les quatre coniques qui résultent de ces combinaisons
jouissent d'autres propriétés remarquables, sur lesquelles
nous reviendrons.
Par la même raison, on voit que l'on peut énoncer
également les théorèmes suivants, qui se déduisent
immédiatement de ceux que nous avons donnés dans
l'ouvrage cité (1) :
Théorème. Si l'on combine trois à trois, dans un ordre
quelconque , les couples de côtés opposés de deux quinqué-
latères (ou de deux sélatères) conjugués inscrits à une
courbe du quatrième (ou du cinquième) ordre, on obtient
un hexagone inscrit à une conique.
Et de même :
Théorème. Si l'on combine quatre à quatre, dans un
ordre quelconque, les couples de côtés opposés de deux
(1) Voici ces énoncés :
Dans un système de deux quinquélatères conjugués inscrits à une
courbe du quatrième ordre, les côtés opposés se coupent en cinq
points situés en ligne droite.
Dans un système de deux sélatères conjugués inscrits à une courbe
du cinquième ordre, les côtés opposés se coupent en six points situés
en ligne droite. Fondements, etc., pp. 26 et 29.
( 192 )
quinquélatères (ou de deux sélalères) conjugués inscrits à
une courbe du quatrième (ou du cinquième) ordre, on
obtient un système de deux quadrilatères conjugués in-
scrits à une courbe du troisième ordre.
Enfin :
Théorème. Si l'on combine cinq à cinq, dans un ordre
quelconque, les couples de côtés opposés de deux sélatères
conjugués inscrits à une courbe du cinquième ordre, on
obtient un système de deux quinquélatères conjugués
inscrits à une courbe du quatrième ordre.
On énoncera les théorèmes corrélatifs de la même
manière, en remplaçant simplement les termes de pluri-
latères conjugués inscrits par ceux de polygones con-
jugués circonscrits, le mot côtés par celui de sommets,
et enfin Yordre par la classe (i).
De même encore :
Théorème. Si l'on combine trois à trois, dans un ordre
quelconque, les couples de faces opposées de deux té-
traèdres conjugués inscrits à une surface du troisième
ordre, on obtient un couple de trièdres conjugués inscrits
à un hyperboloïde.
Et le théorème corrélatif:
Théorème. Si l'on combine trois à trois, dans un ordre
quelconque , les couples de sommets opposés de deux
tètragones conjugués circonscrits à une surface de la troi-
sième classe, on obtient un couple de trigones conjugués
circonscrits à un hyperboloïde.
(1) Voir Fondements, etc., pp. 6 et 7 et 32 à 49.
( 193 )
§ III.
Il nous reste à montrer ce que devient, pour l'hexagone
inscrit à une conique, la relation de I'évolution, que nous
avons trouvée pour un couple de triangles, l'un inscrit, et
l'autre circonscrit à une conique.
Si nous désignons par 1, 2, 3, 1', 2', 5', les côtés con-
sécutifs d'un hexagone inscrit, de sorte que I, et 1',
2 et 2', 3 et 3' sont les côtés opposés de cet hexagone;
par /, 2, 5 les diagonales qui relient les sommets opposés,
et qui passent respectivement par les intersections 25, 51,
et 12; par /', 2', 5' celles qui passent par les intersec-
tions 2'5, 5'1 et l'2; enfin, si nous représentons par les
mêmes chiffres les points d'intersection dune transversale
avec ces diverses droites, il est aisé de démontrer qu'on
aura les relations
12'. 25'. 31' X 12'. 2J.' 5./' = 4 '2. 2'5. 51 X l'S. 2'5. 57,
\2. 2J. 5/ X \'2- 2'5. 5'/ = 1± 23. Jt. X /2'. 25'. 51',
ainsi que d'autres analogues, mais moins symétriques.
Il est à remarquer que chacune de ces égalités peut
être considérée comme le produit de deux relations sim-
ples d'ÉvoLUTiON, qui n'ont, toutefois, pas lieu séparé-
ment (1) : la première, comme le produit des relations
d'évolution entre 11', 22', 55', et entre !•/', 25', 55'; la
seconde, comme le produit des relations d'évolution entre
Î4, 22, 35 et l'y, 2'2, 3'3.
Le lecteur écrira aisément les relations corrélatives,
qui ont lieu pour l'hexagone circonscrit.
(1) C'est par inadvertance que nous les avons indiquées, dans le Bul-
letin de mai, comme existant.
( m )
Théorème d'Algèbre; par M. Eugène Catalan,
associé de l'Académie.
a, b, c, ... k étant des quantités quelconques , inégales,
la somme
la^Tb^a-c*'" ~*~ a — k\ {a — bf (a — cf... (a — kf
r \ \ 1 -| 1
"*" |j^ -1" Z"3~c + • " + 6_ J (6__a)»(6 — c)*...(6-'ife)"
-+- •••
es£ toujours nulle.
Cet énoncé se trouvait dans un billet cacheté, déposé
le 7 avril 1877, et ouvert pendant la dernière séance. La
propriété qu'il exprime est un cas particulier des théorèmes
d'Algèbre indiqués dans mon Rapport sur le Mémoire de
M. Ghysens, et qui sont une traduction du remarquable
théorème de Géométrie dû à M. Liouville. Jusqu'à présent,
je n'ai pu les démontrer directement.
( m )
Note sur une équation différentielle (te Jacobi; par
M. P. Mansion, professeur à l'Université de Gand.
§ I. Cas général.
1. Méthode d'intégration de Jacobi simplifiée. Considé-
rons l'équation différentielle
a( — dy) ■+- bdx ■+- c(xdy — ydx).
(1)
ou
a= a{x ■+- a^y -+- a3 , 6 = b{x -+■ b^y -t- b- , c= f4ac -f- c^y -+- c3.
Introduisons, dans cette équation, la variable fictive s=.1,
dont la différentielle dz est nulle. Il viendra
a(ydz — zdy) -+- b(zdx — xdz) -+- c(xdy — ydx) = 0.
ou encore
a, b, c
x, y, z
0.
(2)
dx, dy, dz
Multiplions le premier membre de cette équation par
le déterminant
R =
a, ,
ft.
ri
<*2>
fr>
r*
as?
fr>
r3
(•>)
dont les éléments a, (3, y, sont indéterminés, et posons
f/, = ajX -t- p,y -+- y4Z, ?f2 = atx •+■ P-2^ ■+- Xs2 5
( 196 )
Nous trouverons
- j346 -+- r^ , «2a + && + r2f ? «3« + p36 ■+- 73c
«! s «2 , "3
(/î/j , du?. , dM3
Posons
ccta -f- [3,6 -t- ^c = /m"i = *i(«ix -+- fr.?/ + y4z) ,
a.a -+- pj) -+- y2c = fe2M2 = /i2(a2;r •+- {32?/ -+-
Cette valeur de cos2%, portée dans la formule (10), la trans-
forme en celle-ci
v. r* H 1\ d?
(13) • -2 — 7i — ^ — n — -Jt^0-
^ cos a (1 — sura cos*») \p p I dr
Cette relation à laquelle satisfont les rayons de courbure
des sections normales correspondantes (*) d'un nombre
quelconque de surfaces et de leur résultante, permet de
calculer celui de cette dernière, les autres rayons de cour-
bure étant connus. Nous exposons, dans le paragraphe
suivant, quelques conséquences qu'on peut en déduire.
(*) Nous appelons ainsi les sections normales qui ont mêmes tangentes
que les sections obliques contenues dans un même plan S.
( 229 )
IV.
Soit un nouveau plan S', mené par OD, perpendiculaire-
ment au plan S. Soient &>', «',,...&>'„ les angles qu'il fait
avec les plans OAN,.... OA„ N„.
D'après la formule (15),
1 1 \ d?
= 0,
^ cos a (1 — sin2a cosV) \v v'I dr
v, /; vh v',...; vn, v '„ étant les rayons de courbure des sec-
tions normales qui correspondent au plan S'.
Si l'on suppose que les plans S, S' soient symétriques
par rapport au plan OAN, on a w = w' = ~ , et les for-
mules (11), (12) deviennent
2r2 l\ \\_<* r\ dr fl 1
cosa(l -+- cos2,*) \p p'I ^ cosa,(l — sin^cos2»,) di^Xpi p\
2rs (\ \\ -, r\ dr (X \
cosa (l-+-cos2a) \ v v'I ** cos«1(1 — sin2«1COsV)) (/r, \v,
Soient C, C les courbures moyennes des résultantes. Il
vient, par addition,
4r2
(14) . . (C — C)
K ' COS a (1 + COS2a) V '
^ cos «! rfri 1 — sii^ajcos2^, \p, pi/
l M Ml
d — sin2aj COS2wi Wj V
Si les surfaces qui touchent, en A,,... A„, les premières
2rae SÉRIE , TOME XL1V. 16
( 230 )
surfaces considérées, sont des plans, la formule se sim-
plifie :
4r2
(15) . (C — C)
COS k(1+ cos a)
v_zi_^ir i i T
^ COS aj (//'i Lpi (1 — SÎl^ajCOS2",) v, (1 — sinV.jCOsV,) J
La formule (lo) prend une forme remarquable, lorsque
les (n -+- 4) surfaces, considérées deux à deux , sont des
transformées par rayon vecteur ('). Dans ce cas, les nor-
males, aux points correspondants, sont situées dans un
même plan, et
Il vient, en représentant par Ci5 C2... C„ les courbures
moyennes des surfaces qui passent par Ai,... A„ :
4r2 ^ r\ dr
cosa(l -t-cosV.) ^cosa,(l — sin^jcos2»,) f/r,
On peut déduire, de la formule (15), une relation entre
les courbures des sections normales correspondantes d'une
surface d'ordre n. Supposons, comme ci-dessus, que les
surfaces, qui touchent en Alv.. A„ les premières surfaces
(*) Lorsque les rayons vecteurs r, rt, de deux surfaces, vérifient
l'équation F(r, r, ) = 0, l'une des surfaces est une transformée de l'autre,
par rayon vecteur. Les normales, en deux points correspondants, de deux
surfaces, transformées par rayon vecteur, sont situées dans un même
plan [voir Nouvelle Correspondance , t. II , p. 172]. Pour avoir un groupe
de surfaces, jouissant de la propriété indiquée dans le texte, on déduit,
d'une surface quelconque, une transformée par rayon vecteur, puis de
celle-ci, une nouvelle transformée, et ainsi de suite.
( £31 )
considérées, soient des plans. La formule (13) devient
M-
\p p /
cos a. (1 — sin'2 a. C0S2w) \p p
_ ^ A dr 1
^ cos a, (1 — sin2a, cos2w,) dr{ p,
Si r ,, )\2... rn sont les rayons vecteurs d'une surface d'ordre
n, et que l'on ait
n — \ L,
r ** >\
les courbures y i sont nulles, et l'on obtient
(17> ■ • • 2 77-^1 n-==o.
*" cos a, (1 — siira, cos^J p,
Sur quelques points de Géométrie Supérieure;
par M. C. Le Paige.
On sait que l'involution du nme ordre peut se définir par
une équation de la forme
f(x) + kf(x) = 0 0 (1)
où x représente le rapport des distances d'un point d'une
droite, à deux points fixes pris sur cette droite.
Si l'on désigne par p4, p2, ... p„ les racines de l'équa-
tion f(x) = 0, et par p,', p,', ... p'„, celles de l'équation
4 — p',) (ii — pâ) — (> — P-) (>s— P'i)0-* — Pi) •••(>*— P»)
= (A» — pO (A» — p^ — (A» — P») ,
(*„ - P.) (** - pi) - (K - p») '
où )b ^21 ^ représentent les racines de l'équation (1).
Il n'est pas difficile de montrer que cette suite d'égalités
revient à l'identité
1 —
ï,\, -+- Z>,).2... ±^3
... Xn
■1 — Zpi -+- 2p,pa ••. ± piPî ••• p„
\ — 2p\ -f- ïp'tp'i ... ± p\pï ... ?'„
analogue à l'équation
1 — (>0 -+- h) *o*i
1 — (i"o -+- y"i) /"o/"i
= c
1 — (vo -+- ^l) »Vl
= 0.
(3)
qui définit l'involution du second ordre.
Nous nous proposons de montrer comment cette iden-
tité se rattache à la théorie des invariants des formes
binaires.
Toute forme binaire, de degré pair, a un invariant qua-
dratique par rapport aux coefficients (*).
Soit une forme
a0x" h — o,x
t
y
n (n — 1 )
•1.2
CJJ
(*) Salmon, Aly. sup., p. 111.
( 235 )
L'invariant dont il s'agit est
n (n — t)
I = a()ari — HfljO,,., -*- «2a„ 2 — ••• ,
dont les coefficients numériques sont ceux du binôme,
mais dont le terme du milieu serait divisé par deux.
On sait que si l'on a deux formes :
n . n {n — I )
fl0x" -+- —alx" ~ly h — — «2x" y ■+■ ••• -+- a„y ,
n
"(*-<) _._..,.
o0x" -+- - o,x '^/ h «2x "(/-+- ••• -+- a„y",
i 1.2
l'on obtient un invariant commun en effectuant , sur un
invariant de la première forme, l'opération
I d d \
L'invariant quadratique simultané des deux formes sera,
par suite,
n n (n — 1 ) ,
I, = o0a„ — - «,«„ , h «2«„_2 — •••-+- ana ,.
Si nous représentons par y,, y2, ... y„; >, , ).2, ... >n, les
racines des deux équations
n .
a0x" -+- - djX" \y -t- ••• -+- a„yn = 0,
« , _. ,
a0x" -+- - o,x" '«-»-•■•-+- a,,*/" = 0,
1
Ii = ?'i?'2 ••• y n 2A,2y,y2 ••• r«-i -•-•••■+■ Ma ••• *„•
(*) Aronhold , Begrllndung der Inoariantentheorie, Journal de
Crelle, t LXII, p. 313.
( 254 )
Les formes de degré impair n'ont pas d'invariant du
second degré par rapport aux coefficients, mais deux
formes de degré impair ont un invariant commun, qui peut
s'exprimer de la même façon, en fonction des racines des
deux équations.
Maintenant nous pouvons observer que si l'identité (5)
a lieu, le déterminant
a n
— ati .
.. ± ain
021
«22 •
. =b aîn
«n-3
i — ««-sa •
• ± ««-s»
i
— IX, .
. ± X,A2 ..
• \
1
— 2p,
• ± Plp2 ••
• pf
1
— 2P; .
• ± pip2-
• pi
est nul , quelles que soient les [n — 5) premières rangées
horizontales.
Il en résulte qu'il est toujours possible de trouver n
quantités y4, y2, ... yn, telles que les équations
«nri?'2...r„
■a«2y,r8 ... y._i
± «i«
0,
n
rir 273— r„ — zp^rirs ••• r„-i h — ± pipî — p„ =0,
rir2r3 »• r„ i^inr^ — r»* -*- ■•• ± ?\?i ••• pL = 0 ,
aient un système de solutions communes.
Si l'on désigne par A2; A? = <ÎB(B-|,AÎ.
Donc
ni'"-1 -+- A'Ai ^I"_1 ■+• AA4
p' = = = p.
ni'—1 — A' A; ni""1 — AA.
En conséquence, la valeur de cette fonction se conserve
dans les projections.
( 236 )
Lorsque
p = -\, 1 = 0.
Dans ce cas, les 2 n points, représentés par les formes
f, fu sont conjugués harmoniques.
Nous ne nous étendrons pas davantage, pour le moment,
sur la signification géométrique de la fonction p.
Nous demanderons à l'Académie la permission d'ajouter
à cette note une démonstration, qui nous paraît simple,
de la remarquable propriété, donnée par M. Folie, dans
le Bulletin de mai, et qu'il a désignée sous le nom d'évo-
lution.
Soit ABC un triangle circonscrit à une conique, et abc,
le triangle inscrit, obtenu en joignant les points de con-
tact.
Supposons qu'une transversale coupe les deux triangles
et la droite ka en sept points, que nous désignerons par
i,V, 2,2' 3,3',*.
Il est visible que les six points 1 S, 22', 55' sont en invo-
lution (*).
Donc
12'. 23'. or?= — 2. 2'5. ô'i.
(*) Steiner-Schrôter, Théorie der Kegelschnitte, S. 67.
( 2Ô7 )
Mais les droites ac, a\, ab, aC forment un faisceau har-
monique; donc 5,3, % 1' sont quatre points conjugués
harmoniques.
Par suite
3 _ 2^_
3T~~2r'
La combinaison de ces deux égalités donne :
12'. 25'. 51' = 1'2.2'5.5'1 (*).
De la démonstration que nous venons de donner res-
sort, nous semble-t-il, la définition suivante de l'évolu-
tion :
Lorsque six points a, a'; b, b'; c, c', sont en involution,
le conjugué harmonique du point a, par rapport à b', c',
forme avec les cinq autres points une évolution.
La construction du sixième point d'une évolution résulte
aisément de cette définition.
— M. P.-J. Van Beneden attire l'attention de ses con-
frères sur le départ, fixé au mois d'octobre prochain, de la
première expédition belge pour l'Afrique centrale. Sans
avoir reçu de mandat spécial à ce sujet, il fait savoir que
M. Maes, de Hassell, docteur en sciences naturelles, qui
sera attaché à l'expédition en qualité de médecin et de
(*) On déduit, de la même manière, le théorème de Ptolémée, sur le
triangle, du théorème de Jean de Ceva. Cette dernière démonstration est
contenue implicitement dans une remarque de M. Salmon. (Higher plane
Curves, p. 107.)
( 258 )
naturaliste, se chargera volontiers des recherches scienti-
fiques que l'Académie lui indiquera.
D'après les explications données par M. Liagre, membre
du comité central de l'Association internationale africaine,
la première station belge à former en Afrique aura pour
chef M. le capitaine Crespel, à qui seront adjoints M. le
lieutenant Cambieret M. le Dr Maes. Les voyageurs parti-
ront pour Zanzibar dans le mois d'octobre prochain, et de
là ils sedirigeront vers le lac Tanganyika. Suivant les cir-
constances, le chef décidera alors s'il faut établir la station
principale sur les bords du Tanganyika, ou y faire un
simple dépôt, et aller fixer la base des opérations futures
à Nyangwe ou à tout autre endroit à désigner dans le
Manyema.
Cette dernière station du Tanganyika, ou du Manyema,
ou de l'Uniamwesi sera la station scientifique définitive,
doublée d'une exploitation agricole qui devra lui per-
mettre, au bout d'un certain temps, de se suffire à elle-
même.
( 239 )
CLASSE DES LETTRES.
Séance du 6 août 1877.
M. Alphonse Wauters, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Ém. de Laveleye, vice-directeur;
J. Roulez, P. De Decker, M.-N.-J. Leclercq, le baron J. de
Witte, Ch. Faider, R. Chalon, Th. Juste, G. Nypels,
Alph. Le Roy , A. Wagener, P. Willems, membres; Aug.
Scheler, Alph. Rivier, E. Arntz, associés; Ch. Piot, Ch.
Potvin, Eug. Van Remmel, correspondants.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur adresse, en copie, un arrêté
royal du 5 juillet dernier, qui ouvre un second concours
pour la collation du prix de dix mille francs institué à per-
pétuité par le docteur Guinard.
L'article 5 de cet arrêté, conformément à ce qui s'est
fait à l'occasion du premier concours, confie le jugement
des travaux à un jury de cinq membres, nommés par le
Roi, sur une liste double de candidats proposés par les
classes des sciences et des lettres.
D'après les usages académiques, la nomination des can-
didats pour ce jury sera portée à l'ordre du jour des pro-
chaines séances des deux classes précitées.
( 240 )
— M. le Ministre offre, pour la bibliothèque de l'Aca-
démie, un exemplaire des ouvrages suivants :
4° Gregorii Barhebraei Chronicon ecclesiasticum, publié
par les chanoines Abbeloos et Lamy, de Louvain; tome IÏI,
gr. in-8°;
2° Sixième livraison de la 5e série du Woordenboek cler
nederlandsche taal, publié par MM. P.-J. Cosyn et Verwys
(Gehalte-Gekken); gr. in-8°;
5° Exposés de la situation administrative des provinces
pour 4817 ; 9 vol. in-8° avec annexes. — Remercîments.
— M. Georges Bancroft écrit de Washington pour
remercier la classe au sujet de son élection d'associé.
— L'Académie d'archéologie de Belgique envoie le pro-
gramme de son concours pour 1878.
— M. Gachard remet, pour être déposés dans la biblio-
thèque de l'Académie, les ouvrages que la Commission
royale d'histoire a reçus depuis l'envoi du 25 mars dernier.
— M. le directeur présente, de la part de M. le baron
Kervyn de Lettenhove, le tome XXVe des Chroniques de
Froissart, qui termine cette série des œuvres de l'illustre
choniqueur belge éditées par la Commission académique
de publication des travaux des grands écrivains du pays.
Ce volume renferme les lettres L à Z de la Table alphabé-
tique des noms géographiques.
M. Ch. Potvin fait hommage d'une pièce en vers qu'il
vient de publier sous le titre de : Rubens, 29 juin 1877.
M. Emile de Laveleye offre, au nom de l'auteur, MIIe la
comtesse Valentine de Sellon, un écrit intitulé ; La peine
de mort au XXe siècle, broch. in-8°.
( su )
« C'est un éloquent plaidoyer, dit M. de Laveleye, en
faveur de l'abolition de la peine de mort. M"e de Sellon
poursuit la réalisation de l'idée de son père, l'illustre phi-
lanthrope genevois, qui avait pris pour devise : L'inviolabi-
lité de la vie humaine. »
M. Alph. Le Roy présente, au nom de M. Vincenzo
di Giovanni, professeur au lycée national de Palerme, un
exemplaire de son ouvrage intitulé : Hartmann e Miceli,
broch. in-12.
La classe vole des remercîmenls aux auteurs de ces
dons et décide le dépôt de leurs ouvrages dans la biblio-
thèque de l'Académie.
RAPPORTS.
Les Annales de l'Académie d'archéologie d'Anvers (1)
ayant publié un mémoire de M. Van Bastelaer intitulé :
Sur les enduits, engobes , etc., des poteries romaines, sur
lequel MM. le baron de Witte et Roulez avaient lu, chacun,
un rapport dans la séance du 5 juillet 1876, la classe des
lettres, à la demande des deux commissaires précités,
décide l'impression de ces rapports dans le Bulletin de la
séance actuelle.
t;}>< i ! dr M. tff btti-on J. rf«? lYiltr.
« L'Académie m'a chargé d'examiner un mémoire qui
a pour titre : Les couvertes, lustres, vernis, enduits, en-
gobes, etc., de nature organique, employés par les
(1) T. XXXIII, pp. llô-UO.
( 242 )
Romains sur leur poterie, par M. A.-D. Van Bastelaer,
correspondant de l'Académie royale de médecine, prési-
dent de la Société archéologique de Charleroi.
J'ai lu avec soin le travail de M. Van Bastelaer. Dès les
premières ligues, je me suis aperçu de ma complète insuf-
fisance pour faire un rapport convenable sur ce mémoire.
Il s'agit en effet dans le travail que j'ai sous les yeux, le
litre d'ailleurs l'indique, non de recherches archéologiques,
mais d'études et d'analyses chimiques. Il faudrait donc
être chimiste pour avoir le droit de porter un jugement
sur ces recherches.
M. Van Bastelaer a examiné quelques vases de terre,
trouvés dans un cimetière belgo-romain à Strée. Les ob-
jets recueillis dans ce cimetière, dit-ii , appartiennent à
l'époque du Haut-Empire, comme l'attestent quelques
monnaies découvertes au môme endroit, monnaies appar-
tenant aux règnes de Néron et de quelques autres empe-
reurs jusqu'à Marc-Aurèle.
L'auteur passe en revue les enduits faits au moyen de la
poix, de la cire, de la gomme, de l'huile. Il divise son tra-
vail en trois sections : 1° enduits de nature organique;
2° enduits inorganiques; 5° enduits pâteux.
Ce que dit l'auteur des vases poissés ou enduits de poix
offre de l'intérêt et certes les passages tirés de Suétone, de
Columelle, de Pline, sont fort curieux.
II est peut-être possible (je n'en réponds pas, car je ne
suis pas chimiste) de reconnaître, après une longue suite
d'années, des enduits produits au moyen de la poix. Mais
je me demande si après quatorze ou quinze siècles d'en-
fouissement au sein de la terre, on peut retrouver des
traces d'enduits de cire, de gomme, d'huile? Ces enduits
étant excessivement délicats, j'éprouve quelque hésitation
( 243 )
à admettre que Ton puisse retrouver et reconnaître la na-
ture de tels enduits, après un laps de temps considérable,
un enfouissement de plusieurs siècles! C'est à la chimie à
prononcer.
Je crois du reste que l'opinion émise par l'auteur sur la
nature poreuse des vases d'argile, fabriqués par les Ro-
mains est quelque peu exagérée ; à mon avis, des terres
cuites plus ou moins dures, ayant séjourné au sein de la
terre et se trouvant en contact avec des sels et d'autres
matières pendant de longues années , ont dû subir des
altérations.
L'auteur, après avoir cité plusieurs passages empruntés
aux écrivains de l'antiquité et desquels il résulte que les
Romains employaient des enduits de cire, de gomme ,
d'huile, convient lui-même que les éludes qu'il a faites à
ce sujet sont insuffisantes. Il est certain que pour arriver à
des conclusions scientifiques de quelque valeur, il ne suffit
pas d'examiner et d'analyser les couvertes de quelques
petits vases isolés, de quelques fragments, trouvés en un
seul endroit. Il conviendrait de soumettre à des analyses
un très-grand nombre d'objets, recueillis dans différents
lieux, dans différents cimetières, dans des pays plus ou
moins éloignés. Les expériences auraient besoin d'être ré-
pétées, renouvelées, contrôlées; ces expériences, ces ana-
lyses, devraient être faites non par un seul savant, mais par
plusieurs. Je crois qu'en chimie, aussi bien qu'en archéo-
logie , si l'on veut arriver à des résultats sérieux, il faut de
longues, de laborieuses recherches et des comparaisons
multipliées.
Je crois en avoir dit assez pour faire comprendre mon
insuffisance en fait d'analyses chimiques. Un archéologue
ne peut pas émettre un avis de quelque poids sur ces
( Mi )
questions. Il est à désirer que le mémoire de M. Van Bas-
telaer, qui contient des recherches curieuses, soit soumis
à l'examen d'un membre de la classe des sciences. »
tlappor-t de M. J. Mtoulez.
« Le mémoire, sur lequel la classe vient d'entendre le
rapport de mon savant confrère et ami M. de Witle, se
compose de trois paragraphes, dont le premier se subdivise
en deux parties. Dans la première partie, il est question
de vases poissés. L'auteur, ayant remarqué sur un certain
nombres d'urnes cinéraires des restes d'un vernis noir ,
croit avoir constaté que ce vernis est un enduit de poix ;
à l'appui de sa découverte il cite une série de textes latins
relatifs aux vases poissés. La seconde partie est' consacrée
à l'examen d'autres vases, notamment de cruches et de
patères; l'auteur conjecture qu'ils ont été enduits d'une
matière organique qu'il regarde comme de la cire, de la
gomme ou même de l'huile ; il trouve en effet ces trois
espèces de vernis indiqués dans des auteurs latins pour les
vases destinés à contenir de l'huile ou certaines con-
serves.
Si les savants, qui jusqu'ici se sont occupés de la con-
fection des vases Romains et Gallo-Romains n'ont pas fait
usage du témoignage des textes invoqués par M. Van Bas-
telaer (1), ce n'est sans doute pas par ignorance, mais par
(1) Un célèbre minéralogiste cependant, Hausmann, dans un mémoire
lu en 1825 à l'Académie des sciences de Gôtlingue (De confectione vaso-
rum antiquorum fictilium quœ vulgo Etrusca appellantur), dit p. 25, sq.:
« A Romanis quidem vernix picluraeque, in vasis sepulcralibus graecis
» obviis, in operibus ficlilibus non adhibitae videntur; nullum enim illa-
( 245 )
la raison que ces textes ne traitent pas de la fabrication de
la poterie en général, mais de la préparation particulière
de certains grands vases (dolia, cadi, amphorœ) destinés à
recevoir du vin, de l'huile, du miel, des figues, des salai-
sons, etc. Aussi trouve-t-on la plupart de ces textes cités
avec d'autres encore non-seulement latins, mais grecs,
dans les ouvrages sur les antiquités de la vie privée des
Romains (4), à propos soit de repas et de boissons, soit
de la fabrication et de la préparation des vins.
Si les expériences et les conclusions de l'auteur du mé-
moire sont fondées, il faut admettre que la poix, l'huile, etc.,
s'employaient pour l'enduit de toute espèce de vases aussi
bien que pour celui des grands vases de provision. Or, les
chimistes qui ont fait des recherches avant lui ne paraissent
pas avoir découvert, que je sache, ces matières orga-
niques; je n'en rencontre, du moins, aucune mention
ni dans le traité des arts céramiques d'Alexandre Bro-
gniart, dans lequel le savant membre de l'Académie des
sciences donne un tableau de la composition de la pâte et
du lustre des différentes poteries romaines, telle qu'elle
résulte des analyses qui ont été faites par plusieurs
» rum vesligium inter operum fictilium Romanorum reliquias numerosas
>> invenilur. (Conf. Rrocehi, Suite vernici usate dagli Anlichi, Bibl. liai.,
» t. VI, pp. 455, 465). Indumento aulem, quodam respeclu, illi simili, sed
» pice vegelabili confecto, in vasis vinariis fictilibus Romani usi sunl ;
• cujus praeparalio a Columella accurate relata esl. »
(1) Voy. Ruperti, Handbuch der Rom. Aller Ihuemer, t. I , pp. 559 el
suiv., 455. — W. Becker, Gallus, oder romische Scenen aus de Zeit
Auguslus, t. III, pp. 251 et suiv. de redit, de Rein. — Becker-Marquardl,
Romische Privatalterthuemer , t. Il, pp. 67 et suiv. — Pauly's Real-
Encyclop. der class. Allerlhumsw., dans plusieurs articles et notamment
au mot vinum, p. 2650.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 17
( 246 )
chimistes nominativement désignés (1); ni dans les obser-
vations de Grivaud de la Vincelle (2) basées sur l'opinion
de savants chimistes, tels que le comte Chaptal et Darcet;
ni dans les renseignements recueillis par de Caumont (5)
et M. S. Birch (4).
Le §2 du mémoire offre une étude sur d'autres vases,
dont la couverte avait disparu par l'action de l'eau et qui
montraient tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des paillettes
jaunes, dont on a déjà signalé la présence sur des vases
Belgo-Romains. L'auteur recherche quel est l'enduit de
nature organique, qui a servi à agglutiner ces paillettes
dorées sur la poterie et quel est le procédé employé par
les anciens pour la pose de cette espèce de dorure.
Enfin le § 5 contient des recherches chimiques sur un
enduit pâteux, formé d'une poudre inorganique délayée et
agglutinée par un liquide organique.
Cette courte analyse du mémoire convaincra la classe
que ce n'est pas sans raison que M. de Wilte et moi, dans
la séance, où elle nous a chargés de l'examiner, avons dé-
claré, sur le simple énoncé du titre, que des archéologues
étaient incompétents pour l'examen de cet écrit. En effet,
il n'appartient qu'à des chimistes de contrôler et déjuger
des expériences de chimie. Je me rallie donc à la proposi-
(1) Traité des arts céramiques ou des poteries, considérées dans leur
histoire, leur pratique et leur théorie, par A. Brogpiart, professeur de
minéralogie, directeur de la fabrique de porcelaine de Sèvres, etc., t. I,
pp. 420 et suiv. Voy. encore pp. 586, 467, 483, de la Inédit. Paris, 1844.
(2) Antiquités Gauloises et Romaines recueillies dans les jardins du
palais du Sénat. Paris, 1807 , pp. 135 et 142 , et Recueil des monuments
antiques découverts dans l'ancienne Gaule. Paris, 1817, pp. 152 et suiv.
(3) Cours d'antiquités monumentales, t II, pp. 203 et suiv.
(4) History of ancient potlery , lre édit. London, 1858, in-8".
( 247 )
tion du premier commissaire de renvoyer le mémoire de
M. Van Bastelaer à la classe des sciences.
Je finis par une observation qui concerne la forme du
mémoire : il a élé dit plus haut que M. Van Bastelaer pro-
duit comme preuves de la vérité de quelques-unes de ses
découvertes une série de passages d'auteurs latins, princi-
palement d'écrivains sur l'agriculture; il ne transcrit pas
seulement en entier les textes latins; il y joint encore une
traduction française. Ce procédé inusité pour les publica-
tions académiques allonge considérablement le mémoire
sans profit pour la chose. Ainsi sur les vingt et un feuillets
dont se compose le premier paragraphe, seize sont rem-
plis par les textes transcrits et leur traduction ; la citation
en note des noms des auteurs, des titres, livres et chapitres
des ouvrages, laquelle eût pu rigoureusement suffire, eût
à peine occupé un tiers de feuillet. »
La classe, adoptant les conclusions de ses commissaires,
avait renvoyé le mémoire de M. Van Bastelaer à l'examen
de la classe des sciences ; celle-ci, dans sa séance du S août
1876, chargea M. Slas de lui faire un rapport sur ce travail.
Mais par lettre du 2o septembre suivant, M. Van Baste-
laer a demandé à la classe des sciences de pouvoir être
remis en possession de son mémoire, « comptant, disait-il ,
y apporter certaines modifications et améliorations impor-
tantes qui préciseront le caractère de ce travail. » Sur
l'avis conforme de M. Stas, la classe des sciences, dans sa
séance du 21 octobre, a satisfait au désir exprimé par
l'auteur, qui, paraît-il , n'a pas jugé à propos de soumettre
une seconde lois son travail au jugement de l'Académie.
( m )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 2 août 1811 '.
M. Alvin, directeur, président de l'Académie.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. Jos. Geefs, C.-A. Fraikin, Edm. De
Busscher, Alph. Balat,lechevalier L. de Burbure, J.Franck,
Gust. De Man, Ad. Siret, Julien Leclercq, Alex. Robert,
Ad. Pauli et F. Stappaerts, membres; Ed. de Biefve et
Alex. Pinchart, correspondants.
M. R. Chalou , membre de la classe des lettres, assiste
à la séance.
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur transmet une copie du
procès-verbal de la séance du 24 juillet, renfermant les
opérations du jury chargé de juger le grand concours de
composition musicale de 1877.
Il résulte de ce procès-verbal que le premier prix a été
décerné à M. Edgard Tinel, de Sinay (Waes); en outre, il
a été accordé un second prix, en partage, à MM. Julien
Simar et J.-B. De Pauvv, de Bruxelles, et une mention
( 249 )
honorable à MM. Sylvain Dnpuis, Emile Delhier, nés à
Liège, et Léon Soubre, né à Bruxelles.
— M. le Minisire fait parvenir, conformément aux dis-
positions du règlement des grands concours, une copie du
troisième rapport semestriel de M. Lauwers, lauréat du
grand concours de gravure de Tannée 1874.
La classe renvoie ce documenta l'examen deMM. Franck,
Leclercq et Pinchart.
— Le même haut fonctionnaire fait parvenir pour les
collections de l'Académie un exemplaire de la médaille
commémorative du 50e anniversaire de la fondation du
Conservatoire royal de musique de Liège.— Remerciments.
— L'administration communale de la ville d'Anvers in-
vite la classe des beaux-arts à s'associer à la célébration
du 500'' anniversaire de la naissance de Rubens, qui aura
lieu le 18 août prochain.
Indépendamment de M. Alvin, directeur de la classe,
MM. Portaels, Slingeneyer et Fraikin sont délégués pour
représenter l'Académie à cette solennité.
— M. P. Génard, bibliothécaire de la ville d'Anvers,
envoie, à litre d'hommage, la première livraison de son
ouvrage intitulé : P.-P. Rubens, Aanteekeningen over
den grooten me es ter en zijne bloedverwanten. Anvers,
1877, in -4°.
M. François Orsoni, de Noto (Palerme), fait don d'une
carte scénographique de l'ancien château de Noto, détruit
par le tremblement de terre de 1695.— Des remerciments
sonl votés pour ces dons.
( 250 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Pinchart lit un chapitre de VHistoire de la tapisse-
rie de haute-lisse à Arras, destiné à être imprimé dans
l'ouvrage qu'il va publier à Paris en collaboration avec
MM. J.-J. Guiffrey et Eug. Mùntz. Ce chapitre concerneles
origines de cette célèbre industrie au XIVe siècle, et ren-
ferme des renseignements sur les premiers haute-lisseurs
artésiens. M. Pinchart s'est chargé de la partie relative aux
Pays-Bas.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Kervyn de Leltenhove (le baron). — OEuvres de Froissart,
tome XXV, table analytique des noms géographiques (L-Z).
Bruxelles, 1877; vol. in-8".
Manifestation en l'honneur de M. le professeur P.-J. Van
Bencden, Louvain, 18 juin 1877. Gand; vol. pet. in-4°.
Potvin (Ch.). — Rubens, 29 juin 1877. Feuille in-8° s. 1.
Abbeloos (J--B-) et Lamy (Thomas). — Gregorii Barhebraei
chronicon ccclesiasticum, tome III. Louvain, Paris, 1877; vol.
gr. in-8°.
DeCeuleneer (A.). — De la nécessité des éludes d'archéo-
logie classique, discours. Gand, 1877; br. in-8".
Génard (P.). — P.-P. Rubens, Aanteekeningen over den
grootenmeester en zyne blocdvcrwanlen, lre livraison. Anvers,
1877 ;br. in-4°.
( 231 )
Cogniaux [Alfr.). — Diagnoses de cucurbilacées nouvelles,
2me fascicule. Bruxelles, 1877; br. in-8°.
Falaise (V.) et Graindorge («/.). — Éléments d'algèbre.
Mons, 1877; vol. in-12.
Moulart (le chan. i» 2-9i)][(>.-e1)(A2-^)+(>1-e2)(>i-91)]=0.
( 38i)
Le premier facteur ne s'annulant que si 1,
G, ==02, on a
(A, - 0,) (A, - 0,)
/2, OU
(a, — o2) (a2 — e,)
= - 1,
ce qui exprime que le rapport anharmonique des quatre
points est égal à — 1.
Nous ne nous étendrons pas actuellement sur les diffé-
rentes formes que l'on peut donner à l'équation qui
exprime que 2n points sont conjugués harmoniques
d'ordre n. Il y a, sur ce point, analogie complète avec la
théorie de points harmoniques d'ordre deux.
Lorsque n = 4, l'équation (16) donne, si 1 = 0,
0 (aS - hY [h - il)' (14 - Al)1
(a,-A8)* 0 (is-^)*(i*-A2)4
(M-hYi^-h? o (u-hY
(i|-i«)*(ia-i*)*(i5-A,)« 0
= 0.
expression, peut-être non remarquée, de la condition pour
que quatre points soient harmoniques symétriques, d'après
la dénomination de M. Cayley, ou équianharmoniques,
selon la désignation de M. Cremona, adoptée par Clebsehf ).
Nous signalerons, pour finir, une propriété de la forme
du quatrième degré.
Soit
\J =(a,b,c, d, ejx, y)\
une forme du quatrième degré.
(*) Sur ce point, voir Cayley, i'h Memoir, etc. ; Clebsch, Vorlesungen
liber Géométrie ; Théorie der binàren algebraischen Formen, s. 170, ff.
( 5S5 )
Son hessien est
H = [ac-b\ 2(arf— 6c), ae + 2bd- 3c2, 2(6e— cd), ce - dl]x, y)*«.(*).
L'invariant linéo-linéaire de ces deux formes est
I, = 5 (ace -+- 2bcd — ad2 — 62e — c").
La quantité entre parenthèses est le catalecticant de la
forme du quatrième degré U; on le représente générale-
ment par la lettre J.
Si les quatre points représentés par l'équation U = 0,
sont conjugués harmoniques, J = 0 (**).
Nous en concluons ce théorème :
Si les quatre points, représentés par une forme du qua-
trième degré U, sont conjugués harmoniques du deuxième
ordre, ces quatre points et les quatre points représentés par
le hessien H, sont huit points, conjugués harmoniques du
quatrième ordre.
(*) A. Catley, A fifth Memoir upon Quart tics, Philos. Traxs.
t. CX L VIII, p. 443.
(**) Cayley et Clebsch, op. cit.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 27
( 586 )
Contribution, à l'histoire du sucre (saccharose); par
M. J. Molteu, aide-préparateur du cours de chimie et
de physique et conservateur des collections à l'Institut
agricole de l'État à Gembloux.
J'ai montré dans une note publiée en 1875 (1), en même
temps que M. Kreusler (2), que la lumière solaire seule
n'intervertit pas le sucre ordinaire en dissolution.
Les résultats étant en contradiction avec ceux annoncés
par M. Raoult (5), je me suis demandé si l'air n'était pas
intervenu dans les expériences de ce chimiste, et si son
action n'avait pas été excitée par la lumière. C'est pour
éclaircir ce point que les expériences suivantes ont été
faites.
Je me suis servi de sucre candi qui a été lavé à l'eau
distillée et desséché ensuite dans le vide en présence de
l'acide sulfurique. Ce sucre ne laissait rien à l'incinération
et ne renfermait pas de sucre interverti; l'absence de ce
dernier a été mise hors de doute par l'emploi de la liqueur
cupro-potassique, de la chaux et du saccharimètre de
Ventzke : 26Kr,048 de sucre dans 100cc de dissolution ont
polarisé 100 degrés avec un tube de 0m,200.
Dix malras d'essayeur, lavés à l'acide sulfurique et à
l'eau régale, reçurent chacun 26ce,5 d'une dissolution de
sucre polarisant 85,8 Ventzke. Ces malras furent partagés
(1) La sucrerie belge. 1875.
(2) Berichte der deutschen Chem. Gesellschafl. 1875.
(5) Comptes rendus des séances de l'Académie de Paris, t. LXX1II,
page 1049.
( 387 )
en cinq groupes que je désigne par A, B, C, D, E, et traités
comme suit :
A. Deux matras. — On fait bouillir la dissolution et on
scelle à la lampe pendant l'ébullition.
B. Deux matras. — On fait bouillir le liquide et on
scelle à la lampe 2 minutes après l'ébullition.
C. Deux matras. — On fait bouillir le liquide et on
scelle à la lampe 6 minutes après l'ébullition.
D. Deux matras. — On fait bouillir et on ne scelle à la
lampe qu'après refroidissement complet du liquide.
E. Deux matras. — Ces matras sont scellés à la lampe
sans faire bouillir.
Un matras de chaque groupe fut exposé à la lumière
diffuse, l'autre fut conservé dans l'obscurité. L'expérience
a duré sept mois, du 25 octobre 187 G au 2i mai J877.
Tous les liquides furent examinés le 24 mai 1877.
Pour polariser, force a été de faire avec le contenu de
chaque matras 100cc, le liquide s'étant concentré par suite
de la chauffe lors de la mise en expérience.
Les polarisations étant en raison inverse des volumes,
les 100cc devaient polariser, si du sucre ne s'était pas inter-
verti, la valeur x donnée par ce rapport :
26«.3 _ x
100 ~~ 8378
=22.5.
Voici les chiffres que j'ai constatés
Matras conservés à la lumière.
Matras conservés dans l'obscurité.
Matras A 22.5
Matras A 22.8
— B 22.5
— D 22.9
- C 22.5
— C 22.9
— D 22.5
— D 22.9
- E . 12.7
- E 43.»
On voit que la polarisation du liquide de tous les tubes
( 588 )
A, B, C, D, s'est parfaitement conservée (I). Je me suis
assuré par les réactifs indiqués ci-dessus qu'ils ne renfer-
ment pas de sucre interverti. Seuls les liquides des deux
inatras E qui n'ont pas été chauffés ont éprouvé une dimi-
nution considérable dans le pouvoir rotatoire. Au surplus
ils accusent une quantité notable de sucre interverti,
réduisant abondamment la liqueur cupro-potassique et se
colorant par l'action de la chaux. J'ai déterminé le poids du
sucre qui s'était interverti en pratiquant l'inversion et en
appliquant la formule connue :
_ 200 (R -t- K')
V ~ 288 - t
dans laquelle
R = polarisation avant l'inversion.
R'= — après —
t = température du liquide interverti.
ij = polarisation due au saccharose.
J'ai trouvé y= 15°4.
La dissolution primitive polarisant 22°5; après l'expé-
rience, la polarisation due au saccharose tombe à 15°4.
La différence 7°1 (22°5 — 1S°4) correspond au sucre qui
s'est interverti. Ce poids de sucre est donc les 51.57 °/0 du
poids primitif:
_ x 100 = 31.57.
22.5
(1) Le lecteur ne manquera pas de constater que les polarisations des
tubes A, B, G, D conservés dans l'obscurité sont légèrement plus fortes
que la polarisation primitive 22°5. La différence atteint même 4/10 (22°9-
22°o); nous pensons qu'elle est trop forte pour la mettre tout entière sur le
compte des erreurs inhérentes aux opérations de l'analyse. Impuissant
pour le moment de donner une explication de cette légère augmentation de
pouvoir rotatoire d'un liquide sucré conservé dans l'obscurité et à l'abri
de l'air, nous nous réservons de revenir plus tard sur ce phénomène que
nous avons du reste déjà constaté dans d'autres circonstances.
( 589 )
Le liquide des ma Iras Ë était opalescent, ce qui était
produit par des moisissures.
Ces essais démontrent que : 1° la lumière n'a pas d'ac-
tion sur le sucre en dissolution, qu'il y ait présence d'air
ou non dans les matras; 2° quand il y a altération, elle est
aussi profonde dans le liquide soustrait à la lumière que
dans celui qui est éclairé; celte altération est provoquée
par le développement d'organismes inférieurs.
Action de la chaleur (J00°) sur le sucre sec.
M. Maumené, dans son Traité sur la fabrication du sucre,
dit, page 17 : Du sucre chauffé pendant 560 heures a 100°
commence par se colorer, perd sa forme cristalline, devient
vitreux et son pouvoir rolatoire tombe à zéro. Ces décom-
positions ne sont pas dues à des traces d'eau, dit-il, car
des tubes dans lesquels il a été introduit 1/10 d'eau n'ont
pas offert l'altération aussi rapidement que ceux où le
sucre était seul.
Ces résultats diffèrent complètement de ceux que j'ai
obtenus, comme on va le voir.
Dans une première expérience, j'ai constaté que du
sucre pulvérisé et desséché dans le vide en présence d'acide
sulfurique n'avait pas sensiblement changé d'aspect et
n'était pas sensiblement modifié après 132 heures de
chauffe à 100°; il avait acquis seulement une très-légère
coloration jaune. Une autre quantité du même sucre
chauffé pendant le même temps dans une atmosphère sa-
turée d'eau s'était, au contraire, profondément altérée; ce
sucre était en partie fondu et il était fortement coloré.
Pour reconnaître quelle était la quantité de saccharose
qui pouvait être détruite, j'ai fait les essais suivants:
( 390 )
Un raatras d'essayeur A reçoit 16gr,235 de sucre des-
séché comme précédemment. Un malras B reçoit 16gr;58o
du même sucre en y ajoutant 1/10 d'eau. Ces deux malras
sont scellés à la lampe et chauffés dans un bain d'eau (100°)
pendant 560 heures. Après l'expérience on constate :
Mettras A.
Le sucre est en poudre sèche comme
avant la chauffe, la teinte est légè-
rement jaunâtre, ne renferme que
peu de sucre interverti, 4.65 °/0 de
saccharose se sont transformés.
Mat ras B.
Le sucre est en partie sirupeux a
chaud, s'est solidifié par le refroi-
dissement, fortement coloré, ren-
ferme beaucoup de sucre interverti,
43.88 °/o de saccharose ont disparu.
C'est par la méthode de l'inversion indiquée plus haut
que nous avons déterminé le sucre disparu.
Il me semble qu'il est permis de conclure de ces essais
que l'altération que le sucre éprouve par la chaleur (100°)
plus ou moins prolongée est due à l'humidité qui l'imprè-
gne. Si le sucre sec a subi une légère altération, cela ne pour-
rait-il pas tenir à de faibles traces d'eau? Car malgré la
précaution que j'ai prise de n'employer que des vases bien
secs, le sucre peut avoir absorbé de l'humidité pendant le
temps qu'il a fallu pour le peser et l'introduire dans le ma-
lras. On sait du reste que M. M. Berlhelol (1) a aussi con-
staté (pour une durée de chauffe de 17 heures) que des
traces d'eau sont nécessaires pour produire l'inversion du
sucre.
Influence de pelites quantités de différentes substances sur
le sucre en dissolution.
Plusieurs matras d'essayeur reçoivent chacun 26oc,o
de dissolution sucrée; avant de les sceller à la lampe, on
(1) Annales de chimie et de physique (3), 1855.
( 391 )
fait bouillir le liquide pour détruire les germes dont le
développement, comme nous l'avons dit plus haut, provo-
querait l'inversion du sucre. Ces matras sont conservés
à la température ordinaire et à la lumière depuis le 25 oc-
tobre 1876 jusqu'au 25 mai 1877.
Polarisation en octobre 1S76.
Dissolution sucrée pure. . . . 22.6
Avec 0,sr01 d'acide arsénieux . 22.6
— 0,s>01 — banque . . 22.6
— 0,»r01 — tartrique . 22.6
— l/10cc. — acétiq. crist. 22.6
— 1/10«. — butyrique. . 26.3
— 1/10". soude D = 1.1 i. . 22.6
— 0,sr0i ebaux 22.6
— O.srOl magnésie .... 22.6
— 1M0™. potasse 20.»
— 0,?r0i glucose de miel . . 26.3
On voit que tous ces liquides se sont bien conservés
sauf les dissolutions contenant les acides tartrique, acé-
tique et butyrique. Tous sont restés limpides et ne renfer-
ment pas d'organismes inférieurs.
Action de l'eau pure et de la chaleur (100°) sur le sucre.
Si l'eau à la température ordinaire n'altère pas le sucre,
il n'en est plus de même lorsque la chaleur intervient et
que le contact a une certaine durée. D'après MM. Mau-
mené et Soubeiran (1) la perte du pouvoir rotatoire serait
très-rapide. M. W. Clasen (2), au contraire, a annoncé
qu'une dissolution de sucre chauffée pendant plusieurs
heures à une température voisine de l'ébullition n'éprou-
vait pas d'altération.
Polar
satioi
en ma
1S77.
22.3
22.5
22.5
I,:. |
Liquide perdu )
22.5
Précipite
f!,i >',>','!
chaux.
fortement
cuprique.
très inlen
bouillir
avec
-Co-
se en
avec
22.5
22 5
20.3
2.63
(1) Maumeîvé. Traite sur la fabrication du sucre, 1876.
(2) Bulletin de la Société chimique, t. X , p. 506.
( m )
Ainsi, d'après les premiers chimistes, une dissolution
marquant 71° ne marquait plus après 12 heures que 25,
après 18 heures que 20, après 20 heures que 0.
On conviendra que cette diminution dans la polarisation
est énorme et de nature à faire supposer que dans la fabri-
cation du sucre les pertes résultant de l'évaporation et de
cuite sont considérables. 11 n'en est rien cependant : les
technologistes savent très-bien que les pertes importantes
sont toutes mécaniques (sucre dans les pulpes, écumes,
noir animal , mélasse).
J'ai donc repris les expériences de MM. Maumené et
Sôubeiran, et par les résultats obtenus, je dois considérer
les nombres de ces chimistes comme fort exagérés.
Une série de tubes lavés à l'acide sulfurique et à l'eau
régale de 25cc de capacité, reçoivent chacun 14"' de liqueur
sucrée polarisant 65°7. Ces tubes sont fermés à la lampe
sans en expulser l'air et on les chauffe dans un bain d'eau
(100°).
Polan
sation
pr
mitive . . .
. 65.7
Après
•1 heur
i de chauffe.
. 65.7
_
2
—
. 65.5
_
3
—
. 65.3
—
4
—
. 65.»
_
5
—
. 65.»
Faible coloration.
—
6
—
. 65.»
-
7
—
. 65.»
La coloration va en augmentant
—
8
—
. 65.»
_
9
—
. 68.»
10
_
. 64.5
Décoloration.
_
11
_
. 64.5
_
12
—
. 64.8
Nouvelle coloration.
—
13
-
. 64.»
_
14
—
. . 64.8
_
15
—
. . 64.»
1
Ainsi la polarisation après 15 heures de chauffe est tombée
de 65"7 à 64°.
( 393 )
J'ai observé comme M. Maumené, sans pouvoir l'expli-
quer, que la coloration après un certain nombre d'heures
diminuait d'intensité.
Influence de Veau et de la chaleur en présence de l'air
sur le sucre.
D'après M. Soubeiran (1) l'air n'a pas d'action.
Une solution sucrée recouverte d'une couche d'huile se
comporterait comme une solution qui serait au contact de
l'air.
M. Lound(2) est arrivé aux conclusions suivantes :
a) Une dissolution de sucre chauffée en présence d'air
donne du sucre interverti.
b) Quand on chauffe à l'abri de l'air, ou en présence
d'air tout à fait purifié, il n'y a pas de transformation.
c) Az et 0 n'ont pas d'action ; CO2 agit, mais plus faible-
ment que l'air.
d) La transformation doit être attribuée en partie à CO2
de l'air, en partie à d'autres substances qui se trouvent
dans l'atmosphère, mais qui n'ont pas encore été déter-
minées.
Je copie les conclusions faisant observer qu'il ne se
trouve aucun détail sur la conduite des expériences dans
le Bulletin de la Société chimique.
J'ai étudié l'action de l'air sur des dissolutions sucrées
chauffées à 100°. 11 résulte de mes expériences que pour
une même durée de chauffe, l'altération est bien plus pro-
(1) Maumené. Traité sur la fabrication du sucre. 1876.
(2) Bulletin de la Société chimique de Paris. 1870.
( 591 )
fonde quand il y a présence d'air que quand on fait le vide
dans les matras.
Mettras privés d'air.
Polarisation avant la chauffe. -18.1
— après 30 heures
de chauffe . . 18.2
— après 65 heures
de, chauffe . . 17.7 (a)
Matras avec de l'air.
Polarisation avant la chauffe. 18.1
— après 30 heures
de chauffe . . 14.3 (/>)
— après 65 heures
de chauffe . . 5.5 à
gauche (/>)■
Tous ces liquides sont restés neutres aux papiers de
tournesol; les dissolutions des matras (a) [b) et (c) four-
nissent les réactions du sucre interverti.
M. Maumené (1) admet que tant que l'action ne dépasse
pas la réduction du pouvoir rotatoire à zéro, ou même le
maximum d'inversion 58 à gauche, le phénomène chimique
se trouve réduit à deux phases : la première est la perte sim-
ple du pouvoir rotatoire, qui tombe à zéro par un mouve-
ment moléculaire, sans que la molécule de sucre cesse
d'être C^H^O11, le sucre devenu optiquement neutre peut
encore (M. Maumené le croit sans l'avoir obtenu) redevenir
sucre ordinaire avec son pouvoir 100° et sa structure cris-
talline. Au delà du 0, lesucre s'altère, absorbe de l'eau, etc.
Je pense, contrairement à M. Maumené, que quand le
pouvoir rotatoire tombe à zéro, c'est que la dissolution
renferme une quantité de sucre interverti qui neutralise
la rotation à droite du saccharose restant dans le liquide,
car dans toutes mes expériences, chaque fois que la rota-
tion à droite diminuait, je pouvais produire les réactions
du sucre interverti qui ne sont pas présentées par le sucre
optiquement neutre de M. Maumené.
(1) Maumené. Traité sur la fabrication du sucre. 1876.
( 595 )
Le rôle de l'air dans l'a Itéra lion du sucre étant manifeste,
j'ai fait quelques essais pour reconnaître quel était le corps
qui provoquait l'altération.
Un ballon de 7oOcc reçoit 150" de liquide sucré polari-
sant 68.8. On scelle à la lampe sans faire bouillir le liquide
et on chauffe à 100° (bain d'eau) pendant 99 heures. Le
liquide après la chauffe est limpide, fortement coloré en
brun et a une réaction acide au papier de tournesol.
Ce liquide décoloré par le noir animal sec polarise 19.8
à gauche.
L'air du ballon avait la composition :
C02 5.04
0 10!)
Az 84.07
L'O de l'air a donc disparu en partie pour produire de
l'acide carbonique.
Dans une autre expérience, j'ai fait agir de l'oxygène
pur, persuadé que l'oxydation serait alors plus active.
Un ballon de 750cc reçoit 150cc dissolution sucrée pola-
risant 69u5. Il est rempli d'oxygène pur et on le scelle à la
lampe.
On chauffe à 100° (bain d'eau) pendant 78 heures. On
obtient un liquide limpide fortement coloré en brun, à
réaction acide au papier de tournesol.
Le liquide décoloré par le noir animal polarise 15°5 à
gauche, distillé en présence d'une faible quantité d'acide
sulfurique ne donne pas d'acide formique. Le gaz du ballon
renfermait 25°/0 de CO2. L'altération a donc été plus con-
sidérable qu'avec l'air.
Le corps qui intervient activement est donc, comme on
pouvait le supposer, l'oxygène.
( 396 )
Ce rôle de l'oxygène a déjà été constaté par M. Mala-
guti (1) sur des dissolutions sucrées acidulées. On voit que
nous avons étendu l'action à des dissolutions neutres.
Pour M. Malaguti, les acides et l'oxygène n'agissent pas
sur le sucre de canne, mais bien sur le sucre interverti.
Nous pensons que cette affirmation est trop absolue en
ce qui concerne l'oxygène; en nous reportant à une expé-
rience indiquée ci-dessus, nous voyons que la polarisation
d'un liquide chauffé pendant 30 heures dans un matras
privé d'air n'a pas bougé, tandis que la présence de l'air
qui agit par son oxygène a fait tomber la polarisation de
18,1 à 14,3 pour la même durée de chauffe.
Selon nous, l'oxygène agirait directement sur le saccha-
rose, à moins que l'on n'admette que le liquide sucré chauffé
pendant un certain temps ne donne naissance à CO2, grâce
à des traces de sucre interverti, acide carbonique qui, à
son tour, contribuerait à l'inversion du saccharose.
L'expérience suivante semble ne pas confirmer cette
manière de voir : trois matras d'essayeur reçoivent chacun
30e de liquide sucré polarisant 21 °5.
Matras I. — On scelle ce matras sans en expulser l'air.
Matras II. — On fait bouillir le liquide et on scelle à la
lampe pendant l'ébullition.
Matras IN. — On fait passer un courant de CO2 pur et
on scelle à la lampe pendant que ce gaz passe»
Ces trois matras sont chauffés à 100° (bain d'eau) pen-
dant 40 heures.
Matras 1 avec de I
Polarisation primitive ... 21.5
— après la chauffe. l.S
(I) Annales de chimie et de physique, t. LIX.
liras II sans air.
Matras III a
21.5
21.5
20.»
4.»
( 5!>7 )
Ou voit que l'interversion a été plus rapide pour le
liquide du malras avec de l'air que pour celui avec CO2.
Celle expérience n'ayant été faite qu'une seule fois, je
n'oserais pas tirer de conclusions.
CONCLUSIONS.
1. La lumière seule, soit directe, soit diffuse, n'inter-
vertit pas le sucre de canne en dissolution, qu'il y ait
présence d'air ou non.
2. L'altération que le saccharose sec éprouve par la
chaleur (100°) est due très-probablement à des traces d'eau
qui l'imprègnent.
3. L'eau froide n'altère pas le sucre; quand il y a altéra-
tion, elle est déterminée par le développement de moisis-
sures.
4. La chaleur (100°) provoque l'altération du sucre en
dissolution; l'altération est bien moins rapide que ne l'ont
annoncé quelques chimistes. L'oxygène de l'air accélère la
transformation; l'oxygène est absorbé et il y a formation
de CO2.
Ce travail ayant été exécuté dans le laboratoire de M. le
professeur Chevron, à l'Institut agricole de l'État, à Gem-
bloux, je crois de mon devoir de le remercier pour son
obligeance et les conseils qu'il n'a cessé de me donner pen-
dant son exécution.
( 598 )
Sur le calcaire dévonien supérieur dans le NE. de V arron-
dissement d'Avesnes, lettre de M. J. Gosselet, associé
de l'Académie.
Les calcaires de la bande de Rhisnes sont classés au-
jourd'hui par tous les géologues belges dans le dévonien
supérieur (1), mais leur âge exact est encore indéterminé.
En 1860, n'y trouvant pas les fossiles caractéristiques du
calcaire de Frasnes, ni ceux des schistes de Famenne, je
les avais assimilés à la base des psammiles du Condroz.
