COLLECTION ACAD^MIQUE. TOME QUATORZIEME,Partie Francoife. ^S.OSS, COLLECTION ACADEMIQUE, COMPOSiE I5es Mc'moires, Adits ou Journaux des plus Celebres ACADEMIES 6i. SociETES LiTTERAiRES de I'Europe. CONCERN ANT LA PHYSIQUE, l'HISTOIRE NATURELLE, lA BOTANIQUE, la CHYMIE, l'ANATOMIE, LA MEDECINE, LA MfiCHANIQUE, &:c. Ita res accedunt lumina rebus. TOME QUATORZIEME, Partie Francoife: Contenant la fuite de THijlolrc & des Mdmoires de VAcademie Royale des Sciences de Paris. A PARIS, Chez G. J. CuCHET, Libraire , Rue & Hotel Serpente. A LIEGE, Chez C. PlomTEUX, Imprimeur de MefTeigneurs les Etats. M. DCC. L XX XVII. -ffvec ^ppTobtttion 6* Priviltgi dtt Ret. ,^,1^ ^^ ifl. TABLE D E S M E MO I RE S CONTENUS DANS CE VOLUME. s. PHYSIQUE. 'URl'appUcation curieufe de quelques ph^nomenes d'Elec!ridte. Pjge i Sur le Vejiive 6 Sur les Aluminieres de la Tolfa i j Sur le pro jet d'amener les eatix de I'Yvette a Paris 17 Sur les diff^rentes mcthodes de fonder les cuvrages de Alaconnerie dans I'eau , fans hatardeaux Hj fans c'puifemens 21 Sur I'ecoulement des fluides par les ouvertures des yaf'es 15 Sur quelques nouveaux phinomenes d'Hydroflatique 50 Sur un phe'nomene ileclrique intireffant , & qui n'avoit pas encore id ohfervL 5 ^ Ohfervations de Pkyfique ginirale 34 Sur la Po'udre a canon employee dans fes differens /rats 4a Sur la lumiere de I'eau de la mer , dans les lagunes de Venije 44. Sur un may en de fe garantir de la mauvaife odeur des Ptiifards. 46 Sur les Trombes de mer. 47 Sur le projet d'amener les taut de V Yvette a Paris 4y Sur la r/fiflance des fluides ^5 Sur les Roues Hydrauliques ^8 Sur quelques Experiences relatives a la Dioptrique 61 Sur I'Eau -o Ohfervations de Phyfique generale 7^ Sur le mouvement du mercure dans les Barometres yo Sur un rnoyen de rem/dier aux inconviniens des debacles 94 Sur la circulation de I' air dans les Mines V<5 Sur les differentes manieres d'effayer les liqueurs fpiritueufes loo Sur la force des bois 1:4 Sur les Pompes i o(5 Qbferyations de Phyftque gen&ale iq ^'^'^^ ^^ Fonderie des Mines dc Cheijfey en Lyonnois , dans lequel fe raffine tout le Cuivre provenant defdites Mines & de celles de Saint-Bel. Par M. Jars. 27S Obferyations Chymiques 202 s. ANATOMIE. VR le Sac nafal ou lacrimal de VHomme , & de quelques Ani- maux 25^ Sur I' inflammation des vifceres du bas-ventre , & particuliifrement fur celle du Foie 2y8 Sur une Maladie fmguliere, arrivie a deux Bouchers de I' Hotel Royal des Invalides jo j Obfervations Anatomiques ; c < Sur les Hermaphrodites .'~;.^.»..;, .■^ 308 Obferyations Anatomiques,. ..^....7t^^ • 3ic> vill TABLE DES MEMOIRES, Sur le MMianifnie de la Rumination , & fur le ump&ament dcs BHes a laine 31^ Sur Us rnoyens de rdtablir la deglutition dans un cas oh. la caufe qui Varrete n'ejl marquee par aucun figne , . 317- Objirvations Anatoniiques j 1 y Sur la jlruclure & fur les ufiges de I'Ouraque dans I' Homme. .. 315 Sur I'aclion da Poumon , fur I'Aorte , pendant la refpiration. . . ^16 Ohfervations Anatomiques 329 Sur les parties de la G^niration de la Femme 33^ Sur la jlruclure da Canal Thorachique , & fur celle du Rejkrvoir du Chyle '.'. 357 Sur divers points d'Anatomie 339 Sur quelques conformations monflrueufes des doigts dans I' Homme. 34^ Objervations fur la flruclure de quelques parties du Veaumarin. Par M. Portal 34.6 Obfervations Anatomiques 348 5, M E D E C I N E. UR les Tables Nofologiques .../.". J55 MECHANIQUE, kJuR la defcription des Arts & Metiers. 3 ^i' Machines ou inventions approuve'es par VAcad^mie^ en ij66. j(5j Sur le rapport des poids Strangers au pqids de marc, ..■' *^7 Sur la dej'cription des Arts & Metiers......... 363 Machines ou inventions approuvies par I' Acadimie , en ij6j 571 Sur la defcription des Arts & Metiers 37S Machines ou inventions approuve'es par I'Acade'mie, en ijSS 578 Sur une Machine propre a moirer les Etofies de J'oie 5 So Sur I'eboulement des Montagnes , ^ fur les moyens de lesprivenir. jSz Sur la courbe dicrite par les boulets & les bombes , eu egard a la ri- fiflance de I'air. 5S5 Sur I'effet des roues mues par le choc de I'eau.,., 389 Sur la defcription des Arts & Metiers r ?9i' Machines ou inventions approuvees par ('Acad/mie j en i^fy. .•;••'. i'J4- Sur la filature des Soies ...'..'...''. ^ .•V.,;^..... ....•'•"•••••/• }5'^ Sur la defcription des Arts & Me'tiers.'.'.'. '.'..■, .•'.'.•. •'••.•■ \ AP\ Machines ou inventions approuv^es par I' Academic, en 2770 403 Fin de la Table des Memoires. ABRIDGE "^vr^^i-f" A B R E G E DE L'HISTOIRE E T DES MtMOIRES DE L' ACADliMIE ROY ALE DES SCIENCES. PHYSIQUE. SUR L' AMPLICATION CUFTET'.<^E DE OUELQVES PHENOMEjSES JD'Ei.ECTRICIT£. ^^^j E p tr I s que I'Eledtricite a exciti la curiodte des pliy(icien», < on s'eft foigneulement occupe h en multiplier les effets, & p i eilayer d'en peniftrcr les caufes-, on a meme tente d'en faire des applications utiles, & ces tentatives n'ont pas ton- Annce I'jGG. jours cti fans fucces, mais on n'avoit pas encore imagine M d'employer cette linguUere propriete de la nature \ des H"'- ufages de pur agrement, une circonftance particuliere a determine M. I'abbe Nollet \ cette recherche , & voici quelle en a etc I'occalion. Tome XJV. Panic Fransoijc, A 1 ABREG^DESMEMOIRES M. I'abbe Nollet s'eroit appercii , & il I'avoit merae public dans quel- _ ques-uns de fes ouvrages, que lorfqu'on avoit une file de plnfieurs bouts 1 H Y s 1 Q u £. ^g fil de metal non contigus, mais fepards par de trcs-petits intervalles , Annie ll66, lorfqu'on faifoit ^tinceler le premier en I'approchant d'un corps fortement elcftrife, & ayant le doigt place fur le dernier, il paroiffoit des etincelles ik tous les intervalles qui les feparoient, & il avoit ajoute qu'en rangeant fur une glace ou fur un morceau de verre, de petits bouts de fil de fer iiiivant un deflein donne , comma d'une fleur-de-lis, ces points lumineux prononceroient dans I'obfcuritd le deflin qu'on auroit fuivi , & feroient line efpece d'illumination clecftrique. M. I'abbe Nollet, qccupe d'objets plus importans, s'etoit content^ d'in- diquer cette experience & ne I'avoit point faite •, un de fes eleves , etabli a Liege, la fit, il y trouva des difficultes, fa patience & fon habilete lui en donnerent la folution , & fur le compte qu'il en rendit \ M. I'abbe Nol- let, celui-ci jugea convenable de rechercher les principes generaux fur lefquels eft fonde cette efpece de jeu eledtrique. Ces principes font du nombre de ceux qu'on connoit depuis long- temps , mais il a fallu les choifir & les rapprocher les uns des antres pour pouvoir les appliquer ^ I'ufage propofe ; eflayons d'en prefenter line idee. II eft conftant, premierement, que la matiere eledrique fuit indifferem- ment toutes fortes de diredion , quelle que foit la figure du corps qui lui f;rt de condufteur , & que fon action eft li prompte qu'on I'appercoit fen- Cblement en meme temps \ une extremite de ce corps & \ I'autre , quel- que longueur qu'on puilfe lui donner. Un corps non ifole, de la meme nature que ceux qu'on nomme con- dudeurs (qui font ordinnirement de metal), itant pr^fenti fort pres d'un condufteur ou d'un autre corps qu'on elecftrife , if s'excite entr'eux dans • le petit intervalle qui les fepare, des etincelles tres-brillantes, 8f fi au-lieii d'un feul corps on en prefente au corps eledlrique plufieurs rangces bout ^ bout avec de tres-petits intervalles entr'eux, les etincelles paroitront ^ tous ces intervalles , fur-tout fi Ton prefente ^ I'extremite du dernier , la main ou quelque grofle maffe, non ifolee, d'une maniere cledtrifable par communication. Ces effets deviendront encore plus marques fi les petits corps font pofes fur du verre , fur une ardoife , ou fur une tablette de marbre ou de pierre ■dure, & ces effets auront toujours lieu, foit que les petits corps metalli- ques foient en grand ou en petit nombre, longs ou courts, minces oil Mais ce qit'il eft important pour notre objet de remarquer, ceft que ii on prefente plulieurs routes \ la matiere elcdrique, elle prend toujours la plus courte, & que s'ii s'en trouve deux ^-peu-pres egales, elle en pren- dra une i I'exclufion de I'autre , fans fe partager , ^ moins quelle ne foit extremement forte. Ceft en partant de ces principes que M. I'abbe Nollet eft parvenu \ don- ner le moyen de faire paroitre en points clcdriques lumineux , fur une DE L'ACADEMIE ROYALt DES SCIENCES. 5 glace, le deffein ciii'oii aura voiilu y tracer par rarrangcment des pctits mor- ^'^— ^— — ceaiix de metal cju'oii y place artiftemcnt. p Ccs morceaux de metal font carres & d'envlron nne Itgne , ils font cou- pes dans line de ces fcuilles d'ctain battu, qu'on emploie k ctamer les gla- ylnn/e tjGS. ces, on les attache fur la glace oil on vent tracer le de^Tein, avec uii peu de gomme 011 de colle de poitTon. Pour rendre les etincelles plus vives, plus r^giilieres & empecher qu'el- les ne manquent, on rangera ces petits Carres lur le delTein , de maniere que leur diagonale foit etendue fur la ligne de ce deffein , & que les car- res fe prefentent les uns aux autres par les pointes, enrre lefqiielles on laif- fera un intervalle d'environ un quart de ligne-, une bande detain coupee dans une feuille pareille , viendra aboutir par fa pointe ^ pareille diftance de celle du premier carte ; ce fera par cettc lame que I'affemblage des car- res recevra le feu eleftrique lorfqu'on prefentera le carreau de glace au conduCleur elecSrique, il paffera par tout raffemblage de ccs carres, mar- quant cliaque intervalle d'une etincelle & fe rendra , par une femblable lame detain du dernier carre , a la main non ifolee qui tiendra le carreau par cet endroit. L'arrangement des pctits carres de metal exige plus d'une precaution : nous avons dit qu'il falloit les placer de uianiere qu'ils fe prcfentaffent na- turellement la pointe, mais li on avoit un angle droit ^ reprsfcnter, il ar- riveroit neceffairement que les deux carres de Tangle fe toucheroicnt pat le cote , d'ou il refulteroit que le feu eleclrique pafferoit fans interruption de I'un dans I'autre, Sc que I'etincelle de la pointe de Tangle manqueroif, pour y remedier, on tirera un des carres voifins de Tangle, & au-lieu de le placer comme les autres, de maniere que la diagonale fuive de la ligns du deliein , on le placera de maniere qu'un de fes cotes joigne les pointes des deux carres entre lefquels il fe trouve cependant avec un petit inter- valle, & alors tout rentrera dans Tordre & I'etincelle paroitra. Ce moyen fera tres-bon quand il s'ngira d'un angle droit ou obtus , mais fi Tangle devenoit fort aigu, les carres qui le forment fe toucheroicnt en- core, & on ne peut alors y remedier qu en employant des moities de car- res coupes par la diagonale, cette coupe tournee vers le dedans de Tangle, on pourra par ce moyen former des angles fi aigus qu'on voudra & dans lefquels Tetincelle de la pointe fera bien prononcee. Si on a difpofc les carres de maniere qu'ils forment des efpeces de zig- zags irreguliers, les etincelles reprefenteront naivement ces traits de feu brifes qu'on obferve dans les grands orages, fur-tout li le tableau efl anime par Teledricite foudroyante , c'eft-k-dire, qu'on lui fafle faire Texperience de Leyde. Tant qu'on ne voudra rcprefenter que des lignes droites ou courbes, dont Talfemblage ne forniera pas une figure rentrante , on y reuflira aifif- ment par les moyens que nous venons d'indiquer , mais fi on vouloit for- mer un cercle, une ctoile , une fleur-de-lis, on n'en vier.droit que tres- difficilement ^ bout, & voici la raifon de cette difference. La matiere eleftrique va toujours, comme nous Tavons dit, par le chc- A ij + ABREGEDESMEMOIRES min le plus court k I'endroit oi'i elle peut etinceler •, d'oii il fuit qa'une p fois introdnite dans une ftiite de caries qui rcprelente un cercle, elle en ■ parcourra la moitie pour aller etinceler au bout du diametre , & ne par- Anm'e i']66, courra nullement I'autre nioitic du cercle qui deviendroit invilible. Quelque grand que paroiffe cet inconvenient, le remede en eft facile, il ne s'agira que de tracer en petits carres la moitie de la figure propofee, fur une des faces du carreau de glace , & I'autre moitie fur I'autre face du carreau ; on ^tablira an moyen d'une petite bande d'etain qui fe repliera par-defliis le bord, d'un cote \ I'autre, une communication entre le der- nier Carre de la premiere moitie & le premier de la feconde, & comme la tranfparencc de la glace ne permettra pas de s'appercevoir de la diffe- rente polition des etincellcs , tout rentrera dans I'ordre , & la figure paroi- tra entiere. Ces efpeces d'illuminations eledtriques peuvent, comme on voit, repre- fenter toutes les figures poffibles , on peut tracer meme, par leur moyen, des infcriptions lumineules , en obfervant de placer partie d'un cote, partie de I'autre de la glace, les parties des lettres qui ne pourroient pas etre de meme cote , & de faire communiquer enfemble ces parties feparees , par des bandes d'etain -, par ce moyen I'eledbricite donnera des figures tracees en points de feu tres-brillans. II eft bon cependant d'avertir que ce grand brillant ne durera que pcu de minutes & s'eteindra peu-^-peu \ mefure que I'eleftricite fe frayera des routes dans la glace ; alors il faudra retirer le tableau , le laiiler repofer quelque temps , & apres I'avoir prefente au feu pour le bien depouiller de toute humidite , il fera en etat d'offrir les memes pheiioraenes que la premiere fois : il fera done neceffaire d'avoir plufieurs tableaux qu'on fera fucceder les uns aux aufres , fi on veut faire durer ce fpeftacle un peu de temps. Ce qui le peut executer par le moyen de I'cleiflricite artificielle ou exci- tee par un globe , peut aufll s'executer par le moyen de I'eledricite natu- relle, ou de celle qui fe trouve naturellement dans rathmofphere, fur- tout pendant les orages •, la phyfique fournit pluheurs moyens d'en faire paffer les effets jufque dans nos appartemens, & on peut aniiner par ce moyen des figures & des infcriptions qui, paroiflant en lettres de feu dans la nuit & pendant un orage, alarmeroient certainement ceux qui ne feroient pas au fait de cette efpece de Jeu, qu'on ne doit au refte jamais tenter par les inconveniens qui peuvent en refulter & qui fe prefentent d'eux- memes. Les etincelles eledriques dont on peut faire en petit des illuminations de toute efpece, comme nous I'avons dejk dit, ne font pas les feuls feux eleclriques qu'on puiffe employer \ cet ufage, on peut de meme tirer parti des aigrettes brijlantes qui paroiffent aux extremites des corps fortement eledrifes •, une tige de metal partagee en plufieurs branches comme un pe- tit arbre, donnera, (i on feledtrife , des aigrettes lumineufes au bout de toutes ces branches , & fi on remplit de flem's I'intervalle entre ces bran- ches, on aura un bouquet compofc de fleurs & d'aigrettes lumineufes, qu'on rendra encore plus biiliantes en trempant les extremites des branches DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. f dans du foufre fondii pour y en attacher line partie : on poiirra mcme , C\ ^^— i— — Ton veut, animer ce boiic|uet par une infcription liimineiUe, pourvu qii'ellep ne foit pas longue, en cmployant les moyens que nous avons prcccdem- ' * • Q u e, nient expofes. ^ _ _ Ann/e ij66. Une autre experience a encore fourni i M. I'abbe Nolict la matiere d'an nouveau jcii eleclrique •, une aiguille de metal tournee en S, on dont Ics [loiiites font feulement tournces en fens contraires, etant fufpendue en equi- ibre fur un pivot comme une aiguille de bouffble , li on vient !k eieciri-. fcr Ic tout , les aigrettes qui fortiront dcs extrcmitcs , rencontrant de la re- ^llance dans I'air , feront reculer I'aiguille & la feront tourner avec rapi- dite, h-peu-pres comme la fufee d'un foleil tournant d'artifice; & il eft aifc da voir que ces aigrettes produiront par ce mouvement un cercle de feu. M. I'abbe Nollet a imagine d'enrichir fur cette experience ; il a fixe fur un axe vertical trcs-aifcment mobile , plufieurs aiguilles femblables dont la longueur alloit en diminuant vers le haut •, alors le tout ctant mis en adtion par I'eledricite , il a refulte de rafferabiage des cercles lumineux que decrivoit chaque aiguille , un cone de lumiere furmonte de I'aigrettc que produifoit I'extremite fuperieure de I'axe. M. I'abbe Nollet n'a pns pouffe plus loin I'application des principes qu'il a ctablis •, mais il en a donnc affez pour qu'on puiffe aifement imaginer line infinite d'autres moyens de tirer de I'agrement de cette propriete de la matiere : Eh, qui fait fi , en les cherchant, on ne s'ouvrira pas la route ^ des objets plus importans? Ce ne feroit pas la premiere fois qu'une recher- che phyllque entreprife uniquement dans la vue de fe procurer de I'agre^ ment, auroit menc ^ dej ufage? de la plus grande utilite^ Physique. Ann^e ij66. ABREG^ DES MEMOIRES S U R L E VE S U VE. I A E Vefuve n'occupe que trop depuis environ trente- cinq ou quarante ans, la curiofite des phyficiens : nous ue rep^terons pas ici ce que I'acade- mie en a public dans fes hiftoires de 1750 (a) & de 1757 (i), & d'apres M. d'Artenay dans le quatrieme volume des Savans etrangers {c)\ mais nous allons conliderer cet objet fous un autre point de vue. Un voyage que M. Fougeroux a fait en Italie, I'a mis ^ portee d'exa- miner de pres cette montagne : mais il s'eft moins attache I decrire fon etat aduel , trcs- variable d'un jour ^ I'autre, & qui d'ailleurs a ete aflez bien decrit , qui d<5termincr la nature des matieres qui font jettees par le volcan,& qui n'avoient pas ete )ufqu'ici examinees avec aflez d'attention. Le Vefuve, comrae tous les volcans enflammes, jette difFerentes matie- res, comme la fum^e, de I'eau, de la cendre, du fable brule, des pier- res plus ou moins grofles, des pierres-ponces, des pierres poreufes & bru- lees , des laves de differentes efpeces & de differentes formes : enfin il s'y fublime du foufre , du bitume , des fels & des ecumes legeres qui ont ete prifes prefque generalement pour du foufre , & que d'autres ont regardees comme du foufre detruit. Les laves ont etc le premier ob)et des recherches de M. Fougeroux-, le Vefuve ne les jette prefque jamais par la bouche ou par I'ouverture qui fait le haut de la montagne , mais par des crevafles ou ouvertures qui fe formcnt dans fcs flancs, ordinairement avec un bruit terrible & des fe- coufl'es plus ou moins fortes : alors il fort par ces crevaffes un fleuve de matiere fondue qui coule plus ou moins rapidement jufqu'i ce que le re- froidiffement I'ait privee de fa fluidite : cette matiere qui , lorfqu'elle cou- le , a tout I'air d'un metal fondu, n'en contient cependant que tres-peu, & eft prefque entierement compofee de cendres, de terres & de pierres vitrifiees par la violence du feu contenu dans cet abime. Oil trouve de la lave de difFerente efpece & de differente forme : celle qui coule au loin le long de la pente de la montagne, paroit, lorfqu'elle eft refroidie , heriflee de pointes en defliis , quelquefois meme cette fur- face imite les fluts de la raer : la furface inferieure eft plus unie, parce qu'apparemment elle s'eft moulee fur le fable oii elle a coule : elle eft dure, compade & fufceptible d'un beau poli. On trouve pres des ouvertures par lefquelles la lave fort de la mon- tagne, une feconde efpece de lave dont la figure imite celle de gros cor- dages; celle-ci eft moins pefaiite, plus fragile & moins dure que celle de la premiere efpece ; elle eft auffi plus bitumineufe & remplie d'une matiere (a) Voyez Hift. de I'Acad. 1750. Colleft. Acad. Part. Fr. Tome X. (i) Voyez Hift. de I'Acad. 1757. ibid. Tome XII. (c) Voyez Sav. ixi. Tome IV. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 7 graffe C[in penetre aflez vite le papier dont on I'enveloppe ; on trouvc cii- — ^■■^— — core ail haut de la montagne, une troifieme efpcce de uve, brillante, dif- p pofee en filets & qui eft d'lin rouge violet; 011 trouve de plus dans quel- ques parties de la montagne , des laves qui aSeiflent la forme fplicrique ; Annee tjGG. toutes ces efpeces de laves font fouvent colorees de vert , de violet & de jaune •, mais ces couleurs qui ne font produites que par I'aftion dcs dilt'c:- rens fels fur le mineral , changent en les gardant. Ce qu'il y a de tres-fingulier, c'eft que prefque aucun de ccux meme qui ont regarde la matiere des laves comme metailique, n'a fpecifie quel ttoit le metal qii'elle contenoit , & que cette matiere ne fe trouve traitcc que dans I'hiftoire du Vcfuve , tiree des mcmoires de Tacademie de Na- ples , & dans un mfmoire de M. Cadet, dont I'acadeniie a rendu compte en 1 76 1 {a). Pour reparcr cette efpece d'oraiffion , M. Fougeroux a foumis k I'exa- men chymique les diffirentes efpeces de laves qu'Uavoit rapportces de fon voyage. Quelques-unes de ces laves paroiffoient contenir une efpece de bitume ou matiere grafle, mais ces memes laves miles au feu, n'ont donnc aucun veftige d'inflammation , que quand il s'y eft trouve du loufre, & il eft d'au- tant plus vraifemblable que la petite quantite d'huile de petrole qui les enduifoit, n'y etoit venue qu'aprL-s qii'elles avoient ete refroidies, que cer- tainement elle n'auroit pas relifte au feu du volcan qui avoit fondu la lave. Les laves de la premiere efpece dont nous avons parle , fe fondent dif- ficilemcnt; cependant M. Fougeroux etant venu k bout deles fondre plu- iieurs fois, en y ajoutant du phlogiftique , il en a retire du fer attirable par I'aimant, une petite partie de cuivre, & beaucoup de fcories qui n'ont pu fe reduire en metal. La feconde efpece ne differe de la premiere qu€n ce quelle fe fond beaucoup plus aifement. Enfin la troiiieme femble tenir da cuivre, mais M. Fougeroux n'en avoit pas affez de celle-ci pour pouvoir I'affurer avec certitude. II refulte de cet examen de M. Fougeroux, que les laves font compo- fees de matieres metalHques fondues, ou le fer domine, de fcories vitri- fiees & de matieres terreufes qui coutiennent des fels -, enfin dune petite quantite d'huile de petrole & quelquefois de foufire natif joint au mine- ral, qui s'oppofe k ce qu'il entre aifement en fufion, & qui le rend aigre & calfant julqu'4 ce que , par des fiifions r^iterees , on le lui ait enleve. II fe trouve encore fouvent du foufre cryftallife fur ces laves , lorfqu'el- les ont ete voifines des ouvertures qui I'ont fublime, mais il ne s'y eft atta- tache qu'apres coup , & comme il auroit fait fur tout autre corps voifin de ces ouvertures. On ne trouve aucim veftige de vitriol dans la plupart des laves, auili ne font-elles pas des pyrites, elles ne fufent point \ I'air, & leurs fels ne fleurilfent point k I'humidite. (a) Vojez Hift. de I'Acad. 1761, ? ABREGE DES MEMO IRES — ^^MiMi— i^ Ces laves font fouvent couvertes d'alun tout forme, qtii fc cr}ftal!ife en T, filets dans les cabinets oii on les garde, on Ten fepare en les lavaiit & fai- rHYSIQUE.,-, II. laiit evaporer la lotion. Ann R E G E D E S M E M O I R E S t liere en ait eprouvc raCiioii , S: on n'y en rcmnrque aucun veftige ; ce p qn'on pourroit raifcnnablement fuppofer, ieroit que cette canierc , qui " * ' y -f^jf eftcftivement partie de I'Apennin, oii on trouve meme i pen de dif- Anm's ijGG, tance de I^, des veftiges marques de I'adion des volcans , auroit etc feu- lement foulevee & penctree des vapeurs de I'acide vitriolique er.leve par le feu , fans eprouver Tadtion immediate de ce dernier , & cela meme feroit d'autant plus probable que la pierre d'alun a befoin de calcination , & que fi elle etoit trop forte elle ne donneroit point d'alun : il eft done tres-vraifemblablc qu'elle n'a point eprouve I'aftion du volcan , qui fure- ment I'auroit calcinee plus meme qu'il ne feroit n^ceffaire pour en tirer I'alun. M. Fougeroux apper^ut un Jour dans un des fourneaux un morceau de bois qui ne briiloit point, il en demanda la raifon , & on lui dit qu'il avoit fait partie d'une de ces caiffes , qui fervent \ cryftalliler I'alun •, il penfa aufTi tot ^ employer ce moyen pour mettre les matieres combufti- bles h I'abii du feu , mais il trouva depuis , dans les memoires de I'acade- mie de Stokholm , de 174.0, que M. Faggot avoit eu les memes vues. La pierre d'alun eft evidemment calcaire , niais la chaux qui en pro- vient eft melee d'une efpece de fible ou terre argillcufe , ce qui lui donnc la propriete de fe durcir en fechant, quoiqu'on ne I'ait melee avec aucun autre fable. II ne feroit peut-etre pas inutile d'examiner fi cette terre qui ne four- nit plus d'alun & qui contient encore cependant la bafe de ce fel , ne pourroit pas etre employee i produire les memes eftets que la bafe de Falun dans I'operation du bleu de Pruffe , du pyrophore , &c. On pour- roit de meme effayer- de fubftituer cette terjre , qui eft trcs-blanche , au blanc de plomb dans la peinture : on fait combien cette dernicre couleur, qui eft une chaux metallique , eft fujette ^ fe revivifier aux moindres ap- proches du phlogiftique & ^ changer les teintes. Nous avons en France des pierres qui paroilfent affez femblables i la pierre d'alun de la Tolfa, ne feroit- il pas utile de les foumettre I I'epreuve & d'effayer (i quelques-unes ne donneroient pas de I'alun & ne pourroient pas etablir ici cette branche de commerce ? Ce n'eft pas la premiere fois qu'on a etc chercher bienloin ce qu'on avoit en abondance chez foi & "k fa portee. Sur DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 17 N. P il Y S I Q U F. Sur le projet d'amener Us eaux de I'Yvene a Paris. Annk tjSS. ous avons rendu compte en 1761, du projet forme par M. Depar- ciciix, d'amener au plus haiit de Paris les eaux de la riviere d'Yvctte, cii la prcnaiit ^ Vaugien, ^ fept lieues de Paris, & de decupler par ce moyen la quantite d'eau cjue cette capitale regoit d'Arcutil & de la porape ctablia fur le pont Notre-Damc •, voici une luite du nicme travail. Avant que de penler i exi^cuter les travaux ncceffaires h une pareille eiitreprife, il etoit ncceilaire de s'alliirer ii les eaux qu'on vouloit amener dtoient laines & pures. Quclques perlonnes intereflees ^ empechcr I'exccution de ce projet, I'a- voientattaque par-Ii & avoi nt pretendu que les eaux de I'Yvette n'etoient ni pures ni faines-, le gout de m.irecage qu'on leur trouve lorfqu'on les fiuile, leur fembloit autorifer fuffifamment cette affertion •, M. Deparcieux es avoit fait examiner par Mrs. Hcllot &: Macquer, qui avoient reconnii que ce gout de m.irais , qui leur eft commun avec toutes les autres petites rivieres, leur eftabfolument etranger, qu'il n'eftdii qu'aux endroits oil ellcs font rctenues par les mouliiis, aux feuillcs, aux racines & aux plantes qui y pourriffent, & i une infitiite de caufes de cette efpece-, que ce gout eft (1 peu adherent ^ I'eau , qu'elle le perd entierement des qu'elle eft expofee ^ I'air libre, & que les grandes rivieres qui ne font prefque compofees que de petites , ne I'ont pas , h. moins que ce ne foit dans le temps oii les eaux font trcs-balTes. M. Deparcieux avoit era cet examen fuffifant pour faire difparoitre I'objedion, mais voyant qu'elle revenoit toujours, il a penfe que le feul moyen fuftifant de la detruire, etoit un nouvel examen fait dans la forme la plus authentique. D:iis cette vue il s'adreffi \ la faculte de medecine , qui fe preta vo- lonticrs i ce qu'il deliroit, & nomnia des commilTaires pour faire Texameii en queftion ; ceux de ces commiiTaires qui out pu fuivre les operations & figner les proccs-verbaux , font Mrs. Majault, poiffonnier, de cette acade- niie, de la Riviere le jeune, Roux & d'Arcet: nous aliens expofer I'abr^gc & le refultat de leurs operations. La premiere chofe qu'ils firent , fut de fe tranfporter avec M. Depar- cieux au pont de Gif, pour voir emplir les bouteilles & les cacheter, & pour examiner la vallce ou coule I'Yvette, pour connoitre fon lit & le terrain des environs, meme Julqu'auprcs de Chevreufe, ayant toujours k la main de quoi faire toutes les cpr'euves qui pouvoient etre faites fur les lieux. Les experiences fuivantes exigeoient qu'on comparat I'eau de I'Yvette avec celles qui etoient gencralement reconnues pour les plus I'atnes & les plus falubresi les eaux qui ont fcrvi de termes de comparaifon , font I'eau diftillee, I'eau de Seine, celle de Loire, celle d'Arcueil, cells de Sainte- Tome XIV. Panic Ffancoijc, C H V $ I Q U E. tS A B R E G ^ D E S M E M 0 T R E S iReine, & cellc de Briftol-, toutcs ces eaux out etc foumifes aux niemes ^preuves que I'eau de I'Yvette. Le premier pas qu'il y avoit h faire dans cette recherche , etoit de s'af- ^nm'c lj6S. finer de la difference de pefanteur fp^cifique de toutes ces eaux : I'areo- iiietre ou pefe- liqueur en fournilloit un moyen facile, mais il ne donnoit pas une prccilion fuftifante ^ caufe de la grolfeur de fon col ; M. Depar- cicux a imagine d'en faire conftruire un dans lequel ce col eft remplace par un fil d'argent ou de laiton , & cette fubftitution lui donne une fenfi- bilite infiniment plus grande", c'eft i I'aide de cet inftrument qu'on a pu determiner les diiierens degres de legerete de I'eau, avec une precifion fuf- fifante, &: I'cxperience a appris fur ce fujet beaucoup de chofes qu'ou n'auroit pas trop devinees. On ne fera pas furpris de voir que I'eau diftillee ait ^te la plus legere de toutes, les autres ont fuivi cet ordre; I'eau de la Loire, prife devant Menars, celle de la Seine, celle de I'Yvette, celle d'Arcueil, celle de Sainte-Reine, celle de Ville-d'Avrai, celle de Briftol & celle de puits. Les experiences ont etc portees plus loin •, on a mele avec I'eau dilicrens fels & difterentes malieres , dont on connoiffoit exaftement la nature & ]a quantite; elles ont conftamment altere le poids de I'eau, foit en la ren- dant plus pefante , foit en la rendant plus legere, mais fans que Ton ait pu en tirer aucune indu<5i:ion fur la falubrite de I'eau ; fouvent des matieres incapables de I'augnienter ou de la diminuer, ont fait varier confiderable- iT.ent fon poids, les memes matieres qui feules y avoient occafionne une certaine difference, ont produit des eftets plus ou moins grands lorfqu'elles ont ete melees ; la quantity d'air que contiennent les eaux , & qui femble- roit devoir en diminuer le poids, I'augmenteau contraire lenliblement; eii un mot, il refulte de cet examcn que, quoiqu'en general on doive, toutes chofes d'allleurs egales, choifir I'eau la plus legere, c'eft un moyen afl'ez in- fidelc de decider de la falubritd des eaux , que de s'en rapporter k la feule difference de leur pefanteur fpecifique, puifquc des matieres qui ne peuvent certainement nuire, font capables de I'augnjenter. Le furplus des epreuves exigeoit des operations chymiques , & elles ont cte faites dans deux laboratoires differens, les refultats fe font prefque tou- Jours trouves les memes, & Meffieurs les commiffaires en ont conftate la certitude par treize proccs-verbaux. La premiere operation a ete de diftiller Jufqu'i ficcite fix livres de cha- cune de ces eaux , pour avoir ea refidu fee, les matieres etrangeres qii'el- les pouvoient contenir ; I'eau de I'Yvette a laiffe de refidu fee , 7 grains & -jj par pintCv celle de Briftol 15 grains & jj, celle de Sainte-Reine 1 ; grains &f^, celle de Ville-d'Avrai jp grains& ^, celle d'Arcueil 7 grains & -^, & enfiii celle de la Seine 5 grains & ^. II refulte de tout cet exa- nen que I'eau de I'Yvette joint ^ la propriete d'etre une des plus legeres, celle d'etre une de celles qui contiennent le moins de matieres etrangeres. II etoit alors queftion de fa voir ce que contenoient ces differens reli- dus -, pour y parvenir, on les mit tous au poids de i gros, chacun lur un iiltie foutenu par lUi entonnoii fupporte par un bocal , & on verfa DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. reHt dire audi quelle eft une des plus difficiles; comment en efFet ofer entreprendre de fonder fous I'eau & quelquefois meme ^ des profondeurs conliderables, des niaflifs qui doivent porter des poids immenfes, & cela (ouvent fur des terrains qui n'ont aucune folidite & auxquels on eft oblige d'en procurer, poiur ainu dire , une artihcieile J La prcffiiere idee qui a du fe prefenter \ ce fujet & qui s'eft effective- mcnt preient^e , a ete d'enfermer de routes parts I'cipace dans lequel on vouloit travaillcr , pour empecher I'eau d'y entrer , & de vmder avec des machines ccllc qui y etoit contenue; & cette methode a cte en elfet fui- vie prefque jufqu'^ prefent par la plupart de ceux qui ont conduit de feru- blables ouvrages. Mais cette fagon de fonder les ouvrages eft lente & difpendieure , & ck: plus file n'eft pas toujours sure-, les moindres defauts dans la conftruttioti des batardeaux ou enceintes qui doivent empicher la rentrec de I'cau, peuvent en aneantir I'effet en tout ou en partie, & quand meme on auroit Fris de ce chef les precautions les plus lages, on ne feroit pas encore ^ abri de tous leS accidens : les fources & les filtrations qui partent du fond, peuvent rendre inutile ou retarder coniiderablement tous les travaux. II etoit done important de trouver d'aurres methodes d'etablir folide- ment les fondations de ccs fort^js d'ouvrages, S: de perfe(3:ionner celle-ci dans les cas oil Ton feroit oblige de t'eniploycr; c'eft effedrivement ce que Ton a fait depuis ua pen moins d'un liiiclc; que I'emulation a etc excitee dans cettc-partie, & c'wil i expofer les methodes qui tendent 4 I'un o» ii ABREGE DES ME MOIRES I'aiitre objet, qu'eft deftine le memoire de M. Perronet duquel nous avons Physique.^ '^^"'^''^ compte. Un des premiers moyens qu'on avoit imagines pour fe paffer de batar- Ann^eijSG. deaux & depuifemens, avoi: ete de jetter des quartiers de picrre fur le fnble, dans toute letendue du terrain que devoit occuper le pont , juf- qu'i lepaiffeur d'environ cinq pieds i ce maffif lie par le fable & les vafes xjui s'introduifent entre les pierres, forme un radicr tres-folide & fur lequel on pent fonder avec furete les piles : on n*a pas meme en ce cas ^ redou- ter les affouillemens de I'eau qui caufent fi fouvent la ruine des ponts, niais cette conftrudion eft difpendieufe , & de plus, I'^levation de ce ra- dier nuit ^ la navigation. Cette mdthode avoit ete employee au pont des Sept-Voies fur un des bras de la Loire ^ Saumur. On avoit employe ^-peu-prcs le meme moyen au pont fait k Marfal en Lorraine fur la riviere de Seille ou le fond eft tres-marecageux , ^ cela prcs qu'au-lieu de pierres de taille on a employe des briques non facon- nees & jettees au hafard dans le marais , pour former un encroutement ou radier general d'environ cinq pieds d'epaifleur-, cette conftrudion qu'on iiomme le briquetage de Marlal, eft attribuee aux Remains : on peut aufG execurer la meme chofe avec de la menue pierre dure. Ces efpeces de radiers de maconnerie genent, comme nous I'avons dit, la navigation , parce qu'ils font eleves au-deffus du fol de la riviere ■■, il eft pollible d'en conftruire de pareils aflez profondement fous I'eau pour ne pas gener la navigation : mais il faut pour cela employer les batardeaux & les epuifemens. Feu M. Blondel avoit fait conftruire de cette manicre quatre des an- ciennes arches du pont de la Charente au moyen d'un radier de ma9on- nerie : mais le fond etoit de glaife , & par confequent exempt de fources & de filtrations, ce qui avoit favorife I'etablifleraent de fes batardeaux 5i fes epuifemens. M. de Regemorte, premier ingenieur des Turcies & Le- vees, s'eft trouve dans un cas bien different lorfqu'il a fait conftruire le nouveau pont de Moulins fur la riviere d'AUier •, on fait que le fond de cette riviere eft un fable fin & mouvant, qui n'a que tres-peu de folidite & fur lequel il eft comme impofllble d'etablir des batardeaux, parce que ce fable permet ^ I'eau de revenir par-deffous, ce qui rendroit I'epuife- ment impoffible : cette difficulte n'a pas effraye M. de Regemorte, il a trouve dans fon genie des reffources pour parer ^ cet inconvenient; uiie couche de glaile d'environ 8 pouces, recouverte de planches d'environ 6^8 lignes d'epaifleur, a fuffi pour arreter les filtrations & rendre I'^pui- V fement trcs-facile, & le radier de maconnerie a ete conftruit tres aifement fur ces panneaux de planches & avec la plus grande folidite : c'eft ainfi 'que M. de Regemorte a trouve le moyen de domter I'inftabilit^ du fable de I'Allier, & qu'il a pu obtenir le fucces le plus parfait dans un ouvrage fi important , auquel les plus habiles en ce genre avoient toujours echoue avant lui. Cette operation eft pofTible tant que le fond de la riviere fera de vafe OU de fable fin , mais li ce fond etoit de gros gravier , ou de pierres & DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 15 de cailloux qui donnaflcnt de plusgrandes i^Tues ^ I'cau, 01), fi Li riviere i^m^^— » ctoit trop profonde oil fujette aiix flux & reflux de U mcr, il £audroit s'y „ firendre differeuiment : on a uu cxeuipic d'uiie parcille conflruiJlion dans '* 1^ S ' Q u 1 fondation du pont dc Wertminfter lur la Tamife, execute en 1758 par Annie t~6G. M. de la Belie •, cet ingenieur voynnt que la marce , qui inoiite en cet en- droit de 17 pieds, nc perniettoit pas de fe fervir de batardeaax ni d';i- puifemens , prit Ic parti de batir dans de caiilons de f.ipin flottans, qui avoieiit la forme & la grandeur de I'emphccnient des piles-, on les fixoit avrc des pieux au-dcfiiis d-.- leiidrcit ou devoicnt etrc adifcs les piles, & apres avoir folidement bati & cramponne plufieurs aflifes dans le caiUon , on le fubmergeoit au moyen d'une vanne qu'on ouvroit , & qui permet- toit \ I'eau d'entrer dans le caiffon ; on laiffoit alors pafler Ic temps de la haute mer, & peu de temps avant les balTes eaux, on dpuifoit ie caifTon avec quatre pompes , apres avoir ferni^ la vanne , & on continuoit le tra- vail de ma^onneriei la meme chofe fe repetoit a toutes lesaiarces, jufqu'a ce que la inagonncrie eut atteint une plus grande hauteur que celle des bords du cailTon , qui ctoit de 16 pieds, alors on demontoit ces bords & on continuoit le travail; cette meme methode avoit etc employee a Tou- lon, i la conftrudion dun mur de quai, &^ Nice pour la fondation du Mole : on a mis encore en ufage deux autres niethodes pour ctablir dans I'cau des fondations fans epuifemcns. La premiere eft de batir le bas de la pile en gros quartiers de picrre dc tnille, bien jointoyee & cramponee fur un radeau de forte charpente, fou- tcnu i li furface de I'eau par des machines & des cables places fur des ba- teaux & de defcendre enfuire le tout au fond de I'eau fur le terrain qu'on a d'avance prepare & dreffe de niveau; elle a ete employee au pont d'Ollie, conftruit fous I'empereur Claude, & k la mofquce faite ^ Conftantinople par les ordres de Dragut-Reys , mais elle ne peut convenir qu'aux endroits ou il ne fe trouve qu'une mediocre profoiideur d'eau, &: feroit impratica- ble dans une mer agitee. Dans ces deux derniers cas, on fait la fondation en beton , cette ma- connerie eft compofce de pozzolane , de terrafies de Hollande ou de cen- dree de Boulogiie , incorporee avec de la chaux vive & de la pierre caiTee ou des petits cailloux, & pofee alternativement avec d'autres Mts de pier- res moyennes •, on defcend cette niaconnerie dans des cailles dont le fond peut s'ouvrir, poiu" la placer fur I'efpace ou on veut fonder, & que Ton a prccedtniment egalife ■, cette maniere de batir forme en peu de temps un niaflafde la plus grande folidite : il paroit par ce que dit Vitruve, que les Romains connoilfoient cette methode, mais ils ne fc fervoient pas des caitlcs dont nous avons parle , ils jettoient leur bcCon dans I'eau apres avoir entoure Templacement d'une file de palplanches ; elle a ete mife en ccuvre €n 1748 , a Tonlon, telle que nous i'avons decrite, dans la fondation de la nouvelle Darfe. Cette methode eft tr^-bonn€ quand on peut fe procurer les mat^riaux convenablcs, car Ics mortiers ordinaires nepeuvent y fuopleer; elle exige encore que k fond foit .llide, mais h les matiriaux manquoitiit , ou que 14 ABREGE DES MEMOIRES — i— — — le fond fut de fable mouvant, & fujet aux affoiullemens f.iits par le cou- p , rant,elle feroit impraticable , & M. Perronet en a imagine un autre qui, H Y s I Q u E- j^i^j j.g P35 meme, procure i I'oiivrage la pUis grande folidite, fans ba- Ann^e ij66. tardcaux ni epuifeniens : effayons d'en prefenter une idee. II commence par entourer de pieiix I'enccinte de I'emplacement de la pile, on y fait enfuite arriver un affemblage de charpente en forme de grillage , dont les mailles ou cafes doivent recevoir les pilots , ce grillage ctant fixe \ la profondeur convenable , on bat un pilot dans chaque maille & un rang de fortes palplanches jointives au pourtour de ralfemblage, & le tout etant battu jufqu'^ refus d'un fort mouton •, on recepe les tetes ^ raffleuiement du grillage de charpente , au moyen de la fcie inventee par M. de Voglie, Ingenieur des ponts & chauflces , cette fcie pcut travailler jufqii'^ 15 picds Ibus I'eau, & etre cependant menee par des hommes pla- ces i fa furface •, on defcend enfuite au pourtour des quartiers de pierre d'un haut appareil, en une ou plulieurs affifes, retenues enfemble par un chailis de fer , de maniere qu'on peirt les couler & les ficher en mortier fur I'echafaud avant que de les defcendre-, on demonte enfuite le challis de fer & on emplit I'int^rieur avec de forts quartiers de pierres ou liba- ges & de bons mortier de chaux & de ciment, ce qui alors eft extreme- nient facile , parce que la tete des affifes eft au-deffus de I'eau. Cette methode epargne des depenfes immenfes,& ce qui eft bien plus avantageux, un grand norabre il'hommes qu'on feroit, fans cela, oblige d'enlever aux travaux de la campagne •, elle a hi niife en ufage avec le plus grand fucccs au pont de Chazai , route de Lyon i Geneve , conftruit en 17^6 par M. de Saint- Andre, ingenieur des ponts & chauflees, & au pont conftruit fur le grand bras de la Loire, i Saumur en 1757 > par M. de Voglie; mais dans cette derniere occallon on a employe les caiifons de Weftminfter, h cela prcs que comme on n'etoit pas gene par la maree, les caiffons font toujours reftds ^ fee, & on n'a pas eu befoin de les ipuifer deux fois par jour. Mais ce qui eft cxtrcmement important , & dont M. Perronet ne man- que pas d'avertir, c'eft que quelque methode qu'on emploie,on ne fauroit prendre trop de foin pour que les pilots foient enfonces au refus d'un fort mouton : on eft effraye quand on voit le poids enorme que ces pi- lots ont ^ foutenir ; au pont que M. Perronet vient de faire conftruire ^ Mantes, & dont les arches ont dix-huit ou vingt toifes d'ouverture & trente-trois pieds de longueur, chai]ue pile eft chargee d'un poids d'en- viron feize millions, ce qui, partage entre les quatre-vingt-dix-neuf pi- lots , leiur donne ^ chacun une charge de plus de cent foixante milliers ; il eft aife de voir par-li combieji il eft neceflaire que les pilots foient affez battus pour pouvoir ne pas ceder fous un fi enorme poids, ce xjui entrai- neroit infailliblement la ruine entiere du pont. Combien de reflbiu-ces I'art & le genie ne fournilfcnt-ils pas aux hommes pour vaincre des difli-: cukes que la nature fenible prefenter comme infuimontablesl - ; Sur DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 15 Physique. Sur I'icoukment des fluides par les ouvertures des vafes. ytnntf' iiGS f A certitude des dcmonftrations geometriqnes eft telle que les Gcomc- Hift. trcs nc peuvent etre partagts fur les queftions de pure geometrie, m,.is dcs qu'il eft queftion d'appliquer cette fcience \ la phylique, la certitude dimi- nue, & fouvent la plus petite circonftance ajoutce ou omife dans les con- ditions du probleme, peut rendre detedlueufe la folution la plus (avante. Le mouvenicnt d'un fluide qui s'ecoule d'un vafc par une embouchure donncc , en fournit un exemple ■■, la determination des loix de ce niouve- ment a ^tc tcntee par les plus grands Geometres , cependan: M. de Borda< a cm remarquer quelques errcurs dans les folutions qu'ils ont donnees de ce probleme, & c'eft \ en fubftituer de plus exades qu'eft deftine le me- moire qu'il a donne cette annee, & duquel nous avons \ rendre compte. Prefque tous les autenrs qui avoient traite cette matiere , & notamment meffieurs Daniel Bernoulli & d'Alembert avoient (implement iiippole le fluide partage en tranches horizontales, qui fe fuccedoient les unes aux autres, \ mefure qu'il s'ecouloit par I'ouverture pratiquee au fond du vail- ieau; mais ils n'avoient pas fait attention i I'obftacle que le fond oppofe ^ cet ecoulement, & fur- tout \ celui qu'eprouvent les molecules d'eau pla- cees fur ce fond & eloignees de I'ouverture , ils avoient d'ailleurs employe dans cette recherche le fameux principe de la confervation des forces vi- ves; & M. de Borda fait voir que ce principe n'a pas toujours lieu dans les recherches de ce genre, auflt leurs lolutions, trcs-juftes dans le cas oil i'ouverture feroit tres-petite, ceflent de I'etre quand elle devient conlide- rable , & M. de Borda a die oblige de recourir it une autre hypothefe. Au lieu de confiderer le fluide comme partage par tranches horizonta- les , il le regarde comme contenu dans une infinite de tres-petits canaux qui , partant de tous les points de la furface , vont en fe courbant & fe re- trecilLnt, fe rendre \ tous ceux de la furface de I'ouverture par oii le fluide s'ecoule-, il determine d'abord la courbure que doivent prendre ces ca- naux & Icur retreciffement, puis enfuitc la vitt-Ue que le fluide y doit pren- dre : d'ou il fuit qu'cn integrant fon equation , il a la mirche totaJe du fluide dans fon ecoulement. L'equation ^ laquclle M. de Borda parvient par cette methode, ne dif- fere de ceile des folutions dc mcflieurs Bernoulli & d'Alembert , que par le fcul terme qui eft relatif a la quantite de I'ouverture par oii s'ecoule le fluide, nous en venous de dire la raifon d'avance, mais malgre cette di- fcrence, la folution meme de M. de Borda ne peut etre regardee comme exacle, que lorfque cette ouverture eft trcs-petite, & ceci tient k un autre principe qu'il eft ncceffaire de difcuter. Newton s'eft apper^u le premier que la velne de fluide qui fort d'un vafe, fe cc^ntraile i une petite diftance de I'orifice par lequcl elle iort, & il en attribue la caufc au mouvemcnc du fluide qui fe rend ^ I'oridce par Tome XIV. Fartie Francoife. D xS AB R E G i D E S M E M O I R E S iMimiiiiMfiiiMiM— des diredions converpentes , ce qui rentre ablolument dans I'idee des pe- _ tits canaiix de M. de Borda. 1 H 1 s I Q u E. j[ „e feroii peiit-etre pas aife de donner nne regie generale de ce retre- Ann^e 1166. ciirement on contrailion de la veine, mais ce qui ieroit extrcmement dif- ficile ^ faire en general , devicnt beaucoup plus facile dans Ics cas particii- liers", M. de Borda trouve par exenipk-, que la veine de fiuide qui fort d'un vafe par un tuyau iiifiniment eiroit, qui entre dans la capacite dil vaifil'au , fe reduit ^ moitie , & qu'en otant le tuyau , la contraction devient moiiidre. M. Newton I'avoit trouve par experience dans ce cas dans le rapport de /^ i i i •, M. de Borda a repete I'cxpericnce plus en grand, & il a trouve que le filet d'eau fc contradloit dans le rapport de i')47 i 100, au lieu du rapport de 141 | ^ 100, que donnoit M. de Newton ; vraifem- blablement cette difference vient de ce que M. Newton avoit fait fon ex- perience lur un orifice trop petit, & dans lequel le plus grand frottement contre les bords de I'orifice , diminuoit la coniraftion. La methode de connoitre la contradlion de la veine par la mefure im- mediate eft sure, mais elle n'cft pas precife, M. de Borda I'a cherchie par line autre voie indiquee par M. Bernoulli : voici far quoi cette methode eft fon dee. Puifque le diametre de la veine fe coritra(5le, il eft clair que dans un temps donne , il paiTe moins de fluide qu'il n'en palferoit dans le meme temps s'il ne fe contra(5toit pas : or on peut calculer par Ics methodes con- nucs, combien il pafferoit d'eau par une ouverture auffi connue, faite il un vaifTeau de capacite donnee; la difference entre cette quantite determinee par le calcul & celle que donnera I'experience , donnera done le moyen de connoitre la quantite dont la veine de fluide fe fcra contradee. En employant cette methode, M. de Borda ajouta quelque chofe ^ Ii maniere dont elle avoit etc pratiquee jufqu'alors ; il fe fcrvoit d'un vailfeau cylindrique de 5 pieds de diametre, au fond duquel ctoit perce un trou, garni d'un tuyau de 24 lignes -^ de diametre, qui entroit de quelques pou- ccs dans ce vailfeau; il avoit fait preparer un autre bout de tuyau qui en- troit fur la partie du premier, contcnue dans le vaiffcau cylindrique, & dont la tere portoit un large plateau perce d'un trou, dont le diametre ctoit precilement egal ^ celui de I'orifice du premier tuyau; ce plateau etoit deftine ^ intercepter la continuite enae la partie du fluide, voifine du lube, qui fe trouvoit au-delfus de I'orifice, & celle qui etoit au-deffous , & il devoit neceffairement arriver que fi les filets d'eau imagines par M. de Borda avoient effedlivement lieu, leur jeu fut gene par le plateau, leur di- redion rendue plus approchante de I'horizontale, & que par conlequent ia contradion de la veine fut plus grande ; c'eft cffedivement ce qui eft arrive ; en fe fervant du tuyau fans plateau la liqueur a employe 17 j" t ^ baiifer de 4 pouces dans le vaiffeau , & en remeitant le plateau elle n'en a cnj- ployc que 145 , mais la liqueur avoit ii pouces 31 lignes de charge dans la premiere experience, & elle n'en avoit que 7 pouces & 11 lignes dans cette feconde ; done la veine s'ctoit plus contradee dans la feconde expe- rience que dans la premiere, & cffedivement le calcul a doime la contrac- DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 17 tion de la veine pour le premier cas, dans le rapport de 194 i- i 100, & '^■— — — dans la feconde de i 60 ^ cenf, cette thiorie de !a contra- tes aux vales, la mcme cliofe fe doit entendre des tubes qui vont en s'e- largiffant, & des vafes dont la forme feroit irreguliere •, on peut & on doit meme ctendre cette propolition jufqu'aux lipbons qui n'ont pas la meme grofleur dans toute leur longueur , & M. de Borda fe trouve encore en ce point dun fentiment different de celui de M. Bernoulli; ce favant geo- m^tre cherchant dans fon hydrodynamique le mouvement du fluide dans 1111 liphon, & employant le principe de la confervation des forces vives, il trouve que quelle que foit la figure de la partie inferieure du hphon, la Uuface la plus elevee du fluide, dans le commencenient du mouvement, delcend de la meme quantite; cette affertion eft, felon M. de Borda, bcaucoup trop generale, & elle ne peut ctre vraie des qu'on fuppofera dans la partie inferieure du fiphon , un ctranglement infiniment petit pac rapport aux parties fuperieures du tuyau, pu'ifqu'en ce cas la vitefle du fluide dans ce palfage devroit etre inhnie, & li ce riitrcciUement infini al- tere infiniment le mouvement du fluide, un moindre augmentera la vitelie ^ proportion de fa quantite i & il y aura toujours une perte de forces vi- ves, i moins que le liphon ne foit egal dans toute fa longueur, Ce meme principe ne s'applique pas plus heureufement a la theorie de ]a rcfiftance des fluides •, pour reloudre ce probleme d'une maniere ger.e- rale , on fuppofe un corps place au milieu d'un fluide en mouvement, & retenu immobile par une corde qui palTe fur une poulie & au bout de laquelle eft un poids qui fait cquilibre avec riinpuliion que le mouvement du fluide donne au corps plonge ; on imagine enluite que les molecules du fluide fe meuvent autour du corps pJonge, coaime dans une infinite de petits canaux qui I'entourent •, ces canaux Jans cette hypothefe font de veritables fiphons, mais tous retrecis dans une partie de leur courbure : il doit done y avoir une perte -de forces viyes & le principe ne peut s'em- ployer ^ cette recherche •, & en etlet , en le fuivant , on trouve nulle la rcfiftance que le fluide cprcuve a la rencontre du corps qui y eft plonge , ce qui eft cvidemment faux. La viteffe de lecoulemcnt & la figure du vafe peuvent etre telles que toutes les tranches ne fe fuivent pas exaitement , & que la continuite de la maffe du fluide foit interrompue dans quclqucs inftans, il s'agit done de detern^iner ou le fcra cette feparation : ce probleme avoit etc dcja re- folu pat lil. d'Alembert ■■, M. de Borda termins fon memoire par une fo- 50 ABREGfiDESMEMOIRES ^—1^— — i^— lution tres-fimple dii nicme probleme, foit qii'on regarde le fluide comme ^ anime par fa ("eulc peianteur, foit cju'on y ajoutc celle de rathmofphere. i. H Y s I Q u E. Q^ j^g s'imagine guere en voyant (ortir de I'eau par line ouverture faite Annee 1766. ^ "" vafe, qu'un efiet qui parolt li limple puiffe donncr lieu ^ des recher- ches i\ fubtiles & li curieules. Sur quelqaes nouvcaux phinomenes d'HydroJlatique. Ilift. VJ N evenement fingulier a occafioiini les recjierches de M. I'abb^ Nol- let, defquelles nous avons i rendre compte. Un ferblantier de Seville en- treprit d'elevc r , ^ 60 pieds de hauteur, de I'eaU deftinee ^ arrofer des fleurs placees fur une terraffe ; comme cet ouvrier ne connoiffoit vraifem- blablement pas d'autres pompes que les pompes afpirantes, il crut pouvoir clever I'eau i cette hauteur par leur moyen , & il en etablit une ; il n'eft pas neceffaire de dire qu'il ne rduffit pas : defefpere du peu de fucces de ion entreprife, il jetta de fureur fon marteau contre le tuyau montant, & y fit par ce moyen un trou d'environ une ligne ^ 10 pieds au-delTus da refervoir oil la pompe puifoit I'eau ■, fa colere fit plus que fon genie , & au meme moment I'eau arriva ^ la hauteur demandee : cette experience fut repetee par plufieurs perfonnes en Efpagne , & toujours avec le meme lucccs. Les premieres relations qu'on eut ici de ce fait, trouverent peu de creancc parmi les phyliciens, il contredifoit en apparence toutes les loix de I'hy- droftatique, & M. I'abbe Nollet ne doutoit pas qu'on n'eut omis, dans le recit qu'on en avoit fait , quelque circonftance qui en feroit difparoitre le merveilleux des qu'on en auroit connoillance. On n'ert avoit cependant omis aucune, & le phenomene bien examin^, rentre exaftement dans les memes loix qu'il femble contredire. Feu M. le Cat, correfpondant de I'academie avoit audi entendu parler de la pompe de Seville , il en avoit fait I'experience , & voici de quelle nianiere il I'avoit faite; il avoit etabli i ^5 pieds de hauteur une pompe afpirante dont le tuyau d'afpiration ctoit plonge dans un refervoir plein d'eau, & i environ 10 pieds au-deffus de I'eau il avoit pratique un petit robinet qui , lorfqu'il etoit ouvert , permettoit ^ I'air d'entrer dans ce tuyau , & lui interceptoit le paffage lorfqu'il etoit fermc. La pompe etant mife en Jeu, I'eau monta k I'ordinaire ^ la hauteur de ;2 pieds, raais audi-tot qu'on ouvrit le robinet I'eau parvint ^ la hauteur de 55 pieds-, il eft vrai que ce ne fut que la partie qui etoit dsja elevee au-deffus du robinet, & pour en obtenir d'autre il fallut fermer le robi- net & I'ouvrir enfuite, ce ne fut que par cetre alternative d'ouverture & de fermeture du robinet que M. le Cat parvint h. elever fon eau i la hau- teur defir^e. M. I'abbe NoIIct n'eut pas de peine ^ reconnoitre dans la pompe de M. le Cat, I'experience connue fous le nom de chambre dc Paj'cal ; ui.s DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ?. coloniie totale de I'athmofphere h laquelle on donne entree dans un tuyau "i^— ^i— m^m vertical vuiJe, doit remonter k la nicme hauteur que lathmofphere meitie, p fi Ic tuyau alloit Jufque-la, ou etre contre-balancee par un poids equiva- " ^ s i q j, e. lent; ce poids, dans la circonftance prciente, til la colonne d'eau qui fe ylniu'c t7oG trouve dans !e tuyau au-deffus du trou -, (i elic avoit 51 pieds, eile leroit prccifement cgaie au poids de I'air qui entre par ce trou, mais elle n'en a que 11, elle doit done etre portce en liaut vers la dccharge de la pompe, tandis que la partie de I'eau qui eft au-deffous du trou retombera dans le refervoir. Tout ceci eft abfolunient conforme aux loix de I'hydroftatique , mais pour rcalifer, pour ainli dire, ce raiionnement , M. I'abbc Noliet fit I'cx- pcrience luivante ; il remplit entiercnient de mercure un tuyau de verre de 4 pieds de long, de la meme grofleur que ceux des barometres , fcellc hermetiquement par un de les bouts; k environ 9^10 pouces de I'autre qui etoic ouvert, il y avoit un petit trou capable d'admettre une groffe cpinglc & bouchc avec de la cire molle; le tube fut enluite renverfc dans un vale qui contenoit du mercure, oil Ton extrtmite ouverte fut plongce; une pattie du mercure retomba dans le vafe , & la colonne de ce fluide qui demeura fufpendue dans le tuyau , prit la mcme hauteur que le baro- metre ordinaire, la partie fuperieure du tuyau demeurant ablolument vuide ; alors le petit trou ayant ete debouche, la partie de la colonne de mercure qui etoit au-dellous, tomba dans le refervoir, tandis que celle qui etoic au-deffus, s'clanca impetueuleraent vers le haut du tube & y demeura at- tach ce. II paroit par cette experience que toutes les fois qui! y aura un vuide au hiUt d'un tuyau plongs dans un vi(e plein de liqueur, & dans Icquel une colonne de cette liqueur eft loutenue, & qu'on ouvrira un pallage k I'air un peu au-d^lTus dc la lurface de la liqueur ou le tuyau eft plonge, la partie de cette colonne qui fera au-deiius du trou par lequel entre I'air, fera portee rapidcment vers le haut du tuyau, & que li on referme enfuite le trou pour faire clever une nouvelle colonne d'eau, on enlevera encore celled en le debouchant, & que cette alternative aura lieu tant qu'on fera le vuide au haut du tuyau & qu'on ouvrira & fermera lucceffivenient I'ou- verture qui donne entree h lair; explication naturelle & trcs-conforn)e aux loix de I'hydroftatique de I'effet de la pompe de M. le Cat ; mais voici quelque chole de bien plus fort. Tandis que M. I'abbc Noliet etoit occnpe de ces reflexions, on vint lui apprcndre qu'il y avoit a Paris une pompe femblable a celle de M. le Cjt, mais qui clevoit I'cau k 55 pieds de hauteur par un jet continu, lans qu'il flit befoiu d'ouvrir 8c de krmer alternativement le tuyau qui donne paffage a i'air, & que cette pomp; linguliere etoit etablie place Dauphine, chez le lieur Bellan^e, orfevre-bijontier. Ce fait qui paroifioit dctruire I'explication qu'il avoit donnde de la pompe de M. le Cat, etoit propre a piquer la curiotits, & il lui etoit trop aiie de la latistairc, pour qu'il ne s'emprelTat pas de s'alTurer par les propies ycux qu'on ne lui en avoit pas impoic , & il fe tranlporta en efTet fur le lieu. ,1 ABREG^DESMEMOIRES MMni MJMiJMM L'examen de la pompe dii fieiir Bellange le convjinquit qu'oii ne liii p avoit rien avance que de vrai ; elle eft compofte d'un corps de pompe H \ s 1 Q u E- j'pn^,;i-of, uf, pied je hauteur fur i^ lignes de diametre-, le pifton dont Annh ij66, le j^u eft de huit pouces, eft perce dans toute fa longueur, & garni d'une foupape qui permet \ I'eau de le traverfer de deflous en deffus quand on Tabaiffe; & au bas de ce corps de pompe eft une foupape qui permet ^ I'eau & \ I'air de monter, mais les empeche abfolument de redefcendre de ce meme endroir oii elle eft amence par un tuyau afpirant de plomb , ver- tical , de 5 5 picds de long & d'environ lo lignes de diametre", il eft plonge par le bas dans un tonneau ouvert & plein d'eau , & 4 fon extre- niite eft une foupape qui permet ^ I'eau d'y monter & I'empeche de re- defcendre , enfin i environ un pied de la furface de i'eau du tonneau , le tuyau eft perce d'un trou de prcs d'une demi-ligne de diametre, recou- vert en-dedans d'une petite foupape tres-legere & tres-mobile. Les chofes etant ainfi difpofees , M. I'abbe Nollet obferva que la ma- nosuvre de la pompe fe failoit avec affez de vitelle pour quelle donnat quarante coups de pifton par minutes-, que nonobftant cette viteffe , I'caii fut affez long- temps ^ parvenir au corps de pompe, mais qu'y etant une fois parvenue, elle coula fans interruption tant qu'on fit aller le pifton. Nonobftant cette continuity du jet , M. I'abbe Nollet s'apper^ut bien que la pompe ne rendoit pas, ^ beaucoup pres, la quantite d'eau qu'elle devoir rendre, elle n^en avoit rendu en lo minutes que 36 pintes , & ces 56 pintes n'etoient \ peine que la fixieme partie de ce qu'elle auroit du produire en calcuiant le diametre du corps de pompe & la levee du pifton. Pendant qu'on continuoit ^ faire agir la pompe, M. I'abbe Nollet def- cendit aupres du refervoir , & voici ce qu'il y obferva : fair exterieur en entrant par le petit trou perce 10 pouces au- deffus du niveau de la fur- face de i'eau du refervoir, formoit un fifflement, & I'eau qui montoit fai- foit entendre un petit gargouillemenr en paffant devant le trou. Si le tuyau montant avoit ete diaphane , il auroit ete facile de voir ce qui s'y paffoit, & de determiner la caufe de ce phenomene, mais fon opa- cite ne le permettoit pas, & M. I'abbe Nollet fut oblige, pour ainfi dire, de le deviner. • Le peu de rapport qui fe trouvoit entre la quantite d'eau fournie par la pom,pe, & cellc qu'elle auroit du donner, fit d'abord voir ^ M. I'abbe Nollet que toute la colonne qui occupoit le tuyau d'afpiration , n'etoit pas de I'eau , & il concut aifement que fair qui entroit par le petit trou & qui n'etoit pas en alfez grande quantite pour empecher abfolument le vuide du corps de pompe , fe meloit dans la colonne d'eau & I'cntrecoupoit , pour ainfi dire; d'ou il refultoit que cette colonne compofee en partie d'air & en partie d'eau , n'avoit au total qu'un poids raoindre que celui de I'ath- mofphere , & qu'elle pouvoit , nonobftant fa hauteur de 55 pieds , etre enlevee & fortir par le tuyau de dechargc •, qu'il failoit meme qu'elle con- liiit beaucoup plus d'air que cet expofe ne femble le demander, parce que le vuide n'etant pas parfait, la pompe n'auroit pu foutenir I'eau en colonne continue DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 35 continue qui une hauteur beaucoup nioindre que la hauteur ordinaire de — ^ 3i P'Cfls- , / . , Physique. Cette explication etoit plau/ible •, pour s'affiirer f: die etoit exadement vraie, M. I'abbe Nollet prit xin tuyau de verre de 6 pieds di' iiMig fur Ann/e i^GS. 4 lignes de diametre au bout diiquel il adapta une petite pompe , I'antre fut plonge dans un vale rempli d'eau teinte avec de rorfeille; i d-'ux pau- ces au-delfus de la lurface de cette liqueur, le tuyau ^toit p'^rcc d'un troii capable de recevoir une moyenne epingle ; tout etant ainfi difpofc, M. I'abbd Nollet fit agir la pompe, & il vit que (a conjecture etoit exacleinent vraie ; la colonne qui s'eleva dans le tuyau, ie trouva compofee altcrnativement d'air &c d'eau, & Ics volumes d'air etoient plus along^s vers le haut que vers le bas. La pompe du fieur Bellangi rentre done dans les loix de I'hydroftati- que dont elle paroiflbit s'ecarter , elle eleve une colonne k la hauteur de 55 pieds, mais cette colonne n'eft pas plus pefante que celle d'une pompe ordinaire , parce quelle eft compofee d'environ r\ d'air , elle I'eft mcme beaucoup moins, & doit par confequent ctre enlevee, quoique le vuide foit moins parfait que Uns une autre pompe , mais elle fera toujours affu- Jettie i de certaines ort'cautions. Le tuyau d'a(pir..[ion ne peut avoir qu'un trcs- mediocre diametre i s'il etoit plus large, I'air & I'eau fe penetreroient mutuellement , cette der- niere occuperoit le bas du tuyau & la pompe ne tireroit que du vent : on ne pourra pas non pl'is augmenter beaucoup le diametre de la pompe, elle deviendroit excclTivemcnt pefante & difficile i manoeuvrer. Le diametre du petit trou n'eft nullement arbitraire , non plus que I'en- droit du tuyau auquel il doit etre perce ; s'il eft trop petit, il ne four- nira i'air que trop lentement , les volunics d'air qui doivent entrecoupcr la. colonne d'eau; fe formeront trop lentement, leront trop petits , &: 1* colonne ne parviendra pas au corps de pompe ; s'il eft trop grand , k colonne fera portee impetueufement vers le haut , & alors le jet n'aur* plus de continuite. L'endroit ou ce petit trou doit etre perce , doit etre afler prcs de la lurface de leau du refervoir, il partage en deux ce que le premier coup de pifton a enleve, & il n'y a que la partie fuperieure qui puilTe etre en- trecoupee d'air; aulTi M. Bellange a-t-il trouve que plus il eloignoit cette ouvertarc de la lurface du refervoir , moins il avoit de facilitc k Lire nionter I'eau : cette pompe, au refte, paroit preferable i celle du ferblan- tier defJeville, mais I'une & I'autre paroiffent plus curieufrs qu'utiles, & >1 y aura bien pcu de cas oii on doive leur donner la preference fur les autres pompes connues; il etoit cependant ncceffaire d'en difcuter les prin- cipes pour en determiner la valeur & pour faire voir que ce fait, en ap- parence ii extraordinaire , ne dcroge en aucune maniere aux Ipix de I'h/- droftatique. Tome XI v. Partie Franfoife. H ABREGEDES MEMOIR ES Physiquk. Annie ij66. ^"'' "'^ phinomenc ikclrique intirejfant , £' qui n'avoit pas encore e'tc objerve, JLVien n'eft peut-etre plus important pour ceiix qui s'appliquent ^ la phyfique experimentale , que d'obferver exadlement que dans toutes les occafions oil il s'agit de comparer enfcmble quelques effets, les circonftan- ces foient abfolument les memes , & que ces effets puiffent etre evalu^s avec exadlitude : I'obfervation fuivante de M. le Roi va fervir de preuve ^ ce que nous avan/n regarde ordinairement les pierres calcaires comme ne tenant que tres-peu ou meme point du tout de fel : voici cependant un fait qui prouve que cette regie eft fujette h exception. Dans le nombre des echan- tillons de pierres qui forment la colledion que M. Perronet a faite de cette inatiere , il s'en eft trouve deux qui , au mois de Juillet dernier, etoient recouvertes d'une efpece d'efflorefcence ou cryftallifation epailfe d'environ 4 lignes •, ces echantillons etoient de 2 pouccs en quarre fur un pouce d'epairieur-, ils avoient ^te tires de la carriere d'Augny prcs Ton- nerre-, Tun etoit pris dans le lit appelle le banc dur , dont le pied cube peft 135 livres 13 onces 3 gros & 9 grains , & I'autre fiifoit partle da lit qu'on nomme le banc blanc , dont le pied cube pefe 1 54 livres 14 on- ces 7 gros 5 3 grains •, la durete de la premiere etoit quadruple de ceiie du tufteau ou pierre de Saumur; & celle du fecond etoit double de celle de ce meme tufteau : d'autres echantillons de pierres prifes meme dans les carrieres voifiiTes & placees dans le meme terroir ou dans fon voihnage, n'ont donne aucun veftige d'efflorefcence ni de cryftallifation : ceux- ci ont perdu de leur poids une quantite tres-fenhble , ce qui prouve que cette produftion faifoit partie de Icur fubftance. L'academie a vu ces echan- tillons charges de leur efflorefcence que meflieurs Perronet Si Macquer ont apportes dans une de fes alTemblees. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 37 II. Ph Y S I Q U f. Le i6 jiiin ly 66 , le tonnerre tomba fur une des ailes dii chateau de ' Chazeron, litud h une liciic an nord-oii(.-ft de Riom. II y avoit au h.uit . de la cheminee la plus clevec du chiteaii , deux barres de fer deftinecb ^ porter dcs girouettes, c'eft par ces barres que le fluide eleiftriquc s'eft in- troduit ; Tunc dcs deux barres qui n'avoit plu's de girouettc depuis long- temps a etc jcttce ^ bas avec uiie partie du couronacment de pierrc de la cheminee, I'autre qui avoit encore fa girouette eft reftee en place. Le fluide cledrique fuivit les crampons de fer qui lioient les pierres de tailie de la fouche de la cheminee , & forfque ces crampons Iiii man- qucrent , il fe porta obliquemcnt fur le mur , marquant fa trace par ua (illon dans I'enduit de mortier pour.alier calfer deux pierres qui fervoicnt de linteau & de faux linteau i la croifee du fecond etage , & fe couler le long de I'efpagnolette aux deux extrimitcs de laquellc le bois du dor- mant a ete noirci de la grandeur d'une carte h joucr •, la boifcrie qui re- vctilfoit I'cmbrafure de la croifee a ete brifee & jcttee ca & li dans fa cliambre; quclques carreaux, dans le voilinage de la fenetre , ont etc ar- raches : on juge bien que la plus grande partie des vitres a (Ste caiTeei Ic fiu eledrique a paffe de li h la fenetre au-delfous de celle-ci , ou il a fait i-peu-prcs la meme chofe. La fenetre du rez-de-chauffee n'avoit pas d'efpagnolette, mais elle avoit des grilles de fer , le tonnerre a brifif de meme les pierres qui (ervoient de linteau & ou les barres etoient fcellces , a defcendu le long de ces barres &: gagnant par- 14 la baluftrade d'une terraffe dont les balullres de pierre etoient lies par des crampons de fer, il en a renverle une partie. Le concierge du chateau , fa fervante & un garde-chalTe etoient alors dans la chambre balk , le concierge & ia fervante furent maltraites , le concierge cut [i vefte dechiree & un de fes bas perce dans le pied fans que fnii fabot flit endommage, & on trouva fur fon corps pkilicurs mcurtrillures tres- fortes vis-^ vis toutes les dechirures de fes vetemens ; la fervante fut encore plus afFedee , elle perdjt connoiffance & ne la recouvra que le lendemain, elle a eu tout un cote meurtri depuis la tcte jufqu'au pied; de petites bmicles de fer qui attachoient fon corfet ont ete prefque toutes brilces & I'etiffe noircie k I'endroit ou ellcs tenoient ; une chaine de cuivre qui lui fervoit de ceinture a marque de meme fa place en noir iLir fes habits, & a etc brifee en morceaux; le garde a ete le moins mal- tr.iite de tous, le coup I'a jettc a terre comme les autres, nuis il s'lil audi tot relevc & a etc en etat de les fecourir, c'etoit la feconde fois que le concierge avoit etc touche du tonnerre dans le meme chateau. II eft bon d'obierver que la pierre de ce batiment eft de la lave dc Volvic, qui pourroit bien contenir quelques parties uietalli^jues : cette obfervation eft tirce d'une iettre de M. du Tour, Physique, }j abreg£ des me moires III. Annk fj66. M. Cotte, pretre de I'oratoirc & profeffeur de Theologie \ Montmo- rency, a fait part \ i'academie de robfervation fiiivante. II fort de I'etang de Monrmorency, deux ruiffeaiix dont I'lm n'a rieri d'extraordiiiaire , mais I'autre exhale une odeur li defagreable , qu'on le norame dans le canton le ruiffeau puant : cette eau ne roiigit point Ic f)3pier bleu , la vafe de ce ruiffeau & la furface de fon eau ont une cou- eur bieuatre , elle altera la couleiir des metaux qu'on y fait f.journer, & fur-tout celie de I'argent qui, aprcs avoir paffe par toutes les nuances de jaune & de rouge , finit par y devenir d'un bleu tirant fur le noir ; la vapeur de cette eau opere meme ces effets plus efficacement que I'eau meme , & une groffe chenille du bouillon bknc que M. Cotte expofa a cette vapeur, s'agita vivement, & y perit en moins de vingt minutes. Quatre bouteilies de cette eau bienboucheesfurentenvoyees par M. Cotte ^ M. Macquer , que Tacademie avoit charge d'en faire I'examen , il n'eut pas de peine k reconnoitre dans cette eau I'odeur bien marquee du foie de foufre ; laiffee ^ I'air dans une jatte de porcelaine elle perdit en vingt- quatre heures toute fon odeur , elle n'a point rougi la teinture de tour- nefol,& n'a que trcs peu verdi le lirop violat •, I'alkali fixe y a occafionne iin Mger precipit^ blanc ; les acides ont plutot d^veloppc que diminue fon odeur; les diffolutions d'argent & de mercure y ont tres-promptement occafionne un precipite brun noiratre fort abondant, & dans le moment meme I'eau a perdu fon odeur. ToHS ces phenomenes qui font precifement ceux qiii doivent etre oc- cafionnds par une eau legereraent chargee de foie de foufre, ont perfuade ^ M. Macquer que I'eau en queftion contenoit une petite quantite de foie de foufre auquel elle devoit toutes fes proprietes. Pour s'en affurer, il a pris de I'eau de Seine tres-pure , dans laquelle il a fait diffoudre quatre grains par pinte de foie de foufre terreux fait par la chaux, cette petite quantite a kiffi pour donner 'k cette eau toutes les proprietes de I'eau de Montmorency, fi ce n'eft que le precipite tire de I'eau qui avoit perdu fon odeur, pour avoir etc expofee ^ fair, etoit un peu plus gris dans I'eau minerale fadlice que dans la naturelle. II eft done bien conftant que I'eau decouverte par M. Cotte ^ Mont- morency, eft legerement fulphureufe & minerale, & comme elle fort de I'etang dont I'eau n'a aucune de ces proprietes , qii'elle les doit au lit oil elle coule \ effcftivement M. Cotte a trouve k la tete de ce ruiffeau du foufre tout forme , mais quand bien meme il ne s'en trouveroit pas fous cette forme ii pourroit trcs-bien s'en former par le phlogiftique qui ie degage des matieres vegetales ou animales qui fe pourriffent, joint ^ quel- qu'acide vitriolique repandu dans le terrain. Ce n'eft pas la premiere fois que des combinaifons de cette cfpece ont produit du ioufre , & peui-etre Ja nature n'emploie- t-elle pas d'autres moyens pour le former. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. y? *■ "' Physiqup. M. Du Toua cnvoya cette annce ^ I'academie unc efpece d'cponge ma- -^"'^^^ ^7^^'' rine , & qii'il ne favoit i quelle claffe rapporter : cette eponge dtoit rcel- lement de la claffe des eponges dc mer & du genre deligne par M. de Toiirncfort, fous le nom d'j/ryonju/n , & coniiu communement fous ceiui de figue de mer-, parce qii'il" affefte ordinajrement la figure de ce fruit : la figuc de mer a prefque toujours a fa tete unc ouvcrture & s'atTuchc XX*. coraux, aux madrepores, aux coquilles , &c. par un & qiielquefois par deux pcdicules : ce qui cmbarraffoit M. du Tour, etoirqu'ayant ouvert fon alcyonium, il en avoit trouve le milieu occupc par unc coqullle da genre dcs vis , qui lui fervoit de noyiu. Quoiqn'ordinairement lalryonium ne renferme aucune fiibftancc ctran- gere, il arrive cependant queiquefois qu'il enveloppe Jcs coqiiilics de differeiites efpeces , & pour lors mallieur i i'habitant de la coquille qui y trouve iiifailliblement fa perte, la crue de ralcyoiiium etant vr-iilcmbfable- nient affez prompte pour I'y cnfermer-, M. Foiigeronx en a fair voir plu- iieurs de cette efpece, entre lefquels il y en avoit un dont le noyau ctoit line vis de deux pouces de longueur , dans l.iquelle on voyoit des fra- gmens de I'efpece de crabe appelle bemard-lhermiteoM/bldat, qui y avoit ete cnferme •, & ce que celle ci otlroit de plus linguiier, c'eft que tout proche de la coquille qui fervoit de noyau, il y avoit dans la fubl- tance mcme de I'alcyonium, une cavite ouverte ^ I'exterieur & qui avoit fervi de logement i un autre bernard I'hermite : celui-ci plus heurcux que le premier , avoit trouve une retraite oil I'autre n'avoit rencontre qu'un tombeau. V. M. le prcfident de Borda , correfpondant de Tacademie , a mande i M. Guettard , que le froid de cette annee avoit ete le plus vif qui eut cte reffcnti ^ Dax depuis 1709-, le 11 Janvier a ete le plus froid, M. de Borda n'etoit pas i Dax ce jour-l^ •, raais le lendemain i i au matin , la li- queur du therinomctre de M. de Reaumur etoit h 11 degrcs & demi au- deffous de la congelation ; & quoique le foleil ait toujours paru pendant cette gclee , la liqueur ne s'eft jamais elevee au plus chaud du jour plus que de cinq degris au-deffus de la congelation , encore n'a-t clle atteint ce terme qu'unt tcHle fois. Les rivieres ont pris pendant cette gelee , & meme celle du Gave, malgrc fa rapiditc-, mais auffi-tot qu'elle a cetTe, les glaces fe lent fondui'S & diflipees fans debacle-, M. de Borda ajoute qu'on n avoit jamais vu dans cc pays un fi grand nombre de canards, ils ic font jcttcs dans lea bois oil lis ont vecu de gland des que les eaux qui inondoicnt les terrt-s ont ete gelees. Le thermomctre, pendant ce mcme hiver, n'eft defcendu ^ Paris, bicn plus feptentriona! que Dax, que d'environ p degres & trob quarts. 40 ABRECE DES MEMOIRES mmammmmmm^mmm Tandis qiic M. Ic prcfident dc Borda obfcrvoit ^ Dax rintenfite du p fioid , M. d'Eyriniac , ingenieur ordinaire du roi & direifteiir des fortili- " ^ * ■ cations, I'obfervoit k Bayonne oii le plus grand froid s'eft fait fentirles lo, Annc'e ij66. 12 & 13 Janvier; la liqueur du thermometre de M. de Reaumur etoit dcfcendue alors au leptieme degre au-deffous de la congelation : on voit par-Ik corabien les circonftances locales ont fait varier I'intenfite du froid dans ces deux villes , I.tiiees k trcs-peu-pres dans le meme .climat & affez v.oilines I'une de I'autre, I, Sur la Poudre a canon employee datis fes diffirens itats. -L feroit peut etre difficile de decider (i I'invention de la poudre doit Amide inGi ^^"^^ ""^^ *^ '^^"S "^^^ decouvertes utiles au genre humain , ou fi Ton doit la rcgarder comme nuilible-, mais il eft au moins certain que cette cora- Hifi. pofition ^tant entre les mains de tout le monde, il eft trcs important d'en tirer tout le parti polUble, & de corriger le plus qu'il fe pourra, les abus qui fe font introduits dans fon ufage. C'eft k en detruire un des plus con- fidtrables qu'eft deftine le memoire de M. I'abbe Nollet, duquel nous avons ^ parler ; mais il ne fcra peut-erre pas inutile \ I'intelligence de ce que nous avons k dire fur cette matiere , de donner ici une idee de la ma- niere dont on fabrique la poudre. La poudre \ canon eft un compofe de falpetre , de foufre & de char- bon de bois-, ces matieres font unics par une longue trituration dans des mortiers de bois •, on a foin pendant cette operation d'linmeder ces ma- tieres avec de I'eau, tant pour empecher qii'il ne s'en diffipe une partle en pouiliere , que pour prevenir I'inflammation qu'une longue trituration i iac ne manqueroit pas d'occalionner en echauffant ces matieres. L'eau dont on les imbibe a encore un autre ulage -, les molecules de la poudre, quelque bien melees qn'elles foicnt en fortant des mortiers, ne feroient pas fufceptlbles d'une inflammation affez prompte; elles font trop ferrecs les unes centre les autres , & n'ouvrent pas au feu des paffages affez confiderables pour faciliter la promptitude dc I'inflammation •, c'eft pour cette r,iifon qu'on la retire des mortiers fous la forme d'une pate prefque fecJie , mais confervant encore affez d'humidite pour fe rdduire en petits grains en paffant i travers un crible oii on la met, & par les trous duquti on I'obligc de paffcr , au moyen d'un plateau de bois pefant dont on la charge , & qu'on agite avec le crible dans le fens horizontal. Ces grains une fois formes laiffent entr'eux des vuides & des intervalles qui favorifent la promptitude de I'inflammation : la matiere de la poudre qui rcfte dans le crible fans fe grainer , ou qu'on fepare des grains par Ic taniis , fe nonrme puherin verd. Une partie de la poudre qui fe conferva dans les magafins , perd k la longue fa forme grenee & rentrc dans I'etat de pulveiin •■, louvent meme le falpt-tre- DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 41 falpftre flcnrlt & s'en Tcparc-, la poudrc dans cet (itat fe nomme poudre di- 2 iompojee. , ,_ ^ Physique. Le pulverin & la poudrc d^compofee avoicnt tou)ours etc rcg.udes dans le fervice de I'artilleric comme des matiercs inutiles, ou dii moiiis inca- Annie t'/Sj. pablcs de rexpioiion neceli'aire an canon & aux mortiers : on cnvoyoit mime la peudre dt-conipofee aux moulins pour la rcbattre lorfquil y eu avoit une certaine quantite dans les niagalins. Cctte opinion ctoit tellement accreditee , que les plus habiles Officiers d'artillerie, que confulta fur ce point M. I'abbc Nollct, I'affurercnt que ni le pulverin , ni la poudre decompofce n'ctoient I'ufceptiblcs d'explofion , 5: qu'ils ne feroient que fufer comme fait le lalpctre (ur les chnrbons ardens. Quelquc confiancc que M. I'abbe Nollet cut en leurs lumieres, bien des raifons le perfuadoient du contraire. On hit que la propriete de la pou- dre fut decouverte par une explolion fubite, & \ laqueile le chymifte ne s'attendoit pas', ce qui ne peut certainemei\t convenir i une matiere qui fufe, & d'ailleurs il eft bien fiir que cette matiere n'dtoit pas grence. II arrive en fecond lieu, plus fouvent qu'on ne voudroit, que la matiere con- tenue dans les piles des moulins, & qui furement n'eft pas grcnee, s'cn- flamme & fait lauter Ic moulin avec lui bruit trcs-conliderable. L'expcrience feule pouvoit decider en pareille circonftance, & on la fit d'abord en petit ; un mortier d eprcuve qui jettoit un boulet de cuivre pe- faiit vingt livres & qui etoit toujours pointe i 45 degrcs d'elevation , fut choili pour cette experience •, il fut charge avec une once de pulverin neuf , qu'on mit dans la chambre du mortier fans le fouler, & on amorca avec du pulverin femblable •, I'inflammation fut prompte & tres-peu ditferente de celle de la poudre grenee, & le boulet fut chalfe \ 45 toifes. Dans une feconde experience le pulverin ayant ete l^gerement foule, la port^e du boulet diminua de i o toifes & ne fut plus que de ; 5. On foupconna que cctte diminution de portee venoit moins de ce que le pulverin' avoit iik foule , que de ce que la charge nemplilloit pas la chambre & laiffoit un vuidc entr'clle & le boulet •, on rcmplit ce vuide avec un tampon dc bois-, les coups furcnt plus forts & le boulet chaUe \ 46 toifes. En compofant la charge de parties egales de pulverin & de poudre grc- nee, I'etiet fut moins grand qu'avec le pulverin feul, & le boulet ne fut chalTe qu'h 5 y ou 40 toifes. La portee fut dc 45 toifes & de 5 j dans deux experiences qui furent faites avec une once de poudre grenee. II refultoit de tons ces faits que le pulverin neuf s'enflammolt fubite- nieiit dans une arme a feuj qu'il pouvoit j nieme en petite quantite, Jetter au loin des corps trcs-gravcs , foit qu'on ne le foulit point d.;ns la piece , foit qu'on le foulat mediocrcment, & qu'enfin il ne paroiffoit diftcrer ea force que tres-peu de la poudrc grenee. Ces conclulions, & fur-tout la derniere , quoique diclees par I'expe- rience, ne parurent pas affez certaines ^ M. I'abbi Nollet pour s'y tenir abfoiumcnt, & il fut refolu entxe lui & Mefficurs les Oificicrs d'.irtilleric JTomc XIV. Partie Fran^olfc, F '/"/• 41 ABREGEDES ME MOIRES de la Fere, de repctcr les experiences plus en grand, avec plus de foin, _ & en variant davnntage les proctides. r H Y s I Q u E. On fe fervit pour cela d'un autre mortler d'epreuve, qui dtoit fixe fous Ann/e t'jGj. le mcme angle conftant de 45 degris , qu'on chargeoit de ip onces, & dont la bombe vuide pefoit 150 livres. Avec 19 onces de poudre grenee la bombe fut chalKe k 180 toifes. Avec pareille charge de pulverin , legercment prcllee avec Ic bouchon de foin, la portee ne fut que de 105 toiles, mais on avoit remarque qu'il etoit lorti par la lumiere environ line once de pulverin , dont on ne put faire rentrer qu'une partie : on recommen9a done I'e-xperience en empe- chant le pulverin de fortir par la lumiere , & les portees furent alors de 135 toifes i & en employant 18 onces de pulverin & une once de poudre grenee, elles allerent ^ 149 & 150 toifes. La portee de la bombe, chaffee par le pulverin , fut done ^ celle de la mcme bombe , chalice par la pou- dre grenee, pour le premier cas, dans le rapport de 3 i 4-, & pour le fecond, dans celui de 5 ^ 6. II y a done une diffirence marquee entre I'efFet du pulverin & celui de la poudre , lorfqu'on s'en fert pour le jet des bombes : il etoit queftion de voir (i ia meme difference fublifteroit dans le fervice du canon. On fe fervit pour les experiences d'une piece de douze livres qui fut chargee alternativement de trois livres de poudre grenee & de trois livres de pulverin, & on tira fur le but du polygone, qui etoit ^ 171 toifes i quelques-uns des Officiers fe tinrent pres de la piece, & d'autres pres du but, I portee de voir fans rifque le boulet y arriver : voici le relultat des txperiences. Les coups tires avec le pulverin parurent an peu plus mous que ceux qui avoient ete tires avec la poudre grenee; cependant il falloit que la diffe- rence de viteife fut bien petite, puifqu'on n'appcrcut aucune difference dans la hauteur du boulet a fon arriv(ie au buf, ce qui feroit infaillible- ment arriv^ li la viteffe avoit et^ fenfiblement moindre avec le pulverin qu'avec la poudre. On remarqua aufli qu'en employant quatre livres de -julverin au lieu de trois livres de poudre grenee , les coups etoient pour e nioins aufli vifs que ceux qu'on tiroit avec la poudre. II demeuroit done certain , par des experiences inconteftables , que le pulverin verd ou neuf pouvoit ctre employe aux memes ufages que la pou- dre, en augmentant un pen la charge; mais un objet plus intereffant ani- moit la curiolite de M. I'abbe Nollet, c'ctoit de favoir, fi la poudre qu'on nonuTie decompose feroit dans le meme cas. Le temps qu'il avoit encore i refter \ la Fere ne lui permettoit pas d'entreprendre la'fuite d'expcrien- ces nccelTaires pour cet objet •, il les remit k Tannic fuivantc , en ayant cependant fait i la hate quelques-unes qui lui donnerent lieu d'avancer qu il croyoit avoir au moins les memes effets avec la poudre dccompofee qua- vec le pulverin neuf. L'Ofificier qui avoit la dircdion du pare d'artillerie, ne paroiffoit nul- lement pcrfuade que la poudre dccompofee put etre employee avec fucces : ce fut lui que M. I'abbe Noliet pria de prefider ^ la preparatiou des ma- r. DE L'ACADEMIK ROYALE DES SCIPNCES. 4} tifres qui devoient fervir aiix experiences, & on y en eniploya cinq dif- — i^M^iM^—i^ fcrcntes; 1°. dc i,i poudre grcnde ; 2°. dii pulvcrin neuf pailc .iii taiiiis ; I 5". dii poudicr frais tire du fond d'un baril nouvcllement vuide ■, 4°. de ' '^ ' "^ ^ '■ la poiidre (Jcrafee, mouillce & enfuite feclice; 5°. enfin, de cc-tte poiidre Annie tiGi qui a demeure long-teiiips en poufller dans les magalins, & qu'on nomine poudre dicompofe'e. Les experiences fiirent repetdes deux fois avec deux mortiers d'epreu- ves differens, fixes i Tangle de 4.5 dcgres, & avec le meme boulet de cui- vre pelant foixante livres, & on lira chaque fois quatre coups avec clia- cune de ces poudres , la charge etant toujours conftamment de trois onces : voici quelles furent les portees nioyennes, avec la poudre grenee, ^6 toi- fes |-, avec le pulverin neuf palfe au tamis , 82 toifes ; avec le poufller frais, 81 toifes-, avec la poudre ecrafee , mouillee & fechee, 91 toifes | ; & enfin avec la poudre dite dicompofee ■> 86 toifes. Ces refultats font voir evidemment que Teffet du pulverin & celui de la poudre decompofee, n'cft que pcu different de celui de la poudre gre- iice ; que ces matieres ne doivent pas etre regardces comme inutiles , & qu'elles peuvent etre employees utilement dans les occalions dc fetes & de rcjouiffances , dans les ecoles, & meme dans le cas oil une place aflie- g^e manqueroit de poudre grenee , en augmentant feulement uii peu lei charges : ils font voir en outre que dans ces experiences, il ne faut pas tabler fur celles qui font faites en petit , piiifqu'elles ont donne des dirtc- rences beaucoup moindres que celles qui ont ete faites en grand , entre I'effet de ces matieres & la poudre grenee. II eft done necelTaire dans une recherche de cette efpece, de ne s'alTurer que fur. des experiences faites en grand & avec toutes les precautions necefTaires. Quoi qii'il en foit , ce* poudres inutiles que M. I'abbc Nollet donne le moyen d'employer , font un veritable prefent qu'il fait \ ceux qui feroient dans le cas de sen fer- rir, & dont il eft aife de fentir toute rutilits. 44- ABREGE DES MCMOTRES Physique. A J £- Sur la lumiere de I'eau de la mcr , dans Us lagun.es de Venife. T JL^ Ac A DEM IE sefl: de]^, deptiis long- temps, occupee de la recherche de la caule qui rend la nier lumiiieufe. Plulieurs poillons qui ont la pro- priete d'etre luifans dans I'obfcuritc, & fur-tout les details, dont M. de Reaumur a donne I'hiftoire en 1715 {a) avoient donne lieu de foupcon- ner que la lumiere de la mer pouvoit bien n'etre due qu'i une multitude de poidons ou d'inledtcs plus petits , qui la rendoient lumineufe par eux- niemes ou par leurs emanations. Ce fentiment fe trouve confirms par les obfervations de M. I'abbe Nol- let, dans les mers d'ltalie, par celles que M. le commandeur Godeheu fit en 1754 dans les mers de I'lnde, & par celles de Meffieurs Vianelli, Gri- felini, Von-Linne, Adler, Donati & plulieurs autres. D'autres ont pretendu que la lumiere de la mer etoit due \ une ma- tiere phofphotique contenue dans la mer , qui fe raffembloit i fa furface en petits grains , qui , en fe crevant par le choc des vagues ou des corps folides , s'y etendoicnt & la rendoient lumineule. Les obfervations de M. le Roi, rapportees dans le troifieme volume des favans et rangers , femblent appuycr ce lentiment. A quelque caufe qu'on veuille attribuer la lumiere de la mer, il eft certain qu'on ne peut trop multiplier les obfervations fur ce fujet •, & M. Fougeroux n'avoit garde, etant k Venife, de negliger d'obferver les iiifedes lumineux que M. I'abbe Nollet avoit vus dans les lagunes. II eut d'abord quelque peine b les trouver, mais M. Grifelint, avec le- quel il eut occafion de confcrer fur ce fujet , I'ayant inftruit de leurs re- traites , il fe fit apporter une braflee de ces herbes marines qu'on connoit en Bretagne fous le nom de Goemon , & en Normandie fous celui de Varech. Ces herbes etant mifes dans une chambre fans lumiere , parurent parfe- mees d'nne infinite d'etincelles trcs-brillantes-, en prenant une des feuilles, fur lefquelles on voyoit briller une de ces etincelles , & I'examinant avec attention , on voyoit cette lumiere changer de place & fe promener fur ia feuille-, elle paroiflbit comme un point un peu alonge, gros comme la tete d'une petite epingle , & ce point paroilfoit s'alonger quand I'animal fe difpofoit i ramper. M. Fougeroux examina ces points, on plutot ces animaux, "k la loupe, & n'eut pas de peine 4 les reconnoitre pour les Scolopendres , dont M. Grilelini avoit donne la defcription & la figure, & qui n'a pas ete moins exaclement deffinee par M. Von-Linne dans fes Amaenitates ; & voici ce qu'il rcmarqua en examinant cet infede-, il brille comme les ani- maux terreftres lumineux quand il lui plait, & il eft le maitre de rendre (a) Yoyei Hift. 1723 , ColIeiSion Academique , Parrie Fran9oife, Tome V. DE L'ACADENflE ROYALE DES SCIENCES. +,- f:, liinnrre plus on moiiis vive; qiielcjuefois Ton corps u'cfL que tranfparciit, &: quclqiicfois audi il en fort dts jets dc Iiimicrc qui formcnt line ctoilc, p Sc cclairent a quclque diftance aiitour de liii : c'cft par toute fa partje po(- tcrieiire qu'il brille-, fa tete fcule demeure opaque, & (i on ccrafe I'infeifte Annc'e Ij6-j. fur d» papier, il y laili'c unc longue trainee de luraiere blcuatre & tranf- parente. II ne luit que tant qu'il a I'huniiditc neceffaire , & il p6rit en fe dcffi- chant-, mais en confervant le got'mon cliargc de fes infedtes dans I'eau de iner, & ayant foin de la rcnouveller, ils coiifcrvcnt long-temps leur lu- niierc-, & lorfqu'on agitoit le gocmon dans I'eau, elle donnoit des etinccl- les qui produifoient quclquefois une trainee de lumiere. La luniiere de ces animaux eft un peu bleuatre , & affez femblable ^ celle que rcndent les animaux terreftres lumincux. M. Fougeroux a cru en voir de deux difterentes grandeurs, mais il ignore fi cettc difference de ~ grandeur vient de la difference d'efpece ou de la difierence de fexe. Quoiqiie les experiences que nous venons de rapporter, prouvent que la mer contient des animaux lumincux , cependant M. Fougeroux incline fort i penfer qu'ils ne font pas la feule caufe de la lumiere de la mer, & il eft perfuade que ceux qui ont penfe que les infeftc-s en queftion en etoient I'unique caufe, ont trop erendu leur id;e, de meme que ccux qui I'ont uniquement attribuee aux feux ele(51:riques. Selon lui les deux caufes peuvent avoir lieu, & peut-etre s'y en joint-il une troifieme •, favoir une matiere phofphorique , provenue de la pourriture des corps marins des plantes , &c. Dans I'une & dans I'autre hypothefe , & meme en les adon- tant tous deux , il fera toujours facile d'txpliqucr pourquoi la mer n'eft lumineufe que dans certains temps, puilque les animaux, d'une part, & I'cledriciti ou la matiere phofphorique de I'autre, ont befoin de circonflan- ces favorables , qui n'exiftent pas toujours pour produire de la lumiere. Les matcriatix de cette matiere phofphorique exifbent dans la mer-, mais M. Fougeroux penfe que le contours de I'air eft neceffaire pour la faire briller •, I'etfort des rames ou le choc du corps du bailment, fcront crever les billies chargees de cette matiere, que leur legerete aura f.iit monter \ la futface , & elles doiineront en s'ouvrant cette etincelle ou cette lueur que nous appercevons -, pcut-etre cette matiere eft-clle trop volatile ou en trop petite quantite, pour qu'on la puife avec une petite quantite d'eau dc mer, & M. Fougeroux regarde comme trcs-probable que la lumiere de I'eau de la mer eft egalement due aux infectcs lumineux & i la matiere phofphorique ou ekdtrique. Ce n'eft pas le premier exemple de deux, ou meme de pluUcurs caules, qui concourent a produire le meme effet. ^6 ABREGE DES MEMOIRES P 11 V S I Q U H. Aniu'i 1167 ^"'^ ^^ may en de fe garantir de la mauvaife odmr des Puijards. T . Hilt. XL arrive Ton vent que les ciiilwies, les offices. Sec. des gran des niaifons , font placets au-deffous dii niveau du terrain , & qu'on ne peut faire ecouler les eaux qui en proviennent que dans des puifards qu'on creufe pour cet ufage •, mais les graiffes & les autres immondices que ces eaux y entrai- nent, fermentent en peu de temps & en font des cloaques qui infedent les cuilines & les autres fouterrains, dans lefquels I'odeur rentre par le con- duit mcnie qui donne pallage aux eaux, & les rend fouvent inhabitables. M. de Parcieux a imagine un moyen tres-dmple de faire difparoitre cet inconvenient', pour cela il place, dans Fepailieur du mur qui fepare la cui- fine ou le lavoir du puiiard , k I'endroit par ou fe fait I'ecoulement, une cuvette de pierre, ^-peu-prcs de la figure d'un bac k paffer I'eau , dont I'extremite qui donne dans le puiiard , a fon rebord un pouce plus bas que le rebord du bout oppofe qui eft ^ niveau du pave , & le milieu de cette cuvette eft creux d'environ 6 pouces •, c'eft par cette cuvette que I'eaii doit neceffairement pafler dans le puifard, & jufque-li rien n'empccheroit la mauvaife odeur du puifard de rentrer dans la cuiiine : voici comment M. de Parcieux lui intercepte le paflage •, vers le milieu de la cuvette il place tranfverlalement une dale de pierre dure qui entre dans deux en- tailles faites aux cotts de la cuvette, & qui defcend d'environ un pouce plus bas que le bout de la cuvette le moins eleve. 