GERS og PACE 0m réa SRI LOS ED A D EE MT ARLES à ee mn mg 2 ve « EPP RL me pe Ep br >» + ar ee PSE Dm à me nm EE ee D MP TE AE SAGE qe om nr ar CS DT EST RER ee ee LE D dés pr LÀ 1 LE 2 8 LE > peine , fn ss Lu ee ER TEE TD EP PT à COMPTES RENDUS HEBDOMADAIRES DES SÉANCES ET MÉMOIRES “DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Re tbe sette. ‘ Ch 2e S Î Nada hist COMPTES RENDUS HEBDOMADAIRES SÉANCES ET MÉMOIRES SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE TOME CINQUIÈME — NEUVIÈME SÉRIE ANNÉE 1893 QUARANTE-CINQUIÈME DE LA COLLECTION Avec figures. PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE à : dr de © Fe mi Ti LI ar DO à r + 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1893 PAPER TE END CNRS Dés ES LISTE DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE AU 31 DÉCEMBRE 1893 ABRÉVIATIONS A A M, associé de l’Académie de médecine. AE P, agrégé à l'École de pharmacie. AFM, agrégé à la Faculté de médecine, A H, accoucheur des hôpitaux. A M, assistant au Muséum. c A M, correspondant de l’Académie de médecine. c H, chirurgien des hôpitaux. mar, membre de l’Académie francaise. M A M, membre de l’Académie de médecine. M1, membre de l'Institut. mA s, membre de l’Académie des sciences. mcrs, maître de conférences à la Faculté des sciences. M H, médecin des hôpitaux. P © F, professeur au Collège de France. PEM, professeur à l'École de médecine. PE P, professeur à l'École de pharmacie. PEMM, professeur à l'École de médecine militaire. PE v, professeur à l'École vétérinaire. P F M, professeur à la Faculté de médecine. PF Ss, professeur à la Faculté des sciences. P M, professeur au Muséum. P u, professeur à l'Université. — VI — ANCIENS PRÉSIDENTS Présidents perpétuels. MM. Rayer (1848-1867). Claude Bernard (1868-1878). Paul Bert (1879-1886). Présidents quinquennaux. MM. Brown-Séquard (1887-1892). COMPOSITION DU BUREAU (1893) PrÉSIdenE RE UE MR TRE M. Chauveau. Vice-présidents................ ç M: Daresie: | M. Galippe. Secrétaire général............ M. Dumontpallier. M. Capitan. Secrétaires ordinaires........ d M. Gilbert. M. Fabre-Domergue. M. Wurtz. Trésorier. 12250000 Ne M. Beauregard. ArChIVISÉe 22 RER eue M. Retterer. MEMBRES HONORAIRES MM. MM. Albert (S. A.S.), Prince de Monaco. Beneden (P.-J. van), cAM, pu. Brouardel, MAS, PFM, MAM, MH, doyen de la Faculté de médecine. Chauveau, MAS, PM, MaAM, 10, ave- nue Jules-Janin. Holmgren, professeur de physio- logie à l'Université d'Upsal. Ludwig (Carl), pu. Ollier, AAM, PFM, à Lyon. Pasteur (Louis), MAF, MAS, AAM, rue Dutot. MEMBRES TITULAIRES HONORAIRES MM. Arsonval (A. d’), Mau, directeur du laboratoire de physique biolo- gique au Collège de France, 28, avenue de l'Observatoire. Balbiani (G.), pcr, 18, rue Souf- flot. Beauregard (Henri), AFP, AM, 49, boulevard Saint-Marcel. Berthelot (M.-P.-E.), MAS, MAM, PCF, sénateur, au palais de l’Institut. | MM. Blanchard (Raphaël), APM, secré- taire général de la Société zoolo- gique de France, 32, rue du Luxembourg. Bloch, 13, rue du Conservatoire. Bouchard, PFM, MAS, MH, MAM 174, rue de Rivoli. Bouchereau, mu, À, rue Cabanis. Bourneville (D.), mu, 14, rue des Carmes. 7 5 3 td k 2 ° Budin (Pierre), — VII — MM. Brown-Séquard, mAs, 19, rue François [°. MAM, AFM, AH, 129, boulevard Saint-Germain. Chamberland, directeur de Labo- ratoire, à l’Inst. Pasteur, r.Dutot. Chatin (G.-A.), MAM, Mas, 149, rue de Rennes. CAM, PCF, Chatin (Joannès), MAM, AEP, maitre . de conférences à la Faculté des sciences, 1447, boulevard Saint- Germain. Cornil (V.), MAM, PFM, MH, Séna- teur, 19, rue Saint-Guillaume. Dareste, directeur du laboratoire , de tératologie, à l'École des Hautes-Études, à Paris, 37, rue de Fleurus. Dastre (A.),Prs, avenue d’Antin, 73. Duguet, AFM, MAM, M4, 60, rue de Londres. Dumontpallier, MAM, Mu, 24, rue Vignon. Duval (Mathias), Mam, PrM, 11, cité Malesherbes. Francois-Franck, mA, directeur- adjoint du laboratoire de phy- siologie au Collège de France, 5, rue Saint-Philippe-du-Roule. Galippe (V.), chef du laboratoire de la clinique d'accouchements, 12, place Vendôme. Gallois, à Villepreux(Seine-et-Oise), et 60, rue du Four, Paris. Gellé, 4, rue Sainte-Anne. Grancher, PFM, MAu, Mu, 36, rue Beaujon. Gréhant (N.), PM, 17, rue Ber- thollet. Grimaux, AFM, professeur à l'École polytechnique età l’Institut agro- nomique, 123, boulevard Mont- parnasse. MM. Hallopeau, maM, AFM, Mu, 91 bou- levard Malesherbes. Hamy, M1, PM, rue de Lubeck, 40. Hanot, AFM, Mu, 122, rue de Ri- voli. Hayem (G.), PFM, MAM, Mu, 7, rue de Vigny. Henneguy, préparateur au Collège de France, 9, rue Thénard. Hénocque, directeur-adjoint du la- boratoire de médecine au Col- lège de France, avenue Mati- gnon, 11. Javal, MAm, directeur du labora- toire d’ophtalmologie à la Sor- bonne, 52, rue de Grenelle. Joffrov, PFM, Mu, 186, rue de Ri- voli. Künckel d’'Herculais (Jules), AM, 20, villa Saïd. Laborde (V.), mam, chef des tra- vaux physiologiques à la Faculté de médecine, 15, rue de l'École- de-Médecine. Laboulbène, MAM, PFM, mu, 181, boulevard Saint-Germain. Lancereaux (E.), MAM, AFM, ME, 44, rue de la Bienfaisance. Landouzy, AFM, Mu, 4, rue Chau- veau-Lagarde. Larcher, 97, Grande-Rue de Passy. Leblanc, MaM, 88,avenue Malakoff. Leven, 12, rue Richer. Luys, MAM, MH, 20,rue de Grenelle. Magitot, mam, 9, boulevard Males- herbes. Magnan, mu, 1, rue Cabanis. Malassez, directeur-adjoint du la- boratoire d’histologie générale au Collège de France, 168, bou- levard Saint-Germain. Marey, mas, mam, PCF, 11, boule- vard Delessert. = VU MM. Mégnin (Pierre), rédacteur en chef du journal l’Éleveur, avenue Auber, 2 ter, Vincennes. Michon (Joseph), 33, rue de Baby- lone. Milne-Edwards (Alph.), MAS, MA, PM, PEP, 57, rue Cuvier. Ollivier (Aug.), AFM, MAM, MH, 5, rue de l'Université. Onimus, 7, place de la Madeleine. Poncet (de Cluny), à Vichy. Pouchet, pm, 10, rue de l'Éperon. Quinquaud, MA, AFM, Mu, 20, bou- levard Saint-Germain. Ranvier, MAM, MAS, PCF, 28, ave- nue de l'Observatoire. Raymond (F.), AFM, mu, 21, rue de Rome. Regnard (Paul), professeur à l'Ins- titut agronomique, directeur- adjoint du laboratoire de physio- MM. - logie expérimentale de l'École des Hautes-Études, 224, boule- vard Saint-Germain. Regnauld (J.), Mau, PrM, 40 bis, fau- bourg Poissonnière. Richet (Ch.), Prm, 15, rue de l'Uni- versité. Robin (Albert), AFM, MAM, Mu, 4,rue de Saint-Pétersbourg. | Rouget (Charles), PM, AAM, au Muséum. Sappey, MAS, MAM, de Fleurus. Sinety (de), 14, place Vendôme. Straus, PFM, MAM, MU, 19, rue La- grange. Trasbot, PEV, Man, à Alfort. Vaillant (L.), pu, 2, rue de Buffon. Verneuil, MAS, MAM, PFM, CH, 11, boulevard du Palais. PFM, 16, rue MEMBRES TITULAIRES MM. Arthus (Maurice), chargé de confé- rences à la Faculté des Sciences, 161, avenve du Maine (23 dé- cembre 1893). Babinski, mu, 54, rue Bonaparte (9 juillet 1887). Balzer, mu, 8, ruée de l'Arcade (10 juillet 1886). Bonnier, prs, 15, rue de l'Estra- pade (1° décembre 1888). Bourquelot, AEP, pharmacien des hôpitaux, 42, rue de Sèvres (4 juillet 1885). Brissaud, AFM, mx, 9, quai Vol- taire (4 février 1888). Capitan, 5, rue des Ursulines (10 dé- cembre 1881). Charrin, AFM, Mg, 11, avenue de l'Opéra (26 mars 1887). MM. Chouppe, 10, rue Vital (26 o- . vembre 1892). Darier, 26, boulevard Saint-Ger- main (14 janvier 1893). Dejerine, AFM, Mu, 168, boulevard Saint-Germain (19 juillet 1884). Duclaux, MAS PFs, 35 bis, rue de Fleurus (11 avril 1885). Dupuy (E.), 53, avenue Montaigne (6 juin 1886). Fabre - Domergue, 1, rue Paul- Robert (11 avril 1891). Féré (Ch.), mx, 37, boulevard Saint-Michel (28 février 1885). Giard, PrFSs, 14, rue Stanislas, (23 juillet 1887). s Gilbert, Mu, AFM, 27, rue de Rome (10 mai 1890) . / M. Gley, arm, 14, rue Monsieur-le- Prince (27 février 1886). Guignard, per, 1, rue des Feuil- lantines (7 janvier 1888). Kaufmann, pev, à Alfort (30 no- vembre 1889). Langlois, 4, rue Berthollet (12 dé- cembre 1891). Laveran, MAM, PEMM, 10, rue Sta- nislas (7 juin 1890). Netter, AFM, Mu, 129, boulevard Saint-Germain (23 février 1889). Nocard, PEv, MAM, à Alfort (5 mars 1887). : Perrier, MAS, PM, 26, rue Gay- Lussac (22 janvier 18817). Phisalix, 5, rue des Chantiers (13 décembre 1890). MM. _Pilliet, 4, rue Richepanse (29 juil- let 1893). Railliet, PEv, à l'École vétérinaire d’Alfort (13 juin 1891). Rémy (Ch.), AFM, 46, rue de Lon- dres (12 décembre 1885). Retterer, AFM, 19, boulevard Saint- Marcel (4 juin 1887). Richer, 15, rue Soufflot (8 juil- let 1893). Roger, AFM, MH, 4, rue Perrault (2 juin 1888). Troisier, AFM, MH, 92, rue Caumartin (17 novembre 1887). Varigny (de), 7, rue de Sfax (15 jé- vrier 1890). Wurtz, 67, rue des Saints-Pères (26 décembre 1891). MEMBRES ASSOCIÉS MM. Arloing, PFM, PEV, à Lyon. Beale, Lionel $S., à Londres. Beaunis, PF, à Nancy. Bowman (W.), à Londres. Dugès (Alfred), consul de France à Guanajuato (Mexique). Hannover, Copenhague. Huxley (Th.-H.), FRS, à Londres. Le Roy de Méricourt, AAM, 5, rue Cambacérès, à Paris. Lépine, PFM, à Lyon. Lortet, PFM, à Lyon. MM. Marion, PFs, Marseille. Moleschott, Rome. Metchnikoft, chef de laboratoire à l'Institut Pasteur, rue Dutot. Paget (James), Sir, à Londres. Renaut (J.), PFM, MAM, à Lyon. Roux, directeur-adjoint du labora- toire Pasteur, rue Dutot. Sanson, professeur à l’Institutagro- nomique, 11, rue Boissonade, Paris. Vogt (Carl), pu, à Genève. MEMBRES CORRESPONDANTS NATIONAUX MM. Baréty, à Nice. Bergonié, AFM, à Bordeaux. Brasse, 25, rue Chasselièvre, à Rouen. Cazeneuve (Paul), PF», à Lyon. Charpentier, PrM, à Nancy. Coyne, PrM, à Bordeaux. MM. Daremberg, mAm, à Cannes. Debierre (Ch.), PrM, à Lille. Delore, à Lyon. Desgranges, à Lyon. Dubois (Raphaël), Prs, à Lyon. Duret, professeur de l’Université catholique à Lille. — X — MM. Gamaleïa, à Paris. Gilis, à Montpellier. Gimbert, à Cannes. Herrmann (Gustave), PFM, à Lille. Huet, PEPM, à Caen. Jobert (CL), Prs, à Dijon. Jolyet, PrM, à Bordeaux. Jourdan, à Marseille. Jourdain, à Montpellier. Laguesse, AFM, à Lille. Lambling, PFM, à Lille. Laulanié, PEv, à Toulouse. Leloir (Henri), PFM, à Lille. Lennier (G.), directeur du Muséum, au Havre. Livon, PE, à Marseille. Luton, PE, à Reims. Maurel, AFM, médecin principal de la marine, à Toulouse. MM. Morat, PFrM, à Lyon. Moynierde Villepoix,PEM, à Amiens. Nepveu, rEM, à Marseille. | Nicati, à Marseille. Nicolas, AFM, à Nancy. OEschner de Coninck, PF», à Mont- pellier. Pelvet, à Vires. Peyraud, à Libourne. Pierret, PFM, à Lyon. Pitres, doyen et PFM, MAM, à Bor- deaux. Rietsch, à Marseille. Testut (Léo), PFM, à Lyon. Thierry (E.), directeur de l'École d'agriculture dela Brosse (Yonne) Tourneux (Frédéric), PFM, à Paris. Vialannes, à Arcachon. MEMBRES CORRESPONDANTS ÉTRANGERS MM. Allemagne. Bois-Raymond (Émile du), pu, à Berlin. Helmholtz, pu, à Berlin. Leuckart (R.), à Leipzig. Virchow (R.), pu, à Berlin. Autriche-flongrie. Adamkiewicz (Albert), pu, à Cra- covie. Belgique. Crocq, à Bruxelles. Frédéricq (Léon), ru, à Liège. Gluge, à Bruxelles. Plateau (Félix), ru, à Gand. Brésil. Abbott, à Bahia. Motta-Maïa, à Paris. MM. Chili. Lataste, PFM, à Santiago. Espagne. Tolosa y Latour, à Madrid. Havane. Sanchez Toledo, à Paris. États-Unis. Seguin (E.-C.), à New-York. Stiles, Washington. Grande-Bretagne. Beevor (Ch.-Edw.), 33, street, W., à Londres. Berkeley (M.-J.), à Kings-Clifr. Horsley (Victor), 80, Park street, Grosvenor square, W., à Lon- dres. Marcet, à Cannes(Alpes-Maritimes). Harley MM. Redfern, à Belfast. Simon (John), à Londres. Williamson, à Londres. Italie. Lussana, PU, à Palerme. Martini, à Naples. Perroncito (Eduardo), pu, à Turin. Vella, à Sienne. Portugal. Mello (de), à Lisbonne. Russie. Mendelsohn (Maurice), à Saint-Pé- tersbourg. MM. Mierzejewsky, à Saint-Pétersbourg. Pelikan, à Saint-Pétersbourg. Tarchanoff (de), pu, à Saint-Péters- bourg. Suisse. Duby, à Genève. Miescher, pu, à Bale. Prévost, PU, à Genève. Girard, à Genève, privat-docent à l'Université. Nalachie. Vitzou, pu, à Bucharest. COMPTES RENDUS HEBDOMADAIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SÉANCE DU 7 JANVIER 1893 M. CHauveau : Lecture de l’adresse de la Société de Biologie au Jubilé de M. Pasteur. — M. F. Royer : Note sur la soi-disant formule urinaire de l’hystérie. — M. le Dr H. Crisriant (de Genève) : Nouvelles recherches sur les organes thyroïdiens des rongeurs. — M. P. REGnarp : De l’action des Chromoblastes chez la Carpe et la Tanche. — M. P. ReGnarD : Sur un bathomètre à compression d’eau. — * M. le Dr Léon Danton : Démonstration expérimentale de l’action directe du courant voltaïque sur le cerveau et sur la moelle épinière (Une preuve clinique). — M. n’ArsonvaL : Seringue stérilisable de M. le professeur Debove. — M. le Dr CampaAna : Cas de phtisie laryngée grave, traitée avec succès par le liquide tes- ticulaire. — M. P.-L. Kiéner et M. H. Vian : Note sur un cas de fièvre typhoïde et de tuberculose aiguë combinées. — MM. les Drs Josern Musso et J.-B. MoreLcr : Sur le microbe du béribéri. — M. Morezrt (de Montévidéo) : Sur la pénétration de microbes étrangers dans le sang et dans les tissus des malades de béribéri. — M. Moreczr : Études sur un cas de langue noire. — M. E.-L. Bouvier : Sur l’orga- nisation des Actæons. — M. En. Carémen : L’exagération du dicrotisme comme signe pronostic de l'hémorragie intestinale dans la fièvre typhoïde. Présidence de M. Chauveau CORRESPONDANCE MANUSCRITE. Lettre de M. H. VrALANNES, qui remercie la Société de l'avoir élu membre correspondant. — Lettre de M. BRAsse, membre titulaire, qui demande le titre de membre correspondant. — Lettre de M. Bouvier, qui demande à être inscrit sur la liste des candidats au titre de membre titulaire. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE. — M. Cnarces Ricuer fait hommage à la Société d’un exemplaire de la Clinique chirurgicale du professeur A. Ricuer, et de deux volumes de la Bibliothèque rétrospective ayant pour titres : Lamarck, Origine des ani- maux; HUNTER, Le sang. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 1 VA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE M. Crauveau donne lecture de l'adresse qu’il a remise, au nom de la Société de Biologie, à la cérémonie du Jubilé de M. Pasteur. « TRÈS ILLUSTRE MAITRE, « La Société de Biologie, qui a l’insigne honneur de vous compter au nombre de ses membres honoraires, s’enorgueillit d’être admise à vous présenter ses hommages en cette solennelle circonstance. « Nulle part ailleurs, vos glorieux travaux n'ont été plus appréciés, plus admirés que dans notre Société ; nulle part, mieux accueillies les grandes idées que vous avez fait éclore dans le domaine des sciences biologiques. « Comment une telle Société, toujours active, toujours jeune, de par son mode de constitution, ne vous entourerait-elle pas de sa vénération! Vous lui avez ouvert de nouveaux champs de travail et de recherches : elle les exploite avec une enthousiaste ardeur. Votre marque, cher et. illustre maître, se trouve ainsi imprimée à toutes nos séances. Il n’en est guère où vos élèves directs ou indirects ne viennent traiter des grande problèmes de science pure ou appliquée, qui ont élé soulevés par vos travaux. Tous ces élèves, les vétérans comme les néophytes, sont fiers de marcher derrière vous, éclairés par le flambeau que vos découvertes nous ont mis entre les mains. « Vous avez bien mérité de la science et de l’humanité, cher et illustre maître. À vous tous nos remerciments et notre profonde reconnaissance. Puissiez-vous, pendant de longues années encore, jouir de la pure gloire que vous avez acquise et que vous répandez sur le pays tout entier! » NOTE SUR LA SOI-DISANT FORMULE URINAIRE DE L'HYSTÉRIE, par M. F. Royer. Dans un article paru au Progrès Médical à la date du 10 décembre 1892, MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau prennent à partie M. Bosc au sujet de la paternité de l'établissement de la formule urinaire dans l'hystérie. Voici les conclusions qu'ils donnent : « L'attaque d’hystérie bouleverse d’une manière brusque, profonde, pas- sagère, chacun des termes de la formule (diminution du volume, de la coloration, de la densité, de l’urée, de l’acide phosphorique total avec inversion des phosphates) de l'azote total. Elle entraîne done une dimi- nution très marquée des oxydations, mais en même temps ces oxydations SÉANCE DU 7 JANVIER 3 diminuées sont incomplètes (diminution du coefficient d'oxydation, aug- mentation du taux de l’acide urique). L'attaque entraîne enfin une hypo- toxicité très marquée des urines qui suivent le paroxysme. » Nous ne discuterons pas quel est celui de ces auteurs qui a donné le premier cette formule, nous dirons seulement que les analyses que nous avons faites à Bicètre, dans le service de M. Féré, ne nous ont pas donné . des résultats conformes aux termes de la formule proposée. Voici quels sont les résultats obtenus sur cinq hystériques actuellement dans ce service. PO PHOSPHATES Ce VOLUME. URÉE. TOTAL. alcalins. terreux. CHLORURES, Prév.., hystérique. 20 oct. — Attaques. 2100 99 E0) 12 NO) 1.473 0.837 12.51 21 oct. — Repos. 1750 DA) MAS DÙ 1.824 1.026 10.22 Bruy…, hystérique. 21 oct. — Attaques. 1470 LISA OO 298 0.712 11.70 22 oct. — Repos. 1970 29 » 2.30% 1.402 0.962 14.31 Du même, 9 nov. — Attaques. 1900 20.50 41.927 1.218 0.709 18.72 10 nov. — Repos. 1400 18.70 2.065 1.295 0.765 11.85 Chau..., hystérique. À nov. — Attaques,. 1450 19,40 1.653 0.928 0.725 412: 2 nov. — Repos. 1200 17.20 1.625 0.998 0.627 12.1 Gom..., hystérique. 6 no: — Atlaques. 1570 On DAME O7 1.202 0.665 12.817 1 nov. — Repos. 1200 19.80 395 LA] © (SE) = _ Fleu.., hystérique. 17 déc. — Attaques. 1200 18.50 1.875 1.115 0.760 18 déc. — Repos. 1310 20. 1.130 Æ (=) = ny [æ)] = Co © [S14 Examinons chacun des résultats. Volume. — Sur ces six analyses, il n’y en a que deux dans lesquelles le volume ait été diminué pendant la période d’attaque; on ne peut done conclure, comme règle générale, à une diminution du volume pendant l'hystérie. Densité. — La densité de toutes ces urines a varié entre 1017 et 1020: il n'y a donc pas eu grande diminution de densité. Coloration. — Sauf dans la dernière analyse, dans laquelle l'urine de la période d'attaque était presque incolore, nous n'avons pas Rs de différence bien sensible dans la coloration. Urée. — On voit, d’après le tableau, que sur six analyses il y a eu deux À. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE diminutions, en tous cas, la différence entre les périodes d'attaque et de repos a été si faible qu'on ne peut conclure à une règle générale de diminution. Phosphates. — Sur ce point, nous sommes moins en désaccord avec MM. Gilles de la Tourette, Gathelineau et Bosc; cependant la diminution de l'élimination de l’acide phosphorique dans la période d'attaque est si faible par rapport à celle de la période de repos, qu'il n’est pas permis de poser comme caractéristique de l’hystérie la diminution des phosphates. Quant à l’inversion totale des phosphates, nous ne l’avons jamais obser- vée dans nos analyses : cette prétendue inversion qui devait établir le dia- gnostic différentiel entre l'attaque d'hystérie et celle d’épilepsie, ne peut servir à aucune conclusion puisqu'elle peut manquer dans l’hystérie et exister dans l’épilepsie. NOUVELLES RECHERCHES SUR LES ORGANES THYROÏDIENS DES RONGEURS, par M. le D' H. CrisriAnt (de Genève). J'ai démontré précédemment que les glandules thyroïdiennes — petits corps thyroïdes accessoires à structure embryonnaire décrits par Sand- strom et par Gley chez le lapin — existent aussi chez le rat, mais qu'ils sont ici, contrairement à ce qui arrive chez le lapin, enchâssés dans la glande principale et qu'on ne peut pas les épargner en pratiquant la thy- roïdectomie classique. J'ai depuis étudié ces organes chez plusieurs autres espèces animales, tant à l’état adulte que pendant la période du développement, et j'ai pu me persuader que l'existence de ces glandules chez les animaux que j'ai étudiés est constante. | L'étude du développement du corps thyroïde nous apprend déjà que cet organe se développe par trois bourgeons, l’un médian et les deux autres latéraux et symétriques ; et on a affirmé que ces bourgeons se soudent chez l'adulte pour constituer le corps thyroïde définitif. Mes observations me permettent d'affirmer que cette disposition n’est pas générale, car les organes connus sous le nom de glandules ne sont autre chose que les bourgeons latéraux, et nous avons vu qu'ils peuvent se fusionner avec le corps principal, comme chez le rat, ou en rester séparés, comme chez le lapin. Je reviendrai prochainement sur les détails de ces recherches; je veux seulement aujourd’hui fixer l’attention sur le fait que les glandules thy- roïdiennes, chez les rongeurs, peuvent présenter les dispositions les plus diverses. En effet, j'ai constaté en faisant l’étude détaillée des organes thy- SÉANCE DU 7 JANVIER 9 LL PROS RER Lt eee Aer PURES roïdiens chez deux autres rongeurs, la souris et le campagnol, des diffé-- rences assez remarquables. . Chez la souris, les glandules se trouvent englobées dans la glande à peu près comme chez le rat; cependant chez quelques individus la glandule d'un eôté tend déjà à sortir de la glande principale, dans laquelle elle n’est que partiellement enchâssée. Chez le campagnol, le fait est bien plus accentué; l’une des glandules est plus ou moins englobée dans le corps thyroïde principal, tandis que du côté opposé la glandule en est complètement séparée. On remarque en outre que, d’un côté, la glandule se trouve à la hauteur de l’angle supérieur de l'organe, au niveau du larynx, tandis que du côté opposé la glandule correspond à l'angle inférieur de l'organe, qu’elle ne touche pas. Nous croyons done que, même chez les rongeurs, on peut observer des différences très importantes dans la topographie des glandules thyroï- diennes. Elles peuvent être, suivant l'espèce à laquelle on a affaire, soit séparées complètement du corps thyroïde, comme chez le lapin (Gley), soit complètement englobées, comme chez le rat, soit partiellement en- globées, et cela à des degrés différents, comme chez la souris et le campa- gnol. DE L'ACTION DES CHROMOBLASTES CHEZ LA CARPE ET LA TANCHE, par M. P. REGNARD. La Société connaît les remarquables expériences par lesquelles M. Pouchet a démontré l'influence du milieu ambiant sur la couleur de certains poissons. Déjà Jurine avait dit que les Lotes que l’on pêche dans les profondeurs du Léman ont une autre couleur que celles que l’on prend à la surface. Les personnes qui pêchent sur Les côtes de l'Océan savent aussi fort bien que les Scorpènes que l’on prend sur le rivage, sont de couleur claire, tandis que celles que l’on prend sur les rochers du fond sont d’un noir violacé. . Ces différences tiennent à ce que l’animal accommode la couleur de son tégument à celle du milieu qui l'entoure et cela par l'intermédiaire de ses Chromoblastes. Malheureusement, il est difficile de donner, dans un cours, la démons- tration de ces faits parce que, à Paris, on ne peut pas se procurer vivants les animaux qui les produisent avec le plus d'intensité. J'ai pourtant réussi cette démonstration en me servant de poissons fort communs et très résistants. Voici comment l'expérience peut se faire: on prend trois seaux en (9) SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE verre : dans l’un, on met des algues vertes baignant dans l’eau; dans l’autre, on verse de l’eau crayeuse ou limoneuse; dans celui du milieu enfin, de l’eau limpide; on a, d'autre part, choisi deux Tanches d’en- viron 10 centimètres de long. (Chez les animaux âgés, l'expérience ne réussit pas bien.) L'un des deux poissons est mis dans l’eau limoneuse, l’autre au milieu des algues. Au bout d’une heure ou deux, on les jette l’un et l’autre dans l’eau limpide. La Tanche qui a vécu dans l’eau crayeuse est blanche, rosée même, car on voit ses muscles et son sang à travers sa peau. L'autre est d’un beau vert bronzé. Au bout d’une heure environ, elles sont redevenues semblables. J'ai réussi la même expérience avec des Carpes ; j'ai même eu la patience de la faire durer une année entière. J'ai divisé un lot d’alvins de Carpe en deux parties : les uns ont été élevés pendant un an dans une obscurité absolue, les autres ont été gardés au grand jour. Les Carpes élevées dans l'obscurité étaient presque noires, les autres avaient une teinte jaune clair. Un accident arrivé à mon aquarium ne m'a pas permis dé voir si, ramenées au jour, les carpes noires auraient pu encore rede- venir claires. Par suite d’une interruption de soufflerie, elles sont mortes dans l'obscurité et sans avoir jamais revu la lumière. C’est une expérience que je referai. SUR UN BATHOMÈTRE A COMPRESSION D'EAU, par M. P. REGNARD. Aujourd'hui que l'étude des animaux des grands fonds a pris une grande importance, on cherche tous les moyens possibles pour arriver à connaître exactement les profondeurs de la mer. Cela est bien moins facile qu’on ne croit. Les fils de sonde, par exemple, quand ils dépassent quelques kilomètres, prennent une position oblique qui rend très difticile l'interprétation du sondage. Aussi a-t-on, avec des résultats variables, essayé de se servir de la com- pressibilité de l’eau pour se rendre compte de la profondeur à laquelle on l’a puisée. H. Fol, Buchanan et d’autres ont proposé divers moyens pour résoudre le problème, mais de réelles objections ont été faites à leurs appareils. C’est pour y obvier que j’ai proposé le bathomètre suivant : Un grand vase de cuivre mince À aura la capacité qu'on désirera. Il sera avantageux, comme on va voir, de lui donner de grandes dimensions. Un hectolitre ne me semblerait pas trop. Il n’y a pas à craindre le poids, SÉANCE DU 1 JANVIER 7 puisque nous savons qu’il nous faut un minimum de 50 à 70 kilogrammes pour aller au fond avec assez de vitesse. Notre vase À est ouvert en haut par un robinet à trois voies R que manœuvre le long levier L. Un collier s'attache au-dessus de ce robinet, il soutient trois fils d'acier ou de chanvre C réunis en patte d’oie au niveau du câble de descente. Sur la troisième voie du robinet se trouve un sac de caoutchouc épais, aplati et vide d'eau. Quand on descend l’appareil, le robinet est dans la position 1, c’est-à- dire que le ballonnet est fermé et que le robinet est ouvert de la bou- teille à l'extérieur. La grande bou- teille se remplit donc d’eau dès qu'elle est immergée. On la descend, au fur et à mesure qu'elle s’abaisse, l’eau s’y comprime naturellement. Arrivée sur le fond, elle se couche et le trainage sur la vase accroche le grappin qui est au bout du levier 4 et ferme du coup le robinet, qui prend dès lors la situation 2. La com- munication avec l'extérieur est sup- primée, mais la bouteille commu- nique avec le ballonnet B.On remonte le bathomètre, l’eau se décomprime _ et l’excès du liquide ainsi produit va se déverser dans le ballonnement B. Arrivé à bord, celui-ci est dévissé, on verse l’eau qu'il contient dans une éprouvette graduée. On a, dès lors, tous les éléments du problème. Les travaux concordants de Wer- theim, de Grassi, de Tait, de Bu- chanan, montrent que l’eau de mer se comprime en moyenne de 0,00000430 par mètre. Un réservoir de 100 litres donnera donc une diminution du volume de l’eau égale à 0,00000430 X 1,000 pour 10 mètres de descente, soit 0 lit. 0043. Pour une dénivellation de 3,000 mètres, par exemple, l’eau diminuera de 0,00000430 X 100 X 3,000, soit 1 Lit. 290. C’est précisément cette eau qui s’emmagasinera dans la bouteille, qui s'y trouvera enfermée à la clôture du robinet et qui regorgera dans le ballon & SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE B à la remontée. Donc, l’ayant mesurée, il suffira de diviser le nombre obtenu par 0,00000430 X V pour avoir la profondeur. I1 y aura à faire une correction de température, car, à la clôlure du robinet, l’eau était froide ; elle se sera réchauffée en remontant et se sera dilatée. La lecture donnerait donc un chiffre trop fort. On remarquera en T, sous le levier L, un tube; il contient un thermo- mètre à renversement, très bien protégé, qui rapportera la température du fond. On remarquera que si des gaz se dégagent de l’eau à la montée par suite de la diminution de pression, ils n’entacheront nullement les résul- tats, car ils se réuniront, il est vrai,en B ; mais quand on ouvrira celui-ci, ils s’'échapperont tout simplement et n’entreront nullement dans la lecture du volume de l’eau transvasée dans l’éprouvette. DÉMONSTRATION EXPÉRIMENTALE DE L'ACTION DIRECTE DU COURANT VOL- TAIQUE SUR LE CERVEAU ET SUR LA MOELLE ÉPINIÈRE,. (Une preuve clinique), par M. le D' Léon Danron. L'électricité peut-elle agir directement sur le cerveau et sur la moelle épinière? Certaines actions physiologiques (vertige galvanique, mouvements conjugués des yeux, mouvements de vascillation du corps) sont considérés par le plus grand nombre des électro-physiologistes comme des preuves de l’action directe de l'électricité sur le cerveau. Cependant l'interprétation de ces phénomènes peut être et a été con- testée. Ils peuvent recevoir une explication, et être mis au compte d'une action périphérique. Aussi récemment un de nos confrères, spécialiste distingué, chef d’un service qui fait autorité, a-t-il déclaré que les résul- tats curatifs que l’on avait cru obtenir jusqu'ici grâce à une action directe de l'électricité sur le cerveau et sur la moelle épinière n'ont été que des illusions. L’électricité, dans cette doctrine, trouverait dans les couches liquides qui environnent ces organes des voies d’une conductibilité tellement supérieure à celle du cerveau et de la moelle épinière que ceux-ci reste- raient inaccessibles à l’action électrique. Les expériences et l’observation qui suivent ont pour but de Ro ee que physiquement et cliniquement la notion de l’action directe est juste. EXPÉRIENCE I. — Sur les parties latérales du crâne à 0,06 ou 0,07 de chaque côté de la ligne médiane antéro-postérieure on applique une couronne de trépan de 0,2 de diamètre environ, on incise la dure-mère SÉANCE DU T JANVIER (e] en croix et par l'ouverture pratiquée on enfonce de chaque côté dans la substance cérébrale une électrode de 0,020 à 0,025 de long sur 0,010 à 0,015 de large. On relie les électrodes au moyen de réophores parfaite- ment isolés, à un galvanomètre de sensibilité convenable (celui qui m’a servi dans mes expériences est un galvanomètre astatique) de manière à avoir un système de dérivation absolument indépendant du courant prin- cipal. Cela établi, on fait passer, conformément aux pratiques courantes de l’électrothérapie, soit par les tempes, soit par les apophyses mastoïdes, soit perpendiculairement, un courant galvanique à l'aide de deux «tam- pons », et voici ce qu'on observe : Le courant principal indique à peine 4 4/2 à 2 milliampères que déjà l'aiguille du galvanomètre chargé d'enregistrer l'intensité intra-cranienne, est en mouvement et ne tarde pas à marquer 8 à 12 divisions au-dessus de 0, suivant les points par lesquels le courant principal est introduit. De telle sorte que, même à doses extrêmement faibles, les courants galva- niques manifestent d’une manière indiscutable leur pénétration jusqu’à la substance cérébrale. Inutile d'ajouter que les intensités intra-craniennes s'élèvent au fur et à mesure que les intensités extra-craniennes sont plus énergiques. . Nous démontrerons dans un instant que l'argument sur lequel on vou- drait s'appuyer pour refuser d’assimiler les applications faites sur le cadavre aux applications qui sont faites sur le vivant, est sans fonde- ments. | EXPÉRIENCE II. — La moelle épinière est située à de plus grandes pro- fondeurs que le cerveau, et protégée par une gaine osseuse ou interverté- brale (disques) à peu près aussi résistante que la boîte cranienne, elle est même rendue plus inaccessible par une enveloppe d’aponévroses et de ligaments qui sont les uns et les autres très résistants. Aussi, bien que la différence semble relativement peu considérable, — elle est atteinte plus difficilement par le courant voltaïque que le cerveau, et cependant on peut agir sur elle beaucoup plus énergiquement que sur l’encéphale, parce que l’on peut sans inconvénient appliquer sur la colonne verté- brale, des courants de 70, 80, 100 milliampères et même 150 milliampères, intensité que l’on n’a pu encore introduire dans la pratique courante de l’électrisation céphalique. Quoi qu'il en soit, voici une deuxième expérience analogue à la précé- dente démontrant péremptoirement que la moelle épinière est facilement accessible à l’action galvanique. On découvre le cordon myélique au niveau d’une des premières vertè- bres dorsales, on pratique la même opération au niveau des premières vertèbres lombaires, puis on introduit dans l’axe de la moelle, sur une longueur de 0%,07 à 0,10, des aiguilles, que l’on relie comme précédem- ment à un galvanomètre, puis on applique, conformément à des pratiques 10 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE usuelles d’électrothérapie, des électrodes (larges plaques mouillées) soit sur la région dorsale en deçà ou en dedans des points d'implantation des aiguilles, ou l’une sur la région dorsale et l’autre sur la région abdomi- nale. Cela établi, on fait passer un courant voltaïque et l’on constate que l'aiguille du galvanomètre de dérivation (c’est-à-dire celui qui enregistre les intensités centrales des extrémités du segment de moelle sur lequel on expérimente) dévie dès que l'intensité atteint 2 à 3 milliampères et qu'avec des intensités de 40-60, à 80-100 milliampères les intensités déri- vées atteignent dans les conditions défavorables 1/2 à 1 milliampère et dans les conditions les plus favorables, jusqu’à 2 milliampères. Or il est facile de juger combien est minime la quantité de courant dérivé qu'il est possible de « capter » à l’aide de la surface exiguë de l'extrémité des aiguilles. Objections. — La valeur des expériences qui précèdent ne peut étre atténuée qu’en établissant une différence entre les applications faites sur le cadavre et celles qui sont faites sur le vivant. Rien n’autorise une sem- blable distinction. On peut, du reste, démontrer expérimentalement en plongeant un cerveau dans une grande cuvette remplie d’eau salée de 8 ou 9 p. 100 et en créant par suite au courant des voies de conduectibilité périphériques bien supérieures à celles qui existent à l’état physiologique, et en utilisant le dispositif expérimental précédent : que la masse céré- brale est atteinte par des courants dérivés, dont l'intensité diffère peu de celle que l’on obtient en opérant sur le cadavre. La conclusion est donc bien précise; dans les applications courantes de l’électrothérapie cérébrale et myélique, le cerveau et la moelle épinière sont atteints directement avec la plus grande facilité par les courants électriques, et c’est commettre uue erreur que de prétendre qu'il est inu- tile de chercher à les utiliser pour guérir les affections qui frappent ces organes sous prétexte qu'il est impossible de les intéresser au moyen d'applications voltaïques percutanées. OBSERVATION. L'observation suivante est destinée à donner un appui clinique authen- tique aux considérations qui précèdent. Elle concerne un malade qui m'a été confié à Necker par M. le professeur Guyon, qui a bien voulu le suivre. Voici son observation résumée en quelques mots : Consultation du 6 novembre 1891. Début de l'affection : 15 ans. — Erections douloureuses permanentes toutes les nuits, suivies souvent de pertes séminales. — A partir de 1889 aggravation de l'affection, pertes plus fréquentes, rêves érotiques extrêmement fatigants. — Trois à quatre heures de sommeil par nuit — une perte séminale au mini- mum par semaine, souvent deux. — Le malade est contraint par ses érections SÉANCE DU 1 JANVIER {1 à se lever sept à huit fois par nuit. — Anémie — faiblesse générale, épuise- ment — la profession compromise sera bientôt impossible. Traitements antérieurs. — Hydrothérapie pendant deux ans tous les jours. — Bromure presque sans intermittences. — Amélioration légère. En 1891, 250 à 300 pointes de feu sur la colonne vertébrale toutes les semaines pendant trois mois. — Ventouses sèches. — Lavements composées? Ballon de glace sous les lombes toutes les nuits pendant trois mois. Le tout sans résultat. — La maladie progresse. Un traitement voltaïque comprenant 16 à 18 applications voltaïques lombo- abdominales et périnéo-lombaires faites pendant quatre mois avec des inten- sités variant de 40 à 140 milliampères, auquel a été ajouté plus tard 12 à 15 électrisations statiques, a produit d'une manière progressive le résultat favorable suivant qui, au mois d'octobre, époque où j'ai vu le malade pour la dernière fois, s'était plutôt accentué. Le sommeil est calme, sans interruption jusqu’à cinq heures du matin; à partir de ce moment jusqu'au lever les érections sont faibles, non doulou- reuses, non fatigantes et permettent au malade de se rendormir facilement. Il ne se lève plus qu'une fois par nuit. Il n'y a pas eu de pertes depuis deux mois. L'état général est devenu excellent. Le malade se sent vigoureux. L'analyse des effets physiologiques du mode voltaique ou du mode statique né permettant pas d'attribuer à toute autre cause qu’à un effet direct de l’é- lectricité sur les centres nerveux le résultat produit, ce résultat, physiquement et cliniquement, est indéniable et il serait facile de l’appuyer par un grand nombre d’autres faits analogues bien observés. SERINGUE STÉRILISABLE DE M. LE PROFESSEUR DEBOVE. Note présentée par M. D'ARSONVAL. J'ai l'honneur de présenter à la Société, de la part de M, Debove, une seringue stérilisable construite par M. Galante. Cet instrument présente le grand avantage, sur ses devanciers, de pou- voir être construit pour une capacité quelconque. Le corps de la seringue est formé d’un tube en cristal gradué en centi- mètres cubes, et très exactement calibré intérieurement. Le piston est constitué par des rondelles d'amiante comprises entre deux plaques métalliques. Le bouton B sert à faire varier la compression de ces rondelles de manière à régler le contact qu'il convient d'établir entre le piston et le corps de la seringue. Deux douilles métalliques mobiles et indépendantes s'adaptent aux extrémités du tube en cristal : L'une, la douille D, présente un prolongement conique G destiné à recevoir l'aiguille. 12 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE L'autre, la douille À, présente un prolongement cylindrique creusé de deux rainures R et dont on verra l'usage plus loin. La seringue est complétée par une armature métallique extérieure mobile, complètement indépendante, formée de deux tiges parallèles réunies d’un côté par un levier L, de l’autre par une plaque échanerée. La solidarité de toutes les pièces constituant la seringue est obtenue à l’aide de cette armature de la façon suivante : Les deux douilles étant mises au contact du tube de cristal, l’armature est reliée à la douille À en en-. gageant dans les rainures R les saillies que présente intérieurement la fourche du levier L. Celui-ci étant placé perpendiculairement à l'axe de la seringue, la plaque échancrée est mise au contact de la douille D qu’elle doit embrasser complètement. : En abaiïssant alors le levier, on détermine une tension énergique des tiges latérales de l’armature qui a pour effet d'appliquer fortement UT les douilles sur le corps de la se- | ringue qui se trouve ainsi montée et prête à être utilisée. En agissant sur le levier en sens contraire, l’action de l’armature cesse. La seringue est instantané- ment démontée pour être stérilisée de la manière suivante: Après avoir enlevé complète- ment l’armature et fait glisser les deux douilles, sans cependant leur faire abandonner le cylindre de cristal, la seringue est placée (sans son armature) dans un récipient quelconque contenant de l’eau à la température ambiante, qu’on porte à l’ébullition pendant un temps déterminé. La seringue est sortie de l’eau en la tenant par l'extrémité, les douilles sont ramenées au contact du tube de cristal. Ceci fait, il suffit, pour monter l'instrument, de relier l’armature à la douille À et d’abaisser le levier, comme cela a été indiqué plus haut. = > (ULFTTEE TER ET) EU Peel | SIBVa ‘ 1LNVIV9 AU 1 ë] Ni SÉANCE DU 7 JANVIER 43 = CAS DE PHTISIE LARYNGÉE GRAVE, TRAITÉE AVEC SUCCÈS PAR LE LIQUIDE TESTICULAIRE, par M. le D' Campana. Note présentée par M. D'ARSONVAL. Phtüsie laryngée, admise après examens laryngoscopiques et ausculta- tions répétés. — Amélioration considérable, générale et locale, par injections de suc testiculaire. O0... K..., trente-sept ans, riche propriétaire, à peu près oisif; arthri- tique, nerveux-émotif. Excès génésiques, nulle tare syphilitique. Un peu de maïigreur et de pâleur, avec une assez bonne conservation des forces musculaires. Pas d'antécédents tuberculeux dans la ligne directe. Vomissement de sang rouge en 1889; il le qualifie de très abondant, et s’obstine à croire qu'il provenait du poumon. Une laryngite peu aiguë, mais tenace, se déclare vers le commence- ment de 1891 ; résiste aux moyens ordinaires de traitement, et aboutit à une aphonie assez complète, du moins pour les notes graves. Le malade, découragé, vient me demander l'essai d’un traitement électrique, en avril 1892. Je l'essaye, mais sans espoir de guérison, car la pression profonde sur la région laryngée, côté gauche, est nettement douloureuse, et ne me laisse pas de doute sur l'existence d’une lésion matérielle grave. Effecti- vement, le traitement électrique ne fournit aucun résultat; il est aban- donné après la cinquième séance. Cependant l’auscultation ne me révèle rien d’anormal aux deux sommets pulmonaires, et j'en exprime la convic- tion en termes persuasifs et sincères. Je revois le malade en juillet. Son médecin ordinaire, un de nos émi- nents confrères de Paris, a réveillé, très involontairement, les craintes de phtisie, par des auscultations répétées; un de nos meilleurs laryngolo- gistes a été consulté, et pratique régulièrement des cautérisations, à l'acide lactique, sur les parties malades du larynx. Je conseille alors des injections de liquide testiculaire, et j'en pratique trois en dix jours. Elles suffisent à relever le moral du patient ef son énergie physique; il part en Suisse, persuadé qu'il pourra s’y guérir. [Il en revient désillusionné. La famille me communique une consultation confidentielle, avec dessin à la plume de l’image laryngoscopique, par le D' S..., de Lausanne, dont la grande compétence est bien connue : ulcératiors en dents de scie de la corde vocale gauche, érosions de l’épiglotte, œdème considérable du liga- ment aryténo-épiglottique (volume d'une noisette), ventricule laryngé oblitéré par le gonflement œdémateux, etc., etc., et comme conclusion : phtisie laryngée non douteuse. 14 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Je reprends les injections séquardiennes, et avec un tel succès d'amélio- ration de l’état général (accroissement de poids, 3 livres; au dynamo- mètre, 52 kilogrammes, au lieu de 37 à 40) que la gravité du diagnostic susénoncé me parait inadmissible. Après la seizième injection, je propose une nouvelle consultation, mais cette fois avec le D’ Poyet, le médecin de la famille et moi. Elle a lieu le 23 novembre. L'examen laryngoscopique ne permet de retrouver aucune ulcération; il n’existe guère plus qu'une tuméfaction assez considérable de l'articulation aryténo-cricoïdienne gauche, comblant le ventricule et empêchant mécaniquement les mouve- ments de la corde vocale du même côté. Cette tuméfaction, bien arrondie, donne l'impression d’un kyste : c’est une arthrite crico-aryténoïdienne, en somme, avec prolifération des lissus articulaires. La guérison est pos- sible, dit le D'Poyet, et il ne peut, en tous cas, être question de laryngite tuberculeuse. Le D' Poyet, reconnaissant la haute compétence de ses deux prédécesseurs, nous demande communication de la consultation du D' $S..., et ne s’en explique la sévérité et le diagnostic qu'en admettant une modification heureuse et très considérable des régions examinées. NOTE SUR UN CAS DE FIÈVRE TYPHOÏDE ET DE TUBERCULOSE AIGUE COMBINÉES, par M. P.-L. KIÉNee, Professeur d'anatomie pathologique à la Faculté de Montpellier, et M. H. VirraRn, Interne des hôpitaux de Montpellier. Les associations microbiennes ont, dans ces dernières années, justement attiré l’attention des bactériologistes et des cliniciens. En ce qui concerne notamment le bacille typhique et le bacille tuberculeux, la liste des mi- croorganismes qui peuvent associer leur action morbide à celle de chacun d'eux, est déjà longue. Mais, il n’a été publié, à notre connais- sance, aucun fait démontrant l'association de ces deux bacilles entre eux. La question offre cependant un réel intérêt clinique. On rencontre en effet, très fréquemment, des pyrexies de forme typhoïde dont la nature, avec nos moyens actuels d'investigation, reste douteuse. Si la maladie se termine par la mort, l’autopsie vient ordinairement lever le doute en montrant les lésions pures de l'infection tuberculeuse ou de l'infection typhique; mais, si la maladie guérit et que l’on voit survenir bientôt après une série d'accidents neltement tuberculeux, on peut se demander en présence de quelle maladie on s'était réellement trouvé. Était-ce une SÉANCE DU 7 JANVIER 15 tuberculose à forme typhoïde, ou bien une dothiénenterie légitime ayant créé une prédisposition à une affection tuberculeuse secondaire? Ces deux interprétations sont les seules qui se présentent à l'esprit des cliniciens dans l’état actuel de nos connaissances. Le fait que nous allons rapporter, montre qu'une troisième hypothèse est possible, celle de la coexistence des deux infeclions, tuberculeuse et typhique. Nous ne rapporterons pas l'observation du malade, qui a été le point de départ de cette communication, nous nous contenterons d'indiquer les résultats de l’autopsie et des recherches bactériologiques que nous avons entreprises. L’autopsie montra tout d’abord, très nettement, les lésions d’une tuber- culose granuleuse disséminée. Le sommet du poumon droit était farci de très fines granulations tuberculeuses, entourées de pneumonie catarrhale. D’autres granulations discrètes étaient disséminées dans le reste du poumon, paticulièrement dans les parties déelives, atteintes de pneumonie hypostatique, comme il sera dit plus loin. En outre, le même poumon présentait, avec le diaphragme, une adhérence large comme le creux de la main, produite par une néo-membranne infiltrée de granulations. Un autre foyer occupait le bord inférieur de l’épiploon qui était épaissi et adhérent aux anses intestinales, dans la fosse iliaque droite. Sur les anses inteslinales, on voyait çà et là, des agglomérations de nodules tuberculeux, dont quelques-uns correspondaient manifestement au siège des plaques de Peyer. Enfin, dans l’encéphale, on découvrit, en soulevant le cervelet, un petit bourrelet de pie-mère tuberculeuse, circonscrivant le plancher du quatrième ventricule, et ayant déterminé le ramollissement de la partie du cervelet avec laquelle il était en contact. Lorsqu'on ouvrit l'intestin, on découvrit d'importantes lésions dont le caractère parut incertain. Les plaques de Peyer étaient telles qu’on les observe dans la fièvre typhoïde, à la fin du troisième septenaire. Dans les larges ulcères qui occupaient le dernier tiers de l'intestin grêle, à partir de la valvule iléo-cæcale et dont les uns étaient en partie détergés, on ne put découvrir aucun vestige de granulations tuberculeuses. Pius haut, les plaques de Peyer se présentaient à l’état d’induration, et on put dis- tinguer çà et là, de petits groupes de granulations tuberculeuses, soit au niveau de ces plaques, soit en dehors d’elles. Les ganglions du mésentère étaient gros comme de petits haricots, rougeâtres, mous, sans tubercules apparents. La rate pesait 210 grammes; elle était grosse, molle, rouge sombre, avec un léger gonflement des corpuscules de Malpighi; telle enfin, qu’on la trouve dans la fièvre typhoïde, mais sans granulations tuberculeuses manifestes. Les poumons, outre les lésions tuberculeuses déjà mentionnées, pré- sentaient une pneumonie hypostatique des mieux caractérisées. L'autopsie terminée nous ayant laissé quelques doutes dans l'esprit, 16 - SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE nous songeâmes à rechercher l'existence du bacille typhique dans la raie. Une aiguille de platine enfoncée par trois fois dans son parenchyme, avec les précautions aseptiques ordinaires, servit à ensemencer trois tubes de gélose, qui, dès le lendemain, donnèrent des cultures pures d'un petit bacille mobile, qui nous parut avoir de grandes ressemblances avec le bacille d'Eberth. Afin de confirmer cette présomption, on rechercha soi- gneusement les caractères de ce microorganisme, à l'aide des opérations dont le détail suit. Des cultures furent faites sur les divers milieux employés en bactério- logie, et donnèrent les résultats suivants. Sur gélatine ensemencée en strie, la culture commence à se développer faiblement dès le lendemain de l’ensemencement, et elle augmente les jours suivants; elle ne liquéfie jamais la gélatine même au bout de plu- sieurs semaines; les cullures sont blanc-grisâtres avec un léger reflet bleuâtre, et disposées le long de la strie d’ensemencement, sans atteindre les bords du tube. Sur gélose glycérinée, placée à 36 degrés, la culture est bien plus abondante que sur gélatine; de chaque côté de la strie on voit une traînée blanc-grisâtre, demi-transparente, barbelée, assez abondante, qui, commence à paraître une douzaine d'heures après l'ensemencement, et qui se développe les jours suivants. Les colonies ne produisent pas de gaz, ne donnent pas d'odeur. En vieillissant, la gélose devient un peu brunâtre. Le bouillon se trouble au bout de vingt-quatre heures, quand il est placé à 36 degrés; à 42 degrés le microorganisme s’y développe encore, mais le trouble n’apparaït qu’au bout de quelques jours. Il se développe sur lait, sans coagulation de ce liquide; l'urine, même acide, permet son développement. Les cultures sur pommes de terre sont caractéristiques. Les deux pre- miers jours on ne voit rien d’apparent; le 3° jour, la culture commence à se montrer, et le 4° jour elle est évidente; elle se développe peu les jours suivants. Les colonies à peine proéminentes ressemblent à la glaçure de sucre que l’on voit sur certains gâteaux, et présentent un éclat d'argent sous cerlaines inclinaisons. Ce mieroorganisme se développe sur bouillon phéniqué. Dans des tubes de bouillon contenant 8 centimètres cubes environ de liquide, on a intro- duit un certain nombre de gouttes d’une solution d'acide phénique à 5 p. 100. Les tubes contenant 18 et 12 gouttes de cette solution sont restés stériles, ceux qui n’en contenaient que 8 gouttes, placés à 35 degrés, ont cultivé, ce dont on s’est assuré par le trouble du bouillon et par de nouveaux ensemencements du liquide sur agar. Ceux qui, contenant 4 gouttes de la solution phéniquée, ont été placés dans l'étuve à 42 degrés, ont encore cultivé. Des tubes de gélatine et de gélose ont été colorés avec #4 et 6 gouttes du liquide de Nœggerath, anciennement préparé. Ces tubes ensemencés SÉANCE DU 7 JANVIER 17 se sont progressivement décolorés, les colonies se colorant en gris violacé très foncé. Des tubes témoins ensemencés avec d’autres microorganismes ou non ensemencés, mis dans la même étuve, ont gardé leur coloration primitive. Ajoutons encore que le microorganisme se développe, mais faiblement, sur milieux privés d'air; il est donc un anaérobie facultatif. Enfin, il n’a produit aucune fermentation gazeuse dans du bouillon contenant 2 p. 100 de lactose et 2 p. 100 de carbonate de chaux. Les cultures sur bouillon et sur agar essayées au papier de tournesol ont donné une réaction neutre. Les caractères morphologiques du microorga- nisme contenu dans ces cultures sont les suivants : Si on dilue une parcelle de culture dans une goutte d’eau, celle-ci blan- chit immédiatement. Colorée avec une goutte d’une solution aqueuse de fuchsine ou de violet de gentiane, la préparation montre alors un bacille quatre à cinq fois plus long que large, sauf quelques échantillons, qui ont une longueur double ou triple, et qui sont formés manifestement par l'union de deux ou trois segments. Ces bacilles sont mobiles ; ils présentent un mouvement de translation assez rapide, et, de plus, un mouvement d’oscillation sur ieur axe, par suite duquel l’une et l’autre extrémité apparaissent successivement au point de vision. Ces baciiles sont la plupart uniformément colorés, mais un assez grand nombre présentent un espace central pâle et à chaque extrémité une petite sphère vivement colorée. Les préparations sèches traitées par la méthode de Gram se décolorent complètement. Les bacilles provenant de cultures vieilles prises sur divers milieux (gélose, gélatine, pommes de terre, bouillon, bouillon phéniqué) présen- tent des caractères de dégénérescence qu’on peutrapporter aux deux types suivants : 1° à côté de bacilles de dimensions ordinaires on observe de très longs filaments ordinairement formés de lignes brisées dont les angles correspondent à l'articulation des deux segments: ces filaments présentent rarement une coloration uniforme, le plus souvent on y voit des alternances régulières ou irrégulières d'espaces clairs, et de cylindres ou de sphères colorés ; 2° la deuxième altération consiste en une augmen- tation de volume des bacilles qui prennent en même temps une colora- tion sombre. Les bacilles ainsi altérés ont tendance à s’agglomérer en petits amas confus de forme irrégulière. Dans les échantillons qui pré- sentent un centre clair, l’hypertrophie porte de préférence sur les sphères terminales, qui souvent sont-demeurées libres par suite d’une fragmenta- tion qui s’est effectuée au niveau de l’espace clair. Il nous semble que dans l’état actuel de nos connaissances sur le bacille d'Eberth, les caractères des cultures et les caractères morphologiques que nous venons de rapporter sont de nature à démontrer l'existence de la fièvre typhoïde chez le sujet qui fait l’objet de cette communication. Les qe 18 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE lésions trouvées à l’aulopsie ne laissent d'autre part aucun doute sur la coexistence d’une tuberculose aiguë. Les deux maladies infectieuses ont donc évolué simultanément, avec cette circonstance, que non seulement les lésions de l’une et de l’autre se sont juxtaposées, mais encore que l’évolution dothiénentérique semble avoir appelé sur la muqueuse intesti- nale et sur le feuillet péritonéal de l'intestin, ainsi que dans la pneumonie hypostatique du lobe inférieur du poumon droit, la fixation de colonies tuberculeuses. C’est done là un exemple très net, le premier, à notre con- naissance, scientifiquement démontré, de fièvre typhoïde et de tubercu- lose aiguë combinées, c’esl-à-dire d’une de ces maladies proportionnées sur lesquelles MM. Kezscn ET KIÉNER ont appelé l'attention dans leur Traité des maladies de pays chauds. Ce fait introduit dans la casuistique des pyrexies de forme typhoïde une nouvelle difficulté de diagnostic, résultant de la possibilité d'une combinaison de l'infection tuberculeuse avec l'infection typhique. SUR LE MICROBE DU BÉRIBÉRI, par MM. les D’ Josepn Musso et J.-B. MoreLur. (Travail du laboratoire de Bactériologie de la Faculté de médecine de Montévidéo.) Nous avons examiné le sang de onze malades, dont trois à Montévidéo et huit à Rio-de-Janeiro. Dans tous les cas, le sang recueilli avec les pré- cautions les plus rigoureuses étant semé dans des lubes de culture conte- nant du bouillon Léæffler, agar, gélatine et sérum coagulé, a donné lieu au développement d’un même microbe. Ge microbe a été aussi retrouvé à l'examen microscopique du sang de deux malades du lazaret de l'ile de Flo- res, et à l’autopsie de deux malades décédés dans le même lazaret, autop- sies faites dix et dix-sept heures respectivement après la mort. Les tubes semés avec le sang, le liquide ascitique, l’œdème sous-cutané, les nerfs périphériques, la moelle (1 fois sur 5) ont donné un résultat positif. Les tubes semés avec le foie (3) et la rate (2) sont demeurés stériles. C'est un microcoque de dimensions assez variables (de 0.8 y à 2.40), réuni en diplocoques en tétraèdes, en chapelets irréguliers et en groupes réguliers (staphylocoques) et irréguliers. Il se colore bien surtout avec le liquide de Ziehl, mais aussi par la méthode de Gram et, quoique moins bien, par la méthode de Weiïgert. Quand il est coloré par Le Ziehl], on voit qu'il n’est pas homogène, mais qu’il contient des corpuscules réguliers en nombre de 1 ou 2, sphériques ou réniformes, qui retiennent avec téna- cité la fuchsine. Il y a aussi une épaisse matière intercellulaire. SÉANCE DU 7 JANVIER 19 Les colonies de ce microbe sur plaques, après un séjour de quarante- huit heures à l’étuve chauffée à 22 degrés, sont rondes, jaunâtres, granu- leuses, entourées d’un liséré de gélatine ramollie. La culture par piqûre dans la gélatine se développe sous forme de colonies isolées, rondes, jau- nâtres qui commencent à liquéfier le milieu en commençant par la surface. Cette liquéfaction progresse avec rapidité variable et peut s'arrêter au tiers supérieur du tube. Il se dépose en bas un précipité cohérent couleur jaune serin, qui par l'agitation se divise en gros flocons poisseux. Dans les premiers jours il y a sur la surface un anneau adhérent aux parois, lequel, au bout de quelques jours, se réunit au dépôt du fond, laissant le liquide qui surnage complètement transparent. La culture dans du bouillon de Læffler offre l'apparence de la culture sur gélatine, lorsque celle-ci a été liquéfiée. La culture par strie sur agar simple se développe sous forme de colo- nies cohérentes, qui se soudent en un enduit porcelainé, à demi transpa- rent, se développant assez en largeur, de couleur blanche tirant au crème et au jaune serin dans les parties déclives du tube et dans les cultures anciennes. La culture par piqüre dans la gélose se présente sous la forme d’une couche qui croît sur la surface sans arriver à toucher les parois; cette couche de couleur blanche ou jaunâtre se couvre au bout de quelques jours de petites écailles jaunes, séchées, disséminées. Sur le sérum semé par strie il y a développement de petites colonies blanches à demi transparentes. Sur pommes de terre, les stries sont blanc sale au commencement, mais elles se recouvrent bientôt de colonies jaunes dans la partie centrale. Une température de 60 degrés pendant une heure détruit la vitalité de ce microbe. Il croît assez péniblement à l'abri de l'oxygène. Les caractères en sont variables, et l’on peut en distinguer deux nes extrèmes reliés d’ailleurs par des types intermédiaires : l’un à microbes pelils disposés en groupes réguliers liquéfiait vite la gélatine; l’autre à microbes plus gros liquéfiait lentement et donnait d'emblée sur pommes de terre une culture jaune serin. L'identité de ces deux types extrèmes est démontrée par l’existence des types intermédiaires, par la première variété en la seconde, par le vieillissement, par la coexistence des diverses formes dans le même sang (cadavres des béribériques, animaux inoculés) et par la transfor- mation que subit la seconde variété dans la première par l'inoculation au lapin, animal sensible et le changement inverse produit par l'inocula- tion au chien, qui est presque réfractaire. Par l’inoculation aux animaux, nous avons établi que la virulence du microbe est d'autant plus notable qu'il liquéfie plus rapidement la gélatine. 20 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les inoculations ont été faites en divers endroits : tissu cellulaire péri- nerveux ({ lapin), tissu cellulaire sous-cutané (14 lapins, 6 cobayes et 3 chiens), veines (2 lapins), méninges cérébrales (4 lapins, 2 chiens). La quantité de culture en bouillon injectée a varié suivant l'animal et l'endroit de l'inoculation. Dans les veines et les méninges des lapins et des petits chiens on inoculait 4/2 à 2/3 de centimètre cube, dans le tissu cellulaire des lapins 4 à 2 centimètres cubes. Dans ce dernier cas, on répétait quelquefois l’inoculation une ou deux fois de manière à injecter 3 à 4 centimètres cubes par doses de 1 centi- mètre cube, espacées de 10 à 15 jours. Les résultats ont été les suivants : tandis que le lapin et le cobaye sont assez sensibles à ce microbe, le chien s’est montré d'autant plus résistant qu'il est plus âgé, la mort ne survenant en lui qu'exceptionnellement,. Cependant, si l’on tue ces chiens un ou deux mois après l'inoculation, on peut trouver des lésions de névrite en voie de régénération avec beau- coup de fibres jeunes, et aussi le microbe inoculé. Le lapin s’est montré toujours plus sensible que le cobaye, comme on peut le voir par la table qui est à la fin de cetle note. Les symptômes offerts par les animaux inoculés consistaient dans une apathie avec parésie des extrémités postérieures, chute des poils et gon- flement de l’abdomen. La mort arrivait dans un laps de temps qui a oscillé entre quarante jours et quatre mois, écarts qui tiennent sans doute à la différence des doses et de la virulence des microbes inoculés. A l’autopsie, on trouve trois lésions dominantes, qui se retrouvent chez l'homme béribérique : l’ascite, l'hydropéricardie et la névrite dégéné- rative. Le liquide qu’on trouve dans l'abdomen et dans le péricarde est fortement albumineux et salé caractère qu'offrent les exsudats de l’homme béribérique. x La névrite est plus accentuée dans les petits filets nerveux que dans les gros troncs et se localise de préférence aux extrémités postérieures. Cette névrite que nous étudions actuellement est surtout périaxile. Comme lésions accessoires, quoique fréquentes, on note une distension énorme de la vessie qui peut contenir, chez le lapin, jusqu’à 45 centimètres cubes d'urine (jamais albumineuse) et des hémorragies à la base des poumons. S Nous n'avons jamais trouvé l’œdème sous-cutané. Quelquefois il y avait un peu d'’œdème dans le tissu cellulaire qui entoure les paquets vasculo- nerveux. Quelle que fût la voie d’inoculation du virus, nous n’avons jamais obtenu de réaction locale. La coloration et surtout la culture nous ont fait retrouver le microbe inoculé dans le sang, Les nerfs, le liquide de l’ascite, et quelquefois dans la moelle. A côté du microbe inoculé nous avons trouvé quelquefois des bacilles SÉANCE DU 7 JANVIER 21 ———_——_—_—_—_—_—_————…—…—…—…—…—…—…—…—…—_—.…." —————…—…—….…—…—….….……—….—…—————…—…—…—…—…——…—…—…—……—……—………—…————…——…—_——…—…_—…—_—…—_—.—.———…——— et des coccus étrangers que nous avons pu identifier avec quelques espèces vulgaires de la bouche et de l'intestin, par exemple : les bacillus g et à de Vignal et le Bacterium coli commune; fait à rapprocher de ce qui arrive chez l’homme où nous avons trouvé à côté du microcoque spécifique, d'autres espèces, c’est-à-dire: le Bacillus mesentericus vulgatus, le Bacillus mesentericus ruber, le Staphylococcus pyogenes albus et aureus, le Streptococcus pyogenes et un pelit streptocoque très intéressant que nous étudions à présent et qui semble favoriser singulièrement la produc- tion de la maladie expérimentale quand on l’associe au microbe spécifique, quoiqu'il soit incapable seul de causer les lésions béribériques. Nous eroyons que les bacilles qu’on retrouve chez les béribériques (malades et cadavres) sont les mêmes signalés par Lacerda, Ogata et Eykmann, comme agents étiologiques du Béribéri. Les infections bactériennes secondaires qu’on observe dans le béribéri spontané et expérimental sont vraisemblablement dues à la diminution de la phagocytose normale des muqueuses par le fait de la névrite péri- phérique. Nous poursuivons ces études, et nous tiendrons cette savante Société au courant de nos recherches (1). Tableau résumant nos dernières expériences. Lapin L — Microbe très liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 24 jours après, 1 c. c.; 15 jours après, 1 c. c. — Mort #3 jours après la première inocu- lation. Lapin IL. — Microbe très liquéfiant. Première inoculation, À c. c.; 24 jours après, À c. ©. — Mort 69 jours après la première inoculation. Lapin IT. — Microbe peu liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 24 jours après, { c. c. — Mort 73 jours après la première inoculation. Lapin IV. — Microbe peu liquéfiant. Première inoculation, 2 c. c,; 24 jours après, 1 c. c.; 15 jours après, 1 c. c. — Survit 413 jours après la première inoculation (1). Lapin V. — Microbe assez peu liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 45 jours après, 4 c. c.; 14 jours après, 1 €. c. — Mort 45 jours après la pre- mière inoculation. Lapin VI. — Microbe assez peu liquéfiant. Première inoculation, 2/3 c. c.; dans la veine auriculaire. — Survil 101 jours après la première inoculation. Lapin VIT. — Microbe liquéfiant exalté par passage dans le corps du lapin I. Unique inoculation, 2 ce. c. — Mort 13 jours après la première inoculalion. Lapin VIIL. — Microbe très liquéfiant. Unique inoculation, { e. c. — Survit 60 jours après la première inoculation. » (1) Ces études étaient à peine achevées, que le courrier d'Italie nous appre- nait la douloureuse nouvelle de la mort de mon cher collaborateur et ami le Dr Joseph Musso. Je ferai ce que je pourrai pour achever tout seul ce travail commencé et présque achevé avec la savante collaboration de mon regretté ami le D' Musso. 99 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ee Cobaye I. — Microbe très liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 25 jours après, À c. c.; 11 jours après, 1 c. c.; 14 jours après, 1 ce. c. — Mort 58 jours après la première inoculation. Cobaye Il. — Microbe très liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 25 jours après, À c. ©. — Survit 84 jours après la première inoculation. Cobaye IT. — Microbe peu liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 25 jours après, 2/3 c.c.; 29 jours après, 1 ©. c. — Mort 95 jours après la première inoculation. Cobaye IV. — Microbe peu liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 25 jours après, À ©. c.; 29 jours après, 4 ©. c. — Survit 83 jours après la première inoculation. Cobaye V. — Microbe peu liquéfiant. Première inoculation, 1 c. c.; 21 jours après, 1 c. c.; 45 jours après, 1 ©. c. — Mort 80 jours après la première inocu- lation. SUR LA PÉNÉTRATION DE MICROBES ÉTRANGERS DANS LE SANG ET DANS LES TISSUS DES MALADES DE BÉRIBÉRI, par M. Morezu (de Montévidéo). Peckelharing et Winckler furent les premiers à signaler l'existence de divers coccus et bacilles dans le sang des malades 'de béribéri, mais ils énoncent, sans se prononcer, l'hypothèse que ce soient des formes d’évo- lution du même microbe, ce qui prouve qu'ils n’ont pas fait d'études systématiques. Les auteurs qui les suivent (Lacerda, Ogata, Rebourgeon, Cornelissen et Eykmann) ne parlent pas de la grande variété des formes de microbes qui se trouvent dans le sang; ce qui nous a fait croire en commençant nos travaux que les deux observateurs hollandais avaient élé victimes de quelque erreur; maïs, bien vite nous fûmes convaincus qu'ils étaient dans le vrai, et que les autres auteurs auraient dû en trouver; mais lais- sant passer, sans mentionner la présence d’autres microbes. Ces infections microbiennes secondaires sont fréquentes chez l’homme dans les formes graves, tandis qu’elles sont exceptionnelles dans les formes bénignes, se trouvant alors isolé le micrococcus que nous croyons ]a cause du béribéri. Dans le sang de neuf malades nous avons trouvé, trois fois le Staphy- lococcus pyogenes albus, une fois le Streptococcus pyogenes, et une fois un pelit Streptococcus à grains très fins (0,3 pu), qui se teint par la méthode de Gram; s'étant à peine développé dans la gélose sous la forme de très petites colonies translucides, et se développant un peu mieux dans le bouillon Lœæffler, présentant en suspension des grains formés chacun, par l’agglomération d’un chapelet d'une centaine au moins de coccus, et se développant faiblement dans la gélatine où on SÉANCE DU 7 JANVIER 93 percevait à peine son développement au sixième jour. Son action patho- gène et son développement dans des pommes de terre était nul. Le faisant passer successivement dans du bouillon Lœæffler additionné d'un petit bout de nerf, et dans du sérum glycériné et glucosé, nous lui avons fait prendre tous les caractères du Streptococcus pyogenes. Il serait done une nouvelle forme, atténuée, du Streptococcus pyogenes, qui présente des formes si variées. Dans les deux cadavres dont nous avons pu faire l’autopsie, nous avons trouvé les infections suivantes : le Bacillus mesentericus vulgaris dans le sanget dans le nerf crural, le Bacillus subtilis (4) dans la moelle dorsale et le petit Streptococcus déjà mentionné dans la moelle lombaire. Chez les chiens inoculés par des injections sous-cutanées ou par trépa- nation, nous n'avons pas pu trouver, jusqu'à présent, cette pénétration de microbes vulgaires. Avec les lapins et les cobayes, il arrive tout à fait l’opposé : dans ce cas l'infection est la règle. Les espèces que nous avons pu déterminer chez ces derniers animaux sont les suivantes : le Bacterium coli commune, et les bacilles g, k et à signalés dans la salive humaine par Vignal (2). Il se fait donc, sans doute, pendant le processus du béribéri, peut-être en faveur des lésions nerveuses qui doivent vraisemblablement empêcher.la phagocytose normale de notre surface interne et externe, une pénétration des microbes qui existent généralement dans la peau et dans les tuniques muqueuses. ÉTUDES SUR UN CAS DE LANGUE NOIRE, par M. Morezrr (de Montévidéo). J'ai eu la chance de trouver un cas de cette si rare maladie et de la pouvoir ainsi étudier au point de vue bactériologique. M. N..., étudiant en médecine, ayant un bon état général et des anté- (1) Ce sont probablement ces microbes qui sont les bacilles signalés dans cette maladie par plusieurs auteurs. (2) Une étude que nous avons commencée sur les microbes de la salive du lapin nous démontre la ressemblance de la flore buccale de cet animal avec celle de la salive humaine. En effet, nous avons pu déterminer jusqu'à pré- sent, dans la salive des lapins, les microbes suivants : Bacterium termo. Bacil : lus subtilis, Bacillus proteus vulgaris, Bacillus fluorescens putridus, et les microbes de Vignal : Coccus a, et Bacillus f, et i. 24 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SE ——————— — ——"———— …—" ———…——…—…—…—…"— —"— —"—"… —"—"— —""— —" —" "— ——"———— ——"— —“_— ———"——————"———“Γ————_— -cédents personnels satisfaisants (1), remarqua, il y a trois ans environ, que sa langue prenait peu à peu une teinte brune; depuis, la maladie s’est maintenue comme elle est aujourd’hui, se desquamant souvent pour réapparaitre bientôt, d’abord avec une teinte jaunâtre, puis brune, pour finir par être tout à fait noire. Examinant la région malade, on voit qu'il existe une couche à peu près ovale qu'occupe la partie centrale de la face dorsale de la langue, le côté gauche étant plus fortement pris, et laissant tout autour de la langue un espace tout à fait sain. Sa couleur est brun foncé dans le centre, et vers les bords, la couleur devient jaune foncé. A l’aide d'une pince on reconnaît que cette couche est formée par l’adossement de nombreuses papilles filiformes fortement-hypertrophiées. Les molaires supérieures et inférieures, surtout du côté gauche, sont recouvertes d’une couche très mince, mais très adhérente de la mème couleur que celle de la langue malade. A l'examen de ces papilles on voit, entre les cellules épithéliales et dans l’intérieur même de celles-ci, un amas de petits becilles de0.83à044p de large et de 2 à 4 u de longueur, et quelquefois, mais rarement, allant jusqu'à 6 &. Des fois, on les surprend au moment de la bipartition et ils ressemblent alors des Diplobacillus de 4 y. Il existe en plus une très petite quantité de Coccus. Transportant une petite partie de la papille dans la gélose solidifiée en bec de flûte, nous avons pu isoler Le Bacillus en question. Dans ce milieu il prend l'aspect, en se développant, de petites colonies transparentes, mais moins visibles que celles du Pneumococcus de Talamon. Au même temps il existe, dans le liquide de condensation qu'on recueille au fond du tube, un dépôt blanchâtre assez apparent. Introduit dans la gélatine par piqüre il n'offre aucun développemént avant le quatrième jour, et dès lors il continue à croître pendant un mois sous la forme de petites colonies blanchâtres, tout le long de la piqüre, tandis qu'à la surface il n’y a aucun développement. Dans le bouillon Lœæffler se produit les premiers jours un léger trouble qui se dépose petit à petit et termine par un léger précipité au fond du tube. Agitant après le tube, il prend l'aspect, en s’élevant, d’une mince toile d’araignée. , Dans le sérum simple solidifié il forme des petites colonies transpa- rentes; dans le même milieu glucosé et glycériné, les stries qu'il forme sont blanchätres et assez visibles. (1) Sa mère, âgée de soixante-six ans et bien portante, est cependant de source cancéreuse ; son père est mort à l’âge de cinquante-deux ans d’un épi- théliome de la langue et sa mère d'un carcinome de l’utérus à l’âge de qua- rante-cinq ans. Une sœur encore vivante semble être atteinte d’un carcinome de l'utérus. SÉANCE DU 1 JANVIER 95 Dans des pommes de terre alcalinisées, au bout de vingt-quatre heures se développent de petites bosselures muqueuses d’un blanc grisâtre qui restent très stationnaires très vite. Nous avons étudié ces caractères mor- phologiques surtout dans les cultures en bouillon. Sa largeur dans ce milieu est aussi de 0.3 à 0.4 w, et sa longueur varie moins que dans les préparations de la langue ; puisqu'il varie généralement entre 0.5 et 1.5 u, et on trouve rarement des individus qui en aient davantage; on peut exceptionnellement en trouver de 4.2 u. Très souvent les individus s'unis- sent en chaïnettes (Streptobacillus) de 6 à 10 articles. On peut très sou- vent observer un groupement assez curieux : deux Bacillus courbés en demi-cercle s'unissent par les deux bouts formant ainsi un cercle parfait, qu’on pourrait prendre par un Micrococeus à centre peu coloré, si on l’examinail avec un faible grossissement. Dans les milieux solides, il est isolé et présente une longueur plus uni- forme, 1 à 2u. Il n'a pas de mouvements propres et il se teint par la méthode de Gram. Nous n’avons pas pu trouver de spores. Nous n’avons jamais pu reproduire la maladie par inoculation. La langue noire se trouverait habituellement dans les perroquets et la girafe, et exceptionnellement dans la vache et la chèvre. Je n’ai-jamais pu trouver la langue ainsi altérée dans ces derniers; je l'ai seulement vue chez les perroquets. On voit dans ces animaux que la coloration noire est héréditaire. Elle est uniforme et ne présente pas l'aspect papillaire comme chez l'homme. Il s'agirait donc d’une pigmen- tation physiologique. Nous n'avons pas trouvé non plus par les cultures, de la muqueuse linguale de cet animal, le microbe que nous avons men- tionné (1). SUR L'ORGANISATION DES ACTÆONS, par M. E.-L. Bouvier. (Campagne de l’Airondelle, 4° note.) Dans une note publiée tout récemment dans les Comptes rendus de la Société, je m’exprimais ainsi : «Les barrières qu’on a voulu élever entre les Prosobranches et les autres Gastéropodes sont bien près d’être renversées, (1) Après que ces lignes étaient rédigées, j'eus l’occasion d'étudier à Pabat- toir municipal quelques langues noires de vaches. Chez ces animaux la cou- leur est produite par une pigmentation de la couche profonde de la muqueuse linguale, pigmentation physiologique, indépendante de tout microbe, comme je pus m'en assurer par l'étude histologique et les essais de culture. 26 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE et on est en droit de penser que dorénavant bien peu de naturalistes con- sentiront à former, avec Jhering, deux Phyllums distincts et complètement indépendants dans la classe des Gastéropodes » (1). Je ne pensais pas être-si près de la vérité. Guidé par des études compa- ratives sur l’anatomie des divers groupes de Gastéropodes, je songeai, pour relier ces groupes entre eux, à m'adresser à la forme géologique- ment la plus ancienne des Gastéropodes hermaphrodites, et je mis à profit pour cette étude des exemplaires d’Actæon solidulus Lam., que M. le D' Jousseaume avait bien voulu me communiquer. La famille des Actæonidés remonte au carbonifère, et le genre Actæon au trias; parmi les Gastéropodes hermaphrodites marins, on ne connaît pas de forme plus ancienne, et c’est avec raison que Jhering en a recom- mandé l'étude. Je m’'aperçus bien vite que l’A. solidulus présentait des caractères intermédiaires entre les Gastéropodes unisexués et les Gastéro- podes hermaphrodites et, dans une note publiée le 24 décembre à la Société philomathique de Paris (2), je donnais de cette espèce une esquisse anatomique suffisamment précise pour montrer que l’Actæon doit compter parmi les plus intéressants et les plus synthétiques de tous les Gastéro- podes. Mon intention est de développer ici cette esquesie, et d'exposer une partie des conclusions qu’elle comporte. : Morphologie externe — Le tortillon de l'A. solidulus présente de nom- breux tours de spire, et sa chambre branchiale, aussi profonde au moins que celle des Prosobranches les plus turriculés, s'étend sur toute la lon- gueur du dernier tour. Le plancher de celte cavité présente trois saillies parallèles qui sont, de gauche à droite, la saillie formée par la partie anté- rieure du tube digestif, celle formée par l’oviducte, enfin un bourrelet très saillant, sorte d’épitænia qui sert de limite à une gouttière dont la paroi droile est formée par le manteau. Cette gouttière se prolonge jusqu’au fond de la chambre palléale et se continue même dans un appen- dice en forme de cæcum qui fait suite à cette chambre. Le pénis, situé sur la tête en arrière du bouclier céphalique, l’orifice mâle se trouve à sen extrémité; l’orifice femelle (car l’animal est herma- phrodite) est un peu plus en arrière, à l'extrémité de l’oviducte. Le rectum est accolé contre la partie droite de l’oviducte, et l’anus se trouve à peu près au niveau du milieu de la longueur de ce dernier conduit. La branchie occupe sensiblement l'axe médian de la voûte palléale; comme chez les Turbos et les Troques, elle est bipectinée et, par un voile membraneux qui divise en deux étages le fond de la chambre palléale, elle se rattache à gauche à la voûte de cette cavité, à droite au bourrelet (1) Quelques observations anatomiques sur le Mollusque Gastéropode (17 dé- cembre 1592). (2) Comptes rendus de la Société philomathique de Paris, 24 décembre 1892, SÉANCE DU 1 JANVIER 97 que j'ai signalé plus haut. Le voile membraneux du côté droit ne s'avance guère qu'au niveau de l’anus, mais celui du côté gauche s'étend beaucoup plus loin en avant, la branchie présente néanmoins une pointe libre, en forme de plumet, comme celle des Prosobranches diotocardes. Les lamelles branchiales ressemblent énormément à celles des Siphonaires, et présentent déjà, quoique à un faible degré, ces plissements et ces groupes qui caractérisent les branchies des Tectibranches. Le rein, contigu à la branchie, occupe en partie la moitié gauche de la chambre palléale, où il forme une bande allongée. C'est un sac très spacieux, tapissé de papilles à l’intérieur; il s’ouvre par une large fente, légèrement bilabiée, un peu en arrière de la base de la pointe branchiale. Le péricarde est situé contre le rein, à la base et sur le côté gauche de ce dernier. L’oreillette est située en avant du ventricule et la disposition est à peu près complètement prosobranche. A droite, sur le manteau, un peu en dessus et en dehors de la gouttière dont j'ai parlé, se trouve une bande plissée et peu apparente, qui rappelle à tous égards l’organe de même nature que j'ai signalé chez les Amphiboles, et qui pourrait bien représenter une branchie droite rudimentaire. Anatomie. — Le tube digestif se fait remarquer par la longueur très considérable de la masse buccale, qui ressemble par sa forme et par sa musculature à une trompe rétractée; les deux glandes salivaires sont formées chacune par un tube médiocrement allongé. L'estomac a la forme d’un sac très allongé qui s'étend sur une grande longueur du tortillon ; il est en relation avec l’œsophage et l'intestin par deux points contigus de son extrémité antérieure. L'œsophage ne se dilate pas sensi- blement et ne présente ni jabot, ni gésier; l'intestin est beaucoup plus grêle et décrit quelques sinuosités à l’intérieur du foie, Je n'ai pas encore étudié l’appareil circulatoire, en outre il m'a été impossible jusqu'ici de mettre en évidence le canal réno-péricardique. L'appareil génital commence dans le tortillon par une glande herma- phrodite très développée, dont les-lobes sont logés à la surface ou à l’inté- rieur du foie. Le canal sinueux de la glande est superficiel et situé sur la face columellaire du tortillon ; arrivé au niveau antérieur de l’estomac, il rencontre deux glandes très développées, semblables à celles qu’on observe chez les Opisthobranches; l’une est la glande de l’albumine, l’autre la glande de la glaire ; en relation avec ces glandes se trouve une poche copulatrice (pleine de spermatozoïdes) dont le canal peu allongé présente une dilatation des plus remarquables. En même temps que ces glandes, le canal de la glande hermaphrodite s'ouvre dans un large con- duit, que j'ai appelé plus haut oviducte, mais qui joue en réalité le même rôle que le canal godronné de l'Escargot, puisqu'il doit conduire à la fois les œufs et les spermatozoïdes. Autant que j'ai pu le voir jusqu'ici, les spermatozoïdes suivent une gouttière comprise entre deux des plissements internes de l’oviducte. Mais en avant, au niveau de l’orifice femelle, la 28 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE gouttière devient un canal déférent très distinct, dont les sinuosités nom- breuses s’apercoivent par transparence entre lextrémité antérieure de l'oviducte et la base du pénis. Ce dernier rappelle par sa forme celui du Bucein, mais il est beaucoup plus court; il est tout entier rempli par les circonvolutions du canal déférent, qui vient s’ouvrir à son extrémité. Le système nerveux ressemble à celui des Prosobranches, particulière- ment à celui des Janthines, avec quelques dispositions, peu apparentes au premier abord, qui ont permis aux descendants des Actæons de devenir orthoneures. Les ganglions cérébroïdes sont réunis par une assez longue commissure et se confondent complètement avec les ganglions commis- suraux correspondants. De chaque masse cérébro-commissurale on voit partir deux connectifs qui viennent s’unir aux ganglions pédieux du même côté. Les ganglions pédieux sont réunis par deux commissures contiguës et assez fortes : la plus antérieure et la plus réduite est probablement celle que Jhering a improprement appelée commissure paracérébrale, l’autre est la commissure normale. Je n’ai pas encore trouvé la commis- sure parapédieuse, mais j'ai pu mettre en évidence la commiseure subcé- rébrale. La branche sus-intestinale de la commissure viscérale passe obli- quement au-dessus de la longue masse buccale et rattache le ganglion cérébro-commissural droit au ganglion sus-intestinal, qui est situé à gauche contre les parois du corps; le ganglion sous-intestinal est situé à droite, à peu près au même niveau, et se rattache au ganglion cérébro- commissural gauche par une branchie commissurale qui passe oblique- ment au-dessous de la masse buccale. A partir des ganglions sus-intesti- nal et sous-intestinal, les deux branches de la commissure vont se réu- nir, sous la forme d’une anse sus-æsophagienne, dans le ganglion viscé- ral qui est situé beaucoup plus en arrière, entre l’oviducte et l'œsophage. C'est le ganglion sus-intestinal qui innerve la branchie et la partie gauche du manteau; le ganglion sous-intestinal innerve, au contraire, la partie droite du même organe (1). IT Les Gastéropodes se divisent en deux groupes, suivant qu'ils sont uni- sexués (Prosobranches) ou kermaphrodites (Opisthobranches, Pulmonés); les premiers sont aussi appelés chiasloneures (ou streptoneures), parce que (1) M. Pelseneer a figuré (Challenger, vol. XXII, Pteropoda, pl. I, fig. 11), sans le décrire, le système nerveux de l’Actæon tornatilis; tous les centres ganglionnaires sont figurés (à l'exception d'un seul qui n'existe peut- être pas dans l'A. tornatilis, mais les ganglions situés sur la commissure vis- cérale ne sont pas tous exactement interprétés, et la commissure elle-même, telle qu’elle a été reconstituée par l’auteur, n'est pas autre chose qu'une commissure à peine tordue de Tectibranche. SÉANCE DU 1 JANVIER 29 leur commissure viscérale est tordue en 8 de chiffre; les seconds au con- traire sont or(honeures (ou enthyneures). — On connaissait jusqu'ici quel- ques chiastoneures hermaphrodites (Valvée, certains Marséniadés), mais la chiastoneurie était absolument inconnue dans le second groupe. La découverte d’une commissure croisée en 8 de chiffre, chez l'Actæon, per- met d'établir que la chiastoneurie n’est point localisée chez les Proso- branches. L’Actæon eslbien un opisthobranche, on n'en saurait douter : sa radule, qui ressemble à celle des Bullidés, sa glande hermaphrodite et l'appareil génital presque tout entier, la forme des lamelles branchiales, la présence d'un disque céphalique et d’une commissure subcérébrale; tels sont les caractères qui le rattachent étroitement aux Opisthobranches, et notam- ment aux Opisthobranches tectibranches. Mais il présente des affinités presque aussi grardes avec les Pulmonés et les Prosobranches. Il rappelle les Pulmonés aquatiques par sa bran- chie, qui ressemble beaucoup à celle des Siphonaires, par son opercule qui se relrouve encore chez les Amphiboles, par le cœur dont l'oreillette est située en avant du ventricule, par la présence d’une branchie rudimen- taire (?) droite analogue à celle des Amphiboles, enfin par la posilion du rein, qui est celle de presque tous les Pulmonés aquatiques. Ses affinités avec les Prosobranches, et surtout avec les Prosobranches diotocardes, ne sont pas moins frappantes. La branchie est bipectinée et munie d’une pointe libre comme celle des Troques et des Turbos ; et comme cette dernière aussi, elle se rattache à la voûte palléale par deux voiles membraneux qui divisent en deux étages le fond de la chambre. La dis- position du cœur est prosobranche, le système nerveux est croisé en 8 de chiffre, enfin les cellules nerveuses, par leurs dimensions tiennent le milieu entre celles des Prosobranches et celles des Gastérapodes uni- sexués. Si l’on observe que les Prosobranches diotocardes remontent aux périodes géologiques les plus anciennes, et que les Actéonidés sont les plus anciens représentants des Gastéropodes dioïques, on est en droit de con- clure que ces derniers se rattachent directement aux Prosobranches dio- tocardes (peut-être par l'intermédiaire des Pseudomélanidés) que leurs formes les plus anciennes (Actæonella étaient probablement de vrais dio- tocardes déjà dioïques, et que les Actéonidés, en passant progressivement aux Opisthobranches tectibranches, ont en même temps servi de point de départ aux Pulmonés aquatiques. Les Actéons sont certainement, comme je le disais au début de cette note, les formes les plus synthétiques de la classe des Gastéropodes et la connaissance de leur organisation suffirait seule pour établir l’homo- généité parfaite de cette classe et de l’embranchement des Mollusques tout entier. En déplaçant progressivement leur branchie vers la droite,les descendants des Actéons ont perdu peu à peu tous les caractères qui les _ # de % æ] # He CT) {_ = 7" j= E] 1 PAL VEN (E © 920 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE raltachaient aux Prosobranches; leur commissure viscérale est devenue -orthoneure, et, suivant qu'ils évoluaient vers les eaux douces ou dans la mer, ils ont donné naïssance aux Pulmonés aquatiques branchifères et operculés d'une part, de l’autre aux Opisthobranches de la famille des Bullidés. L’EXAGÉRATION DU DICROTISME COMME SIGNE PRONOSTIC DE L'HÉMORRACGIE INTESTINALE DANS LA FIÈVRE TYPHOIÏDE, par M. Ep. CHRÉTIEN, Interne des hôpitaux. L'exagération du dicrotisme est un fait d’une grande importance ; puis- qu'il permet de prévoir, un certain temps à l’avance, la production d’un des accidents les plus graves de la fièvre typhoïde, l’hémorragie intesti- nale. Ce fait a été signalé pour la première fois en 1891, par M. le professeur Bouchard, sur un typhique traité dans son service de l'hôpital Lariboi- sière. Depuis, j’ai eu l’occasion d'observer trois fois le même fait sur les typhiques soignés pendant l’année 1892-1893 dans le service de M. Luys, à la Charilé. Trois fois, l’exagération du dicrotisme m'a permis de prédire la production d’une hémorragie intestinale : et trois fois celle-ci s’est produite dans les 24-36 heures qui ont suivi ma constatation. J'ai cherché quel pouvait être le lien physiologique qui rattachait ces deux accidents. C'est cette explication que je désire soumettre à la Société de Biologie. Dès le début de la fièvre typhoïde le pouls est nettement dicrote. En effet, le cœur bat vite, et la tension artérielle est faible, caril y a une vaso-dilatation périphérique assez considérable en rapport avec l’éléva- tion de la température. Mais dans le courant du deuxième septenaire, le muscle cardiaque se prend (du moins dans les formes graves). Sa contraction est plus molle; la circulation se ralentit. Il y a alors renversement des facteurs : un cœur qui bat lentement avec une pression artérielle qui augmente pro- gressivement. Il en résulte une stase sanguine périphérique et viscérale, ainsi que l'indique la congestion pulmonaire passive, si fréquente à ce moment. Alors le polycrotisme remplace Le dicrotisme; car des ondes d’élasti- cité viennent, en raison de l’augmentation de la tension artérielle, s’ajou- ter à l'onde centrifuge secondaire. Le toucher n’est pas assez sensible pour dissocier celte mulliplicité d'ondes : nous sentons la première SÉANCE DU 1 JANVIER 31 pulsation, puis une seconde qui nous parait unique, alors qu’en réalité, elle n’est que la résultante de plusieurs ondes de différentes natures. Le malade se trouve donc à ce moment dans toutes les conditions vou- lues pour faire une hémorragie ; car, d’une part, sa muqueuse intestinale est ulcérée, et au niveau des ulcérations, les artères sont plus ou moins dénudées; d’aulre part, il y a stase dans la circulation viscérale et augmentation de la tension (1). Sitôt l’hémorragie produite, la tension baisse à nouveau, la contrac- tion cardiaque s'accélère, le dicrotisme reparaît. C’est là une explica- tion purement théorique, car on ne peut faire sur l’homme les recherches de la physiologie expérimentale. Cependant il nous semble qu’on pour- rait la vérifier en prenant chaque jour, chez un certain nombre de typhiques simulianément la tension artérielle avec le sphygmomano- mètre et le tracé du pouls à l’aide du sphygmographe de Marey. (1) M. Laborde nous fait remarquer qu'il faudrait sans doute tenir écalement compte de l’état du sang. