AR NELCEE Jtré$ v44 Pi 20 RS Miiadex mate te de (F5 481 16924" Pur US + er ne 1x 21391 PMRCORTEREENEL EC] BRÈS es U Hate AA 1 TEtS j PRE PP ULEAACUE ArArmets 2e 4/0 TE pe PPT RICA NI Fute +4 A PtYE JA £ y An hr AN TAN ARE Hip es ee 47 14 Pr AI + hr: PH EH Lvs 4 de FRA GA re Lgre: HAUT U 11241449 DÉPOT 2 MAYENNE y Ce 35 sure} AN 1144 AU “ns PR THERE TRES $ xp 4 Ë NAME SATA Ds ES Tintens HIER MST CET Fe dire HstS: V2 r9254 PETER HO 22 Ras) 1h MEN 5 CARINUAT AU Nos nl ELI 22664 A 11454 Tigiataté [A à rés U0 7 ) APPLE D 2 DRATEUTE Le NS 1 ri MTS HER É 4 #0 + if Eat MARNE A ttqe Rae t4 Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa http:/www.archive.org/details/calendrierdufermO0youn à CALENDRIER DU FERMIER. mn Imprimé fous le privilege | & avec l’ap- probation de la Société royale d’Agri- culture. Chez la VE, TARBÉ, Impr. du Roi, à Sens. CALENDRIER DU FERMIER, OU INSTRUCTION , mois par mois , fur toutes les opérations d'Agriculture qui doivent Je 2 dans une Ferme. OUVRAGE TRADUIT DE L'ANGLOIS, Avec des Notes inftructives du Traduéteur, fur les objets particuliers à la Culture Angloife. PAR M. LE M. DE G**, Membre de L Affemblèe provinciale de l'Isle de Frances 6 de la Société Royal d'Agriculture. A PARIS: Chez GATTEY, Libraire , au Palais - Royal ; CUCHET , Libraire , rue & Hôtel Serpente ; & NÉE DE LA ROCHELLE, Libraire, rue du Hurepoix , près le Pont Saint-Michel. M DCC, LXXXIX. à + r EF LE L ENT HAS PRET | 4 EX TR ANT DES REGISTRES DE LA SOCIÉTÉ ROYALE D'AGRICULTURE. Du vignt-trois Avril 1780. M. le Marquis DE GUERCHY , ayant préfenté à [a Société Ze Calendrier du Fermier, traduit de l’Anglois, M. Abeille a 1V Ca V] APPROBATION, & moi avons été nommés Commiflaires pour en faire l'examen & le rapport. Cet ouvrage eft d’autant plus pré- cieux pour le cultivateur François, qu'il préfente la pratique de l'Agriculture Angloife & de tous les avantages qu’elle retire des clôtures ; de l'augmentation des fubfiftances des beftiaux par la cul- ture des prairies artificielles , des pommes de terre, des carottes, qui facilitent la multiplication des beftiaux , d’où réfulte la quantité des engrais & l'abondance des moifflons qui en font la fuite. On y voit en détail la fucceflion des tra- vaux & des foins du fermier Anglois pour chaque partie de l’économie ru- rale , ainfi que les fuccès & bénéfices , dont on préfente le tableau, d’après les APPROBATTON. Vi] frais & récoltes de chaque genre de culture. Plufieurs de nos provinces font fufceptibles du même genre d’exploita- tion , & la plupart, de quelques-unes des cultures & des méthodes pratiquées par le fermier Anglois. Ce livre a lavantage de préfenter des faits & une pratique certaine & heureufe. Le culti- vateur peut donc le confulter avec con- fiance & adopter les ufages , méthodes & cultures qui y font décrites , toutes les fois que le climat & le fol ne s’ÿ op- pofent pas. Nous eftimons donc que cette tra- duétion , fruit du zele éclairé de M. le Marquis De GuercHy, pour l’écono- mie rurale, mérite l'accueil & lappro- bation de la Société royale d’Agricul- VIE APPROBATION. ture, & de paroiïtre fous fon privi- lege. Signé, ABEILLE, BONCERF., Je certifie cet Extrait conforme à l'Original & au Jugement de la Société ; à Paris , ce 24 Avril 1789. BROUSSONET , Sécretaire perpétuel. a ———————————— EUR IA NEUR Page 12, ligne 9, après les $ arpens , ajoutez de prés. Page 28, ligne 18, lifez: quand il eft bien cultivé. Page 91, ligne 24, lifez: c'eit que nous. Page 154, ligne 1, foient, lifez : forment. Page 169 , ligne 4, perdoit , lifez: perdroir, Page 229, ligne $ , chaume, lifez : chacun. Page 234, ligne 4, plaille , life : paille. Page 258, ligne 1, on, lifez: ou. Page 293 , ligne 2, lifez : que l’on a proprfé, a. AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR ee $ AGRICULTURE , la première de toutes les fciences, puifque c’eft elle qui nous enfeigne la manière de multiplier toutes les plantes néceffaires à la nourriture du genre humain, après avoir été longtems méprifée & négligée , eft heureufement , depuis quelques années, rentrée dans tous fes droits, Les Rois, les Princes , les perfonnes les plus diftinguées dans toutes les claffes de l’Etat, ne dédaignent plus de s’en oc- x AVERTISSEMENT cuper. Le Gouvernement en France , cherche depuis quelques années à exciter la plus grande émulation parmi les Agri- culteurs, en leur promettant des encou- ragemens. Les Sociétés d'Agriculture fe font établies dans tout le Royaume. Celle de Paris a fourni à la Nation plufieurs excellens Ouvrages en ce genre. Les Mé- moires qu’elle fait journellement impri- mer , contiennent plufieurs extraits d’ou- vrages Anglois. On fait que depuis long- tems cette Nation excelle dans cet art, & l’on peut, fur cet objet, les prendre pour maitres , fans craindre d’être accufé de tomber dans l’anglomanie atuelle, La réputation qu’ils ont à cet égard, leur eft bien méritée ; le defir que j'ai eu de connoitre tous leurs principes, DU TRADUCTELUR. XJ m'a engagétäWaire plufieurs voyages dans ce pays, en différentes faifons, pour voir tous leurs procédés de culture fur chaque objet. J'y ai reconnu que l'origine de leurs talens vient de l'ingratitude d’une partie de leur fol, qui les a obligés à cher- cher , par des expériences multipliées , & lintrodu&tion de nouvelles plantes, les moyens d'en tirer un bon parti. J’ai été tout d’un coup frappé de l’idée qu'il fe- xoit honteux pour une Nation aufli inf- truite , à tous égards, que la nôtre, d’i- gnorer les moyens que nos voifins em- ploient avec fuccès , tandis que lon pro- pofe annuellement en France des effais incertains ; & J'ai cherché en conféquence à connoître leurs meilleurs auteurs en agriculture. Nous vivons dans un pays fertile, où xÿ AVERTISSEMENT. les terres ne rapportent paSfimoitié de ce qu'elles devroient faire, par la manière négligée de les cultiver. Les Cultivateurs attachés à leurs anciennes routines , n’o- fent pas fe livrer à de nouveaux eflais qui ne leur font donnés que par des ama- teurs du bien public, qui ne les ont pas faits eux-mêmes. L'Ouvrage que je donne aujourd’hui au Public, n'a point cet inconvénient. C’eft une traduétion littérale de l’Auteur le plus eftimé d'Angleterre : on n’y trou- vera point de ces confeils fuperflus , dont l'exécution eft impraticable; on lira de fim- ples avis donnés par un Cultivateur expé- rimenté , qui les rapporte dans un ftyle peu fleuri ; ceux qui cherchent l’emphafe dans leurs leêtures , ne la trouveront pas ici, Je DU TRADUCTEUR. XII] ne me fuis attaché dans la traduétion qu’à lexaétitude & à la clarté ; Je n’ai rien chan- gé , que les noms des mefures & de lar- gent, que j'ai réduit aux valeurs de Fran- ce; toutes les autres chofes qui deman- doient quelques explications , font éclair- cies par des notes. Je n'expliquerai point ici le plan de Ouvrage, l’Auteur Le fai- fant parfaitement dans fa Préface. Mon but, en faifant cette tradu&tion, n'étant que de me rendre utile à mes Concitoyens , Je n’ai point cherché l’élé- gance du ftyle, & ne puis à cet égard, trop folliciter l'indulgence de mes Lec- teurs. J'ai cru devoir fupprimer tout ce qui étoit abfolument étranger à notre Con- XLV AVERTISSEMENT. trée , pour que le Volume foit portatif, & moins à charge à ceux qui fe le pro- cureront. a — PRÉFACE DUE LL A UT FER D ve L ES Jardiniers ont reconnu depuis longtems l'utilité dont leur étoient les calendriers publiés jufqu’à préfent, pour leur enfeigner les ouvrages qu'ils avoient à faire chaque mois : nulles profef- fions n’ont autant de rapport que la leur & celie des Fermiers , & ces derniers ne manqueront pas de fentir le prix dont fera pour eux un Ouvrage femblable. Le but de ce Livre n’eft pas d’infiruire d’an- ciens fermiers expérimentés , qui favent prefque tout ce qui y eft contenu; mais comine malheu- reufement ce nombre n’eft pas le plus grand , les jeunes - gens. qui commencent leur état y trouve- ront des détails três-inftru@tifs, & doivent s’en faire un compagnon inféparable. Au commencement de chaque mois , un fermier, foit qu'il ait ou qu'il n'ait pas un ouvrage de cette efpece , doit réfléchir aux divers travaux qu'il a à faire pendant'le mois , il doit tout prévoir pour faire les approvifionnemens néceffaires. Maintenant je laifle à juger au lefteur fi cela À 2, PR EF MCE eff fort facile , & fi l'on n'oublie pas aifément bien des chofes, quand on n’a rien pour vous re- mettre fur la voie; & fi un livre comme celui- ci, quand il ne rappelleroit au cultivateur qu’une fois dans l’année, un ouvrage important qui au- roit échappé à fa mémoire , ne le dédommageroit pas amplement de la petite dépenfe qu'il auroit faite pour fe le procurer. Je dis cela, parce que plufieurs fermiers font très-regardans pour les dé- penfes qu'ils croient fuperflues; c’eft pourquoi, je veux leur démontrer qu’un livre de cette efpece peut leur être de quelque utilité , vérité dont ils ne font pas tous convaincus. Tous les calendriers qui ont paru dans ce genre jufqu’à préfent, n'étoient qu’une efquifle diffufe & très-imparfaite de chaque objet , omettant les cho- fes les plus importantes |, & malgré cela aflez longs pour rendre l'ouvrage d’un haut prix, ce qui a dégoûté les cultivateurs d'acheter tous les autres ouvrages qui ont paru dans ce genre. Il y a environ cinquante ans qu'un Anglois, célebre en agriculture , M. Tu/!, fit fur la culture des terres , plufieurs expériences dont le but étoit de prouver l’inutilité des engrais. Dans ce tems-là il eut plufieurs imitateurs ; ceux qui fuivirent fon fyflême multiplièrent leurs labours , ce qui, felon lui, peut fuppléer aux fumiers. On ne devoit met- tre aucun engrais fur les terres , & les garder pour ET TS Se LES D # EAU T EVUR, 3 fumer les herbages & pâtures. Heureufement ce fyflême n’a pas été généralement fuivi, car il en feroit réfulté une perte réelle pour lagnculture ; & 1l eft bien à defirer qu’on ne retombe pas dans de pareilles erreurs , tant pour la perte du tems que pour l’augmentation néceffaire de bras & de chevaux qu’elle entraîneroit. Le grand avantage des engrais eft bien généralement reconnu , & tout fer- mier bien inftruit en fent tout le prix. Cette par- tie de la culture ne peut jamais être trop recom- mandée , & malheureufement elle a été fort né- gligée par tous les écrivains ; excepté un ou deux, à qui il faut rendre la juflice de dire qu'ils ont traité cette matière de main de maître, les autres ne l’ont pas trouvée digne de leur attention. Un autre objet, négligé aufh par les anciens écrivains en ce genre, eft d’avoir recommandé aux cultivateurs de tenir un regiftre exaét de leur re- cette & dépenfe , au moyen duquel ils puflent à chaque moment de l’année fe rendre compte à eux-mêmes. Comme on ne peut pas traiter cela particulièrement dans un mois plutôt que dans un autre , (marche adoptée dans cet Ouvrage) , nous allons en dire ici deux mots. Il a déja paru depuis quelques années plufeurs modeles de regiftres dans ce genre, comme font ceux des marchands; mais ils étoient fi mal faits, qu'ils étoient plus capables de dégoüter un fermier Ai 4 PRÉFACE d’un pareil foin, que de l’y encourager. La fe:le chofe néceffaire eft de tenir un regifte | où l’on écrive chaque article qui concerne la ferme , ayant une page pour chaque champ , ou au moins une pour chaque champ labourable |, & une pour tous les herbages enfemble. Le fermier doit infcrire fur ce regiftre toutes fes dépenfes ; mais pour le faire avec fruit, il faut qu’il tire à part le prix de fon loyer , & le di- vife en autant de parties qu’il a de champs enclos(1}; de forte qu’en les additionnant , cela fafle le prix total , fans faire un article à part du loyer, à moins que cela ne foit pour mémoire : il faut qu'il divife de la même manière toutes fes autres dé- penfes , comme la dime, la taxe des pauvres, & autres objets divers. Pour entendre ceci, fuppofons que pour Par- ticle dime , il ait payé en argent au curé , pour dimes de grains , d’herbages , menues dîmes , ce qui varie tous les ans, & fait une grofle dépenfe pour la ferme entière, une fomme de cent louis: s’il a quatre cens acres de terre , il en entrera en compte pour fix francs par acre. Il faut faire la même opération pour la taxe (2) Il faut, pour entendre cela, favoir qu’en Angle- terre tous les champs font clis ce haies & de foffés. D'EN L'AUTEUR. $ des pauvres , travaux extraordinaires , gages du mefher , dépenfes au marché , &c. L'entretien des haies & foflés peut en former un à part : tout cela doit être reporté, divifé fur chaque champ. Par cette méthode , le fermier peut toujours fa- voir le profit réel qu’il fait fur chaque piece de terre , ou la perte , s’il y en a , ce qui eft de trés-grande importance pour lui. Il peut auf par ce moyen, en tout tems , en ouvrant fon livre, voir quelle efpece de récolte l’a le mieux payé de fes dépenfes , & calculer quel eft l’ordre de culture qui lui a rapporté davantage, pour la- dopter. Par exemple, il aura calculé qu’un enclos de dix acres de terre cultivés dans l’ordre fuivant : La première année , fur le chaume de bled , des turneps ou gros navets ; La deuxième , de lorge, ( on met du trefle parmi ) ; La troifième , en trefle; La quatrième , en bled, Si , dis-je , il a calculé que cet enclos, au bout de huit ans, lui ait rapporté 3000 liv., & que dix autres acres cultivés dans l’ordre fuivant : Première année, jachère ; Deuxième , bled; Troifième , orge; Quatrième , avoine ; A ï 6 P RÉEL E ne lui ont rapporté au bout du même tems que 1600 liv , il voit tout d’un coup combien une culture eft préférable à l’autre; & cela ne fera pas par un calcul vague , mais par une jufle balance mife entre chaque année, Il comparera de même le profit des différentes fortes de befliaux, pour voir, au bout de l'an, quelle eft l’efpece qui lui rapporte davantage, Perfonne ne peut douter de l’avantage qu'il y a d'exploiter & de régir ainfi une ferme: & voilà pourtant ce qui n’a Jjatnais été traité particulière- ment par aucun auteur. On pourroit citer plu- fleurs exemples pour prouver lutilité de fuivre une pareille marche, mais ce feroit pañler les bornes de cet Ouvrage. Après avoir fait fentir la néceflité d’un calen- drier pour les laboureurs , & l’avantage qui réful- tera pour eux de tenir un regiftre de recette & dépenfe ; cela m’amene naturellement à ‘dire un mot ou deux du grand profit qu'il y a à exploiter une ferme, quand on le fait avec intelligence. Qui- conque voudra en faire l'épreuve , trouvera qu'il n’y a pas de fpéculation , où lon tire un plus gros intérêt de fon argent; &t en même tems c’eft occupation la plus agréable, & la meilleure pour fa fanté : car depuis le plus grand domaine jufqu’à la plus petite ferme, tous les détails font intéref- fans, le foin de lintérieur de la maïfon, des che- DEN E AU TER, 7 vaux des befliaux, occupent agréablement; & fi tout cela eft admuuftré avec prudence , on peut en retirer les plus grands avantages , fans rifquer d’être entrainé dans des dépenfes dangereufes. Le plus grand mérite d’une exploitation. agri- cole fur toute autre, eft de pouvoir la commencer avec peu de fonds. Quelle branche de commerce peut-on entreprendre, fans faire une aflociation ou avoir cent à cent-vingt mille livres d’avance ? tandis qu'un jeune fermier qui a de l’ordre & de l’in- teligence , peut prendre une ferme de cent acres, avec dix à douze mille livres d’avance , la bien ex- ploiter, & vivre agréablement, en retirant un pro- fit annuel de 3 à 4000 liv., c’eft-à-dire, de 30 à 40 pour 100 de fon argent. Il eft vrai que lorfque je calcule fur un tel pro- fit, j'entends qu’il fuivra un meilleur ordre de cul- ture que la routine ordinaire , qui ne lui rapporteroit pas à beaucoup près autant que sil tire parti de fes terres par l’introduétion de la culture de di- verfes plantes utiles. Non que je veuille jamais en- gager un cultivateur , &t furtout un fermier, à fe perdre dans les eflais de nouveaux fyflèmes , ou de plantes étrangères qui n’appartiennent qu'aux jardins, mais feulement lui confeiller de choifir le genre de plantes ou racines qui conviennent mieux à fon fol, & qui le mettront à même d’entrete- nir dans une ferme de peu d’étendue une quantité À iv 8 PRÉFACE de befliaux auffi confidérable que dans une grande, En général, tout laboureur doit fe mettre dans la tête qu'il y a plus de profit à bien cultiver une petite quantité de terres, que d’en faire valoir une plus grande, à laquelle on ne peut pas donner les lsbours & engrais néceffaires. La luzerne , les choux , les carottes &t les pom- mes de terre peuvent entrer dans prefque toutes les cultures, excepté quelques fols qui leur font peu propres. Ces plantes font de la plus grande reflource dans une petite ferme, & mettent, comme je lai dit plus haut , le fermier à portée de nourrir autant de beftiaux que dans une grande ; mais comme ces plantes demandent que les terres où on les feme foient bien fumées , ce fera furtout un très-grand avantage pour une petite ferme, d’être fituée près d’une grande ville, où on peut acheter du fumier de toute efpece , parce qu’alors tout le tems qui n’eft pas deftiné aux labours & aux récoltes, doit l’être à aller chercher du fu- nier en menant vendre des denrées au marché. Pour prouver le profit que le fermier feroit par cette conduite , fuppofons une petite ferme de cinquante acres (1) où il y aura quatre chevaux, (x) L’acre anglois eft de cent foixante perches de feize pieds, le pied de onze pouces de France. \ DE L'AUTEUR. 9 "&c la diflance de la ville, telle qu’on ne puifle me- mer qu'une charge (1) par jour : la dépenfe pour Ja nourriture de quatre chevaux toute l’année , Ôtant la faifon où ils font au verd, . 960 liv. Un charretier, nourriture comprife, . Goo Faux frais de bourrelier, charron , ma- MG LL |". . OO Trois cens charges de fumier, à 6 liv. 1800 Pour l’homme en chemin & à la ville, Beétbariens)(e) s". ." . 6. 9600 FO TAL. ";, 7. 4400 Les fix cens voitures de fumier lui reviendront à 7 iv. 18 f. chaque. Tel eft le prix auquel le fumier lui reviendroit, fi fes chevaux ne faifoient que cet ouvrage toute l'année, À préfent , mettons que la ferme ait cinq acres (x) Ce qu’on appelle une charge de grandes voitures à quatre chevaux , en Angleterre, fait deux tombereaux de notre pays. (2) Pour entendre cet article, on doit favoir qu’en Angleterre les routes s’entretiennent par le moyen de péages avec des barrières. 10 PRÉFACE de luzerne , cinq de prés naturels , & trente-cinq de terre labourable, divifés ainf : Cinq en pommes de terre, Cinq en carottes, Cinq en choux, 35 arpens. Cinq en orge, Dix en trefle, f Cinq en bled, Les trois premières récoltes doivent tre fu- mées tous les ans, ainfi que la luzerne , &t moitié feulement du trefle , à douze charges de fumier l'acre , ce qui, au prix ci-deflus, fera monter les frais de chaque récolte (1) aux taux furvans : La luzerne , par acre, . . 150 liv. 750 liv. Les houR UPS UMR 1 PMERGS 840 Les pommes de terre, . . 200 100% Plus, pour acheter des porcs pour engraifler, . . . 200 1000 Peer carottes tr NN aie 1200 Plus, pour acheter des porcs, 500 2500 7299 (x) Le mot de récolte, en anglois, comprend toutes les préparations néceffaires pour lobtenir. D ET L’ A'U IT NAN RL 1# Ci-contre, . . iv. 7290 lv. Bd, UK). Je. 0,108 450 OR 0 LOT VD 450 Le trefle, moitié à 120 liv. bRRanre 2/36, .: F2" 156 780 a 4, 1," . 30 150 Pour frais de charrois au mar- A ins 720 RAM AL UE, 9840 Ces récoltes , fuivant ces prix, montent pour cinq acres de chacune , en frais, à . . 260 lv. PRODUIT. Les cinq acres de luzerne , & les cinq de choux engraïfleront dix-fept vaches, à 6 louis de bé- meceupaf vache, . 7 40024440) hv Les cinq acres de carottes, à fept cens boiffeaux , par acre , trois mille cinq cens boifleaux à 12 p. . . . . 2100 Premier achat des porcs (1), . + 2400 6948 (x) Note de l Auteur. Il eft jufte de déduire le prix des porcs , les ayant portés en dépenfe , mais non pas 12 FA XP R'ÉMIANC € De l’autre part, . . . 6948 liv. Cinq acres de pommes de terre , à cinq cens boïffeaux par acre , deux mille cinq cens boifleaux à 18 p. . . . 22$0 Premier achat des porcs, . . . . 1200 Cinquacres, Ge, bled), et. JO. ‘18 SES Ébqideme st UP, CS 2 NUS Dix de trefle, à cinq charges par acre, valent trente-fix livres la charge, . 1800 RECETTE TOTALE, . . 13998 nr Les cinq arpens laïffés pour la nour- riture des quatre chevaux, déduifant less ot PE US safe 0 APRES Le produit net fera de . . 4558 Il n’y a pas de doute que cette manière de cul- tiver peut être réalifée partout où la fituation per- le bénéfice de l’engrais , vu que ce feroit autant de boif- feaux de moins de vendus. Nota. Au refte, cet article de l’auteur n’a pas paru bien clair au traduéteur ; mais en ne portant le prix des porcs ni en recette ni en dépenfe , le réfultat feroit le même. DE L'AUTEUR. 13 mettra d'admettre les fuppoñtions que nous avons faites ci-deflus. On trouvera peutêtre que j'ai porté les récoltes bien haut , mais elles ne le font pas trop, vu la quantité d'engrais , d’après laquelle j'ai établi mon calcul. Nous voyons par-là quel profit peut faire un fermier intelligent, fur un petit terrein., Mais jamais un fermier médiocre ne pourra en approcher, en fuivant la routine ordinaire , & en n’admettant pas la culture des plantes & racines avantageufes en- feignées dans cet Ouvrage. Cela fait voir l’impor- tance de bien entendre l’agriculture dans tous fes détails, ce qui la rend alors une des fpéculations les plus avantageufes. L’argent que l’on emploie pour cela ne fauroit affurément être mieux placé, & une pareille confidération mérite l'attention de tous les fermiers. Il faut efpérer que l’Ouvrage que nous préfen- tons aujourd’hui au public, leur fera concevoir cette vérité, & leur fournira tous les détails qui y ame- nent , malgré le mépris qu’en pourront faire ceux qui font fi attachés à leurs vieilles routines, qu'ils ne veulent pas même tâcher d’en fortir pour leur plus grand avantage. Près des grandes villes , le bénéfice de ce fy{- tême d’acheter des engrais , fera bien plus vifñble que partout ailleurs. Auprès de Londres , il y a 14 PRÉFACE DE L'AUTEUR. des fermiers qui entretiennent un attelage (1) uni- quement deftiné à conduire tous les jours à la ville du foin ou de la paille , & à ramener du fumier, Du côté d’Heudon , les plus intelligens préfèrent les vidanges des latrines à tous autres engrais , cela leur coûte 3 liv. à 3 liv. 10 f. la charge, ils les char- rient l'été, & les laïffent en grands tas & couverts de terre , à l'extrémité d’un champ, pour les con- duire enfuite l'hiver par la gelée , fur les pieces de terre; cela revient à fix francs la charge, mais aucun engrais n’approche de celui-là; les habitans d’'Heudon, qui ont beaucoup d’herbages , en met- tent trois charges à l’acre : cela donne aufh fur les terres labourables des récoltes fuperbes. (1) Les Anglois entendent par attelage en général, quatre chevaux ou quatre bœufs, pour dire, le tirage d’une voiture, y ayant des provinces où lon fe fert des premiers, & d’autres où les feconds font en ufage. On fera d’abord furpris de voir dans un Ouvrage d’agriculture , parler de vendre des pailles au lieu de les garder pour la nourriture des beftiaux ; mais il faut favoir qu'en Angjieterre on ne s’en fert que pour faire des litières , ne trouvant pas cette nourriture aflez fuc- culente pour les vaches & moutons, qui ne font nourris que de fourrage ou de racines. FOIS DONNER Dieïs T RIO!U P E A'UUX. L ANS ce mois , les brebis commencent à agné- ler , c’eft alors qu'il faut en avoir grand foin, les turneps doivent leur être donnés avec abon- dance ; car la plupart des fermiers ont eu jufqu’à ce tems-ci aflez d'herbes , foit en plein-champ , foit en bordures (1) pour les nourrir, mais pour les moutons que l’on veut engraifler , & les brebis pleines , il faut au mois de Janvier les mettre aux turneps. Une méthode affez ufitée en Angleterre , eft de charrier les navets à mefure qu’on les arrache, & de les jetter fur une pâture feche & unie, où lon mene les troupeaux deux fois par jour, en ayant foin de leur faire manger ces racines , en petite quantité à la fois, pour qu'ils ne les fou- lent pas aux pieds & n’en rebutent aucunes. En 1 (1) En Angieterre, où toutes les terres font entourées de haies, il eft d’ufage de faire des bordures d’herbe , à laquelle lombre ne fait pas le tort qu’elle feroit aux grains. 16 JANVIER, donnant cette nourriture avec économie , elle fe confervera fort avant dans l’hiver. Dans des terreins bien fecs, des fermiers, pour éviter de fumer les terres qui ont porté des tur- neps pour y mettre de l’orge, culture qui les fuit ordinairement , les font manger aux troupeaux dans les champs, en faifant une enceinte de ce qu'ils doivent manger chaque jour , avec des claies qu’on tranfporte plus loin le lendemain ; cette méthode épargne beaucoup de frais, mais on ne peut lem- ployer que dans un fol extrêmement fec , fans quoi le mouton gâteroit plus la terre quil ne la fumeroit. Cependant, dans les terreins les plus fecs où l’on pratiquera cette méthode , le profit des turneps fera toujours bien moindre , car la fiente de la brebis, & fon trépignement furtout, gâteront une partie de ces racines. Il faut en outre avoir deux parcs pour mettre féparément les brebis pleines, & les bêtes à l’en- grais pour le boucher , & doubler la nourriture à ces dernières. Dans les tems humides, d’orages ou de gran- des neïges , les moutons doivent ètre nourris avec du foin; quelques fermiers les mettent dans les Bois de huit à dix ans , ce qui les abrite & les nourrit en même tems ; d’autres leur donnent le foin dans des rateliers portatifs, & leur en don- nent JaNvtiEen 17 nent une certaine quantité chaque jour au parc. C’eft une excellente méthode , de leur donner .chaque jour une petite quantité de foin dans ces rateliers , malgré qu'ils foient nourris aux turneps; mais cela n’eft pas abfolument néceffaire. Il y a même dans quelques parties du royau- me, des fermiers qui, quand les brebis ont leurs agneaux , les nourriflent de fon ou d’avoine & de turneps tout à la fois, mais il faut pour cela qu'ils foient d’une bien belle race , qui dédommage de cette dépenfe. Du Parcage, ù Beaucoup de fermiers dans ce royaurie, quoi» qu'ils entendent parfaitement l’objet du parcage, ne le pouflent pas aufli loin qu’ils le pourroient, ils font rentrer les troupeaux dès la fin de No- vembre , ou au cofmmencement de Décembre au plus tard , tandis qu'ils pourroient poufler avec fuccès le parc très -avant dans l'hiver jufqu’aux premières neiges. Dans des fermes où il y a des herbages très- fecs, il n’y a aucun inconvénient à les faire par- quer l’hiver entier | &t l’herbe en reçoit le plus grand engrais ; il n’en feroit pas de même d’un pré bas, ni d’une terre labourable humide, B_ 48 JANVIER, Il y a un autre moyen de tirer un grand pro- fit du parcage , fans que la qualité du fol y fafle rien , c’eft d’avoir un très-grand enclos fermé de murs ou de paliffades , bien garni de litière de chaume , de paille ou de fougère, pour enfermer le troupeau la nuit; vous avez par ce moyen vos moutons fainement & en bon air , & en ne mé- nageant pas la litière , vous aurez du fumier de quoi engraifler autant de terrein que vous en au- riez pu parquer ; car cent bêtes nourries ainf, avec du foin & des turneps , vous feront du fumier pour deux acres de terre au moins par mois , fi on a foin de les rentrer de bonne heure & lâcher tard, ce qu'ils n’auroient pu faire en parquant les mé- mes terres (1). Cour de la Ferme. Dans ce mois-ci on doit avoir grand foin de tous les beftiaux de la cour (2), c’eft-à-dire , de (1) Je ne fuis pas de l’avis de l’auteur anglois en cette occafon , d'autant que fi, au lieu de mettre un trou- peau dans ce clos , on l’eût fait parquer , on auroit eu la paille de refte pour faire la litière à d’autres bef- taux. L: (2) Les cours des fermes angloifes font immenfes , & … JANVIER. 19 éeux qui y font lâchés ; qu'ils foient régulière- ment fournis de paille, que l’eau ne leur manque “pas, ayant pour cela attention d’avoir le nombre de batteurs proportionné , pour qu'ils aient de la -paille fraîche tout l'hiver , la cour devarit toujours être couverte de paille ou chaume renouvellée jour- nellement, pour que les beftiaux fe couchent à fec , ce qui eft néceflaire à leur fanté, & aug- mente les engrais. | Des V’aches. Plufñeurs de vos vaches vêéleront probablement ce mois-ci; lorfqu’on les voit bien prêtes à met- tre bas , il faut les rentrer de la cour dans l’é- table & les raflourer (1) deux fois par jour en nourriture verte, c’eft-à-dire, en choux, turneps, carottes ou pommes de terre : lorfqu’eilles ont vêlé , 1l faut les féparer des autres, dans une éta- ble ou une cour à part. On nourrit celles qui élevent des veaux , avec des turneps & de la paille, les beftiaux y font lâchés tout l’hiver , chaque efpece dans un petit enclos de paliffades. (1) Terme technique que l’on ne peut guère rendre autrement, & qui fignifie garnir les rateliers, & man- geoïres de nourriture. Bi 20 JANVIER, mais point de foin, il tarit le lait. Quand à celles que lon trait, on retranche les turneps qui don- nent mauvais goût au beurre , & on les nourrit de choux & de carottes , ce qui augmente fort le lait, les premiers furtout font la nourriture la plus économique ; en ne leur donnant que le cœur , cela donne au beurre un goût exquis, & fi on ne les nourrifloit qu'avec du foin, cela em- porteroit tout le profit de la laiterie. Des Befliaux a l'engraïs. Dans ce tems-ci, les fermiers qui font ce com- merce, font dans le plus fort de leur ouvrage. Il . y a trois méthodes à fuivre pour engraifler les bef- tiaux avec des turneps , choux ou carottes. La pre- mière , de les donner fur une pâture feche, comme “on a dit pour les moutons ; mais il eft bien rare qu'il y en ait d’aflez feche pour porter les bœufs: la feconde eft de les lâcher dans la cour de la ferme ; & la troïfième , de leur donner ces raci- nes dans de grandes auges , fous des hangars où les beftiaux font attachés (1). Les deux dernières méthodes font les meilleures. (1) On a la plus grande attention en Angleterre de tenir toute l’année les beftiaux le plus à l’air que l’on peut. JANVIER 21 Si vous nourriflez dans la cour , vous mettez ces racines dans des auges, & donnez en outre de la paille dans des berceaux , fi le foin vous manque ; mais fi vous en avez, vous ferez bien payé de la dépenfe en leur en faifant manger. La même regle doit être fuivie dans les étables ou- vertes, avec le foin feulement de changer fouvent la litière , fans quoi la peau fe gâteroit , & les bef- taux ne profiteroient pas bien. Dans aucun cas il ne faut épargner la litière , le fumier dédom- mage au centuple de cette dépenfe. Des Porcs. Voici la principale faifon d’avoir des porcs, foit pour élever , foit pour engraïfler ; la dernière mé- thode étant traitée dans les autres mois , je ne parlerai ici que des truies & des éleves. Les truies doivent être féparées, avec bien de la litière, & nourries avec des lavures de laiterie, &t des carottes ou pommes de terre que l’on aura eu foin de récolter exprès pour cela. Ces végé- taux leur font très-falutaires , & valent autant que des pois & de l’orge qu’il faudroit acheter exprès pour eux , & même du fon ne les engraifferoit pas mieux. Les truies doivent toujours avoir à manger autant qu’elles en veulent , fans quoi les B iÿ 22 JANVIER. petits en fouffriroient | & même être tenues pro- prement & bien conchées , leur fanté en dépend ; & la grande quantité de cette efpece d’excellent fumier vous dédommagera encore de ces foins. La nourriture des porcs étant une des bran- ches de commerce la plus utile dans une ferme , économe ne fauroit y donner trop de fois. Je vais en peu de mots donner le détail du meilleur fyflême à fuivre. Un fermier qui veut faire le commerce des porcs, doit fe précautionner de plufeurs truies , & préalablement faire une fuffifante récolte de ra- cines propres à les nourrir, comme carottes , pom- mes de terre, navets, & même de l’orge. Dans une ferme ordinaire, on a une truie ou deux pour confommer les iflues de la laiterie ; mais quand il s’agit d’en faire commerce, c’eft différent. On doit avoir d’abord des pommes de terre pour les nourrir depuis la fin d’Oftobre jufqu'en Mai; alors on a un champ de trefle ou de luzerne où on les met jufqu’après la moïflon , en leur faïfant manger en détail dans des claies que l’on change. Par ce moyen, toute l’année fe trouve remplie de ces deux manières, fans compter ce qui tombe ordinairement des granges, qu’ils ramaflent devant les portes. | Quand les truies cochonnent , on les met à l’eau blanche avec de la farine d'orge, dans l'été, & » JFARN v 1'E'R 23 däns l'hiver oh ‘y mêle des pommes de terre bouil- liés; pour les petits, on les nourrit de même , en ñe mouillant prefque pas leur nourriture: fi on a des vaches à lait dans la ferme , on fe fert de lait clair au lieu d’eau. + D’après ces regles, un fermier doit proportion- ner fes éleves de porcs à fes récoltes, ou plutôt difpofer fes récoltes fuivant les éleves qu'il veut faire, &t s'arranger pour que fes truies cochonnent deux fois par an , en Avril & en Août, afin que les petits puiflent avoir de l'herbe en naif- fant. Dans cetté combinaifon , la vente des porcs maigres fe fera en Oétobre lorfqu'ils fortent de Phérbe, pour les charcutiers qui les achetent pour engraïfler , fi le fermier ne le fait pas lui-même. = Le fort de la cochonnerie (1) doit confifter alors dans les truies, & les petits nés en Août , qui doivent courir çà & là dans la cour pour pro- fier des pailles de la grange, & on leur donnera des pommes de terre, fi cela ne leur füffit pas. Des Chevaux. Le des plus utiles leçons que lon puiffe Fi (1) On excufera , dans un ouvrage purement agricole, d'employer ces fortes d’expreflions. B iv 24 JANVIER ner à un laboureur , eft de toujours tenir fes che- vaux à un ouvrage régulier ; la dépenfe d’un at- telage (1) cft fi grande , que s'il ne fuit pas cette regle il y perdra. Janvier eft le mois où tous les lbours doivent cefler, Si les gelées prennent dans ce mois, il faut en profiter pour charrier les fumiers, furtout les com- pots (2), fi on en a de prêts, pour les terres à orge, car cette récolte demande à être fumée. C’eft auffi le moment de charrier les fagots qui proviennent des haies, & les terres forties des foflés de bordure que l’on aura rafraïchis, Si au lieu de cela le tems eft humide , en doit s’occuper des charrois fur les grandes routes , pour mener du grain au marché, & en même tems ra- mener du fumier acheté à la ville, que lon dé- pofe fur le bord des terres, pour ne pas les fouler en y entrant, & enfuite en faire des compots. (x) Je n'ai pu rendre micux le mot anglois qui ex+ prime la totalité de chevaux ou bœufs qu’a un fermier pour fon ouvrage. (2) Compots , eft un mot anglois, que l'on ne peut rendre que par une périphrafe ; ce font des tas de fu- miers mêlés par couche avec de la terre, que l'on forme devant la porte de la ferme, & que l'on coupe par tranches lorfqu’elles ont quatre pieds de haut , pour mener fur les terres, JANVIER 25 - Ces regles peuvent avoir des exceptions, mais en général cette occupation fera trés-avantageufe dans des terres où on n’a rien à faire. La même chofe doit s’obferver pour les attelages des bœufs; & en général on ne peut trop recommander aux fermiers que ces animaux foient bien fournis de li- tière , fans quoi leur fanté en fouffrira , & les en- grais manqueront à la fin de l’année, ’ Du Barage. Dans le battage des grains & légumes , l’éco- nome (1) doit avoir foin de proportionner le nombre de fes batteurs à fes beftiaux , pour qu'ils aient toujours de la paille fraiche. Il doit fuivre de près fes batteurs , furveiller leur travail , & furtout leur probité : car il peut perdre beaucoup fi la gerbe n’eft pas bien battue, ce qui arrive fouvent ; ces gens étant à leur tâche, battent le plus facile , & lient enfuite les pailles avec moitié grain dedans. Cette manière de voler étant très- \ L (1) Econome , dans le cours de cet Ouvrage, dit tan- tôt le cultivateur, tantôt l’'économe , & fouvent le fer- mier, il faut favoir qu'on appelle en Angleterre, tout feigneur qui fait valoir , gentilhomme fermier , & il n’en eft que plus eftimé, 26 JANVIER facile , le maître doit les veiller de trés-près , aller à fa grange plufieurs fois par iour, & aufh fe trou- ver le foir fur le chemm des batteurs, poug voir s'ils n’emportent pas de grain ; maïs furtout y venir toujours à l’improvifte. Une pareille attention ren- dra à la fois ces gens honnêtes , quand ils auroïent eu Pintention d’être coquins ; au lieu qu’un maître indolent qui n’y regarde pas, rend fripons les gens les moins enclins à le devenir. Des Clôtures (1). Voici le tems d'entretenir les haies & les fof-’ fés, foin auquel l’économe ne fauroit trop’fe livrer; car s’il y laïfle former des breches , autant vaut qu'il n'ait pas de clôtures, pour empêcher les bef- taux d’autrui d'entrer dans fes champs , ou les fiens d'en fortir, ce qui eft de la plus mauvaife agriculture. L'opération doit fe faire ainfi : un homme com- mence par dégager la haie de tous vieux boïs, ronces , & de toutes les branches qui s’écartent (x) Pour entendre cet article, il faut favoir qu'en An- gleterre , comme nous l'avons dit, toutes les terres font enclofes de foffés, fouvent doubles, plantés de haies que Fon rafraichit & tond de tems à autre. JANVIER. 27 par le bas, laïffant monter les branches les plus fortes pour former la banquette du haut , de dif- tance en diflance, furtout les noifetiers , les or- meaux , les chênes , les frênes, les hètres & les faules , mais pas à plus de vingt à vingt-quatre pouces lun de l’autre, à moins qu’il n’y ait quel- ques breches , auquel cas on les laïfle plus près ; cela fait , on rafraïchit les foflés , qui doivent avoir au moins trois pieds dans un fond fee , & quatre dans un terrein humide , jettant la terre fur la berge extérieure , hors de la haie , afin que l’on puifle l'enlever pour les compots ; mais 1l faut pour cela faire marché avec l’ouvrier , fans quoi il la laïfle- roit fur le bord du foffé, ce qui gâteroit herbe des bordures (1). Si l’on a tondu la haie à uné certaine hauteur , on y entrelace des branches fe- ches, avec des pieux pour la défendre jufqu’à ce qu’elle ait repouffé. Cette pratique ne fauroit être trop recomman- dée, car les pieux que l’on met étant bien en- foncés , empêchent la haie de jamais pencher à droite ou à gauche, furtout fi on la fait de faules (x) Bordures. L'on doit fe rzppeler que lufage de ce pays eft d’avoir une bordure de trois à quatre toifes le long des haïes, en herbage qui fait tout le tour de la piece. 28 JANVIER: on autres branches ils reprennent, & font de bien plus de durée. L'on tond enfuite les branches qui dbaflont k en ne les coupant que ce qu'il faut pour les ren- dre flexibles & les entrelacer dans les pieux. Tout ce que l’on abat du bois, doit être employé pour regarnir l’intérieur de la haie, qui par ce moyen deviendra nmpénétrable. La haie ainfi faite, & les pieux ayant repris, le fermier peut être tranquille fur fa clôture : c’eft pourquoi on ne peut trop recommander lufage des haïes vives , qui font bien fupérieures aux autres ; car les feches fe détruifent, & pourrifient en fort peu de tems , c’eft toujours un ouvrage à recommencer. Des Tranchées pour Ls Defféchemens. Janvier eft le tems propre pour ces ouvrages. H a deux efpeces de ces tranchées qu’on eft en ufage de faire dans les terreins fujets à être noyés. Je ne parlerai que de celles couvertes ; il y a deux manières de les faire , foit avec la charrue , foit à la bêche. Dans la première, une charrue st plufieurs fois dans le même fillon pour le creufer au niveau des eaux: ou bien on creufe avec une efpece de HAN VIEN 29 bêche particulière (1), des rigoles de quatre pou- ces de large au fond , & s’élargiffant par le haut, fuivant la profondeur. Si un fermier a une terre où il n’y ait pas aflez de pierres pour arrêter la charrue , la première méthode fera moims difpen- dieufe ; mais il faut obferver que la charrue ne peut fervir que pour de petites tranchées , la bêche doit être employée pour les grandes. Suppofons , par exemple , un champ d’une grande étendue , très-marécageux , coupé par plufieurs ri- goles ou tranchées paralleles faites à la charrue , multipliées jufqu’à ce que la terre ait bien fon égoût; ces tranchées n’étant pas aflez larges s’é- bouleront facilement , au lieu que, faites à la bêche & plus larges, elles feront plus durables , & dé- dommageront bien de la dépenfe. Les prés marécageux font fujets à porter des jones & d’autres grandes herbes qui rendent le foin de peu de valeur ; cette opération les détruira. Les terres labourables dans le même cas , ne peu- vent jamais donner rien de bon, elles font trop fangeufes & tiennent trop à la charrue , dans les tems mêmes où les autres terres font déja labou- rées & femées ; & dans les années molles, les ré- (1) Bêche particulière, plus étroite par le bas que par le haut, 30 JANVIER, coltes y font trop médiocres pour dédommager des frais. de culture: quelque attention que vous don- niez à faire des maîtres ,tant que le terrein fera mol, vous ne pouvez efpérer des récoltes avan- tageufes , il faut en venir aux tranchées cou- vertes. AA La dépenfe de ces tranchées eft d'environ trois louis l’acre (1), faites à la bêche, de 32 pouces de profondeur, quatre de large dans le fond , & douze par le haut , & rempli de dix pouces de haut; ce calcul fait à fix fols la toife, en fe fai- fant dans la faifon où les journées valent vingt- huit fols (2). L’économe doit fe guider, pour le rempliffage des tranchées , fuivant les circonftances ; fi la pierre eft commune dans le canton , c’eft bien la meil- leure manière de les remplir ; à défaut de cela, on peut fe fervir de briques ou d’offlemens, ou encore mieux de fagots d’énines , que l’on cou- che dans le fond, avec de gros gazons renver{és que l’on met par-deflus , & après l’on remplit le tout avec de la terre, &t on refleme de la graine, (1) L’acre a cent foixante perches à la mefure de feize pieds la perche. (2) Où peut juger par cette citation combien la main- d'œuvre eft plus chère en Angleterre. JANVIER. 31 f c’eft'un pré, ce qui ne fait aucune -perte de terrein (1). On prétend qe dans le comté d'Eflex on en a rempli, rien qu'avec de la paille, qui ont duré trente ans. On peut encore, pour aller à léco- nomié , commencer ces tranchées avec la char- rue , en la paffant plufieurs fois, & enlevant à la bé- che la terre qui retombe; on les finit feulement à la bêche , alors c’eft une dépenfe feulement de quatre fols la perche. Des Feves. Si les mauvais tems ont empêché de femer les feves d'automne , on peut le faire ce mois-ci, car le plutôt qu’elles peuvent être femées vaut le mieux. Ainfi le fermier doit profiter pour cela des premiers tems fecs , il y a des fols où il left beau- coup plus en Janvier qu'en Décembre ; on feme ordinairement les feves fur un chaume de bled ou d'orge, qui a eu une feule façon. La meilleure manière de les femer, en atten- (1) Perte du terrein. On a pour cela en Angleterre des bêches de trois ou quatre grandeurs, pour achever la tranchée à mefure qu’elle fe rétrécit. 