^^ 'rïf.* m^M.1" ^êêi^ * ■% «V ^\ '4^- \4 mm X'''r '«« r^^ :m '^ ^^i 3-^ rf#% , rvC« 0.cfS2. SOCIÉTÉ AliKICOLË, SCimiriQUE ET LITTÉBAIBE DES Seplit'me Volume. PERPIGNAN. IMPRIMERIE DE J.-B. ALZINE , Rue des Trois-Journées, ^ . 1848. SOCIETE m mimmmmui ^ii La Société n'entciul approuver ni impronver les opinions émises dans les travaux qu'elle publie; elles appartiennent à leurs ailleurs, qui en sont seuls garants. Les lettres, mémoires, etc., doivent être adressés (^ranc rfc ;)Oj-/j à M. JraD Carcassonne-Frigola , secrétaire de la Société, et les objets d'histoire naiii- relle à M. Companïo, conservateur du cabinet, à Perpignan. AGRICOLE, SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIRE DES PUÉSÉES-ORIEMALES. Sc|)tiènic Volume. « Faisons tous nos effox-ts pour qu'on puissr dire un Il jour: il y eut à Prrpign.n une société' iTliommis a «intentions gcnëieuses, .lont les travaut furent utile? K ù leur pays. » PERPIGNAÎV. nTPRÎMERTE DE J.-B. AL7I\E, Rue (les Trois-Journécs , ) . 1848. '-^ ■-ç»^ * m LA SOCIÉTÉ AGRICOLE, SGIENTIFIQIE ET LITTÉRAIRE DES PYRÉNÉES-ORIENTALES, \UHimui. La dernière publication de la Société des Pyrénées- Orientales remonte aux premiers jours de l'année 1845. Diverses causes, sur lesquelles il est inutile de s'appesantir', nous ont empéciiés jusqu'en 18'i8 de rompre un silence, qui a pu paraître inexplicable a nos correspondants, particulièrement à ces comices agricoles, dont les remarquables travaux nous par- viennent avec tant de régularité. Nous avons à cœur aujourd'hui de dire bien haut que cette lacune, in- dépendante de notre volonté, n'est due ni à notre indifférence, ni à notre incurie. Si notre zèle avait eu besoin d'excitation, (picl aliment n'eût-il pas trouvé dans ce concours d'hommes distingués qui, sur tous les points de la France, associent lenr expérience et leurs lumières, et, appelant à leur secours l'indus- trie et la science unies, tendent à augmenter la masse des produits alimentaires, proI)lème dont la solution intéresse notre époque à un si haut degré !... Nos ef- forts vers le même but, pour n^avoir pas eu de reten- tissement , n'en ont pas moins été coilstans et dévoués. Les rapports de nos commissions, qui visitent chaque année divers points i\n département, nous ' Voir ic discours Je .M. Giiiraud-dc-Sl-Marsu!, prcsiilerit, page \'~. Diil fait lie plus en plus apprécier tout ce qu'il y a tle ressources clans les insiincis intelligenis ei clans Tac- tiviié Lien dirigée des habitants de notre sol. Nous avons encouragé leurs tentatives, en les entretenant des essais multipliés que le génie industriel et agri- cole ne cesse de proposer, ou d'accomplir. L'hiver désastreux de 1847 a été particulièrement l'occasion d'une multitude de projets , dont nous avons cherche le côté praticable. Le Président actuel donnant, dans chacjue séance, un résumé des ouvrages adressés à la Société, cette étude nous était rendue facile, et nous a mis en étal de développer parmi nous l'esprit nova- leur, qui, tôt ou tard, conduit au succès. De la graine de pommes de terre, envoyée par M. le Ministre de l'aericulture, a été distribuée et semée en sillons, a la volée et sur couches. Plusieurs agricuheurs, ap- partenant à notre association , auraient obtenu d'ex- cellents résultats, sans le double fléau de la taupe- grillon et des inondations. Toutefois M. Guiraud-de St-Marsal a pu exposer, en 1847, des tubercules par- faitement sains, pesant de cent à cent cinquante gram- mes, et a distingué quatre variétés bien prononcées : blanche, rouge, rose et violette. M. Fraisse aîné n'a pas été moins heureux dans ses semis. La maladie de la pomme de terre, quoique n'ayant pas exercé de grands ravages dans nos champs, n'en a pasmoins été soigneusement observée, et une notice, remarquable à tous égards, a été adressée par la So- ciété à M. le Ministre de l'agriculture. L'auteur de cet écrit (v. page 225) est M. Vilaséca d'Arles, na- turaliste et agronome distingué, dont nous déplo- rons la perle récenle. Un autre de nos collègues, W. Eychenne aîné , cherchait à propager , en lu même icmp.s , la culinie de la haïaie , el le riz était essayé sur les lenains marécageux de Salses, dans un but combiné de production el d'assainisse- ment. Auteur de cette louable tentative, M. A. Lloubes a voulu prouver à la Société cpie la culture du riz n'était pas nouvelle dans le Roussillon. 11 nous a communiqué un mémoire, remontant à l'année 1743, et déposé par l'auteur, RI. Barrère, médecin à Perpignan, dans les archives de la Société des scien- ces de Montpellier. Le riz du Roussillon était d'un beau grain, et le peuple en faisait du pain, en temps de disette. Les terres appelées Solsxros étaient dessalées après cinq années de culture du riz, et le blé, y venant ensuite en abondance, éloignait toute crainte de famine. Le riz du Roussillon s'était acquis, chez les Espagnols, une réputation telle, qu'ils venaient l'acheter à Per- pignan, et donnaient en échange du sel des mines de Cardone. Il est désirable que celte culture , entreprise avec succès près de INarbonne, (à Mandirac), et dans le delta du Rhône, soit rétablie dans notre pays. M. Vimorl Maux préconisait, de son côlé, fin- troduclion sur notre sol de la plante du Sésame , dont l'huile inodore peut être substituée à l'huile d'olive dans certains emplois. Nous ne pouvons entrer dans d'autres détails sur les diverses branches de l'agriculture, dont aucune n'est négligée par la Société. Nous ajouterons seule- ment que nous avons pris part aux travaux du con- grès central d'agriculture depuis sa fondation, et que nous y avons été représentés par M. François ÂRAGO , de flnstitut , M. Antoine PAGES, maître des requc^tes au conseil d'état, IV M. CÙME lîOUFFIÂ , chef dinsliluliorij à Paris, M. THOMAS, directeur du Moniteur des Eaux et Forets. INos délégués ont posé les questions de perfeciioii- nenient ei d amélioraiion dont cette assemblée est le juge compétent, et notre iniervention n'est point passée inaperçue». Enfin des récompenses, qui sont décernées tous les ans en séance publique dans la grande salle du Musée, ont entretenu des sentiments d émulation dans un pays privilégié par la nalure, et qui ne voudia pas rester en arrière dans la marcbe progressive de la société française. Si le gouvernement et le département même ne nous ont pas soutenus par des subventions en rapport avec nos besoins , du moins les témoignages les plus flat- teurs sont venus parfois nous dédommager et honoicr notre mission. Ainsi le mémoire sur la culture du mûrier et sur 1 éducation des vers-à-soie, publié en 1843, parut d'une si liante utilité au Ministre de la guerre, qu'il en demanda plusieurs exemplaires pour les colons de l'Algérie. C'est par noire entremise r^ue sont décernées les primes, ayant pour but d'en- courager les plantations et l'élève du bétail. En 18^8, le Ministre de Tagriculture a décidé que la Société serait également chargée de distribuer les primes ac- cordées pour le concours des taureaux et des génisses, et a mis à notre disposition une somme de 4.200 fr. dont auparavant M. le Préfet était chargé de faire l'emploi. Ces deux faits suffisent pour prouver que l'impor- tance de notre association est chaque jour mieux sentie. Nous ne pouvons, en outre, nous empêcher 1 Voir les proccs-vorbaux des séances du congrès aux articles arrosages, — reboisement, — régime hypothécaire , etc., etc. de consiaier ici que la solliciiiule toute particulière de M. Victor Rendu , inspecteur-général de l'agricul- ture, garauiii à notre contrée une protection de plus en plus efficace. Frappé de la variété des productions que le dépariemcni des Pyrénées-Orientales est sus- ceptible de fournir, cet éminent agronome a pensé qu il était temps d'y créer une pépinière d'élèves, et de les initier aux idées les plus rationnelles et aux modernes innovations. La création d'une ferme-école sera un immense bienfait, dont nous sommes à la veille de jouir. INos travaux en acquerront une force toute nouvelle. Nous sortirons du vague des théories, même quand il s'agira de cultures jusqu'ici étrangères à nos habitudes, et désormais un vaste champ ouvert a nos expérimentations nous offrira des observations d'au- tant plus fructueuses, qu'elles auront toujours un fait pour point d'appui. Voilà pour l'avenir. Nos gages au passé sont ren- fermés dans ce volume, qui n'a pu donner place à toutes les observations, à toutes les œuvres dans leur intégrité. L'agriculture n'y fournil pas seule son con- tingent. De curieuses recherches d'archéologie, qui jettent un nouveau jour sur l'histoire locale et sur les éléments de prospérité de la vieille industrie roussillonnaise, des explorations et des mémoires scientifiques , des expériences et des découvertes nouvelles, des rapports sur les exploitations minières, sur des procédés de fabrication récemment importés, et sur l'emploi de la vapeur dans deux établissements industriels , s'y trouvent consignés, ou du moins indiqués de manière à n'omettre aucune idée utile, aucun fait digne d'attention. Les bornes qui nous sont prescrites nous obligent, ^"f en effet, à ne pul>liei que par exlrait ceux de nos docunienis, qui i/oni pu entrer clans ce volume, ei qui ont eu les honneurs de la séance publique. On pourra les consulter dans nos archives. Conconrs $!e 1 S4S. INDUSTRIE AGRICOLE — HORTICULTURE. M. Fraisse aine , rapporteur. — «Le fouloirégrappoir de M. Vilesèque est une machine nouvelle, qui , avec une diminution de frais, assure aux propriétaires de vignobles une ré- colte plus abondante. En égrappant avec soin la ven- dange, on pourrait, à l'exemple de nos ancêtres, ob- tenir du vin blanc avec des raisins noirs, et récolter cette excellente liqueur, connue sous le nom de vin grec. » — «M. Eychenne anié s'est livré à divers essais de culture maraîchère: c'est lui qui, dans le désir d'introduire sur notre sol des produits nouveaux, a tenté d'y naturaliser l'ananas, et qui, depuis dix ans, cultive la bataie, précieux tubercule, originaire des Antilles, et qui peut remplacer au besoin la pomme de terre. M. Eychenne a un procédé particulier pour la préparation des fruits, qu'il conserve avec toute leur saveur. » ART CÉRAMIQUE. —PUITS ARTÉSIENS. RI. Falip , rapporteur. — «Divers objets en terre cuite, tels que statues^ urnes, chapiteaux, cruches d'un genre gracieux ont été déposés au Musée par M. G. Oliva, potier à Sail- lagouse. «Ces ouvrages révèlent beaucoup de goût; ils sont ornés de différents reliefs admirablement dis- vu posés et exécuiés avec une précision daulaiit plus surpienanie, que l'ariisle ne possède aucune notion dans l'art du dessin. » — «M. Fauvelle est l'inventeur d'un système de forage, dont le premier essai a eu lieu à la place St- Doniinique. La reconnaissance des habitants de Per- pignan a nommé la source découverte par cet habile ingénieur: la Fontaine-Fauvelle. Cette source jaillit au moment où celles qui alimentaient la ville ve- naient de tarir: elle pourvut aux besoins d'une nom- breuse population. » CONCOURS LITTÉRAIRE. M. iMattes , rapporteur. — «Les (euvres déposées n'ont pu obtenir les suf- frages du jury , qui a cependant remarqué de bonnes inspirations. Rigaud et dom Brial sont bien dignes des Muses, et la sévérité de la commission est un hommage rendu à leur mémoire i. » INDUSTRIE MANUFACTURIÈRE. M. Falip , rapporteur. — ((L'inlroduclion dansnoire département du mé- tier à la Jacquart est due à M. ^ imort-JMaux, fabri- cant. On sait que le génie d'un simple ouvrier a changé la face de l'industrie lyonnaise, et lui a donné le moyeu d'étendre de plus en plusses produits dans les étoffes brochées, qu'enrichit l'arl du dessinateur- genre dans lequel la France ne craint pas de rivaux. M. Vimort- Maux a voulu faire sortir son paysdadopiion du cercle étroit dans lequel il est enfermé. Il l'a doté d'un mé- 1 D'après les recherches de M. Puigfgari dans les reijistres de l'cfjlise de la Real , le célèhre bénédictin Dom Brial est né à Perpignan , et non à Baixas, eoniine l'impriment les biograplies. vil! liera !a Ja(c|uail, à Takle duquel un ouviier seul peui exécuter les dessins les pins riches et les plus variés sur draps, couverUires, lentures d'église, etc. Si le conseil-municipal consentait à rétribuer un contre-maître capable de diriger uos jeunes ouvriers, M. Vimort-ftiaux s'empresserait de mettre à la dispo- sition delà ville ses métiers, qui peuvent devenir une source de richesses pour le pays.» Concours de 1946. ENDIGUEMEIST DES RIVIÈRES. — REBOISEMENT DES MONTAGNES. M. Soucaille , rapporteur. «La première question, pour éire bien traitée, nécessitait une étude approfondie des lieux et lob- servalion judicieuse des phénomènes, qui tendent à modifier la forme et la direction dulit de nos rivières. Les deux mémoires déposés sont incomplets à cet égard. C'est en vain que votre Commission y a cher- ché les indications essentielles qui auraient permis de proposer, pour chaque cas, les moyens les plus efficaces de régulariser le régime des eaux. La ques- tion doit donc être remise au concours. Celui des deux concurrents qui a pris pour devise : « Le temps qui donne h lout le mouvement et rëtie... » a traité avec distinction la question connexe du reboisement des terrains en pente; c'est encore lui qui a fourni les meilleurs détails sur les cours d'eau. « ÉDUCATION DU BÉTAIL. M. Auguste Lloubes, rapporteur «M. Victor Rendu, inspecteur-général de l'agri- culture, ayant obtenu de M. le ministre que le chif- fre des primes accordées au département fût accru, I\ et qu'une somme de 1000 fr. f'ùt disti-ibuée ilirecle- nient par la Soclélé , nous avons eu pour mission d'appliquer, d'après le programme, aux planlalions de mûriers et d'oliviers dans le l*^"" arrondissement, aux prairies naturelles et artificielles irriguées élevant le plus grand nombre de bestiaux bien tenus , et au perfectionnement des instruments aratoires, les nou- velles primes, qui sont dues au zèle constant et à la protection éclairée de M. l'inspccleur-général. » «Parmi les nombreux concurrents pour l'élève des bestiaux, M. Lazerme et M'"^ Duston sont ceux qui se trouvent le mieux placés dans les conditions du programme. Le premier réunit au Mas Lazcrmc, près d'EIne , dans des écuries spacieuses et bien aérées , 54 veaux de 1 à 4 ans, et de nouvelles constructions lui permettront d'en placer jusqu'à 65 devant les râ- teliers. Ces animaux séjournent, pendant les trois mois d'été, en Cerdagne; à leur retour ils sont nour- ris avec des tiges de maïs, aliment rafraîchissant. Leur nourriture d'hiver se compose principalement d'herbe de pré, de trèfle rouge et du regain des prairies. A l'âge de 4 ans, les animaux provenant de cette édu- cation sont vendus et remplacés par des bouvillons, de manière à ce que l'effectif soit toujours de 60 à 65 têtes, M. Lazerme a l'intention de choisir ses nou- veaux sujets dans la meilleure race d'Auvergne. H entretient en outre, sur son domaine, un troupeau considérable de bêtes à laine , et compte 19 h. 29 c. de prairies artificielles irriguées, 35 h. 31 c. de prai- ries naturelles, dont les "/3 sont irriguées. En tout 54 h. 60 c .) «L'exploitation deM^^iJuston au iMas Bond, près d'Âlenya, est conduite par M. Kélip. Le lieu est des plus favoraLles pour mie éducation. Isolée des lerres arables, la ferme, sur uue grande étendue de terrain, jouit de l'avantage inappréciable du parcours. Le bétail peut pacager toute l'année dans le voisinage de l'étang de Si-ISazaire et de la mer; les propriétés sont conliguës-, le fourrage y est d'excellente qualité, et il contient en quantité du sel, qui forme la base du sol de celle contrée. Aussi les bestiaux y soni-ils pleins de vigueur et de sanlé. De très vastes locaux, qui vont être agrandis, pourront loger jusqu'à 80 bœufs. Toutes les ressources qu'offre le domaine seront mises à profil par l'entretien d'un si grand nombre de sujets, auxquels se joindront encore une vingtaine de poulains et les bétes à laine.» (( M. Félip espère n'avoir plus à payer tribut à l'industrie d'un département voisin. Il lui reste vingt bœufs de forte constitution , provenant de l'A- riége. Désormais il tirera ses sujets de la ferme mê- me; il a déjà quatorze vaches de race agenaise et un taureau de race indigène de la plus belle contorma- tion. Un choix sera fait parmi les produits obtenus. Les veaux propres au labour seront conservés, et les autres engraissés pour la boucherie. On peut prévoir les avantages de ce mode d'éducation, que permet la situation exceptionnelle des lieux. » «11 y a dans le domaine 51 hectares de prairies arrosables et 66 h. de prairies naturelles non irriguées; en tout 1 17 h. L'extirpation des joncs et l'écoulement des eaux augmentera encore la production des prai- ries. L'exemple donné par deux de nos grands pro- priétaires a été suivi par des hommes intelligents: MM. J.ClémensetAnd.FontaneildePézilla, éleveurs, sont mentionnés honorablement parla Commission. » XI PERFECTIONNEMENT DES INSTRUMENTS ARATOIRES. M. Fraisse, rapporlcnr , concliil en proposaîil à la Société de demander à M. le ministre de ratrricullure un dynamomètre et des modèles d'instruments ara- toires , et d'accorder la prime à M. Saturnin Llanla, dont les essais ont été mis au grand jour dans notre 6^ volume. Nous y renvoyons nos lecteurs. CONCOURS DE PEINTURE. t\I. Auguste Lloubes , rapporteur. «La ville de Perpignan, à laquelle le Conseil gé- néral du déparlement s'est associé , a établi un bon précédent en envoyant de jeunes artistes étudiera Paris, et .s'inspirer de la vue des chefs-d'œuvre. La Société a pour but de découvrir les vocations réelles et de signaler par une première distinction le mérite naissant. MM. Michel Puig et Jacques Quès sont les exposants de cette année; ils ont l'un et l'autre les meilleures dispositions. Plus tard , nous serons en droit d'être plus exigeants; nous ne les jugeons au- jourd'hui qu'en comparant leurs (euvres. 11 y a une nuance à établir en faveur de M. Michel Puig. » «Thomas Oljati, âgé de 14 ans, a exposé une co- pie, et tout annonce qu'il sera peintre un jour. » RÉCOMPENSES décernées par la Société, en lS4o et 1346. Séance publique du 28 septembre 1845. Fabrication de dentelles. IMédaille d'argent. — Madame Madelaiiie Co- mas , de Collioure, f"" classe; M. Lafabrègue, de Thuir, 2'' classe; M"" Anne Danjou , de Perpignan, id., |)etil module. Art céramique. Médaille d'argent. — iM. G.OIiva, potier à Saiilagouse. Instruction publique: médaille d'argent. — Î\I. Béguin, directeur de l'Ecole normale; M. Mattcs, sous-directeur de TEcoIe normale, id. Ml IlorUcMlturc. Mo.lnll. .lo l.rnnz.. -M. J.a„ Eychouno , A, Porpiijnan. liLhisliio agricole. Médaille Je l.ro.ue. -M. . Yilascca , nutu.ahste , a ' 'hulustric niinicnc. Médaille do bro.ue. - M. Tl.uUicr de PrcWille , h Séffurc. , „ Peinture. Médaille de bronze. - M. Michel Puig , de Perpignan. Séance publique du 23 oclobre 1846. Industrie manufacturière. Médaille d'argent. - M. Viniort-Maus , fa- bricant , à Perpignan. Sondages artésiens : nouveau systcme. Médaille d'argent décernée en 1847.— M. Fauvelle, agent- voyer en chef, à Perpignan. Agriculture: plantations. Médaille d'argent. -M. Barlhe , régisseur des biens de ÎM. de Giiieslous. Mention honorable. —M. Bonaventure Farines de Perpignan. Peinture. Médaille d'argent. - M. Michel Puig de Perpignan. Élève des bestiaux. Médaille de bronze et prime de 30 fr. — M. Julien Durand , berger de M. Azéma. Mention honorable. -MM. Joseph Clémeus et André Fontanell delczilla. Endiguement des rivières. Médaille de bronze. — M. Titus Falip , lujjé- nieur-géoinètre, à Perpignan. Éducation de vers-h-soie trévoltini. Médaille de bronze.— M. Auge, édu- cateur et filateur, à Perpignan. Plantations. — M- Jean Tardieu de Belric, prime de ^0 tr. M. Louis Monné, de Latour ^^ M. Louis Pla, id. M. Raymond Uibes, id. 50 .50 Prime» accordées par 8c ftJouverHiemcnt |)our IS-IG. Prairies. Education du bétail. M. Joseph Lazerme , propriétaire h Perpignan ; ^S0 M. Antoine Félip , régisseur des biens de U^''= Duston. H 50 Plantations de mûriers et d'oliviers. M. de Gineslous , propriétaire , à Caladroy , ^oO M. Azéma, propriétaire, à Belric. — J" Perfectionnement des instruments aratoires. M. Saturnin Llanta, de Perpignan. 200 XIII ESSAI DE CHARRUES. M. Titus Fuiij), ra|)portciir. ((Unconcours ouvert pour le perfeclionnemeal des inslrumenls ara'.oires a prouvé (jue nos agriculleurs^ jaloux de ne pas rester indifférenis ou étrangers au mouveuieni progressif de Tari, s'occupaient, avec tout l'intérêt qu'il mérite, des modifications propres â rendre dun effet supérieur à l'état actuel les charrues en usage dans le Roiissillon. C'est princi- palement sur l'araire perfectionnée (\ue les essais ont eu lieu. Des trois charrues présentées au concours, deux destinées aux terres profondes et de nature résistante par sa densité , avaient des versoirs en fonte à surface courhe, d'une action moins favorahle que celui de la charrue Houquet : une partie des terres soulevées restant stationnaire. » «Dans l'une, présentée par un anonyme, l'angle du versoir avec le sep trop obtus, produisait un accrois- sement notable de résistance; dans Taulre , offerte par iVi. Estirach , maréchal serrurier à Torreilles , une articulation c\u soc devait , par la modification de l'angle, s'éloigner plus ou moins de l'horizontale, et par conséquent faire varier l'enfoncement et l'ac- tion de la charrue. Cette disposition a l'inconvénient d'amener une décomposition de forces, et par consé- quent une perte d'action. On peut en dire autant d'un mouvement circulaire du coiilre , qui ne sau- rait avoir une meilleure position que celle de la direction de la charrue.» « L'araire légère de M.Bachès, serrurier h Perpignan, munie de deux petits versoirs en fonte , ne peut qu'être fort utile pour les vignes et les cultures sar- x!^' clées. Il convienl que le soc soil aiguisé à ses deux bords pour extirper les mauvaises herbes.» La prime de 200 fr. a éié répartie entre les deux derniers concurrents. FABRICATION DU CHOCOLAT. IM. Ait'xis Tastu-Jaubcrt , rapporleur. «L'importation d'une machine à vapeur , de la force de six chevaux, pour la fabrication du chocolat, est due à M. A. Valiaiino fils. La réduction de prix, qui résulte de l'emploi d'un si puissant moteur, (sans que l'économie de temps et de forces nuise h la perfection des produits), a permis à ce fabricant d'étendre ses relations jusqu'en Espagne; de sorte que la Catalogne , qui fourni.ssait le chocolat h une partie de la France, est aujourd'hui, pour ainsi dire, tributaire du Rous- siiJon. L'effet de ce nouveau procédé doit être de propager l'usage d'une substance alimentaire , essen- tiellement hygiénique, et, sous ce rapport encore, l'importateur doit être Tobjet dune distinction.» Une autre machine à vapeur, de moindre puis- sance, est appliquée à Perpignan a la filature de la soie. Cette heureuse innovation, dont M. Auge est l'auteur , permet de contrôler immédiatement la qualité des cocons : elle est de nature à donner une impulsion nouvelle aux petites éducations, que la Société ne cesse d'encourager i. Disons, en passant, que l'influence climatérique a paralysé, en 1847, les efforts des hommes intelligents, qui sont à la tête de l'industrie séiifère. M. Bresson cependant s^est dis- tingué par un meilleur résultat, dii, sans doute, à 1 Le 2'"'^ arrondissement s'est surlout distingué à cet égard. La conirce des Albèrcs parait f'tre dans les nicillenrcs conditions pour cette industrie. La soie qui en provient se fait remarquer chaque ani'.ée par sa supériorité. 1 excellente organisation de sa magnanerie-modèle. Dans le ^O" volume des annales de îa Société sérici- cole, M. Bresson est cité comme ayant obtenu une mention honorable. Nous sommes dispensés de donner ici l'énuméia- lion des primes du Gouvernement et des récompen- ses décernées par la Société , en 1 847. On les trouvera dans ce volume (pages 220 et 221), précédées des rapports de nos diverses commissions. Parmi les mémoires adressés à la Société par les membres correspondants, nous devons mentionner celui de M. Cbapsal , curé dllle, sur les cfTets de la fondre. M. François Arago a donné lecture de ce travail à l'Académie des Sciences qui en a voté l'impression. 11 nous reste à dire nn mot des travaux littéraires. Ce n'est guère qu'aux jours de solennité que la poésie nous liiit entendre sa voix , afin de varier, sui- vant le précepte du bon Lafontaine, les sujets sur lesquels nous appelons l'attention du public. Les der- niers accents de la Muse roussillonnaise ont été graves et religieux. C'est que notre mission est élevée et que, parmi nous, même d'un sujet frivole doit sor- tir quelque enseignement, ou quelque moralité. On nous a demandé quelquefois : J quoi bon les bellcs-lcUres dans cotre association ? Leur intervention peut être facilement justifiée. Le succès des idées dé- pend le plus souvent de la forme qu'elles ont revêtue. Aujourd'hui, plus que jamais, pour que les procédés des arts se simplifient en se perfectionnant il faut que les données de la science, fécondes en applications, soient mises à la portée de chacun, et pénètrent dans l'intelligence la moins cultivée. Cette lucidité, dont les leçons de l'illustre Arago, notre Présidenl honoraire, oflVeni rinimltablc niodèlo, doit être recherchée de lous ceux qui écrivent ponr les classes vouées au travail : elle est le fruit des éludes littéraires. El qu'il nous soit permis d'ajouter que cer- tains rapports de nos commissions, parla méthode, et lagrément jeté sur des matières bien souvent arides, portent, avec bonheur, le cachet des belles-lettres. Le tableau, par ordre de sections, des derniers ou- vrages reçus par la Société aurait pu clore ce simple aperçu; mais l'espace nous manque. Qu'il suffise de reconnaître que les dons successifs des divers minis- tères, ceux dont M. Fr. i\rago nous a gratifiés, et les envois des nombreuses Sociétés, avec lesquelles nous sommes en correspondance, ont, dans une période de quinzeannées, enrichi nosarchivesd'une collection de documents de toute nature, qui leur assignent une véritable importance. Pour les classer convenable- ment, ladministration municipale nous a permis de disposer cVun appartement, à l'Université. La So- ciété se réunit dans un local attenant , qui peut paraître exigu; mais nous dirons de la salle de nos séances, comme de la maison de Socrate : Plilt au ciel qu'elle fut remplie de vcrilnùlcs amis du travail et du progrès! Espérons que ce vœu sera bientôt réalisé, et que chacun sera jaloux de nous apporter son con- cours, sous le régime que la France vieni de conqué- rir, et qui, plus que toul autre, doit placer les arts et les insiiiuiions utiles sous un efficace et puissant palronnage. Le Secrétaire. Nota. — Au inoniont de mettre sous presse, nous apprenons que la famille de M. Vilaséca d'Arles met à la disposition de la Société le ])iécicux lierbier de ce naturaliste, de regrettable mémoire. C'est une riclicsse pour notre Muséum, qui comptci a un bienfaiteur de plus. SOCIETE AGRltOlE, SCIENTIFIQUE ET LIÎÎÉRIIRE tlea Piffénées-Orietttates. Séance puMique du «S SepteuMbre 1945. l'élude géolo- gique du département, «^ de l'histoire naturelle, ' etc., 4 Mémoire de M. Dclocre , clùiurgion principal à rHopital mililaire de rerpionan, lu à la Société en 1857. L'impression de ce Mémoire ayant été relardée , je suis heureux de pouvoir annoncer que la pose de la première pierre de rétablissement lliermal militaire d'Amélie-les-Hains a en lieu le dimanche, 5 octobre iSiT. (Voir le Jui(nia( des Pyrcnàs-Orienlatts du G oc- tobre )8'.7.) Dans tous les discours prononcés lors de la pose de la première pierre de cet établissement, des éloges ont été prodigués à M. de Castellaue, lieute- nant-général, qui présidait cette fcte. Pas une seule vois ne s'est élevée pour rappeler h la postérité que c'est a M. Dclocre seul que nous devons l'heu- reuse idée d'avoir émis le vœu de la formation de cet établissement. M. le général do Castellane a chaleureusement appuyé le projet, et c'est lui qui l'a probablement fait réussir; mais il u^aurait pas dû oublier que le docteur Dclocre en avait fait la proposition. Une seule phrase suffisait dan» l'allocution de M. de Castellane, pour rappeler la mémoire de l'homme <(ui avait eu la principale part à l'idée première de la création d'un éta- blissement thermal militaire à Amélie-les-Bains. 5 Observations sur les puits artésiens creusés depuis peu dans le départe- ment des Pyrénécs-Oiienlales, par M. IMarcel de Serres. 2*^ Bulletin, I83G. M. Eugène Durand a donné deux tableaux géologiques représentant la coupe des terrains traversés par les sondages faits à Toulouges, accompagnés des observations faites sur les trois premiers puits qu'il a fait forer dans celte commune. Ces communications se lecommandent également à la science, aux fondeurs, aux propriétaires, par les indications qu'elles four- nissent. !\l. E. Durand dirigeant lui-mcme tous les sondages, en a éclairé la pratique dans ces contrées, cl popularisé les applications. (V. 3"" Bulletin de la Société.) C M. Adrien Paillette, ingénieur civil, a présenté à la Société une carte géologique du département, sur laquelle il fait connaître tous les points sur lesquels les minéraux sont extraits. 7 Voir les Catalogues des mammifères, des oiseaux , des mollusques ter- restres etfluvialils , et une partie de la llore roussillonnaise dans les divers Bulletins de la Société. 7 lous ces travaux sont des titres dont elle doit s'enor- gueillir, et la Sociéié sera heureuse de faire con- naître les hommes éminenis qui en ont préparé, avec une louahle persévérance, les résultais prochains. Qui peut calculer la révolution salutaire que tous ces éléments de prospérité vont faire éprouver au dépar- lemeni, tant sous le rapport de propriétaire du sol que pour le hien-étre de la population , qui verra ses marchés étendre leur zone dans le centre de la France ! On ne peut disconvenir que le Roussillon , dont les enfants, dans lous les temps, ont payé la dette à la patrie, a été long-temps oublié. L'Empire et la Restauration s'occupèrent peu de le doter des voies de communication que tant d'autres départements obtinrent si largement. Reconnaissons qu'il n^en est pas de même aujourdhui , et qu'une répartition moins inégale a enfin prévalu pour améliorer ce qui existe, pour créer ce qui manque. Ces résultats sont dus, Messieurs, en grande partie, à notre digne pré- sident honoraire, qui n'a cessé de faire triompher à la tribune tous les intérêts généraux. Ils sont dus éga- lement à lintérét et au zèle éclairé de Tadministra- tion municipale, à la tête de laquelle se trouve M. le baron Guiraud de Saint-Marsal. Espérons que notre premier magistrat voudra bien être notre interprète auprès des conseillers du Gouvernement, pour favo- riser l'impulsion nouvelle imprimée aux sociétés des départements, dominés par le désir d'être utiles ei de concourir à porter au plus haut degré la prospé- rité du pays ! DISCOURS DE M. A noms, Sur h objets relatifs à l'Agriculture, qu'il impite le plus d'enccuracer. Séance publique de 1$45* JMessikuks, 11 y a déjà un an que nous élions assembles pour un motif pareil à celui qui nous réunit aujourdhui. Nous devons nous en féliciter, car cela prouve que les bonnes intentions de la Société ont été senties; que son appel, adressé atix bonimes industrieux du pays, n'est pas resté sans écho. Puissions nous , cha- que année, dire à un homme utile, en lui offrant une médaille, voilà notre monnaie iniclleciucUe ; appréciez-là d autant plus qu'elle ne circule pas. La Société des Pyrénées-Orientales, sans avoir la prétention de se donner pour un centre conuiiun vers lequel les rayons de lumière doivent converger, se présente comme un moyen. Ses allures permet- tent à tous ceux qui croient avoir quelque chose d'avanla;^eux à faire connaître, de s'adresser à elle, sans craindre d'être traités de présomptueux. Les a<-^riculleurs et les agronomes seront utiles à eux- mêmes et aux autres en leur faisant leurs confi- dences; nous leurs promettons, cependant, au re- bours des choses d'ici-bas, que plus le secret sera important, plus il sera divulgué. Le congrès des co- mices agricoles, qui vient de se réunir pour la deuxiè- me fois à Paris, et dans lequel nous avons eu l'hou 9 iieur d'eue repiésenlés pnr M. F. Arngo. Pages cl lioulfia, a prouvé tout le frull que l'agricuhuic el rindusirie, sa sœur aînée, devaient retirer de la lumière qui jaillissait de cet ensemble d'observations, produites dans un but commnn , mais faites dans des conditions différentes. L'iiiver de 18-^i5 a été remarquable par sa rigueur et sa durée. Ce phénomène physique doit avoir né- cessairemeni amené cjuelques modifications dans les faifs ordinaues qui se rallachcnt à Tagriculture dans notre déparicmcnt. Les oliviers, la vigne, sont com- munément allac|ués par des insectes qui trompent l'espoir de ragricuheur en dévorant les frui(s et en donnant une maladie à la plante. Nous apprendrons, avec intérêt, si Ton a remarqué, celle année, quel- que diminution dans les ravages de ce fléau, des mi- gi'dtions d'une contrée dans une autre ; ou s'il a enliè- rcment disparu , et si l'on pense que Finlcnsilé du froid puisse être ua agent destructeur efficace. ISous demanderons aussi des observations sur fin- fbience (jiie lélal de Talmosplière, pendant l'hiver et le prinlems, peut avoir exercé sur les lécoltes de toute nature^ ia feuille des mûriers et l'éducation des vers à soie •, sur l'effet utile ou nuisible que les pluies produisent, à une épocjue donnée de l'année, sur la vigne , lolivier , les plantes légumineuses que l'on cultive en grand dans notre département ; sur la qualité des fourrages, el, par suite, sur la santé des animaux des races bovine , ovine, chevaline. Ceci res- sort un peu de la palbologie vétérinaire; mais les obser- vations que l'on produira sur eesujel, el tout ce qui s'y rattache , seront d'autant plus précieuses pour nous qu'elles sont fort rares ci qu'elles traiteront d'uu 10 objet (|ni est la vie de ragriculliuc. Les trois races d'animaux que je viens de nommer lui fournissent en effet leur travail , leurs engrais , leurs produits , livrent au commerce leurs cuirs , leurs peaux et la laine; deux d'entre elles donnent à riiomme la meil- leure viande dont il puisse se nourrir. Nous ne saurions assez appeler l'attention sur tout ce quia trait à l'élevage et à l'engraissement des bes- tiaux; cette branche de l'industrie agricole est d'au- tant plus importante pour notre département, qu'elle n'y est pas exploitée comme elle devrait l'élre, et que nous sonunes tributaires , chaque année, des dépar- tements voisins pour des sommes considérables. Un enfant des rives du Nil aborde , depuis peu d'années, sur nos plages de la Méditerranée ; il y prend pied; il dit à notre olivier, emblème de la paix : prépare-loi à la guerre; il crie à l'œillette, ce pavot du nord : réveille-toi, me voici! Il fait parler de lui bien plus qu'on n'a parlé des Pyramides de Ghiselt. Il se pose en ennemi; il est d'autant plus redoutable qu'il vil sur une terre toujours fertile , sous un ciel toujours pur, et qu'il est un prodige de fécondité. De toutes parts, en France, on se ligue contre lui, comme on le ferait, pour repousser une invasion étrangère , et cependant il n'obéit qu'au souffle de Dieu qui l'a poussé sur la terre en lui di- sant : tu vivras ! Je n'ai pas besoin de nommer le sézame pour vous désigner cet ennemi de notre agriculture; il est effectivement à craindre, el, à ce titre, il importe de le connaître à fond et de voir si l'on ne pourrait pas s'en faire un allié. Nous engagerons les agricul- teurs à tenter des essais de culture de celle plante 11 en oljscivaal soigneusement tous les phénomènes qui se rattacheront h sa croissanee, sa Uoiaison el sa gie- naison, el à noui communujuei' le lésuliai de leurs expériences. Le programme de nos prix a prévu ce que j'ai Thonneur de proposer, el une médaille d'ar- gent est promise à celui qui aura cultivé , sur cent cinquante ares de terrain , une plante oléagineuse ou tinctoriale , inconnue dans le département. Une maladie épidémique , la clavelée, a sévi celte année sur les bêles à laine, dans certaines contrées du dé- partement; nous apprenons qu'à l'heure où nous par- lons, elle est aux portes de noire ville. La maladie de sang a étendu sa contagion el fait aussi de nombreuses victimes. 11 est de rinlérét des agriculteurs el dos industriels d'élre éclairés sur toul ce qui lient à la conservation des précieux animaux de la race ovine ; nous faisons un appel au bon vou- loir de ceux qui onl recueilli des observations sur ce sujet important , el principalemeni aux vétéri- naires. Le JMamicl du Bcvi^er ^ pour le([uel une mé- daille d'argent est réservée par le programme de nos prix, offre le moyen de rendre un service éminenl à l'agriculture, en traitant des deux maladies énon- cées plus haui , telles qu'elles se montrent dans noire département, en développani les meilleurs moyens d'éducation des bêles à laine, mis en pratique tant dans la plaine que sur nos montagnes , el enjoignant à ce précieux travail une nomenclature complète des piaules vénéneuses qui croissent dans nos prés, dans nos champs, sur le bord de nos cours d'eau, el qui ne porteraient pas la mort dans un troupeau , si elles élaienl mieux connues du propriétaire et du berger. L'indication des époques auxquelles ces- 1-2 piailles naisseiil , fleurissent, fruciifient ei sonl plus ledouiables, seraindispensahle, deniéniequerénoncé de leurs noms dans ridiônie catalan , afin d'en faci- liter la reclierclie à ceux qui ne sont pas versés dans la botanique, et qui auront des renseignements à demander dans les campagnes. LVeuvre sera complète si Tauleur y comprend la description des champi- gnons vénéneux qui viennent sur certaines plantes, principalement dans les terres humides. Ces cryp- togames, aussi nuisibles à l'homme qu'aux végétaux et aux animaux , fout essentiellement partie du cadre d'un pareil ouvrage. Une grande question est agitée dans ce moment-ci , celle des arrosages ; elle est vitale poui' notre dépar- tement, que couvre ce vaste réseau liquide tracé par l'industrie de nos pères. On parle de l'étendre da- vantage, de rendre ses effets salutaires plus certains en lui assurant une alimentation continuelle. La société ne peut rester inactive au milieu de ce mou- vement qui s'opère autour d'elle ; elle a déjà traité ce sujet à l'époque où il n'était pas pris au sérieux; au- jourd'hui ([u'il occupe tous les esprits, que l'autorité lui accorde son haut paironnage , ce n'est pas seule- ment pour elle une question d'opportunité, c'est un devoir de rentrer dans la lice. Le déboisement de nos montagnes fait descendre dans la plaine, à la suite des alluvions, des torrents dont l'impétuosité ne connaît d'autre limite que les vagues de la mer; on dirait c|ue nos monts, jaloux de voir leur terre végétale entraînée par les pluies, veil- lent nous l'enlever en vomissant sur nous leurs ondes courroucées, leurs blocs de granit et leurs sables stériles. 11 est du plus haut intérêt de connaître les 13 meilleurs moyens tle se préserver des effeis dcsliuc- teurs des pluies diluviennes (jui font iléborder nos rivières à des époques piesque périodiques. Comme j'ai eu l'honneur de le dire en déhnlant , le champ qui est ouvert par le programme de nos prix est très vaste. S'il est parcouru, comme nous l'espérons, avec le temps, la société aura renq^li sa phisbelle mission en donnant l'impulsion à ce qui est utile et avantageux pour tous. De quehjue pai t «jue lui arrivent les communications de mémoires, elles seront les bienvenues; on les examinera avec toute l'impartialité qti'on a le droit d'atlendrc de nous. Les époques fixées pour le concours ne sont pas absolues; les délais ne prescrivent pas, et ou peut les anticiper; il est même loisible de concourir pour des objets qui ne figuieraient pas nominativement dans notre pro- gramme, mais qui rentreraient dans l'esprit qui l'a dicté. RAPPORT de ia Comniission sur l'Eilccalion des vers à soie IrévoltiDÏ. M. Companyo, rnpporU'ur. Encourager l'industrie séricicolc, c'est rendre un grand service à la classe ouvrière et ouvrir, dans le département, une source de richesses. La France paie des sommes considérables pour limportation des soies grèges de la Chine. Se soustraire à cet énorme tribut serait un bien immense. 11 faut, pour y par- venir, qu'on s'adonne à la cullure du miirier, par- 14 tout où cel arbre pcul prospérer. On multipliera ainsi les éducations des vers à soie et étendra le bien-élre qu'elles procurent aux populations qui s'en occupent. 11 n'est certes pas de contrée où la culture du mû- rier offre de plus beaux résultats; anssi est elle en pi ogres très-sensible. Le moment est venu où le feuil- lage commence à payer les avances pour plantations. Les encouragements accordés par la Société contri- bueront à soutenir le zèle des planteurs et des édu- cateurs. Le mûrier se prête à toutes les cultures et s'ac- commode de tous les terrains. Sa végétation est sans égale. Les peupliers, les platanes, dont on fait des avenues ou des bordures, restent long-temps im- productifs. I^es mûriers peuvent les remplacer avan- tageusement : leur feuillage ne sert pas seulement à nourrir les vers à soie , il est aussi du goût de tous les bestiaux. Son bois est bon pour la menuiserie; cet arbre est donc utile, sous tous les rapports. Mais il existe une espèce de mûrier dont il serait utile de multiplier la culture : nous voulons parler du multicaule, qui se plaît dans les terrains hu- mides. Les bords de nos cours d'eau, des fossés, et les bordures des champs devraient être plantés en mûriers de cette espèce. Il serait d'une très-haute importance pour avoir des vers à soie avec lesquels on ferait trois éducations dans l'année, savoir : en mai, juillet, septend)re; on voit qu'il s'agit ici du irévoltini. On rendrait ainsi l'industrie de la soie per- manente dans cette contrée, car les trois éducations auraient lieu sans autres dépenses de matériel que celles qu'aurait nécessité la première. 1 ]V|me Auge s'occupe , (l^puis plusieurs années, de J'éducaiion du irévoliiui, avec le plus grand succès el toute la faciliié possible. Celle de juillei s'est faiie, cette année, presque en plein vent; car, dans le jour, les croisées de l'élablissenienl restaient cons- tamment ouvertes. Celle de septembre n'a exigé d'al- lumer les poêles de l'établissement que pendant (|uatre à cinq jours; les résultats n'ont pas été moins avantageux. L'éducation de juillet se composait d'une once et un cjuarl de graine. Elle a duré vingt-huit jours. Les vers étaient beaux, forts, bien nourris ; ils ont monté avec la plus grande aisance. Cette éducation a donné 40 kil. de cocon. 39 kil. ont été mis à la filature : ils ont produit 2 kil. OSliecl. de soie, première qua- lité ; on a gardé le reste pour graine. L'éducation du mois de septembre se composait d'une once de graine; sa durée a été de trente-iin jours; elle a donné 36 kil. de cocon : 30 kil. , livrés à la filature, ont pro- duit 2 kil. 180 grammes de soie, première qualité. Chose bien essentielle à remarquer, la soie prove- nant de l'éducation du trévoltini, a été supérieure en qualité aux aiiires espèces, même à celle des co- cons des magnaneries les mieux conditionnées. Géné- ralement, les cocons ont été mous celte année; les éducations n'ont pas bien réussi; les soies se sont res- senties de l'état où se trouvait le ver qui n'avait pas formé le cocon d'une manière complète. Il est donc de la plus grande importance pour le département de voir multiplier l'éducation du trévoltini; et quoi- que M""^^ Auge n'ait pas rempli toutes les conditions voulues par le programme, voire Commission pro- pose d'accorder à cette dame lu médaille (juc la 16 société a mise au concours, en récompense des soius assidus qu'elle a donnés, pendant quatre ans, à la triple éducation du trévollini. C/esl a M'"« Augcr seule que le département sera redevable d'avoir con- servé cette espèce de ver a soie, et cette persévérance et lesrésulialsobienusbien consiaiés donneront, nous osons l'espérer, à d'autres pnriiculiers, l'idée de se livrer à l'éducation du trévoltini, ce qui augmentera, nécessairement, l'industrie sétifère, qu'on ne saurait trop propager dans le département. Les mûriers y sont déjà en assez grand nombre pour suffire au sur- croît nécessaire. Votre Commission a l'honneur de vous proposer, en conséquence, de maintenir, pour l'année pro- chaine, le prix destiné à réducation du trévoltini , et a demander à M. le Ministre de l'agriculture , ou au Conseil-général du département, la somme de 300 fr. , pour être divisée en six primes de 50 fr. chacune, à distribuer aux petites éducations des vers à soie. POUR L,\ FABRICATION DES DEÏÏELLËS A la Société tics Pyrénées-Orientales* ANNÉES -18^5—1847. Année 1845. X. E. SURASID , Rapporirur. Messieurs , La fabrication des dentelles à la main ne peut pas, s proprement parler, être classée parmi les arts in- (Justricls ; cependant , la valeur que le luxe attache h ses produits délicats, l'adresse, le goût , la patience. il la proprelé qu'elle exige et qui la foui rester exclu- sivement l'apanage des femmes, les ressources de divers genres qu'elle leur procure , font que l'atten- tion de la Société des Pyrénées-Orientales a été ap- pelée sur ce genre d'industrie , qu'elle a tenu à encourager. On a fabriqué , de tout temps , des dentelles dans ce département; anciennement, la mode favorisait beaucoup leur emploi comme un des plus gracieux ornements du costume national. Lorsque celle puis- sance capricieuse a fait préférer un luxe plus appa- rent que réel h une liclie simplicité, les dentelles roussillonnaises ont perdu de leur prix ; mais aujour- d'hui leur mérite est généralement apprécié par toutes les classes de la société , et leur débouché serait assurément plus considérable que la production. La société des Pyrénées-Orientales, en ouvrant un concours pour les dentelles , a eu en vue d'exciter l'émulation des ouvrières, de propager un genre de travail qui convient à tous les âges, qui peut s'allier, sans leur nuire , aux soins du ménage et de la famille, tout en prociu-ant d'honnêtes bénéfices. La Commis- sion dont j'ai Thonneur d'être l'organe , a eu à exa- miner divers échantillons de dentelles. Voici , Mes- sieurs , le résultat de son appréciation : 1" Le paquet n" 1 renferme une pièce de dentelle, genre valencienne , d'un même fil et d'un seul réseau. Sa disposition imite la guipure-^ il a huit centimètres et trois millimètres de largeur. La difficulté d'exécution de ce genre de dentelle, très estimé, la bonne façon de l'échantillon présenté, ont déterminé votre Commission à vous proposer de lui adjuger la première médaille d'argent; 5 18 2° Le paquet n° 2 coutieni une denielle île mciiic largeur que la précédente, d'un genre nùxlc, moins caractérisé et moins difficile d'exécution^ mais indi- quant aussi une main très-habile : voire Commis- sion vous propose de lui accorder une médaille de deuxième classe ; 3° De plus, Messieurs, M. Lafabrègue, de Thuir, vous a présenté divers échantillons de dentelles , genre roussillonnais, à points réguhers, de diverses combinaisons, toutes de bon goril et d'une exécution parfaite. Deux de ces échantillons ont la largeur peu ordinaire de dix-huit centimètres. Ces dentelles ont été faites par des ouvrières de Thuir, que M. Lafa- brègue fait travailler en leur fournissant des patrons qu'il invente et qu'il pique. M. Lafabrègue peut con- tribuer aux progrès de la fabrication en continuant à créer de bons patrons. La Commission pense qu'il mérite un encouragement, et elle vous propose de lui décerner une médaille d'argent. Une Commission, dont M. A.ugé a été le rappor- teur, a eu à examiner deux échantillons de dentelles : Celui sous le n° 1000 a été remarqué par son fini, semblable à celui des dentelles du Nord. Ce genre de dentelles pouvant être vendu avec profit à 6 fr. le mètre, sa fabrication doit être encouragée. L'échantillon n° 1.700, imitant le tulle, a été .signalé pour sa largeur et l'extrême régularité de son fond, mais son prix de revient étant sept ou huit fois plus élevé que celui des tulles faits au métier, il n'y Il) aurait aucun profil à se livrer à celle fabrication ; ce- pendant, rexéculion du modèle sou mis à la Commis- sion étant parfait, elle a élc d'avis : loDe donner une médaille d'argent à la personne qui a présenté l'échantillon n° 1000-, 2° D'une mention honorable à celle qui a présenté l'échantillon n" 1.700; 3° De recommander l'introduction de la fabrication des dentelles dans les établissements de bienfaisance pour les filles. RAPPORT sur le concours cte iieinfuro. Séance publique de 184b. II. Kiloubcs , rapporteur. Messieurs , II y a eu un siècle en 1843 que notre célèbre con.- patriote, Hyacinthe Rigaud, est mort; mais ses oeuvres, inspiration de son âme , étincelle de son génie, vivent encore, et la dent corrosive du temps les a respectées. Nous pouvons admirer, dans cette enceinte, une de ses plus belles créations, et la retrouver aussi fraî- che, aussi admirable que si elle sortait de son pin- ceau. Sublime privilège du génie que de vivre après Ja mort, et souvent d'une vie plus glorieuse que la vie matérielle! C'est à Paris, au Louvre, dans sa royale demeure que Rigaud doit être fier de se trouver au milieu de ses égaux; et si son ombre très- 20 saille (le joie en éiani parmi nous dans sa ville na- tale, elle doit regretter que le cortège qu'on lui a fait ne soit pas au niveau de son talent 5 il brillerait , en effet, d'un plus bel éclat, s'il avait autour de lui des noms qui pussent soutenir la comparaison avec le sien. Le Musée, depuis sa fondation, ne s'est pas enrichi de toiles remarquables, à quelques exceptions près; et les amis des arts doivent déplorer qir'un fonds pav- ticulier ne soit pas affecté à l'acquisition de nouveaux tableaux, ei que, lorsque toutes les villes du royaume, et principalement les chefs-lieux de département, participent aux distributions que le gouvernement fait annuellement des produits de la peinture, Per- pignan soit frappé d'une espèce d'exclusion. Il est juste de payer un tribut de reconnaissance aux ci- toyens dont le zèle a doté le Musée de la belle toile due au pinceau de M. Ingies, et qui représente les traits de ce prince infortuné, fleur coupée avant d'être éclose. La Société , qui a contribué puissamment à la créa- lion du Musée, et qui l'a conservé sons son patron- nage, n'a pas besoin de donner des preuves de riniérêt qu'elle porte aux beaux-arts, et pariiculièrement à la peinture ; elle sait que la prospérité d'un état , la civilisation d'un peuple, se mesurent à la manière dont les beaux-arts y fleurissent, et que la France, sous ce rapport, n'a rien à envier à personne. La Société sait aussi que les vocations les plus heu- reuses avortent quelquefois, faute de moyens de se satisfaire, faute d'encouragements. Elle a vu avec un vif plaisir la ville envoyer a Paris quelques-uns de ses jeunes citoyens étudier les arts dans leur majes- 21 tiicux sancluairc , dans leur plus liauic perfcciion. C'est un précédent qui portera ses fruits et qui se perpétuera, nous osons l'espérer. La Société a senti qu'elle pouvait, dans son humble sphère, doiuier la main h ceux qui coDimençaienl à percer dans l'étude de la peinture , et leur dire en leur offrant un encouragement honorifique : Nos vœux vous suivront, travaillez et vous réussirez. En effet, Messieurs, beaucoup de jeunes gens annon- cent d'heureuses dispositions pour la peinture , et c'est leur rendre lui éminenl service que de les en- courager ù cultiver leur art. Le moyen le plus direct pour y parvenir, à cet âge où les impressions sont si vives, les sentiments si généreux , c^cst une distinc- tion accordée publiquement. rS'ous avons reconnu que M. Michel Pouig méri- tait à tous égards de fixer le choix de la Société. A peine âgé de 21 ans, il a prouvé, par ses productions exposées sous vos yeux , et qui sont composées prin- cipalement de portraits, qu'il réunissait h de grandes dispositions, l'entente des premiers procédés de son art, le désir de se perfectionner, et l'amour du tra- vail nécessaire pour y parvenir. En décidant de lui donner une médaille en bronze de grand module , la Société récompense son zèle et ses louables efforis; elle encourage ses bonnes dispositions, et rend hom- mage, dans sa personne, aux autres jeunes gens qui marchent sur ses traces, et mériteront a leur tour, il faut bien l'espérer, un honneur pareil. Monsieur Pouig, ce n'est pas parce que, scrupuleux et habile copiste, vous pourriez avoir reproduit sur la toile l'oeuvre d'un autre, que la Société vous accorde une médaille; mais c'. COME.NANCE TOTALE A hoiât-r dans cliaque vallée. COMIJIAKCE PaOPOaT10»»ELLE à huiler toutes les années. I^'Agly, La Tet , Le Tech , Le Sègie , L'Aude, Le Réai t , TOTAL .... 19,800 l..<.a.es. 36,200 21,500 12,800 3,700 6,000 396 Iioctares. 724 430 256 74 120 100,000 l-ctar.s. 2,000 l.ectares. On peut employer deux modes pour régénérer nos forets : l'un en favorisant l'opération au moyen de primes aux propriétaires qui se distingueraient ^ l'autre en leur accordant le semis ainsi que les jeunes plants. Le premier mode présente des difficultés; elles résultent de la division des territoires en une multi- tude de parcelles de si peu de contenance qu'il y aurait impossibilité d'opérer le reboisement sur de grandes masses. La division des propriétés est devenue telle dans notre département, ([ue les héritages qui étaient formés autrefois de vastes surfaces , ne présentent au- jourd'hui que des propriétés subdivisées et éparses, de telle sorte qu'il serait difficile de trouver, dans chaque commune, des domaines réunissant chacun, cn'propriétéscontiguës, cinquante hectaresà reboiser: 4 et, en admeiianl même que celte coiulition pût exister, il est aisé de démontrer que le reboisement de ces 250 hectares par commune ne suffirait pas pour opérer sur le quart de la surface de nos montagnes. Dans cette supposition, soit par exemple, cent communes renfermant chacune cinq propriétaires pouvant opérer sur les 250 hectares, à planter ou à semer toutes les années, nous aurons les chif- fres 100 -f 250 : 50 = 500 , ci 500 h. Ajoutons à ce <;hiffre les terrains do- maniaux ou communaux d'une sur- face de 10,000 hect. : 50 = . . . . 200 Total de la siu'face qui pourrait se boiser 700 Différence sur les 2,000 hectares. . . 1,300 Si, au lieu de compter sur quelques propriétaires par commune, pour opérer le reboisement et de dé- penser les fonds de TEtat en primes, on employait ces sommes à former des pépinières dans cha- que vallée ; si l'on s'adressait ensuite aux habi- tants auxquels on démontrerait l'avantage de boi- ser des terres incultes pour les rendre produc- tives; si on les aidait dans le travail du repeuple- ment des montagnes en leur fournissant les graines ou les essences 5 si on les contraignait à exécuter la loi de 1669 sur les défrichements, ' nous arriverions plus facilement et plus promptement à réaliser l'opé- ration. ^ Les défrichements ne devraient être permis que dans le ras où des murs en pierre pourraient retenir les terres , ou que des bandes boisées , d'une largeur de -10'" , remplaceraient les murs de soutènement. 51 Prenons un exemple : soil un nonibie de parcelles égal à celui des lieciares : 100.000 hectares non cultivés, et 100.000 parcelles cultivées. La surface en hectares réclame un minimum de 40.000.000 , ou 800.000 par année; les parcelles cultivées , sui- vant la loi de 1669, exigent 10,000.000 de plants, ou 200.000 par année, soit en tout, 50.000.000 d'es- sences diverses, ou un million par année : ce der- nier chiffre, divisé par les 100.000 hectares à reboi- ser , donne dix plants par hectare. Quel est le propriétaire d'une commune qui , dans un but d'intérêt général , ne pourrait semer ou plan- ter dix arbres par hectare, en admettant que les graines ou les essences seraient fournies par chaque département? La supériorité de ce système sur celui de régénérer nos forets par des primes, offrirait en- core un avantage que l'on ne peut contester, en ce que les parties boisées toutes les années réclame- raient peu de soins el que la végétation s'opérerait avec beaucoup plus d'avantage que si l'opération n'était exécutée que sur de grandes étendues. Le reboisement organisé ainsi que nous venons de le dire , garantirait les cultures de la montagne. La plaine bénéficierait encore de cet avantage, se trou- vant moins exposée au ravage des eaux. Si nous estimons la dépense nécessaire pour re - peupler de forets notre département d'après les don- nées connues, en prenant particulièrement celle indiquée par M. Dugied, et en admettant que les essences seront réparties de la manière suivante : 300 hectares en glands, chênes verts et blancs et chênes-liéges; 300 en hêtres ; 600 en châtaigniers ei diverses aulres essences à feuilles caduques ; 600 en pins ei sapins 5 200 en buis, genéls, coudriers, chênes pédon- cules , etc. 2000 hectares. La dépense de 2 000 hectares en achat de graines, iransporl compris, serait de 6.000 fr,, ci 6.000 fr. ' Plus, pour l'entretien de six vastes pépinières dans chaque vallée . . 12.000 Travaux pour essarter les jeunes plants dans les bois communaux ou domaniaux .... - 2.000 Total général de Ja dépense, toutes les années 20.000 fr. ou 10 fr. par hectare. L'on s'accorde généralement à ne considérer la possibilité de repeupler nos forets , qu'autant que l'on ensemencera des terrains préalablement prépa- rés, par des labours ou par la bêche. Le semis en place présente dans son exécution plus de facilité de réussite que la transplantation d'un lieu à un autre ; mais il présente aussi de très grands inconvénients, si Ion considère la dépense et les funestes résultats qu'entraînent des défrichments. Pour pouvoir apprécier la dépense que nécessite 1 Le chiffre de 6 000 fr. a été calculé d'après iin essai qui a été fait au Jardin du Luxembourg, par M. Thomas, membre de la commission de Silviculture , et dont il est résulté que , 1 2,000 plants provenant de glands , châtaignes , faines et pourrettes de Bouleau, n'ont coûté d'achat que 8 fr. ; — en admettant ce chiffre, le million d'essence à planter toutes les années ne coûterait que 606 fr. 66 c. , il resterait encore pour transport des graines et non réussite , la somme de 5,555 fr. 34 c. 53 ce travail, il convient d'en développer les opéra- tions successives comme il suit : 1 o Pour opérer rensemencemenl sur nos montagnes élevées , la première opération à exécuter serait d'opérer larrachemcnl d'un gazon très épais qui recouvre le sol , puis d'opérer TécoLuage \ 2" De défricher les terrains à ensemencer, soit par le moyen de la charrue, soit par celui de la bêche ; 3° D'empêcher que l'entraînement des terres défri- chées n'ait lieu , eu établissant de distance en dis- tance des murs en pierre sèche ou des fossés hori- zontaux •, 4° D'opérer lensemencemenl des graines avec un mélange d'orge ou d'avoine; 5° De herser et rouler les semis. D'après ces conditions, Fou peut approximative- ment calculer ce que viendrait à coûter l'ense- mencement d'un hectare. Mais ce chiffre est telle- ment élevé, qu'il nous paraît impossible de pouvoir at- teindre aux dépenses pour effectuer le repeuplement des 100 000 hectares, à moins d'employer d'autres moyens ([ue ceux ci-dessus indiqués, lesquels pré- senteraient les mêmes résultais ei seraient moins dis- pendieux. Parmi les divers modes à employer , le plus écono- mique serait de conserver la plus grande partie des gazons qui couvrent nos terrains inclinés, de ne lesarracher, autant ({ue possible, que partiellement , sur des lignes parallèles et sur de petites surfaces d'un mètre carré , le centre de ces carrés disposés à quatre mètres de dislance; parce mode, l'on obtien drait sur les dépenses pour rensemencemenl, les améliorations ci-après : fo L''écohuage qui (îevailse faire sur 10,000 mètres carrés, n'aurait plus lieu que sur 2.500 mètres; dif- férence 0 75 *'/o de dépense en moins sur cet article; 2° Même économie pour la surface des terres à défricher ; 3° Les terrains n'étant défrichés que sur des sur- faces d'un mètre carré, il ne serait pas nécessaire de retenir les terres par des murs en pierre sèche ou par tles fossés ; 4° Il y aurait encore 75 ^/o de bénéfice sur la dé- pense concernant les graines, pour les répandre et pour les recouvrir. Donc, si dans le premier cas il faut quinye mil- lions pour reboiser nos montagnes, dans le second cas, il ne se dépensera que 3.750. 