11 refulte de cette conf- truflion , que I'eau pourra toujours pafler fous la pierre pour fe rendre dans le puiiard , mais que cette pierre trempant toujours dans I'eau de 1» cuvette, interceptera abiolument tout paffage ^ fair du puifard pour ren- trer dans la cuilme ou le lavoir , & qu'il ne s'agira , pour eviter toute odeur , que d'avoir foin de renouveller la petite quantite d'eau contenue dans la cuvette, pour I'empecher de fe corrompre; & en eftet M. de Par- cieux ayant fait (ceJIer un pareil equipage k i'entree d'un puifard qui ren- doit tous les fouterrains d'une maifon inhabitables, on n'en a plus relfenti la moindre incommodite. Cette meme invention a encore etc e'mpIoyee^Jar M. de Parcieux avec un egal fucccs dans une circonftance differente-, M. le Comte de Maurepas avoit fait conftruire une glaciere h Pontchartrain , dans un endroit ou le fond glaifeux ne permettoit pas de former un puifard , comme on le fait crdinairement, pour abforber I'ecoulement de la glace : on avoit cru pa- rer i cet inconvenient en formant une pierree qui portoit les eaux de la glaciere par-defTous terre, ^ un endroit plus bas de la colline ou elle etoit creufee , & I'eau s'ecouloit en effet par-la. Mais on n'avoit pas prevu que I'air y entreroit par le meme endroit, & que cette colonne, plus longue que celle qui fe prefentoit h la porte de la glaciere , s'y porteroit avec vi- telfe , & charieroit continuellement un air chaud qui fondroit la gl.ice : c'litoit en eftet ce qui etoit arrive , il s'etabliflbit par cette iifue un cou- DK L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. +-7 rant d'eau & la glaciere fe vuidoit d'elle-menic, de maniere que, fans qu'on y cut pris de la glace, elie etoit abfohimcnt viiide des le mois d'Aout,p quoiciu'elle contint pres de j6 toifes cubes dc glace. La cuvette de M. de '^ ^' ^' Parcieux , placee ^ reiitree de la picrrce dans le nnir de la glaciere , a fait Ann/e i iGt. abfolument dil'paroitre cct inconvenient, & la glaciere eft au rang de eel- ' k'S qui confervent le mieux la glace. On ne pouvoit pas apporter dc r*- nicde plus finiplc que ceku-ci ii des inoonvcniens aufli incommodes que ceux dont nous venons de parler, mais il n'ctoit cependant ni limple , ni aife de le trouvc-x ; & on n'cn doh pas moins dc reconiioiilince <) M. de Parcieux pour avoir inwgini cette ingejiieufe methode. Sur let Trf>mbe$ de mer, r. arrive rarement fur terre, mais tres-fouvent en mer, qu'on appercoh iijft. un amas de vapeurs femblable ^ une grolle mice , qui s'alonge de liaut en b.is en partant d'une nuee, ou qui s'eleve de bas en haut en allant jojn- dre la mice qui eft au-deffus, & qui forme une colonne plus large par le haut que par le bas ■■, cette colonne fait entendre autour d'elle un brnit femblable i celui d'une mer agitce, elle jette fauvent autour d'elle beau- coup de plaie & de grele-, quelqiietbis meme il en fort des Eclairs & des coups de tonnerre, & ce terrible phenomenc eft capable de ren verier les vaillcaux, les mailons, les arbrcs , & tout ce qui fe trouve fur fon paf- fage. Les Marins le connoillent fous les noms de Trombe, Puchot on TV- phon; ils font leur poffible pour sen el&igncr, mais s'ils ne peuvent evi- ter de s'cn approcher, ils tachent de rompre la colonne ^ coups de canon, & queiquefois ils y reuflillent. Un phenomene li fingulier meritoit bien qu'on en recherchat les caufes, audi en a-t-on donne plutieurs explications. Une des plus ingenicufes eft celle qui fut donnee en 1717 , par M. An- doque, de I'academie de Beziers , & que I'Academie a publiee dans fon Hiftoire {a). II admet pour caufe des trompes , tant de mer que de tcrre, deux courans paralleles, de diredion oppolt'e, ciablis dans I'air I line me- diocre diftance I'un de I'autre , & qui forcent la partie immobile de I'ath- mofphere qui eft entre deux, i prendre le mouveraent de tourbiiion-, deli il deduit la figure conique du tourbiiion , dont la partie fuperieure doit prendre plus aifcment le mouvcment cirailaire, parce quelle eft moins chargee , la grande condenfation des nuages , I'efpece de fumee & le bruit qui accompagne fouvent le phenomene; mais quelqu'ingenicufe que foit cette explication, ii s'en faut bien qu'elle explique tout ce qu'on obferve dans ce phenomene, elle le fuppofe toujours accompagne de deux vents yiolens, & fouvent il arrive en calme ■■, de plus la trombe devroit, felon («) Voy. Hifi. de I'Acad. 17*7, Coll« 11 eft certainement peu de machines defquclles I'invention (iC[e plus d'honneur i I'cfprit humain que celles des pompes ^ feu-, mais leur conl- trudion eft difpendieufe, & leur entretien encore plus, fur-tout quand il s'agit d'elever I'eau un peu haut : examinons ce qu'elles pourroient coutcr pour I'un & pour I'autre objet , & comparons-le i la depenfe neceifaire pour amener I'eau de I'Yvette i Paris -, ceux qui propofoient les pompes i feu & qui n'en faifoient monter le produit qu'i 600 pouces d'eau leule- mcnt, qu'ils ne faifoient pas monter i la hauteur neceffaire pour fournir tout Paris , en cvaluoient la depenfe k dix-huit cents mille livres par an G ij 51 ABREGfi DES MEMOIRES **'*'^''"'''^"'™^ pendant ia conftruftion , fans compter les aeceffoires ; & les (Ix ann^es P H Y s I Q u I. S'*''^ demandoient pour mettre ces pompes en etat de fervir, leroicnt plus que fuffifantes pour mettre le projet de I'Yvette h execution. Aim^e lyGy, Ce n'eft pas tout, I'entretien de ces pompes eft iinmenfe -, elles d^pen- firoient pour prcs de deux cents ecus de charbon par jour, fans compter les appointemens des chefs , les gages des journaliers & des fubalternes , & les reparations de toute efpece auxquelles ces machines font necetfaire- nient d'autant plus fujettes, qu'elles elevent I'eau en plus grande quantite & plus haut. Tout ce que nous venons de dire bien confidere, il en refulte que !e projet de I'Yvette qui ne demande prefque aucun entretien , doit etre adopte par preference, & que felon la fage reflexion de M. Deparcieux, on ne doit jamais confier ^ I'attention des hommes , le foin de fournir d'eau tons les quartiers de Paris , lorfqu'on peut s'en rapporter ^ une ri- viere & i un aqueduc foKdement conftruit. Non-feulement les pompes i feu exigent une depenfe plus grande que le projet de I'Yvette , mais il s'en faut beaucoup qu'elles foient audi conti- Jiueilement utiles , elles chommcnt neceffairemcnt pendant tout le temps des reparations, mais ce temps de Tinterrnption de leur fervice n'eft pas Je plus long-, des que les gelees commencent ^ faire charier la riviere, on met toutes les conduites en decharge , pour eviter que I'eau qui y fejour- neroit, les machines n'allant plus, ne s'y gelat & ne les fit crever , il en refte cepend^int toujours affcz , dans les contre-pentes , pour produire ce mauvais eftet ■■, & lorfqu'aprcs les gelees on y remet I'eau , on eft prefque toujours oblige de vuider de nouveau les conduits pour les raccommo- der; d'ailleurs I'eau qui demeure ftagnante dans les tuyaux, y depofe un limon qui s'y durcit & les bouche •, I'eau de la Seine eft d'ailleurs trouble la moitie de I'annce, & on ne la peut boire qu'apres I'avoir filtree on laitle repofer. L'eau de I'Yvette, une fois conduite ^ Paris , n'offre aucun de ces in- eonveniens, elle y coulera toujours lors merne que la furface en feragelec, comme celle de toutes les rivieres grandes & petites , & elle n'occalion- nera pas plus de rupture dans les canaux oil fon cours ne fera pas inter- rompu , que Feaw de la Seine qui vient de Marly ^ Verfailles , n'en occa- fionne dans les tuyaux qui I'y conduifent. On pourroit objc(fter que dans Ics temps de gelee un pen forte , I'eati qui s'echapperoit par les decharges pourroit charger les rues d'un enduic de glace tres-incomniode ; mais il eft, felon M. Deparcieux, tres aife d'y remedier; un puits creufe aupres du baflin d'arrivee , en recevroit la de- charge en levant une bonde qui I'y conduiroit , & avant que cctte eau eiit pu Clever la nappe d'eau fouterraine qui fournit les puits, feulement de 6 pouces, les gelees les pluslongues feroient paffees, on pourroit meme en ce cas , en meitre une partie en decharge dans les champs aux endroits les plus convenables. II nous refte ^ r^pondre \ une derniere objeortion conlidsrable au-dc(Ions dc Vaugien. Lc projct de M. Deparcieux ell done le feul qu'on puiUe raifonnable- ment adopter pour donner dc I'eau \ Paris, en tout temps & en quantite fuffifinte. Mais eft-il li effentiel d'en donner \ Paris qui s'en eft palfs juf- qu'ici? ne peut-il pas s'en paffcr encore, fur-tout etant traverfe par une grandc riviere ; Pour repondre h cette objedion , il ne faut que conlldcfrer Tetcndae immenfe dc cette grande ville, & la diftance ou font les h.ibitans de fes extremites du bord de la riviere -, le nombre immenfe d'hommes employes i porter dc I'eau \ les tonnes trainees fur des charrettes pour le fervice des habitans, & pour porter fecours dans les incendies, / etabliffement du aux foins & a ramour du bien public, de M. de Sartine ) ; & enfin les puits fans nombre, que prcfque toutes les maifons renferment, font des preuvifs ^videntes du befoin qu'on a d'avoir une bien plus grande quantite d'eau que celle dont on jouit aduellement. Cette verite a toujours etc li bien reconniie , que Philippe-Augnfte n'eut pas plutot fait I'enceinte qui porte encore Ion nom, qu'il fit venir ks eaux de Belleville & du Pre-Saint-Gervais pour fournir les fontaines de la rue Maubuee , des Innocens & de la Halle qull fit conftntire. Henri IV. fit conftruire en 1606, la pompe de la Samaritaine pour pouvoir rendre i la fontaine de la Croix-du Trahoir I'eau que lui otoit le Louvre, Sc il en donna \ une fontaine qu'il fit fiire au quai de I'EcoIe : on avoit mcma commence \ travailler ^ la recherche des eaux de Rungis, autrefois ame- nees par Julien I'Apoftat ^ fes bains , iitues i I'hotel de Clui>y. La mort funefte de ce grand Roi interrompit ce proict, mais il fiit continue & mis \ fin par Marie de Mcdicis , qui depenia alors uti million pour bntir lc celebre aqueduc d'Arcueil, fomme qui fur le pied oii eft aujourd'hui I'argent , pourroit etre evaluse \ deux millions ou environ, & cependanr cet aqueduc n'a jamais donne plus de 60 ou 70 pouces d'eau , & n'en donne prelqu'aujourd'hui que la moiti^. Commc cette quantite n'etoit pas \ beaucoup prcs fuSifinte, on Imagira de convcrtir en pompcs , environ quarante cinq ans aprcs I'etablifTenier.t de I'eau d'Arcueil, deux moulins pendans qui etoient ay pont Notre- Dame, & cet etabliiiement lublifte encore au/ourd'hui. Les bornes qui nous lout prtfcrites, nous forcent a fupprimi;r tout b 54- ABREG6 DES MEMOIRES —— »»«P^"^ detail de rexeciition de ce projet & de la diftribution dcs c.iux que doiifte p , M. Deparcieux dans fon memoire , & les exemples qii'il rapporte dc pro- ^ ^ 'jets parcils executes pour donner de I'eau i une infinite d'efidroits moins Entice ilGj. interciFans que la capitale, pour en venir plus promptement aux avantages qui refulteroient de I'execution du projet de M. Deparcieux. Ces avantages font fans nombre; on aura en tout temps & dans tousles quartiers de I'eau pure, faine & en grande abondance, & un fecours tou- Jours allure contre les incendies ; les grandes & moyennes rues feront toujours , excepte le temps des grandes gelees , tenues propres & fraiches par un courant d'eau, & les egouts des boucheries ne croupiront pas coninie ils font aujourd'hui. On pourra debarraffer le pont Neuf &: le pont Notre-Dame des ma- chines qui y font placees, qui incommodent prodigieufement la navigation, & peuvent, dans le cas de glaces ou d'inondations, occafionner les plus grands accidens. Cette eau qui vient de fources bafTes , ne fera pas fujette ^ manquer ou a diminuer corame I'eau d'Arcueil. On pourra etablir aux voilinages des fontaines , des auges ou abreuvoirs pour les chevaux. Cette eau ne fera jamais melee comme I'eau de la Seine des eaux plii- viales ou de la fonte des neiges , & elle fera toujours claire. La proprete qu'elle occaiionnera dans les rues y fera refpirer un air fain & degage de toutes les vapeurs infedes qu'il entraine aujourd'hui avec lui. II faudra incomparablement moins de porteurs d'eau & de tonneaux, & ce feront autant de bras qui feront rendus i I'agriculture ou aux arts ; enfin la facilite d'avoir de I'eau fera etablir des bains chez une infinite de particuliers, & on fait combien ce fecours eft utile ^ la fante. Nous ne pouvons mieux terminer cet article , que par une reflexion trcs fenfee que rapporte M. Deparcieux : « Si, dit-il, on avoit ^ choilir 53 exprcs un emplacement pour y batir une capitale , on chercheroit fans 33 doute un endroit traverle par une grande riviere, & au-deflus duquel 33 il s'en trouvat une autre qui y arrivat •, on defireroit auffi que ce lieu 33 flit aifement acceffible , \ portee de tous les materiaux propres ^ la conf- 33 trudion & de tous les approvifionnemens necelTaiies \ k vie. >3 La fiiuation de Paris eft precifement telle qu'on la pourroit deftrer , \ la petite riviere prcs qui y manque , mais I'art peut nous donner ici ce que la nature nous a refuie, & le projet de M. Deparcieux procure cet avantage. II a donne dans ce memoire une enumeration des Francois qui avoient merite d'etre mis au nombre des bienfaiteurs de I'humanite par les etablif- femens utiles dont ils avoient decore leur patrie •, nous ne craignons point d'etre delavoues du public quand nous dirons que le projet qu'il a propofc f; la maniere dont il I'a ete , lui donnent autant de droit qu'^ perlonne d'etre infcrit dans cette honorable lifte. DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ^5 Physique. Sur la r^fiflancc dss fluides. Ann^e tj6j. iN ous avons expofien 176; (a), le commencement du travail que Ilifi. M. le chevalier de Borda avoit entrepris fur la reiifiaiice des fluides-, il n'avoit alors examins que la rchftance que les corps eprouvent en fe mou- vant dans I'air. 11 eft qiicdion dans celui-ci de I'obftacle que I'eau^ pent oppofer \ lenr mouvement lorfqu'ils y font plongcs •, cet objet qui n 'avoit prefque eto qu'annoncc dans le premier memoire , va etre dilcute dans celui ci. ks Qi juge bien que I'appareil avec lequel M. de Borda faifoit circuier Ics corps dans I'air, & dont le mouvement fc faifoit dans le fens verticil, ne pourroit etre ici d'aucun ufage, & voici celui qu'il liii fubftitua. II fit faire un bailin circulaire de iz pieds de diametre & de 1 pieds & demi de profondcur-, le centre de ce ballin ctoit occupc par une colonne cylin- drique aulJi haute que fon bord", le deifus de cette colonne portoit une crapaudine qui recevoit le pivot infcrieur d'un arbre vertical, dont I'au- tre pivot ctoit recu en haut par un collet •, cet arbre portoit vers le haut une bobine, autour de laquelle fe rouloit un cordon qui, apri.s avoir pade fur une poulie , recevoit un poids dont I'aclion devoir faire tourner cet arbre , & vers le bas une barre longue de 8 pieds qui le traverfoit & tour- noit avec lui. A une des extremites de cette traverfe , il avoit place une lame de fer mince qui prefentoit fon tranchant dans la diredion du mouvement pour n'eprouver de la part de I'eau du baffin qu'une refiftance phyliquemcnt nulle, & c'ctoit a cette lame qu'on attachoit les corps qu'on vouloit nict- tre en experience, qui par ce moyen , ctoient forces de circuier dans I'eau ar le mouvement de la machine, qui cependant etoit toute entiere dans air; les revolutions dtoient comptees de deux en deux ^ I'aide d'un pen- dule \ demi-fecondes. Le corps que M. de Borda foumit I cette experience j fut une bouie de pres de 5 pouces de diametre, tournee esactement ronde-, cette boule etoit coupee en deux , de manicre que fes deux moities puflent ie join- dre ou etre employees feparement, en forte qu'il pouvoit expofer au mou- vement la boule entiere, la demi- boule du cote convexe , ou la meme demi boule par fon cote plat , ou elle faifoit alors le meme eflet qu'un dilque de meme diametre. Le deffein de M. de Borda ^toit d'obtenir la reliftance que I'eau pou- voit oppofer au mouvement des corps qn'il y faifoit mouvoir ; mais pour avoir avec quelque precilion cette reliftance , il falloit la degager d'une autre qui s'y trouvoit melee , & qui etoit celle que le corps meme de I.» machine ^prouvoit de la part de i'air ou de celle des frottemens. (fl) Voyez Hiftoire .-3 du premier de ces micrometres qui rcpondoient k des Physique '^5"''.'"''"'^^ '^^ Ugne: ce meme micrometre, aii moyen d'unc monture par- ■ ticiiliere qu'on y appliquoit , pouvoit auffi porter un microfcope dont il Annie lySy. mcfuroit le chemin en centiemes de ligne. Muni de ces inftriimens, M. le due de Chaulnes commenca enfin I'exa- nien de la r^frangibilite des difKrens verres, dont il s'etoit pourvii par iinc methode audi limple qu'ingenieufe qu'il avoit imaginee. Si apres avoir parfeme les deux furfaces d'une glace un pen cpaiffe de petits objets tels que de la poufliere d'ailes de papillon , on expofe cette glace k un microfcope, de facon qu'on voie diftiiiftement les petits corps qui font fur la furface la plus proche de I'ceil ; il eft clair qu'on n'appcr- cevra pas avec la meme nettete ceux qui font lur I'autre furface, & qu'il faudra avancer le microfcope d'une certaine quantite pour les appercevoir diftindtement. II femble au premier coup-d'oeil, que le chemin qu'on eft oblige de faire en ce cas au microfcope , devroit etre precifement egal h I'epailTeur de la glace; on fe tromperoit cependant, on le trouvera touiours moin- dre, & cet cftet tient au pouvoir refringent de la glace-, eff.iyons de faire voir comment il en depend. Si d'un point d'un objet place fur la furface d'une glace, il part des rayons divergens qui traverfent fon epaiffeur, il eft clair que ces rayons conferveront leur direftion tant qu'ils traverferont I'epaiffeur de la glace ; ■ mais lorfqu'ils en fortiront pour paffer dans fair, I'effet de la refradion leur fera neceflairement augmenter Tangle qu'ils faifoient entr'cux, & ToEil qui verra I'objet par ces rayons ainfi detournes, la rapportera nu point oii ils devroient fe joindre s'ils avoient cette dirediion dans I'epaifieur de la glace, ce point fe trouvera plus pres que ne I'eft reelljment I'objet attache a la furface , & il fera d'autant plus rapproche que la refraftion fera plus forte-, cela fuppofe, voici comment M.le due dc Chaulnes parvientk con- noitre ce rapprochement. II fixe fur une tablette difpofce expres, le micrometre du porte objedlf charge d'un microfcope -, fur cette meme planche eft- elevee une poupee mobile qui porte la glace qu'on veut eprouver, chargee fur fes deux fur- faces de pouffiere de papillon -, alors le micrometre etant k zero , il fait avancer la poupee jufqu'i ce qu'il voie diftindement la poufliere placee fur la furface la plus proche du microfcope. On juge bien que dans cette polilion il ne voit que tres-imparfaitement celle qui eft fur I'autre furface, il approche done le microfcope au moyen de la vis du micrometre j'uf- qu'i ce qu'il les voie diftind:ement, & il a en centiemes de lignes la quan- tite dont le microfcope a ete avance : cette quantite comparce h. I'epaiffeur de la glace, mefuree aufli a I'aide d'un compas d'epaiffeur & d'un microf- cope , en centiemes de ligne , lui donne dans ces memes parties le rap- prochement de I'obiet, & par confcquent le pouvoir refringent de la glace qui le produit , & duquel il eft toujours aife de le deduire. Des experiences de M. le due de Chauhies, il refulte quo prefque tou- tes les elpeces dc glaces diflcrentes, out aufli des refrangibilites diiJeren- DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 6; tes, & qu'on ne pent en aiicune maniere s'en rapportcr ^ un rapoort — . >, general de refrangibiliie entre I'air & le verre, comme on I'avoit fait juf- p „ y 5 , j, ^ ^^ qui prefent. La propriiStd qu'ont Ics differentes efpeces de glace de rompre en gi- Ann^e fj6j. niral les rayons n'a, comme mille experiences le proiivent, rien de com- miin avec la propriete de difpcrfer les differentes parties color^es qui com- pofent ces rayons-, & la diflindlion de ces deux differentes proprietcs eft, pour le dire en paflant, le principe fur lequel porte toute la theoric des lunettes arhromatiques. Pour s'alilirer de cette difference, M. le due dp Chaulnes fit la reflexion fuivante. Puifque les rayons colores font differemment rompus par un verre len- ticulaire, il eft bitn certain que felon la couleur des rayons, le nieme verre portcra le foyer de ces rayons plus prcs ou plus loin lelon leur couleur. II ne s'agiffoit done plus que d'avoir la mefure de ces diffirens foyers-, & voici comment il s'y prit. C'eft un principe connu de tous les opticiens, que li on place un verre lenticulaire \ une certaine dift.uice d'un obiet lumineux, telle qu'il fe faffe de I'autre cote une peinture diftindle de cet objet (ur un plan , la diftance dii point lumineux au verre ou da verre \ la peinture, feront doubles de fon foyer. D'apres ce principe, M. le due de Chaulnes pla^a fur une regie divifee, trois poupees mobiles-, I'une, & c'ecoit celle du milieu, portoit le verre qu'il vouloit eprouver-, les deux autres etoient chargees , I'une d'un papier tranfparent traverfe par deux fils en croix qui paffoient au centre de I'ou- Yerture ronde fur laquelle il etoit tendu, & I'autre d'un carton deftine ^ recevoir I'image. L'objedif qu'employoit M. de Chaulnes, n'etoit pas un objedif ordi- naire-, il etoit corapoie de deux demi-cercles , I'un de verre commun, & I'autre de cryftal d'Angleterrc maftiques enfemble & travailles en meme temps dans le meme baffin. En couvrant alternativement I'une & I'autre moitie de I'objedif, M. le due de Chaulnes parvint i determiner le foyer de chacune , qui , comme on I'imagine bien, n'etoient pa? egaux, puifque le pouvoir refringcnt de chacune des deux moities etoit different. Ces foyers determines par I'image de Tobjet fur le carton , laiffoient cependant quelque incertitude i & pour s'en delivrer, M. de Chaulnes lubl- titua au carton un petit oculjire dont le foyer devoit coincider avec la furface du carton; & pour s'en affurer, il mit fur la furface d'une glace de la poufliere de papillon , & ayant applique cette furface au carton qu'il avoit perce vis-i-vis de I'oculaire, il lira & pouffa ce verre Juiqu'h ce qu'il lui fit voir bien diftindement la pouffiere de papillon : alors il etoit bien fiir que le foyer de fon oculaire etoit i la place du carton , & qu'en voyant di'lindcmcnt I'objet lumineux. i ce foyer, il etoit fiir que c'eioit la vraie place de la peinture. II cut done par ce m.oyen le foyer de chacune des moities de fon ob- 64- A IMl E G E D E S M E M O I R E S II j'"'"''''''^ ayec iine tres-grande exactitude •, & pour cooiioitre le changement " " que les rayons difteremment colores pouvoient faire dans la longueur de P H Y s I Q U ^- i^s foyers, il fubftitua au papier tranfparent, d'abord un vcrre bleu, & Jinnee 1^67. ^"'^"'^ "" ^erre rouge iur lefquels etoient places des cheveux en croix, & il mefura exactemeiit le foyer de chacune de fes moiries d'objeifhif en Ics eclairant d'abord d'une lumiere bleue, & enfuite d'une liimiere rouge, & il en dreffa une table. II eft aile de voir combien ces experiences fufceptibles d'une tres-grande exaftitude, peuvent procurer d'avanrages, elles donnent k tous les artiftes les movcns de s'allurer exaiftement de la qualite refraftive des matiercs qu'ils emploient, & de plus de voir exadement li la courbure qu"ils don- nent i\i flint- glajf ^om corriger I'aberration des coulcurs eft celle qui lui convicnt , puilque li elle eft legitime , les verres colores ne feront pas chan- ger le foyer; & que i'\ au contraire ils I'alongent ou le raccourcilTent , ce lera une marque indubitable que cette courbure eft trop grandc ou trop petite, comme M. de Chaulnes I'a trouve dans I'objedif achromatique dc trois piedsl fait par M. Dollond ■, au lieu que celui de fon excellente lu- nette du meme auteur, n'avoit qu'un feui foyer pour tous les rayons, tant blancs que colores. Nous ne devons pas perdre de vue que le but principal de M. le due de Chaulnes, etoit de determiner routes les dimenlions & toutes les cour- bures de fes oculaires & de cet excellent objeciif fans le demonter; nous I'allons Tuivre dans fes operations. L'epaiffeur des verres etoit extreraement aifee 'k mefurer dans les ocu- laires , le compas d'epaiffeur dont on rapportoit I'ouverture fous le microl- cope, pour y etre mefur^e par le micrometre, la donnoit exaclement, mais il n'en etoit pas de meme de l'epaiffeur des differentes pieces qui compofoient I'objedif j & voici de quelle maniere il s'y prit pour I'ob- tenir. L'objcdif fut fixe fur une poupee percee d'un trou qu'on rendit h-peu- prcs concentrique au verre, cette poupee etoit mobile fur une planche, de maniere cependant qu'elle y flit perpendiculaire •, la meme planche portoit le micrometre auquel dtoit affujeti le microfcope dirige vers la poupee: alors M. de Chaulnes fema fur les deux furfaces de fon verre de la pouf- liere de papillon , & ayant mis le micrometre ^ zero , il fit mouvoir la pou- pee jufqu'^ ce que les pouiTieres les plus proches du microfcope fuffent vues diftinftement ; alors fixant la poupee il fit avancer le microfcope juf- qu'i ce qu'il vit diftindement celles de I'autre lurface, & il marqua ce chemin en parties du micrometre. Ce n'etoit pas encore le plus difficile de I'operation , car independam- ment de ces deux furfaces externes , il devoit s'en rencontrer quatre dans I'interieur, favoir les deux du verre biconcave de flint-glajf, qui occu- poit le milieu de Tobjedif, & les deux furfaces des lentilles de verre or- dinaire qui y etoient appliquees. Le microfcope lui en fit appercevoir trois par les petits points fembla- bles ^ de la poulliere, que cet iuftrument fait toujours voir fur les fur- faces DE LACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 65 faces meme les plus polies , mais la c|iiatrieme iie put etrc nppcrcne ; le ^■^^— — — * contact dc ccllt-ci avec le jUnt- glaJJ' etaiit prefque imiiicdiat , dc facoii p <]uc CCS deux furfaces fe confondoient cnfemblc , conjecture d'autaiit plus vraifembiabie qu'on remarquoit ^ la circonfcrence du verrc , ces an- Anru'e ijSj. neaux colores que produit la prcfllon de deux verres I'un centre I'autre i & nous verrons bientot quelle etoit exadlcment vraie. Les difFerentes p.irties du micrometre donnoicnt done la diftance appa- rente des furfaces, & par confequcnt lepaideur apparcnte des verres; nous difons apparente, parce que corame nous I'avons fait voir ci-defliis, IVffet de la rcfr.idtion eft toujours d'approchcr, ou , pour parler plus jufte, de faire paroitre la furface ultcrieure d'un verre plus proche qu'ellc n'eft rcel- lementi heureufement M. le due de Chaulnes coniioiiroit la quantite dc cet effet pour les deux elpeces de verres qui compofoient fon obJe(fl:if, & il corrigea fes epaifleurs par ce moyen avec tant d'exaditude , que la fomme de routes les epaiffeurs dcduite de fes experiences , ne fe trouva diflerer que de trois centiemes de ligne de I'epaiffeur du verre , prife avec le compas d'epaiffeur 3c mefuree \ I'aide du microlcope &; du micrometre, difference li petite quelle peut paffer pour un veritable accord. Les epaiffeurs des verres etant determinees , il ne reftoit plus k fixer que les difterentes courbures de leurs furfaces •, celles des oculaires fe pou- voient ailement determiner par la longueur de leur foyer ; pour I'avoir avec plus de preciiion , voici comment s'y prit M. le due de Chaulnes. II attacha avec de la cire fon oculaire fur une poupee percee d'un petit trou , il fit avancer le micrometre mis h zero & charge d'une plaque de glace femee de pouUiere de papillon, jufqu'i ce que cette plaque touchat I'oculaire , & I'ayant fixe dans cette fituation , il fit reculer la plaque avec la vis du micrometre , jufqu'k ce qu'il vit diftinctement les pouffieres par le petit trou de la poupee, & alors il eut par le nombre des parties dii micrometre, la longueur du foyer de I'oculaire en centiemes de ligne, & par confequent les rayons des courbures de (a furfaces. Les courbures de I'objedlif tout monte , ii'ctoient pas fi faciles h deter- miner i & nous allons voir avec combi;n d'adreffe M, le due de Chaulnes parvint ^ fe tirer de cet embarras. Pour mefurer les courbures exterieures du verre, il placa fur une regie divifee, deux pointes egales qui pouvoient s'eloigner ou s'ecarter du mi- lieu de la regie fur laquelle dtoit placce une autre pointe qui pouvoit s'a- longer ou fe raccourcir par le moyen d'une vis •, alors ayant ecarte les deux pointes egales jufqu'^ ce qu'elles portaffent prcs du bord de I'objedif , il pouffa au moyen de la vis la pointe mobile jufqii'^ ce qu'elle touchat la convexiti du verre, puis ayant pofe cette efpece de compas fur un fup- port attache au micrometre, de faijon que les deux pointes touchaffent line regie qui y etoit attachee, il fit d'abord coi'ncider la regie avec le fil du microlcope, & fit enfuite avancer le tout jufqu'h ce que la pointe mo- bile parut i fon tour fous le fil, d'oii il refultoit que cet inten-alle, egal au hnus verfe de la courbure, fe trouvoit connu en panics du microme- tre, & par confequent en centiemes de lignes •, d'ou il tira aifcment le Tome XIV. Partie Francoift. I 66 ABREGi DES MEMOIRES — — ■— — rayon de la coiirbiire exterieiire, d'un cote de 25 pouces 11,5 lignes, & p cclui de I'autre de 16 pouces 10, 6 lignes. F H I s Y Q u E. £^g courbures interieures ne pouvoicnt pas fe mefurcr de la meme ma- ^nn^e ij6j. niere-, & M. le due de Chaulnes prit le parti de s'en affurer par le moyen de leurs foyers de reflexion. Pour y parvenir, il fit preparer une piece de cuivre quarree, percie de cinq trous-, I'un au milieu de figure quarree, qu'on pouvoit fcrmer avec line piece qui s'y rapportoit & qui etoit couverte de papier blanc : ce troll etoit deftine \ laiffer paffer, lorfqu'il etoit ouvert, une baguette divileequi fervoit comme de jauge \ I'inftrument ; defl'us , deflous & aux deux cotes de ce trou quarrd il y en avoit quatre rends, diftribiies egalement fur la circonference d'un cercle de 1 pouces de diametre. Cette plaque , ainfi preparee , fut fixee fur une machine paralladique •, la machine orientce, de manicre que la pl.ique fut toujours perpendicuiaire au foleil -, & le verre objedif fut place au bout d'un rouleau couche dans la goutiiere de la machine, de manicre qu'il put s'avancer ou fe reciiler ^ volonte. Tout cet Equipage ayant ete expofi au foleil , M. de Chaulnes appercut diflindement huit image's des quatre trous ronds, renvoyees par ks fur- faces concaves des verres qui compofoient I'objedif, & \ melure qu il ap- prochoit ce verre de la plaque, quatre de ces images fe rapprochoient , & enfin parvcnoient \ s'unir en uue feule, les autres faifoient le meme efFet ^ une diftance difFerente. II dtoit bien evident que ce point de reunion des images, ^toit le foyer de reflexion des furfjces concaves des verres qui compofoient I'objedif ; pour mefurer ces diftances, M. de Chaulnes ouvroit le trou quarre de la plaque, & pafl'oi: par-l^ fa baguette divifee qu'il conduiloit Jufqu'au verre, & qui lui donnoit la longueur de ce foyer, en y ajoutant repailfeur dii verre jufqu'^ la furface rellechi(rante. Nous avons dit qu'il fe trouvoit dans rob)ed:if de M. le due de Chaul- nes , trois furf.iccs concaves difi^erentes , & cependant il n'avoit apper9U que huit points lumineux au-lieu de douze, que les trois furfaces devoient necellairem.ent produire; il eft bien vrai qu'en cherchant ces points qui lui jnanquoient, il en avoit rencontre quatre autres, mais fi foibles, & qui fe reunilfcient \ une fi petite diftance, qu'ils ne pouvoient etre pris pour ceux qu'on cherchoit, aulTi n'etoient- ils que le produit d'une double reflexion dans I'interieur du verre. M. de Chaulnes fe reffouvint alors qu'en examinant les epaiffeurs des pieces qui compofoient fon verre, il avoit trouve deux furfaces li exac- tement appiiquees I'une fur I'autre , qu'il n'avoit pu les diftinguer , & il penfa que ces deux i'urfaces n'en faifant qu'une, n'avoient auffi donti^ quun feul foyer de reflexion; il reftoit en outre un point i cclaircir, c etoit de favoir i quelles furfaces appartenoicnt les foyers qu'il avoit trouves. Pour y parvenir, M. le due de Chaulnes imagina de fe fervir dun ex- cellent objedtif de 5 pieds de foyer, fait par M. de I'Etang, duquel les pieces pouvoient fe feparer , & dont les courbures ctant connues par ks DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 67 baditis dans lefqiiels Ics verrcs avoient etc travailles , formoicnt unc nou- '*^"^™^— — velie efpece dc verification. Physique Danscclui-ci, les courbures convexes Acs lentilles de verrc commun, & les concaves correfpoiidantes du Flint glajf, n'ctant pas auffi parfaitc- Ann^e tjGj. meiit cgalcs que dans robjcdif de Dollond , on appercut trois foyers & douzc points liimincux , lurfqu'on expofa ce verre tout monte au lolLil , comme on avoit fait le premier. De CCS frois foyers , le fecond & troifieme fe trouverent igaux , d'oil il rcfultoit que les deux verres biconvexes etoicnt egaux, & que les deux premiers qui etoient inigaux, appartenoient aux concavites de FUnt-glaJP, qu'on favoit d'aiileurs etrc incgalcs. II s'agiflbit alors de determiner i quelle furface appartenoient les deux autrcs foyers , pour cela M. le due de Chaulnes fcpara d'abord un dcs ver- res biconvexes , & trouva fon foyer pr^cifement egal au fecond dc ceux qu'il avoit obferves dans le verre tout mont^ ; il n'ctoit done pas douteux que ce foyer lui appartenoit, tandis que le troilieme qui etoit plus long, devoit appartenir ^ la derniere furface. Dans le verre appartenant i M. le due de Chaulnes, on n avoit eu in- dication que de deux furfaccs, & il avoit attribue cet efFet i I'identiti de courbure du verre biconvexe & du biconcave , cette explication ctoit d'autant plus vraifemblable, qu'il avoit appercu i la circonference du verre, ces anneaux colores qui font produits par la preflion des verres ; elle etoit meme encore confirmee par une autre experience, car ay ant pris deux ver- res , I'un convexe & I'autre concave , de meme courbure , & les ayant expofes au foleil, ils donnerent deux foyers ^ la meme diftance, tant qu'il furent fepartis , mais des qu'ils furent unis & centres , il n'y en eut plus qu'un. Malgre toutes ces probabilites , M. le due de Chaulnes n'avoit devinc jufte que pour un cote de fon verre-, I'autre, quoiqu'il oftrit le meme phe- nomene, le produifoit par une caufe route dilfcrente , qu'un nouvel exa- men lui fit decouvrir. M. de la Lande avoit une lunette de Dollond des memes proportions que celle de M. le due de Chaulnes, & il en avoit fait deffertir I'objedif pour lui donner une monture qui permit d'en leparer les pieces it volonte. II voulut bien confier cet objedif k M. le due de Chaulnes qui , en prefence de MM. Bczout & de I'Etang, le foumit aux memes experiences que le precedent , en examinant d'abord I'objetitif tout monte , puis cha- cune des pieces feparement , aprcs s'etre bicn allure de I'egalite prefque parfjite du foyer de cet objedlif tout monte & de cclui du lien. II rcfulta de cet examen, des faits tres-lingulicrs -, il Tcft, par exemple, extrcmcment que le verre qui de quelque cote qu'on I'cxpolc au foleil , offre trois lurfaces concaves , ne donne cependant que deux foyers de re- flexion , quoique celui de M. de I'Etang en ait contlammcnt donne trois, d'oii il Uiit neceffairement que de ces trois foyers il y en a deux qui ii; confondent. Qui n'imagineroit que cet eftet, ^gal dans les deux fens dont le verre. I i) 68 ABREGE DES ME MOIRES ■— — 1— I pent etre prefente au foleil , efl: produit dans les deux cas par la meme caiife ; , en fe tromperoit ccpendaiit , & Texanien des foyers de ces furfaces fepa- H Y s I Q u E. j.^gj ^ ^ £-gjj y|jj|. qyg j>y^ ^^^^ c'etoient les foyers de la furface d'un des Annie itGi. verres lenticulaires, & de celle dii Flint glajf c^\\ liii eft contiguL-, qui fe coiifondoient, tandis que de I'autre c'etoient ceux de la furface interne du premier verre lenticulaire & la furface externe du dernier de ces verres qui s'uniflbient : tous ces differens foyers & les fmfaces auxquelles i!s ap- partiennent etant determines, il a ete facile d'en deduire les rayons de leurs courbures, en fe fervant des formules que M. Bezout avoit calculees \ 1* priere de M. le due de Chaulnes, & qui fe trouvent ^ la fin de fon me- moire. Pour achever la defcription de la lunette de M. le due de Chaulnes, il ne lui reftoit plus que de donner le foyer & I'epalfleur de fes oculaires & leurs diftances , tant entr'eux qu'avec robjedrif i &: c'eft aufTi ce qu'il a fait en mefurant exa£tement I'une & I'autre , & en drelTant de tous ces objets une table exalte qui fait la cloture de cet article. Jufqu'ici M. le due de Chaulnes n'a fait qu'examiner I'ouvrage de M. Dol- lond dans toutes fes parties ; ce qui va luivre regardera les additions qu'il a juge \ propos d'y faire pour la precihon & la commodite des oblervations. Une nouvelle machine parallattique , plus folide & plus commode que celle qui eft ordinairement en ulage , fut deftinee \ lui fervir de pied \ M. le due de Chaulnes ne la decrit point ici , refervant cette defcription i I'art de la conftriidlion des inftrumens de mathematiques •, & ceux qui feroient curieux de la voir , pourront fatisfaire leur curiolite au chateau de la Meute, ou elle fert de fupport au grand tclefcope de 8 pieds, que D. Noel a fait pour le Roi. Pour Joindre ^ la commodite de manier la lunette , la pr^cifion dans les obfervations qu'on peut faire par fon raoyen , M. le due de Chaulnes vou- lut y ajouter un micrometre a peu pres femblable .ui micrometre aftrono- niique ordinaire. Nous difons "k peu pres femblable , car il fallut bien y introdiiire quelques differences. Le premier de ces changemens eut pour objet la maniere de fixer le tuyau qui porta les oculaires & le micrometre dans celui qui tient an corps de la lunette, de maniere qu'on put I'y affujettir, fans rifquer de le decentrer : on pourroit croire qu'une fimple vis de preflion fuffiroit, mais ces vis font fujettes ^ gater les pieces fur lefquellcs elles s'appuient , & comme elles n'agiffent que d'un cote, il feroit prefque impoflible qu'elles ne decentraffent le tuyau 5 voici comment M. de Chaulnes a evit6 cet in- convenient. II a entoure le tuyau fixe au corps de la lunette, & qui etoit fendu ^ I'ordinaire , pour y faire couler plus doucement le tuyau de I'oculaire , d'un anneau ^ oreilles qui fe ferre par le moyen d'une vis, & qui corn- prime le tuyau tres-ferme, f«ns le meurtrir ni le decentrer. Le fecond concernc les fils du micrometre , la longueur du foyer des oculaires qui fervent aux lunettes ordinaires, permet d'y employer des fils de foie , des fiU d'argent trait , meme des cheveux , niais le? oculaires des DEL'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 69 lunettes achromatiques font tres- courts , & ces filets feroient beaucoup —*———» {^rodls. M. le due de Chaulnes a remedic ^ cet inconvenient en fe fervant p dc glaces minces, enchalices dans les cadres du micrometre, fur Icfquelics 11 avoit trace avcc un dianunt des traits extremement Hns, & que la mc- Ann^e ijSj, thode qu'il avoit donnee en 1765, lui a permis d'elpacer , de nianiere cju'ils continllent exadement un elpace de 54 minutes, divife en deux cga- l^nnent par le fil du milieu. II ne s'agiffoit plus pour tirer parti de ce micrometre, que de connoitrc le nombrc de parties dc fon mouvcmeiit qui repondoit ^ chaque minute , car M. le due de Chaulnes avoit dcmontre en 1765 , qu'on nc pouvoit pas fc fier a I'egalitc des pas de la vis •, voici comment il s'y eft pris pour Ics obtcnir. II a d'abord d^termini par le calcul, que dans un cercle dont le rayon itoit de 19 toifes 5 pieds & 7 lignes, un intervalle de if. fecondes avoit uiie demi-Iigne-, & d'aprcs ce principe, il a fait conftruirc une mire fur laquelle il avoit marque un elpace de 21 pouces 5 lignes repondant ^ 34. minutes, & qu'il avoit fait divifer en demi-lignes-, on juge aifement qui! auroit ete impoflible de bien difcerner ^ pres de 50 toifes des inter- valles li petits , fi M. le due de Chaulnes n'eut trouve un moyen bien in^ gcnieux de les rendre villbles. Apres avoir divife la longueur de fa ligne en efpace de 20 fecondes , il fubdivifa en cinq un de ces efpaces, & cut par confequent des demi- lignes ou des intervalles de 4. fecondes, alors il fit dccouper une piece de cuivre mince , de maniere quelle format une bande aifez large avec des angles rentrans & faillans , places de maniere que Tintervalle dc 20 fe- condes repondit ^ celui de ces angles. Alors appliquant cette bande fur la mire, de maniere que fon premier angle repondit an o de la divKion , il imprima cette bande k I'ordinaire avec une brolTe, & tous fes angles fe trouverent repondre aux lignes de io en 20 fecondes, II imprima au-deffous une nouvelle bande , mais en placant le premier angle fur la deuxieme ligne, eioignee de la premiere de 4 fecondes, d'oii ii refulta que tous les angles de cette bande fe trouverent eloigiies des li- gnes de 20 fecondes, de 4 fecondes ; une troilieme bande eut , par le mcme moyen, tous fes angles eloignes des lignes de 20 fecondes, de huit fecondes; une quatrieme de 12 fecondes; une cinquieme de 16; & enfin ine fixieme de la totalite de I'intervalle entre les angles. En pte.iant done fuccefllvement les intervalles des angles de la premiere ,~ deuxieme, troiheme bande, avec la premiere ligne, on obtenoit aifement les intervalles de demi-ligne ou de 4 fecondes, qui fans cet ingcnieux moyen tut pas difficile de conftruire une table exade de la divilion du micrometre. II reftoit cependant une difficultc ^ vaincre, la diftance des objets ce- leftes eft comme infinie,& leurs rayons font phyhquement paralleles, mais celie dc 50 toifes ne I'eft pas, & les rayons venant de la mire etoient di- vergens, le foyer u'etoit done pas le mcme dans I'un & I'autre cas, &; il 70 . ABREGfi DES ME MOIRES — falloit eloigner davantage les oculaires dans le dernier cas que dans le pre- mier, d'ou il Tuit que les divilioiis qui auroient ete trouvecs par ce moyen, ^' ^' n'auroient pas ete juftes pour le ciel , elles auroient niceffairemcnt ete trop AiirJe I'jB-j. grandes. Pour remedier \ cet inconvenient, M. le due de Chaulnes imagina de reculer la mire, mais il etoit queftion de determiner de combien; un cal- cul facile lui en donna le moycn, & ce fiit avec cette diftance corrigee qu'il parvint i obtenir des divilions de fon micrometre , telles qu'elles puflent aifenient mefurer les objets celeftes avec exactitude. Les diffiren- tes methodes qui ont ete employees dans ce memoire , brillent par-tout d« genie de I'invention , & y font inaniees avec I'adreffe & la fagacitd les plus grandes. S V R L' E A U. X-iF.s anciens admettoient quatre elemens, c'eft-i-dire , quatre matieres primitives & inalterables, qui entroient plus ou moins dans la compofition de tous les corps-, ccs matieres primitives etoient I'air, I'eau, la terre & Ic feu : cette idee a ete adoptee par prefque tous les phyliciens ; nous difons prefque lous, parce qu'il s'eft efteftivement trouv6 quelques modernes qui I'ont rejettee , & ont pretendu que ces fubftances qu'on donnoit pour ele- vens primitifs & inalterables, etoient eux-mcmes compofees d'autres fubf- tances & pouvoient changer de forme. On s'eft fur-tout attache ^ faire voir que I'eau que nous avons , pour ainfi dire, fous la main plus qu'aucune autre fubftance el^mentaire , pouvoit etre convertie en terre, & par con- fequent n'etoit ni fimple , ni inalterable. On con9oit allez que cette affer- tion, h elle etoit vraie, renverferoit toutes les idees recues, & detruiroit fans retour toute la certitude qu'on pent attendre dcs anaiyfes chymiques, puifqu'on ne feroit Jamais sur que les fubftances provenues de la decom- pohtion d'un mixta, ne fuffent pas le produit de I'operation plutot que les matieres qui les compoloient. Ceux cepcndant qui ont attaqu6 Vinaltirabiliti de I'eau , fi on peut employer ce terme , ne I'ont pas fait fans y etre autorilcs par^ des raifons afl'ez fortes. Ce point ayant ete difcute dans I'academie i I'occalion du pro- jet forme par M. Deparcieux, d'amener ^ Paris les eaux de I'Yvctte, M. le Roi a cru qu'il meritoit d'etre examine avec la plus grange atten- tion , & cela d'autant plus qu'il eft extremement important de favoir i quoi s'en tenir fur un fentiment qui tend ^ renverfer I'idee fi ancienne de I'inal- terabilite de I'eau , & c'eft de la dilfertation que M. le Roi lut ^ ce fujet, que nous allons rendre compte, en prefentant, autant qu'il nousfera pofli- ble , dans toute leur force, les faits allegues par les partifans de la transfor- mation de I'eau , & les raifons & les preuves par lefquelles cet academi- cien fait voir qu'on n'en pent rien conclure contre le fentiment de ceux qui regardent i'eau comme inalterable. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, -i La plus andenne de ces experiences eft celle de Vanhelmont, il planta — unc branche do faule dans dc la terre de jardin defftichee au four, & cette p branche crut 8c acquit un poids & uii volume conlidiirablc en rarrofant " ^ s i Q u E. fimplement avec de I'eau pure, & fans que la terre pltut avoir perdu la An.i/e i^Cj. plus petite quantit(5 de fon poids ; I'eau etoit done capable de fe corpori- fier, pour ainh dire, & de fe changer en la fubftance du boisi elle n'etoit done pas inalterable. Boyle , dans fon traiti de I'origine des formes , rapporte qu'un de fes amis ayant difiille jufqu'i deux cents fois de I'eau de pluie, avoit trouvd que cefte cau donnoit toujours un rclidu terreux, tcUement que, felcni •cette relation , une once d'eau produidt i la fin Ics trois quarts de fon poids en terre-, fur quoi il eft \ remarquer que Boyle n'avoit pas fait lui- meme cette cypcrience, mais qu'il la tenoit d'un autre qui vraifemblable- ment avoit ete trompe par qu^lque circonftance •, ce rcfultat itant hors des bornes de toute polFibilite, revenons \ des experiences plus certaines. Nous pouvons incttre en ce rang la belle experience par laquelle M. du Hamel a fi fort encheri fur celle de Vanhelmont , Sr qui eft rapportee dans les raimoires de I'academie de 17+8 (a),ou il en donne tout le derail. Independamment de plulieurs autres tentatives , il avoit eleve un chene fans autre aliment que de I'eau filtree ou diftillee •, ce chene avoit cru pendant tout le temps de I'experience qui a dure plus de huitannees, d'abord plus vivjment que s'il eut etd en terre , enfuite beaucoup plus foiblement •, mais enfin il avoit toujours cru , & n'a peri que parce qu'on le lailfa manquer d'eau pendant un voyage que M. du Hamel fut oblige de faire. On ne pouvoit pas foupconner ici , comme dans I'experience de Vanhelmont, que la terre lui eut fourni quelque chofe, & il eft tres- certain que toute la fubftance folide de ce chene lui avoit ete fournie par de I'eau hltree, & par confequent exempte dc molecules grollieres. M. MargrafF, de I'academie royale des Sciences de Berlin, a entrepris une nouvelle analyfe de I'eau, dont le refultat femble donner du poids \ Topinion de la mutabilite de I'eau, & dans laquelle il a pris toutes les pre- cautions que fon genie & Ion favoir lui ont pu fuggtfrer. II n'a employs dans fes experiences que de I'eau de pluie ramaffee dans les mois d'hivcr ou fair eft le moins chargi de matieres etrangeres, toujours recucillic dans des grands vafes de verre & avec I'attention de Jie recevoir que celle qui tomboit apres plufieurs heures de pluie pour lailfer le temps i la premiere pluie d'abattre tous les petits corps etrangers qui auroient pu etre fufpcn- dus dans I'air. M. Margraft' ayant amafle environ trois mille fix cents onces d'eau de pluie, rccueillie avec toutes les precautions que nous venons d'expofer, il la mit en diftillation dans des vailfeaux de verre qu'il avoit eu foin de tenir extremement propres, & la diftil!a*'on fe fit i une chaleur allez mo- deree pour ne pas fjire bouillir I'eau : lorfque I'eau contenue dans cluque vaiffeau diftillatoire , itoit rcduite au quart, il mettoit \ part ce quart qui (.j) Voyez Hid. de J 748, Hid. Tome X. 72 ABRECl&DESMEMOIRES ■—'■—■—— rcftoit, & remettoit de noiivelle eau jufqu'^ ce qu'il eilt ditlille b peu-pres P li Y s I Q u t ^^^ vingt-quatre vingt-cinqiiiemes de fon eau •, & par ce moyen il eut tou- 'tes les parties heterogenes qui ne setoient pas pu clever avec I'eau, con- /inn^e I'jSj. centrees & rafFemblees dans ce vingt-cinquieme d'eaii non diftillec. II n'eft pas neceflairc d'ajouter que cette eau , ainfi furchargee de parties etrangeres, etoit trouble. M. Margraft la concentra encore en continuant de la diftiller dans de plus petitcs cornues ; cette eau ayant enfuite etc evaporee jufqu'a uii certain point & filtree par le papier gris, laiffa fur le filtre une terre calcaire blanchatre tirant lur le jaune, tres-fine & pefanr cent grains on un gros 28 grains : la liqueur filtree n'etoit pas claire, elle avoit un ceil d'opale qui f.iifoit voir que la matiere non diiloute qui etoit reftce fur le filtre , n'etoit pas la feule quelle continf, mais qu'outre cette terre, il y avoit en- core dans I'eau des parties lalines dilloutcs qui avoient paffe avec elle par les pores du filtre : pour s'en eclaircir , M. MargrafF y verla une folution de (el de tartre tres-pur, & ayant fait les operations neceflaires, il obtint des cryftaux en aiguilles qui etoicnt de veritable ialpetre & quelques au- tres cryftaux cubiques qu'il reconnut pour du vrai fel marin , les uns & les autres etoient bruns ; preuve evidente que malgre les precautions qu'a- voit prifes M. Margrafl pour avoir fon eau de pluie bien pure, elle tenoit cependant des particules huileufes & vifqueufes. L'eau diftillee cette premiere fois, fut ioumife ^ douze nouvelles diftil- l^itions, dans lefquelles elle donna toujours quelques particules de terre, tellenient qu'en ramaflant les produits des treize diftillations, il fe trouva que les 5600 onces d'eau avoient produit i gros 60 grains ou la 144006. partie de fon poids, d'une terre calcaire trcs-fine & quelques grains d'a- cide nitreux & d'acide marin ■-, l'eau de neige recueillie avec les memes precautions que l'eau de pluie , a donne les memes refultats , il s'y eft trouve fculement un peu plus d'acide marin. Cette opiniatrete de l'eau ^ toujours donner de la terre dans les diftil- lations, engagea M. Margraft 'k continuer de la diftiller, pour voir li elle en donneroit encore; mais il introduilit quelques differences dans le pro- cede, l'eau n'avoit point bouilli dans les treize premieres diftillations, dans les fuivantes qui furent au nombre de trente, cette eau deji diftillee treize fois, fut toujours tenue bouillante, & il obferva de plus de fe fervir d'uii vaifleau qui ^toit d'une meme piece avec le recipient : on y introduifit l'eau par un trou qui fut exadtement bouche , & quand route l'eau avoit pafle par la diftillation dans le recipient, on la faifoit repafferrdans le vaif- ieau pour la diftiller de nouveau ; par ce nioyen , M. Margraft^ etoit sur qu'aucun atome de la pouffiere exterieure ne pouvoit s'y meler. A mefure que les diftillations fe multiplioient, l'eau devenoit de plus trouble en plus trouble, la terre le manifeftoit davantage, & cette terre pa- roiffoit femblable a celle que les premieres diftillations avoient donnee. M. Margraff voyant que l'eau donnoit conflammcnt de la terre i toutes les diftillations, voulut voir ce que produiroit iur elle I'agitation : dans cette vue, il attacha a une aile de moulin une bouteille d'eau diftillee, & I'y laiffa tourner long-temps-, cette eau refta toujours limpide, uais celle I DE TACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 75 \ qui on fit eprouver long temps des fecoufles qui I'ngitoient alternative- "iii^— ■— ^ ment en fens cdntraire , donna de la terre calcaire & des fcls. _ La mcnie chofe, on preftjue !a meme chofc , arriva ^ de I'eau de piuie *^ " '''' S t Q u £• trcs pure, que M. Margr.iff avoit bien enfermce dans un vafe expolc au Annie ilGi, foleil; il s'excita au bout d'un mois un mouvement inteftin dans l,i liqueur; il s'y eleva de petites bulles, & il s'y forma un limon verdatre qui s'attacha aux parois &au fond du vaifleau. L'eau de pluie diflillce dix ou douze fois, & expofee au foleil dans un vafe, de nunicre quelle puitle s'cvaporer fans que la poudiere puille s'y melcr , laille apres fon evaporation une terre toutc femblable \ ceile que donne la Jiftillation. Les experiences de M. Margraft, que M. !e Roi s'eft fait un devoir de rapporter avec toutes leurs circonftances, prouvent done incontclUblement quj IVau de pluie, qwoique trcs-pure, contient cependant une terre cal- caire, une fubftance vifqueufe ou mucilagincufe , un peu d'acide nitreux & un peu d'acide marin. Nous difons, les experiences de M. Margraff, car celles que rapporte Boyle, n'ayant point etc faite par lui-mcme,& s'ecartant fi fort du reiultat de celles de M. Mitgraff, ne paroilfoient meriter aucune attention, on a quelque lieu de s'etonner qu'un phylicien aufll eclaire que M. Newton ait fu, fur un pareil fondement, adopter I'opinion de la transformation de eau en terre. Mais peut-on conclure des experiences que nous venons de rapporter que cette transformation foit pomble; c'cft ce que M. le Roi ne penfe nul- lement, & nous allons rapporter les ralfons qui I'engagent \ croire que les experiences ne foiirnifient aucune preuvc folide de ce pretendu phenome- ne-, mais avant que de Ics rapporter, il ne fera peut-ctre pas inutile de rap- peller ici le principe fur Icquel elles font fondtics. La diftillation el;ve k-s matieres en raifon de leur volatilite , on fait que tous les corps n'ont pas la propriete d'etre enleves par I'attion du fiu, & ^ue parmi ceux qui I'ont, il y en a qui s'enlevent bicn plus facilement que les autres, ou qui, pour parler le langjge de la chymie, font plus volatils que les autres; les fels en general ne s'elevent qu'en fe decompofant, &: par line extreme violence du feu, encore n'eft ce que leur partie acide, lallca- line demeurant obftinement au fond de la cornue. Les parties des corps rcellement diilous dans l'eau, paffent avec elle par les pores du filtre , &: ce moyen feroit infufHfant pour les en feparer. Plus les corps melss avec l'eau lui font adherens, plus leurs molecules font fines, & plus auffi ils peuvent s'elever facilement avec elle , & par con- fequent ctre portes \ une plus grande hauteur que d'autres molecules plus groUicres & uioins adherentes; l'eau rcduite en vapeurs auroit abandonnc ces deriiieres beaucoup plutct : appliquons maintenant ces principes. La partie de la terre melee avec l'eau, !k. qui lui eft trcs peu adherent?, en eft aifement feparee par le filtre , & on dcpouille l'eau qui a palfe par fes pores, des acidcs quelle contient, en les obligeant de fe cryftallifer. Mais que fera-ce fi nous pouvons prouverj qu'une partie de la terre & Tome XIV, Partie Franco ifi. K 74 ABREGfDES MEMOIR ES — »«— ■^— ■ des acides , joints ^ I'eau de pluie, a etc elevee jufqul la hauteur des nu^es _ avec les vapeurs qui ont forme la pluie en fe condenfaiit. Pouvons-nous ■ efp^rer que des fubftances , reduites en parties affez fines & allez adh^ren- Anne'e trS^, tcs aux parties de I'eau, pour etre elevees avec cette eau reduite en vapeurs ^ la hauteur des nuees, en puiffent ctre fcparees par les diftillations qu'on fait dans les laboratoires, ou on n'eleve les vapeurs qu'^ quelques pieds. II ne doit done s'en feparer ^ chaque diftillation , qu'uiie partie qui ira toujours en diminuant , Tans qu'i! foit peut-etre au pouvoir des honimes de parvenir \ en dtipouiller I'eau parfaitcment ■, les dernieres parties de terre & d'acide, ctant vraifemblablement airez fines & affez adherentes aux mo- lecules dVau pour s'elever avec elles au meme degre de chaleur qui fuffit pour reduire I'eau en vapeurs, & ne s'en fcparant qu'k mefure que la di- minution de I'eau, inevitable dans ces occaiions, oil una forte ebullition oblige les moins tenues ^ fe feparer. • ' Or il n'eft pas difficile de prouver que la terre contenue dans I'eau de pluie, employee par M. Margraffi, s'etoit elevee avec les vapeurs; fi on veut bicn fe rappeller les precautions avec lefquelles elle avoit ete recueillie, & que nous avons rapportees. M. Margraff ne prenoit que celle qui tomboit aprcs qu'il avoit deji plu deux ou trois heures , & dans les mois ou I'air eft le moins charge de corps etrangers-, le peu qui pouvoit s'y trouver de ces corps avoit ete surement precipite par deux ou trois heures de pluie piecedente, & cependant I'eau en contenoit une quantite confiderable, & il n'eft pas probable que parmi ces molecules de terre & des acides ni- treux & marin , il ne s'en foit pas trouve de plus deliees & de plus adhe- rentes aux parties de I'eau •, les plus groffieres en ont ete feparees par le filtre & par les premieres diftillations •, mais il en fera demeure d'autres , dont quelques-unes auront ete feparees par les diftillations fuivantes, par le tre- niouffement donne \ I'eau , & fur-tout par I'ebullition forte & continue qu'on lui a fiit fubir. II doit feulement etre arrive, que la quantite de ces relidus alt toujours ete en diminuant, fans que cependant on puiffe s'aflu- rer de la pofl'ibilite de depouiller emierement I'eau de ces matieres qui etoient melees avec elle lorlqu'elle s'elevoit en vapeurs pour former les nuages : que fi Ton doutoit que ces matieres fuffent melees avec I'eau lorf- qu'clle s'elevoit en vapeurs, & fi Ton croyoit qu'elles n'euffent ete que ra- mnffres par la pluie en tombant, raalgre les precautions dont nous avons parle, la ncige qui fe forme ^ une trcs-grande hauteur, & qui cependant. donne les memesrcfidus, prouveroit combien ce doute leroit malfonde. D'ailleurs, toufcs les tcrres refultantes des diffei;entes diftillations, font de meme nature que celle qui eft feparee de I'eau par le filtre dans les pre- mieres operations , & celle-ci n'a jamais'ete regarded comme le prodtiit de I'eau, mais comme une maticre ^trangere qui y etoit jointe. Pourquoi met- tre les autres dans une clalfe diftcrcnte ? On ne doit admettre un principe extraordin.iire que lorfque ceux qui font conni^s font abfolument infuftifans pour expliquc-r un fait propofe : nous venons de faire voir que le fait en queftion s'explique, & meme alfcz facilcment , fans fuppofer d'autres prin- cjpes que ceux qui font admis de tous les phyficiens. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 75 L'accroiflcment da fiule de Vanhclmont , &: celui du ch^ne de M. du ; Hamel,. lie font pas plus- difficiles 4expli«]uefrfiins admettre la transfor- p „ y s i o u E niatiori de I'eau en lerre', ils ne le doiveiit I'lin & I'autre qu'aux parties ter- reufcs & falines que contient toujonrs I'eau, Won M. le Roi , lors mcme Ann^c tySy. quelle a etc filtree 011 diftillee ; aulfi cot accroiffement etoit-il be.iucoiip plus lent que celui d'.irbies (embl.ibles eleves a I'ordinaire & dans la terre. Puifque I'caii de pluie, expofee i un battement continu & alterintif, donne conlbmnicnt de la terre calcaire & des acides abfolument fembla- bles a ccux quelle donne par la diftillation , on ne peat certainement re- gar Jer ces derniers oomme le prodiiit d'une transformation de I'eau en ter- re, il feroit plus qu'cxtraordinaird que la iimple agitation piit produire cet effet; d'ailleurs la- Iimple evaporation le produit; & I'eau de paiii diftillee & enfermee dans des vaiffeaux ou la poufliere ne pouvoit penctrer , s'eft totalement evaporee , & a laiffi; une terre calcaire aofoUiinent femblable i celle qui refVe apres les diilillations les plus reiterdes : il eft d'ailleurs conf- tant, par une infinite d'experiences , & fur tout par celles de M. Cadet, que le verre rediiit en poudre ou porphyrife, fe mele tellemeiit avec I'eau, qu'il n'en altere pas meme la tranfparcnce. II y a plus, non-feulement I'eau laiffe aprcs k diftillation une terre cal- caire, mais elle laiile encore une quantite, petite ^ la verite, mais tres-per- ceptible d'acide nitreux & d'acide matin , & d'une matiere mucilagineufe. 11 faudroit done dire auffi que I'eau fe convertit en acide & en mucilage, ce qui eft i\ abftirde que. perfonne n'a jamais ofe I'avancer. L'opinion de ceux qui foutiennent que I'eau peut etre transformee en terre, n'eft done etablie queTur ce qu'ils rcgardent comme inexplicable, fans cela, qu'aprcs un grand iiombre de diftillations, I'eau donne encore dc la terre, & qu'ils regardent cet efFet comme une preuve de la transforma- tion de I'eau en terre ; mais la difficulte qu'ils trouvent dans I'explication de ce phenomene, ne vient que de ce qu'ils luppofeut, qu'apres un certain nom- bre de diftillations, toute la terre qui pouvoit ctre jointe ^ I'eau doit en ctre degagee : or rien n'eft plus gratuit que cette fuppofrtion -, il eft fou- V:erainement difficile d'obtenir des ctres lunples, & les chymiftes eprouvcnt cette difficulte tous les Jours. . Nous avons fait voir d'ailleurs, que des parties de terre, & meme de Tcrre, peuvcnt ttre affez fines pour s'enlever avec les molecules d'eau, auxquelles elles font adherentes, & que par confequent il etoit impoffible que la diftillation Ten depouillat parfaitement. 11 eft done bien conftant que les experiences, rapportces par les defen- feurs de la transformation de I'eau en terre , ne concluent rien en faveur de cette opinion, & qu'on peut regarder cette fubftance comme inaltera- ble, du moins jufqu'i ce qu'ils aieiit allegue en faveur de Icur fentiment des. preuves plus deciiives. K 7(5 ABREG^ DES MEMOIRES Physique. 4nmii^6T. OBSERVATIONS DE PHYSIQUE GENERALE. jjjA V_/n fait que \x cigale eft extrememenr commune dans I'ltalie, la Pro- vence, le Langiiedoc, & en general dans les pays chaiids; niais on ne croyoit pas podible qu'elle vectit dans la partie feptentrionale du royaiime. Meflieurs dii Hamel avoient autrefois envoye ^ M. de Reaumur, dans le temps qu'il travailloit i fon hiftoire des Infedtes, des depouilles d'infedtes que ce Phyhcien reconiiut pour etre celles des nymphes des cigales ; mais il ne put fe perfuader que la cigale qui les avoit produites fut origiiiaire de Denainvilliers, qui n'eft qu'i vingt & une lieues de Paris. M. Fouge- roux a leve fur ce point toute difficulte i il a fait voir ^ I'Academie une cigale, qu'il avoit prife vivante i Denainvilliers, & en dernier lieu une nymphe de cet infedbe, qu'il avoit auffi trouvee vivante : les habitans du. lieu les connoiflent & tirent meme un bon augure pour leurs recoltes, lorf- qu'ils en entendent beaucoup. Pcut-etre avec des recherches plus exactes en trouvera-t-on encore plus prcs de Paris; du moins les obfervations de M. Fougeroux prouvent-eUes , qu'^ vingt & une lieue au fud de cette ca- pitale , elles peuvent vivre & fe multiplier. I I. Void encore une efpece d'animal qu 'on croit communement etranger; non-feulement ^ la France, mais meme k TEurope-, c'eft le caftor qu'on regarde comme habitant naturel de la partie feptentrionale de I'Ameriquei il eft cependant vrai qu'on en voit dans la France, & meme dans la par- tie la plus meridionale de -ce royaume \ on en trouve fur les bords dtl Rhone, dans la partie de ce fleuve voifine de Saint- Andeol , fur le Gar- don d'Alais & ilir celui d'Anduie , & dans la riviere du Viflre ; on ne le connoit point dans ce pays fous le nom de CaJIor, mais fous celui de Bievre, ou en langage du pays, Biure. II n'y a gucre plus de dix-huit ans qu'on s'eft avife d'en tirer parti, avant ce temps on n'en faifoit pas plus de cas que d'un chien mort : un Chartreux s'avila le premier d'en faire mettre un \ I'etuvee ; on fait que ces Religieux, qui font maigre toute I'annee, mangent des animaux aquatiques, & fur-tout des loutres tres-ana- logues au caftor •, il n'eut pas lieu de s'en repentir , la chair en fut trouvee excellente, & fur-tout celle de la queue, qui eft le morceau le plus dc- licat : depuis ce temps on mange du caftor, on en met en pate & on en confcrve meme les cuiffes toutes cuites dans I'huile. La plupart de ceux qui en tuent, les portent aux Chartreux qui les acherent affez cher. On fe fert de leur peau pour les memes ufages auxquels on emploie celle des DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 77 caflors de Canada ; les caftors de France ont , comme ces dcrnicrs, Ip^— ^——i ^b— deux poches qui contiennent cettc maticre connue fous le nom de cajlo- n reum, elle eft fous differente forme dans les deux pochei : la ftipericure " ^ ^ ' Q u ^. contient du cafloreum prefcjue fluide, il eft plus epais dans !a podie inft- Annie i-Gy. rieure ; en conlervant cette matierc dans iin vaiffeau de verrc bien bou- '' che, elle conferve fa liquidite & unc odeur plu<; vive que n'a le cafloreum. defleche; elle perd feulement un peu de fa fluiditc dans les grands froid*. Ces animaux ^toient autrefois beaucoup plus communs en Langucdoc qu'ils lie le font aujourd'hui •, on pritend que les inondations en ont fait perir Un grand noiubre; leur raretc pourroit aulli venir de ce que les riverains du Rhone les ddtruifcnt autant qu'ils peu vent, parce que ces animaux cou- pent & rongent les plantations de iaules qu'ils font fur les bords de ce fleuye, & qui font pour eux d'un grand revcnu : il ne fcroit peutetrc pas inutile d'exaininer s'il ne feroit pas plus avantageux de facrifier les fiulcs aux caftors que de facrifier le« caftors aux faules. Tout ce detail eft tirs d'une lettrc de M. Montet, de la Societe royale des Sciences de Mont- pellier , qui a deji enrichi I'Hiftoire de TAcadsmie d'un grand nombrc d'obfervatious intereflantes. I I I. M. FouRCROY de Ramecour, Brigadier des armees du Roi, Ingenieiir en chef ^ Calais, & Correfpondant de I'Academie, a mande I M. du Ha- mcl que le 2 Janvier 1767, lamer s'etoit elevee ^ Calais d'une maniere ex- traordinaire. Le barometre qui s'etoit foutenu les jours precedens i iS pou- ces 9 lignes, etoit tombe affez promptement ^ 27 pouces 7 ligncs, & il fouffloit un vent de nord-nord-oueft tres-fort, mais Tans bouffees : le ■ plein de la nier devanca d'cnviron une denii-heure le temps auquel il dc- voit arrivcr, & elle s'^leva de 59 pouces au-deffus du terme reduit des vi- ves eaux ou grandes marees : excepte une feule maree de 17^6 , qui ex- ceda ce terme , on ne fe fouvcnoit point ^ Calais d'y avoir vu la mer fi haute; cent trente-frois travees des Jettees en bois, qui, I la verite, etoient vieilles & en mauvais etat, ont ete renverfees par ce flot extraordinaire. M. de Fienne, ingenieur en chef I Gravelines, a mande ^ M. Four- croy , que la mer qui avoit deji ete plus elevee qu'i I'ordinaire la iiult du premier au 2 decembre , parut pleine le 2 des midi & demi ; qu'.lle cut alors trois alternatives de dicroiffement & d'accroilfement jufqii'i u:ie heure & demie, & qui cette derniere vibration elle monta de 25 pou- ces au dfffus du terme des plus grandes vives eaux. M. Poiffon, in;;enicur en chef i Dunkerque , a audi informc M. Fourcroy, que la marce etoit iDontee de 51 pouces au-deli du repaire des grandes vives eaux, & que quelques perfonncs I'avoient afTure qu'on avoit entendu un coup de ton- ncrre vers les lept heures du matin •, M. Fourcroy prefume que la caufe phyhque de ces marees extraordinaires , quelle quelle piit ctre, avoit fon foyer ou centre d'erfort au nord de Calais, puifqu'elJes ont etc d'autant plus hautes qu'on eioit plus au nord-tft de cette ville. A B R E G E D E S, M E M 0 I R E S. I V. r H Y S 1 Q U E. Ann^e 1767. Le r; Aout 1766, la chaleur fut extreme ^ la Guadeloupe-, fur les cinq heures du ioir, le ciel parut au couchant comme enfiamme, & le vein qui etoit k I'eft fauta au nord-oueft, & fouffla avec violence; tous les habitans itoient dans la confternation & attendoient quelque facheux eveuement, cependant ils n'eurent i effuyer qu'un grand vent avec quelques coups de tonnerre, & leur frayeur fe diffipa-, ce ne fut pas pour long- temps-, des le iS feptembre, les memes apparencess'obferverent, excepte qu'il regnoit alors un calme plat, ce qui preftge ordinairement en ces qiiartiers un ou- ragan & un tremblement de terre ; on reffentit eiffcdivement dans I'ifle cuatre fecouffes pendant la nuit ■, la premiere I minuit , .& les trois autrea vers quatre heures & demie du matin-, mais le jour etant venu on yit la foufriere jetter dela fumec plus qua I'ordinaire, ce qui raffura les habitans. Pour comprendre la raifon de ce dernier article, il efl: neccffaire de fa,- voir qu'il y a dans I'ifle de la Guadeloupe une montagnequi jette de temps en temps de la fumee & des flammes, par deux bouches placees i fon kiji- met; cette ir-ontagnc eft extrememtnt haute-, les nuages paffent ^-peu-pres i la moitie de fa hauteur-, on emploie deux heures i y monter, ou plu- tot h y gravir en fe cramponnant aux pierres, & on doit fe pourvoir de liqueurs fortes pour parer au froid exceffif qii'on eprouve au fommet-, fies des bouches qui font ^ ce fommet , il y a un etang dont on ne connoit pas le fond, & qui contient du poiffon de mauvaife qualits. Avant 1758, I'ifle etoit fujette h beaucoup de tremblemens de terre -, vers cette aunee les deux bouches s'agrandirent, & la matiere brulante du volcan trouvant' une plus facile iffiie, caufa moins de fecouffes dans I'ifle. Depuls 1745 , les ■ bouches fe fontfermees, & on trouve en leur place une multitude de.pe- tites crevaffes par oii il fort de la fumee, & oii Ton ramaffe facilement i la main la plus belle fleur de foufre. II eft aife de voir , par tout ce que nous venous de dire, pourquoi la grande quantite de fumee qui fort de la liiontagne, raffure les habitans fur les tremblemens de terre. Le 6 odlobre, le vent etant au nord & aflez modere, il devint tout-^- coup extremement modere-, la mer paroilToit au loin tres mauvaife, & le temps tres-charge; fur les cinq heures du foir, la pluie qui avoit dure toute la journee, fit deborder I'etaiig qui eft au-deflbus de la foufriere; les ri- vieres fortirent de leur lit -, prefque toutes meme s'en font fait de nou- veaux : la plus grande partie des vivres de ces quartiers , & plus de cent maifons ont ete emportces par les torrens -, le vent & la maree ont fait auffi les plus grands ravages, & tous les batimens qui etoient dans ces pa- rages ont peri , les uns k la cote & les autres ^ la mer. Ce detail eft tire • d'une lettre ecrite I M. Fougeroux , par un habitant de cette iOc. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 79 V. P H Y S I Q U E. r, La foufriere de la Guadeloupe n'eft pas le feul volcan qui ait donne -^i^nie tjoy. cette annie des lujets de crainte k ion voilinageiAIademoilclle Ardinghclli a mandi a M. I'abbi Noilet, que le 15 odobre, le mont Vcfuve s'ctoit ouvert avec un bruit horrible, & avoit pouir(^, par cette ouvertare, uti torrent de matieres enfl.immccs, qui setoit divile en plulicurs branches-, la plus grande couloit avec uiie vitclTe effrayante, & die augmenta telle- mcut, en fe dirigeant toujours vers Portici , que le Roi qui y etoit, & tous les habitans, s'en retirerent i deux heures apres miiuiit : le lendemain ce torrent dc feu etoit arrcte , ou du moiiis ne couloit plus que Iciuenienf, jamais le Vcfuve n'avcjjt f.iit, dans aucune eruption, autant de fracas qu'il en a fait dans celle ci; il faifoit entendre le mcme bruit que cclui dune fiiriv-ufe tempste, pendant laquelle le tonnerre ne celleroit de gronder, & les lecouffes frcqucntes qu'il donnoit faifoient trembler tous les edifices i plus de lix 4 fept licues a la ronde; preuve certaine que les matieres qui s'cnflammcnt font \ una tres-grande profondeur •, la fumee que jettoit la niontagne etoit li epailTe , & en h grande quantite, qu'elle obfcurciflbit le foleil qui, pendant trois jours, n'a paru que de coulcur de fer rouge, & fans rayons. II eft tombe dans les environs du Vcfuve , la hauteur dc trois doigts de cendre , ou plutot de fable calcine , & cette efpece de skiic s'eft ct-ndue jufqu'i Naples : la lave qui en eft fortie avoit , lelon a mefure qui en a ete faite, environ (oiiiante toilss de large & i-peu-prcs vingt pieds d epailfeur. On peut jugcr quel effroi ont du caufer les mugilTemcns effroyables de la montagne , & les fecouGes qui fe luccedoient Tune a I'autre fans inter- ruption : le dommage qu'a caulc cette eruption eft evaluc a plulleurs cen- taines dc mille livres. Au depart de la lettre de madcmoifelle Arding- hclli , leruption t, les Emanations eledriques palLnt librement de I'un dans I'au/.re & laill'ant toute liberie h la matiere aftluente, c^e les poulTer & dc It ; prelTer lun (a) Voyez Ilift. ann^c 1761. ibid. Tome XIII. iS A B R E G ^ D-E S MEMOIRES I I contre I'aiitre , mais fans que pour cela I'eledricite foit cteinte : aufli dcs qii'on les fepare , ils donnent de nouveau les memes phenomenes. Physique. L'affcmblage dii bas de foie noir avcc Ic blanc, paroit ^ M. I'abbe Nol- Ann^e 1-67. ^^^■> coimiie k M. Symmer, ties-analogue ^ la boutcille de Leyde, & Ll eft perfiiade qii'il ne manque i cct appareil qu'une eledricite aflez forte pour exciter la commotion. Oil ne doit pas non plus etre etonne que la bouteiile chargee avec le bas noir, puis enfuite avec le bas bl.iiic , ne donne aucun ligne d'eledri- cite, une de fes furfaces eft eleftrifee \ la maniere du verre & I'autre ^ la maniere des refines , & par confequent elles abforbent les emanations eledrriqucs Tunc de I'autre, & n'en tranfiiiettent point au-dehors ■, d'ou il fuit neceirairement que la bouteiUe-eledtrifee par un bas, eft delelectrilee par I'nutre. L'adhtfrence dcs deux bas de foie noire & blanche, n'eft pas plus diffi- cile ^ ramencr ,:ux piincipes de M. I'abbe Nollet v kurs emanations etant de diflerentes elpecr', ellcs fe pcnetrent rcc iproquc-ment , & il arrive alors aux deux bas ce qui arrive a deux brolics qu'on applique I'une contre I'autre , & qui dans ce cas ne gliflent out difficilement \ mais li on foit celler les emanations du bas noir en lui en prefentant un blanc qui les abforbe totalement ou les diminue, on orera la caule de I'adhereiice , & I'effet ne fubfiftera plus. Jufqu'ici M. Symmer s'eft contents d'expoler les faits finguliers qui ri~ fultent de fes experiences -, d,ins Ion qiiatricme memoire il clTaie de pene- trer jufqu'aux caufes de ces phenoinenes , & pour y parvenir il luppofe dans tout corps cledtiifc deux pouvoirs aart de celle-ci une rellftance qui fcra ceffer I'adhilion Jufqu'i ce qu'elle e foit fiaye de nouvdles routes dans les deux epailleurs du verre : I'ad- helion de deux corpb n'eft pas toujours une marque certaine de la difle- rence de leurs eledtricites. M. I'abbc Noll.t a vu pluheurs fois les deux moities dun ruban de foie blanche, engalc & rendu clrtiricue par le frot- tement, s'approcher I'une de I'.iutre au-lieu de s'ccartcr ,-lortqu'on le plioit par fon milieu fur une regie d^ verre , de maniere que ces deux bouts fiilTent libres & pendens, & cette adherence duroit autanf que leur elec- tricite, ou jufqu'^i ce quon leur prefentat un corps plus fartement elec- trique. (a) Voyez Hift. de I'Acad. acnft 1755. CoUed. Acad. Pirt. Fr. Tome XI. 88 ABRECfiDESMEMOIRES Nous venons de donner line legcre idie des reflexions de M. I'abbe „ Nollet, fur I'ouvrage de M. Symmer, qii'il n'avoit pas comprifes dins le 11 -i s I Q u £• ,^,i,j)QJj-g £jj]'i[ donna en 1761 fur ce fujet; il nous refte h rcndre compte ylnntfe tjSj. des lettres dont il a etc I'occalion. Ges lettres font au nombre de cinq : la premiere que M. I'abbe Nollet nomine la dix-huitieme, pnrce que, comme nous I'avons dej^ dit, il en a • precedemment public dix-fept autrcs fur cette matiere , eft adreffee k M. Cigna , dodteur en mcdecine dans Tuniverflte de Turin. L'objet de cette lettre eft, comme nous I'avons dit, Texamen de quel- ques queftions d eledtricite, relatives ati'x experiences de M. Symmer & aux rcmarques de M. I'abbe Nollet; la premiere eft fur I'adherence d'un ruban elcdltifc aiix furfacts polies des corps elcdrifables , par frottement ou par communication : ce phenomcne fi fingulier rentrc parfaitement dans le fyf- teme des affluences & des effluences fimiiltanees , donne par M. I'abbe Nollet. La feconde qacftion n'eft pas moins intereflante, il s'agit de la com- munication ou plutot du pafl;ige du fluide cledrique k travers I'epaiifeur du verre, que M. I'abbe Ncjllet prouve par I'experience de Leyde, fiite avec un matras vuide d'air & fcelle hermetiquement. La troifieme a pour objet . I'exiftence des deux couraiis oppofes, dont M. I'abbe Nollet tire la preuve de I'experience du carreau de verre dore , & de celle des deux feuilles de metal renfermecs dans une main de papier & fiparees I'une de I'autre par pluiieurs feuillets qui fe trouvent , apres I'explofion , enfoncees en fens con- traire & non pas peicees •, enfin le dernier article roule fur les attradions & les repulhons qui ont lieu dans le vuide : nous n'infiftons fur aucun de ccs articles, parce que nous en avons dejh rendu compte dans le te'mps , I I'occafion de plufieurs memoires de M. I'abbe Nollet. La feconde lettre , que M. Libbe Nollet nomme la dix-neuvieme pour la raifon que nous avons dite , eft adreffee au P. Paulian , jcfulte , profel- feur de phyfique au college d'Avignon •, elle contient I'examen du fyfteme que ce pere pretend avoir imagine pour fcrvir h I'explication des pheno- menes ele61:riques,,& qui eft enonce ^ I'article EUclriciti de fon didtion- naire de phyfique-, M. I'abbe Nollet fait voir dans cette lettre que ce fyf- teme n'eft rien moins que nouveau , & qu'il eft emprunte , au moins en grande partie , de ce que lui-meme a ccrit fur cette matiere & de quel- qu'autres ouvrages bien anterieurs ii celui du P. Paulian \ il y prouve encore que I'hypothefe des athmofpheres foibles que ce pere attribue aux corps qui avoiunent le globe frotte , & qui eft la feule qu'il puiffe dire lui etre propre , eftmal-fondee & infuffifante pour I'explication des phenomenes eleftriques. La troilierae & la quatrieme lettre, c'eft-k-dire la vingtienle & lavingt & unicme, font adreffecs h M. de villette , negociant a Liege & opticieu du prince regnant : ce phyficien avoit ecrit depuis quelques annces plu- fieurs lettres dans lefquelles il lui communiquoit fes expsiiences fur I'elec- tricite : ces experiences offroient des nouveautcs intereilantes , mais plu- fieurs d'cntr'elles av'oient paru k M. de Villette, difticiles i expliquer pat les principes de M. I'abbe Nollet; c'eft ce qui a engage ce dernier ^ en exa- miner les refultats & ^ les rappeller ^ fes principes. Nous DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. S^ Nous ne pourrions , fans exc^der les borncs qui nous font prcfcritcs , ; rapporter ici tous les articles de ces lettresi nous nous bornerons ^ un I'eul „ qui nous a paru mcriter uiie attention parriculiere. r H y s i Q u £. M. de Villctte, dans une de fes experiences, avoit eledlrife un vafe de Annie fSi. metal rempli d'iiuile ; il trempa dans ce fluide I'anneau d'une clef^ i'en ayant enfuite retire, il I'approcha fans I'effuyer, dc la furface de I'huile con- tenue dans le vaiffeau', il vit alors diftindlement un grand nombre de hlets d'huile trcs-fins fe detacher dc I'anneau de la clef, entraines par la ma- • tiere elcftrique qui en lortoit pour fe rendie i la furfice dc la liqueur, & lorfque I'huile qui etoir adherente ^ la clef fut epuifee , les rayons de matiere eledhique , fortant de la clef, faifoient encore ondulcr la furface de I'huile. On ne'peut certainemcnt defirer une preuve plus complette de I'exiftence du courant qui fe porte vers le corps eiedlrique, c'eft-i-dire dc la matiere affluente de M. I'abbe Nollet. La vingtdcuxieme lettre de M. I'abbe Nollet, qui eft la cinquieme 5c dcrniere de ce volume, eft adreffee ^ mademoifelle Laura Badi , de I'aca- demie de I'inftitut de Bologne, ellc contient les precedes par le moyen defquels on peut preparer despetits tableaux dont le dcffein eft marque par des etincelles cledriques , fe procurer des aiguilles que la vertu eleclrique fait tourner fur leurs pivots, & dont les revolutions font marquees par des cerclcs de feu , qu'on peut multiplier & accumuler , pour ainil dire , en forme de pyramides ; former des faifceaux de fil de metal , qui , vers la moitie de leur hauteur , fe divifent en plutieurs branches pour fervir de charpente a des bouquets de fleurs naturelles ou artificielles, afin qu'ils pa- roiffent tous parfemes d'aigrettes lumineufes lorfqu'on les eieftrifera •, enhn , d'animer, pour ainfi dire, ou d'embellir des figures peintes ou enluminees, en failant etinceler des feux cleftriques fur telle partie qu'on voudra : nous n'infiftcrons pas ici davojitage fur cct article, duquel nous avons rendu , compte d.ins I'hiftoire Je 1766 (a), I laquelle nous prions le ledeur de vonloir bien recourir. • (a) Voyez Hift. J766, ci-deffuf. Tome XIV. Partie Frcnfolfe. M JJO ABREG6 DES MEMOIRES P n Y s 1 Q u H. Anm'e ij68. leuTer i>ur le mouvement du mercure djiis les Barometres. Ilift. Jv'uTiLiTE du barometre eft conniie de tout le mondc phyficieiv, non- feulement il indique la pefanteur abloliie de I'atmofphere & les variations , niais il pent encore fervir ^ medirer relevation des montagncs & la pro- fondeur des fouterrains, & meme k donner par des obfervations faites ^ des hauteurs tres-difterentes, la loi de la condenfation de I'air-, il fert d'ail- leurs i verifier le vuide dans les experiences de la machine pncamatique •, en un mot , il eft employe ^ tant d'ufages differens , qu'»n pent le rcgarder comrae un des inftrumens les plus neceiraires aux phyficiens. Mais plus les ufages du barometre font multiplies, plus il eft effciitiel qu'il foit exacfi: •, & il n'eft que trop ordinaire d'en rencontrer qui ne le lont pas, default li dangereux, que dans ce dernier cas, au-lieu dc conduire i la verite, il mcne infailliblement ^ des erreurs d'autant plus grolTiercs, qu'il s'ecarte plus de la perfcdion. C'eft dans la vue de remedier ^ un inconvenient (i conliderable , que M. le cardinal de Luynes a entrepris le travail dont il a donne le relultat ^ I'academie, & duquel nous aliens effaycr de rendre compte. Les defauts d'un barometre ne peuvcnt venir que' du mercure qui le remplit, du tuyau qui le contient, ou enfin de la maniere dont il a ete charg^ : ces trois objets ont ete foigneufement difcutes par fon eminence, le mercure qu'il employoit avoit ete revivifie du cinabre, & purge par cettc operation de toutes les matieres etrangeres qui auroient pu alccrer fon poids ou fa fluidite , & par conrequcnt on n'avoit rien k craindre de ce c6te-lL • Les defauts qui peuvent naitre du tuyau font plus nombreux-, le verre dont il eft compole ne doit avoir aucune felure , .aucune ouverture qui puifle donner paifage ^ I'air-, & nous verrons bientot que dans des tuyaux fcrupuleufement examines, meme avec une Jorte loupe, il s'en trouve dim- perceptibles qui altereiit ou mcme aneantident a la longue tout I'effet du barometre-, il ne doit fe trouver dans leur interieuraucunes afperites quipuil- fent retenir ou gener le mouvement du mercure -, enfin , on s'eft appcrcu que dans les tuyaux d'un tres- petit diametre, le mercure etoit comme gend, & s'elevoit braucoup molns que dans ceux d'un plus grand calibre. M. le cardinal de Luynes examina foigneufement les diflcrens tuyaux qu'il deftinoit i fes experiences, & il en choifit d'abord cinq , dont les dia- metres efoient depuis f de ligne jiifqu'i 13 lignes^-, trois autres tubes de 2 lignes '- de diametre , fiu-ent deftincs h. d'autres experiences ; ils furent tous nettoyes & feches avec foin. Ces tubes ime fois prepares, il ne s'agiflbit plus que de les charger, & cette operation etoit !a plus delicate de toutes •, celui de f de ligne & celuL de 2 lignes j, furent charges le mercure etant exceffivement bouillanti il s'agilfoit de charger de iiicme celui de 1 3 lignes i de diametre, uiais cette DE L'ACADEMIK ROYALE DE<5 SCIENCES. 'ji operation n'cloit pas fans dilTicuIte : comment ofer, en effet, expofer mi — »?» imim luvau de cette eiolTeur au feu neceffaire pour faire bouillir le mercure?n ,, ,- • r I J' r • 1 J -f ^, 1 H Y S 1 Q U 1 comment ly loutcnir charge dime li cnorme coionne de vit argent? com- ment , enfin , le foiitenir pendant I'operation ? Les precautions de M. Ic car- Annii ij68. dinal de Luynes , & radrelle dii heur Cappy cjui le Icconda dans cette occalion, firent difparoitre ces difHcultcs. Son eminence fit conftruire une efpece de foiirneau, compofe de deux cylindres de gros fil-de-fer, dans I'entre-deux defquels on mettoit les charbons allumes , tandis que le tube qu'on foufenoit debout au milieu du vnide du cylindrc intericurre- cevoit i'aftion du feu , qu'on pouvoit gouverner h volonte : le tuyau ctoit foutenu par un coufTinet qu'on tenoit h la main pour empecher que Ic poids du mercure n'en fit partir le fond ou n'y occafionnat des fC-lures-, enfin, on ne faifoit bouillir le mercure que par parties, & fucceflivem;-nt jufqu'i ce que le tube fut entiereme nt rempli •, alors on le ferma a I'aide d'une virole de buis qu'on y avoit maftiquee , & il fu: foigneufement garde en cet etat, Jufqu'i ce que la montuie flit prcte. Des quatre autres tuyaux, le premier, qui avoit | de ligne, fut charge, le mercure txccffivement bouillant, de meme que le fecoiid qui avoit 1 lignes i; le troilieme, de z lignes \ de diametre , fat charge ^ froiJ avec un entonnoir ^ longue queue , trcs-deliee , qui portoit le mercure prefque jufqu'au fond du tuyau ; & enfin le quatcieme fut charge avec du mercure tres-chaud, mais fans le faire bouillir. Les precautions les plus gran des ont cte prifes pour renverfer les tuyaux, & les plonger dans la boite qui devoit fervir de recipient au mercure, fans y Lider renrrer aucune portion d'air ; ces boites etoient formees de bois du'r & creufces en plein bois; Ton eminence ayanttrouve que ces for- tes de boites etoient plus commodes & aiilTi fiircs que ccUes qu'on pour- roit Icur fubftituer. La coionne de mercure qui repond \ la pefanteur de I'atmofphere , doit ctre mefuree depuis la fuvface du mercure dans le recipient, Jufqu^ celle du haut de la coionne dans le tuyau •, or, il eft certain que lorlqae cette coionne augmente, il entre du mercure de la boite dans le tuyau, & que, par confequent, fa furface baiffe-, d'ou il fuit que, pour avoir la hauteur abfolue de la coionne, il faut aiouter ^ i'elcvation du mercure dans le tuyau i'abaiffement de cclui de la boite : tant que le diam.tre du tuyau eft trts-petit par rapport ^ celui de la boite, cet abaiflement eft infenlible, mais quand le tuyau eft gros , I'abaiffement dans la boite n'cft pas \ negli- ger-, & pour s'en affurer, M. le cardinal de Luynes fit percer le couver- cle, de maniere qu'une pc-rite tig? de fil-de-laiton, portce fur un liege qui flottoit fur le mercure, put palfer par cette ouverture; d'oii il rcliiltoit que les variations de hauteur de la bafe fe trouvoient exadlement marquees Ear I'index attache \ cette tige , fur une divilion fixie au couvercle de la oite •, & ce fut dans cet etat que ce barometre & les quatre autres dont nous venons de parlcr furent mis en experience. En meme temps que M. le car.linal dc Luynes avoit prepare les cinq ^ tubes dont nous venons de parler, il en avoit encore prepare un autre M ij 5)1 A B R E G £ D E S M E M O r R E S id'uiie facon diiicreiite, cclui-ci avoit etc nettoye a I'eipriC-de-vin ^ Ton dia- p metre etoit de i lignes r, & il fut charge ^ froid avec rentonnoir ^ loii- s I Q u E. g^g queue. Son eminence fat extremement furprife en voyant que le mcr- Anne'i tjGS. cure ne s'y loutenoit qu'k 16 pouces 7 i lignes, ce meme tube ay.nt etc dechargc & recharge, le inercure trcs-bouillant, la colonne de mercurc s'y trouva il la mcme hauteur que dans un des barometres precedens qui avoit meme calibre, & qui avoit auffi ete charge avec le mercure tres-bouillanti 11 rtftoit ^ favoir li le peu de hauteur de la colonne dans la premiere ex- perience, venoit de la maniere de charger le barometre, o« de ce que le tuyau avoit ete lave interieurement d'efprit-de-vin , & nous verrons bien- tot les railons que Ion Eminence avoit de le (oupconner. En effet , un tuyau ayant etc charge \ froid fans entonnoir, & en prenant toutes les pre- cautions poffibles, le mercure s'y foutint 4 la meme hauteur que dans un tuyau prefque de meme diametre, charge de mercure' tres-bouillanti le meme tuyau ayant ete enfuite decharge , fut lave avec de I'efprit-de-vin, & deffeche avec un linge blanc & bien fee , & ayant ete recharge avec le meme mercure & le plus grand foin , le vif argent ne s'y foutint qu'i un pouce plus bas que dans le barometre de comparailon. La raifon qui avoit porte M. le cardinal de Luynes ^ foup9onner que I'efprit-de-vin nuifoit ^ la hauteur du mercure dans les barometres, etoit que la mcme chole lui etoit arrivee plulieurs annees auparavant, avec deux tubes abfolument parcils, qui ne difla'oient que parce que I'un des deux avoit etc lave avec de I'efprit-de-vin-, & que dans ce dernier, le mercure etoit toujours demeure un pouce plus bas que dans I'autre, malgre toutes les precautions qu'on prit pour les fecher exadtement. Dts oblervations de M. le cardinal de Luynes, confignees pour la plus grande partie dans des tables jointes ^ ce memoire, il refulte que les baro- metres charges, le mercure etant exceffivement bouillant, font ceux ou il refte le moins d'air-, que leurs marches font les plus regulieres, lorsmeme que le tuyau n'a qu'un diametre de t de ligne ou au-delfous-, que les ba- rometres charges i froid avec I'entonnoir i longue queue, fe tiennent bcaucoup plus bas que ceux qui ont ete charges, le mercure bouillant ', que ceux qui ont ete charges fans entonnoir; & avec precaution, meme avec du mercure froid, fe maintiennent prelqu'i la meme hauteur que ceux qui I'ont ete avec du mercure bouillant •, mais que ceux dont les tubes ont ete laves avec de I't-fprit-devin, font de tons ceux ou le mercure fe tient le fjjus bas , ^ moins qu'on ne les charge avec du mercure bouillant exceffi- vement, auquel cas ils fe tiennent auffi haul que les autres ■, que dans les tubes d'un tres-grand diametre, le mercure fe tient plus haut dc quelques Iign£S que dai;s bs barometres ordinaires; que de toutes les methodes uh- tees pour charger les barometres , la plus mauvaife eft de les charger avec Tentonnoir ^ longue queue •, & qu'enfin fi on n'apporte pas le plus grand foin i cette operation , on court rifque de tomber dans d'^normes erreurs ; * les experiences faifant voir qu'on pourroit croire la colonne d'air beaucoup plus courte & moins pefante quelle ne I'eft reellement : M. le cardinal de * Luynes termine ce memoire par deux reflexions^ DE UACADEMIE ROYALE DliS SCIENCES. 95 L,% premiere eft fur la lumiere phofphoriqiie du b.iromctre-, on rcg.irdc — — — coinnniniment cette lumiere'comnie uneprcuve affuree que le haut du ba-p ronietre eft abfolumeiit purge d'air : cependant une obfervation qu'il a faite il y a environ vingt ans, eft une prcuve fans replique que cette regie eft Anm'e ii68. fujette ^ reftridion -, il avoit charge un baronietre , en faifant chauffer 1q mercure, partie par partie, & I'operation etant finie, ie barometre au mojn- dre balancement donna une lumiere tres vivc ; mais il y avoit au haut du tube une felure imperceptible, par laquclle I'air y rentroit peu-^ peu , & il ne fut pas plutot mis en experience , que le mercure commenca ^ balf- fer. Son eminence fuivit la diminution de la colonne jufqu'^ ce qu'elle n'eut plus que quatre pouces de haut, & pendant tout ce temps, il ne ceffa de donner de la lumiere; il eft vrai que cette lumiere qui d'abord ctoit tres vivc, & paroiffoit, aux premiers balanccmens, avoir toujours diminue de vivacite , & ne paroilFoit plus qu'apres un grand nombre de balancc- mens; d'ou il refulte, qu'i la verite, quand un barometre donne une lu- miere trcs-vive aux moindres balanccmens, on pcut conclure qu'il eft bien purge d'air ; mais que (i cette lumiere eft foible , pale , & qu'il faille un grand nombre de balancemcns pour I'exciter, ce n'eft pas une marque du vuidepnrfait dans le,tube, puif,^u"elle peut fubfifter en cet etat, avec uns quantite d'air fuffifante pour reduire la colonne i 4 pouces de hauteur. L'autre remarque eft lur les precautions qu'on doit prendre quand on charge un barometre avec du mercure exceffivement bouillant, lur-tout (1 le tuyau eft d'un tres-grand diametre ■, on doit eviter de faire cette ope- ration dans un lieu trop petit & trop clos-, clle doit etre faite ^ I'air, fi on veut eviter ['alteration que pourroit caufer \ la fante le mercure reduit en vapeur qui s'eleve : on doit de meme prendre garde de laiffc-r dans cot en- droit aucune dorure, ni rien de mctallique, excepte le fer, & de n'av.iir fur foi ni galon ni bijou d'or ou d'ai^ent; cette vapeur s'y ittacheroit in- failliblemeiit, & gataroit fans retour tout ce qui ne pourroit pas foutenir I'adion du feu neceffaire pour la faire partir. On doit encore conduire I'o- peration avec toute la prudence & toute la patience pofTibles, pour eviter de faire caffer les tubes & de perdre une quantite conliderable de mercure: on ne iauroit trop avertir ceux qui font des experiences de phyiique , des inconvenicns auxquels ils pourroient etxe expofes ; il en rellera encore aflea. qui n'auront pas etc prcviis. ABREGE DES MEMOIRES Physique. y'nak n68 '^"'' "" "^oj^"- de ranidier aux inconviniens des dibacles. n V-/ N ne connoit que trop ^ Paris le danger que les glaces & fur-tout les debacles, font efliiyer aux bateaux qui font dans fes ports, & les pertes fre- quentes qu'elles occalionnent •, cette annee a etc une des plus fertiles en ^accidens de toute efpece, & le nombre des malheurs que la debacle a caufe , a engage M. de Parcieux 'k chercher iss moyens de prevenir k I'a- venir de pareils accidens. Le premier pas i faire, quand on veut tenter de remsdier \ un mal, eft d'en connoitre les citconftances & les caufes •, c'eft audi par-Ik que M. dc Parcieux a commence. II arrive bien rarement, ou mcme il n'arrive prefque jamais que la ri- viere de Seine & celle de Marne dcbaclent en meme temps, & c'eft uu grand bonheur qu'elles ne partent que I'une apres I'autre. Le canal meme de la Seine ne fe fermeroit Jamais, li les glacqns ne trouvoient aux piles des ponts des obftacles qui les arretent; mais s'il fe trouve , comme il ne manque pas d'arriver, des gla^ons difpofes ik s'arranger en cintre, il fe forme une arcade couchee qui s'appuie fur les piles de part & d'autre, & qui retient les glacons au-deffus; audi voit-on que des que cela eft arrive, toute la partie qui eft au-deffous, ou , comme difent les gens de riviere, ^ I'aval de I'endroit oil Tembarras s'eft forme, demeurc vuide de glacons. Une feconde caufe du degat que font les glaces dans les debacles, eft rimpoffibilite de pouvoir mettre en furete les bateaux le long des bords de la riviere, & de caffer les glaces qui s'y forment des que la riviere commence ^ charier-, car alors on lie peut plus aller fur fa furface, fans s'expofer au plus grand danger. » Une troifieme caufe eft ee que les gens de riviere nommerxt rencharge , c'eft-k-dire, I'amas des glacons qui defcendent d'en haut, & qui , arretes par ceux qui barrent les ponts, s'amoncelcnt les uns fur les autres, & for- ment une maffe dont les efforts animes par le courant, df viennent redou- tables-, ce qui n'arriveroit certainement pas fi le milieu du lit de la riviere & les arches des ponts reftoient libres. Voici comment M. de Parcieux remedic b ees inconveniens. Puii'que lorfque la riviere eft prife, & les glacons arretes k un certain endroit , toute la partie du courant qui eft au-deffous, dcnieure libre, il eft clair que U on pouvoit, par quelque moyen , faire prendre la riviere au- deffus de Paris , tout fon. canal dans la ville n'auroit d'autres glacons que ceux qui pourroient fe former vers fes bords , & qu'on feroit toujours le niaitre de caffer Journellement, de meme que de ranger les bateaux k I'abri du courant des glaces quand Ja debacle arriveroit, & qu'il eft, comme nous venous de le dire, impoffible de faire des que la riviere commence \ ciiarier. Le moyen qu'cmploie M. de Parcieux , pour produire cet effet , eft DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 95 extrcmement (imple. Nous venous de dire que la Seine & la Marne nc fai- '■■■■■■■■■■■■■■■»» foient j.imais leur debacle enfenible; cctte circonflaiice a determine; M. i^c p iParciiux a ne barrer que le canal de la Seine, un peu avant fa )onction t avcc la Marne : la largcur de fon lit eft en.ctt cndroit d'envjron foixante- Ann^e ijGS. dix oil quatre-vingt toifcsi il y cHablit deux palees de pieux, pareillfs aux piles d'un pont de bois, qui partagent en trois la largeur du lif, & k ces ieux il aniarre des chaincs de madriers flotta'ns, attaches enfenible par les outs avec dcs crochets & des anneaux de fer. II eft: evident que ccs p.ilees ne i^eneront p.is la navigation, parce qu'elles laifll'nt entr'cllcs un intervjllc (uflif.int, & qu'elles feront allez eleve<'S hors de I'eau pour ctre appercues. Mais lorique la riviere (era prete i charier, ce qu'on conncitra aifement par le tluraionietre, les cbaines dcs madriers flottans qu'on mettra alors, rctiendront le boulin ou glace fpongicufe qui fe forme la premiere* & cnluite les autres gla9ons, qui fe prenJront in- failliblement, & des que la riviere fera enticreraent prife, on en detachers les madriers pour les U-rrer. Les glices etant airili arretees, le canal de la riviere demeurera abfolu- ment libre jufqu'au d.