Mais depuis longtemps j'ai abandonné cette manière de
voir qui ne reposait que sur des faits négatifs. D'autres
opinions avaient été émises par MM. Dewalque, Dupont,
de La Vallée-Poussin, Malaise; ni l'une ni l'autre ne me
paraissaient étayées de preuves suffisantes pour m'y rallier.
Il y a deux ans, après une étude détaillée des calcaires
des environs de Philippeville et de ceux du NE. de l'ar-
rondissement d'Avesnes, j'acquis la conviction que ces
couches, colorées par Dumont comme calcaire de Givet,
appartiennent uniquement à l'assise du calcaire de
Frasnes.
Les calcaires du NE. de l'arrondissement d'Avesnes
(1) Sauf le calcaire d'Alvaux. Comme je n'avais pas trouvé de fossiles
dans ce calcaire, je l'avais réuni, provisoirement et avec réserve, aux autres
calcaires de la bande de Rhisnes.
M. Dewalque, en y signalant le Strigocephalus Burtini, a prouvé qu'on
devait le rapporter au calcaire de Givet. Il en est de même du poudingue
qui lui est inférieur; .car M. Dewalque y a aussi rencontré un Strigoeé-
phale. Ce fait confirme mes vues sur les poudingues d'Alvaux et de
Wépion. Ils sont de même âge que les calcaires qui les recouvrent immé-
diatement. Ils représentent un dépôt littoral formé lors de l'envahissement
des eaux marines dans le bassin de Nanmr, à l'époque dévonienne
moyenne.
( 599 )
me fournirent une faune fort voisine de celle de Rhisnes,
mais intermédiaire cependant entre celle-ci et celle de
Frasnes. Quant aux calcaires de Philippeville, ils ont
encore plus d'analogie avec ceux de Frasnes, ce qui est
en relation avec leur position géographique plus rappro-
chée de la bande de Frasnes que ne le sont les calcaires
d'Avesnes.
Dans le travail que je présente à l'Académie j'établis
par la discussion des fossiles et principalement des Coral-
liaires, l'analogie des calcaires de Rhisnes et de Frasnes,
malgré les grandis différences minéralogiques, stratigra-
phiques et paléontologiques qui paraissent au premier
abord les séparer.
Ces différences dépendent probablement de ce que les
conditions de courants et de sédimentation n'étaient pas les
mêmes sur le rivage nord et sur le rivage sud du grand
bassin devono-carbonifère de Belgique.
— M. P.-J. Van Beneden rend compte verbalement des
solennités qui ont eu lieu , le 5 septembre, à l'Université
d'Upsal, lors de la célébration du 400e anniversaire de cet
établissement. Il fait ressortir l'accueil qu'il a reçu comme
délégué de l'Académie et qui résulte, ajoute-l-il , de la
grande réputation dent celle-ci jouit à l'étranger.
COMITÉ SECRET.
La classe se constitue ensuite en comité secret pour
dresser la liste de présentation des candidatures aux places
vacantes, arrêtées parles sections.
( 400 )
CLASSE «ES LETTRES.
Séance du 45 octobre 4817 .
M. Alph. Wauters, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J. Roulez, Gachard, P. De Decker,
J.-J. Haus, M.-N.-J. Leclercq, Ch. Faider, R. Chalou,
Thonissen, Th. Juste, le baron Guillaume, Félix Nève,
Alp. Le Roy, A. Wagener, J. Heremans, P. Willems,
membres; Aug. Scheler, Alph. Rivier, associés; Edm.
Poullet, F. Loise, J. Stecher, E. Van Bemmel, corres-
pondants.
M. Alvin , président de l'Académie, et M. Éd. Mailly,
membre de la classe des sciences, assistent à la séance.
CORRESPONDANCE.
La classe apprend avec un profond sentiment de regret
la perte qu'elle a faite en la personne de l'un de ses plus
éminents associés, M. Adolphe Thiers, né à Marseille le 16
avril 1797 et décédé le 5 septembre à Saint-Germain-en-
Laye, près de Paris.
M. Thiers avait été nommé associé le 10 mai 1865.
(401 )
— M. le Minisire de l'Intérieur transmet, avec un état
récapitulatif, les mémoires et les communications qui 1 li
ont été adressés, avant le 1er septembre dernier, par divers
concurrents, en vue de prendre part au deuxième concours
Guinard.
— Le même haut fonctionnaire envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire des ouvrages sui-
vants : 1° Histoire politique et diplomatique de P.-P.
Rubens, par M. Gachard ; 2° La rivalité de la France et
de la Prusse, par M. Th. Juste; 3° l'Église et l'État, par
le chanoine Ferd. Moulart. — Remercîments.
— La Société de l'histoire de France, à Paris, l'Aca-
démie de Stanislas, à Nancy, la Société d'histoire, à Gratz,
la Commission impériale archéologique de S'-Pétersbourg,
la Société d'histoire, à Wurzbourg, font parvenir leurs der-
nières publications.
— L'Académie de Besançon adresse le programme des
prix qu'elle décernera en 1878.
— M. J. Nolet de Brauwere van Steeland adresse un
exemplaire de son ouvrage intitulé : Poëzij en Proza
(1874-1877);
M. A. Wagener présente un exemplaire de sa brochure
intitulée : Les travaux de M. G. Andresen sur le Dialogus
de oratoribus ;
M. Aug. Scheler offre un exemplaire de ses deux derniers
ouvrages: Aigar et Maurin. Fragments d'une chanson de
geste provençale inconnue. — Deux rédactions diverses
de la légende de sainte Marguerite, en vers français;
M. Stanislas Bormans offre un exemplaire de sa Généa-
logie historique de la Famille d'Harscamp ;
<2me SÉRIE, TOME XLIV. 28
( 402 )
M. Ch. Potvin présente un exemplaire de ses lectures
publiées dans la Bibliothèque Gilon de Verviers , sous
le titre de : Du gouvernement de soi-même ; les principes ;
le devoir ; la vie privée ; la patrie; le travail et les nations.
Il offre ensuite, au nom de MM. Félix Brassart de Douai
et Peigné-Delacourt, d'Amiens, divers ouvrages dont les
titres figurent parmi les ouvrages présentés.
M. Thonissen offre, au nom de M. le professeur Nicolas
J.Saripolos, d'Athènes, différents ouvrages de jurispru-
dence. Une notice bibliographique lue à ce sujet par
M. Thonissen figure à la page 404.
— La classe renvoie à l'examen les travaux manuscrits
suivants :
1° La littérature allemande au XVI Ime siècle, sous l'in-
fluence de la guerre de Trente ans, par M. Ferd. Loise. —
Commissaires: MM. Stecher, Heremans et Scheler;
2° Une page de l'histoire religieuse des Pays-Bas (1 544-
1545), Pierre Brully, successeur de Calvin comme pasteur
de rêglise française de Strasbourg, par M Ch. Paillai" 1.
— Commissaires : MM. Gachard, Juste et Wauters ;
3° Sur la nécessité de fonder une nouvelle science : la
statistique du droit civil, par M. Alexandre de Lubavsky,
de Viazma (Russie, province de Smolenzka). — Commis-
saire : M. Thonissen ;
4° Étude juridique sur la procédure civile au XVI lme,
siècle, d'après les styles des cours échevinales,^ar M. P. De
Croos, avocat, à Béthune (France). — Commissaires :
MM. Rivier, Faider et Leclercq.
( m )
ÉLECTIONS.
La classe procède à l'élection des cinq membres parmi
lesquels le gouvernement choisira, avec les cinq membres
élus par la classe des sciences, le jury chargé de juger la
deuxième période du prix Guinard. Cette liste sera envoyée
au Ministre de l'Intérieur.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. J. Stecher donne lecture de la notice biographique
qu'il a consacrée à feu M. J. Grandgagnage, membre de la
classe, décédé le 19 février de celte année.
Des remercîments sont votés à M. Stecher pour cette
notice qui sera imprimée dans le prochain Annuaire.
— M. Potvin , en offrant les deux nouveaux ouvrages de
M. Félix Brassart, de Douai, lit la note suivante :
« Le premier de ces ouvrages : Le Pas du perron Fée,
est une chronique de la fin du XVe siècle contenant le récit
d'un tournoi qui peut être regardé comme le pendant du
fameux Pas d'armes de la fontaine des pleurs, tenu par
Jacques de Lalaing en 1450. Celui-ci est dû au frère du
bon chevalier: Philippe de Lalaing; il avait d'abord été fixé
à Bruxelles, à la date du 6 février 1462 (vieux style); il
eut lieu à Bruges le 28 avril suivant. M. Brassart attribue
ce récit au héraut d'armes Limbourg, et des quatre ver-
( 404 )
sions connues, celles d'Arras, de Londres, de M. Blondel
d'Auberset de Paris, il a préféré de publier le texte de ce
curieux manuscrit de la Bibliothèque nationale de France,
n° 5759, fonds français, qui contient : Le Banquet de Lille,
le Trépas du roi Charles, l'Entrée de Reims et l'Entrée de
Paris.
» Une savante préface est jointe au texte.
» Le second ouvrage a trois volumes, c'est Y Histoire du
château et de la châtellenie de Douai, deux volumes de
texte et un premier fascicule de preuves.
» Après MM. Guilmot, Duebet et Desplanque, qui « n'ont
soulevé qu'un coin du voile » selon l'expression d'un rap-
port présenté à la Société des sciences de Lille, l'auteur ne
se contente pas de donner la généalogie des châtelains de
Douai; il entreprend l'histoire de l'institution, ou , comme
il dit : « l'historique des rapports des officiers féodaux avec
une commune grandement privilégiée. »
» Cette partie de l'histoire, peu connue, est ici mise au
jour avec une érudition puisée aux sources, dans les
archives municipales, dans les fonds d'abbaye et dans les
grands dépôts de Paris.
» La Société des sciences de Lille a décerné, en 1876,
le prix Wicar à l'auteur de ce livre, et pour en marquer
la valeur, le rapport du jury, déjà cité, s'exprime en ces
termes : « L'histoire des chàlellenies sera désormais un
terrain sur lequel les érudils pourront s'exercer sans
crainte de s'égarer; ils prendront ce travail pour point de
départ et pour guide. »
— M. Thonissen, en offrant à la classe, au nom de l'au-
teur, la collection des œuvres de M. Saripolos, professeur
( 40o )
de droit public et de droit criminel à l'Université d'Albèries,
signale particulièrement à l'attention de l'Académie le
Traité du droit constitutionnel de la Grèce, le Traite du
droit des gens et le Traité du droit criminel de la Grèce , for-
mant ensemble douze volumes in-8°. Tous ces livres, écrits
avec une élégante concision, sont au niveau de la science
contemporaine et attestent hautement le mérite de l'émi-
nent professeur d'Athènes, qui a été, dans la dernière
assemblée constituante, le rapporteur de la commission
chargée d'élaborer la charte constitutionnelle de la Grèce.
Avant été le premier à enseigner le droit public et le
droit des gens dans la Grèce moderne, M. Saripolos peut
être considéré à juste titre comme le père de ces sciences
dans sa patrie. Dans l'accomplissement de sa grande et
noble tâche, il a eu bien des efforts à faire et bien des
obstacles à surmonter. Il ne devait pas seulement combiner
les lois et les traditions de son pays avec les enseignements
les plus élevés de la science européenne: il s'est vu litté-
ralement obligé de créer la langue de la science. Les longs
siècles d'esclavage qui ont pesé sur la malheureuse patrie
de Platon avaient rendu la langue vulgaire presque bar-
bare, et cependant cette langue se montrait, plus que toute
autre, hostile à l'admission de mots empruntés à un idiome
étranger. Grâce à un travail assidu de trente années, M. Sari-
polos a triomphé de toutes les résistances. Les termes
scientifiques qu'il a proposés ont fini par obtenir l'assenti-
ment de tous.
En jetant un coup d'œil sur les livres de M. Saripolos,
mes honorables confrères seront heureux de voir rallumer
le flambeau de la science sur une terre privilégiée, où
toutes les grandeurs de l'esprit humain eurent jadis des
( 406 )
représentants illustres. Aucun ami sincère des lettres ne
saurait rester indifférent à la régénération intellectuelle
d'un pays qui fut le berceau de la civilisation européenne.
Études sur l'histoire du droit criminel de la France ;
par M. J.-J. Thonissen, membre de l'Académie.
I.
Les peines capitales dans la législation mérovingienne.
Malgré les nombreux et remarquables travaux dont les
institutions mérovingiennes ont été l'objet, il reste bien
des controverses à élucider et bien des lacunes à combler.
Sans méconnaître le mérite et le fruit des efforts tentés
par une foule de savants justement célèbres, qui ont con-
sacré leurs veilles à l'exploration des annales de cette
importante période de l'histoire de la France, il est permis
d'affirmer que la science moderne n'a pas dit son dernier
mot sur l'organisation sociale des Gaules, aux premiers
siècles de la domination des Francs. C'est surtout dans le
vaste domaine du droit criminel que le besoin d'études
nouvelles et approfondies se fait vivement sentir. L'orga-
nisation des tribunaux, la compétence respective des divers
magistrats, les formes et la marche de la procédure, à
tous les degrés de la hiérarchie judiciaire, ont été exami-
nées et discutées avec un soin minutieux ; mais il s'en
faut de beaucoup que les mêmes résultats aient été obtenus
pour le droit pénal proprement dit, en d'autres termes,
pour la détermination exacte et la classification scienti-
( 107 )
tique des délits et des peines. On a longuement parlé de
la perte de la paix , de la vengeance chez les anciens Ger-
mains, du Wergelcl, du Fredum, du caractère et du taux
des compositions fixées par les lois salique et ripuaire ;
mais on a très-rapidement glissé sur les peines corporelles
et surtout sur les peines capitales. H en résulte que beau-
coup de jurisconsultes se sont formé une idée confuse ou
fausse du système de répression adopté par les Francs
établis dans les Gaules, ils s'imaginent que le payement
d'une amende qualifiée de composition suffisait toujours
pour rendre le repos aux criminels et les rétablir dans
l'exercice paisible et régulier de tous leurs droits. Ils ne
se doutent guère des nombreuses et importantes excep-
tions que comportait l'application du système. Ils ignorent
que toute une série de supplices, infligés avec une inexo-
rable rigueur, servaient de sanction au droit et répondaient
aux exigences de l'ordre public et de la sécurité générale.
Nous allons nous efforcer de dissiper cette erreur et de
combler l'une des lacunes que nous venons de signaler, en
décrivant et en classant, d'après les documents contempo-
rains, toutes les peines usitées chez les Francs, depuis le
jour où ils abandonnèrent les forêts de la Germanie jusqu'à
l'avènement, de la dynastie carolingienne.
Nous débuterons par la recherche et la détermination
des peines capitales (1).
(1) Pour prouver à quel point celte intéressante matière réclame de
nouvelles recherches et de nouveaux développements, il suffit de citer les
faits suivants. Pardessus (Loi salique, etc.) consacre à peine une page aux
dispositions de la loi salique sur la peine de mort contre les hommes
libres (p. 663) Waitz, dans son savant traité intitulé : Das alte recfit der
salischen Fianken,cn agit de même. Walter, dans sa Deutsche Rechts-
geschichte, concentre en un seul paragraphe l'indication et la description
( 408 )s
A l'origine des temps historiques de la Germanie ,
Tacite attribue aux habitants de cette vaste contrée un
système de répression dont les bases fondamentales sont
exactement celles qui servent d'appui à la législation
mérovingienne. Certains crimes d'une gravité exception-
nelle entraînaient la mort du coupable; ils étaient envi-
sagés comme des atteintes directes et immédiates à la
sûreté, à l'honneur, à la dignité de la nation. Tous les
autres méfaits, quel que fût leur caractère ou leur impor-
tance, étaient censés ne produire que des lésions indivi-
duelles. Les coupables étaient livrés à la vengeance de la
famille offensée, à moins qu'ils ne parvinssent à calmer
son ressentiment au moyen d'une « composition » déter-
minée par la coutume et dont une partie était remise au
roi ou à la nation, en leur qualité de garants de la paix
reconquise. Parlant des assemblées générales des tribus
germaniques, le grand historien romain s'exprime ainsi :
On peut aussi accuser devant ces assemblés et y
» déférer les affaires criminelles. La peine est distincte
» selon le délit. Les traîtres et les transfuges sont pendus
» à un arbre. Les lâches, les poltrons, les prostitués sont
» noyés dans la boue d'un marais, une claie par-dessus.
» Par cette diversité dans les supplices, ils semblent
» témoigner qu'il faut que les crimes s'expient au grand
» jour et que les infamies soient ensevelies. Quant aux
des peines capitules usitées chez les Germains. M. Du Boys, clans sa remar-
quable Histoife du droit criminel chez les peuples modernes, se borne à
parler incidemment du denier supplice dans quelques pages du livre Ier de
son ouvrage. Grimm (Rechlsalterthumer) et Wilda {Strafrecht der Germa-
nen) ont, il est vrai, traité plus amplement le sujet; mais ils se sont placés
au point de vue des principes généraux de l'ancien droit germanique, sans
se préoccuper spécialement des lois et des coutumes des Francs.
( 409 )
» délits moindres, tel est le délit, telle est la peine. Los
» coupables paient une amende en chevaux ou en trou-
» peaux ; une partie vient au roi ou à la nation, l'autre
» au plaignant ou à ses proches (1). »
Il serait téméraire de s'emparer de ce précieux passage,
pour soutenir que la trahison, la désertion à l'ennemi,
l'abandon de l'armée et certain genre de prostitution
étaient les seuls crimes capitaux connus des Germains.
On ne saurait pas, avec plus de raison, en conclure que la
pendaison et la noyade étaient les seuls modes d'exécution
usités chez ces fières et libres peuplades. L'historien romain
ne se proposait pas de dresser le catalogue minutieux des
délits et des peines. Il voulait simplement apprendre aux
Romains qu'une loi pénale et une justice réglée existaient
chez ces Barbares du Nord qui leur inspiraient à la fois
tant de mépris et tant de craintes (2). L'importance réelle
du passage cité consiste dans la division des infractions en
deux grandes catégories, l'une composée de méfaits qui ne
pouvaient s'expier que par la mort de leur auteur, l'autre
comprenant les délits dont la répression était subordonnée
(1) De moribus Germa norum, XII; trad. Nisard. On connaît les
nombreuses controverses auxquelles ce texte a donné naissance. Nous
croyons que les mots cor pore infâmes doivent être pris dans leur sens
naturel. D'autres passages de Tacite déterminent clairement le sens de
ces mots (Annales, I. 73; Histoires, IV, 14). Les mots ignavos et
imbelles désignent probablement ceux qui abandonnaient l'armée ou, dans
un combat, lâchement préoccupés de leur sûreté personnelle, refusaient
de porter secours à leurs compagnons (Voy. \Vaitz,Deu/«7ie Verfassungs-
geschichte, 1. 1 , p. 396.) Le fait d'abandonner le bouclier , ce qui n'est pas
nécessairement un acte de lâcheté, entraînait l'exclusion des sacrifices et
des assemblées (Tacite, Germ., VI).
Voy. encore Germ., XXI.
(2) Wilda, Slrafrecht der Germanen, p 498.
( «0 )
à la volonté des individus lésés ou des membres de leurs
familles (I).
La même distinction fondamentale continue de subsister
chez les Francs établis dans les Gaules. Le rachat du
crime au moyen d'une compensation pécuniaire, désignée
sous le nom de composition, forme, il est vrai, le caractère
dislinctif de leur système de répression. Le payement de
celte composition met le coupable à l'abri du châtiment,
alors même qu'il s'agit d'attentats redoutables, d'incendies
volontaires, d'empoisonnements et d'assassinats accompa-
gnés des circonstances les plus graves et les plus odieuses.
Mais on se ferait étrangement illusion en supposant que
cette règle ne comportait pas d'exception , et que la peine
de mort n'existait plus parmi les libres lils des forêts de
la Germanie, lorsqu'ils eurent renversé la domination
romaine dans les Gaules.
Le texte des lois salique et ripuaire ne laisse aucun
doute sur le maintien du dernier supplice dans la législa-
tion des Francs.
Les crimes capitaux étaient répartis en deux grandes
classes, en ce sens que, pour les uns, la peine de mort
était encourue d'une manière absolue, tandis que, poul-
ies autres, le coupable ne perdait la vie que lorsqu'il se
trouvait dans l'impossibilité de racheter sa vie au moyen
d'une composition.
L'existence des crimes de la première classe résulte
à l'évidence des titres XX etXLH de la Lex cmendata.
Les deux articles qui composent le titre XX sont ainsi
(1) Montesquieu {Esprit des lois, I. XXX, e. 1!)) se trompe donc manifes-
tement eu disant que les Germains ne connaissaient que deux crimes capi-
taux, la trahison et la poltronnerie. On eu verra plus loin d'autres preuves.
( 411 )
conçus: « Si quelqu'un accuse devant le roi, d'une faule
» légère, un homme innocent, en l'absence de ce dernier,
» l'accusateur sera condamné à payer 2,500 deniers ou
» 02 sous d'or et demi. Si le crime qui a été imputé est
» tel qu'il eut dû entraîner la peine de mort s'il oui été
» prouvé (unde mori debuisset, si veriim fuisse l), l'accu-
» saleur sera condamné à payer 8,000 deniers ou 200 sous
» d'or (1). » L'article 7 du litre XLII ajoute : « Si l'esclave
» est accusé d'un crime grave, à raison duquel un ingénu
» devrait être condamné à payer 1,800 deniers ou 45 sous
» d'or, et si la rigueur de la question lui arrache l'aveu de
» son crime, il sera condamné au dernier supplice [Capi-
» lali sententia feriatur (2). »
L'un des plus savants commentateurs de la loi salique,
M. Pardessus, restreint arbitrairement le premier de ces
textesau crime de haute trahison, contre lequel, au dire de
Tacite, la peine de mort était prononcée chez les Ger-
mains, Il se l'onde sur ce qu'il s'agit d'une accusation ante
regem. Il ajoute que le litre XX est le seul texte de la loi
(1) traduction do M. Peyré. — Je cite ici le texte de la L<\v ('mandata.
Les manuscrits qui sont censés renfermer la plus ancienne rédaction de
la Loi salique ttexte publié par Merkel, lexies 1, II, III de Pardessus) ne
renferment pas les mots de culpis minoribus et ne font aucune distinc-
tion entre l'objet de l'accusation. L'article 2 du titre XX (qui l'orme le
titre XVIII de ces manuscrits) n'y ligure pas (voy. Merkel, Lex salica,
p. 12). Il se peut donc (pie cet article il soit une disposition additionnelle,
datant des premiers temps de l'époque mérovingienne ; niais ce doute ne
snllit pas pour le l'aire déclarer étranger à l'ancien droit des Saliens. Nous
verrons que la loi salique ne renferme pas toutes les règles obligatoires chez
les Francs, et rien ne s'oppose à ce que, même dans l'hypothèse d'une
addition pins récente, on y voie une règle omise dans la rédaction primi-
tive et ajoutée dans une rédaction postérieure.
(2) Titre XL, 3, du texte publié par Merkel.
(412)
salique où cette peine soit expressément écrite contre les
hommes libres, les étlits de Chilpéric, de Chlotaire et de
Childebert, qui l'ont étendue à d'autres crimes, étant de la
fin du sixième siècle (1).
Cette interprétation ne saurait être admise. Le crime de
haute trahison n'était pas seul réservé au tribunal du roi
et puni du dernier supplice.
Si la haute trahison avait été le seul crime capital connu
des Francs saliens établis dans les Gaules, les rédacteurs
du texte n'eussent pas manqué de la désigner par son
nom. Ils se seraient épargné la peine de chercher une
périphrase pour indiquer un méfait unique. Or, loin d'agir
de la sorte, ils se servent d'expressions d'une portée
incontestablement générale. Après avoir parlé, dans un
premier article, d'une accusation de culpis minorîbus, ils
placent au début de l'article suivant les mots : Si vero laie
crimen ei imputaveril, unde mori debuisset, si verum
finisse!. Il n'est pas possible de restreindre ces termes à
un cas unique. Les mots taie crimen supposent clairement
l'existence d'un certain nombre de méfaits passibles du
dernier supplice.
Il est vrai que ces crimes ne sont pas désignés dans le
texte; mais le code que nous possédons sous le titre de
Lex salka est loin de renfermer toutes les règles qui,
même au début de la période mérovingienne, réglaient
l'exercice du droit de répression. A côté de la loi écrite,
les coutumes nationales subsistaient dans toute leur force;
elles aussi formaient la « loi des Francs ». La loi salique
elle-même y renvoie à diverses reprises, en ordonnant aux
(1) Loi salique , p. 663.
( 413 )
juges de se prononcer, sur les matières qu'elle ne contient
pas, secundum legem salicam(l). Il suffit de la considérer
dans son ensemble pour apercevoir, à l'instant même, de
nombreuses et importantes lacunes. Loi d'une nation
essentiellement guerrière, elle ne dit pas un mot des
crimes qui compromettent l'existence des armées ou amè-
nent leur défaite; code d'un peuple qui possédait au plus
haut degré le sentiment de ses droits et de ses préroga-
tives, elle garde un silence absolu sur de nombreux atten-
tats qui atteignent dans leur source la liberté, la sécurité
et le bien-être de la communauté nationale. Ces omissions
étaient volontaires, et leur raison n'est pas difficile à trou-
ver. La loi salique laisse de côté tous les crimes qui, comme
le meurtre des personnes royales, n'admettaient pas de
composition. La répression de ces méfaits, placés au-dessus
de toute estimation légale, était réglée par la coutume, et
c'est à eux que fait allusion le texte du titre XX de la Lex
emendata , en parlant de crimes dont les auteurs doivent
être misa mort, unde mort debent (2).
(1) Tit. XLIX; tit. Lit, 2; tit. L1V ;lit. LX, 1, 2, de la Lex emmdala ;
tit. XLVII; lit. L, 2; tit, LU; tit. XVII, 1,2 du texte publié par Merkel.
(2) Les preuves de l'existence, chez les Francs, d'une loi coulumière à
côté de la loi écrite sont aussi nombreuses que décisives. Les documents
connus sous les litres de Sentenlia de septem septennis et Récapitulatif)
legis salicœ (Pardessus, p. 348 et suiv.) indiquent des compositions pour
des délits qui ne sont pas indiqués dans le texte de la loi salique. D'autres
faits sont cités par Pardessus, p. 4i6, et par MIle de Lezardière, Théorie
des lois politiques de la monarchie française, t. I, p. 339.
M. de Savigny a raison de dire que le texte que nous appelons Loi sali-
que n'esl qu'une collection très-incomplète où ne sont même pas men-
tionnées les matières les plus importantes du droit en vigueur chez les
Francs saliens. Histoire du droit romain au moyen âge, traduction
Guenoux, t. Ier, p. 98.
( Mi )
Les Germains de Clovis et de Chlolaire II connaissaient
donc, aussi bien que leurs ancêtres, une espèce de
crimes qui ne pouvaient être expiés que par la mort des
coupables.
L'existence d'une deuxième classe de crimes capitaux
qui pouvaient entraîner le dernier supplice quand leur au-
teur était hors d'état de payer la composition, est tout
anssi clairement attestée par le texte de la loi salique.
Les litres LU et LUI de la Lex emendata portent que le
grafîon ou juge qui refuse d'exercer ses fonctions, sans
pouvoir invoquer une excuse légale, ou qui prélève à litre
de composition au delà de la somme stipulée par la loi
nationale, doit compotier e de vila aut se redimere (1). Le
titre LXI, prévoyant le cas d'un meurtrier qui ne peut,
par manque de ressources, payer la composition de son
crime, décide que, si aucun de ses proches ne paye à sa
place, il doit, lui aussi, componere de vila (2). L'article 6
du titre XIV applique la même règle à l'affranchi et au ïi te
qui se rendent coupables de rapt d'une femme ingénue (3).
La Lex emendata renferme ainsi quatre fois les mots de
vitacomponal, deux fois avec l'addition aut se redimat, et
deux fois sans cette addition.
Il s'agit de fixer la portée juridique des termes de vila
comportât.
On leur attribue généralement le sens de « sera mis à
(1) TH. L et Ll du texte publié par Merkel. Dans ce texte, le titre L se
termine par les mots de vila culpabilis esse débet aut quantum valet se
redemal ; tandis que, dans la Lex emendata, on lit: aut se redimat aut
de vita componat. On va voir que les deux expressions ont la même signi-
fication juridique.
(2) Tit. LVIII du texte publié par Merkel.
(3J Tit. XIII, 4, du texte publié par Merkel.
( 415 )
» mort, sera puni de mort, payera de sa vie (1). » Cette
interprétation n'est pas rigoureusement exacte; elle dé-
passe les prévisions des rédacteurs du texte. Il ne s'agit pas
ici d'une condamnation capitale directement prononcée et
immédiatement exécutable. La condamnation est en quel-
que sorte éventuelle ; son exécution est subordonnée à une
condition, celle du défaut de payement de la composition
légale. Le coupable est obligé de racbeter sa vie, au moyen
d'une somme égale à celle qui aurait été payée si quel-
qu'un lui avait donné la mort; il doit, selon l'une des plus
anciennes rédactions de la loi salique, se rêdimere quan-
tum valet (2). S'il ne paye pas cette somme, sa vie elle-
même sert de composition. Au titre LXI, il est dit, en
termes formels, que le meurtrier indigent ne doit mourir
que dans le cas où aucun des siens ne consent à le racbe-
ter (5). Aux titres LU et LUI, la pensée du législateur est
tout aussi clairement rendue par les mots « aut se redi-
mat », et l'on ne voit pas pourquoi les termes « de vita
comportât » auraient un autre sens dans l'article 6 du
titre XIV (4). Quand les rédacteurs de la loi salique veu-
lent désigner une sentence capitale immédiatement exécu-
table, en d'autres termes, quand ils infligent la peine de
mort absolue et sans restriction, ils se servent d'expressions
qui ne laissent aucun doute dans l'esprit du lecteur; ils
(1) Entre autres M. Peyré, dans sa traduction française de laloi salique.
Paris, F. Didot, 1828.
(2) Voy. la note 1 de la page précédente.
(3) Et si eum nullus suorum per compositionem voluerit rêdimere, de
vitacomponat.
(4) C'est encore dans le même sens que l'article 5 du lit. XXXIV de la
Lex emendala dit : Si quis hominem noxium ligatum per virn luleril
graftoni, vilam suam redimat.
( 410)
disent alors : capilalî sententia ferialur ou mort débet (1).
La même distinction est nettement faite dans les Capitu-
lâmes dont nous parlerons plus loin, et toute hésitation
doit disparaître en présence d'une formule de Marculfe
où nous voyons un individu éventuellement condamné
à mort aliéner sa liberté, pour se procurer les moyens de
racheter sa vie. Le condamné s'exprime ainsi : « Dum et
instiganle adversario, fragilitate mea prœvalente , in casus
graves cecidi, unde morlis periculum incurrere potueram,
sed dum vestra pietas me jam morli adjudication de pecu-
nia vestra redimistis, vel pro mea scelera res vestras com-
plures dedistis, ab hac die de vestro servitio penilus non
discedam, sed quicquid reliqui servi veslri faciunt , pro
vestro aul agentium vestrorum imperio facere spondeo. »
C'est exactement l'espèce que nous discutons (2).
[I faut donc bien admettre que, sous le régime de la loi
salique , il y avait des cas, non déterminés par la loi écrite,
où, même contre les hommes libres, la peine de mort était
prononcée d'une manière absolue , et, de plus, au moins
quatre cas où elle était comminée à défaut de payement de
la composition.
La même classification des crimes capitaux se manifeste
dans la loi des Francs ripuaires, dont la rédaction est
(1) T. XX, 2, et XLII, 7.
(2) Liv. Il, formule XXVIII. Voy. encore la formule LV1II de l'Appendice
et la formule GXXXV de Lindenberg.
Ici encore, nous ne saurions accepter l'idée émise par Pardessus. Il
admet que l'assassin, hors d'état de payer la composition de son crime,
doit être mis à mort; mais, par une distinction purement arbitraire, il
soutient que les coupables dont s'occupent les t. XIV, LU et LUI sont mis
sur la même ligne que tous les autres condamnés qui ne payent pas la
composition. (Loi salique, p. 663 el 664.)
( 4*7 )
postérieure à celle de la loi salique clou l'élément germa-
nique a déjà subi, dans une forte proportion, l'influence
inévitable du contact de l'élément romain.
On n'y trouve pas, il est vrai, le texte de la loi salique
qui punit de mort l'esclave auteur d'un crime à raison du-
quel un ingénu est obligé de payer une composition de
quarante-cinq sous. On n'y menace pas du dernier supplice
le juge qui refuse d'exercer ses fonctions. On n'y dit pas
que le meurtrier, incapable de racheter sa vie, sera mis à
mort. Mais, malgré ces différences, qui ne concernent que
des cas particuliers et dont la dernière est probablement
plus apparente que réelle, l'esprit général de la législation
concernant la peine capitale présente les mêmes caractères.
Plusieurs articles supposent l'existence d'une loi tradition-
nelle à côté de la loi écrite, et ils nous apprennent que la
première de ces lois punissait du gibet des individus qui
ne sont pas désignés dans la seconde (1). Un de ces arti-
cles défend , en termes généraux, aux juges ordinaires de
s'occuper d'accusations capitales dirigées contre des indi-
vidus qui doivent être jugés au plaid du roi (2). En outre,
les mots de vita componal s'y rencontrent a diverses
reprises. Pour l'esclave qui enlève une femme libre, pour
le citoyen qui se rend coupable d'infidélité envers le roi,
pour les juges et les fonctionnaires qui reçoivent des pré-
sents pouvant influer sur les jugements qu'ils sont appelés
(1) Tit XXXI;LXIX,4;LXXIV, -i, 8;LXXXI;XC. Ainsi, au lit. LXXXJ,
il est dit que la fortune du voleur condamné au gibet du chef de vol pas-
sera à ses héritiers, tandis que tous les vols dont s'occupe la loi ripuaire
sont simplement punissables d'amende. Celte exécution avait donc lieu en
vertu d'une autre loi subsistant en dehors du code.
(2) Tit. LV1II, 19. Pour le sens du mot alsaccia, j'ai adopté l'opinion
d'Eccard. (Canciani, Barbarorum leges antiquœ, t. II, p. 513.)
2me SÉRIE, TOME XLIV. 29
( 418 )
à rendre, le texte porte : de vita componat (1). Pour celui
qui conteste la force obligatoire d'une charte royale encore
en vigueur, il se sert des termes : ne aliunde nisi de vita
componat (2). C'est toujours la division des crimes capi-
taux en deux grandes classes que nous avons eu soin de
signaler dans le texte de la loi salique (3).
On voit que, même sous le régime des lois salique et
ripuaire, le nombre des crimes capitaux n'était pas si res-
treint que l'ont supposé les jurisconsultes et les historiens
égarés par une lecture superficielle de ces deux codes
célèbres.
Le nombre de ces'erimes s'accrut encore sous le régime
des Capitulaires de l'époque mérovingienne.
Une disposition additionnelle à la loi salique, souvent
attribuée à Clovis et qui a pour but de fortifier le respect dû
à l'autorité paternelle, punit de mort les ravisseurs et ceux
qui déterminent le fils ou la fille d'un autre à se marier sans
l'assentiment de ses parents; elle statue que les auteurs
d'un rapt ne seront plus admis à se libérer au moyen d'une
composition (4). Une autre disposition additionnelle,
(1) Tit. XXXVI, 7; LXXI, 1;XC.
(2) Tit. LXII, 7.
(3) Nous croyons que, dans la loi ripuaire, les mois de vita componat
ont la même signification que dans la loi salique. On pourrait objecter que
l'article lor du titre LXXI, qui renferme ces mots, prononce en même
temps la confiscation des biens. Comment, dira-t-on peut-être, pouvait-il
racheter sa vie, après la confiscation universelle de ses biens? La réponse
serait facile. Ce condamné se trouvait exactement dans la position de celui
qui est censé parler dans la formule de Marculfe citée ci- dessus, p. 416.
Grégoire de Tours, Hisloria Francorum, VI, 8, parle d'un voleur con-
duit au gibet.
(4) Pertz, Legum t. II, p. 3. — Pardessus, Loi salique, Capila extra-
vagantia, VI, p. 330.
( 410 )
qu'on suppose émanée de la même source, ordonne de
faire mourir sur la roue l'esclave qui épouse une femme
ingénue (1). Childehert Ier, par un décret porté vers 550,
ordonne de mettre à mort celui qui détache du gibet un
condamné encore vivant, à moins qu'ils ne se rachète au
moyen d'une composition de deux cents sous d'or (2).
Chilpéric, roi de Neustrie, dans un édil rendu vers 574 ,
ordonne de livrer l'esclave, auteur du meurtre d'un ingénu,
aux parents de sa victime, « pour être traité comme ils
l'entendent » ; il met hors la loi et donne à tous ses sujets
le droit de tuer les bandits (mali homines) qui n'ont ni
feu ni lieu (5).
Les successeurs de ces princes entrèrent dans la même
voie.
Un pacte conclu en 593, entre Childebcrt II, roi
d'Austrasie et de Bourgogne, et Chlotaire II, roi de
Soissons, menace de la peine de mort les voleurs qui
n'ont pas de quoi se racheter et assimile aux voleurs
les citoyens qui, à l'insu du juge, transigent avec eux ou
(1) Perlz, Ibid., p. 5. — Pardessus, Capila extraoayantia, t. V, p. 530.
(-2) Chap. 8. Perlz, Legum t. Il , p. 8. Pardessus conteste l'attribution
de ce décret à Childebert (Loi salique, p. 452). Il appartient en tous cas à
l'un des premiers successeurs de Clovis.
On trouvera plus loin l'examen du titre LXIX de la Lex emeitdata.
(5) Perlz, Legum t. II, p. 10. — Pardessus, Diplomala, I, n° 174. —
Laferrière (Histoire du droit français, l. 111, p. 240) prétend que cet
édit, porlé à l'occasion de l'envahissement des domaines que Sigebert, roi
d'Austrasie, possédait daus la Touraine et le Poitou, ne reçut pas d'exé-
cution, parce que, la même année, Chilpéric l'ut forcé de restituer les pro-
vinces envahies. Les raisons qu'il allèyue à l'appui de celle opinion ne sont
pas décrives. Les articles 5 et suivants de l'edit ont une portée générale.
( 420 )
cachent leurs méfaits (1). Un décret de Chlotaire II, pro-
mulgué peu de temps après, pour assurer l'exécution
de ce pacte dans les terres placées sous sa domination,
soumet à l'obligation de racheter leur vie (de vila compo-
sant) les complices des voleurs, ceux qui transigent clan-
destinement avec eux, qui leur fournissent un asile ou
recèlent le produit de leurs méfaits dans une maison fer-
mée à clef; il prononce la peine de mort contre le juge
qui enfreint ces dispositions dans l'exercice du droit de
punir (vitœ incurvai periculum) (2). Un édit du même
prince, promulgué dans le concile tenu à Paris en 614,
inflige la peine de mort (capitali sentenlia ferianlur) à
ceux qui épousent une religieuse vierge ou veuve , sans dis-
tinguer entre le cas où elle est dans un monastère et celui
où elle demeure dans sa propre maison ; il menace du
même supplice le juge qui ne tiendra pas la main à l'exé-
(1) Pactus pro tendre pacis, etc., Chap. I, II, III. Pertz, Legum t. I,
p. 7. Comp. les chap. Vli el VIII du décret de Childebert II, de 593 , et le
chap. XXII de Pédit de Chlotaire II , de 614. Pertz (Legum t. I, p. 7, 10
15). Voy. aussi le t. LXVI, 1, du manuscrit de la loi salique dit de Munich
(Pardessus, p. 217). — La formule LVIII de l'Appendice de Marculfe se
réfère à un voleur de chevaux qui aliène sa liberté au profit de celui qui
lui a fourni la somme nécessaire au rachat de sa vie.
Le titre de la convention (Pactus) ne désigne pas ici u;i traité pour
terminer une guerre ou faire une alliance politique; c'est , comme l'a dit
Pardessus, une loi rédigée en commun pour le maintien de la paix publique
dans les Étals limitrophes des deux rois {Loi salique, p. 435).
(2) Chap 1 1, V. X. Pertz, Legum 1. 1, p. 11. La comparaison des chap. I
et V suffit pour prouver qu'il s'agit à la fois de ceux qui recèlent les
choses volées et de ceux qui fournissent un asile aux voleurs. Ces derniers
étaient déjà assimilés aux voleurs par le titre LXXX de la loi ripuaire. La
règle se trouve reproduite dans un capilulaire de date incertaine, cité ci-
après, p. 422 Comp. le manuscrit de la loi salique dit de Munich, t. LXXIV
(Pardessus, p. 218).
( 421 )
cution de l'édit (in ipsum capitali sentenlia judicetur) [\).
Une loi de Childebert II, du 29 février 596, range au
nombre des crimes capitaux la prévarication du juge qui
relâche un voleur, le rapt, le vol, le meurtre volontaire,
l'union incestueuse du fils avec la femme de son père (2) ;
elle renferme celte étrange disposition que le juge qui
(1) Cliap. XVIII et XXIV. Pertz, Legum t. I, p. 15. La constitution de
Chlotaire Ier, de 590 (Pertz, ibid., p. 2), renferme déjà la défense d'épouser
des religieuses, mais n'indique pas de sanclion pénale. — L'édit de Chlo-
taire II, après avoir prononcé la peine de mort, ajoute que, si la religieuse
a consenti à épouser son ravisseur et que le mariage ait été célébré par un
prêtre ignorant l'existence de l'obstacle, les époux seront, séparément
envoyés en exil et que leurs biens passeront à leurs héritiers.
(-2) Chap. II, IV. V, VII. Pertz, ibid., p. S.
Le texte du chap. V concernant les meurtriers est difficile à expliquer-
Il renferme une véritable contradiction dans ses termes. Il dit d'abord que
le meurtrier volontaire commet un crime capital qui ne peut être racheté
par aucun prix de rédemption; puis, immédiatement après, il ajoute que,
s'il est raisonnable d'en venir à un payement, aucun des parents du cou-
pable ne pourra payer à sa décharge Comme, sous le régime de la loi
salique , le meurtrier, hors d'étal de payer la composition, était déjà mis à
mort (voy. ci-dessus , p. 414), on peut dire qu'il est peu probable que
Childebert n'ait eu d'autre but que de rappeler cette disposition ; mais,
d'autre part, il existe des formules qui traitent expressément de transac-
tions conclues à raison d'homicides. (Voy. la formule XVIII duliv. II et la
formule XXII 1 de l'Appendice de Marculfe, la formule XXXIX de Sirmond,
la formule VIII de Bignon etc.)
Le texte relatif au rapt n'est pas non plus exempt d'obscurité. Si le cou-
pable se réfugie dans une église, il doit être livré par l'évêque et envoyé
en exil. Si la femme a fini par donner son assentiment au rapt, elle doit
également, dans ce cas, être envoyée en exil. S'ils ne se sont pas réfugiés
à l'église, la femme qui a fini par consentir est, de même que le ravisseur,
mise à mort.
Quant au vol, le chap. VII s'écarte du pacte de 595, en ce sens qu'il n'y
est pas question du rachat de la vie. Il est cependant difficile de croire
que le vol fut, dans tous les cas, puni de mort.
Enfin, à l'égard de l'inceste, le chap. II punit de la confiscation des
biens les unions entre beau-frère et belle-sœur, tante et neveu.
( m )
consent à admettre au Mal un farfalius s'expose à perdre
la vie (1). Un capilulaire de date incertaine, dont l'authen-
ticité est loin d'être démontrée, mais qu'il convient de
citer comme un indice de l'esprit du temps, prive du droit
d'asile dans les églises les homicides « qui doivent mourir
selon les prescriptions des lois»; il assimile aux homicides
ceux qui troublent un citoyen dans la paisible possession
d'un enfant qu'il a recueilli, par charité, à la porte d'une
église où cet enfant était exposé et abandonné à la pitié
des passants ; il assimile aux voleurs ceux qui leur four-
nissent un asile ; il modifie la législation sur le vol en
ce sens qu'il frappe le premier délit de la perte d'un œil,
le second de la perte de la main , le troisième de la perte
de la vie (2).
Ces lois et ces édils, qui modifient le texte des lois sa-
(1) Cbap, Vt. Quel est le sens du mot farfalius? Les commenlateurs
et les linguistes sont loin de se trouver d'accord. M. Davoud-Oghlou
{Histoire de la législation des anciens Germains, t. Ier, |>. 573) prttend
que le mot farfalius désigne l'avocat romain. La supposition est ingé-
nieuse. Tacite, en effet, nous apprend que les Germains haïssaient les
avocats. Florus (liv. VI, c. 17) rapporte qu'après la défaite de Varus ,
ils mutilèrent cruellement les Romains qui exerçaient la profession d'avo-
cat. Ils coupèrent la langue à plusieurs d'entre eux, en leur disant:
« Vipère, cesse de siffler! » La loi des Goths, malgré les nombreux em-
prunts qu'elle avait faits aux lois romaines, portail que les juges devaient
chasser de l'audience et condamner à une amende de dix sous d'or celui
qui s'aviserait de faire le patron (Liv. II, tir. II, c. 2). Mais ces faits ne
suffisent pas pour autoriser la traduction de farfalius par avocat. Gengler
(Germanisclie Rechlsdenkmàler, p 589) est d'avis que ce mot servait à
désigner ceux qui troublaient la paix pendant la réunion du tribunal et
cherchaient à exercer, par des démonstrations illégales, une influence
coupable sur l'esprit des juges.
(2) Walter, Corpus juris germanici antiqui, t. II, pp. 24 et suiv. Des
doutes sérieux existent au sujet de l'authenticité de ce capitulaire. Pertz
ne l'a pas reproduit dans son recueil.
( *25 )
lique et ripuaire, ou y ajoutent des dispositions nouvelles,
méritent d'autant plus l'attention du jurisconsulte, que
celles de leurs dispositions qui, à l'origine, ne concernaient
qu'une partie de l'empire dos Francs acquéraient, presque
toujours, par la force des choses, le caractère de loi géné-
rale. Les mêmes besoins appelant les mêmes remèdes au
sein de populations unies par la triple communauté de
l'origine, des souvenirs et des intérêts, les règles essen-
tielles suivies dans une partie de l'empire étaient bientôt
adoptées dans les provinces voisines; elles prenaient suc-
cessivement place au Livre des lois (liber legum, liber
legalis), dont les comtes de l'époque mérovingienne se
servaient dans l'administration de la justice (1). Le mou-
vement était d'autant plus naturel que, très-souvent, les
Capitulaires ne faisaient que donner la sanction législative
à des usages déjà consacrés par la jurisprudence (2).
Aussi ne faut-il pas s'imaginer que les crimes cités
étaient les seuls que le droit mérovingien réprimait par le
dernier supplice. Nous sommes loin de posséder tous les
documents législatifs du temps, et les sources historiques
ne sont pas assez abondantes pour nous fournir le moyen
de dresser la liste exacte et complète des méfaits qui,
depuis l'invasion des Francs jusqu'à l'avènement de la
dynastie carolingienne, avaient pour sanction directe ou
éventuelle la mort de leurs auteurs. Nous pouvons, toute-
fois, sans avoir à redouter le reproche d'exagération,
(1) Pour le Livre des lois, voy. Laferrière, Histoire du droit français,
t. III, pp. 58 et 25D. Pardessus, Préface de la Loi sali que , p. xi, u° 5.
(2) On en trouve un remarquable exemple en matière de vol Plusieurs
années avant le pacte de 593, qui Tait du vol un crime capital, Grégoire de
Tours nous montre un voleur conduit au gibet pour expier ses soustrac-
tions frauduleuses (Histoire des Francs, I. VI, 8).
( 424 )
ajouter aux crimes cités la trahison (1), la désertion (2),
l'infidélité dans l'exercice des fonctions conférées par le
roi (3), la révolte (4), les maléfices et les enchantements
dirigés contre la vie d'antrui (5), le sacrilège (6), l'adul-
tère (7), la chasse dans les-forèts royales (8) et le crime de
lèse-majesté. Ce dernier crime avait pris sous les Mérovin-
giens les larges et redoutables proportions que lui avaient
attribuées les séides du césarisme romain. Pour devenir
passible du dernier supplice, il n'était pas requis qu'on
eût commis un attentat contre la personne du roi ou qu'on
eût reconnu l'usurpateur du trône. L'accusation ne con-
naissait pas ces étroites limites. Agir contre les intérêts du
roi, prendre part à une négociation contraire à la dynastie
(1) Déjà les anciens Germains retranchaient les jours du traître. (Tacite,
de vita ac mor. Germ ,XIl). —La loi des ripuaires , lit. LXXI, range l'in-
fidélité envers le roi au nombre des crimes capitaux. Grégoire de Tours
dit que Gontran-Boson fut condamné à mort parce qu'il s'était rendu cou-
pable de plusieurs trahisons (I. IX, 10).
(2) Il n'est pas possible de supposer que les Francs, nation essentielle-
ment guerrière, eussent abandonné, sous ce rapport, les traditions de
leurs ancêtres. Voy. Tacile, ibid.
(3) Grégoire de Tours, liv. VIII, 11 ; liv. IX, 10, 28; 1. X, 19. Loi des
ripuaires, loc. cit. Gesta Dagoberti, c. XXI ; ap. D. Bouquet, t. II, p. 585.
(4) Grégoire de Tours rapporte plusieurs exemples de révoltés mis à
mort.
(5) Grégoire de Tours, 1. VI, 55.
(C) Grégoire de Tours dit expressément que le sacrilège était puni de
mort (1. X, 16; 1 VI, 10). — Déjà avant le christianisme, il avait ce carac-
tère chez les peuples germaniques. La loi des Frisons (Add. III, t. XII)
renferme ce texte remarquable: Qui fanum effregent, et ibi aliquid de
sacris tulerit , ducitur ad mare et ibi in sabulo, qaod accessits maris
opsrire solet, findmlur aures ejus et caslralur et immolatur diis,
quorum lempla violaverit.
(7) Grégoire de Tours, I. V, 53; VI, 36.
(8) Grégoire de Tours, i. X, 10.
( m )
régnante, manquer de respect envers le chef de la nation,
parler de la reine avec irrévérence : tous ces actes consti-
tuaient le crime de lèse-majesté et avaient pour consé-
quence le supplice du coupable (1).
Nous croyons avoir suffisamment prouvé que, malgré le
système général des « compositions », la peine de mort
était loin de constituer une rare exception chez les conqué-
rants des Gaules.
Voyons maintenant quels étaient les modes d'exécution
usités sous le règne des Mérovingiens.
Ici encore, la pénurie de documents contemporains ne
nous permet pas de répondre avec toute la précision dési-
rable. Les Capitulaires de l'époque mérovingienne n'indi-
quent pas, en parlant des crimes capitaux, le genre de
mort que doit subir le coupable; ils sont rédigés de ma-
nière à faire supposer qu'on voulait laisser aux juges la
liberté de choisir entre les divers supplices admis dans le
droit national. Les termes dont ils se servent pour dési-
gner la peine capitale sont indécis et vagues : capitali
sententia feriatur, vitœ periculo feriatur , vitœ incurvât
periculum, de vita componat, vitœ periculum sustineat,
vitam main amitlat, judex eum occidat, pereat, in ipsam
capitali sententia indice tur, occidatur. Trois foisseulement
le genre du supplice se trouve nettement désigné à côté
de l'infraction. La loi ripuaire attribue aux héritiers légi-
times la succession du voleur pendu, pour vol (2); une
disposition additionnelle à la loi salique décide que l'es-
clave qui épouse une femme libre doit mourir sur la
(1) Grégoire de Tours, 1. V, 17, 27,40; VI, 37; VIII, il, 29; I. IX, 15,
14,28; I. X, 18,19.
(2) Tit. LXXXI.
( m )
roue (1), et un décret de Childebert, de 595, parlant du
voleur, autre qu'un Franc, saisi sur le fait, porte : in loco
pendatur (2).
Cependant, en consultant le droit primitif des autres
peuples germaniques et en combinant ses prescriptions
avec les rares témoignages historiques parvenus jusqu'à
nous, on arrive à cette conclusion que, sous la dynastie
mérovingienne, les modes d'exécution étaient au nombre
de cinq : le glaive, la pendaison, la roue , le bûcher et la
lapidation.
La mort par le glaive était en même temps le moins
douloureux et le moins flétrissant des supplices. Grimm
suppose que, dans les temps primitifs de la Germanie, le
condamné mettait le cou sur un billot, que l'un des assis-
tants y appliquait le tranchant d'une hache, et que l'exé-
cuteur enfonçait cette hache à l'aide d'un marteau (5).
Rien ne permet de supposer que les Francs aient introduit
ce procédé barbare dans les Gaules. La décollation s'y
faisait par le glaive; mais on avait aussi parfois recours à la
hache (4). Les expressions ordinairement employées par les
historiens sont : çjladio interficere , gladio occidere , gladio
Irucidare, gladii inlerfectione prostrare , capite plectere ,
caput absciadere, decollare, decidere cervicem, detrnn-
(1) Pardessus, Loi salique, Capila extravagantia , t. V. Periz, Legum
t. II, p. 3.
(2) Décret de Childebert de TS96, chap. H, IV, VI, VII, VIII. Pacte de
Childebert et de Chlotaire, chap. I, II. Édil de Chlotaire M de 595,
chap. II et V. Loi salique, XL1I, 7.
(5) lïechtsalterthumer, p G89.
(4) Grégoire de Tours nous nionlre le roi Contran menaçant de faire
tomber sous la hache la tète de ceux qui mépriseront sescommandemeiils
(I. VIÏÏ, 50).
( 427 )
çare (1). Les premiers de ces termes peuvent s'appliquer
aussi bien à regorgement qu'à l'action de trancher la tète;
mais les quatre derniers désignent clairement la décapita-
tion (2). Il se peut que la tête fut quelquefois exposée sur
un poteau; mais le passage de Grégoire de Tours, invoqué
par Grimm pour attester l'existence de cet usage chez les
Germains, est loin d'avoir la portée qu'il lui attribue. Si les
Bourguignons mirent la tète de Chlodomir au haut d'une
perche, c'était uniquement pour montrer aux Francs que
l'ennemi de Gondomar avait perdu la vie (3). Le savant
philologue allemand eût pu invoquer avec plus de raison
le passage de la loi salique qui punit d'une amende de
quinze sous d'or celui qui, sans la permission du juge,
enlève une tête humaine du poteau où l'ennemi du mort
l'a placée (4); mais ce texte même est loin de fournir un
argument décisif. Tuer un meurtrier par vengeance était
un acte licite, aussi longtemps qu'on n'avait ni demandé ni
accepté de composition; mais l'auteur de cet homicide, à la
différence de l'assassin ordinaire, était tenu d'avouer son
action, de rendre le public témoin de sa conduite, et l'expo-
sition de la tète de la victime n'avait pas d'autre but (5).
(1) Grégoire de Tours, I. Il, 3, 25; lit, 25, 35; V, 19; VI, 55; VII, 46;
X; 21. Frédégaire, c. XLIV (D. Bouquet, t II, p. -431). Vila S. Leodigarii,
e. XII (D. Bouquet, t. II, p 619).
(2) On aurait tort de voir un supplice légal dans les ligues où Grégoire
de Tours raconle le supplice de Leudaste : « Par ordre de la reine (Fré-
« dégonde),ou le coucha par lerre sur le dos, et lui ayant mis sous la
» nuque une énorme barre de fer, on le frappa sur la gorge, et il finit
» ainsi, par une juste mort, une vie tissue de perfidies. » (L. VI, 52)
(5) Grégoire de Tours, 111,6.
(4) T. LXIX,Ô.
(5) Pardessus, p. 658. — Ch-z les Francs ripuaires, le corps devait
être élevé sur une claie, au milieu d'un carrefour. (Loi ripuaire,
t. LXXIX, 1 )
( 428 )
La pendaison, réputée plus flétrissante que la mort par
le glaive, ne s'opérait pas, chez les anciens Germains, avec
l'appareil qui la caractérisait, vers la (in du moyen âge,
chez toutes les nations chrétiennes. Ils pendaient le con-
damné aux branches d'un arbre ou au haut d'un poteau,
et, pour l'étrangler, ils se servaient, au lieu d'une corde
de chanvre, de rameaux de bois flexible, principalement de
chêne et de saule. Ils s'éloignaient encore des usages mo-
dernes pour un détail essentiel. Ils avaient soin de serrer
faiblement le nœud coulant, afln de faire mourir le sup-
plicié aussi lentement que possible. Le cadavre restait
suspendu à la branche, en signe d'ignominie et pour servir
d'exemple (1).
II paraît que les Francs, malgré leur conversion au
christianisme, n'avaient pas adouci la rigueur de ce sup-
plice. Le titre LXIX de la Lex emendala punit d'une
amende de cent sous d'or celui qui détache du gibet un
homme encore vivant (2); un édit que Pertz attribue à
(1) Wilda, Strafrecht der Germanen, p. 501. Grimm, Reclitalter-
thtimer, p. 685. Vita S. Eliyii, citée à la note suivante.
(2) L'art. 1er du t. LXIX de la Lex emendala punit d'une amen le de
4o sous celui qui, sans la permission du juge, détache un cadavre de
furca vel bargo. L'art. 4 du même titre porte l'amende à 100 sous, si
l'homme est encore vivant. — Pardessus croit que le premier de ces textes
se réfère à l'exposition du cadavre d'un homme dont l'assassin n'est pas
connu (t. IX de ses Capila extravagantia, p. 332), et il suppose que
l'art. 4 s'occupe d'une espèce de question dont parle Grégoire de Tours
(1. V, c. 50). L'enlèvement du cadavre d'un supplicié serait ainsi puni par
l'art. 2 {Loi salique, pp. 405 et 404). Nous ne saurions admettre cette inter-
prétation. L'ait. 4 s'occupe incontestablement du corps d'un condamné à
mort, puisque l'une des dispositions additionnelles à la loi salique attri-
buée à Cbildebert Ier, prévoyant le même cas, mais renforçant la peine,
porte que si le coupable ne paye pas 200 sous d'or, il devra mourir à la
place de l'individu qu'il a délivré. Pardessus lui-même a reproduit cette
ne
( 429 )
Childebert Ier, porte que l'auteur de ce délit devra mouri
à la place du condamné qu'il a délivré, à moins qu'il
rachète sa vie (1), et Grégoire de Tours raconte l'histoire
d'un voleur pendu à un poteau, qui échappa à la mort,
parce que les chaînes et le hois s'étaient rompus après
l'éloignement des assistants (2). C'était donc bien réelle-
ment le mode d'exécution usité chez les Germains que, du
moins pour ses parties essentielles, les vainqueurs des
Romains avaient introduit dans les Gaules. Il semble tou-
tefois que, dès la première période de leur domination, le
gibet fût préféré à l'arbre, et que lesramaux flexibles furent
disposition (Capita extravaganlia, XX). Tout le système d'interprétation
que nous repoussons croule par ce seul fait. Il n'est, d'ailleurs, pas possible
de donner au mol furca de l'art. 1er une signification entièrement diffé-
rente de celle qu'il aurait dans l'art. 4 du même titre. Il est bien [lus
simple de voir dans l'art. 2 le cas de l'enlèvement d'un corps exposé par
celui qui prétend avoir exercé une vengeance légitime. Ordinairement le
meurtrier exposait la tète (art. 3 du t. LXIX) ; mais un récit de Grégoire de
Tours prouve que l'auteur de l'homicide suspendait aussi le cadavre aux
branches d'un arbre. Cliramnisinde agit ainsi avec le corps de Sigebert
(Grégoire de Tours, 1. IX, 19). Un passage de la Vie de S. Ëloi, écrite par
S. Ouen et datant de la première moitié du septième siècle (1. I, c. 51),
est de nature à dissiper tous les doutes au sujet du sens que présente ici
\e mol bargus. L'hagiographe dit :« Apud regem obtinuerat, ul omnia
humana corpora quœ judicum censura perimebantur , ubicumque
invenire poluisset, sive per civitates sive per villas, licentiam haberet et
de bargis et. ex rôtis et de laqueis sepelire. » Specilegium d'Acheri, T. II,
p. 87 uMit in-f°).
Il reste, il est vrai, à expliquer pourquoi, dans l'art. 2 du t. LXIX,
l'amende est de trente sous, tandis qu'elle n'est que de 15 sous dans
l'art. 5. Mais ce n'est pas là l'unique difficulté que fasse surgir l'interpré-
tation du texte de la loi salique.