000 fr. Celle dépense diminuerait encore , en donnant les graines et les essences au propriétaiie, au lieu de dépenser les fonds en primes. Les plantations pourraient êlre réparlies sur 3 zo- nesàla fois; chacune d'ellesscrait appropriée aux essen- ces, d'après la température du lieu et la nature du sot. La première zone comprendrait les arbres qui conviennent à la plaine ; celle zone pourrait se limiter à la hauteur de 300 mètres au-dessus du ni- veau de la mer. La deuxième zone pourrait se composer dechàiai- gniers , de chênes, de hêtres, de noyers, de bou- leaux, de frênes, d'érables, d'acacias, etc. Ce rayon pourrait s'élever , depuis la limite des arbres de la plaine, jusqu'à mille mètres au-dessus du niveau de la mer La troisième zone se formerait darbres résineux, en romontani depuis la liauteur de 1000 mètres, jusqu'à 1.800 pour les résineux du pays, ei jusqu'à 2.500 mèires pour les résineux exotiques , observant les diverses lenipéralures ei les qualités du sol , en commençani par le pin laricio , et en finissant par le pin cenihro. Le boisement dans nos hautes montagnes pourrait s'effectuer aver, des arbres résineux exotiques, tels quelejoi/i/a ccmbro , qui croît dans les régions les plus élevées des Amériques; après lui, en descen- dant, viennent le mieux à une certaine hauteur , le mélèze^ puis Vépicca avec le sapin argenté et les pins sylvestre^ le pin laricio ou de Corse ^ et le ^in pignon^ qui se plairaient encore dans les parties basses, parmi les arbres à feuilles caduques. Les Jt-énes, les érables^ peuvent être plantés aux rayons inférieurs; les hêtres, les chênes, les ormes ^ les châtaigniers et les noyers , seraient mêlés aux essences supérieures. Dans les plus basses régions des vallées, croîtraient avec facilité, soit au pied des coteaux, où l'aridité se trouve diminuée par des suintements d'eau de pluie , et particulièrement sur les bords des ruis- seaux, diverses essences, telles (jue Vaulne, le me- risier, le saule, le rhamnas, le bouleau. Vomie, le chêne, lejrêne, le noyer, \e marronnier, le hêtre, Vérable, \e peuplier , \e. platane , le tremble , le charme, le til- leul, Vfprcau^ le mûrier, le cerisier , etc. L'on pourrait encore y joindre des arbres qui attirent le gibier, tels que les sorbiers, les aliziers , les cormiers ^ les coudriers. Pour boiser avec efficacité nos pâtures^ il serait indispensable de bien approprier les diverses es- sences aux terrains et à la température, car, si ces conditions n'étaient pas observées, les plantations ne pourraient prospérer » - ■ T ;)6 La natuialisalioa des arbres exoliques doit élre essayée clans le dépai lemenl ; celte atnélioraiion de- vrait être encouragée dans un pays , où tous les climats sont représentés. Le pin maritime poui lait couvrir une grande par- tie de nos landes, border nos prairies de laSalanque et boiser nos coteaux. Quebjues essais ont été laiis par des propriétaires, sans résultais bien avantageux. Ainsi que le pin marimc, le pin lariclo, ou de Corse, doit être considéré dans notre département, comme Tessence résineuse la plus favorable au climat , et comme la plus avantageuse pour boiser nos landes sableuses sur les bords de la Méditerranée. La culture du pin laricio est connue j elle a été insérée dans le Moniteur du I I avril 1848 , par ordre du ministre de l'agriculture. Le peuplement des pins est obieiiu de deux manières : par le semis sur place et par la planlation. Le premier s'exécute avec succès dans des terrains sablonneux exempts de mauvaises herbes, de brous- sailles, et surtout sous un climat frais et pluvieux. L^on peut semer en toute saison, excepté en hiver ; mais le moment le plus favorable dans ce départe- ment. est raulomnc. On doit observer d'ameublir la terre à la profondeur de quinze centimètres au plus, afin que les racines latérales aient la facilité de se développer. Les semis doivent s'abriter, autant que possible, des venls d'ouest ; on sème épais, dans la proportion d'un litre par mètre carré. Parmi les essences favorables au déparlement des Pyrénées-Olientales, il faut particulièremeni dis- tinguer TacM ia , d'une végétation 1res rapide-, son hois, dur el très pioduclif_, supporte sans rompre tous les genres de torsions auxquels on veut le soumettre. Les branches servent à confectionner des cerceaux, en tout préférables à ceux du châtaignier, attendu qu'ils ne périssent point par la sécheresse ou par l'humidité. Le recepage de l'acacia peut avoir lieu tous les 3 ou 4 ans; son bois est recherché pour confectionner les meubles et les outils aratoires; on le substitue même au fer dans la confection des essieux. Son emploi devrait être plus général , notamment pour construire les charpentes des chemius de fer. Cette essence servira encore à planter avec avan- tage tout le long de nos rivières. Les terrains calcaires de la vallée de l'Agly sont généralement composés de débris de roches où do- mine la chaux; ces terres sont peu fertiles, Teau y pénètre trop facilement et s'en dégage de même. Le sol calcaire , par sa couleur blanche , réfléchit les rayons du soleil et demeure froid; mais d'un autre côté, il présente aux racines des couches poreuses, friables, très perméables , bien préférables aux ter- rains siliceux. La couleur blanche des terrains calcaires peut fa- cilement s'améliorer par le mélange des matières qui s'identifient avec l'humidité. En employant ce moyen, on obtiendrait le reboisement de cette vallée ; il pourrait avoir lieu si on préparait d'avance ces ter- rains dénudés avec une couche végétale que l'on obtiendrait de la décomposition des débris des plantes qui y croissent facilement, ou préparer les terrains à l'avance en y semant du romaiin, du buis, 58 tlu genéi, elc. ; on tlisposerail ainsi le sol à locevoif une végétation plus robuste. Parmi les mesures qui ont été émises contre les défrichements pour faciliter le reboisement et s'op- poser à la dévastation des torrents, il en est qui ont déjà été généralisées par les anciennes lois , et d'autres qui ne paraissent ne pouvoir être pratiquées par leur excessif rigorisme. L'ordonnance de 1669 défendait les défrichements sur les terrains en pente non boisés ; mais cette partie de l'ordonnance n'est jamais appliquée par les tribu- naux, lis s'appuient sur la loi du 9 floréal an x[, laquelle ne prévoit et ne punit que les défriche- ments des terrains boisés-, ce qui est tout autre chose. L'ingénieur Fabre , dans son Traité su/' les torrents j prétend que les défrichements ne doivent être per- mis que par lisières en bandes transversales ou hori- zontales, ou de niveau, à peu de chose près Dans ce cas, les bandes défrichées seraient séparées entre elles par d'autres bandes pareillement horizontales, ou de niveau, qu'on laisserait Incultes et sur lesquel- les on permettrait au bois de croître. Ces bandes incultes seraient destinées à remplacer les murs de soutènement prescrits par la loi; elles auraient au moins dix mètres de largeur. L'ingénieur Surel, dans son Mémoire sur les tor- rents des Hautcs-Alpcs , publié en 1 841 , prétend que, (( pour régler les cultures sur les montagnes, il fau- drait d'abord faire une distinction essentielle sur les défrichements : les unes, qui ne détruisent pas la consistance du sol , pourraient être tolérées sans res- triction, telles seraient les prairies naturelles ou arti- ficielles; les autres, qui rendent le sol meuble, ne 59 seraient plus tolérées dans certains quariiers, qu'à la condition d'être assises sur un talus déterminé. ((Quel serait ce talus? On admet généralement que celui des terres coulantes est de trois de base sur deux de hauteur. Or, une pareille inclinaison serait déjà trop forte; car, si les terres coulent jusqu'à cette limite , par la seule action de leur pesanteur et de leur incohésion, elles ne s'y tiendront plus lors- que les eaux , d'une part , et les araires , de l'autre , auront augmenté chacune desdeux actions. On peut, d'après celte considération , fixer la limite cherchée au talus, qui aurait trois de hase pour un de hau- teur, bien entendu que c'est là une limite extrême qui ne pourrait jamais être dépassée (( Ce règlement ne s'appliquerait pas seulement aux terrains qui seraient défrichés à l'avenir-, il atteindrait aussi les défricliements déjà effectués, partout où ces défrichements auraient été suivis d'ef- fets nuisibles bien constatés. Pour réparer les abus du passé, il ne suffirait pas de prévenir les abus fu- turs; car le mal qui reste à faire sera toujours peu de chose , à côté de celui qui est déjà fait. (( On rendra aux terres défrichées leur adhérence primitive , a dit M. Dugied , en forçant les proprié- taires à les convertir en prairies artificielles, soil par l'autorité judiciaire , soit par faction adminis- tiative. On permettra les défrichements en remet- tant en vigueur l'ordonnance de 16C9 , laquelle prononce une amende de 3000 fr. contre tous ceux qui défricheraient les terrains en pente non boisés. » Le gouvernement n'userait que de son droit, en défendant , sons les peines les plus sévères, tout dé- 60 fiichenienl à l'avenu-; inais^ devraii-il forcer les pro- priétaires qui jouisseni depuis long-lemps des ter- rains qui ont été défrichés, à les convertir en prai- ries artificielles? Celle mesure serait très avanta- geuse au reboisement, parce qu'elle promeiirail aux troupeaux de pouvoir se maintenir en abandonnant les lerrainssusceptiblesde se boiser; mais elle semble iiop rigoureuse, et ne paraît pouvoir être généralisée dans tous les départements, particulièrement dans le nôtre, sans porter les plus grands préjudices aux lia- liilanls de la montagne. Cette question devrait être examinée allenlivemenl par nos Conseils généraux, afin de présenter, le cas échéant, les modifications convenables, exigées par les diverses localités. L'on a déjà objecté que les surfaces converties en prairies artificielles ou en plantations, seraient rem- placées , pour dédommager les propriétaires, par des terrains de conienance égale , que l'on prendrait dans les propriétés domaniales ou communales; mais il est à observer que, si de semblables terrains se rencon- trent dansquelques localités, la plupart des commu- nes ne possèdent ni communaux, ni biens domaniaux, et que, quand même cette possession aurait lieu, il y aurait encore impossibilité d'effectuer souvent de sem- blables compensations , parce que les terrains com- munaux oit domaniaux sont ordinairement situés sur les points les plus éloignés des habitations et disposés sur des parties très élevées, oi^i la végétation de cé- réales est impuissante, ou de peu de rapport. Ainsi, le projet de M. Uugied ne paraît pas pou- voir s'exécuter, en général, sur tous les terrains qui ont été défrichés, encore moins dans les divers do- maines particuliers; car^ dans ce cas, les proprié- 61 ^ X taires dcvraiciil renoncera la possibiliié de ciillivcr avec fruil , suivanl le mode adoplé, à cause de la difficulté de remplacer les terres épuisées par d'autres plus productives. L'étranger qui entre dans le Capcir est étonné de voir une plaine très productive en céréales ei en fourrages, dépouillée de son plus bel ornemen i : au cun aibre ne borde les terrains cultivés depuis la ma- gnifique forêt de la Malte jusqu'à Puyvalador; c'est en vain que quelques habitants ont essayé de border leurs propriétés de saules ou hêtres; la malveillance les a toujours détruits, au fur et à mesure de leur apparition. Parmi les mesures à prendre pour faci- liter le reboisement, il conviendrait d'en émettre de très sévères contre cette manie de destruction qui .s'exerce conlinuellemeni pour le seul plaisir de faire le mal. Le boisement dans le Capcir pourrait s'effectuer facilement, si l'on mettait en réserve la foret de la Galbe, où le hêtre se renouvelle tous les ans, par les semis qui se répandent naturellement sur le ter- rain; après leur belle venue, les sujets pourraient être distribués aux habitants pour être transplantés en grand nombre à la fois, sur les terrains impro- ductifs et sur les bords des propriétés en culture. Pour faciliter le reboisement sur tous nos terrains inclinés, il est encore une mesure à prendre, la plus essentielle de toutes celles qui sont en usage; cette mesure consiste à mettre en réserve tous les trou- peaux, et comme tels, de les soumettre au régime forestier : Sans cette condition, il est impossible de fixer la végétation de quelque essence que ce soil. Perpignan, le I" juin 184G. G2 BAPPOBÎ DE LA COIIMISSIOS chargée, par la société, d'inspecter les plantations d'oliviers et de mûriers du premier arrondissement des Pyrénées-Orientales , COMPOSÉE (le MM. Llanla , Jauberl de Passa el Companyo rapporteur. Messieurs , La commission que vous avez nommée pour vous faire un rapport sur les planialions iVoliviers el de mûriers doit vous rendre compte de ses investiga- tions. Comme rapporteur, vous me permettrez de jeter un regard rétrospectif sur l'état de Tagriculture dans le département pour mieux faire ressortir les résul lais obtenus par les propriétaires qui ont concouru pour les primes. Parmi les déparlements du midi , il en est peu dont l'agriculture soit aussi avancée que celle des Pyrénées-Orientales. Dans les terres d'arrosage, la jachère est inconnue; au blé succèdent les légumineuses, les prairies hi- vernales ou Jhratgcs , el les luzernes. Dans la Salanque, elle existe à peine par Texploi- lalion successive des céréales, du mais, des haricots, des pommes de terre, des orges mangés en vert, e^ des luzernes. Mais, tout ce qui tient aux plantations des monta- gnes et de certaines parties de la plaine , avait été G?, négligé jusqu'ici. Celle ère nouvelle de revenu n'a été ouverte cjne dans ces dernieis temps, et le gou- vernement, iiâtons-nons de le déclarer, a secondé riieureuse impulsion donnée par plusieurs proprié- taires. Au nombre des domaines qui ont été visités par votre commission , nous vous signalerons celui d'A- valri , appartenant à M. Azéma, vice-consul d'Es- pagne. Cet intelligent agronome a fait des plantations qui ne laissent rien à désirer. 11 a commencé par établir des pépinières assez vastes pour suffire à ses besoins. Vous nous permet- trez de vous soumettre un tableau synoptique.^ indi- quant la rotation de la pépinière avant de mettre le sujet en place. Tous les détails de ce tableau ont été puisés dans les notes recueillies par M. Azéma. 64 w 4> 'a •* 05 « ^ _3 — a» " 1 V2 s .s ^ «^ * ^ "^ eu o 4) .2 z; ; "-j: ï l-J ï O '.H c o H <- >■ s «• Si 1' l3g "2 o o b -4) "c 'a ■u a -a o C a-, c ? S " Il cC l^B. 4 S ^ w c > c 'C > • 1 O "1 "i4 Jli '5 tr u > < o eu il a) â J C O ^ ta j' o O s LZ 3* C "cl, fc. = ;? a « P "^ £) c = (M (M T-H ■5 5 -a C t-H T— ( ^-■O i2 h O CD O ^^ •* ■*-H o m if. '5 '^ - « = GO Ci fi iC c m Ori a ra c 'J •M ^ o o — CO •* cû Qi -ë n 3 s CO >=f a •* a = •* a a

*i l^ o o O ce O) eo c ^^ • a u H o o — CO o ,^ (M CO »o o s o 3 a o (M o — 55 G^ G^ T-H o s 9 o a. ffl •M CTÎ o; > S. ,"? O ô ■^ ■ cç e S 9 a 7r, o .S. •'5 ;2 2 S- o -a — P — 1 'S -2 S s; S Q, o -tu ^ 'X*- ^fa e 11 ■M a o 5- j3_ w c« Ln « > es c/5 ê (3 en c ■r, O O C/1 'VD o o 3 o c a. «ru 22 "S O H-i er > • iJ3 rz > "3 o ai ■< g'. r3 c; ^ ,_i ^ rë o C/: C/:! ^n Q co o SM CO ^ o H ■< i i 'S ce ce GO 2 ce 13 ' ::; GO a S ?-^ T-H T— T-H '"^ tH Q — «5 Après vous avoir fail connaîlre la marche adoptée par M. Azéma, soit pour étahlir sa pépinière, soit pour ses plantations, nous avons à vous signaler la manière de piauler les oliviers, ainsi que la taille de ces arbres, suivant la pratique de M. Azéma. Si rien n'est à dédaigner dans les arts ; si les per- fectionnements résultent quelquefois du hasard, de certains faits isolés qui finissent par se grouper el se servir mutuellement de preuves, on peut en dire aillant de lagriculture , science d'observation persé- vérante et de pratique : sous ces deux rapports, nous sommes heureux de publier tous ces docu- ments, que nous devons à l'obligeance de M. Azéma. Les oliviers dans sa propriété , sont espacés de 15 mètres en carré; ainsi l'arbre n'est pas gêné dans son développement, et la terre peut recevoir des récolles intercalaires. Les plants sont choisis parmi les sujets qui ont déjà cinq ans de pépinière. Les fosses disposées pour rece- voir les jeunes oliviers, ont deux mèires de super- ficie carrée el une profondeur de soixante-quinze centimètres, environ. Une couche de terre meuble est placée au fond de la fosse; les racines de l'arbre reposent sur cette couche de terre, qui varie selon le tronçon qui forme sa base, de manière que ce tronçon ne soit qu'à dix centimètres l\l. Azéma place ensuite une couche de terre el de la balle de blé ; la fosse est enfin comblée avec la lerre arable. Les oliviers étant mis en place , reçoivent quatre travaux de binage dans le courant de l'année; aussi les jeunes sujets oni-ils des pousses vigoureuses, et un très grand nombre porte déjà des fruits en abondance. m La laille employée par M. x\zéma est tout à faii différenle de celle qui est en usage dans le départe- ment ; elle consiste à élaguer les branches, à conser- ver avec le plus grand soin tout ce qui est suscep- tible de porter du fruit, et à proscrire la coupe des branches principales. Nous ne saurions trop appeler rallcnlion des agri- culteurs du département sur la (aille de lolivier qui, telle qu'elle est pratiquée, nuit au développe- ment de l'arbre et ajourne ses produits. Ce qui nous fortifie dans l'opinion que nous émeiious, c'est (jue nos voisins trans-pyrénéens ont des récolles d'olives plus fréquentes elplus abondantes que le Ronssillon; et cependant, c'est le même climat, c'est la même nature de terrain : la laille seule de l'arbre diffère , dans les deux pays. Outre l'avantage d'avoir établi , avec beaucoup d'intelligence , sa pépinière d'oliviers et d'avoir natu- ralisé dans le département l'olivier dit Jrhequincs, M. Azéma a le mérite d'avoir vaincu les préventions qui existaient contre tout développement de planta- lions dans sa propriété. L'exemple de M. Azéma a eu déjà des imitateurs , et quelques années suffiront pour créer des produits nombreux là où il n'y avait, trop souvent, que des mécomptes à constater par la culture exclusive des céréales sur un terrain géné- reux, sans doute, mais soumis aux influences clima- tériques des Aspres. Parmi les plantations d'oliviers , nous citerons celles de M. Maria Delhom , de Thuir : son domaine de Belle-Ftste a des oliviers qui remontent déjà à sept, huit et dix ans. Il a également planté deux coteaux en amandiers et en chênes -liège. Malgré la beauté (.le ces planlaiions, M. Maria Delliom jie se trouvant pas clans les concilions du progiamnie , la Commis- sion a en le regret de ne ponvoir Tadmeiiie à con- conrir pour les primes ù décerner. JNonsavons ici à vousenlreienir des plantations faites par M. Carcassonne àsa métairie, située à Cabeslany. Ce piopriétaire intelligent a organisé des pépinières qui lui ont fourni plus de trois cents oliviers mis en place. Les environs de Cabestany étaient ancienne- ment plantés d'oliviers 5 il est donc à croire que l'exemple de M, Carcassonne aura des imitateurs. Cet agronome, dont nous signalons les louables efforts, a prouvé qu'avec une culture simple, facile et de la persistance dans les travaux entrepris, on peut changer, dans quelques années, l'aspect d'une lo- calité, et y créer des produits nouveaux. Diaprés cet examen des domaines visités, la Com- mission a riionneur de vous proposer d'accorder 1° à M. Azéma , la prime destinée par le gouverne- ment aux plantations d'oliviers; 2° Une somme de 50 francs, à litre de récom- pense, au sieur Jean Tardieu, homme d'affaires de M. Azéma; c'est aux soins assidus et bien dirigés de cet agent qu^est due la prospérité de ces planlations; 3" Au sieur Julien Durand, berger de M. Azéma, une médaille de bronze et la somme de 25 fr. Cet ancien serviteur n'a eu, dans sa longue carrière, que deux maîtres : entré chez M. Azéma en 1811 , il compte aujourd'hui trente-cinq années de service, et, pendant une si longue période, jamais une plainte fondée ne s'est élevée contre lui de la pari des propriétaires qui avoisincnt le domaine d'Avalri. Ï5R Plantations de Mûriers. La Commission a visité le vaste domaine tle Cala- droy , situé sur les escarpemenls de Forçn-Rèal. Celte propriété de M. le marquis de Giiicsioux reçoit, tous les ans, des améliorations. Au domaine de Caladroy est annexé celui de La- Tour, qui n'a pas moins d importance. Ces deux éta- blissements agricoles, dirigés par M. Barlhe, habile intendant de M. de Ginesloux, sont très bien tenus. 11 est facile de voir qu'ils dépendent d'un agriculteur originaire des Cevennes, où il a puisé les idées de prospérité qui arraclicni à un sol ingrat tout ce qui n'est pas contraire à sa nature. M. de Ginesloux a voulu, de plus, que ces amé- liorations tournassent au profil de la classe agricole de celle contrée. Ainsi, il veut forcer, en quelque sorte, l'introduction de la culture des Cevennes dans le canton de Latour. A cei effet , une pépinière est établie dans les terres arrosables, et 25,000 mûriers la composeni. Les plantations de M. de Ginesloux oni commencé dans les champs a l'arrosage de la plaine de Latour; nous y avons constaté plus de 1,500 mûriers, d'une belle venue, très bien soignés, et qui sont déjà en plein rapport. La pépinière actuelle se compose encore de 1 5,000 sujets. Une grande partie est déjà disposée à être mise en place l'hiver prochain. Les résultats obtenus par M. de Ginesloux l'ont porté à étendre encore ses plantations sur les terres les plus ingrates , sur les flancs des rochers 69 ou le pic creusaii le fossé desiiné à un arbre. Tous ces essais ont parfaiiemenl réussi. Aussi, le domaine de Caladroy esi sillonné de plantations de mûriers. De la porte du cliàieau à la jonction de la route départementale de Millns à Estngell, une allée de mûriers traverse Caladroy en droite ligne. Plus de six cents sujets la composent, distants de 8 mètres l'un de Tauire. Plusieurs autres allées partent de ce point et traversent le domaine soit pour aboutir aux villages voisins, soit pour faciliter le parcours des propriétés Caladroy a 2,000 mûriers déjà en place; que sera- ce lorsque tous les ravins et d'autres propriétés, déjà convenablement appropriées, auront reçu de nou- velles plantations ! Si la plantation des mûriers, à Lalour, a été fa- cile , que de difficultés n'a-l-il pas fallu surmonter pour faire réussir ces plantations à Caladroy , sur luie colline qui donne dans beaucoup d'endroits une pente de 30 à 35 ccnlimèlres par mèlre ? Ce domaine est, en effet, sur le roc-; le granit en constitue la partie supérieure; le scbiste, avec toutes ses varié- lés, compose la base de la niunlagne; ainsi. Mes- sieurs, il n'est pas d'obstacle qui nail été vaincu. Si M. de Guiesioux n'avait été babil ué aux difficul- tés qu'on rencontre dans son pays natal , il n'aurait pas planté à Caladroy. M. de Ginesloux a introduit dans le canton de La- tour l'industrie qui fait prospérer la Lozère, en inté- ressant la populaiion dans l'élève du ver à soie, il ne plante pas le nivuier pour monopoliser, en ([uel((ue sorte, le produit de ces arbres; il vent que chacun y trouve le fruit de son travail et de ses soins éclai- 70 rés. A cel effet . il associe la population à rindustrie séricicole, et complète rreiivre, en offrant une édu- cation de 250 grammes, faite dans son chàieavi. M. de Ginestoux distribue de la graine, donne le nombre »le mûiiers nécessaire pour Talimentalion des chenilles, et les résuliais obtenus sont partagés entre le propriétaire et celui qui a fait l'éducation. Le tableau des produits de cette année, que nous extrayons des livres de M. Rarihe, intendant de M. de Ginestoux, vous fera juger de l'importance qu'acquerra l'industrie sétifère au fur et à mesure que lexpérience sera acquise, et que les arbres arri- veront à un pronqjt développement. Cinquante grammes d'oeufs de vers à soie ont donné 63 kilogrammes de cocons au sieur Etienne Chiffre de Latour; au sieur Brunet, 35 grammes de graine ont donné -^5 kilog. de cocon; au sieur Bap- tiste Conte, 50 gr. ont donné 'i3 kil. de cocon ; 200 gr. n'ont, au contraire, produit que 43 Lilogramines. Reconnaissons que les petites éducations réussissent toujours; qu'on ne saurait trop les encourager parle bien être qu'elles procurent en occupant des bras cjue 1 âge, ou les infirmités rendent impropres aux travaux des champs. Bientôt Caladroy donnera les mêmes avantages aux villages qui l'avoisinent, car rien n'est plus flivoraMe à la propagation d'une industrie que les bons résultats obtenus. M. de Ginestoux ne borne point l'améliora- tion de ses terres aux seules plantations de mûriers; ses vignobles sont en plein rapport. Des vacants immenses couverts de cbénes-)euse sont parsemés d'oliviers sauvages; les sujets qui pré- sentent un bel aspect sont greffés de bonnes 71 espèces; une éteiulue considérable de ces vacants est travaillée partiellcnicnl, et à mesure que les greffes en oliviers s'étendent , le bois de chêne disparaît , bien- tôt une grande partie de ces terres qui produisaient peu sera rendue h la culiure, et couverte d'oliviers qui donneront de très beaux produits. Nous avons vu déjà, sur ces jeunes plants, greffés depuis cinq à six ans, beaucoup de fruits. Ces greffes donnent encore à M. de Ginesionx la faculté de planter des oliviers partout où le besoin de ses terres l'exige, et de pou- voir fournir une très grande quantité de plants aux agriculteurs du déparlement. Bien que la Commission ail été unanime pour décerner à M. de Ginesloux la prime accordée par le gouvernement, nous devons vous signaler également les belles plantations de M. Bonavcnture Farines, à la métairie dite Mas Roma. Sur un sol insrat, sec et aride, elles ont parfaitement réussi. Elles se composent de trois mille sujets, savoir : En 1838, mùricrs-nains; 2,000 1840, nu'uiers liauie-iige , 500 1841, id. id. 100 1842, id. id. 400 Total , 3,000 Le produit des feuilles de ces arbres suffii pour une éducation de 2àO grammes d œufs. Tous les mûriers sont greffés cl d'une belle espèce, fia Milanaise.) Votre Commission, iMessicLirs, regrettant que les fonds alloués ne nous permctient pas d'étendre nos encouragements, a riionneur de vous proposer : 1° D'accorder la prime destinée aux plantations de mûriers à M le marquis de Ginesloux; 72 2° D'accorder une mention honorable à M. Bona- venlure Farines, pour ses belles plantations d'arbres de même nature ; 30 De décerner une médaille d'argent a M. Simon iiarthe, intendant de M. de Ginesioux ; 4° Au sieur Louis Monné , résidant à Latour , pour les soins qu'il porte aux plantations, ainsi qu'aux pépinières el à la taille des oliviers, une prime de 30 francs ; 5° Au sieur Louis Pla de Latour, pour les planta- lions qui lui sont confiées, la somme de 30 fr., à litre de récompense ; 6'^ A Raymond Ribes , âgé de 44 ans , marié , rési- dant à Caladroy, maître valet de M. de Ginestoux, pour sa bonne conduite , le zèle inlelligeni qu'il met à le servir, la somme de 30 francs. Tel est le rapport de votre Commission. CoMPANYO, rapporteur. n NOTICE SOR LE DE LA COTE DE BARBARIE. Programme de la Notice. Inïroduction. Sommaire. Exposé du sujet. — Premiers clablissements ratalans. — Politique arabe. — Echelles catalanes. Maroc. Sommaire. Relations commerciales. — Relations politiques. — Prise de Ceuta. — Ville d'Arzilla. — Nuages sous Pierre IV. — Reprise d'harmonie. Tlemcen. Sommaire. Colonie catalane. — Ligue de Barcelone et de Valence. — Per- sonnel catalan. — Traité de d3l9. Tunis et Boccif,. Sommaire. Traité de 1270. — -Prorogation de 1278. — Traité de 1285. — Emprunt de Jacques II. — Réclamation. — Prorogation de pait, ou traité de 1313. — Deux incidents. — Seconde prorogation de paix, ou traité de ■1525. — Relations jusqu'en \ 'i73. — Incidents de cette période. Bougie. Sommairt. Bougie Etat à part.— Traité de 1309.— Traité de ^5^3. — Fidé- lité d'exécution. — Secours de Barcelone. — Consul catalan. L'Ile de Gerbes. Sommaire. Conquête. — Raimond Montaner. — L'île devient tributaire. Echelles roussillomnaises d'Afrique. Sommaire. Traité de ^ 278. — Traité de < 51 2.— Traité de -1359.- Tunis, Alger, Tedeliz. — Importations, exportations. Les Colonies militaires d'Afrique. Sommaire. Les Maures chassés d'Espagne. — Colonies militaires d'Afrique. — Commerce catalan et rnussillnnnais. 74 Introduction. Sommaire. Expost du sujet. — l'iemier établisscnietit cutalun. — Politique arabe. — Ixbi'Ilcs oatalanes. Des précieux lenseigneuienls recueillis peiulaiK une mission oiTiciclle dans litalie septenirionalc , M. Louis de ÎVJaslairie, ancien élève de l'Ecole des Charles, a résumé l'aperçu des relations commer- ciales de la haute péninsule des Appennins, avec les Etals Musulmans qui ont formé la Régence d'Alger, depuis l'expulsion des Almohades et l'élévation des dynasties indigènes, jusqu'à la domination turque. Expose du sujet. Présenter en un cadre anologîie les fréquentations simultanées des Catalans au littoral du Maghreb ^ tel est le but de celte Notice, dont Zurita, les do- cuments diplomatiques de Capmany et nos archives fourniroiil le canevas. Mais le docte Capmany, fjui colligea sans se dé- placer du pays natal , n'avait point tout vu , ainsi qu'il résulte d'une récente publication de M. Champolion- Figcac. 11 ne put non plus, trop stalionnaire, remonter aussi près des sources que l'a fait heureusement M de Maslatrie. Premier clablissemenl catalan. INous emprunterons donc à nos deux explorateurs de France, et nous dirons , d abord , d'après ce der- nier, que dès le xii^ siècle, les Catalans pienaieni part, comme les Pisans établis en lîle de Tabarque, a rexploilalion des gisemens sous-marins de corail de Mers el-Djoun, producteur d'une qualité supérieure aux autres de la Méditerranée. S'ils filtraient furtivement à travers rArchipel îîa- léare, poste naturel de piraterie, échu de nouveau à l'infidèle, depuis Raimond-Bérenger III, comte de Barcelone, à Tabord des rives barbaresques, où nulle pari de réaction contre les Chrétiens d'Orient n'avait surexcité l'anlipaihie religieuse, où même la croisade franco-sicilienne de 1270 ne laissa d'autre souvenir c[ue la consolidation du tribut antérieure- ment consenti à Boger-le-Jcuue; ils trouvaient des peuples bien différents de ceux que nous y jugeons aujourd'hui d'après la physionomie qu'ils ont reçue de la suzeraineté ottomane. Chassés des deux péninsules et des îles intermé- diaires, contenus à leur lisièie maritime par la siq^é- riorité de la politique et des forces navales de la Chré- tienté , ces riverains de Barbarie regrettaient bien encore leurs beaux jours, les mosquées ci les champs délicieux de Cordoue; mais, n'ayant plus à craindre de guerres d'invasion, ils tournaient toute leur ac- tivité vers le commerce. Or, à voir dans leur géographe Edrisi le numéra- tion des villes florissantes de ces pnrages, on dirait que le génie de Caribagc, fille deTyr, peicant à tia- vers le réseau de racines vivaces de quekjues restes de civilisation latine, rafiaîchie aux siècles d'Averoès et d'Avicène, avait rétabli l'ancien cordon des colo- nies puniques. C'était avec la renaissance de l'in- dustrie agricole, féconde nourrice de l'industrie ma- nufacturière, avec les marchés des produits du sol , les entrepôts et les bazars qu'alimentaient les caia- vanes de l'Afrique ccnliale , éiablissemenls qui n'ai- lendaienl plus que les débouchés étrangers. Cet inlérêt matériel valut, sans doule, à nos pre- miers navigateurs la bien-venue , et des relations faciles. Si , d'ailleurs , des traditions sur Tancienne communauté de foi chez la vieille population nu- mide ne fécondaient point à leur profit quelque genre d'affinité et de confiance , toujours est-il , quant à ce merveilleux, qu'on vit des Emirs locaux rechercher l'amitié du Saint-Siège, tolérer l'exercice public du culte chrétien, et permettre des fondations monastiques, au xui^ siècle *; non qu'ils autorisas- sent la propagande évangélique, mais ils n'en repous- saient point Finfluence. Le fameux Raimond Lull , Mayorquin, avait argumenté, dans Tunis , contre les docteurs musulmans, et prêché publiquement l'Évangile dans lîougie, h deux époques distinctes. S'il est vrai ([u'emporté trop loin par son zèle, il y fut lapidé , Tan 1314 ^^ il ne l'est pas moins que la ré- pression n'eut point d'autre suite. Nous ne trouvons point, d'ailleurs, que les interdictions pontificales de commerce s'étendissent à cette côte , comme au littoral du Soudan. 11 n'y eut jamais lieu non plus d'y aborder, ainsi que chez ce prince , sur navires à bombardes. Vu la stricte et loyale exécu- tion des traités, une simple yole aurait pu s'y rendre sans inconvénient. Politique arabe. En contact avec les Pisans, les Catalans suivirent si bien les mêmes errements, que le premier traité ' Aperçu de Maslalrie, page ta de répreuve. '^ Reeuerdos y Belkzas de Espana, volume de Mayorqin. / / conclu (I230jeiiue ieni\s habiles niahres el les natu- rels du |3ays, fui le type de ceux (ju'ils obiinrent alors ou plus tard i. C'est ce que dénionlre la collection des docurneais diplomatirines. Les Pisans auraient volontiers aspiré au monopole des échanges, si les Emirs n'avaient compris que de la multiplicité des arrivages européens dépendait le développement du commerce local. Aussi atloptèient- ils le principe fixe de bon accueil à tous les pavillons exoti([ues. S'il y eut faveur, ce fut, comme d'usage, à raison de leur force, ou de l'importance de leurs négociations. La troque se partagea donc assez la rive africaine, selon le rayon de proximité. Gènes , Pise et plus tard Florence, Naples , la Sicile el Venise expétUèreni , de préférence, vers la partie orientale', les Catalans, vers le moyen Maghreb, sans négliger rexlrémiié d'Ouesl, jusqu'au-delà du détroit, et c^est entre ces limites ([n'apparaît aussi le sillage des nefs roussillon- naises. Mais ces directions principales n'exclurent pas un peu de promiscuité de provenance aux mêmes débar- cadères d'Afrique; heureux concours qui manqua rarement d'harmonie. Echelles catalanes. Il est temps de passer en revue les différentes échelles affectées de convenance à notre ancienne nationalité historique. 11 n'y aurait point eu, à cet égard, de guide plus sûr que la carte catalane ma- nuscrite de la rive africaine , que l'on croit rédigée au xv^ siècle. A défaut de ce document, qui fut ' Aperçu de Maslatrie, p. 6 de l'épreuve. 78 détruit à Mayoïcnie par M'"<= George Sand , nous dirons, d'après les monuments écrits, que nos prin- cipaux cmpoiium du pays, c'étaient Maroc, Tlemcen, Tunis et îîoup;ie, lîle de Gerbes, de Djerra ou de Ger- hah, Tripoli et les colonies quasi-niililaircs que fonda la puissance cs|)ai',nolerésulianl du faisceau d'Aragon, de Caslille, de Léon cl de Navarre. Tel sera notre jallonnenicnl , car, inutile d'abor- der le dédale des variations lerriloiialcs des régen- ces, ni celui des successions dynastiques, là où rien n'émane que de la force brutale. Maroc. Sommaire. Relations commerciales.— lldalions politiques. — l'risc de Coula. Ville ir A rzi lia. — Nuages sous Piene IV.— tieprise J'iiarnionie. D'après ce qui précède^ il ne serait point exact de penser avec Capmany ^ que les ports marocains soient les premiers d'Afrique où se présentèrent les Catalans. Relations commerciales. Néanmoins ce fut la capture opérée par les Sarra- sins baléares d'une nef barcelonaise expédiée , l'an 1227, vers Centaciui, constituant un second cas de trêve enfreinte , détermina Jacc^ues le conquérant à déblayer de son mauvais colonnage l'horizon mayor- quin ^. Or, il est à remarquer que, dans le conseil tenu à ce sujet par le prince, Nunyo Sancbez , ce sire apanage des comtés de Roussillon cl de Cerda- gne, se déclara très follement, vii l'intérêt du com- ^ Capinany , tome 5 , 2' partie, page !0!). 2 /6irf., tome 1, 2'" partie, page 80. 79 merce, pour la nécessité de rentreprise, dont il fiii du reste un dos plus vaillants oham[Mons i. Rclalions poliliqucs. Sur la Jin de son règne (1274), le même roi Jac- ques reçut à Barcelone Abcn-Jucef, émir de Maroc, de Fez , de Sugulmessc ei des !)eni-i\3arins , veiians. solliciter un secours de 50 voiles, 10 galères du nom- bre et tout autant de nefs armées, avec 1500 cheva- liers, f|u'il devait monter à ses fiais. C'était à Teflet d'enlever aux Grenadins la place de Coûta. Il offrit 200.000 besans d argent pour le- quipomeni et reniretien des forces de terre et de mer, outre la solde des Génetaires à raison de deux besans la journée, et de 100 au chef Bannerel 2. Jac(jues ne vit-il là qu'un aveu d'impuissance bon à exploiter par temporisation, afin de niî'nager en attendant la contiuuilé de quel([^ues débouchés à Tiidustrie du vasselagc? C'eru été prudence, car la demande , renouvelée en 1285, passe aux yeux de Zurila "^ pour un simple moyen d'intimidation du i\]arocain contre son adversaire. Mais la feinte n'aboutissant à ces fins, l'Emir con- voita telle étroite alliance qui lui facilitât la conquête si diversement méditée. C'était i\bou-Thabet ipii envoya, l'an 1309, Abou- labas et Bernard Ségui , marchand catalan établi à Fez, proposer au roi Jacques II de lui accorder un renfort de galères. L'Aragonais eût volontiers accédé, s'il ne se fût 1 Recuerdns y bcUezas de Efspaiia, vol. de Mayorqiip. 2 Capmany, lotne 3 , '2^ partie, page 109. 3 Zurila, tome t, f° 22.5. 80 antérieurement inierdit loute hosiiliié envers le roi de Grenade, vassal de Caslille, par iraiié consenti à Ferdinand IV^, roi de ce dernier pays. Arrivée à Barcelone , Tambassade marocaine y trouva la nouvelle de la mort d'Ahou-Thabet, et de l'élévation de son frère Abou-el-Rabi. Si la promotion de ce prince iiU , comme on le dit, IVenvre des chrétiens établis dans lEniirat, il fallait t[uc ce prosélytisme y format une masse bien imposante, ou compacte, dont le contingent de Ca. lalogne ne devait point être le moindre élément, vu que de l'historique seul de la négociation qui nous occupe, surgissent les noms de Pierre et de Bernard Segui, de Martin d'Oria et de Raimond ïoro, habi- tués de Maroc i. Quoi qu'il en soit, tranchant la difficulté, ou pre- nant un biais qui calmât ses scrupules, Jacques II renvoya les négociateurs avec un projet de conven- tion qu'Abou el Babi accepta Cet Emir en fit aussitôt retour sous même pli quune dépêche contenant offres, promesses bienveillantes , et demande d'un accrédité diplomatique pour conchire. Les porteurs la remirent au moment où le roi d'Aragon venait d'obtenir que celui de Castille se relâchât sur l'engagement relatif à son vassal de Gre- nade. Pendant ces préparatifs, .Tacques il eut à expédier (voie de mer) à Fez, Artal d'Azlor, Chevalier, qui, sur l'apparition des croiseurs de Grenade, subit re- lâche forcée à Cartagène. Cet empêchement inat- tendu, signalé au roi, fit presser l'aTmement de seize fortes galères, dont le commandement échut à Jaz- ' r.apmany , tome 3, 2'' p.irtiu , page 200. SI peri, noire vicomte tic Castelnau, investi à la fois du caraclète diplomatique. Comme amiral, il lui était prescrit de disperser Tescadre grenadine pour passer au blocus de Ceiita. En l'autre qualité, il devait simultanément aviser à la rcciilication du pacte d'al- liance , offensive et défensive, objet également au gré des contractants , parce qu'il importait également à leur politique *. Or, le traité se résumait aux trois chefs suivants, savoir : «Que le roi d'Aragon et l'émir de Maroc seraient, n contre tous les Snrrazins du monde , les amis de leurs «amis respectifs, et les ennemis de leurs ennemis ((réciprof[ues; «Qu'Abou-el-Rabi subventionnerait la manuten- (dion de la flotte aragonaise , et de 1000 Génetaires «fournis jusqu'à la reddition de Ceuta; «Et que la place gagnée serait à lui, mais le butin «à l'armée de Jacques. » Subsidiairement, l'infidèle avait à coopérer de son trésor et de sa marine à l'abaissement de Grenade; Plus, à jurer, selon sa loi, de ne faire ni paix ni trêve avec cette puissance , sans l'assentiment de son allié 2 Ceuta, conquis (1309), Casielnou y laissa garnison, et Bernard Segui pour Alcayt de TAlcazar •'. Entou- rée de l'enceinte à'wel' Almadajna , celle partie cen- trale et culminante des places arabes, appelée aussi Zuda ou Alcazaba, en était réellement le donjon '. ' Capmany , lomc 5, 2'" partie, page 200-201. 2 Ibid. , tome 4 , page 42. 3 Ibid., tome 3, 2'" partie, page 201 et note. * Recuerdos y bellezas de Espana, vol. dr Ataynrquo. 82 C'est ce qu'on voyail a Palma, Yviça, Torlose, Ca- laïayud et autres villes Abou-el-Rabi ne régna que deux ans. Sous-Abou-Saul , son fils et successeur, les condi- tions indemnitaires de l'alliance n'étant pas encore soldées, Jacques II, pressé d'argent pour son arme- ment de Sardaigue (1323), envoya Homeu de Cor- bera réclamer à iMaroc 40,000 doubles, montant de la liquidation, offrant, toutefois, de nouveaux secours maritimes, au besoin ^ Ville d'Arzilla. Ici, d'après le marchand et voyageur italien Bal- ducci Pegolotti, s'encadie ce renseignement mer- cantile , savoir : que , vers 1340 , les Catalans franchissaient le détroit , et que leur trafic d'éco- nomie et de commerce, consistant à gagner peu. mais souvent, avait obtenu d'un quart en sus l'aug- mentation du quintal de la cire, ce qui n'eut point lieu pour d'autres marchandises, telles que les cuirs de toute espèce, l'ivoire, la graine d'écarlate, l'alun et l'indigo qu'ils importaient de Fez, de Mequinez, de Salé, de Zafi ^. Douterait-on de leurs tâtonnements océaniques? Les peaux maroquinées portent encore , chez eux, le nom de Tafdet. Nuages sous Pierre IV. L'aurore du règne de Pierre IV fut troublée de sinistres annonces, provenant des échos de Maroc. Aussi brave qu'entreprenant, l'Émir ne parlait que • Capmany, tome 3, 2^ partie , page 202. 3 Capmany, tome 3, 2= partie, page ^47-^49. â3 dV.nvahii' l'Espagne par le royaume de Valence , où lui tendait les bras la vieille et nombreuse race nio- risque, dont les auleiu's furent précisément vassaux des Beni-Marins, possesseurs de Ternirai de Maroc , et même vassaux de Cassète. Rien de plus certain que le concours de Grenade à la tentative. D'aillei:rs, le nouveau Tarick avait déjà pris pied à Gibraltar et à Algézira , récemment conquis (1338) tout exprès. Loin de trembler devant la menace, Pierre fit appel à l'esprit religieux des rois contemporains de Mayorque, de Portugal et de Casiille. Comme clief naturel de la croisade, il recourut au Saint-Siège, en obtint le décime ecclésiastique, organisa sur grandes proportions l'armée navale, la distribua stratégique- ment aux points vulnérables, et les projets maro- cains d'aliaque s^évanouirent devant l'appareil de la défensive aragonaisc. Mais inopinément , Torage se détourna sur le roi de Castille qui, heureusement renforcé par celui de Portugal, renouvela pour l'in- fidèle, aux bords du Salado (1340), l'horrible bou- cherie de Navas de Tolosa Leur victoire consommant la sûreté de Pierre, ce prince s'empressa de les féliciter i. Toutefois, en 1345, il gardait encore rancune au vaincu, qu'il traitait de perfide 3/arocain, officiel- lement parlant ^. Finalement, la raison d'état lui porta conseil. Le roi de Castille ayant coalisé contre l'Aragon nombre de princes de l'une et de l'autre croyance, force fut de recourir à l'alliance de Maroc (1357). 11 y éprouva cependant moins de répugnance, car l'Émir était « Zurita, tome 2, f" 150- M 3. 2 Ré[j. des IMoiinaiesi ilc Pcrpijjnan, f" 17. 84 alors Abou-Heaun, beaucoup mieux disposé à des relations de bon voisinage, comme usurpateur des états de son père aux doubles bords du Détroit. Pierre IV renoua donc, par l'entremise de son am- bassadeur Pierre Boyl , qui stipula dans un traité valable pour cinq ans, (1357) : ((Que la guerre survenant entre Maroc et la Cas- «lille, l'Aragon ne donnerait aide à cette dernière, «à toute puissance hostile^ ni h des vassaux rebelles; «que le gouvernement aragonais, accueillerait avec ((faveur les affluences marocaines; s'interdirait en- « vers elle le droit de bris et de naufrage, et même «leur porterait secours en cas de pareil sinistre i. d Celle convention était à peine en cours d'activité, que l'Émir en obtint une prorogation de cinq ans, au moyen d'un négociateur africain, qui regagna Fez à bord du Mnyorquin François Portel ^. 11 était temps que le Maghrébin de l'Ouest, le plus fervent zélateur de l'Islamisme et de son intolé- rance, s'engageât enfin, d'après des stipulations réci- proquement obligatoires, à prendre sous sa main tutélaire hommes et biens jetés par la tempête sur la côte. Jacques-lc-Conquérant (1230), avait établi dans lîle de Mayorque, l'empire de ces articles du droit des gens '^. Alfonse III l'étendit (1286) à tous ses étals '*. Mais des Barbaresques avaient précédé l'un et l'autre prince dans cette voie de civilisation 5; 1 Zurita , tome 2, f" 287 v° et Capmany, tome 5, 2'' partie, page 202. 2 Capmany, tome 5, 2"= partie, page 20 j. 3 Coutume de Mayorque, Damcto, Recucrdos y bcllezas de Espana, vnl, do Mayorquc. * Livre vert mineur , de rcrpignan , f" 93. ^ Traité Génois, de 1250, dans V Aperçu de Maslatrie, page 10 de t'é- preuve. 85 et combien de peuples de l'Europe chrélienne éiaienl encore en arrière ! Ombrageux de l'accord qui précède, le roi de Cas- lille forma le projet de le rompre. 11 osa donc pro- poser à l'Émir (1358) de lui fournir un conlingeni auxiliaire pour parvenir à recouvrer, comme enclave de son royaume, les états que possédait, dans celui de Murcie, rinfanl aragonais Don Ferdinand, mar- c[uis de Torlose. A la justification de ses vues, il al- légua que le prince dont il méditait la spoliation ne se trouvait point à couvert d'un certain pacte conclu en 1357, n'étant^ a cette époque, obligé, ni vassal de Pierre IV , et croisant, au contraire, le fer avec lui, à la tête de ses féaux '. Pierre déjoua la sourde menée , el l'harmonie fut maintenue. Mais ici tarit la source des renseignements. De ceux que nous venons de compulser résulte que l'accès de Ceuta, principal marché du Magreb de rOuest, était ouvert aux Catalans, et qu'ils jouis- saient de la même liberté de trafic dans l'intérieur des contrées marocaines, dont ils coniournaienl le limbe maritime, même au-delà du Détroit, tout le long de ces plages appelées alors Espagnoles ^ ou du Ponent , confusément avec celles de (irenadeetd'Andalousie^. Tlcniccn. Sommaire, Colonie catalane. — Ligue Je Barcelone et de Valence. — l'crsonncl catalan. Colonie catalane. La harrière Baléare et le canal de Valence une fois libres, grâces à Jacques-le-Conquérant , les nefs ' CapnKiny, tome 5, 2"^ partie, pajjc 205. ^ Capmany, tome 3, 2° partie , page (40. ne catalanes se lancèrciii à pleines voiles , ei rapeiçii piécilé nous apprend ' : Qu'elles abordèrenlen nombre à la côle de Tlem- cen* que, vers 1247 , une colonie chrétienne, dont les migrations catalanes formaient la principale con- sistance , avait obtenu faculté de s'y grouper à domi- cile; qu'elle y possédait des maisons, des magasins, de bains, des oratoires on chapelles, et que, par le port d'Oran et de Mers el-Kéhir, elle y concourait |X)ur bonne pari au commerce du pays avec les mar- ches littoraux de la Méditerranée. C'était à peu près un établissement complet , qu'une administration forte et sage avait attiré, ou acquis, afin de réparer les brèches de la fortune publique par l'industrie mercantile ^. Ligue de Barcelone et de Valence. La colonie eut de mauvais jours à passer , lorsque Barcelone et Valence secoururent d'une armée na- vale (1315) l'Émir de Bougie contre celui de Tlem- cen. Dans ce conflit, le dernier perdit toute sa ma- rine ^. A Tlemcen, précédemment, tenait l'Emirat, de- puis 1268, la dynastie de Beni-Zain , ennemie mor- telle et inconmiutable des Beni-Marin , de Fez, que vainquit et asservit Hamou-Mousa , lallié d'Ara- gon ''♦. Malheureusement, cet Émir fut supplanté (1319) par son fils Tachfin. Impossible que la révolution ne trouvât quelque 1 Aperçu (Ift Maslatric, page 15 de l'épreuve. - Apcroii de Maslatrie , page iC> do répreuve. ■^ Capmany, tome 3, page 72. ^ Ihiii., tome 5, 2- partir, page 2IC. i 87 viciime parmi nos colons reconnaissants au précé- dent règne , ou qu'elle n'en menaçât les concessions gracieuses. Attentif à l'événement, Jacques II d'Aragon sonda le terrain; et le nouvel Emir n'étant qu'ardent et belliqueux, mais point personnellement hostile, Ber- nard Despuig, chevalier, avec Bernard Zapila, bour- geois de Barcelone, reçurent mission royale d'aller renouer les vieux liens d'amitié, sous la recomman- dation de Finaltérable bonne foi qui en avait ci- menté la durée i. Personnel catalan à Tlemeen. Or, du fond des instructions officielles données à ces délégués, ressort le tissu d'adresse et de cour- toisie la plus propre à capter la faveur du Barbares- que au profit du commerce, alors d'une telle impor- tance, qu'il s\Tgissail d'obtenir la délivrance d'un per- sonnel de trois cents Aragonais à la chaîne 2. Après l'expression du vœu royal pour l'harmonie et la paix sur terre et sur mer, pour une égale faci- lité aux vasseaux respectifs d'aller et de venir, de résider et de négocier chez les deux puissances , moyennant l'acquit des droits imposés, la partie offi- cielle donnait faculté : «De conclure une trêve de dix ans; d'accorder h. «l'étranger, s'il le demandait, quelques galères à «construire, toutefois de ses deniers, aux chantiers «d'Aragon qui seraient à sa convenance; de lui lais- «ser le choix du capitaine, sauf l'approbation du ('gouvernement aragonais, seul compétent à l'éclai-, ' Capmanv, tome 5, 2'" partie, page 2t6. 2 Ibid., pa'j;. 217. ((leij enfin Je lui iburnii- aussi uomLic île cLeva- (( liers, aiusi que V Amiral de hi Mer ». Les recomniandaiions secrètes prescrivaient d'exi- ger un gage de cordialité qui représentât le tribut an- nuel de 2.000 doubles, pour équivalent d'une rede- vance précédemment fournie : l'abolition du droit de bris et naufrage ; le rétablissement de l'ancien tarif des douanes j plus, en cas de guérite avec Gre- nade, qu^il fut loisible à l'Aragonais de s'approvi- sionner, au comptant, à Tlemcen, et que TIemcen fît alors à Maroc telle diversion qui empêchât l'Emir de se porter au secours du Grenadin '. C'était être bien sûr de son ascendant qvie de recherclier, accompagnée de tant d'exigences, une trêve avec son voisin. Nous ignorons la suite des négociations. Mais en fait, il n'est pas un Émir qui repousse les propo- sitions de la diplomatie aragonaise. Celui de Tlem- cen , surtout, devait être le moins difficile, sans cesse menacé par la dynastie de Tunis , et par sa rivale de Maroc, a laquelle il succomba l'an 1337 2. Or, son infériorité relative àces deux ennemies, se déduit des offres de secours de terre et de mer que le roi d'Aragon prend l'initiative de lui faire. Plus de faiblesse encore se révèle vis à vis de l'A- ragon qui, loin de lui louer sa marine, comme à d'autres, ne lui prêle que ses chantiers pour lui débiter son matériel , sous réserve de la main d'œuvre au pays. Jacques II entendait fort bien qu'un débouché catalan à Tlemcen faisait heureuse concurrence aux ' Capniany , tome 4, page G7. - Apcr(;ii dp Maslntrif , page t8 de IVpreuve. 89 niarcliaiuls de Portugal el deCaslillc '. Nous verrons plus lard que Jacques H de Mayorque fixait avec le même intérêt ce marché du Maglireb. Tamis ci ESosag'iï'. Sommaire. Tiailt- do 1270. — Prorogation de 1278. — Traité de 128.'). — I-^iiipruiit de Jar([ues II. — lloolaiiiation. — Prorojjation de jiaix, on traite de 1315. — Deux iiicidciils. — Seconde prorogation d(! paix, ou traité de 1325. — Helalions jusqu'en I'i73. — Incidents de^ cette période. Au commencement du xn'= siècle, couime nous Tavons vu , les navigaieuis catalans fréquentaient les ports septentrionaux d'Afrique. La capture par les Sarrazins Baléares d'uncde leurs nefs, revenant de Bougie, en 1227, fut un des motifs de la croisade aragonaise contre l'île de Mayor([ue '*. Les Catalans ne discontinuèrent point à la suite , consted'un règlement de l'an 1243, relatif à la percep- tion du péage provincial, dit Leude deTamarit 3^ pins d'une ordonnance de police, datée de 1258, concer- nant l'endjarcadère de Barcelone , et du code mari- time, connu sous le nom de Consulat de 31er s. Mais point encore de traité connu et de forme à garantir leiu' commerce de Barbarie ; tandis que les Pisans, dès 1230 et 1265, les Génois, dès 1230, 1234, 1250, les Vénitirns, dès 1250 cl 1260 étaient en possession d'exploiter commercialement les mêmes plages, sous la garantie de conventions diploma- tiques, de sauf-conduits et nssurcmcnts ''. Cependant le roi d'Aragon qui , déjà, l'an 1267, ' Capniany, tome 1, 2' partie, page 80. 2 Ibid. et page 81 . ■' Ibid. '' Api'Kii (le Maslatrio, pages 0, S, fO, 11,(3 dr répreiive. 90 avaii obtenu accès el faveur aux terres du Soudan de Babylonc i, ne pouvait laisser raclivité catalane dans ce provisoire vis-à-vis de ses plus voisines parties d'Afrique; et quoiqu'ail dilCapmany 2, qu'il est dou- teux qu'avant 1285 aucun traité eût assuré le com- merce de la navigation dans ces pays, voici qui jus- tifie ce grand prince. Traité de 1270. C'est M. Champolion-Figeac , par la découverte qu'il a faite à la Bibliothèque Royale, de la Conven- tion du 14 février 1270 3. Dans cet acte, daté de Valence, Jacques-le-Conquérant traite pour ses états d'Aragon, de Mayorque et de Montpellier, avec l'Émir de Tunis Abou-Abdilla, que combattit Saint- Louis, et c'est sur même pied de réciprocité que le Barbaresque pour les jjossessions et dépendances de son Émirat. Or, comme l'observe avec une admirable sagacité M. Champolion-Figeac, les concessions mu- tuelles sont si justement stipulées qu'en tirant une ligne de Montpellier à Zineiha, et de Dénia à Beni- Acchor, d'après le pacte, on obtient un parallélo- gramme inscrivant les Baléares, dont les deux petits côtés , sur les rives opposées de la Méditerranée , sont égaux, ce qui donne, dit l'auteur, la traduction topographique de cette idée dominante, savoir, libre pratique d^une étendue des côtes d'Europe , équiva- lente à libre pratique d'une pareille étendue de côtes en Afrique. Nous ne nous étendrons pas davantage au sujet 1 Capniany, tome -1, pufjcs Cet 7. 2 Capinany , lomc 1 , 2'-' partie, pajjc 204. 2 Uecutil de docmicnls inédits, tome 2, page 71 . 91 tVnn tlocunienl si parf'aiiemenl analysé par un maître (le Tari; mais, en bon provincial, nous ne pouvons nous abstenir de signaler CoUioure et Conct parmi les embarcadères à qui les dispositions s'en appliquent. Ajoutons encore que ce traité précéda de cinq à six mois le désastre de la croisade de Sainl-Louis , qui n'eut pour résultat que le traité Franco-Angevin et Tunisien , de novembre même année , fruit amer comme éclos s'il est permis de le dire, sur le cer- cueil du meilleur des rois. Abou-Abdilla mourut en 1277 '. A Jacquesle-Conquérant, qui l'avait précédé au tombeau dès le 5 juillet 127G, avait succédé son fils, de même nom , quant aux étals des Baléares, de Roussillon, de Cerdagne et de Montpellier. Prorogation de 1278. Ce prince crut devoir faire proroger de cinq ans le traité de 1270, ce qu'il obtint d'Yabya-Abouzakaria, fils et héritier d'Abou Abdilla , le 1 3 juin , 1278 î. C'est encore M. Champolion-Figeac qui nous l'ap- prend , d'après un document exhumé aussi de la Bi- bliothèque Royale, rectifiant avec celui qui précède, ou plutôt complétant la leçon du docte Capmany. Traité de 128S. Plus fort et plus redoutable que son frère puîné, l'héritier d'Aragon ne se boina point à celte deuïi- mesure. Si le succès éclatant d'une flotte vénitienne à Saini- ' Recueil de dorumenfs inédits, paj]*" tOO. ^ Ibid., page 87. 02 Jean-trAcre donna pied à Venise d'oblenir à Tu- nis , en 1260, rauiélioration d'un irailé de Tan 1250, qui, mieux que Pierre 111, par son Insigne amiral Conrad de Lança, avait établi auprès du gou- vernement tunisien le prestige de sa puissance? Qui, mieux que ce prince, à Constantine , où les razzia de ses Almugavares arrivèrent à Fappui des négocia- tions qu'ouvrirent, de sa part, des industriels cata- lans? Qui, mieux encore, à Collo, ce pori de Cons- lanline même, qui le vil dans tout l'appareil de ses armes, en expecialion du tocsin sicilien i? Au col de Panissars, enfin, le 4 des Noues, de juin 1285, ce même roi d'Aragon conclut, avec le plénipotentiaire de l'émir de Tunis, la convention dont suit la substance ">■ : c( Admission et sauvegarde dans les ports arago- c( nais à tous les Tixnisiens , ainsi qu'à leurs niarchan- « dises, et défense absolue d'hostilités h leur égard, «sous peine de réparation pécuniaire. (( Défense encore de prêter main-forte aux fins «de nuire à leurs propriétés quelconques d'Afrique. « Le vasselage aragonais devait secours et protec- «lion au navire et au Tunisien naufragé. «Nef de Tunis en partance des ports d'Aragon, ou «toute autre portant des Tunisiens à bord, devait « jouir des mêmes franchises que celles des nationaux. 11 y avait là reconnaissance du droit des neutres. « Nefs aragonaises armées ne pouvaient être ad- (( mises aux ports de Tunis. Et ces ports, nous dit-on ^, s'étendaient par La ' Zitri'rt, (oiiic I, 1" 250 v" 2'ifJ v", IMonlanos et Dojclusc. ■•^ Capmany, lonic 2, page 9. •^ AperiMi de Maslalrir, page 15 de l'épreuve, Ziirita , lonic I, f" 2-56. 93 Calle , 13one|, Diidjelli et Dellys , jusqu'au-delà do Chercliel. Collo même appartint à Tunis, ou à Bougie. «Prohibition au vassal aragonais d acheter des « objets dérobés aux Tunisiens , ou à leurs esclaves. « Interdiction encore à FAragonais de porter se- H cours au navire chrétien qiti, serré de près par un « vaisseau de guerre tunisien , chercherait sauvelé « vers la plage Aragonaise. Mais le navire poursuivi (( qui aurait gagné terre devenait inviolable, car il n'y (( avait de bonne prise qu'en haute mer. «Corsaires tunisiens en chasse d'ennemis pou- «vaieni faire l'aiguade et des vivres aux poris d'A- , et l'on ne peut penser que ce fût à l'unique usage des Européens, lorsqu'on y voit, au commencement du xive siècle, le droit afférent s'élever à 34,000 besans par an 2. «Les quartiers catalans et les Fondiques, à Tunis « cl à Bougie, étaient à rebâtir ou à réparer, aux ((frais du gouvernement local. K Les conventions arrêtées sous l'Emiiat d'Abou- ((Zakaria, devaient recevoir leur plein accomplisse- (' ment , de sorte que les marchands, alors, inique- Kment incarcérés et spoliés, fussent élargis et in- (( demnisés. «Faculté à l'Emir de requérir ou de prendre, au ((besoin, à loyer, tel navire catalan qui lui convînt, (( pour quelque mission en pays de paix. «Punition sévère à tout patron qui vendrait, ou ((livrerait odieusement à des corsaires son passager «tunisien, ou de Bougie, et prompte remise de cet «individu à son prince ^ s'il était retrouvé dans les « états d'Aragon. ' Apen;u do Maslalrie, pafjr 8 dp l'rprruvc. 2/6(rf., piige 18. 