-llous de Paris : on pourra ranger ^ I'aife les bateaux & cafler la glace des bords \ &-lorlque la debacle vicndra, les glacons ne trouvant aucune rcliftance, coulcront librement, & il ne s'y fera jamais de reifcharge ni d'accumulation de glace , ce qui diminuera infiniment le dan- ger des debacles. & les dommages qu'elles peuvent caufcr. Mais pour mettre ahlolument les bateaux & les marchandifes hor« d'at- teinte, M. de Parcieux propofe d'etablir dans Paris meme une Gave , ^ trcs-bon marche; il prend pour cela le petit bras de la riviere, depii.s la pointe du terrain {a) jufqu'^ fa reunion avec le grand bras au-delTous du Pont neuf'i cet efpace un pru approfondi & fermc par en haut d'une efla- cade dc charpente rufnfante pour arretcr les glaces, deviendroit une re- traite alluree pour les bateaux, qu'on y feroit entrer d'autant plus aif'ment que la riviere prife plus haut l.iilieroit toute liberte dc les y conduire pen- dant la gelee, lajis craindre les glacons. On pourroit peut etre craindre que la depenfe neceffiire i ces ctabliire- raens ne fut capable d'empecher de les entieprendre : mais le zele de M. de Parcieux a prevenu cette obiL(ftion, & il s'eft alFure par un calcul exact & eclaire, & par les avis des gens de I'art , que la depenleetoit modique re- lativement ^ cttobjet & \ limmenfe utilite qui en relulteroit. Ce niemoire fera le dernier etiet du zele patrioiique de M. de Parcieux ■■, la niort qui, nous I'a enleve cette aiinse, a f.iit perdre avic lui une grcnde qu ntitd d'idccs heureufes & utiles que lui fournifioient Ion (avoir & ion ectur vraiment citoyen. (a) Cc qu'on nomme ttrraiii , eft h jaidin du Cfapitre cle X&uc D...nc, Caui '., U poince de I'ifle du PuUis, 5)5 ABRECJ^ DES MEMOIRES ^nn^e i-j68. Sur la circulation de I' air dans Us Mines. Ilift. V-/ N ne connoit que trop le danger que le difjut de la circulation dc I'air dans les mines, fait courir ^ ceux qui font employes i leur exploita- ~ tion : il les expofe non-feulem.ent \ etre etouftes, faute de pouvoir y ref- pirer, on du moins ^ y fouftrir bcaucoup de ce'chef, mais encore ^ y etrc empoiionne par les exhalailons malfaifantes qui s'y amalfent, & meme h y perir par des vapeurs inflammables qui s'allument au feu des lampes qui les eclairent, & qui tuent infailliblement tous ceux qui n'ont pas le temps ou la prefence d'eiprit de fe coucher i plate terre. Les exemples de ces ac- cidens font malheureufem.ent trop frequens, pour qu'on puilfe les revoquer en doute. La circulation de I'air dans les mines, eft le moyen le plus afliire de faire difparoitre tous ces inconveniens, & travailler ^ la procurer eftrendre un des plus grands fervices qu'on puille rendre 4 I'humanite , & fur-tout \ ceux que leur etat attache aux travaux des mines. C'eft ^ fournir les moyens de procurer cettc circulation fi neceflaife ," que lont deftines les Memoires de M. Jars , dont nous- avons ^ rendre compte. Une obfervation qu' il fit dans les mines de ChefTy , lui donna lieu de demeler le principe fur lequel eft fondee toute fa theorie : ces mines font percees dans la pente dune coline, fous laquelle les galeries s'enfon- cent prefque horizontalcment, & d'elpacc en eipace on y a perce , auwnt qu'on a pu, des puits de refpiration qui penetrent dans les galeries, & dont I'orifice eft place plus ou moins haut lur les colines. 11 s'appercut que le courant d'air qui s'etabliffoit en cte dans les galeries, avoit une direction abfolument oppofee ^ celle du courant qui avoit lieu en hiver -, e'en ftit affez pour I'engager k rcchercher la caiife de ce fingulier phenomene, & voici la raifon tres-plaufible qu'il en donne. Lorfqu'une galerie eft, comme celles de Chefly, percee par un puits de refpiration, il y a, tant i I'embouchure de la galerie qu'i celle du puits, une colonne d'air qui s'etend jufqu'au fommet de I'atmolphere. La colonne qui appuie fur I'orifice de la galerie, eft compofee toute entiere de I'air ex- terieur, & ^ la meme temperature que lui; celle qui appuie fur i'oiifice dii puits eft i I'exterieur , compofee du meme air, mais depuis I'oiifice du puits jufqu'^ la galerie , I'air de la colonne eft ^ la temperature des caves. Les deux colonnes font done n^ceffairement inegales en poids, quoiqu'e- gales en longutur ; en hiver , I'atmofphere etant plus froide , & par con- fequent plus pefante que I'air de I'intericur de la mine, la colonne du puits, compofee en partie de ce dernier , eft plus legere que celle qui fe pre- fente ^ I'embouchure de la mine : celle-ci chafle done I'air de la galerie, & le fait fortir par le puits. En etc, au contraire, I'air exterieur etant plus Ifger & plus chaud que celui de la mine, la colonne du puits, compofee en DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 57 en partie de ce dernier, devient la plus pefaiite, & lair fortira par I'ou- — — ^mi i»i verture de la galerie. p De cette obfervation & dc la theorie i laqiiellc elle fcrt de bafe, il " i Q u e. rcfiilte que, lorfque I'air exterieur fera k la meme temperature que celui Annie tlSy. de la mine, les deux colonnes ctant alors de meme poids, ii ne s'ctablira dans la galerie aucun courant, & c'e/l erfecHvement ce qui arrive dans ces mines & dans beaucoup d'autres lemblablement (ituies, dans lefquelies on eft oblige de fufpendre Ics travaux i la ptmllb & ^ la chute des tluillcs , c'eft-i-dire, pour parler le langage de la bonne phyllque, dans les temps oil I'air exterieur eft \ la meme temperature que celui des mines. Le meme inconvenient fe trouvera encore dans les mines dont les ga- le r.es font horizontales, & placees fous une plaine qui I'eft aulli : inutilc- nient tentera-t-on d'y donner de I'air en percant un grand nombre de puits, I'egalitc de toutes les colonnes d'air qui penctreroient par-li dans la mine, les mettroit en equilibre, & il ne s'y efabliroit aucun courant. On peut cependant rappeller ces efpeccs de mines h I'etat de celles qui font percees dans les colines; Tart aide du principe de M. Jars, peut don- ner ce qu'avoit refule la Nature -, il ne s'agit , pour cela , que d'etablir une inegalite de poids dans les colonnes qui inliftent fur deux puits , pour qu'il b'ctablifle un courant d'air dans la galerie qui joint ces deux puits ', & voici les moyens qu'emploie M. Jars pour I'obtcnir. Sj la galerie eft percee dans la pente d'unc moiit.igne, tant quelle n'ira pas plus loin que I'endroit ou Ton peut percer un puits, il fera aife d'y avoir une circulation d'air; mais ii on veut pouffer la galerie plus loin, li circulation celfera dans la partie qui eft au-delk du puits ; & voici com- ment M. Jars parvient i I'y etablir : il forme un plancher ^ quelque dif- tance du lol de la galerie; ce plancher, tres-utile d'ailleurs pour le roulage des brouettes & le paffage des eaux, forme un canal qui le prolonge juf- qu'au fond de la mine ; on intercepte par une porta la communication de Ja partie anterieiire de la galerie avec le puits de refpiration ; d'oii il fuit que I'air entrant par I'embouchure de la galerie , eft porte par le canal jufqu'au fond de la mine , & n'ayant plus alors de communication avec la galerie, k caufe de la porte, il eft oblige de repaffer par le puits v il fe trouvera done alors deux colonnes inegales en pefanteur, & le courant d .lir s'etablira. 11 s'etabliroit de meme au fond d'un puits creufe au bout de la galerie, en y conduilant, au moyen d'un tuyau , I'air qui palft fous le plancher dont nous avons parle, & qui entre par I'ouverture de la galerie. Nous avons fuppofe dans tout ce que nous venons de dire, que I'ori- fice de la galerie fut dans une coline, & plus bas que I'orifice des puits de refpiration -, mais h la galerie etoit percee horizontalement fous une plaine a-peu-prcs de niveau , tous les puits feroient egalement profonds, & toutes les colonnes d'air en equilibre, & par confcquent, il n'y auroit aucune circulation. Pour rompre cet equilibre, M. Jars a imagine d'elever fur I'orifice d'un Tome XIV. Partie Franfoije. N 05 ABREGE DES MEMOIRES des puits, line tour oil cheminee, qui prolongeat la longueur du piiits, 6 dont la ma9onnerie fiit affez epaille pour conferver i I'air qu'il con- Physique. ^-^^^^ ^ |^ meinc temperature qui celui du puit •, il eft clair que par ce Anr.L^e 17(^8. moyen I'^quilibre entre les colonnes fera rompu, & le courant d'air seta- blira dans la galerie. Toute cette circulation d'air aura done lieu dans les galeries, d'un fens pendant I'hiver , & d'un fens oppofe pendant I'^te ; mais dans le printeraps & dans r,iutomne, oii I'air exterieur & celui de la mine ont la nieme tem- perature, il n'y au'oit aucun courant d'air, & il faudroit abandonner les ouvrages : voici de quelle maniere M. Jars remedie \ cet inconvenient. II etablit pres de I'entree de la mine ou de I'embouchure dun des puits, iin fourneau dont la cheminee eft fort clcvee -, le f. u y eft allume fur un grillage qui eft i quf Iques pieds de terre , & dans cet efpace qui renfcrme le cendrier, on pratique dans le mur du fourneau une ouverture pour re- cevoir I'embouchure d'un tuyau de fer qui defcend dans la mine & le pro- longe avec des tuyaux de bois jufqu'i (on extremite ■■, il arrive de-li que le fourneau, dont la norte doit toujours etre exadement fermee, exceptc d.ins les momens ou I'on attife Ic feu, tire & pompe avec violence I'air du fond de la mine, & que celui- ci eft i chaque inftant remplace par ce- lui qui entre par rembouchure de la mine ou du puits. Par cet ingenieux moyen, que M. Jars a emprunte de Lehmann, & qui fe trouve decrit en- core en plulieurs autres ouvrages, on pent etablir au fond des mines les plus profondes un courant d'air tres-r^pide, capable non- feiiiement de fournir \ la libre refpiration des ouvriers , mais encore d'entrainer \ me- fure qu'elles fe forment , les vapeurs pernicieufes & meiirtrieres qui ne fe produilent que trop fouvent au fond des mines. Ces vapeurs ne font ici rien moins que des illufions , 1' Academic en a parle en 1763 (voy. Hifl. de I'Jcad.), i I'occalion de celles qui infeftoient alors les mines de charbon de Briancon , qui convaiiiquirent defagreable- ment les incredules de leur reaiite , & M. Jars a employe fon fccond Me- moire (voy. les Mem. de I'Acnd.) I rapporter les accidens de cette elpece qu'il avoit obferves dans fes voyages; nous ne repeterons point ici ce que ces obfervations ont de commun avec celles de Brian9on. Nous dirons feulement que dans le nombre des ouvriers tues par les vapeurs inflamma- bles, lorfqu'elles s'allument, il s'en trouve qui portent des marques plus ou moins grandes de brulure, & d'autres qui n'ont aucunc bleffure exte- rieure, & ces derniers font, i ce qu'on pretend, etouftcs par le retour & la condenfation de I'air que la vapeur avoit dilate prodigieufement en s'al- lumant. i /r -i Ces derniers confervent long-temps leur chaleur & leur foupleffe ; ils ne font communement roides qu'au bout de deux ou trois jours-, M. Jars penfe avec beaucoup de vraifemblance que ces malheureux ne meurent que long-temps apres la fuftocation , & que des fecours prudemment adminif- tres pourroient les rappelier i la vie. Toujours I'humanite exige-t-elle de tenter ces fecours : que d'hommes de toutes les nations devroient la vie DE L'ACADEMlE ROYALE DES SCIENCES. 99 I la rcJflexion dii Phyficien frjiigois & 4 Ton amour pour I'liumanite, li ce: nioytrn reuffiiroit ! P h y s i Q u On ne doit pas regarder ccs vapeurs inflammables comm'-' d;s cas rares; des tiiyaux de refpiratioii ctablis dans les mines de Workington & de Annife lySS. AS'hiihe-hnven , en Anglcterre , en tircnt une (i grande quantite qu'on avoit propoft d'en diftribuer les ecoulemens dans toutes ks rues de la dfrnierc de ces villes, pour les eclairer , projet peut etre peu railonn.i- ble, mais qui prouve bien I'immenfe quantitc de cette maticre contcnuc dans les mines. II fe trouve aufll dans quelques autres mines des vapeurs non inflam- mibles, mais du genre de celles qui otent k I'air fon elafticite , & le ren- dcnt non refpirable ; celles-ci ne font pas moins funeftes aux ouvriers que les autres , & ne manquent pas de les fuftoquer. Hcureufement la circulation de I'air dans les mines emporte egalement les unes & les autres , & on fera toujours maitre de fe la procurer en fuivant les principes de M. Jars; on ne doit pas meme redouter la de- penfe du feu neceflaire en quelques cas pour I'etablir : il n'y a point de mine metallique qui n'ait beioin de fourneaux pour fon exploitation , & on peut pronter de ce feu pour operer la circulation d'air d.ins la mine-, il nV-n coiitera qu'un pcu d'attention dans la conftrudlion dtl fourneau qui y fera deftine , & les mines de charbon en ofFrent affez de ceiui qui ne feroit pas propre ^ etre vendu , pour fubvenir abondamment ^ I'entretien de ce feu. II ne dependra done deformais que des Dircifteurs des mines de procurer a leurs ouvriers la fiiretc & la falubrite dans leurs travaux; les principes de M. Jars , que nous venous d'etablir , leur en donneront toujours la facUite, N v AB RE G t DES MEMOIRES Sur Us diffe'rentes manieres d'ejfayer les liqueurs fpiritueufes. P H Y S I Q U E. Annie iJ^J- Hift. J. t eft line infinite de circonftances dans lefquelles on eft oblige de decider du degre de force des liqueurs fpiritueufes , foil pour I'intiret da commerce , foit pour rigler avec jaftice la perception des droits du Roi. L'importance de ces objets a engage M. de Montigny i en faire le fujet dc fes recherches : nous allons effayer de donnor line idee des principes fur lefquels il fe fonde, & des confequences qu'il en a ki tirer. Toute liqueur fpiritueufe eft iin compofe d'efprit ardent & de flegme, & elle eft d'autant plus forte, quelle conticnt plus du premier & moins du fecond. Decider done de la force, par exemple, d'une eau-de-vie propofee, eft determiner combien elle contient d'elprit-de-vin -, le prix de I'eni-de- vie & le droit quelle doit payer, ne peuvent porter que f\ir cette partie, & non fur Ic flegme ou I'eau qui I'accompagne, & qui n'a par lui-ineme aucune valeur. On a tache d'y parvenir de plufienrs manieres, & toutes font plus ou moins imparfaites. Quelques marchands emploient \ cet effet un petit vaii- feau de verre ou ils mettent un peu d'eau-de- vie , qu'ils font mouiier en la iecouant •, le plus ou le moins de cette ecume leur fait juger de la force plui ou moins grande de I'eau-de-vie. On voit affez combien cette epreuvx eft vague; mais ce n'cft pas tout, rien n'eft plus aife que de la rendre infi- dele en melant dans leaii-de-vie quelque matiere mucilagincule. D'autres emploient une methode difterente : on (ait que I'huile d'olive fe foutient ^ la furface de I'eau, & va & fond dans refprit-de-vin -, il doit done arriver , & il arrive en eftet , qu'une goutte d'huile jettee fur de I'eau- de-vie, y defcend d'autant plus promptement quelle eft plus forte, & c'eft par la rapiditi de cette defcente qu'ils jugent du degre de force de celle qu'ils efTaienf, mais il eft aife de voir combien cette eprcuve, quoiquc meilleure que la precedente, laiffc encore d'incertiiude fur le degre de force des liqueurs fpiritueufes. La diftillation & \i combuftion feroient des moyens certains de deter- miner la quantite d'efprit ardent qui eft contenu dans une liqueur propo- fee •, mais il ne faut que la plus petite reflexion pour voir que les precau- tions, la depenfe & le temps qu'ils exigent ne permcttent de les employer ni dans les bureaux des fermes du roi, ni dans le commerce. Les areometres ou pefe-liqueurs femblent oflrir une relfource plus affu- ree. Ces inftrumens font, comme on fait, des efpeces de phioles chargees au fond d'un peu de mercure & qui s'enfoncent plus ou moins dans les liqueurs, fuivant que celles-ci ont une pefinteur Jpccifique plus on moins grande : or, il eft certain que plus une eau-de vie eft torte, c'eft- ^- dire. DK L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. loi plus die contic-nt d'cfptit-de-vin , plus elle eft legere-, & qu'au contrairc , -^— — ■ ■ ■ plus clle ell foible, c'eftk dire, plus elle contient dVau, plus fous un mcme Physique, volume elle eft pefjnte : les pele-liqueurs pcuvcnt done tiiic jugec du plus ou moins de gravit^ fpecifique d'uiie eau-de-vie propofee, & par conft- Ann^e fjSj. quent de fon plus ou moins de force. C'c-ft audi ^ ce moyen qu 'out eu recours ceUT qui out voulu apporter quelque precillon dans I'examen du degre de force des liqueurs fpiritueu- ies, & il faut avouer qu'il n'y en a pas de plus prompt ni de mtillcur. Mais quelque legitime que foit la preference qu'on aceorde aux arco- mcrres, font-ils exempts de defauts, & pent- on decider fiirement par leur moyen, non- fculement li une eau-de-vie eft plus forte qu'une autre, mais \ quel degrc elle eft plus forte? c'etoit ce qu'il falloit examiner. La conftrudrion de cet inftrument a conliderablenient varie entre les mains des phyficiens, ils y ont employe diverfes matieres, ils lui ont donnc diffcrentes formes , & ont introduit des differences jufques dans la ma- niere de s'en fervir. Les uns ont place une divillon fur le long col de cet inftrument, & ont juge de la pefanteur ipecifique de la liqueur par le plus grand ou le moindre enfoncement de rarcometre qui y etoit plojig^; d'au- tres ont juge de cette pefanteur par la quantite plus ou moins grande de poids connus qu'il falloit ajouter a I'areomctre pour le faire toujours en- foncer ^ une meme hauteur. M. de Montigny rapporte en detail toutcs ces tentativcs, & les noms des phyilciens qui les ont faites ; & il examine en msme temps ce qu'elles peuvent avoir d'utile ou de dcfedueux. Tous ces areometres conviennent entr'eux , en ce que leurs divifions font egales,& il femble au premier coup d'oeil, que ces divilions doivent tres-bien reprefenter les degrcs de force ou la quantite d'efprit ardent que contient la liqueur. Rien ne feroit cependant moins exaft, & nous allons bicntot voir combien ce precede s'ccarteroit de la verite. Les experiences que fit M. dc Reaumur, lorfqu'il conftruiiTt fes thermo- mc-tres, lui oftirent un phenomene iulqu'alors inconnu', il s'appercut que I'eau & I'efprit inflammable fe penetrotent mutuelleraent, que I'eau dilFol- voit en quelque forte refprlt-de-vin , de maniere que fi on les m^le en parties egales, le volume qui en refultera ne fera pas double de celui que ckique liqueur occupoit (eparement. Si cette imbibition d'une liqueur dans I'autre etoit toujours proportionnelle \ la quantite d'elprit contenu dans la liqueur, I'exadlitude du rapport ne feroit point akeree, & il pour- roit ctre iiirement marque par les divilions egales de I'areometre ; mais la diminution de la liqueur ne fuit pas cette loi , & elle varie felon la pro- portion dans laquelle elles font nieks-, il a done fallu que M. de Montigny fubftituat des divilions inegalcs aux divilions egales des areometres ordi- naires , & voici comment il s'y eft pris pour les obttnir. II a commence par s'alfucer du rapport exad de I'elpritde-vin le mieux deflegine avc?c I'eau dillillee, en pelant dans la m'me boutc-ille environ deux.pintes de chacune de ces deux liqueurs •, & la vue, dans cette opi- lation , a cte de le procurer par la luite le niuycn de reconnoitre li Telf- P H Y S I Q U E. ici ABREGfi DES MEMOIRES prit-devin qu'il voudroit employer, feroit , s'il m'eft permis de m'expri- mer ainli , au nieme titre que celiii qu'il employoit. 2\vec ces deux liqueurs ainli connues, il a fait neuf difFerens melanges, Annh 1768. I'und'une partle d'eau & de huit parties d'elprit-de-vin; iefecond,de deux parties d'eau & de lept parties d'elprit-de- vin , Sc ainli de luite Jufqu'ii la neu- vieme, qui avoit une ieule partie d'ef[)rit-de-vin centre huit parties d'eau. Ces melanges faits avec I'attention de ne miler Ics liqueurs que peu ^ peu, pour eviter la chaleur & I'evaporation de I'efprit-de-vin , qu'une fer- mentation trap forte n'auroit pas manque de produire, furent mis ^ repo- fer pendant vingt quatre heures. M. de Montigny s'ctoit pourvu d'areometres de verre,caril les prefere ^ ceux de metal, qui pourroient fe laiffer entaraer par les liqueurs qu'on elTaie. II avoit encore fait preparer un vaiffeau cylindrique detain, capa- ble de contenir la liqueur & I'areometre qu'on y plongeoit : ce vailleau avoit ^ fon bord une petite baguette detain (oudee , deftinee i recevoit un parallelipipede d'ivoire, qui s'y place comme un cierge kir Ion chande- lier, & i le maintenir verticalement; ce meme parallelipipede d'ivoire etoit encore garni d'un curleur qui rembralloit , & qui portoit une dent hori- zontale, alfez longue pour traverfer le vaiffeau par fon centre. Tout etant ainli prepare, on mit dans le vik de la liqueur la plus foi- ble, jufqu'i ce que le haut de la tige de I'areometre concourut avec le cur- feur place au plus haut du parallelipipede , & on marqua un trait lur ce der- nier. On prit enfuite la liqueur immediatement plus forte, c'eft-i-dire, celle qui contenoit deux parties d'efprit de-viu", on la fubftitua dans le vafe i la premiere, obfervant que fa furface flit ^ meme hauteur, on baiffa le curfeur jufqu'^ ce qu'il rcpondit au haut de la tige de I'areometre, qui s'enfoncoit certainement davantage qu'il n'avoit fait dans la premiere expe- rience, & on tra9a de meme un trait h cette hauteur fur le parallelipipede d'ivoire : en repetant cette operation avec les neuf liqueurs compolees, on eut neuf divilions qui repondoient aux neuf degres de force des liqueurs fpiritueufes , & qui cojtiprenoient & au-dela toutes les differences poffibles cntre les eaux-de-vie. Ces divifions font inegales, mais M. de Montigny n'a trouve aucun in- convenient fenlible k rendre egales les divilions intermediaires •, I'erreur qui peut en naitre, eft un infiniment petit pour le commerce. On aura done fur la regie d'ivoire une echelle qui repondra exaftement 3UX quantites d'efprit ardent qui font contenues dajis chaque eau-de-vie, & on fera toujours k porteg d'en arbitrer le prix & d'en fixer le droit avec equite. II reftoit cependant encore ^ parer i un inconvenient; les liqueurs, & fur- tout les liqueurs fpiritueufes fe rarefient par le chaud, & fe conden- fent par le froid ■, il en refulte neceflairement une variation dans leur pe- fanteur fpecifique, & I'areometre indiqueroit nial leur degre de force, li on ne faifoit I'epreuve en un lieu foigneufement entretenu i la meme tem- perature k laquelle a etc faite la graduation de I'inftrument. DE L'ACADEMIK ROYALE DES SCIENCES. 1C5 II fcroit , abfoliimcnt parlaiit, podible de s'lilliijcttir k cette conditio!- mais elle feroit incommode , & M. de Montigny a trouve Ic moyen de s'y p udraire. La regie ou parallclipipede d'ivoire qui porte les divifions a quatre fa- Ann^e i-ySS. CCS , il trace fur chacune de ces faces une divilion , en fe procurant dans le lieu oil il opere, une temperature dificrente de 5 dt-gres en 5 dcgrcs dii thermometre, k commencer par la temperature qui eft 5 degres au-deffous du terme de la congelation. Au moyen de deux parallelipipedes, on a huit icheiles qui repondront 4 toutes les temperatures de ce climat, depuis 5 de- gres au-dcllous dc la glace jufqu'i 30 au-deffus : ces deux regies & un pe- tit thermcmetre , mettront I'cflayeur en ctit d'operer avec exadlitude , er> choifitrant lechelle qui conviendra ^ la temperature marquee par le ther- mometre. Les echelles dont nous venons de parler, ne font faites que de 5 en 5 de- gres du thermometre, & il y a des temperatures interincdiaires-, mais M. de Montigny s'eft alfure que cette difference pouvoit etre negligee, fans au- cune erreur lenlible. Au moyen de la conftrudlion propofee par M. de Montigny, on aiira des arometres qui pourront donner toujours le degre de force des diffe- rcntcs liqueurs Ipiritueufes; la conflrHClion de ces inftrumens lera facile & pi;u difpendieufe, leur ufage fera aife & donnera toujours le moyen de determiner avcc equite la valeur de ces liqueurs & les droits auquels elles doivent etre alfujetties, fur-tout fi on relache ce droit, comme Is propofe M. de Montigny, d'une partie qui p'Ut aller h ~\ mais li cependaiit il arri- voit k ce fujet quelque ditierend, M. de Montigny propofe un moyen de fiire facileinent, en juftice , cette appreciation d'une maniere encore plus precife. Ce moyen n'exlge d'autre inftrument qu'une petite balance, aux deux extremites du fleau de laquelle font fufpendus deux cylindres de cuivre pjrfaitement equilibres-, en plongeant un de ces corps dans I'eau-de-vie con- tcftee, & I'autre dans une liqueur compofce d'eau & dVlprit de vin, qu'on rendra plus ou moins forte, au moyen de dofes connues de I'un oil de I'autre, )uiqii'i ce que les deux poids fe retrouvcnt en equilibre, on aura le degre precis de force de la liqueur conteftee : cette operation ne prut jamais etre fujette ^ aucun inconvenient, & fe pent pratiquer par tout avec la plus graBde facilite. Les areometres propofes par M. de Montigny , re- folvent done ablolument le probleme qu'il s'ctoit propofe, & leur ufage peut en meme icmps cclairer le commercant, en le mettant ^ purtCi de garantirdes infidelites auxquclles il pourroit etre cxpofe, pnrttr une exactc juftice dans la perception des droits , qui n'i etc julqu'ici que trop arbi- traire, & oter enfin tout prdtexte k la fraude & aux abus en cette partie. 104 ABREG6 DES ME MOIRES Physique. Ann^e ijGj. ^'"- ^'^ f"''^ ^'' ^°''' Ilift. V^N fc' plaint depuis long-temps que la quality des bois de charpente n'eft plus la mcme qii'tlle ctoit au commencement de ce fiecle. Les inge- nieiirs remarqiient que des eclufes qui duroient autrefois quarante & cin- quantc ans , n'en durent aujourd'hui que dix ou douze. Les aichite(3:es fe ■ trouvent trcs-fouvcnt dans le cas de changer au bout de peu de temps les poutres qu'ils emploient dans les batimens , quelqu'attention qu'ils aient apportee ^ les bien choilir, & cnfin les vaifleaux qui avoient encore leurs membres fains au bout de quarante ans, ne peuvent durcr aujourd'hui plus de dix ou douze fans les avoir abfolunient detruits. Un phenomene fi intereflant meritoit bieii qu'on effayat d'en afligner la caufe, & M. du Hamel en a fait Tobjet de fes recherches; mais pour ne pas s'expofer a travailler en vain, il i voulu avant tout s'alfurer de la force des bois, & voici les refultats qu'il a tires des experiences faites 'k Bred par ordre de M". de Roquefeuille & Marchais , fous les yeux de meffieurs les ingenieurs , pour fixer , avec connoiflance de caufe , les dimenfions des poutres qu'on devoit employer 'k un batimeni conliderable qu'on y conf- truifoit. On difpofa, pour cet effet, deux chevalets places k 15 pieds I'un de I'autre, fur lefquels on fit porter fucceffivement trois poutres un peu plus longues que cet intervalle , & on les chargea de piulieurs poids, julqu'i ce qu'elles rompiffent fous la charge. La premiere avoit 10 pouces de largeur fur 9 d'epaiueur , on la char- gea d'un canon de 56, pefant 7591 livres; elle plia un peu fous ce poids, & la charge ayant ete augmentee Jufqu'i Syoi livres, elle rompit vers fon milieu-, on reconnut, apres fa rupture, quelle avoit quelques defauts. Une feconde de 1 1 pouces | d'epaiffeur, fur 10 pouces de largeur, fut chargee d'un femblable canon , qui la fit un peu plier •, on liilpcndit uii fecond canon \ 8 pieds de I'extremite, elle arqua davantage-, elle rompit fous un troifieme canon , place de I'autre cote •, & elle etoit alors chargee de 12,760 livres, placees i trois points differens de fa longueur : cette poutre etoit tres-faine & de droit fil. * La troilieme etoit, comme la feconde, tres-faine & de droit fil; elle avoit un pied de large fur 1 3 pouces d'epaiffeur ■, un canon de 5 6 livres , fufpendu ^ fon milieu, I'a fait arquer Lulement d'un pouce -, deux autres canons ayant ete fufpendus l 5 pieds de chaque cote du milieu , fare a ete jufqu'a 4 pouces : on voulut alors la charger de deux autres canons, pla- ces ^ 6 pieds de diftance de fon milieu, elle eclata litot quelle ientit le poids du premier, & rompit des quelle le porta en entier : elle etoit alors chargee de 16,606 livres. II refulte de ces trois experiences, que la force des bois n'efl: pas au- jourd'hui DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 105 Jourd'hui telle quelle a eti obferv^e autrefois p.u M. Parent & par les phy" ^■^— — " ficiens qui fireiit alors les nicmes experiences-, qu'on fc tromperoit beau- p ,^ y s i 0 u £ coup li on vouloit I'evaiuer fur le pied de leurs refultats -, & qui! faut par- tir, dans I'architedure & la conftrudion , du degrc de force qn'ils ont au- Ann^e tjGS. jourd'hui. Mais qui peut avoir caufi cette efpece de deperiflement dans les bois } Plulleurs phyliciens en ont cru trouver la caufe dans les gelees de 1 709. M. du Hamel ne difconvient pas que cette caufe n'ait pu contribuer au nial dont on fe plaint. Les fortes gelees font capables, dans quelques cir- conftances, de faire fendre les arbres, & d'altercr beaucoup les couches ligneufcs, d'ou rcfultent des vices dans I'interieur des arbres, qui les ren- dent plus Aijets h la pourriture, alterent leur qualiti ; & les rendent itioins capables d'une forte refiftance. Malgrc routes ces raifons, M. dw Hamel eft bien eloigne de regarder cette caufe comme la fcule , & il penfe qu'il y en a d'autres qui influent plus geiicralement fur la force & la duree des bois. On abat , depuis long- temps, les bois fans les replantcr, & la plupart de nos fiitaies font fur de vieilles fouches : les arbres qui les compofent ne font done produits que par des racines ufees & par un terrain deja epuifej doit-on etre etonne que ces bois ne foient pas de bonne qualiic :- Nous dirons la meme chofe des baliveaux , qui ne fervent qu'i gater les taillis, fans jamais produire de la futaie. On ne peut done trouver d'arbres fains que ceux que le hafard a fait epargner dans les lilieres ou les haies , ou dans quelques cantons de referve. Nous fonimes d'ailleurs forces d'employer les bois que nos aieux avoient rebutes, parce qu'ils ctoient venus dans les ter- rains marecageux J & qui, outre ce defaut, ont encore celui d'etre pref- que toujours fur le retour. Enfin on en va chercher que les endroits inac- ceflibles oiiilsfont crus, avoient defendus iufqu'ici,& que leur grand age a rendus gras & tendres , & incapables de fervir k d'autres ufages qu'4 boi- fer I'interieur des maifons. Teiies font les raifons tres-vraifemblables que M. du Hamel apporte de la diminution de la force des bois.'En connoiffant les caufes de ce mal, on voit aifcment qu'on ne peut I'epargner ^ ceux qui nous fuccederont, qu'en prenant avec foin toutcs les precautions dont Tomiflion en a etc la caufe-, qu'on fera toujours fagement, lorfqu'on voudra employer des bois i quelque ufage , d'examiner avec foin quel degre de force & de refiftancc on doit sen promettie. Tome XIV. Partie Franfoife. Ann^e iy68 10(5 ABREGE DES ME MOIRES U E. S U R L E S F O M P E S. Hifi. Xl n'nrrive que trop fouvent que ceux qui entrepreiinent d'^t.iblir des pompes pour les diffcrentes operations auxquelles on les applique , fe trou- vent trompes fur I'effet de ces machines , qui produifent beaucoup moins qu'on ne (embloit avoir droit de I'efperer. Une des principales caufes de cette diminution de produit , eft I'etran- glement que la colonne d'eau eprouve en paffant par les foupapes qui font inevitables dans ccs machines. L'importance de cet objet a determine M. le chevalier de Borda h I'exa- niiner dans le memoire duquel nous allons effayer de prefenter une idee. II fe fert dans ce memoire du meme principe qu'il avoit employe dans celui qu'il avoit donne en 1766 (a), la confervation des forces vives, il examine I'increment & la perte de ces forces pendant une revolution entiere de la roue qui mene le pifton , & en le comparant k I'incre- ment des momens de tout le fyfteme , il obtient la perte caufee par les itranglemens. II refulte de ce calcul , que la perte caufee par les etranglemens , eft , toutes chofes d'ailleurs egales, proportionnelle au quarre de la vitefle de la roue, &, par confequent, ^ celui de la viteffe du pifton. M. de Borda n'avoit entrepris cette recherche que dans la vue de I'ap- pliquer k la pratique-, la premiere application qu'il en a faite, a eti h la ma- chine h feu , qui eft etablie aux mines de charbon de Montrelais , prcs d'Ingrande. Les piftons y ont 6 ^ pieds de jeu , & la machine donne neuf coups de piftons par minute, ce qui donneroit 6 lecondes j par vibration; mais comme il y a un peu de temps perdu entre la defcente & la lev^e du pifton , M. de Borda croit qu'on peut legitimement fixer le temps de chaque vibration h 5 fecondes \, &:^ par confequent, celui de chaque demi- vibration h 1 fecondes j. Pour obtenir la contradion des colonnes de fluide , il mefura exade- ment I'ouverture des foupapes , mais il s'appercut bientot qu'il fe trompe- roit , s'il ne faifoit entrer que cette donnee dans fon calcul , & cela pour deux raifons ; la premiere eft que I'eau arrive ^ ces onvenures par des di- redtions convergentes , qui produifent dans les colonnes un relferrement plus grand que celui qui refulteroit de la feule diminution du paflage; & la feconde, que I'eau eft rejettee par la maniere dont s'ouvrent les val- vules contre le corps de pompe, ce qui augniente encore le refferremenf, enfin, il y a au bout inferieur une grille pour empecher qu'il^ n'y entre des ordures, & cette grille peut, felon lui, ctre comptee k cet egard pour une foupape. Le calcul applique ^ ces Clemens , il en eft refult6 que la force necef- (i) Voyez Hift. 1766, ci-delTus. r, DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 107 faire pour fairs inouvoir cette pompc , eft k celle qui fuftiroit , s'il n'y . avoit point d'ctranglemens, comrae 61 H — 4,88 eft i 61 , ou, ce qui i^^- p , j y s i Q u t. vient au meine, qu'il y a dc ce chef plus dun treiziemc de la force de perdu. Ann^e 1768. Le mcmc calcul a encore etc applique ^ une autre machine ^ feu , em- ployee au deffechement d'un grand lac-, celieci n'elevoit I'eau qua cinq pieds de hauteur, le jeu de chaque pifton etoit de fix pieds, 8c ellc fit- foit dix alpirations par minute ■-, mais le temps de fa montic etoit un pen moindre que cclui de d deicetue, & il y avoit entre Tun & I'autre uia petit intervalie d'environ dcmi-ieconde. La mefure des ouvertures des foupa- es, lui fit juger que leurs paffages contradtoient la colonne de fluids dans a raifon de 4^^ i , mais que les foupapcs inferieures produifoient une contraiflion un peu plus grande. Le calcul fait d'apres ces donnees , il en rifultc que la force neceilaire pour faire mouvoir ces pompes , eft' k celle qui auroit fuffi , s'il n'y avoit aucun ctraiiglement , dans le rapport de 7,8()8 a 5 , ou prefque comme 8 eft ^ ^. Toute cette recherche I'a conduit i une reflexion bien importante ', pnif- que la rcliftance occalionnee par les etranglemens croit comme le quarre de la vitclFe du pifton, on peut, en diminuant cette derniere d'une cer- taine quantite, diminuer Tautre bien plus conliderablemenf, fi, par excm- ple , au-lieu de quatre piftons , ayant chacun 6 pieds de jcu , on en met- toit 8 qui ne jouaffent que de 5 pieds, la machine ne feroit pas plus char- gee , Sc la reliftance cauiee par les etranglemens feroit reduite au quart de ce quelle etoit, avantagc bien liel & du aux recherches de M. le chevalier de Borda. On doit done, dans la pratique, augmenter plutot le nombre des corps de pompes, que d'augmenter la courle & la viteffe des piftons. II auroit ete bien hirprenant qu'ayant, pour ainli dire , toute cette theo- rie i la main , il eut neglige d'en faire rapplication aux pompes des vai(- feaux qu'il avoit continuellement devant les yeux , & auxquellcs il eft li important de donner tout I'avantage dont elles peuvcnt ctre fufceptibles, auili n'y a-t-il pas manqu^ , & il a eu lieu d'etre fatisfait de fon travail, par les defauts qu'il a trouves dans ces pompes ordinaircs , & par les moyens faciles d'y remedier que fes recherthes lui ont donnes. La pompe qu'il a examinee, avoit 6 pouces de diametre interieiu" ■, le paffage de la foupape inferieure avoit ; pouces ^ de diametre , d'ou il coii- clut, en failant k la contradlion les memes augmentations que dans les ar- ticles precedens, qu'elle etoit dans le rapport de 47 i 1 •, celle qui etoit occafionnee par la foupape du pifton , etoit dans le rapport de 6 ^ i , & on pcut doubler la quantite de cette contradtion ^ cauie de la grille placee au bas du corps de pompe , qui en occalionnoit une i-peu-prcs egale ^ celle de cette derniere foupape : toutes ces donnees etant introduites dans I'ciquation , il trouva que de la force de onze hommes qui , dans i'cfpace de I 5 minutcfs dc temps , avoient fait jouer cinq cent quatre-vingt-dcux fois le pifton , qui parcoutoit i chaque fois z pieds, il y en avoit prel- qu'un tiers de perdu. Oii io8 ABREGfi DES MEMOIRES ""— — ^— ^ En reduifant le Jen dii pifton h i 8 pouces , on n'avoit plus befoin d'line Phy'sioitf '^ S"^^"*^^ force, & Ja perte caul^e par les etranglemens ne va plus qu'i un ■pen moins d'un cinquieme; en diminuaiit de memc la viteffe d'environ un jinnee ty68. quart, on dtminuera encore la perte de force caufee par les etranglemens, & elle ne fera plus qu'une feptieme partie de la force raotrice : il fera done toujours plus avantageux de multiplier les pompes, en diminuant la courfe & la viteffe de leurs piftons , que de diminuer le nombre des pompes en augmentant ces memes quantites. Pendant qu'il etoit occupe de cet objet , il a voulu examiner fi un pif- ton defcendant par Ton propre poids, emploieroit ^ delcendre d'une quan- tite donnee le meme temps que fa theorie donneroit pour cette defceiite. Deux operations ^toient neceffaires pour cette recherche , la premiere , de determiner par I'experience le temps de la defcente du pifton ; & la fe- conde , de la determiner par le calcul. Le corps de pompe , duquel il fe fervit, avoit 6 pouces de diametre, le pifton pefoit 77 livres, mais deduifant de ce poids celui du volume d'eau qu'il d^plagoit , ce poids etoit reduit i 41 livres, & pouvoit equiva- Joir ^ une colonne d'eau de 5 pieds j de hauteur : M. de Borda avoit cloue fur I'ouverture de la foupape de ce pifton, une plaque de fer-blanc, per- cee d'un trou de i 8 lignes de diametre , qui n'etoit que la feizieme partie • de la fedlion du corps de pompe •■, on avoit done le diametre de la colonne au point de fa plus grande contradlion, dans le rapport de 224 ^ i , avec le diametre total de la colonne, cu de -tt di\ diametre de cette colonne, & I'experience a fait voir que ce pifton , eleve de 4 pieds & abandonne ^ ion propre poids, eft defcendu en 6 fecondes de temps. Si Ton applique prefentement le calcul algebrique 'k ces donnees, on trouvera pour le temps de la defcente du pifton 5 fecondes i, accord qui marque egalement & I'exaditude de I'experience & la fagacite avec laquelle le calcul avoit ete conduit, Le memoire de M. de Borda eft termine par quelques remarques fur la refiftance des fluides, mais ces reflexions ne I'ont pas conduit 4 des reful- tats abfolument exafts ; elles font en quelque- forte le germe & I'objet d'un autre travail : celui duquel nous venons de rendre compte , eft bien propre 4 en faire defirer I'exccution. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 109 OBSERVATIONS DE PHYSIQUE GENiRALE. ^„„^^ gg' I. T. J_i'ACADEMiE a rendu compte au public en 1761, (a) de I'accident arrivi ^ Strasbourg, par la meiile d'un Coutelier, qui laiita en eclats, & elle donna en meme temps fes reflexions fur la caiife de cctte rupture, & fur la m\- iiiere d'y remedier ou plutot de la prcvenir. Voici un fecond exemple de cet accident, arrive le 5 juin de cette annee, ^ Ivry, pres Paris. Un Emou- leur forain ayant ete appelle dans uue maifon bourgeoife , etablit fes ma- chines dans la cour de cette maifon , & fe mit ^ travaiiler en prefcnce d'une jcune perfonne qui s'amufoit ^ le regarder, & qui, pour fe garantir du foleil, qui etoit trcs-vif, tenoit fur fa tetc un parafol un peu incline. Apres avoir repaffe deux ou trois pieces, la meule I'auta en eclats avec un bruit femblable i un fort coup de moufquet ■, un de ces Eclats, pef.int ^- peu-prcs trois livrcs, palla par deffus un batiment d'environ quarante pieds de hauteur, & alia toniber ^ dix-huit toifes au-del^, dans un jardin , on il eclata en tombant, une branche de tilleuU un autre, prefque du meme poids, glitfa fur le parafol de la fpedatrice, qui en fut heureufement quitte pour la peur; beaucoup d'autres eclats plus pctits, fe difperferent aux en- virons, & une partie de la meule, abfolument en poudre , fe trouva fur le pave, fans que cette explolion ait caufe aucun malheur. Ce fait, qui a etc communique ^ I'Academie par M. d'Alembert , ne fait. que confirmer cclui dont elle a parle en 1761, les reflexions quelle avoit faites fur la caufe de cet accident, & la necefllte des moyens quelle avoit donnes pour Ic preveuir. n. M. MoRAND fils avoit plufieurs fois remnrque, en paffant dans le che- min qui eft pratique dans la montagne de Saint-Germain-en-Laye , que dans U coype de tewes, il paroifToit dans quelques parties du milieu de la montagne des veines de terre remarquables par leur couleur noire, affcz foncee dans quelques endroits-, il s'imagina bien que cette meme couche de terre regnoit dans plus d'un endroit de I.i montagne •, il la retrouva ef- feftivcment dans un ravin profond qui fert de route aux gens de pied pour abreger leur chemin, & il en ramaffa des raaffes confiderables qu il foumit ^ I'examen. Cette terre eft; noiratre & glaifeufe : elle contient dans des le- ges caverneufes des portions abfolument noires, fcmdcs de molecules vi- getales , trcs-reflemblantes a du menu chirbon. Ce bizarre melange piqua la curiolltc de M. Morand , & il s'etudia \ en chercher la caufe ■■, il foupconna que ces parties cbarbonneufrs etoicnt (a) Voy. Hift. 1762. Colled. Acai Part. fr. Tom. XIIL no ABREGfi DES MEMOIRES "— ^'— *™'*^"^ de la tourbe, dont la coiichc s'etoit formee primitivement an haut de la Physique "lof f'lg'iP) & eiifuite tran(poitee par Ics pluies qui I'avoieiit entrain^e dans le vallon pele-mele avec des terres argilleufes; il ^toit aife de s'en alliirer, Anaife lj68. i! ne falloit qu'cn niettre au feu quelques morceaux , & riv^iiement fut tel qu'il I'avoit prevu : la partie leniblable au charbon biula & donna I'o- deur caradleriftique de la tourbe, tandis que le refte fe durcit au feu comrae une veritable argile-, & quelques morceaux de cette matiere charbonneufe, expofes au feu d'une lampe animee par un chaUimeau , y brulerent commc de la tourbe, donnerent la meme odeur, & laifferent apres la combuftion, une cendre abfolument la meme que celle de la tourbe. II y a done eu de cette matiere dans la montagne de Saint- Germain , & peui-etre sen trouveroit-il encore. III. Le 6 decembre de cette annee, M. le chevalier Tiirgot etant ^ Lanteuil, en baffe Normandie , y obferva une tres-belle aurore boreale •, elle avoit pour bafe une vapeur femblable ^ un brouillard epais , il travers lequel il voyoit cependant les etoiles de la feconde grandeur; tout le refte de cette partie du ciel etoit ^claire d'une lumlere rougeatre, qui allolt en degradant de lumiere , ^-peu-pres comme il I'auroit ete par la reverberation d'un grand incendie. Sur les lix heures du foir, la lumiere devint trcs-brillante de- puis I'oueft nord-oueft, jufqu'^ I'eft-nord-tft •, \ onze heures & demie, il fe forma au nuage noir des efpeces de fenetres ou de creneaux tres-lumi- neux, & il en partit des rayons lumineux qui s'elevoient en ondulant juf- que par-del^ la grande ourfe-, il y avoit audi des rayons obfcurs, de la meme couleur que le nuage d'oii ils s'elevoient : i minuit le nuage s'e- claira tout d'un coup & le phenomene demeura tranquille , plufieurs des rayons lumineux fe feparoient de leur bafe , & demeuroient comme fuf- pendus en forme de flammes legeres; la vapeur qui fervoit de bafe, pa- roiffoit avoir un mouvement fenlible de I'oueft ^ I'eft. M. le chevalier Tur- got s'en affura en la comparant i des clochers qu'il voyoit h I'horizoh. II eft aife de reconnoitre ^ cette defcription les memes phenomenes que M. de Mairan avoit obferves en 1726. • , I V. Feu M. de Reaumur avoit etonne tout le monde Phyficjen, par la fur- prenante reprodudion des polypes & de quelques autres animaux. Voici encore un fait de meme efpece , & peut-etre plus lingulier, dont M. de la Condamine a fait part ^ I'Academie. M. Spallanzani s'etant avife de cou- per les comes, & meme la tete, ^ quelques limacons, s'appercut avec eton- nement que quelques uns de ces animaux qu'il croyoit morts, ne I'etoicnt point, & qu'au bout d'un temps affez long, il leur etoit revenu, aux uns, de nouvclk's cornes, & aux autres, line tete entiere. DE L'ACADEMIE ROYALE DE3 SCIENCES, m Ce fait excita la carioCni dc pitilieurs Acadt;miciens , & couta la tcte '^ un grand nonibre de lima(jotis. Plulieiirs moiiriircnt leellemciit de I'opera- ~^ ~ tion , mais d'.nures , plus hcureux , en echappcrent. Voici ce que nous ^ " ^ s i q r r. ;ivons pu recueillir des obfervations qui ont ete faites par Mrs. |e chevalier ^pn/e fC'S Turgor, Lavoilier, Tenon , HerilFant, & de quelques autres qui ont etc ^ communiquces k I'acadcmie. A quclques-uns, on a coupi la tcte en entier : il faut ctre adroit pour cette operation •, car li elle n'efl faite en un iiiftant,.& avec un'inftrument bien tranchant , I'aninial fe retire Ci proniptcmcnt qu'on n'en coupe qu'une partie-, d'autres ont cu la tete fendue en long, & on en a emporie une moititS; d'autres, enfin, en ont etc quittes pour leurs comes qu'on leur a coupces ou arrachees : ces derniers ne paroiirent pas fort incommodes dc ce retrancliemenf, ceux memes, auxquels on a fendu la tete lonoitudiiia- lement, n'en ont pu paru fouffrir beaucoup ; il s'eft forme une peau nou- velle, tres-aifce k diflinguer de I'ancienne, qui eft bicn plus foncee en ecu- . leur-, la nouvelle n'acquicrt, qu'aprcs I'cnfiere reproducflion de la partie, I'air chagrine que paroit avoir la peau du limacon : les limacons, k qui la tcte a ^te abfolument couple, fe retirent dans leurs coquilles, & y reftent plus ou inoins long-temps renfermes, c'eft-^-dire, trente ou quarante jourc. II eft inutile d'ajouter que c'eft fans manger , & que leur corps foutfre une diminution confiderable par ce long jeiine, ou i'animal ne vit que de ce qu'il avoit pris avant I'amnutation ; il eft feulement etonnant que la di- geftion ait pu s'en faire ; elle fe fait cependant, puifquils rendent leurs excremens pendant un ou deux Jours. Ah bout du terme, qui eft au moins d'un mois , on voit fe former, au milieu de la partie coupee, une efpece de protuberance qui croit peu- ^-peu , & devifnt enfin une nouvelle tete , garnie dune bouche & de dents. M. Hiiiifant a demontre que ces dents etoient une nouvelle pro- dudlion, ayant fait voir la tete coupee d'un limacon, qu'il avoit confer- vee dans de refprit-de-vin, & ^ laquelle tenoicnt les dents, quoique la nouvelle tete de I'animal en fut pourvue. Les cornes ne reparoiffent aux nouvelles fetes , qu'apres qn'elles font abfolument fomiees •, clles n'obfervent auctine regie dan? leur reproduc- tion •, celles memes qui ont ete coupees ou arrachees , n'obfervent pas plus de regularite. Elles font, en general, d'abord dune couleur phis claire que le rcfte de la tete, & il fe forme, au bout, ce point noir qu'on croit ctre I'anl de I'animal. Telles font les oblervations fingulieres qu'a ofJertes 1 amputation de la tete des limacons : c'eft un nouveau miracle d'hiftoire naturclle , & une ample matiere oticrte aux recherches des phyliciens. Physique. Ill ABREGE DES ME MOIRES V. Ann^e ij68. Nous avons d^ji parle ci-defllis des efFets du froid de I'hiver de 17(^7 ^ 1768 ^ Paris; il n'a pas ete moindre dans les autres provinces du roy.iume, A Courfeiilles-fur-iner, le therniometre defcendit,le 5 Janvier, ^ 11 de- gres I au-deirous de la glace ■■, la ncige n'y fondit pas , meme au foleil. A I'endroit de la haiite-mer, il s'etoit forme iin amas d'ccume glacee , lem- blable ^ la neige, mais plus folide, qui avoit plus de 15 pieds de bafe , & qui etoit de 4 pieds de haut, & de 10 dans certains endroits-, & de- puis cet amas Jufqu'i la bafle-mcr, ce n'etoit qu'une glare dans laquelle ie trouvoient enchallees les petites barques des peciieurs, & plus de qua- tre cent milliers d'lniitres, dans la feule paroiffe de Courfeulles. Ce detail eft tire d'une lettre de M. I'abbe Mareft, prieur de Courfeulies, 5» M. le • chevalier Turgot. A I'autre extremite du royaume, ^ Aix en Provence, le fjroid n'etoit pas moins exceflif' il y fut plus rude qu'en 1740, &, i ce qu'on croit, egal \ celui qu'on y avoit eprouve en 1705. Des le 1 janvier, le vent s'etoit tourne au nord , & avoit amene une grande quantite de nuages tres-noires : le barometre baiffa tout-i-coup ^ 17 pouces 1 lignes, & on reffentit une legere fecoufle de tremblement de terre, au village de Rognac, fitue pres de I'etang de Beyre. L'Academie a tire cette relation d'une lettre ecrite d'Aix 'k M. Fougeroux , qui I'a communique ^ I'A-. cademie. Tandis que le froid fe faifoit (i bien fentir en France , il n'epargnoit pas plus I'Amerique. Don Antonio de Ulloa, gouverneur de la Louiliane, & correfpondant de I'Academie, lui a mande que le lo Janvier, le ther- mometre de M. de Reaumur ^toit defcendu i 7 4 degres au-defibus de la congelation ; niais le 20 , au matin , il etoit remonte i 8 -j degres au-' deffus •, & le 11, au foir , i 9 7 degres. Voil^ un froid affez vif pour la Louifiane , mais il n'a pas beaucoup dure; la plus grande chaleur qu'y ait obfervee Don Antonio, n'a fait moo- ter le thermometre qu'^ 3 3*^ i > chaleur peu fuperieure ^ celles que nous eprouvons en France. Les deux extremes de la temperature des deux cli- mats font affez vuilins; mais la marche du chaud & du froid dans I'inter- valle entre ces deux ter.Ties , peut etre, & eft vraifemblablement affez differente : ce climat paroit feulement en general un peu plus chaud que le notre. V r. M. HuGHiNS avoit autrefois obferve des balancemens fenlibles dans la hauteur du mcrcure du barometre. M. Fourcroy de Ramecourt, ingenieur en chef i Calais & correfpondant de I'academie, lui a fait part d'une ob- fervation femblable-, la nuit du 11 au 11 decembre , tous les barometres de Calais defcendirent d'environ 14 lignes, & le 12, ^ cinq heures du foir, il etoit \ i6 pouces j) lignes, une ligne j plus bas que M. Fourcroy nc DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 115 ne I'avoit vu depiiis cinq ans. II f.iifoit maiivais temps, le vent etoit an ^™^—^— — fud oueft & fiid-(ud-oiicft, & il y avoit dc temps en temps dcs coups dc p vents accompagnes de pluie & de grele : i neuf hcures du foir, M. Fourcroy, regardant fon barometre avec unc loupe, apper^ut un balancement dans Annie tj68. la furface du mercure , qui tantot s'elevoit en bouton , & tantot fe creu- foit en entonnoir , & en moins de deux minutes de temps , il remonti de 16 pouces o lignes i i6 pouces 2 lignesi un demi-quart-d'heure aprcs, ctant ^ 8 ou <) pieds de diftance de Ion barometre, il le vit defcendre fenliblement : alors il prit le parti de placer fon barometre prcs de fon fauteuil & ^ portee de fes yeux avec une lumiere & une montre ^ cote, & il I'obferva conftamment pendant la plus grande partie de la nuit , & lui vit faire plulieurs balancemens d'environ deux lignes dans de tres-courts efpaces de temj)s , en forte que fon raouvement etoit extremement fen- fible ^ la vue limple. Le lendemain, on vit pendant toute la foiree beau- coup d eclairs , mais fans entendre le tonnerre. Les marees meme parurent derangees; celle du 11 monta beaucoup plus haut qui I'ordinaire, & an- ticipa de 15 i 20 minutes I'heure ^ laquelle elle devoit arriver. Une let- tre de M. Boucher , medecin \ Lille , & correfpondant de I'Acadcmie , lui a appris que le barometre avoit aufli eu dans cette ville des abailTe- mens extraordinaire:. VII. M. Gautier , medecin du roi \ Gray en Franche-comt6 , a tnandi I M. Macquer, que pendant I'ete de 1768, il y avoit eu aux environs de cette ville un orage terrible accompagne d'une grcie afFreufe pour fa quan- tite & fa groffcur; I'orage etant paffe , on trouva dans les endroits creux plulieurs amas de grele , entre lefquels on apper^ut une raafle de glace de plulieurs pieds de long, trcs-large & de plulieurs pouces depaifleur : on crut d'abord quelle etoit tombee de la nu^e fous cette forme, mais il eft evident que ce fentinienr n'eft point foutenable, puifque, fi elle s'etoit for- mec dans la nuee , fa chute I'auroit brifee en eclats ; il eft plus probable que cette^ table de glace setoit formee de la reunion de plulieurs grelonj unis par I'eaude la pluie que la fraicheur des grelons avoit elle-meme gla- cee. On a di]\ quelques exemples de ces concretions de glace, & fi on doit quelquefois admettre le merveilleux, ce n'eft au moins que lorfque le pbyiique eft abfoluraent 4 bout. Tome XIV. Partie Franfoife. 114 ABREGE DES MEMOIRES Sur le rapport des differentes denfith de I'efprit de yirij avec fes Ann/e 1763. diffhens degrh dc force. Hift. \Jti a du s'appercevoir de bonne heiire, qii'en melant de I'eau pure \. une liqueur fpiritueufe, comme , par exemple , de I'efprit de vin , 011 af- foiblilloit ce dernier dans la memc proportion qu'on y joignoit de I'eau \ en forte qu'une liqueur compofee de parties egales d'eau & d'elprit-de-vin, etoit de moitie moins forte, ou moins fpiritueufe que I'efprit -de- vin pur. II refultoit encore neceffairement du melange des deux liqueurs , que I'eau etant fpecifiquement plus pefante que I'efprit-de-vin , la liqueur com- pofee des deux, devoit etre d'une gravite fpecifique, moyenne entre I'une & I'autre, & jufque-li on avoit bien raifonne, mais on fe preffa un peu trop de condure que cette augmentation de pefanteur etoit toujours pro- portionnelle \ la quantite d'eau pure qu'on y avoit fait entrer , c'eft^-dire en raifon inverfe de la force de la liqueur , & cette conclufion , quoi- qu'univerfellement adoptee par les phyficiens, fut dementie par I'expc- rience. En 175}, („_/- j-iffq, foncer quand il ctoit neceffaire : cet areometre tut pefe dans une balance tres-exade, & M. Briffon eut grand loin d'ecrire fon poiJs. C'eft ^ I'aide de cet inftrument que M. Briffon a mefure la pefanteur fpecifique de ces liqueurs; il I'a d'abord plonge dans I'efprit de vin pur, * & il a marque avec un fil, fur le col de I'arconietre , le point julqii'au- quel il s'enfoncoit •, le volume d'efprit de vin, deplace par cette immer- fion, a pefe 686 grains & |. On juge bien que pour le faire enfoncer aii- tant dans I'eau, il a fallu mettre des poids dans le plateau de la balance, & le volume d'eau, ^gal ^ celui de I'efprit de vin , a pefe 8zo grains & 5. II eft prefqu'inutile d'ljjouter ici, qu'en plongeant fuccefliveraent I'arco- metre dans les differentes liqueurs compofees, le meme volume a etc de plus pefant en plus pefant, h mefure que les liqueurs etoient plus chargees d'eau-, M. Briffon n'en a pas ete furpris, c'etoit une confequence neceffaire du melange plus ou moins grand de I'eau avec I'efprit de vin -, il ne fut pas plus etonne de trouver toujours la pefanteur fpecifique des liqueurs compofees plus grande que ne le demandoit la quantite d'eau melee avec I'efprit de vin , c'etoit I'effct de la penetration des liqueurs entr'elles -, mais il le fut beaucoup de voir la marche de ces augmentations, & de recon- noitre qu'elle n'ctoit nullement proportionnelle i I'affbibliffement de I'ef- prit de vin. Deux tables , dont la premiere contient les augmentations de poids obfervees, avec leurs differences; & la feconde, ces meraes augmen- tations reelles comparees avec celles qui refulteroient du melange de I'eaii avec I'efprit de vin , s'il ne fe faifoit point de penetration entre les deux liqueurs, lui ont fait voir toutes ces differences. Des experiences de M. Briffon, que nous venons de rapporter, il re- fulte que I'efprit de vin augmente de denfite k mefure qu'on y mele de I'eau ; mais cette augmentation n'eft nullement proportionnelle h la quan- tit(5 d'eau melee, ou ce qui revient au meme, h I'affoibliffement de I'ef- prit-de-vin : les differences entre les augmentations de denllte, caufees par la penetration mutuelle des deux liqueurs vont en diminuant, jufqu'i ce que la liqueur foit corapofee de parties egales d'eau & d'efprit de vin : paffe ce terme, ^ mefure qu'on ajou(# de I'eau , les differences entre les augmentations, vont en augmentant. Tout cela prouve inconteftablement que , comme nous I'avons dcj^ dit , I'eau & I'efprit de vin fe penetrent mutuellement ■, mais que cette penetration a un terme, & quelle n'a lieu que jufqu'^ ce que le melange foit conipofe de parties egales d'eau & d'efprit de vin ; & qu'apres ce terme , elle eprouve un dccroiffement tres- fenfible. Mais comment accorder ceci avec les obfervations de M. de Reaumur, qui aflure que la plus grande diminution de volume fe trouve quand le melange eft compofe de deux tiers d'eau & d'un tiers d'efprit de vin .> , Voici la raifon trcs- probable que donne M. Briffon de cette difference. M. de Reaumur, qui navoit pas les memes vues que lui, ne faifoit pas DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 117 fes melanges feparement -, il ajoutoit feulement de I'eau ^ des melanges «^— ^— ■ dcji faits, fans meme leiir donner le temps de perdre la chaieur que '^ p „ „ s i o melange avoit occ.ifionnce-, d'ou il fuit qu'il a vraifembiablement ajoute k la diminution de volume, caufce par la penetration, ceile qui ne venoit Annie fjSg. que du refroidiflement de la liqueur •, & que I'opinion de M. Briffon , qui fixe, par fes experiences plus fuivies, le terme de la plus grande di- minution de volume au terme de I'igalitc de I'eau & de i'efprit dc vin , n'en peut ctre ibr.iniie. L'augmentation de denfiti qui provient de la penetration mufuelie des deux liqueurs, eft, fuivant M. Briffon, de -^ & }, -i., du poids de I'ef- prit de vin. M. de Reaumur ne la faifoit que d'un vingtieme; mais cette dirfercnce eft une fuite de la premiere erreur, etant preciftment la quan- tite qui convicnt au melange de deux tiers d'eau & d'un tiers d'efprit de vin ; que ce favant phylicieii regardoit comme cclui qui occafionnoit la plus grande penetration. II eft done deji bien prouve que dans le melange de i'eau & de I'ef- prit de vin , il Ic fait une penetration reelle entre les deux liqueurs , de laquelle il relulte une augmentation de dcnfite ; mais la penetration eft-elle mutuelle , ou une feule des deux liqueurs penetre- t-elle I'autre ? M. Briffon croit que l'augmentation de denlitc eft due 4 une penetra- tion mutuelle des deux liqueurs; & voici corame il le prouve. L'augmen- tation de denfite d'un melange , compofe de huit parties d'eau & de huit parties d'elprit de vin, eft d'environ vingt grains; fi la I'eule introduction de I'eau dans les pores de I'elprit de vin , etoit la caufe de cette augmen- tation, un melange d'une feule partie d'efprit de vin, avec quinze parties d'eau, devroit augmenter en denfite de deux grains & demi, huitieme par- tie de vingt grains, puifqu'il y auroit bien plus d'eau qu'il ne faut pour remplir les pores de I'elprit de vin ; cependant il n'augmente en denlite que d'environ un grain & trois quarts ; preuve evidente que I'efprit de vin penetre audi les pores de I'eau , puifqu'etant en trop petite quantitc dans le melange, il n'a pu fournir affez de particiiles pour les remplir : d'un autre cote , fi l'augmentation de denhte n'etoit due qu'i I'infroducflion de i'efprit de vin dans I'eau , un melange d'une feule partie d'eau , avec quinze parties d'efprit de vin , devroit donner deux grains & demi d'aug- mentation de denfite , & il en donne une de pres de quatre grains & demi; I'eau s'infinue done elle-meme dans les pores de I'elprit de vin, & I'introdudHon de I'elprit de vin dans les pores de i'eau , n'eft pas la feule caule de l'augmentation de denlite de ce melange. II eft done deji bien fiir que les deux liqueurs (e penetrent mutuelle-- ment; mais fe penetrent- elles egalement ? Pour parvenir i decider cette queftion, il ne faut que confiderer ce qui devroit arriver fi les deux liqueurs fe penetroient egalement , & ce qui ar- rive recllement dans Texpcrience : Ci la pcncrration etoit egale, il eft liir que l'augmentation de denfite feroit la meme, foil que le melange fdt com- pofe de quinze parties d'eau & d'une d'efprit de vin , ou de quinze panies d'efprit de vin & d'une d'eau : or, c'eft ce que I'expcrience ne donjie nul- ii8 ABRECE DES ME MOIRES — — — lement •, la den(it^ , produite par le melange d'une partie d'cfprit de vin avec quinze parties d'eau, n'eft que dc quatre grains & demi; tandis que 1 H Y s 1 Q u E. ^^j[g j^^ij yjpi^j j^j melange d'une partie d'eau avec quinze parties d'efprit Annii 1763. de viii, n'eft que d'un grain & trois quarts : il y a done plus de parties d'eau qui penetrant I'efprit de vin , qu'ii n'y a de parties d'efprit de vin qui penetrent I'eau ; & M. Briiron trouve que I'eau contribue au pheno- mene pour deux tiers, & rcfprit de vin pour un tiers. II reiulte encore des experiences qu'il a faites, que toutes les parties de I'eau ne font pas egalement propres ^ s'infinuer dans les pores de I'elprit de vin , & q«e par confequent elles ne font pas toutes femblables : mais comment fuppofer des parties dillemblables dans une matiere regardie juf- qu'ici comme un element, & qui par confequent devroit avoir toutes fes parties honiogenes? mais M. Brilfon ne convient nullement de cette con- fequence : la matiere de la lumiere ou dii Ru eft bien certainement un element •, cependant les experiences de M. Newton prouvent evidemment que fes parties ne font rien moins qu'homogenes , & que par confequent I'homogeneite des parties n'eft nullement neceflaire I un element. '. Toutes ces experiences femblent conduire & conduifent reellement \ un moyen de connoitre la force des differentes efpeces d'efprit de vin & d'eaii- de-vie, c'eft-i-dire, en quelle proportion i'efprit inflammable y eft meI6 avec i'eau : mais pour pea qu'on y falTe d'attention , il lera aife de voii que ce ne peat etre par le moyen de I'areometre feul & fans aucun cal- cul", cet inftrument ne donne, par fes differens enfoncemens , que le rap- port des denfites des liqueurs oii on le plonge , & nous yenons de voir que ces denfites n'ont aucun rapport avec les quantites d'eau & d'elprit ardent qui compofent la liqueur qu'on examine. M. Briffon trouve cependant le moyen de ramener le pefe-Iiqueur \ cet ufage. Pour cela, il a dreff(f une table qui contient les pefanteurs fpd- cifiques de toutes les liqtieurs mcl; cette variation qui ^ . dependent du changement de'lieu; mais If marche en eft fi irreguliere , qu'on n'a pu jufqu'ici la reduire ^ aucune regie conftante , & il en faiit toujours revenir ^ fuivre les obfervations faites dans un meme lieu. Celles que M. le Monnier rapporte dans cet ouvrage, font tout ce qu'on . a de plus certain fur cette matiere •, & fi elles ne font pas^bfoluraent fuf- * fifintcs pour decouvrir la loi que fuit ce phenomene ^ Paris, elles met- tent fur la vole de nouvelles oblervations qu'on paurroit faire pour la de- couvrir, en failant voir, cornme nous I'avons dit, que I'extremite de I'ai- DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. i;^ guille femble tcndre vers un point qui s'ecarte un peu dti nord h I'ouc-ft' comme un pendule tend au centre de la tcrre, & faire autoiir de fon cen- p tre , en vertii de cette tendance , de lentes ofcillations dont chaciine dure " ■"■ s i Q u e. environ deux liecles , & qui, pour le temps & la grandeur, font divifccs Ann^e tj-'o. en deux p.irties i-peu-pri.s cgnles. Sur le Pe'trole de Panne, L* ES huiles vegetalcs cffentielles ou gtafTes, ne font pas les fcules que Hifi. nous connoidions , il y en a de naturelles & de mincrales qui fortcnt d'el- Ics-nicmes de la terre ou des rochers en quelqucs endroits , & qu'on nomine pour cette railon pe'trole , petroleum ou huile de pierre. L'Academie a rendu compte en 1715 , voye\ I'HiJloire , de I'analyfe que feu M. Boulduc avoif taite de cette huile mintrale , d'oii il rcfultoit que c'ctoit un bitume liquide qui ne dift^roit des bitumcs- folides que oar fa fluidite. L'huile de pctrole qui avoit etc foumife aux experiences de M. Boul- duc, venoit du bailiiage de Mont Feflin dans le duche de Modenc-, mais le minioire de cet acadeinhrien ne conticnt aucun detail fur la nianierc dc le rccueillir & fur les endroits ou on le trouve •, coimoiliancc cependant ncceflaire , fi Ton veut eflayer, de connoitre comment cette huile Ic forme dans la terre , & ce qui entre dans fa comp'olition. C'eft i quoi M. Fougeroux a effayc de remedier dans les deux memoi- res dcfquels nous avoiis a parler. M. Ferrarini, chymilte de S. A. R. I'ln- fant due de Parme, I'a mis il poitce de decrire avec exaditude la maniere de retircr le petrole , ulitee dans les etats de ce prince. Le village de. Miano d'ou on le tire, n'eft eloigne de Parme que d'en- viron cinq lieues ; ou y creufe de certains puits qu'on ne perce pas Juf- qua I'cau, dans le fond delqucls le petrole fe ramalfe , & defquels on le tire avec des efpeces de leaux deftines i cet ufage. II y a dans ce lieu plu- . fieurs de ces puits abandonncs, mais i! n'y en a que cinq qui travaillcnt, dont trois donnent du petrole blanc, & deux autres du parole roux. Tous ceux de ces puits qui fournilk-nt du petrole, ne font pas a plus de dix pieds de diftance des ancicns, & ^ environ quarante pieds les uns des autres-, ils ont ^-peu-pres cent quatre-vingt pieds de profond-ur^Les ha- bitans allurent qu'ils y a cinquante ans le petrole fe trouvoit i une bien moindre profondeur. ' On ne connoit point d'indices certains qui puiffcnt indiqucr i la fur- face du terrain, s'il cogtient du petrole h la profond(y.ir que nous vcnons • dc dire ; il faut en coiirir le hafard : fouvent diverfes circonftances loca- * les obligent d'abandonner les puits plus purloins crcufes ; quelquefois ctant perccs a leur profondeur, on n'y trouve qu'une quantite de petrole iiififthiante pc^ir indemniler des frais. Une longue experience a cepcnd.mt appiis aux habitans de Miano quel- 154 ABREGE DES MEMOIRES — — «■— 1— ■ ques regies qui leiir fervent de guide dans leur travaux ; ils obfervent de p ne jamais fouiller pres d'un endroit oii Ton ait anciennement tire du pe- r H ■v s I Q u . j^^i^ .^ j^ veine en doit etre epuifee : ils regardent comme un figne avan- Ann(e tljo. tageux de trouver pres de la furface de la terre un litaffez epais d'une efpece d'argill^ d'un gris verdiitre , coupee de fix en fix pieds par une au- tre terre plus commune. Cette argille, qu'ils nortiment terrcno cocco / e^ d'autjint plus dure quelle -eft plus profonde; ils veulent cjue des la pro- fondeur de cinquante pieds on jente une odeui* de petrole , & qu'elle « s'augmente ^ melure qu'on approfoiidit le puits, jufqu'i devenir iiifuppor- ^ table aux ouvriers qui , vers la fin ,. ont beioin d'etre releves de quart- d'hcure en quart-d'heure. . Lorfque tous ces fignes fe trouvent, on continue de percer Jufqu'^ ce qu'on voie fuinterle petrole des terresi fouvent il s'en elance par jets : il eft nieme arrive qu'en percant un puits de cette efpece, on trouva au fond , une cavite naturelle dans laquelle ii s'etoit raffemble environ huit cens li- vres de cette huile minerale. Deux raifons font qu'on retrecit le fond des puits-, on en enleve plus aifement le petrole, & on abrege le travail des ouvriers, que I'odeur pe- netrante de cette huile rend prefque impraticable. Ces puits fournilfent peu en hiver , audi font- ils abandonnes dans eet'te faifon, & on n'y vient puifer que depuis le printemps jufqu'a la fin de I'automne. Des trois puits de Miano qui fourniffent du petrole blanc, deux le don- nent pur & fans melange; le troifieme, fait depuis quatre ans, le fournit i mele avec de I'eau un peu falee. Le petrole qu'on en retire & qui fuyuge cette eau , n'en eft pas moins bon •, il fortoit pur d'abor J , &; I'eau n'y eft venue qu'apres. Le feul inconvenient qui en refulte, eft la ncceflite.de I'c- • puifer plus fouvent i I'eau, fi on la laifi'oit trop s'accumuler , boiicheroit les fources de I'huile & I'empecheroit de couler. • La quantite d'huile fournie par chaque puits dan^ le meme temps n'eft pas egale : il y en a qui ne donnent par jour qu'une demi-livre de pe- .. trole , tandis que d'autres en fourniffent depuis une livre jufqu'i quatre. L'huile au (ortir des puits eft toujours un peu louche ^ caufe de la terra qu'elle tient, & elle eft d'autant plus coloree que cette terre eft plus brune; on la lui enleve en la diftillant avec de I'eau, I'huile monte la premiere & eft alors tres-claire & tres- blanche. Les montagnes voilines de Miano & que cotgie le Tare, fourniffent auffi une petite quantite/tde petrole; & tout ce canton contient des lits de coquilles foffiles en partie dctruites. • Dans les puits de Saljb maggiore , d'oii Ton tire I'eau falee qui fournit de fel tout I'ctat de Parme, on trouve auffi du petrole qui furnage I'eau-, • Ja plupart des puits. n'en donnent qu'une quantity trop petite pour la re- ♦ cueillir ■, mais il y en a un duquel on en tire affez pour qu'on emploie « cette huile k eclairer les Si^ricrs pendant la nuit, parce que fa mauvaife qualite I'empecheroit d'etre marchande. M. de Montigny a auffi obfervi dans les lalines de Franche-comte , que leurs eaux contenoi-ent des par- tics graffes & bitumincuks qui avoient une affez forte odeur de petrole. dil l'academie royale des sciences. m5 A Velleia, qui n'eft qii'i environ fept lieiies de PLiiTince, il y a an pied d'une montagnc line fource cjiii (cnible bouillir, qiioique le tlierniomctre n'y indique aiicune chalcur fenlible. Ce phcnomcne n'cft pas rare en It.ilie, & I'acadcmie en a dcji donne {'explication dans ion hiftoire, voye^ I'Hip toire ; raais ce qui s'oflrc de (Ingulier , c'eft que fur cctte eau s'obferve une vapour fombre, qui a une odeur de p!;troie,.&' qu'au-deffus dc cctte fource, pour pen qu'oj) creufe la terre , il en fort une vapeur femblable qui prcnd ftu h Tapproche d'un corps enflamme , & brule pendant plu- (leurs jours. ♦•. Ce phcnomene a fourni i M. Fougeroux I'explication trcs-naturelle de ces feux , ou plutot de ces vapeurs inflaniiTftbles qui s'obfervenfcn tant d'endroits de 1 Italic ; & c'eft ce qui fait la matieYe de Ton (econd mdmoire, II en a obferve pluheurs dans fa route -, mais il fe reffemblent fi fort par les circonftances eflentielles , que nous ne parlerons que des plus con- (idenbles, pour venir plus promptement ^ Tcsplication trcs-plaulible qu'il en donne. Cos feux font ceux de la montagne de Canida j pres Pietra-mnia ; ils font au nombre de quatre, & les habitans leur donnent des noms ditfc- rens •, la premiere bouche fe nomme di legno , parce que la vapeur allu- mee donne une flamme clairc & femblable \ celle du bois enflamme; la feconde s'app^Ue del piglio; la troifieme del montaggiolo ; Sc la quatrieme porte le nom general de la montagne de Canida. La feconde bouche ou celle delpiglio eft lituee plus bas que celle di legno j fjr la mane montagne, i environ 70 toilts de fon fouimet. Dans celle-ci, dun leger et^foncement, ayant environljept pieds de diametre,-il fort une vapeur trcs-volatile qui ne devient vifible que lorfqu'on I'allume en lui prefentant une lumiere. Cette flamme n'eft en aucune maniere nuilible, die n'occupe pas ^ la fois toute la luperficie de ce terrain ; du papier, du bois (ec jettes dans ce feu ne s'y enflamment pas comme dans un feu or- dinaire, mais ils s'y ronlumcnt alfez promptement. La vapeur feule eft fii(- ceptible d'inflammation, & la terre n'a aucuiie chaleur a quelques pouces de profondeur-, elle eft dans cet endroit couleur de ccndre huileufe, ayant line odeur tres-fenfible de pctrole, & (i I'on fouille un peu plus profonde- , ment, on en voit fuinter de cette huile -, on y obferve aulli des debris de vcgetaux detruits : ces vegetaux entreroient-ils d.ins la compolition du pc- trole? Si on jette de cette terre dans de I'eau chaude , il y furnage une liqueur huileufe-, cette meme liqueur paroit encore s'eleVer fous une forme laitcufe, dans la diftillation de cette terre. On n'obferve aux environs de ces feux aucun des phenomenes qui conf- tatcnt Ja prcfence d'une bouche de volcan , quoiqu'on puilTe foupconner affez legitimement qu'il y en ait "cu autrefois & qu'il puiife mcme y en avoir, mais trcs-profondcment. ^_refulte de cctte ftrudure que ces va- peurs inflammables pourroient bicn n'etre qu'une evaporation de fhuile de petrole contenue dans la terre & enlevee par I'adion de ce feu profond. Si cette vapeur Icgere eft aflez abondante , elle continuera de briiler dcs P n V s I Q u E. m* 1^6 ABREG]^DESMEMOIRES ; qu'elle aura pris feu ; mais li elle eft moiiis abondante, elle s'eteindra des que le feu n'aura plus d'aliment, & ne pourra s'allumer de nouvcau que Physique, i^^-^^^^-^ii^ (-,„ renouvellee. _ Amu'e iTjo, On n'eft jamais plus fur d'avoir devine le fecret de la nature, que lorf- qu'on peut parvenir \ en imiter les effets ; c'eft efFecflivement. ce qui eft arrive ^ M. Fougeroux-, & voici comment il eft parvenu k imiter en petit ce qu'il avoit vu en grand dans fon voyage. li a mis dans une grande terrine de la terre glaife trouvee au fond des puits de Miano , dans laquelle il avoit melc .de cette terre legere que de- pofe le petrole dans les vailfeaux oii on le met", il a recouvfrt ce melange avec pkifieurs pouces de terii» legere* en mettant Je tout fur des char- bons allumes. La vapeur s-'eft elevee ^ une tres-foible chaleur ■■, elle s'eft allumee des qu'on lui a prefente un corps enflamme, & a produit comme les feux d'ltalie , une flamme bleue qui a couru fur'ce terrain fadlice, • abandonnant fouvent une pl^fe pour paifer dans une autre, detruifant les * corps aifement inflammables fins les enflammer, & qui s'eteignoit des qu'on fouffloit deffus un peu fort •, en un mot cet effet en petit , etoit li feni- blable \ celix que M. Fougeroux avoit obferves en Italic , qu'il n'eft pref- que pas pollible qu'il n'en ail devine la veritable caufe. Sur Us Bancs mhalliques prifervatrices du Tonne rre, Hjft. V_/n connoit depuis long-temps ^lanalogie qui exifte entreje tonnerre & I'eleiflricite ; I'academie en a rendu compte en plufieurs endroits de fon hiftoire-, {a) elle a de meme rapporte Tingenieufe application faite par M. Fran- klin , de ce principe ^ un moyen de preferver du tonnerre les edifices , en elevant au-deffus de ces meraes edifices, des verges ou pointes metalliques qui communiquaffent par des condudleurs de meme nature avec le terrain, & au moyen defquelles on pouvoit , felon lui, foutirer , pour ainfi dire, le feu eledrique qui s'approcheroit de ces edifices, & le faire difUper en (ilence & ians explofion. Cette idee etoit affc'z intereffante pour meriter qu'on en fit de nom- breufes experiences; c'eft cependant ce qu'on n'a point fait : les uns out traite ce moyen d'inutile, d'autres Font regarde comme plus propre c» pro- voquer la foudre qu'i s'en defendre, & prefque perfonne ne I'a mis en pratique. C'eft ce qui a determind M. le Roy ^ difcuter de nouveau cette matiere dans le memoire duquel nous avons ^ rendre compte , & ^ y faira voir que, malgre tout ce qu'on a pu dire, I'lTtilite de ces barres eft fondee fur Tanrilogie la plus fuivie & la mieux etabJie. (a) Voyez I'Hiftoire de 1748, 1752, 1753, 1755, 1764? I7^7> t^'^- Tumes X, * XI , Xlil & ci-deffus. Le DK L'ACADHMIE ROYALE DES SCIENCES. 157 Lc premier pas d.ins cette recherche doit ctre de mcttre, pour aind dirc»^— »ctp»» foils les yeiix du Icdteur la marchc du fliiide eledrique , cjiie la plus gr.inde p partic«des phyllciens regardeiit aujourd'hui a^'ec la plus grandc probabilite, ' '-' " ^' au moins comme tres- analogue avec la matiere du tonnerre , s'il n'eft pas Ann^e 1770. abfolument le nieme. 11 refulte dc rexamcn qu'cn a fait M. lc Roy, quel- ques principes ^tablis par rexperience , & tju'on ne peut en aucune fjijon rcvoquer en doute. La matiere elcclrique palTe avec une rapidlte prodigieiife d'unc extrc- mitc k I'autre des corps cleftrifables par communication , fur-tout s'ils font mctalliques , & cela quelque longueur qu'on Icur Uippofe. Si I'un de ces corps prenant I'clecflricite d'un conduCleur par I'un de fe» bouts, toiiche par I'autre la terre ou I'eau d'un baffln , d'un puits, &c. I'elec- tricite du condudtcur difparoit, & il n'eft plus poffible de I'eledlrifer tant que cette communication fublifte. Le fiuide eledlrique palTant librement dans un corps metallique , n'efl difpofe ^ eclater que lorfque cette route lui manque , & qu'il fe trouvc vis- ^- vis du corps qui ne le recoivent que diflicilement •, alors il ne manque pas de les brifcr & de Ics detruire. Quelque quantitc de matiere eledVrique qu'on fuppofe couler dans le corps metallique , pourvu qu'il la puilFe contenir , il ne communique au- cune impreffion aux corps qui en font les plus voifins. Nous avons dit, pourvu qu'il la puiffe contenir; car s'il etoit trop menu pour la recevoir toute, elle le fondroit & le briferoit. Les corps metalliques fort aigus attirent de trcs-loin I'elcftricite. Si un corps metallique eft: furmonte d'une partie faillantc , mcme aflez peu elevee , I'eledricite fe portera fur cette partie , fans toucher au refte du corps. "Teh font les phenomenes les plus conftans que prefente I'eleftricitc excitee par le frottement ■, examinons prefentement I'analogie qui fe trouve entr'cux , & les effets du tonnerre qu'on a obferves. II efl: certain que toutes les fois que le tonnerre tombe fur un edifice, ce font prefque toujours les parties metalliques faillantes, comme les croix, les girouettes , les timbres d'horloge, &c. qu'il attaque de preference; & il n'eft pas moins connu que li ces corps comrauniquent ^ des barres de fcr, fils d'archal, fentons de cheminecs, la foudre fuit conftamment ces corps jufqu'i leur extremite. M. le Roy rapporte plulienrs exemples qui prouvent cette m.irche du tonnerre , qu'il regarde comme fi conftante, qu'il n'hefite pas d'aflurer que fi on avoit des obfervations fuivies , on ne trouveroit pas un feul exemple du contraire. On obferve de meme que toutes les fois que les fils font trop menus pour contenir tout le feu clecttique qui s'y Jette, il'les fond, les brife, & les detruit. Lorfque le tonnerre a une fois enfile un conduifteur metallique , il fuit cette route pailiblement tant qu'il lui eft polFible de la fuivre -, mais oil clle lui manque , il cclate & brife tous les corps qui s'oppofent h fon paf- lage,^ moins" que res condudeurs mctalliques n'aboutilTeiit au tenaiu ou Tome XIV. Partie Franfoije. S ijS ABREGI^ DES MEMOIRES jh line grande maffe d'eau, ou il fe perd. Ce5 proprietes de la foudre font ■D prouvees par iin cratid nombre de fails, dans k-fqucls elles ont conftam- ri; y s I Q u E. t . , ^ ,- .*' ^ ment etc; oblervees. Annie i-jjo. Si prefcntement on vent prendre ia peine de comparer les eftttsde I'e- Icdlricite & ceiix dti tonnerre, que nous venons dt- rapporter , il fera diffi- cile dc fe refiifer i I'identite qui fe trouve eiitre I'-une & Taiitre , & d'en co.nclure que Ics memes moyens qii'on eniploie pour diffiper Icledlricite-- artiRci-ellc, peuvent etre egalement employes pour difliper celle des nuees orageufes. Examinons prefentement comment ces moyens peuvent etre mis en ufage pour preferver les edifices de la foudre-, & voici la manicre dont M. le Roy penfe qu'on les pent employer. On placera au plus haut de I'edifice une barre de fer de cinq 4 fix pieds au moins de longueur, & de deux pouces de diamctre , & cette barre fera prefque cylindrique , & terminee par "en haut par une pointe qui ne fera pas trop aiguc , afin de ne pas attirer le fen du tonnerre de trop loin. Cette barre communiquera tres-intimement avec une autre barre, qui def- cendra depuis le haut de I'edifice jufques dans la terre ou dans un badin plein d'eau, ou elle fe plongera; & fi le lieu eft fort expofe h de violens orages, on ctablira au-deffoUS du conible des barres horizontales, foute- nues fur des appuis ou confoles de pierrc •, qui communiqueront aux barres delcendantes. Ces dernieres barres, qui doivent fervir de condudeurs ^ la foudre pour la perdre dans le terrain , auront au moins huit ^ neuf lignes d'equar-" riflage : on peut affez raifonnablement prefumer que cette groffeur fera fuffilante pour recevoir toute I'eleftricite orageufe , fans que les barres foient rompucs; mais la feule experience peut fixer ces dimenlions d'une maniere invariable. En obfervant bien toutes ces circonftances , il y a^ tout lieu de croire que la foudre tombant fur un edifice, enfilera de preference I'app.-.- reil metallique qu'on lui prefente, & ira fe perdre dans ia terre lans cauier aucun dommage ^ cet edifice. ' '•■ II ne refte plus qui repondre k deux objedions qui pourroient fe farre contre cet ufage des barres prefervatrices -, on pourroit les regarder coiiime inutiles, ou meme comme dangereufes. < ,i;'.!'>'Q •^.> La premiere ne merite pas qu'on s'y arrete', retabliffement de ces b.mes eft fi peu couteux & fi facile, fr on le compare aux frais d'aii batimciit, & I'utilite dont elles peuvent etre eft C\ grande, qu'on ne doit osrtainemfut- pas heliter i faire cette petite -depenfe. , ," Quant au danger, Tobjeftion eft plus forte, mais il eft aife de la de- tririre : ces barres ne pourroient etre dangereufes, qu'en ce qu'elles attire- roient le tonnerre; mais li elles peuvent Tattirer, elles le tranlmettront in- fiiiliiblement au terrain ; & fi elles ne I'attirent pas , elles nc praduiront aucun eflct. II eft done' prudent d'einployer ce prcfervatif pour les grands edifices, & jjour ceux qui contiennent des mstieres, combuftibles. Auili le grand- due de Tbfcane , dont le fuftrage meriteroit d'etre compte , quand on ne le regarderoit que comme phyficien , a-t-il fait placer de c'cs barres lur DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ,;., tous fes niagalins k poudre. La rcpublique de Vcoife a, dit-on, pris le -— — meme parti, & le clupitre de Saint- Paul dc Londres confiilra il y a deux „ ans la locietc royale lur les moyeiis de prcferver ce grand cdilicc dcs cfk'ts ^ " ^ * ' Q i' £• du tonnerre. Des excmples de cette efpece, prouvent au moins tjue cctte Ann(fe I'rjo. invention eft mile au rang dcs chofes poflibles & utiles. REFLEXIONS SUR LES AREOMETRES, FarticulUrement fur les Principes d'npr^s kfquels on pent en fabe de comparaHes ; avec la defcription d'Ar^ometres d' argent ( a ) deflinis d determiner les ^ejanteurs Jp^cifiques des ejprits de vin 6" des eaux- de-vie J & des moyens d'enf'aire de pareils ou de comparabLes. Par M. L E R o I. A, . VA N T d'entretenir I'academie , des aerometres que j'ai I'honneur de lui Men prekiiter, il eft i propos de dire un mot dcs railpns qui m'ont d;teriuins I les faire faire. On (air, & M. di Malesherbes le rappella \ la dcrniere affemblce, que les fermiers-generaux demandent depuis long temps un reglement au fujct des eaux-de-vie & des cfprits de vin, & qu'il eft queftion d'avoir des areo- mctres qui puilFent etre employes & par les commis des fermiers, & par les commercans , pour reconnoitre avec exactitude la qualite ou plutot la pefanteur de ces liqueurs, & par-Ik le droit qu'elles doivent payer. On tint en confequence, au commencement de 1768, plulieurs aflem- blces \ ce fujet, rant chez M. de Montigny , de cet academic, que chcz M. de Mazieres , fermier-general. Vers le mois de mars , pour obliger le (ieur Germain , orfevre du roi , je me rendis avec lui a une de ces alTem- blces, qui fe tenoit chcz M. de Montigny. On parla de ces areometres; & fur ce que j'expolai de la poffibilite d'en faire en argent de comparables, & qui pulient remplir tout ce qii'on demandoit de cet inftrumcnt pour le commerce; M. de Mazieres chargea le fieur Germain d'en faire faire de cette efpece, conformement a mes vues. Pour fatisfaire h ce que -■«— puilic tcllcment conft.iter la nature & le decrc de puretc ou dc reclifica- r> tioii , quun tiers ait la poiiibilite den avoir de parhitement ideiitiqucs. 11 eft vr.ii qu'on pcut s'aidcr dans cctte determination de leur poids dans unc AiirJe ^t7yo. nicfure connue;mais cc n'tU pas unt: chole facile que d'avoir dtuv nicfu- res parfaitenient les memes, & encore d'avoir avec une exr.tflitude rufrifante la quiiitite de liquide qu'cllcs contiennent. L'eau diflillec, il eft vrai, pcut diminucr la difficulte en I'cmployant comme I'une de ces liqueurs, fj. pe- « fanteur fpccifiquc ^tant afllz coiiftante; mais il rcfic toujours k trouver la feconde liqueur, ce qui n'eft rien moins que facile. On ne peut s'affurer bien exadtement du degre de redilicatioi) des.efp'its de vin; &liJ'on vou- loit avoir recours k une liqueur qui donnarun terme au-dc-ffoLis de I'eaw diftillee , on n'y trouveroit pas moins de difticulte. M. Baumc a propofe dans fa ph.irmacie (a) une inaniere de graduer un pefcliqueur, en prenant pour premier terme de la divilion ou zero , le point oii s'enfonce un areo- metrc dans une liqueur compofcc de neuf parties d'eau pure & d'une p.ir- ' tie de fel marin purific & bien fee, & pour fecond terme, le point oii cet areometre fe plonge dans l'eau diftillee; & divilant enfuite cet efpace en dix parties, en former les degres de lechelle, &c. Mais on fent combicii il eft difficile de s'alTurer que le fel marin diffous dans cette eau foit tou- jours pur & bien exaclement leche an meme degre, & par confcquent aas y premier terme de cette graduation foit bien conftant. Cctte circonftance eft cepcndant d'autant plus nscelfaire , que I'intervaire entre ce terme & celui de l'eau diftillee n'eft pas fort conliderable , leurs pefanteurs fpecifi- qucs n'ctant que dans le rapport ^-peu-pres de no} a 955. On voir, par- tout ce que je viens de dire, I'extreme difficulte d'avoir des liqueurs parfaitenient identiques dans leur cfpecc, ou qu'on pulife in- diqucr comme telles aux perfonnes qui voudroient les employer; d'ou il rclulte qu'il fera toujours tres-difficile de faire des areometres bien exac- tement comnarables (en prenant ce mot dans toute fa generalite^ ; lorlqu'on divifera leur echelle au moyen de deux points determines, par Li diffe- rence de leurs enfoncemens dans deux liqueurs indiquces. La plus siire methode pour y reuflir, eft d'eniployer le fecond moyen dont nous avons parle; favoir, de fe fervir d'eau diftillee, dont la ptlan- teur eft fuppofee conftante , pour avoir le premier terme de la graduation , & de determiner enluite le fecond au moyen de petits poids egaux, li les areometres font de la meme pefanteur; & proportionnes h 1-nirs poids, " s ils font difterens , comme nous I'avons fuffilamment explique plus haut. Car, par la dans la graduation de I'echelle, on n'aura qiK la petite errcur qui pcut refulter de la dillerence d.ins l'eau diftillee, qu'on reg^rde comme infenlible ; ou (1 Ton emploie une autre !iqu?ur a la place de cette cau , pour determiner le premier terme, on n'aura k craindre que la moitie de I'er-- reur qu'on auroit en enjployant deux liqueurs dans cette graduation 'a), (a) El^mens dc phartmcie j-yjconrfe iiition ,'pagc-^6i. (u) On a toujours fuppoft- dans tout ce qu'on a dit ici, que ia temperature c:oit !• nC'me dans ces differences d<:teunlaaucia& ,44 ABREG^ DES MEMOIRES All rc-de, ce dernier inoyen , qiioiijue le mejlleur fans contredit , ne p lailie pas que de coniportcr encore des difficultes ; & deux perfonnes qui '^ ^ ^ ' ne le feront jamais communiquees ni les liqxieurs , qu'elles eniploient pour jinnee i'"ro. diviler Icurs areonietres, ni ces memes areometres auront toujours de la peine \ en conftruire dent les divilions k rapportent tres-exaAement. II en eft ici ^ peu-prcs de meme que dans les thermonietres , qui, lorfqu'ils n'ont pas etc fails d'aprcs un meme thermometre fervant de modele, dif- » ferent fouvent entr'eux , quoique foigneufement gradues par la ineme methode. Quoi qu'il en foit, cette extreme generalite dans la maniere de faire des areomctras comparables , n'eft pas aufli importante pour le commerce qu'on pourroit fe I'imaginer -, car, fi'on fuppofe qu'un homme foit charge par le Gouvernement d'en faire qui foient comparables , aiin d'indiquer d'une maniere conftante la qualite des eaux-de-vie & des efprits de vin par leur pefanteur, il iui fera toujours facile d'y reudir, rieii n'etant plus aife que d'avoir pludeurs etalons qui Iui fervent en meme temps de comparaifon & de mcyens pour reconnoitre I'identite, ou la non-identite des liqueurs qu'il cmploie pour graduer fes areometres. Et quant aux particuliers, peu leur importe que I'areometre qu'on leur prcifente ait cte gradue par une methode generale ou non , lorfqu'ils ne la connoiflent pas ■■, il leur fufEt que la graduation foit conftatee juridique- ment, & que, compare ^ d'autres de la meme efpece, il indique les me- mes dcgres pour les memes liqueurs , afin que ces perfonnes lachent recon- noitre, au moyen de cet inftrument , leur pefanteur, & en confequence leurs qualitcs & les droits qu'ils doivent payer. Mais en voil^ affez fur ce fujet. II faut , apres avoir expofe les difFerentes methodes de faire des areome- tres comparables, paffer ^ la defcription de ceux qui font devant I'acadc- mie, & rapporter les moyens qui ont ete employes pour les faire, de mar niere qu'ils aient cette propriete. Ayant determine les dimenfions de I'oeuf {a) & de I'echelle ou de la tige de ces rr^iometres, j'en fis faire un en confequence; & pour qu'il le fut avcc toute la precilion poffibje, I'cEuf compofe de deux parties fut tournc fur un mandrin & calibre de la meme epaifleur -, la tige creufe formee d'unc lame d'une epaifleur doiinee, fut tirde i la filiere pour qu'elle flit bien cy-. lindrique & exattement du meme diarnetre par-tout. Cet areometre fini, on fit le fecond, en donnant, autant qu'on le puti les memes dimenfions & les memes epaifleurs i I'ceuf & \ I'echelle. Pour cet eflet, on tourna les deux parties de I'oEuf fur le meme mandrin, en leur menagcant la meme epallTeur, & on donna pareillement h la lame formant la tige, la meme epaifleur qu'a la premiere, & on la tira k travers du meme trou de la meme filiere. Ces deux areometres etant leftes k peu-pres avec la meme pefanteur de left, j'en ploiigeai un que je nommerai y^, dans une liqueur qui etoit une eau-de-vie fort affoiblie ou fort au-deflus du poids (t) J'ai donn^ cc nora ii cette partie de rardometrej 1 eaufede fa forme ovo'iie. ordinaire DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 145 ordinaire dc cctte liauiur, & dans laciuelle I'areoiTietre ne dcvoit entrer , que julc]u'au pied dc rcchelle, ay.mt dctfxmine aiiparavant pat des calculs,p cju'uii volume de cctte liqueur, occupe par I'ccuf, devoit pell-r i pcu pres Ic poids total de rareometrc. Cette operation faite, je marquai fur la tige Ann^e ijjo. le point oii il s'enfoncoit, qui fe trouva un pen plus haut que I'endroit oii Icchclle tient h I'auf. Jcmis enfuite cetareonietre dans del'elprit de vin bieii redifii dc M. Cadet, de cette academic, & je marquai de mcme vers le haut de rcchelle le point ou fon enfoiicemcnt rcpondoit. Je plongeai de memc, & i la mcme temperature, Ic lecond arcometre que j'appellc^j dans la premiere liqueur, il le trouva qu'il n'cntroit pas tout-^ fait jufqu'au collet i mais aprcs avoir fait racier un pcu I'truf, il s'enfon9a davantage dans la liqueur, & entra julqu'au point rcquis. Je le mis enluite comme I'autrc dans 1 'elprit de vin de M. Cadet, & je marquai le point de fon enfonce- ment dans cette liqueur. Ccs deux points ctablis refpediivement fur chacuti de ces areometres, Je Ics portai chcz M. Canivct, pour qu'il divisat I'inter- Valle qui les feparoit refpecflivenicnt , en foixantc parties egales. Cctte di- villon ayant etc faite, je les plongeai, fans aucune autre preparation, dans differens melanges d'cfprit de vin & d'eau, dans diffcrcntes eaux de-vie, & j'eus la (atisfiiftion de voir qu'ils s'accordoicnt avec bcaucoup de preci- sion : I'acadcmie pcut en jugcr par la manicre dont ils fc correfpondent au- jourd'inii, qu'il y a plus dc deux ans qu'ils font faits. L'arcometre que j'ai appcllc 5 , a ete un pcu iali par une liqueur dans laqucllc il a trempe, & aui a oblige dc le ncttoyer ; cependant on va voir la preciliou avec laquelie s'accorde avec rareomette A (a). Les moyens qu'on a pris pour les faire fcmblables en dimenfions & en poids, ont fi bien reulTi, que I'un pefe 1547 grains |, & I'autre i^j+fi dc facon qu'ils ne different que de 5 grains { fur pres dc deux niillc. Je prie Tacadimie dc confiderer de plus que ceci n'efl qu'un eflai, & qu'ini iiomme qui en auroit fait plullcurs , & qui y feroit (lile, acquerroit bientot le moyen de les faire facilcment & en peu de temps ; mais il faut dire quelque chofe de plus detaille fur la fabrication de ces inftrumens, on voit qu'elle depend de deux chofes,& de la maniera de les fabriquer, proprenient dite , & de cclle de les graduer. Pour les faire facilcment du iiieme volume & du meme poids, il faut ajouter b ce que J'ai dit fur la fabrication de I'ccuf, qu'il faut avoir un moule dans lequel on faffe entrer chaque partie de I'ccuf, de manicre qu'on puilfe s'alfurer par-li & par le inandrin , qu'ils ont la meme forme interieurement & exterieurement , & aufli qu'ils font de la meme epailleur ; par-1^ on fera affure que les deux moitics de I'osuf , foudecs & reunies cnfcmble , formeront le mcme volume & le meme poids. Quant i rcchelle, ce que j'en ai dejh dit fuffit pour les graduer ■, on prendra un efprlt de vin bien redlifie , & on le mclera avec une quantite d'cau diflillce , dc facon qu'il en refultc un melange qui donne une liqueur plus lourde ou plus pcfante que la plus commune des eaux- de-vic. On plongera les ardometres dans cctte liqueur -, ils s'y enfonceront (a) L'exp^rience en fut faite fiir le champ, & toutc la compagnie vie avec quelle jiif- telle les memes degres de ccs inlirumcns le ripundoienc dans les iiicmes liqueurs. Tome XIV. Partie Franfoife. T 1^6 ABREGE DES MEMOIRES ™ iin pen .iii-deirus dii collet on du point de reunion dt; Tichelle Sc de roeiif; il faiit obferver qu'il eft neceilaire que ce point d'inimerfion foit k quelque i' H Y s I Q u L. (jj(^j„(-e du collet , pour que s'll fc trouve quelque difference dans les poids Atmie 17~0. ^'^ '-^^ ariometres, cet intervalle ferve conime de remede pour faciliter leur graduation : (on fuppofe ici qu'on veut les faire i-peu-pres de la meme grandeur •, ) enfuite on plongeri ces areomi-tres dans le meme cfprit de vin dont Je viens de parler, ou un autre, car cela eft egali & ayant mirque ce (econd terme ou le point ou ils s'enfoncent dans cette liqueur, on di- vifera I'intervalle qui fepare ces d.nix points dans un nombre d; parties ^gales, h volonte. Ces areometrcs ainfi fabriques & ainli gradues, feroiit de toute neceffitc comparables dans toutes les liqueurs oii on les plongera : au-lieu de cet elprit de vin, on auroit pu determiner le fecond point par un petit poids, comme nous I'avons dit. On voit dvidemment que cette iiiethode s'ctend h. des areomefres de toutes grandeurs, plus petits ou plus grands que ceux que nous venous de decrire ; & que pourvu qu'ils niar- quent dans les msmes liqueurs, on pourra toujours les graduer de maniere qu'ils foient comparables h ccux-ci. En decrivant ces areometres, je n'ai point parle des raifons qui ni'ont determine h leur donner la forme qu'ils onr, afin de nc point interrompre ce que j'avois h dire fur la maniere de les faire & de les graduer; cepen- dant cet article eft aii'ez important pour meriter que nous nous y arretions. J'ai fait obferver au commencement de ce memoire , combien il eft iiecef- frtire qu'ils aicnt la plus grande mobilite-, or, c'eft un objst qu'on ne pout remplir qu'autant que la figure de la partie qui porte I'echelle eft regulie- re, & d'une forme i produire la moindre reliftance dans les mouvemens d'afcenlion on de defcenfion de I'inftrument dans les liqueurs. En effet , frins cela , qnelqu'attention que vous ayez dans la conftrudlion & la gradua- tion de votre inftrument, il vous induira frequenuncnt en erreur , en ne rcvenant pas ou ne s'enfon^ant pas an meme point , dans la meme liqueur ; j'indfte d'autant plus 1^-deffus, que c'eft une chofe h laquelie on ne fait pas alfez d'attention , & qui ajoute beancoup ^ I'imperfeition de ces inftru- iv.ens. On en voit dont le plus grand diametre ne fe trouve pas au milieu du flotteur, de facon que (i I'areometre tend h fe mouvoir d'un fens, il ^prouve plus de reliftance que s'il fe meut de I'autre-, ce qui fait qu'il iii- dique difterens degres felon qu'on I'enfonce au deffus & an-deflbus du point ou il doit revenir. J'ai foigneufement eviti cet inconvenient dans mcs areo- metrcs-, le plus grand diametre fe trouve preciferaent au milieu de la hau- teur du flotteur, & j'ai eu foin pareillemcnt qu'ils eprouva.Tent le moins de reliftance dans leur mouvement, en leur donnant la forme, ou ^-peu- pres, du folide produit par la revolution de la chainette-, aufTi qu'on lache ces areometres dans une liqueur au-deffus ou an-dcflbus du point oii ils doivent s'arretcr, ils y revienncnt toujours avec exaditude. Entin je dois obferver qu'on leur a donne une efpece de douci j pom qu'ils n'aicnt pas ce gras qu'on obfervc fur certains mtftaux polis, & qui auroit nui a I'cxac- titude de ces inftrumens , en diminuant leur mobilite j & lea empcdiant dc revenir au meme point. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 147 Addition au M3 I'.ireom; tre , nagcant toujours au d.lius de ces liqueurs foibkr. Le lecond , « que ces ariomrtres dovicndroicnt beaucoup trop chers, t5 par les foins & Ijs attentions Icrupuleules qu'ils exigent dans leur conl- sj trudlion, & cela pour approcher dun dcgrc de precilion que nous de- »3 vons regarder comme luperflu , relativement aux bcfoins du commerce. i> Je reponds, 1°. que le premier inconvenient ne pent en aucune f.'.coii avoir lieu dans ces arconietres, conliderant I'objjt auquel ils font deftmes, & que ces divijions & ces /bus-dtvi/ions pour des liqueurs qui contieii- droient beaucoup d'eau & peu d'ej'prit de yin. , me devicnnent ablolu- ment iiuitiles. En effet , j'.ii dit & prouve dans le commencement de ce memoir; , que ces inflrumens ne doivent pas avoir la proprietc de marquer dans I'eau & dans IVfprit de vin, parce qii'il en rcfulteroit neccffairement que leur echelle feroit ou trop longue ou trop groffe, &, dans le premier cas, que Tinflrument ne feroit plus portatif, dans le fecond, qu'il n'auroit pas toutc la mobilitc requife ; il s'enl'uit done qu'ils devoient etre conftruits de ma- niere qu'une partie de I'ceuf qui forme le corps de I'ariometre , nagedt toujours au-dejjus des liqueurs foibles , c'eft-i-dire, car cela merite ex- plication , de toutcs celles qui font beaucoup plus pefantes que les caux- de-vie les plus communes-, toutefois en marquant dans ces dernieres. Or, des qu'ils en ont la propriite, ils ont, comme je I'ai dcji fait voir, tout ce qu il faut pour le commerce ; puifqu'on cfl: en etat d'effayer avec ces inflrumens toutes les eaux-de-vie marchandes, & nieme de beaucoup plus foibles. II faut le dire en paffant, on tient beaucoup trop, & dans les fcien- ces meme , aux premieres formes des chofes. Quand on commcnca i fe fcrvir du pefe liqueur dans la phyfique, on voulut qu'il put indiquer les pelantcurs de toutcs fortes de liqueurs; & ccmme I'eau eft celle qui eft Li , plus commune, il fallut qu'on y rapportat toutes les autres, & coniequem- ment que h pcfanteur flit indiquee par I'echelle de ces pefe liqueurs ; il f.iUut done qu'il y eiit iiii grand rapport de volume entre (a boule & fa tige, & pour cela que cette tige filt fort longue ou fort groffe-, & il en relulta les inconvcniens dont nous venons de pnrler. On n'aura done des pcfe-liquturs bien mobiles, & pat confequent capables de donncr de tres- Tij 14? ABREGfi DES MEMOIRES pctites differences , qu'autant qu'ils feront conftruits uniqiiement pour les ■n liqueurs particulieres auxquelles leur iifage eft deftine; il faut done que ks pele-liqucurs pour les eaux-de-vie &; Ics elpnts de vin ne marquent ylnn^e tjyo. que dans ccs liqueurs , afiii qu'ils aient toute la perfcttion dont ils font fufceptibles. En effet, de quelle utilite peut-il etre pour le commis du fer- mier ou pour I'epicier, de favoir par Ton areometre, qu'une certaine li- queur contient huit parties d'eau fur une d'elprit de vin , lorfque le pre- mier n'aura jamais de droits k exiger fur une pareille liqueur , & que le fecond n'en vendra jamais une femblable ; Mais il ne leur eft pas indiffe- rent d'avoir un inftrument qui leur indique promptement , furement & nettenient la pclantcur de la liqueur dont ils veulent (avoir la qualite. Ainti, je crois qu'il fuffit de cette obfervation pour repondre i I'exccs de preci- iion que M. de Montigny fuppofe que j'ai donne ^ mes areometres ; & je fuis affure, comme je I'ai deji dit, que des ouvriers ftylcs ^ en faire , les donneront ^ un prix tout aufli modique que la chefs pcut le comportcr. Au refte, M. de Montigny convient que mes areometres peuvcnt fe di- vifer par fa methode; & en effet rien n'cft plus facile-, mais je dois ajouter que cette methode, qui n'eft pas aifee dans la pratique, n'eft point du tout neceffaire, & qu'on peut aifement s'en paffer-, car il luffit d'avoi!',"-"tine fois pour toutes, etabli le rapport entre les divillons de Icchelle d'un areome- tre dont on fera convenu , & les pefmteurs des differentes liqueurs com- pofees de parties d'eau & d'efprit de vin , felon les proportions que cet academicien a donnees, ou toutes autres , pour avoir des areometres qui faffent connoitre enfuite, avec toute I'exaditude & la prccillon poilible, la conformite ou la difference des liqueurs qu'on effaye , avec celles dont lej degres de rareometre annoncent la compofition. DE L'ACADEMIK ROYALE DES SCIENCES, i+y D Physique. Sur Us Lunettes achromatiques. ■ j, , 'rPi'fS que M. Eiiler a propofe de dctruire les couleurs qui paroiffent Ilift. dans les lunettes, en fliifant paffer les rayons dins des verres qui cuffent une force difperlive dirferente •, la perfection de ces lunettes a etc I'objet des geometres , des phyliciens & des chymiftes. M. Dollond eft le premier qui ait dccouvert par I'expcrience , que la combinaifon des verres de jlint-glafj', avec des verres ordinaircs , pouvoit produire I'effet que M. Euler avoir annonce. Les experiences qui le con- duilirent ^ ce reuiltat, avoient etc faite par Newton, ou du moins paroif- foient I'avoir ete, & cependant ce grand homme n'avoit pas appercu cctte diftercnce dans la force dilperllve de I'eau & da flint- glajf.ll n'eft certai- nement pas ctonnant qu'il ait pu fe tromper dans cette occafion : tout ce qu'il a fait d'ailleurs, a bien mis fa gloire i couvert. Mais un favant an- glois, faiti vraifemblablement de renthonliafme national, n'a pas cru qu'on p\it meme lui reprocher cette legere erreur-, il a cherche des moyens de la iauver , & voici celui qu'il emploie : il a fuppofe que Newton , pour aug- menter la force refradtive de I'eau, y mettoit fouvent desfels, & qu'ainli il etoit vraifemblible qu'il avoit compare avec \e flint- glajf, non de I'eau pure, mais une diirolutioii de fel de Saturnei & repetant ainii I'experience, il a trouvc le meme rclultat que Newton. Idee (inguliere, mais qui prouve bien la veneration qu'on a en Angleterre pour la meraoire de ce grand homme ; heureufe la nation oii i'on fait honorer le genie avec cette efpece de fuperftition, & oil les hommages qu'on lui rend, meme apres la mort, font infpircs par cette efpece d'enthouliafme , li different des louanges froi- des , plus fouvent infpirees par le delir d'abaiffer fes contemporaiiis , que par celui d'honorer fes predeceffeurs ! M. Jeaurat qui s'etoit propofe de travailler \ la perfection des lunettes achromatiques, a cru devoir, avant que de donner les tables necelFaires ^ leurs conftruiftions, determiner par de nouvelles experiences, la difterente force de rcfrangibilite & de difpcrllon du verre de Venife & di\ flint-glajf; fes refultats font tres-peu diftercns de ceux de M"- Dollond , Clairaut , & I'abbe de Rochond, & il les a tires des experiences femblables h celles de ce dernier. II y a deux fortes d'aberrations i craindre dans les lunettes , celle de fphericite & celle de rcfrangibilite -, il eft impoffible de les aneaniir entie- remcnt toutes deux, (i Ton n'emploie que des verres fphsriques; & on eft convenu dans la pratique de n'en point employer d'autres. Cette erreur , fi e'en eft une, avoit feduit Defcartes , & peut-etre s'eft-on trop tbt re- bute des obftaclcs. Quoi qu'il en foit, puifqu'on ne fe fert que de verres fpheriques, il faut du moins rendre I'abeiration inevitable, la moindre pof- fible. Ce probleme , qui eft du genre des problemes indctermines , cxige ,,s ABREC^ DES MEMOIRES ^^r:-— — -— ~ bicn de la fineffe, pour ctre n-folu dune maniere k fatisfaire h Wilt Ce que ' ' la phylicjae y fait entrer de confiderations particulieres ; & plulieurs cek- P H Y s 1 Q u I. ^^^^ g^ometres en out Lit I'objct de leurs rccherches. Ann/e 1770. M. Jcaiirat propofe ici de s'en tenir h. detruire totalement I'aberratioii ' de rcfrangibiiite , qui eft la plus grande, parce qu'en la detruilant, on de- truit line partie de I'aberration de Iphsricitei & qu'en multipliant le nom- jbre des venes , on la detriiit entieiemeiit ou prefque enticrement. Lcs verres etant ainii multiplies, il eft evident que la quantite de lumiere fera aulTi diminuee •, mais M. Jeaurat trouve par experience , quelle ne I'eft pas aflez pour que cette diminution puilfe nuire ^ la bonte de la lunette. ., . , 1 . . Quand on veut appliquer la theorie k la pratique, il taut introduire dans les formules analytiques, la valeur des diffirentes refradions, & ces va- leurs font donnces par I'experience. M. d'Alemb.rt a employe des refrac- tions telles ^ue fi dans cette hypothele , on veut detruire en entier I'abcr- ration de rcfrangibiiite , il faut doaner aux verres une grande courbure -, mais Fepaifleur des verres etant limitee , il en relilteroit que les lunettes auroient une petite ouverture, & il eft effentiel qu'tlles en aient un- grande. Les valeurs de refradion que M. Jeaurat a trouvees par fes experiences, donnenr, apres leur fubftitution dans les fornnitcs analytiques, des dimen- (lons plus favorabLs ; auffi , la lunette conftruite d'aprcs fes prtncipes , & qui a 5 pouces delong , a-t elle 18 lignes d'ouvertiire , tandis que les lu- nettes angloifes de 6 polices, n'en ont que 1 5. Lc but de M. Jeaurat etant d'cclairer les conftrudeurs des lunettes , il a joint ^ fon memoire, huit ditferentes combinaifons de verres, tendantes toutes au nieme but , & par lcs meraes principcs : & dans chaque combi- nalfon , des tables de la longueur des rayons pour chaque longueur de I'ob- iedif, depuis deux pouces jufqii'^ io pieds; & pour ne ricn ncgliger de ce qui pent contribuer ^ la perfection de ce travail , il a place k h fin , des notes fur la maniere de preparer I'emeri, & de trnvailler les verres. Ce n'eft qu'au moyen d'ouvrages pareils k celui de M. Jeaurat, que les arts peuvent titer p»rti des hautes fpecuUtioiis des favans. T>E L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCLS. 151 OBSERVATIONS DE PHYSIQUE GENERALE. *■ Annce ?770. I, J_iA ville de Remiremont & le bourg de Plombieres , c^Iebre par fes nift. eaux minerales, font litiiees d.ins des vallees qui recoivcnt les ecoulemcns de plulieiirs inontagnes voifines dont elles font entourees. Le 25 juil- let 1770 , il y cut i Remiremont iin orage tres- violent avant le coiicher du foleil •, les habitans fe crurent qiiittes de tout danger par la ceflation de cet orage : iis etoient ccpendant bien cloignes de ictre; & cet orage, tout violent qu'il avoit etc, n'etoit que le prelude do la fcene aftreufe qui alloit fe palfcr : I'air n'avoit pas nieme ete rat'raichi. Bicntot on vit des nuees tres-noires fe raflembler en maffes ejiormes , & fe inouvoir d'une facoii effrayante au gre du vent, qui parolflbit louftler i-la-fois de tous les points de riiorizon. Bientot il fe declai'a un fecond orage plus fuiieux que le premier , &: que I'oblcurite des nuees, jointe \ celle de la nuit , rendoit encore plus terrible. Cepcndant les ravages du vent , les eclairs redoubles & le ton- nerre, qui rouloit & eclatoit prelque fans interruption, ne furent que la' nioindre caule du degat qu'eprouva ce malheureux canton. L'enorme quantite de pluie que cet orage verfa fur les montagnes voi- fines, en fut, ^ proprenient parler , le fleau deftrucleur i la quantite d'eail qu'elle produifit, eut bientot produit un nombre prodigieux de torrens , qui, roulant impetueufeinent par toutes les gorges des montagnes, entrai- nerent tout ce qui fe trouva (ur leur route, & couvrirent les vallees, qui formoient auparavant des prairies riantcs Sz des terres bien cultivecs, d'un amas informe de debris, de terre , de fable , d'arbres & de rochers ■■, cii forte que ce canton n'offre plus aujourd'hui que I'image du chaos. Les collines, & fur-tout celles dont le terrain n'etoit pas cxtremement tenace, ont etc coupees & entamees en un tres-grand nombre d'endroits, & il s'y eft creufe de profonds ravins qui ont I'air de precipices. On jugera aifement que dans ce delordrc general, les habitations ne fu- rent pas epargnees •, toutes celles qui fe trouverent fur la route des tor- rens , furent cntra'inees avcc tout ce qu'elles contenoient , & celles qui fe troHvoient en bas, furent enfevelies fous les eiiormes monceaux de debris que les eaux y avoient amenes. On n'cntendoit de tous cotes que les cris des malheureux habitans qui perifoient accabk's fous les nuilons ruinees , ou qui trouvoient dans leur fuite la mort qu'Us avoient voulu eviter; & ces cris , joints \ Tobfcurite & au fracas que faifoient les vents , les eaux & le tonnerre , imprimoicnt la derniere touche d'horreur ^ cet aflreus tableau. Dans le nombre de maifons detruites avcc leurs habitans, on a fur tout tnentionne une huilvrie , placce dans une petite plaine au pied des colli- 151 ABREG^ DES MEMOIRES nes. Cette petite plaine , autrefois prairie agreable, eft devenue On amas de rochers, de cailloux, de terre & de fable, entouree de coteaux i moi- i' H Y s 1 Q u E. ^.^ detriiits -, & ce Tafte amas de decombres fert aujourd'hui de tombcau Ann^e IJJO. ^ riiuilier & ^ toiite fa famille, dont aiicun n'a pu echapper au danger. On a regarde comma iin phenomene fingulier , ce qui eft arrive dans line autre plaine parcille , le torrent I'a comblee du debris d'une mafTe enorme de terrain qu'il a Gpc par le pied, & des arbres d'un bois de fa- pin qui la couvroit. Ces arbres renverf^s, & entraines pele-mele avec les rochers & la terre , forment une malTe confufe dans I'endroit ou etoit la plaine ; un fcul de cgs arbres, au milieu de tout ce ravage, a gliffe paral- Iclcment h lui-meme, & fe trouve aujourd'hui plante debout au milieu de tons ces debris : il feroit peut-etrc difficile d'afTigner le degre de probabi- lite d'un tel evenement. Plombieres ne pouvoit manquer,_par fa lituation, d'avoir part ^ ce difaftre -, la vallee oii ce bourg eft lltue eft fi etroite , quelle n'a pu comporter qu'un feul rang de maifons, au nombre d'environ quatre- vingts. La petite riviere d'Eaiigrogne qui y paffe , y porte non-feulement les eaux de fa fource , placee fur la niontagne d'Olichamp , ^ une lieue & demie de Plombieres , mais encore les ecoulemens des eaux pluviales qu'elle recoit dans ce trajet. Aufli Plombieres avoit-il efTuye deji du dom- m,ige en 1660, par le debordement de cette riviere-, & on avoir fait pour s'en garantir un large canal, revetu de groffes pierres de taille dans toute la longueur de ce bourg. Malgre cette precaution, Plombieres ne fut pas en cette occafion exempt du ravaoe qu'effuya tout le canton. Des quatre heures aprcs-midi la riviere commenca h croitre , vraifemblablement par I'ecoulement de la pluie du premier orage, & une demi-heure apres elle etoit augmentce d'environ trois pieds, mais toujours dans fon lit. Vers dix heures du foir, elle commenca j» deborder , & rait un pied d'eau dans la rue , & en moins d'une heure elle etoit montee jufqu'k fix pieds au-delTus du fol des maifons , defqucUes il y eut plufieurs de renverfees , & quelques-unes fort entamees. Vers mi- nuit les eaux baiflerent conlids^rablement, mais bientot apres elles remon- tcrenti parce que les foins entraines par I'eau, & les debris des maifons cngorgerent le canal", mais enfin elles s'ecoulerent, & la riviere rentra dans fon lit : les petits bains, les deux etuves qui etoient vis-k-vis, & le grand bain , ont etc detruits ou combles de decombres. Ce qu'il y a de fingulier, c'eft que les fources mlnerales n'ont pas parii donner avec plus d'abondance qu'h I'ordinaire , pendant que les (ources d'eau commune etoient confiderablemcnt augmentees ■, vraifemblablement I'orlgine des premieres eft affez profonde & affcz eloignee , poiir qu'elles n'aient rien pu rccevoir des eaux de cette efpece de deluge, qui a ravage la fuperficie du terrain. II eft au refte impofTible de fe former une idee du bouleverfement af- frcux de tout ce canton , dans une etendue de pays de plus de douze lieues quarrees -, il eft tel , que ceux qui I'avoient vu la veille ,_ s'y trouvoient comme ctrangers, & la quantite d'eau etoit fi enorme, que quinze jours apres I'accideat les torrens coubient encore , & dans plufieurs endroits affez; '^ lens \ DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 155 fez fenhblcment. Tout ce detail eft tire d'unc relation trcs-circonftancice ■.- de ce funcfte phenomene , envoyce ^ M. Morand fils, par M. Degucrre.p n y s i o u E dodcur en mcdccine, ftipendie de la ville & dc I'abbaye de Remiremoiit, tjiii pafle ordinairement toiite la faifon des caux ^ Plombieres : on peut AnrUe 2770. jiiger s'il a eti ^ portee de recueiilir toutes les particularites de ce fait, nialheureufement trop intereflaiit, ' II. Le 6 juin 1770, vers les dix heiires dii foir, M. du Scjour, pere dc M. du Sejour, academicien, etant ^ Chambourcy pres Saint-Germain en Laye,avec M. Leblanc , connii par fon talent pour la poelie, & M. de Verriere, ils appercurcnt un arc-en-ciel caufe par la lune : cette pianette ctoit alors preique au meridien , & diftante de fon plein ieulement d uii jour & demi. L'arc-en~ciel paroilfoit du cote du Nord, ou il pleuvoit ac- tuellement, & tomboit Jufqu'^ terre fur la foret de Saint-Germain. On n'/ diftinguoit point les couleurs , comtne on les voit dans I'arc-en-ciel pro- duit par le foleil ■, on appercevoit feuiement des nuances entre les differens cercles conceiitriques dont Tare etoit coinpofe. Ces arcs-en-cicl lunaires lent rares , mais ils ne font pas fans exemple. Nous apprenoiis d'Ariftote qu'on en obferva deux de fon temps , mais il ajoute qu'ils etoient blancs. Gemma, Frifus, Verdries & Senner, affluent en avoir oblerve dans lefquels les couleurs etoient fenlibles. Snellius en a vu deux en deux ans de temps, & Plot en a obferve un en 1(575. E" '7' i il en parut un avec de belles couleurs dans le Derbishire en Angleterrej il eft vrai que felon la remarque de M. Mulfclienbrock, on pouvoit foup- ^onner que dans quelques-unes de ces obfervations on avoit pris pour des arcs-en-ciel de ces couronnes qui entourcnt quelquefois la lune -, & cell d'autant plus , qu'on y fait mention de cercles entiers , figure que I'arc- en-ciel ne peut jamais avoir. Le celebre M. Weidler obferva en 17 19 uti arc-en-ciel lunaire, forme par les rayons de la lune en quartier, recus fur une petite pluie •, audi n'y put-il prefque pas reconnoitre les couleurs M. Mudchenbroek lui-meme en rapporte deux dans fes efi'ais de phyli- quc. V. E£'. de Phyf. de Mujfchenbroek-, &c. 1615-, le premier, du pre- mier oftobre 1729, entre 9 heures & demie & 10 hcures. Dans celui ci, quoique la lune repandit beaucoup de lumiere, & que la pluie fur laquelle (e forma I'arc-en-ciel filt tres-forte , il ne put diftinguer aucune couleur, & le fecond, obferve k Yffclftein ; celui-ci etoit fort grand & fort ecla- tant; mais il ne paroifioit que d'une couleur jaune, & par- tout unifornie. I I I. L'academie a deji fait mention dans fon hiftoire, de plulieurs echos fin- guliersj en voici encore un qui peut en augmenter le nombrc. M. I'abbc Guynet, eccleluftique du grand Seminaire d'Autun , etant pendant les va- cances du i76 petit le corps organlfe dont ils font le germe-, iiifenliblement ce corps fe developpe par Tadditlon continuelle des parties nutritives qui augmentent les fibres & ctendent les mailles, jufqu'a ce que le corps ait attaint le terme de fon accroiffement , c'eft pendant cet accroiffement que les coquilles peuvent s'attacher cntr'elles ou \ d'autres corps •, bientot la fubftance ter- reufe vlent remplir ces mailles & incrufter tout le corps auquel elle fe Joint intimement par le moyen du fuc vlfqueux animal dont nous avons parle ci-deifus, & forme un corps dur & follde, moule fur la fubftance animale qui lui a fcrvl de bafe & de rudiment. Jufque-li nous ne voyons pas encore la caufe qui peut produire les belles couleurs dont tant de coquilles font ornees -, mals (i nous fuppofons aVec M. Herifiant que les fibres de la fubftance animale foient vafculalres & que leur cavite contienne differentes liqueurs , n'eft-il p'cra , ctant durcle, la cou- leur quelle avolt recue etant moUe . rf qui fournit une explication trcs- fimple de la maniere 'I""* ^ produifcnt les couleurs des coquilles & leurs •varictcs. II refteroit k faire voir que les pores, les madripores, les milUpores, les coraux & une infinite de produdicns marines de cette efpece font precliement dans le meme cas que les coquilles ; mr.is M. Heriifant n'auroit prefque pu que rcpdter ce dont nous venons de rendre comptc -, 11 a mlcux airoe lailfer au kiaieur le plaliir dc falre lui-meme I ces objets I'applicarlon des princlpes que nous venons de pofer, en les prefentant aux yeux dans les planches qui acconipagnent ce memolre, dans leurs diirerens etats; & nous nous contenterons de dire l"ur,pkment, i". que ces corps ne font i66 AB REGt D£S ME MOIRES ——I—— autre chofe que des grouppes formes par I'affemblage d'un nombre pra= digieiix de loges tcftacees, deftinees i loger chacune iin animal, & qui fe H I s T o I u £^-oujj.nt s^ fe joignent fucceflivement les uiies aux aiitres-, t°. que ces ma- Natuuelle. ^.g^gg fingulieres & une infinite d'autres femblables, font autant d'incrufta- ^nn/c 1766. tions animales qui fourniHent, par I'analyfe chymique, les memes prin- cipes que les os & les coquilles; ;°. enfin que I'organifation de ces corps eft auffi digne de notre attention que celle des coquilles, & prouve aufli- bien que cette derniere, la fageffe & la puiffance de I'Etre lupreme qui les a formees. Hift. Sur un infecle lumineux de Cayenne , appelU Marechal. \j N evenement llngulier a donne lieu \ I'obfervation dont nous aliens rcndre compte. Pendant le mois de feptembre 1766, le temps ^tant affez doux, deux femmes du fauxbourg S. Antoine, virent une lumiere affez vive qui , apres avoir file quelque temps en I'air , defcendit & fe pofa fur une fenctre : corame cette lumiere duroit toujours fans s'afFoiblir , elles avertirent dans la maifon , on ouvrit la fenetre & on trouva que cette lu- iniere , dont les yeux avoient peine k foutenir I'eclat , partoit d'un infede vivant qui fut pris & enferme. Get jnfede ayairt ete apporte \ M. Fougeroux, il le reconnut bientot pour un infede qui fait fa rehdence ordinaire ^ Cayenne, & qui y eft connu fous le nora de Marichal. II eft du genre de ces fcarabees fauteurs, communs dans ce pays, & que les naturaliftes delignent par le nom d'elatery mais il eft beaucoup plus grand : on en trouve une efpece plus petite & lumineufe dans I'ifle de S. Domingue. Le marechal que M. Fougeroux a entre les mains, a dix-huit lignes, ou un poULc (ix lignes de long-, fa tete eft plus large que longue, fes yeux gros & noirs, & fes antennes affez courtes-, le corcelet eft affez grand & fe termine par trois pointes , dont celle du milieu , plus grande que les autres, lui donne le reffort qui lui permet de fauter : c'eft de deux endroits du corcelet places ^ droite & i gauche , que part la lumiere qui le fait remarquer-, le corps a t^viron onze lignes & eft compofe d'anneaux , u couleur de I'infede eft cafe tii««f fur le cannelle •, il a fix pattes, dont deux tiennent au corcelet, & les autres au coi^o, Uc ^iles font membraneufes & recouvertes comme dans tous les fcarabees par deux elpetca de fourreaux durs , qu'on nomnie ilitres. La lumiere que donnent les deux lanternes de I'animal eft trcs-vive, elle a une legere teinte de vert qui la fait reffembler \ la plus belle emeraude-, il fort auffi quelquefois de la lumiere par la feparation du corcelet & dil ventre, & il y a bien de I'apparence qu'on en verroit fortir entre les an- neaiix du corps, fi on levoit les elitresj inais M. Fougeroux ne voulut pas le tenter de crainte de fatiguer I'animal. II doit paroltre affez etonnant qu'un infede originaire de la zone Xat- DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 1^7 ride, ait pu fe tr.infporter jufqu'en nos climats : cette efpece de problcme ii'a cependjiit pas cmbarraffc M. Fougcroux , & il en donne line lohitioii „ trcs-fimpl?. H I s T o I R I On fait que les fcarabees nefont infedes volans , que pendant une aflez ^-^turil it, petite partie de leur vie, & qu'avant de prendre cette forme, ils reftent /tnne'e 1766. long-teinps foiis la forme de vers ; celui-ci en particulier fe nourrit en cet etat du bois qu'il ronge, & dans lequel il fe creufe una retraite. C'eft: vrailemblablemcnt dans cet etat que I'infefte en queftion eft venii de Cayenne , enferme dans quelque piece de bois de. Cayenne \ il aura fait la traverfcc dans une faifon favorable, & il s'eft trouvs aflez heureux pour fubir fa metamorphofe avant I'hiver-, il a vccu fous la forme de fcarabee au moins trente Jours, car on ignore depuis quel temps il etoit metamorphofe lorfqu'on I'a vu parohre. C'eft dommage qu'on n'ait eu en nieme temps I'autre individii, on auroit pu naturalifer ici ces anim.iux, qui auroient fait un ornenient de notre climat : mais au moins cette aventure fait-elle voir qu'il n'efl: nullement impoffible de les y tranfporter. II etoit afll-z naturel que I'infeifle lumineux de Cayenne rappellat ^ M. Fougtroux ceux qu'il avoit vus dans d'autres pays. Nous en avons un en France, coiinu communement fous le nom de Ver luifant , & norami par le? nituraliftes Lampyris, Fyrolampis ou Cicendela ; la femelle de cette efpece eft un ver ^ lix pattes, dont le corps eft compofe de douz2 anneaux, dont les derniers feuis donnent de la lumiere; cette lumiere in- dique au m.i!e, qui eft aile, I'endroit oii eft la femelle, c'eft pour lui le flambeau de I'amour. M. Fougeroux a eu fouvent le plailir de voir le male venir ^ une femelle de cette elpece qu'il tenoit dans fa main. Ce male a les Jambes plus longues que la femelle , fon corps n'a que einq anneaux , mais il a un corcelet divife d'avec le corps •, fes ailes font moins longues que fon corps , & les ^litres ou fourreaux de fes ailes font minces & flexibles; la teteeftun peu appiatie & les yeux allez gros : cclui-ci n'cft pas ordinairement lumineux, mais cependant il donne de la lumiere lorl- qu'on le prend peu apres I'accouplement. Quelques fcolopendres ou niille- pieds de ce pays depolent aufli dans I'oblcurite , une trainee de lumiere. Nous n'avons encore aucune connoiffance fur les differentes metamor- fihofes des deux individus du ver luilant de notre pays, aucun auteur ne es a futvis depuis la fortie de I'ccuf, jufqu'i leur dernier changemenf, on n'a point parle du ver male. M. de Oder, correfpondant de racademie,a dccrit, dans les memoires des Savans etrangers [a], I'individu femelle", mais M. Fougeroux penfe que ce qu'il donne pour une transformation pourroit bien etre plutot un changement de peau, qu'une veritable me- tamorphofe. Notre ver luifant eft commun en Italie , mais il n'y eft pas comme ici le feul infcAe lumineux •, un autre infecle volant nommc la lucciolc , y donne, des qu'il eft nuit, le ImguUer fpettacle d'une infinite d'ctoiles volantes •, melfieurs I'abbe Nollet & de la Condamine en or.t pailc dariG (il) Vpyez Memoires Jes Savans (?t:ange:s, tome II, psge :5i. H I S T O I R E '1^8^ ABREGi' DES MEMOIRES la relation de leurs voyages en Italie; mais M. Foiigeroux a cm devoir en ajouter iine defcription un peu pins detailMe , & en donner la figure n I s T o I R E ^^j.jj ^ JQ;„tg ^ (-eiigj jju marechal & dii ver luifant de France. JNaturelle. j^^ lucciole a environ cinq lignes de long, fes elitres (car elle eft du Annie tiSS. genre des fcarabees) font moiis & le corcelet d'un rouge cannelle, la tete eft groffe & noire, les antennes meniies & eftilees , & le ventre com- pofe d'anneaux bruns, excepts les deux demiers qui font jaune-citron, & qui repandentde la lumiere quand I'animal leveut-, des fix pattes, deux font attachees au corcelet & les quatre autres au thorax ; on voit par cette defcription que la lucciole a quelque reflemblance avec le male da ver luifant , d'aprcs laquelle on pourroit penfer que ce feroit le mcme ani- mal auquel la difference du climat donncroit la flicuite de briller , ce qu'il n'a point en France •, mais deux chofes s'oppofent \ cette opinion : pre- mi^rement, en cxaminant la lucciole avec attention , on verra que le tho- rax eft totalement different de celui du lampyris male •, fecondement , on ne trouve jamais la nuit de ver luifant dans I'endroit ou la lucciole eft en grande quaiitite. La lucciole eft extremement commune dans toute I'ltalie & fur-tout \ Rome, elle vole bas & lentement, & jette un trait de lumiere tres-vif i chaque coup d'aile-, fa lumiere eft aflez vive pour qu'un cornet de papier qui en contient plufieurs puiffe fervir de fallot , & fi on ecrafe un de ces infedes , il laiffe fur le papier ou fur la main , une trainee de lumiere qui dure quelques minutes; quand meme on ne feroit que frotter le papier avec rinfefte, il deviendroit lumineux, & lorfqu'il ceileroit de i'etre, on ranimeroit la lumiere en le mouillant , mais ce feroit pour difparoitre ear fuite fans retour. M. Fougeroux a tente vainement de diflbudre la liqueur lumineufe que laifl"e echapper I'infedte ecrafe , dans I'huile de gerofle , il n'a pu y r^umr , il n'a pu de meme conferver la lucciole lumineufe dans I'eau-de-vie ; quel- ques-uns de ces infedes enfermes dans une bouteille , y ont vecu & brille pendant trois jours , il n'a appcrcu entr'eux aucune diff^erence de figure , iii de grandeur. Comme cet infede fe trouve dans toute I'ltalie , depuis Naples Jufqu'aux Alpes, M. Fougeroux penfe qu'en I'aidant k pafler les mers ou les monta- gnes, on pourroit aifement fe procurer ici le joli fpe^tacle qu'il donne : mais il faudroit auparavant s'affurer qu'on n'acheteroit pas cet agrement aux dcpcns des moiflbns ou de quelqa'autre objet important , ce qui feroit en ce cas I'acheter trop cher. Sur DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, ir.c, H I S T O I R E Sur des injicles fur Uf^uels on trouve des planus, Naturelle. J-i'HiSTOiiiE naturelle offre \ chaque pas des mervcilles & des fingii- "''^ ^ *7 9' larites dignes de la curiolite des pliylicicns ; en voici line qui ne le cede iiift, en ce genre ^ auciinc de cclles qui font connues. On favoit que quclques plantes pouvoient croitre fur d'autres plantes defqucllcs elles tiroient leur iubfiftance , mais on ignoroit qii'il y en eut plulieurs qui pullent s'etablir fur un animal vivant; il y en a cependant qui ont cette linguliere pro- priete. M. Fougeroux en a obferve quelques-unes & a recherche dans le$ Naturaliftes le peu d'obiervations de ce genre qui s'y rencontroient. Ces plantes iont precifement I'inverfe de la plante-vcr de la Chine dont M. de Reaumur donna Ihiftoire en i-ji6. [a) Un ver attache fa chryfalide \ Textrimite des racines de cette planter mais les plantes dont nous avons ^ parler , naiffent au contraire fur des animaux vivans & en tirent pcut- ctre leur fubfiftance-, mais c'eft-li tout ce qu'elles ont de comniun avec cux, & on ne peut guere les regarder, coaime quelques cclebres phyfi- ciens, comme une efpece moyenne entre le regne vegetal & le regne ani- mal. On pourroit peut-ctre, ^ plus jufte titre, les nommet parajites des animaux iur lefquels elles vcgetcnt , encore faudroit-il s'allurer par des ex- periences decifives, qu'elles tirent leur nourriture de quelques-uns des fucs de ces animaux : paffons ^ la defcription que donne M. Fougeroux, des plantes de cette eipece qui font venues ^ fa connoiffance. Les tranfadlions philofophiques font mention des mouches vegetantes des Caraibes. La nymphe de la cigale de la moyenne efpece , appellee par Arilote, Tettigometre M:t;jJ icada ,liui mater ) ou mere de cigale, eft fujette \ porter fur ellc une plante du genre des davaria, ainfi nommee parce que fes tiges & fes branches, quand elle en a, font terminees par des tuberculcs qui lul donnent I'air d'une petite maifue. La racine ou pedicule de la plante couvre ordinairement le corps dc I'infede & queiquefois la tete ou le corcelet , & lorfque I'un & I'autre ont hi. confervcs dans I'efprit de vin , on peut enlever la plante & la feparcr dc I'animal fins endommager celui-ci ; le pedicule de la plante fe trouve alors traverfc par des cannelures que les anneaux de I'infecte y ont impri- mees; mais on ne trouve aucun veftige de racines qui penetrent dans le corps de I'animal. Cette plante produit des filets plus ou moins longs & en plus oil moins grand nombre-, M. Fougeroux en a vu qui avoient jufqii'^ deux pouces de longi ces filets font terminus par des tetes ou tubercules, ils font pleins & folides, tant qu'ils ne font pas parvenus ^ leur entier accroiffement ; pafls ce terme, les fommites fe trouvent fouvent percees, vraifembublement p.r des vers qui fe metaraorphofent en fortant de ces plantes. (a) Voy. Ilift. de I'Acad.iyie. Collect. Acad, part, ft. Tome VI. Torne XIV. Fartii Franc oije. X I70 ABREGE DES MEMOIRES I I I II I ■Mill ■!■ Certaines plantfs fe trouvent encore quelquefois, non-feulement fur I« nymphe de cigale, mais encore fur la cigale meme-, M. Foiigeroux en a Hi ST 0 1 R E y^j ^jj^g ^yj. jii^g cigale apportee de Cayenne, celle-ci eft diffcrente de la. INaturelle. (■iii^,aria dont nous venons de parler , c'eft line efpece de facus forme de ^nne'c !-(^9- '""6^ '^'^'^ blancs & foyeux qui recouvrent tout le corps de I'infede Sc le debordent de fept a huit lignes deifus & deffous le ventre de I'animal. M. Fougeroux a encore vu la incme plante attachee h un autre infede du genre des procigales. La davaria vient aufli fur des vers ; M. Fougeroux en a va fur plufieurs , & notammcnt fur ceux qui produifent , en fe metamorphofant , la petite efpece de hannetons, & on ne peut pas fuppofer que ces vers foient dii genre de ceux qui produifent les cigalps-, ces deux efpeces de vers ont entr'cux des differences trop marquees pour les confondre; les vers de cigales ont deux grofles pinces qui leur font particulieres & qui ne pcrmetr tent pas de sy ni^prendre. Nous avons dit que les tranfaAions philofophiques parloient de la moii- che vegetante des Caraibes : voici ce qu'en dit M. Watfon •, ces mouches fe trouvent dans la Dominique-, elles s'enterrcnt, felon lui, dans le mois de mai & commencent 4 fe metamorphofer en juin-, le petit arbriffeau qui en nait , reffemble ^ une branche de corail ■■, il croit julqu'k la hauteur de trois pouces & porte plufieurs petites gouffes , oii naiffcnt certains vers qui fe metamorphofent enfuite en mouches. II eft prefque inutile de refuter ce fentiment, abfolument contraire aux idees de tous les naturaliftes & aux faits fur lefquels elles font appuyees,& il eft evident que M. Watfon a etc trompe par les vers, qui,comme nous I'avons dit, rongent la davaria & fe metamorphofent dans les creux qu'ils y ont formes. Celui de M. Hill paroit bien plus probable & eft fonde fur les obferva- tions qu'il a faites ^ la Martinique', les cigales font tort communes dans cette ifle , & pendant leur ^tat de nymphe, elles s'enterrent fous les feuilles mortes pour attendre leur mctamorphofe; li le temps neft pas favorable, il peril un grand nombre de ces infedtes; alors les femenfes de davaria s'attacheiit aux cadavres, & fe developpent ^-peu-pres comme \e fungus ex pede equina vient fur la corne des chevaux mortsi cette explication ne prcfente rien de contraire ^ la bonne phyfique , & M. Fougeroux penche beaucoup k I'adopter. II paroit done conftant qu'il y a des plantes qui viennent fur les cada- vres de quclques animaux , que celles qu'on connoit font prefque toutes du genre des fungus , que mcme quelques lines viennent lur des animaux vivans ■, M. Fougeroux a cru , comme nous I'avons dit , remarquer des pieces qui fembloient le prouver , & la mouffe qu'on obferve fur les an- ciennes carpes, telles que celles de Fontainebleau , en peut encore four- nir une preuve. Mais s'il y a des plantes qui peuvent croitre & vigeter fiir des animaux vivans , il y a aufli des infedbes qui choiliffent les racines ou d'autres par- ties d'une plante pour s'y attacher lorfqu'ils fentent approdicr le temps dt DE L'ACADEMIF. ROYALE DES SCIENCES. 171 leur mctamorphorc •, la plaiite-ver dc la Chine eft de ce nonibre ; il eft ' — — — « vrai que riniertion de 1 animal dans la racine , oil il feniblc ctre conime 11 chatonne, fenibleroit inllniicr que c'eft la piante qui eft crue ("ur le ver, j^ & non pas celui-ci , qui s'eft attache ^ la piante •, cependant le volume de la piante qu'on dit etrc analogue au Gin-feng, & la maniere, commune 4 Ann^e ij6^. un grand nombre d'infciftes, de s'attacher \ differens corps pendant leur metamorphofe , ne permettent pas de s'ecarter en ce point du fentiment dc M. de Reaumur. Nous avons meme en Europe un infe(5l:e du genre des mantes qui fait, \ decouvert , la meme manoeuvre, on le nomme en Portugal Louradeosf 8c en Provence , ou il s'en trouve un de meme efpece , Prega diou , parce qu'il fe met fouvent dans la pofture d'un homme qui eft k genoux & qui prie Dieu. Cet animal s'attache , au temps de fa metamorphofe, aux extre- inites des branches de queiques arbres , & il n'en a pas fallu davantage \ ceux qui les ont vu fortir de leurs chryfalides, ainfi fituees , & qui font i-peu-pres du meme vert que la branche ^ laquelle eiles font attachces» pour allurer que ces infedles naiffoient efteiftivement d'un arbre. On pourroit peut-etre s'etonner de la conftance avec laquelle la davaria femble s'attacher par preference, aux nymphes de cig.iles dans I'Amcrique, & de ce que dans les autres pays ou ces infedles fe multiplient , on ne trouve pas cette piante fur elles ni fur leurs nymphes; mais pour peu qu'on y fade reflexion , on verra aifement que rien n'eft plus naturel. Ces plantes font du genre des paralites, & on fait que chaque parafite afFcAe de s'atta- cher ^ une efpece de piante d^termince ; il n'eft done pas etonnant que celle-ci s'attache par preference \ une meme efpece d'infede : il eft aufll ficile de voir que le grand nombre de ces nymphes qui fe trouvent en Amerique, & les circonftances du climat & de I'cndroit, y rendent cette efpece de phenomene tres-commun , quoiqu'on ne i'obferve pas dans les contries de I'Europe oii il y a le plus de cigales. Au refte, M. Fougeroux, qui n'a pu faire fes obfervations que fur des infedtes defleches ou conferves dans I'efprit-de-vin, & fur les figures qu'en ont donne queiques phyficiens, eft bien eloigne de regarder ce travail comme complet , & il invite ceux des naturaliftes qui feront ^ portee d'examiner ce fiit fur le lieu , & par eux-mcmes , ^ multiplier les obfervations d'apres lefquelles feules on pent obtenir la veritable thcorie de ce phenomene d'hiftoire naturelle. Y Ij 1.71 ABREGfi DCS MEMOIRES H I S T O I R E Naturelle. Sur la pierre appdUe Tripoli. 'Ann^e 2765. f\ , . ,. ^ . . ^ . i - j t V>/uoiQUE le tiipoli loit line matiere tres-iouvent employee dans ks Ilift. ^^arts, & qu'i cet igard , il foit devenu un objet de commerce , on n'en eft pas mieux inftruit Cur fa nature & fur foii origme, & il y a pen de points d'hiftoire naturelle fur lelquels les lentimens des phyhciens aicnt plus varie. . , Nous avons en France des carrieres de tripoli , on en trouve h Polligne en Bietagne, & \ Menat i fept lieues de Riom en Auvergne ■, mais celui dont on fait le plus de cas, eft celiii qu'on tire de Venife , & que les Venitiens prennent aux environs de Corfou dans une montagne nommee Epiro, pres d'un bourg appeile Santi-Quarenta. _ . Cette efpece de pierre eft legere & peu folide , les parties qui la corn- • pofent n'etant que foiblement liecs, fur- tout lorfqu'elle eft recemment tiree .de la carriere-, par cette raifon meme, elle fe fepare dans I'eau, plutot qu'elle iies'y diffout, & s'y precipite peu de temps aprcs. Lorfqu'on en applique un morceau fur lalangue, elle s'y attache, donne une faveur de glaile qui eft meme perceptible \ I'odorat-, les acides n'agiflent que tres-peu fur le tripoli, il fe vitrifie i un feu violent-, enfin fa couleur eft d'un j.ume plus ou moins fonce, & quelquefois meme d'une legere nuance de rouge, fut- vant la nature de la matiere dont le tripoli a ete forrad & la preparation quelle a recue pour etre reduite en cet etat. Les fentiir.ens des naturaliftes ont extremement varie fur la nature da tripoli , I'analyfe chymique n'a meme pu fixer ces variations ■, les uns I'ont mis au rang des argiles vitrifiables •, d'autres font place avec les terres re- fradaires-, d'autres font mis au rang des craies •, quelques uns en ont fait un fablon mineral; d'autres ont cru qu'il ^toit formd d'arbres & de bois foffiles-, d'autres enfin, croient que cette pierre eft formee d'une argile ou limon fin qui lui eft particulier ■, & ce dernier fentiment, qui eftadopte par M. Pott, femble etre celui qui s'accorde le mieux avec les experiences & les obfervations. Mais quand meme on admettroit que le tripoli eut ete originairement une efpece d'argile , il eft sur qu'il n'eft plus en cet etat dans les carrieres oil on le trouve, & il eft queftion de determiner le changement qu'il a fouffert & les agens qui le lui ont fait eprouver : la feule infpeftion des carrieres d'ou on le tire, pouvoit decider cette queftion ,& c'eft auffi ^ ce moyen qua eu recours M. Fougeroux •, voyons ce qu'a produit cet cxamen. _ ^ Les pierres des environs de Menat en Auvergne & de Polligne en Bre- tagne, ou fe trouve le tripoli, font fchiteufes & non litees; clles font jaunes & de diff'erentes nuances de rouge, & cette derniere_ couleur leur vient d'une legere quantife d'ocre qu'elles contiennent & qui a fubi I'aition da feui auffi eft--ce une efpece de tradition, ^ue les caaieres de tripli ds DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 17, Mcn.it out iti autremcnt cmbr.ifccs pcndsnt fcpt h liiiir ans; on y troiivc — ^— i— — > des pierres brulces & reduites en cciime plus oil moiiis I'igere , & Ics nvjiiies 11 indices de la prefence d'un volcan.fe rctroiivcnt h la carricrc dc Pollignd. ' ^ ''' ° ' ''■ ^ Le tripoIL de Menat a donnc, par Tannlyfe chyniiquc, du foufre & dii for ; atureli.f, & celiii dc Pollignc, du foufre & de I'alun •, matieres qu'on fait ctreordi- Annie fjSg. nairement des produits de volcan. II y a plus, en couvrant de terre la glaife ou le fchide glaifeux , & I'expofant au feu , dans des vaiffeaiix fernies , on obtient une efpece de tripoli femblabic au mauvais tripoli de Bretagne. II y a bien lieu de croire qu'avec un pen plus de peine, I'art viendroit k bout d'imiter en ce point plus parfaitcment la nature. On rrouve dans queli]ucs endroits de I'ltalie , des terrcs argilleufes , briilees par les feux Ibuterreins, & fouvent elles renferment des vcgc- taux, CO qui pourroit appuyer le fentiment de M. de GardeM, fur la na- ture du tripoli. Mais rien ne pent mieux prouver la neceffite de I'adion des feux foir- terreins pour la formation du tripoli , que ce qui fe pafle en Fores dans la carricre de Saint Genis ^ proche Saint-Etienne, oii le feu eft depuis plus de cent ans, & dont nous avons parle en 17155. Voye\ Mdm.de I' Acad. i7 _ . qii elles puiUent alien Pendant le cours des obfcrvations fur Ic tremclia, M_, Adanfon a rcmar- ^nn/e tjSj. que entre fcs filets un grand nombre de petits ctres microfcopiqucs de dif- fcrcntcs figures, & qui avoient dcs mouvemens trcs-vifs en tons fens : il rtkilte de ce que nous venons de dire , que Ics filets du tremelli ont un niouvenient lateral & un mouvement progreflif & de recul , qui I'ublifte ir.eme aprcs leur jondion , & que li quelque plante pouvoit faire la nuance cntre le regne vegetal & le regne animal, celle-ci ^ raifon de cctte clpcce de mouvement fpo.itane, auroit plus de droit qu'aucune autre d'y pretea- dre i mais M. Adanfon obferve qu'on ne doit pas ici prendre le terme dc fpontane ^ la rigueur, & qu'il y a encore bien loin du mouvement qu'il a obferve dans la plante en queftion aux mouvemens volontaires des animaux. OBSERVATIONS BOTANIQUES. JLiEs fortes gelees d'hivcr font fouvent eclater des arbrcs dans Ics boisv Hifi. cet accident fe reconnoit dans la fuite fur ces arbres par des efpcces d'e- minences en forme de cotes qui s'etendent fuivant la longueur du tronc, & qui fe trouvcnt prefque toujours du cote du midi. M. de Regemorte I'aine, a fait i fa niaifon de Dachftein pres Strafbourg, une obfcrvation importante qu'il a communiquee a M. du Hamel : il avoit remarque dans la pepiniere dc Moret que pendant des hivers longs & rudes, quelques ar- brcs de Judee d'un pouce & demi de diamstre, & meme plus forts, avoient ^te fendus dans la longueur de leur tronc par la gelee, & que la pjupart itoient morts depuisj il craignit avec railon le meme fort pour quelques ar- bres de la meme efpece qui etoient dans fon jardin de Dachftein , il les vi- fita dans la plus grande rigueur du froid de cette annee, & trouva les plus beaux fendus depuis I'enfourchement des branches Jufque dans le pied, de maniere qu'on pouvoit mettre le bout d« petit doigt dans la fente, &: tou- tes CCS fentes etoient dans la partie du tronc tournee au midi •, il ordonna k fon jardinler de couvrir ces fentes avec de la bouze de vache ; celui-ci nigiigea d'exccuter cet ordre-, cependant, etant retourne k Dachftein apres la gclee, il trouva toutes les fentes h exactement retlrmses qu'il n'en ref- toit pas le plus Icger vertige. Le meme accident arrive fans doute ^ bieii d'antres arbres qui font moins foigncufement obferves que ceux de M. de Regemorte , & les fentes fe refermant au degel , on ne foupconne pns meme qu'ils fe foient ouverts pendant la gelce-, & on attribue la' mort de ccux qui periffent k toute autre caufe : ceux qui font affez hcureux pour ichapper lont ceux auxqucls fc trouve cttte arete laillante dont nous venous de parler. i84 ABRECE DES MEMOIRES B O T A N I g U E. •'■■'• Z767. ]vj ]p prefident de Ma!esherbes a communique ^ M. Guettard, ime lettre qui liii avoit etc ecrite de Bretagne, par laquelle on lui mandoit qu'un plan de Jeunes frenes d'environ quatre ^ cinq ans & ta-s-bien venus, avoit ^te prefque dans le cas d'etre perdu ou au nioins recepe , parce que des fre- lons avoient enleve la plus grande partie de I'ecorce de ces arbres. On fa- voit depuis long- temps que ces animaux employoient I'ecorce des arbres k former I'efpece de papier dont leurs nids iont conflruits ; mais il falloit qu'ils fe fuirent etrangement nniltipliss dans cc canton pour avoir pu faire un pareil degat. III. La meme lettre Contenoit encore une obfervation finguliere fur les plan- tes qui viennent des pays (itues au-del^ de I'equateur , & qui par confe- quent out leur hiver quand nous avons I'ete , & I'automne quand nous avons le printemps; ces plantes meme, aprcs avoir ete multipliees de mar- cottes ou de boutures , confervent toujours un penchant i pouffer & h flcu- rir pendant notre automne & notre hiver; le laurier-thym qui dans les pro- vinces maritimes riuffit trcs-bien dans les jardins & dans les bois , deve- loppe fes boutons en novembre, & on en a des fleurs jufqu'en Janvier quand les gelees ne font pas excelTives. II paroit par I'obfervation fuivante que ceux qui levent ici de graine doivent etre exceptes de cette regie •, quelques bales de laurier-thym ayant muri dans les bois, elles ont produit de jeu- nes arbres qui ont donne quelques fleurs au printemps, & n'en ont point donnc I'hiver, quoiquc tous les autres de leur efpece en fuffent garnis. Peut- etre ces jeunes arbres dont la graine a ete feraee, ft a leve, pour ainfi dire, k contre-temps, du moins relativement aux autres, ont-ils acquis par cette circonftance cette elpece d'indigenat. IV. On fait depuis long-temps qu'on multiplie les champignons en divifant leurs racines qui donnent par ce moyen autant de pieds qu'elles ont ete fe- parees en diflerentes parties ; mais on ne s'etoit pas encore avife de penfer que cette efpece de plante put fe greffer en approche d'un pied fur I'au- tre : le hafard a procure k M. Fougeroux , la preuve de cette poflibilite , dans deux pieds de champignons de I'efpece nommee par Bauhin fungus Pileolo lata £' rotunda : cinquante ou foixante champignons de cette e{t pece etoient reunis fort pres les uns des autres , & M. Fougeroux en trouva deux qui ayant chacun leur pedicule en terre avoient leurs tetes ou chapeaux reunis par une partie de leur circonterence, il s'y etoit fait une vraie greffe iiaturelle : il y avoit dans le meme amas de champignons deux autres pieds bien plus dignes d'attention , Tun des deux qui stoit le plus gros avoit fon pedicule DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. i»5 pddicule en terre & Ton chapeau comme ^ I'ordiiuire ; raais le fecond qui '^^— ^^'— *^" attira I'attention de M. Fougcroux , ctoit plus lingiilierement litiie , il dtoit p tournc ^ contre-fens dii premier, fa convexite adoffce k celle dii premier auquel il tenoit par cet cndroit , ayant par confequeiit fon pedicule & fes Ann^e fjGj^ feuillcts tourncs vers le cicl , & iie tirant aucune noiirritiire que du pre- mier champignon avec lequel il etoit greffc ; audi le pedicule du fecond commencoit-il it fe fletrir. L'adhcrence des deux tetcs ^toit fi intimc que rien n'indiquoit duns Icur fubftancc I'endroit de leur reparation, & que M. Fougcroux n'a pu le re- niarquer memo en les diircquanf, il n'efl pas aifc: d'imiginer comment cette jondtion il linguliere a pu fe faire , cependant M. Fougeroux pcnfe qu'on Peut I'expliquer en fuppofant que ces deux champignons venus d'abord pros un de I'autre & peut-etre avec leurs tetes inclinees I'une vers lautre , fc foient coUes des le commencement de leur formation , & qu'enfuite I'ac- croiflement rapide de I'un des deux ait arrache le plus petit, qui, dans cet etat, a du fe trouver dans une lituation renvcrft:e,& vivre abfolument aus depens de celui qui I'avoit enleve, ne pouvant plus rien tirer de la terre par fon pedicule. Cette ingenieufe explication n'offre rien que de trcs-na- turel, & rend raifon de cette efpece de phenomene de la uianiere la plus fatisfaifante. C E T T T. annee parut iin onvrage de M. du Hamel , intitule : da tranf- fort , de Id conferyation 6' de la force, des bois j faifant la conclufion du traite complet des bois & des forets. Nous avons rendu compte en 17(34, du precedent volume de cet cu- vrage, qui contenoit lexploitation des bois {a); nous aliens en reprendrc la fuite en parlant de celui- ci. Les bois une fois abattus, doivent ctre promptement retires du terraiu qui les a vu naitrei le fejour qu'ils y feroient, & le paffage des voitures, & des ouvriers nuiroient beaucoup i la repouffe des bois qui doit fe faire fur les fouches, & ruineroient le taillis qui doit y renaitre : auffi les or- donnances prefcrivent un temps oii les bois doivent etre tires des ventes, prononcent des peines centre ceux qui feroient negligens k les enlever *, & pour en faciliter les moyens aux marchands de bois, les memes ordon- nances leur accordent un grand nombre de privileges , que M. du Hamel indique dans Ion ouvrage. - Les dift'crcntes maffcs des pieces de bois, & les differens ufages auxquels elles font deftinees, introduifent neceffairement de la difference dans la nia- niere de les tranfporter. Les groffes pieces de bois deflinees ^ la egnftrudtion ou ^ la charpentc, fe traiifportcnt en les trainant fur le terrain , ou en les menant avec des efpeces de voitures i roues qu'on nomme fardiers j & qui different des au- tres voitures , en ce que le corps de celle-ci eft au-deffus de la chars^e qui eft fufpcndue au-deffous, & qu'on y foutient, au moyen d'une chains (a) Voyez Hifi. 1764, Coll. Acad. Put. Fran9 T«me XIII. Tome XIV. Fartie Franfoije. A a its ABREGfi DES MEMOIRES ■ ■ tonrnee autoiir d'liii rouleau cju'on fait agir avec des leviers. On eft etonni T> de voir avec quelle facilite cette efpece de voiture enleve , avec un petit ■ nombre d'hommes, & tranfporte au loin des pieces enormes, qu'on ne Annie lySy. pourroit autrement tirer des bois qu'avec des peines & des depenfes in- croyables. Les pliiiches & les moindres pieces fe tranfportcnt fur des charettcs or- dinaires , de meme que les lattes & les echalas •, les ouvrages dc boiffellerie , ou, comme on les nomme dans les forets , de raderie, fe traniportent k fomme. ou "k dos de mulet. Le bois qui n'eft pas employe aux ufages dont nous venons de parler , eft deftine au chaufFage : les bois d'une certaine groffeur fe coupent en bu- ches, & les brins trop menus font deftines i faire du charbon •, le menu branchage fe travaille en cottercts & en fagois. Les biiches, les cotterets, les fagots & le charbon , fe tirent du bois & fe conduifent aux ports des rivieres, ou h leur deftination , dans des cha- rettes ^u fur des chevaux. Le bois une fois arrive au bord des rivieres, peut etre tranfporti de deux manieres, ou en le chargeant dans des bateaux, ou en ralfemblant, pour en former des efpeces de radenux, qu'on nomme trains, & qui fuivent en flot- tant le cours de I'eau , jufqu'^ i'endroit de leur deftination. Comme on n'a pas toujours \ portee des bois, une riviere navigable, on y fupplee par les ruilfeaux qui y affluent, & dans lefquels on jette les bu- ches , fans les afTembler , apres les avoir marquees de la marque du raar- chand : on arrete toutes ces biiches ^ I'embouchure de la petite riviere dans la grande, au moyen d'une eftacade de pieux, & apres avoir rafi'emble tou- tes les buchfs appartenantes ^ chaque marchand, on les laifle fe fechcr avant que de les alfembler en trains ■, fans cette precaution , ces bois trop imbibes ne flotteroicnt pas : il arrive meme que lorfqu'on les jette dans I'eau avant que de les avoir fait affez deffecher, une partie reftc au fond des ruifleaux; ces bois fubmcrges fe retirent enfuite, mais ils ont perdu de leur qualite, & on les nomme fond riers ou canards. Le bois qu'on ne veut pas flotter, s'embarque dans des bateaux, & c'cft ce qu'on nomme bois neuf.Ce bois eft le meilleur & le plus cher de tous: on embarque de meme le charbon , & pour pouvoir charger le bateau de ce qu'il peut porter de cette marchandife legere, on garnit le tour du ba- teau de claies, qui la contiennent k une affez grande hauteur. La plus grande partie du bois de corde, tout le bois de charpente, & une grande partie des planches, fe flottent-, c'eft-^-dire , qu'on en forme des alfemblages ou radeaux qui flottent h la furface de I'eau, tant par leur le- gerete propre , que par celle qu'on leur procure , au moyen de futailles vui- des qu'on engage dans ces trains , & on les fait defcendre au fil de I'eau jufqu'i leur deftination : un train que trois ou quatre hommes peuvent conduire, contient jufqu'^ cinquante voies de bois-, on voit aifement com- bien cette maniere de voiturer ce bois , epargne dt frais & de depenle. Lorfque les trains font arrives au lieu de leur deftination , on coupe les • harts ou rouettes qui les affemblent , Si on tire les pieces ou les buches k DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 187 tefte, pour les incttrc en dipot dans les chaiUicrs, oii on les arrange pour les conlcrver. La coiifervation des bois fait Tobjet du fecond livre de louvrage de BOTANIQUE, M. du Hamel : 011 fent bien qu'il n'eft plus ici queftion du bois k bru- AnrUe Ij6y. ler , & qu'il ne s'agit que des bois de conftruilion , de charpente & de menuiferie. La feve qui fert ^ entretenir I'arbre tant qu'il eft fur pied, devient foti plus redoutable ennemi lorfqu'il ell: abattu ', elle en occalionne infailliblc- inent la deftruiflion. M. du Hamel regarde cette liqueur comme compofee de partie rellneu- fes, mucilagineufes ou gommcufes, etendues dans beaucoup de flegme : CO compofe , des que le mouvement qu'il avoit dans I'arbre eft arreti , de- vient trcs-propre i occahonncr la fermentation & la pourriture, li on ne fe hate de lui'enlever ce Iflegme qui peut y donner lieu; il y occalionne en- core un autre inconvtinient , il rend le bois fufccptible de fe tourmenter, & li on I'emploie , fur-tout ^ la menuilerie , avant qu'il foit bien fee , il fe retire , les affemblages fe dcjoignent , & il s'y fait des vuides con- liderables. Les bois conferves fous des hangards pendant environ deux ans , font communcment aifez fees pour la charpente •, mais ceux qu'on deftine h la menuiferie doivent fubir un bien plus long detiechement, bien entendu ce- pendant que la plus grande ou moindre chalcur ou lecherelTe du climat doi- vent accourcir ou prolonger ce terme. Comme on n'eft pas toujours ^ portee d'attendre (1 long- temps, on ef- faie d'acc^lerer le dclTechement du bois , foit en I'expofant \ la plus grande ardeur du foleil , foit en le mettant flotter dans I'eau pour difloudre la fevc tenace qui fe diffiperoit difficilement , foit entin en employant le fecours du feu pour le deilecher-, tous ces objets font la matiere du fecond livre, excepts le dernier article qui eft renvoye au troifieme, dans lequel font di- crites les etuves qui fervent ^ cet ufage , & i pluUeurs autres qui y font traites. Il eft aifi de voir que les diffif rentes queftions que ces objets prefetttent,, ne peuvent fe rcfoudre par des raifonnemens phyfiques feuls , & que I'ex- perience doit les decider -, c'eft aufli la route qua prife M. du Hamel : cha- que queftion particuliere , dependante des objets que nous venons d'enon- cer , eft dccidee par une nombreufe fuite d'experiences , & cette decilion eft accompagnee de difFcrens precedes pour la confervation des bois , foit par le dcllcchement , foit en cnduifant fa furface de quelque matiere im- penetrable h I'cau , foit au contraire en le faifant fcjourner dans I'eau. Djs tables d'expiriences tres-etendues indiquent fuivant quelle loi fe fait I'eva- poration de la f-^vc, quel temps eft neceflaire pour I'imbibition de I'eau dans les bois qui y font plonges , & pour I'evaporation de cette eau imbibec ; tjuelles qualites les bois acquierent en paffant par ces differcns etats, ce que le fejour du bois dans I'eau peut avoir d'avantageux pour obvier h la pi- quure des vers , & enfin quelle difference il fe trouve entre les bois con- firvcs dans I'cau douce , & ccux qui le font dans I'eau de la mcr, A a ij ,58 ABREC6 DES MEMOIRES • Le premier objet du troifieme livre eft , comme nous I'avons dit , le deffechement des bois par une chaleiir artificiellc , & M. du Hamel y a B o T AN 1 Q u E. j^ji^j 1^ maniere d'employer cette meme chaleur I les attendrir & ^ leur don- Mne'i ii6j. ner differentes courbures : on juge bien que ces deux precedes doivent va- rier fuivant la qualite & les dimenfions des bois. Le bois fe peut deffecher au feu de plufieurs maiiieres-, on peut le leur appliquer immediatement , meme jufqu'i en reduire une couche en char- bon-, cette methode eft employee pour la partie des pieiix qu'on chaffe en terre, & I'exp^rience a fait voir \ M. du Hamel , que cette precaution pro- curoit au bois enfonce en terte, une duree un peu plus longue-, mais elle lui a en meme temps appris , que quoique cette couche charbonneufe fe trouve entiere, il arrive tres-ibuvent que le bois quelle recouvre fe trouve altere, & que cette methode n'eft pas plus avantageufe \ pratiquer pour les bois deftines \ la conftrudtion. Lorfqu'on ne veut pas deffecher le bois par I'application immediate du feu, on lui fait eprouver une chaleur moderee & foutenue affez long-temps-, M. du Hamel a varie immenfement les experiences pour s'alfurer des eftets, & il en refulte que la chaleur immediate du feu , ne peut etre employee que pour le deffechement des bois minces, les gros bois ne pouvant I'ctre fuffifamment par cette methode. Puifque I'adion immediate du feu feroit infuflfifante pour le deffeche- ment des gros bois, il a fallu employer des intermedes, qui puffent , fans les alterer, leur communiquer une chaleur moderee i & les nioyens que les befoins de la marine ont fait inventer pour produire cet effet, ont encore procure un autre avantage , ils mettent le bois en etat de fe ployer fans fe cafferi avantage immenfe pour la conftrudion. Les intermedes qu'on emploie pour le deffechement du bois font de trois efpeces , I'eau dans laquelle on fait bouillir les pieces , la vapeur de I'eau bouillante , & le fable chaud imbibe d'eau bouillante dans lequel on les enterre : on a imagine pour employer ces differens moyens des etuves avec des fourneaux , qui facilitent extremement ces operations , & qui cco- nomifent finguli^rement les matieres combuftibles qu'on emploie \ cet ufage & la main-d'oeuvre neceffaire pour y parvenir. M. du Hamel donne, avec la conftrudion de ces etuves , tout le detail des experiences qu'il a faites des trois differentes methodes, il paroit donner la preference a la troi- fieme , & avertit des precautions qu'on doit prendre pour employer les bordages au fortir de I'etuve , pour cviter qu'ils ne s'eclatent ou qu'ils ne s'alterent en leur faifant prendre la courbure neceffaire. Jufqu'ici M. du Hamel n'a parle que des bois de charpente & de conf- truftion ; le quatrieme livre traite des bois propres aux rames & aux ma- tures, & de la maniere de les conferver. Les rames fe font ordinairement de bois de hetre , mais tout bois dc cette efpece n'y eft pas propre, il y en a qu'on connoit \ fa couleur roufle qui devient caffant \ mefure qu'il fe fecbe , & celui-li doit etre fevere- raent rejette •, le meilleur eft celui qui vient dans un bon terrain plus fee qu'humide , & fur- tout, on doit choifir les arbres qui etant venus dans des DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ily madifs ont bien file & ont pen de nocuds , itant evident que les rames ^*^'— — "^" qu'oii eii fera aiiront plus de fil & feront moids calTantes. R ^ -, . „ „ rf-\ /-■! 1 » in* \ r a •»• DOT A NIC UE, On refend les arbres qu on deltuie a cet ulage , & qui doivent avoir 46 ou & c'cfl fous cette forme qu'on les tranfporte dans les ports aprcs les avoir fait ftijour- ner environ un mois dans I'eau, pour les garantir de la piquure des vers ^ laquellc le hetre eft fort fujct ■, on les conferve alors fous des hangards avec des calles entre deux, pour faciliter Ic paffagc de I'air & les tenir fe- chement ; on doit de nicine , lorfqu'on tranfporte par mer les eftelles , ne les embarqucr que lorfqu'elles font bien fechees. Audi tot que les eftelles font arrivees dans les ports on les faconm: en rames , avant qu'elles foient tout-i-fait fechcs , & on les conferve dans les magalins comme on avoit fait les eftelles en mdnageant cntr'cUes uii courant d'air. Les mats & les vergues des navires fe font ordinairement de pin ; on pre- fere cehii du Nord, & fur- tout celui qui eft venu dans un bon terrain plus fee qu'humide : les pieces de matures fe diftinguent en mats , matereaux & ejparts i les pieces qui ont depuis 60 jufqu'h 80 pieds de long, & de- puis environ 24 pouces jufqu'i 30 de diametre au pied portent le nora de mats ; celles qui n'ont que depuis 40 jufqu'i 70 pieds de long , fur i 5 ^ 12 ou i4 pouces de diaraetre prennent celui de matereaux ■■, toutes Ics pieces au-deffous de ces dimendons fe nomment ejparts. Les arbres qu'on choilit doivent etre droits & avec le moins de nocuds qu'il eft pollible , ces nceuds ne manqueroient pas de les afloiblir & de les rcndre caflans. On fubftitue quelquefois da fapin au pin pour la mature des batiracnsv nais ces mats ne valent jamais ceux de pin , & on doit toujours employer ce dernier ^ la mature des grands vailfeaux. Comme les pieces propres ^ faire des mats font rares & chares, on prenJ toutes les precautions pofTibles pour les conferver-, aufH-tot qu'un navite eft entre dans le port pour y defarmer on le demate de tons fes mats, ex- ceptc les trois mats majeurs , on porte les autres ious des halles , & on les enduit d'un melange de goudron & de grailTe, ou meme de fuif, pour les preferver de la piquure des infectes. Comme il ne feroit pas poflrble de conferver de cette manlere. I'iir*- menfe quantite de mats non travailles qu'on garde dans let ports; on a ima- gine de creufer des fofies ou on les alfujettit ious I'eau qui les met a I'a- bri des infeiStes, ils fe confervent tres-bien en cet etat dans I'eau douce, mais encore bien mieux dans I'eau falec qui leur procure une bien plus grandc foupleffe. Le cinquieme 8c dernier livre de I'ouvrage de M. du Hamel, a pour ob- jet les moyens de connoltre & ceux d'augmenter la force des bois, matierc de la plus grande importance. Des experience's fans nombre , ont appris b M. du Hamel quelle etoit la force des bois de differentes efpeces & de dif- fcrens echantillons, connoiflancc utile & meme neceflaire ■, mais il ne s'eft ,90 A B R E G 15 D E vS M E M O I R E S "" — pas contents de cette force natiirelle, & fcs recherches Iiii oat procure Ics moyens de donner au bois ime force artificielle infiniment fupcrieure , & BoTANiQUi. jjjj,j^ pi|,5 appropriee aiix ufages aiixquels ces bois font detlines ; eflayons 4-innit 1767. ^^ prefenter une idee de cette ingenieufe m^thode : dans toute piece de bois prcte i rompre fous fa charge, il y a dans I'endroit auquel elle va rompre , des fibres dont les unes font en extenlioji & les autres dans une contradion violente, une experience extrcmement fiinple pent en convain- cre les plus incredules-, qu'on prenne un parallelepipede decire, & qu'on le plie, on appercevra ^ la partie concave I'eftet de la compreflion pat le conflement qui y arrivera •, & ^ la partie convexe celui de I'extenfion dcs fibres par la diminution de la largeur du parallelepipede en cet endroit : appliqiions ce principe au bois. La premiere & la principale queftion eft de favoir combien dans un mor- ceau de bois pret \ rompre il y a de fibres en extenlion , & combien il y en a en contraction -, car il eft evident qu'il n'y a que celles qui font en ex- tenfion qui reliftent \ la rupture, les autres ne font que matiere purement pafTive, elles peuvent feulement, par leur plus on moins de rehftance, ap- procher ou eloigner, des fibres etendues, le point d'appui, fur lequel fc fait I'effort de la puiffance qui tend ^ faire rompre la piece de bois? Pour entendre cet article , qu'on fe reprefente le morceau de bois comme compofe de deux pieces, mifes I'une au bout de I'autre, & Jointes ^ I'en^ droit de la rupture , non pas immediatement , mais un peu elnignees & unies par une infinite de petits relforts; il eft clair que fi ces rellorts font egalement fufceptibles d'extenfion & de compreffion , il y en aura une par- tie qui fe contradlera & une autre qui s'alongera , & il fe trouvera vers le milieu de la piece un plan dans lequel les refforts ne feront ni alonges ni comrades ■, fi au contraire ils ont plus de facilite i s'etendre qui fe con- , trader , ce plan fera plus pres de la partie concave, & il fera plus pres de la partie convexe s'ils fe contradent plus facilement qu'ils ne s'alongent vSuivant ce raifonnement , [i on ote de la piece tbus les refforts en con- tradion & qu'on fubftitue au plan imaginaire dont nous avons parle, un point d'appui reel & incompreffible, on aura precifement la meme force-, on pent meme I'augmenter en ^loignant ce point d'appui des fibres eten- dues qui occafionnent la refiftance. II fuit del^ qu'on pourroit, fins dtminuer la force d'utie piece de bois; la fci&r dans une partie de fpn cpaiffeiir, pourvu qu'on remplit le trait de fcie d'un corps dur •, qu'on pourroit meme , par ce moyen , augmenter la force & la roideur de cette piece , en faifant en forte que ce corps Stran- ger ferrSt plus vers I'entree du trait de fcie qu'au fond ; hngulier para- doxe : car enfin , quel etrange moyen de fortifier une piece que de la fcier jufqu'i fa moitie, & peut-etre au-deli. Ceft cependant ce que I'experience a dSmontre , M. du Hamel a fait faire des barreaux de bois., les plus egaiix qu'il a ete poffible ; il en a fait rompre fix , & la force moyenne neceffaire pour les faire rompre , a etc de 525 livres : des barreaux pareils fcies jufqu'au tiers de leur epaiffeur, Sc d-ins lefquels Ic trait de fcie avoit etc rempli par un coin de bois dur, n'ont DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 191 ronipu que fous le poids de 551 livres •, fcies ^ moitic, ils out rompii «^— — — ^'— foils 541 livres; fcies aiix trois quarts, ils out encore porte cinq cent trcntc u livres. II y a plus, li avant la rupture da barreau, on le decharge pour chaf- ' fer dans le trait de fcie un nouveau coin qui rempliife le vuide que la com- Annfe fjG-j, predion des deux bouts avoit fait, it peut porter un plus grand poids; nil des barreaux fcies aux trois quarts a porte par ce moyen un poids de 57<5, de 55 livres ou un peu plus d'un dixieme plus pefant que ccUu qu'il portolt etjnt entier : il ell evident que Ics fibres redees cntieres font en ce cas I'ollicc d'une bande de fer qui uniroit Ics deux bouts du bois coup^-, & comme les fibres du bois ne s'etendent que tres diHicilement , la reliftance qu'cUes apportent \ la rupture eft egale a I'adhcrence des fibres cn- tieres aux fibres coupees : aufli le bois ecUte-t-il prelque toujours en long avant que de fe rompre. Cette ^norme reliftance des fibres du bois, & la forte adherence qu'elles ont les unes aux autres, ont engag6 M. du Hamel k faire ufage de cette pro- Eriete pour empecher les pieces droites de fe courber, & les pieces cour- es d'alterer la courbure qu'on leur a donnee. 11 y parvient en compofant ces pieces de plulieurs autres endentees les unes dans les autres , de ma- iiiere qu'elles ne puiffent alterer leurs figures fans changer de longueur, ce que les endentures ne leur permettent pas. II propofe d'employer cette me- thode dans la conftrudlion des mats & des vergues d'alTemblage , & dans les pieces qui ont une courbure determinee comme la quille des galeres, qui doit fe relever par les deux bouts- : il arrive prefque toujours qu'elles' Cerdent cette courbure \ la nier, ce qui altere leur viteffe & leur folidit^. ^ie feconde contrequille endentee fur la premiere, a eteappliquee ^ une galere qui avoit d^ji flechi, & I'a mife en etat de ioutenir la mer lans perdre la courbure qu'on lui avoit rendue. Avantage imraenfe qui derive abfolument des experiences & des principes de M. du HameJ. Cet ouvrage a paru renfermer un tres-grand nombre de vues, & d'ex- periences tres-ingenieules & trcs-propres \ former des principes certains, dcfqucls on peut tircr une infinite de conlcquences utiles. 15)1 ABREG^ DES MEMOIRES B O T A N I Q U E, ytnn/e i"68. OBSERVATIONS BOTANIQUES. I i A rhubarbe, .ce piirgatif fi ufite parmi nous, eft unc marchandife etran- cere, & la plus grande partie de celle qii'on emploie, nous eft apportee de la Chine. Un de meflieurs les botaniftes d'Edimbourg a mande ^ M. du Hamel qu'ils etoient enfin parvenus i clever le rheum palmatum , ou vraie rhubarbe ; il y a tout lieu d'efperer que cette plante fe pourra naturalifer en Europe , & que nous ne ferons plu$ dans la neceflite de la tirer de I'autre extrcmite de notre globe. I I. M. TiLLET a fait voirun epi de feigle rsmeux, oii duquel il en fortoit un autre plus petit -, il a aufTi montre deux (iliques de haricots , portces tou- tes deux par le meme pedicule. Cette ann6e parut un ouvrage de M. du Hamel, intitule : Traiti des arlres fruitlers , contenant leur figure , Leur defcription ^ leur culture, G'c. Cet ouvrage intereffant pour tout le monde , & fur- tout pour ceux qui s'occupent du jardinage , avoit ete commence, il y a pres de trente ans, par M. du Hamel •, mais il avoit prefque renonce k le faire paroitre a caule de la depenfe des planches-, M. le Berryais, amateur zele, I'y a determine par fes exhortations & par les foins qu'il s'eft donne pour I'edition de cet ouvrage. Non-feulement I'ouvrage de M. du Hamel intereffe les amateurs du jar- dinage, mais encore ceux qui cultivent les arbres , dans la vue de tirer du profit de leurs fruits : ceux memes qui n'ont point de jardin , peu- vent etre bien aifes de connoitre les fruits qu'on eft h portee d'avoir dans les difFerentes faifons. C'eft k difcuter cet objet qu'eft deftine le premier chapitre. Les arbres fruitiers s'elevent ordinairement en pepinieres, ils y font plan- tes fort prcs les uns des aurres -, c'eft I^ qu'ils re9oivent leur premiere cul- ture & leur premier accroiffement ; ils fe multiplient ou par les femences ou par les drageons qui repouffent du pied, ou enfin par les boutures qui ne font que des branches qu'on coupe & qu'on fiche en terre ou elles re- prenncnt racine-, mais ce dernier moyen de multiplication n'eft pas com- mun k toutes les efpeces d'arbres , & n'eft , au contraire , praticabk que fur un DEL'ACADKMIE ROYALE DES SCIENCES, i^j an petit nombre. De qiiclqiie fa^on qu'on s'y prenne , il faiit choifir line ■■^— — — — terre convcnable , & la preparer de maniere que les jeiines plants s'y plai- „ fi;iit i de plus, (i on en excepte la bouture , toutes les autres L<^oas de raul- ^ ^ t a n i (^ v i. tiplier les arbres ne donnent que des fauvageons qu'il faur, pour ainfi dire, Annie ijGS, civilifer par I'opcration de la greffe : cette operation cxige de la part da cultivateur des foins & de I'attention , pour choihr des fujets & des greffes qui foient analogues, pour bien failir le temps de I'opcration , & pour U taire avec furete. Aucun de ces dirterens objcti n'eft neglige dans le pre- mier chapitrc de M. du Hameli tous y font dil'cutes feparement & avec toute I'attention qu'ils meritent. On n'cleve pas les arbres en pepiniere dans la vue de les y laiffer v ils doivent en etre tires pour les planter aux endroits auxquels ils font del- tines : c'eft cette plantation qui fait I'objet du I'econd chapitre ; il y a uii trcs-grand nombre d'obfcrvations ^ faire pour allurer le fucccs de cette plan- tation i on doit avoir egard ^ I'age & i la groffeur du plant , fuivant les difterentes efpeces des arbres, & felon I'ufage auquel on les define. La terre, dans laquelle on delire faire les plants, doit etre foigneufement f>reparee fuivant la nature des arbres qu'on veut lui confier, & fuivant auffi a qualite & la pofition du fol. L'intervalle qui doit etre entre les fibres , n'eft pas non plus toujours le meme-, il varie par une infinite de circonf- tances auxquelles on doit avoir egard. La faifon dans laquelle on doit le- ver les arbres , la maniere de les traniplanter , ont encore leurs varietes , & on doit foigneufement les obferver, (i on veut affurer la reuffite de is^ plants; quelques arbres, enfin , i"e fement & s'elevent dans la place qu ils doivent refter, & cette methode peut avoir des avantages dans quelques circoiiftances. On voit par- tout ce que nous venons de dire, com-, bien il eft necelfaire de faire un bon choix dans toutes ces varietes , & le fecond chapitre de M. du Hamel eft uniquement deftine k ea fournir les moyens. Les arbres plantes dans les jardins , y peuvent etre places de deux ma- nieres, ou en plein vent, c'eft-k-dire, ifoles & formant une tctc, ou en elpalief , c'cft-a-dire, etales contre un mur ou un treillage, & formant une elpece d'eventail ■, on conceit ailement que ces derniers ne recoivent pas ^galement I'air & le foleil de tous cotes , & qu'il eft ablblument ndcelTaire de bien choilir I'cxpofition convenable ^ chaque efpece d'arbres, & de bien difpofer les treillages qui doivent maintenir lenrs brandies dans cet etat } d'autres arbres font encore traites d'une autre maniere; ils font bas de tige, & forment une tete creufe en dedans & femblable i une coupe ; on les nomme buiff'ons : ce font a proprement parler des pleins vents h baile tige. Le chapitrc troifieme eft employe ^ bien expliquer toutes ces differences ,& les attentions qu'cUes exigent du cultivateur. Un des principaux foins du proptictaire des arbres de Jardin , eft qu'ils foient tiilies dans la faifon convenable , & de k maniere qui eft nropre ^ leur poiition & a l.-ur efpece, c'eft-i-dire, qu'on leur retranche le bois fuperflu qui les rendroit diftormes ou leur feroit porter du fruit mouis Tome XIV. Fartie Franco iji. Bb 194 ABREG^ DES MEMOIRES ■^^— ■"■■""I beau oil en moindre quantite : cctte operation n'a prefcjii'aiicune difficult^ T> pour les arbres en plein vent-, ce n'eft, en grandc partie, qu'iin elagnge. 'Mais celle des arbres en efpalier eft difterente, ceux-ci qu'on eloigne da- Annie 1768, vantage du plan de la nature, ont befoin de plus d'art pour etre retenus dans I'etat force ou on les a mis; le fyfteme de la taille doit meme varier fuivant qu'ils font jeunes ou dejk formes : en un mot , cette operation eft peut-etre une des plus favantes de tout le jardinage , & M. du Hamel ne neglige rien pour en bien etablir les principes, tant pour les arbres en ef- palier que pour ceux en buiffon. Non-feulement la taille eft neceflaire aiix arbres qu'on veut entretenir en efpalier, mais feurs branches doivent etre etalees & attachees aux murs ou aux trcillages pour leur faire prendre le pli qu'on veut leur donner : on les y maintient avec des liens d'oher ou de jonc, obfervant de rompre les pouffes fuperflues, furvenues depuis la taille, ce qu'on appelle eboitrgeon- Tier. Cette operation fe nomme palijjfer , & elle &it le dernier article du quatrieme chapitre. Les arbres ne font pas plus exempts de maladies & d'accidens que les aniraaux : il faut done favoir y remedier dans I'occafion : ces maladies font fouvent occafionnees par les infedles qui les endommagent, & il faut re- chercher les moyens de detruire ces ennemis deftrufteurs , & de remedier aux maux qu'ils ont caufes & ^ ceux qui peuvent furvenir naturellement. C'eft ^ donner les principes de cette efpeee de medecine vegetale qu'eft deftine le cinquieme chapitre de I'ouvrage de M. du Hainel. Le but qu'on fe propofe en plantant des arbres fruitiers, eft de fe pro- curer de bons fruits ; mais pour les avoir meilleurs , il y a des precautions • ^ prendre •, ils doivent refter ^ I'ombre des feuilles Jufqu'i un certain temps, aprcs lequel on doit les decouvrir & les expofer au foleil : on doit les cueillir dans le temps convenable, & les placer dans des fruiteries propres ^ les con- ferver, & fur- tout k les mettre ^ I'abri de la gelee & de I'humidite. Toutes les precautions neccffaires pour reulTir dans ces importautes operations, font exaftement detaillees dans le Ikieme chapitre. Jufqu'ici nous n'avons parle que de la culture des arbres en general ; le refte de I'ouvrage de M. du Hamel a. un autre objet. Des qu'on fe pro- pofe une plantation d'arbres fruitiers, on en a vue que les fruits qu'on ef- pere en tirer, foient de la meilleure efpeee, & qu'ils fe fuccedent les uns aux autres, de maniere qu'on n'en manque jamais. Une longue fuite d'ob- fervations & de reflexions a appris ^ M. du Hamel \ faire un choix des diffcrentes efpeces d'arbres qui peuvent repondre h. ces vues , & il en donne la dcfcription, celie de leurs fleurs, de leurs fruits, & les particularites qui regardent la culture de chaque efpeee. Les amandiers font les premiers dont il parle; il en decrit I'arbre en ge- neral, & pafle enfuite ^ la defcription des neuf meilleures efpeces de cet arbre ; car il ne perd point de vue que fon but eft de peupler les jardins d'arbres utiles , & non de ceux qui ne ferviroient qu'^ la feule curiofite, Les abricotiers viennent enfuite, & M. du Hamel donne la defcription de DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, 155 dix des efpeces de cct arbre. Aprcs avoir dit tin mot de Icpine-vinctte . — ^— i—— ^» dont Ic fruit s'emploie en confitures, il palFe tout de fuite aux cerilicrs, fous „ laauelli denomination font compris non-leulement ceux qui portent les ce- o t a n i q u E. riles proprenient ditcs , mais encore les merifcs, les guignes, & les bigar- Annce ti68. reaux & les dirfcrentes efpeces ou varictes de cette fainille, au nombre de trente un. Les coignaffiers fuivent les ceriliers, au nombre de trois efpe- ces; viennent enfuite les figuiers : & cjuoiqu'il y ait un tres- grand nombre d'efpeces de ce fruit , M. du Hamcl n'en decrit que trois , qu'il regarde comme les plus propres ^ ctre cultives dans notre climat. Les frailiers ne font pas un arbre, mais leur fruit fait dans fon temps I'agrcmcnt de nos de(- ferts , & M. du Hamel a donne place dans cet ouvrage ^ dix-fept efpeces difFcrentes de fraihers. Les grofeilliers fuivent immediatement les frailiers , & il decrit huit efpeces de cet arbre, tant de grofeillierj i grappe, que dc grofeilliers epineux. Les pommiers font en bien plus grand nombre, & quoique M. du Ha- mel ait omis ^ deflein les pommiers i cidre , dont le fruit n'eft pas bon ^ -.», manger, il decrit cependant trente-neuf efpeces de pommes. Aprcs les pommiers viennent les nefliers •, la famille de ces arbres eft trcs- nombreufe, mais M. du Hamel n'en decrit que trois efpeces; les autres ne fournidiint pas de fruits propres pour les tables, il s'eft contente de les in- diquer. II ne parle de meme que du feul murier rouge, Ic murier blanc, malgre I'utilite de fes feuilles pour les vers a foie , n'entrant pas dans le nombre des arbres que M. du Hamel s'eft propofe de decrirc. C'eft par cet article que finit le premier volume. Le fecond commence par les pechers-, le nombre des efpeces & des va- rictes de cet arbre eft immenfe s mais M. du Hamel n'en decrit que qua- rante-trois efpeces , qui font les meilleures , les plus connues , & qui fe trouvent dans prefque toutes les pepinieres bien afforties : la culture de cet arbre cxige des attentions plus fuivies & plus particulieres que celle d'au- cun autre, & il n'a pas oublie de les detailleravec foin. Les pruniers fui- vent immediatement les pechers -, mais quoiqu'il y en ait un tres-grand nombre , M. du Hamel n'a choili que huit des meilleures efpeces , pour leur donner place dans cet ouvrage. ^ La famille des poiriers eft la plus nombreufe de toutes , & celle qui me- rite le plus d'attention , parce que ces fruits fe fucccdent les uns aux au- tres, pendant prefque toute I'annee : malgre le retranchement que M. du Hamel a fiit de toutes les efpeces qui fervent i fiire du cidre, & de celles qui ne fourniffent que des fruits pen agreables •■, il en decrit cependant cent dix-neuf efpeces. Le frambroifier n'eft pas, i proprement parler, un arbre-, c'eft une efpece de ronce, mais il eft dans le meme cas que le fraifier, fon fruit fe fert fur nos tables; auffi M. du Hamel n'a-til pas neglige. d'en parler. Le dernier article de I'ouvrage de M. du Hamel eft la vigne; en retran- chant toutes les efpeces qui ne produifent que du raihn proprc ^ faire du vin , il decrit quatorze efpeces difFcrentes de raifin de treille & propre ^ Bb ij jotf A B R E G fi D E S M E M O I R E S M— — fervii- fur les tables. Get ouvrage eft orne de plus de deux cents planches, deffinees & gravees dans la plus grawde perfedlion. L'cdition ne le cede BoTANiQUi. p^ji^j ^^^ planches du cote de Texaditude , ni du cote de la nettete dc Ann^e inGS. rimpreflion : en un mot, on pent regarder cet ouvrage comme un des plus beaux qui ait paru en ce genre, & comme un guide allure pour tous ceux qui voudront former des potagers ou des vergers, & en tirer le plus d'a- grement & le plus d'utilite qu'on puilfe attendre des plantations de cette efpece. lis profiteront des recherches & de la longue experience qui ont mis M. du Hamel en etat de confacrer , pour ainli dire , ce monument \ I'utilite publique. Siir le changement des Efpeces, dans les Plantes. .U, NE obfervation de feu M. Marchant, rapportee dans I'hlftoire de I'a- ^ cidemie de 1719 (^) a donne lieu ^ la queftion qui fait I'objet de ce me- Annce ijog. y^^\^Q^ (j^ns lequel M. Adanfon recherche (i les efpeces font conftantes, Hift. ou fi par la communication de poullieres ftminales etrangeres i une plante, il peut fe former de nouvelles efpeces qui fe reproduifent conftamment fous la meme forme. La plante qui avoit fait le fiijet de I'obfcrvafion de M. Marchant etoit une efpece de mercuriale qui vint d'elle-meme dans fon jardin au raois de juillet 1715 , & qui avoit les ffuilles comme des filets; il la trouva aflez difi'erente de la mercuriale ordinaire pour lui donner un nom nouveau , & la nonuna Mercurialis foliis capillaceis. Au mois d'avril fuivant, cette plante reparut dan's le meme endroit, avec une autre efpece de mercuriale •^ feuilles, profondement dentelees, qu'il nomma Mercurialls foliis in ya- rias 6' incequales lacinias qiiaji dilaceratis. De cette obfervation de M. Marchant, il fembloit qu'on pouvoit inferer qu'il fe pouvoit produire de nouvelles efpeces, & que les anciens n'avoient pas eu tort de n'en dccrire qu'un fi petit nombre-, les .uitres, que nous ob- fervons aujourd'hui en fi grande quantite, ayant hi produites depuis eux, & n'exiflant pas de leur temps. Ces plantes de M. Marchant ne durerent que quelques annees, & il n'en fut plus queftion Jufqu'en 1744., que M. Linnxus , qui avoit jufque-1^ re- garde les efpeces comme conlLuites, commenca ^ douter de cette conftance, & meme ^ croire qu'il s'en pouvoit produire de nouvelles ; & voici ce qui donna lieu ^ ce changement. En J 742, M. Zioberg herborifant dans une ifle fituee en mer \ environ fept milles d'Upfal , trouva dans un terrain graveleux tout convert de li- naire, une plante affez femblable ^ la linaire commune, mais qui en dif- feroit affez confidcrablcment dans fes fleurs, pour conftituer, felon M, Lin- (a) Voyez Hift. 1719, Colleft. Acad. Parde Franj. lome IV. DE L'ACADEMIK ROYALE DES SCIENCES. 197 nwis , line nouvclle efpece qu'il imagina provenir de la fccondation d'uiie <■———— liiuire ordinaire par une autre plante qii'on croit etre la jufciuiame ou le „ tabac , M. Linnc lui a donne le nom de pelona j & il prcfimic qu'cllc fcra o t a n i q u e. conftante. _ ^ Annie 17%. M. Linnc cite une autre metamorphofe du meme genre, qui arrive tous les ans dans le jardin d'Uplal , oil les graines du ciiardon ordinaire ii tstes velues, lui ont donnc Ic chardon ^ \.im vclues & raflemblecs des Pyre- nees-, il ignore li cettc variation provient des femences meme de la plante ou de la fccondation de ces memes femences, faites par les poufTieres d'une autre plante. II rapporte encore une transformation de cette efpece-, la graiide & la petite verveine d'Amiirique ont produit une nouvclle efpece de vervcine femblable pour les feuilles, a la verveine d'Europe, & pour toutcs les aii- tres parties ^ la grande verveine d'Amerique. M. Gmelin parle encore d'une plante de la linaire ^ feuilles rondes, qu'on nomine pour cette railon num- mulaire, qui avoit porte une fleur toute lemblable h la peloria de M. Lin- n2us : il ajoute meme encore que le pied d'allouctte de Siberic , iionirae Delphinium J dont il n'avoit trouvc dans ce pays que deux efpeccs, avoit produit dans fon Jardin de Peterfbourg Jiifqua lix elpeces de cette plante, qui diff.-roient , par la grandeur de leurs fleurs , par la couleur , le port & ]a d(5coupure plus ou moins profonde de leurs feuilles, & qu'il croyoit provenir du melange des deux premieres efpeccs primitives qu'il y avoit apportees. M. Von-Linne lui-meme a pretendu , en parlant des plantes de cette efpece, que la pimprenelle-aigremoine qui s'efl reprodnite de graine ^ Upfal pendant plufieurs annees , eft venue de la pimprenelle commune fccondie par les pouflieres de I'aigremoine, & qii'un grand nombre de plan- tes ^'il cite ont une pareille origine -, & il conclut , de toutes ces obfer- v.itions , que tous les genres des plantes ne font autre chofe que des plan- tes nces d'une meme mere & de peres difterens, & que c'eft un nouveau champ ouvert aux botanilles pour tenter de multiplier les efpeces par de parciis melanges. M. Adanfon avoit d'abord adopts le meme fentiment, d'apres les obfer- vations de M. Linnxus; mais ayant eu occafion d'elsver non-feulement la pelore vivace de la linaire commune, envoyee par M. Linna'us, mais en- core une pelore annuelle formee en 1762 au jardin du roi, de la linaire d'Efpagne h feuilles menues, la mercuriale de M. Maichant, & plifl'ieurs aii- tres plantes, il a cru devoir embraffer un fentiment contraire : & pour au- toriler ce changement, il reprcnd dans fon memoirc tous le« f.iits qui out fervi de fondement ^ I'opinion de M. Linnxus, defqucis il fait voir qu'on ne peut rien conclure en faveur de cette hypothcfe : effayons de rendre compte de fes motifs. Li mercuriale de M. Marchant etoit difparue en iyi6; elle repamt pour la premiere fois en 1766 , fous les chaflis du jardin du roi ; & M. de Juf- fieu la confia ^ M. Adanfon , pour fuivre les experiences qu'il meditoit fur ce fujet ipS ABREGfiDES MEMOIRES ■I I I I Miui On etoit pour lors an 1 1 juin, & la plante etoit en pleine fleur; M. Adati- _. fon la rcconnut pour un individu male , fes feuillcs reflembloient k celles COTANIQU . j'^ij^ releda rongees des infedtes , fans cependant en avoir eprouvc aucune /lnn(e tlG^. atteime; niais les anteres ou lommites des etamines, etoient trois fois plus petites cju'k I'ordinaire, fpheriques, &, autant qu'il fut poffible d'en juger, abfolument vides de poulliere feminale. II etoit aife de voir (i cette plante etoit capable de fe reproduire, ou (i ce n'etoit qu'une variete monftraeufe : M. Adanfon n'y manqua pas -, pour cela il plaga, fur une des couches de fa niclonniere, dix pieds de mercu- riaie femelle, au-deffous de la mercuriale male en queftion , &, trois ou quatre fois par jour, il fecouoit cette derniere fur elles, pour que la pouf- fiere feminale, fi elle en contenoit, put les feconder •, & afin doter touts ambiguit6, il avoit detruit tous les pieds de mercuriale qui avoient paril dans Ton jardin. Les graines des mercuriales femelles etant venues en inatu- rite des le 15 de juillet, il en fema une partie dont aucune ne leva, & le pied de mercuriale extraordinaire crut jufqul 1 1 pouces de hauteur , & dura jufquaux premieres gelees qui le firent perir. Au printemps de I'annee fuivante , M. Adanfon fema ce qui lui reftoit de fes graines : il en leva environ un dixieme , qui ne produilit que des mercuriales communes. Nous avons dit que les feuilles de la mercuriale extraordinaire, reflem- bloient \ celles du refeda : d'apres I'idee de M. Linnius, il elfaya de fecon- der des mercuriales femelles avec les pouflieres du refeda & par celles du chanvre male -, mais toutes les graines provenues de ces melanges , n'ont encore donne que des mercuriales ordinaires. Toutes ces experiences ont fait voir k M. Adanfon , que la^econdatioa ti'a pas lieu par le fecours des pouflieres etrangeres quand les plantes font de families differentes •, & que le pen de graines de les mercuriales qui ont germe, malgre la fcrupulcufe attention qu'il avoit apportee \ detruire tous les males de cette efpcce qui avoient para dans fon jardin , avoient ete fe- condees par quelques pouflieres de mercuriale male que le vent avoit ap- portees du dehors , & que cette mercuriale \ feuilles dechiquetees , de meme que celles de M. Marchant, ne font que des individus monftrueux ou des mulcts vicies dans leurs tiges , dans leurs fleurs & dans -les parties de la generation , & non pas de nouvelles efpeces. La pelore que M. Linnarus cite , comme fe reproduifant de graines, nc prouve pas davantage en faveur de la produdion de nouvelles efpeces : la linaire vivace ordinaire qu'il a envoyee & la linaire annuelle d'Efpagne, ont donne tantoi <^uelques fleurs pelores, melees avec des fleurs naturelles fur le meme pied, tant^t tous les pieds font \ fleurs naturelles, tantot ils font \ fleurs pelores , mais loujours les fleurs pelores ont ete fteriles : les feules fleurs naturelles ont produit des graines fccondes •, ces plantes ex- traordinaires doivent done erre regardees comme des demi-mulets dans lef- quels les organes de la generation font conftamment vicies, Ces fairs font cependant les feuls authentiques que produifent M. Lin-* DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. rg? tiius pour appuyer fon opinion-, Ics autres que lui & M. Gmclin citent fur ^■""■"— ■■■■■ les plaiitcs qu'ils nomment hybrides ou bdtardes , n'ont pas etc obferv^s g o t \ v o avec aurant d'attention & ne paroillent ctre que des efpcces dc conic(ftu- res, fondees fur les deux premiers faits de la mercuriale & de la peiorc--, & ylnrnfe ijCg. comment pourroit-on fe fier ^ des conjedures, tandis que deux faits biei> plus politifs & bien micux circonftanciss, dcfquels M. Linnarus n'avoit eii probablement aucune connoHrance, ne prouvent cepcndant rien en faveur de fon opinion ? Le premier de ces faits regarde le fraider comnnin ; la graine de ce frailicr a donne en 1765 , nn fraifier dont les feuilles font fimples ; c'eft-i- dire, qu'au-lieu de trois feuilles, ou pour mieux dire, de trois lobes fur chaque tige, il n'en paroit qu'un , & les graines de celui-ci ont produit des pieds i une feuilie , d'autres ^ trois, & d'autres enfin qui ont des lines & des autres melees enfcmble; ce frainer fe multiplie plus conftam- - ment par fes fouets ou bourgeons qui reprefentent alfez ordinairemcnt les jndividus dont ils font fortis : on a cru pouvoir partir de-li pour donner ^ ce frailier le nom de nouvelle race : on a mcme dte plus loin , en iUp- pofant que les diverfes efpeces de fraillers coniuis font des races vejuies toutes d'une mcme efpece primitive par des melanges de fecondation. Ce- pendant M. Adanfon penfe que ce frailier ^ une fcuille n'eft pas une race ou efpece particulicre , puifqu'il n'eft pas conftant dans fa multiplication par graines; & en fecond lieu, parce qu'en examinant de pres ces feuilles uniques , on y retrouve des veftiges des deux feuilles qui manquent , & une bifurcation dans la principale ner\aire qui indique que les trois feuilles fe font reunies en une ; d'ou il fuit que ce fraifier n'eft pas mcme une varietc, mais feulement une monftruolite par dcfaut , tandis que la fleur a plus de parties quelle n'en devroit avoir, & eft nionftrueufe par execs-, on peut, felon lui, comparer ce frailier aux animaux monftrueux qui ont quelqucs parties doubles , & d'autres au contraire reunies en une feule. Pour faire voir avec quelle circonfpeiftion on doit porter (on jugement en pareille matiere , M. Adanfon rappelle I'orge quarre , provenu du fu- crioii qu'il a obferve en 1761; cet orge qui, comme on fait, a deux rangs de grains i chaque epi , a produit quelques epis h quatre rangs -, ces grains recueillis avec foin ont donne pendant lix ans queltjues epis quarrcs , & an bout de ce temps ont perdu tout-h-coup cette proprietc, pour rentrer dans leur etat naturel : nous avons rendu compte de cette obfervation en 1764. (voy. Hifl. 1764.) & en ijG^, { voy. HiJI. 176^). La plante qui meriteroit mieux qu'aucune autre le nom d'efpece, feroit fans doute I'efpecc de bled qu'on nomme bled de miracle ; cepcndant ce n'eft qu'une monftruolite par execs-, M. Adanfon s'eft aflure, par des ex- periences fuivies, qu'en le femant dans une terre trop maigre ou trop fe- che, il degenere peu-i-peu, & reatrc dans I'efpece originaire dont il eft forti, qui eft celle qu'on nomme grojfet , & qu'on cultive dans les provin- ces mcridionales du royaume. M. Adanfon fe croit done autorifc i rejeter abfolmnent la produclion 100 ABREGE DES MEMOIRES Mill I iiiide nouvelles eipeces-, il demeure d'accord que par le fecours de fecondi- tions etrangeres, qui cependaiit ne peuvent avoir lieu qu'entre des indivi- BoTANiQUE. j^^ ^^ j^ meme efpece , ou entre des efpeces peu dilFcrentes , on peut ob- Anm'e 17 6q, teuir des variations & des monftruolites hngulieres, mais qui ne feront pas des changemens d'efpece ■, ces changemens ne fe peuvent guere operer que dans les plantes, il eft tres-difficile d'en operer de pareils fur les arbres-, la longueur du temps neceffaire pour voir I'efiet des fecondations etrangeres, & raffiduite qu'exigent des obfervations de cette efpece ont empeche juf- Gu'ici qu'on ait pu s'en affurer. On ne doit pas au refte s'etonner que I'art & meme le hafard aient pro- duit de pareils phenomenes : la culture, le terrain & fur-tout le climat , operent journellement des changemens encore plus furprenans & qui fe- roient meme meconnoitre ces plantes par des botaniftes peu exercis : le ta- bac, le ricin ou palma chrijii , qui font ici au rang des plantes annuelles, forment en Afrique des arbriffeaux vivaces. M. Adanfon meme eft par- . venu ^ faire paffer deux hivers ^ des plantes de tabac : mais ces change- mens, quelques grands qu'ils foient, ne font pas pour cela des changemens d'elpeces. II fuit de tout ce que nous venons de dire, que tons les exemples al- legiies pour preuve du changement dans les efpeces ou la produdtion de nouvelles races, ne font que des variations ou des monftruolites •, que I'exa- men de ces changemens exige I'attention la plus fcrupuleufe -, & qu'enfin il paroit que la tranfmutation des efpeces n'a pas plus lieu dans les plantes que dans les animaux. Les ecarts meme de la nature ne lui font permis que dans certaines bornes au-del^ defquelles tout rentre dans I'ordre eta- bli par la fageffe du Createur; ceft par cette judicieufe reflexion que M. Adanfon termine fon meraoire. OBSERVATIONS DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, zci BOTANIQUE. OBSERVATIONS de BOTANIQ^UE. /InrUe 1763. o. 