32 JANVIER dant que l’on ait imaginé un bon femoir (1) , eft en faifant des rayons à la houe à dix-huit pouces de diftance , ou deux pieds , &t les feves mifes à trois pouces l’une de l’autre ; les raies doivent être bien droites à caufe du binage à y donner avec la houe à cheval , inftrument nouvellement imaginé , très-utile pour ces fortes d'ouvrages qui deviennent fort-difpendieux à bras d'homme. L'on doit trés-bien fumer la terre pour les feves, & l’on en fera amplement dédommagé par la ré- colte , d’autant que cela prépare la terre pour recevoir du bled : on la fume automne , ou dans ce tems-ci, fuivant le moment le plus propice. Des Carottes. Si le fermier juge à propos de donner deux fa- çons pour les carottes, ce que je crois inutile, la feconde doit être donnée en Janvier , fi toute- fois. le tems le permet. EEE (1) Lorfque cet Ouvrage a été écrit , le femoir de M. Cooks n’étoit pas connu ; cet Anglois a imaginé un inftrument trainé par deux chevaux , qui feme douze à treize arpens par jour, & n’emploie que demi-fe- mence : J'ai vu une ferme de quatre cens arpens, cul- tivée ainfi avec le plus grand fuccès, Des JANVIER, 33 Des Pommes de terre. Le même raïfonnement ci-deflus peut fervir à cet article , obfervant feulement que pour cette récolte le terrein a dû être labouré , & fi depuis ce tems les herbes y ont pouflé, il faut le labou- rer en Janvier ; c’eft aufli le moment de mener les fumiers que l’on a préparés, fi toutefois il gele, car en général on ne peut guère trouver ce mois- ci le moment de labourer. Des eleves des Befliaux. Les veaux de l’année dernière doivent à pré- fent être nourris au foin mêlé avec des turneps, des carottes & pommes de terre; il ne faut ja- mais les laïfler jeûner , ni manquer de litière, & les tenir propres. Tous ces foins font très-effen- tiels Phiver , pour ne pas retarder leur croiflance, que la meilleure nourriture de l’été ne feroit pas augmenter , s'ils avoient une fois pâti. Si le foin eft cher , on doit y fuppléer avec de la bonne paille , en augmentant la ration des racines; pour les génifles & les bouvillons de deux ans, ils peu- vent être nourris au foin & à la paille, avec un C 34 JANVIER. peu de turneps, ce qui fait qu'il faut les tenir fé- parés des veaux de l’année : plus les beftiaux font jeunes , mieux il faut les nourrir. Des Bois. [ y a peu de parties de l’Angleterre où il foit avantageux à un fermier de louer des bois, mais fouvent il ne dépend pas de lui de les pren- dre avec la ferme, ou de les laïfler ; dans le pre- mier cas, il doit chercher à en tirer le meilleur parti poffble ; ce mois-ci eft celui où 1l doit tou- jours s’en occuper, & doit prendre fes ouvriers à la tâche. [Il y a des cantons où l’on met feulement le bois en ramier, & on le vend comme cela ; dans d’autres endroits on le fait débiter en fagots, pieux, perches à houblon, claies, &rc. je crois cette der- nière méthode plus profitable (1). On eft fort divifé fur l’âge auquel on doit (1) Plus profitable, L'ufage étant en général en An- gleterre de ne brûler que du charbon dans les chemi- nées , on ne fait que peu de bois de corde, on fait feu- lement des fagots pour les fours ; excepté en Suflex & deux ou trois autres provinces, où les fermiers brülent de la corde. JANVIER, 45 éoupet les bois , on le fait depuis neuf ans juf- qu’à vingt-fept ; douze à quatorze c’eft l’âge le plus ordinaite. J'ai vu des bois où on laïffoit à la coupe un brin fur chaque fouche , pour qu’à la feconde il ÿ ait de gros brins dans chaque ramier ; mais il eft à craindre que ces brins n’attirent toute la ‘feve, & ne faflent tort aux autres reiettons : en général , il y a plus d’efpece de marchandifes à faire dans un vieux bois que dans un jeune , & par conféquent le débit en eft plus für. La plus grande attention que doit avoir le fermier qui a des bois , c’eft d’en bien entretenir les clôtures ; car il vaudroit mieux pour lui que fon bétail s’échappât dans fes bleds que dans un jeune bois , où ils font un dégât réel pour trois ans. Si le bois eft trop grand pour que ce foit une dépenfe trop forte de l’enclorre, c’eft alors le cas de le couper tard, puifqu’à douze ans les beftiaux n'y peuvent plus faire de mal. Un grand point eft de favoir à quel âge cha- que efpece de bois acquiert fon plus grand poidss pour cela on peut prendre des brins égaux de ché- nes, d’ormes, de hêtres, &c. à fix ans, à douze ans &t à vingt-quatre, & voir quel eft le plus pé- fant; c’eft un effai bien aifé à faire en petit , cer en grand il demanderoit trop de foin. Dans les bois de hètre de Buckinghamchire, on C ÿ 36 JANVIER. fuit une autre méthode; on coupe les brins de trente à quarante ans, & au lieu de les couper en taillis à plein, on élite les arbres les mieux venans , &c on laifle toujours les plus beaux ; on fait cela pen- dant plufieurs années, ce qui rapporte dix-huit à vingt liv. Pacre par an , & on en forme par la fuite de belles futaies, on fcie les arbres ainfi abat- tus , à la longueur propre pour faire de la char- pente , & les bouts fe mettent en bois à brüler qui fe tranfporte facilement au marché de Londres par la Tamife , ce qui fera d’un bien plus grand rapport qu'un taillis. Dans les pays humides , où le hêtre , le frêne & l'orme ne viennent pas , les faules & peupliers y viendront très-bien, ces deux bois font propres à beaucoup de chofes ; dans le comté d’Effex on en fait des tuyaux ou auges couvertes, pour mettre dans les tranchées dont nous avons parlé pour le defléchement des terres ; dans ce pays-là un acre ainfi planté eft d’un auffi bon rapport qu’un de terre labourable. Een — N. B. Cet article fur le bois eft abfolument par- ticulier à l’Angleterre, & je ne l’ai traduit que pour ne rien omettre de Ouvrage que j'ai entrepris : il y en a plufieurs dans le même cas ; le leéteur intelligent ne s’attachera qu'à ce qui eft analogue au pays qu'il habite, : 37 SE —— ++ MRCE V R L'UIR: =— DE SRE PIE (& ox le mois où il faut femer des feves , fi on ne l’a pas fait en Janvier , à moins que les terres ne foient trop molles ; car lorfque la ré- colte en vient trop tard, on n’a pas le tems de donner les labours pour mettre du bled. Les uns les fement avant de labourer , & les enterrent à la charrue , d’autres fement fur le labour & herfent après ; mais dans tous les cas ils les mettent par rayons & labourent à plat; de la dernière manière , une perfonne marche de- vant la charrue, qui met les feves dans la raie que la charrue recouvre ; lorfqu’on veut les biner, on fait pafler la charrue à cheval entre deux. Mais je le répete, je préférerois pour cet ou- vrage qu’on fe fervit d’une charrue à femoir, qui abrégeroit bien l’ouvrage: on peut encore fe {er- vir d’un petit femoir en forme de brouette à baf- cule , cela épargneroit bien du tems & de lar- gent, Un fermier qui a un bon fol pour les feves, Ci 33 FÉVRIER, doit donner tous fes foins à cette récolte qui ef très-avantageufe ; en en faifant ufage, il peut ban- nir la méthode pernicieufe des jachères. Le binage que l’on donne aux feves , eft une efpece de la- bour de plus encore pour la terre; mais 1l faut ab- folument donner cette façon avec la houe à che- val, car à bras d’hommes cela feroit trop difpen- dieux, & ne feroit pas un auffi bon ouvrage. Si un cultivateur veut calculer la dépenfe & la recette des terres pourfuivies en jachère, ou des feves cultivées ainfi, il verra combien la dernière méthode eft préférable, es feves viennent parfaitement dans les terres fortes , dans les terres rouges , mais dans le fable ou dans le gravier 1l faut y fuppléer par une au- tre récolte. | Le cultivateur doit fe rappeler que, fi dans ce mois k$ terres font molles , & que le cheval enfonce & emporte la terre avec fes pieds, il faut re- mettre aux Mars tous les labours, De lAvoine noire (1), Voici le tems de cette femence, la terre doit (1) Avoine noire. I] y a en Angleterre de l’avoine blanche & de la noire, qu’on feme en tems différens ; la première eft beaucoup plus péfante & meilleure, FÉVRIER 39: avoir été labourée d’abord , & on l’enterre à la herfe ; il faut quatre boifleaux par acre dans les bonnes terres, & cinq ou fix dans les médiocres & les mauvaifes, L’avoine réuflit bien mieux dans les terres la- bourées avant l'hiver & herfées au printems ; il y a un double avantage, puifque cela occupe les charrues l'hiver. Il ne faut jamais retarder cette femence que lorfque l'humidité de la terre empêche de labou- rer, car il eft fort important que cette récolte fe fafle de bonne heure. Des Pois a Cochons. C’eft aufli la faifon de femer cette efpece de pois , fur la culture defquels il y a la même ob- fervation à faire que fur les feves, pour le tems & la manière de les femer , & les binages à y don- ner à la houe à cheval. Cette méthode a tant d'avantage pour détruire les-mauvaifes herbes , que tout bon cultivateur doit préférer de faire fuccéder ces récoltes aux bleds, par préférence à l’avoine ou à l’orge, ce qui vaut mieux pour les terres , & en même tems rend davantage. On peut femer ces pois comme la- C iv 40 FEVRIER. voine noire , fur des terres labourées d’hiver , & enterrées à la herfe. Dans quelques endroits on les plante avec des plantoirs à quatre pointes, alors il n’en faut qu’un boifleau par acre, au lieu de deux. Il faut remarquer qu’en général les laboureurs ont la mauvaife habitude de ne mettre leurs pois que fur des terres qui ne peuvent pas porter autre chofe, croyant que la faifon favorable fait plus fur cette récolte que le fol, & qu'en général c’eft une récolte très-incertaine ; le fait eft qu’ils ne réufliffent pas quand les terres font mauvaifes ou mal cultivées, & qu'ils demandent d’être net- toyés de la mauvaife herbe pendant leur croïffance; c’eft au point que, fi un fermier trouve dans fa ferme une piece de terre que fon prédéceffeur a laiffé infeéter de mauvaifes herbes, une récolte de feves ou de pois cultivés à la houe à cheval, les détruira bien plutôt qu’une récolte d’avoine qui n’y réufhroit pas ; au lieu qu'après celle-là l’avoine ou l'orge y viendra bien , & pourra de nouveau être fuivie de ces légumes. Une progreffion pa- reille de récoltes pendant quelques années, main- tiendra la terre en bon état, & les pois ainfi cul- tivés n'auront plus la réputation d’être une récolte incertaine que parmi de mauvais laboureurs. #s FÉVRIER, 41 Des Bordures (1 ). C’eft le bon tems pour remettre ces bordures en ordre, elles ont prefque toutes le défaut d’é- tre trop hautes, ce qui provient des terres que lon y laïffe lorfque l’on cure les foflés, & que lon n’a pas attention d’enlever auffitôt , & aufli du peu d’attention des charretiers, en tournant leur charrue ou leurs herfes; elles font fouvent garnies de buiflons ou racines, ce qui gâte l’herbe. On doit alors commencer par faire couper Îles buiflons & les mettre en petits fagots, & enfuite mettre les racines en cordes ; on paie quarante-huit fols par cent de fagots de trois pieds, & vingt-quatre fols par corde de feize pieds de long, & trois pieds fur tous fens, bien entaflés, pour lequel prix ils doivent bien régaler & unir la terre ; fi la bor- dure eft trop haute, il faut ôter de la terre, la mettre en berge dans le milieu pour que les voi- tures puiflent l'emmener dans la cour de la ferme ou fur des prés , alors on donne deux fols de plus de la corde pour faire cet ouvrage. (1) Bordures. L’on doit fe rappeler ce que jai dit qu’é- toient les bordures le long des haies. 42 FÉVRIER. Si un fer de bèche ne fufft pas pour mettre la bordure de niveau avec l’herbe, il faut en donner deux & y refemer de l’herbe , car ces bordures bien entretenues fourniflent d’excellens fourrages , au lieu que chez des fermiers négligens, elles font pleines de ronces & d’épines qui +s’élargiffent tou- jours , & finiflent par gagner la terre & y ré- pandre de mauvaifes graines. Des Bois. Ce mois-ci, comme le précédent, eft le meil- leur pour couper les tailis & les exploiter en mar- chandifes dant on croit avoir le plus de débit. Dans des endroits c’eft le cercle qui fe vend le mieux , dans d’autres , l’échalat à houblon ou les fagots ;1l y a des endroits où les fagots de mé- chans buiflons fe vendent à merveille; les claies font en général d’un débit très-afluré. En général, le fermier doit diriger l’exploita- tion de fes bois fuivant les demandes qui lui font faites : cet avis n’eft pas néceflaire aux vieux fermiers , mais les jeunes ne le trouveront pas de trop. LT E | FÉVRIER. 43 De P? Orge. Voici le tems où l’on doit choifir, dans les. champs qui ont porté des navets, celui que l’on croit le plus propre à l'orge, & principalemene ceux où les racines ont été mangées dans le champ ; fi la terre ne paroît pas trop compalte, de forte qu’un feul labour y fufhfe , on attendra pour cela le mois de Mars ; mais fi la terre ef foulée & battue , il faudra donner la première façon ce mois-ci, fans quoi cela rejetteroit les fe- mences trop tard. Des Carottes. Cette culture eft fort importante pour les fer- miers qui l’entendent ; Mars eft le tems propre pour. les femer , mais il faut préparer la terre, ce mois-ci, Je fuppofe que la terre ait reçu un la- bour bien profond en Oétobre, il faut en don- ner un léger dans ce mois-ci, par un tems fec, ce qui préparera la terre à en recevoir un bon le mois fuvant pour femer. Les terres propres aux carottes , font les terres fortes , les fables ou terreins decs , de forte que l’on pourra toujours 44 FÉVRIER les labourer ce mois-ci; ce labour ne feroi® pas. bien néceflaire fi la terre étoit en bon état ; & fi même, après être labourée , la terre étoit bien meuble & fe hersât bien, on femeroit fur ce la- bour , fans en donner un nouveau en Mars; car quoique ce mois-là foit ordinairement celui des femences , c’eft plutôt la température de lair qui doit régler que le refte , & la graine de carotte craint tant l'humidité en général , qu'il vaut mieux la femer en Novembre qu'en Mars s'il eft hu- mide. Des Choux. Les terres deftinées du mois d'Avril de l’année précédente pour cette plante, & qui ont été la- bourées en rayons en O&tobre , doivent ce mois- ci recevoir une façon pour renverfer les rayons, mais non pas pour labourer à plat ; cela rendra la terre bien meuble , la façon d’Oftobre n’ayant fait que retourner les chaumes : car la culture des choux doit toujours être confidérée comme une jachère qui laïfle repofer la terre , mais qui ce- pendant eft d’un grand profit. Comme ce labour eft principalement celui qui défigne les choux, { ceux d'automne étant en ufage pour tirer les grains, } il eft à propos de traiter ici en détail cette culture; tant d'auteurs FÉVRIER, 45 ont parlé de l'utilité de ce légume pour engraifler les beftiaux , qu’il feroit impardonnable de le pañler fous filence. Les choux font fi avantageux dans les terres fortes ou argilleufes, qu'ils mettent à même les fermiers qui ont de telles terres, de nourrir lhiver autant de beftiaux que le font ceux qui ont des terres légères avec des turneps. Le grand inconvénient des fermes où il ny a que des terres argilleufes , eft le défaut de nour- ritures vertes l'hiver , qui oblige les fermiers à ne nourrir les beftiaux qu’en foin pendant toute cette faifon , & qui les empêche d’avoir un grand nombre de beftiaux , & de bénéficier fur cet objet, tant pour les éleves que par la grande quantité des engrais , qui ne fe forment jamais fi bien qu’en ayant de forts troupeaux l’hiver. Mais tous ces inconvéniens font remédiés par la culture des choux, qui eft, comme je le dis, bien fupérieure à celle des turneps dans les terres fortes : le calcul fuivant fera voir la différence de bénéfice des deux cultures. Un acre de terre glaife demande au moins trente-fix livres de dépenfe pour la jachère ; mais la récolte des choux en dédom- mage bien, & l'orge ou l’avoine qui fera femée après , fera d’un bien plus grand rapport, ainfi que le trefle que l’on femera parmi, au lieu que les turneps n’auroient pu réuflir dans cette forte 46 FÉVANE de terre; mais un des grands avantages des choux pour la nourriture des bètes à laine, eft qu'ils paf- fent tout l’hiver en terre, & peuvent les nourrir jufqu’au printems ; les choux-navets ou choux verts durent tout le mois d'Avril, & même jufqu’à la mi-Mai , les fix dernières femaines où les beftiaux font le plus difficiles à nourrir ; les turneps ne font pas de même , de forte que tout fermier qui a quelques terres propres aux choux, doit toujours en faire quelques acres exprès pour cela. Des Rigoks pour les eaux. Ce font ce que nous appelons des maîtres qu’il eft à propos de faire ce mois-ci dans toutes les terres où l’on voit féjourner l’eau ; car pour épar- gner fort peu d’argent que cela coûte, on s’ex- pofe fouvent à perdre toute une récolte. En les faifant , il faut bien obferver la pente, pour que l’eau ne féjourne nulle part; il faut non-feulement faire des maîtres dans les terres labourées d’hiver, mais curer ceux faits dans les terres à bled. S’ils font remplis par les terres que les eaux en- traînent, ou par les taupes ou autres accidens, il faut bien en tirer toutes ces terres, car on ne fau- roit avoir trop de foin de purger les terres d’eaux flagnantes, FÉVRIER. 47 Du Fumage des Prés. Voici le tems de mener toutes fortes d’engrais fur les prés naturels ou artificiels , comme cen- dres de bois, cendres de leflive , poufhière de dré- che, chaux, &c. & en général tous les végétaux que les pluies d’hiver peuvent répandre fur la terre ; tous ces engrais doivent être menés fur les prés en Février. Mais auparavant de faire un achat confidérable de Pun de ces engrais , il faut effayer en petit, pendant plufieurs années , lequel réuffit le mieux fur vos prés, fans cela vous rifqueriez fou- vent de faire de grandes dépenfes, fans vous aflu- rer le profit: & encore ne faut-il pas juger de la bonté de lengrais au premier moment ; car, par exemple, la fie & la pouflière de drêche ren- dent les prés bien verds au printems ; mais c’eft au volume de foin, lors de la fauche, que l’on doit juger de cela : je l'ai moi-même éprouvé, & puis en parler favamment. Pour calculer cela au jufte, marquez des fépa- rations dans un pré, fupputez le prix de l’engrais que vous y mettez , fauchez & ferrez chaque mor- ceau de pré ainfi fumé féparément ; par exemple, mettez la dépenfe du fumier à un louis l’arpent, 48 FÉVRIER à la moiflon, pefez le foin de la récolte (1), vous faurez quel eft l’engrais qui a le mieux réufhi fur votre fond, & eft le plus économique ; par ce moyen vous ferez sûr de votre expérience , & du genre d’engrais que vous devez adopter en grand l'année fuivante : en eflayant ainfi, on ne fait rien au hafard , & l’on eft en garde contre les faux fyfièmes. Du fumage des Bleds en hiver. Ce mois-ci eft aufli le tems de mener des en- grais fur les bleds , comme cendre, fuie, chaux, fiente des pigeons, terreau ou fumier de lapin de clapier , & beaucoup d’autres engrais confommés, que l’on a dans le voifinage des villes ; fi toute- fois 1l gele. C'eft un bon principe de pratique , que cette méthode en agriculture, furtout fur des bleds qui n’ont pas été fumés ; mais 1l faut calculer que la dépenfe n’excede pas le profit , & fonger que parmi tous les engrais que nous venons de citer, les vrais fumiers font encore les meilleurs. (1) Récolte. L’on ne vend jamais en Angleterre le foin à la botte, mais toujours à la charge & au poids. De FÉVRIER, 49 De la Baffe - cour. Ce mois-ci demande les mêmes foins que le précédent pour la propreté des animaux, le foin des fumiers , & le renouvellement fréquent des htères (1 ). Plantation de Saules. Je ne m'étendrai pas beaucoup dans ce calen= drier , fur les plantations, qui regardent plus les fei- gneuts & propriétaires, que les fermiers ufufrui- tiers ; mais les faules étant d’une crue prompte, ce dernier fera bien d’en planter dans les endtoits aquatiques de la ferme pour boûcher des trous dans les hates. Cet arbre eft d’un trés-bon produit pour les tontures, qui donnent des pieux, des écha- lats, des fagots, &c. (1) Lirières. Je préviendrai le leéteur à cet article, que l’auteur fe répétant ici beaucoup, j'ai abrégé , comme je le ferai par la fuite en pareil cas les autres mois. AE de) FÉVRIER. Des Vefces. Voici le tems de femer cette graine fur une terre qui a été labou£e l'hiver; fi ce mois-ci eft fec , donnez une feconde facon, & femez-en trois boifleaux par acre , le tout bien herfé , fi c’eft pour faucher en verd, & deux boifleaux par ar- pent feulement , fi c’eft pour récolter en graine. C’eft une excellente culture que la vefce en verd fur une jachère , car on la fauche avant qu’elle en -ait tiré le fac; cela, détruit parfaitement , les mauvailes herbes, & fi vous la femez de bonne heure en Février, la terre fera très-bien prépañe pour femer des turneps fur un feul labour. Il ne faut pas récolter la vefce à graine dans ne terre où on veut mettre du bled; car il n’eft pas d'une bonne agriculture de mettre deux fois de fuite du gran dans une terre. Par exemple , il ne faut jamais femer de bled après l’orge ou l’a- voine, ni faire fuccéder ces grains au bled, mais faire entre chaque une récolte de turneps, vefce en verd, trefle ou autre fourrage. Un bon acre de terre en vefce donnera une tonne & demie (1) ou deux tonnes de fourrage, (1) Tonne. La tonne de fourrage en Angleterre fait environ deux mille livres , poids de marc, # À: FÉVRIER. $ï ce qui fera bien fupérieur à la feconde récolte d’un grain que l'on auroit fait fur la même terre. De Parrofement des Pres. C’eft une partie très-négligée dans prefque toute l’Angleterre , & cependant bien importante, que d’arrofer un pré ou une pâture quand on le peut, en y amenant de l’eau de quelque hauteur voi- fine , foit par une rivière, un canal ou des tran- chées. Quoique cela foit un peu coûteux , c’eft un des meilleurs engrais que lon puifle donner à un pré, & l'ouvrage néceffaire pour amener les : eaux au printems quand il fait fec, doit fe faire ce mois-ci. S'il y a dans le pré des trous ou creux où l’eau refte , il faut les combler avec la terre des tranchées , & répandre le refte fur le. pré, ce qui y fera encore un engrais de plus; file pré eft en pente & qu'il. y ait {ur le haut un ruifléau ou un foflé plein d’eau, il faut faire de diftance en diflance des faignées avec de pe= ttes vannes, pour lâcher , quand on veut, l’eau dans le pré. La « D 52 FEVRIER: Des Pommes de terre. Cette racine eft une des plus lucratives que le fermier puifle faire , puifque le rapport n’en dépend pas uniquement de la vente de la récolte au mar- ché ; elle rapporte bien plus lorfawon la fait con- fomimer à divers animaux , furtout aux cochons. En Irlande, on en nourrit les vaches, les che- vaux , les moutons, & généralement toutes fortes de beftiaux. La terre deflinée aux pommes de terre doit avoir été labourée l’hiver & en Janvier , fi ce der- nier labour n’a pas eu lieu, 1l le faut donner ce mois-ci fi le tems eft fec, car il ne faut jamais mettre la charrue en terre dans un tems mol; il ne faut préparer de terre pour cette racine qu’au- tant que l’on en peut fumer , à raïfon de trente charges de fumier par acre; car un acre bien fumé vaut mieux que deux qui le feroïent mal. Des Compors. Nota. Il eft difficile de traduire ce mot en fran- çois, ce qui fait que Je l'ai mis tel qu'il eft, c’eft un compofé de fumier & de terre mélangée en- E*É V RIÆIR! 53 femble. Un-fermier tirera le plus grand avantage des compots faits ce mois-ci avec des matières végétales bien mélangées. Il y en a de plufieurs efpeces , on peut les claffer comme il fuit: 1°. La glaife ou terre fotte,: des cendres de leffives , du fumier, de la chaux, du tan , des végétaux pourris, pourvu qu'il n'y ait pas de graine, & on recommence à remettre de la terre , des cendres, &c. autant de lits que l’on veut , fuivant la hauteur de la couche. On peut aufli fe fervir de chaux vive en eau, de plantes maritimes, de fable de mer, fi on en ef à por- tée , qui non-feulement excitent la fermentation des autres engrais , mais fervent aufh à divifer le fond de la terre avec laquelle ils s’'amalgament, On fait ces couches fuivant la longueur que l’on veut, mais chaque lit doit avoir fix pouces d’épais , jufqu’a un pied même fuivant quelques auteurs, mais cette épaifleur eft trop forte pour que la fermentation puifle s’opérer , furtout à travers la terre forte ou la glaife , ce qui oblige , quand on retourne les compots, à broyer avec la main les parties qui ne font pas divifées , & à les remettre en couche de nouveau, ce qui eft un furcroit de travail & une perte de tems, fans compter que les autres ingrédiens qui fermentent plus vite perdent de leurs forces. Je confeillerai donc une autre manière de faire D ïÿ 54 FÉVRIER, des compots ; il faut d’abord marquer la place pour en faire deux, & y imettre un lit de fumier. Un homme fe place entre deux, on amene tous les matériaux néceffaires qu’il prend avec une pelle, & il en foupoudre les couches avec chaque ma- tière , l'une après l’autre, les lits étant plus min- ces, la mixtion eft plus facile , & en deux mois de tems la fermentation fera plus forte qu’en quatre ou cinq de l’autre manière , & ils n’ont befoin que d’être retournés une fois feulement avant de les mener fur les terres , ce que l’on fait en les coupant à la bêche , & les remélant enfuite comme auparavant ; il ne faut pas après être trop long- tems fans les mener fur les terres, après cette feconde mixtion , éar ils perdroient toutes leurs forces, Si on voyoit que la fermentation ne fe fit pas aflez vite, il faudroit faire de grands trous avec un gros pieu au milieu de la couche, & y jetter de l’urine de befhaux , ou du jus d’une fofle a fumier. Un compots fait ainfi va améliorer toutes fortes de terres, mais furtout des prés ou des pà- tures grafles, On fe fert pour ces derniers d’une charrue à cinq coûtres fans foc qui fend le pre, & y laïfie des incifions dans lefquelies le terreau du compots s’introduit ; l’eau des pluies contribue même au bien de la chofe. Un pareil engrais fait tant d’ef- fet for un bon pré, que l’année fuivante il porte trois fois plus qu'auparavant. FÉVRIER 55 IL'eft à obferver qu'il vaut bien mueux faire pafler cette efpece de charrue dans les près avant d'y mener les engrais ; cela feroit bien moins d’ef- fet fi on ne la fafoit pañler qu'après. Si on a uncompots confidérable à faire pour engraifler une terre loin de ia maïfon , il eft \ PI à tops de le faire fur le haut de la piece même, où on prend la terre pour la mélanger , on n’a que le fumier à y mener , ce qui abrège fort les charrois. La meilleure place pour faire un com pots, eft un terrein plat, parce que le jus qui en découle ne fe perd pas fi promptement, & on peut le ramafler autour pour l’arrofer de nouveau, ce qui excite la fermentation. Il eft encore bien plus avantageux de les fie dans le milieu de la cour de la ferme, dans un creux en forme de baflin qui reçoit, par ce moyen , tous les égoûts des étables & écuries autour de la cour ; on a foin , lorfque l'on cure les beftiaux , de ne. pas jeter le fumier en tas , mais de le répandre bien également, & de Jeter deflus de la terre que lon arrofe enfuite avec l'urine des befliaux. On continue cette opé- ration , comme nous avons expliqué ci-deflus , pour la confiruétion du compots , il faut feule- ment avoir foin, fi on y jette des refles de four- rage qui puiflent y introdure de mauvaifes grai- nes , de ne point mcmer l’engrais fur des terres D iv 56 FÉVÆRHTIER, à grains , mais fur des herbages ou des terres deflinées à porter des turneps , pommes de terre & autres plantes deftinées à être binées, ce qui détruit les mauvaifes hérbes que cet engrais fait poufer. # PIS ON ENGLELS &/E mois eft le plus propre pour femer des orges , 1l réuflit fouvent femé en Avril, mais il eft préférable de le femer de bonne heure , la terre demande d’être bien préparée; celle qui a porté des turneps eft bien la meilleure , d’autant que c’eft le tems où les beftiaux achevent de man- ger ces racines dans le champ ; on peut alors fêmer l'orge fur une feule façon, la terre ayant été bien préparée pour les engrais & Jabours avant les turneps. _ Quoique j'aie dit qu’il étoit plus avantageux de femer les orges aux Mars , cependant comme ce grain demande une terre feche, il faut, après un hiver pluvieux, attendre que la terre foit bien refluyée ; ainf il eft poffible que tout le mois fe pañle fans que la charrue puifle entrer dans la terre; car un confeil important à donner à tout labou- reur , eft de ne pas femer dans des terres molles quel- ques graines que ce foit. Si la terre eft bien meuble & fe herfe parfaitement, cinq boïffeaux par acre fuf- 58 MARS. fifent; mais fi le terrein eft en motte, & ne s’a- meublit pas bien, il en faudra fix; fi vous n’avez pas de terre à turneps pour lorge , ou que votre fol foit glaifeux , il ne faut pas attendre que le hâle le prenne , & on peut femer l’orge dès la fin de Février & le commencement de Mars. Il y a des laboureurs qui, dans ces fortes de terre, ont une autre méthode de cultiver l'orge ; après la moiflon , ils tirent de diftance en diftance des rayons bien creux , qui reçoivent les eaux de Fhi- ver ; par la gelée, ils mettent du fumier fur cette terre, qu'ils laiflent en tas dans ces raies ; au mo- ment de le femer , ils le répandent , & jettent deflus la femence qu'ils enterrent à la charrue, & herfent le terrein après , c’eft une excellente ma- nière, & qui me peut manquer de donner de fü- perbes récoltes; on peut la pratiquer fur des terres qui ont porté des feves, des pois , &c. on peut alors ne femer que quatre boifleaux l’acre , il faut enfuite herfer plufieurs fois dans tous les fens. Le meilleur ufage que l’on puifle faire de l'orge, ef de le mettre fur des terres deftinées à porter du trefle en fuivant l’ordre de culture ci-après. On feme d’abord des turneps , choux ou fe- ves , aprés de l'orge, fur lefquels on met le trefle, on laifle le trefle fur pied toute l’année fuivante, & la troifième on le retourne après la deuxième coupe , pour y mettre du bled ; quelque culture que | MARS. 59 vous faifiez la premiére , l’orge doit toujours fui- vre une récolte pour laquelle on a fumé, & être femée avec le trefle qui fe reflent de cet en- grais. Quelques fermiers peu avifés ne fentent pas l'avantage de cette culture; s'ils ont des près na- turels, ils diront que ferons-nous de tant de trefle ? Comment un homme qui a quelque argent dans fa poche, peut-il faire un raifonnement aufhi faux , &t ne pas acheter des befliaux tant que fa ferme en peut tenir? d’ailleurs quelle récolte feroit-on fuivre à l’orge, les grains ne doivent jamais fe fuccéder lun à lautre , fans qu'il y ait une ré- colte d’herbe ou légume entre deux , fuivant les meilleurs principes d'agriculture. L’herbe prépare même mieux la terre encore que les feves, tur- neps ou la vefce. Le bled fe feme après un trefle fur une feule façon & réuflit à merveille (1) D’ail- leurs il n’eft pas de récolte de grain qui paie fon maître aufli bien qu'une de trefle, qui fert à nourrir les chevaux , les bêtes à cornes & à laine, mieux que tout le refte , fans compter qu'il rend (x) J'ai vu, par moi-même, en Angleterre, la preuve de ce que l’auteur avance , & j'ai remarqué , à mon grand étonnement , que le bled ainfi femé fur une façon, étoit aufll beau qu'un à côté qui en avoit eu quatre. 60 MARS, la terre parfaitement meuble , pour porter enfuite du bled ou de l’avoine. Il y a deux manières de le femer; la première, de le femer après que l’orge eft herfé , & de l’en- terrer par un fecond herfage ; la feconde , eft de le répandre fur la terre lorfque l'orge eft levé, & de l’enterrer après avec le rouleau. L’inconvénient de la première méthode, ef que la poufle du trefle nuit fouvent à celle de l'orge; il eft vrai que fi le trefle montoit très-haut tout de fuite, il y auroit peutêtre du profit de faucher le tout avant que l’orge ne monte en épi pour le former comme du foin, ce fourrage rapporteroit plus pour la nourriture des beftiaux , que la ré- colte du grain que l’on manqueroit (1). De L Avoine. L’avoine blanche doit être femée ce mois-ci par préférence , & les fermiers doivent bien fe garder de donner dans l'erreur commune de ne la femer (1) Je n’ai pas achevé ni entré dans de grands détails fur ce chapitre, ne croyant pas cette méthode pratica- ble en France, à moins d’une grande fécherefle ou tout le foin manqueroit , & alors je doute que le trefle poufsât affez pour cela. MARS. 6i qu'après les autres grains ; elle demande les mêmes préparations que l’orge , & cette récolte paie bien le cultivateur de fes foins ; c’eft encore une er- reur de croire que l’orge rend plus que lavoine blanche bien cultivée ; j'ai été témoin de plufeurs effais à cet égard, où la récolte d'avoine éoaloit & quelquefois furpafloit celle de orge, la quan- tité dédommageant bien par fa fupériorité de lin- fériorité du prix. Quelle bonne raifon peut-on donner pour croire que fi une terre n’eft pas aflez bien préparée pour mettre de lorge, l’avoine y réuffiffe ? il n’y en a, je crois, aucune. L’argument ordinaire , mais faux, eft de dire qu’elle donnera une récolte fuffifante pour payer les frais, mais le profit fera nul; ce qui eft un fyflême toujours faux dans un bon agri- culteur. Quel profit retirera-t-on d’un champ où l’on fera fuccéder l’avoine à une récolte d'orge, ou à une de bled , fi on füuit le fyftême des jachéres ; le grain après un autre réuflira toujours mal, au lieu qu’en la femant après une récolte de légumes, comme nous l'avons dit pour l'orge , elle fera très- avantageufe , & on y pourra femer aufh du trefle deflus : cette méthode eft bien préférable en tout point , à celle de mettre l’avoine fur un chaume de bled. Pour toutes les raifons ci-deflus, je confeillerai à tout bon fermier de femer également ces deux 62 MARS grains aprés une récolte de légumes, & de don- ner la préférence à celui auquel il aura éprouvé que fa terre convient le mieux, & toujours y fe- mant du trefle. Dans les bonnes terres il faut quatre boiffeaux par arpent , & dans les terres légères il en faut mettre fix. Des Pois. C’eft le tems de femer toutes fortes de pois, qui ne lont pas été en Février, & il ne faut pas attendre plus tard , fi le tems eft beau; les pois blancs fe fement les derniers, & fur une terre lgére , car ils ne réufhiflent pas dans les terres fortes où il y a de la glaife. Cependant il n'y a pas de foi où les pois ne viennent , en cher- chant l’efpece qui convient à la terre ; dans la glaife il faut mettre des pois à cochons , fur les terres de fable ou graveleufes , les petits pois tendres réuf- fiflent ; on les feme tous avant le labour , ou on les enterre à la herfe. Le premier moyen a de l'inconvénient. Si la terre eft battue par la pluie, ils ne leveront pas du tout, n’ayant pas la force de percer la croûte, qui fe fera formée fur la terre; d’un autre côté, en les enterrant à la herfe, il y a l'inconvénient que fi la terre n’eft pas bien meu- ble, & qu'ils ne s’enterrent pas , les pigeons & Les MARS. 63 oifeaux en mangent la plus grande partie , ce que lon peut parer, en mettant quelque chofe fur les femences , qui éloigne ces animaux. Si la terre fe fépare bien , il vaut mieux en tout les en- terrer à la herfe; mais fur les autres terres , il eft plus avantageux de fe fervir de la charrue , pour les garantir avant la lévée, de la grande ardeur du foleil qui les brûle, furtout dans les terres fé- ches. Il faut femer les pois après du grain , comme bled , avoine , &c. mais furtout après le bled, parce que dans une bonne agriculture , il doit toujours y avoir du trefle de femé fur les orges & avoines ; la manière fuivante de difpofer les ré- coltes , eft auffi très-avantageufe : 1°, Des turnéps ou choux , fuivant le tetrein ; 2°. de l’orge ; 3°. du trefle ; 40, du bled ; $°. des pois. Quand le bled a fuccédé au trefle, vous pouvez tirer après, une bonne récolte de poix , & vous revenez après au - premier ordre ci-deflus. Il eft-plus avantageux fou- vent de femer les pois à la charrue à femoir, parce qu’ils font bien plus faciles à biner à la main; il n’y a point de récolte qui paie mieux ces frais- là que celle-ci; lorfqu'ils font femés à la charrue ordinaire , ce travail devient beaucoup plus difficile : un autre avantage eft la femence que cela épar- gne, on y gagne un boiffeau &t demi par acre; il feroit même plus avantageux d’avoir une charrue CA MARS. qui feme plufieurs rayons à la fois à diflance égale, cela abrégetoit encore les ouvrages. Des Vefces. Si on na pas pu les femer en Février , il ne faut pas attendre plus tard que ce mois-ci pour le faire, ( Voyez ce qui ef dit en Février ). Des Carottes. C’eft à préfent la vraie faifon de les femer, à moins que le tems n’ait été aflez fec pour permettre de le faire en Février. Labourez la terre à l’or- dinaire , mais le plus à plat poflible ; femez-y à la volée, environ 4 livres de femence par acre. L'idée générale eft de croire que les carottes ne viennent que dans le fable , mais cela eft faux, : car elles viennent parfaitement dans les terres rou- ges , légères ou humides , pourvu qu’elles aient du fond ; car il faut que la charrue , en fonçant, amene toujours une terre de la même qualité. Une terre fablonneufe qui auroit ces mêmes qualités, fourniroit de très-bonnes récoltes ; le fable noir eft le meilleur. Mais malgré cela, je le répete, les carottes réufhffent dans les autres terres , quelque- fois | MARS, 65 fois même dans les terres fortes ; mais jamais dans la glaife. La feule raifon pour laquelle on donne la préférence aux terres fablonneufes , eft que la culture en eft plus facile , tant pour la plantation que pour le binage , dans le cours de lannée, Si vous voulez avoir une fuperbe récolte de ces racines, mettez fur la terre quinze ou vingt voitures de fumier bien pourri, par acre; enterrez- le à la charrue , enfuite femez les carottes & en- terrez-les à la herfe; la récolte fera abondante , & une de celles qui dédommageront le mieux du fumier que l’on y menera. Ce n’eft pas que beaucoup de gens difent que le fumier ne vaut rien aux carottes , parce qu'il les fait monter trop vite , les empêche de groffir ou leur donne un mauvais goût ; mais je rai jamais eu de preuves de pareilles affertions : un principe général en agriculture , eft que les engrais doublent les produits. Je ne peux pas quitter cet article fans confeiller cette culture à tout bon fermier , non pas en petit pour un ou deux arpens, mais un enclos entier , comme de navets, bleds, &c. ce qui lui fera d’un trés-grand profit, valant jufqu’à cinq louis l’acre, frais faits, ce que nulle récolte , même celle de bled ne donne, excepté les pommes de terre, fans comp- ter que cela ameublit parfaitement les terres. Ë 66 MARS. Des Panais. Cette racine eft recommandée par plufeurs au- teurs qui ont écrit fur l’agriculture , comme pré- férable même aux carottes. Je crois qu'il n’y a pas de comparaïfon à faire, fi ces dernières font femées à propos & dans des terres convenables : il eft certain que cette plante réuflit dans la glaife à plus forte, fi on fume bien avant. Ceux qui voudront en faire l’effai, doivent les femer ce mois- ci, & fuivre les mêmes procédés qui ont été re- commandés pour les carottes ; &t alors , avec de bons engrais, cette culture pourra réufhr. Des Pommes de terre. Mars eft la meilleure fafon pour les planter , la terre ayant été labourée Fhiver, & reçu une feconde façon en Février. Le premier tems fec de ce mois-ci, on doit la fumer en fumier bien pourri, & l’enterrer à [a charrue , en en mettant vingt-cinq à trente voitures par acre , & le répane dant bien également, & puis herfer enfuite. Une des manières de les planter eft d’avoir un plantoir à trois dents , qu’un homme enfonce dans MARS. 67 Ja terre en mettant le pied deflus, & fait trois trous en terre à la fois; un petit garçon le fuit, qui jette le plant dans le trou & le recouvre avec fon pied ; il faut après cela herfer la terre deux où trois fois : voilà la meilleure méthode. Les rayons doivent être faits à neuf pouces l’un de l’autre; pour pouvoir fe biner facilement. Une autre ma- nière, moins difpendieufe encore , eft de les femer devant la charrue qui les recouvre. De ces deux manières , il en faut vingt boifleaux par acre. On défriche fouvent un herbage pour y mettre des pommes de terre, & plufieurs cultivateurs pré- fèrent cette méthode. On commence par mettre fur le pré que l’on veut défricher quinze ou vingt voitures de fumier, alors vous l’enterrez avec la charrue , & plantez les pommes de terre de la ma- nière indiquée ci-deflus ; le gazon retourné, en fe pourriflant , forme un nouvel engrais. Une autre méthode eft de mettre le fumier fur le pré, par couches à deux pieds de diffance l’une de lautre; on pofe les pommes de terre fur le _ fumier , on laboure enfuite les intervalles , & on jette le gazon fur les pommes de terre, il fe con- fomme & fert enfuite à les buter. On peut planter aufli des pommes de terre fur des bordures (1) que l’on défriche lhiver pour (1) Bordures ; on fe rappelle ce qui a été dit ci- E ï ÉD MARS. détruire les racines ou les ronces autour des haies ; c’eft dans ce mois qu’on y doit planter des pom- mes de terre en rayons , qui y réufhront à mer- veille, à caufe du bois pourri qui eft tombé de la haie, & qui fait une forte d'engrais ; elles fe- ront bonnes à cueillir à la fin de Septembre, & la terre n’en fera que plus propre à produire enfute de lherbe. C’eft une attention que fouvent beaucoup de fermiers négligent , parce que la pl.s petite dépenfe les effraie, & qu'ils ne calculent pas que vingt- quatre fols dépenfés à propos leur rapportent dix fois plus au bout de l’année : ces bordures fur lef- quelles on a jeté toutes les terres forties du foflé, deviennent un excellent fond. Ce font de ces at- tentions qu’un fermier intelligent ne manquera ja- mais d’avoir. En fuivant les principes de la nouvelle culture avec la houe à cheval, pour les pommes de terre, on doit laifler deux pieds d'intervalle entre les rayons, pour que le cheval ne foule pas la plante; cette méthode eft bien plus économique que la houe à bras, on prétend même qu’elle peut dif- penfer de fumer; mais je ne confeillerai jamais à PR Den ot A AE CLIP ACTA NUE PE NE EST 2m DSP 65 QE 6 RCD GS SE PNA deflus , des terres enclofes de haies & de do & de l'entretien de ces borgures. MARS. 69 un fermier, tant qu’il aura des engraïs , de ne pas en mettre fur fes terres le plus qu'il pourra. Des Choux. Il y a des faifons pour planter les choux , de- puis la fin d'Avril jufqu’au commencement de Mai, ou au milieu de l'été. Dans tous les cas, le pre- mier labour a dû être donné à Noël. Si le deu- xième n’a pas été fait en Février , il faut le farre en Mars, au plus tard; furtout, fi c’eft pour plan- ter en Avril; il doit être en fillons & non à plat. Le commencement de ce mois eft aufi le bon tems pour femer la graine de choux ; il faut pro- portionner le terrein pour cela à celui que vous voulez enfuite replanter , en calculant fur une livre de graine pour trois acres que vous aurez à re- planter. Ilfaut prendre la meilleure des terres de la ferme pour cette femence , & y mettre du fu- mier abondamment & bien pourri; ce qui fera fa- cile, puifque vingt perches de terre fufffent pour en-replanter dix acres : la