10 i Aussi voyons-nous (1447) le patron d'une nef raialane , nolisée par Tunisiens , donner ôiage de rexacliludc de sa parole à rendre cargaison ei pas- sagers à bon port '. «En cas de nécessite, TÉniir pouvait réclamer le (I service de vingt galères aragonaises, à raffrètemeni «de 3.000 doubles tous les quatre mois, pourvu que (( rarmeuient ne fût point contre une puissance cliré- « tienne. « Sur les droits catalans de douanes , TEniir devait payer, cbaque année de paix, à l'Aragon, savoir , ((3.000 doubles pour les états de Tunis, et 1000 ((pour ceux de Bougie, sauf, en cas d'insuffisance, (( à prendre le complément au trésor. Somme totale , au moyen de ces prorogations réi- térées, qui ne sont souvent que des confirmations avec développements sur points imprévus, le traité de 1285 obtint une longévité de trente-quatre ans bien constatée. A partir de son dernier renouvellement, stipulé en cbarle-parlie , plus de documents ratifiant la durée de l'état de paix. Mais elle résulte évidem- ment d'une suite d'expéditions mercantiles, ou de simples faits, en date de 1325, de 1334, de 1404, de 1439, de 1446, de 1447, de 1462 et de 1473 2. Dans le nombre se trouve trace de la mission des frères de la Uédemption, et de la traite des nègres, à bord d'un Aragonais, nolisé par des marchands bérèbères ^. ' Copniany , torae 2, pajje 271 . - Cajjmany , tome \ , 2" partie , page 85 et suivante ; toine 2, page 287j tome 5, 2^ partie, page 2t5. "^ Capiiianv , tnine ", 2'' pnriie, pige 2lo. 505 Iiicidetils de cette période. Nous ignorons à qncl point TAiagon fut fidèle au traité; mais nous le voyons, dès le 18 juin 1325, obligé de réclamer auprès de l'Émir de Tunis et de Bougie, la délivrance d'un patron de liarcclone et de sa cargaison , l'un et l'antre de mauvaise prise i. Le 8 janvier 1430, réclamation à l'Émir contre son lieutenant de Bongie qui, au mépris de ses ordres, n'avait point complètement restitué le chargement d'une galiolc catalane échouée. Il lui fut représenté qu'en pareil cas le vice-roi de Sicile avait fait pendre le détenteur -. Le 14 .'septembre 1444, le roi d'Aragon fui prié d'intervenir pour la mise en liberté de 500 esclaves chrétiens, dont 80 de Barcelone, maltraités à Tunis cl sollicités à l'apostasie en représailles de la déten- tion de quelques Africains aux bagnes de Sitile ^. Le 20 novembre 1446, même réclamation pour obtenir que le percepteur du droit sur le corail, pro- venant des corailleurs catalans et sardes à Tunis, baissai son tarif de 50 à 10 p. % 4. Bougie. Sommaire. — Bougie, élut à part. — Tniilé de l."0!). — Traité de 1513. — Fidélité d'exécution. — Secours de iîaicelone. — Consul catalan. Bougie , étal à pari. Abou-Feraz, Émir de Tunis, ayant conquis, nous dit Capmany, le pays de Tlemcen , en démembre ' Ciipniany, tome 2, page 90. ■* Und , page 2ô9. •■' llnd., pajje 258. '' Ibid., page 268. 106 celui de Bougie, dont il érigea, pour son iroisièuie fils, un élal à paît, pUiiôi qu'indépendant, car il dut bien retenir sur cet apanage une suzeraineté quelconque. A quelle époque, demandera le critique, eut lieu celle dotation? INous le demanderons à lui-même, car nous lavons vainement cherché. Le faii ni le nom de son auteur, tel que ci-dessus, ne se trouvent point constatés dans la notice de Abou-Hafs de Tunis, donnée par iM. Reynaud ^ D après ce document , on ne peut guère prendre que Yahya pour ALou-Feraz, quoiqu'ainsi désigné dans le dictionnaire géogra- phique de la Marlinière. Si l'application est juste, le démembrement de Bougie daterait d'avant 1249, époque du décès d'Yahya. Outre la capitale, c[ui comptait 20.000 maisons, le nouveau titulaire rangeait sous sa loi Dgldjelli, Micila, Migana^ Tetzesa, Zamora , Necaus, les mon- lagnesde Beni-Jubar, de Cabès et d'Auraz. ^. Miche, non de son territoire, uiais de son accès aux Chrétiens, Bougie était avec Tunis, le marché principal du Magrcb de l'Est. Les rois d'Aragon ne négligèrent donc pas ce .sous-Emirat, lorsque les traités tunisiens ne le concernaient, s'il est permis de le dire, que de seconde main. Traité de 1309. Dès 1309, Pérès de Mora , agent aragonais, y négocia la convention suivante, qui garantissait pour cinq ans : ' Ilecneil dea documenis iiicdils, loine 2, pagp -109. '■^ Cnpinaiiy, tome 5, 2'' paplie , el noie, il'aprcs Louis de iMunuoI ; et (oinc '(, |)a{;c ."9. 107 (( Liberté aux vassaux des deux puissances de fré- (t quenler el d'habiter les états respectifs, d'y voyager « sous sauf-conduit , sans lequel le pouvoir demeurait «irresponsable, et d'y exercer le commerce à leur «gré; (( Délivrance gratuite et léciproque d'esclaves ; « Li(|uidation d'intérêts précédemment acquis; (( Aux Catalans , concession de quartier spécial «d'habitation avec consulat; Fondique ou Loge, « el franchise des nations les plus favorisées, les Gé- « nois de Djidjedlli exceptés, car, tel était le pori «privilégié de Gênes ; «A l'Emir, assurance, de dix galères auxiliaires «d'Aragon, chargées de quatre engins, à raison de «20.000 doubles pour l'armement pendant quatre «mois, au nolis de 5.000 doubles mensuelles au- « delà de ce terme, et à condition de n'en point « user contre Africains amis de la puissance aiago- naise ; «Aux vassaux respectifs prompte justice dans les «deux mois de la i^lainie officielle, el sans que de «leurs griefs particuliers, sujets à réparation, pût ((s'ensuivre enfreinte de paix el trêve; «A l'expiration de celle-ci , délai de six mois aux « vassaux pour vuider réciproquement leurs affaires, «el les étals respectifs. La marine était donc toujours le côté fiible des Emirs barbaresques, relativement à l'Aragon, qui s'en prévalait , soit aux fins de s'immiscer dans la politique Intérieure, soit au profil de ses exigences pécuniaires. El de nos jours, la supériorité navale des puissances maritimes n'acquérait pas toujours immiinité de tribut auprès de l'Africain. 108 Traité de 1315. La bonne inlelligencc produisit de si heureux fruils que rÉmircliargea Jean Poculuyl, consul cata- lan , d'en solliciter la continuation «. C'est ce que le négociateur obtint au moyen de l'accord sous forme de charte-partie, en date du 7 janvier 131.T, dont voici l'analyse : '.(Paix et trêve de cinq ans à partir dul^'' mars, en «vertu de laquelle tout vassal d'Aragon et de Bougie (I acquérait sauvegarde sur terre et sur mer avec ses «marchandises non prohibées, sauf l'acquit des droits (i d'importation à l'entrée. « Faculté à tous de voyager dans l'intérieur des ((étals respectifs, moyennant avis au pouvoir res- (( pensable des mesures de sûreté. (( Les droits afférents à l'argent et aux marchandises ((d'importation une fois payés étaient définitifs quel- le que part de Tune et de l'autre domination que le ((marchand dût aller acheter ou débiter. (( Libre à lui de transborder. «Les marchandises reconnues de furtive inlro- (( duction restaient passibles des droits ordinaires. ((Défense aux agents de la Gabelle, chrétiens ou «musulmans, d'exercer des visites à bord des na- (( vires; permis à l'Alcayi seulement, assisté du con- (tsul. « Consulat d'Aragon à Bougie , Fondique d'usage, ((franchises sur pied d'autrefois, et plus avantageuses « même, s'il en était chez les Génois, ou tous autres 109 (( exoiiques ; mais au consul les anciennes ledevances (( de la Gabelle. «Les fondiqnes , sous la juridiclion du consul; '( nul Musulman n'avait à y pénétrer que de sou «aveu; prompte justice devait y être rendue aux « Chrétiens et à l'infidèle grevé de ces deniers. '( Le marchand n'était redevable à la Douane qu'à « n ois échu, et pour ce qu'il aurait vendu, sous «déduction de toute avance qu'il eût faite. « Tout dcbct de la Douane était remboursable à la « demandedes créanciers. «Dommages causés ou reçus entre intéressés à la «trêve ne constituaient point cas iVe?ifreùttc , mais «bien devoir de réparation, pourvu qu'il y eût dans «le trimestre notification officielle. «A l'expiration de la trêve, six mois de délai «pour régler les affaires de part et d'autre et vuider «les états respectifs. «Délivrance gratuite et réciproque d'esclaves.» L'article identique du traité de 1309 n'avait donc point été religieusement observé. Bougie, au reste, est la seule ville barbaresque où le cas soit prévit au profil de l'humanité. Quelle plaie que l'esclavage, puisque l'ordre de la Merci comptait à lui seul 2G,000 captifs rachetés de 1218 à 1317', sous le gouvernement de ses Grands maîtres laïques '. Ce n'était point seulement du pro- duit des quêtes que cette milice avisait à la rédemp- tion, mais aussi du revenu de ses commanderics, grevées à cet effet , comme celles des Templiers et ' Ribera , pajjc ôiO , n" 1l>4. 110 des Hospitaliers. Or, à ces trois ordres rédempteurs^ il faut ajouter celui des Trinitaires. Le traité ci dessus portail enfui : «Restitution mutuelle des navires capturés, de ((leur cargaison ou de 1 équivalent , ei levée du «séquestre, ou embargo de toute nef». « Plus, assujeltisscment de VÉmir à une redevance «annuelle de 1000 doubles à valoir sur les droits «catalans de Douanes, et, à défaut, sur le trésor (I public. » Fidélité d'exécution. Cet accord, offrant assez d'analogie avec les traités tunisiens, fut fidèlement exécuté, ainsi que le roi d'Aragon le témoigna officiellement à l'Emir le 18 mai 1315 '; et pas un indice de rupture qui se pré- sente tant que Bougie resta constituée en état à part, c'est-à-dire jusque vers 1223. Secours de Barcelone. C'est en reconnaissance que Barcelone n'hésita point de fournir à l'Émir (1314-13f5), le secours d'une escadre destinée à manœuvrer contre Tlemcen, ainsi que nous avons eu occasion de le dire ^. Rattachée à TÉmirat et à la fortune de Tunis, Bou- gie partagea, jusqu'à la fin du xv^ siècle, le bénéfice des relations de sa capitale avec la côte de Catalogne. A plus forte raison ces rapports augmentèrent-ils pen- dant l'occupation espagnole de 1510 à 1551 ^. ' Capmaiiy , tome \, page 62. 2 /6id., tome I, 2'' partie, page 83. ^ Ibid., tome 1 . 2« partie, page 85. 11 Consul catalan à Bougie. Il y avait consul catalan à Bougie , l'an 1315 i , c'est-à-dire avant le traité tunisien de 1323 , qui fut aussi stipulé pour elle. Mais le pouvoir consulaire de la côte ne paraît résider qu à Tunis, en 1325 ^. li'ïle de GoriKPS. Sommaire. Conquête. — UaimonJ Montaiicr. — L'ile devient tiiliu(aire. Conquèle. A l'avenue ouest des eaux de Tripoli, Tainiial Roger de Lauria, s'empara, le 12sop!embie 1285, de lîle de Gerbes pour le roi d'Aragoa, qui lui en conféra l'investiture féodale ^. Raimond Montaner. Mais à la mort du vaillant feudaiaire, sicilien, comme on sait, bien valut à ses enfants l'assistance de Frédéric d'Aragon, roi de Sicile, ainsi que l'expé- rience politique et militaire de luiimond Monianer (1313), à qui fut due la conservation de la conquête, comprenant lapeliieîle dcQuerquenez au voisinage*. Montaner avait préparé à Gerbes le iraité tunisien de 1313, que conclut Guillaume Oloniar ^. L'Ile (le Gerbes Iributaire. Peu productive par elle-même, l'île intéressait, néanmoins, le commerce, à raison de son marché. 1 Capmany, tome 2. Appendix, page 67. 2 Capmany, tome 2, page 90. 3 Zurita, tome 1, i" 277 v". ^ Ibid. tome 2, flO v° f' Ibid. Les Catalans y bàtireni donc une lour avec sa bar- bacane. De là , ils dominaieni les Syrtes. Nous ignorons si Gerbes était encore au pouvoir de l'Âragou lorsqu'elle fut pillée (1388) par les Gé- nois ^ Mais il est cerlain que le pays s^avoua tributaire de Fcrdinaud V, Tan 1497. Ëctaellc!« ronssillonnaiscs d'Afrique* Sommaire. — Tiailé Je 1278. — Traité de 1312. — Traité de 1359. Tunis, Alger, Tedcliz. — Importations, exportations. Insulaires et riverains de la Méditerranée, les états de Wayorque imposaient au souverain le soin de veil- ler à la prospérité du commerce maritime. Or, il faut en convenir, des trois princes dont se composa l'éphémère dynastie, pas un, sous ce rapport, ne faillit à sa mission. C'est sous Jacques I^r que la construction navale est chez nous parfaitement constatée, et qu'elle con- court au plus grand armement militaire que la suze- raineté aragonaise eût fait jusqu'alors. Traité de 1278. Déjà précédemment , à peine eût-il succédé à son père dans les mouvances Baléares, qu'il s'empressa d'obtenir, pour cinq ans, au profil des vassaux, la prorogation du traité de 1270, avec la puissance tu- nisienne. Bernard d'Oms, son ambassadeur, parvint à ce résultat aux Ides de juin 1278, conste d'un ' Mariana. 113 document publié par M. Cliampolion- Figeac i , comme exhumé de la Biblioilièque royale. Les mêmes religieux qu'où porte huit ans auparavant, y figurent en qualité de témoins, mais leur qualité de Franciscains est nettement énoncée. Trailé de 1312. Sanche, qui, tout roi du second ordre qu'il était, n'héslia point, plus lard, d'en remontrer diplomati- quement à l'Angleterre 2^ conclut avec TEmir de Tunis encore le trailé du 6 des Calendes de février 1312, d'après lequel Consulat était accordé aux pro- venances mayorquines, Fondique avec four à Tunis et à Cone^ ainsi que nous le révèle aussi M. Cham- polion Figeac ^ par une exiiumation du Trcsor des Chartes . D'aulres religieux furent témoins de l'acte passé par l'agent royal de Mayorque à la Chancellerie tuni- sienne , ce qui prouverait de nouveau la tolérance locale accordée aux ministres du culte catholique. Trailé de 1539. Jacques 11^ qui vit les nefs roussillonnaises s'élan- cer jusqu'à Byzance, ne se contenta point de les pro- léger, soit par l'établissement des galères perpigna- naises de conserve (1335), soit en faisant instruire hardiment (1335), une procédure tendant à provoquer une mesure do représailles contre le roi de Naples *. ' Recueil de documenls inédits, tume 2, page 95. 2 Capmany, tome (, 2' partie, page )ôO. •^ Recueil de documents inédits, tome 2, page <00. ^ Pierre (iirauil , notaire. 114 Le 15 avril 1339, même année où fui ouverle à nos navigateurs l'échelle française de Ilarllcur i, t\y- meri , vicomie de Narbonne, Aymeri de INarbonne, sire de Talayran, Dalmace de Casielnou el Hugues de Tatso, ses agenis h Tlemcen , y conclurenl, avec rÉmir de i^kroc, un iraiié de paix el trêve dont M. Champolion-Figeac nous a signalé le dépôt à la Biblioihèque royale '^. La convention était pour dix ans, portait abolition de course, du droit de iris et naufrage, et même obligation de sauvetage aux habi- tants des côtes respectives sur lesquelles aurait échoué quelque navire des puissances conlracianies. De la traite africaine, élaient interdits aux vassaux mayorquins les chevaux , les armes et les cuirs, tant de bœuf que de vache, salés ou préparés. Tedeliz , Alger , Tulîs. Ces divers traités font converger la course des nefs roussillonnaises vers le Maghreb central , d'accord avec les contrats de nos archives qui n'assignent que Tedeliz, Alger et Tunis, surtout aux expéditions de Canet et de CoUioure ^. Imporlalion el retours Elles y versaient, au besoin, l'excédant de nos huiles et de nos blés, el y puisaient aussi celte der- nière denrée dans les temps de disette. Nos facteurs y débitaient bien plus abondammenl les draps, en général ; draps fins et draps de burnous de la couleur qu'affectaient les tribus diverses. 1 Ordonnance du Louvre, tome 2,pn{;e 135. 2 Recueil de documents inédils, tome 2, page t 12. 3 Guillaume Gaulasses, Jacques Molines , Antoine GirauJ e( autres no- taires. Ils appoilaicnl, en lelour, la cuiraleric i harba- rcsfjuc fCuyrain bnrbarisvlij cvue. ^ on préparée, du corail , de la rire ei de la la'uie aussi peu csiimée que celle de Aiayorque , car Tune el Taulre jouissaient du droit de libre exportation, à Tinverse de la laine indigène dont la sortie était prohibée. S'il est vrai, comme lavancc l'auteur de l'Aperçu ^, (pie les Génois lissent grand commerce de cette matière première, bruie, lissée et teinte, ce n'est poinlchez nousqu'ilsvena ent s'approvisionner, llsen soutiraient bien quelques draps, mais surtout de la pelleterie. Nous avons suivi les Catalans à Arzilla -^ et rien d'étonnant alors qu'on nous les signale avec les Por- tugais à Ceuta, Tanger et Salé'*. Les nefs roussillon- naises les aceompagnaienl-ils sur cette cote? D'après le Règlement municipal des assurances maritimes'', elles n'étaient pas, du moins, étrangères aux bou- ches du Tage. D'autres documents nous les présen- tent vers celles du Duero et du Minbo p, au char- gement de la morue et du poisson salé. Les colonies militaires (9c la eôte d'Afrique. Sommaire. Les Maures chassés d'Espagne. — Colonies militaires crAfriiinc. — Couiiiierfe catalan et rouGsiUonnais. Les Maures chassés d'Espagne. Définitivement expulsés de leur délicieuse Gre- nade (1494), les Maures se réfugièrent à la côte * Nous avons cn)|ii'uiUé cet pi|iiivalent du mot catalan cuyram, dans 1; table (la l'etlt Talainus de MonljtcUier , publié pour la première fuis en I8.~(! ^ Aperçu (le iMaslaliie pa(;c 7 de Teprenve. ^Capniany, tome T», 2' partie, pa}>es I '«7-1!)!). ^ Aperçu de ?ilaslalrie, psge «S de Téprenve. * Livre I A'Ordinaliovs, h la Mairie de Perpignan. •* Divers notiiircs. 116 d'Afrique d'où ils s'élançaient comme des bêles fauves de leur repaire , pour léagir sur mer par la piraterie, sur terre, par des irruptions aussi furtives qu'inopinées , qu'éclairait l'incendie , qu'ensanglan- taient des massacres accompagnés d'esclavage sans ra- chat,oud'une exorbitante rançon, sil'onn'apostasiait. C'est ce que constatent plusieurs constitutions de Catalogne ' de 1520 à 1590, déposant aussi des arme- ments maritimes demandés à Barcelone, et a Va- lence en vue de défensive et de garantie contre ces déplorables calamités. Colonies mililaires. Or, avant même que cet état de choses empirât sous les deux Barberousse , Dragut, et la domination nominale des Turcs , ou les Régences , le goviverne- meni des Royaumes-Unis de Gasiille et d'Aragon essaya de le réprimer en colonisant militairement la lisière barbaresque. Dès 1497 , il s'empara donc de Melilla, à la hau- teur d'Almérie; en 1508, de Vêlez Gomera et de son penoji, à la hauteur de Malaga ; en 1 509, d'Oran et de Mers-el-Kébir ; en 1510, de Tripoli, et successive- ment le cordon des stations espagnoles s'étendit de- puis les Syrcies jusqu\î Ceuta, tandis que les Portu- gais continuaient l'occupation au-delà du détroit des Colonnes^. Dans ces diverses expéditions figure avec éclat Mi- chel Boëra 3j descendant, selon Capmany '*, d'une 1 Tom. 4, Liv. 4, Tit. 29. 2 Mariana, Ferreras. s Publ. de 1855, n" 4. * Tom. -t, V* partie, pag. -)85 et note. 117 famille roussillonnaise. A celles ([iii leur succédèrent Don Bérenger d'Onis, amiral i , ei Don Gabriel de Llupia^, capitaine propriétaire d'une galère, tous les deux Roussillonnais, augmentèrent par de bons services l'illustration de leur noble sang. Il y avait urgence à couvrir d'une égide tutélaire ce qu'il restait encore de commerce avec l'Egypte en 1520, et surtout les primeurs des deux Indes; car, depuis que Camoëns avait poétiquement narré comment ses compatriotes avaient affronté le cap des Tempêtes, personnifié en géant Adamaslor , c'est à Lisbonne et non à Alexandrie qu'était l'entrepôt des produits de l'Indostan : à Cadiz et à Séville, après le développement des découvertes de Colomb , la balance des denrées du Nouveau-monde. De tous les points de la JVIéditerxanée , on affluait à ces trois ports pour y charger de seconde main. Relief de la couronne d'Aragon, qui avait refusé à celle de Cas- tille tout concours aux frais des premières explora- tions tiansailantiques, Barcelone n'obtint qu'en 1702 faculté d'envoyer tous les ans deux navires aux Indes espagnoles •^. Commerce catalan et Roussillonnais. L'Abeille mercantile de Catalogne voltigea de fleur en fleur aux marchés africains, et sa sœur la Rous- sillonnaise l'y suivit de compagnie. En effet, le cahier des doléances , remis aux Députés de Perpi- gnan, partant, l'an 1585, pour les états de Montçon, * Ferreras. 2 Rég. ù5 de la Pioc. Roy., f° 257. ^Conflit de Catalogne, I vol., liv. 4, lit. 2R. 118 signale la cupidilé des habitaiils de Cullioure à sur- faire dans leurs frais d'hébergcnieni el anlres dé- penses, les marchands qui allaienl s'eml)arf[uer à bord des nefs destinées aux Dcux-Siciles, à Alexan- drie et à Tripoli. C'est l'abus sans daule qui donna lieu à la grande discussion d'embarcadère (1359- '1389, entre ce port et celui de Canei i. De Tunis à Tripoli, dans la traversée du golfe, le nocher roussi llonnais pouvait saluer de ses pavois riiomonyme de Ruscino , si ce n'était là le berceau de son origine. De 1510 à 1520, les expéditions de Perpignan, par Collioure, à Cadiz , étaient fréquentes 2. A la fin du même siècle, le Roussillonnais avait connaissance des îles Fortunées (Islcs bcatcs.J^ dont il comparait au sien l'heureux climat. Renard de Sainï-Mat.o , correspondant du minislcre de l'Instruction puhlitjue pour les travaux historiques. ' Liv. vorl mineur ' 2 Bernard Borgo, notaire. ^ iiy An€'Hi:^i.&€iis: MjOvae.e, m; m Ywmm mm de sai^t-martivde-camgo ', Tirées de ilocumeiils aullieiiliqucs , el iiarllculièremcnt d'un iiivenlaire des lilres de celle abbaye, dressé en 1586, par le Visiteur apostolique Don Jean d'Agullana. PREMIERE PARTIE. A peu de tlisianoe et dans renclos même de Sainl- Marlin-de-Canigo, qui s'élendail jusqu^à la Porta fovana 2, on trouve une église en ruines appelée Saint-Marlin-le-Vieux, paroisse autrefois de Casiell^. L'identité de ces deux noms de saint a répandu sur Torigine du monastère une confusion qu'il convient d'abord de débrouiller. • Le nom de Canigo, ou Canigou, comme on l'éerit ordinairement en fran- çais, en changeant en ou Vo sourd de Canigo, est dérivé du latin Canum jugum (sommet blanc de montagne) qui se prononçait Canum iugum ou plutôt Caiioîni io^om. Tel est aussi le nom lalin du Mont-Blanc des Alpes. 2 Porte extérieure. "* Caslell est mentionné, en 966, sous le nom de Castrum Samii-Marliiù, 120 L'inveulairesus-énoncé signale , aux n°' 1 101 , 509, 510, 51 1 , 512, 513, plusieurs dous faits au monas- tère ("zo/wj^Zc/to ou cofz/oZ'/o) de Sain t-Mar lin, y esl-ildilj et c'est sous les dates de 997 (la plus ancienne à peu près de ce répertoire), 998, 999, 1000, 1007, 1008. Ces dons sont des alleux au territoire de Marresans ([\Jarinyans)et de Soanyes; une pièce de terre à Coma, près de Thorent; deux vignes à vSahorra; un alleu au même endroit ; une métairie dans le vallon de Molitg. Mais le rédacteur de l'inventaire, qui n'a fait que transcrire, sans aucun ordre de dates, les éiiqueiies des chartes originales qu'il indique , aurait pu voir dans les textes, s'il les eut consultés et compris, qu'il y s'agit, non de monastère, mais d'église, mot désigné en latin par domus , maison; car c'est ainsi que dans le moyen-âge on appelait une église , comme dans l'Écriture-Sainte, où maison du Seigneur est syno- nyme de temple. V. Ducange. El en effet, sur qua- tre donations que nous avons encore à mentionner à ce sujet, il y en a deux : l'une citée dans l'inventaire, et l'autre extraite du cartulaire de l'abbaye, qui se trouvent insérées en entier dans la Marca hispnnica, elc/esllà qu'on les voit, contrairement même à leur titre emprunté, appliquées toutes les deux à l'église Saint-Martin, ad domum Sancti-Martini , sans autre désignation. Voici ce que disent les chartes des quatre donations : Château de Saiiil-lMarlin, dans le testament de Scniofred, comte de Cerdagne, où ce seigneur lègue à son frère, le comte Oliba-Cabréta, les vignes qu'il possédait du clief de son père, le comte Miron, situées auprès de ce cbâteau {Marca hispanka, col. 886). 1*21 Eu 1005 ei le 2 des ides de juin, Guifred i II, sixième comie de Ceidagne et Couflcni , fils el suc- cesseur d'Oliba Cai)réta, donne, conjointenienl avec sa femme Guisla , à Téglise de Saini-Martin {ad do- mum Saiicti-Martini... libi Sancto-Martino) , Taileu qu'ils oui à Algaded, lerritoiie de Vernei -. (Inven- taire, n" 5, Marc, hisp., roi. 961. En 1007, le 8 des calendes d'avril, la même église reçoit d'Adberi et de sa femme lUcIiel un alleu au territoire de Sahorra (Inventaire, n° 512). Le 5 des ides de mai suivant , la comtesse Ermen- garde, mère du comte Guifred, veuve d'Oliba Ca- bréta, la gratifie d'un de ses alleux au territoire de Lup\a {lôid., fol. 11 8, B.) Enfin le 2 des ides de juillet de la même année 1007 , le comte Guifred et Guisla sajemme , pour le ' Ce nom , ainsi que plusieurs autres (l'origine rcltiiiue ou germanique qui commencent par Gu, se trouve aussi écrit par W, WiTred ; mais l'ortho- graphe que nous suivons est depuis long-temps la plus usitée. 2 Le village de Vernet est cité, en 8G.", dans un acte du Cartuiaire de l'église d'Elne. En 874 il y fut tenu un plaid dans l'église de S'-Saturnin, maintenant ahandonuée et ruinée depuis environ quarante-cinq ans, par suite d'un déhordement de la rivière de Cadi, qui en 1710 avait détruit une grande partie du quartier appelé Vilallonga, où était cette ancienne église (Marca hisp., col. 796). Dans une charte de Tan 898 (Ib. col. 851 ), il est fait mention du château de Vernet. Nous ignorons en quel temps il avait été bâti. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il ne peut être attrihué aux Maures, en dépit de tant de gens du pays qui voient partout des monuments de ces étrangers sur nos montagnes, tandis que l'histoire nous apprend que, hien loin de pouvoir s'y établir , ils ne purent les franchir, la première fois > qu'après trois ans consécutifs de vaines tentatives, et qu'en 7aG , en parti- culier, un de leurs plus vaillants Généraux périt avec la plus grande partie de sa puissante armée, en entreprenant de forcer ces barrières, moins acces- sibles encore alors qu'aujourd'hui, et bien défendues par le courage de non ancêtres. 122 ilixième qui lui rouipète i, donnent à l'église (ac?(/o- »mni) de Sainl-Marlin , siluée sur la côie du mont de Canigo, les alleux qui leur appartiennent à Vernel et dans son territoire , un autre dans celui de Millas, un troisième à Llupia et dans son territoire, « afin, ((disent-ils, que ce même lieu (Saint-Martin) soit ((édifié en l'honneur de N. S. J.-C. , qu'il y soit ((attaché des hommes qui militent sous la règle du ((bienheureux Père saint Benoît, et que, selon la ((volonté et le privilège du Pontife romain et de " l'évèqne d'Elne, et selon l'institution du roi de ((France, on y serve perpétuellement le Toul-Puis- ((sant » i^Marc. Jiisp. , col. 964, extr. des arch. de Saint-Martin.) Chose étrange! cette charte qui donne une notion et une date si précieuses, ne figure nullement dans l'inventaire, bien qu'elle existât aux archives, comme ]'a fait voir Mgr. de Marça C'est donc bien positivement en juillet 1007 que fut fondé le monastère. A. la vérité, le site où nous en voyons les restes , n'est pas précisément celui qui avait été d'abord choisi; nrais cela vient, sans doute, de ce que le comte , au moment d'effectuer son projet, trouva convenable de le modifier à cet égard. Cette laborieuse entreprise ne tarda pas plus de deux ans à être mise à fin, puisque l'église conven- tuelle, dont le changement, fait par le fondateur à son premier plan , exigeait la construction, fut dédiée le 4 des ides de novembre 1009. 11 est bon de voir ^ Le dixième, que la loi (jolhe allouait aux femmes sur les biens de leurs mûris. comment s'exprime l'évêque consacrant dans le pro- cès-verhal de celle cérémonie. «Moi, Oliba, évéque du saint siège d"Eine,ie suis «venu au lieu nommé Canigo, pour consacrer «l'église siluée en ce lieu, en rhonneiir de saint ÎMar- « tin , évêque et confesseur, de la Sainic-Vierge «Marie, de Saint-Michel-Archange, et qu on appelle «Monastère de Canigo, construit sur celle mon- « tagne par un prêtre ei moine nommé Sclua ', sous «les ordres el la direclion bien entendue du sei- « gneur Guifred, comle, par la grâce de Dieu, et ((de sa fenmic Guisla, qui ont enrichi ladite église « de vases sacrés el d'ornements sacerdotaux o Nous allons dire, en substance, ce que poile le reste de Tarte : Les fondateurs appliquent à la nou- velle église les domaines (pfils avaient donnés au vieux Si-Martin, le 2 des ides de juillet 1007, en y ajoutant deux métairies. Tune à Sahorra et Taulre à Enveig. Les assistants, au nombre tie vingt, don- nent jusqu'à IG vignes situées à 111e, à Uigardâ , à Tarerac, Forques, Vinca, Moliig, etc. Levéque as- sure et confirme, en ce jour, tous ces dons à l'église (clomui) de St-Marlin, à condition que les moines qui y serviront Dieu, seront toujours sous le régime de la sainte Eglise mère d'Elne, sous le sien et celui de ses successeurs ÇMai-c. hisp^ col. 971 • inv. n° 142) 2. ' Le nom do Sclua a clo changé en celui de Selva par tous ceux qui n'oni pas lu ou qui ont mal lu les manuscrits originaux. 2 Une petite chronique des premiers temps du monastère de S.-JM., tirée des Mss. de la bihliotlièque Colherline et publiée par îîaluze dans ses Mis- cellanea, énonce et la Gallia clirisliana le répète, que l'église do ce monastère fut consacrée de nouyeau en I02G. Mais on ne connaît point d'acte de cette seconde consécration invraisemblable. F, 'Inventaire et la Marca liispanica n'en font aucune mention. Celte chronique contient assez d'autres erreurs-. 124 L'église de St-Alaiiin de Canigo, conslruiie dans loule la simplicité du style roman, primordial, est à trois nefs séparées par de lourds piliers. Elle porie sur une crypte creusée dans le roc, de même forme et d'égales dimensions, mais plus basse, qui était dédiée à la sainte-Vierge. Le seul ornement du vais- seau supérieur est l'arcature qui règne au dehors en haut des apsides. Sur deux des piliers de ce vaisseau se trouve sculptée une fleur de Us assez semblable à celles que présentent plusieurs des plus anciennes monnaies de France et d'Aragon (P/. I). Quant au monastère, l'historien Jérôme Pujades et frère Reginald Poe ^ qui avaient visité ces lieux, s'accordent à dire, entre autres choses, que les cel- lules n'étaient guère plus spacieuses que des tom- beaux, que celle de Tabbé seulement était éclairée par une lucarne si petite même , qu'on pouvait à peine y passer la tête, et qu'elle donnait sur des ro- chers et des précipices affreux. Foc ajoute que ces cellules avaient été détruites comme inutiles , peu de temps avant l'année où il écrivait (1627). 11 y a apparence qu'elles furent abandonnées , lorsque la communauté, qui s'était vue composée de quinze moi- nes suivant Pujades et Poe, (V. plus bas fan 1 150), se trouvant réduite à peu près à l'abbé et aux offi- ciers claustraux , au nombre de six , on construisit pour eux des habitations particulières (V. PI. II). L'époque de leur première construction n'est pas ' Le docteur Pujades, daas sa Crdnica gênerai de Calaluna, et Fr. Rég. Poe, dominicain, dans sa Vida de san Galderique, imprimée à Perpignan, en 1 627, ont inséré, dans ces écrits, quelques Dotices sur le monastère de S'-Martin qu'on peut dire identiques dans le vrai comme dans le faux. 125 précisément connue ; on pourrait la rapporter néan- moins au xiii^ siècle, mais particulièrement au xiv<^j car c'est alors que les officiers commencent à figurer sur l'inventaire , et qu'on les y voit jouir en ménie- lemps du revenu de leurs offices changés en béné- fices. Tout étant prêt pour réialilissemenl d'un corps religieux à Saint-Martin, le comte Guifred sollicite du Saint-Siège la concession de l'église qu'il a fait bâtir et consacrer à celte fin. Par une bulle-privi- lège en date du mois de novembre 1011, le pape Serge IV lui accorde celle église, avec confirmation des biens qu'elle a acquis et qu'elle acquerra dans l'avenir. Il y prescrit en méme-lenips que les abbés du monastère soient élus librement par la commu- nauté, selon la règle de saiiil lîenoîi (V. celte bulle dans Marca, col. 988, et le n° 2 de rinvenlaire). L'original, écrit sur papyrus doublé de loile, se con- serve comme un monument précieux à la Biblio- thèque publique de Perpignan. Il a été envoyé à Paris, en 1842, par ordre du ministre de l'instruc- tion publique pour en êlre pris un ftic simile. Les premiers moines de Saint -Marlin furent tirés de Saint Michel-de-Cuixa ^ , et n'eurent d'aboid pour abbé que celui de cette même abbaye, Oliba (frère du comte Guifred), qui régissait aussi et simultané- ment le monastère de Sainte-Marie-de-Kipoll, en Ca- talogne, depuis l'an 1009 {GalL Christiana.) Mais en 1014, cet abbé et les religieux de Cuixa, * On a pu remarquer que Saint Michel est un des trois patrons auxquels réfjlise de Saint-Marlin fut dédiée. \'2ii le comle Gulfred cl Bernard, son frère, comie de lîésalu, exposèrent à levêque diocésain, Oliba, qu'ils avaient déterminé de meure à la lêie du monastère un abbé pris dans le sein même de la communauté, \u que 1 église était consacrée et siiffisamment pour- vue de revenus et de moines. Ils priaient, en consé- quence, ce prélat de leur donner cl nommer pour abbé de Sainl-3Jarlin frère Scliia, qui avait construit le monastère. Cette demande est souscrite par Tabbé Oliba, le comte Gnifred , (iuisla sa femme et plu- sieurs moines Tlnvcnt. u° 3). L'abbé Sclua recul en dot quelques propriétés au len itoire dlUe , notam- ment un alleu près de l'ancienne église Saint-Etienne, en i0\6 {lôàL fo 112, v). En déférant à févêque d'Elne la nomination d'un abbéde leur choix , les électeurs semblent s'être con- formés plutôt ou v(eu du fondaicitr (Voyez, plus liant, lacie de fondation), ei à celui du consacrant de l'église, qu'à la règle de Saint-Benoît el aux pres- cripiions du pape Serge IV. On rapporte qu'en l'an précité 1014 le con)ie Guifred désireux de doter son monastère de quel- ques reliques, envoya des émissaires dans le Tou- lousain pour tcàcber de s'en procurer, et qu'ils en revinrent avec celles desaini Galdéric(ou Gaudéricj, (Petite chronique déjà ciiée; Hist. de Long.; Gallia Chris dan a ^ etc.) Il en sera reparlé ci-dessous. L'in- ventaire, n° 181 , mentionne, en effet, sous la date du 8 des calendes d'octobre 1015, un don faii à l'église de Saint-Martin , à Saini-Galdéric el aux autres saints qui y sont. 1017, 4 des calendes de mars. Le comte (iuifred et sa femme vendent à l'abbé Sclua el à Sainl-Mariin 127 ce qu'ils possédaient en alleu, à Targassona, Torha , Parilinclla ei Livia (Jbid. 923.) L'an 1018 ei le 13 (les ralenclesclaoùi , la comtesse Guisla fait son testament et lè^ue à Sainl-i^Jariin ses alleux trOrella, Guissa ei Celra, et deux de ses plus beaux draps de lit' (Inventaire n° 8, Marc, hisp., col. 1019, où se trouve l'acte en entier). Dans le mois de juin de la même année, Guisla cessa de vivre, ainsi qu'on le voit dans le verbal des serments prêtés par ses exécuteurs tesiameniaires, en date du 20 de ce mois (3/arc. hlsp., col. 1020). Le 4 des nones de décembre suivant, le comte fait donation au monastère de ses alleux de Pollestres, pour la rémission de ses pécbés et de ceux du comte Bernard, son frère, et de Guisla, sa défunte épouse, afin que saint Martin soit leur intercesseur auprès de Dieu. (Inventaire, n° 14). 1019, 2 des calendes de juin. Donation faite au monastère par une femme, nommée Enviga, d'un alleu aux territoires du cbateau de Vinca et du villag;e de Rupidéra (lùùl. 522). 1025, 4 des calendes d'avril. Bérenger, évéque d'Elne, cède au même monastère l'église, biens et revenus de Saint-Salurnin-de-Vernet (église actuel- lement détruite), et reçoit, en échange, de fabbé Sclua, l'église de Marqueixanes, et les revenus qui y sont attachés (/ù luilVu()as l^-tiujtisd, olhit {)oinuuis Cîiu- ftibns con^rttn cornes nolnlissimus \.]\\\ , sul? fifitfo 0cafi 5^rtrhin |)Viii'Sttûs , Çiutc fociim jiissit a'hfiuni , uniii l'f monac!)us Uni annis ijmnî)(;cim , m nomim* ^onunt ttosfrt #fcstt*-(ê^5ns{i ; cnjus ^icft comitis tt qn$ ttxons ^rtsaBi'fl) coimfissm; coff^ora (rrtnsl'rtftin fccif [w Çoc monumcnfo ^ominns ^cr^ngarius K' S^ofum- ^rtno, aBCfts isfîus fc>ct, annc milTcsimo , frcccntcsimo , incjcstmo Si'ctin^o. Plus tard encore, la dépouille mortelle des deux illustres époux fut transférée à l'église supérieure et placée dans une niche en arcade ogivale, fermée d'une grille. Sur le sarcophage, une statue en mar- bre blanc représentait le comte costumé en cheva- lier armé de toutes pièces, et plus haut , sur le mur, on le voyait en peinture, revêtu du froc. Tous les ans, le jour où les religieux célébraient l'anniversaire de sa mort , ils paraient ce tombeau de mille fleurs (Biogr. de St.-Gald.). ' Colontr , nom d'un hameau ruine, prés de Villefranrhe. 131 En 1050, l'abhé Miroii ei ses moines envoienl un messager à ions les monaslères de l'ordre, en Europe ^ selon Pujades cl Poe , avec une encyclique, pour leur annoncer la mort du comte Guifred Ils y de- mandent des prières pour ce prince dont l'illustra- lion, disent-ils, est connue en France, en Italie et en Espagne, et qui, après avoir enrichi de ses dons leur monastère, renonça aux honneurs temporels, à sa femme et ses enfants, et voulut être pauvre de J.-G. dans le saint lieu qu'il avait (onde. Ils vantent son extrême bonté à fégaid des jeunes et des vieux frères, et terminent son éloge par ce quatrain , qu'ils se proposaient, sans doute, d'inscrire sur son tom- beau : 'tRujits Srtci'iifo con^uiifur nu-mCint si'pttfcro ^uo^ ^uts ij35i' sifn ^ufcljro coiisti'uxi'raf itcdi. «Sfuluis cxiiCicun i^um mcusis cûni^d'ct Çoriim , excessif scctifo , qui'in |^oscltt' v\\ii\'C e&fn'ijto. La lettre finit par une demande particulière de prières pour leurs autres frères défunts, au nombre de vingt-un, et parmi lesquels se trouvent trois abbés, savoir : Sclna , Renard et Guillaume. On y recommandesuriout de ne pasoublierle nom d'Oliva, père tendrement chéri , dulcissimi patris (V. cette pièce dans i\Jarca, col. 1094). Cet Oliva est assuré- ment le frère du comte (juifred qui, étant à lafoisabbr deSaini-Michel-de-Cuixa et de N. D. de Ripoll, gou- verna, coumie nous avons vu, le monastère de Saint- INlarlin, jusqu'au moment où il fit nonmier un abbc particulier, sans cesser d'avoir pour celte maison ci 132 pour les deux autres une affection toute paternelle, suivant l'cxprcssion de Ba]uze (Ala rc. hisp., col. 446). Ce qui achève de prouver qu'il s'agit ici de cet abbé, c'est la première des réponses qu'on lit (^I6id., col. 1095) à la suite de l'encyclique. Celle réponse commençant par celle adresse : Fratribus degentibus cœnobio almi Martini, est inconiesiablenient celle des moines de Saint-Michel : l'éloge de l'abbé Oliva (mort enlO'iC») et du comte Guifred son frère en est le principal sujet. Pujades et Poe nous apprennent que toutes les réponses à l'encyclique étaient écrites en beaux carac- tères, sur vélin, et que, collées les unes à la suite des autres , elles formaient un rouleau de cinq pouces de diamètre. On lisait dans celle de iMaësiricht que le comte Guifred avait très bien fait de renoncer à ses biens, à son comté, à son gouvernement, pour l'amour de Dieu, et de prendre en même temps l'habit de la sainte religion du grand saint Benoît, en se débarrassant de la bosse, c'esl-à-due des ri- chesses figurées par la bosse du chameau, afin de pouvoir passer par la porte étroite du cielj allusion, un peu forcée, à ce que dit saint Matthieu, xix , 124. Faciliiis est canieluni per for amen o eus transire, quàni divitem intrare in regniim cœloruni ' . 1 II parait aussi que la calligraphie n'était pas négligée à Saint-Marlin, témoin les quelques manuscrits qui nous en restent, celui surtout que pos- sède M. Heury, ancien conservateur de la bibliothèque publique de Perpi- gnan. C'est un volume de 590 pages, sur vélin, très bien écrit, où, parmi de nombreux sujets ecclésiastiques et des chants d'église, notés à la manière de l'ancien temps, sur des portées d'une seule ligne, on trouve ces articles scientifiques: -1° une description de Rome antique; 2° un abrégé de géo- graphie et de météorologie, sous le titre de Imago mtmdi; 3° un petit glossaire 133 Après la mon du comle , on slalua, à Saint-Martin, qu'en niémoiie de ce fondateur et de ses bienfaits, un jeune enfant, de quelque lieu qu'il fût, serait bénévolement instruit dans les lettres et honnête- ment entretenu au monastère, et que, parvenu à rage de raison, un autre prendrait sa place , ainsi de suite, à toujours. Les dispositions de ce pieux statut furent rappelées plus tard dans un mande- ment adressé par un chapitre général de Tordre à nos cénobites, pour les obliger à s'y conformer cons- tamment, comme ils avaient fait jusqu'alors. 11 est dit dans l'inventaire que ce mandement, qui s'y trouve résumé sous le n° 50, était écrit sur par- chemin, en vieux caractères; il n'y manquait que la date, devenue illisible, ainsi que les souscriptions. Erreurs et fiiMes dcbilées au sujet du comte Guifred. Des traditions romanesques et quelques auteurs aussi crédules que dépourvus de critique, nous di- des mots difficiles de la langue iatino, principalement des noms des figures d« grammaire et de rhétori(|iie, ce qui fuit voir que les sciences profanes entraient pour quelque chose dans l'éducation de ces cénobites. 11 y a encore sept ou huit chartes, ou précis do chartes, qui ne sont pas sans intérêt. Nous aurions des richesses plus précieuses encore dans ce genre, si on ne nous efit enlevé un volume in-4", en vélin, dont les couvertures en bois étaient revêtues do lames d'argent, avec des figures repoussées. Ce volume contenait les quatre Evangiles et TExposition de saint .lérôme sur le symbole. Rlalheureusemcnt il fut mis à la disposition de l'évèque diocésain, après la sécularisation du monastère, comme on verra ci-dessous. Nous lisons, en outre, dans la cor- respondance de M. Dominique Besombes avec le dernier abbé, M. Grumet de Montpie, dont il était procureur-fondé, qu'il tenait en réserve pour ce prélat nombre de livres in-folio, tous en vélin, couverts de planches de chêne, Mss. du onzième siècle, dit-il, et d'autres livres retirés du monastère (lettre du 10 septembre 1783). Que sont devenus ces regrettables manuscrits?... M. de Montpie fut immolé à Paris, sous le règne de la t«rr»ur. 134 senl que le comle Guifred fonda le monastère de Sl-iVJarlin, en expiation d'un homicide. Le plus ancien de ces auteurs est, à noire connais- sance , le catalan Tomic, dans son histoire des rois d'Aragon et des comtes de Barcelone, composée en 1A38. Il n'est nullemejil parlé de cel homicide dans les Gestes des comtes de Barcelone, rédigés à la fin du XII 1^ siècle par un moine anonyme de Ripoll^ quoi- qu'il y soit fait mention de Guifred et de sa pieuse fondation {Marca hisp. Col. 5-^i3) i. Suivant donc Tomic, «les Maures ayant envahi la Cerdagne, le comte Guifred confia le commandement de ses troupes à un de ses neveux. Ce neveu fut vaincu dans un combat et s'enfuit vers le Barida (au fond de la Cerdagne espagnole) Le comte vint fon- dre sur les ennemis, les mit en déroute et les pour- suivit jusquà un château appelé Sant-Marti dels Castells (dans ledit Barida). Etant entré dans l'église, il y trouva son neveu qui s'y était réfugié et qui te- nait un christ embrassé. Outré de colère, il le tua de sa main , et à cause de ce meurtre , le pape lui ordonna d'édifier le monastère de Saint-Martin de Cani2:o. » Ce fait a paru digne de foi au docteur Pujades et à Fr. Poe : ilsdonuent pour motif de leur opinion que le comle, (comme dit le pape Serge IV dans sa bulle précitée), avait demandé l'église de St-Martin dans ' L'archiviste Carbonell, dans ses chroniques, le docteur Tristany, dans sa Coi'ona hencdiclina , gardent également le silence sur ce jioint. Diago , Condes de Barcetona , se borne à dire que Guifred, informé de la défaite de son neveu , alla à son secours, vainquit les Sarrasins et les poursuivit jusqu'à Sanl-Mard-dels-Ca^iclli. 135 le bul d'y élahlir mi nionaslère pour la rémission de ses péchés et de ceux de ses grands parents ; mais rien de plus mal imaginé que ce moiif, puisc[ue des for- mules pareilles se rencontrent dans une infinité d^acles , de donations ou de fondations religieuses de ces temps-là. Nul de ces trois écrivains ne cite à son appui ni auteur, ni document historique, et n'indique la date de l'événement. Et comment en donner une date certaine, tandis que Tliisloire ne signale plus d'inva- sion de Maures dans la Cerdagne , ni même en deçà du Llobregat, depuis 1 50 ans , au moins, avant la naissance de Guifred, comme chacun peut le véri- fier. Du reste ^ Pu jades et Poe s'abstiennent de dési- gner l'église, du nom de Saint-Martin, où aurait été commis le prétendu meurtre. C'en serait déjà assez pour désabuser sur ce sujet les personnes judicieuses. Mais poursuivons. Le valencien Deuier , écrit que le meurtre fut commis à l'époque où les Maures, ayant appris la mon du vaillant et redoutable Bernard, surnommé Taillefer, (frère du comte), entrcrenl en Catalogne par la Cerdagne. Or, le comte Bernard Taillefer ne mourut bien positivement qu'en 1020, onze ans, au moins, après la fondation du monastère. Mais voici qui est plus curieux encore. Non content de placer la scène tragique à St-Marli dels Castells , c'est là même, dit cet historien, (au fond de la Cerdagne espagnole), que le comte édifia le monastère de St- Marlin de Canigo , par ordre d'un pape qu'il ne nomme pas. De plus, il fait mourir Guifred en 1025 dans ce monastère, auquel on travaillait déjà, dit-il, (que y a se labrabnjl 136 Bosch fTitolx de lionor , etc.J qui donne pour ga- rants Tomic, Beuter et Diago, copie les deux pre- miei'S, en ajoutant toutefois que le neveu anonyme livra bataille, sans ordre ni commission du comte. Feliu de la Penya {^Annales de Catalufia^ place l'invasion de la Cerdagne (et du Roussillon, ajouie- t-il), sous la date de 999, et néanmoins après la mort de Bernard Taiilefer (1020.) iMais le meurtre fut commis, suivant lui, dans un ermitage de St-Mariin, c'est-à-dire , ajoute-t-il encore, au vieux St-Martin de Canigo et sur un fils de Bernard Taiilefer qu'il ne nomme pas. S'il fallait en croire fauteur anonyme d'une Histoire de saint Gaudcriquc, composée en 1706 et imprimée à Perpignan en 1716, le comte Guifred aurait lue son cousin (et non son neveu) dans l'église de Si-Mariin dcls Valls ^ monastère Lénédiclin ruiné, dit-il, situé du côté de Puigcerda, au pied de la montagne de Calme t. Le comte, dit encore notre biographe, alla implorer du papeSex'ge IV l'absolution de son crime, et l'obtint à condition qu'il ferait bàiir un monastère • Ce n'est pas au pied de la montagne de la Calm , près de Puigcerda , comme le dit ranonyme, d'après Camos {Jardin de !\Iaria) h ce qu'il paraît, mais au pied du plateau de Carlit, à une lieue environ au-dessus d'Ângus- trina, qu'il y a une petite église du nom de Sanl-Marli-den-Valls (in vallibusj . Les gens du pays content, en effet, que ce fut là que Guifred donna la mort à son neveu. L'ont-ils appris de l'auteur en question, ou celui-ci le tenait-il de ces bonnes gens? — On ne peut pas dire non plus que ce Saint-lMartin ait été un monastère de l'ordre de Saint-Benoit; car on le trouve désigné comme une prévoté dépendante du Chapitre d'Espira-de-l'Agli , en 1529 (Anciens Mss.). — L'église de ce Saint- ;\Iarliii fut consacrée Is 4 das cal. de septembre 1 1G4. 11 est dit dans l'acte, (juVUe avait été reconstruite par les paroissiens tV Angoslriiia ; mais pas un mot qui puisse désigner un mo- naitère. 137 el une église eu Thonneur de St. Martin. Ainsi donc le pape Serge IV, qui ne fui élu qu'en 1009, aurait ordonné, par une bulle de 1011 , de bâtir une église el un monastère qui existaient déjà avant son élec- tion. Quel esprit assez opiniâtre dans ses préjugés pour- rait méconnaître maintenant la fausseté d'un fait dont les difféienis récils contradictoires sont entacbés d'aberrations si grossières? Mais la critique de ces mauvais écrivains, si com- munément pris pour des oracles, n'est pas encore épuisée. Tomic donne pour femme cl unique femme à Guifrcd Dolsa, fille du comte de Pallars. Bosch la lui donne aussi, mais en secondes noces; et eu pre- mières, xVlispesa fille du vicomte de Querforadat, laquelle parait éire FAlispesa attribuée par Beuier à Bernard Taillefer. Ni lui, ni Tomic, ni Carbonell, ni Lapefia , pas plus que l'auteur des Gestes , ne disent moi de létal i-eligieux qu'embrassa le comte dans son monastère. Le biographe anonyme de saint Gaudéric doute fort de celte particularité , par la raison c|u'il a vu ce personnage repi'ésenté en guer- rier, et non en moine, sur son tombeau. Nous verrons d'autres bévues dans un article spé- cial concernant les anachronismes. Voici une seconde tradition populaire dont Pu- jades, Poe, le bénédictin Tristany , le biographe français de St-Gaudéric et Carrère (voyage pittoresque en Bousssillon 1787j, se sont faits bien gratuitemenl les échos. Le comte Guifred, dit-on , et sa femme Elizabeth (ou Guila , selon Carrère), après s'être démis du comté en faveur du fils aîné, et avoir richement 138 dolé le monastère, se relirèieni dans ce |Dieux asile, pour y mener une vie péniienie, au l^r élage du clocher, petit réduit d'environ 10 pieds en carré, n'ayant pour les servir qu'un valet et une chambriè- re. Deux détestables barbouillages en noir d'homme et de femme, à ce qu'il semble, dont il y reste des traces sur un mur, sont regardés par le vulgaire comme un témoignage du fait, tandis qu'on ne de- vrait y voir, tout au plus, que la représentation bien moderne d'une légende fabuleuse, et qu'aucun écri- vain, même des plus crédules, n'a fait mention de ce prétendu monument. C'est là, ajouie-t-on, que la comtesse s'occupait à broder des nappes d'autel et d'autres ornements d'église, et c'est à elle même qu'il faut attribuer cette nappe dont la broderie en soie est un sujet d'admiration, par la délicatesse du travail, le bon goût et la fraîcheur des couleurs , pour tous les cu- rieux qui vont la voir à Caslell. Le comte, de son côté, s'occupait à creuser dans le roc vif le tombeau où. il fut d'abord enseveli. Que ce tombeau soit l'ouvrage de Giiifred , c'est ce qui demeure prouvé par le quatrain de l'encycli- que. Il se pourrait aussi que la comtesse eût brodé la nappe qu'on montre à Caslell, quoiqu'on n'en ait aucune preuve. Mais , quant au fait de la retraite des deux époux au clocher , c'est peu qu'il ne soit garanti par aucun document hislorisque, il est même de tout point invraisemblable ^ ' Ce qui pourrait avoir induit à croire à cette retraite du comte et de sa femme, c'est la réunion de leurs os dans le monument élevé par l'abbé de Colomer. 139 Nous voyons en effet le comte se remarier dans un âge avancé, quatre ou cinq ans après la mort de Guisla, et avoir deux enfants de sa seconde femme, dont l'Art de vérifier les dates ne parle pas. Dix ans après, il entre en religion, lorsque les deux enfants pouvaient avoir au plus sept ou huit ans, et ce n'est qu'au moment de se retirer du monastère, qu'il se démet de son comté et de tous ses biens, en vertu du testament mentionné ci-dessus. Mais loin d'avoir perdu sa femme alors, comme le supposent les au- teurs précités et autres, l'encyclique dit formellement qu'il y avait renoncé, et plusieurs clauses du testa- ment qui la concernent , préviennent le cas où elle convolerait en secondes noces. Anaelii'onismcs. C'est dans des auteurs de marque et non pas seu- lement dans cevix qui viennent d'être cités que nous allons relever un certain nombre de ces sortes d''erreurs- Sur la foi d'une simple note (|ui se trouvait aux archives de St-Marlin, Baluze dit dans la Marca lus- painca, col.4l8,que lespremiers fondements du mo- nastère furent jetés par Guifred en 1001. Lesliisio- riens du Languedoc et les auteurs AeAvLGallta christ., le disent aussi, s'appuyant les uns et les autres sur la Petite chronique de la Bibliothèquc-Colbertine dont il a été parlé plus haut. Mais le même Baluze men- tionne ensuite, col. 420, la charte de 1007 dans laquelle Guifred manifeste, ]iour la première fois^ l'intention d'édifier un monastère. L'auteur déjà cité des Gestes des comtes de Barcelone fait mourir Gui- fred en 1 025, au lieu de 1 049, après avoir gouverné trente six ans son comté. Tomic et Carbonell le 140 répètent. Beuter veut que le comte soit décédé en 1027. Bosch redresse Beuter pour dire 1035. Bien plus, Dom Vaissète , après avoir reconnu, T. II p. 578, édition in -fol., que l'auteur des Gestes manque d'exactitude, en adopte l'année de la mort du comte à la page suivante. L'Art de vérifier les dates reproduit les chiffres 1001 et 1025 d'après des renseignements qui por- tent le nom de notre compatriote M. Fossa , et l'on ne conçoit pas comment de si savants critiques ont pu s'en tenir pour ces deux époques à de sim- ples énoncés, tandis que dans le même livre où elles se trouvent ainsi consignées , des actes authentiques en démontrent la fausseté. Variantes sur renlèvenient des reliques de saint Gaudéric. Tous les auteurs qui ont parlé delà translation de ces reliques s'accordent sur la date de 1014. Le seul Feliu de la Pefia, la fait opérer en l'anlOOO, c'est-à- dire sept ans avant la fondation du monastère. Quanl aux circonstances de ce fait, voici d'abord, en peu de mots, ce que dit Domenech , hagiographe de la principauté de Catalogne, d'après un manuscrit de Saint-iVlarlin, et un ancien bréviaire, également ma- nuscrit, du diocèse. (I Les envoyés de Guifred s'étant rendus à Tou- louse, pour y dérober des reliques (usage très com- mun dans ce temps d'ignorance et de ténèbres), trou- vèrent l'endroit où gisait dans un tombeau le corps de saint Gaudéric, très favorable à l'exécution du vol, attendu, dit-il, que les murs d'enceinte étaient détruits jusquaux fondements et les portes ouvertes et sans garde. Us y revinrent de nuit , mais ils ne purent 141 lever la pierre tombale qui recouvrait les reliques , qu'après avoir fait v(eu au saint de le placer clans un lieu où il serait très honoré. Le tombeau ouvert, ils en emportèrent les ossements sacrés ». Suivant le biographe anonyme de St. Gaudéric, les émissau-es du comte arrivés à Toulouse, entrèrent à St- Sernin, sousprétexte de vieiterlecaveauqui renferme tant de reliques; et ayant remarqué que la grille de fer qui garantissait lâchasse de St-Gaudéric était plus facile à forcer que les autres, ils s'introduisirent nui- tamment dans cette église, et même dans le caveau, probablement après avoir mis quelqu'un dans leurs intérêts. La grille fut forcée, mais la châsse résista à tous les efforts, comme la pierre sépulcrale de Tau- Ire version. Aussi, même vœu au saint, en lui repré- sentant, en outre, qu'il serait plus honoré en Con- fient qu'à Toulouse, oh il rencontrerait tant de concur- rentSy pour ainsi dire , de sa gloire. Celle considération détermina saint Gaudéric à se rendre : la châsse fut mise à terre ei pillée. Mais, comme on vénère encore à Toulouse des reliques de ce saint, notre biographe a soin d'ajouter que les ravisseurs , par l'effet du trouble où ils étaient, ou bien par délicatesse, durent en laisser une partie au fond de la châsse. » Pujades et Poe expliquent différemment la chose. Ils disent que les émissaires ayant fait hahe sur un coteau, tant pour y prendre du repos et quelque nourriture que pour arranger convenablement les reliques, tout à coup, pendant cette dernière occu- pation, un tourbillon de vent vint miraculeusement enlever un morceau d'os, sans qu'ils pussent en suivre la trace. En même temps, le sacristain chargé de la garde des reliques de Saint-Sernin, instruit en sonf^e 142 1 par un ange tle ce qui venait de se passer el du lieu I où se trouvait le morceau d'os, alla, dès le matin, recueillir ce débris du saint trésor, et le rapporta au lieu où s'était commis le vol ». Il est à remarquer, d'un autre colé, que les bislo- riens du Languedoc, qui disent tout simplement, comme on a vu, que les reliques de saint Gaudéric furent tirées du Toulousain, rapportent une charte de Tan 1 107 ou environ, qui parle dune église de St-Pierre dépendante de l'abbaye de Monlolieu (dioc. de Carcassonne), où l'on dit que gît le corps de saint Gaudéric : in parrochialsajicti Pétri ubi corpus saiicti Gaudcrici jacere diciturÇT. ii. Prevtv. p. 372). Enfin, il y a dans le canton de" Fanjaux , diocèse précité, une commune et une église du nom du même saint. DEUXIEME PARTIE. Reprenons la suite de nos articles chronologiques. 1079, 2 des calendes de décembre. Oblation faite par Oliba et sa femme, de leur fils et de leurs biens au monastère (Inveni. 29). 1084, 5 des ides de juillet. Guillaume Raymond, comte de Cerdagne , fils du comte Guifred , engage au monastère de Saint-Martin et à l'abbé Pierre Su- niaire, jusqu'à iNoël de Tannée suivante, les villages d'En et de Vuyiesa, pour vingt livres d'or, très fin, et en grande partie doré , tiré du trésor même de l'autel, promettant d'ajouter h;^ la restitution de cet argent, une croix en vermeil, de cinq palmes de long sur quatre de large, et à condition encore qu'à défaut de remboursement au terme convenu, lesdits villages appartiendront définitivement à Saint-Martin, (^A/arc. hisp., col. 1174). 143 1091. Le même comie de Cerdagne soiimei audit aLbé de Saint- Marliu et à ses successeurs, le monas- tère de N. D. de Serraleix (dans le Bergadan), pour le restaurer cl y rétablir la discipline (iVJarca, col. 1009). Ce monastère avait été fondé en 977 parOliba Cabréla et son frère Miron (Jbid. 914). 1092. Donation faite h Saint-Martin de Téglise de Saint-Romain-de-Llupia , par Bércnger, Arnaud et autres, le 3 des nones de juillet. (Invent, f" 178. A.) Il est fait mention de cette église en Fan 1028(/<^/r/._, f° 118; C.) 1114, veille des nones de février, Bernard-Guil- laume, fils et successeur de Guillaume-naymond , depuis 1095, pour la rémission de ses péchés et de ceux de ses grands-parents, fait abandon au monas- tère de Saint-Martin des droits d'albergue toltes , exactions, questes, pailles, homicides et adultères qu'ils percevaient justement ou injustement dans la seigneurie de Saint-Martin , dans le lieu et paroisse de Marqueixanes , du quart qu'il percevaii à Cor- nella et dans les closes de la combe de Saint-Martin, {Ibid. n» 26). Graves et scandaleux démêlés enirc les moines de la Crasse et ceux de Sl-Marlin. En 1114 et le 2 des ides de février, le même comte Bernard, au mépris des prescriptions du pape Serge IV et des dernières volontés du fondateur, son grand-père, avait donné à perpétuité à Fabbaye de la Grasse le monastère de Si-Martin , afin que dé- sormais Fabbé de ce monastère fût exclusivement élu parmi les moines de ladite abbaye, et il avait en même temps cédé à St-Martin les droits seigneuriaux qui lui oompétaicut à Marqueixanes (Inv n°32; dom IMarienne, Thés, anccd. T. 4 ^ col. 131.) Ce comte nioui'ul eu 1117. Cependant, en 1159, la conimunaulé de St-Mar- lin, encouragée au recouvrement de sa liberté par Tassentimeni de la reine d'xVragon , la volonté de l'évêque diocésain et les prières du clergé et du peuple, élit pour son abbé frère Raymond, sacristain de Tabbaye de N. D. de Ripoll. L'acte est souscrit par (iaufred, abbé de celte abbaye, Bernard, prieur de St-Martin et quinze moines (Inv. 35.) Le comte de Barcelone et prince d'Aragon, Ray- mond BérengerlV, instruit du projet de ces moines, leur avait écrit de suspendre leur opération jusqu'à l'arrivée de Bernard de Belloc (lùid. , 34). Mais, dans ces entrefaites, l'abbé Gaufred lui rendait compte de l'élection et des motifs qui l'avaient déterminée, motifs qui , joints à la crainte de déplaire à la reine, l'avaient forcé lui-même à y consentir, et il termi- nait sa lettre en priant le comte d'engager l'abbé de la Grasse à ne mettre aucun obstacle à cette élection et à rendre au monastère de Saint-Martin tout ce c|ui en avait été enlevé. Le comte écrit, en effet , a labbé et aux moines de la Grasse de ne pas attaquer l'élection de Raymond, jusqu a ce que celui-ci se soit rendu auprès d'eux pour leur donner satisfaction , ainsi qu'il s^ était offert en présence de l'archevêque de Narbonne {T6id., 37 ; lettre du roi d'Aragon, Alfonse II, dont on verra , en son lieu, le sommaire). L'abbé de la Grasse, après avoir lancé un interdit sur le monastère de Saint-Martin elles églises qui en 14;'} dépendaient , se plainl viveinenl au comle de Barce- lone el à ] archevêque de ÎNaibonne , du procédé des moines de ce nionasicic. Le comle lui répond, eu 1 159, c{ue réleciion était, déjà commeucée lorsqu'il a reçu sa lettre. Il le prie d'aliendre qu'il ait fîui de faire passer des troupes en INavaire, et de lever son interdit, s'il aime mieux l'avoir pour médiateur que pour adversaire (Inven- taire 30) . II 61 Ou lit dans la Marc. In'sp. , col. 1331 , une bulle du pape Alexandre Ili, eu date d'Agnani, jour des calendes de mars 1161. Elle est citée dans la Gallin christia/ui , comme confirmativc duu interdit que ral)bé de la Grasse aurait lancé sur celui de Saint Martin (Iiaymond), pour lui avoir dénié lobéis- sancc qu'il était tenu de lui prêter, selon l'usage précédemment en vigueur. l\lais voyez la note 2. ^ Ces derniers arlicles el <[Ui'li]nos-uns Jcs suivaiils se trouvant sans Jale «l pêle-mêle dans {'Inventaire, il a fallu les classer les uns et les anlres, selon Tordre naturel on prcsuinable des choses. Quant aux bulles papales que nous allons citer, où il n'y a d'autre date (jue celle du jour et du lieu, il a été moins difficile d'en découvrir l'aniîée, en vérifiant à quelle époque ic paj>c habitait le lieu désigné. - Cette pièce, tirée des manuscrits de la bibliothèque Colberline, n'est point mentionnée dans l'inventaire, ni dans la lettre du roi d'Aragon au pape, où il est question de l'interdit fulminé par Fabbé de La Grasse. Kn second lieu, le pape parle ici d'après un ouï-dire et dans la supposition que l'abbé do La Grasse ait exécuté l'ordre qu'il lui avait donné d'interdire l'abbé de Saint-Martin; mais on a du remarquer que c'était le monastère cl non préciscineiit Tabbé élu do Saint-ÎMartin qui avait été interdit, et pour une autre cause que celle de refus d'obéissance de la paît de cet abbé. Si donc le pape eut réellement e\pédié la bulle en question, elle serait restée sans effet, puisqu'elle n'était fondée que sur un malentendu. Pourrait-elle se concilier d'ailleurs avec le second point de l'informalion, dont le même pape chargea, un an après, Tévéque d'Elue, comme on va le voir? 10 14G M 62. Le 5 des calendes de mai, le pape déjà cité écril à l'abbé élu et à ses moines que ceux de la Grasse se plaignent d'avoir été chassés, à main armée, de Saint-Martin par eux et par leurs confrères de Ripoll. 