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Mareraeux, directeur, 1, rue Cassette. | Or ARE res pat Un RU | RES LEE 33 SÉANCE DU {4 JANVIER 1893 M. Ch. Ricuer : Des phénomènes chimiques du frisson. — MM. Hawrior et Ricuer : De l’action physiologique du chloralose (Mémoires.) — MM. Broww-Séquarp et D'ARSONVAL : Quelques règles relatives à l'emploi du liquide testiculaire. — MM. n’Ansonvar et CHarrin : Action des microbes pathogènes sur la cellule végétale. — M. P. ReGnanp : Sur une bouteille destinée à recueillir l’eau des grandes pro- fondeurs. — M. P. REGNARD : Sur une pompe de roulis utilisable pour l'analyse des gaz de l’eau à bord des navires. — M. GC. CHaBrié : Chimie physiologique : sur le passage des graisses dans l'urine. — M. J. ne Rey-PatLHAne : Action de l'alcool et du soufre sur la levure de bière. Présidence de M. Dareste. DES PHÉNOMÈNES CHIMIQUES DU FRISSON. Note de M. Ch. RICHET. (Note déposée dans la séance du T janvier.) En continuant l'étude du frisson thermique, de cause centrale, c’est-à- dire du frisson dû à un refroidissement général du sang, j'ai été amené à rechercher quelles étaient alors les combustions respiratoires pour les comparer avec celles de l'état normal et celles de la stupeur profonde (sans réaction motrice), telle que la chloralisation, Je rappellerai pour mémoire que les combustions respiratoires varient avec la taille de l’animal, et que, pour les chiens de taille moyenne, c'est-à-dire pesant 10 kilogrammes, la quantité d’acide carbonique est par heure et par kilogramme de 1 gr. 200. Quand l'animal est profondément chloralisé, la diminution est parfois colossale. Ainsi, chez un chien dont la température est restée pendant six heures au-dessous de 27 degrés, et qui n’a jamais eu de frisson, la venti- lation a été réduite au taux exceptionnellement faible de 3 lit. 07 par heure et par kilogramme, et la production de CO? n’a été que de 0 gr.187, soit la sixième partie de la production normale. Si les chiens frissonnent, on voit alors aussitôt croître la quantité d'acide carbonique produit. Mais, pour qu'il y ait un excès de production et un réchauffement BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 2 34 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE suffisant de l’animal, il faut que le frisson soit très fort. Les chiffres sui- vants prouvent qu'un frisson modéré est impuissant à relever le taux des échanges au niveau normal. Dans six expériences, où nous avons constaté un frisson léger, mais toutefois bien caractérisé, les quantités d'acide carbonique ont été, par heure et par kilogramme, pour des chiens pesant environ 40 kilogrammes: 0 gr. 630 0 gr. 875 0 gr. 342 4 gr. 203 0 gr. 688 0 gr. 645 En revanche, dans le frisson violent, la production a dépassé beau- coup la normale. Dans un cas nous avons eu À gr. 95, et dans un autre cas À gr. 245. Alors, en même temps que le frisson et la production d'acide carbonique, je voyais croître la température du chien, et j'assistais ainsi à la démonstration formelle de la corrélation très simple qui unit ces trois phénomènes, contraction musculaire, combustion du carbone et réchauffement du corps. Dans ces expériences j'ai aussi constaté que le quotient respiratoire se modifiait par le fait du frisson, et se rapprochait de l'unité. On sait d'’ail- leurs que tel est l'effet des contractions musculaires ; mais il était bon de l'établir aussi pour le frisson. Quotient respiratoire. Avant le frisson. . . 0.70 Après le frisson. . . 0.84% al 0.55 — 0.63 == OH = 0.79 — 0.87 — 0.84 2e 0.74 — 0.69 — 0.75 =— 0.81 Mentionnons enfin une autre expérience qui établit une analogie inté- ressante entre le frisson qui amène le réchauffement et la polypnée qui amène le refroidissement. Ce sont évidemment deux fonctions bulbaires de régulation thermique. Eh bien! elles ne peuvent se produire que si l'intégrité du bulbe est parfaite. Autrement dit, le bulbe étant extrême- ment sensible à toutes les variations du sang en oxygène et acide carbo- nique, il faut que la fonction respiratoire soit satisfaile pour que la fonc- tion de régulation thermique puisse s'exercer. Si en effet on asphyxie un chien qui frissonne, on verra par le fait de l’asphyxie cesser son frisson. Si on lui rend de l'air, alors que les respi- rations asphyxiques n’ont pas encore cessé, pendant une ou deux minutes il restera encore sans frissonner, et le frisson ne reparaîtra que lorsque de nombreuses inspirations d'air pur auront rétabli la teneur normale du sang en gaz oxygène et acide carbonique. C’est là une preuve que la ces- SÉANCE DU 14 JANVIER 35 sation du frisson était bien due au phénomène chimique de l’asphyxie, appauvrissement du sang et par conséquent du bulbe en oxygène. Quoique ces divers phénomènes du frisson n'aient été étudiés par nous que pour le frisson de cause centrale, survenant chez des chiens chlora- lisés et en voie de réchauffement, il est probable qu’on peut généraliser, et les appliquer au frisson psychique et au frisson toxique. (Laboratoire de Physiologie de la Faculté de médecine de Paris.) MM. M. Hanrior et Ch. RicueT: DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORA- LOsE. (Voir Mémoires du présent volume, p. 1.) QUELQUES RÈGLES RELATIVES A L'EMPLOI DU LIQUIDE TESTICULAIRE, par MM. BROWN-SÉQUARD et D'ARSONVAL. En attendant que nous rendions compte à la Société des résultats obtenus par les médecins si nombreux qui ont employé le liquide testi- culaire provenant de notre Laboratoire, nous croyons devoir appeler l'attention sur certains points importants concernant l’usage de ce liquide. I] faut qu'on sache bien qu’il est presque absolument essentiel, lorsqu'on emploie le liquide contre une affection organique quelconque, ou même contre une simple névrose (neurasthénie, hystérie, chorée, névralgie, etc.), de faire des injections tous les jours. Nous ne connaissons qu’une excep- tion à cette règle; elle est relative à la sénililé, état organique qui, à cause de la lenteur de son développement, ne réclame d’injections que par périodes de cinq à six jours, deux ou trois fois par mois, suivant la condition du sujet. Nous tenons à répéter ce que nous avons souvent dit, que le liquide testiculaire a plus de puissance contre toutes les formes de diabète sucré, y compris même la glycosurie pancréatique, que le liquide du pancréas. De même il a plus de puissance contre tous les états morbides des centres nerveux ou des nerfs que le liquide cérébral ou médullaire, ou contre la maladie d’Addison que le liquide des capsules surrénales, ou contre les affections organiques du rein, que le liquide rénal, etc. Ceci ne veut pas dire, cependant, que le liquide rénal ne doit pas être employé dans l’uré- mie, par exemple, ce que nous croyons, c’est qu'alors les deux liquides organiques : le testiculaire et le rénal, doivent être injectés l’un après l’autre et dans des points différents. 39 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE C’est encore une question difficile à décider, de trouver combien de temps, dans certaines maladies, il faut continuer l'emploi du liquide, lorsque les bons effets, attendus ou désirés, ne se montrent pas, malgré des injections quotidiennes, à dose convenable. Nous admettons volon- tiers que dans les affections neurotiques ne dépendant pas d'une lésion organique, il soit très souvent inutile, après dix ou douze jours d’injee- tions, de continuer à en faire, si les bons effets ne se sont pas encore montrés, mais dans la sénilité et encore plus dans les cas de maladie organique et spécialement dans les scléroses des cordons latéraux et des cordons postérieurs, il est essentiel de persévérer trois, quatre semaines et même plus longtemps, malgré la non-apparence d'amélioration. M. Depoux, dans un cas d’ataxie locomotrice, n’a vu de bons effets com- mencer à se montrer qu'après un mois d'injections quotidiennes de liquide testiculaire, à hautes doses. Les retards, quelquefois considérables, dans les améliorations dues à ce liquide, sont d’autant plus remarquables que dans certains cas (même d'ataxie locomotrice) le liquide peut produire des changements favorables dans le cours de la première semaine et même en moins d’un ou deux jours. Quant à la dose qu'il faut employer, c’est le médecin qui fait les injec- tions qui doit la trouver pour chaque individu. Elle dépend non seule- ment de l’espèce, du degré et de la durée de la maladie, mais aussi, — nous avons à peine besoin de le dire, — de l’idiosyncrasie du sujet. Le minimum est de À gramme de liquide pur;le maximum, excepté dans des cas très rares, est de 5 à 6 grammes. Dans l’immense majorité des cas, la dose doit être de 2 à 5 grammes de ce liquide pur, lorsqu'on a à combattre des affections organiques quelconques et de 3 ou 4 à 5 grammes contre l’ataxie locomotrice et les autres scléroses de la moelle épinière. Quant au mode d'action du liquide testiculaire, nous nous bornerons aujourd’hui à répéter ce qu'a soutenu l’un de nous, dans toutes ses publi- cations sur ce liquide, à savoir que c’est à l’action dynamogénique qu'il exerce sur les centres nerveux, que sont dus les effets si remarquables observés dans tant de maladies diverses où il a été employé. Nous termi- nerons en ajoulant que, l'étude de ces effets montre que la puissance immense du système nerveux dans la production des altérations de nutri- tion et des sécrétions, est dépassée par la puissance de ce système sous l'influence du liquide testiculaire dans l'acte de ramener à l’élat normal la nutrition et les sécrétions altérées. _ SÉANCE DU 14 JANVIER 31 ACTION DES MICROBES PATHOGÈNES SUR LA CELLULE VÉGÉTALE. Note de MM. D'ARSONVAL et CHARRIN. Nous désirons appeler l'attention de la Société sur une question géné- rale, dont nous venons de commencer l'étude. Il s’agit de l'action que peuvent exercer, sur les végétaux, les microbes pathogènes propres aux animaux. Sans vouloir exposer, dans cette communication préalable, les consi- dérations théoriques qui guident nos recherches, nous nous bornerons à rapporter les résultats d’une première expérience. Nous avons d’abord étudié l'influence que le bacille pyocyanique pos- sède sur la levure de bière. — On prend deux tubes à essai identiques que l’on remplit, jusqu’à 5 centimètres du bord, avec de l’eau sucrée tenant en suspension cette levure de bière. On finit de remplir l’un de ces tubes avec de l’eau pure, le second avec une culture de ce bacille pyocyanique. Ces deux tubes sont bouchés par un bouchon de caoutchouc portant un tube plongeur. S'il se dégage des gaz dans l’intérieur du tube à essai, ces gaz chasseront le liquide et on pourra juger de l’activité de la fermen- tation par la quantité de liquide expulsé. — On plonge les tubes ainsi préparés dans de l'eau à 37 degrés; on constate que, deux heures après, le tube sans virus est vide, tandis que celui qui a été ensemencé présente à peine quelques bulles gazeuses. La fermentation alcoolique a été arrêtée par la présence du bacille pyocyanique. : Si on relire ce dernier tube de l’eau à 37 degrés et qu'on le mette à A0 degrés seulement, la fermentation alcoolique s'établit; le tube se vide complètement en huit à dix heures. Cette seconde expérience sert de contre-épreuve à la précédente : à 37 degrés, le bacille pyocyanique a toute son activité, il influence la levure ; à 10 degrés, au contraire, la levure, qui est faiblement influencée par l’abaissement de la température, reprend son action. Cette action inhibitoire est-elle due au bacille lui-même ou aux pro- duits solubles qu'il sécrète? C'est ce que nous pourrons dire seulement dans la prochaine séance, quand l'expérience aura parlé. La marche de la fermentation alcoolique sera enregistrée dans ces expériences ultérieures, de façon à en connaître les phases. Cet acte d’inhibition, exercé par un organisme monocellulaire sur un autre organisme monocellulaire, quelle qu’en soit la cause, nous paraît appelé à jeter quelque jour sur l’inhibilion en général. Il a lieu en l’ab- sence de tout système nerveux; c’est donc un acte inhibitoire d’origine cellulaire moins compliqué que les actes inhibitoires que M. Brown- Séquard nous a appris à voir chez les êtres supérieurs. 38 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SUR UNE BOUTEILLE DESTINÉE A RECUEILLIR L'EAU DES GRANDES PROFONDEURS, par M. P. REGNARD. Dans les différentes expéditions qui viennent d’avoir lieu pour l’explo- ration des grands fonds marins, on a souvent essayé de recueillir l’eau des profondeurs pour connaître sa teneur en oxygène et avoir une idée de la possibilité qu’avaient les êtres vivants de vivre dans ce milieu. Tous ces appareils de Wille, de Meyer, de Buchanan, de Richard et Villegente relèvent du même principe. On envoie avec un fil de sonde une bouteille d’acier dans les profondeurs, puis un mouvement de bas en haut ou un messager en plomb ferment les deux robinets qui sont aux extrémités, on ramène l'eau emprisonnée et on peut l’analyser. Or l'opinion n’est pas encore bien faite sur ces analyses : certains observateurs parlent d’une très faible quantité de gaz trouvée pen- dant que d’autres racontent que l’eau extraite moussait comme de l’eau de Selltz quand on ouvrait le récipient. On ne se fera sur ce point de conviction définitive que dans de prochaines expéditions. J'ai pensé, pour ma part, qu'il y aurait peut- être lieu d'ajouter une nouvelle bouteille à (toutes celles qui ont déjà été décrites jusqu à présent, et cela parce qu’elle en diffère d’une facon radicale, comme principe et comme résultat. Je ne suis pas très rassuré, en effet, sur la qualité de l’eau que peuvent contenir ces bouteilles ouvertes par les deux bouts dans lesquelles le liquide est censé se renouveler par le simple fait de la descente. Il peut fort bien ne se renouveler qu'incomplètement et l’eau que l’on ramène des grands fonds pourrait bien être, en partie, de l’eau qu'on y a menée de la surface. Ensuite tous ces robinets peuvent bien tenir quelques atmosphères. Mais si la pression des gaz se dégageant est très grande, il est certain qu'ils les laisseront fuir. Je propose donc l'appareil dont je vais maintenant don- ner la description. Entre deux forts plateaux de bronze se trouvent fixés deux ballons de caoutchouc (fig. 1). L'un, P, est en caoutchouc très épais et quand on l'écrase il reprend vivement sa forme. L'autre, P’, est au contraire très mince, s'écrase facilement et ne revient pas sur lui-même. Le ballon P se termine à sa partie inférieure par un gros robinet R dont la clef est mue Mél SÉANCE DU 14 JANVIER 39 ——— . par le grand levier L. Le petit ballon P’ est terminé par un robinet R': de plus, les deux ballons sont en communication par un tube d’ébonite T Fic. 2. percé de nombreux trous. Enfin, au robinet R, et dans l’intérieur du ballon P, se trouve adaptée une soupape en caoutchouc de Denayrouse. 40 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On sait que sous les pressions les plus formidables ces soupapes tiennent d'autant plus qu’elles sont plus pressées. L'appareil étant ainsi disposé, on commence par fermer le robinet R, puis on adapte le robinet R° à la machine pneumatique à mercure. En un. coup de pompe, le vide est fait dans les deux ballons dont les parois s'appliquent énergiquement l'une contre l’autre. On ferme le robinet R’, la bouteille de caoutchouc ne contient par conséquent absolument rien. On la suspend alors au fil de sonde F (fig. 2) et on la descend dans la mer. Quand on est arrivé au point voulu, on envoie du bord l'anneau de fonte À qui passe autour de la bouteille, s'accroche au levier L et l’abaisse brusquement; la bouteille est ouverte (fig. 3). Le ballon P, en caoutchouc épais, se dilate violemment et se remplit complètement d’eau; P’, au contraire, reste flasque. On remonte alors l'appareil, et si l’eau contenue en P augmente de volume, si elle dégage des gaz abondants, tout cela va se loger en P” quise distend au fur et à mesure des besoins. Il est entendu qu'à la remontée le clapet de Denayrouse C se ferme énergiquement par le simple poids de l’eau qui est au-dessus; je me suis assuré qu'il tenait en effet absolument. On a pesé la bouteille avant le départ, on la pèse au retour, la différence des deux poids représente l’eau ramenée, on ferme alors le robinet R, on abouche R’ avec le ballon vide de notre appareil d'analyse, eau et gaz qui ont pu se dégager y sont entraînés d’un seul coup. Nous avons même ajouté un perfectionnement qui peut servir quand on ne puise pas à très grande profondeur. Un croisillon CG, suspendu au- dessous de la bouteille, recueille l’anneau de fonte qui n’est pas perdu. Pour les grandes profondeurs cet anneau doit être abandonné. Nous nous sommes servi de cet instrument par des profondeurs moyennes. IL nous a donné d'excellents résultats. Nous attendons une prochaine expédition pour l'envoyer dans les grands fonds ; nous sommes persuadé qu'il pourra rendre service. SUR UNE POMPE DE ROULIS UTILISABLE POUR L'ANALYSE DES GAZ DE L'EAU À BORD DES NAVIRES, par M. P. REGNARD. Il semble aujourd'hui qu'il y ait un grand intérêt à faire à bord du navire même l’analyse de l’eau recueillie à la surface ou dans les profon- deurs de la mer. Il n’y a pas pour cela d’appareil préférable à la machine pneumatique à mercure. Seulement, la pompe en usage dans nos laboratoires ne serait .pas utilisable dans ces conditions, il serait tout à fait imprudent de l'ins- SÉANCE DU Â4 JANVIER 4 En en cu LL mi LL o l = (A) i | | ERSSSESRE SENTIMENT SSSR TES STI LES NISENTES RESTE NEO RER me Es Dei EE 49 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE taller à bord d’un navire. Le roulis la mettrait de suite hors d'usage. Le mercure se renverserait sans cesse ; de plus, le baromètre se penchant à chaque inclinaison du navire, le même mercure ferait bélier et viendrait choquer sur le robinet à trois trous qui, étant en verre, serait brisé du premier coup. Nous avons done dàû faire une modification à la pompe, de façon à la rendre très portative et même pratique à bord d’un navire (fig. 1). Une grande barre de fer, de la grosseur du doigt, est attachée au pla- fond de la cabine où l’on opère; elle est terminée par un poids G, très. lourd (20 kilogrammes); elle oscille donc en même temps que le bateau, mais très lentement. Une planche est fixée vers son milieu et sur cette planche se trouve tout le mécanisme de la pompe, c’est-à-dire la chambre barométrique L, la cuvette » et le tube gradué T. Un pelit robinet, ter- miné par le tube de caoutchouc L permet de vider l’excès de mercure de la cuvette quand celle-ci se trouve un peu trop pleine. Le robinet à trois voies est supprimé, il est remplacé par deux pinces en fer PP” qui saisis- sent des tubes de caoutchouc, et les ferment ou les ouvrent suivant qu'on veut mettre le baromètre en communication avec la cuvette ou avec le ballon analyseur. Cette disposition est très bonne, elle reproduit l'effet du robinet à trois voies et n’est nullement fragile comme lui : de plus tout accident, qui avec le robinet en verre est irréparable à bord, se répare au contraire en quelques minutes avec les caoutchoucs pressés. Le vide est aussi bien tenu qu'avec le robinet, nous avons pu le conserver intact pendant toute une semaine. Le réservoir L est monté et descendu au moyen d’une simple poulie; quand il doit êlre au repos, on accroche le bout de la corde qui le tient à un piton qui n’est pas figuré dans la planche. Enfin le ballon analyseur Z a dû être aussi modifié; il est maintenu dans un peu d’eau chaude que chauffe un fourneau à pétrole M, fixé solidement au plancher. On ne peut faire ici un courant d’eau autour de son col, mais Îles bulles qui se produisent sont obligées de passer dans un tube S, où elles rencontrent un rétrécissement X qui les crève et les empêche d'aller plus haut : le liquide qui résulte de leur destruction retourne en Z par le tube U. Enfin l'eau s’introduit dans l'appareil en aboutant notre bouteille à eau par son robinet R’ au petit robinet de verre V. Quand l'appareil ne sert pas, on l'attache solidement au mur de la cabine, il ne fait alors aucune oscillation et il suit celles du navire, Le réservoir est attaché un peu plus haut que la boule barométrique. On peut utiliser notre instrument par les houles moyennes : il est évi- dent qu'il ne faut pas s’en servir par les gros temps, mais qui pensera jamais à faire une expérience délicate par la tempète, quand on a déjà toutes les peines du monde à se maintenir debout? D'ailleurs ces jours-là on ne peut même pas recueillir de l’eau et envoyer les bouteilles dans la profondeur. SÉANCE DU 14 JANVIER 43 Les tubes contenant les gaz de l’eau peuvent être simplement bouchés avec un bouchon de caoutchouc et maintenus debout dans des porte- tubes, le mercure qui reste au fond, au-dessus du bouchon, suffit pour les fermer aussi herméliquement que s'ils étaient soudés à la lampe. Enfin si, à bord, on est bien installé, on peut placer une petite cuvette profonde à mercure sur une suspension à la Cardan et faire les analyses par la potasse et l'acide pyrogallique, sinon on ne fait ces analyses qu'au retour. CHIMIE PHYSIOLOGIQUE. SUR LE PASSAGE DES GRAISSES DANS L'URINE. Note de M. C. CHABRIÉ. (Travail du laboratoire de chimie de M. le professeur Guyon.) On sait que le passage de quantités notables de graisse dans l'urine est un fait rare dans nos climats, assez fréquent dans les régions équato- riales. AE On a été, autrefois, jusqu’à mettre en doute la présence de la graisse dans la sécrétion rénale admise depuis longtemps par Budge, Gautier, Leube, Méhu, Rayer, Salkowski. Il m'a paru intéressant de reprendre cette étude. On peut distinguer plusieurs cas : Premier cas. — Les urines contiennent des graisses, mais aussi de l’al- bumine, de la fibrine et des hématies. Leur aspect est blanc laiteux : c’est la chylurie. Elle peut être due à la présence dans le sang d’un parasite, la filaire, ou bien produite, peut-être, simplement par un état patholo- gique (chylurie nostras). Dans un cas de chylurie parasitaire, j'examinai séparément les urines émises pendant la nuit et pendant le jour. Voici les résultats : URINE URINE de la nuit. du jour. Quantité. 633 c. c. 370 c. c. Densité . 1022 — 1020 — Réaction. alcaline alcaline Couleur , thé au lait thé au lait Odeur. de sang fraîche de sang Aspect. trouble louche Dépôt . cristaux de graisse, cristaux de graisse, hématies hématies nombreuses, caillots de fibrine. 44 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE URINE URINE de la nuit. du jour. Albumine rte Men 4 gr. 50 8 gr. 00 Graisses (LAMPE re 3 gr. 50 | tes ice LAS 0. 5 to erouo ce 18 ar.192 18 gr. 61 Chlorures . . . à 1 gr. 20 8 gr. 50 Acide esphaniqe : 2 gr. 00 3 gr. 00 On a trouvé des larves de filaire dans le dépôt de ces deux urines. Les nombres sont exprimés en grammes et se rapportent au litre. De ces données on peut conclure : 4° Que la sécrétion des graisses est plus considérable pendant la nuit. Ce fait a déjà été signalé; mais dans des cas bien étudiés on a remarqué que l’albumine apparaissait en même temps que la graisse, ou que la quantité d'albumine était d'autant plus grande que celle de matières grasses était elle-même plus forte. Or, d’après mes observations, c’est le contraire qui a eu lieu, à tel point que la somme des poids de l’albumine et de la graisse est à peu près constante : 5 +3 gr. 5 —8 grammes dans un cas; OU SN GREEN) TON TS dans l’autre. 2° Que la sécrétion des principes normaux n’a pas été modifiée. Ceci est digne de remarque, car on sait que dans les cas d’albuminurie paroxystique qu'on peut à divers titres, rapprocher de ces crises de chylurie, les proportions d’urée peuvent varier considérablement au moment où se produit ce maximum d'albuminurie passagère, faits sur lesquels j'ai insisté ailleurs. Deuxième cas. — Les urines peuvent ne pas présenter un aspect parti- culier (on voit quelquefois des gouttelettes de graisse à leur surface ou dans leur dépôt). Elles sont ou non albumineuses, mais ne contiennent ni hématies, ni caillots de fibrine. Ici, il ne s’agit plus de chylurie, mais plutôt de lipurie. Ceci a été signalé de un grand nombre de maladies. Je l’ai observé chez un brightique qui n'avait jamais subi de cathété- risme, dont le rein n’éliminait pas mal les éléments normaux, mais chez qui l’albuminurie était persistante depuis deux ans au moins. J'ai trouvé : Quantité d'urine émise en 24 heures . . . . : : 2,500 ec. c. — d’albumine (par litre). . . . . . : . 2,40 — de graisse — PR PA EE REED — d'urée — so ON EAI0 0 (1) J'ai rangé sous le nom de graisse des composés amorphes, neutres et solubles à froid dans l'éther. SÉANCE DU 14 JANVIER 45 Comme on le voit, la quantité de matières grasses était très faible, bien que le malade présentât des signes d'adipose bien nets. Troisième cas. — On a signalé la présence des graisses dans l'urine à la suite d’une injection abondante de ces substances. Il est alors à remar- quer que leur proportion dans cette humeur n’augmente pas si la per- sonne qui les a ingérées était déjà atteinte de lipurie ou de chylurie. Je ne parle pas des lipuries produites par l'introduction de substances chimiques toxiques dans le tube digestif, comme dans l’empoisonnement par le phosphore, parce que je n’ai pas eu occasion d’en observer. Quatrième cas. — Il m'a semblé curieux de rechercher si la rétention intestinale pourrait provoquer la lipurie. I. Z'xpériences sur les cobayes. — Un cobaye sain dont la nourriture contenait un peu de substances grasses, a émis une urine contenant, par litre, 0 gr. 05 de graisses et 11 gr. 71 d'urée. Je lui ai fait une ligature du gros intestin. Après vingt-quatre heures, son urine possédait 0 gr. 90 de graisses et 7 gr. 93 d’urée. . Cette augmentation de la graisse urinaire est bien réelle; car, tandis que les poids de graisse par litre sont entre eux comme ! et 418, les volumes d'urine sécrétée dans les vingt-quatre heures sont entre eux comme 5 et 1. Un autre cobaye sain a subi une semblable ligature de l'intestin pen- dant quarante-huit heures. Son urine renfermait après ce temps 1 gr. 60 de graisses, soit une quantité deux fois plus considérable que celle de l'urine du cobaye dont l'intestin n'avait été lié que vingt-quatre heures. U. £xpériences sur le chien. — J'ai fait une ligature de l'intestin à un chien, et je l'ai maintenue quarante-huit heures. La sécrétion rénale de cet animal a été fortement modifiée, puisque la quantité d’urée a passé de 23.06 à 15.37, mais la proportion de graisse est restée la même qu'avant l'opération (traces). Le sang lui-même ne s'était pas enrichi en substances grasses. Il en contenait 0 gr. 27, proportion même assez faible. IL. Faits recueillis par l'examen de malades atteints de hernies. — Premier malade. C'était un individu atteint d’une hernie étranglée depuis vingt-quatre heures. À ce moment il émettait une urine contenant : CRIS SC RE EN Re ee) opt (RÉGE LR S RE R Ee LAs Quelques heures après avoir été opéré (cure radicale), j'ai trouvé : q P »J GLISSE EUR LS ENTRE ne en 0er 07 (Gé CREME RE AE aa AT OT 91 Donc la rétention intestinale passagère avait déterminé l’apparition de quantités appréciables de graisse dans l’urine. 46 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Deuxième et troisième malades. Il s'agissait d'hommes porteurs de fortes hernies non étranglées.Leurs urines contenaient 0.05 et 0.065 de graisses; quantités presque négligeables, puisque j'ai obtenu chez un homme bien portant, mais soumis à un régime riche en viandes, le nombre de 0 gr. 08 pour les graisses, tandis que l’urée atteignait celui de 26.90. De tous ces faits on peut conclure que le passage des graisses dans l'urine peut être dû : 40 A la présence d’un parasite dans le sang ; et on a vu que le fonction- nement du rein n’en paraît pas impressionné relativement à sa sécrétion des principes normaux. 2 A certains cas pathologiques et en particulier à celui d'un mal de Bright. La lipurie était d’ailleurs très légère. 3° À l’ingestion abondante des graisses, 4° A la rétention intestinale. Mais dans ce cas, il faut distinguer entre les effets produits par la ligature expérimentale ou pathologique chez l'homme, le cobaye ou le chien. Tandis que chez les deux premiers, une rétention intestinale de vingt- quatre heures peut suffire à faire passer les graisses de l'intestin dans Vurine, chez le chien une rétention de quarante-huit heures n’a produit aucun effet semblable. Il serait sans doute intéressant de chercher à quel endroit de l'intestin la ligature aurait un effet maximum sur le passage des graisses dans l'urine chez quelques animaux. Nous nous proposons, M. Dissard et moi, de poursuivre cette étude. ACTION DE L'ALCOOL ET DU SOUFRE SUR LA LEVURE DE BIÈRE, par M. J. de REY-PAILHADE. (Note présentée par M. LAVERAN.) On délaie de la levure de bière pressée d’une part dans son poids d’eau, et d'autre part dans son poids d’alcool à 45 degrés centésimaux. Ces deux mélanges qui ont des caractères communs offrent cependant des différences marquées au point de vue chimique. Les propriétés communes sont d’absorber rapidement l'oxygène libre dissous dans les liquides au sein desquels baignent les cellules, de donner à froid de l'hydrogène sulfuré, quand on les mélange avec du soufre, de décomposer énergiquement l’eau oxygénée. On constate des différences en colorant les deux mélanges par quelques gouttes de carmin d’indigo. Il faut opérer à l’abri du contact de l’air dans des flacons absolument SÉANCE DU 14 JANVIER 471 pleins et bouchés. La bouillie aqueuse reste bleue, tandis que l'alcoo- lique reprend au bout de quinze à vingt minutes la teinte jaune primi- tive. Le carmin d’indigo a été hydrogéné, car il suffit d’agiter la liqueur à l'air pour la faire virer immédiatement au bleu. Un essai spécial montre que la levure est morte; mise, en effet, dans des conditions favorables, elle ne décompose plus le glucose. Le tournesol est décoloré aussi. L'alcool a donc eu pour effet : 1° de tuer la levure; 2 de produire aux dépens des matériaux constitutifs de l'organisme vivant une matière ou un ensemble de matières douées du pouvoir d'hydrogéner le carmin d'indigo et le tournesol. En filtrant la bouillie alcoolique d’abord au papier, puis à l'appareil stérilisateur de M. d’Arsonval, on obtient un liquide jouissant, au degré d'intensité près, des propriétés chimiques de la bouillie elle-même. On peut répéler ces expériences en employant de l’eau chargée de 2 p. 100 de fluorure de sodium. M. Raulin a montré que certains orga- nismes anaérobies se développant bien dans l’eau de levure réduisent énergiquement le carmin d’indigo. Ces microbes, quine dégagent pas d'hydrogène libre, contiennent donc le corps ou un corps très analogue à celui produit par l’action de l'alcool faible sur la levure de la bière. A l’aide d’un artifice, on peut cependant décolorer le carmin d'indigo sans tuer la levure; il suffit de La mélanger et de la broyer avec son poids de soufre. Le mécanisme de ce phénomène est alors le suivant : le soufre avec le principe immédiat que j'ai appelé philothion, contenu dans la levure vivante, produisent de l'hydrogène sulfuré. Ge dernier corps est alors décomposé par le carmin d’indigo, qui s'empare de l'hydrogène en mettant le soufre en liberté. Le soufre joue dans ce cas un rôle d’intermé- diaire, j'allais dire de ferment minéral hydrogénant, qui prend de l'hy- drogène à la levure vivante et le transmet ensuite au carmin d'indigo. Ce dernier fait est intéressant, car il montre que l’adjonction d’une malière minérale presque insoluble, le soufre, peut modifier profondé- ment les propriétés physiologiques d'un organisme vivant. Une partie du soufre de certaines matières albuminoïdes paraît y entrer sous forme de sulfhydryle HS, qui sous des influences faibles se dégage à l’état de HS, précisément à l’état de ce composé sulfuré dont on vient de voir l’action hydrogénante. Si on se rappelle aussi que l'hydrogène sulfuré est facile- ment oxydable, il y a lieu de se demander si le soufre ne Joue pas un rôle important dans les actes physiologiques des êtres? IL est permis de le croire, car la levure traitée par deux fois son poids d'alcool à 90 degrés centésimaux, dégage immédiatement des quantités appréciables d’hydro- gène sulfuré; par contre, la bouillie présente des propriétés infiniment moins actives que celle quia élé préparée avec de l’alcool faible. DS Tee PT eur: ge 4 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Élection d’un membre titulaire. Votes exprimés : 43. MHDARIER. 4 TN A EN SE EE OT IR MSIE TE RER perte One TE re CRE MÉSDOUVIERS nine emma ee 1 — En conséquence, M. DARIER, ayant obtenu la majorité des suffrages, est élu Membre titulaire de la Société de Biologie. Dans la même séance, ont été élus : Membres honoraires. MM. LupwiG, vAN BENEDEN, OLLIER, S. A. ALBERT, prince de Monaco. Membres associés. MM. ARLOING, BEAUNIS, METCHNIKOFF, RENAUT, ROUX, SANSON. Membres correspondants nationaux. MM. Gris, JourDAIN, MOYNIER DE VILLEPOIx, NICOLAS. Membre correspondant étranger. M. Virzou (de Bucharest,. Le Gérant : G. MASSON. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marermeux, directeur, 1, rue Cassette. SÉANCE DU 2{ JANVIER 1893 M. p»'Arsonvas : Présentation d'un travail du Dr Biraud sur la mort et les accidents causés par les courants électriques de haute tension. — M. Moy : Note sur les urines bilharziennes. — M. E. Gzey : Altérations de l'œil chez un chien diabétique par extirpation du pancréas. —- M. Cu. Féré : Note sur la fréquence et sur la dis- tribution de quelques difformités de la peau chez les épileptiques. — M. On. FéRé : Note sur l'influence de la compression temporaire sur l'accumulation de la graisse dans le tissu cellulaire sous-cutané. — M. Énice BerGur : Remarques sur l’action physiologique de la cocaïne. — M. ÉwLe BerGer : Sur l'emploi en ophtal- mologie de mélanges de plusieurs produits pharmaceutiques. — M. F.-H. Les- BrE : Considérations sur la première prémolaire de quelques Mammifères domes- tiques. — M. Paur Ricuer : Du rôle des muscles triceps fémoraux et fessiers dans la station verticale. — MM. n’Ausonvas et CnarriN : Concurrence vitale entre le bacille pyocyanique et la levure de bière. — M. À. Dasrre : Incoagulabilité du sang et réapparition de la fibrine chez l'animal qui a subi la défibrination tolale. — M. J. Lronères : Note sur deux Acariens de la famille des Sarcoptidés. — M. Srk- pHEN Arrauctr : Le bacille pyocyanique dans un œuf de poule. — M. P. REGNanp : Dynamomètre permettant de mesurer la puissance musculaire de l'appareil caudal du Poisson. — M. P. Recnarp : Sur un dispositif qui permet de mesurer la vitesse de translation d’un poisson se mouvant dans l’eau. — M. B. Aucxé : Complications péritonéales de la variole. : Présidence de M. Chauveau. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE. M. le D° Berconté (de Bordeaux) fait hommage à la Société des Archives d'Electricité médicale, et demande l'échange avec les Comptes rendus et Mémoires de la Société de Biologie. PRÉSENTATION D'UN TRAVAIL DU D' BIRAUD SUR LA MORT ET LES ACCIDENTS CAUSÉS PAR LES COURANTS ÉLECTRIQUES DE HAUTE TENSION, par M. D ARSONVAL. Le travail que j'ai l'honneur de déposer sur.le bureau de la Société a été fait au laboratoire de M. le professeur Lacassagne, de Lyon, et un peu sous mon inspiration, par le D’ Francis Biraud. I! a le mérite de consti- tuer la première monographie complète publiée sur la question, grâce à l'enquête que MM. Lacassagne et Biraud ont faite auprès des électriciens du monde entier. Le livre de M. Biraud renferme la description très com- plète des accidents de fulguration constatés dans l’industrie électrique, la B1oLoGie, COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 3 50 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE A Re relation des électroculions pratiquées sur l’homme et les animaux en Amérique, et enfin, quelques expériences personnelles à l’auteur. Les con- clusions qui se dégagent de l’ensemble de ces observations concordent absolument avec celles que j'ai formulées en 1887 devant la Société sur le même sujet. L’électricité tue des deux manières suivantes : 1° En produisant des lésions mécaniques des vaisseaux et du système nerveux : 2° En inhibant les grandes fonctions totalement ou partiellement (arrêt de la respiration, du cœur, des échanges entre les tissus et le sang, etc). Le premier genre de mort est surtout le fait de l’action de la foudre et des décharges statiques de puissantes batteries, il accompagne, en un mot, les décharges disruptives. On ne le rencontre presque jamais dans les cas de fulguration indus- trielle. Le second, au contraire, est presque la règle. Au point de vue pratique, ces deux genres de mort se distinguent, comme je l'ai dit, en ce sens que le premier entraîne la mort définitive tandis que le second peut ne consister qu’en un état de mort apparent dont on peut faire revenir l'individu en pratiquant la respiration artifi- cielle immédiatement après l'accident. Un foudroyé doit être traité exac- tement comme un noyé, suivant la formule que j'ai donnée aux électriciens, formule dont l'application a pu rappeler à la vie un certain nombre d'ouvriers depuis celte époque. Quant à l'électrocution, j'ai dit autrefois ce que j'en pensais au journal américain le World. Le livre et les expériences de M. Biraud confirment mon opinion : l'électroculion est un procédé compliqué, barbare et infi- dèle. Comme moi, M. Biraud n’a pu arriver à tuer sûrement un malheureux lapin, même en employant une machine Ferranti donnant un courant de 2,500 volis et de 20 ampères; et, lorsqu'il a cru l'avoir tué, la respiration artificielie l'a ramené à la vie (1). — J'avais mis au défi les médecins amé- ricains d’oser pratiquer la respiration artificielle après avoir électrocuté leur patient. Ce défi n’a pas été relevé puisqu'on s’empresse, au contraire, de faire l’autopsie immédiate du suppiicié. L'expérience montre, en effet, que l’autopsie est un adjuvant nécessaire de l'électrocution. Il faut donc féliciter M. Biraud de sa 5° conclusion qu'il formule ainsi : « L'électrocution, ou exécution capitale au moyen des cuurants élec- triques, offre un grand nombre d’inconvénients; ce procédé ne devra pas être adopté en France ». (1) Les machines employées pour l'électrocution en Amérique étaient moins puissantes, et donnaient seulement 1,500 volts. Dans les ateliers Gramme, j'ai eu, en 1888, à ma disposition des machines donnant 8,000 volts, et qui ne tuaient pas sûrement. SÉANCE DU 21 JANVIER 51 NOTE SUR LES URINES BILHARZIENNES, par M. Mory, Médecin-major de 1re classe, professeur agrégé au Val-de-Grâce. (Communication faite dans la séance du 14 janvier 1893.) On sait que les manifestations pathologiques habituelles de la Bilharzia sont les hématuries, les calculs vésicaux, les engorgements prostatiques et les hémorroïdes. Souvent la maladie passe inaperçue ou ne se révèle que par des hématuries (ransitoires insignifiantes et une sensation de chaieur à la prostate. Pour peu que le malade ait séjourné quelque temps en Égypte ou en Tunisie, comme celui de mon collègue Cahier, il y a lieu, en face de symptômes de ce genre, de rechercher la Bilharzia. Ce trématode, à l’état adulte, habite les grosses veines abdominales, et ses œuls s’éliminent en majeure partie par les urines. Contrairement à ce qui se passe pour les filaires du sang dont les périodes de ponte sont. intermittentes, l'élimination des œufs de Bilharzia par les urines est continue. Ils se sont montrés tous les jours pendant deux mois dans celles de notre malade, bien qu’en quantité variable; rien de plus facile par con- séquent que de confirmer un diagnostic d'hématurie bilharzienne par l'examen des urines. Il suffit, pour cela, de les recueillir à un moment quelconque et de pré- férence après une demi-heure de marche et de les regarder dans un verre à pied. S'il y a des œufs de Bilharzia, on remarquera au fond du verre de petits pelotons fibrineux blanchâtres allongés en massue et rouges à leur grosse extrémité. On les trouve même dans les urines claires qui ne paraissent pas hématuriques. Recueillis avec une pipelte et examinés sous le microscope à un faible grossissement (0 de Verick), ils offrent l'aspect suivant (fig. 1) et se com- posent, on le voit, d'œufs de Bilharzia, de globules sanguins, de globules blancs surtout, et de débris épithéliaux. Leur aspect dans les urines est si caractéristique qu'avec un peu d'ha- bitude on pourrait diagnostiquer des urines bilharziennes sans le secours du microscope. Quand on examine un certain nombre de ces pelotons, on voit que la teinte rouge correspond loujours à leur grosse extrémité, la plus riche en globules rouges; leur masse, qui va s’effilant de plus en plus, n’est plus constituée en dernier lieu que par un mince tractus fibrineux dépourvu d'œuts et de globules; on constate en outre que les œufs contenus dans les bouchons fibrineux ne sont pas orientés régulièrement, c'est-à-dire (BL LS) SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE que les uns ont l’éperon dirigé vers la grosse extrémité du peloton et les autres vers la petite. Cette différence d'orientation, peu caractéristique dans la masse prin- cipale du peloton, devient, au contraire, d’une parfaite nettelé dans son prolongement filiforme où les œufs ne sont plus juxtaposés mais disposés en chapelet; elle indique bien que l'œuf ne franchit pas de lui-même la paroi du vaisseau au moyen de son éperon. Celui-ci n'est donc, à notre avis, que le reliquat de son insertion passagère dans la glande coquillière et ne joue aucun rôle ultérieur. La forme même des bouchons fait penser que les femelles adultes-pondent en perçant elles-mêmes la paroi des veines, de manière à expulser hors du système vasculaire leurs œufs qu'une gouttelette de sang extravasée en même temps vient aussitôt FC de Peloton fibrineux chargé d'œufs de Bilharzia. — 1. OEufs. — 2. Globules sanguins, fibrine et cellules épithéliales. — 3. Cristaux. enrober. Ainsi s'explique l'absence d’œufs et d'embryons de Bilharzia dans le sang, même quand on en trouve dans les tissus les plus divers. Cette manière de voir s'impose pour ainsi dire à l'observateur; en effet, si les œufs s’échappaient des capillaires au moyen de leur éperon qui ne présente d’ailleurs aucune résistance, ils ne seraient pas réunis en amas après leur émigration et tous les éperons devraient au moins être dirigés dans le même sens; de plus, si la donnée ancienne de la ponte intra-vas- culaire était vraie, tous. les œufs devraient se rendre au foie ou aux pou- mons et non dans la vessie et autres organes. Car ces œufs sont absolu- ment inertes et incapables de faire d'eux-mêmes aucun mouvement, ainsi que l’a fait remarquer M. Blanchard. Il est facile de concevoir d'ailleurs qu’un certain nombre d'œufs se SÉANCE DU 21 JANVIER 99 détachent de la grosse extrémité des amas principaux, peu cohérents et se retrouvent au fond du vase. Si l’on se reporte maintenant aux données anatomiques de Bilharz sur le corps des adultes mâle el femelle, on se convaincra facilement que les œufs arrivent dans la poche coquillière en position céphalique ou pel- vienne, si l’on veut me permettre l'expression, et s’y recouvrent d’une enveloppe protectrice de même forme que la poche; le plus souvent, la tête de l'embryon correspond au cul-de-sac de la poche coquillière qui forme l’éperon mou de l’enveloppe. Une fois l’œuf complet, il gagne la chambre rétro-vaginale, véritable utérus où s'accumulent les embryons encapsulés jusqu'au moment où la distension de cette poche provoque sa contraction; à ce moment, la femelle, avec son extrémité céphalique en biseau, perce la veine où elle s’est logée, se fixe avec sa ventouse abdominale de manière à ce que son orifice vaginal corresponde à la plaie veineuse, et expulse ainsi les œufs hors du système vasculaire; le mâle, avec sa pire ventouse, aide peut-être la femelle dans ces deux opérations. Quand l'animal se retire, la petite plaie s’oblitère par un bouchon fibrineux qui se rompt au niveau de la veine par suite de l’élasticité de sa paroi, et les œufs tombent alors par petits amas, soit dans la vessie, soit dans le tissu cellulaire péri-rectal, prostatique, etc.., suivant le cas. Outre les bouchons ci-dessus, on trouve un certain nombre d’œufs libres dans les urines. En examinant ces derniers avec un objectif moyen, on constate qu'ils offrent les différents aspects reproduits dans la figure ci-dessous, suivant qu'ils sont plus ou moins avancés dans leur évolution. Fic. 2. 1. Embryon ordinaire avec deux cellules antérieures. — 2. Embryon à éperon opposé à celui de l'œuf. — 3. Embryon d'urine vieille. — 4. Embryon en voie de quitter sa coque. L'examen de ces figures montte: 1° que l’extrémité effilée de l'enveloppe extérieure de l'œuf correspond le plus souvent à la partie céphalique de l'embryon, mais lui est quelquefois opposée. Nous avons toujours trouvé l'éperon terminal dans les œufs des urines; sa position n'était latérale que sur des œufs comprimés placés au sein des tissus, et ce déplacement de l’'éperon montre seulement que l'embryon est indépendant de son 04 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE enveloppe ; 2° que les organes intérieurs de ce dernier sont d’autant plus difficiles à délimiter et à déterminer que les urines sont plus vieilles. En inclinant la plaque porte-objet en différents sens, on réussit assez facilement à dissocier les bouchons et à obtenir des œufs libres ; mais il faut éviter de presser sur la lamelle, car ces derniers s’écrasent avec la plus grande facilité. Quand on a réussi, on peut examiner les œufs à un plus fort grossisse- ment et en ajoutant une goutte d'eau légèrement alcoolisée ; on voit avec beaucoup plus de netteté certains détails Ge leur structure, notamment la poche pulsatile indiquée sur la figure suivante (fig. 3) (1). Fic. 3. 1. Embryon laissant voir ses cils et des vésicules libres. — 2. Embryon laissant voir la poche pulsatile (a). — 3. Embryon libre contracté par l'alcool avec sa vésicule pulsatile encore mobile (a). Globe sarcodique (b). Par ce procédé, les embryons éclosent, ainsi que le montre la figure 3, mais ils ne lardent pas à succomber, et l’on voit s'échapper de leur corps des globes sarcodiques entrainant avec eux une partie des cils de l’em- bryon ; d’abord mobiles, ils perdent bientôt tout mouvement et sontenvahis par les microbes. Quel que soit d’ailleurs le procédé de préparation employé, nous avons toujours vu mourir ces globes et nous ne les croyons pas susceptibles d'évoluer. En ajoutant une goutte d’eau pure à un bouchon pris dans une urine fraîche, on voit les embryons naître après très peu de temps, ainsi que l’a indiqué Cobbold. - Mais si les urines datent de quelques heures, l'éclosion est retardée et les embryons obtenus sont moins beaux. Nous en avons vu éclore encore péniblement après deux heures d'immersion des amas fibrineux dans l’eau. Pour observe: les embryons libres, j'ai filtré l'urine et placé le résidu (1) Cette poche offre un mouvement de flamme du rythme de 8 à 10 ondu- lations par seconde. SÉANCE DU 21 JANVIER 99 dans l’eau pure. Et prenant ensuite au hasard de l’eau dans le petit verre d'expérience (un verre de montre, par exemple), j'en ai examiné le contenu à un faible grossissement et sans lamelle couvre-objet. Par ce moyen, on arrive assez facilement à trouver des embryons libres doués d’une agilité surprenante comparable à celle d’un poisson, — si bien qu'il faut acquérir un certain degré d'habitude pour les suivre dans le champ du microscope qu'ils traversent avec la rapidité d’une flèche. En ce moment, ils présentent l’aspect suivant (fig. #) : Fic. 4. 4. Embryon vivace dans l’eau pure. — 2. Embryon languissant. — 3. Embryon mort. Globes sarcodiques ciliés. Quand on laisse l’eau s’évaporer, leurs mouvements deviennent de plus en plus languissants, et si l’on emploie alors un objectif fort, on les voit se replier sur eux-mêmes de mille manières, s'invaginer même quelquefois et enfin mourir. Quand la lamelle est tout à fait sèche, on peut les colorer et les fixer dans le baume ; malheureusement 1ls se détériorent de quelque manière que l’on s’y prenne et laissent échapper les globes sarcodiques déjà signalés. ; Nous n'avons pu réussir à obtenir des préparations colorées fixes de quelque valeur que pour les amas d'œufs non écelos, traités pendant une heure par l'acide osmique au 1/100° et colorés ensuite dans la chambre humide au picro-carmin ; l’œuf se teint en jaune, la masse fibrineuse en rouge et le tout se conserve assez bien, mais en perdant beaucoup de sa netteté primilive. : En examinant après vingt-quatre heures l’eau pure contenant nos embryons, nous les avons trouvés morts et méconnaissables, — nous avons d'autre part inutilement cherché à les faire absorber par des mouches (Musca domestica), sous une cloche, de sorte qu'après avoir été tenté d’abord d'adopter l’opinion de Sonsino, sur l'aptitude de l'embryon si vivace à atteindre l’état adulte sans passer par un hôte intermédiaire, je suis revenu à l’opinion commune qui admet pour lui cette dernière nécessité. 06 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ——— Cet hôte doit sans doute vivre dans l’eau douce et avoir une très petite taille ou être comestible. | La fréquence de la Bilharzia dans le pays du'Nil, mise en regard de sa rareté dans nos possessions algériennes, est un argument des plus impor- tants en faveur de l'hôte aquatique intermédiaire; c’est le manque d’eau qui chasse la Bilharzia d'Algérie. Le malade de mon collègue Cahier (1) avait aperçu les premiers syMp- tômes de son affection après six mois de séjour à Gabès. Or, à Gabès, il une rivière permanente assez large pour que de petites barques y puis- sent circuler. C'est là un précieux indice pour nos camarades d'Algérie ; cette con- trée n’est pas uniformément aride et les régions favorisées où se rencon- trent la Seybouse, l'Oued-Kébir et le Chélif dans leur cours inférieur méri- tent une attention spéciale au point de vue de la Bilharzia ; si on l'y trouvait un jour, le faible débit des cours d’eau de nos possessions d'Afrique septentrionale offrirait pour la recherche de l’hôte intermé- diaire des conditions bien plus avantageuses que l’immensité du Nil. Nous ferons remarquer enfin que le malade sur lequel ont été faites nos recherches avait quitté la Tunisie depuis près de dix ans, ce qui donne aux Bilharzias adultes une longévité considérable qu'il est intéressant e rapprocher de celle des filaires et autres parasites du sang. ALTÉRATIONS DE L'OEIL CHEZ UN CHIEN DIABÉTIQUE PAR EXTIRPATION DU PANCRÉAS, par M. E. GLEy. (Communication faite dans la séance du 14 janvier 1893.) Depuis quelques jours il s'est produit sur ce chien, que j'ai honneur de présenter à la Société, une opacité cornéenne des plus marquées. Get ani- mal est diabétique, à la suite de l’extirpation complète du pancréas, le 10 novembre dernier ; il présente tous les symptômes de ce diabète, aujourd’hui bien connu : polyurie, polydipsie, polyphagie, amaigris- sement : la quantité de glycose éliminée par jour oscille, depuis deux mois, réguliérement entre 70 et 110 grammes par jour. La kératile (2) a débuté, il y a quatre ou cinq jours, par la partie inférieure de la cornée et s'est vite étendue à toute la membrane. La sensibilité de la cornée paraît intacte. (1) Les recherches ont été faites sur les urines du malade de notre collègue Cahier (Soc. de Biol., 20 juin 1892). (2) Il y eut, en effet, une légère inflammation, mais les premiers jours seu- lement. SÉANCE DU 21 JANVIER SÉ C'est, à ma connaissance, la première fois que l’on constate des altéra- tions ‘ l’œil dans le diabète produit sur le chien par l’extirpation du pancréas. Il suffit de rappeler i ici que les médecins ont observé très sou- vent la cataracte dans le diabète de l’homme. NOTE SUR LA FRÉQUENCE ET SUR LA DISTRIBUTION DE QUELQUES DIFFOR- MITÉS DE LA PEAU CHEZ LES ÉPILEPTIQUES, par M. Cu. FÉRé. J'ai déjà eu occasion de signaler en passant quelques difformités de la peau chez les épileptiques (1); comme leur fréquence n’est peut-être pas sans rapport avec les troubles de l’évolution du système nerveux, j'ai pensé qu'il ne serait pas sans intérêt de les étudier de plus près. Malheureusement, je n’ai trouvé que peu de documents stalistiques pour établir ane comparaison. La plus nombreuse est celle de M. Hallopeau (2), sur laquelle j'aurai à revenir. Les seules difformités ou lésions congénitales que j'ai observées sur les 167 épiteptiques non hémiplégiques que j’ai étudiés sont les nævi pigmen- taires el saillants, les nævi vasculaires, les Llaches pigmentaires, le mol- luscum, les verrues molles, le lentigo. 142 malades sur 167, ou 85,02 pour 100, ont présenté l’une quel- conque de ces lésions. 4° Nævi. — 50 individus présentent des nævi pigmentaires saillants, ou 29,93 p.100. Sur ces 50 individus, il existe 134 nævi. 35 malades ont . n Line ie œ de de DE OH | ll | = + © ax & NO À C ns Les nævi sont distribués de la facon suivante : (1) Ch. Féré. Les épilepsies et les épileptiques, 1890, p. 419. — Ch. Féré et P. Batigne. Note sur un nouveau cas d’asphyxie locale des extrémités, avec lésions congénitales de la peau chez un épileptique (Revue de médecine, 1892). (2) Hallopeau. Lecons sur les maladies nerveuses et syphilitiques; les nævi (Progrès médical, 1891, t. XIII, 2 série, p. 17). « D8 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE A DROITE MÉDIAN A GAUCHE Face. NE re 8 1 A Cou (en avant). . 2 » 5 — (en arrière). . » » o Poitrine . 3 » 3 Abdomen 3 » 6 Dos . 2 50 2 Épaules . 11 » 7 Aisselles. 2 » 3 Lombes . 2 » 5 Flancs. 1 » » BI AIS PIE 3 » 3 Avant-bras. 1 » 3 Cuisses. . . 2 » 2 Totaux. 40 51 (1) 43 2 T'aches érectiles. — 36 malades seulement présentent de ces taches, ou 21,55 p. 100. Sur ces 36 malades, il existe 236 taches, ainsi réparties: 13 malades ont. 1 tache Gérer DRPEE 3 _ = D — GR es ee ee (l == — 5 — a re GE (| — — SU 1 — _ 9 — 1 _ tee 14 — 0) De Le 16 — 1 —- — 21 BUT il —- — TA ÈREE Les taches sont distribuées de la manière suivante : À DROITE MÉDIAN A GAUCHE Faces te PME 1” » Cou (en avant). . es 2 { 2 PORtrINne Tee AMONT TETE 54 L 52 Abdomen. . . " il 9 Dos . 20 10 28 Epaules . 2 » 2 Aisselles . » » 2 Lombes nl » 8 Flancs . 5 n n Bras. 8 [| » 6 Avant-bras. . 2 » 1 Fesses . (| » il Cuisses. . 2 » 2 Jambes. . 1 » ») Totaux: eus 102 17 417 (1) Les cinquante nævi de la région dorsale et qui existent sur un seul malade ne sont pas tous strictement sur la ligne médiane mais forment un groupe médian. SÉANCE DU 21 JANVIER 59 RE ee 3 Taches pigmentaires. — 105 malades sur 167, ou 62,87 p.100, ont de ces taches, au nombre total de 631, réparties de la manière suivante : 25 malades ont. 1 tache. 2 1} CARE UE 9 — — 3 — 6 — — " — DR QE SAN " — — 6 4 — — ñ == 6 — — 8 — h) — — 9 ST 4 — — 10 — 1 RERO JAN RE à LR R EE Jos es À AA Are ja ans nn 10 RES À LPS DO EE | ARS DR Ve (| AUS le (IL RARES 0 ve j 2 enaQes Hi eee | ee He Ces taches sont distribuées comme suit : A DROITE MÉDIAN A GAUCHE FAC € ASE RS AE Re 15 » ù 8 Couenavant) ne EE 17 [l 28 TL ENARTICRE) UNE UE q) 4 9 BONNE EPA NAN ARANe 37 (0) 38 Abdomen: sen nn 17 1 24 DOS TER Ne re 41 3 42 1j OS NO RLER ETES EN EN CEE SRE DS 16 » 21 ATSSCLIE SA EE NP CAE NL ee 2 » 6 ILONDES AMIS NE EERe 6 » 13 PANNE SU RTE MIRE PA APTE Ge 12 » 8 Bras. SRE EEE S MI EU RER ED Da BAS 19 » 20 AVE DTAS AURA MEN RU 24 » 30 HeSSe SH PE Een nn et RUN 22 » 16 ŒUISS ES PHARE RU AR UE 17 » 40 JAN E SR RS AC NN Se te 3 » 5 SCO LUTRAN ES AMEN EAN » » 1 MODES UNE MR RARE » 1 » LOLAUX ELU ES Veil 21 65 309 4° Molluscum. — II se présente sur 58 malades sur 167, ou 34,73 p. 100. Ces 58 individus présentent 110 tumeurs. 36 malades ont. molluscum 1 2 ss 3 ER 4 pra 7 nn 8 Æ NN & © © | _ (4) Ces taches forment sur le même individu un groupe médian. 60 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ——— rame Elles sont distribuées comme il suit : A DROITE MÉDIAN A GAUCHE FACE AT EU CNE LASER " » » Courenpyant) Peer 11 1 5 — (en arrière). 6 ” 7 Poitrine . 8 » 3 Abdomen. . 8 » 5 Dos . 4 1 1 Épaules . pl] » 4 Aisselles . n » 3 Lombes 5 X 2 Flances. 3 » " Bras. (| » 1 Cuisses. 5 » { Scrotum.. 1 » » Totaux. 65 6 39 5° Verrues molles. — Elles se présentent exclusivement sur la face: 2 malades eu ont, 1 6 — — 2 1 — = " Ces 18 tumeurs sont distribuées ainsi : A DROITE MÉDIAN A GAUCHE 9 il 8 6° Lentigo. — 33 malades, ou 25,74 p. 100, en présentent sur la face; & en ont à la fois sur la face et sur le cou; 4 en ont à la fois sur la face et les mains; 2 en ont à la fois sur la face, les mains et les avants-bras. A peine le tiers (48) des 142 malades qui présentent des difformités de la peau, n’en présentent qu'une seule sorte: ce sont le plus souvent alors des taches pigmentaires, 23 ; les nævi, 8; les molluscum, 7; puis les taches érectiles, 3; le lentigo, 4; les verrues, 4. Un autre tiers (47) en présentent deux, le plus souvent le lentigo et les taches pigmentaires (14) et les nævi et les taches pigmentaires (11), puis le molluscum et les taches pigmentaires (7), le molluscum et les taches érectiles (5). Un autre groupe de 34 malades présentent trois sortes de difformités ; le plus souvent le lentigo, les taches pigmentaires (4), nævi (7) ou les taches pigmentaires, les taches érectiles et le molluseum (7). Enfin, 13 seulement présentent à la fois quatre formes de difformités, Le plus souvent (5 fois) le lentigo, les taches pigmentaires, le molluscum et les taches érectiles. Les lésions congénitales de la peau se présentent très fréquemment chez les épileptiques mâles et adultes, si on les compare aux individus examinés dans un service ordinaire de médecine. Sur 62 hommes adultes, SÉANCE DU 21 JANVIER 61 M. Hallopeau n’en a trouvé que 34 affectés de nævi, et sa classification des nævi comprend toutes les lésions sur lesquelles ont porté notre sta- tistique sauf le lentigo; mais le lentigo ne figure que 4 fois isolément dans notre statistique. Or, en défalquant ces quatre sujets, nous obtenons encore une proportion de beaucoup supérieure à celle de M. Hallopeau, qui est de 48,36 p. 100 seulement au lieu 82,64 p. 400. Nous pourrions done conclure que les lésions congénitales de la peau sont plus fréquentes chez les dégénérés que nous étudions que chez les sujets normaux, si la stalis- tique de M. Hallopeau, sur 27 femmes seulement il est vrai, ne nous ins- pirait une certaine réserve; elle donne en effet 88,88 p. 100 de nævi. Remarquons toutefois que la statistique de M. Hallopeau est faite à l'hôpital Saint-Louis; or, il n’est pas invraisemblable que les affections acquises de la peau soient plus fréquentes chez les sujets qui ont plus d'anomalies de développement. Abstraction faite du lentigo, 138 individus présentent 1,133 lésions qui se distribuent, suivant les régions, de la manière suivante : RAC EE AREA EAN RAGE RER AAA SUR LR Se ER Aa LAS 2 (OA NS a CETTE CA ARE AMEN LOeRA Ar PER RS 100 PONtrne PANNE A AT LL EU PORN Et A DEN Abdomen . .. TEE SN Te es à 78 DOS HU LANCE IR EUS EURE EE EEE NUE Eee 40 ÉDANleSRS Pen RRR dl Etre NULS. 18 PASS IE STE PR NES RER EF eLen SE PRE DA 29 GIE SR EAN PS ER RU CE A AE ES 52 IRAN ER ANT EN ANS PORN R EEE ESC ARECSE A Een ES EE 1 RIRES AA AAA PRE LAN RER ES ARE D6 AVAL D CASE Rata NL eme RAS NE A re 60 HÉSS ES NA UL NE: Pr PUR PAPA PA AN agree 40 CUS S ESA PANNE RU GEST RS RENÉE AM NN 69 A AD 6 Se A ER EE A te RU 19 À CO LUE Re eue ALI ER ANT ae LRU SR AT 2 MORE SN EP RES UNE pe NA ANR RAA ER NL 1 1133 Les lésions sont distribuées, suivant les régions, dans la proportion suivante : RAC GR Rene RU A US 4 SON ne 4100 COUR APRES RE PEER Et CAO ne AMENES S DA ER REC PSE ER EE re es PGI) qe Membresupémeur@Ets os TAN MÉmIDLe MN IÉMEUL (2) EEE 00 040020 Malgré la différence de volume, on voit que le membre inférieur pré- sente beaucoup moins de lésions que le supérieur. La différence s’accentue encore beaucoup plus si on compare la jambe à l’avant-bras, (1) Comprenant l'épaule et la région de l’omoplate. (2) Comprenant les fesses. 62 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE puisqu’à l’avant-bras on en rencontre 5,29 p. 100, tandis qu'il n'y en a que 1,67 p. 400 à la jambe; c’est-à-dire qu'à la jambe ces lésions sont abso- lument rares. Je n’ai pas trouvé de localisation exclusive d’un seul côté; sur 12 sujets seulement il y a une prédominance latérale évidente. Je n'ai rencontré aucun cas dans lequel les lésions fussent nettement localisées à un trajet nerveux. NOTE SUR L'INFLUENCE DE LA COMPRESSION TEMPORAIRE SUR. L'ACCUMULATION DE LA GRAISSE DANS LE TISSU CELLULAIRE SOUS-CUTANÉ, par M. Cu. FÉRé. M. P. Richer avait déjà utilisé (1) un instrument qu'il nous a présenté il y a quelques mois (2), et destiné à mesurer l'épaisseur du tissu adipeux qui double la peau avec une abondance très différente suivant les régions. | C’est de cel instrument que je me suis servi pour apprécier une parti- cularité que je ne trouve signalée ni dans les travaux de M. Richer, ni ailleurs. On sait qu'une compression permanente est capable d'empêcher l'ac- cumulation de la graisse sur un point du corps, tel est souvent l’eflet par exemple des bandages herniaires et des appareils orthopédiques main- tenus constamment en position. J'ai observé trois individus dont deux sont obèses, mais dont le troisième est d’un embonpoint très modéré, qui présentent ane particularité frap- pante : tandis que la peau de la jambe est doublée d'un parrement épais, la peau du pied est extrêmement mince et semble appliquer direc- tement sur l'aponévrose. La transition est brusque, à 5 ou 6 centimètres au-dessus de la cheville, où on voit un bourrelet saïllant. Tandis que Île pli cutané est au-dessous du bourrelel respectivement de 5, 6 et 8 milli- mètres d'épaisseur, il atteint au-dessus une épaisseur de 20, 25 et28 milli- mètres. La cause de cette différence d'épaisseur du tissu graisseux paraît évidente, c’est la compression de la chaussure. Ces trois individus portent des bottines à élastiques modérément serrées dont l’action n'est que diurne. Une compression temporaire peut donc déterminer une modification de l'accumulation de la graisse dans le tissu cellulaire sous-cutané. La 1) P. Richer. Anatomie artistique, 1890, p. 1#3. (2) P. Richer. Note sur la mensuration du pannicule adipeux sous-cutané (C. R. Soc. de Biologie, 1892, p. 491). SÉANCE DU 21 JANVIER 63 déformation qui en résulte est plus évidente dans la région inférieure de la jambe, parce que la peau est Lendue sur un plan résistant, mais, en la recherchant à l’aide du compas d'épaisseur de M. Richer, on peut les retrouver ailleurs, notamment au niveau des jarretières et de la ceinture. D'autres parties des vêtements peuvent agir de la même manière : les gants, par exemple, et il est probable qu’elles agissent en effet beaucoup plus souvent qu'on ne le pense. C’est donc un fait dont il faut tenir compte dans l'étude des formes soi-disant normales et qui est sans doute susceptible d'applications pratiques. REMARQUES SUR L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DE LA COCAÏNE, par M. EMILE BERGER. 11 y a quelques semaines, la dissociation syringomyélique des sensibi- lités a été l’objet d’une discussion dans cette Société; il me semble inté- ressant à cette occasion d'attirer l'attention des physiologistes sur quelques qualités peu connues encore de la cocaïne. C'est en 1884 que j'ai montré pour la première fois à mes élèves (peu après la découverte de l’anesthésie locale par la cocaïne) que cette substance produit dans la conjonclive de l'œil, d’abord l’abolition de la sensalion de tact et seulement ensuite celle de la sensation thermique. Goldscheider semble avoir été le premier qui ait communiqué ce dernier fait au monde savant. On peut encore diviser en deux stades, la période extrêmement courte, où la sensation de tact est abolie et la sensibilité thermique conservée. Dans le premier stade, le malade dont la conjonctive est cocaïnisée, reconnaît très bien la nature de l’irrilation thermique. Dans le deuxième stade, la sensibilité thermique devient obtuse ; Le plus souvent le malade, dont je touchais la conjonctive au moyen d'une extré- mité de sonde chauffée, me répondait qu’il la sentait froide. Il faut d’ailleurs examiner plusieurs cas pour se convaincre de l'exac- titude de ces faits, qui, par la courte durée de ces deux stades et l'inter- valle qui les sépare, peuvent facilement échapper. SUR L'EMPLOI EN OPHTALMOLOGIE DE MÉLANGES DE PLUSIEURS PRODUITS PHARMACEUTIQUES, par M. Émice BERGER. Les recherches que j'ai faites pendant ces derniers huit mois sur l’em- ploi en ophtalmologie de mélanges de plusieurs substances pharmaceu- 64 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tiques me sont suggérées par ce fait, qu'en choisissant les antisepliques et en les associant, ou peut augmenter leur pouvoir antiseptique sans que la toxicité du mélange croisse en proportion de ce pouvoir antisep- tique. Ce principe, constaté d’abord par M. Bouchard, a donné dans la pratique les résultats les plus favorables; je me contente de rappeler en outre ce fait que, d’après MM. Brown-Séquard et Rabuteau, plusieurs bro- mures administrés ensemble agissent mieux que le sel de potassium seul, en permettant d'éviter les accidents de bromisme, et de mentionner le dernier rapport de M. Cornil (1) sur les travaux de M. de Christmas et spécialement sur son antiseptique composé le « phénosalyl ». Partant donc de ce principe, voici les résultats auxquels je suis parvenu dans ma pratique ophtalmologique. J'ai essayé comme mydriatique d’une solution contenant : 1 p. 100 de sulfate d’atropine, 1 p. 100 de sulfate de duboïsine, 2 p. 100 de chlorhydrate de cocaïne. Une goutte de ce mélange, instillée dans le sac conjonctival, détermine une dilatation pupillaire maxima qu’on ne pourrait produire avec aucun autre médicament. Les instillations de ce collyre combiné m'ont rendu de très grands services dans des cas d'’iritis avec synéchies postérieures de l'iris. Un collyre contenant : 0.3 p. 100 de sulfate d’atropine, 0.3 p. 100 de sulfate de duboïsine, 2 p. 100 de chlorhydrate de cocaïne, est un mydriatique, au moins aussi actif qu’une solution de sulfate d’atro- pine de 1 p. 100, sans être aussi toxique. Ce dernier fail est d’une haute importance, car les intoxications par l'atropine administrée en collyre sont plus fréquentes qu'on ne serait tenté de le croire généralement. Feddersen (2), à la suite d’un travail des plus fastidieux à résumé 104 observations d'intoxication par ce produit. Dans 53 cas, elle a été produite par des collyres où la dose d’atropine variait de 0.17 à 3 p. 100. J'ai essayé en outre un mélange composé de deux myotiques d’un usage journalier : le sulfate d’éserine et le chlorhydrate de pilocarpine. Dans un cas de mydriase paralytique, le collyre combiné : Sulfate d’éserine, 1 p. 100. Chlorhydrate de pilocarpine, 2 p.100, provoqua dans l'œil droit un rétrécissement pupillaire plus prononcé et (4) Bulletin de l'Académie de médecine, 1892 (séance du 20 décembre). (2) Feddersen. Beitræge zur Atropinvergiftung. Berlin, 1885. / SÉANCE DU 21 JANVIER 65 plus durable que dans l'œil gauche où je fis successivement l'épreuve parallèle avec de l’éserine (1 p. 100) et de la pilocarpine (2 p. 100). J'ai essayé ensuite le collyre combiné dans l'œil gauche et les collyres myoti- ques simples dans l’œil droit ; un rélrécissement pupillaire plus prononcé et plus durable était, dans ces expériences, du côlé gauche. Il m'a paru inutile de faire de nouvelles recherches sur l’action de collyres combinés de substances astringentes; nous avons en effet d’an- ciennes formules qui sont très suffisantes el je ne rappelle que pour mé- moire la pierre divine, si fréquemment employée en ophtalmologie.. Il me semble que tout le bénéfice que l’on retire de l'emploi de quelques eaux minérales, surtout dans les affections du tube digestif ou par ralen- tissement de la nutrition, elc., lient à ce fait que, dans ces eaux miné- rales, nous retrouvons précisément une association heureuse de subs- tances médicamenteuses d’une action analogue, association qui, jusqu’à présent, a fréquemment donné un meilleur résuitat qu'un seul produit pharmaceutique qu’on a tenté de lui substituer. Enfin, je me suis efforcé de supprimer quelques inconvénients de la cocaïne en me servant, comme collyre, d’un mélange comprenant : 2 p. 100 de chlorhydrate de cocaïne, et 2 p. 100 de chlorhydrate de pilocarpine. Ce mélange, instillé dans l'œil, provoque l’anesthésie locale, la dilata- tion de la fente palpébrale, et l’abaissement de la tension intra-oculaire, sans produire de mydriase (le mélange produit quelquefois même un léger myosis) et de diminution de l’amplitude de l’accommodation. Il y a déjà huit mois que je ne me sers de ce mélange pour l’anesthésie locale de l’œil, et j'ai pu faire ainsi des cautérisations de la conjonctive, l'ex- traction de corps étrangers, de petites opérations même (extirpation d'un chalazion, etc.), sans que les malades aient été gènés par la mydriase qu'on observe dans l'œil cocaïnisé. On voit donc que l’on peut, par la combinaison de plusieurs substances médicamenteuses, supprimer les inconvénients d’une substance unique en ne conservant que ses qualités avantageuses. Ne pourrait-on pas, dans celle voie, produire de nouveaux médicaments à volonté? CONSIDÉRATIONS SUR LA PREMIÈRE PRÉMOLAIRE DE QUELQUES MAMMIFÈRES DOMESTIQUES, par M. F.-H. LESPRE, Professeur d'anatomie à l'Ecole vétérinaire de Lyon. Des quatre prémolaires de la dentition type des Mammifères, la pre- mière fait souvent défaut, surtout à la mâchoire inférieure, et, quand elle existe, elle n’est pas toujours sujette au renouvellement, ou, pour 3. ) (æp) SDCIÉTE DE BIOLOGIE employer l'expression de M. Lataste, elle n’est pas toujours diphysaire. Par exemple, chez le chien et le porc aux deux mâchoires, chez les Solipèdes à la mâchoire supérieure, elle ne pousse qu'une fois, après les molaires de lait, mais avant les molaires de remplacement, si bien que les uns la comptent dans la. première dentition, les autres dans Ja deuxième. M. Lataste, dans une série de communications du plus haut intérêt faites en 1888 à la Société de Biologie, établit que, dans la dentition pri- mordiale des Mammifères, toutes les dents qui précèdent les arrière- molaires ou molaires permanentes, c’est-à-dire, les prémolaires, les canines et les incisives sont caduques el sujettes au renouvellement. Quand elles deviennent monophysaires, comme la première prémolaire des animaux précités, c'est, pense-t-il, toujours par atrophie de la dent de première génération en dent de lait, de telle sorte que toute dent d'essence diphysaire devenue monophysaire appartiendrait à la seconde dentütion. En tant qu'il s’agit des incisives des Rongeurs, des incisives, des canines et des prémolaires des Marsupiaux, des canines des Solipèdes, ete., la manière de voir de M. Lataste est rigoureusement juste; mais elle ne me paraît pas applicable à tous les cas, notamment à la première prémolaire des Solipèdes, du porc, du chien, que je considère comme une dent de lait ayant perdu sa remplaçante et non pas comme une dent de deuxième dentition qui aurait perdu sa dent de lait (4). Chez les Solipèdes, la première prémolaire n'existe qu'à la mâchoire supérieure ; on ne la rencontre que lrès exceplionnellement à la mâchoire inférieure: c’est une dent plus ou moins rudimentaire que certains au- teurs disent inconstante, mais que j'ai rencontrée sur tous les sujels âgés de moins de trente mois qu'il m'a été donné d'examiner (2). Elle se rat- tache aux molaires de lait par sa forme colletée, par la date de son érup- tion qui n’est en retard que de deux ou trois mois sur celle des autres, tandis qu’elle précède de deux ans la sortie des molaires remplaçantes, et par sa chute, qui a lieu ordinairement en même temps que celle de la dent suivante. Il est rare de la rencontrer chez l'adulte. Dans ie bœuf et le mouton, la même dent rudimentaire apparaît quelquefois; elle tombe presque toujours avec les trois molaires de lait suivantes pour n'être jamais remplacée. Les anatomistes vétérinaires la rangent dans la première dentition (3). Chez le porc, la première prémolaire existe aux deux mâchoires; toutefois elle peut faire défaut à la mâchoire inférieure. En général, elle (1) Voyez Lesbre. Journal de l’École vétérinaire de Lyon, 1888. (2) Voyez observations sur les dents et les mâchoires des Solipèdes, in loc. cit., 1892. (3) Voyez notamment Girard. Traité de l'âge des animaux domestiques. SÉANCE DU 21 JANVIER 67 fait irruption vers cinq mois, en retard de trois à quatre mois sur Îa seconde, laquelle est en retard elle-même de six à sept semaines sur les deux suivantes, car la sortie de ces dents se fait successivement d'arrière en avant. Dans les animaux précoces, il n’est pas rare de la voir sortir à deux ou trois mois; tandis que jamais les prémolaires remplaçantes ne font éruption avant treize à quinze mois. Celte dent n’est pas, à propre- ment parler, une dent permanente; elle est très caduque, et bien peu d’ani- maux âgés la possèdent, surtout à la mâchoire inférieure. Il y a donc de sérieuses raisons d'en faire une dent de lait, dont la remplaçante a été empêchée de se développer par le volume exagéré des canines dont la partie enchâssée oblique en arrière n'a laissé aucune place disponible. Au surplus, voici une preuve qui prévaut sur toutes les autres, c'est que j'ai rencontré sur la tête d’un porc de vingt mois, à la mâchoire supé- rieure, une première prémolaire remplaçante nouvellement sortie, et, immédiatement en avant, la dent de lait non encore tombée. Cette pre- mière prémolaire était devenue diphysaire par apparition d’une dent de deuxième génération; donc c’est cette dernière qui disparait lorsque ladite dent est monophysaire. Chez le chien, la première prémolaire aux deux mâchoires est égale- ment monophysaire mais très caduque dans les animaux d’un certain âge. Je ne l'ai jamais vu remplacer. Elle sort en moyenne vers trois mois, en retard de deux mois environ sur les autres molaires de lait, en avance du même temps sur les prémolaires remplacantes. Ce retard d’éruption par rapport aux autres dents de lait doit être imputé au défaut d'espace, car j'ai constaté, de même que M. Lataste, qu'elle apparait dans son fol- licule dès les deux ou trois premières semaines qui suivent la naissance, alors qu'il n’y a pas encore trace des prémolaires remplaçantes; mais elle ne peut achever son développement que lorsque la croissance de l’os le lui permet. Quand cette dent sort de son alvéole, elle fait contraste avec les autres, déjà plus ou moins usées et branlantes ; c'est pourquoi la plupart des auteurs la rangent dans la deuxième dentition.. Cependant il est plus probable que ce soit une dent de lait, comme son homologue chez le porc, et que la dent remplaçante ait disparu par suite du défaut d'espace résultant du développement extrême des canines. Si c'était une dent de deuxième génération, il serait bien extraordinaire de la voir sortir si longtemps avant les autres, attendu qu'il est de règle que les pré- molaires remplaçantes, dans ces animaux comme dans les porcins, sor- tent successivement d’arrière en avant. Il serait intéressant de chercher chez le fœtus ou le très jeune sujet, s’il n'existe pas un organe adamentin annexe au follicule de cette dent et ébauchant une dent remplaçante; c'est une étude que je me propose de faire aussitôt que j'en aurai le moyen. Dans les Camélidés, la première prémolaire, isolée des autres et en forme de canine, est aussi monophysaire; mais à l'encontre de ce que. 68 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE nous venons de dire, ce n’est pas une dent de lait mais bien une dent d’adulte ; en effet, elle ne sort que vers six à sept ans (1), quand la den- tition est achevée, et, dans le jeune âge on voit à sa place une légère intumescence des maxillaires creusée d’une petite cavité folliculaire qui représente sans doute une trace de la dent de lait. Cette dernière a avorté, et l'on peut se demander encore si ce n’est pas par manque d'espace, car on voit les canines très obliquement implantées ne laisser que quelques millimètres d'intervalle entre leur racine et le bord maxillaire. Plus tard, les barres s’allongent beaucoup. De sorte que le germe de la dent rem- placante ne trouve pas les mêmes obstacles. En résumé, quand la première prémolaire devient monophysaire, cela peut résulter soit de l'avortement de la dent de lait, soit, le plus souvent, de l’avortement de la dent de deuxième génération. D'une manière générale, on dirait qu’une dent devenue diphysaire dont la dent remplaçante a disparu, marche vers la disparition totale; tandis qu'il en est tout autrement d’une dent diphysaire qui a perdu sa dent de lait, il semble qu’elle n'ait fait que s'adapter à de nouvelles con- ditions physiologiques. Du ROLE DES MUSCLES TRICEPS FÉMORAUX ET FESSIERS DANS LA STATION VERTICALE, par M. Pauz RICHER. Dans une précédente communication (2), j'ai montré tout le parti que l’on pouvait tirer, pour l'étude de la physiologie musculaire, de l’obser- vation méthodique du nu. Je désire aujourd'hui aborder un point limité de mécanique animale et faire voir qu'il est facile, par ce procédé bien simple, de déterminer très exactement le rôle, encore discuté, qui, dans Ja station verticale, revient aux muscles extenseurs, triceps fémoraux et fessiers. On sait que deux théories sont en présence pour expliquer le méca- nisme de la station. L'une, la plus ancienne, la théorie musculaire, fait jouer un rôle essentiellement actif aux muscles triceps fémoraux et fes- siers dont la contraction permanente serait absolument indispensable pour maintenir l’extension de la cuisse sur la jambe, et du tronc sur la cuisse. L'autre, émise en 1843 par les frères Weber, soutient au contraire que l’extension de l'articulation de la hanche et du genou, dans la station verticale, est purement passive et qu’elle est maintenue par l’action de la pesanteur agissant en sens opposé des ligaments distendus. (1) Voyez Vallois. Histoire naturelle du Dromadaire, 1856. (2) Séance du 7 mai 1892. SÉANCE DU 21 JANVIER 69 Le problème, non encore résolu, est celui-ci : dans la station verticale les triceps fémoraux et les fessiers sont-ils actifs ou passifs, contractés ou relächés ? Il me semble que la simple inspection du nu suffit à le résoudre. J'ai montré que le triceps fémoral, comme tous les muscles en général, mais peut-être avec plus d’évidence encore, influait de façon fort différente sur la morphologie de la région suivant son état de relâchement ou de contraction. La productiou du bourrelet sus-rotulien pendant le seul relâchement musculaire est absolument topique. Et il suffit de regarder un homme nu debout portant également sur les deux pieds, pour voir, alors que l'équilibre de la station est assuré, se produire le bourrelet en question, indice absolument certain du relâchement du triceps. Plus le relâchement est considérable, plus ce bourrelet s'accentue ; il disparaît avec la contraction. Il n’y a donc pas de doute possible. Et si l'on veut, comme supplément d’information, pratiquer le palper, l'état de consis- tance du muscle viendra confirmer ce qui précède. Force est bien de conclure que l’extension du genou est due à une autre cause que la contraction de l’extenseur, et il faut admettre alors, avec les frères Weber, que la ligne de gravité de la partie du corps siluée au-dessus du genou passe en avant du centre de cette articulation dont l'extension se trouve ainsi passivement maintenue et limitée par la distension des ligaments. Et plus cette ligne de gravité passera en avant de l'articulation, plus l'équilibre se trouvera assuré en dehors de toute contraction musculaire et plus le relâchement du muscle triceps devra s’accentuer. C'est ce qui se produit, en effet, lorsqu’on fait varier la position de la ligne de gravité en imprimant au corps de légères oscillations dans le sens antéro-pos- térieur. Dans l’oscillation en avant, on voit, par l’exagération du bourrelet sus- rotulien, que le relâchement du triceps s’accentue. Au contraire, dans l'oscillation en arrière, aussitôt que la ligne de gravité tend à passer en arrière du centre de l'articulation, le bourrelet disparaît, les triceps se contractent énergiquement, et cela, pour s’opposer à la flexion de l'ar- ticle entraîné dans ce sens par la pesanteur. Ainsi s'explique comment, dans la station droite bien équilibrée, l’axe des membres inférieurs vu de profil ne suit pas une direction verticale mais légèrement oblique de haut en bas et d'avant en arrière. Les artistes ont bien saisi ce détail. Dans la station hanchée, la ligne de gravité du corps passe encore plus en avant du genou de la jambe portante qui est en extension. Aussi le triceps fémoral est-il de ce côté en relâchement exagéré pour ainsi dire, et c’est en effet sur cette jambe et dans cette circonstance que le relief du bourrelet sus-rotulien se produit avec une véritable exagération. Les artistes n’ont pas manqué de reproduire cette forme intéressante et dont je donne ici la raison physiologique. 710 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Pas plus que les triceps fémoraux, les muscles fessiers ne se contractent dans la station verticale. L'état de contraction ou de relâchement des muscles fessiers est très facile à reconnaître d’après la forme de la région. Dans la contraction. la fesse se creuse fortement en dehors, de facon à prendre un aspect réni- forme. Il faut admettre, toujours avec les frères Weber, que, dans la station verticale, la ligne de gravité du corps passe en arrière de l’articulation de la hanche dont l’extension, purement passive, est limitée par la distension du ligament de Bertin; ce qui explique le maintien de l'extension de la hanche coïncidant avec le relâchement de son puissant muscle extenseur. El le relâchement des fessiers augmente si le torse se porte en arrière, tandis que s’il se fléchit légèrement de façon à faire passer la ligne de gravité en avant de l’article, on voit aussitôt les muscles fessiers entrer en contraction pour s'opposer à la flexion qu'entraînerait fatalement l’action de la pesanteur. La constatation si évidente du relâchement des muscles fessiers et tri- ceps fémoraux dans la station verticale donne donc gain de cause à la théorie mécanique à l’encontre de la théorie musculaire soutenue encore aujourd'hui par des physiologistes fort distingués. CONCURRENCE VITALE ENTRE LE BACILLE PYOCYANIQUE ET LA LEVURE DE BIÈRE. (Note de MM. D’ARSONVAL et CHARRIN } Dans notre précédente communication, nous avons montré qu’à la tem- pérature de 37 degrés le bacille pyocyanique arrête l’activité de la levure de bière et l'empêche de dédoubler le sucre en alcool et acide carbonique. Cet arrêt de la fermentation alcoolique est-il dù à l’action des produits solubles sécrétés par le bacille, ou doit-il, au contraire, être rapporté à une action directe du bacille sur la levure, à une véritable concurrence vilale, en un mot, entre ces deux organismes monocellulaires? Les résultats signalés dans la dernière séance tendaient à faire admettre cette dernière hypothèse, mais n'étaient pas suffisamment probantes pour entraïner la conviction. Comme le faisait très judicieusement remar- quer notre collègue M. Charles Richet, on sait que certaines substances empêéchantes voient leur action augmentée par la chaleur et presque tota- lement supprimée par le froid. Ce pouvait être le cas dans les faits que nous avons rapportés. L'expérience suivante prouve, d'une manière indu- bitable, que l'arrêt de la fermentation alcoolique est du au bacille pyo- cyanique lui-même et non à ses produits solubles. MINE SÉANCE DU 21 JANVIER 71 On prend quatre tubes à essai semblables; on les remplit à égale hau- teur de la même solution sucrée tenant en suspension de la levure de bière. On finit ensuite de les remplir : le premier avec de l’eau, le second avee une Culture vivante de bacille pyocyanique, le troisième avec la même culture tuée par l’acide carbonique liquéfié, suivant le procédé imaginé par l’un de nous, le quatrième avee la culture filtrée à la bougie d'alumine, et, ne contenant, par conséquent, que les produits solubles. Cela fait, on bouche ces quatre tubes avec leurs bouchons respectifs munis de tubes plongeurs; on les porte dans un bain à 37 degrés. Voici alors ce que l’on constate : le tube n° 4 fermente; le tube n° 2 (contenant le bacille) ne bouge pas; les tubes n° 3 et 4 fermentent, mars beaucoup plus rapidement que le Lube n° 1 qui renferme la levure pure. C’est donc bien le bacille pvocyanique seul, qui entrave la fermentation, puisque sa sécrétion, son protoplasma activent au contraire la fermenta- tion, au lieu de l’arrêter. Nous sommes donc bien en présence d'une véritable concurrence vitale. À 37 degrés, cet arrèt complet de la fermentation par le microbe n'est pas définitif. Au bout de huit à dix heures (plus ou moins, suivant les pro- portions relatives de levure et de bacille), la fermentation alcoolique s’éta- blit et continue très lentement. Cela tient probablement à ce fait que le germe est fortement aérobie ; la levure, en lui enlevant peu à peu loxy- gène, le met en état d'infériorité au bout d’un temps plus ou moins long et a ainsi raison de lui. Maintenant, pourquoi les produits liquides, où la bactérie morte est en suspension, aclivent-ils cette fermentation? Celte action accélératrice est-elle le fait des principes sécrétés par le bacille ; ou bien est-elle due simplement à l’action du bouillon de bœuf; ou enfin à la culture même? Des expériences, encore incomplètes, semblent montrer que celte der- nière hypothèse est la vraie. INCOAGULABILITÉ DU SANG ET RÉAPPARITION DE LA FIBRINE CHEZ L'ANIMAL QUI A SUBI LA DÉFIBRINATION TOTALE, par M. A. DAsTRe. L. — Cause de l'incoagulabilité du sang. Après avoir constaté que l'an pouvait, par une série de saignées et de réinjections successives, amener le sang d’un animal (chien) à n'être plus coagulable, et à ne plus fournir de fibrine, il faut indiquer la cause de cet état nouveau du sang. L'impossibilité pour un sang de fournir de la fibrine peut tenir à l’une 119 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE des trois causes suivantes : absence de sels terreux solubles, absence de fibrinogène, absence de fibrine-ferment. Ce sont là, en effet, les trois seuls facteurs de la coagulation. On connaît des exemples de l’un et l’autre de ces cas. Dans l'espèce, c’est le fibrinogène qui fait défaut. L'expérience élablit en effet que si l’on fournit au sang incoagulable, le fibrinogène et le fibrinogène seul, la coagulation a lieu. Le fibrine-ferment existe en proportion suffisante. Expérience (82). — Chien de 20 kilogrammes. Défibrination totale du sang dans l’espace de quatre heures après huit prises. — La neuvième prise ne fournit plus de fibrine par battage, ni de caillot spontané. On prélève plusieurs échantillons de 20 grammes. L'un des échantillons est mélangé à 150 grammes de transsudat d'hydrocèle. — Un second est mélangé à 80 grammes d’une solution forte de fibrinogène dans NaCI 7/1000. — Le lendemain, on trouve dans les deux éprouvettes un vaste coagulum en réseau de toile d’araignée, de consistance très molle. L'expérience élablit donc que la saignée finale contient une quantité suffisante de fibrine-ferment pour provoquer la coagulation d’un liquide fibrinogéné. Une contre-épreuve permet de constater directement l'absence de fibri- nogène. Expérience (83). — Un échantillon de 20 centimètres cubes de sang ultime, incoagulable, est mélangé au sortir du vaisseau avec 80 centimètres cubes de solution physiologique de NaCI 7/1000. On laisse déposer les globules à la gla- cière, pendant quarante-huit heures. On décante le liquide surnageant. A 20 centimètres cubes de ce liquide, on ajoute un égal volume, 20 centi- mètres cubes de la solution salée NaCI à 30 0/0. — Le fibrinogene, s'il en exis- tait dans le sang de la saignée devrait précipiter entièrement. Or, la liqueur reste à peu près limpide ; il n'y a point de dépôt adhérant au verre. En résumé, le sang ullime, incoagulable, circulant in vivum est consti- tué absolument comme le sang artificiellement défibriné in vitro. IT. — Réapparition de la fibrine. Le sang de l’animal ne reste pas longtemps dans cet état, où le géné- rateur principal de la fibrine fait défaut. Au début, et pendant quelque temps encore, des suintements hémorragiques ont lieu par toutes les surfaces de sections, points de suture, etc. Puis ces hémorragies se taris- sent; le sang se reconstilue, la fibrine reparail. Le temps absolu au bout duquel cette réapparition de la fibrine devient SÉANCE DU 21 JANVIER 1e appréciable, dépend de conditions diverses, parmi lesquelles intervient comme facteur important, la durée même de l’opération. Il a semblé que lorsque Le taux de la soustraction sanguine était faible et l’opération de la défibrination de longue durée, la fibrine reparaissait vile. Au contraire, avec un taux de soustraction élevé, et conséquemment une défibrination rapide, l’incoagulabilité du sang persiste plus longtemps. Les détermi- nations d’ailleurs n’ont pu être assez nombreuses pour permettre de préciser davantage. Dans un cas (88), sur un chien de 19 kil. 500 dont la première prise de 500 grammes avait fourni 0 gr. 600 de fibrine sèche. On trouve, trois heures et demie après la défibrination, dans une prise égale, 0 gr. 269 de fibrine sèche, c'est-à-dire un peu moins de la motié de la quantité initiale. Dans une autre expérience (62), après quarante-cinq minutes, on trouve 0 gr. 04 de fibrine sèche. La rapidité relative de la reproduction des générateurs de la fibrine montre l'instabilité de cette condition où l’animal a été placé artificielle- ment. 11 y a un mécanisme naturel qui tend à replacer l'organisme dans son état normal, et à reconstituer le sang. — L'intérêt de ces expériences consiste précisément à saisir le jeu de ce mécanisme. On remarquera d’abord que ce mécanisme doit fonctionner pendant la durée de l'opération même, el non pas seulement après qu’elle est ter- minée. Le sang tend à réparer ses perles en fibrinogène. Mais la perte, outrepassant de beaucoup la réparation, il arrive que celle-ci soit insai- sissable. Mais bientôt la réparation s'accélère rapidement. Dans un cas (70), la quantité de fibrine, vingt-quatre heures après l'opération, avait non seu- lement regagné le taux initial, mais l’avait dépassé d'un tiers. La fibrine était surabondante. À cet égard, la condition du sang est semblable à ce que l’on observe dans les pyrexies graves. Cette surproduction de fibrine avait été observée à la suite des saignées, par les anciens cliniciens. Elle n’est pas due, comme on le voit, à la sous- traction totaie du sang, comme ceux-ci pouvaient le croire, mais à la seule soustraction de la fibrine, comme le prouve notre expérience et celle de Magendie. £ Il reste à savoir quels sont les caractères de cette fibrine de nouvelle formation : c'est ce que j’indiquerai dans une note prochaine. —1 = SOCIETÉ DE BIOLOGIE NOTE SUR DEUX ACARIENS DE LA FAMILLE DES SARCOPTIDÉS, par M. J. LIGNIÈRES, Répétiteur à l'École vétérinaire d'Alfort. 