terre doit être bien herfée & bien unie, mais 1! n’eft pas néceffaire de la pañler au rateau. | Quant aux efpeces de choux, il y en a plu- fieurs ; les meilleures efpeces font les choux d'E- E à 70 MARS, coffe & le chou Américain, pour nourrir les vas ches & les bœufs jufqu’a la mi-Mars , & le chou- navet pour nourrir les moutons jufqu’à la mi-Maï. Par ce moyen vous pourrez facilement faire pafler lhiver à vos vaches & moutons , ce qui eft un article très-important en agriculture. Les choux qu’on replante en Avril & Mai doivent être des deux premières efpeces dont on vient de parler ; car tout ce que l’on a dit de la graine à femer dans ce mois-ci, ne regarde que ceux à replanter Vété, Des terres à Turneps, Les terres deflinées à cette culture ayant été, comme je le fuppofe , labourées à Noël, doivent recevoir une feconde façon ce mois-ci, & être bien herfées ; & fi la terre eft fort couverte. de mauvaifes herbes, on la labourera encore une fois en Avril ou Mai, pour les bien détruire, la terre ne pouvant être trop meuble pour recevoir cette femence. Des femés de Tref. Mars eft le tems propice pour femer cette gras minée avec les avoines ou les orges. On met quinze à vingt livres de graines par acre, Il y a deux MARS. 71 manières de les femer, ou le lendemain que l’on a femé le grain, en l’enterrant à la herfe , ou après que l’orge ou l’avoine eft levée , en l’enterrant avec le rouleau. Cette dernière méthode a l’inconvé- nient de gâter la première femence, fi on la pra- tique dans un tems humide. Un bon fermier ne doit pas négliger cette cul- ture , & je crois que c’eft une excellente mé- thode de femer du trefle fur tous les bleds & avoines ; on ne doit même femer de ces mêmes grains que dans des terres où l’on peut mettre de l'herbe avec ; fi on fait autrement , c’eft une mauvaife économie. Dans les tems médiocres furtout , un fermier qui agiroit autrement feroit sûr de perdre au bout de l’année. Dans ces fortes d'emplois , le profit ne dépend que du grand nombre de beftiaux que cette culture vous met à même d’élever; quelle perte n’en réfulte-t-il pas fi on n’en feme pas aflez ! Tout fermier qui fentira la vérité de cette af- fertion , ne femera jamais une raie de mêmes grains fans trefle, quand il fentira que cela n’aug- mente fa dépenfe ‘que de la femence, qui eft un objet de douze livres au plus’, tandis que le rap- port eft un des plus lucratifs, parmi les plantes que l’on fauche. S'il eft bien gouverné , cela donne au moins deux coupes. Ce fourrage eft excellent E iv 72 MARS. pour les chevaux , pour les moutons , pour les va- ches , & même les cochons. Un autre grand avantage du trefle , eft de net- toyer parfaitement la terre de mauvaifes herbes, & d'améliorer le fol. Si vous le femez fur une terre qui porte du grain (1) pour la première fois, vous pouvez le laifler un an fur pied, & y faire fuccéder une récolte de bled, ou de mêmes grains fur un feul labour fans fumier, & fans crainte d’a- voir une feule mauvaife herbe ; grande diminution de tems & de dépenfe , chofe bien effentielle à confidérer en agriculture. Une preuve bien con- vaincante que le trefle n’épuife pas la terre , & la bonifie , eft de voir les fuperbes récoltes de bled que lon y fait l'année fuivante fur une feule façon. Un fermier qui aura la pratique de ne jamais “emer de mêmes grains fans y mettre du trefle, peut être sür de faire les plus belles récoltes du canton, par les engrais que cela lui fournira , fans compter le profit qu'il retirera des beftiaux , dont :l peut élever le double de fes voifins avec la même quantité d’arpens de terre, (1) Pour entendre cet article, on doit fe rappeler qu’en Angleterre on ne met jamais de grain deux ans de fuite ; mais on le feme toujours après de l’herbe ou des légumes, MARS. : 73 Du Ray-graff. Cette plante eft bonne dans quelques pays , & fous quelques rapports , mais les laboureurs doi- vent bien y regarder avant de la cultiver. Elle vient dans les terres légères , dans les terres fortes, il faut la méler avec du trefle ; fon plus grand avantage eft de fe faucher de bonne heure ; on peut la donner en verd aux troupeaux : dans de bons fonds on peut la faucher au commencement d'Avril. Si on la feme pure , il faut quatre boif- feaux à l’acre , fi on la mêle avec du trefle, deux fufhfent avec douze livres de trefle ; ce fourrage d’ailleurs ne vaut rien fumé (1). Des Troupeaux. » On doit finir ce mois-ci de nourrir les trou- peaux avec des turneps , car fi on les laïfle plus longtems en terre, la récolte d'orge ou d’avoine (1) L'auteur a fans doute voulu parler du ray-graff à large feuille ; car le ray-gr4f] ou faux feigle eft un excellent fourrage , cultivé dans le Suffex & le midi de l’'Angieterre, 74 MARS. qui doit fuivre en fouffrira ; d’ailleurs, dès que la végétation commence, ces racines ne valent plus rien , & les animaux n’en veulent que lorfqu'ils font bien affamés. Le fermier doit difpofer les chofes , de manière que fes turneps finiffent à la fn de ce mois, & mettre fon bétail aux choux. Ce changemeut de nourriture ne leur peut faire que grand bien, & fait furtout profiter beaucoup les agneaux. Voici la fafon en général où les troupeaux de toute efpece, les brebis , les agneaux & les moutons , pour engraifler , doivent être bien nour- ris ; car s’ils jeunent en cette faifon , ils dépériront bientôt, 8 ce fera une grande perte pour le propriétaire. Un fermier intelligent doit réferver pour cette faifon, la vefce en verd, le ray-grafl, les choux, furtout pour les agneaux; car sil met fon troupeau en cette faifon dans les prés, fa ré- colte de foin s’en reffentira. Pour les moutons à tuer , le bon tems pour les vendre eft à la fin de Mai, terms où ils fe vendent le plus cher; aufli un fermier intelligent aura toujours deux enclos de choux pour mettre fon troupeau , en fortant au quinze Mars de ceux des turneps. Avec un pareil foin , il fera sûr de faire un grand profit fur fes moutons. Cette nourriture demande quelques attentions; s’il fait fec, on peut faire confommer ces choux | MARS, 7$ dans le champ , comme les turneps, en mettant feulement des claies, pour que le troupeau n'en foule pas aux pieds plus qu'il n’en peut manger en un jour ; s'il fait humide , il vaut mieux les faire arracher, & les leur donner fur une pâture feche près le champ. Des Vaches. Dans ce mois-ci on doit nourrir les vaches ; génifles ou veaux à l’étable, & ne les laifler aller dans aucun champ ni pâture , parce que n'y ayant pas encore de quoi les nourrir en verd; s'ils mangeoient feulement une ou deux poignées d'her- be, cela les dégoûteroit enfuite du fourrage fec, fans compter qu’ils abimeroient les herbages avec leurs pieds, & qu’on perdroit un bon engrais que lon trouve en les laïffant courir dans la cour de Ja ferme, que l’on peut tenir fermée , fi toute- fois 1l y a de l’eau dedans , ce qui eft bien pré- férable à s’en rapporter aux domeftiques pour les faire boire Il faut que la cour foit toujours par- femée de litière, foit paille , chaume ou fougère; car plus il y en a, plus ces animaux vous fe- ront de fumier , ce qui eft la grande richefle des cultivateurs. Un fermier qui éleve des veaux , ou qui en a 76 MARS: en févrage dans ce tems-ci , doit les faire foi- gner bien fcrupuleufement dans une cour à part, où il ne leur mañque rien ; ces animaux doivent toujours avoir le véntre plein, il faut leur donner en verd des choux, comme aux vaches à lait, & en fec de bon fon. Des Chevaux 6 Bœufs. Le tems des femences eft celui où ces animaux travaillant le plus doivent être le mieux foignés , ils doivent travailler dix heures (1) par jour, mais pour cela il faut que les charretiers ou bou- viers qui labourent n'aient que cela à faire, & ne foient pas occupés du foin de leurs che- vaux ; il doit y avoir un garçon de cour, qui dès le matin harnache les chevaux après les avoir fait boire & manger , & en fait autant à midi & le foir ; par ce moyen les charretiers vont à l’ou- vrage à fix heures, & ramenent à onze heures les (1) On voit par-là la différence du travail dans ce royaume. Les chevaux ne font toute l’année que’ huit heures de travail en une feule attelée , le refte de la journée , les charretiers travaillent dans la cour. Les che- vaux ne fortent jamais qu'à fept heures du matin, juf- qu'à trois après midi, MARS. 77 chevaux pout diner , l:fquels trouvant leurs rate- liers garnis, ont aflez d’une heure & demie pour diner , &t retournent jufqu’à fix heures du foir. De cette manière , deux chevaux peuvent labou- rer un acre & demi par jour. Les labours de . Mars, quand le tems n’eft pas trop humide , font les meilleurs de l’année , & font préférables à deux qui ne feroient donnés que dans le mois de Mai, _ Des Maïtres pour tirer Les eaux. Dans toutes les terres femées & labourées ce mois-ci , il faut tirer des maîtres pour égoutter les eaux, on les fait à la charrue , & enfuite on les fait curer à la bêche. Beaucoup de fermiers n’ont pas cette attention, ce qui cependant les expofe à perdre les plus belles récoltes, par un orage ou une mondation. Des Feves, On doit les femer la première femaine de ce mois-ci, mais pas plus tard; 1l faut fe rappeler que plus on feme tard, plus on doit fumer ; cette cul- ture eft fort importante dans des terres fortes , fur- tout fi on renonce au principe abufif des jachères, A 0 Rd, dE D E L'ORGE. , T L $2ORGE qui n’a pas été femée en Mars, doit l’être au plus tard le quinze de ce mois, fans quoi la récolte n’en vaudra rien; fi on la feme fur une terre qui a porté du bled l’année précé- dente , elle doit avoir reçu un labour avant l’hi- ver, & un fecond en Mars ; fi au contraire la terre a porté des turneps, une feule façon bien herfée dans ce mois-ci fuffit; il y a des fermiers qui, pour pouvoir donner deux façons, remettent à femer leurs orges la première femaine de Mai, mais ils y perdent plus qu'ils n’y gagnent. Voici un calcul qui a été fait, fur ce que l’orge femée en différens mois rapporte de boïfleaux pour un de femence , d’où il ef facile de partir pour un calcul. - En Février , douze & demi pour un. En Mars, onze & demi. En Avril, huit & demi. w En Mai, fix. En Juin , trois & demi. AVRIL 79 Ce tableau prouve l'avantage de femer de bonne heure : cependant je crois qu'il y a une grande quan- tité de terres où on ne peut pas femer ni labou- rer en Fevrier , comme les terres fortes, les fonds humides ; mais dans les fables ou les terres gra- veleufes que l’on a pu labourer l'hiver , il peut ÿ avoir un avantage à femer de bonne heure, mais jamais , je crois, aflez fort pour rapporter ce qui eft dit dans la table ci-deflus. Il y a même encore une chofe à craindre en femant les orges de fi bonne heure, c’eft que s’ vient des gelées ou neiges après qu’elles font levées , c’eft autant de perdu. Au refle, fi le terrein ou le tems n’a pas per- mis de femer de bonne heure, 1l faut ce mois-ci ne labourer qu’au moment de femer ; car fi vous laïffiez les terres trop longtems labourées , les pluies qui font communes pendant ce mois, battroient la terre , & feroient que l’on ne pourroit plus y entrer pour herfer ni femer, ce qui retarde alors les fe- mences , & caufe une perte réelle au fermier. On doit conclure, de tout ce que nous venons de dire, que dans les terres fortes on doit com- mencer à labourer la terre l’hiver , en rayons , pour que les eaux s’imbibent , en y faifant des maîtres pour les égoutter; enfuite les labourer , femer & herfer de bonne heure au printems, en ayant foin que le femeur & les herfes fuivent de près les os 80 À Y RiI L charrues, pour qu’en cas de pluie, on puifle fe- mer fans donner le tems à la terre de fe plom- ber , & ne jamais laïfler, moyennant cela, une terre labourée à moitié femée , tandis que l’autre. ne left pas. Beaucoup de fermiers, pour lappât d’avoir quel- ques champs de plus pour leurs troupeaux , ne la- bourent pas l’hiver leurs terres deftinées à l'orge, ce qui eft fort mal fait, car au printems ils labou- rent tard, la terre ne s’ameublit pas bien , & ils fement trop tard. Les meilleures récoltes d’orge en Angleterre fe font dans des terres argilleufes, labourées en rayons avant l’hiver, fumées enfuite par la gelée, & {e- mées à la fin de Février ou au commencement de Mars. La plus grande partie des cultivateurs d’An- gleterre foutiennent, aïnfñi que tous les écrivains, que les meilleures récoltes fe font fur des terres qui ont porté des turneps ; je ne combattrai point cette opinion, mais feulement j’examinerai fi ce font les turneps qui ont amélioré la terre , ou les fumiers qu'on y a mis, je crois que c’eft plutôt ce dernier engrais , car on fume très-bien pour les turneps, on donne trois façons aux. terres , on y met les -moutons pour manger les turneps pendant les mois de Janvier, Février & Mars, ce qui équivaut prefque un fecond parcage. Mais faites une épreuve : divi- fez une piece de terre en deux parties égales; dans l’une, s AU VUR EU 81 lune, cultivez des turneps & de l'orge, comme nous venons de dire , & dans l’autre , qui aura porté une autre récolte quelconque , recueillie en Oéto- bre, donnez un bon labour à la fin de ce mois, fumez l’hiver, & femez-la en orge , de fort bonne heure, au printems, je fuis sûr que vous aurez une récolte fupérieure à l’autre moitié de la piece. Si on a affez d'engrais dans une ferme pour fuivre cette dernière méthode , je là crois. préfé- table, & on fait alors fuccéder aux turneps une récolte que lon peut femer tard fans inconvénient, comme par exemple du bled de turquie, qui, quand ef bien cultivé, eft d’un excellent rapport, & n’épuife point la terre. On voit qu’en général, lorfque la terre eft bien préparée , 1l eft plus avantageux de femer de bonne heure ; ce premier point eft furtout très-important pour le trefle , que l’on doit toujours femer avec l'orge , dans les principes d’une bonne agriculture, & c’eft principalement pour préparer la terre à cette plante, que les labours d’hiver font nécef- faires. Les auteurs font très-partagés , ainfi que les cul- tivateurs , fur la quantité de femence que lon doit employer ; quatre boiffeaux par acre font, ordi- nairement aflez : dans la glaife pourtant, ainfi qæ dans les terres .graveleufes, il en faut cinq. Il y a des fermiers qui prétendent que deux boiffeaux F 82 AVR 1 L: fuffifent dans des terres bien meubles , mais je n’eft crois rien, quoiqu’en général tout cela foit fuivant le terrein. Dans une terre bien fumée & bien pré- parée , trois boifleaux peuvent fuffire , furtout fe- més avec le trefle , parce que quand l'orge ef trop forte, cela l’étouffe. Il y a beaucoup d'Ouvrages qui traitent du plus ou du moins de femence que l’on doit mettre dans les terres; mais lon peut fur cela fuivre les réfultats des expériences qu’on a faites fur fon fol, Des Pois blancs. Voici la propre fafon pour femer les pois blancs , autrement appelés pois pour bouillir, Les » terres doivent être légeres , fablonneufes , ou même graveleufes , bien labourées & herfées ; on en met trois boifleaux par acre : c’eft une plante très- bonne à cultiver dans les fols dont je viens de parler , qui détruit très-bien les mauvaifes herbes;” mais fur des terres fortes ou argilleufes , la ré- colte n’en feroit pas profitable , ou au moins il faudroit que les terres fuflent bien préparées & bien meubles, Avrii 83 æ Du Bled de Turquie. La terre deflinée pour femer éette graine en Mai, doit être labourée ce mois-ci, car il faut qu’elle le foit deux fois en tout, & herfée trois ou quatre fois; non pas que cela foit néceflaire pour la graine même, mais pour l'herbe que l’on doit toujours femer avec. Le fecond labour en- terre les mauvaifes herbes que le premier a fait croître , & qui engraïflent d’autant la terre. Je con- feillerai aux fermiers d’effayer davantage de cette culture ; fur vingt paroifles, il y en a dix-neuf qui ne connoïflent le bled de Turquie que de nom : il a plufieurs ‘avantages , entre autres un très grand, eft de préparer parfaitement la terre pour du froment, mieux qu’aucuns autres légumes, Un boïffeau fuffit pour femer un acre, ce qui he fait que le quart de la dépenfe de lorge 3 on ne doit femer qu'à la mi-Mai, parce qu’alors on a bien le tems au deuxième labour de tirer toutes les mauvaifes herbes que le printemis aura fait poufler, & vous n’avez pas le rifque que les mauvaifes terres faflent manquer vos récoltes , comme on voit fouvent pour les orges & avoi- nes; cela fe vend aufli bien que l'orge, lorfqw’il eft connu, & eft beaucoup meilleur pour engraif- fer des cochons ou de la volaille; c’eft la meil- F j 84 À VARIE, leure des graines pour femer de l'herbe avec , cela lui donne le mème abri que l'orge, & ne lui en- leve pas tout le fuc de la terre. Du Trefle. On feme le. trefle, comme nous lavons dit ; avec l’avoine ou l'orge ; 1l en faut quinze livres de graine par acre dans un terrein bien fumé & dans un bon fond , dans le cas contraire , il en faut mettre au moins vingt livres; car une bonne terre produira plus de trefle avec moins d'engrais, qu’une. médiocre avec plus. Il y a des tables de comparaifon & de calcul à linfini pour cela ; mais le principe que j'avance n’y eft fondé que fur ce que j'ai éprouvé moi-même, chacun doit donc là-deflus eflayer la quantité de femence que . fon fol demande; par exemple, j’obferverai qu'à cet égard, l’argile & la terre graveleufe font dans le cas d’être traitées de même , ce qui prouve que plus ou moins de graine dépend moins de la qua- lité du fol, que de la manière dont il eft engraïflé: cette réflexion eft faite de même dans les voya- ges de M. Yong , fameux écrivain anglois ; fur la partie de l’agriculture. AVRIL. 85 De la Garance. Voici le vrai tems pour femer la garance fur une terre qui doit avoir été labourée au mois d'Oc- tobre, bien égoutée l’hiver par de bons maitres qu'on y aura tirés; on doit redonner un fecond labour au commencement de ce mois, & herfer la terre plufeurs fois; & enfin les derniers jours d'Avril recommencer le labour & le herfage : alors la terre eft en état d’être plantée. Les plants doivent être pris dans un vieux champ de ga- rance ; lorfque les tiges ont deux pouces au plus de haut, il faut les arracher, car plus le plant eft petit, mieux cela vaut, & les mettre dans leau à mefure qu’on les arrache ; un autre ouvrier les reprend tout de fuite dans l’eau pour les planter, afin de ne pas leur donner le tems de fe fé- cher. Il faut des gens au fait pour faire ce der- nier ouvrage, & difpofer les rangs avec ordre, à deux pieds de diflance l’un de Pautre, & rele- vant un peu la terre en rayons, parce qu’alors les eaux s’égouttent l'hiver, fans avoir befoin de tirer des maîtres dans la terre, qui au refte doit avoir été labourée à plat ; des hommes ou fem- mes pañlent devant, & relevent la terre en efpece de foffé , un enfant fuit derrière & met le plant de- dans, - Fi 86 AVR I:L Si on admet la culture de la houe à cheval , il faut laïfler des intervalles de trois à quatre pieds, mais alors on peut mettre deux rangs de plant dans chaque rayon ; cette méthode eft plus éco- nomique , comme je lai déja dit pour d’autres plantes , celle-ci devant être nettoyée avec beau- coup de foin. On ne doit pas s'inquiéter beaucoup fi la plante poufle peu le premier mois; fi cepen- dant il venoit de grandes féchereffes, 1l feroit à pro- pos d’arrofer. La garance ne réuffit pas dans toutes fortes de terres , les opinions font très-partagées fur la na- ture de celles qui lui font propres: aufli ce que je puis confeiller de mieux à celui qui voudra en- treprendre cette culture, eft d’en effayer en petit avant de s’y livrer. Une autre chofe à confidérer eft la difficulté du débit. Un fermier éloigné de la ville ira très- fouvent quatre ou cinq fois de fuite au marché porter fa garance, fans être préparée, ( fon état n'étant pas de le faire}, fans trouver à la vendre: ou fouvent, pour en favoir le cours , il écrira à un marchand, qui lui répondra qu’elle vaut quatre louis le quintal, & fi d’après cela, il en mene au marché fuivant , on ne lui en offrira plus que trois, on lui répondra qu’elle eft baïffée : il n’en eft pas mois vrai qu'il en fera pour fon voyage. Quant 4 moi, fans décrier la culture de la garançe, je AVRIL, 87 dirai que je naime point à cultiver une plante dont le débit n’eft pas afluré , ni le prix réglé , & où il faut s’en rapporter à la confcience des mar- chands. Si l’on vouloit encourager la culture de cette plante, & établir dans le royaume des manufac- tures pour la préparer , il fe formeroit bientôt des … foires aux environs, où les cultivateurs feroient affu- rés de vendre : fans cela , cette culture ne s’accré- ditera jamais beaucoup dans le royaume, De la Luzerne. Cette plante eft une des plus fameufes que lon cultive en Angleterre , & depuis quelques an- nées elle a été, plus qu'aucune autre , un fujet de differtations , & les opinions ont bien varié à cet égard. Je n’entrerai pas dans tous les détails fur les trois principales manières de la cultiver dont les auteurs ont traité « favoir, en la femant à la volée, avec un femoir, ou par tranfplanta- tion. Si vous ufez de la première méthode , il faut que ce foit avec du bled de Turquie (1) fur une (1) Je crois cette aflertion bien générale; car en France | où cette méthode n'eft pas connue , on ré- E 83 A vVRTEL bonne terre, peu humide , bien nettoyée de toute efpece de mauvaifes herbes , & dans le meilleur état de culture pofhble ; il faut vingt livres de graine par arpent , on la feme à plat fur la terre, & on pafle deux ou trois fois la herfe deflus ; avec ces foins , la luzerne ne peut manquer de téuflir fur un bon fonds : mais dans du fable, du gravier de craie ou de chaux , elle manquera pref- que toujours, | Pour la cultiver au femoir , le mois d'Avril eft le tems propre. La terre ayant été labourée l’hi- ver, bien égouttée , & enfin ayant reçu un der- nier labour en Mars & un au premier de ce mois-ci , au dernier labour on forme des planches de cinq raies, & on herfe bien enfuite; à la fin de ce mois, on met fur les planches de bon fu- mier ou compots bien confommé , de mamière qu'il n'arrête pas la herfe n1 le femoir, enfin, à la fin d'Avril on enterre ce fumier par un der- nier labour , dans les planches de cinq pieds feu- lement , en les relevant un peu, & on feme en- fuite le grain en rayons, à un pied l’un de l’au- tre: cinq livres de graines par acre fufhfent pour cette culture. La tranfplantation {era traitée un autre mois, éolte de fuperhes luzernes avec de l'orge ou de l’a- yoine. À v.R NÉ: 89 : La culture de la luzerne au femoir eft très- avantageufe dans de bonnes terres , & bien fu- mées : un bon fermier doit toujours en avoir une certaine quantité, pour en difpofer pour les diffé- rens ufages auxquels elle eft propre. D'abord, pour nourrir les chevaux au verd, en la fauchant tous les jours , pour les vaches à lait , les génifles d’éleve, les bœufs qui travail- lent, & même pour engraifler. Mais le premier objet eft le meilleur, & un bon fermier doit met- tre dans le printems tous fes chevaux à cette nour- riture , &t avoir toujours un certain canton de luzerne deftiné à cela. Un bon acre de luzerne, bien ménagé , peut nourrir quatre ou cinq che- vaux , du dix Mai au premier Oftobre , ce que nulle autre herbe ne pourra faire, Je ne puis trop confeiller à tout bon cultivateur d’avoir un nom- bre fuffifant d’arpens de luzerne bien préparée, bien foignée , & où, furtout, on ait bien foin de détruire les mauvaifes herbes qui létouffent & en altèrent la quantité. | Du Sainfoin, Il y a des parties de l'Angleterre où les fer- miers ne pourroient pas payer moitié de leurs fermages, fans la reflource de cette plante dans 90 À v R EL, des terres de gravier , de fable, ou des terres à chaux : quelque pauvre que foit le terrein, le fain- foin y réufhra. Avril eft le bon tems pour le femer ; la feule attention à avoir eft que la terre foit bien net- toyée de mauvaifes herbes , & bien meuble, On le feme fur une facon , avec de l’orge ou du bled de Turquie , & on l’enterre avec un tour de herfe feulement; il faut que la herfe foit un peu péfante, fans quoi il faudroit deux tours; & le faire par un tems bien fec. Sur un terrein à fainfoin on ne doit pas héfiter d'en femer , car aucune plante ne rapportera au- tant dans des terres médiocres qu’on loueroit à peine un écu lacre pour labourer ; & en fain- foin , elles rapporteront deux cens & demi ou trois cens bottes l’arpent, à la première coupe, & fournira enfuite un excellent pâturage. Le produit de ce fourrage eft excellent , il n’en refte jamais au marché, & la confommation en eft sûre, tous les animaux en étant friands. Les terres de la qualité de celles où on feme du fainfoin, en les mettant en labour , ne rappor- teroient jamais autant que femées ainfi, quand ce ne feroit que pour en faire un pâture pour les bêtes à laines. La quantité de femence néceffaire eft de quatre AvRIT 91 ou cinq boïfleaux par acre; on le feme à la va- Jée, & il réuffit prefque toujours. De la Pimprenelle (1). Voici le bon tems pour femer cette plante, & la meilleure manière de la cultiver eft d’en femer un boiffeau par arpent , avec de l'orge, de la- voine ou du bled de Turquie, dans un terrein frais, & d’y donner trois tours de herfe. Il n’en eft pas comme du fainfoin, cette plante vient dans les terres médiocres, mais plus le fol où on la met eft bon , mieux elle réuffit, & plus elle eft abondante, Le grand ufage de la grande pimprenekle eft pour nourrir les moutons au printems: çar fi on la lafle un peu haute l’automne , fans la cou- per , elle pouffe tout l'hiver , malgré les plus grands froids , même fous la neige, & fera bonne à faucher de très-bonne heure au prirfèms. Elle a pour cela l'avantage fur toutes les autres plantes artificielles ; elle réuffit fort bien auf mêlée avec du ray-graff, en en mettant trois picotins avec deux boifleaux de ce dernier fourrage par acre, (1) L'auteur anglois l'appelle burnet, c'eft ce nous appe= lons en France grande pimprenelle, 92 AVRTL Des Troupesaux. Il ny 2 ren qui demande plus les foins du fermier , que la nourriture de fon troupeau, en Avral & Mais le degré de perfe&üion fur cet ar- ticle. prouve le plus ou le moins d'intelligence du fermier , &t eft plus important que tous les autres travaux de la ferme. Ces fois dépendent de l’abondance des tur- neps & du foin, que l’on aura ménagée lhiver ; car fi cette nourriture vient à manquer, on ef forcé de faire manger au troupeau quelques can- tons de trefle ou de pré, ce qui nuit à la fau- che. On peut leur faire manger quelquefois du : bled. ou feigle en herbe, quand il eft trop fort. Beaucoup de fermiers manquent dans le royau- me à un objet f important, de forte qu’une grande partie ne peut pas garder autant de bêtes à laine qu'ils le voudroient , #ar défaut de nourriture, Ces deux mois-là , il y a des cultivateurs affez intel- ligens pour ménager leurs turneps, au point que non-feulement les racines puiflent nourrir les bre- bis , mais encore pour que les feuilles & re- jets de ceux qui montent à graine puifient leur faire une pâture verte de bonne heure ; ils font aufh tous les ans un clos de ray-graff ou de trefle, À VRI L: 93 dans‘ une terre bien préparée , à demi-femence, * pour faire un bon pâturage au printems, jufqu’au quinze de Mai, tems où il y a aflez d'herbe dans les pâtures ordinaires : cela eft d’autant plus né- ceffaire que, 1°. fouvent les feigles & bleds ne font pas aflez forts pour pouvoir , fans inconvé- nient, y mettre le troupeau ; 2°. Rien ne fait plus de tort aux pâturages , que d’y mettre les mou- tons trop tôt, au printems ils arrêtent la première poule d’herbe ; 3°. Rien ne nuit plus à la récolte d'orge qui doit fuivre les turneps , que de les ar- racher ou faire manger top tard , en retardant le tems des labours & celui de la femence, fans comp- ter qu’une fois que les turneps commencent à mon- ter, la racine eft creufe & ne vaut plus rien. Je confeillerai donc d’avoir, comme je l'ai dit, un petit champ de trefle & ray-grafl, qui dès le com- mencement d'Avril doit avoir trois pouces de haut; cela fera un excellent pâturage pour fix femaines au printems. Mais il ne faut pas compter fur cette nourriture feule , pour peu que lon ait un fort troupeau, car il faudroit bien des acres de terre pour le nourrir , &t l’emploi de la terre ne feroit pas proportionnée avec le profit que l’on feroit fur le troupeau , qui feroit toujours inférieur. Mais voici ce qu’un cultivateur prévoyant doit faire. Il ne doit pas lui refter un feul turneps fur pied après le mois de Mars, mais il doit alors avoir 04 AVRIL un champ de choux-navets tout prêt pour mettré le troupeau, ce qui fera d’un excellent rapport & occupera bien moins de terrein , fourniffant bien plus de nourriture , en peu d’efpace, & ne retar- dant par conféquerit la femence d’orge que fur un bien petit terrein; & fi le tems même.eft beau, cela n’y fera prefque pas de tort ; les gelées ne font aucun mal à ces choux que l’on peut con- ferver jufqu'au 1$ de Mai, tems où ils montent à graine, & ne valent plus rien à manger ; on feme auffi pouï le mêrne objet des grands choux d’E- coffe & d'Amérique , mais ces deux efpeces du- rent moins, parce qu’elles montent à graine plu- tôt. Je confeillerai de préférer les choux - navets, Plufieurs auteurs s’accordent à dire que de ces der- niers un arpent peut nourrir pendant fix femaines un demi-cent de bêtes ; d’après ce calcul , il eft aifé à un cultivateur de favoir ce qu'il en doit fe- mer tous les ans, Une autre plante fort bonne à cultiver pour nourrir les bêtes à laine, eft, comme nous l’avons dit plus haut , la grande pimprenelle ; un arpent en vaudra mieux que trois de trefle ou raÿ-grafl ; car fi cette plante a fix pouces de haut en No- vembre , & qu’on ne la fauche pas, elle gtandira encore de deux pouces, quelque grand froid qu'il fafle, jufqu’au mois de Février ; cette nourriture fera excellente dans le commencement du prin AVRIL 95 tems , non-feulement pour les brebis, mais pour les chevaux & vaches, cela en nourrira bien plus, & fera bien plus profitable pour manger dans les champs , que toute autre efpece d’herbage. Des Vaches, Il n’y a pas de profit pour un bon fermier de for- tir fes vaches de la cour ce mois-ci, s’il a une bonne provifion de choux & de paille , elles lui feront plus de bénéfice à la cour, par la quantité du fi mier; & il faudroit qu’il eût bien de l’herbe de trop, pour les y mener ce mois-ci; car ces bêtes n’y trouvant pas aflez de quoi vivre fe dégoûte- roient , malgré cela , des fourrages fecs après, fans compter que cela fait tort à lherbage. Les vaches à lait & les vieilles deftinées à lengrais doivent toujours avoir des choux à difcrétion, & ne jamais manquer de litière, Des Chevaux, Les chevaux doivent encore être nourris à l’é- curie ce mois-ci, & on ne doit pas fonger à en mettre aucuns à l’herbe , ni leur ménager la li- tière , pour qu'ils vous faflent plus de fumier , non 1 96 AVRIL, plus que la nourriture; car voilà le tems où les forts ouvrages commencent , & où les chevaux tra- vaillent dix à douze heures par jour, Des Bœufs. On fera la même obfervation fur les bœufs, qui doivent aufhi être bien nourris: les choux ne doivent pas leur manquer ; fi c’eft de gros bétail , il leur en faut à chacun cinquante livres par jour : ce calcul prouve combien il eft avantageux & né- ceflaire de cultiver cette plante avec une cer- taine étendue, Des Cochons. Les truies doivent en ce mois-ci être prêtes à mettre bas , elles demandent beaucoup de foins, ainfi que les cochons de lait & les cochons à l’en- grais ; elles ne trouvent encore rien dans les champs , 1l faut les tenir enfermées dans la cour de la ferme, où les batteurs, qui doivent encore travailler tout le mois, leur fourniront d’amples nourritures : outre cela , vos. débris de turneps, carottes, panais, & les eaux de la laiterie, doivent les FO AV RTS 97 les éntretenir en bon état, pourvu que les foins &t la litière ne leut manquent pas. Des Patates: Les patates ou pommes de terre doivent comi- mencer à être binées à la fin de ce mois, pour y détruire toutes les mauvaifes herbes ; cette opé- ration eft néceflaire , & dédommage bien de la dé- penfe par le profit qu’elle donne, Des Carottes. Si elles ont été femées de bonne heure , elles feront auf bonnes à biner à la fin de ce mois. La regle eft de commencer cette opération dès que la plante dépañle les mauvaifes herbes; mais il ne faut jamais la faire par un tems mou. On fe fert pour cela d’uné houe de trois pouces de large , avec un manche de deux pieds ; l’ouvrier doit être à genou, comme les jardiniers pour far- cler l'oignon ; s’il y a beaucoup d'herbe , cet ou- vrage vaut trente-fix livres l’acre , & le profit de la literie en augmentera bien de trente fols pa jour. G # | s 98 ATVÉRIET. Des Choux. Avril eft le tems de replanter les choux femés d'automne; c’eft un ouvrage très-aifé & peu dif- endieux , mais il faut avoir de lattention pour le bien faire. Un peu avant de planter, on doit avoir achevé de labourer & d’enterrer le fu- mier; ce dernier labour doit être en grandes plan- ches, un peu bombées & bien herfées , fi c’eft pour planter en rayons de cinq pieds & biner à la houe à cheval; mais fi c’eft pour cultiver à la man, on doit mettre la terre en rayons, & plan- ter un rang fur chacun. Des enfans pofent d’abord les plantes de dif- tance en diflance , le long des raies où on doit les planter , alors un homme fuit avec une houe, & lès plante ; par ce moyen, la befogne eft très- promptement faite, & on peut la faire faire pour cent fols ou fix francs l’acre. Si le tems eft beau, on fera travailler le foir , le plus tard poffble, car la rofée & la fraicheur ne peuvent faire que du bien aux plantes. La culture de cette plante eft très-utile pour nourrir toutes fortes de beftiaux ; un bon acre de choux peut rendre de trente-cinq à quarante ton- nés péfant (1), & rendre par-là cinquante écus NE LION re ARS US (1) La tonne pefe douze cens. AVRI 69 üu deux cens francs, jufqu'au mois de Janvier , frais faits , ce qui vaudra mieux que trois récoltes de bled , demandant moins de dépenfe : aufi je ne puis trop confeiller cette culture en grand. Le choux-navet a l'avantage fur toutes les aus tres efpeces, à caufe du tems où cette plante fe prolonge dans le printemns : car , comme je lai dit à l’article soupeau , le plus loin que les turneps puiflent aller eft la fin de Mars, & c’eft le mo- ment où 1! eft le plus difficile de nourrir les trou- peaux ; au lieu que les choux-navets les conduifent à la mi-Mai (1). Cette culture a le grand avantage de réufhir parfai tement dans les terres fortes , où les turneps man- quent , & de ne point épuifer la terre, ce qui ef une découverte trèszutile pour les fermiers qui n’ont que de ces fortes de terre, & qui fe ruineroïent en foin au printems, Cette plante demeurant en terre jufqu'à la mi- Mai , il neft plus terns d'y femer des mêmes grains ; 1l y a dans ce cas deux méthodes à fui- vre : la première , c’eft d’y faire fuccéder du bled de Turquie, dans les lieux où il réuffit; la fe conde eft d’avoir toujours un enclos defliné aux choux-navets à la fin, Dès que la confommation (x) L'auteur anglois répète à ce fujet tout ce qu'il 4 dit à l’article sroupeau , ce qui m’a paru inutile, Gi 100 À VRM À. en eft finie, on retourne la terre & on la fumeÿ à la mi-Juin, on donne un fecond labour ; nous verrons ci-après la fuite de cette méthode (1). Des Bois & re Dans ce mois-ci , tout doit être fini dans les bois, tant pour la coupe que pour les charrois qui abi- ment les rejets ; il faut auff bien relever les foflés, pour empêcher les beftiaux d'y entrer. C’eft auff le moment d’avoir achevé de tondre & nettoyer les haies, & ramañler les fagots, pour ne pas arrêter la poufle de lherbe, Du nettoyage des Prairies artificielles. Il faut, au commencement de ce mois-ci ; avoir foin de bien farcler les herbages femés l’an- née d’auparavant, n’y pas laifler une feule mau- vaife herbe , arracher le long des haies toutes les (1) Dans les deux articles qui fuivant celui-ci, l’auteur recommande de tirer des maîtres dans toutes les terres à avoine & orge, & de donner un bon labour bien herfé aux terres pour les turneps, ce qui ne méritoit pas un chapitre entier. AVRIL. 101 ronces & épines qui auroient pu y poufler, & bien répandre toutes les buttes & taupinières. Cette opération étant faite, on doit faire pañler fur ces prairies le rouleau à cheval , qui unit bien le terrein, & le difpofe de manière que la faux puifle également pañler partout. On doit pour cela fe fervir d’un rouleau plus péfant & plus grand que ceux dont on fe fert pour rabattre les orges. Plufieurs cultivateurs ont porté aufli à un fi grand excès le poids de leurs rouleaux, qu'un cheval ne pouvoit plus les mener , ce qui eft par- faitement inutile. On a imaginé à préfent en Angleterre une nou- velle opération pour amélioration des prés, dont dont j'ai déja parlé, c’eft d’y faire pañler l’hiver une charrue fans foc, à laquelle on ne laiffe que le coûtre; cela fend la terre, & la difpofe à re- cevoir les engrais , de telle nature qu’on veuille y mener , & les pluies entrant dans la terre, y font plus d'effet pour la végétation : cette préparation eft fouvent plus avantageufe pour les prairies, que d'y pañler un rouleau trop péfant, furtout lorfque les plantes font en train de poufler, cela les comprime trop & arrête leur croiffance : il y à de lexcès à tout. Le rouleau doit écrafer feule- ment les trous des taupes ou des vers, & non pas rendre la terre trop compaéte , un excès dans le poids praduit ce dernier efet, êt devient une Gi 103 AVRIL dépenfe confdérable & inutile; fa nature du ter: rein plus ou moins ferme doit auf fervir de regle en cette occafion. Du Houblon. Le commencement de ce mois eft le tems pro- pre pour en planter. On doit avoir labouré la terre bien profondément en hiver , l'avoir fumée & relabourée en Mars , puis bien herfée ; après cela on fait pafler un charretier habitué à tirer des maîtres dans les champs, qui , avec fa char- rue , trace des raies bien creufes , de huit pieds en huit pieds, ce qu'il fera auffi bien qu’avec un cor- deau, s’il en a l'habitude. Quand il a fini, on lui fait refaire la même opération en travers, ce qui divife la piece en quarrés de huit pieds fur tous fens ; alors on forme des buttes aux angles, & par ce moyen on peut donner toutes les façons à la houe à cheval, ce qui eft bian moins cher que de cultiver le houblon en fofles, comme au trefois, Du Lin. La fin de ce mois eft le bon tems pour {e- AVRIL 103 mer cette graine; la terre qui lui convient eft un fol gras , bien ameublé par les labours , fitué dans quelque vallée, au bord d’un ruiffeau, ou encore mieux , fur des terres que les rivières ont couver- tes pendant quelques mois , comme nous lavons dit pour le chanvre : un fond de terre tremblante, où il y a de l’eau deflous à une certaine pro- fondeur, convient aufli au lin, ce qui fait qu'il a fi bien réufhi dans la Zélande depuis quelques an- nées, mais 1l faut que de pareils fonds foient bien cultivés & fumés |, & rencontrent une année feche. | On a remarqué, dans les Lettres de la Socièté de Dublin, que les fonds humides avoient fourni de fortes récoltes de lin, même avec une moit- dre quantité de femence ; M. Duhamel , dans fes Ouvrages , recommande les terres fortes pour cette plante , préférablement à tout autre fol. Dans les provinces méridionales du royaume ; plufieurs cultivateurs fement leur lin en Septem- bre & OGobre; cette pratique réuffit affez bien : la plante foutient bien l'hiver , & dès le commen- cement du printems elle entre en végétation, & fe récolte par ce moyen beaucoup plutôt. Is en fement aufli d’autres au commencement du prin- tems ; mais ils remarquent que cette dernière fe- mence réuflit toujours beaucoup moins bien ; c’eft- à-dire , pour la quantité, car la qualité du lin ef G iv 104 AVRIL. plus fine que celui qui a pañlé l'hiver déhors. M. Duhamel parle aufli beaucoup pour le lin femé avant l'hiver. Cependant il y a tant de rifques à courir pendant les gelées, les neiges & les grandes pluies, pour cette plante qui eft fi tendre , que nous ne traiterons ici que de la culture du lin: au printems. | | ” En général, la terre definée à cette plante ne fauroit être trop meuble & en trop bon ordre de culture, par les différens labours & les meilleurs engrais que l’on y peut mettre : par exemple , fi c’eft une pâture défrichée à laquelle on veuille faire porter du lin, :l faut préparer la terre pendant dix-huit mois ou deux ans, pour qu’elle foit en état de produire une belle récolte de lin. Il eft vrai que pendant cette intervalle, pour ne pas perdre abfolument fon travail, on peut faire por- ter à la terre qu'on y defline , des plantes qui ne féjournent pas longtems en terre, comme fe- ves , pois & turneps, qui demandant plufieurs la- bours & binages, entretiendront toujours la terre en bon état, & détruiront à la longue les mau- vaifes herbes qui tueroient le lin. L'Ouvrage fameux intitulé : Corps d’obferva- tions de la Société d’agriculture de Bretagne , nous dit que la meilleure terre pour mettre du lin , fe- roit un bois défriché où l’on brüleroit les fou- ches & racines fur place, comme font les Livo- niens. : AVRIL. 