'N n'eft que trop inftruit de la maladie nommee ergot j qui afFede quel- quefois le fcigle, & des fuites fiineftes de I'ufage de ces grains vicies', I'a- cademie en a rendu compte en plus d'un endroit de fon hiftoire, {voy. Hi//, ijio, Si Mem. IJ48 ,) mais on etoit communeraent perfuade que cette efpece de maladie n'attaquoit que le (eigle. Le Pere Cotte, de I'Ora- toire, correfpondant de TacadeiTiic, a trouve cette annie 1769, aux envi- rons de Montmorency, dix epis de froment dont prefque tous les grains etoient ergotes; les moilTonneurs I'ont afllire qu'ils en avoient remarquc beaucoup d'autres. M. Royer, favant botanifte & ami du Pere Cotte, lui a dit plulieurs fois que dans les difFerens cantons oil I'avoient conduit fes herborilations, il avoit trouve beaucoup de fromens ergotesi & I'hiftorieii de I'acadcmie peut certifier qui! en a recueilli lui-meme, en 1749, une alTez grande quantite dans un champ de bled barbu pres de Bayeux. I I. Le Bambou, le plus grand des rofeaux connus, croit naturelleraent dans I'lnde Si dans I'Afriquc ; on croit qu'il a ete tranfporte dans les ifles du vent de I'Amerique, par I'efcadre de M. de Bompart en 1759, & il y a prodigieufement multiplie ■, le terrain le plus propre au Bambou , comme \ tous les autres rofeaux, eft un fol leger & frais, comme les bords des ri- vieres-, il fe multiplie de boutures , chaque nosud portant le germe de la racine & des Jets. Cette plante exige les plus fortes chaleurs; mais pendant leur duree, fa vegetation eft etonnante; chaque brin, gros comme le bras OH la Jambe , s'elevant dans I'efpace de quelques mois, Jufqu'i 40 ou 5 o pieds de hauteur, fuivant la qualite du terrain. Lorfquc les fouches font iuttfam- ment efpacees , elles peuvent produire Jufqu'^ cent jets & plus •, ces fou- ches ne portent des brins de cette force que lorfqu'elles font bien formees, c'eft-k-dir&, de deux ou trois ans, & il n'en fore jamais du raeme endroit on on en a coupe , mais ^ cote : le bambou ayant en fortant toute la grof- fcur dont il eft fufceptibie, & s'elevant fi rapidement k fa hauteur, le refte de fa vegetation eft employ^ i remplir I'interieur des tiges & ^ poufler les feuilles qui ne paroiffent qu'alors, & dont les animaux font trcs-friands , le developpement de ces feuilles fe fait fucceffivement en defcendant , Sc elles partent de chaque noeud dont il fort diverfes branches lorfque le bam- bou eft mur, c'eft^-dire depuis trois jufqu'i fix ans, fuivant fa grolTeur. On reconnoit fa maturite i la couleur de jauneorangd que prennent fes feuilles & le corps du rofcau , pour lors il eft trcs-dur ; fon icorce ferrec Tome XIV. Partie Francoife. Cc 2C2 ABREGE DES MEMOIRES ■i— — ^— — & trcs-polie le defend des imprefllons de I'eaii & du foleil, & il eft alors J, tres-folide, rintericur en ^tant prefqu'entierement renipli. ' Ce rofeau eft d'liii ufage inhni dans les colonies ■, on en fait des pieux Annie fjS^- pour entoiirer les champs, & il arrive fouvent que ces efpeces de haies de- viennent vivantes, les pieux prenant qiielqiiefois racines -, on en fait des chevrons, des fablieres & des faitages pour les cafes \ ncgres, en le refen- dant il donne de la latte, dii cercle & du cliffage pour ccs cafes : en un , mot, on peut dire que cette production eft una des plus utiles qui ait ete tranfportee aux iiles. Tout ce detail eft tire d'une lettre de M. Dubuiffoii habitant de Saint-Domingue , k M. de Bory, qui I'a coiiimuniquee ^ I'academie. Cette ann^e, M. Sieuve, de Marfeille, prefenta \ Facademie im ou- vrage fur les moyens de garantir les olives de la piquure des infecles , & fur une nouvelle methode d'en extraire une huile plus abondante & plus fine , par le moyen d'un moulin de fan invention , avec lu maniere de la garantir de toute rancifjure. L'ouvrage de M. Sieuve eft divife en trois parties i dans la premiere , il indique les difFerentes efpeces d'olives, les accidens auxquels elles peuvent etre lujettes^ & les moyens de les prevenir. On cultive en Provence, fix efpeces difterentes d'olives, M. Sieuve exa- mine les avantages & les defavantages de ces difterentes efpeces, foit par rapport i la quantite d'huile, foic eu egard i fa qualite plus ou moins par- ftiite, c'eft \ raifon du peu d'huile que fourniflent les olives dime cer- taine efpcce qu'on referve les plus belles de cette efpece pour les faler, & ce font ces olives qu'on nous apporte en baril, & qu'on nomme/^iVAo- lines 3 nom qui leur vient de celui de Picholini, qui a invents la iiianiere de les appreter, & non, comme bien des gens le pretendent, de ce qu'el- les font plus petites que quelques autres efpeces d'olives , ce qui foit dit en pafl'ant. La fechereffe ou les pluies exceflives nuifent beaucoup aux olives, mais I'ennemi le plus redoutable qu'elles aient eft un petit ver qui s'infinue au- dedans du fruit, & en mange fi bien la fubftance , que fouvent il laiife le noyau \ fee; la perte que caufe cetinfed:e eft immenfe, M. Sieuve prouve dans fon ouvrage qu'elle eft fouvent de la moitie de I'huile qu'on auroit recueillie. On peut bien Juger qu'il n'a pas neglige d'examiner un ennemi fi terri- ble •, il a decouvert qu'il venoit d'une mouche affez petite , d'une couleur ^-peu-pres femblable \ celle d'une j'eune abeille : cette mouche pond fes ccufs dans les ger^ures du tronc des oliviers-, ils eclofent peu de mois apres, commencent \ grimper aux branches de I'arbre dont ils rongent d'abord les feuilles , & setabliiFent enfin dans le fruit qu'ils detruifent , & dans lequel ils fubiffent leur metamorphofe. Nous ne pouvons entrer ici dans le curieux detail de toutes les operations de cet animal , qu'a fuivi M. Sieuve fur des vers de cette efpece qu'il avoit fait eclore dans fon cabinet : cet article doit ttre lu dans fon ouvrage.. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 105 Ce ver a cependant des ennemis parmi les iiire(fles , les fourmis en font — ^— "i— ■ fort friandes & en dctruilent beaucoup ; mais dies en laifferoient encore „ beaucoup trop pour les proprietaires des oliviers, (i M. Sieuve n'avoit troiivii ' un moyen de garantir les olives dc leurs atteitUes. Nous avons dit que les Annie ijSg. mouches defquelles naUlent ces vers, depofoient leurs ceufs dans les ger9u- res du tronc de Tolivier, & que de-li iis s'elevoient, en rampant, juf- qu'aux branches, aux feuilles & aux fruits oil ils faifoient leurs ravages : on peut done aneantir ce ravage , en erapechant ce ver de pouvoir parvenir aux branches, & c'efl: ce qu'opere M. Sieuve, au moyen d'une elpece de goudron de fa compolition , avec lequel il fait au haut du tronc un collier de la largeur de lix doigts , ce collier devient pour les vers un obftacle infurmontable \ 8c I'experience lui a fait voir qu'en eftet aucun des arbres qui avoient eu ce prefervatif, n'avoit eu d'olives attaquees par les vers-, tandis que ceux du nicme plant , qui n'avoient pas eu ce fecours , avoient une grande partie de leurs fruits detruits ou altercs par ces infec^es. La fecondc partie de I'ouvrage de M. Sieuve, a pour objet de determi- ner le temps auquel on doit cueillir les olives, les precautions neceffaires pour en extraire I'huile & la maniere de la conferver. Les olives font , felon M. Sieuve , en etat de fournir la meilleure huile lorfqu'elles ont acquis une couleur rouge, noiratre & confervent encore une certaine confiftance; c'eft dans ce temps qu'elles doivent ctre cueillies, fi on en excepte cependant celles du plant fauvage qu'on peut fans rilque cueillir un peu avant leur maturite. Mais ce qu'il recommande k plus expreffement, eft de n'employer que la chair de I'olive ^ faire de I'huile : celle-ci eft parfaite", & des experien- ces fuivies, lui ont appris quelle fe conferve pluiieurs annees, au-lieu que celle qu'on tire da bois ou de I'amande du noyau , ou merae de I'olive en- tiere broyee \ la maniere ordinaire , eft toujours inferieurc & fujette 4 fe rancir. Ce ne feroit rien que d'obtenir d'excellente huile, li Ton n'avoit encore I'art de la conferver. M. Sieuve prouve, par plufieurs experiences delicates, que I'huile peut s'evaporer, & que cette evaporation peut la dcteriorer; il juge done i propos de I'enfermer dans des vales tres-exaftement bouches; les meilleurs bouchons de liege ne fuffifent pas , il faut qu'ils foient re- couverts de cire-, & pour la mettre etitierement ^ I'abri de toute alteration, il y enferme un morceau d'eponge preparee : I'academie n'a pu pronon- cer fur ce prefervatif dont I'auteur s'eft referve le fecret. Nous avons dit que M. Sieuve prefcrivoit de n'employer que la chair des olives pour faire I'huile : ce triage feroit long, difficile & difpendieux, avec les moulins ordinaires; mais il devient extremement facile avec un moulin tout nouveau qu'il a invente, & dont la defcription forme la troi- fieme & derniere partie de fon ouvrage. Ce moulin duquel nous ne pouvons donner ici que la plus legere idee & qui eft trcs-bien decrit dans I'ouvrage de M. Sieuve, ne reflcmble, en aucune facon , 'k tous ceux dont on a communement connoilTance ; il con- (il^e en une grande caifle oblongue, traverfce vers le milieu de fa hauteur Cc i; 204 ABREGE DES MEMOIRES.&e. i' — *— par une table toute coup6e de cannelures tranfverfales , au fond defquelles BoTANiouE '^"^ perces des trous en grand nonibre pour permettre i I'huile de s'ecou- ' ler dans la fond de k caiffe : au-deffus de cette table, eft fufpe.idu k Annie tjGg. quatre cordons un morceau de bois pefant , ayant des cannelures toutes pareilles -, ce morceau de bois pent s'approcher , ou s'eloigner i volonte , de la table cannelee •, & comme il eft plus court que la caifle, on le peut fcire aller & venir fuivant fa longueur, au moyen d'une poignee qui y eft attachee •, & ^ I'autre bout , il y a une piece qui , ^ chaque mouvement , permct aux olives de tomber, de la tremie oii on les met, entre les can- nelures de la table & de la piece mobile, qu'il nomme d^tritoir ; c'eft-li qu'elles font ecrafees , fans que les noyaux puiffent I'etre , parce qu'on a foin d'ecarter fuffifamment les deux pieces ■, Thuile paffe par les trous qui font au fond des cannelures de la table, & tombe au fond de la caifle, qui eft terminee par un entcmnoir de bois , garni d'une chauife , i travers h- quelle I'huile coule nette dans le baquet deftine ^ la recevoir •, le marc & les noyaux reftes fur la table cannelee, en font tires avec une efpece de ra- ble & traites i I'ordinaire , pour en titer une huile moins parfaite que la premiere, qui, comme on voit, n'eft tiree que de la feule chair des olives. Telle eft, mais dans un trcs-grandabrege, la conftrudion du moulin de M. Sieuve, au moyen duquel il parvient ^ executer parfaitement ce qu'il propofei c'eft par cette delcription qu'il termine fon ouvrage, dont I'objet eft trop intereffant pour ne pas meriter toute I'attention du public : I'exa- men qu'en a faitl'academie, I'a convaincue que les experiences de I'auteur etoient choifies avec intelligence & tres-multipliees , que les chofes y pa- roiflbient vues avec attention , fans precipitation , & toujours affurees par de longues ipreuves-, que tout y annon^oit un obfervateur zele qui a dirige eonftamment fes vues fur un objet utile, & qu'on a tout lieu de prdfumer que cet ouvrage fera favorablement regu du public^ C H Y M I E. 207 C H Y M I E. o SUR LE GIALLOLINO o u JAUNE DE NAPLES. N auroit peine \ croire , fl I'exp^nence ne le demontroit tons les ,,,,, jours, ijii'on ignore parfairement la nature & Torigine d'lme infinite de produClions de la nature & de I'art, meme de celles dont on fait le plus C h y m i e. grand ufage. A i CS Celle dont nous avons \ parler ici efl: certainenient de ce nombre; il ' * femble meme quelle rencherifle fur routes les autres en ce point, car au Hift. inoins I'origine de plulieurs drogues ufuelles qui nous efl: inconnue , ne I'cft pas dans le pays d'ou on les tire ; mais celle du giallolino ou jaune de Naples eft audi peu connue \ Naples, d'oii on le tire, qu'elle left icii un fcul particulier qui en a le fecret, prend toutes les precautions poffibles pour qu on ne puiffe le lui derober , & Jufqu ici il n'y avoit que trop bien reufli. C'eft done nn fervice eflentiel que M. Fougeroux rend \ la phydque eii lui devoilant la nature , jufqu'i preient inconnue , du jaune de Naples , & \ toutes les nations policees , en leur procurant chez elles-memes & ^ peu de frais, ce qu'elles etoient obligees de tirer dc loin & de Ictranger. Pour faire voir combien on etoit loin de connoitre la nature du giallo- Tino , il -ne faut que rapporter les opinions des differeos naturaliftcs fur ce fujet. La plupart des auteurs qui ont parle du giallolino , I'ont range dans la claffes des ceres, parce que fa pelanteur indiquoit qu'elle contc'noit un me- tal , & que , felon eux , fa couleur jaune dclignoit que ce metal etoit du fer. D'autres , & c'etoit Topinion la plus generalement re9ue , le regardent comme une produiftion du Vefuve ou des mines de foufre qui font dans fon voilinage, & prefque tous fe font exaiftement copies les uns les autres fur cet article. Le P. de la Torre le regarde comme un foufre detruit , & croit que la matiere du giallolino eft cette meme matiere jaunatrc qu'on trouve autour des crevalles du volcan \ nous avons fait voir d'avance com- bien il s'etoit trompc fut cet article {a). M. de Montami dans fon ouvragc (a) Voye* ci-delTuSji I'^cide du Vefuve, to8 ABREGlJ DES MEMOIRES poflhumc , penfe que c'eft un fafran de mars {oxmi par le volcan , $c qui a - acquis dans la terre oii il a re]ourni, les qualites que nous lui voyons-, d'au- C H Y M I E. j^gj ^^^ regards le giallolino comrae uiie terre bolaire. Celui de tous qui Ann^e 1766. a le plus approche de la verite fur ce point, eft M. Pott; I'analyfe chymi- que i laquelle il avoit founiis cette fubftance I'avoit affez eclaire fur fa na- ture pour lui donner lieu de penfer que c'etoit une produ(fi;ion de I'art , corame elle I'eft en effet : il refulte de tout ce que nous venons de dire, que prefque tous les auteurs , fi on en excepte M. Pott , ont regarde le jaune de Naples comme une produdioii naturelle, & la plupart comme un ocre martial. L'examen que M. Fougeroux en a fait, I'a mis \ portee de prononcer bien nettement, qu'il n'etoit ni I'un ni I'autre , majs une chaux metallique produite par le fecours de I'art •, & il eft li bien parvenu ^ en connoitre la nature, que fes recherches lui en ont entierement appris la compofition & meme la raaniere de le faire : fuivons-le un moment dans fes recherches. Le jaune de Naples nous eft envoye fous la forme d'une croute OVL pierre, epaiffe d'environ quatre lignes, pefante & compofee de grains pe- tits , durs & peu lies entr'eux. A la feule infpedtion on voit que cette ma- tiere a eprouve un feu long & violent, mais ce qu'il etoit aife de voir & qu'on n'avoit point remarque, c'eft que plufieurs de ces morceaux portent encore la figure des vaiffeaux dans lefquels ils ont etc moules, preuve evi- dente que cette matiere eft un produit de I'art. Les marchands de couleur le broient & le porphyrifent pour le met- fre en etat d'etre employe , & ce n'eft qu'apres avoir fubi cette prepara- tion qu'il devient doux & gras au toucher •, on I'envoie aufli de Naples fous cette forme. Cette pierre ne tombe point en efflorefcence ^ I'air, & n'afpire pas I'hu- midite dont il eft charge, elle eft beaucoup plus pefante qu'une fubftance terreufe ne le feroit fous pareil «-olume, ce qui fait bien voir quelle con- tient un metal -, elle refte quelque temps fufpendue dans I'eau & fe pre- cipite enfuite au fond du vafe , elle n'y fait aucune effervefcence, elle s'at- tache l la langue & abforbe avec avidite les liqueurs; tous caraderes ^ui indiquent que cette fubftance eft une chaux metallique, & que le metal a fouftert une violente calcination. Si on filtre I'eau qui a diflbus le jaune de Naples & qu'on la fafle eva- porer, on obtiendra une quantite de petites lames briilantes, qui s'attachent au vafe & fe difTolvent difficilement dans I'eau, c'eft-^-dire, des cryftaux pour cela il mit dans un creufet deux gros de terre vitriliable du borax , trois once$ de fel de Glauber tire du borax , & un gros de charbon^ ce nic- ii4. ABRECe DES MEMOIRES lange ctant mis au feu , le phlogiftiqiie dii charbon s'unit, comme i! I'avoit P _ _. bieii prcvu , k I'acide vitrioliqiie & forma un foufre qui fe brula , la bafe " ^ w 1 '• jj^j Cg] de Glauber devint done libre, & M. Cadet efperoit quelle fe Join- Ann/i 1 7 66. droit )l h terra vitrifiable pour former du borax , mais il n'obtint de cette operation que quelques cryftaux , encore aflez equivoques , de fel fedatif & un verre qui paroifloit noir , parce qu'il etoit en groue maffe, mais fon- cierement vtrt lorl'qu'on le fouffloit mince ^ la lampe d'cmailleur , & ce verre ^toit comme tous les verres metalliques oii il entre des fels ou du fa- ble, couvert dune croute faline. Ce verre & fa croute faline ayant ete piles , M. Cadet tenta de les dif- foudre dans I'eau , mais il n'obtint qu'une diffolution trcs-imparfaite , le verre pile refta prefquc enticr; I'eau avoit feulement pris une tcinte de vert trcs-fonce, & il fe trouva fur le filtre une pouffiere grife tenant du fou- fre-, c'ctoit apparemment ce dernier qui avoit noirci le poelon d'argent dans Icquel I'operation avoit ete faite. M. Cadet fit encore rebouillir la li- queur fur ces matieres, y ajoutant de I'cfprit de vitriol pour la rendre plus acide; le verre ne parut pas avoir fubi une grande dilfolution, cependant la liqueur fembloit avoir contrade quelqu'amertume, & effedivement quel- ques gouttes encore chaudes ayant ete mifes fur une lame de verre , s'y cryftaliiferent en aiguilles-, il refultoit del^ que la terre vitrifiable du borax n'avoit encore contradte aucunc union avec le principe faiin : pour efl'ayer de lui en faire prendre , M. Cadet fit bouillir dans cette liqueur deux gros de verre de borax pulverife , elle perdit un peu de fon amertume ; pref- que tout le verre de borax fe retrouva fur le filtre, & alors il ne parut plus d'aiguilles, & tout fe cryftaliifa en belies lames de fel fedatif. M. Cadet voulant fe procurer une plus grande quantite de ce fel, le fon- dit dans I'eau , y ajouta une once de fel de foude bien defl'ecbe, neuf gros d'huile de vitriol & affez d'efprit de vitriol pour rendre la liqueur trcs- acide; il fepara par le filtre une fecule bleue, venant du fer contenu dans la foude, il y ajouta un gros de terre de borax imbibe d'efprit de fel fii- mant, & la liqueur continua de donncr des cryflaux par ecailles •, ce fel fedatif foumis h la diftillation , donna d'abord quelques gouttes de liqueur legerement acide , il fe fublima bcaucoup de lei ledatif au col de k cor- nue, il fe forma enfuite un cercle noir k ce meme col, & il vint une li- queur jaune en petite quantite; celle-ci ne tomboit qu'avcc peine, & avoit une odeur fnlphureufe & penetrante, ce qui refta dans la cornue etoit un verre tranfparent qui ne differoit du verre de fel fedatif que par une plus grande acidite : ce verre fut dilTous dans de I'eau, & M. Cadet y ajouta le fel fedatif fublime & la liqueur acidule venue par la diftillation -, cette li- queur avoit une odeur abfolument femblable h celle du phlegme tire dil lei fedaiif, & elle verdiffoit comme lui la flamme de I'efprit-de-vin; ce phlegme participoit aulTi de I'efprit de fel , puifqu'il prccipita en lune cor- nee la diffolution d'argent par I'efprit de nitre. La liqueur ainii compofce , M. Cadet y ajouta encore un demi-gros de verre dc borax imbibe d'efprit de fel. Si. elle donna conftamraent des Y M I r. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ik cryftaux de fel fcdatif en ccaillcs, dm aiiciin mtlange de fel de Glauber; ;i ce fel en tenoit cepend:yit un peu qui fe faifoit reconnoitre par foil anier- p tune. M. Cadet fe fouvint que Ic (el fedatif fe diffolvoit tout entier dans " I'cfprit de vin qui ne touche point au fel de Glauber; au moyen de cctte Annie fjGS. propriety il fepara entierement de fon fel fedatif le peu de icl de Glauber qu'il contenoit, & il I'eut abfolument pur, & la petite quantite de fel de Glauber qu'il en lira fut une preuve incontcftable que la plus grande par- tie de celui qu'il avoit employe avoit ete converti en fel fedatif, i I'aidc de la terre vitrifiable du borax & des acides vitrioliqtie & niarin : void de nouvelles preuves de cette alTertion que rapporte M. Cadet. II a mis dans un creufet quatre gros de terre de borax & une once de fel de loude, & lorfque ce melange a etc fondu, il I'a retiri du creufet & I'a pulverife ; cette poudre a ete bouillie pendant une hcure dans I'eau , & il a verfe dans certe liqueur onze gros d'lniile de vitriol ; cet acide n'a pas produit tout \ fait la meme efFervefcencc que s'U n'y avoit eu que I'acide & lalkali feuls. M. Cadet a attribui cette difference \ ce qu'une partie de la terre vitrifiable s'etoit combinee nvec I'alkali de la foude pour former du borax -, & en eifct , il avoit trouve quelques cryftaux de ce fel dans la liqueur avant I'addition de I'acide vitriolique : la liqueur etant filtree , il eft demeure fur le filtre trois gros & demi de terre de borax , d'oil il fuit que I'acide n'en avoit dilTous qu'un demi-gros; la liqueur filtree a d'abord donne des cryftaux de fel ledatif , puis elle s'eft convertie en une gclee tranfparente qui , ayant etc diflbute dans une fuftifante quantite d'eau , a fourni des cryftaux de fel fedatif : la raifon qui a fait prendre cette forme gelatineufe i la liqueur, n'eft pas inconinie ^ M. Cadet, niais il la referve pour un autre mcmoire ; il refulte feulement de cette experience , que la terre de borax combinee avec la foude & I'acide du vitriol, produit du veritable fel fedatif, & que par confequent cet acide & cet allcili entrent ueceffairemcnt dans fa formation. Deux gros de verre de borax en poudre ont ete meles avec onze gros d'huile de vitriol , etendus dans une petite quantite d'eau -, il s'eft fait une ctTervefcence accompagn^e de chaleur, le tout ayant ete mis ^ bouillir dans douze onces d'eau , au bout d'un quart d'heure il y ajouta une once d'al- kali de foude, & continua encore I'ebullition un autre quart d'heure; la liqueur filtree donna quelques fenfitions d'acidite, & clle donna des cryf- taux de fel fedatif : en ajoutant dans une feconde experience du verre de borax imbibe d'efprit de fel , M. Cadet obtint du fel fedatif, mais cry;- tallife lingulierement ; les cryftaux avoient la figure d'etoiles & etoient ac- compagnis d'autres cryftaux qui reflembloient \ des eventails. II eft done bien certain que la bafe alkaline du fel marin entre dans la formation du fel fedatif, & quelle s'unit i la terre vitrifiable du borax ou \ fon verre meme, lorfque ce dernier a cie penetre de I'acide vitrio- lique ou de I'acide marin ; il n'eft done pas etonnant que le fel fedatif ait quelqu'amertumc, puilcue cette bafe, jointe \ I'acide vitriolique, forme toujours un fel amer ; il nc I'eft pas plus qu'il rcndc folubic la crcmc de ii6 A B R E G fi D E S M E M O I R E S 1;;:^:^;;:^=:^=: tartre , & qii'il forme avec pile une efpece de fel de feignette , comrae la J- obferve M. de Lailone, & la fciile imiltiplicite des principes auxciuels il " V M I I. ^^ ^^^^.^ empeche ce dernier fel de fe cryftallifer-, la terra vitrifiable & Annie tj66, metalliqiie dii borax retient avec rant de force , non-feulement I'acide mariii qui eft I'acide propre du borax , mais encore tons les acides & les alkalis qu'on lui prcfente, & les deguife fi bien qu'il eft prefque inipofllble de les en feparer & de les avoir fous leur propre forme. Le fel fedatif, joint ^ I'alkali du fel inarin , conftitue une efpece de bo- rax •, M. Cadet a tenti de regenerer ce fel par la combinaifon du fel fe- datif avec differens alkalis. II a pour cela mcle du fel fedatif avec I'alkali du tartre, il s'y eft forme du tartre vitriole, Joint i quelque portion d'un fel femblable au borax, mais ce fel en differe encore beaucoup -, il ne fe bourfouffle qu'avec peine , nefe fond qu'avec beaucoup de difliculte,& ne fe vitrifie qu'avec un affez grand feu. La meme operation faite avec le fel de foude, a produit line matiere faline ailez femblable au borax, excepte qu'il avoit une legere amertuine; celui- ci s'eft bourfouftle tres-facilement , mais il s'eft vitrifie avec peine , quoique plus facilement que le precedent, & ni I'un ni I'autre n'ctoient da borax veritable & n'ont pu ctre employes ^ fouder qu'avec une extreme difficulte. II ne reftoit plusi M. Cadet pour avoir rempli I'obiet qu'il s'etolt pro- pofii, que de prouver par des experiences decilives que I'acide vitriolique & I'acide marin entroient tous deux dans la compofition du fel fedatif. M. Bourdelin a etc le premier qui y ait appcr^u I'acide marin , mais cet acide lui a ichappe plus d'une fois fans qu'il put en deviner la caufe, il avoit feulement fait voir qu'il y exiftoit mafque commc dans le fel de fuccin. M. Cadet a trouvc que pour degager cet acide , il falloit furcharger la folution d'acide vitriolique , cet exces d'acide vitriolique s'emparant d'une partie de la terre vitrifiable, fait reparoitre I'acide marin qu'il en chafTc & I'oblige k fe montrer fous fa propre forme. M. Cadet a imagine de plus une operation extremement ingenieufe, qui prouve ^ la fois i'exiftence de I'un & de I'autre acide dans le fel (edatif. On fait que pour faire du fublime corrofif, on mele avec le mercure de I'acide vitriolique & du fel marin ■, I'acide vitriolique plus puiffant que I'acide marin, le chaffe de fa bafe & s'en empare, & celui-ci fe com- bine avec le mercure & fe fublime avec lui fous la forme du fublime corrofif. On fait d'ailleurs que le mercure combine avec I'acide vitriolique , forme une fubftance jaune , nommee turhith mineral; ii done les deux acides exiftent dans le fel fedatif, il ne falloit que lui ajouter du mercure pour obtenir I'un & I'autre. Pour y patveair, M. Cadet Joignit ^ dii fel fedatif du mercure preci- pit6 DP L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 217 f'lti per Je, on fans addition, car il ctoit bien plus aifs de les combiner ^—— — — cnfemble Ions cette forme, que fi le merciirc eiit etc coul.int. ^ La premiere operation ne lui donna que du turbith mineral, il fe fou- » '^ ^t ' -• vint alors que pour faire rcparoitrc I'acide marin , engage dans le fcl fe- Annce ii£6. datif, il falloit le (urcharger d'acide vitriolique ; dans cette vue il ajouta «•' au mcme melange, de I'akin qui, comme on fait, contient I'acide vitrio- lique, Joint \ une terre blanche', alors il seleva du fublime corroiif, preuvc cvideiite que le fel fedatif contenoit ks deux acides vitriolique & marin, puilqu'ils Ibnt I'un & i'autre neceliaires \ la formation du lliblime corroiif-, le relle de la diftillation contenoit du fel fedatif a moitie decompofd, de I'acide vitriolique ajoute lui rendit fa premiere forme, mais il tenoit en- core du fublime corroiif : il eft done bien certain que i'acide marin exiftoit dans le fcl fedatif, & que cet acide eft I'acide propre du borax. M. de Lalione avoit fait avec la terre de I'antimoine , une efpece de borax en I'unilfant i I'efprit de lei ; M. Cadet en a fait auffi de fon c6t6 avec Ic meme acide. II refulte de ce que nous venous de dire, que le cuivre eft un des principes du borax •, que I'acide de ce fel eft le fel marin & non I'acide vitriolique, comme on I'avoit communement penfii, que pour faire rep.t- roitre cet acide il faut fiirchargcr le fel fedatif d'acide vitriolique i que le fel fedatif n'eft point tout forme dans le borax comme on I'avoit cru juf- qu'iei •, que I'acide vitriolique ne iert pas feulemcnt ii feparer le fel fedatif de la bale alkaline du borax, mais que la plus grande pirtie entrc dans fa compohtion-, que I'acide vitriolique eft bie/i demontre dans le fel fedatif par le turbith mineral qu'il forme avec le mercure; que le borax contient une terre blanche & vitrifiable, qu'il eft trcs-eflentiel de lui conferveri que par cette raifon on doit, pour faire le fel fedatif, preferer le borax de Chine \ celui de Hollande ou de Venile, parce que le premier con- tient plus de cette terre-, qu'il faut, pour favorifer la formation du fel fe- datif, lurcharger la diffolution de borax d'acide vitriolique, fans quoi on tireroit plus de fel de Glauber que de fel fedatif-, que la bafe alkaline du fcl marin contenu dans le borax , entre pour beaucoup dans la texture du fel fedatif, & que c'eft \ elle qu'on doit la proprlete qua ce fel de rendre foluble la creme de tartre -, que les alkalis fixes , joints au fcl fedatif, for- ment une efpece de borax regener^, qui diftere a bien des egards du bo- rax naturel ; qu'enfin I'acide marin combine avec le verre mctallique du borax, forme un fel particulier trcs-different du fel fedatif, mais avec le- quel on peut regenerer de vrai borax i voili certainement un grand pas de fait vers I'entlere connoilTance de ce fel 11 rebelle & li lingulier. M. Cadet efpere aller plus loin & parvenir ^ faire du borax artificiel abfolument lemblable au naturel -, mais ce travail eft la matiere d'un autre nicmoirc que cclui-ci doit faire attendrc avec impatience. Tome XIV. Partie Fran^oifi. Ee C H Y M I I=. Annie ijGS. ii8 A B R E G £ DES MEMOIRES O B S E R V A T I ON S C H Y M I (^ U E S. I. JLVJ-r. Sage, apothicaire, a fait voir ^ racademk des cryftaux d'liti fel cuivreux, forme en laillint du ciiivre affez long-temps dans la diirolii- tion d'alkali volatil fait avec ralkali fixe : ces cryftaux lent oblongs & dil plus beau bleu; ils ont deux de leurs faces configurees de la meme ma- niere, avec quatre facettes fur chaque furface-, ces cryftaux expofes h I'air vcrdidcnt tres-promptement & perdent abfolument leur forme; la reflem- blance de fes cryftaux avec quelques mines de cuivre azurees , a porte M. >Sage k penfer que ces mines ne devoient leur couleur & leur forme qu'i I'alkali volatil qui les avoit penetrees ; mais trouvet-on an fond des mines un alkali volatil ? on eft communement perfuade que ce fel ne fe tire que des matieres animales dilToutes ou expofees h la putrefadlion : mais independamment de cet alkali volatil, M. Sage croit en avoir appercu u» autre qui fe degage en quelques occalions des matieres minerales , & il a cite I'exemple du foufre qui, mele avec de la limaille de fer & humecle d'ea^ , exhale des vapeurs qui paroiffent etre chargees d'alkali volatil ; cette efpece meme ne paroit pas avoir ete inconnue ^ Henckel , qui aflure I'avoir tiree des differens mineraux : quoi qu'il en foit, robfervation de M. Sage a paru d'autant plus digne d'etre donnee au public quelle peut contribuer k jetter lui grand jour fur une matiere jufqu'ici allez pen connue^ I I. On deconvrit en ^766, h Severac en Rouergue , terre appartenante i madame la marechale de Biron, une mine de charbon de terre fingnliere-, M. le mardchal de Biron en envoya des echantillons h plulieurs chymiftes, & defira d'avoir fur cet objet I'avis de I'academie : il refulte de Tanjlyfe qui fut faite de cette matiere par M. Cadet, de cette academic-, par M. Sage, duquel nous venons de parler dans I'article precedent; & par M. Baume , apothicaire de Paris , & bien connu par fa capacite en chymie , que le charbon de Severac eft compofe d'un charbon vegetal foflile, mele de vi- triol martial dont une partie meme eft formee en cryftaux dans le char- bon : deux livres de la matiere envoyee pour echantillon , ont donnc par h leflive quatorze onces de tres-bon vitriol purement martial & une tres- petite partie d'alun ; le rilidu a fourni dans la diftillation quelques vapeurs d'efprits fulphureux , un peu de foufre & quelques gouttes d'line huilc bitumlneufe, d'une odeur toute femblable ii celle de I'huile de fuccin; d'ou il fuit que ce charbon depouille de fon vitriol , eft un vrai bitume : cette mine mdrite done d'autant mieux d'etre exploitee que le vitriol martial quelle donne eft tres-pur, fe tire k tres-peu de frais, pourroit au TTE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, iij nioins diminiier I'importation de celui d'Angleterre , qu'oii tire en grande — ^^— ^■■— qii.intitd pour iin grand nombre d'arts pratiques eii Francx- , & qu'il yap tout lieu d'elpcrer qu'oii trouvera ^ une plus grande profondeur dc bon charbon dc tcrre. Anne'e lyS^- Cette annde M. d'Arcet, dodeur en mcdecine de la faculte dc Paris, Hift. communiqua 'i I'academie le refultat d'un travail trcs-long qu'il avoit fait Jiir I'aclion d'un feu igal & violent, continue pendant pLufieurs jours fur un grand nombre de terres , de pierres 6' de chaux metalliques , eJJ'ay^es pour U plupart telles qu'elles Jbrtent du Jein de la terre. On fait que dans le nombre dcs diftcrentes niaticrcs que la chymie foil* met ^ I'adion du feu, fon agent le plus ordinaire, il y en a qui la fou- tiennent fans fe fondre lorfqu'elles y font expofees feules , & d'autres, au contraire , qui y coulent & fe vitrifient ; les premieres ont ete nommces apyres infujihles on re'fraclaires , & la diftindion entre les unes & les autrcs , eft adniife par les chymiftes. Mais ne s'etoit-on pas un peu trop preflc d'admettre cette diftindion , & ne devoit-on pas au moins la reftreindre au degrc de feu que peuvent donner les fourneaux dont on fe fert ordinairement ? Le memoire de M. d'Arcet peut repondre h. cette queftion & fairc voir que la plupart de ces matieres rcputees infufibles , ceffenr de I'ctre dcs qu'on les cxpofe k iin feu egal , violent & continue pendant un efpacc de temps iuffilant. II a pour y parvenir, profitc du feu gradue & poufle ^ une grande vio-' lence dans les fours ou M. le comte de Lauragais' faifoit les elfais fur la porcelaine, pour y examiner diftcrentes matieres, dont les unes etoient re- gardees comme infuhbles , les autres comme fulibles ou vitrifiables avec addition , & d'autres enfin comme vitrifiables par ellcs-memes ou fans addi- tion d'autre matiere. M. Pott avoit travaill^ fur ce meme objet, mais fon fourneau etoit trop petit & trop mince , & il le chauffbit avec du charbon , dont le feu eft toujours bien moins vif que la flamme d'un feu de bois , foutenu plufieurs jours & pouffe k une grande intenlite : il ne faut done pas s'ctonner de trouver quelquefois de la difference entre les relultats de ce celebre chy- mifte & entre ceux de M. d'Arcet. Les matieres infulibles ou refradaires que M. d'Arcet a foumifes i (es cpreu^^cs, font les quartz, les pierres calcaircs, les argilles, le tripoli, I» craie de Briancon, le talc, I'ardoife, le nihil album minerale , les gypfes, la fclenite , le fel fedatif , le tartre vitriolc, les fpaths, les fables, les gra- nits, Tamianthe, \e Jijber montanum , les laves, les ponces & les autres Froduits des volcans anciens ou nouveaux, diftcrentes chaux metalliquea» antimoine de bifmuth , de zinc, le minium , la chaux d'ctain & la platine ; en voici les relultats. Les gyples qu'on avoit toujours regardes comme abfolument invitri- fiabies ians addition, ont tous coule leuls & donne des verres plus ou moins beaux & plus ou moins tranfparens, qui rongcnt & percent les creufcts comme le verre de plonib •, la fclenite qu'on rcgardoit audi comme Ee ij 420 A B R E G L' D E S M E M O I R E S — — ^i— — infufible, a coulc de meme que le fel fedatif, & I'line & I'autre ont donni ,, ^ un verre femblable k celiii du gypfe •, le tartre vitriole a fondii & forme " ^ ' ' ■ line maffe demi-opaque, blanchatre & friable. ^hne'e ij66. Les quartz & les plerres ou fables qui s'y rapportent , le cos turcica , le cryftal de roche , les grcs de Fontainebleau , le fablon d'Etampes ou de Fontchartrain , la picrre ^ fulil & un fpath qu'on dit entrer dans la com- pofition de la porcelaine de Saxe, ont cte abfolument infufibles fans ad- dition. Dans le nombre des pierres ou terres calcalres , M. d'Arcet n'a trouve que la chaux ordinaire, la craie, & un Ipath calcaire fervant de matrice i line mine de plomb , qui aient invinciblement refifte au feu , toutes les autres fe font vitrifiees plus ou nioins parfaitement. Les argilles trcs-pures, comme plulieurs argilles blanches, la terre \ pipe de Rouen, ont relifle \ la violence du feu, quand elles ont ete feules, iTiais la moindre quantite de terre metallique les rend tres-vitrifiables ; I'argille bleue des environs de Paris a forme une maffe femblable ^ une fcorie ferrugineufe ; celle de Montereau a un peu mieux refifte , toutes les autres n'ont point coule & fe font au contraire conliderablement durcies •, le tripoli , de meme que la craie de Briancon , ont donne des marques d'ane vitrification commencee', le talc,le mica rouge & le mica blanc ont donne les memes marques , & la maffe qu'ils ont formee a ete affez dure pour faire feu contre le briquet-, I'ardoile s'cft enflee en forme de fcorie, •pilee & remii'e au fu, elle a donne un email brun couleur de cafe. Les fpaths, tant fufibles que calcaires, ont tons fondii ^ un feu plus oil moins violent, & ont donne des verres, les uns tranfparens & les autres differemment colores , fuivant les diftcrentes terres metalliques qui peuvent y etre jointes •, le feul fpath , qu'on dit etre employe dans la porcelaine de Saxe, & le fpath calcaire tenant de la mine du plomb, ont rellfte all feu qui cuit la porcelaine, & le premier doit etre reporte dans la clafle des quartz-, le fable de Nevers, celui de la Garre, creulee pres de I'hopital general, le glared de I'iile aux Cygnes , les granits & fur-tout celui d'A- len^on, contiennent du fpath & ont tous coule & fourni des vitrifications plus ou moins complettesi cette fubftance blanche nommee medulla faxi , a fourni un fpath duquel on a tire un verre tranfparent, le refte etoit line argille blanche propre ^ faire de la poterie -, cette matiere differc par confdquent beaucoup de celle qu'on appelle lac luncs , qui eft* entie-: rement calcaire. Les laves , les ponces & les autres produits des volcans , ont tous fubi la vitrification , preuve evidentc que le feu qui cuit la vraie porcelaine eft bien fup^rieur h celui des volcans qui ont travaille les ponces & les laves. Dans le nombre des chaux metalliques que M. d'Arcet a eprouvees , il nc s'eft trouve que la feule chaux de zinc qui n'ait pas coule, elle s'eft abfolument dillipee ; toutes les autres fe font vitrifiees & ont donn^ des verres de differentes couleurs, celle d'etain fur-tout a donne un verre d'un beau jaune fonce,tres-egal & tres- tranfparent j ce verre eft d'unefigrande durete qu'il fait feu avec le briquet. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iir La pLitine, cette matiere ll liiigulicre qui a tant de caraiiteres conimuns avec Tor, a ite fonmife aiix experiences de M. d'Arcet, elle ne s'eft point fondue, mais les grains fe font colics; la maffe etoit auili noire que i'c- " ^ '"' ' ^• caillc de fer, & il sen derachoit une poudre noire fortcment attirable par Aiin^C' tjSA Taimant, ce qui lui donne lieu de conjcdurer qu'avec un trcs-grand feu on parviendroit k la calciner route entiere & ^ taire voir que cette mcr- veillcufe fubftaiice n'eH: pour la plus grande partie que du fer. Aprcs avoir examine ces ditfercntes matieres pre(entees feulcs au feu , M. d'Arcet les y a expofees combinees deux i deux , & enfuite trois a trois, commc avoit prccedemnient fait M. Pott -, on rttrouve encore ici des differences entre les refultats des deux chymiftes; la difference des feux pcut bien y entrer pour quelque chofe , mais une autre caufe pcut bien avoir audi contribuc h les produire : M. d'Arcet a dofe fes compoUtions par des mefures, tandis que M. Pott les dofoit par les poids ; il n'cft done pas podible de comparer les refultats de leurs operations comme on auroit pu faire C\ les matieres eullent ete de part & d'autre dofces de la memc maniere. Le mcmoire de M. d'Arcet n'en fera pas nioins utile pour tous ceuxqui voudront travailler k la porcelaine, ^ la vitrification ou aux emaux, il leur enfeigne k bien diftinguer les matieres vitrifiables par elles-memes de celles qui ne le font pas, & les fubftances qu'on doit joindre k ces der- nieres pour les rendre plus ou moins fufibles dans un feu violent. Ce memc memoire fiit voir que les naturalises fe font trompes en donnant pour pierres vitrifiables les cailloux , les pierres k fufil , les quartz & ie fablon, qui ne fe fondent que par I'addition des fels, & en regardant au contrairc comme infulibles des matieres qui coulent feules au feu, telles que le gypfe, la chaux d'etain & plufieurs efpeces de Ipaths : il fait voir que ces matieres peuvent fournir, fans I'addition d'aucun fel , des couvertes & des emaux, il donne au naturalifte des notions plus claires fur la fuhbilite des terres, pierres, &c. & leur enfeigne 4 les clailer d'une maniere plus precife rcla- tivement k cet objet ■, toutes connoilTances uniqucment dues au memoire de M, d'Arcet & aux decouvertes intereflantes qu'il y rapporte. 2ii ABRECE DES MEMOIRES C H Y M 1 E. .Amiii ilCiJ- ^^'' ^^^ ^^^^ qu'on retire des cendres des v^gilaux. Ilifc. I L n'y a peiit-etre que bien pen de perfonnes (\m ignorent que les cen- dres des veq^taiix contiennent un fei alkali, qu'on en retire en les lellivanti <:'eft-i-dire, en faifant paffer delEis une certaine quantite d'eau qui fe charge de ce fei, & ^ laquelle on I'enleve en la faifant evaporer, pour donner lieu k la cryftallifation ou i la defficcation de ce fei. Mais (i toutes les plaiites contiennent du fei alkali, elles ne contiennent pas toutes le raeme; la plupart des plantes qui croillent dans ce climat , fourniffent un fei alkali de la nature de celui du tartre , qui , comme ce fei, ne fe cryftallife point, qui comme lui tombe en deliquiurn ^ I'air, qui, joint ^ I'acide nitreux, forme un veritable nitre, avec I'efprit de fei, le fei de Sylvius , & enfin avec I'acide vitriolique , un tartre vitriols. La foudc, au contraire, plante qu'on recueille au bord de la mer , fournit un alkali qui fe cryftallife, qui ne tombe poin: en deliquiurn, qui forme avec I'efprit de fei un vrai lei marin , avec celui de nitre, un nitre qua- drangulaire, & avec I'acide vitriolique, un fei de Glauber. Cette difference vient-elle de la nature meme de la plante, ou doit-on I'attribuer au terrain qui I'a produite J I'une & I'autre opinion peut etre ap- .puyde de bonnes raifons; en eriet, les plantes difterentes, cultivees dans le imeme terrain , confervent chacune I'odeur & la faveur qui leur font propres: ■des plantes & des arbres meme, que M. du Hamel a elevcs dans I'eau pure, ont donne les memes principes que ceux qui avoient ete eleves dans la ■terre •, d'oii il femble qu'on pourroit conclure que la difference des prin- cipes que fourniffent les vegetaux, n'eft nullement due ^ la difference du terrain , mais £l celle de leur difpofition organique. D'un autre cote, le gout de terroir que contradent les fruits & les legu- mes dans de certaines terres , femble prouver que le terrain fournit aux plantes quelque chofe qui paffe dans leur fubftance, fans le denaturer :' les plantes qui croiffent fur les vieux batimens mines, donnent du falpctre en abondance, tandis que celles qui croiflent au bord de la mer, abondenc en fei marin, & que celles qui viennent dans des terres rouges & ferrugi- neul'es , fourniffent bcaucoup de fels vitrioliques. Pour lever cette incertitude, il fallcit trouver le moyen d'avoir une meme plante , elevee d'une part au bord de la mer, & de I'autre dans les endroits ijui en fuffent tres-eloigncs. Cette occadon s'eft prefentee, & M. du Hamel n'a pas manque d'en profiler. II apprit que M. Fontane , infpedeur des manufadrures de Poitou , avoit imagine d'ctablir au bord des marais falans de fa province, un femis confidsrable de kali, & qu'il s'etoit procure une quantite conlidcrable de bonne graine de cette plante : il engagea M. Trudaine ^ lui faire avoir une livre de cette graine , & il la fema dans trois ou quatre terrains de diffe- DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, iij rente nature, nuis tous titucs dans le Gatinois, & par confcqiicnt trcs- iloignes de la mer. La parite 6toit alors abfoliiment exafte dii cote des plantes, & l1 Ics pro- C h v m i t. diiits en etoient diflerens, on ne pouvoit s'en prendre qu'au terrain. ytrm^e i~C-i II s y trouva en ctiet dc la difference , la cendre du Ic.iii du Gatinois ^ ^ donna par la leflTve iin Tel, dont line partie fe fondoit a I'air, & cjiii, par fon mehnge avec Thuile de vitriol, donna un veritable tartre vitriole v i'autre portion de la mairc laline ayant etc diffoute dans I'eau troide filtrcc & cvaporee, donna dc beaux cryftaux de Tel alkali de la foiide. La ioude envoyee par M. Fontanne, ne donna qiie I'alkili que donnent ordinaireraent ies cendres de kali-, c'eft-k-dire, celui qui fert de bafe au fel marin , & qui , comine on vicnt de le voir , eft trcs-dilierent de I'alkali du tartre. II refulte done des experiences de M. du Hamel, que le kali ou Ibude ileve loin de la nier, tient unc efpece de milieu cntrc Ies plantes maritimes & cellcs qui naillent naturellement dans nos provinces , puilque ce kali a donne , outre I'alkali qui eft naturellement propre a cettc plante, un autre aiiali tout femblable a celui du tartre, tel que le donnent Ies plantes na- turelles de ce canton; d'oii il fuit que le terrain d'une part, & de I'autrff la nature des plantes, peuvent concoiirir a la formation des diiFcrcns fels qu'on retire des vegetaux. II reftoit encore ^ M. du Hamel i examiner, fi en femant la gralne de kali , venue dans ce cliniat, la quantite de fel de foude & de I'el marin qu'elle donne, ne diminueroit pas ', I'experience ctoit trop aifte i tenter pour etre negligee ; il a feme de la graine de kali qn'il avoit recueillie, & cette nouvelle recolte a donne Ies niemes produits , (i ce n'eft que le fel de la nature de I'alkali du tartre a paru y etre un pen plus abondant, & qu'en faifant le tartre vitriole :ivec I'eau-mere & I'acide vitriolique, il s'eft precipitc vingt-quatre grains d'un fel fembkble au fel fait avec le mercure & le vinaigre. Quoi qii'il en loir, Ics experiences de M. du Hamel font voir que Ic kali croit" trcs-bien dans I'interieur du royaume,& que, quoique la ioude qu'il donne foit un peu difftrente de celle du kali, crii au bord de la mer, elle eft cependant trcs-alkaline & trcs-propre ^ etre utilement employee dans Ies bianchilferies & dans Ies favonneries. Pendant le cours des experiences de M. du Hamel, & tandis que I'aca- demie etoit occupee de cette matiere , M. Cadet lut «n memcirc fur une foude d'une autre efpece , faite avec une plante marine , connue en Nor- mandie fous le nom de Varech, 8c en Bretagne foils celui de Goi'mort cu Sar. Gette efpece de fonde differe beauconp de la foude de kali , elle a nn gout tres-fale & une forte odeur dc foie de foufie , que n'a pas la foude de kali ; cette derniere .nyant , au contraire , uiie faveiir acre & btiilante. Comme Ics marcliands alterent trcs-fonvxnt la bonne foude avec cclle-ci, il ctoit trcs- important d'en connoiirc la nature, pour voir ce 12,. • A E He C E D E S M E M O I R K S qui pent relulter de ce melange, & cet examen a ^tc I'objet da travail de M. Cadet. C H Y M I I. g^jj. jj^ livres de cendrcs de varech , il a fait boiiillir douze pintes d eaii ; Annce l-G-. cette leffive ayant etc filtree & niife an frais, il s'y eft forme une pellicule, ^ ^' gj cette liqueur avoit une forte odeur de foie de loufre ; treiite-lTx autres pintes d'eau out palfe encore fur la terre reftante, & ess dernieres lelTives furent evaporees julqu'i pellicule. La premiere leffive portee au frais, donna des cryftaux trcs petits de tartre vitriole •, le rcfte de la liqueur fut joint aux autres lelTives. Pendant revaporation de ces le/Iives, M. Cadet obferva un phenomeiic fingulier -, la rpatule de fer avcc laquelle il remuoit cette liqueur bouillante, fe chargeoit d'un pr^cipite vert , qui , en perdant fon humidite , devenoit d'un rouge de mars : il ciDt alors que ce precipite vert etoit compofe d'une niatiere bleue, qui fe trouve prefque toujours dans la meilkure foude , Jointe k une terre jaune ferrugineul'e, & dans cette vue il verfa d.ins une partie de cette leffive, de I'acide nitreux, pour abforber cette terre qu'il foupconnoit; mais il fut bien furpris de voir paroitre des flocons jaunes, qu'il'reconnut pour de veritable foufre; il n'eut pas alors de peine i de- viner comment la liqueur qui contenoit du foufre & un alkili tartareux , avoit pris une odeur de foie de foufre, qui, comme on fait, n'eft com- pofe que de ces deux ingreditns. Cette meme liqueur filtree & cvaporee, donna \ la premiere evaporation des petits cryftaux, que M. Cadet reconnut ailement pour du fel mariii , mais qui avoient une affez forte odeur de foie de foufre-, la liqueur qui les avoit donnes paroilfant acre & alkaline , il jugea \ propos de Tevaporer Jufqu'i (kcite-, elle donna pendant toute cette evaporation une odeur tres- marquee de foie de foufre , & I'eau enticrement evaporee a laiffe un fel d'un gris fale & fonce, qui, pouffe \ un feu vif, devenoit d'un rouge brun ; ce fel avoit uiie faveur alkaline & falee : M. Cadet I'ayant diffous dans I'eaii bouillante, y a mele de la creme de tartre \ le fel n'en a abforbe qu'environ les trois cinquiemes de fon poids, au-lieu que le fel de foude d'alicante en auroit abforbe prefque le double de ce meme poids. La liqueur ayant ete feparee de la creme de tartre qui reftoit , fut eva- poree jufqu'^ pellicule, elle donna alors, par la cryftallifation , des cryftaux de creme de tartre qui etoient meles de quelques autres de fel marin : une feconde evaporation fournit une belle cryftallifation de fel marin, fans odeur de foie de I'oufrc, & il eft aife de voir que cette odeur lui avoit ete otee par la creme de tartre qui avoit decompofe le foie de foufre en lui enle- vant I'alkali. La troilieme cryftallifation , & toutes celles qui fuivirent, don- nerent du fel de Seignette pur, & il refta une eau-mere qui tenoit le milieu ' cntre celle du fel marin & cclle du fel de Seignette. II refulte done de ces experiences, que la foude de varech, differe beau- coup de celle de kali, i°. par le foufre quelle contient , 2°. par le tartre vitriole quelle produit, fel totalement etranger i la foude de kali; 5°. par la grande quantite de fel marin quelle fournit , & le peu d'alkali de foude qu'elle contient librc & dcgage de fon acide ; d'oii il luit que I'ufage en doit C H V M I E. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 115 dolt £tre profcrit dans les favoiinerics & d.ins les binnchi.Tcries. Dans Ics favoiineries, parce qu'ellcs exigent des cendres bicn clurgces d'.(lkili, &: flue celk-s de varech n'en contienncnt que fort pen i & d.ms les blanchif- ieries, parce que ccs cendres qui ne conliennent prc(qu; que du fi-1 marin , Annie V*7* ne feroient jamais une k-flivc aiTcz forte, & que d'ailleurs le fer qu'elles contiennent, & qui y eft demontre par le tartre vitriolc qu'elles donneiit, tacheroit le lingc & fur- tout le balin qu'on y cxpoferoit : ce dernier article a meme etc confirnic par rcxpericncc, la foude de varech employee feule n'a point fait de ledive, du moins propre a blancliir Ic linge, & oji a ith oblige dc le tranfporter promptement dans un autre cuvier & d'y verfer de la leflive de kali , fans quoi il auroit etc entierement tache & gate. La foude de varech, du moins dans fon ctat naturel, eft done inu- tile aux favonneries & aux blanchifferies, raais ellc peut fervir aux ver- riers ; le fel marin quelle contient en trcs-grande quantite , aide ^ la fulion des terres,& ^ la violence du feu, en enlerant I'acide, y lailTc line grande quantitc d'alkali. On pourroit encore tirer du fel de cette foude, de I'efprit de fel, & on auroit en ce cas I'avantage que le relidu de la diftillarion fourniroit du fel de Glauber , forme par la bale du fel marin & par I'acide du vitriol qui cxifte dans la foude de v.irecli. Ce fcroit cependan: un trcs-grand avantage,fi la foude de varech pou- voit devenir auffi bonne que la (oude d'alicante, on epargneroit des fom- mes confiderables qui pallent i I'etranger pour I'achat de cette matiere : M. Cadet ne croit pas la chofe impolTible, il a deji fait fur ce fujet quel- ques tentatives qu'il compte fuivre •, le moyen le plus fur, felon lui, fcroic de joindre au varech d'autres plantes marines cultivees i terre & moins chargecs de fel; celles-ci feroient ^ la fois deux eftets avantageux , elles fourniroient de I'aDcali , & la matiere inflammable qu'elles contiennent en_ plus grande abondancc, faciliteroit la decompoluion du fel marin, & la bafe de ce fel qui eft le veritable alkali de la foude s'y trouveroit en bien plus grande abundance ; mais pour opcrer cette calcination d'une manierc plus parfaite, il feroit neceflalre de fe fervir de la troiileme conftrudtioii de fourneau donnee par M. Fontanne ; ce fourneau eft trcs-limple , on fait dans un terrain clcve & expcfe au vent, un folfe de cinq ^ lix pieds de long, profond de dix-huit pouces & large de quinze ; on enduit les pi- rois & le fond de ce folTe d'argille melee avec du (able. On pole demis des barreaux de fer en travers, i deux pouces I'un de I'autre, & on eleve autour fur le terrain un mur d'environ quinze ou dix-huit pouces de hau- teur-, le feu s'allume au fond de ce folTe que nous nommerons le four , ^ quand il eft bien allume , on emplit de kali I'efpece de cheminee for- nicc par le mur,il fe confurae & tonibe en cendres ^ travers les b.irreaux: on continue la meme manceuvre jufqu'a ce que les cendres touchent aux barreaux, alors on lailfe eteindre le feu, & quand tout eft refroidi on de- truit le four pour en tirer la f^ude. C'eft dc cette maniere que M. Cadet croit qu'il faudroit briiler le varech mels avec d'autres plantes pour en tirer de bonne foude, ce' feroit un Tome XIV. Fanie Frar..oiJc. I i C 11 Y M 1 E, AnnJe tjGj, ii<5 A B R E G E D E S Jl E M O I R E S 1 avantage confiderable, mais M. Cadet n'a pas encore fini ce travail, & il doit faire la matiere dun autre memoire, il s'efl contente de faire voir dans celui-ci la poffibilite d'y reuflir. Surl'aclion d'un feu violent de Charborij appUqu^ a plufieurs Terres , Pierres & Chaux metalUques. Uifi. X^ ous avons rendu conipte, {a) I'annee demiere, d'un mimoire que M. d'Arcef, dodeur en medecine de la faculte de Paris, lut ^ I'academie ^-peu-pres fur le meme fujet, & duquel il refiilte qu'une infinite de terres & de pierres qu'on avoit julqul prefent regardees comme refraftaires & infulibles, ne fe iont point, & qii'un feu d'une force & d'une diiree fufti- fantes, les pent mettre ou en fulion ou dans uii dtat trcs-approchant de la fuiion. M. d'Arcet avoit profite, pour fes experiences, de la chaleiir trcs-vive & trcs- long-temps foutenue des fours ^ porcelaine de M. le comte de Lauraguais ; mais les travaux qu'il avoit entrepris, meriteient d'etre fui- vis, & les fours de M. le comte de Lauragais ayant ceffs de travailler, M. Macquer a cru devoir eflayer de produire au bout de quelques heu- res , dans un fourneau i charbon , le meme degre de chaleur que don- noient les fours ^ porcelaine oii Ton fe fert de bois apres plufieurs jours de feu contitniel. Le fourneau dont fe fervit M. Macquer etoit prefqu'abfolument fem- blable ^ celui dont il avoit donne ia defcription en 1758 (/')> dans (on memoire fur les argilles , il n'en differoit que parce qu'il etoit un peu plus fort & un peu plus grand , & que fa conllrudion dtott telle que fans le fecours d'aucun foufflet, il s'tebliffoit un courant d'air qui entroit par fon ouverture inferieure , traverlbit le foyer & fortoit par un long tuyaii qui lui fert de cheniin^e, qui augmentoit extraordinairemeiit I'adivite du feu. Comme il etoit principalement queftion d'examiner fi ce fourneau pour- roit donner en peu d'heures un degre de chaleur egal i celui que don- noient les fours ^ bois chauffes plulieurs Jours de fuite , M. Macquer ex- pofa k I'adiion du feu de fon fourneau les memes matieres qui avoient fubi i'adrioii des fours de M. de Lauragais , c*eft-a-dire , les chaux blanches d'an- timoiiie & d'etain, & le gypfe pur, auquel il joignit une pierre venue de Norwcge de la nature de la craie de Briancon , un fpath tres-dur tini du granit d'Alencon , une argille blanche trcs pure depouillee de fon (able, la meme avec fon fable, & un morceau de craie de Champagne. Toutcs ces matieres reconnues pour tres-refradtaires , furent mifes cha- cune dans un petit creufct , & tous ces creufets ious une nioufle d'argile (j) Voyez Hift. i-6 par les experiences precedentes ; mais pour profiter dc la pljce on y en " ^ '"'' ' ^' mit plii'ieurs autres , comme dc I'.imiante dcs Pyrenees, line pierrc dure, Ann^e l^G-^, cryftallifee en cubes, tirce du cabiiH-t de M. dc Malesherbes -, de la craie blanche & de la craie verte de Briincon , un asbefte venant du Nord , un fpath calcairc qui fe trouve entre Lyon & Grenoble , du tripoli , du liege de montagne, du talc de Molcovie, un fpath durjfcpare d'un gr.init des environs de Chefy , un morceau du meme granit , & une pierrc qui paroit de la nature de I'ardoile, tiree du cabinet de M. de Malesherbes. Le feu fut continue pendant cinq heures , & tout fe trouva en bon ^tat i la fin de Toperation , fi ce n'ell que le grand creufet qui contenoit tous les petits, s'etoit, on ne fait pourquoi, incline fur le cote, & , par confequent, elosgnc du centre du foyer, ce qui avoit dii diminuer I'etfct du feu. Malgre cette diminution , toutes les matieres qui y avoient etc expofees etoient fondues, & plulieurs vitrifiees en tout ou en partic; la feule pierrc dure en cubes avoit relifte , elle n'avoit recu d'alteration que dans fa cou- leur, qui avoit beaucoup blanchi, mais elle n'avoit pas etc fondue, ni menie pris la moindre difpolltion 'k la fuiion , dans aucune de fes parties. II refulte de toutes ces experiences, que le four ^ charbon de M. Mac- quer a prodiiit en peu d'heures les memes efiets que le four ^ bois dont s'etoit lervi M. d'Arcet, avoit produits, aprcs plulieurs jours de feu, & qu'on peut, ians le fecours des foufflets, obtenir, avec un pareil fourneau , en cinq ou lix heures de temps , une chaleur egale ^ celle que donnent les grands fours ; ce qui peut infiniment faciliter les experiences de cette nature , & que M. Macquer avoit eu principalement en vue. Ccs fourneaux meritent done la preference fur ces derniers, mais ils la meritent encore fur les fourneaux ou le feu eft excite par des fouftlets,& meme fur les verres & les miroirs ardens -, fur les fourneaux a fouillets, parce que I'adion brufque & turbulente du feu dans ces fourneaux, a la- quelle aucun creufet ne peut relifter, quand il eft dans fa plus grande force, ne manque prefque jamais detroubler les experiences, & d'en rendrc les relultais incertains ■-, 8c lur les miroirs ou verres ardens , parce qu'inde- pendamment de la dirticulte de tenir les matieres ^ leur foyer , ils font encore fujets a un plus grand inconvenient, qui eft I'inegalitc de leur adion furies corps, h raifon de leur coulcur & de leur poli, qui, comme on Voit, n'ont aucun rapport ^ leur plus ou moins grand degre de fuiibilitc. Le feu de charbon des fourneaux \ vent, doit done etre prefcre , parce qu'il fe gradue de lui-raeme, & que le courant d'air qui I'anime traveile toutes les parties du foyer avec beaucoup d'egalite, & fait monter la cha- leur en bien moins de temps , au meme point que dans les fours i flamme. Le feul inconvenient anquel ils foient fujets, clt qu'ils fatiguent davan- t.ige que ces derniers les creufets ou etults, par le poids & Ic contacl du charbon J mais cet inconvsnient, auquel on peut ai'cment parcr , par b 4 » 230 A B R E G E D E S M E M O I RE S choix de ces valireaux, n'ell pas comparable a la facilite que procure la promptitude de leiir adion , qui peut infiniment fervir k multiplier les C II V .'•! 1 £• experiences, & ^ la grande diminution de la depenfe qu'exigent les fours Ann^e zvfi'r. ^ bois. Les fours propofes par M. Macquer, font dope un veritable prelent qu'il fait a tous ceux qui auront h tenter des experiences de cette efpcce> & lui donuent un droit reel it leur reconnoiffance. Sur I'Eau min&ale de I'abbaye des Fontenelles en PoitoUj ^ fur la nature de la Sde'nite. Ujft. X_iES eaux mincrales font des remedes fouvent eflficaces, pr^pards par la nature meme-, mais plus on a lieu de compter fur leur fecours, plus il eft iiecefiaire d'en connoitre, pour ainfi dire, la compolition , afin de n'en ordonner I'ufage qu'i propos & dans les cas convenables ; il eft done im- portant , lorfqu'on dccouvre quelque nouvelle fource de ces eaux , d'exa- miner avec fom les qualites de ce prefent de la nature, pour ne pas le rendre funefte par notre imprudence; c'eft precilement ce que M. Cadet a eu en vue dans I'examen qu'il a fait d'une eau niinerale qui s'eft trouvee en Poitou , prcs I'abbaye des Fontenelles , ^ environ douze lieues de la met. Cette eau \ la fource meme eft extrcmement claire; cependant on voit continuellement nagjr lur ia furface une efpece de rouille en forme d'c'cu- me •, celle qui fut cnvoyee ^ M. Cadet etoit claire & limpide, elle avoit feulement depofc au fond de la bouteille un peu de poudre jaune, elle n'avoit aucun goiit ferrugineux , & paroiffoit auffi douce & audi legere que I'cau de Seine filtree. La premiere epreuve ^ laquelle M. Cadet la foumit , fut d'y verfer quelques gouttes d'huile de tartre par defaillance, qui la troublerent, & !ui donnerent un ceil d'opale , preuve qu'elle contenoit une matiere feleni- teufe, dont I'alkali du tartre avoit abforbe racide,& fait reparoitre la terre qui fcrt de bafe ^ cette efpece de fel. L'alkali volatil nc lui donna aucune nuance de bleu qui put indiquer la prefence du cuivre , & la lame de fer poli qu'on y plongea , n'y prit pas de couleur de cuivre. La noix de galle ne lui donna aucune nuance de violet qui piit y faire foupconner du fer; nous verrons cependant bientot qu'elle en contenoit, & on ne doit pas toujours conclure qu'une eau ne foil pas martiale , parce que la noix de gallc n'y decele pas le fer. En evaporant cette eau , elle fe trouble & ne s'eclaircit qu'en precipitant une poudre jaunatre, qui a paru ^ M. Cadet etre produite par un fer trcs- divife & prive de fon phlogiftique : I'eau evaporee jufqu'i liccite a laifle du fel marin au fond dc la capfule. La quantiti de cette eau qu'avoit recue M. Cadet , etoit trop petite pour que fes experiences fuflent concluantes, & commc I'cloignement ne DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIEXC!IS. 151 liii pcrmcttoit pas de fe rcndreil.i foiirce, il ecrivit qu'on en fit evjporer environ cent pintes, jiifqii'^ cc qu'clles fulFcnt reduites a une piiite , con- fcrvant avec foin dans cetre pinte tout ce qui fe precipiteroit dans le vail- feaii pendant ['evaporation. ' Cette can ainii concentree liii fut cnvoyee dans une bouteille bicn bon- chce •, la liqueur ctoit claire , niais il y avoit au t'ond un dc^ot conh- derable. M. Cadet agita la bouteille pour meler le tout, & le verfa fur un filtre-, la liqueur filtree stoit d'une coulcur citrine, & Liffoit fur la langue une imprellion de Icl m.irin ; elle fut mile en evaporation dans un vailTeau de verre : vers le milieu de cette operation , M. Cadet y appercut un grand nombre de feuillets talqueux, craquetant fous la dent, & ne donnant au- cune marque de caradere lalin , en un mot de cette matiere connue par les chymiftes fous le nom de felenite , & qu'on croit communtfment etre une elpcce de fel , forme par I'acide vitriolique , uni k une tcrre calcaire : nous verrons bientot ce qu'il y .1 a rabattre de cette idee. La felenite que contenoit la liqueur, en ayant ete enlevee, I'cvaporatioti fut continuce-, il s'y forma une pellicule, compolcie de pctits crylfaux de fel marin trcs-reguliers,qui fe prccipitoient au fond, & lorfqu'clle eut celTc d'en donner, il refta une petite quantite d'une eau-mere, lemblable a cellc qui refte aprcs la fabrication du lei marin-, avec I'aikali fixe, on prccipite de cette eau-mere une terre blanche calcaire, de la nature de cellc que donnent les eaux de Sedlitz , le lei d'Eblom & le nitre : quoique cette derniere foit difterentedcs deux autres, en ce qu'elle eft: en partie calcaire, au-lieu que le precipite des deux fels n'eft que la bafe alkaline du fel marin , niais tres-alt^ree •, elle donne avec I'acide vitriolique un lei de Glauber , filus amer que le fel de Glauber ordinaire, & qui fournit un precipite par es alkalis fixes, ce que ne fait pas le fel de Glauber prepare avec le lei marin ou avec I'aikali de la foude. Le depot de ces eaux paroilfoit ocreux , quoique I'eau ne donnat aucun gout ferrugineux ; mis dans un creufct au feu de forge, il fe convertit en une poudre d'un affez beau rouge : pour s'affurer li cette terre etoit mar- tiale, M. Cadet la mela avec de I'huile de lin cuite, & la diftilia dans une cornue de verre lutee : le feu ayant etc pouUe julqu'4 fondre la cornue , il refta une poudre noire attirable par I'aimant-, cette poudre ayant etc me- lee avec I'huile de vitriol , s'eft dilfoute avec chaleur & effervefcence •, la didolution etendue dans I'eau & filtree enfuite a pris une couleur violette «jui a bientot pafle au noir , & a donne par I'evaporation , du vitriol de mars. II itoit done bien conftant que le depot de ces eiu\ etoit ferrugi- neux, quoiqu'il n'cn eut d'abord donne aucune marque; pour s'alfurer s'il lie tenoit pas du cuivre, M. Cadet employa une autre methode que cellc oe I'aikali fixe , qu'il avoit dcpuis long-teuips fait voir etre infidele", il fit dilfoudre ce vitriol de mars dans de I'efprit de vitriol dont il etoit sur •, il y joignit deux fois autant d'efprit de vin reclifie , & ayant trempc un pa- pier blanc dins le melange, il I'alluma -, la flamme ne donna aucun indice de couk'W ver;e,.d'ou il fuit que cette cau ne coaticnt pas le moin- C H Y i5i ABREGf DES ME MOIRES 'dre atome de cuivre, qui n'auroit pas manque de colorer la flamme en vert. Le rouge que prend le depot des eaux des fontenelles , par la calcina- Annii tjS-j. tion, lui fit juger que cette terre pourroit etre employee avec fucccs dans la peinture en dmail-, il I'aviva avec I'huile de vitriol blanche, & apres I'a- voir fcchee Sc calcinee fous une moufle , il rempioya fur un morceau de belie porceliine avec le fondant ordinaire-, elle le fondit & donna le beail rouge de mars au morceau de porcelaine. On avoit auCfi envoys ^ M. Ca- det une certaine quantite du depot ccreux , qui fe trouve ^ la fource meme; il s'en eleva pendant la calcination une grande quantite de vapeurs acides fulphurcufes & trcs-pcnctrantes, & il refta un veritable colcotar. L'eau minerale des fontenelles contient done du fer tres attenue & priv^ de la plus grande partie de fon phlogiftique, elle le prend vrailemblable- ment en pallant fur quelques pyrites ferrugincufes ; elle contient encore du fel marin , puifqu'on Ten rttire en nature , & qu'enfin elle contient de la fclenite : cette derniere eft due, felon M. Cadet, ^ une partie de la terre vitrifiable, qu'il croit etre contenue dans ces eaux, & qui, s'uniffant \ I'a- cide vitriolique, oblige le fer de fe pr^cipitcr-, d'oii il luit que ces eaux ne peuvent etre tranfportees , & qu'il faudra les prendre fur les lieux. Les in(idecins du pays les regardent comme aperitives, bonnes pour I'eftomac, cfficaces contre les maladies de la peau & contre les coliques nephretiqu.s. Ce que nous venons de dire fur la formation de la lelenite qui fe trouve dans ces eaux , ne s'accorde pas avec I'opinion commune qui compofe uni- quement cette fubftance de I'acide vitriolique, joint \ une terre calcairej mais M. Cadet a cm devoir s'en ecarter, & voici les raifons qui I'y out engage. Les eaux des rivieres & de la plupart des fources , paffent ^ travers des lits de fable, & elles en entrainent avec elles des portions fi fines, qu'elles paffent i travers les pores du filtre, & ii on y verfe quelques gouttes d'.^- cide vitriolique, elles donnent apres quelque temps de digeftion & d'e- vaporation , un fel en aiguilles foyeufes; or ce fel n'a surement pas pour bale une terre calcaire , le fable etant de la nature de celles qui iont fuli- bles & vitrifiables. La nieme chofe s'opcrera , fi au lieu de meler avec I'eau de I'acide vi- triolique, on y mele de I'acide nitreux ou de I'acide marin; la felenite n'eft done effentiellement compofee ni de I'acide vitriolique , ni d'une terre calcaire, puifqu'une terre vitrifiable, jointe indifferemment aux trois aci- des, a produit de la felenite ^ filets foyeux, & c'eft vraifemblablement 4 la formation de la felenite qu'on doit attribuer la feparation & la precipi- tation du fer qui s'opere dans les eaux minerales, la terre vitrifiable ayant {ilus d'affinite que ce metal , avec I'acide du vitriol qu'elles contiennent , e lui fait abandon ner. Quelques-unes de ces eaux cependant confcrvent encore du fer apres qu'on en a enleve la ftlinite ; mais ce fer reftant n'eft du qu'^ la grand<^ quantite de ce metal dont elles etoient furchargees , & cette quantite eft telle, que M. Cadet en a tire du bleu de Prnffepar les precedes ordinaires. Les DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 153 Les eaiix les plus pures donneut un fcdiment terrcux , mcme ^ la ving- ^—^ ^— °— tieme diftillation , nous en avons dit la raifon ci dclTus (a), & il y en a *-. <^ui, bien que trcs-cbires & trcs-limpidcs , dcpofen: pend.int Icbullition une (i grande quantite de ce principe terreftre & falin , qu'on ne p?ut s'em- Ann^e tjGj. pecher d'etre ctonne que Itur iinipidite n'en foit pas altcrce-, I'eau du grand puits dcs invalides eft de ce nomore, & il y a bien de I'apparence que I'ac- croilTemcnt des plantes dans I'cau, dont nous avons parlc ci-dellus (b), u'eft du qui cctte matiere terrcufe , li intimement unie a I'eau qu'cUe paflc tvec elle par le hltre, & nc I'abandonne pas memc du moins en entier, dans les diftillations les plus rciterees : il fe trouve done , dans prclque toutes les eaut, de la terrc ritrifiable ou calcaire, & il feroit encore plus difficile d'en trouTer qui ne contingent pas un ou deux , & quelquefoLs les trois acides mineraux ; M. Cadet les a irouves dans quelques-unes ■■, luais voici encore d'autres preuves du fentiment de M. Cadet. II a triture du verre commun, Jufqu'i le rcduire en poudre impalpable," le verre en cet ctat s'hume^te avcc I'eau , fe petrit comme la glaile & eft Jttaquable par les trois acides mineraux, & par quelqu'acide qu'aient etc faites les diffolutions , elles one donnc par la cryftallifation de la lelenitc «n filets foyeux : or il eft bien certain que la terre du verre eft vitrifit- ble, puifqu'elle a etc vitrihfe; done il peut y avoir de la fclcnite formce par une terre vitritiable unie \ I'un des trois acides mineraux. L« hafard procura encore a M. Cadet rimitation de k nature dans la produ Pia quatre ou cinq onces de bile hutuaines cette quantitene pemiettoit pas d'&endre beaucoup le travail', voicice que meffieurs Pia & Cadet obferverent fur oette matiere. Cette bile, fans avoir une odeur fetide , «n e^aloit cependant une fadis & defagreabJe-, expofee dans nvte cornue i xm feu medioa-e, elk te bour- foufle promptement en groffes bulks & paffe prefqu'entierement dans k recipient -, mais fi par une lente evaporation on la prive de lair qu'elle con- tie nt , elle fournit par ia diftillation une trcs grande quantiti de flegme , an pcu d'alkali volatil & beaucoup d'huile animate. L'efprit de fel verie fur la 'bile y a produit une legere effervefcence , lii- ^uelie etant paflee, on a filtre ce melange, & on I'a etendu avec un peii d'eau diftilleei la Kquenr etoit alors tranfparenle & d'un beau vert s en I'i- vaporant lentement elle a donne nne pellicule faline , qu'on a recueillte avec foin-, cette pellicule fcchee & melee avec de la chaux vive, a donne, des qu'on I'a humcaie d'un pea d'eau, une odeur tres-penetrante d'alkali volatile ce qui prouve que la pellicule itoit un vrai fel amthoniac, forme par I'acide marin qu'on y avoit mile , & par I'alkaU Tolatil qu'avoit founii la bile. Qiielque bien f.iites que fuffcnt ces experteiKes, elks partircnt faites trop en petit j & les commiliaires que 1 acaJcmie avoit noir.mes pour DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 15,- FcTamen du mimoire de M. Bordauve, .psriirent, en approuvant fes ▼lies, dcfirer qii'on en fit d'amres plus en grand & plus dccUives , qui _ pufFent mcttre les phyficiens en ctat dc porter un jugement certain i'lir I'o- ^ ^ "^ '^^ ^ rigine de la bile, k\r fes propri^tes & fur les alterations qu'elL- fubit &• ytnne'e inG-j qu'clie prodiiit -, & M. Cadet qui avoit deji eu grande part aiix premieres experiences entreprit ce travail : comme il auroit eti difficile de fe procu- rer une aflez grande quantite de bile humainc fraichc, M. Cadet employi celle du bceuf •, & c'eft fur cette derniere que fes experiences ont etc faites. Avant que de penfer \ de nouvelles experiences, M. Cadet crut n^cel- faire de confulter les aiiteurs qui avotent traitc la meme raariere , & de voir ce qii'ils avoient fait fur ce fujet. Ceux qui ont pnrle de la bile ne font pas d'accord fur fa nature; les uns y admettent de I'acide & dc I'alkali •, &• d'autres fans rien decider fur \x nature des fels, la regardent comme compofe de parties (alines & hui- leufes. Verrheyen , un des phyhciens qui s'eft occupc dc cette recherche, deflifcha & calcina de la bile, & la lefTive de la cendre donna un fei al- kali : cet anatomifte doutoit cependant (\ cc fel etoit I'onvrage du feu oil Tun des principes conftituans de la^ bile •, la couleur verte que la bile prend lorfqu'elle eft melee avec le (irop violat le faifoit pcncher vers le dernier (entimenf, mais il eft evident que cette experience ne conclut rien, Ic jaune de la bile devaiit ncceffairemait &■ independamment de tout alkali, produire avec lb bleu une couleur verte •, iln'avoit garde non plus de di- terniiner la nature de cet allcali , qui eft , comme nous le venons bientot, la bafe du (el marin , qu'on ne connoiflbrt pas alors pour un fel de cette efpece : la faveur fucrce que donne la- bile epaidie par rcvaporation , puis diffoute dans I'eau & qui tient \ un autre fel que contient la bile, n'a- voit pas non plus ichappe \ Verrheyen. L'alkali volatil- que les premieres experiences de M. Cadet hii avoient fait reconnoitre dans la bile , n'eft point un de fes principes conftituans.; & il a reconnu depuis qu'il n'eft dii qu'i une fermentation putride fponta- nee qui ne peut avoir lieu dans le corps animal vivanr. M. Marbricd, dans fon ouvrage fur la nature & les proprietes de Fair fixe , dit que la bile de bccuf ne donne aucun llgnc d'allcali ; cependant ayant diftille au feu de lampe de la bile de bceuf gardee dans une bou- teille pendant deux ou trois mois , elle a fourni un efprit volatil piquant & d'une odeur fitidc, fur quoi il obfervc que I'allcali provcnant des fubf- tances putrides , eft d'une odeur plus dcfagreable , mais raoins piquante, que celui qu'on tire par le moyen du feu de celles qui ne Ic font pas; I'auteur de I'effai fur I'hiftoirc de la putrefadion , juge que les acides ve gctaux & mineraux agilfent ^-peu-pres de Ja meme msni-re fur la bil & en fcparent les flocons huileux •, mais ce qui eft bien fingulier c'eft qu les alkalis fixes & volatils operent la meme (cparation que les acides quoi- qu'en moindre abondance, & que ces derniers flocons font plus iufcep- tibles que les premiers de fe diffoudre dans Feau; il cbferve aufli que de la dticompofition des felj \ bafe tcrrcufc ou mitallique par la bile , il I'i- Gg i) E. lie i'y6 A B R E G E D E S M E M O I R E S fulte quelle coiitient un alkali qui a plus d'afEnite avec I'acide de ces fels qu'il n'en a lui-meme avec les fubftances terreufes ou mctalliques , puil- C. H Y M I E. ^i^j.jj abandonne ces dernieres pour fe joiiidre i cet alkali. Tel titoit I'etat Annie 11 Sj. '^*^ connoiflances qu'on avoit fur cette matiere quand M. Cadet a entre- pris le travail dout nous allons effayer de domier une idee : mais en em- ployant dans fes experiences au-lieu de la bile humaine celle de bcruf qu'il pouvoit avoir plus aifement ■■, les trois acides mineraux furent I'uccel- uveraent meles avec cette fubftance. L'acide marin mele avec la bile au vingt-quatrieme de fon puds, la coagule d'abord , & il s'en exhale une odeur I'enfible de foie de foufre y mais peu d'heures aprcs ce coagulum fe diffout & devient affez fluids pour pafler aifement par le papier gris , il fe depofe fur le filtrc une matiere tlanchatre gelatineufe , qui nageoit dans le fluide & qui en avoit pris une legere teinture verte : cette fubftance eft purement animate & donne cb brulant une odeur de corne brulee ; la Kqueur filtree eft d'un beau vert, elle a donne par I'evaporation un precipit^ femblable h de la poix noire, mais qui n'avoit cette couleur que parce que fes parties etoient trcs-rap- prochees-, car il coloroit en vert le papier & le bois blanc; ce precipite fc petriffoit fous les doigts comme de la cire molle , & prenoit trcs-bieii I'empreinte d'un cachet : la liqueur a fourni par une feconde evaporation un fecond precipite pareil au premier, alors elle a perdu fa couleur verte, & eft demcuree d'un jaune de petite biere; fon g3ut en cet etat fe trou- voit trcs-acide : on y reconnoiffoit celui de I'efprit de fel qu'on avoit em- ploye , elle faifoit fur une pierre de liais une eftervefcence afl'cz vive , ce qui fit connoitre \ M. Cadet qu'il y avoit encore de I'efprit de fel libre-, jl y ajouta de nouvelle bile qui produifit les memes phenomenes que la premiere ; alors la liqueur ayant ete evaporee elle a donne un fel blanc ei> petites aiguilles , puis ayant ete verfee par inclination & evaporee de nou- veau , il i'e forma une pellicule & un fel brun ayant la fiveur & le gout du fel marin, decrepitant fur les charbons, en un mot un vrai fel marin bruni par une partie graffe qu'il retient obftinement , & forme par l'acide ma- rin , qu'on avoit employe, joint h I'alkali de fa bafe qui exiftoit dans la bile. M. Cadet y reconnut aulTi des cryftaux en trapeze qui avoient la faveur du fel qu'on nomme fucre de lait. L'acide nitreux a ete de meme joint ^ la bile, mais celle-ci 6toit gelee', & il a fallu couper les veficules pour Ten tirer -, la gelee en avoit leparc \e ferum en petits glacons tranfparens minces, fans couleur, fans odeur & fans gout, le refte etoit feulement epaiffi. M. Cadet I'ayant mife en. cet etat dans un vaiffeau de verre fur un fable mediocrement chaud , I'efpnt de nitre verfe deffus s'eft teint en un beau rouge tirant fur le violet, qui ^ mefure que les glacons fe fondoient devenoit d'une couleur grife : ce gris auquel M. Cadet 'ne s'attendoit pas le furprit, il foupgonna que cette odeur n'etoit due qui ce qu'il avoit fait degeler trop promptement la bile, & en effet, en melant d'autre bile fondue plus lentement avec la liqueur j ille reprit une trcs belle coulsur verte : la liqueur filtree laiffs fur le tiltr? DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, J37 la mcme matiere gcl^tineufe animale qui avoir paru dans rexptrriencc faitc : avcc I'c-lptit de fel, il seleva du melange de I'acide avec la bile unc odcur /~ fade & dcljgrcable, mais cjiii ne tcnoit point de celle du foic- de ioufrci " ^ '' ' ^" ce que M. Cadet croit devoir attribuer k ce que la bile de la premiere /In.i^e xiGj. experience pouvoit avoir ^prouve un coinmencemeiit de fermentation pu- tride, dont la gelee avoit prefervi celle-ci. La liqueur ayant etc evapcree n'a point donne de precipite rclineux comme celle de la premiere experience, il s'eft cleve au contraire \ /ii Airfice u:ie fubftance jauiie relincufe parfemee de petits points blancs qui fe petrifibit dans les doigts, mais en s'y attachant (i on n'avoit pas la precaution de les mouillcr : la liqueur avoit une belle couleur de jaune-citron , dont M. Cadet ftit fort hirpris; & il pen(^i que la couleur verte ne manquoit ici que parce quo I'acide nitreux avoit enleve \ la bile un phlogiflique fubtil, qui avoit cchappe a Tefprit de fel de la premiere experience, elle ctoit trcs-acide & trcs-tranlparentc -, evaporee au tiers dans une capfule de verre , elle a donne des cryftaux quadr.mgulaircs ; en continuant I'cvapo- ration, ii s'eft encore cleve de cette fubftance jaune r^lineufe, dont nous avons parle, la liqueur a donne, en fe refroidilfant, de nouvcaux cryftaux quadrangulaires, & un autre fel en aiguilles tres-adhsrent aux parois du vailleau ; enfin I'eau-inere jointe \ I'huile de tartre par defaillance a donne des cryftaux de fucre de lait comme dans la premiere experience. Le fel quadrangulaire etoit de veritable nitre quadrangulaire , forme par I'efprit de nitre & la bafe du fel marin exiftante dans la bile : mais d'oii peut venir, dans ce recrement, la bafe de ce fel leparee de fon acide ; M. Cadet penfe qu'une grande partie du fel marin que contiennent les fubftances dont fe nourrilfent les horames & les animaux fe decompofe dans leur corps , que I'acide s'y joint \ un alkali volatil , & que la bafe de- venue libre s'unit en partie avec I'lniile animale pour former cette efpece de favon qu'on nomrae hile. Nous difons en partie, car cette meme bafe da fel marin fe refrouve dans le fang & dans I'urine. Les deux experiences que nous venons de rapporter , prouvent evidem- ment que cette bafe exifte dans la bile ; pour s'en affurer encore plus & Tavoir immediatement, M. Cadet a fait deflecher dc la bilei un feu trcs- doux, & I'ayant enfuite fait calciner, elle a donne une odeur de foie de foufre , & les cendres leflivees ont donne un fel parfaitement femblable au fel de foude qui, comme on fait, eft la bafe du fel marin. Pour conftater encore mieux la nature de ce fel , M. Cadet I'a faturc' avec I'acide vitriolique, & il a obtejiu par la cryftallilation de tres-beau fel de Glauber i nouvelle preuve de I'exiftence de la bafe du fel marin dans la bile i le fel de Glauber n'ccant compofe que de I'acide vitriolique iiiii \ cette bafe. Dc toutes ces experiences il refulte : 1 °. Que lorfque la bile a eprouvc feulement un commencement de fer- fcentation putride , cile dqniie un alkali volafil qui pourroit bien ne pas C H Y M 1 E. fjS ARREGE DES ME MOIRES exifter dans le corps animal , & que cet allcili volatil forme avec I'acide ma--" rin, contenu dans la bile, line cfpece de fel ammoniac. z°. Que les acides mineraux coagulcnt d'abord la bile, en fe faififfant Annee tjoj, ^^ I'alkali qui cntre dans fa compoiition, puis pen de temps apres la ren- dent affez fluide pour paffer I traVL-rs du papier gris. 5°, Qu'elle contient en elle-meme le fel alkali qui fert de bafe aa fel marin , & qui eft le meme que le fel de foude, & que ce fel y eft uni i une huile animale, avec laquelle il forme une efpece de favon liquide. 4°. Que les fels en aiguilles qu'on en tire par la vole des acides , font dus II la combinaifon de ces acides avec une terre calcaire qui fe trouve dans la bile , & font de vrais fels fcleniteux , & qu'il y a grande apparence que cette terre calcaire eft ce qui donne lieu ^ la fermentation des pierres biliaires ou ftercorales; d'oii il fuit que, comme Henckel I'a remarque , I'ufage des abforbans terreux expofe i des concretions pierreufes •, ce qui eft confirme par un exemple rapporte par M. Cadet. 5°. Que les cryftaux trap^zoides qui fe f6parent da ferum de la bilei approchent beaucoup de.ceux du fucre de lait, ou plutot n'en different, qu'en ce qu'ils n'ont pas la meme faveur douce de ce dernier : ce fel , tres- difficile ^ diffoudre dans I'eau, peut aiTffi contribuer aux concretions pier- reufes qui fe forment dans le corps humain , en fe decompofant dans les differens organes oil la bile peut etre portee. 6°. Enfin, que la bile eft un veritable favon, forme d'une graiffe ou huile animale & de la bafe alkaline du fel marin ; qu'elle contient encore un fel de la nature du lait , & luie terre calcaire legerement ferrugineufe , ce qui pourroit etre I'origine de la couleur verte & jaune de la bile & de fon amertume qui ne fe trouvent pas dans le favon. On n'avoit certaine- ment pas eu jufqu'ici une connoiflance aiiffi detaiJlee de la bile, que celie que donne I'analyfe de M. Cadet ; le role que joue ce recrement dans, Ic- conomie animale, fuffit pour faire voir Timportsuce de ce travail. D£ L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. »5P C H Y M I E. Sur un. nouveau moyen de teindre la Sole en un rouge vif, & enpluficurs jinn^g ,"68 autrcs belles couleurs. X EU dc pcrfonnes ignorent que la cochcnille eft Ja matiere colorante uuj. qti'on enipluie h In teintiire de I'ecarlate & dcs atitres nuances de beau rouge de bon teint, mais pcu favent comment on parvient a en tirer la pliipart de ces couleurs , & il ne fera peut-etre pas hors de propos de donner ici line legerc idee des precedes auxquelles elle s'unit. Quelque peu d'efperance que ces reflexions doiinaflent k M. Macqucr, de rclbudre le problcme par des diflblvans huileux , il vouliit ks em- Annie 1768. ployer pour n'avoir rieii h Ic rpprocher ; il elTaya done de I'Iniile dc lin , i'effence de terebenthine & plulieurs autres ; mais il n'obtint , par ce moyen , que des fubftanccs viiqueufes , jncapables de deffechemcnt & fans aucune crlaftieitc. L'huile effeiuielle de terebenthine redifi^e fur la chaux , fut employee avec plus de fucccs , & comme cette derniere eft difloluble dans I'efprit- de-vin, M. Macquer voulut I'enlever au caoutchouc, quelle avoit dilTous par la digeftion , & mcme par lebuilition dans ce dernier •, mais il n'y cut qu'une partie de l'huile qui Ce joignit h I'cfprit-dc-vin , le refte de- meura obftinement attache ^ la reline , & i'empccha dc reprendre fa premiere conliftance. La dilTolution faite dans l'huile de Jin cuite avec la litharge , s'cft Icntenient & imparfaitement dellechee ; mais aprcs ce deflecheinent , la reline n'avoit plus ni liailon ni elafticite. M. Macquer favoit bien que I'eau ni I'efprit-de-vin ne ditfolvoient le caoutchouc •, mais il favoit auffi que dans le digefteur de Papin , I'eau aidee de la chaleur pouvoit amol- lir les OS les plus durs : il mit done du caoutchouc d'abord avec de I'eau, & enfuite avec I'efprit-de-vin dans cette machine; mais Foin de s'y dilfoudre, il en eft forti plus dur & plus racorni. Cette reline expofee k fee a un degre de chaLnir incapable de s'allu- mer , a etc affez facilement fondue ; mais alors elle fe trouvoit dans Ic meme etat que celle qui avoit etc diiToute par les huiles, c'eft-i-dire, vifqueufe & fans elafticite. Comme le caoutchouc, dans fon premier etat, eft, comme nous I'avons dit , une efpcce de lait vegetal , M. Macquer crut devoir tenter li des fubftances laiteufes , qu'on tire de plulieurs plantes , ne pouvoient pas operer cette dilfolution ; il en effaya de plufieurs fortes, & fur-tout le lait de figuier que M. Benin kii fournit en a^Tez grande quantitd : ce niiniftre s'interefloit au fucccs de Toperation , mais de quelque maniere que M. Macquer ait pu s'y prendre & varier fes precedes , il n'a pu rien obtenir par cette voie. Le caoutchouc une fois delTeche n'eft done plus fufceptible d'etre dif- kus par aucun des diffolvans dont nous venons de parler; il n'en reftoit plus qu'un k effayer : nous avons dit en 17^ 5, que cette matiere ne pou- voit ctre attaquee que par des dilTolvans trcs-volatils , & que meme eii ce cas ce n'ctoit que la partie la plus volatile qui agilloit fur elle. On ne connoit point de fubftance plus volatile que I'ether; M. Macquer jugea done le devoir employer pour dilfoudre le caoutchouc -, mais il n'auroit encore eu aucun (ucces , s'il n'eut employe que de I'ether ordinaire : pour obtenir celui dont il fe fervit, il avoit diftille k une chaleur trcs-douce huit ou dix livres de bon ether, & n'avoit pris que les deux premieres Uvres qui paflerent dans cette rectification. Hh ij C H Y M 1 E. 24+ ABREGE DES MEMOIRES I Le caoutchouc, coupe par morceaux, 8c mis dans uii matras bien bou- che , avec une aflez grande quantite de cet ether , pour qu'il en foit plus que couvert, s'y diffout parfaitement fans autre chaleur que celle de I'air: /Innie ll62. la diffolution eft claire & prend une couleur ambree : elle conferve I'odeur d'iSther , mais melee avec une odeur defagreable , propre \ la re- fine elaftique , & elle eft un peu moins fluide que I'ether pur. Cette diffolution ne detruit aucunes des proprietes de la refine •, fi on ]a \tiis ou qu'on I'etende fur un corps folide, elle y forme, en un inf- tant, un enduit de refine aufli daftique quelle I'^toit avant que d'etre diffoute : fi on la verfe dans I'eau, elle ne s'y mele point, & ne lui donne aucune apparence laiteufe , mais il fe forme \ la furface une membrane folide" & fort elaftique, qu'on peut etendre tres-con(iderablement fans qu'elle fe dechire, & qui reprend fes premieres dimenfions des qu'on ceffe de la tirer. Les Indiens qui veulent faire avec le caoutchouc des bouteilles , des gobelets & d'autres uftenfiles \ leur ufage, forment d'abord des moules de terre graffe , & les enduifent de plulieurs couches de caoutchouc en kit , qu'ils font durcir \ la fum^e obfervant de ne pas mettre une nou- velle couche que la precedente ne foit bien feche ; & quand il y en a une quantite fuffifantc , ils retirent la terre avec un outil : on peut faire la meme chafe avec la refine diffoute dans I'ether , mais les moules de terre ne pourroient fervir pour des ouvrages d'un beaucoup moindre volume, tels que des tuyaux gros comme une plume ou meme plus petits ; M. Mac- quer a fubftitu^ , dans ce cas , aux moules de terre , des moules de cire qu'il enduifoit avec un pinceau de diffolution de caoutchouc, & en plon- geant enfuite ces pieces dans I'eau bouillante , la cire fondoit & s'elevoit \ la furface de I'eau , & il reftoit un tuyau flexible & elaftique droit ou courbe, felon qu'on avoit form^ le moule. II faudra feulement faire cette operation avec adreffe & promptitude , la refine diffoute dans I'ether fe fechant fi promptement , qu'il eft difficile de I'etendre uniformement fans cette precaution. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ^45 n Y .M I D Sur la combinaifon de I'acide concret du tartre avec Vantimoine. ytnii^'e i-68 ANS le nombre des fubftances minerales que les chymiftcs ont fou- Ilifi. niifes k leurs recherches, il y en a pen — »i— iiiMi 11 qui peuvcnt rendre le tartre le plus foluble ; 3^. qu'on pent unir tellc- _, ment ^ I'acide du tirtre I.i bale metallique de rantimoine, quelle n'eu U H 'v M . pj,i(]g i^ti-e feparee par ralkali le plus capable d'operer cette defiinioni yliintfe 1768. +"• qii'en Joignant \ I'acidc tartarcux une bafe alkaline, on produit iin fel neutre vegetal qui attaque tres-bien rantimoine , & le diirnit mieux que cet acide leul ne pourroit faire , & qu'on forme , par ce moyen , un fel metallique tres- foluble & qui a des proprietes fort intereffantes •, 5°. enfin, que les nouveaux fels antimoniaux qui refultent des opdrations de M. de Laflbne, font la plupart formes par les memes agens que ceux qu'on em- ploie ordinairement, & qu'ils n'en different que parce que ces agens font mieux appropries. Effayons de le fuivre dans fes recherches. On fait en general que le foie d'antimoine , le lafran des metaux & le verre d'antimoine font plus ou moins diffolubles par I'acide tartareux , fuivant que la terre de i'antinioine y eft plus ou moins depouillee de fon phlogiftique, mais que le diaphoretique mineral ou elle en eft plus de- pouillee que dans aucune autre preparation> femble faire une exception ^ cette regie; aucun chymifte n'ayant fait mention ni de fa diffolution par I'acide tartareux , ni du fel qui en rcfulte , fi on en excepte une feule obfervation conlignee dans le Journal de Medecine de novembre 1760, ou cette operation eft enoncee d'une maniere vague, & oii I'auteur fem- ble meme s'etre mepris , en prenant pour un lei antimonial un peu de creme de tartre furabondante & legerement alteree. Voyons prefentement, d'apres les operations de M. de Laffone, quelle aftion I'acide tartareux peut avoir fur le foie d'antimoine , fur la chaux de ce mineral , impar- faitement dephlogiftiquee , parce qu'on n'avoit employe ^ cette operation que le double de fon poids de nitre , & enfin fur le diaphoretique mi- neral. Les autres preparations antimoniales viendront enfuite. Le foie , la chaux d'antimoine & le diaphoretique mineral ont etc , fans aucune lotion prealable , jointes feparement ^ I'acide concret du tar- tre, dans la proportion d'une partie d'acide contra deux d'antimoine, le tout combine par I'ebuUition. L'evaporation de ces liqueurs a donne tous les fels capables de cryftallifer, & en continuant la concentration, elles fe font reduites en gelees trcs-vifqueufes ou en gommes falines tres-diffi- ciles 'k fecher & trcs-avides de Thumidite de I'air, d'une faveur fade & defagreable , & dont la couleur eft d'autant plus foncie, que I'antimoine a etc plus dephlogiftique. II eft ^ remarquer que les fels gommeux tires du foie & de la chaux d'antimoine , font de moitie plus abondans que celui qu'a fourni le diaphoretique mineral ; ce qui vient de ce que I'acide tartareux trouve ^ fe combiner avec la terre antimoniale , lorfqu'elle eft plus ouverte & plus dephlogiftiquee , & ^ former par confequent avec elle des fels neutrcs & cryftallifables. Mais quelle peut etre la caufe de la vifcofite du fel que donne le refte de la liqueur , lorfqu'on I'evapore prefque Jufqii'i liccite? La terre antimoniale feule, unie avec la bafe du tartre, n'eft pas capa- ble de produire cette efpece de vifcolite ; il n'en refulte qii'un fel metal- lique terreux qui cryftallife & n'eft pas extreraenient foluble. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, 247 11 fcmbleroit qii'oii en devroit plutot chercher la caufe dans le fcl al- =: kali que conticnnent Ic foic & la chaux d'antimoiiie ; on fe trompcroit q ^^ ^, ^^ ^ ^ cependant li on lui attribuoit cet eflct : car le diaphorctique mineral par- faitemcnt cdulcorc & dcpouillc de tous (es fcls par de frequentes lotions An/ie'e iy68. d'eau bouiilante, traitc avcc I'acide tartareux , n'a point donnc de cryf- taux, niais a forme unc nialfe trcs-vilquculc, femblable i la gommc ara- bique tranlparcntc & inlipide comme elle-, il etoit rcfte fur le filtre lix gros de terre antimonialc , qui , traites de la meme facoii avec I'acide dii tartre , ne donnerent que trcs-peu de fcl gommcux , mcis avec bcaucoup de cryftaux d'un fel femblable au tartre (libie. Cette experience fait voir • que ces fix gros de terre antimoniale etoient dcpouilles par les op'irationi prccedentes d'une terre alkaline , qui s'unit intimcment h la teire antimo- niale , lorfque la deflagration detruit le nitre , & que par confequent elle etoit privee de I'intermede qui fervoit \ former le fel gommeux : vcut- on en etre encore plus fur ? I'experience fuivante en fournira une preuve. Si Ton projette , peu i peu "dans un creufet embrafe cette chaux antimo- niale , incapable de produire le fel gommeux , meme dii diaphorctique mineral & du nitre joint ^ la creme de tartre & i la poudre de charbon, il refultera de cette operation une chaux antimoniale qui fe fera rechar- gee de fels alkaliles que les lotions pourront empotter , mais i laquellc elles laifleront n^anmoins cet intermede qui lui donnc la proptiete de for- mer le fel gommeux-, & 11, au contraire, on mele limplement avec I'acide tartareux les fleurs argentces de rcgule d'antimoine , qui, comme on fait, font de toutes les preparations de ce mineral, celle qui contisnt le moins de matiere etrangere, & dans laquelle la terre reguline efb la plus divifee, on n'obtiendra pas de fel gommeux , mais un fel cryftallife , & abfolument femblable au tartre ftibie ordinaire-, ce fel offre encore une lingu'arits remarquable : li on le met fur des charbons ardens , il fe bourfoufle comme le borax , & il fe revivifie des grains de regule -, nouveau moyen d'obtenir la revivification des fleurs regulines qu'on peut joindre i celui que M. Rouhault, chymifte francois, avoit fourni, il y a quelques annees, pour cette operation regardec jiilqu'alors comme impofTible. Ces fleurs regulines peuvent etre cependant traitees de maniere qu'elles deviennent parfaitement dilTolubles par I'acide tartareux, & forment avec lui un fel trcs-gommeux -, il ne s'agit que de les projctter dans un creufet avec da fel de foude -, il s'en forme alors une efpcce d'email jaune , ^ la furface duquel paroit une couche verte, ce qui, joint ^ un leger gout d'airain que I'emetique lailfe dans la bouche , pourroit faire foupconner un principe cuivreux dans I'antimoine : cet email fe diflbut tres-bien par I'acide du tartre, & forme le fel gommeux dont nous venons de parler. La terre antimoniale n'eft pas la feule qui, combinee avec I'acide tarta- reux , donne des fels gommeux pareils cl ccux dont nous venons de p.ir- ler -, celle de I'alun , & le borax en nature unis au meme acide , donncnt des fels gommeux tous femblables h ccux qu'il forme avec la terre an- timoiyale , & toujours par Tintermcde de la meme terre alkaline , ce qui C H Y M I E. 248 ABRECE DES ME MOIRES I eft (1 vrai que lorfciue la terre de I'alun en eft bieii depouillee, elle ne donne plus de fel gommeux. Le lei gommeux antimonial a cependaiit deux proprietes que n'ont pas 'Ann(e tjS8. les autres-, il n'a prefqu'aucune faveur, & fi on verfe fur fa folution quel- que portion de celle d'alkali fixe , la liqueur refte claire , & ce n'eft qu'apres environ vingt-quatre heures qu'il s'y fait une precipitation in- complette. On doit encore obferver que quelques-uns des fels gommeux antimo- niaux, prepares avec la fubftance reguiine chargee de tout le fel alkali , produit par la deflagration du nitre avec I'antimoine , font deliquefcens , c'eft-i-dire, qu'ils attirent I'humiditi dc fair, tandis que le diaphoretique mineral, parfaitement depouille par les lotions de cet alkali, donne un fel fee, & qui ne s'humede point \ I'air : il eft done plus que vraifem- blable que la terre alkaline s'uniffant \ la terre antimoniale avec laquelle elle paroit avoir une tres-grande affinite , laiffe Talkali prefque d^couvert & en etat d'attirer I'liumidite de fair dont cefel eft, comme on fait, fort avide , & d'en humefter toute la maffe ^ laquelle il eft uni. On peut cependant , avec le concours des acide mineraux , difpofer I'antimoine \ (e combiner abondamment avec I'acide tartareux, fans for- mer de fel gommeux. Si , par exemple , on fait diflbudre le r^gule dans I'eau regale & qu'on verfe dans cette difTolution le deliquium du tartre , il fe precipite une poudre extremement fine, qui fe combine tres-bien avec I'acide tarta- reux, & forme avec cet acide un fel neutre cryftallifable •, ce fel eft une efpece de diaphoretique mineral foluble, ou, fi I'on veut, le bezoard mi- neral reduit en fel. Si on mele de meme le deliquium de I'alkali du tartre avec celui de Tantimoine , il fe precipite une poudre d'algaroth , differente de celle qui fe precipite en aftbibliffant le deliquium de beurre d'antimoine avec I'eau diftillee ; celle-ci ne peut etre attaquee par I'acide tartareux , & celle qui eft precipit^e par I'alkali du tartre, s'y unit avec la plus grande facilite, & forme avec lui un tartre ftibic tres-energique & d'un degre d'emeticite conftant & invariable. Jufqu'ici M. de Laflbne n'a opere que fur I'antimoine, pour faciliter fa diffolution par I'acide tartareux ■, dans ce qui fuit , il prepare dgalement Tun & I'autre pour faire diifoudre ^ cet acide une bien plus grande quan- tite de verre d'antimoine que celle qu'il en diffout ordinairement. En melant une partie de fel fedatif avec deux parties de crsme de tar- tre , il en r^fulte un tartre foluble qui conferve toute fon acidite , fi memc elle n'eft augmentee par ce melange. Cet acide ainfi prepare , mele dans la proportion de trois parties contre une de verre d'antimoine , & foumife k I'ebullition , diffout prefqu'entie- rement ce verre , & il refulte de leur union un fel gommeux , qui , doucement deffeche , fe reduit en une poudre d'un blanc jaunatre , qui forme un emetique trcs-folube &' bien plus energique que le tartre ftioic ordinaire : le fel fedatif agiroit-il ici en joignant i'acide qu'on lui foup- jonne C H Y M I 4.. DE LACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 149 coniie ^ cclui du tartre, on /culement en augmentant la folubilitc de cc : dernier } Ce meme acidc combine , qui agit avec tant d'avantage fur le vcrre d'antimoine, n'attaque pas les autrcs preparations de ce mineral beaucoup Annie ijCS. plus vivement que I'acide tartareux fcul. Ccpendant quelqiies-uns des TlIs gommcux, refultans de cct acidc prepare, ont des proprictes un peu dif fercntcs de celles dont jouillent les mcmes fcls ptdpares avec I'acide tar- tareux feu I. Celui , par excniple, qui eft fait avec le fafran des metaux, eft tres- foluble , & doit probablement avoir une aiflion plus douce que les autrcs tartrcs ftibies. II paroit aufTi par la couleur jauoe , que le principe fulfu- rcux y eft plus developpe , cc qui lui doit donner vraifemblablement quelques proprictes elTentiellcs dont les autres font prives. On obtient du meme fafran des metaux , en appropriant I'antimoine par le borax , un autre fel gommcux moitie plus charge qu'a I'ordinairc de la fubftance regulinc , & qui fe rapproche du kermcs mineral. Pour y parvenir, on met parties egales de borax calcine & de fafran de mct.iux dans un crculct qu'on poulTe ^ grand feu , il en refulte un email cuuleur de foie , pefant cinq gros : cet email pulverife & jette dans I'eau avec une' once de crcme de tartre auiri pulverifce , la liqueur a pris une belle couleur de kermes mineral, & eft devenue, aprcs la filtration d'un Jaune fonce; il eft refte fur le filtrc deux gros de reudu de couleur de kermes mineral, & I'evaporation a donne un fel gommeux de couleur rougeatre : une once de I'acide du tartre a done dilfous , dans cette ope- ration , deux gros de la fubftance du iiUm des metaux. ■ Une chofe digne de remarque , eft que I'acide tartareux qui, rendu foluble par le fel fedatif, a tant d'aclion lur le verre d'antimoine, n'en a prefqu'aucune fur I'antimoine crud; mais que, li au-lieu du fel fedatif, on cmploie le borax entier \ le rendre foluble , il attaque alors fenliblement I'antimoine crud , & forme avec lui un fel gommeux , tranfparent & am- bre, qui contient la neuvieme partie de fon poids d'antimoine : I'alkali du borax entre vraifemblablement dans cet effet pour quelque chafe, mais il n'agit cerfainement pas kul dans cette occalion : car cet alkali ou tout autre, combines fculs avec I'acide tartareux, ne le rendent nullement pro- fire^ attaquer I'antimoine-, le fel vegetal meme & le fel de feignette oil e tartre eft rendu foluble par les alkalis, n'ont aucune adion fur ce mi- neral , ni fur la piupart dc fes preparations : le verre d'antimoine & le diaphoretique mineral plus depouilles de phlogiftique que les autres, font les feuls qu'ils paroiffent entamer. Nous termincrons cet article par quelques reflexions de M. de Laflone fur I'ufage des fels dont nous venons de parler; leur extreme folubiliti & leur ctat gommeux les mettent cerfainement dans la claffe des mcdi- camens les plus penetrans , & les rendent plus proprcs qu'aucuns autres ^ s'inUnuer dans les voies de la circulation. Les fleurs regulines, le bezoard mineral &: le diaphoretique mineral, re- gardes comme infolubles dans I'eftomac, & employes, pour ainii dire, Tome XIV. Fartie Fran^oije. li i59 ABREGE DES MEMOIRES , cmpyriquement dans h pratique , fe retrouvent ici transform^! en (efs „ pommeux & folubles : que n'eft-on pas en droit d'attendre de cc nouvel C H Y ii I E. ^j^j ^^j. j^jj j^j rendre infiniment plus puiffans & plus propres aux ufa- yinnee z 168. ges auxquels on les deftine ? ' Le fel gommeux forme par la diflblution d'un diaphoretique mineral, imparfaitemcnt prive de fon phlogiftique , devient un purgatif tres doux, & peut etre mis au rang des remedes commodes & utiles. Enfin , dans le nombre de ces fels antimoniaux, purgatifs, eractiques, ou diaphoretiques , dont la force & I'aftion font (1 difi'erentes , il s'en trouve qui paroiflent devoir avoir des vertus particulieres , & reunir tous les avantages qu'on peut dearer pour ces fortes de niedicamens •, mais,. felon la fage remarque de M. de Lafibne, c'efl: k I'experience & aux ob- fcrvations, feuls guides furs de la bonne pratique, qu'il appartieiit de pro- noncer fur cet article. Sur une fourcc minirah trouvh a Vaugirard. jljft J_/ES eaux minerales font des remedes prepares par la nature, & peii- vent etre utilement employees dans un tres-grand nombre d'occafions •, iiiais pour en tirer toute I'utilite dont elles font fufceptibles, & pour fi- voir \ quels malades elles font propres, il eft abfolument neceffaire de connoitre les mineraux qu'elles contiennent, & dans quelle proportion ils y font meles. L'academie s'eft trouvee cette annee dans le cas de faire un examen de cette nature. Un particulier , proprictaire d'une maifon \ Vaugirard , fituee dans le bas de ce village, decouvrit dans le Jardin de fa maifon, une efpece de fource dont I'eau parut produire des eftets purgatifs \ quelques perfonnes qui en burent, & il fe propofa de la faire examiner. Elle le flit en effet, d'abord par M. Rouelle, enfuite par MM. Heriffint & Darcet, commiffaires nommes par la faculte de medecine, & enfin par M. Morand, medecin. Ces trois examens etoient d'autant plus fuffifans pour conftater la na- ture de cette eau , que les refultats fe rapportoient tres- bien entr'eux ; mais le proprietaire , ne voulant rien avoir ^ fe rcprocher , crut devoir confulter l'academie, & MM. Macquer, Morand medecin, & cadet, fu- rent charges de cet examen. Nous allons effayer d'en donner le refultar. La fource minerale eft (ituec dans un jardin place au plus bas de Vau- girard , vers la plaine de Crenelle-, elle fe trouve au fond d'une efpece de puits non revetu, d'environ 18 pieds de profondeur , le thermometre ctoit alors \ I'air libre ^23 degres au-deffus de zero-, plonge dans I'eau du puits, il defcendit jufqu'^ 10 ou 11 degres, temperature ordinaire des caves & des puits. Le fouterrain n'avoit aucune odeur extraordinaire , & on ne remarqua dans I'eau aucun mouvement inteftin. DE L'ACADEMIE ROYALE DHS SCIENCES. i,i Cette cau piiifee ^ la fource , & mife dans dcs bouteilles , a pani iin — w^m^— pen trouble & blanchatre; au bout de vingt-quitre heures d; repos, elle T- a parii nioins trouble, mais die n'etoit pas parfaitement cLire : ia filtra- " ^ "' ' ^' lion par le papier gris ne lui a pas mcine ote fon ceil louche, ruais elle Ann^e i"63. a achevc de s'eclaircir d'elle-mcme par Ic repos. ^ L'cau de Vaugirard a une laveur douccatre & fade comme Tout routes les eaux qui ne tiennent que trcs-peu de fubftances falines , & I'eau dii puits d'une mailon life i Paris , prcs la croix du Tralioir , & qui a fervi de point de comparaifon dans cette recherche , a paru avoir la miiue laveur. La pefanteur fpecifique de I'eaii propofee , compar^e ^ ceile d'autres eaux connucs, devoit etre con ft.itce, elle I'a etc de deux manicres : pre- niicrement, en empliffant iuccellivement line meme bouteille d'eau dif- tillee & d'eau de Vaugirard , & la pefant i chaque fois : fecondemcnt , en employant deux excellens areometres qui ont etc plonges dans I'eau de Vaugirard & dans plulieurs autres eaux connues de riviere , de fontaine & de certains puits de Paris. Get examen a fait reconnoitre que I'eau de Vaugirard ctoit plus pelante que I'eau d'aucune riviere , qu'elle I'ctoit nioins que celle de certains puits de Paris, mais plus que celie de quel- ques autres. Pour connoitre les difterentes fubftances que cette eau tenoit en dif- folution , MM. les compiillaires ont employe revaporation , mais en ope- rant en meme temps & de la meme maniere fur quantites egales d'eau de Vaugirard & de celle du puits litue prcs la croiic du Tralioir, dent nous avons parlc. Quatorze bouteilles d'eau de Vaugirard , & pareille quantits de celle du puits en queftion , ont ete evaporees lentement & fans bouillir dans Une badine d'argent , jufqu'i ce qu'elles aient ete reduites Tune & I'autre ik une livre ; ces eaux ainii concentrees ont toutes deux pris une faveur Sere, falee & fort amere, & une couleur jaunaire trcs-lenlible : il s'ctoit cryftallife pendant I'evaporation fur I'une & fur I'autre une affez grande quantitc d'un fel feuillete & grifatre qui fat reconnu pour feleniteux , & qui , lave & delRche , pefoit trois gros. L'evaporation ayant alors ete continuse dans des capfules de verre , lorP' que la quantite de chacune dc ces eaux a ete reduite ^ 4 onces, la cou- leur eft devenue beaucoup plus foncee & la laveur beaucoup plus acre , ertet naturel de la concentration , & on n'a obferve dans tout Ic couis de cette operation aucune difference entre I'eau de Vaugirard & celle du puits de comparaifon : il s'eft , pendant ce temps, forme encore fur i'une & lur I'autre des pellicules en grande partie felcniteufes , qui ont ete foi- gneufement enlevees -, enSn l'evaporation ayant ete continuee jufqu'au Bout , les reiidus fortement dciicches , fe font trouves jaunatres , acres , amers & deliquefcens ; celui de Vaugirard pefoit z gros & 21 grains, & fufoit avec vivacite fur les charbons ardens; celui de I'eau du puits de comparaifon pefoit i gros 48 grains, & fufoit moins vivement fur les cliarbons, que le rciidu de I'eau de Vaugirard. li ij ^muM-BMULimmi i^i A B R E G fi D E S M E iM O 1 R E S ;^ II refultoit de ce que nous venous de dire , que les eaux de Vaiigi- r.ird & celles du puits de comparaifon etolent reellement chargees d'une H Y M I E. ,^,,f;((i conliderable d-e felenite, & que de plus elks contenoient une Annec fj68. quantite fenfible de fels nitreux, & il ne reftoit plus, pour achever cet examcn , qu'i connoitre In nature de ces fels. Pour y parvenir, les deux refidus ont etd diffous \ froid, chacun dans line once & demie d'eau dlftillee •, ces folutions itoient troubles & )au- natres , ce qui indiquoit qu'elles ctoient chargees de matieres non diliou- tes qui en acceleroient la tranfparence. Le filtre a enleve ces matieres qui fe font trouvees pefer dans chacun des refidus, environ 54 grains, & ces matieres etoient grifes. Les liqueurs clarifiecs par la filtration ont etc evaporees -, il a com- mence ^ fe former pendant levaporation des cryftaux confus •, alors on a mis les liqueurs refroidir pour obtenir des cryftallilations plus regulieres, & en efFet on a appercu dans la liqueur de I'eau de Vaugirard des ai- guilles de nitre affez fortes, trcs-bien formces, & qui ont fufe avec force fur les charbons ; mais outre ces aiguilles , il y avoit encore un amas de cryftaux plus confus, dans lequel on diftinguoit des cryftaux cubiques de fel marin , & qui ne laifloit pas de fufer fur les charbons. MM. les com- miffaires ont Juge que fur 24. grains que pefoicnt ces fels , il pouvoit y avoir environ 16 grains de nitre & 8 grains de fel commun. L'evaporation de la diffolution du rehdu de I'eau du puits de compa- raifon, a donne une mafle faline tres-confufe , dans laquelle on n'a pu diftinguer aucunes aiguilles de nitre , mais une bonne quantite de fel commun •, ce fel mis fur les charbons ardens n'a fufe que tres-foiblement : la totalite des fels contenus dans ce rcfidu pefoit 50 grains, fur lefqufls il y avoit environ 25 i 14 grains de fel marin , & 6 k 7 grains de nitre.' II refulte de ces experiences, que Tune & I'autre de ces eaux contient une petite quantite de nitre & de fel marin parfaitS", mais que I'eau de Vaugirard contient plus de nitre que de fel, au lieu que I'eau du puits donne plus de fel que de nitre. Les liqueurs evaporees ne donnoient plus de cryftaux, mais leur acrete & leur amertume ne laiffoient aucun lieu de douter qu'elles ne continf- fent encore du nitre & du fel marin , c'eft-^-dire , les acides de ces deux fels unis \ une bafe terreufe. Pour s'en affurer, on ajouta h chacune une fuffilante quantite d'alkali du tartre , qui, ayant avec ces acides plus d'af- finite que la terre , devoit la leur faire abandonner & la precipiter •, ce fut effedrivement ce qui arriva : il fe precipita de la liqueur de I'eau de Vaugirard environ jfS grains d'une magnelie ou terre trcs-blanche , & la liqueur donna, en I'evaporant, des cryftaux de nitre & de fel febrifuge de Silvius; on fait que ce dernier eft compofe de I'acide marin joint a I'alkali du tartre, & ces fels pefoient un gros, compofe d'environ 54 grains de nitre & de 1 8 grains de fel de Silvius. L'e.ui-mere, qui reftoit de I'evaporation de celle du puits de Paris, a donni les memes produits, mais feulement en quantitcs un peu differen- tes ; il s'en eft precipite 14 grains de magnefie , & il s'eft ioimi un gros DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 155 dc cryftaux compofe de 48 grains de fel dc Silvius liir 24. grains dc nitre. L'eau de Vaiigirard & cellc dii piiits de comparaifoii , contlcniient done C H Y ii i I. I Tune & I'aiitre dii nitre & du ft-1 marin , panic h bafc alkaline & partie Ann.{e ijGS. ^ bafe terreiifc ; avec cette difference qii'il y a plus de nitre , i propor- tion , dans l'eau de Vaugirard , & plus de lei marin dans celle du puits ■ de comparaifon. 11 ne reftoit plus i examiner que la niatiere fcleniteufe c]ui avoit etc feparee de ces caux •, l'eau de Vaugirard en avoit fourni 5 gros , fans compter les 54 grains qui ctoient relics fur le filtre; on a verfe fur cette felcnite une bonne quantite de vinaigre diflille ; il s'eft fait une efFervef- ccnce confiderable , laquelle etant ceifce , on a lave & fechi la fclcnite , qui s'efl trouvec reduite i 3 gros 24 grains, mais elle avoit alors perdu fa couleur grife , & etoit devenuc d'un beau blanc ; les niemes effets ont eu lieu i I'egard de la lelenite tiree de l'eau du puits de Paris : enfin, le vinaigre qui avoit fervi 'k ces operations, ayant etc evapore, a donnc un dcDot terreux , ^ peu prcs egal dans Tunc & dans I'autre. On peut conclure de ces dernieres experiences , qu'outre la felenite , le nitre & le fel commun , tant ^ bafe d'alkali fixe qua bafe de terre calcai- re, qui fe trouvent, tant dans l'eau de Vaugirard que dans celle du puits de comparaifon , elles contienncnt une petite portion de terre calcaire li- bre , qui s'en fcpare par I'evaporation , & s'attache h. leur felenite. Non-leulement on pent connoitre la nature des fubftances contenues dans une eau propofee , par les operations que nous venons de decrire , mais on ne peut encore les decouvrir par le changement qu'elles font \ eertaines matieres qu'on y mele , & ce moycn n'a pas ete neglige. L'eau de Vaugirard ni celle du puits n'ont point d'abord verdi le firop de violettes , mais au bout d'une demi-heure ce melange a pris une cou- leur fenfiblcment verte , & le papier bleu , rougi par quelques gouttes de vinaigre ctendues dans un verre d'eau, a repris la couleur en le trem- pant dans l'eau de Vaugirard, meme filtrce , ce qui eft dil ^ la terre cal- caire libre qu'on y a rcmr.rquee. La tejnture de tournefol n'a fubi aucune altdrition , cette couleur qui fe change aifement par I'aclion d'un acide foible , nc fe vcrdiffant pas de meme par Tadion d'un alkali qui n'efi: pas tort •, I'efprit de vin mele ^ cette eau en alfez grande quantite , en a precipite une matiere blanche , qui n'etoit que de la felenite cryftallifee confulement, ce qui arrive des qu'on le mele avec des eaux fcleniteufes. L'alkali du tartire & I'alkali volatil du fel ammoniac, ont precipit^ dc ces eaux une terre calcaire ou une efpece de magnelie , provenant de la deconipohtion de la felenite, & des fels nitreux & marin ^ bafe terreufe qui y font contenus. La dilfolution d'argent par I'efprit de nitre, a occafionne un depot blanc & abondant, compofe de vitriol lunaire produit par i'acide vitrio- lique de la felenite uni avec une portion d'argent , & de lune cornie formee de I'acide marin & du meme metal j la noix de galie n'a fait C H Y »t I £. 154. A B R E G £ D E S M E M O I R E S : prendre i I'eau aucuue teinte , preuvc evideutc qu'elle ne conticnt point de fer. Toutes les experiences que nous venons de rapporter, Sc qui s'accor- ^nn^e tjSS. dent parfaitement avec les analyfes prccedemment faites , prouvent incon- teftablement que I'eau de Vaugirard contient par pinte environ 5 3 grains • de fiibftances ialines , dont plus de la moitie eft de la felcnite ; que le refte eft partie nitre h bafe calcaire , partie fel marin aulTi ^ bafe calcaire, partie, enfin, vrai nitre & vrai fel marin en trcs-petite quantite, & enfin une quantite encore plus petite de terre calcaire libre, foit quelle I'ait €te naturellement , foit que les evaporations I'aient rendue telle ; les me- mes fubftances fe retrouvent aufll dans les eaux du puits de Paris , qui ont fervi de piece de comparaifon. Si i'on veut comparer ces produits k ceux que donne I'eau qui a fervi i lefliver des platras falpetres ou les terres devenues nitreufes , on fera frappe de la reffemblance, & on verra clairement la raifon pour laquelle ces eaux en font imprignees : le terrain de Paris abonde en falpetre , qui y eft fourni par les caves , les foffes d'aifance & les ecuries qui y font de tous cotes; il n'eft pas moins rempli de fel marin qu'y introduifent toutes les lavures de vaiffellcs : il n'eft done pas etonnant que les eaux qui paf- fent ^ travers des terres chargees de ces fels, en emportent une partie, & les eaux de Vaugirard doivent etre dans le meme cas , par la quantite de maifons baties en platre qui compofent ce village ou il y a un grand notnbre d'habitans. Quant aux ufages mediciuaux de ces eaux , il eft bien difficile de les afligner •, quoique les fels dont nous avons parle foient en tres-petite quan- tite dans ces eaux, cependant, comme ils font adtifs , ils peuvent pro- duire quelqu'effet , foit comme purgatifs, foit comme aperitifs : c'eft il la prudence des medecins ^ placer ces eaux ^ propos, & 4 en bien deter- miner les effets ; mais nous ne pouvons nous difpenfer d'ajouter qu'on peut aifement y fuppleer 011 par telle de la plupart des puits de Paris , 011 par une legere leflive de platras. C'eft ^ I'experience i nous inftruire fue les eft'ets qu'on doit attendrc de cette nouvelle rcllource de la nature. DE L'ACADEMIH ROYALE DES SCIENCES, i,^ N< C U Y M 1 f. Sur la nature de la Bile. ^„^/^ ^.^-^^ ors av'ons rendu compte en 1767 (a) dii travail de M. C.idct fur Hift. cette matiere : il en refultolt que la bile etoit un veritable favon , compofc d'une huile aniniale , de la bafe alkaline du fel marin , du fel marin liii- meme, d'lin autre fel de la nature du fucre de lait, d'une tcrre caic.iire, participant Icgcrcment du fer , & enfin d'une petite quantitd d'une fubf- taiice animate gelatineufe. Toutes ces parries integrantes de la bile avoient etc demontrees par Ics obfervations de M. Cadet, d'une maniere qui lui paroiflbit inconteftable; & d'aillcurs la propriete favonneufe de la bile eft li bien reconnue , qu'on J'emploic k d^graill'er des ctoffes, fur lefquelles le favon meme a fouvent peine i mordre. Malgre toutes ces preuves, M. Cadet a ete extremement furpris de trouver, dans une thefe de M. Ra-derer, foutenue ^ Strasbourg, que la bile contient un principe acide, & qu'elle coagule le lait-, deux proprictcs qui detruiroient abfolument le fentinient de M. Cadet , puifqu'alors la bile ne feroit plus un favon, ou qu'au moins ce feroit un favon extraordinaire, dont la partie faline , au lieu d'etre un alkali , feroit un acide. Quelqu'affure que fut M. Cadet de I'exaiftitude & de la precilion de fes recherches, cependant I'autorite de M. Rccderer I'ebranloit : &. dans cette incertitude , il a cru devoir confulter I'oracle des vrais phyliciens , I'ex- perience. Pour cell , il a pris deux onces de bile tiree d'un bonif qu'on venoit dc tuer , & par confequent exenipte de toute alteration , & les a melees avec une chopine de lait de vache, tire depuis quatorze heures; il a bien reniud ce melange, & I'a laifle repofer plulieurs heures, fans y rien remar- qucr qui tendit k la coagulation du lait. II a mis fur le feu une autre chopine de lait, & lorfqu'il a ete bouil- lant , il y a mele deux onces de bile , & a fait faire au melange deux ou trois bouillons •, il ne s'eft fait aucune coagulation , feulement la partie graffe & vifqueufe de la bile a rendu le lait plus cremeux. Ces deux me- langes furent mis rafraichir dans de I'eau , ^ la temperature de dix degres ; Ic premier y eft refte pres de quatorze heures, fans qu'on y vit aucune fe- paration ; ik I'igard du fecond, il s'en dleva au bout de trois heures une creme liffe & fans grumeaux, que la fimple agitation reunit au lait, prc- cifement comme il arrive au lait bien pur qui eft en repos. II etoit deji bien prouve, par ces experiences, que la bile rtcente rrc caille point le lait 5 mais voici quelque chofe de oien plus fort , non- feulcment elle ne la caille pas, clle I'empeche de fc cailler, & retablit celui qui I'eft. Co) VoyexHift. 1767, ciJeffusv Z'jS abregS des memoires ■— i— Pour s'en afllirer, M. Cadet a fait cailler du lait avec le vinaigre dif- ^, tille , & il y a nieli de la bile; apres quelques bouillons, la bile a rcee- ntre une partie du lait : preuve certaiiie de 1 alkali qua a deinonfre dans AnrJi f^Sg. la bile, & d'autant plus certaiiie que ralkali femblable a celui de la foude, c|ue M. Cadet a tire de la bile , I'huile de tartre par dcfaillaiice , & meme I'alkali voktil , ont produit le meme effet ; fur quoi M. Cadet oblerve que ce moyen pourroit etre employe, avec fucces, pour empechcr le lait de tourner pendant les chaleurs & les orages. Tout ceci femble prouver, avec la plus grande Evidence, que, comme M. Cadet I'avoit avance dans Ton premier memoire , la bile eft une efpece '' de favon qui ne contient aucun acide developpe ■, nous dilons dev.loppe: car I'acide entre ncceffairement dans les huilfs & les graiffes comme un de leurs principes conftituans , & k cet egard la bile contient de I'acide j mais ce n'eft pas de celui- ci, que I'etat dans lequel il eft prive de toute aftion rend oifif, qu'a voulu parler M. Rosderer, c'eft d'un autre acide libre & capable d'agir fur le lait, ce qui changeroit confiderablement h nature de la bile conlideree comme favon. M. Cadet a cru ne pouvoir mieux s'eclaircir fur ce point , qu'en traitant le lait avec le favon , comme il I'avoit traire avec la bile. Dans cette vue, il a fait diffoudre quatre gros de bon favon blanc dans quatre onces d'eau, & a mcle cctte dillolution avec une chopine de lait; cette liqueur n'y a occafionne aucune decompolition ; un pareil melange auquel il a fait faire trois ou quatre bouillons , lui a off^^rt une decom- pontion fenfible : une partie du lait s'eft caillee, mais le rede s'eft bien fou- tenu ; & I'ayant mis repofer, il s'en eft eleve une creme bien lille & fans grumeaux. Cette efpece de decompofition piqua la curiolite de M. Cadet •, il en rechercha la caufe & crut I'avoir trouv^e dans une portion d'huile ranee que le favon garde pouvoit contenir , & dont I'acide fe leroit cchappe : il etoit aife de s'en eclaircir; il ne falloit qu'employer du lavon recem- ment fait, il ne devoit operer dans le lait aucune coagulation; aufll n'eii opera-t-il aucune, & il refta bien prouve que le favon, qui ne contenoit aucun acide developpe, produifoit fur le lait le meme elfet que la bile; & que pour peu qu'il en contint , il cailloit le lait au moins en partie. La bile qui agit fur le lait, comme le favon qui ne contient point d'acide, n'en contient done pas elle-meme. On n'ignore pas que les matieres animales ne contiennent que peu oil point d'acide developpe ; la bile qu'on fait, d'ailleurs contenir beaucoup de principe alkalin , en doit par-1^ meme contenir moins qu'une autre , & il eft facile de s'en affurer ■■, on fait que I'acide rougit le papier bleu , & que I'alkali le verdit : M. Cadet prit done de la bile de bosuf recente, I'eten- dit dans quatre fois autant d'eau, & il vit, comme il s'y etoit attendu , que cette liqueur, loin de rougir le papier bleu, lui donna une couleur verte ; & pour s'affurer que la plus petite portion d'acide libre lui auroit donne la propriete de rougir le papier bleu, M. Cadet mela avec huit on- ces de la diffolution de bile dans Teau, une feule goutte d'huile de vitriol, & DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 257 Sc cette petite quantitc d'acide fufjit pour lui donncr la proprictc de rou- — — gir le papier bleu. „ II y a plus : ies acides agiflent fur la bile conime fur le favon, & la « \ m 1 t. coagulent en grumeaux , en feparant I'luiile dc I'alkali. Anne'e tjGa, M. Cadet avoit d'abord foupconnc que I'acide que M. Rcrdcrer avoit obferve dans la bile , pouvoit s'etre deg.igc de I'lniile animale par U ftr- nieiitation acide qui precede ordinairement la putridc; mais (1 ce pafl'nge a lieu dans la bile, il doit etre bien court & bicn difficile ^ failir ; car M. Cadet ayaiit eu la patience d'examiner dc quart-d'hcure en qu.irt- d'heure I'eftet de la bile fur le papier bleu , jufqu'i c& quelle fut pir- venue ^ la fermentation putride , n'a pu trouver aucun inftant ou ellc I'ait rougi, & oil par confequent elle ait pu etre foupconnec de la plus petite acidite. II y a bien de I'apparence que dans I'experience de M. Rtrderer, il eft arrive, ou que le lait dont il s'efl: fervi , etoit deji difpofe k I'aigre , ou que la bile elle-meme etoit altir^e : on fait , par exeniple , que la bile verte ne doit cette coulcur qu'i la prefence d'un acide etranger •, il nc feroit done pas difficile h. une bile de cette efpece de caillcr le lait. Mais un cas particulier de cette efpece ne peut tirer i confcquence, & ne peut porter aucune atteinte 4 I'opinion avancee par M. Cadet , que la bile eft un veritable favon animal exempt de tout acide developpe ■■, opinion que Ics experiences qu'il a rapportees dans fon premier memoire , & celles qu'il rapporte dans celui-ci, (emblent prouver de la maniere la plus in- conteftable. Tome XIV. Partie Francolje. Kk 158 abreg£ des memoires C H Y M I E. A I 76Q *^"'' ^'^ n^ceJJM de retirer des coupelles la partie d'argent fin qu'elks retiennent toujours. tlift, i^ ous avons dij^ rendu compte en 1761 {a) & en 17(15 {h) des travaux que M. Tillet avoit entrepris fur cette matiere, de laquelle nous aliens reprendre la fuite, les experiences precedentes avoient evidemtnent demontre que les coupelles retenoient toujours une partie fenfible d'argent fin dans I'operation de I'effai , que c'etoit cette partie retenue qui avoit fait regarder comme impoflible d'avoir de I'argent abfolument dur & in- deftrudible •, & enfin , qu'en faifant rendre ^ la coupelle ce qu" elle avoit abforbe, I'argent pouvoit ctre porte ^ tel degre de purete, qu'il ne per- doit plus rien ^ etre effaycj meme plufieurs fois. L'import.mce de la ma- tiere a determine M. Tillet i reprendre la fuite de ce travail & ^ rappro- cher, pour ainfi dire, les idees qu'il avoit donnees dans les pricedens memoires. ElTayer une certaine portion d'argent, c'eft determiner h quantite d'ar- gent pur & celle de cuivre ou d'autres m^taux qui y font contenus. Pour cela on met une petite partie de I'argent qu'on veut effayer, me- lee avec une certaine quantite de plomb , dans une efpece de creulet po- reux fait avec des cendres d'os bien leflivees-, on expofe enfuite ce creu- fet, qu'on nomme coupelle , dans une moufle placee dans un fourneau, oil elle eft environnee de tous cotes de charbons ardens-, bientot I'ardeur du feu fait couler le plomb qui aide I'argent k fe fondre. Le plomb qui fe vitrifie aifement, facilite la vitrification des autres metaux , & les entraine avec lui fous la forme de litharge ^ travers la coupelle dans laquelle il ne refte que I'argent fin ; on pefe alors cet argent, & ce qu'il a perdu de fon poids eft regarde comme la partie de metaux etrangers qu'il tenoit & qui s'en font alles avec le plomb, & on juge par-1^ du titre auquel doit etre fixee la portion d'argent qu'on vouloit eflayer. On voit par ce court expofe, que, comme on ne foumet \ I'effai qu'une tres-petite partie de la matiere, on conclut toujours du petit au grand, & que les moindres erreurs font extremement i craindre. Aufli M. Tillet compte-t il jufqii'^ onze defauts dans lefquels peuvent tomber les effaycurs; le pen de fcniibilite & de precifion dans les balances d'effai , le peu de jufteffe des poids , qu'on nomme de femelle , & qui ne fauroient ctre trop exadls, la mauvaile fufion des matieres ^ effayer dans lefquclles ralliage eft fouvent tres-inegalement diftribue, les matieres etran- geres que contient fouvent le plomb , I'argent dont il n'eft prefque jamais depouille, I'inegalite avec laquelle cet argent peut etre mele dans la raaffe, peuvent faire que differens effais oii il fera employe, donnent des litres (a) Voyez Hift. annee 1762. (i; Voy. Hifi. 1763. Colleift. Acad. Pait. fr. Tom. Xllt DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 25j» differens -, (i on emploie des dofes de plomb plus ou nioins fortes quecelles — —— ^^^ qui font prcfcrites, il en naitra encore dcs variations dans le litre-, pour peu qu'on manque d'attention ^ la conduite du feu, les boutons, quoi- ^ " Y m i f. qu'avec toute I'apparence poffible d'une operation parfaite, pourront en- /InnU iiGa. core retenir de I'alliage, ou au contraire avoir rendu du fin, foit par des petits globules d'argent qui s'en feparent & reftent adherens aux coupelles, foit par des pitillemens qiii ecartent ces globules •, & ce cas eft le plus \ craindre, parce que non-ieulemcnt il appauvrit I'effai, mais encore parce qu'il enrichit \ fes dcpens les autres qui fe trouvent dans la moufle qui re- ^oivent ces globules etrangers , & en font riellement augmentcs. En examinant ce que nous venons de dire , il eft aife de voir que la plus grande partie de ces defauts peut s'eviter avec du foin & de I'attcn- tion , & c'eft aufli ce que M. Tillet recommande aux cfTayeurs & qu'il a pratique lui-mcine : Icxattitude des balances, I'examen de la maffe d'ar- gent qui a fervi ^ fes experiences, celui du plomb qu'il employ oit, la fa- brique des coupelles, la conduite du feu, ont fait I'objet de fes foins & ont affurt le fucccs de fes experiences; nous allons.effayer de prefenter une idee de Ton travail & des rclultats qui en ont etc le fruit. II ne fera done point ici queftion de routes ces erreurs qu'on peut cvi- ter avec de I'attention , il s'agit ici d'une autre caufe d'erreur qui ne tient \ aucune de celles que nous venons d'indiquer , fi ce n'eft peut-ctre ^ la conduite du feu pendant la dur^e de I'operation. L'operation par laquelle on effaye I'argent, tend effentiellement \ conf- tater combien il y a d'argent fin dans le niorceau qu'on elTaye, & com- bien d'alliage ou de metal etranger y eft mele. Comme cet eiTai ne fe fait que fur une trcs-petitc quantite d'argent, il eft neceffaire qu'il foit fait avec toute la precifion poilible, puifque la proportion (e trouve entre I'argent , & I'alliage de cette petite quantite iert a fixer le litre de la maffe, louvent confiderable, dont elle a ete tiree. II fe trouvoit cependant un grand nombre de defauts dans l'operation ufitee par les elTayeurs, & malhcureuferaent ils alloient prelque lous ^ di- minuer la quantite de fin , & par confequent au detriment du propric- laire. L'imponance de cette matiere a determine M. Tillet \ tourner fes vues vers cet objet li intereflanf, & pour nc point s'egarer, voici les precau- tions qu'il a prifes. Pour s'alTurer que I'argent & le cuivre ctoient cgalement meles dans les portions qu'il alloit foumettre \ I'effai , il a lire la portion d'argent qu'il y dcftinoit d'une maffe de iSoo marcs, chargee d'environ un dou- zieme de cuivre, & qui avoit ete fondue & bien braffee dans un creulet de fcr ■, il fit laminer cette portion , & ce fut de ces lames qu'il lira la matiere de fes effais. 11 s'ctoit de meme affuri d'une portion de plomb depouille, autant qu'il itoit pofllble , de tout argent ; chole abfolument neceffaire dans la re- cherche qu'il alloit entreprendre. Les fourneaux d'effai font ordinairemcnt conftruits de mantere \ ne Kk ij C H Y M I n. i6q ABREGE DES MEMOIRES donner qu'une chaleiir affez moderee ; elle fuftit i I'operation telle qu'ofi la pratique, mais elle auroit cte inluftifante pour les ^preuves que M. Til- let meditoit; il falloit done les rendre capables de donner un degre de Ann^e tjGg. chaleur plus conliderable, & voici le moyen qu'il emploie poury parvenir. II fait le cendrier de fon fourneau de 14 pouces de liaut, au-licii de trois pouces qu'on lui donne ordinaireraent •, & pour y introduire un courant d'air plus vif , il y adapte i 4 pouces du fond un tuyau de tole qui , paflint au-dchors ^ travers le mur de la chemin^e , y appelle I'aic exterieur ■■, deux barreaux de fer traverfent le cendrier ^ la hauteur de 5) pouces, & y fonnent une grille qui recoit les charbons embrafes qui tombent du fourneau , & les expofe h tout le courant d'air du tuyau ; niais comme ces charbons ^ demi-confumes n'echaufteroient pas affez le plancher de la moufle, M. Tillet a menage, au-delTous de ce plancher, une ouverture dans le corps du fourneau , par laquelle on y pent intro- duire du charbon noir & faire eprouver ^ la moufle I'aftivite du charbon qui s'allume-, une porte de tole gamie en-dedans de terre ^ creufet, ferme cette ouverture : enfin , pour occafionner un plus grand tirant d'air, il couvre I'extrifmite fuperieure du fourneau d'utie efpece de chapiteau co- nique" de fer , au-devant duquel eft une ouverture ferm^e d'une porte qu'on n'ouvre que pour jetter du charbon au-deffus de la moufle , & cette efpece de dome eft encore prolonge par un tuyau de tole de 5 pieds ou environ de longueur & de lix pouces d'ouverture ; pour pcu qu'on foit au fait de la maniere dont I'air agit dans les fourneaux, il eft aife de fentir combien les additions que fait M. Tillet au fourneau d'effai , doi- vent augmenter la force & I'activite du feu. M. Tillet employa d'abord le fourneau d'effai dans I'etat ordinaire-, il n'avoit alors pour but que de voir (1 , apres avoir reconnu un titre quel- conque dans un argent dont il connoiffoit le degre de purete, il le trou- veroit toujours le meme en I'effiyant de nouveau; mais il eut beau faire, il trouva toujours des variations dans le titre •, il n'ignoroit pas que les coupelles retenoient un peu d'argent , mais il n'etoit pas alors queftioii de favoir ce qu'il fe perdoit de fin , mais de rendre cette perte egale dans tous les effais , puifqu'alors on pourroit y fuppleer par un calcul facile. M. Tillet s'etoit apper^u dans le cours de fes operations, que, fur la fin de I'operation , I'air qui favorife I'imbibition de la litharge dans la cou- pelle, y diminue auffi la chaleur ^ tel point qu'il n'en refte que ce qui eft abfolument neceffaire pour tenir la matiere en fulion \ Sc cette remar- que lui fit foupconner que le bouton qui demeuroit aprcs I'operation pourroit bien avoir retenu quelque portion de cuivre, & alors il n'etoit plus ^tonnant que cette portion de cuivre , vraileinblablement variable , introduife quelque variation dans le titre. Pour eviter cet inconvenient, M. Tillet employa done le fourneau tel que nous venons de le decrire •, alors le feu devenu plus fort, ne laiffa plus refroidir la matiere •, il employa de plus fortes doles de plomb •, il fit lubir aux boutons un fccond elfai, il retira des coupelles I'argent qu'cUes DE LACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, ii'i avoicnt retenir, & ayaiit rc-joitn i chaque boiiton la particulc d'argent re- ^__ tiree de fa coupelle, Ics rediltats furent par-tout Ics mcmes &. doiiiicrciit „ ~ le ineme titrc de lo denicrs zi grains ^: l^ » \ :■: i -. Devenu par-li certain dii titre de fon argent, il rccommcnca fes ex- Annie t'Gi). pcrieiices : dans la premiere faite avcc la do(e de plomb ordinaire de fix fois le poids de i'argcnt , Ic titre donnc par {'operation fiit lo deniers 2 1 grains-, ia coupelle auroit done du retenir i grain j •, cependant ells en rendit i grains 4 ; d'ou il fuit evidemment que le boutoii de fin te- noit encore i grain | d'ailiage : dans la feconde, le bouton d'eirai rcte- noit encore plus d'ailiage : dans la troiheme enfin , le bouton contenoit 2 grains ~ d'ailiage. Le bouton de la feconde experience paflce une feconde fois h la cou- felle avec trois parties de plomb, perdit 4 grains ~ de fon poids, ce qui auroit mis au litre de 10 deniers 17 grains ^; mais en reuniffant k ce bouton 2 grains qu'avoit retcnu la premiere coupelle , & 1 grains | ab- forbes par la feconde; le vrai titre fe trouvera de 10 deniers 22 grains ' ou i, qui revienc precifcment au titre intrinfeque de la matiere de I'efTai. Quoique M. 'Fillet fik bicn fur dn titre de la matiere de fes eflais, il refolut de s'en affurer encore d'uiie autre maniere, en compofant une por- tion d'argent dont le titre ne peut pas etre equivoque. II avoit cu befoin en 17155 , pour quelques experiences, d'une portion d'argent abfolument pur, (Voy. Hifi. ijG^) & il avoit trouve moyen de I'obtenir ; il avoit encore une partie de cet argent precifement \ 1 2 de- niers; cependant, pour etre encore plus fur de fa purete , il I'effiya de nouveau avec une forte dofe de plomb , & fut par-li convaincu que cet argent ne contenoit aucun alliage •, 10 deniers 22 grains - de cet argent, furent mis avec i grain y de cuivre de rofette, & compoferent par coii- fequent un bouton allie qui contenoit 10 deniers 22 grains - de fin. Cette portion mife h. la coupelle avec la dofe ordinaire de fix parties de plomb, vint au titre de 10 deniers 22 grains i •, il y .ivoit done un quart de grain de plus que dans I'argent pur, fans compter celui qu'avoit abforbe la coupelle, & en y joignant ce dernier, il fe trouva 11 deniers o grain & | ; d'oii il fuit que le bouton pefoit 2 grains ^ plus que la quantite d'argent pur qui avoit ete employee , & qui ne pouvoit venir que d'un refte d'ailiage ou de plomb que le bouton avoit retenu -, audi cette quantite dilparut-elle 5 en paflant une feconde fois le bouton i la coupelle avec trois parties de plomb , en rejoignant au fecond bouton , provenu de cette operation , ce que la coupelle avoit retenu , M. Tillet trouva Ion argenr precifement au meme titre qu'il I'avoit mis-, il eft done prouve que Ics petites diffirences qui fe trouvent entre ces elfais , vien- nent tres-vraifemblablement beaucoup plus de la partie d'ailiage que re- tient le bouton , que de I'inegalite dans le melange de I'alliage de la ma- tiere qui a fervi aux elfais , & qu'on pouvoit faire difparoitre ces diffe- rences en enlcvant aux boutons, par une feconde operation, la petite par- tie d'ailiage qu'ils avoicnt retenue. Prefque tout ce que nous venous d'expofer avoit eti fait au feu or- C II Y M I E. 1.61 ABREGfi DES MEMOIRES ; dinaire de coiipelle. M. Tillet voulut voir fi en faifant lopcratjon k iiti feu beaucoup plus vif & qui put faire pafler les elTais en beaucoup raoins de temps , il obtiendroit un autre rcfultat •, il employa pour ces experien- Anntt ijGg. ces le fourneau tel que nous I'avons dicrit, mais il y remarqua les memes circonftances , & la perte fur les boutons d'effai ne fut pas plus marquee dans une facon d'operer que dans I'autre •, d'oii il conclut que I'exaditudc rigoureufe des eflais ne tient point ^ la conduite du feu , que les bou- tons d'effais eprouveront toujours une perte de fiu plus ou moins conll- derable tant qu'on ne retirera point de la coupelle le fin quelle a abforbc pour le rejoindre au bouton. La dofe du plomb qu'on emploie dans ks afEnages , meritoit bien d'^ tre examinee , & M. Tillet en a fait un des objets de fes recherches •, il avoit dej^ examine cette matiere , & il n'ignoroit pas que plus on em- ployoit de plomb au-delk d'un certain point, plus il y avoit de perte fur le fin ; & cette confideration , jointe ^ la neceffiti de ne fe pas trop ecar- ter de la dofe de plomb qu'on emploie dans les aflinages etrangers, I'a- voit determine ^ propofer au Confeil de fixer la quantite de plomb h hx fois le poids de I'argent qu'on effaie. Quand nous avons dit que I'augmentation du plomb augmente la perte de I'argent fin , nous n'avons pas pretendu dire que cette perte flit pro- portionnelle ^ la quantite de plomb que Ton ajoute •, bien loin de li , paffe un certain terme , cette augmentation n'a prefque plus d'eflet. M. Tillet a voulu chercher la raifpn de cette difference fi marquee , & voici ce qu'il a obferv6 : pendant tout le temps que I'argent allie nage dans une grande quantite de litharge , I'affinage ne le fait qu'imparfaite- ment, la circulation de la matiere eft lente , & la coupelle n'abforbeque peu d'alliage, & par confequent pea de fin, qui ne s'y introduit qui la faveur de rintrodudion de la litharge-, d'oii il fuit que pendant tout ce temps il ne fe fait prefqu'aucune imbibition dans la coupelle, ni aucune perte de fin, & que I'un & I'autre n'ont lieu que lorfque la matiere cir- cule vivement dans une quantite moderee de litharge. D'apres ces remarques , il fit deux nouveaux effais en employant fix parties de plomb I I'ordinaire , mais dont il ne mit d'abord que quatre dans la coupelle-, & lorfqu'elles furent prefqu'imbibees , & que I'argent fut pret i fe fixer en bouton , il y remit les deux autres , & il obtint un bouton qui ne laiffa aucun doute fur fa purete. Dans le fecond eflai, M. Tillet mit d'abord cinq parties de plomb dans la coupelle, & la fixieme lorfqu'elles fe furent imbibees -, le produit fut abfolument egal k celui du premier effai. Pour peu qu'on y fafie reflexion , la caufc de cet effet eft aifee ^ ap- pcrcevoir : en effet, I'argent allie fe trouve dans cette operation reduit deux fois i n'etrc mele qu'avec une ou deux parties de litharge-, il circule done avcc plus de facilite & s'epure davantage : il eft vrai qu'il s'y fait une plus grande perte de fin , mais cette perte n'eft pas reelle puifqu'on peut rctirer de la coupelle la partie de fin qu'elle a abiorbe. On fait depuis long-temps qu'on peut employer dans les affmagcs le DE L'ACADEMIE AOYALE DES SCIENCES. i6i blfmuth au-lieu du plonib , foit qu'on I'cmploie pur , foit c|u'on le mcle »»— ^— «^ avec le plomb. M. Tillet a cru qu'il etoit dc Ton objct d'cxjmiiier s'il y ~ ~ " avoit quelqu'avantjge i fubflituer en tout ou en partie ce demi-mdtal au " ^ ''' ' '• plomb; il a trouv^ qu"^ la virite il purifioit un peu mieux I'argent, mais Annie tlGo. qu'il en entrainoit aufli un peu plus dans la coupelle ; inconvenient qui n'en eft un , que tant qu'on ie tiendra i juger du litre de la inatiere par le feul bouton, fans faire rendre b la coupelle ce qu'elle a retenu de fin. Puifque les coupelles retiennent toujours une partie de fin , il etoit na- turel de chercher les moyens de faire en forte qu'elles en retmffent le moins poflible : dans cette vue , M. Tillet im.igina de former des cou- pelles neuves avec des debris de vieilles coupelles, comptant que cette matiere , diji imbibce de litharge , abforberoit moins de fin que I'au- tre; mais Texpcricnce lui fit voir qu'elles n'en abforboient pas moins, & il n'en lira d'autre utilite que d'apprendrc que ces debris d'anciennes cou- pelles pouvoient fervir ^ en conftruire de nouvelles lorfqu'on manque de matiere propre ^ les conftruire; mais en ce cas on devroit obferver, lorfqu'on voudra revivifier la litharge qu'elles avoient abforb^es, qu'elles donneroient toujours une certaine quantite de plomb &: de fin etrangerc au dernier eflai, & ne feroient qu'induire en erreur. De routes les obfcrvations de M. Tillet , que nous venous de rappor- ter, il rilulte : 1°. Que dans la maniere d'eflayer, ulltee en Europe, I'argent mcme le plus pur eprouve conftamment une perte plus ou moins conliderablc par la quantite de fin qu'abforbent les coupelles. i". Qu'en reffufcitant la litharge inibibee par les coupelles & paffant ce plomb 5 I'effai, il rend la partie de fin qu'il avoit entrainee avec lui, & qu'on obtient par ce moyen la totalite de I'argent fin contenu dans la ma- tiere qu'on eflaie. 5°. Qu'un effayeur, meme en prenant toutes les precautions prefcrites pour I'exaditude des effais , ne peut fe flatter de trouver toujours la meme matiere au meme litre. 4°. Que I'egaliie du litre , abftra<9:ion faite de la perte caufee par I'im- bibition du fin dans la coupelle , ne depend ni de la chaleur excedive , ni de la ch.ileur modcree du fourneau , ni de la promptitude ou de la Icnteur de I'operation -, ou que du moins le dcgre de feu qui pourroit la produire, depend de tant de caufes, qu'il eft prefque inipoflible de le determiner-, & que fi, par une longue habitude, un effayeur avoit p« parvenir k le failir, cette connoiffance ne fcroit que pour lui, & que les inftrudions les plus precifes ne pourroient le tranfmcttre h d'autres. 11 en refulte encore que le feul moyen d'avoir le litre reel des matie- res qu'on effaie, feroit de faire reftituer aux coupelles I'argent qu'elles out ablorbe : il eft vrai que ce feroit faire deux operations au-lieu d'une ; mais le degre d'exaftitude qu'on obtiendroit par-Ii , & qu'on ne peut ob- tenir que par ce moyen , dedommageroit bien de ce travail. M. Tillet a cepcndant cherche ^ I'abreger, & voici les tentatives qu'il a faites fur cet objet. i6+ A B R E C E D E S At E M 0 I R E S II avoit reraarque qu'il fe trouve d'aiitant moins de variation dans le P litre des efJais , qu'on vife plus ^ epurer le bouton , q\i"i le garantir de la perte que kii tait eprouver la coupelle. ylr.m'e t'^Gg. H avoit encore obferve que huit parties de plomb etoient-fuffirantes pour aiEiier complctement le bouton , pourvu qu'on les employat k deux fois; favoir, fix parties la premiere fois, & les deux autres lorlque celles- ci font imbibees dans la coupelle ; que nieme fix parties pouvoient fuSre en faifant I'cperation en trois fois •, favoir , trois i la premiere , deux- k l,i feconde , & une a la troifieme. Quelle que foit la dofe qu'on adopte, le bouton s'epure egalement, & la perte eft de 4 grains abforbes par la coupelle : or, il n'elt pas dilHcile de trouver le moyen de charger le plomb d'affez d'argent fin pour qu'il reftitue au bouton ces quatre grains abforbes par la coupelle ; on pourroit meme fans cela tenir compte de ces quatre grains, mais il faudroit pour cela que le plomb ne contint aucune partie d'argent, & c'eft ce qu'il n'ell pas aife de fe procurer ; c'eft pourquoi M. Tillet croit qu'on doit s'en tenir k enrichir le plomb dans la proportion neceffaire , pour qu'il com- penfe le dechet du bouton. Avec tout cela pourtant , il ne Juge pas cette operation abfolument fiire , quoiqu'elle le foit bcaucoup plus que I'operation ordinaire ■, & ce n'eft , (eion lui , qu'en faifant reftituer it la coupelle ce quelle a retenu , qu'on pent juger invariablemenr du titre de I'argent. Mais i quoi peut fervir cette exa6titude,& cette petite partie d'argent, qu'abforbe la coupelle; merite-t-elle qu'on emploie tant d'art & tant de peine pour s'en aifurer ? Oui fans doute •, car la portion d'argent qu'on effaie, doit regler, par fon effai, la valeur de maffes enormes auxquelles elle eft relative ; elle repond ^ i & environ un feptieme pour cent de tout I'argent monnoye qui circule dans le commerce , & i i & environ un. douzieme de tout celui qu'on emploie en vaillelle : on peut juger de I'e- norme non-valeur que cette petite partie d'argent , abforbee par les cou- pelles , introduit dans le commerce, mais cette non-valeur ne peut dif- paroitre que par un concours general de toutes les puillances 5 celle qui poinconneroit leule plus haut que les autres, auroit trop h perdre dans ion commerce, & il y a bien de I'apparence que ce concours fi utile n'ar- rivera jamais , & que la verite phyfique paroitra inutilement ■■, elle fera ce- pcndant de quelqu'ufage , s'il vient jamais a s'elever quelque lyfteme fpe- cieux fur cet objet •, ces experiences feront autant de points immuables &lumineux, ^ la faveur defquelles il fera facile d'en juger fainement; mais n'euflent-elles que la curiofite pour objet , les phyficiens auront toujour? h M. Tillet Tobligation d'avoir le premier eclairci une matiere h curieufc 3c li intereffante. OBSERVATION DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. i6 ^'"^^ ^^ Fonderie des Mines d» Clieijj'ey en Lyonnois , dans lequel fe raffine tout le Cuivre prove- nant defdites Mines & de celks de Saint-Bel. Par M. Jars. Mi'm. jlVvant la conftruftlon dii fourneau dont le dedin accompagne le prefent memoiie , on raffiiioit le cuivre des mines de Saint-Bel & dc Cheiffey fur un petit foyer pareil i celiii reprefente par la planche fz dii Traiti des Fonderies de Schlutter •, mjis ayant In dans le meme traite , que dans certaines fonderies des mines d'AlIemagne , on rafiEnoit le cui- vre avec fucces dans un grand fourneau, & avec moins de frais que fur le petit foyer, je penlai que pour diminner la depenfe de I'exploitation , il conviendroit de fuivre la meme methode-, je vis en meme temps que les cuivres que Ton traitoit dans ces fourneaux , provcnoient du travail dc la liquation , & qu'ils contenoicnt par confequcnt du plomb qui aide beaucoup h la fonte & accelere la fcorification d?s parties heterogenes , comme fer , zinc , arfenic , &c. qui font unies ordinairement au cuivre qui n'ed: pas raftine , & que Ton ajoutoit jufqul deux quintaux de plomb fur chaque raffinage de quarante quintaux de cuivre qui n'a pas palfe par le plomb ; ces confiderations fufpendirent quelque temps la refolution ou J'lJtois de propofer aux interefl'es de ces mines , de faire coliftruire un grand fourneau h raffiner , puifque le cuivre de Saint-Bel provicnt d'un mineral tres-ferrugineux , & celui de Cheilley d'un mineral uni i beau- coup de blinde, dc dont le cuivre contient par conf«quer»t du zinc-, dans I'un il faut fcorifier le fer, & dans I'autre le zinc : on fait qUe ces ma- tieres exigent une chaleur trcs-vive pour fc fcorifier , de\k je conclus que (1 Ton vouloit fe fervir des fourneaux dont parle Schlutter , on le- roit dans la ncceffite d'ajouter du plomb ; & quoiqu'il y eiit encore de I'avantage ^ Ics prefercr au petit foyer , je fus du fentiment que fi Ton pouvoit augmenter le degre de chaleur i ces fourneaux , on pourroit fe difpenfer dc cette addition -, j'avois dejh forme plulieurs projets de four- , neau lorfque je fus envoye k Sainte-Marie-aux-mines ou je vis que Ton fe fervoit du fourneau reprefente par la planche 44 du Traite des Fon- deries dc Schlutter, mais feulement pour feparer le plomb des matte;, comme on le pratique dans le pays d'Hanovre , & enfuite le cuivre noir des memes mattes apres qu'elles ont etc refondues •, & comme cc cuivre noir eft eucere melc au plomb pour en ieparcr I'argent par la liquation , DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 279 Je propofai au dircdlcur de fuivrc la methode dccrite par Schlatter pour; r.irfiner le cuivre dans le nicme fouriieaii •, il le fit cxicuter , &: je fus p tnnoin de la rcuffite ; il cclFa aiors de faire raffiner fur le petit foyer oii t i £. roptiration etoit extremement longiie & confiinioit beaucoup dc charbon, Annie 177 Q. p.irce que le plomb uni au cuivre fe revivifioit de nouveau par le con- tadt immcdiat du charbon c]ui liii communicjuoit du phlogiflique ■, I'arfe- nic lie fe fcorifioit audi cjue difficilenunt, car on retiroit fort ibuvent d« cuivre qui n'avoit pu parv?nir au vrai point du raffinagci il n'en eft paj de menie du reverbere ou I'op^ration fe fait par la flamme. Cepcndant Cclui dont je parle , ain(i que tous ceux dont on fe fcrt en Allemagne, pcrdent beaucoup de chalcur par les trois bouches h feu qui rcftent ou- vertes pendant I'opcration ; c'cft pourquoi ayant projete de nouveau de perfebord cte fait de 9 pieds ^ de long fur 7 pieds j de large, ainli qu'on peut le voir dans le plan inferieur (fig. z); mais je ne tardai pas k en faire diminuer I'etendue tout autour , comme il pamit par le plan fuperieur ; elle eft plus que fuffifante pour y raffiner cinquante quintaux •, & meme foixante h la fois : cette recoupe eft devenue tres- utile au fourneau , puifqu'elle fert i y faire une chemife ou doublure que Ton peut reparer fans que la voilte en puille etre endommagee •, cette Briques blanches voute, de meme que la chemife, font conftruites avec-des briques faites a.nt eft fait I'inte- d'une argile blanche que Ton tire du Dauphine , & dont Meffieurs de rinur du fourr.tau. j'^jj^^ngge fe fervent ^ Lyon pour faire leurs creufets , (a) n'ayant point trouve Jufqu'^ prefent d'argile dans le pays qui puille fupporter le degre de chaleur du fourneau fans fe vitrifier : I'interieur du conduit de la pe- tite cheminee qui communique I la grande , eft fait pareillement avec des briques de la meme terre , ainfi que la couverture dudit conduit, mais en briques beaucoup plus grandes , comme on peut le voir dans I'elevation •, I'exterieur du conduit eft fait en briques ordinaires. Soupirauxouven- Dans I'epaiffeur des murs du fourneau, on a menage tout autour deux toules. j-angs de petites ventoufes ou Ibupiraux pour I'cvaporation de I'humi- dite, dont les unes prennent depuis les briques, & les autres depuis la brafque en dedans, & montent obllquement jufqu'en dehors; elles lont abfolument ncceflaires , on ne fauroit en faire une trop grande quantite i on en fcra convaincu, fi Ton fait attention jufqu'^ quel point I'cau peut etre rarefiee par la clialcur : malgre cela , il n'arrive que trop fouvent (lorfque I'on a ete quelque temps fans raffiner) qu'il lort une flamme bfeua- tre ^ travers les murs, quelquefois par les foupiraux, & qui eft luivie d'un bruit confiderable, ce qui ebranle beaucoup le fourneau & peut occalion- ner que la brafque qui forme le ballin ne seleve, & que le cuivre n'entre par deffous. On doit auffi obferver qu'il faut au moins que le mur de derriere le fourneau foit bati avec un mortier de terre , au-lieu d'y em- ployer de la chaux & du fable qui, devenant trop companies, empechent la foitie de I'humidite & occafionnent par cette raifon des ebranleraens. Lorfque je lis conftruire le fourneau dont il eft ici queftion , je n'avois pratique h la chauffe qu'un limple cendrier pareil i ceux des fourneaux que Ton a en Allemagne', je I'ai fait depuis beaucoup plus bas afin d'aug- menter le courant d'air qui entre dans le fourneau pour procurer plus de chaleur. Je n'avois egalement fait pLacer qu'un fouftlet double ^i la tuyere du fourneau, je me fuis determine ^ en ajouter un fecond-, ces change- niens ont avance Toperation au moins de deux heures , & ont diminue un peu la confommation du bois. ' fa) C'eft la t:rrc de Larnage. . „ ,,. Proeede DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iSr Prodde pour Ic raffinage du cuivre dans un grand fourneau. H Y .M 1 F.. J'oBS ERVERA I , avant toutcs rhofes, qii'on ne fauroit trop faire fc- Annit I'/JO. cher un pareil fourneau avaiit que de coinniencer i y raltinet : pour n'avoir attendu que quinze jours aprcs fori cntiere conftrudlion , dont huit avoicnt etc employes ^ y entretenir un peu de feu , je fas fur Ic point de douter de {i reuirite, comme on va le voir. Ayant fait former le balTin avec de la brafque , ainfi qu'il fcra dit plus Premiere opiracion bas, je fii arranger trente quintaux de cuivre noir dans le fuirneau, on ^"1 "'^ P^'^^'*"- ferma les ouvertures, & Ion mit du bois dans la chaufc-, niai> malgre ■n feu trcs-vif que Ton entretint pendant quinze heures confecutives, on ne put parvenir a faire fondre le cuivre, je I'attribuai en panic ^ I'hu- midite du fourneau , mais je crus audi que la nature du cuivre demandoit qu'on y ajoutat du plonib ; c'eft pourquoi je ne me ributai point, & me determinai ^ imbiber ce cuivre dans le balfin de reception du fourneau ^ manche, d'une quantitc de cinq pour cent de plomb : ce cuivre ainli Addition depIoaV- imbibe fut fondu & raftini fort aifement dans le fourneau de reverbere, j'eiLyai pour une fcconde operation de ne mettre que moitie cuivre im- bibe & moitie cuivre fans plomb, ce qui ne failoit plus que deux & demi pour cent de ce mctaU on fit deux raflinages de trente quintaux chacun en cette proportion : enfin, voyant que le fourneau devenu par- faitement fee, avoit une chaleur bien au -d.ni'us des prccedentes fois , je fis de nouveau un raffinage avec du cuivre (ans plomb, il reuiTit; j'aug- mentai audi la quantite , de forte qu'aujourd'hui chaque raffinage eft fixe ^ cinquante quintaux \, il fallut en conftiquence agrandir les baffins de Combien on ralTine reception qui n'avoient alors que quatrc pieds de diametre cxterieure- ''s <^"'^'^ * '' ^"''' ment. Quoique Ton ait egalemtnt reuffi i en mettre loixante ^ la fois, on n'a pas continue par I'c -rabarras de retirer les rofettes qui font pour lors trop pefantes •, il a fallu du temps pour amener cette operation au point ou elle eft aujourd'hui , fur-tout ayant etc oblige de former des ouvriers qui n'etoient accoutumes qu'i travailler au petit foyer -, c'eft la facon dont fe conduit h prefent I'opcration que je vais decrire. II eft trcs-effentiel de bien placer la tuyere pour ce procede ; on a Comment or* place reconnu qu'en donnant fix lignes d'inclinaifon ou pente k fon plan ho la tuyere, rizontal, qui dirige le vent des foufflets fur le cuivre, c'etoit la placer le plus avantjgeulcment pour ce fourneau. Le grand badin fervant ^ contenir le cuivre , eft forme avec une Compofition de la brafque {a) compolce de deux parties & demie d'argile & de deux par- braffetlu grand bafli*. ties de charbon reduit en pouJre, lefquelles ont cte auparavant pilees & palfees par un crible -, fur quatre parties de cette compolition on en ajoute une de fable egalcment pafle par un crible : cette bralqiie etant melee & humedl^e de fa(jon qu'elle puiffe fe peloter da«s la maifon fans (• ques pieces de cuivre fur le canal de la percie , qui eft prochc de la "■' ""f"'^*"- petite cheminie, \ I'endroit R de k coupe fur la ligne AB, [fig. ^) afui de diminucr I'ouverture pour la fortie de la flamme qui feroit trop grande fans cela-, lorfque le cuivre eft fondu, le canal eft plein de cuivre, ce qui retrdcit cgalement le paflage de la flamme. Les cinquante qiiintaux de cuivre noir ayant ete arranges dans le fourneau , on f^rnic routes les ou- vertures avec de grandes briques faites avec de I'argile ordinaire, de la laille hachce & de la bourre de veau •, on les lute bien tout au tour , & on met du bois dans la chautTe , dont on entreticnt le fju de facon que le cuivre foit cinq ^ fix hcures avant d'etre entierement rouge : ceci s'obferve feulement lorfqu'ou a refait deux couches ou mcme les trois couches du baffin, c'eft afin de le fecher & d'en faire dvaporer I'humidi- te •, on n'eft pas fouvent dans ce cas-li , car on pent raffiner au moins deux cents milliers de cuivre fans toucher ^ celle du fond ; pour la fe- conde, elle ne dure guere paffe dix k douze raftinages ; & quant k la fu- pcrieure, que nous nommerons aduellement la premiere, tile ne reafte qu'^ deux ou trois operations tout au plus ; mais que Ton refdlTe cette premiere ou non , on force le feu des le commencement , le bafTiii ayant affez le temps de fecher & de s'echaufFer jufqu'i ce que le cuivre foit Temps qu'it fiut fondu : dans ce cas-ci, il ne faut que deux heures au cuivre pour etrjpourrougirle cuivre. parfaitement rouge-, c'eft alors qu'on fait agir les foufflcts, le cuivre de- Temps ou if faut vient d'abord pateux , il d^goutte enfuite peu h peu jufqu'i ce qu'il foil W'^ ^gir lei louffleis. entierement fondu-, on le reconnoit par un petit trou que Ton a pratique dans le milieu de la brigue qui bouche I'ouverture par oii Ton dccraUe ; depuis le moment qu'on a fait agir les fouftlets jufqu'a la paifaite fufion du cuivre, il faut environ fix hcures, ce qui fait huit heures depuis que Ton Temps pour Lndre a commence ^ mettre du bois dans la chaufle : on a grande attention le cuivre. pendant la fonte, de n'ouvrir aucune ouverture du fourneau, ni de tou- cher le cuivre en aucune fa9on , parce qu'on le refroidiroit & retarderoit par confequent I'operation-, pendant tout ce temps-li, on a foin de pren- dre de la charbonnaille dans le cendrier pour la porter dans les badins de Comment T'onchauF- reception, avec laquelle on les chauffe en la remuant de temps en temps fe les baffiRsdere-.ep- Si en y mcttant de la nouvelle aprcs avoir retire la premiere-, on les chaulie """• de cette fa^on-la lorfqu'ils ont dejk fervi , & que par confequent ils ne renferment aucune humidite -, mais lorfqu'on les refait i neuf, (ce qui n'arrive qu'aprcs trente ou quarante rallinages) on les feche & les chaurte bien un jour auparavant avec un gros feu de charbon-, on ne fauroit aflez Combiendiirentls prendre de precaution pour ccla, afin d'eviter les accidens qui pourroient t^'ns de rd.epujn. liirvenir : on entreticnt aulFi un L\x d^ charboo ^ I'ciidroit ou le fail la Nn ij 284. ABREGfi DES MEMOIRES —I"' — ~ percee. Un qiiart-d'heiire aprcs cju'on a juge que le cuivre eft en belle „ fiilion, on le decrafle pour la premiere fois , on ouvre h cet eftet I'ou- " ■ verture marquee par la lettre B dans I'clcvation (fig. 5); on prend en- Annce tijo. fuite dans le cendrier, de la charbonnaille qu'on arrole d'un peu d'eau , & . avec une pelle on la jette fur tout le bain de cuivre •, elle refroidit affez Comment on reure J fj-Qfjgj „j,i furnagent le bain, pour ou'elles s'y rendent adherjntes : on rat enluite devant louverture, la barre de fer qui elt marquee dans 1 ele- vation , & que Ton y rend fixe en la faifant entrer de chaque cote dans le mur ; elle fert h fupporter le rack de fer avec lequel on retire les fco- ' ries; cet inftrument ell: fait d'un fer plat d'environ un pied de long fur cinq pouces de large, & demi-pouce d'epaifleur, foude h I'extremite d'une grande barre de fer qui a un pouce en quarre ; on retire avec ce rack, que Ton peut aufli nommer dcumoire j les fcories qui furnagent le b.iin , lorfqu'il eff rouge au point de fe plier, on le retire pour le redrefler ; pendant ce temps-i^ on jette de nouvelle charbonnaille qui refroidit un pen le reftant des fcories qu'un autre ouvrier retire avec un rack pareil ail precedent : cela fait, on referme louverture avec la meme brique qu'on lute bien tout autour avec de I'argile -, le raffineur pafTe enfuite derriere la tuyere & fait fauter la pelote d'argile dont il a ^te parle pre- cedemment ; pour lors le vent des foufflets frappe fur le bain de cuivre , I'agite, &, par le contadt immediat de I'air, accelere la fcorification : de- puis ce moment, le raffineur doit vifiter fouvent la tuyere pour en deta- cher, avec une baguette de bois, des morceaux de cuivre qui s'y attachent Comment on prend <5iii-l4"^fois : (i le cuivre eft trop adherent, il lui fubftitue une baguette Peffai. de fer; il prend enfuite des effais pour connoitre \ quel point fe trouve le cuivre; il a pour cela un fer arrondi & poli aux deux extremites, que Ton nomme fer d'effais^ il le paffe par la tuyere, le trempe dans le cui- vre , d'oii il le retire promptement pour I'eteindre dans un petit baquet d'eau -, quoiqu'il foit difticile de donner des regies certaines pour connoi- tre quand le cuivre a acquis le point de perfeftion, on peut cependant Marques que le cui- '^i'^s cn general qu'il donne par gradation les marques fuivantes. Si, peu vre donne avanc d'e- de temps apres que Ton a decraile le cuivre pour la premiere fois, on en we raffir.s. prend un effai, il eft uni & d'une couleur pale en-deliors mele de taches noires , fa fradure eft d'un rouge cendre , rcffai fe detache en frappant la baguette fur un marteau , on relfuie bien pour prendre un fecond eflai , meme on la frotte fur une pierre tendre , afin que le cuivre s'en detache plus aifement : le cuivre du fecond elfai, que Ton prend environ un quart- d'heure aprcs, devient raboteux fur la furface exterieure, les ouvriers le nomment la rape ; on prend de ces effais de temps en temps, par lefquelt on voit que le cuivre devient de plus en plus raboteux & acquiert une plus belle couleur; on y appercoit interieurement des taches couleur de laiton, & le cuivre de I'effai devient plus mince : ^ la rape fuccedent de petites elevations, mais qui font toutes percees , de forte que I'effai eft encore raboteux au toucher ; lorfque les elevations deviennent plus conli- derables, quoique toujours percees, on decraffe le cuivre pour la fcconde «. & dernieie fois de la meme facon qu'il a cte decrit plus haut; le cuivre DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iS^ approchc alors de fa pcrfciflioii, ce que Ton reconiioit k [i belle couleiir> : aux elevations qui commeiiccnt i fe fcrmer , & k ce que I'efiai devient dc plus cii plus uni au toucher-, cnfin uiie partie des el(ivations fe ferine , il fe forme uii ou deux pctits crochets ^ I'extreniite de ['elfai •, on y ap- percoit aufTi quelquefois des taches d'un rouge approch.int dc la coulcur de fang , iefquels cndroits font fort unis quoiqu'im peu ondcs ; il faut environ une ou deux heures au plus pour que le cuivre parvienne i ce Quandeft cequcte point-li depuis la premiere fois qu'on a decralfc, c'eft alors que Ton doit ^"'^'^<^<^''''''''|"^•• faire les percees : un moment auparavant on commence i dcgager le paflage en otant, avec un ringard, I'argile que Ton a mis derriere la bri- que dans le trou de la percee , c'efl: afin qu'au7i-t6t que h raffineur a Comment fe fait U rcconnu le vrai point du raftinage du cuivre, on puiiie le Lire couler P^''*''- dans Ics baflins de reception •, on met 'i cet eftet dans le trou de la per- cee, une barre de fer d'environ un pouce de diametre, pointue k une de fes extremites , dont I'autre eft garnie d'un bou*on de fer fur IrqutI on frappe , jufqu'i ce que i'on penle quelle a ^te allez avant pour faire fauter la brique ; on a enluite un morceau de fer d'un pouce { en quarre fur I pied 8 pouces de long, dont on peut voir le deflin fur la planche (fig. 6) : on le met lur le fer dc la percee, de facon que ce dernier puiife cntrer dans la fourche B , ^ I'cndroit du bouton •, un ouvrier le tient perpendiculairement par I'extrcmite A, pendant qu'un autre frappe avec line mafle ^ I'endroit C ; de cette facon , on retire les fers de la percee, & le cuivre coule dans chaque baflin de reception : mais, comnie il ar- rive quelquefois qu'une des percees eft ouvcrte plus promptement que I'autre , on a m^iage un canal horizontal pour faire communiquer les deux badins; on peut le voir dans le plan fuperieur [fig. Z L); par ce moyen le furplus du cuivre fe rend dans I'autre ballin , fans cela on courroit rifque de voir le cuivre fe repandre dans la fonderie , & mettre les ou- vriers en danger par I'humidite qu'il rencontreroit. Lorfqu'on fait les percees, on n'ote point la charbonnaille qui a etc mife d.ins les baffins de reception pour les echauller, parce qu'elle furnagc le cuivre & qu'on la retire h I'aide d'un morceau de bois emmanche au bout d'une baguette de fer, avec les fcories qui ont fuivi le cuivre; on bouche enfuite les deux trous de percee avec de I'argile , pour qu'il ne coule pas davantage de fcories; lorlque route la furface du cuivre a ete bien nettoyee, il s'y cleve une elpece de fumee qui n'eft autre chofe que de petites parties de cuivre Ipheriques divifecs i I'infini , & que Ton nomme par cette raifon cendrife de cuivre. * Pour eviter qu'il ne s'en eleve une trop grande Cendrtfede cjivi?. quantity qui fe repand autour du ballin & mcme jufque fur le fourneau, on a plufieurs petits fouftlets k bras avec Iefquels on fouille fur la furface pour que le cuivre fe refroidifle plutot : au(Ii-tot qu'il eft fige, on y re- pand un peu d'eau que Ton renouvelle julqu'i ce que la rofette ait allez de confiftance pour la tranfporter ; on fait venir h cet effet les fondrurs & autres ouvriers qui font h portee pour aider h tranfporter ces rofettcs ; on ( 1 ) Si le cuivre dtoit un peu moins rafline , i! s'en tievetoit une plus gnnde quaniits. II Y M 1 E. i%6 abreg£ des memoires en met cinq ^ chaque baffin pour lever & porter Ips pieces de cuivre dans deux ciives qui font ^ cote, & ou I'eau fe renouvelle continuellement, afin quelle foit toujours froide, parce que le cuivre de cette fa^on en acquieit Ann^e Jyjo. "ne pl"s belle couleur : on leva ces rofettes avec des fourches & des fers plats par le bout, qui fervent d'abord de levier, en prenant pour point d'ap- pui les cercles de fer qui font fixes autour des bafllns, c'eft afin qa'ils ne puifl'ent etre endommages •, ces cercles de fer font marques dans le plan fu- perieur •, \ mefure que les rofettes diminuent de diametre , & par confe- quent de pefanteur, on renvoie les ouvriers i leur premier travail, on en met deux i chaque cuve, qui reftent jufqu'i la fin pour retirer les rofettes ^ mefure qu'elles font froides-, ils les portent fur des planches, afin qu'elles puiflent fe fecher avant de les enfermer dans le niagafin. Le grand baffin peut fervir pour deux & fouvent trois raffinages, comme il a etc dit plus haut, fans autre reparation que celle doter les fcories qui s'arretent devant la percee & de mettre une nouvelle brique devant chaque petit mur-, j'obferverai \ cette occalion , que lorfqu'on fait ^ neuf toutes les couches qui forraent le baffin , on doit avoir I'attentioii de ne pas battre auffi fortement les couches inferieures que la fuperieure, fans quoi la brafque de cette couche etant frappee & trouvant de la refif- tance par-deflbus, ne sy lie point; c'eft par cette raifon qu'on ne fe fert des pilons de fer que pour battre la couche fuperieure : m'etant appergu dans les commencemens que cette couche s'enlevoit fort fouvent avant la fin de I'operation , quelquefois auffi- tot qu'on avoit fait la percee , je I'at- tribuai d'abord h la negligence des ouvriers-, pour m'en convaincre, Je voulus etre temoin lorfqu'on battoit la brafque , mais la couche rcfifta en- core moins qu'auparavant •, je pris des-lors le parti de ne faire frapper fortement que la couche fuperieure, on continue avec avantage •, j'aurois cependant defire que la couche fuperieure eut pu refifter ^ plus de deux ou trois raffinages : (a) on pretend que le baffin du fourneau de Tayoba en Hongrie, refifte i dix ou douze, mais je penfe devoir I'attribuer au plomb qu'on ajoute au cuivre, lequel en fe fcorifiant, s'unit \ I'argile & au fable qui compofent la brafque, aprcs que le charbon en a ete detruit, & forme un vernis fur toute la furface-, je le crois d'aurant plus que les baffins de reception du meme fourneau ne durent pas h. beaucoup pres autant que ceux du fourneau de Cheffey. Comme il pourroit arriver que par la negligence de ceux qui battent la brafque, il s'enlevat non-feule- mcnt une couche, mais meme deux du grand baffin, on verra par le plan TioifiemebjITinde fi'perieur, que j'ai pratique un baffin [fig. a, M), qui eft ordinairement reception. plein de pouffier de charbon , mais que Ton peut vuider au befoin pour y faire couler le furplus du cuivre qui fe trouveroit trop bas dans le fourneau pour couler dans les deux baffins de reception. Corr.biende temps L'operation que je viens de decrire , dure ordinairement dix i douze duieunrufEnagc. heures , comme on peut le voir par ce qui a ete dit ci-deffus •, on a (a) On 'vcrra dans !e fupplement, que, corjuintemcnt avec mon frere, nous fommes faivcnus k remplir notre objet & « ne ricn lailVei ii dclirer ii cet egird. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iP- reconmi que cliaqiie raffinage confomiv.e I'un dans I'aiitrc environ qiiatrc cents fagots de 4 pieds y i 5 pieds de long fur 1 pieds de circonfcrcnce; Q ^ y ^ comme la flamme dii fagot tourmente bcaiifoup phis le fourneaii , que lie fait cc-lle du bois de corde, on emploie fort iouvent dc ce dernier, Jinnee lyjo. I'operation n'en devient pas plus chere -, pour en briiler moins , on retrccit „ . . , la chaufte , corarue on pent le voir dans le plan lupcneur , par la ligne b^ij^ Tion&ais {fig. z, B ); lorlqu'il eft refendu, trois moules ou voics au plus faifant enfcmble 184 pieds cubes de bois blanc, comme tremble &: pcu- plier, fuffifenf, iorlque le bois eft tres-lcc foit en fagot, foit en bois de corde, on en brule encore nioins que la qusntite ci-deffus : un maitre raftincur Sc deux aides conduifent le raftinage. Le charbon do terre peut s'cniployer utilement ponr ropcration dent Le charbon de terre je vicnsde parler, I'epreuve en a cte faites; il eft vrai qu'iine dcmi heurj P<^"^'f«e'npl")«aii aprcs que le cuivre fut fondu , voyant qu'il n'avancoit pas autant qu'avec''' "^^' le bois, )e fis achever le raftinage avec des fagots bien fees, & je con- feilierois d'en ufer toujours de meme ll on avoit une mine de charbon affcz i pottee pour que Ion put preferer fon ufage i celui du bois, parce que lorfque le cuivre approche de fa perfediion , il feroit \ craindre que i'adJe vitriolique du charbon ne fcorifiat une partie du cuivre, aulieu qu'on ne court pas les memes rilques tant que le cuivre noir contient du fer & du zinc avec lefquels I'acide vitriolique a plus d'arfinitc. Un raftinage de cinquante quintaux de cuivre noir, rend ordinairement TXch^t da cuh- e quarc ntc-cinq ^ quarante-lix quintaux de cuivre rofette , ce qui fait un *'"■ "'^"'■i^SSfi- dcclict de huit ^ neuf pour cent-, mais ce dechet n'eft qu'apparent, puif- que, par des ellais reiteres, on a reconnu que fon dechet reel n'ctoit que de quatre &, demi pour cent, parce qu'il refte toujours bcaucoup de cuivre dans les craffes •, on fait que dans quelque fourneau que ce foit les fcories provenant du raftinage font toujours riches en cuivre : ce dschet a etc cop.ftate en 1760 par un eifai de deux cents quintaux de cuivre noir en quatre raffinages, dont les cralfes furent fondues fepaicment dans un four- neau a nianche-, il eft auffi prouve que le cuivre fait environ un pour cent moins de dcchct dans ce fourneau que iur le petit foyer ije crois qu'on peut attributr cette difference \ ce que Tom perfcftionne dans une feuie operation , une quantite de cuivre qui en exige au moins vingt fur le petit foyer •, on fait que Ton ne peut raftiner du cuivre fans qu'il n'y en ait toujours un peu qui fe fcorihe avec les niatieres qui lui font ttran- gerc's; plus le volume eft grand, plus la quantite qui fe fcorifie tft moindre Il proportion : d'.iilleurs le petit foyer eft un fourneau ouvert d'oii Ton s'appercoit que le foiiftlet cnleve des petites parties de cuivre qui fe re- pandent dans la fonderie, la violence du vent en enleve auffi par la che- minie •, on en ramalfe une partie en AUeniagne , en pratiquant une petite chambre dans la chemince des petits foyers i raftiner le cuivre : quant i la diff^erence pour la confommatien du bois, il eft prouve que la depenfe du grand fourneau, eft moindre des deux tiers de celle qu'exige en charbon le ratlinage fur le petit foyer. On peut voir par la dcfcription que je vicns ds donncr, que Ic fourneau i raiEner Ic cuivre, conlliuit aiuc mines de C H Y M IE tn A B R E G E D E S M £ M O I R E S rCheilTey en Lyonnois, a plus de chaleur que n'en ont ceux d"Al!emagne, , & par cette raifon il eft plus avantageux : celui de Grunenthal en Saxe confomme 458 pieds cubes, bois de corde , & environ z+ pieds cubes Annce 1770. de charbon pour raftiner feulemcnt quarante quintaux dc cuivre noir : i Tayoba, en Hongrie, on confomme environ no pieds cubes bois de corde, pour raffincr cinquante quintaux de cuivre noir, auxqucls on aioute trois k quatre quintaux de plomb qui fe fcorifient en pure pcrte -, on fait en outre que dix livres de plomb Icorihent environ une livre de cuivre. EXPLICATION D E LA P L A N C H E. FiGUall'RHMIERE. RepHfentant k plan infi'ricur. A, fondation de maconnerie. B , canaux pour empecher I'humidite des fondations , de monter dans le corps du fourneau; on les a pondtues parce qu'ils font au delfous du niveau du plan •, ils communiquent en dehors par I'ouverture ou efpece de foupirail , lettre X, C , \t cendrier. D le foupirail par ou entre I'air dans la chauffe ou r^verbere, il eft dirigd ■" fuivant les lignes ponftuees : c'cft par- Ik que I'on retire les cendresj on y defcend par I'efcalier E. , F, le mur de la fonderie. G , les petites ventoufes. Hj forme du baflin rempli de fcories tout autour des ventoufes & par-, deffus, FiGURI SICONDI. Reprifentant le plan fupirieuh A , ouverture de la cheminee qui monte perpendiculairemcnt. B, grille fur laquelle on met le bois; cette chaufte fe rctrecit fuivant k ligne poniftuee , par le moyen d'un petit mur de brique , lorfque i'opirjtion fe fait .ivec du bois de corde , au lieu des fagots. C , tuyere pour la diredion du vertt. D , deux fouftlets de bois doubles dont on n'a defline qu'une partie. E , pafTage de la flamme. _ DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. zSj F , ouvertiire par oii la flamme fort pour enhler la cheminee. — ^— — ""^ Gj pallige dcs fcories; c'eft rouvcrture par laqiicUe on decrafle le ciiivre. C h y m i f H , pctits murs en briques , entrc lefquels on a laiffi Ics paflages pour les ^ , _ pcrcecs, & dcvant lefquels on met une'brique. " ■'' ' I , baflin oii fe raffine le cuivre. K, les deux bafUns de perc^e. Lj canal d? niveau qui communique les deux baflins de reception 8c qui fert en c«s que fe cuivre couie plus abondamment d'uiie percee que de I'aurre •, pour lors il fert ^ recevoir le furplus du cuivre qui, fans tela, deborderoit & fe repandroit dans la fonderie. M, eft un troifierac baffin qui eft au niveau du terran , mais qui eft toa- jours rempli de charbonnaille, on- ne s'en fert que dans un cas d'ac- cident, c'eft-i-dire, lorfque la brafcue qui forme le grand baffin dans I'interieur du fourneau, vient ^ s'elever & que ie cuivre fe trouve trop bas pour pouvoir s ecouler dans les baffins fuperieurs , pour lors on^ait couler le reftant dans ce balfin M. Figure troisiemi. Reprifentant la coupe da fourneau , prife fur la ligne A' B' , des deux plans dans laquelle on a fait paroitre la youte du foup trail pour • U pajjage de I' air dans la chauffe, A, ma^onnerie des fondations. B , canaux pour I'humiditc. C, le cendrier. D, foupirail vout^ par ou entre I'air dans la chauffe j ily a line porte que Ton ferme lorfque le vent eft trop fort. £, efcalier pour aller dans le cendrier. F , 'mur de la fonderie. G , les petites ventoufes inferieures. K, lit de fcories. I, briques arrangees verticalement fur les fcories. K f petite couche d'argile. L, lit de brafque qui fe fait en trois couches, commc il a ete dit ci-i devant. M, chaufFe ou reverbere oii Ton met le bois, 1<1 , paffage deja flamme. O , interieur du fourneau. P , voute du fourneau. Q^, tuyere. * Tome XIV. Partie Frangoife. Oo C H Y W I I. 2f9o A B R E C £ D E S M E M O I R E S ! Rj fortie de la flamme; il y a une petite voilte k cct endroit, indepen- dante de la grande voute, etant fujetle I cette reparation. S ^ premier conduit de la chemince. Annce ijjo. j-^ deiixieme conduit qui moute obliquement & aboutit dans la grande cheminee perpendiculaire. V, grande chemince perpendiculaire ; les lignes ponduees marqiient I'oii- verture pour la conduite de la flaranie. Xj porte qui fe ferme avec une feule briquc faite avcc de I'argtle, de la paille hachee & de la bourre de veau; elle ne s'ouvre point pendant f'operation , les autres ouvertures font bouchees de nieme. Yj petit mur de brique oii fe fait la percee du cuivre , devant Icquel on met une brique pour retenir je cuivre. Z , baffin de reception. FiGtTRE QUATRIBMI. Repr(fentant la coupe du fourneau prife fur la ligne C D' des deux plans. A, maconnerie des fondations. B , canaux pour Itiumidite; ils comimmiquent en dehors par I'ouvcrture ou efpece de foupirail X. ■ C , les petites ventoufes inferieures. D , lit de fcories. E , briques placees vertlcalement. F, petite couche d'argile. Gj lit de brafque. Hj petites ventoufes fuperieures pour la fortie de I'humiditc. /j fortie de la flamme. K, interieur du fourneau. L, voute du fourneau. M, conduit oblique qui aboutit i la grande cheminee. N t grande cheminee perpendiculaire; les lignes pondtuees delignent I'ou- verture pour la conduite de la flamme : on, a m^iaga une ouverture ^ I'endroit marque par la lettre O. P , baffin de reception. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. iouvoit bien n'ctre pas de plus an- cienne date : quoi qu'i! e.n foit, I'obfervation de M. Sabattier n'en eft pas moins interefl'ante , & fi elle ne detruit pas le fyfteme re9U , elle apprend au moins h ne jamais admettre d'bypothefe fans auciwe reftridtion. La na- ture n'cft pas toujours affez docile pour s'affujettir aux loix qu'il nous plait de lui impofer. •II. L'academie rendit compte au public en 1747 (a), de la gucrifon d'line morfure de vipere , operee par de I'eau de Luce que M. de Juflieu fit prendre ^ un de fes eleves qui avoit ete mordu par un de ces animaux. Voici un nouveau fait de meme efpecc arrive chez M. le premier prefident de Malesherbes , qui en a fait part ^ l'academie. II fe trouva parmi des fagots qui etoient dans le grenier du juge de Malesherbes , un ferpcnt •, un homme qui vint pour tuer cct animal , le prit pour une couleuvre & s'amufa k I'irritcr ■, la vipere , car e'en etoit une , le mordit ^ la main , il (u) Voycz Hift. de I'Acad. 1747. CoIIeft. Acad. Part. Frang. Tome X. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 507 fentit li I'inftant line doiilcur trcs-vive, & Ton bras en tres-peii de nio- ^— »— — iM— mens enfla conlidcrablcment ; les chirurgicns du lieu qui ftirent appelles lui , firent prendre bcaucoup di- thetiaque & lui appliquircnt dcs vclicatoires , ■■ '^ ■* t o m i E; le tout fans aucun fucuts. M. de Malesherbcs ne fut avcrti que le lende- Annie 1766, main matin , & il trouva le malade dans un itat trcs-fachcux , I'enflurc avoit dcj^ g3gn6 le haut de I'cpaule, il '61011 prefque fans pouls , les cxtre- mites froides , & il avoit de frequens maux de cceur : M. de Malesherbes fe fouvint alors de la miniere dont M. de Jullieu avoit gueri fon ejeve, & il refolut d'en fiire uGge. II cnvoya fur le champ une perfonne avec un flacon d'eaii de Luce^ on fit au malade des fcarifications , & on y mit de cctte eau ; on lui en fit evaler lix goiittes dans de I'ean, & dans I'aprcs-midi on lui en fit pren- dre i petites doles de dcmi-heure en demi-heure : ce remede a ranii«e le pouls du malade, lui a occalionne de fortes fueurs, a diminuc les maur de cocur & calme le vomiffement : le malade a dte toujours de mieux en mieux , & il eft entiercment gueri. Voili done un fecond exempie de J'efficaciti de ce remede , & il le prouvc d'autant mieux que M. de Ma- Icsherbes foupconne qy'il n'avoit pas etc fort exad: fur le regime, qu'il avflit mangi de la viande & bu du vin abondamment. On pourroit loup- conner que la nature lui avoit infpire ce dernier gout conime un fecours ajoute aux remedes, fi ce meme goiit ne fe trouvoit pas plus (ouvent meme qui! ne feroit seceffaire, chez bien d'autres qui n'ont pis iti mox- dus de la viperc. III. M. GuFTTARD a fait voir \ I'academie tine icaille de tortue tcrreftre qui oftroit une (ingularite remarquable, i'animial avoit probablement recti un coup violent fur le- milieu du dos •, il s'etoit forme en dedans , k cet cndroit, une cheville offeufe de meme nature que I'ccaille k laquelle cllc tenoit, & qui avoit environ 8^9 lignes de longueur : cette cheville fem- bleroit avoir dil gener beaucoup I'animal , cependant il ne paroiffoit pas en avoir fouft"ert_, & il fe portoit trcs^bien lorfqu 'on I'a tue pour en fairc du bouillon. IV, M. LE Cat eft dans I'ufage d'envoyer de temps en temps i Tacadsmic, le denombrement des operations de la taille lateralc qu'il fait k Rouen avec tant dc fucces depuis I'annee 1729 •, le dernier dont il lui a fait part, comprend neuf annees depuis 1757 jufques & compris 1765 , pen- dant lelquelles il a fait confecutivcment cinquante-neuf failles heureufes. \J\\ ftul de fes malades eft mort, encore trois mois apres I'operation & par les /uitcs des obftrudions dans le ventre qu'il avoit auparavant. Si k ce nombre de cinquante-neuf, on ajoute celui de foixante-dix au- tres faites par ditiercns chirurgicns k Lille, k Berg-op-zoom, Bruxelles, Toulon, Dijon, Orleans, Anvers, ccla fait un total de cent vingt-ueuf A N A T O M I E. ;o8 AB R E G t DES MEMOIRES ! operations fiiivies dii plus grand fucces. On ne croit pas qn'il y ait en Eu- rope aiicune methode de tailler ,. dont on puifl'e citer pareil exemple, II eft bon de rappeller ici fommairemejit que cette operation eft la Antn'e tj66. methode iaterale que M. Morant a apprife de M.^Chefeldon , i Londres en lyiy, pratiquee depuis i Paris par le frere Cofine, avec un inftrnment particulier, & i Rouen par M. le'Cat avec un autre inftrument qu'il ap- pelle gorgeret ciflotome dilatateur , ainfi nomme parce que ce gorgeret cache dans I'epaiifeur du fond de fa gouttiere une lame qu'on en fait lor- tir pour exccuter la fedion interieure des proftates & le debridement du col de la veffie, & que cet inftrument eft compol'e de deux branches qui s'ecartcnt enfuite pour la dilatation du col de la veiTie. :U. S u R L E s Hermaphrodites. N evencment finguller a doniie lien au memoire de M. Ferrein , dont > y ^ nous aliens rendre compte : il fut confulte fur I'etat d'un enfanf, dont le ' ^' fexe paroiffoit equivoque, & qu'il etoit cependant trcs-important de*de- iliit. clarcr male ou femelle , parce que , s'il etoit male , il devoit jouir d'une fortune tres-confiderable , h. laquelle il n'avoit aucun droit s'il etoit femelle. L'examen d« fujet en queftion fit aifement reconnoitre ^ M. Ferrein qu'il *i 'avoir que I'apparence , & meme trcs-imparfaite , du fexe mafciilin, & que I'enfant etoit veritablement"tine fille -, mais cet examen engagea M. Ferrein h fe rappeller tout ce qu'il avoit lu ou vu fur cette matiere, & fur- tout les oblervations qu'il avoit faites fur le nomme Michel j & voici le refultat de fes reflexions fur ce fuJet, Les anciens, dans le nombre defqucls on compte Leonide & Paul ^gi- nette, reconnoifloient des hermaphrodites males & des hermaphrodites femelles , & ils avouoient que ces derniers etoient les plus communs ; en effet, tous ceux dont on a fait des obfervations fuivies & bien confta- tees, font de cette derniere efpece; on n'y appercoit,-^ la' verge pres , que les parties exterieures de la fcmme, quelquefois feulement un peu de- ngurees par raccroiifement de cette pretendue verge, que les auteurs les plus eciairis reconnoilfent pour le clitoris confiderabiement accru , & au- quel cet accroiffement extraordinaire a donne une fauffe apparence de la verge virile. Maigre cette fauffe reffemblance, & I'accroiffement qui li caufe, ces pretendues verges mafculines ont toujours les caradleres elfentiels du cli- toris ■, on n'y trouve ni le canal, ni la fiibftance fpongienfe de I'urette; le corps de cette efpece de verge eft fort tourne vers le bas ; il n'y a pas de frein au-deffous du gland •, le vuide qu'on obferve i I'extremite tj'eft que le bout d'une rainure ou fillon qui lepare le dcllous du gland en deux parties; le prepuce difparoit au-deffous du gland, & enfin les nymphes partcnt du dcflous du gland pour s'etendre julqu'^ la region du vagin. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 509 Tclles font les obfcrvations faitcs , prcfcjue generalemciit, fur tous les i^— ^ pretciidus hermaphrodites, ^ qiioi nous devons ajouter, d'aprcs Ics obfer- . vations de Graaf & de Van-Horne , que les parties internes qui caraderi- ■'^ '^ ■* ^ o m 1 fe'U le fexe feminin, fe trouvcnt chez eux commc chez les autres filles. Anne'i liGi. M. Ferrein a mcme obferve fur le nommc Michel, dont nous avons dej^ parle, que lorfqu'on manioit les tegumens des aines, on fentoit deux cordons 'qui lortoientr par I'DUverture dcs anneaux , & alloicnt (e perdre pres du pli de la cuilFe, & que la figure di; ces cordons & leur lituation, lie pcrmettoient pas de douter que ce ne fuffent les ligamens rends de la niatrice. Cc meme Michel avoit eu I'^coulement periodique des regies pendant quatre ans , au bout defquels elles s'etoient perdues. II n'eft'donc rien moiiis que ^certain qu'il y ait eu de veritables herma- phrodites , au moins tous ccux qui ont etc examines ne meritoient nulle- ment ce titre, & M. Ferrein termine Ion mcmoire par une reflexion bien finguliere , c'eft que , s'il fufHfoit pour etre hermaphrodite d'avoir une verge femblable i ceile de I'homme, jointe aux parties du fexe feminin, il n'y auroit aucune femme qui n'eilt ete hermaphrodite , au moins pen- dant quelques mois : les diflcdtions multipliees qua faites M. Ferrein, lui ont fait voir, que dans les premiers mois de la groffcUe, tous les em- bryons femelles ont une verge faillante , & figuree ^-peu-prcs comme ceile des males, attachee au pubis, en lorte que ce^x qui les voient, fans etre au fait de Tanatomie , les prennent pour males •, mais en les exami- nant de pres 'on reconnoit, comme dans les deux fujets qui ont donne lieu au memoire de M. Ferrein , que ce n'eft qu'une fauffe apparence. Ce n'eft qu'avec I'attention la plus grande , & apres I'examen ie plus fcrupu- leux, qu'on eft en droit, dans les recherches phyllques, de tompter fur cc qu'on croit avoir vu. 3,i A B R E C £• ■ D E S MEMOIRES A N A T O M 1 E. Ann^'i zySj. OBSERVATIONS ANATOMiqUES. 1V&. IVl R. GuATTANi, premier chirurgten du pape, & corrcfpondant de I'acadcmie, a envoys k M. Moraiid robfervation iuivante : un domcllique de M. Ic cardinal de Gonzague vint !e confulter fur une tumeur.qiii lui etoit fiirvenue k la region du foie; en examinant ce vifcere, M. Guattaui troiiva qti'il s etendoit jiifqu'aii nombril & a la ligne blanche ,«qu'il etoit tendti, reliftant foiis le doigt, & que la tiimeur paroiflbit circonlcrire-, lei tegiimens gardoieTit cependant leur couleur naturelle : mais on fentoit vers le centre de la tumeur une efpece de fluctuation , & le malade ne fe plai- gnoit d'aucune douleur ni d'aucune incommodite. Ces fyniptomes n'ayant pas paru k M. Guattani fufEfans pour bien conftater une maladie de cette efpece, il fe contenta de prefcrire au malade un regime convenable, au- quel ce!ui-ci fe fouinit; mais voyant au bout de quelques mois qu'il n'en recevoit aucun fouiageraent, & que Ton mal alloit toujours en augmen- tant, il confuita d'autres chirurgiens, & ce ne fut qu'au bout d'environ neuf mois que M. Guattani le revit. La tumeur alors s'etendoit Jufqu'i quatre doigts ou environ de I'om- biiic i elle etoit de forme ovale , enflammee , & on y appcrcevoit une fluctuation bien marquee ; la nature de cette tumeur paroiffant k M. Guat- tani aflez equivoque, & ayant remarque que'la peau & les tegumens etoient tres-eminces, il jugea quelle s'oiivriroit d'elle-meme & s'abftint d'y porter I'inftrument. Elle s'ouvrit en effet peu de Jours apres dans un violent acces de toux qui prit au malade , & il en fortlt une prodigieufe quantiti d'hydatides ou velicules pleines d'eau : le malade affura qu'il en etoit forti plus de trois cents avec une telle violence , qu'elles avoient ete lanc^es centre la mu-. raille , affez diftante de fon lit. _ , Ces hydatides, dont on avoit conferve quelques-unes, qu'on fit voir k M. Guattani, etoient groffes comme des balles de moufquet, & ce qu'il y avoit de plus lingulier, c'efl: qu'aucune n'eut ete crevee, ni en paffarit par I'ouverture, qui k peine pouvoit admettre un tuyau de plume, ni en fr.ippant contre la muraille oii elles avoient ete lancees , aufli la membrane qui les formoit etoit-elle.tres-folide. M. Guattani introduilit une fonde dans I'ouverture, & il reconnut que la capacite, alors vuide, de la tumeur s'etendoit fous la partie concave du foie, mais il n'en put atteindre le fond-, il fit dans cette cavite des in- jections aftringcntes pendant quelque temps, & le malade guerit, k une petite fiftule prcs qui donnoit une trcs-mediocre quantite de lymplie, &. qui s'eft fermee d'elle-meme au bout d'environ fix ans. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, jn Cette obfcrvatioii en r.ippella a M. Giuittani une autre qu'il avoit taitc dans les premiers temps de fes etudes anatomiques; en ouvrant le ventre a v, . ^ „ , d ui> cadavrc hiimain il appercut nne tumeur adnercnte a la partie concave du foie-, cette tumeur ctoit de la groileur d'unc grenade, rondc & trcs- Annc'e I'jGj. dure : M. Guattani I'ayant ouverte, il en fortit une grande quantitc d'hy- datides grofles comine des balies de moufcjuet •, le fac oil elles etoicnt contenues ctoit trcs-fort & tres-epais, ce qui avoit vrailcmblabiement eni- pechc cette tumeur de fe percer. Ces deux exemples li femblabies don- nent tout lieu de conjciflurcr que ces tumeurs (out plus frequcntes qu'on ne penfe , & qu'on pcut les porter trcs long-temps fans s'cu apperccvoir par cies effets lenlibies. • ■ ■ 1 1: M. Portal a fait voir \ I'academie deux reins mondrueux trouves dans le cadavre d'une feiiimc; ces reins etoieht trois fois plus gros qu'i I'ordinaire; leur furface exterieure etoit reniplie d'eminences & de cavitei femblabies \ celles des reins des foetus, ou meme des enfans, & les ure- tercs avoient kur goulot fi dilate, qu'un feul pouvoit contenir un verre deau. Lel-cin droit etoit dans la meme diredlion que le gauche; ils avoient chacun deux arteres & deux veines enuilgentes ; leurs extrcmites fuperieu- res font plus eloignees Tune de I'autre que leurs extrcmites intcrieures, &. ceiles-ci font jointes enfemble par un proloiigcment de la propre lubf- tance des reins qui referable \ un ligament \ cette production etoit appla- lie pofterieuremeiit ; elle etoit unie & polie, & repofoit fur la partie an- terieure de i'aorte qui etoit dans cet endroit plus epaiile qu'ailienrs ; la fur- face exterieure de cette artere etoit aufll tres-polie, ce qui peut-etre ne venoit que du frottement r^pete de ces pieces : la veflie du meme fujet etoit extremement dilatee , & cependant les ureteres etoient en bon etat ^ leurs extrcmites inferieures ou elles s'inferent dans ce vi'.cere. II ne paroilloit pas que cette femme eut jamais reifenti aucune incom- inodite dans Ics voies urinaires, ne s'etant trouve dans la vellie ni d.ins les leins aucun gravier ni aucun calcul, & ces parties ne portant aucune mar- que d'inflammation : la caule de fa mort n'etoit pas equivoque i le pou- non plein de tubercules purulens , & I'extteme maigreur du cadavre , etoient des prfuves certaines quelle etoit morte dune phtifi; pul- nionaire. CiTTE ann^e parut nn ouvnge de M. Lieut.md, intitule : Uiflorta Anatomico-Medica fiflcns numerofa cadaverurn humanorum extijpicia , quihus in apncum venit genulna Morborum Jedes ; horumque referantur caujhe vel patent effeclus , auquel ouvrage M. Portal, duquel nous venons de parlcr dans I'article precedent, & qui a veillif II ledition, a joint plu- (ieurs d5 fes propres obfervations, & une table tres-ample felon I'ordre des differentes maladies, deu^i volumes in-^to. 5ii ABREGE DES MEMOIRES «!■■ Uacidcmie a dejk rendu compte au public en 1759 (a) d'un ouvrjgc dii meme autcur & du meme genre , intitule : Prdcis de la Mc'Jecine pratique ; A N A T o M I £. i^^jj ppj ouvrage n'etoit , pour ainli dire , que le refultat & I'abrcge de Jinnee iiG-'. celui dont nous avons i parler, qui contient tous Ics faits fur lefquels la pratique de M. Lieutaud eft appuyee. L'anatomie eft en ettet le flambeau de la medecine, non-feulement elle cnfeigne au medecin la ftrud;ure du corps humain p.ir la diffedion dcs cadavres fains , raais celle des cadavres de ceux qui font raorts de mala- die, donne lieu de reconnoitre les ravages qu'elles out caufes dans les diffirens organes , les caufes qui ont pu les produire , & fouvent ce . qu'ii auroit "ete \ propos de faire pour gu^rir Ic nial ou en retarder ic progres. . . _ Un fecbnd avantage que le medecin retire de I'ouverture des corps de ceux qui meurent de maladie, c'eft de Juger des cas ou le fecours de I'art eft inutile, & de pouvoir mettre d'une part I'honneur de la medecine \ couvert par un pronoftic ftjr , & de I'autre epargner au malade le defa- grcment de remedes qui lui feroient totalement inutiles. Ces avantages, que l'anatomie eft feule capable de procurer, ont et4 (I bien reconnus de tout temps , que I'etude de cette fcience remonte juf- qu'^ la plus haute antiquite : M. Lieutaud la pouffe jufqu'au temps des Egybtiens , & ne doute point que les pretres de cette nation n'ouvriffent en fecret les cadavres qui leur etoient confids pour leur procurer les hon- neurs de la fcpulture-, mais ces diffeftions furtives ne pouvoient procurer une grande inftrudion , & les progres de l'anatomie furent fort lents, juf- qu'^ Efculape, qui n'etoit ne ni en Grece , ni \ Epidaure, comme les poetes I'ont avance, mais en Egypte & \ Memphis ; I'exemple d'Efculape fut fuivi par la famille des Afclepiades , qui donna \ I'Egypte des rois & des pretres, & enfin le celebre Hippocrate. Depuis le temps de ce prince de la medecine, on na trouve plus de veftiges de I'etude anatomique, jufqu'i celui d'Erafiftrate , medecin du roi Seleucus, qui fut fi bien demeler I'amour du prince Antiochus fori fils pour la reine fa belle-mere; aprcs lui, vint Herophile, fondateur de Tecole anatomique d'Alexandrie , qui, fous la protedtion de Ptolomee-Lathure , avoit diffeque plus de fix cents cadavres , mais dont les ouvrages ont mal- heureufement p^ri par I'injure des temps. On n'entendit plus parler de I'hiftoire des etudes anatomiques pendant environ cinq cents ans : ce ne fut qu'aprcs ce temps que.le genie & I'ap- plication de Gallen la firent , pour ainfi dire, renaitre de fes cendres-, mais ce ne fut que pour difparoitre encore plus long-temps -, ce dernier intervalle dura plus de mlUe ans , jufqu'au temps de Vefale & d'Euftache, qui, malgre Icurs autres occupations, firent des progres furprenans dans Tart de dilTequer les cadavres. Depuis ce temps, I'etude de l'anatomie n'a plus eprouve d'interniptions: bien-loin del^, I'ufage s'eft etabli dans prefque tous les hopitaux, d'ouvrii Co) Voyez Hift.. amide j 759. les DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 515 les corps de ceux qui y meurent ; mais ccs obfetvations eparfcs dans un grand nombre de volumes, ne fe trouvoient que rarement cntre Ics mains A ^ . t o \ de ceux qui pratiquoient la medecine , & leur ^toient par ce moyen aufli inutiles que li dies n'euflent jamais cxifte. Annie tj6j. Pour cviter cet inconvenient, niluftre Bartholin, dont le nom feul fait I'eioge , entreprit de raffcmbler ces obftrvations epaiics, en y joignant les fiennes, & d'en former un feul corps : cet important ouvrage etoit pref- que fini Icrfqu'il fut malheureufement confume par le feu, & le grand age de i'auteur ne lui permit pas de le recommcncer. Bonnet entreprit un ouvrage de meme genre, d'aprcs fes propres ob- fervations, & cet ouvrage fut depuis complete par Manget, qui lui donna le titre de Sepukliretum Anatomicum ; mais quoique ce livre contienne Un grand nombre d'obfervations utiles & curieufes , il en renfcrme audi plulieurs moins certaines, melees de conjectures halardecs, mal ccrites, & capables de rebuter les lecleurs les moins delicats. II n'a pani depuis Manget que peu d'ouvrages de ce genre , jufqu'k M. Morgagni, qui a public fes propres obfervations, Jointes \ celles de Vafalva •, mais ces obfervations font pour la plupart traitees plus au long qu'il n'eiit ete neceffaire , & un grand nombre ont etc faites fur des caiu> vres de gens qui n'etoient pas morts de maladie. Tels font les feuls recueils d'obfervations anatomiques, dans lefquels les jeunes medecins & les jeunes chirurgiens qui veulent s'inftruire , puiflent trouver du fecours : ce n'eft pas cependant que nous n'ayons encore une infinite d'oblervations de Ruyfch , de Boerhaave, de meffieurs Senac, Winflow, Hunaud, Ferrein , Haller, Petit, & le baron de Van-Swieten, de cette academie; de Pringle, de meffieurs TiiTot, Huxham , Haem, Storck, Hafenolt, Sauvages : ce dernier ayant Joint ^ I'eludc de I'hiftoirc naturelle celle des mathematiques, Imberc , Fournier, Baderi, & enfin M. Portal, editcur de cet ouvrage, que fa grande jeuneffe n'a pas empc- che d'etre mis au rang des celebres anatomiftes , & que I'acadsmie vient d'admettre , depuis la publication de cet ouvrage , au nombre de fes membres. Nous ne pourrions , fans injuftice, paffer fous filence, la part qu'ont eue au progres dc I'anatomie, ceux qui ont cultive I'autre panie de la me- decine; c'eft- k- dire , la chirurgie •, les ncms de meffieurs Petit, Morand & Tenon , de cette academic-, de mcflicurs le Cat, le Dran , & de piu- fieurs autres fivans anatomiftes de cet ordre , tiendront toujours un rang diftingui dans les fafles de I'anatomie-, mais quelque prccieufes que foient les obfervations que nous tenons de leur main, elles font eparles dans un grand nombre d'ouvrages , oii il n'eft pas toujours aife de les trouver. II etoit done tres-utile qu'il y eiit une collection de ces obfervations anatomiques , & fur-tout de celles qui pouvoient donner des lumieres fur la connoiffance & la guerifon des maladies -, cette neceflite avoit memo ete fi bien reconnue, que quelques perfonnes avoient entrepris ce travail; mais on fent aifement combien un pareil ouvrage eft diilicile, audi per- Tomc XI V, Panic Fran^oije, R r 31+ ABREGE DES MEMOIRES ■ — ^■— fonne. de ceux qui I'avoieiit entrepris, n'y avoit-il reufii; & en effet, . pour peu qu'on y faffe reflexion, on verra bientot combien de favoir, de -■ lefture & de travail il exige pour affembler les materiaux, les foumettre Annie llS-j. ^ Texamen d'une fage critique, en exclure les faits villblement faux ou meme hafardes, & prefenter les autres avec une bricvete neceffaire en pa- reille circonftance, & qui ne faffe ccpendant ricn perdre de la clarte. Nous ne dirons rien de trop quand nous affurerons que toute la ca- pacite de M. Lieutaud lui a ete niceffaire en cctte occafion, & nous ajoii- terons nieme qu'il a ete plulieurs fois tente de Tabandonner , par la dilfi- culte qu'il y rencontroit. \Jnz colledtion fi nombreufe avoit befoin d'etre rangee fuivant un cer- tain ordre , pour qu'on en put tirer toute I'utilite dont elle eft fiifcepti- ble : M. Lieutaud a prefere I'ordre anatomique \ toute autre-, c'eft-k-dire, qu'il a mis enfemble routes les obfervations qui regardoient les maladies d'une certaine partie •, il a mieux aime les ranger dans cet ordre , que de fuivre celui des maladies, toujours beaucoup plus equivoque; & comme il arrive tres-fouvent que la meme obfervation prelente un derangement dans deux parties differentes, des renvois indiqucnt h la tin de chaque rfmcle ce qui peut avoir ete dit dans un autre. Ceux meme qui defireroient de trouver les obfervations rangees dans Tordre des maladies , ne feront pas prives de cet avantage ■, il leur lera procure par une table tres-ample que M. Portal a ;ointe ^ I'ouvrage de M. Lieutaud, & dans laquelle on trouvera les oblervations indiquees fui- vant cet ordre. Ce que nous venons de dire de I'ouvrage de M. Lieutaud, en fait a f- fez comprendre I'utilitt;-, c'eft une elpece de trefor public de la medecine, dont toutes les pieces ont ete choifies avec la plus grande attention : on y trouvera, prefque toujours, les caufes des maladies, & les lignes auxquels on les peut reconnoitre ', fi on en excepte cependant les maladies de nerfs, dont I'irritation n'exifte plus aprcs la mort-, encore meme, dans ce cas , y trouvera- t-on les marques des effets fendbles que cette irritation a pro- duits •, facilite immenfe pour ceux qui fe deftinent \ la pratique de la me- decine, qui pourront, pour ainli dire, s'approprier dun coup-d'ceil I'ex- perience de tous ceux qui les ont precedes. Ce travail avoit befoin d'etre prefente d'une maniere claire S: precife , & cet avantage ne lui manque pas; I'extreme brievets i laquelle M. Lieu- taud a ete oblig^ de fe reduire, ne I'a pas empeche de rendre les objets de la maniere la plus claire, &, ce qui en releve encore le prix, avec la plus belle latinite. Cet ouvrage a paru tres-propre h contribuer au pro- gres de la vraie medecine , & digne de la reputation ii bien meritee dont jouit fon auteur. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. jry A N A T O M I n. Sur le Michanifme de la Rumination, 0 fur le tempirament des BCtes j j ^„ , "^ ■" Aanee tyoa, a laine. V_>Eux qui font meme niidiocrement iiiftruits de I'^conomie animale, Hift. favent que dans le nombre dcs quadriipedes frugivores, c'eft-h-dire, qui fe iioiirriffent d'hcrbes on de grains, il en eft pliiliciirs efpcces qui ont la finguliere propriete de manger deux fois le ineme aliment; c'eft-i-dire, qu'aprcs avoir, comme les autres animaux, avals leur aliment, ils le font revenir par la gorge dans leur bouche , le machent de nouveau , & I'ava- lent enfuite fans retour , c'eft ce qu'on nomme rumination ; Sc les ani- maux qui ont cette propriete , fe nomment animaux ruminans. Ces animnux ont plufieurs eftomacs , & on a meme cru qu'il en avoient qua- tre. Nous verrons bientot fi cette aflertion eft jufte •, mais , quoique la connoiffance de la rumination foit de toute anciennete , le mechanifme, par lequel elle s'operc, n'en etoit pas mieux connu. M. Daubenton a ta- chc de le developper d'abord par ciiriolite , & enfuite par I'influence que cette (inguliere operation lui a paru devoir avoir fur le temperament de Taniraal. Les herbes coupecs par I'animal , Jorfqu'il pature, font portees , par la premiere deglutition, dans le premier eftomac qu'on nomme la panj'e , Sc oii elles reftent comme en depot , fans avoir prefque fubi aucune alte- ration. Get eftomac eft accompagn^ de trois autres, & ils font fitues dc ma- niere que I'ccfophage communique aux trois premiers , prefque par le meme orifice. Le fecond eftomac, qu'on appelle le bonnet, communique immedia- tement i la panfe, & cette communication eft contigue ^ celle de I'ccfo- phage. Lorfque I'animal veut ruminer, la panfe, alors pleine d'herbes, fe con- trafte, une partie de cette herbe remonte par I'adion des nuifcles dc I'trfophage , dans la bouche, pour y etre remlchee , mais elle paffe aupa- ravant par le bonnet •, & aprcs cette feconde mafticjtion, elle eft avalee de nouveau &: portee, non dans la panfe ni dans le bonnet, mais dans Ic troilieme eftomac, qu'on nomme fiuillet , d'ou elle paffe dans la caillet- te , qui eft le quatrieme , & de-l.\ dans I'inteftin. II le prefente ici deux queftions : pourquoi I'herbe contenue dans la panfe, paffe- t-elle dans le bonnet, lorfque ce vifcere fe contrafte, & n'en- rile-t-elle pas immediatement la route de I'ttfophage ? & pourquoi lors de .la feconde deglutition , paffe-t-elle immediatement dans le feuillet, fans entrer dans la panfe ni dans le bonnet ? Un mufcle place \ rextremite de I'oefophage , ^ I'endroit ou il s'infere dans la panfe , eft I'organe qui opere toutes ces diff(^rentes fondions •, il * peut, comme les mufcles de la bouclie, fe contrader par un coin ou par Rr ij ii6 A B R E G E D E S M E M 0 I R E S ' '"autre : d.ins le temps oii la panfe fe coiitratte , il fe fcrme par le coin A qui repond ^ i'oefophage , & le paflage du bonnet etant libre , I'hcrbe y ' entre , s"y imbibe de la ferolite contenue dans I'epaifleur du bonnet , qui Annc'e ij6S. I'exprime en fe contraftant , & alors roefophage s'ouvre du cote du bon- net , & la pelote d'hcrbe imbibee remonte dans la bouche. Dans la feconde deglutition , au contraire, le mufcle fcrme abfolument I'entree de la panfe, & ne lailfe libre que le paflage dans le feuillet. Mais pourquoi ce paflage de I'herbe dans le bonnet, & quel en peiit etre I'ufage ? La feule infpeftion des matieres contenues dans la panle & dans le feuillet, le demontre: I'herbe dans la panfe eft en nature & prefque feche •, dans le feuillet elle eft en bouillie tres-liquide , elle ne peut avoir pris cette humidite que dans fon paflage par le bonnet; la texture de ce vifcere nieme fait voir qu il eft tres-propre ^ contenir de la ferofite , & k la rendre par la compreflion-, & fi on veut admettfe ici I'analogie, cet eftet n'eft pas equivoque dans le chameau, oii une partie femblable con- tient Jufqu'^ quatre pintes d'eau , au moyen de laquelle cgtte animal peut ctre plulieurs Jours fans boire : le bonnet du mouton rend de meme en ]e comprimant, une ferofite abondante qu'il repompe lorfqu'il fe retablit en fe lachant. II eft done evident que ce fingulier organe eft une efpece d'eponge animale qui s'imbibe de la ferolite du lang de I'animal , & de I'eau qu'il boir. II refulte de-li que cet organe doit* d'autant plus pomper de la ferofite du fang , que I'animal y introduira moins d'eau par la voie de la boiflon , & que par confequent il n'eft pas indifferent de bien regler le temps & la quantite d'eau qu'on leur laifle prendre : fi la boiflon eft trop abon- dante, le bonnet ne tirera pas toute la ferofite qu'il doit tirer du fang, & cette ferofite fuperflue caufera des maladies dangereufes ^ I'animal. M. Daubenton a vu des moutons dans ce cas , etre remplis d'ydatides ou veflies pleines d'eau qui genoient tous les vifceres : fi, au contraire, on ne les fait pas aflez boire, le bonnet deflcchera abfolument le fang, & I'animal fe deflcchera : la meme chofe arrivera fi I'animal cflliie aflez de chaleur pour fuer-, cette evacuation retirera une partie de la ferofite qui auroit ete necefiaire pour la digeftion , & toute I'economie animale fera troublee. Cette derniere reflexion a fait voir ^ M. Daubenton combien la pra- tique ufitee en ce pays, de tenir les moutons dans des etables, etoit per- nicieufe ; ces animaux font aflez bien vetus pour ne pas craindre le froid , ils ne redoutent que le chaud ; la chaleur artificielle qu'on leur procure , ne fait que leur caufer des maladies & deteriorer leur laine. Au nord & au fud de la France , on les tient tout I'hyver fans abri , & M. Dauben- ton lui-meme a eflaye de les tenir ^ I'air tout I'hyver avec le plus grand fucces : mats cette matiere eft aflez importante pour etre traitee ^ part , & dans un plus grand detail , & M. Daubenton la referve pour un autre memoire. Celuici aura toujours doniie un des principes fur lefquels eft fondee cette meiliode. DE L-ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 317 A N A T O Mil Sur les moyens de ritahlir la diglutition dans un cas ou la caufe qui I'arrite n'ifl marquic par aucun fignc. ' Xv I f. N n'cft plus ordinaire que de voir la deglutition interceptce par HiTt. line efquinancie , une inflammation , line tumour furveniie ^ la gorge ; dans tous ces cas, la caufe en eft ailce \ reconnoitre, & ces maladies font connues de tous les medecins. Mais il eft un autre cas.oii la deglutition eft interceptce fans qu'il paroiffe aucun fignc qui puifle en indiquer la caufe ni le traitement. Ce cas s'eft prcfente quatre fois k M. Ferrein , & il a cru devoir communiquer k I'academie fes obfervations \ ce fujet, pour prevenir le danger auquel les malades feroient infailliblement expofcs , faute de favoir le moyen de les guerir. Les qu.itre fujets fur lefquels M. Ferrein a obferve ce phenomene, ctoient deux fiUes d'environ vingt ^ vingt-cinq aiis, & deux femraes, jouillant les unes & les autres d'une bonne fante. Tout d'un coup elles s'appercurent qu'il leur ctoit impoflible d'avaler la moindre parcelle d'alimens folides ou liquides , fans cprouver d'ailleurs aucun mal ni aucun fymptome dans le gofier ni dans aucune partie dii corps , li ce n'eft qu'une d'entre elles reffentit quelques maux de cccur avant cet accident, & fans qu'il ait etc fuivi d'aucun autre, excepte ^ una dont nous allons parler. A celle-ci, il prit le troilieme jour de fon accident, un acces convullif avec une forte agitation des bras & des jambes, & perte de connoiffance pendant un demi-quart-d'heure-, apres quoi elle reprit connoiffance & fa gaite naturelle, mais fans pouvoir parler pendant les deux premieres mi- nutes : ces acccs la reprirenf pendant environ huit jours , mais la foi- bleffe , fuite neceffaire du dcfaut de nourrlture , devint nienacante malgre les lavemens nourriffans qu'on lui donnoit. M. Ferrein ayant appris qu'ellc avoit mange exceflivement de iucreries la veille de fon accident , crut que les humeurs contenues dans I'eftomac pouvoient exciter le fpafme du pharynx & les convulfions de tout le corps , & il chercha ^ la faire vo- mir •, comme I'emetique ne pouvoit pafTer ^ caufe de I'enibarras de la gorge, il cut recours i la fiunee du tabac, qui effedivement la fit vo- mir : la £jcilitc d'avaler revint aufli-tot •, des cordiaux , des purgatifs doux & un regime approprie acheverent I'entiere guerilon. Les trois autres perfonnes n'ayant pas eu des fymptomes fi facheux, furent traitees un peu plus doucement ; des lavemens charges de deux grains d'extrait d'opium , firent ceffer le fpafme , la faculte d'avaler revint, & les purgatifs doux , fagement adminiftres , eurent I'honneur de la cure. Cette obfcrvation a paru d'autant plus importante , que cette efpece de maladie etoit peu connue , & quelle n'etoit point une fuite de vapeurs: aucune des quatre perfonnes que nous venous de citer, n'y ayant et6 fu- jette ni devant ni aprcs font accident. A N A T O M I t. }i8 ABRECE DES MEMOIRES Voici encore iin fait ^-peu-prcs de meme nature, tire d'une lettre de M. Montet, de la fociete royale dcs fciences de Montpellier, & dont ' la guerifon a ete operee par un autre remade , mais fonde fur le meme /imiie tySS. principe. La femme d'un medecin de Montpellier, vive & d'lin tempera- ment a61:if , fut attaquee d'un mal de gorge accompagne d'une fievre affez forte ; ne pouvant confulter fon mari qui etoit alors abfent , elle prit d'elle-meme I'emetique qui la purgea beaucoup , fans diminuer la fievfe, & lui donna une difficuke d'avaler tres-confiderable. Les faignees faites au retour de fon mari, firent tomber la fievre, mais le mal de gorge fub- fifta, de meme que la difficuke d'avaler-, les fangfues, les veficatoires , I'introduiftion meme d'une fonde de plomb , ne purent debarrafler roefo- phage, & la malade couroit rifque de perir d'inanition , lorfque fon mari imagina de lui propofer d'effaycr de la glace pilee; les premiers glacons furent fans effet -, mais apres plufieurs tentatives , la malade fentit qu'il etoit pafle une goutte d'eau : ce fucccs I'encouragea ^ continuer , & elle avala une certaine quantite d'eau qui paffoit goutte h goutte; le bouillon ne pouvoit cependant pas encore paffer, & on ne parvint k en introduire qu'en le faifant preceder de quelques glacons : on varia I'ufage du remede, & on foutint pendant plufieurs Jours la malade avec des eaux glacees qu on rendoit nourriffantes. La fonde de plomb , les rafraichiffans & quelques au- tres remedes prudemment adminiftres , acheverent la cure que la glace avoit fi heureufement commencee. Tous ces faits prefentes fous un point de vucs general, femblent indi- ' quer que ce mal a pour caufe un fpafme caufe par des liqueurs vifqueufes & irritantes-, que la glace n'avoit agi qu'en obligeant les glandes k fe con- trafter & en diminuant la difpofition inflammatoire , & qu'en general les caimans font , dans ce cas , les remedes les plus efficaces qu'on puiffe ad- miniftrer. Le' dernier fait donne encore upe lecon plus importante •, il enfeigne aux medecins k favoir ofer prudemment , & k franchir les regies ordinaires , lorfqu'elles fe trouvent infuffifantes. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ?ip A N A T O a: 1 t, OBSERVATIOA'S ANATOMiqUES. Ann^e i 6S J_iES dents des animaiix out ordinaircment leiir accroiffjment & leiirs Hift. limites marquees par la nature ; dies paffent cepeiidant quclmiefois ces limitcs dans I'homme meme & dans quelques animaux. M. Fougeroiix , patlaiit fur ce lujet, rapporta que M. de Juflieii avoit eu chcz lui un des animaux du genre des lapins , & qu'on nomme vulgairemrnt cochons d'lnde ; il s'appcrciu que les dents incilivcs de cet animal s'alongeoient prodigiciifement & h tel point qu'il falloit les. lui caffer & les lui limer de temps en temps pour qu'il put prendre la nourritur*, fans quoi il ctoit oblige de jeter en I'air les herbes dont il fe nourrilloit , & de les retenir adroiteraent pour les faire entrer dans la gueule , fans les couper comme k I'ordinaire avec fes dents inciiives •, M. Fougeroux ajouta qu'il avoit obferve le meme accroiffement de dents lur pluiieurs lapins, & fit voir quelques- unes des tetes de ces animaux : M. le due de Chaulnes & M. Morand , qui avoient obferve la meme chofe , firent voir dc pareilles tetes -, il relulte de toutes ces obfervations que le genre du lapin eft plus fujet qu'on ne penfe ^ cet alongement de dents qui doit faire perir beau- coup de ces animaux par la difticulte de fe nourrir qu'il leur caufe; ce meme phenomene s'obferve quelquefois dans rhomme i raais i'art fait, dans notre efpece , venir au fecours de la nature , & on fe dcbarraffe de ces dents, foit en les arrachant, foit en les limant pour les empecher de ddtigurer on d'incommoder ceux qui les portent j ce qui rend cet incon- venient trcs-rare parmi les hommes. I I. M. Tenon a fait voir 2i Tacademie line vefTie Iiumaine , divifee inte- rieurement comme en deux parties , par une cloifon percce dans fon mi- lieu ; elle lui avoit ete envoyee par M. Durand , habile chirurgien a Chartres : les exemples des doubles veflies ne font pas rares; I'examen de cette derniere fait avec exactitude , a fait voir qu'elle n'etoit double qu'en apparence , & que ce n'etoit qu'une feule veflic , dont la tunique mem- braneufe s'etoit echappce en partie, par les mailles du refeau charnu qui enveloppe ce vifcere ; ce qui pourroit faire croire que les autres veflies qu'on a cru doubles , ne devoient cette apparence qu'4 la meme caufe. Le malade qui a fourni le fujet de cette obfervation , etoit mort age de foixante-quinze ans, des fuites d'une retention d'urine , s'etant toujours bien porte julqu'a environ un an avant fa mort. II commenca alors ^ rcf- fentir quelques difiicultes d'uriner, qui s'augmenterent de plus en plus, julqii'au point que la retention fut complettc , trois mois avant fa niortj A N A T O M I E. 519 ABREG6 DES MEMOIRES fans cependaiit qu'il reffentit aucune douleur , meme en comprimant la region du pubis-, il fut fonde & on liii tira dfux pintes d'lirine, niefure ' de Paris. Un plus grand nombre de fails de cette nature , decideroit peut- ytiirj^i lj68. etre fi I'indolence de la veffie, malgre I'extrerae dilatation , ne feroit pas un pronoftic affure d'une hernie de cette efpece : ce qu'il y a de certain , c'eft que lorfqu'elle exifte , plus elle eft confiderable , moins I'urine agit fur le vaiffeau pour le dilater, parce quelle etend plus aifement les parois membraneules de la hernie , oil elle trouve moins de reliftance. I I I. M. DU Peyron de Chuyssiole, dodeur en mcdecine , & M. Bon- houre , chirnrgien , ont fait part ^ Facad^mie de robfervation fuivante : dans la paroifle d'Ailly, dedion de Mauriac , dans la haute Auvergne, il y a une payfane, nee le ly aout i6y6 , & par confequent agee de plus de quatre-vingt-onze ans, qui eft affujettie, i cet age, aux evacuations or- dinaires k fon fexe •, elle eft de taille mediocre , bien proportionnee , & conferve encore des reftes d'une phylionomie agreable : elle a eti mariee ^ dix-fept ans, & a eii douze enfans quelle a tous allaites ; elle n'a jamais eu d'autre maladie que celles de fes couches. Cet etat de fante pent etre cgalement attribue k fa bonne conftitution & ^ la frugalite de fa vie , ne s'etant jamais nourrie que de laitage , de froraage , de legumes, & quel- quefois d'un peu de viande de cochon , le tout accompagne de pain bis de feigle & de gateaux de farralin. Elle a toujours vaque aux travaux de fon etat , fans ceffer d'obferver les jeunes ordonnes par i'Eglife : fes orga- nes ne paroiffent pas affbiblis •, elle lit, coud & travaille k d'autres ou- vrages fans lunettes, & k un pen de durete prcs dans I'ouie , elle jouit encore de tous (es fens, de fa memoire & de fon jugement -, en un mot, on pent la mettre dans ce petit nombre de perfonnes heureufcment pri- vilegiees de la nature , auxquelles il a ete accorde de jouir pailiblement de Teur etre , pendant tout le cours de la plus longue carriere. Cet avan- tage pent bien corapenfer la privation des biens & des dignites , qui fii- rcmcnt I'auroient accourcie & en aiiroicnt altere la jouiifaiice. I V. Tous ceux qui font un peu au fait de la chaffe, favent qu'on rcgirde comme certain que les lapins & les lievres fe donncnt mutucllement I'ex- clulion , en forte qu'on ne voit aucun lievre dans les garennes ou les lapins font etablis -, & qu'au contraire , les cantons oii il y a beaucoup de lievres , font depeuples de lapins : il faut cependant que cette antipathic generale entre les deux efpeces, ait fes exceptions. M. Fcugeroux a fait voir h I'academie , la peau d'un animal tue dans une garenne , & qui a paru tenir vifiblement des deux efpeces. L'amour qui fait rapprocher le fceptre & la houlette, auroit-il done audi le pouvoir de riunir les efpeces antipathiques ? V. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES, jzr " • A N A T O M 1 E. Un des amis de M. Tillet lui a mande qu'iine Jument, qui itoit plei- ■""^'^' iJo3. ne, avoit mis bas un poiilain & un mulet. Ce fait eft une preuve dc- monftrative de la podibilitc de la luperf;.tation , puifqu'il a fallu ici Ic concours de deux males de diftcrente elpece-, mais ellc n'eft pas la feule, & I'academie a deji public dans Ton hiftoire de 175 }> yoy. Hiji. an- nie 17 S3-) uue oblervation abfolument femblable. V I. L'acADEmie a rendu compte en ij66 , {Ibid. tySff.) d'un fait qui prouve combien il eft dangereux de furmener le gros betail. En voici un autre qui fait voir que la gioife voLaille, que Ton mene a pied, court le meme rifque. M. du Haiuel a rapporte , que des marchands ayant amens ^ Pithiviers & aux environs, une grande quantite d'oies , qu'ils avoient prelfees pour arriver ^ un certain jour oii ils croyoient en avoir un meil- leur debit , preique tous ces animaux ctoicnt morts , fans qu'on en put doniier d'autre canle que I'exccs de fatigue qu'on leur avoit fait eprouver. V I I. I M. Borden AVE, cliirurgien de Paris, & bien connu de Tacadanic far plulieurs bons ouvrages qu'il lui a communiques , lui a fait part dc obfervation fuivante. Un homme , age d'environ cinquante ans , etoit fujet depuis long-temps k eprouver une difficulte conliderable de refpi- rer, ^ une efpece d'anxiete & k des fufFocations, & fon pouls etoit, en general, affez foible-, apres fa mort , on trouva le ventre trcs-enfle, & une infiltration confiderable dans les cuilTes & dans les jambes : I'ouverture du ventre y fit voir un epanchement peu confiderable , & beaucoup de defordre dans les vifceres qui y font contenus ■, la difficulte de refpirer & la lenteur du pouls failoient foupconner qu'il y en avoit audi dans !a poi- trine , & on I'ouvrit : le poumon droit etoit adherent ^ la plevre , dans une grande partie de fon ctendue, & il y avoit un epanchement de ce cote , & un plus grand dans I'autre capacite de la poitrine •, le pericarde parut epailTi, & en voulant I'ouvrir, on s'appercut qu'en quelques endroits il reliftoit ^ I'inftrument tranchant ; ce qui etoit caufc par une concretion offeufe qui s'etendoit fur la furface exterieure des ventricules, cSt fur- tout lur celle du ventricule anterieur ; le pericarde trcs- adherent fe coufondoit en ces endroits avec la fubftance du cceur , fans pouvoir Ten fcparer : la maceration ayant permis de feparer la fubftance charnue , on trouva une concretion offeufe , inegalement epaifle , tranfparente en quelques en- droits, large de plus de deux pouces, & commune aux deux ventricules Tome XIV. Partie Fnncoife. Ss 5" ABREG^ DES MEMOIRES I ^^— du coeur & k fa cloifon, fans aucune interruption-, elle couvroit prefqii'en- . tierement le ventricule droit jiifqu'h fa pointe , continuoit en remontant A N A T o M I t-jjnj 1^ cloifon , & de-1^ s'etendoit fur le ventricule gauche, pour aller Annie ijGS. rejoindre la partie propre au ventricule droit. Cette obfcrvation engagea M. Bordenave ^ rechercher les exetnples de faits pareils , & voici le rcfultat de fes recherches : on trouve fouvent dans la fubftance du cosur, & nieme dans les ventricules, des concretions pierreufes, menie ailez confiderables, qui furement font capables de gener ies fond:ions. On obfcrve aflez frequemment dans les vieillards , que les troncs des groflcs arteres font cartilagineux , meme offeux, & tres-retrecis, mais on obfcrve bien plus rarement des offifications dans les oreilletles & dans la fubftance du cceur •, on en trouve cependant des exemples , & M. Bor- denave en cite quelques-uns : le premier eft tire de I'hiftoire meme de " I'academie (voy. Hifl. annie iyz6) : dans le cadavre d'un Jefurte, tnort i I'age de foixante-douze ans , on trouva , dans Tepaiffeur des parois dii CCEur, un os plat, long de 4 pouces & demi , large de plus d'un pouce, qui embraffoit, pour ainli dire, les deux ventricules, & aiiquel les fibres charnues etoient tres-adherentes. Dans un autre fujet , on trouva une o/Tification plus confidernble ; la fiirfacc externa des orelllettes etoit legcrement & inegalement ollifiee, les valvules femi-lunaires etoient, en partie, cartiiagineufes , &, en partie, offeufcs; le cceur etoit prefque environne d'une lame d'os, qui commen- 9oit ^ fa bafe & finilToit anterieurement au tiers de fa furface, mais s'e- tendoit pofterieurement jufqu'^ fa pointe ; cette lame avoit en quelques endroits jufqu'^ un pouce d'epaiffeur, & environ une ligne dans Ion plus mince-, cet os n'etoit pas continti , mais interrompu en divers endroits par des portions cartiiagineufes ou membraneufes , & dans tous ces en- droits , le pericarde y etoit adherent. La gazette de France, du premier fevrier 1768 , oftre encore un exem- ple pareil en la perfonne d'un medecin de Morlaix , qui mourut fubite- ment ; on annonca alors qu'on lui avoit trouve le cceur ofTihe -, mais la verite etoit qu'il ne contenoit que beaucoup de points ifoles d'offifi- cation. II refulte de tous ces faits que la formation des concretions pierreufes dans le coeur n'eft pas rare , que I'offification des groffes arteres prcs du coeur , meme des valvules & des ventricules, au moins I'induration cartilagineufe de ces memes valvules, font affez ordinaires dans les vieillards, mais que roflification de la propre fubftance du cceur fe rencontre tres- rarement. •Comment eft-il poflible que, dans ce dernier cas , les fondtions du CQEUr puiifent fubfifter , meme imparfaitement , comme nous venons de voir qu'elles I'avoient fait dans les circonftanccs que nous avons rappor- tees, & que M. Bordenave a appuyces de quelques autres faits analogues, - quoique moins graves ? II en attribue la caule au mouvement alternatif du ccEur & des oreillettes -, il doit en rcfulter que fi les oreillettes ou le cceur coiJervent ieur mouvement, la partie qui en fera privee en tout eu DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 31$ en p.irtic, agir.1 encore par foii rcffort, excite par le niouvcment de I'aiitrc qui y cliaffera le fang , & il s'etablira unc circulation pcnible , ^ Ja vcritci mais qui fuffira pour conlcrver Ja vie au nialade : aufTi voyons- -^ " A T O m I £. nous que tous ceux qui out fait le fujet de ccs obfervations , eprouvoient Ann/e t7f!8 des accidens pins ou moins graves, & ils en auroient peut-ctre fubi de plus ficheux, fans I'cfpece d'infenlibilite de cet organe ; car, pour ic dire en paffaiit, la fenlibilitc du cocur phyllque eft auffi petite, que celle dii coeur moral eft grande. Mais que dire , lorfque la plus grande parlie du cosiir fe trouve dc- truite, que fi bafe, fes oreillettes & un des ventricules n'exiftent plus, qu'il n'y a plus de cloifon ni do valvules? cependant, la pcrfonne qui a etc le fuJct de I'obfervation dont nous parlons , & qui a ete publiee en 1718 , par M. Soumain, chirurgieii de Paris, vivoit, quoiqu'avec un grand BOiubre d'accidens, & la circulation ne fe pouvoit faire que par le inoyen du pericarde , lui-meme conliderablemcnt altcrc. II eft tres-difticile de comprendre comment la circulation pouvoit s'operer avec des organes li alttres; feroit-elle due, en ce cas , h la feule action des arteresr ce qu'on peut plus :urement en conclure, c'eft que toutes les reflburces de la na- ture ne nous font pas encore connues. I Sur la jiruclure & fur Us ufages de I'Ouraque dans I'Homme. I L n'eft pent-ctre aucune partie du corps animal fur la ftrudure & fui les ufages, de laquelie les anatomiftes aient autant varie que fur celle qui fait I'objet de cet article : on fait que I'ouraque eft une partie ayant I peu- ^^^^'^ ^7^9- prc-s, fur- tout dans le foetus, la figure d'une chaulTe d'hipocras extreme- Hift. ment alongee , dont la bafe tieut au fond de la veflie , & la pointe ^ I'ombilic. Mais comment eft compofee cette partie, & quel peut etre I'ufage au- quel elle eft dcftinee : C'eft fur ces deux points que les anatomiftes fe partagent i les uns ont regarde I'ouraque comme un vrai ligament , & les autres en ont fait un canal de communication entre la verfie & la mem- brane allanto'ides : feu M. Hales ne pouvant decouvrir de canal dans I'interieur de I'ouraque , avoit imagine quelle ctoit compofee d'un tilfu fpongieux, qui abforboit, pour ainli dire, I'urine de la vedie, & I'alloit porter dans rallantoide ; mais independamment de ce que I'anatomie ne fait rien remarquer de femblable dans cette partie, cette explication ne peut avoir aucun lieu dans le fcctus humain qui , comrae on fait , n'a point d'allanto'ide. Cette diverlite d'opinions a pour origlne le peu de foin que Ics ob- fervateurs ont eu de confulter la nature •, elle feule peut donner la folu- tion de cette queftion, & c'eft aufll la vole que M. Portal a cru devoir Ss ij 5H ABREGE DES ME MOIRES II ^^i— prendre, & qui luL a eft'cdivement procure des connoiflances plus claires A & plus certaines. L'ouraque eft, conformement h ce qu'en dit M. Senac, dans fes eflais Annie Ziffg. de phyfique, compofee de quatre filets exaftemciit reiiiiis, depuis I'om- bilic Jufqu'h trcs-peu de diftance de la vcffie •, 1^ Lis fe fepjrcnt I'uii de J'autre, & fonnciit, par cct ecartement , une efpece de patte d'oie , dont les Hl.ts fe diftribuent fur la veffie : deux de ces filets embraffent les co- tes de ce vifcere •, un occupe la partie anterieure , & un autre la pattie pofterieure ; ils s'unilfent avec les fibres de la tunique mufculeufe de la Vellie, mais fins contra£ter avec elles une adherence qui empeclie abfo- lument de les feparer, de les fuivre 3c de reduire, pour ainli dire, lou- raque' en fes propres elem-ns, pourvu cependant que le lujet foit trcs- jeuiie •, car dans un fcetus qui a feulement trois mois, ils deviennent trcs- difliciles h feparer i & dans I'adulte, cette feparation feroit impoffible. Ces filets, dont nous venons de parler, font revetus, d'un bout h I'autre, par une prolongation du tiflii cellulaire qui les enveloppe fans les ferrer, & leur forme une enveloppe que M. Portal nomme tunique vaginale. Quclques recherches qu'ait pu faire M. Portal , il n'a jamais pu apper- cevoir de cavite dans ces filets , ni que leur reunion en format une : ^ iiiefure que le fujet avance en age , les filets fe reuniffent plus exa(fle- mcnt, & le volume de I'ouraque diminue, & quelquefois cette diminu- tion va jufqu'i rentier aneantiifement de cette partie. De tout ce que nous venons de dire, il fuit que I'ouraque eft verita- blement un ligament, qu'il eft deftine dans le fcetus ^ des ufages particu- liers qui ceffent aprcs la nailLnice de I'enfant : effayons de les determiner. La polltion de la veffie n'eft nuUement la meme avant & apres la naif- fance : avant que le foetus foit ne , elle eft fufpendue beancoup au-deffus du baffin , qui n'a pas alors pris tout fon accroiffement , & il femble que I'auteur de la nature ait eu en vue de diminuer le volume du foetus, & de rendre I'accouchement plus facile-, or, pour affujettir ainll la veffie hors & au-dcflus du baffin, & cependant leinpecher de ballotter, il fal- loit qu' elle fut fufpendue & fixee -, & c'eft vraifemblablement I'ufage de I'ouraque qui reniplit parfaitement ces vues; mais des que I'enfant eft ne, I'agrandiffement du baffin , le poids de la veffie qui s'emjplit d'urine , & celui des inteftins , foUicitent puiffamment la veffie h delcendre -, ce qui ne fe peut faire fans diftendre I'ouraque , & fans en rapprocher les fila- mens qui s'uniffent alors au point de ne pouvoir plus fe feparer; la tuni- <]ue qui I'enveloppe , s'y colle davantage & en fait une efpece de ligainent qui meme s'oblitere quelquefois cntierement chez les vieillards. Mais comment, dans cette hypothefe, expliquer les ecoulemens d'urine qui fe font quelquefois par le nombril, & defquels on a plufieurs exem- ples ? La ftrudure de la veffie donne , felon M. Portal , la folution dc cette difficulte. Ce vifcere eft compofc de deux parties, I'une membraneufe & conti- nue- deftinee ^ recevoir & ^ conferver I'urine, & I'autre qui rccouvre DE L'ACADEMIK ROYALE DES SCIENCES, 525 celle-ci, compofce de fibres nnifciilaires deftinc-cs u comprinicr, par leur; a(fli(in , la nn.mbrane interne qu'cllcs eiiveloppeiit, & i la foicer de chaf- "1 fcr I'liriiie. A n a t o m 1 s. Cette partie miifciilaire n'eft pas continue comma I'autre , Ics trouf- Ann^e 176*0 feaiix de fibres ferment plutot une efpece de refcaii qu'un corps iiiiifor- ' nie, au moins y a-t-il des endroits qui en font prefqu'enticrement de- nues ; il doit done arriver , & il n'arrive en effet que trop fouvent , que fi par quclque accident la vedie fe trouve trop gonflie , la membrane in- terne fe falfe jour par quelqu'une des mailles de ia tunique mufculaire , & forme une liernie de la membrane interne. On a vu quelqucfois prcs de la moitie de la membrane interne palfcr au travers de la tunique muf- culaire, & former I'apparence d'une vefTie double : or, M cette liernie fe flit du cote de la bafe de la veffie , ou effedivement Ics troudeaux de fibres mufculeufes font les plus ecartecs les unes des autres, il peut arriver qu'tlle fe prolonge dans la gaine qui enveioppe l?s fibres de I'ouraque ; & alors ou la membrane interne s'etendra julqu'a I'ombilic, & y formera un conduit urinaire \ ou li elle creve avant que d'y crre parvenue , la gaine de I'ouraque y fuppleera, & dans I'un ou I'autre cas le malade ren- dra fcs urines, en tout ou en partie, par le nombril -, M. Portal a vu dc ces hcrnies de Tune & de I'autre efpece. II n'cft done pas njcefiaire que I'ouraque foit cflenticllement un canal, poilr qu'il puiffe arriver des ecoulemens d'urine par le nombril, & cc fait ne detruit en aucune maniere le fentimcnt de ceux qui la regardent comme un vrai ligament. Combien de precautions ^ prendre dans I'e- tude de I'anatomie, pour n'etre pas feduit par les apparenees qui femblent k-s plus fortes & les plus decilivcs ? 3i« ABREGE DES MEMOIRES A N A T O M I E. Anne'e tiGq. ^"'' i'<^^i°^ ^"- Poumon , fur I'Aorte , pendant la refpiration: Hift. V^ N n'auroit pas lieu d'etre furprls de trouver de I'incertitiide fur Is pofitioii , la ftrudture & I'ufage dc quelques organes petits & caches du corps animal •, mais il eft (ingulier qu'il puiffe s'en trouver fur la ftrudure de parties trcs-apparentes , & qui n'ont pii manquer de s'offrir aux re- gards des anatomiftes , dans toutes les difledrions qu'ils ont faites. De ce nombre font certainement les bronches , ces rameaux de la tra- chee-artere , deftines \ porter I'air de la refpiration dans le poumon. M. Por- tal a ete furpris des diflerences qui fe trouvent dans les defcriptions que les anatomiftes font de ces parties , leur ftrudure & leur polition dans le corps animal •, quelquefois meme ils ne s'accordoient pas avec leurs pro- pres figures, & il fembloit que le peintre eut deffine plus fidelement que Fanatomifte n'avoit decrit. Pour favoir ce qu'il y avoit de bon fur ce point dans les dlfFerens ou- vrages des anatomiftes , il refokit de ne s'en rapporter qu'^ rinfpeftioii des pieces mcmes , & de confulter , par de nombreules diffedions , le grand livre de la nature , & non-feulement il y a trouvi le moyen de dilFiper toutes fes incertitudes , mais encore il a recueilli quelques faits impoitans, qui avoient echappe jufques-li aux obfervateiirs , ou du moins n'eu avoient ete vus que tres-imparfaitement : voici, en abrcge, le reful- tat de iss obfervations. La trachee-artere, parvenue entre la feconde & la troifieme vertebre dii dos, fe divife en deux branches, que les anatomiftes nomment bronches , fif'fx'i guttur.) & qui different entr'elles par leur groffeur , leur longueur &; leur diredion ; la bronchc droite eft d'un quart plus groffe que la gau- che, & celle-ci d'un cinquieme plus longue que la droite, & en merae temps plus inclinee & plus pofterieure. La diredion de ces canaux n'eft pas la meme dans les differens ages; la bronche gauche eft , dans le foetus qui n'a pas refpire , plus inclinee & plus en arriere que dans I'enfant venu au jour , & la bronche droite dans I'enfant venu h terme eft un peu plus elevce qu'elle ne I'etoit avant la naiffance de Tenfint. Cette defcription eft exafteraent conforme i ce que robfervation a offert ^ M. Portal-, elle a fixe fes idees, & I'a mis i portce de reconnoitre ce qu'il y avoit d'exadt dans les defcriptions & dans les planches des dif- ferens anatomiftes : pourfuivons ce que fes obfervations lui ont fait re- marquer fur la ftrudure de ces canaux aeriens. Les premieres divihons des bronches ont , comme la trachee-artere, des anneaux cartiLigineux •, mais ils font entiers & non pas interrompus comme ceux de la trachee-artere. Ces anneaux font retenus i leur place par un ligament tres-elaftique d'un blanc un peu rougeatre, que quelques DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 327 anatomiftes, au nombrc deltjiicls on coiiipte M. HaJlcr, out regard;^ comme — — a^i— — imilciilaire-, ce ligament eft compole dc deux plans de Hbresi & Bartholin cioir cjiic le plan intcrieur eft une prolongation dc la membrane qui tapilTe "^ '^ ^ ^ o m 1 e. la bouche , & lextirieur line produ(flion de la plevre. Aiuiic iiGfi L'examen anatomiqiie n'a rien oftert h M. Portal qui put appiiyer ccs fentimens 5 la liniple maceration fuftit pour feparer ce ligament dcs cartila- ges, & il n'y a rien reconnu qui put Icrvir i Juftitier Torigine qu'on lui donne, ni h le fairc reconnoitre pour mulculeux. L'interieur des bronches eft tapilTc dune membrane qui forme plulieurs replis longitudinaux , paralleles entre eux i mais outre ces replis , il s'en trouvc encore un autre dans le point ou la trachee-artere fournit la bron- che gauche : celui ci eft forme en partie p.ir la membrane , & en partie par le premier cartilage dc la bronche , qui eft pouffe dans I'intdrieur dti canal-, & cette efpece de faillie dependant de I'inclinaifon de la bronche, varie dans les differcns ages de la vie ■, clle fait en cet endroit rcffct des cperons d'un pont. Jufques li les recherches de M. Portal n'ont fervi qui lever les doutes que les defcriptions des anatomiftes avoient jettes fur cette partie; voici prefentemeni quelque chole de plus intereffaut, & qui lui apparticnt en propre. La bronche drolte flotte librement dans la poitrine , rien ne s'oppofe aux diffcrens mouvemens que peut lui imprimer I'air ou I'abaiffement des cotes-, elle s'eleve lorfque le lobe du poiimon qui lui rcpond, s'enfle, & s'abailTe auffi facilement lorfqu'il s'affaiffe. Mais il ii'cn eft pas de mane de la bronche gauche, I'aorte rembrafle exaitement ; d'oii il luit qu'elle ne peut s'clever fans gener le cours du fang dans cette artere principale -, cette connexion de la bronche & de Tartere-aorte a ete connue de quelques phyliologiftes , mais perfonne ne s'etoit avife de penfer que cette joniflion mettoit ces deux parties dans le cas d'agir neceffairement I'une fur I'autre. En effet , il eft evident que I'aorte ne peut dans cette conftrudtiorr , augmenter fon volume, fans comprimer la bronche gauche, & fans gener le paffige de fair qui va dans le lobe gauche du poumon : aulli M. Por- tal a-t-il trouve dans le cadavre d'un homme dont la refpiration eioit trcs- ^tnke , qu'il y avoit un anevrifme a la croffe de I'aorte , que la bronche gauche ctoit comprimee par I'artere, & que la capacite etoit extremement diminuee. D'un autre cote, la bronche gauche dilatee ou relevee par I'air, peut, en preffant I'aorte, gener prodigieufement le cours du fang, donner lieu ^ des palpitations violcntes & occalionner un nombre infini de maladies qui etoient d'autant plus diSicilcs \ guerir, qu'on n'en foupconnoit pns meme la caufe. II eft done d'une extreme importance de bicn ^tablir ce nouveau prin- cipe & d'en examiner attentivement les fuites : fuivons M. Portal daTis cette difcuffion; I'aorte dans le fcetus qui n'a pas rcfpire eft tres-incHo^e de devant en arriere , zo , & on en fait beaucoup moins de cas , ces animaux ctant generalement pleins de defauts. Les mulets males font toujours infcconds , & il n'y a pas d'exemple ^ Naples qu'ils r.ient jamais produit •, •^ I'egard des mules femelles, elles ont cuclqiijfois produit un mulct, etant cous'ertes par un cheval : ces exeni- ples font rares ■, cependant le pere de la Torre en a vu un arrive du regne de Don Carlos , h prefent roi d'Efpagne , lorfqu'il etoit roi de Naples , & le prince de Francaviila & Don Carlo de Marco ont affure avoir etc temoins de quelques faits femblables dans leurs haras. Ce que nous venons de dire , d'aprcs le pere de la Torre , ne diminue au refte en rien la (ingularite de roblervation de M. de Nort •, le pere de la Torre ne parle que de l'animal ne du commerce d'une aneile & d'un cheval , & la mule de M. d« Nort etoit nee de celui d'un ane & d'une jument 5 mais il paroit refulter de tout ce que I'academie a vu fur cette matiere , que les males de I'une & de I'autre efpece font conftamment inf(^conds , mais que les femelles peuvent , dans quelques circonftances rares & jufqu'i prefent inconnues, devenir fecondes. jH ABREGfi DES MEMOIRES A N A T O M I E. . , Sur Us parties de la GMration de la Femme. Annie tjjo, ^ Hift. ■ ' E s parties de ia generation font un des principaux objets de I'anatomie. Independanimeiit de leur importante fondion dans raccompliflement des vues generales de raiiteur de la nature pour la perpetuity des efpeces, dies font encore, & fur- tout dans la femme, le fiege de pkifieurs mala- dies cruelles & dangereufes qu'on ne peut efpcrer de guerir qu'autant que la ftrudure de ces parties & leurs difterens rapports ^ toutes celles qui compofent le corps animal , feront parfaitement connues. C'eft ce qui a determine M. Portal ^ en faire le fujet de fes recher- ches-, il commence dans le meraoire dont nous avons a rendre compte, par I'examen de la matrice & des liens qui fervent ^ la fixer dans fa po- lition •, les parties internes de ce vifcere , & enfuite les externes doivent devenir le fujet de plufieurs autres differtations. On auroit peine \ croire combien font differentes les unes des autres les defcriptions qu'ont donnees les anatomiftes, de cet important organe; ils n'etoicnt d'accord ni fur fa figure ni fur fa pofition , ni meme fur fa nature. Les uns le regardoient comme une efpece d'animal fixe par des ' liens au fein d'un autre animal -, d'autres voyoient dans ce vifcere un vaiffeau avec des voiles & des rames : on juge bien que toutes ces idees ne ten- doient pas k faire connoitre la ftrufture de la matrice , & ^ faciliter la guerifon des maladies dont ellej peut etre 1« fiege. II a done ete neceffaire i M. Portal de porter fur cette matiere , en- core fi obfcure , le flambeau de I'anatomie •, & voici le fruit de fes re- cherches. La matrice dans le fcEtus eft placee enticrement au-deffus du baffin 5 dans I'enfant qui vient de naitre elle commence \y defcendre, mais elle excede encore fenfiblement le niveau du haut des os pubis •, dans la fiUe de quinze ans elle eft au-deffous de ces os; & enfin elle eft trcs-enfoncee dans une vieille fenmie. Sa fituation ne varie pas moins que le lieu qii'elle occupe •, elle eft prefque venicale dans le fcetus , & prefque horizontale dans un age avance. La matrice change audi de figure avec I'age-, dans le foetus elle eft prefque prifmatique , dans I'adulte elle reffemble "k certains flacons de cryftal , qui approchent de la forme tiiangulaire; & enfin dans un age plus avance elle eft irregulierement arrondie. La difference d'age en apporte meme dans fa coulcur ■■, eile eft blanche dans le foetus , rouge dans la fille nubile , & pale dans la vieilleffe. La matrice eft recouverte prefqu'entierement par une lame du pcritoi- ne*, cette lame fe replie vers I'orifice de la matrice, & forme les deux ligamens ronds, compofes de la diiplicature de cette lame & d'un cor- don de vaifleaux qui vont h la matrice, & quelle enferme-, en s'etcndant DK LACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 5)5 fur les cotes de la inatrice , elle forme fa lame anterieure des ligamens larges qui s'attachent aux mufcles iliaques •, la lame pofterieure forme , 4 par deux replis, deux ligamens circulaires qui embraffcnt le redum. Lorf- '^ ■^^ ^ 0 m 1 i. que la matrice Ce d^vcloppe dans la grofiefle, la hauteur des ligamens Ann^e 17-0 larges diminue ; & il paioit qu'en general la matrice n'eft fiifpendue par tant de ligamens flexiblcs , que pour pouvoir s'cnfler librement, & fe prcr ter au dtiveloppement du fatus. La matrice lulpendue dans le bas ventre par fes ligamens, & enve- loppee de la lame du pcritoine qui la recouvre, prcfente une efpece de reliemblance avec une chauve-fouris qui etend ia ailes. AuUi cette ref- femblance lui en a-t-elle fait donner le nom par quelques anatomiftes. Cette mcme lame du pcritoine partage , par fa polition , le ballin en deux cfpeces de chanibres , I'une anterieure , & I'autre poftcrieure. Dans I'adulte, la chambre anterieure eft plus petite que la pofterieure, parce que I'os lacmm fe penchant en arriere , augmente la capacite de cette dernie- re -, mais dans I'enfance , ou cet os eft prefqu'^-plomb , la capacite des deux chambres eft i-peu-prcs ^gale. Les deux portions de cette lame qui enveloppent la matrice , peuvent s'en feparer, mais cependant en dechirant toujours quelques productions cellulaires qui s'enfoncent entre les fibres, pour y former aux vailleaux des gaines ou capfuks alTez femblables ^ celle qui , dans le foie, revet k veine-porte, & qu'on conno'it communement fous le nom de capj'ule de Glijfon , quoique , felon M. Portal , la dccouverte en foit due k li'^alisus , qui I'a decrit le premier. Ces gaines cellulaires des vaifleaux fe frouvent dans quelques fujets furchargees de grailFe -, dans d'autres, elles deviennent le fiege d'une by- dropilie finguliere , contenue entre la paroi externe de cette gaine & le vaiffeau. M. Portal I'a quelquefois obfervee: il a meme oblerve une hy- dropille de I'aorte i-peu-prcs femblable, qu'il a decrite dans I'HiJ/oria Anatomico Medica de M. Lieutaud , dont il a donne une nonvellc edi- tion en 17^7. II refiilte de ce que nous avons dit de la polition de la m.itrice, qu'elle eft fufpendue & comme fixee par huit ligamens. De ces huit, les quatre fuperieurs ont etc connus & decrits par tous les anatomiftes •, mais trcs peu ont obferve les quatre infericurs qu'on a fucceflivement attribues k plu- lieurs illuftres anatomiftes , nos contemporains •, mais M. Portal trouve qu'elle appartient ^ Hcrmondaville, qui profelToit I'anatomie en France vers le milieu du treizieme liecle , & dont la chirurgie eft confervce ma- nufcrite dans la bibliotheque du roi & dins celle de Sorbonne ; & M. Por- tjl les trouve depuis dccrits dans les ouvrages pofterieurs , & fur tout dans ceux de Sandorini & de Gvmzius , dans lefquels il eft impoQible de les meconnoitre. La cavite de la matrice varie comme fa grofleur & fa pofition dans les differens ages. Dans I'enfince, elle eft forroee de quatre plans, qui lui donnent alR-z la figure d'une pyramide triangulaire troiiquce par la pointe, & dont la bafe feroit cu haut. Elle eft alors bicn plus epaifie vers ion col ,,6 A B R E G E D E S M E M 0 I R E S . que vers Ton fond-, ce qui eft abfoliiment different dans radulte, ou elle "elt bien plus epaiffe h fon fond qui fon col : obfcrvation abfolument due A N A T o M I E. ^ j^^_ Sue, chirurgien de Paris, & celebre anatomifte. yInrJe 17~0. Ce qu'on obferve de plus lingulier dans I'interieur de la matrice, eft ' ' ' une ramification de pluUeurs lignes faillantes , qui , dans une jeune per- fonne, ferment la rcffemblance d'un palmier. Cette ramification fe voit dans les planches de Graaff, quoiqu'il n'en dife ricn dans fon ouvrage : le deflinateur avoit apparemment les yeux meilleurs que I'anatomifte. Entre les branches, & principalement auprcs du tronc de cet arbre, on obferve les orifices des canaux excreteurs de plulieurs corps ganglofor- - mes , delqucls fort une matiere vifqueufe quand on comprime la paroi de k matrice •, on les appercoit encore plus aifement en fiifant rotir une matrice ^ grand feu. ^ Dans I'adulte, I'arbre & fes branches s'effacent, & la cavite devient hfle & fe retrecit avec le temps. Dans les matrices de tous les ages , les parois laterales font toujours plus epaiffes que les anterieures & pofterieures , parce que c'eft-li que fe trouvent les troncs des arteres & des veines qui fourniffent le fang^ ^ cet organe & Ten remportent \ & comme ils ne penetrent la matrice qu k une certaine diftance de fon col , il doit neceffairement arrivcr que le fond en foit plus epais que le col, toutes les fois que ces vaiifeaux feront gor- ges de fang, comme il arrive dans la groffeffe. M. Portal a obferve frequemment des excroiflances fur la paroi interne de la matrice des vieilles femmes , meme dans celles qui n'avoit pas eu d'enfansj ces excroiflances etoient connues, mais on ne les croyolt pas fi communes. La furface interne de la matrice eft tres-irritable •, quelques gouttes de vinaigre jetees dans celle d'une chienne vivante qu'on avoit ouverte, y ont produit ^ I'inftant des mouvemens tres-marques. Harvee avoit obferve ^-peu-pres la meme chofe ; mais la furface exterieure ne paroit pas jouir de la meme fenfibilite. MM. Senac & Haller avoit auffi trouve que la furface externe du cosur n'etoit prefque pas irritable , quoique la lurface interne des ventricules le fiit beaucoup. Les obfervations de M. Portal fur la matrice dont nous venons de rendre compte, jettent un trcs-grand jour fur la ftruifture de cet organe, & font bien propres I faire dclirer la fuite de ce travail , qu'il promet donner. Sur DEL'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 53- N A T O M I E, Sur la flmclure da Canal Thorachique , ^ fur celk du Refervoir Annie ijjo. du Chyle. s g I I'organe qui a fait le fujet de I'article precedent , eft un des plus ef- Hift. fcnticls a l,i confcrvation des efpcces, celui duiiiiel nous avons k trailer dans celui-ci ne left pas moins h ceile de chaquc iiidividu. Les anciens anatomiftes n'ont eu aucune connoiirance du canal thora- chique , qui cependant fait la coTiiiuiiiication entre les organes de la di- jeftion & ccux de la faiiguification. Euftache I'appercut le premier dans e cheval ; mais la decouverte de cet organe dans i'homme eft entierement due au celebrc Pecquet, autrefois membre de cette academie. Vanhornc, fon condifciple & Con ami, en donne una defcription plus detailise-, Sc enfin du Verney encherit encore lur leurs travaux. Pour niicux comprendre Ic but des recherches de M. Portal fur cette matiere, il ne fera peut-etre pas inutile de remettre fous les y.ux du ledeur la polition , la ftructure & I'ulage du canal thorachique , tel qu'il avoit etc decrit par les anatomiftes qui I'ont precedi. Les alimens une fois digeres dans IVftnmac , paflent dans les inteftins greles; li s'ouvfpnt les orifin^s dun grand nombre de canaux trcs-dclics, qui, en fe rcuniflant , forment ce qu'on nomme les yeines la3ces j qui, aprcs avoir rampe qu.lque temps fur le melentere, vont fe rendre a un tuyau nomme le canal thorachique , place verticaleraent Ic long de I'epine du dus , & qui va s'inferi'r dans la veine fouclaviere , a quelques doigts dc fon embouchure dans roreillette gauche. Ces vaifieaux feparent des alimens digercs , qui paffent dans les inteftins greles, la partie deftinee ^ la nourriture de Tanimal, qui, dans cet etat, eft fous la forme d'une li- queur blanche un peu epailfe , qu'on nomme chyle , & la vont verfer dans la fouclaviere , & de-ii dans le coEur , ou el'le fe mele avcc le fang. Pecquet, qui n'avoit d'abord obferve cet organe que dans le chien, avoir appercu que I'infertion des veiues lactees dans le canal thorachique , fe faifoit dans une efpece de veflie, ou que le has de ce canal ce renfloit & formoit un refervbir, auqucl les anatomiftes avoient mcme donne loii iiom ; il crut pouvoir en inferer que le mcme refervoir fe trouvoit auili dans Thomme. Cette conckillon etoit precipitee; mais Pecquet etoit d'au- tant plus excufable, que quoique ce refervoir ne s'y frouve pas, I'extre- mitc infiricure du canal oii fe fait I'infertion des veines ladlees, eft enve- loppee d'un tilfu cellulaire qui lui eu donn& I'apparence. C'eft ce point anatomiquc dont M. Portal a voulu s'affurer \ &. voici le refiiltat de fcs obfervations. Le refervoir pretendu du chyle n'cxifte point dans I'liomuic ■■, dans pli s dc trente fujets que M. Portal a dilKqucs, il a troiive les vaitTcaux ladts Tome XIV. Purtie Fran^oiJ:. Vy ' jjS A B R E G i D E S M E M O I R E S ■ ^^— — — » commiiniquant immcdiatement avec I'extremite inferieure dii canal , qui A ' A n M I i; f°''™^ ^''' ^^^ endroit une efpece de fac on d'aiineaii vafciil.iire, reconvert d'line lame de tiflii cellulaire. On pent meme avec de I'adreffe degager ylnnc'e 2770. les veines ladees dii liffu cellulaire qui les enveloppe-, & il y a apparence que les anatomiftes out etc trorapes par I'apparence de membrane que prend ce tiflu cellulaire avec I'age. Ce refervoir dn chyle, qui n'exifte pas dans rhomme , exifte dans plu- (lenrs animaux. On le trouve dans le chien oii Pecquet I'avoit efFeftive- ment vu ; I'ecureuil & le (inge ont pluHeurs refervoirs Sc plulieurs canaux. Dans quclqucs poiffons ils font encore pins nombreux-, M. Ferrein en a vu jufqu'^ fept dans le dauphin. II eft effentiel d'etre en garde centre une illufion qui peut en impofer dans cette recherche •, il fe trouve quelquefois des ramifications d'arteres fanguines vides de fang , & d'autres fois des vaiffeaux lymphatiques qui rampent fur I'extremite inferieure du canal thorachique , lans le psnetrer, & qu'on prendroit aifemcnt pour des veines laftecs , fi Ton n'etoit prevenii qu'ils n'en font pas , & qu'ils ne s'ouvrent pas dans le canal. Au-deffus de Tinfertion des veines laftees , le canal thorachique s'eleve prefque perpendiculairement, en fnivant h-peu-prcs la colonne vertebrale; mais h Con extremite fuperieure il fe detourne un pen , pour fe jeter dans la foucliviere gauche-, quelquefois, mais rarement, cette extremite fe par- tage en deux canaux, dont I'un va s'ouvrir dans la fouclaviere gauche, & I'autre dans la jugulaire du meme cote. Le canal thorachique va en s'elargiffant h fon extremite fuperieure. Get clargiflement fit foupconner k M. Portal qu'il devoit y avoir en cct endroit des vaiffeaux de communication qui y aboutiffent, & il les chercha. Sa recherche ne fut pas vaine ', il poulJa de I'air dans les vaiffeaux lymphati- ques de Willis , qui rampent k I'exterieur du poumon , & cet air penetra dans le canal par deux tuyaux lymphatiques qui s'y inferent : il en a de- puis trouve jufqu'^ vingt-deux de cette efpece. Quclques anatomiftes, du nombre defquels font Bartholin & Albinus , paroiffent en avoir connii quelques-uns : mais aucun n'avoit appercu ceux qui naiffent de la partie anterieure du canal jufqu'k M. Portal , qui y en a demontre fix , qui pa- roiffent partir de Tcefophage & de la graiffedu mediaftin. On ignore en- core I'ufage de ces vaiffeaux : mais c'eft beaucoup en anatoniie que d'etre certain de leur cxiftence : toutes les embouchures de ces tuyaux dans ie canal font garnies de valvules. La reflemblanc^ du chyle avec le lait, avoit fait imaginer k quelques ■ anatomiftes qu'il devoit y avoir une communication immediate entre le canal thorachique & les mamelles-, mais cette communication n'exifte pas, & M. Portal n'a pu en trouver aucun veftige , quelques recherches qu'il ait faites fiir ce fujetj preuve bien frappante que les conjedtures les plas plaufibies, ne doivent jamais etre regardees comme des faits, ni regues fans un fevere examen. Lorfque M. Portal lut i I'acaddmie le mcmoire dont nous venons 4s I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 155 parler, AL Piiifon, chiriirgien , y fit voir rout ce fyftcme vafcuJ.iire, pour "^^^^^^^"^ aiiili dire, realifii dans une piece en cire colorce, qui en rcprefcntolt juf- . qu'aux plus petites branches, & leur pofition. L'exa£litude de la refTcm- blance, & la perfeftion de I'execution, attirerent ^ I'auteur de juftes cloges Annu lyjo. que meritoit une piece , qui etoit en mcmc-temps une prcuve fublillante 'de fcs connoidances en anatoniie, & dc fon aJreUe en ce genre. Sur divers points d^Analomie. J|_^E memoire dtiquel nous avons "^ parler dans cct article, eft moins iijfr. nne differtation , qu'un recueil d'obfervations importantes , qui n'ont en- tr'elles aucune liailon, & defquclles nous allons eflayer de prefenter une l^gere idee. Les anatomiftes avoicnt beaucoup Lififtc fur la dilatation contre nature de la vcffie , & fur les mauvais effets qui en refultoient i mais tres-peu d'entr^eux avoient detaille les inconvcniens qui naiflent de la diminution & du racorniffement de la veflie, plus conimun qu'on ne le penfe dans Ics lujcts qui lont parvenus a un age avance. Les trois premieres obfer- vations dc M. Portal lui furent offertes par hafard. La preniirre fut faite fur le cadavre d'une vieille femme, dans lequel il trouva la vefile rcduite a la groheur d'une noix , & I'ouverture de fon col preiqu'enticrement oblitcree i auffi paroiUoit-il des veftiges d'inflamma- tion dans les reins & dans les parties voillnes , & il y a bien de I'appar rence que cctte femme etoit raorte d'une fupprcflion d'urine. Dans le fecond & le troilieme cadavres, il obferva le meme racornifle- mdnt dc" la veflie j mais il remarqua que ia membrane interne etoit la feule qui fe fut epaifl^e, & que dans le premier de ces deux fujets , il s'ctoit forme un canal de communication entre I'ombilic & la veflie. Ces deux obfervations ayant mis , pour ainfi dire, M. Portal fur la voie," il cxamina un grand nonibre de cadavres de vicillards , dans lefquels il trouva trcs-frequemment, non-feulement la meme diminution de la veflie, mais encore un pareil racorniflement dans I'eftomac, fur-tout dans ceux qui ont fait un grand ufage de liqueurs fpiritueufes. II rclulte de ces ob- fervations , que les ifchnries ou fupprcflions d'urine occalionnees par cette caufe, ne font pas rares chez les vieillards, quoique la plupart des ana- tomiftes n'en ayent point parle. Les anatomiftes ne connoilTent que depuis peu de temps la maladie nommee Spina bifida , qui n'efl: qu'une efpece d'hydropilie dans la moclle cpiniere ; les uns ont cru que I'eau etoit infiltree dans la membrane qui enveloppe cette moclle , & les autres quelle etoit amaflee entre la pie & la dure-mere. Les obfervations que fit M. Portal fur le cadavre dun toetus hydrociphale , dans lequel il trouva une communication libre d'un bouti Vv ij J49 ABREGf DES MEMOIRES I'autre de cette moelle, liii fit foiipconner que ce canal pouvoit exifter 7 dans I'etat natiirel , & I'engagerent h faire des rechcrches fur ce fujet. II a Anatomic. ^^^^^^ efFedivement ce canal decrit dans deux autenrs : Charles Etienne 'ytnn/e zyjo. ^^ f"*'' mention dans fa defcription de la moelle epiniere, & ajoute qu'il fe remplit quelquefois d'une liqueur Jaunatre; Colombus a ete plus loin, il en a donne la grandeur & une defcription exafte & trcs- detaillee. M. Portal croit que cette cavite , qui dans I'etat naturel eft prefque tou- jours vide, eft deftinee ^ facilirer les mouvemens de la moelle epiniere; mais ii eft bien fingulier que ce canal, decrit par deux anatomiftes tres- anciens , ait ete ignore ou mal connu de la plupart des anatomiftes mo- dcrnes. Les anciens anatomiftes avoient tons regarde les deux ventricules late- raux du cerveau , comme deux cavites diftindes & independantes Tune de I'autre. .Varoli a penfe le premier qu'ils communiquoient Tun avec I'au- tre •, & fon fentiment a tellement ete adopte par tous ceux qui font fuivi, que le celebre M. Winllow n'a pas helite i decrire fort au long les ou- vertures par ou fe fair cette communication. M. Portal a cependant trouve dans plulieurs fujets la cloifon qui les fepare bien entiere •, & meme dans une de fes obfervations, ou il trouva ces deux ventricules remplis de li- queur, il put faire ecouler celle qui remplifloit un des deux ventricules; Inns .que I'autre en perdit une feule goutte. II a trouve une obfervation feinblable dansTulpius, qui avoit trouve un des ventricules "rempli d'eau, tandis que fautre etoit abiolument vide. Le meme fait fut encore obferve par Baglivi k fouverture du corps du celebre Malpighi. II n'eft pas eton- • rant au refte qu'il ait pu fe gliffer quclque incertitude en cette partie , la cloifon qui fepare ces deux cavites etant li mince, qu'il fiut une extreme adreffe pour ne pas la dechirer en enlevant la voutc qui les recouvre. Il n'arrive que frop fouvent aux anatomiftes de dctruire ou d'alterer , fans s'en appercevoir, les parties qu'ils veulent obferver-, c'eft une partie ef- fentielle de cet arr, que de favoir diriger fes coupes & fes obiervations. II y a long-temps que Charles Etienne & Rioian fe font eleves contre Tufiee des corps balein^s , deftines k redreffer la taille ou h en cacher les defiuts. Leur fentiment a ete adopte par tous les anatomiftes qui les ont fuivis •, M. Winflow lui-meme en a fait la maticre d'un de fes memoires, & M. Portal vient encore de traiter la meme matiere-, mais malgre I'ac- cord de tous les anatomiftes fur cette matiere , on a toujours continue d'en faire ufage. Void un fait qui fait voir quelles fuites cet uf-^e pcut avou". Une femme de qualite , agee de foixante-fix ans , qui faifoit ufage de ces corps pour cacher les defauts de fa taille, fe trouva attaquee d'une douleur periodique aflez vive au pied gauche •, cette doulcur revenoit tous les jours quclques heures apres le repas , elle augmenta avec I'age , & elle etoit plus violente quand cette dame avoit mange plus qu'^ I'or- dinaire. Elle mourui d'une maladie qui n'avoit aucun rapport ^ cet acci:- dent. M. Portal Fouvrit, & il trouva que les corps dont elle s'itoii fervie. DE fACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ,4, avojent force Ics deux dernicrcs des faufles cot.'s dii cote g.iiiclic k fe renverfer dans le bas-ventrc •, elles appuyoient en cet etat fur le colon , . & lorfqiie cet iiitcftin sVnipIiiroit de marieret, comme Ics cotes renver- ^^ " ''^ ' ^" fees soppofoient i fi dilatation de ce cote, il preflbit alors Ics nerfs lorn- y1nn/e 1770. baircs, & cctte predion t]ui aliedoit audi les nerfs criiraux, etoit la caiife dn la doiileur quelle fentoit au pied gauche. Combien de faits (inculiers ticnnent i. des caiilcs qu'on ne s'aviferoit pas mcme de foupconner , & que robfcrvation feule pent fiire connoitre ? La queftion qui roulc fur I'egalite on I'inegalit^ des ventricules du Cffiur, a partage jufqu'ici Ics plus celebres anatomiftes , & chaque partic peut citer en fa fivcur des noms refpcftablcs : les obfervations multipliees etoient done feuks capables de ia decider. C'eft audi le moycn qu'a em- ploye M. Portal •, & il a en effet trouve par-lil ia raifon de la diverfite d'opinions qui regne fur ce point entre les anatomiftes, & il I'a tiree dir changement de capacite que Ics ventricules eprouvent dans les differens' ages. Le ventricule gauche eft plus grand que !e droit dans le fcetus 5 dans I'cnfance, les deux ventricules (ont ^-peu-prcs egaux •, & enfin le ventri- cule droit dTvient le plus grand dans I'adulte. On ne fera pas etonne de cette difference ■, pour pen qu'on fade re- flexion que la circulation ne fe fait pas de l.i meme nianicre dans le fce- tus & dans rhoinme qui a refpire. Dans le foetus , c'eft le ventricufe gauche qui rc^oit le plus de. fang; dans I'homme , c'eft au contraire le ventricule droit qui en recoit davantage. II doit done n(5cedairenKnt arriver que ch.icune de ces cavites fe diftende & s'agrandide h proportion de la quantite du fang qu'cUe recoit, & que le developpement du caur fe fade dans cctte meme proportion. II y a cependaHt des exceptions h cette regie generaie. M. Portal a trouve dans fes nombreufes dilfcctions quelqucs cadavres dans lefquels elle n'dtoit pas obfervee ; mais cela meme ne doit pas furprendre. La conftrudlion de tous les individus d'une meme efpece eft la meme, (i on ne ia confidere qu'en gros; mais il s'y trouve pourtant une foule de va- rietes de detail des qu'on les examine feparcment. L'interieur de nos coips lie fe rcdembie pas plus que nos vifages , qui , bien que tous compofcs des mcmcs parties, ont toujours. cntr'eux des diticrences fullifantes pour les faire diftingucr. Le dernier article du memoire de M. Portal , eft un recueil de plu- fieurs obfervations fur les miifcies. Les premieres roulent fur les niurc'cs que M. Portal nonmie capfulaires. Ces mufcles cxiftent dans prefque toutes les articulations; ils iont attaches d'une part i I'os, & de I'autre i la capfule articulaire. lis remplident les plus grandes fondHons dans I'e- conomie animale; car tandis que les mufcles les plus puidans elevent I'os, ils elevent en meme-tcmps la capfule ^ & empechent, en I'eloignant de I'os, qu'elle n'en foit blellce ou comprimde; ce qui fait dire i ^L Portal, que fans cux le mouvement des cxttcmites feroit ou douloureux , on meme impoffible, Cependant malgre.i'importance de I'ufage de ces mul"- A N A T O M I E .y_ A B R E G £ D E S M E M O I R E S des, & Icur prefence dans prefque toutes les articulations , plulieurs d'eii- tr'eu'x avoicnt ^chappe aux recherches des auatomiftcs; & parmi ceux qui en avoient connu une partie , plulieurs leur attribuoient des fondions ylnn^e 1770 tres-differentes de celles auxquelles ils font reellemcnt deftines. _ ■^ II y a plus, il le trouve plulieurs mufcles bien connus & bien dccrits par les anatomiftes, qui, lelon M. Portal, doivent ^tre ranges dans cette claffe De ce nombre font ic fus epineux , qui fert k I elevation de 1 hu- merus & de fa capfule i le ;;^fif fejjier, qui iouleve la capfule de la hau- che dans lextenfion du femur ; le p op lite , Ic long palmaire ,\t plantaire erde & les lomhricaux. Le travail de M. Portal fur ces mufcles , 1 a mis f portce de les decrire avec exaditude, & de donner I cette partie d'a- natomie le dcgre de perfection qui lui raanquoit. Les mufcles denteles porteriturs, out fait auffi le fujct des recherches de M. Portal. Ces mufcles font fouvent confondus par une large apone- vrofe, dont les feuiUets font continus dans plulieurs fujets , mais fepares dans d'autres. Malgre une membrane qui recouvre ces mufcles, & I'apo- nevrofe du grand dorlal qui les maintient en fituation , il arrive quelque- fois qu'ils fe deplacent ; 8c M. Portal rapporte un exemple tres-lmgulier de ce deplacement, qui couta la vie au malade. Un homm.e ayant fait une chute afTez confiderable, fentit une douleur tres-vive au dos entre la huitierae , la neuvieme & la dixieme cote, & alfez pres des vertebres •, on y fentoit une tumeur dure , & il ne pouvoit flechir le tronc , quelqu'eff'ort qu'il (it , & le plus Jeger ctoit accompagni de douleur trcs-vives : il perit dans les^ convullions. A I'ouvertiire du cadavre , M. Portal trouva que cette tum'eur etoit formce par une partie du mufcle grand dorfal, qui avoit ete deplacee, & s'etoit_ introduite eiitre les feuillets de I'aponevrofe commune des deux denteles, ou elle etoit pinceei d'ou il conckit avec raifon, que pour guerir ce malade, il auroit fallu faire une incilion h la peaus incifer le ligament, & debrider les par- ties , pour detruire I'etranglement & favorifer la redudion. Les mufcles des yeux font le dernier objet des recherches que M. Por- tal a conummiquees k I'academie dans ce mcmoire. Galien avoit admis fept mufcles deftines au mouvement de I'ceil , & il fut fuivi par Vefale. Fallope ofa le contredire, & reduillt les fept mufcles de Galien k (ix , i Tun defquels ( le grand oblique) il reconnut la finguliere propricte de pafTer par une efpece de poulie, au moyen de laqucUe il fait faire h I ceil un mouvement prefque contrairc k fa premiere diredion. Arantins tra- vailla fur la meme matiere , & vit que ces mufcles s'attachoient autour de cette efpece d'anneau , qu'on nomme le tron optique , parce qu'il donne paffage au nerf de ce nom •, excepte cependant le petit oblique, qui, felon lui, a fon attache \ la partie inferieure & externe de lorbite. Valfalva pcnfa dans la fuite que les mufcles de I'cEil forraoient, par leur reunion, un anneau qui embralioit le nerf optique, & que par confe- quent ils etoient tous egaux, parce qu'il fuppofoit cet anneau concentri- que i I'axe de Tail. M. Wiuflow dccouvrit que le trou optique etoit DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 545 plus prcs de Tangle interne de I'ail , que de Tangle externe •, 8c compMnt toiijours que Tattache des inufcles ctoit fur Taiiiicau qii'on fuppofoit Tt-n- ~ tourer, il en conclut que les inufcles etoient incgiux en longueur. Cette •'^ '^' '^ t o m i e. conclullon hit atraquee par M. Lieutaud, dont les recherchcs lui avoient ^„n^e 1,7-, fait voir que les quatre mu(cl-s etoient egiux en longueur , & qu'ils for- ' inoient par leur reunion un cone droit , dont Taxe paffoit par le centre de la prunelle ; mats que le trou optique etoit cloignc d"environ trois li- nes de cot axe. M. Portal a ete plus loin , & fes recherches lui ont fait voir que les miifcles interne , inferieur & externe , fe reuniiTent en un feul tendon grcie &: co.urt, attach^ au bord inferieur & poflerieur du trou optique-, niais que dans les enfans ils paroilToient fe rainificr dans Tos. Quant au mufck- droit fuperieur & au releveur de la paupiere , le tendon dans le- quel ils fe reuniflent a fon attache h la partie fuperieure & anterieure du trou optique. Les attaches de ces mufcles ne forment done , par leur reunion , aucun anneau qui embrnfle le nerf optique , comme Valfalva Tavoit avance ; & il etoit d'autant plus important de dctruire cette erreur, quelle itch prc- judiciable i Tart de guerir, puifqu'elle entrainoit une erreur conliderable , plufieurs medecins attribuant la caufe de quelques gouttes fereines k la contradtion fubite de cette anneau qui comprimoit le nerf optique , & traitant leurs malades en confequcnce -, mais il eft vifible que Tanneau itant un etre de raifon , fa preffion fur le nerf optique, & les effets qu'ou lui attribue, tombent d'eux-memes, & qu'il faut chercher une autre caufe de cette maladie. II arrive rarement que les recherches anatomiques por- tees k un certain point, manquent de procurer quelque avantage k la me- decine & k Thumanitc. 344- ABREGE DES MEMOIRES A N A T O M I El Aniu'e /"o ^^'' I'^^H^^^ conformations monjlrueufes des doigts dans VHomme. Ilift. X L n'eft pas rare de voir des hommes nes avec on pliifieurs doigts fu- perflus, voyei les memoires ; mais ces variations meritent d'etie exami- nees & rapprochees , & peiivent par ce moyeii domier lieu i des rccher- ches intereflantes & miles. C'eft dans cettc viie que M. Morand a entrepris de recueillir tons les faits de cette efpece qu'il a pu trouver , & dont I'hiftoire compofe una partie dii memoire diiquel nous avons ^ rendre compte, & qu'il en a tire des indu6tions qui pourront Jetter qutlque jour- fur cette niatiere. Les doigts furnuraeraires qu'on oblerve, iont en general de dcHX efpe- ces; ils peuvent etre fymmetriques avec les autres, & pour lors c'cft un doigt fuinumcraire, ou bien il part de la premiere phalange du cinquicme doigt, foit par une efpece de bifurcation, foit par une articulation lache entre deux furfices plates. Un doigt furiiumeraire peut avoir du mouvement ,ou en etre prive; s'il en a, & qu'il foit fymmetrifecomnie les autres, il faut qu'il foit or- ganile comme eux, & qu'il ait fes os, fcs niufcles, fes nerfs & fes ten- dons; s'il n'a pas de mouvement, il eft alors forme d'un ou de pliideurs OS revetus de leur periofte, & couverts en dehors de la p^-au; mais il n'a entre I'os & cette peau qu'une grailfe de la coniiftance du luif , qui en remplit I'intervalle : ce dernier cas eft le plus commun. M. Morand rapporte beaucoup d'exemples de cette efpece de monf- truofite ■, mais dans le nombre de ces exemples, il sen trouve deux, qui font voir quelle peut devenir comme hereditaire dans une famille. Le premier exemple eft tire d'une obfervation com.muniquee a Tacade- mie par M. le commandeur Godeheu , fon correfpondant •, d.ns fon (ejour k Make, il y avoit vu un habitant nomme Gratia Kalleia , qui etoit ne avec fix doigts aux mains & aux pieds; celui-ci avoit eu quatre enfans, dont trois avoient herite en tout ou en partie de cette conformation dc leur pere; & I'aine qui lui etoit le plus fembbblo en ce point, s'etant ma- rie , a eu quatre enfans , dont trois etoient leniblables plus ou moins h leur pere. II refulte de ce court expofe, que cette efpece de monftruofite peut fe communiquer par les peres, & fe tranfmetrre a toute une f.imiUe; mais fe pcut-elle auffi tranfmettre par les meres? L'obfervation luivaute, publiee par M. de Maupertuis, va repondre ^ cette queftion. Elifabeth Horftman , de Roftoch en Allemagne , etoit nee avec fix doigts ^ chaque main & ^ chaque pied , elle eut une fille conformee de memej celle-ci fut marice, & cut quatre enfans qui apporterent en naifiant la ineme fingularite , & quatre autres qui n'avoient rien d'extraordinaire •, un des premiers s'etant marie ^ une fille bien conformee , en eut fix enfans , dont DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 545 dont deux garcons avoient vingt-quatre doigts; cette conformation monf- »^^^^^»,. tnieufe fe communique done auITi par les meres, & s'altere par les allian- T ces avcc des fuj?ts bien conformes. II y a plus ; quclques namraliftes affii- ■^ ^ ^ ^ o m i , rent qu'il y a dans i'inde une montagne dont les habitans ont tous liuit Ann^e 1710. doigts ^ chaque pied ; il y a grande apparcnce que ces montagnards , ftpares par ieur fituation dcs autres Indiens , ont perpctuc chez eux cette monftruofite par des alliances conflammcnt faites entr'eux. Une circonftance finguliere que le hafard a ofterte k M. Morand, Ta mis ^ portee dn voir dans le plus grand detail I'organifation d'un fujet fexdi- gital qui vivoit i Paris en 1754, & fut un an fans pouvoir sen lervir : an bout de ce temps, on lui fit reprendrc fc travail, qui! foutint pendant tre'ze mois, puis il mourut d'une maladie qui parut tout i-fait etrangcre h la chute. M. Tenon, auquel racadcmie doit la relation de ce fait, I'ouvrit, & il trouva toute la caviti cotyloide droite, dont ctoit lortie la tcte du femur, remplie d'une fubftance offeufe', raais il s'^toit forme une autre cavite ar- ticuiaire, qui recevoit cette tete au-defius & en avant du bord fourcilier, fur une partie de I'os des ifles, naturellemcnt convexe & fort etroite dans le cheval; cette cavite ne paroilToit point avoir etc crcufee dans I'os par Tac- tion de I.i tcte du femur-, Tos n'ctoit pas moins epais en cet endroit, que I'etoit la partie correfpondante gauche dans I'os lain ■■, elle avoir etc pro- duite par le concours de pliilleurs caufes dignes d'attention •, I'os des ifles du cote malade, & fur-tout dans le lieu afFedle par la maladie, s'etoit con- fiderablement elargi; & fur le penchant de fa convexite, oii il eft commu- nenient fort mince, il avoit acquis beaucoup d'epaiffeur, pnrce qu'il s'e- toit amaffe & elevc fur cet endroit beaucoup de fubftance offeufe ; c'etoit au milieu de cet amas nouvellement produit , que s'etoit formee la nou- vclle cavite •, la tete du femur paroiflbit confiderablcment ufee h fi furface interne, & on ne trouva ^ cette nouvelle articulation aucun veftige du li- gament rond ni du hgament capfulaire, qui avoient ^te vraifeniblablcmcnt ddtruits. Cet exemple inconteftable, & peut-etre unique, prouve invinciblement qu'i la fuite d'une luxation arrivee a la cuiffe d'un cheval , il s'etoit formi une articulation nouvelle , une cavite cotyloide differente de I'ancienne , qui n'eft point I'efftt de I'excavation de I'os', & qu'enfin la nature a voulu faire voir qu'on ne devoit pas tant fe defter de fes reffources , meme dans le cas de la luxation en haut & en avant, qui arrive foit rarement, meme dans rbomme. A N A T O M I E. 551 A B R E G E D E S M E M O I R E S, &c. V I I I. Ann.'Se lyjo, M. Tenon a cii accafion d'obferver un homme, qui dans fon enfanc* avoir eu, ^ la fuite de la petite verole, les deux avant-bras attaqii^s d'lme carie qui en detacha plufieurs efquilles; depuis, les os n'etoicnt parvenus qu'au tiers de leur longueur naturelle-, la carie avoit produit cct eftet en detruifant une partie des vaiffeaux qui fervent ^ la nutrition & ^ I'accroif- femenf, dans un adulte elie n'eut occafionne que ramaigriffement du mein- bre attaque : les mufcles de I'horame obferve par M. Tenon , avoient pris toute leur longueur-, elle n'etoit plus proportionnee avec cclle des os, en forte que I'avant bras n'etoit plus fufceptible de mouvement fpontane ; on lui rendoit cette faculte en empoignant les mufcles de maniere 4 les tendre, & ^ en diminuer la longueur : les mains n'avoient point perdu le fenti- ment •, elles diftinguoient toutes les qualitcs feufibles ) la carie n'ayoit ni dctruit ni afFoibli les organes du toucher. MfDECINE M E D E C I N E. \ Tome XIV. Panic Franpife. Yy i 355 D M E D E C I N E. SuR lEs Tables Nos o zo g iqu e s. ks Tannic 1757, M. Razoux, do(fteur en medecine de la facultc | de Montpellier, medecin de I'Hotel-Dieu ^ Niines, correfpondant de i'^-xr , cadsmie, iui coininuniqiia TelFai d'line efpece de journal des differentes £ d e c i .\ temperatures de I'air ^ Niraes, & des maladies qui regnoient alors dans le Annie iiGq. nieme canton ; il eft aife de voir quel jour ces obfervations rapprocliees peuvent jctter dans la pratique de la medecine, fur une infinite de pheno- WSi. mcnes qui ne peuvent ctre expliques que par ce moyen. Ces obfervations ctoient reduites , pour ainli dire, au moindre terme, par I'adreffe avec laquclle M. Razoux avoit fu les ralTembler dans des efpeces de tables no- fologiques. Ce meme travail fut fait par M. Razoux les annecs iuivantes , & I'academie jugea qu'il etoit affez utile pour meriter qu'elle en pubiiat iin elTai de quelques mois dans le volume des favans etrangjrs ; le temps ne- cetTaire ^ rimprefllon de ee volume a permis ^ M. Razoux d'en fornier im corps d'ouvrage \ part, qu'il a fait impriraer, & qu'il a dedie k I'aca- demie en 1767. M. Razoux commence fon ouvrage par I'expofition du but qu'il s'etoit propofe, dont il prcfente les avantages dans une preface qui fert comme d'introdudlion ■■, il y detaille , avec la plus grande exadifude , la methode qu'il emploie pour conftruire fes Tables, & rapporte des paffages nom- breux, par lefquels il prouve que les plus favans medecins qui I'avoient precede, defiroient un pareil ouvrage, & des lettres qui font voir que ceux de fes contemporains qui ont eu connollTance de ion deflein , n'ont cefle de I'exhorter S fe livrcr \ ce travail. Cette preface eft fuivie d'un difcours prcliminaire , dans lequel M. Ra- 70UX commence ^ entrer en matiere. Comrae un des principaux objets qu'il s'eft propofe dans cet ouvrage, eft de prefenter le tableau des varietes que les differentes temperatures de I'air ont pu introduire i Nimes dans les maladies-, il commence par une defcription exade de la (ituation de la ville de Nimes & de fon territoire , lituation qui doit neceffairement itv- fluer fur les vents qu'on y eprouve, fur le plus ou moins d'humiditc, Sc fur le plus ou moins de purete de fair •, la nourriture dans les diffsrcns ctats de la vie, la maniere de vivre, les productions du terrain, les ani- maux-, en un mot, tout ce qui peut influer lur I'etat de la fante des ha- bitans , y eft favamment difcute ; il n'epargne pas meme les ftipL-rfluites agreables, lorfqu'elles peuvent porter atteinte ^ cet important objet; niais en rccorapcnfe il recommande I'ufage des baius j & dcGre beaucoup d'en Yy ij 55^ ABRECE DES MEMOIRES ■ — » voir etablir de publics ; il appuie mcme cet article de plafieurs obfeiva- „ , tioiis qui en font voir I'avaiitage. Comme il y a quelques remedes ufites dans I'Hotel-Dicu de Ninies i Ar.rJe tlSg. qui pourroient n'etre pas fi bien connus ailleurs , M. Razoux n'oublie point d'en donner la conipofition •, il ajoute de nieme un extrait du livre de M. de Sauvages, intitule, Noiologla Mcthodicn fijlens Morborum genera & daJTes , &c. pour mieux niettre fon lefteur en etat de dlftinguer les efpeces de maladies dcfquelles il va etre dans le cas de parler. Ce n'eft qu'apres tous ces preliminaires , qu'il a juge n^ceffaires, que M. Razoux vient enfin h fes tables , qu'il commence par le mois de juiri i75y, il donne pour chaque jour du mois la hauteur du mercure dansle barometre , la hauteur de la liqueur dans le thcrmometre matin & foir ; Ics vents qui ont fouffle & I'eclat du ciel pendant chaque jour : ces obfer- vations occupcnt la premiere page de chaque mois , au bas de laquelle il en fait une courte recapitulation. Les pages fuivantes contiennent le nombre des malades de chaque cfpece de maladie , qui font entres pendant le mois , tant dans la falle des hom- ines que dans celle des femmes, I'efpece de leurs maladies-, le nombre dc ceux qui ont ete gueris, celui des morts , celui des convalefcens, & les obfervations qu'il a faites fur les differens traitemens que les maladies ont exiges , leurs fymptomes , leurs crifes & la rcuffite bonne ou mauvaife que fes foins ont eue. La derniere page de chaque mois contient une efpece de recapitulation du nombre des malades , des gui^ris , des morts & de ceux qui lont reftes ^ I'Hotel Dieu , ranges fuivant I'ordre de leurs maladies. Ces tables font continuees de la meme maniere depuis le mois de juin '757 ' jufqu'en decembre 1761. L'ouvrage de M. Razoux eft termine par donze lettres, obfervations & memoires flir divers fujets de medecine. II s'agit dans le premier article, d'une hydrophobie (inguliere dont uti homme fut attaque fans avoir ete precidemment raordu ni piqui par aucun animal, & feulement pour avoir refpire de trop pres I'air qui fortoit de la gueule d'un chien enrage. Dans le fecond, il s'agit de vers fortis des puftules de la petite-v^rolc ; mais feulement de celles du vifage, & que M. Razoux reconnut etre nes des osufs qu'y avoient depofe des mouches , du genre de celies qu'on nomme ici mouches bleues. D'autres vers font le fujet du troifieme article •, ils etoient dans les finus frontaux & caufoient au malade des maux de tete afJreux. M. Razoux trouva qu'ils dtoient de la nature de ceux qui fe trouvent quelquefois dans les finus frontaux des moutons,& cjui leur occafionnent une efpece de vertige qu'on nomme turelu. Les quatrieme & cinquieme articles ont pour objet les bons effets de la plante ^^'^eWtcfolanum fcandens fen dulcamara , prife interieurement pour la guerifon du fcorbuti nous n'en dirons rien ici, en ayant parle amplement en 1751, ( Voy€\ HiJ}. anme tj6i.) d'apres les obfervations memes de i. D E C 1 M L. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 357 M. Razoiix •, nous ajoiiterons fculcment que la malade qui a fait le fujet • de cette obfervation, jouiffoit cii 1767 d'une parfaite fantL-, quelle s'ctoit j^ niarice & ctoit accouchee d'uti enfant bien conftitud. L'objet du fixieme article eft un vomiflemcnt habituel caufc par une Annie lySq, excrcfceiice ou fungus qui ftrmoit abfolument I'orifice intcricur de I'eflo- mac , & qui tit a la fin perir le malade. Dans le feptieme, M. Razoux rend compte des rhumes ^pidstniques ob- ferves aux environs de Nimes, Ics divers fymptomes qu'il y a obllrves & des diffiirens remcdes qu'il a employes pour les guerir. Le huitieme roiile tout entier fur les obfervations que M. Razoux a faites fur les pouls critiques, c'eft-^-dire , qui annoncent ces evacuations qui terminent , ou , comme difcnt les medecins , jugent une ma'adie ; ce mor- ceau, foutenu par- tout d'obfervations curieufes, eft peut-etre le morceau le plus intdrefunt du livre de M. Razoux. Les neuvicme , dixicme & onzieme articles contiennent I'liiftoire de quelques inoculations & quelques dilcufTions polemiques c> ce fujer. Quant au douzieme , il n'eft que I'indication d'un memoire prefente par M. Razoux ^ la focietc mcdico-phylique de Bafle, & infers dans le cin- quieme volume des Ac!a Helvetica , & qui a pour objet les maladies exanthemateufes ou caraclerilees par une eruption i la peau. Get ouvrage contient un nombre prodigicux d'obfervations curieufes & qui peuvent devenir d'une extreme utilite dans la pratique de la mede- cine-, on y reconnoit par-tout Tobferyateur exacl, le medecin prudent, &: I'ami de I'humauit^. MECHANIQUE. MECHANIQUE. i6i MECHANIQUE. SUR LA DESCRIPTION JD E s Arts et Metiers. -I— iEs arts qui ont hi publics pendant le cours de Taiinee 1766, font ■ ^ au nombre de fix. -ir - „., , Le premier ell 1 art du Couvreur , par M. du Hamel •, cct art cjm en- feigne i niettre les batimens \ I'abri dc la pliiie par rarrangemtnt nic'- Annd f]6S. thodique de pieces qui ne font pas exadement jointcs Ics unes aux autres, & qui fouvcnt menie ne le font point du tout > eft partage en quatre par- Hift. ties diftcrentes, fuivant les difFerentes matieres qu'on emploic pour cet eft'et, qui font la couvcrture en paille ou en rofeau, la couverture en tuile, celle en ardoife , & enfin la couverture en laves ou pierres plates, ufitee dans une grande partie de la Bourgogne & de la Champagne j M. du Hamel enfeigne le choix des niateriaux propres \ chaque couver- ture, la maniere de les mettre en osuvre , les differentes precautions que les ouvriers doivent prendre, rant pour faire I'ouvrage folide que pour evitcr les dangers attaches \ un art 'ix periileux; & enfin les moycns de reconnoitre fi I'ouvrage eft bien fait, & de fe defendre des malverfalions qui s'y peuvcnt commettre, & dcfquclles il n'eft que trop necelTaire que le public foit inftruit. Le fecond eft Van de frifer ou ratlner les itoffes de laine , par M. du Hamel ; cet art eft dcftin^ \ produire fur les etoffes de laine une infinite de petits boutons de poil , qu'il feroit tres long & trcs-difpendieux d'y Former \ la main •, il s'cxecutc par le moyen dune machine niue par des chevaux , qui fait en pcu de temps une operation qui exigeroit des ou- vriers intciligens & un temps coniiderable , & qui ne fe feruit Jamais aufli parfaitement & aufli egalement qu'avcc la machine : c'eft le comble de I'adrcffe & de I'induftrie que de pjrvenir \ diminucr le temps , les frais & la main-d'oeuvre , en augmcntant la perfedion de I'ouvrage. Letroifieme eft \art de faire des tapis , facon du Ley ant , connus fous le nom de tapis de la fuvonnerie , par le meme M. du Hamel", la fabri- que de cette cfpece d'etofte connue depuis trcs- long- temps dans le Le- vant, apportee ancicnnement en France, puis perdue & oubliee , a etc renouvcll.-e fous le regne d'Henri IV, & portee de nos jours au point de perfcdion ou nous la voyons : I'etolfe qui en eft le produit, oftre, outre la beaute, une hngularitc rcmarquable ; on fait qu'elle eft une cipece de velours , mais au lieu que dans le velours ordinaire le poil eft forme par les cxtremites coupees d'une fecondc chaine , il eft dans celui-ci compofc Tome XIV. J-'artie Franfoi/e, Z z 5; j54 ABRECE DES MEMOIRES ^^ III. Mechanique. Ann^e. ij66. Un rob, ou extrait de confiftance firupeufe, propofS par M. de Cha- mouffet, pour preparer, prefqiie fur le champ , en le melant avec de I'eau, line boiffon agreable & faine; les commiffaires nommes par I'academie I'ont VII preparer en leur prefence , & fe font bien affiires qii'il n'entxoit dans fa compofition tjue les memes raatieres qui fervent h faire la biere. Ce rob, nieie feiilement avec de I'eau & fans aucune fermentation, fait une tifannc nourriffante & rafraichiffante, plus ou moins legere, & M. de Chamouffet propofe nieme un rob fans houblon , & par confequent fans amertumei en trempant dans le melange des petits batons prepares pour cet ufage, la liqueur entre promptement en fermentation, & lorfqu'au bout de qua- rante-huit heures, elle s'eft eclaircie, elle devient uae biere agreable & bien brafTee, toute femblable \ de la bonne biere ordinaire-, on eft mai- tre de ne la compofer qui mefure qu'on en a befoin , & par confequent de Tavoir toujours fraiche. II feroit i defirer que cet:e preparation put foutenir le tranfport par mer & etre portee dans les pays chauds oil elle feroit d'une grande reffource : mais c'eft i I'experience i prononr cer fur cet article , & I'academie n'a eu garde de prevenir fa decilion. I V. Des meules de compofition propres i repafTer toiites fortes d'inftru- mens tranchans, & des cuirs k repafTer les rafoirs, prefentes par le Sr. Coiic: les meules font compofees de quatre matieres tres-dures, pulverifees, paf- fees an tarais de foie, & unies par des matieres qui fondent au feu & prennent, en fe refroidiffint, une durete confiderable : on les moule dans des boites difpofees pour leur donner la forme qu'elles doivent avoir, & on place au centre un carre de bois pour les enarbrer jufte & facilement: ces meules ont paru beaucoup moins fujettes i rayer les outils que les meules ordinaires, elles font beaucoup moins de feu avec I'acier, & les outils en font moins endommages; elles ont de plus une certaine onduo- (ite propre I conferver & I adoucir le poli de I'acier : les memes matieres qui entrent dans la compolition des meules, entrent auffi dans la pate dont _ le fieur Coiie enduit fes cuirs k repafl'er-, & les cuirs & les meules ont paru devoir etre utiles pour rentrerieu & la confervation des inftrumeni traiiclians. V. Un clavefRn, prefente par M. de Virebez, organifte de I'eglife royalc & paroifliale de Siint-Germain I'Auxerrois : le claveifin ordinaire a, comme Ton fait , toujours la meme harraonie , li ce n'eft qu'on peut , fuivant la miithode de M. du Moutier, dont nous avons rendu compte en 1757 (tf), («) Voyez Hift. Je l'A.c»d. 1757. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 5^5 lui^ donner le moycn d'exprimer Ic pianoforte par le inoyen des bafcules ^—i ^i qu'on place fous la traverfe antirieure dii pied , & qu'on prc-ffc avcc les ', genoiix : ccliii dc M. dc Virebcz a , comme (imple clavcdin , la mcme pro- ^^^haniquf. ptietc & mcme dans line plus grande etcndue, piiilciuil donne qu.itre gra- Ann^e n6S dations dirfirentes de I'iiitenlite du fon , mais il eft de plus fufceptible d'un autre effet bien plus (ingulier, il iniite uii grand nombre d'iiiftruniens, tant ^ corde qu'i vent , & tous ces changemcns s'operent fans lever Us mains de dellus le clavier, & fi Ton veut, en jouant la nieme piece : quelques- uns mcme font fingulierement bien imit;is, tels que la harpe, le balibn , &c. quoique ce claveflin n'alt, comme tous les autrcs, que trois cordes de mdtal i chaque touche. On juge bien que les pieces qu'on joue fur cet inftrument imitateur, doivent ctre appropriees i fes changemens & i ce dont il eft; rufceptible , & qu'il ne faudroit pas, par exemple, lui deraan- der de longues tenues, lors meme qu'il imite le baffon ou le clairon : la mechanicuic de cet inftrument eft ablolument cachee, & il differe tres-peii du claveliin ordinaire; elle a paru ingenieufe & aulli limple que le pouvoit comportcr la niultiplicite des eft'ets , & elle a d'ailleurs toute la folidite qu'on peut dehrer, en forte que cet inftrument nc fera prefque pas fujet ^ plus d'entretien qu'un claveflin ordinaire. L'auteur a paru meriter de juf- tes louangcs pour avoir par fes recherches & fon genie , fu donner un ft grand nombre de varietes ^ un inftrument qui n'avoit par lui-mcme qu'un feul fon ; c'eft un agrement confiderable qu'il lui ajoute , & un grand pas vers \i perfcdioii du claveflin, V I. _ Une rnethode pour regler par line voie plus prompte & plus expedi- tive que rimprcffion mcme, toutes fortes de papiers deftines h la mulique, au plaint-chant, i la fabrication des regiftres, etats, &c. propofee par M. de Vaulfenville , correfpondant de I'acadcmie ; cet art exige une ef- pece d'appareil d'inftrumens, la pliipart peu difpendieux, mais qui cpar- gnent un temps iiifini , tant pour I'opcration meme que pour les princi- paux outils quiy fervent •, un chaftis folidenient arretd fur une table, tient ferme le papier fur lequel on doit operer, dirige la marche des tirelignes qui doivent former les traits, & borne Icur courfe, pour menager les mar- ges, au moyen d'un fil de fer qu'on y peut tendre i volontc -, une ma- chine alfez limple, plie & coupe d'un feul coup tous ces tire-lignes avec la plus parfaite cgalitc; des moulcs fervent ^ les aifujettir h. des diftances egales dans des petites malfes de plomb fondu, & tout cet equipage fe pre- pare avec la plus grande promptitude &: la plus grande facilite -, I'operation meme n'eft pas plus longue ni plus difficile, & les commilfaires de i'aca- dcmie, qui ont vu operer M. de Vauflenville, penlent qu'il n'avance rien de trop quand il alTure qu'un homme peut par ce moyen , rtigler lui feul plus de papier , qu'une preffe qui exige deux hommes , n'en imprimeroit dans le mcme temps. C'eft un art tout nouveau qu'il prcfente , tant il ajoute k la maniere ordinaire de rcglcr le papier, & un veritable prclent qu'il fait au public. 366 ABREGfiDESMEMOIRES "" VII. .Mechanique. ylnnc'e 1766. Un n fphere mouvnnte , prifentee par M. Caftel, fecretaire du roi-, cette fphere reprefenre tout le fyfteme planetaire, fuivant Copernic, monte lur un piedeftal , trcs-elegamment oriie , qui fert de boite k une pcndule i lecondes dont le mouvemcnt fe communique ^ toute la machine -, & comme il eft fouvent neceffaire que la pendule puifie aller fans la fphere , ou la fphere fans la pendule, la communication de Tune ^ I'autre pcut etre interceptee en faifant defengrener d'avec le mouvement de la pendule , la roue qui communique le mouvement ^ tout le rcfte de la iphere , qui pour lors ne va plus qu'en menant cette roue I la main : la pendule eft faite avec le plus grand foin-, elle marque d'un cote les heures , les minu- tes & les fecondes fur un cadran de glace, qui lailfe voir tout le rouage interieur de la machine:, & de I'autre cote fur un autre cadran d'argent, les mois, les jours de la femaine, les jours, les {)hafes de la lune, & les autres niouvemens celeftes qu'on a coutume de reprefenter en parei! cas : le rouage ou mouvement de la fphere n'eft compofii que de trente-fept roues & de quinze pignons, & les nombres en ont iii. ca!culi5s avec tant de precifion, qu'aucune planete ne peut s'ecarter du vrai que dune quantite tres-neglec- tible , & qui ne deviendroit fenfible que fur un tres-grand nombre d'an- necs. Le mouvement de la terre fur fon axe & le parallelifme conftant de cet axe, y font executes d'une maniere tr^s-fimple, ainfi que les mouve- mens de la lune. Cette fphere , au refte , n'eft pas la premiere de cette efpece qui ait paru , & fon merite n'eft pas de produire les memes eftets que les precedentes , mais de les produire d'une maniere plus fimple & plus cxade, & c'eft ^ quoi il paroit que M. Cartel eft parvenu, tant par la precifion des calculs que lui ont donne fes nombres, que par la par- faite execution de la machine pour laquelle il na rien ipargne , & qu'il a de plus decor^e avec tout le gout poflible. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 5(^7 Mechanique. Sur le rapport des poids Strangers au poids de marc. XViEN ne feroit peut-etre plus avantageux an commerce que I'unifor- miti gcndrale de poids & de mefures ; la diverlite de ces poids & de Cfs mefures ne peut introduire dans la Ibcicti que des abus (oiiveiit oppofes aux regies inviolables de la probiti , & touiours contrairesau veritable but du commerce : nous ne nous dtendrons pas davantage fur cet article qui a etc dcja difcute en 1747 (a), h roccafion d'un Memoire de M. dcla Condamine, fur une mefure univerfelle & invariable, auquel nous prionj Ic le(5teur dc vouloir bien recourir. II n'etoit queftion dans le Memoire de M. de la Condamine que des mefures, les poids ne meritent pas une moindre attention-, il y a meme lieu de penfer, d'aprcs quelques vcftiges de I'antiquite , qu'ils ont ete au- trefois aUez geiicralement uoiformes, mais que la matiere dont ils etoient conftruits , setant plus ou moins ufee fuivant les diffcrens ufages qu'on en a fails, & le plus ou moins de temps que les difti^rentes nations ont mis I fe procurer des etalons, que les precautions qu'on prenoit rendiffent inalterables ; les differences qu'on obferve aujourd'hui dans les poids des differentes nations les plus fcrupuleufement etaloiines, ne viennent que de ce qu'on a , pour ainii dire , confacre , & comme etemife les differences qui s'y trouvoient introduites au temps ou on les a hxes. II ne feroit peut-etre pas pofflble d'engager tous les Souverains & tou- tes les nations i retablir I'uniformite primitive des poids ; mais ne peut-on pas effayer de fe rapprocher de cette uniformite par un autre moyen , & une comparaifon ex3(fte des poids ufites chez prefque toutes les nations Commer9antes avec le poids de marc de France .' ne produiroit-elle pas , quoiqu'un peu moins facilement le merae effet ? c'ell cette comparaifon qui a fait I'objct du travail de M. Tillet, duquel nous allons eflayer de rendre compte. On pouvoit faire cette coir.paraifon de deux maniercs, la premiere en demandant aux effayeurs des monnoies des nations ctrangeres, le rapport de leurs poids , qu'ils devoient mieux connoitre que perfonne , avec le ^oids de marc de France ; & la feconde en fe procurant des poids bien ctalonnes des differentes nations & en les comparant avec le notre. La premiere maniere fut choilie comme la plus hmple •, un Memoire rcdige par feu M. Hcllot & M. Tillet, que M. Chauvelin, charge du de- tail des monnoies, avoit choifis pour cette importante recherche, fut en- Yoye par M. le Due de Praflin aux ambaffadeurs du roi dans les cours ctrangeres, qui le communiquerent aux effayeurs & aux chymiftes, mais cet expedient n'eut pas le fucccs qu'on en attendoit; les reponfes qui fu- lent envoyces etoient li peu d'accord les unes avec Ics autres , que (a) Voyez Hift. ie lAcad. 17^7. CoUeift. Acad. Pait. Franj. Tome X. AnrUe t-jGy. Hift. ,68 ABREGlfiDES MEMOIRES I MM. Hellot & Tillet n'en piirent tircr d'affi;z precis pour fervir de bafs h Icur travail. Mechanique. j[ fjji^ij j^i^^ gy^jj. ygcours k la feconde maniere, & fe procurer des ylnnee ilG-j. poids eti^angers bien authentiquement etalonnes •, le zele de M. de Praflin ie preta encore \ cetle recherche , & bientot la difficiiltc fat applanie , & les commiffaires nninis des pieces neceilaires pour rexecution de leur projet. , , Lorfqu'il s'eft trouve que les divifions des poids envoyes ne rcpondoient pas exaclement au poids total, on a fcrupuleufement recherche_ d'oii ve- noit I'errcur, &ri elle etoit dans ce dernier ou dans les lubdivilionsi mais exceptc ce cas , & ^ moins qu'on n'y ait etc conduit par des induftions tirees des Memoires qui les accompagnoient , c'eft toujours fur Ie poids total qu'on s'eft regie. _ Lorfque du nieme endroit il eft venu deux poids, I'un deftine aux tiia- tieres precieufes & I'autre aux matieres groffieres , dont la proportion ^toit connue ou donnee par le Memoire ; le premier a toujours etd pris pour regie, puifqu'on avoi: certaiuement eu plus d'interet i en empecher I'al- tsration. , Les rapports entre ces poids etrangers & Ie poids de marc, nont pas feulement etc enonccs en gros, mais on a pouffe I'exaiftitude.jurqu'aux plus petites fradions, & donne le rapport de leurs plus petitcs dividons avcc la nieme precilion. _ , Le poids de France, qui a fervi \ cette comparaifon, eft celui quon Yiomms poids de Charlemagne , qui eft corapofe de cinquante marcs, & foigneufement conferve par la Cour des Monnoies , qui ne le communi- que qu'avec beaucoup de formalites •, & les balances qui devoient etre ailez fortes pour pefer un marc, etoient tres-exaftes & alfez fenlibles pour trebucher \ un quart de grain. On s'eft foigneufement allure que ce poids n'avoit recu aucune altera- lion fenfible, en Ie comparant avec de tres-anciennes monnoies bien con- fervecs qui, pefees avec les divifions de ce poids, ont ete trouvees exafte- jnent du meme poids qu'elies devoient avoir fuivant les Edits qui en avoient ordonne la fabrication. Rien ne prouve mieux combien la comparaifon immediate des poids ctoit neceffaire, que ce qui eft arrive dans cet examen pour la livre ro- malne-, plufieurs Memoires en donnoient Ie rapport \ la livre de France, comme de 24 ^ 55 , & ce rapport ne s'accordoit nuUement avec ceux que lui donnoient Boutteroue, Garrault, le Blanc & le P. Merfenne, qui ne s'accordoient guere mieux entr'eux : I'examen de cette livre \ la balance a fixe f cute I'incertitude , & fait voir que la livre romaine eft a celle de France, comme z^ ^ ^6. Au refte, quelqu'attention qu'aient apporte les commiiraires dans cette operation , ils n'ofent fe flatter quelle ait ete abfo- lument exempte de petites erreurs , tnais on peut cependant etre fur qu'il ne s'y en eft pas glille de confiderjbles, I'utilite de leur travail eft general & rcgarde toutes les nations de I'Europe-, c'eft un oracle du commerce, \ cela prcs, que fes reponfes ne feront pas ambigues ; & pour lui donner touts I DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 5^9 toute I'litilitc dont il eft fufceptible , M. Tillet y a joint trente-ime — ^— — tables, qui expriment jiifqiic dans Ics plus pctitcs parties les rapports des ,, . poids d'Amfterdam, dc Berlin, dc Berne, de Bonn, dc Bruxelles, de Co- ^'^^"^'^'"" - Jogne, dc Conftantinople , de Copenhagtie , de Dantzic, de Drefde , de Annie f]6-f. Florence, de Genes, de Hambourg, de Liege, de Lisbonne, de Londres, de Lucques , de Madrid , de Malte , de Manheim , de Milan , de Munich , de Naples , de Ratisbonne , de Rome , de Stockliolm , de Stuttgard , de Turin, de Varlovie, de Venife & de Vienne. On peut ailement juger de I'utjlitc d'un pareil ouvr.ige & du travail imuienle qu'il a coiite. SUR LA DESCRIPTION DES Arts et Metiers. I t Es arts qui ont etc publics pendant le cours de I'annKe 1767, font aii nombre de cinq : Le premier eft I'art du facleur d'orgues , par D. Bedos de Cclles, Re- ligieux Benedidin de la Congregation de Saint-Maur; cet art,un des plus favans peut ctre qu'ait invente I'efprit humain , exigeoit pour etre decrit, tant de connoiirance de mullque , de mcchanique & de phylique , que I'Acadcmie s'eft trouvee heureufe de les rencontrer ramies dans la per- fonne de D. Bedos, avec la bonne volonte pour les mettre en ocuvre : ce qu'il a fait paroitre en 1767 de cet art, n'cn eft encore que la premiere partie-, elle contient la defcription des differentes efpeces de tuyaux d'or- gue , tant \ bouche qu'^ anclie , les pieces qui les compofent , leurs pro- portion & leurs melanges, article qui tient i la plus profonde theorie; la compolition des jeux a mutation, dans lefquels plufieurs tuyaux de diffc- rens tons parlent \ la fois fur une meme touche, & oi"i la gradation mu- licale eft interrompue par des fauts ou reprifes ; le tableau que I'auteur en donne dans une grande planche gravee, offre i TcL-il la proportion de tous les tuyaux h bouche d'un grand orgue, & donne I'idee des recher- ches profondcs de ceux qui ont fu fi parfaitement arranger cette multi- plicite de fons, qu'aucun ne fit avec un autre une dilTonnance dcfagrea^ ble-, vient enfuite la defcription des fommiers qui recoivent le vent des foufflets pour le diftribucr aux tuyaux par le moyen des foupapes que les touches des claviers font ouvrir,des regiftres neceflaircs pour fairc taire ou parler les jeux, fuivant la volonte de i'organifte, des claviers, tant de la main que des pedales , & I'admirable ufage des abreges qui ramencnt fous la main de I'organifte, & dans une elpace de peu dc pieds, toutes les parties de cette vafte machine, auxqueiles il communique par ce moyen le mouvement i fa volonte ; les precautions neceflaires pour conferver le vent des fouftlets, & pour les conftruire de maniere qu'ils puilicnt four- nir le vent ncceffaire , n'y font pas oubliees, & \ toutes les planches qui reprcfentcnt ces parties en detail , i'auteur en a ajoutc deux , dont Tunc Toim XIV. Fartic Frangoije. Aaa MicHANIQUE. ,70 A B R E G E D E S M E M O I R E S rcprefente , fous iin double point de vue , rinterieur d'uii grand ofgiie vu par dcrriere ; & I'autre une coupe du meme inftrument falte par un ' pljn perpendiculaire ^ fa face, pafl'ant par le nnlieii du clavier : I'organifte Annie fjSj- & le fouffleur font reprefentes en adtion dans cette derniere , & on y voit le jeu de toutes les machines. Le fecond efl: \'Art du Paumier-raquetier & de la Faiime, par M. de Garfault; la defcription de cet art contient deux objets fepares; le pre- mier eft la conftrudion & le detail des dift'erentes parties des jeux de paume , tant carres qui dedans des raquettes & battoirs de difterentes ef- peces, & des balles & volans qui fervent i cet exercice & qui forment line branche de commerce-, & le fecond contient les regies de ce jeu, egalement propre i denouer & i fortifier le corps , & i fe procurer la jufteffe du coup d'oeil, la force & I'adreffe fi neceffaires en certaiiies oc-. cafions. Le troifieme eft VArt du Corroyeur, par M. de la Lande; cet art a pour but de rendre aux peaux la foupleffe que leur a fait perdre I'operation du tanneur, & de leur donner la force, leclat & les autres qualites propres aux ufages auxquels elles font deftinees. M. de la Lande decrit toutes les operations neceiTaires I ces difterens objets-, il y joint la maniere de co- lorer les cuirs, foit en noir, foit en rouge, celle de les conferver dans leur couleur naturelle, la preparation des cuirs de Ruffle, nommes im- proprement & par corruption, cuirs de RouJJi; celle du chagrin & celle des peaux de veau & de mouton , paffees comme Ton dit i I'alun , pour lufage des relieurs, quoiqu'on n'emploie pas i leur preparation un feul atome de ce fel; rien enfin n'y eft oublie de ce qui concerne cet art qui fournit i un fi grand nombre de nos befoins. Le quatrieme eft celui du Meunier, auquel M. Malouin fon auteur, a Joint celui du laoulanger , la defcription de ces arts contient leur hiftoire & celle de leurs progres : on fera peut-etre etonne d'y trouver des recher- ches & une fineffe qu'on n'y avoit pas foupconnees -, on n'imagineroit pas certainement que ce n'eft prefque que de nos jours qu'on a trouve le moyen de conferver une partie tres-confiderable de la meilleur farine que I'ancienne mouture faifoit perdre, & que la difference dans la maniere de moudre, peut deteriorer ou perfedionner confiderablement la farine tiree du meme bled. M. Malouin entre fur cette matiere dans le plus grand detail •, il diftingue les differentes efpeces de farine & les ufages auxquels elles font les plus propres -, il donne la maniere de preparer les levains, de petrir, de donner I'appret h la pate & d'en former les pains de differen- tes efpeces, depuis le pain mollet Jufqu'au pain de munition & au bifcuit de mer-, la maniere de les cuire, la conftruftion des fours, tant fedentai- res que de campagne, & la maniere de chauffer les uns & les autres con- venablement. II eft peu de perfonnes qui apres avoir lu cette defcription, n'avouent qu'elles n'avoient pas une jufte idee de cet art C\ gen^ralement pratique. A ces deux arts, M. Malouin a joint celui du Vermicelier ou de li pre- paration de cfs pates , connues fous le nom de Macaroni , de Vermicel, DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ,71 Ae Laiagues , &c. li fort en ufage en Italic & dans qiie^ucs province' S!?;^^?!;^ nieridionales dii royaiime, & mcme dcpiiis quelque temps dans la capi- vi . tale; il donne ia defcription de tons les inftnimens neceffaircs I ces jj jf. "^ ^ «= " '^ " "i ^rentes tabriques, & y joint le detail & la prtfparation des difFerentes ma- Ann^e iy6y. tieres qu'on pent fnbftituer & qu'on fnbftitne en effct an pain de bled dans les difl'crentes parties dii monde , lorfqn'on ne pent s'en procnrerj le tout eft accompagne de plnfieurs notes hiftoriques & phylianes tres-intd- re/Tantcs & on pent rcgarder cet onvrage, moins comme la fimple def- cription d'nn art qne comme un traitc hiftorique &: phyfiquc des arts Ics pins ncceiiaires aux hommes. Le cinquieme & dernier art qni ait paru en iy6j, eft ceini du harbier- perruquier , par M. de Garfanlt ; apres avoir fommairement parle de la barberie, I'autenr paffe tout de fnite ^ I'art proprement dit du perruquier-, il donne les differentes manieres de faire les cheveux , de les frifer & dc les accomnioder ; il diftingue les differentes efp^ces de cheveux frparea de la tete; il enfeigne la maniere d'en reconnoitre la quaiitc, de les af- fortir pour la couleur & pour la longueur , de les preparer & de frifer ceux qui font deftines k I'etre ; il decrit enfuite les differentes fortes de perruques, il donne la maniere de trefler les cheveux, de monter la per- ruque , c'eft-a-dire de former cette efpece de calotte qui doit envelop- per jufte la tete & porter les cheveux, celle de les y placer & de l?s y arreter , celle de former les boucles & les tours de cheveux -, il y a outre I'art du perruquier en vieux, dont la fondion eft uniquement de raccommoder les vieilles perruques •, & il termine enfin cet onvrage par I'art du baigneur-etuvifte qui , fuivant les reglemens , eft une dependance de celui du perruquier; il decrit les diverfes operations de ce dernier, la preparation des differentes matieres qu'il emploie & les differentes uften- & qui ne feront pas affez affoiblis pour nc pouvoir fe tenir allis. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 375 M E C H A >; I Q v.- E. SUR LA DESCRIPTION Ann/e iy68. DES Arts et Metiers. JLiES arts qui ont ite publics pendant le cours de I'annee 1768 , font au nombrc de fix. Le premier eft I'art du ferrurier , par M. du Hamel-, I'objet de cet art eft imnienfe, & fe divife en un trcs-grand nombre de branches-, elles ont toutes ccpendant des principes communs & generaux , & c'eft par oii il commence : il donne la maniere de connoitre les differens fers & les iifa- ges auxquels ils font propres-, il diftingue les differentes efpeces de char- bon qu'on emploie , & les differens travaux auxquels on les doit em- ployer i il paffe de h k la maniere de forger le fer & de le limer, pour lui donner la forme neceffaire. Les premiers fers qu'on emploie dans les batimens , font les gros fers , comme ancres, tirans , etriers , ehevetres, &c. qui fervent k en augmen- ter la folidite-, c'eft aufli ce qui fait I'objet du fecond chapitre : il y joint le detail d'une partic de la groffe ferrure des batimens de mer : aprcs ces groffes ferrures , viennent les ouvrages qui doivent fervir ^ la furete des habitans des maifons ou h leur drnement, comme balcons , rampes, d'ef- caliers, grilles de fenetre , portes de jardins, vitraux en plomb, & raeme ceux que le heur Chopitel avoit imagines pour fuppleer aux chaflis de bois ordinaires ; les differentes pieces qui ont rapport a la fermetiire des portes, croifees, armoires, coffres, &c. & la maniere de les pofer, qui forme, pqiur ainfi dire, un art diftind de celui du ferrurier, fait I'objst du quatrieme chapitre ; il y diftingue toutes les differentes ferrures en iifage , & y ajoute des reflexions fur leur utilite & fur les cas oil elles font preferables les unes aux autres : le chapitre cinquieme contient le curieux detail de la conftrudion des differentes efpeces de ferrures & de cade- nats -, cet article , le plus favant de tout I'art de la ferrurerie , eft traits avec le plus grand detail, & eft certainement un des plus intereffans-, c'eft le feul que M. du Hamel ait trouve tout fait dans les papiers de M. de Reaumur, & il ne manque pas d'en avertir le Lecteur : le fixieme & der- nier chapitre contient encore un art prefqu'entierement fepare, c'eft celui de la ferrure des carroffes , tant pour leur folidite que pour les refforts & les autres pieces , qui n'ont pour but que les commodites ou I'agre- nient : tous ces objets font traites avec :oute la clarte poffible , & accom- pagnes de planches qui prefentent aux ycux le dcveloppement des pieces , & les Ouvriers dans I'adion de leur travail. Le fecond eft i'art du cordonnier , par M. de Garfault •, il eft divife naturcUement en trois branches, dont les travaux font affez differens les uns des autres j le cordonnier pour hommes , le cordonnier pour femmes Hifi. 37(J ABREGfi DES MEMOIRES ■Miw— — — £• /t' hottler : 11 commence par line couitc hiftoire des chaulTures qui ont fj,, etc autrefois en iifage, & dont la defcription a pu echapper ^ Tinjure des '*'^'*^"^' temps •, il decrit enfuite fepardment chaciine des parties de cet art, ail Anme 1168, moyen diiquel on trouve le fccret de former, avec des matieres molles & Hexiblcs , des chaiifliires qui , fans gener le pied , le raettent \ I'abri de I'eau & des autres inconveniens qu'auroicnt \ craindre ceux qui vont ^ pied , ^ armer k s jambes des cavaliers centre la plus grande partie des accidens qui peuvtnt leur arriver, & \ donner b prefque toutes ces chauf- iures, & rur-toiit \ celle qu'on fait pour les Dames, tout Tagrdment & toute lelegance dont elles font fufceptibles. Le troifieme eft \art de fabriquer la brique & la mile j & de les fairs cuire avec la tourbe , comme on le pratique en Hollande, par M. Jars, alors correfpondant , depuis membre de racademie , & dont elle regrette aujourd'hui la perte. Cet art eft une fuite naturelle de celui du brique- tier-tuilier, publie en 1765, par MM. da Hamel, Fourcroy de Rame- court & Gallon •, la difference dans la matiere qui fert ^ la cuiffon , eii entraine neceffairement une dans la conftruftion & dans I'arrangement du four, & c'eft pour cette raifon que Tacademie a cru devoir joindre cette efpece d'appendice ^ I'art dej^ publii. Le quatrieme eft \'art de divi/er les inflrumens de matMmatique ■, par M. le due de Chaulnes : cet art, dont I'academie a publie les principes en 176^, {voy. Hifi. annee ijGf,), eft abfolument nouveau, & n'a au- cun rapport aux methodes ufitees jufqu'^ prefent. On fait de quelle im- portance il eft que les inftrumens foient exadement divifes , & que ce talent a fait prefquen entier la reputation dont ont joui les plus celebres artiftes en ce genre : mais ce talent eft rare, & ceux que la nature en a favorifes, ne font exempts ni de la mort, ni de la vieilleffe, ni de toutes les infirmites auxquelles tous les hommes font fujets. II a imagine des inf- trumens armes de microfcopes & de telefcopes, qui font, pour ainli dire, . tout feuls la divilion des lignes droites & des arcs de cercle, ou, pour parler plus jufte , au moyen defquels un homme de capacite mediocre , pent, avec un peu d'attention, attcindre ^ un degre de perfection ft fur- prenant, qu'un inftrument de 11 pouces de rayon, divife de cette ma- niere, a foutenu la comparaifon avec un quart de cercle de 6 pieds de rayon. Ce nouveau divilcur eft un veritable prefent que M. le due de Chaulnes fait aux mathematiciens , & fur-tout aux aftronomes : c'eft un excellent artifte, capable d'executer aifement ce que les hommes n'execu- teroient qu'avec peine, qui peut, par confequent, multiplier extreme- ment le nombre des bons inftrumens, & qui n'eft fujet ni i la mort, ni 'k aucune des infirmites qui peuvent rendre inutiles les talens les plus pre- cieux. Le cinquieme eft \'art de la trcjilerie ou de faire le fil d'archal, c'eft- i-dire , de reduire le fer en fil , plus ou moins fin , julqu'au dernier nii- mero des cordes de claveflin. Le fer, dans cette operation, aprcs avoir ete forge en tringles aflez fortes, on le force, au moyen d'une machine niue par un courant d'eau & de tenailles qui y font attaches , i pall'er lucceilivement DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 377 fucceffivement par Ics diffdrens trous des filiercs , & on parvient ^ liii donner Textenfion & la fineffe qu'on defire. Le choix dii fer, fcs prepa- v» ■. rations avant que de le prcfenter aiix filieres, les machines deftinees ik QUE. cet ufage, celles qui fervent i letendre par la refiftancc des devidoirs , AnnU i~68. lorfque fa fineffe ne lui perraet plus d'ctit faifi par les tenaillcs; rien n'a cchappc aux recherches de M. du Hamel, & Ton croit, en lifant la. def- cription de cet art, etre tranfporte dans les ateliers meme oil on I'exerce. Le fixieme & dernier art qui ait cte public en 1768, eft cclui d' ex- ploiter les mines de charbon de terre , par M. Morand, fils, premiere partie. On lait ^ combien d'arts eft utile cette elpece de matiere ; les voya- ges qu'il a fait i Liege, k Aix-la-Chapelle & ^ Charleroi, & la ie<5lure allidue du petit nonibre d'auteurs qui out ecrit fur cette matiere, I'ont mis ^ portee de trailer cet important objet dans toute fon etendiie : la premiere partie de fon cuvrage eft la feule qui ait encore paru, les au- tres la luivront de preS', elle contient I'hiftoire du charbon de terre, tant comme faifant partie de I'hiftoire naturelle, que relativement aux arts & au commerce; il donne fa compofition , fa nature, fes differentes efpeces & fes varictes, les metcores aqueux & igncs qui accompagnent cette fubf- tance dans les mines , & qui genent prodigieufement les ouvriers dans la pourfuite de leur ouvrage : il entre enfuite dans le detail des terrains oii font lituees les mines, & de la nature des differentes couches de terre, de fable & de roc qu'on rencontre avant de parvenir au charbon ; il donne les differentes polltions des filons, & decrit les obftacles qu'on trouve "k vaincre dans Texploitation des mines de la part des eaux : en un mot , on trouve dans cette partie de fon ouvrage, s'il m'eft permis d'ufer de ce mot , une anatomic exacle de I'interieur du terrain , bicn capable de faire dellrer la fuite de cette defcription , qui doit contenir I'art, pro- prement dit, d'exploiter les mines; cette premiere partie de I'ouvrage de M. Morand a paru fi utile ^ M. I'eveque prince de Liege, qu'il Ten a fait remercier par fon Miniftre, & Ten a remercic lui-iucrae par une lettre ecrite de fa main. Tome XIV. Partie Frangoije, Bbb jyS abreg£ des memoires Hift. M^CMANIQUE. Ann^e ij68. MACHINES ou IN VE N T 10 .•' S APPROUVEES PAR L'ACADEMIE EnM. DCC. LXVIII. L VJne vielle organifee, prefent^e par le fieur Joubert, maitre luthier \ Paris : cette vielle eft veritablement organifee , c'eft-a-dire , garnie d^un petit jeu de flute qu'on joue en meme temps que la vielle , ou , fi Ton veut, feparement Tun de I'autre, toujours avec le meme clavier & en fai- fant agir dans Tun & I'autre cas le foufflet par le mouveraent meme de Li manivelle. Le fon de cet inftruraent a paru agreable •, & quoique I'idee n'en foit pas abfolument neiive, cependant comma on n'avoit pu jufqu'icL reuffir ^ I'executer, on a cru que cetoit une addition utile a un inftrument deji connu, & que la maniere dont il I'a cxeciitee, & Tart avec lequel il a reduit toute cette raechanique fous un tres-petit volume, meritoient d etre encourages. I I. Une nouvelle grue ou plutot un changement \ faire aux grues ordinai- res, par M. Berthelot : perfonne n'ignore que dans I'ufage ordinaire de la grue, les hommes qui la font agir, font appliques i la circonference d'une roue qu'ils font toumer par leur propre poids -, & que fi le cable qui fou- tient le fardeau qu'on eleve vient I cafler, ils font expofes aux plus grands dangers. Dans la grue de M. Berthelot les hommes n'agiffent pas imme- diatement fur la roue •, ils font places \ terre , fur deux efpeces de marches ou pedales, & ces pedales font agir alternativement deux leviers verticaux, places aux deux cotes de la roue •, ceux-ci font garnis de nientonnets qui cedent en montant , mais qui accrochent en defendant les chevilles de la roue, qu'ils font toumer avec d'autant plus d'avantage, que les menton- nets peuvent agir fur le rayon horizontal de la roue , & que fi le cable vient ^ caffer, les hommes ne courent pas le moindre rifque. Cette conf- trudion , qui fe peut appliquer aifement ^ routes les grues dej^ faites , a paru fimple , peu difpendieufe , & trcs-propre i eviter tous les accidens. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 573 M^CHANIQUI. Un crlble ^ ncttoycr Ics gnins , propofi par M. Gambler; ce crible Anndc ij68. cfl cylindrique, & porte d.ins fon iiitcricur dcs lames de tole, piqu^es en rape, difpolccs en hclice, cjiii obligent, par cctte fitiiation, Ic grain \ par- courir environ trente pieds de longueur dans le crible, quoiqu'il n'ait que quatre picds & demi dj longueur-, des grilles de fil de fer y feparcnt les differentes qualiKS de grains nettoyes par les rapes , un autre crible plat recoit le moinJre grain ,-& enfin la poudierc & les ordures legeres y iont emportees par im venti'iteur, tandis que les grolFes & les pefantes tom- bent au fond, dans une cailFe deftinee ^ les recevoir. II a paru, en gene- ral, que ce crible produiloit un trcs-bon effet, & que la maniere dont on a conftruit le cylindre , qui en fait la partie eirentielle , etoit nouvelle & ingenieufe : qui la verite, cet inftrument demande i etre execute par un ouvrier intelligent, & coutera plus que les autres 5 mais qu'aufli il devien- dra plus propre qu'aucun autre qu'on connoilTe , \ nettoyer parfaitement le grain qui le trouvera charge de pouQierc & d'ordures , ce qui eft un avantage confiderable. I V. Un nonveau compas de proportion , propofi par le pere ToufTaint de Saint-Marcel, carme-d^chaulFe, prieur de la mailon de Langres : ce com- pas ne rcllemble en rien au compas de proportion ordinaire •, il eft com- pofe de quatre branches egnles , ayant chacune leur pointe , deux de ces branches portent chacune une oreille divifee en quart-de-cercle , dont le centre eft le meme que le centre de mouvement du compas ; les deux autres branches s'attachent fur ces quarts-de-cercle, qui fervent i mefurer combien elles s'ecartent du plan dans lequel fe meuvent les deux pre- mieres ; il eft evident que plus elles en font ^loignees , moins elles s'ccar- teront par le mouvement des autres branches qui les entraine, & qu'on peut, par ce moyen, mettre telle proportion qu'on voudra entre I'ouver- ture des unes & des autres : c'eft-li le principe de la conftrudion de cet inftrument : il n'y a point de problcmc qui puiffe fe refoudre par le com- pas de proportion ordinaire, qui ne fe refolve par celui-ci avec plus d'eten- due, d'exaditude & de facilite, au moyen d'une regie divifee que I'auteur y a jointe , & des tables qu'il a calculees pour cet ufige. La conftrudion en a paru ingenieufe : il eft feulement i craindre que les qu.itre pointes dont il eft armi, ne le rendent d'un ufage incommode ^ ceux qui n'y fe- roni pas accoutumes. Bbb i) j8o ABREG^DESMEMOIRES Mechanique. J, J ^c Sur une Machine propre a moirer les Etoffes de foie. liift. J.VX o I R E R une etofFe , eft imprimer fur la ftirface , des ondes diffe- reniment contournees -, ces ondes ne fe peuvent impiimer que fur les ctoft'es dans lel'quelles la groffcur du fil de trame produit des cannelures tranfverlales , qu'on nomme grain ; & c'eft I'applatiffement de ces canne- lures en fens oppofes, qui forme les ondes de la moire : elles doivent ctre grandes & bien terminees par des filets fins & delies , produits par I'interfedion des applatiffemens du grain en fens contrairev comme I'ap- platiffement ne prend point fur les plis, il en relulteroh que les ondes de la moire feroient interrompues d'efpace en efpace par des efpeces de lignes tranfverfales , qui feroient un effet defagreable ; on lemcdie ^ cet inconvenient, en depliant I'etoffe & changeant les plis de place, ce qu'pn appelle ksfaire courir. Alors toutes les parties de Tetoffe fouftVent alter- nativeraent la preffion qui ecrafe le grain , & les ondes ne font pas irt- terrompues. Le moyen qu'on emploie pour operer ces ondes , eft de faire paffer I'ctofte , enveloppee d'une toile & roulee fur uii rouleau de bois de gayac, fous une caiffe , dont le fond eft tres-poli, & qui eft charges d'un poids enorme. Cette caiffe eft tiree par un cable alternativement ea avant & en arriere •, au moyen de cette operation , le poids enorme de cette machine ecrafe le grain de I'etoffe, & I'applatit en divers fens, ce qui forme les ondes qu'on remarque fur I'etoffe. Les Anglois ont ete long-temps feuls en poffeflion de la maniere de bien moirer les etoffes, nous n'avions pas ici de machine affez parfaite ; ce n*a ete qu'en 1740 qu'on en a fait venir une de Londres, & elle fut ^tablie k Paris. Etifin quelques annees apres, la ville de Lyon en fit venir une feconde, & fit un fort affez avantageux k un moireur de Londres, pour le determiner ^ venir s'etablir i Lyon •, & depuis ce temps on a pu fabriquer en France des moires auffi belles que celles d'Angleterre. Les unes & les autres font cependant fouvent fujettes h quelques de- f^mts, & quelque bien faite que foit la machine, fon effet n'eft pas tou- jours conftanf, M. de Vaucanfon a cru devoir rechercher les caufes de ces variations , & effayer d'y remedier. La nature de li foie qui compofe I'etoffe , la groffeur ou la fineffe dc fon grain , I'efpece de teinture dont elle eft coloree , introduifent ne- ceffairement des differences dans la force neceffaire pour ecrafer le grain , & il faudroit que la machine put s'y preter, pour que Tetoffe fe trouvat egalement moiree. La maniere de rouler les etoffes fur un rouleau de bois, rend encore I'adtion de la machine tres-inegale fur les differens tours de I'etoffe, & pour peu quelle quitte le rouleau en fe defferrant, les plis le deraiigent Si les ondes fe croilent & deviennent confufes. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 3S1 II faudroit done, pour (5viter ces inconvcniens, que letofFe ne fut m^m^i— im f.\s rouMe, & que la machine piit prendre promptement, & prefqu'i w , volont^, le degre de force iieceffaire pour s'accomniodcr I la reliftancc Ji, '''^"^^■'Q"r• II eft aifi de voir que lefpece dc calandre que nous venons de de- crire , ne pcut , en aucune maniere, op^rer ces etfets ; aufll M. de Vau- canfon rabandonnc-t-il entieremcnt, & voici ce qu'il lui fubftitue. Au-lk'U de faire pafler I'etoffe roulee fous une calandre, il la pile en zic-zac h I'ordinatre, & apres I'avoir mife entre deux toiles, il la fait paffer entre deux rouleaux places .Vpeu-prcs comme ccux d'un laminoir ou d'une preffe d'imprinierie en taille-doucc. II eft d'abord evident que par ce moyen on evite I'inegaUte d'adion de la calandre fur I'etoffe roulee & Ic derangement des pHs, qui n'arrive que trop fouvent, dans la methode ordinaire. Mais H fubliftcroit encore dans cel!e-ci un inconvenient tres-conildera- ble : nous avons dit que la difference de I'efpcce de (oie, celle de la tcin- ture, celle mi-ine de la preparation, celle meme de la texture de Tetofte, peuvent rendre le grain plus ou moins difficile i ecrafer; il peut done arriver, & il arrive, meme prefque neceflairement , que non feulement ditferentes pieces d etoffes , mats encore dift'crentes parties d'une meme piece exigent ditferens degres de preffion de la machine; & c'eft ce qui le peut operer avec des rouleaux fixes & invariablement arretes, qui exer- ceroient toujours une preflion conftante & uniforme-. Pour remedier h cet inconvenient, M. de Vaucanfon introduit une conftrudlion particuliere dans fa machine; I'un de fes deux cylindres, qui eft le fup^rieur, eft form6 de metal tres-dur, & a fes tourillons appuyes fur des collets immobiles fixt^s au batis : le rouleau inferieur, qui eft de bois de gayac, a fes tourillons roulans dans des collets hxis aux extremites de deux leviers, h environ neuf pouces de leur ^oint d'appui, & la queue de chacun de ces leviers eft faille par un tirant de fer qui repond i un fecond levier, au bout duquel eft attache un plateau de balance, qu'on peut charger de difterens poids. La feule pcfanteur des leviers, fans aucun poids dans les plateaux, produit fur le point de conta*5b des deux rou- leaux, un effort de ik milliers ; & un poids de 25 livres ajoute dans chaque plateau , augmente cet effort de 5000 livres : on peut done, avec la plus grande facilitc , augmenter ou diminuer, dans un inftant, la pref^ lion de la machine, la faire preter h toutes les diffcrentes qualites d'ctoffes qu'on peut avoir h moirer; & elle peut fuppleer feule aux deux calandres angloifes qu'on emploie ordinairement h cet effet, & donner un moirage bien plus parfait qu'elles ne peuvent le produire. On juge bien qu'une parcille machine n'a pu s'exdcuter qu'apres un nombre prefqu'infini de tentatives; auffi M. de Vaucanlon ne les a-t-il pas epargn^es; & ce n'eft qu'apres s'ctre inftruit , par ce moyen, fur un trl-s-grand nombre de points, qu'il a fait cxccuter cette machine aux frais du roi , pour la fabriquc de Tours , ou elle a cu un trcs-grand fucccs. j3z ABREG^DESMEMOIRES ■ •— — Cependaiit , nialgre ce fiicccs , M. de Vaiicanfon croit devoir attendrc ,, , qii'une plus loneue experience ait confirme les avantages de cette ma- chine, pour oler conleuler de 1 employer, & pour en donner une dei- Annis ij6q. cription plus detaiUee, & accompagnee de planches. Ceux qui font le plus en hit de decider , font ordinairement les plus referves ^ prononcer fur les objets meme qui leur font les plus familiers. ,'■ Sur I'eboulement des Montagnes j ^ fur les moyens de les priyenir. Iiift. Xl n'eft que trop certain que des portions condderables de terrain peii- vent fe detacher, & fe detachent quelquefois des mont.ignes, & caufent, dans leur chiJte , les plus affreux ravages-, des montagnes meme toutes en- tieres peuvent quelquefois s'ecrouler , & nous en avons un exemple dans line montagne tres-elevee & prefqu'adjacente \ celle de Chimborago, la plus elevee de la Cordeliere des Andes. Des evenemens qui peuvent avoir des fuites (1 terribles , meritent bien cu'on faffe tous fes efforts pour les prevenir •, c'efl: audi ce qu'a tente M. Perronet •, & c'eft k rendre compte de fes recherches fur ce point, qu'eft deftine le memoire dont nous allons effayer de donner une idee. Le premier pas \ faire dans une recherche de cette nature, eft de de- couvrir les caufes de ces accidens ■, nous difons les caufes , parce que pluheurs circonftances , foit naturelles , foit artificielles , peuvent les oc- cafionner. Dans le nombre de ces caufes , fe trouvent naturellement les volcans , les tremblemens de terre & les autres phenomenes de cette efpece-, mais ils ne font ni ne doivent faire I'objet des recherches de M. Perronet •, loute la puiffance & toute I'induftrie des hommes , ne peuvent en empe- cher les effets-, & tout ce qu'on peut raifonnablement faire en pareil cas, c'eft decarrer des endroits fufpeds d'y etre fujets, les edifices & les routes publiqucs. Examinons prefentement les autres caufes de ces defaftres aux- quels I'art peut legitimement efperer de s'oppofer. Pour pouvoir proceder avec ordre dans cette recherche , il eft nccef- faire d'etablir quelques principes. Une mafie de terrain eft compofee de terre plus ou moins tenace , de fable, de cailloux & de pkifieurs autres niatieres aflifes communement fur un banc de glaife toujours incline, ou fur un banc de roche qui I'eft quelquefois. Les terrains ainfi fitues devroient naturellement gliffer fur leur bafe in- clinee, ou meme s'ebouler lorfqu'ils ne font pas tenaces, ou foutenus par d'autres terrains-, mais leur pefanteur d'une part, & le glacis qu'ils pren- nent au premier eboulement, leur interdit ce mouvement, & commune- ment une mafle de terre qui a une fois pris cette efpece d'equilibre, refte en repos, s'il n'y furvient queique changement. Ce changement peut venir de plufieurs caufes > un batiment trop lourd, eleve fur un terrain DE L'ACADEMIE ROYAIE DES SCIENCES. 5S5 de cctre efpece, pent rompre fon equilibre &: le faire glifl'cr fur fa bafe ; — — »mmm line fouille faite an pied , & qui emporteroit line partie du glacis , feroit j.-^ , encore capable de prodiiire le mcme efFet, h moins que la liaifon de la ^^haniquf. terra ne le retlnt. On doi: done bien examiner la nature du terrain qu'on Annie 1160. iz propofe de charger d'un grand edifice, ou au pied duquel on fe pro- pofe de fouiller , pour voir (i on n'a rien \ craindre de ces operations. Puilque Tadlierence des particules de la terrc les unes aux autres aug- mente la difficulte quelle a de glifler ou de s'dbouler, I'eau qui pourroit s'y inllnuer ne manquera pas de la diminuer; premierement, en dimi- nuant I'adheiion mutuelle des parties du terrain & les rapprochant de I'etat de fluiditc; & en fecond lieu, lorlqu'en humedtant le banc de glaife ou de roche incline, fur lequel la malfe de terrc irilifte , elle lui donne une bien phis grande facilitd de couler defliis & d'y gtilfer -, & M. Perronet rapporte plulieurs exemples de ces accidens, qui ont ceflc des qu'on a ditourni les eaux qui les caufoient. Ce cas arrive quelquefois, niais il n'eft pas le plus ordinaire; il en eft un autre qui fe prefente bien plus frequerament, & qui exige des inge- nieurs & des architedles ['attention la plus fcrupuleufe & le coup d'oeil le plus exadl & le plus fur. On a tous les jours des terraflcs ou des chauffees \ conftruire , des efcarpemens \ faire, & des coupures profondcs \ pratiquer-, or, les cotes de ces fortes d'ouvrages ne peuvent fe foutenir que lorfqu'ils ont pris un talus plus ou moins grand , felon la nature du terrain dans lequel on opere. II eft done de la plus grande importance que ceux qui font charges de ridiger les projets de ces fortes d'ouvrages, aient des regies conftantes qui puiffent en afTurer la folidite & la duree , fans faire cependant une depenfe inutile , & fans occuper en pure perte des terrains Ibuvent precirux. C'eft \ procurer aux ing^nieurs ces connoiflances fi utiles que M. Per- ronet s'cft fur-tout applique dans ce memoire, dans lequel il conllgne ^ la pofteriti ce que fes rccherches & la longue experience en ce genre , lui ont appris fur cette matiere. Pour s'affurer fi la mafle entiere du terrain ne pent etre fujette \ glifler fur fa bafe , il a fallu reconnoitre d'abord quelle etoit la pente de cette bafe qui pouvoit lui permettre ce mouvemenr. Pour cela , M. Perronet a commence par placer des pierres taillees de diffJrcns poids fur des pieces de bois hmplement drefliies \ la fcie ; elles n'ont commence ^glifler que lorfque ces pieces ont fait, avec I'horizon , un angle de 59 i 40 degres. Si le corps & le plan fur lequel il glifle font polis , une beaucoup moindre inciinailon uiffit-, il commencera \ gliller lorfque le plan fera in- cline a I'horizon de \%^ 16 \ 27'; c'eft ce dernier angle que les experien- ces de feu M. Amontons ont fait nommer X angle des frotumens , & qui a dtc adopte par prefque tous les mechsniciens. 38+ ABREGE DES MEMOIRES — «— — — Mais line obfervation bien eflentielle, eft que cette angle n'eft conftant ., , que lorfqu'il n'eft queftion que de poids peu confiderables, & qu'il dimi- ECHANiQUE. ^^^^ ^ mefure que les maffes augmentent. Voici comment M. Perronet Annie lySg. s'eii eft afllire. II a examine avec foin rinclinaifon qu'on donne aux plans fur leTquels les vaiffeaux portent dans le chantier ou on les conftruit pour etre lances a la men Cette inclinaifon n'eft guere que de lo k 15 ligncs par pied, ce qui donne pour angle raoyen 4i, & de laquelle par confequent nous ayons i prefenter une idee. Les poilFons font extremement voraces, & avalent avec avidite ce qu'ils regardent comme leur proie-, cette propriete a fourni un moyen de s'eni- f)arer d'eux en employant un crochet de fer ou d'acier trcs-pointu, & dent a pointe eft armee d'une barbe-, ce crochet, qu'on nomme hain ou ha- mecon, eft recouvert d'une infede, d'une pate, en un mot, de quelqu'ob- jet'qui puifle attirer le poiffon , & attach^ h une corde qu'on nomme ligne; des que le poiffon a avale I'appat , la pointe de I'hamecon fe pique dans fon palais ou dans fa gorge, & on I'amene ^ bord en tirant doucct ment la ligne. Pour peu qu'on y reflechiffe , on verra aifement que, fuivant les difFe- rentes groffeurs du poiffon , il faut des hains ou hjmecons de grolfeur dif- ferentes •, ceux qui peuvent fervir ^ prendre des ^perlans ou dfs goujons, ne prendroient certainement ni des raies ni des requins ; il faut done en- ., feigner ^ les conftruire de toutes les grandeurs; & c'eft ce que M. du Hamel enfeigne dans les articles 6, 7 & S. Les lignes doivent audi etre propor- tionnees aux hamecons, & clles font I'objet des articles 5 & 4. En vain prefenteroit-on des hamecons au poiffon , s'il n'etoient appat^S ou couverts dc quelque chofe qui puiffe exciter fon avidite •■, 8c pour ren- dre ces appats plus utiles , on doit confulter le godt des differens poiffons qu'on veut attraper : ces appats font la matiere de I'article 5 , dans lequel M. du Hamel difcute la nature, la rarete des differens appats, & les in- conveniens qui peuvent refuiter de leur recherche. Les lignes, une fois appatees, s'emploient de difterentes manieres; quel- quefois on les met au bout d'une perche legere ou d'une canne qu'on tient k la main; & c'eft ce que nous appellons ki pecher a la ligne; quelque- fois ces lignes font attachees k des cordes qu'on enfonce plus ou moins dans I'eau ; quelqucfois elles tiennent ^ des bois ou ^ des paniers charges ' de pierres ; ces affemblages de lignes font ou dormantes ou mobiles & en- trainees par le mouvement des batimcns. Toutes ces difterentes manieres font exaftement dctailiees dans I'ouvragc de M. du Hamel. Plus il y a de poiflons affembles dans un meme lieu , plus on peut efpe- rer de faire une bonne peche, fur- tout fi ce font des poiifons qui fe tien- nent ordinairement prcs du fond; pour les engager ^ fe raffembler, on compofe des appats qui vont au fond de I'cau, & que pour les y attirer, on DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ;?, on fern? d.iiis Ics endroits ou Ton fe propofe de peclu-r ; ccs appats k" nomment appdrs de fond. La difference des poiffons & du fond de la mcr qui fe trouve dans jes ^^'^"^^'*2"^' d — r -'- — '"^' >^"> 'c iiuuvc oans les liffcrens parages , & an voilinage des diff^rentes cotes frequentdes par Ics pecheiirs, introduifent ncccffairement des vari^tes dans leiirs procides; & M. du Haniel n'a pas oublii de detailler tous ces precedes , & ce n eft pas la partie la nioins curieufe de fon ouvrage. Toutes ks operations dont no«s venons de parler, ne peuvcnt s'ex^- cuter fans un grand nombre d'inflnimens qui fe trouvent de nienie foigncu- fcnient dccrits dans cet ouvrage, avec la nianierc de les employer aux dif- fcrens ufagcs auxquels ils font deftines. On voit bien de meme que Ja phipart des pcches dont nous venons de parler, exigent que les pecheurs s'eloignent des cotes plus ou moins, & que par confequent ils emploient differentes efpeces de batiinens, fuivant les differentes cotes ou fe doivent faire les peches. On ne peut imaginer combien de bitimens differens de forme & de grandeurs font employes ^ cet ulage-, M. du Hamel n'a pas neglige cet article important, & non- feulement il decrit tous ces differens bStimens, mais il les reprefente dans des planches foigneufement gravees , de meme que tous les hamecons, les outils neceffair'-s a leur conllrudion , les appats; en un mot, il'n'a rien neglige pour rendre cet ouvrage intereffant, & pour mcttre fon ledeur au fait de tous les objets qu'il y a traites •, & la maniere dont cefte premiere fedion a etc executee eft bien propre ^ faire delirer de voir bientotparoi- trc la feconde , qui doit comprendre la peche au filet. Ann/e tySg. Tome XIV. Partie Frangoife. D d d rH ABREGE DES MEMOIRES M E C HA N I Q U E. Annee ijS^. Jlift. MACHINES o u INVENTIONS APPROUVEES PAR L'ACADEMIE En M. D C C. L X I X. VJ N tour, prefentd par le (ieur Pafquier , Suiffe de M. le marquis de Voyer : !e mechanifme de ce Tour , qui tourne toujours du meme fens , par un moyen equivalent i une petite roue au pied, a paru ingeiiieux, &c pouyoir plairc aux amateurs de I'art de tourner. I I. Une methode, propofee & executee par le (ieur Montulay, ^ I'ufage des graveurs en blafon , & qui conlifle ^ compofer une grande planche de cuivre, de pluheurs planches plus petltes dont on peut changer ^ volonte les difpofitions, & qu'il fait affujettir d'une maniere folide, limple & in- g^nieufe. Quoique I'objet dont le lleur Montulay s'eft occupe , ne foit pa» d'une utilite fort etendue, ccpendant comme il intereffe I'art de la gra- vure , & quelle peut en faire des applications heureufes , il a paru ali'ez intereflant pour meriter d'etre public. III. Une montre ^ trois parties, prefentee par le (Teur Tofembach , horlo- ger : on fait que les montres de cctte efpece ont la double propriete de fonner I'heure & de la rep^ter i volonte ; les premiers inventeurs n'avoient prefque fait que combiner enfeinble les pieces qui appartenoient fepare- ment ^ la repetition & \ la fonnerie-, mais cette grande complication ctant vicieufe , plulieurs habiles horlogers ont cherche ^ rendre la machine plus /imple & les cfFets plus furs. Le lieur Tofembach a rencheri fur ce qui a ete fait, & la montre qu'il a prefentee n'a en tout que vingt-fix pieces au- lieu de quarante-quatre'qu'ont les montres k trois parties ordinaires, & de trente-lix qu'ont les finiples montres h repetition. Cette montre a paru executee d'une maniere firaple & facile, & la conftrudion en a etc trou- vee ingeuieufe. DE-i|--ACADEMlE ROYALE DES SCIENCES. 3^5 I V. MicH ANIQUE. Un microfcope, tnventi par le fieur Selva, Opticien, etabli I Venife : ^inn^e trS^. ce microfcope eft purenicnt catoptrique ; Tobjet eft abfolument cache k I'ceil, qui ne voit que ion image rcnvoyee & groffie par un pc-tit miroir de metal d'environ fix lignes dc rayon , enchaffe dans une grolls lentille de cryftal, dont I'unique ufage eft d'dclairer I'objet qui fe trouve h Ton foyef. On a cru que ce microfcope avoit fur les microlcopes dioptriques ordi- naires, I'avantage d'etre plus facile i conftniire, plus clair & plus fimple ; & que cette invention du lieur Selva pouvoit ctre regardce comme inge- liicule & utile. V. Ume maniere de faire changer d'air ^ chaque heure le carillon des grof- fes horloges par I'horloge mcme : les cylindres de ces horloges n'avoient aucun mouvemcnt dans le fens de leur longueur , & on n'avoit d'autres moyens de faire varier les airs , que de changer les chevilles qui prennent les levees des marteaux, 'k la fiveur d'un grand nombre de trous qui font perces dans le cylindre; niais cette operation exigeoit la- main dun mufi- cien ftyle ^ cette operation. M. Courtois , horloger , a propofe d'operer le nieme cftet par le mouvement de I'horloge meme-, pour cela, il rend I'ar- bre du cylindre quarre , & le cylindre qui y eft enarbre pent par ce moyen glifler le long de cet axe ■■, k une des extreniites, eft une dtoile dont il faute une dent i chaque heure, & qui porte, fur la face tournee vers le cylin- dre, un plan incline qui rencontrant une piece attachee au cylindre, le pouife plus ou moins, luivant que la dent de I'etoile qui paffe, prefente une partie plus ou moins elevee du plan incline-, & comme cette etoile avance d'une dent \ chaque heure, le cylindre fait fonner un air different. Ce moyen a paru ingenieux , & on a cru qu'etant execute avec toute la precifion neceifaire , il pourroit etre utile dans les groffes horloges aux- quelles on voudroit adapter des carillons. V I. Une pompe pr^fentie par le fieur Qucntin , maitre Pompier \ Rouen ; cette pompe a deux tuyaux d'afpiration qui s'ouvrcnt dans le corps de pom- pe, I'un au-deffus, I'autre au-dellous de la courfe du pilton-, if en refulte que le pifton alpire ?c foule en meme temps, folt en montant , foit en defcendant, & que le jet eft continu : cette continuite meme eft favorifiie par un rcfervoir d'air qui fe comprime & agit par fon reffort. Cette pompe eft cffentiellcmcnt femblable \ celle que feu M. de la Hire , fiis, avoit don- nee en 1716 , & que I'academie a publiec dans fon volume dc la meme annee. ( Voye^ Mc'm. de Iji6 , p. ^zx.) i I'addition pres du refervoir d'air qui en alTure I'cftet 5 mais cette addition , une conftruclion plus limple , Ddd ij 5<)(f ABREGfi DES MEMOIRE* ^ ■ — i» plulieurs chofes de detail , & la perfedtton que le Ikur Quentin* luLfe dans ,, , I'cxtJcudon, ont paru nieriter i'approbation de I'acaderaie. Mechanique. '■ '^' Jnjiie iJ^S' V I L Un telefcope gregorien, deftine aux obfervations aftronomiques , prc- fent^ par le fieiir Navarre : ce telelcope a 5 1 ponces de long , & eft monte comme les telefcopes ordinaires de cette efpece ; mais la nionture , aii-lieii de n'avoir que trois pieds fur lefquels elLe s'appuie , en a quatre, & porte de plus un fil \ plomb , poivr mettre de niveau le plan fur lequel cet inf- trunient fe meat. Le fieur Navarre a adapts au demi-cercle vertical qui le trouve toujours dans ces montures, une divillon de Nonius ^ pour mefu- rer exadlement Tangle que le telefcope fait.avec I'horizon : on peut pla- cer les filets dans le telefcope, aved facilite & precilion, de meme que les oculaires qui doivcnt avoir ces memes fils k leur foyer, & le micronietre eft conftruit de facon qu'il n'y a aucuiie perte de temps dans fon mouve- ment. Cette conftruftion a paru niarquer beaucoup d'adreffe & d'intelli- geiice dans I'auteur, & devoir ctre trcs-commode dans I'ulage qu'on en peut faire pour les obfervations. VIII. Une maniere de donner \ I'acier utr poU aufli vif & audi beau que ce- Uii d'Angleterre, prefentee par le fieur Perret, maitre coutelier de Paris, avec un miroir d'acier, fait par cette methode, & dont le poli ne laiffe rien ^ defirer : la potce qu'il eniploie & qu'il a donnee au public, dans un ouvrage qu'il a fait imprimer, eft un compofe d'acier & de foufre calcine lentement , pulverif^ & enfuite paffe i I'eau pour en avoir tous les diffe- rens degres de fineffe. II a paru, par les Ouvrages que le fieur Perret a pre- fent^s , & par les effais qu'il a faits devant les commiffaires de I'academie , qu'il ne laiffoit rien a defirer fur cet article, & que fon poli pouvoit allet de pair avec celui d'Angleterre. r X. Une noHvelle methode ponr corriger I'adion du chaud & du froid fur ]e pendule des groffes horloges , prefentde par le fieur le Roi , I'aine ; ce moyen eft extremement fimple; il fait paffer les relforts de fulpenfion da pendule dans une forte fourchette de cuivre, du deffous de laquelle fe compte fes ofcillations, & la longueur du pendule-, cette fourchette eft pla- cee iur rextremite d'un levier de la premiere efpece , dont I'autre extre- mite eft conduite par une branchc de cuivre, fixee ^ la cage du mouve- inent-, des que cette branche s'alonge par la chaleur, elle eleve I'extremiti du levier ^ laquelle die tient, & fait par conlequent bailltr I'antre, \ la- quelle tient la fourchette, ce qui diniinue la longueur du pendule que la thalrur avoit augmcntce, 5c cette diminution peut cire ameuee ^ fa Jufts DE UACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 5^7 valeur, en faifant varier le point d'appiii du levi^r. Cctte mahocle a p.ini — ^—n — — llmple, commode & utile, & meme la feule qui puiffe rcuflir dans de gtof- »* : , 5"***^ fes horloges & avec de longs pcndulcs, oil il eft ccpendant iiicciraire de C!!a., n^ v. r.. corriger les eftets de la dilatation des metaiix & dc la grandeur des arcs Ann^c Z7<%. qui varient fuivant le temps. X. Une nouvelle divifion du manche des inftrumens ^ cordes, propoftc par M. Goflet, fadteur d'inftrumens, ^ Rheims. On fait que plufieurs inf- trumens, tcls que la viole 9c toutes fes parties, le quinton, la guitare, la niendole, la mendoline & fouvent la contre-bafle de violon,ont leur man- che entourre de cordes qu'on nomme touches , & qui fervoicnt, ^ ce que Ton croyoit, ^ partager les cordes en demi-tons lorfqu'on appuyoit Ic doigt liir elles ; mais on n'avoit pas penfe que ces touches faifoient tous les demi- ^ons egaux fur toutes les cordes, tandis qu'il y en a de majeurs & de mi- neurs, & que cet inconvenient introduiloit necelLirement du faux dans •I'lnflrument i le lieur GofTet s'en apper^ut en remontant une guitare, & ayant confulte M. Turpin, organifte de Rheims, celui-ci lui en eut bien- tot fait voir la raifon, & ils y remedierent en fubftituant aux touches des cfpeces de lillets bas, colles lur le mancbe, plus haut ou plus bas fous cha- que corde, felon que le demi-ton fera majcur ou mineur. ce que ne pcu- vent faire les touches qui coupent toutes les cordes h. la meme hauteur: cette maniere de divifer les manches des inftrumens ^ cordes , a paru pre- ferable ^ celle qui etoit en ufage , & digne de I'attention du puolic ma- licien. X L Une maniere, propolee par M. le Bnin, de donner par une preparation particiiliere , plus de blancheur au papier, de le rcndre plus liffe & plus uni, & de procurer an papier commun une grande partie des proprietes du papier connu fous le nom de papier d'Hollande ; les echantillons qu'il a prefentcs & les epreuves auxquelles I'acadcmie I'a foumife, fur-tout celle de blanchir & preparer la moitie d'une vieille fcuille d'inipredion com- iBUne, fans toucher h I'autre moitie, ont fait voir evidcmment que cette preparation reudit fur le papier imprime & meme fur les eftampes, fans alterer ni I'impreirion ni la gravure , qu'elles acquierent meme plus d ecl.-rt par la blancheur que cette preparation donne au papier, celui qui I'a eprouvc n'cft pas plus penetrable h I'encre qu'il ne I'etoit auparavant , peutetre feir- lemcnt s'y etend-elle un peu davantage que fur le vrai papier d'Hollande, ce qui rend les traits un peu moins bien termines : cette preparation a para mcriter d'etre approuvee, moins comme une decouverte nouvelle, puif- qu'on la pratique depuis long-temps en Hollande, que comme un objet utile k la focicte & au commerce national. 55S ABREGit DES MEMOIRES MicHANlQU£. Annii mo. Sur la filature des Soies. n Hift. v^ N eft depuis quelqnes annees extremement eclaire fur la theorie abf- traite & piirement geometrique de !a mechaniqiie. La geometric a di6le des loix h cette partie de la kience des machines , & ceiix qui s'y ap- Jsliqucnt out des regies certaines qui ne leur laiffent , pour ainfi dire, que e merite de les appliquer plus ou moins facilement au calcul. Mais pour peu qu'on y faile d'attention , on verra aifeiiient que ces machines , prifes dans I'etat purement ideal, ne font pas celles qui peuvent fubvenir aux befoins de I'humanite , & qu'il doit y avoir une autre efpece de mecha- nique qui touche de plus pres aux machines ufuelles. L'immenfe varietc des circonftances phyliques qui atfe(ftent ces dernicres , la multitude & la precilion des operations qu'elles doivent executer , fouvent fans exiger au- cune attention de la part de ceux qui s'en fervent, n'a pas Jufqu'ici per- mis de rappeller cette partie de la mechanique ^ I'application commode des regies generales-, & le mechanicien, proprement dit, eft oblige de tirer de fon propre fonds des reflburces dans une infinite de circonftances. Cette efpece de genie de refTources , les connoifTances qu'il exige , & le travail prefque continuel iieceffaire pour en faire I'application , font autant de caufes de la rarete des grands mechaniciens, & autant de raifons de leur d^- cerner les honneurs dus aux bienfaiteurs de I'humanite, fur-tout quand leurs travaux influent fur le commerce national. L'ouvrage de M. de Vaucanfon, fur la filature des foies, dont nous avons \ rendre compte, eft precifement dans ce dernier cas. Le cocon d'un ver ^ foie n'eft, ^ proprement parler, qu'un peloton de fil, file par cct infefte-, & tirer la foie des cocons, eft devider ce pelo- ton. Comme cette foie eft legerement gommee par I'animal , on met les cocons dans une baffine remplie d'eau chaude ■■, & aprcs les avoir fufHfam- ment agites , pour en detacher ce qui peut y refter de bourre , on ramaHe, avec quelqucs brins de bruyeres, les bouts des fils qui flottent, pour ed reunir plulieurs enfemble, & en former des brins plus ou moins fortsv fuivant les difliirens ufages auxquels on la deftine. Cette operation s'ap- pcUe le tirage des foies , & c'eft d'elle que depend en grande partie la beautc de la foie, par I'attention qu'on doit avoir \ bien purger les cocons de leur bourre , & h ne tirer enlemble que ceux qui peuvent donner de la foie de meme qualite. Ces alfemblages de fils de foie fimples font paffes , deux "k deux, par les yeux des deux branches d'une meme fourchette, attachee an tour, qui [lorte le devidoir ou il fe vont rendre. Anciennement, on ne faifoit que es croifer fur deux rouleaux cylindriques mobiles, puis ils palToient dans les yeux de deux pieces mobiles , qui les dirigeoient & les obligeoicnt d'etaler lecheveau fur le devidoir. Les Piemontois qui s'ctoient it is en pofiellion de travailler mieux la foie qu'aucune nation , avoient ajouts \ DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 599 cette pratique celle de tordre cnfcmble Ics deux afl'embl.iges de fils, afin — ^— «— — que par ce moyen le fil, oblige de coaler dans Ics helices que formoitiyi . ce tors, conlervat nioiiis de bourre, fe fcchat en s'exprimant , & fe rendit ^■'^^"'^^"2 t' • plus uni & plus brillant. Mais le nonibre de tours qu'on faifoit faire aux Ann^e ijjr. deux fils ne pouvoit pas trop fe nieCiirer, parce qu'il netoit execute que par Ics tireufes qui rouloient Ics deux briris cntre leurs dili^ts, devenus prefque infenlibles par I'iiabitude de Ics plonger dans I'eau bUiilljntc : & li les tours fe trouvoicnt en trop grand nombre, il falloit caifcr Ics fils pour les detordre •, aulli , pour separgner cette peine , elles donnoient toujours moins de tours qu'il n'etoit neccffaire. D'ailleurs, fur les t^urs, meine Piemontois, le mouvement du va & vient, cette piece qui con- duit le fil fur difFerens endroits du devidoir, n'etoit pas aifcz bien exe- cute-, 8c ceux qui avoicnt voulu corrigcr en France ce dcffaut, y en avoient introduit de plus conhderables. C'eft k tous ces inconveniens que M. de Vaucanfon a cntrepris de remedier, dans le tour qu'il a filt fabriqucr, & qui eft en ufage depuis phis de douze annees h h manufacture dc foie d'Aubenas, ou Ton fait, par fon moyen , des foies auffi belles & audi pro- pres au moins k etre mifes en organlin , que celk-s du Picmont ; il y a niemc apparence qu'clles les furpaffent, puifquelles fe vendent plus cher. Pour faire difparoitre I'inconvenient qui nait de la niauvaife maniere ds faire la croifure & le roulement des fils, il met entre les filieres de la four- chette dont nous avons parle , & les yeux des guides du va & vient ^ m cercle de cuivre affujetti entre quatre rouleaux qui lui permettent de tour- ner fur lui-meme, au moyen d'une corde fans fin, qui repond h une ma- nivelle-, ce cercle eft vide en dedans, & porte aux deux extremites d'un de fes diametres , deux_ crochets de verre dans lefquels on paffe les fils , aprcs les avoir fait croifer au fortir des yeux de la fourchette , & on les croife encore avant que de les faire palTer dans ceux des guides du va & vient ; il refulte de cette operation, que la tireufe, en faifant aller la ma- nivelle qu'elle a fous fa main , fera tourner le cercle de cuivre & donnera i la foie autant de tours qu'elle voudra-, & C\ elle s'appercoit qu'elle en ait donn^ plus ou moins qu'elle ne le doit, elle peut , fins interrompre le travail, & fans cafler le fil , en ajouter ou en oter : il refulte encore ttn avantage de cette conftrudion , cell que les tours qu'on donne aux fils de foie, erant partagcs en deux endroits differens, permettent aux fils de gliffer bien plus ailement que s'ils ctoient reunis, & les expofent bien moins i fe caller. ^ Le mouvement du va & vient y qui diftribue les fils fur le devidoir, n'eft pas moins effentiel ^ cette operation ; les fils de foie malgre les croi- fures, arrivent toujours un peu mouilles fur le devidoir, & il eft n^ceffaire qu'ils ne fe collent par les uns aux autres , ce qui rendrolt la foie difficile ^ devider & toute ecorchie-, & il en refulteroit un dcchct de 10 i iz pour cent-, il faut done que le mouvement des guides du va & vient, foit tel que le fil de foie qui arrive , ne rencontre /amais celui qui vient d'ar- rivcr, mais toujours ceux qui ont eu le temps de fe fechcr j pour ccia il faut que ce mouvement foit relatif ^ celui du devidoir. 4CO- ABREG^ DES MEMOIRES ■■umaii— — . Poiir etablir ce rapport d'une fjcon conftante, les Pismontois fe fer- . . , voieiit d'lm eiigrenage de quatre, roiies deiitees , dont la premiere etoit CH NiQUE. ^|^^j.[jj.^g furl'axe du devidoir, mais cct engrenage etoit fi pen folide, que Annce lyjo. '? reglement Pieincntois obligeoit ^ avoir, pour chaque tour, una double garniture dcs pieces qui compofent ce mouvement, parce qu'il etoit rare qu'elles fe confervaffent en ctat pendant toute la duree d'un tirage. Les filcurs Francois n'avoient jjmais vouki adopter cette mechanique, & ils regloicnt le mouvement des guides par le moyen d'une corde fans fin, ■paffie Jur deux poulies de dillcrens diametres, dont I'une tenoit \ I'arbre du devidoir : cette conftrudlion etoit limple; elle evitoit les inconveniens dcs cngrenages , mais elle en avoic elle-mcme de plus confiderables, I'ine- gnle tcnHon de la corde, qui lui permettoit quelquefois de gliller, la va- riation du diame^re de la poulie, des guides que la vapeur de la bafTine faifoit rcnfler pendant le jour, & qui diminuoit la nuit, jetoient une ine- galite dans le mouvement des guides, qui derangeoit abfolument toute To- peration. M. de Vaucanfon avoit bien pare quelques-uns de ces inconve- niens; mais I'ex'perience I'obligea cnlin de revenir aux engrenagesj il les a perfeiflionnes, il les a eloignes de la vapeur de la baffine, & par ce moyen, il eft parvenu k les rendre durables, & \ etablir cette proportion conftante entre le mouvement des guides & celui du devidoir, qui efl li neceffaire ^ la perfed:ion de 1 echeveau ; & le refultat de ce travail a tii une telle diminution dans Je dechet, que la foie bien tiree ne perd pas une once fur cent livres. Les tours i double croifade, tels que nous venons de decrire, ont ete ctablis ^ Aubenas, an nombre de cent-, & le fucccs qu'ils ont eu , de- puis environ douze ans qu'ils font etablis, a engage M. de Vaucanlon^ en publier la dcfcription ■, une (age defiance Ta-voit retenu jufques 1^ : mais quelque perfedion que les tours de M. de Vaucanfon puitient donner ^ la foie, la nettete & I'egalite dans le fil dependent de trois manutentions anterieures : i°. de tirer chaque qualite de cocon feparement; i°. de les bien purger dans la baffine , & toujours en petite quantite ^ la fois ; 3°. enfin, de ne jamais jetter cju'un brin i la fois, pour entretenir I'cgaliti de groffeur dans le fil de foie. Malheureufement , ceux qui font le tirage en partlculier, & pour leur compre, ont peu d'interet ^ rendre la foie parfaite-, bonne ou mauvaile, on parvient avec de petites fineffes , ^ la vendre h- peu-ptcs un prix c'gal. On ne doit done attendre de la foie propre ^ organfiner , pour faire des chaincs d'etoffes, que des grandcs manufadures , ou le tirage de la foie fe fait avec les precautions necefiaires, & ou ceux qui tirent, trouvent leur interet \ bien tirer. Que'ques ecrivains ont regarde ce t-Jrage fait dans les grandes manufac- tures, comme funefte ^ I'induftrie des campagnes", cependant en nous met- tant ^ portee de nous paffer de I'etranger , les manufadures doivent aug- menter cette branche de notre commerce , & par confequent la culture des vers & dcs miiriers. Si une nation exiftoit ilolce de toutes les autres, les operations qui exigent le plus de mains, devroient etre prefaces •, mais lorlqu'oii DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. +oj lorfqu'on a des voilins avec lefquels on pent cere en concurrence , il fetn- — m^^m^w^mi ble que la perfcftion des travaux doive remporter fur toute autre confide- ^ ration. II faut en France, ou tirer de Picmont la foie des chaines, ou ^ta-"^"^' blir de grandes manufaftures fcniblables ^ celle d'Aubenas, dont les foies Annie nio. ont deja dans le commerce, un prix fuperieur \ celui des foies de Piemont, ou nous pafler de belles etoffes : quel parti prendre ? Nous ne nous per- mettroiis furement pas de prendre le dernier. Tel eft letat de la queftion entre M. de Vaucanfon, & les ecrivains qu'il combat, & il ne nous ap- partient nullement de prononcer entre eux. SUR LA DESCRIPTION r>-ES Arts et Metiers. T JL-lES arts qui ont 6te publies en 1770, font au norabre de quatrc. Hift. > Le premier eft Yart du facleur d'orgues , feconde & troilieme parties , par Don Bedos de Celles , religielix benedidlin de la . congregation dc Saint-Maur, correfpondant de I'academie. 11 avoit donne, dans la pre- miere partie, I'immenfe detail des parties qui compofent un grand orgue ; mais il n'avoit pas enfeignc la maniere de les fabriquer, ni les dilFerens moyens d'accelerer ce travail , & de le porter ^ fa perfe(h:ion : c'eft I'ob- jet de la feconde partie , ou la conftruftion de chaque piece , & fa liaifon avec les auttes, font traitees dans le plus grand detail. La troilieme eft deftinee \ enfeigner la maniere de dreffer les devis des orgues plus ou moins grands , qu'on peut fe propofer de conftruire ; celle de vciller \ lexecution de ces projets-, celle de recevoir les orgues quand ils font exe- cutes. D. Bedos y enfeigne encore le melange des jeux de cet inftru- ment, en faveur de ceux qui voudroient toucher de I'orgue , & qui ne feroient pas au fait de cette partie •, & enfin il y fournit ^ ceux qui ne font pas i portee d'avoir aifement des fadleurs, les moyens de conferver leur orgue , & d'y faire eux-memes les petites reparations auxquelles cet inftrument eft plus fujet qu'aucun autre. Le fecond eft I'jrt du menuijier, feconde partie, par le (ieur Rouboi fils, maitre menuifier. L'auteur avoit donne, dans la premiere, le manuel dc cet art, la defcription des outils, & celle des differens alfemblages •, dans celJe-ci il met en ufage ces premieres connoilTances, & en fait I'ap- plication ^ la mcnuiferie mobile , telle que les portes , les fenetres , les volets, &c. ^ quoi il joint un traite coraplet de I'art du trait. Cet art eft beaucoup plus favant qu'on ne fc I'imagir.e, & bien des ouvricrs le pra- tiquent lans en connoitre les principes, qui deviennent cependant dune necedite ablolue dans les cas extraordinaires. Enfin il met fon ledeur 4 portee de connoitre tout ce qui peut ctrc oeceilaire h. la f?rmcture & i Touie XIV. Fartie Franfoije. Ecc 40Z A B R E G E D E S M E M O 1 R E S — — — iMUMumm 1^ decoration des appartemens , & en etat de le faire execiiter lui-memei -.. , fans pouvoir etre trompe ni fur la bonte de I'ouvraee , ni fur la depenl'e Mechanique. .-J . >^ ° r ^ qua exige. Ann^e I'jjo, Le troilieme eft \art de I'indigotier, par M. de Beauvais-Rafeau. Cet art prefque abfolument inconnu en France, ne pouvoit etre decrit que par quelqu'mi qui, comme I'auteur , Teiit vu pratiquer lui-mcme, & y eiit porte des yeux accoutumes i obferver. II decrit les difi'erentes efpe- ces de la plante dont on tire cette matiere , fa culture , la maniere de la r^colter, d'en faire pourrir les feuilles, de battre la teinture qu'elles donnent, pour en feparer la fecule colorante-, & enfin de recueillir cette fecule, & de la mettre en etat d'etre vendue. Toutes ces operations y font detailMes avec foin, & on fuivra avec plaifir la defcrJption nette & precife que I'auteur en donne. Le quatrieme & dernier art eft celui da brodeur, par M. de Saint- Aubin, deffinateur du Roi. Ceux qui n'ont qu'une connoiffance fuperfi- cielle de cet art, feront etonnes, en lifant cette defcription, de voir com- bien il exige de connoiffances & d'adreffe. L'auteur en donne une cotirte hiftoire , decrit les differens genres de broderie qui font en ufage , les differens points , les differentes etoffes & les difterentes matiercs qu'on y emploie ■, & le tout eft accompagne de plufieurs deffins executes par M. de Saint- Aubin , qui ne font pas un mediorre orueraent pour cet ouvrage , dejk intereffant par Uii-meme. » DE L'ACADEMIE RGYALE DES SCIENCES. 403 MACHINES o u INVENTIONS APPROUViES PAR L'ACADtlMIJJ En M. D C C. L X X. MiCHANI Q VI. Annie tyro. u. N thermometre divife en qiutre panies, prcrent(5 par M. I'abbe Sou- ni/t. mille , correfpond.int de racadcmie. Tout le monde phyhcien connoit les thermometres de M. de Reaumur, & on fait que c'eft ^ la propriete qu'ils ont d'etre compsrables, qu'on eft redevable d'un trcs-graiid nonibre d'ob- fervations intereflantes ; inais li Yon veut avoir les parties des degres avec quelque pricifion , ils doivent etre extremerHent grands , & par confc- quent tres-diffi riles i tranfporter •, & (1 on les rdduit i un moindre vo- lume , la pettteffe de leurs degres , empechera dc diftinguer leurs divi- (lons, M, I'abbe Soumilie a remidie i ce defaut, en coupant, pour ainli dire, ce grand thermometre en qiiatre parties. Dans la premiere diviUon, le terme de la glace eft place tout au haut du tube ; & i mefure que le froid augmente, la liqueur defcend, & marque les degres de condenfa- tion Jufqul 10 degres, terme fuffifant pour ce climat, & qu'il feroit pof- Cble de porter plus loin s'il etoit necelTaire •, & lorfque le temps devient plus chaud que le terme de la glace, I'efprit de vin qui monte eft recti dans une boule qui termine le tuyau par en-haut, & cette partie de ther- mometre devient inutile; la feconde commence ou celle-ci finit, c'eft-i- dire, que le terme de la glace eft tout prcs de la boule infericure, & ^ mefure que la chaleur augmente, I'efprit de vin s'eleve jufqu'i 10 degrees, aprcs quoi il entre dans la boule fuperieure, & cette feconde partie de- meure inutile •, la trolfiemc commence au ice- dcgre & va Jufqu'au 40^- ; & enfin la quatrieme, au 6ie. : on voit aifement qu'un cinquieme le por- teroit jufqu'i 80, &c. C'eft par cet ingenicux moyen, que M. I'abbe Sou- milie eft parvenu ^ fe procurer en plulieurs parties aifement tranfporta- bles, un thermometre dont les degres ont un pouce de long, & peuvcnt €tre aifement divifes en douziemes d'une ligne, fur lefquels il fera encore Dofllble d'eftimer de plus petites parties. Ce nioyen de faire appercevoir }ufqu'aux moindrcs changeraens de la temperature de I'air, fans trop au- gmcnter la grandeur du tliermometre , a paru ingdnieux & fort fiir. Eee ij 404 ABKE C t DES MEMOIRES MtCIIANIQUE. * I' Annie 1770. Une machine propre \ faire perir les mulots dans leurs troiis, par la vapeur dii foiifre , prefentee par M. Gaffelin •, elle confifte en line boite de tole, garnie de deux tuyaiix de meme metal, dont Tun repond \ un fouftlet, & I'aiitre fert de bufe , pour chaffer I'air dans les trous des mulots ; on allume dans la boite dont nous venons de parler, quelques morceaux de vieux linge & quelques eclats de bois; des que ceux-ci font bien en feu, on jette deffus du foufre concafle, on ferme la boite, & introdui- fant le canon de la machine dans un des trous, on fait agit le foufflet : il eft evident que par ce' moyen , la fumee du drapeau & du foufre eft chaf- fee dans les trous des mulots •, on la voit fortir par les ouvertures qui y communiquent , & qu'on a foin de fermer; & par ce moyen, on force ces animaux deftrudteurs ^ recevoir la vapeur du foufre qui les tue infail- liblement. Cette machine a tres-bien rcufli dans les epreuves que le gou- vernement en a fait faire; elle a paru ingenieufc, portative & tres-propre ^ remplir le but que I'auteur s'etoit propof6. I I I. Une canne gnomoniqiie , qui fert \ indiquer I'heiire par les hauteurs du foleil, prefentee par M. de Caire de la Condamine. La methode de M. de Caire peut fe reduire \ ce probleme : itant donate la longueur de I' ombre du baton a midi , trouver fur le baton les hauteurs qui j d toutes les heures , donneroient la meme longueur d' ombre ; & en cela , elle differe des methodes qui ont etc decrites jufqu'ici ; Tufage en paroit aiifll plus commode, parce que M. de Caire n'eft pas oblige de mekirer la longueur de I'ombre, qui fouvent feroit trop longue & mal terminee, lorfque le foleil eft peu eleve ; la fuperficie cylindrique eft partagee lon- gitudinalement en huit , par huit lignes qui vont d'un bout h I'autre ; I'une, qui eft la plus apparente, marque les longueurs de I'ombre h. midi, de cinq en cinq Jours, pour une latitude donnee : des fept autres lignes, les deux extremes appartiennent aux folftices •, & les cinq autres, aux dif- ferens lignes-, & fur ces demieres, il a marque le nom des heures i cote des difterens points qui donnent h ces heures , la longueur de ces om- bres egales i celle de I'ombre de midi-, I'ufage n'en eft pas plus difficile que la conftrudion -, fur un plan uni & horizontal, on mefurera fur I'om- bre de la canne, une portion egale k la longueur de I'ombre ^,midi, & on en marquera I'extremite ; tenant enfuite la canne perpendiculaire, on promenera le doigt en travers fur la ligne qui repond au ligne oil eft le ibleil, jufqu'^ ce que I'ombre de ce doigt vienne fur I'extremite marquee pour I'ombre mcridienne ; & alors en regardant fur la canne , le doigt in- diquera fur la ligne I'heure cherchee. Cctte ingenieufe conftrudion a paru devoir etre utile & agreable ^ ceux qui feront fixes dans un meme can- DE TACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 40? ton , 8i qui lie le loucieront pas d'avoir I'heurc avec une trcs-grandc; exaditudi.-. J „ MECHAMQUt, Une pendnle prefentie par M. Blefta, horloger, qui eft fufpendiie dans fa boite, de maniere qii'elle peut toujours aller, quoiqu'on I'iiicline meme affez conllderablc-mcnt. Dans Its pendiiles ordinaires , le mouvcment de la pendiile eft attache fixemeiit ^ la boite : dans celle de M. Bicfta , il en eft, pour ainfi dire, indtipendant •, il tourne libremen: autour de deux pivots, places exaftement dans le prolongement de I'axe du rochet; ces deux pivots font portes fur les faces exterieurcs d'une efpece de chaOis, qui rellemble k la cage d'une trcs petite pendule, 8c roulent dans deux pieces fixecs dans I'intericur des platines du mouvement : cette petite cage pprte dans fon interieur la verge avec I'ancre, & k Con extcrieur la fuf- penlion du pendule. D'aprcs ce que nous venons de dire , il eft aifi de voir que li on incline la cage d'un cote ou de I'autre, le mouvcment ds la pendule fe niettra toujours dans la verticale •, & corome elle-meme tourne autour de ce meme point , que la relation de I'ancre & des dents du rochet ne fera pas changee , & que la pendule refte eu echappement , elle continuera d'aller. II faut ajouter encore , que pour ramener avec plus de force la petite cage k fa veritable polition , elle porte un grand cadre de cuivre, dans lequel le mouvement peut aller & venir, & qui a par en bas une epailfeur conliderable , afin d'avoir plus de poids. Cette conftrudion de M. Biefta , pour f.ure qu'une pendule fe trouve toujours en echappement, malgre Ics diveries politions de la cage, a paru neuve & ingenieule, & pouvoir etre utile en bien des occalions. V. Un Cadran ou dqnation mobile, prefente par le meme auteur. Ce ca- dran a deux faces; iur I'une font marques les jours de I'annec, & fur I'autre eft le cadran garni de deux aiguilles, I'une de cuivre & I'autre d'acier-, I'aiguille de cuivre eft fixee h une aiguille qui eft fur la face pof- terieure du cadran, & qui fert ^ indiquer les jours de I'annee -, I'une ne peut pas fe mouvoir, fans faire mouvoir I'autre-, alors h Ton met la mon- tre fur I'heure vraie un certain Jour de I'annee, il faut placer I'aiguille pofterieure fur ce jour, & I'aiguille d'acier fur midi du cadran, en faifant alors gliffer raigiiille pofterieure (ur les Jours fuivans; I'aiguille d'acier in- diquera.l'equation du temps, & fera par confequent connoitre combier> la montre ou la pendule qu'on examine, a dii avanccr ou retarder fur le temps vrai. Ce cadran ne donne done que ce qu'on peut obtcnir par le calcul aftronomique, Sc qu'on trouve meme tout cilrule dans la connoif- fance des temps -, mais cette maniere de trouver I'equation , la rend fen- (ible aux yeux , & I'academie a cru qu'elle pourroit, par cette raifon , etre agreable au public. '/inn^e 1770. Mechanique 40(J A B R E G E D E S M E M O I R E S V I. Annie 1770. jjgj f^^ps Je feutre, prefentes par le fieiir Gerard, tailleiir de corps ^ Rheims. Ces corps font faits d'un feutre prepare , tres-fort , & cepen- dant foiipie, qu'on pent revetir dune etoffe plus ou moins epaiffe , fui- vant la faifon. Le lieur Gerard n'y ajoute point de baleine. Ce feutre comprime mollement & avec uniformite les parties dii corps qu'il recou- vre : on a cru que ces corps feroient exempts de la plupart deS incon- veniens reprochss li fouvent aux corps baleines , & qu'ils pouvoicnt ctre approuves comma beaucoup moins dangereux que ces derniers. VII. Un dais, execute uniqUement en fer, par le fieur Gerard, ferrurier de Paris , charge de Tentreprife des ferrures du nouveau batiment de Saintc- Genevieve. Ce dais , entierement de fer, eft compofe de quatre colonnes, du haut defquelles partent des ornemens qui, en fe reuniffant, forment le dcffus du dais', ce deffus eft: furmonte d'une gloire , & chaque colonne I'eft d'un ange ^ genoux regardant la gloire : le tout a feize pieds de hauteur. Du piedeftal de ces colonnes , partent des ornemens en guirlandes de rofes qui s'uniffent , & portent au milieu , fur des nuages , le livre fcelli de I'apocalypfe & I'agneau. Les colonnes font compofees de palmes , au- tour defquelles s'entrelacent des pampres charges de railins. Tout cet af- fcmbla-''e eft: compofe de pieces travaillees feparement au marteau, polies & affujeties par des vis entr'ellet,& ^ un batis de fer qu'elles recouvrentj & le tout eft U leger , que le dais tout monte pefe i peine quatre cents livres. L'academie a regarde cet ouvrage comme un chef-d'csuvre dans I'art de la ferrurerie , & comme une preuve de la poffibilite d'employer le fer en ornemens , & de lui faire imiter parfaitement les plus legers feuillages. C'eft, ft Ton peut s'exprimer ainfi , une efpece d'extenfion de I'art de la ferrurerie , & c'eft i ce litre que l'academie lui a donne place dans fon hiftoire. VIII. Uke machine, propofee par le P. Bertier, de I'oratoire, pour elevejr de I'eau par la dspreffion ou elevation du mercure , prodnite par le balan- cement d'une pendule. II avoit deji propofe cette meme machine en 1755 ; rnais l'academie, en I'approuvant, I'avoit regardie comme d'une execution extreraement difficile : I'expWence eft venue au fecours de la thcorie du P. Bertier i la machine a hi executee avec le plus grand fucccs, & plu- fieurs perfonnes Ton: vu fairc tres-bieu fon effet, chez feu M. Paffement. DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. 407 M E C H A N » Q U |. Une maniere propofce par le memc auteur, pour monter les globes Anmfe 1770. de nuniere qu'ils puillent fcrvir de cadran. E!le conlifte i mettre an globe un demi meri jien mobile far Ls poles, & qui foit refendu dans i'inter- valle entre les tropiciucs-, dans cette fente coulcni un curfeur charge d'line lentille. Eii placant le globe h \i liaiiteur du pole de I'endroit oii Ton obfervc, &: roricntaiit , le demi-mertdien itant tourn^ au foleil , & le currcur place felon la declinaifon da foleil ; dcs que I'image de cet aftre , produite par la lentille , tombera prccifcment fur le milieu de lepaifleur du demi-meridien , cclui-ci fera le cercle horaire aduel , & marquera , fur lequateur, I'lieure qu'il eft & que Ton delire_ de favoir. On a cru que cet ufagc du globe pourroit etre agreable h plulleurs perfonnes. Un fauteuil roulant, h. I'ufige des malades, gens ages ou convalefcens, prefente par le fieur Ferry, fcrrurier. La mechanique de ce fauteuil a trois objets-, 1°. de faire marcher le fauteuil ^ la volonts de celui qui y eft adis-, i°. de baiffer le dodier fous tel angle qu'on jugcra i propos, jufqu'^ la lltuation prefque horizont.lei }°. de prolonger le liege allez en avant pour foutenir les Jambes du ma- lade , qui dans ce cas pourroit faire un lit de fon fauteuil ; le premier de ces irois objets eft rempli par deux manivelles, que le malade peut mou- voir lui-meme, & qui, i I'aide d'une bafcule, coramuniquent le mouvc- ment ^ un engrenage qui fait mouvoir deux roues placees fous les pieds de derriere du fauteuil 5 le fecond objet eft rempli par un arc de cercle dente , qui eft mene par une mechanique femblable ^ celle que nous ve- nons de decrire; le troifieme enfin, qui eft le prolongement du liege, fs fait par le moyen d'un double chaffis de fer , qui, par le mouvcment que lui imprime une autre manivclle, fort de dcflous le fauteuil : le mecha- nifnie par lequel I'un de ces chaffis s'eleve au niveau du liege , pour fup- porter les jambes du malade, eft la partie de la machine la plus ingenieafe : lorfque le double chaffis eft forti, pour la plus grande partie, de defibus le fiege , le chaffis faperieur fe trouve arrcte par un frein , • tandis que I'autre continue fon mouvement : cette circonftance oblige des efpeces de chevalets qui fe trouvent entre les deux chaffis, de selever, de (one qui I'extremite du mouvement le chaffis fuperieur fe trouve ccarte de I'infcricur de route la hauteur des chevalets, ce qui le met au niveau du fiege. _ Quoique cette mechanique ait beaucoup de rapport avec celle qui eft employee i I'opera, pour mettre le parterre au niveau du theatre, on doit cependant (avoir gr« au lieur Ferry d'en avoir fait une application inge- nieufe & utile ; fon fauteuil a paru bien remplir I'objet qu'il avoit eu en 4o8 ABREGE DES MEMOIRES,&c. *^— — "^"^^ vue : on croit qu'il feroit utile dans le cas pour lequel il eft deftin^ •, mail Mechanique.I"'' ^^'^"''^ Teulement ^ defirer quil travaillat ^ le limplifier, tant pour le rendre moins pefant que pour en diminuer le prix , qui , dans I'etat ou Annie ITJO. Jl eft , & vu la multitude des pieces qui le compofent , deviendroit cer- tainement coufiderabie. Fin du Tome quator{ieme. ,/■.;./ .K- ■.:->'' 'V /;,v.-,',; /'/,