1. — Tyroglyphus malus (Shimer) (1). Le T'yroglyphus malus a été vu et lrès sommairement étudié en Amé- rique, notamment par Shimer (2) et Riley (3); jusqu'ici il n'avait pas été rencontré en Europe. Ludwig Karpelles (4), dans un essai de elassifica- tion, signale bien le Tyroglyphus malus, mais les caraclères qu'il en donne sont visiblement empruntés aux auteurs américains. Cet Acarien vit dans les coques des Kermès, et notamment du Xermes conchiformis (Mytilaspis pomicorticis), mais seulement dans les coques vides, c’est-à-dire là où on ne trouve plus ni œufs ni Coccus vivants, car il se nourrit exclusivement des débris de mues et autres sécrélions de ces derniers. Plusieurs auteurs avaient prétendu que le 7yroglyphus malus suçait le suc des plantes ; les autres, au contraire, pensaient que les œufs des Ker- mès lui servaient de nourriture. Pour m'assurer de ces faits, j'ai mis des Tyroglyphes sur de jeunes pousses de pommiers. Tous sont morts de faim sans avoir touché ou même tenté de toucher à la plante. D'autre part, j'ai enfermé plusieurs de ces Acariens, après les avoir fait jeûner huit jours, dans une cellule de verre remplie de Kermès et d'œufs. Ces derniers sont restés intacts, tandis que tous les Tyroglyphes sont ’ q JET morts au bout d’un mois environ. Quand, au contraire, je les enfermais avec des coques maintenues un peu humides, ils y vivaient facilement. Nymphe hypopiale. — Jusqu'ici, la nymphe hypopiale du 7yreglyphus malus était restée inconnue. La cause en est sans doute dans la rareté de la transformation hypopiale chez cet Acarien. Malgré tous mes efforts, et en me plaçant dans des conditions très variées, je n’ai pu les obtenir expérimentalement comme l'avait fait Mégnin pour le Tyroglyphus rostro- serratus par exemple. Les huit exemplaires que je possède actuellement sont le résultat de recherches poursuivies pendant deux années; durant celles-ci, j'ai eu la bonne fortune de trouver deux fois la nymphe hypopiale vivante dans (1) Les détails zoologiques seront donnés dans un Mémoire spécial Mémoi- res de la Société de zoologie de France, 1893). (2) Shimer. Trans. Amer. Ent. Soc. Vol. I, p. 368. 9 (Acarus malus). (3) Riley. 5 th. Rept. Ins. Mo., p. 87. (4) Ludwig Karpelles. Beiträge zur Naturgeschichte der Milben. Berlin, 1883. il SÉANCE DU 21 JANVIER 75 EE l'intérieur même de la nymphe octopode normale; à ce moment, cette dernière était inerte comme si elle allait effectuer une mue ordinaire, mais à l’intérieur de son corps, on distinguait parfaitement une teinte roussâtre dénotant la présence de l’hypope. Lesnymphes hypopiales, très TYROGLYPHUS MALUS 230/1 Femelle ovigère. Nymphe hypopiale. Face ventrale. Face ventrale. résistantes, vivent sans prendre aucune nourriture, elles ont pour but la conservation de l’espèce lorsque les conditions deviennent défavorables. En cela, elles peuvent être assimilées aux graines des plantes et aux spo- _res des microorganismes. Il. — Hemisarcoptes'coccisugus (n. g. n. sp.). L'Hemisarcoptes coccisuqus vit, comme le Zyroglyphus malus, dans les coques du Xermes conchiformis ; mais, à l'encontre de ce dernier, on le 76 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE trouve exclusivement dans celles qui contiennent des œufs ou des Kermès vivants. Cet Acarien diffère, au point de vue zoologique, des Glyciphages, des Tyroglyphes, du Carpoglyphus de Robin, des Canestrinia, des Coleopte- r ophagus et des Linocoptes de Berlese, des Pullea de Canestrini (1), mais HEMISARCOPTES COCCISUGUS. 230/1 Femelle ovigère. Face ventrale. on est frappé de ses ressemblances avec les Sarcoptides. Etant donnés cette dernière particularité et son mode de vie, je propose de lui appli- quer le nom générique d'Hemisarcoptes (hemi, demi; Sarcoptes, Sarcopte) et comme nom spécifique, celui de coccisugus (Coccus, Kermès; sugare, sucer). L'Hemisarcoptes coccisugus est un Acarien parasite dans toute l'accep- tion du mot. Il est le plus terrible ennemi des Kermès, qu'il tue pour se nourrir. Sa ponte est très abondante, elle s'effectue pour ainsi dire durant toute l’année, mais en subissant des variations de quantité. La grosse ponte‘commence en avril; elle est à son maximum dans la mi-mai, — éclosion des œufs du Coccus, — décroît ensuite jusqu'à la fin de juillet, où elle redevient abondante, — ponte du Coccus —, puis diminue pour atteindre son minimum en novembre, décembre et janvier ; elle se réveille en février et mars. Lorsque les œufs des Kermès sont intacts, ils sont blancs, lisses et par- (1) Genre Pullea Canestrini, 1884. si SÉANCE DU 21 JANVIER in faitement ovoïdes ; s’ils ont été sucés par notre Acarien, ils apparaissent comme bosselés; souvent même on les trouve complètement vidés ; alors les deux parois de l'œuf, plus ou moins recroquevillées, sont en contact, et l’ensemble prend une teinte jaunâtre. Quand le Kermes est attaqué depuis longtemps par l’Hemisarcoptes coccisugus, il est facile de remarquer que la ponte du premier est très HEMISARCOPTES COCCISUGUS. 230/1 Mâle. Face ventrale. notablement diminuée. Au lieu de donner de 60 à 70 œufs, le Coceus n'en pond que de 30 à 15 et quelquefois moins encore. C'est, je crois, ce que Giard appellerait un phénomène de castration parasitaire. Préparation des Acariens et autres animaux microscopiques à corps mou. — L'Hemisarcoptes coccisugus est globuleux; aussi est-il extrèmement difficile de le placer sur le dos au moment de sa préparation, car presque toujours il se retourne et présente l’un de ses côtés; d'autre part, en mourant, il replie ses pattes sous le corps, ce qui gêne aussi considérable- ment les études microscopiques. Ce sont ces deux inconvénients qui mont suggéré le mode de préparation suivant, qui d'ailleurs est applicable, comme je l’ai constaté souvent, non seulement à nombre d’Acariens, mais encore à beaucoup d'animaux microscopiques à corps mou. Les Acariens, par exemple, sont placés sur leurs pattes à la surface d’une lame de verre. Dès qu’ils se mettent en marche, on leur laisse tom- 18 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ber sur le dos une très petite goutte d’éther (ou de chloroforme). Ce liquide les anesthésie immédiatement et parfois les tue; mais, chose remarquable, l’éther a pour effet de leur faire étendre très fortement les pattes. On profite de cet instant pour chauffer très légèrement la lame, de façon à tuer complètement l’Acarien s’il ne l’est déjà, en même temps qu’à durcir son tégument chilineux. Le chauffage demande une certaine habi- tude, que l’on acquiert du reste très vite; au début, en effet, on le pousse facilement trop loin, ce qui ratatine complètement l'animal et détruit la préparation. Lorsque l’Acarien est bien mort, avec les pattes allongées et écartées, on peut le nettoyer avec quelques gouttes d’une solution faible de potasse (3 à 5 p. 100), puis le monter, dans la glycérine par exemple, avec la plus grande facilité. Ainsi obtenues, les préparations sont par- faites pour l'étude. LE BACILLE PYOCYANIQUE DANS UN ŒUF DE POULE, par M. STÉPHEN ARTAULT. Un œuf frais présentait au mirage une teinte verte généralisée, j'en extrais avec toutes les précautions d’usage (flambage de la coquille au point de piqüre et introduction de l’aiguille d’une seringue stérilisée), une albumine d’un très beau vert fluorescent, non encore liquéfiée et déga- geant une légère odeur ammoniacale. C’est une culture très prospère du bacille pyocyanique, comme le äémontrent toutes les réactions auxquelles je le soumets et les cultures que j'en fais : expériences confirmées d’ail- leurs par M. Charrin. Ce qui fait l'intérêt de cette observation, c’est qu'il s’agit d'un œuffrais, qui n’a pu, par conséquent, être infecté que par sa mère. Or, on sait que les poules sont assez réfractaires à la maladie pyocyanique ; il faut donc supposer que la nôtre l’avait en quelque sorte à l’état latent. Mais comme, d’autre part, les expériences de MM. Charrin et Gley ont démontré que le bacille pyocyanique agit, soit par lui-même, soit par ses produits, sur la descendance des animaux pyocyanisés, entraînant des malformations, des atrophies embryonnaires, il est intéressant de prendre, pour ainsi dire, sur le fait la transmission maternelle de l’agent morbide, et il serait important de connaître la destinée de l'embryon d'un pareil œuf. Je ne sais si M. Dareste, qui m’a dit avoir trouvé jadis plusieurs fois des œufs à albumine verte, a observé quelque chose de spécial dans leur évolution, ni même si les embryons en étaient viables. A clinomycète dans un œuf de poule. Je dois à un vétérinaire de mes amis l'observation de la présence de l’actinomycète dans un œuf de poule. C’est un fait très intéressant qui r ES SÉANCE DU 21 JANVIER 19 peut éclairer quelques points obscurs de l’étiologie de l’actinomycose viscérale chez l’homme. Quant au mode d'infection de cet œuf, je ne saurais partager l'opinion du vétérinaire qui suppose que la poule, allant picorer sur un fumier (où, après les opérations dans les cours de ferme, on jette tous les produits de l'intervention chirurgicale) aura absorbé des débris actinomycosiques, dont quelques-uns, ayant traversé son tube digestif, se seront retrouvés dans l’œuf au même titre qu’une foule d’inclusions. Quand on connaît la délicatesse de l’actinomycète, sa faible résistance aux moins corrosifs des réactifs, on a peine à s'expliquer comment il au- rait pu résisier aux intenses fonctions digestives de la poule; tandis que s’il est vrai, et ceci parait aujourd'hui démontré, que l’aclinomycèle ne soit qu'une forme d'un champignon d'ordre élevé, quelque parasite des graminées par exemple,il est beaucoup plus simple de supposer que c'est au contact de la paille que l'œuf s'est infecté. On sait d’ailleurs qu'israël et Wolf ont réussi à cultiver l’actinomycète daus des œufs. Myxomycète dans un œuf. Je demande la permission de revenir sur un point de ma communica- tion orale à l’une des dernières séances : Il s’agit de cet organisme singulier que j'ai trouvé dans un œuf déga- geant une odeur de levure, et qui montrait des formes de zoospores, des corps vermiformes, des corps amiboïdes et une sorte de capillitium. La confluence des zoospores, celle des corps amiboïdes, et surtout la présence de ce capillitium me le faisaient considérer comme un myxomy- cète; mais un myxomycète dévié, ayant formé par habitude un capillitium sans l’entourer d'un kyste protecteur dont le besoin ne se faisait pas sen- tir dans ce milieu nouveau pour lui. Or, je viens de trouver dans une culture sur pomme de terre, datant du mois de septembre dernier, des masses brunes, déprimées en bouclier, pédonculées, larges d’une fraction de millimètre ou d’un millimètre au plus, dont la face supérieure est couverte de concrétions et de spicules calcaires qui me les font regarder comme les kystes d’un myxomycète très voisin du genre Jidymium. D'ailleur, protozoaires ou myxomycètes, il est très intéressant de cons- later que l'œuf paraît être un excellent milieu de culture pour ces orga- nismes encore peu étudiés. 80 SOCIÉTÉ DE BiOLOGIE DYNAMOMÈTRE PERMETTANT DE MESURER LA PUISSANCE MUSCULAIRE DE L'APPAREIL CAUDAL DU POISSON, par M. P. REGNARD. Il y a déjà longtemps que l’on soupçonne que, dans les phénomènes de progression du Poisson, l'appareil caudal est utilisé à l'exclusion presque absolue des nageoires. Or a tenté de le démontrer de différentes manières. J'ai cherché pour ma part, comment, au point de vue de la force pro- duite, le Poisson utilisait la puissance de déplacement que lui donne son appareil caudal. Voici l'appareil que j'ai combiné pour cette étude (figure). Au deux bouts d'un grand aquarium sont fixés deux supports en bois. À l'extrémité de l’un se trouve un dynamomètre D gradué en grammes expérimentalement. Du levier de ce dynamomètre part un fil L qui, plongé d’abord dans l’eau, se réfléchit sur les deux poulies R R', puis sur la poulie R’’et porte finalement le contre-poids B qui le tient tendu ; c'est sur le trajet horizontal de ce fil que nous attachons un gros Cyprin ou une Carpe au moyen de deux hamecons piqués en avant de leur nageoire dorsale. En procédant de cette manière avec une Carpe de 90 grammes nous voyons que, quand elle essaye de nager doucement, elle entraine SÉANCE DU 21 JANVIER s1 25 grammes : le quart environ de son poids; si nous lui faisons faire de violents efforts de fuite, elle arrivera à enlever 170 grammes; presque le double de son propre poids. Coupons-lui alors toutes les nageoires, sauf la caudale, c'est à peine si nous observons un changement dans sa force. Si, au contraire, nous supprimons cette dernière en laissant les autres sur un poisson du même poids, nous ne le verrons pas développer une puissance de plus de 35 grammes dans ses plus grands efforts. Il y aurait intérêt à suivre cette étude sur un grand nombre de pois- sons : nous le ferons quelque jour. SUR UN DISPOSITIF QUI PERMET DE MESURER LA VITESSE DE TRANSLATION D'UN POISSON SE MOUVANT DANS L'EAU, par M. P. REGNARD. S'il est facile de déterminer la vitesse de translation d’un animal terres- tre, il est loin d’en être de même quand il s’agit d’un animal qui vit dans l’eau. Celui-ci doit en effet conserver la liberté absolue de ses mouvements, faute de quoi sa vitesse sera certainement diminuée. Voici comment nous avons cherché à vaincre la difficulté. Un plateau tournant est mû par un moteur électrique animé par la pile thermo- électrique très règulière P (figure). Le courant de cette pile est au préala- ble obligé de traverser une boîte de résistance qui permet de l’augmenter ou de le diminuer et par suite de diminuer la rapidité de rotation du disque. Sur celui-ci se trouve un vase V plein d’eau, au centre duquel s’en trouve un autre V'’: de sorte qu'entre les deux existe un couloir circulaire dans lequel le poisson se meut librement. Chaque fois que le disque fait un tour, il établit un contact qui ferme le courant d’une pile P’, sur un signal de Deprez, lequel écrit sur un cylindre tournant R. Sur ce même cylindre un métronome M enregistre les secondes, grâce à un tambour de MareyS. On a donc en même temps enregistré sur le cylindre : 4° le nombre de tours effectués par le plateau tournant; 2° le nombre de secondes pendant lequel le plateau a tourné. Ceci dit, voici comment on procède : on place le poisson en V et on met le disque en mouvement; le poisson se met aussitôt à nager à contre- courant. On augmente la vitesse du disque jusqu’à ce que le poisson, faisant son maximum d'effort, demeure immobile tout en nageant. On dit alors que sa vitesse est juste égale à celle du disque qui tourne en sens inverse de lui. Or, en lisant sur le cylindre, on y trouve inscrite la 3. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SÉANCE DU 21 JANVIER 83 vitesse du disque et par suite celle du poisson, puisque connaissant la circonférence du disque tournant on connaît le chemin parcouru en le multipliant par le nombre de tours. — Examinons les résultats donnés par l'instrument : Une Carpe de 6 grammes fait 59 centimètres à la seconde. Une Carpe de 5 grammes fait 52 centimètres à la seconde. Une autre Carpe de 5 grammes fait 22 centimètres à la seconde. Une Ablette de 1 gramme fait 50 centimètres à la seconde. Une Chevaine de 15 grammes fait 24 centimètres à la seconde. Mais à cause de sa laille, ce dernier était peut-être gêné dans l'appareil. La méthode va nous permettre de tenir compte de l'influence de la fatigue. L’Ablette qui faisait 50 centimètres à la seconde n’en fait que 32 après une course forcée de 5 minutes et 16 après 15 minutes de fatigue. Les poissons peuvent donc fournir une course très rapide et très ins- tantanée (10 fois environ la longueur de leur corps en une seconde), mais cet effort ne peut être longtemps soutenu. L'amputation des nageoires a aussi une certaine importance sur la vitesse fournie. À une Carpe qui fait 60 centimètres à la seconde, on ampute les nageoires pectorales; elle n’en fait plus que 40. On ampute les ventrales, elle fait encore 40 centimètres; mais:si on ampute la cau- dale, elle n’en fait plus que 13. C'est donc la caudale qui est de beaucoup la plus utile. Voici une expérience qui le prouve : une Carpe parcourt 50 centimètres à la seconde; elle n’en fait plus que 22 après l’amputation de la caudale, si ensuite on coupe les peclorales et les ventrales, elle n’en fait plus que 15; la grande chute de vitesse a été après l’ampulation de la caudale. L’am- putation des nageoires d'un seul côté est plus fâcheuse pour le poisson que l’amputalion &es deux côtés à la fois, car elle le déséquilibre. Une Carpe qui parcourait 50 centimètres à la seconde n’en parcourt plus que 26 après l’amputation des nageoires d'un seul côté, elle remonte à 38 dès qu'on a coupé celles du côté opposé. COMPLICATIONS PÉRITONÉALES DE LA VARIOLE, par M. B. AUCRHÉ, Agrégé, médecin des hôpitaux de Bordeaux. La périlonite est une complication rare de la variole. On arrive à s’en - convaincre si on parcourt les ouvrages classiques consacrés soit à l'étude de la variole, soit à celle des péritonites. Ces complications existent cependant ; elles ont élé observées ; mais leur pathogénie attend encore 84 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE son étude. Deux cas de suppuration péritonéale que nous avons eu l'occa- sion de recueillir pendant les quelques mois que nous sommes resté à la têle du service des varioleux de Pellegrin (Bordeaux) viennent apporter quelques renseignements à cet égard. Dans un premier cas, il s’agit d'une péritonite généralisée ; dans le second, d’une suppuration des ovaires avec pelvi-péritonite suppurée. Voici d'ailleurs résumées les observations de nos deux malades. OBs. L. — Variole cohérente ; péritonile purulente généralisée ; Mort au trei- zième jour de la maladie. Mie R. M..., âgée de dix-neuf ans, entre à l’hospice de Pellegrin, pavillon des varioleux, le 2 août 1892. De bonne santé habituelle, bien réglée, sans enfant, elle n'avait jamais été vaccinée, et n'avait jamais rien éprouvé du côté des organes génitaux internes. Le 28 juillet elle est prise brusquement d'un violent frisson, de céphalalgie, de rachialgie, de vomissements et de fièvre. Au bout de trois jours, l'éruption fait son apparition sur la face et le cou. Lorsque la malade entre dans nos salles l’éruption s’est étendue sur pres- que tout le tronc. Les jours qui suivent, l’éruption se complète. Le 9 août la suppuration se fait à la face ; la fièvre, qui avait baissé Les jours précédents, se relève et atteint 390,6 le soir; la suppuration gagne le tronc et les membres, et dès lorsilest facile de se rendre compte que l'on se trouve en face d’une variole très cohérente, confluente. La situation persiste sans modifications apparentes jusqu'au 13 août. Ce jour-là la malade tombe dans un état de stupeur profonde ; elle ne parle plus, répond avec peine et lentement aux questions qui lui sont posées ; la fièvre persiste avec la même intensité. Il n’y a pas de vomissements, pas de diarrhée. La malade n'accuse aucune douleur du côté de l'abdomen qui n'est pas examiné. Il n’y a pas à parler de l’altération des traits puisque la face est toujours recouverte d’un véritable masque de pus. Le lendemain l’état reste le méme : fièvre, stupeur, pas de vomissements, ventre tendu, un peu bal- lonné ; mais sa pression ne détermine qu'une plainte légère. Le 15 août au matin, l'état s'est encore aggravé ; la respiration est très difficile et très préci- pitée ; mais l’auscultation ne permit de constater que quelques râles de con- gestion aux deux bases, surtout à la base droite, Les bruits du cœur sont bien rapides (116), il n'y a pas de bruits anormaux. Les urines contiennent des traces d’albumine. Le ventre est modérément-tendu, un peu douloureux à la pression. La malade meurtle même jour à midi et demi. L’autopsie est faite trois heures plus tard. La surface cutanée présente les lésions ordinaires de la variole cohérente arrivée au sixième jour de la suppuration. En ouvrant la cavité abdominale on constate immédiatement l'existence d’un épanchement intra-péritonéal dont la quantité peut ètre évaluée approximativement à un litre et demi. Ge liquide est à peu près dépourvu d’odeur ; il est grisâtre, un peu grumeleux, mais non ‘crémeux et épais comme le pus dit louable. Il occupe toute la cavité abdomi- nale. Toute la séreuse est rouge et recouverte d'arborisations sanguines très nettes. Par places il existe des fausses membranes grisâtres, molles, qui se SÉANCE DU 21 JANVIER 85 ——__— dilacèrent et se détachent facilement. Les anses intestinales sont distendues par des gaz, dépolies, poisseuses, fortement congestionnées, et unies entre elles en plusieurs points par un exsudat grisâtre et peu résistant. L'intestin et l'estomac sont enlevés avec soin, lavés, et insufflés. On ne trouve pas la moindre trace de perforation ou d’ulcération. La séreuse qui recouvre les organes génitaux offre les mêmes caractères de rougeur et d'arborisation. Mais l’utérus, les ovaires et les trompes sont trou- vés en parfait état d'intégrité. Le fait a un volume un peu exagéré. Sa surface est pâle et marbrée d'ilots de coloration jaunâtre. Sur les coupes l'aspect est le même. Des fragments traités par l'acide osmique ont été examinés au microscope. Des ensemence- ments faits. avec le parenchyme hépatique sont restés absolument stériles, Les reins sont peu altérés, microscopiquement. Leur volume est à peu près normal ; leur surface est d’un rouge brun foncé. Sur la coupe, la substance verticale offre la même coloration. La substance médullaire présente une coloration rouge brun très intense. L'examen microscopique démontre les lésions d’une néparite diffuse très légère. Des cultures faites avec le paren- chyme rénal ne donnent que des résultats négatifs. Les voies urinaires infé- rieures, cautère et vessie, sont intactes. Les autres viscères ne présentent que des lésions insignifiantes. Il n’y a pas d’épanchement pleural. Les poumons sont congestionnés à leur base, mais on ne trouve pas trace de broncho-pneumonie. Les bronches sont rouges et con- tiennent des mucosités un peu purulentes. Le cœur paraît normal à l’examen microscopique. Des échantillons de l’exsudat péritonitique sont recueillis dans des pipettes stérilisées et ensemencées en stries et en plaques sur gélose, en plaques sur gélatine. Deux ordres de colonies poussent dans ces milieux : les unes sont dues au staphylocoque doré ; les autres sont formées par le streptocoque pyo- gène. Elles sont beaucoup moins nombreuses que les précédentes. Un demi-centimètre cube de pus est injecté dans le péritoine d’un lapin. Il meurt avec de la péritonite généralisée et dans l’exsudat, on trouve les mêmes colonies, mais celles de streptocoques sont ici beaucoup plus nombreuses que celles de staphylocoques. En résumé, il s’agit d’une péritonite purulente généralisée développée ‘pendant la période de suppuration d’une variole cohérente sous l’in- fluence de l’action combinée du staphylocoque doré et du streptocoque pyogène. - Os. IL. — Variole discrète grave; suppuration des ovaires; pelvi-péritonite purulente. Mort. Autopsie. M°° F... D..., âgée de trente-quatre ans, entre à l’hospice de Pellegrin, dans le service des varioleux, le 26 septembre 1892; elle est à la fin de période de dessiccation d’une variole discrète grave. Vaccinée dans son enfance avec succès, elle n’a jamais été revaccinée. Elle a eu un enfant, mais ne s’est jamais plainte de douleurs abdominales. Elle vaquait régulièrement à ses occupations lors- 86 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE _ qu'elle ressentit les premiers symptômes de la variole. Celle-ci évolue régu- lièrement, au moins en apparence, mais la fièvre ne tombe pas malgré la des- siccation complète des pustules. Néanmoins la malade a envie de se lever; mais un incident nouveau survient; un œdème périmalléolaire se développe, gagne en étendue, et la patiente se décide à entrer à l’hôpital. Il existe un œdème considérable des membres inférieurs qui sont infiltrés dans toute leur longueur. C’est un œdème assez résistant, non douloureux, soit spontanément, soit à la pression. La coloration de la peau est un peu rougeätre, et au niveau des régions malléolaires internes sont situées deux larges ulcérations grisâtres qui suppurent beaucoup. Il n'y a ni induration ni douleur sur le trajet des vaisseaux fémoraux et poplités. Le ventre est un peu gros, douloureux quand on vient à comprimer la région de l’hypogastre. Le facies est pâle; l'intelligence est un peu obnubilée; la transpiration est de 38°,8, le matin, 39°,2 le soir, Cet état dure quatre jours, et la malade succombe le 30 septembre. L’au- topsie est pratiquée cinq heures après la mort par M. Jonchères, interne dis- tingué des hôpitaux, qui trouve les lésions suivantes. À l'ouverture de la cavité abdominale on ne constate tout d’abord rien d'anormal. Mais lorsqu'on soulève la masse intestinale, on trouve dans la cavité du petit bassin, environ un demi-verre de pus crémeux, d'aspect bleu verdâtre, et des fausses membranes épaisses, blanchâtres, friables et peu résis- tantes, unissant ensemble tous les organes de cette région. La vessie est volumineuse, étalée, repoussée en avant, et, quoique vide, elle remonte jusqu’à deux travers de doigts au-dessous de l’ombilic. Elle est retenue dans cette situalion par des fausses membranes qui l’unissent à l'intestin grêle dont quelques-unes sont agglutinées par le même exsudat, et par deux tumeurs fluctuantes situées plus en arrière. L’utérus est petit, dur et inclu entre la vessie et les deux tumeurs précédentes. Celles-ci, de la grosseur de grosses oranges, remplissent complètement l’excavation du petit bassin, et arrivent au contact l’une de l’autre sur la ligne médiane, en arrière de la vessie. Elles baignent dans le pus et sont recouvertes de fausses membranes grisätres, friables qui les font adhérer à la vessie, à l'intestin grêle, au gros intestin et à l'utérus. Leur surface est irrégulièrement arrondie, bosselée et sillonnée par de gros vaisseaux remplis de sang. Leur section donne issue à un pus épais, légèrement sanguinolent, un peu fétide. Après lavage, on constate que ces tumeurs sont formées de plusieurs poches bien distinctes, bien limitées, de volume variable. L'aspect est à peu près le même des deux côtés. Il est diffi- cile de reconnaître les ovaires dans ces masses purulentes. Les trompes sont perdues au milieu des exsudats membraneux; elles ne contiennent pas de pus. L'utérus est petit, mais il ne parait pas altéré. M. Jonchères croit que ces deux tumeurs sont constituées par des kystes ovariens suppurés. L'examen micros- copique aurait levé tous les doutes à cet égard, malheureusement les pièces n’ont pas été conservées. Quoi qu'il en soit, il parait certain, d’après ce qui précède, qu'elles étaient formées non aux dépens des trompes, mais aux dépens des ovaires. Les vaisseaux fémoraux ne présentent pas trace de phlébite. Les autres viscères ne présentent que des lésions sans importance. On recueille avec soin dans des pipettes stérilisées du pus de la cavité pel- SÉANCE DU 21 JANVIER 87 vienne et du pus des tumeurs ovariennes. On fait des ensemencements en stries sur gélose, en plaques sur gélatine. Il pousse de nombreuses colonies de streptocoques pyogènes sans aucune autre espèce microbienne. En somme, il s’agit dans celte observation d'une femme qui, douée d'une bonne santé antérieure, est prise de variole, qui meurt à la fin de la période de dessiccation, et chez laquelle on trouve, à l’autopsie, de la suppuration ovarienne et de la pelvi-péritonite suppurée. Ces lésions sont certainement survenues pendant le cours de la variole, car personne sans doute n’admettra que pareille affection puisse passer inaperçue et laisser la femme qui en est atteinte dans un état de santé tout au moins appa- rente, comme celle de notre maïade avant son atteinte de variole. Quantau siège de la suppuration, il est plus discutable, et, bien que le pus paraisse situé dans le tissu de l'ovaire, préalablement sain ou kystique, il serait imprudent de l'affirmer, à cause de l’absence d'examen microsco- pique. Quoi qu’il en soit, la nature de celte complication nous paraît bien indiquée par l'examen bactériologique. C'est le streplocoque pyogène qui doit être rendu responsable aussi bien de la suppuration des ovaires que de celle de la cavité pelvienne. Mais comment s’est produite l'infection? L’intégrité de l'utérus, l’ab- sence de pus dans les trompes ne paraissaient guère s’accorder avec l’hy- pothèse d’une infection par la voie utérine. Il est plus probable que les streptocoques, transportés par le courant sanguin, ont été se fixer dans les ovaires et ont déterminé leur suppuration. Ce qui n’est qu’une proba- bilité pour cette seconde observation, nous paraît être la réalilé pour la première. [ei l'utérus, les trompes et les ovaires sont tout à fâit sains; aucun des viscères ou des organes contenus dans Ja cavité abdmoninale ne peut être accusé d’avoir élé la cause de la péritonite. Il faut donc, en désespoir de cause, se rattacher à cette idée, que les germes sont arrivés à la séreuse péritonéale par l'intermédiaire du courant sanguin. Le Gérant : G. MAssoN. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarerHeux, directeur, 1, rue Cassette. PART ET Se (ARE VS LL ss EP RER ane REA RTE Leripe LA SDK | D Sole CEA "A4 RS LR EN dan mn dre mater msn prectiisq ES ie 2 el Ho 0 abonnant ei RENTE RAM 89 SÉANCE DU 28 JANVIER 1893 MM. E. Gzey et L. laricoue : Accidents tétaniques d’origine infectieuse chez la grenouille. — M. Hector Grasser : Note sur quelques effets physiologiques de l’eau oxygénée. — M. le D' Garezowskr : Du diplomètre et de l’application de cet appareil pour définir la nature et le degré des paralysies oculaires. — MM. Laveran et CATRIN : Sur un diplocoque trouvé chez des malades atteints d’oreillons. — M. NAGEOTTE : Note sur le cerveau des ataxiques. — MM. Le8EeLz et MiRcEA VEsescu : De l'action du curare sur les animaux à sang chaud. —-- M. Cu. Féré : Note sur l'abaissement de la pression artérielle dans l'hémiplégie hystérique. — M. H. Rocer : Poison cardiaque d’origine microbienne. — M. l'abbé Maumus : Sur la transformation de l’'amidon végétal en sucre par le bacille du charbon. — MM. M. Haxrior et Ca. RICHET : Effets psychiques du chloralose sur les animaux. — M. J. DaGoner : Note sur l’ana- tomie pathologique de la paralysie générale. — M. 1.-P. Monrar : Action de la nico- tine sur quelques fermentations indirectes. — MM. E. Leccaincue et L. MonraNs : Sur l’histogenèse du tubercule dans la morve chronique. Présidence de M. Galippe. ACCIDENTS TÉTANIQUES D ORIGINE INFECTIEUSE CHEZ LA GRENOUILLE, par MM. E. Gzey et L. LAPICQUE. Dans un très intéressant mémoire paru dans le dernier numéro (janvier 1893) des Archives de physiologie, sur le Mécanisme de produc- tion des contractures du tétanos, MM. J. Courmont et M. Doyon (de Lyon) rapportent qu’ils ont pu, les premiers, déterminer le tétanos chez des gre- nouilles en leur injectant sous la peau une goutte de culture du bacille de Nicolaïer (1) ; et, à ce propos, ils écrivent incidemment : « Le télanos spontané peut s’observer sur la grenouille. M. Guinard, chef des travaux de physiologie à l'École vétérinaire, nous a obligeamment rapporté le cas d’une grenouille conservée après une vivisection sans inoculalion aucune, qui après une incubation de dix jours, fut atteinte de tétanos généralisé et en mourut. Nous n'avons trouvé relaté nulle part le tétanos de la grenouille soit spontané, soit expérimental. » La lecture de ce passage nous permet de penser que les bactériologistes (1) L'étude des phénomènes présentés par ces grenouilles leur a été, comme bien on pense, des plus utiles dansles recherches qu’ils avaient entre- prises. CS BioLoGrEe. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 90 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE EEE) pourraient trouver quelque intérêt aux observations suivantes, tout incomplètes qu'elles sont, que nous avons eu l’occasion de faire il ya plus de deux ans. L'un de nous, au cours de recherches sur l’action de la caféine sur les muscles, fixant un jour une grenouille pour l'étude myographique, avait vu l'animal pris d’une attaque tétanique et mourir au bout d’un moment. Quelque temps après, le 8 décembre 1890, on prend, en vue d’une expérience de ce genre, une grenouille qui se trouvait au laboratoire, dans le même aquarium que la précédente, depuis six ou sept semaines; à l'instant l’animal est saisi par une violente attaque tétanique; on le remet dans l’aquarium ; une demi-heure après, on le trouve mort. Voilà donc un cas très net d'attaques tétaniques spontanées. Nous fimes alors quelques expériences très simples : 1° Au fond du petit aquarium, parmi des cailloux, se trouvait une mince couche d’eau qui n’avait pas été renouvelée depuis deux ou trois jours. Cette eau, assez limpide d’ailleurs, tenait en suspension quelques fragments membraneux (morceaux d'épiderme de grenouille). On chauffa une portion de cette eau à 60 degrés pendant un quart d'heure et on en injecta un demi-centimètre cube dans la cuisse droite d’un cobaye pesant 270 grammes. Cet animal ne présenta, le jour suivant, aucun accident, 2 Le 9 décembre, avec de petits détritus obtenus par le raclage d'une petite plaie que portait à la mandibule supérieure la grenouille morte après attaque tétanique, dans les conditions relatées plus haut, on ensemenca : 1. Un tube d’agar peptonisé, glycériné et sucré, recouvert d’une épaisse couche d'huile; Avec des parcelles de la moelle dorsale de cette grenouille : 2. Un tube de sérum peplonisé et glycériné recouvert d’une couche d'huile; Avec des parcelles de la moelle dorsale et du bulbe : 3. Un tube d’agar; Avec des parcelles des muscles d'une patte: 4. Un tube de gélatine; Avec une goutte de sang pris dans l'oreillette : 5 et 6. Un tube de gélatine et un tube de sérum. Tous ces tubes furent mis à l’étuve à 39 degrés. Le 12 décembre, on constate que la gélatine des tubes 4 et 5 s’est liquéfiée. On les laisse à la température du laboratoire, qui oscille entre 10 et 16 degrés. Les autres tubes sont placés dans une étuve à 32 degrés. Les jours suivants, à partir du 13, on constate de très belles colonies dans le tube 5, très développées dans la profondeur. Avec cette culture, on ensemence le 15 décembre deux nouveaux tubes de gélatine (tubes 5 bis). L'examen microscopique (préparations colorées avec le violet de gen- tiane) révéla la présence d’un seul organisme, qui était un bacille très SÉANCE DU 28 JANVIER 91 court. Le 16 décembre, des colonies se développent dans les deux tubes 5 bis. Le 17, la gélatine est liquéfiée dans ces tubes. En ce qui concerne les autres tubes, on a remarqué, le 13 décembre, que le tube de sérum (6) a commencé de se liquéfier. Le 16 décembre, le sérum est liquide. Le 17, à dix heures quarante-cinq du matin, on ense- mence un tube de gélatine avec une goutte provenant de ce tube. Dès le lendemain, il y a culture dans le tube de gélatine, culture identique aux précédentes. — Le 17, on enlève la couche d'huile qui se trouve dans les tubes ! et 2 et on les remet dans l’étuve à 32 degrés. Le 20 décembre, il y a culture dans le tube 2, et, quelques jours après, le sérum s’est liquéfié. — Dans les tubes 1 et 3, rien à noter. 3° Le 17 décembre, on injecta deux gouttes de la culture du tube 5 dans le sac lymphatique droit d’une grenouille et la même quantité dans les muscles de la cuisse droite d’une autre grenouille. Le 2 janvier 1891, onfit une nouvelle injection à la première, mais, cette fois, de 1 centimètre cube de la même culture; et, à la seconde, une injection de 1 centimètre cube de la culture 5 bis; les injections furent faites à deux heures trente, partie dans les muscles de la cuisse droite et partie dans la cavité péritonéale. La % janvier, la première fut trouvée morte à dix heures du matin; la seconde mourut le 5 janvier vers midi. Les membres inférieurs étaient œdématiés; la cuisse injectée, très rouge; les muscles, également très rouges et se déchirant très aisément. — On ensemença deux tubes de gélatine avec une goutte de sang pris dans le ventricule de la seconde gre- nouille; sous l'influence de cette excitation, le cœur, qui était arrêté, se remit à battre depuis quelques instants. Il y eut culture dans ces deux tubes; ces cultures présentèrent les mêmes caractères et le même orga- nisme que les précédentes. Le 17 décembre également, on injecta dans les muscles de la cuisse gauche d’une grenouille trois gouttes de la culture 5 bis (culture prove- nant du sang el faite sur gélatine). Le 2 janvier 1891, à deux heures, on la trouva morte. À deux heures vingt minutes, on ensemencça deux tubes de gélatine avec une goutte de sang pris dans une oreillette. Le 5 janvier, on remarque que la gélatine des deux tubes est liquéfiée. Le 31 décembre, on injecta dans le péritoine d’un cobaye, pesant 315 grammes, 4 centimètre cube de la culture 5. Le 2 janvier 1891, l’ani- mal allait bien. Ces observations sont beaucoup trop incomplètes pour que l’on en puisse tirer quelque conclusion ferme : les cultures n’ont pas été faites en assez grand nombre, leur examen n’a pas été régulièrement suivi ; de plus, les grenouilles inoculées ne sont malheureusement pas mortes sous nos yeux, de sorte que nous n'avons pu noter les accidents qu’elles ont présentés. Ce qui mérite, croyons-nous, d'attirer un peu l'attention des bactériologistes, c’est le point de départ même de ces quelques 92 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE recherches, cette sorte de petite épidémie de tétanos chez des grenouilles. Il ne sera pas inutile d'ajouter que ces grenouilles, conservées depuis quelque) temps au laboratoire, avaient été prises à la ligne et ainsi avaient subi un traumatisme. — Maintenant, s’agissait-il là du tétanos proprement dit, de la maladie due au bacille de Nicolaïer? On sait que celui-ci est anaérobie; or, l'organisme qui s'est développé dans nos cul- tures était aérobie. A-t-on dès lors eu affaire à une infection spéciale, déterminant des accidents tétaniformes? A ce point de vue encore, il est regrettable que les grenouilles inoculées ne soient point mortes en pré- sence des observateurs. NOTE SUR QUELQUES EFFETS PHYSIOLOGIQUES DE L'EAU OXYGÉNÉE, par M. HecroR GRASSET. Dans le cours de recherches sur l’eau oxygénée, exécutées dans le laboratoire de M. le professeur Duplay, à l'hôpital de la Charité, et ayant trait à un sujet spécial, j'ai élé amené à observer quelques faits intéres - sants concernant les propriétés physiologiques de ce produit. MM. Paul Bert et Regnard, puis MM. Laborde et Quinquaud, avaient donné des résultats expérimentaux et des conclusions qui différaient quelque peu, surtout quant aux effets des injections intra-veineuses, sur lesquels s’engagea une légère polémique. Coppola, deux ans plus tard, en 1887, se servit de l’eau oxygénée comme moyen de démonstralion, facile et classique, de la rapidité de l'absorption veineuse. Il injectait une petite quantité d’eau oxygénée dans l’oreille du Japin et voyait immédiatement, par transparence, le dégage- ment de bulles gazeuses dans les vaisseaux. J'ai le résultat de vingt-six expériences entreprises sur des cobayes ou lapins, et d'une sur un jeune chien, au moyen de l'eau oxygénée du com- merce neutralisée d’une façon spéciale. Lorsqu'on prépare l'eau oxygénée soi-même (opération longue et délicate), on a beaucoup de chances d'y laisser des traces de sels de baryum qui amènent des accidents toxiques. Au contraire, lorsqu'on emploie l'eau oxygénée du commerce, on est en présence d'acide sulfurique qui augmente le degré de stabilité du com- posé, mais qui produit une série d'accidents éclamptiques remarquables. Pour parer à ces inconvénients, on neutralise l’eau oxygénée du com- merce par la quantité, juste suffisante, de soude caustique, qui donne du sulfate de soude non nocif. La solution d'eau oxygénée ainsi neutralisée contenait à peu près six volumes d'O par volume de produit; par dilution avec l'eau distillée, on l’amenait facilement au titre désiré. Elle a été employée sous forme SÉANCE DU 28 JANVIER 93. D ——_— —————— ———— d’injections sous-cutanées et intra-péritonéales ; je ne parlerai pas des injections intra-pleurales dont les phénomènes ne sont pas encore bien élucidés. à MM. Laborde et Quinquaud disent n’avoir pas recherché ce qui se pro- duit dans le cas d’injections sous-cutanées, ils n’ont pas expérimenté par la voie péritonéale. : Les solutions diluées ne dosant que 3 volumes de gaz ou moins peuvent être injectées à des doses relativement élevées dans le périloine et ne donner lieu qu’à des phénomènes passagers, légers. Chez un cobaye de 390 grammes, j'ai injecté, sans trouble pour l'animal, 25 centimètres cubes - de solution pouvant dégager 75 centimètres cubes de gaz. La solution aussitôt injectée diffuse rapidement et produit une mousse abondante autour de la masse intestinale, le gaz dégagé dilate la cavilé abdominale, et il se produit un tympanisme très marqué ; en même temps on remarque une dyspnée dont les causes sont évidemment mulliples. La résorption gazeuse est assez prompte, car au bout d’une heure environ on ne cons- tale plus qu’une légère expansion abdominale. A des doses un peu plus élevées, ou avec des solutions plus fortement concentrées, le animaux poussent quelques cris douloureux, présentent quelques mouvements convulsifs, une diarrhée légère, et une dyspnée plus marquée. Les injections de solution dosant six volumes deviennent dangereuses à partir de 42 ou 15 centimètres cubes.Le lapin semble plus susceptible que le cobaye. L'animal meurt au bout de quelques minutes après des phé- nomènes douloureux, diarrhéiques, dyspnéiques d'intensité variable avec Ja dose. L’autopsie immédiate est excessivement intéressante : une préparation histologique du mésentère prouve l'intégrité de l’endothélium ; les veines mésentériques et pariétales présentent de multiples et volu- mineuses embolies gazeuses que l’on peut suivre dans la veine cave, l'oreillette droite; le cœur est mou et dilaté. Les artères pulmonaires charrient des bulles gazeuses, et les veines de la base de l’encéphale en présentent aussi. À des doses plus élevées la rate ressemble à une éponge d’un rouge tirant sur le vermillon et crépite sous le doigt ; le foie coupé laisse échapper une mousse abondante. Jamais je n'ai trouvé le sang : noir et poisseux qu'ont trouvé MM. Laborde et Quinquaud à Ja suite d'in- jections intra-veineuses ; toujours le sang était rutilant. Chez une femelle cobaye pleine, tuée par une forte dose, les embolies gazeuses, suivies jusque dans les veines des parois utérines, n’ont pu être retrouvées dans le cordon ombilical. Les injections sous-cutanées sont plus nocives que les injections intra- péritonéales. Avec des solutions dosant trois volumes on arrive à produire la mort des animaux après quelques phénomènes convulsifs. À l’autopsie, outre l’emphysème œdémateux étendu, on remarque encore des embolies gazeuses veineuses, prédominant surtout dans les veines de la paroi 94 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE abdominale ou thoracique suivant le lieu d'injection, embolies que l’on peut suivre jusque dans l'oreillette droite. En résumé, à dose égale d’eau oxygénée pure injectée, plus la concen- tration est élevée, plus rapides sont les phénomènes emboliques et plus grande est la toxicité (si l’action n’est pas toute mécanique, ce qui n'est pas invraisemblable). Conclusion : Les injections intra-péritonéales et sous-cutanées d’eau oxygénée ne sont pas nocives si la dose est peu élevée et si elles sont faites lentement, mais poussées rapidement, elles peuvent devenir promp- tement mortelles. Cette conclusion est analogue à celle que MM. Laborde et Quinquaud ont tirée de leurs expériences. DU DIPLOMÈTRE ET DE L'APPLICATION DE CET APPAREIL POUR DÉFINIR LA NATURE ET LE DEGRÉ DES PARALYSIES OCULAIRES, par M. le D' GALEzOWSKI. - Messieurs, les paralysies des nerfs moteurs des yeux sont excessivement fréquentes, elles se rencontrent presque à tous les âges et dans des con- ditions de santé des plus variées : l’ataxie locomotrice, la syphilis, la tuberculose, le traumatisme, la glycosurie, etc., en‘sont souvent la cause. Tantôt elles ne s’observent que sur un seul œil, dans d’autres cas, nous les voyons apparaître dans les deux yeux à la fois. Elles peuvent être partielles, dans une paralysie de la troisième paire, et n'occuper que quelques filets nerveux isolés, ou bien on voit le mal envahir plusieurs nerfs moteurs à la fois, sixième, troisième et quatrième paires. On comprend la gravité des troubles de la vue qui en résulte, et les difficultés du diagnostic au début du mal; mais elles sont encore bien plus grandes, avec la marche ultérieure de la maladie. Il y a aussi la diplopie provoquée par des spasmes des fibres muscu- laires, chez les hystériques, et dans les différentes autres affections ner- veuses qui peuvent simuler la paralysie et qu'il était jusqu'à présent difficile par moment de définir, car on n’avait pour cela aucun moyen. Pour combler cette lacune et rendre possible la définition exacte du degré d’écartement des images doubles de la diplopie, j'ai cru utile de construire un appareil qui nous permette de juger, jour par jou du degré d'amélioration ou d’aggravement de la maladie. Cet appareil a été admirablement exécuté, d’après mes indications, par notre distingué et habile opticien M. Peuchot. Il se compose d'un stéréo- scope à deux œilletons; en avant de chacun d'eux est placé une plaque métallique portant une double fourche destinée à recevoir Les verres sphé- SÉANCE DU 28 JANVIER 95 riques et cylindriques; à l'arrière, un verre dépoli quadrillé. Chaque ligne verticale est numérotée à droite et à gauche en partant du centre; chaque ligne horizontale est représentée par une lettre À, B, G, etc. A la distance d'un mètre des œilletons, une tige verticale dont la hau- teur correspond avec le centre du verre dépoli : à l'extrémité de cette tige comme centre, une règle carrée portant une lampe qui glisse, à frotte- ment doux, sur la règle. Cette règle tourne autour de son centre et décrit une circonférence parallèlement au stéréoscope. La lampe est montée de telle sorte qu’elle suit tous les mouvements, en gardant sa position ver- ticale. Le malade regardant dans l'appareil avec les deux yeux verra deux reflets de la lampe, un rouge et un autre blanc, sur le verre dépoli. Chaque déplacement de la lampe pourra être défini par les divisions qui existent sur le verre. SUR UN DIPLOCOQUE TROUVÉ CHEZ DES MALADES ATTEINTS D'OREILLONS, par M. LAVERAN, Professeur, et M. CATRIN, Professeur agrégé à l'École du Val-de-Grâce. La maladie connue sous le nom d’oreillons est une maladie générale, contagieuse, dont la nature microbienne semble évidente a priori ; néan- moins, l'étude de l’agent pathogène des oreillons n’a tenté jusqu'ici qu’un très petit nombre d'observateurs. En 1881, MM. Charrin et Capitan ont fait à la Société de Biologie une courte communication à ce sujet; dans la note qui figure au compte rendu de la séance du 28 mai 1881, MM. Charrin et Capitan annoncent qu'ils ont examiné le sang de six malades atteints d’oreillons, et que, dans tous les cas, ils ont constaté la présence de microbes en grand nombre la plupart sphériques, parfois allongés en bâtonnets mobiles. Ges observateurs n'ont trouvé aucun microbe dans l'urine; la salive contenait, comme toujours, une grande variété de microbes. Les recherches de MM. Charrin et Capitan ont été faites sur des élèves de l'École polytechnique à la demande de M. le D' Védrènes, quia publié une relation de cette épidémie; M. Védrènes note que MM. Capitan et Charrin ont trouvé dans le sang de huit malades atteints d’oreillons des bacilles ou des microcoques simples, en points doubles ou en chaïînettes. Le sang ensemencé dans le bouillon donnait, au bout de vingt-quatre heures, des cultures dans lesquelles on retrouvait les formes microbiennes observées dans le sang; des inoculations faites à des chiens, à des lapins et à des cobayes n'ont donné que des résultats négatifs. 96 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Dans ce même travail, M. Védrènes signale deux tentatives de culture du sang faites par MM. Pasteur et Roux ; dans ces deux cas, les cultures sont restées stériles. (Æec. de Mém. de méd. mil., 1882, t, XXX VIII, p. 179.) Dans un cas d’oreillons graves, M. le professeur Bouchard a trouvé des bactéries en grand nombre dans la salive recueillie à sa sortie du canal de Sténon et dans les urines qui étaient albumineuses. (Karth. Étude sur une forme grave d’oreillons. 7’hèse, Paris, 1883.) En 1885, M. le D: Boinet a publié dans le Lyon médical(p. 285) une note sur le microbe des oreillons. M. Boinet, qui a examiné le sang de quinze malades alteints d'oreillons, dit avoir constaté la présence de microbes sphériques, tantôt libres, tantôt accolés aux hématies, le plus souvent isolés, plus rarement en point double, plus nombreux dans les cas d'oreil- lons compliqués. Exceptionnellement, M. Boinet a trouvé les bacilles signalés par MM. Capitan et Charrin ou des microcoques en chapelets. Le pus d’un abcès de la nuque survenu chez un malade atteint d’oreil- lons contenait des microcoques en chapelets ou en amas (zooglées). Les cultures faites par Boinet à l’aide de ce pus et les inoculations aux ani- maux n'ont pas éclairci la question de la nature du microbe des oreillons et ne pouvaient pas l'éclaircir. C’est un fait bien connu que la suppura- tion est très rare dans les oreillons; en étudiant le pus d’un abcès de la nuque survenu comme complication des oreillons, Boinet s’exposait à cul- tiver et à inoculer des microbes de la suppuration (staphylocoques et streptocoques) et non le microbe des oreillons; c'est, en effet, ce qui ui esl arrivé. M. le D' Netter a constaté l'existence de microcoques dans le sang et dans le liquide extrait de la tumeur parotidienne chez un malade atteint d'oreillons graves compliqués d’endocardite. (Jaccoud. Lecons de chnique médicale, faites à la Pitié, 4883-1884. Paris, 1885, p. 513.) Le D' Bordas aurait obtenu, avec le sang des malades atteints d’oreil- lons, des cultures d’un bacille qu'il a rencontré en abondance dans la salive de ces malades; ce bacillle serait, d'après cet observateur, l'agent pathogène des oreillons. (Bordas. Oreillons. Recherches sur les causes de leur contagion. Société de Biologie, 16 novembre 1889.) Malgré l'intérêt que présentent les travaux que nous venons de résumer, on peut dire que la question de la nature du microbe des oreillons n’est pas encore résolue ; les caractères assignés à ce microbe par les observa- teurs que nous venons de citer manquent de précision, ou même sont contradictoires ; de nouvelles recherches sont donc indispensables. Une petite épidémie d’oreillons ayant éclalé récemment dans quelques régiments de la garnison de Paris, nous avons pensé, M. Catrin et moi, qu'il serait intéressant de faire l'étude bactériologique des cas d’oreillons envoyés au Val-de-Grâce en examinant, non seulement le sang, mais aussi la sérosité prise dans l’intérieur des parotides et des testicules enflammés; souvent, en effet, l’orchile a compliqué les parotides dans cette épidémie, SÉANCE DU 28 JANVIER 97 TR REREEREREZEZEZEZE OT comme dans la plupart des épidémies qui sévissent chez des adultes. Le sang a été obtenu par piqüre du doigt; des ponctions faites dans les parotides ou dans les testicules avec la seringue de Straus ou de Malassez nous ont permis d'obtenir, chez la plupart des malades ponctionnés, quelques gouttes de sérosité pure ou teintée de sang, qui étaient immé- diatement ensemencées dans du bouillon ordinaire de culture. Nous avons pris, bien entendu, des précautions minutieuses pour éviter l'intro- duction des microbes extérieurs : les seringues hypodermiques servant aux ponctions élaient stérilisées avec le plus grand soin, la peau était stérilisée à l’aide du sublimé, puis lavée à l'alcool absolu, et séchée. Nous avons ponctionné 14 fois des parotides, 6 fois des orchites our- liennes, l'examen histologique et bactériologique du sang a été fait chez 7 malades, enfin, dans un cas, nous avons examiné l’exsudat d'un œdème aigu de la paroi antérieure de la poitrine compliquant les oreillons. L'examen histologique du sang ne nous a pas révélé l'existence de microbes ; si des microbes existent dans le sang (ce que l'examen bacté- riologique tend à démontrer), ils sont en petit nombre et difficiles à constater par l’examen histologique du sang frais ou desséché et coloré. L'exsudat des parotides, ensemencé dans le bouillon, a donné des cul- tures 9 fois sur 14: 5 fois le résultat a été négatif. L’exsudat de l’orchite ensemencé dans le bouillon a donné des cultures 3 fois sur 6. Le sang, ensemencé dans le bouillon, a donné des cultures 4 fois sur 7. Enfin, le liquide de l’œdème de la paroi antérieure de la poitrine, ensemencé dans le bouillon, a donné une culture. Dans tous les cas où nous avons obtenu des cultures, soit avec les exsudats des parotides, des orchites ou de l’œdème ourlien, soit avec le sang, nous avons constaté, dans le bouillon, la présence des mêmes microbes, il s'agissait de miero- coques souvent associés en diplocoques. Presque toujours les cultures étaient pures, ainsi que nous nous en sommes assurés en faisant des cul- tures en plaques. Dans aucun cas nous n'avons observé de bacilles. Chez deux malades, nous avons procédé en même temps à l’examen du sang et à celui de l’exsudat parotidien, et nous avons constaté la pré- sence des mêmes microcoques dans les cultures faites avec le sang ou avec l’exsudat parolidien. Les résultats ont été négatifs 11 fois sur 28; ces résultats négatifs perdent beaucoup de leur importance, quand on songe que les ponctions faites dans la parotide ou dans le testicule enflammé ne donnent qu’une ou deux gouttes de liquide; parfois même, on peut se demander si la goutte de liquide qu’on ensemence dans le bouillon, n'est pas tout simplement une goutte d’eau stérilisée qui restait dans la seringue. Quant au sang, dont nous ensemencions deux ou trois gouttes, les résultats ont été négatifs 3 fois sur 7, ce qui montre simplement que les microbes n'existent pas en grand nombre dans le sang, comme le prouve déjà l'examen histologique. 98 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les caractères des microbes que nous avons rencontrés dans tous les cas où nous avons obtenu des cultures peuvent se résumer comme il suit : Microcoques souvent associés par deux; la forme en diplocoques s'est rencontrée dans tous les cas et souvent avec une prédominance qui la rendait tout à fait remarquable. Quelquefois les microcoques étaient grou- pés par quatre ou en zooglées. Ces microcoques, régulièrement arrondis, mesurent de 4 p à 1.5 y de diamètre, ils sont animés de mouvements plus ou moins vifs mais peu étendus; ils se colorent facilement par le violet de gentiane et par le bleu de méthylène et se décolorent par la méthode de Gram. Ils se cultivent facilement sur les milieux ordinaires. Le bouillon se trouble au bout de vingt-quatre heures (à 35 degrés), le trouble augmente les jours suivants, il se forme un petit dépôt sur les parois et surtout au fond du tube. Gélatine en plaques : au bout de quarante-huit heures on distingue de petites colonies punctiformes blanches, qui se développent lentement, et qui ne liquéfient que tardivement. Gélatine en tubes : après inocula- tion par piqûre on voit se développer le long de la piqüre des colonies punctiformes qui se réunissent bientôt et qui s’élargissent à la surface libre ; au bout de quelques jours la gélatine se creuse à la partie supé- rieure et se liquéfie très lentement. Sur gélose à 35 degrés, les cultures sont déjà abondantes au bout de vingt-quatre heures. Il se forme le long de la strie ou des stries d'inocu- lation des colonies blanches qui deviennent bientôt confluentes. Sur pomme de terre le microcoque donne une culture blanchâtre peu apparente. Ce microcoque dont l’existence a été constatée dix-sept fois sur vingt- huit dans le sang ou dans les exsudats (parotides, orchites, œdème), des malades atteints d’oreillons est-il la cause des oreillons ? Nous inclinons à le croire, mais il est évident que la démonstration de son action patho- gène reste à faire et que les faits signalés dans cette note ne peuvent donner à cet égard que des présomptions. Nous nous proposons, M. Catrin et moi, de continuer ces recherches et de les compléter notamment en étudiant le mode d’action de ce microcoque sur les animaux. NOTE SUR LE CERVEAU DES ATAXIQUES, par M. NAGE£EOTTE. M. Raymond, mon maïtre, a publié dans le courant de l'année der- nière deux observations de paralysie générale unie au tabes. Ces observa- SÉANCE DU 28 JANVIER 99 tions ont remis à l’ordre du jour la question des rapports qui existent entre les deux maladies et ont provoqué d'intéressantes aiscussions à la Société médicale des hôpitaux. Dans un des cas présentés, la paralysie générale était restée très effacée au point de vue symptomatique et aurait certainement passé inaperçue dans un service où l'attention n'aurait pas été attirée sur ce sujet: aussi M. Raymond disait-il, avec une remar- quable sagacité : « 2! faudra examiner, histologiquement et minutieuse- ment, le cerveau de tous les ataxiques. » Ayant eu à étudier cette question, j'ai en effet trouvé dans les comptes rendus d’autopsie, lorsque les auteurs étudiaient soigneusement à l'œil nu le cerveau des ataxiques ordinaires, la mention très fréquente de lésions qui, sans être pathognomoniques de la paralysie générale, per- mettaient néanmoins de la soupconner (épendymite, atrophie des cir- convolutions, pachyméningite hémorragique, etc.). Pour savoir à quoi m'en tenir, je me suis adressé à M. Dejerine qui, avec une générosité dont je ne saurais trop le remercier, a bien voulu mettre à ma disposition l'écorce cérébrale de trois ataxiques morts dans son service. C'étaient des alaxiques vulgaires, qui n'avaient jamais rien présenté de suspect au point de vue mental, en apparence du moins. J'ai examiné le gyrus rec- tus, les circonvolutions frontales, la partie moyenne des circonvolutions rolandiques et le lobe occipital. Or, un de ces trois cerveaux, apparte- nant à un homme de cinquante-trois ans, présente des lésions indénia- bles d’encéphalite interstitielle, comme le montrent les préparations que j'ai l'honneur de vous faire passer. La lésion, très avancée, ne diffère en rien de celle de la paralysie générale : c’est la même infiltration cellulaire des parois des vaisseaux et de certains capillaires, avec prolifération des cellules de la névroglie; c'est la même disparition des fibres à myéline tangentielles ; quant aux lésions des cellules nerveuses, chacun sait com- bien elles sont difficiles à apprécier exactement, même dans les cas les plus légitimes de paralysie générale. Ces lésions se retrouvent dans Île gyrus rectus et dans la partie convexe du lobe frontal. Elles sont rempla- cées par une simple congestion vasculaire dans les circonvolutions mo- trices et dans le lobe occipital. Jendrassik avait déjà décrit, dans deux cerveaux d’ataxiques, une lésion qu'il considérait comme la lésion primordiale du tabes; il avait vu une disparition des fibres à myéline tangentielles qui, disait-il, est histologi- quement identique à celle de la paralysie générale, mais qui en diffère topographiquement; il n’avait pas vu de lésions vasculaires. On peut objecter à cet auteur que la disparition des fibres tangentielles est une lésion banale, qui se rencontre dans beaucoup de circonstances; d’ail- leurs dans une seule et même affection la topographie de cette lésion, quoique soumise à quelques règles générales, est trop variable dans le détail pour que l’on puisse établir sur elle seule la caractéristique d'un processus morbide. 100 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Il en est autrement des lésions d’encéphalite vasculaire diffuse que je viens d'indiquer ; elles n’appartiennent en propre qu’à la paralysie géné- rale. Je crois pouvoir conclure de ce fait, isolé il est vrai, mais recherché par suite d'idées théoriques préconçues, que la paralysie générale peut échapper cliniquement, soit lorsqu'elle se rencontre chez de vieux cachectiques, soit lorsque ses lésions n’ont pas encore envahi la totalité de l’écorce cérébrale, comme c'était le cas. DE L'ACTION DU CURARE SUR LES ANIMAUX A SANG CHAUD, par MM. Legecz et MIRCEA VESESCU. L'action paralysante du curare sur les plaques terminales motrices a été démontrée jusqu’à l'évidence par l’illustre père de la physiologie mo- derne, Claude Bernard, au moyen de ses expériences géniales sur les grenouilles. Nous avons cherché cependant à examiner si le curare agis- sait d’une manière identique aussi sur les animaux à sang chaud, et ici, les résullats que nous avons obtenus semblent être de toute autre nature que ceux obtenus par les expériences sur les grenouilles. En effet, tandis que dans les grenouilles le curare produit Ja paralysie des plaques terminales, motrices, ce toxique semble agir chez les chiens, partant chez les animaux à sang chaud, sur les centres nerveux. Les expériences qui nous ont amenés à ce résultat sont les suivantes. Nous nous sommes servis du même dispositif que M. Laborde a employé dans l’expérimentation de l’action de l'aconitine pour démontrer que, chez le chien, la moelle épinière intervient sous l'influence de ce toxique dans la modification de la propriété sensitive des cordons nerveux mixtes ; nous avons mis à nu et isolé, chez un chien de taille moyenne, le paquet vasculo-nerveux d’un membre antérieur, dans la région la plus rapprochée de la fosse axilaire. Nous avons isolé et lié la veine, le plus près possible de la racine du membre, en appliquant en même temps une ligalure générale, contenant le membre entier à sa racine et laissant hors de la ligature l'artère et le plexus brachial. Nous avons ensuite injecté dans l'artère, dans le sens périphérique, une demi-seringue Pravaz d’une solution à 5 p. 100 de curare; au bout de dix minutes, nous n’observons aucun effet dans le membre injecté; les trois branches du plexus répon- dent aux différentes excitations par de vives réactions locales et géné- rales. Encore dix minutes, pas un changement; encore dix, le membre conserve ses mouvements, quoique d’une façon un peu altérée, probable- SÉANCE DU 28 JANVIER 101 ment à cause de ce que les muscles, ne recevant plus que le sang veineux, leur contractibilité devait souffrir, ce qui arrive aussi dans l’expérience de M. Laborde avec l'aconitine. N'observant aucun autre changement au bout de dix minutes encore, nous avons délié la veine et la racine du membre, en rétablissant ainsi la circulation. Alors il ne s'écoule pas cinq minutes que l’animal se couche sur le flanc et meurt avec les symptômes connus du curare. Cette expé- rience, nous l’avons répétée plusieurs fois avec des résultats absolument identiques, ayant en même temps soin de pratiquer une légère émission sanguine pour diminuer la tension sanguine produite par la ligature de la veine. Nous avons fait la même expérience sur plusieurs lapins; au bout d’une heure à partir de l'injection, on n’observe aucune modification dans les mouvements du membre dans l'artère duquel linjection a été faite, et dont la veine et la racine avaient été préalablement liées. Par contre, lorsqu'on isole la veine crurale et que l’on y fait l'injection, l'animal se paralyse et meurt, au bout d'environ cinq minutes, avec les mêmes symplômes que le chien de l'expérience précédente et — ce qui plus est — le membre antérieur dont la racine et la veine sont restées liées, se paralyse lui aussi. Ces expériences nous autorisent à soutenir que l’action du curare sur les animaux à sang chaud est différente de l’action produite sur les ani- maux à sang froid. En effet, si le curare agissait aussi sur les animaux à sang chaud, rien qu'en paralysant les plaques terminales motrices, il eût fallu que le membre dans l'artère duquel nous avons injecté le curare, ne pouvant se débarrasser de cette substance puisque, à cause de la liga- ture de la veine, la circulation veineuse de retour est complètement empêchée, se füt para:ysé, chose que l’on n’observe nullement; et cette paralysie aurait dü avoir lieu d'autant plus que la quantité de la subs- tance injectée a été dans la suite suffisante, pour tuer l'animal, lorsque nous avons laissé cette substance arriver aux centres par l'enlèvement de la ligature de la veine, ou par l'injection dans la veine crurale. Dans ce dernier cas, la paralysie s’est produite également dans le membre dont la veine brachiale avait été préalablement liée. Nous publierons nos observations prochainement in extenso dans un mémoire, à côté d’autres expériences que nous avons faites sur la del- phinine et la cicutine. 102 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : NoTE SUR L’ABAISSEMENT DE LA PRESSION ARTÉRIELLE DANS L'HÉMIPLÉGIE HYSTÉRIQUE, par M. Cu. FÉRé. Dans une note sur les rapports qui existent chez les hémiplégiques entre l’atrophie musculaire, là température des membres et la pression sphyg- mométrique (1), j'ai montré qu’il existe dans l’hémiplégie un abaissement de la pression artérielle du côté paralysé, et que cet abaiïissement de pression est en général en rapport avec l’atrophie musculaire et avec l’abaissement de température. Cet abaissement de la pression artérielle mesuré avec le sphygmomètre de Bloch était de 200 à 259 grammes chez les sujets où il était le plus marqué. Il s'agissait d’hémiplégies datant de l’enfance. Depuis l’époque où cette étude a été faite, j’ai répété l'exploration sur des hémiplégies récentes, et j'ai toujours observé un abaïissement de pres- sion, mais beaucoup moins marqué. Cet abaissement de la pression artérielle peut se retrouver non seule- ment dans les hémiplégies de cause organique, mais aussi dans l’hémi- plégie hystérique. Chez un hystérique qui, à la suite d’attaques, est resté plusieurs fois hémiplégique pendant quelques jours, j'ai observé, tant que durait l’hémiplégie, un abaissement de la pression du côté droit, de 100 à 125 grammes; cet hystérique, conservait dans l'intervalle des attaques une hémiamyosthénie et une hémianesthésie très prononcée, et la pression artérielle restait légèrement inférieure dans son côté droit. J'ai observé plusieurs fois, le même fait chez des hystériques hémiamyosthéniques sans paralysie véritable. Une femme qui fréquentait la consultation pour des troubles gas- triques hystériques, avec ovarie, hémianesthésie et hémiamyosthénie légères à droite, s’affaissa dans la rue, sous l’influence d’un choc moral : son enfant avait failli être écrasé par un omnibus. Elle se releva en appa- rence indemne; mais, le lendemain matin, elle constatait un œdème con- sidérable de la jambe gauche (côté anesthésique). Quand elle est revenue à la consultation, on ne trouvait en dehors de l’œdème bleu aucune augmentation grossière de l’hémiamyosthénie; la marche n’était gènée en apparence qu'en raison de l'augmentation de poids du membre et d’une douleur assez vive qui siégeait au niveau du tendon d'Achille, ou plutôt sous le tendon. Il n’y avait qu'une différence de 8 kilogrammes entre la force dynamométrique de la main gauche et celle de la main droite. Précédemment on avait constaté une différence de, 5 et de 6 kilogrammes. (1) C. R. Société de Biologie, 1888, p, 638; — Les épilepsies et les épilepti- ques, 1890, p. 32. SÉANCE DU 28 JANVIER 103 EE "| "| "UV" | |" "|" "|" | — — — — — — ———…—…"”"’"’_"”"|’"”…"’”’"”|” — — —— —_——_——" "——— Il n'y avait pas d’engourdissement, ni d’enflure de la main gauche. Cependant l'exploration de la radiale de ce côté indiquait un abaissement de pression de 100 grammes. Cette coïncidence d’un abaissement de pres- sion avec des phénomènes de paralysie vaso-motrice, et la diminution parallèle de l'abaissement de pression et de l’œdème, n’a rien qui puisse surprendre, mais leur constatation m'a paru intéressante au point de vue des analogies a établir entre l’hémiplégie hystérique etl'hémiplégie par lésion destructive, et aussi au point de vue de la simulation de para- lysie et de l’œdème hystériques. POISON CARDIAQUE D'ORIGINE MICROBIENNE, par M. H. Rocer. Dans une communication antérieure (1), j'ai décrit un bacille qui avait déterminé chez l'homme une seplicémie mortelle; ce bacille présente une grande analogie avec le Proteus vulgaris; il s’en distingue par un certain nombre de caractères ; il constitue une espèce ou une race spéciale et peut être désigné sous le nom de Bacillus septicus putidus. Poursuivant l'étude de ce microbe, j'ai recherché quelle était l’action des produits solubles auxquels il donne naissance; je l’ai semé dans du bouillon et dans du lait; puis, au bout d’un mois, j’ai stérilisé les cul- tures par différents moyens : chauffage, filtration sur une bougie de porcelaine, contact prolongé avec un mélange de naphtol et d'essence de cannelle. Par ce dernier procédé, on est sûr que les toxines ne sont pas arrêtées par le filtre ou détruites par la chaleur. Si l’on injecte une certaine quantité de ces produits de culture sous la peau ou dans le péritoine d’une grenouille, on la voit, au bout de quinze ou vingt minutes, tomber dans un état de torpeur assez marqué ; elle reste immobile; ses membres sont dans la résolution; pourtant elle peut encore sauter et les excitations cutanées sont suivies de réflexes très énergiqnes; les nerfs et les muscles réagissent facilement sous l'influence des courants électriques ; mais, si on ouvre le thorax,on constate que le cœur est arrêté et n'est plus excitable. Get arrrêt du cœur survient donc à une période peu avancée de l’intoxication. La dose capable de produire cet effet varie suivant le liquide qu'on emploie. Le meilleur procédé consiste à se servir d’une culture dans le lait. Après l’avoir filtrée sur du papier, pour se débarrasser de la caséine (1) Roger. Recherches bactériologiques sur un cas de septicémie. Société de Biologie, 29 octobre 1892. 404 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE précipitée, on l'évapore dans le vide, sur l’acide sulfurique et on la réduit au cinquième ; le liquide ainsi obtenu détermine des troubles cardiaques très graves, quand on en injecte 1/2 centimètre cube représentant 2 c. c. 4/2 de la culture primitive. Pour arrèter le cœur, il faut 44 ou 16 goultes, ce qui équivaut à 3 ou 4 centimètres cubes. Si le liquide a été concentré au bain-marie, on doit employer des quantités plus considérables, correspondant à 5 ou 6 centimètres cubes. Les cultures dans le bouillon sont moins actives ; il est nécessaire d'injecter l'extrait de 7 à 8 et même 10 centimètres cubes. Pour étudier de plus près les effets de ce poison cardiaque, j'ai eu recours à la méthode graphique. Le cœur étant mis à nu, je prends un tracé normal. Ce tracé varie quelque peu d’un animal à l’autre : les grenouilles sur lesquelles j'ai opéré étaient conservées dans un aquarium placé dans une chambre chauffée à 12-14°; bien qu’elle fussent toutes dans des conditions iden- tiques, les mouvements du cœur n'étaient pas semblables; ils différaient et par leur intensité et par leur fréquence. lians quelques cas on n'en comptait que 20 à la minute; le plus souvent il y en avait 30 ou 40. L'intensité des systoles n’est pas fixe non plus; tantôt les battements sont faibles et ne soulèvent le style enregistreur que de 6 ou 7 millimètres, tantôt, et plus souvent, la ligne d’ascension correspondant à la systole atteint 40 ou 12 millimètres. Dix ou douze minutes après l'injection des produits microbiens le tracé est profondément modifié ; les battements cardiaques sont notablement ralentis ; on ne compte que 10 ou 12 pulsations à la minute ; leur ampli- tude est très considérable ; la ligne verticale correspondant à la systole atteint 11 ou 12 millimètres; la systole est donc devenue plus énergique que normalement dans Les cas où les battements étaient primitivement fai- bles, En même temps, la forme du tracé est modifiée : la contraction systo- lique se fait brusquement, comme à l’état normal ; mais le cœur resle con- tracté assez longtemps, 1 ou 2? secondes, ou même 2 secondes 1/2; puis la décontraction se produit assez rapidement; le tracé est donc beaucoup plus simple qu’à l’état normal; il est constitué par une ligne ascendante, presque verticale, un plateau horizontal, une ligne descendante, enfin une ligne horizontale correspondant à la diastole. La longueur des diastoles varie suivant la gravité de l’empoisonnement et aussi d'un moment à l’autre ; car les battements du cœur sont devenus irréguliers : générale- ment la diastole se prolonge de 3 à 7 secondes ; à la fin de l'intoxication, elle dure 20 et 30 secondes ; il n’y a plus alors que deux ou trois batte- ments à la minute. Souvent, j'ai pu enregistrer la dernière contraction cardiaque ; elle est généralement très forte ; l'arrêt du cœur n’est pas précédé d’une diminu- tion progressive dans l'intensité des battements ; les systoles restent éner- giques, mais elles s'éloignent de plus en plus ; enfin le cœur s'arrête en diastole. SÉANCE DU 28 JANVIER 105 Si la dose employée est élevée, l'arrêt du cœur survient en 15 minutes: si elle est plus faible, le cœur donne le tracé que j'ai décrit et il continue à battre ainsi pendant plusieurs heures. Quand le cœur est arrêté, on constate qu’il est devenu complètement inexcitable : les excitations, tant mécaniques qu’électriques, sont incapa- bles de déterminer de nouvelles contractions. Ce résultat tendrait déjà à prouver que le poison agit sur le myocarde, c’est ce qu'on peut démon- trer plus aisément en opérant en dehors de l’organisme. On enlève deux cœurs de grenouilles; l’un est placé dans du bouillon pur ou dans du lait, l’autre dans les liquides où a vécu le microbe : ce dernier s'arrête au bout de 12 ou 13 minutes ; l'arrêt du cœur se produit de la même façon que chez l'animal vivant, les systoles s’éloignent de plus en plus ; et, tout en diminuant notablement d’énergie, sont encore assez fortes quand survient la dernière contraction ; à ce moment je muscle est inexcitable. Le cœur placé dans le lait ou le bouillon pur, bat pendant 45 ou 50 minutes; les battements se ralentissent progressivement et deviennent de moins en moins intenses, enfin ils ne s'arrêtent qu'après avoir passé par une phase où ils sont à peine perceptibles. Si, à ce moment, on soumet le cœur à des excitations faradiques, on obtient une contraction à chaque secousse électrique. J'ai opéré, en dehors de l’organisme sur la pointe du cœur isolé, et j'ai constaté que la contractilité disparaissait rapidement quand cette pointe était plongée dans le milieu ou avait vécu le microbe. Des tracés ont été pris dans tous les cas; ils démontrent que les acci- dents ne sont pas dus à une action sur les centres bulbaires, les pneumo- gastriques ou les ganglions du cœur. Ce n'est pas seulement quand il a cessé de battre que le cœur est devenu inexcitable ; il l’est déjà longtemps avant sa mort. Dans une première série d'expériences, j’ai recherché ce que devenait l'influence des pneumogastriques; j'excite ces nerfs, chez une grenouille saine, au moyen d'un courant faradique à interruptions rapides : Les bobines élant distantes de 6 centimètres, le cœur s’arrête; après une excitation de cinq secondes, l'arrêt peut se prolonger quinze à dix-huit secondes. Une demi-heure après cette première détermination, j'empoi- sonne l'animal avec une dose insuffisante pour arrêter le cœur. Je cons- tate alors que l'excitation des pneumogastriques est sans effet; les bobines peuvent être mises au contact et le courant peut passer pendant huit, dix el. même vingt-sept secondes, le rythme du cœur n’est nulle- ment modifié. J'ai étudié ensuite l’action des courants faradiques portés directement sur le muscle cardiaque. Si l’on opère sur le cœur normal, voici ce qu'on observe : avec un courant interrompu 228 fois à la minute, on voit se produire une série de systoles de plus en plus rapprochées; dans l’inter- valle des systoles le style s’abaïisse, mais reste bien au-dessus de la ligne 4, 406 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE diastolique normale; il y a une véritable tendance au tétanos, comme l'ont montré Bowditsch et M. Ranvier. L’excitation terminée, le cœur reste un certain temps sans se contracter; cette ligne de repos est obliquement descendante; avant de retomber au niveau de la ligne diastolique nor- male, elle se relève brusquement; il se produit une série. de systoles suivies de diastoles qui se rapprochent progressivement du type primitif. Mais si on répète plusieurs fois les excitations, on voit le tracé se modifier notablement : les battements deviennent beaucoup plus lents et sont séparés par des intervalles de repos souvent considérables ; la longueur des systoles s’allonge également, de telle sorte que le tracé rappelle assez bien celui que détermine la toxine microbienne. Mais pendant les dias- toles, le cœur est excitable et chaque secousse électrique détermine aussitôt une systole. Enfin si on continue les explorations, on voit la force du muscle s’affaiblir progressivement, les lignes systoliques sont de moins en moins élevées et le cœur finit par s'arrêter ainsi d'une façon progressive. Après l'arrêt des mouvements, on constate que de nouvelles excitations produisent encore des contractions pendant un certain lemps. Si on opère sur une grenouille intoxiqué, les résultats sont bien diffé- rents: au début de l’empoisonnement, c’est-à-dire sept ou huit minutes après l'introduction du poison, les excitations du cœur donnent lieu à un léger soulèvement du style, représentant des systoles avortées; à une période plus avancée, le cœur est devenu inexcitable. Quelles que soient l'intensité et la durée du courant, le rythme des battements n'est nulle- ment modifié. Enfin, si on emploie un courant très énergique, on voit le cœur s'arrêter d’une façon définitive. Dans une de mes expériences, les bobines étant à 12 centimètres, on obtenait le tétanos du cœur, avant l’empoisonnement; après l’intro- duction de la substance toxique, les bobines ont pu être placées à 10, 8 et 6 centimètres, les excitations on pu être prolongées pendant dix et douze secondes, sans produire d'effet. Enfin, en mettant les bobines au contact, le cœur s’est arrêté et les mouvements n’ont pu être rappelés. Ainsi, alors même que le cœur est fatigué par une série d'excitations électriques et qu'il donne un tracé comparable à celui que détermine la toxine microbienne, son mode de réaction vis-à-vis des courants faradi- ques est bien différent. Dans le premier cas, les excitations électriques déterminent des systoles ; dans le deuxième cas, elles restent inefficaces. Enfin, le cœur fatigué s’arrête peu à peu, les systoles devenant de moins en moins fortes: le cœur intoxiqué s'arrête à une période où les systoles sont très énergiques; elles s’éloignent et finissent par disparaître, Je n’ai pas encore isolé là substance qui, dans les cultures, possède cette action sur le cœur; j'ai constaté seulement que la matière active se trouve dans le précipité que l'alcool absolu détermine. En reprenant ce précipilé par l’eau, on constate qu'il a le même pouvoir que la culture totale. Quant aux matières solubles dans l'alcool elles ralentissent les TE à AY SÉANCE DU 28 JANVIER 407 a battements; mais pour obtenir ce résultat, il faut en introduire une quan- tité assez considérable (extrait de 20 à 30 centimètres cubes de culture). Conclusions : Parmi les substances toxiques contenues dans les cultures da Bacillus septicus putidus, il en est qui sont précipitées par l'alcool et agissent énergiquement sur le cœur de la grenouille. Leur injection détermine un ralentissement notable des battements du cœur, avec augmentation de la durée des systoles. L'arrêt du cœur sur- vient à une période où les systoles sont très énergiques, mais où les batte- ments s’éloignent de plus en plus, au point d'être séparées les uns des autres par des diastoles qui durent une demi et même une minule. Pendant la durée de l’empoisonnement, le cœur ne peut être arrêté par les excitations portées sur les pneumogastriques ; il devient également inexcitable aux courants faradiques agissant directement sur le muscle. SUR ELA TRANSFORMATION DE L'AMIDON VÉGÉTAL EN SUCRE PAR LE BACILLE DU CHARBON, par M. l'abbé Maumus. J'ai l'honneur de communiquer à la Société de Biologie quelques faits qui contribueront peut-ètre à étendre nos connaissances sur la biologie générale de la bactéridie charbonneuse. Le premier fait se rapporte à la transformation de l’amidon en sucre, par le Bacillus anthracis. Le second fait concerne la disparition de ce sucre, sous l'influence de ce même bacille. Ceux qui ont cultivé le charbon sur pomme de terre connaissent bien cet enduit grisâtre qui recouvre assez rapidement la surface ensemencée. Get enduit est formé d’une part, par les bacilles du charbon et d'autre part, par les cellules de la pomme de terre ensemencée, cellules qui sont ramollies et qui ont subi un commencement de colliquation. Je me suis demandé si, sous l'influence de la végétation du bacillus anthracis, les grains d’ non contenus dans les cellules n'étaient pas D ncionnee en glucose, comme on l’observe sous l’action de certains ferments digestifs. D'ailleurs, M. Straus dont les conseils bienveillants m'ont été si pré- cieux dans mes recherches et à qui je suis heureux d'offrir aujourd’hui l'expression de mes remerciements et de ma respectueuse reconnaissance, m'avait déjà fait observer qu’en traitant par la solution d'iode dans l’iodure de potassium, les cellules superficielles de la tranche ensemencée, on n’obtenait plus la coloration bleue des grains d’amidon : c'était plutôt la coloration rougeûtre des grains de dextrine. 198 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE A RE ee A L'expérience m'a montré que celte vue était exacte et que le bacille du charbon est susceptible de transformer l’amidon en glucose. Voici le procédé que j’ai suivi : Des tranches de pommes de terre introduites dans des tubes de Roux ont été stérilisés à l’autoclave à 120 degrés pendant un quart d'heure. J'ai eu soin de mettre dans le fond de ces tubes une quantité d’eau stéri- lisée suffisante pour que la partie inférieure de la pomme de terre baignât dans le liquide. J'ai ensemencé ensuite ces pommes de terre avec une culture de charbon et les tubes ont été placés à l’éluve à 37 degrés pendant un laps de temps variable. La végétation du bacille s'effectue très abondamment et déjà, au bout de quelques jours, des grumeaux se détachent et tombent au fond des tubes, en troublant de plus en plus le liquide. Ces grumeaux sont formés de filaments de bacilles et de cellules végétales. Lorsqu'on traite ce liquide par le réactif de Fehling, dans les premiers jours qui suivent l'ensemencement, on n'obtient pas de réduction : tou- tefois, vers le sixième jour, la réaction du glucose commence à se mani- fester quoique faiblement; mais, vers le douzième jour, j'ai obtenu un pré- cipité franchement rouge d’oxydule de cuivre. Des tubes témoins contenant des pommes de terre stérilisées à la même température, pendant le même laps de temps, et non ensemencées ont élé placés dans la même éluve à côté des premiers : le liquide qui en baignait le fond n'a jamais réduit la liqueur cupro-potassique. J'ai fait une variante de cette expérience en remplaçant la pomme de terre par l'empois d’amidon très dilué, de façon que le liquide fût à peine louche. Cet empois a été obtenu en chauffant au bain-marie 30 grammes d'amidon dans 500 grammes d'eau distillée à une température d'environ 80 degrés pendant dix minutes. J'ai laissé reposer et ai ensuite décanté le liquide un peu louche qui surnageait. Ce liquide a été réparti dans des tubes à essai et stérilisés à l’autoclave à la température de 120 degrés pendant dix minutes. Je me suis assuré qu'au sortir de l'autoclave ils ne réduisaient pas la liqueur de Febling. Un certain nombre de ces tubes ont été ensemencés avec une culture de charbon et placés à l'étuve à 37 degrés. Le bacille s'y développe avec abondance et la transformation de l’amidon en sucre s'effectue avec une grande rapidilé. Au bout déjà de quarante-huit heures, le liquide com- mence à réduire le réactif de Fehling : au bout de quatre jours, la tota- lité de l’amidon a disparu, comme on peut s’en assurer par l'iode et a élé transformée en sucre. Les tubes Lémoins placés à l’étuve, dans les mêmes conditions, n'ont pas donné la moindre réduction. Ce premier fait établi, j'ai pu faire une autre constatation. En conli- puant à maintenir à l’étuve les tubes où l’amidon a été tolalement con- verti en glucose, j'ai constaté au bout de quelques jours que la leneur en SÉANCE DU 28 JANVIER 109 EE glucose de ce milieu diminue progressivement : il arrive même un moment, vers le sixième ou septième jour, où toute trace apparente de glucose a disparu. Qu'est devenu ce sucre? Il est infiniment probable qu'il a été utilisé comme aliment par la bactéridie qui a continué à se développer dans les tubes. ; Je puis donc affirmer que lorsque le Bacillus anthracis a de l'amidon à sa disposition, il est susceptible de le transformer en glucose. En outre, lorsque le sucre a été formé, le bacille le consomme et l'utilise comme aliment. EFFETS PSYCHIQUES DU CHLORALOSE SUR LES ANINAUX, Note de MM. M. Hannior et Cr. RIcuHET. Dans notre précédente communication (voyez les Mémoires de la Société de Biologie, 14 janvier 1893, p. 1-16), nous avons montré que les chiens, après ingestion d’une dose de 0 gr. 5 par kilogramme de chloralose mêlé au lait ou à la viande, présentaient une incoordination motrice avec de l’excitabilité bulbo-médullaire. Surtout nous avions cherché à préciser la dose toxique mortelle minima, et démontré que cette substance toxique dissociait étrangement la sensibilité. En effet elle anéantit à peu près totalement la sensibilité à la douleur, et elle laisse intacte ou plutôt elle exagère la sensibilité à la succussion — et non à la succession, comme nous le fait dire une erreur typographique. Dans les expériences que nous relaterons aujourd'hui, il s'agira des effets psychiques produits sur les chiens par des doses plus faibles, soit par des doses voisines de 0 gr. 25 par kilogramme. Une heure ou une heure et demie environ après avoir pris cette quan- tité de chloralose mélangée à du lait, les chiens commencent à changer d’allure. Ils ne tiennent pour ainsi dire plus en place. Leurs mouvements deviennent incertains, hésitants, et très semblabies à ceux des chiens qui ont subi une opération cérébrale. Alors, au lieu de se coucher el de s’en- dormir, comme font les chiens qui ont reçu une dose plus forte, ils errent dans le laboratoire, la tête basse, sans répondre aux appels des personnes présentes. Si un objet quelconque est devant eux, chaise, table, mur, porte, etc. ; ils se détournent quelque peu ; mais, le plus souvent, surtout quand l'absorption a été rapide, ils se heurtent contre ces obstacles. Souvent même ils n'ont plus l'intelligence ou l'initiative nécessaire pour changer de route, et ils restent ainsi, la tête entre les barreaux d’une chaise, ou allongée dans l’angle d’un mur, sans songer à prendre un 410 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE autre chemin. En cela ils se comportent tout à fait comme les canards excérébrés, dont l’un de nous a raconté ici l’histoire (1). Ainsi, au point de l’innervation motrice, ils sont très semblables aux animaux qui ont une lésion cérébrale, et spécialement aux chiens qui ont subi une double extirpation de la région rolandique. Mais l’analogie ne s'arrête pas là, et nous avons pu trouver une ressem- blance plus curieuse encore en. étudiant l’état des sens, et surtout l’état des perceptions optiques. On sait en quoi consiste la cécité psychique expérimentale chez le chien. Ferrier, Munck et d’autres physiologistes l'ont bien étudiée. L’un de nous a présenté à la Société de Biologie un chien qui avait subi à plusieurs mois de distance l’ablation totale des régions cérébrales voi- sines du pli courbe (2). Ge chien avait gardé toute son intégrité motrice; mais il avait perdu la faculté de reconnaître les objets qu’on lui présen- tait. 11 ne tremblait plus devant le bâton ou le fouet, ne fermait pas les paupières devant une menace, et, si on lui montrait un lapin, malgré sa passion pour la chasse, il ne pouvait le prendre que guidé par l'odorat. Quoique ce lapin fût tout près de lui, il ne parvenait pas à le saisir, et il le cherchait cependant avec une ardeur passionnée, qui arrivait même à être très comique, puisque ce lapin, qu’i: cherchait tant et qu'il sentait si bien, élait tout près de lui, lui crevant les yeux pour ainsi dire. La compréhension des images visuelles était abolie; la per- ception ne se faisait plus en tant que perception ; et malgré cela, la sen- sibilité visuelle n’était pas perdue, comme l’indiquaient la persistance des réflexes de l'iris, et la conlinuation de la marche sans heurt au milieu des objets du jaboratoire. Nous avons retrouvé ces mêmes symptômes chez les chiens intoxiqués par le chloralose. En effet, à la dose de 0 gr. 25 par ingestion stomacale, les chiens ne sont pas assez paralysés pour ne pas pouvoir marcher et même courir. À un examen superficiel, c'est à peine si on pourrait les croire empoi- sonnés; pourlant leur intelligence est presque totalement anéantie. Ils ne répondent plus à l’appel, et, si on les menace du fouet, ils ne parais- sent pas effrayés. Même on peut les frapper vigoureusement, les rouer de coups, sans qu'ils cherchent à se plaindre ou à se détourner. Ils con- tinuent à errer de côté et d'autre, impassibles et indifférents, comme soumis à une impulsion irrésistible, un peu comme les chiens cocaïnisés, avec cette différence que, dans l’empoisonnement par la cocaïne,. les chiens sont plus excitables qu'à l’état normal, tandis que nos chiens chlo- (4) Ch. Richet. Bull. de la Soc. de Biol,, 1883, p. 129, et Trav. du Laborat., 1898 Dipru1s: (2) Voy. Ch. Richet. Trav. du Laborat., t. T, p. 126. SÉANCE DU 28 JANVIER 411 ralosés sont à peine excitables. Ce sont des chiens somnambules, qui marchent, sans rien percevoir des excitations environnantes. Voici donc des chiens insensibles, et qui ont conservé non seulement leurs réflexes (comme nous l’avions dit précédemment), mais encore leur apparente spontanéité. Ils marchent, courent, se détournent des objets qui leur font obstacle, et cependant ils sont insensibles ; car il est clair qu'un chien, qui ne gémit pas quand on le bat, quand on lui écrase la patte, ou quand on lui fait une opération sanglante, peut être à bon droit dit insensible. Quand on constate en même temps qu'il n’a aucune paralysie du mouvement, non seulement la sensibilité à la douleur est abolie, mais encore la sensibilité spéciale de certains sens est perdue. Il y a perte des perceptions visuelles, comme l'expérience suivante l'indique nettement. Parmi les chiens de notre laboratoire se trouve un bull à qui a été faite, il y a deux mois, une fistule gastrique. Il est remarquable par sa férocité avec les animaux. Extrémement doux envers les hommes, il est terrible vis-à-vis des rats, lapins, pigeons et autres bêtes. Nous lui avons alors fait prendre 0 gr. 25 par kilogramme de chloralose. Au bout d'une heure il pouvait marcher, quoique légèrement titubant, et parfois con- tracturé. Alors nous lui présentâmes un lapin. L’odeur l’excita violem- ment, et il essaya de le prendre; mais il ne le voyait pas, car il suffisait de déplacer légèrement l'animal, pour qu’il ne puisse l’atteindre, malgré ses efforts désespérés. On mettait le lapin tout près de lui, et il ne le re- connaissait plus ; pourtant il le sentait, et il cherchait avec une ardeur étonnante — par l’odorat (qui était conservé) — à le retrouver. Nous cons- talâmes aussi plusieurs fois que l'audition et les perceptions auditives n'étaient pas abolies ; car il accoureit au bruit que faisait un coq avec ses ailes; mais il ne le voyait pas plus qu'il ne voyait le lapin. En somme, sauf cette cécité psychique, le chien paraissait intact. La même recherche peut être faite plus simplement en étudiant un réflexe psychique élémentaire, celui qui peut être considéré comme le type des réflexes psychiques, c'est-à-dire le clignement consécutif à l'approche brusque d’un objet menaçant. L'expérience, répétée sur une dizaine de chiens, nous a toujours denné le même résultat. Alors que les autres fonctions, motrices ou sensitives, semblent intactes. Le cligne- ment réflexe des paupières est aboli, et les chiens chloralosés ressemblent tout à fait aux chiens dont on a enlevé les régions cérébrales voisines du pli courbe. IL fallait compléter ces données par l'étude directe de l’excitabilité cérébrale. C’est ce que nous avons fait dans trois expériences qui nous ont donné des résultats très concordants. Ces expériences peuvent être faites d’une manière intéressante, en em- poisonnant l'animal, non plus par l'ingestion stomacale de chloralose, 112 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mais par l'injection directe en solution aqueuse dans les veines. Si l’on fait à chaud une solution de chloralose, on peut en dissoudre facilement 10 grammes par litre. La solution chaude ne précipite pas immédiate- men-, et elle peut être injectée dans la veine saphène. Il n’est pas besoin d’une quantité considérable pour amener une anesthésie suffisante. A la dose de 0 gr. 06, ou 0 gr. 08 par kil., l’anesthésie est à peu près obtenue. On voit alors que, pour un chien de 10 kilogrammes, ce qui est le poids moyen des chiens, une injection de 60 centimètres cubes produit l’anes- thésie. Sur trois chiens ainsi anesthésiés, nous avons pu, sans produire de réactions douloureuses, mettre à nu l’encéphale et le gyrus sigmoïde. C'était un curieux spectacle que de voir l’animal impassible aux incisions de la peau et des muscles, à la dilacération et à la section de la dure mère, et cependant sautant en l’air dès qu’on ébranlait la table ou le plancher. Une fois le gyrus sigmoïde mis à nu, nous constatâmes qu'il était encore excitable, et que son excitation électrique provoquait une réponse dans les membres du côté opposé. Alors nous fimes la section de la zone de substance grise dont l’excitation avait provoqué ces mouvements, et nous vimes, avec la plus grande netteté, trois fois dans trois expériences, que la substance blanche sous-jacente était devenue plus excitable. Les courants qui déterminaient sur le gyrus intact une réponse faible, déter- minaient sur le gyrus à substance grise abrasée une réponse forte, et les courants qui ne déterminaient pas de réponse sur le gyrus intact, déter- minaient une réponse faible sur le gyrus abrasé. Dans les trois cas, il ny eut pas la moindre incertitude sur le sens des résultats. Ce fait concorde bien avec ce que l’un de nous a observé il y a long- temps dans la chloralisation (1). M. Fr. Franck, qui doutait d’abord de ce fait, s’est rendu compte de sa réalité, et il a donné un récit détaillé d'expériences irréprochables (2). Ainsi, comme avec les anesthésiques, l’excitabilité cérébrale corticale diminue avec le chloralose; les faisceaux blancs sous-jacents restent excitables ; mais la substance grise est moins facilement excitable, comme si la substance grise intoxiquée opposait à l'excitation électrique la résis- tance d’un tissu inerte interposé entre l’excitant et les faisceaux blancs seuls excitables. Il est vrai que les chiens chloralosés diffèrent des chiens chloralisés par ce caractère important, que l'écorce cérébrale n'est pas chez eux absolument paralysée. On peut par l'excitation électrique des zones ro- landiques produire une attaque d’épilepsie corticale, tandis que, chez les (1) Ch. Richet. Thèse d'agrégat., 1878, p. 74. (2) Fr. Franck. Fonctions motrices du cerveau, 1887, p. 116. SÉANCE DU 28 JANVIER 113 chiens chloralisés profondément, cette épilepsie corticale ne peut plus être produite. Mais c'est là sans doute une question de dose. Nous poursuivons cette étude, mais on comprend qu’elle est longue, et nous ne pouvons présenter encore que certains résultats sommaires. Quoi qu’il en soit, il paraît maintenant bien établi que l’action du chloralose est éminemment psychique. C’est même, à ce qu’il semble, un poison psychique par excellence ; car il réserve son action sur certaines parties, bien limitées, de l’écorce du cerveau. Nous voudrions, pour terminer, revenir sur quelques points de notre communication précédente. Il s’agit d’abord de cette excitabilité médullaire remarquable qui coïn- cide avec l’anesthésie cérébrale. Or, sans préciser davantage, nous avions à peu près admis que, dans ce cas, c'était la moelle épinière qui était devenue plus excitable. En réalité, les choses ne se passent pas tout à fait ainsi ; car, si l’on fait la section de la moëlle, à la région lombaire ou à la région dorsale, on voit que toute cette excitabilité disparaît aussitôt. Les secousses provoquées par la succussion continuent dans le train an- térieur, mais elles se sont absolument éteintes dans le train postérieur. IL est donc assez vraisemblable que cette excitabilité exagérée est sous la dépendance du bulbe rachidien, et non de la moelle proprement dite. Enfin nous avons de nouveau constaté la susceptibilité vraiment extraordinaire des chats au chloralose. Quand on leur donne, par inges- tion stomacale, la dose tout à fait minime de 0 gr. 005 par kilogramme, on peut observer quelque modification (très légère) dans leurs allures. Cette dose répond à environ 0 gr. 30 chez un homme adulte. Par consé- quent le chloralose est une substance très active, et qui ne doit pas être employée, sauf indications spéciales, à des doses plus fortes que celles que nous avons montrées être inoffensives. Peut-être sa supériorité sur les autres hypnotiques tient-elle à ce que ce corps est surtout un poison psychique, limitant son action à la zone corticale du cerveau, et respectant les fonctions bulbaires et médullaires. (Travail des laboratoires de Chimie et de Physiologie de la Faculté de médecine de Paris.) 