10ÿ Si le terrein deftiné à porter du lin eft argil- leux , il faut bien prendre garde de ne pas le la- bourer par un tems mou , il deviendroit trop compaét. Si la terre aufhi a été longtems fans être labourée , 1l faut qu'elle le foit avant l'hiver, en rayons bien creux, pour que les pluies & les ge- lées la rendent meuble pour recevoir les façons fuivantes. En Février, s’il ne fait pas trop mou, on y conduit du fumier bien pourri , & on lenterre tout de fuite, en Mars dans les provinces du midi, & au commencement d'Avril dans celles plus fep- tentrionales : on donne un dernier labour ,‘& on a foin alors de rendre la terré auffi meuble qu'il eft poffible ; on fait cafler les mottes avec un outil à la main, puis on répand la femence qu’on en- terre légérement avec une herfe où l’on met des épines , qui n’enterre pas la femence de plus d’un pouce. Si le terrein eft mou ou froid, il faut fe- mer un peu de fiente de pigeon avec la grame, car cet engrais réuflit parfaitement pour le ln; mais il ne faut pas le faire fur une terre légère ou fur un terrein fec , car cela brüleroit. Il faut auffi avoir bien attention , fi la terre n’a pas beaucoup d’égoût, de tirer de bons maï- * tres pour bien deflécher la piece; car rien n’eft fi nuifible à cette plante que d’avoir le pied dans. l'eau, 106 Av: HI; Notre meilleure graine de lin vient du Nord, principalement de Riga dans la Zélande ; mais nous en pouvons récolter d’aufl\ bonne en fuivant les inftruétions indiquées ici. La graine de lin eft ré- putée bonne , quand elle eft large , huileufe , lourde & d’une couleur brune & foncée; on connoît fa- cilement fi elle eft huileufe, en en écrafant quel- ques grains ; elle eft affez lourde ; quand en en jettant dans un vafe d’eau , elle va tout de fuite au fond. Pour connoitre fi elle n’eft pas trop vieille, il faut en compter un certain nombre de grains, que l’on feme fur une couche bien chaude , & on compte enfuite fi tous les grains levent, Quand la bonté de la graine eft reconnue, on en feme plus ou moins épais, fuivant que l’inten- tion du cultivateur eft de récolter du lin pour grai- ne, ou avoir de belles tiges pour filer ; dans ce dernier cas, on le feme un peu épais pour que les tiges pouflent un peu ferrées , & foient par conféquent plus minces, ce qui ajoute beaucoup à la fineffe des fibres de la plante; fi, au ëbntraire, on feme le lin pour en récolter de la graine, il faut le femer beaucoup plus clair , pour que les plantes étalent davantage, & prennent par confe- quent plus de vigueur. | Plufieurs cultivateurs fement des graminées avec le lin, s'ils font dans l'intention de faire enfuite une pâture de la piece. La plante pouffe lentement AvVRII 107 fous le lin, mais après qu'il eft arraché , elle re- prend de la vigueur ; couvre bientôt le champ, & donne un nouveau profit. Le lin eft quelquefois en- dommagé par les infectes , lorfqu'il n’a que trois ou quatre pouces de haut ; on dit que pour les détruire , il faut y répandre une légère femence de cendres : il eft certain que, fi cette opération ne dé- truit pas les infeétes, elle donnera toujours de la vigueur à la plante , pour laquelle ce fera encore un nouvel engrais, De la Cour de la Ferme. une le douze de ce mois, le fermier doit examiner s’il a aflez d'herbes pour cefler de raf- fourer ; mais il ny doit pas fonger avant: car s’il met fon bétail dans un herbage , avant que l’herbe foit bien pouflée, 1l lui en faudra une fi grande étendue , qu'il ne lui reftera prefque rien à fau- cher. Dés que les befliaux font lâchés ; il faut ramaf- fer tous les fumiers de la cour , & en former des compots avec de la terre , de la chaux , de la marne , comme nous avons dit plus haut ; 1l faut employer à cet ouvrage le plus de bras poffbles pour l’expédier , afin que cet engrais refte quelque tems mélangé avant qu'on ne le mene fur les terres, fans quoi la fermentation ne fe fait pas fi bien, La méthode que l’on doït fuivre pour cela , eft de commencer par relever les furmers du milieu de la cour le long des murailles , & en- fuite de creufer au milieu un foffé de trois ou quatre pieds, pour recevoir l’égoût des fumiers; M A 1. 108 aprés cela on commence à faire les lits, comme nous l’avons expliqué , & avec une pelle creufe, on arrofe à mefure chaque couche de terre ou chaux avec le jus de fumier qui fera dans le fofé , on fait enfuite des tranchées dans le compots, avec des bâtons ferrés , pour y faire introduire ce jus , ou même de l’eau de marne ou d’é- goût, s’il y en a quelque réceptacle à portée de la cour : par ce moyen, vous aurez un excellent mélange d’engrais , pour mener fur les terres qui doivent porter des choux ou des turneps ; c’eft dans le fon & le fuccès d’un pareil travail que lon reconnoit un bon fermier , fi tout ce qui fort des étables eft bien employé, il aura de quinze à vingt charges de fumier , par tête de grande bête, &t environ dix par chaque porc, en ne comptant pas les petits, le tout compris un tiers de terre ou chaux mélangée avec le fumier, ce qui d’une voi- ture en fera fix. Il y a plus, fi une pareille couche eft faite fur terre & refte ainfi tout l'hiver , la terre fur laquelle elle à été faite eft fi imbibée d'urine & de jus de fumier , ainfi que de urine des bef- taux , qu’elle formera un aufli bon engrais à mener fur les terres que le compots lui-même, & même préférable à la chaux & à la marne. Un des grands avantages de cette manière d’en- graifler les terres eft le bon marché dont elle eft; 116 MA. les cultivateurs qui en feront la vérification , éprou veront qu'il n’eft pas une manière plus économi+ que de fumer , il n’y en a pas qui ne monte plus haut de trois à quatre fois, & au-delà, Il y a même des endroits où les autres engrais font fi rares, que fi l’on n’emploie cette métho- de , on ne peut parvenir à fumer toutes les terres , & il eft bien peu de fol qui puifle fe pañler d’en- grals, Des Befliaux nourris dans Les Herbages. Il ÿ a deux régimes ufités pour nourrir les bef- taux à l'herbe , lorfque la faifon eft arrivée de leur faire quitter le fec : une partie des herbagers font dans lufage de mettre tous leurs animaux à la fois dans une grande & vafte prairie, où ils courent çà & la, à leur volonté ; d’auttes divifent leurs herbages en petits enclos, où ils les enfer- ment fucceflivement, & ne les font pañler de l’un à l’autre , que lorfque toute l’herbe eft mangée. Chaque cultivateur qui emploie l’une de ces deux méthodes , croit toujours la fienne la meilleure : mais cela eft impofhble , l’un d’entr'eux fe trompe aflurément. Je penfe qu’en général, pourvu que la quantité de terrein à paître foit en proportion du nombre des beftiaux qu’un fermier a à nourrir, il y a toutes fortes d'avantages à avoir les enclos MAT tie divifés par des haies ou des paliffades, avec des portes qui ferment; par ce moyen , les animaux mangent toujours de l’herbe fraiche , ils ne la foulent point aux pieds: & comme d’ailleurs tous les herbages ne font pas également gras, on peut mettre les animaux les plus maigres dans les meil- leurs cantons. Il y a deux manières de fpéculer fur l’engrais des beftiaux. La première eft d’acheter des animaux mai- gres, en Otobre ou Novembre, de les nourrir avec de la paille jufqu’au mois de Février, en- fuite jufqu’au mois de Mars avec des turneps, & enfin depuis cette époque jufqu’au mois de Mai, avec des choux-navets ou de grands choux d’E- cofle ; alors on les met à l’herbe pour les ache- ver d’engraifler , & on les tue en Août ou Sep- tembre. L'autre méthode eft de ne les acheter qu’à la mi-Mai, à la pointe des herbes, & de les reven- dre en OËétobre ou Novembre fuivant. Lorfque les fourrages ou racines ne manquent pas dans une ferme, & furtout les pailles pour les litié- res, la première méthode eft plus lucrative; mais dans le cas contraire , le fermier trouvera plus de profit à fuivre la dernière, 112 MA Du Bled de Turquie. La dernière quinzaine de Mai eft la bonne fai- fon pour femer le bled de Turquie, plutôt ou plus tard, fuivant que l’on a eu le tems néceffaire pour donner tous les labours , afin de détruire toutes les -mauvaifes. herbes & de rendre le ter- rein bien meuble. Si les façons d’hiver ne fuff- fent pas, on donne un dernier labour dans cette faifon , & on feme à la herfe. Cette plante vierit dans toutes fortes de fols, excepté les terres for- tes ; il eft d’un bon produit , furtout pour rem- placer l'orge, fi un hiver trop pluvieux vous a fait arriver jufqu’à la fn de Mai, fans pouvoir en femer; ou dans des terreins où l'orge ne réuffit pas. Le bled de Turquie réuffit dans les terres frai- ches & humides ; 1l fe vend bien, & tous les ani- maux s’en nourriffent auf bien que d’orge moulu, il les engraïfle parfaitement ; enfin un de fes grands avantages eft de ne pas épuifer la terre. CETTE TERRES 2 De la Luzgerne. Ce mois-ci eft encore très-propre pour enfemen- cer cette plante; le terrein doit être bien purgé de toutes plantes nuifbles, en bon ordre de cul- ture, Mat. 113 ture, & préparé comme pour femer de loignon, €e qui ne peut guère fe faire avec avantage en Avril. Si on eme cette plante en rayons avec un femoir , on la feme toute feule ; mais fi on la fe- me à la volée, on peut la mêler avec du bled de Turquie. Cette plante eft d’un rapport immenfe , & quor- qu’elle ne foit en pleine valeur qu’au bout de trois ans, la feconde année elle donne déja cent écus de produit par acre : il n’eft certainement pas en agriculture de plante d’un rapport fi cer- tan & d’une culture plus facile, fans être difpen- dieufe. Le fermier doit feulement , pour jouir de ces avantages , defliner les meilleures terres de fa fer- me à cette culture, & ne pas épargner les engrais avant de la femer, & même après, fi elle ne leve pas également partout. Quel eft le genre de ré- colte qui puifle rapporter à un fermier cent écus par acre tous les ans, une fois la premiére dé- penfe faite , & même plus, s’il renouvelle l'en- grais ? On peut nourrir cinq chevaux pendant les vingt- fix femaines de l’été , dans un acre de luzerne, ce qui ne fait pas quarante fols par cheval ou va- che, chaque femaine , ou vingt fols par géniile, Ef-1l aucune autre manière de nourrir. autant de befliaux avec la récolte d’auffil peu de terreinà | H 114 M A 1. Un fermier qui aura vingt chevaux, les noutrir4 fix mois de l’année avec le produit de quatre ar- pens de terre, qu'il aura feulement attention de réferver à portée de fon écurie , pour être à même d'apporter l’herbe &t d’y mener de l’engrais; par les mêmes calculs, un fermier nourrira cent va- chss avec vingt arpens de luzerne , & un cheval avec trente-quatre perches ; le tout pour les fix mois d'été. Quel produit plus réel en agricul- ture ? Quelle quantité confidérable d'engrais fera tous les ans un cultivateur qui aura cette reflource pour doubler le nombre de fes beftiaux? Je nourris ainfi mes chevaux à l'écurie tout l’été , en leur faifant ample litière pour me faire beaucoup de fumier. Il en eft de même des vaches, bœufs ou éleves ; ces derniers fe mettent fouvent dans un petit clos pour être en liberté ; on leur y donne du fourrage verd dans des berceaux. On pourroit employer cette dernière méthode pour tous les befliaux ; mais on en retireroit bien moins d’en- grais, qu'en les nourriffant à l’étable, On compte ordinairement dix voitures de fumier par été, pour chaque tête de gros bétail, ce qui, d’après les données ci-deflus, feroient cinquante par acre de luzerne , & cela fans forcer beaucoup en paille pour litière, objet fur lequel je n’épargnerai ni ne confeillerai jamais d’épargner. Il y a bien plus d’a- MA 115 “Vantage pour les fermiers , de nourrir ainfi les beftiaux , que de les laïfler courir ça & là dans une pâture , à laquelle ils ne font aucun bien; leur fente fait poufler l'herbe inégalement & par touffes, où elle tombe , &t ne fume pas la vingtième partie du terrein, Ainfi, fans calculer ce que pourroient ajouter ces cinquantes voitures de fumier, (les frais de li- tière déduits, ) à la valeur de la luzerne , on peut , fans exagérer , dire que cette plante fournit par chaque acre fon engrais, & plus de moitié d’un autre, pufquil ne faut que trois voitures par acre : une culture aufli profitable peut-elle être trop recommandée ? Si on me confulte , d’après tout ce que je viens d'avancer , fur la manière de cultiver Îa luzerne par rayons, je répondrai en peu de mots: Choïfiflez dans votre ferme la terre qui a pro- duit la plus belle récolte de grain , labourez & famez-la bien une année avant, à trois voitures larpent; fi elle eft plate & humide, defféchez-là, plantez-ÿ des turneps par rayons, cultivez-les deux fois dans l’année , & après qu'ils auront été ré- coltés | donnez encore deux labours à la térre ; lorfqu’elle eft en bonne culture, femez votre lu- zetne en rayons, à un pied de difance , & ayez foin , la première année, de la bien dégarnir des mauvaifes herbés ; enfin, fumez votre luzerne tous H à 116 M A:1. les ans, à demi-fumier feulement , avant l’hiver ; pour garantir la plante des fortes gelées : je ne vous garantis pas que cette méthode foit la mell- leure, mais du moins qu’elle vous rendra plus tous les ans que les récoltes ordinaires de bled que vous feriez. Du Sainfoin. Semez cette plante avec du bled de Türquie ; ê& fi votre terre y eft propre, vous en tirerez un bon profit: car dans les pays où le foin & les pâ- turages font rares , le fanfoin eft d’un excellent rapport , & devroit être plus cultivé quil n’eft. Cn a la prévention de croire qu'il ne vient que dans la pierre ou dans la chaux , & c’eft mal à propos que l’on fe figure cela; il eft certain que la racine de fanfoin craignant l’eau, n’en trouve pas dans de pareil terrem ; mais ce préjugé em- pêche que cette herbe ne foit cultivée dans beau- coup d’autres parties du royaume, où elle réuff- roit d'un bout à l’autre, Il eft malheureux qu’il n’y ait pas quelques réfultats d'expérience qui prou- vent qu’elle vient dans les terres fablonneufes, comme dans les terres fortes; car les fermiers en- _racinés dans leur préjugé, ne peuvent fe convain- cre que par des exemples , & les raifonnemens ne font le plus fouvent rien fur eux, Mar 117 n ® Des Curotres. Si ces racines n’ont pu être eflerbées & cul- tivées le mois dernier , il eft à propos de le faire ce mois-ci, & même de recommencer cette opé- ration, fi la première a été faite de bonne heure , & que l’herbe ait repouflée, Des Pommes de terre, On peut faire la même obfervation que pour les carottes , avec la différence que cette culture fe fait avec une charrue à cheval, qui détruit bien toutes les racines des mauvaifes herbes , lefquelles feroient fort nuifibles à cette plante, Des Choux, Voici auffi le tems de donner un binage à ceux qu’on a plantés en Avril, pour les féparer des mauvaifes herbes ; on peut aufli ce mois-ci donner un labour à la terre, où l’on a deflein de les re- planter au mois de Juin. Hi 118 M A 1. Des Jachères, Les fermiers qui fuivent encore le fyflème dé- favantageux de laffer leurs terres en jachères , doivent ce mois-ci labourer les terres qu'ils defti- nent à porter du bled, pour détruire les mauvaifes herbes qui y font pouflées , & en dévorent le fuc, au lieu des bonnes que l’on auroit pu y mettre, Il eft effentiel de ne pas tarder plus longtems à étruire ces plantes qui fans cela monteroient à graine ; il eft même effentiel de bien herfer la terre après , pour ne pas la laiffer en groffes mottes qui cacheroïient les racines des plantes que l’on auroit détruites ; car on les verroit bientôt re- pouffer , au lieu que la herfe en divifant la terre, les ramenera deflus ; le foleil les féchera & les empêchera de reprendre, J’ai éprouvé moi-même, ainfi que plufeurs fermiers expérimentés, l’avan- tage de cette pratique, d’après cela on ne peut trop répéter les labours dans les terres les plus brûlantes de l'été, quand on voit furtout que la terre fe couvre d’herbes. Le chiendent feul ne peut fe détruire de cette manière , il faut le couper entre deux terres, l’emporter , & le brüler hors du champ. M A1. 119 Des Grains femés en rayons (1). Le bled , l'orge & l’avoine qui auroient été fe- més en rayons pour être cultivés avec la petite chatrue à un cheval, doivent recevoir une facon ce mois-ci pour détruire les mauvaifes herbes , & renchaufler les plantes avec la terre qui for- tira de la raie; on doit avoir lattention de faire ramafler & enlever les racines de ces herbes, à mefure que la charrue les arrache, Des Troupeaux. Je fuppofe que les nourritures du printems aient conduit le fermier jufqu’au dix de ce mois , ïl faut mettre les troupeaux dans les herbages d’été qu'on aura difpofés fuivant le nombre des bêtes qu'on veut avoir, Si c’eft un troupeau de brebis qu'on a feulement pour en tirer le profit des agneaux & des laines, & pour les faire parquer, il faut avoir foin de les entretenir en bonne fanté, fans leur donner trop de nourriture, fans quoi la (x) Cet article, & quelques autres femblables , font abfolument propres à l'Angleterre |; où l’on fuit cette pratique dans quelques parties, avec le plus grand fuccés, 7: [1 IV 120 M A 1. dépenfe emporteroit le profit ; aufh de pareils troupeaux ne font-ils bons que dans les fermes où le terrein eft médiocre, & où il y a des bruyé- res ou des pâtures feches, feulement pour les pro- mener, mais où ils n’engraiflent jamais. Une autre fpéculation dans les provinces où tout eft enclos , eft d’acheter des brebis en Août &x Septembre , pour les faire paitre fur les jaché- res ou les herbages les plus maigres , jufqu’à Noël. On les rentre alors pour les bien nourrir de choux & de turneps, jufqu’à ce qu’elles aient agnelé , & nourri leurs agneaux, que lon vend aux bouchers; enfüuite on engraifle les mères à l’herbe , jufqu'au mois de Septembre , tems où on les revend. Cette méthode eft très-profitable aux fermiers ; mais en la fuivant on ne peut parquer que fort peu de terre l’été ou l'hiver , fur un terrein & dans un tems fec. Une trofième méthode de fpéculation fur les bêtes à laine, eft d’acheter à la fin de ce mois des bêtes de trois ans, tondues , pour les faire par- quer jufqu’au mois de Mars, pour enfuite les en- graifler avec des choux & des turneps, jufqu’à la fin de Ma, fuivant le tems de l’année où ils fe ven- dent le mieux. Voilà la méthode qui, fans contredit, rapportera le plus à un fermier , furtout fi la terre eft bonne & qu’il puifle en même tems y avoir des bêtes à l'engrais, &t encore quelques brebis pour M At. 121 agneler , sl facrifie tous fes fourrages aux bêtes à laine. Au refle, de quelque forte que foient celles que le fermier aura chez lui, voici , comme nous la- vons dit, la faifon de les faire pañler de la nour- riture d'hiver à celle d’été, & il doit bien calcu- ler ce qu'il a de trefle ou d’herbes naturelles pour y proportionner fon troupeau, & le nombre des beftiaux de toutes efpeces. Les brebis , les cochons , les chevaux & les ge- nifles fe nourriflent fort bien avec du trefle ; les moutons que l’on veut engraïfler, les bœufs de travail & les vaches à lait fe trouveront mieux de lherbe naturelle; ce n’eft pas qu’il n’y ait des can- tons où l’on dit que le trefle rend le beurre & le fromage meilleur ; mais je crois que, comme ils mangent plus de cette herbe, on n’y gagne pas. Un bon acre de trefle peut noutrir fept à huit mou- tons par an, ou un cheval & un mouton , même plus dans les bonnes terres; un acre de pré (1) peut nourrir de même une vache & un mouton; au refte, on calcule toujours fes pâtures avec fes animaux , 1l faut mieux avoir un peu de nourriture de refte que d’en manquer , parce que dans le pre- (1) Ce calcul paroît au-deflous de la vérité, mais je me fuis fait un devoir de traduire toujours littéralement ; quoi- que cela fe contrarie avec ce qui eft dit plus haut, 122 MAL premier cas, il eft facile d’en mettre une partie en foin , & il ne l’eft pas de vendre des bêtes engraïiflées à moitié. Du Parcage, On commence ce mois-ci, au plus tard, à faire parquer les moutons déhors en Angleterre, & cette pratique eft excellente à tous égards. Tous les trou- peaux maigres , & peutêtre même ceux pour en- graïfler , fi le tems eft beau , doivent être mis au parc, avec la différence que pour ces derniers le parc doit être plus étendu, le parcage en ira plus vite & en vaudra mieux ; la fente & l'urine font d’un bien meilleur engrais que celle des bêtes mai- gres , cependant il ne faut pas donner dans l'excès de quelques fermiers qui ne parquent pas aflez leurs terres , en mettant trop de claies, ou en ne laïf- fant le troupeau qu’une nuit dedans , il vaut mieux les y laifler deux que de les trop preffer dans le parc : fi c’eft une terre labourée , 1l faut que la terre foit toute noire ; fi c’eft un herbage, il fufht qu'il foit à-peu-près également parqué partout. Les terres les plus propres à parquer ce mois-ct, font celles qui doivent être enfemencées à la fin de Juin, en choux ou turneps , pour que l’engrais foit fraiche- ment donné, MA, 123 Des Cochons. Quand une partie des beftiaux dont la ferme étoit garnie, font lâchés & mis en pâture , il faut en faire autant des cochons , en choïfiffant ceux que l’on veut engraifler , & les mettant dans une piece de trefle, c’eft une partie eflentielle de l’a- griculture , mais qui, malheureufement , n’eft pas en ufage dans un cinquième du royaume ; cela mérite confidération , & des renfeignemens que nous nous fommes procurés dernièrement , nous mettront à même d’en démontrer lutilité. Dans lancien régime on gardoit les truies toute l’année à la maifon , ou tout au plus dans un petit clos à portée, où on leur donnoit à manger des eaux grafles, du grain, &c,; mais un grand abus de cette méthode étoit de, ne faire aucune difinc- tion entre les truies qu’on élevoit pour produire des cochons de lait, ou des porcs à l’engrais. Les relavures ne doivent fervir que pour les premiers , & les autres être mis en pâture, comme nous la- vons dit, dans une piece de trefle à la moitié de ce mois: par ce moyen, on peut en élever bien davantage. [ls reftent enfermés dans un enclos juf- qu'à la fant Michel; il faut feulement avoir fom que les clôtures foient bien bonnes , & qu'il y ait 124 Mar une grande mare au milieu pour les faire boire. Cette manière de les nourrir eft préférable à toute autre, ils croiflent à vue d'œil, & font prefque affez gras pour les tuer quand ils fortent de-là. Cette pratique doit certainement être fuivie avec fuccès, & le fermier y trouvera bien fon profit. Les fumiers que lui feront les truies à la maon, & le bénéfice qu'il retirera de ces animaux, ayant toutes les iffues de la cour & de la laiterie pour les cngraïfler , le dédommageront amplement de la coupe du trefle. D'ailleurs, comme dans ce mois- ci, la laiterie fournit confidérablement de lait de beurre , &t autres :flues; on peut pratiquer un con- duit en brique qui amene le furplus dans un trou ménagé à cet effet dans la cour , & qui forme une efpece de citerne, où 1l fe conferve pour le tems où il s’en fait moins dans la ferme: cette écono- mie eft fort en pratique dans les endroits où il fe fait des éleves de porcs. Des Chevaux. Au commencement de ce mois, les fermiers doivent cefler de nourrir leurs chevaux au fec, pour les mettre à l'herbe dans des trefles , & nour- tir dans l’écurie ceux qui travaillent, avec de la luzerne , ou autre herbe qu’on leur fauche exprès one tte ne * ÉÉNe Mar 125 tous les jouïs. Ceci eft un des importans articles d'agriculture , il économife infiniment la dépenfe fur la nourriture des chevaux , qui fans cela em- porteroit la moitié du profit de la ferme. On con- fomme bien moins de fourrage verd en le don- nant à l’écurie ; que fi on le laïfloit manger dans le champ , & on a le profit du fumier de plus; il faut pour cela avoir un petit enclos de trefle ou de luzerne, à portée de la maiïfon pour fau- cher & apporter deux fois par jour aux chevaux, Un acre de luzerne , qui a été bien fumée & dans de bonne terre, peut nourrir quatre chevaux, de la fin d'Avril à la fin d'Octobre ; mais un fermier intelligent , pour ne pas être en défaut, doit calculer fur un acre pour trois chevaux. Ce fyflême de conduite eft d’un avantage gé- néralement reconnu ; & tout fermier un peu in= telligent en Angleterre , en a fi bien fenti l’écono- mie, qu'ils ont tous des enclos de luzerne exprès pour cela (1). Des Bœufs. Ces animaux s’entretiennent l'hiver à meilleur RE de AE DE UE TE PE EDR TP RD TC NOEPÉRE SE RET) (1) EL feroit bien avantageux en France que l’on effayät de cette méthode , vu furtout la cherté de layoine dans cûtte faifon. Je me fuis apperçu que l’on commençoit déja en Normandie, 136 MAX compte que les chevaux , mais dans cette faïfon c’eft à-peu-près la même chofe; il faut fe conduire pour leur nourriture, comme nous venons de le re- commander pour les chevaux. Des Vaches. Il faut avoir bien foin des vaches dans ce mois- ci, parce que le laitage commence à donner &t les veaux à arriver ; les trefles ou ray-graff qui au- sont été parqués l’automne précédente, doivent don- ner au commencement de ce mois de bonne her- be, qui les nourrira très-bien. Quelques cultiva- teurs prétendent que le trefle donne un mauvais goût au beurre, c’eft une chofe à calculer, fi cela. fait tort à la vente, & qu’on ait d’autres herbes à leur donner. La luzerne nourrit fort bien les vaches ,; & ne donne aucun mauvais goût au lai- tage : étant fauchée &t donnée dans des rateliers a l’étable , cela nourtira plus de bétail qu'aucune autre plante, & en même tems on aura toujours la même quantité de fumier , article important qu'il ne faut jamais oublier. Si l’on adopte cette méthode , il fuit d’avoir à portée de la ferme une petite pâture d’un acre ou deux, avec un abreu- voir au milieu pour promener les vaches ; on les rentre à midi pour quelques heures , par ce moyen M A 1. 127 on leur donne à manger trois fois par jour à l’é- table , ou dans des crêches placées dans la cour, ayant foin d’avoir toujours de la litière fraiche deffous. La manière d’attacher les vaches par les cornes dans un herbage leur eft bien auf profitable , mais elle eft plus difpendieufe , en ce qu’elles perdent plus d'herbe, & qu’on n’en retire nul engrais. Quant à ce qui eft de les lâcher dans une pâture , il n’y a pas de comparaifon , elles gâtent deux fois plus d’herbe qu'elles n’en mangent, on eft obligé, en fuivant ce régime , de compter un acre par tête de bétail, au lieu qu’en les nourriffant comme nous l'avons expliqué , un acre fufñt pour en nourrir trois. On doit obferver lorfqw'on nourrit des chevaux , bœufs ou vaches avec de la luzerne , de la faire faucher tous les jours, où au moins tous les deux jours ; on a pour la charrier , une petite charrette, garnie en planches , bien légère , menée par un cheval. On divife chaque piece que l’on define à être fourragée en verd , en plufieurs carrés , pour que l’on en fauche un par jour ou tous les deux jours , toujours également, pour que chaque animal en ait fa fufhifance ; on peut compter que tous les mois on pourra refaucher à la même place. 128 M A ft De la Laiterie; C'eft mamntenant le plus fort de l'ouvrage pour la laitière, ( terme anglois qui exprime la femme qui a foin de la laiterie;) c’eft une des portions la plus délicate de lexploitation d’une ferme. Un fermier qui n’a pas une femme parfaitement in- telligente , qui foigne à chaque moment fon lai- tage , ou une bonne maiïtrefle-fervante en état de la remplacer, perdra fur fa laiterie confidérable- ment , au point de ne pas retirer fes frais. Celle qui eft chargée de cette befogne doit être fur pied à quatre heures du matin, ou elle fera en arrière de fa befogne. | À fix heures on doit traire, & avoir aflez de monde à cet ouvrage , pour qu'à fept heures il foit fini, la même regle doit être obfervée le foir. La propreté eft le grand point dans une laiterie; tous les uftenfiles doivent être lavés tous les jours dans l’eau bouillante, du moins tout ce qui peut entrer dans la chaudière. Dans les tems chauds,.on doit jeter fouvent de l’eau fraîche fur le plancher ; pour cela 1l doit toujours y avoir un courant d’eau dans la lai- terie. Tous ces foins font de la plus grande. impor tance dans une exploitation confdérable , où la laiterie Man 1) laitérie fait un des principaux objets de rapport, qui; sil eft bien conduit , paiera bien le fermier des foins qu'il y donnera. Des Ruches. On doit foignei ferupuleufement les mouches à miel ce mois-ci, fans quoi l’on court rifque de perdre les effaims. La plupart des fermiers ne fentent pas aflez l'importance de ce genre de fpé- culation; jamais une fermé ne devroit être fans cela ; le foin que l’on y donne eft peu de chofe, pour ce que cela rapporte , &t les plus petits profits ne doivent jamais être négligés par les fermiers. Du Chanvre: Voici la meilleure faifon pour femer le chan vre , fi la terre a eu fon premier laboùr en O&o- bre , en grandes-planches, & des taîtres tirés pour bien égoutter les eaux ; le tout bien fumé ; aprés avoir donné un bon labour, on feme & on en- terre la graine à la herfe, à raifon de quatre boif- feaux par acre, cette plante demande la terre la meilleure & la plus forte que l’on puifle trouver; car dans des terres médiocres , elle ne rend aucun il 130 M AL profit : il n’y a aucune récolte qui mérite plus l’at- tention du fermier | & lui foit plus profitable, ù Du Lin. Cette culture demande auffi une excellente terre, & beaucoup d'engrais; je dirai de cette plante la même chofe que du chanvre : il n’en eft pas une qui rende autant au fermier , s’il y donne tous fes {oins & ne néglige rien dans fa culture. Le lin peut fe femer en Avril, mais fi la terre n’eft pas dans le meilleur état poflible , il faut mieux s’en occuper & remettre la femence en Mai. DE TÜRNEPS: Voica la vraie fafon de femer les turneps ; ceux femés plus tard réufliffent rarement; plufeurs fermiers ont la prévention de croire qu'il faut les femer pofitivement quinze jours avant ou quinze jours après le folfice d'été , mais c’eft un pur préjugé auquel il ne faut avoir aucun égard. La terre doit avoir été labourée , comme nous l’a- vons dit, en Mai, & les fumiers conduits deflus a la moitié de ce mois. Un fermier intelligent doit avoir aflez de befiaux & d'engrais pour mettre le quart de fa ferine en turneps , 1l feroit même à defirer qu'il pût en mettre le tiers , mais quelque quantité que ce foit , il faut avoir foin de les bien fumer. Des que le fumier eft répandu , on l’enterre tout de fuite à la charrue, & on feme la graine fur le labour ; on la herfe bien trois ou quatre fois de fuite. Il eft très-eflentiel que ces trois opé- tations -là foient faites tout de fuite; car fi l’on nenterre pas le fumier dès qu'il eft mené , il fe li 19 JuUurN. deffeche au foleil, & de même fi l’on ne herfe pas tout de fuite après avoir labouré, la terre fe met en mottes, & ne fe herfe pas fi bien: quant à l'efpece de graine, la meilleure eft celle de gros navets ronds, qui poufle prefque hors de terre, &t n’y tient que par le collet des racines : cette efpece eft préférable aux autres, en ce qu'ils f confervent mieux lhiver, & ne craignent pas la gelée; 1l en faut une quarte par acre : peutêtre une pinte ou une demie mème fufhroit , fi le tout le- voit & échappoit aux infeétes; mais il vaut mieux en mettre plus que moins; j’en ai vu cependant femé épais dont il ne levoit pas un grain, & d’autre femé clair dont il n’en manquoit pas un. Dans une faïfon très -feche , quelque épais que l’on feme, la graine ne levera pas, mais auffi cela eft-il rare. Le plus grand ennemi de cette graine, eft le puceron, qui la mange avant qu’elle ne leve : il y a eu plufieurs remedes d’enfeignés pour y re- médier, mais aucun n’eft sûr. Le meilleur eft de faire tremper la graine dans du jus de fumier & fécher au foleil ; un autre eft de couvrir la terre de fuie quand elle eft femée , mais ce remede qui n’eft pas immanquable eft fort coûteux. La pratique la plus sûre pour faire réuflir vos femences, fans que les pucerons y faflent tort , eft de les femer dans une bonne terre | & bien fumée pour hâter la végétation; car ung fois le- JUIN. 133 vées , elles n’ont plus rien à craindre de ces infeétes, au lieu que dans une terre maigre &t fans engrais, la plante tarde à lever, & eft la proie des mou- ches : fi malgré cette précaution la graine eft man- gée, & qu’on ne la voie pas lever , il ne faut pas manquer de relabourer & refemer : on y eft à tems à la fin de ce mois & même au commencement de lautre. Des Choux. Sur les terres deftinées à porter des choux , il faut fuivre la même route qui vient d’être prefcrite pour les turneps , obfervant feulement de mettre le fumier dans les raies ,.pour que la charrue le retourne , de forte que la plante que l’on met fur le fommet du rayon foit amendée. Quant à la diflance entre les rangs, c’eft fuivant la richefle du fol, fi on remarque qu’à quatre pieds ou trois, les plantes ne fe joignent pas, on peut les mettre à deux. Quand le fumier eft bien enterré, la meilleure manière de faire cette plantation eft de faire mar- cher le long des raies une femme & un enfant avec un fagot de plant fous le bras, qui en pofe un de deux pieds en deux pieds, un homme fuit qui le plante avec le plantoir auf vite que la femme marche, S'il falloit qu'il portèt aufñi les plantes, li 134 JUIN. il perdroit un tems infini : cet ouvrage coûte en Angleterre , pour le tout, fix francs par acre, les rangs à quatre pieds, La plupart des cultivateurs prétendent inutile d’arrofer les choux après la plan- tation ; il n’en eft pas moins vrai que fi le tems eft très-fec , le foleil féchera la plante entièrement avant qu’elle ne reprenne ; le fermier fera bien payé par le fuccès , de la dépenfe d’arrofer qui ne fera pas confidérable , s’il a une mare à portée, en fe fervant d'une charrette à arrofoir faite ex- près. Une circonfiance où la plantation des choux ef bien avantageufe , eft dans une terre où les tur- neps ont manqué, & où il eft trop tard pour en refemer , on peut les planter fans relabourer la terre, ce qui eft bien préférable à y remettre des turneps qui réuffiffent bien rarement femés fi tard. Tout bon fermier ne fauroit trop multiplier ces nourritures vertes pour les beftiaux au printems. Elles font bien préférables à tous égards au foin. Le profit qu'il en retirera eft réel, car s’il manque d'engrais faute de beftiaux , il perdra fûrement ; ou fi fes foins manquent, & qu’il foit obligé d’en achèter , n’ayant pas d’autre nourriture , il perdra fürement encore, Un autre avantage bien aufi grand que ceux- ci, c’eft de changer le cours des cultures : après les choux ou les turneps, il mettra de l'orge avec Ju, 1:28 135 du trefle par-deflus ; au bout de deux ans, il re- tournera cette herbe pour y mettre du bled; par cette fucceflion de récoltes , fes terres lui rap- porteront toujours infiniment. La grande attention eft de ne jamais faire deux récoltes de grain de fuite. Les choux qui ont été plantés en Avril, & qui ont eu la première façon avec la houe à che- val en Mai, doivent recevoir la feconde dans ce mois-ci, cette dernière opération eft très-utile pour hâter la crue de la plante, Des Carottes. Il faut auffi faire la même opération aux caz. rottes à la fin de ce mois; fi ce font des hom- mes qui font cet ouvrage , ils doivent avoir foin non-feulement d’arracher les mauvaifes herbes , mais même les carottes qui feroient trop près les unes des autres, d’autant que voilà la dernière façon, à moins que l'été étant très-pluvieux , les mau- vaifes herbes ne repouflent, au point d’être obligé d’y donner encore un binage à la fin d’Août. Des Pommes de terre, L'auteur anglois recommande ici pofitivement les mêmes foins pour cette plante que pour la précé= l'iv 136 J'urrNe dente , ainfi que pour le lin; le traduéteur a cru devoir éviter au leéteur ces répétitions. De la Luzerne. Si la graine a été femée en rayons, elle de mande des fois attentifs ce mois-ci, elle ne peut guère être binée qu'a bras d'homme, à caufe de la foibleffe de la plante qui eft fufceptible d’être brifée par la moindre chofe ; on ne doit pas y laif- {er une feule mauvaife herbe, & l’ouvrier doit avoir la plus grande attention de fe baifler pour ar- racher avec fes doigts les mauvaifes herbes qui feroient croïfées avec les jeunes plantes de lu- zerne , auxquelles elles feroient le plus grand tort, fi on ne les arrachoit pas : toute épargne de tems &t de foins à cet égard feroit pernicieufe ; car il n'y a pas de plante qui craigne autant l’approche des mauvaifes herbes , furtout quand elle eft jeune. Si on s’y prend de bonne .heure pour faire cette opération, elle fera peu coûteufe ; mais fi vous tardez trop longtems, la dépenfe fera beaucoup plus forte , & les mauvaifes herbes trop enracinées pour les bien détruire. Dans ce mois-ci les luzernes femées en rayons Pannée d’avant , doivent être bonnes à couper, & aufftôt après, il eft bien fait de donner une façon Juin. 137 avec la houe à cheval entre les raves , furtout fi on y apperçoit de mauvaifes herbes. Quelques cultivateurs prétendent qu'il faut cou- per à la faucille la luzerne en rayons, parce que fans cela en fauchant , il fe trouve beaucoup de terre en motte que la faux ramañle, qui fe mêle dans le fourrage & dégoûte les animaux. Du Sainfoin. La fin de Juin eft le bon tems pour faucher ce fourrage, qui eft le meilleur que l’on puifle met- tre en foin; dans le terrein qui lui eft propre, il rend jufqu’à fix cens bottes par acre, & le regain eft excellent pour le pâturage des beftiaux; ce der- nier objet vaut autant à lui feul, que le loyer du terrein qu’on y a employé, Du Trefle. Voilà auffi la faifon de faucher le trefle, fi on peut fe pafler de le faire manger en verd; c’eft le plus propre au fourrage après le fainfoin, fi on a foin de le laïffler une couple de jours en an- dins | & de le rentrer bien fec, & par un beau tems, 138 Ju1N, Des Pres. Les prés fitués dans de bons fonds ou qui ont été fumés, font aufli bons à faucher ce mois-ci : il faut avoir attention de faire faucher le plus près poffble , &c dès que le tems eft beau , ne pas épar- gner les bras, de manière que le foir même le foin foit retourné , fané le lendemain matin , mis en petites meules le foir, & le troifième jour on doit faire les meules (1). Je fuppofe que le tems s'y prête, car fi la pluie furvient, il eft à propos de le laiffer en petites meules , & même de le répandre enfuite pour bien fécher, plutôt que de le ferrer mou, car alors les animaux s’en dé- goütent facilement. De la différence de faire faucher ou manger Les Herbages. Nulle matière n’a été autant difcutée que celle- ci; plufieurs prétendent que la faux brûle les près, (1) On doit fe rappeler qu’en Angleterre on n'en- grange jamais le foin; ainfi il a le tems de jeter fon feu dans la meule, LU 1.Ni 139 & que conféquemment il ne faut pas les faire faucher plufeurs années de fuite , mais les mettre alternativement en pâture ; d’autres , au contraire, difent que les beftiaux abiment les prés, & qu'il ne faut pas leur faire manger plufieurs années confécutives ; j'ai voulu faire des obfervations exac- tes à cet égard , & je puis aflurer que jai vu des prés de mes voifins, que lon fauchoit depuis vingt ans , & même plus, fans qu’on y apperçüût le moin- dre dommage; j'ai de même éprouvé que dans un de mes enclos, au milieu duqg:el il y a une fépa- ration, j'ai alternativement fauché ou fait manger chaque partie , & je n’y ai apperçu aucune diffé- rence, Il y a bien du pour & du contre à dire fur ces deux manières d'exploitation , on peut dire à l'avantage du pâturage , que les beftiaux engraif- fent tous les ans leurs pâturages, en s’engraiffant eux-mêmes ; mais dans quelle faifon y emportent- ils cet engrais ? dans les chaleurs; il eft defléché avant d’entrer dans la terre : combien d’ailleurs ne gâtent-ils pas plus de fourrage , en le livrant à leur dent dans le champ, que fi on leur fauche pour manger journellement au ratelier. Quant à l’engrais, il eft bien certain que celui que les beftiaux feront dans la cour de la ferme, fera bien plus profitable , mêlé avec la paille, 140 JUIN. fur laquelle feront pofés leurs rateliers , que leur fiente femée çà & là dans la prairie, S'il fait très-chaud , la grande ardeur du foleil pourra nuire aux animaux en pâture;, sil pleut, les trous qu'ils feront dans la prairie l’'endommageront confidérablement. Enfin , la dernière objetion contre l’ufage de faire pâturer , eft que fi l’on mettoit tous les her- bages que l’on define à fon bétail, en une feule piece , ils en gâteroient une fois plus en cou- rant à travers, qu’ils n’en mangeront; & fi, au contraire, vos herbages font divifés en plufeurs en- clos, comme toute l’herbe pouffe à la fois au prin- tems , elle fera trop forte dans les derniers où vous les mettrez, & pourra leur faire mal. reg ER 2 EE 2 or ee Du Binage avec un Cheval. Toutes les plantes qui ont été cultivées en rayons doivent recevoir un binage ce mois-ci avec la houe à cheval, imftrument dont on ne peut trop recommander Putiité (1) ; fi on a cul- (1) Cet in‘trument commence à être connu en France; on s’en eft fervi avec fuccès fous le nom du cultivateur Américain, pour les pommes de terre de la plaine des Sablons à Paris. JU 1° TAÏ tivé du bled ou de l’avoine de cette. manière ; cette opération doit y être faite de même, mais cette culture eft furtout recommandable pour les feves & les turneps. Des Jachères. On doit, dans les cantons où cet ufage fubfifte ; donner la feconde façon aux terres pour détruire les mauvaifes herbes qui auroïent pu poufler de- puis le mois d'Avril ; ce labour doit être fuivi d’un bon herfage en long & en travers. Du Mais. Sile printems a été trop mauvais pour femer les orges en Avril ou Ma, on peut encore ce mois-ci femer du mais dans les terres qui y étoient deftinées , la première femaine de Juin, & cette fa- culté qu'a ce grain de fe pouvoir femer tard le rend précieux ; mais il faut que la terre foit bien meuble , & qu'il n’y ait pas une feule mauvaife herbe. Des Troupeaux, Les mbutons commencent à fe tirer d'affaire 142 Jui ée mois-ci, & vivent bien fur les pâtures les plus maigres de la ferme, fi ce font furtout des bêtes achetées pour parquer & engraifler enfuite l'hiver , il fuffit de les mettre feulement une heure le ma- tin & autant le foir, dans une piece de trefle que vous aurez deftinée exprès pour cela. Voici la faifon, & pas plutard, de châtrer les agneaux avant que les chaleurs ne viennent; cette opération demande beaucoup de furveillance de la part du fermier , pour qu'il n'arrive pas d’acci- dent. Une autre qui ne demande pas moins d’atten.- tion de leur part, eft la tonte des troupeaux; on doit choiïfir por cet ouvrage les meilleurs ou- vriers du pays: au préalable, le berger doit laver le troupeau dans l’eau la plus claire quil pourra trouver ; prendre pour cela un beau jour où le fo- lil fe montre , afin de fécher plutôt leurs laines; une vieille erreur eft que le lavage fait tort au poiflon , s’il fe fait dans un étang; au contraire, la vermine qui en fort nourrit le poiflon. On ne peut fixer combien de:fois de fuite on doit laver un troupeau, c’eft jufqu'à ce que le berger, en preffant la laine entre fes mains, remarque que l'eau qui en fort n’eft pas fale. Deux jours au-plus tard, après cette opération , on doit commencer la tonte, la principale atten- tion eft de ne pas piquer ces animaux avec les TUIN; 143 forces ; on doit aufli avoir foin de ployer chaque toifon à mefure , & de mettre toujours le crottin, & toutes les parties défeétueufes de la laine en-de- dans , pour que la toifon paroïfle plus belles ce Aoin eft effentiel pour la vente. Il y a beaucoup de provinces où, pour laver ; tondre & paqueter les laines, il en coûte quatre francs par chaque vingt bêtes , les gens de cet état gagnant dans cette faifon quarante fols par jour. Du Parcage. Voici le mois le plus avantageux pour le parc; aufñ n’y a-t-il que de mauvais fermiers qui n'y font pas dans cette faïfon : on commence par pars quer les terres qui doivent porter des turneps ou des choux , comme étant les premières plantes qui doivent être femées. La regle pour bien parquer , eft de donner une verge carrée (1) à chaque bête , & de faire deux nuits fur le même terrein ; fi même tout votre ter- rein n’eft pas parqué, lorfque l’on feme , on peut continuer jufqu’à ce que les turneps levent ; aprés (4) La verge d'Angleterre fait deux tiers de l’aune de France , on voit par-là que l’on y parque bien plus fort qu'en France. 