(1) Voy. ci-dessus, p. 419.
(2) Un seul prêtre était resté en prière. Grégoire de Tours, avec sa
crédulité ordinaire, transforme le fait en miracle (1. VI, 8).
( 430 )
remplacés par des cordes ou des chaînes (1). La loi salique
désigne l'instrument du supplice sous les noms de bargus et
de furca (2); mais les mots palibulo condemnare se rencon-
trent fréquemment dans les auteurs contemporains (3), et
rien ne permet de supposer, avec les criminalistes français
du dix-huitième siècle, que la mort par la corde ne fut
jamais, dans les premiers siècles de la monarchie, infligée
aux femmes. Une femme, coupable d'adullère , subit cette
peine sous le règne de Chilpéric (-4).
Le supplice de la roue est fréquemment mentionné par
les chroniqueurs et les hagiographes des premiers siècles
du moyen âge. Grégoire de Tours rapporte que Grindion,
complice de la révolte de Mérovée , fils de Chilpéric, fut
condamné au supplice de la roue : adpreltensum, intextum
rolœ, in sublime sustulerunl (5). Le même historien, par-
lant des châtiments que la reine Frédégonde fit subir à
des femmes de Paris, soupçonnées d'avoir fait périr par
des maléfices le jeune fils de Chilpéric 1er, se sert de
(1 ) Grégoire tle Tours, VI, 8. Passage de la Vie de S. Ëloi , cité ci-dessus
p 429.
(2) T.LXIX,i,4.
(3) Voy. notamment Grégoire de Tours, III, 15; VII, 47. D'autres
expressions employées par les auteurs contemporains pour désigner la
pendaison sont : laqueo vitam finir e, pendere, laqueo suspendere , ad
peiidendum deducere (Grégoire de. Tours, V, 55 ; VI, 8). Décret de Childe-
berl de 595, c. VIII. Loi ripuaire, t. LXXIX. Vita S. Leodigarii, c. XIV ;
ap. Bouquet, t. II, p. 621).
(4) Grégoire de Tours, 1 V, 55. — Jousse (Traité de la justice crimi-
nelle de France , t. I, p. 46) réfute l'opinion de ceux qui prétendaient que
le premier exemple de la pendaison d'une femme avait eu lieu en 1449. Il
cite une femme nommée Epilingue, pendue en 898, pour avoir voulu
empoisonner le roi. On vient de voir qu'il aurait pu remonter beaucoup
plus haut.
(5) L. V, 19.
( 431 )
l'expression suivante : alias rôtis, ossibus confractis, innec-
tit (1). S. Ouen , dans la Vie de saint Eloi, raconte que ce
pieux ministre obtint du roi Dagobert l'autorisation d'en-
lever des poteaux et des roues les corps des suppliciés et
de leur procurer une sépulture décente (2).
Mais comment ce supplice était-il exécuté chez les
Francs établis dans les Gaules?
En Allemagne, le corps du condamné était broyé au
moyen d'une roue, puis jeté sur cette roue, les membres
« tressés » entre les rayons, et exposé au haut d'un poteau
ou d'un échalaud (5). En France, au contraire, au moins
dans les temps modernes, le patient était lié sur une croix
de Saint-André placée horizontalement sur un échafaud;
le bourreau, armé d'une barre de 1er, rompait les osa
toutes les jointures du corps et terminait celte horrible
opération par deux ou trois coups sur la poitrine. Le
cadavre était ensuite exposé sur une roue tournant sur un
pivot à l'un des coins de l'échafaud , et le bourreau avait
soin de replier les membres brisés (4).
Un savant criminaliste du dix-huitième siècle a prétendu
que ce dernier mode d'exécution ne datait que du règne
de Henri IV. « Il y a, dit-il, des endroits, comme en Alle-
» magne, où l'on roue avec la roue; mais... dès le
» règne de Henri IV on changea ce supplice (5). » Il est
difficile d'admettre cette opinion pour ce qui concerne la
(1) L.VI, 55.
(2) Vita sancti Eligii. Specilegium d'Acheii, t. II, p. 87.
(3) Giinim, Rechlsalterthumer,p 0S8.
(4) Rousseaud de la Combe, Matières criminelles , p. n, 4e édit. Jousse,
Traité de la justice criminelle, t. Ier. p. 43. Sainl-Edme, Dictionnaire de
la pénalité, vis Rompu vif.
(5) Rousseaud de la Combe, loc, cit.
( «2 )
pratique suivie sous les prédécesseurs de Charlemagne.
Les paroles citées de Grégoire de Tours sont de nature à
faire supposer que, dès le sixième siècle, les membres du
patient étaient brisés par l'exécuteur et non broyés sous
le poids d'une roue. Grimm se trompe, à son tour, en
affirmant que, chez les peuples germaniques, le supplice
de la roue n'existait que pour les hommes (1). On agis-
sait ainsi dans les temps modernes; mais l'exemple des
sorcières exécutées sous le règne de Chilpéric Ier prouve
que les justiciers des Francs ne connaissaient pas ces
scrupules. 31 est inutile d'ajouter que le corps du con-
damné « rompu » était, comme le corps du pendu, exposé
aux regards de ses concitoyens et livré à la voracité des
oiseaux de proie (2).
La lapidation n'est pas mentionnée dans les monuments
législatifs de la période mérovingienne; mais il n'en est
pas moins certain que cet antique supplice, connu de tous
(1) P. 689.
(2) Grimm, p. 688, suppose que, dans les temps primitifs, les membres
des condamnés étaient broyés sous les roues d"un chariot lourdement
chargé. La supposition est admissible et donne l'explication de l'emploi de
la roue dans l'exécution des peines capitales; mais il n'est pas possible
de voir une preuve quelconque dans le passage de Grégoire de Tours, que
le savant allemand cite à l'appui de son opinion. L'historien des Francs,
parlant de massacres commis par les Thuringiens, s'exprime ninsi : « Ils
» suspendirent les enfants aux arbres par le nerf de la cuisse, ûrent périr
» d'une mort cruelle plus de cent jeunes lilles, les liant au cou de chevaux
» qu'on forçait, à coups d'aiguillons, à s'écarter chacun de son côté, en
» sorte qu'elles furent déchirées en pièces; d'autres furent étendues sur
» les ornières des chemins et clouées en terre avec des pieux ; puis on
» faisait passer sur elles des chariots chargés, et leurs os ainsi brisés, ils
» les laissaient pour servir de pâture aux chiens (III, 7). » Il est évident
qu'il ne s'agit pas ici de supplices légaux.
( 433 )
les peuples d'origine germanique, figurait parmi les peines
légales des Francs (I). Grégoire de Tours la désigne par
l'expression lapidibus obruere, lapidibus urrjere, lapi-
clare (2). Le palienl était lié à une colonne, à un poteau,
à un tronc d'arbre, et les assistants lui jetaient des pierres.
Chilpéric Ier donna l'ordre de lapider un grand nombre de
soldats qui s'étaient soulevés contre lui (5). Gonlran, fils
de Chlotaire Ier, fit attacher à un poteau et lapider son
chambellan Chaudon, qui avait osé tuer un buffle dans une
forêt royale (4). L'auteur de la chronique attribuée à Fré-
dégaire reproche à Brunehault d'avoir fait lapider saint
Didier (5). Dans la Vie anonyme de saint Léger, on voit les
serviteurs d'Ébroïn lapider Guérin , après l'avoir attaché à
un tronc d'arbre (6). La lapidation était le supplice favori
du peuple en révolte; il l'infligeait aux grands, clercs ou
séculiers, qui avaient encouru sa colère , et, sous ce rap-
port, elle offrait chez les Francs plus d'un rapport avec
l'antique jugement de zèle usité chez les Hébreux (7). Ce
fut ainsi que les habitants de Trêves saisirent Parfhenius,
lui coupèrent les mains et le lapidèrent contre une colonne,
(t) Les lois des Anglo-Saxons faisaient de la lapidation le supplice de
l'esclave voleur. (Davoud-Oghlou, Histoire de la législation des anciens
Germains. t II, pp. 582 etG93). Voy., pour les Germains septentrionaux,
Grimm, Reehtsalterthumer, p 693, et \Vilda,S/ra/Vec/f< der Germanen,
p. 503.
(2) Voy. 1. V. 19, et les notes suivantes. Au etiap. 1 du 1. II, il emploie
le mot lapidare.
(3) Grégoire de Tours, I. IV, 50.
(4) Ibid., 1. X, 10.
(5) G. XXXII ; ap. D. Bouquet, t. II, p. 423.
(6) G. XIII; ap. D. Bouquet, t. II, p. 620.
(7) Voy. mes Études sur Vhistoire du droit criminel des peuples
ancieris, t. II, p. 20.
2n>e SÉRIE, TOME XLIV. 30
( m )
parce que, sous le règne île Théodebcrt, il avait imposé de
lourds tributs au peuple (1).
Le bûcher, pas plus que la lapidation , n'est cité dans
les lois franques antérieures à Charlemagne.La Lex emen-
data, de même que les Capilulaires, gardent à son égard
un silence absolu. Un seul manuscrit de la loi salique en
fait mention , pour l'empoisonneur incapable de payer la
composition légale, et ce passage est justement soupçonné
d'être une interpolation faite par un copiste du huitième
siècle (2). Cependant cette peine, plusieurs fois citée dans
les lois des autres peuples d'origine germanique, était in-
(1) Grégoire de Tours, 1. III, 36 Sous le règne de Chilpéric, le peuple
de Paris voulut lapider l'évêque Prétextât, accusé d'avoir comploté l'assas-
sinai du roi (Ibid., I. V, 19). Le peuple de Tours chercha à faire périr de
la même manière l'évêque Brice, accusé d'incontinence (Ibid., I. II, 1).
(2) Manuscrit de Wolfenbullel, XIX, 1. Feuerbach suppose que le
copiste était Visigolh et a voulu enrichir la loi salique d'une disposition
emprunlée aux lois de son pays (Die Lex salica und und ihre verschiedenen
Recensionen, pp. 73 à 78). La peine du feu est, en effet, comminée par la
loi des Wisigolhs contre l'empoisonneur (1. VI , t. 11 , 2). Il est plus pro-
bable que, du temps du copiste, la peine de mort avait élé étendue à
l'empoisonneur, soit par le c. IV du décret de Childeberl II de 596, soit
par un capitulaire qui n'est pas parvenu jusqu'à nous , et que l'usage avait
désigné le bûcher.
On trouve encore la peine du feu, comme châtiment du sacrilège, dans
la Lex Frisionum, pour la province païenne (Add. Wlemari, XII); dans
les lois des Anglo-Saxons , pour l'esclave voleuse (Aedst. Dunhr. 6); dans
la loi des Wisigoths, pour l'homme libre qui , dans une ville,mel le feu à la
maison d'autrui , et pour esclave qui commet ce crime, même hors delà
cité (1. V1I1 , t. II, 1), pour le serf qui viole un tombeau (I. XI, t. II, 1),
pour le commerce illicite d'un esclave avec une femme libre (LUI, 1. 11,2;
t. IV, 14). De la combinaison de ces textes, M. Davoud-Oghlou a conclu
avec raison que, chez les Visigoths, les mots mors turpissima (1. II , t. II,
2) désignent incontestablement le bûcher (Histoire de la législation des
anciens Germains , t. I, p. 160).
conteslablement usitée chez les Francs, après la conquête
des Gaules. Grégoire de Tours rapporte plusieurs exem-
ples d'individus condamnés à périr dans les flammes. Une
femme qui avait mal parlé de Clovis, fils de Chilpéric Ier,
fut déclarée coupable de lèse-majesté, attachée à un po-
teau et brûlée vive (1). Une femme du Mans, concubine
d'un clerc, ayant pris des habits d'homme, fut brûlée
comme coupable d'adultère (2). La reine Frédégonde fit
brûler des sorcières accusées d'avoir pratiqué des malé-
fices et des enchantements pour faire mourir son fils (5).
Chrammes'étant révolté contre son père Chlolaire, celui-
ci le fit brûler dans une cabane où il s'était retiré avec sa
femme et ses filles (4). On saurait difficilement voir
dans ce dernier fait un supplice légal; mais il n'est peut-
être pas sans intérêt de faire remarquer que les Sagas du
Nord parlent, à plusieurs reprises, de coupables brûlés dans
leurs maisons (5).
Aux Deines capitales que nous venons de passer en
revue, Grimm, dans ses Reclitsalterthiimer, ajoute la
noyade (6). Nous ne saurions nous ranger à cet avis pour
ce qui concerne l'empire des Francs sous la dynastie méro-
vingienne. Il est vrai que les anciens Germains noyaient
dans la fange les lâches et les prostitués (7). Il est vrai
encore qu'on rencontre la noyade dans les lois d'autres
(1) Grégoire de Tours, !. V,40.
(2) L. VI , 56.
(3) lbid.,c. 53
(4) Ibid., IV, 20.
(o) Grimm, Rechlsalterthûmer, p. 700.
(6) P. G96. Wiliia, Strafrecht der Germanen, p. 507, affirme aussi que
les historiens des Francs citent la noyade parmi les peines légales.
(7) Voy. ci-dessus, p. 408.
( 456 )
peuples sortis, comme les Francs, des forêts de la Germa-
nie (1). Il est vrai enfin que, vers le milieu du neuvième
siècle, sous la dynastie carolingienne, une empoisonneuse
du nom de Gerberge fut condamnée à être noyée (2).
Mais le premier de ces faits est antérieur à l'époque qui
nous occupe, le second est étranger à la législation des
Francs, et le troisième se manifeste plus d'un siècle après
la disparition des Mérovingiens; on ne saurait pas plus
s'en prévaloir que des noyades pratiquées, longtemps après,
sous les règnes de Philippe-Auguste, de Charles VJ, de
Charles VII et de Louis XI. Quant aux passages de
Grégoire de Tours invoqués par Grimm, ils sont complè-
tement dépourvus de force probante; ils ne sont que des
récits de quelques-uns de ces effroyables actes de cruauté
qui déparent les annales des rois de la première race.
Gondebaud égorgea son frère Chilpéric, et, ayant attaché
une pierre au cou de sa belle-sœur, il la noya (3). Deutérie,
femme de Théodebert, jalouse de sa propre fille, la mit
dans un chariot attelé de bœufs indomptés, qui la précipi-
tèrent du haut d'un pont dans le fleuve (4). Gonsuinthe,
enflammée de colère, prit une jeune fille par les cheveux,
la foula longtemps sous ses pieds, et, couverte de sang,
ordonna qu'on la plongeât dans une piscine (5). Il suffit de
rapporter ces faits pour en déterminer le véritable carac-
(1) Chez les Bourguignons, la femme qui quittait son mari était noyée
dans la fange ( Lex Burgundionum, t. XXXIV, 1 ). Chez les Anglo-
Saxons, la femme condamnée à mort était noyée. Davoud-Oglilou, Op.
cit, t. Il, p. 693.
(2) Annales Bertiniani , ad. an. 834. Pertz, I, 428.
(3) L. II, 28.
(i) L. III, 26.
(3) L. V, 39.
( «7 )
1ère. Aucun jurisconsulte éclairé ne consentira à y voir
l'application d'une peine prononcée en vertu du droit na-
tional. Autant vaudrait convertir en peines légales les
horribles tortures qui mirent fin à la vie de Leudaste et à
celle de Bru nehault (1). Les seuls supplices qui avaient, chez
les Francs, un caractère incontestablement légal étaient la
mort par le glaive, la pendaison, la roue, la lapidation et le
bûcher.
Ces supplices étaient souvent accompagnés de tortures
et de mutilations. Aux condamnés pour crime de lèse-
majesté, on coupait, avant l'exécution, les mains, les pieds,
les oreilles et les narines (2). Les voleurs et les meurtriers,
avant d'être suspendus au gibet, étaient parfois mutilés,
étendus sur des roues, accablés de coups de verges et de
bâton (3). « Mourir d'une manière cruelle, mourir dans les
» tourments » sont des locutions familières aux histo-
riens du temps (4). Les rois et les juges variaient et mul-
tipliaient les tortures avec une fécondité d'imagination
digne des implacables justiciers qui parurent à la fin du
moyen âge.
Il semble même que les Francs avaient poussé l'art
de torturer à un très-haut degré. Parlant d'un clerc,
condamné à mort comme coupable de lèse-majesté, Gré-
goire de Tours s'exprime ainsi : « J'eus grand'peine à ob-
» tenir sa vie, et ne pus l'exempter des tourments. Je ne
» crois pas qu'aucune chose inanimée, aucun métal eût
(1) Grégoire de Tours, 1. VI, 31 Frédég;iire, c. XLII.
(2) Grégoire de Tours, 1. V, 19, 27 ; I. VIII, 29.
(3) Ibid., I. VI, 8; I VII, 47.
(4) Crudeli nece diversis mortibus adfecerunl (Grégoire de Tours, 1. V,
19). Inter supplicia defeerrunt (Ibid., X, 18).
( 438 )
» pu résister à lous les coups que supporta ce pauvre nii-
» sérable. A la troisième heure ou le suspendit à un arbre,
» les mains liées derrière le dos; on le détacha à la neu-
» vième et on retendit sur des roues, où il fut frappé à
» coups de bâton, de verges, de courroies mises en double ;
» et cela non pas seulement par un ou deux hommes,
» mais tant qu'il en pouvait approcher de ses misérables
» membres, lous le frappèrent (1). » On cherche en vain
l'indice d'un texte de loi ou d'une coutume ayant limité
l'action arbitraire des juges dans l'exercice de la redou-
table prérogative de désigner les tortures préalables.
Le même pouvoir arbitraire desjuges se manifeste dans
le choix du supplice. Très-sou vent on voit infliger des peines
différentes à des auteurs d'actes de même nature. Le gibet
était la peine ordinaire des voleurs (2), et cependant nous
savons, par Grégoire de Tours, que les deux fils de Wad-
don , qui avaient désolé le territoire de Paris par des vols et
des meurtres, furent condamnés, l'un à avoir la tête tran-
chée, l'autre à l'exil (3). En matière d'adultère, on ren-
contre tantôt le gibet et tantôt le bûcher (i). La même
inégalité se manifeste dans la répression du crime de
lèse-majesté. L'historien des Francs, racontant la triste
fin des complices de la révolte de Mérovée, fils de Chil-
péric, s'exprime ainsi: « Gaïlen , ayant été pris, on lui
» coupa les mains, les pieds, les oreilles, le dessus des
» narines et on le fit périr misérablement. Grindion fut
» condamné au supplice de la roue. Cucilion, autrefois
(1) L. V, 50.
(2) Voy. ci-dessus, p. 429. Grégoire de Tours, 1. VI, 8.
(3) L. X, 21.
(4) Grégoire de Tours, I. V, 35; VI, 3G.
( 4:,<) )
» courte du palais du roi Sigebert, eut la tête tranchée.
» Beaucoup d'autres, venus avec Mérovée, furent mis à
» mort de diverses et cruelles manières (1). » Ailleurs,
parlant de deux clercs et d'un serviteur qui avaient reçu de
Frédégonde la mission de tuer Childebert II, il dit : « On
» les appliqua à divers tourments, on leur coupa les mains,
» les oreilles et les narines, et ils moururent chacun
» d'une mort différente (2). » Ailleurs encore, il raconte
que des sorcières, accusées d'avoir pratiqué des maléfices
pour l'aire mourir le fils de Chilpéric Ier, périrent les unes
sur la roue et les autres sur le bûcher (5). Les juges choi-
sissaient le supplice qui, à leur avis, se trouvait le mieux
en rapport avec les circonstances concomitantes du crime;
et c'est probablement de cette manière qu'il faut expliquer
les termes généraux et vagues dont les capitulaires méro-
vingiens se servent pour désigner la peine capitale.
Il nous reste à rechercher quelle était dans l'opinion des
juges du temps la gravité respective des divers supplices
que nous avons énumérés.
Wilda soutient que, chez les peuples germaniques, l'exé-
cution par le glaive ou la hache était la « mort simple », et
que toutes les autres peines capitales doivent être rangées
(1) L. V, 19.
(2) L. VIII, 29. On remarque la même inégalité dans les supplices infli-
gés à ceux qui étaient entrés dans un autre complot dirigé contre la vie
de Childebert. « Los uns, dit Grégoire de Tours, furent condamnés à la
prison, d'autres eurent les mains emportées; plusieurs, les nez et les
oreilles coupés, furent livrées à la risée publique... Plusieurs moururent
dans les supplices, afin que l'honneur du roi fût vengé. » L. X , 18.
(3) L. VI, 55. Il est vrai que, pour ce dernier cas, il est permis de
douter s'il s'agissait réellement d'une condamnation judiciaire. L'historien
dit que ces femmes furent mises à mort par autorité de la reine.
( MO )
au nombre des morts « qualifiées » ou a exaspérées (1). »
Nous n'hésitons pas à nous ranger à cet avis pour ce
qui concerne le droit pénal des Francs.
D'après une tradition constante, qu'on retrouve chez
toutes les nations d'origine germanique , la mort par le
glaive était réputée moins déshonorante que la mort au
gibet. Il est certain que ce sentiment existait déjà à l'époque
reculée qui l'ait l'objet de nos investigations. L'auteur ano-
nyme de la Vie de saint Léger dit que la mort au gibet est
un supplice très-honteux (2). Il était fréquemment appliqué
aux esclaves (5) et avait pour conséquence l'exposition du
cadavre aux regards et aux insultes de la foule (4). Au
troisième livre de l'Histoire des Francs, nous voyons un
barbare , poursuivant deux prisonniers fugitifs, dont l'un
était un esclave et dont l'autre appartenait à une famille
distinguée, s'écrier en jurant: « Je ferai condamner l'un
» au gibet et hacher l'autre à coups d'épée (5). »
Le gibet était donc réputé plus flétrissant que le glaive;
mais le supplice de la roue, qui entraînait également
l'exposition du cadavre, était, de son côté, réputé plus dou-
loureux et plus infamant que le gibet. Un capilulaire,
ajouté à la loi salique et que nous avons déjà cité, dit for-
mellement que l'esclave, assez audacieux pour épouser une
femme libre, doit subir la mort la plus honteuse, la mort
sur la roue : pessima crucialu (pœna) ponatur, hoc est in
rota mittatur (6).
(1) Strafreclit der Germanen , p. 500.
(2) C. XIV5ap. D. Bouquet, t. II, p. 621.
(3) Grégoire de Tours, 1. VII , 46, 47.
(4) Voy. ci -dessus, p. 432.
(5) LUI, 15.
(6) Pardessus, Loi salique, Capita extravaganlia, t. V.
( i M )
On n'éprouve ainsi aucun embarras dans la classilication
du glaive, de la polence et de la roue; mais il n'en est pas
de même pour les deux autres peines capitales usitées chez
les Francs. Il est difficile de constater, en l'absence com-
plète de témoignages historiques, quelle place on assignait
à la lapidation dans la triste échelle des supplices; mais le
bûcher, que les Wisigoths réputaient la plus honteuse des
peines (1), fut de tout temps, en France et en Alle-
magne, réservé à des crimes qui portaient un cachet par-
ticulier de perfidie ou d'infamie, tels que l'inceste au
premier degré, la magie, l'empoisonnement, le parricide.
On peut, sans méconnaître les lois de la saine critique,
faire remonter cet usage jusqu'au berceau de la monarchie
française.
L'enseignement qui ressort des pages qui précèdent n'est
pas difficile à saisir.
Ceux qui placent le système de répression des Francs à
peu près exclusivement dans le payement d'une compo-
sition, mise en rapport avec la gravité de l'acte et la qualité
de la victime, commettent une erreur grave. La peine de
mort, variée dans son exécution , rendue plus ou moins
infamante et douloureuse suivant l'importance ou le carac-
tère odieux du crime, occupait une large place dans la
législation pénale de la période mérovingienne. Si l'on ne
trouve pas dans la loi salique, dans la loi ripuaire et dans
les capilulaires de la première race toutes les peines capi-
tales qui figurent dans d'autres codes des peuples germa-
niques (2); si les sujets de Chlotaire Ier et de Dagobert II
(1) Voy. ci-dessus , p. 434.
(2) La noyade dans la fange était usitée chez les Burgondes (Lex Bur-
gundionum, t. XXXI V, 1). Les Wisigoths connaissaient la mort sous la
( 44^2 )
ne connaissaient pas certains supplices atroces des temps
modernes, tels que l'écartèlement au moyen de chevaux
attelés aux extrémités du corps, il n'en est pas moins in-
contestable qu'ils étaient loin de partager les sentiments
d'humanité que manifestait le législateur des Bavarois , en
écrivant ces lignes remarquables : « Qu'aucun Bavarois ne
» soit condamné à mort, à moins qu'il n'ait comploté la
» mort du duc, engagé les ennemis à envahir la province
» ou machiné avec l'étranger la prise d'une cité (1). » Ils
étaient loin surtout des nobles aspirations qui guidaient le
roi anglo-saxon Aedhelred, quand il donnait ce sage con-
seil aux justiciers de son royaume : « Il ne faut pas légè-
» rement condamner un homme à mort et détruire ainsi
» l'œuvre et l'image de Dieu que Jésus-Christ a rachetée
» si cher (2). »
discipline (Lex Wisigothorum, 1. VI, t. V, § 8). Chez les Anglo-Saxons,
la femme condamnée à mort pour vol élait noyée {Davoud-Oghlou , Op.
cil, t. II, p. 379).
(1) Lex Bajuvâriorum, t. II, c. I, § 5. Le lexle ajoute : « Cetera vero
quœcumque commiserit peecata quousque habel subslantiam componat
secundum legem.
(2) Davoud-Oghlou, Op. cit., t. II, p. 694.
( uz )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du il octobre 1877.
M. Alvin, directeur, président de l'Académie.
M. Lfagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. Portaels , vice-directeur; L. Gallait,
Guill. Geefs, Jos. Geefs, C.-A. Fraikin , Éd. Félis, Edm.
De Busschcr, Alph. Balat, le chevalier L. de Burbure,
J. Franck, Gust. De Man, J. Leclercq, Ern. Slingeneyer,
Alph. Bohert, F.-A. Gevaert, Ad. Samuel, G. Guffens,
membres; Éd. de Biefve, correspondant.
MM. Éd. Mailly, membre de la classe des sciences, et
B. Ghalon, membre de la classe des lettres, assistent à la
séance.
COBBESPONDANCE.
La classe apprend avec un vif sentiment de regret la
mort de l'un de ses associés de la section de gravure,
M. Jean-François-Antoine Bovy, né à Genève en 1795,
M. Bovy avait été élu le 8 janvier 1847.
— M. le Ministre demande que la classe s'occupe d'un
( AH )
programme d'études à suivre par les lauréats du grand
concours de gravure, pendant leur séjour à l'étranger. —
Renvoi à la commission des prix de Rome.
— Le même haut fonctionnaire écrit qu'il a invité le
conseil d'administration de l'Académie royale des beaux-
arts d'Anvers à donner connaissance à M. Cuypers, lauréat
du grand concours de sculpture de 1872, de l'avis émis
par la classe des beaux-arts sur le neuvième rapport
semestriel de ce lauréat.
— La classe reçoit à titre d'hommage, les ouvrages sui-
vants au sujet desquels elle vote des remercîments :
1° Œuvres d'André Van Hasselt, poésies, 4e et 5e vo-
lumes; prose, 4e volume. Ensemble 5 vol. in-12. (Envoyé
par le Déparlement de l'Intérieur);
2° P.-P. Rubens, aanteekeningen over den grooten
meester eu zijne bloedverwanten, door P. Génard, 2e aflev.
In-4';
5° De klokke Roeland , cantate, avec traduction fran-
çaise, par M. J. Sabbe. In-8°.
— Le gouvernement du Venezuela annonce la création
d'un Institut des beaux-arts à Caracas.
( 445 )
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Bormans (Stanislas). — La famille d'Harscamp. Généalogie
historique. Namur, 1877; extr. in-8°.
Juste (Théod.). — La rivalité de la France et de la Prusse
d'après de nouveaux documents (1757-1871). Bruxelles, 1877;
in-8°.
Xolet de Brauwere van Steeland (Dr. /.). — Poëzy en
Proza. Amsterdam, 1877; vol. in-8°.
Potvin (Charles). — Du gouvernement de soi-même : Les
Principes. — Le Devoir. — La Vie privée. — La Patrie. — Le
Travail. — Les Nations. — Paris, Bruxelles , etc.; 6 broch.
pet. in-8°.
Gachard. — Histoire politique et diplomatique de P.-P.
Rubcns. Bruxelles, 1877; vol. in-8°.
Scheler (Aug.). — Aigar et Maurin. Fragments d'une chan-
son de Geste provençale inconnue. Bruxelles, 1877 ; br. in-8°.
Deux rédactions diverses de la légende de sainte Marguerite
en vers français, publiées avec variantes, d'après des MSS.
Anvers, 1877; extr. in-8°.
Wagener (A.). — Les travaux de M. G. Andresen sur le Dia-
logus de oratorihus. Gand, 1877; br. in-8°.
Beco (Jean). — Rapport sur l'industrie du zinc, du cuivre
et du plomb aux États-Unis d'Amérique; 2me partie, industrie
du cuivre. Bruxelles, 1877; br. in-8°.
Deby (Julien). — Rapport sur l'industrie sidérurgique aux
États-Unis au point de vue des intérêts commerciaux de la
Belgique. Bruxelles, 1877; br. in-8°.
Génard (P.). — P.-P. Rubens. Aanteekeningen van dcn
grooten meester en zijne bloedverwanten, 2e livraison. Anvers,
1877; broch. in-4°.
( 446 )
Degeorge (Léon). — La Maison Plan tin à Anvers. Bruxelles,
1877 ; br. in-8°.
Marchai (le chev. Edmond). — Mémoire sur la sculpture aux
Pays-Bas pendant les XVIIe et XVIIIe siècles, précédé d'un
résumé historique. Bruxelles, 1877; vol. in-4°.
Sabbe (Jul.). — De Klokke Roeland, cantate. La Cloche
Roland, traduction de la cantate flamande. Bruges, 1877; br.
in-8°.
Hemptinne (A. De). — Appareil de concentration à 66 de-
grés de l'acide sulfurique. — Nouveau procédé de fabrication
de l'acide sulfurique. — Fabrication de l'acide sulfurique.
Bruxelles, 1875-77; 5 extr. in-8°.
Royaume de Belgique. — Recueil des rapports des secré-
taires de légation de Belgique, tome III, 7rae livraison. Bruxelles,
1877; br. in-8°.
Ministère de l'Intérieur. — Statistique médicale de l'armée
belge (1870-74). Bruxelles, 1877; vol.in-4".— OEuvres d'André
Van Hasselt, prose, tome IV; poésies, tomes IV et V. Bruxelles,
1877; 5 vol. in-12. — Le Doryphora decemliueata, coléoptère
du Colorado. Bruxelles, 1877; br. in-12.
Société archéologique de Namur. — Table des annales
(vol. I-XU). Namur, 1877; vol. in-8°.
Annales des travaux publics de Belgique, tome XXXV,
1er cahier. Bruxelles, 1877; br. in-8e.
De Vlaamsche School , 2d semestre de 1877. Anvers;
12 feuilles in- 4°.
Société royale de numismatique. — Revue belge, 4e Iivr. de
1877. Bruxelles; in-8°.
Allemagne et Autriche-Hongrie.
Schlagintweil- Sakùnlïmski (H ermann von). — Klimatisuber
Charakter der pflanzengeographischen Regionen Hochasiens.
Munich, 1876; exlr. in-4°.
( «7 )
Mûhry (Dr. Adolf). — Ueber die exacte Natur-Philosophie.
Gottingue, 1877; br. in-12.
Biderman (//.-/.). — Die Romanen und ilire Verbreitung
in Ôsterreich. Gratz, 1877; br. gr. in-8°.
Akademie der Wissenschaften zu Mùnchen. — Sitzungs-
berichte der mathem. Classe, 1877 n° 1. — Abhandlungen der
hislor. Classe, tome XIII, 2mc livr. Munich, 1877; br. in-8° et
br. in-4°.
Senckenbergische naturforschende Gesellschaft. — Bericht,
1875-1876.— Abhandlungen, tome XI, n° I. Francfort S/M,
1877; 1 br. in-8° et 1 br. in-4°.
Aslronomische Gesellschaft. — Vierteljabrsschrift,2me livrai-
son de 1877. Leipzig; br. in-8°.
K. Bibliothek zu Stuttgart. — Festscbrift zur vierten Sacu-
lar-Feier der Universitat zu Tiïbingen. Stuttgart, 1877; br.
in-4°.
Historischer Verein fur Steiermark. — Mitlhcilungen,
25. Heft. — Beitrâge zur Kunde steierm. Geschichtsquellen,
14. Jahrgang. Gratz, 1877; 2 br. in-8°.
Berliner Gesellschaft fur Anthropologie , Ethnologie und
Urgeschichte. — Sitzungen, 11 u. 17 febuar 1877. — Verhand-
lungen, Jahrgang 1877. Berlin ; 3 br. in-8°.
Historischer Verein fur Unterfranken und Aschaffenburg.
— Archiv, XXIV. Bd. 1. Heft. — Die Geschichte des Bauern-
krieges in Ostfranken von Lorcnz Fries, lre livraison. Wurz-
bourg, 1870-77; 2 br. in -8°.
Puscariu [Johann Rilter von). — Das Stcrcometer, privilé-
giées Korper-Messinstrument. Buda-Pest, 1877; br. in-8°.
Kôn. stalistisches Bureau in Berlin. — Preussische Slalis-
tik, XXXXIV. Berlin, 1877; br. in-4°.
Gesellschaft fiir Natur- und Heilkunde in Dresden. —
Jahresbericht 1870-77. Katalog der Bibliothek der Gesellschaft.
Dresde, 1877; 2 br. in-8°.
( 448 i
Naturh.-medicinischer Verein zu ffeidelberg. — Verhand-
lungen, 2. Band, 1. Heft von 1877. Heidelbcrg; br. in-8°.
IVaturwiss. Verein fur Schleswig-Holstein. — Schriften,
tome II, 2e livraison. Kiel, 1877; in-8°.
Verein fur valerldndische Naturkunde. — Jahreshefte,
55e année. Stuttgart, 1877; in-8°.
Nalurforschende Gesellschaft in Freiburg. — Verhand-
lungen, Bd. VU, Heft I . Fribourg, 1877; br. in-8°.
Geologische Reichsanstalt zu Wien. — Al)bandlungen ,
tome VII, n° 4. — Jabrbucb, 1877, n° 2. — Verbandlungen,
1877, nos 7-10. Vienne; 1 br. in-i° et 2 in- 8°.
Anthropologische Gesellschaft. — Mittbeilungen, Bd. VII,
nos 4-6. Vienne; in-8°.
Universitàt zu Kiel. — Scbriften aus dem Jalire 187C.
Kiel, 1877; vol. in-4°.
Amérique.
Packard (A.S.). — Beport of tbe rocky mountain locus and
olber insects. Washington, 1877; vol. in-8°.
Ericsson (John). — Contributions to tbe centennial exhi-
bition. New-York, 1876; 1 vol. in-4°.
Smith (Lawrence). — A description of the Rochester, War-
renton and Cynthiana meteoric stones. Brocb. in-8°.
Geological survey of Canada. — Exploration géologique du
Canada, rapport des opérations de 1875-76. Montréal, 1877;
vol. in-8°.
Observatory of Harvard collège. — Annals, tomes VI-VIII.
Cambridge, 1871-76; 5 vol. in-4°.
Muséum of comparative zoology at Cambridge. — Memoirs,
vol. V, n" 1. Cambridge, 1877; in-4°.
Meteorological office of Canada. — Sixtb annual report.
Ottawa, 1877; vol. in-8°.
( 449 )
Danemark.
Société des sciences de Copenhague. — Oversigt, 1876, n° 2.
— Mémoires, tome XI, nos 3 et 4 de la classe des sciences. —
Tyge Brahes mcteorologiske dagbog for 1582-1597. 'Copen-
hague, 4876-77, 1 br. in-8°, 2 br. in-4° et 1 vol. in-8°.
Espagne.
Observatorio de Marina de San Fernando. — Almanaque
naulico pour 1878. Madrid, 1877; vol. in-8°.
France.
Société des antiquaires de Picardie. — Bulletin n° 2 de
1877. Amiens; br. in-8°.
Académie de Stanislas. — Mémoires de 1876. Nancy, 1877 ;
vol. in-8°.
Société des architectes du département du Nord. — Bulletin
n° 6, 1875-74. Lille; br. in-8°.
Société linnèenne du Nord de la France. — Bulletin, 1877,
juillet-septembre. Amiens; feuilles in-8°.
Revue des questions historiques , 12rae année, livraison du
1er octobre 1877. Paris, in-8°.
Académie des inscriptions et belles -lettres de V Institut de
France. — Mémoires, tome XXV, lre partie. Paris, 1877; vol.
in-4°.
Société académique d'architecture de Lyon. — Annales,
tome V, 1875-76. Lyon, 1877; gr. in-8°.
Antoine (Ch.). — Des propriétés mécaniques de différentes
vapeurs. — De quelques propriétés mécaniques de la vapeur
d'eau saturée. — Des chaleurs totales des vapeurs à l'état de
saturation et à l'état de vapeurs surchauffées. — De l'applica-
2me SÉRIE, TOME XLIV. 51
( m )
tion des lois de Mariotte et de Gay-Lussac aux vapeurs. Brest,
1875-77; 4 broch. in-4°.
ffouel. — Catalogue des pièces du musée Dupuytren ,
tome I avec atlas. Paris, 1877; in-8°.
Peigné- Delacourt. — Recherches sur divers lieux des pays
des Silvanectcs. Études sur les anciens chemins de cette con-
trée. Amiens, 1804; br. in-8°. — Étude nouvelle sur la cam-
pagne de J. César contre les Bellovaques. Senlis, 1869; br.
jn-8». _ Le vélocifère employé dans le moyen âge en Belgique
pour le transport des fardeaux. Namur, 1870; br. in-4°. —
L'origine des noms de Bruxelles et de Louvain attribuée à
d'anciens appareils de chasse à La Haye. Namur, 1871 ; br.
in-8°.
Brassart (Félix). — Le Pas du Perron Fée tenu à Bruges,
en 1465, par le chevalier Philippe de Lalaing, publié pour la
première fois. Douai, 1874; br. in-80.— Histoire du château et
delà châtellenie de Douai, Châtelains, Prévôts, Gaveniers, etc.,
tomes I et II. Preuves, 1er fasc. Douai, 1877; 5 vol. in-8°.
Delaborde {le vle Henri). — Notice sur la vie et les travaux
de Jean-Joseph Pcrraud. Paris, 1877; br. in-4°.
Delisle [Léopold). —Fragment du dernier registre d'Alexan-
dre IV. Paris; feuille in-8°.
Delisle (Léopold). — La Bibliothèque nationale en 1876.
Rapport. Paris, 1877; br. in-8°.
Delisle [Léopold). — Notice sur cinq manuscrits de la Biblio-
thèque nationale et sur un manuscrit de la Bibliothèque de
Bordeaux, contenant des recueils épistolaires de Bérard de
Naples. Paris, 1877; extr. in -4°.
Giunde-Bretagne et Colonies.
Institution of civil engineers. — Minutes of proceedings ,
tome XLIX. Londres, 1877; vol. in-8°.
Zoological Society of London.
(4SI )
2me parties. — Transactions, tome X, lre et 2rae parties.
Londres, 1877; 2 br. in-8° et 2 in-i°.
Statistical Society. — Journal, tome XL, 2me partie. Londres,
1877; br. in-8".
Meteorological Society. — Quarlerly journal, 1877, juillet.
Londres; br. in-8°.
Society of anliquaries ofLondon. — Proceedings, 2,uc série,
tome VII, n° 2. — Arcbcologia : Miscellaneous tracts, tome
XLV. London, 1877; 1 br. in-8° et 1 vol. in-4\
Asiatic Society of Bengal. — Proceedings, 1876, novembre
et décembre; 1877, janvier-mai. — Journal (nafural bistory),
n° IV de 187G et n° I de 1877; (philosopby), n° III de 1876 et
n° I de 1877. Calcutta, i 870-77; in-8°.
Cambridge philosophical Society. — Proceedings, tome III,
lr' et 2me parties. ~ Transactions, tome XI, 5me partie; tome
XII, lre et 2me parties. Cambridge, 1871-77; 2 br. in-8° et 5
in-4°.
Royal geograpliical Society. — Journal, vol. XLVI. — Pro-
ceedings, vol. XXI, nos 4 et 5. Londres, 4877; in-8°.
Royal asiatic Society. — Journal, tome IX, 2",e partie.
Londres, 1877; in-8°.
Guèci:.
Saripolos (Nicolas). — Traité de droit criminel, tomes I-V,
(en grec moderne). Athènes, 1868-71 ; in-8°. — Traitéde droit
public, tomes I-V (en grec moderne). Athènes, 1874-7o;
5 vol. in-8°. — Pro Gracia, lIe et 2,ue parties. — Le passé, le
présent et lavenir de la Grèce. — Être ou ne pas être. — La
forme emporte le fond, etc., etc. Athènes; brochures in-8°.
( 452 )
Hollande.
Vrecde. — Deux protestations de citoyens hollandais contre
l'incorporation de la République sud-africaine, dite Trans-
Vaal, etc. Utrecht, 1877; br. in-8°.
Cosyn en Verwys. — Woordenboek der nederlandsche taal,
5de reeks, 6de aflev. (Gehalte-gekken). La Haye, 1877; br- gr.
in-8°.
Donders (F. C.) en Engelmann. — Onderzoekingen gedaan
in het physiologisch laboratorium der Utrechtsche boogeschool.
Utrecht, 1877; br. in-8°.
Eeden (F.-W. Van). — Flora Batava, afbeelding en beschrij-
ving van nederlandsche gewassen, 257e en 238e afleveringen.
Leide; in-4°.
Snellen van Vollenhoven (S.-C). — Pinacographia : Afbeel-
dingen van noordwest-europeesche sluipwespen, 5e livr. La
Haye, 1877; in-4°.
Nederlandsche entomologische vereeniging. — Tijdschrift
voor entomologie, tome XX, 3me et 4me livraisons. La Haye,
1877; 2 br. in-8°.
Société botanique du Grand-Duché de Luxembourg. —
Recueil des Mémoires, nos 2-3, 1875-76. Luxembourg, 1877;
br. in-8°.
Sterrenivacht te Leiden. — Catalogus van de boeken der
bibliotheek. La Haye, 1877; in-8°.
Alberdingk Thijm (Jos.). — De Dietsche Warande, nieuwe
reeks, 2de deel, 2dc aflev. Amsterdam, 1877 ; br. in-8".
BULLETIN
L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES,
DES
LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE.
1877. — N° 11.
CLASSE DES SCIENCES.
Séance du 40 novembre 1877.
M. Maus, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. Houzeau, vice-directeur ; J.-S. Stas,
L. de Koninck, P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Long-
champs, H. Nyst, Gluge, Melsens, F. Duprez, Ern. Quete-
Jet, Ern. Candèze, F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, Éd.
Morren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, F. Folie, F. Pla-
teau, F. Crépin et Éd. Mailly, membres; Th. Schwann,
E. Catalan, associés ;Ch. Van Bambeke, G. Van der Mens-
brugghe, correspondants.
2™ série, tome xliv. 52
( m )
CORRESPONDANCE.
M. le Ministre de l'Intérieur envoie, pour la Bibliothèque
de l'Académie, les livraisons 237 et 258 de la Flora batava;
la 5e livraison de la Pinacographia de M. Snellen van
Vollenhoven ; la brochure intitulée : Le Doryphora ; et
deux rapports sur l'industrie sidérurgique , par MM. J. Beco
et J. Deby, délégués belges à l'Exposition de Philadelphie.
— Les établissements scientiliques dont les noms sui-
vent ont fait parvenir leurs dernières publications : l'Aca-
démie des sciences de Vienne, l'Institut géologique de
Hongrie à Bude, le Verein fur vaterlàndische Naturkunde
à Stuttgart, l'Université de Kiel et l'Académie des sciences
de Stockholm.
— La Société royale de la Nouvelle-Galles du Sud, à
Sydney, remercie pour l'échange de publications accordé
par l'Académie, et annonce le premier envoi de ses
travaux.
— La classe reçoit, à litre d'hommage, les ouvrages
suivants, au sujet desquels elle vote des remercîments aux
auteurs:
1° Recherches sur les fossiles paléozoïques de la Nouvelle-
Galles du Sud (Australie), par M. L.-G. de Koninck, I vol.
in-8° avec atlas in-4" ;
2° Liste des jardins, des chaires et des Musées botani-
ques du Monde, 5e édition, par M. Éd. Morren. broch.
in-8° ;
( i55 )
5" Précis de chimie générale élémentaire, 2e édition,
tome III, par M. Louis Henry ; vol. in-8° ;
4° Recherches sur les graines originaires des hautes lati-
tudes, par M. A.Petermann ; broch. in-8° offerte au nom de
l'auteur par M. Malaise ;
5° Études sur les mines militaires, par M. le colonel
Cocheteux, vol. in-8°, offert au nom de l'auteur par
M. Liagre ;
6° Études sur la dissociation, par M. A. Bouvet; broch.
in-8° offerte au nom de l'auteur par le même;
7° Sur l'action locale des acides dilués, par M. le Dr Du
Moulin ; — Contributions à l'étude des échinides, par le
Dr Fredericq ; — Cristaux de phosphate ammoniaco-
magnésien sur les replis péritonéaux d'un python, par
Jules Mac-Leod ; o brochures offertes au nom des auteurs
par M. F. Plateau.
— M. le colonel Cocheteux, sur sa demande, sera remis
en possession du billet cacheté dont il avait demandé le
dépôt dans les archives le 6 avril 1872.
— Les travaux manuscrits suivants sont renvoyés à
l'examen de commissaires :
1° Recherches sur les Acinéliniens de la côte d'Ostende,
par M. Julien Fraipont. — Commissaires : MM. P.-J. Van
Beneden, F. Plateau et Van Bambeke ;
2° De l'action physiologique de la gelsémine, par MM. Fé-
lix PutzeysetH. Romiée. — Commissaires: MM. Schwann,
Éd. Van Beneden et Gluge ;
5° Recherches expérimentales sur le Daltonisme. Moyens
de le produire et de le corriger, par MM. J. Delbœuf et
W. Spring. — Commissaires : MM. Schwann, Gluge et
J. Plateau ;
( 456 )
4° Courbes et surfaces focales, par M. J. Bosel. — Com-
missaires : MM. Folie, Catalan et De Tilly ;
5° Recherches sur le développement du maxillaire infé-
rieur de l'homme, par M. H. Masquelin. — Commissaires :
MM. Éd. Van Beneden et Van Bambeke.
RAPPORTS.
Conformément à l'opinion émise par MM. Van Beneden
père et fils et M. Félix Plateau, la classe décide le dépôt
aux archives d'un travail de M. Ernest Lambert intitulé :
Morphologie du système dentaire des singes.
Il sera donné avis à l'auteur que le troisième commis-
saire a exprimé le désir de lui voir réduire son mémoire
aux proportions d'une courte notice, ne renfermant absolu-
ment que les résultats qu'il croit pouvoir signaler comme
neufs.
— La classe a décidé également le dépôt aux archives
d'une note de M. Achille Brachet sur un ternis au collo-
dion, examinée par MM. Melsens et Montigny.
Sur la détermination des volumes et des aires;
par M. Emile Ghysens.
Rapport dt- .ff. Catalan.
« L'idée première, d'où l'auteur a tiré sa formule fon-
damentale (4), n'est peut-être pas absolument nouvelle;
mais elle est ingénieuse, et M. Ghysens a su l'appliquera
( «S7 )
des questions intéressantes et difficiles. Nous croyons pou-
voir l'engager à étudier, de plus près, les remarquables
intégrales I et H, qu'il a imaginées, et qui contiennent,
comme cas particuliers, les intégrales elliptiques.
Enfin, M. Ghysens pourrait, peut-être, pendant l'im-
pression de son travail, étendre un peu le paragraphe V.
En résumé, ce petit Mémoire nous paraît très-digne
d'être approuvé par l'Académie, et publié dans le Bulletin
de la séance. »
La Classe a approuvé ces conclusions, auxquelles a adhéré
M. De Tilly, second Commissaire.
Études sur russification. I. Évolution du cartilage em-
bryonnaire chez les mammifères; par M. H. Leboucq.
RaftpuÈ't tte- il. Mùtlouut'tl I etit MSetietlen.
« Le Dr Leboucq, chef des travaux anatomiques à l'Uni-
versité de Gand, a étudié, en se servant d'une méthode
nouvelle, le mode de formation du tissu osseux dans les
os longs, dans le but d'élucider la question de savoir jusqu'à
quel point le cartilage intervient dans la formation de l'os
qui se substitue à lui. Le cartilage embryonnaire est-il rem-
placé par un tissu de nouvelle formation ou bien l'os est-il
un produit de la transformation du cartilage?
Cette question souvent étudiée a été diversement ré-
solue par les nombreux histologistes qui, depuis Schwann,
se sont occupés de l'évolution du tissu osseux.
La méthode employée dans les recherches est ici d'une
( 458 )
importance considérable et la valeur des résultats dépend
en grande partie de ce que vaut le procédé opératoire que
l'on pratique. L'auteur a eu recours au traitement par
l'iode, pour colorer les cellules du cartilage, de manière à
les rendre bien apparentes au milieu d'autres cellules.
Neumann avait constaté que, soumises à l'action d'une
solution iodée, les cellules cartilagineuses voisines de la
limite d'ossification se colorent en brun-acajou, tandis que
les éléments de la couche granuleuse se colorent en jaune.
Leboucq décalcifie ultérieurement les coupes en les trai-
tant, sur le porte -objet, par la glycérine acidifiée par
l'acide formique ou l'acide acétique. Il a constaté que, par
l'emploi de ces procédés, les cellules cartilagineuses ne se
déforment aucunement et qu'elles prennent une colora-
lion tout à fait caractéristique, alors même qu'elles ont été
au préalable soumises à l'action de l'alcool.
L'auteur expose ce que l'analyse de ses préparations lui
a révélé et conclut en affirmant que les cellules cartilagi-
neuses prennent une part active à la formation des os
longs chez les mammifères. On les trouve en effet dans
les canaux médullaires primordiaux où elles remplissent
le rôle d'ostéoblastes.
Dans le stade d'évolution de l'os, caractérisé en ce que
la ligne d'ossification de la diaphyse vers l'épiphyse est
nettement marquée, l'auteur trouve encore comme preuve
de sa manière de voir, ce fait que les cellules cartilagi-
neuses persistent non altérées jusqu'à cette limite.
Le travail du Dr Leboucq a été fait au laboratoire d'his-
tologie de l'Université de Gand, sous la direction de notre
confrère Van Bambeke. L'autorité de ce dernier en matière
d'histologie et la valeur des travaux antérieurs du De Le-
boucq constituent une double garantie quant à l'exactitude
( 4&9 )
des observations sur lesquelles reposent ces conclusions.
Aussi je n'hésite pas à proposer à la classe 1° d'ordonner
l'impression de ce travail dans les Bulletins de l'Académie;
2° de voter des remercîments à l'auteur pour son intéres-
sante communication.
Le travail est accompagné d'une planche indispensable
à l'intelligence du texte. J'ai l'honneur de proposer à la
classe de la faire reproduire par la cromolilhographie. »
La classe a adopté ces conclusions, auxquelles ont adhéré
les deux autres commissaires, MM. Schwann et Gluge.
Recherches sur le développement du maxillaire inférieur
de l'homme; par M. H. Masquelin.
Êltipitoft de M. Edouard Van* Mtetteden.
« J'ai pris connaissance du travail sommaire que M. Mas-
quelin a présenté à l'Académie et dans lequel il a rendu
compte de ses recherches sur la formation de l'os maxil-
laire inférieur chez l'homme.
Il a constaté des faits nouveaux, qui sont d'un haut
intérêt pour les questions tant controversées de l'ostéo-
genèse. J'ai vu les préparations de M. Masquelin et je suis
en mesure de garantir l'exactitude de ses observations.
Je n'hésite donc pas à proposer à l'Académie l'impression
de son travail dans le Bulletin de la séance. »
La classe a adopté ces conclusions, auxquelles a souscrit
le second commissaire, M. Van Bambeke.
( 460 )
Note sur l'extension des théories de l'involution
et de l'homographie; par M. C. Le Paige.
Rapport flf M. Folie.
« Dans un travail inséré au Bulletin d'octobre 1877,
M. Le Paige a développé la notion nouvelle, qui lui est
due, de %i points conjugués harmoniques du ne ordre.
Il revient, dans celui-ci, sur la condition qui exprime
cette relation, et lui fait prendre diverses formes, analo-
gues à celles qui caractérisent les points harmoniques du
second ordre, au moyen de simples transformations de
déterminants.
Partant, d'abord, de la condition, qu'il a donnée précé-
demment, de l'involution de [n ■+• \)n points, il montre
qu'elle peut se réduire à la forme suivante
2" + ipt(x-it)...(x-K) = 0;
1 = 1
et il interprète les constantes, pour toutes les valeurs de n
depuis 1 jusque 4; au delà, l'interprétation géométrique
de ces constantes ne deviendrait possible qu'en recourant
aux variétés à n dimensions de Riemann.
Dans les formes mêmes qu'il trouve, il rencontre des
théorèmes très-généraux, dont l'un avait été employé par
Hesse, comme un nouveau mode de transformation des
figures.
II passe ensuite du cas de l'involution au cas des points
( M )
conjugués harmoniques, ce qui transforme la relation pré-
cédente en
pt ( x — a) -+- pi {x — fi)" -+- pz [x — v)n -+-•••-+- pfl+, (x — o)"= 0.
Ces relations générales ont, naturellement, comme cas
particuliers, celles qui appartiennent au second ordre.
Reprenant les invariants dont il s'était déjà occupé pré-
cédemment, et se servant de la notion du rapport anhar-
monique du n" ordre, que nous lui avions communiquée il
y a quelques jours, M. Le Paige trouve, très-simplement,
que ce rapport s'exprime par le quotient de deux inva-
riants.
Considérant une fonction plus générale, à laquelle il
donne le nom de fonction anharmonique , il retrouve la
notion qu'il a précédemment développée, de 2n points
conjugués harmoniques, et fait voir qu'elle est bien la
généralisation de celle de deux couples de points conjugués
harmoniques.
Il cherche également quelles sont les relations analo-
gues, pour les ordres supérieurs, à celles qui expriment,
dans le second ordre, l'involution de trois couples de points
au moyen de l'égalité de rapports anharmoniques; dans le
développement des calculs, il se borne à la considération
du troisième ordre, en faisant observer que la même marche
est tout à fait applicable aux ordres supérieurs; et il trouve
des relations qui offrent, en effet, une analogie complète
avec celles qui sont connues pour le second ordre.
Le travail se termine par des équations toutes nou-
velles, et très-remarquables, de l'homographie, soit pour
le second ordre, soit pour les ordres supérieurs.
M. Le Paige a montré, par tous ses travaux, combien la
théorie des formes peut rendre de services à la géométrie.
( 462 )
Cette dernière science lui sera fort redevable dans la
théorie de l'involution du ne ordre, qui était demeurée
inachevée, depuis qu'elle avait été découverte par Poncelet
et appliquée par nous à l'extension des théorèmes de Pascal
et de Brianchon ; aujourd'hui, on peut la dire aussi com-
plète que celle de l'involution du second ordre, grâce aux
travaux de M. Le Paige , et à sa découverte des points con-
jugués harmoniques du ne ordre, qui lui donne un complé-
ment indispensable; grâce un peu aussi, oserons-nous le
dire, à notre notion du rapport anharmonique du ne ordre,
qui permet de rattacher à celui-ci l'involution du même
ordre.
Nous proposons à la classe d'adresser à M. Le Paige des
encouragements et des remercîments bien mérités, et
d'ordonner l'insertion de sa note au Bulletin. »
La classe a adopté ces conclusions auxquelles s'est rallié
M. Catalan, second commissaire.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Éd. Van Beneden donne lecture d'un travail intitulé :
Contribution à l'histoire du développement embryonnaire
des Téléostéens.
L'impression de cette communication a été différée sur
la demande de l'auteur, jusqu'à la prochaine séance.
( 165 )
Un nouveau principe de probabilités; par M. E. Catalan ,
Associé de l'Académie.
I.
Théorème. La probabilité d'un événement futur ne
change pas lorsque les causes dont il dépend subissent des
modifications inconnues (*).
J'ai appliqué ce théorème, et j'en ai même donné une
démonstration, dans une Note insérée au Journal de
M. Liouville (tome VI). Antérieurement, dans le célèbre
Mémoire sur davantage du Banquier, au jeu de trente-et-
quarante, Poisson avait recours, afin d'éviter de longs
calculs, à une considération ingénieuse qui ne diffère pas,
au fond, de celle qui constitue le principe énoncé (");
(*) Il s'agit ici, bien entendu, de ce que certains Géomètres appellent
probabilité subjective, el que l'on désignerait plus clairement, me semble-
t-il, sousia dénomination de probabilité extrinsèque, par opposition à la
probabilité intrinsèque. Si une urne contient 99 boules blanches et J boule
noire, la probabilité intrinsèque de l'extraction d'une boule blanche est à
peu près 1 : il est presque certain que la boule attendue sera blanche.
Mais, pour une personne qui saurait, seulement, que l'urne renferme des
boules blanches et des boules noires, la probabilité, extrinsèque cette fois,
serait ^.
(**) Cette assertion, émise par M. Emile Mondésir (Journal de Liou-
ville, tome II, p. 10), est peut-être trop absolue. En effet, Poisson dit
d'abord : «... lorsque ces cartes ont été mêlées, s'il existe une chance
« quelconque pour qu'un événement A arrive au premier coup et un
» événement B à un autre coup, au dixième, par exemple, il y a exacte-
» meut la même chance pour que l'événement B arrive au premier coup
» et l'événement A au dixième; car on peut former un autre arrange-
» ment de toutes les cartes, qui ne diffère de celui que le hasard a
» donné, qu'en ce que les cartes qui sortent au premier dbup sont rem-
( 4(54 )
mais l'illustre Géomètre n'a pas cherché, paraît-il, à géné-
raliser cette notion (*).
Depuis quarante ans, personne, à ma connaissance,
n'a démontré ni même formulé le principe qui fait l'objet
de la présente Note : c'est pourquoi je le qualifie de nou-
veau.
Avant d'en faire des applications, avant de le vérifier
sur un exemple, essayons d'en donner une démonstration
générale.
Comme on le fait ordinairement, assimilons l'événe-
ment attendu, à la sortie d'une boule blanche, d'une urne
A qui contient b boules de cette couleur, et n — b boules
noires, rouges, bleues, etc. Si l'on tire p boule (**), qu'on
» placées par celles qui sortent au dixième, et vice versa; il en résulte
s qu'avant que le jeu commence, la probabilité d'un refait de 51 est la
» même pour le premier coup, pour le dixième, ou pour tout autre
» coup. » (Annales de Gergo)ine, tome XVI, p. 191.) Ce raisonnement
semble établir, seulement, que la probabilité de l'arrivée de A au pre-
mier coup, et de l'arrivée de B au dixième, égale la probabilité de l'ar-
rivée de B au premier coup, et de l'arrivée de À au dixième; proposi-
tion incontestable.
Il est vrai que le célèbre auteur complète ainsi sa pensée : « Elle (la
« probabilité dont il s'agit) ne varie pendant la durée du jeu, que pour
» les joueurs qui ont la connaissance des cartes sorties; mais un joueur
» qui ne les connaîtrait pas devrait parier la même somme à tous les
» coups, pour l'arrivée d'un refait de 31. »
Autrement dit : « la sortie d'un certain nombre de cartes inconnues,
» ne change pas la probabilité de l'événement attendu » Et celte con-
clusion est d'accord, uon-seulement avec notre principe, mais encore avec
les premières notions de la théorie des probabilités.
(*) Il y a plus : dans les Recherches sur la probabilité des jugements.
Poisson énonce une conséquence du même principe , et il renvoie, pour
la démonstration, au Mémoire, de M. Mondésir.
(**) Le nombre p est connu ou inconnu, suivant que l'on a compté les
boules, ou qu'en ne les a pas comptées. Dans les deux cas, comme on
( 465 )
les introduise, sans les regarder, dans une urne B; les
probabilités d'extraire une boule blanche, soit de cette
urne B, soit de l'urne A, dont la composition a été modi-
fiée , sont égales à b.