114 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE NOTE SUR L'ANATOMIE PATHOLOGIQUE DE LA PARALYSIE GÉNÉRALE, par M. le D' J. DAGONET. Au X° Congrès international de Médecine à Berlin, à propos de la dis- cussion sur l'anatomie pathologique de la paralysie générale progressive, j'ai parlé d’un fait qui me paraissait intéressant et qui ne semblait PE avoir beaucoup attiré l’attention des auteurs (1). Quand on examine, au microscope, des coupes de circonvolutions céré- brales de paralytiques généraux, on remarque, le long des vaisseaux, des globules réfringents et homogènes, isolés ou groupés en amas parfois considérables. Ces globules sont d’une grande transparence, leur contour est nettement circulaire, leur volume très variable, de 2 à 18 y. Ils sont situés hors des vaisseaux cérébraux, dans les gaines lymphatiques et ils se dirigent vers la pie-mère où on les retrouve souvent en grand nombre. - Les recherches bibliographiques montrent qu’'Adler (2), en 4875, a décrit ces globules brillants, dans la paralysie générale, sous le nom de boules colloides. Obersteiner (3) les a aussi observés, et il ajoute que Wed! et Meynert les ont signalés dans les organes en voie d’atrophie. La description de Wedl (4) prête à la confusion et il ne s’agit pas de paralytiques généraux. Dans des cerveaux d'idiots, Wed! a vu des masses colloïdes, globuleuses, qui siégeaient sur les parois des petits vaisseaux : c'est, dit-il, un développement anormal, un processus de dégénérescence dans lequel les capillaires sont arrêtés dans leur poussée de bourgeonne- ment. Ce n’est évidemment pas notre cas. Pourtant il ajoute que quel- ques corps colloïdes étaient libres et, plus loin, il parle de masses réfringentes qui obstruaient les vaisseaux et oblitéraient leur lumière, il s'agissait alors d'organes en voie d’atrophie, d’un cervelet sénile. Ce sont là certainement des thromboses fibrineuses ou plutôt hyalines comme dans les observations de Meynert. Quelle interprétation peut-on donner de ces globules réfringents qui se trouvent dans les gaines des vaisseaux cérébraux, chez les paralytiques généraux ? Les réactions montrent que ce ne sont pas des gouttelettes graisseuses. Adler a insisté sur la résistance de ces globules à la potasse et à l’éther ; d'autre part, l'acide osmique ne les colore pas en noir. Il ne s’agit pas davantage de substance colloïde ni amyloïde. On peut obtenir certaines 1) Dagonet. Verhandl. des Congresses, vol. IV. Berlin, p. 1891. 2) Adler. Archiv für Psychiatrie, vol. V. ) Obersteiner. Medic. Jahrbücher, 1877. ) ( ( (3 (4) Wedl. Wiener Sitzungsberichte, il XLVIIT, 1863. SÉANCE DU 28 JANVIER 115 réactions de la dégénérescence hyaline : ainsi la fuchsine acide, la méthode de Weigert, spéciale à la fibrine, les colorent également, mais le picro-carmin, par exemple, les différencie de la substance hyaline en leur donnant une teinte jaunâtre, etc. Il résulte de l’étude que j'ai poursuivie, qu’on ne peut pas trouver les traces de l'origine mucléaire ou cellulaire de ces corpuscules, admise par Adler, ni partager l'opinion d’'Obersteiner, pour qui ces boules hyalines paraissent dues à une coagulation, post mortem, et à une disposition particulière du sérum. Leur nombre, plus considérable dans la paralysie générale que partout ailleurs, c'est-à-dire dans une affection surtout caractérisée par des processus de destruction intenses, leurs propriétés physiques et chimiques, leur siège, m'ont fait penser qu'il s'agissait d’un des déchets de la substance cérébrale, d’un prôduit de dédoublement de la myéline ; ce genre de recherches a été peu pratiqué par les histolo- gistes. Les corps qui constituent la myéline sont mal définis. On décrit, outre les substances extractives et les albumines, la neurokératine, la choles- térine, une ou deux substances phosphorées (le protagon de Liebreich et la lécithine), et une substance non phosphorée, la cérébrine. Baum- stark (1) dit que la cérébrine est une combinaïson sans phosphore, sem- blable aux glycosides, qui résulterait du dédoublement du protagon phos- phoré, mélange de lécithine et de cérébrine. Zhudichum, ajoute-t-il, admet tout un groupe de cérébrines. Les globules colloïdes d’Adler, autant que j'ai pu m’en convaincre par leur aspect physique et par leurs réactions chimiques, sont des gouttelettes de cérébrine, qui résultent du dédoublement de la myéline. On peut les trouver normalement dans le cerveau, comme dans le cas de mort vio- lente cité par Obersteiner, c'est alors un produit des déchets de la vie cérébrale. Quand le nombre de ces globules est considérable, comme on le voit dans la paralysie générale progressive, il indique un processus intense de destruction cérébrale et les gouttelettes de cérébrine, qui cireu- lent dans les gaines vasculaires du cerveau, sont en rapport avec la dispa- rition des fibres à myéline, décrite par Z'uczek dans cette affection. ‘ (4) Baumstark. Zeitschrift für physiolog. Chemie, vol. IX, 1885. 116 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ACTION DE LA NICOTINE SUR QUELQUES FERMENTATIONS INDIRECTES, par M. I.-P. Morar. = Les physiologistes ont étudié avec détails l’action de beaucoup de poi- sons, d'alcaloïdes végétaux (morphine, atropine, strychnine, nicotine) sur la fermentation alcoolique, c'est-à-dire en définitive, sur l’activité du ferment figuré levure de bière, Saccharomyces cerevitiæ. (A Marcacci, P. Regnard, etc.) D'autre part, on a signalé également des faits relatifs à l'influence sur le ferment figuré, levure d' bière, de certains organismes, microse, levures diverses, bacille pyocyanique. {D’Arsonval et Charrin.) Une troisième catégorie comprend les actions produites par les alca- loïdes végétaux sur les ferments solubles. Bourquelot a réuni les documents relatifs aux faits de ce genre et rappelé les recherches de Duclaux (bases alcalines, sulfate de quinine sur l'invertine); de Bouchardat (bases alcalines sur l’émulsine); de Dug- gan (diastase); de Kjeldahl (strychnine, etc., sur diastase). J'ai étudié plus particulièrement la nicotine qui, d’autre part, exerce une aclion (rès énergique sur les nerfs de la vie organique. L'exemple le plus net est le suivant : EXPÉRIENCE. — Je mélange à une solution de sucre de canne, une cer- taine quantité d’invertine tirée de la levure de bière à jeun. L’interversion se produit dans les conditions que l’on sait au bout de quelques minutes : le mélange réduit abondamment le réactif cupro-potassique. Mais, si au préalable, on a additionné l’invertine d’une certaine quantité de nicotine, l’interversion est retardée, ou même empêchée complètement suivant les doses employées. J'ai hâte de dire que ces doses sont massives par rapport à celles qui seraient nécessaires pour paralyser dans son entier le système nerveux grand sympathique. Le parallélisme des deux actions, paralysante dune part, et antifer- mentative de l’autre, ne cesse pas malgré cela, d’être soutenable. En effet : 1° la petitesse infinie des quantités actives du poison s'explique par la petitesse véritablement infinitésimale des substances réellement actives du nerf, surtout si l'on admet que le poison atteint, dans ce cas, un fer- ment; 2° la spécificité des ferments comme aussi des poisons n'étant pas absolue, il peut s'agir, dans un cas comme dans l’autre, de réactions non tout à fait semblables, mais seulement analogues et qui par conséquent ne sont pas rigoureusement comparables au point de vue quantitatif. La nicotine ajoutée à la levure de bière (et non plus seulement à son ferment soluble) retarde considérablement la fermentation alcoolique : SÉANCE DU 28 JANVIER 117 il est permis de penser que c'est au moins pour une part en vertu du mécanisme exposé plus haut. La nicotine ajoutée à l’émulsine et à l’amygdaline retarde de même beaucoup la création de ces deux substances qui aboutit à la production de la glycose. La nicoline ajoutée à la salive n’a qu'une action très limitée et qui sou- vent m'a paru douteuse sur la transformation de l’amidon en glycose et maltose. A la vérité, il reste à examiner s’il s’agit ici d'une action véri- tablement spécifique, ou seulement d’une action banale due à la nicotine agissant en tant qu’alcali. Au point où en est actuellement l'étude des ferments envisagée d'une facon générale, les applications qui ressortent de ces faits relativement soit à la physiologie des nerfs, soit à la physiologie végétale, soit aux diverses actions microbiennes pouvant être faites par chacun et du reste je ne puis les développer ici. Quelles qu'elles puissent être, les faits ci- dessus exposés auront toujours la valeur d'une indication. SUR L'HISTOGENÈSE DU TUBERCULE DANS LA MORVE CHRONIQUE, par MM. E. LecLaincue et L. MOonNTANÉ, Professeurs à l'École vétérinaire de Toulouse. L'évolution du tubercule de la morve chronique peut être parfaitement étudiée dans le poumon du cheval. En ce point, les foyers sont complè- tement isolés; ils se présentent à des degrés divers de développement et il est possible de les reconnaître et de les isoler dès les premières pé- riodes. L’altération initiale consiste en une inflammation des voies lympha- tiques sous-pleurales et interlobulaires, particulièrement intense au niveau des points où le tubercule va se développer. Celui-ci est constam- ment situé dans le voisinage immédiat de la plèvre ou d’une travée inter- lobulaire, souvent au point de réunion de la plèvre et d’une travée, ou encore au point de jonction de deux travées voisines. Il en résulte que le tubercule se trouve sous-tendu et partiellement limité par une bande de tissu cellulaire enflammé. | Le premier slade de l'évolution du tubercule consiste dans le dévelop- pement d’un foyer de pneumonie exsudative, fibrineuse, occupant une partie plus ou moins considérable d’un lobule. Les alvéoles pulmonaires correspondants sont remplis par une masse de fibrine granuleuse, jau- nâlre, contenant quelques leucocytes mononucléaires. La plèvre ou la travée conjonctive sont infiltrées par une énorme quantité de leucocytes; 118 ‘SOCIÉTÉ iDE BIOLOGIE les vaisseaux lymphatiques se montrent dilatés et certains sont litlérale- ment bourrés de leucocytes. — Les tubercules sous-pleuraux apparaissent, dès ce moment, sous la forme d’une petite tache ecchymotique à peu près régulièrement arrondie. A une période plus avancée, la partie centrale du foyer primitif de pneumonie est envahie par une immigration bruyante de leucocytes ; ceux-ci infiltrent les parois, ils remplissent les alvéoles qui dessinent sur la coupe une grappe fortement colorée. En même temps, le tissu pulmo- naire subit des modifications réactionnelles dans le voisinage du foyer; cette zone de retentissement est indiquée par l’évolution d’une pneumonie épithéliale plus ou moins étendue. — Les tubercules superficiels se pré- sentent à ce moment sous l'aspect d'une masse arrondie, de couleur grise, transparente, homogène, formée d’un tissu peu résistant de con- sistance charnue. Parfois persiste à la périphérie une auréole rosée, trace de l’ecchymose primitive. Dans un troisième stade, le foyer central subit une dégénérescence caséeuse frappant à la fois les parois alvéolaires et les leucocytes impor- tés, tandis qu’une zone épithélioïde de réaction s’édifie à la périphérie. On distingue alors dans le tubercule : un centre dégénéré, granuleux et coloré, formé par les détritus cellulaires; une couche moyenne, à con- tours festonnés, de pneumonie fibrineuse ; une couche externe de pneu- monie interstitielle, caractéaisée par une prolifération des éléments des cloisons et de l’épithélium alvéolaire. La cavité des alvéoles est ainsi progressivement effacée par l’épaississement et l’accollement des parois. — Ces lésions sont décelées à la surface du poumon par des taches arrondies, d’un gris jaunâtre, qui se montrent constituées, à un examen plus attentif, par une partie centrale, d’un blanc sale, entourée d'une zone de couleur grise. Dans une période plus avancée, la zone de pneumonie interstitielle gagne peu à peu sur la zone fibrineuse ; elle forme autour du foyer tuber- culeux une coque limitante. Le tubercule ainsi constitué ne subit plus que les altérations dégénératives ordinaires. La pneumonie interstitielle forme à la périphérie une paroi cellulaire compacte dans laquelle on peut distinguer : une couche interne, la plus large, formée de grosses cellules jaunâtres parmi lesquelles il n’est pas rare de rencontrer des cellules géantes; une couche externe, moins épaisse, constituée par des faisceaux conjonctifs délicats, séparés par des cellules rondes, à gros noyaux, de nature embryonnaire. La zone interne mérite déjà le nom de « zone épithélioïde », tandis que la zone externe est l’ébauche de la coque fibreuse. Un dernier stade est marqué par l'achèvement des ceintures fibreuse et épithélioide; le tubercule adulte est alors constitué avec ses trois zones distinctes : une centrale, caséeuse; une moyenne, épithélioide ; une externe, fibreuse. — A ce degré ultime seulement, le tubercule affecte ” ET x SÉANCE DU 28 JANVIER 119 les caractères restés classiques d’une masse arrondie, résistante, présen- tant sur la coupe une coque épaisse, intimement confondue avec le paren- chyme voisin, et un contenu caséeux s’éliminant facilement par le grat- tage. Il nous est possible d'esquisser dès maintenant, d’après des observa- tions directes, la pathogénie des lésions. Les bacilles arrivent par les voies lymphatiques, provoquant dans toutes les régions envahies une abondante leucocytose. L’inflammation, d'abord limitée aux travées, gagne ensuite le parenchyme (pneumonie fibrineuse) ; un peu plus tard les bacilles envahissent l’alvéole, en même temps que s'opère l’afflux des leucocytes dans les cavités. Les phénomènes ultérieurs sont la consé- quence des propriétés nécrosantes des produits du bacille (caséification) ou de la réaction inflammatoire des tissus voisins (zone épithélioide et sclérose). En résumé : Le bacille morveux chemine dans les voies lymphatiques et la lésion initiale est une lymphangite périlobulaire ; Le lobule pulmonaire est envahi secondairement, de la périphérie au centre; la première expression anatomique du tubercule est un noyau de pneumonie fibrineuse ; Le centre du foyer enflammé est bientôt le siège d’une apoplexie leu- cocytaire, suivie d'une dégénérescence caséeuse des éléments et d’une réaction périphérique aboutissant au développement d’une ceinture épi- thélioïde doublée d’une enveloppe conjonctive. Le tubercule de la morve chronique ne diffère du tubercule de la morve aiguë que par une attaque plus discrète des bacilles permettant l'édification d’une zone réactionnelle périphérique. En outre de ce type évolutif le plus ordinaire, les lésions de la morve pulmonaire chronique, affectent aussi des formes différentes que nous décrirons dans une prochaine note. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Mareraeux, directeur, 1, rue Cassette. 121 SÉANCE DU 4 FÉVRIER 1893 MM. p’ArsonvaL et CHArrin : Bacille pyocyanique et levure de bière. — M. A. p’Ar- sonvaL : Production des courants de haute fréquence et de grande intensité; leurs effets physiologiques. — MM. Lesace et Pineau : Note sur un cas d'infection lente par le pneumocoque. — MM. Gies pe LA TOuRETTE et CATHELINEAU : La nutrition dans l'hystérie. — MM. Haxrior et Cu. Ricner: Effets physiologiques du chlo- ralose. — M. le D' ArsLan Ervaxr : La peptonurie dans la scarlatine. -- M. G. DuraAnp : Disposition des muscles dans l'iris des oiseaux. — M. Henry DE VARIGNY : A propos du paradoxe de Weber. — M. le D' L. Jousn: Note sur l'appareil photogène d’un Céphalopode. — MM. LecLaincHe et Monrané : Sur des lésions par- ticulières de la morve pulmonaire chez le cheval. Présidence de M. Chauveau. M. Macwan fait hommage à la Société de deux volumes ayant pour titres : — Recherches sur les centres nerveux; alcoolisme, folie des dégénérés héréditaires, paralysie générale, médecine légale, par M. Macnan. — Leçons cliniques sur les maladies mentales faites à l’Asile clinique (Sainte-Anne), par M. MAGNaw. BACILLE PYOCYANIQUE ET LEVURE DE BIÈRE. Note de MM. d'ARsSONvVAL et CIARRIN. Dans notre dernière note, nous avons signalé ce fait que la levure sucrée, renfermant une culture stérilisée de bacille pyocyanique, fermente plus activement que la même levure pure. Nous venons dire aujourd'hui que le bouillon de viande qui a servi à faire la culture du bacille n’y est pour rien, car le bouillon de viande, ajouté seul à cette levure sucrée, ralentit, au contraire, la fermentation alcoolique. Ce sont donc bien les produits solubles sécrélés par le bacille qui activent cette fermentation. — Nous avons dit également que le bacille n'arrête le phénomène que pendant huit à dix heures. Depuis, nous avons conslaté qu'on empêche de nou- veau une fermentalion, qui allait partir, en l’aérant fortement. — Il BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 6) 122 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE nous reste encore à étudier l’action des proportions respectives de levure et de bacille sur le processus de concurrence vitale que nous avons signalé. C’est un point que nous sommes en train d’élucider. Nous tenons à rappeler, en terminant, ce que nous avons dit déjà à la Société, à savoir que le but que nous poursuivons n’est pas d'étudier la levure de bière, mais de savoir comment les microbes pathogènes des animaux agissent sur la cellule en général. Nous avons choisi la cellule végétale par ce qu'elle est plus résistante aux causes de mort que la cel- lule animale, ce qui nous permet de varier les conditions de l'expérience. Parmi ces cellules végétales, nous avons pris la levure parce qu'elle est un être monocellulaire, dont les propriétés sont bien connues et que ces propriétés persistent à la température (37 degrés) propre des animaux supérieurs. Nous n’avons pas, néanmoins, l'intention de nous en tenir là, et nous continuerons nos expériences avec des plantes plus complexes chez lesquelles nous étudieronsles modifications apportées parl'inoculation de microbes pathogènes. PRODUCTION DES COURANTS DE HAUTE FRÉQUENCE ET DE GRANDE INTENSITÉ; LEURS EFFETS PHYSIOLOGIQUES, par M. A. D'ARSONVAL. I. —J’ai entretenu à plusieurs reprises la Société des effets physiologiques des courants alternatifs de haute fréquence. Je lui ai montré également différents dispositifs permettant de les obtenir en employant une bobine de Ruhmkorff comme souree d'électricité. Le dispositif que j'indique à la Société, aujourd’hui, est beaucoup plus simple et permet de graduer, d'une facon rigoureusement continue, l'intensité de ces courants, qui peut être de plusieurs ampères. Si on décharge une bouteille de Leyde au moyen d'un excitateur formé d’un gros fil de cuivre roulé en hélice, cette hélice est parcourue par des ondes électriques alternatives d'une fré- quence extrême. Il faut pour cela que le fil de l'hélice soit gros (3 à 4 mil- limètres de diamètre) et ne fasse que quelques tours, huit ou dix environ. Les spires de l'hélice réagissent l’une sur l’autre au moment de la décharge, et on obtient, à cause de la fréquence, des phénomènes d’auto- induction très énergiques. On donne ainsi naissance, dans l’hélice, à de véritables extra-courants ayant une grande intensité. Si on réunit, en effet, les deux bouts de l’hélice par,un conducteur métallique, on constate, au moment de la décharge, une forte étincelle. Si l’on intercale une lampe à incandescence sur celte dérivation, elle est portée au blanc éblouissant. Pour obtenir cet éclat avec un courant continu, il faudrait dépenser environ deux ampères avec celle que j'emploie. SÉANCE DU 4 FÉVRIER 193 Ca Le courant dérivé est donc très intense, et a une grande force électro- motrice, puisqu'il peut franchir une distance de 5 à 15 millimètres à l’air libre sous forme d’étincelle. Malgré cela, si on fait passer ce courant à travers le corps humain, on ne sent absolument rien. Il n’a d’action ni sur la sensibilité ni sur la contractilité. Pourtant, il traverse le corps, comme je m'en assure en le faisant passer à travers le corps de deux personnes qui tiennent entre elles la lampe à incandescence ci-dessus. La lampe s’allume au blanc éblouissant entre ces deux personnes et con- somme,lpar conséquent, ses deux ampères, quine peuvent lui arriver qu'à travers les bras des deux patiente, qui ne ressentent absolument rien. La bouteille de Leyde est chargée périodiquement par une forte bobine de Ruhmkorff, comme dans mes expériences précédentes. On gradue l’inten- sité de cet extra-courant d’une manière rigoureusement continue en prenant une longueur variable de l'hélice qui est faite d'un gros fil nu dont les spires sont espacées de quelques millimètres. Le courant ainsi produit joint des propriétés analgésiques remarquables, bien qu'il ne soit pas senti. Ses effets sont plus marqués que ceux du courant de haute tension obtenu au moyen de la bobine à deux fils noyée dans l'huile. Le dispositif est aussi beaucoup plus simple, et il est facile de l’em- ployer en électrothérapie, comme je suis en train de le faire. Si on fait passer ces courants, sous forme d’étincelle, à la surface de la peau, ils ne produisent pas de douleur, mais on sent instantanément une chaleur intense sur la partie touchée. Elle se vascularise beaucoup, avec produc- tion de sueur et d'une analgésie qui dure souvent plus d'une demi-heure. Ce procédé d'’électrisation est certainement appelé à rendre les plus grands services à la thérapeutique électrique, comme j'aurai prochaine- ment l’occasion d'en fournir la preuve. II. — Mais ce n’est pas tout : cette hélice, qui est le siège d’une force électromotrice oscillante, à périodes extrêmement rapides (plus d'un million d'oscillations par seconde), peut servir à communiquer les mêmes oscillations au courant continu provenant d’une pile. Il suffit de faire passer le courant provenant de la pile à travers l’hélice pour que cette dernière lui communique des oscillations isochrones. Le courant de la pile devient lui-même oscillant, et on peut intercaler un conducteur quel- conqne (un être vivant par exemple) dans ce circuit. Ce conducteur sera traversé par un courant oscillant dont l'intensité peut alors devenir aussi grande qu'on pourra le désirer, puisque la résistance de l’hélice où se produisent les oscillations électriques est absolument négligeable. Je reviendrai ultérieurement sur les conséquences pratiques de ce dispositif, que je veux simplement signaler aujourd’hui. IIT. — Gette hélice, qui est le siège d'oscillations électriques si rapides, peut encore être employée d’une autre manière. J'ai renfermé dans son intérieur, mais sans aucune communication avec elle, des êlres ou des tissus vivants. Ces corps sont soumis alors à une induction extrêmement 124 SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE énergique, qui modifie leurs courants propres. J'ai pu constater ainsi des modifications profondes dans l’excitabilité des nerfs et des muscles isolés et des changements non moins intéressants dans les principales fonctions des animaux qu'on soumet en entier à cette induction. IV. — J'ai alors construit un solénoïde beaucoup plus grand, danslequel j'ai enfermé des animaux. J'ai fait traverser ce solénoïde par des courants alternatifs puissants, mais à faible fréquence (140 par seconde) prove- nant d’un alternateur Siemens industriel. J'ai pu ainsi observer toute une série de phénomènes du plus haut intérêt, phénomènes dont la cause réside dans les puissants courants que le solénoïde induit alors dans les tissus vivants se comportant comme des conducteurs fermés sur eux-mêmes. Il y a là toute une technique nouvelle pour employer les courants sinusoïdaux, dont j'ai introduit l'usage en électrothérapie, sans les faire passer à travers le corps du malade et sans risquer de produire chez lui soit de la douleur, soit des secousses dangereuses. : NOTE SUR UN CAS D'INFECTION LENTE PAR LE PNEUMOCOQUE (Endocardite végétante, pleurésie, péricardite el péritonite), par MM. LESAGE et PINEAU. Nous avons l’honneur de présenter à la Société de Biologie, l’histoire d'une malade, que nous avons pu observer dans le service de notre maître, M. le professeur Jaccoud. Il s’agit d’une infection par le pneumocoque, maladie qui, dans le cas particulier, présente des points intéressants, au point de vue clinique et bactériologique, sur lesquels M. le professeur Jaccoud a récemment insisté dans une de ses cliniques. La durée fut de trois mois. Le début s'établit lentement et insidieuse- ment, par l’apparition d’un état cachectique progressif, accompagné, de temps à autre, de points de côté et d’accès de toux. Peu à peu la cachexie augmente, devient très marquée, accompagnée de faiblesse et d’amai- grissement notables, et la malade est obligée de quitter son travail, par suite de l'apparition d’une douleur épigastrique intense. A l'entrée à l'hôpital, le symptôme capital, qui frappe immédiatement est cet état cachectique qui est des plus notables (amaigrissement, pâleur et teinte jaunâtre de la peau, faiblesse extrême, anorexie complète, légère suffusion œdémateuse). La première idée, qui vient à l'esprit, est qu’il s'agit d'un cancer viscéral. En effet, il n’existe aucune fièvre, plutôt même de l’hypothermie (36°,5). On cherche la localisation de ce cancer, SÉANCE DU À FÉVRIER 195 et on pense à la placer dans la région épigastrique, pour la raison sui- vante : douleur à ce niveau. Cependant, ces douleurs sont tellement vives et tellement exaspérées par la moindre pression, que la prise du péritoine paraît certaine. La dyspnée très marquée, présentant les allures de la dyspnée de la pleurésie diaphragmatique, vient confirmer cette idée. L'absence totale de fièvre semble cependant contraire à cette opinion. Le cœur est examiné, et le diagnostic de lésions polyvalvulaires est porté : rétrécissement aortique, insuffisance mitrale et insuffisance tri- cuspide, asystolie. La malade présente de plus, depuis quelques jours, une diarrhée notable, vert foncé, qui, au premier abord, éveille l’idée de:méléna. Cependant, aucun signe d'hémorragie n'existe; de plus, l’étude de cette diarrhée permet de reconnaître la présence du B. coli et du B. pyocya- nique. La teinte verte des selles est due à la pyocyanine, que nous avons pu extraire en très grande quantité. L'apparition d’une diarrhée, durant une cachexie intense, à type de cancer, n’a rien qui puisse nous étonner. Sur ces entrefaites,la malade meurt, etnous trouvons les lésions suivantes: 1° Sur la valvule aortique, des végétalions volumineuses, irrégulières, occupant tout le pourtour de l’orifice, et produisant un rétrécissement aortique. De même, la valvule mitrale présente, en plusieurs points de sa cir- conférence, quelques végétations, qui donnent naissance à de l'insuffi- sance mitrale. De plus, on remarque sur cette dernière valvule, des cicatrices indélébiles d’endocardite chronique ancienne. Nous ne trouvons aucune ulcération sur ces végétations : d’ailleurs, l'absence d’embolie vient corroborer cet examen. Donc, il existe dans le cœur, des lésions indéniables d’endocardite infectieuse, portant sur l’orifice aortique et l’orifice mitral. On note de plus, l'existence d’une insuffisance tricuspide concomitante de l’asystolie terminale. 2° Dans les plèvres, le péricarde et le péritoine, on constate la présence d’un épanchement séro-fibrineux, avec quelques fausses membranes sur le péricarde. La quantité est de un litre dans chacune des plèvres, 100 grammes dans le péricarde et près de 2 litres dans le péritoine. Outre cet épanchemernt, on note de la rougeur et un état inflamma- toire notable sur les paroïs de chacune de ces séreuses. 3° On ne constate aucune autre lésion, dans les divers viscères exa- minés avec le plus grand soin, sauf un petit noyau apoplectique dans le poumon droit. Telles sont les lésions constatées à l’examen macroscopique. Nous avons recherché, par les moyens classiques, la cause de cette endocardite infectieuse et de cette inflammation des trois séreuses. 1926 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En coupe des végélations endocarditiques, on observe une infiltration du tissu embryonnaire par une telle abondance de pneumocoques, que la préparation traitée par la méthode de Weigert, présente des points colorés visibles à l’œil nu. La coupe de la fausse membrane du péricarde vient démontrer de même l'existence du pneumocoque, mais en petite quantité. La culture des végétations et des liquides séreux, démontre l'existence du pneumocoque. : D'autre part, l’expérimentation montre, que ce microbe est peu actif, par suite, probablement, de la longue durée de la maladie qui l’a atténué. En effet, ce pneumocoque tue bien les animaux, mais à dose énorme et avec lenteur ; de plus, repris de ces animaux, il ne récupère pas la forte virulence du pneumocoque actif. Outre ce microbe, nous trouvons le B. coli qui a envahi tout l’or- ganisme, comme il arrive dans tout cadavre; mais l'étude de ce B. coli montre que ce microbe n’est pas le saprophyte normal. En effet, au point de vue des cultures et de l’expérimentation, il présente les divers carac- tères du B. coli virulent (culture peu épaisse sur les divers milieux, réac- tion lente sur la lactose, etc.) ; de plus, septicémie rapide des animaux soumis à l’inoculation. Nous croyons que la diarrhée terminale peut être mise sur le compte de la prise de virulence du B. coli. Pourquoi, maintenant, ce mierobe a-t-il pris de la virulence ? Nous l'ignorons. Peut-être du fait de la cachexie pneumococcique. Et, ce qui semble venir à l’appui de cette opinion est qu'outre la prise de virulence du B. coli, nous avons noté de plus l'infec- tion de l'intestin par le bacille pyocyanique. Ce dernier a produit de la pyocyanine, qui a donné la coloration verte des se.les et s’est infiltrée dans le liquide sérofibrineux du péritoine, ainsi que le montre la réac- tion chimique. Conclusions. — Cette observation vient à l’appui de la description, qu'a tracée M. le professeur Jaccoud, de la forme lente et cachectique de l’endo- cardite infectieuse, qui, dans ce cas, évolue lentement, pendant des mois, sans fièvre, sous le masque d’une cachexie progressive, coexistant avec des signes d'affection valvulaire. On comprend facilement la difficulté de ce diagnostic, L'étude expérimentale du microbe producteur, le pneumocoque, montre que le long séjour dans l'organisme, a modifié et atténué sa virulence. De plus, cette observation montre l’extension du pneumocoque aux diverses séreuses avoisinant l’endocarde. Peut-être la plèvre a-t-elle été le point de départ de cette infection endocarditique. La modalité du début de la maladie tendrait à le faire admettre. SÉANCE DU # FÉVRIER 197 EE — ———— _——— Ï e LA NUTRITION DANS L'HYSTÉRIE, par MM. Gicces DE LA TOURETTE et CATHELINEAU. Depuis 1888, époque où nous avons commencé la publication de nos recherches sur la #utrition dans l'hystérie, la formule chimique de l’attaque que nous avons découverte a reçu de constantes confirmations. En France, nous signalerons l'opinion de Grasset (1) ; de Pitres (2); de Chantemesse (3); de M. Joulin (4), qui a répété toutes nos expériences dans le service de M. Joffroy à la Salpêtrière; de M. Ballet (5); de MM. Frémont et Villejean (6); de M. Bosc (7), et enfin de MM. Carrier et Tuja (8) qui, tout récemment encore, se servaient de celte formule chi- mique pour établir le diagnostic différentiel, souvent difficile, de la pseudo- méningite hystérique. En Italie, Rummo (9) aretrouvé les mêmes caractères, et R. Vizioli (10), se basant sur nos recherches, s’est aidé de l’abaissement de l’urée et des autres caractères de la formule pour préciser nosographiquement la fièvre hystérique. Signalons, en Allemagne, les recherches de Lowenfeld (11), et particu- lièrement celles de M. Hitzig (12), qui confia ses analyses au professeur von Mehring. Non seulement, celles-ci furent confirmatives des nôtres, mais l'inspection seule des courbes des excreta dans un état de mal léthargique (1) Grasset. Arch. de Neurologie, t. XX, 1890, p. 205 et suiv. (2) Pitres. Lecons cliniques sur l’hystérie et l'hypnotisme, t. I, p. 232, 1891 et confirmation orale. (3) Chantemesse. Soc. méd. des hôpitaux, 28 mai 1891. (4) Joulin. Commun. orale. (5) Ballet. Attaque d’hystérie à forme d'’épilepsie partielle, Gaz. des hôp., 1891, n° 32, p. 158. (6) Frémont. Comm. orale. (7) Bosc. Société de Biologie, 7 maï, 23 juillet 1892. (8) Carrier et Tuja. Soc. nat. de méd. de Lyon, 21 novembre 1892; —- Lyon médical, p. 478. (9) Rummo. Riforma medica, 1889, p. 1397. (10) Vizioli. Ipertermia ed ipotermica in uno caso d'isterisme con annotazine sulla nutrizione delle isteriche, Ann. di Nevrologia n. s., anno IX, fase. v, vi, ASOHPAP AS 00 (41) Lowenfeld, Ueber hysterische Schlafzustande, Archiv für. Psychiatrie, Bd XXII, XXHIT, 1892. (12) Hitzig. Schlaffattacken und hypnotische Suggestion. Berliner klinische Wochenschrift, n° 38, 19 septembre 1892. (Commun. au deuxième Congrès intern. de Psych. Londres, 30 août 1892.) 198 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE “ permit, comme nous l’avions démontré, de prévoir la fin de l'état de mal et de prédire le retour à l’état normal. | Tout au plus, MM. J. Voisin (1) et Féré (2) essayèrent-ils d'enlever à l’inversion de la formule des phosphates. le caractère si spécial qu ‘elle présente joint aux autres dans l'attaque d'hystérie; la thèse de Voulgres (3), et le communiqué de nouvelles recherches de notre part (4) réponäirent victorieusement, croyons-nous. Dans ces conditions et puisque, en quatre ans, il ne s'était produit que. des faits confirmatifs des nôtres, pouvons-nous légitimement espérer que les résultats que nous avions énoncés devaient être définitivement acquis à la science; mais il paraît qu’il ne doit pas en être ainsi. C'est au moins ce qu'en a décidé M. Royer (5). Son opinion est briève- ment exprimée; nos recherches et celles de M. Bose semblent, seules, avoir attiré son attention, au moins n’en signale-t-il pas d’autres et se borne- t-il, pour les combattre, à un total de douze analyses, pour cinq sujets qu'il qualifie d’'hystériques, et cela lui suffit pour donner à notre formule du « soi-disant » et conclure à son rejet pur et simple. A noter cenendant que chez deux malades sur cinq, l’urée est abaissée le jour de l'attaque; que sur les phosphates, tout en niant l’inversion de la formule, il est « moins en désaccord avec MM. Gilles de la Tourelte et Cathelineau et Bose ». Tout est singulier, du reste, au point de vue de l’hystérie, chez les malades de M. Royer; tel (n° 2), qui avait une chute de l’urée, a, quel- ques jours plus tard, une augmentation le jour de l'attaque; même se trouve absent ce caractère vieux comme la pathologie, tiré de la déco- loration de l'urine et de sa faible densité. Six analyses des urines de la période d’altaque, comparées à celles du lendemain du paroxysme qui pouvait empiéter sur cette deuxième période, suffisent à M. Royer pour s'inscrire en faux contre les résultats obtenus par les auteurs précédem- ment énumérés et contre nos expériences qui ont porté sur plus de cent malades et ont été variées autant que le comportait le sujet. Mais enfin, M. Royer pourrait avoir raison contre nous, et rien ne dit qu'ilne l'ait pas, si nous nous plaçons à un point de vue aussi juste que particulier que M. Royer n’a pas envisagé. (1) J. Voisin. C. R. hebd. Soc. Biologie, 23 avril 1892, p. 330. (2) G. Féré. C. R. hebd. Soc. Biologie, p. 260, 1892. (3) Voulgres. L’élimination des phosphates dans les maladies du système nerveux et de l’inversion de leur formule dans l'hystérie. Thèse de Lyon, 1892, p. 43. (#) Gilles de la Tourette et Cathelineau. Soc. Biologie, 9 août 1892, et Progrès médical, n° 17, 23 avril 1892, p. 316. (5) Royer. Note sur la soi-disant formule urinaire dans l'hystérie. C. R. en hebd. Soc. Biologie, 7 janv. 1893, p. 2. LOT PORT | SÉANCE DU À FÉVRIER 129 Pour contrôler nos recherches sur la formule chimique de l’hystérie, M. Royer s’est rendu dans un service de Bicètre, celui de M. Féré, qui ne recoit, en fait d'hystériques, que les aliénés qui lui sont envoyés par le bureau d'admission de l’asile Saint-Anne. L’aliénation et l'hystérie peu- vent s'associer, nous le savons parfaitement; mais M. Royer n'’exigera pas de nous que nous lui fournissions l'indication bibliographique des auteurs qui se sont occupés des troubles de la nutrition dans laliéna- tion mentale. Quand on veut contrôler des recherches, il faut se placer sur le même terrain que l'observateur que l’on vise, et il n’est pas dou- teux, dans la circonstance, que la coexistence de l’aliénation n'ait radi- calement vicié les résultats de M. Royer au point de vue de l'hystérie. Que cet auteur se mette dans des conditions analogues aux nôtres, et nous ne doutons pas qu'il arrive à des résultats purement confirmatifs de ceux que nous avons obtenus, et bien d’autres après nous. Il pourra ensuite tirer tels résultats qu'il jugera réels au point de vue de la nutrition dans les associations morbides en pathologie nerveuse. EFFETS PHYSIOLOGIQUES DU CHLORALOSE. Note de MM. Hanrior et Cn. Ricuer (1). En poursuivant l'étude physiologique du chloralose, nous avons cherché à préciser les effets produits par l'injection péritonéale ou intraveineuse de celte substance. Nos expériences ont porté sur les chiens, les oiseaux (principalement des pigeons), et les chats. Voici les chiffres (rapportés toujours à 4 kilogramme d'animal) : DOSE grammes 0.005 Rien d'appréciable. .006 — .009 — .011 Quelques effets douteux (canard). .014 Effets hypnotiques nets (canard). .015 — .017 — .018 — - .019 — (canard). See ee ee © (4) Voir Mém. Soc. Biol., 1893, p. 1-16, et Bull, Soc. Biol., 1893, p. 109-143. 130 DOSE grammes 0.030 0.032 0,036 0.036 0.038 0.042 0.049 0.053 0.062 0.06% 0.090 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Sommeil profond. Survie (canard). — (canard). Ces expériences, très concordantes, nous autorisent à donner les con- clusions suivantes pour les oiseaux : Dose active minimum . . 5 Dose hypnotique minimum, . . . . . Dose mortelle LI e L e e e LL e 0.010 cn. Doll TER ° e e e e e e e e e e e 0.050 Ces chiffres ne sont pas différents de ce que donne l'ingestion stoma- cale. En effet, si l’on donne aux oiseaux du chloralose mélangé aux ali- ments, on retrouve à peu près la même dose toxique. DOSE grammes .215 .190 .146 .145 .080 2 See © ee Eee [æ) +? > Se SN D Ot ©: OS Mort Survie Mort Survie Mort Survie Effets faibles (canard). (poule). (canard). (canard). La moindre régularité des phénomènes s'explique par la variation dans la rapidité de l'absorption digestive; mais, malgré cette diversité, il y a, chez les oiseaux, une absorption rapide, de sorte que, chez eux, l'ingestion stomacale et l'injection veineuse sont à peu près équivalentes. SÉANCE DU # FÉVRIER 131 EEE Chez les chiens, il n’en est pas de même, et la dose élevée nécessaire pour amener la mort tient peut-être à une absorption stomacale plus lente. Mais cependant, quel que soit le procédé de pénétration du poison, le chien est beaucoup moins sensible que le chat ou le pigeon. Voici les expériences d'injection intraveineuse faites sur le chien : DOSE nes 0.018 Rien d'appréciable. 0.018 Effets assez faibles. 25 — Ù 1 ©: 5 Presque nuls effets. Effets hypnotiques et anesthésiques. Survie. Où ot > © OZ © » - r © © © =} | 5 bee =: Mort. ET NS Se fe) CÙ © Il s'ensuit que, sur le chien, la dose active minimum est voisine de 0 gr. 020, et la dose mortelle voisine de Ogr.13 (par injection intraveineuse), tandis que, par ingestion stomacale, la dose toxique est de 0 gr. 60 environ. Pour les physiologistes, il est intéressant de connaître exactement la dose anesthésique, celle à laquelle peuvent se faire, sans mouvements de défense de l'animal, et, par conséquent, sans qu’il y ait de la douleur, des opérations et des vivisections. Cette dose nous a paru être de 0 gr. 06 environ, par injection intraveineuse ; et le modus agendi le meilleur nous a paru le suivant: On prend 10 grammes de chloralose qu'on dissout à chaud dans de l’eau distillée et on introduit la solution filtrée dans un ballon. Cette solution, en se refroidissant, laisse déposer des cristaux ; mais ces cristaux ne se forment qu’à la longue; et, pendant quelques heures, on peut l'injecter telle qu’elle est dans les veines du chien en expérience. La même solution peut servir le lendemain, si l’on a pris soin de boucher le ballon pour que le titre ne change pas. Des cristaux se sont formés, mais ils se redissolvent sans peine, si l’on porte le ballon au bain-marie, et le titre est évidemment alors resté le même. Dans ces conditions, pour un chien de 10 kilogrammes, une injection de 60 centimètres cubes de la solution amènera l’anesthésie, et on peut faire cette injection sans précaution; car, quelque vite qu’on la fasse, il ne semble pas qu’on ait à craindre de syncope cardiaque ou respiratoire. Du moins, nous n’avons jamais rien vu de semblable. 132 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On peut alors faire sur ce chien ainsi anesthésié des opérations diverses. L’anesthésie est complète, et les réflexes sont cependant conservés. Enfin, en cherchant la dose active minimum chez le chat (par ingestion stomacale, ou par injection péritonéale), nous constatons une sensibilité extraordinaire du chat aux très faibles doses. DOSE grammes 0.0125 Effets très marqués. 0.0120 — 0.0058 Quelques effets assez marqués. 0.0045 — difficilement appréciables. On peut donc dire que le chat est sensible à la dose de 0,005 par kilo- gramme, dose à laquelle ni les pigeons, ni les chiens ne semblent ressen- tir le moindre effet. Y a-t-il accumulation des effets du médicament, ou accoutumance? Nous ne saurions le dire encore. Nous devons cependant mentionner quelques expériences qui prouvent en tout cas l’innocuité (chez les ani- maux) des doses répétés de chloralose. A. — Une chienne bull, de 11 kil. 2, prend, Le 10 janvier, 5 grammes de chloralose. Même dose le 11 janvier. Mème dose le 12 janvier. Soit, en trois jours, 15 grammes de chloralose, ce qui fait, par kilogramme, la dose énorme de 1 gr. 34. Le 13 janvier, elle est tout à fait remise, et nous la donnons à un de nos amis qui la prend comme animal de garde. B. — Un chien bull, jeune, de 8 kilogrammes, prend, le 23 janvier, 2 grammes de chloralose, et, tous les jours, sans exception, il reprend la même dose jusqu’à aujourd’hui 4 février; soit, en douze jours, 24 grammes de chloralose, ce qui fait, par kilogramme, 3 grammes de chloralose. Il ne semble pas malade. C. — Un coq, de 1,980 grammes, prend, le 23 janvier, 0 gr. 10, etil recoit la même dose tous les jours (sauf les 29, 30 et 31 janvier) jusqu'au # février. Il ne semble pas être malade. Ainsi, de ces trois expériences, on peut conclure que les effets du chlora- lose ne s'accumulent pas chez l'animal. En définitive, nous croyons que la dose active minimum est, même chez l'animal le plus susceptible, voisine de 0,005, ou, si l'on veut, 0,004 par kilogramme. Cela peut donner quelques indications sur la dose thérapeu- tique. 0,004 par kilogramme, cela signifie, pour un adulte de 50 kilo- grammes, 0 gr. 20, et pour un enfant, une dose cinq fois plus faible, c'est-à-dire 0,04. Même il sera sans doute prudent de ne pas atteindre ce SÉANCE DU # FÉVRIER 133 chiffre — au moins au début — chez les enfants, et nous n’oserions pas conseiller de donner à des enfants plus de 0 gr. 02. Il faudra aussi faire grande attention à l'emploi de ce médicament chez les hystériques. La sensibilité des hystériques aux médicaments est con- nue, et, ainsi que quelques faits recueillis de divers côtés semblent nous le faire admettre, elles paraissent être exceptionnellement sensibles au chioralose [comme d’ailleurs à la morphine). Ce n’est donc que par de petites doses qu'il faut procéder dans le traitement de l’insomnie chez les grandes hystériques, par exemple 0,10 ou même 0,05; et il est important que nos confrères qui voudraient employer le chloralose, soient prévenus de l’activité extrême de ce médicament dans l'hystérie. C’est d’ailleurs le fait des médicaments psychiques; ils sont essentielle- ment 2ndividuels, et ont besoin d’être maniés avec prudence. Mais l’activité même de ce nouveau médicament constitue une précieuse ressource thé- rapeutique; car il agit sur l'élément cérébral psychique, en. laissant absolument intactes les fonctions cardiaques, vasculaires, stomacales et médullaires. Le tout est de déterminer, selon les indications ei les indi- vidus, les doses auxquelles il est efficace et inoffensif (1). LA PEPTONURIE DANS LA SCARLATINE, par M. le D' ARSLAN ERVANT. (Polyclinique des maladies des Enfants de la Faculté de Paris, dirigée par M. le professeur Grancher.) La peptonurie dans la scarlatine, a été très peu étudiée. Obermüller (2; pour la première fois, s’est occupé de cette question. Après lui, Heller (3) a étudié la peptonurie en même temps que l’albuminurie chez les scarla- : tineux. Dernièrement, Loeb et Binet (4). et d’autres encore, s’adonnèrent également au même sujet d'étude. Mais aucun d'eux n'’arriva à une véri- table conclusion. D’après les expériences que nous avons faites nous-même dans la Poly- clinique du professeur Grancher, à l’époque (juillet-août 1892) où nous était confié provisoirement le service des scarlatineux, nous pouvons dire que la peptonurie est un symptôme de la plus haute importance et qu’on ne doit jamais négliger de la rechercher. (1) Nous avons cherché à savoir si le chloralose était antiseptique. Même à forte dose (10 grammes par litre), son action antiseptique est nulle, cariln’en- trave pas la fermentation lactique du lait. (2) Obermüller. Thèse de Würzburg, 1873. (3) Heller. Propeptonurie nach scarlach., Bzrlin. klin. Woch., 1879, 48. (4) Binet, Rev. méd. de la Suisse romande, sept. 1890; — Deutsch. med. Zeit., 1891, 53, p. 614. 134 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Tous les médecins savent aujourd'hui que cette fièvre éruptive, à marche régulière, ne présente aucune gravité, mais d'innombrables com- plications assombrissent son pronostic. Avec Baginsky, nous pouvons répéter qu'il n’y a pas un organe qui échappe aux complications de la scarlatine. | Jusqu'à présent on a cherché dans les modifications du pouls, de la température, du degré de l'éruption, de la diffusion des adénites, de l’état général, enfin de l’albuminurie, pour établir a priori un pronostic de la maladie, ou l'existence d’une complication latente. À mon avis, ces signes n’ont qu'une valeur assez restreinte, et cela pour deux raisons simples : 1° parce que chacun d’eux peut faire défaut avec une forme grave de scarlatine, et 2° parce que chacun peut exister sans qu'il y ait aucune gravité ni des complications. Cette manière de voir est démontrée par la pratique de tous les jours. Relativement à l’albuminurie, avec Tomasi-Crudeli, Konnenberg, Fede, Reklinghausen, Fischer, nous la considérons comme un symptôme d’une lésion organique des reins, causée très probablement par l'infection secondaire (Bouchard). Nous croyons avoir trouvé dans la peptonurie un signe précieux pour établir, avec beaucoup de probabilité, dès le début de la scarlatine, un pro- nostic plus ou moins favorable. - Étant donné la difficulté dans laquelle le médecin des enfants se trouve à tout instant, quand il s’agit d'établir le pronostic de la scarlatine, on comprendra aisément que les expériences que nous venons de faire, et les conclusions auxquelles nous sommes arrivés, sont d'un intérêt qui n’est pas à mépriser, bien qu’elles demandent cependant à être confirmées. La méthode que nous avons employée pour déceler les peptones dans les urines est la suivante : Avant tout, un élimine l’albumine, si elle existe, avec la chaleur ou avec le ferrocyanure de potassium et l'acide acétique. On filtre, on s'assure pour la dernière fois de l’élimination complète de l’albumine. Alors on prend à peu près 5 centimètres cubes de ces urines et on ajoute une dizaine de gouttes d’acide acétique et autant du réaclif suivant : Bichlorure dhyArATE re Ce ne lodure deSpDOlassEUT A NRC SCENE EC Eautdistilléer M au Si nn GET Ve en Dans le cas de peptonurie, on a un précipité blanc qui est plus ou moins accentué, selon la quantité de peptones contenus dans les urines analysées. Il faut noter qu'on peut avoir la même réaction si le malade a pris des alcaloïdes. Dans ce cas, en ajoutant de l'alcool absolu, le précipité doit disparaître, s’il est dû aux alcoloïdes ; si le précipité ne disparaît pas, ce sont les peptones. Cette méthode nous a toujours donné d'excellents résultats. Nous l'avons comparée, par une série d'expériences, aux autres méthodes SÉANCE DU # FÉVRIER 135 jusqu'à présent connues (Hofmeister (1), Schulter (2), Fonret, Hankin et Wesbrook) (3), et nous avons vu qu’elle est assez sensible pour entrer en comparaison avec ces méthodes. Elle est même supérieure à quelques- unes d’entre elles. Avec des solutions artificielles de peptones nous avons essayé à nousrendre compte de son degré de sensibilité. En effet, avec une dilution à 4 p. 50,000, nous avons eu une réaction très manifeste. Ces expériences furent répétées aussi par M. Rénault, interne de la Polycli- nique, qui eut les mêmes résultats. Sur vingt et un malades, atteints de scarlatine, nous avons analysé les urines méthodiquement chaque jour, et, dans quelques cas, même deux fois (matin et soir) pendant toute la durée de leur maladie. En mème temps, nous avons tenu rigoureusement compte de tous les autres symptômes. Onze de ces malades, chez lesquels la scarlatine a évolué régulièrement sans aucune complication, nous n’avons jamais trouvé aucune trace de peptone dans les urines. Voici le résultat des dix autres cas : Deux scarlatineux avec angine grave pseudo-diphtéritique moururent. Ils présentaient, dès le premier jour de leur entrée dans le pavillon des scarlatineux, une abondante peptonurie sans aucune trace d’albumine. À l'examen bactériologique des fausses membranes, avant, et du sang de divers organes, après la mort, on trouva les streptocoques en grande quan- Libé? Un petit malade, qui, dans la période de desquamation, attrapa la rou- geole, présentait la peptonurie deux jours avant l’éclosion de cette nou- velle maladie. À ce moment, aucun autre symptôme n’était manifeste. Deux autres malades, auxquels on avait supprimé le régime lacté, peut-être avant que les conditions ne le permissent, présentèrent, dès le lendemain, la peptonurie. En cffet, après un ou deux jours, des troubles gastro-intestinaux survinrent, qui disparurent immédiatement à la reprise du régime lacté. Dans deux autres cas encore, la peptonurie précéda l'apparition de l’'albumine. Les trois autres petits malades avec diverses complications (angine pseudo-diphtéritique à forme bénigne, épistaxis et érythème infectieux) ont présenté constamment la réaction des peptones dans les urines. On doit noter que, chez quelques-uns de ces malades, nous avons observé de l'albuminurie très fugace, disparaissant de malin à soir ou (4) Hofmeister. Zeit. für physiol. Chimi, #, 253, 1880; — Prager med, Vochenschrift, 5, 321, 1880. (2) Schulter, Maly’s Jahresbericht, 5, 321, 1887. (3) Hankin et Wesbrook. Annales de l'Institut Pusteur, n° 9, t. VI, 25 sept. 1892. 136 SOCIETÉ DE BIOLOGIE même dans quelques heures. Dans ces cas n'existait pas la peptonurie. Dans les deux cas, compliqués par l’angine pseudo-diphtéritique qui emporta nos deux malades, et dans les deux autres cas qu'on avait sou- mis à la diète ordinaire avant que les malades soient complètement guéris, en même temps que la peptonurie nous avons remarqué une forte réaction d'indigo. L'indicanurie chez les enfants n’est pas un fait nouveau; déjà Hochsinger (1), Kahane (2), Steffen (3), et dernièrement Voute (4) ont observé. D'après ce rapide aperçu de nos observations, nous croyons pouvoir en tirer les conclusions suivantes : 1° Dans la scarlatine bénigne et à marche régulière, la peptonurie n'existe pas. 2° Dans la scarlatine avec complications, la peptonurie existe, et, fré- quemment même, elle précède ces dernières. 3° La présence de quantité notable de peptones dans l’urine des scar- latineux est un signe pronostique défavorable, ou, au moins, dénote l’exis- tence d’une grave complication. 4° La peptonurie n’a aucun rapport avec l’albuminurie, ni le pouls, ni la température. 5° Dans les cas de complication grave ou dans ceux avec troubles gas- tro-intestinaux, à la peptonurie s’associe l'indicanurie. Au point de vue de la pathogénie de la peptonurie dans la scarlatine, nous ne pouvons qu’avancer des hypothèses. On est obligé d’exclure l’origine pyogène (Hofmeister, Maixner (5), Jaksch (6). On ne peut pas même songer à une peptonurie hématcgène (Jaksch), ni à celle que Maixner a appelée entérogène. La théorie admise par Lussana et nous-même (7), c'est-à-dire, d'une peptonurie hystogène, ne trouve pas ici sa place et n'arrive pas à expliquer nos expériences. Nous pouvons exclure également l’origine hépatique (Bouchard) (8). Selon nous, l'unique hypothèse à laquelle on peut recourir est celle de Mya et Belfanti(9). Ces auteurs, après certaines expériences, ont affirmé une nouvelle source de peptonurie, que nous appelons parasitaire. Ils ont (4) Hochsinger. Verhandlungen der achten Versammlung der gesellschaft für Kinderheilkunde, in Bremem, 1890. Ueber Indicanurie im Saüglingsalter. (2) Kahane. Ueber das Vcrhalten des Indicans bei der Tuberculose Kind. Bei- träge für Kinder., herausgeseben v. prof. Kassovitz, neue Folge IL. Q ) Steffen. ft äge zu Indican. bei Kindern, aus den Kinder-Spital zu Stettin. (4) Voute. Revue des mal. de l’enfance, février 1893, t. XI. (5) Maixner, Prager Vierleljahreschrift, 144, 75, 1879. (6) Jaksch. Zeitsch. für klin. Med., 6, 413, 1883. ° (1) Lussana e Arslan. La peptonuria nella inanizione acuta, Rivista Veneta scenze mecl., 1890. Bouchard. Riforma medica, 1441, 1886. Mya e Belfañti. Centralblatt für klin. Med., 7, 728, 1888. CI E SÉANCE DU À FÉVRIER 4971 prouvé que les micro-organismes peuvent transformer les corps alburni- noïdes en peptone, et ainsi déterminer la peptonurie. Getle théorie est parfaitement applicable dans notre cas, si on considère que les complica- tions de la searlatine sont dues à l'infection secondaire. Au reste, nous retournerons sur ce point, quand nous sera donnée l’occasion de faire cette publication avec tous ses détails. DISPOSITION DES MUSCLES DANS L'IRIS DES OISEAUX, par M. G. Duran», Ex-interne des hôpitaux. L'existence du muscle dilataleur de l'iris est contestée chez les mammi- fères. Sur les conseils de mon maître, M. le professeur M. Duval, j'ai entrepris d'examiner cette question. La grande difficullé de eette étude consiste à distinguer les fibres cellules des fibres de Remak, des fibres de la limitante postérieure, etc. Aussi, me suis-je proposé d'acquérir, aupa- ravant, des notions exactes sur la disposition et la siluation des fibres radiées chez les oiseaux. En effet, leur nature striée rend ces recherches moins délicates. Outre les coupes radiées, j'ai fait parallèlement aux deux faces, suivant la méthode déjà employée par M. Retterer (1), des coupes d'iris inclus dans le collodion et dureis dans l’alcool, entre deux morceaux de moelle de sureau aussi plans que possible. L'iris des oiseaux a été bien étudié (2), et, depuis Külliker, tous les auteurs sont d'accord sur les points suivants : existence d’un sphincter occupant toute la superficie de l'iris, existence d'un plan de fibres radiées en arrière de ce sphincter et échange de fibres entre les deux plans. Voiei certains points moins connus, que mes études m'ont permis de préciser : ce sont les anastomoses entre les fibres musculaires et l'existence, chez cerlains oiseaux, de deux plans de fibres radiées. (1) Société de Biologie, 1888. (2) Maunoir. Mémoire sur l'org. de Viris, Paris, 1812. — Treviranus. Beitr. z. An. u. Phys. der Sinn°sio., Bremen, 1828. — Krohn. Müller’s Archiv, 1837. p. 357. — Müller, Gesamm. Schrift., p. 182. — Wittich. Archiv f. Ophtalm., 1856. — Kolhker. Mikrosk. Anat., W, p.643. / — Huttenbrenner. Wiener Sitzungsber., Bd 57, 1868. ! — Dogiel. Archiv f. mikrosk. Anat., 1870, 1885. — Grünhagen. Archiv f. mikrosk. Anat., 1873. _— Koganei. Archiv f. mikr. Anal, 1885. ? —- Faber. Der Bau der Iris, ete., Leipzig, 1876, p. 69. Ve — Angelueci. Archiv f. mikr. Anat., 1881. A US — Michel. Archiv f. Ophtalm., 1877. SR ST — Cantield. Thèse de Berlin, 1856, et Arch/v f. mikr. An., 1886. 138 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE L'iris des oiseaux, comme celui des mammifères, comprend deux plans : un plan antérieur, où mésodermique, qui forme le corps propre- ment dit de Liris, et un plan postérieur ou épithélial. Le corps irien (mésoderme) est conslitué par du tissu conjonctif contenant une muscu- laturé très développée à fibres circulaires en avant (sphincter) et radiées en arrière. Les fibres circulaires, formant le sphincter, occupent un plan moyen dans le corps de l'iris 4 s'étendent sur toute la largeur du bord ciliaire au bord pupillaire. Ces fibres, un peu plus volumineuses près du bord ciliaire, ne forment pas de faisceaux, mais présentent entre elles de nombreuses anastomoses. Très peu d'auteurs en font mention. Koganei(!) ne fait que les signaler, et Dogiel (2) décrit et figure les arcades que forment les extrémités des fibres dilatatrices en s’anastomosant près du bord pupillaire. D'après mes observations, les fibres du sphincter s’anastomosent beau- coup plus fréquemment que les radiées. La même fibre musculaire, dans un court trajet, peut émettre successivement deux ou lrois ramifications latérales, en diminuant elle-même proportionnellement de volume; ou bien elle se bifurque à son extrémité en deux ou plusieurs branches, ce mode de division est surtout fréquent sur les grosses fibres radiées; plus rarement, les deux branches d’une bifurcation vont se rejoindre un peu plus loin, en circonscrivant un espace elliptique, qui présente lui-même des striations comme si la substance musculaire avait été amincie entre les deux branches de la bifurcation. Les fibres du sphincter ne s’anasto- mosent pas seulement entre elles, mais encore avec les fibres radiées, de telle sorte qu'on peut voir une fine fibre radiée se continuer à angle droit avec une grosse fibre circulaire. En somme, ces unions multiples entre les fibres musculaires de l'iris, rappellent, comme l’a déjà dit M. Retterer, à propos du sphincter irien chez les mammifères, la disposition des faisceaux striés du cœur. Le mode de disposition des fibres sphinctériennes présente quelques va- riantes suivant les Lypes. T'antôt ces fibres restent serrées et bien circulaires jusqu’au bord ciliaire (poule, dindon, pigeon); ou bien elles sont plus écartées, séparées par du tissu conjonctif (faisan, oie); ou bien encore, serrées dans la zone pupillaire, elles deviennent clairsemées et obliques en approchant du bord ciliaire (canard). Chez presque tous les oiseaux, on ne trouve que des fibres circulaires au niveau du bord pupillaire. Cette description du sphincter est, du reste, celle que tous les auteurs s'accordent à admetlre, et mes observations ne font que confirmer cette disposition. Pour le dilatateur, au contraire, cerlaines particularités sont restées inaperçues de la plupart des observateurs. La description que j'en ai (1) Koganei. Archiv f. mikr. Anal. 1885. (2) Dogiel. Archiv f. mikr, Anat., 1870. SÉANCE DU 4 FÉVRIER 139 trouvé chez presque tous, est celle-ci : sur un plan postérieur au sphineter, se trouve un plan de fibres radiées ou plus ou moins obliques, qui se recourbent en avant à des hauteurs différentes dans la couche sphincté- rienne. Cependant Dogiel (1) signale chez quelques oiseaux, non plus un dilatateur, mais deux : l’un, postérieur, constitué de fibres plus parallèles, qui oscupe toute la superficie de l'iris ; l’autre, antérieur, tirant son ori- gine du sphincter à diverses hauteurs et se portant d'avant en arrière à travers toute l'épaisseur de l'iris pour prendre ensuite la direction radiée. Grünhagen (2) décrit aussi la même disposition. Mais depuis eux, parmi les auteurs qui se sont occupés de l'iris des oiseaux, Canfield (3), seul, parle de cette particularité en citant l'opinion de Dogiel, mais déclare ne pas se prononcer sur son existence. Mes recherches me permettent d’être plus affirmatif. J'ai rencontré cette disposition chez certains oiseaux (poule, dindon, canard). Que les fibres radiées provenant du sphincter soient considérées comme dila- tatrices ou non, c'est une question de physiologie qu'il ne m’appartient pas de trancher. Le fait positif, c'est qu'il existe réellement chez ces oiseaux deux plans de fibres radiées en arrière du sphincter. Ils présen- tent les caractères suivants : le plan antérieur en rapport avec le sphinc- ter s’insère sur le tissu conjonctif du corps ciliaire par des fibres isolées et des faisceaux. Elles se dirigent vers le bord pupillaire suivant une direction d’abord radiée, puis se recourbent à des hauteurs différentes en formant une couche de fibres entre-croisées en arrière du sphincter, et finalement se terminent en prenant la direction de ce dernier : une petite portion de ces fibres provient des fibres du sphincter situées tout près du bord ciliaire et qui se recourbent pour prendre !a direction radiée. Sui- vant que toutes Les fibres de ce plan se recourbent plus ou moins haut dans le sphincter, le plan qu'elles forment occupe une plus ou moins grande superficie de l'iris. Ainsi, chez la poule, ce plan n'occupe que le voisinage du bord ciliaire; chez le dindon, au contraire, il va presque jusqu’au bord pupillaire. Les fibres qui constituent ce premier plan rayonné (antérieur) n’ont pas un diamètre moindre que celles du sphincter. Il n’en est pas de même des fibres musculaires du second plan (postérieur), dont nous allons main- tenant nous occuper. Ses fibres sont bien plus fines que toutes celles, circulaires ou rayonnées, dont nous avons parlé. Voici, par exemple, quelques chiffres qui feront bien voir cette différence : chez la poule, elles ont 3 4,5 contre 8 x pour celles du sphincter; chez le dindon, 5 x,7 contre 16 x pour celles du sphincter; chez le canard, 4 x contre 5 u,, 6 pour celles du sphincter; chez l’oie, 4 w contre 10 w pour celles du (1) Dogiel. Loc. cit. (2) Grünhagen, Loc. cit. (3) Canfield. Archiv f. mikr. Anat., 1886. 140 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sphincter. Ces'fines fibres musculaires forment un plan radié qui est situé à la partie la plus postérieure du corps irien. Elles s’étendent du bord ciliaire au bord pupillaire, recouvrant toute la surface de l'iris, au lieu que le plan antérieur n'en recouvre parfois qu'une partie (poule’, ainsi que nous l’avons dit. Ces fibres sont bien plus parallèles entre eiles, et ont une direction beaucoup plus perpendiculaire au sphincter que celles du plan antérieur, qui s’entre-croisent obliquement entre elles et avec celles du sphincter. Enfin, les fibres du plan postérieur se recourbent rarement en avant pour se mêler au sphincter (poule), tandis que celles du plan antérieur se recourbent à toutes les hauteurs. À Tous ces caractères distinetifs entre les deux plans se retrouvent, comme nous l'avons dit, chez certains oiseaux. Il s’en faut qu'ils soient aussi bien marqués chez tous. La division en deux plans peut ne pas exister. L'iris présente alors un seul plan rayonné, formé de fibres grosses et petites, entremèêlées. Ce sont tantôt les unes, tantôt les autres qui domi- nent. Le faisan, par exemple, a un plan de grosses fibres obliques très développé; chez le pigeon, les fibres rayonnées sont tellement clairsemées que Michel n’a pu les trouver. Elles existent cependant (1), mais réduites à de très rares fibres obliques, et seulement au voisinage du bord ciliaire. En résumé, il existe dans l'iris des oiseaux : 1° un sphineter très déve- loppé qui s'étend du bord ciliaire au bord pupillaire ; 2 en arrière de lui, existent, chez quelques oiseaux, deux plans radiés : l’un, antérieur, de grosses fibres radiées puis obliques, qui se jettent plus où moins haut dans le sphincter; l’autre, postérieur, de fines fibres nettement radiées et recouvrant toute la superficie postérieure de l'iris. Chez d’autres oiseaux, on ne peut distinguer qu’un seul plan radié, formé de fibres grosses et petites, entremêlées. A PROPOS DU PARADOXE DE WEBER, par M. HENRY DE VARIGNY. Dans un récent numéro des Archives de Physiologie (le n° 1 de 1893), un physiologiste de Nantes, M. A. Rouxeau, publie un mémoire concernant le paradoxe de Weber. Déjà fort discuté par Volkmann, Wundt, Marey en particulier, ce phénomène physiologique ne semble point encore interprété de façon absolument salisfaisante. On admet généralement que, dans certaines conditions de travail statique, c’est-à-dire de soutien de poids, le muscle, sous l'influence de l'excitation directe ou indirecte, peut à tel point perdre son élasticité qu’il s’allonge au lieu de se contrac- (1) Koganeï. Lor, cit. (2) Canfield.'Loe. cit. SÉANCE DU 4 FÉVRIER 141 ter; son élasticité diminuant considérablement au moment où se fait l'excitation. Cette explication peut n'être pas pleinement exacte, et les critiques qu’elle a soulevées sont sans doute justifiées; mais il ne nous paraît pas qu'il faille pour cela repousser l’existence même du paradoxe, comme le veut M. A. Rouxeau. Ce physiologiste a pu, en somme, observer des phénomènes qui ressemblent à ceux que l’on décrit sous le nom de paradoxe de Weber, chez les écrevisses et les crabes auxquels, à l'exemple de M. Ch. Richet, il s’est adressé pour cette étude. Seulement, tout en admettant l'exactitude apparente des faits recueillis par M. Ch. Richet et par lui-même, il les interprète d’une facon très différente. Si, dans cer- tains cas, on observe le paradoxe de Weber, dit-il, cela est le résultat d’une modification dans les condilions de l'expérience : au lieu de conti- nuer à exciter le muscle constricteur de la pince de l’animal (les expé- riences dont il s’agit ont toutes porté sur la pince), c’est le dilatateur que lon excite, ou du moins, l'excitation du dilatateur prime celle du cons- tricteur. À dire vrai, on ne voit guère pourquoi, sauf dans le cas où la situation des électrodes serait modifiée, l'excitation du dilatateur rem- placerait celle du constricteur, et si les deux muscles étaient excités ensemble, l'influence du constricteur, beaucoup plus volumineux et puissant, demeurerait prépondérante. Quoi qu’il en soil, avec ce raison- nement,il était naturel que M. Rouxeau voulût éliminer l’action du dijata- teur, ce qu’il fit en en sectionnant les tendons. Cette opération n’a toutefois pas empêché le paradoxe de se représenter, «moins souvent peut-être, et avec une physionomie un peu spéciale... mais enfin il s’est reproduit ». Le dilatateur étant ainsi hors de cause, M. Rouxeau a cru devoir expliquer les faits par l’action d’un « cône de tissu mollasse » qui rem- plit l'intérieur de la branche fixe de la pince, qui est formé de fibres musculaires lisses, lesquelles fibres, en se contractant, soulèvent l’inser- tion du constricteur, et amènent l'ouverture de la pince, par un méca- nisme qui n’est point très clair d'ailleurs en l’absence de figures. Si ce cône est détruit, le paradoxe de Weber cesse de se produire, et la conclusion de M. Rouxeau est qu’en réalité, dans les expériences faites sur les pinces des crustacés, ce qu’on prend pour le paradoxe de Weber est dû à l'excitation de muscles autres que celui sur lequel on croit agir. Les faits annoncés par mon collègue et ami M. Ch. Richet, à l'égard du paradoxe de Weber sur les crustacés, — et ce sont les faits que discute M. Rouxeau, — je les ai également constatés et enregistrés. J'en ai parlé dans mes #echerches expérimentales sur la contraction musculaire chez les invertébrés (1886) où j'en ai donné trois graphiques. Il n’y a pas lieu d'’in- voquer certains d’entre eux contre l'interprétation de M. Rouxeau, puis- qu'ils sont passibles des mêmes objections que les faits de M. Ch. Richet : aussi ne dirai-je rien des expériences sur la pince des Pagures. Toutefois il me sera permis de rappeler d’autres faits du même ordre, et auxquels la critique de M. Rouxeau n’est point applicable. Par exemple, on observe 142 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE fort bien le paradoxe de Weber en employant le muscle caudal du Pagu- rus callidus. Ce musele, qui n’est pas recouvert d’une carapace, l'extrémité postérieure de l’animal étant toujours Jlogée dans une coquille ou une éponge, se prête aisément à des expériences myographiques qui seraient plus difficiles chez l'écrevisse ou le homard, et j'ai nettement constaté, à plusieurs reprises, l’une ou l’autre des formes du paradoxe de Weber. Ce muscle se compose de deux parties : les fibres de flexion, les plus nom- breuses et les plus puissantes de beaucoup, et les fibres d'extension, et, à la vérité, je ne vois pas qu'il y ait à se préoccuper du fait que ce musele renferme des fibres antagonistes. N’est-il pas évident que les unes et les autres produiront, par leur contraction, un raccourcissement, lequel se traduira toujours de même manière, les mouvements enregistrés étant ceux du muscle abdominal én toto ? Dès lors, on ne voit point comment l'excitation des deux ordres de fibres pourrait déterminer des effets inverses. Pourtant la chose se pourrait discuter, et sans insister autre- ment sur cet exemple, je préfère invoquer les cas de paradoxe de Weber que j'ai observés chez l’£ledone moschata et le Stichopus regalis. En dé- coupant dans le manteau de l’Zledone une bande musculaire, on obtient un muscle artificiel, très vigoureux et agile, chez qui j'ai souvent observé une des formes du paradoxe, celle qui consiste en l'allongement du muscle après les excitations tétanisantes. Mais mieux vaut encore s’adres- . ser au Sfichopus regalis. Cette belle Holothurie possède de magnifiques muscles dont la délimitation est aussi parfaite que pour n'importe quel muscle de vertébré, et qu’on détache très aisément du corps. Les fibres y sont toutes de même sens et de même fonction; il n’y a donc pas d'ob- jections à baser sur des considérations anatomiques. Ici, comme dans le cas précédent, j'ai observé le paradoxe de Weber sous la même forme que précédemment. Je dois dire en effet que la décontraction par exci- tation ne s’est présentée à moi qu'une seule fois : mais il convient d'ajouter que je n’ai point fait de recherches spéciales pour observer le paradoxe de Weber et me suis contenté de noter les phénomènes qui se sont offerts d'eux-mêmes. NOTE SUR L'APPAREIL PHOTOGÈNE D'UN CÉPHALOPODE Histioteuthis Ruppellii (Verany), par M. le D' L. Jousiw, Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Rennes. Ayant eu l'occasion de me procurer un Céphalopode excessivement rare, Histioteuthis Ruppellü Verany, vivant à de grandes profondeurs, j'ai cher- ché à me rendre compte des causes de la brillante phosphorescence signalée chez cet animal par le savantitalien. Seul, à ma connaissance du moins, Verany a observé et décrit ce mollusque vivant, et il insiste dans SÉANCE DU 4 FÉVRIER 143 sa description, un peu lyrique peut-être (et surtout dans celle d’une es- pèce voisine), sur les lueurs de säphir et de topaze qu'émet l'animal. Les points de la peau, qui sur l’animal vivant sont lumineux, se retrou- vent avec la plus grande facilité lorsqu'il est conservé dans l'alcool. Ils consistent en taches bleuâtres, ovales, ayant environ 7 millimètres de long sur 6 de large; on les aperçoit surtout sur le corps, la tête, et la face externe des bras. Les tentacules, les nageoires, la face interne des bras, et la membrane ombellifère qui relie les bras entre eux, en sont dépourvus. Les chromatophores s'arrêtent au bord de ces taches, mais passent en grand nombre derrière elles. Ces organes bleuâtres constituent une sorte de miroir légèrement con- cave, mais ne sont que la portion accessoire de l'organe lumineux. L’or- gane essentiel producteur de lumière, consiste en un petit corps noir, placé en arrière et en bas du miroir, et ayant environ 2 millimèlres de long. 11 a la forme d’un ellipsoïde court, dont un des pôles, transpa- rent, est enchâssé dans le miroir, tandis que tout le reste de l’organe est enveloppé d’un vernis noir, épais, absolument imperméable à la lumière. Le grand axe de cet ellipsoïde est fortement oblique, par rapport à la surface du miroir, et son point d'attache se trouve sensiblement au foyer inférieur de l’ellipse représentée par ce miroir légèrement concave. L'épiderme cutané, transparent, passe sans s’interrompre devant ces deux organes (Voyez figure, Ep., p. 144). Ce miroir est formé d’une grande quantité de lamelles transparentes superposées, et est tapissé en arrière de chromatophores noirs formant écran. On sait que les lamelles superposées à plat polarisent la lumière et constituent un miroir; c’est à cause de cette structure que j'ai attribué cette fonction à cet organe. Le schéma ci-après, représentant une coupe longitudinale des deux organes, montre bien leurs rapports. Examinons maintenant la structure de l'appareil photogène. Elle se compose de deux parties, l’une active, productrice de lumière, l’autre passive chargée de la projeter au dehors. A sa superficie, on trouve : 4° une couche noire parfaitement opaque, interrompue seulement sur la calotte antérieure; c’est quelque chose de comparable à une sclérotique pourvue de sa cornée transparente en avant (C). 2° En dedans de la couche noire, un réflecteur, sur la nature duquel nous allons revenir (R). 3° En dedans de celle-ci, une épaisse couche pathogène à structure complexe (F). _ 4° Enfin des milieux transparents, peu différents de structure entre eux, mais qui cependant, grâce aux diverses colorations que leur donnent les réactifs, peuvent être décomposés en un cône (A), une lentille biconvexe (L) et au-dessus une lentille concave-convexe (T). 144 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Rien de particulier à signaler sur la couche noire formée d'innombra- bles grains de pigment agglomérés. Le réflecteur, épais, est très curieux. Il est constitué par un nombre énorme de cellules excessivement régulières, toutes biconvexes, et formées de lamelles concentriques enchâssées les unes dans les autres, autour d’un EXPLICATION DE LA FIGURE Schéma d'une coupe longitudinale de l'appareil phos- phorescent passant par le grand axe du miroir et de l'organe photogène. Tous les conteurs ont été dessinés à la chambre claire; les rapports des parties sont exacts, les élé- ments cellulaires sont schématisés. M. Partie supérieure du miroir concave externe. Mi. Partie inférieure du même. Cr. Chromatophores derrière le miroir, constituant un écran noir. C. Écran pigmentaire noir de l'appareil photogène. R. Réflecteur formé d'un très grand nombre de petits cristallins. N. Nerfs traversant la couche réflectrice sans sy arrêter. F. Couche photogène. A. Cône transparent. L. Lentille biconvexe. T. Lentille concavo-convexe. Ep. Épiderme recouvrant l’ensemble de l'organe. noyau central. Chacune d'elles ressemble à deux séries de verres de montre, de plus en plus petits, emboîtées, et appliquées l’une contre l’autre, ce sont de petits cristallins. Ces cellules, très petites vers la périphérie, deviennent progressivement plus grandes vers le centre de l'appareil, mais sans changer de structure. Elles sont toujours orientées de façon à ce que leur plan axial soit parallèle à la surface noire. J'appelle cette couche transparente le réflecteur, parce que, en se. basant, comme tout à l'heure pour le miroir, sur les phénomènes de réflexion produits par de nombreuses lamelles superposées et transpa- rentes, il est certain que cette couche, doublée d’un écran noir, réfléchit les rayons lumineux tombant vers sa surface. En considérant la figure ci-dessus, et les photographies faites sur les coupes, on voit que le réflec- teur est parabolique. - Il est à remarquer qu'aucun nerf n'arrive dans ce réflecteur, mais il est traversé de part en part par de gros troncs nerveux qui vont direc- tement à la couche photogène plus interne. Cette couche, que j'ai qualifiée de photogène, est beaucoup plus com- - SÉANCE DU #4 FÉVRIER 145 plexe et les éléments qui la composent sont très difficiles à dissocier. On y trouve trois sortes de cellules : a). Des éléments conjonctifs de soutien, enchevêtrés, pourvus de noyaux; b). Des cellules nerveuses ganglionnaires, bipolaires, nombreuses, situées principalement vers la périphérie; c). Enfin des cellules ovuïdes, grosses, se colorant bien par les réactifs, auxquelles m'ont paru aboutir les filaments nerveux, et auxquelles je crois devoir attribuer la production de la lumière. Cette opinion est très vraisemblable, si l’on considère que, une fois la phosphorescence établie par la constalation de Verany, on arrive, par l'exclusion successive de tous les autres éléments qui évidemment ne sont pas actifs, à ne plus se trouver en présence que de ces grosses cellules, En outre, cette couche photogène est située précisément dans la région que doit occuper la source lumineuse dans un tel système optique pour qu'il puisse fonctionner. L'ensemble de ses éléments converge en effet autour du foyer du miroir parabolique. Le reste de l'appareil se compose de milieux transparents, dépourvus de terminaisons nerveuses, formés de longues cellules hyalines dirigées selon l’axe principal. Au premier abord, tous ces lissus semblent homo- gènes; mais on peut y distinguer trois régions. Un cône central,très transparent, à longues cellules, peu colorables par les réactifs (A). Une région en forme de lentille biconvexe (L), rendue assez nette parce que le picrocarmin la colore plus en jaune que les autres couches; elle est plus serrée de texture et probablement plus dense que le cône. Enfin, la lentille superficielle (T) renferme une forte proportion de tissu conjonetif, les cellules y sont plus petites, Les noyaux sur les coupes paraissent plus nombreux et plus colorables que dans la lentille biconvexe. Dans cette lentille superficielle les cellules de la moitié inférieure con- tinuent la direction générale, parallèle à l’axe des éléments transparents; mais, dans la moitié supérieure elles sont très obliques vers le haut. Or, cette moilié est recouverte extérieurement par le pied du miroir externe, dont les fibres lamelleuses élémentaires continuent précisément la direc- tion oblique des cellules de la lentille, et sont intimement en relation avec elles. Il me semble dès lors probable que, dans ces conditions, la lumière émise par l'appareil est projetée en partie directement en dehors et cons- titue le point brillant observé par Verany sur l’animal vivant, et pour l’autre partie, suivant l’obliquilé des fibres, pénètre dans les lamelles du miroir, s’y réfracte, et est aussi projetée à son tour au dehors, formant la roue lumineuse surmontant le point brillant. Enfin, des rayons obliques émis par le projecteur peuvent directement venir frapper le miroir et s'y réfléchir. Telle est la structure de cet appareil, dont Verany a constaté la lumi- nosité fort vive sur l'animal vivant. Il ne peut être interprêté, d'après ces données anatomiques, que de deux façons : ou bien c’est un œil, ou bien 143 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE c’est un organe phologène. Ce ne peut être un œil puisque l’animal en a déjà deux aussi gros, et presque aussi bien constitués que l’œil humain ; en outre, ces organes lumineux sont le plus nombreux précisément autour des yeux qu'ils entourent d’une couronne complète. On ïes compren- drait à la rigueur à une grande distance des yeux, mais non contre eux. La constitution absolument particulière de ces organes, et surtout des deux réflecteurs, qui, à ma connaissance du moins, ne se trouvent dans aucun œil décrit jusqu'ici, l'absence de cellules rétiniennes pigmen- tées toujours présentes dans les yeux des mollusques, la situation de la couche à cellules nerveuses, très différente de ce qu’elle serait dans un œil véritable, font que cet organe ne peut fonctionner comme récepteur d'images. C'est un appareil chargé d'éclairer les lieux obscurs que le Céphalopode parcourt normalement, ou d'attirer vers lui les animaux du voisinage dont il fait sa proie. Un mémoire plus étendu, avec figures, complétera prochainement cette note. SUR DES LÉSIONS PARTICULIÈRES DE LA MORVE PULMONAIRE CHEZ LE CHEVAL, par MM. LECLAINCUE et MONTANÉ, Professeurs à l'Ecole vétérinaire de Toulouse. La néoformation tuberculeuse, dont nous avons indiqué précédemment l’évolution, ne constitue pas la seule forme de lésions pulmonaires qui peuvent être observées dans la morve chronique du cheval. D’autres types sont aussi rencontrés, qui doivent leurs caractères particuliers, soit à leur siège anatomique, soit à leur mode de développement. I. — Dans la morve chronique, les travées interlobulaires situées au voisinage des tubercules se montrent infiltrées, par de très nombreux leucocvtes et elles prennent ainsi, en certains points, un aspect réliculé. En quelques endroits aussi, les cellules migratrices se trouvent accumu- lées en un petit ilot, régulièrement arrondi, situé dans le tissu conjonctüf dissocié. Les éléments cellulaires, fortement colorés, sont emprisonnés dans un fin réticulum : l'ensemble représente exactement un follicule clos. Ces foyers de leucocytes peuvent enfin se trouver agglomérés et consti- tuer, par leur réunion, une forme particulièrement intéressante. À un faible grossissement, on distingue sous la plèvre une masse arrondie, constituée par la réunion de dix à quinze ilots bourrés de leucocytes et séparés par des cloisons de tissu conjonctil nucléaire. L'aspect rappelle en son ensemble celui d’un ganglion lymphatique. La lésion est déve- loppée sur le trajet d’une travée interlobulaire, à peu de distance de la soudure avec la plèvre; on voit netlement la travée se diviser en deux SÉANCE DU 4 FÉVRIER 447 faisceaux qui s'écartent pour embrasser la néoformation. L'un, refoulé vers la plèvre, se confond avec elie; l’autre sépare le foyer du tissu pul- monaire périphérique. Ce dernier est resté sain; les alvéoles les plus voisins, comprimés et aplatis, se présentent sous la forme de fentes étroites et irrégulières. À un plus fort grossissement la plèvre et la parte de la travée qui lui est accolée se montrent infiltrées de leucocytes. Les cloisons séparant les ilots sont formées par un tissu grossièrement réticulé, renfermant de très nombreux vaisseaux dont quelques-uns présentent la forme embryon- naire. Les ilots ou follicules sont constitués par une accumulation de leucocytes, pourvus d’un noyau unique volumineux et par un fin réti- culum granuleux. Les îlots occupant le centre de la lésion renferment des éléments qui ont subi un certain degré de dégénérescence vitreuse ou cireuse. Tous ces caractères caractérisent histologiquement le lymphadénome, et cependant la nature spécifique des allérations est évidente. La lésion est ébauchée déjà dans les cloisons conjonclives qui, dila- cérées par les leucocytes infiltrés, prennent l'aspect réticulé: elle se pré- cise davantage par l'accumulation des leucocytes en foyer dans le tissu dilacéré; enfin, une dernière phase est marquée par la confluence des follicules. Dans la travée envahie, comme aussi dans les cloisons inter- folliculaires, on rencontre d’ailleurs les bacilles morveux en abondance, et si la coloration intense des leucocytes rend leur constatation difficile au centre des ilots, on les trouve au moins à la périphérie, dans le voisi- nage des cloisons. Les pseudo-tubercules ainsi développés ont un aspect assez particulier. Ils se présentent, à la surface du poumon, sous la forme d’une tache régulièrement arrondie, nettement délimitée, d'une teinte légèrement jaunâtre et lranslucide, ou d’une couleur rosée et opaque; sa surface est légèrement convexe ; le parenchyme voisin n’est nullement altéré. Sur la coupe, on trouve un tissu de consistance charnue, très finement granu- leuse, parfaitement homogène-dans toute sa masse, au moins pendant les premières périodes de l’évolution. Ces formes paraissent exister dans de nombreux cas de morve du che- val, mais l'on n’en rencontre jamais qu’un très petit nombre, chez le même sujet. Chez un premier cheval, qui avait fortement réagi à la mal- léine, nous n'avons trouvé que deux foyers de celte nature, en l'absence de toute autre lésion du poumon ou des muqueuses. Un deuxième cas nous a été fourni par l'examen d'un fragment de poumon recueilli sur un cheval également abattu après l'épreuve de la malléine. Une troisième observalion a été relevée dans un poumon présentant de très nombreux tubercules morveux de différents âges; un seul nodule offrait les carac- tères indiqués, et ceux-ei élaient assez nets pour que la forme histolo- gique de la lésion ait pu être immédiatement prévue. 