11 leur apprend, en entre, qu'il a chargé l'évêque d'Elne d'informer de cette expulsion et de la prétention de l'abbé de la Grasse (Inv. 33). L'abbé de Ripoll, Gaufred , recommande l'affaire de Si-Martin à la reine (Inv. ^i3)-, révé<[ne de Vicia recommande àceUii d'Elne, et l'invite par de puissants motifs à maintenir l'élection de Raymond {Ibid. 48). L'évêque d'Elne écril au comte de Barcelone que c'est à lori et sans l'avoir consulté , que la commu- nauté de Saint-Martin a élu pour abbé le moine de Ripoll, lorsqu'on devait en prendre un de la Grasse {Ibicl. /iG). Ce prince, ayant appelé auprès de lui à Barcelone, l'archevêque de Narbonne et l'abbé de la Grasse , l'affaire de l'élection est scrupuleusement examinée dans une assemblée composée des suffraganis de Tarragone el des magnats de l'État. Le jugemenl rendu presqu'à l'unanimité dans celle assemblée , force l'abbé à lever son interdit {Lettre du roi d'Ara- gon au pape, déjà citée). 1162. Les moines de la Grasse, furieux de se voir déchus de leur prétention , parlent accompagnés d'une multitude de gens armés et viennent fondre à Timprovisie sur le monastère de Saint-Martin , fra- cassant, brisant loul sur leur passage; ils blessent plusieurs moines au pied des autels, en tuent un et percent de leurs traits Tirnage même de J-C. cru- cifié. Us chassent de la maison les religieux lettrés et attachés à la règle {doctos et in regulari ordinc as- 14T siietos), en les accaljlani d'injures ci de coups. Ils n'en gardent qu'un petit nombre d'autres qu'ils lais- sent presque mourir de faim ; ils s'cm|iarcni des effets et des biens du monastère c[u'ils vendent ou donnent à leur gré (Invenl. 39, 41 , 42) i. Le comte de Barcelone écrit au chancelier de la sainte Église romaine pour lui recommander l'af- fiire de Saint-Martin-de-Canigo et le prier d'ob- tenir du Saint-Père f|ue justice soit faite des atten- tats des moines de la Grasse, cl que l'archevêque de INarbonne révoque la sentence ([u'il a portée contre lelu cl les moines de Sainl-iMariin Çlôiil. 38) Il est à remarquer qu'il n'est parlé nulle autre pail de celte sentence, et qu'on ne peut même la supposer, vu le jugement ci-dessus mentionné, rendu en pré- sence du comte de Barcelone. Le roi d'Aragon , Alfonse II, lils et successeur du €omic Uayraond Bérenger, mort le G août 1162, adresse audit pape, conjointement avec l'évêque de Barcelone, le sénéchal du palais et tous les seigneurs de sa cour, une lettre dans laquelle, après le détail des torts cl mcfoils de l'abbé cl des moines de la Grasse, que nous venons de voir, et la jusiificaiion de leurs victimes, le Saint-Père est siq^plié de nieltrc fin, sans retard, à ce désordre, en sorte c|ue le mo- nastère de Saint-Martin se voie délivré de toute vexa- tion et d'un procès qui achève de le ruiner. (Ce do- cument, dont nous avons donné précédemment deux extraits, se trouve aux archives de notre Préfecture, 1 En I I 18, tin abbo Je La Grasse avait pareillement cnyalii de vive fnire le monastère de Saint-Fcliu-de-GuixoIs, diocèse de Girone, et s'en était des- potiquemcnt rm|iarc ( 1/(i;t. Itisp., roi. I2.'>l ). 148 dans un fragment du carlulaire de Sainl-iMariin , liasse A, n" 9) 1 163. Par un rescrit daté de Tours_, 17 des cal. de mars, le pape charge rarciievêque de iNarbonne et l'évêque de Lérida , d'informer de celle affaire. (In- veni. AO) , et le 17 des calendes de juin suivant, il adjoint, ou substitue, à ce prélat celui de Girone (Inveni. 31). Le 3 des ides dudit mois , le même pape écrit , de Tours, aux moines de Canigo et à toutes les per- sonnes attachées à ce monastère, qu'il leur rend leur abbé I^aymond , et il leur recommande en même temps de le recevoir avec la bienveillance et le res- pect qui lui sont dus, comme leur père et leur pas- teur (Jbid.^ 47). Le jour suivant, il ordonne par let- tres apostoliques, que Tordre soit rétabli h Saint- Martin; que tout ce que le monastère possédait lui soil rendu, nommément les domaines qu'il désigne en quarante-cinq lieux divers II veut qu'à l'avenir il n'y ait d'autre abbé que celui qui aura été librement élu par les religieux de la communauté, ainsi que l'avait établi le pape Serge IV, et que le monastère ne soit plus soumis qu'au saint siège, auquel il payera, tous les ans, un morabotin *. Défenses sévères à qui que ce soit de contrevenir à ces dispositions. (In- vent. 49, et la bulle entière dans Marca, col. 1334). L'abbé Raymond et ses frères écrivent à l'abbé et aux moines de la Grasse une lettre où, après avoir rappelé tous les outrages qu'ils en ont reçus, ils les * Bosch, Joseph, dans son traité des vieilles espèces du Roussillon, p. 49, évalue le morabotin (d"or) à 2 fr. 80 c. au xii"' siècle, d'après une charte des Arch. du Domaine, de Tan M 80. 149 sonimeai, d'aulorité du pape, de comparaîlie devant Sa Saiiiieié, à la fêle prochaine de Saint-Andié, pour réparer le mal qu'ils onl fait (Inveni., n° 40). Cependant , malgré les lettres apostoliques pré- citées, l'abbé et les moines de la Grasse ne disconti- nuant pas de tracasser et molester ceux de Saint- Martin, l'abbé de ce monastère, Pierre IV, élu en I Î72, alla enfin lui-même s^en plaindre au pape susdit , et lui demander la protection du saint siège. Sa Sainteté fit droit à sa réclamation par une bulle où , relatant les griefs exposés, elle promet de ne pas souffrir (jue 1 abbé et les moines de la Grasse f|uerelleni désormais en aucune manière , m pour quel({ue raison que ce soit, ceux de Saint- Martin , si ce n'est en sa présence ou en pré- sence de la personne qu'elle désignera elle-même (Fragment déjà cité du carlulaire de Saint-Martin). Cette bulle est datée de Saint-Jean-de-Lalran, 10 des calendes de mai , sans antre indication ; mais comme on sait que le pape Alexandre III se trou- vait à Rome en 1 171 , et à Agnani en 1 17'i , c'en est assez pour en fixer l'expédition à 1 172 ou 1173. 1172. Permission donnée à l'abbé de Saint-Martin, Pierre et à ses successeurs , par Alfonse II , roi d'Ara- gon , de construire une forteresse à Marqueixanes (Invenl. 95). 1178, 7 des calendes d'avril. Donation faite au mo- nastère, par Pierre de Domanova , de l'église Saint- Pierre deBelloc, sur la montagne de Villefranche (Inv., fol. 117). C'était, en 1329, un prieuré à la collation de l'abbé de Saint-Martin (Invent, de 1787, p. 4G). 11 fut réuni au monastère en 1402 (V. cette dale). 150 Même aimée, confiimalioii du tesiamenl de la femme Guisla de Vernel , qui fui reçue à prendre l'iiabit de saint Bcuoîi dans le nionaslère, où elle fut tonsurée et voilée (Inv. de 1787, p. 69). 1180. Mention des eaux thermales de Vernet, dans une vente de la moitié d'un moulin à foulon faite par Pierre Mir, à Guillaume de Saint-Martin, Je 4 des nones de mars de ladite année (Inv. 474.) 1 191 .Permission donnée en mai, parlabbé, elc , à Bernard de Colomer de construire un moulin à foulon à Vernet (inv. de 1787, p. 40.) 1192, 6 des cal. de juillet. Sentence rendue par le roi d'Aragon, Alfonse II, au cMleau de Vallrich, déboutant Raymond et Guillaume de Caslell-Rous- sillon , frères, et leur mère Rixendis de leur pré- tention sur les pacages d'Odello qui sont déclarés appartenir en franc-allcu au monastère de Saint- Martin (Invent, de 1787 , p. 66.) Les prétendants y renoncent le même jour (Inv. n° 734.) 1195, le jour de Pâques, institution d'une con- frérie de saint Martin dans l'église du monastère par Pierre , abbé (Ms. sur vélin, cité plus haut en note). L'inauguration de celte confrérie est représen- tée dans ce Ms.,par un dessin que nousreproduisons, PI. m, comme assez intéressant au point de vue de l'art el des costumes de l'époque, en cette contrée. 1203. Pierre II, roi d'Aragon, considérant que le monastère de Saint-Michel de Cuixa était tombé dans un tel état de ruine el de misère que ni Dieu, ni les liommes ne pouvaient plus y être dignement servis , nomme , du consentement unanime de la communauté, Pierre iV, abbé de Saint-Martin à Tab- baye de Saint-Michel, afin, qu avec la grâce de Dieu, 151 il puisse leslaurei' ce monastère. Le roi annulle en même temps toutes les aliénations fixités par Arnaud, ci-devanl abbé [G allia christ., instruui. , col. 486). Pierre régit à la fois les deux abbayes jusqu'à sa mort, arrivée en 1209. 1219. Donation faite par Nunyo Sanchez, seigneur (^Domino) de Roussillon, Vallespir et Cerdagne, à i'ierre (V) et au monastère de la dîme du territoire d'Eus. Acte passé à Cornella (Inv. fol. I 19). Même année, ce seigneur fait don au monastère des dîmes de Llunat (Inv. de 1787, p. 13). 1220, 8 des ides de novendjrc. Sanche, comte de Provence^ tant pour lui que pour .«on fils INunyo, absout, moyennant la somme de 4000 sous barcelonais, l'abbé et le monastère de St. -Martin elles babitanis de Vernet, à l'exception de deux, du crime qu'ils ont. commis, en recevant dans ledit lieu Bérenger d'Es- pira , Adliémar de Saint-Ferriol et leurs complices. 11 déclare en même temps les l)iens de ces deux cliefs confivsqués (Inv. de 1787, p.. 05). 1233, 13 des cal. de septembre. L'abbé Bernard, h la prière de ses frères, augmente d'un quarteron leur portion de pain pour les jours où la commu- nauté doit souper, et d'un reuf pour les dimancbes, mardis et jeudis. 11 institue un anniversaire perpé- tuel pour son âme, et assigne une certaine portion à cba(jue moine, le jour où il sera célébré, ainsi que le jour de la dédicace de l'autel de sainte Catlieri- ne. 11 veut enfin que, pendant l'avent et le carême, on serve à la communauté du beau pain de froment. Afin de subvenir à ce surcroît de dépense, il donne de SCS propres 1450 sous, des terres, des censives et des moulins (Inv. 56). On peut voir par là combien Ià2 la règle devait ëlic austère ancicuneiiienl à Sainl- IMartin. '12''i0, 9 mars. L'abbé de Saint-Martin exemple Pierre Quers ei sa femme, de Marqueixanes , des mauvais usages appelés inf.csr.ia^a]) inleslal) et xorquia (stérilité) qui donnaient des droits au seigneur sur les biens de ses vassaux morts sans lester ou sans avoir eu ou laissé des enfants légi limes (/Z-^VZ., p. T4). V. pour de plus amples détails sur ces usages, les Constitutions de Catalogne. 1245. Privilège concédé à l'abbé de Saint-Marlin par le roi d'Aragon, Jacques I"^"", pour construire \\\\ château à Casafabre (Inv. fol. 14, v°). 1254, 16 des calendes de septembre. Guillemelle Simorra , de Saint-Estève-del-J\lonastir , lègue par testament son bien au monastère de ce lieu, prieuré dépendant de Saint-Martin, et s'y donne elle-même pour sœur. Le prieur, qui la reçoit en cette qualité, s'oblige à lui fournir le nécessaire pour son entre- tien (inv. de 1787, p. 77). 1262, 13 des cal. d'aoi\t. Bernard deColomer, habitant de Vernel, vend au monastère de Saini- JMarlin la moitié d'un moulin à foulon qu'il possé- dait par indivis aux bains de Vcrnct (Inv. 941). Même année, cal. de novembre. Pierre VII, abbé de Saint-Martin, fait rémission aux hommes de Ver- net des droits féodaux appelés mauvais usages (Inv. f. 102, K). 1265, 16 des cal. d'août. Allodialité, reconnue parle commissaire des fiefs, des biens suivants du monastère : église et village de fJelloc , possessions h la paroisse de Vinca, à Sahorla, à Marqueixanes, aux Masos , à Eus, Ria, Coma, Eslanyils , Forçais., Vcrnel ; Villefranclie , Coniella , Caiiipills , FuUa , Sahorra, Torrent, Escarô, Ynytcsa, Soanyes, Maii- nyans , Espira de Confleni et autres villages (Inv. 156; lavenlaire de 1787, p. 45. Liber fcndoruni A, f. 63). '!270, 5 des cal. de juin. Lettres de François- Pierre Alcano, pénitencier de la sainteÉgliî^e romaine, donnant pouvoir à Tabbé de Saint-Martin (Pierre VII) d'absoudre les moines <[ui avaient porté les mains sur d'autres moines, et s étaient emparés de leurs propres; à condition que les délinquants résignent les propres dont ils jouissent entre les mains dudit abbé qui les utilisera en faveur du monastère (Inv. GO). 1282, 6 des nones d'octobre. Union du prieuré de Saint-Romain de Llupia, faite par l'abbé Pierre Vllï, au prieuré de Saint-Martin (lùid., fol. 112, v° L). 1284, 5 des cal. de mai. Union du même prieuré tle Saint-Romain à la Préccntorie du monastère [Ibid. M.) La chapelle de ce saint existait en 954 (Ibid. E). Elle n'est pas encore entièrement ruinée. 1296. Les habitants de Yernet réclament contre le paiement qu'exigeait d'eux l'abbé de Saint-Martin pour les frais d'un repas qu'il avait donné au roi de Maillorque (Archives de la Préfecture). 1300, 6 des cal. de juin. Guillaume III , abbé, permet à François-Arnaud Serradell , moine et au- mônier , de doter de ses biens présents et futurs Pautel qu'il avait élevé à saint Gaudéric dans l'église conventuelle [Ibid. 61). Même année. Une rixe violente eut lieu dans le monastère entre les moines divisés en deux partis soutenus par des laïqvïes. La cause de cette dissen- tion fut une accusation de simonie portée contre 1 5î l'abbé (Guillaume de Cervoles), avec complot pour lui refuser l'obéissance. Le pape Boniface Vlll fit informer de ce scandale. Les laïques furent renvoyés devant leur évéque pour les peines qu'ils avaient méritées , et les religieux furent déclarés suspens pendant un temps plus ou moins long, suivant le degré de leur culpabilité. Le saint-Père motive sa décision en ces mots : Propter violentam manimm in- jcctioncm in se ipsos religiosos (Fragment précité d'un cartulaire de Saint-Martin). L'inventaire, n-^ 92, menlionne, sous la date des noues de mars 1301 , des lettres d'absolution de François Matthei , cardinal, pour les censures en- courues par les moines. 1309, 14 des cal. d'avril. Permission accordée par Arnaud, abbé, à Guillaume deNovelles, de construire et tenir des bains dans les maisons qu'il possède à Vernet , près des eaux de ce lieu , et de recevoir une source d'eau thermale qui se trouve hors des grands bains, (Inv. 1208). 1312, 17 des cal. de juin. Ordie de l'abbé Arnaud à ses moines de se rendre au chapitre général con- voqué à Saint-Tibéri (diocèse d'Agde), et de com- paraître devant le président (Inv. 63). V. plus bas, année 14-'i8. 1 321 , 3 des cal. de septembre. Collation du prieuré de Saini-I\omain de Llupia par l'abbé Bércnger, en faveur de François-Jean Peyrri (Inv fol 117, v°). 1328, veille des noues d'avril. Statut fait par l'abbé Bérenger , du consentement de la commu- nauté, portant que désormais, à la mort d'un moine du monastère, un prêtre séculier devra résider toute l'année subséquente, célébrer des messes pour l'àmc 155 ilu dcluul cl assister aux divins offices; que TaLbé sera tenu de lui fournir la portion monacale de pain, et de vin, et le chamLrier de lui compter 45 sous pour son vestiaire [Ibid. fol. 103, v° 2, li). 1351, 19 mars. Privilège accordé par le roi d'A- ragon, Pierre IV , à Tabljé de Saint Martin, pour re- bâtir le château de Marqueisancs (Inv. 121). En 1347, ce l'oi avait fait démanteler cette forteresse, ainsi que celles de Codalet et de Prades, après les avoir reprises sur le roi de Maillorque , son adver- saire. (Zurita, T. H, 1. v», c. 9). 1361, 22 mai. Réclamation présentée par le pro- cureur de l'abbé au viguier du Confient, au sujet de six arbalétriers que l'infant de Maillorque pré- tendait devoir lui être fournis, pendant un mois, aux dépens dudit abbé (Inv. 163). 1366, 29 juillet. Affranchissement des droits dits qucstia , intcstia , xorqida , coi^ucia ' accordé aux hommes et femmes îles lieux d'Odello, Vilalta, Par- dinellas, Egued , Targasoaa et Pla, jiar l'abbé Puiy- mond et ses moines (Inv. 7^il). 1370, 12 juin. liémissiou accordée par Tabbé cl sa communauté aux hommes de Marqueixanes, des droits tVintcstia et de xorquia (mots déjà expliqués) el d'autres de ce genre (Inv. 243). 137.Ï , 18 octobre. Lettres d'abolition accordées par le roi d'Aragon, à l'abbé, aux moines et prêtres de Saint-Martin , pour les crimes à eux imputés lors de l'invasion dudit monastère el de ses cliâieaux ' Qiiestia, qucste ou foiiafJe, droit que le scigueur levait tous les aus sur chaque chef de famille. Coijucia, droit qu'il exigeait des maris ijui toléraient l'adultère do leurs femmes, etc. V. les Constitutions de Catalogue. 156 el forteresses faite par l'infant de Maillorque en 1374, et restitution de tout ce qui leur avait été saisi à cette occasion (Inv. 126). 1377, 7 mars. Le procureur royal inféode à Ray- mond Coste, aliàs Samaler, de Villefranche, les bains de Vernei avec leurs édifices, le tout confisqué sur Jacques Pascal, dudit lieu, rebelle au roi , comme fauteur de l'infant de Maillorque en sa dernière in- vasion du Confient (iNole d'André Roure , notaire^ 11° 86, fol. 5, Arcli. de la Préfecture). 1395. Inféodalion d'un moulin à scier sur la rivière de Cadi , faite par fabbé de Saint-Martin (Inv. de 1787, p. 21). 1402, 13 août. Bulle de l'antipape Benoît Xïll , qui unit à raumônerie et à l'œuvre du monastère de Saint-Martin, le prieuré de Saint-Romain de Llupia et celui de Saint-Pierre de Belloc, près Villefrancbe (Inv. fol. 117, v°). 1A33, 17 juillet. Indulgences accordées par l'évé- que d'Elne aux fidèles qui aideront de leurs mains aux réparations du monastère (Inv. 1506). On verra plus bas la cause de celte détresse. Même année, 9 oci. Quittance faite par Guillau- me Carmesson , tailleur de pierres, à Don Jean Squerd, abbé du monastère, de la somme de 14 liv., monnaie de Barcelone , à lui dues pour la recons- truction du clocher dudit monastère (Inv. 77). Nous disons reconstruction , quoique le texte porte pro constructione , et l'on va voir pourquoi. 1440. Disgrâces el misère du monastère de SaiiU-Marlin. Jean II, abbé , sollicité de payer la décime impo- sée sur tous les revenus ecclésiastiques parle concile 157 de Bâie, en 1433, avait représenté ([ue les désastres et les pertes qu'avait essuyés son monastère rendaient impossible l'aequitlement de la somme à laquelle il se trouvait taxé. Sur ce moiif^ Louis de iJeiga, prieur de N. f). de Cornella, sous-collecteur des droits de la chambre apostolique dans le diocèse d'Elne, fut délégué, le 7 des ides de mars 1439, par le concile susdit, pour vérifier les faits allégués de la part dudii abbé , et prononcer définitivement sur sa réclamation. Voici en résumé le résultat de ses investieaiions • 1° Les réparations à faire au dortoir, tombé de vétusté , demanderaient une dépense de 250 florins d'Aragon. Il en coiiteraii davantage pour celles du réfectoire, d'une salle de Tabbé et d'une cuisine de la communauté, attendu que ces édifices, outre leur dégradation causée par le laps du temps, avaient été ébranlés jusqu'aux fondations, en 1428, par de grands tremblements de terre qui firent crouler le clocher , une partie de l'église , et notamment les murs des maisons monacales'. 500 florins suffiraient à peine pour relever ses murs, et il en faudrait 200 pour le portail du monastère. Le château de Vernet , où se recueillaient les denrées de ce monastère, était dans un tel état de délabrement que sa lestauration serait une affaire de plus de 500 florins. En sorte que, suivant Tévalualion des experts, le ' Le tremblement de terre de 1428 se fit fortement sentir à Perpignan (Mém. de la Cnmmunanté de Saint-.Jacrjues). Tiistuny rapporte qu'un trem- blement de terre, (jui eut lieu trois ans après ladite date, renversa le monas- tère d'Amer, dans le diocèse de Girone. 158 loial (les dépenses qu'exigeaient ces divers bàiimens, serait de 1 .900 florins d or d'Aragon, et il fut estimé que, vu la pauvreté de la maison, quinze ans de ses revenuspourraient tout au plus donner cetie somme. Les réparations qu'on n'avait pu se dispenser de faire, toutes légères qu'elles étaient, avaient telle- ment épuisé les ressources que l'abbé n'avait plus de qiaoi entretenir un écuyer (ou page) , ni un valet. 2° Le monastère avait éprouvé beaucoup de dom- mages et de vexations eu différents temps, surtout en Tan 1374, lorsque l'infant de Maillorque avec ses partisans vint de nuit par des cbemins détournés et à travers des rochers, envahir la maison; qu'il mal- traita et blessa l'abbé et les moines, les emmena prisonniers, emporta les joyaux de Téglise, prit en- suite et ruina le village et le château de Vernel appartenant à saint Martin *. (V., plus haut ;, an 1375). 0° La mortalité qui, depuis nombre d'années, désole les villages dépendants du monastère , les a si fort dépeiq^lés que le peu de revenus qu'en retire l'abbé ne suffit pas pour soutenir les cbarges qui le concernent. A partir de l'irruption de T'infant, le village ou château de Vernet, qui comptait GO liom. mes, n'en a plus que 20 dont f[ucl((ues-uns sont vieux et d'autres sans enfants. A Castell , de 10 hom- mes qu'il y avait, il n'en reste plus que 2 ^. A Celra, ' Les diViaJatinns île la loiir do ce cluUeau ne datent pas cependant d'è celte cpo(|nc, comme on pourrait le penser. Ce fut eu ITDT) environ que rac(|ucreur, M. M", en fit abattre uno face pour en utiliser les pierres. Ses héritiers finiront bientôt par la démolir en entier, dans la même vue. 2 Déi.T en l-'iô'i, dans une transaction de l'abbé et son monastère avec les consuls de Vernet et Castell, il avait été reconnu que la mortalité avait I âU un seul , qui csl nièinc très âgé el n'a poinl clcn- fanls; à Borcloll^ de 4, pas un; à Guissa, de 7, 2; à Avellanet, de 5,2; il en est de même à Joncel. A Marqneixanes, de 35, 2ô ou 26 ; à Targassona, de ^5, 7; à Vilalia, eu Cerdagne , de 3 ou 4, aucun; à Eguei, de 10, 5; à Odcllû , de 12, 7. En un mot, depuis Tépoquo susénoncée , ces lieux ont perdu plus de la moitié de leurs habitanis. A peine se trouve-l-il un étranger qui veuille ou qui ose s'y éta- blir; ce qui fait qu'ils ne produisent plus rien pour le monastère. Les revenus de la grande prévôté, affermés autrefois à 100 livres barcelonaises, ne le sont plus aujourd'hui qu'à 50. Ceux du chambrier qui en produisaient 50 , n'en donnent plus que 30. Ceux de l'aumônier sont tombés de 30 à 12. Ceux de l'infirmier, de 20 à 2. Ceux de l'ouvrier du monas- tère sont ati-dessous de la dépense à laquelle cet offi- cier est obligé. De plus, dans le monastère, il y a toujours deux moines el quatre prêtres bénéficiers à qui l'abbé est tenu de fournir chaque jour une offrande de pain et de vin pour le repos de l'âme du comte fondateur. 4° L'abbaye fut taxée d'abord pour la décime an- nuelle des revenus du monastère, dans le diocèse d'Elne , à la somme de 387 livres 1 1 sous barcelo- nais. Cette taxe a été réduite de moitié par l'autorité apostolique; mais elle est encore si forte que la mai- son a dû supporter jusqu'à présent des dommages, des frais et des intérêts considérables, parce que réduit le nombre des feux de ces villages, de 200 à 2o ; et en cette considé- ration leurs liabilants, qui étaient tenus Je compter ■''lO livr. Lare, à cliaquc nouvel abbé, pour une mule, à son entrée en possession, obtinrent de nVn p;iyer désormais (|ue "5 (Arles on node pouvoir). 160 Tabbc acliiel, ses prédécesseurs cl les officiers claiis- iranx, ont élé excommuniés plusieurs fois el leur monastère interdil. La recette totale de leurs revenus ne s'élève, année commune , qu'à la somme de 220 livres barce- lonaises , et pour l'entretien de toute la maison, l'abbé doit en dépenser plus de 300 par an; d'où il suit qu'il s'endette cbaque année de plus de 100 li- vres, chose prouvée par les registres de recette el dépense el autres documents. Senleuce du coninùssaire. D'après ces représentaiions , le commissaire sus- nommé, en venu de ses pouvoirs, réduiila laxede la décime à 40 livres barcelonaises, à savoir : 25 pour les revenus du diocèse d'Elne, et 15 pour ceux du diocèse d'Urgell. 11 fixe les laxes anciennes et les actuelles, pour le grand prévôt, à 10 livres; pour le chambrier, à 7; pour l'aumônier, à 3; pour linfir- mier, à 40 sous barcelonais ; pour l'ouvrier , à raison de la prévôté inférieure et du prieuré de Saint-Ro- main, attachés à son titre, à 40 sous, sans cjue ces di- verses taxes puissent être augmentées, ou qu'il puisse en être exigé d'autres d'aucune espèce à l'avenir. Acte dressé à Perpignan , le 28 janvier I4'i0, dans la chapelle de saint Jean-Baptiste, située au cime- tière de l'église de La Real. (Arch. de la Préfecture; mention dans l'Inv. , 1500). 1448, 1" mai. Élection de l'abbé de Saint-Marlin (Jean-Erquerd) et de trois autres abbés, pour la dignité de présidents de l'ordre dans la province bénédicilne de Narbonne , Auch el Toulouse. Celle élection fut faite dans un chapitre réuni au monas- tère de Sainl-Tlbérl (In vent. 78; Gallia christ.) 161 Nous allons expli((uer celle pailiculariié. En 1336, le pape Ëenoîl XII, Lc'nédiciin, reforma l'ordre auquel il apparlenait, el lui donna une consii- tulion. 11 en divisa les monaslères en irenle-six provinces. Le royaume d'Aragon forma la neuvième, sous le nom de province larragonaise ; Narbonne, Toulouse Aucli formèrent la quatrième, eic. (Longueval, Ilist. de l'Egl. gali.). L'éleciion ci-dessus fait voir que les Bénédictins de notre diocèse , suffragant alors de INarbonne * , étaient compris dans la quatrième pro- vince. Ce qui distinguait spécialement celte réforme, c'est que tous les trois ans, dans chacune des pro- vinces, on élisait en chapitre provincial, au lieu d'un général, trois présidents. De plus, les abbés étaient à vie et non triennaux, comme dans la con- grégation de Valladolid à laquelle noire monastère de Saint-Genis fut affilié, en 1504, après avoir élé uni à celui de Montserrai, où celle réforme existait depuis onze ans ÇGall. christ., Marc, col. 340). Mais avant la conslitulion de Benoît XII, Saint- Martin et les autres monastères du même ordre de ce diocèse, faisaient partie de la province bénédictine de Narbonne qui ne s'éiendait pas hors de cet arche- 1 L'Eglise d'Elnc, primitivement soumise à la métropole de Narbonne, ne reconnut que le Saint-Siège, depuis I jll jusqu'en 1517 où elle se rendit entièrement indépendante, comme Lien d'autres. En I5G4, l'évèque d'alors, obligé par le Concile de Trente de se cboisir un métropolitain , se décida pour celui de Tarragone. Mais en 1078 l'évècbé redevint, par ordre du roi, suffragant de .\aibonne. Dès ce moment, la congrégation tarragonaise n'eut d'autre supériorité sur nos monastères de Saint-Martin, Cuixa et Arles, que celle d'envoyer un visiteur choisi dans l'un des trois. On va voir ce qu'était devenu Saint-Genis; el, quant à Saint-André-de-Suréda, il se trouvait uni à Arles depuis 1592. II 162 vcclié.(V. ci- dessus laii 1312. Llnv.ii^ 88, siguale en- core un chapitre provincial de iNarbonne , où se trou- vait un procureur de Tabbé de Saint-Martin , en 1 321 . 1460. Lettre du roi d'Aragon, Jean 11, cpii ordonne au lieutenant du gouverneur de Koussillon et à tous autres officiers, de faire exécuter des lelires apostoli- ques concernant l'union de labbaye de St-Miclicl à celle de Saint-Martin, et d'assister l'abbé des deux monas- tères dans la prise de possession de ladite abbaye de Saini-Mirhel et dans la reconnaissance de sesvassaux. Donné à Fraga, le 6 décembre (Invent. 143). 1465 ,'19 avril. Privilège accordé par Louis XI a l'abbé des deux monastèresdeCanigo et deCuixa, pour extraire du sel des salines de Canci, à leur usage , sans payer des dvo'iis [1 6 id. 144). Confirmation de ce privi- lège dudit roi, le 14 mai 1468 (lôid 45). Cette union des deux abbayes paraît avoir cessé en 1 47 1 (Inv. 1 43). 1467, 14 décembie. Lettres expédiées par le gou- verneur de Roussillon, pour l'exécution de lafiiculté accordée à l'abbé île Saint-Marlin, parle roi Martin, d'imposer pendant dix ans, desdroits surlepain , le vin et les marchandises, afin de subvenir aux frais de répa- ration des murs et forteresse du monastère (/<^z(^., 1 53). 1519, 25 août. Permission accordée par le vicaire de l'évêque d'Elne de quêter pour les besoins du monastère {I6id. 1 507). 1523, 3 des cal de janvier. Induit apostolique ac- cordé à l'abbé de Saint-Martin pour user de la mîlre, de la crosse et des autres insignes abbatiales, de con- férer la tonsure et les ordres mineurs aux novices et autres personnes dépendantes du monastère , de réconcilier les églises et les cimetières pollués avec de l'eau bénie par un évêque (Inv. 81). Avant celle 1G3 concession, les abbés de Saint-Marlin n'avaient droit qu'à la crosse i. I 592. Union du prieuré de Saint-Esteve-del-Monas- tir, du Mas de la Garrigue et de N. D. deMudagons, avec leurs dépendances, au monastère de Saint-I\Jar- lin. (Inv. de 1787, p. 30). Saint-Esiève était une abbaye en 995 (cariulaire de l'église d'Elne). Par un abus digne de ces temps de barbarie, elle tomba entre les mains de lîernard 'i'aillefer , comte de Bésalu , qui, en 1020, la légua par testament à ses descendanis, dans ledit comté ou dans celui de Cerdagne (AJarca , col. 177). Celle abbaye, rentrée dans la juridiction spirituelle vers ' 11 parait mémo que uos abbés ne commencèrent h user de ca ilrnit (j\io postérieuiemenl a 1503. Ce qui nous le fait [lenser ainsi, c'est que sur trois abliés, dont on voit les sarcopliajjes ornés de bas-reliefs, au sommet du mau- solée du comte, dans Téglise de Caslelt, celui dont Tépitapbe porte la date susdite, est représenté sans crosse, tandis que d'un autre côté, son successeur immédiat, mort eu 1315, en est décoré, et que parmi les religieux qui en- tourent son cercueil, fi {jure aussi un successeur avec cette insigne. Le troisième sarcopbage offre de même deux abbés crosses, que nous devons croire moins anciens que les précédents , quoique aucune insci'iption ne nous les fasse connaitrc ; et il se pouirait bien (|ue le défunt fût ce licrcnfjer de Colomer, qui eu 1332 réunit les restes du comte et de sa femme dans le nouveau monument iju'il leur fit élever. 1! se pourrait aussi que quelqu'un de ces abbés appartint à Sainl-.Miclicl de Cuixa. Comme les deux épitapbes se trouvent bors de portée , et l»é« de ^aliif-Matrtiii. NOMS DES ABBES. Olil.a Scliia Renard I Guillaume I Mi l'on Beiiaia 11 Pierre I, on P"=Ernien(;;iud. Pierre II, ou P'^Suniaire . . . Ilaymon(ll,Valls,ile la Grasse Pierre III, Je la Grasse .... Bérenger I, de la Grasse. . . . Raymond II, sacr. deRipoll. Gcrald, frère Je Raj nionj II . Pierre IV Pierre V, Pierre J'Kspini . . Bernard Pierre VI, ou P" de Saliorra . Pierre VII Guillaume 11 Pierre VIII Guillaume III, G. de Cervoles Arnaud de Corbiac Bérenger de Colonier, ou P. Bérenger Raymond III, de Banyuls. . . Paul DATKS CO.NNUES. riU;Mll.lirS. DEIlNltRES. 12 eal. d'avril 8 cal. de mars o id. de juillet iXones de févr. .Mars 3 id. d'octujjre 10 cal. de déc 7 cal. d'octob. 10 cal. Je mai 12 cal. de févr. 10 cal. de mai îXones de mai . 'i id. Je février lOcal.de janv. 9 cal. de mai . 15 c. de juill. ~) id. d'octobre 51 juillet. . . . 10 cal de juin I OO'J 101'. ioi; lOoO I OUO 1080 1 08 i 1114 1125 I I .'iT ii;^'j 1171 (172 1212 1250 1258 1282 1 20 1 1299 1 500 1505 I5li 1 55C 1558 iJ. de juillet 5 id. d'uctob, I 10 cal. de fév. 12 c. de sept. 17 cal. de Jéc. 7 iJes J'oclob. I '( cal. Je uov. 8 cal. de mai . I5 non. daoï'it {.j cal. J'ott. 1011 10'.; ? 1049 lOCo I07(i 1 08 5 HIO 1114 llo2 157 1168 1171 1212 1250 1255 1279 1290 1299 1299 1 505 1514 1 5.-5 i 55(i 1 558 172 NOMS DES ABBI'S, DATÏS CO.NSLF.S. PaEMIlMiGS. UEUMÈIIES. Pierre IX, OU P. -R. de Veinet Raymond IV, ou R. Patau . . Pierre X Raymond V, ou R. Béivngei-. Pierre XI François Guillaume IV Marc de Vilalta Guillaume V, ou G. Catala. . Jean I, ou Jean SquerJ. . . . Jean II, de Millars Rodolphe de Lahire Jacques de Banyuls .juin . C août . / mai 9 décembre . . 5 non.de sept. Aloys, dit le card. d'Aragon, I "' abbé commendataire Gaspard Borrcll , idem, en lîilS; régulier 9 avril 15 juillet.. . . iQ cal. denov. ) '( mars 4 juin 3 cal. de mars Fin de décem. Jacques Sirach Le caid. Cesarini, abbé com- mand., depuis le 20 des c. d'avril 1522, survivancier de Js. Sirach, lui succède. SigisHiond Paratgc Le cardinal Jacques, admi- nistrateur perpétuel Pierre Xll .28 avril . Mars . . . Onufre de Giginta Ange Juallar Le docteur D. Melcb. Soler' d'Amcndaris, coadjuten du précédent 9 février. Veille des non. de janvier. . 8 juillet 9 août 1 359 ^5-58 1560 1300 1384 1386 1391 1597 1397 1407 1442 ^471 1484 ^506 1515 1522 1534 1552 ^558 1562 1577 1601 4 non.dejanv. 1 547 15 avril 1560 7 mai 1560 28 janvier. . . 1580 1585 2! novembre. 1590 20 août 1396 1597 22 juin 1405 !44l 1468 1471 Moit en ^506 1515 Fin de juillet, m. 20 c. de j*' 1522 ^554 6 décembre . . 1 623 1540 1554 1558 1362 m. 9 mai. . . . 1594 6 décembre. . 1625 Dcctmbrc 1648 (Lacune. I'. ci-dessus, année 1649. 173 NOMS DKS ABBRS. D. Pierre l'ouiltroux (l\ XIII) I). Augustin Llauibi D. I(jnacc Jii Valls D. Jarij. Boinljes, do iMillas, nioiue d'Arles D. Jeaii-Jaequcs de Durforl . D. Jean -Marie Gruinet de MoiUpie, dernier abbé. . . DATES CONNUES. niEMii.iii s Di;RMi.iii:s. 17 mai. . . . .j I octobre . IG!).S I7l'r 1728 I / fO 17 déeenibrc . I7C 5 l'^"' septembre. 1779 m. le 28 août 171'. 1728 1 739 m. le K) févr. l76-'( m. le IG févr. 1779 Sécularisé en -1782, avec le monastère HOTES. — I. Les auteurs do la Gallia ilirisliatia ont comniis plusieurs erreurs au sujet des al)l>és Pierre II, Ilàynioiiii I et Rajmond 11, en citant à faux la Marca liispanka, coniuie on peut le vérifier. II. Uayniond III de Banyuls était un pciso!;na{|e distiiijjué. Il fut député deux fois au])rès du pape ((iléniont VI ) par le roi de IMaillorque Jacques II, pour traiter d'affaires concernant ce prince, il accompagna à ]\Iontpellier et à Sanl-Saloni la reine Constance , le roi même à Montblanc , et enfin des dames de la cour à Arles, en Provence, où elles devaient entrer dans quel- ques maisons religieuses (Cbaites aux Ardi. de la Préfecture). La Gallia le porte comme abbé d'Arles en l.'ii et en 13.32. III. Le cadre (|ue nous avons cru devoir cboisir pour cette liste des abbés, n"a pas permis d'v indiijner les documents d'oii les dates sont prises; mais on peut être assuié qu'elles résultent do longues et soigneuses recberchcs. DESCRIPTION DE L'ABBAYE DE SAINT-MARTIN, PUBLIÉE EN 1787, par le ilocteur Cari'ère , dans son Voyage |tilloi'esque en Roussillon. « La position du monastère est pittoresque; il est environne tic « rochers, de précipices; mais on y voit avec étonnemcnt les belles «terrasses, les jardins en amphithéâtre que l'art y a construits, en n tirant le plus grand parti du terrain le plus ingrat... On admire «surtout un chemin superbe qui conduit du village de Castell lus- « qu'au monastère : il est construit en terrasse , ayant la montagne «d'un côté, des précipices profonds de l'autre, et soutenu par un « mur construit avec art , assez large et d'une pente assez douce pour « qu'une i'oilurc puisse f passer sans danger 1 et parvenir jusqu'au 1 ÎM. Carrère fait ensuite une étrange bévue, en attribuant à l'abbé dom Llambi, la construction de ce cbemin, exécutée, dit-il , quarante ans avant l'époque où il écrit, et par conséquent en I7'(7 ; or cet abbé était mort en 1728 et notre auteur était né en 1740. 174 « inoiiaslèie. Une partie de ce chemin Iraveise un bois épis f|ui en « augmente ragrcment. » L'exactitude de ce taljleau nous a été attestée par un vieillard d'au- tant plus digne de foi (ju'a raison de son état, il avait fréquenté assi- dûment ces lieux depuis son enfance. Il ajoute que l'épaisse forêt que traversait le cliemin , se composait de tilleuls, noisetiers, chênes, yeuses , bouleaux et autres arbres divers , et ipie le sol était couvert d'un gazon parsemé de serpolet, de marjolaine, d'églantiers, etc. La planche ii indique l'emplacement de ce bois. En proie à une aveugle cupidité, cette riche végétation ne survé- cut pas long-temps à la suppression du monastère ; les édifices dé- pouillés tout aussitôt, par la même passion, de tout ce qui pouvait les conserver, n'ont pu que tomber de jour en jour en ruines. Déjà le temps approche où il n'en restera debout que le clocher, tandis (|uc 1.1 crypte, et les autres souterrains ne seront que des repaires de loups ou des élables à cochons : TEMPVS EDAX... EDACIOR HOMO. APPENDICE SIR LES BAINS DE VERNET. 1181. Cette date est la plus ancienne que nous avons pu trouver au sujet de ces bains. Elle nous est fournie par l'inventaire de 1586 qui signale, n" 134^, un liiage appelé ad rupcs de catidis , aux rocheis des eaux chaudes ou des bains thermaux. Tel est, en ed'el, le sens de calidis avec l'ellipse très usitée de ciqais. Mais il est à cioiic encore que calidis est tout simplcmeiit ici une traduction de caldas qui, en catalan et en castillan, signifie tout de même bains thermaux, et caldas est tiré de l'adjcclif latin caldas, synonyme de calidus. 1 18G. Vente failc à Guillaume de Saint-Martin par Pierre Mir de la moitié d'un moulin à foulon, sur le territoire de Vernet, avec la servitude des eaux froides et chaudes (ibid. 374 j. 1202. Yeule faite par Bcmaid de (jolomer au monastère de la moitié d'un moulin à foulon qu'ils possèdent ensemble par indivis aux bains, ad halnca, de Vcrnct (ibid. 941j. 1301. Donation et concession d'un emplacement auxdits bains faites par Guillaume, abbé de St-Martin , à Guillaume Pascal du même village (ibid. 1329J. 1309. Permission et faculté données par Fr. Arnaud, abbé de St.-iNIarlin, à Guillaume de Novelles de faire et posséder des bains dans ses maisons, et de recevoir, à cet elfet, une source d'eau chaude qui est hors des grands bains. 1315. Inféodation faite par Fr. Arnaud, abbé de St. -Martin , à Pierre Sabatcr, scieur de long, d'un espace de terre inculte dans une tour des bains (d)id. 1201 J. 175 1350. Uccoiuiaissnnce (éod.ilc failc à Fr. ll.iynioiitl (IV), abbc, p.ir J;iri|iiC3 Pascal, à laisnn des maisons siuu'esaiix Ijaiiis iiui avaient ajipartcnu à Picnc Saljatcr (tbid. 1266J. 1353. Vente de (|ticl(|i]cs maisons auxdits l^ains, faite par Guil- laume Noells, pièire, il Js Pascal de Vernct (Ibid. fol. 104, v", 3, Y)). 13(57. Jacques Pascal se reconnaît vassal de l'abljé Saint-Wartin (ibid. llGGj. 1374 ou 75. Confiscation au profit du roi des bains, de leurs dé- pendances, etc., appaiteimiit î» Jacques Pascal, condamné et mis à mort comme fauteur el adhérent de l'infant de IMaillonpie, lorsque ce prince envahit le Contient (en 1374). 1377. Le procureur-royal considérant que les bains confisqués sur ledit Pascal seraient plus productifs s'ils étaient inféodés, que s'ils continuaient de rester entre les mains du roi, les inféode à Raymond Coste, (iliàs Samaler, de V'iiicli anche, et à ses descendants, elc , à perpétuité, moyennant une redevance anruelle de 6 liv. 10 s. de lerii de Rarceloiie note d'André llomcu , notaire, n. 86, fol. 5, archives de la préfecture '. 1383. Mention des grands bains dans un acte de reconnaissance (Invent., fol. 119, v"). 1417. 10 mai. Procéduie faite par le juge du Confient, à la re- quête de l'abbé et de son monastère, pour le soutien de leurs droits de Vernet sur les bains, eaux et forêts el justices (Inv. de 1787, p. 42). 1698. Le biographe anonyme de saint Gaudéric nous apprend que l'abbé dom Pierre Poudéronx , son contemporain 2, peiné devoir que ces bains étaient entièreracnl dépourvus de logements, résolut d'y en établir, et qu'il commença par y faire construire, à ses frais, un hôpital militaire. LTn incendie ruina les bains, au commencement du dernier siècle, dit-on; mais comme le biographe anonyme ne fait pas mention de cet accident, il a dii arriver api es 1706, ou [)lutùt, après 1716. 1774. On lit dans une description histori(pie et géographiipie du Roussillon, manuscrite : « Les bains de Vernet se prennent dans un bassin de 32 pieds de long sur 15 de large et de deux pieds de pro- fondeur, partagé en deux par un mur de traverse. Le logement com- mode qu'on avait bâti à côté du bassin est ruiné en partie ; il peut ' Nous ignorons en quel temps ont cessé d'cvister ces bains qui n'étaliMit autres que ceux dont la source avait été concédée à Guillaume de Novelles en 1309. Tout ce que nous pouvons dire , c'est qu'on on a trouvé des traces consistant en de longues tiges forées, à l'endroit où M. Couderc a fait cons- truire le réfectoire de son établissement. 2 I). Poudcnnu fut abbé depuis IfiOS jusqu'en 171 'i. La biographie eu question fut écrite en 170fi et publiée en 171(5. Voir cet opuscule. 176 être rclalili à peu de fiais. La voûte (gothique) du Lassin est en 1res bon état l. » 1778. Après la scculaiisalion du monastère de St. -Martin , l'abbé M. Ginmet de Montpie, considérant que les bains de Veinet étaient en très mauvais état, que les bâtiments qui les renfermaient tombaient en ruine, et que ceux qui les environnaient étaient presque détruits, les bailla à titre d'empliylhéose au docteur Pierre Barrera, de Pradcs pour une ccnsive annuelle de 6 liv. et 400 liv. de droit d'entrée en possession. Il permit à l'acquéreur de couper dans les forêts de l'ab- baye le bois et les autres matériaux nécessaires pour les réparations , le tout sous la condition expresse que les bains seraient gratuits pour les habitants de Vernet et de Castell, cl pour les pauvres. Acte reçu par Me Serra, notaire, le 12 avril de l'année ci dessus. M. Barrera se hâta de restaurer soigneusement le bâtiment voûté. Une maison d'habitation fut adossée à la principale façade exposée an midi. La piscine fut comblée, et sur la place qu'elle avait occu- pée s'élevèrent huit cabinets contenant des baignoires en marbre du pays, ou des bassins à douches. Auparavant, dit-il, les baigneurs ne pouvant se rendre au village, au sortir des bains, n'avaient pour s'abriter et se coucher qu'une barraque jonchée de paille. M. Bar- rera s'occupa encore de la direction et de la distribution des eaux et d'autres perfectionnements. 1797. Le 26 octobre, M. Barrera vendit les bains à M. Morat d'Estagell. Ce nouvel acquéreur renchérit sur les améliorations de son prédécesseur. En 1833, on trouvait aux bains quatorze cabinets à baignoires. La maison d'habitation était réparée et agrandie. Il y avait vingt-une chambres , dont dix à cheminée , et un salon de réu- nion commune, etc. Voir pour plus de détails le traité précité du docteur Anglada. 1833. M. Mcrcader commença l'établissement des bains qu'il pos- sède et régit. 1834. M. Morat vendit le sien à MM. Couderc et de Lacvivier. On sait combien de commodités et d'agréments présentent aujour- d'hui ces deux beaux et vastes établissements. PuiGGARI, corrcsponJaiil de rAcadcniio des sciences de Toulouse et d'autres sociétés savantes. ' D'après le docteur Aiijjlada (Traité des caiix viinéraks, etc., I8.'5, t. i, p. 185), rédifice voûté est un parallélojjiaiiniic dont le jjrand côté diiigé de Test à l'ouest, offre, dans œuvre, environ {A m. de longueur et environ 7 de largeur. La voûte est élevée d'environ 8 m. 7 au dessus du sol , et les murs ont dans la partie basse I m. Ei d'épaisseur. nu. PaE CAMGO. Eclielle Je l/^OOO, ;5 'Y/c. Q. ■ Massive co]oTine .(le granit. .■ . . Q:'. MjtSSivS. et.loDrde. cojoniie dç granH . ' . . . •11. Porie- de l'église souterraine de S^¥artiii-de Canigo ; S'. Porte d'enti'ée sous le cloclier. ■' ' ■ T. Màitsolée du Comte . U. . Po?fe intéTi.eupe , . -. ■ • • Y. Porte latérale . X. Porni«, liRuteuï' «t largeur de k médiane. ■ Y. Tonne , largem- et liâuteiir -des nefs latérales . • . . T.. ■ • . .• CIo(hej\. . ■■'■.•"'. n»W . ■. •, . • ■ U. '■•'■'■ •■ ■ ' • . • ■ arcs, à- plein • ' • .. .-•.. .. Chaft iiH. Bitt CtgJi^ d'- . ^'PV'^- 'LC: c/i N r. p oO ^ f^ A- 1 — 1 ■ ^e ca (^ o w i. p>4 'g ^ CJ O 2; o cCf pq ^_ ^ p- f— ', ,_^ ^— ' -_i ft !^ o (— 1 H <1 Oh 1=) e 1 — ; — ' < !2; 177 Année 1^-19, Séance puMiqae (in 7 vwmh 1847. DISCOURS Dn Pi'ésidenl de la Société des Pyréiiées-Orienlales. Mf,ssip:urs, En subsliliiant au lilie de Société Plnlomatiquc de Pcrjjignaii , qu'on avait adopté dans le principe , celui de Société agricole, scicntifu^uc et littéraire des Pyrénées - Orientales , on a mieux caractérisé notre association et précisé le but qu'on se propose d'at- teindre. On sympathise et s'identifie ainsi en quelque sorte avec le plus grand nombre de sociétés savantes, dont les travaux ont presque uniquement pour objet l'agricullure et linduslrie. On exprime qu'avant tout son existence doit cire mile. L'agriculture, Messieurs, que nous voulons sur- tout encourager, en assurant le bien-être des peu- ples , est la base fondamentale de la force et de la durée des Etats. La vie des champs entretient constamment dans l'homme les principes de morale et la pensée reli- gieuse. Celui qui, loin des agitations du monde et des giandenis, consacre son existence aux travaux 12 \7S delà terre, alteiul loui ilu ciel. Son àine sélève vers rÊi.re supérieur qui dispose des saisons. Si les éléments, favorables à la culture, lui font recueillir d'abondantes moissons , sa famille réunie au foyer domestique exprime à Dieu sa gratitude. ÏA quand l'orage éclate, quand la lempêie détruit ses espé- rances, sa pieuse résignation lui fait regarder ce dé- sastre comme une épreuve, un cbàtiment. Ainsi, dans la prospérité, dans le malheur, Thomme des champs adresse au ciel sa prière d'action de grâces on l'expression de son repentu-. Non seulement sa vie est morale, mais il puise la vigueur, la santé dans resercice journalifr de ses forces pliysiques. On voit rarement dans les campa- c^nes des corps frêles , des tempéraments énervés, comme dans les villes , où tant d objets excitent l'envie, irritent les désirs et font malheureux ou coupable, celui qui ne peut les satisfaire. El ne doit on pas vivement regretter que l'utile, l'indispensable laboureur abandonne sa modeste chaumière et les travaux agricoles, qui lui assurent un honnête sa- laire, pour se précipiter vers les grandes populations, où l'encombrement dans toutes les professions ;, des habitudes, des besoins inconnus au village rendent son existence précaire! Les relevés statistiques font connaître que, de 1800 à 1836, la population des villes s'est accrue d'un quart, celle des campagnes à peine d'un cinquième. Les charges publiques pe- sant presque en entier sur la propriété, l'aristocratie financière substituée à la territoriale, l'ambition dans toutes les classes, la vanité des parents^ le mode d'éducation... tout tend à ce fâcheux résultat, d'un si grand poids dans les destins futurs de notre patrie. 179 J'ai d'il rétlucalioii , cl en efïci, iMessieurs, ce n'est que depuis peu ((u'on s'est occupe de créer des écoles spéciales d'agricuiliire h portée de toutes les condiliojis. Enlra-l-elle jusqu'ici pour quelque chose dans Tinstruction primaire, dans celle des ccoies supérieures et des collèges? On y enseigne les lan- gues anciennes, les sciences, les inaihématiques ; on s'occupe essentiellement de liiléralure, des beaux- aris. Tout concourt à diriger les vues des jeunes gens vers des positions sociales plus élevées que riinnd)le état agricole, el pourtant quel état est plus digne de considération! IN'y a-t-il pas autant de gloire à améliorer une charrue, à inventer un nou- \cl inslrumenl agricole qu'à peifecllonner une arme de guerre, à trouver de plus actifs, de plus énergi- (jues moyens de desiruciion! Les découvertes tie l'agriculture restent ; ce sont des bienfaits éternels pour riiumanité. Que resie-l-il des guerres, des in- vasions, des conquêtes les plus éclatantes? de vastes lerriloirrs ravagés, des milliers de viclimes, de l'ambition ou de la haine; partout ruine cl désola- tion. A ces désastreuses époques, les sciences, les arts reculent , el ])ientôl s'évanouissent les progrès de plusieurs siècles; Tliisloire a consacré ces tristes vérités. Quels furent, en effet les déplorables résul- tats de l'invasion des iîarbares dans le iv^ siècle? L'ignorance, la férocité des peuples chasseurs et pas- teurs, long-temps refoulés par les Fiomains dans les forets au delà du PJiin et du Danube, triomphèrent de la civilisation , el plongèrent l'Europe dans les ténèbres jusqu'au règne éclatant de Charlemagne. Après lui, la France divisée, jouet de l'ambition des possesseurs de grands fiefs sous le régime féodal, ÎSO bouleversée dans ses longues lunes contre son éier nelle rivale d'ouire-nicr , déchirée plus lard parles guerres de religion , n'a vu renaître et fleurir les sciences et les lettres qu'au siècle de Louis XIV. Sous la puissante égide de Colbert, 1 agriculture et le commerce firent aussi des pas immenses. A ce grand génie sont dûs les actes fondamentaux et les mesures réglementaires , doù jaillirent ces deux sources fécondes de la vie des Etats. La paix est nécessaire à leur prospérité. Le sage, le philanthrope font des vœux pour sa longue durée. Elle favorise Télan de l'esprit humain vers l'industrie: elle per- met à l'expérience de consacrer les essais d'un intel- ligent système agricole. De ces considérations générales sur la plus nohle, lapins importante destination de l'homme, passons à l'examen de l'état actuel de l'agriculture, et cher- chons par quels moyens il sera possible d'élever ses pioduits au niveau de l'accroissement rapide de la population. La France a 35 millions d'habiians dont la consommation moyenne en céréales est de trois hectolitres, indépendamment des légumes, de la viande, du poisson Le produit net des 20 millions d'hectares en culture, déduction faite de la quantité nécessaire aux semences et aux exploitations indus- trielles, ne va pas au-delà de 105 millions d'hecto litres qui ne sont point en rapport exact avec cette population , car , de 1820 à 46, on a importé du l)lé pour des sommes considérables. Nous posons donc en principe, sans entrer dans des calculs inoppor- luns_, que « les produits actuels de la France suffisent ((moyennement à la consommation» ; maison sait que raccroissement annuel est d'au moins 162,000 181 iii(li\ idiis , ce (jni , tlaiis AOaiiî, donnera 10 mil- lions , ou j)rès (l'un liers en sus. 11 faul donc songer à l'avenir, puisqu'on devra alors obienir 30 millions d'heciolilres de céréales de plus quaujourdliui. Celle grande question ei, si nous osons le dire, celle cffrayanlc perspective , pour la France surioul , où l'on fait du pain le principal, l'indispensable aliment, doit vivement préoccuper le gouvernement et don- ner lieu aux médiiaiions des sociétés d'agriculture. Mais comment saiisfcra-t-on aux besoins des excé- dents annuels de la population? S'adresser aux nations étrangères? ce serait appau- vrir la France sans réciprocité d'échange, et s'ex- poser à manquer de grain en cas de guerre. Former des dépôts de réserve? on se jetterait dans une énorme dépense d'emmagasinement et d'intérêts du capital d'achat, qui rendraient des grains défec- tueux , plus chers que ceux provenant de l'extérieur même dans une année de disette. Reste le défrichement; ressource éphémère et bornée, car, si de 7 millions d'hectares existants en terres Incultes, on relranche 2 millions de penles rapides ou d'escarpements, qu'on doit bien se garder de défricher, et 4 millions de landes, uniquement propres à des plantations, il ne restera guère qu'un million d'heclares en terres susceptibles de culture avantageuse. L'hectare donnant, moyennement, en France, 5,70 i ou pour un million d'heclares, 5 mil- lions 700,000 hectolitres, onze années suffiront pour les absorber, en attribuant à chaque individu trois hectolitres annuels. Ainsi , au bout de onze à douze ' Imi ItMiaiit coin|3lc (lox jmhèies cii usage dans la |>l(is giaude partit; Je la France. 1S2 années, tous les défrichements possibles seraienl opérés, Cl l'eniharras se lepioduirait. Cesi donc uniquemeni dans l'amélioration des terres actuellement exploitées, sans exclure toute- fois la ressource des défrichements, qu'il faut cher- cher le remède radical. On ne saurait douter du succès quand on connaît le produit des terres cul- tivées avec intelligence dans des contrées dont le sol est loin de valoir celui de la France. Ainsi, du pa- rallèle des produits avec FAngleterre, il résulte que rhectare y donne en céréales jusqu'à 20 pour \. En France, la moyenne esl au-dessous de 8 '. En Angle- terre, le revenu des terres va jusqu'à 720 fr. par individu employé a la culture. Il n'est, en France, que de 180 fr. Comment diminuer ou faire dispa- raître celte énorme différence? Une seule voie esl ouverte, celle de l'engrais. Le moyen d'en ohtenir.^ c'est l'augmentation de hétail. Sa conséquence ? un assolement dans lequel les plantes fourragères entrent en plus forte proportion que dans Tétai présent. Vouloir arriver à de grands résultats par des comhi- naisons, des procédés de détail, de culture, serait illusoire. On sait que le rapport des plantes épuisant la terre à celles qui l'améliorent, ou qui servent à la nourriture des hestiaux, esl de 20 à G. La sup- pression des jachères , la culture d'une partie des terres consacrées aux céréales, en prairies naturelles et arlificiellesétahliraienl l'équilibre. Mais à l'engrais, il faut joindre l'irrigation, sans laquelle les prairies ne donnent qu'un faible produit. La France a de 1 Moyenne du produit des terres semées en céréales, dans les bonnes années. 183 grajuls pas à faire poiu' eu organiser coiiiplètemeul le sysième. U n'y a cependaiii d'au Ire difficuhé que la dépense, car son territoire est sillonné de cours d'eau. Ainsi Tirrigaiion, l'engrais, doivent être les objets les plus imporianis des vues, des travaux des forts propriétaires; car, pour des expériences, pour des essais pratiques, plus concluanis que les théories, la puissance des capitaux est la plus sûre garantie du succès en agricullurc comme dans l'industrie. MallieureusemeiU le bétail n'existe, en France, que dans des proportions insuffiscintes avec les terres cultivées. Les économistes voudraient un bœuf ou l'équivalent par heclare ; la France n'en possède que la moitié, moins même, puisqu'en cotant quinze moutons ou douze cochons par téie de gros bétail, on n'en trouve que 15 à 16 millions très mal nourris. Tels sont. Messieurs, les moyens de pourvoir un jour aux besoins d'une population toujours crois- sante , el de se mettre à l'abri de ces famines jadis fréquentes, dont, grâces à l'inappréciable bienfait de l'introduction de la pomme de terre dans Talimen- tation, le retour esi infiniment plus rare. Aussi, la maladie de ce précieux tubercule est-elle considérée comme une grande calamité, dont plusieurs contrées et surtout l'Irlande, ont déjà cruellement éprouvé les effets. Tout porte à croire qu'elle se renouvellera celte année. INous ferons une rapide application de ces prin- cipes, de ces considérations, au département des Pyrénées-Orientales. Pour une population de 174,000 âmes, le sol devrait donner en céréales 522,000 hectolitres. Il en donne moyennement 400. Déficit, im quart. A la ISl vériié, le produil des ponimes de lene el des légumes verls et secs, Tahondance des fruits, la pari de viande el de poisson dans la nourriture du Houssillonnais, plus forte que dans la généralité des autres départements , compenseraient Lien ce ré- sultat, si rénorme exportation des deux premiers articles ne nous privait d'une précieuse ressource, qui nous mettrait tout à-fait en état de nous passer d'avoir recours à l'extérieur. La surface du déparlement est de 412,000 hec- tares. Celle des terres cultivées en céréales, en vignes, prairies naivirelles, exploitées, ne va pas à 200,000. Il y a donc plus de la moitié du départe- ment en terrains, dénués de culture^ ou non sus- ceptibles d'emploi, si ce n'est pour paccage, quand les localités le permeileni. La place ne manque pas pour opérer des défrichements, des reboisements de montagnes, et tirer parti du sol; mais les bras man- queraient. 11 paraii donc plus rationnel, c'est même une nécessité, de s'attacher à augmenler le rende- ment des terrains maintenant en culture. Il faut, dès lors, réduire, autant que possible, la jachère, étendre l'irrigation qui ferlilise déjà de vastes parties * du territoire et que des projets à l'étude ont pour 7 but de doubler; enfin accroître, perfectionner les engrais. Nous sommes naturellement amenés à la question du bétail, correspondant aux terres exploitées. Le département est loin d'en posséder la quantité né- cessaire. Au défaut d'une statistique bien établie des bestiaux de toute naiiue , il faut nous borner à un simple aperçu, et même l'arrondissement de Perpi- gnan est le seul où nous puissions formuler un rap- 18.-, porl entre les leires cnlilvées en cciéales , en prai- ries, ei les bestiaux destinés à l'exploiiaiion , les deux autres arrondissements, et surtout celui de Prades, élevant beaucoup pour la vente sur des pac- cages naturels. Le premier arrondissenionl a 3.000 têles de bêles bovines, 155,000 ovines, 12,000 clievaux, mulets, ânes, 18,000 codions ou cbèvres, ce qui, en rappor- tant toutàTuniié de gros bétail, bccuf ou cheval, sui- vant l'usage, forme un total de 24,000 léles. Or, le pre- mier arrondissement a plus de 50,000 hectares en culture, ne comptant même les vigues que pour un f[uart de Tengrais ordinaire. Ce n'est dans la plaine du Houssillon, au plus, qu'une tête pour 2 hectares. La cote moyenne pour toute la France, cote recon- nue fort insuffisante, est de plus d'un demi par hectare. Nous avons donc beaucoup à faire pour arriver au but, et nous devons, avant tout, accroître considérablement la culture fourragère. Elle n'est guère, en ce moment, que le i/|q du total, tandis qu'on pose en principe qu'il faudrait la porter au tiers, au moins au quart. Alors seulement nous pourrons dire (|ue nous lirons parti d'un sol où le chêne-liége et l'olivier sont des produits naturels, et qui se prêle à toutes les cultures, depuis le sarrasin ins(|u'au riz, dont l'essai vient de réussir celle année dans les marais de Salces. Le département des Pyrénées-Orientales , est eu quelque sorte hors ligne pour la culture de la vigne qui peut y venir partout , et dont il est à craindre que, depuis l'introduciion de nouveaux" cépages d'un rendement très abondant, i'appat d'un produit supérieur à celui des céréales, n'envahisse les loiri- 186 toires même à l'arrosage qui lui sont consacrés. Nous regreilerions vivement de voir ainsi sacrifier des fonds si fertiles , qu'on pourrait généralement les métamorphoser en jardins, cet emploi dûl-il enri- chir les propriétaires; car, avec de For, on ne sur- monte pas tous les obstacles, el il peut arriver telle circonstance qui oblige à vivre du produit du sol dans chaque localiié. Ce serait alors une immense calamité que de manquer de céréales. Je ne saurais passer sous silence une branche es- sentielle de notre industrie agricole : le jardinage qui prend nn essor qu'on pourrait taxer de dérai- sonnable, si l'établissement très probable d'un che- min en fer n'offrait une garantie de la facilité du débit. Ce genre de culture laisse néanmoins beau- coup à désirer, el nos jeunes jardiniers devraient aller à Paris ou dans des localités, renommées pour l'horticulture, puiser des connaissances qui feraient disparaître de vieilles routines , el inlrodiiiraient des procédés inconnus de leurs devanciers. Ainsi favorisé par le climat, la chaleur, l'irrigation, ce beau déparlement , au moyen de quelques amélio- rations dont l'exécution dépend de la volonté de ses habitants, n'aura rien à envier à aucun autre sous le rapport agricole. Que ne puis-je en dire autant du commerce et de l'industrie! Ici, Messieurs, nous avons de péni- bles regrets à exprimer. Et comment n'en aurions- nous pas, quand 1 hisloire est là pour constater la célébrité des manufactures de soie et de lainage du Roussillon pendant plusieurs siècles? pour nous faire connaître l'étendue de ses relations commerciales, ses vaisseaux sillonnant dans tous les sens la Médi- 187 leiraiiée , la Mer-Noire, s'élancani hors du déiioii jusqu'aux mers de Guinée, pour nous montrer son influence , son action respectées sur les côtes d'Es- pagne et d'Afrique, où ses bâtiments armés opéraient de concert avec les flottes des rois d'Aragon! Com- ment ont disparu celle puissance et celle prospérité industrielle? des guerres incessantes et toujours dé- vastatrices sur une frontière, une faible population absorbée par les besoins de ragricultiire , la jalouse concurrence des provinces voisines , interdisant la sortie des produits manufaclniés , amenèrent ces funestes résultats. L'abandon des plantes propres à la leinture et à la fabrication, lelles cpie la garance, le pastel , la gaude et le chardon , avantageusement cultivés pendant des siècles, en fut la conséquence. Ce serait faire injure à l'inslruclion , à la capacité des Ilonssillonnais , que de metire en doute qu^il dépendrait de leur goût , de leur volonié de faire renaître parmi nous des industries qui y furent long-temps en honneur. Le sucres est certain s'ils rentrent dans la lice , n'ayant à cond)aitre que des rivalités de talent; et n'a-t-on pas sous les yeux l'exemple de la prospérilé des établissements ma- nufacturiers récents de la Villeneuve! l'exploitation des abondantes mines de fer et antres métaux de nos Pyrénées , celle des carrières de nos innombra- bles variétés de marbre , mis en œuvre dans deux ateliers dont les produits sont remarquables ; les tanneries, les fabriques de bouchons, les distilleries et par dessus tout , l'éducation des vers-à-soie , ou- vrent un vaste champ aux spéculations , au génie industriel. Je ne puis cependant m'empécher d'a- dresser à cette population si intelligcnie le reproche 18S de ne pas tirer j)ai'ii de toutes les ressources de sa position. Bornons-nous à citer l'art sérlcicole. Dans quelle contrée a-l-il , plus que dans le Roussillon , des chances de réussite? Eh hien ! au lieu de pro- gresser, il fait, j'ose le dire, des pas rétrogrades. Exploité par quelques éleveurs sur une grande échelle, on ne le voit point se populariser, descen- dre au modeste rôle, qui peut seul néanmoins par sa généralité, lui valoir l'état prospère auquel cette extension l'a porté ailleurs. On fait de tous côtés des plantations de mûriers qui croissent rapidement sur les terrains les plus aspères ; une grande par- lie des produits reste intacte : ils seraient exploités jusqu'au dernier, et celte culture prendrait un im- mense accroissement, si chaque petit propriétaire oc- cupait les loisirs desa famille à élever des vers-à-soie. Les sciences, les arts lihéraux , que la Société des Pyrénées-Orientales honore et cultive, entrent dans le programme de son institution. Nous devons aux savants archéologues qui en font partie la connais- sance d'une foule de faits intéressants que recelaient les antiques et volumineuses archives des couvents, du notariat et de l'Intendance. Les laborieuses re- cherches de notre collègue, M. de St-]\]alo, appréciées par les ministres de Tlntérleur et de la i^Lirine, ont reçu des éloges flatteurs. JNon seulement l'histoire y trouve des renseignements précieux, mais, en nous montrant ce que furent nos pères et Tétat du commerce dans les xiu'^ et xiv^ siècles, en nous indiquant des cultures, des produits maintenant négligés ou perdus , ils nous remettent sur la voie et nous encouragent à reproduire ce qui eut jadis tant de succès. 