Supposons, en effet, que l'on n'ait rien changé à la
composition primitive de A. La boule qui va sortir peut
être considérée comme faisant partie d'un groupe de
p boules, isolés parmi les n boules de A. On peut faire,
sur la composition de ce groupe, les mômes hypothèses
que l'on ferait sur celle de B : ce groupe inconnu peut
donc remplacer B (*). Semblablement, un groupe de
n — p boules, complémentaire du premier, peut tenir
lieu de l'urne A, modifiée. Le théorème est donc dé-
montré.
II.
Il y a dix ans, un Géomètre, à qui nous avions commu-
niqué la démonstration précédente, nous répondit :
2 - r2) E (c, p) + r* F( c, ?)}
Ka2 - r2
V.
On peut souvent évaluer, par des considérations ana-
logues à celles du paragraphe I, des aires partielles de
surfaces de révo'ution. Prenons, comme exemple, l'ellip-
soïde de révolution al-
longé ABC, repré-
senté par l'équation
r m d
I.
L'aire de la surface,
comprise entre le plan
Z Y etunplan DE F,
parallèle à celui-ci et
situé à la distance x de l'origine, a pour expression , comme
on sait,
S =tt6 xVl
( 544 )
pourvu qu'on pose
. «2 ~ b*
r2= -—
On a donc, en représentant par dX la partie infiniment
petite H I H' 1' , comprise entre deux plans voisins, menés
parOX,
d\ = - ix\/ï — r^x2 h — arc sin rxjd?,
on obtient l'aire A de la partie BCMN.
Supposons que l'on ait,
Il en résulte
par suite
4 -4- HiXi
1 — 2^1 -*- 2ptp2
1 — 2 vt H- 2 Vi Vi
conserve la même valeur absolue, lorsqu'on y remplace
A\, ^2-> ^ô'i Fi-> F-21 Pô ■> de., par des quantités, /', , V2 , X'3, etc.,
telles que
).\ = x — lr, Xj = x— is; etc.
En effet
2Ai = 5x-2>,; ï/u'i = 5x — ijut ; etc.
2>i>2 = 5a;2 — 2x 2/, -+- 2},/2; etc.
(*) Bull, de l'Académie royale de Belgique, l. XL1V. Octobre 1877,
p. 565.
( 5*7 )
Il en résulte que
D'=
1— 2 >i-+-2 >i >â
1— Z/Cj+Sac^j
=
1— 2v'4 -t-S^Vg
1 — ôx-f-s^ 5x2 — 2xï).| + ï/,i4
1 — DX-4-I//.J Sx*— 2x2^-+- 2^,//.,
1 — 5x-
-).i-
*2x 2 v, H- 2 y, j/j
Dans le second déterminant, ajoutons, à la seconde
colonne, les éléments de la première multipliés par Zx, ce
qui n'en change pas la valeur.
Nous aurons
D'=
1 2).t 5x2 — 2x2>4 -+- 2/,>.2
1 Z[i, ÔX2 — 2x2^, -+- 2pM/u.2
I 2 v, 5x2 — 2x 2 v, -+- 2 y, l/s
Si, aux éléments de la dernière colonne, nous ajoutons
les éléments de la première et ceux de la seconde, respec-
tivement multipliés par — ox2 et %x, nous trouvons
D' = -D.
On pourrait donner, de ce théorème, une interprétation
géométrique simple. Il est visible, de plus, que la démon-
stration s'applique à un déterminant de même forme que I)
et d'ordre quelconque.
Ceci établi, écrivons la condition d'involution de (n + l)«
points :
1 — 2).4 -f- 2^/2. . . dr >4>2. . . i„
i — iMi ■+• 2ft1(u2 . . . =b f/,^2 • • • P„
\ — lrs{ -+- 2ctjCT2 . . . do t^CTs .
= 0.
(I)
( 548 )
Ce déterminant, comme nous l'avons vu, ne change pas
de valeur absolue si nous y remplaçons >., , >.2, .... >„, etc.,
par x — l{,x — l2....x — /„ , etc. : il en sera de même
de chacun des mineurs :
1 Xj >2 '
'I 2ct£ -4- ICTjCTs . . . ^p 2îJiCT2 . . . W„.
Par suite, si nous développons le premier membre de
l'équation (1) suivant les éléments de la dernière colonne,
après y avoir effectué la substitution indiquée, nous trou-
vons
pl[x-ii){x-x^...{x—^-*-pt{x-iti)(x—f^...[x—/tl,)-^ -
-^pn+i{oc~^l){x-rz.2)...[x~rzn) = (), . . (2)
où pi , p2, .... p„ + i sont indépendantes de x.
Puisque nous en avons l'occasion, nous dirons quelques
mots de l'interprétation géométrique des quantités p.
Pour n = 2, les coefficients p, , p2, p3 sont proportion-
nels aux déterminants
sx,
etc.
par conséquent aux lignes ^ — zpn Vi — iv, , etc.; ou
aux distances qui séparent les points milieux des trois
couples.
Il en est encore ainsi pour les involutions de Zn points,
seulement les points milieux sont remplacés par les cen-
tres des moyennes distances de chaque groupe de n points.
Dans nos involutions, lorsque n = 5,les constantes
P\> VnPîi Pi sont proportionnelles aux aires de quatre
( 549 )
triangles; lorsque n = 4, les constantes sont proportion-
nelles aux volumes de cinq tétraèdres.
Il est inutile de développer ces considérations : on
s'apercevra aisément qu'il en est ainsi en se rappelant
l'expression de l'aire du triangle, et celle du volume du
tétraèdre, au moyen des déterminants.
Au delà de n = 4, il n'y a plus d'interprétation géomé-
trique possible : nous devrions recourir alors à la concep-
tion des variétés nplenoent étendues (*).
Remarquons encore que si trois formes
(«,, a2, o3fx, y)\
(61, 62, h\x, y)\
[Ci, cit f3)x, yf,
représentent six points en involution, les droites qui ont
pour équations
(a,, a2, a-0'x, y, z) = 0,
(64, b2,b-o{x,y,z) = 0,
(d, c2, cjx, y, z) = 0,
passent par un même point.
De plus les trois points (oj, o2» az)-> (&i > ^21 ^3)»(ch c2->c*)
sont en ligne droite.
Cette dernière propriété a été employée par Hesse (*").
(*) Riemann, Ucber die Hypothesen, etc. Math. Werke. S. "2bo. Voir
aussi Cauchy, Mémoire sur les lieux analytiques; C. K , t. XXIV, p. 880,
Cayley, Introductory Memoir upon Quantics, Philos. Trass., t. CXLIV,
p. 246; Gauss, Theoria resid., biquad. Comm. secund. Werke, S. 110.
Ibid., S. 178, 2'"- Band,etc.
Il y a d'ailleurs d'autres relations entre les involulions à («-+- \)n points
et les variétés à n dimensions.
(**) Hesse, Ein Uebertragungsprincip, Joirx. de Crelle, t. LXVI
p. 15.
2"'e SÉRIE , TOME XLIV. 58
( 550 )
Dans le cas du troisième ordre, on a des théorèmes ana-
logues, où il suffit de remplacer le mot droite par le mot
plan.
Nous revenons maintenant à l'objet que nous avions
spécialement en vue.
Si dans la condition dévolution, nous supposons que
les n points de chacun de n groupes se réduisent à un
seul, nous obtenons la relation qui existe entre 2n points
harmoniques (*).
En introduisant cette hypothèse dans l'équation (2),
nous aurons
pi n(x - })-h/j2(x - fx)" -4- ps{x - v)"-i— -f-fWi (ac-o)"=0. (5)
Si nous désignons par m un point arbitraire, para,, a2,
an, e, /", ... g les 2« points conjugués harmoniques, la re-
lation (5) devient
p{ .mat. mat...man + p2.?«e"-+-p3. «*/'"-«-•• -t-pn+,.mo =0. (4)
Lorsque n = 2, nous obtenons l'égalité connue (")
mav . mat . ef -+- me . fat ■+■ m( . ae = 0.
Remarquons encore que l'égalité fondamentale
I, = 0,
(*) Il conviendrait peut-être, pour la brièveté du langage, d'appeler
cette relation: Relation bservéc tieul a un ]
nuomplet.
( 7U)
Dyliscus marginalis 9.
Chair de porc fralcue .
r.hair.le hiruf avant m'-
t deux ou trois jours.
Lee .
afcali
(715 )
i.VliU.'ILIlLs
OBStRVtïlU^,
Trace d'acidité.
Douteuse.
Légère acidité.
Très-légère acidité
Très-légère acdité
Trace d'acidité dû»
Faible trace d'acidit
Pas acide.
Acidité franche.
Très-légère acidité.
Très-légère acidité.
Acidité franche.
Acidité franche.
Trace d acidité.
Celle an.liié des glandes
- « 1 1 - ■ r r - - rxplhpiP II' l:lll "|i-
MintMhciuuAcilmsfnoîJ.)
L'acidité apparente de l'in-
testin terminal est due à
quelqiK'M'oli.v,,!. ■gui-
des auules {voyez na 7.)
( 718 )
Locusia viridissina tf.
( 719 )
: firislale ilr|»uïs
nssil.lo Je lim'lor
i-lègère, peut-être dou-
Pas acide.
c fr.nn Ire.
( 720 )
. Contenu dujabul
Cœcnnis de In
moyen. . . .
Elndca r;mai!ciisis
I
Iuscctcs se nourrissant
iOEsopliagi1; ['ami r! '."il
Intestin trrmmal; i>arm
C 721 )
Iran.' il'aejiiliu*.
i expliqué ailleurs (Note
de oialicrcs végétales.
0
0?
0
TL
TTL?
L
0
L
0
IL!
0
L
0
0
0
TL
TTL
0
0
0
0
0?
0
TTL
°
0?
0
TTL
Li>ri?nli
Trace .la
( 722 )
( 725 )
<:vnu.Ti.i;i;s
Stctheophymagrossuin 9
Triphœna pronumba
Acide . . , / Gœcums
/ Contenu
sde capucine. Neutre
Acidité* franche.
■e nciiliiL'. |iro\c-
Li.'^iTe nciiiitu.
Neutre.
Pas acide.
Trace d'ac
l'iHiiniL' chez -i'aulro^ l.'|
.|.>]ii..T.'s, Ils l;|u1iuIls qui '
lLlllpIl^M'iU IfS Li'lIlllcS |
..'■|.illiuli;ik-s iIl l'ii)
SLint iialuicIlLlliclH l'
( 724 )
( 725 )
Deuxième fragment du
Neulre ou acidité très-
Neutre ou alcalin
(inTtrsiiaMCONiisilanv
C.nllU'Iill de
Alcalinité; douteuse.
Alcalinité franclie.
.,,„»!,
/ '';I;'|^1"1I1''1^'1
ik'.ilnuU' li,i
50
726 )
( 727 )
1 Glandes antérieures . .
Contenu de l'intestin
Intestin moyen; paroi
Contenu de l'intestin ter-
Liquide dégorgé -
moyen (feuilles d i
i,ll|.|-i'|ii:illl
milles de Scdum telc-
Cmitenu de l'inieslul
Intestin terminal; paroi ï
i \u m ii m .
Trace d'alcalinité.
Légère acidité.
Trace d'acidité dou-
Acidité franche.
Trace d'acidité.
;is[ioii. leur n'Mi'inm n .i
[>:)* car,-,]-,' ,■[,. nruir.ili-. ■<■
n.- .11. |-.njr;piiw.-i,:u-
lardivoyez le cas suivant).
Légère alcalinité.
Acidité franche.
Trace d'acidité dou-
Cas ircs-rcm.ii-(|unhJc et
!';)« idilr (ir..|.iv des ali
Légère alcalinité.
N'.'iivc |>.'i la r-Mi'li il-
cahne du liquide ili^.-Miï.
Légère alcalinité.
Alcalinité franche.
Trace d'alcalinité.
Alcalinité franche.
Trace d'alcalinité.
Cas analogue; aliments
■■■ i'li -...i. i.lit. d-'iiuit,. p-n
lal.'.iljiu!.- .lu Ii.juhI.' hi-
gestif.
( 728 )
( 7"29 )
Fouilles de tilleul .
l'ygaera buccphala (che-
nille]
Individu prêt à s'en-
lerrcr pourln nymphose.
[ liguslii dienillej.
Illnyrn IV'liillus
divisées). . .
Paroi de l'intestin mojen
c n
Contenu de l'intestin
moyen (liquide visqueux
, brun-rougeâirej . . .
Paroi de 1 intestin moyen
Paroi et contenu de l'in-
testin terminal. . . .
1 Contenu de l'intestin
Très légère aie,
Alealinitè douie
Al'illlll'' ll.IIH.llL'.
Ahiiljnnefiainiie.
I.^ei'ealejlinitè.
OIISIliMIUns.
Cas analogue au j ■r.-ct-.k-ni.
pendant
leslinnmven. siège
gestion; 'il ne de-
■■'Me ' illuL
ordinairement
( 730)
1
1
i
INSECTES.
ALIMENTS
„L
PAKTIES
;
l.!îlm!uu.s forficatiis. . .
Hniian âiïum Gervaisii .
Intestin moyen; paroi
coutenu ."..__
Intestin moyen; paroi
Intestin terminal; par
A l'inspection de ces résultais, je reconnais volontiers
que j'ai été trop alïirmalifen assurant que jamais la sécré-
tion du tube digestif des insectes n'était acide. Mais entre
cet aveu franc et l'acceptation de l'hypothèse inverse que
l'acidité serait un phénomène constant, il y a une grande
distance que ces nouvelles expériences soignées ne per-
mettent pas de franchir. En eiret, il semble résulter des
essais ci-dessus, que si on fait abstraction des insectes
suceurs qui ne peuvent guère fournir de données sérieuses,
les insectes maxillés se partagent naturellement en deux
groupes :
1° Les carnassiers et les omnivores ; c'est-à-dire ceux
( 731 )
qui se nourrissent en tout ou en partie de matières ani-
males (n°* 1 à 19), chez lesquels le liquide digestif est
légèrement acide; mais d'une acidité souvent si faible
qu'elle peut ne pas être décelée par du tournesol ordinaire
indiquant cependant ~ d'acide chlorhydrique dissous et
qu'il faut employer une teinture de tournesol sensible à
2° Les insectes qui se nourrissent de matières végétales
(n" 20 à 22, 50 à 52, 54 à 58), chez lesquels le liquide
digestif est alcalin. Ceux-ci nous rendent témoins du phé-
nomène suivant, surtout accusé chez les chenilles : les
feuilles sont presque toujours légèrement acides, cette
( 732 )
acidité est ou neutralisée dans le canal alimentaire, ou
même fait place à une réaction alcaline lorsque la digestion
est en pleine activité. Ce n'est que dans les excréments et
à la suite, probablement, d'une décomposition partielle
que réapparaît une certaine acidité (1).
Si donc j'ai eu tort d'affirmer que les liquides digestifs
des insectes sont constamment neutres ou alcalins, il n'en
reste pas moins parfaitement vrai qu'une sécrétion diges-
tive alcaline s'observe chez un grand nombre d'entre eux,
peut-être chez tous les phytophages.
Reste, pour terminer, à répondre à deux objections;
la première, que je suis en désaccord avec le principe de
l'unité de plan des fonctions organiques, la seconde que je
semble oublier l'acidité caractéristique du suc gastrique
des vertébrés.
Grâce aux travaux de physiologistes éminents et à mes
propres recherches antérieures, il n'y a qu'une seule
réponse à faire : le liquide digestif des articulés, insectes,
myriapodes, arachnides et crustacés, n'est pas du tout
l'analogue du suc gastrique des vertébrés; il se rapproche
plutôt du suc pancréatique des animaux supérieurs; l'aci-
dité qu'on peut y observer assez souvent, n'est qu'un
caractère très-accessoire et non le signe d'une propriété
physilogique. De plus, j'avais entrevu chez les insectes (2),
M. Hoppe-Seyler a démontré chez les crustacés (3) et j'ai
(1) L'expérience est frappante pour les chenilles qui se nourrissent de
feuilles de capucine (Tropœolum majus).
(2) Recherches sur les phénomènes de la digestion chez les insectes.
(Mém. de l'Acad. roy. de Belcique, t. XLI, 1874), page 22.
(3) Ueber Unterschiede im chemischen Bau und der Verdanungs
hcherer und niederer Thiere. (Archiv. fur die gesammte physiologie de
Pfluger, Bd. 14, 1877), p. 393.
(733)
vérifié chez les aranéides (1) que le ferment sousi'influcnce
duquel s'effectue la digestion des albuminoïdes est évidem-
ment tout autre que la pepsine gastrique des vertébrés;
l'addition de très-faibles quantités d'acide chlorhydrique,
loin d'activer son action, la ralentissant ou l'arrêtant com-
plètement.
J'espère que les naturalistes qui ont cru devoir faire
des observations ou des réserves lors de la publication de
mes Recherches sur la digestion chez les insectes, recon-
naîtront que j'ai fait des efforts pour arriver à la vérité,
tiendront compte des résultats et les vérifieront au besoin.
Recherches sur les minéraux belges (4e notice). Sur-
la Kaolinite (Pholérite) de Qucnast et du terrain
houiller; par M. L.-L. de Koninck, Dr Se, chargé de
cours à l'Université de Liège.
Il y a quatre ans, j'ai rencontré à Quenast, dans la dio-
ri te quarfzeuse, des parties de roche formées principale-
ment de pyrite en grains irréguliers et d'une matière
nacrée, d'une blancheur parfaite, presque sans cohérence
et excessivement douce au toucher. C'est dans la carrière
du bois de Neppe, aujourd'hui complètement abandonnée,
que j'ai trouvé cette substance.
Au premier abord, j'ai cru pouvoir la rapporter à l'es-
pèce désignée généralement sous le nom de Pholérite;
l'analyse est venue confirmer ces vues.
(I) Recherches sur la structure de l'appareil digestif et sur tes phé-
nomènes de la digestion chez les Aranéides dipneumones , 5e partie.
(IÎULLET. I>E L'ÀCAD. ROT. DE BELGIQUE, 2e série, t. XLIV, 1877).
( 734 )
En choisissant, dans les échantillons que j'avais récol-
tés, les parties les plus pures, en les broyant simplement
entre les doigts et en les passant à un tamis très-fin, j'ai
pu séparer presque complètement la pyrite et les grains
durs. La matière ainsi obtenue a fourni à l'analyse :
Perte au fou 14.49
SiO* 45.58
Al203 36.80
FeX)5 5.68
CaO . .
MgO .).... traces
Alcalis /
100.55
Ces résultats conduisent à la formule :
AIW,' 2Si02, 2H20.
La composition correspondante est :
H20 13.90
SiO* 46.33
Al203 39.77
100.00
Les différences entre les résultats de l'analyse et le cal-
cul s'expliquent par la présence de pyrite. Cette dernière
a été constatée qualitativement, mais la quantité de sub-
stance que j'avais ne m'a pas permis d'en faire le dosage.
La formule que j'indique plus haut n'étant pas admise
par tous les auteurs pour la pholérile, j'ai cru faire chose
utile en soumettant à l'analyse un échantillon parfaite-
ment caractérisé de pholérile du terrain houiller. J'y étais
( "35 )
d'autant plus porté, que nous ne possédons aucune ana-
lyse récente de ce minéral, si répandu cependant dans les
charbonnages du pays.
J'ai fait choix, pour l'essai, d'un échantillon provenant
de la houillère de la Haye à Saint-Gilles (Liège). La pholé-
rite se rencontre, dans cette exploitation, on petites masses
aplaties irrégulières, provenant du remplissage de fentes
d'un schiste grossier; elles atteignent par places plusieurs
millimètres d'épaisseur. C'est une matière blanche , d'aspect
cireux, onctueuse au toucher, facile à rayer par l'ongle,
à poussière écailleuse, paraissant parfaitement exempte
de tout mélange, infusible mais durcissant au feu comme
les argiles.
Deux analyses concordantes ont donné :
H20. . . .
. . 13.88 . .
. 10.91
SiO-i . . .
. . 45.95 . ,
. . 45.97
Al*Os . . .
. . 40.27 . ,
. . 40.1-2
100.10 100.00
Traces de Fe2 O3, CaO, MgO et alcalis.
Ces analyses conduisent aussi à la formule :
A120', 2Si02, 2H20.
L'absence presque complète de fer est assez remar-
quable, vu la forte proportion de ce métal qui se trouve
dans les roches houillères.
J'ai enfin analysé également des échantillons de pholé-
rite écailleuse, pulvérulente, de couleur jaunâtre parsuite
de mélange d'une petite quantité de limonile. Ces échan-
tillons appartenaient à feu M. AVigny, collectionneur con-
( 736 )
sciencieux de notre ville; ils étaient étiquetés de sa main,
l'un : Pholérite du terrain houiller. — Bagatelle (près
Visé); les autres : Talc granuleux, Nacrite. — La Char-
treuse (près Liège). Les résultats ont été les suivants :
HaO 13.85
SiO* 46.72
Al203, ...... 38.32
Fes03 0.77
CaO 0.60
MgO traces
100.26
Cette composition correspond encore une fois à la for-
mule :
A1203, 2SÎ02, 2H20.
La proportion de Si O2 est un peu trop forte , mais cela
provient de quartz, dont la présence dans la substance a
été constatée.
Quant au gisement de cette pholérite, elle se rencontre,
autant qu'on peut en juger par des échantillons de col-
lection, comme remplissant des géodes irrégulières dans
un grès houiller fortement altéré.
L'espèce Pholérite a été créée en 1825 par Guillemin (I).
Il avait analysé une substance blanche qui se trouvait
« dans le terrain houiller de Fins (Allier) remplissant les
fissures de quelques rognons de minerai de fer et les
fentes de couches de grès et de schistes argileux et for-
mant des taches blanches sur ces diverses roches. » Il
(1) Annales des mines, t. XI, 1825, p. 489.
( 737 )
donne comme résultat de ses analyses :
i. il.
H*0 13.000 .... 15.00
SiO2 42.923 .... 41.65
Al'Oî .... 42.075 .... 43.33
100.000 .... 100.00
Ces analyses, calculées d'après les poids atomiques au-
jourd'hui admis, conduisent à la formule :
4A1Î03, 7S102, 8H*0.
L'époque à laquelle ces analyses ont été faites, permet
de ne leur attribuer qu'une importance relative. Elles con-
cordent au reste fort peu entre elles.
Guillemin donne la formule :
Al Si -+- 2aq (2A1203, 3Si02, 4H«0)
et comme composition correspondante :
H'O 15 564
SiO* 40.750
Al2Os 43.886
100.000
J'ai eu la curiosité de remonter de cette formule et de
cette composition aux poids atomiques employés par Guil-
lemin; j'ai obtenu Si = 31.65 et Al = 27.42.
Le gisement de la Pholérite de Guillemin ne laisse au-
cun doute que c'est bien au même minéral dont j'ai fait
l'analyse (Pholérite du terrain houiller) qu'il a eu affaire,
d'autant plus qu'il dit lui-même avoir rencontré le miné-
ral en question dans la concession de Cache-Après, près
Mons.
(738;
La formule qui se déduit de mes analyses est celie à
laquelle conduisent toutes les analyses de Kaolinite. Au
point de vue chimique, la Pholérite et la Kaolinite sont
donc identiques.
Au point de vue physique, il n'y a pas non plus de dif-
férences. L'examen microscopique de la Pholérite de la
Chartreuse fait reconnaître que ce minéral est formé de
paillettes hexagonales, généralement allongées (lig. 1),
plus ou moins régulières et appartenant, selon M. l'abbé
Renard, qui a bien voulu les examiner, au système rhom-
bique; les angles mesurés au moyen d'un microscope à
platine tournante et graduée , sont de 120", dans les limites
d'exactitude que comporte ce mode de détermination. La
plus grande dimension de ces cristaux atteint au maxi-
mum 1/4 de millimètre.
Les Pholérites ordinaires du terrain houiller présentent
le même aspect, mais avec des dimensions beaucoup
moindres et une cristallisation d'autant moins nette que la
cohésion est plus considérable. C'est ainsi que la Pholérite
de La Haye examinée au microscope ne laisse pas recon-
naître de cristallisation bien tranchée, tandis que d'autres
échantillons, provenant des charbonnages de Mariemont
(fosse Abel) et moins cohérents, sont formés de lamelles
assez bien définies (lig. 2).
La Kaolinite de Quenast est, au point de vue de la cris-
tallisation, intermédiaire entre leséchantillons de la Char
treuse et de Mariemont (lig. 3); enfin il est reconnu (1)
que la Kaolinite proprement dite peut se présenter en
écailles hexagonales du système rhombique, avec des an-
gles de 120°. Je donne au surplus (lig. 4) comme point de
({) Dana, Descriptive Mineralogy, lbfiS, p. 475.
mil. cl.- L'Acad
rP
Q>
Fig. â.
Fiq. 4.
( 759)
comparaison la figure publiée par Dana, malheureusement
sans indication de grossissement.
En résumé, il n'y a aucune raison pour conserver l'es-
pèce Pholérite dans la nomenclature; au lieu de compli-
quer la minéralogie par la création d'espèces fort peu cer-
taines, il faut, au contraire, comme dans toute science
d'observation, chercher à simplifier et n'admettre des com-
plications que lorsqu'elles sont reconnues nécessaires. Il y
a donc lieu, comme l'ont déjà proposé MM. Johnson et
Blake il y a dix ans (1) et comme le font partiellement
certains auteurs, de réunir les minéraux connus sous les
noms de Pholérite, de Nacrite, de Lithomarge et de Kao-
lin, sous le seul nom de Kaolinite, abandonnant le nom de
Kaolin pour les variétés plus ou moins pures employées
dans l'industrie.
J'ajoute, pour terminer, que la Kaolinite de Quenast ré-
sulte bien probablement de l'altération de la diorite sous
l'influence d'émanations qui ont amené la pyrite (2).
Laboratoire de chimie analytique de l'Université de
Liège, Août 1877.
(1) The americ. Journ. of Se. and Arts, cond. bj Silliman and Dana ,
2« sér. t. XLI1I.
(2) Corap. De la Vallée et Renard, Mémoire couronné, p. 17.
( 740 )
Recherches sur les minéraux belges (5e notice). Sur la
présence de Vapatile cristallisée dans l'étage salmien;
par M. L.-L. de Koninck, Dr Se, chargé de cours à l'Uni-
versité de Liège.
Le quartz dans lequel a été découverte à Salm-Château
la nouvelle espèce minérale appelée Dewalquite par les
uns, Ardennite par les autres, se présente en filon en deux
endroits différents : d'une part dans un terrain communal
qui joint au chemin de fer, en dessous des ruines de l'an-
cien château de Salm, d'autre part dans la propriété de
M. Jottrand, le long du chemin vicinal qui la traverse.
Ces deux affleurements ne sont pas dans le prolonge-
ment l'un de l'autre ; je n'ai pas étudié la question de
savoir s'ils appartiennent au même filon ou à des filons
différents.
Grâce à l'obligeance de M. Jottrand, qui a bien voulu
m'autoriser à faire des fouilles dans son terrain, j'ai pu
suivre sur quelques mètres le dernier affleurement.
En cet endroit, la Dewalquite et le feldspath que
l'accompagne sont fort altérés ; la plupart des échantillons
s'émieltent entre les doigts. Ces minéraux ne se trouvent
pas exclusivement dans le quartz ; on en rencontre égale-
ment en masses devenues friables, qui paraissent être des
ramifications du filon, dans le phvllade violet grossier for-
tement altéré lui-même, qui joint le quartz.
En examinant plus attentivement un échantillon de ce
genre, j'ai trouvé quelques petits grains cristallins, de
couleur lilas très-clair, possédant quelques facettes très-
brillantes. L'un deux est nettement cristallisé en prisme
( 741 )
hexagonal ; un autre, cristal très-incomplet, possède une
complication de facettes telle, qu'il ne m'a pas été possible
de définir la forme par les moyens qui sont à ma dispo-
sition.
A première vue, j'ai cru devoir rapporter ces cristaux à
l'apatite, quoique cette espèce n'ait pas été indiquée à l'état
macro-cristallin dans le pays. A la suite d'essais chimiques,
nous nous sommes convaincus, mon assistant, M. le Dr A.
Jorissen, et moi, que cette opinion était exacte. En effet
un petit grain, de la grosseur d'une tète d'épingle, chauffé
dans un tube fermé, n'a pas donné d'eau. Traité ensuite
sur un verre de montre par l'acide nitrique , il s'est dissous
complètement sans effervescence. Cette solution a donné
par l'ammoniaque un précipité blanc, qu'une nouvelle
addition d'acide nitrique a fait disparaître ; enfin celte
liqueur, divisée en deux parties, a donné d'une part, par le
réactif de Sonnenschein, un précipité de phosphomolvbdate
ammonique, et d'autre part, par l'acétate sodique, l'acide
acétique et l'oxalate ammonique, un abondant précipité
d'oxalate calcique.
Cette découverte de l'apatite à Salm-Châleau vient
augmenter encore la liste, déjà relativement longue, des
phosphates que l'on a rencontrés dans l'étage salmien
supérieur de Dumont et qui comprend à ce jour la Libethe-
nile, la Pseudomalachite, la Torbernite, la Wawellite et
l'Apatite.
Laboratoire de chimie analytique de l'Université de
Liège, Novembre 1877.
2me SÉRIE, TOME ÏLIV. 51
( 712 )
Contribution à l'histoire du développement embryonnaire
des Téléosléens; par M. Edouard Van Beneden , membre
de l'Académie.
Lors de mon séjour à Ville-Franche en Savoie, en août
et septembre 1874, j'eus l'occasion de faire quelques
observations sur le développement d'un poisson osseux.
Je m'appliquai surtout à l'étude des premières phases du
développement et je cherchai à élucider la question si
discutée de l'origine et du mode de formation des feuilles
embryonnaires. Je rencontrais journellement, au milieu des
produits de la pèche au filet de Muller, de petites perles
incolores et parfaitement transparentes; le diamètre de ces
petites sphères hyalines dépassait à peine celui d'une forte
nocliluque; leur apparence rappelait celle de ces proto-
zoaires: aussi ne fut-ce qu'après les avoir examinées à la
loupe que je reconnus que j'avais affaire aux œufs d'un
poisson osseux.
Plusieurs fois les pêcheurs m'apportèrent des masses
d'apparence gélatineuse recueillies à la surface de la mer
et formées de centaines ou de milliers d'œufs agglutinés
ensemble. Ces œufs présentaient tous les caractères de
ceux que je rencontrais journellement détachés les uns des
autres : ils avaient les mêmes dimensions, la même trans-
parence, la même composition. Dans une même masse tous
les œufs se trouvaient toujours au même état de dévelop-
pement. Celte circonstance facilite beaucoup l'étude des
phases successives de l'évolution : les œufs meurent assez
rapidement sur le porte-objet, de sorte que l'on ne peut
( 743 )
voir les phénomènes successifs du développement s'accom-
piir sous ses yeux. Mais comme tous les œufs d'une même
grappe se développent également vite, Ton peut toujours
déterminer le temps nécessaire pour l'accomplissement
des modifications qui se sont produites, depuis le moment
où l'on a détaché de la souche les derniers œufs que l'on a
examinés.
Dans tous les amas d'œufs qui m'ont été apportés les
œufs étaient ou bien en voie de fractionnement, ou bien
ils renfermaient des embryons à peine ébauchés. Je n'ai
jamais trouvé de grappes composées d'œufs sur le point
d'éclore-, ni même d'embryons pourvus de leurs vertèbres
primordiales. Par contre, je n'ai jamais péché à l'étal
de libellé d'œufs en segmentation, ni même d'embryons
assez jeunes pour qu'il fût possible de les utiliser pour
l'élude de la formation des feuillets. Il est probable que les
œufs agglutinés proviennent du môme poisson que les œufs
que l'on pêche isolés. Il semble que, pondus en masses,
ils restent quelque temps agglutinés pour se séparer
ensuite et flotter alors, libres de toule adhérence, à la sur-
face de la mer. Je dois ajouter cependant qu'ayant con-
servé ces grappes dans des vases, afin de suivre pas à pas
les modifications qui se produisent, je ne vis jamais les
œufs se détacher les uns des autres. Mais aussi ne peut-on
les tenir indéfiniment vivants dans de semblables condi-
tions. J'ai eu beau renouveler l'eau plusieurs fois par jour,
je n'ai pu conserver mes embryons vivants pendant plus
de vingt-quatre à trente-six heures.
Quoique je n'eusse nullement l'intention, en me ren-
dant à la Méditerranée, de m'oecuper de l'embryologie des
poissons, et que du reste le désir d'arriver à résoudre les
(744)
diverses questions relatives à l'organisation et au déve-
loppement des Dicyémides me laissât peu de loisir, je ne
pus résister au désir d'utiliser les matériaux splendides
que j'avais sous la main. Aucune des difficultés qui se ren-
contrent d'habitude dans l'étude du développement des
poissons osseux ne se présentait ici : la membrane des œufs
est fort mince et d'une parfaite transparence; le deuto-
plasme est constitué par un globe albuminoïde parfaite-
ment homogène, hyalin, libre de toute granulation et
limité par un contour très-net et parfaitement régulier.
Dans le protoplasme de l'œuf, pas plus dans le germe que
dans le manteau protoplasmique qui revêt une partie du
globe vitellin, il n'existe ni globule de graisse, ni vésicule, ni
élément formé d'aucun genre : rien, en un mot, que l'on
pourrait confondre soit avec une cellule, soit avec un noyau.
Des œufs pélagiques très-semblables, provenant proba-
blement d'une espèce très-voisine, ont été observés par
Haeckel (I) lors de son dernier séjour sur les côtes de
Corse. Il a publié le résultat des recherches qu'il a faites
sur leur développement dans la seconde partie de son ou-
vrage : Die Gastrula and die Eifurchung der Tlriere. Ces
mêmes œufs il les avait trouvés à Nice en 1856.
Haeckel n'a pas réussi plus que moi à déterminer, d'une
manière positive, l'espèce de poisson dont proviennent les
œufs qu'il a eus sous les yeux. Mais, se fondant sur la des-
cription qui a été donnée par Retzius des œufs du Gadus
Iota, Haeckel émet l'opinion que le poisson dont il a étudié
le développement est un Gadoïde voisin du genre Lola,
peut-être une Motelie.
(1, E. Haeckel , Biolugische Stuuien, 2'" Hel't. Studien zur Gaxlrœa-
Theorie. lltc Theil. Die Gastrula und die Eifurchung derThiere.
( 74o )
Les œufs que j'ai trouvés à Ville-Franche el ceux qui
ont servi aux recherches de Haeckel présentent les plus
grandes analogies. Trouvés daus les mêmes conditions ,
sur le même point des côtes de la Méditerranée, ils on! à
peu près les mêmes dimensions, la même apparence et
la même composition. Au moment de la ponte ils sont
agglutinés en amas de volume variable, dont la forme ne
présente rien de constant. Cependant la quantité de ma-
tière qui les réunit était en ce qui concerne mes œufs fort
peu considérable, de sorte que je ne pourrais pas dire
comme Haeckel que les œufs sont empâtés dans une
substance homogène; il n'est pas possible d'isoler des
fragments de celte substance unissante et il est à peine
possible de l'apercevoir entre les œufs, quand même on se
sert de forts grossissements. Mes œufs ont un diamètre de
0,80 à 0,8o de millimètre. Ils sont complètement incolores
et ont la transparence du cristal. Leur membrane est très-
mince; on ne peut y découvrir ni pores en canalicules, ni
ponctuation d'aucun genre; elle est homogène, assez résis-
tante, fort élastique et assez étroitement appliquée sur
le vitellus. C'est ce qui fait qu'il est presque impossible de
l'isoler sans compromettre le contenu de l'œuf.
Les plus jeunes œufs que j'ai eus sous les yeux mon-
traient le disque segmenté en deux globes. Ils me furent
apportés un matin vers sept heures. Je reçus deux autres
masses dans lesquelles les œufs étaient au début de la
segmentation. Elles furent également recueillies le malin
de bonne heure. Il est probable que la ponte se fait vers
le moment du lever du soleil. Tous les œufs ont la
forme d'un ellipsoïde de révolution, très-voisin de la
sphère : le grand axe est d'un sixième à peine plus grand
que le petit. À l'une des extrémités du grand axe (pôle
( 746 )
animal) se trouve le disque germinal! f. Celui-ci repose sur
le globe vitellin qui a la même forme que l'œuf lui-même.
Seulement l'ellipsoïde deutoplasmiqueest tronquée à l'une
des ex (remîtes de son grand axe suivant une surface con-
cave à son milieu, convexe sur ses bords, il en résulte la
formation d'une chambre polaire limitée en dehors par la
membrane de l'œuf, en dedans par le globe vitellin; c'est
dans cet espace que se trouve le disque segmenlé.
Le globe vitellin est formé par une substance hyaline,
parfaitement homogène, incolore, peu réfringente, dé-
pourvue de toute structure ; il tient en suspension un
seul et unique élément formé : c'est une masse sphérique,
brillante, à contour très-foncé, et qui occupe dans le globe
une position constante. A part cela, le globe vitellin est
absolument dépourvu, je le répèle, de toute granulation,
de toute vésicule, de tout élément que l'on pourrait prendre
soil pour une cellule, soil pour un noyau de cellule. La sub-
stance qui la constitue est une matière albuminoïde : elle
se coagule par l'alcool, l'acide chromique et se trouble par
l'acide acétique. La sphère réfringente tenue en suspension
dans le globe vitellin est formée d'une huile ou d'une
matière grasse. Elle se colore d'abord, en brun, puis en
noir, par l'acide osmique. Ilaeckel a trouvé ce même globe
huileux dans les œufs qu'il a étudiés. Il lui donne le nom
de OElkugel ou de Fetlkurjel. Seulement cet élément, au
lieu d'être tenu en suspension dans le globe vitellin, occu-
pait, dans ses œufs le pôle végétatif de l'œuf et était simple-
ment engagé dans une dépression de forme sphérique que
présentait, en ce point, la surface du globe vitellin. C'est
là un caractère qui différencie les œufs de Haeckel de
ceux que j'ai moi-même observés. Grâce à cette cir-
constance que le poids spécifique du globe huileux est
( 717 )
inférieur à celui des substances qui constituent les autres
parties de l'œuf, les œufs étudiés par Haeckel prenaient
invariablement la même position. Toujours le pôle ani-
mal était dirigé vers la profondeur, le pôle végétatif vers
la surface. J'ai constaté que, dans mes œufs, la position
du globe huileux était tout à fait constante : il était tou-
jours excenlriqnement placé et occupait invariablement
l'hémisphère végétatif de l'œuf. J'ai en vain cherché, pour
m'expliqucr ce fait, quelque particularité de structure dans
le vitellus. Je n'ai pu découvrir aucune trace de filaments
reliant le globe huileux, soit à la surface du vitellus, soit
au disque germinalif. M. Van Bambeke (I) a décrit récem-
ment dans l'œuf non fécondé de la tanche des pseudopodes
qui rayonnent dans la sphère vitelline, à partir de la face
inférieure du disque. Ces pseudopodes qui s'observent
avant le début delà segmentation ont pour fonction d'ame-
ner, sous le disque, les éléments vitellins jusque-là dissé-
minés. Ransom (2) avait déjà vu des traînées granuleuses
comparables à celles auxquelles M. Van lîambeke attribue
le rôle de pseudopodes.
Il existe du reste d'autres différences de détail cnire les
données de Haeckel et les miennes. Quant au mode
d'agrégation de ses œufs, voici comment il s'exprime :
« Dieser Laich bildel kleine weiche Gallerlkluwpen, in
welchc zahlreichc kleine, vollkommcn durchsic/iligc Eier
eingebetlet sind. » Ses œufs étaient spbériqucs et mesu-
raient 0,64 à 0,65 de millimètre de diamètre. Il me parait
(1) Ch. Va* Bambeke, Recherches sur l'embryologie des poissons
osseux, Mém. de l'Ac*d. boy. des se. de Belgique, t. XL.
(2) W. II Boso.ii, Observations on the ovum of osseous fishes, Philos,
Thans.,vo1. 157.
( 748 )
donc certain que nous n'avons pas eu sous les yeux les
œufs de la même espèce; mais les différences sont si
minimes qu'il n'y a guère lieu de douter des affinités des
poissons dont ces œufs proviennent, si toutefois on peut
juger des affinités des Téléosléens d'après les caractères
que présentent leurs œufs.
Comme je l'ai dit plus haut, les plus jeunes œufs que
j'ai observés avaient le germe segmenté en deux (fig. 1).
Les cellules de segmentation sont convexes en dehors,
accolées l'une à l'autre par une surface à peu près plane
et limitées du côté du vitellus nutritif par une ligne con-
vexe assez nette, mais moins apparente cependant que les
lignes qui marquent leurs limites latérales. Les globes de
segmentation sont formées d'un protoplasme très-clairet
tout à fait homogène. On ne peut y découvrir aucune
trace de noyaux. Ils ne reposent pas immédiatement sur
le vitellus : ils en sont séparés par une couche d'une
substance protoplasmique chargée de fines granulations,
mais dépourvue de tout globule adipeux. Je n'ai trouvé
dans cette couche rien qui ressemblât ni à une cellule, ni
à un noyau de cellule. J'ai mis le plus grand soin à cher-
cher de semblables éléments, tant en examinant les œufs
frais et vivants, qu'en les étudiant après les avoir traités
par l'acide osmique et les matières colorantes (picrocar-
min et hématoxyline). Cette couche forme au globe vitellin
un revêtement continu de telle sorte qu'en aucun point
les globes de segmentation ne se trouvent directement en
contact avec le vitellus. Celte couche dépasse de tous côtés
les bords du disque segmenté, et partout elle se moule
exactement sur le globe vitellin. Il n'est pas facile de déter-
miner la ligne limite de ce manteau protoplasmique tant
( 749 )
il devient mince sur ses bords. Il ne présente pas partout
la même épaisseur. Au centre du disque segmenté il est
assez épais : il y affecte l'apparence d'une lentille bicon-
vexe qui occupe tout l'espace compris entre le globe vitel-
lin déprimé en ce point et la face profonde des cellules de
segmentation. En outre, il présente un épaississement
assez considérable sous le bord du disque; cet épaississe-
ment forme, tout autour du disque, un bourrelet circulaire
à section triangulaire. L'un des côtés du triangle est
adjacent à la face inférieure des globes de segmentation;
il regarde en liant et en dedans, vers le pôle animal de
l'œuf (1); l'autre, appliqué sur le vitellus nutritif, regarde
en bas, vers le pôle végétatif; le troisième est libre; il est
séparé de la membrane de l'œuf par un espace rempli
d'un liquide clair et hyalin; il regarde en haut et surtout
en dehors.
Celle couche est homologue, comme je le montrerai
plus loin, à celle que Van Bambeke a décrite chez le
Gardon sous le nom de couche intermédiaire. Ce nom lui
convient à raison de son interposition entre le germe et le
globe deutoplasmique; en outre il a le grand avantage de
ne rien préjuger quant à sa valeur morphologique. Je la
désignerai donc sous ce nom; j'appellerai lentille médiane
l'épaississement qu'elle présente à son milieu, sous le
germe; avec Van Bambeke j'appellerai bourrelet périphé-
rique l'épaississement annulaire sous-jaceut aux bords du
disque segmenté.
J'ai pu voir les phases successives de la segmentation
(1) Je suppose l'œuf placé de telle manière que l'axe soil vertical, le
pôle animal en haut, le pôle végétatif en bas.
( 7^0 )
du disque, en examinant, à des intervalles peu éloignés, de
nouveaux œufs enlevés à cette masse qui me fut apportée
vers sept heures du malin et dont les œufs étaient, à ce
moment, segmentés en deux globes. Vers huit heures et
demie tous les œufs montraient le disque segmenté en
quatre cellules; de sorte qu'il s'écoule au moins une heure
et demie entre le moment où apparaît le premier sillon et
l'instant où les deux premiers globes se segmentent à leur
tour. J'ai constaté que le temps qui s'écoule entre deux
phases successives du fractionnement est de plus en plus
court au fur et à mesure que les cellules diminuent de
volume. J'ai constaté du reste le même fait en étudiant
la segmentation de l'œuf du lapin.
Je ne décrirai pas dans tous leurs détails les phases suc-
cessives du fractionnement : ce phénomène a été sou-
vent décrit et ligure et je n'ai pu du reste étudier assez
complètement ni le mode ni l'ordre apparition des sillons
pour pouvoir ajouter quelque chose à ce que l'on connaît
de la segmentation chez les poissons osseux. Toute mon
attention a été portée sur la couche intermédiaire et j'ai
cherché à voir aussi exactement que possible les modifica-
tions qu'elle subit dans les premiers temps du développe-
ment embryonnaire.
J'ai représenté deux phases de la segmentatien propre-
ment dite. La figure 2 représente l'œuf au point où en
était arrivée la segmentation vers onze heures du matin.
A ce moment je n'ai pu découvrir aucune trace de noyaux
dans les segments du disque examinés sur le vivant. Mais
en traitant ces œufs par l'acide osmique, puis par l'alcool
au tiers et, après les avoir lavés, en les soumettant à l'ac-
tion du picrocarmin, j'ai pu constater l'existence dans
chacun des globes d'un beau noyau sphérique, tout à fait
(751 )
homogène el dépourvu de nucléole. Si on laisse mourir les
œufs sur le porle-objet, on constate que le protoplasme
des globes se trouble et devient légèrement granuleux en
même temps qu'il prend une légère teinte jaunâtre. On
voit apparaître alors, dans chaque globe, une grande tache
claire, très-faiblement délimitée et d'un aspect parfaite-
ment homogène. Ces taches sont dues à la présence du
noyau qui ne se voit pas quand le protoplasme est vivant,
mais qui apparaît après la mort sans que l'on ait besoin
d'aucun réactif, pour en démontrer la présence. On peut
rendre aussi ces noyaux très-apparents par l'acide acétique
à 1 p. °/0. A celte phase du développement une ligue très-
nette sépare le disque fractionné de la couche intermé-
diaire. Celle-ci a conservé les mêmes caractères qu'elle
présentait déjà lors de la segmentation du disque en deux
globes. Elle montre toujours son épaississcmenl lentil-
laire médian aussi bien que son bourrelet périphérique.
L'aspect de cette couche intermédiaire diffère toujours
de celui du protoplasme du disque par son caractère fine-
ment granuleux. Sur le vivant je n'ai trouvé dans celte
couche aucune trace d'éléments nucléaires. Aussitôt après
la mort, la couche intermédiaire se ratlatine légère-
ment et la limite du globe deuloplasmique devient elle-
même irrégulière. Les noyaux jusque-là invisibles des
globes de segmentation deviennent alors très-apparents;
mais il n'est pas possible de découvrir, dans la couche
intermédiaire, aucune trace de noyaux. Le traitement par
l'acide osmique, par le picrocarmin, par l'hémaloxyline, n'a
pas réussi davantage à y déceler la présence éléments
nucléaires. L'acide acétique en solution à un pour cent,
qui fait apparaître si nettement ces noyaux dans les globes
( 752 )
de segmentation ne m'a pas donné de meilleurs résultats.
Je crois pouvoir affirmer de la façon la plus positive
l'absence de tout noyau cellulaire dans la couche intermé-
diaire à cette phase du développement de l'œuf.
A cinq heures du soir les œufs étaient arrivés au stade
que j'ai représenté figure 3. Le disque segmenté pré-
sente, pris dans son ensemble, la forme d'une lentille
plan-convexe; il repose par sa face plane sur la couche
intermédiaire avec laquelle il se trouve partout en contact
immédiat. Il est constitué par des cellules polyédriques
très-claires, dans chacune desquelles il est facile de distin-
guer, même sur le vivant, un beau noyau sphérique ou
légèrement ellipsoïdal. Les cellules ne sont pas partout
serrées les unes contre les autres. Çà et là on observe
entre elles de petits espaces de formes et de dimensions
variables. Mais, ni à celle phase du développement, ni à
aucun moment de la segmentation, il n'existe dans l'épais-
seur du disque de cavité de segmentation. Les cellules
superficielles sont polyédriques comme les cellules sous-
jacenles et il en est de même des cellules qui reposent sur
la couche intermédiaire. De sorte que le blaslodisque ne
montre aucune trace de délaminalion : il n'est pas pos-
sible d'y distinguer de feuillets différenciés. La seule diffé-
rence que présentent les cellules qui constituent le disque
est relative à leurs dimensions. Les cellules des couches
superficielles sont un peu moins volumineuses que les
cellules profondes.
La couche intermédiaire a subi dans les œufs arrivés à
ce stade du développement une modification importante :
on peut constater la présence dans toute l'étendue de la
couche d'un grand nombre de noyaux généralement ova-
( 733 )
laires, à contour très-net, pourvus d'un, quelquefois de
deux nucléoles punctiformes. Tous ces noyaux ont à peu
près les mêmes dimensions; ils sont un peu plus petits
que les noyaux des cellules du blastodisquc.
Si l'on installe le tube du microscope de façon à voir
la surface du globe deuloplasmiquc, et si l'on examine
la région qui borde le pourtour du blaslodisque, on y dis-
tingue une zone finement granuleuse dans laquelle appa-
raissent des noyaux équidistants. Impossible de distinguer
aucune délimitation de cellules. Autour de chaque noyau
se voit une petite zone granuleuse dans laquelle apparaît
une slrialion radiaire bien manifeste. Celle-ci devient
beaucoup plus nette par l'acide acétique faible. Les zones
granuleuses périnucléaires sont séparées entre elles par
des espaces clairs dépourvus de toute granulation. Ces
espaces forment ensemble un réseau dans les mailles
duquel se voient les noyaux entourés de leur couronne
radiaire. C'est cette partie de la couche intermédiaire qui
a été observée par Kupfler (1) chez les Spinachia et les
Gaslerosteus et qui a reçu de cet excellent observateur le
nom de zone nucléaire (Kernerzone). J'ai été frappé aussi
de la ressemblance que présente à ce moment la couche
intermédiaire avec cette couche cellulaire qui apparaît chez
les Céphalopodes à la surface du deutoplasme et dont les
éléments découverts et décrits par Ray Lankesler (2) ont
reçu de lui le nom de Auloclasles.
(1) Kupffeu, Beobaclilungen iiber die Entwickelung der Knochenfische,
Max Sciiultze 's Arcuiv fÏ'r MicnosK. Anat., Bd. IV.
(2) R\y Lankestkf., Observations 07i the developmenl of the Ceplialo-
poda, QuvTEiiLY Journal of miciioscopical science, vol. XV. [New séries.)
( 734)
Dans la partie de la couche intermédiaire qui se trouve
en dehors du blaslodisque les noyaux sont répartis avec
une très-grande régularité en une rangée unique. Mais si
l'on installe le tube du microscope de façon à voir la
coupe optique de l'œuf, on reconnaît que dans la lentille
médiane aussi bien que dans le bourrelet périphérique les
noyaux se trouvent dans différents plans et qu'ils semblent
disséminés sans ordre dans le protoplasme de la couche
intermédiaire.
L'apparition simultanée d'un grand nombre de noyaux
entourés d'une zone granuleuse dans celle couche proto-
plasinique, qui revêt comme un manteau le globe deulo-
plasmique et dont la présence se révèle dès le début du
fractionnement, ne peut s'expliquer qu'en admettant la
formation simultanée par voie endogène de toute une géné-
ration de cellules dans cette couche intermédiaire. Dès que
les noyaux se montrent le groupement régulier des gra-
nules du protoplasme autour de chacun d'eux démontre la
subdivision du protoplasme en autant de territoires cellu-
laires qu'il y a de noyaux. De ce que l'on ne dislingue par
les limites des cellules on ne peut pas conclure à l'absence
d'individualisation des éléments: la strialion rayonnéc du
protoplasme autour de chaque noyau prouve qu'il ne s'est
pas agi seulement d'une génération de noyaux, mais
d'une formation de cellules. Noyaux et corps cellulaires
apparaissent simultanément.
Je ne pus poursuivre ultérieurement les œufs sur les-
quels j'avais pu constater les transformations successives
que je viens de décrire. Le lendemain un grand nombre
d'entre eux étaient morts; chez les autres le blaslodisque
considérablement étendu recouvrait une grande partie de
( 755 )
la surface du deuloplasme et montrait les premières traces
de l'ébauche embryonnaire dans la partie élargie du bour-
relet marginal. Quelques heures après tous mes embryons
avaient cessé de vivre, malgré le soin que j'avais pris de
renouveler fréquemment l'eau dans le cours de la journée.
Mais quelque temps auparavant j'avais été à même d'étu-
dier un stade du développement très-voisin de celui que je
viens de décrire. Les ligures 4 et 5 représentent vu à la
coupe optique (fig. 4) et à la surface (lig. 5) un œuf arrivé
à celle phase de révolution onlogénique.
Le blaslodisque un peu plus aplati que dans le stade
précédent est aussi plus étendu. Il est en contact immé-
diat par toute sa face profonde avec la couche intermé-
diaire. Il n'existe aucune trace ni de cavité de segmenta-
tion ni de cavité germinalive. Le disque se constitue de
cellules claires, polyédriques, nucléées; le seul caractère
important par lequel il se dislingue du stade précédent
consiste dans la différenciation des cellules superficielles.
Celles-ci , au lieu d'être polygonales à la coupe, se montrent
aplaties; elles forment une sorte d'épilbélium pavimen-
teux simple qui délimite extérieurement le blaslodisque.
A la coupe ces cellules paraissent lenticulaires; leur face
externe est à peu près plane; leur face profonde est régu-
lièrement convexe ou présente des facettes par lesquelles
ces cellules se moulent sur les éléments sous-jaccnls. Les
cellules profondes, adjacentes à la couche intermédiaire
ne présentent rien de particulier.
En passant de la phase précédemment décrite au stade
dont nous nous occupons le blaslodisque s'est donc subdi-
visé par voie de délamination en une couche superficielle
qui est la lamelle enveloppante [couche épidenno'ùlale de
(756 )
Vogt (1) et de Lereboullet (2), Deckschiclit de Gôtle(3)) et
une masse profonde qui est le feuillet primaire externe.
La couche intermédiaire présente exactement les mêmes
caractères que dans le stade précédent. La seule particu-
larité que j'aie observée , c'est qu'à la coupe optique on
distingue çà et là, tant dans le bourrelet périphérique que
dans la lentille médiane, des cellules rondes et finement
granuleuses qui paraissent logées dans la couche intermé-
diaire et sont beaucoup plus nettement individualisées que
les cellules voisines.
A la phase que je viens de décrire succède le stade que
j'ai représenté (fig.6). Des œufs qui le matin vers 10 heures
présentaient les caractères que j'ai figurés (fig. 4 et 5)
avaient subi l'après-dîner vers les 5 heures les modifica-
tions que je vais énumérer.
Le blaslodisque s'est considérablement étendu et con-
stitue maintenant une calotte appliquée sur la portion
tronquée devenue convexe du globe deuîoplasmique. Le
(1) C. Vogt, Embryologie des Salmones, Neuchâlel, 1842.
(2) Lerebouelet, Recherches d'embryologie comparée sur le dévelop-
pement du Brochet, de la Perche et de VÊcrevisse. Mém. présentés par
divers savants à l'Ac. des Se. de l'Institut de France. Se. math, et phys.,
t. XVII, 1862.
2° Id., Recherches d'embryologie comparée sur le développement de la
Truite, du Lézard et de la Limnèe, Ann. des Se. mat., 4e série, t. XVI,
1861.
3° Id., Nouvelles recherches sur la formation des premières cellules
embryonnaires, Comptes rendus, 1864, et dans les Annales des Se. nat.
Zool., 1864.
(5) Gôtte, Beitrdge zur Enticickelungsgeschichle der Wirbellhiere,
Archiv fur HIKROSK. A.\AT , Bd. IX.
( 757 )
hlasto lisquc s'est en même temps aplati et notablement
aminci. Entre la couche intermédiaire et le disque a paru
une cavité excentriquement placée et dans le disque lui-
même nous pouvons distinguer deux régions. L'une cen-
trale plus mince l'orme la voûte de la cavité genninalive;
l'autre périphérique plus épaisse l'orme au blastodisque un
bourrelet marginal. Celui-ci consiste en un anneau plus
large d'un côté que de l'autre, ce qui détermine l'excen-
tricité de la cavité.
La constitution cellulaire du blastodisque s'est notable-
ment modifiée : les cellules se sont multipliées et sont
devenues beaucoup plus petites. On peut distinguer dans
le disque en y rattachant tout ce qui se trouve en dehors
de la couche intermédiaire proprement dite 1° la lamelle
enveloppante constituée par une seule rangée de cellules
plates; 2° une couche formée exclusivement de cellules
polyédriques, serrées les unes contre les autres, claires et
transparentes, dont le protoplasme est à peu près homo-
gène et qui toutes sont pourvues d'un noyau très-appa-
rent privé de nucléole. Cette couche forme la plus grande
partie du gastrodisque; elle est plus épaisse dans la portion
la plus large de l'anneau périphérique, de sorte que sur
•me coupe optique elle a, prise dans son ensemble, la
l'orme d'une virgule dont le point d'origine correspondrait
à la partie la plus large de l'anneau marginal;
3° Une couche formée par des cellules rondes, peu adhé-
rentes entre elles, finement granuleuses et pourvues rie
noyaux à nucléole punctiforme. Celle couche est adhérente
à la face profonde du blastodisque, mais elle n'existe pas
dans toute son étendue; elle manque à peu près complète-
ment à la voûte de la cavité germinalive. Elle n'est repré-
sentée en cette région que par quelques cellules isolées.
2ine SÉRIE , TOME XLIV. 52
( 738 )
Elle n'existe donc à l'état de couche continue que sur le
pourtour du disque; elle présenterait, si elle était isolée,
la forme d'un anneau. Elle n'est pas partout également
développée : elle a son maximum d'épaisseur et sa plus
grande largeur dans la partie la plus large du bourrelet
marginal du blastodisque. Elle repose immédiatement sur
la couche intermédiaire.
La couche intermédiaire a subi, elle aussi , des modifi-
cations importantes. L'épaississement lenticulaire médian
n'existe plus; au contraire le bourrelet périphérique a con-
servé le même développement que dans les phases précé-
dentes; sa section est toujours triangulaire, de sorte que
le bourrelet, pris dans son ensemble, a toujours la forme
d'un prisme triangulaire contourné circulairement et appli-
qué par l'une de ses faces sur le globe deutoplasmiquc.
La courbe intermédiaire forme le plancher de la cavité
de segmentation; cependant sur celte couche reposent çà
et là quelques cellules arrondies dont les caractères sont
très-semblables à ceux qui distinguent les cellules de la
couche profonde du blastodisque. Ces cellules paraissent
dérivées de la couche intermédiaire; car à côté des cellules
complètement isolées on en trouve d'autres qui, tout en
faisant saillie dans la cavité de segmentation , sont partiel-
lement confondues avec la couche intermédiaire. La sur-
face qui indique la limite de cette couche, du côté de la
cavité germinative, est bosselée; au centre de chaque émi-
nence se trouve un noyau et il semble que les bosselures
se détachent de la couche-mère, pour donner naissance aux
cellules qui reposent sur le plancher de la cavité.
Des cellules arrondies présentant les mêmes caractères
se trouvent, en outre, dans le bourrelet périphérique; de
sorte que celui-ci n'est plus constitué seulement par une
( 759 )
masse protoplasmique tenant en suspension des noyaux
cellulaires; mais il renferme (les cellules parfaitement in-
dividualisées. Dans toute l'étendue de la couche intermé-
diaire on distingue, au contact du protoplasme, une rangé*;
bien régulière de noyaux ovalaires aplatis. Les limites des
cellules sont trop peu marquées pour que l'on puisse dire
qu'elles forment un épithélium pavimenteux simple; mais
il n'est pas douteux qu'une couche épithéliale formée par
une rangée unique de cellules plates se développe aux
dépens de la partie profonde de la couche intermédiaire;
cet épithélium repose immédiatement sur la surface du
deutoplasme. (Voir fig. i) et 10.)
Telle est la série des phases du développement que je
suis en mesure de décrire d'une manière assez complète
pour pouvoir en tirer quelques conclusions. Les observa-
tions que j'ai faites sur les stades ultérieurs du dévelop-
pement sont trop fragmentaires pour pouvoir être publiées.
Il me reste à comparer les laits dont je viens de rendre
compte à ce que l'on connaît actuellement de la formation
des feuillets embryonnaires chez les Téléostéens et à for-
muler quelques conclusions.
1. Ce qui ressort tout d'abord, avec une parfaite évi-
dence, des observations que je viens d'exposer, c'est que
les feuillets embryonnaires ne procèdent pas exclusive-
ment du germe segmenté, qui forme, à la (in du fractionne-
ment, ce que Lereboullet appelle le blastoderme et ce que
nous avons désigné avec Haeckel sous le nom de blasto-
disque. Une partie des tissus embryonnaires se développe
aux dépens d'une couche qui revêt le globe deutoplas-
mique et qui ne prend aucune part à la segmentation.