148 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE [T. — On rencontre encore un type très différent d’altération, constitué par un foyer diffus de pneumonie alvéolaire étendue à la plus grande partie d'un lobule sous-pleural. La lésion se développe dans l’angle formé par la plèvre et une travée interlobulaire; parfois, dans les parties sous- pleurales adjacentes de deux lobules. La plèvre et la travée sont épaissies et infiltrées de leucocytes qui pénètrent également dans les parois alvéo- laires. Les alvéoles sont remplis par un exsudat fibrineux et par une accu- mulation intense de leucocytes en voie de dégénérescence. La partie du lobule envahi dessine ainsi une grappe arrondie, limitée par une zone étroite de pneumonie catarrhale. Dans tout le reste du globule, et prinei- palement dans le voisinage du foyer, les vaisseaux sont gorgés de sang et il existe des hémorragies disséminées dans les alvéoles. Ces lésions reproduisent exactement ce que l’on observe dans la morve aigué; elles n'en diffèrent que par leur étroite localisation. Dans toute l'étendue du foyer, on rencontre de très nombreux bacilles; ceux-ci sont surtout abondants dans le contenu alvéolaire. On les trouve encore disséminés dans toute la zone hémorragique. Ces lésions ont élé relevées chez un animal qui ne présentait aucun symptôme d'affection aiguë. Il existait ne vingtaine de foyers peu étendus, disséminés dans les deux poumons. Chacun d'eux était indiqué sur la plèvre par une tache jaunâtre, à contours irréguliers, de 3 à 4 mil- limètres de diamètre, entourée par une zone de congestion très marquée. La coupe montre une surface blanchâtre, uniforme et granuleuse, à con- tours irréguliers, limitée par un tissu congestionné. Le foyer dessine un cône à base sous-pleurale dont l'aspect rappelle l’infarctus de l'infection purulente. En résumé : 1° a.) Les lésions de la morve peuvent affecter, dans le poumon du cheval, une forme histologique simulant le lÿmphadénome ; b.) Gette forme est due au développement de foyers lymphoïdes agminés dans les travées interlobulaires. 2° a.) Une altération exceptionnelle est constituée par l’évolution d’un noyau de pneumonie alvéolaire entouré d’une zone hémorragique. b.) Gette forme, qui appartient cliniquement à la morve chronique, est constituée analomiquement par un foyer très limité de morve aiguë. Le Gérant : G. MAsson. Paris. — linprimerie de la Cour d'appel. L. Marerneux, directeur, 1, rue Cassette. SÉANCE DU | L'FÉVRIER 1893 M. G. MariINesco : Sur la micro-photographie du système nerveux. — M. Cn. FÉRÉ : A propos de la soi-disant formule urinaire de l'hystérie. — M. Emile SERGENT : Note sur un cas d’exophtalmie à volonté. — M. Rarnarz Dugois : Sur l'influence du système nerveux central sur le mécanisme de la calorification chez les hiber- nants, — M. RapaEz Dugois : Recherches de pathologie comparée sur la peste des écrevisses. — M. RapnaEL Dugpois : Extinction de la luminosité du Photobacterium sarcophilum par la lumière. — M. Neuuanx : Pseudo-parasitisme du Lælaps slabu- laris sur une femme. — M. N. GréHawr : Application du grisoumèêtre à la recherche médico-légale de l'oxyde de carbone. — M. le Dr GusrAve Prorrowski : Nouvelle méthode pour démontrer le point de départ d’excitation, ainsi que les phéno- mènes électrotoniques dans l'emploi des courants d’induction. — M. Vaouez : Phlébite traumatique de la jambe droite, œdème réflexe de la jambe gauche. — MM. Vaouez et Bureau : Pouls lent permanent. Considérations cliniques et phy- siologiques. à Présidence de M. Dareste. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE COMPARÉE DE LA PHOLADE DACTYLE; séfructure, locomotion, tact, olfaction, qustation, vision dermatoptique, photogénie, par M. Raruaez Dugois (brochure de 167 pages, 68 figures dans le : texte et 45 planches hors texle, chez Masson, Paris, 1892). L'ouvrage que j'ai l'honneur d'offrir à la bibliothèque de la Société forme le deuxième fascicule du second volume des Annales de l’Univer- sité de Lyon. Dans la préface, je me suis attaché à faire ressortir tout le parti que le physiologiste pouvait tirer des animaux inférieurs, en général, et de la Pholade dactyle, en particulier. Grâce à la méthode graphique, cette huître peut écrire, pour ainsi dire, ses propres sensalions avec une clarté et une précision qui ne laissent rien à désirer, ainsi qu'on pourra s’en convaincre par l'examen des nombreux graphiques contenus dans cet ouvrage. À ce propos, j'ai signalé la nécessité urgente de donner aux physiologistes, des moyens de travail sur le littoral maritime, où l’on ne rencontre actuellement que des laboratoires d'anatomie. Quelques pages d'introduction ont été consacrées à faire ressortir toute l'importance qu’il y aurait à introduire, dans les recherches et dans l’en- seignement de la physiologie, une division méthodique du travail indis- pensable au perfectionnement. La physiologie zoologique et la physiologie anthropologique, par exemple, devraient être enseignées séparément, à la condition, toutefois, de ne pas négliger la recherche dés rapports entre les B10LOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 6 150 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mécanismes employés par l'homme et par les animaux pour salisfaire les fonctions, par la physiologie comparée, et de poursuivre la découverte des grandes lois communes aux végétaux et aux animaux par la physiologie générale, cette science si française puisqu'elle a élé créée par Claude Bernard, et pourtant si délaissée chez nous depuis la mort de l'illustre physiologiste. J'ai protesté contre le danger ou tout au moins l’inutilité de certaines dénominations telles que « physique biologique », « chimie biologique », que l’on voudrait substituer au mot physiologie; cette science constitue une branche spéciale de la mécanique générale et ne peut être cultivée, abstraction faite de la connaissance approfondie de l’organisation des êtres vivants. La première partie de l'ouvrage est consacrée à l'étude anato- mique et histologique de la Pholade et principalement de son siphon : elle a été faite en vue des recherches dynamiques, le physiologiste ne pouvant séparer la connaissance de ce qui se meut de l'étude du mou- vement. Entre autres points importants, l'histologie a montré les rapports de continuité entre les éléments ou segments épithéliaux pigmentés du siphon, les fibres musculaires sous-jacentes et le système nerveux, dispo- sitions très analogues pour les parlies qui sont impressionnables par la lumière (fonelion dermatoptique) et celles qui produisent la lumière (fonction photogénique). L'étude morphologique montre, en outre, les analogies existant au point de vue statique entre la rétine de notre œil et la peau restée sensible à la lumière chez la Pholade dactyle. La deuxième partie, la moins importante, comprend la physiologie zoologique du siphon considéré comme organe du mouvement et du travail, de la respiration, de l'éli- minalion, de l’excrétion et de la reproduction. La troisième partie, de beaucoup la plus importante, renferme la physiologie comparée du siphon envisagé comme organe de la sensibilité générale et spéciale. La comparaison du mécanisme de l’olfaction, de la gustation et de la vision, chez la Pholade, avec celui qui appartient aux animaux plus élevés en organisation, nous a conduit à une théorie géné- rale de sensations pressentie dès l’antiquité par Aristote et formulée ainsi par son commentateur, saint Thomas d'Aquin : « £rgo non debet poni alter sensus præter taclum. » La découverte et l'étude approfondie de la fonction dermatoptique chez la Pholade, ainsi que la démonstration récente de la contractililé des cônes et des bâtonnets de la rétine, transforment complètement les théories admises jusqu'à ce jour sur le mécanisme de la vision, qui se trouve aujourd’hui ramené à un phénomène tactile. Notre nouvelle théorie rend inutiles les hypothèses sans fondement morphologique ni expérimental à l’aide desquelles, jusqu'à présent, on a essayé d'expliquer SÉANCE DU 11 FÉVRIER 151 la vision des couleurs et, par conséquent, les autres hypothèses qui en découlent. La quatrième partie est consacrée à la fonction photogénique chez la Pholade. On me pardonnera peut-être d’avoir tant insisté depuis plusieurs années sur la production de la lumière chez les êtres vivants, en con- sidérant que c’est un des plus beaux chapitres de la science des phé-. nomènes communs aux animaux et aux végétaux, c'est-à-dire de la physiologie générale. SUR LA MICRO-PHOTOGRAPHIE DU SYSTÈME NERVEUX, par M. G. MARINESCO. (Communication faite dans la séance du 28 janvier.) J'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie une série de photo- graphies qui reproduisent des préparations histologiques ayant trait à diverses altérations du système nerveux : tabes, maladie de Friedreich, poliomyélite, myopathie spinale du type Charcot-Marie, névrites, etc. : Je me suis servi du grand appareil de Zeiss, avec 'pour les faiblesg rossis- sements, l'objectif de Ross, et pour les forts, les objectifs apochromatiques de Zeiss. J'ai employé pour l'éclairage la lumière oxhydrique (de Ziecone) modifiée, selon le cas, par l’interposition de diverses solutions colorées. La durée de la pose a varié entre quelques secondes et plusieurs minutes. La micro-photographie appliquée à la bactériologie a déjà donné d'excellents résultats à R. Koch, Pfeiffer, Van Ermengem. En ce qui con- cerne le système nerveux, nous pouvons citer l'Atlas de MM. Paul Blocq et Loude. Il paraît certain que ce mode de reproduction est supérieur à tous les autres en ce dernier cas, en raison de la sincérité et de l’exac- titude qu’on en peut obtenir. Je suis heureux de saisir l’occasion de remercier ici M. le professeur Van Ermengem, qui non seulement a mis son laboratoire à ma disposition mais encore m'a aidé de ses conseils éclairés. À PROPOS DE LA SOI-DISANT FORMULE URINAIRE DE L'HYSTÉRIE, par M. Cu. FÉRÉ. D’après leur dernière note (4), MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau ne me paraissent pas avoir bien compris l’objet de la discussion qui s’est élevée à propos de leur soi-disant formule urinaire de l’hystérie. (1) La nutrition dans l’hystérie (C. R. Soc. Biol., 1893, p. 127). 152 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 2 po ue tu A tn ee QU EE SERRE Nous ne contestons pas que les éléments de cette formule puissent se trouver réunis chez les hystériques; ce que nous contestons, c'est qu’on ‘les trouve chez tous les hystériques dans les conditions indiquées et qu’on ne les trouve pas ailleurs. Si M. Royer (1), dans la note qu’ils incrimi- nent, n’a pas passé en revue tous les faits où on a trouvé ladite formule chez les hystériques, il n’avait pas à le faire puisqu'il avait pour but de réunir des faits où elle n’existe pas, et il n’avait pas du tout l’intengion de nier des faits positifs. Mais ces faits positifs ne prouvent rien contre nos faits négatifs. MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau pensent qu'ils ont répondu victorieusement à nos objections relatives à l'inversion de la formule des phosphates, et que la thèse de M. Voulgres est en faveur de leur préten- tion; je leur ferai remarquer qu'ils n’ont rien répondu à ma réponse sur cette partie de la question (2), ils n'ont pas répondu davantage à M. Peyrot (3). Mais le point qui m'intéresse particulièrement dans la nouvelle note de MM. Cathelineau et Gilles de la Tourette, est le suivant : ils affirment que les analyses de M. Royer n’ont aucune valeur parce que les hystéri- ques qu'il a étudiées ne sont pas des hystériques ordinaires. Le même reproche aurait pu s'adresser aux analyses de mes autres élèves. Ils affir- ment avec assurance que mon service ne reçoit, en fait d'hystériques, que des aliénés qui lui sont envoyés par le bureau d'admission de l'asile Sainte-Anne, et que la coïncidence de l’aliénation vicie les résultats. MM. Cathelineau et Gilles de la Tourette devraient savoir que les hysté- riques et les épileptiques qui sont dans les asiles d’aliénés n'y sont pas nécessairement paree qu'ils y sont aliénés. Ils y sont parce que, quand on ne peut plus les garder dans des services hospitaliers ordinaires, on n’a pas d'autre place où les mettre, puisqu'il n'y a point en France d'asiles spéciaux pour les épileptiques et les hystériques. Mais les hystériques de mon service ne sont pas tous des aliénés, même au point de vue administratif; car j'ai soixante-douze lits qui n’ont rien à faire avec les aliénés et qui ne reçoivent leurs malades que des services de l'Assistance publique, parmi lesquels il y a des hystériques qui ont été à la Salpétrière; des vrais hystériques, je pense. Quand MM. Gilles de la Tourette et Cathelineau affirment que nous n'avons étudié que des hystériques aliénés, ils font de la généralisation arbitraire comme lorsqu'ils affirment que leur formule est constante chez (1) Note sur la soi-disant formule urinaire de l'hystérie (C. R. Soc. Biologie, 1893, p. 2). (2) Ch. Féré. Réponse aux objections de M. Gilles de la Tourette à la note sur l'inversion de la formule des phosphates éliminés par l'urine dans l’épi- lepsie (C. R. Soc. de Biol., 1892, p. 328). (3) F. Peyrot. Sur là formule urinaire dans l'hystérie (Ibid., p. 177). SÉANCE DU 11 FÉVRIER 153 eee sl les hystériques et leur est exclusive. En fait, les hystériques de mon ser- vice n’ont que les troubles mentaux qui font partie du caractère hysté- rique; quelques-uns même travaillent avec une grande régularité et en liberté dans l’hospice et n’ont pas de troubles mentaux du tout; par conséquent, s’ils n’ont pas la soi-disant formule urinaire, nous pouvons dire que cette formule n’exprime pas une loi. NOTE SUR UN CAS D’EXOPHTHALMIE A VOLONTÉ, par M. EMILE SERGENT, Interne des hôpitaux. Dans cette note, je n’indiquerai que les caractères essentiels du phé- nomène curieux que j'ai observé récemment dans le service de M. le D: Gingeot, à l'hôpital Saint-Antoine. Cette observation servira de base, en effet, à un Mémoire que je publierai prochainement. D....., âgé de quarante-quatre ans, a constaté pour la première fois, à l’âge de sept ans, d'une facon toute fortuite, la variété rare et curieuse d’exophthal- mie dont il est atteint. Cette exophthalmie n’est pas constante; elle n’apparaît que dans certaines conditions qui sont sous la dépendance de la volonté du sujet : c’est une exophthalmie à volonté. Elle se produit sous l'influence de la position déclive antérieure de la téte, de l'effort ou de la compression des jugulaires internes. Elle est réductible spontanément par la cessation de la cause qui l’a produite, ou plus rapidement par une légère pression pratiquée avec les doigts sur le globe oculaire. Elle ne s'accompagne d'aucune tumeur extérieure, ni variqueuse, ni autre. Elle est unilatérale (œil gauche). Elle est indolente, mais s'accompagne d’une sensation spéciale, bien connue de D...; il lui semble que « quelque chose remplit son orbite »; il sent son exophthalmie. En dehors de l’état d’exophthalmie, l'œil est profondément enfoncé dans l’or- bite. Cette excavation s’exagère dans le décubitus dorsal et peut être portée à son maximum |par une pression légère exercée avec les doigts sur le globe oculaire. Cette manœuvre permet de constater que l’œil jouit d’une mobilité anormale, qu'il fuit et se dérobe dans l'orbite avec la plus grande facilité. A l’élat normal, les mouvements de l'œil et de la paupière supérieure jouissent de leur complète intégrité; il en est de même de l’accommodation pupillaire. Sous l'influence de l’exophthalmie, les mouvements du globe sont un peu moins étendus et semblent mécaniquement gënés, mais ils subsistent dans 154 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tous les sens. Il ne se produit jamais de diploplie dans aucune direction. La paupière supérieure a tendance à tomber au-devant du globe saïllant; mais cette ptose peut être évitée si D... prend soin de maintenir la paupière éner- giquement relevée dès le début de l’exophthalmie. La pupille paraît se con- tracter d'une manière moins accusée à la lumière. Le panctum proximum à l’état normal est à 22 centimètres ; sous l'influence de l’exophthalmie, il s'éloigne et la vision s'améliore naine par l’ap- plication d’un verre convexe. L’acuité visuelle de l’œil gauche est de 8/2; celle de l’œil droit, de 5/5. . L’exophthalmie, à son maximum, rétrécit le champ visuel/de 10 à 15 degrés de côté temporal. L'examen ophthalmoscopique ne révèle aucune altération du fond de l'œil; il n’y a pas de varicosités veineuses, même pendant l’exophtalmie. (Je remercie M. le D' Parinaud de l'examen spécial qu’il a bien voulu pra- tiquer et qui lui a fourni ces derniers résultats.) Le globe oculaire n’est animé d'aucun battement, d'aucune pulsation; il n'y a pas de bruit de souffle. La compression des carotides est sans effet; elle ne fait pas cesser l’exophthalmie. De l’ensemble de ces caractères, deux conclusions découlent naturelle- ment : 1° La cause immédiate de l'exophthalmie est de nature veineuse. 2° Les moyens de fixité de l'œil sont relächés et le tissu cellulo-adipeux de l'orbite a disparu en totalité ou en partie. Quelle est la forme anatomique de cette cause veineuse ? L'examen direct (autopsie) faisant défaut, la réponse ne peut être absolue ; mais il est possible de la soupçonner par élimination : Ce n’est pas une tumeur, au sens propre du mot : un angiome veineux, seule tumeur à laquelle on pourrait songer ici, donnerait lieu à une exophthalmie constante, non pas provoquée de toutes pièces mais sim- plement exagérée par les entraves apportées à la circulation de retour. C’est une tendance à la dilatation passive des veines de l’orbite dans leur ensemble ou seulement d’un gros tronc et en particulier de l’ophthal- mique supérieure; celle-ci peut, en effet, à l’état normal, ainsi qu'il résulte des recherches de Festal (1), atteindre un calibre énorme par rapport au volume de l'œil. D'où il suit que deux hypothèses sont seules probables : Soit une sorte de varicocèle rétro-oculaire Soit une dilatation de la veine ophthalmique supérieure, formant une sorte d'anévrysme veineux passif. Mais, quelle est la cause première de cette dilatation veineuse ? Elle réside, selon toute probabilité, dans une prédisposition locale qui (1) Festal. Thèse, Paris, 1887. Recherches anatomiques sur les veines de l'orbite : leurs anastomoses avec les veines des régions voisines. SÉANCE DU 11 FÉVRIER 155 ferait de ce cas une anomalie congénitale bien plus qu’un fait pathologique. Dans les antécédents de D..., on ne retrouve rien, en effet (ni trauma- tisme, ni phlegmasie locale ou générale), qui puisse plaider en faveur d’une origine acquise. Quelle peut donc être cette anomalie ? Je me bornerai à signaler, sans les discuter ici, et sous toutes réserves, les hypothèses qui me paraissent vraisemblables. 4° Anomalie portant sur le squelette (étroitesse de la fente sphénoï- dale, par exemple, au point de passage de la veine ophthalmique). 2° Anomalie portant sur les parties molles (absence du tissu cellulo- adipeux de l'orbite et laxité de l’appareil ligamenteux). 3° Anomalie portant sur les veines (parois minces et peu résistantes). Selon l’hypothèse admise, la dilatation veineuse sera regardée comme primitive ou secondaire. Dans la première et la troisième hypothèse, c’est la dilatation progressive des veines qui provoque successivement la résorption du tissu cellulo-adipeux et le relâchement des ligaments ; dans la seconde hypothèse, c’est l'absence de ce tissu qui favorise la dilatation des veines. Si hypothétiques que soient ces vues sur la cause première de l’exophthalmie, il subsiste un fait certain : la nature veineuse du phéno- mène, prouvée par l'influence de toutes les conditions qui portent entrave à la circulation de retour et en particulier par la compression des jugqu- laires. J’insiste sur l'importance de cette compression, car elle permet de classer définitivement cette variété d'exophthalmie. En effet, jusqu'à ce jour, trois observations de même genre avaient été publiées : la première par Mackenzie en 1856, la seconde par Grüning en 4873, la troisième par Vieusse en 1878. Ces observations constituaient à elles seules l’un des deux groupes classiques des tumeurs variqueuses de l'orbite, admises par tous ies auteurs depuis le travail d’Yvert (1). Dans ce travail, Yvert distingue deux groupes : l’un, représenté par des tumeurs variqueuses apparentes extérieurement, sans exophthalmie ; l’autre, ca- ractérisé par un exophtalmos intermittent, sans tumeur extérieure. La nature veineuse et variqueuse du premier groupe était suffisamment établie par la simple inspection, qui permettait de voir la tumeur se gonfler dans la position déclive de la tête, dans l'effort et même sous l'influence de la compression des jugulaires internes, pratiquée dans un cas par Nélaton. Elle ne pouvait être admise pour le second groupe que par analogie ; ce rapprochement semblait d’ailleurs trouver sa justifica- tion dans l’observation de Schmidt, où l’exophthalmie coïncidait avec une tumeur apparente à l'extérieur. (4) Recueil ophthalm., 1881 (n°s 1 et 2), « Tumeurs veineuses de l'orbite en communication directe avec la circulation veineuse intra-cranienne ». 156 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cependant, un doute pouvait encore subsister à l'égard de cette ana- logie de nature, et Chauvel l’exprime dans son article « Orbite » du Dic- tionnaire Dechambre, lorsqu'il écrit : « La compression des jugulaires internes n’a pas été malheureusement mise en pratique chez les sujets observés. » Cette lacune est aujourd’hui comblée, et mon observation permet de ranger définitivement dans les tuméfactions veineuses de l'orbite en communication directe avec la circulation veineuse intra-cranienne, cette variété rare d’exophthalmie, pour laquelle je propose la dénomination d’ « exophtalmie à volonté ». DE L'INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL SUR LE MÉCANISME DE LA CALORIFICATION CHEZ LES MAMMIFÈRES HIBERNANIS, jar M. RAPuaEz DuBoïs. Sous l'influence d’excitations centripètes diverses, la température cen- trale de la marmotte en état de torpeur hibernale peut s'élever, en deux ou trois heures, d'une trentaine de degrés. Le réchauffement se fait len- tement, progressivement, et cette circonstance permet d'analyser plus facilement que chez tout autre mammifère le mécanisme de la calorifica- tion. Lorsque l'excitation centripète a été suffisante, le réchauffement se fait d'une manière automatique, sans qu'il soit nécessaire de continuer l'excitation provocatrice du réveil, qui aura pu ne durer qu'une seconde. Dans une série de recherches, je me suis proposé de déterminer les lésions des centres nerveux susceptibles de s'opposer au réchauffement automatique et par conséquent au réveil de la marmotte engourdie ou de modifier la marche de ces deux phénomènes corrélatifs. La section totale de la moelle dans la région des 8° et 9° vertèbres dor- sales n’empèche pas le réchauffement qui est de 20 à 25 degrés centigrades en 3 ou 4 heures. L'animal peut ensuite avoir des sommeils et des réveils successifs. Si la section porte entre la 4° et la 5° vertèbre dorsale, l’éléva- tion de la température est à peu près la même que dans les cas précédents, mais elle est déjà ralentie : 24 degrés en 5 h. 30. Cette lésion n’empèche pas les périodes alternatives de torpeur et de sommeil. Mais lorsque la section est pratiquée entre la 7e cervicale et la première dorsale, le réchauffement est à la fois ralenti et très amoïindri. Dans ces cas, la température s’est élevée de 1°,2 seulement en 4 h. 30; l’animalest resté somnolent vers 16 degrés pendant 3 jours, puis il est retombé en état de torpeur à 11 degrés. Quand on fait la section au niveau de la 4° cervicale, l'animal reste SÉANCE DU Â1 FÉVRIER 151 comme figé dans sa torpeur et meurt dans cet état au bout de 6 à 8 jours, bien que la respiration continue à se faire automatiquement grâce à la conservation des racines des nerfs phréniques. Pratiquée sur un animal éveillé, cette opération a abaïissé en sept heures la température de 17°,2; l'animal ne s’est jamais réchauffé, et est mort le 8° jour. Ces deux expériences semblent confirmer l'opinion de Claude Bernard, qu'une marmotte en hibernation ressemble à un lapin à moelle coupée au niveau de la 4° cervicale. Pourtant l'illustre physiologiste n'avait vu qu'une partie de la vérité, car, la moelle restant intacte, on pourra encore empêcher la production de la chaleur animale. La section portant entre l’occipital et l'atlas, avec la respiration arlifi- cielle, même accélérée, n’a abouti, au bout de 3 h. 30, qu’à un abaisse- ment de 0°,2, et la section du bulbe, au-dessus du nœud vital, n’a donné qu'une élévation de 1 degré en 4 heures. Le même résultat a été obtenu en portant la section soit au-dessous, soit au-dessus des tubercules quadrijumeaux, soit en enlevant les hémi- sphères cérébraux, ou en les détruisant par le procédé de Goltz. Pourtant, les marmottes se réchauffent avec la boîte cranienne large- ment ouvere. Quelle est donc la partie qui préside au réchauffement automatique de la marmotte ? On peut expérimentalement prouver que ce sont les couches corticales supérieures des hémisphères, car, en détruisant celles-ci par le procédé de Goltz, on empèche le réchauffement aussi bien que par la section de ia moelle au niveau de la 4° cervicale. D'ailleurs, l’ablation des hémisphères chez la marmotte éveillée, chez le lapin et chez le pigeon produit aussi l’abaissement de la température. Toutefois, on peut obtenir encore, soit par des excitations centripètes périphériques, sait par l'excitation de l’axe cérébro-spinal au-dessous de la section, une élévation de la température, mais elle cesse immédiate- ment quand on suspend l'excitation, et l'animal aussitôt retombe en état de torpeur. Il faut donc admettre que la marmotte privée de la substance grise de ses hémisphères « oublie », pour ainsi dire, de réchauffer, comme tout mammifère ou oiseau oublie de se nourrir ou de se mouvoir. La mar- motte n’a pas plus alors de spontanéité thermogénique que de spontanéité motrice. Force est donc de reconnaître qu'il y a, dans les circonvoluticns cérébrales, des parties nécessaires à l’automatisme de la calorification, comme il y a, autre part, des centres assurant l’automatisme de la respi- ration, de la circulation et du mouvement. Dans une prochaine commu- nication, je ferai connaître les voies centrifuges du réflexe thermogène ou du réveil. LE 158 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE RECHERCHES DE PATHOLOGIE COMPARÉE SUR LA PESTE DES ÉCREVISSES, par M. RapnaEL DuBois. En 1891, le Conseil général du département de l’Ain m'a chargé de la mission de rechercher si la maladie des écrevisses, que l’on a désignée sous le nom de « peste des écrevisses », sévissait encore et s'il y avait lieu d'accorder ou de refuser les crédits importants demandés pour Île repeuplement des cours d’eau. Le Conseil demandait en outre à être ren- seigné sur la nature de l’agent infectieux et sur les moyens de combattre l'infection. A l’époque où j'ai commencé mes recherches, les uns avaient attribué la maladie à des champignons, les autres à un distome, d’autres à l’alté- ration des ruisseaux par des produits industriels ou agricoles. Je dirai de suite que cette altération ne peut avoir qu’une influence locale tout à fait accessoire. Pour l’année 1899, j'ai limité mes observations et mes expériences à la région du lac de Nantua, si renommée jadis par ses écrevisses, qui consti- tuaient autrefois un revenu important, remplacé aujourd’hui par un tribut de 12 à 15 millions que nous payons chaque année à l'Allemagne. Les eaux de la région peuvent être, au point de vue de la maladie, divisées en trois zones : 1° Le lac et son déversoir en communication avec la mer par la rivière d’Ain, tout à fait privés d’écrevisses; 2 En amont du lac, le ruisseau du Merloz, où l’on trouve à la fois des écrevisses saines et des écrevisses malades. Ces dernières présentent tous les symptômes de la peste des écrevisses si bien décrits par Zundel (Journ. de microgr. de Pelletan, 1881, p. 459); 3° Les sources ou Doye des Neyrolles alimentant le lac et le ruisseau du Merloz et séparées de ce dernier par un barrage : au-dessus de ce bar- rage, il n’y a que des écrevisses saines. Dans les écrevisses malades du Merloz, j'ai vainement cherché le dis- tome auquel Harz avait altribué l'épidémie, et qui, d’ailleurs, avait été décrit dès 1827 par de Baër, alors qu'il n’existait pas trace d'épidémie. Mais en revanche, j'ai rencontré dans le tube digestif des écrevisses malades, et dans celles-là seulement, une quantité d'organismes inférieurs. se présentant sous forme de cellules allongées, ovoïdes, cylindriques ou étranglées vers le milieu selon le degré de développement, avec une enve- loppe à double contour, un protoplasma vacuolaire s’échappant sous forme amæboïde d’une des extrémités par un petit orifice s’ouvrant de côté, comme cela est figuré sur le dessin ci contre. Ces spores, car ce sont bien évidemment des spores, ne se cultivent dans aucun des nom- breux bouillons que j'ai essayés, pas même dans le liquide de Raulin. SÉANCE DU 11 FÉVRIER 159 Ce fait m'avait fait penser qu’elles étaient de nature animale, peut-être appartenant à des sporozoaires, tandis que MM. Henneguy et Thélohan, dont chacun connaît la haute compétence en pareille matière, penche- raient, après examen de mes préparations, à les considérer plutôt comme une levure. Il est à noter que mes observations ont été faites en juin et juillet, c’est- à-dire dans les mois où a sévi la grande épidémie. Le fait que les écrevisses, séparées par un barrage de la région où la maladie est restée endémique étaient indemnes, m'a fait supposer que EXPLICATION DES FIGURES A. Parasites trouvés en automne chez les écrevisses nourries avec le Gardon. B. Parasites trouvés en juin et juil- let chez les écrevisses malades du Merloz. l'agent de transmission était ur animal remontant les cours d’eau en communication libre avec la mer, d'où viendrait le parasite, peut-être un poisson. Pour éclaircir ce point, j'ai renfermé des écrevisses saines dans un cer- tain nombre de réservoirs où elles ont été nourries chacune avec un régime spécial. Les unes recevaient de la viande de boucherie, les autres de la chair des diverses espèces de poissons du lac : truite, carpe, brochet, gardon, etc. Au bout de trois mois, j'ai examiné toutes les écrevisses, et on n'a trouvé de parasites ancrmaux que dans l'abdomen et les muscles des écrevisses nourries avec les Gardons : ces parasites sont identiques avec les Myxosporidies trouvées récemment par MM. Henneguy et Thélohan dans desécrevisses d’une autre provenance et décrites par ces auteurs sous le nom de Thelohania Contejani, mais dont ces savants n’ont pu suivre l’évolution complète. Existe-t-il des rapports entre les parasites trouvés, en octobre, dans les muscles et l'intestin et ceux rencontrés, en juillet, dans l'abdomen ? C’est ce que notre prochaine campagne nous apprendra sans doute. Pa. 160 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE EXTINCTION DE LA LUMINOSITÉ pu Photobacterinm sarcophilum PAR LA LUMIÈRE, par M. RAPHAEL DuBois. - J'ai donné le nom de Photobacterium sarcophilum à un microorganisme photogène que j'ai recueilli sur un lapin devenu lumineux après sa mort. C'est la première photobactérie, apparue spontanément sur de la viande mammifère, qui ait été isolée à l’état de pureté. Ses caractères morpho- logiques et physiologiques diffèrent sous plusieurs rapports de ceux qui ont été reconnus chez les photobactéries marines étudiées jusqu’à ce jour. Je les ai fait connaître dans diverses publications antérieures (1). Je rappellerai seulement ici que j'ai pu cultiver ces photobactéries en milieu chimiquement défini. Ce milieu était ainsi composé : eau com- mune, 100 grammes ; asparagine, À gramme; glycérine, 1 gramme; phos- phate de potasse, 0 gr. 40; sel marin, 3 grammes. Maïs les cultures conservées depuis l’année dernière ont brillé plus difficilement cet hiver dans le même milieu. Il est probable qu’elles ont déjà subi certaines modifications difficiles à expliquer actuellement. Au moment où ces cultures étaient en pleine activité, j'avais été surpris de voir que, contrairement à ce que j'avais annoncé pour les photobac- téries marines des poissons et de la Pholade, celles du lapin se mettaient à briller quelques jours après leur inoculation dans un bouillon de géla- tine-viande-peptone non neutralisé et rendu même assez acide par l'acide lactique. Maïs j'ai reconnu que la règle générale que j'avais formulée était exacte, et que cette anomalie n'était qu'apparente, car, avant de briller, mes photobactéries avaient sécrété dans le point inoculé une substance qui rendait le milieu alcalin. Il résulte de ce fait que certains microorganismes sont esclaves du milieu où ils tombent, tandis que d’autres le modifient de façon à conserver leurs propriétés caractéris- tiques là où d’autres les perdraiïent. Il en est vraisemblablement de même des microorganismes pathogènes, car il y en a qui s’inoculent à tous les sujets, tandis que d’autres exigent un état de réceptivité préalable. La lumière exerce sur les cultures du Photobacterium sarcophilum une action très énergique. Si l’on maintient à l'obscurité les cultures que j'ai conservées depuis l’année dernière, elles restent transparentes et très brillantes, comme celles qui sont renfermées dans les tubes que je pré- sente à la Société. Maïs, si on les expose pendant quelques jours à l’ac- tion directe de la lumière, à une température de 10 degrés environ, elles prennent une belle coloration jaune-orange, deviennent opaques et perdent leur luminosité sauf sur les bords de la culture. (4) Bulletin de la Société Vaudoise des sciences naturelles, XXVII, 1892, et Annales de la Société Linnéenne de Lyon, XXXIX, 1892. DU: SÉANCE DU 11 FÉVRIER 4161 Les inoculations faites avec la substance jaune de la culture donnent des colonies qui s’accroissent avec activité, mais ne brillent pas. Toute- fois, elles retrouvent peu à peu leur éclat primitif lorsqu'on les main- tient pendant plusieurs jours à l'obscurité. Dans ce cas, elles deviennent d'abord jaune sale, puis grisâtres et enfin transparentes comme les cul- tures primitives. Ces observations montrent nettement que le pouvoir photogène est indépendant de l’activité du développement dans certains cas. Les photobactéries des cultures transparentes et celles des cultures jaunes sont également mobiles, mais celles qui sont restées photogènes sont plus allongées. Je ferai connaître prochainement l’action des diverses radiations lumineuses sur la production de la lumière par le Photobacterium sarcophilum. — me PSEUDO-PARASITISME DU Lælaps stabularis SUR UNE FEMME, par M. G. NEUMANN. J'ai été consulté pour déterminer un « parasite » dont une femme était affectée au point que sa santé en était fortement ébranlée. Voici les détails essentiels de cette observation. Depuis plus d’un an, cette femme, dont le mari et le fils sont marchands de chevaux, a ressenti maintes fois sur son visage des chatouillements, dont elle a pu facilement saisir la cause. C’étaient des Acariens assez volumineux que, dans son entourage, on prit pour des « poux » particu- liers. Depuis lors, les moindres sensations cutanées lui ont paru causées par ces parasites, son sommeil a été troublé et insuffisant, son moral très ébranlé, sa nutrition compromise. En fait, toute la maison qu'elle habite paraît être, jusque dans les derniers recoins, envahie par une pullulation excessive de ces Acariens : on en trouve dans les greniers à fourrages, dans les écuries, dans la cour, dans les appartements. Il n'est pas surpre- nant que quelques-uns s’aventurent ou s’égarent sur la peau de l'homme; cependant, ni le mari ni le fils de cette femme n'ont jamais ressenti le même contact, ce qui tient peut-être à une moindre susceptibilité. Dans les spécimens qui m'ont élé envoyés pour la détermination, j'ai reconnu le Lælaps stabularis (Koch) Berlese. Cette espèce de Gamasidé vit habituellement dans les fourrages, dans les greniers et magésins à - foin. Il était donc naturel qu’elle se trouvât dans la maison habitée par cette femme, mais il est plus difficile de donner la cause de sa pullulation excessive, qui à résisté aux moyens aussi judicieux qu'énergiques employés pour la combattre. En tous cas (c'est le point essentiel de cette 162 SOCIETÉ DE BiOLOGIE note), la présence du Lælaps stabularis sur la peau de l’homme ne peut être considérée comme un fait de parasitisme. Il n’y a, d'ailleurs, jamais eu de prurit ni de lésion cutanée; l’altération de la santé a été le fait du retentissement de troubles psychiques sur la nutrition, et elle a disparu aujourd’hui que la malade est éclairée sur ce qui l'avait si longtemps tourmentée. On sait, du reste, que les Acariens de la famille des Gama- sidés, au moins ceux de la tribu des Gamasinés, ne se nourrissent guère que de matières mortes et surtout de débris végétaux. Ceux qu'on ren- contre sur des animaux (Vertébrés ou Arthropodes) n'y sont qu’à titre de commensaux, soit pour se faire transporter, soit pour s’abriter tempo- rairement dans le revêtement tégumentaire. APPLICATION DU GRISOUMÈTRE A LA RECHERCHE MÉDICO-LÉGALE DE L'OXYDE DE CARBONE, par M. N. GRÉHANT. Le grisoumètre de M. Coquillion, que j'ai modifié en le faisant construire tout en verre, en allongeant le tube gradué et en le terminant par un robinet, permet de doser avec la plus grande exactitude l’oxyde de car- bone extrait d'un volume de sang pris chez [l’homme empoisonné par ce gaz; on peut opérer sur un volume très petit compris entre 10 centi- mètres cubes et 2 centimètres cubes. L'idée de cette application m'est venue, en lisant un rapport médico- légal qui a été publié récemment en Belgique; il s'agissait d'une femme qui n’aurait pas élé assassinée, comme on le croyait d'abord, mais qui aurait succombé à un empoisonnement produit par un poêle; en effet, trois mois après la mort, un chimiste expert a pu recueillir quelques cen- timètres cubes de sang, et l'examen spectroscopique a démontré dans ce liquide la présence de l’oxyde de carbone. Le procédé que je propose est plus exact et plus sûr; sa technique est très simple. Dans un tube de verre long d’un mètre, large de 2 centi- mètres, fermé à sa partie inférieure, on fait le vide avec une pompe à mercure; si l’on n’a pas de trompe à sa disposition, c’est-à-dire un auxi- liaire très commode de la pompe, on remplit le tube d’eau et on fait le vide de l’eau beaucoup plus rapidement que le vide de l’air. J'aspire, à l’aide d’une pipette graduée à robinet supérieur, munie d'une ampoule de caoutchouc, du sang de chien empoisonné par l’oxyde de car- bone el conservé à l'air depuis trois semaines; je fais passer dans le vide 8 c. c. 75 de sang, puis un excès, 20 centimètres cubes d'acide acétique à 8 degrés, et j'immerge le tube dans l’eau bouillante. SÉANCE DU 11 FÉVRIER 163 AN me TR LR ee Ve né Les manœuvres de la pompe donnent 7 c.c. 8 gaz pour un mélange de potasse et d'acide pyrogallique, le volume se réduit à 2 c. c. 7. Ce gaz, privé d'oxygène et d’acide carbonique, est transvasé sur l’eau dans une petite cloche tubulée munie d’un robinet et d'un long tube de caoutchouc qui est fixée par son extrémité libre sur le grisoumètre plein d'eau au- dessus du robinet supérieur; les trois robinets étant ouverts, on fait passer le gaz dans le grisoumètre, on introduit, dans la cloche, de l’air qui est envoyé dans l’ampoule et qui remplit tout son volume et une portion du tube gradué. On ferme le robinet supérieur, on porte le grisoumètre dans un grand bocal plein d’eau constamment renouvelée dans lequel il reste vertical et complètement immergé; les lectures des volumes se font toujours dans l’eau, car si on soulève l’ampoule dans l'air, l'ins- trument fonctionne comme un thermomètre à air, et on ne peut pas obtenir un volume invariable. Le volume de l’ampoule jusqu’au zéro étant désigné par V, le volume occupé par le gaz est V+ 22.8 (V + 22.8! On fait rougir le fil de platine : SUMOISONODIIENt Re ET US V+13.7 60 — ee drone EN lol 60 EN M eo Re . + « V+12.6 volume fixe. 10.2 10 c. c. 2 représentent le volume d'oxyde de carbone retiré du sang. Or, une expérience préalable, faite avec 1 c. c. 01 d'oxyde de carbone pur, a donné dans le grisoumètre, une réduction de5 c. c. 3; on écrit donc la proportion : Tel était le volume d'oxyde de carbone contenu dans 8 c. c. 75 de sang; dans 100 centimètres cubes de sang, on aurait trouvé 22 c. c. 2 d'oxyde de carbone. La même expérience, répétée sur un volume fort petit du même sang, 2 c. c. 5, a donné, dans le grisoumètre, une réduction de 3 c. c. 8, qui correspondait à 0 c. c. 7 d'oxyde de carbone pur, ou à 28 p. 100 d'oxyde de carbone. Bien entendu, on ne peut pas compter sur une aussi grande exacti- tude, quand on opère sur un volume de sang aussi petit que 2 c. c.5. Ce procédé de recherche avec le grisoumètre, qui est un eudiomètré rendu très sensible, est donc immédiatement applicable aux recherches médico-légales, comme aux recherches physiologiques. .J’ajouterai, en terminant, que j'ai été obligé d’abandonner la pile au bichromate de potasse, qui manque de constance, et que j'emploie une 164 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE pile de Bunsen de six éléments que je fais monter à l'air libre, en dehors du Laboratoire, et qui me donne une intensité constante de neuf ampères, bien suffisante pour porter au rouge le fil de platine enroulé en spirale. NOUVELLE MÉTHODE POUR DÉMONTRER LE POINT DE DÉPART D'EXCITATION, AINSI QUE LES PHÉNOMÈNES ÉLECTROTONIQUES DANS L'EMPLOI DES COU- RANTS D'INDUCTION, par M. le D' GUSTAVE PIOTROWSKI. (piauats du laboratoire de physiologie générale au Muséum d'histoire naturelle.) Pour des causes purement physiques, trop connues pour que j'aie besoin de les définir, le courant induit de fermeture est un excitant physiolo- gique plus faible que le courant de rupture. C’est avec un certain élonnement que j'ai remarqué, en soumettant le nerf sciatique d’une grenouille à l’action de l'alcool éthylique, que ce rap- port se modifiait en bien des cas, c’est-à-dire que j'obtenais une contrac- tion du muscle plus forte à la fermeture qu'à la rupture du circuit primaire. J'ai observé ce phénomène dans mes recherches sur la conduc- tibilité et l’excitabilité des nerfs (1), et notamment en étudiant les modifications de la période latente et de la vitesse de transmission de l'excitation sous l’action de l'alcool. é J'ai établi mes expériences de la manière suivante : je me servais d’une préparation du muscle gastrocnémien et du nerf sciatique. Je plaçais le nerfdans une chambre humide formée de liège, avec deux ouvertures dans la paroi. Ensuite, j’insérais le nerf par les deux ouvertures et je fermais l’espace qui entourait le nerf avec du kaolin pétri avec une solution physiologique de sel. Dans la chambre, se trouvait, près de la paroi voisine du muscle, une paire d’électrodes sur lesquels le nerf repo- sait. Je faisais parvenir le courant d'induction de l'appareil à chariot de M. Du Bois-Reymond. A l’aide de tubes introduits à cet effet, on pouvait introduire de l’air saturé de vapeurs d'alcool, d’éther, de chloroforme, etc. Sous l’action de ces vapeurs, l’excitabilité du nerf diminue, et il faut appliquer des courants de plus en plus forts pour provoquer la contrac- tion la plus faible. Après un certain temps, je puis constater qu'à la fermeture la contraction apparaissait déjà, tandis qu'il n’y en avait pas encore de traces à la rupture. Pour obtenir la contraction la PU faible, (4) Dr G. Piotrowski, Ueber die Trennung der Exregbarkeit vod ile tungsfähigkeit. — Du Bois-Reymond. Archiv für Physiologie, 1893 (sous presse). SÉANCE DU 11 FÉVRIER 165 j'étais obligé de rapprocher les bobines de quelques centimètres de plus qu'à la fermeture. En répétant récemment ces expériences, je me convain- quis que ce phénomène apparaissait seulement quand le courant du circuit primaire élait ascendant; done, quand le courant d’induction de fermeture était descendant et que celui de rupture était ascendant. En tenant compte de ce fait que l'alcool abaisse fortement et abolit même la conduc- tibilité, ensuite que l'excitation provient de la cathode qui, à l'ouverture, se trouve plus loin du muscle qu’à la fermeture, tout porte à croire qu’à la fermeture une excitation plus faible suffit, parce qu’elle a une route moindre à parcourir, et, par suite, un obstacle moindre à vaincre. Pour- tant, celte explication par elle-même paraît insuffisante, si l'on remarque cette différence dans la roule à parcourir, c'est-à-dire l'éloignement des électrodes qui était égal, dans mes expériences, à 3 millimètres. S'il en était réellement ainsi, l’éxcitation ne pourrait pas du tout parvenir d’une distance plus grande et elle demeurerait sans résultat. Pour vérifier cette supposition, j'ai eu l’idée de placer une autre paire d’électrodes en dehors de la chambre, à 30 millimètres de la première et avec l’aide de ces électrodes j’excitais le bout central. De cette manière, j'ai pu reconnaître aussi qu’en excitant cet endroit on obtient un phéno- mène analogue, c’est-à-dire la prédominance de la fermeture sur la rupture du courant primaire ascendant. Ce phénomène apparaît simultanément au point central et au point périphérique, la conductibilité n’est donc pas si affaiblie, comme on aurait pu le supposer, parce que l'excitation parvient encore du point central. Il faut donc chercher ailleurs la raison de ce phénomène, et notamment, d’après moi, dans l’action électrotonique des courants d'induction. Dans les courants ascendants, la cathode et par suite le point de départ de l'excitation réside plus loin du muscle que l’anode ; elle a donc à traverser un espace qui reste sous l'influence de l'anode qui abaisse la fonction des nerfs, c'est-à-dire leur conductibilité et leur excitabilité. Si donc à l’action de l’anode se joint l’action de l'alcool, l'obstacle devient plus grand et l'excitation traverse beaucoup plus difti- cilement cette partie. Par contre, dans les courants descendants, l'anode n'entre pas en ligne de compte, et l'excitation agit plus facilement, même si elle est beaucoup plus faible, comme par exemple à la fermeture. En voulant prouver en toute évidence que dans ce cas agit la diminu- lion de la conductibilité provoquée par l’alcool et l’anélectrotonus, el non pas seulement la diminution de la conductibilité sous l’action de l'alcool, j'ai combiné une expérience de manière que j'ai placé un pôle, c’esl-à- dire la cathode au milieu de la chambre et deux autres pôles des deux côtés du premier : ces derniers devaient servir d’anodes. De cette manière, la cathode n'était pas modifiée quant à sa situation, et, par suite, l’espace que l’excitation devait traverser restait d’égale longueur; mais dans les courants ascendants, l'anode était placée devant la cathode, plus près du muscle, et dans les courants descendants, plus loin de celui-ci, derrière la 6. 166 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cathode. Dans cette disposition, les phénomènes décrits plus haut appa- raissaient d'une manière plus évidente, c’est-à-dire que, dans les courants ascendants, il fallait employer pour provoquer une contraction le plus faible des courants plus forts que dans les-courants descendants, et que même les courants descendants de fermeture agissaient plus fortement que les courants ascendants de rupture. On peut aussi observer l’action de l’anode en déterminant la période latente. Dans les courants descendants, elle est plus brève que dans les courants ascendants, pendant lesquels elle peut même être double de longueur. De cette manière, à l’aide de l'alcool, qui diminue la fonction du nerf, on peut démontrer l'influence de Poe c'est-à-dire l’anelec- tronus. Que l'anode diminue la conductibilité dans les courants d’induc- tions comme dans les courants constants, c’est ce que démontrent les recherches de MM. Âries et Sewall (1), Sewall (2), Yeo et Herroun (3), Werigo (4), ete. Pourtant, dans les nerfs normaux, il est difficile de le prouver. Il faut avoir recours à des expériences assez compliquées. M. Fick (5) pensait que le phénomène qu'il appelait « Lücke » dépend de l’anelectrotonus. Pourtant l'iegel (6) a prouvé qu'il apparait dans les courants descendants. La difficulté de démontrer l’anelectrotonus repose en ceci que l'excitation part non seulement de la cathode, mais aussi dans les courants plus forts de l’anode. D’autre part, la diminution de l’excita- bilité par l’anode peut apparaître plus tard que l'excitation elle-même, comme sembleraient le prouver les recherches de Zschiriew (7) et Bern- stein (8). L'alcool, par contre, retarde l’action excitante sur les nerfs, d’abord en diminuant leur” conductibilité, ensuite en diminuant leur, excitabilité, après quoi l'excitation Donne se répandre plus lentement que l’anelectrotonus. physiologique. Enfin, l'influence de l'alcool peul produire par la diminution de l’excitabilité cet effet que l’anode n'irrite pas du tout les nerfs, mais que la cathode seule les excite. À capite, j'ai. voulu éclaircir ce dernier point expérimentalement. Les travaux de; MM. Chaveau (9), Harless (10), Lamanski (11), Biedermann (12), ete, ont démontré que dans les courants d’induction l'excitation part de la 1) Kries et Sewal. Arch. f. Anal. und. Physiologie, 1881. 2) Sewall. Journ. of Physiol., II. 3) Yeo et Herroun. Journ. of Physiol., VI. 4) Werigo. Pfl Arch., XXX VI. 5) Fick. Vierteljahresschrif. der Naturfor. Ges., in Zurich, XI. 6) Tiegel. Pf. Arch., XIIL. F ARS 7) Tschiriew. Arch. f. Anat. und Physiol., 1889. ) Bernstein. Arch. f. Anat. und. Physiol., 1886. - 9) Chaveau. Journ. de la Physiol., AI. | -(10) Harless. Zeitschr. f. Rat. Med., LI. | rey (41) Lamanski. Sfudien d. Dh So Inst. zu LIN s (42) Biedermann. Sitzber. d. Wien. Akad., Abth, III. Bd. LXXXIIT. ( ( ( ( ( ( ( = @ » SÉANCE DU À1 FÉVRIER 167 cathode. Pourtant M. Werigo (1) affirme que dans les courants plus forts elle part ainsi de l’anode. Pour résoudre cette question, je placais un pôle d’un côté hors de la chambre sur lequel reposait la partie centrale du nerf. Or, l’action de l'alcool supprimait complètement la conductibilité, ainsi que je le constatais par une paire distincte d’élec- trodes sur les deux pôles desquels reposait le nerf. En irritant le musclée avec cette dernière paire d’électrodes, on n’obtenait pas de contraction, tandis que dans la disposition précédemment décrite les courants ascen- dants provoquaient une contraction. Puisque dans ce cas l’excitation ne pouvait provenir de la cathode parce que la conductibilité était supprimée, par suite l’anode seule qui se trouvait derrière la parlie modifiée du nerf pouvait l’exciter. Pour irriter le nerf avec l’anode à l'ouverture du circuit, il faut user de courants beaucoup plus forts même que dans la fermeture par l’excilation à l’aide de la cathode. L'alcool aussi supprime avant tout l’action irritante de l'anode. Je l’ai démontré de la manière suivante : un pôle excitait la partie centrale hors de la chambre comme précédemment et l’autre la parlie périphérique, pourtant à l’intérieur de la chambre, tout. près de la paroi. L'alcool donc diminuait l’excitabilité de cette partie; de cette manière, l’action des courants ascendants diminuait et disparaissait même plutôt que l'action des courants descendants de fer- meture.À capite, des expériences répétées avec des électrodes none sables ont donné les mêmes résultats. Les expériences décrites sont assez faciles à faire. Elles ne demandent pas des appareils trop compliqués et leurs résultats sont assez certains et assez clairs. Pour cette raison, elles se prêtent facilement à la dÉmens tration dans les Cours des Dhénomn suivants : 4° L’excitation, dans les faibles courants d’induction, ne part que de È cathode et dans les courants plus forts de l’anode également. Ù | 2° L'anode, à la rupture, cause une très faible excitation, QUE Pble même que la cathode à la fermeture du courant. 3° Enfin l’anode diminue la conductibilité des nerfs de la même manière que dans les courants constants. PHLÉBITE TRAUMATIQUE DE LA JAMBE DROITE. ŒDÈME RÉFLEXE DE LA JAMBE GAUCHE, par M. Vaouez. Dans une communication faite récemment à l’Académie des sciences, M. le professeur Ranvier signale un curieux effet des réflexes vasculaires. L'injection d'une goutte d'essence de moutarde dans le sac lymphatique (1) Werigo. Loc. cit. 168 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sous-cutané de la jambe d’une grenouille produit une congestion intense de la patte correspondante, tandis que l’autre patte abdominale s'anémie. Relatant d’autres expériences analogues, M. Ranvier pense que certains faits de la pratique médicale doivent pouvoir s'expliquer par des phéno- mènes sympathiques ou réflexes de même ordre. Nous rapporterons ici une observation de nature semblable. Un malade entra, en décembre 1892, dans le service de M. le professeur Potain, à la Charité, pour des accidents de phlébite. Celle-ci était d'ori- gine traumatique. Le sujet ayant été atteint du choéra, on lui avait fait des injections intra-veineuses de sérum dans la veine saphène du côté droit. Quinze jours après environ, il commença à ressentir des douleurs de ce côté, et le long du trajet de la veine. Ces douleurs s’atténuèrent assez rapidement. Elles reparurent aussi violentes trois semaines plus tard, c'est ce qui détermina le malade à entrer dans notre service. Je pus constater une phlébite des plus caractérisées de la saphène interne droite, sans œdème de la jambe, avec sensation dure de cordon veineux, mais je ne fus pas peu surpris de voir que la jambe gauche était le siège d'un œdème marqué remontant jusqu’à la parlie moyenne du mollet. Cet œdème avait apparu brusquement en même temps que la jambe droite devenait douloureuse. Du côté gauche on ne constatait aucune douleur, aucune oblitération veineuse, et l’œdème disparut très rapide- ment en quatre ou cinq jours, tandis que la phlébite droite continuait à évoluer. Il n’y avait, d’ailleurs, dans l’état général du sujet ni dans aucune altération locale, rien qui pût expliquer ce phénomène. Je crois que l’on est autorisé à invoquer des troubles vasculaires réflexes analogues à ceux décrits par M. Ranvier et à ceux que l’on observe après le pince- ment ou la compression des veines d’une oreille chez le lapin. Je n'ai pas trouvé mention d’autres faits analogues dans la littérature médicale, celui-ci est donc intéressant à connaître pour éviter l’erreur que l’on aurait pu commettre en diagnostiquant une phlébite gauche, que les con- ditions toutes spéciales de l’étiologie et l’évolution de la maladie n’auto- risaient pas à admettre. POULS LENT PERMANENT. CONSIDÉRATIONS CLINIQUES ET PHYSIOLOGIQUES, par MM. VaouEz et BUREAU. L'étude des phénomènes cardio-vascalaires qui caractérisent essentiel- lement la maladie dite du « pouls lent permanent » a conduit la plupart des auteurs à admettre que le ralentissement était le plus souvent plus SÉANCE DU 11 FÉVRIER 169 apparent que réel, et que le cœur, notamment, présentait d'ordinaire des contractions supplémentaires plus ou moins faciles à constater. Nous avons pu examiner à ce sujet deux malades atteints de cette affection ; les tracés que nous avons recueillis, avec la direction et les conseils de notre maître, M. le professeur Potain, nous ont permis d'arriver à des conclusions que nous jugeons intéressantes, surtout si on les rapproche de certaines expériences physiologiques que nous exposerons plus loin. Jugulairé Carotrde Pointe du Cœur a Nous ne relaterons pas ici les observations cliniques ; nous dirons seule- ment que dans un cas, suivi par l’un de nous en 4889, la lenteur du pouls avait apparu à la suite d’un traumatisme de l'abdomen, dans l'autre cas, il s'agissait d’un homme jeune encore (vingt-neuf ans), chez lequel il était impossible de relever aucune condition étiologique satisfaisante. Dans les deux cas, le pouls oscillait entre vingt-deux et trente pulsations, et les symptômes concomitants rappelaient exactement ceux qui ont été décrits par Adam, Stokes, Charcot, etc., et que l’on retrouve également dans les cas de Malassez, Cornil, Blondeau, etc. L’auscultation du cœur permettait de retrouver, à de certains moments, ces battements surajoutés dont nous avons parlé et dont nous voulions étudier la valeur. C’est à cela que nous ont servi les tracés figurés ci- dessus et pages suivantes, sous les n° 1, 2, 3 et 4. 470 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Le tracé radial n'indique rien que de connu déjà : la lenteur excessive du pouls avec, de temps à autre, de très faibles ondulations correspon- dant à un essai de systole ventriculaire. : Le tracé de la pointe du cœur nous permet déjà de voir que les soulè- vements intermédiaires sont bien réels et correspondent à des contrac- tions actives, mais cela ne suffit pas pour nous assurer qu'il s'agisse de systoles ventriculaires. On sait, aujourd’hui, — les observations de Vugu/aire ns me loue mm mm mm fm mn me me on mu Carotide Radirale Fic. 2. — N... Salle Bouillaud, n° 8, novembre 1892. MM. Potain et F. Franck en font foi, — que la contraction de l'oreillette est capable de déterminer un soulèvement apparent de la région précor- diale de donner, sur les tracés, une ligne d’ascension bien caractérisée. C’est également cette même contraction qui, dans les tracés recueillis sur la pointe du cœur à l’état normal, provoque l'ascension correspon- dant à la période présystolique, sur laquelle les auteurs ont tant discuté. Il fallait donc nous adresser aux tracés comparatifs de la radiale, de la carotide et de la jugulaire. On voit alors de suite qu'il y a, sur cette dernière, des mouvements isolés qui ne correspondent à rien de pareil sur les tracés artériels. L'examen des tracés nous conduit à ces deux conclusions : A° toutes les fois qu'il y a une contraction du ventricule, on en retrouve l'effet dans la radiale aussi bien que dans la carotide ; il faut donc rejeter l'hypothèse émise par certains auteurs que des con SÉANCE DU 11 FÉVRIER 174 tractions systoliques avortées ne suffiraient pas à distendre le système artériel dans son entier; % il y a des contractions auriculaires parfaites et isolées, capables de Sbrnes lieu à un bruit d’auscultation simulant la systole ventriculaire et de déterminer des soulèvements marqués q, la jugulaire. | C’est la conclusion à laquelle Stokes était déjà arrivé et que MM. Chau- veau, Tripier, Letulle, ont pleinement adoptée. Les tracés que nous pré- sentons sont la confirmation écrite de cette opinion. Il nous restait à contrôler ces résultats avec ceux fournis par la physio- logie. M. F. Franck a bien voulu nous permettre de reprendre dans son laboratoire les expériences qu'il avait déjà faites lui-même sur le mode de la contraction cardiaque à la suite de l’excitation du pneumogastrique, VENTRICULE. OREILLETTE: FiG. 3. — Excitation du bout périphérique du DHcumoscetrique droit. Chien, 16 décembre 1892 (Lab. de M. Fr. Eranck). et son préparateur, M. Hallion, nous a aidés dans ces recherches. Nous laisserons de côté ce qui a trait au ralentissement des contractions car- diaques. Mais, si nous considérons le tracé n° 3, pris avec l'appareil de M. F. Franck, simultanément sur le ventricule et l'oreillette à la suite de l'excitation du bout périphérique du pneumogastrique droit, nous verrons que la dissociation des contractions apparaît dès le début de l’excitation, et est de la sorte tout à fait analogue à ce que l’on constate sur les tracés recueillis chez nos malades (tracé n° 3). Nous ajouterons de plus que le deuxième de ces malades présenta, à plusieurs reprises, surtout lorsque les pulsations augmentaient de fréquence, un véritable rythme couplé du cœur. Ces observations concordent donc exactement avec les conclusions formulées par le professeur Chauveau, en 1883. Mais il y a plus; si l'on examine les tracés recueillis après excitation du bout central du pneumo- gastrique (tracé n° 4), on s'aperçoit qu'un phénomène un peu analogue peut se produire. Les contractions ventriculaires cessent presque com- plètement, les contractions auriculaires persistent dans leur intégrité. Cette considération nouvelle, tirée de la physiologie, nous permet de faire rentrer dans la conception imaginée par le D' Charcot, la plupart des faits de pouls lent permanent, jusqu'ici inexplicables. C’est ainsi 172 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE qu'on a pü attribuer certains de ces cas à une contusion du plexus solaire, à des troubles gastriques, à des lésions primitives du cœur, ete. En un mot, ce ne sont pas les altérations du nerf dans son chemin centrifuge, mais aussi bien celles qui l’atteignent dans son trajet centripète en dehors des cas où le bulbe est directement en cause, qui peuvent faire apparaître la lenteur du pouls avec les accidents qui s’y rattachent. VENTRICULE. OREILLETTE. Fic. 4. — Excitation du bout central du pneumogastrique droit. Chien, 16 décembre 1592 (Lab. de M. Fr. Franck). Nous terminerons en ajoutant deux considérations à ce qui précède. M. Comby a pensé pouvoir attribuer les attaques épileptiformes du « pouls lent permanent » à des accidents urémiques. Les malades qu'il avait en vue étaient des athéromateux présentant, selon toute vraisem- blance, des altérations du rein. Cette conclusion ne s’applique pas à la majorilé des cas ; chez le second de nos malades notamment, cette inter- prétalion ne peut pas être invoquée. Disons enfin que nous avons essayé, presque sans succès, la plupart des médicaments proposés pour parer aux accidents syncopaux; seul, l'emploi de la solution de trinitrine les a conjurés d'une manière marquée et même les a fait disparaître pour un certain temps, sans d’ailleurs relever la fréquence du pouls. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Mareraeux, directeur, 1, rue Cassette. 173 SÉANCE DU 18 FÉVRIER 1893 MM. A. Onauveau et KAurMaANN : Sur la pathogénie du diabète; rôle de la dépense et de la production de la glycose dans les déviations de la fonction glycémique (Mémoires). — M. A. Carr : Humeurs et sécrétions dans l'infection expérimen- tale. — M. Rocer : Action de quelques toxines microbiennes sur le cœur. — M. le professeur Dr Arexaxore Poruz (de Saint-Pétersbourg) : Méthode clinique simplifiée d'analyse d'urine pour fixer les degrés d’auto-intoxication et l'énergie des processus d'oxydation intra-organiques. — M. Rapnaez Dugois : Sur la physio- logie comparée de la thermogenèse. — M. H. BourGes : Myélite aiguë expérimen- tale produite par l’érysipélocoque. — Note de M. Prerre BONNIER, présentée par M. A. Gran» : Sur les fonctions otolithiques. — Note de M. le D' DE LA JARRIGE, pré- sentée par M. p’ArsonvaL : Des injections intra-pulmonaires. — M. G. LoisezL : Les cartilages linguaux et le tissu cartilagineux chez les Gastéropodes. — M. le D' Gricoresou (de Bucharest) : Influence de la stase sanguine de l’hématopoièse. Présidence de M. Chauveau. SUR LA PATHOGÉNIE DU DIABÈTE ; ROLE DE LA DÉPENSE ET DE LA PRODUCTION DE LA GLYCOSE DANS LES DÉVIATIONS DE LA FONCTION GLYCÉMIQUE, par MM. A. CHAUvEAU et KAUFMaNN. — (Voir Mémoires du présent volume, p. 17.) HUMEURS ET SÉCRÉTIONS DANS L'INFECTION EXPÉRIMENTALE, par M. A. CHARRIN. Personne n'ignore la multiplicité des modifications qui surviennent dans les liquides organiques au cours des Pyrexies. — Je me suis efforsé d’en préciser quelques-unes, en étudiant ce qui se passe chez l'animal -inoculé avec le bacille pyocyanique. - Les sucs intestinaux, on le sait, deviennent très abondants; ils doublent -et triplent, soit en poids, soit en volume. Ils se présentent sous un aspect “beaucoup plus liquide; ils sont, parfois, riches en pigments, en pigments -verdâtres spécialement. Ils renferment nombre de microbes, parmi eux Îe bacille injecté. FtOIe He XHODIGE à La diminution des urines, la chose n’est ni rare; ni indifférente, con- traste avec l'augmentation des sécrétions digestives. Un lapin, soumis au Jait depuis plusieurs jours, exerète par les reins 120, 450, 260 centimètres B10LOGIE. COMPTES RENDUS. — 92 SÉRIE. T. V, 7 174 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cubes, par vingt-quatre heures, et même davantage. (Ce chiffre tombe à 30, 40, 70, en cas d’infection aiguë, et cela dès la première ou la seconde journée.— Les oscillations qualitatives sont des plus marquées. L’urée va croissant à mesure que la mort approche; des analyses successives, por- tant sur la sécrétion rénale de trois sujets inoculés le 12 janvier et ayant succombé, l'un le 14, les autres le 15 du même mois, ont donné : 6; 13.2: 18.4; 27; 36 grammes par litre. L’acide phosphorique, le plus habituel- lement, s'élève. Dans les cas précédents, on a obtenu : 0.26; 1.10 ; 2.45; 3. Inversement, le chlore s’abaisse : 3.50; 3.10; 3.90 ; 2. Ces résultats sont empruntés à une série de recherches poursuivies dans un but spécial par M. Chevallier et moi, recherches qui comportent plus de 50 analyses et sont loin d’être terminées. Ajoutons que l'albuminurie est la règle; que l'hématurie s’observe exceptionnellement. En outre, le liquide vésieal contient des toxines, attendu qu’en l’injectant on vaccine dans telles con- ditions ; on crée des accidents morbifiques dans telles autres. On doit au professeur Bouchard ces notions fondamentales. Si on lie l’uretère, au lieu de recueillir, à l’aide d’un dispositif spécial, les urines librement émises à partir de l’instant de l’inoculation, la vessie étant vidée à ce moment précis, on constate que la sécrétion se réduit à 5, à 10 centimètres cubes. De plus, la maladie évolue avec une rapidité excessive; elle revêt, assez fréquemment, la forme hémorragique, rare en dehors de ces circonstances. On a, ici, la preuve expérimentale de l’in- fluence exercée par un viscère, placé dans une situation anormale, sur la marche, sur les caractères de l’infection. L'extravasation, l'élévation thermique, ne sont pas les seules modifica- tions subies par le sang. — L'oxygène est légèrement diminué (Gley, Lapicque, Charrin); les globules blancs sont souvent plus abondants ; les substances bactéricides (Roger, Charrin), substances détruites à 70 degrés, insolubles dans l'alcool, apparaissent dès le troisième jour (Bouchard). L’alcalinité décroit dans de faibles mesures; la fièvre suffit à expliquer, cette variation dans la réaction (Drouin, Gharrin). Il n’en est pas ainsi chez la plante (exp. inédites). Là, l'acidité peut fléchir, l’état neutre ou alcalin survenir; le milieu s'adapte. — Quant à la lymphe, donnée capitale, son volume serait sensiblement supérieur à la moyenne, d’après Roehmer, Gartner, etc. Les sérosités, parfois, sont un peu plus abondantes qu’à l’état physio- logique. Localement, sous la peau, on peut observer de l’œdème, de l’in- flammation, de la suppuration, des signes de digestion du tissu conjonetif. Enfin, il existe d’autres altérations portant sur la quantité comme sur la qualité de certaines sécrétions des plus importantes. Ayant reçu les confidences de deux auteurs, Rüffer et Sherrington, relativement à des études de ce genre, je suis obligé, pour le moment, de garder le silence et de m’en tenir à ce que j'ai signalé. On voit combien sont générales (et il n’y a là que quelques indica- Qt SÉANCE DU À18 FÉVRIER 41 tions), les alléralions humorales. Sucs intestinaux, urine, sang (réaction, éléments, figurés ou solubles), Iymphe, sérosités, etc : tout est intéressé. Comment se réalisent ces altérations? Il est difficile de répondre d’une facon précise; il est aisé, en revanche, de formuler des hypothèses plausi- bles, basées sur des faits. Les lésions cellulaires des glandes, la mise en jeu, soit des vaso-moteurs, soit des conditions physiques de la circulation, soit des appareils nerveux plus ou moins chargés de la fonction sécrétoire : Lelles sont quelques-unes des causes propres à actionner la formation, la composition des sucs, des humeurs, etc. Or, l'anatomie pathologique nous a appris, ici, la fréquence des altéra- tions épithéliales de l’intestin, du rein, de divers conduits. D'autre part, sous l'impulsion première du professeur Bouchard, sous celle des expé- riences de Gley et Charrin, on s’est efforcé de déceler les propriétés des toxines bactériennes à l'endroit de l’axe cérébro-spinal, et l'on sait com- bien déjà cette méthode a été féconde. Dans le cas qui nous occupe on a précisément démontré que ces toxines agissaient sur les vaso-dilatateurs; un spasme intense survient, puis, ordinairement, une dilatation lui suc- cède. On a démontré, également, que la pression était capable de s'élever; parfois, elle s’abaisse, de même que, parfois, certains troncs nerveux per- dent en partie leur excitabilité (recherches inédites). Ajoutez à cela. lhyperthermie qui altère et les solides et les liquides. Ajoutez à cela la reproduction du plus grand nombre de ces modifications, en utilisant les sécrétions du bacille, après stérilisation. Dès lors, il est permis de conclure au rôle de ces sécrétions bacillaires, rôle tantôt direct, les toxines lésant elles-mêmes les cellules, tantôt indi- rect, le système nerveux intervenant à titre d’intermédiaire. Il est encore possible d’incriminer la dyscrasie, attendu que le sang, la lymphe, nous l'avons vu, n’ont pas leur composition normale; or, ce sont là les sources auxquelles puisent les glandes pour y trouver les matériaux destinés à les nourrir ou à constituer leurs excrétions. Leur intégrité est nécessaire autant que celle de la circulation qui apporte les éléments utiles, qui aide à l’osmose par la vitesse, par La pression, autant que celle des nerfs, etc. toutes choses que les toxines influencent. ACTION DE QUELQUES TOXINES MICROBIENNES SUR LE COEUR, par M. RoGEr. Les cultures du Bacillus septicus putidus exercent une action énergique sur le cœur de la grenouille (1). Leur injection détermine un notable (1) Roger. Poison cardiaque d’origine microbienne, Société de Biologie, 28 janvier 1893. 176 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 20 nn à eng nn tt NO Un LH pt qui CPS ralentissement des battements et augmente la durée des systoles; le cœur finit par s'arrêter en diastole, sans passer par une période d'affaiblisse- ment progressif; les contractions deviennent de plus en plus rares, tout en restant très énergiques. Mais ce qui caractérise surtout cet empoison- nement, |c'est que le cœur cesse rapidement d’être excitable par les agents mécaniques ou par les courants faradiques agissant directement sur le muscle. Les analogies qui existent entre le B. septicus putidus et Le Proteus vul- garis, m'ont conduit à rechercher si les cultures de ce deuxième microbe n’exerceraient pas une action semblable; j'aiopéré comme jel’avaisfaitpour mes premières recherches, en me servant constamment de la méthode graphique. Or, les toxines du Proteus ralentissent les battements du cœur, augmentent souvent leur amplitude et modifient la forme du tracé, à peu près de la même façon que les cultures du B. septicus. On pourrait donc croire que les effets sont identiques dans les deux cas: il n’en est rien en réalité; car le cœur empoisonné par les cultures du proteus con- serve son excitabilité. Les secousses électriques déterminent des systoles énergiques; si elles se succèdent rapidement, il se produit une série de contractions tétaniformes suivies d’un repos plus ou moins prolongé; les réactions sont donc les mêmes qu’à l’état normal, à la condition toutefois d'employer des courants assez Choses lempoisonnement diminue l’excitabilité du cœur. Il existe une autre différence entre les toxines du B. septicus et celles du Proteus vulgaris. Les premières agissent sur le cœur à une période peu avancée de l'empoisonnement, alors que les autres manifestations morbides sont à peine marquées. Les cultures du Proteus déterminent d'abord des troubles généraux extrêmement graves; l'animal commence paravoirde la difficulté à sauter, puis ses membres se paralysent progressivement el il devient inerte. C’est à ce moment que:le cœur présente les modifications que j'ai indiquées. Les manifestations cardiaques sont donc rejetées au deuxième plan, loin de constituer le phénomène primitif et capital, comme dans l’intoxication par les cultures du B. septicus putidus. + Le Pacille diphtéritique influence également le cœur; mais son action est bien moins appréciable. Les cultures stérilisées, concentrées dans le vide, ralentissent les battements et diminuent leur amplitude, mais elles ne modifient pas l’excitabilité du myocarde. Les effets sont d'ailleurs très peu marqués, au moins aux doses que j'aiemployées ; ainsi, dans une de mes expériences, j'injectai 15 gouttes représentant 6 centimètres cubes d’une cullure dans le bouillon, âgée d'un mois; les battements tombèrent de 32 à 24 à la minute et la ligne systolique s’abaissa de 12 à 8 millimètres. Dans une autre expérience, j ‘introduisis 10 gouttes répondant à 3 centimètres cubes d'une culture dans le sérum, éga- lement âgée d'un mois; au lieu de 38, il n’y eut plus que: 28 battements et la hauteur des eos n’atteignit que 5 millimètres au lieu de 8; Ces SÉANCE DU 18 FÉVRIER 177 modifications sont donc très légères et nullement comparables à celles que produisent les deux autres microbes que j'ai étudiés. D'ailleurs la grenouille est peu sensible à l’action des toxines diphtéritiques ; l'injection de quantités corespondant à 5 ou 6 centimètres cubes d'une culture dans le sérum, n’amène aucun trouble notable. Les phénomènes produits par le P. septicus putidus ne peuvent donc être considérés comme des manifestations banales; les toxines de ce microbe exercent sur le cœur de la grenouille une action véritablement spécifique. MÉTHODE CLINIQUE SIMPLIFIÉE D'ANALYSE D'URINE POUR FIXER LES DEGRÉS D'AUTO-INTOXICATION ET L'ÉNERGIE DES PROCESSUS D'OXYDATION INTRA-ORGANIQUES, par M. le Professeur D' ALEXANDRE PœuL (de Saint-Pétersbourg;. Nous connaissons maintenant les leucomaïnes et leur rôle dans l’orga- nisme, et nous savons de quelle importance il est de rechercher leur présence pour expliquer les phénomènes de la vie des tissus et de l’indi- vidu qui, jusqu’à présent, étaient des mystères dont nous devons l’expli- cation aux recherches de la science française. Nous ne reviendrons pas sur la description de ces substances, que M. Armand Gautier a faite d’une manière magistrale dans son cours de chimie. Le célèbre savant a démontré que les leucomaïnes sont des pro- duits de la vie normale des cellules, et que ce n’est pas seulement dans des conditions anormales ou pathologiques que se forment ces substances, dont une partie présente des qualités toxiques. Mais, naturellement, leur accumulation dans l'organisme est une condition anormale, pouvant amener des aecidents graves et même la mort. Il est donc indispensable que, d’une façon ou de l’autre, l'organisme se débarrasse de ces substances qui empêchent son fonctionnement normal. Cette élimination a lieu au moyen des processus d’oxydalion intra-organique, grâce à laquelle les leucomaïnes sont, soit complètement brülées, soit transformées en com- positions plus simples et rendues ainsi propres à être éliminées par les reins. C’est précisément en cela que consiste la défense de l'organisme contre l’auto-intoxication. L’auto-inloxication a sa place dans les maladies les plus diverses, soit chroniques, soit aiguës, comme par exemple : l’arthrite, le rnumatisme, la plus grande partie des maladies infectieuses, la constipation chronique, toutes les formes de surmenage, le diabète, et toute une série de maladies nerveuses. Dans les maladies causées par les micro-organismes infectieux, les causes de l’auto-intoxicalion sont les produits de la vie des bactéries 178 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE et M. Bouchard a le premier constaté dans ces maladies la présence des ptomaïnes. Dans une suite d'observations des plus intéressantes, M. Bouchard a démontré, entre autres choses, que la diminution des processus d’oxyda- tion, chez les anémiques, par exemple, amène une augmentation de la toxicité des urines. M. Armand Gautier a démontré que l'oxygène qu'introduisent dans l’organisme, la respiration ou la nourriture, ne pouvait pas, à lui seul, expliquer toute l'oxydation intra-organique et arriva à cette conclusion qu'il y avait lieu d'admettre la présence d’un ferment d'oxydation. J'ai déjà indiqué que la spermine était très vraisemblablement le fer- ment chimique qui favorise les processus d’oxydation intra-organique. Ce ferment agirait par sa seule présence, d’une manière catalytique. Mais maintenant que l'étude de l'auto-intoxication a pris une si large place dans la pratique, on comprend aisément de combien d'importance il est, pour les médecins, de connaître les quantités de leucomaïnes pré- sentes dans l'urine. La méthode d'analyse des leucomaïnes proposée par M. Armand Gautier, est de la précision la plus complète, mais, par cela même, elle exige une manipulation très délicate et très longue, ce qui la rend impraticable pour les analyses d’urine journalières. D'un autre côté, comme l’on sait, l'évaluation de l’urée au moyen de la solution d’azotate de mercure par la méthode de Liebig, perfectionnée par Pflüger, donne des résultats vagues, puisque, par ce moyen, on évalue non seulement l’urée, mais encore les leucomaïnes. Les procédés de Knoop, de Hüfner, d'Yvon, etc., fondés sur l’emploi de l’'hypobromite de soude, donnent des indications peu précises sur la quantité de l’urée, car, dans ces conditions, on mesure également une partie de l’azote des leucomaïnes. Pflüger et Bohland ont proposé un moyen de dosage de l’urée, fondé en partie sur l’ancien procédé de mesure de l’urée de Bunsen, d’après lequel l’urée en présence d’une soluiion alcaline de chlorure de baryum se décompose en une molécule d'acide carbonique et deux molécules d’ammoniaque. Mais comme dans l'urine, il y a d’autres matières azolées, Pflüger et Bohland les précipitèrent au moyen de l'acide phosphotungstique et mesurèrent ensuite l’urée par la méthode de Bunsen. Bien que ce moyen ne soit pas à l'abri de tout reproche, il n’en donne pas moins des chiffres assez rapprochés de la vérité. Mais il est lrop compliqué pour répondre aux exigences de simplicité de la pratique médicale. Le moyen que je propose, bien que ne contenant rien de nouveau en particulier, est, par sa simplicité, pratique pour chaque médecin et demande pour la mesure particulière de l’urée et des leucomaïnes à peine quelques minutes avec des accessoires peu compliqués. Les résultats que SÉANCE DU 18 FÉVRIER 179 l'on reçoit par cette méthode, bien que ne pouvant pas prétendre à la précision absolue, répondent complètement aux exigences cliniques. Autant qu’il est à ma connaissance, toutes les leucomaïnes donnent avec l'acide phosphotungstique en présence de l'acide chlorhydrique, un précité, tandis que l'urée et les sels d’ammoniaque ne se déposent pas dans ces conditions. Je me suis servi dans ce but d’acide phosphotungs- lique préparé selon le procédé de Scheibler. Dans les cas d'urine anor- male, la présence de l'albumine et de la peptone aurait empêché la mesure des leucomaïnes, car l’acide phosphotungstique les précipite éga- lement. Mais l'acide phosphotungxtique, en présence d’un excès d'acide acétique précipite l’albumine et la peptone sans agir sur les leucomaïnes. Quand il n’y a que de l’albumine et seulement des traces de peptone, il est préfé- rable d'éliminer l'albumine en la coagulant par le chauffage à ébullition. Le précipité de leucomaïnes qui est effectué avec facilité sous l'influence de l’acide phosphotungstique-en présence de l'acide chlorhydrique pré- sente dans l’appareil un fort résidu, par l'aspect duquel on peut déjà juger, jusqu'à un certain point de la quantité des leucomaïnes de l'urine. L'évaluation des leucomaïnes par l'aspect du dépôt pourrait passer pour le moyen le plus simple pour les besoins cliniques. Un peu plus bas on trouvera des procédés plus précis bien qu'également simples, pour la mesure des leucomaïnes. Voici le procédé de mesure des leucomaïnes par l'acide phosphotungs- tique : À 100 centimètres cubes d’urine ne contenant ni albumine, ni peptone, on ajoute 25 centimètres cubes d’acide chlorhydrique (P. 8. 1, 134) et 10 centimètres cubes de solution de 10 p. 100 d'acide phospho- tungstique. Au bout de quelques minutes, il se forme dans le verre un précipité. Quand il est déposé, on se débarrasse d’une partie du liquide, et le précipité, avec le liquide restant, est versé dans une éprouvetle graduée (lube eudiométrique divisé en centimètres cubes). Dans la plupart des cas, le précipité se forme assez rapidement et d’une façon assez régulière (1). Dans les contre-épreuves avec la même urine, dans plusieurs essais avec l'acide phosphotungstique Les résultats reçus sont concordants (2). Le résidu, outre les leucomaïnes, contient une certaine quantité de (1) Pour hâter le précipité et empêcher l’adhérence du dépôt sur les parois (ce qui d’ailleurs arrive très rarement), on peut de temps en temps faire tour- ner verticalement le tube autour de son axe. Si on a à sa disposition une machine centrifuge pour précipiter les dépôts, on doit recommander de s’en servir. (2) Dans quelques cas, très rares, j'ai reçu un dépôt ne pouvant pas servir pour l'évaluation des leucomaïnes d’après le volume de leurs phosphotungs- , 2 SOCIETÉE DE BIOLOGIE 180 NUMÉROS COULEUR SELON VOGEL 1000:4 1000:6 1000:5 1000:6 1000:6 1000:6 1000:5 1000:5 1000:4 1000:5 1000:8 1000:5 1000:4 1000:5 1000:6 1000:5 1000:3 1000:5 1000:5 POIDS SPÉCIFIQUE . = IR I — S © © OS OC De D & © 16 [AS] 19 Re Re ee 2 [=] = (eù 4°04:9 1.018 1.022 1.020 1.029 1.012 1.029 1,012 4.021 1.020 1000:5/1,013 AZOTE DE L'URÉE SELON YVON REACTION UREÉE SELON YVON p. 1000 |p. 1000 A = Q 2 x = É (él mn A4 A (ea| O a PAR z | ka] © DE gel on = 78 | A5 [ea AY E © tu a A [ea] R A 8 #2 ea Fa mi = É e Q 3 < p. 1000{p. 1000 !p. 1000 16.93! 7.90116.19| 7.55] 0.74 13.04! 6.08112.30| 5.74] 0.74 16.73| 7.80/16.14| 7.53| 0.59 21.63110.09/21,12| 9.85] 0.51 24,65111.50/23.49/10.96! 1.16 19.36| 9.03118.27| 8.52] 1.09 18-2319 1241751188 44IN 0072 u 119.45] 9.03118.86| 8.80! 0.59 a 15.241 7.09/14.87| 6.94) 0.37 — |24.31111.34123.78|11.10| 0.53 O0 115.96! 7.451145.43| 7.01! 0.53 €124.06110.29123.58|11.00! 0.48 27.01112.60126.46112.35| 0.55 39.69 35.14/16,40! 0.55 9.29| 4.331 8,45] 3.94] 0.84 31.78114.83130.25114.11| 1.53 11.01| 5.14110,93| 5.10] 0.08 17.84| 8.32117.16| 8.01| 0.68 19.31| 9.01118.78| 8,76| 0.53 12.98| 6.06112.29| 5.73] 0,69 QUANTITE TOTALE KJELDAHL de l’azote de l’urine SELON p. 1000 8.9% 6.12 8.42 10.34 12.414 OPDI 10.26 9.84 1.36 12.83 1.74 41.21 13.17 17.19 5.26 15.41 D.91 9.36 9:76 6.46 RAPPORT DE L'AZOTE TOTAL de l'urine (SELON KJELDAHL) à l'azote de l'urée (SELON PŒHL) 8.94: 7.55—100:84.45 6.72: 5.74—100:85.42 8.42: 7.53—100:89.67 10.34: 9.85—100:95.26 12.14:10.96—100:90.28 9.57: 8.52—100:87.96 10.26: 8.17—100:79.63 9.84: 8.80—100:89.43 7.36: 6.94—100:94.44 12.83:11.10—100:86.52 9.74: 7.01—=100:90.57 HA 00= 10098418 13.17:42.35 —100:93.77 17.19:16.65—100:96.86 5.26: 3.94—100:74.91 15.41:14.11—=100:91.56 5.34: 5.10—100:96.05 9.36: 8.01—100:85.58 9.76: 8.76—100:89.75 6.46: 5.73—=100:88.70 ALBUMINE p. 1000 absente. traces. » absente. 0.48 traces. 0.98 traces. ») absente. 132 absente. )) ») )) traces. absente. )) )) )) PEPTONE TRACES a = LEUCOWAINES | 4 | 2 | & | $ EE Re e) A De ee = © Se © es (2) 3 ne IE D = En | à EA A CS I NO S 2 E éré | E a” © E A ASC I EN SA = 2 ei Se ET Re F4 A = Del Le k 52 Sete Ra A © HAN Or E a A OÙ = CA SRE | CE à < O ss | | — p. 1000|p. 1000|p. 1000|p. 1000|p. 1900|p. 1000 1.30! 0.91! 0.71] 1.68| 1.53| 3.80 7. 85120,90 05311243 410,39) 8822 3.40| 0.43] 0.58] 1.94! 1.86! 5.04 3.991 0.50! 0.58|: 1.64 1:5#11442 6.35| 0.79| 0.65| 1.36| 1.73] 7.24 10.60} 1.33| 0.55|: 1.87 .2.24| 7.63 1.40] 0.93! 0.83| 1.98| 1.76| 4.81 6.10) 0.78| 0.64| 2.12] 1.63|112.93 2.801 0:35|: 0:33) 4,16 4,62| 5:60 5.15] 0.64! 0.98| 4.17! 1.54|10.52| 4,45! 0.56! 0.29| 1.18| 1.18| 8.23 4,901 0,640. 81/2.3111 24031 6,13 5.001.0.69/ 0.711495 44521 5.62 5.65] 0.71! 0.64] 3.46| 2.58| 6.92 8.50! 1.06! 0.68! 1.42! 1.15! 4.741] 13.20] 1,651 0:81| 3,82 2:98110.82 1 8010.23); 0.211 4H 4321 6084 7. 100 6120/0112 N021M20106 112"32 4,20! 0,53! 0.54! 2.52| 1.98|10.37 3.20| 0.40! 0.56! 1.11] 1,0! 4.13 SÉANCE DU 18 FÉVRIER 181 matières colorantes de l’urine et de l'acide urique. J'ai remarqué qu’en divisant par huit le nombre de centimètres cubes du dépôt obtenu pour 100 centimètres cubes d'urine, on recoit sensiblement le poids en déci- grammes des leucomaïnes présentes dans ces 100 centimètres cubes d’urine, soit le poids en grammes des leucomaïnes de 1,000 centimètres cubes d'urine. Par exemple, si pour 100 centimètres cubes d'urine il se dépose 4 centimètres cubes de précipité, nous diviserons 4 par 8 — 0 gr. 5 de leucomaïnes pour 1,000 centimètres cubes d'urine. (Ce que nous écri- rons 0 gr. 5 p. 1000.) Pour avoir enfin un résultat encore plus précis, on traite le résidu de phosphotungstates recu de 100 centimètres cubes d'urine, par l'acide sulfurique concentré, d’après la méthode de Kjeldahl pour le dosage de l'azote. En présence de l’acide phosphotungstique, les leucomaïnes sont très facilement transformées par le chauffage avec l'acide sulfurique en sels ammoniacaux. Jusqu'à présent, à l'exception du procédé de Pflüger et Rohland, tous les moyens pour évaluer l’urée, pèchent en ce qu'ils mesurent en même temps les leucomaïnes ; on pourra donc mesurer l'azote des leucomaïnes par le procédé que je viens d'indiquer, puis, dans le restant du liquide, mesurer l’azote de l’urée par l'hypobromite de soude. Pour la simplification du calcul des résultats, on peut employer les pro- portions suivantes : _ 100 centimètres cubes d'urine sont traités par 25 centimètres cubes d'acide chlorhydrique, 10 centimètres, cubes de solution à 40 p.100 d'acide phosphotungstique et 15 centimètres cubes d’eau. Après la précipitation du résidu, 1.5 partie du liquide filtré répond à une partie d'urine employée. Pour évaluer l'azote de l’urée par l’hypobromite de soude selon la méthode de Fauconnier, de Yvon, etc...,on prend 3 ou 6 centimètres cubes du liquide filtré, d’où l’on a déjà précipité les leucomaïnes et le volume de l'azote obtenu correspond à 2 ou 4 centimètres cubes de l'urine que l’on avait à analyser. Comme dans certains cas la mesure de l’urée a lieu en présence d’acide, j'emploie l'hypobromite de soude reçu de la manière suivante : 4 partie de brome et 4 parties de solution de soude caustique (P. S. 1,363) c'est-à-dire une partie Na Ho et 2 parties d’eau. tates, par exemple dans les cas d'éclampsie, quand l'urine du malade, avec beaucoup d’albumine, contenait également beaucoup de leucomaiïnes, J'élimi- naïs l’albumine, le résidu de phosphotungstates se présentait si nuageux et si floconneux que faire l'évaluation par le volume des dépôts était absolument impossible. Je crois pouvoir ajouter que, en général, le caractère des dépôts de phosphotungstates présente un intérêt diagnostique remarquable sur lequel je me propose de revenir plus tard. 182 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Comme on pouvait le prévoir on reçoit de cette façon une teneur en urée moindre que par les méthodes auparavant usilées. La table ci-dessus donne les résultats d'analyses d’urines tout à fait diverses. Dans ces analyses, l’urée est mesurée parallèlement par la méthode d’Yvon au moyen de l’hypobromite de soude et par la méthode que j'ai proposée. Les résultats reçus par cette seconde méthode sont moindres, mais la différence des résultats, bien que en rapport avec la présence des leucomaïnes, n'indique pas exactement leur quantité. Dans le tableau se trouvent les résultats de la mesure en volumes des leuco- maïnes sous forme de phosphotungstates, et en même temps la mesure de l’azote tolal de l’urine par la méthode de Kjeldabl. L’acide urique est mesuré par la méthode de Haykrafñt. Des résultats insérés dans le tableau, le lecteur peut conclure jusqu'à quel point cette méthode répond aux exigences de la pratique médicale au point de vue de la simplicité et de la précision. Cette méthode a déjà d’ailleurs été d’une réelle utilité en indiquant la liaison génétique entre les symptômes morbides et la quantité de leucomaïnes présente dans les urines, et je me propose de revenir sur eette question, dont l'étude m'occupe en ce moment. SUR LA PHYSIOLOGIE COMPARÉE DE LA THERMOGENÈSE par M. RaPHarz DuBoïs. Les résultats expérimentaux que j'ai fait connaître dans la précédente séance montrent bien nettement que la moelle, pendant le réchauffement automatique de la marmotte, n’est qu’un lieu de passage pour l’excita- tion centrifuge thermogène. On sait que la section complète au niveau de la quatrième vertèbre cervicale empêche absolument le réchauffement spontané. IL n'en est pas de même avec la section des cordons antérieurs et antéro-latéraux au même niveau. Après cette opération, la température se relève comme chez l'animal normal etil y a des alternatives de sommeil et de torpeur. Ce fait montre déjà que le système musculaire ne joue qu’un rôle au moins très secon- daire dans le réchauffement, puisqu'après la section des cordons anté- rieurs et antéro-latéraux, il y a paralysie de la partie la plus impor- tante du système musculaire. Si la section porte sur les cordons postérieurs, l’excitation centripète de réveil ayant été produite par l'opération elle-même, le réchauffement automatique s'opère normalement. SÉANCE DU 18 FÉVRIER 183 Mais, vient-on à détruire l’axe gris de la moelle, le réchauffement com- mencé s'arrête aussitôt : ce n’est donc pas la substance blanche médul- laire quisert de voie de conduction au réflexe thermogène, mais bien l’axe gris. Ce point étant établi, si nous pratiquons la section des deux nerfs sympathiques au cou, on n’observe rien de particulier : le réchauffement se fait bien et l'animal peut avoir ensuite des périodes régulières de réveil et de torpeur. Un des sujets opérés présentait seulement pendant les périodes de réveil un léger état d’engourdissement. Mais, après l’extirpation des ganglions cervicaux inférieurs et premiers thoraciques, la température ne s’est élevée que de 3°,8 dans le rectum et de 1 degré dans la bouche en six heures. On verra, par les expériences suivantes, qu’il ne faudrait pas se hâter de mettre ce résultat sur le compte de la suppression des origines des nerfs accélérateurs du cœur. Si on coupe la chaine sympathique du côté droit, entre le sixième et le septième ganglion thoracique au moyen d’une plaie pratiquée dans le thorax, il y a ralentissement marqué du réchauffement qui est incomplet, et la marmotte retombe très vile en son état de torpeur. Je me suis assuré qu'avec le poumon gauche seul, la marmotte se réchauffait aussi bien qu'avec ses deux poumons, nouvelle preuve de la trop grande importance accordée jusqu'à ce jour au fonctionnement de cet organe dans le mécanisme de l'hibernation. La section du nerf splanchnique droit, avec ouverture de la plèvre droite, a donné un ralentissement plus marqué encore que dans l'expé- rience précédente et un réchauffement également plus incomplet. C'étaient là des indications précieuses mais néanmoins ces lésions n'em- pêchaient pas complètement le réchauffement, résultat qu'il était indis- pensable d'obtenir pour élucider la question posée. On a alors extirpé les deux ganglions semi-lunaires et, après cette opération, qui est plus facile chez la marmotte que chez le lapin, en sept heures la température du rectum s’est élevée seulement de 0°,2 et celle de la bouche s’est abaïssée de 32,4. L'animal est resté endormi deux jours et est mort dans la nuit du deuxième jour. Si l'on rapproche ces résultats d'autres faits expérimentaux que je ferai connaître très prochainement on est conduit à admettre que c'est le foie qui est le foyer de réchauffement de l'hibernant et qu'il existe entre ce viscère et les circonvolutions cérébrales des relations établies par l'axe gris de la moelle et le svstème grand sympathique. Les communi- cations sympathiques se font au niveau de la région cervicale principa- lement entre la 4° et la 7° vertèbre cervicale. 