189 Les pioduclious liuéiaircs oui éic foii rares celle année. L'époque présente n'esl poini favorable aux belles-leitres : les nuises, effaroucliées des penchans sérieux de la généralion qui arrive, des débais po- liliqncs qui envaliissenl ions les journaux el de la gravité des événements qui inenaccnl d'ébranler le système social , ne savent où trouver un asile j car sur loule la surface du globe, les idées positives, les intérêts matériels, les calculs de la spéculation, ont remplacé les douces illusions de la Poésie , décrié les inspirations lyriques, les chants élégiaques, et détruit tout le charme des réunions purement lit- téraires, aussi rares aujourd'hui (pi'elles furent ré- pandues dans le siècle dernier. Fidèle à son litre, la Société des Pyrénées-Orien- tales s'empressera d'encourager tous les talents. Elle se plaira à louer, à appuyer de son suffrage les dé- couvertes, les améliorations utiles, et à favoriser la production de nouveaux éléments de prospérité. Nous avons celle année jugé dignes d'une haute marque de salisfaclion ; Le forage de la place Si-Dominic(ue, à Perpignan, qui alimente inie fontaine publicjue, autour delà- quelle se presse constammeni une population re- connaissante. Je suis heureux d'être son interprète envers M. Fauvelle , inventeur d'un procédé de forage aussi rapide qu'économique. . La greffe du chêne-liége sur le chéne-vert, opérée avec succès après de longues lenlalives par M. Thor. rent, d'Oms. C'est une découverte des plus intéres- santes pour noire déparlemeni. Les belles plantations et pépinières d'oliviers de M. Jean Carcassonne, a Cabestany,el celles très cou- 190 sitléraLles de cliàlaigniers, oliviers el au 1res espèces darbres de M. Braqiiemarl , à Prades. Les exploitaiions lemarquahles de M. Girvès, pro- priétaire, à Ll(), dans la Ccidagne, cl de M. Sébastien Pages, à Palan cl aux Cabanes. La fabrique de cbocolai à la vapeur de M. Valla- rino , à Perpignan, qui donne luie extension consi- dérable à une brancbe de commerce assez imporlaaie pour le pays. Ces objets oui obtenu des primes el des médailles en argent que nous allons décerner. Nous nous plai- sons à rappeler que M. de Fleville a déjà reçu celte distinction pour l'exploitation bien entendue des mines do bouille de Segure , el M. Conte pour les produits de plus en plus perfectionnés de sa brique- terie statuaire et arcbiieclurale. La Société a aussi accordé des médailles de bronze pour la confection satisfaisante de dentelles et d'in- génieux ouvrages de sculpture en bois sur racines. Si nous n'avons pas cru pouvoir signaler, comme devant être adoptés, des changements proposés pour nos charrues actuellement en usage, nous apprécions néanmoins les efforts de M.^i. Carcassonne , fils, Es- lirach et Bachès ; cl c'est un devoir pour nous de mentionner honorablement leurs essais de perfec- tionnement desinsirnmentsaraloires. Les expériences faites en présence d'une réunion d'agronomes, oui fourni une nouvelle preuve de la supériorité des charrues llouquetie el Dombasle. Nous saisirons celle occasion de recommander l'emploi de la houe à cheval de M. de Moux , que MM. les inspecteurs d'agriculture estiment de voir produire une économie de 60 pour cent sur les travaux des vignes. 191 I . > I . V \ 1 Pour remplir tligiieiiieril la làcKe qu'impose à 1; Société JVeuvre émineiument ulilc (ju'cllc a entre- prise, il faut que le zèle de ses ineuiLres se ranime, que noti'C appel soit enleailu de tous, qu'ils com- prennenl l'importance de la direction nouvelle vers l'agricullurc et l'industrie , maiutenaiiL objets prin- cipaux de toutes les associations. Mais ce zèle , ce dévoùmenl , ce concours de lu- mières, que nous réclamons, n'atteindra que diffi- cilement el très imparfliitemenl le but, sans la ferme cl constante protection de l'autorité supérieure, sans rintellincnie libéralité du conseil général. Il est à regretter que, malgré nos justes demandes, on n'ait pas voulu cette année dépasser la mesquine alloca- tion de 300fr. , dont Textréme insuffisance est bien connue. On n'ignore pas qu'elle est partout ailleurs beaucoup plus forte. Ainsi , dans les départements voisins, on l'a portée à I .GUOfr. dans TAriége; 3.000 fr. dans l'Aude. La société de Loiret Clier dispose de 18.000 fr. Quelle récompense, quel encourage- ment peut accorder celle des Pyrénées-Orientales , cjuand elle n'est pas en état de solder les frais d'im- pression de ses bulletins? Son existence paraît-elle sans inqioiiance, sans utilité? Pense-ton ccniralre- nient à l'opinion générale qu'il ne peut résulter de ces associations aucun profit pour les sciences, l'a- griculture, l'industrie ? il est rationnel de supprimer la subvention. Nous rentrerons alois dans l'obscurité quand on s^efforce partout ailleurs den sortir; et ce département retombera sous la pierre tumulaire , qu^ont tenté de soulever des cœurs généreux , amis de leur pays, passionnés pour sa gloire. Mais ayons confiance dans lavenir. Les ministères de l'agriculture 102 ei (le ilnslraciion publique nous ont compris tlaiis la répartition annuelle de secours et de primes. On nous promet une ferme-école à laquelle on adjoindra une école d'irrigation. Espérons que Fautorilé et le conseil-général prendront des mesures pour la réali- sation de ces bienveillantes dispositions. Nous les seconderons, non pas seulement par une vaijie ins- cription de notre nom sur la liste des membres dune société savante, mais par un concours actif, soutenu, qui les rende utiles. Ces sentiments, Messieurs, sont dans vos cœurs; je n'en suis que l'interprète. Vous rougiriez de rester stationnaires dans ce siècle de mouvement. Et si le RousslUon , notre patrie , ne peut voir renaître sa splendeur et cet éclat dont les rayons ont percé la nuit des temps, ayons la noble ambition de l'élever à un rang distingué. Rivalisons de zèle et d'ardeur pour qu'elle marche à grands pas dans la voie des améliorations et du progrès. GREFFE DU ClIESE-LlEfiE SUR lE CIlEffl-VERT. M. CoinpanyOt rapporteur. De toutes les découvertes dont l'agriculture doit s'enorgueillir, il n'en est aucune qui , par ses résul- tais, puisse être comparée à la greffe. Mais si elle a enrichi les vergers, les jardins, de ces belles espèces d'arbres fruitiers , qui augmentent 193 les jouissances de IhomiDe en même temps qu'elles fbt- menl une source nouvelle de bien-éireel de richesse, on doit reconnaîlre que la plupart des essences qui peuplent nos forets nom pas reçu jusqu'ici d'amélio- rations appréciables de la transmutation opérée par le greffage, il n'en sera pas de même désormais, grâce à une découverte des plus importantes que je suis heureux. Messieurs, d'avoir à vous faire connaître. Parmi les arbres qu'on cherche à reproduire, soit par plantation de jciuies sujets, soit par semis, on doit placer le chéne-liége au premier rang. Cet arbre séculaire, si vivacc, dont l'écorce pré- cieuse augmeute de valeur avec l'àgc , est très long à venir; mais, une fois développé , il s'empare à lou- jours du sol aride, ingrat ^ sur lequel il se trouve et que sa présence transforme en propriétés d'un revenu considérable, sans aucune espèce de culture. C'est ainsi que l'a considéré un de nos savants collègues très compétent en pareille matière i. A côté du chêne-liége , se trouve, le plus souvent, le chéne-vert, soit que l'on considère ce dernier arbre conniie bois île cliarronnagc , de chauffage, ou comme produisant dans la plante racliilique la ma- tière nécessaire pour la mégisserie , soit que le ter- rain sur lequel il vient naturellement ne soit suscep- tible d'aucun produil, il est de fait que cet arbre occupe une quantité énorme de coteaux ^ où le chénc-liége se propagerait rapidement. On a, dès- lors, senti l'avantage d'essayer la greffe sur un aibre que l'affinilé végétale rapproche du chêne-liége ; mais la greffe du chêne, en général , a été consi- ' Vciir le MriiKiiii' sur !o clirMU'-liqii', de M. .hmlioil de P:iss:i. 194 dérée , jusqu'à ce jour, comme une opéralion très- inceriaine ei forl difficile; c'csl dans ces termes que s'exprimait M. Bosc, Tua de nos plus savants agro- nomes. Ce que la science cherchait depuis Colu- mellc, ei ce que les plus hahiles praticiens n'avaient pas su trouver, est désormais un fait acquis, grâce à l'application et à la sagacité' d'un cultivateur du déparlement. Le sieur Joseph Thorrenl-Uicard , fils du maire de Viliemolaque, et propriétaire à 0ms, pratiquait avec succès la greffe sur ses arbres frui- tiers; il en étudiait avec soin les phénomènes pour en varier les résultats. Son attention se porta, un jour, sur les bois de chênes-verts qui couvrent les collines d'Oms, et s'étendent sur les terres voisines, jusqu'à la rencontre de la crête granitique de Batéra. Dans les bois de chênes verts, soumis à des coupes réglées, se trouvent des bouquets disséminés de chênes-liéges. Notre jeune observateur, qui connais- sait la richesse des produits de ce dernier , entrevit l'immense avantage qu'il y aurait à le greffer sur le chêne-vert. Il se mil donc à étudier la nature delà greffe qui pouvait le mieux s'appliquer au chêne- vert , et pour connaître l'époque la plus convenable à cette opération, il greffa tous les quinze jours, à partir du 1" jour de mars, jusqu'au l'^'" août. Sa persévérance fut couronnée d'un plein sviccès ; il obtint quelques pousses de chêne-liége sur le chêne-verl; mais il fallait encore surmonter un der- nier obstacle et trouver une matière qui conservât à l'arbre greffé et à la greffe elle-même la fraîcheur nécessaire pour le développement de la sève; après divers essais, il y est parvenu. Nous ferons con- naître plus tard les matières qui entrent dans la com- 19;') posilion de ce masiic ; nous en indiquerons les pro- poriions et la manière d'en préparer le mélange. Voici comment opère le sieur Joseph Thorreni pour son greffage : il taille le tronc du cliéne-vert, et lorsque les rejetons ont acquis une consisiance ligneuse, il en choisit deux des mieux disposés, et il coupe tous les autres; alors JM. Thorrent greffe en fente au niveau du sol, à partir du 10 mars jus- qu'au j*-"'" avril, selon la marche plus ou moins tar- dive de la sève. Sur coiie grelTe, il dépose une couche mince de son masiic, qu'il rend fusible par la chaleur, et il recouvre le loui avec delà terre végé- tale qu'il prend au pied de l'arbre. Nous avons vu des greffes du 20 mars 1847, dont la pousse, à la fin de juillet, était déjà de 70 à 80 cent. Celles du 15 mars l84Gavaicnl environ un mèlre 30 cent, dehau- teur , et le bas de la tige avait tellement grossi que son diamètre élait quatre fois plus grand que celui du scion greffé sur le pied recepé. Ces greffes, comparées avec des chénes-liéges semés depuis cinq ans sur le même terrain , offrent des pousses qui oni dépassé la force de ces derniers. La greffe du chéne-vert en chéne-liége est donc un résultat positif incontestable , une véritable cou- c[uêie agricole, que nous devons à l'un de nos plus modestes compatriotes ^ qui ne se doute pas de l'im- portance de ce qu'il a obtenu. Il nous a fait connaî- tre l'époque la plus utile et, hatons-nous de le dire, la seule qui offre des résultats incontestables. Nous connaissons aussi le masiic substitué à la cire à gref- fer, à l'onguent de Saint-Fiacre el à toutes les autres préparations usitées par les horticulteurs; nous sa- vons enfin combien la greffe en fente est facile, 196 usuelle, pourvu cependant que le greffcur, abdi- quani loul préjuge, ne perde jamais de vue que la greffe exige, avant loul, que les deux libers, ou cette zone végéiaiive , celle du scion et celle de Varbre recepé, soient en contact immédiat; sans celte précaution, l'opération est compromise, el c'est du temps perdu que de l'effectuer. 11 n'est pas bors de propos d'examiner les avantages quele département est appelé à recueillir du greffage du chêne-vert, n^embrassant, toutefois, que les zones oùse trouvent déjà quelquesplanlaiionsdecliêne-liége et où les expériences du sieur Tborrent ont élé faites. Voici, d'après le cadastie, les terrains qui pourraient bientôt être convertis en plantations de cbénes-liége. COMMUNES : Oms, 383 hectares. Moniauriol , 168 Calmelles, 573 Taillet, /.8 Vives, 283 Llaurô, 70 Montbolé, 737 Palalda , 107 Saint-Marsal, 372 Taulis, 135 Labastide , 364 Cameles, 137 Casielnau , 66 Caixas, 524 Monlferrer, 389 Corsavi , 555 Tord ère, 20 Arles , 1.097 18 comm. 6.045 hect. 197 /\insi, il y a dans les dix-liuii coinmuues, en hols de cliênes-veiis, environ G. 000 heclaies Calculons sur la moitié de celle contenance , ei nous aurons 3.000 heclares qu'on peut convertir en bois de chêne-liége ; supposons (-ent pieds par hectare , et 50 kilog. de liège par pied d'arbre, tandis qu'il en est qui produisent jusqnà -^00 kilog, nous aurons , dans moins de 60 ans, sur 300,000 arbres, un pro- duit réel de 30 millions de kilogrammes, qui , répar- tis en dix années, le plus long terme pour enlever l'écorce, donnent, dans une seule année, le pro- duit moyen de 3 millions de kilogrammes. Le pro- duit moyen du liège est d'environ 50 centimes le kilogrannne ; c'est donc un produit annuel de un million 500,000 fr. Maintenant , réduisons le résultat de ce simple calcul au tiers, au quart, au cinquième, si l'on veut, pour fliire la part des éléments, des hommes et de loutes les erreurs plus ou moins contestables qu'on voudrait nous opposer, il nous restera toujours un accroissement annuel de revenu public de 300.000 fr. au moins, c'est à-dire un capital incontestable de plus de G millions. De pareils résultais n'ont pas besoin qu'on les connnente, il suffit de les signaler. A jouions cependant que les conienances en bois qui nousontservi debase, sesoni accrues depuis 1824, que les communes ci-dessus renferment des terres vaines et vagues très étendues, que ces terres de- viendraient des bois de chêne-vert , si on les menait en défends, si les chèvres surtout en étaient exclues, et dès-lorsnousauronsla certitude que^ sur le plateau d'Oms, plusde lOOOOhect. pourraient, dans moins de GO ans, être convertis cji superbe foret dechénes-liége. 108 La découverle du sieur Joseph Thorrenl doii être considérée , pour ragricullure du déparlemeni , comme un bienfait incalculable. La société, qui s'est toujours empressée d'accueillir tout ce qui peut être d'un intérêt local, ne saurait saisir un moment plus opportun pour récompenser le modeste propriétaire dont les expériences pratiques ont amené un si beau résultat. Organe de la Commission, j'ai donc l'hon- neur de proposera la société, bien qu'une ques- tion de cette nature ne soit pas dans son programme de 1847, d'accorder au sieur Joseph Thorrent une médaille d'argent , grand module , en récompense de ses persévérants efforts pour arriver au point pré- cis de déterminer l'époque où la greffe du chène- Jiége sur le chêne-vert est faite avec succès, et de garantir cette greffe des influences atmosphériques qui l'altéraient. Je pi'opose, en outre, de solliciter de S. Exe. M. le ministre de l'agriculture et du commerce une indemnité pécuniaire, afin que le sieur Thorrent livre à la publicité le mastic de son invention qui peut seul faire réussir le mode de greffage employé. RAPPORÎDEM. CilARlESLUERilE, au nom de la Commission chargée de la visite des domaines qui ont concouni ponr la prime de la meilleure exploitation. Une vérité qui , malgré tous les obstacles , s'est fait jour dans l'opinion publique avec une force 199 invincible , c'est qui^ c'est surtout île l'agriculture que la France lire et ses richesses et sa force. Notre gouvernement a conipiis qu'il était utile de la pro- léger d'une manière efficace, de l'aider à prendre le rang qu'elle doit avoir dans la nation , le premier de lous, de seconder enfin l'élan que mille têtes intel- ligentes clierchenl à lui imprimer àcolé des millions de bras qui la servent chaque jour. Cette force d'im- pulsion, il fallait l'organiser; on l'a fait A Paris des congrès d'agriculture, des chaires d'agriculture, des écoles , un ministère spécial ont été crées ; en province des comices, des sociétés se sont formés où chacun vient apporter le fruit de l'expérience i(ue donne la pratique ; enfin un système de primes qui, pour n'être pas encore complet , est appelé , nous l'espérons , à faire quelque bien en excitant et en entretenant l'émulation parmi les cultivateurs, a été organisé. C'est l'application de ce dernier système qui nous appelle aujourd'hui à rechercher quelle est la partie faible de noire agriculture en Roussillon, quelle est par conséquent, celle qui a le plus besoin de vos en- couragements. Le département des Pyrénées-Orientales n'a jamais été aussi arriéré, aussi routinier que la plupart des provinces de la France; les nombreux canaux d'ir- rigat-ion qui le sillonnent et le ferliliseni, prouvent la supériorité de sa culture , supériorité qu'il a con- quise depuis des siècles et qu'il est appelé à conser- ver , nous en sommes convaincu. Mais des modifi- cations importantes sont réclamées aujourd'hui", des changements capitaux sont devenus indispensables dans certaines branches de l'industrie agricole-, ils 200 sont impéiieusemeni exigés par les besoins nouveaux d'une population qui augmente chaque jour, par l'envahissement tle la culiurc sur une grande niasse de terrains abandonnés jusqu'à ce jour à l'état de pâturages, par la concurrence, enfin, des productions étrangères qui a eu pour effet d'avilir le prix des noires. C'est assez indiquer quelle est l'amélioration es- sentielle, le changement important c[ue vous êtes appelés, Messieurs, à encourager. 11 nes'agil de rien moins que de substituer ^ jjartout où la nature du sol le permettra avec utilité, la race bovine à la race ovine. Nous ne nous dissimulons pas les difficultés d'une pareille innovation j mais l'intérêt immédiat des agriculteurs est là qui nous garantit qu'elles seront aisémentsurmoniées. LaSociété n'hésitera pas a le proclamer en face du pays. Une réforme com- plète est indispensable; il faut introduire dans nos exploitations rurales l'éducation du gros bétail qui, désormais, remplacera l'enirelien des troupeaux. L'avenir justifiera notre opinion d'aujourd'hui. il est certain que quelques localités exceptionnel- les conserveront encore leurs tioupeaux , ce sont celles où la nature du sol ne permet pas de culture, mais partout ailleurs on étendra la production des fourrages au profit du gros bétail , on adoptera les mesures qui seront les conséquences forcées de ce changement, parce que là seulement est la source de la prospérité de nos campagnes. MM. les hispecteurs généraux comprenant comme nous les nécessités de l'agriculture en Roussillon , parce qu'ils ont vu le dépérissement successif de nos troupeaux , l'avilissement des revenus qu'ils 201 {lonnaienl autrefois , les besoins énormes tVengrais pour noire sol où une température élevée Ta épuisé vite , ont confirmé ces nouvelles idées. Us ont ap- porté clans le sein do notre société les résultats de la comparaison établie entre noire département et les autres déparioments de France ; ils ont préconisé avec nous Téducation du gros béiail , et ont obtenu du ministère de Tagriculture une somme assez con- sidérable qu'ils vous ont confiée pour être distribuée aux propriétaires qui entreraient le plus largement dans la voie nouvelle que nous venons de tracer. En passant par vos niains , cette somme acquiert plus d'importance aux yeux de vos concitoyens; les primes que vous décernez , vous en multipliez la valeur par la distinction dont vous savez l'entourer. Aussi les concurrents sérieux ne vous manquent- ils pas, malgré Tbésitation naturelle chez les culti- vateurs appelés à rompre avec des habitudes ancien- nes. Us craignent les innovations. S'ils surmontent les soucis, les dépenses d'un changement d'exploi- tation rurale , et s'ils sont les premiers à servir de modèles , ils méritent un dédommae^ement autre que l'intérêt qu'ils letireiil; c'est vous , Messieurs, qui le leur offrirez dans la proportion de ce qu'ils auront fait. En vérité, Messieurs, ccst beaucoup oser que de dire à un pays : vous changerez vos habitudes; vous renoncerez à une branche d'industrie (la production des laines) qui a fait votre fortune. I\lais nos convic- tions noiis le commandent; d'ailleurs , il nous sera facile de prouver au propriétaire agriculteur du Koussillon ({ue, désormais, il est fatalement conduit à l'abandon de la race ovine, et cela, parce (|uc les 202 terres joropres à parcourir diminuent de jour en jour; parce que les bêles à laine, nourries avec les fourrages produits par la culture, sont exposées à mille chances de maladies occasionnées par les pas- sages subits et trop fréquents de l'état de privation à une trop grande abondance, de là une mortalité qui décime nos troupeaux et qui nous fait éprouver des perles incalculables-, parce que le prixdes laines va s'affaiblissant tous les jours, et il ne saurait ea être autrement-, les marchés du nord ne sont-ils pas encombrés de ces belles laines étrangères produites sur d'immenses territoires abandonnés tout entiers à d'innombrables troupeaux? Le Roussillon pourra- t-il jamais soutenir la concurrence avec les déserts de l'Amérique où une toison se donne pour un franc et souvent pour beaucoup moins? parce qu'enfin la grande culture disparaît en France pour fiùre place à la petite, conséquence forcée de la division de la propriété. Un grand propriétaire pourrait, en effel, entretenir encore un troupeau, un petit pro- priétaire ne le pourra jamais, les frais de garde ab- sorberaient de beaucoup tous les bénéfices , s'il en existait. Et cependant les engrais que donnent au dépar- tement les nombreux troupeaux, doivent être rem- placés, nous disons plus , ils sont insuffisants et de beaucoup; ils doivent être augmentés; nos irriga- tions, notre culture maraîchère, en absorbent une si grande quantité ! Chacun se flatte ici que notre plaine, avec son beau soleil et ses canaux d'irrigaiions , deviendra, après l'achèvement du chemin de fer, un vaste jar- din où toute la France viendra puiser largement des 203 primeurs ei des fruits; oui , Ja chose esi possible , mais à une condiiion, c'est que le pays se mettra à même de centupler ses engrais , car sans cnx pas de jardins possibles. Les jardiniers, la terre, Tcau et le soleil ne nous manqueront pas; mais le fumier, où le irouverez-vons? Si vous n'avez pas pris vos me- sures à lavance, vous serez impuissants à produire ce que Ton vous demandera. N'oublions pas que les fumiers qui sortent chaque jour de notre ville sont à peine suffisants pour les jar- dins environnants; que le départ de cpielques che- vaux de guerre sufliiait seul pour mettre aux abois bien des jardins et Jiien des jardiniers; que si nous les laissons s'amoindrir, nous courons à notre ruine; que si nous ne les augmentons pas, nous restons dans lagéne, dans la souffrance, nous restons stationnaires , quand nos voisins progressent et nous laissent en arrière. L'insuffisance des engrais en Pioussillon est géné- ralement reconnue, c'est la plaie de notre agriculture; si cette vérité était sérieusement constatée, nous n'aurions pour la défendre qu'à dire ce qui se passe chaque jour sous nos yeux dans nos exploitations rurales; heureusement ce mal a son remède, c'est rélevage. A notre gouvernement, à notre société, en particulier, par ses conseils, est donc réservé le soin de nous éclairer, de nous encourager el de nous dire que si nous voulons remplacer les troupeaux qui nous quittent, nous devons introduire dans nos fermes l'éducation du gros bétail, que, par ce systè- me, nous pouvons en même temps doubler nos produits en doublant nos engrais. Quant aux nombreux propriétaires, ([ui n'ont d'autres engrais pour la terre qu'ils cultivent, que 204 les fumiers provenant de leurs bestiaux de travail, vous leur direz qu'après avoir fait quelques efforts pour bien remplir leurs granges, ils doivent consa- crer à des fourrages d'hiver ou de printemps (à des esparcettes surtout), une portion de la terre qu'ils des- tinent aux céréales; qu'ils doivent placer près de leurs bestiaux de travail quelques jeunes poulains, quelques jeunes taureaux. Par ce moyen, ils auront doublé au bout de l'année la quantité de leur fu- mier ; par ces engrais nouveaux, la récolte prochaine du blé sera aussi abondante que s'ils avaient ense- mencé toute leur terre. Ils auront en bénéfice la valeur de leurs élèves qu'ils vendront le double du prix qu'ils les auront payés. Quelques faits , quelques observations sur ce ([ui se passe sous nos yeux dans le département , prou- veront que ce système, dans lequel nous engageons les agriculteurs du pays à entrer, est le seul bon, le seul qu'on ne peut se dispenser d'admettre sans re- tard, que la raison autant tjue l'intérêt le comman- dent. Chaque année , le déparlement dépense plus d'un million pour l'achat des deux tiers de la viande qui sert à la nourriture de sa population , pour l'a- chat des bœufs , des chevaux de trait , des mules surtout qui sont employés à la culture de ses terres et de ses vignobles. Ce gros million , sorti de nos poches, va eniichir nos déparlemcnts voisins-, nous sommes ainsi leurs tributaires, car nous ne pouvons nous passer des bestiaux qu'ils ont élevés. Ils nous les vendent , et cependant, chez eux, les fourrages ont une bien plus grande valeur que dans notre plaine où jamais , même en temps de sécheresse , ils ne se sont élevés au niveau de leurs mercuriales. 205 I\'esl-il donc pas dérisoire de voir un pays donner de l'argenl à un aulre pays où les fourrages soni à des prix élevés^ contre du bétail qu'il pourrait pro- duire à bien meilleur marché? Notre département manque d'engrais, et cepen- dant nous l'avons vn expédier des quantités énormes de fourrages sur les côies d'Afrique, souvent même le roulage en a transporté jusque dans l'Aude et dans l'Hérauh, à des prix tels qu'il y aurait eu un im- mense avantage pour notre plaine à les convertir en viande, en les faisant consommer sur place. Espérons que ces faits parleront plus haut que nos paroles^ que nos conseils, qu'ils éclaireront les agriculteurs du Roussillon et les décideront à pren- dre bientôt une marche nouvelle toute dans leur intérêt. La commission que vous avez chargé de vous dési- gner les propriétaires qui ont fait le plus d efforts pour entrer dans celle voie d'amélioration que vous encouragerez, a trouvé dans la plaine du premier arrondissement un ccrlain nombre d agriculteurs qui^ depuis peu de lemps , ont abordé franchement leducaiion du gros béiail , mais elle s'est souvenue que seuls ils avaient obtenu des primes l'année der- nière, à l'exclusion des éleveurs des 3*^ et 2<^ arron- dissements; qu'il était, par conséquent, de toute justice de les réserver cette année pour ces derniers. Votre commission s'est arrêtée à l'exploitation de M. Sauveur Girvès de LIo , et a reconnu qu'à tout égard, c'était la plus complète, la mieux ordonnée, celle qui présentait les plus beaux produits du troi- sième arrondissement. Elle n'a pas hésité à s'y trans- porier pour juger par elle-même de l'cxacliiude des 506 faits qu'elle voulait vous soiimellre, de la valeur des efforts que son propiictairc n'a cessé de faire pour arriver aux résultats qu'il a obtenus. M. Girvès a son habitation dans la Ccrdagne fran- çaise, sur le penchant de la vallée de Llo, qu'ar- rosent les eaux du Sègre. Eu face s'étendent les vastes granges qui abritent les récoltes en gerbes, les pailles, les bois d'exploitation; à gauche de grandes écuries destinées aux vaches, aux junienis et à leur suite. A droite, deux étables : l'une sert de bergerie, l'autre est occupée par des taureaux ou des bœufs de travail; au-dessus de tous ces bâtiments sont des gre- niers où l'on enferme, lors de la récolle, tous les fourrages destinés à la consommation de l'hiver. L'espace carré compris entre Ihabiialion de M. Girvès et tous ces locaux, forme une cour excessive- ment vaste, parfaitement nivelée, où a lieu en été la dépiquaison du seigle et du fromeni. Soixante vaches on génisses^ toutes de belle espèce, forment le fonds de l'écurie de M. Girvès. Six tau- reaux de choix sont conservés pour la reproduction; plusieurs d'entre eux ont été présentés au concours et ont obtenu dos primes; tous ont de très belles formes et accouplés à des métis remarquables par leur belle conformation, ils donnent des produits d'une qualité supérieure et (jiii se vendent au prix moytMi de 80 fr. , à fàge de six à dix mois. Ce sont les mar- chands de l'Ariége qui viennent les acheter pour les revendre dans ce déparlement et même dans l'Aude et la lïauie-ljaronne; là ils sont élevés et deviennent de très beaux breufs de travail. M. Girvès n'avait pas encore vendu ses veaux, il en présenta plus de irenie a votre commission, tous de la phis belle espérance. 207 Vingi-(jiialre jumenis ou pouliches, quatre pou- lains, huit raules ou mulets de six mois, un bel étalon de race espagnole, et un étalon baudet , for- ment, chez M. Girvès un ensemble que nous avons admiré et qui nous a prouvé que chez lui l'indus- trie chevaline ou mulanière était portée à un très haut degré de perfection. Tous ces animaux ont des formes irréprochables, tous sont dans un état parfait d'entretien. Nous ne nous lassions pas d'admirer particulièrement ces belles juments de Cerdagne au poil noir, à l'œil bril- lant, aux mouvements souples ei élégants, marqués du chiffre ancien de la maison. On voit que son chef tient à honneur de conserver pure la race que lui a laissé sa famille. Malheureusement, cette race de chevaux de Cer- dagne, si renommée, est destinée à périr bientôt. Les propriétaires ayant plus de bénéfice à livrer leurs juments au baudet, font uniquement des mules qu'ils vendent fort cher aux Espagnols, au lieu de faire des chevaux que le ministère de la guerre ne veut pas payer ce qu'ils valent pour la remonte de notre cavalerie. M. Girvès, indépendamment des vaches et des juments, nourrit encore chez lui six cents bétes à laine, en grande partie brebis portières. Les agneaux mâles sont vendus à la boucherie ; les femelles sont, en général, conservées pour servir à la reproduciionl Ces animaux représentent dignement le véritable type de la race ovine de Cerdagne, remarquable par des formes larges et vigoureuses et par une haute taille. I\L Girvès fait tout ses efforts pour lui conser- ver une réputation déjà ancienne dans sa maison. 208 Le produit principal pour lui est le fumier qu'il obtient de oc troupeau en le faisant parquer sur ses piopriélés. C'est donc un nombre total de cent irenlc-huii élèves et de six cents bétes à laine que nous avons- constaté. Quatorze hectares de prairies à LIo, dix huit à La Llagonne, lui donnent une assez grande quantité de fourrages pour renireiien de tout ce bé- tail pendant un hivernage qui dure fort long-temps dans cette contrée , située sur un des points les plus élevés de nos Pyrénées. Quelques hectares semés en trèfle dit farouche, lui viennent encore en aide pour augmenter ses appro- visionnements. Pendant la saison d'été, cinquante hectares de friches , pâturages désignés dans le pays sous le nom de devèses, procurent une noiuriiure abondante et saine. A la sortie de ces pacages, avant d'entrer défini- tivement dans les éiables dont nous avons indiqué la position et qui sont toutes vastes et aérées, on livre à la dépaissance les regains des prairies qui ne sont pas assez hauts pour être fauchés. M. Girvès vient de faire construire de vastes écuries dans la montagne , à sa ferme de la Horde, qui domine une plaine dite le Pla de Barès. Celle propriété, remarquable par son exposition au midi, a été transformée en un vaste parc où le bétail vit dans l'abondance, presque sans gardiens , pendant huit mois d été. il est fiicile de se faire une idée de Ténorme quan- tité de fumier qui sort chaque année des écuries de cette exploiiation; on le porte halniuellcmcnt sur les champs qui doivent être semés en blé ou en seigle. 209 M. Girvès vil au milieu de sa famille, où il con- serve religieusement les mœurs pairiarchalcs et hos- pitalières qui sont pour lui une tradition ; il admi- nistre seul cette vaste exploitation, agrandit chaque jour ses prairies par des conquêtes qu'il fait sur la montagne, non sans de grandes dépenses, et amé- liore, chaque année, par un entrelien réglé cl bien entendu , par des croisements faits avec intelligence, une race de bœufs qui est appelée à rendre de grands services à noire plaine. Comme éleveur, M. (iirvès a obtenu de 1res beaux succès; votre commission vous propose de lui décerner la prime accordée par le gouvernement. A notre arrivée à Llo, un jeune homme d'une physionomie douce el franche à la fois, fiil le pre- mier à nous recevoir el nous conduisil auprès de M. Girvès. Dès ce moment, il ne nous quitta plus. Ses yeux, d'une vivacité rcniar(|uable el où respire rintelligence , il les avait toujours fixés sur nous ou sur son maître; il prévenait nos moindres désirs, répondait par des signes à nos moindres questions. Vous avez {-ans doute compris, nous dit M. (iirvès, f|ue c'est un sourd-muci ; je l'ai à mon service depuis bien long-temps; nous laimons parce qu'il esl bon, qu'il esl iloué des meilleures qualités. 11 nous est si profondément dévoué que mes enfants et moi le traitons en ami et non pas en seviteur. Cesl lui qui veille à tout quand nous sommes absents, et, déplus, il aime passionnément les bestiaux; vous pourrez en juger pendant voire séjour ici. En effet. Messieurs, nous l'avons jugé , el nous vous proposons de lui allouer la prime de 150 fr. que vous destinez aux bons serviteurs d'iuie fernie. Son nom est Charles INoëll. •210 Le sieur Colxet est depuis longues années berger chez M. Girvès : sa bonne conduite, sa fidélité nous ont été constatées de telle manière que voire com- mission propose de lui décerner la prime de 50 fr. Votre commission s'est plus tard transportée dans l'arrondissement de Cérel, chez M Séb. Pages, qui nous a fait visiter en détail son domaine de Cabanes. Ce domaine est consacré, en très grande partie, h la production des fourrages pour l'éducation du gros bétail. INous avons vu des prairies naturelles et arti- ficielles très étendues et surtout parfaitement défen- dues contre les inondations du Tech, dont elles ne sont séparées que par des bois taillis d'une très belle venue. Après avoir parcouru en tont sens la partie appelée los Bâchons, nous sommes entrés dans des écuries où étaient réunis des bœufs et des vaches pour le travail , quelques élèves parmi les- quels on distingue plusieurs sujets propres à la repro- duction. M. Sébastien Pages nous a assuré que la plus grande partie de ses bestiaux a été vendue depuis peu de temps, que bientôt il serait en mesure de les remplacer. n nous a été facile de nous convaincre en parcou- rant le domaine de M Pages à Palan, que ce pro- priétaire faisait sur ses terres une très large part à la culture fourragère. ÎNous vous proposons de vouloir bien accorder à M. Sébastien Pages une médaille d'argent, grand module, à titre d'encouragement. •211 RAPPORT de lii liomniission chargi^e de leiidrc compte du concoiirs sur l'cxionsion et le jierfcclioniiement de la culture du mûrier et de l'oiiiier. M. T. FRAISSE , »iBt, rapporteur. Messieurs, ^ons n'aurons à vous pailor que de lolivier , au- cun roncuirenl ne s'claul présenté pour le mûrier. Quelle, est la cause de l'abandon oii se trouve de- puis quelque temps ce dernier? La Commission n'a- vait pas à s'occuper de cette question ; cependant elle ne peut s'empêcher de faire observer, qu'au lieu de donner des primes pour la culture du uu'irier singulièrement perfectionné par notre collègue, M. Jauberl-de-Passa, elles devraient être attribuées aux éducateurs de vers à soie , non pas en grand , mais pour les éducations de 20 à 30 grammes de graine, faites chez le cultivateur. Alors l'emploi de la feuille de mûrier sera assuré , et la culture de cet arbre se propagera avec rapidité. Si la culture du mûrier est négligée, il n'en est pas de même de celle de l'olivier. La Commission a vu avec plaisir, dans ses différentes courses, que les plantations de cet arbre sont en plein progrès, et partout les propriétaires ont compris son importance. 11 ne manque plus qu'à adopter et faiio connaître la meilleure manière de le cultiver. Nous devons savoir gré à M. V. Rendu, inspecteur général de l'agriculture, d'avoir proposé , pour noire déparle- 512 ment , des primes trencouragement que le minisire s'esl empressé d accorder. Déjà l'année dernière , vous avez décerné une couronne à M. Azéma pour la supériorité de la laille des oliviers; anjourd'hni la commission vous propose d'alirilMier celle récom- pense à réducalion de cet arbre précieux dans la pépinière jusqu'au moment où il peut être mis en place. On ne saurait trop se récrier stir la manière dont nos oliviers sont généralement lailiés, nous pouvons dire mutilés, aux abords de Peipignan • l'ouvrier abat à lorl et à travers, sans s'inquiéter si en privant l'arbre de son pins bel ornement, il ne privera pas aussi le propriétaire de récolte pendant sept ou huit ans , tandis qu'avec un peu de travail et d'engrais , on aurait le plus souvent rendu à l'arbre toute sa vigueur. 11 est vrai qu'il est des cas où il devient nécessaire de retrancber une ou plusieurs branches, mais celle opération ne devrait éire qu'à la dernière extrémité, après avoir épuisé tous les moyens de rendre la santé aux parties malades M. de Gasparin , dans un mémoire sur la culture de l'olivier , prouve que , pourvu qu'il soit traité convenablement, c'est l'arbre le plus productif. Après seize ans de vie, il a payé tous les frais de plantation et de culture, etc. A la dix-septième année, il donne un produit net de 5 fr. par arbre ou 2000 fr. par hectare qui va toujours croissant, et finit par dépas- ser le produit de toute autre nature. M. Carcassonne a planté , depuis 1837 jusqu'en 1847, 1165 oliviers en partie dans un sol ingrat , où sous un terrain en apparence très sec, existe, à en- viron 80 c. de profondeur, un sous-sol imperméable 213 qui relient les eaux d'iiifiltralioii. Les jeunes planls y végélèrenl trabortl avec vigueur; mais dès que les racines arrivèrent au sous-sol beaucoup trop humide, le feuillage jaunit et les arbres commencèrent à dépé- rir. Déjà 25 oliviers morts et 50 très jaunes devaient faire craindre pour toute la plantation, lorsque M. Carcassonnc se hâta de faire ouvrir au tour de chaque pied malade, une tranchée de 40 c. en carré sur 2 m. de profondeur, à une assez grande distance, pour ne pas blesser les racines. Il fit remplir la moi- tié de ces tianchées en cailloux et recouvrir ensuite de terre ; les arbres ne tardèrent pas à reprendre leur belle couleur verte, quelques-uns dans les vingt-quatre heures, et depuis cette opération, ils n'ont cessé de végéter avec vigueur. On opéra de même au fond des trous pour remplacer les arbres morts. Les pépinières d oliviers de M. Carcassonne ont vivement intéressé la Commission; elles se compo- sent de près de 7000 sujets de différents âges; les plus forts sont très dioits , contre l'ordinaire de celte nature de planls. I^eur têie est bien formée. 11 se sert , pour la plantation de ses pépinières, d'un instrument dont fait usage i^L Narcisse Nooll, propriétaire à Laroque; c'est un plantoir semblable à ceux employés pour la vigne , mais avec un ren- flement a la partie inférieure, pour élargir le trou. Après y avoir mis le plant , on le remplit de terre fraîche et on butte avec une cheville en bois. Un homme peut planier dans un jour de 200 à 250 re- jetons De 1839 à 1846, M. Carcassonne en a planté en pépinière à peu près 1000 par année , sur lesquels 765 sont déjà placés à demeure sur ses (erres. •211 La Commission s'esl rendue chez M. Bracqucmarl pour visiier ses planiaiions, établies sur la monlagne de Bohère, près de Prades. Tous les lenains el les montagnes qui reniourent sont arides, el ne présen- taient, au moment de la visite, aucune apparence de végétation. Après avoir traversé des vacants, dévorés par Tar- deur du soleil , on est frappé d'admiration , en arri- vant dans un superhe bois de chàlaigniers, à l'extré- mité duquel se trouve une belle vigne parsemée d'arbres fruitiers , el entre autres d'abricotiers plus vigoureux fjue ceux de nos meilleurs jardins de la plaiiic. 11 a fallu toute la persévérance de M. Bracquemarl el une volonté de fer pour ne pas renoncer à une entreprise, dont les ouvriers même qu'il employait, cherchaient à le détourner. Cette montagne, jadis stérile, est aujourd'hui couverte de ''i5 mille beaux chàlaigniers, 800 oli- viers, 600 amandiers et noyers, 150 pommiers, 150 pins ou sapins , 80 poiriers , 60 merisiers , et d'une vigne en plein rapport. Trois bassins creusés à différentes hauteurs, con- tenaient encore beaucoup d'eau , au moment de la visiie de la Commission au mois de septembre. Ces réservoirs entretiennent une certaine fraîcheur aux environs. La Commission n'avait à s'occuper que des oliviers qui , encore jounes et cultivés d'après la méthode ordinaire , ne pouvaient donner lieu à l'at- tribution de la prime, ei lutter avec les planiaiions de ce genre de M. Carcassonne; elle est cependant d'avis qu'il faut accorder à M. Braquemart des en- couragements. 2 là Il nous reste à parler des piaiilations de M. Four- cade de Maurellas. Considérables, bien tenues, elles donnent des espérances que justifient Tintelligence et la capacité du propriétaire. En conséquence, la Commission propose d'accorder: La prime pour Tex tension de la culture de loli- vier, à M. Carcassonne. Une médaille d'argent à M. Bracquemart , pour TensemLle de ses plantations. Une mention honorable à M. Fourcade de Mau- rellas. RAPPORT SljR LES Ml^ES DE SÉGURE. 11. Ciulraufl de iit,-IVIarsal, rapporteur. Il n'y a qu'un cri en France, on pourrait dire eu Europe, contre la dévastation, la destruction des bois. La surface des forêis du royaume, qui s'élevait à quinze millions d'hectares, au milieu du xYiii-^ siècle, quand la population n'excédait pas dix-sept millions d'àmes , nalleint pas, même de nos jours , sept milliojis avec le double d'habitants. Où en serions-nous sans Tenq^loi de la houille? quel serait l'avenir du monde, si la consommation du combus- tible, étant maintenue au chiffre actuel, on ne met- tait un frein au défrichement des bois; si on ne pre- nait aucune mesure pour le reboisement? Il résulte des calculs les |)lus modérés que tous les bassins houillers de la France seront épuisés en moins de cinq cents ans. On trouve même des appréciations 216 de consommation, sans tlonie exaspérées, qui ne por- tent pas leur durée au-delà d'un siècle. Quoi qu'il en soii , car ce n'est pas ici le lieu d'établir ces calculs, l'application du charbon de terre à tous les usages est devenu en quelque sorte une nécessité. Le dépar- tement des l'yrénées-Orientales , dans lequel on s'était flatté plusieurs fois de l'existence de bassins houillers, na point réalisé , jusqu'ici , ces espé- rances. Nous serons heureux de pouvoir tirer du voi- sinage, à une lieue de notre frontière , des moyens de ménager nos forêts des Pyrénées, déjà bien pauvres. Le bassin houiller de Ségure , à en juger par des affleurements très apparents, répond à 300 hectares de surface horizontale; mais son développement est bien plus considérable par sa forme conchoide , dont la flèche dépasse 230 mètres. Il se compose de quatre couches dont l'épaisseur varie de 0 m. 50 à un mètre. On l'exploite sur trois points désignés par la grande, la petite mine, et celle de Quintillan. Les distances entre les couches sont : sept mètres de la première à la seconde , huit de la deuxième à la troisième , et seulement un mètre de la troisième à la quatrième. On trovive de moindres distances entre les quatre couches de la mine de Quintillan. La couche la plus puissante, ayant de Om. 90 à un mètre d'épaisseur, est la plus voisine de la surface du sol , et naturelle- ment celle qu'on exploite. La houille qu'on retire en ce moment des mines de Quintillan , parait supérieure à celle extraite dans le principe. On y remarque des troncs entiers de palmier, très reconnaissables à leur écorce tubercu- leuse , et on y voit de nombreuses empreintes de fou- gères et d'autres végétaux. Ayant été analysée avec 217 soin par M. Bonis, professeur de cliimie au collège «le Perpignan, je me borne à citer les résultais de sou travail : houille de couleur noire, brillante, subs- tance dure, contenant du sulfure de fer et du carbo- nate de chaux. Elle s'enflamme aisément et dégage beaucoup de chaleur, sans odeur appréciable. Sa composition est : En matières volatiles , 22 parties Charbon , GO Cendres, 18 100 parties. Pendant la combustion, elle ne se boursouffle ni ne se colle. Son poids est de 850 à 880 kil. par mètre cubique. II est évident, d'après ces propriétés, que cette houille, peu favorable à la forge, offre un emploi excellent dans les usages domestiques, le chauffage des chaudières à distillerie et les fourneaux à réver- bère. Ou s'en sert avec avantage pour les fours à chaux et à plâtre. Il résulte d'un rapport fait à la Société, sur des essais pour l'application aux brique- teries, qu'il y aurait économie de combustible en la substituant au bois. L'exploitation s'opère au moyen de galeries de 0 m. 90 à I mèire de hauteur , et d'à peu près la même largeiu-. Elles sont recoupées par d'autres galeries à angle droit, laissant entre elles des piliers de 1 mètre 80 à 2 mètres. Les ouvriers se servent du pic à deux pointes et de coins en fer. Ils peuvent exir.iire par jour de 10 à 12 hectolitres de charbon, qu'on paie à raison de 0 fr. 30 par hectolitre, pesant 85 à 88 kilog. Ce prix est augmenté proportionnel- 518 lement aux distances Des enfants chargés du trans- port, au moyen de sacs de 65 à 70 kil. de poids, Topè- renl à dos et en s'aidant des mains contre les parois et le sol de ces étroites galeries. Ici comme dans toutes les mines, l'esploilation et surtout le trans- port dans les canaux font éprouver un sentiment pénible. Qu'on se figure de pauvres créatures, sou- vent des petites filles, dans un âge où les jeux, Tair, la liberté, sont indispensables au développement du corps et à former Tintelligence, enfouies à des pro- fondeurs de 5 à 600 mètres sous le sol de celte terre riante qu'elles devraient fouler sous leurs pieds , attelées à un lourd charriot, qu'elles traînent à qua- tre pattes, dans des galeries boueuses qui ne sont, en réalité, que de longs tuyaux , rarement d'un mètre, réduit souvent, en Angleterre, à l'incroyable proportion de 50 et même 35 centimètres. L'âme se révolte au détail des procédés dune industrie de- venue cependant, en quelque sorte, l'artère du mouvement des arts et de rexisience d'une partie notable de la populatiou. Mais, quelle qu'en soit l'importance, le mode d'ex- ploitation devait appeler l'attention des bommes d'Etat et des gouvernements Aussi, dans la session de 1 842, le Parlement anglais s'en est vivement occupé. En France, une loi semblable, de 1841 , s'ap- plique à toutes les usines et manufactures. Aux mines de Ségnre, on se conforme exactement à la loi française, et on refuse d'employer des en- fants âgés de moins de huit ans. Le travail journa- lier ne dure jamais plus de huit heures en deux séances : de sept à onze et de une à cinq. Ils peu- vent gagner de 1 ir. à I fr. lOc-, suivant la dislance. I 219 On [n'a leiiioiiier à M. de ^ aubau rexploiiaiiou (.le la mine de Quiniillan , pour la cuisson de la l)ii(|ue des places du Roussillon. rségligée , puis reprise en 1816, on était peut-être au moment de l'abandonner quand le hasard fil découvrir la niasse actuelle, qui fournil abondaninienl un charbon de bonne (|nalilé. ISous pensons quaduiinistrée avec sagesse et économie, elle donnerait des bénéfices honnêtes , si les traiisporis ponvaieni s'ef'tecluer avec facilité dans les trois directions de Carcassonne, ISar- bonne et Perpignan. C'esi un objet de haute impor- tance à traiter^ non seulement dans lintérêi des mines de Ségure, mais pour révacuaiion des pro- duits agricoles des deux fertiles bassins de Tuchan et de \ ingrau, lexploiiation des mines de fer qui se trouvent entre Lagrasse ei Tuchan , celle d'une mine d'antimoine argentifère, enfin les produits des forges à la catalane, établies dans les gorges des Corbières. On aurait ainsi l'immense avantage de la substitution des transports sur des charrettes, à celui qui, dans létal présent des communications, ne peut s'opérer qu'à dos de mulet. Le pris, en ce moment excessif: 1 f, 50 c. par quintal métrique, de Ségure à Perpignan , serait considéra- blement réduit, et la houille, qui se vend sur les lieux I fr 90 c. la première, et 1 fr. 35 c. la se- conde qualité, n'aurait point sa valeur doublée par les frais de transport. Une médaille d'argent ayant été déjà décernée à M. de Pleville, directeur de ces mines, on ne peut que proposer un rappel daulant plus fondé, que le zèle, la capacité de cet administrateur éclairé ne se sont point démentis. 220 PRIX ET ENCOURAGEMENTS DÉCERNÉS PAR LA SOCIETE. 1° Une médaille d'argenl à M Fauvelle pour le forage du puits, suivant les procédés de son inven- tion, simples, économiques et rapides. 2° Idem à M. Joseph Thorreni pour la greffe du chêne-liége sur le chêne- vert. Opération tentée long-temps sans succès, et qu'on peut ranger parmi les découvertes les plus intéressantes. S*^ Idem à M. Antoine Vallarino pour sa fabrique de chocolat à la vapeur, qui aura pour effet de faire acquérir plus d'extension à cette branche importante de l'industrie roussillonnaise. A° Idem à M. Bracquemart de Prades , pour ses plantations de châtaigniers et arbres verts sur une montagne couverie de débris de roche dure. Exem- ple de reboisement à encourager. 5° Idem à M. Sébastien Pages pour la formation de prairies considérables sur des terrains graviers du lit du Tech. G° Médaille de bronze à M™^ veuve Paris pour ses dentelles. INous nous faisons un plaisir de men- tionner M™^ Meyer, comme ayant remis un ouvrage de même nature très bien fait. 1° Idem à M. Jalabert , pour ses sculptures ingé- nieuses et très bien traiiées sur racines d'arbre ou d'arbuste. 8° Rappel de médaille d'argent, en faveur de M. de Pleville , pour l'exploitation bien entendue des mines de Ségure. 9° Idon en faveur de M. Conte, briqueiier, pour les produits de son usine statuaire et archiieclurale, de plus en plus remarquables. 221 PRIMES m mmmm. 10. M. Girvès de Ll'j , clans la Cerdagne , pour rexploiiailoii la mieux eniendiie , la plus grande surface cultivée en plantes fourragères, el les trou- peaux de bciail de toute nature les plus nombreux. Prime de 500 fr. , dont 200 pour les agents de la culture, distribués ainsi : 150 ir. à M. Charles Noëll sourd-niuel , surveillant de l'exploitation , jeune homme très intelligent el très attaché à son maître, et 50 fr. au sieur Joseph Coixet , maître berger de M. Girvès. 1 I . M. Jean Carcassonnc , à Perpignan , pour ses belles plantations cl pépinières d'oliviers. 12. Prime de 300 fr. h M. Eslirach , maréchal serrurier à Torreilles. Jdcin à M. Bachès, serrurier à Perpignan; Iflern à l\J. Jean Conslant, valel de ferme chez M. d'A liber jon. Partie de la prime de 200 fr., allouée à chacun d'eux comme encouragement, pour les essais d'amé- lioration a des charrues. Nous devons faire mention d'une troisième char- rue, dont l'auteur a désiré garder Tanonyme, comme indiquant de la capacité el de rinielligenoe dans celte branche de l'art agricole. INous nous plaisons à citer M. Fourcade , proprié- taire à Maureillas, comme ayant opéré de nombreuses plantations d'oliviers, en général jeunes encore. Tout porte à croire qu'il réussira parfaitement. jyiine Tignères a présenté des dentelles exécutées à l'aiguille qui méritent une mention honorable pour leur fini el la délicatesse du travail. La nature 222 de l'objet l'endiait nécessairemcnl le prix de beau- coup inférieur aux dentelle:! faites suivant le mode généralement adopté. LISTE des objets exposes à la séance publique du 7 novembre 1847, AgrErnlfnro. 1" Charrue avec des modifications proposées par le sieur Estirach, serrurier-maréchal à Torreilles; Charrue d'un anonyme 2° Charrue-Dental, en fer, à double versoir, du sieur lîachès , serrurier à Perpignan. 3° Houe à cheval de M. de Moux, agronome dis- tingué du déparlement de l'Aude , uîontée avec palettes et socs de rechange •, Harnais de bœuf ou vache ^ potir le travail dans les vignes. 4" Modèle en petit d'une charrue, par le sieur Bascou, de Rivesaltes, ouvrier de M. Estirach. 5° Branches d'olivier à gros fruit, cultivées par M- (iuinard, de Millas. ()° Gerbe de riz, venu dans le marais de Salces, jjremier essai fait par la compagnie Lichtenstein , de Montpellier. Le produit est imparTait, le semis n'ayant été mis en terre qu'en juin, deux mois après l'épo- que ordinaire. 7" Produit d'un semis de pomme de terre, opéré en mai, recueilli au commencement d'octobre, à Puigsoutré, terre de M. Guiraud de Saint-Marsal. Ce produit de première année est remarquable par le volume des tubercules qui, d'ordinaire, ne sont ■2-23 pas plus gros que des noix. Un d'eux pesaii 12") grammes. 8° Patates venues d'une plaïuaiion de M. Fraisse, qui a douné un produit très abondant. 9" Goiu'gcs provenant d'une seule plante , du jar- din du sieur Etienne Gaillard, à la poudrière Une seule pèse 02 kilogrammes; les cinq ensemble pèsent 252 kilogrammes. 10° Graines d'arachide, provenant du Sénégal. La plante oléagineuse a été cultivée par M. Guinard , de Millas. Elle est venue sur un sol improductif situé au bord de la rivière de la Tel. Industrie. lloOxalis cultivé par M. Fraisse. Plante nutri- tive, partie sous terre comme navel; la partie au- dessns pour chicorée ou épinards. 12° Graine et plante oléagineuse, cultivée par M. Fraisse, d'un produit très abondant, donnée par un x\nglais, qui n'a pas indiqué le nom. On pense que c'est une caméline (miagrum sativum). 13° Chocolat à la vapeur, de M. Vallarino; mode de fabrication qui contribuera à l'extension de celte branche de commerce et sans doute à la réduction du prix. 14" Ouvrages en terre cuite de M. Conte, brique- tier à Perpignan, qui acquièrent tous les ans de la perfection et de l'importance. Ils s'appliquent main- tenant à des sculptures, des statues et objets de dif- ficile exécution. 15° Echantillon de soie tordue ou filée, provenant des aieliers de M. Auge. 16° Ouvrages en plaire, du sieur Quès. Rosaces, corniches et ornements. 224 f7^ Echantillon des mines de houille de Ségure ei des roches de gisement : houille, grès, porphire, schistes, etc. 18" Cheminée en marhre du pays, exécutée par le sieur Philippot , remaïquahle par le travail, la variété et le poli des marhres. 19. Marhres du pays mis en (euvrc par des ou- vriers de M. Fraisse; extraction des pins belles car- rières du déparlement. 20' Cannes sculptées sur racines de mirlhe, par l\J. Jalaberl. Indépendamment du mérite du travail, on remarque beaucoup d'adresse et dinlelligence dans le parti qu'on a tiré des accidents du bois. 2\° Dentelles des dames Paris et Meyer, faites au métier ordmaire, façon Valenciennes. 22° Dentelles en fil , à l'aiguille , par M"^^ Ti- gnères, genre nouveau, moins heau sans doute que celles au métier, mais plus économique. Sciences. 23» Manuscrits arahes provenant de la Casbah de Tlemcen. Dons de M. Tasiu Jauberi; Le gros volume est l'Alcoran avec des comme n- (aires; Le petit volume est un livre de prières. Arts. 24° Portraits de maître habile et possédant son art ; Tableaux d'élèves plus ou moins capables, mais dénotant de bonnes dispositions. Dans le but de les encourager, la Société allouera, l'an prochain , deux médailles, une d'argent et une en hronze. 5-2j NOTICE SDR L"ALTER.\TiO^ DES POM^iES DE ÏERRE, La pomme de terre est sans contredit l'une des plantes qui rendent le plus de services à Hiomme , soit qu'il la destine à son propre usage, soit qu'il la fasse consommer par les bestiaux. Mailjeureusement , depuis quelques années, une altération spéciale à ce tubercule, vient détruire celte récolte, et faire le désespoir du cultivateur. Far quels moyens pourra-t on combattre ce nouveau fléau , et s'opposer à ses ravages? Ce problème pré- sente des difficultés qui paraissent insurmontables. Si je ne puis en trouver la solution complète, j in- di(|uprai du moins quelques procédés à l'aide des- quels on pourra toujours pallier le mal. Puissent mes faibles essais attirer l'attention des personnes versées plus intimenicnt que moi dans l'étude de la matière que je vais traiter. Puissent-ils provoquer des expériences plus décisives que les miennes ! ! l 1er. — Caractère et causes de ralléralion des pommes de terre. De même que chez l'homme et les animaux, certaines maladies sont causées par d'autres êtres vivants, animalcules parasites qui vivent aux dépens de leur substance, de même cbez les végétaux , il existe des maladies qui sont dues à la présence de 2-2G ceriains champignons microscopiques qui se déve- loppent clans leurs lissus, ei en provoquent la des- truction. Nous nous bornerons à citer dans nos jardins : le poirier, le pommier qu'on voit souvent couverts d'une poussière blanche qui nVst au ire qu'une vé- gétation qu'on n'aperçoit qii'à l'aide de la loupe. Dans nos cJiamps, le maïs , la bcttei ave , les hari- cots , les dolics, les pois, et bien d'autres plantes sont envahies par de semblables maladies. Les pom- mes de terre avaient été jusqu'ici épargnées par les végétaux parasites. Elles subissent maintenant la loi commune. Je crois, en effet, que lallération particulière à ce tubercule provient delà présence dansée végétal d'une multitude d'êtres microscopiques cpii s'y dé- veloppent aux dépens du tissu cellulaire. Une pom- me de terre altérée , offre à l'extérieur des taches brunes, la peau se dessècbe et se durcit par parcel- les *, les alvéoles, dans lesquels sont disséminés les grains de fécule , se liquéfient et disparaissent. Les grains de fécule deviennent libres, se tassent et s'amoncellent. L'altération se propage et va toujours s'irradiant dans l'intérieur du li.ssu. Les parties qui se décomposent sont d'iuie couleur brun noisette , et contrastent avec celles qui sont encore intactes; la pomme de terre apparaît romine marbrée au de- dans. Bien souvent l'alléralion apparaît immédiate- ment sous la peau , comme dérivant d'une cause extérieure; (juelquefois elle se déclare au milieu du tubercule. 