144 Ju rn: cela vous tranfportez votre parc fur les herbages que vous avez fauchés pour faire manger au bé- tail, & vous les faites. parquer à mefure que l’on les fauche ; furtout les trefles que. vous êtes dans l'intention de retourner. Echa*donner: Cette opération eft fort importante à faire dans cette faïfon, afin de ne pas donner le tems aux chardons de monter à graine. On fe fert pour cela dun inftrument de fer placé au bout d’un bâton; 1 faut auffi employer un: ouvtier adroit,, qui prenne bien garde de ne pas arracher le bled avec les mauvaifes herbes., on ne doit pas regarder ce travail comme inutile ; je fuis perfuadé que la négligence de; le faire oécafionne les plus. fréquentes mala- dies des bleds, même la nielle & la carie ; j'ai fait les plus grandes expériences à cet égard, &x fuis forcé de convenir que cela y influe beaucoup. Du Marnage. Voilà la meilleure faifon de l’année pour faire cet ouvrage qui eft très-important , il faut profiter de la longueur des jours , & de la beauté des che- mins, Pa te J w 1 N: 145 fins , c’eft le roi des engrais , & tout cultivateur qui en a à fa portée & n’en fait pas ufage , doit être traité d’ignorant en agriculture ; il y a même des parties du royaume où on ne fe fert pas d’au- tres fumiers. Quand la marne fe trouve dans des pays ouverts (1), comme bruyères, pâtures ou garennes, & pas profondément , on en fait tirer pour un écu ce qu'il en faut pour un acre; mais fi la marne eft profonde , ou dans de bonnes terres clofes , cela coûtera douze à quinze liv., alors le profit ne fera pas aufh confidérable , d'autant qu’a> vec le charroi & le répandage ; l’acre revient à plus de quatre-vingt francs. Cette dépenfe paroît confidérable , mais auffi on doit calculer qu’une terre marnée s’en reflent vingt ans ,; & que l’on a bientôt regagné fon argent ; furtout fi c’eft un propriétaire qui n’a pas de Pope à payer; car pour un fermier qui n’auroit qu’un bail de neuf ans , la dépenfe feroit trop confidé- rable , auffi font-ce les feigneurs & les grands pro- priétaires qui doivent donner l’exemple de pareils engrais. Il y a plufeurs fortes de marnes , il y en a de tendre qui eft favonneufe , d’autre qui eft dure (x) Pour entendre ceci, on doit fe rappeler que toutes les terres cultivées font entourées de haies & foffés en An- gleterre, 146 JON: comme de la chaux , que l’on appelle pierre de marne, d’autres fois elle eft grife ou verdâtre, ti- rant fur la glaife; enfin, il y en a qui eft pleine de coquillages , qu'on appelle marne marine. Il y a différens lits d’épaiffeur de marne , depuis deux pieds jufqu’à douze : quant à la manière de recon- noître la bonne, c’eft celle qui jettée dans Peau s’'imbibe promptement , ou qui pétille beaucoup fi on la jette au feu. Pour connoitre la profondeur ou la qualité de la marne, on fe fert de fondes, avec lefquelles cette opération eft fort facile. La manière la plus économique de conduire la marne fur les terres, eft de prendre lendroit où la terre eft la moins profonde, & d’y faire une entrée en pente, pour que la voiture puifle y entrer ; lorfque cela fe fait af, il n’en doit coûter que fept fols par charge de trente boiffeaux , pour la charger & la répandre, & environ neuf fols pour la voiture, ce qui revient à feize fols la charge, dont il faut un cent par acre. Si la marne eft trop profonde pour s’y pren- dre ainfi, on eft obligé de faire de grands trous comme des puits, & de tirer la marne dans des feaux, d’où on la porte fur la voiture , alors cela coûte dix-huit fols au heu de fept; au refte , toutes ces dépenfes font bien peu de chofe, fi on les com- penfe avec le profit annuel qu’on en retire. Nota, Il paroït que l’on ignore en Angleterre la manière de marner avec des ânes, Juik 147 De ? Argules Dans les terres très-légères ou très-fablonneu< fes , l’argille répandue deflus peut faire le même bien que la marne fur d’autres terres ; le mélange feul excite une plus grande végétation ; les procé- dés à fuivre & la dépenfe qu'ils entraînent, font àä-peu-près les mêmes que ceux de la marne, ainfi nous ne nous y appéfantirons pas. De la Craie, Les mêmes raifonnemens & les mêmes calculs peuvent fe faire fur la craie, c’eft un excellent en- grais pour les terres graveleufes | & même pour les terres fortes, s’il y a trop d’atgile, cela divife ces fortes de terres : voici la vraie faïfon de faire cette opération ; elle n’eft pas plus coûteufe que la marne , fi elle eft auf à portée, Des PV. afès d'Etang: Voici la bonne faifon pour curer es marres & les étangs & même les riviéres, où la boue eff fujette à fe ramafler, Car en s’y prenant de bonne 1% K ; 148 Ju 1x. heure , la vafe a le tems de fe fécher & de fe di- vifer , & vous en faites plus facilement ce que vous voulez. Cette partie de l’agriculture eft fort négligée, & on a tort, car ces boues forment un des meilleurs engrais qui exiftent : heureux le fermier qui fuccede à un laboureur pareffeux, car 1l trouvera tou- tes les marres pleines de vafes, s’il y a un courant d’eau dans le lieu où on les ramafñle, elles font en- core meilleures. La meilleure manière de les employer, eff lorf- qu’elles font un peu féches , de les mêler avec une égale quantité de marne ou de craie, & de bien les mêler enfemble , 8 remuer tous les mois, fi la chaux n’étoit pas chère, cela feroit encore un meil- leur mélange. On continue de le remuer ainf juf- qu’à la fin de Septembre , & au mois d'Oétobre on le mene fur les près ou autres herbages , & on le répand tout de fuite; c’eft la meilleure opéra- tion que l’on puifle faire aux prairies, qui l'année d’après paient bien la dépenfe. De la femence de Colfat & Navetre. Voici la faifon de faire ces fortes de femences, de la même manière que nous l'avons prefcrit pour les turneps ; le grand ufage de ces plantes eft la graine pour faire de l'huile , elle fe vend depuis dix J'u Tr 149 louis jufqu’à trente la charge, & un bon acre bien fumé & cultivé peut en rendre une demi-charge. Dans des pays on en feme une très-légère quan- tité par acre fur une terre qui a porté du grain ou des pois, pour faire un fourrage verd, pour les agneaux & brebis au printems, quand les turneps font finis ; après cela on retourne la terre pour une autre récolte, K ï) 150 VILLE TE Travaux du Fermier dans la Cour de la Metairie, FES appelé compots que l’on a formé & confervé l'hiver précédent , étant une fois con- duit fur les terres, vous pourrez alors à votre loi- fr commencer à y mener la terre des foflés cu- rés, la craie, la marne ou l’argille, dans les enclos dont vous devez vous fervir pour pâturage l’hiver prochain ; il eft vrai qu’il n’eft pas abfolument né- ceffaire de faire faire cet ouvrage au mois de Juil- let. Cependañt comme vos chevaux n’auront pas beaucoup à fairé dans cette faïfon , on le recom- mande, comme une affaire très-importante , & qui pourra employer les bœufs & les chevaux jufqu’à la fin de Septembre , tems où on pourra travailler à cette befogne qui eft de la dernière conféquence pour améliorer les terres d’une ferme quelconque ; c'eft pourquoi l’on doit s’y prendre de bonne heure, ê MU: :L LHBnt 151 Des Turneps ou Navets. Voilà le tems pour donner une façon à vos navets , cet ouvrage eft en ufage dans prefque toutes les provinces du royaume: mais comme il eft fort négligé , ou prefque inconnu dans quel- ques autres , je ne crois pas mal à propos de m'’é- tendre un peu fur la méthode de le pratiquer , & fur la néceflité de la fuivre. En cas que les ouvriers foient rares, qu'ils de- mandent un prix exorbitant , ou qu'il n’y en ait pas du tout, vous ferez faire des houes par un forgeron, de la forme fuivante : La partie de fer contiendra douze pouces exaéts de longueur, & trois ou quatre de largeur ; il faut qu’elles foient bien faites & aiguës : faites-y mettre des manches longs de cinq pieds; ainfi pourvu d’inflrumens , allez avec vos gens aux champs , la houe à la main vous-même , faites-les houer de bon cœur, ê&tmayez pas peur d'en trancher beaucoup ; 1l faut qu’ils relevent la terre autour de chaque plante qu’ils laïffent , lefquelles doivent être les plus fortes: & les plus faines; vous verrez par ce moyen que cha- que plante de navet fera éloignée l’une de l’autre de quatorze pouces ; car leurs houes s'étendant à cha- que coup de douze pouces, on ne pourra jamais faire du mal à la récolte, Les ouvriers formés K iv 152 J'u"1:L°L\Er une fois, il faut les faire travailler à tant par jour xx & y être préfent foi-même, il faut qu'ils bêchent affez profondément pour détruire les mauvaifes herbes , & tous les navets qu'ils veulent retran- cher; quinze jours après, vous renverrez les mêmes hommes pour examiner les plantes , &t reétifier tout ce qu’on pourra avoir négligé; alors il fau- dra retourner la terre avec les houes, extirper le refle des mauvaifes herbes, & fi l’on trouve des navets doubles , les éclaircir. Les ouvriers ne fau- ront pas trop bien comment s’y prendre la première année, mais par degrés ils parviendront à travail- ler à la perfeétion, & en mêlant parmi eux de nou- veaux ouvriers chaque année , l’art ne fe perdra pas. | | = Dans les provinces où l’on fait cultiver les na- vets à la houe , cet ouvrage fe fait à tant par piece de terre, cent fols par arpent pour la pre- mière opération de houer; un petit écu, & quel- quefois quarante-huit fols de France font les prix ordinaires ja feconde fois, fuivant le terrein. Dans ce cas, il eft néceffaire que le fermier fafle at- tention à l'ouvrage, car les ouvriers fe dépêche- roient bien vite pour gagner l'argent. Il faut qu'il examine lui-même le terre qui vient d’être pio- ché, & qu xl fafle non-feulement extirper les her- bes, mais auffi féparer les navets partout. Cha- que plantation doit avoir deux opérations de la PU EL L'ENN 15% forte, & chaque plante débarraflée de toute mau- vaife herbe, doit avoir une diftance exatte & ré- gulière. Des Choux. Il faut foigner les choux plantés en Avril ou Mai, dans le mois de Juillet ; ayant été houés en Juin, ils n’auront peutêtre pas befoin de culture jufqu’au mois d’Août ; mais cela dépend des fai- fons. Si les mauvaifes herbes recroiffent , 1l faut les détruire; car il eft certain que pour produire une bonne récolte , il faut les tenir propres à force de houer, de nettoyer les intervalles engorgées par la pluie ou autrement, avec les inftrumens nécef- faires. | Les choux plantés dans le mois de Juin , doi- vent avoir le premier binage avant le milieu de Juillet , toutes les mauvaifes herbes doivent être arrachées, & les mottes qui feroient reflées fur les fillons, brifées comme il faut. Un peu de terre meuble fervira de nouveau foutien à chaque plan- te; bientôt après il fera néceffaire de les faire la- bourer à la chatrue , on formera un fillon de cha- que côté, & on jettera la terre entre chaque in- tervalle pour introduire le foleil dans la terre, où font plantés les choux, ce qui l’adoucira & la pul- 154 J-U-1/L LE T. vérifera ; 1l faut que les choux foient une petite butte de terre, & on pourra alors les houer avec une grande facilité. Pommes de terre. Il faut faire labourer la terre pour la troïfième fois dans les champs de pommes de terre plantées en rangées ; la méthode ordinaire d'aller & de revenir avec la charrue, n’eft pas bonne pour cette forte de plante ; car en tranchant les racines quand la pomme de terre eft en vigueur , vous feriez du mal à la plante, & vous détruiriez les fouches qui produiroient des pommes , c’eft pourquoi le troifième labour doit être fait avec un inftrument ap- pelé le cultivateur, dont il y en a de plufieurs efpe- ces, maïs dont tous coupent & pénètrent la terre fans la tourner , ou former le moindre monticule ; 1l y en a qui travaillent avec plufieurs petits focs trian- gulaires, d’autres avec des plats, & d’autres avec de fimples focs ; mais tous ceux qui tranchent & emportent du terreau au fond des fillons feront très- propres. On pourroit fe fervir d’une double charrue pour fortifier les plantes par des éminences produites par le labourage , la nouvelle terre donneroit de quoi produire de nouveaux fruits, comme pois FUI L L'EUX 155 ou haricots qu’on planteroit entre les rangs. Des Luzernes. *._ La luzerne qui a été tranfplantée fe fauche dans le mois de Juillet; il faut la labourer dans les in- tervalles d’un côté & d’autre ; à l’égard de la houe, il n’eft pas néceffaire de s’en fervir tandis qu'il n'y aura pas de mauvaifes herbes , & que les rangs feront bien entretenus ; fans cela il eft néceflaire d’arracher toutes les herbes qui peuvent nuire à la luzerne, Du Fauchage, Toutes les prairies & les pâturages qui n’ont pas été fauchés dans le mois de Juin doivent fe faucher dans ce mois; l’article de couper le foin eft de grande conféquence pour le fermier ; tout dépend , comme nous l'avons déja dit, d’avoir beaucoup d'ouvriers , car fi on ne profite pas du beau tems, on aura bien à s’en repentir. En cas qu’on ne puifle pas les employer à faucher, on pourra leur faire faire d’autres ouvrages, comme répandre lengrais ; les femmes qui aident à faire les meules de foin, pourront s’employer à Ôter les pierres, détruire 156 Ju 1 LL ET. les mauvaifes herbes, & avec bien des bras, l’on pourra bien vite former les meules, ce qui eft l’ob- jet principal , il faut commencer par mettre en pe- tites meules, alors le foin ne fouffrira pas, même en cas de pluie, & ayant beaucoup de bras, cela facilitera à le fauver des accidens. L’on paie les ouvriers à tañt par arpent, par exemple une pif- tole pour faucher, faner , ramafler & entafler en meules, Des Chevaux. Les chevaux & les bœufs doivent toujours étre nourris dans le mois de Juillet, avec de la luzerne dans l’étable ou dans la cour, c’eft la meilleure herbe pour cet effet; & un arpent de ce foin réuffit beaucoup mieux qu'aucun autre. Le fainfoin & le trefle font bons aufli; le ray-graff fauché tous les jours fera auf très-bon. Si ces herbes manquent, vous n'avez qu'à employer du foin ordinaire, & cela vaudra beaucoup mieux encore que de laïffer les beftiaux dans les champs; mais fi cependant il n’y a pas aflez de litière, il vaut mieux les y laifer que de pourrir fur le fumier. Ju izirrt 157 Des Jachères. Il ne faut pas fuivre l'exemple de ces fermiers qui négligent les jachères dans ce mois-ci, pour ne fonger qu'aux foins & à la moiflon ; il eft né- ceffaire d'y détruire les mauvaifes herbes, & con- ferver aflez de chevaux & de gens pour que les terres foient bien herfées & labourées. Il y a des fermiers qui foutiennent que les jachères où il y a beaucoup de chiendent ou de chardons , devroient être labourées une feconde fois au commencement de Juin, ce qui laïfleroit le champ rempli de mottes immenfes , qui feroient expofées au foleil jufqu'à la fin d’Août; ils prétendent que cette opération détruit les chiendents & les autres mauvaifes her- bes qui croitroient infiniment , fi l’on ne remuoit la terre avant lardeur du foleil : mais on peut faire bien des objettions à cette méthode , même s’il étoit vrai qu’elle détruisit les mauvaifes her- bes. Les femences de ces herbes refteroient en- fermées fous les mottes, & quand on emblave- toit le champ, elles croitroient avec la graine: on pourroit ajouter qu'une grande partie du fol eft privée de la chaleur du foleil dans les jours les plus chauds de lPété, par lombre des mottes. Pour améliorer la terre , il eft sur qu'il faut la répandre & l’adoucir, pour que le foleil pénétre 158 JUILLET. dans chaque particule de terre pulvérifée ; au lieit qu'il ne peut pas répandre fes bienfaits dans des mottes dures comme le marbre. Ces remarques ne doivent pas férvir à faite le procès aux fermiers qui traitent leurs terres en jachères , fuivant cette méthode ; je fuis convaincu que dans certains fols, elle peut réuffir; mais je fuis d'avis qu'une telle manière de labourer ne doit pas être adoptée pout des terres froides & difficiles à couper ; les eflets en pourroient devenir dangereux. Du Parcage, Dans le mois de Juillet, le fermier doit s’occu- per à parquer les terres laiffées en jachères pour mettre du bled. Quand on ne veut pas y femer d’autres herbes , ou y planter des navets, il faut toujours avoir foin de parquer les champs qui doi- vent être labourés le plutôt: par exemple , les champs qui doivent être enfemencés en turneps le mois d'Août, ou les luzernes prêtes à être retour- nées; par ce moyen, les plantes profiteront de lengrais ; & au contraire, fi l’engrais refte fur la fur- face de la terre expofé à s’évaporer par lardeur du foleil , les plantes n’en recueilleront pas le même avantage, PAU + LL EUR 159 Du Marnage. Il ne faut pas manquer de continuer à tirer la marne , la craie, la boue ou Pargille dans le mois de Juillet, c’eft la propre faifon pour travailler fur tous les fols ; je dis fur tous les fols , parce que l'hiver il ne faut pas en tirer dans les terres qui font humides ou glaifeufes : les engrais quoique bien coûteux d’abord, récompenfent par leur durée. Pour faire le fervice de ces voitures , fervez-vous de peu de chevaux ; par exemple , la petite charrette à trois roues eft excellente pour cela, un cheval pourra en mener deux ; l’on en charge une tandis que l’autre s’en va , par l'avantage de la troifiè- me roue qui foutient la charrette & la charge au lieu d’un fecond cheval , comme dans les grandes charrettes ; les petites ne contiennent que quinze boïfleaux , & les roues n’ont que neuf pouces de large. Ces voitures font excellentes & très-utiles pour ne pas gâter dans l'hiver le gafon par-déflus lequel elles doivent pañler, fi la diflance n’eft pas éloignée, quatre ou cinq hommes feront employés pour un feul cheval , & c’eft ce qu'aucune autre machine ne pourroit faire. Remarquez, je vous prie , quel avantage aura le fermier , de faire voi- turer par un cheval dépareillé, tout ce qui eft né- ceffaire à la métairie, tandis que lattelage eft ré- 169 JU: TL LE Ti gulièrement employé à labourer la terre , ou à faire les journées néceffaires pour les grands chemins ; après avoir examiné impartialement cette manière d’agir pour l'avantage du fermier , 1l faudra convenir qu’elle eft la plus prompte & plus économe que toute autre. Du moment de couper les Poïs. Les pois précoces font coupés en général le moïs de Juillet; s’il y en a beaucoup, il faut les arra- cher; s'il y en a peu, en les fauchant ils viendront fort bien. Dans les tems humides & pluvieux, 1l faut avoir grand foin des tiges & des feuilles de pois ; les touffes doivent être retournées bien fou- vent, autrement elles feront gâtées. Il ne faut pas cueillir les pois blancs avant qu’ils ne foient bien fecs, car on ne pourroit jamais les vendre avec profit, vu qu’on ne regarde ordinairement que la beauté & la groffeur des pois. Leur paille bien confervée fert de fourrage pour toute forte de bef- tiaux ; mais fi elle eft humide, elle ne peut fervir que de litière. Des Oroes. Vers la fin du mois de Juillet, il y aura de l'orge à faucher, particulièrement , cette efpece qu'on ap- pelle LU 2 EL L'RUR 167 pelle de Julham : cette récolte faite de bonne heure, a l'avantage de détruire plufeurs mauvaifes her- bes qui monteroient à graine en peu de tems, & feroient du tort à la récolte prochaine. Du Froment. C’eft dans le mois d’Août que je parlerai du froment ; il y a des fermiers qui le coupent dix jours avant qu'il foit mûr. Il ef certain que le bled ainfi coupé parvient à une parfaite maturité dans les champs , & la graine en eft meilleure 3 d’ail- leurs, une récolte fi avancée vous met en état de travailler à d’autres objets de la campagne pen- dant l’été ; mais on a toujours les pluies à re- douter. 162 à rs Ac CRT LA" M OT LS LS TOURNÉ > EST dans ce mois que le fermier doit don- mer toute fon attention à la récolte des bleds après un an & demi, & peutêtre deux de tra- vail, & d'inquiétudes de toute efpece, il s’em- prefle de la reflerrer faine & fauve dans fa gran- ge. Le mauvais tems lui peut faire bien du tort, c’eft pourquoi il lui faut beaucoup de monde pour profiter du moment, pour ne pas mériter le re- proche de fermier indolent, comme nous l'avons dit pour les foins. Il y a deux façons de couper le bled , lune avec la faucille , l’autre avec la faux; la première eft la plus ufitée & très-ancien- ne ; la dernière eft une nouvelle méthode pour éviter la peine. Il y a eu bien des difcuffions à ce fujet dans ces dernières années , & même d’affez vives, Quelques perfonnes ont foutenu que les avantages de la nouvelle façon de faucher le bled étoient fi certains , que les fermiers ne pourroient que perdre en ne la fuivant pas ; le parti op- ÀAOUT. 163 pofé foutient auffi que la manière ordinaire eft pré- + _férable. " Dans la nouvelle manière, les hommes font tomber ce qui eft coupé fur le bled qui refte fur pied pour pouvoir le ramafler plus aifément ; deux femmes fuivent chaque faucheur , pour en faire des tas, que les hommes qui les fuivent forment en ger- bes. Cette méthode eft très-expéditive, & épargne beaucoup de dépenfe ; car de faucher ne coûte pas . moitié tant que de le couper avec la faucille, d'autant plus qu’une partie de l’ouvrage eft faite par des femmes , & cela eit de grand avantage. Par cette méthode, l'on gagne aufhi beaucoup de paille , que le fermier fait mettre dans fa grange, & qu'il vend ou emploie fort bien, & qui fans cela refteroit dans les champs après la récolte. D'un autre côté, il faut confidérer que le bled s’égraine davantage , & on en perd, fans compter que le bled coupé fi bas contient plus de mau- vaifes herbes ; d’ailleurs , il eft néceffaire de laifler plus longtems les gerbes dans les champs pour fé- cher; car les tiges des mauvaifes herbes en matu- rité retiennent une efpece de moiteur qui les em- pêche de fe flétrir, tandis que celles du bled de- viennent paille, même avant d’être coupées. Cette objettion eft de grande conféquence ; car il eft tou- jours dangereux de laiffer les gerbes longtems Li 164 A OUT. # dans les champs, à caufe de lincertitude de la fafon. Le battage arrive enfuite , dont la dépenfe fera plus confidérable pour du bled fauché qu'avec du bled fcié, car plus la paille fera longue & remplie de mauvaifes herbes, plus l’opération deviendra en- muyeufe & pénible, & par conféquent plus coû- teufe : les avantages & les défavantages des deux façons pourront fe comparer de la forte (1). À l'égard de la dépenfe pour le faucher, on y ga- gne une bagatelle, peutètre trente-fix fols par ar- pent, ou tout au plus quarante-huit fols , ce qui n'eft pas équivalent aux inconvéniens ; d’ailleurs, la différence du battage rendroit prefque égale cette épargne. *Suppofez qu’un acre vous donne cin- quante boiffcaux de bled, & qu’il vous coûte trois livres pour le faire battre quand il eft fcié ; vous ne pouvez vous attendre que les batteurs le feront à moins de trois livres cinq ou fix fols, quand il eft fauché, Cette différence eft de plus de fix fols par arpent , & dans les faifons où il y a abon- dance de mauvaifes herbes, la &ifférence feroit en- core plus remarquable : & quelle proportion y a-t-l entre cette fomme d’argent & le hafard de 1) L'auteur auroit dû ajouter qu'il n'y avoit d’avan- tage à faucher , que dans les mauvaifes terres, où les paillés font courtes & rares. 4 ‘oi Mer d A OUT. 165 laïffer le bled plus longtems-dans les champs? Le: point principal eft certainement la paille, car elle fe vend dans le voiñnage de Londres, trente-fix francs , deux louis la charretée ; il n’y a donc pas de doute , que de faucher le bled ne foit plus. avantageux. Dans les provinces où l’on eft accontumé: à ‘{cier le bled , le fermier fait ramafler le chaume après la récolte, & le fait mener dans cour pour en former de la litière & du fumier. Voilà un autre avantage qui rélulteroit de la coutume de faucher, car la faux coupe prefque ras la terre: la dépenfe donc de ramafler le chaume feroit épargnée; mais d’un. autre côte, elle eft fi petité, (trente-fix fols par acre,) qu'il ne vaut pas la peine d’en parler. D'ailleurs, il y a grande diffé- rence d’être obligé de faire entrer le tout dans les tems preflés de la récolte, ou de le faire après, quand on a du loïfir ; plus Les gerbes feront longues, plus il faudra de tems ou de bras pour les voitu- rer, © 1l eft certain qu'il ne fera guère écono- mique d'employer des bras farnuméraires dans cette faifon , où les manouvriers demandert un prix ex- orbitarit. Jobferverai donc pour eonclure, que la cou- tume de fancher le bled ne peut convenir que dans les endroits où l’on vend bien la paille, ceft-à-dire, à un prix confdérable, au point que | Li 166 AOUT. le fermier puifle y trouver plus d'avantage à la vendre qu’à en faire du fumier. L'on paie fouvent le moiflonneur qui coupe le bled avec la faucille , à tant par arpent, & cela peut bien fe faire, mais il faut avoir attention que l’ouvrage foit fait dans un tems convenable , il faut que la gerbe foit proportionnée à la quan- tité des mauvailes herbes | & à la maturité du grain. En entaflant le bled, ils ont l’art, dans certaines provinces , de l’arranger de manière que l’eau en coule, & ne s’y fixe pas ; ainfi, fans être bien ferré, 1l fe maintient aflez fec dans les tems pluvieux. C’eft une excellente méthode qui mérite d’être fuivie ; il y a des fermiers qui laiffent le bled fur la tige, jufqu’àa ce qu'il foit affez mûr pour le couper & l'emporter , c’eft-à-dire, qu'ils le ren- trent auflitôt que les gerbes font liées; ceci pourra fe faire quand la récolte fera fans mauvaifes her- bes ; car elles ne font jamais affez feches pour pouvoir les emporter avec le bled. Dans une ferme de plufeurs charrues , on fait bientôt entrer la récolte avec trois charrettes; une fe charge dans les champs, une autre fe décharge a la grange, & la troifième va & vient. Il y aura aflez de anq chevaux & de cinq hommes , dont deux chargeront, un autre menera , & les deux autres déchargeront, cela ira bien vite. Dans beaucoup de provinces l’on a coutume AOUT. 167 d’entafler les gerbes de bled en meules : ils ont raifon ; ni les rats, ni les fouris ne peuvent y pé- nétrer , fi la meule eft bâtie fur des piéces de bois dreflées fur des pierres. Les bouts de la paille ref- tent en-dehors , de forte que les épis font à la- bri. Il eft sûr que le bled fe conferve mieux & a meilleure mine, quand il fort d’une meule que d'une grange. L'air y donne une plus belle couleur; quand il * eft queftion de le faire battre, on doit tranfporter _ toute la meule à la fois dans la grange, car il ef dangereux de laiffer une meule entamée , expofee à l'air toute la nuit; il faut auf le faire dans le beau tems & au fec, car dans l'hiver l’on peut attendre longtems. Il feroit néceffaire de faire dref- fer la meule tout près de la grange, du côté où il y aura une croifée , par où l’on pourra atfément lintroduire. Tout ce que j'ai remarqué dans ce chapitre , eft de la dernière conféquence , & l’on ne fauroit y faire une trop grande attention. Recolte des Orges. Il faut que Porge refle cinq ou fix jours bien féparée dans les champs , après avoir été fauchée ; on y gagne beaucoup par la pluie, car la graine fe gonfle, & il en faut moins en la mefurant ; mais L iv 168 À OU T. il faut avoir grand foin que lorge ou l’avoine foient bien féches avant de les ferrer. Le bled fe gâte prefque toujours quand il eft ferré trop hu- mide ; la chaleur pénétre dans le monceau , la grane fe décolore, & la paille fe gâte. Ce font deux grands malheurs, & particulièrement le der= nier; car la paille de l'orge eft un excellent four- rage. Après avoir coupé l’orge, il fant ratifler les champs ; on fe fert fouvent d’un inftrument qu’on appelle le rateau de la rofee, parce qu’on s’en fert le matin. Le laboureur le tire par un morceau de cuir: mais avec cet inftrument on ne fait pas beau- coup d'ouvrage ; le bras fe fatigue , & beaucoup de gerbes reftent dans les champs. Il y a dans plufieurs provinces un autre rateau qu'on appelle rateau à cheval , long de dix ou douze pouces, & tiré par un cheval; cette machine fait beaucoup mieux & plus promptement l’ouvrage : on devroït lintroduire partout ,. car elle fait la befogne de vingt hommes, & le prix n’en eft pas bien grand; on peut s’en procurer une complette pour quatre louis & demi. Du Blid ou Sarrafin. Ea récolte de ce bled ef la plus difficile à faire, car fi l’on n’en a pas grand foin, le grain fe perd. À OU T: 169 Quand il eft mûr, il faut le faucher à la rofée, & a le laiffer fécher dans le champ : s’il eft trop mûr, il faut le tranfporter humide avec la rofée ; car autrement il perdoit le gran en le voiturant. Comme la graine eft noire, la couleur de léchan- tillon n’eft pas de grande conféquence. F Des Poïs. Il ne faut pas faucher les pois, mais les ar- racher , & avoir foin de les retourner après la pluie ; car les tiges & les feuilles font fi remplies de fuc, que la paille fe gâteroit, fi on néglgeoïit cette précaution. Cette efpece de fourrage eft ex- celfente pour la plupart des beftiaux. Si on veut la mettre en meules , 1l faut le faire tout de fuite, & le faire bien , car la moindre humidité nuiroit. aux pois. [l y a des perfonnes qui ont confeillé aux fermiers de faire nourrir leurs cochons avec les plantes entières des pois, fans les écoffer, pour en éviter la dépenfe ; mais c’eft un très- mauvais confeil ; l’épargne n’eft pas grande, & la perte eft très-confidérable. Les cochons maigres mangeront tous les pois qu'ils trouveront ; mais les gras ne . toucheront que ceux qui feront fous leur nez, & fouleront le refle aux pieds. 170 AOUT, Des Feves. Les feves font toujours coupées avec la fau- cille & hées en gerbes; il faut les laiffer long- tems aux champs; c’eft pourquoi les gerbes doi- vent être petites. On peut les lier avec des liens de paille, ou avec de la filaffe qui durera deux ans, fi les batteurs ont foin de les conferver. On peut trés-bien entañler les feves en meules. Semence de Navers ou de Coljat. La récolte des femences de navets, colfat, ou choux verts, non-feulement eft très-incertaine , mais fujette à toutes fortes d’inconvéniens. Le point effentiel eft de ne pas laïffer échapper le beat tems ; car comme :l les faut battre , auflitôt qu’elles font cueillies, ou du moins fans les rentrer ou entaf- fer, comme les autres graines, elles demandent plus de bras qu'aucun autre produit de la terre, Cette récolte eft trés-vétilleufe ; car fi le laboureut n’y apporte pas le plus grand fon, comme auff dans le tranfport à l'aire pour ks battre; il perdra beaicoup de graine. Pour les tranfporter, on fe fert de petites charrettes à quatre roues &t àleffieux de bois, couvertes en drap, & tirées par un che- #- À Oo U À 171 val; les roues doivent avoir deux pieds de diamé- tre, la couverture fix de long , cinq de large & deux de tour, toute cette dépenfe ne doit guère monter à plus de trente-fix francs , ou deux louis. J'ai vu plufieurs de ces machines travailler tout à la fois dans un feul champ. On fouleve la graine très-doucement , & on la jette dans ces machines fans là moindre perte; on la porte aux batteurs qui commencent à travailler fans relâche , ayant des hommes qui fournifflent à leur ouvrage par le moyen des charrettes, & d’autres qui emportent la paille de Paire, & lorfque les bras ne manquent pas, plufieurs arpens de terre font finis dans un jour ; mais s’il vient à pleuvoir , tout eft arrêté, & la récolte endommagée ; il ne faut donc pas épargner le monde , hommes , femmes & enfans, pour profiter du beau tems. Du Glanage. L’ufage de glaner eft univerfel & très - ancien en Angleterre ; cependant les pauvres n’en ont pas le droit fans la permiflion des fermiers ; mais on le tolère. Cet ufage eft quelquefois porté à l'excès, il faut donc que le fermier y mette des bornes, que le glaneur ne puifle pañfer fous aucun pré- texte. Les glaneurs commettent bien fouvent des 172 AOUT. infdélités : ils enlevent même quelquefois jufqu’aux gerbes. Il faudroit donc une loi qui interdife aux glaneurs lentrée d’un champ, jufqu’à ce qu'il foit dépouillé de la récoite, & ne pas permettre non plus aux beftiaux d’y entrer, qu'après les glaneurs. Des M oiffonneurs. Le prix que l’on donne aux moiflonneurs dans les d'férentes parties de l’Angleterre varie confi- dérablement, & dans la même province l’on trouve des fermiers qui paient différemment les uns des autres. La méthode commune dans quelques en- droits et de s’arranger par acre, foit pour fau- cher, pour couper , pour retouriier ou faner, pour fecouer, pour lier, pour charger , pour entaffer , pour mettre en grange, &tc. enfin, pour faire tout ce qui concerne la récolte. C’eft une très-bonne manière , mais cela demande autant d’attention de la part du maitre, que s'ils étoient à la journée ; car 1l faut être bien attentif à la manière dont fe fait chacune de ces opérations , & furtout prendre garde que les ouvriers ne coupent pas le bled hors de fafon; qu'ils aient fon de le laiffer faner après la pluie, & de ne le mettre en grange ouen meule , que bien fec. Si l’on s’eff arrangé de payer les hom- mes par mois, par femaines , ou par jour , il efè _ St cp 7 nu OS Es a I PT ne € + IT LS NOR. A OUT. 173 néceffaire de veillér à ce qu’ils emploient bien leur tems. Si le ciel menace de pluie, les ouvriers doivent travailler tant qu'ils verront clair , à moms que la rofée ne foit sep forte ; car c’eft une maxime reçue dans plufieurs SR € , que le moiffenneur ne doit pas parler d’heures à la moif- fon pour quitter. Dans plufieurs provinces il eft dufiec de nour- rir les motflonneurs , & dans quelques endroits ils coûtent très-cher à nourrir. Je ne confeillerai à aucun fermier de le faire, à moins que Îles ou- vriers ne travaillent très-affidüment. Mais comme cet ufage eft déja établi, au point que les moif- fonneurs ne font pas contens fans la nourriture, il faut avoir toute l’économie pofhble ; la meil- leure manière fera de faire engraiffer un bœuf ou deux, avec quelques moutons à cet effet, Turneps ou Navets. Il faut biner pour la feconde fois les navets dans le mois d’Août; il ne faut pas négliger de le faire même dans le tems de la récolte, & l’on trouve toujours des hommes qui aiment à y tra- vailler : d’ailleurs , il faut toujours louer affez d’'hom- mes pour faire les deux ouvrages , celui de la récolte , quand elle le demande, & celui du bi- 174 AOUT, nage des navets , quand il eft néceffaire. Des Choux. La même opération eft néceflaire pour la fe- conde fois, aux choux plantés à la Saint-Jean, Au commencement du mois d’Août, il faut labourer les fillons avec la double charrue , & jetter la terre d’un côté & d’autre. La terre qui a été expofée pendant quelque tems à l’air & au foleil, fera en bon état pour faire poufier les fibres des racines, il ne faut pas la toucher après en aucune manière; car le choux eft une plante qni croît avec une füurabondance , que les racines fuivent très-volon- tiers. La terre ainfi pulvérifée, les choux devien- dront certainement d'une groffeur proportionnée à la quantité de nourriture qu’auront les racines; il faudra aufli avoir grande attention de détruire toutes les mauvaifes herbes & les taupinières avec la houe ; c’eft de-là que dépend tout le fuccès de lentreprife. Du terms de femer la graine des Choux. Le mois d’Août eft la faïfon pour femer l’ef- pece de choux qu’on a tranfplanté en Avril, ou A OUT. 175 au commencemert de Mai. Il faut labourer une portion de terre en jachère , jufqu’a ce qu’elle de- vienne aufll bonne que celle des jardins, l’engraif- - fer abondamment avec du fumier très-pourri, que vous ferez entrer avec la femence , une livre de graine pour chaque arpent de terre fufñra. Pour faire voir de quelle conféquence eft le produit des choux, je donnerai les exemples fui- vans, pris d'un Livre très-connu , intitulé : Le Tour de fix mois à la Campagne, par M. Yong. VALEUR PAR TONNEAU. Pour engraïfler des bœufs, 10 1. 16 1 Pour engraifler des genifles, 18 1. Par lexpérience de M. Scrope, pour des bœufs, 6 L. 19 f. Prix moyen, environ douze liv. de France. Le produit d’un arpent de choux s’eft trouvé être d’après la table fuivante : Dans les terres de M. Middlemore, $4 tonneaux. — De M. Lysher, 27. — De M. Tucher, 44. — De M. Crorve , 35. — De M. Turner, 39. — De M. Smett, 18. 176 À OUT. — De M. Scroope, 37 tonneaux, — Du même ,à Datton, 24. — De M. Darlington, 40. — De M, Dixon, 48. Produit moyen, 36 tonneaux, lefquels'ä douze francs , reviennent à 432 livres par arpent environ. Pour ajouter à ce prix moyen, il faut inférer d’au- tres prix qui ne peuvent pas fe découvrir par le poids. Un arpent de choux a produit en argent: Dans les terres de M. Turner, en 1768 5.1.0 A EST 0 ORNE — Du même,en 1769, . . 261 » — De M. Rockinghem , . . 240 10 — De M. Dodinorsh, . . . 427 15 — De M. Storvelitel,. ".". #5 » — De M. Scroope,en1769,. 239 » RTE Pour les fix arpens, ‘71. 1. . 1949 $ Prix moyen, 4 7/MNRPERET SRE 17 me T Il eft à propos de remarquer que ce prix eft au-deffous de la valeur réelle ; on l’a fupputé, felon la RS A\0 UE 177 la valeur des choux pour engraifler les befliaux, à douze francs par tonneau; mais tous ceux qui nourriflent les animaux , favent très-bien qu’on ne peut pas fixer le prix. Les navets &c autres végé- taux nourriront & engraifleront un bœuf, mais non pas fi bien que les choux. Les navets & le foin ne feront pas non plus avoir aux vaches abon- dance de bon lait tout l’hiver ; cette propriété eft réjervée feulement aux choux. Ceux qui font accoutumés à l’énorme dépenfe de nourrir les beftiaux avec du foin, verront tout de fuite la différence du prix par les choux , à douze livres le tonneau. La comparaïfon eft en- core plus frappante avec des navets ; le prix ef à-peu-près de trois louis & fix francs par arpent, Je crois n'avoir pas donné la jufte valeur des choux ; c’eft pourquoi je veux en donner une table 2 qui contiendra des prix différens. aGitomeanr à 10 liv. . . 0.1} 360 lv. UN, 7... OR ME). .'. OPEN D 0 COEUR ME Eu + . Le LE NIOIINON [Ill D Je ferai la comparaifon à préfent du produit avec les rentes des terres : M 178 A OU ff. livres. fols. tonneaux, M EVREL A RSA EN a M." Tucher LV ea AU À | ML" Tétner 0e Le RL M Crorvet,) 29 4 28 . UT Mu Scroëpes Jai ru PARAITRE à PP PS CAR AS ERREUR | 1 0 M. Darlington, . 16 . 4 . . 40 Mi Dixon! Ua NORGE Prix moyen de la rente, 20 liv. 10 folk. Les terres de 18 liv. de rente & au-deflous, ont produit , l’une portant l’autre, trente-deux ton- neaux paf arpent. Celles au-deflus de 18 liv., quarante-quatre ton- neaux. On peut voir par ces calculs , qu'il faut plan- ter les choux dans un terrein fertile & riche; les cultivateurs ci-deffus nommés , font de la même opinion : cette maxime s'accorde parfaitement avec la raïfon; Car la plante eft très-forte & vigou- reufe, fes racines très-profondes, & par confé- quent , elle eft très-propre à devenir groffe & belle à proportion de la fertilité du fol. AOUT. 179 Quarante-quatre tonneaux à douze liv. 504 liv. Trente-deux au même prix, . . . 384 ESS (1) Différence en faveur des pre- MT RES ES Il eft donc clair qu'il faut deftiner la meilleure terre de la ferme à la culture des choux, & qu'il faut bien l’engraiffer. Je ferai voir aufli la différence des fols pour produire les choux. Dans des terres grafles &t remplies de craie, M. Turner a récolté 39 tonneaux. DENCRDENE, . ° 35 M. Scroope, . . 37. M. Darlington , . 40. M. Dixon, . . . 48. es Produit moyen, . 39. Dans des terres grafles , très-fertiles, M. Tucher a. récolté 44 tonneaux. (x) Note du Tradu£leur. L'on s’eft aftreint à traduire littéralement cet article & à laifler les poids , en rédui- fant feulement en argent de France, pour ne rien chan- ger au fens de l’auteur , & faire voir l'importance de cette culture en Angleterre, Mi 180 À. ONGT. Dans des terres inférieures, M. Middieno:e a récolté 34 tonneaux. D Eviter: : 107.47 PIS M :Simett..0 7.) een M: SCrobpe, 35". 0 ha l a ——_—_—_—_—_—_— Produit moyen, . . 3o. Maigré la préférence que l’on doit donner aux fols riches & fertiles pour les choux, on voit fou- vent que ces plantes réufliffent aufli très-bien dans des terres inférieures. À l’égard de la préparation pour la récolte des choux, on les feme en géné- ral dans des terres en jachère, en les fumant comme fi c’étoit pour des navets; plufeurs effais ont été faits pourtant fans le moindre engrais. Il y a deux époques pour femer les choux , Pété & le printems; la première eft dans le mois d’Août & Septembre, plus généralement dans celui d'Août, la feconde eft à la fin de Février jufqu’à la fin de Mars. Les choux femés l’été fe tranfplantent: en Avril ou en Mars, les autres en Juin; on ne peut pas bien déterminer laquelle de ces deux époques eft la meilleure; mais on peut remarquer en général, ‘que les plus gros choux font ceux. qu’on récolte l'hiver : l'expérience l'a fait voir dans les terres À oO UE : 181 de MM. Turner , Crorve, Turcher & Dixon ; ceux que M. Scroope recueille , font en général des choux du printems; les choux d’hiver l’emportent pour le poids. D'ailleurs , il eft bien aifé de concevoir que les plantes qui ont eu tout l'été pour croitre, doivent être plus péfantes que celles qui ne font plantées qu’en Juin & tranfplantées au printems, qui eft ordinairement une faifon humide , doivent avoir un avantage décidé fur les autres, tranfplan- tées à la Saint-Jean , qui eft prelque toujours un tems fec. Coup-d'œil rapide fur la manière d’engraiffer les Beflaux. Le produit des choux dans deux arpens de terre de la ferme de M. Yong a engraïflé trois gros bœufs ; M. Ellevker a eu des bœufs engraiflés juf- qu’au poids de quatre-vingt flones ; des bœufs de vingt-trois louis. Un acre peut en ‘engraifler deux de trente-fix flones (1): le terrein étoit peu pro- fond & abondant en craie. … L’on peut calculer l'avantage de nourrir les bœufs avec des choux , felon la Façon de M. Turner, pendant quatre mois, à 140 liv. ou 150 liv. par acre. | * (1) Une flone eff de quatorze livres. M 1 182 A OUT. M. Scroope a vendu des bœufs de cent flones géant , fe foutenant bien dans leur graifle, ce qui n'arrive pas toujours, Dénr on les nourrit de na- vets, Par les expériences indiquées ci-deflus , l'on voit que les choux font une nourriture excel- lente pour toute forte de bœufs des plus forts ; &t à l'égard des bouvillons & des géniffes , il n’y a pas de doute qu’une plante qui peut engraifier les gros bœufs, doit être excellente pour les jeu- nes beftiaux. Les Choux ne font pas moins avantageux pour nourrir & engraiffer les Vaches. M. Tucher remarque que f les vaches fe nour- riflent toujours de choux, fans jamais changer de nourriture , le beurre eft un peu rance. M. Turner , par la nourriture des choux , a ob- tenu deux pintes de lait de plus par jour, mais il avoit aufli un certain goût. M. Jlarvis a fait faire d’excellent beurre ; mais il falloit s’en fervir tout de fuite > autrement il ne pouvoit fe garder. M. Smith en a eu d’excellent, & en auffi grande quantité que l'été, qui fe pouvoit garder une quin- zaine de jours , mais il a eu foin de ne faire AOUT. 183 donner aux vaches aucunes feuilles de choux flé- tries. M. Dodfirorsh, avec deux vaches, en Janvier, dont une qui venoit de vêler , & l’autre prête à vêler, a eu de produit dans une femaune , dix-fept livres & dix onces de beurre. M. Dalton a eu de très-mauvais beurre , parce qu'il wa pas eu foin de féparer les feuilles mortes & flétries. M. Scroope tire de cette manière les plus grands avantages , il y trouve fix à gagner contre toute autre nourriture ; le lait eft en plus grande quan- tité & meilleur , le beurre excellent; mais il a la précaution aufli de faire ôter les mauvaifes feuil- les des choux. M. Darlington {e fert conftamment de choux pour les vaches à lait, il trouve le beurre ex- cellent, & le garde longtems ; mais il a la même précaution pour les choux. M. Dixon fait beaucoup de beurre qui a un goût parfait. Quand il manque de choux , il n’a guère de beurre d’hiver. _ On ne fauroit difputer ni utilité, n1 l'efficacité des choux pour nourrir & engraifler les beftiaux, & lon voit que par le moyen de cette nourri- ture , l’on obtient une grande quantité de lait & de beurre ; le grand point eft de Pavoir d’un goût parfait. Je ne vois pas la moindre néceflité M iv 184 AOUT. de ne donner aux vaches que des choux ; il teft néceflaire au contraire de leur donner de tems en tems quelque portion de fom & de paille : mais en tout cas, il eft démontré par les expé- riences que nous venons de rapporter, que le beurre eft excellent, fi les feuilles flétries font ôtées des choux. Ce font elles, fans doute , qui communi- quent un mauvais goût au lait & au beurre. MM. Smett , Scroope , Darlington & Dixon ont eu d’excellent beurre , parce qu'ils ont eu la précaution de faire ôter les mauvaifes herbes; j’ai cru ne pouvoir m'empêcher de faire ces réfie- ions fur une plante qui eft d’une utilité auff étonnante ; elle fournit une nourriture prodigieufe & fi abondante , que les vaches produifent du lait tout lPhiver. On ne peut comparer les choux à aucun autre végétal, pour les grands avantages qui en réfultent, & la culturé de cette plante demande du fermier l'attention la plus foignée. Ayant ainf examiné le mérite de cette plante pour nourrir, & engraifler les beftiaux ; je donnerai un petit ta- bleau de la quantité qu’ils en mangent ; il fera court, mais d’une grande utilité pour calculer la propor- tion de la nourriture entre les befliaux, & par à on pourra déterminer combien de choux feront né- ceffaires pour une certaine quantité donnée de poids de viande. M. Turner à calculé qu'un bœuf de quatres À:.0 0 AT 185 vingt fones mange deux cens dix livres de choux en vingt-quatre heures, outre fept livres de foin. M. Scroope a trouvé qu’un bœuf de cent flones mange en vingt-quatre heures cent foixante-huit li- vres de choux & fept de foin. M. Dodfnorsh a fait fon calcul fur un bœuf de foixante-dix-huit ones, il en mange dans le même efpace de tems deux cens vingt-quatre livres fans fon. Un bœuf de 80, mange 15 ftones. MU 100, à; . . 