Celle couche, pas plus que le germe proprement dit,
ne renferme, au début, aucune trace d'éléments cellulaires;
(760)
des cellules se forment, par voie endogène, dans la couche
intermédiaire, à la fin du fractionnement et les feuillets qui
en dérivent ont un mode de formation très-analogue à celui
de lectoderme chez les Insectes (1).
C'est celte couche que Lereboullet a connue et dési-
gnée sous les noms de membrane sons-jacente au germe,
et ailleurs de feuillet muqueuse, Elle a été appelée membrane
viielliue par OEIIacher (2) ; Rindenschicht par Ilis (3) ;
membrane intermédiaire par Van Bambeke.
Cette couche a été méconnue par Haeckel, ce qui lui
fait dire : So k'ônnen nur die Furchwujszellen einzig
und allein die Grundlage des enlslehenden Fischkorpers
bilden; il admet la formation de l'endoderme par inva-
gination des bords du blaslodisque.
Iisl-il possible d'admettre que cette couche ait fait dé-
faut dans les œufs que Haeckel a eus sous les yeux, et que
le développement de certains feuillets se fait par invagi-
nation des bords du blaslodisque, chez certains poissons
osseux, aux dépens d'une couche qui ne prend pas part à
la segmentation chez d'autres? Je ne le pense pas, et je
crois que Haeckel lui-même n'accepterait pas pareille sup-
position. Il y a, du reste, diverses particularités, dans les
dessins publiés par Haeckel lui-même, qui me paraissent
prouverai je les compare à certaines ligures de ma planche,
que la couche intermédiaire existait dans les œufs que
(1) Aur.. Wkiss.ua>, Beilrtige zur Enhvickelungsgeschichte der [nsec-
trn, Zeitscii. fur wiss. Zool., vol. XIII. 1863.
(2) OELLAcnF.il, Beitrâge zur Entwickelungsgeschichte der Knocken-
fische-, Zeitscii. fur wiss. Zooi.., [>d. XXII.
(3) His, Uhtersuchungen ttbsrdie Entwickrlung von Knoclienfischen,
besonders iïber diéfonige des Salmens , Zkitsch. fur A;\»t. bhij Entwi'ck ,
i«» Bel 1876.
( 761 )
ce savant a eus sous les yeux. C'est ainsi que dans les
figures 5o et 56 de sa planche IV, Haeckel a figuré les
globes de segmentation se prolongeant en dehors par une
sorte de queue appliquée sur le globe deuloplasinique.
Celle queue correspond évidemment à cette partie de la
couche intermédiaire (voir ma planche, lig. 1) qui dépasse
en dehors le germe segmenté et qui se trouve intimement
appliquée à la surface du deutoplasme.
Celte première conclusion de mes observations vient à
l'appui des résultais avancés et soutenus en ce qui con-
cerne divers poissons osseux par Lereboullet, par Kupffer,
par Owsjannikow, par Klein, par His et par Van Bam-
beke. Je suis bien loin de vouloir adhérer pour cela à
la fameuse théorie du parablaste de His, défendue en ce
qui concerne les poissons osseux par Owsjannikow (I).
L'idée fondamentale de cetle théorie, c'est qu'une partie
des tissus de l'embryon ne dériverait pas de la cellule-œuf,
mais procéderait de cellules conjonctives de la mère, qui,
immergées dans le jaune de l'œuf, seraient destinées à re-
produire des tissus conjonctifs et vasculaires. L'embryon
se rattacherait à l'organisme maternel par un double lien :
par ses tissus archiblastiques dérivés de la cellule-œuf,
l'embryon se rattacherait aux tissus archiblastiques ma-
ternels; ses tissus parablasliques dériveraient directement
des tissus conjonclivo-vasculaires du parent. Non-seulement
celte théorie n'a pas été démontrée par M. His, mais
l'idée m'en parait absolument insoutenable, si l'on se place
sur le terrain de l'embryologie comparée.
D'un autre côté, mes observations ne cadrent aucune-
(I) Ow.sjannikuw, Ueber die ersten Vorgdnge (1er Enticickclung in den
Eiern des Coregonus lavaretus, Bull, de l'Acad. de S'-Pétkrsb., t. XIX.
( 762 )
ment avec les idées de Rathke(l), de von Baër (2), de
Slricker (5), de Rieneck (4) , de Weil (o) et de Œlla-
cher, qui tous ont admis que les divers feuillets de l'em-
bryon se forment par délamination aux dépens du blasto-
derme. Je ne puis me rallier davantage à la manière de
voir de Gôtte et de Haeckel, d'après laquelle le feuillet
interne se formerait par invagination des bords du blas-
todisque et dériverait ainsi comme les autres feuillets du
germe segmenté.
Est-ce à dire que les poissons osseux s'opposent à la gé-
néralisation du phénomène de l'invagination en tant que
caractérisant les premières phases du développement de
tous les Métazoaires? Est-il impossible de ramener le type
du développement des Téléostéens au mode de formation
de la Gastrula chez l'Amphioxus, les Batraciens, les Mam-
mifères? Nullement. Voici, en effet, comment j'interprète
les phénomènes. L'œuf des poissons osseux, aussitôt après
la fécondation, se divise en deux cellules très-dissem-
blables : l'une est le germe qui se segmente et d'où dérive
le blaslodisque; l'autre est formée par le globe deuto-
plasmique revêtu, du moins partiellement, d'une mince
couche de protoplasme : la couche intermédiaire. Cette
(1) Rathre, Bildungs-und Entwickelungsgeschichte des Blennius
viviparus, Abiiasd. zur E*TwicKELUNGSGEScnicnTE. Erste Ahhanil., 1835.
(2) K.E. von Baeb, Untersuchungen iiber die Entwickelungsgeschichte
der Fische. Leipzig, 1835.
(3) Stricker, Untersuchungen iiber die Entwickehmg der Bachforelle,
WlK'VER SlTZUNGSBER., Bd., LI.
(4) Rikheck, Ueber die Schichtungdes Forellenkeimes, Max Sciiultzb 's
Abchiv.. Bd.V, 1869.
(5) Weil, Beitriige zur Kennlniss der Entwickelung der Knochen-
fische, Wiener Sitzumceb., Bd. LXV, 1872.
( 703 )
dernière cellule, qui est l'origine de l'endoderme , pré-
sente une conslilulion analogue à celle des cellules adi-
peuses. Celte cellule ne se segmente pas ultérieurement;
mais il y apparaît, vers la lin de la segmentation du
germe, toute une génération de cellules qui se forment
par voie endogène. De là un feuillet cellulaire sous-jacent
à la couche qui provient de l'extension du blastodisque et
ce feuillet est homologue «à l'endoderme des autres verté-
brés; la masse cellulaire qui forme le blastodisque repré-
sente l'cetoderme. Le blastodisque s'étend peu à peu et
tend à recouvrir par épiboliele globe deuloplasmique. Il en
résulte que le développement des Téléosléens débute par
un fractionnement total du vitellusen deux cellules : l'une
d'elles continue à se segmenter, tandis que l'autre conserve
ses caractères et reste indivise. Ce fait, d'une plus grande
lenteur dans le fractionnement des cellules qui doivent
donner naissance à l'endoderme, est très-fréquent non-
seulement chez les Vertébrés, mais aussi dans les autres
embranchements; il se présente d'une manière constante
dans le cas de formation d'une Gastrulà par épibolie. Or,
c'est par épibolie que se forme la Gastrulà chez les Téléos-
léens. La Discogastrula n'existe donc pas; la segmentation
discoulale de Haeckel ne diffère en rien d'essentiel de la
segmentation inégale (Inœquale Furchung).
On objectera peut-être le mode si particulier de forma-
tion des cellules de la couche intermédiaire : ces cellules
ne sont pas le résultat d'une vraie segmentation. Je rappel-
lerai que Strasburger (1) a démontréque la multiplication
des cellules par voie endogène n'est pas un procédé pri-
mordial de multiplication cellulaire, mais un mode secon-
(1) Strasburger, Ueber Zellbildung und Zelltheilung. Jena , 1876.
( 764 )
daire dérivé de la division pure et simple. Il s'y rattache
par toute une série de formes intermédiaires. La forma-
tion simultanée, par voie endogène, d'un grand nombre de
cellules dans une cellule unique, serait une abréviation ou
une condensation d'une série de divisions successives.
(I est clair que la formation du blastoderme des Insectes
doit être interprétée de cette manière; et l'on trouve dans
l'embranchement des Arthropodes, principalement chez,
les Crustacés, toute une série de formes de transition.
Cette manière de voir trouve ici une nouvelle applica-
tion : la formation de l'endoderme des poissons osseux est
au développement de ce feuillet par segmentation régu-
lière tel qu'il existe chez les Acraniens, les Cycloslomes,
et les Batraciens, ce qu'est le mode d'apparition du blas-
toderme des Insectes à la formation de ce feuillet par seg-
mentation, tel qu'il se montre, par exemple, chez beaucoup
de Crustacés.
II. Kupfïer est le seul qui ail reconnu et décrit chez les
poissons osseux le développement de cellules à la surface
du globe vitellin en dehors du germe segmenté. La zone
nucléaire {Ke ruer zone), observée par Kupfïer chez les G«.v-
(erosteus et les Spinachia , correspond évidemment à la
partie de ma couche intermédiaire située sur le globe deu-
loplasmique en dehors du blaslodisque.
La partie de ma couche intermédiaire qui est située
sous le blastodisque, répond à la membrane formée de
globules vitellins, ou feuillet muqueux de Lereboullet et
à la couche intermédiaire de Van Bambeke. Le bourrelet
périphérique à section triangulaire sur lequel repose le
bord du blastodisque a été observé par Lereboullet chez
la Truite et parfaitement décrit par Van Bambeke chez
( 7«5 )
le Gardon ; mais ce dernier auteur n'a pas trouvé chez les
Cyprinoïdes qu'il a étudiés, pas plus du reste que Lere-
boullct, d'épaississement lenticulaire médian. Il est même
douteux que la couche intermédiaire soit dès le début con-
tinue sous le blaslodisque, chez tous les poissons osseux;
(voir à ce sujet le travail de Van Bambekc et le dernier
mémoire de Klein). La lentille intermédiaire paraît être
une disposition propre à notre espèce. iMes observations
démontrent, dans tous les cas, que Kupffer se trompait
quand il exprimait l'opinion que sa zone nucléaire était
toute autre chose que le feuillet muqueux de Lereboullef.
Ce que OElIacher a décrit chez la Truite sous le nom
de membrane vilelline s'identifie encore avec notre couche
intermédiaire; seulement cet excellent observateur a été
induit en erreur, quand il a admis que les cellules qu'il a
observées dans celle couche, à la On de la segmentation,
sont dérivées du blastoderme et immigrées dans la couche
sous-jacente à ce dernier. Klein , a non-seulement reconnu
celte même couche chez la Truite, mais il a démontré que
des noyaux cellulaires s'y montrent en grand nombre, vers
la fin de la segmentation; celte couche il l'appelle para-
blasle. Ilis l'a décrite chez le Saumon sous le nom de
Rindenscliicht (couche corticale). Le bourrelet périphé-
rique est désigné par lui sous le nom de Keimwall et les
cellules que l'on y observe, à la fin du fractionnement, sont
appelées parablastisehe oder Nebenkeimzellen.
III. Je n'ai trouvé, à aucune des phases du dévelop-
pement, la moindre trace de cette cavité que Van Bambekc
appelle cavité de segmentation. En cela, je n'ai pas été
plus heureux que Kupffer et plusieurs autres embryolo-
gistes, qui n'ont jamais pu découvrir une semblable cavité
dans les œufs vivants.
; 7m ;
La cavité de segmentation observée par Lereboullel,
chez la Perche et chez le Brochet, n'a été constatée qu'après
l'emploi de réactifs coagulants; et ce n'est qu'après trai-
tement par l'acide sulfurique dilué que Kupffer a trouvé
une semblable cavité dans le blastoderme du Gobius niger.
Van Bambeke n'a reconnu la présence de sa cavité de
segmentation chez le Gardon qu'en procédant à la confec-
tion de coupes à travers le blastodisque durci. Elle n'a été
trouvée, chez la Truite, ni par OEllacher, ni par Klein (1),
ni par His.
La présence de cette cavité dans l'épaisseur du blasto-
disque n'est donc pas constante chez les poissons osseux;
il est même possible que la cavité décrite sous ce nom et qui
n'a été observée que sur des œufs durcis, soit une produc-
tion artificielle. Dans tous les cas le nom de cavité de seg-
mentation donné à cette cavité ne lui convient nullement.
La cavité de segmentation, telle qu'on la connaît chez
l'Amphioxus, les Cyclostomes, les Batraciens et une foule
de vertébrés inférieurs, se trouve invariablement située
entre l'ectoderme et l'endoderme. Elle est limitée d'un
côté par la concavité de l'ectoderme, de l'autre par celte
partie delà vésicule primitive qui, après son invagination,
constituera l'endoderme. Si l'on admet que la couche in-
termédiaire des poissons osseux est homologue de l'endo-
derme des autres Métazoaires, il est clair qu'une cavité
développée dans l'épaisseur du blastodisque ne peut être
une cavité de segmentation. Seule, une cavité développée
entre le blastodisque et la couche intermédiaire, pourrait
être désignée sous ce nom. Une semblable cavité existe
(1) Kleix, Observations on the earhj development of the common
Trou/, Quart. Jocrn. of micr. Se. (Neto séries, n° LXII.) London, 1876.
( 707 )
chez les poissons osseux; elle apparaît à la fin du frac-
tionnement; elle a généralement été désignée sous le nom
de cavité germinalive ou de Keimhôhle.
Il est indispensable, rne semble-t-il, de modifier la ter-
minologie dans le sens des observations qui précèdent.
Je propose de désigner sous le nom de Cavité de Lere-
houllel, la cavité observée par cet auteur dans l'épaisseur
du blaslodisque chez la Perche et le Brochet, et signalée
par Van Bambeke chez le Gardon, par Kupffer chez le
Gobius niger,el retrouvée par Balfour (1) chez les Élasmo-
branches. Je le répète, c'est encore une question de savoir
si cette cavité existe bien pendant la vie.
II faut, au contraire, donner le nom de cavité de seg-
mentation (Furchungshôhle) ou de Blastocœlome, à la
cavité qui apparaît à la fin du fractionnement entre le
blastodisque (ecloderme) et la couche intermédiaire (endo-
derme). C'est cette cavité qui a été décrite chez la Truite
par Stricker, par Rieneck , par Weil, par OEIIacher, par
Klein, par His et par Gôlte, et qui a été tantôt appelée
Furchungshôhle, tantôt Keimhôhle.
Avec OEIIacher, je considère cette cavité comme homo-
logue de la cavité germinalive du poulet; c'est pourquoi je
crois que le nom de Keimhôhle peut également lui être
conservé. La présence de cette cavité est douteuse chez le
Gardon, les Spinachia, Gasterosteùs et Gobius, si l'on en
juge par les observations de Van Bambeke et de Kupffer.
IV. Une dernière question que je veux examiner est
relative à la destinée des deux couches primordiales de
fl) Balfocr, The development of elasmobraneh Fishes. Joubkal or
AlVAT. AiVD Phts., vol. X.
( 768)
l'embryon des poissons osseux : le blastodisque (ecto-
derme) d'un côté, la couche intermédiaire (endoderme) de
l'autre.
A la phase représentée par la (igure 6, l'embryon se
constitue, abstraction faite de la lamelle enveloppante, de
trois feuillets cellulaires bien apparents dans le bourrelet
marginal du blastoderme [Randwulst}. L'externe délimité
par la lamelle enveloppante dérive évidemment du blas-
todisque; l'interne n'est que la couche intermédiaire dans
la profondeur de laquelle les cellules se disposent en un
épilhélium pavimenleux simple. Mais entre les deux existe
une couche cellulaire incomplète; elle manque à la voûte
de la cavité de segmentation et son épaisseur diminue de
dehors en dedans.
Quelle est l'origine de cette couche? Dérive-l-clle du
blastodisque? ou bien est-elle constituée de cellules déri-
vées de la couche intermédiaire?
Je n'ai pu malheureusement suivre de mes yeux le dé-
veloppement de cette couche; cependant je ne doute pas
de son origine endodermique; je pense qu'elle se constitue
de cellules nées pour la plupart dans le bourrelet périphé-
rique de la couche intermédiaire.
Je m'appuie sur les considérations suivantes :
1° Les cellules de cette couche ont les mêmes dimen-
sions, la môme forme arrondie, l'aspeclgranuleux, le même
noyau pourvu d'une nucléole punctiforme que celles qui se
trouvent engagées dans le bourrelet périphérique et qui
sont incontestablement d'origine endodermique. Elles sont
au contraire très-différentes des cellules du blastodisque;
2° Les cellules qui reposent sur le plancher de la cavité
de segmentation et qui se sont formées aux dépens de la
lentille médiane de la couche intermédiaire, ont tous les
( 769)
caractères de celles qui constituent ccltecouche moyenne;
5° Le blastodisque proprement dit est resté délimité
inférieu rement par une ligne très-nette, et nulle part on
ne trouve de passage insensible de l'une des couches à
l'autre;
4° Je ne trouve aucune cellule présentant des carac-
tères intermédiaires entre les cellules claires et hyalines
du blastodisque, et les cellules granuleuses et à noyau
nucléole de la couch 3 intermédiaire.
Si mon interprétation est exacte, l'embryon se constitue
au moment de l'évolution que j'ai représenté ligure 6:
1° D'une lamelle enveloppante;
2° D'un feuillet eclodermique dérivé du blastodisque
et destiné à se subdiviser ultérieurement en un feuillet
sensoriel et un feuillet moyen externe;
5° D'un feuillet moyen interne d'origine endodermique,
et destiné à fournir les éléments du sang, les vaisseaux et
les tissus conjonctifs;
4° D'un feuillet endodermique destiné à fournir ulté-
rieurement des cellules au feuillet moyen interne et à
donner naissance à l'épithélium du tube digestif.
EXPLICATION DE LA PLANCHE.
Fig. 1. Stade l.Le germe est divisé en deux segments. Ceux-ci sont
séparés du deutoplasme par la couche intermédiaire.
— 2 Stade 2. Phase ultérieure de la segmentation du germe.
— 5. Stade ô. Le blastodisque est constitué. Dans la couche intermé-
diaire ont apparu des noyaux en grand nombre. (Coupe
optique.)
— 4. Stade i Le blastodisque s'est étendu et les cellules superficielles,
( 770 )
en se différenciant, ont donné naissance à la lamelle envelop-
pante. (Coupe optique.)
Fig. 5. Le même œuf vu à la surface
— 6. Stade b. Le blaslodisque s'est aplati ; entre lui et la couche inter-
médiaire a apparu la cavité germinalive. On distingue, indé-
pendamment de la lamelle enveloppante , la couche ecloder-
mique, le feuillet moyen conjonclivo-vasculaire d'origine
endodermique et le reste de la couche intermédiaire.
— 7. Une partie du blaslodique et de la couche intermédiaire du
stade 4. (Obj. 8 de Harlnack.)
— 8. Les noyaux de la couche intermédiaire entourés de leur couronne
radiaire tels qu'ils se présentent quand on les voit étalés à la
surface du globe deutoplasmique. (Obj. 8 de Harlnack.)
— 9. Une partie plus fortement grossie de l'embryon représenté fig. 6.
(Obj. 8.)
— 10. Cellules du plancher de la cavité germinative chez le même
embryon. (Obj 8.)
Recherches sur les Acinéliniens de la côte d'Oslende ; par
M. Julien Fraipont.
Travail du laboratoire d'embryogénie et d'anatomie comparée de
VUniversité de Liège. — Professeur M. Edouard Van Beneden.
INTRODUCTION.
L'histoire des Polypes, des Vcrs(Turbellariés, Trématodes,
Cestodes et Hirudinées), des Bryozoaires, des Tuniciers, des
Crustacés, des Poissons et des Cétacés de nos côtes a été
écrite de main de maître par P.-J. Yan Beneden, dans une
série de travaux qui portent pour titre : Recherches sur la
faune littorale de Belgique. Les* Protozoaires n'ont pas été
l'objet de publications spéciales de la part de ce savant.
Durant un séjour que je fis à Ostcnde pendant les mois
d'août et de septembre de cette année, je me suis appliqué
o
o
o
o
i
o
o
( 771 )
à l'élude des Acinétinicns de nos côtes. J'ai terminé ces
recherches au laboratoire (Yanalomie comparée de l'Univer-
sité de Liège.
J'ai trouvé huit espèces bien distinctes Cependant je ne
doute pas qu'il n'en existe un plus grand nombre et j'es-
père, par des recherches ultérieures, pouvoir compléter la
liste des Acinélinicns du littoral de Belgique. Quatre des
espèces que j'ai étudiées vivent en commensales sur la Cli-
tia volubilis; j'en ai trouvé trois autres sur la Campanu-
laria dichotoma; enfin, une sur la Sertularia argentea. Il
est probable que ces espèces ne se rencontrent pas exclu-
sivement sur tel ou tel hydroïde particulier, mais qu'elles
peuvent se lixer sur des formes très-différentes et non-
seulement sur des Polypes, mais également sur des Bryo-
zaires, des Algues et même sur des corps inertes. Je suis
en mesure d'aflirmer qu'il en est bien ainsi, tout au moins
pour une des espèces, VA. tuberosa, que l'on trouve en
abondance sur diverses Campanulaires et Serlttlaires, sui-
des Bryozaires tels que Laguncula repens , Laguncula
elongala et Boicerbaukea iinbricala.
Parmi ces espèces six sont nouvelles; les deux autres
ont été décrites et étudiées par Ehrenberg, par Stein et
par Claparôde ; ce sont : YAcineta tuberosa (Ehr.) et Y A ci-
neta Lyngbyi (Ehr.)
Parmi les espèces nouvelles que je crois pouvoir établir,
une appartient au genre Ophryodendron (Claparède et
Lachmann). Je la désigne sous le nom d'O. Belgicum.
Trois appartiennent au genre Acineta. Je les appelle respec-
tivement: Acincta divisa, Acineta crenata, Acineta vorticel-
loïdes. J'ai rencontré en outre deux Podophrya bien dis-
tinctes de toutes les espèces décrites jusqu'à présent: la
P. Bvnedeni et la P. truncata.
( 772)
Je ne me suis pas borné à l'élude des Acinètes au point
de vue systématique. J'ai eu surtout eu xwde revoir et de
compléter les connaissances que l'on possède sur l'organi-
sation et le développement de ces Protozoaires.
Le beau travail de Hertwig sur la Podophnjagemmi-
para (1) nous a fait connaître un mode de reproduction
qui n'avait été que soupçonné avant lui, la reproduction
par bourgeonnement externe. Mais toutes les recherches
antérieures deClaparède et de Lachmann, de Slein et de
plusieurs autres avaient établi l'existence d'un mode de
reproduction bien différent. Ils avaient montré que les
Acinétinicns produisent des embryons internes, qui vien-
nent au monde couverts d'une robe ciliée, et supposé que
ces embryons se forment aux dépens du noyau du parent.
Quel est le rapport existant entre ces deux modes de
reproduction? Se présentent-ils simultanément chez une
même espèce ? Ont-ils l'un et l'autre la signification d'une
simple reproduction agame ou bien ce dernier mode de
reproduction coexisle-t-il avec la reproduction sexuelle?
Voilà autant de questions auxquelles il serait bien diiïicile
de répondre dans L'état actuel de nos connaissances et il
en est bien d'autres que l'on peut se poser, tant sur l'orga-
nisation que sur le développement, sans trouver dans les
recherches des naturalistes qui se sont occupés de ce
groupe, des éléments pouvant conduire à une solution
positive.
La reproduction sexuelle tient de bien près à la généra-
tion scissipare chez les organismes inférieurs et quand
nous voyons divers modes de génération coexister chez
une seule et même espèce de Vorticelles, nous sommes
(1) Ueber Podophrya gemmipara, Morphologisches Jahrbuch von Cari
Gegenbaur. Bd. I,He. I. 1875.
( 773)
tout au moins en droit de nous demander, si chez d'autres
Protozoaires et chez les Acinétihiens en particulier, la
reproduction agame seule admise par Hertwig est réelle-
ment la seule existante.
Je suis loin d'avoir tranché toutes les questions que sou-
lève l'histoire des espèces que j'ai eues sous les yeux; mais
j'ai observé, j'ai constaté des faits nouveaux et je n'ai d'au-
tre prétention que d'avoir apporté ma pierre à l'édifice.
Dans une première partie de mon travail je décrirai à
propos de chaque espèce, étudiée séparément, ce que j'ai
observé relativement à son organisation, à sa reproduction,
à son développement. Dans une partie générale je ferai
l'étude comparative et synthétique du groupe au point de
vue systématique et organologique et je ferai remarquer
ee qui dans mes recherches tend à modifier nos connais-
sances sur l'organisation, la reproduction et le développe-
ment des Acinétiniens.
Je remplis un agréable devoir en exprimant ici toute ma
reconnaissance à M. le professeur Edouard Van Beneden
qui a été pour moi un guide éclairé et bienveillant et dont
l'appui et les conseils ne m'ont jamais manqué.
PARTIE SPÉCIALE.
OPIlKYODEi\B>RO!V BELGICVM.
Le genre Ophrijodendron fut créé parClaparède et Lach-
mann pour désigner un groupe d' Acinétiniens d'une organi-
sation toute particulière. Ce groupe est caractérisé avant
tout par l'existence d'une trompe rétractile, portant près
de son extrémité libre des organes ressemblant à des ten-
tacules ou à des suçoirs. Le nom d' Ophryodendron abie-
2me série: tome xliv. 53
( 774 )
tinum fut donné à l'espèce trouvée par eux à Glesnàsholm
(écueil situé dans la mer du Nord non loin des côtes de
Norwége). Cette espèce fut trouvée sur des Campanulaires
qui, elles-mêmes, étaient fixées sur des Zostera (1). Cla-
parède et Lachmann distinguèrent chez cet Ophryodendron
deux formes d'individus : les uns, ils les comparèrent à
des vers, les autres à des œufs fixés par leur petite extré-
mité.
Quelque temps après, Strethill Wright découvrait en
Angleterre un organisme ayant beaucoup d'analogie avec
l'espèce décrite par Claparède et Lachmann et lui don-
nait le nom de Corethria serlulariœ. Il trouva cette
espèce sur la Srrlularia painila. Claparède revendiqua
la priorité du nom Ophryodendron ; et Strethill Wright
qui, lors de la découverte de son Acinétinien , n'avait pas
eu connaissance de l'ouvragé de Claparède, crut plus tard
pouvoir identifier sa Corethria serlulariœ avecl'O. abieli-
num et accepta ce dernier nom pour désigner l'animal
qu'il avait observé (2).
Dans un travail récent sur un Ophryodendron de la Médi-
terranée, Koch émet l'opinion que la Corethria serlulariœ
n'est pas identique à l'O. abielinum, mais une espèce voi-
sine (3), et propose de lui conserver le nom spécifique que
lui avait donné St. Wright et de la désigner sous le nom
de 0. serlulariœ. Je me range complètement de cet avis;
(t) Claparède et Lachmann, Études sur les Infusoires et les Rhizopodes.
Genève, vol. II, p. 145, pi. S.
(2) St. Wright, Tlic Annales and Magazine of Nalural History, vol.
VIII ,lhird séries. Lomlon, 1861, p. 120, pi. III, IV el V.
(5) Koch, Zuei Acinelen auf Plumularia celacea. EHis. Jena , 1 876 ,
n. 7. noie 1.
( 775 )
car si l'on s'en rapporte aux dessins des deux auteurs on
devra reconnaître que les caractères de forme et d'organi-
sation sont suffisamment distincts pour que l'on puisse
les considérer comme deux espèces différentes.
L'O. abietinum a été trouvé depuis par Hincks près de
Bangor, sur YBalecium halecinum , el par P. J. Van Beneden
sur la Sertularia abictina à Ostende, comme j'ai pu m'en
convaincre par quelques croquis que ce savant a bien
voulu me communiquer (1).
Hincks a décrit une nouvelle espèce sous le nom
(10. pedkcllalum ; elle se caractérise par la présence d'un
pédicule à l'aide duquel l'organisme se fixe sur la loge ou
la tige de la Plumulaha pinnata.W constate comme Clapa-
rède deux formes d'individus. N'ayant pas pu découvrir de
formes de transition entre les deux genres d'individus, il
admet le dimorphisme de l'espèce et nomme les uns Pro-
boscidiens, les autres Lagéniformes (2).
Koch a publié, il y a quelque temps, l'histoire d'un
Ophryodendron trouvé à Messine et auquel il donna le nom
d'O. pedunculalum (5). Cet auteur constate également chez
cette espèce, qui vil sur la Plumularia cetacea, la présence
de deux formes correspondant aux Proboscidiens et aux
Lagéniformes de Hincks; il les désigne respectivement sous
les noms de [orme A et B. Koch n'a pas eu connaissance du
travail de Hincks sur YO. pedicellatum. La description et
(1) M Van Beneden a donné une figure de Y Ophryodendron observe
par lui à Ostende dans son étude sur les Commensaux el les Parasites
dans le règne animal, p. 68. Paris, 1875.
(2) H.ncks, Quarterly Journal of Microscopical Science, vol. XIII, new
séries London, 1875, page I, pi. I.
(5; Ouvrage déjà cilé.
[ 776 )
les figures qu'il donne de son espèce se rapprochent telle-
ment de celles faites par le naturaliste anglais, que je pense
que les deux espèces sont excessivement voisines, si pas
identiques. Toutefois, comme les dessins semblent indi-
quer des différences dans l'aspect du protoplasme, je crois
qu'il faut considérer provisoirement VO. pedunculatum
comme distinct de l'espèce trouvée en'Angleterre.
L'Ophryodendron que j'ai trouvé à Ostende sur la Ciitia
volubilis diffère de toutes les espèces décrites; de sorte
que le nombre des espèces connues du genre s'élève à
cinq.
On ne trouve jamais en grande abondance VO. belgicnm.
Il y a lieu de distinguer chez cette espèce, comme chez
VO. abictinum, VO. pedunculatum et VO. pediceUalum,6eux
formes d'individus. Avec Hincks, j'appellerai les uns Pro-
boscidiens, les autres Lagéniformes.
I. - PROBOSC1DIENS.
On peut distinguer chez un Proboscidien un corps et
une trompe.
LE CORPS.
Forme générale. — L'aspect le plus fréquent sous lequel
apparaît un Proboscidien est celui d'un ovoïde fixé par sa
petite extrémité ou celui d'une poire à laquelle on aurait
enlevé son pédicelle. Ce caractère le différencie tout d'abord
de VO. pedicellatum et de VO. pedunculatum. Chez certains
individus la partie rétrécie prend une forme plus allongée
et donne à l'organisme l'aspect d'une massue. A la face
supérieure et libre, la paroi du corps se creuse souvent en
une gouttière plus ou moins profonde. Les bords qui déli-
mitent cette gouttière ne sont jamais ou que très-rare-
ment identiques; tandis que l'un est convexe et contribue
( 777 )
à donner à VAcinétinien un aspect pyriforme on ovoïde,
l'aulre en général moins élevé est concave et sinueux.
Le corps protoplasrnique que j'ai «à décrire est délimité
par une membrane et renferme une ou des vacuoles et un
noyau. Nous aurons donc à distinguer successivement ces
différentes parties.
La cuticule. — Le corps de l'O. belgicum est recouvert
par une membrane assez épaisse, réfractant fortement la
lumière et présentant à la coupe optique un double con-
tour. La substance qui constitue celle cuticule me paraît
amorphe. Si Ton suit la membrane vers l'extrémité b;isale
de l'organisme, on voit que, chez certains exemplaires,
elle s'épaissit en un disque plus ou moins large qui
s'insère solidement sur la loge ou la tige de la Clitia volu-
bilis (figure 14 et 24). Lorsque ce disque est considérable
il arrive qu'il n'est pas exclusivement constitué par la cuti-
cule, mais que la substance protoplasrnique périphérique y
pénètre. Chez d'autres individus la membrane se moule
simplement suivant une petite surface sur le périsarc du
Polype et y adhère fortement (ligure 16). Chez d'autres
encore elle forme un épaississement assez considérable
ayant l'apparence de deux cônes placés bout à bout. L'un
constitue l'extrémité de la base du corps, l'autre l'organe
de fixation. Ce dernier est souvent plissé à sa surface dans
le sens vertical (fig. 18).
La substance protoplasrnique. — Le protoplasme est
très-opaque chez la plupart des Proboscidiens adultes et
est pourvu de granulations de différentes grosseurs. Les
unes sont plus foncées, les autres plus claires; les unes
sont sphériques, les autres ont des bords irréguliers. Chez
certains individus il existe dans le protoplasme de petits
( 778 )
corps fusiformes à bords très-réfringents (tig. 18). Clapa-
rède el Lachmann (1) ont cru d'abord voir en eux 1rs
organes urticants de la Campanularia qui auraient été
secondairement introduits chez YOphryodendron; mais i!s
n'ont pu conserver cette manière de voir. Quant à moi, je
ne suis pas en mesure de donner des renseignements
précis, d'où l'on puisse induire la véritable origine et la
signification de ces corpuscules. J'incline à croire néan-
moins qu'ils sont un produit du protoplasme de l'orga-
nisme et qu'ils doivent être comparés aux Trichocystes
que l'on connaît chez plusieurs Infusoires. Chose remar-
quable, certains individus en sont complètement dépour-
vus, d'autres en ont un petit nombre; enfin il en est, mais
peu nombreux, dont le corps est chargé de ces éléments
au point d'en perdre toute transparence. Je les ai vus aussi
chez les Lagéniformes. Claparède avait observé que les
embryons ciliés eux-mêmes étaient quelquefois pourvus
de ces éléments, qui se montraient alors renfermés dans
des corps vésiculiformes;ce qui conlirme le rapprochement
que j'ai cru devoir établir entre les corpuscules el les tri-
chocystes des Infusoires.
On peut distinguer dans le protoplasme des Probosci-
diens favorables à l'observation une couche corticale
claire, finement granuleuse et une couche médullaire
plus foncée, plus opaque et tenant en suspension des
granules plus volumineux. Si l'on fait agir l'alcool fort et
le picrocarmin, la distinction entre Yectosarc el Yendo-
sarc devient pi us marquée.
Cette différenciation du protoplasme en deux couches
(!) Ouvrage déjà cité page 143, vol 11.
( 77!) )
n'a pas été remarquée par les observateurs qui m'ont pré-
cédé dans l'étude des Ophryodendron.
Vacuoles. — Claparède et Lachmann semblent seuls
avoir trouvé chez VO. abietinum une vacuole qu'ils n'ont
cependant pas vu puiser avec certitude. Chez VO. belgicum
la présence d'une vacuole est constante. Tantôt il en existe
une, tantôt deux. Il se pourrait même que l'on eu trouvât
un plus grand nombre. Quand la vacuole est unique elle
se forme dans la partie renflée du corps, mais pas à la
même place chez les différents individus. Quand il y en a
deux, l'une se trouve dans la partie antérieure du corps,
l'autre dans la portion rétrécie. Cette dernière vésicule
n'atteint jamais le volume de la première. La forme de la
vacuole est le plus souvent ovoïde; ses bords sont plus
ou moins irréguliers et son contenu est clair et hyalin.
Jamais je ne l'ai vue puiser; cependant j'ai tout lieu
de croire qu'elle se comporte de la même façon que les
vacuoles contractiles des autres Acinéliniens. Stein (1) cl
après lui Herlwig ont constaté que chez les Protozoaires
marins la durée de temps qui s'écoule entre deux systoles
est beaucoup plus longue que chez les Protozoaires d'eau
douce. Herlwig (2) rapporte même que chez le Podophrya
gemmipara il s'écoulait quelquefois plusieurs heures avant
qu'une vacuole crevât. On comprendra par là qu'il n'y a
rien d'étonnant à ce que je n'ai pas vu puiser la vacuole
chez mon espèce, car jamais je n'ai suivi pendant longtemps
la même vacuole contractile.
Le noyau. — C'est Koch qui le premier a observé d'une
(1) Stein, Organisants der Infusionsthierc. Leipzig, 1859, t. F, p. 91.
(u2) Herlwig, ouvrage cité.
{ 780 )
façon certaine et complète le noyau chez VOphryoden-
dron (1). Les observateurs qui l'ont précédé, ou bien
n'ont pas vu de nucléus, ou bien ne l'ont déchiffré que
partiellement. Cela ne doit surprendre personne, vu que
le noyau n'est pour ainsi dire jamais visible chez ces
organismes en vie et que les auteurs qui ont précédé Koch
n'ont pas appelé à leur aide l'action des réactifs.
La méthode que j'ai employée avec le plus de succès
pour faire apparaître le nucléus consiste dans l'appli-
cation de l'alcool absolu (pendant cinq minutes) et du
picrocarminate d'ammoniaque (pendant un quart d'heure).
L'acide osmique noircit rapidement la substance des
Ophrijodendron et ne m'a pas donné d'aussi bons résul-
tats. Par la première réaction que je viens de citer, le pro-
toplasme ne se teint que faiblement en rose, tandis que le
noyau se colore fortement en rouge. Chez l'adulte, le
nucléus a une forme peu constante ; cependant il est
presque toujours arborescent. On peut en général lui dis-
tinguer un corps ou tronc principal et des diverticules.
Il est quelquefois massif et lobule, mais le plus souvent il
est pourvu de prolongements plus ou moins effilés qui se
terminent toujours par un renflement. D'autres fois, il a
une forme qui rappelle un E, un F ou un Y, dont les deux
bras sont toujours dirigés vers l'extrémité antérieure du
corps (fig. 14, 15, 20). C'est ce dernier cas qui est le plus
fréquent.
Le volume du noyau est aussi fort variable et n'est pas
toujours proportionnel à la taille des individus.
Le nucléus est moins compliqué chez les jeunes exem-
plaires : il a alors le plus souvent la forme d'un bâtonnet
(1) Koch, ouvrage cité.
( 781 )
renflé à ses deux extrémités et plus ou moins recourbé
sur lui-même.
Il ne m'a pas été donné d'observer rien de particulier
quant à la structure interne du noyau chez l'adulte. Pour
ce qui concerne le noyau des sujets très -jeunes, j'en
parlerai dans la partie qui traite du développement.
LA TROMPE.
Claparède et Lachmann pas plus que Hinks n'ont dé-
chiffré la structure intime de cet organe chez les Ophryo-
dendron; Koch a pu en donner une description plus com-
plète grâce à l'emploi de l'hématoxyline. Pour Wright, la
trompe de l'O. abietinum serait constituée d'une substance
très-réfringente et contractile, identique à la substance
constituant la tige des Zoothamninm. Si j'en juge par mes
observations sur la trompe de l'O. belgicum , je ne puis pas
partager l'opinion de Wright.
La trompe chez l'O. belgicum est insérée dans la dé-
pression supérieure du corps, un peu sur le côté. Elle est
recouverte par la cuticule amincie. Son diamètre trans-
versal est plus large à sa base qu'à son extrémité libre.
C'est un organe éminemment contractile : tantôt elle est
épanouie, tantôt elle se contracte et disparaît complète-
ment à l'intérieur de la concavité et quelquefois s'enfonce
assez profondément à l'intérieur du corps protoplasmique.
Lorsque la trompe est un peu contractée on aperçoit à sa
surface des sillons transversaux qui ont leur siège dans
la cuticule. Elle peut aussi s'incliner de tous côtés en s'in-
fléchissant sur sa base d'insertion.
Remarque intéressante et qui a son importance au point
( 7S2 )
de vue des caractères morphologiques et physiologiques
que l'on doit attribuer à la trompe, le protoplasme du
corps y circule librement. Cependant il y est plus clair et
ordinairement plus finement granuleux. Il n'est pas rare
de trouver dans le protoplasme de cet organe des corpus-
cules naviculaires (fig. 14).
Suçoirs préhenseurs. — L'extrémité libre de la trompe
se termine par une couronne d'appendices digitiformes.
Quoique je n'aie jamais vu (.YOphryodendron se servir
de ces organes pour saisir une proie, je pense qu'ils sont
les homologues des appendices de préhension et de suc-
cion des autres Acinétiniens. Leur mode d'agir et de se
contracter, la constitution et les mouvements de la
trompe, tout me porte à croire que c'est bien là leur
l'onction. Je propose de nommer ces organes : suçoirs
préhenseurs.
La disposition radiée des suçoirs préhenseurs autour
d'un axe commun est la même que chez l'O. pedunculatum
et l'O. Pcdicellatum, tandis qu'elle s'éloigne tout à fait de
celle qui caractérise l'O. abietinum et l'O. serlulariœ.
La cuticule, plus amincie encore que sur la trompe,
recouvre les suçoirs préhenseurs. Contrairement à ce qui
arrive chez la plupart des autres genres û' Acinétiniens, ces
appendices ne sont pas pourvus de renflements à leur extré-
mité libre. Lorsqu'ils sont épanouis, ils sont assez grêles
et d'une transparence magnifique. Ils peuvent se mouvoir
dans tous les sens et rentrer complètement à l'intérieur de
la trompe. Je n'ai pu les y suivre que chez quelques exem-
plaires particulièrement favorables et encore leurs con-
tours étaient-ils assez values.
( 783 )
II. — LAGÉNIFORMES.
Les Individus lagéniformes sont caractérisés par l'ab-
sence de trompe proprement dite et de suçoirs préhen-
seurs. De plus, leur aspect est complètement différent
de celui des Proboscidiens; il rappelle la forme d'une
bouteille dont le goulot serait terminé par un renflement
à convexité bien marquée. Ce dernier détail les différencie
des Lagéni formes , de VO. abietinum , de VO. pedicella-
lum et de VO. pedunculatum, dont je m'occuperai dans la
discussion des rapports entre les deux formes d'individus,
ils sont quelquefois pédicules, comme c'est le cas chez les
autres espèces (TOphryodendron. Ce pédicule consiste en
une ligelle grêle et rectiligne, qui pénètre assez profondé-
ment à l'intérieur du protoplasme. La substance qui le
constitue est très -réfringente et paraît complètement
amorphe (fig. 50). Mais la plupart des Lagéniformes que
l'on rencontre ne sont pas pédicules; alors ils sont iixés au
périsarc de la Clitia volubilis par une surface plus ou moins
considérable (fig. 51). La cuticule a tous les caractères de
la cuticule des Proboscidiens.
Quatat au corps protoplasmique, il renferme les mêmes
éléments que celui de la première forme. Quelquefois il est
un peu plus clair que celui des Proboscidiens. Un ectosarc
clair et finement granuleux se laisse facilement constater
(fig. 10). Quant à l'endosarc, il est plus foncé, plus opaque,
et les granulations y sont plus volumineuses (fig. 10).
L'acide osmique, l'alcool fort et le picrocarminale d'ammo-
niaque rendent ces deux couches plus manifestes (fig. 50).
On trouve souvent chez les Lagéniformes ces corpus-
( 784)
eûtes naviculaires dont j'ai déjà parlé, et même quelque-
fois en grande abondance (fîg. 31). On distingue également
dans le protoplasme une ou deux vacuoles, le plus souvent
ovoïdes et occupant une place peu constante chez les dif-
férents individus.
Noyau. — Le noyau n'est pas visible chez le Lagéni-
forme en vie. Il apparaît fortement coloré en rouge après
le traitement par l'alcool fort et le picrocarmin. Il est peu
compliqué et moins volumineux que celui de la plupart
des Proboscidiens adultes. Il a la forme d'un bâtonnet
aminci au milieu et renflé à ses deux extrémités (fîg. 31),
ou plus rarement celle d'un fer à cheval; mais jamais
il ne possède de diverticules (fîg. 30). Enfin, il occupe
généralement le centre de la portion endosarcique du
corps.
Quant aux formes de transition entre les deux caté-
gories d'individus, je me propose d'en parler dans un cha-
pitre spécial.
REPRODUCTION ET DÉVELOPPEMENT.
On a observé chez les Ophryodendron deux modes de
reproduction : la reproduction par bourgeonnement externe
et la reproduction par bourgeonnement interne.
La première a été constatée par Claparède et Lachmann,
comme le prouvent manifestement la description et les
dessins qu'ils en donnent (1). Elle a également été observée
par Wright, Koch et Hinks (2). Ce dernier l'a décrite même
(1) Ouvrage déjà cilé, 2e volume, 5e partie, p. 1-43 et pi V, fig.-i et 7.
(2) Ouvrages déjà cités.
( 785 )
chez des Lagéni formes; de plus, du fait qu'il vit deux indi-
vidus attachés par le même pédicule, cet auteur conclut à
la possibilité de l'existence d'une reproduction fissipare
consistant en une division longitudinale.
Quant à la production d'embryons internes, mes prédé-
cesseurs, à l'exception deWright, l'ont également observée :
Claparède et Hincks ont décrit des embryons internes
avant beaucoup d'analogie avec les embryons externes
dont parle Hertwig chez la Podopltrya gemmipara. Ils
étaient ovales ou allongés, avaient une face légèrement
convexe, l'autre aplatie ou concave et pourvue de cils
vibraliles.
Quant à moi, je n'ai remarqué chez mon espèce que la
reproduction gemmipare; et pas plus que mes prédéces-
seurs je n'ai pu suivre les différents stades de l'évolution
de cet Acinétinien sur le même individu.
C'est à la face supérieure et libre du corps des Pro~
boscidiens qu'apparaissent les bourgeons. Tout d'abord
ceux-ci ne sont qu'un simple renflement du corps proto-
plasmique à convexité parfaitement régulière. Parfois on
en observe qui n'ont pas cette forme. On en trouve qui
paraissent doubles. Ils se terminent par deux bosselures
affectant entre elles les mêmes rapports que les condyles
de l'extrémité inférieure du fémur (fig. 25).
Le bourgeon, généralement unique, commence à s'in-
dividualiser par un étranglement qui se fait à sa base, de
la surface vers l'intérieur. Si l'on traite par le picrocarmi-
nate d'ammoniaque un sujet parvenu à cette phase, on
trouve que le noyau du parent envoie un prolongement
grêle qui se termine dans le bourgeon par un renflement
sphérique. Je n'ai pas observé que le noyau changeât de
place et gagnât de plus en plus l'extrémité antérieure du
( 786 )
corps pour pousser des diverticules dans les gemmes,
comme c'est le cas chez la Podophrya gemmipara.
J'ai pu voir chez un seul exemplaire de cet âge une
lâche se colorant plus fortement à l'intérieur du renfle-
ment terminal du noyau (lïg. 2-4). Je pense pouvoir consi-
dérer ce corpuscule comme un nucléole.
Si l'on étudie des bourgeons plus avancés en âge, on
voit que le corps prend une forme plus ou moins sphé-
rique et adhère encore au parent par une portion de sa
surface dont l'étendue varie avec les individus. Le corps
protoplasmique de ces bourgeons est identique à celui des
bourgeons plus jeunes. Quaut au noyau, il est compléte-
menlséparé de celui du parent. Il possède alors une forme
qui rappelle assez bien celle d'un quadrilatère. Il est beau-
coup plus clair que celui de l'adulte et par l'action des
réactifs que j'ai cités plus haut, on y distingue ordinaire
ment deux petits corpuscules très-foncés que je prends
pour des nucléoles.
Je n'ai pas observé de stade plus avancé chez des exem-
plaires encore attachés au parent.
Mais on trouve souvent, dans le voisinage des Probosci-
diens, de très-jeunes sujets tixés sur des Clitia volubilù.
L'absence de cils vibratiles chez les bourgeons les plus
développés et le fait que je n'ai jamais vu de formes libres
rappelant celle de ces bourgeons me porte à croire que
les gemmes se détachant des parents se fixent immédiate-
ment dans leur voisinage.
Examinons les plus jeunes sujets fixés sur la Campanu-
laire. Ils ont une apparence pyriforme et sont caractérisés
par l'absence de trompe. A la face supérieure qui est la
grosse extrémité on dislingue souvent un sillon plus ou
moins bien accentué. Une cuticule à double contour enve-
( 787 )
loppe complètement le corps proloplasmique. Celui-ci est
finement granuleux, et je n'y ai distingué ni masse
médullaire, ni substance corticale. Il existe dans le proto-
plasme une vacuole dont les bords sont assez irréguliers et
dont le contenu se colore en rose par le picrocarmin. Le
noyau occupe le centre de l'organisme et a plus ou moins
la forme d'un bâtonnet renflé à ses deux extrémités. Jamais
chez ces individus je n'ai trouvé de nucléole (fig. 27).
Nous devons examiner ici le fait de la présence des
nucléoles chez les bourgeons et de leur absence chez les
adultes. Je ferai remarquer tout d'abord que j'ai observé
ce fait chez plusieurs Poriophrya et Acinètes marines. De
plus chez YAeineta luberosa, on peut voir un beau nucléole
dans le noyau de jeunes individus fixés et ayant déjà repro-
duit la forme du parent. Au moment de la production des
bourgeons le noyau pousse un prolongement dans l'inté-
rieur du gemme en voie de formation. Ce prolongement
est toujours renflé à son extrémité. Quelquefois un nu-
cléole apparaît dans ce renflement terminal avant la rup-
ture du pédicule qui rattache au nucléus du parent le noyau
de l'individu en voie de formation. Mais le plus souvent
un ou deux nucléoles apparaissent dans le noyau dérivé,
après la rupture du pédicule. Ces nucléoles se colorent
par le picrocarmin beaucoup plus fortement que le reste
du noyau. Dès que les gemmes se sont détachés du parent,
il n'est plus possible de distinguer les nucléoles. La
présence des nucléoles paraît donc caractériser chez les
Acinéliniens un moment déterminé de l'évolution de
l'individu.
Je ne puis donner actuellement une interprétation dece
fait. Mais j'ai cru devoir attirer l'attention sur ce détail
( 788 )
en ce moment où l'étude du noyau de la cellule attire si
vivement l'intérêt des histologisles.
On peut suivie chez différents exemplaires toutes les
phases de transition depuis les plusjcunes individus décrits
plus haut jusqu'aux sujets plus volumineux qui ont un
aspect d'ovoïde (fig. 29). Chez ceux-ci la constitution du
corps et du protaplasme est la môme que chez les précé-
dents. Quant au noyau, il est devenu plus voluminieux et
a pris la forme d'un bâtonnet renflé à ses deux extrémités
(fig. 29). 11 est aisé de passer de cette forme à un individu
lagéniforme proprement dit. Il suffit que le diamètre
transversal du jeune sujet diminue tant soit peu, et que
la partie antérieure de son corps s'étire en avant (fig. 50).
Pour ce qui est de la présence d'un pédicule transitoire
chez les Lagéniformes, le fait n'est pas si extraordinaire.
En effet, bien des organes chez des Protozoaires aussi bien
que chez des animaux supérieurs apparaissent dans le
cours de leurévolution individuelle pour disparaître ensuite.
C'est ce qui arrive chez des Lagéniformes plus âgés et plus
massifs (fig, 31). Enfin, que l'extrémité antérieure se diffé-
rencie progressivement (fig. 10) et l'on arrrive ainsi par
une suite de formes transitoires non interrompues à la
forme du Proboscidien (fig. 19 et 20).
RAPPORTS DES PROBOSCIDIENS ET DES LAGÉNIFORMES.
Discutons maintenant les diverses opinions qui ont été
émises au sujet des liens qui rattachent les Proboscidiens
aux Lagéniformes.
Tout d'abord il n'y a pas lieu de douter que les deux
formes n'appartiennent à une seule et même espèce.
Mais celle espèce est-elle dimorphe comme le prétend
( 789 )
Hincks et les Lagéniformes onl-ils pour fonction de four-
nir la nourriture nécessaire aux Proboscidiens que l'on n'a
jamais vus se servant de leurs appendices ?
Ou bien, comme semble le croire Koch, les Lagéniformes
peuvenl-ils, après s'être détachés de leurs pédicules, se fixer
sur les Proboscidiens, se souder, puis se confondre avec
eux; et les embryons ciliés ne prendraient-ils naissance que
dans les individus formés par suite d'une véritable conju-
gaison entre un Proboscidien et un Lagéni forme? Ou bien
enfin les bourgeons que produisent les Proboscidiens don-
nent-ils indifféremment naissance à des individus à trompe
(Clap. et Lachmann, liv. 2, pi. S, fig. 7) ou à des Lagéni-
formes, et ceux-ci ne constituent-ils qu'une phase de l'évo-
lution de ceux-là?
Il est remarquable que cette dernière hypothèse qui est
certainement celle qui se présente le plus naturellement à
l'esprit n'ait été soutenue par aucun des auteurs qui se
sont occupés des Ophyodendron.
Constatons d'abord que l'on ne trouve jamais chez mon
espècedes individus Lagéni formes fixés sur les Proboscidiens.
Ce fait exclut déjà à lui seul l'hypothèse de Koch. Les
bourgeons que produisent les individus pourvus de trompe
sont notablement plus petits que les Lagéniformes; de
sorte qu'il faudrait pour faire cadrer les faits que j'ai
constatés, avec l'hypothèse que cet auteur semble accepter,
supposer que les Lagéniformes, non-seulement se détachent
de leur pédicule, non-seulement changent de forme avant
de se fixer sur les Proboscidiens mais admettre en outre
qu'ils diminuent de volume, que leur noyau devient plus
simple, qu'en un mot les Lagéniformes suivent une série
de transformations inverses de celles qui caractérisent
les stades successifs de l'évolulion des autres Acinéliniens.
2'"* SÉRIE, TOME XLIV. 54
( 790)
Quant à l'hypothèse du dimorphisme émise par Hincks,
elle repose sur l'absence de formes intermédiaires entre
les deux sortes d'individus distingués par lui.
J'ai fait connaître plus haut plusieurs formes établis-
sant le passage entre les Lagéni formes et les Proboscidiens,
et je ne doute pas de l'identité morphologique de la trompe
de ceux-ci avec l'extrémité antérieure effilée des Lagéni-
formes. Des individus comme celui que j'ai figuré pi. I,
fig. 10, me paraissent très-démonstratifs à cet égard.
Au reste, si Hincks et Koch n'ont pas vu ces formes
intermédiaires, Claparède et Lachmann ont été plus
heureux.
Comment ces auteurs considèrent-ils les individus dont
Claparède et Lachmann disent: « L'extrémité antérieure
» de ces espèces de vers présentaient une espèce d'enfon-
» cernent spécial que nous crûmes devoir considérer
» comme une bouche ou comme une ventouse desuccion,
» mais que nous reconnûmes bientôt n'être qu'une fos-
» sette indiquant l'ouverture d'une cavité dans laquelle
» était logé un long organe rétraclile que nous avons à
» décrire plus loin ; » El dans un autre passage : « En
» compagnie de cet animal en forme de ver, s'en trou-
» vaicnl d'autres dont le corps était pour ainsi dire plus
d trapu, offrant l'apparence d'un œuf dont la pointe serait
» tournée vers le bas. Quelquefois aussi on rencontrait des
o individus, qui , tout en présentant une forme ovoïde,
» étaient cependant plus allongés, si bien qu'on trouvait
d tous les passages possibles de la première forme que
» nous avons décrite à la seconde (1). »
(1) Claparède el Lachmann, ouvrage déjà cité, 2m« vol., pp. 145 et 144.
( 791 )
Ces savants n'ont pas cherché à s'expliquer la cause de
ces formes de transition entre les deux sortes d'individus.
Mais que répondront à ces faits les défenseurs du dimor-
phisme. Pour moi, il me paraît évident que Claparède et
Lachmann ont donné la solution de la question, puisqu'ils
ont \u un organe rélraclile, qui est la trompe (comme Clap.
et Lachmann le disent dans un autre passage) imaginée
dans l'orifice que Hincks a considéré comme caractérisant
l'extrémité antérieure des Lagéni formes.
Je conçois donc comme suit la reproduction des Ophryo-
(tendrons: Les Proboscidiens donnent naissance par bour-
geonnement externe à des individus semblables à eux,
soit directement (Clap. et L., liv. 2, pi. 5, fig. 7), soit après
qu'ils ont passé par la phase d'individus lagéni formes.
Les Proboscidiens produisent en outre des germes par
bourgeonnement interne ou par voie endogène; et ces
germes viennent au monde partiellement couverts de cils
vibraliles. Le sort ultérieur de ces derniers n'est pas connu;
mais on peut en dire autant de la grande majorité des
embryons des Âcinétiniens.
Les bourgeons de notre Ophrijodcndron seraient analo-
gues aux embryons externes de la Podoplmja gemmipara
d'Hertwig. Ce mode de reproduction ne présente donc
rien d'exceptionnel si ce n'est que les gemmes ne devien-
nent pas ciliés. C'est ce qui ex| lique qu'ils ne se portent
pas à de grandes dislances des parents, mais se fixent
dans leur voisinage pour contribuer à la formation de
colonies.
Les embryons internes ont été si souvent observés chez
les Acinétiniens qu'à ce point de vue encore la reproduc-
tion des Ophryodendron n'a rien d>xlraordinaire.
Enfin quant à la coexistence de ces deux modes de
( 792 )
reproduction chez une même espèce, elle est connue chez
une foule d'organismes inférieurs, el il n'est pas besoin de
sortir du groupe des Protozoaires pour en trouver des
exemples.
Voici quelques mesures prises sur VOphryodendron
belgicum :
Le plus grand Proboscidien que j'ai eu sous les yeux me-
surait depuis l'extrémité basale jusqu'à l'extrémité supé-
rieure convexe : 0mm,1i44.
Le plus petit individu fixé sur le polype que j'ai observé
mesurait : 0mra,0585.
Le plus grand bourgeon que j'ai vu encore attaché au
parent mesurait en diamètre : 0mm,0220.
La longueur moyenne des Proboscidiens estdeOmm,0750
à 0mm,0800.
La hauteur des plus grands Lagéni formes est de
0mm,0990.
La plus grande largeur des Lagéniformes est de
0mm,016o.
La longueur moyenne de la trompe des Proboscidiens
est de 0mn\0350.
La plus grande largeur en moyenne est de 0mm,0055.
La hauteur moyenne des suçoirs préhenseurs épanouis
est de Omm,OMO.
La largeur moyenne des suçoirs préhenseurs épanouis :
0mm,0016.
.%CIXET.% DIVISA.
Le génie Aciiteia créé par Erhenbcrg a reçu de Clapa-
rède el Lachmann sa signification actuelle. Les Acinètes
proprement dites se distinguent principalement du genre
( 795 )
Podophrya en ce qu'elles possèdent une loge creuse. Ce
genre comprend un assez grand nombre d'espèces parmi
lesquelles il en est qui ont été assez complètement décrites
pour permettre de les reconnaître sans trop de difficultés.
D'autres, au contraire, n'ont été que fort imparfaitement
étudiées.
J'ai observé à Ostende plusieurs Acinètes. [/espèce dont
je vais donner la description s'éloigne de toutes les formes
connues; je la considère comme nouvelle et je propose de
la désigner sous le nom de : Acinela divisa.
VA. divisa rappelle, à première vue, une espèce trou-
vée par Claparède et Lachmann sur les côtes de Norwége
et décrite sous le nom d\A. patula (1). Les détails que ces
savants donnent sur l'organisation et la reproduction de
celte espèce sont fort insuffisants. Cependant l'insertion
de la loge sur le pédicule, les dimensions de celui-ci, les
caractères des appendices et plusieurs autres particularités
distinguent nettement les deux espèces.
J'ai trouvé VA. divisa sur les loges et plus souvent sur
les tiges de la Campanularia dicholoma. Ce Polype était
lui-même fixé sur des Fucus vesiculosus qui flottaient
en abondance à la surface de l'eau d'une huîtrière.
La forme la plus ordinaire de cette Acinêle rappelle
celle d'un ovoïde placé sur une coupe à Champagne plus
ou moins évasée, le pied de celte coupe étant d'une lon-
gueur variable mais toujours très-grêle. Cette position du
corps sur la loge est la même que chez VA. paiula.
(1) Etudes sur les [nfusoires et les Rhizopodes,Zme partie, i'ne volume,
I». 135, pi. V, fig 12 à 17.
( 794 )
ORGANISATION.
On peut distinguer chez VA. divisa un squelette et un
corps protoplasmique. Commençons cette élude par la con-
stitution du squelette.
LE SQUELETTE.
Le squelette comprend le pédicule, la loge et la cuticule
recouvrant le corps praloplasmique.