184 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE MYÉLITE AIGUE EXPÉRIMENTALE PRODUITE PAR:L'ÉRYSIPÉLOCOQUE, par M. H. Bources. (Travail du laboratoire de M. le professeur Straus.) Au commencement du mois d'avril 4899, j'avais à ma disposition des cultures d'un érysipélocoque, qui, après avoir perdu sa virulence pre- mière, était, par ensemencements successifs dans du sérum de lapin, devenu de nouveau virulent au point de tuer un lapin en quatre jours par inoculation dans le tissu cellulaire. Sa virulence avait encore disparu au bout de deux mois et il ne produisait plus en injection dans le sang aux doses de 2 à 3 centimètres cubes qu'un amaigrissement passager des animaux en expérience et ne donnait lieu en injection sous-cutanée à la dose de 4 centimètre cube qu’à une rougeur très circonscrite, qui durait à peine 24 heures. Parmi les animaux ainsi inoculés dans l’espoir de rendre sa virulence à ce streptocoque, il se trouva un lapin qui fut atteint d’une myélite aiguë. Il avait recu, le 4 avril, 3 centimètres cubes de culture dans le tissu cellulaire, en même temps que 1 centimètre cube dans la veine marginale de l'oreille. La réaction locale fut à peine sensible, mais deux jours après, l'animal commença à trainer le train postérieur, et Le 9 avril (5 jours après l’inoculation), il était atteint d’une paraplégie complète accompagnée de diarrhée avec paralysie des sphincters de la vessie et du rectum. L'animal maigrit très rapidement, mais c'étaient les muscles du train postérieur qui étaient le plus complètement émaciés. L'animal mourut le 49 (15 jours après l’inoculation, 10 jours après le début de la paralysie); la paraplégie resta complète jusqu’à la fin; dans les derniers jours, il se fit à la cuisse droite une escarre qui atteignit rapidement les dimensions d’une pièce de 2 francs. À l’autopsie, le foie, les reins étaient rouge sombre, très congestionnés. La rate, au contraire, était très petite. Les poumons paraissaient sains. La moelle n’offrait d'autre modification apparente qu'une friabilité plus marquée qu’à l’état normal au niveau du renflement lombaire. Elle fut placée dans le liquide de Müller, ainsi que le cerveau, qui n'était pas altéré. Les nerfs des quatre membres, d'apparence saine, furent placés dans l'acide osmique. Des fragments des muscles des quatre membres, d’une teinte jaune pâle et considérablement atrophiés, particulièrement au niveau des membres postérieurs, furent placés dans le liquide de Müller. Le sang du cœur, ensemencé dans du bouillon, ne donna pas de cul- ture de streptocoque. Voici les résultats que m'a donnés l'examen histologique de ces pièces : EXAMEN DE LA MOELLE A L'ÉTAT FRAIS, — Par la dissociation de frag- ments de cette moelle fraîché, pris à différents niveaux et colorés au SÉANCE DU 18 FÉVRIER 185 picro-carmin, on conslate que ni la région cervicale, ni la région dor- sale ne renferment de corps granuleux, tandis qu’on en trouve en grande abondance au niveau du renflement lombaire, surtout dans le cordon latéral gauche et dans les cordons postérieurs. Les cellules nerveuses retrouvées dans les fragments dissociés, sont, en grand nombre réfringentes, alvéolaires ; leurs noyaux sont mal colorés. Cette altération des cellules se retrouve dans toute la hauteur de la moelle aux régions cervicales et dorsales, mais d’une façon plus constante au niveau du renflement lombaire. EXAMEN DE LA MOELLE DURCIE. — Les coupes ont été colorés au picro- carmin et toujours comparées à des coupes de moelle saine de lapin faites au même niveau. Renfjlement cervical. — Les altérations portent presque exclusivement sur la substance grise. Les cellules nerveuses des cornes antérieures, étudiées à un faible gros- sissement, paraissent avoir diminué de nombre de plus de moitié. Dans les deux cornes antérieures, c’est à peine si une ou deux cellules peuvent être considérées comme normales. Les altérations des cellules nerveuses étudiées à un fort grossissement (7 de Vérick) présentent les aspects suivants : tantôt la cellule est arrondie, sans prolongements, elle fixe mal la matière colorante, le pro- toplasma reste, clair, rosé, réfringent ; le noyau est peu coloré ou ne se voit plus. Tantôt le corps cellulaire est creusé de vacuoles réfringentes ; les prolongements se colorent mal ou ont disparu, le noyau est peu appa- rent. Les cellules nerveuses des cornes postérieures paraissent Déalerenl moins nombreuses qu'à l'état normal. Leur protoplasma est aussi déformé, se colore mal ou se creuse de vacuoles. Les noyaux de la névroglie se voient en beaucoup moins grand nombre qu'à l'état normal. Les cordons de la substance blanche sont à peu près intacts; cependant on constate de temps à autre au centre d'un tube nerveux un cylindraxe très gros, mal coloré, d'aspect vitreux. Les modifications vasculaires sont peu sensibles. On peut noter cepen- dant que dans la substance grise les orifices des vaisseaux sont souvent oblitérés par des blocs jaunâtres réfringents et qu'on rencontre quelques amas de globules rouges en dehors des vaisseaux. Région dorsale. — Les altérations restent encore ici eantonnées à la substance grise. Les cellules nerveuses sont beaucoup moins nombreuses qu'à l'état normal. C'est la dégénéreséence vacuolaire qui domine; on rencontre des espaces clairs, circulaires ou à contours policycliques, généralement sans noyau, quelquefois avec un noyau mal coloré représentant les vestiges de cellules complètement dégénérées. 1 186 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les cellules des cornes postérieures sont aussi profondément atteintes que celles des cornes antérieures. Au milieu de la substance grise on ren- contre fréquemment des cylindraxes gonflés et mal colorés. Les cellu!es de la névroglie sont parfois vésiculeuses, les noyaux sont beaucoup moins abondants qu’à l’état normal. Son aspect fibrillaire est peu net. Dans les cordons de la substance blanche, les tubes nerveux ne sont souvent plus bien nets, ni bien dessinés. Les cylindraxes sont fréquem- ment hypertrophiés et pâles. Les modifications vasculaires sont devenues très marquées à la région dorsale. Les vaisseaux sont nombreux, très apparents, pleins de sang, sur- tout dans les cornes postérieures, et l’on constate dans la substance grise de fréquentes extravasations sanguines. Renflement lombaire. — Lorsqu'on examine les coupes à un faible grossissement, on est frappé tout d’abord de ce qu’elles se colorent fort mal (bien qu’elles aient séjourné trente-six heures dans le picro-carmi- nate d’ammoniaque); on remarque en outre qu'il est très difficile de dis- tinguer la substance grise de la substance blanche. On voit que toute la surface de la coupe est criblée de cercles clairs contenant des débris de corps granuleux ; l'extrémité de la corne postérieure droite est complète- ment détruite. A un fort grossissement, les cellules nerveuses sont à peine reconnais- sables. Quelques-unes sont entièrement réfringentes et à peine rosées, d'autres complètement vacuolaires; mais la plupart ne sont plus repré- sentées que par des espaces clairs à contenu grenu avec ou sans noyau, conservant encore la forme de la cellule nerveuse. La substance grise est parsemée d’espaces clairs arrondis, renfermant ou ayant renfermé des corps granuleux. Les noyaux de la névroglie ne se colorent plus; son aspect fibrillaire a complètement disparu et elle a pris l'apparence d’une masse amorphe mal colorée. La substance blanche est encore plus envahie par les corps granuleux. Dans la partie postérieure du cordon latéral droit on voit de grandes cavités claires, creusées par les corps granuleux qui ont complètement détruit à ce niveau les fibres nerveuses etla substance grise de la corne postérieure. Au contraire la zone radiculaire postérieure gauche conserve un assez grand nombre de fibres nerveuses intactes. Partout ailleurs les cylindraxes ne se colorent plus, ou bien sont très gros, grenus et rose pâle. Les vaisseaux sont peu apparents, ils ne contiennent pas de sang. EXAMEN DES RACINES RACHIDIENNES. — Lesracines postérieures paraissent saines sur loute la hauteur de la moelle. Quant aux racines antérieures, elles semblent normales dans les régions cervicale et dorsale. A la région lombaire, au niveau du point où la racine antérieure côtoie le ganglion SÉANCE DU 48 FÉVRIER 187 rachidien, les cylindraxes sont altérés, gonflés, granuleux, peu colorés. Sur tout le reste du trajet des racines antérieures, les tubes nerveux sont sains. A la région lombaire, également, la plupart des cellules nerveuses des ganglions rachidiens sont vésiculeuses. Elles se colorent peu, mais ont conservé leurs noyaux. EXAMEN DES NERFS PÉRIPHÉRIQUES. — Les nerfs des membres antérieurs et postérieurs, colorés au picro-carmin, après séjour de vingt-quatre heures dans l'acide osmique, ne présentent pas de lésions à la dissociation. Dans les nerfs de la patte postérieure droite, on trouve quelques tubes à myéline fragmentée, mais en si faible quantité qu'on ne peut guère regarder cette altération comme pathologique. EXAMEN DES MUSCLES. — Les muscles des quatre membres sont atteints de dégénérescence granulo-graisseuse. L’altération est beaucoup plus prononcée au niveau des membres postérieurs qu'aux membres anté- rieurs. En résumé, la maladie et les lésions que j'ai obtenues expérimentale- ment, diffèrent sensiblement de ce qu’a décrit M. Roger (1). Tous les cas qu’il a observés se traduisaient cliniquement par une atrophie musculaire progressive accessoirement accompagnée de parésie; ils étaient anato- miquement caractérisés par une dégénérescence des cellules nerveuses de la moelle limitée aux cornes antérieures. Dans les cas que nous venons d'étudier, il s’agit d’une myélite aiguë diffuse à corps granuleux, ayant détruit presque entièrement la: moelle au niveau du renflement lombaire et ayant altéré les cellules nerveuses sur toute la hauteur de la moelle et dans toute l'étendue de la substance grise. Cette myélite avait produit une paraplégie complète du train postérieur, avec paralysie des sphincters et escarre fessière, accessoirement accompagnée d’atrophie musculaire des membres. SUR LES FONCTIONS OTOLITHIQUES. Note de M. Pierre BonNier, présentée par M. A. Grarp. Les Otolithes sont des corpuscules de faible densité, immergés dans un milieu liquide et maintenus par différents artifices organiques au voisi- nage d'une paroi neuro-épithéliale ectodermique à fonction tactile. Leur rôle sensoriel se manifeste et s'explique simplement par l'expé- (1) Roger. Atrophie musculaire progressive expérimentale, Annales de l’Ins- titut Pasteur, 1892, p. 436. 188 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE rience suivante. Si dans un vase en verre rempli d’eau on agite avec la main la masse liquide, en la poussant violemment contre un point de la paroi, quelle que soit la force déployée, l’ébranlement transmis au liquide ne parviendra pas à briser le verre. La fluidité et la plasticité même du liquide décomposent et divisent les forces dirigées contre la paroi, et le travail produit, manquant d'unité dans sa force et sa direction, est insuf- fisant pour réaliser un effet appréciable. Si, au contact de cette même paroi, on immerge un corps De libre, même moins dense que l’eau, un fragment de glace, l'agitation de en se communiquera au solide, l'inertie relative de celui-ci, exploitée par l'impulsion, le fera donner comme un bélier contre la paroi, et un effort beaucoup moindre que dans le premier cas sera capable de briser cette dernière. Sa qualité de corps solide traduit en un travail effectif, un dans sa force et sa direction, l'agitation plastique et variable du milieu liquide. Cette propriété solidienne attribue au corps immergé le rôle intermé- -diaire de concentrateur de l’ébranlement transmis et d’indicateur de sa direction. Dans l’ébranlement, le frottement simple de l’otolithe inerte et passif, la paroi tactile peut analyser la force et la direction du déplacement complexe de la masse liquide par rapport à elle (orientation objective), et par un mécanisme identique le déplacement de la paroi elle-même par rapport au milieu liquide, pélagique ou endolymphatique qui la baigne (orientation subjective). Le seul appareil otolithique existant avant toute acier otocystique est la massue qui constitue l'organe marginal de certaines Méduses. C'est un prolongement teutaculiforme dont l'extrémité distale s’est condensée en un petit amas calcaire : une telle formation est tout à fait comparable, surtout au point de vue physiologique, à l’haltère des diplères, prove- nant de leur côté d’une aile condensée. Le tentacule, organe mobile et tactilé, a dû perdre sa mobilité et accroître son inertie pour s'adapter à une tactilite qui ne s'exerce que dans la perception des frottements, déplace- ments et ébranlements de la masse liquide ambiante, ou de l’animal lui- même dans son milieu liquide. La fluidité de ce milieu rend ces mouve- ments peu appréciables, quel que soit leur sens, mais ils deviennent très sensibles quand ils sont transmis à un corps solide, inerte et d'une den- sit à peine différente de celle du milieu où il est immergé, ce corps solide et inerte ne présente d'autre mouvement que celui que lui commu- niquent le déplacement du milieu ou celui de l'animal, mais il le traduit -en un mouvement simple de translation on d’oscillation bien autrement puissant que celui du liquide lui-même. Etablissons brièvement la physiologie d’un tel cuéane. Si l'animal se meut, l’otolithe étant plus inerte et moins fluctuant qu'aucune autre par- -tie de l'organisme, répondra au moindre déplacement par une oscilation marquée variant avec l'intensité et la direction .du mouvement. Ce qui SÉANCE DU 18 FÉVRIER 189 reste à l'appareil de sa tactilité tentaculaire percevra un frottement très actif du milieu liquide sur telle ou telle face de sa masse solide. Si, l’ani- mal étant immobile, le milieu se déplace en totalité, comme il arrive à la surface où flottent les méduses, la moindre vague intéresse l'inertie de la pelite massue plus vivement que celle de l’animal entier, et le frottement contre la masse liquide y est plus apprécié par le neuro-épithélium tac- tile qui tapisse le tronc de l'appareil en massue. Que ce soit un ébranle- ment simple du liquide, comme l'approche d’un autre animal se mouvant dans le voisinage, le bris d’une lame ou la chute d’un objet à la surface, l’appareil inerte y est toujours plus sensible et sa tactilité y est plus direc- tement intéressée, tant par ia force que par la direction de l'ébranlement. L'organe marginal renseigne aussi l'animal sur ses propres déplacements dans l’eau, par un procédé qui rappelle vaguement celui des navires et des aérostats mesurant leur vitesse. C’est donc bien déjà un organe péri- phérique du sens de l’espace sous sa double forme d'orientation subjec- tive et objective, sa configuration sphérique le rendant également sus- ceptible aux ébranlements et aux mouvements de toute direction. L’orientalion subjective commandant, dans chaque domaine sensoriel, les réflexes d’équilibration et d’appropriation des mouvements coordon- nés, ces organes marginaux se rapprochent encore des haltères des dip- tères par leur fonction d'organes sensoriels de l'équilibre, sensibles à la pesanteur. Ces petites massues des organes marginaux chez les Hybroïdes vont offrir, chez des individus appartenant à des groupes très voisins, de grandes variations et inaugurer presque d'emblée les formations otocys- tiques. Ainsi, tandis que chez les Æginides la massue reste saillante, on trouve chez les Trachynémides une massue très courte, dont le pied est circonserit par un soulèvement circulaire de l’ectoderme, C’est déjà une formation concave. La perception de frottement dans Île liquide se double d’un toucher effectif par le contact de l’otolithe avec la crête ectodermique à longs cils qui l'entoure. Enfin, chez les Géryonides, l’ectoderme se referme au-dessus de l'otolithe, qui se trouve ainsi inelus dans la masse de l'animal. Remarquons en passant, chez les Trachyméduses dont l’otocyste est ainsi fermé, une disposition du neuro-épithélium très analogue à la for- mation rétinienne de certains mollusques. En assimilant l’otolithe, centre de transmission des ébranlements, au cristallin des appareils visuels, d’une part on constate que chez les Trachyméduses le nerf suit la paroi de l’otocyste et pénètre dans sa cavité avec le pédicule de l’otolithe, pour se terminer dans un neuro-épithélium qui est adossé au corps otolithique et non à la paroi otocystique; d'autre part, on sait que dans l'œil de Pec- ten, le nerf développe aussi une cupule dont les bords se contournent en dedans pour former une rétine adossée au cristallin et non à a paroi oculaire. 190 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cependant, la disposition la plus générale est l'inverse; le cristalin et l'otolithe n’ont plus de rapport constant avec le neuro-épithélium rétinien ou otocystique qui s’adosse simplement à la paroi de l'organe, sans invo- lution du nerf. En effet, dans toutes les formations otocystiques qui sui- vront, l’otolithe ya perdre son pédicule et la paroi de l’otocyste reprendra pour elle l'exercice de la tactilité. L'otocyste en grelot remplace l’otolithe en battant de cloche. Il est aisé defvoir que dans ces appareils plus ou moins clos, l’otolithe libre fonc- tionne presque exactement comme la massue otolithique primitive, dont le mouvement pendulaire est remplacé par le grelottement de la petite masse solide libre dans sa loge à paroi tactile: et le frottement que per- cevait la tactilité de l’organe saillant à l'extérieur en oscillant dans son milieu liquide a fait simplement place à des perceptions de contact et de pression de la part de la rétine sphérique de l’otocyste. Les formations otolithiques dans les organismes supérieurs seront étudiées avec les formations otocystiques et labyrinthiques qui feront l’objet de prochaines communications. Ajoutons seulement que certains animaux possèderont plusieurs oto- lithes dans une même cavité ; chez les vertébrés, sauf quelques exceptions, il y aura un grand nombre de petites masses calcaires. Certains inver- tébrés emprunteront au milieu extérieur des particules solides qu’ils introduiront dans leurs fossettes otocysliques ouvertes. Enfin l'impor- tance de l’otolithe étant en raison inverse du rôle de l’'endolymphe chez les animaux supérieurs, pourvus d'appareils labyrinthiques décomposant l’ondulalion liquide, l’otolithe est réduit au rôle secondaire d’excitant taclile des extrémités nerveuses, saupoudrées d’une fine poussière calcaire rendant plus sensibles les pressions et les frottements de l’endolymphe circulant sur la paroi hérissée de cils. : En résumé les appareils otolithiques sont les premiers organes périphé- riques de l'orientation objective et subjective dans l’espace analysé par la perception des ébranlements. Comme tels ils créent, concurremment avec les autres appareils sensoriels, des images d'espace indispensables à la description des mouvements voulus, ou réflexes : aucune appropriation de mouvement n'étant possible sans représentation d'espace. Ce sont des organes périphériques des fonctions d’équilibration, relevant du sens de l’espace dans son domaire auriculaire; ils perçoivent l’ébran- lement et Ia trépidation sous leur caractère analytique etn'ont rien à faire avec l'audition qui, sous forme de perceptions lonales, synthétiques, est absolument refusée à tous les invertébrés et aux Vertébrés inférieurs. SÉANCE DU 18 FÉVRIER 191 DES INJECTIONS INTRA-PULMONAIRES. Note de M. le D'° DE LA JARRIGE, présentée par M. D'ARSONVAL. J'ai l'honneur de signaler à l'attention de la Société un mode de trai- ment pour les affections pulmonaires. Il consiste dans l'introduction directe de liquide dans les tubes bron- chiques par la voie du larynx et de la trachée. Le liquide injecté se compose d'huile d'olive stérilisée, tenant en disso- lution 10 p. 100 de menthol et 5 p. 100 de créosote de hêtre; on l'injecte à une dose variant de 5 à 20 centimètres cubes. Le traitement est basé sur les expériences de CI. Bernard, qui ont démontré la parfaite tolérance du poumon pour les liquides, et leur grande facilité d'élimination. CI. Bernard en tirait cette conséquence, qu'il y avait lieu, pour la médecine, d'utiliser cette remarquable propriété, à usage thérapeu- tique. Ces injections ne sont pas nouvelles, elles ont été pratiquées à diffé- rentes reprises. Les injections d'huile mentholée se font couramment dans la clinique des D Lubet-Barbou et Martin; de plus, M. le profes- seur Debove, dans son Traité de la phtisie pulmonaire, cite les injections d'huile créosotée, pratiquées à l'hôpital de la Croix-Rousse, par le D: Dor. La méthode n’est donc pas nouvelle; toutefois, mon expérience per- sonnelle, qui date de trois ans, m’a autorisé à croire que l'association du menthol et de la créosote donnait des résultats plus probants que l’un ou l’autre de ces agents employés séparément. de ne m'arrêterai pas à l’idée de démontrer la supériorité rationnelle du contact direct de l’agent thérapeutique, avec les surfaces enflammées sur les autres modes de traitement. Du reste, le raisonnement et la cli- nique vont ensemble et marchent de pair dans le cas. Je crois qu'il y a lieu de généraliser la méthode et de la faire entrer dans la pratique courante pour trois raisons : la première, parce qu’elle est facile; la deuxième, parce qu'elle ne détermine chez le malade ni douleur, ni réflexes ; la troisième, parce qu'elle est efficace, ainsi que la Société pourra en juger. Le résultat presque constant, obtenu après les premières injections, consiste dans la diminution très considérable des crachats et dans leur changement de coloration, ils deviennent moins épais, plus aérés et plus blancs; parrallèlement, on constate le retour au sommeil, et les accès de toux et de suffocation se font de plus en plus rares. Pour mme résumer, je crois pouvoir afñimer que si, dans les cas de tuberculose généralisée, l'injection intra-trachéale ne peut servir que de 192 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE palliatif, en diminuant l'intensité des symptômes. Il n’en sera pas de même, si la lésion est limitée et si le malade n'est pas encore arrivé à la période de cachexie et de dénutrition. J'ai à mon actif des cas de tuberculose certains, absolument guéris, chez lesquels il ne reste comme signe local qu'une légère diminution du bruit vésiculaire au sommet, alors qu'au début on percevait très claire- ment et du souffle et des râles humides. Quant aux bronchites catarrhales non spécifiques, elles ne résistent pas à vingt ou trente injections; c’est, je puis le dire, le triomphe de la méthode. Ce traitement n’est qu’à ses débuts, il est encore à l’état rudimentaire; il comporte de nombreuses modifications ou adjonctions soit par la qualité, soit par la quantité du liquide à injecter. Mais un fait va rester acquis, c'est la tolérance parfaite des tuyaux bronchiques pour les liquides; l’efficacité, relative ou absolue suivant les cas, vous sera démontrée ulté- rieurement. Dans tous les cas, j'ai pensé que ce moyen thérapeutique pouvait enri- chir notre arsenal d’une arme nouvelle, au grand bénéfice des médecins et des malades. Technique. — Œlle est des plus simples : 1° un miroir frontal pour éclairer le fond de la bouche ; 2° un petit miroir laryngien que l’on place dans la zone éclairée et qui vous donne l’image de l’épiglotte et de la glotte; 3° une seringue d’une capacité variant de 5 à 20 centimètres cubes terminée par une canule longue et recourbée; 4° une lampe ou une bougie. Le malade ouvre la bouche aussi grande qu’il le peut et tient le bout de sa langue avec deux doigts, puis la lampe étant placée derrière le malade, on dirige la lumière vers le pharynx avec le miroir frontal, et l’on place le petit miroir larÿngien dans la zone lumineuse. Ce dernier, qui est tenu de la main gauche, reflète l’image de la glotte; il suffit alors d'introduire dans l'ouverture ainsi perçue le bout de la seringue qui est tenu par la main droite, en ayant soin d'exercer un mouvement de bascule de bas en haut, afin que la canule dépasse les premiers anneaux de la trachée. Remarque. — On peut à volonté introduire le li quide dans la bronche droite ou gauche suivant l’inclinaison que l'on donne soit au malade, soit à la seringue. Rien n’est simple comme celte manœuvre, son application ne résiste pas à un apprentissage de quelques jours. Pour les médecins habitués au maniement du laryngoscope, la difficulté n'existe pas. Ogs. I. — J. Choulet, sept ans, habitant à Montreuil-sous-Bois, boulevard de l'Hôtel-de-Ville, 106. La mère m'amènele malade au mois d'avril 1891 ; je constate une dilatation bronchique considérable, il crache un pus fétide, d’une abondance telle que SÉANCE DU 18 FÉVRIER 193 ————_—_—]————…———…—…—…—…— …— … …" — — —…" _ _ —_ —-__——…—…—…—…—…—…—…—…——————.—.…—…—………….…—._———.———.—_—._—_—".,."..———————— le produit de la sécrétion journalière remplit et dépasse même quelquefois le contenu d'une tasse à café; état cachectique très prononcé ;.insomnie, toux, inappétence, amaigrissement. Après quinze injections, Le petit malade non seu- lement avait cessé de cracher, mais encore il se relevait à vue d'œil : aujour- d'hui, il se porte fort bien, il est même d’une force et d’une vigueur fort au- dessus de la moyenne. Remarque. — L'injection se fait aussi bien chez l'enfant que chez l'adulte. Ogs. II. — Guillot (Ernest), vingt-trois ans, habitant la commune de Mon- treuil, rue de l'Église, 9. Quoique très manifestement luberculeux (je le soignais depuis longtemps), est reconnu bon pour le service, rejoint en 1891 son régiment à Meaux, reste un jour à la caserne, huit jours à l'hôpital et recoit son congé de réforme aussitôt après. Injections journalières en 1891, pendant deux mois, aujourd'hui il présente tous les signes et la plus parfaite santé, les seuls stigmates restant consistent dans la légère diminution du bruit vésiculaire aux sommets, qu’on pourrait attribuer à un état cicatriciel. Si je n'étais pas limité par l’espace, je pourrais multiplier des faits de ce genre. LES CARTILAGES LINGUAUX ET LE TISSU CARTILAGINEUX CHEZ LES GASTÉROPODES, par M. G. Loisez. L'histologie du tissu cartilagineux est très peu avancée pour les inver- _tébrés ; on n’a guère étudié, jusqu'ici, que le cartilage à cellules ramifiées des Céphalopodes et encore on n’a jamais cherché à expliquer pourquoi ces animaux ont une forme de cartilage qui s'éloigne tellement des formes connues chez les autres mollusques et chez les vertébrés. La radula des Gastéropodes est supportée par une ou plusieurs pièces dont tous les caractères physiques rappellent, en général, ceux du car- tilage. La structure de ces pièces n’a été étudiée, d'une façon complète, . que par LEBERT, SEMPER et CLAPARÈDE, c’est-à-dire, à une époque où la - technique histologique n’était pas assez avancée pour pouvoir donner des - résultats bien précis. Dès 1844, VALENCIENNES (1) avait vu les cellules qu’on trouve dans les cartilages linguaux du Buccin et les avait comparés aux cellules carlilagineuses des Lamproies. En 1846, LEBERT (2) décrivit ces cartilages comme formés, chez les Buccin, par de grandes cellules sem- (1) Compt. Rend. Ac. des Sc., 25 nov. 1844, et Arch. du Muséum, t. V, 1851, (2) Arch. f. Anat. und Physiol., 1846. 494 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE blables aux cellules végétales et, chez l'Haliotide, par des faisceaux fibreux ou granuleux ; plus tard (1), il revint sur ses opinions et ne voulut voir, - dans les pièces de support de la radula, que des fibres musculaires; ce qu'il avait pris pour des cellules n’était, dit-il, « que la coupe transver- sale d’un certain nombre de cylindres aplatis et verticaux des muscles ». Dans un premier mémoire, qui ne traite que de Pulmonés (2), SEMPER admit et sembla confirmer ces dernières idées de LEBERT, mais il reprit _bientôt ses recherches et les étendit alors à un grand nombre de moilus- ques (3). Dans les genres Limax, Sepia et Loligo, la plaque qui supporte la radula serait formée par trois muscles; dans les genres Zymnaæus, Helix, etc., on verrait apparaître de véritables cellules cartilagineuses au milieu des fibres des deux muscles latéraux; enfin chez les Puccinum, Trochus, ete., on ne trouverait plus que du cartilage. Dans une monographie de la Néritine, CLAPARÈDE (1) nous fit connaître les recherches histologiques qu'il avait faites sur les cartilages linguaux de plusieurs mollusques. Partout il ne déerivit que des cellules cartilagi- neuses accolées intimement les unes aux autres ou plongées dans une substance fondamentale, mais il ne fit nullement mention de fibres mus- culaires. Comme on le voit, pas ce court historique, il reste beaucoup à faire au point de vue de l’histologie comparée de ces cartilages. J'ai repris cette étude en m'attachant surtout à comparer les éléments de ces orga- nes avec ceux du tissu conjonctif des mollusques, et ceux du tissu carti- lagineux des vertébrés. Comme l’a bien montré SEMPER, l'organe de soutien de la radula, est essentiellement musculaire chez la plupart des Pulmonés, mais son aspect et sa consistance rappellent absolument ceux du cartilage. Je dirai, dès maintenant, que ces caractères se retrouvent chez certains autres mus- cles des mollusques, ainsi, dans l’attache postérieure du muscle columel- laire, dans le muscle des mâchoires de la Seiche et de beaucoup de Gas- téropodes; par contre, on ne retrouve plus cet aspect cärtilagineux dans l'appareil de quelques Pulmonés. Le mot de cartilage ne devrait donc pas être employé pour désigner les organes de support de la radula ; il vaudrait mieux se servir d’une appellation plus générale, telle que celle de pièces de soutien. Déjà, à un faible grossissement, on peut reconnaître dans la structure des cartilages linguaux de l’AHelix pomatia : \° Une membrane d'enve- loppe, 2° des faisceaux musculaires dirigés perpendiculairement à l’axe (1) Ann. Sc. nat., 3° série, t. XIEE (1850). (2) Zeitschr. f. wiss. Zool., t. VIIT (1856-1857). .. (3) Id., t. IX (1858). (4) ; - SÉANCE DU 18 FÉVRIER 195 de la pièce et enfin, 3° de nombreuses cellules vésiculeuses comprises entre ces faisceaux. | 4° La membrane d’enveloppe est formée par une gangue fibrillaire contenant des noyaux et se colorant en rose par le picro-carmin, alors que le reste dela coupe se colore en rouge brun; Pacide acétique la gonfle et la fait disparaître entièrement, ce qui montre bien qu'elle est formée uniquement de tissu conjonctif. 2 Les faisceaux musculaires sont composés de fibres lisses dans l’inté- rieur desquelles on peut reconnaître en général deux substances : une fibrillaire, contractile, et une granuleuse, protoplasmique ; mais les rap- ports de situation entre ces deux substances sont loin d'être constants, comme le veulent les auteurs, et la structure des fibres n’a rien d’absolu- ment caractéristique chez les mollusques. Quand on suit le développe- ment de ces fibres, on voit que la différenciation du protoplasma en fibrilles se fait de la périphérie vers le centre ; lorsque la fibre a atteint son maximum d'évolution, c’est-à-dire quand ou son pretoplasma s’est transformé, on ne voit plus le noyau de la cellule primitive. Ces fibres, qui composent en partie les cartilages linguaux de l’Escargot, diffèrent des fibres ordinaires, par leur plus grande largeur et par leur manière différente de se comporter avec certaines substances colorantes ; enfin, j'ai trouvé parfois au milieu d'elles, des fibres striées transversalement, analogues à celles des muscles volontaires des vertébrés. 3° Les cellules vésiculeuses forment, dans les pièces de soutien de la radula, des trainées épaisses ou des masses fusiformes qui écartent les faisceaux musculaires dans leur partie moyenne ; à l’étal frais, ces cel- lules apparaissent comme des blocs de matière amorphe, complètement transparente, limités par des contours très nets, contenant un gros noyau sphérique et quelquefois des granulalions protoplasmiques ; en somme, elles ressemblent complètement aux cellules qui composent le nodule sésamoïde du tendon d'Achille de la Grenouille. Leur forme est celle de polygones irréguliers, intimement accolés entre eux, sans qu'on puisse voir, en général, une membrane à leur périphérie, mais, dans tous les cas, ne présentant aucune trace de substance intercellulaire. Leur dia- mètre varie de 15 à 20 & ; celui de leur noyau de 3 à 4 4. Ces cellules sont détruites rapidement par les alcalis et les acides, excepté l'acide acétique - qui ne les altère que très peu; elles ne renferment ni graisse, ni matière Leone; la‘ substance qui les remplit presque en entier est liquide, mais je n’ai pu rien savoir sur sa composition chimique. Telles sont les cellules que l’on a considérées comme étant de nature oser Une étude attentive et comparative de plusieurs types m'a montré, au contraire, que ces cellules vésiculeuses devaient être con- : sidérées comme appartenant à un stade évolutif spécial des cellules con- jonctives ordinaires. J’ai trouvé, en effet, dans les pièces de soutien de Lymnæa stagnalis et 196 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE d'AHelix aspersa, de grosses cellules semi-vésiculeuses et remplies en partie par des granulations protoplasmiques de plus en plus abondantes ; chez l’Arion et la Limace, j'ai vu ces cellules perdre leur état vésiculeux et ressembler complètement aux cellules conjonctives ordinaires des Gas- téropodes; enfin chez 7ritonia Hombergtü, les cellules vésiculeuses sont remplacées par des masses protoplasmiques diffuses, nucléées, disséminées au milieu d’un grand nombre de fibres musculaires, structure quiest celle, en réalité, de tout autre muscle. D'autre part, en étudiant la répartition du tissu conjonctif dans les -muscles des Gastéropodes en général, j'ai vu que cet état vésiculeux des cellules n’est pas un fait isolé, spécial aux cartilages linguaux, mais qu'il se rencontre dans beaucoup d’autres muscles, soit à l’état emrbyonnaire (muscules radulaires de l'Escargot), soit à l’état adulte (musele columel- laire du Buccin, muscle de la mâchoire de l'Escargot). Je peux donc écrire, comme proposition générale : À un certain stade de leur développement, les muscles des Gastéropodes renferment, entre leurs fibres, des cellules vésiculeuses se rapprochant beaucoup des cellules conjonctives ordinaires du même animal. Dans la plupart des muscles, ces cellules disparaissent à l’état adulte et ne sont plus représentées que par leurs noyaux et quelques granulations protoplasmiques, mais, lorsque la fonction du muscle l'exige, elles persistent pendant toute la vie de l'animal; c’est ce qui existe, par exemple, pour les pièces de soutien de la radula chez certains Gastéropodes. Dans les genres Planorbe et Paludine, les cartilages linguaux sont formés de fibres musculaires et de grosses cellules vésiculeuses, polyé- driques, entourées par une membrane assez épaisse. Que cette membrane s'élargisse outre mesure, ou qu’un dépôt de substance compacte se fasse entre les cellules, et nous aurons la forme de cartilage que l’on trouve chez le Puccin. Une coupe microscopique des cartilages linguaux de ce Mollusque nous montre, à la phériphérie, une coque épaisse (10 à 15 p), de substance cartilagineuse qui envoie, en dedans, de nombreux pro- longements intercellulaires. On ne trouve, dans ces organes, aucune trace de tissu musculaire, mais seulement des grosses cellules polygonales (en moyenne 30 y de diamètre), contenant un noyau et de nombreuses granulations proloplasmiques, et séparées les unes des autres par des bandes plus où moins épaisses de cartilagéine ; à leur périphérie est une membrane qui se confond le plus souvent avec cette dernière subs- tance. La substance fondamentale de ces cartilages a tous les caractères opti- ques de la cartilagéine des animaux supérieurs ; mais VALENCIENNES a montré qu'elle ne donnait que de la gélatine par la coction et j'ai vu qu’elle se colorait d’une façon toute spéciale avec certaines substances : ainsi l’iode la colore en jaune d'or, le picrocarmin en une belle couleur rose vif et le bleu de quinoléine en bleu pâle. 1 SÉANCE DU 18 FÉVRIER 19 INFLUENCE DE LA STASE SANGUINE SUR L'HÉMATOPOÏÈSE, par M. le D' GricorEescu (de Bucharest). Dans une série de recherches que nous avons faites dans le laboratoire de M. le professeur Dastre, présentées à la Société de Biologie en 1887, nous avons démontré que le sang de l'oreille du chien est le plus riche en globules rouges; dans l’artère splénique, il est moins riche, et dans la veine splénique, il l'est davantage. Et lorsque nous provoquions la stase sanguine dans la rate, les globules rouges devenaient plus nombreux même que dans le sang de l'oreille. Les globules blancs devenaient de plus en plus nombreux, dans tous ces cas. Ce fait est déjà constaté depuis longtemps par MM. Picard et Malassez, en provoquant cette stase splé- nique, par la section des nerfs de l’artère splénique. Aussi nous avons démontré, que la stase sanguine physiologique, qui se produit dans la rate pendant la digestion (maximum trois heures après le repas) a le même effet, c’est-à-dire l'augmentation du nombre des glo- bules (V. Quelques expériences sur le rôle hémopoïétique de la rate; Arch. de phys., 1891). Mais, pour donner une vérification plus générale à ce fait, nous avons exécuté un nombre d'expériences, qui viennent à l'appui de nos pre- mières recherches. 1° Le sang (obtenu par piqûre) de la peau de la région plantaire d’un chien à été plus pauvre en globules (gl. r. 3,000,000; gl. bl. 40,000 par millimètre cube), quand la Gircuatan était libre, et le même sang était plus riche en globules (gl. r. 4,540,000 ; gl. bI. 17,000), lorsque nous pro- voquions une gène su préalable par mn bandage circulaire, appliqué au-dessus de la même patte. 2° Le sang (obtenu dans les mêmes conditions) de la peau du côté de la région plantaire était également plus pauvre en globules (gl. r. 2,490,000; gl. bl. 4,000), quand la cireulation était libre, et le même sang était plus riche en globules (gl. r. 4,540,000 ; gl. bl. 17,000), lorsqu'on provoquait préalablement, une stase sanguine de la même façon. 3° En comparant le sang de la peau de la région plantaire d’un chien au sang de l'artère et de la veine fémorale, à leur origine, nous avons trouvé la même différence : le sang de l’artère fémorale a été plus pauvre en globules (gl. r. 2,800,000 ; gl. bl. 15,000) ; le sang de la région plan- taire a été plus riche (gl. r. 3,300,000 ; gl. bl. 21,000) et celui de la veine fémorale a été un peu moins riche (gl. r. 3,133,000; gl. bl. 17,000) que celui de l'artère. 4° En plus, nous avons étudié la richesse globulaire du sang compa- 198 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE —.— rativement dans les différentes régions de la peau du chien, séance tenante, et nous sommes arrivé aux mêmes résultats. Globules rouges. Globules blancs. a) Sang de la peau de la région sacrée. . . . . . 5,426,000 32,000 b) — _ — plantaire . . . . 5,246,000 16,000 C) —— — 0 diOrerlerr rte à 4,880,000 15,000 d) — -— — l'aisselle. . . . : 4,486,000 21,000 ) — — — thoracique latér. %,460,000 21,000 Donc, le sang est plus riche en globules aux régions où la peau est plus dense et dont la circulation est plus difficile, et au contraire, il est moins riche aux régions où la peau est plus lâche et sa circulation est plus libre. Par conséquent, il résulte de toutes ces expériences'que la stase san- guine provoquée expérimentalement ou la stase ue augmente la richesse globulaire du sang. Les faits indiqués déja depuis longtemps par M. Malassez, que la richesse globulaire du sang est plus accentuée dans le sang veineux de la peau, des muscles en activité viennent également à l'appui de cette conclusion, car, dans tous ces organes la circulation est plus difficile que la circulation libre des vaisseaux proprement dits; aussi, dans toutes ces parties, le sang est-il plus riche en globules que celui des vaisseaux dont la circulation est active. Aussi, M. Ranvier a constaté que la gêne circu- latoire augmente le nombre de globules blancs. Nos expériences ci-dessus, considérées en détail, confirment pleinement cette assertion. Conclusion. — La circulation active accélère l'usure des globules san- guins, tandis que la stase circulatoire reconstitue ces éléments anatomi- ques et augmente la richesse globulaire du sang. Maintenant, il s'impose naturellement, une conclusion plus générale : Tout organe à circulation plus ou moins difficile est destiné à augmenter la richesse globulaire du sang, et s’il y en a qui diminuent cette richesse, dans ce cas, la destruction des globules se fait par une fonction spéciale de ces organes; telle est la rate qui détruit les globules rouges du sang. Le Gérant : G. Masson. ————<" Paris. — Imprimerie dé la Cour d'appel. L. Marerneux, directeur, 4, rue Cassette. 199 SÉANCE DU 25 FÉVRIER 1893 M. Marassez : Influence des congestions diverses sur la richesse du sang en glo- bules rouges ; fonctions hématopoïétiques de la rate. — M. Cu. Fé£ré : Du chloralose chez les épileptiques, les hystériques et les choréiques. — M. Cu. Féré : La folie communiquée de l'homme aux animaux. — M. Rapnarz Dugois : Sur l'influence comparée de la section de la moelle et de sa destruction sur la calorification chez le lapin. — M. R. Dusors : Sur le réchauffement automatique de la marmotte dans ses rapports avec le tonus musculaire. — M. L. Queyrar : Microorganismes dans la trachéo-bronchite simple. — M. À. Gizsert : Des poisons produits par le bacille intestinal d'Escherich. — M. E. GLex : Glande et glandule thyroïdes du chien. — MM. Gzey et C. Puisazix : Sur la nature des glandules thyroïdiennes du chien. — MM. À. Biner et Courtier : Note sur la mesure de la vitesse des mouvements graphiques. — M. le D' Fromonr : Démonstration anatomique de la récurrence ner- veuse. — M. le Dr L. Burre : Respiration placentaire à l’état normal et à la suite d'une hémorragie de la mère. — M. Mory : Lésions anatomiques produites par le distoma sinense. - Présidence de M. Chauveau. INFLUENCE DES CONGESTIONS DIVERSES SUR LA RICHESSE DU SANG EN GLOBULES ROUGES; FONCTIONS HÉMATOPOÏÉTIQUES DE LA RATE; par M. MALASSEZz. Dans les Comptes rendus de la dernière séance (v. p.197) se trouve une note de M. Grigorescu ayant pour titre : « Influence de la stase sanguine sur l’hématopoïèse ». Je voudrais présenter quelques remarques, non sur les faits apportés, — ils sont d’accord avec ceux que j'ai observés, ainsi que veut bien le rappeler M. Grigorescu, — mais sur la signification qu'il leur attribue. 1° Il a vu, comme moi, que le sang veineux est plus riche en globules rouges que le sang artériel; et que cette différence s’exagère sous l'in- fluence d’un obstacle au retour du sang veineux. Mais, d’après lui, ces phénomènes seraient dus à une néoformation globulaire se produisant pendant la stase sanguine; tandis que, d’après moi, ils résulteraient surtout, pour ne pas dire uniquement, des pertes de liquide subies par le sang, c'est-à-dire d’une simple concentration du sang. Les expériences que BroLoGciE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 8 200 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE j'ai faites autrefois montrent, en effet, que cette augmentalion de richesse se produit sans qu'il y ait stase véritable, qu'elle s’exagère quand on favo- rise la sortie des liquides du sang et s’atténue dans les conditions con- traires. 2° M. Grigorescu a vu aussi que les congestions résultant d'un obstacle au retour du sang veineux produisent dans la rate comme dans les autres tissus, une exagération de la plus grande richesse globulaire du sang veineux ; et ce serait encore dû, je pense, moins à une néoformation globulaire qu’à une concentration du sang. 3° Ce qu'il importe de remarquer, c'est que les congestions dues à une section des nerfs, lesquelles s’accompagnent d'une plus grande activité circulatoire, produisent des effets différents, selon qu'il s’agit de la rate ou d'autres tissus. Dans tous les tissus, en général, dont on a coupé les nerfs, la richesse globulaire du sang veineux diminue, elle se rapproche de celle du sang artériel; ce qui serait dû, non à une usure globulaire, mais à ce que les pertes de liquide subies par le sang sont moins considérables, non pas d'une facon absolue, mais relativement à la beaucoup plus grande quantité de sang qui se trouve traverser alors les tissus. Dans la rate, il en est tout autrement : sous l'influence de la seclion de ses nerfs, elle se congestionne, sa circulation devient plus active, ce que l’on observe également avec les autres tissus; mais, si elle n’est pas épui- sée, la richesse globulaire de son sang veineux, au lieu de diminuer, aug- mente au contraire et cela d’une façon considérable et pendant un certain temps; après quoi, elle se rapproche de celle du sang artériel. Nous croyons avoir démontré expérimentalement, P. Picard et moi, que cette augmentation énorme et passagère ne peut s'expliquer ni par une concen- tration du sang, ni par la sortie de globules préalablement accumulés dans la rate; qu’elle doit être due à une véritable néoformation globu- laire. Rapprochant ensuite ces congestions spléniques par énervement des congestions analogues qui se produisent dans les glandes en état d'activité; les rapprochant encore des congestions spléniques qui s'ob- servent sans cesse à l’état normal, de celles qui ont lieu pendant la digestion, de celles qui succèdent aux hémorragies, nous en avons conclu, que la rate devait entrer en activité fonctionnelle sous l’influence de ce genre de congeslions et qu’elle était donc, non pas un organe destruc- teur de globules rouges, comme on le croyait généralement alors, mais, au contraire, un organe formateur. SÉANCE DU 25 FÉVRIER 201 Du CHLORALOSE CHEZ LES ÉPILEPTIQUES, LES HYSTÉRIQUES ET LES CHORÉIQUES, par M. Cu. FÉRé. Depuis que MM. Hanriot et Richet ont appelé l’attention de la Société de Biologie sur l'action physiologique du chloralose, j'ai expérimenté ce médicament sur trois catégories de malades : des épileptiques, des hystériques, une choréique. Ces expériences mettent en lumière quelques faits qui me paraissent dignes d’une mention. Tout d’abord, il faut remarquer que la tolérance pour ce médicament semble beaucoup plus considérable qu'on ne l'avait cru tout d'abord. MM. Hanriot et Richet considèrent le dose de 1 gr. 50 comme une dose trop forte qu'on ne doit guère atteindre; la dose moyenne étant de 0 gr. 40 environ ; etils font des réserves particulières chez les hystériques (1). Après avoir constaté que ces doses moyennes ne donnaient lieu à aucun trouble, j'ai pu augmenter jusqu'à À gramme, | gr. 50 et même 2 gr. 25 sans aucun accident. Depuis, j'ai débuté plusieurs fois par la dose de gramme. Cette dose initiale est restée sans aucun résultat chez un épileptique atteint d'excitation maniaque ; chez un hystérique, elle a pro- duit un sommeil de douze heures, laissant, au réveil, un peu de torpeur intellectuelle sans douleur de tête, sans trouble gastrique. Quelle que soit la dose employée, l’appétit est resté intact, même quand le médicament a été continué sans interruption pendant plusieurs semaines. Plusieurs ma- lades se sont plaints de cauchemars. Chez un hystérique qui est arrivé pro- gressivement à prendre ? gr. 25, il s'est produit un sommeil très profond S accompagnant pendant plusieurs heures d’un ronflement bruyant et d’in- continence d'urine, symptôme indiquant spécialement une suspension de l’activité cérébrale. Après sept à onze heures de sommeil, ce malade s’est réveillé sans aucune douleur de tête, sans aucun trouble gastrique. Du reste, nous allons résumer rapidement les résultats obtenus chez les trois catégories de malades qui ont été soumis au médicament. IL. Epileptiques. — 1° A.…., cinquante-quatre ans, épileptique. Insomnie persistante depuis plusieurs semaines. — 2 février. Un cachet de 20 centi- grammes de chloralose. Aucun effet. — 3 février. Deux cachéts, a dormi environ huit heures, sans rêves. Depuis celte époque, il prend chaque jour 40 centigrammes avec le même effet, sans aucun trouble. 2° M..., vingt-deux ans, épileptique. Insomnie. — 9 février. 40 centigrammes de chloralose, sommeil tranquille. — Les 13, 14,15 février, les nuits ont été trou- blées par des cauchemars, qui ne sont plus reproduits depuis. Aucun trouble. 39 P..., vingt-huit ans, épileptique. Insomnie. — 7 février. 20 centigrammes (4) Hanriot et Richet. De l’action physiologique du chloralose (Mémoires des {7 À ] D la Soc. de Biologie, 1893, p. 7). A LUE À 202 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de chloralose. À dormi quatre heures. Le deuxième et le troisième jour l'effet a été moindre. — 10 février. 40 centigrammes. Depuis, le sommeil est bon, sauf lorsqu'il survient quelques secousses. 4 Del.…, trente ans, épileptique. Délire à la suite d'accès sériels. — 47 février. Chloralose, 1 gramme. Aucun effet: agitation persistant toute la nuit. — 18 février. Même dose; le malade s'est assoupi à minuit, jusqu'au matin. — 19 février. Même dose; sommeil interrompu, calme. — 20 février, 1 gr. 50 de chloralose, a très bien dormi et est resté calme depuis. Le médi- cament a été supprimé le 23, sans avoir produit aucun trouble. II. Hystériques. — 5° M..., trente-quatre ans, hystérique à grandes attaques et à crises d’étourdissement, ne dort pas depuis plusieurs nuits. — 16 février. Chloralose, 1 gramme, aucun effet. — 17 février. Même dose, aucun effet; a eu six attaques le lendemain matin. — 18, 19 février. Même dose, sans effet. — 20 février. Se plaint de maux de tête, torpeur intellectuelle, difficulté à trouver ses mots. — 21 février. 15 centigrammes de chloralose ; sommeil de douze heures. — 22 février. Bon sommeil. — 24 février. À peu dormi, attaques le matin. 6° B.., vingt-huit ans, hystérique à grandes attaques, insomnie persis- tante et presque complète. — 6 février. Chloralose, 60 centigrammes; bon sommeil. — 8 février. Même dose, attaques le soir, excité la nuit, peu de sommeil. — 9 février. Même dose. Bon sommeil, aucun trouble. — 10 février. Refus du médicament. Insomnie. — 14 février. 0,75 centigrammes de chlora- lose, sommeil de six heures. — 15 février. Chloralose, 4 gramme, pas de som- meil, secousses. — 16 février. Chloralose, 1 gr. 50, sommeil, quelques secousses, cauchemars. — 17 février. Même dose; pas de sommeil. — 18 fé- vrier. Le médicament manquait; deux heures de sommeil. — 20 février. Chloralose, 1 gr. 30; quatre heures de sommeil. — 21 février. Même dose, même effet. — 22 février. Même dose, six heures de sommeil. 70 F..., trente ans, hystérique à grandes attaques. Contracture des membres inférieurs, insomnie complète depuis plusieurs jours, attaques très fréquentes. — 3 février. Chloralose, 40 centigrammes, aucun effet. — 4 février. 50 centi- grammes, sommeil interrompu. — 5 février. 50 centigrammes, six heures de sommeil, — 6 février. Ibid. — 1 février. Attaques le soir, 60 centigrammes de chloralose, peu de sommeil. — 8 février. Mème dose, crises de dyspnée la nuit, pas de sommeil. — 9 février. 60 centigrammes, bon sommeil. — 10 février. 10 centigrammes, sept heures de sommeil. — 11 février. Ibid. — 12 février. Même dose, mauvais sommeil. — 13 février. Même dose, sommeil. — 14 février. Chloralose, À gramme, sommeil de sept heures. — 15 février. Chloralose, 1 gr. 25, dort six heures. — 16 février. Chloralose, 1 gr. 50, som- meil de douze heures. — 17 février. Même dose, sommeil agité de onze heures. — Les attaques diminuant de nombre depuis que le malade dort, on aug- mente encore la dose. — Le 21 février, 1 gr. 75, sept heures de sommeil. — 22 février. 2 grammes de chloralose, sommeil de sept heures, mais très pro- fond, miction involontaire. — 23 février. 2 gr. 25, sommeil, stertoreux, deux mictions involontaires. — Aucun autre trouble, bon appétit. Les attaques sont moins fréquentes. La contracture des membres a diminué. Le malade peut faire quelques pas. SÉANCE DU 29 FÉVRIER 203 INT. Choréique.— 8° Une jeune fille de dix-huit ans, à antécédents hystériques avérés, futprise le 12 janvier, le lendemain d'une chute accidentelle dans un escalier, d’une chorée généralisée, mais prédominante du côté gauche, où siège l'hémianesthésie et l'ovarie hystériques. Elle avait été soumise dès le début à un traitement tonique et à l'hydrothérapie froide. L'état général avait subi une légère amélioration, mais les troubles moteurs persistaient avec la même inten- sité et la même étendue. Le sommeil avait toujours interrompu les mouve- ments; mais il était troublé presque constamment par des cauchemars, et il ne durait guère par intervalles que cinq ou six heures par nuit. Le 19 février, une dose de 0,60 de chlorolose a procuré un sommeil continu et calme de huit heures, sans aucun malaise au réveil. Le 20, la malade a pris 0,75 de chloralose, le sommeil a duré dix heures sans interruption. Le jour suivant, les mouvements avaient très considérablement diminué. Le 21, la même dose a donné un sommeil aussi ininterrompu de neuf heures et demie. Les mouvements choréiques avaient complètement cessé au réveil et ne se sont plus reproduits depuis. L'irritabilité du caractère, la tendance à larmoyer sans motif qui persistait depuis le début de la maladie a aussi disparu. Avec la même dose de chloralose, la malade dort environ huit heures depuis la cessation de la chorée. Ce sommeil parait tout à fait exempt de rêves, et la malade ne présente aucun trouble gastrique ni autres. Il est juste de remarquer que le traitement primitif n’a pas été interrompu. Ce n’est pas là un fait extraordinaire dans l’histoire de la chorée. L'influence du sommeil prolongé a été noté par nombre d’auteurs, et cet effet du chloralose a été démontré pour l’hydrate de chloral depuis long- temps par Gairdner, puis par Bouchut, Verdalle, Bridge, Bastian. Il montre surtout que la femme même hystérique peut supporter des doses relativement élevées de chloralose qui présente des avantages évidents sur le chloral. Le sommeil prolongé (1) est, avec la suralimentation, l'agent curatif le plus indiscutable d'un grand nombre de troubles dits fonctionnels du système nerveux et en particulier de l’'hystérie, de la neurasthénie, de la chorée. Un médicament qui a l’avantage de procurer le sommeil sans provoquer de troubles gastriques et de permettre de continuer les autres soins hygiéniques mérite une considération particulière. Il est permis de supposer que dans plusieurs des cas où son effet a manqué, la dose a été insuffisante. Des doses de 4 à 2 grammes paraissent pouvoir être tolé- rées d’une manière continue chez l'adulte. (1) Corning. The curative potency of prolonged Sleep. New York med. Journ., 1886, t. XLIIL, p. 296. 204 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE LA FOLIE COMMUNIQUÉE DE L'HOMME AUX ANIMAUX, par M. Cu. FÉRé. L'intelligence des animaux ne se distingue de celle de l’homme que par des degrés (1); leurs passions sont comparables aux passions humaines (2). Il n’y a donc rien d'étonnant de voir chez les animaux les anomalies et les maladies intellectuelles qui s’observent chez l’homme. La folie se montre dans certaines espèces avec la même hérédité que d’autres névroses, comme l'épilepsie, la plus fréquente. Young a eité une famille de chats où l’épilepsie s’est montrée dans trois générations, et où dans deux générations on a vu la folie puerpérale se manifester deux jours après la délivrance (3). Si les maladies mentales sont moins fré- quentes chez les animaux, c’est que la civilisation les pénètre moins et ne laisse guère parmi eux ses déchets, et que, d'autre part, la sélection est moins contrariée chez eux par de mauvaises lois. La rareté de la folie chez les animaux rend compte de la pénurie des documents scientifiques qui la concernent. Les traités d’art vétérinaire sont à peu près muets à cet égard. La plupart des études sur ce sujet émanent de médecins qui ont le plus souvent appliqué à l'interprétation des faits les données de la psychologie humaine (4). L’imbécillité n'est pas rare parmi les animaux domestiques, en particulier chez le chien et chez le cheval, mais, pas plus que l’idiotie, elle n’a guère fixé l'attention. Il en est de même dela démence paralytique (5). Les troubles psychiques qui ont été éludiés chez les animaux sont les perversions instinctives, que l’on a fait entrer dans l’histoire de la crimi- nalité chez les animaux (6), et les épidémies mentales se rapportant sur- tout aux paniques qui se manifestent principalement chez les chevaux (1) Romanès. L'intelligence des animaux, 1887. (2) E. P. Thompson. The passions of animals, 1851. (3) British medical Journal, 1879, t. IT, p. 92. (4) Ennemoser. Beitræge zur Seelenkunde der Thiere (Zeitschr. f. psych. Aerztle, 1820, IL, p. 49). — Nasse. Vom Irrescyn der Thiere (ibid., p. 170). — Pierquin. Traité de la folie des animaux, 2 vol in-8, 1839. — Lindsay. Madness in animals (The Journal of mental Science, 1871-1872, p. 181); The Pathology of mind in the lower animals (ibid., 1877, p. 11). (5) Mendel. Ueber paralytischen Blüdsinn bei Hunden (Allg. med. centr. Zeit., Berlin, 1884, L. III, p. 569). (6) Lombroso. L'homme criminel, 1881, ch. r. — Lacassagne. De la crimi- nalité chez les animaux /Revue scientifique, 1882, 3° série, t. IT, p. 35). — A. Goubaux. Des aberrations du sens génésique et de l’hybridité chez les animaux : les jumarts (Nouv. Arch. d'Obstétrique et de gynécologie, 1888, t. UT, p. 455, 492). SÉANCE DU 23 FÉVRIER 205 pendant les guerres ou les manœuvres, sur les champs de foires ou dans les ferrades (1). Ces derniers faits sont particulièrement intéressants en ce qu’ils montrent bien l'influence de l’imitation parmi les animaux d’une même espèce, et c’est justement sur l'imitation de troubles morbides que je veux appeler l'attention. Il est à remarquer d’ailleurs que des faits d'imitation entre des animaux d'espèces différentes ont été quelquefois observés, et qu'ils peuvent cons- tituer une vérilable anomalie chez l’imitateur qui en arrive à se livrer à des actes inusilés dans son espèce. C’est ainsi que Romanës cite un terrier king-charles, qui avait été allaité et élevé dès le troisième jour de sa vie par une chatte et qui avait aussi peur de la pluie que sa mère d’adop- tion : jamais, s’il pouvait l’éviter, ilne posait ses pattes sur un endroit humide ; il se léchait les pattes deux ou trois fois par jour pour se laver Ja figure ; il accomplissait cet acte tout à fait à la façon des chats assis sur la queue ; il restait des heures entières à guetter un trou de souris, ete. (2). L'existence à l’état physiologique de limitation chez des animaux de même espèce ou d'espèce différente nous conduit par des transitions naturelles à des faits pathologiques qui ne paraissent pas avoir beaucoup fixé l'attention : à la contagion de la folie de l’homme aux animaux. Depuis le mémoire de Lasègue et Jules Falret, on décrit chez l’homme sous le nom de folie communiquée, un délire identique chez deux ou plu- sieurs personnes, vivant ensemble, mais développé plus tard chez l’une Ges deux, remarquable en général par sa débilité mentale. La folie com- muniquée est plus fréquente chez les individus sur qui pèse une tare héré- ditaire commune. Son évolution présente un point particulièrement intéressant, c'est que la séparation amène la guérison rapide de l'imita- teur, tandis que l'initiateur évolue suivant la nature de son propre mal. Plus souvent qu'une véritable folie, on voit $e communiquer des anomalies émotionnelles et des intolérances sensorielles : des personnes qui vivent longtemps en commun finissent par partager des répugnances morbides pour cerlaines odeurs ou pour certaines saveurs; les craintes morbides sont aussi souvent partagées. La contagion de l’émotivité et la répétition fréquente de l'expression des mêmes émotions rend compte de la ressem- blance physique qui finit quelquefois par s'établir entre ces malades. Cette contagion des intolérances sensorielles n’est pas rare de l’homme aux animaux qui vivent en communauté avec lui, et en parti- (1). Decroix. La panique chez les animaux (Bull. de la Société imp. et ezn- trale de méd. vétérinaire, 1870, p. 104). — P. Delorme. Etudes sur les terreurs paniques chez les animaux. (Recueil de médecine vétérinaire, 1871, p. 73). — G. Fleming. Panics among horses (The Veterinarian, 1871, t. XLIV, 706, 717). — Lindsay. Mental Epidemies among the lower animals (The Journ. of mental Science, 1871-1872, p. 425). — Abadie. Panique chez les animaux (Revue véléri- natre de Toulouse, 1887, t. IL, p. 496). (2) Romanès. L'évolution mentale chez les animaux, p. 223. 206 SOCIÉTÉ DE B:OLOGIE culier les chiens d'appartement qui pour la plupart appartiennent à des races artificiellement dégénérées. Les relations étroites qu'il a avec l’homme (1!) et son aptitude à l’imitation sont les principaux facteurs du développement intellectuel du chien. Ce sont ces mêmes facteurs qui jouent le rôle principal dans le développement des troubles intellectuels communiqués. L’induction des émotivités morbides diffuses ou systématiques (2) s'effectue d'autant plus facilement chez les animaux qu'ils y sont sponta- nément sujets : Les peurs morbides ne sont pas rares chez les chiens et chez les chevaux (peur de la foudre, peur du sang, etc.). Rodet a même signalé (3) chez le cheval, longtemps avant que Morel eût décrit son délire émotif,des émotivités systématiques bien caractérisées. Il cite une jument, qui n'avait peur que du papier, soit qu’elle le vit, soit qu’elle l’entendit froisser ; une autre, qui ne craignait que les corps blancs inanimés, et un cheval qui avait une haine systématique pour les chevaux gris clair. Je ne m'arrêterai pas aux faits de contagion d’intolérances sensorielles qu'on voit assez souvent se développer chez les chiens d'appartement qui vivent dans la communauté d'hystériques ou d’émotifs et incapables de supporter certaines odeurs ou certains bruits sans réagir, par des mani- festations bruyantes : ces animaux en arrivent rapidement à réagir de la même manière aux mêmes excilations, même lorsqu'ils sont seuls. L'as- sociation de la réaction morbide de l'excitation une fois établie est tenace, elle ne disparaît pas toujours par le seul fait de la séparation de l'animal de son maitre. ; Les faits d’émotivité morbide induite sur lesquels je vais appeler l’atten- tion se rapportent exclusivement à l'agoraphobie. J'ai observé deux cas analogues et M. le D' Capilan m'en a communiqué un troisième. Je rap- porterai avec quelques détails.le fait que j'ai eu occasion d'observer plus complètement. Une dame âgée maintenant de cinquante-trois ans est atteinte d’agora- phobie depuis l’âge de vingt-deux ans. Pendant longtemps, les crises d'angoisse et d’anxiété ont conservé le même caractère, se produisant exclusivement lorsque la malade était dehors et voulait traverser une place ou une large voie. L'appui d’une personne quelconque suffisait à la calmer, de sorte que son émotivilé morbide qui avait résisté à des traite- ments divers, était supportée avec résignation. Je la connaissais depuis plusieurs années, mais elle ne me demandait d’avis qu’à propos de névral- gies et d’insomnies : elle élait convaincue d'avoir épuisé la thérapeutique relative à l’agoraphobie. Elle ne me parlait de ce dernier trouble que (4) Calderwood. The relations of mind and brain, 3° éd., 1892, p. 233. (2) Ch. Féré. La pathologie des émotions, 1892, p. 398. (3) Rodet. Doctrine physiologique appliquée à la médecine vétérinaire, 1828, p. 272. SÉANCE DU 29 FÉVRIER 207 AR LE PRO RER OS PRE PRE pour m'intéresser à son griffon écossais qu'elle prétendait affecté de sa maladie, par contagion. J'ai accueilli avec négligence ses récits jusqu'au jour où une autre malade de la même catégorie m'a rapporté des faits absolument identiques, dont j'ignore d’ailleurs l’évolution ultérieure. Le chien avait environ un an quand il a été acheté par la malade, il ne présentait aucun trouble comparable à ceux qu'il éprouve aujourd'hui et dont on ne s’est aperçu qu'environ dix-huit mois plus tard. Lorsqu'il sortait avec sa maîtresse qui suivait les murs el qui, lorsqu'elle avait à traverser une rue ou une place, tout accompagnée qu’elle était, s’empa- rait de son chien, le portait dans son bras (et il la soutenaif, suivant son expression), l'animal paraissait parfaitement normal. Mais lorsqu'il sor- tait avec une autre personne, on remarquait qu'il suivait les murs et que quand on voulait lui faire traverser la rue, il était impossible de le faire sortir du trottoir, même tenu avec un cordon. Il manifestait tous Îles signes de la peur, on était obligé de le porter. Même en suivant les murs, il ne marchait presque jamais en avant de la personne qui l'accompa- gnait. Lorsqu'il le faisait et qu'il arrivait à une encoignure, il s'arrétait eourt et quelquefois tombait. Au mois de janvier 4890, M%° X... prit l'influenza et dut garder la chambre pendant plus de six semaines. Sous l'influence de l’affaiblisse- ment produit par la maladie aiguë, son émotivilé morbide s’accrut con- sidérablement, à tel point que le seul fait de rester debout sans sou- tien au milieu de la chambre lui donnait de l'angoisse, et qu'il lui était devenu impossible de pénétrer seule dans une autre pièce de l'apparte- ment. Pendant tout le temps que sa maîtresse avait gardé la chambre, le chien ne l'avait quittée que pour ses nécessités et n’était plus descendu dans la rue, il n’était plus sorti de l’appartement. M®e X... dut faire un assez long apprentissage pour redevenir capable de redescendre son escalier. Les essais durèrent une quinzaine de jours avant qu'une sortie dans la rue fût possible. On avait à peine remarqué pendant ce temps que le chien n’avait fait aucune tentative pour sortir de l'appartement; il s’arrêtait sur la porte et n'allait pas plus loin. Quand M°° X..…. eut repris ses anciennes habitudes et fut redevenue capable de sortir comme autrefois avec un appui, elle voulut faire sortir sa bête; mais quand il s’agit de descendre l'escalier, on trouva une résistance absolue. Quand on essaya de traîner la bête avec son cordon, elle fut prise d’un tremblement général, laissa aller ses urines et ses excréments, on dut renoncer à la descente. La lentative a été renouvelée en ma présence, et j'ai pu observer chez cet animal tous les phénomènes caractéristiques de la terreur si bien décrits par Darwin (1) : les oreilles se portaient en arrière, la queue se placait entre les pattes de derrière, il était pris d'un tremblement général, se roulait par terre en hurlant, et il laissait aller (4) Darwin. L'expression des émotions, 1877, p. 132. 268 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ses excréments. J'ai remarqué pour la première fois dans cette circons- tance, et je l’ai vu souvent depuis, un fait qui a échappé à Darwin, c'est qu'un des premiers phénomènes d'une émotion pénible chez le chien est la sécheresse du nez, qui se manifeste chez quelques chiens à la moindre contrariélé. Chez l'animal en question le phénomène était très marqué dès le moment où il était mis en demeure de franchir un espace. Lors- qu’on essayait de le descendre dans la rueet de le faire marcher même à côté d'une personne, la même scène se renouvelait. La personne qui avait vendu le chien offrit de le reprendre pour le guérir. Le fait est que quand cette bête eût été remise avec d’autres et laissée libre, elle reprit très rapidement des habitudes normales et quand on la rendit à sa maîtresse, au bout d’un mois, elle était capable de tra- verser une rue quand on l’appelait de l’autre trottoir. Mais au bout de quelques semaines, elle avait repris ses habitudes morbides, suivant sur les talons. En somme, il s’agit d’un animal qui est devenu agoraphobe au contact d’une agoraphobe, et qui élait susceptible de guérir par la séparation. On retrouve là les caractères principaux de la folie communiquée dans laquelle un individu atteint d’un délire qu'il a inventé, le communique à un autre, généralement d’une intelligence inférieure, qui vit avec lui. Il n’est pas sans intérêt de remarquer que l'animal qui fait l’objet de cette observalion, avait une aptitude très marquée à limitation du mouvement. Un petit garcon qui fréquentait la maison le plaçait en face de lui, et lui faisait imiter des mouvements alternatifs d’élévation des mains ou de pro- jection de la langue. Sur l’autre cas, je n’ai que des renseignements très incomplets, n'ayant vu la malade que deux fois. L'animal, entré sain dans la maison, était devenu agoraphobe après six mois de contact. Dans le cas qui m'a été communiqué par M. Capitan, l’agoraphobie est aussi très ancienne chez la vieille fille propriétaire du chien; et l'animal présente une particula- rité qui mérite d’être signalée. Lorsqu'il passe dans un escalier où il y a une glace, qui lui donne, sans doute, l'illusion d'un large espace, il est pris de mouvements convulsifs et tombe en poussant des cris ; sa maitresse est obligée de l’emporter. Ces faits montrent que les animaux sont capables de contracter cer- taines émotions morbides qui paraissaient réservées à l'homme, et que imitation peut jouer un rôle important dans la pathogénie de ces troubles intellectuels. SÉANCE DU 295 FÉVRIER 209: SUR L'INFLUENCE COMPARÉE DE LA SECTION DE LA MOELLE ET DE SA DESTRUCTION SUR LA CALORIFICATION CHEZ LE LAPIN, par M. RapuAEL DuBois. Après la section de la moelle chez le lapin, la tonicité musculaire est conservée, parfois même exagérée, jusqu'à la contracture, tandis que chez la marmotte en état de torpeur cette même opération, ainsi que la section des cordons antérieurs et antéro-latéraux, est suivie de la réso- lution musculaire. Il n’y a donc pas identité d’état entre les animaux éveillés et ceux qui sont en torpeur hibernale. Cependant, pour répondre à certaines objections, soulevées par notre dernière communication, j'ai voulu savoir si un lapin à moelle coupée au niveau de la quatrième vertèbre cervicale lutterait avec plus de succès contre le refroidissement qu'un animal de même espèce et de même taille auquel on aurait, après une section à la même hauteur, détruit toute la partie inférieure de la moelle, et, par conséquent, supprimé la tonicité musculaire, d’une manière complète, dans la plus forte partie du système musculaire. La température rectale initiale du lapin à moelle détruite était de 39°,4. Celle du lapin à moelle simplement coupée, de 39°,6. Vingt minutes après l'opération, on a commencé à relever la tempé- rature des deux animaux et on a continué toutes les demi-heures. Tem- pérature extérieure : 12 degrés. LAPIN LAPIN à moelle détruite. à moelle coupée. 40 h: 30 360,4 340,8 A1 heures 349,6 390,4 Contracture des paltes posté- rieures. 11%h 090 320,6 310,6 12 heures 30°,8 30°,» >) ») )») 1 heure 289,» 260,4 4 ne 80 270,» 250,» 2 heures 259,4 249,2 La contracture diminue. 2 h. 30 240,4 239,» 3 heures 230,6 220,4 3 h. 30 229,6 210,8 4 heures 2202 200,8 La contracture a presque com- plètement disparu. 4 h. 30 DAS RE 200,4 5 heures 200,8 200,» » ») »» 6 heures 200,» 190,» ï » » ») 7 heures A997E 180,6 Cette expérience. montre-assez nettement pour qu'il ne soit pas néces- 210 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE saire d’insister davantage, que non seulement la conservation de la tonicité musculaire ne permet pas à un animal de se réchauffer s’il est refroidi, mais, de plus, qu'elle ne peut ni empêcher, ni même ralentir le refroidissement si celui-ci doit se produire. SUR LE RÉCHAUFFEMENT AUTOMATIQUE DE LA MARMOTTE DANS SES RAPPORTS AVEC LE TONUS MUSCULAIRE, par M. R. Dugois. Dans l’état de torpeur complète, alors que la température de l'animal ne dépasse celle du milieu ambiant que de quelques dixièmes de degré et que le rayonnement est inappréciable, la tonicité musculaire est con- servée à un tel point qu'on pourrait presque considérer les muscles comme étant en état de contracture. Les fléchisseurs l’emportent sur les extenseurs, qui ne sont nullement flasques ; c'est pourquoi tous les mam- mifères hibernants sont roulés en boule. Il faut faire un véritable effort pour les étendre sur la table de vivisection, surtout s’il s’agit d’un héris- son, dont les muscles pauciers opposent au déroulement une sérieuse résistance. Cet état dure autant que la torpeur pendant laquelle les com- bustions sont extrêmement ralenties. Les sections de la moelle entrainent la résolution musculaire au-dessous du point où elles sont pratiquées et, s’il s’agit des cordons antérieurs et antéro-latéraux de la moelle, c'est à l’apparition de cette modification de l’état des muscles que l’on reconnaît que la section a été complète. D'ailleurs, si la tonicité musculaire jouait un rôle tant soit peu impor- tant dans le réchauffement, on ne comprendrait guère qu'une marmotte à laquelle on coupe la moelle au niveau de la 4° vertèbre cervicale soit comme « figée » dans son état de torpeur et encore moins qu'il en soit de même après extirpation des ganglions semi-lunairés. Dans une précédente note (séance du 41 février 1893), j'ai indiqué que la section de la moelle dans la région dorsale n’empêchait pas l'animal de se réchauffer complètement. J’ajouterai que le mème phénomène se produit quand, après section entre la 6° et la 7° vertèbre dorsale, par exemple, on détruit la moelle en arrière de la section. Voici quelques chiffres qui permettront de fixer les idées. I. — Section entre La 4° et la 5° vertèbre dorsale. Rectum : élévation de la température pendant :- Les 2 heures qui ont suivi la section, . . . . . . . 12, 3 .— FR He 7 sietfe relier ele 41102 SÉANCE DU 23 FÉVRIER 911 II. — Section entre la 8e et la 9° vertèbre dorsale : Rectumi2rheuressie nr RATE CR Loi NN 189 — D TE DT CNT ODN En VE STARS SR RE EE DR D D Le IT. — Section entre la 6° et 7 vertèbre dorsale avec destruction de la partie postérieure de la moelle : ReCEAMÉE A DeUTES EEE Ne 0 170 — a NL re Ce era 10 Los 0 Ces chiffres montrent bien que la destruction d’une grande partie de la moelle n’a pas une influence notable sur le réchauffement. Dans une prochaine note, je me propose de démontrer que le foie est bien, comme je l’ai annoncé, le principal foyer de réchauffement, et que sa température, toujours plus élevée que celle des masses musculaires, pendant l'accomplissement de ce phénomène, ne tient nullement à sa position profonde dans la cavité abdominale. MICROORGANISMES DANS LA TRACHÉO-BRONCHITE SIMPLE, par M. L. QUEYRAT. La trachéo-bronchite simple — le rhume vulgaire — est considérée comme le type des maladies uniquement provoquées par le froid. Cependant, si l’on examine de près comment les choses se passent en matière de trachéo-bronchite, on voit que lorsqu'un cas de rhume se montre dans une famille, il est bien rare que les personnes qui vivent en commun avec le malade ne soient pas atteintes à leur tour : elles pren- nent le rhume, suivant la locution usitée, et cela alors même qu’elles n’ont pas été exposées à l'influence du froid. Il y a donc là un indice de contagion et une raison de supposer — à priori — que le froid n'est pas la seule cause de la trachéo-bronchite simple. J'ai fait, depuis plus d’un an, à l’Institut Pasteur, au laboratoire de M. Roux, une série de recherches concernant la microbiologie de la tra- chéo-bronchite, et c’est la première partie des résultats auxquels je suis arrivé que je viens présenter à la Société de Biologie. Si l’on fait des préparations sur lamelles avec les crachats des malades atteints de rhume et qu'on colore — par exemple avec le violet de gen- tiane — on voit, surtout dans les premiers jours de la maladie, que les crachats contiennent une grande quantité de microorganismes spéciaux. Ce sont des cocci assez volumineux, se présentant soit isolés, soit en amas, souvent réunis en diplocoques, quelquefois en chaïnettes de trois A SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ou quatre articles. Ils provoquent une réaction phagocytaire des plus intenses, et on voit des leucocytes qui en sont littéralement bourrés. Ces microbes-se montrent en très grande abondance pendant les pre- miers jours de la maladie, puis à partir du huitième jour, environ, leur nombre diminue et à la fin de la seconde semaine, on n'en trouve plus que quelques-uns. Si l’on ensemence des parcelles de ces crachats sur gélose ordinaire et qu’on mette les tubes à l’étuve de 35 à 37 degrés, on a, en vingt-quatre heures, une culture extrêmement abondante qui seprésente sous forme de colonies arrondies, déjà assez grosses, opaques, saiflantes el, suivant les cas, on obtient uniquement des colonies jaunâtres ou des colonies blan- ches ou un mélange des deux. Sur onze cas de trachéo-bronchite que j'ai plus particulièrement suivis, sept fois il n'y avait que des colonies jaunes, une fois rien que des colo- nies blanches, trois fois un mélange des deux. Quelle que soit La coloration (qui peut, d’ailleurs, varier dans la suite), ces colonies évoluent de la même façon: si le tube est laissé à l’étuve, elles s’étalent dans les jours qui suivent ; si elles sont rapprochées, elles fusionnent en une sorte de plaque ; elles font nettement saillie au-dessus de la gélose ; elles ne diffusent pas sur toute la surface. Lorsqu'on fait le réensemencement en strie, on obtient un épais ruban jaunâtre ou blanc. Si avant de faire l’ensemencement avec les crachats on a eu la précau- tion de les laver dans une série de bains d’eau stérilisée, de manière à les débarrasser des impuretés provenant du pharynx ou de la bouche, on a souvent d'emblée une culture pure. Parfois, cependant, on a d’autres microorganismes, mais les colonies auxquelles ils donnent naissance sont peu nombreuses, il ne s’agit pas toujours des mêmes microbes, par conséquent leur présence peut être considérée comme accessoire. En ensemençant jour par jour des tubes de gélose avec les crachats, on voit que le nombre des colonies spéciales que j'ai décrites diminue au fur et à mesure que la maladie s'approche de son terne. Au début elles se chiffraient par plusieurs centaines, vers le douzième ou le quinzième jour, en général, l’ensemencement, si abondant soit-il, n'en donne que quelques-unes, parfois même plus du tout (4). Lorsqu'on a obtenu en cultures pures les colonies blanches ou jaunes et qu’on les cultive en divers milieux et à diverses températures, voici à quels résultats on arrive. (Ces résultats sont les mêmes pour l’une et l’autre variété de colonies.) (1) En revanche, on voit apparaître une multitude de colonies minuscules, punctiformes, translucides, qui cultivées en bouillons, donnent naissance à un streptocoque différent du pyogène. Peut être s'agit-il là du streptocoque que M. Pansini dit exister à l’état normal dans la trachée et qu il dit avoir ren- contré dans tous les cas de bronchite. SÉANCE DU 29 FÉVRIER 9213 Ces microorganismes ne se cultivent pas à la température de 15 de- grés: ils poussent faiblement à 23 degrés, d'où le peu de développement de leurs cultures sur gélatine qu'ils ne liquéfient pas. La température de 35 à 37 degrés semble être celle qui leur convient le mieux. À cette température, ces microbes pullulent rapidement dans le bouil- lon qu'ils troublent : il se fait un dépôt abondant au fond et sur les parois des tubes ensemencés ; en agitant le liquide, on produit des ondes pulvé- rulentes : souvent il se produit une collerette à la partie supérieure. Dans la suite, le liquide se clarifie. Ces microorganismes poussent également sur le sérum gélatinisé, leur culture est moins abondante que sur gélose. Sur pomme de terre, ils donnent une culture lisse, humide, peu appré- ciable. Ils ne poussent pas sur la carotte. Si l’on fait des préparations avec les cultures en bouillon, on voit que les microbes dont je viens de parler se disposent en chaïnettes : ce sont des streplocoques. Ii se colorent facilement par les colorants habituels ; traités par la méthode de Gram, ils gardent leur coloration. La seule différence que présentent les streptocoques issus des colonies jaunes et ceux issus des colonies blanches, c’est que les streptocoques blancs donnent des chaînettes moins longues, que leurs articles sont plus gros et qu'ils fixent les colorants d'une manière plus intense. Mais ce sont là, en somme, des différences minimes, et comme toutes les autres réactions sont identiques, peut-être ne s'agit-il là que de deux variétés d’une seule et même espèce. Il y aurait beaucoup à dire sur la biologie de ces microorganismes, sur les produits qu'ils sécrètent, sur le résultat de leur inoculation aux ani- maux.: j'ai, à ce sujet, de nombreuses expériences en cours : dès qu'elles seront Lerminées, je les communiquerai à la Société de Biologie. En résumé, dans tous les cas de trachéo-bronchite que j'ai eu l'occasion d'étudier, j'ai trouvé ces mêmes microorganismes, se présentant sous formes de cocci dans les crachats, donnant sur gélose les cultures particu- lières que j'ai décrites, se disposant en streptocoques dans le bouillon. La présence constante de ces organismes, démontrée par l'examen et l’'ensemencement des crachats; ce fait que très abondants au début de la maladie, ils diminuent et disparaissent presque complètement dans les derniers jours, semble indiquer qu’ils jouent un rôle prépondérant dans l’étiologie de la trachéo-bronchite simple et que le froid n’y joue qu'un rôle accessoire. 914 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DES POISONS PRODUITS PAR LE BACILLE INTESTINAL D'ÉSCHERICH, par M. A. GILBERT. Le bacille intestinal d'Escherich, récemment extrait des matières fécales d’un individu normal, est doué d’un pouvoir pathogène marqué. Inoculé dans la veine de l'oreille du lapin, en culture jeune dans le bouillon, à la dose d’un centimètre cube, il détermine la mort, presque toujours. Ses qualités pathogènes peuvent s’exalter dans le corps humain, et les premiers, M. Girode et moi (1), avons montré que la virulence du bacille d'Escherich recueilli dans des conditions pathologiques est différente de celle du bacille normal des fèces. ixpérimentalement, par l'inoculation d'animal à animal, la virulence du bacille du côlon peut également être exaltée (Wurtz), de même que, par contre, la culture successive dans des milieux artificiels est suivie d’une atténuation de cette virulence. La toxicité des produits solubles du bacille d’'Escherich, est comme sa virulence, sujette à des variations étendues. Le bacille pathologique est capable de donner naissance à des poisons d’une grande toxicité, alors que le bacille qui a vieilli dans les milieux de laboratoire ne produit que des substances d’une loxicité presque nulle. Intermédiaire, par sa virulence, au bacille pathologique et au bacille des laboratoires, le bacille des fèces engendre des poisons d’une toxicité intermédiaire. Pour étudier l’action et le degré de toxicité de ces poisons, nous avons ensemencé douze ballons contenant un litre de bouillon, avec le bacille d'Escherich fraichement extrait des selles d’un homme adulte et sain. Inoculé aux lapins, dans les conditions spécifiées plus haut, ce bacille amenait la mort des animaux. Une portion du bouillon (2) dans lequel nous l'avons ensemencé ayant été réservée, nous avons pu nous assurer que le milieu employé pour nos expériences amenait la mort des lapins par injection intra-veineuse à la dose de 165 centimètres cubes par kilogramme. Les douze ballons ensemencés ont été placés à l’étuve à 33 degrés, puis utilisés successivement dans un laps de temps allant de deux à trente- cinq jours. Chaque expérience a été faite dans des conditions identiques : le con- tenu des ballons a été filtré sous pression au fillre Chamberland, puis le 4) Gilbert et Girode. Contribution à l'étude clinique et bactériologique du choléra nostras, Bullet. Soc. médicale des hôpitaux, 1891. (2) Ce bouillon était du bouillon de bœuf fait avec 500 grammes de viande par litre, additionné par litre de 10 grammes de peptone et de 5 grammes de chlorure de sodium, puis neutralisé avec le carbonate de soude. SÉANCE DU 29 FÉVRIER 915 produit de filtration a été porté à 39 degrés et inoculé dans la veine de l'oreille du lapin, à la dose d’un centimètre cube par 10 secondes. Préalablement, chaque ballon a été semé sur plaque pour la vérifica- tion de la pureté de son contenu. La toxicité des bouillons ensemencés s’est toujours montrée très nota- blement supérieure à celle du bouillon témoin. Il a fallu injecter seule- ment de 37 à 94 centimètres cubes des premiers par kilogramme d'animal pour amener la mort. D'une façon générale, la toxicité s’est accrue avec l’âge des cultures. Cependant, cette loi a subi quelques exceptions, explicables peut-être par le défaut de résistance de certains animaux, et notamment le bouillon de culture de 48 heures s’est montré d'une toxicité supérieure à celle des bouillons injectés les jours suivants. Les effets des bouillons dans lesquels s’est développé le bacille d'Es- cherich sont d’ailleurs bien différents de ceux du bouillon simple. Injectés avec ce dernier, les animaux offrent tout d'abord de l’accélé- ration réspiratoire ; puis leur ventre se gonfle, leurs yeux sont chassés des orbites, ils urinent abondamment et sont pris de diarrhée; enfin ils s’en- gourdissent progressivement, leurs pupilles se dilatent légèrement, leur respiration devient faible, et ils saccombent au milieu de légères convul- sions. L’injection des bouillons cultivés est suivie de l'apparition de phéno- mènes qui se produisent toujours dans le même sens, quel que soit l’âge de la culture. Tout d'abord, dans une première phase, les animaux s’affaiblissent; leurs muscles sont le siège de tremblements fibrillaires; leurs pupilles se dilatent légèrement. L'impotence musculaire s’accroit rapidement et va jusqu’à la résolution complète; la sensibilité cutanée et sensorielle est abolie parallèlement ; la somnolence se montre et va jusqu'au coma. Dans une deuxième phase, aux troubles précédents s'ajoutent des con- vulsions, du nystagmus et de l’hyperexcitabilité réflexe de la peau et des organes des sens. Les convulsions frappent les quatre membres, elles con- sistent en secousses brusques et courtes, violentes et irrégulières, rares d’abord, puis plus rapprochées. Elles naissent d’'elles-mêmes ou peuvent êlre provoquées par le moindre frôlement des poils et le moindre bruit. Enfin, dans une troisième phase, les animaux sont pris d'une contrac- ture tétanique et à la mydriase succède le myosis (1). La contracture est générale, et d’une violence inouïe, le corps se courbe en opisthotonos, les membres se tendent, les griffes s’écartent, les mâchoires se serrent, les paupières se ferment, et cet état se prolonge jusqu'à la mort. Pendant la durée des expériences, le cœur est peu modifié, et il bat encore, quoique faiblement, après l'ouverture des animaux. Mais la respi- (1) Le myosis persiste après la mort. 8e 216 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ration est notablement frappée : tout d’abord elle s'accélère, comme dans l'injection de bouillon simple; ultérieurement, au lieu de s’affaiblir, elle devient ample et saccadée; elle se suspend à l'apparition de la crise tétanique; enfin quelques mouvements respiratoires, irréguliers et incom- plets, marquent la fin des animaux. Lorsque l'injection est suspendue à la première phase, les animaux qui étaient dans le coma, inertes, anesthésiques, les pupilles dilatées, la res- piration large et saccadée, peu à peu recouvrent le sentiment et le mou- vement, si bien qu’au bout d’une heure ils se tiennent, quoique impar- faitement, sur leurs pattes. Pendant ce temps, ils urinent abondamment, évacuent des matières diarrhéiques et présentent un abaissement de température de plusieurs degrés. Les jours suivants, ils se remettent à manger, mais ils demeurent som- nolents, conservent une diarrhée intense, s’amaigrissent et meurent fré- quemment dans un extrême état de faiblesse, avec de l’hypothermie. À l'autopsie, on trouve les lésions d’une entérite plus ou moins violente; le gros intestin peut être le siège d’ulcérations et d'escarres, les ganglions. mésentériques sont tuméfiés. Lorsque l'injection est suspendue à la deuxième phase, les animaux ne succombent également pas sur-le-champ. Les secousses convulsives persistent pendant quelques minutes ou même pendant un quart d'heure, puis disparaissent, et les symptômes évoluent comme précédemment. Mais lorsque la troisième phase a commencé, la mort;est inévitable, immédiatement, alors même que l'injection serait suspendue. Le principal intérêt qui s’attache à la connaissance de la toxicité des produits solubles du bacille intestinal d'Escherich réside dans ce fait que ce microbe est un des parasites importants de l’homme. Son espèce est représentée dans le tube intestinal par des milliards d'individus. Il est certain que pullulant, dans les substances alimentaires comme dans un bouillon de laboratoire, ceux-ci donnent naissance à une somme consi- dérable de poisons et il est également certain que ces poisons sont absorbés, si bien, que selon, les expressions de M. le professeur Bouchard, l'homme est constamment sous une menace d’empoisonnement, qu'il travaille à chaque instant à sa propre destruction, qu'il fait d'inces- santes tentatives de suicide par intoxication. Le foie vraisemblablement annihile une partie de ces poisons. M. Roger a montré qu'il exerce une action destructive sensible sur les poisons pris en bloc des matières fécales ; ceux qu’élabore le bacille d’Escherich ne doivent pas échapper à son influence. Toutes les interventions antitoxiques ne nous sont pas connues, Celle des! reins sans doute est la plus efficace. C’est par lés reins que s’éli- minent principalement les poisons engendrés par le bacille d'Escherieh. L'hypertoxicité des urines, dans certaines maladies du foie, constatée par M. Roger et par M. Surmont; l’hypotoxicité occasionnée par l’antisepsie oo” SÉANCE DU 29 FÉVRIER 947 = intestinale (Bouchard, Gilbert (1) et Surmont); la diurèse même déter- minée par l'injection intra-veineuse des poisons escherichiens sont autant de preuves de l’action désintoxicante des reins. D'ailleurs, les phénomènes qui succèdent à l'injection intra-veineuse de l'urine chez le lapin, tels qu’ils ont été décrits par M. Bouchard, sont sur un grand nombre de points, superposables à ceux qui suivent l’injec- tion des produits solubles du bacille d'Escherich, si bien qu'il est permis de croire que les poisons intestinaux prennent une grande part dans la toxicité des urines et jouent un rôle considérable dans l'apparition des symptômes urémiques. GLANDE ET GLANDULES THYROÏDES DU CINEN, par M. E. GLEy. J'ai trouvé chez le chien les mêmes glandules thyroïdes, restées à l’état embryonnaire, que j'ai décrites chez le lapin (2). J'ai constaté la présence de ces organes sur tous les animaux sur lesquels je les ai cherchés. Cette recherche a porté, jusqu'à présent, sur 33 chiens, pris au hasard, de race et d'âge divers. On peut donc dire que l'existence de ces glandules est constante. | La glande thyroïde du chien est constituée par deux lobes complète- ment distincts, situés de chaque côté de la trachée, généralement du pre- mier ou du deuxième anneau au cinquième ou sixième. Chaque lobe pré sente une face interne, une face externe, un bord antérieur (ou ventral, plus large, un bord postérieur (ou dorsal), plus mince, une extrémité supérieure, arrondie, une extrémité inférieure en pointe. La glandule se trouve en général placée vers le tiers supérieur de la face externe de chaque lobe, plus près du bord antérieur que du postérieur, superficielle- ment enchâssée dans cette face, mais parfaitement distincte néanmoins de la glande, comme on peut le voir sur les pièces fraiches ou préparées, que je présente à la Société. Cette disposition est donc absolument ana- logue à celle que nous ont fait connaître les remarquables recherches de H. Cristiani sur le rat (3)-et bien différente de celle que j'ai constatée (1) Gilbert. Le Re Soc. des hôp., 1892. (2) E. Gley. Sur les fonctions du corps thyroïde (Comptes rendus Soc. de Biol., 4891, p. 841) ; — Note sur les fonctions de la glande thyroïde chez le lapin ë chez le chien (Ibid., p. 843); — Effets de la thyroïdectomie chez le lapin (Arch. de physiol., janvier 4892; p. 135.) - (3) Comptes rendus Soc. de Biol., 22 octobre 1892, p. 798, et Arch. de physiol., janvier 1893, p. 164. 