11 se produit alors comme une excavation qui se trouve isolée parmi les parties encore saines. Finalement, sous l'influence de Thumidité, le luber- 227 cille se change en une niasse molle ei visqueuse. Sous rinflucnce de lair ainiospliéïKjue , el à l'abri delà vapeur aqueuse, il se couver lii en une substance fori diiic, spongieuse el racornie. Que s'esl-il opéré pendanl raccomplissemenl de ces faits.'' Des corpuscules aloniiques, dont les sémi- nales existent probablement dans ralinospbère, ont élé produits dans la pomme de terre, el y ont végé- té. Je décrirai plus lard la forme de ces végétaux , les diverses réactions qu'ils subissent sous Tinlluence de cerlains agents cljimi(|ues, et les divers produits qui résultent constamment de ralléralion des tu- bercules. Les expériences que j'ai entreprises à cet égaid sont loin d'élre encore teriuinées. J II. — Pn'caiilioiis pour |ivései'ver les pommes de terre de l'alléralioii. Les pommes de terre peuvent être attaquées par la maladie, soii qu'elles tiennent encore à la plante, soit qu'elles en aient clé préalablement détachées. Ainsi il arrive souvent, qu'à fépoque de l'arrachage, Ton rencontre déjà des tubercules altérés; d'autres ibis raltéiaiion ne se manifeste qu'après la récolte, c'est ce qui a eu lieu généralement cette année-ci. L'humidité favorise singulièrement l'altération des tubercules. 11 se forme dans l'intérieur des tissus, des végétations analogues aux ntoisissttres ; ce n'est f[u"à l'aide tle riiumiilité qu'elles peuvent se déve- loppei'. Si l'on prend une pomme de terre déjà atteinte de maladie, et (|u'on la divise en plusieurs parcelles, toutes les iranriics placées dans un lieu liumidc 228 seront prompienieiu gàiées ; celles placées dans un lieu sec résisteront bien plus long temps. Celte petite expérience explique les faits suivants. Les pommes de terre enfouies dans des silos sont ordinairement plus sujeiles à la maladie que celles qui sont conservées dans rinlérleur des mai- sons. Les silos sont toujours très mal construits, l'humidité dn sol s'y infiltre , les gaz et la vapeur d'eau provenant des tubercules n'ont pas d'issue. Les pommes de terre, provenant de ma récolte, ont été mises , partie dans un grenier , partie dans une cave. Les premières se sont bien conservées, les autres ont été attaquées par la maladie. Les pommes de terre provenant d'un sol argileux, ont été plus atteintes que celles qui étaient récoltées sur un sol léger et sablonneux. L'un retient avec force l'humidité et la concentre sur le tubercule, l'autre la laisse s'échapper. Les pommes de terre qui , après leur complète maturité, sont encore restées dans le sol, ont toutes souffert de la maladie. Au lieu de se ressuyer et de perdre de l'eau de végétation , elles ont absorbé de l'humidité. Une excellente précaution à prendre, pour pré- server de la maladie les pommes de terre , consiste à remuer les tas de temps en temps, en ayant soin d'écarter celles qui sont altérées. Celles qui sont à la surface des las se déi'Sècheni et se racornissent, mais celles qui sont dans l'intérieur de la masse , sous Vinfluence de l'humidité en excès, se ramollis- sent , se putréfient , et deviennent pour les autres une cause d'altération immédiate. Cependant malgré tous les triages possibles, la maladie fait toujours 529 des progrès. Parmi les luLercules qui onl élé triés scrupuleusement, ceux-là mémo (ju'on croit les plus sains, deviennent plus tard susceptibles d'altération. Il arrive même que les meilleures pommes de terre, qu'on a choisies une à une pour semence, se gâtent et s'allèrent dans les sillons avant de pousser les germes hors terre. J'ai eu occasion d'observer ces faits nn grand nombre de fois, tant sur la récolle de 1846, que sur celle de 1847. L'on dirait que le germe de la maladie existe dans la pomme de terre à l'éiat latent, et qu'il a élé déposé dans le sein du tubercule pendant l'acle même de la végétation. On est porlé à croire que , durant cette espèce d'incu- bation , il existe déjà dans le légume à l'état rudi- menlaire, attendant la cause qui le fera éclore plus tard , et produira son parfait développement. L'ob- servation suivante rend probable celte manière de voir. Des ponmies de terre saines et bien pelées sont mises dans un bocal; douze heures après, les unes conservent encore leur blancheur, d'autres devien- nent roussàtres , et commenceni à brunir. Cette nuance est un indice infaillible du principe morbide qu'elles recèlent dans l'intérieur de leurs tissus. En effei, celles-là finissent par s'altérer, tandis que les autres restent intacies. I! résulte de ce qui précède , que la principale condition à observer, pour préserver les pommes de terre de l'alléralion , c'est l'absence de loule humi- dité. Ainsi les propriétaires auront soin de les conserver dans des lieux secs ei bien aérés. Les greniers sont préférables aux caves. Il csi vrai ((uc les tubercules 2M) y verdissent bien souveiii, ci conuacieni une saveur acre. Mais cela n'arriverait pas, si on n'y laissait pas pénétrer la lumière; il suffirait simplement île fer- mer les ouvertures avec une étoffe leinie en noir. Les rayons lumineux seraient absorbés , et l'air at- mosphérique passerait à iravcis le tissu. Dans quelques localilés, on a riiabiluclc île placer au milieu des tas de pommes de terre des fagots et des branches sèches : c'est un excellent moyen d'assainissement et d'aération. On ne saurait trop le recommander aux cultivateurs 11 faut éviter surtout, avecle plus giand soin, d'en- tasser les pommes de terre dans les caves creusées profondément dans le sol ; elles y contractent la ma- ladie en fort peu de temps Les silos, tels qu'on les fait dans le llaut-Val- lespir, sont peii propres à conserver les pommes de terre. 11 faut, autant que possible , éviter d'y avoir recours. Pour résumer complètement mon opinion, je crois que si la maladie sévit depuis quelques années avec tant d'intensité, c'est nous-mêmes qui en sommes la cause principale. La récolte que la providence nous a donnée cette année-ci, élail bonne, nous lavons gâtée. Les ponmies de terre, il est vrai, recelaient déjà les germes de la maladie. Nous n'avons point cherché h prolonger le cours de leur incubation ; au contraire, sans nous en douter, nous avons fait tout ce qu'il fallait faire pour le faire éclore, et la ma- ladie a paru. Prenons dorénavant les précautions que la pru - dence nous suggère, et les ravages de celte maladie seroni moins terribles. 231 S III. — Moyens propres à comballre l'altéralion des pommes de terre. L'alleralioii fail ilcs progrès très rapides dans les luberciiles (|ui coniinencenl à èlre allaqués. La désorganisation csl bieiilôl après des pins complètes. Pourra-t on parvenirà enrayer la maladie dèsledébul.^ Ceci est possible; voici à Faide de quels moyens. Toutes les substances qui arrêtent généralement les progrès de la putréfaction et de la fermentation , détruisent pareillement le principe morbide qui existe dans la pomme de terre. Ainsi, si l'on plonge dans de l'eau aiguisée par de l'acide sulfurique(buile de vitriol) des tubercules ([ui commencentàs'altérer, l'allératinn nefait plus dcpro- srès, et on les conserve durant des mois entiers dans ce li(p»ide. L'acide cliloro-bydri([r.e (acide muriati- que.^ esprit de sel) produit absolument le même effet. Le clilorc gazeux, qu'on a fait dissoudre dans l'eau, l'bypo chlorile de chaux (chlorure de chaux), le sulfite de soude, le sel marin , possèdent encore les mêmes propriétés Riais le procédé le pluséconomi([ne à employer consistca faire usage de l'acide sulfureux. i\ cet effet, on resnplil d'eau à moitié un tonneau de contenance environ de ceui-vingl litres. On fait brûler successivement , dans 1 intérieur du tonneau, plusieurs mèches soufrées, jusiju'à ce que la com- bustion cesse;on remue alors fortementlc Tupiide : par l'asitation, le sa?, sulfureux se dissout dans l'eau. Si les mèches enflammées (|u'on plonge de nouveau dans ce tonneau refusent de brûler, on y introduit de l'air à l'aide d'un soufflet Lorsque l'eau a ab- sorbé quinze à vingt grammes de soufre, on la sou- tire et l'on peut s'en servir. 232 En faisan l niacéier des pommes de leiie pentlaul quinze iours dans ce liquide, cl les faisanl onsaile séchei- au soleil , elles se conservenl durant des mois cnlieis sans ({ue ralicialion ftisse des progrès sensibles. Je n'ai pas encore essayé l'aciion de la créosote et des autres substances congénères, provenant delà distillation du bois, sur les tubercules en altération. 11 est à présumer que Ion obtiendrait les mêmes bons résultats. Le moyen le plus efficace, sans contredit , pour détruire complètement les causes de Falléralion de la pomme de terre consiste dans la dessiccation com- plète des tubercules. Ils peuvoil alors se conserver intacts durant des années entières. Comme il faut éviter avec soin d'en opérer la cuisson , on ne peut point faire usage du four ni de l'étuve La cbaleur du soleil n'est plus assez forte à l'époque de la récolte pour qu'on puisse y avoir recours. On parvient à ce résultat en soumettant les pommes de tene coupées en morceaux, à un courant d'air chauffé à cnviion 50 degrés. Dans mes expériences, j'ai adopté un appareil analogue à celui dont se servent les cln- niisles pour analyser les gaz. Ainsi desséchées, les pomn)esde teiresont encore propres aux mêmes usages auxcjuels on les emploie ordinairement, en les faisant ramollir pendant vingi- qualre heures dans l'eau froide. Comme elles n'ont pas subi de cuisson, elles reprennent leur eau de vésféiation et redeviennent fraîches. On eu extrait la fécule très facilement. On pourrait employer en grand, dans les féculeries, des pommes de terre ainsi préparées. Elles cuisent parfaitement cl ne cou- 233 traolcMil aucun mauvais goûl. Desséchées, ramollies dans Icau froide ou cuiles, les heslianx ne les re- fusent jamais, el ils s'en montrent toujours fort avides. Ce serait un avantage énorme pour le cultivateur d'avoir à sa disposition des pommes de terre durant toute Tannée Outre ((ue sa récolle serait désormais assurée, et à l'abri des causes qui en provoquent l'ahéralion, il n'aurait plus à craindre les pertes qu'il éprouve tous les ans par la germination. Comme je l'ai exposé, avec une bien faible dépense, l'on peut facilement parvenir à ce résultat. l IV. — Emploi des tubercules altérés. On peut les faire servir avec succès a la nourriture des animaux. Comme la fécule n'est pas attaquée, et (|ue c'est uniquement le tissu cellulaire qui dispa- raît, les pommes de terre altérées conservent encore leurs propriétés nutritives. C'est à tort que les culti- vateurs les rejettent en général. Ces pommes de terre crues, coupées en morceaux, saupoudrées de sel et mêlées avec du son, sont une excellente nourriture pour les Ineufs el les chevaux, llsles mangent avec avidité, els'en liouvent irèsbien. Si fou destine à la nourriture des Lesliaux des quantités considérables de tubercules altérés, il faut prendre les précautions suivantes : Après qu'ils ont éié coupés en morceaux, on les fait infuser pendant vingt quatre heures dans de l'eau acidulée par de facide sulfurique. Après cette macération, l'odeur infecte des tubercules a disparu. L'acide a décomposé les sels ammoniacaux, cl il a saturé les alcaloïdes provenant de la décomposition 234 des tubercules. Ou les lave à plusieurs reprises, puis on les fait bouillir avec de Peau alcalisée par du carbonate de soude. Toutes les traces d'acide dispa- raissent, et la cuisson s'obtient facilement. Les pommes de terre qui n'offrent en fjuelque sorte qu'une niasse pulrescenle; celles qui sont molles et altérées penveni élrc encoie employées à la nour- riture des bcsiianx 11 faut les faire détremper dans une eau plus acidulée ([ue la précédente. L'infusion durera trois jours, cl ou renouvellera l'eau acide de temps en temps. Far plusieurs lavages, elles devien- nent presque inodores. On les saupondie fortement avec du sel avant de procéder à la cuisson. Sous l'influence de l'orge germée (diasiase), les mbercules altérés produisent du sucre et de la dex- leine. On obiienl les mêmes résultats par l'action de l'acide sulfurique concentré, ce qui indique claire- ment f|u'ils sont encore susceptibles d'être utilisés dans les distilleries d'eau-de-vic de pommes de terre. Les pommes de terre atteinles de la maladie , pourvu que l'aliéralion ne soit pas très avancée, sont encore propres à être ensemencées. Autant qu'il est possible de le faire, il ne faut semer que des tuber- cules bien sains; cependant, lorsqu'ils deviennent rares, les culiivaieurs doivent employer forcément des pommes ilc terre altérées. Dans le but de con- naître si la maladie du tubercule se communiquait à la plante, j'ai semé à pail , l'année dernière, une certaine ([uantilé de pommes de terie altérées. Au moment de la récolte, j'ai obtenu des tubcrctiles par- faitement sains; très peu étaient atteints de maladie . Vll.I.ASEC.A , notaire à Arles , iii;'n)I>rc Je la Société . 235 Dlî VÎ'ÏM COMME NOIVEL AGENT TIIÉRAPEITIQUE. sur l'opidémie de fièvres n'iuillciitos pernicieuses qui a régné ;i Sais es pendant le mois de déceml)re 1847. membre du jury iiu'dkal du di'iHirlemenl des t'ijréiiées-OrienluUs. 11 y a déjà plus trnii an , une. ^nanclc cl In^lle découvcrle iioiis \eiiaii (rAmcri(|iu'. Les docleiiis INorlon cl Jacksoii aiinoiiçaienl ([iie liiilialalioii de lelher déliiiisail la scnsibililc , ([ue désoiniais l'on pouvait supprimer la douleur pcndanl les opéralious chirur^ieales. Celte découvcrle inl daboid accueillie avec un sentiment d'admiraliou et de reconnaissance; mais bientôt après, rincrcdulilé \iul se mêler à celle première impression. Quelques-uns de nos plus habiles opérateurs , hommes de creur ei de progrès, hardis cl prudents à la fois, se livrèrent à des essais nombreux, cl des 236 faits lietiieux el bien observés forcèreni les plus incrédules à reconnaître la réalité des effets de Télber, la cbirurgie venait de faire une des plus belles conquêtes des temps modernes. De toutes parts Timpulsion fut acceptée ; les exemples venus de haut furent suivis. Éloigné de Paris, ]C me hâtai de faire exécuter un appareil; le hasard a voulu qu'il fût absolument semblable à celui de RI. Charrière , moins la perfection. 11 me permit de satisfaire promplenient le vif désir que j'éprouvais d'essayer moi-même cet agent merveil- leux^ et d'augmenter le nombre des faits qui, en se groupant , venaient apporter une certitude de plus à ce nouveau bienfait. J'admis sans réserve ce moyen si rare de soulager les douleurs humaines; j'obser- vais en silence que, dans certains cas, chez les indi- vidus lymphatiques , Tinflammation adhésive était lente à se développer, quelquefois même difficile à obtenir. J'attendais les observations des maîtres de la science, mais j'eus dès lors la pensée que l'on pourrait , par une nouvelle application , utiliser l'action positive de l'élher, et donner à la médecine pratique un agent thérapeutique de la plus haute im])ortance. Placé peu de temps après en face d'une épidémie grave, menaçante, qui, pour être vaincue, devait être attaquée rapidement, directeiuent et sans re- lâche, je fus amené, sous l'empire de terribles dif- ficultés, à réaliser, dans une certaine mesure, lap- plication que je n'avais fait qu'entrevoir. Encouragé par des succès inespérés, j'étendis mes essais, et ce sont aujourd'hui ces essais que j'ai ritonneur de â37 soumeitre à rAcadciuie, espéraui ijue mes obsci va- lions pourronl donner, aux iiilclligcnces délilc qui la composent, une utile impulsion dans une voie que je crois féconde. J'ai cru lui devoir aussi le récit rapide d'une épidémie qui m'a amené au ré- sultai où je suis arrivé, cl dont Tétudc même isolée pourrait êlrc de cjuelque utililé pour les pralicicns. Salses est un pelit village du déparlement des Pyrénées-Orienlalcs, éloigné de Perpignan d'environ 15 kilomètres; adossé à TOuesià des montagnes arides, il est silué sur les bords d'un étang qu'alimenlcnl dca sources salines très abondautes, el dans lequel les venls d'Est et de Sud jellent souvent la Aiédi- lerranée, qui n'en est séparée que par un banc de sable. S'il est vrai que les effluves miasmatiques c[ui s'élèvent des endroits marécageux, soient les causes les plus probables des fièvres inlermillenles et ré- nultenles, on comprend aisément d'après sa position que la commune de Saiscs soit exposée d'une ma- nière constante h des fièvres d'accès qui en déciment la population. Cependant ces fièvres, malgré la sécheresse qui a régné pendant toute l'année I8-^i7, avaient été assez rares, lorsque la grippe qui désolait une partie de l'Europe et presr[ue toute la France , se déclara à Saiscs le 28 novembre 1847. Elle se produi^il iVa- bord d'une manière bénigne, et ne fut, comme partout, qu'une indisposition sans gravité; mais, du 14 au 29 décembre, des symptômes effrayante se développèrent brusquement; el sur 1200 liabilanls, plus de 300 personnes furent atteintes de fièvres rémittentes pernicieuses, dont les formes variées, 238 la graviié , les symptômes insolites el souvenl fou- droyants éponvantèreni toute la population, i Ordinairement , le paroxysme d'une fièvre perni- cieuse se prépare, s'annonce par des signes qui ré- vèlent le troiiMe ([ui doit survenir; à Salses , Pépi- dé(nie éclata inopinément. Le principe vital était rapidement affaiLli par une vraie et profonde lésolulion des forces de tous les organes; la naiure luttait vainement. Un refroidis- sement général, intense, f[ue rendaient plus sensible encorequelijues légères bouffées de chaleur, lesongîes pâles et bleuâtres, la face flétrie , plombée, livide , des pétéchies sur la surface du corps, le coma, le délire, tels éiaienl les premicis symptômes d'une affection (jui , cbez les enfants , piovo(|uait des cris aigus. La respiration était tantôt difficile et lente, tantôt siertoreuse et précipitée; une loux incessante amenait des douleurs plcniétiques , des crachats rouilles, des crarlials sanguinolents, des vomisse- ments de sang; les yeux étaient caves, ternes, presque toujours fermés ; des douleurs obtuses s'emparaient des membres ([ue contractaient bientôt après des crampes violente.^; la rétention, l'incon- linence , la rareté, la suppression même des urines venaient ailestcr que les reins el la vessie partici- paient au trouble généial. Le pouls petit , faible, • J\'|)res fièvres pernicieuses avec des'symplômes pleu- rétiques et piieunioni(|ues ont présenté des phéno- mènes curieux : tous les indi\idns qui accusaient des douleurs à la poitrine ne crachaient point de sang, ions ceux, au contraire, qui crachaient du sang ne res^eulaient pas de douleurs; si pou d'entre eux étaient pris de convulsions, presque tous se plaignaient de crampes atroces. Pendant toute l'épidémie, le momentdelarémission a été fort intéressant . Bien que le pouls ait gardé cons- tamment les mêmes caractères, les accidents se cal- maient peu à peu; la face s^animait; les yeux des ma- 240 lades, qui avaient présenlé des symplômes ihorachi • ques, devenaieni brillants; avec la chaleur revenue, une moiteur légère se produisait; la face se coloi'ait d'un rouge foncé, cuivré; les pétechies disparaissaient, du moins en partie; la toux diminuait ; les vomisse- ments cessaient peu à peu; les convulsions ne s'ar- rélanl qu'après quelques oscilJalions , quelques retours, laissaient la léle lourde, rinlelligence obscurcie; la réaction s'opéraii lentement, incom- plètement, mais la déglutition était devenue pos- sible , et la guérison pouvait être espérée. Ce fin seulement vers le 12 décembre que la ma- ladie, abandonnant l'estomac et les intestins, se porta au cerveau. Les effets en furent affreux ; les malades , saisis par des convulsions , tombaient comme frappés de la foudre, dans les maisons, dans les rues, dans les champs; j'ai vu quelques-unes de ces convulsions durer plus de quinze heures. D'après cet exposé de symptômes, il est bien certain que l'épidémie quia désolé Salses a offert des fièvres pernicieuses rémittentes, algides, péléchiales, ca- larrhales, pleurétiques, pneumoniques, cholériques, néphrétiques, cysliques, tétaniques, convulsives, syncopales , épilepliques. Jamais médecin n'a eu, comme moi, le triste avantage d'observer à la fois un si grand nombre de variétés de fièvres pernicieuses que les auteurs ont décrites isolément, et qui n'ont pu être saisies qu'après de longs intervalles et dans des contrées différentes. Voici le tableau des trois grandes divisions qu'a présenté l'épidémie, des va- riétés c(ui ont été communes à chacune d'elles, ainsi que du nombre des individus atteints. Ml DIVISIONS. le 2« 3« Thoracliiques. Abdominales.. Cérébrales... VAnitTES COMMU.NES nus trois divisions. VAIiltTLS SPECIALES. Catarrlialcs. B-S- = -r- -3 ) ÂlgiJes pctécbialcs. .] Plcurétiqiies. ' Piictimoiiiqiics. ^Cholériques. Algidcs pctécbialcs. . | Gysliqucs. ' Néphrétiques. /'Tétaniques. \ . I • , '.'Il ) ConviilsivfS. I Alaïues pelecliuilcs. . ' c i ° * ibyncopales. i ' Epilcpliqiics. ] 1.30 10 15 6 \?,6 296 Je dois faire remarquer que les vcnls d'Ësl et de Sud soufflaicm au uionieni de la grippe, et que leur degré de calme ou de violence a parfaitement coïn- cidé avec l'invasion de l'épidémie , le changement ou Taggravalion des symptômes ; je dois constater aussi que les vieillard? ont été le plus épargnés, mais que les enfants et les femmes, surtout, ont été atta- qués dans la proportion énorme des quatre cin- quièmes du nombre des malades. Pour lutter contre un si rapide et terrible fléau , il fallait des moyens énergiques et prompts; les résul- tats du traitement que j'adoptai, vinrent confirmer de la manière la plus heureuse la justesse de mon diagnostic; car, la population de Salses, si grave- ment frappée, ii'a eu à déplorer que trois décès. La femme Sauvy , après avoir bu à Tinsu de Tof- IG •242 ficier de saiilé,, cUi vin très fortement alcoolisé, fut, je crois, victime de son imprudence- La femme Ferrand se refusa avec obstination au traiiemenl prescrit ; enfin la fi mme Bertomieu, en- ceinte de six mois , fut atteinte dans la rue par des convulsions que je parvins un instant à suspendre, mais qui furent bientôt rappelées par des contrac- tions utérines et ne cessèrent qu'avec sa vie. Ces trois femmes, comme on le voit, furent soustrai- tes fatalement à Faction régulière du traitement qu il me reste à exposer, et que je ne crois pas inutile de faire précéder de quelques considérations pratiques. Si, dans certaines contrées, dans certaines épidé- mies, les auteurs peuvent avoir raison de prétendre que, pour combattre les fièvres pernicieuses, Tad- ministration du quinquina doit être précédée de moyens thérapeutiques d'une nature opposée, sui- vant les symplôiues apparents , inflammatoires ou non, à Salses , l'administration immédiate du quin- quina, blâmée par quelques-uns , regardée comme prématurée par d'autres , et trop souvent inutile quand l'erreur a été reconnue, procure seule des succès qui ne sont dûs qu'à l'a -propos d'une médica- tion prompte, active et suivie. A Salses, rarement, presque jamais , quelle que soit l'obscurité de la ré- mission, quels que soient les symptômes dominants, l'hésitation n'est possible-, le quinquina est pour le médecin le seul, l'unique moyen de salut contie des accès de fièvre dont il est dit : le premier lue quel- quefois, le deuxième souvent, le troisième toujours. C'est à Salses que le praticien doit toujours avoir présentes à sa pensée les paroles du professeur Baumes, parlant de l'épidémie de i"780 ; 54â « Je donnais le quinquina à pleines mains; on aurait «dit que j'en abusais, si le cas eût éic moins pres- «sani , si la fièvre eiii été moins grave, si les succès «eussenl été moins multipliés et moins complets. » Ces considérations préliminaires indi({ucnt assez que le quinquina devait être et a été le principal agent ihcrapeuiique que j'ai employé pour triom- pher de l'épidémie, et qu'il a clé immédiatement administré avec une prodigalité nécessaire. J'ai or- donné, dans les 24 heures, jusqu'à cent et cent cin(|uanle grammes de {[uinquina en décoction; j'en ai, pour ainsi dire, saturé les malades, sans avoir jamais eu à réformer ceîte médication; et si l'on s'étonne de la préférence que j'ai constamment ac- cordée à la décoction de quinquina sur le sulfate de qiiinine, je dirai que l'expérience m'a prouvé de- puis long temps que si le sulfate de quinine jouit d'une action spéci(îc[ue conire les fièvres intermit- tentes flanches, il e.>i loin d'agir avec la même effi- cacité contre les fièvres lémittentes. Je me féliciterai toujours d'avoir résisté aux indi- cations qui paraissaient qucl(|uefois nécessiter impé- rieusement l'emploi de saignées générales ou locales. Partout ailleius ([u'à Salses, je n'aurais pas hésité un instant. Il est, je crois, parfaitement inutile de recher- cher les causes des fièvres intermittentes et rémit- icnles , de vouloir expliquer l'ordre particulier suivant lequel s^encliaînent et se reproduisent pério- diquement ces maladies. Il est bon de savoir que ces fièvres naissent dans les mêmes ciiconstances, que les mêmes causes peuvent les produire et qu'elles offrent entre elles des traits de .similitude parfaits. 244 Il est surtout esseniiel cVêire bien averti que ces fièvres devenues pernicieuses, ou se développant de prime abord comme telles, participent toujours du caractère des maladies intercurrentes; qu'elles peu- vent cependant se distinguer par un symptôme per- manent , qui menace incessamment la vie des ma- lades, mais qu^on n'est pas toujours assez heureux pour reconnaître. Du reste , quelles que soient les formes qu'em- prunte la maladie, le médecin qui a étudié le pays où il exerce, qui a observé par lui-même, ou qui s'est éclairé aux traditions de ses devanciers, ne se laissera pas tromper par ses métan)orphoses. Dans le cours d'une pratique de dix-sept ans à Salses , M. Lanes, dont le concours intelligent m^a été si précieux pour réunir les nombreux matériaux de mes observations, a eu bien certainement un grand nombre de péripneumonies à combattre : six foix il a cru nécessaire dVmployer la saignée, et trois décès lui ont appris combien il devait être avare d'un pareil moyen. Quant à moi, une pratique de plus de vingt années dans celte localité tout exceptionnelle, m'a fait proscrire la saignée, et j'ai le moins possible eu recours à l'application des sangsues. En général, une perte de sang, même modérée , y éternise les convalescences, atténue souvent l'action du quinquina et parvient quelquefois à en détruire la puissance. Le quinquina était donc d'une absolue nécessité; mais comment l'administrer, puisque la déglutition était impossible? Un commencement de réaction au- rait peut-être pu le permettre; c'est vainement que pour l'obtenir , j'avais fait employer des frictions avec l'alcool très fortement camphré, que j'avais fait 245 promener des sinapistnes sur tonle la surface du corps. Le lemps pressait cependant; qne faire? Les accès pouvaient devenir sub-inirans, il fallait agir. C'est alors que je me rappelai Péiher ei que mes prévisions sur l'efficacité thérapeutique de ce nouvel agent me revinrent à l'esprit. En face d'une diffi- culté que je ne pouvais surmonter, qui menaçait de mort une partie de la population , je résolus de ten- ter un essai bien incertain, sans doute, mais le seul qui m'offrît encore une dernière espérance. Le manque d'instruments, l'impossibilité de faire respirer des vapeurs éthérées à un grand nombre de malades à la fois, et peut-être le souvenir vague des expériences du docteur Pirogow, qui avait imaginé d'introduire des vapeurs éthérées dans le rectum , me suggéra l'idée d'employer l'éther en lavement , el je la mis aussitôt à exécution. Quel ne fut pas mon élonnement, lorsqu'après quelques minutes je vis la chaleur revenir, les con- vulsions el tous les accidents diminuer , s'arrêter même? Si les symptômes alarmants leparaissaient , un deuxième lavement les faisait disparaître de nou- veau. La réaction s'opérait comme par enchante- ment, la déglutition devenait possible, el l'adminis- tration du quinquina, libre enfin, pouvait combattre avec succès répidcmicn Les lavements étaient composés de cent grammes d'eau à peine liède, et de cinq à trente grammes d'éther sulfuric[ue. Dans un cas très important , l'éiher a été donné pnv. Je ne doute pas qu'on ne doive l'employer à des doses beaucoup plus fortes. Lors des épidémies précédentes, pendant la rémis- sion, souvent mêmeaprèsla disparition de toutdanger, 246 ]e cerveau ou les orgaues qui avaicnl souflci t des ai- teinies du mal , conservaient long-ienips encore les iraces profondes du passage de la fièvre pernicieuse. Jamais, si ce n'esl en décembre 1847, symptômes aussi graves, aussi terribles n'avaient été observés à Salses; et cependant, après le traitement qui leur tut opposé, après Tessai que je venais de tenter pour les combattre , les convalescences ont été promptes, complètes. Les organes malades, le cerveau lui-même n'ont gardé aucun ressentiment des secousses qu'ils avaient éprouvée»; la mortalité a été nulle. Quel est le praticien qui, en face de si beaux ré- sultais , ne sera convaincu comme moi , que c'est unic[uement à Télher qu'il fi\ut les attribuer? L'éther, administré d'une manière nouvelle, ve- nait de rendre à lliumanité un immense service : l'absorption instantanée, Taciiviié si lapide , 1 inno- cuité et la puissance de cet agent, pour ainsi diie inconnu, me paraissaient devoir fixer l'attention de mes confrères, j'allais rendre publics ces premiers essais, tout imparfaits qu'ils sont, lorsque encouragé par les succès, déjà obtenus à l'aide d'un médica- ment, dont l'usage facile favorisait les expériences et me permettait de les multiplier, je voulus appli- quer son action à d'autres maladies, et pousser plus loinmesobservations.Ces nouveaux essais m'amènent aujourd'liui à présenter à l'Académie des résultats nouveaux et plus importants peut-être que je n'a- vais osé l'espérer. L'observation suivante pourra me fournir tout naturellement l'occasion d'énoncer (juel est l'enchaînement d'idées qui m'a déterminé à pour- suivre ces expériences. Un jeune homme âgé de 30 ans avait deux fois 247 été atteint par répidéiiiic ; deux fois le tiaiienieiit avait triomphé d'une rcmillence pneiimoaique avec vomissement de sang. Tout à coup , une deuxième rccliutc a lieu le 5 janvier; la toux est suffocante, le pouls presque nul , un froid glacial s'empare de tout le corps, le malade conserve encore sa connais- sance , mais à huit heures du soir, on attend la fin de son agonie , car rien ne réussit à provoquer la réaction. A houl de moyens, (le quinc{uina ne pro- duisant aucun effet avait été suspendu), un lave- ment avec l'éiher pur à la dose de 20 grammes est administré; dix minutes après, la toux se calme, la chaleur reparaît d'abord à la face, puis à la poitrine et à l'abdomen ; tout le corps reprend bientôt sa chaleur naturelle; à dix heures, la loux n'existe plus; la respiration devient tout à fait normale. A onze heures du soir , le retour de la toux , moins convulsive cependant, exige un nouveau lavement d'éther toujours pur à la dose i\c. 15 grammes, et la toux disparaît pour ne plus revenir. Le 0 , à neuf heures du matin , et à troi.s heures de l'après-midi , on administre un troisième et quatrième lavement avec dix grammes d'éiher; peu d'instants après, le malade éprouve le besoin de manger, et le 7, il désire si vivement des aliments qu'ils lui sont accordés avec prudence. Depuis lors, aucun accident n'a reparu. Celte fois, l'éiher n'est plus un niédicameni se- condaire ; par une action cjui lui est propre, il atta- que directement une affection toute particulière, et détruit une loux nerveuse qui allait devenir mor- telle. Ce fait inattendu fit naître en moi de nouvelles pensées, et je résolus détendre, par d'autres expé- riences, l'application de l'éther. Je tentai, pour la •248 première fois, un essai contre les affeclions rliiin)a- tismales, ei le résuhai dépassa mes espérances. A SalseSj une jeune fille de 14 ans éiaii retenue dans son lit depuis plus de 20 jours par un rhuma- tisme articulaire; deux lavements éiliérés réussirent Je jour même à calmer les douleurs. A Perpignan, je suivis avec un vif intérêt cl une attention scrupuleuse l'action de Téiher , sur une jeune fille de 18 ans, d'un tempérament délicat et très irritable. Celte enfant, habituellement malade, avait été plusieurs fois atteinte de douleurs rhuma- tismales articulaires qui avaient duré au moins 40 jours, et qui, ordinairement, étaient aggravées par des palpitations douloureuses du cœur. Alitée depuis quatorze jours, elle était dévorée par la fièvre et une soif ardente; une continuelle in- somnie rendait plus intolérables encore les palpita- tions violentes du cœur, et les douleurs avec engor- gement qui s'étaient emparé des articulations du poignet, du genou et du pied. J'ordonnai un lave- ment avec qualre grammes d'éther; il fut pris et rejeté presque à l'instani , mais cependant les dou- leurs se calmèrent assez pour lui permettre trois heures de sommeil. Le lendemain un autre lavement avec huit grammes d"éther, provoqua des phénomè- nes très curieux que la jeune fille me jaconta, et je reproduis fidèlement , et pour ainsi dire , sous sa dictée, les sensations qu'elle lue dit avoir éprouvées. A peine léiher fut-il introduit , que l'air expiré se chargea immédiatement de vapeurs éihérées ^ 1 Cette instantanéité de l'absorption de Tétlier est constante; et sonvenl, pendant plusieurs jours , la respiration conserve une odeur éibérëe très appréciable 249 La malade ressentit une douce moiienr^ et comme une vapeur chaude qui glissa sur lous ses membres, s'arrêta sur les articulations malades , et peu d'ins- tants après, se dirigea vers le cerveau. Elle en com- para alors les effets à ceux de la vapeur du charbon; elle disait qu'elle croyait comprendre, d'après ce qu'on lui avait raconté , combien il pouvait être doux de s'enivrer. La fièvre disparut, les douleurs du coeur et des articulations cessèrent, elle s'endor- mit vers les dix heures du soir, et ne se réveilla que le lendemain heureuse et souriante. Depuis lors, les douleurs n'ont point reparu et l'engorgement des articulations diminua très japidemenl. Quelques jours après , j'ai eu l'occasion de voir M. Remy, habile violoniste, de passage à Perpignan, alleinl d'un engorgement rhumatismal très considé- ral)le avec douleur et rougeur à l'ariiculaiion du poignet droit. N'ayant pu le revoir pour constater l'effet d'un lavement avec l'éther, il m'écrivit le surlendemain la lettre suivante ; a Si j'avais osé «sortir, je me serais empressé d'aller vous voir, et «vous témoigner toute ma reconnaissance; votre «remède a produit un effet merveilleux. Voici la «quatorzième fois que jai le rhumatisme , jamais «aucun médecin, jusqu'à ce jour, n'avait pu réussir «à me guérir aussi promptement. » De{)uis, j'ai réitéré mes essais sur d'autres mala- des atteints d'affections rhumatismales, de douleurs précordiales, gastralgiques et enleralgiques; toujours un soulagement presque instantané est venu répon- dre h mon attente. J'ai donc naturellement acquis la conviction que l'emploi de l'éther, administré comme je l'ai indiqué, •250 sera pour Tavenir de la plus grande ulililé. La mé- decine pourra trouver , dans la propriété sédative et anesthésianie de Téiher, un nouveau et puissant moyen d'action , sinon pour guérir , du moins pour soulager toutes les affections dont la douleur est le symptôme dominant, toutes les maladies qui, direc- tement et indirectement , se raiiaciient aux lésions du système nerveux. L'éther pourra combattre avec avantage les accidents traumatiques et quelques ma- ladies de Tenfance devant lesquels la médecine est trop souvent incertaine et impuissante; peut-être même, pourra-t-il être d'une utile intervention con- tre les affections organiques chroniques, en parvenant à suspendre certaines complications qui en augraen- lenl la gravité. ^ Ne pourrait-on pas aussi l'essayer contre le choléra? M. Flourens , cherchant à poser la théorie physiologique de l'éthérisation, a remar- qué que les vapeurs d ether, absorbées et entraînées par le torrent circulatoire , agissent d'abord sur le cerveau , puis sur le cervelet et enfin sur la moelle épinière. il semble que l'absorption de l'élher en lavement agit d'une manière différente , que son action seporteplus directement sur la moelle épinière. Le professeur Gerdy, expérimentant sur lui-même l'inhalation, éprouva d'abord un engourdissement général, une chaleur à la tête, comme si des vapeurs enivrantes lui montaient au cerveau; cet engourdis- sement gagna bientôt les membres inférieurs , s'ac- 1 Un zouave venant d'Afrique, avec la disscntcrie, qu'il conservait depuis plus de sis mois, fut obli];é de s'arrêter à Salses à cause de l;i rigueur du temps et du mauvais état de sa santé. M. Lanes essaya de calmer les douleurs de ce malheureux, et lui ordonna deux lavements cthérés: le premier réduisit h deux le nombre des selles qu'il poussait dans la journée; le deuxième les supprima pendant vingt-quatre heures. L'expérience n'a pu être continuée. 251 conipagnaiil tl'une sensation île clialeur agréable. La jeune fille dont jai parlé éprouva les mêmes sensa- tions, mais en sens inverse. Il y a peut-èire dans ce fait (jue je signale aux physiologistes^ le sujet de nouvelles expériences, même pour arriver à rextinclion de la sensibilité. Je dois dire cependant que je n'ai observé que chez un malade la perle de la sensibilité. M. Velpcau a dit: « L'éiher , cette découverte «américaine, me paraît une grande chose, et la «chirurgie en tirera peut être d'immenses avantages.» Cette prédiction toute hardie qu'elle paraissait alors, serait aujourdliui une assertion bien timide. Des faits décisifs et répétés tous les jours dans le monde entier , sont venus changer celte prédiction en une bienfaisante réalité. Et si j'avouais ma pen- sée tout entière , je dirais que l'éiher sera peut- être plus utile encore à la médecine ; que ses pro- priétés mieux étudiées, mieux connues^ en feront un de ses agents thérapeutiques les plus précieux. Les faits acquis sont pour moi des vérités démon- trées-, je ne sais si l'avenir détruira ou justifiera mes espérances; je soumets avec confiance à l'Académie ce mémoire que des préoccupations de tous les jours m'ont empêché de rendre plus digne d'elle. Si elle veut bien y trouver quelque intérêt , si elle daigne raccueillir favorablement , j'ose croire que les ob- servateurs ne manqueront pas. Us répéteront mes expériences; ils en détermineront le degré d'uiilité pratique , et alors je m'estimerai heureux d'être ar- rivé au hut vers lequel j'ai dirigé tous mes travaux, et que, malgré mes désirs et mes efforts, je craignais de ne pouvoir atteindre 252 MllONSTRATlON DE DECX THÉORÈMES DE GÉOMÉTRIE , par 11. Crova. professeur de malhêmaliques spéciales au collège de Perpignan. Théorème 1. — Les milieux des cordes iniercep- tées par une ligne du second ordre, sur des droites issues d'un même point, sont sur une autre conique qui lui est homolhélique et qui passe par le point dont il s'agit. Démonstration. — Soit pris le point donné pour ori- gine des coordonnées auxquelles nous supposerons d'ailleurs une direction quelconque, et soit alors l'équation de la courbe supposée A^2-fB;2_|-2Cx>-|-2Dx+2Ej+F;-=o. (1). Soit alors j=mx l'équation de l'une des droites dont il s'agit; on obtiendra les coordonnées de ses points d'intersection avec la courbe, en considérant leurs équations comme celles d'un même problème déterminé, ce qui, en éliminant/ entre elles, don- nera, pour avoir les valeurs de x qui répondent à ces intersections, l'équation du second degré, (A4-B/7i2-f-2G/n)x2-f2(D-j-E/«):r+F=o. Si l'on représente par x la valeur de x qui répond au milieu de la corde interceptée, cette valeur sera, comme l'on sait , la demi-somme des valeurs de x données par cette équation. Or, dans une équation du second degré, sans coefficient à son premier terme, le coefficient du second terme, pris en signe con- traire, est égal à la somme des racines, d'où l'on voit qu'on aura D-f-Effz A-j-Bw2-f2Cw 553 ou l)icn encore Bx' /?^2 -}- (2 Ca'-f- E) m -I- (A^'+ D) = o Si, (le plus, on représente par jMa valeur tlcj qui répond à ce milieii, on aura éliminant donc m entre ces deux équations, l'équa- tion résultante Aa.'2-f-B/2-j-2C.ry-|-D..'-|-E/=o , (2). sera celle du lieu des milieux des cordes interceptées par la courbe proposée sur toutes les droites issues du point donné. Or, cette équation est du second degré; d'où il suit que la courbe dont il s'agit est une ligne du second ordre: cette équation est privée du terme indépendant de x et de y, d'où il suit que la courbe en question passe par l'origine, c'est-à-dire par le point donné; enfin, les coefficients des termes du second ordre dans l'équation (2) sont les mêmes que dans l'équation (l); d'où il suit que la nouvelle courbe est homothétique avec la première. Théorème 2. — Les milieux des cordes intercep- tées par une surface du second ordre^ sur des droites issues d'un même point de l'espace, sont sur une autre surface du second ordre^ qui lui est homothé- tique, et qui passe par le point donné. Démonstration. — Soit pris encore ici le point donné pour origine des coordonnées, qui pourront d'ailleurs avoir des directions quelconques, et soit alors Ax2+R)-'?-|-C:2_|_2D,;-|-2Ec,.+2F.n+2G.a4-5Hj-j-Kc-fr.=ro, (1) l'équation de la surface dont il s'agit. Une quelconque des droites issues du point donné aura des équations de la forme x = niz, yz=nz. 254 Si, considérant ces trois équations comme celles d'un même problème déterminé, on élimine entre elles a: et j, Téquation résultante en z donnera les valeurs de :: qui répondent aux deux extrémités de la corde interceptée. Celte équation esi : (Am^-+B«2-f-G+2D/i4-2Em+2FOT/0;^+~(Gm+II/i-fK);+L=o. Si Ton représente par z la valeur de ~ qui répond au milieu de celte corde, par les mêmes laisons que ci-dessus, on aura : Gm-]-lî«-}-K ~ =AOT'^4-B«'?-[-C4-5D/i-}-2 Ew-|-"2F«/7i ' ou bien : Az'm2-fBr.'«5+2F;'«m + (2E;'H-G)«iH-(2D^'+lI)«+(Cj'-}-K)=o. Si, de plus, on représente respeciivemeni par x et r'ics valeurs de x el y qui répondent aux mêmes milieux, on aura : éliminant m el ii entre ces trois écjuaiions, l'équation résultante, sera celle du lieu des milieux des cordes interceptées par la surface proposée sur loules les droites issues du point donné; oi", cette équation est une équation du second degré, dépourvue du terme indépendant de x\ y'' et z\ et dans laquelle les coefficients des termes du second ordre sont les mêmes que ceux de l'équa- tion (1)-, donc le lien dont il s'agit est une surface du second ordre, homolbétique avec la surface proposée, et passant par le point donné. 255 Dcmonsiration du piinci|ie fondamental de la Irigonomélrie spliérique , par 11. Crova, in-ofesseur de inathcruatiques spéciales. On a rhabiiude de démontrer le principe de la uigononiélrie sphérique, pour un cas particulier, et d'en établir la généralité par une discussion plus ou moins longue. J'ai pensé qu'une démonstiation di- recte, applicable à tous les cas, ne serait pas déplacée. Soit 0 le centre d'une splière, sur larpielle esi tracé le triangle quelconque ABC. Je mène les rayons OA, OB, OC et les cordes AB, BC et AC; je trace, sur OA, les perpendiculaires AE et AD, l'une dans le plan AOB et l'autre dans le plan AOC Si, du centre de la splière, on mène les perpendiculaires 01 et OK sur les cordes AB cl AC, il est évident qu'elles ren- contreront toujours les tangentes AD et AE. Cela posé, dans le triangle DOE, on a : DE^=C)Ë'-i-0D'^-20E. OD Cos. DOE. Le triangle DAE donne pareillement: î5Ë'=AË!-f AD2-2AD. AE Cos. A. Soustrayant la seconde équation de la première, et divisant par 2, on obtient : 1+AD. AECos A. = DO. EO Cos. DOE, ou bien : Cos. '-hCQS.lc-{-S\n.lb Sin. '-cCus,A = Cos DOE iangle lOK on obtient: rn^2_l_nî^_TK^ Cos.^^/.-J-Co.s.^^r-Sin.2i« Dans le triangle lOK on obtient cos.DOE=9^!±2Lz:l^-:=. 20K.0I 2Cos.^Z.Cos.^o Substituant dans Téquation précédente, remplaçant Cos.^iiparl+^ffl^ et faisant les réductions qui se présentent, on obtient la formule fondamentale : Cos. Âj=Cos. b Cos. r-|-Siii. h Sin. c Cos. A. (T\ lu phuichrjt 256 ArcFtéotogie tocate- NOTICE SU m PiEHRE îDHlLAlRE , trouvée derrière ranciennc chapelle de la confrérie de Sl-Gcorges, dépendance du couvent des FF. Prêcheurs à Perpignan. Nous Favons explorée avec M. de Bonnefoy, noire collègue, qui en a fait l'esiampage i. Grâces h liiuerveniion de M. le président, auprès de M. le directeur des fortifications, elle était par- faiiemenl déblayée , et voici ce que nous y avons distingué : Un édicule formé de deux pilastres à chapiteau en volute , avec superposition d'une imposte, d'où s élance une archivolte tribolée, recouverte d'un faîte triangulaire flanqué de deux pinacles fleuronnés. Là dessous est casé un chevalier bardé de fer. Armel en tête, cuirasse sur gambeson, brassards, gantelet, jambards, rien ne manque à la défensive personnelle. L'arme offensive , c'est une large épée suspendue à un ceinturon assez lâche dont , au-delà de la bou- cle, flotte un long excédant. Le noble preux appuyé la main droite sur le pom- meau de sa joyeuse, pendant que de la gauche il en presse le reste contre la cuisse du même côté. Cuirasse el chaussure sont à lames imbriquées, et 1 Ainsi liiéc a» naturel, l'image était crcnviron 2 '". M. Falip, géomètre, l'a lieiireuscnicnl réduite h la proportion qu'csigeait h format Ju bulletin. -1 So- irs pieds posés sur un chien , emblème d'une mort paisible et nalnrelle , anlanl qu'il nous souvient du symbolisme afférent. L'image est simplement au trait de gouge forte- ment burinéj et encadrée dans l'inscripiion suivante: «ANi>0 M". CCC". LXXX". V". OBHT NOBILIS VIR DNS. <(BEnNARDUS DE SONO, MILES , ET VICE COMES DE EVDLO CUJUS '(ANIMA REQUIESCAT IN PAGE , AMEN ! 0 LECTOR , ORA 1>R0 ME. » C'est donc décidément Bernard de So, chevalier, vicomie dEvol. Le berceau de sa famille fut le Donazan , portion du Hasez cédée par Roger, comte de Caicassonne, à Oliba Cabreta , comte de Cerdagne f^/)... ï^aissetc , Tom. 2. Pag. 116 J ^Vifred, fils de celui ci, le comprit avec le Capcir cl le Confient, dans le domaine comial qu'il transmit à Raimond, son fils du premier lit fD... Vaisscic.J A Festinciion des comtes de Cerdagne, le Donazan, fit , ainsi que tous les états de ces princes, accession au comté de Barcelone. Le 3 tles calendes de juillet 1245, Roger, comte de Foix , reconnut tenir en fief de Jacques le con- quérant , roi d'Aragon, les châteaux de So , de Qué- ragut , tout le Uonazan , et les lieux d'Estavar , de l>aj?nda cl d'Evol (Arch. de la couronne rlAragonJ. Le Donazan devint enfin un relief de la couronne mayorquine, au dernier partage des étals d'Aragon par le roi Jacques précité. Au sein de ce petit pays affluent de l'Aude déjà mentionné l'an 1 095 (/l/<^//tY7 , Tit. 311), le modeste Castel de So , de Son, ou d'Usson , donna son nom à une maison notable qui fournil un chevalier à la fa- 17 258 meuse journée des Navas(1 21 2), et qui grand il et pros- péra jusqu'à s'allier aux sires occitaniq nés de Narbonnc et de Puisserguier fHist. de la Blaison de Francc.J La veille des nones d'octobre 1260, Guillaume de Se reçut de Jacques le conquérant l'investiture féo- dale des châteaux de Sahorra, d'Eus, de Puyvalador et d'Evol fRcg. de la proc. roY- à l'Uiiù'Crsitc.J Le 8 des calendes de décembre 1260, le même roi gratifia de nouveau Guillaume des châteaux de So et de Quéragv;i , grâce que compléta le comte de Foix dans les limites de son immédiation {Ibid.) Aux nones d'août 131 1, le roi Sanche vint ajouter à la possession du château d'Evo! le cumul de la jurisdiclion et des justices civiles au profit de Guil- laume encore (Ibid.) Enfin le château d'Evol , ainsi aliéné, avec partie de ses attributions judiciaires, devint le titre d'une vicomte approximativement à l'époque où le devin- rent ceux d'Ille et de Canet en faveur des sires de Fenouillei et de La Guardia , qui avaient déjà vu Pons de Caramany faire de son perion bannière par son élévation au grade chevaleresque de baron et de captai f Par ch. des archives de la préfecture j a l'U- niversité.J C'était dans le premier quart du xiv« siècle, lors- que a rextinclion des sires de Serrallonga , des vi- comtes de Tatso, et presque des vicomtes de Casiel- nou déjà sans hoirs, la royauté mayorquine jugea convenable de remplir ces lacunes de l'ordre des magnats, au moyen d'une création de dignitaires aptes à former, comme les précédents, l'auréole du trône. Nous ignorons encore la date précise de réreciion 259 de la viconiic crEvol. Mais ce qui rapporterait bien positivement le fait à la période conjecturée , c'est qn'il n'y en a pas même trace dans les archives de la couronne d'Aragon. Nous sommes encore plus avancés que les docu- nieuls de ce précieux charlrier^ quant à la connais- sance du premier titulaire. En effet, dès fan 1339, Zurita (Tom. 3. 1"°* 133, 177. r» et v°) nous signale déjà Jean de So, vicomte d'Evol, que nous trouvons aussi dans notre Livre vert mineur (f" 175) le 17 décembre 13'i2, tandis qu'au riche dépôt de Barce- lone , il ne surgit qu'en 1344. C'est à jiropos de ce que, le 2 des ides de janvier de celle année , Pierre IV lui aurait repris les lieux d'Evol , de La Hoca , de Saulo et autres, dont il l'aurait indemnisé par la ces- sion des châteaux de St-Mariin et de Subirais sans retrait néanmoins du litre vicomtal; en voici la preuve. Le 15 des calendes de septembre 1346, le même roi donna le cliàleau d'Evol, entre autres, à Bernard (iuillaume d'Eulcnza ÇArcli. de la courouiic d' AragouJ., et toutefois, l'an I3'i8, apparaît dans notre Livre vert uiiiieur (f" 210 V ), Bernard de So, vicomte d'Evol. Est-ce là le personnage de notre monolithe ? C'est probable, quoiriuc nous ne puissions consciencieu- sement nous dissimuler que sur réclamation du comte de Foix , le château d'Evol fut remis, par sentence du conseil royal en date du 28 septembre 1351 , à Bérenger, hérilier de Jean de So, le vicomte précité fJrch. de la couronne d^JragonJ. Il n'y a moyen de se tirer de là qu'en supposant l'indivision du litre entre Bernard cl Bérenger. Quoi qu'il en soit, Bernard compta l'an 1 363 parmi 260 les champions de Pierre IV, roi d'Aragon, en guerre à outrance contre Pierre le cruel , roi de Castilîe (Zurita, Tom. 3. f» 31. v^ Le 12 juillet 1370 , il souscrivit , qualifié de Ma- jordome du palais, un acte du bon plaisir royal fLiv. vert majeur f" 245.) Il négocia, Tan 1373, la médiation du duc d'An- jou, gouverneur du Languedoc , entre Pierre IV et Henri de Transtamare {Zurita, Tom. 3. f° 364. v.) Plus lard, il fut employé à moycnner l'alliance de son prince avec le roi de France [lôid.) j El bientôt (1 374) on le vit en position de com- battre la malheureuse tentative de rhcriiicr de Mayor- i que sur le Houssillon (lùid. f° 366.) 1^ Les vicomtes avaient leur caveau funéraire à la chapelle de St-Clémenl de l'église de nos dominicains. Bernard de So y fut probablement enseveli , et c'est de là qu'est provenu le monument qui fait l'objet de celte notice. (V. la planche, n» 4). A tons ceux qui ont été ainsi détournés de leur destination primitive, le comité central, établi au ministère de l'insiruciion publique, entendrait qu'on substituât sur les lieux même quelque marque de ^ rappel. Mais à quoi bon ici, vu l'usage actuel de la nécropole monastique? Passe encore si la pierre lumulaire à laquelle se rattachent les souvenii's ci-dessus, pouvait être re- levée de son ignoble service par quelqu'une de ces dalles frustes et à portée d'emploi qui ne sont guère utilisées que pour matériaux! i Nous ne terminerons pas sans enregistrer que 1 Elle est à \>résent déposée au Musée. •261 l'église de nos F. F. prêcheurs possédait aussi les restes nioriels des vicomtes dllle et de Caiiet , de l'infant don Ferrand de Mayorque, et de quelques autres défunts d'origine royale. C'est ce que nous ont appris de vieilles écritures déposées à l'Université. On n'accueillera pas avec moins d'intérêt , que la chapelle de Si-Georges était le consistoire capitulaire de la confrérie des chevaliers, qui avaient à l'espla- nade immédiate le champ du Tournoi appelé chez nous lo Rench et lo Boni à Barcelone. Renard de Saint-Mai.o. At'cHéotoffie lovtttc. K Découverte d'une antique à Sainl-Hippolyle (canton de Rivesaltes). Dans le mois de novemhre 1847 , comme on tra- vaillait à ragrandissemeni de l'église de celte com- mune, on trouva, en déplaçant le maître-autel, une colonne qui en soutenait la table, avec celte inscrip- tion : FLAV. VAL. CONSTANTmO. NOB . OAES. En toutes lettres : Flavio Valcrio Constantino no- hilissimo Cœsari. V. la pi- 5, Fig. 1 . C'est à Constantin I<='", surnommé plus tard le grand , que s'adresse cet hommage , comme nous l'avons établi précédemment, et que nous allons le démontrer^ après avoir expliqué l'épigraphe par l'histoire, ainsi qu'il suit D'après la forme d'administration introduite par Oiocléticn , pour aider les empereurs à soutenir le 26'2 poids du gouvernement, on créait des Augustes cl des Césars. Les Augustes partageaient avec l'empe- reur le pouvoir suprême, et gonvernaieni les dépar- lemenls les plus honorables. Les Césars , destinés à leur succéder, étaient ordinairement chargés de la défense des frontières; les uns et les autres disposaient de la force des légions. Constance Chlore, père de Constantin, était Au- guste , et avait pour sa pan la Gaule , l'Espagne et la Grande-Bretagne. Il mourut à York , le 25 juillet 306 , après avoir remporté une grande victoire sur les Fictes. Son fils était auprès de lui, et les soldats prétoriens, charmés de ses excellentes qualités et fidèles à la recommandation du père, s'empressèrent de le proclamer Auguste et empereur. Mais Tem- pereur Galérius, qui redoutait de l'avoir pour col- lègue , ne lui accorda que le titre de nobilissime César * , et cependant , de peur de mécontenter l'armée, il le reconnut pour souverain des provinces qu'avait possédées son père, et lui envoya même la pourpre; en sorte qu'il était réellement Auguste, bien qu'il n'en portai pas le nom. Cependant Maximien, ayant repris la haute di- gnité qu'il n'avait abdiquée qu'à regret, s'allia avec Constantin, lui donna sa fille Fausia en mariage, et ressaisissant les droits qu'il prétendait avoir sur Teni- pire d'Occident , il lui conféra en même temps le nom et le rang d'Auguste (31 mars 307). Au commencement de 308, Constantin ne jouissait ' Lo mot nobiUssimus qu'on ajoutait à celui de César, nVlait, suivant Gibbon, qu'une cpilhète vaffuc , plutôt qu'un titre ilétermiiu^ , sous les préJécesseurs tle Gouslauliu,, '263 encore de ce lilrc que ilans les provinces qui lui obéissaient; mais Galéiius se vil enfin forcé de le reconnaître eti celte qualité, et conséquemnieni dans tout l'empire, excepté les pays qui élaienl sous la loi de Maxence. Ainsi donc Tincription de Saint-llippolyte date de 30C ou de 307. On a contesté néanmoins qu'elle concernât Cons- tantin 1 plutôt que Constantin II son fils qui, suivant de graves auteurs , disail-on , s'appelait comme son pève Fl(^wiiis F^alcriiis Coustaiilinus ^ et qui reçut le titre de César en 317. Mais celte prétendue identité de noms est aussi fausse qu'invraisemblable Nous pouvons opposer à ces auteurs un savant dont la compétence est incontestable en pareille matière : c'est le numismate Bimard de la lîasiie. Voici, en ré- sumé, ce qu'il établit, en s'appuyant des monuments, dans une de ses précieuses notes sur la Science des médailles du P. Jobert, ouvrage généralement estimé: Conslantin i portait le prénom de Flavius i, le nom de Valerius et le surnom de Constantiiius. Tant qu'il vécut, son fils aîné fut appelé sur les médailles Coiistnntinas junior nohilissiinus Cœsav. Après la mort de son père, les médailles ei les inscriptions font précéder son surnom du prénom de Flavius , et du nom de Claudius ou de Julius. V. d'ailleurs tous les biographes et d'autres historiens. Ces noms de Julius et de Claudius , dii encore M. de la Basiie , étaient ceux que la famille Flavia tenait de ses alliances par les femiîies avec les familles Claudia et Julia. ' Flavius , nom de famille, devint un prénom adirés le m' siècle (Sclioell, Hist. al)!', (le la liUérat. nini.) 264 Autre difficulté : Tinscriptiou de Sainl-Hippolyie, poursuivait-on, n'a pas un caractère officiel, et il nesl pas probable qu'on en ait réellement consacré quelqu'une à Constantin I, dans le peu de temps où il ne lui fut permis qu'un titre qui ne pouvait lui être fort agréable. Eb bien , nous sommes à même aujourd'bui de produire des inscriptions où ce Cons- tantin se trouve très explicitement désigné avec ce même titre. C'est d'abord celle que donne Bergier, p. 72. C. Flwius Falcrius Coiistaiitinus et Gnlcrins Valcrius iVaxiniianus * y figurent , et sont qualifiés de nobilissimes Césars A iMariigni, dans le Valais, il y a une colonne milliaire consacrée à ces deux Césars en ces termes : Dominis ?iostris Maximiaiw et Constaniino iiobilissimis Cœsaribus (Ann. de philos, chrét., mai 1848). Le musée de Toulouse possède un autre milliaire découvert par le savant archéo- logue, M. Alex. Dumége, qui Ta publié dans ses Monuments religieux des Folces etc., et dans sa des- cription des antiques du musée précité. On y lit celte inscription Imp. Coesar. FiAVio y Ki.crio Cons- TANTINO ^Omlissirno CoESrt/7 DIVI CONSTAlSTIt PU kMGUSti FILIO 2. Les sigles imp. caes. onl arrêté iM. Dumége; un autre académicien y a lu hnpcrantc Cœsare. ftiais les lexiques d'abréviations romaines ne leur donnent iamais cette signification; imperanic ne peut donc être écrit qu'en toutes lettres. De plus, ce mol ainsi 1 C'est Maxiniien II , appelé aussi Maxiniin , (jui était uobilissirae César en même temps que Constantin I. 2 Celte inscription se ressent comme la nôtre de la décadence des arts. Bergier fait une pareille observntion sur une inscription de Conslanlin l*'"' en Italie, p. 73. •205 écril el Cœsarc devraienl êtie nécessaircnienl suivis du nom d'un empereur. C'est aussi ce que Foii voit dans Bergier , p. 73G , sur une inscriplion, qui n'est pas d'ailleurs dédicatoire. En un mot, ces sigles ne peuvent , à notre avis , se traduire auireuieni que par le Aa\.\Ç inipcratori Cœsari d'accord avec Coiistan- tiiio. Et l'on ne doit pas trouver étrange que ce prince reçoive sur la même inscription le titre d'empereur et celui de nobilissime César, ]>uisque, en effet, il fut l'un el l'autre à la (bis pendant un an , comme il a été dit ci-dessus d'après l'histoire. Voilà sans doute assez de preuves à l'appui de notre thèse. Pour en revenir à la colonne trouvée à Saini- iFippolyle , nous devons faire remarquer qu'un des côtés du chapiteau est brut. Elle avait été, par con- séquent, adossée à un édifice , à un fort peut-être , si ce n'est même à l'ancien relais appelé en latin 3Iu- tatioiics, aujourdliui Mudagons, localité peu distante de Saint-IIippolyte , près de laquelle passait la voie romaine qui conduisait de la (iaule en Espagne, ainsi que l'a doctement prouvé feu M. Jacques de St-Malo. Cette antique, enfin, se trouve maintenant placée convenablement au porcJie de l'église d'où elle a été tirée, avec une épilaphe insignifiante du xiv*^ siècle, provenant du njême endroit. II. Découvertes d'objets du moyen-âge. 11 paraît que le couvent de Saint-François de Perpignan lie renfermait pas moins que celui de •266 Saiiii-Douiinique i, des monuineiiis funèbres érigés à de grands personnages. JNous y avons vu dans l'é- glise, avant 93 , celui du viconiie de Pérellos ei de Koda 2, G'élail un mausolée en marbre blanc , sur lequel reposait une statue qui le représentait en costume de guerrier revêtu de son armure et avec le chien symbolique à ses pieds. 