Le pédicule. — Le pédicule est l'organe de fixation de
YAcincic. Il est très-grêle et peut atteindre en longueur
jusqu'à cinq fois la hauteur de la loge. Sa largeur moyenne
est de 0mm,0035.Chez VA. patula il a toujours une largeur
plus considérable.
Le pédicule se constitue de deux parties : une mem-
brane réfractant fortement la lumière et une substance
centrale d'un aspect mal. Au point d'insertion de la loge
sur le pédicule la paroi de celle-là est en continuité avec
la membrane de celui-ci. On n'aperçoit pas davantage
une limite bien marquée entre la substance cet traie du
pédicule et l'intérieur de la loge. Chez YA.palula la loge
se termine en pointe à la partie inférieure et celte pointe
repose sur le pédicule dont l'extrémité est également effilée.
11 en résulte que les rapports entre le pédicule et la loge
sont ceux de deux cônes placés bout à bout. Jamais chez
VA. divisa ce mode d'insertion n'existe. Ll l'on ne dislingue
au niveau de l'insertion de la loge avec le pédicule qu'un
faible étranglement de la membrane et encore n'est-il pas
constant. A son extrémité basale le pédicule se renfle en
une petite ampoule, plane à sa face inférieure et qui se
moule sur le périsarc de la Campanulaire en y adhérant
fortement.
( 793 )
La substance centrale pénètre «'gaiement dans ce renfle-
ment et s'arrête contre la paroi interne de la membrane.
Ce sont là les seuls détails d'organisation que la ténuité
du pédicule m'a permis d'observer.
La loge. — La loge est l'organe de sustentation du
corps protoplasmique. Sa forme est peu constante et, si on
a un grand nombre d'exemplaires sous les yeux, il est aisé
de voir toutes les transitions depuis une forme très-allon-
gée jusqu'à une forme très-évasée. Il faut attribuer cette
diversité d'aspect à l'âge et surtout à la quantité plus ou
moins grande de nourriture absorbée par l'organisme. La
substance qui constitue la loge est d'ailleurs très-élas-
tique.
On peut distinguer dans la loge : une paroi et une ca-
vité. La paroi réfracte fortement la lumière et à la coupe
optique on lui voit un double contour. Si l'on observe des
loges vides, on s'aperçoit que sur les bords libres la paroi
s'invagine à l'intérieur pour constituer un véritable plan-
cber, sur lequel vient s'appuyer et se mouler le corps pro-
toplasmique (fig. 5).
Ce plancber est aussi fort élastique. En effet le corps de
VAcinète peut s'enfoncer profondément à l'intérieur de la
coupe (fig. 2) ou en sortir presque complètement (fig 1).
Quanta la cavité, elle est circonscrite de tous côtés par
la paroi delà loge. Elle me paraît remplie d'un liquide qui
peut être résorbé par le protoplasme dans certaines cir-
constances. C'est ainsi seulement que je puis m'expliquer
le fait que le plancher sur lequel repose le corps proto-
plasmique de VAcinète peut être plus ou moins refoulé à
l'intérieur de la coupe.
Quelle est celte substance qui remplit la cavité de la
loge?
( 796 )
Slein (1) a fait connaître, chez VA. mystacina, une couche
de substance gélatineuse (Gallertschicht) qui enveloppe le
corps de l'organisme et qui est traversée par les « suçoirs. »
Comme chez loules \esAcinètes, le corps protoplasmique
est délimité par une cuticule; il est clair que cette sub-
stance est rejelée par VAçinète à travers cette membrane.
Rien d'étonnant, si l'on trouve un produit de sécrétion dans
l'intérieur de la loge de mon espèce. Celte substance peut
être analogue à la gélatine de VA. mystacina et avoir été
rejelée par le corps protoplasmique à travers la membrane
qui lui sert de surface de sustentation.
La cuticule du corps protoplasmique. — Une membrane
articulaire recouvre et protège le corps protoplasmique.
Elle est en continuité directe avec la paroi de la loge. Voici
la façon dont elle se comporte: la membrane de la loge,
après s'être invaginée, se dédouble à une petite distance
du bord libre; l'une des lames va constituer le plancher
cuticulaire; l'autre revêt la portion du corps qui est à dé-
couvert. C'est cette dernière portion qui est à proprement
parler la cuticule du corps protoplasmique. Elle réfracte
fortement la lumière et a un double contour.
Chez certains individus, le corps protoplasmique se dé-
tache du plancher de la loge et prend, du côté de celui-ci,
une forme concave. Il apparaît ainsi, là où le soulèvement
a eu lieu, un espace libre circonscrit d'un côté par le
plancher, de l'autre par le corps de VAçinète (fig. 16).
Le protoplasme est délimité en ce point par une ligne
foncée et très-nette.
(1) Die Infusionsthiere. Leipzig, 185i.
( 797 )
LE CORPS PKOTOPLASMIQUR.
Forme générale. — L'aspect du corps de VA. divisa est.
très- variable. Cependant sa forme la plus constante est
celle d'un ovoïde trop étroit pour se maintenir sur le bord
libre de la loge. Cet ovoïde s'élargit à sa base suivant une
certaine épaisseur et peut ainsi se soutenir sur l'espèce de
plateau formé par les bords évasés de la coupe et le plan-
cher cuticulaire. D'où il suit que l'on peut considérer au
corps protoplasmique deux parties distinctes: une portion
située dans la concavité formée par l'invagination de la
paroi de la loge et que j'appelle portion adhérente du
corps; en second lieu, une partie située à l'extérieur de la
loge : c'est la portion libre au corps (llg. 4 et 8).
Il existe fréquemment des exemplaires, dont la portion
adhérente a pris une extension assez considérable pour faire
saillie bois de la coupe, en prenant une forme convexe.
Du milieu de cette convexité, un peu creusée suivant une
certaine surface, s'élève la portion libre. Quelquefois le
sillon délimitant les deux parties, est oblique (fig. 5). Mais,
comme dans tous les cas précédents, c'est la portion libre
seule qui est pourvue d'appendices.
J'ai observé un individu, dont la portion libre s'était for-
tement étirée en longueur et avait pris l'apparence d'une
trompe renflée à son extrémité supérieure. Les organes
tentaculifoi mes (fig. 10) étaient fixés sur ce renflement.
La division du corps en deux parties distinctes dis-
paraît chez les sujets qui ont absorbé une grande quan-
tité de nourriture. Alors, le corps gonflé [taries matières
alimentaires, prend la forme d'un ovoïde régulier, ou d'une
( ~^s )
sphère, et pénètre assez profondément à l'intérieur de la
loge (fig. 2).
Nous avons à voir maintenant la constitution de la
substance protoplasmique, et à examiner successivement
les différents éléments que Ton trouve dans le corps, à
savoir : la vacuole pulsatile et le noyau.
Constitution du protoplasme. — Le protoplasme, chez
l'adulte, est très-opaque et d'une coloration jaune sale. Il
est pourvu de granulations de différentes grosseurs. 11 en
est un certain nombre plus volumineuses, dont les bords
sont très-irréguliers. Ces grosses granulations existent
surtout en abondance chez les Acinètes de grande taille
gonflées par la nourriture (fig. 2). Quant à la coloration du
corps, je partage complètement l'avis de Hertwig (1) à ce
sujet : elle n'est pas accidentelle, et due à la présence de
matières étrangères colorées, mais un produit du proto-
plasme et une propriété qui le caractérise. On peut distin-
guer chez certains individus, même vivants : un ectosarc
et en endosarc (fig 4 et 8). L'eclosarc est clair et pourvu
de fines granulations. Son épaisseur est très-faible en com-
paraison de l'endorsarc. Celui-ci lient en suspension les
grosses granulations. Et c'est dans son sein que la- colora-
lion jaune est la plus accentuée.
En traitant par l'alcool absolu et le picrocarminate d'am-
moniaque, la délimitation entre la couche médullaire et la
couche corticale devient plus manifeste.
Enfin, le protoplasme de la portion adhérente est iden-
tique au protoplasme de la portion libre; d'ailleurs ces deux
parties ne sont séparées, comme je l'ai dit, que par un
sillon plus ou moins bien marqué; il s'ensuit que les gra-
(1) Hertwig, ouvrage déjà ci lé.
( 790 )
miles protoplasmiques peuvent passer d'une partie à l'autre,
sans le moindre obstacle.
Vacuole pusaUite. — Il existe une vacuole pulsatile
chez VA. divisa; la place qu'elle occupe n'est pas la même
chez tous les individus; elle est généralement sphérique
et elle prend le plus d'extension chez les exemplaires les
plus volumineux et gonflés de nourriture. Les bords de la
vacuole sont foncés cl son contenu est clair et a une appa-
rence hyaline. Elle apparaît d'abord comme une petite
lâche claire, augmente de volume excessivement lente-
ment et, arrivée à une certaine grosseur, elle crève et
disparaît. Pendant un temps qui est quelquefois Tort con-
sidérable, on ne voit plus de trace de la vacuole: puis elle
reparaît, comme je viens de le dire.
Ainsi que chez d'autres Acinétiniens que j'ai observés
à Ostende, la période de diastole est très-longue. C'est
ce qui avait été noté chez des Protozoaires marins par
Slein et par Hertwig, comme je l'ai fait remarquer à la
même occasion chez l'O. belgknm
Il est probable que la composition du protoplasme se
différencie, en cet endroit où la vacuole se forme et qu'une
véritable attraction s'exerce, en ce point, sur les résidus
liquides. C'est, selon moi, une véritable cavité qui naît en
même temps qu'elle se remplit de liquide.
Je me range donc de nouveau à l'avis de Stein, de
Hertwig et de Maupas (1), quant à l'absence de membrane
circonscrivant la vacuole pulsatile.
Le noyau. — Je ne connais le noyau de VA. divisa que
(1) Maupas, Sur l'organisation et le passage à l'état mobile de la
IV fixa, Archives de zoologie expérimentale et ge.\érale de Lacaze Du-
lliiers, t. V, n° 3, p. 401.
( 800 )
par l'action des réactifs. Les méthodes que j'ai employées,
pour le l'aire apparaître, sont les suivantes :
Traitement par l'alcool fort et le picrocarminate d'am-
moniaque.
Traitement par l'acide osmique et le picrocarminate
d'ammoniaque.
Traitement par l'alcool fort et le bleu d'aniline.
Traitement par l'acide osmique seul.
Traitement par l'acide chromique (très-faible) et le picro-
carminate d'ammoniaque. C'est par l'alcool absolu et le
picrocarminate d'ammoniaque que j'ai obtenu les meil-
leurs résultats.
Le nucléus a une forme peu constante, qui dépend
surtout de l'âge de YAcinèle. Chez l'adulte, il ressemble
le plus souvent à un ruban pelotonné sur lui-même
et envoyant quelques prolongements inéguliers (fig. 4
et 17); d'autres fois il a la forme d'un bâtonnet lobule
et plus ou moins contourné sur lui-même (lîg. 9). Chez
les jeunes individus, il est moins compliqué, mais encore
variable quant à la forme; tantôt il a celle d'un ovoïde
bosselé et pourvu de trois ou quatre petits ramuscules.
Chez certains exemplaires, il est conoïde; à l'angle supé-
rieur on distingue très-bien plusieurs petits prolongements
rectilignes se colorant un peu plus faiblement que le
reste du noyau par le picrocarmin (fig. 16); c'est là, pro-
bablement, la naissance de ces ramuscules qui deviennent,
dans certaines circonstances, volumineux chez l'adulte.
Ayant fait agir l'alcool et le picrocarminate sur YAcinèle
pourvue de cette trompe , dont j'ai parlé plus haut, il se ht
une belle élection entre la substance de l'eclosarc et de l'en-
dosarc; quant au noyau, il avait un aspect tout caracté-
ristique : la partie qui se trouvait dans la portion adhérente
( 801 )
du corps était divisée en deux protubérances; une seconde
partie se prolongeait dans la trompe sous forme de bande-
lette mince; enfin le nueléus se terminait, dans le renfle-
ment, par un crochet (fig. M). Les plus jeunes individus,
(|ue j'ai observés, possédaient un noyau complètement
sphérique, situé au centre du corps protoplasmique.
Suçoirs préhenseurs. — Il me reste, pour terminer
l'histoire de l'organisation de celte espèce, à voir les
appendices du corps. Claparède et Lachmann ont reconnu
les premiers la vraie constitution et la fonction réelle
des organes tentaculiformes si caractéristiques des Aciné-
liniens. Mais, tandis que ces auteurs crurent pouvoir con-
fondre, sous une même dénomination, tous les appendices
des Acinétiniens, Hertwig, en faisant l'étude de sa Podophrya
gemmipara, reconnut la présence, chez cet organisme,
de deux sortes d'organes : les uns filiformes, très-longs et
fort rétracliles, se terminant en pointe; ils servent exclusi-
vement à saisir les aliments. Je leur conserverai le nom
de filaments préhenseurs (Fangfàden) que leur a donné
Hertwig. — Les autres plus courts, renflés en boule à leur
extrémité, ressemblant à des épingles qui se trouveraient
fixées sur le corps protoplasmique de VAcinétinien; ceux-
là sont de véritables organes de succion et je leur conser-
verai le nom de tubes en suçoirs, ou simplement suçoirs
(Saugrôhren). J'ai trouvé, chez ma P. Bcnedmi, les deux
genres d'appendices que Hertwig a le premier distingués.
Il est donc acquis qu'il y a lieu, chez certaines espèces,
de faire une distinction entre organes de préhension et
organes d'absorption ou suçoirs. Mais tous les Acincliniens
n'ont pas ces deux sortes d'appendices; chez la plupart
d'entre eux, tous les organes tentaculiformes sont renflés
à leur extrémité et leurs caractères sont intermédiaires
(802)
entre ceux des organes préhenseurs d'un côté, des suçoirs
de l'autre. Je démontrerai, dans le cours de ce travail, que
filaments préhenseurs et suçoirs sont des différenciations
secondaires d'une seule et même espèce d'organes, qui chez
les Acinéliniens inférieurs remplissent à la fois les deux
fonctions. La division du travail a amené ultérieurement
la transformation de ces organes en filaments préhenseurs
d'un côté et suçoirs de l'autre.
C'est pourquoi je donne ici aux appendices primordiaux
le nom de suçoirs préhenseurs, voulant par là rappeler la
dualité primitive de leurs fonctions.
Les suçoirs préhenseurs s'insèrent à la face supérieure
et libre du corps; leur nombre est variable; j'en ai compté
jusqu'à cinquante-cinq. Ils sont grêles, transparents et ter-
minés à leur extrémité supérieure par un petit renflement
en forme de boule ou d'entonnoir. A l'état de repos, et
lorsqu'ils sont épanouis, ils sont rectilignes. Alors l'orga-
nisme présente tout à fait l'aspect d'une pelote, sur laquelle
seraient fichées un certain nombre d'épingles (tig. 1). Les
suçoirs préhenseurs peuvent se mouvoir dans différents
sens, se recourber et prendre des formes ondulées. Ils
peuvent s'allonger et se raccourcir. Contrairement à ce
qui arrive chez YA.patula, ils ont la faculté de disparaître
de la surface du corps, de façon que l'on n'en voie plus
de trace ; c'est ce qui arrive quand l'organisme est sou-
mis à une excitation violente, telle que la compression
du couvre-objet, ou bien quand il est complètement dis-
tendu par l'absorption d'une grande quantité d'éléments
nutritifs. Chez VA. paiula, au contraire, les extrémités ren-
flées apparaissent encore au niveau de la cuticule, lorsque
les suçoirs préhenseurs sont complètement contractés.
( 803 )
C'esl du moins ce qui arrive la plupart du temps, d'après
les observations de Claparède et Lachinann (I).
J'ai observé une Acinèle qui possédait, indépendamment
d'un grand nombre de suçoirs préhenseurs, d'autres appen-
dices La l'ace de la partie libre du corps, que j'avais sous
les yeux, était garnie d'une rangée de cils vibraliles qui
partait de la lace supérieure, faisait un crochet à droite
pour redescendre obliquement sur le pourtour latéral. Je
n'ai pu m'assurer si cette rangée se prolongeait de l'autre
coté de la face supérieure et sur le pourtour latéral opposé.
Les cils étaient épais, longs et avaient un mouvement
ondulatoire très-lent. Après plusieurs heures d'observa-
tion, je n'ai pas constaté de transformation notable dans
la constitution de cet individu , si ce n'est des changements
de forme du corps protoplasmique et de la loge (lig. 7,
8,9).
La présence de cils vibraliles chez des Acinélinîens
adultes n'est pas un fait nouveau. Les Sptiœruphrya , qui
vivent en parasites chez les Infusoires, peuvent sortir de
leurs hôtes, se revêtir de cils vibraliles et mener une vie
errante, pour passer ensuite dans le corps d'autres Infu-
soires et reprendre leur constitution primitive.
Mais la présence de cils vibraliles n'a pas été seulement
observée chez les Spkœrophrya. Tout dernièrement Mau-
pas a été témoin de phénomènes analogues chez la Podo-
phrya fixa (2). Il a vu de ces organismes , après avoir
rétracté leurs suçoirs, se revêtir de cils vibraliles, se inou-
(1) Éludes sur les Infusoires et les Rhizopodes. ôme partie, 2me volume,
p. 135, fig. 15, planche V.
(2) Sur l'organisation et le passage de l'état mobile de la P. fixa,
Archives de zoologie expérimentale et générale, t. V, 1876.
( 804- )
voir librement, grâce à ces cils pendant un certain temps,
et repasser de nouveau à la vie sédentaire après avoir
perdu leur revêtement ciliaire.
Je suis très-disposé à admettre que la présence de cils
vibratiles chez mon espèce a la même signification que
chez le P. fixa.
J'ai vule mode d'agir des suçoirs préhenseurs vis-à-vis
d'une proie et j'ai pu suivre toutes les péripéties d'un véri-
table petit drame. Une Microgonidie de Vurlicelle s'était
approchée d'une Acinète, elle faisait autour de celle-ci
toute espèce d'évolutions telles que le font ces petits orga-
nismes autour des Macrogonidies. A un moment donné,
elle s'approche à portée des suçoirs préhenseurs; aussi-
tôt cinq de ceux-ci les plus épanouis et les plus rappro-
chés de l'imprudente se replient sur elle comme des
grappins; en même temps, trois ou quatre des appendices,
moins étalés, s'allongent et s'appliquent sur la face infé-
rieure du petit être. Bientôt celui-ci est entouré de tous
côtés par les suçoirs préhenseurs entrelacés et il est réduit
à l'immobilité. Alors commence le phénomène de succion.
De jaune foncé qu'elle était, la Microgonidie devient
blanche ; son volume diminue rapidement et à mesure
qu'il décroît des suçoirs préhenseurs s'en détachent; au
bout de quelques minutes, il ne reste plus du petit orga-
nisme qu'une cuticule rabougrie, contenant un amas de
granulations. Le fait que je n'ai pas vu, pendant l'absorp-
tion, passer de granules, du corps de l'I illusoire dans celui
de V Acinète, et qu'au contraire une petite masse de ces
granulations est restée accolée à l'extrémité du suçoir pré-
henseur, me porte à croire que chez cette espèce il n'y a
que la partie liquide du protoplasme de l'organisme cap-
turé qui est absorbée par voie d'endosmose.
( 805 )
REPRODUCTION ET DÉVELOPPEMENT.
Chez VA. divisa il existe fréquemment des gemmes sur
la face supérieure et sur le pourtour latéral de la portion
libre du corps. Je ne me crois pas autorisé à employer le
mot de bourgeon pour désigner ces organes. En effet, ils
n'ont ni la valeur morphologique, ni la valeur physiolo-
gique des bourgeons externes, tels que les a décrits
Hertwig chez la Podoplirya gemmipara et tels que je les ai
observés moi-même chez la P. Bcnedeni.
Je nommerai ces organes: diverticules générateurs, et
j'expliquerai plus loin la raison qui me porte à leur donner
ce nom.
Examinons, tout d'abord, un de ces organes complète-
ment développé : il a la forme d'une corne d'abondance
fixée par sa petite extrémité sur le corps de VAcinèle et
il est circonscrit par une membrane, qui n'est que la cuti-
cule amincie de celui-ci; l'orifice de la corne est délimité
par un bourrelet à double contour qui est un épaississe-
ment de la membrane. Au niveau de cet orifice, le proto-
plasme esta nu; celui-ci est clair, finement granuleux et
laisse souvent apercevoir à son intérieur une vacuole
pulsatile, dont la position n'est pas la même chez tous les
exemplaires et qui a tous les caractères des vacuoles pul-
satiles en général (fig. 81). Chez les individus traités par
l'alcool et le picrocarmin, le diverlicule montre souvent un
beau noyau ayant une forme plus ou moins quadrilatérale;
ce noyau se colore faiblement en rose et possède un
nucléole assez irrégulier, dont la coloration est toujours
beaucoup plus foncée (fig. 6).
Voyons, maintenant, comment se forme et se développe
2me SÉRIE, TOME XLIV. 55
806 )
grand
les yeux, on peut suivre, par comparaison, les différents
stades de l'évolution de cet organe.
Au début, le diverlicule apparaît sous forme d'un
simple tubercule protoplasmique, qui peu à peu soulève
la cuticule. Le protoplasme est ordinairement très-clair à
ce point et linement granuleux. Je pense que l'ectosarc
seul intervient dans la formation de cet épaississement
(fig. 15). Je n'ai jamais vu, en effet, l'endosarc se pro-
longer à son intérieur.
Il se forme bientôt, à la base du tubercule, un étrangle-
ment qui progresse de l'extérieur vers l'intérieur; le plus
souvent, le diverlicule possède à cette phase la forme d'un
ovoïde fixé par une des extrémités de son grand axe et
dont l'autre se termine ordinairement par une petite tubé-
rosité (fig. 7 et 8). A un stade plus avancé, l'organe dont les
dimensions se sont accrues, affecte plus ou moins la forme
d'unrhombe (iig. 9); puis augmentant toujours de volume,
il prend , le plus souvent, une apparence pyriforme (fig. 1).
Plus tard encore, l'axe de la poire s'incurve et l'on voit
apparaître, à la face supérieure de l'organe, les premières
traces d'un orifice circulaire. Au début on ne distingue
qu'une simple tache claire mal délimitée; celle-ci grandit,
s'accentue de plus en plus et l'on voit bientôt un bourrelet
circulaire à double contour en circonscrire les limites (fig. 8',
7", 9nl). La cuticule est, probablement, résorbée par le
protoplasme au point où la solution de continuité apparaît.
Le diverticule possède alors la constitution que j'ai décrite
plus haut et une forme que j'ai comparée à une corne
d'abondance (fig. 6,v). Il est à remarquer que la taille
maxima des diverlicules est proportionnelle au volume de
YAcinète sur laquelle ils se forment (fig. 6lvet 9111).
(807)
Jamais, à aucun stade du développement de ces organes,
je n'ai vu de cils vibratiles naître sur les faces latérales,
ou suivant un plan transversal. Jamais je n'ai observé de
Tonnes libres ou de jeunes individus fixés rappelant l'as-
pect et la constitution des diverticules. 11 m'est arrivé,
cependant, d'observer, pendant des heures entières, les
mêmes organes, dans l'espoir de les voir parcourir les
phases d'évolution décrites par Hertwîg chez la P. gem-
mipara et que j'avais moi-même constatées par I élude de
la P. Benedeni. Jamais je n'ai vu le noyau de YAcinète
envoyer des prolongements à l'intérieur des diverticules.
Jamais je n'ai vu même la moindre trace d'une continuité
entre le noyau du bourgeon et celui de YAcinète; bien au
contraire, chez des diverticules ovoïdes, c'est-à-dire très-
jeunes, j'ai toujours observé un noyau plus ou moins
sphérique (fig. 49), complètement individualisé, se colo-
rant en rose par le picrocarmin et possédant un nucléole,
qui se colore en rouge foncé. J'ai donc tout lieu de croire
que le nucléus naît dans les diverticules, sans l'interven-
tion du noyau de YAcinète et qu'il se forme par conséquent
par voie endogène.
Quelle pourrait être la valeur morphologique de ces
diverticules? Sont-ils les homologues des bourgeons des
Poaophrya et doit-on les considérer comme des embryons
destinés à devenir libres, ou bien ont-ils une autre signi-
fication ? Un jour, que j'observais depuis plusieurs heures
le même diverticule, espérant le voir se détacher, se cou-
vrir de cils vibratiles et nager librement dans l'eau comme
le font les bourgeons externes d'autres Acinétiniens, je vis
tout à Coup des mouvements se faire dans le protoplasme
avoisinant l'ouverture circulaire du diverticule; bientôt,
je distinguai, à l'entrée de l'orifice, un petit organisme
( 808 )
(fig. 14'). Comme son diamètre transversal était un peu
plus grand que le diamètre de l'orifice, il faisait de grands
efforts pour se libérer. Je pus le dessiner avec précision
lorsqu'il fut sorti de moitié, et je m'aperçus qu'il possé-
dait une couronne de cils vibratiles dont il se servait
comme de leviers II avait une forme ovoïde et rappelait
tout à fait les embryons internes décrits par Stein chez
YAcinète du « Cyclops quadricornis » chez la Podophrya
de la « Vorlicella microstoma (1) » et les petits embryons
internes dont parlent Claparède et Lachmann chez la
Podophrya quadripartita (2). Lorsqu'il fut complètement
dégagé, il se mil à parcourir la préparation avec une
grande agilité et je le perdis bientôt de vue.
Il est clair que j'ai assisté là à une véritable parturition
et que le petit organisme, que j'ai vu sortir de l'orifice du
diverticule générateur, n'est autre chose qu'un embryon
interne engendré dans l'organe. En effet, il est tout à fait
certain que l'embryon venait bien de l'intérieur du diver-
ticule. Il ne peut donc y avoir que deux opinions quant à
la signification de cet organisme cilié. Ou bien il s'est agi
d'un parasite qui s'est libéré sous mes yeux, ou bien d'un
embryon que le diverticule a engendré.
Les caractères de cet organisme, aussi bien que ceux
du diverticule, d'où je l'ai vu sortir, permettent de tran-
cher catégoriquement la question. Tous les caractères des
embryons internes des Acinèles observées par Stein et
par Claparède se retrouvent chez cet individu, et la
(1) Die Infusionsthiere, Leipzig 1854, p. -48, fig 58,59,40, -il delà
p|. III: p. 25, fig. 38,39 do la pi. IV.
(2) Éludes sur les Infusoires et les Iihizopodes, 3e pari., 2* vol.,
1800 à 1801 p. 116, fig. H et 12 de la pi. III.
( 809 )
constitution des diverlicules montre clairement que j'ai
affaire ici à des organes qui n'ont rien de commun avec
les embryons externes des Podophrya. Pour accepter
l'idée du parasitisme, il faudrait admettre que mes diver-
licules soient des embryons en voie de développement par
gemmation. Or toutes mes observations se dressent contre
cette manière de voir. Jl faudrait croire en outre à l'exis-
tence d'un orifice préformé, destiné à permettre la sortie
du parasite; il faudrait expliquer l'absence de cils vibratiles
sur ces bourgeons, en même temps que la persistance de
ceux-ci à ne pas se détacher du parent; il faudrait eniin
rendre compte de cette inaction des suçoirs préhenseurs,
au moment de l'entrée et de la sortie du parasite, tandis
qu'ils saisissent dans d'autres cas, avec tant de rapidité,
des organismes bien plus volumineux, qui viennent à leur
portée.
Je ne vois donc aucun fait à invoquer en faveur de cette
interprétation, tandis que tout prouve que j'ai eu affaire à
une véritable génération.
S'il en est ainsi, il me paraît très-probable que le noyau
et la vacuole contractile que j'ai observés dans les diverti-
cules appartenaient à l'embryon en voie de formation et
dont les limites échappent facilement, jusqu'au moment
de son complet développement. Et comme je n'ai jamais
pu distinguer aucun lien entre le noyau de ces embryons
et celui de VAcinèle parente, il faut donc bien admettre que
l'embryon se forme tout entier par voie endogène dans un
organe spécial, auquel j'ai donné le nom de dicerticule
générateur.
J'ai trouvé un noyau bien distinct et pourvu d'un
nucléole dans le diverticule d'où j'avais vu sortir l'em-
bryon. Ce fait démontre que le protoplasme du diverti-
( 810 )
cule peut donner naissance successivement à plusiei rs
embryons et qu'il peut exister, à côté d'un germe sur le
point de venir au monde, un autre embryon en voie de
développement.
J'avais cru d'abord pouvoir faire un rapprochement
entre ces diverticules de VA. divisa et des embryons
enkystés à la surface de VA. mystacina que Stein a décrits;
mais après avoir étudié avec soin la description que
ce savant a donnée de la reproduction chez son A. mysta-
cina (1), j'ai du renoncer à cette idée. En effet, les kystes
de Stein sont formés par le soulèvement de la couche géla-
tineuse, qui recouvre cette Acinète, et les diverticules ne
donnent pas naissance aux embryons; ceux-ci naissent à
l'intérieur du corps de Y Acinète; ils soulèvent secondaire-
ment la couche gélatineuse du parent et y croissent peu à
peu; de sorte que physiologiquement les diverticules de
Stein sont plutôt des poches incuhalrices que des organes
générateurs; et au point de vue anatomique, il n'y a pas
d'analogie entre les deux catégories d'organes, si ce n'est
une simple ressemblance de forme. Chez VA. divisa il
s'agit de dépendances du corps protop!asmiqncq\ù prennent
une configuration déterminée et sont pourvues d'un orifice
préformé; chez VA. mystacina les diverticules sont engen-
drés par un produit de sécrétion.
Par le mode de reproduction que je viens de décrire
aussi bien que par l'existence de diverticules générateurs,
VA. divisa vient encore compliquer davantage l'histoire de
la génération chez les Acinétiniens. On connaissait, en effet,
la reproduction par simple division, la multiplication par
bourgeons externes, la génération dans l'endosarc d'em-
(I) Die Infusionslhiere. Leipzig ISoi, p.35, pi. I, fig. 19 à 21.
(811 )
brvons internes (Claparède et Lachmann.Stein et Hertwig);
ce dernier mode de formation est, il est vrai, encore peu
connu; mais voici un mode de reproduction qui n'avait
pas encore été soupçonné jusqu'à présent chez les Aciné-
tiniens : il consiste dans la formation par voie endogène
d'embryons internes, dans des diverticules générateurs qui
très-probablement dépendent exclusivement de l'ectosarc.
EXPLICATION DES PLANCHES.
Sauf notation contraire, toutes les figures ont été dessinées à l'oculaire
deux et à l'objectif dix à immersion de Hartnack, c'est-à-dire à un gros-
sissement de six cents diamètres.
Planche I.
Ophryodendron nelglcum.
Fig. I. Ophryodendron belgkum (grossi 70 fois), flxé sur la loge d'un
hydrante de Clitia volubilis.
— 2,3,4-, 5, 6. Ophryodendron belgicum. — Individu grossi 400 fois.
— 7. Individu rendu opaque par la présence de corpuscules tiavicu-
laires. — Individu grossi 400 fois.
— 8. Proboscidien adulte fixé sur une tige de Clitia volubilis.— Indi-
vidu grossi 400 fois.
— 9. Jeune Lagéni forme. — Individu grossi 400 fois.
— 10. Lagém'forme dont l'extrémité antérieure se différencie en
trompe pour passer à la forme Proboscidien.— Individu grossi
400 fois.
— 11. Proboscidien adulte — c = cuticule — e = ectosarc —
en = endosarc — t = trompe — s = suçoirs préhenseurs
— v = vacuole.
— 12. Proboscidien traité par le picrocarminate d'ammoniaque ayant
la trompe un peu contractée et les suçoirs préhenseurs épa-
uouis.
( 812 )
Fig. 13. Grand exemplaire de Proboscidien dout les suçoirs préhenseurs
sont rétractés à l'intérieur de la trompe* — Individu vu à la
coupe optique.
— H. Proboscidien ayant la trompe complètement rétractée à l'inté-
rieur du corps. — Individu vu à la coupe optique.
— 15. Proboscidien dont la trompe et les suçoirs préhenseurs sont
complètement épanouis A'oyau en forme d'Y. — Individu vu
à la coupe optique.
— 16. Proboscidien dont la trompe est contractée possédant un noyau
lobule.
— 1 7. Jeune Proboscidien dont le protoplasme contient des corpus-
cules naviculaires.
— 1 8. Jeune Proboscidien dont la trompe est contractée et dont le corps
protoplasmique tient en suspension un grand nombre de cor-
puscules naviculaires. — Individu vu à la coupe optique.
— 19. Jeune Proboscidien vu à la coupe optique.
— 20. Jeune Proboscidien dont les suçoirs préhenseurs se sont retirés
dans la trompe.
— 21 . Proboscidien comprimé et vu par sa face inférieure. On aperçoit
dans la trompe, par transparence, les suçoirs préhenseurs
contractés.
— - 22. Proboscidien possédant un bourgeon volumineux.
— 25. » vu de face ayant deux bourgeons volumineux!
dans lesquels le noyau maternel envoit deux prolongements.
— 24. Proboscidien contracté dont le noyau envoit un prolongement à
l'intérieur d'un bourgeon. — Individu vu à la coupe optique.
Fig. 25. Proboscidien possédant un bourgeon de forme anormale dans
lequel il envoit un prolongement nucléaire, et un second bour-
geon chez lequel le noyau dérivé est complètement indivi-
dualisé.
— 26 Proboscidien possédant un bourgeon individualisé.
— 27,28, 29. Développement d'un jeune individu fixé sur la tige de la
Clitia volubilis.
— 30. Individu Lagéniforme possédant un pédicule (p.) par lequel il est
fixé à la loge du polype.
— 31. Lagéniforme ayant perdu son pédicule et dont la forme du corps
se rapproche de celle d'un Proboscidien.
— 32. Proboscidien d'un 0. abielinum trouvé sur la Sertularia abie-
tina par J. Van Beueden et dessiné par lui.
— 33. Lagéniforme de l'O. abietinum (même observation que pour la
figure précédente).
( 8*3 )
Planche II.
Aclneta divisa.
Kig. 1. Acineta divisa, adulte, dont les suçoirs préhenseurs sont com-
plètement épanouis — b = diverticule générateur pyriforme
— c. p. = corps protoplasmique — I == luge — m. c. =
membrane cuticulaire — s. p. = suçoirs préhenseurs —
p = pédicule.
— 2. Individu ayant absorbé une grande quantité de nourriture et
ayaut rétracté ses suçoirs préhenseurs, — vu à la coupe
optique.
— 5. Loge de TA. divisa — pi = plancher cuticulaire sur lequel repose
le corps protoplasmique — b. 1.= bords libres — m = mem-
brane du pédicule — s. c. = substance centrale.
— 4. Individu ayant ses suçoirs préhenseurs à demi contractés. — Il
est trailé par le picrocarminate d'ammoniaque — p. a. = por-
tion adhérente du corps — p. 1. = portion libre.
— 5. Individu dont le sillon qui sépare la portion adhérente de la por-
tion libre est oblique.
— 6. Individu en train de manger une Microgonidie qu'il a saisie. —
I = Microgonidie libre — II = la même capturée — III =
restes de la Microgonidie — d = diverticule en forme de
corne d'abondance — o = orifice du diverticule générateur.
Kig. 7. Individu adulte possédant une couronne de cils vibratiles — c. v.
= cils vibratiles — d - diverticules générateurs.
— 8 Même individu vu à la coupe optique — c = cuticule — e =
eclosarc — en = endosarc.
— 9. Même individu vu à la coupe optique et trailé par le picrocarrnin
— n = noyau.
— 8, 7, 9. — I, II, III = développement de l'orifice chez les diverticules
générateurs. — IV, V, VI = développement d'un jeune diver-
ticule générateur.
— 10. Exemplaire dont la portion libre s'est étirée en trompe.
— 11. Même individu traité par le picrocarminate d'ammoniaque —
c = cuticule e = ectosarc — en = endosarc. — Vu à la
coupe optique.
— 12. Individu dont le plancher cuticulaire est devenu concave du côté
de la cavité de la loge — v = vacuole pulsatile.
— i3. Individu possédant un diverticule générateur ovoïde.
( 8.14 )
Fig. 14. Parturition d'un embryon par l'orifice du diverlicule générateur.
— I = embryon se libérant — Il = embryon libre.
— 15. Individu possédant cinq diverlicules générateurs à différents
états de développement. — I = soulèvement de la cuticule
par une simple tubérosité protoplasmique — II = phase plus
avancée — III = diverlicule pyriforme — IV = diverticule
ayant la forme d'une corne d'abondance.
— 16. Jeune exemplaire possédant un noyau conoïde.— A l'angle supé-
rieur on aperçoit trois petits prolongements nucléaires — e. 1.
= espace libre entre le plancher cuticulairc et le corps pro-
toplasmique. — Individu vu à la coupe optique.
— 17. Jeune individu vu à la coupe optique, ayant un noyau pelotonné.
— 18. Jeune spécimen dont les suçoirs préhenseurs sont rentrés à l'in-
térieur du corps.
— 19 et 20. Très-jeune sujet possédant déjà un diverlicule générateur
— 21. Le plus jeune individu que j'aie vu fixé sur la lige de la Campa-
nularia dichotoma — v = vacuole pulsatile.
Ophryoderulron Bdgiavn Fraip
/ f
'
Adneta divisa f'raif
( 815 )
CLASSE DES LETTRES.
Séance du 5 décembre 1811 .
M. Alph. Wauters, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. Ém. de Laveleye, vice-directeur,
,1. Roulez, Gachard, P. De Decker, J.-.I. Haus, M.-N.-J.
Eeclercq, CI). Faider, R. Chalon, Th. Juste, F. Nève,
,1. Nypels, Al p. Le Roy, Ém. de Borchgrave, A. Wagener,
P. Willems, membres; Aug. Scheler, Alph. Rivier, Arntz,
associés ; Edm. Poullet, G. Rolin-Jaequemyns, Ch. Piot,
Ch. Potviu et E. Van Bemmel, correspondants.
M. L. Alvin, président de l'Académie assiste à la séance.
CORRESPONDANCE.
Madame Adolphe Thiers écrit de Paris, à la date du
22 novembre dernier, pour remercier l'Académie des sen-
timents de condoléance qui lui ont été exprimés, de la part
de la classe des lettres, au sujet de la mort de son mari.
— M. le secrétaire perpétuel donne lecture d'une lettre
du 7 novembre dernier, écrite par M. le baron Paul Guil-
laume et annonçant la mort de M. le baron G. Guillaume,
membre de la classe.
( 816 )
Aux funérailles, M. Waulers a prononcé, en sa qualité
de directeur de la classe, un discours qui ligure ci-après.
Il accepte en outre la mission d'écrire pour l'Annuaire la
notice biographique du défunt. Une lettre de condoléance
sera écrite à Mme la baronne Guillaume.
— MM. les questeurs du Sénat et de la Chambre des
Représentants adressent des cartes de tribune réservée
pour la session législative 1877-1878. — Remercimenls.
— M. le Ministre de l'Intérieur envoie, pour la biblio-
thèque de l'Académie, un exemplaire de l'ouvrage publié
par M. Louis De Backer, sous le titre de : L'Extrême-Orient
au moyen âge, d'après les manuscrits d'un flamand de Bel-
gique, etc. In -8°. — Remercîments.
— La classe reçoit, à titre d'hommage, les ouvrages
suivants au sujet desquels elle vote des remercîments aux
auteurs :
1° Œuvres de Froissart : chroniques, tome XXIII,
2de partie, vol. in-8°, offert par M. le baron Kervyn de
Lellenhove, lequel a remis, au nom de M. Caffiaux, de
Valenciennes, un exemplaire de son Mémoire sur la charte
de la frairie de la Halle basse de Valenciennes (XIe et
XIIe siècles); broch. in-8°;
2° Gazette archéologique, publiée par MM. J. de Witte
et François Lenormant, 3e année, n° 5, octobre 1877 ; cah.
in-4°, présenté par M. Roulez;
5° De la langue et de la poésie provençales, in-12 ; —
Voyage à travers champs (en collaboration avec M. Gra-
vrand), in-12; — L'Harmonie des passions humaines,
notice sur le fronton du théâtre de la Monnaie, in-12
( 817 )
oblong ; notice sur le baron de Slassart (couronnée par
l'Académie), in-4° \Marc Bruno, etc., in-18; œuvres poéti-
ques de Boileau(cr\ collaboration avec M. Gravrand), in-8°;
histoire de Saint-Josse-tot-Noodc et de Schaerbeck, in-12;
Pafria belgica, 3 vol. in-8° ; Dom Placide, in-12; Guide
de l'excursionniste, 6e édition, in-18; Introduction à Vhis-
loire de la littérature française, in-12; deux discours de
rentrée à l'université de Bruxelles; deux rapports sur le
prix quinquennal de littérature française, par M. Eugène
Van Bemmcl ;
4° Les successions à cause de mort en Suisse, par
M. Alphonse Rivier ; brochure in-8" ;
o° Étude philologique de la langue française, lre partie,
par M. J. Baslin, de Saint-Pétersbourg, vol. in-8°, présenté
par M. Liagre;
6° Des paratonnerres à pointes, à conducteurs et à rac-
cordements terrestres multiples, par M. Melsens, gr.-in-8".
M. Liagre, en déposant cet ouvrage sur le bureau, ajoute
que M. Melsens se fera un plaisir d'en remettre des exem-
plaires aux membres de la classe qui lui en exprimeront
le désir.
Les notes lues par MM. le baron Kervyn et Roulez en
présentant les brochures de M. Caftiaux, et de MM. De
Witte et Lenormant, se trouvent sous la rubrique Commu-
nications et lectures.
— La Société philosophique de Cambridge a adressé
ses dernières publications.
( 818 )
ÉLECTIONS.
Sur la demande de la commission administrative, il est
procédé au remplacement de M. le baron Guillaume
comme délégué de la classe auprès de la dite commission,
pour finir le mandat qui expirera à la prochaine assemblée
générale de mai 1878. M. Ch. Faider est élu.
— La classe continue à MM. Chalon, Conscience, De
Decker, Faider et Gachard, membres sortants, le mandat
de membres de la commission spéciale des finances pour
l'année 1878.
— Les suffrages désignent ensuite M. J. Heremans
comme membre de la commission de la Biographie natio-
nale, en remplacement de M. le baron Guillaume.
RAPPORTS.
MM. Gachard, Th. Juste et Wauters donnent lecture
de leurs rapports sur un travail de M. Paillard, intitulé :
Pierre Brullij. Son arrestation à Tournai, son procès, son
supplice ; poursuite dirigée contre ses complices et adhé-
rents à Tournai, Valenciennes, Douai, Lille et Arras. Invo-
cation et défense des privilèges des dites villes.
Ce travail sera renvoyé à l'auteur, qui recevra en même
temps communication des objections soulevées par les
rapporteurs.
— MM. Rivier, Faider et Leclercq donnent lecture de
leurs rapports sur un travail de M. P. De Croos, avocat à
( 819 )
Béthune, intitulé : Ancien droit belgique. XVIIe siècle. De
la procédure civile d'après les styles des cours échevinales.
Étude juridique.
Des remercîraents sont votés à l'auteur dont le travail
sera conservé dans les archives de l'Académie.
Fouilles sur l'emplacement d'une villa de l'époque romaine,
à Laeken. — Fouilles à Assche , par M. Crick, com-
munication de M. L. Galeslool.
Mtap/tofl fie fl . Il'agener.
« Déjà en 1851 , M. Galesloot a rendu compte à la classe
de quelques fouilles effectuées sur l'emplacement d'une
villa romaine, découvert par lui à Laeken.
Il nous fait connaître aujourd'hui le résultat de nou-
velles fouilles faites au même endroit en septembre der-
nier. L'emplacement en question se trouve au milieu de
terrains destinés à être transformés en parc public. De
nombreux terrassiers y travaillaient à l'époque indiquée et
M. Galesloot a profité de cette circonstance pour continuer
ses recherches.
Les efforts de l'archéologue bruxellois n'ont malheureu-
sement, il en convient lui-même, abouti qu'à des résultats
insignifiants. Ce qu'il a découvert se borne en définitive à
une partie de pavement en ciment poli et à une certaine
quantité de fragments en stuc peint. Les couleurs qu'on y
remarque sont le rouge, le jaune, le blanc et le vert. Les
ornements appliqués sur le fond se composent générale-
ment de lignes droites, mais dans leur nombre se trouvent
aussi quelques feuilles dénotant une main exercée.
( 820 )
Nous ne croyons pas devoir entrer à cet égard dans
d'autres détails et nous ne suivrons pas l'auteur dans ses
digressions sur la préparation du stuc et des couleurs
chez les anciens, d'autant plus qu'on n'y trouve rien de
neuf.
A propos des nombreuses écailles d'huîtres que les
fouilles de Laeken ont amenées à la surface du sol .
M. Galeslool se demande comment ou pouvait transporter
ce mollusque d'une manière assez rapide pour qu'il par-
vînt, sans être avarié, des bords de l'Océan aux extrémités
du pays, alors que les voies de communication étaient
dans un étal tout à fait primitif. Nous répondrons à cela
que si l'on mangeait à Rome les huîtres de Brindes, plus
tard même les huîtres anglaises et celles qui étaient
engraissées dans les parcs de Bordeaux (1), il faut bien
admettre que les anciens possédaient le talent de les gar-
der fraîches pendant un temps assez long. D'ailleurs dans
les premiers siècles de l'empire les voies de communication
ne devaient pas être aussi primitives que le dit M. Galeslool
et en général je me figure, d'après les découvertes de ces
derniers temps, la civilisation belgo-romaine bien plus
avancée qu'on ne la croyait il y a un demi-siècle.
On le voit, le résultai des nouvelles fouilles faites à
Laeken est à peu près négatif. Aussi M. Galesloot a-t-il
cru utile, pour étoffer un peu sa communication, d'y
ajouter quelques renseignements sur deux endroits situés
dans la même commune et qui au XVIe siècle portaient
l'un et l'autre le nom de Tomberg. M. Galesloot dit que ce
nom indique évidemment une tombe romaine. Je veux
bien admettre, en me basant sur quelques analogies, que
(1) V. Marquardt, Boemische Privatallerthiimcr, l. II, p. 53.
( 821 )
Tomberg veut dire montagne des tombeaux, mais rien ne
nous oblige à présumer en cet endroit des tombeaux
romains. En effet, les explorations faites à l'un de ces
Tombergs n'ont pas fait découvrir le moindre vestige de
tombe.
M. Galeslool nous apprend encore que plusieurs actes
éehevinaux de Laeken, datant de la lin du XVe siècle,
renseignent près de l'église le Guldenenbodem, c'esl-a-dire
le champ ou le fond d'or. Il n'est pas impossible, ajoute-
t-il, que cette dénomination provienne d'une importante
découverte de monnaies. Sans doute la chose est possible,
mais de telles possibilités ne conduisent à rien.
L'archéologue bruxellois termine sa notice en signalant
un fait qui, d'après lui, mérite quelque attention. « Un
jour, dit-il, en visitant les substructions déblayées d'une
très-importante villa à Gerpinnes (arrondissement de Char-
leroi), je trouvai, imprégnés de terre, deux fragments dis-
joints d'une peinture sur bois, offrant une sorte d'ara-
besque en blanc sur fond noir. Elle a bien le caractère de
l'ancienneté et ce n'est certainement pas de la peinture à
l'huile. » Provenait-elle de la villa? M. Galeslool n'ose pas
se prononcer, mais il croit que s'il en était ainsi , sa trou-
vaille trancherait en quelque sorte matériellement la ques-
tion débattue jadis avec tant d'éclat entre Raoul-Rochette
H Lelronne. Nous ne pouvons laisser passer, sans la con-
tester formellement, une pareille affirmation, car malgré
les exagérations regrettables auxquelles s'est laissé entraî-
ner un philologue de la valeur de Letronne, il n'est jamais
allé jusqu'à soutenir la thèse vraiment absurde que les
anciens n'auraient pas connu la peinture sur bois. Il est
vrai que M. Galeslool reconnaît lui même que telle n'est
pas précisément la queslion disculée avec tant de passion
2mc SERIE, TOME XLIV. 56
( 822 )
par 1rs deux académiciens français. Mais dès lors que
prouve sa trouvaille , même en la faisant remonter jusqu'à
l'époque romaine?
Au travail que je viens d'analyser se trouve joint un
rapport sur les fouilles faites à Assche par M. Prosper
Crick. Déjà à diverses reprises M. Galesloot avait fait part
à l'Académie des recherches entreprises depuis plusieurs
années à Assche par ce jeune archéologue. Commencées
en septembre 1871, ces fouilles sont régulièrement
continuées après la levée des récolles. Elles avaient
fourni jusqu'en 1875, indépendamment de nombreuses
médailles, beaucoup de fragments de poterie, dont plu-
sieurs portaient des sigles figulins inédits, quelques frag-
ments de verre, des figurines de chevaux et de génisses en
terre de pipe, plusieurs lampes, deux figurines en bronze,
représentant l'une un soldat romain, l'autre un Mercure,
des styles, des fibules et des bracelets, également en bronze,
des aiguilles en os, etc. Indépendamment de ces objets, il y
en a deux sur lesquels, dans ses précédentes communica-
tions, M. Galesloot avait spécialement appelé l'attention de
l'Académie: une statuette en argent, d'un travail exquis,
et un objet en cuivre, fortement argenté, que M. Galesloot
décrit de la manière suivante : « Il se compose d'une tige
ronde, de 70 centimètres de longueur, et qui s'amincit
graduellement de bas en haut. Elle s'adaptait à un manche
ou plutôt à une lance. Des fragments de bois sont restés
dans la douille, qui a la grosseur d'un pouce. Trois disques
convexes, diminuant également de grandeur, huit, sept et
six centimètres, placés de distance en dislance, ornent
celle sorte d'insigne, dont le sommet se termine par un
anneau de cinq centimètres de diamètre. La partie supé-
rieure en est disjointe et portait, selon toute apparence,
( 8"23 )
un autre ornement, peut-être un médaillon. Tel est, aussi
exactement décrit que possible, cet objet énigmalique. »
Je crois qu'il ne peut y avoir aucun doute sur la nature de
cet objet, qui doit être une espèce d'étendard militaire. Il
suffît pour s'en convaincre de jeter les yeux sur les signa
figuré;; dans l'ouvrage de Marquardt sur les antiquités
militaires de Rome (pi. II, fig. 9 et 10).
Les fouilles de 1877 ont été moins fécondes que 1rs
explorations précédentes de M. Crick. Elles ont fourni,
indépendamment de quelques médailles et de quelques
petits objets en bronze, une enclume, deux fragments de
haches en silex, et un éclat d'un vase en verre, portant en
relief les lettres IN.... M. Crick croit en outre avoir trouvé
un tronçon d'une des rues intérieures de l'ancienne bour-
gade située, non loin d'Assche , sur les champs appelés
Kalckhocen.
Je crois qu'il est du devoir de l'Académie d'encourager
des recherches dans le genre de celles auxquelles se livrent
avec tant de persévérance MM. Galesloot et Crick. J'ai
donc l'honneur de proposer à la classe d'ordonner l'inser-
tion dans son Bulletin de la notice de M. Galesloot, mais
je crois devoir ajouter qu'il serait désirable qu'à l'avenir
l'auteur se bornât à communiquer à l'Académie les faits
nouvellement découverts , sans les entourer, comme il l'a
fait cette fois, de considérations un peu hanales, qui ne
font en rien progresser la science. »
Rapfiot't île .». M*iol.
« Je me rallie au rapport de M. Wagener sur les deux
notices de M. Galesloot concernant les fouilles effectuées à
Laeken près des restes d'une villa romaine, et à Assche.
( 824 )
Si les fouilles de Laekeo ont produit un résultat négatif,
elles ont du moins fait connaître des spécimens très-rares
de la polychromie usitée en Belgique pendant la domina-
tion des Romains. Ces spécimens offrent une singulière
analogie avec les débris des peintures murales recueillis
dans la villa romaine de Fouron-le-Comte. Au surplus la
villa de Laeken paraît avoir une. certaine ressemblance
avec celle de Potiron en ce qui concerne les matériaux
et la construction, s'il est permis d'en juger par les pierres
de sable d'une forme irrégulière trouvées sur place.
Je pense, comme M. Wagener, que ces notices peuvent
cire imprimées dans les Bulletins de l'Académie. »
La classe a adopté les conclusions de MM. Wagener et
Piol, auxquelles s'est rallié M. Wauters, troisième com-
missaire.
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Roulez, en offrant la livraison de la Gazette archéo-
logique de Paris mentionnée page 816, fait remarquer
qu'elle contient, entre autres, une dissertation de M.Ana-
tole de Barthélémy sur les vases sigillés et épigraphiques
de fabrique Gallo-Romaine. Après avoir commenté plu-
sieurs de ces vases portant des noms de villes ou de peu-
ples, raulcur poursuit ainsi: « A propos d'ethniques in-
scrits sur les vases , on ne peut passer sous silence la petite
urne du Musée du Louvre qui porte GENIO TVRNACESIV:
elle provient de l'ancienne collection Durand. Celle urne
en terre cuite très-fine est revêtue d'une belle couleur
( 82S )
rouge : la panse esl décorée d'une guirlande de lierre en
relief; la légende esl tracée en creux, à la pointe, sur le col.
La forme du vase de Tournai, la manière dont est gravée
la légende n'ont aucun rapport avec les coupes dont nous
nous occupons; nous ne le citons ici que parce qu'il porte
un ethnique. » xM. de Barthélémy ajoute en note : « Je ne
pense pas que l'authenticité de ce vase puisse être soup-
çonnée, malgré les arguments mis en avant. »
En 1852, M. Adrien de Longpérier adressa à notre
classe un dessin avec une notice explicative de ce monu-
ment, consacré au Génie lutélaire des Touruaisiens. Con-
formément aux conclusions de mon rapport, l'insertion en
fut ordonnée dans le tome XIX, 2m<' partie des Bulletins
L'inscription m'avait d'abord paru un peu suspecte, mais
lorsque j'eus appris qu'elle avait été examinée avec soin
non-seulement par le savant conservateur des antiques du
Louvre et par M. le baron de AYitte, mais encore par deux
des plus habiles archéologues d'alors, le duc de Luynes et
Charles Lenormant, je m'inclinai devant l'avis de juges
aussi compétents. D'autres antiquaires belges n'ont pas
suivi mon exemple. L'un d'eux, dans un article qu'a publié
le Bulletin des Commissions d'art et d'archéologie de l'an-
née 1871 (pp. 70 et suiv.), a cherché à établir la fausseté
de l'inscription et, sur son autorité, elle vient encore d'être
déclarée décidément suspecte, dans un article du même
Bulletin de la présente année.
M. de Longpérier avait fixé au commencement du pre-
mier siècle de notre ère, l'époque de la confection de l'urne
du Louvre. Dans mon rapport j'opposai à son opinion, sans
toutefois le produire comme une objection absolue, le fait
que le culte des Génies locaux ne paraît s'être répandu
dans l'empire romain qu'à partir de la lin du second siècle.
( 8->6 )
J'invoquai le témoignage de Lersch, qui dans son recueil
des inscriptions du Rhin (Cenlrahnaseitm Rheinlândi-
cher Inschriften /, 4) affirme que, des inscriptions relatives
aux génies locaux, ayant une date certaine, la plus ancienne
est de l'an 182 et la plus récente de l'an 255 après J.-C.
Il est évident que j'avais en vue non pas l'Italie, mais les
localités de l'empire éloignées de Rome comme l'est Tour-
nai. Mon objection contre l'opinion du célèbre archéologue
français était favorable à la thèse soutenue dans le Bul-
letin d'archéologie, mais l'auteur n'hésita pas à sacrifier
cet argument à l'occasion qu'il crut trouver de me donner
une leçon, ii cita à cette fin, d'après des inscriptions anté-
rieures au deuxième siècle six Génies locaux, à savoir le
Génie de Cliviae [sic), le Génie de Stabiae, le Génie
d'Herculanum, le Génie de Puteoli, le Génie de Inleram-
nae, le Génie de Carthagène. On remarquera que quatre de
ces villes sont situées en Italie et l'une en Espagne. Le
savant antiquaire n'a pas fait attention à une circonstance
importante : ces villes furent des colonies romaines, orga-
nisées par conséquent à l'image de la métropole. Rome
ayant son génie, elles eurent le leur. L'existence de ces
Génies locaux n'a donc aucune valeur dans la question
actuelle. Reste le Genius Cliviae dans les provinces Rhé-
nanes. C'est improprement que ce nom lui est donné, car
l'inscription qui le mentionne a prétendument été déter-
rée non pas à Clèves, mais à Quaiburg, village voisin.
Bimard de la Bastie, qui ne l'a connue que par Gruter,
conjecture qu'elle est du temps d'Auguste ou de la répu-
blique; Henzen, de l'assentiment de Rorghesi, la déclare
avec raison fausse ou au moins interpolée (Orelii, Insc.
LaL, III, p. 28).
( 827 )
M. le baron Kervyn de Lellenhove, en faisant hommage
au nom de M. Caffiaux, de son Mémoire sur la charte de
la Halle Basse de Valenciennes, insiste sur l'importance
de ce document qui, grâce à l'érudition de M. Caffiaux,
se trouve aujourd'hui décrit et analysé dans sa forme si
intéressante et dans ses diverses dispositions. M. Caffiaux
le fait remonter au XIe ou au XIIe siècle, et à ce point
de vue il convient de le comparer aux chartes de ce genre
qui à Aire et à Saint-Omer posèrent les règles les plus
anciennes de l'association. Soit que l'on considère ce docu-
ment sous le rapport du droit communal, soit que l'on y
découvre le point de départ des célèbres hanses du moyen
âge, le mérite au plus haut degré une étude approfondie,
et l'on doit remercier M. Caffiaux, déjà connu par tant de
recherches utiles consacrées à la ville de Valenciennes,
d'avoir remis en lumière ce précieux trésor des premiers
temps de son histoire.
Discours prononcé aux funérailles de M. le baron G. Guil-
laume, le 9 novembre i817, par M. Alphonse Waulers,
directeur de la classe.
« Messieurs, la classe des lettres de l'Académie, déjà si
éprouvée cette année, vient encore de faire une perte
regrettable par la mort inopinée de M. le lieutenant général
baron Guillaume. D'autres voix plus autorisées vous diront
les phases successives de cette vie si remplie, les postes
éminentsauxquelsla confiance royale appela notre collègue,
les grades, les distinctions qu'il conquit par ses longs
services. Une tâche déjà suffisamment délicate m'est réser-
( 828 )
vée, celle de vous entretenir dignement, devant le cercueil
où reposent les restes mortels du général Guillaume, des
travaux littéraires auxquels il consacra ses loisirs et ses
veilles.
» Le grand mouvement qui s'est manifesté il y a qua-
rante ans, dans le but de reconstituer notre passé sur ses
bases véritables, ne pouvait négliger notre histoire mili-
taire, que l'on savait confusément avoir été brillante. Des
publications, entreprises à l'aide de documents incomplets
ou erronés, n'avaient paru que pour tomber dans un oubli
mérité lorsque Guillaume, alors simple capitaine au régi-
ment d'élite, aujourd'hui des grenadiers, se jeta dans une
carrière où il devait remporter tant de succès. Son Histoire
de l'organisation militaire sous les ducs de Bourgogne,
qu'il écrivit en réponse à une question posée par l'Acadé-
mie, et qui fut couronnée en 1846 (1), constitua un heu-
reux début, et un juge compétent, le baron de Stassarl, l'un
des commissaires chargés de juger ce travail, donna de
grands éloges à la méthode et au style de l'auteur.
» Celle première œuvre comprenait une étude sur toute
la période qui s'étend depuis l'origine de l'époque féodale
jusqu'au règne de Philippe le Beau. Elle embrassait peut-
être un cadre trop vaste pour que chacune de ces parties
put être traitée avec tout le soin nécessaire: le capitaine
Guillaume semble avoir eu cette pensée et, plus lard, il
resserra ses écrits dans des limites plus étroites, afin de
leur donner un plus grand fini. Depuis lors, passant de
grade en grade jusqu'à celui de lieutenant général, devenu
correspondant de l'Académie le 9 mai 1860 et membre
effectif le 6 mai 1867, il a successivement fait paraître:
(1) Elle est insérée au t. XXII des Mémoires couronnés.