12. RIRES... ie 00 Voilà l’exacte proportion : un bœuf de cinquante: une flones, en mange onze. Suppofez donc qu’un bœuf de quatre-vingt flones commence à fe nour- rir de choux le premier de Novembre, il aura con- fommé le dernier jour d'Avril , dix-fept tonneaux de choux, & onze cens livres de foin. Le produit moyen des choux eft à-peu-près de trente-fix tonneaux par acre , ce qui fufñt pour engraïfler deux bœufs d’une telle force , & laïfle un furplus de deux tonneaux , qui fait une bonne portion de la valeur du foin. Si, au lieu de deux gros bœufs, l'on vouloit en nourrir & engraïffer quatre de la moitié de ce poids, on pourroit les mettre tout à fait maigres à cettè nourriture , & ils feroient engraiflés en moins de fix mois. Quel 186 A OUT. avantage prodifieux de pouvoir engraïfler quatre bœufs avec un arpent de terre ! quel engrais ne produiront-ils pas ! quels fuccès n’obtiendra pas un fermier , avec de tels avantages! Des Pommes de terre. Les pommes de terre en rayons doivent quel- quefois être binées dans le mois d’Août ; même quoiqu'il foit trop tard pour faire la même opé- ration fur aucune plante. Si les intervalles font remplies de mauvaifes herbes, ou trop fermes, fi les plantes ne font pas aflez couvertes de terre, faites-y pañler le cultivateur, ou houe à cheval, qui tranchera les mauvaifes herbes , & amollira le terrein ; après cela la charrue commune les éclair- cira toutes, & en jettant la terre de côté & d’au- tre, leur fervira de banc & de foutien. Îl eft très- néceffaire de le faire, car les racines & les fibres errantes s’attacheront à la terre nouvellement re- muée , & cela fera augmenter les récoltes, Du Sainfoin. Voilà le tems de faire entrer les befliaux dans les champs de fainfoin qui ont été fauchés en AOUT. 187 Juin il faut avoir foin d'y faire paître toutes fortes de béftiaux fans diflin@tion. Si on laifle dans ces champs trop longtems les brebis, elles en man- gent le cœur , en attaquant la racine même. Les bœufs , les vaches, les chevaux , & toute forte de jeune bétail peuvent y païître en sûreté. Mais on me permettra de remarquer que dans plufeurs fermes, le regain mangé dans le champ n’eft fouvent pas bien néceflaire. C’eft le fourrage qui. eft de conféquence ; dans ce cas, le fanfoin recoupé redonneroit bien plus que le pâturage. On prétend que de couper la feconde fois nuit beau- coup au fainfoin ; mais comme on n’a encore fait ucune expérience pour le prouver , je fuis porté à croire que ce n’eft qu’une fuppofition. Il fera peutêtre arrivé quelque accident dans des terres ingrates ; mais 11 ny a pas de raïfon pour en faire une maxime générale , & malgré tout ce que l’on a dit à ce fujet, je confeillerai aux cultivateurs de fainfoin , d’en faire leffai en faifant couper la moi- tié d’un champ deux fois l’année, & l’autre moi- tié feulement une fois, continuant la comparaifon pour voir la différence , jufqu’à ce que les deux parties foient entièrement confommées. Cet effai décideroit la queftion, & feroit de grande utilité à bien des fermiers qui ont eu là-deflus des idées remplies de faux principes & de préjugés. 188 AD'GLE De la Pimprenelk. La pimprenelle qu’on a laiflée dans les champs pour femence, doit être coupée vers la fin de ce mois ; 11 faut bien de l'attention en la faschant, car la graine fe perd aïfément, il vaut mieux la faire battre dans les champs mêmes, comme l’on: fait pour les navets & les choux verts, & faire du foin de fa paille ; la récolte eft très-abondante, & 1l y en a qui maintiennent que la pimprenelle eft aufhi bonne pour les chevaux que l’avoine, On n'a pourtant pas encore fait aflez d’effais ou d’ex- périences pour en aflurer. Des Jachères. Ce qui nuit beaucoup aux fermiers, eft de né- ghiger les jachères deflinées à femer le froment & l'orge. Ils prétendent n'avoir pas. affez de bras pour labourer la terre , tandis que l’on fait la ré- colte du bled. Il eft vrai que tout le monde doit s'occuper à faire rentrer le bled; mais tandis qu'on le fauche ou qu’on le fane, il n’y a que les hom- mes qui y foient occupés, les chevaux ne de- vroient pas refter à rien faire : l’on voit fouvent ces terres en friches, & remplies de chardons & A0 Un 189 d’autres mauvaifes herbes, vers la fin de la moif- fon, tandis que les bœufs & les chevaux font ref- tés les trois quarts du tems à l’étable. Si vous de- mandez pourquoi l’on a négligé ces terres , l’on vous répondra que la terre ne doit pas être dans un état bien parfait pour le froment , que le bled ne réuffit jamais dans des terres fans mottes, & que fi elles font bien conditionnées , elles ne pro- duiront que de mauvaifes herbes. Tout ceci prouve que leurs jachères ne le font point du tout; car une terre bien cultivée ne doit point avoir de mau- vaifes herbes ; fi elles n’ont pas été extirpées , elle ne vaut rien. Du Parcage. Dans ce mois-ci, le fermier doit continuer à parquer , les troupeaux s’en trouveront fort bien, & la terre en recevra un grand avantage. Souve- nez-vous qu'il faut toujours parquer d’abord, la terre qui doit être femée la première : les champs de lu- zerne peuvent être parques dès le moment qu'ils font coupés, & s’il n’y en a pas, on parque les ter- res deflinées à être femées en bled. 190 AOUT, Des Cochons. ; Dans cette faifon les truies font leur feconde cochonnée, &t fi le fermier n’a pas eu la précau- tion d’avoir beaucoup de lavure dans le réfervor , il fe trouvera bien dans l'embarras. Le trefle ne fert pas pour les truies 8 les cochons, il faut les nour- rir avec du lait de beurre & du petit lait, qu’on a confervé dans la laiterie , le fon , le méteil, l'or- ge, le bled farrafin , ou les pois, moulus en fari- ne , & mêlés avec le lait font excellens, Des Carottes. Il faut examiner vers la fin de ce mois, les carot- tes , & les faire houer bien légérement , afin d’ex- tirper le peu de mauvaifes herbes qui peuvent s’y être introduites depuis la dernière opération en Juin. Si on les a houées comme il faut la première fois, il fuffira de les faire farcler. 191 | CPE RENE DORE SU STE ET ERREURS éEES NEIL À DCE NE 2 eo 0 RE PR + ES SE SEPTEMBRE. LAN E IE LD. 9) N a trouvé par l’expérience de plufieurs pro- vinces, auffi bien que par des effais particuliers , que ce mois eft la véritable faifon pour femer le bled. Dans la première quinzaine , on pourra fe- mer les jachères , &t dans l’autre, les terres en trefle, bien engraiflées. Il faudra cependant obferver que cette regle n’eft pas génerale; au contraire, fi le mois de Septembre eft très-fec, il fera néceflaire d'attendre la pluie ; mais en Septembre, il en tombe ordinairement en abondance ; & en général, ce mois-ci eft toujours plus préférable que celui d'Oc- tobre. Un écrivain de mérite qui vient de l’éprouver après avoir fait bien des expériences , s’en explique ainfi : Le bled femé de bonne heure, dit-il, avoit be- foin d'être bien farclé avant l'hiver , à l'égard donc du labourage après l’enfemencement , celle- ci étoit la feule différence pour la dépenfe , (ex- cepté celle de la charrue, ) en le faifant en Juillet 192 SEPTEMBRE. ou Août , & en Septembre ou Oftobre. L’objec- tion principale du fermier pour femer de bonne heure le bled , étoit la néceflité de le farcler. « Si nous femons de bonne heure, difent les fer- » miers, nous aurons le bled rempli de mauvai- » fes herbes, qui finiront par détruire la récolte ». Cette objeétion feroit frivole, fi on pouvoit en tirer quelque avantage : car admettant qu'il feroit difficile de nettoyer promptement la jachère com- me il faut, le bled néanmoins demande d’être bien - farclé. Je me fuis fouvent fervi de la manière com- mune de faire farcler à la main, dans des champs femés à la volée en pin, & quand le bled eft femé de bonne heure , l’ouvrage eft beaucoup plus facile à faire. Si cette méthode ne plait pas, lon peut fe fervir d’une houe à quatre pouces, la- quelle , fans doute , détruira en effet toutes les mauvaifes herbes ; mais je puis aflurer, par l’ex- périence de plufieurs années , que la dépenfe de faire farcler dans un champ femé en plein, ne va jamais au-delà de fix livres par arpent , pourvu que la jachère foit labourée à l'ordinaire , c’eft-à- dire, qu'on ait commencé à y travailler dans l’au- tomne ou auparavant; car dans la manière incon- cevable de fe fervir de la charrue pour femer lor- ge ou le bled, ils courent grand rifque d’être to- talement abimés, La feconde quinzaine de Sep- tembre , SEPTEMBRE. 197 tembre, ou la première d'O&tobre , font les épo- ques pour femer le bled, & c’eft un mois entier avant que les fermiers de Sufolk fement le leur ; toute objettion donc à cet égard devient inutile, car l’expérience prouve le contraire. Ce n'eft pas qu'il n’y ait des fermiers qui s'i- magment que la meilleure faifon pour femer le bled eft vers la fin d'Oftobre , mais ma propre expérience m'a toujours convaincu du contraire 3 & je ne me fuis jamais apperçu qu'il y ait la moin- . dre différence entre le bled femé à différentes épo- ques ; ils n'ont pas plus fouffert les uns que les autres, & le vent ne les à pas couchés davan- tage. Pour femer , la première confidération eft la qualité de la femence , il y en a de tant de for- tes, qu'il eft difficje d'indiquer la meilleure. Ce- pendant le froment blanc, en général , & le rouge du Comté de Kerr , font regardés comme les plus propres à donner la plus belle fleur de farine ; mais dans plufeurs pays argilleux & humides , les fermiers préfèrent ce qu'ils appellent gros froment, & dans quelques provinces Clog ou Rivers; mais fon nom véritable eft froment barbu, il fe vend ordinairement trente-fix ou quarante-huit fols le minot moins que les autres fortes , mais par fa confiflance & fa durée, l’on eft sûr d’avoir une N 194 SEPTEMBRE. récolte plus abondante, & conféquemment on eft indemnifé. D'après le réfultat de mes expériences, 1l me fera permis d’en tirer les conclufons fuivantes : Premièrement , 1l eft à préfumer que le bled étranger , même celui des climats les plus oppo- {és, eft fupérieur au nôtre. 2°, Le bled qui a été recueilli pendant plufeurs années dans le voifinage, ne fait pas grand pro- fit, il eft même pire que tout autre. 3°. Le bled des terres fablonneufes du comté de Norfolk ef três-mauvais , 1l ne réuffit pas même dans un fol aroilleux. 4°. La femence que produit kh vallée d'Eves- ham, eft excellente; la rouge de la province de Kert eft auffi très-bonue, celle de la province de Cambridge pareillement ; mais elle ne vaut pas les deux efpeces ci-deflus défignées. j°. Il n’y a pas grande différence entre le fro- ment rouge &t le blanc ; le baïbu produit davan- tage, mais fa qualité eft inférieure, Go, Le feul changement de fol eft de grande con- féquence , comme le prouve la fupériorité du bled dans des terres argilleufes , fur celui des terres fa- blonneufes, & comme le prouve encore celle du bled qui eft le produit d’un fol fablonneux , fur celui qui a été longtems recueilli dans le voifinage pour préparer la femence, L’ufage de l'infufion des SEPTEMBRE. 195 liqueurs eft tout-à-fait aboli, mais il eft néceffaire de le laver plufieurs fois dans de l’eau très-propre, pour Ôter les particules noires & la pouflière ; par cette méthode vous aurez certainement une plus belle récolte : cette opération eft bien néceflaire ; car par-R vous pourrez découvrir les grains lé- gers & pailleux. Tous ceux qui ne vont pas vite au fond doivent être Ôtés tout de fuite, & alors vous ferez sûr de ne femer que les plus fans & les plus remplis. L’infufñon de la graine dans de l'urine ou de la faumure a ce grand avantage, ce- lui de préferver le bled d’être rongé des vers, vercoquins , &tc.; mais elle n’augmente ‘pas la moiflon. Après l’infufñion ou le lavage , il eft d’u- fage de l'entafler & d'y mêler du fel; on le feche, après avec de la chaux. Dans des faifons feches le fel eft excellent pour rendre le bled moîte, ce qui le fait pouffer beaucoup plus vite. On n’eft pas d'accord fur la manière de labou- rer la terre pour le bled , s’il eft mieux de rendre le terrein plus ou moins plat, ou de former des petits fillons à une perche de diflance, & les raies pour les eaux, à trois pieds. Dans la première méthode , on enterre la femence avec la herfe , & dans la feconde avec la charrue , en formant les raies ; fi la terre eft trop mouillée & que l’eau ne coule pas , 1l faut les faire au moins de trois pieds, parce qu’alors chaque fillon devient une efpece de Ni 196 SEPTEMBRE. canal, & quand il eft bien creufé, pas une goutte d’eau ne reftera fur le fol. Dans des terreins fecs, 1 vaut beaucoup mieux labourer la terre à plat, parce qu’alors on coupe le bled plus également. On feme ordinairement deux boïffeaux fur cha- que arpent de terre: on a pourtant introduit la méthode d'employer moins de femence. Tableau des Expériences de M. Young. Poiffeaux. Picotins. Deux picotins ont rendu . . 6 .u..3- Un boiffeau , SE AUS NA OT OP NN Un boïfléau &c demi," 50208 0 CPR Peux boifeañs, (7 AE MER Deux boifleaux & demi, . . 20! . . 18 Trois boifleaux, M0: 5 7 OR Trois boïfleaux & demi, . . 13 . Quatre boiflemie 4 ROME LODNENMS Quatre boifleaux &r dem, .n, 8 © . » Cina Doilfeaux 2 ON Te, TOUTE ER Ce qu prouve que le trop de femence ne fert à rien. Il eft très-important, dans la culture du bled, de former des fillons pour faire couler l’eau; cette opération cft néceffaire dans toutes les terres , ex- PRE n scsi : SEPTEMBRE. 197 cepté celles qui font feches pendant tout lhiver, ou qui ne font pas deflinées au bled. Il faut les creufer avec la charrue , aufitôt qu’on a fini de labourer & de femer, & au bout de ces fillons ou petits canaux , il eft néceffaire d’en faire un grand , en rejettant les mottes fur la terre, & ou- vrir les fillons afin que l’eau puiffe couler aifément dans les petits canaux qui aboutiffent au grand. A l'égard du nombre de ces petits canaux , cela dé- peud de la furface de la terre ; il eft néceffaire d'en faire autant qu'il en faut pour qu'il ne refte pas d’eau du tout autour du bled , même dans les faifons les plus humides. Dans les champs où il n’y a pas de pente , il eft néceffaire de faire creu- fer des doubles fillons pour faire couler l’eau, à douze pieds de diftance lun de l’autre, L'on feme fouvent le bled dans des terres ert trefle | & c’eft la culture la plus avantageufe. En labourant cette terre , c’eft une excellente mé- thode que de faire entrer une charrue, d’abord pour en Ôter une petite quantité, à-peu-près à quatre pouces de profondeur , enfuite un autre foc dans le même fillon , environ à trois pouces , fou= levant le terreau & enfonçant le gazon , en même tems la herfe rend après la furfacé bien unie, & le bled trouve un lit de terreau pour y germer, au lieu de fillons fimplement labourés une fois, où il ne peut pivoter. N 193 SEPTEMBRE. On le feme quelquefois dans des terres où il y a eu des feves, & c’eft une manière excellente quand les feves ont été bien confervées; mais fi elles n'ont pas été fumées & bien houées , il fau- dra labourer la terre trois fois. Dans ce cas on pourra retarder l’enfemencement jufqu'au mois d'Oftobre, mais jamais plus tard ; auflitôt qu’on aura ferré les feves , il faudra donner le premier Hibourage , & avant la fin du même mois, le fe- cond. La culture du bled n’eft avantageufe que po r ceux qui la foignent avec toute l’attention pofl- ble ; car s'ils la néghgent , ils font sûrs d’être du- pes de leur travail. Les remarques fuivantes font très-juftes à tous égards. 10. Si on vend le bled au marché, voilà où lon peut commencer à tromper, parce qu'il dimi- nuera beaucoup dans le tranfport , fi le maître ne le fait mefurer devant lui avant de le livrer: en- fuite celui que l’on confomme pañle entre les mains de ceux qui doivent le moudre ; alors il y a mille occafions pour voler le fermier, en fubfütuant au poids, du fel , des cendres, de la chaux, &c. On peut encore en voler davantage dans le tems de la moiflon, les glaneurs & les glaneutes ôtent tou- Jours quelque chofe des gerbes , & l’ajoutent à leur glanure; & dans le tems du battage, le fer- mier perdra le cinq, le fix, & même le dix pour SEPTEMBRE. 159 .cent de la récolte; s'il n’a pas l'œil à toutes les différentes opérations. Tout le monde fait que les ouvriers ne battent jamais le bled qu'avec des ha- bits qui ont des poches dans la doublure , qui contiennent la moitié d’un picotin chacune; d’ail- leurs ils ont l’art de remplir des facs , & de les cacher fous de la paille ou en quelque recoin près de la grange, pour l'emporter quand ils peu- vent : il y a du danger aufli quand on le mefure , & quand on le fait pafler au grenier ou chez les perfonnes qui l’ont acheté; car il eft trés-aifé à un charretier de laifler un fac de bled, chemin fai- fant, chez un ami , ou en chargeant la charrette. Je fuis fâché de parler un peu trop librement de l'honnêteté des domeftiques ; mais la néceffité eft bien fouvent la caufe des aétions déshonorantes , & l’on voit à préfent les pauvres voler publique-e ment le bois, fans qu'on y fafle, pour ainfi dire, attention , ou qu'ils croient eux-mêmes commet- tre un vol. Bled fèmé en rayons. Tableau de bled produit dans les terres femées en plein ou en rayons : Livres tournois. Feves femées en plein, . . 49liv. $ fols N iv 200 SEPTEMBRE. Orge , de la même manière, . 36 lv. » { ble" ide. à) RMS HN 8 Fpément , 2dems iii eee 8 IL paroït que le froment femé en plein ou pêle- mêle, eft bien fupérieur en produit à celui qui eft en rayons; mais il n’en eft pas ainfi pour les feves, elles” produifent plus quand elles font en rayons. Le trefle femé en plein réuflit prodigieufement, & produit l'avantage confidérable de préparer la terre pour femer le bled. L’orge femé en plein vous donne un profit de trente-fix livres par arpent, & après la terre fe trouve préparée pour le trefle , qui eft de grande importance. Le réfultat donc des deux manières de femer eft, felon le tableau fui- vant, par ordre de culture: ‘La première année, feves en rayons; La feconde, orge ; Semés JA en plein, La troifième, trefle ; P La quatrième , froment ; En fubfütuant le profit des feves, ainfi femées, à celui de celles femées en plein, ces quatre ré- coftes donneront un profit annuel de 277 liv. 16 f. de France, ou 69 liv. 11 f par arpent: dans des terres légères 1l ne faut pas penfer à cette mé- thode, v es AN SEPTEMBRE. 2OI . Je vous dirai franchement que la dépenfe pour faire cultiver en rayons eft confidérable , il m’en a coûté un petit écu par arpent ; d’ailleurs , toutes les charrues pour houer font mauvaifes , ou du moins ne font pas parfaites , comme il faudroit . qu'elles fuffent, Si quelqu'un m’engageoit à faire läbourer cent arpens de terre avec de pareilles charrues , je ne confentirois pas à le faire à moins de trois livres par arpent; c’eft une grande fomme il eft vrai, mais les outils font mauvais, & fou- vent ont befoin d’être raccommodés. Depuis la pu- blication de cet Ouvrage, on a inventé plufieurs charrues pour cet ufage; mais malgré tout cela, je fuis encore de même avis. Ces charrues font excellentes pour ceux qui cultivent ainfi le bled pour leur amufement , mais ne ferviront jamais aux fermiers qui fouhaitent avoir une bonne ré- colte ; ils n’examinent pas les particularités de linf- trument , & ils aiment à donner leurs ordres d’une manière bien fimple, Ils aiment à dire , par exem- pl: «Les charrues iront demain dans la piece de » vingt arpens; deux herfes les fuivront, deux au- # tres iront quelqu’autre part; le rouleau travail- ». lera dans la piece de dix arpens ; les charrettes » mont chercher de la marne , & le tombereau » à un tel endroit pour du fumier; Jean un tel » fémera un fac de grain par arpent en fuivant la » charrue ». Ces ordres font bien donnés , bien en- 202 SEPTEMBRE. tendus & bien exécutés , fans la moindre diBculté, Le fermier fe leve de bonne heure pour voir fi tout le monde eft forti, il s’en va à une certaine heure aux champs, pour voir comment fe fait l’ou- vrage , &t s’il manque. L'homme qui eft à la tête des ouvriers peut lui en rendre compte , & con- duire le labourage, fi le maître eft à dix lieues de diftance ; mais fi au contraire il falloit dire: « En- » ‘voyez quatre charrues dans la place de vingt » arpens; que deux herfes les fuivent, & enfuite » la charrue pour rayonner; il faudra avoir foin » de ne pas fraifer plus que cinq picotins d’orge »# par arpent; & fouvenez-vous , Jean, de ne pas » aller plus profond que de quatre pouces. Avez- » vous pris garde à ce fer qui guide la charrue? » 1l faut avoir foin de le varier, comme je vous » ai montré , & de le faire mouvoir oblique- » ment ». Après de telles inftruétions, fi Jean a beaucoup d’efprit, les affaires iront bien ; mais malheur au fermier qui fe fie au hafard. D'ailleurs, la machine eft fujette à mulle accidens dans les nains d’un payfan, elle eft trop compliquée, & fi on laifle pañler la faifon , adieu tout efpoir de récolte. Dans la manière ordinaire rien ne peut arriver pour empêcher le labourage. Malgré ous ces inconvéniens , cette charrue eft de grand avan- tage , particulièrement pour les feves; & il ef dommage que nous n’ayons pas de machines plus SEPTEMBRE. 203 fimples & moins compliquées , ou du moins des machines exprès pour les feves. Trefe. La feconde fauchaifon pour le trefle n’eft prête en plufieurs terres que la première femaine du mois de Septembre. Cependant en engraïffant la terre comme il faut, on aura l’avantage de fau- cher de bonne heure. Les jours courts & pluvieux, fi communs dans cette faifon , ne font pas favo- rables au fauchage. Il ne faut pas deftiner les champs de trefle, qui ont fervi de nourriture aux troupeaux , pour y femer le bled, & il vaut mieux labourer pour cela ceux d’où fortent les cochons, parce qu'ils peuvent alors fe nourrir de glands. Des Moutons. C’eft dans le mois de Septembre qu’il faut pen- fer à fe pourvoir de moutons ; il eft néceffaire de bien examiner la fituation de la ferme , añin de favoir quelle forte de troupeaux font les plus avan- tageux. C’eft ainfi qu’ordinairement on les choifit, on prend , ou 1. Des jeunes brebis. 204 SEPTEMBRE 2. Des moutons de deux ou trois ans, 3. Des agneaux, 4. Des vieilles brebis. Les provinces fuivantes donnent les meilleurs moutons. 1. Tecfnaler. 2. Lincoln. 3. Dorfet. 4. Vritts. s. Nerlfold. 6. Norfolk. 7. Les moutons Gallois, 8 . Les moutons des marais. A l’évard de la race, il eft important d’en ache- ter de bonne efpece , que votre terre foit des meilleurs ou non. Quant à la grandeur, il faut la proportionner à la nourriture que vous pouvez donner à vos troupeaux ; fi votre fol eft pau- vre , léger & fablonneux, les moutons du pays de Galles , de Norfolk on des marais , font les meilleurs ; de telles terres vous conferveront tou- jours la race, mais elles n’engraifleront jamais vos troupeaux. Î[l vaut donc mieux acheter des mou- tons robuftes, & y méler des petits béliers de SEPTEMBRE. 20$ bonne race ; en fe fouvenant pourtant que pour de tels fols, il n’y a rien de plus dangereux que des béliers trop jeunes : dans des terres plus ferti- les, vous pouvez en choifir de plus grands. Les moutons les plus grands font ceux de Licoln; mais des troupeaux fi grands ne font bons que dans des pâturages gras, de trente-fix à quarante- huit livres de France, de loyer par arpent. Ceux de Leïcefter font prefque auf bons, quoiqu'un peu plus petits. Pour des terres depuis douze juf- qu’à trente livres de loyer, il faut choifir les mou- tons des provinces de Hertsford , de Dorfet ou de Wilts, ils feront toujours beaucoup plus de profit. Le premier article, c’eft-à-dire, d’avoir des brebis de belle efpece , eft très-avantageux pour ceux qui veulent conferver la race; alors on en tire du profit en agneaux, en laine & pour le parcage. Le fermier qui veut acheter des brebis de race, doit bien examiner la nourriture & le paturage qu'il a , & borner le nombre de fon troupeau à proportion. Il y a toujours des pâtura- ges d’inférieure qualité , les meilleurs étant pour les. vaches ; du trefle, de la pimprenelle & d’au- tres herbes très-bonnes pour les troupeaux ; d’ail- leurs , il y a le droit de les faire paître fur des communes , & fur des landes qui font quelquefois annexées à la ferme. Il faut auf avoir foin de conferver une certaine quantité de navets ou de 206 SEPTEMBRE. choux pour la nourriture d'hiver, comme en gé- néral, dix arpens de terre ainfi enfemencée pour chaque cent de moutons , & une piece de terre de pimprenelle ou d’autres herbes | où l’on puifle les mettre au printems. Il faudra toujours, quand on a de tels troupeaux , les faire parquer , même au milieu de l'hiver, ayant foin de le faire fur des terres feches ou graveleufes , ou fans cela , à l'a- bri fous des hangars , avec grande abondance de htière. Le profit de ces troupeaux , fuppofé que les brebis de deux ans aient coûté dix-huit livres, fera à-peu-près felon le tableau fuivant : Pour: la line, vi 4er, 5 CP SNS Pour un ones. 20". Jane » Pour l’avantage du terre par- QUE a ROME, 4 TL ANNE 16 SSSR T ME ENS CS EUREES Somme totale, . . 18 12 LR D'R. Mais cela dépend de lefpece des troupeaux , il faut qu'ils foient de la meilleure race , & non pas trop grands; ceux de la province de Herford font excellens ; les troupeaux de Norfolk font d’une efpece inférieure , & on peut le calculer de la ma- mère fuivante : SEPTEMBRE. 207 Pomme, 4. cd OMR NA L Hopmiaiagnean, ÿ. 750. SU » Avantage du terrein parqué, bd h Total, + bei CO Il y a une autre manière de fe fervir des bre- bis, c’eft de les acheter le mois de Septembre, & de les mener paitre fur des terres en chaumes, jufqu'à ce qu’elles aient agnelé , les nourrir après avec des navets ou des choux , non pas très- abondamment , mais leur en donner aflez pour les conferver en bon état, L'été fuivant, vous vendez les agneaux dès qu'ils font gras, & faites engraif- fer les brebis après ; de cette manière, vous vous défaites des uns & des autres dans l’efpace d’une année, & vous en retirerez le profit fuivant : PO PE, NUE 4 liv. 16 f, Pour l’agneau & la brebis, . 36 » Avantage d'avoir été parqués pendant quatre mois, . . . » 12 me ma ARR: Total, ‘:. 51200 8 Hlreba Coûté | :. !. ,. «18 » Proft, . 17083 8 208 S'E P'T'EIM BR E. Pour cette opération, il faut avoir les brebis de bonne heure , afin qu'on puifle engraiffer & vendre les agneaux dans le commencement de Ma au plus tard; fi on a beaucoup de navets & de choux, le profit fera encore plus avantageux ; car les agneaux gras fe vendent fouvent au com- mencement de Mai, jufqu’à un louis piece, quand ils font de la race de Hertford. Il y en a qui achetent des brebis inférieures à l’âge d’un an, dans ce même mois de Septembre , pour les revendre graffes un an après; le calcul n'eft pas du tout avantageux ; il vaudroit mieux des moutons de deux ou trois ans, dans ce mois-ci, les nourrir paffablement bien pendant l'hiver , en leur donnant de tems en tems des choux ou des navets, & les parquer dans des terres feches, où ils reftent ainfi jufqu’au mois de Juillet ; on les fait pafler après dans de bonnes prairies , & en- fuite à la nourriture des navets, de celle des na- vets à celle des choux; & on les vend en Avril ou Mai, lorfque le mouton eft plus cher que dans aucune autre partie de l’année ; le profit alors pourra fe trouver ainfi : Pour un mouton gras, . . . 32 iv. 8 £ Four a Laine "AS ee » 38 8 Avantage A - A SEPTEMBRE: + 0j Ci-contre, . . . 38 lv. 8f. Avantage fur la terre parquée >" 16 re Kotal, :4 7/40 NAS Prix coûtant, . . 19 \Ù 4 EEE PS PET A EMEA E Profit, : : 21 on Par cette méthode , prefque toute la premiére an- née eft employée à parquer , & cela vous fert pour tout le refte de l’année. Il faut obferver que le profit provenant de l’engrais fur les terres par- quées , eft bien plus confidérable que celui que je viens de noter dans les exemples ci-deflus. À la longue , ce profit eft incroyable & au-delà de tout calcul, les moutons font plus aïfés à garder & à fourrir que les brebis ; d’ailleurs , ils font moins fujets à fouffrir par les accidens ordinaires. Les moutons d’un an s’achetent auffi dans ce mois-ci, & on les vend un an après, gras , & Le profit eft con- fidérable. Il fera néceflaire de dire quelques mots fur les vieilles brebis; l'on tire tous les ahs , du troupeau qui n’a pas été engraïflé , un certain nom- bre de brebis , on les vend & l’on retient lé même nombre d’agneaux à leur place. La méthode de les tirer eft, felon l’état de leurs bouches , quand les O 210): SEPTEMPBR E, dents leur manquent , au point qu’elles ne peu< vent plus fe nourrir dans les pâturages ordinaires, ni être parquées ; on les choïfit , & on les fait pañler aux marchés & aux foires, où ces fermiers qui ont des terres plus riches , les achetent &t les font engraïfler. Cette manière de vendre eft très- avantageufe , il eft vrai que le prix n’eft pas bien confidérable ; le prix moyen peut fe fixer à neuf francs, on en vend quelquefois à douze liv. ; mais le fermier qui les achete , les conferve jufqu’a ce qu'elles aient agnelé , les engraïfle après avec des choux ou des navets, & lés vend enfuite avec avantage. Si, par exemple, élles coûtent fix louis la vingtaine, elles fe vendent quelquefois dix-huit livres, lon voit bien que le profit fe triple, Pour engraiffer Les Befliaux. Il faut faire grande attention dans ce moïs-ci aux beftiaux que lon a deflein d’engraiïfler , &t au foin qui refte ; il arrive bien fouvent dans le mois de Septembre, que la nourriture manque; il faut donc y fuppléer par quelqu’autre moyen; car un bœuf, ou toute autre bête qui eft prefque en- graiflée requiert d’être bien nourri ; fi on lui di- minue les vivres, il commence à maigrir. Vers le milieu de ce mois, il faut avoir une grande piece SEPTEMBRE. 21 de terre, fauchée, prête à recevoir les befliaux, Vers la fin du mois, jufqu’à la moitié d'O&tobre, il en faut une autre tout-à-fait fraîche. Le bœuf eft à meilleur “marché à la Saint-Michel, que dans aucun autre tems de l’année ; ; Car on fait con- duire alors tous les autres beftiaux au marché; ceci devroit faire changer au fermier fa méthode ordinaire , & 1l devroit vendre alors feulement une partie de fon bétail, c’eft-ä-dire , ceux qui font tout-à-fait gras, & qu'il ne peut plus garder, & nourrir le refte quand toute l’herbe eft pañlée , avec des choux ou navets. } Vaches. Pour les vaches à lait, il faut beaucoup d’her: bes pendant tout ce mois , autrement le lait leut manquera plutôt dans cette faifon que dans une autre ; la luzèrne fauchée, tandis qu’elle eft verte & donnée aux vaches dans la cour , eft pour elle la meilleure nourriture , le produit eft fi ré- gulier & fi peu dépendant des faïfons , qu'il eft … très-aifé de proportionner le nombre de beftiaux aux herbages , & alors on ne manqueræ pas de nourriture, La luzerne fauchée réguliérement tous les jours, en fournira jufqu’à la troifième femaine d'Oftobre ; &, quoiqu'il y ait des perfonnes qui © j 212 SEP; SEM PRE) ‘foutiennent que les vaches! ainfi traitées ne dor- nent pas autant de lait, que 7 elles font en pûture:il eft vrai néanmoins qu’en fuppol nt même qu’elles n’èn donnent que la moitié ,. cette. moitié rendra certainement plus de profit réel fur la to- talité; car il faut fi peu de terrein pour nourrir les vaches au ratelier, qu'il n’y. a paside compa- raifon entre ces deux méthodes , fi Pon regarde le profit. Las De l'Engrais “hs Prairiés. IL faut engraiffer les prés avec des compôts & non pas avec du fumier feulement , pour plufieurs raifons. Le fumier ne doit pas être tellement pour- ri, qu'il fe rende liquide ; fa force & fa qualité fe peréient. quand iteft trop pourri; & quand il eft en bon état, il eft fi bon pour les terres labou- rables, qu’il n’y a pas de profit à le faire mettre fur de l’herbe. D'ailleurs, il y a beaucoup d’au- tres ingrédiens à mêler au fumier, qui le rendent plus propre pour lherbe que pour les terres la- bourables. Il faut y mêler de la craie, de l'argile,” de la tourbe , de la tetre de foflés, de la’ vafe d'étang, de la chaux, des cendres , de la fine & du fumier. Tout cela, ou au moins .une partie , ‘mêlé enfemble deux fois dans le cours d’une an- SEPTEMBRE 213. née, Gb très-propre pour répandre fur les prés, & av ec un peu de fumier. parmi, lengrais devien- dra excellent Septembre eft la véritable faifon:pour faire le mélange de ces engrais, il faut en mettre quinze ou vingt charrettes fur chaque arpent, pas . dayantage. On n’engraïfle jamais trop les ter- res labourables , mais on peut aifément trop en- graïfler les prés ; ; car quand il y a trop d'engrais, il ne peut pas facilement pénétrer, Il faut avoir foin de faire répandre les monceaux bien régulié- rement, c’eft plus néceffaire que fur les terres la- “bourables ; un bon fermier fait fumer fes prairies & fes pâturages tous les trois ou quatre ans , ex- cepté quand elles font très-grafles. Découpage (1) des Prairies. C’eft une nouvelle méthode que celle de décou- per les prés; elle n’eft pas encore bien connue : elle confifte à couper le gazon avec une charrue ui n’a que des coûtres, ou une herfe fendante, forte que la furface puifle être fendue ou dé- chirée. Cette opération ef tout-à-fait oppofée à li- dée ordinaire du roulage en automne, qui fe fait (°1) terme technique que je n'ai pu rendre autres ment. à O il 214 SEPTEMBRE. à deffein, non-feulement d’applatir la terre pour la rendre propre à la fauche, mais auffi de prefler la furface autant que l’oñ peat , & c’eft pour cette raifon que l’on choifit les rouleaux les plus lourds. S'il y a quelques défauts dans la nature du gazon qui puifle empêcher la terre deproduire du foim à proportion de la fertilité du fol , ils proviennent de ce que la furface eft attachée à une terre humide, qui l'empêche de jouir de linfluence de l’atmofphè- re. Le roulage augmente cet inconvénient , car plus vous preflez le fol, moins les racines dé lherbe au- ront de féve : maïs fi vous le découpez & le déchi- rez en piece , c’eft comme fi vous le faifiez houer, & cela donne le moyen aux racines de pénétrer dans la terre déliée. Si vous avez envie auffñi de fumer vos près, cet argument devient plus fort: après avoir découpé la furface & mené Pengrais, il entrera dans les fillons des coûtres, & alors il pénétrera où vous fouhaitez qu'il foit, aux pieds des racines de l’herbe. Tout le monde fait com- bien il eft difficile de faire entrer l’engrais dans le gazon, il faut herfer plufeurs fois, & roule avant que de le faire entrer. La moitié de l'où- | vrage feroit faite fi l’on fe fervoit de la méthode de découper. Qu Il y a cependant dans le roulage un grand avan ge, c'eft celui de faire produire une herbe plus te 6: plus belle; en détruifant les vers, on ôte SEPTEMBRE 215 cette différence de couleur qui eft moins agréable à la vue, & le gazon devient d'un plus beau verd ; c’eft pourquoi il eft bien de faire rouler les prairies tout près de la maïfon, mais non pas pour produire une grande quantité de foin, De la Pimprenelle, Il ne faut pas faire paire les beftiaux dans les champs de pimprenelle, après qu’elle a été fau- chée ; car ils doivent fervir pour la femence en Juillet ou pour une feconde récolte. La grande particularité de cette plante eft d’être bonne à manger en Mars, & fi on la laifle haute de fix ou huit pouces au mois d'O&tobre, on la trou- | vera à la hauteur de huit à dix pouces au coms mencement de Mars, & avec toutes fes feuilles ; comme en automne : les gelées d'hiver ne lui font point de mal; tout l’avantage de la pimprenelle dé« pend de cette précaution , & tous ceux qui y ont fait paître les troupeaux s’en font trouvés fort mécontens , c’eft pourquoi ils ont décrié cette plan- te ; mais il n’en eft pas de même des fermiers qui favent la ménager. © iv- 216 SEPTEMBRE, De la Fougère. C’eft dans ce mois qu'il faut couper la fougère; la ferrer dans les granges en gros tas, & la faire fervir aux beftiaux tout l’hiver, pour litière dans la cour & former du fumier : elle fert auffi de litière pour les étables, les écuries. C’eft avec cette plante que vous aurez beaucoup d’engrais , ce qui eft la vraie clef de l’agriculture & du labourage. De tous les végétaux, la fougère donne le plus de fels, & voilà par quelle raïfon elle eft fi bonne pour le fumier : fi le fermier n’en a pas dans fes landes , il devroit en acheter dans le voifinage , pourvu qu’elle ne foit pas trop loin; il pourra la payer comme la paille, & il ÿ trouvera toujours fon avantage. Du Chaurme. C’eft dans ce mois qu’il faut couper les chau- mes de froment ou de feigle, ou le rateler , & le faire tranfporter dans la cour, pour en faire du fu- mier, comme de la fougére ; cette opération eft bien négligée dans nos provinces , elle eft pour- tant de la dernière conféquence ; le chaume laïffé dans les champs n’eff d'aucun avantage, confidéré. CA F5. PTS SEPTEMBRE. 217 comme engrais , il empêche au contraire le tra- vail de la charrue; car, sil y en a trop, elle ne peut plus faire l'ouvrage comme il faut. Il eft donc très-utile de dépouiller les champs de toute efpece de chaume , & de le tranfporter à la ferme, où les beftiaux , en le foulant aux pieds, en formeront d’excellent engrais , ce qui épargne la paille. Dans les provinces où l’on fe fert de chaume , l’on donne pour le couper, le ramafler, &c. quarante-huït fous & quelquefois trois liv. par arpent; dépenfe ‘qui n’eft pas confidérable , eu égard à l'avantage que l’on en retire, | Du Houblon. L'on commence quelquefois à cueillir les hou= blons: à la fin du mois d’Août , mais ce mois-ci eft le véritable pour cette récolte ; il faut avoir pour cela beaucoup d'ouvriers : les femmes tra- vaillent aufli bien que les hommes ; car il faut du foin & de l'attention , plutôt que du travail. Après l'avoir cueilli , il faut arracher les perches ou pieux qui doivent être foigneufement arrangés pour la faifon fuivante, e 213 SEPTEMBRE, Du labour des Jachères d'hiver. Voici le tems où la charrue doit retourner d’abord comme il faut , toute efpece de terres en chaume , c’eft un point principal du labourage qui eft très= fouvent négligé ; les fermiers s’imaginent qu'il n’eft néceffaire de faire labourer les jachères qu’au mo- ment de femer l'orge ; la principale raïfon qu’ils donnent eft celle que ces champs nourriffent les troupeaux ; mais quelle nourriture ! que ces fer- miers fe donnent la peine de confidérer que l'air en toute faifon, & quand il gele en particulier, pu'yérife les mottes. Au milieu de l'été , quand la terre eft tout-à-fait cuite par l’ardeur du foleil , on pourroit douter de cet effet; mais fi vous at- tendez la pluie & les autres variations , le fait fera aifément prouvé ; 1l eft certain que la pulvé- rifation de la terre, dans la faifon de l’hiver , eft de grande conféquence ; c’eft là ce qui détruit les mauvaifes herbes & les empêche de prendre ra- cine. Si les jachères font bien labourées au mois de Septembre, & fi on y laïffe de bons fillons & des maîtres jufqu’aux mois de Mars ou Avril, on ne les trouvera pas couvertes de mauvaifes her- bes, ou s'il y en a un peu au premier laboug, de printems , la charrue les détruira. On voit qu'il eft de la dernière conféquence de donner aufli ce SEPTEMBRE. 