11 y a un an environ , qu'en abattant la cloison d'une arcade de l'ancien cloître du couvent , on y trouva une statue sépulcrale, ayant sur le socle cette inscription malheureusement tronquée : Illustris do- mina Alamanda Castro iiovo. (V. la pi. 5, Fig. 2). On seul que ces seuls mots ne peuvent nous appren- dre que très peu de chose sur celte dame ; mais voici qui est curieux et qui donne bien à penser. 11 existe au musée de Toulouse, n» 614 , une épitaphe ainsi conçue : Anno domini m ce. xx. m , xf kal. ja- nuarii , obiil domina Alamanda de Castro novo , uxor quondani Willclmi de Casti'O novo , militis , canonica ecclesiœ Sancti Stephani ; cujus anima, etc. Il y a cinq écussons sur la dalle : un à chaque angle du som- met, aux armes de Toulouse, et trois au-dessous aux armes de Castelnou, consistant en un château sur- monté de trois tours avec tourelles. Or, en 1212, nous trouvons un Guillaume de Castelnou , parmi les chevaliers roussillonnais , qui • V.la notice de M. deSt-Malo sur la pierre sépulcrale de Bernard deSo. 2 Raymond de Pérellos, vicomte de Roda , était un fidèle serviteur de Jean! d'Aragon. Ce roi , pour le récompenser de ses services, érigea en vicomlé son lief de Pérellos, en Roussillon, Tan 1501 . 11 TappcUe sou bon ami, dans le diplôme de ce litre. Kn i'iM , il le nomma gouverneur de Roussillon ut général de l'armée qui défendait cette frontière. En l-'(20, Alfonse V le fit vice-roi et capitaine-général de tapies, etc. 567 contribuèrent au gain de la fameuse bataille de las Nnvas. Ce chevalier ajjpartenaii sans doute à la branche cadette de nos vicomtes de Caslclnou ; el ceux de cette branche avaient pour armoiries v\n château, comme on le voit, dans l'église de Moni- t'errer sur Télégant mausolée de noble Dalmace de Castelnou , mort en 1322. Le même écusson a été remarqué encore parmi les débris du cloître de Sl- Francois. Cette Alamande, malgré son très honora- ble blason, ne porte aucun titre sur l'épitaphe; peut- être même n'élait-elle qu'une fille naturelle d'un comte de Toulouse. En ce cas, son mariage avec un simple chevalier , miles ^ n'était pas disproportionné. Peut-il y avoir plus de conformité entre la statue el l'épitaphe.'' Ce qui reste à savoir est , quant à pré- sent, du domaine des conjectures. D'une autre arcade du cloître susdit, on a tiré, il y a 5 ou 6 ans , la figure sépulcrale d'un cheva- lier qu'aucune inscription ne nous fait connaître , mais qui donne lieu néanmoins aux quelques re- marques que l'on va lire. (V. la planche 5, Fig. 3). Son costume est semblable à celui que présentent des figures de chevaliers du xii« et du xrii^ siècle , sans que l'on puisse supposer qu'il ait cessé d'être plus long-temps en usage. Un touriste anglais qui visita , l'an passé , noire musée dit, à la vue de ce personnage tirant son épée ou la remeltaiil dans le fourreau, (|ue c'était un croisé représenté au moment de parlir pour la Terre 268 Saillie ou après en être revenu. 11 ajouta que de telles figures sépulcrales n'élaieni pas rares en An- gleterre, tandis que celle-ci était la première de cette espèce qu'il rencontrait en France; il en fut si charmé qu'il en prit le dessin. Si cependant quelque hasard le ramenait à ce musée, ou lui fesait totnher entre les mains le présent volume, avec quel plaisir n'y verrait-il pas Bernard de So dégainant ou rengainant sa flamberge, et com- me il s'empi'csserait d^en faire tout d'abord un autre croisé roussillonnais ! Mais aussi quel désappointe- ment, s'il en lisait ensuite l'épitaphe en date, hélas! de 1 385 ! Quant à la jambe croisée de la figure qui nous oc- cupe, elle indiquerait une auituclc en mouvcnient , suivant M. Didron , directeur des Annales d'Archéo- logie (mai 1 845). Enfin, si ce n'est pas un Castelnou ou un Pérellos qui fait l'objet de cette note , c'est toujours un de nos anciens preux dont nous regrettons bien d'igno- rer le nom. Mais... Mors etiani s axis , nominibusqae venit. (Ov.) ' P. PuiGGARl. 1 Cette pierre tombale a été transportée au musée , ainsi (juc la statue d'Âlamanda. 269 ITOTIOE SUR L'ANCIENNE CULTl'RE DE LA GARANCE EN ROUSSILLON. Snmmnire : Avignon. — Culture à Perpignan. — A EIne cl dans le rayon. — Règlement épiscopal. — Procèdes de culture. — Culture à Saint-Féliu d'Amont et à ftlillas. — A la Salanca. — Exportations. —Derniers vestiges de culture. — Conclusion. Avignon. Dapics les journaux, Avignon a volé une statue à J'iniroducteur de la garance dans le comlal sous le règne de Louis XIV, date que la statistique du dé- partement de la Drôiue réduit à celle de I7G0. A noire place, que ferait celte ville reconnaissante pour nos ancêtres oubliés chez qui la ménie cullure prime d'une si forte antériorité? Celait au xiv^ siècle. Avignon voyait commencer la série des papes français ^ dont le séjour continu dans l'enceinte de ses murs fui appelé des Romains l'e.ril de l'église , le rapt de la papauté par les Proven- çaux, son assujettissement au royaume des Gaules , et la seconde captivité de Babylone. La résidence de la cour pontificale , la centralisa- tion des affaires et du haut personnel de la chréiien- té, y dérivaient en quelque sorle le Pactole parmi 270 les affluents du Rhône, c'est-h-dire , une prospériic peui-étre indifférente h la recherche ingénieuse des ressources agricoles. A Tombre d'un trône modeste , aussi tutélaire de l'industrie indigène que le Saint-Siège empressé de couronner des lauriers du Capitole et de faveurs utiles les sommités artistiques et littéraires, alors nos simples devanciers comptaient , au nombre de leurs éléments de travail , la manipulation du lainage. Déjà même cet art patriarcal , passé de l'u- sage domestique à l'appi'éciation étrangère, fournis- sait jusqu'à l'Avignonais des expéditions maritimes h bord de nos propres nefs affrétées , qui lui rappor- taient à destination fixe les deni'ées de l'Orient. Grâces à l'esprit d'association, cet énergiqvîe ressort des pays pauvres , bras , capitaux , ateliers , usines , rien ne manquait à la fabrique roussillonnaise. Culture à Perpignan. A peine en train d'activité , l'homme des champs la mit au complet par la culture de la végétation tinctoriale. Le premier fruit de ces labeurs fut la garance , pourpre rurale inférieure à celle des rois , que ce- pendant nos ouvriers savaient enqirunter à la graine fVécarlate, tant furent fécondes les traditions de l'antique teinturerie de Karbonne! Point d'indice d'industriel Cadmus qui nous ait importé la gi'aine exotique de la plante, objet de cette notice. On dirait une production spontanée du climat et du sol promue de la Flore sauvage à la Flore agricole. I^'époque de cet avancement de condition est in- coniesiablc. Elle résulte d'un litige relatif au taux 271 tic la dîme cjue devaient à révéquc d Elne^ quelque pari que ce fût du diocèse , les garaiicières des hommes de Perpignan. De là conclusion d'un rayon- nement de production étendu bien au delà de son centre , puisque les redevables s'y trouvaient posses- sionnés sur nombre de fiefs. Or, d'après la sentence arbitrale intervenue aux Calendes de décembre 1323, la ctihure de la garan- ce ;, du pastel, de la gaude , du chardon et oliorum cxplctorum similium , datait déjà de quelques années. C'était sans doute depuis rétablissement de nos fabriques de drap, dont l'origine remonte en Confient et Vallespir jusqu'au xii« siècle, et qui apparaissent l'an 1249 sur tel pied de perfection que leurs pro- duits obtinrent, dès 1326, accueil et faveur à By- zance, dernier refuge des arts et du luxe de la civi- lisation romaine. La dîme fut fixée inférieu rement à celle du Bled. A la suite , se présente en pleine continuité la manipulation du lainage et de la teinturerie. Le producteur fait des envois de draperie outre-mer , et parmi les commandes prescrites en retour, ne figure jamais l'utile plante qui nous occupe. Un seul tarif de nolisation prouve qu'elle végétait aux échelles accoutumées des nefs roussillonnaises Mais, pas le moindre cas d'importation ne résulte des quelques centaines de documents par nous dé- pouillés, à l'inverse du pastel , dont nos fabriques n'obtinrent jamais suffisance indigène. Le iiaut- Languedoc et la Toscane directement, et Gènes de seconde main, complétaient l'approvisionnement. Après la sentence définitive du liiigc ci-dessus , disette momentanée de renseignements, <,]ui toute- 272 fois ne permet pas de soupçonner que noire culture n'allât de pair avec la mannfacture, car, en 1350, une usine à garance s'établit à Perpignan , près la porte Si-Martin, alimentée probablemeni de pro- duction locale , ne pouvant supposer que la meule y attendît la production étrangère à l'étal brul. Le silence de nos vieilles écritures s'explique na- lurellemenl. C'est que la propagation de la garance marchait à proportion des besoins , sporadiquement conduite et naturalisée par la main de l'industrie aux lieux les plus appropriés à sa végétation et les plus rapprochés des fabriques. Culture à Elne. Telle , radieuse et comme en son oasis de préfé- rence, nous apparaît elle, l'an 1393, à Elne, fief de pariage entre l'évêque et le chapitre diocésain. C'est plus; car voilà que de cet adopiif berceau , elle se provigne successivement sur l'irradiation de Talso d'aval, d'(^rgelès, de Palau, d'Ortaffa, de Mon- tescot, de Mosellos, d'Alénya , de Saint-Cyprien et de Vilarasa , de la Tonr-bas-Elne et de Palol , et même jusqu'à Villeneuve-de-la-Raho. A la fin duxive siècle, pendant lexV^, et presque tout le xvie , Elne était en plein mouvement com- mercial des nombreux produits de son crû. Marché de toute espèce de grains et de fourrages; marché de bestiaux ne laissant que peu de place à quelques maquignons auvergnats -, foyer de con- sommation occasionné par le nombreux personnel ecclésiastique dont s'entourait le siège épiscopal ; cour de justice diocésaine et féodale; double bail- liage que ne dédaignaient point d'occuper les che- valiers du Heu; classe nobiliaire richement posses- 2/3 sionnée sous iiiféoclaiioii et allotlialiié • bourgeoisie nettement signalée par le nom de la rue dite des Bourgeois fdcls ciutadansj , classe induiitrielle et agricole également aisée fournissant , à l'envi de la précédente, une jeunesse studieuse qui passait de rUniversiié de Perpignan aux doctes facultés de Montpellier et de Toulouse: ainsi se reflète d'après nos monuments la physionomie d'Elne. Or, tant s'en faut qu'elle se fût effacée, lorsqu'oii appuya, d'une prétendue décadence totale de la Cité du pays, la demande longuement méditée en trans- lation de la résidence épiscopale et capiiulaire. Jus- qu'au derniei' moment où elle fut formulée, Elne présenta, outre la population énoncée, des mar- chands, des négociants fmcrcatorcs , uegociatoresj , des médecins et des facultatifs en pharmacie, dont Tun entre autres est qualifié de chymicus. Précédemment , c'était aussi une ville manufac- turière du lainage , qui n'excluait point quelque débit de Yervins, de ftlalincs et de Courtray. L'évê(|ue l'ianella (vers 1373) y avait amené la dérivation actuelle du Tech, d'après les inspirations il'un Paieur interrogé par lui dans une de ses pé- destres promenades, sur l'innovation que pouvait réclamer le bien public. Autrement dit , le canal actuel , qui féconde à un si haut degré le territoire, ne fut d'abord creusé que dans l'intérêt de la dra- perie. Aussi vit-on succéder la manufacture au com- plet. Tisseurs, moulins à foulon, établissement de teinturerie et pareurs; culture de garance, de pastel, de gaude et usines à l'avenant, tout était là. C'est que , par la confusion du pouvoir spirituel et féodal en mêmes mains, l'homme de Dieu dictait 18 274 au suzerain les soins dus h la prospérité matérielle du vasselage. L'exemple en résultait du prélat siégeant à l'épo- que où nous sommes de ce mémoire. C'était Galceran , frère de Bernard /Vlberl , gou- verneur de nos comtés, qui renforça de quelques compagnies de gendarmerie aragonaise l'ost du Dau- phin , plus tard Charles Vil , roi de France , fait historique dont nul auteur n'a parlé. Réglemenl épiscopal. Attentif à l'administration suzeraine , frappé du développement de la garancicre , tant à Elue même qu'aux reliefs de sa mouvance, et voulant prévenir le cas où l'abondance des produits ne serait que le résultat de la fraude dite Billoii de garance y de con- cert avec le chapitre co-seigueur , Galceran Albert s'empressa d'aviser à un règlement sur la prépara- lion consciencieuse de notre plante tinctoriale. Ce règlement , rédigé en Chapitre pascal de l'an 1434, contient, pour disposition principale, que des prud'hommes seraient chargés de suivre et de sur- veiller les procédés de manipulation jusqu'à la meu- le, au sortir de laquelle la production mise en sache recevrait l'estampille du sceau de la cité , pour cer- tificat d'origine et de confiance. Aussi la voyons-nous dès lors qualifiée de Rubéc moite y boîie j purgate , mcrcantilis , receptibilis et sigil- late , accueillie avec même faveur que ces draperies perpignanaises, à qui la marque laborieusement ob- tenue de la lettre P acquérait crédit et valeur en Italie sous le nom distinctif de Perpignano. Celte mesure dictée par la bonne foi n'était qu'en 275 vue doblcnir an vasselage , traité comme famille, un débit garanti sur la juste renonmiée tle la pro- duction. Si des critiques y trouvaient une porte ouverte à l'arbitraire, et préféraient la liberté de main d'reuvrc en regard de celle d'appréciation, nous répondrions d'abord, que le règlement ne fut point si strictement obligatoire que Saint-Cyprien ne refusât de l'admet- tre ; et subsidiairement, qu'Elne qui Tadmit, obtint une longévité de culture avec une prospérité d'é. coulement au-dessus de toute concurrence. Le marché de garance .ugilaitc , bidlaïc se soutint à Elne jusqu'en 1515. 11 avait de l'importance, puis- que sur trois à quatre notaires, nous avons relevé plus de 150 ventes h livrer, de la part du producteur qui n'avait point sa production récoltée, et à crédit, de la part du consommateur qui jie pouvait payer qu'à terme. Or, c'est de quelque considération que celte somme de contrats à pactes sur une période plus que séculaire. Car , combien ne font-ils point présimicr d'échanges instantanés d'argent contre mar- chandise qui n étaient scellés que d'une poignée de mains? Certes ce fut le plus grand nombre. {}ne consommation étonnante, c'est celle du petit village de Saint-Jcan-pla-de-Corts. Eiait-ce pour l'approvisionnement de la manufacture de Céret, où l'on ne trouve qu'un seul exemple de culture? Un des grands producteurs à Elne, c'était Dalmace de Bauyuls, damoiseau, ou gentilhomme non encore admis en l'ordre de chevalerie. Procédés de culture. W ne viendra dans l'esprit de personne qu'Elne, 276 à portée de Collioure, ne fût qu'un enlrepôt plutôt qu'un vaslc champ de garance. D'abord , ainsi que nous l'avons dit, point d'importation connue jusqua présent. De plus_^ si la réalité de la production locale n'était démontrée par renies de semence ou de grai- nes récoltées sur place , elle se déduirait de celles des récoltes en vert. Quoi de pins concluant au sur- plus que les contrats d'association pour la culture, contrats que nous trouvons jusqu'en 1551 ? Là, se présente la série des procédés d'exploitation. Le pastel empruntait le secours de la charrue t)our la préparation du terrain au semis. La garance au contraire exigeait de le pelleverser (Fangai-) au pelleversoir (Frt/?g^rt), opérations et instrumenis usités encore sous le même nom en catalogue , et qu'on retrouve en Languedoc à la première façon des terres destinées au mais. On voit l'agriculteur amender le sol Çfemare), en- semencer (^sciniiiare^ , sans pouvoir dire si c'est en place à point fixe et définitif, ou en couche pour transplanter en porrèle. 11 paraît que les pieds de garance étaient disposés par alignements comme la vigne, et suffisamment espacés aussi pour en faciliter les habitudes traçantes. \ Il fallait sarcler fsarculare). Dans l'activité de végétation , qu'était-ce que la garance rubea de duobus , de tribus vamis ; duoruin triunique ramoruni ? Qu'était-ce encore que la garance roja de una e de dos cubertas ? Le praticien vaut ici mieux que Saumaise , et malheureusement l'auteur n'est ni l'un ni l'autre. A bout de végétation probablement, et pour que 277 loule l'iiliiucalalica profilai à la racine, la garauce élaii tlcpouillée de ses branches. On aiiachail la lacine à la bêche f^ixada de rojaj, oulil spécial disiincl de la bêche du ']ai'd\mev (ylixada /lo/tolannj , el de de celle du vigneron fAixnda va- basscraj. Derrière l'airachenr suivait un ramasseur à la fou relie fGafa de rojaj. On transportait au séchoir dans des toiles (Tcles ^ borrassos de rojaJ. Suffisaninient sèche, la racine élail battue et bal- loiée pour en secouer les parties terreuses encore adhérentes. C'était alors la vubva picala ^ baslonata^ destinée à la meule. Nous trouvons des cultivateurs de garance à frais et hénéfices communs. C'est à l'origine de l'exploitation. A la fin (1551), un propriétaire associé à un coion habile, dil le contrat, se charge d'amender la terre, et le colon prend à son compte la semence : les journées de pelleverseur et du semis sont à communs dépens. La production se partage également , el comme le colon, cultivant de ses mains, est tenu à plus de labeurs que le propriétaire , celui-ci l'en indemnise en répondant tout seul de la location de la propriété. 11 est probable que les lieux d'exploitation étaient munis d'usines. Vers 1443, Nissac Naiban , juif, se liviaitàla moulure à Elne. La garancièrc épuisée recevait des plantes fourra- gères. La luzerne n'apparaît à Elnccprau xvi'' siècle. Elle prime à Millas. 278 Cullnrc à Saiiil-Frliii d'Amoiil el à Millas. Dans rintervalle de 1393 à 1 551 , qui esi la pëiiode connue de la garance au territoire d'Elne et environs, voilà que la même culture se présente (lA^iO) bien constatée à St-Féliu d'Amont et h Millas, peut-être encore à Néfiacb. Or, l'innovation devait d'autant plus naturellement advenir sur ce sol doué des mêmes conditions de fécondité que le territoire d'Elne, qu'il ne manquait plus à Millas que les plantes tinctoriales pour y met- tre au complet la manufacture du lainage , qui mê- lait par fois aux laines indigènes les laines aragunaiscs. On est aussitôt à se demander s'il est probable que, sans laisser de trace dans l'intervalle, la garance ait francbi celui de Perpignan à Millas, où se trou- vaient si fort à proximité les manufactures d'Ille et de Tbuir. La chose ne païaît point vraisemblable, car Sainl- Estève, Baho et Villeneuve colonisés de moulins à foulon, la culture du pastel à Pézilla , INéfiach et Millas même , font présumer une masse de fabrica- tion qu'il y avait tout intérêt à ne point laisser ren- chérir par les faux frais de la teinturerie foraine , alors que les transports étaient si coûteux. La ma- nufacture d'Arles se trouva fort mal de pareilles dépenses pendant l'occupation française de 14G2 à 1493. La manufacture d'Argelès eut besoin de la teinturerie d'Elne, et fut épbémère. Celle d'Elne déclina, dès qu'il lui fallut recourir pour le même objet à Perpignan, L'établissement des teinturiers à Thuir était en ruine l'an 1439, et Thuir u'offre 579 qu'un momcnl de concours aux cxpctliiions de dra- perie ouire-niei-. Culture ù la Salanca. Pourquoi la garancière roussillonnaise n'aurail-elle pas remonté le cours de La Tel où elle avait servi la fabrication de Vinça, de Prades et de Villefranche? Pourquoi n'aurait-elle point ainsi progressé à l'ouest, lorsqu'elle prenait de l'extension sous la capitale de la province ? De ce centre, en effet, pari un troisième rayonne- ment (1449— 1453) surPia, Clayra , Sl-Hippolyle , St-Laurent et Vilallonga-de-la-Salanca. Si-Laurent même cultivait de plus le pastel. Dans ce foyer de production , peu de contrats à livrer^ ou à crédit ^ ce qui dénionlrerail la généralité des ventes à deniers comptants. Exportations. A l'apogée de la culture , notre surabondante ga- rance devint un objel d'exportation à Naples dès 1 519. Capmany la signale, comme employée à la teintu- rerie de Barcelone sous le nom bien distinct de Ru- bia de Roselloii . Les contrats d'écoulement à l'étranger n'abondent guère, ou du moins ne les trouvons nous pas fré- quemment. C'est d'ailleurs qu'il fallait parer à de nombreux besoins; jugeons-en par l'aperçu suivant de la lopograpbie du lainage. P'alloiis parallèles au Tech. Banvuls-sui-Mer ) ri • • . r"' Lolliouie. . . - j ' ...... 280 Vallée du Tech. Argelès. . Sl-Ândrc. Maiireillas. Cérct. . . Elnc 3ypr Le Volo- St-Jean-pla-de-Corts. Arles Piats-de-Mo!16. . . . fal)rif|iiaient. Moulin à foulon. Canolies. Thuir. . Cabestany. Castel-Roussillon. Perpignan. . . . Malloles Millas Ille Vinça Prades Vernet Villefranche. Manufacture au complet, moins les plantes tinctoriales. Manufacture au complet. Culture du pastel et usine afférente. Pareurs, moulin à foulon et à pastel. Moulins à foulon. Manufacture au complet, moius les \ plantes tinctoriales. Vallée du Réart. Culture du pastel. Manufacture au complet, moins les plantes tinctoriales. Son bailli concourait (1 392) aux expédi- tions d'oulre-mer. Culture du pastel. Vallée de La Te t. Moulin à foulon. Manufacture au complet. Moulin ;i foulon. Manufacture au complet. Pareurs et terre à foulon. Paieurs et moulin à foulon Pareurs. Le premiei' moulin à foulon y apparaîît en 1110. Seconde manufacture après Perpignan, investie de juridiction disciplinaire sur les petites fabi iques du rayon ; lecevant les draperies du pays de Foix pour leur donner le dernier «ipprêt ; concourant hors de toute proportion, relativement à Céret , Arles et Thuir, aux expéditions d'outre-raer. Moulins à foulon. Bonpas Vernet St-Estève Baho Villeneuve-de-la-Rivière. Eus [ Moulin à foulon et pareurs. 281 Fallcc de l'Jgly. Pi.T. . . . St-Laiiiciii Baixas. . Moulin à Pastel. Culture du Pastel. n. . I > Pareurs. Lstagel ) Est-ce assez de données snr la oonsomniaiion de garance, sans compter rinconnii, et grâce fesant de la grande fabrique de Pnycerda qui s'approvisionnait à El ne? Derniers vestiges de cullui'e. Les derniers vestjgcs de culture sont à Bonpas. Le 3 avril 1625, la communauté ecclésiastique de St-Jean de Perpignan permit à Antoine Pieynès d'ex- ploiter ce genre de production à la grange de Cana- mais , au même prix de fermage que les terres à blé. La descendance de la plante y végète encore à létat sauvage, inexlirpable , et d^ine cpialité snpé- rieiue, ainsi qu'il conste d'expériences fiiites aux fabriques de l'inlériour. Les jardins d'Avalri , teriiioire i\Q Montescot, les coteaux de St-Lazare, du camp de l'Union, et ceux d'Elne la produisent également vivace; jtisqu'aux arides fondrières de Tresserre qui en recèlent les touffes erratiques. Ce n'e?i point là seulement , c est partout qu'elle se présente comme pour déposer de la propagation qu'elle reçut de nos pères, et c'est sur l'éiendue entière de la province qu'on pourrait suivre la piste de l'ancienne culture, l'enfance pour guide , car les artistes de cet âge tirent encore de la l'acine de ga- rance le pourpre de leurs bagues en crin. Un de ces amateurs, aujonrd liui homme fait et distingué dans sa carrière, s'était si parfaitement initié dans la cou- 282 naissance des qualiics de cette plante que , d'après ses enseignements, un teinturier ne se pourvut plus que dans nos champs, et cessa de s'adresser au com- merce. CooclusioD. Belle encore en son délaissement , du haut des herges où elle est confinée, elle semhle nous appe- ler à une reprise d'adoption. C'est plus; une voix officielle nous y convie en ces termes : «Epuisé de culture, le département de Vaucluse en lègue le tour de rotation à l'heureux sol des Pyrénées-Orientales. » Et l'homme de qui émane ce propos (M. Rendu i), sans connaissance de nos précédents, ignorant donc qu'à surface égale des deux pays^ le nôtre n'est pas parvenu à bout de végétation après trois siècles, cet homme, disons-nous, désigne encore le champ d'essai. Ce champ, c'est le territoire d'Elne. 11 l'a trouvé, devons-nous dire par emprunt de l'exclamation d'Archimède. Puissent les faits de ce faible récit donner au bon conseil l'impulsion d'une prompte pratique ! Renard de Saint-Mai.o. ' Inspecteur géucral de l'agriculture. 283 HTDROLOCrlE, lar M. BOUIS , iirofesseur de cliiniie. Après les beaux sondages de Bages et de Toulou- ges, la ville de Perpignan commença, il y a environ vingt ans, des travaux seml)lables, avec l'espoir d'ob- tenir aussi des eaux jaillissanies saines ei abondantes. Un premier irou de sonde, poussé à cent mètres sur la place de la Liberté, et plus lard un forage h 150 mètres de profondeur sur l'Esplanade , restèrent in- fructueux. Des éboulemenls , le brisement de la sonde, des moyens d'action trop faibles amenèrent l'abandon de la recherche des eaux par ce procédé. L'administration municipale , présidée par M. le baron Guiraud de St-Marsal , dont l'apiilude, le dé- voûment aux véritables intérêts de la cité et du pays ne se sont jamais démentis , mit au concours un prix pour le meilleur projet indiquant les moyens d'amener dans Perpignan des eaux potables pour les besoins de la population. M. Fauvellc proposa de coUiger des eaux , par un système de canaux souterrains ramifiés et suffisamment prolongés, dans 284 les premières couches aquifères qu'on renconlrc à peu de profondeur, au dessous de la surface du grand plateau de Toulouges au Soler ei Perpignan. Celle couche alimente la généralité de nos puits -, elle rempHi les interstices de la couche de cailloux rou- lés, au-dessous du sol supérieur, dans l'étendue de notre plaine. Ce travail , en cours d'exécution et après un heureux commencement, fut abandonné. On avait en vue de reprendre les anciens projets de conduire les eaux des sources du Soler ou de Thuir, lorsque l'administration municipale décida de tenter encore un sondage sur l'Esplanade , en faisant les frais de sonde et de ses accessoires, en rapport avec la profondeur à laquelle on devait parvenir. Ce son- dage , par l'ancien système , était à 1.50™ dans le sol, lorsqu'il fut discontinué , par suite de la mise en pratique des nouveaux procédés de forage deMonsieiu- Fauvellc. Ce fut en effet pendant ce forage à l'Esplanade que M. Fauvelle mit en expérience une idée heu- reuse et féconde sur la pratique de celle opération. 11 parvint facilement et rapidement à 50 mètres de profondeur, el l'expérimentation s'arrêta faute de tubes. On eut néanmoins la certitude que , par ce procédé, on pouvait arriver à de grandes profondeurs avec les deux conditions d'économie de temps el d'argent. Immédiatement après cet essai, la ville traita avec M. Fauvelle pour un sondage sur la place Saint-Dominique, el celui de l'Esplanade fut suspendu. A mesure que des difficultés imprévues, des obs- tacles h vaincre se sont présentés dès la première application du sondage Fauvelle , le génie inventif de son auteur est toujours parvenu à les surmonter, 585 el à y ajoute!' un nouveau pcrfcctionnenienl. La pensée primitive de l'injection de l'eau , pour dé- layer el remonter les débris du terrain détaché par la sonde, est la même dans la pratique actuelle que lors des premiers essais; mais la forme et la force de la pompe d'injection, servant aussi à l'aspi- ration, la marche de l'eau tantôt descendante, tantôt ascendante dans le tube sondeur , ont sensible- ment modifié le procédé et l'ont amélioré. 11 paraît d'une application assurée sur la plaine du Roussillon et autres terrains d'alluvion plus ou moins anciens. Si l'on avait à traverser des couches puissantes, for- mées par des roches dures, compactes et cohérentes, ce système, coordonné au besoin avec l'ancien pro- cédé, paraît répondre à toutes les exigences du son- dage, quelle que soit la nature du sol intérieur. Voici au reste un résumé succinct du principe de l'opération. La sonde se compose d'un outil perfora- teur, de forme variable, vissé à une suite de liges cylindriques, creuses de 3 à 4 mètres de longueur se vissant bout à bout les unes aux autres. Lorsqu'on veut enfoncer la sonde , on la fait tourner sur son axe, el une pompe portative, aspirante et foulante, injecte de l'eau dans la sonde, d'où elle ressort par la partie inférieure, en lavant conlinucllement l'ou- til qui perfore, et en entraînant les patties les plus divisées du terrain attaqué. Celle eau continuelle- ment foulée par la nouvelle eau injectée dans la sonde , remonte à la surface en suivant l'espace libre entre la sonde et le trou pratiqué dans le terrain. En suivant cette direction , le liquide n'a pas assez de puissance ascendante pour entraîner avec lui et remonter les gros sables, les graviers et 286 autres détritus du sol. Dès l'origine ou reconnut la nécessité de se débarrasser de tous ces déblais , et M. Fauvelle a résolu en grande partie ce problème, par un cliangement dans la marclie de l'eau dès que l'opération exige le déblayement du trou. La pompe, qui était foulante, devient aspirante à l'extrémité supérieure de la sonde; l'eau s'introduit aloi'S par les parois exiérieiu's et elle remonte dans le tube, entraînant avec elle les graviers et des débris ayant jusqu'à trois centimètres de diamètre. L'expé- rience a démontré, qu'à 1 50 mètres de profondeur , une seule pompe pouvait fonctionner pour opérer ce dégorgement. L'eau est donc l'agent employé pour faciliter le sondage, nettoyer l'instrument, dégorger le trou de sonde. lorsqu'on veut forer et s'approfondir , elle pénètre par le tube sondeur et revient à la surface en suivant les parois extérieurs de ce tube. Dès que l'opération nécessite de déblayer le trou, alors l'eau suit une voie opposée ; elle est aspirée , et elle en- traîne en remontant les débris du terrain perforé. Ce mode de forage , employé sur la place Saint- Dominique, a amené à la surface une source qu'il est juste d'appeler source Fauvelle , pour rappeler qu'elle est la première obtenue par ce système , et comme un témoignage de gratitude et de souvenir de la ville de Perpignan , envers un citoyen qui a contribué à lui fournir économiquement une plus grande abondance d'eaux potables. Un second sondage est maintenant en cours d'exé- cution sur la place de la Loge; à la fin de celte no- lice nous en signalerons les résultats s'il est terminé. Cet aperçu historique des travaux commencés 287 depuis quelques années, dans Perpignan, pour aug- menter le volume des eaux applicables à la boisson, devrait faire supposer que celte ville en était Lien dépourvue et qu'elle élail dans l'obligation de s'im- poser des sacrifices , sans rapport avec ses res- sources ordinaires; un exposé succinct de nos ri- chesses hydrologiques devra modifier celle opinion. Aux portes de la ville , dans les fossés des fortifica- tions, naissent plusieurs sources bonnes, pures, fraî- ches , habituellement abondantes ; dans l'intérieur de la ville sont beaucoup de puits, d'un bon usage , et qui rendent d'immenses services seulement pour la boisson. 11 y a ensuite les fonlaincs alimentées par des eaux réunies dans les coupures profondes pratiquées dans le sol qui circonscrit les lunettes en dehors de la citadelle , et par des eaux prises au ruisseau de la ville qui s'infiltrent dansées coupures servant également de réservoirs; les fontaines de la place de la Liberté, de Saini-Sauveur, des Carmes en sont alimentées. Nous étions donc, dans cet état de choses, mieux favorisés que beaucoup de villes, où l'on emploie à la boisson des eaux artificiellement filtrées qui , quoi qu'on fasse , ne sont pas toujours d'une pureté et d'une limpidité irréprochables. Source Fauvelle. Le sondage à la place Sainl-Dominique commença en janvier 1846. Des obstacles imprévus, des ébou- lements , la rupture de la sonde , retardèrent cette première opération. On fut obligé de percer un se- cond trou a 1 mètre de distance du premier , et en juillet de la même année, après vingt-un jours de forage sur le second point, la sonde parvenue à 170 288 mètres ouvrit la voie à une eau inférieure qui vint déboucher à la surface. Les terrains traversés , dé- layés et amenés au dehors par l'eau d'injection, ne peuvent se déterminer aussi exactement couche par couche que par l'ancien procédé de forage. Ils ont paru cependant tout à fait conformes, d'après les indications de M. Fauvelle , à ceux traversés dans les autres parties de la plaine , cl principalement à ceux de la place de la Liberté et de l'Esplanade. A 90 mètres, on rencontra une couche de gravier d'environ G mètres. Comme sur les autres points du Roussillon , on trouve au-dessous de la couche des cailloux roulés, des argiles plus ou moins sableuses, plus ou moins calcaires , ce qui diversifie tous ces leri'ains traversés en graviers, sables, argiles, argiles sableuses , marnes calcaires et marnes argileuses. Leur classification chronologique rentre dans les alluvions anciennes et non dans les roches sédimen- laircs antérieures. Pendant deux mois, celte source coula sans varia- lion sensible; mais en septembre, les travaux de lubage et d'aménagement ayant été suspendus par l'absence de M Fauvelle, l'eau diminua successi- vement en volume et elle disparut totalement, lors- qu'elle était déjà devenue d'un grand secours à la population des quartiers environnants qui , dès le premier jour de son apparition , l'avaienL appliquée à la boisson et aux besoins dn ménage. La nécessité de rendre au plutôt aux habitants l'usage d'une eau dont on avait apprécié l'immense utilité, fit recommencer sans plus de relard les ira- vaux suspendus; on déblaya le irou de sonde, on tuba à 13G mètres de profondeur; l'eau reparut el 589 elle n'a plus cessé de couler. Dans ce dernier travail dirigé par M. Espériqueile, la sonde descendit à 17G mètres. On prétend avoir été arrêté par un terrain très dur qui , en se délayant, rendait l'eau blanchâtre ; peut-être a-l-on rencontré la roche snr laquelle re- posent les alluvions. L'eau de cette source s'élève à 60 centimètres au-dessus du sol ; on pourrait la faire monter dans un tube jusqu^à environ 4 mètres; elle est reçue dans une petite colonne prismatique en fonte sur- montée d'un chapiteau. Elle se déverse par trois tuyaux dans un bassin circulaire en marbre C{ui eiuoure le pied de cette colonne; ce petit monument est simple, de bon goùi et convenablement approprié. Pendant quelques mois après son apparition, l'eau remontait en petite quantité du sable fin. Actuelle- ment elle ne charrie plus des sables; elle est limpi- de, transparente, sans couleur, sans odeur. Elle ar- rive 3 la surflicc avec une force ascendante peu considérable; elle ne peut produire ni jet ascendant, ni même une forme de champignon. Son volume diminue, si on veut élever le point de déversement au-dessus du niveau du sol. Avec la disposition ac- tuelle des lieux , sons le rapport des hautetirs , le 26 décembre 1846, j'ai évalué ce volume à 36 litres par minute. Le 27 avril 1847, ce volume a été re- trouvé le même; une troisième épreuve aurait été faite dans ces derniers temps, si on avait pu disposer de la source pendant quelques minutes. L'affluence y est si continue, que l'opéiaiion a été momentané- ment suspendue. Voici le résultat de l'observation habituelle de la longueur du jet qui sort de chacun des trois tuyaux de la fontaine. Après une séche- 19 290 Vesso de plusieurs mois, on observe que la distance parcourue par chaque jet diminue faiblement; com- me aussi trois ou quatre mois après de longues pluies, celle distance paraît augmenter. On peut donc admettre en principe que le volume de celte eau ne varie pas , et s'il y a une variation légère , momentanée , appréciable par la distance parcourue par les trois jets d'écoulement , elle n'est sensible en plus ou en moins que long-temps après que les influences météorologiques ont réagi à la surface de la terre ; preuve de la lenteur avec la- quelle les eaux profondes en subissent les effets. La température de la source Fauvelle , prise en août 1846 par François Arago, était à 20° C. L'eau jaillissait depuis peu de jours; le trou de sonde n'était pas tube, et par conséquent il devait y avoir mélange avec des eaux supérieures. Le 26 décembre 1846, après le tubage à 136 mè- tres, l'air atmosphérique étant à 2° 5C., la tempé- rature de l'eau était à 20° 4 C. Le 17 avril 1 847, l'air marquant 13°C, l'eau a donné 20" 8 C. Le 17 juillet 1848, l'air élevant le thermomètre à 23° 8C, l'eau l'a élevé à 21"» C. Ces trois observations ont été obtenues avec le même instrument ; l'élévation graduelle qu'elles signalent, dans la température de l'eau , ne peut provenir de lélévalion correspondante de la température atmosphérique ; on doit latiribuer à ce que l'eau du fond a de plus en plus chauffé les parties supérieures du tube d'ascension , et est par- venue à maintenir l'équilibre de température sur son parcours. Si elle montait avec abondance et ra- pidité, elle perdrait moins en chaleur que ce qu'elle perd réellement; ce n'est pas trop de supposer qu'elle 291 emploie vingt-cinq minutes pour arriver du ihnd à sou point demergence. Si nous admciions mainte- nant quelle a suffisamment chauffé le canal con- ducteur pour ne plus perdre de sa chaleur première, on peut en étahlir raugmenlation graduelle de cha- leur, ainsi qu il suit : à Perpignan , la température moyenne des puits, à 10 mètres de profondeur, est à IC^Gj de ces 10 mètres aux 170 mètres, point de départ de la source Fauvelle, il y a 160 mètres; eu divisant ces 1G0 mètres par 5, différence entre 16" (température moyenne des puits), et 21° température de cette source, on obtient 32. De sorte que par 32 mètres de profondeur, à partir de 10 mètres au-des- sous du sol , cette eau jaillissante augmente de un degré de température. Ce résultai se rapproche de rohservation générale de un degré d élévation iher- momèlrique pour 30 mètres d'enfoncement dans la croûte solide du globe. L'eau Fauvelle coule depuis assez long-temps pour que la température en soit équilibrée à 2/oC; si elle change encore, elle devra augmenter. Elle diffère, sous ce rapport, de nos eaux de source aux environs de Perpignan , qui varient de 2 à 5 degrés de l'hiver à l'été, selon leur position. Le 17 juillet IS'iS, l'eau de la fontaine du Chat marquait 12° 5 C, et Teau de la fontaine JNotre-Dame, après le lavoir, était a 15° 2C; il y a plusieurs années, en hiver, je trouvai la première à 10" 6 C, et la seconde à 12»5C. L'eau de la place Saint-Dominique rafraîchie est agréable à boire, elle ne pèse point sur l'estomac, elle dissout le savon et f-ert à une bonne cuisson des légumes. Ces caractères prouvent qu'elle est peu ehargée en sulfates terreux et autres sels ayant les 592 mêmes bases. L'ébullition la trouble légèrement , indice de la séparation des carbonates de chaux ou de magnésie. JNous avons déterminé la proportion des gaz at- mosphériques oxigène, azote, acide carbonique dis- sous, en adoptant, de préférence pour cette opération, l'emploi d'un ballon surmonté d'une cuvette en fer blanc, au milieu de laquelle se place un flacon ren- versé qui reçoit les gaz séparés par la chaleur. Avec cet appareil on peut prolonger l'ébullition de l'eau, bien mieux qu'avec une cornue terminée par un tube recourbé , plongeant dans de l'eau bouillie. Nous nous sommes convaincu qu'après une heure d'ébuUition , il y avait encore isolement de gaz, et que les eaux naturelles , contenant des proportions minimes de carbonates alcalins , se dépouillent très lentement de leur acide carbonique. Le 18 septem- bre 1847, 1 litre d'eau de la source Fauvelle, main- tenue en ébullition pendant une heure, a abandonné 36 et demi centimètres cubes de gaz, composé de 4 cenlimèires cubes oxigène, 17 et demi C.C. azote, 15 C.C. acide carbonique. L'analyse a été opérée par la potasse caustique , le phosphore , en suivant les conditions exigées de jaugeage , de réduction de volume, etc. ' 1 Cette expérience ayant été renouvelée à une antre époque, la proportion des gaz a été de cinq C.C. oxigène , seize C.C. azote , treize C.C acide car- bonique. Ces différences dans les résultats ont reparu avec d'autres eaux de source, de rivière , de puits. Ce que nous disons des gaz en dissolution dans les eaux naturelles, s'applique aussi à leurs éléments fixes. Rarement deux analyses faites à des époques éloignées donneront des résultats iden- tiques dans les rapports d'une quantité déterminée d'eau avec les matières dissoutes. Celles-ci se retrouvent les mêmes, mais elles varient en proportion avec l'eau et quelquefois entre elles. On retrouve, par exemple, les eaux 593 Nous ne rapporterons pas les essais avec l'eau ^ telle qu'elle sort de la source, avec Teau bouillie et filtrée, avec l'eau concentrée; voici seulement les résultats de l'analyse quantitative sur le résidu de mille parties d'eau. Carbonate de chaux et de magnésie. . . . 0.06 Sulfate de chaux 0.01 — ■ de soude 0.03 Chlorure de sodium 0.02 Silice 0.04 Ammoniaque , potasse traces indéterm. La source de Saint-Dominique donne 36 litres à la minute et 51.8G0 litres par jour. En évaluant moyennement à 5 litres l'eau nécessaire par indivi- du, elle pourrait desservir, utilisée en totalité, une population de 10.000 âmes. Lorsqu'on calcule la quantité d'eau nécessaire à tous les besoins de l'éco- nomie domestique, au lavage des rues etc, alors l'évaluation est de 20 litres par personne. L'expé- rience démontre combien sont grands les services rendus par cette eau au milieu d'un quartier où l'eau potable était peu commune. Qu'on parvienne par le sondage à obtenir deux ou trois jets semblables sur d'autres points de la ville, et nous n'aurons rien à envier aux villes les mieux abreuvées. Ces eaux jaillissantes , réunies à celles de nos fontaines et de quelques puits , assureraient une boisson bonne et sulfureuses , les eaux salines , toujours sulfureuses , toujours salines, et l'expérience démontre que le principe sulfureux peut osciller, que le degré de salure monte ou baisse dans les eaux salines selon les saisons. Les essais sur la proportion des gaz en dissolution dans les eaux naturelles, exigent beaucoup de temps et de persévérance; plus loin nous indiquerons le.s, évaluations des gaz de plusieurs autres eaux potables. 204 abondante , excepté clans les cas de longues séche- resses, où les premières seraient spécialement réser- vées à cet usage. On ne pourrait pas, il est vrai, avec ces jets placer de nombreuses bornes-fontaines, voi- sines souvent incommodes pour les maisons où on les adosse , sans compter les inconvénients d'une canalisation souterraine en concurrence avec celle des égouts et du gaz. Si cependant on était assez heureux pour obtenir, au moyen du sondage sur des parties élevées de Perpignan, une ou deux sour- ces assez volumineuses pour en appliquer l'excédent au lavage des rues et des égouis , il y aurait alors avantage, malgré les inconvénients de nouvelles ca- nalisations, a les appliquer à ce lavage et à abandon- ner Tusage du ruisseau de la ville qui est une véri- table source continue de dépenses exorbitantes, pesant loxndement sur le budget municipal. Les indications de volume , de température, de propriétés , de composition de l'eau de la première source jaillissanle obtenue dans Perpignan , seraient d'une valeur tout-à-fait locale, si nous n'avions cher- ché à les généraliser en les comparant à celles des autres sources de celte ville et des principales fon^ laines jaillissantes du déparlement. De cette compa- raison , pourra surgir une pièce de plus à joindre à l'édifice qui doit éclairer la géologie souterraine des eaux et des lorrains qu'elles parcourent. Eaux jaillissantes <1e Bages. Bages est le lieu le plus renommé par la beauté, le nombre, le volume, la force ascendante de ses sources jaillissantes. Elles naissent dans les parties basses d'un bassin naturel d'environ 2 kilomètres de 295 diauièlre. A l'esl, le leiiaui perd sa haulcur et, par celle ouveriure, les eaux s'échappeni dans le canal dit Ruisseau de la Mer. Ce canal creusé peu d'années avant les sondages, a assaini la localité, et rendu moins fréquentes des fièvres de mauvais caractère , résultat habituel des pluies abondantes. La bonne tenue de ce canal et l'apparition des sources jaillis- santes, qui ont permis d'arroser d'assez grandes sur- facesj ont donné une vie nouvelle à celle commune. La population s'est accrue, elle jouit de plus d'aisan- ce , et partout les vieilles bâtisses sont remplacées par des maisons neuves plus vastes et mieux appro- priées. Ce qui se manifeste à Bages , par l'augnienla- tion des terrains mis en irrigation , est un de ces exemples assez communs dans notre département , de ce que demande notre agriculture pour en mul- tiplier les produits et les pousser dans la bonne voie du progrès. Appliquez à l'irrigation toutes les eaux dont on peut disposer , qu'en cela ladministration vienne en aide aux particuliers, mettez à exécution les meilleurs projets pour la création de réservoirs qui, au besoin, alimenteront nos grands canaux en septembre et en octobre, et vous aurez indubitable- ment rendu plus de .services à notre industrie agri- cole que par tous les encouragements donnés en essais de culture ou en primes , et même que par les institutions professionnelles. ÎNous avons pour nous et sans concurrence le soleil et le sol ; que tous nos efforts concourent donc à faire arriver et à assurer de l'eau partout où cela se pourra. Onze sources jaillissantes ont été obtenues à Bages, sur une bande de terrain, direction nord-sud, de 596 1 .500 mètres de long ei de 1 f>0 à 200 mènes de large. Elles diffèrent sensiblement dans leur volume. La première, obtenue par M. Durand, en août 1833, fut alors évaluée à 2.000 litres à la minute. La source dite de la Prairie, obtenue encore par M. Durand en 1845, est maintenant la plus puissante; elle n'a pu êtreexaciemeni jaugée; il est probable qu'elle donne de 2.500 à 3.000 litres à la minute. C'est une des plus belles sources jaillissantes connues; si elle n'est pas supérieure à celle de Grenelle par son volume , elle lui est préférable par la beauté et la pureté de ses eaux. Malheureusement elle nesl pas dans une position à rivaliser pour les services. En classant ces sources de Bages d'apiès leur vo- lume, il y a en première ligne cette source de la Prairie. Viennent ensuite la source delà fabrique de M. Durand, obtenue en 1833; celle dite de la Gué- rite, de M. Vilar; celle dite de la Société, obtenue à frais communs par plusieurs propriétaires, et celle de M. Garnier; les deux sources de la commune. La source de la Prairie, par sa position dans la partie la plus basse, et par son abondance, a réagi, dès son apparition, sur le volume des autres, On le reconnaît à la gerbe, au-dessus de l'orifice des trous de sonde, qui est moins vigoureuse et moins élevée que primi- tivement On peut évaluer à 1 I mètres cubes à la minute le volume d'eau fourni par la réunion de ces sources. La profondeur moyenne des terrains perforés est de 50 mètres; ils sont composés de marnes, sables et ar- giles, qu'on traverse avec une facilité extraordinaire. La couche aquifère a présenté des différences ma- jeures de puissance selon les positions. Si on s'écarte 297 à l'est du bassin niéine de Bages, le sondage esl sans heureux résulial. A un champ de l'Hospice, la sonde signala 2 mètres d'eau; à la source de la Société , la couche fut estimée de 15 mètres , et on crut la trou- ver plus puissante à la source de la Prairie. L'épais- seur de la couche aquifère augmente donc de l'est à l'ouest, et c'est un indice pour admettre que la mar- che souterraine de cette eau est dans la direction du Canigou à Bages, et non sur les Albères. En août 18H3, la température de la source de la Fabrique était à 1 8° 75, et celle des sources naturelles appelées les Mattcs^ à 17° 87 C. Nous ferons observer que les 3Iatt.es peuvent être considérées connue les soupapes de sûreté par où s'échappe le trop plein des eaux souterraines de Bages, mêlées à des eaux de filiration superficielle. Leur importance et leur volume ont diminué depuis les sondages. En 1836, François Arago signala une différence dans la température des sources. La température de la source la Fabrique fut reconnue à 18° C; celle de la source de la Guérite à 19° C. Ttroisième bulletin de la Société philoniaibiqne de Perpignan, page 11 .) En 1847, l'air atmosphérique étant à 12° C, j'ai obtenu les résultats suivants : grande source de la Prairie 19° 5 C; source de la Fabrique 19°C.; source de la Société 19° 5 G ; source de la Guérite 18° 5 C.; les deux sources communales 18" 5 C. Les rapports qui existent entre ces dernières ob- servations et celles de 1833 et 1836, démontrent que la température de ces eaux sest équilibrée à une moyenne de 19° C. Cette température servira à ad- mettre, comme une grande probabilité, que la cou che ou courant qui alimente les fonlaiiies de Bages, 298 est bien au-dessous de 50 mètres, dès qu'on dépasse le bassin de cette commune, et que , pour retrouver cette même eau sur d'autres localités, le forage devra dépasser au moins 100 mètres. La densité de l'eau de Bages est de 100.028, l'eau distillée étant 1 00.000; un de ses caractères physiques le plus remarquable, c'est la grande diaphanéité, qu'on apprécie en la plaçant dans des bocaux en verre blanc de trois ou quatre litres de capacité, et l'exa- minant comparativement à d'autres eaux; elle res- semble par ce caractère aux eaux thermales sulfureu- ses, alcalines et à certaines eaux salines, si belles par leur limpidité et leur transparence. Elle est utilisée et d'une bonne application pour tous les usages économiques, nonobstant son emploi principal pour l'arrosage. On a remarqué sa quaUté favorable pour le lavage du linge. Les réactifs y décèlent des proportions fort minimes de chaux et de sulfates. Une longue ébullition ne la trouble pas sensiblement; filtrée ensuite, elle verdit le sirop de violettes et ramène au bleu le papier rougi de tournesol. Placée dans un matras et portée à l'ébul- liiion , elle dégage de l'acide carbonique qui précipite l'eau de baryte; en ajoutant quelques gouttes d'acide sulfurique pendant l'ébullition, le dégageant d'acide carbonique, est plus prononcé et la précipitation de la baryte plus abondante. Un litre d'eau de la source jaillissante de M, Vilar a donné, après une ébullition d'une heure, oxigène 4 ^2 centimètres cubes, azote 18 C. C, acide carbo nique 16 C. C. Mille parties d'eau contiennent; 299 Carboiinte de sonde. 0.03 Cai-Jjonate de cliaux et de magnésie. . . . 0.01 Sulfate de soude O.Ol Cliloiuie de sodium 0.03 Silice 0.05 Feu traces Matière azotée piop. indét. Ces résultats établissent une différence notable en- tre les eaux jaillissantes de Bages , Teau jaillissante de Perpignan ei celle de nos puits et fontaines. Elle se dislingue de Teau de Grenelle, qui contient du carbonate et du sulfate de potasse, avec des propor- tions majeures de carbonates terreux. Sous certains rapports, elle se rapproche des eaux sulfureuses Py- rénéennes; par la présence de la soude carbonatée, de la silice et d'un composé azoté, et par la faible proportion de sels terreux. Nous reviendrons sur ces différences, comme indices probables des terrains parcourus par les eaux. Eaux jalllfssiantei» - ce C/5 E- a o o J3 2 t S' o t- ce - -3 B 3 o 1 o .- o e " (3 C > — S 5 ^-' *- ? - "^ -2j « 3 QTj w tr- ù «1 0) c^ / ^t co lO ^^ 1^ lO ^'^ î--^ OJ / ^ § --T 'M lO •a— O o\ lO ^T 1 ^" '-J ^ lO 1^ >o l- — IM 00 l'S OD ^■■n \ 3 lO lO fM 1^ iO ~T -■•r lO l'^ 2 c \ so -■^ î^ -■t 'M ï- l'a o «r o ;lo :o ;.'^ ic o ;.-5 -o ■J o o ■^ ..— 00 c<5 ;o 1- ;-^ 1^ •^T ::5 îo .■-5 •^T ^T '■T ■^■~" o ^ ^l^ i :.-5 00 I« O ^ — ;."^ '-J i- O T- <^ l^ — o -= \ 'é -J 2 o co ;'^ •^ — Ol --T — fS MnbiiioqjBJ -J aaiov ^ CI C5 — « l'^ ;'5 '-S I': -M l- 'O — — — — — ^ — — •a.iozv ci ce oc 1- 1^ 1-' »^ o c^i ri ' -j :-? î.-^ •3N!30I\0 d ^ Ci o :,-5 ;'S «-T v-T iO -~ co" o 1 .5,-3 en n ^ — CO = — "2 H £ -tj ?^ O --J c « • t» = o "re ^ CJ o c CJ C3 o J2 C !0 jop de violettes, et bleuit le papier de (oiudp- &ol rougi. L'eau du luuferrer, qui descend de la partie orienlale du Canigou, examinée à la nièuie épo(|ue, a donné les mêmes indications. Leau de la Tet a réagi également, après sa concentration, en juillet 1848. L'eau de la rivière de Castell, puisée au-dessous du pont, à Vernet , en juillet 1848, a réagi comme Jes précédentes. Ce caractère alcalin, pour devenir appréciable, exige une forte concentration de l'eau , à l'époque où les rivières sont basses; lorsque les eaux sojU abon- dantes, ce caractère n'est pas, ou n'esl que difficile- ment reconnaissable. Il suffit cependant d'avoir pu le pr-éciser dans les circorjslances indiquées, pour avoir la preuve directe de l'action des eaux sîir les terrains de cristallisation. L'alcalinité qu'elles peu- vent avoir acquise est subordonnée à la température, au volume, à la durée du contact. D'après ces observations, on peut ad meure : 1° Les eaux jaillissantes de Bages étant alcalines avec des proportions de silice plus sensibles que les autres eaux de source non minéi'ales, et avec des proportions fort minimes de sels de cbaux et de magnésie, coulent souterrainement jusqu^au point où elles jaillissent, à travers des rodiez de crisîaUi- sation ou leurs débris La présence d'une petite proportion de matière azotée rapproche encore les eaux de Bages des sul- fureuses dégénérées, moins les sulfates. 2" Les eaux jaillissantes de Toulouges, moins al- calines que celles de Eages, et où lélément calcaire conrmence à prédominer, sont intermédiaires entre 311 celles de Bages cl les autres sources jaillissantes. Elles provieunenl probablement d'une déviation de la même masse liquide débouchant à liages, mêlée à des eaux filtrées à travers les terrains calcaires, carbonifères de Tliuir et de ses environs. 3° L'eau jaillissante de Perpignan, sans caraclère alcalin et char^fce en sels terreux, doit traverser les alluvions anciennes et modernes de la plaine en amoni de la ville. '\° Celles de iiivesalies, décomposition analogue à Teau de Perpignan, auraient jîour parcours les allu- vions de Peyrestorles , d'Espira, de Ilaixas. Voilà les réi-ultats de nos premières observations. Si nous pouvons entreprendre de nouvelles recher- ches sur le même sujet, nous nous empresserons de les soumettre à l'appréciation des géologues, avec l'es- poir qu'elles serviiont à cojifirmer les indications sur la nature du terrain parcouru soulerrainemenl pai les eaux. !^e sondage à rexlremilé de la place de la Loge à Perpignan, a amené, le *2 aoiit i 8't8, à la surface du sol, une source peu abondante. L'eau montait par l'intérieur de la sonde, et elle a continué à couler jusqu'au moment où rinstrumeiii a été relevé. Elle a jailli de 1 5T mètres de profondeur; après quatre jours d'écoulement, sa température, à l'ouverture de la sonde, était à 21° C. Quelques essais prélimi- minaires l'ont fait assimiler, pour la composilion , à l'eau jaillissante de la place Saint-Dominique. 312 Celle source cessa il arriver sur le sol dès t(ue la sonde fui enlevée; il y eut dans le irou un amoncel- lement de cinquante mèires de sable qui arrêlèrent l'ascension complète de Teau. 31. Fauvelle s'occupe mainlenant du tubage et de déblayer ces sables inté- rieurs. Dès que ce travail sera poussé assez profondé- ment, l'eau remontera au-dessus du sol^ et si alors elle donne lieu à quelques observations particulières, nous les soumettrons à la Société agricole de Perpi- gnan, qui a bien voulu admettre la présente notice dans ses bulletins 313 DESCRIPTIOJl DE DEUX NOUVELLES PLANTES de la Famille des Getuisièes, recueillies dans le deparlemeiil des Pyréuécs-Orientales par M. Coinpanyo, docleur-niédecin. Les bassins pyrénéens sont parcourus tous les ans par de nombreux botanistes de toutes les na- tions; mais, quoique niinulieusenient explorés, ils renferment encore beaucoup d'espèces végétales qui ont échappé aux investigations de la science. On se porte de préférence, on a hàle d'arriver aux endroits renommés et cités comme piodnisant le plus d'espèces rares; les guides ont un itinéraire dont ils ne sauraient dévier; c'est ainsi que restent inexplo- rées certaines vallées où croissent beaucoup de plan- tes peu connues. Les habitants du pays, qui s'occupent depuis long- temps de botanique, auraient du fiéquenter les points riches en végétation, situés dans le centre du dé- pariemenl, isolés des i ou tes tracées par les hommes spéciaux, qui y ont recueilli un grand nombre d^es- pèces nouvelles. Pour moi , ce sont ces points, que je m'attache surtout à visiter avec soin, assuré que je suis d'y trouver toujours quelque chose d'intéressant. 314 Les vallées de Port-Vciidrcs el de Banyids-sur-lMcr aiiireiii les boLanisles ([ui viennent herboriser dans le lloussillon; mais la chaîne des Albères, qui y est ailenanieesi négligée: les environs d'Arles-sur-Tech, de Prais-de-MoUû, de la Presle les atlirenl égale- ment; les vallées du centre du déparlement sont dé- daignées. Nos voyageurs, arrivés à la Preste, iraver- senl le Canigou , abandonnant ainsi de fécondes localités, pour gagner les vei'sants du Vernet et se diriger de là vers la Trcncade d'Ainbolla, afin d^ex- plorer la Font de Camps. Les pas de nos observateurs se portent aussitôt vers Mont-Louis, et toutes leurs recherches ont pour objet la riche Vallée d'Eyue, f[ue le célèbre Gouan appelait à juste titre le jardin botanique du Uoussillon. Toutes ces localités laissent peu de chose à faire aux botanistes qui viendront les parcourir: pourquoi ne pas moissonner dans celles qui ont été délaissées, en s'atiachant à découvrir et à décrire ce qui est passé inaperçu? il faut tant de temps cl de travaux pour connaître d'une manière complète la botanique d'une contrée ! En 1842, nous eiimes l'idée, en parcourant le site de notre Dame-de-Pène, de pousser nos recherches sur la chaîne de montagnes qui borne la plaine du Uoussillon au nord. Nous suivions celle qui conduit à Force-Réal fForcc Beal, dans Tidiome roussillorr- naisj. jNous explorâmes cette liche localité, et nous dirigeâmes notre course sur les bois de Caladroy. Continuant de parcourir le sommet des collines de la rive gauche de la Tel, nous vînmes descendre sur la ville d'ille. En passant h Reglella, nous fûmes surpris de l'aspect d'un arbuste, difféi'a ni beaucoup 315 ilii geiiél ordinaire ; son port loul parliciilier nous engagea à réuidier, el nous pûmes bientôt nous convaincre que c'était une espèce rrpssion ilr notre reconnaissance. 317 comme piaules textiles. Les noires, surloiu la pre- mière, cultivées et soignées, ponrraient rendre les mêmes services que le genél d'Espagne, et tlonneraienl un fil qui servitait aux usages domestiques. Wimmer, dans sa floi-. V. Schles 278, a séparé les genêts el formé \mi nouveau genre, qu'il a appelé 5^- rothanmns de 2apoç, balai , ©^cpoç, arbuste. ]\os deux genêts appartiennent à cette section , et nous appel- lerons le n° 1 Sarothamnus Carlierus. Companyo. (Planche n° 6). Frutex forma peramœnus , — ■stipula cylinârucea , 1 ™ 20, 1 •" 40 alla , striata sub nigris lineis suprà riridem corticem rurrentihus , sulcantibus ramulos superioris anni , formatis, lUvidetur, srissà corlice. — \ertex concretus , densus , sinfju- Jaris; ramuU extensi , Icnti.^-Folia peliolata, ter foliolata, parva, orbiculata in summo, virentia suprà , subsericnta in- frà.- — Flores flavi, cor user ^ satis magni , spicati secundùm ramulos, petiolati.