( 829 )
V Histoire des régiments nationaux pendant la guerre de
sept ans (de 1756 à J763. Bruxelles, 1854, in-8°) , {'His-
toire des régiments nationaux pendant les guerres de la
révolution française (1792 à 1801. Bruxelles, 1855, iu-8°),
['Histoire des gardes wallonnes au service d'Espagne
(Bruxelles, 1858, in-8°), la Notice sur quatre régiments
wallons au service de A aples (Bulletins de l'Académie royale
de Belgique, 2e série, l. XXVIII, 1869), {'Histoire des
bandes d'ordonnance des Pays-Bas (Nouveaux Mémoires
de l'Académie, t. XL, 1875) et Y Histoire de l'infanterie
wallonne sous la maison d'Espagne (Mêmes Mémoires.
I. XLII, 1876).
» Chacune de ces œuvres comble, de la manière la plus
satisfaisante, une des lacunes dont on déplorait l'exis-
tence. Notre collègue y déploie les qualités que l'on aime
à rencontrer chez un narrateur: l'exactitude, la précision,
l'impartialité. Partout on sent vibrer le cœur du patriote,
l'émotion du soldat qui s'enorgueillit des exploits de ses
aînés. Grâce aux efforts, à la patience, aux démarches de
l'auteur, le jour luit sur des laits dont le souvenir s'était
presque complètement éteint. Les actes de courage et de
dévouement ensevelis dans de lointaines archives, les
noms des braves tombés au champ d'honneur, il les
recueille pieusement et les révèle avec amour.
» Les œuvres dont nous venons de donner la liste pour-
raient être appelées le Livre d'or de nos vieux régiments.
Pendant quatre siècles, du XVe au XVIIIe, c'est tout un
passé de loyauté, d'abnégation, de fidélité au drapeau. Là,
on nous parle de cette gendarmerie flamande, connue dans
l'histoire sous le nom de Landes d'ordonnance, le pre-
mier corps de troupes nationales permanentes qui ait
existé dans notre pays ; ici, de cette glorieuse infanterie
( 850 )
qui, pendant plus d'un demi-siècle, l'ut, suivant l'expres-
sion pittoresque du maréchal comte de Mérode-Westerloo,
un des piliers de la puissance espagnole, de celte infante-
rie dont Bossuet nous retrace l'altitude à la bataille de
Rocroi, dans ces lignes devenues célèbres : « Restait cette
» redoutable infanterie de l'armée d'Espagne, dont les gros
» bataillons serrés, semblables à autant de tours, mais à
» des tours qui sauraient réparer leur brèches, demeuraient
» inébranlables au milieu de tout le reste en déroute et lan-
» çaientdes feux de toutes parts... (1). »
» Et que dire de ces Gardes wallonnes, dont le nom
appartient à l'histoire de l'Europe et qui méritèrent la con-
fiance absolue des rois d'Espagne par leur vaillante con-
duite à Saragosse (le 20 août 1710), à Villa -Viciosa
(le 10 décembre de la même année) et dans mainte autre
occasion ?
» Que dire de ces régiments dont le souvenir vit en-
core dans l'armée autrichienne, ces héros de Kollin
(18 juin 1756), de Prague (6 mai 1757), de ces légendaires
dragons de la Tour, de ces glorieux débris qui, à Marengo,
ont disputé aux invincibles légions du premier consul Bona-
parte le ruisseau de Fontanone, emporté celte position
après des prodiges de valeur et failli changer les destinées
de l'Europe.
» Notre collègue, dévoué à sa tâche, animé de l'esprit
le plus large et le plus impartial, ne voulait oublier per-
sonne. 11 aimait à citer, avec les exploits des fidèles défen-
seurs de la maison d'Autriche, ceux des Belges qui avaient
embrassé les principes philosophiques du siècle dernier,
consacré leur épée à la cause de la Révolution française et
(1) Oraison funèbre de Louis de Bourbon, prince de Coudé.
( 831 )
signalé leur valeur en emportant les fameuses positions de
Quaregnon, lors de la bataille décisive de Jemmapes. Soig-
neux à annoter le moindre détail, il n'oubliait pas, au
besoin, de dégager de l'étude des faits d'importantes leçons.
« Ils offrent, tel était le jugement porté par lui sur ses
» écrits, ils offrent, me semble-t-il, des enseignements pré-
» cieux aux jeunes militaires, car ils permettent de con-
» stater que souvent, à la guerre, c'est la bonne contenance
» d'un seul régiment, l'intrépidité d'un bataillon isolé,
» parfois même l'audace d'une simple compagnie qui a
» décidé de l'issue d'une grande bataille. »
« Je ne puis m'étendre sur les nombreuses notices con-
sacrées, soit à de brillantes individualités, comme Philippe
de Clèves, seigneur de Ravestein, soit à des régiments en
particulier, à l'état d'armes spéciales à certaines époques
ou à des questions du moment, mais il ne m'est pas possi-
ble d'omettre l'édition des Commentaires de Bernadino de
Mendoça (1567-1577. Publications de la Société de l'his-
toire de Belgique. Bruxelles, 1870, 2 vol. in-8°). Le géné-
ral, dans une préface instructive, a su faire ressortir les
mérites de cetérivain élégant, à la fois guerrier valeureux
et habile diplomate, admirateur du duc d'Albe, serviteur
dévoué de Philippe 11, mais exact, impartial et jouissant en
Espagne d'une réputation méritée.
» Le discours prononcé dans la séance publique de la
classe des lettres de l'Académie, le 12 mai 1875, a digne-
ment terminé cette longue suite de travaux. Le baron Guil-
laume, qui était alors directeur de la classe, l'a intitulé :
Du mouvement intellectuel dans l'armée; il produisit, sur
l'assemblée et sur le pays une sensation profonde en prou-
vant dans quelle forte proportion notre corps d'ofliciers
participe aux luttes scientifiques, aux luttes littéraires, aux
(832)
luttes artistiques, luttes qui parfois, dit avec raison l'ora-
teur, n'exigent pas moins de courage, d'abnégation et de
persévérance que les combats de la guerre.
» Appelé, en 1863, à faire partie de la commission
directrice de la Biographie nationale, en remplacement de
Mgr de Ram décédé , le général Guillaume en devint le
président lorsque notre honoré collègue, M. Gachard,
archiviste du royaume, fut obligé, à cause de l'état de sa
santé, de renoncer à ces fonctions. Je crois être l'organe
fidèle de tous les membres de l'Académie en témoignant
que, dans l'accomplissement de ce nouveau mandai, ainsi
que chaque fois qu'il fut appelé à présider une commission,
un jury, et, en 1871 et 1875, lorsqu'il fut directeur de la
classe, il sut se concilier leur affection par le tact, le
sentiment des convenances, l'obligeance, que l'on était cer-
tain de rencontrer chez lui.
» Si cette vie si bien remplie est fatalement terminée,
il nous reste, Messieurs, une consolation, c'est celle de
penser que longtemps encore la mémoire du général baron
Guillaume vivra, comme celle d'un citoyen qui a utilement
et noblement employé son existence. La patrie et l'armée
lui doivent un souvenir reconnaissant. Pour le pays il a
retracé les litres de gloire que ses enfants ont conquis sur
les champs de bataille et par lesquels ils ont justifié les
termes expressifs dont César à salué le nom belge il y à
près de vingt siècles : Belgœ quorum maxima virlus, « les
Belges, dont rien n'égale le courage. » A l'armée, il a mon-
tré comment les bandes d'ordonnance, les vieux régiments
au service d'Espagne et d'Autriche, les gardes wallonnes
ont supporté les dangers, les fatigues, les phases souvent
si pénibles de la vie militaire. Cette pensée, que les travaux
de notre collègue n'auront pas été inutiles à la patrie, doit
( 833 )
être en ce jour une consolation pour tous ceux qui l'ont
connu et adoucir l'amertume des sentiments de regret que
sa perle nous inspire et que partagent la classe des lettres
de l'Académie royale de Belgique et la commission de la
Biographie nationale. »
Fouilles sur remplacement d'une villa de Vépoque romaine,
à Laeken, près rie Bruxelles. — Fouilles à Assche, par
M. Prosper Crick. (Communication de M. L. Galesloot.)
En 185!, j'ai eu l'honneur de rendre compte à l'Acadé-
mie de quelques fouilles partielles, faites sur l'emplace-
ment d'une villa de l'époque romaine que j'avais découvert
à Laeken (I).
Cet emplacement, comme je l'ai dit, est sur un plateau,
nommé Stuyvenberg, un peu au delà de la fontaine et de
la chapelle consacrées à sainte Anne, et dont la construc-
tion est due à la munificence de l'infante Isabelle (2). Il se
trouve maintenant au milieu des vastes terrains destinés
à être transformés en un parc public, entreprise considé-
rable, digne des embellissements de la capitale, si brillam-
ment transformée depuis 1850, et qui donnera à ce quartier
une physionomie nouvelle et un aspect vraiment grandiose.
Nous voilà loin des temps reculés où notre petit, mais
riche pays, faisait partie du vaste empire romain, dans
lequel il était littéralement perdu, ne comprenant, d'après
(1) Bulletins, t. XVIII, 1" parlie, p. 204.
(2) Histoire ries environs de Bruxelles, par M. A. Waulers, t. II, p. 343.
( 854 )
les cartes routières , les historiens et les statistiques offi-
cielles, que deux villes: Tongres et Tournai. Seulement,
on n'y regardait pas de si près alors, et il serait curieux
de savoir combien de centres importants de population
ont été passés sous silence par les uns et les autres.
Comme la parcelle de terre dont il s'agit formait, avec
les terres avoisinantes, une des dépendances du palais de
Laeken, le Roi avait bien voulu me permettre de l'aire des
fouilles en règle (1). C'était au mois d'avril 1875. Mais je
reculai alors devant la dépense où j'aurais infailliblement
été entraîné et la difficulté de me procurer des ouvriers.
Aujourd'hui, qu'une légion de terrassiers est employée
sur les lieux, je me suis dit que le moment était venu de
mettre la main à l'œuvre et d'interroger plus minutieuse-
ment le sol. Après m être entendu avec M. Plaquet, con-
ducteur des travaux, de l'obligeance duquel je n'ai eu qu'à
me louer (2), je commençai les fouilles le 8 septembre
dernier. Elles furent continuées les jours suivants. Le Roi,
qui passait par là, les honora un instant de sa présence,
et parut s'y intéresser.
Contre mon attente et à mon grand regret, il ne fallut
pas longtemps pour constater que rien des substructions
ou fondations n'était resté à sa place. J'en excepte une
faible partie du pavement d'une chambre, composé d'une
couche épaisse de ciment, soigneusement poli à la sur-
(1) J'avais fait pari de mon projet à M le baron de Crassier, premier
président de la cour de cassation, qui, avec l'obligeance qu'on lui connaît,
en parla à M. Van Prael, ministre de la maison du Roi.
(2) Il en est de même de M. Didier, altaché au ministère des travaux
publics, et qui surveille les travaux pour le compte del'ILlat, la création
du parc ayant été donnée en entreprise.
( 835 )
face (1). Le reste avait été détruit de fond en comble (2).
Les traces d'un incendie se manifestèrent à diverses
reprises, la terre étant çà et là noircie par les cendres.
Si je ne fus pas heureux sous ce rapport, j'ai été, d'un
autre côté, mieux favorisé. En effet, malgré des [neuves
évidentes de dévastation, et chose difficile à expliquer, j'ai
pu recueillir une grande quantité de fragments de stuc
peint, provenant des murs intérieurs ou parois des cham-
bres. Le rouge, dans ses différentes nuances, y domine.
Les teintes en sont rehaussées par de larges raies et des
filets servant d'encadrements, les uns jaunes, les autres
blancs. Le vert a été employé comme ornementation sur
du fond blanc. Un morceau de ce fond, le plus intéressant
de la collection, représente des feuilles d'une plante, et
des filaments. Traitées avec arts, elles dénotent une main
exercée. M. Ch Piot, membre de la classe des lettres, qui
a eu ce spécimen sous les yeux, peut en rendre témoi-
gnage.
Lorsqu'on les considère dans leur ensemble, ces nom-
breux débris, dont la description entraînerait trop loin, font
supposer une habitation riche en peintures décoratives.
Il serait superflu d'entrer dans de nouvelles explications
sur la nature du ciment qui porte ces fines et belles cou-
(1) M. C. Van Dessela trouvédes restes d'un pavement à peu prés sem-
blable à Rumpst, où il a constaté l'existence, pendant la période romaine,
d'un vaste établissement, à proximité du Rupel. Cette découverte me sem-
ble remarquable en ce qu'elle prouve, selon M. Van Dessel, qui se fonde
sur la situation des lieux, que les crues du Rupel devaient être moins
fortes alors qu'elles ne le sont aujourd'hui. (Bulletins des Commissions
d'art et d'archéologie.)
(v2) Seules, une grande tuile plate et une tuile failièresonl sorties en-
tières, ou à peu près, des décombres.
( 836 )
leurs, après celles que j'ai données à l'Académie, eu 1856,
à propos d'une autre habitation de cette époque, qui s'éle-
vait non loin de celle-ci (1).
H suffit de dire qu'il est fait avec un soin tel, que seul il
explique sa conservation pendant une longue suite de siècles,
au sein d'une terre froide et humide (2). Je crois, en vérité,
que les anciens en auraient remontré a noire industriel,
M, Blaton-Auberl dont les réclames couvrent les murailles
et remplissent les colonnes des journaux. Et il n'est point
douteux que le fameux ciment porlland, tant vanté de nos
jours, ne dût céder la palme, après plusieurs siècles d'ex-
périence, à l'indestructible ciment romain.
Le même soin présidait, on le sait, à la préparation et
à l'application des couleurs. Delà des résultats analogues
de durée. Je ne sache même pas que les procédés employés
par les Grecs et les Romains nous soient parfaitement
connus, malgré toutes les recherches auxquelles on s'est
livré pour les découvrir (3).
(1) Bulletins, t. XXIII, 2e parlie, p. 181.
(2) Je signalerai pourtant un fragment, de 19 centimètres de longueur
sur 11 de largeur et 4 d'épaisseur, composé d'un mélange de chaux, de
très-petits silex entiers et de paille hachée, qui a laissé ses empreintes.
Sur celle couche en est étendue une de plâtre i ur, d'un millimètre. Elle
porte la couleur, qui est d'un beau rouge, traversé par un (ilet jaune délica-
tement tracé. A 5 centimètres de ce filet, une bande jaune sépare le rouge
d'une couche blanche, sur laquelle on reconnaît des traces d'ornements
en couleur verte A. en juger pas d'autres fragments, le fond rouge était
aussi relevé par des dessins en couleur blanche, landis que des fonds
blancs le sont par des encadremenls rouges. Ainsi, la variété ne faisait pas
défaut. Quant à l'effet de l'ensemble, il serait difficile de se prononcer en
connaissance de cause.
(3) Voyez, entre autres, Raoul -Rochelle et les nombreux ouvrages qu'il
cite : Peintures antiques inédiles, précédées de recherches sur remploi
de la peinture dans la décoration des édifices sacrés el publics chez les
Grecs et les Romains; Paris, 1836, grand in-4°.
( 837 )
Quant au mobilier de la villa, j'entends parler de ses
débris, tels qu'objets en bronze, poterie, monnaies, etc.,
rien n'en a été retrouvé, malgré de soigneuses investiga-
tions. Cette absence de choses qui abondent ordinairement
dans les explorations de l'espèce, ferait croire que la villa
lut dépouillée de son ameublement avant d'avoir été
détruite. Quant à l'époque de cette destruction, ce serait
se perdre en de vaines conjectures que de vouloir la déter-
miner, même approximativement. Le seul indice dont il
l'aille, me semble-t-il, tenir compte, c'est qu'aucun objet
n'a révélé des temps postérieurs à la chute de l'empire
romain. Ordinairement, les Francs ont partout laissé des
traces de leur occupation; mais, je le répète, ce n'est pas
ici le cas.
J'ajouterai ce détail. L'opération des déblais a amené à
la surface du sol un grand nombre d'écaillés d'huîtres.
On me dira, peut-être, qu'il n'y a là rien d'étonnant,
puisqu'on les rencontre ordinairement dans les substruc-
tions de l'époque romaine. J'en conviens. Pourtant, lors
qu'on y réfléchit, on se demande comment nos gourmets
helgo -romains se procuraient ce mollusque, recherché
par eux et par les Romains en général (1), comme il l'est
encore par nous. Comment en effectuait-on le transport
d'une manière assez rapide pour qu'il parvînt, sans être
avarié, des bords de l'Océan aux extrémités du pays, alors
que les voies de communication étaient dans un état tout à
fait primitif? Voilà un mystère, auquel, pour ma part, j'ai
(1) Lexicon antiq. roman., par Samuel Pitiscus; La Haye, 1737,
au mot Ostrea. (3 vol. grand in-ful )
2me SÉRIE, TOME XL1V. 57
( 858 )
souvent songé. Du reste, il est bien d'autres questions que
soulève cette civilisation ancienne, sur laquelle nous ne
possédons, en ce qui concerne notre pays, aucune notion
positive. D'où venaient, par exemple, ces artistes peintres
et les artisans qu'il fallait pour bâtir une maison telle que
celle qui a existé à Laeken ? Où cherchai t-t-on les ingré-
dients pour préparer les fines couleurs et les matériaux
en général? Tout démontre, à l'évidence, qu'il y avait dans
les contrées environnantes des centres populeux où les
habitants des campagnes allaient s'approvisionner de tout
ce qui leur était nécessaire et dont l'existence nous est
restée inconnue. Il ne serait pas moins intéressant de
connaître, dans ses détails, l'organisation administrative
et judiciaire du pays, chose dont nous n'avons qu'une idée
très-vague, et qu'il y a désormais peu d'espoir d'éclaircir,
faute de monuments écrits.
Il me reste à faire connaître, concernant les antiquités
de la commune de Laeken, les renseignements que
voici.
Il résulte d'un acte passé devant la chambre de tonlieu
de Bruxelles, le 4 novembre 1562, que Roland de Weerl,
un des sept seigneurs fonciers de Laeken, y acquit une
pièce de terre située, dit le document, à l'endroit nommé
Tomberg, ce qui dénote évidemment une tombe romaine.
Guidé par d'autres indications que cet acte m'a fournies,
j'ai exploré les lieux, à l'extrême limite de la commune,
vers Strombeek, sans y avoir remarqué des vestiges d'une
tombe, que des travaux de culture peuvent avoir fait dis-
paraître depuis bien longtemps.
Un autre Tomberg est mentionné dans un acte des
échevins de Laeken, du 24 novembre 1571. Par cet acte,
François Van Beughem, (ils de l'architecte Louis Van
( 839 )
Beughcm (1), se constitue caution pour son fils Louis,
receveur général des domaines, à Utrecht. Parmi les biens
qu'il possédait à Laeken, où il était également seigneur
foncier, et qu'il donne en garantie, figure une pièce de terre
près du Tomberg, sans indication précise de l'endroit,
qui n'est pas, toutefois, dans la direction du précédent.
Enfin, plusieurs actes échevinaux de Laeken, de la fin du
XVe siècle, renseignent près de l'église, le Gulden bodein ,
c'est-à-dire le champ ou le fonds d'or. Il n'est pas impos-
sible que cette dénomination provienne d'une importante
découverte de monnaies. Ce champ était voisin de celui
portant le nom de la Couronne (de Croon), qu'il a encore
aujourd'hui, tandis que le Gulden bodem n'est plus connu.
Puisque je me suis occupé de peintures murales dans
les lignes qui précèdent, l'occasion se présente de signaler
un fait qui mérite quelque attention.
J'ai cité plus haut, en note, le savant ouvrage de Raoul-
Uochette : Peintures antiques, etc. L'auteur le publia pour
établir, contrairement à l'opinion du non moins savant
Letronne, que les Grecs et les Romains produisaient des
tableaux peints sur bois. Or, un jour en visitant les sub-
structions déblayées d'une très -importante villa, à Ger-
pinnes (arrondissement de Charleroi), je trouvai, impré-
gnés de terre, deux petits fragments disjoints d'une
peinture sur bois, offrant une sorte d'arabesques en blanc
sur fond noir. Elle a bien le caractère de l'ancienneté et ce
n'est certainement pas de la peinture à l'huile. Provenait-
elle de la villa? Je n'oserais pas me prononcer à cet
(1) Louis Van Beughem ou Van Bodegkem commença à acheter des
immeubles à Laeken en 1509. Les actes (1516) le qualifient de mailre
ouvrier du roi d'Espagne (depuis Charles-Quint) , fils de feu Livin. Il
avait épousé Anne Van Aelst.
( 8i0 )
égard, en présence surtout de la bonne conservation du
bois, quoique je possède des débris de bois, encore intact,
extraits de la tombe de Cortil-Noirmont, ouverte récem-
ment et qui a produit un précieux trésor archéologique.
Si pourtant il en était ainsi, si, au lieu d'une supposition,
nous avions un fait réel, authentique, cette trouvaille
trancherait en quelque sorte matériellement une question
soulevée entre d'éminenls archéologues à propos de l'in-
telligence des textes d'auteurs grecs et latins, de Pline
surtout. Il est vrai qu'il s'agit ici d'un édifice privé, et que
Raoul-Rochette a soutenu sa thèse au point de vue de
l'ornementation des temples et des monuments publics,
notamment de la Grèce, dans la belle période de l'art. Au
surplus, en considérant le luxe de décoration que les
Belgo-Romains déployaient dans leurs demeures, et ce fut
surtout le cas à Gerpinnes, où l'on ne ménagea pas le
marbre, il ne faudrait pas s'étonner qu'ils eussent possédé
des peintures sur bois, encastrées ou non, dont le même
auteur a victorieusement prouvé l'existence. C'est ainsi
encore qu'en fait d'objet de luxe, ils ont dû avoir des
orgues hydrauliques, comme semble l'indiquer la mosaïque
de la villa de Nennig, en face de Remich (Grand-Duché).
Celle magnifique œuvre d'art, unique en son genre, en deçà
des Alpes, et qui est la propriété de l'empereur d'Alle-
magne, représente d'une manière saisissante des combats
de gladiateurs. Dans l'un de ses médaillons on remarque
un joueur d'orgue hydraulique qu'accompagne un musi-
cien jouant du cor (cornicen) (1).
(1) Die romische villa zu Nennig und ihr Mosaik erltiulert von
domcapitular von Wilmoivsky. Bonn, 186-i; grand in- fol. Publication de
la Sociélé der Altherthums Freundeim liheinlande.
(841 )
Fouilles à Assche , par M. Prosper Crick.
L'Académie, à qui j'ai fait part du résultat des fouilles
que M. Crick a faites à Assche, depuis quelques années(l),
apprendra, sans doute, avec satisfaction que ce jeune
archéologue les a reprises, cette année, après la levée des
récoltes.
Bien qu'il y ait mis, comme avant, un zèle dont la
science doit lui savoir gré, ses explorations ont été moins
fécondes en découvertes que précédemment. M. Crick n'a
recueilli que les objets suivants : 1° six pièces de mon-
naie dont une de l'empereur Trajan, une de Domitien et
le reste du bas empire; 2" une jolie anse en bronze; 3° une
feuille de lierre en bronze; 4° une petite cuiller du même
métal; 5° une enclume de 30 centimètres de hauteur;
6° une petite pierre ronde que M. Crick suppose avoir
servi de pierre à aiguiser; 7° deux fragments de haches en
silex; et 8° un éclat d'un vase en verre portant en relief
les lettres IN...., d'un nom propre ou d'un mot.
Ainsi que je l'ai dit en premier lieu, c'est sur les
champs appelés Kalckhoven, où s'élevait sous la période
romaine une grosse bourgade, que M. Crick se livre à ses
(1) Bulletins, t. LX,p. 217, et t. LXI, p. 594. Dans cetle dernière notice,
j'ai signalé, sans en indiquer le provenance, une urne cinéraire antique
que Pierre Roose, chef et président du conseil privé, légua par son testa-
ment à Georges Uwens, son ancien condisciple à l'université de Louvain
et qui fut ensuite conseiller au conseil de Brabant. Or, M le conseiller
Sehnermans nous avait déjà appris que l'urne provenait de Rome, où elle
fut acquise avec d'autres inscriptions pour le compte de Jean Wowerius,
ancien élève de Juste Lipse et l'un de ses exécuteurs testamentaires.
(Bulletins des Commissions d'art et d'archéologie, année 1869, p. 547.)
( 842 )
explorations. Celles qu'il vient de terminer lui ont été
utiles au point de vue topographique. « Les résultats
» obtenus, m'écrit-il, complètent, à un certain degré, les
» travaux antérieurs. Pour la connaissance des lieux, par
» exemple, ils m'ont confirmé dans la pensée que le plus
» grand des chemins empierrés, que j'ai reconnu à diffé-
» rents endroits, à 1 mètre de profondeur, au lieu d'être
» un tronçon de route, est une véritable rue intérieure
» de la bourgade, une sorte de plalea. »
En dépit du léger mécompte qu'il vient d'éprouver,
M. Crick présume que les terres qu'il explore n'ont pas
dit leur dernier mot en fait de découvertes archéologiques.
Aussi, loin de se rebuter, comple-t-il remettre la main à
l'œuvre, au mois d'août de l'année prochaine. On ne peut
que lui souhaiter une heureuse chance et une compensa-
tion à ses sacrifices pécuniaires.
( 813 )
CLASSE DES BEAUX-ARTS.
Séance du 6 décembre 1877.
M. Alvin, directeur, président de l'Académie.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents: MM. L. Gallait, Guill. Geefs, H. Vieux-
temps, Joseph Geefs, C.-A. Fraikin , Edm. De Busscher,
Alph. Balat, le chevalier L. de Burbure, J. Franck, Gust.
De Man, Ad. Siret, Ern. Slingeneyer, Alex. Robert, Ad.
Samuel , Ad. Pauli, G. Guffens,et F. Stappaerts, membres;
Alex. Pinchart, correspondant.
MM. Éd. Mailly, membre de la classe des sciences, et
R. Chalon, membre de la classe des lettres, assistent à la
séance.
CORRESPONDANCE.
MM. les questeurs du Sénat et de la Chambre des repré-
sentants envoient des cartes de tribune réservée pour la
session législative 1877-1878. — Remercîments.
— M. le Ministre de l'Intérieur envoie, conformément
aux dispositions du règlement des grands concours, une
copie du 14e rapport semestriel de M. Ern. Dieltiens, lau-
réat du grand concours d'architecture de 1871. Ce docu-
ment est renvoyé à l'appréciation de MM. Balat et De Man.
( 844 )
MM. Van de Kerkhove frères annoncent qu'ils ont
ouvert, depuis le 1er décembre, place de Brouckere, n° 26,
à Bruxelles, une exposition permanente de tableaux anciens
et modernes.
— M. Liagre dépose sur le bureau l'exemplaire d'un
ouvrage dont M. Melsens a l'ait hommage à la classe des
sciences, intitulé : Sur les paratonnerres à pointes, à con-
ducteurs et à raccordements terrestres multiples. Bruxelles,
1877 ; vol. gr. in-8°. — Remercîments.
Il ajoute que l'auteur se fera un plaisir de mettre à la
disposition des membres de la classe les exemplaires qu'ils
lui demanderont.
ÉLECTIONS.
La classe continue à MM. De Man, Fraikin, Franck,
Gme Geefs et Slingeneyer, membres sortants, la mission de
composer sa commission spéciale des finances pour l'année
1878.
PROGRAMME DE CONCOURS POUR 1879.
La classe a ensuite adopté définitivement les sujets sui-
vants pour son programme de concours de l'année 1879 :
SUJETS LITTÉRAIKES.
PREMIÈRE QUESTION.
Faire l'histoire de l'architecture qui florissait en Belgi-
que pendant le cours du XVe siècle et du commencement du
XVIe, architecture qui a donné naissance à tant d'édifices
( 8iS )
civils remarquables, tels que halles, hôtels de ville, beffrois,
sièges de corporations, de justices, etc.
Décrire le caractère et l'origine de l'architecture de
cette période.
DEUXIÈME QUESTION.
Faire une étude critique sur la vie et les œuvres de
Grètry, étude fondée autant que possible sur des documents
de première main; donner V analyse musicale de ses
ouvrages, tant publiés que restés en manuscrit; enfin,
déterminer le rôle qui revient à Grètry dans l'histoire de
l'art au XVIIIe siècle.
TROISIÈME QUESTION.
Déterminer, en s' appuyant sur des documents authen-
tiques, quel a été, — depuis le commencement du XIVe siè-
cle jusqu'à l'époque de Rubens inclusivement, — le régime
auquel était soumise la profession de peintre, tant sous le
rapport de l'apprentissage que sous celui de l'exercice de
l'art, dans les provinces constituant aujourd'hui la Bel-
gique.
Examiner si ce régime a été favorable ou non au déve-
loppement et aux progrès de l'art.
QUATRIÈME QUESTION.
On demande la biographie de Théodore-Victor Van
Berckel, graveur des monnaies belges au siècle dernier,
avec la liste et la description de ses principales œuvres,
ainsi que l'appréciation de l'influence que cet é minent
artiste a pu exercer sur les graveurs de son époque.
La valeur des médailles d'or présentées comme prix
( 846 )
pour ces questions est de mille francs pour la première,
de huit cents francs pour la deuxième, et de six cents francs
pour les troisième et quatrième questions.
Les mémoires envoyés en réponse à ces questions doi-
vent être lisiblement écrits, et peuvent être rédigés en
français, en flamand ou en latin. Ils devront être adressés,
francs de port, avant le 1er juin 1879, à M. J. Liagre, secré-
taire perpétuel, au Palais des Académies.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage ;
ils n'y inscriront qu'une devise, qu'ils reproduiront dans un
billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse. Faute,
par eux, de satisfaire à cette formalité, le prix ne pourra
leur être accordé.
Les ouvrages remis après le temps prescrit, ou ceux
dont les auteurs se feront connaître, de quelque manière
que ce soit, seront exclus du concours.
L'Académie demande la plus grande exactitude dans les
citations ; elle exige,. à cet effet, que les concurrents indi-
quent les éditions et les pages des ouvrages qui seront
mentionnés dans les travaux présentés à son jugement.
Les planches manuscrites seules seront admises.
L'Académie se réserve le droit de publier les travaux
couronnés.
Elle croit devoir rappeler aux concurrents que les manu-
scrits des mémoires soumis à son jugement restent déposés
dans ses archives comme étant devenus sa propriété.
Toutefois, les auteurs peuvent en faire prendre copieà leurs
frais, en s'adressant, à cet effet, au secrétaire perpétuel.
( 847 )
SUJETS D'ART %5*B'H IQI É.
ARCHITECTURE.
On demande un projet de fontaine monumentale à pla-
cer à l'extrémité d'une place publique avec cascades, bas-
sins, gradins , etc.
MUSIQUE.
On demande une sjjmphonie à grand orchestre.
Elle devra être entièrement inédite et n'avoir jamais été
exécutée en public.
Les plans et les partitions destinés au concours devront
être remis au secrétariat de l'Académie avant le 1er septem-
bre 1879.
Un prix de mille francs, attribué à chacun des sujets
précités, sera décerné à l'auteur de l'œuvre couronnée.
L'Académie n'acceptera que des travaux complètement
terminés ; les plans et les manuscrits devront être soigneu-
sement achevés.
Le manuscrit de la partition musicale et une reproduc-
tion du projet d'architecture couronnés deviendront la
propriété de l'Académie.
Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage;
ils n'y inscriront qu'une devise, qu'ils reproduiront dans un
billet cacheté renfermant leur nom et leur adresse. Faute,
par eux, de satisfaire à celte formalité, le prix ne pourra
leur être accordé.
Les ouvrages remis après le terme prescrit, ou ceux
dont les auteurs se feront connaître de quelque manière
que ce soit, seront exclus du concours.
( 848 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
M. Alvin fait connaître les dispositions qui ont été
prises pour la fête solennelle d'installation des Académies,
fixée au samedi 15 de ce mois, à 1 heure.
Il donne connaissance du programme, qui se compose
de deux parties : la première, consacrée à la solennité pré-
citée, et la seconde à la séance publique annuelle de la
classe des sciences.
— La classe s'est ensuite constituée en comité secret
pour la présentation des candidatures supplémentaires aux
places vacantes.
( 849 )
CLASSE DES SCIENCES.
Séance du 14 décembre 4817 .
M. Maus, directeur.
M. Liagre, secrétaire perpétuel.
Sont présents : MM. J.-C. Houzeau, vice-directeur;
B.-C. Du Mortier, J.-S. Stas, L. de Kc-ninck, P.-J. Van
Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst, Gluge,
Melsens, F. Duprez, G. Dewalque, Em. Quetelet, Candèze,
F. Donny, Ch. Montigny, Steichen, Brialmont, Éd. Dupont,
Éd. Morren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, F. Folie,
F. Plateau, F. Crépin et Éd.Mailly, membres; Alf. Gilkinet,
correspondant.
CORRESPONDANCE.
La Société royale de médecine publique de Belgique an-
nonce sa constitution définitive et demande les publica-
tion académiques. — Renvoi à la Commission adminis-
trative.
■ — M. Chasles remercie la classe d'avoir bien voulu
( 850 )
ordonner l'impression dans le Bulletin de sa réclamation
concernant la communiation de M. Saltel.
« On me propose, ajoute-t-il, de réunir divers théorèmes
nouveaux concernant cette môme théorie des deux carac-
téristiques, tous démontrés par la même méthode, et vérifiés
souvent d'une manière évidente. J'aurai l'honneur de vous
adresser ce travail, en vous priant, M. le secrétaire perpé-
tuel, de vouloir bien être mon interprète auprès de l'Aca-
démie. »
— La classe renvoie à l'examen des commissaires les
travaux manuscrits suivants :
i° Deux théorèmes de géométrie de l'espace analogues
à celui de Pascal en géométrie plane , par M. Sautreaux-
Félix, étudiant en mathématiques à Nice. — Commissaire :
M. Folie ;
2° Description d'un photomètre stellaire, par M. Ad. de
Boë. — Commissaire : M. Houzeau ;
5° Podophrija Benedeni. Acineta tuberosa, par M. Ju-
lien Fraipont. — Commissaires : MM. P.-J. Van Beneden,
F. Plateau et Van Bambeke.
JUGEMENT DU CONCOURS POUR 1877.
M. le directeur procède à l'ouverture du billet cacheté
joint au mémoire envoyé en réponse à la sixième question
du programme, demandant VÊtude du cycle d'évolution
d'un groupe de la classe des Algues; il fait connaître
comme auteur : M. Rostafinski, correspondant de l'Aca-
démie des sciences de Cracovie, à Cracovie.
( 851 )
COMMUNICATIONS ET LECTURES.
Note sur un Cachalot nain du crag d'Anvers (Physeterula
Dubusii; par M. P.-J. Van Beneden, membre de l'Aca-
démie.
Parmi les nombreux matériaux que les travaux d'Anvers
ont mis au jour, se trouve un animal d'un intérêt majeur
que M. du Bus n'a pas eu entre les mains et que je m'em-
presse de faire connaître.
C'est un Ziphioïde du groupe des Cachalots, on pour-
rait presque dire un vrai Cachalot, mais qui ne dépasse
que de fort peu la taille de notre Hyperoodon.
Nous maintenons toujours l'opinion que nous avons
exprimée depuis longtemps, que les Cachalots sont de vrais
Ziphioïdes.
Il est fort remarquable que celle mer scaldisienne, qui
nourrissait de vraies Baleines avec et sans ailerons de très-
petite taille, ait nourri également à côté de ces nains mysli-
cèles un Cachalot nain.
Il est peut-être encore plus remarquable que la mer du
crag se trouvait dans le même cas où se trouvent aujour-
d'hui quelques parages éloignés qui nourrissent des
espèces naines à côté des espèces géantes. On sait, en
effet, qu'à côté de la Balœna marginata d'Australie vit la
Balœna antipodum, et qu'à côté des grands Physétères
habitent des Kogia qui n'ont pas plus de neuf pieds de lon-
gueur.
Les mers d'Australie ont conservé en vie plus d'un ani-
mal que l'on ne voit plus ailleurs qu'à l'état fossile, et l'un
( 8oi2 )
des exemples les plus remarquables est ce poisson Cerato-
das, de nos terrains primaires, que l'on vient de découvrir
vivant dans les fleuves de l'Australie.
Voici ce que nous possédons de ce Physétère fossile de la
mer du crag auquel nous proposons de donner le nom de
Physeterula Dabusii.
Le Musée royal a reçu des ossements de trois individus.
Celui qui sert de type pour celle description a son maxil-
laire inférieur à peu près complet.
Un second a la tête à peu près complète, mais la partie
antérieure est perdue.
Un troisième possède également une grande partie du
crâne.
Indépendamment de la tèle, nous possédons plusieurs
côles, quatre vertèbres caudales et une partie du sternum.
Une des vertèbres a encore son os en V.
Ces os ont été trouvés dans le sable noir, à peu près à
la même place et à côté d'eux gisaient un humérus el un
temporal de Heterocetus hupschii, un humérus et un tem-
poral de Dauphin non encore déterminé.
L'éliquette qui accompagne ces os porte : Nouvelle en-
ceinte, 3e section, fossé du ravelin, partie droite en face
du gazomètre de la fabrique Woot, sur le canal de Heren-
thals, 20 novembre 4863.
L'os maxillaire inférieur a pu être reconstitué à peu
près complètement; nous possédons les branches de droite
et de gauche.
La forme du maxillaire est fort gracieuse, et le bord in-
férieur est élégamment ondulé.
Les deux branches s'écartent fortement en arrière
( 853 )
comme dans le Physétère vivant, tandis qu'en avant elles
se réunissent sur une longueur considérable; elles forment
une symphyse qui occupe à peu près le tiers de la longueur
totale. Le Cachalot vivant a celte symphyse de la moitié
de la longueur totale, ou même plus.
La brièveté de la symphyse est un caractère de jeune
âge; le jeune Cachalot que M. Flower a figuré a une sym-
physe qui dépasse un peu le tiers de la longueur du maxil-
laire, tandis que l'adulte a cette même symphyse de plus
de la moitié de la longueur (I).
En arrière l'os est fort élevé et l'entrée du canal den-
taire est extrêmement large comme dans tous les Céto-
dontes. Du reste, le canal dentaire conserve une grande
largeur dans toute son étendue. Tout l'os en avant n'est
pour ainsi dire qu'un étui du canal avec des cloisons pour
les dents.
On distingue à sa surface externe cinq trous menton-
niers, échelonnés à une dislance à peu près égale vers le
milieu de la hauteur de l'os. 11 y en a un qui est double.
Les dénis sont fort intéressantes ; elles sont au nombre
de vingt-deux, non pas qu'il en existe autant en place, mais
nous tenons compte du nombre d'alvéoles. Il y a douze
dents en place à droite et dix à gauche.
Ces dents sont à peu près toutes semblables, mais on
peut cependant reconnaître fort bien celles de gauche et
de droite.
Elles ont à peu près treize centimètres de longueur sur
deux centimèlres et demi d'épaisseur. 11 n'y en a qu'une ,
nous supposons que c'est l'anlérieure, qui n'a que la
moitié en épaisseur des autres.
(1) Flower, Trans. zool. soc, vol. VI, pi. LVI, fig. 1 et 2.
2me SÉlilE, TOME XL1V. î)8
( 854 )
Toutes sont fort légèrement courbées.
Leur base est assez large et ouverte pour îe bulbe den-
taire; elles se renflent faiblement vers le milieu, puis se
terminent en haut en pointe.
De la quatrième à la huitième les dents présentent, à la
base de leur couronne, une surface usée en avant ou dans
la partie convexe et une autre en arrière, dans la partie
concave. La première usure est plus étendue et plus
élevée.
La surface antérieure ou externe de chaque dent est
plus ou moins arrondie, tandis que la face interne est
aplatie sur presque toute la longueur.
Chaque dent a sa partie osseuse entourée depuis la base
jusqu'au sommet d'une couche de cément, dont la couleur
comme la structure contraste avec la substance osseuse.
Celle-ci a un aspect de silex, tandis que la substance cor-
ticale ne semble formée que de poussière accumulée. Le
cément est facilement attaqué. L'ivoire se brise comme un
silex et présente la même cassure.
Le cément est très-mince aux deux bouts, assez épais
au milieu; en avant il devient assez mince pour produire
l'effet d'une légère altération de la surface.
La substance osseuse, dégagée du cément, présente à sa
surface des stries circulaires et des stries longitudinales,
ces dernières sont moins bien accusées que les premières.
Les dents antérieures ne semblent ni plus faibles ni
plus usées que les autres.
Les dents antérieures sont représentées par la partie
profonde des alvéoles. Le bout du maxillaire est brisé.
Il y a quatre vertèbres caudales moyennes dont trois
fort complètes et une avec un os en V.
( 855 )
Ces vertèbres sont à peu près aussi hautes que larges;
le disque est parfaitement circulaire et légèrement concave
des deux côtés. La surface articulaire pour les os en V l'ait
une forte saillie en avant et en arrière.
L'os en Y est proportiouellement fort.
Les côtés sont au nombre de plusieurs. Les deux ou
trois antérieures se distinguent par leur largeur et par
leur courbure. Elles forment un angle presque droit en
haut, puis se courbent fort légèrement.
Le sternum est représenté par une moitié de la pièce
antérieure et un fragment de la pièce moyenne qui est
perforé au milieu.
On connaît quelques débris de Physétère recueillis dans
le midi de la France par M. Paul Gervais, en Italie par
MM. Pedroni et Lawley, dans la Caroline du Sud par
M. Gibbes. Mais tous ces débris sont trop incomplets et
trop mal conservés pour permettre de faire une compa-
raison rigoureuse avec les Physétères vivants. La pièce que
nous faisons connaître est d'une conservation assez complète
pour ne laisser aucun doute ni sur le genre ni sur l'espèce.
'La mandibule que nous représentons ici a été rapportée
à P Homœocetus villersii, mais il est à remarquer que ce
genre Homœocetus a été établi sur une région cervicale
qui a été reconnue après pour une région cervicale de
Balénide.M.du Bus, voyant une région cervicale à vertèbres
soudées mais à allas libre, a cru qu'il avait un Cachalot
sous les yeux. Il a reconnu lui-même cette erreur, car
aucune région cervicale n'a conservé son étiquette
d' Homœocetus.
En terminant nous ferons remarquer que, dans la mer
de nos antipodes, vivent encore aujourd'hui , comme
( 856 )
dans la mer du crag, de petites espèces de Kogia à côté de
grand Cachalots, de Neobalœnah côté de grands Mysticètes.
EXPLICATION DE LÀ PLANCHE.
Mandibule de Physeterula Dubusii, vue au dixième.
Fig. 1 . Les deux mandibules vues d'en haut, pour montrer la symphyse,
la direction des mandibules en arrière et les dents qui sont
encore en place.
— 2. La mandibule droite.
— 3. Trois dents isolées.
ÉLECTIONS ET PRÉPAKATIFS DE LA SÉANCE PUBLIQUE.
La classe se forme en comité secret pour s'occuper des
élections aux places vacantes et des préparatifs de la
séance publique du lendemain. Les résultats des élections
paraîtront dans le compte rendu de la séance publique.
Bull.de lÀcad. Royale
ujjnn a
Litii.G.Severejas,
Physetenda dubusii
(ny
SOLENNITE
D'INAUGURATION DU PALAIS DES ACADÉMIES
ET
SÉANCE PUBLIQUE ANNUELLE DE LA CLASSE DES SCIENCES,
Samedi, 15 décembre 1877, à I heure.
Le bureau est composé de la manière suivante :
MM. Alvin, président de l'Académie des sciences, des
lettres et des beaux-arts, président; le Ministre de l'Inté-
rieur; Soupart, président de l'Académie de médecine;
Maus, directeur de la classe des sciences ; Hairion, Ier vice-
président de l'Académie de médecine; Wauters, directeur
de la classe des lettres; Chandelon, 2d vice-président de
l'Académie de médecine; Liagre, secrétaire perpétuel de
l'Académie des sciences, des lettres et des beaux-arts; et
Thiernesse, secrétaire de l'Académie de médecine.
Assistent à la séance :
Classe des sciences: MM. B.-C. Du Mortier, L. de Koninck,
P.-J. Van Beneden, Edm. de Selys Longchamps, H. Nyst,
Gluge, Melsens, F. Duprez, G. Dewalque, E. Candèze,
F. Donny, Ch. Montigny, Steicben, Éd. Dupont, Éd. Mor-
( 8o8 ;
ren, Éd. Van Beneden, C. Malaise, Alb. Briart, F. Plateau,
Éd. Mailly, membres; Th. Schwann, E. Catalan, associés ;
H. Valérius, F.-L. Cornet, Ch. Van Bambeke, G. Van der
Mensbrugghe, AH'. Gilkinet et M. Mourlon, correspondants.
Classe des lettres: MM. Gachard, P. De Decker, J.-J. Haus,
M.-N.-J. Leclercq,Ch.Faider, Th. Juste, F.Nève,G. Nypels,
Ém. de Borehgrave, A. Wagener, J. Heremans , P. Wil-
lems, membres; Aug. Scheler, Alph. Rivier, Eg. Arntz^
associés; Edm. Poullet, Loise, S. Bormans, Ch. Piot,
Ch. Potvin, correspondants.
Classe des beaux-arts: MM. L. Gallait, Guill. Geefs,
H. Vieuxtemps, Jos. Geefs, C. Fraikin, Éd. Fétis, Edm. de
Busscher, le chevalier Léon de Burbure, 3. Franck, Gustave
De Man, Ad. Siret, Ern. Slingeneyer, A. Robert, F. Ge-
vaert, Ad. Pauli, F. Stappaerts, G. Guffens, membres;
Éd. de Biefve et Alex. Pinchart, correspondants.
Académie royale de médecine : MM. Bellefroid, Rich.
Boddaerl, Borlée, Boni vin, Bribosia, Cousot, Craninx,
Crocq, Delwart, De Roubaix, Foelen, Gille, Kuborn, Le-
febvre, Lequime, Michaux, Pigeolet, Rommelaere, Warlo-
mont, Willième, membres titulaires; MM. Decaisne, Mal-
corps, L. Martin, membres honoraires; MM. Blas, Belval,
Boè'ns, Debaisieux, Degive, Dugniolle, Du Moulin, Ham-
bursin, Hayoit, Henriette, Hubert, Hugues, Janssens, La-
rondelle, Masoin, Motte, Sacré, Van Aubel, Van Bastelaer,
Vanden Corput, Van Welter, Vleminckx, Wehenkel et
Willems, correspondants.
Absents pour motif de santé : MM. Deneffe, Sovet et
Thirv, membres titulaires.
( 851) )
Se sont excusés : MM. Fossion, Gallez, Gouzée el Mas-
cart, aussi membres titulaires,
À 1 heure, les bureaux des deux Académies, auxquels
s'était joint M. le Ministre de l'Intérieur, ont eu l'honneur
de recevoir Leurs Majestés au pied du grand escalier du
Palais.
LL. AA. RR. le Comte et la Comtesse de Flandre, reçues
un instant avant, attendaient également le Roi et la Reine.
Leurs Majestés ont été complimentées par les présidents
des deux Académies.
Le cortège royal a d'abord parcouru les locaux, où deux
bouquets ont été présentés : l'un, à la Reine, par M. le
président de l'Académie des sciences, des lettres et des
beaux-arts; l'autre, à la Comtesse de Flandre, par M. le
président de l'Académie de médecine.
Au moment où Elle a paru dans sa loge, la Famille
royale a été saluée par les acclamations de la nombreuse
assemblée qui se trouvait réunie dans la grande salle du
Palais, et par la Brabançonne exécutée par la musique
des grenadiers, sous la direction de son habile chef,
M. C. Bender.
Dans la loge ministérielle se trouvaient, entre autres :
M. Beernaert, Ministre des Travaux publics, et sa dame;
M. le baron Gericke de Herwynen, Ministre des Pays-Bas;
M. le comte de Barrai de Monteauvrard, Ministre d'Italie;
M. de Thomar, Ministre de Portugal; MM. Rogier, Des-
camps et Demeur, représentants.
La solennité a commencé par l'ouverture d'Obéron, in-
terprétée par le môme corps de musique.
— M. le Ministre de l'Intérieur s'est levé et a prononcé
le discours suivant :
( 860 )
Sire, Madame; Monseigneur, Madame; Messieurs,
Encourager la culture des sciences, des lettres et des
arts est l'un des premiers devoirs du gouvernement dans
les pays civilisés. En Belgique, ce devoir n'a jamais été
perdu de vue el le gouvernement s'est toujours attaché à
s'en acquitter avec une sage et bienveillante impartialité.
Les institutions diverses, fondées et agrandies depuis
1850, les dotations accordées pour leur permettre de fé-
conder leurs travaux, les collections de tout genre ouvertes
aux éludes, tout, en un mot, démontre que les pouvoirs
publics n'ont à aucune époque méconnu leurs obligations
à l'égard du développement de la vie intellectuelle de la
nation.
Pour ne parler que des faits principaux accomplis dans
ces derniers temps, je citerai, dans l'ordre scientifique :
l'organisation du Jardin Botanique acquis au prix d'un mil-
lion, la réorganisation du Musée d'histoire naturelle, qui
est devenu une institution scientifique de premier ordre,
l'Observatoire muni d'instruments nouveaux et d'un maté-
riel scientifique complet, enfin l'établissement des premiers
jalons pour la confection d'une nouvelle carte géologique
du pays.
Dans l'ordre littéraire, je rappellerai l'organisation nou-
velle, les accroissements considérables et les locaux recon-
struits de la Bibliothèque royale, les Archives mieux dotées
et logées prochainement, je l'espère, dans un bâtiment
spécial, enfin les encouragements divers donnés à l'art
dramatique et à la plupart de nos institutions destinées à
la culture d'une branche quelconque de la littérature.
Quant aux beaux-arts, l'intervention bienveillante de
( 86J )
l'État s'est manifestée sous des formes variées : le Conser-
vatoire royal de musique doté d'une organisation nouvelle
et de locaux parfaitement appropriés, les Musées de pein-
ture reconstruits et enrichis, le Palais des beaux-arts dé-
crété et déjà bâti en partie, tels sont les principaux actes
par lesquels le Gouvernement a manifesté son intention
d'encourager le développement des beaux-arts, et de prê-
ter à ceux qui les cultivent un concours sympathique,
surtout lorsque des crises comme celle qui sévit aujour-
d'hui menacent de tarir les sources de leur activité.
Le concours des pouvoirs publics était naturellement
acquis aux Académies, qui occupent le premier rang parmi
les institutions destinées à animer la vie intellectuelle du
pays. C'était pour le Gouvernement un devoir patriotique
de leur témoigner sa bienveillance dans toutes les occa-
sions où eile peut se produire avec fruit.
C'est ainsi que, tour à tour, il a étendu le cercle d'ac-
tion de l'Académie royale de Belgique, en complétant son
organisation, en augmentant sa dotation et en lui permet-
tant de multiplier ses travaux par le concours de corps
spéciaux.
L'Académie de médecine, de fondation plus récente, a
reçu le même encouragement et a montré, par son activité
féconde, qu'elle en était digne à tous égards.
L'influence de nos sociétés savantes grandira de plus en
plus dans l'avenir : c'est parce qu'il est convaincu de ce
résultat, que le Gouvernement leur a affecté le palais dont
l'inauguration solennelle a lieu aujourd'hui.
En daignant rehausser celte cérémonie par leur pré-
sence, leurs Majestés le Roi et la Reine donnent un nou-
veau témoignage de leur vif intérêt pour tout ce qui peut
contribuer à élever le niveau intellectuel de la nation. En
( 862 )
d'autres occasions, cet intérêt s'est manifesté avec éclat,
et il ne saurait pas être inopportun, en inaugurant le palais
des Académies, d'exprimer hautement les sentiments de
gratitude que tous nous en éprouvons.
— M. Alvin prononce l'allocution suivante au nom de
l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-
arts :
Sire, Madame, Altesses Royales,
Au renouvellement de l'année, mon honorable prédé-
cesseur dans la dignité de président de l'Académie,
M. Ch. Faider offrant à Votre Majesté l'hommage respec-
tueux et reconnaissant ainsi que les vœux de la Compagnie
pour le bonheur de la Famille royale, avait fait allusion à
l'inauguration du palais que le Gouvernement du Roi venait
d'assigner aux Académies. Le Roi avait daigné promettre
d'honorer la solennité de son auguste présence.
Cette fête, toute de reconnaissance, coïncide avec la
séance publique annuelle de la classe des sciences, date qui
a l'avantage de rappeler la fondation de notre Compagnie,
il y a cent quatre ans, par l'impératrice Marie-Thérèse, de
glorieuse mémoire.
Les deux Compagnies savantes qui occupent en com-
mun ce palais depuis quelques mois, — l'Académie royale
des sciences, des lettres et des beaux-arts, et l'Académie
royale de médecine, — y ont vu l'occasion de resserrer les
liens de confraternité si désirables entre les hommes de
bonne volonté qui consacrent leur existence aux arts libé-
raux, et en même temps de témoigner, avec un ensemble
plus imposant, leur profonde gratitude envers leur auguste
Protecteur.
( 865 )
Le Roi, — la Belgique entière le sait et elle s'en glo-
rifie, — le Roi prend vivement à cœur tout ce qui se rat-
tache au développement intellectuel de la nation et même
aussi à l'extension de la civilisation universelle. C'est un
des soins les plus constants et ce ne sera pas le moindre
honneur de son règne.
L'acte de l'autorité qui a motivé la fête d'aujourd'hui
est un nouveau témoignage de la sollicitude royale. Les
Académies occupent désormais un palais distinct, exclusi-
vement affecté à leur service et digne de l'idée que se fait
notre souverain de l'importance du rôle dévolu aux œuvres
de l'intelligence dans les sociétés modernes.
En voyant briller les mots : Palais des Académies, sur
la façade de cet édifice, destiné d'abord à abriter des per-
sonnes royales, le peuple paprendra, par l'exemple que lui
donne un monarque, à honorer le talent et le savoir dans
la personne de ceux qui ont su les acquérir et les cultiver
avec succès.
Oui, le peuple comprendra que ce palais est son domaine
à lui; que l'accès lui en est ouvert; que des sièges y atten-
dent non pas ceux-là qu'y appellerait le hasard de la nais-
sance ou le caprice de la fortune, mais ceux qui se seront
distingués par l'étude et par un travail fructueux. Il saura
que l'instruction est la seule route qui y conduit, route
aujourd'hui largement ouverte, grâce au concours de tous
les pouvoirs publics du pays.
En remerciant le Roi et son Gouvernement d'avoir assi-
gné ce palais au service des Académies, ce n'est donc point
à un sentiment d'égoïste et puérile satisfaction que nous
obéissons; les locaux que nous venons de quitter étaient
assurément fort convenables. Nous nous réjouissons sur-
tout parce que la mesure se rattache à un ensemble de
( 864 )
dispositions intéressant au plus haut degré les sciences,
les lettres et les arts, et qui leur seront éminemment pro-
fitables en permettant de réunir et de grouper, suivant
leurs analogies, les grandes collections artistiques, scienti-
fiques et littéraires de l'État.
Nous avons été heureux, Sire, et fiers aussi, de recevoir
dans ce palais notre hien-aimé Protecteur, son auguste
frère, cœur si sympathique, et les deux illustres princesses
qui perpétuent, sur le trône et à côté du trône, les tradi-
tions de grâce et de vertu qu'y avait fixées jadis notre tant
regrettée reine Louise-Marie.
L'installation des Académies laisse encore à désirer ;
Votre Majesté l'a pu constater en parcourant nos salles de
réunion ainsi que nos collections; mais nous nous repo-
sons, pour les améliorations désirées, sur la sollicitude du
Roi. ?^ous savons d'expérience que Sa Majesté ne perd
jamais de vue les besoins légitimes qui lui ont été signalés.
L'Académie n'a point oublié l'empressement avec lequel
le Roi a pris en main l'intérêt des artistes, dans une cir-
constance que je me plais à rappeler.
De celte même place, il y a six ans, notre président
d'alors, Louis Gallait, faisait parvenir la plainte de ses con-
frères jusqu'aux oreilles du Roi :
« Les artistes, disait-il, n'ont pas même obtenu qu'on
» leur donnât un local convenable pour les expositions de
» leurs œuvres. »
Votre Majesté a entendu cette plainte. Un édifice s'est
élevé, malgré bien des obstacles que la persévérance royale
a surmontés. Le monument sera digne de son origine et de
l'objet auquel il répond. Il ouvrira ses portes aux œuvres
de nos artistes lorsque le pays célébrera le cinquantième
anniversaire de son indépendance.
( 865 )
— M. Soupart, au nom de l'Académie royale de méde-
cine, s'exprime en ces termes :
Sire, Madame, Altesses Royales,
L'Académie royale de médecine, par mon organe, remer-
cie Vos Augustes personnes d'être venues honorer de leur
présence cette solennité inaugurale, et lui donner— ainsi
revêtue du sceau royal — un caractère exceptionnel de la
plus haute signification pour les deux compagnies savantes
dont elle consacre l'union confraternelle.
Sire,
La fondation, par le Roi, votre illustre et vénéré père,
de l'Académie royale de médecine de Belgique, est un de
ces actes qui signalent un progrès dans la vie d'une nation ,
un de ces actes qui, sous une apparente simplicité, con-
courent puissamment à glorifier un règne, car ils laissent
derrière eux une trace lumineuse, une marque ineffaçable
de la haute sollicitude du souverain pour la culture des
sciences et, notamment, d'une science étroitement liée au
bonheur du peuple par ses moyens d'action sur la santé
publique.
Aujourd'hui, Sire, en prenant l'Académie de médecine
sous Votre Royal patronage, en l'installant dans ce palais,
Votre Majesté montre tout le prix qu'elle attache à son
développement. Elle l'entoure d'un prestige qui exercera
la plus salutaire influence sur ses travaux, et contribuera
à étendre les bienfaits qui doivent en résulter pour l'hu-
manité.
Pour mériter cet insigne honneur, l'Académie de méde-
cine doit avoir rempli sa mission à la satisfaction du gou-
( 866 )
versement de Voire Majesté; elle doit avoir répondu à
l'attente de son Fondateur.
Eh bien, qu'il nous soit permis de le dire, avec un sen-
timent de légitime orgueil: oui, Sire, l'Académie royale
de médecine de Belgique, grâce au zèle et à l'activité de
ses membres; grâce à l'initiative et à la liberté d'action qui
lui lurent octroyées, et dont elle à largement usé; grâce
aussi à la direction qui lui fut imprimée par celui dont
nous déplorons la perte récente, et qui s'est illustré en la
présidant pendant une période de trente-deux années,
l'Académie de médecine a su mériter l'estime et la consi-
dération du monde savant.
Aucune partie des sciences médicales n'est restée élran-
Consullée sur une foule de points qui intéressent la
santé publique, elle a lait une étude consciencieuse de
toutes les questions qui lui ont été soumises; de plus, elle
a pris l'initiative de beaucoup d'autres.
L'hygiène des ouvriers mineurs, — le travail des en-
fants dans les manufactures, — les falsifications des matiè-
res alimentaires et médicamenteuses, — la vente des objets
contenant des substances toxiques ou nuisibles à la santé,
— la police des décès et des inhumations, — la police
sanitaire, — le travail des femmes dans les mines, — la
prophylaxie des maladies épidémiques et contagieuses : tels
sont, en fait d'hygiène publique qui, on le sait, est, de la
part de Votre Majesté, l'objet de préoccupations constantes,
les principaux points qui ont servi de thèmes à des discus-
sions approfondies, où le gouvernement et la législature
ont déjà puisé et pourront encore puiser d'utiles éléments
au double point de vue social et humanitaire.
(867 )
A ces travaux que l'on peut dire d'utilité publique, vien-
nent se joindre des productions scientifiques d'une impor-
tance pratique incontestable et formant une sorte de
monument, à l'édification duquel ont concouru tous les
membres de la Compagnie chacun dans la sphère de sa
spécialité.
La plupart de ces œuvres revêtent un cachet d'origina-
lité qui mérite d'autant plus d'être signalé, qu'il réalise,
en quelque sorte, une pensée toute nationale, développée
par l'éminenl Ministre qui attacha son nom à la fondation
de notre Académie de médecine, et résumée dans ces pa-
roles simples et éloquentes : Être soi et demeurer soi, pro-
noncées dans la séance d'installation de la Compagnie par
le savant et vénérable Fallot qui la présidait.
Peu d'entre nous ont été à même d'entendre celte sage
et patriotique exhortation, et la plupart de ceux qui oui
pu la recueillir pour nous la transmettre, après l'avoir mise
eux-mêmes en pratique, ne sont plus. Qu'il nous soit per-
mis, en ce moment solennel, de payer à leur mémoire un
juste tribut de regrets et d'afiirmer qu'ils ont bien mérité
de la science et de l'humanité.