219 fecond labour; car chaque plante nuifible qui com- mençoit à végéter par le labourage de automne tefleroit enfermée dans la terre jufqu'au labou- sage du printems ; fi vous femiez deflus, vous fe- tiez sûr alors d’avoir abondance de mauvaifes her- bes, qu'un labour dans l’automne auroit décou- vertes , & qu’un fecond détruira. Car pour faire périr les mauvaifes herbes, il faut les faire croi- tre, & quand une fois elles font forties de la terre, la charrue les détruit , de forte que fi le fer- mier retourne les chaumes dans ce mois-ci , non- feulement il détruit les mauvaifes herbes , mais 1l prépare la terre à la végétation. Il faut faire à-peu- près la même chofe pour les champs qu’on def- tine aux jachères ; il eft très-avantageux de les labourer d'hiver, fans attendre les effets de l’at- traétion. L'effet de l’attra@tion pourra paroître très-équi- voque à la plupart des fermiers qui ne voient ja- mais les chofes plus loin que lapparence ; tout ce qu'on a dit là-deffus ne peut pas fe prouver par l'expérience. Tous les Volumes qu’on a pu- bliés fur l’agriculture ne prouvent pas que l’atmof- phère contribue à rendre l’engrais meilleur , la- vantage des jachères ne donne pas aflez de preu- ves; il y a plufieurs argumens qui démontrent évi- demment que la deftrution des mauvaifes herbes & la pulvérifation de la terre font toujours avan- 220 SEPTEMBRE tageufes. L’on voit des récoltes égales, & plufeurs dans l’année ; le froment, par exemple, après les feves , réuflit fort bien , & aufh après les pois & le trefle. Après toutes mes obfervations, enfin , je vois que la plus füre méthode eft celle de détruire les mauvafes herbes, Îl'y en a qui difent que le nitre fait beaucoup ; tépandu fur la fuperficie de là terre après le la- bourage dans lhiver ; ils foutiennent que le nitre eft le principe de la végétation; cette opinion paroît tout-a-fait dépourvue de raïfon. Le falpêtre a tou- jours été pernicieux , ou pour mieux dire , veni- meux dans toutes les expériences. Je ne faurois pas prouvér le contraire, mais je doute toujours des maximes qui ne font pas appuyée de l’expé- rience; je me borne donc à recommander au fer- mier le labourage d’automne, qui eft fondé fur des principes qu'il doit fort bien comprendre, & fur des effets qui font certains , c’eft-à-dire, la pulvé- rifation des mottes & la deftruétion des mauvaïfes herbes ; fi lon cherche à perfuader les laboureurs par des raïfons ou par des difcufhons , elles de- viennent pour eux du grec ou de l’hébreu. L’'Auteur recommande de faire des Maitres. Il ne faut pas oublier de faire des maitres dans RES 7 — SEPTEMBRE, 221 vos champs aufhtôt qu'ils font labourés; c’eft de- là que dépendent la fécherefle & {a falubrité du fol. Il:y a des fermiers qui négligent cette opéra tion, même dans les champs de froment. Pour épargner une bagatelle , on efluie fouvent une perte trés-confidérable. Le fermier doit défigner les places où il faut faire les rigoles , & y employer tout de fuite fes charretiers avant que la charrue quitte tout-à-fait les champs. Il eft néceffaire de faire faire aux maîtres une efpece d’écoulement , & d'y former une berge bien propre, n’oubliant pas d'ouvrir un pañlage dans les fillons , afin que l'eau puifle couler dans les rigoles , la dépenie ne mérite pas d’être comparée au profit ; 1l faut abfo- lument approfondir les maîtres & les curer à la bêche, autrement la boue les rempliroit, & 1l fau- droit creufer de nouveau. : De !a Luxerne, La luzerne en rayon ou tranfplantée vous four- nira probablement une autre récolte dams le mois de Séptembre, ou tout au plus tard la première femaine d’'O&obre, après lavoir fauchée cette fois, le petit regain qui fuit n’eft pas de grande confé- quence , mais fi on la coupe au commencement ou vers le milieu de Septembre, la chofe eft bien 322 SEPTEMBRE! différente ; car on aura une autre récolte à la fin d'Oftobre. Toutes les fois que vous aurez fait I4 dernière récolte , ayez foin d’engraiffer les champs avec des compots de craie, de marne , de gazon, de fumier pourri, de cendres, de fuie & de chaux, & fi on le fait chaque année, un petite quantité fuffira , douze charrettes par arpent. Dès que l’en- grais fera bien répandu, faites entrer la charrue or- dinaire dans les champs , & fi la luzerne a été fe- mée en fimples rayons , entrez dans chaque inter- valle, ouvrez la terre & faites un gros fillon de chaque côté. Par cette opération , chaque champ aura l'air d’une jachère en élévation , fous laquelle reftent les rangs de luzerne. Vous ferez sûr alors que tout l’engrais a pénétré jufqu’aux plantes, à labri du mauvais tems, & chaque fillon devient une efpece de conduit , qui fe décharge dans la rigole, & conferve la plantation en bon état. Il faudra , au premier beau tems fec après Février, faire herfer les fillons en travers plufieurs fois, afin de mettre le champ au niveau , & de donner aux jeunes plantes la facilité de percer. Les cultivateurs de luzerne doivent obferver qu'un feul arpent labouré de la forte, leur rendra beaucoup plus, que plufieurs labourés à la manière ordinaire. On croira que c’eft une extravagance que de fumer les champs tous les ans; mais la lu- zerne demande d’être bien engraïflée. Si la terre SEPTEMBRE: 273 eft bonne; elle produira fans engrais ? mais pour la porter au degré de perfeétion, & en tirer un plus grand profit, il faut amender la terre. Il y a des champs qui ont produit des récoltes de qua- rante louis, & plus par année; mais la luzerne avoit été plantée fur un fol aufh gras qu’un fu< mier, Du Parcage. Il ne faut négliger, fous aucun prétexte ; de par* quer dans ce mois-ci. Après avoir femé le fro- ment, Or pourra parquer la terre deftinée aux fe- ves, pendant les mois d'O&tobre & de Novem= bre. Les récoltes font toujours bonnes & paient bien les foins que vous leur donnez, A | | AN LL pce RL TE s Fr - — nn OCTOBRE. L'Aureur Anglois commence l’Inftruétion fur ce mois-ci, par des préceptes très-détaillés fur les mefures & précautions à obferver , lorfque lon veut prendre un bien à ferme , ainfi que pour la louée des domeftiques. Comme tout ce quil dit à ce fujet eft purement local, & relatif aux loix Angloïfes, j'ai cru devoir le fupprimer dans un Ouvrage purement d'agriculture pratique. Jen ferai peutêtre. un réfumé à la fin de l’Ouvrage , fi ce fupplément me paroït utile au fujet. Des travaux de la Cour. Comme voici le dernier mois où les befliaux font nourris au verd, foit en pâture , foit au rà- telier ; il faut que la cour foit mife en bon or- dre pour les recevoir à demeure. Cet article eft fort important pour un fermier , & il doit avoir grande attention en louant une ferme, de remar- quer fi la cour eft commode & fpacieufe. Si ce- pendant d eft forcé par les circonflances de trai- ter D O CTOBRE.. 224 ter avec un propriétaire fans rencontrer un pareil avantage , 1l faut qu'il y remédie à peu de frais, en cherchant un térrem adjacent à la cour, où puiflent donner les portes des étables ou des gran- ges ; aflez étendu pour contenir tout fon bétail, Il le fera entourer de bonnes paliffades , fufffam- ment hautes & folides : le profit qu’il doit en re- tirer l’indemniféra bientôt de cette dépenfe. D’ail- leurs , sil veut faire cette dépenfe d’une manière plus économique ; c’eft d’entourer fon terre d’un mur fait en terre avec du mauvais foin ou de la paille bien méèlée avec la terre, & de couvrir le tout avec du chaume , comme une mafon. La furface de ce terrein doit être couverte de gravier ou de craie battue, pour que l’on püifle aifément avec la pelle y ramafler le fumier & balayer tout le tour. C’eft dans cette efpece de cour que le bétail doit être journellement raffouré avec de la paille fraiche , que l’on renouvellera fbuvent. Le fer- imier fera bien auf , à fes momens perdus, d'y faire conduire de la marne , des gazons pourris , ou de la terre de marne pour jetter fur la paille & le mêler avec; on ramafle le fumier avec ces ter- res, à mefure qu'il fe pourrit, & l’on forme du tout, au milieu du terrein , une couche de trois à quatre pieds de haut, que l’on conduit enfuits P 226 OCTOBRE. dans les terres. On peut même placer les ber- ceaux où on met le fourrage , fur cette efpece de couche , pour que les animaux larrofent de leur urine; mais 1l faut pour cela avoir foin de renouveller fréquemment la litière avec de la paille ou du chaume , qu’on peut entremêler alternati- vement avec ce qui fortira des toits à porcs , pou- laïliers , pigeonniers , &c. Un fermier qui engraïfle des vaches ou des bœufs avec des turneps, doit par préférence les faire manger dans de grandes auges , placées au milieu de cette cour , il y trou- vera bien fon profit pour augmenter {on fumier, en ne confommant pas les pailles, & il ne peut en même tems tirer un mcilleur parti de fa récolte de navets. Telle eft la manière la plus füre de multiplier les engrais , & de gouverner la cour d’une ferme ; jai tiré ces principes d’un des meilleurs auteurs qui ait écrit fur l’agriculture. Des Chevaux. À la fin de ce mois on doit reïnettre les che- vaux à la nourriture feche, c’eft-à-dire, à la paille, au foin & à l’avoine ; c’eft le moment où ils font plus difpendieux ; car fi on ne les nourrit pas bien, ils tombent à rien , & ne font pas en état OcTo8BsREeE 537 de faire la moitié de l'ouvrage: il faut leur don- ner le meilleur foin & de la pailie à difcrétion , furtout lorfque ces denrées ne font pas chères. Dans le cas contraire, il faut leur donner du foin & de la paille hachés enfemble, ce qui économi- fera confidérablement ces fourrages. Quant à lavoine , files chevaux travaillent tous les jours , il faut compter deux boifleaux par {e- maine pour chaque cheval , ce qui ne fera que bien füuffifant pour les entretenir & les dédom- mager de la perte de la luzerne. Nourris de la forte , ils peuvent travailler tous les jours durant l'hiver. Mais ce régime de nourriture eft fort coûteux, Il y a une manière plus économique , c’eft de fubffituer à l’avoine les carottes en totalité, ou du moins en grande partie. On donne deux boifleaux de carotte pour un d'avoine ; & pour quatre che- vaux, au lieu de donner huit boïffleaux d’avouie par femaine , on n’en donnera que deux & douze de carottes. La manière de les employer eft de les bien laver, de les couper par morceaux , & de les mêler dans la mangeoire avec de la paille h22 chée, Cette nourriture réuflira très-bien aux ch:« vaux , & épargnera bien de la dépenfe. Cette méthode de nourrir les chevaux avec des carottes, a été particulièrement recommandée pa un auteur célebre , qui s’en explique ainf: P j 528 O CT O 8 R € « On ne peut difputer que les carottes ne foient une bonne nourriture pour les chevaux, mais ce qu'il eft effentiel d'établir , c’eft leur grand avan- tage fur l’avoine, Un attelage de chevaux peut être entretenu avec des carottes feulement, fi leur plus grande courfe eft de fept à huit mille autour de la ferme, & on n’a befoiñn de leur donner d’a- voie que lorfqu'ils vont à vingt ou vingt-quatre. Cet hiver, mes chevaux ont fait plus d'ouvrage que de coutume , ayant fervi à l’exploitation d’une partie de mes tailis; ils ont toujours bien été, & ont meilleur poil qu’à Pordinaire , nayant mangé que des carottes. Cela prouve que cette nourri- ture leur eft meilleure que l’avoine ; d'autant que je penfe qu'il eft avantageux pour les chevaux de ne pas toujours manger de la même nourriture ; mais aufñ je leur donne de la paille à difcrétion, & le foin peu à peu pour qu'ils en aïent toujours dans le ratelier; par cette méthode les chevaux ne fe- ront jamais trop échauffés. Suppofons que le boifleau d'avoine coûté qua- rante-huit fols, & celui de carottes fix fols, ce fera huit de ces derniers pour un d’avoine, Le prix de l’avome varie, à la vérité, beau- coup , mais le meilleur marché qu’elle foit , eft 36 fols; on en aura encore fix de carottes pour un. Je n’établirai même mon calcul qu’à quatre pour un, & Je prouverai que quand il n’y auroit fm O,cT o'BRE, 229 que deux pour un, on y trouvera encore du profit. D'ailleurs , en comparant le parti que l’on peut tirer de deux quantités de terres données pour la nourriture des chevaux , & calçulant le produit de chaume, on verra de quel côté eft le profit, fans compter dans quel état chaque efpece de récolte laiffe le terrein qui l’a produit. Vingt arpens de terre qui vous feront néceffai- res pour la nourriture de vos chevaux , feront dans le plus mauvais ordre, quand ils auront porté de Pavoine ; au lieu que les cinq, où j'aurai récolté des carottes , feront dans le meilleur état de cul- ture pofhible, après toutes les façons qu’ils auront reçues. C’eft pourquoi je confeillerai la culture de cette racine à tout fermier qui y aura un terrein propre, comme étant un objet important d’éco- nomie rurale , qui allégera confidérablement la dé- penfe des chevaux ». Les bœufs doivent être nourris ce mois-ci à la paille & aux choux, & à défaut de ces derniers, aux turneps ; mais les premiers font préférables. Il faut leur donner environ cinquante livres par jour chacun, & que le ratelier foit toujours garni de paille , d’orge ou d’avoine. S'ils font beaucoup d'ouvrage , il faut fubflituer le foin à la paille, mais avec économie ; car le. grand avantage de fe fervwir de bœufs , préférablement aux chevaux pour Pi 239 OCTOBRE. la culture, confifte dans la nourriture d’hiver , fur laquelle on peut économifer ; mais on ne pent en faire autant pour les chevaux. Ce n’eft pas qu'il n'y ait des cultivateurs qui re donnent pas d’a- voine aux chevaux hiver , quand ils ne font pas grand ouvrage , d’autres qui même ne leur don- rent que de la paille; mais c'eft une fort mau- vaife méthode, car des chévaux qui ne font pas bien entretenus toute l’année , toribent à rien quand le fort de l’ouvrage commence, Comparaifon entre les Chevaux © Ls Bœufs. Voici un article très-important en agriculture; car certainement l'avantage eft d'un côté, & il ne s'agit que de le trouver. Il n’y auroit pas à hé- fiter, fi, comme quelques -uns le prétendent, on pouvoit entreterit deux attelages pour un , en fe fervant de bœufs; mais tout le monde s’eft avifé de raïfonner ou d'écrire fur cette matière; chacun a eu fon opinion, appuyée même par des expé- rences : mais il en eft de cela comme des fermiers qui exploitent des terres légèrés, & qui veulent b'ûmer la eulture des turneps. La localité fait tout, Tel s'eft toujours fervi de chevaux , & les croit fupérieurs aux bœufs, tandis que d’autres ne veu- lent employer que ces dermers à leur culture, à SRE ec Met sont tds mé PPT TT AE, OCTOBRE, 231 Tout cela n’eft qu'une opération de calcul, & un fermier qui veut l’entreprendre doit avoir toujours la plume à la main , comme un mathématicien le compas. Je ne réponds pas de réfoudre une quef- tion aufli importante, mais je rapporterai tous les calculs & dépenfes de plufieurs expériences faites dans une feule année, dont on pourra enfuite faire le rapprochement, Première Expérience. Dépenfe de deux chevaux & de deux bœufs faite en 1766. Il en coûte par acre pour labourer avec deux che- MR UE + 6. 0 el NI ACR Entretien , achat & ufage des har- Ve à » ‘0 «y CN J Lee he ns ins me | 2 ———————— 2 11 me Pour deux bœufs, 2: : 3: : 2 2 Le deuxième article eft nul, ou du moins prefque rien , mais faut ajouter celle d’un tou- 232 OCTOBRE. De l'autre part, ‘J . 2 liv. 2 fols ÉDSUL es + DOM USM N 6 se | pére | Le profit pour les bœufs eft par BEFCIdELT PA QU VUS SM ee 3 (:), Il faut obferver que , quoiqu’on ne porte rien pour les harnois, il faut au bout de lan compter la dépenfe & l'entretien des jougs ; mais les chai- nes de fer s’ufant peu, la dépenfe d’entretien ef peu de chofe ; ainfi cet objet peut être porté à deux fous par an. Mais un autre avantage que les bœufs peuvent avoir, c’eft qu’une paire de petits bœufs laboure- ront un acre en un jour, fout comme des bœufs bien gras , de 12 à 1300 péfant, & leur confom- mation fera bien moins forte. Dans la province de Suflolk, pour un écu par femaine on nourrit une bonne paire de bœufs dans l'été, & une di- minution de 12 à 24 fols fur la dépenfe ci-def- fus, fera tout de fuite une grande différence. D’un (1) Note du D. J'ai traduit cet article fans entendre l’auteur , car sûrement il faut trois jours à deux bœufs pour labourer un acre, le tcucheur ne gagneroit donc que deux fols par jour. O'cTo BRtE!, 237 autre côté , les chevaux dépériffent toujours en travaillant , & on perd tout lorfqu'ils meurent, au lieu que les bœufs ne travaillant que jufqu’à quatre ou cinq ans, on gagne deflus lorfqw’on les vend; tandis que fur les chevaux, fi on tient un état exa@ des accidens auxquels ils font fujets, on trouvera l’un dans l’autre une perte de 20 pour 100 par an. S'ils fe caflent une jambe, il faut-les jeter à la voirie; au lieu que fi un pareil accident arrive à un bœuf, on le vend au boucher , & l’on perd rarement deflus. Ces derniers animaux demandent bien moins de fom, de dépenfe pour la nourriture, le panfage, &c, Dans la province de Suffolk , un homme ne foi- e pas plus de quatre chevaux, & outre cela, , les charretiers font revenus de la charrue, on ne peut les employer à aucun autre ouvrage ; tandis que mes bœufs ne demandent d’autre foin que de les curer ; & de garnir leur ratelier de fourrage , un garçon fera chargé aifément de dix à douze bœufs; c’eft une grande différence , au lieu d’un charretier pour quatre chevaux ; les gages de. ces derniers font bien chers. Je crois donc pouvoir aflurer, d’après cette expérience faite dans notre province, qu’il y a un profit réel à admettre la cul- ture des bœufs (1). geo « (1) Je ne trouve pas cet article plus clair, car outre 234 OCTOBRE. Des Vaches. Les vaches à lait doivent dans ce mois-ci ren- trer à la cour de la ferme; celles qui en ont le moins doivent être mifes à part , & on ne doit pas épargner la paille & les choux, étant bien prouvé que de ce mêlange , il ne peut réfulter au- cun goût pour le laitage. Les genifles d’éleve doi- vent aufh être rentrées à la fin de ce mois, & nourries avec foin à l’étable. Elles ne feroient que s’amaigrir en reftant plus tard dans les pâtures , qu’elles abimeroïent en outre avec leurs pieds. De ? engrais des Befhaux. Voici le bon tems pour rentrer les bœufs qui auront été l'été en pâture , pour les mettre à l’en- grais avec des turneps, des choux ou des carot- tes. Les premiers font bons avec du foin, mais les deux autres plantes les engraiflent plus prompte- ce petit garçon pour foigner les douze bœufs, il faut un chartier par chaque paire pour labourer; maïs j'ai voulu fuivre mon exaitude ordinaire , en traduifant littéra- lement. OCTOBRE. 235 nent feuls. On place ces animaux dans des éta- bles fermées, fi l’on veut; mais cela demande beau- coup plus de foin, & eft beaucoup plus coûteux, que de les mettre dans une cour jonchée de plaille, fur laquelle font dreflées des crêches ; car les bœufs dépériront promptement à l’étable, s'ils ne font pas tenus très-proprement , ce qui confomme bien plus de paille. À la fin d'Oftobre on peut aufhi acheter à bon compte du bétail blanc , après le déparq, pour en- grafler & les vendre au boucher en Avril, on doit en proportionner le nombre à la récolte que lon aura faite de turneps ou de choux. Quant à la quantité qu'il en faut pour engraif- fer les bœufs, on peut la calculer de la manière fuivante, emière Experience. Prem p Le 17 Oftobre 1776, on a mis à l’engrais deux bœufs qui pefoient en fortant de l’herbage cinq cens chacun , on leur mit du foin conftamment dans le ratelier, & on leur donna des navets dans la proportion qui fuit: ayant vérifié ce que péfoit le panier dans lequel on leur en donnoit , il s’eft trouvé pefer cinquante-huit livres, 236 OCTOBRE. La première femaine ils en mangé- rent en tout, . 52 paniers, pefant. 3016 div: La deuxième, 5 64 RENTREE La troième , . . 68 /. RNA La quatrième, 2/72, ORPI CORRE La cinquième, #., 77/40 1/7 T0 ES La fixième 21780) sh LOS ONE La feptiéme "it 5770) NES ; La huitième PR 2 Te 24260 | - + -4756 La dième j4,2: 12701, 54 20 SUR La onzièmelbs : N 781 2: VW NORARRE | KE di SP + 3306 La neuvième, . . 82 La douzième, . . 78 La treizième, . . 57 Et 32 boiffeaux de paille tchsb La quatorzième,. 7$ . + 4350 Et 28 boifleaux de paille actée La quinzième, MAR. Cr . 4756 Et 28 oil de paille Häthée: 1BO7NNNN ss + LOIRE Sn, N Ce qui fait vingt-huit tonnes & huit quartes entre les deux , ou quatorze tonnes quatre quartes chacun, OCT 0 5 RE 237) Obfervarions. On a remarqué que les fix premières femaines ils mangeoient toujours de plus en plus, & en- graifloient peu fenfiblement , mais enfuite leur ap- pétit & leur graifle augmenta proportionnellement jufqu’aux dernières femaines , qu’on leur ajouta la paille hachée , pour achever de les mettre en état de vente. Quant au foin, quoiqu'on ne l'ait pas péfé ré- gulièrement , cela a pu aller à vingt livres par jour chacun, & on ne le diminua pas même en don- nant la paille. Ceci prouve la manière dont il faut s’y pren- dre pour bien engraïfler les beftiaux, & l’avan- tage qu'il y a de les charger quelquefois de nour- riture. D’après ma récolte des turneps de cette année, je juge qu’ils en confomment un acre cha- cun ; les bœufs mangent le quart de leur propre poids de ces racines en un jour, Deuxième Expérience, Le 24 Décembre 1766, on a mis de même une vache maigre , de quatre cens péfant, & on l’a gar- dée de même dix femaines à l’engrais, ayant du foin à difcrétion ; & elle a mangé cinq tonnes dix-huit 238 OcrorBxrE);: quartes de turneps , en commençant par vingt-deux boifleaux la première | & croiflant jufqu’à vingt- huit la dernière. Elle a confommé pendant ce tems le tiers d’un acre de turneps, & mangé par jour l'équivalent du tiers de fon poids fans le foin. Je pourrois citer plufeurs autres expériences qui ont donné à-peu-près les mêmes réfultats. Des Cochons. Voici de même le tems de retirer les porcs du trefle pour les mettre à l’engrais; c’eft une fpéculation très-importante pour un fermier. Ce n’eft pas le gain qu'il fera fur ces animaux , qu'il doit compter ; car quand ïl ne retireroit de fon grain que le prix qu'il le vendroit au marché, il y gagneroit d’abord les frais de voyage , & le tems de fes chevaux, & enfuite le fumier qu'il en re- tirera , qui eft de la meilleure qualité que l’on puiffe avoir dans une ferme, Ainfi, non-feulement je con- feillerai à tout cultivateur d'élever de ces animaux, hais encore d’en acheter de maigres pour engraif- fer ; il fera ainfi confommer fon orge, fon feigle, les feves , le bled de Turquie , &c. S'il eft dans un fol où les pommes de terre ou les carottes puiflent réuflir, il tirera pour lengrais des porcs OCTOBRÉ 239 plus de profit d’un acre de ces racines , que s’il étoit enfemencé en orge ou autre grain, De La Cour à Cochons, Je vais décrire une cour que j'ai fait confiruire en 176$ pour engraifler des porcs, & rapporter la dépenfe que j'ai fait pour cela, afin de mon- trer le profit que Pon peut retirer d’une pareille fpéculation. D'un côté de la cour étoit un bâtiment cou- vert en tuile, avec un fourneau pour cuire les lé- gumes , & un grenier deflus pour ferrer le gran & les facs, @ a coûté fans le bois, : 450 lv. ñe chaudière immenfe pour cuire le | DIAMER Te ‘14 lee Te RS NC D'un côté étoit un puits avec une pom- RUE Ont: + « . «SN VNIAO D'un autré côté de la cour, un han- gar fous lequel étoit un grand baflin en brique , fait à chaux & ciment, pour verfer le manger de la chau- MANN ee 044 0 s NO 240 OCTOBRE; De Pautre part, . . : 1440: La cour pouvoit tenir cent cochons; Le long d'un autre mur étoit un ap- pentis pour coucher les porcs, . . 6o La cour étoit pavée , ce quia coûté, . 250 Les auges pour manger, . ,. . : 72 Enfin, le bois pour tous les bâtimens, les paliffades du côté où il n’y avoit pas dE au Nul cet: + ce PS TRES EEE TA (x) Total de la dépenfe, : : 2400 ef J'ai auf engraiflé cette année-là quatrevingt- huit porcs feulement. Jai confommé pour 170 livres de paill tout, & j'ai eu 90 charges de fumier, qui on efimées par des fermiers 6 Liv, . . . 540 lv. Otant le pox.de lame, .: OReRES a ———— Refte du profit fur le fumier, : «+ . 370 Et j'aurois pu en avoir pour 800 liv. s'ils euffent (1) Jai voulu rapporter tous ces articles en détail, pour montrer combien la main - d'œuvre eft plus chère en Angleterre qu’en France. eu GÉTOBRE 241 eu aflez de paille. Un feul homme a été chargé de ce foin, dont la dépenfe eft le ful que je porte fur le bénéfice des porcs: on voit , dédui- fant cinq pou cent de ma première inife , le pro- fit que jai retiré. J'ai voulu entrer dans ce détail pour montrer aux fermiers combien il eft avantageux pour eux de confacrer à cet ufage toute la récolte de leur grain qui y eft propre , ils en tireront le même parti, & auront bientôt leurs terres engraïflées au fuprême degré, ® Des Moutrons: Voici le tems de commencer à faire manger à ces animaux, des turneps ou des choux , foit dans le champ, fi le terrein n’eft pas trop humi- de, ou fur une pâture feche à portée ; on les tien- dra à cette nourriture jufqw’en Avril & Mai, c’eft- à-dire , aux choux, car les turneps ne fe confer: vent pas jufqu’à cette époque (1 ). (x) Je fuis furpris de cette affertion de l’auteur, gelant très-peu en Angleterre ; car j'ai, dans ce moment-ci, 20 Mats 17838 , des turneps en terre qui y ont pallé lhs- Ver fans être nullement altérés, Q 242 OCTOBRE. Du Fumage des Pres. Ce mois, ainfi que le précédent , doit être em- ployé à fumer les prés, mais on ne doit pas at- tendre plus tard, fans quoi les voitures les abime- roient. Il y a des provinces où l’ufage eft de me- ner tous les fumiers de la cour fur les prés ou autres herbages , mais c’eft un fort mauvais ré- gime d’agriculture. C’eft aufll comme d’obliger les fermiers de mener une certaine quantité de muids de chaux par an, fur les terres labourables , au lieu d'autres fumiers ; c’eft aufli mal entendu, que fi on vouloit faire tirer les chevaux par la queue (1); car, fuivant tous les chymiftes, la chaux fertilife dans le premier inftant les terres | mais finit par les brû- ler & les détériorer. C’eft donc un grand abus de quelques propriétaires d'exiger de leurs fermiers de fumer tous leurs herbages &t leurs terres laboura- bles : cette claufe ne peut être inférée ou diétée que par des ignorans en agriculture. Lorfque lon a choifi un fermier inftruit & intelligent , on doit le laïfler maître de fes moyens d’engrais & de fes (x) Expreffion de l’auteur, que l’on n’a pas voulu changer ainfi que quelques autres tenant à. la langue. O0 € + O AR 344 principes de culture ; par exemple, interdire aux fermiers deux bleds de fuite: dans une terre, l’o- bliger à biner à la charrue , les turneps ; les pois & les feves, font des précautions fages. L'ordre fuivant de cette culture parera à tous les inéonvéniens , tiendra toujours les terres en bon ordre , & conviendra également aux terres fortes 8 aux terres léoeres. La première année , des turnens ; P - ps 3 La feconde, de l'orge; . La troifième, du trefle; La quatrième , du bled. Ou pour kes terres fortes : La première année, des choux ; La feconde, de l’avoine ; La troifième, du trefle ; La quatrième , du bled. Ce que je dis n’eft pas pour exclure l’ufage de fumer les terres en herbes ; c’eft même très-avan- tageux, l'année avant de les retourner , mais il ne faut pas deftinér à cela tous les fumiers de la cour; les cendres , les compots, la craïe, la marne, les gazons brülés font d’excellens engrais pour les herbages | &' les fumiers ordinaires de cour pour les choux , turneps , &c. s Q5 2A4 ÔO c T'O/B RE, De la récolte des Carottes. On doit dans ce mois-ci arracher les carottes, quoique plufieurs perfonnes attendent le mois de Novembre ; mais il eft plus prudent de ne pas retarder par la crainte de la pluie ou de la ge- lée. Cette opération fe fait aflez vite , avec des crochets À trois dents où àvla bêche : ; ce dernier moyen eft plus long, mais les brife moins. On les fouleve en-deflous avec cet inftrûment, on les tire par la tête, & on fecoue les racines pour ne pas emporter de terre; cela fe fera facilement fi la terre a été tenue en bon ordre ; s’il fait beau, on les laiffle quelques jours fur le champ, pour que la terre qui eft autour fe defféche ; on les ra- male par tas, & on les charrie à a la maïfon; en arrivant, on leur coupe la tête que l’on donne aux RE & on feme les racines dans une grange ou fous un hangar ; d’autres en font des efpeces de meules couvertes de fable ou de paille de feigle ; elle fercnt également bien , fi elles font bien entaflées, couvertes & à l'abri de la gelée, En calculant l'emploi de la récolte de ces raci- nes , il faut en réferver pour les chevaux, quoi- qu'il y ait quelques perfonnes qui prétendent que cela leur donne feulement bon poil, c’eft toujours ES PE PL PT OCT O BRIE 24$ . une preuve que cela ne leur fait pas de mal, & il y'en a à qui nous en avons donné ,' qui leur ont fait grand bien. Les truies pleines & les porcs à l'engrais font encore un moyen d’en tirer bon par- ti, ils en font très-friands, & cela leur eft très- profitable. Les truies qui ont des petits ne peuvent rien manger de meilleur pour faire augmenter leur lait. | Cela a été démontré dans les Mémoires de la Société de Londres , pour l’encouragement des arts &t du commerce; on y a même avancé que les porcs de lait fe pouvoient nourrir avec les carot- tes feulement, du moment où ils ne tettent plus, Les bœufs s’en engraïffent fort bien, & les vaches s’en nourriflent aufli parfaitement , fans que cela donne aucun goût au laitage ; 1l eft peu de racines dont jé croie devoir autant recommander la cul- ture, De la récolte des Parares. Il n’eft pas moins important aufhi\ de fe fervir du crochet pour arracher ces racines , que la char- rue couperoit , ainfi aue les carottes ; mais.on peut fe fervir de ce dernier inftrument pour les sommes de terre, la charrue les retourne parfai- tement ; on les ramafle avec la main, & s'il y er à quelques-unes de recouvertes , en herfant le ter Q 246 OCTOBRE, rem elies feront remifes deflus , ou au plus tard au deuxième labour que l’on donnera ; car cette méthode a le double avantage de préparer la terre pour y mettre du bled tout de fuite après, ou de Jorge au printems fuivant. Je me bornerai à dire pour la manière de conferver & d'employer ces racines , la même chofe que j'ai dite pour les ca- rottes; elles craignent de mème la gelée, & font use excellente nourriture pour les porcs , les va- ches, & même pour les hommes. Des Labours d'hiver. On doit ce mois-ci s'occuper de labourer les terres humides & fortes, où on ne pourroit plus entrer le mois fvant, car les terres légères & fa- blonneules fe labourent tout l'hiver ; on doit prin- cipalement labourer les terres deflinées à porter des choux ou des turneps lPannée d’après , & la- bourer à moitié, (ce que l’on appelle dans quel- ques cantons, recafler, ) celles deftinées à porter de l’avoine : en général, il eft d’une bonne agri- culture, qu'il n’y ait pas une terre qui ne foit la- bourée à la fin de Novembre, les pluies & les gelées d'hyver y font bien plus de bien, quand la terre eft amfi ouverte; & le labour que l'on y donnera enfuite au printems la rendra bien meuble , & dans O c TO BR°E. 247 _ Le meilleur ordre poflible , pour telle efpece de _ plante que l'on veuille y femer. Des Feves. “ Ïl y a une efpece de feves que lon nomme mazagan , qui fe feme dans cette fafon; il eft à propos de les femer , ainfi que toutes les feves & pois, en rayons, pour pouvoir les biner avec la houe à cheval. On commence par bien labourer la terre, en rayons de quatre pieds. & on feme les raies à un pied, ou au moins à huit pouces de diftances, en ayant foin de tirer de bons maî- tres pour égoutter la piece. On fuppofe que pour les feves d'hiver , la terre aura reçu un premier labour en Septembre, auffitôt apres la moiffon. | Comme c’eft auffi le tems de préparer la terre pour les feves de printems, je ne puis trop re- commander en général cette culture aux fermiers À comme étant une excellente nourriture pour les bêtes à laine , qui ne détériore pas la terre, & même lameublit en les cultivant par rayons. VAUT, com Des Labours pour les Carorrs. Dans ce mois-ci on doit penfer à donner {é Çiv 23844) : De TOBR E! premier labour aux terres qui doivent porter des carottes au printems, On choilit pour cela les ter- res les plus légeres, mais cependant pas trop fa- blonneufes; on laboure le plus profond que lon peut, fans craindre de ramener une terre qui foit entièrement neuve, pourvu que ce ne foit pas de la glaife ou de.la marne; car cette racine pivote beaucoup , & a befoin d’une terre qui ait du fond, c'eft pourquot il feroit bon , pour préparer ces terres, d’avoir une :groffe charrue exprès , qui la- boure bien profondément. Les fermiers qu n'en ont pas , repañent deux fois de fuite dans la même raie, mais cela eft infuffifant ; on devroit enjever au moins dix-huit pouces à deux pieds de terre. ka Société de Londres à fait exécuter une pareille charrue dans fon Ecole d’Agriculture, qui enleve deux pieds de terre, avec quatre chevaux ; mais aucuns fermiers n’en ont eflayé , ils ont bien tort; car peu de récoltes eft auf avantageufe que celle des carottes , & on pourroit la fubflituer uti- lement à celle des turneps , dans les terres qui y font préparées. De l'emploi des Turneps. Les calculs fuivans ont été faits fur la culture de ces racines, fur le profit qu'il y a de. les fu OCTOBRE, 249 © mer, de les charrier à l’étable, où de les faire manger à l’étable. Un acre qui na pas été fumé , mais qu'on a fait manger dans le champ, a rendu, . 6o liv, LOMME, Aimé, 09. 008, LT ES Le même qui a été fourragé dans le AA OR 0e 0 CS Le même, fumé & enlevé à la voiture, . 40 Ce tableau préfente tout d’un coup le profit des turneps ; d’après la dépenfe , on voit qu'il y'en a un réel, à faire confommer ces racines dans le champ, la dépenfe pour les charrier étant confi- dérable ; elles font fort péfantes, furtout avec les têtes & les racines, & tiennent beaucoup de pla- ce. Une récolte de quarante tonnes prêtes à man- ger , pefe le double avant d’être épluchée. il y a plufieurs méthodes de les charrier ; quelquefois on occupera une voiture à cet ouvrage une demi-. journée , pour amener de quoi nourrir les ani- maux à l’engrais, pendant trois ou quatre. jours. Ce n’eft pas là le tout, cela demande encore du foin à la maïfon , pour couper, laver & difiribuer les turneps. C’eft un homme âgé ou un petit garçon qui eft chargé de cette bélogne ,e& la moitié du tems , les beftiaux n’ont rien à manger, font né ligés ou mal foignés ; les voitures fouvent {ont eccupées, & m'ont pas le tems d'aller cher- 259 OCTOBR'E. cher la nourriture. Un fermier inteligent doit avoit aflez de bétail pour mériter la dépenfe d’avoir un cheval & une petite voiture à trois roues , defti- née à cet ouvrage feul, & un homme qui va aux champs, les charrie , les apprête , les donne aux animaux , & les cure exaétement ; en arrachant amfi les turneps par rayons, la befogne avance. On peut calculer combien on peut engraïfler de bêtes ; & l'ouvrage va malgré tout cela. Il n’y à pas de comparaifon du profit quil y a de faire manger les turneps dans le champ ; & c’eft la vraie manière de tirer le meilleur parti de cette culture ; qui a toutes fortes d'avantages, puifqu’elle produit une récolte, où 1 ne faut ni moiflon ri voiture, ni battage ; mais, je le répete , s’il falloit faire les dépenfes des charroïs, un fermier ne pour- roit trouver qu'il eût ‘rien de refte après la ré- colte:, fi ce n’eft d’avoir bien préparé fes terres pour une autre récolte. Voici une autre expérience qui a été faite fur le rapport des turneps. Une tonne charriée à la maiïfon pour le troupeau, eft revenue , frais faits, à . 3 liv. » fol. La même ,’en nourriflant des. béufs, MN. 0e ê Idem. Des moutons maigres, . 3 14 BR SERRE Re di $ M 7 ? OCTOBR Ci-contre, . . Idem. Des vaches , . . Pour engraifler les porcs, . Autre épreuve de même, . Autre, fur des brebis, +. . E. 251 . ON RV NT 0 fol: Autre , pour engraïfler des ge- 5.111 2 AP ES AIM AMAR Les mêmes , mangés dans ‘le D CS a UT Les moutons engraïflés dans le CPR |» Le ne Shi Ye : ND A 14 QE: .16 1143 12 EVA 18 FO 12 SRE 8 ET TR 18 es ù ù À 26 » D La tonne a coûté l’une dans l’autre 2 liv. 8 fous. Je ne puis m'empêcher d’obferver ici qu'aucun des auteurs qui a écrit fur Ja culture , n’a fait de pareils tableaux de comparaifon ; c’eft cependant la feule manière de calculer le profit que l’on » peut faire fur ces racines, que de préfenter les frais * de récoltes. Il n’en eft pas de même des autres produc- tions , le prix commun des marchés fixe leur rap- port ; les frais de moiffon & battage font con- 252 OCTOBRE. nus; mais pour les turneps ce n’eft pas de même, il ne fuffit pas, comme ont fait quelques écrivains, de fupputer combien péfant rapporte un arpent, cette méthode eff toujours fautive, Je fuis entré dans tout ce détail, comme l’ayant vérifié par ma propre expérience, &t ai comparé par moi-même la différence des récoltes de turneps avec d’autres pour l’engrais des beftiaux. Nous avons vu que la balance commune des confommations faifoit revenir la tonne de turneps à cinquante ou cinquante-deux fous , tandis que la tonne du foin revient depuis trente-fix jufqu’à {oi- xante liv., & celle de paille à dix-huit liv. , & cer- tainement 1l s’en faut bien qu’une tonne de foin nourrifle autant de beftiaux que dix-huit tonnes de ces racines. | I y a un autre calcul qu’il peut être aufh avan- tageux d'établir, c’eft pour prouver au cultivateur ce qu'il doit acheter d'animaux maigres fuivant fes récoltes. | Par exemple, un acre ayant produit tant de ton- nes de turneps , on a engraïflé des beftiaux qui avoient coûté tant, on a réduit cela en une table, d'après le produit de quatre années différentes. tonnes. beftiaux achetés. La première , l’acre 2 }.". 32.00. 399 OCTOBRE. 253 tonnes. beftiaux achetés, | Ci-contre, . . . 300 lv. Pnde, =. : 2.1... 4700 ER téoeme., x... .1.120.17F0708 Eqtheme, 0 400.48 1 01 4008 2022 L’acre à rendu l’un portant l’autre , trente-cinq tonnes. Il y a eu des befliaux par tonne , pour . 131. 1of. Et il y en-.a eu par acre , . . sos 10 Ceux qui n’ont jamais fait ces expériences, trou- veront ces produits bien forts, ou pour s’expliquer plus clairement , trouveront qu’il y a eu pour bien de l’argent de bétail , en rapport avec le terrein; mais 1l faut confidérer que ces. animaux n’ont pas été. à l’engrais depuis le mois de Septembre juf- qu’au mois d'Avril, pratique qui n’eft même pas la meilleure ; car fi on commence à confommer trop tôt les turneps, ou qu’on veuille les, prolon- ger trop loin, on les fait manger trop verds, ou lorfqu'ils font déja montés à graine, ce qui eft éga- lement nuifible aux animaux. D'ailleurs , chacun fe conduit fuivant fes facul- 254) OCTOBRÉ. tés, & un fermier qui n’aura que cent louis à mettre en beftiaux, ne peut en mettre deux cens. D'après les réflexions que nous venons de faire , on peut calculer fur quinze louis de beftiaux par acre, l’un portant l’autre; ainfi , un fermier qui a cent vingt acres de terres, divifés dans l’ordre qui fuit : un quart en turneps , un en orge, un en trefle & un en bled, fur fes trente acres de turneps , il en deftine- ra cinq à fon troupeau , & faura qu’il faut qu’il ait pour neuf cens liv. de bêtes maigres pour confommer le refte. On voit par là qu’un fermier qui n’a pas quelques avances ne peut entreprendre ce com- merce (1), & que l’aifance eft néceflairé à tout homme qui veut entreprendre une exploitation ; car fi un fermier ne peut fuivre la marche que nous venons de prefcrire , faute de moyens, que fera-t-1l obligé de fi turneps , &t de retomber dans l’ancien abus de laïfler fes terres en Jachères, ce qui depuis nom- bre d’années a été reconnu préjudiciable à Pagri- culture ; il ne fera prefque plus de trefles, ou ils : feront de moindre qualité , fuccédant à une ré- colte de grain: n’ayant prefque pas de fourrage, re ? de ne plus cultiver de (1) J'ai traduit cet article, non que je le croïe utile à nos cultivateurs , mais pour faire voir la richefle des fermiers Anglois. OGeTorRKR 255 il fera obligé de diminuer fes beftiaux ; il n'aura plus d'engrais, & ne tendra direétement qu'à fa ruine ; il profiteroit encore davantage en culti- vant des turneps , ne fut-ce que pour y mettre fon troupeau, e 256 Lu NOVEMBRE. De la Cour de la Ferme, ÿ bles JE ne pourrai que renouveller ici les recomman= dations que j'ai faites le mois dernier au fermier, fur le foin de fes beftiaux à la cour ; plus on avance dans la mauvaife faifon , plus ils deman- dent à être foignés. On peut employer le chaume, la bruyère pour épargner la paille; le principal étant qu'ils aient toujours de la litière neuve, & que les animaux ne puiffent jamais s’enfoncer dans la terre de la cour , ou fur celle des compots, qu’ils emporteroiïent avec leurs pieds. À mefure que l’on voit le fumier pourrir , il faut le recouvrir ; on peut économifer en prenant celui qui fort de deffous les chevaux , & que l’on met avant fous les autres befliaux , après en avoir bien fecoué le crotin. Du Barrage. Sitôt que les beffiaux font rentrés à l’étable, les batteurs doivent être mis à l'ouvrage, pour pou- Voir NOVEMBRE 259 Voir leur fourmr de la paille fraiche tous les jours ; il faut pour cela que le nombre des ani- maux foit proportionné avec la quantité de paille que l’on a récoltée, & il faut aufli ne mettre que le nombre de batteurs néceflaires , pour qu'il y ait des litières jufqu’au printems , furtout fi l’on n’eft pas à portée d’une ville pour en acheter quand on en manquera. Des Clôtures. Voici le premier mois pour faire les haies & les foflés ; lorfqu’une fois on a mis fes clôtures en bon état, ce qui doit toujours fe faire les trois premières années du bail ; le mieux eft de divifer tout ce que l’on a de haies, en douze parties éga- les , & d'en entretenir toujours un douzième par an. La meilleure manière de faire les haies, eft de les entrelacer comme des claies, entre des pieux que lon plante fur le fommet du foffé ; on entre lace du bois fec entre, & on plante du plant d’é- pine blanche au pied ; cet ouvrage que beaucoup de fermiers négligent ; ne faifant que ce que porte exactement leur bail, eft fort important; car fans cela, fi vos clôtures ne font pas bien entretenues, votre bétail courra çà & là parmi vos emblas R 258 NOVEMBRE ves ,; & fouvent dans celles des voifins , on en- trera dans des herbages qu'ils gâteront, fans comp- ter qu'ileft certain qu'il y en a qui feroient périr tout un troupeau, s'ils y entroient. Aufli tout fermier intelligent ne néghgera pas cet objet important , &t gardera toujours une cer- taine fomme d'argent pour cela, dont au furplus il aura calculé la valeur en paffant fon bail. Il faut recreufer & fouvent curer les foflés , fans quoi les haies ñe deviennent plus d'aucune utilité, & font promptement abimées par les beftiaux; il faut aufi avoir foin que les maitres tirés dans les terres aboutiffent dans les foflés, dont la berge, à cet effit , doit avoir une ouverture pour les re- cevoir , & en même tems ces foffés , quand ils peuvent contenir, l’eau, font d’une très-grande uti- lité pour mener les eaux flagnantes dans des par ties trop feches; tous ces procédés font détaillés parfaitement dans l’extrait fuivant, tiré d’un auteur moderne fort célebre. Obférvations génerales. La clôture des héritages eft un des points les plus effentiels d'agriculture , & les fermiers qui ont des terres enclofes, en tirent bien plus que ceux qui cultivent en champs ouverts , & ont bien moins A NOVEMBRE. 259 de foins & d’embarras ; ils entretiendront une harde de cochons , un troupeau de moutons , une bande de vaches, & un attelage de chevaux, dans un petit herbage de trefle, entouré de cent acres de bled , fans courir aucun rifque , & fans avoir be- foin de perfonne pour les garder ; il ne s’agit que d’avoir des défenfes folides autour , & bien entre- tenues. Les foffés , dans la province de Suffolk, où j’ha- bite, font faits parfaitement ; on y plante une fim- ple haie fur le bord, avec une haie feche der- rière, qui ne dure pas un hiver entier ; elle tom- be, on la vole, les animaux rongent le plant qui meurt , & voilà la dépenfe perdue. Cet inconvénient peut fe parer en faifant des haies entrelacées comme des claies, qui font très= folides , furtout fi on fait des pieux en faules ou en peupliers qui reprennent en terre, & font pref- que une feconde haie vive; elles n’ont pas le dan- ger d’être écrafées l’hiver par le poids de la neige, lorfqu’une fois la haie vive ef pouflée à une cer- taine hauteur. é "Et le bois qui en fort, on l’entrelace dans le pied pour boucher les trous, on plante de nou- veaux pieux vifs vis-a-vis la haïe feche qui de- vient alors inutile, & ces clôtures font après cela impénétrables à toutes fortes d'animaux. Une manière encore plus füre de s’enclorre, qui À j 360 NOVEMBRE, eft un peu plus difpendieufe | mais dont on tire bien le profit par la fuite, eft de faire un double foffé avec une banquette au milieu, fur le haut de laquelle on plante la haie vive , & derrière, la haie en claie dont j'ai parlé, mais toujours avec des pieux de faules on de peupliers. Mais après avoir blâmé les haies fèches ordinaires de notre pays , je ne puis m’empêcher de vanter lu- fage de faire les foflés dont la berge de dedans eft prefque droite , & celle de déhors aflez en pente, pour que les befliaux puiffent venir paître jufqu’au bas, fans pouvoir remonter fur l’autre ; la berge la plus droite doit, pour bien faire , être gazonnée pour empêcher les terres de s’ébouler ; plus les ter- reins font humides , plus on doit faire les foflés creux, pour deffécher les terres : on n’eft jamais embarraflé de ce qui en fort, en les portant à la maifon, on en fait de bons compots , & on ne peut en avoir trop. Plufieurs auteurs ont traité des clôtures , fans entrer dans ces divers détails , & furtout fans en- trer dans le calcul de la dépénfe , ce que je trouve important de mettre fous les yeux du cultiva- teur. Le plan ci-joint repréfente une ferme d’un mille en quarré, contenant par conféquent fix cens qua- rante acres , divifés en feize enclos de quarante acres chacun ; par conféquent , il y a dix mille toi- NOVEMBRE. 