- — Calix parvus ^ bilabiatus, florcm leviter circumdaris ; legumen salis magnum, extensum, arcuatum, glabrum, ftiscum in maturitate ; 8 — 12 semina , reniforma , sub/iigra. Celte plante croît sur le plateau de Reglella près d'ille, où elle esl assez répandue parmi le Cytisus spi- iiosus. INous l'avons aussi trouvée en très petit nom- bre sur les escarpements des torrents, qui débouchent dans la rivière de Saini-Marsal, près de son confluent avec le Tech. ÎS'otre espèce se rapproche de deux plantes de la même famille, décrites par Wil dans son Itin. hisp. ; mais elle en diffère par ses fleurs plus grandes, ses légumes plus allongés el la disposition de ses feuilles. L'aspect de Tarbusle en général esl bien diffcreni. Elle serait voisine encore du Spa. nrborcutn de Desf. ; mais elle ne peut lui être comparée, notam- 31 s mont par ses légumes glabres dans notre espèce , tandis cpiils sont velus dans l'espèce de Dcsfoniaines. Après avoir cherché eu vain la description de celle plante dans les auteurs, et l'avoir comparée à celles qiti avaient avec elle le plus d'analogie, nous avons reconnu f[ue celait une espèce nouvelle , ei nous nous sommes décidé à eu donner la descrip- tion suivie d'une planche représentant un rameau de grandeur naiurelle avec le détail de la fleur cl des fruits. Celle plante n'est ni alpine , ni pyrénéenne, puisqu'elle vit sur les plateaux peu élevés du centre du déparleraenl. Nous la dédions à notre ami, M. J. Cariier, chirurgien-major du 1 <^'' Dragons, en retraite. Le zèle de ce botaniste distingué ne s'est démenti en aucune cinonstance , pendant sa longue carrière médicale militaire; chargé du service de rhô|)ilal de Monl-Louis , il étudia la végétation des bassins pyrénéens; envoyé en Corse, ses études de prédi- lection oui enrichi son herbier de plantes rares, et, en le menant à notre disposition , il a augmenté la colleciion de la ville. N" 2. Sarolhamnns Jauberlvis. CoMPA?iYO. (Planche n» 1.) CaJijx Bilahratus salis magnus. Flores parri . aurali, ter- minales, terni , quaterni et quintuplù umbellati extremis ?-fi- miisculis, pstiolo brcxi. Legnmcnbi'cre, inflaium, perHIlnsinn, cinereo-albnm 3, 4, 5 seminibus, reniformis, nigris. Sn/frule.r stipula ieiiuis, cylindracea , 50 vel (iO cent, alla superanlibus ramulis Icntis, diffusis; folia 3 foliata pcr lotnm longitudinent ramuloritm , salis magna, brevissimn pctiolo , subacuta, in- siiper rorusca, virentia dùm virida. stt} VI. Sarothamnus Carlicrus. Companyo. A. Fragment de la plante de grandeur naturelle , disposition des fleurs et des gousses. B. Etendard. C. Une des ailes. D. Carène. E. Androcée et pistil. F. Calice. G. Légume renfermant des graines dans leur maturité, ff. Gousse ouverte laissant voir la disposition des graines. PLANCHE N" VH. Sarothamnus Jaubertus. Companyo. A. Fragment de la plante de grandeur naturelle portant des fleurs et des graines sur les rameaux. B. Etendard. C. Due des ailes. D. Carène. E. Androeée et pistil. F. Calice. C. Légume renfermant des graines dans leur maturité. H. Gousse ouverte laissant voir la disposition des graines. -tas^^Qï^Sê** — 321 RAPPORT DE M. P. MASSOT , D.-SI. sou LES EAUX MliRAlES DE SAINT-MARTIN DE FENOUILLA. Profondémeni convaincu de refficaciié des sources qui conliennent, dans des proportions chiniiqueineni appréciables, des agents minéralisaieurs, je vais es- sayer, dans ce rapport sur les eaux du Boulou et de Si-Martin de Fenouilla, de réunir el d'analyser, en peu de mots , les propriétés médicales que présentent ces eaux, et je remercie les membres de la commis- sion dont je fais partie de m'avoir choisi pour être l'interprète de leur pensée, de leurs désirs et de l'es- pérance de tout un département. Les eaux minérales qui jouissent des propriétés le mieux constatées ne sont pas toujours les plus con- nues. La vogue n'est pas immédiatement le résultat nécessaire de leur utilité; le hasard, l'imprévu, et quelquefois les circonstances les plus frivoles sont pour beaucoup dans l'importance que les établisse- ments thermaux doivent acquérir, et dans le succès qu'ils obtiennent. Loin de moi la pensée de regarder les eaux de St- Mariin de Fenouilla et du lîoulou , comme un spéci- fique, comme une panacée universelle : je dirai quVl 21 322 lessoni gazeuses, acidulés, alcalineseï ferrugineuses i; qu'elles ont une grande analogie avec celles de Vichy, du Moni-d'Oret de Spa; que depuis bien long-ienips elles sont fréquentées par un grand nombre de ma- lades dont très peu sont étrangers au déparlement, tandis que les eaux renommées dont je viens de par- ler reçoivent les malades du monde entier. Cependant bien des motifs devraient déterminer les malades à se diriger vers le Roussillon*, car le dé- partement des Pyrénées-Orientales, le plus peiit de la France, renferme, à lui seul et hors de toute pro- portion, des sources minérales très nombreuses et assez différentes enir'elles pour offrir au médecin des applications thérapeutiques très variées. En effet , si Ion parcourt les trois grandes vallées qui partagent le Roussillon, on trouvera dans celle de TAgly, la moins riche des trois, des sources salines, ferrugineuses et sulfureuses. Le Vernet, les Escaldes, Vinça, Molitg sont connus dans la vallée de la Tet; leur nom seul rappelle leur efficacité contre les ma- ladies cutanées et rhumatismales, les affections du larynx et de la poitrine. Dans la vallée du Tech, la Preste, Araélie-les Bains, Sorède, le Boulou et St- 1 D'après Aii[;laila, Toau du Boulou et de Saiut-iMartin-de-FenouilIa, par •1000 centimètres cubes, se compose: BOllLOO. SUNT-MAUTIN. ■\° Acide carbonique Gl 1,5 7oO,0 2° Carbonate de soude 2,A^\ 2,7S7 5° Chlorure de sodium 0,SN2 0,0)!) 4° Sulfate de soude traces. 0,32-4 5° Carbonate de chaux 0,7 41 0,-4 iS 6" Carbonate de magnésie 0,2-15 0,-1 59 7° Carbonate de fer 0,052 0,050 8° Silice 0,154 0,n)6 9* Mélange organique 0,025 M. le professeur Berard y a reconnu l'existence de raluniinc 32^ Martin de Fcnonilla offrent des sources plus variées encore et non moins efficaces; car, non seulement elles combattent les affections dont je viens de parler, mais de plus elles ont une vertu toute spéciale con- tre la chlorose, les maladies des reins et de l'estomac. Après ces considérations générale?^ que j'ai cru nécessaire d'émettre, je vais m'arréter sur le point où la vallée du Tech rencontre celle qui commence au Pertus. C'est là que se trouvent les sources du Boulon et de St-Martin de Fenouilla, sources précieu- ses, dont l'action, j'allais dire la spécificité , contre les maladies si cruelles de l'estomac ne saurait être contestée. Si l'analyse chimique me permet de comparer les eaux du Boulou et de Sainl-Wariin de Fenouilla, à celles de Spa et de Vichy , elle me permet encore d'affirmer c|ue, à titre d'eaux acidulés, elles méritent une préférence! que la beauté du climat leur aurait déjà depuis long-temps assurée , si la réputation des sources de nos Albèrcs avait pu franchir les étroites limites de notre département. Les médecins auraient pu , en écrivant les résultats d'une pratique souvent heureuse , attirer les regards des malades et fixer l'attention des médecins étrangers. Déjà nos établissements thermaux offraient aux baigneurs un abri contre les ardeurs de leté ; mais aujourd'hui quelques-uns, les seuls encore que pos- sède la France , permettent aux malades d'y braver les rigueurs de l'hiver. Un système de chauffage^ indiqué par M. Lallemand, a été exécuté à Vernet et à Amélie-les-Bains par des hommes qui ont su ' \nsla(la Rerjjinaii. 324 comprendre riiiimense portée des idées du hardi professeur. Ces idées fécondes ont porté leurs fruits, car déjà la France, TAngleterre, l'Allemagne et mê- me TEgypte sora venues reconquérir la sanlé dans nos thermes et rendre hommage à notre climat. Le beau ciel du Houssillon procure aux malades la facilité d'arriver aux établissements dans toutes les saisons, et la haute température de plusieurs sources donne presque sans frais le moyen d'y ré- pandre et d'y entretenir , pendant la durée de Ihi- ver , une chaleur douce, convenable et toujours égale; c'est ainsi que se trouve complètement résolu l'important problême de prolonger sans interruption l'effet salutaire des eaux , et d'obtenir des résultats que leur action temporaire et discontinue n'aurait jamais permis d'espérer. Les eaux de Saint-Martin, dans tine situation tout aussi avantageuse , jouiront aussi du rare privilège de recevoir les malades, quelle que soit l'époque de l'année. Depuis peu de temps la main de l'homme, a tracé dans ces lieux des jardins et des promenades, au milieu desquels sont réunies les sources de Si. -Martin pour les préserver de tout mélange et leur conserver toute leur pureté ; et la nature a fait de ce vallon une délicieuse retraite, ombragée d'arbres séculaires et coupée dans tous les sens par des cours d'eau qui lui donnent un luxe de végétation qu'il est difficile de ne pas admirer. On le voit, au milieu des richesses hydrologiqnes du département, les sources de St-Martin méritent d'être distinguées par leur position , leur abondance et leur efficacité. En effet leur mode d'action sur M 325 j'écononiie , rcjid leur emploi jomiialier couue la série si variée des maladies de l'estomac qui, souvent idiopalhiqucs , sont plus souvent encore les tristes compagnes d'ujie foule d'affections. Une commission militaire a déjà obtenu la fonda- tion d'un hôpital à Amélie; espérons que les motifs exposés par elle, en faveur d'ini second hôpital à construire à Saint-Martin pour les convalescents de l'Algérie et d'Amélic-les-Bains , engageront M. le ministre de la guerre à Taccordcr , et à augmenter ainsi les droits qu'il a déjà acquis à la reconnaissance de l'armée. Ces considérations réunies ont enfin décidé les propriétaires à élever un vaste établissement. Joignons nos encouragements et nos vœux à leurs efforts. L'exécution de ce projet deviendra pour le pays une richesse de plus et nn bienfait pour riiumaniié. 11 est temps d'établir tous les djoils que nos eaux minérales doivent avoir à la confiance publique; de faire connaître que pas un pays ne petit rivaliser en productions naturelles de ce genre avec ce petit coin des Pyrciiées que l'on appelle le département des Pyrénées-Orientales: il est icnqîs enfin d'augmenter le cercle de leurs relations actuelles, et de les appe- ler à prendre une part active et méritée dans la concurrence générale. En terminant ce rapport, je dirai que si lîordeu fut le créateur de Daréges, Anglada a la gloire d'être le Bordeu des Pyrénées-Orientales. Tous les méde- cins doivent s'associer à son (euvre, imiter l'exemple du docteur Lallemand , et remphr ainsi les vœux que notre modeste compatriote a exprimés avec au- tant de désinléressemeni que de patriotisme. 320 HOTE SUR LES BATIMENTS DE LA LOGE '. La ville de Perpignan possède un édifice très re- marquable par le style de son architecture gothique, connu sous le nom de Loge de Mer. 11 occupe une partie du côté sud de la place de ce nom , qui lui vient sans doute de ce qu'il fut jadis la Bourse, le point de réunion des commerçants. Dans le bas , quatre portes ou croisées à large dimension; dans le haut, dix ouvertures accouplées, ornées de sculp- u lures élégantes, forment un ensemble qui, malgré | l'irrégularité des panneaux, plait à l'œil. Le sommet '' est couronné d'un baluslre à dessins d'un goût ex- quis. Cet édifice est un objet d'affection pour les i Perpignanais , qui le vénèieni comme un précieux héritage transmis par leurs ancêtres. Le tribunal civil , qui n'est séparé de la Loge de Mer que par les bâtiments de la Mairie , est aussi très remarquable. Des croisées à trois divisions for- mées par des colonnettes d'une charmante structure, des portes rondes à immenses voussoirs , un très petit nombre de jours sur une grande surface unie, ' Voir la planche n" S. 327 un loil sans corniche saillant d'un mène, enfin une simple moulure de 0'". 50 pour soubassement, doi- vent le faire ranger parmi les constructions pitto- resques du raoyen-àge. On doit vivement regretter l'altération de la partie inférieure , par la substitution décroisées rectangulaires modernes à barreaux droits, aux formes circulaires et aux grillages contournés de la construction primitive. ,.,..;*.: rj - Entre ces deux édifices en belle pierre de taille que le temps n'a point dégradée , l'œil est pénible- ment affecté de l'aspect délabré des bâtiments de la iMairie percés irrégulièrement , crépis de teintes différentes, et dont cependant l'entrée, à deux grands arceaux grillés, porte le type d'une origine assez reculée. On sent depuis long-temps la nécessité de relier la Loge de Mer et le tribunal par une cons- truction d'un style qui s'en rapproche, et fasse dis- paraître la discordance blessante , produite par cet amas de bâtisses incohérentes, qui détruisent tout l'effet des belles façades qu'elles séparent. Des projets adressés en 1842 offraient une dispo- sition de bâtiment d'une architecture moderne s'é- levant à GO. 000 fr. L'intérieur renfermait les locaux nécessaires à l'administration communale. Le mi- nistère en blâma la distribution et le dessin, prescrivit la refonte des projets, et déclara qu'on n'en adopte- rait aucun portant atteinte aux deux antiques édifices avec lesquels la nouvelle construction devrait être en harmonie. D'après cet exposé, ce qui paraît le plus naliïirel, le plus convenable , c'est de prolonger la façade de la Loge jusqu'au tribunal , suivant le même dessin. On en doublerait ainsi l'étendue et l'effet serait vrai- 328 ment grandiose. La planche n" 8 , représenie la fa- çade telle qu'elle existait avant sa restauration en 1842. On ouvrit alors les portes, on enleva la masure qui masquait l'entrée , ainsi qu'un balcon régnant sur la plus grande partie de la façade. Si le conseil municipal obtient l'assentiment du conseil des bâtiments, pour l'exécution du projet tel que nous l'indiquons, peu de localités, en France, présenteront un aussi long développement d'édifices gothiques d'un travail délicat et original. GuiRAUD DE SaINT'MaRSAI.. 329 m imnmim \ pfjîpiunan. Souvenir de 1831 Lu cil séani'c |mbliqiic , à la Société des Pyi'éBées-Oriciitales , le 7 seplcnibre 1847. " Le Sainl-Simoiiisme a';i pu trouver à la Société •I d'autre loi que le bonLcur ; à la morale 'I d'autre principe que la syinpathiej et, voulant " forcer les hommes au bonheur par l'organi- « satioii sociale, il a méconnu à la fois la liberté •1 et l'obligation. Le droit manque à sa morale «comme à.sa politique. « (Ca. de Rémusat.) Ce que je vais rappeler est déjà loin de nous. 11 s'agit du Si-Simonisme, foi éteinte, vestige effacé. Qui de vous, en effet, a gardé souvenance de ces théories audacieuses, de ces manifestes, pleins de chaleur et de conviction, que la Presse lançait parmi nous, peu de temps après le grand événement de 1830? Rien de plus remarquable, dans ces jours de 330 surexcitalion, que colle lentalive de régénéralioii sociale, qui avaii séduii tant de nobles cœurs. Les espriis, qu'échauffe le soleil méridional, de- vaieni nalurellement rendre hommage à Sl-Simon. Aussi de très bons arlicles, publiés dans le Globe, émanaieni-ils de plumes roussillonnaises. Malgré l'orgueil que nous en avons ressenti, nous n'aurions pu voir sans regret ces généreux enfants du pays sa- crifier leur fortune et leur carrière, le présent et l'avenir, à de chimériques espérances. L'un d'entre eux recevait, en avril 1834, la visite de Moise R** de L^*, le plus jeune ei l'un des plus fervents dis- ciples de St-Simon. C'était le fils chéri du père En- fantin, qui s'appuyait sur lui avec amour, quand il était renvoyé de police correctionnelle en Cour d'as- sises, et de là à Sainte-Pélagie, où il se trouvait en ce moment. Le hasard nous fit rencontrer R** dans un cercle, entouré de jeunes-gens et d'officiers de la garnison, qui avaient fêlé sa bien-venue. Au milieu des recher- ches du luxe moderne, lui, simplement vêtu, en blouse et en casquette d'ouvrier, les reins serrés dans une large ceinture de cuir, (comme il convient à l'a- pôtre, voyageant à pied, et en souliers ferrés) savou- rait lentement le parfum d'une crème glacée, et pro- menait sur les curieux, qui se pressaient autour de lui, des regards calmes et assurés. • Moïse parla, pendant plus d'une heure, avec le plus heureux choix de termes. Il effleura quelques points de la doctrine dans une causerie, qui s'éleva parfois jusqu'au ton de l'inspiration. Pourrons-nous donner quelque idée de ce mélange de bonhomie et d'enthousiasme, de résignation et de gaîlé, avec le- 331 quel il luanifesiaii sa croyance, assemblage d'erreurs ei de vérités, toujours empreint de dévoûmenl j)our le Père ?... «Avec le Christianisme, disait-il, riiumaniié a mar- ché dix-huit siècles; nous nous chargeons, nous, de la conduire pendant six mille ans. On n'a pas, jus- qu'à nous, assez insisté sur les avantages du travail et de l'association, d'où découlent tout progrès el toute vertu. On n^a pas assez dit que les fruits de la paix sont préférables aux stériles lauriers de la guerre, et, dans un autre ordre d'idées, on n'a pas ccraplète- meni amélioré la condition des femmes. Leur société devrait être constamment la nôtre dans nos travaux comme dans nos plaisirs; et, les abandonner aux humbles soins du ménage, tristes et isolées, c'est se montrer l'ennemi de soi-même. Pourquoi ne voii-on que des hommes dans ce salon? Pourquoi relrouve- t-on ici la fatigue et l'ennui, jusque sous les éclats, d'une gaîié factice? C'est que, loin des femmes, il n'y a pas de véritable joie. Qu'elles viennent se mêler à nous, quel changement! Au milieu des parfums et des fleurs, aux accords d'une saisissante harmonie, partout l'animation, le plaisir, le bonheur! Car nous sommes les partisans déclarés de la jouissance. Avec nous, votre cœur ne sera jamais vide. Les oi- seaux du ciel chantent en s'éveillant; ils chantent encore au déclin du jour. Pourquoi l'homme n'élè- verait-il pas ainsi la voix vers son créateur?Nous avons des chants pour toutes les heures, dans notre retraite de Ménilmontant , où nous travaillons en commun, cliacuii suivant sa capacité. » Et le St-Simonien parcourait des yeux son audi- toire , joignant à l'elfet des paroles ce ((u'ils appelaient 332 la puissance du regard. — «Mais, dil quelqu'un , doù vient le pou d'empressement des femmes à répondre à votre appel ?i) — ((€""651 à nous de leur aplanir la voie, répondit tranquillement R**. Nous luttons aujourd'hui contre des obstacles de tout genre. On nous comhat, non par de bons arguments, mais par la raillerie et l'in- sulte. Quelquefois même une foule aveugle nous mal- traite. Le succès de notre cause demande donc beau- coup de résignation. Pour mon compte, j'en ai fait preuve, et je saurai persister; oui, messieurs, si je recevais un soufflet , je ne dirais rien... , non, rien!... Mais, si devant moi on battait une femme, mêlée à notre œuvre de régénération, oh!., je tuerais l'agres- seur! Vous voyez bien que l'heure n'a pas encore sonné: les femmes nous viendront plus tard.;) — «Ceux-là même, que vous prétendez émanciper, lèvent donc la main sur vous! 11 faut croire qu'ils ne sont pas dignes de vous comprendre, qu'ils n'en se- ront jamais capables... — Nous saurons les maîtriser. En voyant noire calme dans la persécution, le peuple doit finir par se dire : « Ces hommes si résignés , sicon- « vaincus, pourraient bien avoir raison. » Qu'ils nous écoutent; c'est tout ce que nous demandons. J'ai quel- quefois regardé en face le furieux qui voulait me frap- per. Mon aiiilude, pleine de fermeté, sans audace, a été recueil, contre lequel sa colère est venue se briser. Le peuple!., c'est une perle fine, qu'il faut dégager du limon qui la ternit. 11 existe en lui des ressources précieuses, de ces âmes vierges, dans les- quelles nos principes germeront mieux que dans vos c(eurs glacés. Et cependant, si nous voulons que ses idées se rectifient, que ses mœurs s'adoucissent. 333 cela dépend cucoro do vous, messieurs. C'est voiic exemple qui le changera, dès que vous aurez changé vous-mêmes. Nous nous plaignons de sa violence; mais ne voii-il pas que la violence est aujourd'hui la loi dominante; que le droit, c'est la force; que la guerre seule fait les héros? Telles sont les maxi- mes en crédit. Eh hien! le peuple ne fait que les suivre dans sa sphère. Qu'une fois on lui dise qu'il y a plus de gloire à créer, qu'à détruire ; à ohéir qu'à commander, il le croira, si vous le pratiquez. Ilien n'est aristocrate comme le peuple : il se règle toujours sur ceux qui lui sont supérieurs en lumières et en fortune.» — « L'accomplissenient d'une pareille œuvre de- mande plus d'un jour, dit d'un ton demi-ironique un capitaine à moustaches grisonnantes. Nous som- mes arrivés lard, et ce sera la lâche de la génération qui nous suit. N'espérez rien vous-même , jeune homme. » — a Ainsi donc, s'écria R**, nous, misérables ma- nœuvres , brisés par la fatigue , nous ne pourrons admirer le Temple , sorti de nos mains, lorsqu'assis sur sa base inébranlable, il aura son parvis de mar- bre et son dôme d'airain .-')) — (( La vie est courte, répliqua l'inexorable interlo- cuteur. » — ((Croyez-vous donc à la mort? L'existence est un bien impérissable. Tout ce qui doit vivre, vit déjà,* tout ce qui a vécu vit encore. On ne nieurt pas; on change d'enveloppe. » — Comment donc! C'est de la métempsycose! — «Oui, messieurs, j'ai la conviction (jue, sous dos formes différentes, je serai éternellement apôtre et 334 libérateur. C'est ce qui me donne le eonrage de poursuivre ma mission. » — «Vos compagnons doivent être soutenus par cette pensée , eux , qui s'exposent au fanatisme des Orientaux, en se livrant à la recherche de la femme libre. » — «Sans doute, et c'est une glorieuse entreprise que je voulais seconder. Jusqu'à ce que la présence de notre Mcre vienne compléter le symbole vivant de la divinité, nous travaillons en vain. Tout ce qui respire, que dis-je? tout ce qui végète a deux sexes, et le créateur du monde ne les aurait pas! Il serait imparfait, lui, le principe de toute perfection! Dieu, c'est la puissance infinie jointe à la jouissance infi- nie. Nous prions en disant : Notre père et notre mère, qui êtes aux deux et sur la terre... » — «El. . . votre père terrestre, où est-il maintenant?» — ((On l'a séparé de ses enfants. Pour bien long- temps, hélas! il est à Sainte-Pélagie.» — «Condamné pour outrages à la morale publique, dit à demi-voix un jeune magistrat. » — ((Quelle dérision, s'écria l'apô ire ! Où donc est-elle cette morale? Vous, pour qui l'adultère est un sujet de risée, vous qui, à Frascati, avez organisé le jeu et la débauche , vous vous êtes fait des lois de convention , eu vertu desquelles vous emprison- nez l'homme, qui vous rappelle aux lois de la nature. C'est avec la même injustice que nos historiens ont jugé le passé. Des observateurs plus clairvoyants n'eussent pas flétri les roués de la Régence. >•> — «Eh quoi! vous prétendriez réhabiliter leur mémoire !.. » — «Mous ferons davantage. Le délire effréné de 335 celle époque n'claii aulre chose qu'une énergique proiesiaiion contre un culic profané, conire un oiilrc social menaçant luine. La parole de Saini-Simon n'avait pas encoi'e retenti , et des hommes d'élite sentaient instinctivement que tout était à refaiie. Spartacus de la société moderne, ils se débattaient contre leurs chaînes. Ils sapaient les fondements du vieil édifice , en attendant le nouvel architecte. En un mot, c'étaient nos devanciers à qui, tôt ou lard, Fliumanité paiera sa dette. Oui! les roues de la Ré- gence seront un jour divinisés! — d A coup sûr, Messieurs, d'aussi étranges paradoxes ne sont pas dangereux. Celui-ci parut même le fruit d'une exaltation passagère, dans ce jeune adepte, à qui Enfantin disait : Toi, ^**, tu seras le page ef- fronté de Saint Simon. Aussi l'on se conlenia desourire, et de lui faire remarquer que la classe des maris ne serait pas très pressée de se relier à cette doctrine, «i^h! les maris, répondit-il avec finesse, ils sont comme les propriétaires.» C'est tout ce qu'il laissa échapper sur cette tjuestion^ non moins subversive que leurs idées sur le mariage : la division des propriétés , suivant le degré de capacité , c'est-à-dire l'abandon de tout droit dliérédité, de tout patrimoine à la masse com- mune, sauf à en reconqiiérir une part , en vertu de la maxime célèbre : A chaque capacité , suivant ses œuvres; car cette curieuse doctrine exigeait une en- tière abnégation. Elle nous fesait rétrograder de plus d'un siècle, par le sacrifice de notre individua- lité, de cette liberté personnelle, précieuse conquête de la révolution de 89. Notre état social appelle incontestablement de grandes réformes; mais il est permis de douter qu'avec de pareils guides, on fût 336 arrivé à la perfection absolue. Dd reste, les zélateurs du Saint-Simonisnie l'oni cux-mcnies jugé définitive- ment, en se lançant dans le courant des idées et dans les emplois publics. Les voici tous rendus à rinduslrie, aux armes, à l'agriculture et au barreau, serviteurs dévoués d'une société ^ qui devait crouler sous leurs anathèmes. Et R** lui-même est devenu un bon père de famille et un excellent citoyen : tant il est vrai qu'avec un esprit éclaii-é et un cœur droit, on est ramené par l'expérience aux saines idées et aux principes conservateurs de toute civilisation. .T. Carcassonne-Frigola. 337 DÉCEPTIOL « 0 mes songes dorés ! /> (ScBlLLEa.) O jeune ange, apparu dans une rêverie ! 0 ma perle, enlevée à l'écrin de Marie! 0 ma vierge d'amour ! Moi qui t'avais créée et si pure et si belle , Que, pour voir un instant la blancheur de ton aile, Je priais chaque jour ! O sarcasme du sort ! Dérision amère ! Mensonge aux doux regards, insultante chimère Qui raille ma candeur! 0 douleur ! voir ainsi se flétrir toutes choses ; Voir tomber sous ses pas tant de suaves roses, Tant de fruits dans la fleur ! De votre jeune cœur, plein de foi, d'innocence. Faire un splendide autel , rayonnant d'espérance ; Et pour divinité, Prendre ce que votre âme a, dans sa joie intime. Rêvé de plus suave, ou bien de plus sublime , Amour , gloire ou beauté ! 338 Et puis , quand votre main vient soulever le voiIc Qui cachait, dans la nuit, la lumineuse étoile, 0 misère ! ô tourment ! Sous l'encens et les fleurs, dont vous pariez l'idole, Et dont vous lui faisiez une sainte auréole , Voir les yeux d'un serpent ! . . . II Voilà , voilà la vie avec ses deux visages , Ses splendides clartés et ses sombres nuages ; Son sourire fardé, sa livide pâleur; Son manteau chatoyant , robe de Déjanire ; Sa parole emmiellée et son dard qui déchire , Sa main compatissante et son rire moqueur ! III Pauvre rêve d'enfant ! chaste et sainte ignorance , Qui versiez à longs flots sur ma rieuse enfance Des sourires de fleurs et des hymnes d'oiseau ! O pitié! noble erreur de mon ame crédule, Qui croyait se chauffer à la flamme qui brûle , Sans laisser au foyer le tribut d'un lambeau. Oh! mes illusions, dont le magique charme Mêlait un peu de miel au fond de chaque larme ; Aux ténébreux accords un doux rayon de foi ! Ces souffles destructeurs que le monde récèle Ont brisé voire tige, en passant, d'un coup d'aile, Et vos tristes débris gisent autour de moi 339 Et inaiiiteuant , mou Dieu, pour fiuii sur la icrre Ces jours, ensevelis cncor dans le mystère , Pâles et sans soleil, comme des jours d'exil; Pour porter, sans gémir, le fardeau qui m'écrase ; Pour boire jusqu'au fond l'amertume du vase Sans détourner les yeux , que me rcstera-t-il? rv Ce qu'il me restera? trois perles de rosée. Qui descendent du ciel sur toute fleur brisée , Po\u- ranimer sa tige et lui donner encor Un encens plus suave et plus de rayons d'or ! Ce qu'il me restera? trois brillantes étoiles Qui jettent dans la nuit leur lumière sans voiles. Pour diriger mes pas dans ce sombre chemin, Où vainement on cherche une main pour sa maui. Amour ! foi ! poésie ! ô mon beau diadème , Rien ne ternit l'éclat de ta splendeur suprême ! Sous la fange du monde on peut bien te cacher , T'obscurcir un instant, mais jamais te lâcher! Aussi, je marcherai, fière de ma couronne. Le front haut, sans jamais demander à personne Une obole du cœur , fruit doré ; mais amer, Qui satisfait la soif, comme l'eau de la mei'. J'irai , sans m'arrêler à soulever le masque , Pour voir si son sourire est railleur et fantasque; Sans prêter mon oreille à la porte du cœur. Pour connaître comment parle l'esprit menteur. 340 J'irai, ma lyre en main , oublieuse du monde, Sans jamais regarder la vase au fond de l'onde ; Le sourire à la bouche et les yeux vers le ciel , Epanchant sur le pauvre une part de mon miel. Et, calme par la foi, je verrai , sans colère, Les œuvres du démon grandir sur cette terre ; L'oppresseur orgueilleux , la victime à genoux , Et sans pleurer sur moi , je pleurerai sur tous ! 1840. Anaïs Faure , née Biu. 341 PRËIUIËRE PAGE. Vers écrits sur l'album de M'^'^ *¥* «Chantez! m'avez- vous dit, réveillez- vous , poète! o Inclinez , un moment , votre rêveuse tête « Sur ce livre, pour vous s'ouvrant avec bonheur. « Je veux de la guirlande , entre toutes choisie , « Que vont me tresser, là , Peinture et Poésie , «Vous devoir la première fleur. » Fleur cependant bien humble et bien décolorée , Fleur bien indigne , hélas ! d'être ainsi désirée Par vos printemps si frais et si purs et si verts Que celle dont je puis, docile à vos paroles. Faire entr'ouvrir pour vous les tardives corolles , Sous la neige de mes hivers. Et comment pouvez-vous souhaiter, jeune fille , Vous , si calme et si gaie au sein de la famille , Un chant des miens, toujours de mes douleurs éclos? Ignorez-vous mes deuils, mes lentes agonies, Et ne savez-vous pas qu'aux moindres harmonies Je mêle toujours des sanglots? 342 «Chante, » dit, comme vous, le passant avec joie A l'humble enfant , venu des bords de la Savoie , Que le froid et la faim poursuivent sous nos cieux , Et le pauvre petit, pour réjouir la foule. Ranime sa voix faible, et dans son cœur refoule Les pleurs qui montaient dans ses yeux. Au cercle souriant qui devant lui s'étale, Il dit un de ces airs de la terre natale Qu'il a déjà semés tout le long du chemin. Et quand sa vielle , enfin, sous ces doigts se repose , Il est du moins payé de l'effort qu'il s'impose ; Une aumône pleut dans sa main. Mais moi, que, bien plus triste encor, au fond de l'àme, Je livre à cet album l'hymne , que me réclame Votre sainte amitié dont l'appel est si doux , Que, les yeux tout en pleurs, je chante pour vous plaire, Dites, de mon tribut quel sera le salaire? Quel prix obtiendrai-je de vous? Daignerez-vous m'offrir quelque pure aquarelle , Où notre Castillet dressera sa tourelle , Où jusqu'à nos grands monts l'œil pourra s'égarer? Du soyeux canevas , tendu sous votre aiguille , Daignerez-vous, pour moi , couvrir la blanche grille De fleurs qu'on irait respirer? Non , de tous ces trésors à d'autres la merveille ! Pour vous, je suis à peine un ami de la veille Qui ne saurait prétendre à ces dons précieux. Mais de votre piano que j'obtienne, en échange, Quelques brillants accords , que de vos lèvres d'ange Je recueille un chant gracieux ! 343 Et vous , qui prétendez être sans poésie , Vous en aurez versé , dans mon âme saisie , Mille fois plus , d'un son de votre douce voix , Qu'en humble fils de l'Art , ici , je n'en épanche Sur le vélin noirci de cette page blanche Où la plume échappe à mes doigts. PiERBE Batlle. 344 DERNIER CHAI. Auac poètes chrétiens. Avant de déposer ma frêle et douce lyre ; Avant d'éteindre en moi ce foyer de délire , Source dont l'harmonie alimentait mes jours ; Avant qu'un souffle aride, en passant sur ma tête, Efface de mon front le signe du poète El que ma corde d'or se brise pour toujours , Frères, je viens à vous, sans orgueil, mais sans crainte. Déposer à vos pieds la goutte d'huile sainte ; Pauvre fleur, qu'en mourant s'exhale tout son miel ? Dans un hymne d'adieu, chant de deuil et de larmes, Je viens, le cœur rempli de lugubres alarmes , Vous parler d'avenir en vous montrant le ciel ! A vous, qui sur ma vie errante et solitaire , Avez mis un rayon des gloires de la terre ^ A vous ce dernier rêve éclos sous ma douleur ! A vous ce dernier cri d'amour et d'espérance ! Mais l'hymne interrompu dans les cieux recommence; Le cœur fermé s'entr'ouvre au souffle du Seigneur. 345 Poètes, dont la lyre harmonieuse et pure, N'est rien qu'un vain écho des lois de la nature, Si pour vibrer il faut à vos accords touchants, Une étoile au ciel bleu, les baisers du zéphyre, Le ruisseau, pur cristal où l'humble fleur se mire. Et le nid que l'amour berce des plus doux chants ; Si vous n'avez jamais dans un rêve sublime Entendu cette voix mystérieuse, intime, Qui dévoile des cieux la magique splendeur!... Ah ! vous pouvez briser ce jouet inutile, Et fouler à vos pieds cet instrument débile, Que n'anima jamais l'esprit révélateur ; Mais si Dieu mit en vous l'éternelle lumièie. S'il verse chaque jour sur votre humble prière Les parfums de l'amour, les rayons de la foi ; Si vous avez enfin, poète, âme choisie, Humecté votre lèvre aux flots de poésie, Que le Christ en mourant répandit sur la croix ; Ah ! levez-vous , montez nu sommet du calvaire ; Il vous faut désarmer une sainte colère; Car le bras du Seigneur s'appesantit sur nous. Chaque jour est marqué d'un sinistre présage ; Mais votre lyre peut faire avorter l'orage. Il en est temps encore, ô frères ; levez-vous ! Nochers harmonieux sur l'océan du monde, Conjurez la tempête et la foudre qui gronde , En invoquant le nom du Dieu de vérité. Aux longs mugissements de ces flots indomptables Qui, dans leurs bras d'écume enveloppent les sables, Que votre lyre mêle un cri de charité. 346 i Que votre hymne, vibrant dans un accord immense, Verse sur la patrie un rayon d'espérance. Dépouillez votre cœur de faiblesse ou d'orgueil ; Et, puissants par l'amour, sous la même auréole Marchez, marchez en paix, semant cette parole Qui renverse l'obstacle et sauve de l'écueil. Si Dieu vous a donné la parole de vie. Pourquoi dans votre cœur reste-t-elle asservie? Le soc a déchiré le sol des nations : A vous, frères, à vous, de verser la semence Que le Seigneur a mise en notre intelligence ; A vous de la verser dans ces larges sillons. Par le sang des martyrs dîit-il être arrosée, Eh ! qu'importe ! ce sang n'est-il pas la rosée Qui fait fructifier l'humble grain du semeur? A cet œuvre de paix travaillez sans relâche ; Et, forts par l'espérance, accomplissez la tâche Qui vous est réservée en ces jours de labeur. Quand les feux du soleil dissiperont l'orage ; Que les peuples émus, bénissant votre ouvrage, Lèveront leurs regards et leurs mains vers les cieux, Alors l'impiété ne viendra plus vous dire. Le visage fardé d'un insolent sourire, Ce que peut dans vos mains ce glaive harmonieux . Anus Faure , née BiH. 1842. 347 ^tn^ Mmin^i^, I LES COUVENTS. Oui, lasses de marcher dans la vie, au milieu d'aspics toujours cachés sous les fleurs des charmilles. Elles viennent, hélas ! ces douces jeunes filles De se réfugier dans la paix d'un saint lieu. Subissons, sans nous plaindre, un si cruel adieu. Elles n'aspiraient tant à l'ombre de ces grilles Qu'afîn de mieux prier pour nous, pour nos familles, L'ame, de bien plus près, là, s'adressanl à Dieu. Trop pures pour rester sur nos mondaines fanges Et trop jeunes encor pour monter vers les anges, N'ayant touché qu'à peine au calice de fiel, Ne devaient-elles point, ces craintives colombes. Poser du moins leurs nids, tristes comme des tombes, Sur le pic d'ici bas le plus voisin du ciel? 348 II SOUVENIR D'UN SOIR. Sous tes beaux orangers, couronnés de fruit mûr, Tu me disais, un soir : « Vois, les ombres sont prêtes « A voiler de nos monts les sourcilleuses crêtes ; « J'aime cette heure oîi règne un demi-jour obscur. « Oh ! que la terre est belle et que le ciel est pur ! « Que de fleurs à nos pieds ! que d'astres sur nos têtes ! « Qui pourrait assister à ces splendides fêtes «Sans croire au Dieu caché, par delà cet azur? » Et tandis que tes yeux, dans ces sphères sans nombre, Dans ces calices frais étoilant le pré sombre. De la beauté suprême admiraient les reflets, Moi, dans son œuvre aussi, j'admirais mieux encore Ce Dieu qae tout béait, tout chaule, tout adore. Car c'est, alors, en toi que je le contemplais. 349 III L'ARBRE DE LA CROIX. Le voyez- vous cet arbre au Calvaire plante? Oh ! que de fois l'impie a crié : « qu'on l'arrache ! « Il étend sur la terre une ombre qui nous cache « Du vrai soleil moral la sublime clarté. « A l'oeuvre ! » Et, vers sa fin , chaque siècle emporté , A son tour, en passant le frappe de sa hache, Tombe et se dit : « Un autre achèvera ma tâche. » Mais le temps que peut-il contre l'éternité? On l'abat , il renaît , on le renverse encore Et son front , de nouveau , s'élève , se décore De rameaux atteignant les plus lointains séjours. Nul effort ne l'ébranlé , au fond de ses racines , Qu'entretiennent les eaux de nos saintes piscines Et que le sang du Christ fécondera toujours. P. Batlle. 350 A SI. J. CARCASSOMl. Oh ! ne l'éveillez pas cette lyre endormie, Dont le dernier accord s'est éteint dans les pleurs ; D'un passé lumineux, que votre voix amie N'évoque plus les chants et les suaves fleurs!... Une tombe a fermé ce gracieux poème, Eclos sous les rayons d'un sourire d'amour ; Et mon cœur, déchiré par un adieu suprême, N'a plus de souvenir pour ces biens sans retour. Ne demandez donc plus à la fleur effeuillée Son parfum, doux trésor par l'orage emporté ! Car cette frêle tige , encor de pleurs mouillée , Ne doit plus rcQeurir que dans l'éternité!... Avili, 1848. A>Aïs Faure , née Biu. i 351 DÉPART. A Monsieur H Madame •¥1"f Lyre, écho de mon àme, en ses jours de tempête, Lyre qui sommeillas si long-temps sous mes doigts, Pour un couple charmant, dont le départ s'apprête, Retrouve quelques sons de ta débile voix. Dis à l'heureux époux, dis à la jeune mère. Cœur tendre où toujours veille un inquiet amour, Tout ce que de regrets, de pleurs, de peine amèrc, Doit nous coûter, hélas ! ce départ, sans retour. De notre vie en deuil adieu donc tous les charmes ! Adieu, doux entretiens sous nos liserons verts, Musique de famille et sympathiques larmes Que nous' versions ensemble en lisant de beaux vers! Nous ne prêterons plus une oreille attentive A cette habile voix, si légère en son vol, Qui, d'une humble fauvette encor toute craintive. Sut faire, par ses chants, un divin rossignol ; Et la vermeille enfant, de chacun admirée, Qui des traits de son père est le vivant miroir, Grandira, de vertus et de grâces parée. Sans que jamais, jamais, nous puissions la revoir! 352 Ab ! du moins, dans ce cœur où rien ne geruie encore, Semez des souvenirs ; qu'elle n'ignore pas Qu'aux champs roussillonnais où Dieu la fit éclore Elle fut, en naissant, bercée entre nos bras. Répétez-lui souvent notre nom ; à le dire Façonnez cette lèvre, avide encor de lait, Qui ne sut, près de nous, que pleurer ou sourire. Car c'est du regard seul que l'enfant nous parlait. Plus tard, vous lui direz nos ennuis, nos souffrances. Mon printemps effeuillé, dès sa première fleur ; Mon fils, surtout, mon fils, mon trésor d'espérances Jeté dans une tombe.... où le suivit mon cœur! Vous sûtes quelquefois, vous, ami, vous. Madame, Endormir des regrets, si vifs quand je suis seul ; Mais, il le faut, partez et laissez, sur mon âme. De toutes mes douleurs retomber le linceul. P. Batlle. 355 PROGRâillE DES PRIX PROPOSAS par la Société agricole . scientifique et littéraire des Pyrén'^r.s-Orieiitales . pour Vsnwc 1848, Agriculture. 1° Une médaille d'or, du prix de 100 francs , à l'auteur du meilleur manuel complet d'Agriculture, appliquée au dépar- tement; 2"^ Une médaille d'argent à l'auteur du meilleur mémoire sur la culture de l'olivier : on traitera des maladies et des insectes qui lui nuisent ; on indiquera le remède et le moyen de l'en préserver ; 3° Une médaille d'argent à celui qui aura cultivé , sur cent cmquante ares de terrain , une plante oléagineuse ou tinctoriale , inconnue dans le département ; ' 4" Une médaille d'argent à celui qui aura envoyé à la So- ciété le meilleur mémoire sur le débordement des rivières de notre département. L'auteur devra traiter du reboisement des montagnes, et indiquer des moyens peu coûteux pour garantir les propriétés des riverains des efTets dévastateurs des inondations; 5" Une médaille d'argent à l'auteur du meilleur mémoire sur l'état actuel de l'agriculture du département, comparé à celui des départements voisins. 6" Une médaille d'argent à celui qui aura le mieux cul- tivé , dans le département , quinze ares , au moins ^ de ter- 23 354 Jain en sparte , et qui offrira à la Société un kilogramme de graine de cette plante pour être distribuée; 7" Ujie médaille d'argent à l'auteur de la meilleure nomen- clature des espèces de vigne , cultivées dans le département, avec leurs noms botaniques et leurs synonymes dans les départements de l'Aude et de l'Hérault. Les différences qui existent entre les divers plants , quant à la production et à la qualité, devront être traitées; 8" Une médaille d'argent pour la destruction des insectes nuisibles à la culture , et notamment la taupe-grillon , dont la multiplication devient effrayante. 9" Une médaille de bronze au jardinier qui présentera des primeurs en fruits et légumes, ou les plus beaux produits aux époques ordinaires; 10" Une médaille de bronze, pour la meilleure tenue de comptabilité agricole , présentant des notes journalières raisonnées sur l'exploitation d'une propriété d'au moins vingt hectares: 11" Une médaille de bronze pour la fidélité domestique et les longs services des valets de ferme dans la même propriété. Indnstric 12" Une médaille d'argent au fabricant du département qui présentera le drap le mieux confectionné ; 13" Une médaille d'argent à l'ouvrier qui présentera le plus beau travail d'ébénisterie , de serrurerie , comme ba- lances , romaines les plus précises et autres objets ; 14"Une médaille de bronze à celui qui aura introduit dans le département la fabrication d'objets utiles en sparte ou en fil d'agave. Bcaux-âirts. 15° Une médaille d'argent et une de bronze pour les deux meilleures compositions en peinture à l'huile. Sciences. Belles-liettrcs. 16° Une médaille d'argent à l'auteur des deux meilleures pièces historiques en prose ou en vers, sur Hyacinthe Ri- gaud , peintre, né à Perpignan, et sur dom Hrial , aussi de Perpignan , bénédictin de Saint-Maur et ancien membre de l'Institut ; 17" Une médaille d'argent à l'auteur du meilleur mémoire sur l'importance du Roman roussillonnais , pour l'intelli- gence de nos documents historiques , de notre législation locale et de nos anciens titres de propriété; 18" Une médaille d'argent pour un mémoire sur nos ar- chives publiques et privées , importantes surtout , afin d'ex- traire les actes de concession d'eaux d'arrosage, et de re- cueillir la collection des concessions des bois et pasquiers communaux; 19" Traité de l'Irrigation dans nos contrées, des lois et des règlements qui l'ont régie à ditTérentes époques ; 20" Histoire des Beaux-Arts, en Roussillon, dans le moyen âge et jusqu'à ce jour; 21" Quelles furent les conséquences , sous le rapport ma- tériel et politique, de la réunion du Roussillon à la France? Cond tions à rentplir par îes coiicurs'«>uts. 1" Les auteurs de manuels, mémoires, et ceux qui en- verront à la Société des modèles , des échantillons , etc. , n'y apposeront pas leurs noms: ils y mettront seulement une devise , et ils y joindront un billet cacheté portant la même devise à l'extérieur; et , à l'intérieur, leur nom et l'indica- tion de leur domicile ; 2" Les produits d'agriculture et d'horticulture seront en- voyés à la Société en temps opportun ; 3" La Société conservera , dans ses archives , les manuels et mémoires qui n'auront pas été couronnés , en permettant toutefois aux auteurs d'en prendre copie. Les modèles et les produits d'agriculture et d'horticulture, seront rendus aux personnes qui les auront présentés ; 4" Les mémoires, modèles, échantillons, devront être adressés, franc de port, au secrétaire de la Société, avant le M août de Tannée du concours; 356 !s°Les prix seront décernés en séance publique, à la fin du mois doclobre 1848. Les objets destinés à l'exposition doivent être envoyés, franco, à la Société, avant le I" octobre, terme de vigueur. 6° Les concurrents pour les priiiies du gouvernement et les prix à décerner par la Société , devront s'adresser, avant le 31 juillet, au secrétaire, atin qu'on nomme une Com- mission, qui se rendra sur les lieux et fera un rapport. Ils remettront un état indicatif de leurs titres à l'obtention de la prime ou du prix auquel ils prétendront. La Société se plaît à penser qu'elle sera secondée, dans ses efforts constants, pour le progrès de l'agriculture, de riiîdustrie et des arts. Primes allouées par le Ministre ile l'agriculture, 1° Pour la meilleure confection des fumiers 100 fr. 2° Pour le fauchage des céréales 100 3° Pour l'exploitation la mieux conduite et ayant le plus grand nombre de bestiaux bien tenus 500 40 Pour l'extension de la culture des fourrages dans les aspres (terrains non arrosés) 300 50 Pour le perfectionnement de la taille de lolivier 200 6° Primes aux taureaux 2.000 70 Reboisement 1000 Total : 4.200 fr. Perpignan , le 20 mars 1848 Le Président, RJ GUIRAUD-de-St-MÂRSÂL. as a. °" -s; "= 'Ed S 2 J o ~ _3 ce 00 OC' OC 00 et 1^ 00 l'5 oc 00 o ■?! = cT cT cT oc — 00 — 1^ ^ M -5 lo ''5 O »— l'i »M — ■>! ;.-5 _ •^ C5 l'^ Cl — = ;-, _ -^ ;.-5 o «i o; ~ oc — ' o o o o o" o" cT C5 o; Ci o ■ ecTcTcoocTo 00' 'M o '•r te !0 1>. C3 (M ■M t^ lO ^T lO 1~. 1-. OC ^ C5 i^l i: JJ ':: 2 - r t- — _ C — 5 — C; o « ~ O O O o o~ o es oc . o lO 00 M : o « o - o O 'M . O O S °o œ ;.-; X c; oi et o SOI': ;e !>. vr o^ oc o 1^ ■M i- -o oô — 2J o " — — ■ o ' o'o'c" o o o' 1^ ;;'i ?' iî "~ — cî ^1 1- o ÇJ !^ OC' — 12 C5 o I- -M o 'M -M — 1- ;i jC ;, "S i£ 1! ~ — 'M l't o t-- . ~ — „ '^ — ■ ~ ® ® o — o cT o~ cT o~ o" o" o' cT 1- " o" o o" s o o o i ^ V- 5 !^ t: _ GC — lO o — 1*5 1'^ Cl O O — OCOOO'OO O'OOOOOOO'O «"o" o o « o — oc o IC oç — — C>l "o — ■ 'O o o o o o .■;j ~ ic 1^ ;-: d — o o o o o o o oooooo — coocTo" o ■■ 00 . Eo = = ^^=: c; o e e o o o X i'5 '^ i:; ^! ic — it ~ oc 1^ :■: — o I- ^- I- o -M c- o O 'S d C O — -o • o C; o C: S O O C' O O O > 1- ?i ! CJ !^ « ' "2 £-S -= ZT -^ ^ ta- ^ *2 'Z O ^"C^ î^ ^ Ci C'I ;o Cl o Cl co 00 a-' s: _ S O oc '-5 oc K. _ ..J o oc CO o •^-^ p 2 ^ a, S "^ 1j a 3 j ~ c s 3 = 3 S 3 U — -, = «3 i- I - o V 358 RÈGLEMENT DE LA SOCIÉTÉ. -S^ËS-I^O— - Vo/a. I.i'S statuts de la Société ont été publiés dans le ti"^ volume, 2° partie page 299. Il y a été apporté di'puis cette époque les modifications suivantes : Paragraphe ajouté à l'art. 13. Le bulletin nest composé que de publications faites clans l'année, et reconnues d'une utilité géné- rale. Si les mémoires à imprimer renferment des planches , le comité de rédaclion ne peut les com- prendre dans le bulletin sans avoir consulté la So- ciété, qui sera convoquée à cet effet, et qui votera au scrutin secret. SEUCESPliBUQUES. Chapitre III. Art. 29. La Société pourra se réunir en séance publique et extraordinaire ; l'époque de ces solennités et leur opportunité sera réglée ultérieurement et annuelle- ment. 359 Art. 30. La Société niei annuellement au concours des questions intéressant Tagriculiure, les sciences et les arts. Elle fait connaître par un programme les con- ditions de ce cojicours. Art. 31 . Elle distribue les prix obtenus en séance publique dans le courant de septembre. Art 32. Il ne peut être donné de médailles que pour les objets mis au concours. Le bureau peut toutefois, pour des cas non prévus, disposer de deux médailles de bronze ou d'argent et de deux mentions honora- bles; mais ce droit ne lui est conféré que dans des circonstances extraordinaires et pour des objets re- connus utiles. Art. 33. . Si le bureau jugeait nécessaire de décerner en de- hors du concours d'autres médailles que celles que l'art, précédent l'autorise à donner directement , il ne pourrait le faire qu'en consultant la Société, qui voterait au scrutin secret, après avoir entendn le rapport d'une Commission. Cbapitrc IV. Art. 34. Le Secrétaire est chargé spécialement de la rédac- 360 lion du procès-verbal de chaque séance ei de la cor- respondance courante. Il lient un registre des procès- verbaux adoptés par la Société 5 il y inscrit le titre des ouvrages reçus, et appose sur chaque volume ou pièce le timbre de la Société. Art. 35. Danà la séance de décembre , a\anl les élections, le Secrétaire présente le résumé des travaux de la Société pour l'année expirée. Art. 36. La correspondance officielle est conservée dans les archives de la Société ainsi que les noies, mémoires qu'on aura lus; mais, au préalable, ces pièces sont revêtues du timbre de la Société. Art. 37. L'Archiviste est chargé de la conservation de toutes les pièces; il inscrit sur un registre spécial tous les ouvrages reçus ; mais ils restent sur la table du ca- binet des archives , jusqu'à la séance suivante , afin que chaque membre de la Société puisse en prendre connaissance, sans déplacement. Art. 38. Si un ouvrage venait à manquer , il en instruirait la Société, qui prescrirait une enquête. Art. 39. Le déplacement des ouvrages ne pourra avoir lieu qu'après l'intervalle fixé par l'art. 37. Alors seulement il sera facultatif à chaque sociétaire de les emporter, après toutefois en avoir reconnu la remise sur le re- gistre de l'Archiviste. Art. 40. Ces ouvrages sont rendus dans un délai qui ne :}6i pourra excéder un mois; Tarchivisie devra en accu- ser réception. Tout ouvrage perdu par un sociétaire sei'a remplacé à ses frais. Art. 41. Le Trésorier est chargé de la rentrée des cotisa- lions; il est tenu de prévenir par écrit, au moins deux fois, les membres qui négligeraient de s'acqiiiiter. Il lient un livre journal où sont inscrites les recettes et les dépenses, avec leur nature; il propose le budget de l'année suivante à la séance du mois de décembre, après le compte-rendu du Secrétaire. Art. 42. Aucune dépense ne peut être faite sans avoir été votée par la Société. Art. 43. Les memlnesde la Société coiTCspondanls pourront devenir résidants, en se conformant à Fart. 15, après que. le bureau a reconnu qu'on peut les dispenser des conditions imposées par l'art. 9, s'ils n'y ont pas satisfait. Art. 44. Tout membre résidant qui, à la fin de l'année, n'a pas acquitté sa cotisation, est censé démissionnaire, et, comme tel , rayé de la liste des membres de la Société, après, toutefois, qu'il a été invité par les membres du bureau à se conformer au règlement. Art. 45. Aucun membre démissionnaire ne peut réclamer le remboursement de sa cotisation versée. Art. 46. Les membres résidants et correspondants reçoivent 362 un diplôme, signé par deux membres du bureau, et portant le sceau de la Société. Art. 47. En cas de décès d'un membre de la Société , une dépuiaiion est envoyée au convoi funèbre et auprès de la famille. Art. 48. En cas de dissolution de la Société , les fonds en caisse seront distribués aux pauvres , le mobilier et les autres objets qu elle possède , répartis entre les membres résidants. Nota. Par une disposition nouvelle, la cotisation annuelle pour les membres résidants est portée à dix Jrancs (art. 15). IVJM I\JASSOT,(Paul), président Méric (François), vice-président. Lloubes (Auguste), secrétaire. Mattes, secrétaire-adjoint. Vimort-Maux, trésorier. Famp (Titus), archiviste. MM. GUIRAUD-DE-St-MARSAL, président. CoMPANYO, vice-président. Fraisse (aîné), secrétaire. Tastu-Jaubert, secrétaire-adjoint. Vimort-Maux , trésorier. Falip (Titus), archiviste. Beirenn posia* 1848. MM. GUîRAUD-DE-St-MARSAL, président. Lloubes (Auguste), vice-président. .T. Carcassonne-Frigola, secrétaire. Tastu-Jaubert , secrétaire-adjoint. Vimort-Maux, trésorier. Falip (Titus), archiviste. COMITÉ DE RÉDACTION. MM. Puiggari. R. DE St-MalO. Membres résidants dêcëilés. 1848. MM. Parés, propriétaire à Rivesalles. Villaseca, naturaliste à Arles-sur-Tech. 364 bVtwtwvivvwv vv'iw'm^» i-i^i «-i^-^w^ï»^»»»*» \v»^ï«»\»»t.-v,\v»\i» w j LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ AGRICOLE. SCIENTIFIQUE ET LITTÉRAIHE Des Pyi'finécs-Oriciilales. Président bonoraire. 1833. M. F. AUAGO, C a;^, secrétaire perpétuel de \ Académie des Sciences, représentant du peu pi e. Membres bonoraîres» 1835. M. Mathieu, O *, membre de Flnstitul. 1836. M. GuizoT, G 0 ifîf, membre de rAcadémie française. 1841. M. IlÉNAUT, Pierre, ^^ , ancien préfet des Py- rénées-Orientales. Membres résidants. 1833. M. Alzine, imprimeur-libraire. {Ff. 1833. M. Batlee, Pierre, négociant, homme de let- tres. (F). * Les fondateurs do la Société sont désignés |);ir la Icllrc t'. ? 4 365 1833. M. Béguin, cUrecleurde l'école normale. (F). 1 833. M. Caffe, arcliit. de la ville de Perpignan. (F). 1833. M. Crova, professeur de mailiématiques spé- ciale^ et de physique. {F). 1833. M. Fauvelle , ingénieur, membre du conseil- municipal. (Fy 1833. M. Fraisse, direcieur des posies, à Narbonne. 1833. M. De Gaffard, propriétaire. 1 833. M. Grosset, coiurôleur au change près la Mon- naie de Bordeaux. (F) 1833. M. RiBELL, ^, docteur en médecine. 1834. M. .Iacomet, propriétaire. 1834. M. Lloubes, Auguste, négociant, maire de la ville de Perpignan. 1834. M. Tastu-Jaubf.rt , avocat. 1835. M. AYMÉRicri, agent d'affaires. 1835. M. Bassal, pharmacien à Bivesaltes. 1835. M. Bnuis, pharmacien, professeur de chimie. 1835. M. Companyo, docteur médecin, direcieur du muséum d'histoire naturelle. 1835. M, Durand, Eugène, banquier. 1835. M. Guiter, notaire, représentant du peuple. 1835. M. Massot, Paul, docteur-médecin, membre du Conseil-Général. 1835. M. MouCHOus, Théodore, pharmacien, mem- bre du comité de surveillance des écoles primaires. 1835. M. Passama, docteur -médecin, membre du conseil-municipal. 1836. M. Bresson, propriétaire. 1836. M. Lacombe-Saint-Michel, propriétaire, con- seiller de préfecture. 36G 1836. M. Lacroix, *, président du tribunal civil. 1836. M. Méric, François, homme de leilres, juge de paix. 1836. M. PiCAs, llippolyie, représenianl du peuple. 1836. M. Vimort-Maux, manufacturier. 1838. M. AuGÉ, *, capitaine en reiraiie. 1838. M. Famp, géomètre de 1'^ classe, adjoint au maire. 1840. M. Bonafos, docteur-médecin, professeur de botanique. 1840. J\l. Carcassonne-Frigola, négoc , membre du comité de surveillance des écoles primaires. 1841. M. Domenech, François, avocat. 1841. M. Eycheistme, aîné, propriétaire. 1841. M. lIuRET, ^, ancien principal du collège de Perpignan. 1841. M. Lazerme, Charles, propriétaire 1841. M. Mattes, sous-directeur de Técole normale. 1841. M. RocAMiR-DE-LA-ToRUE, peintre d'histoire, expert honoraire des musées de Paris. 1841 . M. ViADER, docteur en médecine. 1841. M ViLLALONGUE, Sylvcsirc, négociant. 1842. M. SoucAiLLE, conduci. des ponis-et-cliaussées. 1843. M. Guiraud-de-Saint-Marsal, G ^, colonel du génie en retraite. 18'j3. m. Triquizra, instituteur, propriétaire, à Prats- de-Mollo 1845. M. Camps, négociant, homme de lettres. 1845. M. Jaubert-de-Passa, ^, piopriétaire, corres- pondant de l'institut , membre du conseil général. 1845. M. Pages, *, Bonaveniure, ancien préfet. 1845. M. Pages, Sébastien, piopiiéiaire, à Palan. 367 1845. M. PuiGGARi, homme de lellres, ancien prin- cipal du collège de Perpignan. 1846. M. AzÉMAR, propriétaire, vice-consul d'Espa- gne. 1846. M. De Ginestous , propriétaire, à Caladroy. 1847. M. D'AuBERjEON, propriétaire 1847. iM. De Bonnefoi , Louis, homme de lettres. 1847. M- Carcassonne, Jean, propriétaire. 1847. M. Cuii.T.É, Geruîain, négociant, conseiller de préfecture. 1847. M. GiRvÈs, Sauveur, propriétaire, à Llô. 1847. M. 5^enard-de-St-Malo, *, correspondant du Ministère de l'instruction puhlique pour les travaux historiques. 1847. M. Vat.larino, Antoine, négociant. 1847. M. ViLT.ANOVA, docteur-médecin j naturaliste, à Arles. 1848. M. Desprès, Anionin, propriétaire. 1848. M. Garau, .loseph, avocat. 1848. M. GouEii., Pierre, docteur en médecine. 1848. M. Lefranc, Pierre, homme de lettres, re- présentant du peuple. 1848. M. Moker, Joseph, archiviste du département. admis depuis le l^"" janvier 1845. (Voir la liste générale dans le d" volume , I"" partie). 1845. M. Cari. Ritter, professeur à l'Académie de Berlin. 1845. M. Maniel, professeur d'entomologie à Mont- pellier. 1846. M. Aymar de Bression, de Paris. 368 1846. IVl. JoLiAN Bassou, lieutenant colonel d'infan- terie de marine. 1846. M. Guillaume, Alexandre, chef de bureau au ministère du commerce. 18A7. M. DuPUY, prêtre, professeur d'histoire natu- relle à Auch. 1847. M. Irat, avocat à Paris. 1847. M. De St-Walo, fils, avocat à la cour de cas- sation. 1847. M. Le Marq. de Belpuig a Palnia (Mayorque). 1847. Don Joachim Maria Bover de Hosellû (Mayor- que). 1847. Don N"' Brondo y Zaforteza à Palma (id). 1847. M. CABARRUs(de), consuldeFranceàPalma(id). 1847. M. ScHAERER, naturaliste, pasteur à Berne. 1847. Don Basilio Sébastian Castellanos, C. de Tordre de Charles III, bibliothécaire à Ma- drid, président de l'Académie nationale dliistoirc et d'archéologie. 1847. Don Luis Maria Bamirez las Casas-Deza de Cordoue , président de l'Académie des sciences, arts et belles-lettres. 1847. Don Modesto Lafuente, homme de lettres, h Madrid. 1847. M Isidore Chaussât de Palma (Mayorque). 1847. M. G^ MoLÉON (de), publiciste, à Paris. 1848. Don Bamon Medel de Palma (Mayorque). 1848. Don Antonio Martinez de Palma (id.) r,^. I. X F,g. 2 Planche 5. ■\ ' 'V , /'fi/. S i,i,&iiîsri',oi>n«''' Cftapc, Itfà Hue i'/i'tJ,! drr hreiaiian i ' Pltiiulte 6 fj SAROTHAMN \]Z CARLIERUS f'Co,„py ■Vt:' r ^f"; " ^ 'V- oAHClHAilirUS jaube: f i(l. Rniitrillnniiaisp PLlIV, rTr'lTV l'Iaiiclic y. fiiçaife lù la Lnife dr t //»' c/ Discours de M. Coinpanyo, président, dans la séance pu- Pages bliqiie du 28 septembre 1845 1. Discours de M. Lloubes , sur les objets d'agriculture qu'il importe le plus d'encourager H. Rapport de M. Companyo, sur l'éducation des vers-à-soie trévoltini 13. Rapport de M. Eugène Durand , sur le concours pour la fabrication des dentelles 16. Rapport de M. Lloubes, sur le concours de peinture en 1845 19- :1tiunce 1S4G. Discours de M. Paul Massot, président, dans la séance pu- blique du 25 octobre 1846 22. Etudes sur le reboisement des terrains en pente , par M. Falip 97. Rapport de M. Companyo, sur les plantations d'olivier et de mfiner 62. Notice sur le commerce catalan de la côte de Barbarie, par M. Renard-de-Saint-Malo 73. Notice sur l'cincicnnc abbaye fl*" St-Martin de Canigo], par M. Puigg.-ni 119 370 Année 1S4V. Discours de M. Guiraud-de-Sainl-Marsal, président, dans Pages la séance pnljliqiie du 7 novembre 1847 177. Rapport de M. Corapanyo, sur la greffe du cliêne-Iiége sur le cliène-vert 195 . Rapport de M. Charles Lazerme, sur le concours pour l'ex- ploitation la mieux dirigée 198. Rapport de M. Fraisse aîué, sur la culture du mûrier et de l'olivier 211. Rapport de M. Guiraud-de-Saint-Marsal , sur les mines de houille de Ségure 215. Prix et encouragements décernés par la Société dans la séance publique de 1847 220. Primes du gouvernement proclamées dans la même séance. 221. Exposition de 1847 222. Notice sur l'altération des pommes de terre, par M. Vilaseca. 225. Notice sur l'emploi de l'éther, comme nouvel agent théra- peutique, par M. Paul Massot 23j. Démonstration de deux théorèmes de géométrie , par M. Crova 252. Démonstration du principe fondamental de la trigonométrie sphérique, par M. Crova 255. Notice sur une pierre tumulaire, par M. R. de St-Malo. . 256- Notice sur divers objets d'archéologie locale, par M. Puiggari. 261 Notice sur l'ancienne culture de la garance en Roussillon , par M. Renard-de-Saint-Malo 269. Hydrologie, par M. Bonis 283. Description de deux nouvelles plantes de la famille des Gé- nistées, par M. Companyo 313. Rapport de M. Paul Massot , sur les eaux minérales de St- Martin-de-Fenouilla 321. Note sur les bâtiments de la Loge de Mer, par M. Guiraud- de-Saint-Marsal 326. Belles-lettres. Un .Saint-Simonien à Perpignan , souvenir de 1 834 , par M. Carcassonnc-Frigola ■'-'' 371 Déception, par M"*^ Atiais Faine née Biii,m. correspond. . 337, Première page, par M. Pierre BatUe 341. Dernier chant: aux poètes chrétiens, par M^^ Anaïs Faiire, Pages née Bill 344. Trois sonnets par M. Pierre Baille : Les couvents 347. Souvenir d'un soir 348. L'arbre de la croix 349. A M. Jean Carcassonne-Frigola, par M""^ Anaïs Faure, née Biu 350. Départ à M. et M^e *** , par M. Pierre Batlle 351. Programme des prix que se propose de décerner la Société en 1848, et des primes accordées par le gouvernement. 353 Météorologie , tableau des quantités de pluie tombée pen- dant douze années à Perpignan. Moyenne annuelle. . . 357. Modifications au règlement de la Société des Pyr.-Or. . . 358. Composition du bureau en 1846, 1847 et 1848 363. Liste des membres résidants de la Société agricole, scienti- fique et littéraire des Pyrénées-Orientales 364. Liste des membres correspondants, admis depuis 1845. . . 367. ERRATA. Page 22, Discours Jl' M. P. Massot, président, lire en tète: IS'ifi. — 139, ligne 7, du, Usez au. — ^57, — 22, ses, lisez ces. — ne, — 0, n78, usez nss. — 264, — 9. C'est d'abord, etc. Effacez celle phrase. FiiX. ^^^T^mi 'ife#''l> i. «7f •: t 1 11 '^ «