218 SOCIËTÉ DE BIOLOGIE 2 —————— sur le lapin, où les glandules sont complètement isolées et relativement éloignées de la glande. Cependant celte disposition n’est pas constante. Sur 33 chiens, je ne l'ai notée en effet que quatorze fois. Sur les 19 autres animaux, j ai trouvé sept fois l’une des glandules enchâssée dans la face externe, mais l’autre isolée à l'extrémité supérieure du lobe correspondant, séparée de ce lobe par un court tractus de tissu conjonctif lâche. Comme on le voit, cette disposition est encore assez fréquente. Enfin, on peut constater des dispo- sitions très variées: c’est ainsi que j'ai trouvé quatre fois une des glandules à la place la plus habituelle, et l’autre au milieu de la face externe de l'autre lobe; une fois, l’une d'elles à la place habituelle, et l’autre à la partie inférieure de la face externe ; une fois, les glandules dans leur situa- tion ordinaire, mais non pas enchâssées, attenantes seulement à la cap- sule de chaque lobe par da tissu conjonctif qui leur formait une enveloppe propre; deux fois, toutes deux isolées à l’extrémité supérieure des lobes ; une fois, toutes deux isolées à l'extrémité inférieure des lobes; une fois, placées à l'extrémité supérieure du bord antérieur des lobes. Enfin, deux fois, j'ai trouvé une des glandules au milieu de la face externe, mais sur l’autre lobe, outre cette glandule, qui était à peu près à la même place, il y avait deux autres nodules parfaitement distincts et situés soi à la partie supérieure, soit sur le bord antérieur. C’est une disposition de ce genre qui avait attiré, il y a déjà longtemps, mon attention sur ces faits. Dans ce cas, il existait encore d’ailleurs, sur le côté d’un deslobes et séparé de ce lobe par une lame de tissu conjonctif large d'un demi-centimètre à peu près, un lobule de la grosseur d'une très grosse lentille, lobule constitué comme le reste de la glande et ainsi formant une véritable glande accessoire. J'ai depuis retrouvé sur deux autres chiens un semblable petit lobule. L'existence de glandes acces- . soires situées en des points plus ou moins éloignés de la glande thyroïde est connue du reste depuis très longtemps; tandis que celle des glandules, organes embryonnaires, constitue une donnée tout à fait nouvelle (Sands- trôm, Gley, Cristiani). En résumé, on voit que la disposition des glandules chez le chien, étant très variable, rappelle à la fois ce que Cristiani a récemment décrit chez le rat (loc. cit.) et ce qu'ila décrit, tout dernièrement, chez la souris et chez le campagnol (Soc. de Biol., T janvier 1893, p. #). Par ce nouvel exemple, ajouté à ce que nous ont appris les recherches de Sandstrüm sur l’homme, le cheval, le bœuf, de Sandstrüm et de Gley sur le lapin, de Cristiani sur le rat, la souris et le campagnol, le fait de l'existence de ces organes embryonnaires devient très général. CARE SÉANCE DU 29 FÉVRIER 219 EEE mn SUR LA NATURE DES GLANDULES THYROÏDIENNES DU CHIEN, par MM. FE. GLey et C. Puisazix. Nous avons entrepris l'étude histologique et embryologique des glan- dules thyroïdiennes que M. Gley a trouvées chez le chien. Nous signalons simplement aujourd’hui le fait essentiel concernant la nature de ces organes, à savoir leur structure analogue à celle de la glande thyroïde fœtale. Sur des pièces durcies, l'aspect des coupes, après coloration, les fait déjà nettement distinguer, à cause de leur coloration plus vive, du reste du tissu environnant de la glande. À un faible grossissement, on voit des amas lobulés, séparés par des espaces clairs, indice du bourgeon- nement primitif. Ces amas lobulés sont constitués par des cellules em- bryonnaires serrées les unes contre les autres. Ces cellules ont fixé la malière colorante beaucoup plus fortement que le tissu de la glande thyroïde proprement dite. Il n’y a ni vésicules thyroïdiennes, ni subs- - tance colloïde. NOTE SUR LA MESURE DE LA VITESSE DES MOUVEMENTS GRAPHIQUES, par MM. A. BINET et COURTIER. L'usage, convenablement réglé, de la plume électrique dite «plume Edi- son » permet d'apprécier,et même de mesurer la vitesse des mouvements graphiques. On peut, en effet, en reliant la plume à un signal Deprès, qui écrit sur un cylindre contrôlé par un diapason, compter le nombre exact des pulsations de la plume pendant qu’on s’en sert pour écrire. La distance des points marqués par la plume sur le papier peut être mesurée à la loupe, et mieux encore au microscope, si on a soin de faire le tirage de l'épreuve sur une plaque de verre, par exemple sur un porte-objets On trouve dans ce dispositif expérimental de bonnes conditions pour faire une étude sur la vitesse des mouvements graphiques. La présente note est simplement destinée à attirer l'attention sur un procédé d'observation, quinous paraît appelé à rendre de grands services à la psychologie des mouvements. Nous nous bornerons, pour le moment, à signaler ce fait intéressant que l'écriture d’une personne normale pré- sente un nombre véritablement extraordinaire de changements de vitesse, qui sont produits d’une façon régulière par la direction et la forme des traits à tracer ; pour en donner un exemple typique, nous citerons le mot psychologie, qui tracé d’une main machinale, présente une quarantaine de changements de vitesse, visibles à la loupe; il n'existe pas une seule lettre qui soit tracée d’un mouvement uniforme. 220 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE = - Dans une prochaine note, nous indiquerons les résultais de nos mensu- rations, et donnerons une idée des applications nombreuses que l’on peut trouver à ce procédé d’observalion. (Travail du Laboratoire de Psychotogie de la Sorbonne. Hautes-Etudes.) DÉMONSTRATION ANATOMIQUE DE LA RÉCURRENCE NERVEUSE, par M. le D' Fromowr, Aide-major au 16€ bataillon de chasseurs, à Lille. Sur deux adultes vigoureux et sans anomalies musculaires disséqués au laboratoire du professeur Debierre (Institut anatomique de Lille), j'ai trouvé entre les deux branches d’origine du médian une anastomose qu'il me paraît intéressant de relater, en raison des déductions physiologiques qui en découlent. Ogs. L — L'anastomose a 1 millimètre de diamètre; elle part de la racine externe du médian à 5 centimètres de la réunion en un tronc unique, se dirige en bas et en dedans en passant devant l’humérale, puis remonte fran- chement et regagne la racine interne ayant décrit une anse à concavité supé- rieure. A sa terminaison dans la racine interne, l’anastomose est bifurquée et se comporte différemment pour les deux filets. Le filet inférieur descend dans la racine interne vers l'extrémité du membre ; le supérieur, au contraire, se recourbe très nettement vers l’origine de cette racine dans laquelle il peut être suivi pendant 3 centimètres du côté des centres. Os. IL. — L'anastomose unique, à ses deux points d'origine et de termi- naison, est un peu plus volumineuse que la précédente. Elle part de la racine externe du médian à 6 centimètres au-dessus de la réunion des racines, se dirige verticalement en bas et, décrivant une anse à concavité supérieure, Va se jeter dans la racine interne au même niveau. Des deux côtés, en dissociant légèrement le névrilème, on peut constater que les fibres nerveuses remontent vers le plexus brachial. Ogs. IL. — Dans cette observation, l’anastomose affecte une disposition rectiligne descendante ; partie de la racine interne, à 5 centimètres de la jonc- tion, elle se jette dans l’externe à un 1/2 centimètre du tronc commun. Ce dernier cas rentre dans la catégorie des anastomoses ordinaires, départ de fibres en un point d'un nerf puis, reconstitution ou apport de ces fibres à un autre nerf : la direction des filets nerveux y est centrifuge. Dans nos deux premières observations, au contraire, des fibres venues des centres par une racine du médian regagnent ces centres par l'autre racine; SÉANCE DU 29 FÉVRIER 991 Er ne Ua TU elles décrivent une anse complètement fermée et dont les deux extrémités aboutissent à la moelle, Cette disposition. parait être assez rare, bien que nous l’ayons trouvée deux fois en quinze joies et des recherches auxquelles je me suis livré, il semble résulter qu’elle n’a pas encore été observée ou du moins décrite. Bien que les anastomoses nerveuses se prêtent peu à une classification, les recherches de ces dernières années (Hartmann, Debierre, Curtis, Ber- taux) paraissent en avoir donné une interprétation suffisante. De ces recherches il ressort qu’en thèse générale une anastomose entre deux nerfs dans un segment de membre se reproduit entre les deux mêmes nerfs et en sens inverse au segment inférieur (médian et cubital à l’avant-bras, cubital et médian à la main). La quantité de fibres appartenant à un nerf resterait toujours semblable; il y aurait seulement déviation, puis reconstitution, et les anastomoses seraient destinées à assurer la trans- mission nerveuse par des voies de retour ménagées à des hauteurs variables. Tout autre paraît être Le rôle de l’anastomose dans nos deux cas : venue du plexus brachial par l’une des racines du médian, elle retourne à ce plexus par l’autre racine sans avoir donné aucun rameau, soit à la peau, soil aux muscles. De celte disposition anatomique on peut déduire qu’elle ne prend aucune part à la formation du médian et par suite à sa distri- bution en tant qu'organe de transmission nerveuse pour le membre. À quoi servirait une anse nerveuse de ce genre, centrifuge dans son trajet descendant, centripète dans son trajet ascendant, et rattachée par ses deux extrémités à un plexus nerveux, tel que le plexus brachial, si elle ne reliait la racine motrice à la racine sensitive de la moelle? La seule hypothèse possible pour expliquer ces anastomoses consiste à les considérer comme se rattachant aux phénomènes de la sensibilité ré- currente. Longtemps discutée, celle-ci a été démontrée définitivement par Magendie en 1822, sans qu'on ait pu trouver nettement les voies par les- quelles les fibres de sensibilité abandonnées à la racine antérieure regagnent les racines postérieures. Pour Longet, ces fibres se réfléchissent près du ganglion à la jonction des deux racines; pour Magendie, cette réflexion se fait dans les anses terminales anastomotiques qu'il admettait à la périphérie entre les deux nerfs moteurs et sensibles. Cl. Bernard enfin suppose que la récurrence se fait en des points variables, mais toujours à une assez grande distance des ganglions. Nos deux anasto- moses semblent confirmer cette dernière hypothèse : en effet, s’il est im- possible de démontrer physiologiquement qu'elles contiennent réellement des filets récurrents, leurs connexions avec les centres médullaires, dont elles viennent et auxquels elles retournent, sont une caractéristique qui n'appartient qu'aux fibres de sensibilité récurrente et peut nous permettre d'affirmer la réflexion de ces fibres au niveau du plexus brachial. 999 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cette réflexion doit se faire également en des points plus inférieurs, car dans notre observation I une partie de l’anastomose dédoublée s’infléchit pour descendre vers la périphérie. Elle peut également se faire au niveau des racines des nerfs rachidiens, puisque le professeur Debierre a rencon- tré plusieurs fois, dans ces dernières années, une anastomose directe jetée entre une racine motrice et la racine sensitive correspondante au niveau du ganglion spinal. RESPIRATION PLACENTAIRE A L'ÉTAT NORMAL ET A LA SUITE D'UNE HÉMORRAGIE DE LA MÉRE, par M. le D' L. Burre. Dans un travail fait en collaboration avec M. Charpentier, sur l'influence des hémorragies de la mère sur la vitalité du fœtus, j'avais cru remarquer que la coloration du sang dans les artères ombilicales présentait, contrairement à ce qui a lieu à l’état normal, une teinte un peu plus rosée que celle du sang de la veine ombilicale. Mais ce n'était qu'une impression. Aussi, j'ai pensé qu'il serait intéressant de faire des recherches plns précises sur ce sujet, en dosant les gaz dans le sang des deux vaisseaux. Il y a déjà plusieurs années, Cohnstein et Zuntz (4) avaient fait des expériences sur la respiration du fœtus et avaient dosé l'oxygène et l'acide carbonique du sang comparativement dans la veine et dans l'artère ombilicale. Dans une première expérience, ils avaient trouvé : O p.100. Co? p. 100. ATÈLE NOMINALE ARR EEE D A0) 46,54 Veinelomhilicale rer O6 41,82 et dans une deuxième : O p. 100. Co? p.100. ATLÉTESOTMDINCAlE MAP NNOENRR 20 47.0 Veine ombilicale , . À 6.3 40.5 Dans le premier cas, 100 grammes de sang, en circulant à travers le fœtus, s'étaient donc chargés de 4 c. c. 72 Co? et avaient perdu & c. c. 67 Ox. ; dans le second cas, la même quantité de sang avait perdu 4 c. c. Ox. et s'était chargée de 6 c. c. 5 Co*. J'ai répété cette expérience en opérant sur une grosse chienne pleine, (1) Ark. f. die Ges. Physiol., t. LIV, p. 173, 4884: SÉANCE DU 29 FÉVRIER 993 voisine du terme, et, avec un aide, j'ai fait l'extraction presque simulta- nément dans les deux vaisseaux ombilicaux. Voici les chiffres que j'ai obtenus : O p. 100. Co? p. 100. ANntercsombiicdle NAME Re 02 2 48.0 Meiner ombilicale PEN CR RS M) 40 ,1 100 grammes de sang ont donc perdu, en traversant le fœtus, 3 c. c. 7 Ox. et ils ont gagné 7 c. ce. 9 Co*. L'expérience directe met donc hors de doute ce fait que laissaient pré- voir les lois de la physiologie, que la mère fournit à l'embryon l'oxygène nécessaire à sa vie. Le sang qui vient du placenta par la veine ombilicale contient plus d'oxygène que celui qui y retourne par l'artère, après avoir traversé le corps du fœtus. L’acide carbonique se trouve en proportions inverses et le sang de l'artère ombilicale en contient plus que celui de la veine. Le fœtus, en même temps qu’il absorbe de l'oxygène, produit de l’acide carbonique qu'il élimine. En est-il de même dans certains cas pathologiques, et en particulier lorsque la mère subit une hémorragie considérable? Sur une chienne pleine, vigoureuse, de forte taille, je mets une des carolides à nu, j'y introduis une canule et j'en extrais 400 centimètres cubes de sang. J'ouvre alors l'abdomen et l’une des cornes utérines, j'incise un sac fœtal, j'isole une artère et la veine ombilicale et, avec un aide, j'extrais du sang de ces deux vaisseaux. Je retire de l'artère 6 centimètres cubes de sang, qui me donnent : CO RE RE ee puni Ce Co DRE SAR TENTE ONE RE PR Re PC CA ApreSRacidepyroeallique EE Re 10) crc ce qui fait 3 ce. c. Go° et 0 c. ce. 6 Ox. De la veine, j'extrais 7 centimètres cubes de sang qui fournissent : (CEA RE ee ae TAN ent a ONC CAD Dre SO RME Re R rs Re NS ne ON GC Après acide D Eliane PU RP me MON GA soit 2 c. ce. 95 Co° et 0 c. c. 4 Ox. En faisant le calcul pour 100 grammes de sang, on obtient : O p. 100. Co? p. 100. Antéretomhilicale et AID 0) Veine ombilicale. ., . . . . . ne) ©t DS 0 .À CS On voit que le sang, en circulant à travers le fœtus, s’est chargé de 7 c. c. 9 Co’, chiffre à peu près normal. Par contre, au lieu d'avoir perdu 9294 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de l'oxygène, il en a gagné. C'est là un fait en apparence paradoxal, mais qui peut néanmoins s'expliquer en admettant qu'à la suite de l'hémorragie, la mère a attiré dans son système circulatoire l'oxygène en réserve dans l’organisme fœtal. De plus, cette soustraction d'oxygène permet de comprendre pourquoi, à la suite des hémorragies, les fœtus succombent avant la mère, comme l'ont démontré nos expériences avec M. Charpentier. Dans ces cas, en effet, la mère utilisant pour elle tout l'oxygène du fœtus, celui-ci man- quant avant celle-là de l’élément indispensable à sa vie, meurt rapide- ment par asphyxie, produite par le défaut d'oxygène. LÉSIONS ANATOMIQUES PRODUITES PAR LE DISTOMA SINENSE, par M. Mory, Médecin-major de {re classe, professeur agrégé au Val-de-Grâce. J'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie une série d'obser- vations de distomes. Dans nos climats, les douves, si communes chez le mouton, sont extrè- mement rares chez l’homme: mais on rencontre souvent sur lui en extrême Orient un trématode d'une espèce voisine : distoma sinense, puisque, sur quinze aulopsies d’Annamites je l'ai trouvé sept fois. Toutes les provinces du Tonkin semblent d’ailleurs également atteintes par cet entozoaire; car les localités dont nos malades étaient originaires se trouvaient très éloignées les unes des autres et réparties également dans tout le pays. Voici ma première observalion : Le milicien Binh-van-Nehi, entré le 22 avril 14887 à l'hôpital militaire d'Hanoï, souffrait depuis dix ans environ, d’un gonflement indolore et pro- gressif de l'abdomen. Il présente à l'examen les signes d’une ascite peu consi- dérable sans œdème des membres inférieurs ni du scrotum, et l’on perçoit en outre au palper, dans l’hypocondre gauche, une tumeur volumineuse qui semble faire partie du foie, dure, à surface inégale et se bn | en bas jusqu'au voisinage de l’ombilic. Le malade n'est pas très amaigri, son teint n’est pas cachectique; aussi, rejetant l'idée d’abcès ou.de kyste en raison de la consistance de la tumeur; l'absence de cachexie et d'ædème malléolaire me faisant, d'autre part, éliminer tout néoplasme, j'arrive à diagnostiquer « quelque chose que je ne connaissais pas ». Le 28 avril, le malade est pris de choléra et meurt la nuit suivante, à une heure du matin. L'autopsie, pratiquée le même jour à dix heures du matin fournit les résul- tats suivants : Abdomen. Le foie, très volumineux, pèse avec sa vésicule 3 kil. 200; el pré- ALL: 19 re Qt SÉANCE DU 25 FÉVRIER sente l’aspect d'une énorme masse tuberculeuse à l'état phymatoïde ; il est dur, hosselé, à surface grossièrement chagrinée; sa couleur est d'un Jaune sale, moucheté de taches foncées. A la coupe, on remarque deux foyers hémorragiques du volume d'une noix; le reste de la section offre une sur- face jaune formée par la juxtaposition de’ masses arrondies, fibreuses à leurs périphéries phymatoïdes dans ler partie centrale. Il n'existe plus aucune trace de tissu hépatique normal. Nous pensions être en présence d'une tuberculose anormale ; mais en exa- minant de plus près le liquide sirupeux brun verdâtre qui s’écoulait des voies biliaires nous constatâmes non sans surprise, qu'il se composait presque uni- quement de douves ou plus exactement de distomes lancéolés ; ces parasites occupent les voies biliaires principales — le cholédoque surtout — qu'ils obstruent presque complètement. La vésicule biliaire, considérablement distendue, contient un liquide séreux, presque incolore, depuis longtemps, accumulé, sans doute, mais pas un seul distome. Le pancréas, hypertrophié dans sa partie duodénale, adhère au foie sur une large surface et présente en ce point, sur le quart de son étendue, la même dégénérescence fibro-graisseuse que ce dernier organe; il contient aussi quel- ques douves placées au-dessus du canal de Wirsung dans les canaux secon- daires dilatés de sa tête. Rate : à peu près normale ; poids, 120 grammes. Reins : normaux ; poids, 105 à gauche, — — — 100 à droite. Les poumons présentent au voisinage de leur surface pleurale quelques petits infarctus phymatoïdes sans inflammation périphérique. L'aspect de ces infarctus pourrait en imposer pour du tubercule; mais en en ouvrant un avec la pointe d'un bistouri, on réussit facilement à extraire la parcelle caséeuse émigrée du foie sans changement de caractère; et l’on constate que le tissu pulmonaire qui la contenait est lui-même tout à fait normal. On voit aussi à la surface pleurale du poumon de petits noyaux gris fibreux disposés en ligue, entourés de pigment et paraissant être d'anciens infarctus aseptiques résorbés. Voici, très résumées, les autres observations qui offrent moins d'intérêt. OBs. IE. — Tuberculose mésentérique. Entré à l'hôpital le 41 février. — Mort le 9 mai. Foie : Jaune brun, légèrement atrophié; poids, 1,270 grammes avec sa vési- cule à demi vidée ; cette dernière est très dilatée comme dans la première observation et les canaux biliaires, très élargis, contiennent des distomes : il y en a aussi dans le canal cystique et dans la vésicule, pleine de liquide clair; la plupart sont vivantes. Substance du foie d'apparence normale. Le hile est obstrué par des masses tuberculeuses sous-péritonéales. La rate pèse 215 grammes, et contient de gros noyaux tuberculeux ; son 226 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE extrémité supérieure offre une sorte de calotte sphérique complètement dégé- nérée, plus dure et plus pâle que le reste du parenchyme de l'organe. Reins normaux. Le droit poids ee 22 LOU STATE LÉePAUCRE ERP nn Les poumons sont tuberculeux et pèsent : Pedro me Ent Re 000 = Le gauche, ES ET DO Di gains D ONU — Éercœur MIavVÉ DEC A ER O0 —= O8s. IE. — Sujet mort de la rage. — Autopsie le 22 mai 1887. Le foie contient quelques distomes, mais semble normal d’ailleurs. O8s. IV. — Tuberculose pulmonaire. Entré le 1% mai 1887. — Mort le 29 sans phénomènes prémonitoires. Le foie pèse 1,150 grammes, il est plus jaune que normalement mais ne présente pas d’altérations graves. Distomes dans les voies biliaires. Celles-ci sont obstruées et l’on voit à la surface convexe du foie quelques gros canaux biliaires distendus par suite de l'accumulation des distomes dans le canal cholédoque. OBs. V. — Rupture de la rate par coup de pied de mulet. — Autopsie le 23 juin 1887. Poids de la rate. Re ne Dot 860 grammes. — du foie. . Se nie OA) — Celui-ci contient des distomes, la bile est jaune, le foie peu altéré. Ogs. VL — Fracture du fémur au tiers supérieur par coup de feu. — Autopsie, le 25 juin : foie 1,155 grammes distomes rares. Ogs. VII. — Fièvre rémitlente pernicieuse. — Autopsie, le 10 août 1887 : Foie assez volumineux contient une grande quantité de distomes ; vésicule biliaire distendue ; canaux biliaires périphériques non dilatés. Voici maintenant les quelques remarques que m'ont permis de faire les sept observations ci-dessus : 4° Les distomes ne siègent qu’exceptionnellement dans la vésicule, et pour les découvrir, il faut ouvrir les voies biliaires principales. Quand ils sont en petit nombre rien ne peut faire soupçonner leur présence, et c'est ainsi qu’elles ont passé inaperçues pour nous jusqu’au jour où les ayant constalées une fois et ayant appris à les chercher nous les avons trouvées dans la moitié de nos autopsies ultérieures. Quand les distomes sont nombreux, on voit s'écouler de la coupe du hile une bouillie noirâtre épaisse que l’on prendrait pour de la bile précipitée; mais il suffit de l’étaler sur la table d’autopsie pour que les entozoaires apparaissent très distinctement enrobés dans un liquide plus clair que la bile normale. SÉANCE DU 29 FÉVRIER 2251 Quand ils sont rares, ils apparaissent comme des flocons dans la bile qui s'écoule ou bien on les rencontre dans les canaux biliaires assez loin du hile, comme l'ont dit nos collègues de la marine, MM. Grall et Vallot (1). Quand nos autopsies étaient faites hâtivement, comme cela était quel- quefois nécessaire pour les cholériques, on trouvait des distomes vivants et animés de mouvements vermiculaires irréguliers, faibles, mais très manifestes. Ces animaux, très sensibles à l’action de l’air ou du froid, mouraient après une ou deux minutes. * Les altérations du foie nous ont semblé en rapport assez direct avec le nombre des distomes : quand ceux-ci sont en petit nombre, le foie paraît tout à fait normal; quand ils sont plus nombreux, les canaux biliaires se dilatent, et plus tard, sans doute, le foie s’enflamme plus ou moins lui- même. L'inflammation produite par les distomes ne paratt pas susceptible de se terminer par la formation d’un abcès; cependant M. Grall a rapporté le cas d’un légionnaire atteint d’un phlezmon du flanc droit dont le pus contenait des distomes; ce qui tendrait à prouver que ces parasites sont moins bien supportés, par les espaces celluleux périhépatiques que par le foie lui-même. On conçoit bien cependant que l’irritation persistante des canaux biliaires, si aseptique qu’elle puisse être, doit entrainer, à la longue, une modification matérielle du parenchyme hépatique. Notre observation I en est une preuve manifeste. Il résuite d’ailleurs des observations recueillies au Tonkin que l’hyper- trophie précède la dégénérescence et que celle-ci ne se produit que de longues années après le début de l'infection et seulement quand les dis- tomes sont nombreux. L'hypertrophie avec ou sans dégénérescence ne se montre que deux fois sur sept dans nos observations; mais, une fois établie, elle semble défini- tive, et dans notre colonie l’on n’a pas encore signalé de dégénérescence atrophique attribuable au distome. Cependant, si l’on remarque que l’obstruction et l'irritation des voies biliaires ou du hile des reins par des calculs irréguliers, s'accompagne habituellement de cirrhose atrophique. On est conduit à se demander si le même fait ne peut pas se présenter dans les cas de distome hépatique. D'après l’autopsie rèlatée par Mac-Connell (cas de distomes avec atro- phie du foie), la question devrait se résoudre affirmativement et les entozoaires seraient aussi aptes que les calculs à provoquer des troubles trophiques se traduisant non seulement par des altérations histologiques, mais par une diminution du poids de l'organe, Notre observation IV montre que les distomes peuvent aussi causer la (4) Grall. Archives de la Marine navale, 1887. Vallot. Archives de la Marine navale, 1889. 228 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mort subite par arrêt brusque de l’excrétion biliaire et syncope réflexe: c’est la seule manière plausible d'expliquer le décès qui ne pouvait résulter directement d'une tuberculose limitée au poumon gauche, et en voie de sédation. Bien qu'il n’y eut aucun symptôme cholérique, quatre à cinq jours avant la mort le pouls devint petit sans qu’il fut possible alors de se rendre compte des causes de ce fait qui ne se sont élucidées qu'à l’au- topsie. En découvrant les organes abdominaux dans notre première observa-. tion, nous avions cru d’abord être en présence d’une énorme masse tuber- culeuse; mais, l'intégrité absolue des ganglions mésentériques, siège pré- féré des tuberculoses graves dans la race annamite, nous a fait rejeter cette idée et conduit à examiner de plus près les voies biliaires, Les résul- Fic. 1 A. Distome mort à l'état de flaccidité. — B. Distome encore vivant et l'extrémité céphalique contractée. — C. Douve du bœuf morte (grandeur naturelle.) tats de cet examen sont consignés plus haut et, si l’on veut bien remar- quer que la portion de pancréas qui contenait les douves était exacte- ment dans le même état que le foie, on reconnaîtra que le rapport entre la dégénérescence des deux organes et la présence des douves dans leurs canaux excréteurs, est des mieux établie. Il est seulement à regretter que les conditions dans lesquelles nous nous trouvions n’aient pas permis linoculation du tissu dégénéré au lapin. Notre malade n’avait, à son entrée à l’ hôpital, ni ictère, ni diarrhée; il n'était pas très amaigri, et n’avait pas de fièvre. Il aurait sans doute encore pu vivre un certain temps, sans l'intervention du choléra, qui est venu brusquer le dénouement comme il le faisait d'habitude à cette épo- que pour les cachectiques de toute nature arrivés à la période ultime. Aussi, avons-nous été très étonné de la disparition totale et déjà ancienne peut-être, de tous les éléments physiologiques du foie : il est fächeux SÉANCE DU 25 FÉVRIER 299 que l'examen des urines n'ait pas été fait non plus que celui du foie dégé- néré au point de vue glysogénique. Quand nous avons été fixé sur la nature de la maladie, nous avons cherché les œufs de distomes dans les liquides intestinaux recueillis à l’autopsie, sans pouvoir en rencontrer ; cette recherche n’est donc pas un moyen de diagnostic exclusif des distomes. Mes observations, sommaires d’ailleurs, concernant la morphologie des distomes en présence desquels je me trouvais, concordent avec celles de mes collègues de la marine. J'ai eu recours à l’obligeance de M. le vétérinaire Voisnier pour obtenir un spécimen des douves que l’on rencontre d’une manière à peu près constante au Tonkin dans la vésicule biliaire des bœufs. La figure 1 ci- contre donne les proportions respectives, l'aspect et les dimensions exactes de la douve du bœuf et du distome de l’indigène. F1G. 2. — OEufs de distomes Fic. 3. — Œufs de distomes, grossis 250 fois environ. 200 d. La douve du bœuf est de couleur sanguinolente, le distome est verdâtre, avec un point plus clair vers le milieu du corps. Entre celte tache claire el la ventouse caudale se voient les canaux testiculaires colorés en rouge pâle. En dissociant un disiome, on remarque que ses œufs sont beaucoup plus adhérents aux organes que ceux du ténia. Il faut insister assez longtemps pour en isoler quelques-uns; on remarque alors qu'ils ont une coque indépendante formant une deuxième paroi et qui porte à l'union du tiers céphalique avec le tiers moyen un faible sillon trans- versal, qui semble indiquer le point où s'ouvrira l'œuf (fig. 2). Le contenu de ce dernier est granuleux. On y distingue quelques noyaux mal limités plus volumineux les uns que les autres. En examinant une portion d’oviducte avec son contenu, on reconnait, comme l'indique la figure ci-dessus, que les œufs qui s’y trouvent ne sont pas tous au même degré d'évolution et que les moins avancés, dont le contour est à peine indiqué, sont formés de cellules rondes agglomérées, comme si l'œuf à son origine était constitué par plusieurs ovules, concen- trant ainsi, dans une apparente unité, les éléments futurs des êtres mul- tiples qui, Cane les stades ultérieurs de ses surprenantes dus viendront reconstituer leur individualité temporairement oo 7R 4 Pin « à & 7e Fr { Pr er ‘ 1 e PU 230 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Disons en terminant que nous n'avons jamais rencontré de distomes chez les Européens. Le cas rapporté par noire collègue Grall et mentionné plus haut (abcès contenant des distomes), offre donc un grand intérêt ; il montre en effet, d'une manière certaine, que l'Européen peut être envahi par ces para- sites après un court séjour au Tonkin. Il est, d'autre part, assez probable, d’après notre première Disenaron que les douves vivent plus de dix ans dans le foie et suivent en cela la loi commune qui semble accorder à la plupart des entozoaires une longévité correspondante à celle de leur hôte. Le Gérant : G. Masson. oo oo Paris, — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarerHEux, directeur, 1, rue Cassette. SÉANCE DU 4 MARS 1893 MM. E. LecLaINCHE et L. MonTaé : Altérations vasculaires et bronchiques dans la morve chronique. — M. le D' Kart : Tuberculose irido-ciliaire à marche rapide, sans bacilles, et non inoculable. — M. RaPpnaez Dupois : Influence du foie sur le réchauffement automatique de la marmotte. —MM. D» ArsonvaL et CHARRIN: Relations entre les fonctions chromogène, pathogène, antifermentative du bacille pyocyanique. — MM. CuarriN et GLEy : Quatre infections distinctes chez un chien diabétique. — MM. J. Héricourr et;CnarLes Ricuer : Vaccination du singe contre la tuberculose. — MM. le Df pe Backer et J. Brunar : Nouvelle méthode de traitement des mala- dies infectieuses de nature microbienne, au moyen de ferments figurés. — M. le Dr A. Marsec : Écoulement du sang par les points lacrymaux, au cours d'une épistaxis, après le tamponnement des fosses nasales. — M. G. Duran» : Dévelop- pement des muscles de l'iris chez l'embryon de poulet. — M. G. Loisez : Les pièces de soutien de la radula chez les Céphalopodes et le tissu cartilagineux des Mol- lusques. — M. J. Sorras : Sur l’état de la moelle épinière dans deux cas de com- pression des racines postérieures. — M. J. DEJERINE : À propos de la communica- tion de M. Sottas. — M. S. Jourpaix : Note sur un mouvement de rotation singulier de la tête chez une larve de Culicide. — M. Louis LaPrcque : Étude quantitative sur le régime alimentaire des Abyssins. — M. L. Vaunix : Analyse d'une urine albumineuse ne renfermant pas de sulfates solubles. — M. Aimé Guinarp : Note sur les dangers des injections sous-cutanées de liquides organiques quand ces liquides ne sont pas parfaitement limpides: — M. L. Queyrar : Appareil à contention pour les cobayes. — M. L. Quevyrar : Emporte-pièce à pommes de terre, — M. P. Tné- LOHAN : Altérations du tissu musculaire dues à la présence de Myxosporidies et de microbes chez le Barbeau. Présidence de M. Chauveau. CORRESPONDANCE MANUSCRITE Lettres de MM. les professeurs LunwiG et van BENEDEN, qui remercient la Société de les avoir élus Membres honoraires. — Lettre de M. le professeur BEAUNIS, qui remercie la Société de l'avoir élu Membre associé. — M. JourDaIN, élu Membre correspondant, adresse ses remerciements à la Société par l'intermédiaire de M. HENNEGUY. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS, — 9€ SÉRIE. T. V, 9 252 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ALTÉRATIONS VASCULATRES ET BRONCHIQUES DANS LA MORYE CHRONIQUE, par MM. E. Lecracue et L. MONTANÉ, AMC REE NL Professeurs à l'École vétérinaire de Toulouse. (Communication faite dans la séance précédente.) Dans de précédentes notes, nous avons établi que les altérations de la morve chronique du poumon, chez le cheval, débutaient dans Île tissu conjonctif sous-pleural et interlobulaire. Les travées envahies sont considérablement élargies ; les espaces plas- matiques du tissu conjonctif renferment de très nombreux leucocytes qui dissocient les éléments et donnent à l'ensemble un aspect réticulé; les fentes et les vaisseaux lymphatiques sont remplis et distendus par des cellules rondes accumulées. Avec celles-ci, on rencontre en tous les points les bacilles spécifiques. Les lésions s'étendent aussi aux gaines lymphatiques qui entourent les vaisseaux et les bronches:elles sont suivies d’altérations particulières por- tant sur les parois vasculaires ou bronchiques. Autour des gros vaisseaux, on observe, à un faible grossissement, une zone granuieuse, fortement colorée. Elle est constituée par une infiltra- tion de leucocytes qui distendent la tunique adventice et la transforment en une large gaine lymphatique annulaire. En certains points, l'inflam- mation s'étend à la tunique moyenne; celle-ci est envahie par les cellules rondes, en même temps que l’endothélium se gonfle, prolifère et se dé- tache. Les leucocytes infiltrent toute la paroi et font irruption dans Îa lumière du vaisseau, en même temps que des bacilles libres ou intra- cellulaires. Très marqués en quelques endroits, ces troubles déterminent la des- truction totale des parois et l’obstruction du vaisseau. On voit alors sur la coupe une zone étendue de tissu embryonnaire renfermant quelques cellules musculaires lisses, vestiges de la tunique moyenne, et, occupant la lumière du vaisseau, un bourgeon de tissu embryonnaire. Des lésions de même ordre sont rencontrées au niveau des bronches. L'infiltration du tissu lymphatique péribronchique est suivie de la réac- lion inflammatoire des parois; le derme de la muqueuse, infiltré par de nombreuses cellules migratrices, s'épaissit et bourgeonne dans l'intérieur du canal, en même temps que l’épithélium se multiplie et se désquame. On trouve la lumière de la bronche obstruée par un exsudat muqueux, très riche en leucocytes et en bacilles. Certaines d’entre les bronches aci- neuses sont ainsi complètement oblitérées par le bourgeon inflammatoire. Les altérations du tissu lymphatique, péribronchique et périvasculaire, marquent toujours la phase initiale du processus; elles sont constantes SÉANCE DU 4 MARS 235 au voisinage des tubercules jeunes; mais les lésions des parois des vais- seaux et des bronches sont observées en quelques points seulement de de leur trajet. | L'immigration rapide des leucocytes et des bacilles vers la lumière des canaux est particulièrement grave. Même en cas de lésions discrètes et lo- calisées en apparence, des bacilles pénètrent dans le sang, au moins au début, et sont entrainés par la circulation. D'autre part, dès les pre- mières périodes de l'évolution de la morve pulmonaire, des bacilles se rencontrent en abondance dans les bronches, par conséquent dans le jetage, et, dès ce moment, les malades sont dangereux au point de vue de la contagion. TUBERCULOSE IRIDO-CILIAIRE A MARCHE RAPIDE, SANS BACILLES, ET NON INOCULABLE, par M. le D' Kacr. (Communicalion faite dans la séance précédente.) La tuberculose de l'iris et du corps ciliaire a été décrite il y a plus de vingt ans. On savait qu’elle atteignait surtout des sujets jeunes en puis- sance de tuberculose ou d'hérédité tuberculeuse. Elle débutait par des granulations jaunes, plus ou moins confluentes, à la surface de l'iris. Au bout de quelques semaines, la masse fongueuse perforait la sclérotique, ou bien, dans les cas les plus favorables, il survenait une atrophie du globe. Ces notions ont été confirmées maintes fois; il s’y est ajouté la connaissance des bacilles et de l’inoculabilité de ces tumeurs à l'œil du lapin. En 1879, Haab rapporta des cas de tuberculose nodulaire de l'iris chez des sujets tuberculeux, et où une guérison locale spontanée était survenue. Mais ces observations restèrent isolées : la majorité des auteurs continue à considérer les éruptions nodulaires sur la face antérieure de l'iris, à évolution lente et sans grande réaction inflammatoire, enfin guérissant sans détruire le globe, comme des lymphomes ou bien comme des lésions gommeuses relevant de la syphilis héréditaire. Invariablement les succès thérapeutiques étaient attribués au traitement antisyphilitique. En 1889, une nouvelle observation de tuberculose curable fut publiée par M. Panas, et, en 1890 parurent deux travaux importants, l’un de Liebrecht, l’autre de Van Duyse. Ces travaux établissaient nettement l’existence d’une iritis tuberculeuse, à nodules discrets, à évolution atté- nuée, survenant chez des sujets tuberculisés, ou jan l'observation ulté- rieure a montrés tuberculisables. Leber se rallia à cette manière de voir en 1891. La principale objection 234 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE qui fut faite était fondée sur l'absence habituelle de bacilles et d’inoculabi- lité de ces tumeurs, excisées par une iridectomie, dans la chambre anté- rieure du lapin. À quoi Van Duyse répond qu'il s’agit de microbes atté- nués ou bien étouffés par une prolifération fibreuse abondante. Ces faits étaient une confirmation de la conception nouvelle. Tout en admettant l'existence d’une tuberculose atténuée irido-ciliaire, il me semble cependant que les explications données ne sont pas valables. En effet, j'ai observé, l’année dernière, un fait de tuberculose irido-ciliaire à marche très rapide et dont les produits ne contenaient pas de bacilles et n'étaient pas inoculables, Il s’agit d’une fille de douze ans, atteinte quinze mois avant son affec- tion oculaire d’une coxalgie à droite avec abcès péri-articulaires, coxalgie qui fut traitée par des injections d'éther iodoformé seulement. La guéri- son s’ensuivit, avec raccourcissement du membre. L’affection oculaire débuta brusquement, au dire des parents, par des douleurs ciliaires et un trouble de la vue. Les douleurs cessèrent au bout de trois jours. Vers le 40e jour, je constatai: iris jaune-verdâtre, trouble. Semis de petits points blanchâtres à sa surface, du volume de têtes d'épingles, très nom- breux, et devenant confluents par places. Dans leur intervalle, un lacis capillaire simulant des hémorragies. Pupille obstruée. Région supéro- interne du corps ciliaire bombée, vivlacée, d’aspect de scléro-choroïdite. Pas de douleurs. Etat général bon. La bosselure sclérale augmente rapidement et tend à se progager en arc dans le sens du corps ciliaire. Le 2 jour, malgré un traitement par l'iodure et les frictions, essayé à tout hasard, la tumeur ciliaire faisait une telle saillie sous la conjonctive que je fis l'énucléation. Examen de la pièce. — Perforation de la sclérotique au niveau de la bosselure, après enlèvement de la conjonctive. Il s'écoule du foyer un liquide séro-purulent. Corps vitré normal. Infiltration blanchâtre de tout le corps ciliaire, sans augmentation notable de son volume, sans tumeur. Les crêtes des procès ciliaires sont d’un blanc crayeux, mais distinctes. L'infiltration s’arrêle à 2-3 millimètres de l’ora serrata par un semis de points blanchä- tres. Ces mêmes points se voient sur la face postérieure de l'iris. Choroïde et rétine non altérées. En résumé : infiltration en nappe de la portion du corps ciliaire cor- respondant à la perforation. Coupes. — Les coupes microscopiques faites sur la pièce durcie à l’al- cool montrent une infiltration diffuse de l'iris et du corps ciliaire par des cellules lymphoïdes et de petites accumulations de cellules épithélioïdes au pourtour de très nombreuses cellules géantes. Les cellules migratrices engainent les vaisseaux ciliaires antérieurs traversant la sclérotique. Le SÉANCE DU # MARS 235 canal de Schlemm en est rempli et contient, en un endroit, une volumi- neuse cellule géante correspondant à la lumière du canal. La perforation scléroticale est à bords nets, comme faite au couteau. Elle est due aux cellules qui entourent les vaisseaux ciliaires et qui ont ramolli le tissu scléral. Il s’agit donc bien de tuberculose diffuse du corps ciliaire et de l'iris. Mais sur les coupes colorées par les méthodes d'Ebrlich-Weigert, de Ziehl et de Gram-Weigert, je n'ai pas pu voir un seul bacille tuberculeux. Immédiatement après l’énucléation, j'ai fait une inoculation d'un frag- ment pris dans la masse sous-conjonctivale, vers la périphérie de la tumeur. Ce fragment avait le volume d’un grain de riz. Il fut inséré dans la chambre antérieure d’un lapin. Dans les jours qui suivirent il y eut un peu d'iritis traumatique; puis la tumeur diminua de volume et disparut presque complètement. Au bout de deux mois, il n'y avait pas eu trace d’éruption tuberculeuse. Ainsi voilà une tumeur tuberculeuse, à marche très rapide, ni caséeuse ni fibreuse, qui ne montre ni bacilles, ni contagiosité. Je tirerai de cette observation cette seule conclusion; que, pour l'œil en particulier, l'ab- -sence de bacilles et d’infectiosité d’une tumeur n’est pas un critérium suf- fisant pour écarter le diagnostic de tuberculose. INFLUENCE DU FOIE SUR LE RÉCHAUFFEMENT AUTOMATIQUE DE LA MARMOTTE, par M. Rapnaez DuBors. L'examen des courbes de réchauffement indique que la température s'élève plus rapidement dans le foie, que dans les muscles des membres inférieurs, dans le rectum, dans la bouche et le cerveau. A la fin du réchauffement, la température du foie est également plus élevée que dans les organes précipités. Toutefois, un thermomètre placé dans l’œsophage, dont le réservoir occupait une position voisine des poumons, et du cœur, a indiqué, à un moment donné, une température supérieure de 2 degrés à celle du foie. A la fin du réchauffement, la différence entre le foie et l’œsophage était seulement de 3/10‘ de degré en faveur de ce dernier. Cette constatation autorise à admettre que si la plus grande rapidité de réchauffement se fait dans le foie, le sang qui s'échappe de celui-ci peut encore s’échauffer d’une légère quantité dans le thorax. La recherche des différences de température existant, dans le même moment, entre le foie, le cœur, le poumon et les muscles, faite au 2306 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE moyen d’aiguilles thermo-électriques, montre que le poumon et le cœur produisent par eux-mêmes une certaine quantité de chaleur. Il en est de même des muscles de la région thoracique et même de la glande hiber- nale. Les muscles des membres ont toujours, pendant le réchauffement, une température très inférieure à celle des points dont il vient d'être: question. | La ligature de la veine cave, au-dessous du foie, n’entrave pas la rapi- dité du réchauffement. Ce dernier est seulement moins complet dans le rectum. Il en serait autrement si une quantité notable de chaleur se produisait dans les masses musculaires de la partie postérieure de la marmotte pendant le réchauffement automatique du réveil. Au contraire, la ligature des veines sus-hépatiques a été suivie d’un réchauffement incomplet : 12 degrés seulement dans la bouche et & degrés dans le rectum, en deux heures. De plus, la température avait à peine atteint 26°,4 dans la bouche et 20°,6 dans le rectum que le refroidissement a succédé au réchauffement et a marché avec une grande rapidité jusqu’à la mort de l'animal. Après la ligature de ta veine porte, la température de la bouche s’est élevée de 19 degrés et celle du rectum de 11 degrés en deux heures et demie, puis, comme dans le cas précédent, la température s’est abaïssée rapidement jusqu’à la mort. Avec la ligature totale des vaisseaux au- dessus du foie (veines cave supérieure et hépatiques) le réchauffement a été moins rapide et plus incomplet : 9 degrés dans la bouche et 2 dans le rectum en quatre heures. Le refroidissement a été très rapide. Ces constatations m'ont amené à considérer le foie comme l'organe le plus essentiel du réchauffement, sans méconnaître toutefois qu'une cer- taine quantité de chaleur se produit, en outre, dans le cœur et le pou- mon, ainsi que dans les muscles, en activité, de la respiration. Il ya lieu de noter, toutefois, que l'interruption de la circulation dans la glande hépatique n'arrête pas immédiatement et radicalement le réchauffement, dès son début, comme l’extirpation des ganglions semi- lunaires. On doit donc admettre qu’en dehors de l’action exercée par cette opération sur l’état du foie, il se produit une influence complémen- taire d’un autre ordre sur laquelle nous aurons à revenir. Nous ajouterons seulement que l'isolement complet de la rate, par des ligatures, n’a exercé aucune influence sur le réchauffement d’une mar- motte qui a subi ultérieurement des phases de torpeur et de réchauffe- ment, comme dans l’état normal. L'autopsie a démontré que le tissu de la rate était complètement dégénéré. Cet organe était remplacé par une poche renfermant une bouillie épaisse constituée surtout par des leu- cocytes. SÉANCE DU # MARS 937 Re Le M ns RELATIONS ENTRE LES FONCTIONS CHROMOGÈNE, PATHOGÈNE, ANTIFERMENTATIVE DU BACILLE PYOCYANIQUE, par MM. D’ARSONVAL et CHARRIN. Il a été établi, par des expériences récemment communiquées par l’un de nous, que la fonction pigmentaire du bacille pyocyanique n'était pas en relation positive avec son pouvoir d'inhibition à l'égard de la levure de bière. La preuve a été fournie d'une façon directe. Un germe, rendu impuis- sant, par la méthode des chauffages, à fabriquer du vert, n’a pu s'opposer à l'évolution de la levure. Nous apportons un nouvel argument en faveur de cette opinion. On place dans des tubes où se trouvent cette levure et de l'eau sucrée, une culture du microbe en question, culture d'un beau vert fluorescent, et l’on voit les gaz se produire. Il y a plus : on inocule celte culture à des lapins, par voie intra- veineuse, à la dose de 4c.c.5, dose très suffisante pour tuer dans d’autres circonstances. Or, les animaux résistent. Donc, si le pouvoir d'empêcher le fonction- nement de la levure de bière n’a rien de commun avec la qualité chro- mogène, on ne saurait en dire autant des propriétés pathogènes ; ces propriétés sont en rapport direct. M. Cuauveau. — Elles sont peut-être identiques. M. CHarriN. — La chose est possible. Nos études ne sont point assez avancées pour nous permettre d’être affirmatifs à cet égard. QUATRE INFECTIONS DISTINCTES CHEZ UN CHIEN DIABÉTIQUE, par MM. CHaRRIN et GLEY. Nous désirons dire quelques mots de faits qui, pris isolément, ne com- portent aucun enseignement bien nouveau, mais qui, groupés, offrent sans doute quelque intérêt. Il s’agit d’un chien devenu diabétique à la suite de l’ablation du pan- créas. Durant trois mois, il élimine 70 à 120 grammes de glycose par vingt-quatre heures ; il maigrit peu à peu malgré une alimentation sura- bondante, se cachectise et meurt. Un mois avant la mort, s’est développée une kérato-conjonetivite (1); (1) Voy. E. Gley, Altérations de l’œil chez un chien diabétique par extirpation du pancréas (Soc. de Biol., 14 janvier 1893, p. 56). 238 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE dans le liquide puisé au niveau des culs-de-sac de la conjonclive, existait en abondance le staphylococcus albus. — Pendant la semaine qui a pré- cédé la fin, on a opéré des prises de sang dans un but physiologique. Un phlegmon s’est formé dans la plaie du pli de l’aine (on avait saigné l'artère fémorale); des soins antiseptiques n’ont pu le guérir. — Dans ce foyer vivait, à l’état de pureté, un bacille se rapprochant du bacterium coli par quelques points, s'en éloignant par d’autres. — A l’autopsie, on a décou- vert des masses caséeuses dans le péritoine, et dans le péritoine seulement; dans ces adénites, existaient le bacille de Koch et l’aureus. Ainsi donc, chez un même animal carnivore, réputé relativement résistant aux infections vulgaires de l'homme, bien que cette résistance soit peut-être inférieure à ce qu'on a prétendu, en particulier pour la phtisie, d’après Cadiot, se sont développées quatre de ces infections, l'une occasionnée par l’albus, la seconde par un bacille spécial, la troisième (tuberculose) par le microbe spécifique, la quatrième (suppuration de ces lésions bacillaires) par le staphylocoque doré. Or, cet animal était diabé- tique, et physiologiquement, et cliniquement. Il est difficile de concevoir une donnée expérimentale confirmant avec plus d'éclat ce que nous apprend la médecine humaine, une donnée plaçant davantage en évidence l'importance du terrain dans les affections bacté- riennes, principalement dans celles dont l'agent n'est pas hautement différencié. VACCINATION DU SINGE CONTRE LA TUBERCULOSE. Note de MM. J. HéRicoURT et CHARLES RICHET. En poursuivant les expériences que nous avons entreprises sur la tuber- culose des singes (1), nous avons pu constater quelques faits qui sont très nets, encore qu'ils ne portent pas sur un très grand nombre d’animaux. D'abord, nous avons vérifié de nouveau la résistance du singe à la tuberculose aviaire, constatée précédemment par nous. Mais cette résis- tance n’est que relative, et si l'injection, au lieu d’être faite sous la peau, est faite dans la veine, l'animal meurt assez vite de tuberculose con- fluente (2). Un singe A. (Marianne) recoit, le 10 novembre 1892, 1 centimètre cube de tuberculose aviaire injectée dans une veine de l’avaut-bras. Elle meurt Je 15 décembre. (4) Voir Bull. Soc. Biol., 1891, p. 802. (2) Tous nos singes étaient des animaux de même espèce, Macacus inuus. nst une espèce résistante, et plus facile à se procurer que toute autre. SÉANCE DU 4 MARS 239 Un singe B... (Béhanzin), recoit, le même jour (10 novembre), 1 centimètre cube de culture de tuberculose aviaire injectée dans une veine de l’avant-bras, et meurt le 30 décembre. Un singe C..… (Ravachol) recoit, le 10 novembre, 1 centimètre cube de la même culture, injectée de même dans une veine de l’avant-bras, et meurt le 14 décembre. Un singe D... (Justin) recoit, le 10 octobre, 1 centimètre cube de culture de tuberculose aviaire dans une veine de l’avant-bras et meurt vers le 20 dé- cembre. Donc, la tuberculose aviaire injectée directement dans les veines tue assez vite, puisque la survie de ces quatre singes a été de 35, 50, 34 et 10 jours ; en moyenne 50 jours, en chiffres ronds. A cette gravité de la tuberculose aviaire, on peut opposer l’innocuité de la tuberculose inoculée sous la peau. Un singe E... (Antoine) recoit, le 10 mars 1892, 1 centimètre cube de tuber- | culose aviaire sous la peau, et cette opération est répétée le 12 avril 1892. Aujourd’hui, l'animal est encore très bien portant. Un singe F... (Antoinette), est opérée exactement comme le singe précé- dent ; le 40 mars et le 12 avril. Elle est aujourd’hui encore très bien portante. Un singe G... et une singe H... recoivent, le 9 avril 1891, chacun 1 centimètre cube d'une culture de tuberculose aviaire; ils sont en très bonne santé le 10 octobre 1891, et servent pour une autre expérience (1). Ainsi, voici quatre singes, qui, après inoculation sous-cutanée de tuberculose aviaire étaient en bonne santé ; onze mois après l'inoculation (Eet F) et cinq mois après (G et H). | Nous conelurons de ces faits les deux propositions suivantes : «.) La tuberculose aviaire en inoculation sous-cutanée est inoffensive pour le singe. 8.) Cette même tuberculose en injection intra-veineuse amène la mort rapidement. Ces faits, portant sur un nombre d'animaux suffisant, nous semblent démontrés. Il n’en est pas tout à fait ainsi des expériences suivantes destinées à prouver que la vaccination contre l'injection intra-veineuse de tuberculose aviaire peut être obtenue. . Reprenons l’histoire du singe E... (Antoine). Le 10 mars, il reçut 1 centi- mètre cube de culture tuberculeuse sous la peau, Le 12 avril, la même opéra- (1) Ge sont ces deux singes dont nous avons raconté l’histoire dans notre communication antérieure, pr. 802. 9240 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tion est répétée ; et il ne sembla pas s’en ressentir plus que dé la première. Quatre mois après, il est en parfait élat de santé, et il en est de même d'An- toinette qui a été traitée exactement de la même manière. Le 16 août, nous injectons dans la veine de l'oreille, à Antoïne et à Antoi- nette, 0 c. c. À d'une culture tuberculeuse, et, après une très courte maladie, pendant laquelle les deux animaux sont tristes, buvant beaucoup, et dolents, le rétablissement complet survient, si bien qu'ils sont tout à fait guéris, tant de leurs deux inoculations sous-cutanées que de leur injection intra-vei- neuse. Alors, le 40 novembre, on injecte à Antoine 1 centimètre cube d’une culture aviaire, dans une veine de l’avant-bras. Le même jour la même inoculation, avec la même culture, est faite aux deux singes Béhanzin et Ravachol. Béhanzin pèse 5,870 grammes, el recoit À centimètre cube, soit 0 ©. c. #7 par kilogramme. Ravachol pèse 3,046 gramme et reçoit 0 e. c. 5, soit 0 €. e. 16 par kilogrammes. Antoine pèse 4,250 g srammes ef recoit { centimètre cube, soit 0 c. ©. 24 par kilogramme. __ Eh bien! quoique Antoine ait recu la plus forte dose, il ne meurt pas; il est aujourd'hui très bien portant. Il a été, à la suite de l'injection, malade pen- dant dix à douze jours; mais, à partir du 10 janvier environ, sa santé et sa gaieté ont repris. Cependant Béhanzin est mort le 30 décembre, et Ravachol le 10 dennie Il résulte de cette expérience, malheureusement unique, que nous pou- vons considérer Antoine comme ayant été vacciné : soit par les deux inoculations sous-cutanées, soit par l'injection intra-veineuse à faible dose (du 16 août 1892). Les expériences ultérieures établiront quelle est de ces deux alterna- tives celle qui est exacte. En tout cas, à moins de supposer, ce qui est bien peu admissible, qu'il s'agisse d'une immunité accidentelle, il faut regarder le fait de cette vaccination comme acquis; car tous les singes ayant reçu de la tubercu- lose en injection intra-veineuse sont morts (1). Ce qu'il faut noter aussi, c'est que Marianne et Justin sont morts de l'injection intra-veineuse, et morts assez rapidement, quoiqu'ils aient recu au préalable une inoculation sous-cutanée. Mais cette inoculation préalable avait été faite le 8 octobre, soit un mois sculement avant l’ino- culation veineuse. Ainsi, en résumé, voici le procédé qui nous a réussi pour la vaccina- tion d'Antoine et qui sera à appliquer de nouveau, c’est : 1° Inoculation sous-cutanée. 2° Longtemps après, injection intra-veineuse très diluée. (4) Aux quatre que nous avons mentionnés (Marianne, Béhanzin, Ravachol, Justin), il faut en ajouter un cinquième (Marius), qui, inoculé dans la veine le même jour que Marianne (le 10 novembre), est mort le 47 novembre, mais probablement d’une septicémie quelconque plutôt que de MDerapse SÉANCE DU # MARS 241 Ce n’est là assurément qu’une expérience unique, mais elle nous à paru, malgré cela, devoir être mentionnée ici. En effet, si le procédé de vaccination qui nous a servi est multiple et incertain quant à sa détermination précise, ce qui ne paraît pas douteux c’est le fait même de la vaccination: (Travail du Laboratoire de Physiologie de la Faculté de médecine de Paris.) NOUVELLE MÉTHODE DE TRAITEMENT DES MALADIES INFECTIEUSES DE NATURE MICROBIENNE, AU MOYEN DE FERMENTS FIGURÉS, par MM. le D' pe Backer et J. BRuHAT. 1° Les auteurs rapportent deux observations relatives à l’inoculation de dipthérie dans l'oreille d’un lapin guérie par leur méthode. Îls présentent quelques remarques au sujet du microbe diphtéritique, et concluent de leurs expériences d’inoculations aux animaux, et de leurs essais bactério- logiques directs, que les cellules de certains mycodermes, botaniquement purs, associées aux éléments nécessaires à leur vie physiologique peuvent être introduites dans l’économie sous forme de liquides injectables ; 9° Ces liquides sont d’une innocuité absolue quand le mycoderme est pur (les levures du commerce étant impropres à cet usage thérapeutique), mais il est nécessaire de soumettre les diverses variétés botaniques de levure à un choix méthodique, pour n’employer que les plus actives; d'éviter leur dégénérescence au moyen d’une culture appropriée; 3° Ces mycodermes en liquide injectable agissent, au contact de certains microbes pathogènes, absolument comme le font les leucocytes naturels, en englobant et digérant comme eux les parasites envahisseurs; 4° L'action de ces mycodermes paraît surtout favorable dans les mala- dies infectieuses où les toxines microbiennes font subir aux leucocytes une influence chimiotactique négative; et cette influence heureuse semble être sous la dépendance : 4° du pouvoir phagocytaire de ces ferments figurés ; 2 de l’action neutralisante de leurs diastases sur les (oxines et diastases microbiennes; 3° de la production au foyer même de l'infection d'éléments antiseptiques, alcool et acide carbonique, toutes les fois que les microbes n’empêchent pas la fonction ferment de ces mycodermes. Les auteurs ont appelé ce nouveau liquide physiologique inj ctable « Backérine », du nom du docteur qui en a concu l’idée et donné a for- mule. 249 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ECOULEMENT DU SANG PAR LES POINTS LACRYMAUX, AU COURS D'UNE ÉPISTAXIS, APRÈS LE TAMPONNEMENT DES FOSSES NASALES, par M. le D' A. MArgec. Je crois intéressant de rapporter devant la Société de Biologie, un fait clinique dont le mécanisme s'explique facilement mais que l’on trouve cependant rarement signalé. Il s’agit de l'issue du sang par les points lacrymaux, au cours d’une épistaxis, après le tamponnement complet des fosses nasales. Voici dans quelles conditions j'ai observé ce fait. Une dame, âgée de cinquante-deux ans, fut prise tout à coup d’une épistaxis abondante ayant son point de départ sur la cloison de la fosse nasale gauche. Après le tam- ponnement antérieur de cette fosse nasale, le sang s'écoula par la narine droite ; je pratiquai alors le tamponnement antérieur complet des deux fosses nasales; le sang s’écoula tout d’abord par l’arrière-gorge, mais sous l’action d'efforts que faisait la malade pour arrêter l'écoulement en arrière, une partie de ce sang vint sourdre au niveau des points lacry- maux, des deux côtés, les yeux parurent s’injecter, puis le sang s’écoula en larmes le long des joues. Le même fait se reproduisit le lendemain après le tamponnement que je fus obligé de pratiquer au cours d’une nou- velle épistaxis. Ce phénomène, qui impressionna vivement ma malade, s'explique faci- lement même sans altérations des voies lacrymales, comme c’était ici le cas, mais il n’en est pas moins intéressant au point de vue physiologique parce qu'il montre l'insuffisance des diverses valvules que l’on a décrites dans les voies lacrymales. DÉVELOPPEMENT DES MUSCLES DE L'IRIS CHEZ L'EMBRYON DE POULET, par M. G. Duran. Après avoir examiné la disposition des fibres musculaires circulaires et radiées dans l'iris des oiseaux (1), j'en ai étudié le mode d'apparition chez l'embryon de poulet. C’est à partir du 9 jour que j'ai constaté des caractères morphologi- ques distincts entre les cellules embryonnaires. Des deux couches mus- culaires, c'est la circulaire qui apparaît la première. Elle occupe le plan moyen du corps irien entre deux couches d'éléments conjonclifs. Ses cel- lules fusiformes, à noyaux allongés, toutes dirigées dans le même sens et parallèlement au bord pupillaire, lui donnent l'aspect d’un tissu serré, {1) Société de Biologie, 10 février 1893. SÉANCE DU # MARS 243 EEE aa nettement fibrillaire, qu'on peut comparer à celui des fibres-cellules. Au contraire, le tissu mésodermique environnant présente une texture lâche avec des noyaux arrondis et un protoplasma étoilé. Il est à remarquer que, tandis que le bord interne du sphincter va jusqu’au bord pupillaire, son bord externe ne s'étend pas encore jusqu’au bord ciliaire. Il est séparé par une zone de tissu mésodermique embryonnaire du grand cercle artériel de l'iris, qui forme en quelque sorte le point de repère de ce bord ciliaire. Au 13° jour, le sphincter s'étend sur toute la surface de l'iris du bord pupillaire jusqu’au bord ciliaire. Il est formé d'éléments allongés sous forme de filaments très fins, très serrés dans la zone pupillaire, plus clair- semés dans la zone moyenne. Enfin dans la partie qui est en dehors du grand cercle artériel, les noyaux sont plus abondants que partout ail- leurs. Dans le tissu conjonctif postérieur, apparaissent à cette époque, les fibres obliques sous forme de trainées de cellules disséminées. Au 15° jour, ces fibres obliques sont très nettes, nombreuses et bien constituées : on les voit se recourber dans la zone moyenne du sphincter, en arrière duquel elles sont situées; elles sont placées exclusivement dans la zone ciliaire. Le sphincter a ses fibrilles excessivement fines dans la zone pubpillaire, et notablement plus volumineuses dans la zone ciliaire. Au 19° jour, apparaissent, dans la partie la plus reculée du tissu con- jonetif postérieur, quelques fibrilles nettement radiées. Au 21° jour, on constate avec évidence, tous les détails de la disposi- tion musculaire qu’on retrouvera chez l’adulte, c’est-à-dire : un plan cir- culaire antérieur, un plan moyen de grosses fibres obliques, et un plan postérieur de fines fibrilles radiées, entremêlées de quelques-unes plus volumineuses. Ces fibrilles sont bien nettes à ce stade, avec leurs carac- tères distinctifs de situation, de volume et de direction. Elles se voient seulement dans la zone ciliaire, et ne vont pas encore jusqu'au bord pupillaire. L'écart de volume entre les fibres circulaires des zones pupil- laire et ciliaire est très marqué, et c'est dans cette dernière qu'il faut chercher les premières manifestations de la striation qui apparait nette- ment sur quelques fibres et se devine sur un plus grand nombre. En résumé, chez l'embryon de poulet, le sphincter apparaît le premier, le 9 jour, dans la zone pupillaire d’abord et n’atteint qu'ultérieurement le bord ciliaire. | Au contraire, les fibres rayonnées commencent à se montrer dans la zone ciliaire, les fibres obliques le 13° jour, et les fibres radiées le 19° pour. Les fibres cireulaires du bord ciliaire qui se développent après celles de la zone pupillaire, deviennent ensuite plus volumineuses que celles-ci, et c’est sur elles qu’il faut chercher la striation qu'il est possible de cons- tater le 21e Jour (fin de l’incubation). (Travail du laboratoire de M. le professeur Duval.) 244 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE LES PIÈCES DE SOUTIEN DE LA RADULA CHEZ LES CÉPHALOPODES ET LE TISSU CARTILAGINEUX DES MOLLUSQUES, par M. G. Loisez. (Recherches faites au laboratoire d’histologie du Professeur Mathias Duval.) Les pièces qui supportent la radula chez les Céphalopodes rappellent beaucoup, par leur forme, les mêmes organes qui existent chez les Gasté- ropodes pulmonés. Les auteurs qui parlent de leur structure, tels que MM. Ch. Livon (1), Carl Vogt et Yung (2), les décrivent comme formés de fibres musculaires, sans y signaler aucun autre élément conjonctif ou cartilagineux. Chez le Poulpe et le Loligo, la radula est supportée en effet par deux pièces prismatiques, en forme de lame de couteau, réunies entre elles par une mince membrane el dont la constitution est essentiellement muscu- laire. Chez la Seiche commune (Sepia officinalis\, ces pièces présentent, le long de leur bord antéro-interne, une bande étroite, d'aspect et de consistance cartilagineuse ; en avant celte bande se réunit à sa congénère, de sorte que l’ensemble rappelle beaucoup la plaque de soutien en forme de fer à cheval de l’Æelix pomatia. Dans leur intervalle, se trouve une tige cylindrique qui supporte en avant la radula et se termine en arrière par une partie molle et muqueuse. Cette tige, homologue de la papille formatrice de la radula, chez les Helix, est très consistante,; sa couleur blanche et nacrée pourrait la faire prendre pour du cartilage, mais sa dissociation montre l'existence d’une substance gélatineuse, transparente, dans laquelle sont disséminées des fibres entre-croisées, résistant à l’acide acétique, et des cellules nues, fusiformes ou étoilées, pourvues de pro- longements protoplasmiques assez nombreux. À C’est un tissu analogue qui constitue la bande cartilaginiforme des pièces de soutien. Un coupe transversale de la masse radulaire montre que ces pièces sont formées de fibres lisses à direction borizontale, s'imbriquant plus ou moins les unes dans les autres et renfermant de beaux noyaux en bâtonnet. Ces fibres ne sont pas disposées en fais- ceaux, mais en nappes continues; de place en place cependant, on voit quelques masses granuleuses contenant des noyaux sphériques ou ovoïdes. Les deux pièces de soutien sont réunies entre elles, en avant et en bas, par un muscle assez épais formé de fibres entre-croisées ; c’est au niveau de l’attache de ce muscle sur les pièces que se trouve la bande cartila- giniforme dont j'ai signalé l’existence. Sur les coupes transversales, cette région se présente comme un noyau formé par une substance amorphe, (1) Ch. Livon. Structure des organes digestifs des Poulpes. Journ. anal. eb Phys., t. XVII, 1881. (2) Carl Vogt et Yung. Traité d'anatomie comparée pralique, t. I. SÉANCE DU 4 MARS 245 fixant irès bien toutes les matières colorantes et contenant un grand nombre de cellules nues, allongées dans un même sens. Les dissociations montrent que cette substance amorphe est molle, transparente, et que les cellules sont irrégulières, nucléées et pourvues de nombreux prolongements anastomosés souvent entre eux. Du reste, la forme de ces cellules varie avec le point que l’on envisage; du côté des pièces de soutien, elles sont fusiformes et renferment un petit noyau ovoïde; au centre de la bande, elles sont plus grosses, pourvues de prolongements nombreux, leur noyau est également plus volumineux (10 à 15 L) et est devenu sphérique ; enfin, au fur et à mesure qu'on se rapproche du muscle d'union des deux pièces, on voit ces cellules perdre leurs prolongements et acquérir un aspect vésiculeux ; en même temps, la substance fondamentale disparaît peu à peu et on trouve bientôt une masse de grosses cellules vésiculeuses, entourées par une membrane très mince et accolées les unes aux autres sans l’interposition d'aucune substance interstilielle. Nous avons là, en somme, des cellules complète- ment semblables à celles que j'ai étudiées dans les pièces de soutien de l’Helix pomatia (A). La consistance parliculière que présente la bande cartilaginiforme qui renforce les pièces de soutien de la radula, chez la Seiche, est due, uni- quement, à l'existence d’une épaisse coque conjonctive qui l'entoure. Ses éléments constitutifs sont de nature conjonctive, car, si on se rapproche de sa périphérie, on voit les cellules, qu’elles soient étoilées ou vésicu- leuses, se changer peu à peu en cellules conjoncetives ordinaires et se con- fondre insensiblement avec les éléments de la membrane d’enveloppe. Du reste, s’il restait quelques doutes sur la nature de ce tissu, on pourrait agir ici comme je l’ai fait pour les Gastéropodes, c’est-à-dire rechercher si on ne trouve pas un tissu conjonctif semblable dans les autres muscles de la Seiche; il suffirait de s’adresser aux muscles propres du bec de per- roquet, dont l'extrémité, toute antérieure, située entre les deux lames de chaque mâchoire, n’est plus guère formée que par une substance fonda- mentale fibrillaire où l’'hématoxyline décèle l'existence d’un grand nombre de noyaux. En résumé, les pièces de soutien de la radula sont formées, chez la Seiche, comme chez les Gastéropodes pulmonés, par deux muscles, dont les éléments conjonctifs deviennent en partie vésiculeux, en vue du rôle mécanique qu'ils ont à remplir; mais ici, au lieu que cette différenciation se produise dans toute l'étendue des muscles, elle se localise dans une région limitée à leur bord antéro-interne. - Deux formes de cellules paraissent prédominer dans la constitulion du tissu conjonctif des Mollusques. Chez les Ptéropodes et les Gastéropodes, (1) G. Loisel. Les cartilages linguaux et le tissu cartilagineux chez les Gas- téropodes (Compt. Rend. Soc. Biol., 18 févr. 1893). 246 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE on trouve de grosses cellules arrondies, renfermant une sérosité transpa- rente et très peu de protoplasma; chez les Céphalopodes, au contraire, ces cellules sont petites, étoilées, à prolongements ramifiés nombreux et remplies complètement par un protoplasma granuleux. A ces deux formes de cellules conjonctives correspondent, chez ces ani- maux, deux formes de cellules cartilagineuses : les unes sphériques ou polyédriques, ainsi que nous l'ont montré les cartilages linguaux du Buc- cin; les autres ramifiées, telles qu’on peut les étudier dans le cartilage céphalique des Céphalopodes. L'étude des pièces de soutien de la radula, chez certains Mollusques, nous a fait voir des formes de cellules intermé- diaires entre les cellules conjonctives ordinaires et les cellules cartilagi- neuses, ce qui indique bien que le tissu cartilagineux doit être considéré chez les Mollusques, ainsi que chez les Vertébrés, comme une phase évo- lutive du tissu conjonctif. Ces faits nous expliquent la différence de structure qui existe entre le tissu cartilagineux des Gastéropodes et celui des Céphalopodes. De plus, le cartilage à cellules ramifiées de ces derniers animaux nous appa- raît alors comme une forme primitive, un état intermédiaire pour ainsi dire, entre la cellule conjonctive et ses dérivés; ce serait le cartilage fœtal des Vertébrés arrêté dans son développement et fixé à cet état dans les animaux inférieurs. SUR L'ÉTAT DE LA MOELLE ÉPINIÈRE DANS DEUX CAS DE COMPRESSION DES RACINES POSTÉRIEURES, par M. J. Sorras, Interne des hôpitaux. J'ai eu l’occasion d'observer récemment dans le service de M. Dujardin- Beaumetz, deux cas de compression des racines postérieures de la moelle. Comme dans ces deux cas l’altération ne portait que sur un petit nombre de racines, les lésions consécutives de la moelle offrent un certain intérêt et méritent d’être signalées. I. — Dans le premier cas, il s'agissait d'un homme de quarante-deux ans, chez lequel une tumeur cancéreuse du sacrum comprimant les racines du plexus sacré donna lieu à des signes de névrite sciatique intense. Le nerf sciatique droit fut d’abord pris, puis, vers la fin, le nerf sciatique gauche. Le malade succomba treize mois après l'apparition des premières douleurs. À l'autopsie, on trouva une dégénérescence absolue des cinq premières racines sacrées postérieures du côté droit. À gauche, les III: et IVe racines sacrées postérieures seules sont en voie de dégénération. Sur des coupes histologiques de la moelle, faites après durcissement, on ja cel SÉANCE DU # MARS 2417 £ # constate, dans le cordon postérieur droit, une dégénérescence secondaire ascendante dont la topographie est la suivante : a.) Dans la région qui correspond aux racines altérées du côté droit, tout le cordon postérieur, y compris la zone de Lissauer, est dégénéré, à l'exception toutefois d’une petite zone placée en arrière de la commissure grise et d’une mince bande contiguë au sillon médian postérieur. La corne postérieure a perdu presque tout son réticulum nerveux et est atrophiée. La corne antérieure est également diminuée de volume, les cellules motrices présentent nne atrophie manifeste. La moitié droite de la moelle, dans son ensemble est d’ailleurs plus petite que la moitié gauche, dans cette région. b.) Dans la portion toute terminale de la moelle, il n'existe plus, dans le cordon postérieur qu'un petit triangle de sclérose a égale distance de la corne postérieure et du sillon médian, e.) Au-dessus de la lésion, dans la région lombaire, la zone de dégénéres- cence est rejetée en dedans par l'entrée dans le cordon de Burdach des racines lombaires saines, et prend la forme d’un L majuscule dont l’angle correspond à l'angle postéro-interne du cordon postérieur, À mesure que l’on s'élève dans la région lombaire, la branche horizontale de cet L diminue d'étendue, tandis que la branche verticale augmente d'importance. L’altération de la zone de Lissauer ne dépasse pas le niveau supérieur de la Ve lombaire. d.) La colonne de Clarke a perdu beaucoup de ses fibrilles, mais cette modi- fication ne remonte pas au-dessus du niveau de la X° dorsale. e.) Dans la région dorsale inférieure, le champ de dégénérescence affecte la forme d’un triangle contigu au sillon médian postérieur. Le tiers postérieur de ce triangle occupe toute la largeur du cordon de Goll et est très altéré. Au contraire, dans les deux tiers antérieurs il n'existe qu’une faible raréfaction des fibres nerveuses. f.) En s’élevant dans la moelle dorsale, la partie postérieure dégénérée du cordon de Goll conserve sa situation et son intensité d’altération. Dans la partie antérieure, au contraire, Les lésions diminuent de plus en plus d'impor- tance. g.) À la région dorsale supérieure, le champ de dégénérescence intense est refoulé dans le quart postérieur du cordon de Gall. Des trois quarts antérieurs de ce cordon, il n’y à que la partie contiguë au sillon médian postérieur qui présente une altération légère sur une faible largeur. l h.) Enfin, à la région cervicale, la zone de dégénérescence intense n’occupe plus que le cinquième postérieur du cordon de Goll. Il existe, de plus, dans la partie interne du cordon de Goll, une zone triangulaire de dégénération très légère, qui se prolonge, en s’effilant le long du sillon médian postérieur, sans aller jusqu à la commissure grise. La pointe de ce triangle s’en éloigne de plus en plus, à mesure qu'on se rapproche du collet du bulbe. Il. — Le sujet de notre deuxième observation, est un homme de quarante ans, qui présenta pendant la vie les signes d’une paralysie radiculaire totale du plexus brachial gauche. On trouva à l’'autopsie un abcès froid du creux sus-claviculaire comprimant le plexus brachial, un mal de Pott cervico-dorsal, - avec une pachyméningite exterae tuberculeuse. La moelle n'était pas direc- 9, 248 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tement intéressée, mais il existait une dégénérescence des racines posté- rieures des VIC et VII° paires cervicales du côté gauche. a.) Sur les coupes de la moelle faites à ce niveau, on constate une dégéné- ration de la zone de Lissauer et des fibres radiculaires. Le champ de dégéné- rescence occupe la parte postérieure de la bandelette externe de la zone radiculaire du cordon postérieur, et se prolonge en s’effilant le long du bord interne de la corne postérieure. Au niveau de la Ve cervicale, la zone de dégénérescence est rejetée en dedans, et diminue d'intensité. En remontant dans la moelle, elle se porte de plus en plus en dedans et en avant. c.) A la partie Supérieure de la région cervicale, elle affecte la forme d’une virgule à grosse extrémité antérieure pas tout à fait contiguë à la commissure grise. La concavité est tournée en dehors, la convexité est appuyée sur le prolongement du septum intermedium, elle ne pénètre donc pas dans le cordon de Goll. En rapprochant ces deux observations des cas analogues déjà publiés, nous croyons pouvoir tirer les conclusions suivantes : 4° Une vérification de la loi établie par Kahler à savoir que sur une coupe de la moelle dans la région cervicale supérieure, les fibres longues des différents étages de la moelle forment des triangles inscrits les uns dans les autres. Le plus petil triangle placé à l'extrémité postérieure de la cloison médiane est constitué par les nerfs sacrés. Le triangle le plus grand et en même temps le plus périphérique est formé par les nerfs cervicaux. Dans l'intervalle se placent les nerfs intermédiaires. 2° Nous pouvons ajouter que le cordon de Goll, c’est-à-dire la partie du cordon postérieur de la moelle situé en dedans du septum intermédiaire ne comprend que les fibres longues radiculaires des régions inférieures de la moelle. Celles de la portion supérieure se placent en dehors du septum intermédiaire dans la portion appelée cordon de Burdach et aboutissent dans la bulbe au noyau de ce cordon tandis que les premières vont au noyau du cordon de Goll. 3 Le niveau de la moelle à partir duquel les racines cessent de fournir au cordon de Goll n’est pas nettement défini. La limite antéro-externe de ce cordon n'est d’ailleurs pas tranchée et il est facile de comprendre qu'elle ne peut être qu'artificielle. Dans un travail qui paraîlra prochainement je me réserve de rapporter ces observations avec tous les détails qu'elles comportent. À PROPOS DE LA COMMUNICATION DE M. SOTTAS, par M. J. DEJERINE. L’intérét de la communication précédente porte principalement sur ce fait que, dans le premier cas de M. Sotlas — compression des racines SÉANCE DU # MARS 249 postérieures au niveau de la queue du cheval — l’auteur a indiqué en détail, ce que l’on n'avait pas fait jusqu'ici, quelles étaient les racines qui étaient comprimées. Au point de vue de l'anatomie de la moelle épi- nière cette particularité est très importante, car nous saurons désormais, où se terminent dans les cordons postérieurs, les racines postérieures sacrées. Je ferai remarquer en outre que ce fait est tout à fait confir- matif de ce que nous enseigne l’anatomie pathologique du tabès. Dans le tabès cervical, en effet, les lésions des cordons postérieurs présentent une topographie qui est absolument l’inverse de celle constatée.par M. Sottas dans la compression des racines sacrées. Dans le cas de tabès cervical que j'ai rapporté en 4888 (1), les parties des cordons postérieurs qui sont lésées, sont justement celles qui sont indemnes dans le cas de M. Sottas. NOTE SUR UN MOUVEMENT DE ROTATION SINGULIER DE LA TÊTE CHEZ UNE LARVE DE CULIGIDE, par M. S. JourpaiN, membre correspondant. Dans l’eau d'une cuvette où je conservais des Branchipes recueillis aux environs de Saint-Vaast-la-Hougue (Manche), j'ai rencontré des larves d’un Culicide, que des circonstances indépendantes de ma volonté m'ont empêché de déterminer génériquement et spécifiquement. Ces larves pos- sèdent un mouvement de rotation de la tête, dont je ne connais aucun autre exemple. En examinant une de ces larves, qui se tiennent habituellement à la surface de l’eau, dans la position normale, c’est-à-dire la face ventrale tournée vers le fond de la cuvette, je ne fus pas peu surpris de voir que la tête avait Le côlé qui correspond à cette face tourné vers le ciel. Il n'y avait point de méprise possible, cette face portant les pièces buccales, qui sont dans un état de mouvement continuel. J'observais depuis quelques instants le jeu de ces pièces quand, tout à coup, sous mes yeux, la tête pivotant sur elle-même, se retourna et reprit Ja position habituelle, c'est-à-dire me présenta la face dorsale, comme le reste du corps n'avait cessé de le faire. Ce retournement extraordinaire s’opéra plusieurs fois à des intervalles variables chez toutes les larves que je pus observer. Il s'accomplit avec une rapidité extraordinaire, par la demi-révolution autour de l'axe antéro-postérieur d'une face latérale de la tête, face qui n'est pas toujours la même. On imite ce retournement en faisant passer brusquement la main de la (1) Archives de Physiologie, 1888. 250 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE pronation à la supination et vice versa, avec cette différence toutefois que le mouvement n'étant pas limité à la main seule, ne s'arrête pas au poi- gnet, qui, dans ce cas, correspond au cou. Il est facile de se rendre compte de la disposition des agents mus- culaires qui rendent ce retournement possible. Toutefois, l'accident arrivé à mes larves ne m'a permis aucune constatation directe à cet é gard. Il serait aussi intéressant de se rendre compte de la façon dont se com- portent les connectifs œsophagiens, par suite de la position anormale que prennent les ganglions cérébroiïdes. Ce mouvement de la tête n’est pas sans utilité pour cette larve qui peut ainsi, à son gré, épier ce qui se passe au-dessus et au-dessous d'elle, dans l’air et dans l’eau. Ainsi que je l’ai dit, je ne connais aucun autre exemple d'un mouve- ment de rotation aussi étendu de l'extrémité céphalique. Chez un grand nombre d'animaux, il n'y a pas de mouvements propres de rotation de la tête. Chez certains, toutefois, le plan sagittal peut être déplacé angulairement à droite ou à gauche par la torsion d'une portion plus ou moins considérable de la partie antérieure du corps. Chez divers Insectes et surtout chez les Oiseaux et la grande généralité des Mammifères, il existe un mouvement de rotation limité de la tête. Chez les Vertébrés, on sait que ce mouvement s'exécute autour de l’apo- physe odontoïde de l’axis. S’ajoutant, chez les Oiseaux, à celui des ver- tèbres du cou, il produit une grande facilité de déplacement du plan sagittal tel que la pointe du bec peut être dirigée vers l'extrémité cau- dale. Mais, je le répète, ce résultat n’est pas obtenu uniquement par le mouvement propre de la têle; il est dû encore et surtout à la torsion de la colonne articulée qui forme le cou. C'est ainsi que s'expliquent quelques-uns des mouvements singuliers qu’on observe chez les Torcols (Yunx torquilla L.), et qui ont fait prendre plus d’une fois par un dénicheur effrayé les jeunes au nid pour de petits cerpents. Chez les Mammifères, y compris l'Homme, la rotation de la têle ne fait pas normalement parcourir à la ligne médiane de la face un arc de 90 degrés, soit à droite, soit à gauche; autrement dit, la tête ne se pré- sente pas rigoureusement de profil sur un corps vu de face. Cette attitude se voit cependant sur beaucoup de monuments de l’anti- quité, mais elle ne correspond point à la réalité. Elle me semble devoir être attribuée à l'insuffisance des artistes, qui trouvaient plus de facilités à reproduire les corps de face et les têtes de profil. SÉANCE DU À MARS 251 ÉTUDE QUANTITATIVE SUR LE RÉGIME ALIMENTAIRE DES ABYSSINS, par M. Louis LaApicQuE. (Mémoire présenté par M. E. Gley.) La question de la ration alimentaire de l'homme, et en particulier du minimum d'aliments azotés nécessaires, question que l'on avait pu regarder comme tranchée à la suite des mémorables expériences de Voit, a été agitée à nouveau et discutée vivement depuis quelques années. Hirschfeld, Kumagawa, Klemperer ont démontré que l’on peut réaliser l’état d'équilibre chez l’homme avec une somme d’albumine bien plus faible que le chiffre posé par Voit. Ces expériences ont été confirmées par divers expérimentateurs; j'ai pu moi-même dans des recherches faites en commun avec M. Marette (1), sous la direction de M. G. Sée, constater l'équilibre physiologique avec une ration comprenant une énergie totale de 2,700 à 3,000 calories et 57 grammes d’albumine seulement. Mais ces expériences de laboratoire, ainsi que toutes celles que l'on ferait sur des plans analogues, ne peuvent légitimement donner lieu à des conclusions générales. Vouloir tirer ces conclusions serait s'exposer aux objections très sérieuses qui ont été fournies dans la discussion; il serait trop long de rappeler ici ces objections; la plus grave porte sur la durée forcément limitée des expériences. : Il m'a semblé que l'observation ethnographique pourrait fournir des documents à l’abri de ces objections. Je rappellerai que ce sont des obser- vations de ce genre, celles de 2. Scheube, Y. Mori et Æellner sur le régime des Japonais, qui ont suscité la discussion actuelle. Constater qu’un peuple donné vit, travaille, se reproduit avec tel régime, c'est recueillir le résultat d’une immense expérience naturelle, devant laquelle il n’y a qu’à s’incliner. Et lorsqu'on aura réuni un nombre suffisant de documents, leur comparaison devra fournir d'elle-même des conclusions générales solides. En un mot, la question, au point où elle a été amenée aujourd’hui, me paraît être du domaine de l'observation plutôt que du domaine de l’expérimentation. Je me suis proposé de recueillir dés documents sur ce sujet au cours du voyage d'études que je fais actuellement dans des conditions de tra- vail très favorables. M®° Jules Lebaudy, qui a armé un yacht pour faire faire un voyage à son fils, non seulement m'a autorisé à être de ce voyage avec toute latitude pour entreprendre les recherches scientifiques que je jugerais bon, mais bien plus, elle a installé sur son navire et mis à ma disposition un petit laboratoire muni de tous les appareils nécessaires. (1) Recherches non encore publiées. LS Qt [NS] SOCIÉTÉ DB BIOLOGIE En présentant aujourd’hui à la Société de Biologie une première série d'observations, je suis heureux de rendre hommage publiquement à la générosité de M" Jules Lebaudyÿ et par là même de signaler ce rare exemple de désintéressement et de zèle pour les recherches scientifiques. Le yacht Sémiramis vient de séjourner sept semaines à Massaua (colonie italienne d’Erythrée). Cette ville est une des portes principales de l’Abyssinie. J'ai profité du séjour dans ce port pour étudier le régime des Abyssins, tant à la côté, où ils viennent en grand nombre, que dans l'intérieur, ou j'ai fait quelques excursions. J’ai trouvé auprès des auto- rités italiennes l’accueil le plus bierveillant, et je prie Son Excellence O. Baratieri, gouverneur de l'Erythrée, de vouloir bien agréer l’assurance de ma gratitude. J’adresse aussi mes remerciements les plus sincères pour leur amical concours à M. le capitaine médecin de marine Ragazzi, à MM. les D'° Ansermino et Bozoli, ainsi qu'à MM. le capitaine Perimi, le capitaine Forno, le lieutenant Penazzi et le lieutenant PBorrha, officiers des troupes indigènes. 