261 fes de foflés & de haies : je vais préfenter la dé- penfe première de cette clôture pour un proprié- taire ou un ferimier qui aura un long bail ; & après, je ferai le relevé de toutes les dépenfes néceffai- res , pour bien entretenir cette défenfe aprés fa première conftruétion, M D 0e Rs RAD AO os # ps + % # . # * + RARE RANRNAK nee MEN MAO : # * * ES # £ Ê 5 * F4 + % # ARE HORÉRROONE HAE AARÉDEX RE Ÿ & x # x * * # X È * * # # & M + + pa Fa BAMERX REINE HAÉRX Rene tax KR # # % * * # # * # : $ * RMI A IE RATE OI DE COS Je fuppofe donc ce quarré d’un mille, avec un foffé de fix pieds de large par le haut, cinq de creux , réduit à rien dans le fond , pour lenclios du tour avec une haie de fureau , de bons pieux de boïs vif, cette dépenfe coûtera cent huit fous R ii 262 NOVEMBRE. la perche , fans compter quatre francs pour une haie feche entrelacée, fon en veut une, & douze fous de plus par perche , fi la haie ef garnie d’é- pines, ce qui reviendroit alors tout compris à fix francs fans la haie feche, Les foflés de travers dans cet enclos, comme il eft figuré ci-deffus, n’ont befoin que d’avoir quatre pieds d'ouverture, & trois de profondeur , ils reviendront , avec une haie d’épines blanches, feulement plantée fur la berge , & une haie en fureau en bas de çes pieux de faule, à quatre liv. dix fous, | Il faudra feize barrières d’entrée, qui , bien con- ditionnées en bois de chêne, avec des traverfes, deux gros poteaux, & bien ferrés, reviendront dans notre comté à un louis piece. Il faudra à chaque entrée, une petite arche en brique fur le foflé, pour l'écoulement des eaux, enfin à tous les angles où les foflés fe rejoignent, où il faut, pour bien faire , des paliffades en bois pour empêcher les beftiaux de defcendre dans le foflé , & il en faut de pareilles à côté des poteaux des barrières pour empêcher que l’on ne pañle à l'extrêmyté de chacune. Récapitulation. Un mille, ou trois cens vingt perches de tour NOVEMBRE. 263 du liidarperche, ., Mat 01920 lv, Les foffés des enclos intérieurs , deux mille huit cens quatre-vingt perches à quatre liv. dix fous, . . . . 12960 \ Seize portes à un louis piece, . . 384 Seize archés à vingtfix francs, . . 416 Palffades pour les portes , à cent fols, 140 Vingt-une places aux angles , paliffadées TNT ENRONRNNENENNECRRRERR 15989 ÿ LE ou. 7, Ce qui fait par acre , à raïfon de 640, a-peu- près la fomme de 25 lv. 19 fous. Par ce calcul, on voit qu'avec environ un louis par acre, on aura de bons enclos dans lefqugls on pourra faire telle culture qu’on voudra ; cela dif- penfera même un propriétaire de mettre dans le bail, qu'on ne pourra abandonner les bêtes à lai- nes dans une terre, dont les clôtures n’ont pas neuf ans, ce que l’on fait fouvent pour empêcher que ces animaux ne mangent les haies vives. . Auellement, il faut calculer ce qu'il en coûtera pour réparer ces haies au bout de quatre à cinq ans , ce qui eft la feule chofe qui puifle être à la charge du fermier; car la première dépenfe doit R iv 264 NOVEMBRE, regarder le propriétaire , à moins que le prix du bail n’ait été fait en conféquence ; cette opéra- tion confifte à remplacer tous les pieux qui font morts, Caflés ou pourris , & remplacer le bois de la haie en bois neuf; & on fait fagoter & mener à la maïfon celui qui eft hors de fervice pour brû- ler. Cette dépenfe feroit bien plus confidérable, f les pieux n’étoient pas de faules ,| de peupliers ou d’autres bois vifs ; car ceux que l’on met en terre, & qui ne reprennent pas , pourriflent promptement. Des Bordures. Les bordures , dans les cantons où les enclos font petits , prennent fouvent la dixième ou dou- zième partie de la ferme ; mais dans les grandes exploitations , c’eft encore plus confidérable : néan- moins elles ne doivent contenir que la largeur né- ceffaire, pour que les chevaux en labourant puifs {ent tourner fans faire de fourrières. Elles doivent être aufli unies que les autres prés de la ferme, & bien nettoyées de chardons, de ronces , d’épi- nes, & d’autres plantes nuifibles , que les haies pro- duiroient , fi on n’avoit pas cette attention ; ce qui | ne feroit, de ces portions de terre ; que du terrein perdu ; cette opération doit fe faire toutes les fois que l’on répare les haies; il faut alors avoir grand foin de bien ramafler toutes les élagures , bien ré- NOVEMBRE. . 26$ pandre egalement les anciennes buttes, s’il y en a, ainfi que la terre fortie des foflés , fi on les a cu- rés. Pour la pente, il faut qu’elle foit bien égale , afin que les eaux des maîtres puiffent tomber dans le foflé. Lorfuw’on a curé les foflés , on peut ra- mañler les terres en un tas, s’il y en a beaucoup, pour les mener l’hiver fur les prés , ou en faire des compots , ou enfin la mêler avec de la chaux, & la répandre dans le champ même. La chaux mêlée de la forte a un grand avantage ; c’eft qu’elle détruit toutes les racines des mauvaifes plantes qui {e trouveroient mêlées dans ces terres, & les réduit en un fimple engrais végétal. Tout ce qui vient d’être recommandé ci-deflus, eft de la plus grande utilité, & ne peut être que très-profitable au fermier ; cela lui donne de bonne herbe, au lieu de mauvaife ; cela deffeche fa terre, fi elle en a befoin , & lui fournit un bon engrais; auf ne pouvons-nous trop recommander aux cul- tivateurs de s’y conformer. Du Parcage. Si ce mois-ci eft pluvieux , il eft tems de ceffer de parquer dans les terres humides ; le fermier doit alors mettre fon parc fur des terres feches & fablonneufes , ou fur les prairies artificielles qu’il 266 : NOVEMBRE. veut détruire l’année fuivante; ce dernier parcage eft excellent pour lhiver, car les pluies qui enter- rent fréquemment le fumier de brebis, l'empêche de brûler lherbe; ce qui arrive lorfque l’on par- que ces terreins l'été, & leur fait tort pour la coupe qui précéde le défrichement. Il y a quelques fer- miers entêtés qui ont voulu fe récrier contre Pu- fage de parquer tout l’hiver ; mais l'expérience prouve bien aëtuellement que cela n’a nul incon- vénient, ni pour le troupeau, ni pour le terrein ; en fe conformant à ce que nous venons de dire, la plus grande partie des gentilshommes & des fer- miers de nos provinces le pratiquent ainfi depuis plufieurs années, & s’en trouvent très-bien. C’eft auffi le moment de parquer les pâtures où l’on voit de la mouffle; rien ne la détruit mieux que cet engrais ; l'urine de brebis lui eft plus contraire que tout autre fumier, Des Chevaux. Voici un mois fâcheux pour ces animaux chez les mauvais fermiers ; car après les forts ouvrages de l’automne , ils les réduifent fouvent à une nour- riture maigre & infufhfante : mais ceux qui les nourriflent bien en font amplement dédommagés par le travail qu’ils en retirent. Il en eft de toute NOVE M BRIE. 267 æfpece pour ce mois-ci. Sur les terreins légers on peut conduire la marne, la chaux ou la glaife tout l'hiver; & dans les terreins humides on peut me- nér toutes fortes d’engrais fur les herbages , pourvu que lon ait des tombereaux ou charrettes .bafles avec des roues à jantes larges de neuf pouces , qui ne font jamais d’ornières. Si la fituation du terrein ne permet pas d’occu- per toujours les chevaux à ces fortes d'ouvrages, on peut les employer à mener les denrées de la récolte aux marchés voifins, & ramener en re- venant, du fumier, ce qui eft une excellente fpé- culation. On trouve dans les villes des engrais de toutes efpeces , des fumiers de chevaux , de porcs, de pigeons, &c.; des cendres de charbon, de la fuie , du marc de cidre ou de bierre , des cu- rures de latrines , & généralement toutes efpeces d’immondices, qui, amoncelées en un tas Phiver , près la ferme , donnent de quoi faire, lorfqu'ils font confommés , d’excellens compots. Rien n’eft plus avantageux qu’une pareille pratique , & rien cependant n’eft plus négligé par les fermiers , que la dépenfe effraie , & qui n’entendent pas leur propre intérêt , puilqu’il eft prouvé que le profit les dédommageroit amplement des frais. 268 NOVEMBRE. Des Defféchemens. Voici le moment de creufer ou de rafraichir les vidanges faites dans les terres ou prés hu- mides , fi on en a dans la ferme; car fans cela il eft inutile d’en louer ou d’en cultiver : ce feroit des dépenfes ou des femences perdues , que de fumer des terres avant de les avoir defléchées ; c’eft vouloir ne tirer que cinq pour cent de fon argent , quand on en. peut tirer cinquante, Il faut commencer par entourer ces fortes de terreins d’un bon foflé, dont on ne laïfle pas la moindre terre fur les bords intérieurs, afin que l'eau y tombe aifément , on fait enfuite des rigo- les dans le champ , de tous les fens , fuivant la pente , pour amener les eaux dans ce grand fofé. On à imaginé en Angleterre depuis quelques années deux ou trois efpeces de charrues , avec lefquelles on peut faire kes rigoles bien plus vite, & à bien moins de frais qu’à la bêche , il y a quatre cinquièmes à gagner , & l’ouvrage eft aufh bien fait. Un fermier qui a beaucoup de terres à deffécher , ne doit pas héfiter d’acheter une de ces charrues. On proportionne le nombre de ces rigoles au plus ou moins d'humidité du fol; il les faut quelquefois à deux perches de diflance , même NOVEMBRE. 269: à une, fi le fonds efl très-marécageux. Dans les herbages on doit recouvrir ces vidanges, après les avoir comblées avec des pierrailles , des briques ou des fagots d’épines , pour que les eaux pañfent deflous ; on y pofe enfuite des gazons renverfés ; & l’on reffeme enfuite de l’herbe fur la fuperficie du terre; cette pratique eft très-importante, & l’on en eft fouvent rembourfé par la récolte de la première année. É Des Bois. Voici la faifon de couper les bois dans une fer: me, fi on en a; mais en général , ils ne font pas confidérables dans ce royaume : & même dans les provinces où il y en a, le fermier fera bien de n’en louer que ce qui lui eft néceffaire pour fon ufage, car c’eft ordinairement un genre de fpécu- lation qui ne leur réuflit pas. Cela leur prend trop de tems & trop d'argent pour les premières avan- ces ; 1l vaut beaucoup mieux qu'ils emploient leurs fonds à augmenter leurs troupeaux, à acheter des beftiaux pour engraïfler, ou à conduire des engrais fur les terres. Si cependant un cultivateur eft forcé de pren- dre les bois avec la ferme, ou quil en foit pro- priétaire , 1l doit donner toute fon attention à faire 270 NOVEMBRE, exploiter fon bois de la manière la dd avanta= geufe fuivant la fituation, | Le meilleur parti à tirer des‘bois dans ce royau- me, où on n’en brûle pas communément , c’eft de faire des échalats pour le houblon, qui ont douze pieds de haut, des cercles pour les tonneaux , dans les provinces où on fait de la bierre ou du cidre; des claies, des pieux pour les clôtures , des fagots ou du bois de charronnage, s’il s’en trouve. Mais malgré tout cela, je confeillerai encore à tout bon cultivateur de vendre par préférence fon bois fur pied , s’il en trouve loccafion. Les frais de tranf- port emporteroient tout le profit & ruineroiïent les chevaux, fans compter le tems que cela emplore- roit , tandis que fa furveillance feroit très-utile dans: au autre endroit, De la Pimprenelle. C'eft un mauvais ufage de beaucoup de fer- miers, de continuer dans cette faifon de laïfler aller leurs beftiaux dans ces fortes d’herbages. C’eft une fort mauvaife pratique , furtout fi le terrein eft humide, ou les tems pluvieux, cela détruit la racine de cette plante; il ne faut jamais y laïffer aller aucune efpece de beftiaux l’hiver , & alors l'herbe poufle mieux , & forme une excellente pà- ture pour le printems, NOVEMBRE, 277 Des Clôtures en Pierres, Dans les mauvais terreins très-pierreux, la clô- ture ordinaire eft une muraille de pierre fort épaifle que lon forme avec les pierres que l’on tire du champ ; voici la faifon de faire cet ouvrage, la pierre blanche ou pierre à chaux, eft celle qui s'emploie la mieux pour ce genre d’ouvrage , fe coupant plus aïfément ; c’eft une très-bonne opé- ration que d’épierrer ainfi les terres : non-feulement cela fert pour les clôtures, mais pour les répara- tions de la ferme , & la terre ne s’en trouve que meilleure après. Si les pierres ne font pas plates, il eft néceffaire de faire les murailles beaucoup plus larges du bas que du haut; on les fait ordinaire- ment en pierre feche , ou avec du mortier de terre. Cet ouvrage peut fe faire tout l’hiver , & fe paie à tant la perche ; c’eft en général une mauvaife clôture, qu’on ne doit employer que quand le terrem vous y force. Des Fourmillières. C’eft le mois de détruire les fourmillières & les taupinières ; on a inventé depuis peu une char- 272 NOVEMEBRE. rue qui coupe & renverfe parfaitement ces buttes ; on emporte enfuite les fourmillières dans une voi- ture , pour qu’elles ne fe repeuplent pas. Il eft cer- tain que cela abrége de beaucoup l’ouvrage ; mais je connois une méthode ufitée par plufeurs fer- mier , qui me paroît préférable; c’eft de creufer à la bèche un grand trou large d’entrée, & profond dans le milieu de la fourmillière, & de laïfler en- fuite comme cela, tout l’hiver , les gazons retour- nés, pour que l’eau puifle s’y introduire &t noyer les fourmis. On évite par là l'embarras de les en- lever , & de favoir où les mettre. Au printems on releve les terres, & on régale le terrein en remet- tant les gazons deflus ; l'herbe repoufle, & :l n’en paroïît rien à la pâture; cette opération eft peu coûteufe , on peut la faire pout dix à douze fous du cent de buttes, fans cela on perd beaucoup d'herbes ; & un fermier intelligent ne regardera pas à cette dépenfe, d'autant qu’elle fera du nom- bre de celles qu’il aura calculées en louant fa ferme. Ceux qui ne fe conduifent pas ainfi n’y entendent rien ; 1l y a en agriculture plufieurs dépenfes fem- blables , pour lefquelles il eft abfolument néceflaire d'avoir quelques fonds d'avance ,; comme pour le commerce. | Des NOVEMBRE, 173 Des Pois. Dans les terreins fecs on feme ce mois-ci ce qu’on appelle les pois à cochons, qui réfiftent aux plus fortes gelées, & font bien plus hâtifs l’année d'avant que ceux femés au printems ; il faut en femer quatre à cinq boifleaux l’arpent , fur un chaume de bled; & les enterrer à la charrue, fans hierfer après, mais ayant foin de faire des maîtres pour écouler les eaux. Du Débit des Bois. Je ne parle pas de cet article, comme objét de fpéculation ; les mêmes réflexions fe préfentant que pour les taillis, inais feulement parce que, dans là plupart des baux, il eft permis aux fer- miers de couper, dans les arbres épars de la fer- me, ce qui lui eft néceffaire pour l'entretien de fes charrues , charrettes & clôtures. Il ne doit pas en abufer ; fi fon attirail eft bien monté en en: trant , il ne doit que l’entfetenir pour lavoir de même en fortant. Voici en conféquence le tems de couper les ormes & les frênes , pour les em- ployer l’année fuivante feulement, On a une pe- tite cour particulière, avec un hangar où les ou- S 274 NOVEMBRE. vriers débitent les bois ; il ne faut furtout jamais lemployer verd. Du Troupeau. Les brebis & agneaux doivent encore trouver à fe bien nourrir ce mois-ci dans les pâtures, mais les, moutons que l’on veut engraïfler, doivent être ramenés à la bergerie à préfent, & nourris aux turneps & enfuite aux choux; 1l faut qu’ils en man- gent à difcrétion , mais prendre garde qu’il ne s'en gâte une partie, C’eft le fujet de la diverfité des opinions de différens fermiers dont nous avons déja parlé; les uns veulent mettre le troupeau dans le champ même pour y manger les turneps, & éviter par-là la dépenfe du tranfport; d’autres préfèrent de faire mener ces racines fur une pà- ture bien féche, où on les donne au troupeau. Je dirai à cela que fi le terrein eft fec ou fà- blonneux , il n’y a pas le moindre inconvénient à faire pâturer les turneps dans les champs, ayant furtout l'attention d'y conduire les bêtes maigres, après que les moutons gras y ont pañlé pour man- ger ce que ces derniers n’ont pas voulu ; ‘cette mé- thode que peu de fermiers connoïflent, eft très- avantageufe & mérite d’être recommandée ; car en général l’engrais des moutons eft un des points Pen. NOVEMBER. 27S les plus importans en agriculture. Comme il eft ef- fentiel que les moutons à l’engrais mangent con- tinuellement , il eft eflentiel d’avoir dans le champ de navets, quelques rateliérs toujours” pleins de foin , pour varier leurs nourritures de tems en tems, I y a même des fermiers qui leur donnent dans des auges, du fon ou de la farine de méteil & d'orge. Ces nourritures feches ne peuvent faire que beaucoup de bien , entremélées avec celle des tur- neps , qui eft bien fraiche. La paille & le foin ha- chés font aufhl\ une très-bonne nourriture à don- ner avec des turneps , & moins coûteufe que le grain ; au refle , je ne donne cela que comme confeil, car j'ai vu des troupeaux nourris parfaite- ment avec des turneps feulement. Il y à encore une obfervation trés-importante à faire fur l’engrais des moutons d'hiver, c’eft que les meilleurs mois pour les vendre font Avril & Mai, parce que le mouton vaut un où deux fous par livre de plus. C’eft pourquoi un fermier pru- dent doit fe précautionner de nourriture , pour quand les turneps ne valent plus rien, ce qui ar- rive le 15 Mars, environ , d’autant que c’eft ie mo ment alors de retourner la terre pour femer l’or- ge, & quand on ne le voudroit pas, ils montent à graine à cette époque , & ne valent plus rien, Les grands choux d’Ecofle , font la meilleuts plante à faire fuccéder aux turneps , parceque les Si 276 NOVEMBRE. plus fortes gelées leur font abfolument indifféren- tes, ainfi qu'aux choux-navets, &t les moutons font très-friands de ces deux efpeces ; le produit en ef immenfe , & ils fe confervent jufqu’à la mi-Maï, que vous vendez vos moutons, gras, & que vous commencez à avoir de l’herbe pour les autres; cette pratique eft une des meilleures que l’on puifle fuivre. Dans les terres fortes bien cultivées & fumées, le ray-graff & le trefle commenceront auffi à don- ner , vers la mi-Avril, de quoi nourrir les beftiaux ; mais c’eft d’un fi petit rapport , que cinq arpens de ces fourrages n’en vaudront pas un de choux dans cette faifon. Il ef vrai que, pour que ces ra- cines réufliffent bien , il faut que la terre foit par- faitement bien fumée & cultivée , alors le produit fera certain , mais fans cela la récolte fuivante s'en reflentiroit; car vos choux vous conduifant jufqu'à la mi-Mai, les orges ne réufhiroient pas bien après , fi le terrein n’avoit pas été bien en- graifié. Des Feves. Voilà une excellente faifon pour planter les fe- ves qui feront par ce moyen bonnes à houer en Mars ; le fameux agriculteur Yong entre à cet égard dans de grands détails que nous allons rapporter ici. NOVEMBRE. 277 Le tableau de comparaïfon que j'ai fait, dit-il, de treize années de récoltes confécutives , de feves femées en rayons, & houées à la petite charrue, a donné un produit de trois quartes fept boifleaux trois picotins , ce qui peut porter le profit d’un acre, tous frais prélevés; à trois louis par an, & qui doit déterminer à fuivre par préférence cette méthode à celle de femer à la volée. Depuis nombre d’années , plufieurs écrivains ont infiniment vanté cette nouvelle méthode de cultu- re , & l’ont étendue à tous les grains, bleds, orge, avoine ; ils ont cité à cet égard une infinité d’e- xemples & d'expériences, je les ai toutes recueil- lies, dit toujours M. Yong , & ai moi-même voulu les répéter |, me méfiant de la prévention de tous les écrits qui ont paru alors, où chacun difoit c’eft exécrable , ou c’eft admirable, fans aucune admif- fion de partage. Ils ne peuvent pas condamner cette méthode pour une culture , fans la condamner pour toutes; je ne fuis pas fi partial , & je me ferai un de- voir d'inftruire le public, que d’après mes expé- riences , elle m’a parfaitement bien réufli fur les fe- ves , médiocrement pour le bled & les pois, & fort mal pour l'orge ou lavoine, Le réfultat ci-deffus, de mes expériences fur les feves, ne me laïfle plus de doute fur la bonté de cette mamère de les cultiver, du moins fur des Si 278 NOVÉMBRE. terres fortes comme les miennes, où un produit de trois louis par acre me paroïît fort confidérable. Jé connois de mes voifins qui ont des terres grafles excellentes , fur lefquelles on doit faire de bien plus belles récoltes. Je trouve que dans mes terres, le rapport d’un acre de feves cultivé ainfi, excéde celn de mes meilleurs bleds. Il doit paroïtre bien fufhfant de tirer un pareil profit d’une terre qui devroit être en jachère , & qui n’en produira qu’un plus beau led après, ayant été fréquemment remuéé, TE ET mme N. B. On a cru inutile de rapporter ici le eal- cul des treize années , le réfultat eft le principal, & le refte fuperflu. , D en . 249 DÉCEMBRE. DIU 5 BIANT' T'A/GIE Voie: le mois où l’on doit commencer! à faire battre les grains , fans difcontinuer tout hiver, pour que les befliaux ne manquent pas de paille, Les fermiers intelligens qui engraiflent des beftiaux commencent toujours par faire battre la plus mau- vaife paille , pour qu’en avançant dans l'hiver, les befhaux en trouvent journellement de meiïlleures. Par exemple, la paille de bled étant la plus mau vaife , on doit commencer par là; enfuite l’avoi- ne, l'orge, & enfin, l’avoine ou l'orge, avec la- quelle il y aura eu du trefle de fémé, qui ef la meilleure de toutes, & préférable au foin pour tous les beftiaux. Les fermiers ne peuvent mettre trop de foin à bien choifir leurs batteurs, car fi ces gens ne font pas honnêtes ou adroits , 1ls y perdront beaucoup; ils ne battront pas à fond, laifleront du bled dans la paille, ou s'ils veulent en einporter , ils en met- tront journellement dans leurs poches, aux heures de leurs repas, ou en cacheront dans des trous à S 1v 80 « DÉCEMBRE, portée de la grange, où ils viendront la nuit les chercher ; le bled eft auffi tentant à voler pour ces gens-la, que l'argent. La parefle parmi ces gens n’eft pas moins nui- fible aux cultivateurs ; car il y en a qui ne don- nent que deux ou trois coups de fleau fur chaque gerbe pour avoir le plus facile, & laïflent, par ce moyen, la moitié du grain dans la paille ; c’eft une perte immenfe pour le fermier , s’il ne veille fes batteurs de près , s’il n’examine pas la paille ayant qu'elle entre dans les rateliers. C’eft au point que dans une ferme très-confidérable , je confeillerois au fermier d’avoir un homme occupé uniquement à veiller les batteurs , 1l le regagneroit bien à la fin de lannée. L'importance de ces détails, la fatigue de cet ouvrage pour les hommes, qui même eft mal-fain, fait bien regretter qu’on n’ait pas pouflé plus loin les recherches que l’on a faites, pour trouver une machine pour battre les grains. Il a été préfenté ä la Société de Londres, un moulin à cet effet, dont on a fait l’effai en grand; mais cette machine étant revenue à fept ou huit cens louis, eft au- deflous des facultés d'aucun fermier , & n’a pas rempli le but. Il feroit bien à defirer que cette So- ciété, qui eft animée de fentimens fi patriotiques , faffe de nouvelles recherches à cet égard, & ex- ok eee DÉCEMBRE. +25 cite l'émulation des méchaniciens , pour trouver une machine fi utile à l’humanité, De la Cour de la Ferme. On doit continuer tout ce mois-ci les mêmes attentions pour le travail intérieur de la cour, & la diftribution journalière des fourrages ; fi le fer- mier n’y a pas perpétuellement l’œil , les domefti- ques, par négligence , lui feront perdre la moitié de fes pailles : le chaume de bled, la bruyère, la paille fourragée , doivent être feuls employés à la litière , & on doit garder la paille fraiche pour les beftiaux. Dès qu'il a plu un peu abondam- ment, on doit renouveller la litière de la cour, pour que les beftiaux foient toujours couchés fé- chement, Les étables & les écuries doivent être curées fréquemment , & les fumiers bien répandus dans la cour, & arrofés tous les jours avec les urines qui fortent des étables, & qui doivent être raffemblées dans un puifard à une extrémité de la cour ; on doit de même en couvrir les fumiers chaque fois que l’on y répand des terres deflus pour former des compots, cela fe fait très-facile- ment avec une petite pompe faite exprès, qui ef a côté du puifard, & qui arrofe parfaitement ; on s'en fert de même pour tirer de l’eau des puits 74 DÉCEMBRE. pour larrofement des jardins ; tous ces foins font fort effentiels pour multiplier les engrais. Des Chevaux. Comme on ne peut guere fonger à faire des labours ce mois-ci, & que même il y auroit de l'inconvénient à labourer la plus grande partie des terres, on ne peut occuper les chevaux qu’au char- roi des engrais de toute efpece , fur les herbages, comme nous l’avons déja recommandé ci-devant. On peut cependant commencer à défricher les terres précédemment en herbages , & c’eft même le bon tems pour cet ouvrage; car fi la terre étoit feche on ne pourroit y réufhr, & d’ailleurs fi l’on attendoit au printems, les gazons retournés n’au- roient pas le tems de pourrir. On ne doit défricher un herbage que lorfque lon voit l'herbe femée dépérir, &t la fuperfcie couverte de moufle, il y a alors bien plus d’avan- tage d'y mettre la charrue, & d’y faire trois ou quatre bonnes récoltes de grains, pour les remet- tre en pâturages après. Les avis font bien partagés fur l’efpece de grains à femer dans ces défrichemens , les uns commen- cent par l’avoine blanche , d’autres par la noire, d’autres y mettent des pois à cochons; 1l ne peut DÉCEMBRE: 283 y avoir de regles fûres là-deflus , c’eft felon la qualité du fol, & le fermier intelligent fait mieux que perfonne ce qui convient à fon terrein, Des Fumiers. S'il gele , on doit en profiter pour conduire les fumiers de cour & les compots fur les terres def- tinées à porter de l’orge ou des turneps; car par le tems humide on ne peut aller que dans les her- bages; on doit laifler les fumiers en grand tas dans le champ, & ne le répandre qu’au moment de la- bourer , pour que les pluies de l’hiver ne détrui- fent pas la puiffance végétative dans les terres argilleufes de l’Angleterre. Les cultivateurs ont une fort bonne méthode l'hiver , ils profitent des ge- lées pour conduire du fumier tel qu'il fort des éta- bles , fur les bordures des champs qu’ils veulent engraifler , & ils en forment à mefure des com- pots avec les terres qui fortent des foflés que l’on a curés, ils les laiflent enfuite bien confommer, }& ne les menent dans la terre qu’au printems ; ils fement enfuite du trefle dans l'orge après qu’il eft levé , pour l'empêcher de faire tort au grain: l’année fuivante , ils font deux bonnes coupes de ce trefle, & y fement du bled l’automne fur une façon qui y réuflit parfaitement , à caufe de l’en- 284 DÉCEMBRE. grais que la terre a reçu l’année précédente. Cette méthode eft excellente , & ces terres rapportent fept à huit quartes par acre, Du Troupeau. Comme dans ce mois-ci on peut commencer à avoir des agneaux, on doit redoubler de foins pour les brebis, & ne les pas laïfler manquer de nourriture. Lorfqu’elles ont agnelé , elles doivent avoir des choux & turneps abondamment, &t même du fom dans les crêches aux champs ; les choux ont un très-grand avantage , c’eft que tel fort qu'il gele, on peut toujours les couper, lorfque lon ne peut plus arracher des turneps. Lorfque le tems eft très-mauvais , on fera bien de rentrer les agneaux dans la cour où font les meules, & d’y tranfpor- ter les crêches ou rateliers pour leur donner leur manger fec. Il y a des fermiers qui, dans le tems des neiges , rentrent leurs agneaux dans leurs gran- ges , mais c’eft une mauvaife méthode; il vaut mieux avoir un hangar dans la cour dont nous venons de parler, fous lequel ils pourront manger ; ils y feront plus fainement, & vous donneront une plus grande quantité d’excellent fumier, pourvu que la litière ne leur manque jamais , cela fera l'effet d'un parc , fi on a eu la précaution l’au- DÉCEMBRE, 28$ tomne, de garnir cette cour fous la litière, d’un lit de marne, ou de gazon provenant de foflés ra- fraîchis ; le tout étant bien confommé fera un ex- cellent engrais, Des Vaches. Il faut bien obferver dans cette faifon les va- ches qui font prêtes à vêler, & les retirer trois femaines d'avance d’avec les autres qui ne man- gent que de la paille , & les bien nourrir avec les choux , les turneps & du foin , comme le jeune bétail, & dès qu’elles ont vêlé , il faut les nourrir aufh bien que les bêtes à l’engrais. Des Porcs. Voilà la faifon de faire le meilleur profit de ces animaux, pour le fumier qui eft le principal, il faut avoir bien fom que les truies, & furtout celles qui ont des porcs de lait, foient amplement four- nies de litière , & toujours tenues bien proprement, ce qui fe voit au luifant de leur peau; les porcs que l’on veut engraïfler doivent aufli avoir tou- jours de la nourriture devant eux: fans ces atten- 286 NOVEMBR#*, tions on perd beaucoup fur ces animaux, & on en a moitié moins de fumier. Si un fermier, fur les cochons qu'il engraïfle , trouve à retirer l'argent qu’ils lui coûtent, & ce- lui de ce qu'il vendroit leur nourriture au marché voifin , il y gagnera aflez en épargnant les frais de tranfport, & par le fumier qu'il en retirera, furtout sil a foin de récolter amplement des ra- cines qui leur font propres. Des Clôtures. Je ne puis que répéter ici ce que j'ai dit dans le mois précédent , 1l faut continuer exaétement dans cette faifon l’entretien & réparation des haies. Du Fummage des Pres. Ï faut continuer aufli de mener les compots far les prés ou terres en herbages, mais furtout, à moins qu’il ne gele fort, n’y entrer qu'avec des Voitures à roues larges ; il faut réferver le fumier de cour & des étables pour les terres labourables, & ne mener que les compots fur les herbages. DÉCEMBRE. 287 Du Marnage. Je recommanderai la même chofe pour le mar- nage ; ceux qui ont adopté cet engrais, ainfi que la mixtion de toute autre terre, comme glaife, craie, chaux, &c. ne doivent päs difcontinuer ce mois-ci, tant qu'il y fera bon; ils ne peuvent pas employer plus utilement leurs attelages | & c’eft fans contredit un des meilleurs engrais à employer, & qui dure le plus longtems. De la Plantanon des Saules. Je puis répondre que cette plantation fera très- profitable à ceux qu l'entreprendront , très-utile à tout le royaume; cet arbre vient plus fort en vingt ans, qu'aucun autre arbre en foixante où foixante-dix , &: rend tous les ans beaucoup de bois. Aucun arbre n’eft plus facile à multiplier , & ne vient auff vite: au bout de fix ans il eft en rapport , & fe tond tous les trois ans ; de forte qu’en divifant fa plantation en trois , on s’en fera un revenu annuel après dix ans ; le rapport fera beaucoup plus confidérable & plus immenfe après vingt, comme on le verra pas les calculs ci-après. Pour faire cette plantation avec avantage , il 288 DÉCEMBRE: faut commencer par enclorre le terrein qu’on ÿ deftine , pour le défendre contre toute efpece de bétail , enfuite le bien labourer à la charrue ou à la pioche pour détruire les racines & les mauvai- fes herbes. La faifon pour planter eft depuis No- vembre jufqu’en Avril, on commence par les ter- reins les plus fecs. Les rejets de l’année font les meilleurs, lorfque l'on veut faire un plantation de grands arbres, on les coupe de dix-huit à vingt pouces de haut, & on les enfonce de fept à huit en terre , le gros bout en bas ; ces poufles d’un an feroient bien deux ou trois boutures ; mais je ne confeillerai pas d'employer le haut des branches, elles feroient trop foibies pour mêttre en terre. Les boutures doivent être à trois pieds de dif- tance environ fur tous fens ; fans alignement ; il en faut environ cinq milliers par acre. Au mois de Juin 1 faut parcourir la plantation , &t à toutes les tiges qui auront pouflé plus d'un rejet, il faudra fupprimer le furplus , pour donner de la force à la maîtrefle branche; & on doit couper ces branches le plus uniment poflble , pour que lécorce re- couvre la plaie : après cette opération , 1l faut pio- cher la terre, on y peut même femer des turneps; loin de faire tort à la plantation, les fréquens bi- nages que l’on donnera à ces racines feront du bien aux jeunes plantes, pourvu que chaque tur- neps DÉCEMBRE. 2S9 ñeps foit à un pied au moins de chaque petit ar= bre; hiver fuivant lorfque les turneps font cueil= lis , on pioche encore une fois le terrein , & l'été fuivant on arrache feulement l'herbe qui aura pouflé, avec le crochet, & voilà la dernière cuk ture qu’exige cette plantation. Cet inftrument eff une efpece de fourche à trois dents recourbées, comme on s’en fert dans le comté de Kent, pour cultivér le houblor ; cet ouvrage fe paie commu nément à l’entreprife, à raifon de quinze livres de France par acre. Au bout de quatre ou cinq ans que les faules font bien pouflés , on doit en couper de trois ou quatre l’un , pour donner de la force aux autres; Ces branches que l’on coupe, doivent , fi le terrein eft bon, avoir un pied de tour, & de vingt à trente de haut; ils font propres à plufieurs ouvrages , pour des bois de chaifes, des cercles, des pieux à houblons, ou pour des paliffades, ils fe vendent cinq à fix fous, l’un portant l’autre, Sur cinq mille qu’on a plantés , il doit y en avoir trois mille de bons à couper de la forte, ‘ & ceux qui refteront feront encore à fix pieds fur tous fens, & grofliront promptement ; en n’é- valuant la première coupe qu’à cinq fous, celà fera fept cens cinquante livres l’acre, & je fuis per« fuadé qu'ils fe vendront plus. Sept à huit äns après , il faut encore couper T 290 DÉCEMBRE. les trois quarts de ce qui refltera , ce qui fera environ quinze cens, lefquels parvenus à l’âge de vingt ans, feront des arbres fuperbes. La feconde coupe fera bien meilleure que la première , & ils vaudront bien un écu piece, étant trés-pros & bien fournis de bois; ils feront propres à divers ufages; les plus gros & les plus droits feront des mâts de petits bätimens. Les cinq cens reftés fur pied , feront à l’âge de vingt ans , d'environ foixante pieds de haut , & vaudront bien un louis (1) la piece, d’où on voit qu’au bout de trente ans, un acre de terre loué un louis, & planté en faule , aura rapporté douze à quinze mille livres à fon maître, & je crois avoir mis tout au plus bas. Le bois de faule, quoique tondu, eft d’un bon ufage, très-blanc , n’ayant point d’aubier ni de moëlle ; 1l eft très-bon pour les charrons & les tourneurs ; les planches en font bonnes pour des planchers ou de la boiferie dans les campagnes, cet arbre n'étant jamais creux, lorfqu’on ne lui coupe pas la tête. Jai même oui dire à un homme très-véridique , & d’une expérience con- (1) On voit par ces eftimations, la cherté énorme du bois en Angleterre ; d’ailleurs , ce ne fontspas des faules toquart comme les nôtres , mais des arbres laiffés de toute leur hauteur. DÉCEMBRE 29 fommée , que les pieux de faules fe confervoient en terre , aufh bien qu'aucun bois , excepté le chêne ; & que les conftruéteurs de navires les pré< féroient à tous autres pour des mâts, vu quil ne fe fendoit, ni ne s’éclatoit pas comme le fapin. Cet arbre a des feuilles longues & pointues ; d'un verd fort tendre, & doux à l’œil ; il viené partout, à moims que le terrein ne foit extrêmes inent fec ; 1l eft excellent pour planter le long d'un ruiffeau , alors on lui coupe la tête, & il donne tous les trois ans des tontures très-abon< dantes. Les cultivateurs qui voudront, en faifant cetté plantation , joindre l’agréable à Putile , peuvent placer plufieurs rangs d’allées qui feront bientôt un ombrage, & un couvert fort agréable, On peut aufh le planter en tallis, pour couper tous les fix ou fept ans; on en fait alors de l'é- chalat , des paniers, &t des fagots pour le chauf- fage. Depuis que j'ai écrit cela, un gentilhomme de mes amis ma dit avoir vu trois faules vendus quinze louis ; je penfe que c’eft l’efpece qu’on ap- pelle à queue d’hirondelle, dont la feuille eft lui- fante , qui vient dans la province de Norfolk ; c’eft le plus beau & le plus grand. M. North l'appelle même faule de Norfolk, Ti 292 DÉCEMBRE. mais c’eft un nom purement d'opinion; car d’aus tres l’appellent faule de Hertfortshire ; la defcrip- tion qu'il donne de fes feuilles, de la dureté de fon bois qui n’a point d'aubier & qui n’eft jamais creux, prouve qu'il eft d’une qualité bien fupé- rieure à toutes les autres. Il ajoute que ceux qui en defireront pourront s’en procurer chez lui. Com- me ce gentilhomme eft mort depuis , je ne puis aflurer fi l’on pourroit en avoir chez fes héri- tiers ; il feroit malheureux que l’on eût perdu la fouche d’un fi excellent arbre. Il y a une obfervation importante, qu’ajoute M. North, pour la culture de cet arbre, c’eft, fi on veut s’en procurer de cette beauté , il faut, lorfque lon fait la première coupe de ces taillis , en laïffler de quatre en quatre feulement , les plus droits, que l’on coupe enfuite à huit ou dix pou- ces de terre; les rejettons qu’ils pouflent après font plus vifs & plus forts pour faire des plan- tards , que l’on ne coupe qu’à fept & huit pieds de longueur , & dix pouces de tour ; cela fait enfuite , en les lalant croître à volonté , des ar- bres de la plus grande élévation; 1l faut feule- ment, dans leur commencement , leur donner des tuteurs, pour qu'ils montent droit. On peu trai- ter de même toutes efpeces d’arbres qui pouffent des boutures , & les planter le long des haies, DÉCEMBRE. 19% des chemins , des prés, des ruifleaux , &c. On D pres , gagnera le loyer du terrein , propofé dans la pre- mière méthode , d’être employé à cette planta- tion, FIN. T ij 29 À ns nana tn TA 0 LU Des Articles contenus dans ce Volume. Av ERTISSEMENT DU TRADUCTEUR, Page y PRÉFACE DE L'AUTEUR, I J) A'N'VL'ER Des Troupeaux , 15 Du Parcage , 17 Cour de La Ferme, 18 Des Vaches, 19 Des Befliaux à lengrais , 20 Des Porcs, 21 Des Chevaux , 23 Du Batrage, 25 Des Clôtures , 26 Des Tranchées pour les deffechemens , 28 Des Fêèves, 31 Des Carottes , 32 Des Pommes de terre, 33 TABLE. Des élèves des Befliaux , Des Bois, FÉVRIER. Des Fèves, De PAvoine noire, Des Pois a Cochons , Des Bordures , Des Bois, De lOrc, Des Carorres , Des Choux , Des Rigoles pour les eaux, Du fumage des Pres, Du fumage des Bleds en hiver, De la Baffe-cour , Plantation de Saules, Des Vefces, De Parrofement des Pres, Des Pommes de urre, Des Compots , MARS, Des Orges, De l’Avoine , Des Pois, 60 G2z 296 , 6 AUB)E Æ. Des Vefces , Des Carorres , Des Panas, Des Pommes de terre, Des Choux, Des terres a Turneps, Des femis de Trefle, Du Ray-graf, … Des Troupeaux, Des Vaches, Des Chevaux & Bœufs, Des Maires pour urer les eaux, Des Fêves , AVRIL, De l’Orge, Des Pois blancs, Du Bled de Turquie, Du Trejl, De la Garance, De la Luysrne, Du Sainfoin, De la Pimprenelle, Des Troupeaux , Des Vaches, Des Chevaux , Des Bœufs n TA B:LBS _ Des Cochons , Des Patates, Des Carottes , Des Choux , Des Bois & haies, Du nettoyage des Prairies artificielles , Du Houblor, Du Lin, MAI. De la Cour de la Ferme, Des Befliaux nourris dans les herbages , Du Bled de Turque, De la Luzerne, Du Sainfoin , Des Carottes, Des Pommes de terre, Dss Choux, Des Jachères , Des Grains fèmés en rayons, Des Troupeaux , Du Parcage, Des Cochons , Des Chevaux , Des Bœufs, Des Vaches, De la Lairie, 297 an 97 ibid, 98 100 ibid, 102 ibid, 108 110 112 ibid, 116 117 ibid. ibid. 118 119 ibid, - 122 123 124 125 126 128 Des Ruches, Page 129 Du Chanvre, ibid. Du Lin, 130 JUSTE Des Turneps, 131 Des Choux , 133 Des Carotes , 134 Des Pommes de terre, ibid, De la Luyerne, 136 Du Sainfoin , FX Du Trefle, ibid. Des Pres, 138 De 4 différence de faire faucher ou manger les Herbages, | ibid. Du B'nage avec un Cheval, 140 Des Jachères, 141 Du Mas, ibid. Des Troupeaux , ibid. Du Parcage, 143 ÆEchardonner , 144 Du Marnage, ibid, Del’ Argile, 147 De la Craie, ibid. Des Vafes détang ; ibid. De la fèmence de Colfat & Navette, 148 TABLE PE IL) LEE 299 Travaux du Fermier dans la Cour de la Métai- rl, Des Turneps ou Navers , Des Choux , Pommes de terre, Des Luzernes , Du Fauchage, Des Chevaux , Des Jachères , Du Parcage, Du Marnase, Du moment de couper ks Pois, Des Oroes, Du Froment, A OUR La Moiffon , Rcolte des Orves , Du Bled noir ou Sarrafin ; Des Pois, Des Féves, Semence de Navers ou de Colfat, Du Glanag, Des Moiffonneurs , Page 150 152 153 154 155 ibid. 156 157 158 159 160 ibid. 161 162 167 168 169 170 ibid, 171 172 300 LÀ BUL'E) Turneps ou Navets, 173 Des Choux , 174 Du tems de femer la graine de Choux, ibid, Coup-dœil rapide fur la manière d'engraiffer les Befliaux , 181 Des Choux pour engraiffer les Vaches , 182 Des Pommes de terre, 186 Du Sainfoin, ibid, De la Pimprenelle, 138 Des Jachères, ibid. Du Parcape, 189 Des Cochons , 190 Des Carotes , ibid. SEPTEMBRE Le Bld, 191 Trefle , 203 Des Moutons, ibid. Pour engraiffer les Befliaux , 210 Vaches , 211 De l’engrais des Praïries , 212 Découpage des Prairies , 213 Prnprenelle, 215 De la Fougère, 216 Du Chaume, ibid, Du Houblon, #17 Du labour des Jachères d'hiver , 218 TABLE L’Auteur recommande de faire des Maîrres, De la Luzerne, Du Parcage, + JCTORRE Des travaux de la Cour, Des Chevaux , Comparaifon entre les Chevaux & les Bœufs, Des Vaches, De lengrais des Biflaux , Expérience , Des Cochons , De la Cour a Cochons, Des Moutons , Du fumage des Pres, De la récolte des Carottes , — des Patates, Des Labours d'hiver, Des Féves , Des labours pour les Carottes, De l'emploi des Turneps , NOVEMBRE. De la Cour de la Ferme, Du Barrage, Des Clôtures , Obfervaiions générales , 302 T' À BL E Récapitulation , Des Bordures , Du Pgrcage, Des Chevaux, Des Defféchemens , Des Boïs, De la Pimprenelle, Des Clôtures en pierres ; Des Fourmilhères , es Pois, Du débit des Bois ; Du Troupeau, Des Feves, DÉCEMBRE. Du Battage, De la cour de la Ferme, Des Chevaux , Des Fumuers , Du Troupeau, Des Vaches, Des Porcs, Des Clôtures , Du fumage des Prés, Du Marnage, De la plantation des Saules , Fin de la Table, 262 264 265 266 263 269 279 271 ibid. 272 ibid. 274 276 279 281 282 283 284 28$ ibid, 286 ibid. 287 ibid, TC mi ur UT 4 8e n HA Vs voiterecpul me AiTt TE had LEA DH EG ve b COR a pres À Î Dras bar henri PAS ANNEE (PMNATT et Tee rs Ven ut/4 1) Me Lan . Here *… 671) : MT TE 55] *< TEL ANUS k 5 4byr arret RENE SR 5} Di LE TA AT ER Cr Te CRUE alerte Ua ripegt pif A H PTE Re aiment (el ny Ca p FUI IPC Ç AVR PA DIT * Mere! ù n one POUNTTS a # "à pe 7 Fi 4-0 fo BR eh à 4 404 à Res + À rhoidimilir Mini 1 SHARE 4 è ess +444 Het MO PET EN COURS D 2 Li LT Pr mn Ho AJ ssh Ds v HIER ( sutré abs idire ARC UTOMENT db ati pére ALAN lors he (He Hotte nd. L ODA ES Ve rt be US Lope see Siege tes ARTE ÉAbtE AT EEE e0 Lot »épre aeret \ ren