Les vides que leur mort a laissés dans nos rangs sont
heureusement comblés par d'ardents et courageux pionniers
chez lesquels le feu sacré de la science restera vivace.
L'Académie de médecine n'a pas borné son activité aux
questions d'intérêt actuel. Remontant dans le passé, et
cherchant, dans l'histoire de nos gloires nationales, des
exemples à suivre, des modèles à imiter, elle s'est attachée
à rehausser l'éclat qu'ont jeté, à diverses époques, sur la
Belgique, les Vésale, les Van Helmont, les Palfyn, les
( 868 )
Verheyen, les Dodëns, les Vandenspiegel, les Rega, dont
les écrits et les importantes découvertes ont fait l'admira-
tion des savants.
Préoccupée aussi de l'avenir scientifique du pays, l'Aca-
démie de médecine étudie, en ce moment même, les moyens
propres à améliorer, à perfectionner l'enseignement médi-
cal et à procurer de bons guides à la jeunesse studieuse,
en provoquant parmi elle le goût de la carrière ardue du
professorat.
Forts de ces antécédents, en présence de pareils éléments
et de pareilles dispositions, nous pouvons, Sire, envisager
sans crainte le sort de notre Académie royale de médecine,
et dire avec assurance : son passé répond de l'avenir. Pla-
cée sous l'égide lutélaire de Votre Majesté, elle saura tou-
jours se rendre digne de la sollicitude du gouvernement
en justifiant de plus en plus la confiance du pays.
Sous l'empire de cette pensée de progrès et. d'encoura-
gement, c'est avec joie que nous nous livrons à l'espoir
fondé que Vos Majestés et Vos Altesses Royales pourront,
pendant de longues années, contempler d'un œil satisfait
le chemin parcouru par l'Académie royale de médecine et
par l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-
arts, fraternellement unies dans un but commun : le pro-
grès SCIENTIFIQUE.
La musique exécute ensuite le premier des C'Sardas
de V. Nemeth, Rosza Bokor, inscrits au programme.
— Après cette première partie de la séance, M. Maus,
( 869 )
directeur de la classe des sciences, remplace M. Alvin au
fauteuil delà présidence, ct,s'excusantsur l'état de sa santé,
il prie M. Liagre de donner lecture, en son nom, du dis-
cours suivant :
Sire, Madame, Altesses Royales, Messieurs,
Je dois aux fonctions de directeur de l'une des classes de
l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts
l'honneur de prendre la parole dans celle séance publique,
à laquelle la présence de Leurs Majestés et de Leurs
Altesses royales, el l'installation de deux corps savantsdans
un palais princier, donnent une solennité exceptionnelle.
Je me propose d'attirer votre attention sur l'utilité pra-
tique des sciences mathématiques, physiques et naturelles,
dont l'ensemble compose le programme des éludes de la
classe qui a bien voulu m'associer à ses travaux.
En faisant connaître la composition de l'écorce solide de
la planète que nous habitons; en expliquant les phéno-
mènes qui se produisent à sa surface, et les effets de la
force mystérieuse qui règle le cours des astres, ces sciences
ont donné aux hommes les moyens d'extraire les métaux
pour les transformer en instruments de travail, de se diri-
ger sur la mer et d'aborder à tous les continents; enfin de
faire concourir des forces naturelles considérables à l'exé-
cution de ces grands travaux, dont notre siècle s'enor-
gueillit, et qui marqueront une époque brillante dans l'his-
toire de l'humanité.
Un simple coup d'oeil, jeté sur les principales applica-
tions des sciences mathématiques, physiques et naturelles,
justifiera cette assertion.
c2me SÉRIE, TOME XL1V. 59
( 870 )
La chimie a déterminé les éléments des corps com-
posés, qui abondent dans la nature, et fourni la hase de
tous les procédés que l'industrie emploie, pour extraire du
sol les matières premières et leur donner la composition
et la forme qui les rendent utiles.
Je signalerai la production économique du fer et de
l'acier, employés à construire les machines, les rails, les
navires, les ponts, les charpentes des éditices et des mai-
sons.
Je citerai ces lentilles qui permettent aux astronomes
de sonder les profondeurs de l'espace, et aux naturalistes
de rechercher les êtres microscopiques qui compromettent
notre santé, et le moyen d'empêcher leur développement.
On doit à la chimie ces corps impressionnables à l'action
de la lumière, qui reproduisent instantanément et plus
exactement que ne pourrait le faire le dessinateur le plus
habile, les chefs-d'œuvre de l'art, les objets d'une grande
délicatesse et les phénomènes fugitifs qui intéressent le
naturaliste et l'astronome.
Les procédés chimiques perfectionnés sont mis en œuvre
pour former, avec les métaux les plus inaltérables, ces
règles qui donneront, avec une extrême précision, la même
unité linéaire, à toutes les nations qui doivent concourir
à déterminer la mesure et la forme du globe terrestre.
La connaissance du cours des astres est nécessaire pour
indiquer sur les caries la position des continents entourés
par la mer, et annoncer, longtemps d'avance, les heures de
marée haute, qui permettent aux navires d'entrer dans les
ports de l'Océan.
L'observation du ciel, complétant les indications de la
boussole, donne au navigateur le moyen de figurer sur la
( "I )
carie les positions successivement occupées par son navire,
d'éviter les écueils et d'arriver à destination.
Un accident, survenu pendant la pose du câble transat-
lantique^ mis en évidence l'exactitude des calculs astro-
nomiques. Le câble, enroulé dans le navire, se dévidait el
s'étendait sur le fond de la mer, lorsque, arrivé au milieu
de la traversée, il se rompt; après quelques tentatives pour
ressaisir l'extrémité de la partie noyée, on a dû y renoncer
et, après avoir déterminé la longitude et la latitude du lieu
de l'accident, retourner au port chercher des grappins.
L'année suivante, le navire était ramenéà l'endroit indiqué,
on repêchait le bout du câble à la profondeur de 1,000 mè-
tres , el l'on terminait heureusement celle hardie entre-
prise.
Quoique les physiciens ne connaissent que bien impar-
faitement encore toutes les propriétés de l'électricité et du
magnétisme, ils ont cependant déjà indiqué les moyens de
soustraire les édifices et les navires aux ravages de la
foudre, et de transmettre à des distances prodigieuses
avec une vitesse qui ferait le tour du globe en moins d'un
dixième de minute, nos correspondances et bientôt nos
conversations.
Cette transmission rapide est particulièrement utile
pour assurer le service des chemins de fer, pour réclamer
contre l'incendie, des secours d'autant plus efficaces qu'ils
sont plus prompts, avertir les populations menacées d'une
inondation, et les navigateurs de l'arrivée d'un cyclone.
L'emploi du télégraphe électrique, pour faire ouvrir si-
multanément toutes les retenues d'une rivière canalisée,
chaque fois qu'il survient une crue, et les refermer aus-
sitôt qu'elle cesse, rend les débordements moins fréquents
et moins désastreux.
( 872 )
Les courants électriques produisent une lumière très-
vive déjà utilisée pour l'éclairage de phares et de grands
ateliers.
Ces courants appliqués à des électro-aimants produisent
une force motrice, dont l'emploi se généralisera aussitôt
que les courants électriques seront obtenus par des pro-
cédés chimiques peu coûteux. On pourrait provisoirement
les produire à l'aide de machines hydrauliques et les trans-
mettre dans les villes voisines par les (ils télégraphiques.
L'étude des lois qui régissent le règne végétal et le
règne animal, permet au naturaliste de donner d'utiles
conseils en indiquant, soit les plantes les plus productives
qui supportent notre climat, soit les espèces d'animaux qui
conviennent le mieux à leurs diverses destinations.
Les nombreuses assises du sol, que la végétation couvre
d'un manteau de verdure, portent les traces degrands bou-
leversements : à des couches verticales succèdent des cou-
ches horizontales; certaines roches renferment des cailloux
roulés, qui ont appartenu à des roches déposées avant celles
qui les contiennent aujourd'hui, les roches ont des com-
positions différentes, les débris fossiles d'animaux et de
végétaux abondent dans certaines d'entre elles tandis qu'ils
font complètement défaut dans d'autres.
En classant les roches d'après leurs caractères, leur po-
sition relative et les fossiles qu'elles contiennent, le géo-
logue a pu rapporter leur formation à plusieurs périodes
distinctes, reconnaître les substances utiles, particulières
à chacune d'elles, épargner par ses conseils des recherches
dispendieuses dans des roches stériles, et guider le mineur
dans ses pénibles travaux.
Le calcul mathématique a perfectionné les machines
( 875 )
hydrauliques et augmenté la force motrice que les chutes
des ruisseaux et rivières procurent presque sans fraisa de
nombreuses usines.
Après avoir démontré que l'ascension du mercure dans
un tube privé d'air, et de l'eau dans les pompes aspirantes,
était due à la pression que l'atmosphère exerce sur tous
les corps terrestres et constaté par des expériences publi-
ques l'énergie de celte pression, qui, exprimée en mesures
modernes, équivaut à 10,000 kil. par mètre carré, les phy-
siciens du XVIIe siècle ont cherché à obtenir de leur décou-
verte une nouvelle force motrice.
Parmi un grand nombre d'essais infructueux, une ma-
chine employée à extraire l'eau d'une mine de houille,
obtint un succès durable.
Celte machine, composée d'un cylindre et d'un piston,
faisait mouvoir les pompes du puits par l'intermédiaire
d'un balancier.
Le dessus du piston était constamment soumis à la pres-
sion de l'atmosphère, et le dessous à l'action de la vapeur,
qui équilibrait la pression atmosphérique, lorsque le cylin-
dre communiquait avec la chaudière, tandis qu'elle se
condensait et formait le vide dans le cylindre, quand la
communication avec la chaudière était interrompue.
Il suffisait donc d'établir et d'intercepter la communica-
tion entre la chaudière et le cylindre, pour élever et abais-
ser le piston, et faire manœuvrer les pompes.
Cette machine qui procurait une nouvelle force motrice
au moyen d'un combustible minéral, fourni par d'immenses
dépôts souterrains, a excité un intérêt universel.
Un modèle, qui servait à la l'aire connaître aux élèves
d'un cours de physique, devint le sujet d'études et d'expé-
riences qui ont introduit dans la machine plusieurs perfec-
tionnements importants :
( 874 )
La vapeur, au lieu d'être condensée dans le cylindre par
l'introduction d'un jet d'eau froide, a été envoyée dans un
appareil spécial appelé condenseur, et le cylindre a pu con-
server une température élevée.
Le dessus du cylindre ayant reçu un couvercle, la vapeur
sortant de la chaudière a remplacé la pression atmosphé-
rique et fait alternativement monter et descendre le
piston.
Le mouvement alternatif a été transformé en mouve-
ment circulaire.
En interrompant l'introduction de la vapeur dans le
cylindre, avant que le piston ait atteint l'extrémité de sa
course, on a utilisé" l'action de la détente de la vapeur et
augmenté son effet utile.
Enfin la forme et la résistance données aux chaudières
ont permis de porter la tension de la vapeur à plusieurs
atmosphères.
Ces divers perfectionnements ont réduit la consomma-
lion du combustible, au point qu'un même poids de houille
produit aujourd'hui environ huit fois autant de travail que
primitivement.
La haute pression a permis de supprimer la condensa-
tion, lorsque l'on ne disposait pas d'un volume d'eau suffi-
sant, ou qu'il était nécessaire de réduire le poids de la
machine.
Il est bien remarquable que les philosophes, ou savants
de l'antiquité, qui nous ont transmis l'Éolypile, appareil mû
par ia vapeur, n'aient pas eu la pensée d'utiliser cette force
et inventé la machine à vapeur dix-huit siècles plus tôt.
Ce long retard se comprend, lorsqu'on sait que les
hommes de génie de celte époque reculée étudiaient la
( 873 )
nature à un point de vue philosophique, et n'appliquaient
pas aux phénomènes physiques le calcul mathématique,
qui seul en donne une connaissance précise et complète.
Quoi qu'il en soit, la machine à vapeur recevait de
nombreuses applications à mesure qu'elle consommait
moins de combustible, et que sa construction, mieux appro-
priée à ses diverses destinations, devenait plus parfaite.
Aujourd'hui, elle extrait la houille à nue profondeur
qu'elle seule peut atteindre, forge les plus grosses pièces
de fer qui entrent dans la composition de ces puissantes
machines, dont la force égale et parfois dépasse celle de
1,000 chevaux. Elle lamine avec une célérité remarquable
les rails des chemins de fer et fournit la force motrice à
des myriades d'usines et d'ateliers.
installée sur les navires, elle réduit à douze jours la
traversée de l'Océan. Enfin transformée en locomotive
remorquant les waggons des chemins de fer, elle exécute
les transports avec rapidité et économie, deux conditions
inconciliables sur les autres voies de communication.
La locomotive remorque les marchandises avec une
vitesse plus grande que les anciens services de poste les
mieux organisés.
Les trains rapides parcourant- de 80 à 100 kilomètres
à l'heure, dépassent la vitesse du vent pendant la tempête,
bien supérieure à la vitesse idéale du poète latin, Ocior
Euro.
L'économie est le résultat de la puissance de la locomo-
tive qui entraîne une longue file de voitures, les mar-
chandises transportées avec célérité arrivent au moment
opportun.
La locomotive et le bateau à vapeur peuvent faire affluer
en temps utile, dans un pays dont la récolte a manqué,
( 876 )
des denrées alimentaires amenées de contrées lointaines,
en quantités assez considérables pour préserver la popula •
lion des calamités d'une famine.
Les nombreux avantages des chemins de fer desservis
par locomotives ont engagé toutes les nations à en con-
struire, et déjà ils relient les principales villes des conti-
nents de l'ancien et du nouveau monde.
En se développant dans toutes les directions, les chemins
de fer ont rencontré des obstacles considérés jusqu'alors
comme insurmontables, de larges fleuves, des bras de mer
à traverser, de hautes montagnes à percer.
La physique a indiqué l'emploi de l'air comprimé pour
descendre à une grande profondeur sous l'eau, et fonder
sur un terrain solide les nombreuses piles de ponts d'une
longueur inusitée.
Le calcul mathématique a déterminé la forme et les
dimensions de ces poutres en fer, à la fois légères et so-
lides posées sur des piles laissant entre elles un intervalle
qui dépasse souvent ioO mètres.
La proposition de percer le Mont Cénis par un procédé
mécanique, utilisant la force des torrents qui roulent au
pied des deux versants, a été présentée en août 1845 Les
travaux ont été commencés en août 1857.
Les mineurs partis des deux extrémitées opposées, et
guidés par un tracé géométrique, se sont rencontrés le
26 décembre 1870 dans la montagne dont la cime dispa-
rait dans les nuages; et le 17 septembre 1871 la locomo-
tive traversait le tunnel de 12 kilomètres, qui ouvre un
chemin facile vers le pays du soleil et des arts.
On croirait, en voyant les nombreux et féconds résul-
( 877 )
tais obtenus par l'application des sciences mathématiques ,
physiques et naturelles, qu'ils ont été accueillis avec la-
veur, si l'on ne savait que toute idée neuve rencontre des
opinions arrêtées, et contrarie des intérêts qui suscilenl
des oppositions persistantes.
Si les mêmes épreuves ne peuvent être épargnées aux
améliorations futures, il faut du moins chercher à en
abréger la durée.
Depuis plusieurs années, on discute les moyens qui
doivent être préférés pour fournir aux centres de popu-
lation une abondante distribution d'eau, afin d'éloigner
prompteinent toute matière susceptible de corrompre l'air
que l'on respire dans les villes, et pour épurer les eaux cor-
rompuesqui ne peuvent, sans gra\e inconvénient, s'écouler
dans les rivières.
Permettez-moi d'exposer très-brièvement la manière la
plus naturelle, qui est aussi la plus simple et la plus
économique, de résoudre ces deux problèmes qui intéres-
sent la sanlé de nous tous.
L'eau est très-abondante dans la nature, elle couvre les
trois quarts de la surface du globe, elle constitue celle im-
mense plaine liquide qui s'étend d'un pôle à l'autre et dans
laquelle le continent américain forme une île.
Soumise à une température très-basse aux pôles et très-
élevée à l'équateur, l'eau éprouve des variations de densité
qui déterminent des courants, superficiels et chauds allant
de l'équateur vers les pôles, et sous-marins d'eau froide
des pôles vers l'équateur.
Ces courants tempèrent la rigueur du froid des régions
polaires, et modèrent Pévaporation sous la zone loi ride.
La vapeur, fournie par levaporation des eaux de la mer
et des terres humides chauffées par le soleil, s'élève dans
( 878 )
l'air et forme les nuages qui circulent dans l'atmosphère
au gré des vents.
Lorsqu'un nuage est refroidi par un vent du nord, ou
par le contact du sommet glacé des hautes montagnes, il se
transforme en pluie ou en neige qui tombe sur le sol.
Une partie de l'eau de la pluie et de la neige fondue coule
à la surface, et l'autre pénètre dans les terrains perméables
jusqu'à la rencontre d'une couche imperméable.
L'eau ainsi retenue remplit les pores du terrain perméa-
ble, et monte jusqu'au niveau qui lui procure une issue
dans une vallée voisine el forme une source.
Les eaux des sources, des pluies et des neiges fondues
forment les ruisseaux, les rivières el les fleuves qui ren-
dent à la mer toute l'eau que l'évaporation lui avait enlevée.
La mer peut ainsi continuer à fournir la vapeur aux
nuages qui, transformés en pluie ou en neige, alimenteront
indéfiniment les fontaines, les ruisseaux elles tleuves.
Les sources oui un débit plus régulier que les pluies
qui les alimentent, parce que l'eau qui pénètre dans le sol
ne coule pas librement, mais suinte à travers les pores du
terrain perméable, chemine lentement et n'arrive à la
source que longtemps après la chute de la pluie; l'eau ainsi
retenue dans la terre rend l'écoulement de la source d'au-
tant plus régulier qu'elle est fournie par une plus grande
étendue de terrain perméable.
On donne ordinairement le nom de nappe souterraine
au volume d'eau qui remplit les pores du sol perméable, et
constitue le réservoir des sources.
J'emploierai celte expression, mais en priant de remar-
quer qu'elle s'applique à un volume dont la surface n'est
pas horizontale, comme celle d'un étang, mais présente une
( 879 )
inclinaison d'autant plus grande, que le terrain est moins
perméable et oppose plus de difficulté à son écoulement
vers la source.
L'existence de ces nappes souterraines, dans le sol per-
méable qui constitue la très-grande partie du territoire de
la Belgique, est attestée par cette multitude de puits que
les habitants creusent près de leurs maisons, et qui leur
proeurent l'eau dont ils ont besoin.
Le niveau auquel l'eau se maintient au fond de ces puits
indique la surface de la nappe souterraine dans laquelle
ils ont pénétré.
En comparant le niveau de l'eau au fond de tous les
puits d'une région, il est facile de déterminer la surface de
la nappe souterraine qui s'étend sous le sol.
La quantité d'eau fournie par les pluies et les neiges
pendant une année est, en moyenne, d'après les indications
de l'Observatoire de Bruxelles, équivalente à 7,000 mètres
cubes par hectare.
Cette quantité se partage, comme il vient d'être dit, en
deux portions : l'une coulant à la surface, l'autre péné-
trant dans la terre.
D'après les observations faites dans plusieurs localités,
et notamment dans la province du Brabant, la quantité
d'eau qui alimente les nappes souterraines, équivaut à peu
près à 20 ou 25 % du volume total d'eau tombée, soit de
1,400 à 1,750 mètres cubes par année et par hectare, ou
de o à 5 mètres cubes, en moyenne, par jour et par hectare.
L'eau des nappes souterraines est généralement préférée
par les habitants, parce qu'elle est limpide et possède une
température constante; sa bonne qualité est attestée par
la bonne santé dont jouissent les personnes qui en font
usage.
( 880 )
Il semble donc bien naturel de puiser, dans les nappes
souterraines qui alimentent, d'une manière satisfaisante,
la plus grande partie de la population, l'eau nécessaire
aux villes.
Le moyen est simple et peu coûteux, il consiste à ou-
vrir dans le terrain aquifère, à un niveau notablement in-
férieur à la surface de la nappe souterraine, une galerie à
peu près horizontale, munie d'un revêtement en maçon-
nerie, dans lequel on a soin de ménager, au niveau du
radier, un grand nombre d'ouvertures destinées à laisser
affluer l'eau dans la galerie, dont l'orifice deviendra une
véritable source artificielle, débitant la même eau que les
sources naturelles et les puits du voisinage.
La surface de la nappe souterraine s'abaisse à mesure
que l'eau s'écoule par la galerie, et prend la forme d'une
vallée dont le fond est occupé par la galerie.
La largeur de cette vallée, ou la distance entre les som-
mets de ses deux, versants, peut être déduite de leur incli-
naison qui différera peu de l'inclinaison de la nappe vers la
source voisine.
Multipliant cette largeur par la longueur de la galerie ,
on connaîtra le nombre d'hectares de terrain perméable
qui recouvre noire vallée souterraine et, par suite, le
nombre de mètres cubes d'eau qui pénétreront dans la
galerie et s'échapperont par son orifice.
Les galeries pour alimenter les villes ont déjà été
employées avec succès :
Elles amènent à Liège l'eau qui pénètre dans les terrains
du plateau de la rive gauche de la Meuse.
Des galeries creusées sous le bois de la Cambre, et sous
une petite partie de la forêt de Soignes, fournissent par
( 881 )
jour un supplément de 8,000 mètres cubes d'eau qui per-
met, maintenant, de satisfaire aux demandes des habitants
et d'assurer les services publics de Bruxelles.
Monceau-sur-Sambre reçoit, d'une galerie, 2,500 mè-
tres cubes par jour. Charleroi fait étudier un projet de
galerie destiné à remplacer l'eau puisée aujourd'hui dans
la Sambre, par l'eau d'une nappe souterraine.
La ville d'Amsterdam est alimentée par l'eau recueillie
dans les dunes voisines de Harlem.
Les villes qui auront besoin d'eau la chercheront bientôt
dans les nappes souterraines des plateaux les plus rap-
prochés de leur territoire, et n'hésiteront pas [dus à percer
une galerie que les particuliers à creuser un puits.
L'eau distribuée aux habitants des villes sert à entraîner
toutes les substances organiques inutiles ou nuisibles, dans
la canalisation souterraine des maisons et des rues, pour
aboutir au collecteur destiné à les éloigner de la ville.
Les matières ainsi emportées forment un excellent
engrais, qui a créé et entretient la fertilité de nos provinces
voisines de la mer dont le sol, composé en grande partie
de sable, était naturellement aride.
Les engrais des villes sont transportés sur les champs
où ils sont délavés dans de l'eau, et le mélange est étendu
sur le terrain cultivé.
Ce mélange contient les mêmes substances que l'eau du
collecteur de Bruxelles, laquelle peut en conséquence fer-
tiliser les terres cultivées.
L'eau du collecteur, en contact avec les racines des
plantes et le terrain qu'elle traverse, s'épure et sort lim-
pide lorsqu'elle s'échappe du terrain irrigé, comme j'ai eu
l'occasion de le constater à Crovdon et à Gennevilliers, en
( 882 )
buvanl un verre de cette eau qui ne décelait aucune trace
de son origine.
On purifiera donc l'eau du collecteur de Bruxelles en la
répandant sur une grande étendue de terrain cultivé, au
moyen d'une galerie maçonnée qui sera munie de vannes,
destinées à distribuer l'eau qu'elle contient sur les terrains
situés à droite et à gauche de son parcours.
La ville de Bruxelles donne un commencement d'exé-
cution à ce système.
Une machine à vapeur, installée à l'extrémité du collec-
teur, élèvera l'eau sur le plateau du versant de la rive
droite de la Senne, pour servir à l'irrigation d'un sol aride
composé de sable, qui rappelle le sol primitif d'une partie
des provinces d'Anvers et des Flandres, ce terrain devien-
dra fertile, aussitôt qu'il recevra à la fois l'eau et l'engrais
qui lui ont manqué jusqu'à présent.
En distribuant l'eau du collecteur, gratuitement pendant
les premières années et en n'exigeant ensuite qu'un prix
inférieur à la valeur de l'engrais qu'elle contient, la ville de
Bruxelles fera concourir l'intérêt privé d'un grand nombre'
de cultivateurs au développement des irrigations qui tri-
pleront le produit des terres.
Il n'est pas douteux qu'en peu d'années l'irrigation
s'étendra sur des milliers d'hectares: comprenant des prai-
ries, des champs, et des jardins potagers qui, arrosés en
diverses saisons, absorberont tout le débit du collecteur.
L'eau pure des nappes souterraines et les irrigations
agricoles donnent la solution des deux problèmes: d'as-
sainir les villes et de fertiliser les campagnes.
Ces résultats obtenus par l'application de lois que les
sciences mathématiques, physiques et naturelles ont fait
( 883 )
connaître, donueronl à ces sciences de nouveaux litres
à la reconnaissance du monde civilisé.
Après l'exécution du second des C'Sardas de V. Nemelh
M. Liagre communique de la manière suivante le résul-
tat des derniers concours et des élections de la classe des
sciences.
RÉSULTATS DU CONCOURS ANNUEL POUR 1877.
Un mémoire portant pour devise : Trop souvent l'esprit
avide de généralisations, etc. (J. Decaisne), avait été envoyé
en réponse à la sixième question :
On demande l'étude du cycle d'évolution d'un groupe de
la classe des Algues.
La classe, après avoir entendu la lecture des rapports
des commissaires, a décerné à ce travail la médaille d'or
du prix de six cents francs.
L'ouverture du billet cacheté a l'ait connaître comme
auteur M. J. Rostafinski, membre correspondant de l'Aca-
démie des sciences de Cracovie, à Cracovie.
Un mémoire portant pour devise : Aliud ex alio reficit
natura, nec ullam , etc (Lucrèce), avait été envoyé en
réponse à la troisième question:
Ou demande de nouvelles recherches pour établir la com-
position et les rapports mutuels des substances album i-
noïdes.
Adoptant les conclusions de ses commissaires, la classe
( 884 )
n'a pas jugé pouvoir décerner le prix au mémoire en ques-
lion, pour les motifs suivants :
1° Les principales données du travail ont déjà été
publiées ;
2° L'auteur s'est fait connaître, bien qu'indirectement;
3° Le mémoire, quoiqu'il soit une œuvre considérable et
certainement très-remarquable, ne résout pas la question
posée par l'Académie.
RÉSULTATS DE LA SIXIÈME PÉRIODE DU CONCOURS QUINQUENNAL
DES SCIENCES NATURELLES.
Sa Majesté, sur la proposition de M. le Ministre de Pïn-
lérier, faite conformément au rapport, du jury ebargé de
juger la sixième période du concours quinquennal des
sciences naturelles, a décerné le prix de cinq mille francs
à M. Edouard Van Beneden, professeur à l'Université de
Liège.
M. le secrétaire perpétuel ajoute à celte proclamation les
paroles suivantes :
L'Académie, dont j'ai l'honneur d'être ici l'interprète,
félicite chaleureusement le jeune professeur, qu'elle est
heureuse de compter parmi ses membres. Elle est heu-
reuse également de voir le fils marcher dignement sur les
traces de son illustre père.
Ces paroles sont accueillies par des applaudissements.
ÉLECTIONS.
La classe a eu le regret de perdre, pendant le courant
de l'année, quatre de ses associés : M. Ulysse Le Verrier,
appartenant à la section des sciences mathématiques et
( 885 )
physiques, et MM. Ernesl von Baer, Auguste Bellynck
et Parlatore, de la section des sciences naturelles.
Elle a appelé, par ses suffrages, à la première place,
M. W. Weber, professeur à l'Université de Gôttingue et,
aux trois autres, MM. Daubrée, membre de l'Institut de
France, à Paris ; Albert Kolliker, professeur à l'Université
de Wùrtzbourg, et le comte G. de Saporta, correspondant
de l'institut de France, à Aix (Savoie).
M. Walthère Spring, professeur à l'Université de Liège,
a été élu correspondant de la section des sciences mathé-
matiques et physiques, et M. J. Delbœuf, professeur à la
même Université, a été élu correspondant de la section des
sciences naturelles.
M. Thiernesse a donné ensuite les résultats du dernier
concours et des élections de l'Académie royale de mé-
decine.
BANQUET D'INSTALLATION DES ACADÉMIES.
Le samedi 15 décembre a eu lieu, à 5 heures et demie,
au Grand-Hôtel, Boulevard Central, le banquet d'installa-
tion de l'Académie royale des sciences, des lettres et des
beaux-arts et de l'Académie royale de médecine de Bel-
gique.
La grande salle, brillamment décorée et éclairée, avait
été disposée de manière à comprendre, en cinq grandes
tables , les cent huit convives qui ont pris part à cette fête.
La table d'honneur, occupant le milieu, était présidée
2me SÉRIE , TOME XLIV. 60
( 886 )
par M. Ahin , président de l'Académie royale de Belgique,
qui avait à sa droite M. Delcour, Ministre de l'Intérieur,
M.Maus, directeur de la classe des sciences, et M. La vallée,
inspecteur général , chef de service des bâtiments civils de
l'État; à sa gauche, M. Bellefroid, secrétaire général du
Ministère de l'Intérieur, M. Hairion, premier vice-prési-
dent de l'Académie de médecine, M. Liagre, secrétaire
perpétuel de l'Académie de Belgique. Vis-à-vis, M. Sou-
part, président de l'Académie de médecine, avait à sa
droite M. Beernaert, Ministre des Travaux publics, et
M. Alphonse Wauters, directeur de la classe des lettres;
à sa gauche, M, Vergole, directeur général au Ministère de
l'intérieur, M. Chandelon, second vice-président de l'Aca-
démie de médecine, M. Thiernesse, secrétaire de l'Acadé-
mie de médecine, et M. Lequime, commissaire du banquet
pour ce même corps savant. M. Edmond Marchai, secré-
taire adjoint de l'Académie de Belgique, avait été placé à
la même table, en sa qualité de secrétaire de la Commis-
sion mixte d'installation.
D'après les dispositions prises par la dite Commission,
la table d'honneur avait été arrangée de manière à y mettre
les invités ainsi que les membres des bureaux des deux
Académies. Les autres membres des deux corps savants
avaient été libres de se placer selon leur spréférences.
Au dessert, M. Alvin a prononcé en ces termes le toast
au Roi :
« Chers confrères,
» Je vous propose la santé du Roi, notre Auguste Pro-
tecteur.
» Et je comprends dans ce toast toute la Famille royale.
( 887 )
t> C'esl boire, on même lemps, au bonheur el à la pros-
périté de la Belgique.
» Depuis un demi-siècle bientôt, ne nous sommes-nous
pas accoutumés à confondre dans un même amour la Pairie
et la Dynastie.
d Je n'ai pas dessein de vous l'aire un long discours; il
faudrait, en effet, trop de paroles si je voulais énumérer
tous les titres du Roi à notre reconnaissance..
» Mais, pour exprimer nos sentiments, il suffit de trois
mots : vous les répéterez avec moi : Vive le Roi. »
Une triple salve d'applaudissements a accueilli ce toast
qui a été transmis à l'instant même à Sa Majesté.
Le Roi a fait écrire du palais de Bruxelles le 17, par son
secrétaire, M. Jules Devaux, la réponse suivante :
« Monsieur le président,
» Le Roi a eu connaissance du toast que vous lui avez
porté le 15 de ce mois au banquet d'installation des Aca-
démies.
» Sa Majesté me charge de vous dire combien Elle a été
sensible aux sentiments que vous avez exprimés. Ce n'est
pas d'hier qu'Elle les connaît et Elle vous en remercie
sincèrement. Sa Majesté serait heureuse de remercier par
votre organe tous ceux qui, dans la fête du 15, ont acclamé
son nom. »
M. le Ministre de l'Intérieur s'est levé ensuite pour
boire à la santé des Académies.
Voici comment il s'est exprimé :
( 888 )
Messieurs
» A ce banquet, où se trouvent associées pour la pre-
mière fois nos deux grandes compagnies savantes, je suis
heureux de porter un toast qui, en rappelant leur passé,
fécond en travaux utiles, présage un avenir plein de pro-
messes.
» L'importance d'un pays ne se manifeste passeulement
par le progrès de l'industrie et du commerce, elle s'affirme
surtout par le développement scientifique, littéraire et
artistique résultant de l'intelligente activité de la nation.
» La Belgique, depuis 1850 surtout, n'a cessé de mar-
cher avec succès dans une voie féconde et l'impulsion de
ses Académies n'a pas peu contribué à lui assigner le rang
distingué qu'elle occupe en Europe.
» L'Académie royale des sciences, des lettres et des
arts qui à son origine n'était qu'une société littéraire bien
modeste, a grandi successivement, avec le concours sym-
pathique des pouvoirs publics. Fondée par Marie-Thérèse,
comme Académie royale et impériale, elle fut réorganisée
en 1816, sous le titre d'Académie royale des sciences et
des lettres et complétée en 1845, par l'adjonction de la
classe des beaux-arts; dans ses travaux elle embrasse donc
aujourd'hui le champ tout entier de la science, de la litté-
rature et de l'art.
» Lorsque nous avons célébré en 1872 le centième
anniversaire de sa fondation, les voix les plus autorisées
ont rappelé dans un magnifique langage les services nom-
breux rendus par l'Académie de Belgique. Je ne pourrais
rien ajouter à ces témoignages élogieux , si ce n'est que
( 889 )
l'Académie continue à remplir consciencieusement sa
noble mission. Oui! elle est digne du haut rang qu'elle
occupe parmi les sociétés savantes de l'Europe.
» L'Académie royale de médecine, née plus récemment,
n'a pas eu à subir les vicissitudes qui ont marqué la car-
rière de l'Académie de Belgique. Sa mission n'esl pas
seulement scientifique, comme le disait le Ministre émi-
nent (1) qui a présidé à son installation ; l'Académie royale
de médecine est appelée à éclairer le Gouvernement sur
les nombreuses question que soulève l'hygiène publique;
elle fait, en quelque sorle, partie de l'administra lion du
pays.
» Si je parcours les publications de ses membres, celles
que par ses concours elle a suscitées dans le corps mé-
dical, je constate, avec une vive satisfaction , qu'elle peut
se placer avec honneur à côté de sa sœur aînée.
» Dans l'ordre administratif, elle n'a pas été moins dé-
vouée à l'accomplissement de sa mission. Bien des ques-
tions touchant à l'organisation de l'enseignement médical
et aux intérêts de l'hygiène publique ont l'ait l'objet de
ses délibérations. L'Académie a été ainsi pour l'adminis-
tration un auxiliaire éminemment utile et jamais le Gou-
vernement n'a fait en vain appel à ses lumières.
» En buvant à l'avenir et à la prospérité de nos Acadé-
mies, nous buvons aussi, Messieurs, au développement et
au progrès des lettres, des sciences et des arts dans notre
chère patrie. »
Les applaudissements les plus chaleureux ont accueilli
(1) M. Nolhoml»
( 890 )
ces paroles, auxquelles JYI. Soupart s'est empressé de
répondre de la manière suivante :
« Messieurs,
» J'ai l'honneur de porter un toast à MM. les Ministres
de l'Intérieur et des Travaux publics.
» Leur présence ici , l'empressement courtois qu'ils ont
mis à répondre à notre invitation et à venir s'asseoir au
milieu de nous témoignent assez de leur sympathie et de
leur sollicitude pour les deux corps savants qui représen-
tent les sciences, les lettres et les beaux-arts dans notre
pays.
» A eux l'honneur d'avoir, sous les auspices de notre
bien-aimé Roi, assigné comme temple de la science, le
palais dont nous félons aujourd'hui l'inauguration.
» A eux aussi l'honneur de stimuler parmi nous le zèle
scientifique, comme vient de le faire M. le Ministre de l'In-
térieur par des paroles si élogieuses à notre adresse.
» Au nom des deux Académies ici réunies et se don-
nant fraternellement la main , je remercie MM. les Minis-
tres Delcour et Beernaert de leur bienveillance et de leur
sollicitude envers elles.
» En leur adressant ce toast de félicitations et de re-
connaissance, qu'il me soit permis d'associer à leurs noms
celui du Ministre M. J.-B. Nothomb qui , comme j'ai eu
l'honneur de le rappeler tantôt, a proposé au Roi Léo-
pold Ier l'arrêté de fondation de l'Académie royale de
médecine et dont le souvenir nous est cher.
» Veuillez donc, Messieurs, vous unir à moi en buvant
à nos protecteurs MM. les Ministres Delcour, Beernaert et
Nolhomb. »
( 891 )
M. Beemaert, Ministre des Travaux publics, a remercié
les Académies, tant au nom de son collègue qu'au sien,
en s'ex primant à peu près en ces termes :
« Il y a quelques heures (1) mon honorable collègue,
M. le Ministre de l'Intérieur, vous disait avec raison qu'à
aucune époque, en Belgique, le Gouvernement n'a négligé
ses devoirs envers les sciences, les lettres et les arts.
» \ous n'avons donc droit à aucun remercîmenl. spé-
cial pour ce que nous avons pu faire de bon et d'utile
dans le cours de ces dernières années; nous n'avons fait
que remplir notre devoir et permettez-moi d'ajouter que
quand nous nous sommes occupés des Académies, c'était
le plus agréable et le plus cher de nos devoirs.
» C'est nous, Messieurs, qui sommes et qui devons vous
être profondément reconnaissants et pour votre accueil si
cordial et pour les choses aimables que M. Soupart a bien
voulu nous dire en votre nom et pour l'honneur que nous
font les Académies, en nous admettant aujourd'hui dans
leur sein, dans une occasion où nous pouvons — pour une
fois au moins — sans infériorité, participer à leurs tra-
vaux. Merci donc, Messieurs, et merci de grand cœur.
» Et maintenant, permettez-moi de proposer un toast
à mon tour, en reprenant celui que portait tout à l'heure
mon collègue.
» Il a dit ce qu'a été et ce qu'est l'Académie; c'est
presque l'histoire du pays.
» Quand on se reporte aux temps qui ont précédé la
date bénie à laquelle remonte notre existence nationale,
(lï Pendant la séance solennelle d'installation.
( 892 )
on peut dire que tout ou presque tout était à faire ou à
refaire.
» Nos anciens monuments, témoins des grands jours
d'autrefois, étaient délabrés ou en ruine et les derniers
siècles n'en avaient point construit; les collections succes-
sivement formées en Belgique avaient pris le chemin de
l'étranger, de Madrid, de Vienne, de Dusseldorf et les
rapines de la dernière invasion n'avaient été qu'imparfai-
tement réparées; en fait d'artistes on en était réduit à
admirer Lens et Paelinck; l'état des lettres et des sciences
n'était guère plus brillant et l'Académie — unique alors
— faisait peu parler d'elle.
» Dès aujourd'hui, Messieurs, la Belgique peut se faire
honneur des progrès accomplis. Disons-le sans flatterie,
depuis notre régénération politique, nous avons fait un
bond prodigieux.
» Par l'importance de ses affaires, la Belgique dépasse
de grands pays, l'Italie, l'Autriche, la Russie; dans l'ordre
des choses intellectuelles, quel est le pays — parmi les
plus grands aussi — qui ne serait pas fier de la couronne
d'illustrations de tout genre que cette table réunit? Quel
est le savant étranger qui n'aspire à l'honneur d'être affilié
à vos compagnies?
» Eh bien, Messieurs, cette situation brillante, presque
privilégiée, ne doit être pour tous qu'une excitation à faire
plus et mieux, de manière à augmenter encore le renom et
la splendeur de notre chère patrie.
» Beaucoup de choses ont été faites, mais il en reste
beaucoup à faire. Il faut les faire! Plus heureux que d'au-
tres, nous pouvons y consacrer les ressources d'une paix-
féconde. La Belgique doit grandir encore.
» Le Gouvernement le comprend, Messieurs, et vous
( 895 )
pouvez compter sur son concours comme il compte sur le
vôtre.
» Buvons, Messieurs, buvons ensemble à l'avenir du
pays, à son développement, à ses progrès. »
La fête était terminée à dix heures.
OUVRAGES PRÉSENTÉS.
Bemmel (Eug. Van). — De la langue et de la poésie pro-
vençales. Bruxelles, 1840; pet. in-8°.
Bemmel {Eug. Van) et Gravrand {F.). — Voyagea travers
champs. Bruxelles, 1849; in- 12.
Thyes (Félix) et Bemmel [Eug. Van). — Marc Bruno, prolil
d'artiste. Bruxelles, 1855; vol. in- 12.
Bemmel [Eug. Van). — Notice sur « l'harmonie des pas-
sions humaines » fronton du grand Théâtre à Bruxelles, par
M. Eug. Simonis. Bruxelles, 1854; hr. in- 12 oblong.
Bemmel (E. Van). — Notice sur le baron de Stassart.
Bruxelles, 1856; extr. in-4°.
— Introduction à l'histoire de la littérature française.
Bruxelles, 18GG; extrait pet. in-8°.
— Histoire de Saint-Josse-ten-Noode et de Schaerbeek.
Saint-Josse-ten-Noode, 18G9; vol. pet. in-8n.
Boileau. — OEuvres poétiques, édition classique colla-
tionnée sur les meilleures textes avec des notes, par Van
Bemmel et Gravrand. Mons, 18G9; vol. in-8°.
Bemmel (E. Van). — Discours d'ouverture prononcé en
séance publique de l'Université libre de Bruxelles, le 9 octobre
1871. Bruxelles, 1871 ; br. in-8°.
— Discours d'ouverture prononcé en séance publique de
( 894 )
l'Université de Bruxelles, le 14 octobre 1872. Bruxelles, 1872;
br. in-8°.
— Dom Placide. Mémoires du dernier moine de l'abbaye de
Villers. Bruxelles, 1875; vol. pet. in-8°.
— Rapport du jury ebargé de décerner le prix décennal de
littérature française pour la période de 1855-1862. Bruxelles,
1863; extr. in-8°.
— Rapport du jury chargé de décerner le prix quinquennal
de littérature française pour la période de 1868-1872. Bruxel-
les, 1875; extrait in-8°.
— Guide de l'excursionniste, 6e édition. Bruxelles, 1876;
vol. in-18.
— Patria Belgica, encyclopédie nationale ou exposé métho-
dique de. toutes les connaissances relatives à la Belgique,
■Ire partie : Belgique physique; 2mc partie : Belgique politique
et sociale; 3me partie : Belgique morale et intellectuelle. Bruxel-
les, 1875-75; 3 vol. in-8°.
Cornet. — Notice sur le bassin houillcr limbourgeois. Liège,
1877; br. in-8".
Cornet et Briart. — Sur le relief du sol en Belgique après
les temps paléozoïques. Liège, 1877; in-8°.
Kervyn de Lettenhove (le baron). — OEuvres de Froissart,
chroniques, tome XXIII, 2de partie. Bruxelles, 1877; in-8".
Melsens. — Des paratonnerres à pointes, à conducteurs et
à raccordements terrestres multiples. Description détaillée des
paratonnerres établis sur l'hôtel de ville de Bruxelles en 1865.
Bruxelles. 1877; gr. in-8°.
Juste (Th ). — Les progrès de la puissance russe. Pierre le
Grand, son règne et son testament. Bruxelles, 1877; in-8".
Rivief (Alphonse). — Les successions à cause de mort en
Suisse. Gand, 1877; extrait in-8°.
Massart-Janssens (A.). — Hygiène et sauvetage pour la
femme, pour la famille et pour la société, lre et 2de parties.
Bruxelles, 1877; 2 br. in-8°.
( 895 )
Dessel {Camille Van). — Topographie des voies romaines
de la Belgique. Bruxelles, 1877; vol. in-8°.
Gregoir {Ed.). — Panthéon musical populaire, ouvrage en
six volumes, sixième volume. Bruxelles, etc., 1877; in-8°.
Wilte (le baron J. de). — Discours prononcé à l'Académie
d'archéologie de Belgique dans la séance du 27 mai 1877. An-
vers, 1877; hr. in-8°.
Rapport triennal sur la situation de l'instruction primaire
en Belgique, présenté aux Chambres législatives parle Ministre
de l'Intérieur. Bruxelles, 1877; vol. in-4°.
Société chorale et littéraire des Mèlophiles de Hasselt. —
Bulletin de la section littéraire, 15rae volume. Hasselt, 1 8 7 G ;
hr. in-8°.
Willemsfonds. — Jaarhoek voor 1878. Gand, 1877; vol.
in-18.
Observatoire royal de Bruxelles. — Annuaire pour 1878.
Bruxelles, 1877; vol. in-10.
Académie royale de médecine de Belgique. — Bulletin,
1877, nOÏG-I0. Bruxelles; in-8°.
Revue de l'instruction "publique, t. XX, Iivr. 5-6. Gand; in-8°.
Annales d'oculistique , t. LXXV1I et LXXVIII. Bruxelles,
l877;in-8°.
Illustration horticole, t. XXIV. Gand, 1877; in-8°.
Société belge de géographie. — Bulletin, lre année, 1877.
Bruxelles, in-8°.
Société royale de botanique de Belgique. — Bulletin,
tome XVI, n° 1. Bruxelles, 1877; in-8".
Société entomologique de Belgique. — Annales, tome XX,
2d fasc. Bruxelles; in-8°.
Annales des travaux publics de Belgique, tome XXXV,
2",e cahier. Bruxelles; in-8°.
( 896 )
Allemagne, Autriche-Hongrie.
Barrande {Joachim). — Céphalopodes. Etudes générales.
Extraits du système silurien du centre de la Bohême, vol. II,
texte S. Prague, Paris, J 877; vol. in-8°.
Kundrat (Hans). — Die Selbstverdauungs-Processe der
Magenschleimhaut. Gratz, 1877; br. in-8°.
Rostafinski (J.) und Woronin (M.). — Ùber Botrydium
granulatum. Leipzig, 1877;in-4°.
Handelsstalistisches Bureau. — Tabellarische Uebersichten
des hamburgischen Handels im Jahre 1876. Hambourg, 1877;
in-4°.
Statisiisches Bureau in Budapest. — XIII. Publication :
Untersuchungen iiber die Einkommen-und Hauszinssteuer
fur Budapest. — XIV. Publication : Die Sterblichkeit der
Stadt Budapest in den Jahren 1874 und 1875, und deren
Ursacben. Berlin, 1877; 2 br. in-8°.
Archeulogische Gesellschaft zu Berlin. — 75. Programm
zum Winckelmannsfeste. Berlin, 1877; in-4°.
Beiblàller zu den Annalen der Physik und Chemie, t. I,
nos 7-12. Berlin, 1877; in-8°.
Akademie der Wissenschaften zu Berlin. — Monatsbericht,
mai-aoùt. Berlin ; in-8°.
Chcinisrhe Gesellschaft zu Berlin. — Bericht, 1877, nos 12-
18. Berlin; in-8".
Archiv fur Malhematik und Physik, 61. Teil, nos 1-5.
Greifswald; in-8°.
Geographische Anstalt zu Gotha. — Mittheilungen, 25. Bd.
VIII-XII. Erganz. n" 52. Gotha; in-4°.
Akademie der Wissenschaften zu Munich. — Sitzungs-
berichte, mathem.-phys. Classe, 1877, I, II. Munich; in-8°.
Medic.-naturw. Gesellschaft zu Jena. — Zeitschrift fur
Xaturwisscnscbaften, XI. Bd., nos 5 und 4. léna; in-8°.
( 807 )
Amérique.
U. S. Coast Survey. — Meteorological researches for the
use of the Coast pilot, part I. Washington, 1877; hr. in-4°.
Museu nacional do Rio de Janeiro. — Archivos, vol. I,
4me trimestre de 1876. Rio de Janeiro, 1877; in-4°.
Boston Society of natural history. — Procecdings, vol.
XVIII, 5me et 4me parties. — Memoirs, vol. Il, 4me partie,
n" 5. Boston, 1877 ; 2 hr. in-8° et 1 hr. in-4°.
U. S. navy départaient. — Scientific results of the United
States arclic expédition , vol. I, physical observations by Emil
Bessels. Washington, 1876 ; vol. in-4°.
American philosophical Society . — Proceedings, tomes XV
et XVI, nos 98 et 99. Philadelphie, 1876; in-8°.
Davenporl Academy of natural sciences. — Proceedings,
tome I, 1867-1876. Davenport, 1876 ; in-8°.
U. S. geological and geographical Survey of the territories.
— Supplément to the fifth annual report. — Preliminary re-
port of the U. S. geological Survey of Montana. — Annual
report, 1875, embracing Colorado. — Miscellaneous publica-
tions : n° 1 lists of élévations principally in that portion of the
U. S. west of the Mississipi river, fourth édition; n° 7 ethno-
graphy and philology of the Hidatsa Indians by Washington
Matthews. — Bulletin, n°2; vol. III, nos 1-5. — Catalogue of
the publications of the Survey, 2'1 édition. — Bulletin of the
U. S. entomological commission, nos 1 et 2. Washington, 1872-
1877; in-8°.
Journal of sciences and arts, tome XIV. New-IIaven, 1877;
in-8°.
The Penn monthly, juillet-décembre de 1877. Philadelphie;
in-8°.
( 898 )
Espagne.
Real Academia de la historia. — Boletin, tome I, cuaderno 1 .
Madrid, 1877; in-8°.
Société de géographie de Madrid. — Bulletin, t. II, nos 2
et 3; t. III, nos 1-4. Madrid; in-8°.
France.
Mannheim (A.). — Nouveau mode de représentation plane
déclasses de surfaces réglées. Paris, 1877; extrait in-4°.
Mannheim (A.). — Sur le déplacement infiniment petit d'un
dièdre de grandeur invariable. Paris, 1877; extraitin-4°.
Baillij [Jules). — De Bruxelles à Tervueren, poëme nou-
veau. Paris, 1878; br. in-8°.
Bernier (Théodore). — Le Besogné de Mont-Bliart, en 1 G08,
précédé d'une notice sur ce village. Angre, Mons , 1877; br.
in-8°.
Collin de Plancy [V.). — Note sur les insectes diptères
parasites des Batraciens. Paris, 1877; extrait in-8°.
Talon (Ed.). — Sur les diptères parasites de la Rana escu-
lenta. Paris, 1877 ; extr. in-8°.
Garcin de Tasstj. — La langue et la littérature hindousta-
nies en 1877, revue annuelle. Paris, 1878; br. in-8°.
Deydier. — La locomotion aérienne. Oran , 1877; br.
in -8°.
Société zoologique de France. — Bulletin, 1877, 5m£ et
4me parties. Paris; in-8°.
Les Mondes, revue des sciences , t. XLIV, octobre-décembre
de 1877. Paris; in-8°.
Ecole normale supérieure. — Annales, 1877. Paris; in-4".
Revue britannique, juillet-décembre 1877. Paris; in-8°.
Société des études historiques. — L'Investigateur, mai-juin
de 1877. Paris ; in-8°.
( 899 )
Société de géographie de Paris. — Bulletin, mai-août. Paris,
1877; in-8».
Société d'anthropologie. — Bulletin, t. XII, février-juin 1877.
Paris ; in-8".
Société linnéenne de Bordeaux. — Actes, tome XXXI.
jjrae livraison avec atlas. Bordeaux, 1877; in-8n.
Caffiaux (H.). — Mémoire sur la charte de la Frairie de la
Halle Basse de Valenciennes (XIe et XIIe siècles). Paris, 1877;
exlr. in-8°
Société des sciences, de V agriculture et des arts de Lille. —
Mémoires, 4e série, tome III. Paris. Lille, 1877; vol. in-8°.
Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon. —
Mémoires : classe des lettres, t. XVII; classe des sciences,
tomes XXI et XXII. Lyon, 1876-77; 3 vol. gr. in-8°.
Société d'agriculture de Lyon. — Annales, 4me série, tome
VIII, 1875. Lyon, 187G; vol. gr. in-8°.
Société des sciences de Nancy. — Bulletin, tome III, 1877,
fasc. 6. Paris, 1877; in-8°.
Grande-Bretagne.
Observatoire de Greenwich. — Beport. of the tclescojiic
observations of the transit of Venus, 1874. Londres, 1877;
in-4°.
Mathematical Society, n03 112-121. Londres; in-8°.
Astronomical Society. — Monthly notices, t. XXXVII,
nos 8 et 9; t. XXXVIII, n° I. Londres; in-8°.
Geographical Society. — Procccdings, tome XXI, n° 6. Lon-
dres; in-8°.
Anthropological Institute of Greal-Britain and Ireland —
Journal, vol. VII, n° 1. Londres; in-8°.
Numismatic Society. — The numismatic chronicle, 5°" par-
lie de 1877. Londres; in-8°.
( 900 )
Hollande - Luxembourg.
Institut R. grand-ducal. — Section des sciences naturelles :
Carte géologique du grand-duché de Luxembourg, par MM.
Wies etSicgen, avec guide par M. Wies. Luxembourg, 1877;
8 feuilles in-plano et br. in-8°.
Donders (F.-C). — 18,,e verslag betrekkelijk de verpleging
en het onderwijs voor ooglijders. Utrecht, 1877; in-8°.
Italie.
Ardissone (Fr.). — Le Floridee italiche descrilte ed illus-
tiale, fasc. 1. Milan, 1874;in-8°.
Boldù [Roberto). — Délia liberté ed eguaglianza dei culti.
Florence, 1877; vol. pet. in-8°.
Lemaire (Enrico). — Problema délia trisezione geometrica
di un angolo o di un arco dato risoluto dall' ingegniere. Naples,
1877; br. in-8°.
Vulcanismo italiano, anno IV, 1877. Rome; in-8°.
R. htituto veneto di scienze, lettere ed arti. — Àtti,
5me série, tome III, nos 4-7. — Memorie, tome XX. Venise,
1876-77; 4 br. in-8° et 1 vol. in-4°.
Accademia délie scienze dell' Istituto di Bologna. — Me-
morie, tome VII, fasc. 1-4. — Rendiconto, 1876-77. Bologne,
1877; 4 br. in-4° et 1 vol. in-8°.
Société Toscana di scienze naturali in Pisa. — Atti, vol.
III, 1er fasc. Pise, 1877 ; gr. in-8°.
Acudemia olimpica di Vicenza. — Atti, 1876 et 1er semestre
de 1877. Vicence; 2 br. in-8°.
Fin nu Tome XLIV de la 2rae série.
BULLETINS DE E ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE.
TABLES ALPHABÉTIQUES
DU TOME QUARANTE-QUATRIÈME DE LA DEUXIÈME SÉRIE.
1877.
TABLE DES AUTEURS.
Académie d'archéologie de Belgique. — Adresse son programme de con-
cours pour 1878, 240.
Académie des lettres, sciences, arts et, agriculture de Melz. — Adresse
le programme de ses concours pour 1877-1878, 103.
Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon. — Adresse son
programme de concours pour 1878,401.
Académie R. des beaux-arts d'Anvers. — Demande relative à une loi
protectrice des œuvres de l'intelligence, 258.
Adan (£.). — Hommage d'ouvrage, 51 4.
Alvin (L.). — Délégué au congrès artistique d'Anvers, 110, 249; donne des
explications relatives à un tableau de Rubenset aux gravures que l'on
se propose d'exposer à Anvers, 111 ; rapport sur le mémoire de con-
cours concernant les influences subies par P. -P. Rubens et A. Van
Dyck pendant leur séjour en Italie, 265; discours prononcé à la séance
publique de la classe des Beaux-Arts, 281, 285; discours prononcés au
nom de l'Académie : 1° à l'inauguration du buste de Rubens, à Anvers,
259; 2° à la séance d'installation des Académies, 862; toast au Roi lors
du banquet d'installation, 886.
Antoine (Ch.). — Hommage d'ouvrage, 516.
2me SÉRIE, TOME XLIV. 61
()0-2 TA18LE DES AUTEURS.
Association britannique pour l'avancement des sciences. — Annonce
l'ouverture de sa 48e session. 654.
Association internationale africaine. — M. le baron Greindl remercie
pour la souscription de l'Académie, 2; communication relative à la
1"' expédition pour l'Afrique centrale, 237.
B.
Baes Edgar). — Rapports de MM. Alvin, Siret, Slingeneyer sur son mé-
moire de concours concernant les influences subies par P.-P. Rubens et
Ant. Van Dyck pendant leur séjour en Italie, 263, 270, 271 ; proclamé
lauréat, 297.
Balat (Alphonse). — Commissaire pour l'examen du 14e rapport semes-
triel du lauréat Dielliens, 845.
Bambeke (Ch. Fan). — Commissaire pour les travaux suivants: 1° de
M. Fraiponl sur les Acinéliniens de la côle d'Oslende, 455, 850; rap-
port, 694; 2° de M. Masquelin concernant le développement du maxil-
laire inférieur de l'homme, 456; rapport, 459.
Bancroft [George). - Remercie pour son élection d'associé, 240.
Baraquin (E.). — Présente un travail intitulé: Innovations industrielles.
517.
Bastelaer (Fan). — Rapports de MM. le baron deWitle et Roulez sur sou
mémoire concernant les enduits, engobes, etc., des poteries romaines ,
241, 244.
Bastin(J.). — Hommage d'ouvrages, 817.
Bemmel{Eug. Fan). — Hommage d'ouvrages, 816.
Beneden {Ed. Fan). — Lauréat du concours quinquennal des sciences
naturelles, 515, 1 18, 884; commissaire pour l'examen des travaux sui-
vants : 5° de M.Lambert, intitulé : Morphologie du système dentaire des
singes, 517; lecture de son rapport, 456; -2» de M. Leboucq, concernant
le cartilage embryonnaire chez les mammifères, 518; rapport, 457;
5" de MM. Putzeys et Romiée, concernant l'action physiologique de la
gelsémine, 455; 4° de M. Masquelin, concernant le maxillaire inférieur
de l'homme, 456; rapport, 459; contribution à l'histoire du développe-
ment embryonnaire des Téléostéens, 462, 742.
Beneden (P.-J. Van). — Hommage d'ouvrage, 5 '.renseigne ses confrères sur
le départ de la lrc expédition pour l'Afrique centrale, 237; commissaire
pour les travaux suivants : lu de M. Lambert, intitulé : Morphologie du
système dentaire des singes, 517; leciure de son rapport, 456; 2° de
TAlîl.E DES AUTEURS. 903
M. Fraipont sur les Acinétiniens de la côte d'Osteude, 453, 8o0;rap-
port, 692; rend compte de la célébration du W0C anniversaire de l'uni-
versité d'Lpsal, 399; réélu membre de la Commission spéciale des
finances, 6G6; cachalot nain du crag d'Anvers, 851.
Berliner (/.). — Hommage d'ouvrage, 515.
Bessels {Emile). — Hommage d'ouvrage, 515.
Bormans (Stanislas). — Hommage d'ouvrages, 401,611.
Boset (/.). — Présente un travail concernant les courbes et surfaces
locales, 456.
Bourotle (Aug.). — Lauréat du concours d'art appliqué de la classe des
beaux-arts (peinture), 298.
Uouvcl (A.). — Hommage d'ouvrage, 453.
Bonj (J.-F.-A.). — Annonce de sa mort, 445.
Brochet (Achille). — Présente les travaux suivants concernant : 1" un
compteur électrique, 4: lecture du rapport de MM. Montigny et Duprez,
518; 2° un vernis fluorescent applicable sur verre, 517; lecture des
rapports de MM. Melsens et Montigny, 456; 3° le pouvoir pénétrant des
objectifs à immersion, 655.
Brassart (Félix). — Hommage d'ouvrages, 402; note bibliographique sur
ces volumes, par M. Polvin, 405.
Briart (Alph.). — Hommage d'ouvrage, 655.
Burbure (Le chev. L. de). — Rapport sur le mémoire de concours concer-
nant l'histoire de la typographie musicale dans les Pays-Bas, 272.
Caffiaux. — Hommage d'ouvrage, 816; note bibliographique sur celle
brochure par M. le baron Kervyn de Leltenhove, 827.
Capellini(G:). — Hommage d'ouvrages, 5, 516.
Carrara (F.). — Hommage d'ouvrages, 61 1 ; note bibliographique sur ces
volumes, par M. Thonissen, ibid.
Catalan (Eug.). — Rapports sur les travaux suivants : 1° de M. Lagrange,
intitulé : De l'influence de la forme des corps sur l'attraction qu'ils
exercent, 10; 2° de M. Mansion, concernant une équation de Jacobi,
120; 5° de M. Le Paige, concernant l'extension des théories de Pinvo-
lulion et de l'homographie, 462; lecture de son rapport sur la note de
M. Escary concernant la fonction P <—> de Lamé, 127; commissaire
pour l'examen des travaux suivants : 1° de M. Ghysens concernant : a,
les sous-normales polaires, etc., 4; lecture de son rapport, 127; b, la