4° Nature de l'alimentation : La base de l’alimentation des Abyssins est la durrha(Sorghum vulgare). Les femmes écrasent le grain entre deux cailloux et le vannent pour enle- ver Je son ;'puis la farine est délayée dans l’eau; une certaine quantité de la pâte liquide ainsi formée est versée sur une plaque de fer chauffée par- dessous et légèrement graissée ; on recouvre le tout d’un couvercle conique en paille tressée et enduite de bouse de vache; après une cuisson de quel- ques minutes dans cette espèce de four, on obtient une galette assez sem- blable d'aspect à celle de nos paysans bretons. Ces galettes portent le nom d’engera. Avec l’engera, il est un condiment obligé, le berhémi, Sont de piment, (Capsicum sp. ?) Les plus pauvres se contentent pour assaisonner leurs galettes d'une pâte appelée aussi berbéri et que l’on peut comparer à notre moutarde tant pour sa consistance que pour la façon dont on en use. La saveur en est insoutenable pour un palais européen. On compose le ber- béri en prenant volumes égaux (une poignée) de capsicum grillé, d’oi- gnons grillés, de durrha et de sel; on broie le tout avec un peu d’eau. Ne pas’avoir de berbéri à mettre sur son engera est une rude privation pour un Abyssin. Les gens à l’aise mangent avec l'engera diverses sauces, composées de berbéri, de beurre, d'oignons, de sel et de la farine de légumineuses diverses, haricots, lentilles, ete.; le nom de la sauce change avec l'espèce de légumineuse employée; quelquefois celle-ci est remplacée par des herbes cuites avec les mêmes assaisonnements; d’autres fois, ces mets sont à base de lait. Ce sont, en tout cas, des sauces et non des aliments propre- ment dits, car on n’en mange qu’en petite quantité, en tartine sur l’en- gera. La saveur en est tellement forte, d’ailleurs, qu'il serait impossible d'en manger beaucoup. SÉANCE DU # MARS 233 Les Abyssins mangent aussi de la viande, bœuf, chèvre, ou mouton, mais de temps en temps seulement et en petite quantité. Ils mettent cuire la viande en menus morceaux à même dans une des sauces dont je parlais plus haut (1). Les Abyssins ont deux espèces de boissons fermentées, le ted), hydro- mel aromatisé avec diverses plantes, et le {alla, sorte de bière faite avec la durrha. Ces deux boissons n’entrent pas d’une façon courante dans le régime des gens du peuple. 2° Détermination quantitative de la ration : La grandeur et le poids des engera varie beaucoup suivant la maison où elles ont été faites, mais dans chaque maison elles sont remarquable- ment constantes; chaque ménagère a ses mesures, constituées par des récipients variés, qui lui servent à déterminer la proportion de farine et d’eau de la pâte, comme aussi à prélever la quantité de cette pâte desti- née à une galette. Parmi celles que j'ai examinées, le poids variait de 400 à 750 grammes. J'ai analysé divers échantillons d’engera achetés à Massaua et aux envi- rons, ainsi que d’autres rapportés du plateau. La proportion de substance sèche se lient à peu près constamment de 38 à 40 p. 100. Les échantillons ont été desséchés daus une étuve de Gay- Lussac garnie d’une solution de chlorure de calcium; la température était de 102-103 degrés. Exceptionnellement, j'ai trouvé un échantillon, d'aspect sensiblement différent, plus blanc que les autres, qui ne conte- nait que 34 p. 100 de substance sèche. C'était de l’engera mal cuite. Les cendres constituent environ 2.5 p. 100 du poids de la substance sèche. La durrhka en contient en moyenne 2 p.100 (2); j'avais pensé, étant donné le système de mouture, que l'augmentation serait plus considé- rable. L'azote a été dosé par la méthode de Kjeldahl, avec la modification proposée par Henninger, c'est-à-dire que j'ai, après neutralisation de l'acide sulfurique, décomposé par l’hypobromite de soude le sulfate d’am- moniaque formé, et mesuré directement l'azote dégagé. J'ai trouvé de 1.2 à 1.6 d'azote p. 100, c’est-à-dire, en multipliant par le facteur 6.25, respectivement 7.5 et 10 p. 100 d'albumine, en moyenne sensiblement 9 p. 100. L'amidon a été dosé en saccharifiant par l’acide chlorhydrique étendu (1) La réputation de grands mangeurs de viande crue que possèdent les Abyssins leur a été faite par les voyageurs qui ont assisté au brondo ; on appelle ainsi des orgies de viande crue auxquelles se livrent les Abyssins à propos de quelque grande cérémonie, mariage, naissance ou funérailles ; maïs c'est un fait trop exceptionnel pour qu'il puisse entrer en ligne de compte dans le régime. (2) Kænig. Chemie der menschlichen Nahrungs-und Genussmittel. 9254 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE et dosant la glycose par la liqueur de Fehling. J'ai trouvé en général de 90 à 94 de glycose, soit de 81 à 85 d'amidon, en moyenne, 83 p. 100. Par suite de circonstances accidentelles, je n'ai pas pu dans cette série doser la graisse. D’après les chiffres de Æænig relatifs à la durrha (loco citato), j'admets la proportion de 2 p. 400. La graisse introduite pendant la préparation est négligeable, la plaque de fer sur laquelle se fait la cuisson est simplement frottée avec un chiffon à peine gras. Le berbéri apporte trop peu d'éléments nutritifs pour qu'il vaille la peine d’être analysé. La composition des sauces à base de légumineuses est évidemment variable suivant les habitudes de chaque ménage. D'autre part, comme tous les membres de la famille puisent à même le plat, il est impossible de déterminer ce qu’en mange un individu donné. Pour ces raisons, il en m'a pas paru nécessaire de faire des analyses complètes de ces sauces. J'ai seulement déterminé le poids sec et mesuré dans un vase cylindrique la hauteur de la couche de graisse surnageant après quelque temps de repos. D'après ces données, et d'après les renseignements recueillis sur leur confection, je leur attribuerai grossièrement la composition suivante, dont l’approximation est suffisante pour les conclusions que j'en veux tirer. Substance sèche : 20 p. 400. Composition de cette substance sèche : Graisse, 50; albumine, 12.5; hydrates de carbone, 30. Reste à déterminer la quantité d'aliments absorbés chaque jour par un homme. J'ai choisi comme sujets les soldats indigènes enrégimentés par l'Italie. Ces sujets, qui vivent chacun dans sa maison en famille absolu- ment à la mode de son pays, m'ont paru présenter les conditions néces- saires pour que leur régime spontané ait bien la signification physiolo- gique de la ration d'entretien. Ils reçoivent une solde assez élevée pour pouvoir se nourrir largement, eux et leur famille ; ils ont une vie active sans dépense exagérée d'énergie musculaire ; enfin, j'avais la commodité de les observer, grâce à l’obligeance amicale des officiers italiens qui les commandent. Je n'ai pas voulu faire ces observations à Massaua même, craignant que l'exemple des Arabes, qui dominent, n’ait altéré le régime abyssinien; en particulier, l'abondance et l'extrême bon marché du poisson pouvaient avoir introduit un élément évidemment étranger à l’ali- mentation sur le plateau. A. — Les observations que je prendrai comme type sont celles que j'ai pu faire à Ghinda, poste militaire auprès d’un village indigène, situé à mi-hauteur sur le talus du plateau, entre 900 et 4,000 mètres d’allitude, à 60 kilomètres environ de la mer. La température, en celle saison, y est à peu près celle du mois de juin dans le nord de la France ; elle est inter- médiaire entre celle de Massaua, qui est très chaude, et celle du plateau, SÉANCE DU # MARS 255 — où j'ai eu, à Asmara, par 2,300 mètres d'altitude, de la gelée blanche le matin 1° janvier). Pendant trois journées consécutives, j'ai suivi l'alimentation de deux soldats abyssins; j'allais dans leur case à l’heure de leur repas et je me faisais présenter toute la nourriture préparée pour le repas de la famille. Les deux soldats se prêtaient de bonne grâce à celte inquisition de la part d’un ami de leurs officiers, et rien ne me permet de supposer qu'ils aient cherché à me tromper en quoi que ce soit. Ils faisaient deux repas par jour, l’un à neuf heures du matin, l’autre à cinq heures du soir. Le n° 1 (Idris Tokruraï) a mangé à lous ses repas de l'engera avec du sobhei, sauce à base de lentilles. Le sobheï, pour une famille de quatre per- sonnes, emplissait à peu près à moitié une terrine d'un litre. /dris mange le matin deux engera; le soir, une ; chacune de ces engera pèse 370 gram- mes. Sur mes questions, il m'apprend qu’il mange de la viande « de temps en temps, quand l'envie lui en prend et qu’il en trouve à bon compte ». En le faisant préciser, il dit : « à peu près quatre fois par mois. » Il met la viande dans cette même terrine avec le sobheï. Tous les renseignements donnés par lui ont été contrôlés par les asser- tions des sous-officiers indigènes. La famille du n° 2 (Maradj Gosba) mangeait, le soir, de l’engera avec une herbe cuite au beurre et assaisonnée de berbéri; le matin, de l’en- gera avec du chiro, sauce à base de haricots. De chacun de ces mets, il y avait environ deux assiettées pour cinq personnes. Maradj mange une engera le matin, une le soir. Chaque engera pèse 480 grammes. À l’un des six repas, l’engera était faite avec la farine de taf (Poa abyssinica) (1). Mëmes renseignements que pour le précédent au sujet de la viande. Récapitulons : le n° À mange par jour trois engera de 370 grammes, soit, en chiffre rond, 1,100 grammes d’engera; le n° 2, deux engera de 480 grammes, soit en chiffre rond 1,000 grammes d’engera. La moyenne est de 4,050; ce qui fait, à 40 p. 100 de substance sèche, 420 grammes de substance sèche. Mettons pour chacun des deux 100 grammes de sauce par repas, soit (4) Je n’ai pas pu analyser directement l’engera consommée par les sujets; les échantillons que j'avais prélevés se sont gâtés pendant le voyage de retour. Cela a peu d'importance pour l’engera de durrha; toute la durrha consommée dans le pays étant actuellement importée, la composition ne tient en rien aux conditions locales, et la moyenne calculée sur d’autres échantillons vaut pour l’engera de Ghinda. Mais la composition du taf m'est entièremnnt inconnue; le recveil de Kænig n’en contient pas une seule analyse, et ïe n'ai pu en retrouver à Massaua. Je suis donc obligé de calculer ce taf comme de la durrha, bien qu’il soit probablement un peu plus riche en albumine. Il est vrai que, dans la région où j'observais, le taf constitue un extra assez rare; le régime moyen n’est sans doute pas influencé sensiblement par cette variante. 256 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 200 grammes pour la journée, c’est-à-dire 40 grammes de substance sèche. La ration journalière s'élablit donc de la façon suivante, en calculant avec les compositions moyennes posées plus haut : ENGERA SAUCES TOTAL Albumine:::2 tisane 38 5 43 AHAON AN esta at Lt CR OS 12 360 Graisse. . . . . CRETE ES 8.5 20 28.5 Je pense qu’en ajoutant 250 grammes de viande par semaine, on compte largement; mettons donc en plus pour sept jours 50 grammes d’albumine et 410 à 15 grammes de graisse, c’est-à-dire par jour 7 grammes d'albu- mine et 2 grammes de graisse. La ration devient : Albumine, 50 grammes; Amidon, 3860 grammes ; Graisse, 80 grammes. Calculons en calories, en admettant pour les valeurs calorifiques de 1 gramme dans l'organisme : Albumine, 4 cal., 5; Amidon, 4 cal., 5; Graisse, 9, 1. AMbuminé:s 20 SES EME DIS CHR EE RD P SR Amidon ist ect Fe ird1biLe Lie Te Ne 360 Dé VAL —= 1620 rer Graisse st is hat ren er te O0 = RO Ce qui fait au total, en chiffre rond, 2,400 calories, l’albumine four- nissant un peu plus du dixième de cette somme. Pour comparer cette ration aux rations qui ont été observées sur des Européens, il faut tenir compte du poids des sujets. Je n’ai pu obtenir le poids des sujets des obsérvalions qui précèdent, n'ayant pas eu en temps voulu les instruments nécessaires. Mais je pense que les mesures prises à Massaua sur des Abyssins adultes me donneront une moyenne valant pour ces observations, à la condition d'éliminer quelques sujets obèses, ou visiblement amaigris, ou de taille trop petite pour être admis dans les troupes; 20 sujets ainsi choisis me donnent la moyenne de 52 kilo- grammes. Ce poids est sensiblement plus faible que celui des Européens. Les Abyssins en effet, avec une taille analogue à la nôtre (166 centimètres pour les sujets en question), sont de proportions beaucoup plus grêles {1). Voici d'autres observations à mettre à côté des précédentes; je les résume brièvement. B. -- Lorsque les guerriers abyssins sont en campagne, ils mangent la Borkuta qu'ils préparent eux-mêmes. C'est une sorte de pain très primi- tif; la farine étant pétrie avec un peu d’eau, on met au milieu un caillou rougi au feu, on arrondit la pâte en boule tout autour et on fait cuire à même sur les charbons ardents. Le gouvernement de la colonie alloue à (1) Je compte publier ultérieurement les documents que j’ai recueillis sur ce sujet. SÉANCE DU # MARS 957 ses troupes indigènes en campagne 500 grammes de farine de froment par jour et par homme pour faire la Borkuta. De nombreux officiers m'ont assuré que leurs soldats font de longues journées de marche consé- cutives sans autre aliment. Bien qu’on ne puisse affirmer que ces condi- tions réalisent le régime d'entretien, il est intéressant de constater que cette ration donne une valeur voisine de celle de la ration observée à l'état spontané. En effet, 500 grammes de farine de froment, en calculant d'après les moyennes de Kænig, fournissent 4,935 calories, avec 50 grammes d’albumine. à C. — Il y a à Massaua beaucoup d'Abyssins descendus du plateau pour gagner quelque argent par leur travail, principalement comme portefaix; ils n’ont pas leur famille et vivent d'engera et de berbéri achetés sur la place publique. Or il est de notion courante qu'un homme vit avec 2 engera par jour; ces engera vendues sur la place publique pèsent en général 700 grammes. La ration calculée comme celle des observations À donne 2,300 calories avec 50 grammes d’albumine. | D. — À Massaua, la prostitution est réglementée et surveillée médica- lement ; les femmes qui s’y livrent sont pour la plupart des chrétiennes abyssines. J'ai observé leur régime à l'hôpital spécial où on les enferme lors- qu'elles sont atteintes de maladies contagieuses ; elles s’y nourrissent à leur guise, des provisions qu’elles font venir de l'extérieur, et selon loute vraisemblance, suivent le même régime qu'en liberté. Leur ration journalière comprend ? engera, pesant de 635 à 450 grammes, avec des sauces variées comme celles des observations. La valeur moyenne peut être estimée à 2,400 calories avec 50 grammes d'albumine. 11 faut remarquer que ce régime dépasse la valeur de la ration d’entre- tien. Ces femmes, en effet, engraissent rapidement, et dès l’âge de vingt et un et vingt-deux ans atteignent un embonpoint considérable. Dix femmes, âgées de dix-huit à vingt-cinq ans, m'ont donné le poids moyen de 53 kil. 200 pour une taille moyenne de 155 centimètres. Æ, — À Asmara, d'après les renseignements que j'ai obtenus sur les lieux, les soldats indigènes mangent par jour 4 engera, avec les sauces habituelles. J'ai pesé et analysé une de leurs engera; elle pesait 450 grammes, avec 40 p. 100 de substance sèche; celle-ei contenait 10 p. 100 d’albumine et 82 p. 100 d’amidon. La ration s'établirait ainsi avec une valeur totale de 3,300 calories et 78 grammes d’albumine (1). (1) Cette ration diffère considérablemeut des précédentes, mais je ne l'ai pas observée directement, et il faut peut-être tenir compte ici de la grandi- loquence orientale. Si je ne puis me dispenser de mentionner ce renseigne- ment, je ne lui accorde pas grande valeur. 9258 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En résumé, le régime des Abyssins est essentiellement végétal ; le sel est considéré comme indispensable ; le goût des épices est très vif. La valeur totale de la ration journalière est de 2,000 à 2,300 calories, dont la plus grande partie est fournie par les hydrates de carbone ; l’albumine de la ration se monte à environ 50 grammes. Je ne veux, pour le moment, lirer aucune conclusion de ces chiffres. (A bord de la Sémiramis, Massaua, 12 février 1893.) ANALYSE D'UNE URINE ALBUMINEUSE NE RENFERMANT PAS DE SULFATES SOLUBLES, par M. L. VAuUDIN. Les variations des sulfates dans l'urine sous les influences patholo- giques n’ont encore été étudiées que dans un petit nombre de maladies, surtout dans quelques maladies fébriles. Ce que nous savons aujourd'hui sur la question se trouve d'ailleurs indiqué d’une façon très complète dans la seconde partie du grand traité de Neubauer et Vogel (Analyse des Harns, 9° édit., par Huppert et Thomas, 1890, 2° Abtheil., p. 267). J’ai eu, il y a quelque temps, l'occasion d'analyser une urine intéres- sante à plusieurs titres; je remarquai surtout l'absence totale d'acide sulfurique à l’état de sulfates ou de sels sulfoconjugués. Ce fait n’ayant pas été signalé jusqu'ici, à ma connaissance, j'ai prié le D' Valin qui m'avait fait remettre cette urine de me renseigner sur l’histoire de la maladie. C’est son observation avec les résultats de mon analyse que je rapporte ci-dessous. Observation du D' Pauz Van (de Fécamp). M. V..., quarante-deux ans. Soigné par moi depuis 1888. A cette époque : accidents tertiaires de syphilis consistant en vastes ulcé- rations sur le front et le bras droit au niveau de l'épaule. Traitement spéci-. fique. Cicatrisation rapide. A cette époque et depuis déjà longtemps, V... mangeait et buvait beaucoup. Il prenait très peu d'exercice et avait une tendance à dormir continuellement. Il devenait énorme. Ces symptômes s’accentuèrent en même temps que les mauvaises habitudes de V... et vers les premiers mois de 1892 il arrivait à peser plus de 290 livres. Alors les symptômes graves commencèrent à se montrer : circulation difficile, congestion et cyanose de la face et des extrémités; dyspnée, catarrhe bronchique avec expectoration abondante. Au milieu de la scène, le cœur ne fonctionne pas trop mal, les bruits ne sont pas trop affaiblis ni SÉANCE DU 4 MARS 959 irréguliers, le pouls est à peu près normal. Il n'y a pas d'ictère, la palpation et la percussion du foie sont impossibles à pratiquer à cause de l'épaisseur de la couche graisseuse de l'abdomen. L'appareil digestif fonctionne bien. L'appétil est bon; pas de symptômes dyspeptiques. Le malade mange énormément. Selles régulières. Au commencement d'avril, œdème des bourses et de l’abdomen, puis des membres inférieurs. Urines rares. À ce moment, le malade émettait comme urine une sorte de boue très colorée en brun et dont la quantité, en vingt-quatre heures, était de 250 à 300 centimètres cubes. Soumis au régime lacté exclusif et à la caféine, la quantité d'urine a augmenté ; après huit ou neuf jours de traitement, elle était de 1,500 centi- mètres cubes par vingt-quatre heures. C’est à cette époque qu'on en a fait l'analyse. La veille de la mort, le pouls est devenu petit, irrégulier ; les bruits du cœur étaient très affaiblis. | Eu résumé : symptômes prédominants de néphrite alcoolique. Analyse de l'urine de M. V... Urine du 28 avril 4892 : Volume dans les vingt heures : 1,500 centimètres cubes. L'urine a une couleur jaune brunâtre, elle est trouble, et laisse déposer - difficilement un sédiment floconneux blanchâtre. Sa consistance est épaisse; elle a une odeur forte non putride. . L’urine est acide au papier de tournesol, et pendant plus d'une semaine elle s’est conservée dans un vase ouvert sans se putréfier. La densité est égale à 1027 à + 15°. Les opérations analytiques que j'ai effectuées ont donné les résullats suivants : Résidu fixe. — L'urine évaporée à l’étuve à 100 degrés abandonne un résidu dont le poids, calculé pour 1 litre, est de 68 gr. 38. Ce résidu est chauffé doucement pendant quelques instants jusqu’à ce qu'il ne dégage plus de fumée et que les matières organiques soient com- plètement carbonisées. On traite à plusieurs reprises par de l'eau bouil- lante le charbon obtenu. Les liquides sont filtrés et réunis pour les sou- mettre à l'évaporation; ils laissent un poids de sels solubles égal à 6 gr. 02. Le charbon restant sur le fillre est incinéré; il laisse un poids de cendres égal à 1 gr. 98. Le poids des éléments minéraux est donc de 8 grammes par litre. La quantité de matières organiques est de 68 gr. 38 — 8 gr. — 60 gr. 38 par litre. La proportion durée, évaluée au moyen de l'appareil d'Yvon, est de 9 gr. 45 pour 1,000 centimètres cubes. Les cenrres solubles obtenues dans la détermination des principes miné- 260 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE raux sont dissoutes dans l’eau distitlée bouillante aiguisée d'acide chlor- hvdrique. La solution chaude traitée par le chlorure de baryum n’a pas donné, après plusieurs heures de repos, de précipité appréciable ; elle ne renferme donc pas de sulfates solubles. Les cendres insolubles traitées par l’acide chlorhydrique étendu ont donné une solution qui précipile légèrement par le chlorure de baryum. Dans une autre partie de l'urine, on a dosé l’acide phosphorique; la quantité par litre d'acide total est de 0 gr. 33. Le poids du chlorure de sodium a élé dosé; la proportion pour 1,000 cen- timètres cubes est de 5 gr. 25. Enfin l’albumine a été déterminé sur une partie de l’urine étendue de quatre fois son volume d’eau. Le poids trouvé par litre est de (rente et un grammes, 20 centigrammes. ï L'examen microscopique du sédiment a permis d'y déceler : Cylindres hyalins, en grand nombre; Cellules de l’épithélium de la vessie et du rein. Le tableau suivant résume la composition d’un litre de l'urine analysée : EAU. M RP it re eds Ce ER OO Me one con Wréez,5.: 29 INSEE RAN NSSREER 9.45 60 SEA : AUAÏBümine ts AVES LH EME SOI 0 AS Ce (| Éléments complémentaires. . . , . 19.73. ae Acide phosphorique + PEU 68.38 Malières minérales : x SULLUTIQUE 0500 OR 0.00 8 grammes. Chlorure de sodium. . 25 9.2 Éléments complémentaires. . . . . 2.42 À beaucoup de points de vue, la composition de cette urine est remar- quable; l'énorme quantité d'albumine, la faible proportion durée et d'acide phosphorique, l’abaissement du rapport entre ces deux éléments qui est descendu jusqu’à 1/28.5, sont importants à signaler; mais c'est surtout sur l'absence de sels solubles contenant de l'acide sulfurique que ie désire attirer l’atiention. ‘Le malade étant soumis au régime lacté absolu, avait, en conséquence, une alimentation dépourvue de sulfates (on sait, en effet, que le sérum du lait ne renferme pas de sels de cette nature); leur disparition de l'urine nous indique que dans ce cas particulier de néphrite alcoolique, le soufre des matières protéiques du lait a subi ane oxydation trop peu avancée pour pouvoir passer en solution dans l'urine. Exisle-t-il des cas analogues à celui que je rapporte ? Il serait intéres- sant de les rechercher et de voir si l'absence de sulfates dans l’urine ne caractérise pas certaines néphrites, et à quelle époque de la maladie celte disparition a lieu. REED. SÉANCE DU 4 MARS 9261 NOTE SUR LES DANGERS DES INJECTIONS SOUS-CUTANÉES DE LIQUIDES ORGANIQUES QUAND CES LIQUIDES NE SONT PAS PARFAITEMENT LIMPIDES, par M. AIMÉ GUINARD, Chirurgien des hôpitaux. Au mois de novembre dernier, j'ai donné des soins à un pharmacien de Paris qui, depuis plusieurs mois, se sentait dans un état de faiblesse musculaire inaccoutumé. Il ne se plaignait d'aucun phénomène localisé, mais seulement d’un état général mauvais, d’une véritable faiblesse comme celle qu'on rencontre chez les grands neurasthéniques. Mon ma- lade, qui est un rhumatisant de longue date, est âgé de soixante-sept ans. Je vis dans cet état une indication très nette de pratiquer des injections de liquide testiculaire. J'avais précisément chez moi un flacon de ce liquide préparé par MM. Brown-Séquard et d'Arsonval; ce flacon, j'insiste sur ce fait, éfait entamé; il m'avait servi deux mois auparavant pour le traitement d'un autre malade sur lequel les injections n'avaient produit aucun effet, ni en bien ni en mal. Je fis à mon malade, qui était venu chez moi en voiture, une injection de ce liquide en prenant toutes les précautions antiseptiques recommandées par la note qui accompagne chaque flacon sorti du laboratoire de M. Brown-Séquard. Le malade se plaignit d'une douleur assez vive au niveau du point piqué (/a fuce ex- terne du bras droit), et rentra chez lui. Les douleurs furent bientôt suivies d’engourdissement du bras et les jours suivants l’engourdissement s’éten- dit au membre inférieur droit. Enfin, au bout de quatre jours, le malade avait non pas une hémiplégie complète, mais une hémiparésie très accentuée du côlé droit accompagnée d'un degré marqué d’aphasie. A aueun moment il n’y a eu d’ictus apoplectique. Les accidents sont arrivés à leur sammum en quatre jours et sont allés en décroissant progressi- vement les jours suivants. Actuellement, il ne reste plus trace d’aphasie, et le malade recommence à sortir. A cette occasion, j'étais tourmenté de l'idée qu'il pouvait y avoir une corrélation entre ces accidents et mon injection du liquide de M. Brown- Séquard. Je portai donc le reste du flacon au laboratoire de M. le profes- seur Bouchard où il a été examiné par mon ami M. Roger. Voici les résultats de l’inoculation qui a été faile par M. Roger sous la peau d’un cobaye. L'animal est mort au bout de quatre jours avec un : æœdème généralisé et une suppuration locale. Au niveau de la piqüre et dans tous les viscères, on a trouvé en abondance le Proteus vulgaris. M. Roger avait injecté 4 centimètres cubes de liquide. Tels sont les faits bruts. Quelles réflexions doivent-ils suggérer. Je dirai d’abord que je ne veux nullement incriminer les injections de liquides organiques, et les accuser de pouvoir provoquer des hémiplégies. 9262 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Je crois qu'il y a eu là une coïncidence fâcheuse chez mon malade. Mais le fait seul que ce même liquide m'avait servi quinze jours auparavant pour un autre malade qui n’en avait éprouvé aucun dommage, prouve bien que ce n’est pas le traitement par les injections de liquides organiques qui doit être mis en cause. Il n’en est pas moins vrai que le liquide en question, remis au laboratoire de M. Bouchard a été reconnu nocif. C’est sur ce point que je désire appeler l'attention. On dira sans doute que la présence du Proteus vulgaris indique tout simplement que le liquide dont je me suis servi éfait corrompu, et que, pour éviter tout accident, il faut avoir soin de s'assurer que le liquide qu'on va injecter est d’une limpidité parfaite. Cette précaution est d’ailleurs recommandée par MM. Brown-Séquard et d’Arsonval. C’est ce que je suis à l'avenir bien décidé à observer avec la plus grande attention ; etsi je publie cette note, c'est pour que tous les médecins en fassent autant. Il faut qu’on sache les dangers que peut présenter l'injection d'un liquide organique devenu trouble, opalescent, louche. L’'éliquette énorme dont M. d’'Arsonval entoure ses flacons permet difficilement de s'assurer de la limpidité du contenu. Îl est pourtant, je le répète, de Loute nécessité que cette consta- tation puisse se faire avant chaque injection. Pour me résumer, je dirai donc que cette note n’a pas pour bat de discréditer la méthode de M. Brown-Séquard (bien que d’ailleurs je n'en aie jamais obtenu aucune amélioration notable). Je veux seulement appeler l'attention des praticiens sur les dangers qu'il peut y avoir à s'écarter des recommandations de M. d'Arsonval, et en particulier à ne pas s'assurer que le liquide est d’une limpidité absolue, sans dépôt aucun au fond du flacon. APPAREIL A CONTENTION POUR LES COBAYES, par M. L. Queyrar. Le but de cet appareil est de permettre à un expérimentateur de prati- quer sur les cobayes les opérations de laboratoire sans avoir besoin d’aucune assistance. Cet appareil — que j'ai fait construire par M. Wiésnegg — est cons- tiltué par un trépied sur lequel est soudée une lame de nickel reprodui- sant grossièrement la forme d’un cobaye dont les pattes antérieures et postérieures seraient écartées. L'animal est étendu sur cette espèce de : patron métallique dans le décubitus dorsal. Au niveau de la tête se trouve une potence (P), qui permet d’abaisser sur la partie supérieure du cou une tige terminée par une petite plaque triangulaire à sommet antérieur (T). Gette plaque constitue un véritable coin qui vient s'encastrer entre les branches du maxillaire inférieur et SÉANCE DU À MARS 263 immobilise la tête. La tige qui supporte la plaque est actionnée par un ressort à boudin; une crémaillère avec cran d'arrêt règle sa course : on peut donc — à volonté — abaisser la plaque, la relever ou la rendre fixe. De plus, la potence, par l'intermédiaire d’un écrou à oreilles (E), peut s’inciiner soit en arrière, soit en avant, ce qui donne la facilité à l’opéra- teur (une fois que les pattes du cobaye sont attachées) de mettre la tête et le cou de l'animal en extension plus ou moins complète. Les pattes sont assujetties sur les prolongements latéraux (L, L, L, L) à l’aide des liens fixés par des œillets au-dessous de l’appareil. Ces liens, après avoir été enroulés autour des pattes, viennent s’arrêter sur une 9 264 - SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE lame formant ressort (R) placée à l'extrémité et en dessous de chaque prolongement. D'autre part, les cobayes employés dans les laboratoires étant de dimensions variées, j'ai fait en sorte que l’appareil püt s'adapter à la plupart des tailles. Pour cela, j'ai réalisé le dispositif suivant : l’appareil se divise transvercalement en son milieu et tandis que la moitié antérieure reste fixe, la moitié postérieure, actionnée par une crémaillère (C) et guidée par deux curseurs. s'écarte. Lorsque l'écart est jugé suffisant, on fixe les curseurs à l’aide de la visV. (V. fig. p. 263.) Fermé, l'appareil convient pour les cobayes de moyenne taille; lors- qu'on a à opérer sur de gros cobayes, on l’adapte à volonté aux dimen- sions de l’animal. On arrive très rapidement à disposer les cobayes sur cet appareil. Pour cela, on prend l'animal de la main gauche, on le couche sur le dos et on met sa région sous-maxillaire en regard de la plaque triangulaire, qu'on abaisse de la main droite; on incline un peu la potence en avant de manière à ce que la plaque cunéiforme s’encastre solidement entre les branches du maxillaire : la tête est fixée. On lie ensuite les pattes comme je l’ai indiqué, en commencant par celles de derrière; j'ajoute que les prolongements qui supportent les SÉANCE DU # MARS 265 pattes présentent des ecrans alternants qui donnent aux liens un solide point d'appui. Enfin, s’il s'agit d’un gros cobaye, après avoir desserré la vis des cur- seurs (V), on donne l’écartement voulu à l’aide du bouton à crémaillère (B) et on adapte l’appareil aux dimensions de l’animal. On peut de même régler à volonté l'extension de la tête, en inclinant plus ou moins en avant la potence que l’on fixe ensuite dans la position voulue à l’aide de l’écrou (E). Je dois dire enfin que cet appareil utilise la propriété que présentent la plupart des cobayes (surtout les cobayes adultes) de tomber dans une sorte d'état hypnotique lorsqu'on les maintient dans l’extension dorso- horizontale, d’où un double avantage et pour l’expérimentateur et pour l'animal mis en expérience (Voir figure ci-contre.) L'animal étant disposé comme je viens de le dire, rien de plus facile que de faire des inoculations sous-cutanées, intra-péritonéales, intra-vei- neuses, des trachéotomies : j'ai même pratiqué ainsi, à diverses reprises, des laparotomies, et je le répète, pour toutes ces opérations, l’expérimen- tateur peut procéder rapidement, commodément, et sans avoir besoin d'aucune assistance (1). Pour toutes ces raisons, le petit appareil que voici m'a paru mériter d’être présenté à la Société de Biologie. Il va sans dire qu’il pourrait également s'appliquer à des animaux plus volumineux, tels que des lapins ou des chiens; il n'y a là qu’une ques- tion de dimensions plus grandes à donner à l'appareil. EMPORTE-PIÈCE A POMMES DE TERRE, par M. L. Queyrar. sc On sait toute l'importance qu'a la culture de certains microbes sur la pomme de terre; on sait aussi l’heureux perfectionnement que M. Roux a apporté à ce mode de culture en stérilisant à l’autoclave à 115 degrés, des fragments de pomme de terre introduits dans des lubes étranglés à leur partie inférieure. Mais daus ce cas encore, il y avait quelques petits ennuis de technique. (1) On peut tout aussi bien opérer sur la voûte cranienne ou la région dor- sale de l'animal ; pour cela, il n’y à qu'à le disposer à plat ventre sur l’appareil et à incliner la potence en arrière, de manière à ce que la plaque triangulaire, concave intérieurement, vienne s'appliquer à la manière d'un casque sur la nuque; les pattes sont liées, comme je l'ai déjà dit, et le cobaye se trouve de la sorte parfaitement maintenu. 266 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Il fallait d’abord beaucoup de temps pour tailler les fragments de pomme de terre; ces fragments ne s’adaptaient pas exactement au tube de verre, ballottaient dans son intérieur; la surface d’ensemencement n'était pas toujours régulière. . Pour remédier à ces petits inconvénients, j'ai fait construire par M. Collin, en 1890, l'emporte-pièce ci-dessus et que connaissent proba- blement déjà quelques membres de la Société de Biologie, car voilà trois ans qu'il est employé au laboratoire et aux cours de M. Roux. - C’est un cylindre, tranchant par son extrémité inférieure et mesurant un diamètre de 18 millimètres (ce diamètre correspond à celui des tubes de verre ies plus ordinairement employés pour les cultures sur pommes de terre). La hauteur du cylindre est également de 18 millimètres; à sa partie supérieure sont soudées deux branches montantes, longues de 15 centimètres environ, qui aboutissent à une poignée. SÉANCE DU À MARS 267 De plus, le cylindre est divisé en deux parties égales par une lame tranchante, perpendiculaire, d’une hauteur de 5 millimètres. On comprend facilement comment on se sert de cet emporte-pièce. On équarrit la pomme de terre à ses deux extrémités, on la fait reposer par une de ces extrémités équarries sur un plan de liège ou de carton (de manière à ne pas ébrécher l’emporte-pièce), puis on enfonce perpen- diculairement le cylindre tranchant au travers de la pomme de terre. On le retire par un léger mouvement de torsion et on retire avec lui deux demi-cylindres de pomme de terre qui s'adaptent très exactement sur Ja concavité des tubes et présentent une surface d’ensemencement parfaitement régulière. (V. figures ci-contre.) Après la stérilisation, il est bon, pendant que la pomme de terre très chaude est encore molle, de disposer les tubes sur un plan incliné et non pas verticalement. La pomme de terre une fois refroidie, on peut disposer les tubes n'importe comment. . On arrive avec cel emporte-pièce à débiter très rapidement un grand nombre de fragments de pomme de terre qui, ainsi que je l’ai dit, pré- sentent le double avantage de se mouler exactement sur la concavité des tubes et de présenter une surface d’ensemencement très régulière. J'ajoute que, pour éviter l'oxydation de l'acier par la pomme de terre, et, réciproquement, la teinte noirâtre que l’acier peut laisser à celle-ci, si elle n’est pas très bien lavée, on pourra faire dorer ou nickeler l’emporte- pièce. ALTÉRATIONS DU TISSU MUSCULAIRE DUES A LA PRÉSENCE DE MYXOSPORIDIES ET DE MICROBES CHFZ LE BARBEAU, par M. P. THÉLOUAN. (Travail du laboratoire de M. le professeur Balbiani au Collège de France.) On sait que depuis quelques années, ant en Allemagne qu'en France, les Barbeaux d'un grand nombre de cours d’eau sont victimes d’une épidémie meurtrière causée par les Myxosporidies. Je ne m’occuperai pas ici des signes extérieurs de la maladie : exis- tence sur divers points du corps de tumeurs plus ou moins volumineuses, ulcération fréquente de ces tumeurs, etc. Ces faits ont été déjà très bien décrits par Ludwig (1) et Raïlliet (2). L. Pfeiffer (3) a le premier reconnu que, dans ces tumeurs, le parasite (4) H. Ludwig. Ueber die Myxosporidien-Krankheit der Barben in der Mosel, 1889. (2) Railliet. La maladie des Barbeaux dans la Marne. Bulletin de la Société cen- trale d’aquicuiture, t. Il, 4890. (3) L. Pfeiffer. Die Protozüen als Krankheitserreger, 1890. 268 SOCIËTÉ DE BIOLOGIE envahit non seulement le tissu conjonctif, mais les faisceaux primitifs des muscles. L'épidémie ayant continué de sévir dans la Seine et dans la Marne, j'ai pu faire surles Barbeaux malades quelques observations dont j’exposerai les résultats dans cette Note. A peu près tous les organes peuvent être envahis par le parasite : je l'ai trouvé dans le foie, le rein, la rate, dans le Lissu conjonctif de diverses régions. Dans un cas, j'ai observé dans la paroi de l'intestin, à environ 10 centimètres de l’anus, un épaississement très notable de là paroi ayant amené la disparition presque complète de la cavité intestinale à ce niveau. Cet épaississement était dù à là présence de Myxosporidies dans le tissu conjonctif où s'étaient formées des sortes de loges occupées par les masses plasmiques et les spores. Je n’en ai pas rencontré dans les ovaires, mais M. le professeur Bal- biani à, depuis longtemps, signalé Ia présence de Myxosporidies dans cet organe chez le Barbeau (1). Je ne m'occuperai pas ici des différentes manières dont ces Sporozoaires peuvent amener la mort de leur hôte, et, comme je l’ai dit, je ne revien- drai pas sur la description des tumeurs consécutives à l'infection des muscles ; je signalerai seulement les résultats auxquels m'a conduit leur étude au point de vue histologique. La présence du parasite dans le faisceau primitif semble amener rapi- dement la dégénérescence de ce dernier. En examinant à l’état frais des fragments de muscles infectés, on voit des faisceaux qui, par places, ont conservé leur aspect normal et leur striation et qui, sur d’autres points, présentent des espaces plus ou moins considérables où la substance mus- culaire est remplacée par des masses d'aspect vitreux, réfringentes. A côté de ces masses et dans leurs intervalles se trouvent des gouttelettes graisseuses, des granules jaunâtres d’origine indéterminée et enfin des spores plus ou moins nombreuses. En pratiquant des coupes au niveau des tumeurs, j'ai retrouvé cette dégénérescence, elle gagne de proche en proche la substance musculaire des faisceaux primitifs envahis et on la retrouve dans des parties de ces éléments où le parasite ne semble nas avoir pénétré; au contraire, les faisceaux primitifs voisins non infeslés, semblent à l'abri de cette alté- ralion, et l'on obser ve fréquemment un faisceau dégénéré entouré de ee sains. Le faisceau ainsi dégénéré et fragmenté ne larde pas à être envahi par des cellules phagocytaires, provenant les unes du sarcolemne, les autres du tissu conjonctif. Celui-ci, en effet, au niveau des points malades, est le siège d'une prolifération irritalive très marquée. Il faut distinguer dans le faisceau dégénéré les parties où se trouvent (1) Balbiani. Lecons sur les Sporozoaüres, Paris, 1884. SÉANCE DU # MARS 269 des spores en grand nombre et celles où ces éléments sont très peu nom- breux ou absents, le processus dégénératif ayant eu pour origine la présence du parasite en un point différent. Dans ce dernier cas, les cellules qui ont pénétré dans le tissu dégénéré se multiplient rapidement : à mesure que leur nombre augmente, on voit les débris musculaires diminuer : bientôt ils ont complètement disparu, et la place du faisceau est finalement occupée par du tissu conjonctif. Pendant que ces phénomènes se passent, l’irritalion se propage, la prolifération conjonctive s'étend et il se produit une sclérose des régions voisines des muscles avec atrophie des faisceaux primitifs. Dans les points où le faisceau dégénéré renfermait un grand nombre de spores, la formation de tissu conjonctif se borne d'abord à l’épaississe- ment du perimysium. Il se forme ainsi des espèces de travées conjonctives séparant les espaces occupés par les spores et qui répondent aux fais- ceaux primitifs disparus. Ces faits se voient surtout nettement sur dés coupes transversales. Peu à peu ces travées augmentent d'épaisseur en même une que leur . (issu devient plus dense : elles forment ainsi autour de chaque espace une coque fibreuse qui tend à se rétrécir de plus en plus. El semble y avoir là un véritable enkystement du parasite comme il s’en produit autour des corps étrangers introduits dans les tissus. Telle est la série des phénomènes que l’on peut observer dans quelques cas chez le Barbeau et tel est le processus que j'ai observé dans les autres Poissons où j'ai rencontré des Myxosporidies amenant la dégéné- rescence des muscles (Glugea destruens du Callionyme). Mais, comme l'ont signalé tous les auteurs, les tumeurs du Barbeau s'ouvrent très souvent à l'extérieur, en donnant lieu à l'écoulement d'un liquide puriforme et à la formation d’ulcères sanieux. Ces faits sont dus à la présence de microbes dans les tumeurs myxospo- ridiennes. Pfeiffer (4) y a signalé l'existence d'un grand bacille mobile avee un flagellum. J'ai observé également un grand bacille (6 u de longueur) tantôt isolé, tantôt en colonies linéaires; mais je l'ai toujours vu immobile. Il liquéfie rapidement la gélatine, donne sur la géiose de grosses colonies &'un blanc un peu jaunâtre ; inoculé à des lapins, il provoque la formation de petits abcès locaux très limités. Il se colore facilement par le bleu de méthylène, le violet de gentiane, la fuchsine, etc. Outre ce bacille, j'ai rencontré aussi, mais plus rarement, tantôt en même temps que lui, tantôt seule, une autre espèce microbienne représentée par des Cocci lantôt isolés, Lantôt réunis sous forme de streptocoques ou de diplocoques. (1) Pfeiffer. Die Protozüen als Krankheïtserreger 2° auflage, juin 1891. 210 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Je n'ai jamais observé ces organismes que dans les muscles atteints par les Myxosporidies, jamais dans les autres organes. Il faut, je crois, les regarder comme les agents de la transformation puriforme et comme la cause de l'ouverture des tumeurs chez le Barbeau. Dans les cas où l'on peut constater leur présence, le processus de prolifération conjonctive ne peut se produire, ou, du moins, il ne peut s'achever, le tissu musculaire et le tissu conjonctif sont mortifiés, pour ainsi dire digérés et le contenu de la tumeur devenu le liquide ne tarde pas à se faire jour à l'extérieur après destruction des téguments. En résumé, d'après mes observations, la présence de Myxosporidies dans les faisceaux primitifs amène la dégénérescence vitreuse de ces élé- ments. Les faisceaux dégénérés disparaissent sous l’action de cellules phago- cytaires qui par la suite s'organisent en tissu conjonctif ; les spores du parasite finissent ainsi par se (rouver emprisonnées dans des sortes de kystes fibreux. Certains microbes trouvant dans le tissu musculaire dégénéré un terrain favorable s’y développent etamènent la mortification et la fonte puriforme de ce lissu et du tissu conjonctif voisin. Le rôle de ces microbes me semble nettemént établi par mes observa- tions. Je ne fais ici que le signaler ; j'espère, dans une prochaine note, pouvoir donner de ces organismes une étude plus complète. Le Gérant : G. MAsson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Mareraeux, directeur, 1, rue Cassette. 271 SÉANCE DU i1{ MARS 1893 M. D'ARSONVAL : — Remarques à propos de la communication de M. Guinard. — M. Laveran (Discussion). — M. BEaureGanD : Note sur une Balænoptera Sibbaldi échouée à Ouessant. — M. le Dr E. Cassagr : Du fonctionnement de la cellule hépatique dans certaines infections du tube digestif. — M. Cu. Féré : Note sur l'influence des agents physiques et des chocs moraux sur les intoxications. — M. G. Moussu : Sur la fonction thyroïdienne. — M. E. GLey : Remarques sur la communication de M. Moussu. — M. Tu. Guizcoz : Photographie instantanée du fond de l'œil humain, — MM. V. PAcuon et Cnarzes Ricner : De la respiration périodique dans l’intoxication par le chloralose. — MM. A. Cuauveau et KAUFMANN : Le pancréas et les centres nerveux régulateurs de la fonction glycémique (Mé- moires). — M. F. Tourneux : Sur la structure des fibrilles des muscles jaunes du dytique et de l'hydrophile à l'état de repos. — M. le D' Giues (de Marseille) : De la galvanocaustie interstitielle. Exposé d'une nouvelle méthode de thérapeutique. MM. J. Courmont et M. Dovon : La substance toxique qui engendre le tétanos résulte de l’action sur l'organisme récepteur d’un ferment soluble fabriqué par le bacille de Nicolaïer. — MM. Cnarrix et Courmonr : Atténuation de la bactéridie par des principes microbiens. Origine de ces principes. — M. Reuy Samr-Lour : Morphologie comparée de l'os carré. — M. Bezancon : De la tachycardie sympto- matique dans le cours de la tuberculose. — M. L. Guinarp : Action physiologique de la morphine chez les bovins. Présidence de M. Chauveau. CORRESPONDANCE MANUSCRITE M. ARLOING remercie la Société de l’avoir élu membre associé. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE M. le professeur CnarLes Ricuer fait hommage à la Société du tome IT des travaux du laboratoire de physiologie de la Faculté de médecine. REMARQUES A PROPOS DE LA COMMUNICATION DE M. GUINARD, par M. D ARSONVAL. Si M. Guinard s'était scrupuleusement conformé aux instructions qui accompagnent chaque flacon délivré par le laboratoire, aucun des deux, fails qu’il a signalés ne se seraient produits. À, BIoLOG1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 10 $r. + \- # Fi A = 272 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En effet, nous recommandons, M. Brown-Séquard et moi, de ne jamais faire l'injection aux membres. L'accident signalé par M. Guinard est dû, non à l’impureté du liquide, comme il le croit, mais très probablement à ce qu’il a piqué un filet nerveux ; l’impureté du liquide aurait donné un abcès. Si le Proteus vulgaris a pu se développer dans le liquide, c'est parce que ce dernier est resté plus de deux mois en vidange et que, d'autre part, il a dû être dilué. | L'expérience m'a montré, en effet, nombre de fois, qu'un liquide frais marquant de 45 à 17 degrés Baumé, comme celui que nous délivrons, reste stérile, alors même qu'on le laisse débouché et qu'on le chauffe à 80 degrés pendant plus de quinze Jours. Le même fait a été vérifié par M. Egasse, assistant de M. Dujardin- Beaumetz. Mais il y a plus: non seulement ce liquide est stérile mais il jouit encore du pouvoir microbicide. Cela résulte d'expériences faites au labo- ratoire de Naples, expériences confirmées au Val-de-Grâce par notre col- lègue M. Laveran. Si on ensemence l'extrait liquide frais avec des microbes pathogènes, ces microbes sont tués par un contact de vingt- quatre heures avec le liquide. C'est pour cette raison que nous avons jugé complètement inutile d'employer des ampoules scellées pour l'ex- trait organique concentré et que nous l’avons toujours livré en flacons de 30 grammes, bouchés au liège, durant tout le cours de l'enquête à laquelle nous nous sommes livrés, M. Brown-Séquard et moi. Ge pouvoir antiseptique, dû à l’action combinée de l'acide carbonique et de la glycé- rine, explique pourquoi aucun accident ne nous a été signalé, bien que nous ayons délivré aujourd’hui environ dix mille flacons représentant, au bas mot, trois cent mille injections. Quant à l'efficacité de la méthode, contestée incidemment par M. Gui- nard, le volumineux dossier qui sera sous peu communiqué à la Société lui fera connaître l'opinion motivée des cliniciens de tous les pays s'occu- pant de pathologie humaine et même de pathologie comparée. Je crois utile, à la suite de cet incident, de donner in extenso l'instruc- lion imprimée qui enveloppe chaque flacon délivré par le laboratoire du Collège de France: LABORATOIRE DE MÉDECINE DU COLLÈGE DE FRANCE Mode d'emploi de l'extrait organique. 1° Ce liquide est donné gratuitement et ne peut être vendu. 2° 11 doit être injecté sous la peau. 3 Il ne doit pas être injecté pur. Il faut remplir la seringue de Pravaz à moitié seulement d’eau distillée, de nouveau récemment bouillie et froide, et compléter l’emplissage avec le liquide organique. SÉANCE DU 11 MARS 213 EE _—]_]—_ —_]—]_]—————————— 4° Tous les vases employés, de même que la seringue, la canule, la peau du malade et les doigts de l'opérateur devront être soigneusement lavés à l'eau phéniquée à 2 p. 1000, avant et après l'injection. 50 On doit faire chaque jour une injection de 2 grammes au moins du liquide dilué comme ci-dessus. On peut aller jusqu'à 8 et 410 grammes par jour sans aucun inconvénient. Si le médecin ne peut faire d’injections quoti- diennes, il devra en faire au moins deux par semaine et injecter alors de 3 à 8 grammes de liquide dilué, en plusieurs piqûres. 6° L'injection doit être faite de préférence à l'abdomen, entre les épaules ou à la fesse. Après avoir fait un pli à la peau, il faut introduire la canule dans toute sa longueur, sous la peau, et presque parallèlement à sa surface, 6° Le traitement doit être continué trois semaines au moins, et beaucoup plus longtemps s'il est dirigé contre la faiblesse sénile. 8° Le flacon doit être tenu soigneusement bouché, et en lieu frais. Il ne faut jamais introduire d’eau dans le flacon. On devra en cesser l'usage s’il se trouble notablement. 9v Si la piqûre était douloureuse (ce qui est rare), on étendrait le liquide de deux fois son volume d'eau au lieu d’un seul, comme nous l'avons indiqué ci-dessus. C. E. BRowN-SÉQUARD. — D' D’ARSON VAL. M. Laveran. — Au sujet de la communication faite dans la dernière séance par M. le D' Guinard, je crois devoir signaler les faits suivants. J'ai préparé, au mois de janvier dernier, du liquide organique, en suivant exac- tement les règles tracées par notre collègue, M. d’Arsonval; ce liquide organique a été filtré sur papier et stérilisé par l’acide carbonique sous pression. Je me suis assuré, à plusieurs reprises, que ce liquide, qui n'avait pas été filtré sur porcelaine, ne renfermait pas de microorganismes ; aujourd'hui encore, après deux mois de préparation, les cultures dans le bouillon ou sur gélose sont stériles. [l y a mieux, les microbes ordinaires de la suppuration ensemencés dans ce liquide ne tardent pas à dispa- raître; j'ai souillé du liquide organique avec des cultures des microbes ordinaires de la suppuration : Streptococcus pyogenes, Staphylococcus pyogenes aureus, B. pyocyaneus el j'ai constaté qu'au bout de vingt- quatre heures, les ensemencements faits avec les liquides organiques ainsi souillés étaient complètement stériles; les inoculations faites à des animaux n'ont donné lieu à aucun accident. La bactéridie charbonneuse avec spores a seule résisté, encore était- elle fortement altérée dans sa vitalité, les cultures sur gélose ne don- naient rien, l'inoculalion à des cobayes de fortes doses du liquide orga- nique souillé a seule démontré que la bactéridie n'avait pas perdu complè- tement ses propriétés. Il résulte de ces faits que les injections de liquide organique ne sont pas dangereuses quand le liquide a été préparé suivant les règles for- mulées par M. d’Arsonval et conservé dans de bonnes conditions, le danger vient plutôt de l’eau qu’on ajoute au liquide ou des seringues 974 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ncomplètement stérilisées. Pour ma part, je n’ai jamais ohservé d’acci- dents à la suite des injections de liquide organique faites dans mon service. : M. DUMONTPALLIER. — Je n’ai qu'un mot à ajouter aux remarques si autorisées de MM. d’Arsonval et Laveran au sujet des injections sous- cutanées de l'extrait organique préparé dans le laboratoire de médecine du Collège de France. Depuis plusieurs années, d’abord à l’Hôtel-Dieu puis dans ma pratique privée, j'ai fait sur plusieurs malades des centaines d’injections du liquide préparé par M. d’Arsonval et je n'ai jamais constaté d'accidents locaux ou généraux, mais j’ai toujours eu soin de me conformer aux conseils formulés par MM. Brown-Séquard et d'Arsonval. NoTE SUR UNE Palænoptera Sibbaldii ÉCHOUÉE À OUESSANT, par M. BEAUREGARD. Le 23 février, M. Rideau, commissaire de l'inscription maritime au Conquet, informait par dépêche M. le Directeur du Muséum qu'un Cétacé ong de 30 mètres venait d’échouer à Ouessant. Le service de l’Anatomie comparée, immédiatement prévenu, demanda de plus amples renseigne- ments, d’où il résulta, sans.doute possible, que le Cétacé échoué élait une Balænoptère de l'espèce 2. Sibbaldii appelée encore Baleine bleue. Le cabinet d'anatomie comparée du Muséum possédant déjà de très beaux squelettes mâle et femelle de cette espèce, M. le professeur Pouchet ne jugea pas à propos de faire les dépenses considérables qu'auraient exigées le dépècement et le transport du squelette de l'individu échoué sur nos côtes. Toutefois, en raison de la rareté de l'événement, nous avons cru devoir faire connaître à la Société de Biologie cet échouement et lui donner en même temps quelques détails complémentaires qu'a bien voulu, sur notre demande, nous communiquer M. le commissaire de l'inscription maritime au Conquet. L'animal, qui mesurait 30 mètres, était un mâle ; l'endroit de l'échoue- ment est situé au sud de l’île d'Ouessant, sur la grève de Roharo, à l’en- trée Est du petit port de Porsguen. Le Cétacé est tombé la tête au Nord, fait que nous observons constamment, ainsi que nous l'avons fait remar- quer déjà à plusieurs reprises. La couleur du dos est d'un noir bleu. Les fanons, complètement noirs, sont de petite taille : les plus grands, en effet, ont de 02,90 à 4 mètre de long sur 0",35 à 0,55 à la base. — Il existait 130 grands fanons; 58 moyens de 0",60 de long et 360 petits de 0,30 environ. La Baleine a été vendue 2,750 francs à un industriel de Brest. QT SÉANCE DU 41 MARS 9275 Du FONCTIONNEMENT DE LA CELLULE HÉPATIQUE DANS CERTAINES INFECTIONS DU TUBE DIGESTIF, par M. le D' E. CaAssaETr, Professeur agrégé à la Faculté de médecine de Bordeaux. Dans une des dernières séances de la Société de Biologie, M. A. Gilbert a émis cette opinion que, vraisemblablement, le foie annihile une parlie des poisons éliminés par le bacille d'Escherich, dans l'intérieur même du tube digestif. IL a rappelé les expériences de M. H. Roger qui ont définitivement établi son action destructive vis-à-vis des poisons intesti- naux pris en bloc et maintenu au rein normal, le rôle principal dans leur excrétion (l'hypertoxicité des urines dans les maladies du foie (Roger, Surmont); hypotoxicité par l’antisepsie intestinale (Bouchard, Gilbert, Surmont). Les observalions suivantes sont une preuve de l'atteinte portée au fonctionnement de la cellule hépatique par l’absorption des substances toxiques, produites à l'occasion de certaines maladies infectieuses du tube digestif. Ogs. I (résumée). — Le nommé L. P.., charpentier, cinquante-deux ans, d'une santé robuste, entrait à l'hôpital le 23 novembre 1892, pour un embarras gastrique fébrile développé à la suite de quelques écarts de régime, répétés à intervalles rapprochés dans les jours précédents. Après deux semaines de lassitude, de frissons et de fièvre, qui ne l'avaient cependant pas décidé à se faire soigner, le malade entra à l'hôpital ne se plaignant que d’une douleur assez vive dans la région périnéale. La langue était saburrale, la constipation opiniâtre, l’état général mauvais, la face ter- reuse, blafarde; les conjonctives subictériques. Le foie était augmenté de volume et douloureux. Les forces diminuant de jour en jour malgré le traite- ment d'usage et l'embarras gastrique persistant, je me décidai, après un nouvel examen du foie resté hypertrophique, à rechercher s'il n'existait pas quelque altération dans le fonctionnement des cellules hépatiques. Mes investigalions portèrent d'abord sur les substances caractéristiques de la sécrétion biliaire : les matières colorantes et les sels. Les urines ne conte- naient ni matières colorantes normales de la bile, ni urobiline (procédés chimiques seuls); mais on y découvrit, au moyen de la réaction de Petten- koffer, une grande quantité d'acides biliaires. (Plus tard, et pour cause de sensibilité plus grande, je substituai à cette réaction, celle du furfurol en solution à la dose d’une goutte pour 20 grammes d’eau distillée.) Comme preuve de la déviation dans le fonctionnement de la cellule hépa- tique que m'indiquaient les recherches susénoncées, je pratiquai aussitôt l'expérience de la glycosurie alimentaire à la fois chez ce malade et compara- tivement chez deux témoins, atteints, l’un de cirrhose atrophique, l’autre de bronchite chronique. Deux heures après l'absorption de 200 grammes de sirop de sucre, l'analyse décela une très grande quantité de glycose dans les urines du malade atteint d'embarras gastrique; tandis qu'il n’en existait pas même de traces chez les deux témoins. 976 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Il se produisit alors un incident qui me fit douter un moment de l'origine de ces accidents hépatiques : la douleur périnéale s’accrut, un abcès volumi- neux pointa à l'extérieur et il en sortit une grande quantité de pus, dont l'examen ne put être fait. Je me demandai s’il ne s'était pas fait au niveau de cette collection purulente et non à la surface du tube digestif, une résorption de produits toxiques capables d'expliquer les troubles hépatiques de mon malade et son état général. Mais l’embarras gastrique persista deux mois encore après la terminaison de cet abcès et, avec lui, l'élimination par les urines, d'une grande quantité de sels biliaires. Ceux-ci disparurent enfin; depuis longtemps la glycosurie alimentaire avait cessé. Jamais il n’y avait eu d'irritation rénale suffisante pour donner lieu à de l’albuminurie. L'amélioration ne date que du moment où le malade prit 12 grammes de bicarbonate de soude par jour (traitement physiologique de Roger). Après une infection digestive intense, il y avait donc eu une véritable maladie des cellules hépatiques et celle-ci s'était traduite : d'abord par l’excré- tion urinaire d’une grande quantité de sels biliaires, ensuite par une glyco- surie alimentaire qui dura plusieurs jours. Or le malade n'avait aucune pré- disposition hépatique, ni héréditaire, ni personnelle et la gravité tout entière de la maladie provenait, au début, de l'intensité même de l'infection intesti- nale. Plus tard, le foie prit un rôle prédominant, puisque l'amélioration de l'état général ne se fit que parallèlement à la disparition des signes hépatiques énumérés plus haut. | Cette observation indique que le foie peut être absolument barré pour les produits assimilables, alors que rien ne peut le faire supposer par l'examen extérieur; elle forme un contraste frappant avec l'histoire du cirrhotique, témoin, qui, malgré des lésions circulatoires avancées (ascite), avait cependant des cellules hépatiques en bon état. Oss. II (résumée). — Chez un second malade, celui-ci alcoolique et présen- tant depuis deux ans tous les signes d’un ulcère de l'estomac (douleur xiphoï- dienne et dorsale, augmentée par les repas; selles noirâtres ; amélioration par le régime lacté), les mêmes signes d'une altération dans le fonctionnement des cellules hépatiques se produisirent à l’occasion d’un embarras gastrique fébrile. Instruit par l'observation du malade précédent, je procédai à l'analyse minu- tieuse et répétée des urines et pus y reconnaître, par les mêmes réactions que plus haut, des sels biliaires en grande quantité, sans urobiline ni matières colorantes. l Au moment d’une aggravation dans l'état général, la glycosurie alimentaire, qui avait fait défaut jusqu'alors, devint manifeste; puis elle disparut au fur et à mesure de l'amélioration relative de l'état du tube digestif. Les sels biliaires persistèrent cependant pendant toute la durée de la vie du malade. Il succomba trois mois après son entrée à l'hôpital et l’autopsie démontra l'existence, au niveau de la petite courbure et du cardia, d'un vieil ulcère, récemment dégénéré avec quelques ganglions péri-vertébraux et deux ou trois noyaux secondaires, de peu de volume, dans le foie. Par ailleurs, cet organe SÉANCE DU 41 MARS 271 eo paraissait normal. L'ulcère avait usé complètement la paroi stomacale et la cavité du ventricule était fermée par la face inférieure du foie. Chez ce second malade, comme chez le premier, la recherche des sels biliaires dans les urines put donc mettre sur la trace d'une altération dans le fonctionnement des cellules hépatiques, alors que les autres procédés étaient pendant longtemps insuffisants. — Chez lui aussi, consécutivement à une infection digestive, le foie était barré pour les substances assimilables, telles que la glycose. Ors. IIT et IV (résumées). — Chez deux autres malades, atteintes de fièvre typhoïde, la recherche des sels biliaires fut moins probante, malgré la gravité de leur état. Elles avaient, il est vrai, été l'objet d’une antisepsie intestinale sévère, dès le début de leur affection, et peut-être est-ce à cette raison que doit être reportée la différence observée dans l'élimination urinaire, par rapport aux précédents. Chez elles la glycosurie alimentaire n'a jamais existé et les sels biliaires n’ont été décelés qu'en petite quantité dans les urines. Encore y a-t-il, à ce sujet, un détail important à signaler. L'élimination a été très apparente aussi longtemps que se sont continuées les déjections alimentaires; elle a cessé dans ka phase d'état de la maladie, alors que le régime lacté était institué depuis une dizaine de jours; elle a reparu quand l'alimentation solide a été permise dans la convalescence ; elle a cessé définitivement quand les malades sont revenus complètement à la santé. Si l'on pouvait tirer une conclusion de ces deux ordres de faits et malgré le petit nombre d'observations produites, il semblerait que, vis- à-vis des cellules hépatiques, les embarras gastriques fébriles simples pourraient avoir une importance plus grande que les fièvres typhoïdes, même graves, et amener plus facilement leur asystolie. Ces faits prouvent, en tous cas, que les infections digestives retentissent à bref délai et de la manière la plus grave sur la glande hépatique, puisqu'elles arrivent à annihiler complètement quelques-unes de ses fonctions et non des moins importantes. NOTE SUR L'INFLUENCE DES AGENTS PHYSIQUES ET DES CHOCS MORAUX SUR LES INTOXICATIONS, par M. Cu. FÉRé. L'histoire de l'influence des agents physiques et des chocs moraux sur les infections comprend déjà un assez grand nombre de faits intéressants; mais celle de l'influence des mêmes agents sur les intoxications propre- ment dites est beaucoup plus pauvre. Les faits les plus probants, à ce 978 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE dernier point de vue, ont trait à l’alcoolisme (1). Les rapports de plus en plus évidents des infections et des intoxications permettent de supposer que l'histoire des intoxications s’enrichira de nouveaux faits. Je désire appeler l'attention sur des faits qui ne sont pas sans intérêt d’ailleurs au point de vue pratique : il s’agit de l'influence des agents physiques et des chocs moraux sur le bromisme. I. — Dans son excellent travail sur l'emploi du bromure de potas- sium (2), M. Auguste Voisin dit expressément que la température exté- rieure ne lui a pas paru exercer la moindre influence sur la genèse des accidents qu'il peut produire. J'ai partagé cette opinion tant que je n'ai donné le bromure qu'à des doses modérées ; mais depuis que J'ai prescrit des doses plus élevées, il m'a fallu reconnaître que la saison est loin d’être indifférente au point de vue de la tolérance. Dans sa thèse, compre- nant beaucoup de documents pris dans mon service, M. Chaumont relève insuffisamment l'influence du froid (3). J'ai fait la statistique des accidents bromiques qui ont été relevés dans mon service depuis le 1% avril 1890 jusqu’au 4° octobre 1892, c'est-à- dire de trois périodes estivales de six mois entre lesquels sont intercalées deux périodes hibernales de même durée. Ce relevé, qui comprend, outre les accidents plus graves, tous les troubles gastriques attribués au bromure et qui ont nécessité une intervention, donne les résultats suivants : NOMBRE NOMBRE des des ACCIDENTS BROMIQUES SUJETS AFFECTÉS 49 Période estivale (avril à octobre 1890) . . . 23 12 . 2° Période hibernale (octobre 1890 à avril 1891). 112 21 3° Période estivale (avril à octobre 1891) . . . 31 16 4° Période hibernale (octobre 1891 à avril 4892). 140 29 5° Période estivale (avril à octobre 1892) . . . 40 18 En somme, pendant l'hiver un plus grand nombre de sujets sont atteints, et les mêmes sujets sont plus souvent alteints. Tandis que le nombre des sujets atteints n’augmente que d’un tiers ou de la moitié, le nombre d'atteintes chez les sujets les plus sensibles augmente de quatre cinquièmes; c’est-à-dire que l'influence de l’hiver est surtout marquée sur des sujets plus sensibles. Le nombre des sujets bromurés varie peu; cependant la quantité des accidents bromiques a augmenté notablement : c’est qu'au commen- (4) Ch. Féré. La pathologie des émotions, 1892, pp. 60, 288. (2) A. Voisin. De l'emploi du bromure de potassium dans les maladies nerveuses. 1875, p. 66, 71. (3) A. Chaumont. Du Bromisme, Thèse, 1892, p. 44. SÉANCE DU 11 MARS 979 cement de 1890, les doses maxima ne dépassaient guère 12 grammes, tandis qu'à la fin de 1892, elles atteignaient 21 grammes (1); on peut même dire que les accidents n'’augmentent pas en proportion des doses. Ce résultat est vraisemblablement attribuable à l'usage de l’antisepsie intestinale que nous employons depuis plusieurs années (2). Bien que la fréquence des accidents bromiques ne nous ait pas paru suffisante pour imposer la règle de l’antisepsie préventive, il est certain que ce trai- tement a supprimé un grand nombre de récidives qui se fussent pro- duites sans son emploi. II. — Quant à l'influence des chocs moraux sur l'invasion du bromisme, je ne puis l’appuyer que sur un seul fait, maïs qui m'a paru caractéris- tique. Il s’agit d'un homme de quarante-sept ans qui est épileptique depuis l’âge de vingt-trois ans. Il n'avait que de rares accès, mais de fréquents vertiges. Depuis 1871, il était soigné par Legrand du Saulle, et soumis à une bromuration ininterrompue. Jusqu'en 1886, il n'avait jamais pris que des doses faibles, n'ayant pas dépassé 5 grammes par jour. Le résultat avait été de suspendre à peu près complètement les accès quine reparaïis- saient pas même chaque année. II lui restait en moyenne un ou deux ver- tiges par mois. Depuis cette époque, il avail continué son traitement sans voir d'autre médecin, trouvant la situation tolérable. Il n'avait jamais eu de troubles graves provoqués par le bromure. De temps en temps, il avait l’haleine fétide, de la constipation, quelques boutons d’acné. Il y remé- diait, comme le lui avait appris Legrand du Saulle, par un purgatif et quelques gouttes de liqueur de Fowler qu'il cessait quand l'éruption avait disparu. En décembre 1889, il avait eu deux accès en une semaine. C’est à celte occasion que je le vis. Je lui conseillai d'augmenter sa dose de 1 gramme. Le résultat fut une suspension nouvelle des accès, les ver- tiges étaient devenus aussi un ‘peu plus rares, mais cependant ne s’éloi- gnaient pas de plus d’un mois. La tolérance du bromure était parfaite et en trois ans, le malade n’en avait éprouvé que deux fois les inconvénients qu'il connaissait, et auxquels il avait remédié comme précédemment. Il prenait régulièrement son médicament ; mais en redoutait l'augmentation et il avait évité toute consultation pendant cette période de trois ans. Le 21 janvier 1893, il apprit la mort d'un oncle, et en même temps la privation d’un héritage, qu'il avait fait entrer dans ses comptes. A partir de ce moment, l’inappétence a été complète ; dans la soirée, la prostration (4) Ch. Féré. La bromuration à hautes doses dans l'épilepsie (Revue de médecine, 1893, p. 177). (2) Ch. Féré. Bromuration et antisepsie intestinale (Nouvelle Iconographie de la Salpétrière, 1890). — C. Grémaud. De l'influence de l'antisepsie intestinale sur quelques éruptions médicamenteuses, Thèse, 1891. 280 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE se manifestait par une faiblesse marquée des jambes, de l'incertitude de la marche et même de la titubation. La bouche était pâteuse et l’haleine extrêmement fétide; dans la nuit il se produisit un ptyalisme abondant, un liquide visqueux et d’une fédidité spéciale s’écoulait de la bouche. Le lendemain matin, le malade était dans la stupeur, ne manifestant sa spon- tanéité que pour se plaindre de sa tête, sa physionomie est hébétée ; il ne répond que par des monosyllabes. Le pouls faible, mais non ralenti, bat soixante-dix fois par minute ; pas d’élévation de température. Respiration normale. Get état ne pouvait guère laisser de doute sur son origine ; mais sa disparition en trente-six heures sous l'influence d’un purgatif énergique montre bien qu'il ne s'agissait pas d'autre chose que d’une intoxication bromique aiguë. Je remarque que le malade avait été saisi de ces acci- dents en parfaite santé, qu’il n’a pas été exposé au froid, qui ce jour-là d’ailleurs n’était plus très vif ; on ne peut guère refuser au choc moral le rôle de cause occasionnelle. Dans cette circonstance, les accidents bro- miques ont été provoqués par le choc moral, chez un individu saturé, comme le delirium tremens est provoqué chez des alcooliques. SUR LA FONCTION THYROÏDIENNE, par M. G. Moussu. Dans ma dernière communication, en vous faisant connaître les résul- tats que j'avais obtenus dans mes expériences de thyroïdectomie chez les jeunes animaux, je suis arrivé à émettre un certain nombre de conclu- sions, au nombre desquelles il s’en trouve une que je tiens à rappeler; c’est la suivante (1): « L'importance des glandules dites accessoires (à structure embryon- naire) devient de plus en plus problématique, puisqu'elle ne suffit même pas à empêcher le développement de l’état crétinoïde. » Ces glandes accessoires (à structure embryonnaire) ont formé le point de départ des travaux de M. Gley, chez le lapin, et lui ont fourni les gros arguments, qu’il a opposés à quelques-unes de mes expériences sur les adultes. Il me semble donc utile d'y revenir un peu, afin d'essayer de trancher la question. Je laisse de côté, bien entendu, les glandules accessoires à structure thyroïdienne, qui, peuvent se trouver accidentellement au voisinage de l'organe principal et dont personne ne pourrait contester l'importance. Les glandules accessoires à structure embryonnaire, primitivement dénommées parathyroïdes (ce qui avait l'avantage d'éviter les confusions) (4) Société de Biologie, 24 décembre 1892. % SÉANCE DU 11 MARS 281 ont été décrites chez l’homune, le cheval, le bœuf, le chien, le chat, le lapin et le rat. — Les objections qui m'ont été opposées, au sujet de mes expériences sur le mouton, la chèvre et le porc, n'auraient donc pu avoir de valeur que si l'existence de ces glandules embryonnaires avait été démontrée chez ces animaux! D'ailleurs peu importe, je suis tout prêt à supposer qu’il y a chez les animaux des glandules embryonnaires dans le voisinage du corps thyroïde, le long de la trachée, ou même dans le médiastin. Quelle importance cela peut-il avoir? Est-on autorisé à les considérer comme glandules thyroidiennes accessoires, rien que par le seul fait qu'elles ont une structure embryonnaire ? Si les suppositions de M. Gley étaient exactes, pourquoi les glandules embryonnaires du chien n’auraient-elles pas la puissance physiologique de celles du lapin? Et si l’on admet que ces glandules sont insuffisantes à suppléer le corps thyroïde chez les chiens thyroïdectomisés, pourquoi voudrait-on que ce soient ces glandules embryonnaires qui chez certains animaux (chez les- quels elles n’ont pas même été décrites, mouton, chèvre, porc), empè- chent l’évolution dés accidents que l'on constate chez le chien ? A priori, c'est absolument illogique. Vouloir que chez le lapin une seule glandule supplée l’organe principal enlevé, admettre d’un autre côté que les glandules embryonnaires ne sont jamais capables de suppléer les glandes principales chez le chien, et prétendre en fin de compte que si chez certains sujets d'expériences (moutons, chèvres, porcs), on n'ob- serve pas d'accidents aigus, cela tient tout simplement à ce que l’on n’a pas enlevé des glandules, est vraiment par trop hypothétique. Et cepen- dant c’est bien là l’idée qui se dégage des travaux de M. Gley et des objections qu’il m'a opposées. C'est une théorie qui ne peut aboutir, parce qu'en s'altachant aux recherches de suppléance, elle écarte, elle élimine le problème principal, sans chercher à le résoudre. Sans doute M. Gley a dit : « Lorsque j'extirpe le corps thyroïde et les glandules embryonnaires à des lapins, les opérés meurent; lorsqu'au contraire, j’extirpe les corps thyruoïdes seuls, les opérés survivent et les glandules embryonnaires s’hypertrophient. « Done les glandules suppléent physiologiquement les corps thy- roïdes. » Nous n’en étions pas plus avancés quant à la nature intime de la fonc- tion thyroïdienne, mais, faute de solution, c'était un semblant d'explica- tion. J'ai, d’ailleurs, fait remarquer que cette conclusion se trouvait en désaccord avec les faits fournis par M. Gley lui-même. Depuis longtemps, j'aurais pu m'inscrire en faux contre cette idée, mais je n’ai pas l'habitude de publier hâtivement et, aujourd'hui, je puis dire que si l’hypertrophie des glandules accessoures embry onnaïres se pro- 282 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE oo duit chez le lapin, ce n’est pas dans tous les cas, mais, surtout et peut- être exclusivement, sur les sujets jeunes. J'ajoute que c’est là une donnée sans grande importance, puisque d’autres travaux nous ont mentionné l’hypertrophie de la glande pitui- taire ou nous signalent la reviviscence du thymus (1) dans les cas d’ab- sence ou de lésion des glandes thyroïdes. Lequel de ces organes si différents comme structure et comme évolu- tion embryologique, joue un rôle de suppléance ? Les glandes dénommées vasculaires sanguines forment un système particulier dont les corrélations fonctionnelles commencent à ètre mises à jour. Rien d'étonnant, dès lors, à ce que la fonction physiologique de certaines d’entre elles se trouve modifiée par l'absence ou l’ablation d’une autre. Mais de là à conclure à une suppléance effective, il y a loin, et en ce qui nous concerne, rien n'autorise à penser que les glandules parathyroïdes suppléent l'organe enlevé. Et j'irai même plus loin en disant qu'il est probable que les glandules thyroïidiennes accessoires signa- lées aux différentes hauteurs de l’encolure et dans l'épaisseur du médiastin antérieur ne sont probablement que des vestiges de thymus non complè- tement disparus, ou des ganglions lymphatiques. Je suis d'autant plus porté à le croire, que les observations que.j'ai pu enregistrer jusqu'ici m'ont montré, que chez les sujets très jeunes ou sur les fœtus, le thymus se prolongeait en haut jusqu’en arrière du corps thyroïde. D'autre part, pour avoir le droit de rattacher physiologiquement au tisus thyroïdien, des glandules quelconques, une structure embryonnaire et l'hypertrophie post-opératoire sont insuffisantes pour justifier ce rappro- chement. Il aurait fallu démontrer que les parathyroïdes d’une région quel- conque, partant de leur structure embryonnaire, pouvaient subir l’évo- lution et l’acheminement vers l’état adulle et se transformer en tissu thyroïdien vrai. Ce qu'il y a de certain, c'est que cette preuve indispensable n’a pas été donnée et qu’elle ne me paraît pas près de l’être. Dès aujourd'hui je m'inscris en faux contre celte supposition, et j’ap- porte des preuves à l’appui. Sur deux jeunes lapins, auxquels j'avais fait subir la thyroïdectomie simple, j'ai recueilli, après huit mois, des glandules hypertrophiées, présentant environ trois fois le volume normal. Ces glandules ont été fixées par l'alcool absolu, colorées en masse par le carmin boracique, incluses dans la paraffine, coupées en série et montées dans le baume, Je vous en présente ici quelques préparations. On peut voir que ces glandules sont extrémement riches en vais- seaux, mais que la structure embryonnaire est restée intacte, malgré (4) Marie. Semaïne médicale, 18 février 1893. sl SÉANCE DU 11 MARS 283 l’hypertrophie. Pas le moindre changement ne peut êlre noté en vue de l'acheminement vers l'état du tissu thyroïdien adulte. Les glandules embryonnaires, comme les vestiges du thymus, comme la pituitaire, comme d’autres organes vasculaires peut-être, s’hypertro- phient en conservant leurs caractères propres. C'est là, sans doute, je le répète, une conséquence de corrélation fonc- tionnelle, mais non une modification justifiant les hypothèses de sup- pléance. Je me vois donc forcé de répéter aujourd'hui, avec preuves à l'appui, que les objections qui m'ont été opposées manquaient de démonstration et ne reposaient que sur des hypothèses. J'ajoute que rechercher les suppléances physiologiques, c’est déplacer le but, mais non l’atteindre. Peut-être supprime-t-on deux fonctions et non une seule, en faisant à la fois l’ablation des thyroïdes et des glandules embryonnaires ? REMARQUES SUR LA COMMUNICATION DE M. Moussu, par M. G£ery. Je n’ai pas l'intention de continuer avec l'auteur de cette communication une discussion (1) qui cesse, à mon avis, d'offrir un intérêt scientifique, puisque cet auteur n’oppose plus à des faits que des arguments théoriques. Mais j'ai le devoir de relever les interprétations erronées de mes propres travaux. Si M. Moussu avait bien voulu lire avec quelque attention ma note concernant l'existence des glandules thyroïdes chez le chien (2), il aurait vu que, quand on pratique la thyroïdectomie sur cet animal, on ne peut pas ne pas enlever les glandules avec la glande, puisque celles-là sont enchâssées dans celle-ci. Comment dès lors aurais-je bien pu dire que les glandules ne sont pas susceptibles de suppléer la glande chez le chien? Et que devient tout le raisonnement qui a pour but de me mettre en contra- _diction avec moi-même, qui reconnaïilrais l'impuissance des glandules chez le chien, après avoir soutenu l'importance de leur rôle chez le lapin ? En second lieu, je puis affirmer que, dans toutes les publications où j'ai eu l’occasion d'aborder cette question, j'ai soigneusement distingué entre les recherches qui ont trait au rôle de la glande thyroïde (effets de la thyroïdectomie), et celles qui concernent le mécanisme de la fonction de la glande. Autant nos connaissances sont avancées sur le premier point, autant (4) Voy. Arch. de physiol., octobre 1892, p. 743; Comptes rendus Soc. de Biol., 17 décembre 1892, p. 979 et 24 décembre 1892, p. 1000. (2) Comptes rendus Soc. de Biol., 25 février 1893, p. 217. 284 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE elles sont pauvres et rares sur le second. Je n'ai jamais rien dit ni écrit qui pût autoriser quelqu'un à avancer que je pensais avoir éclairei la nature intime de la fonction thyroïdienne, en déterminant le rôle des glandules. L'étude physiologique de ces organes, outre le problème spécial qu’elle à résolu, ce me semble, — et n’en déplaise à mon contra- dicteur, — a posé une tout autre question, question intéressant la physio- logie générale. Que répondrai-je maintenant à la partie positive de la note de M. Moussu?IlL y est question en tout et pour tout de deux expériences: l’auteur, ayant enlevé la glande thyroïde à deux lapins, a trouvé, au bout de huit mois, « les glandules hypertrophiées, présentant environ quatre fois le volume normal..., extrêmement riches en vaisseaux ». Mais celte hypertrophie et cette vascularisation, ce sont des phénomènes que j'aisignalés en 1891 et 1892(1). Cette confirmation de mesexpériences m'est d’autant plus agréable qu'elle est plus rare de la part de M. Moussu. Celui-ci, à la vérité, interprète ces faits à sa facon, qui est naturel- lement autre que la mienne. C’est bien ici le cas de dire que les inter- prétations passent, les faits demeurent. Et, pour la majorité des physio- logistes, un organe plus vascularisé est un organe en état de suractivité fonctionnelle. Ajouterai-je qu'il n’est pas permis d'essayer de confondre les glandules thyroïdes avec des ganglions lymphatiques, organes dont la structure est aujourd’hui bien connue ? J'aime mieux rappeler à M. Moussu cette proposition, qui résulle immé- diatement des faits, et que j'ai déjà opposée à toutes ses critiques : l’ex- tirpalion de la glande thyroïde chez le lapin a été reconnue inoffensive par plusieurs physiologistes, en Italie, en Russie, en Suisse ; j'avais moi- même constaté le fait; l’extirpation, outre la glande, des glandules, opé- ralion que j'aile premier pratiquée, est, dans la plupart des cas, mortelle: Il n’est pas de raisonnement qui tienne contre cette preuve expérimentale de l'importance physiologique, de la signification fonctionnelle des glan- dules. Libre ensuite à M. Moussu de déclarer que « l'importance des glan- dules devient de plus en plus problématique, puisqu'elle ne suffit même pas à empêcher le développement de l’état crétinoïde ». Mon contradicteur montre ainsi qu'il a sans doute mal lu non seulement mes travaux, mais ceux de Hofmeister. Je pense bien que les glandules ne suffisent pas tou- jours (il importe d'ajouter ici ce dernier mot) à empêcher le développe- (1) Comptes rendus Soc. de Biol., 19 décembre 1891, p. 843 ; Arch. de phy- siol., janvier 1892, p. 135. — J'ai ajouté à cette époque que, dans ces organes hypertrophiés, se produisent quelques modifications de structure que je me réservais d'étudier. Des circonstances indépendantes de ma volonté ne m'ont pas encore permis de terminer cette étude. SÉANCE DU 11 MARS 269 ment de la cachexie spéciale ; mais elles suffisent à empêcher les acci- dents aigus consécutifs à la tnyroïdectomie, de telle sorte que la maladie chronique (troubles trophiques) seule peut se développer, sans autres désordres. Le raisonnement de M. Moussu ne se comprendrait que s'il avait écrit : «puisqu'elle ne suffit même pas à empêcher le dévelop- pement des accidents aigus », le développement de la seule cachexie devant être justement regardé comme une preuve de l'impor tance fonc tionnelle des glandules (1). PHOTOGRAPHIE INSTANTANÉE DU FOND DE L'ŒIL HUMAIN, par M. Tu. GuiLLoz, Chef des travaux du Laboratoire de physique à la Faculté de médecine de Nancy. Note présentée par M. D'ARSONVAL. P La photographie du fond de l'œil a déjà fait l'objet de bien des tenta- tives, dont les plus heureuses sont, d’après les journaux d'ophtalmologie, celles de Gerloff. Il a publié en décembre 1891 (2), une photographie mesu- rant trois largeurs de papille et contenue dans un cercle de 9 millimètres de diamètre entouré par l'image diffuse de l'iris. Get essai, de même que ceux qui l'ont précédé, a porté sur la photographie de l’image droite. De l'avis de l’auteur lui-mème, son procédé est pénible et incertain et ne résout pas le problème de la photographie du fond de l'œil. Mon procédé est d’une application bien plus facile; il n’est ni pénible ni dangereux pour le patient et donne l’image d’une bien plus grande portion du fond de l’œil avec un grossissement et une netteté plus grande. Le principe de ma méthode est bien simple. Il repose sur ce fait : qu'une loupe et une lampe suffisent pour pratiquer l'examen ophtalmoscopique à l’image renversée lorsque la pupille du sujet est dilalée. La méthode est directement applicable aux animaux qui, comme le chien, ont la pupille normalement distendue. La source lumineuse est placée de 0",30 à 0,50 de l'œil examiné. L’observateur, situé immédiatement derrière la source, s’en protège au moyen d'un écran dont le bord en est très rap- proché. Il forme avec la loupe l’image renversée et il l'examine, sa ligne visuelle étant tangente au bord de l’écran. Remplace-t-on l'œil par l’ob- jectif photographique, on obtiendra sur la plaque de verre dépoli de l’ap- pareil une image droite du fond de l'œil. (1) Encore convient-il de remarquer que, dans presque tous les cas, jus- qu'ici observés, chez le lapin adulte, ces organes ont même suffi à empêcher la cachexie. (2) Klin. Monasb. für Augenheik., décembre 1891. 286 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Je joins à cette note une photographie de mon dispositif. Une loupe de 20 dioptries placée devant l’œil à photographier recoit d’une lampe à gaz, dont le verre a été remplacé par un tube de tôle, des rayons rendus à peu près parallèles par suite de leur passage dans une lentille de 18 dioptries, dont le foyer occupe la position de la flamme. A celte lampe, se trouve amené un petit instrument que je nommerai pistolet à magné- sium. l”projette automatiquement dans la flamme, au moment où se prend la photographie, un mélange bien sec formé d’une partie de chlo- rale de potasse et de deux parties de magnésium en poudre. J'ai modifié l'appareil photographique, afin de pouvoir tirer aussitôt après avoir mis au point, en y adaptant une caisse dont la paroi postérieure reçoive le châssis dans lequel la plaque sensible est mise à découvert. Un miroir, incliné à 45 degrés dans la caisse, forme obturateur et renvoie les rayons sur la paroi supérieure de la caisse où se trouve un verre dépoli pour recevoir l'image. Après avoir mis au point, on relève, au moyen de manettes, le miroir mobile autour d’un axe horizontal occupant sa partie supérieure. Lorsque le miroir est complètement relevé, une des manettes comprime une poire en caoutchouc. Cette aclion soulève un piston com- mandant la détente du pistolet. L'éclair magnésique se produit et on laisse retomber le miroir, la plaque étant impressionnée. Les reflets lenticulaires sont rejetés à la périphérie en inclinant la loupe. Gette inclinaison n'est pas suffisante pour déformer l’image du fond de l’œil ainsi que je l'ai démontré en photographiant l'image ren- versée du fond d'œil artificiel et le dessin lui-même sorti de l'œil. Les reflets cornéens sont rejetés en déplaçant latéralement la loupe. Ils occu- pent sur les images photographiques la périphérie de l’image lorsqu'on n'a pu les éviter complètement. Les reflets lenticulaires sont aussi très aisément reconnaissables : leur forme arrondie et leur intensité ne per- mettront jamais de les confondre avec un aspect du fond d'œil normal ou pathologique. L'œil supporte très bien l'éclair magnésique et immédiatement après l'avoir subi il peut continuer une lecture. On est même moins incom- modé par la lueur de l'éclair comme patient que comme spectateur car, dans le premier cas, l’éclairement se répartit d’une manière diffuse sur la réline. Nous présentons six photographies de fonds d’yeux normaux prises sur trois de nos amis. Elles montrent nettement des détails assez fins et il est avantageux de les étudier à la loupe. Six photographies ont été prises sur un œil atteint d’un vaste colobome occupant toute la région supé- rieure et temporale du fond de l'œil. Elles permettent de reconstituer les limites du colobome et de l’étudier dans une très grande étendue. Enfin, trois autres photographies représentent des staphylomes poslérieurs. SÉANCE DU 11 MARS 987 DE LA RESPIRATION PÉRIODIQUE DANS L'INTOXICATION PAR- LE CHLORALOSE. Note de M. V. Pacuon et CHARLES RICHET. On sait toutes les difficullés qui empêchent d’obtenir régulièrement dans une série d'expériences le curieux phénomène de la respiration pé- riodique. En effet, le plus souvent, la morphine ou le choral, même à forte dose, ne produisent la respiration périodique que d’une manière passagère, et, par conséquent, il est difficile d'interpréter et d’analyser de près ce phénomène. Au contraire, si l'on injecte à un chien une quantité convenable de choralose, on voit toujours la respiration se ralentir pour devenir périodique, avec des périodes ou groupes de deux ou trois, plus rarement quatre respirations, et on peut en bien suivre les phases. La dose convenable de chloralose pour obtenir cet effet est d'environ 0gr. 15 par kilogramme en injection intraveineuse. Encore n'y a-t-il aucun inconvénient à dépasser cette dose; car, si la mort survient parfois avec des doses voisines de 0 gr. 15, c’est seulement quand on ne surveille pas la respiration. On peut empêcher l’asphyxie en faisant de temps à autre quelques respirations artificielles par la compression du thorax, et alors l’animal ne meurt pas et peut éliminer le poison. On retarde aussi la mort, ou bien on peut faire ingérer des doses plus fortes en empêchant l'animal de se refroidir. (Un moyen très simple consiste à allumer de grosses lampes à gaz avec réflecteurs sur la table où il est attaché. La chaleur développée ainsi est suffisante pour empêcher le refroidissement du chien.) Dans ces conditions, on voit, par l'inscription simultanée du cœur et de la respiration, que, pendant la durée de la pause respiratoire, le cœur bat régulièrement, puis que ses battements se ralentissent, s’affaiblissent, et, finalement, deviennent très lents et très faibles. À ce moment, la circula- tion se fait mal, l’asphyxie est menaçante, la langue bleuit ; et le besoin de respirer survient, qui détermine une grande respiration ; mais cette respiration ne suffit pas, et, tout de suite après ce mouvement unique, une autre inspiration survient; alors l'hématose est assurée pour un certain temps ; les battements du cœur reprennent leur vitesse et leur force normales ; et de nouveau survient une grande pause respiratoire. Pendant cette pause respiratoire, on voit un phénomène assez remar- quable, c’est la dilatation progressive du thorax. Constamment le thorax se dilate, comme s’il se gonflait peu à peu; et les tracés recueillis à cet égard sont absolument nets. Il s’agit sans doute de l’élasticité du thorax qui revient peu à peu àsa distension normale moyenne, alors qu'après une respiration forcée elle était au-dessous de la aistension normale. 104 288 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Quant à l'explication de la respiration périodique, elle est tout à fait simple, et elle concorde parfaitement avec ce que M. Pachon a vu sur la respiration périodique dans la morphinisation et la chloralisation et, d'autre part, avec ce que M. Ch. Richet a vu en étudiant la localisation de l’action toxique du chloralose à l'appareil cérébral. En effet, si nous admettons, comme cela semble bien prouvé, que le chloralose supprime l’action cérébrale, il s'ensuit que le bulbe seul entre en jeu pour provoquer des phénomènes respiratoires, alors que si l’as- phyxie est commencante. Le besoin de respirer ne se manifeste qu'après une sorte de semi-asphyxie, et alors une respiration ne suffit pas; il en faut deux ou trois, ou même quatre, pour donner au sang une quantité d'oxygène suffisante. Pour bien observer cette respiration périodique, il est nécessaire de ne pas laisser l'animal se refroidir; car s’il se refroidit, on voit survenir le frisson thermique. Un chien chloralosé se comporte, à cet égard, comme. un chien chloralosé : et, quoique n'ayant plus de mouvements spontanés, il a un frisson thermique dont la force est considérable. C’est une preuve évidente, ajoutée à beaucoup d’autres, que le chloralose, paralysant l'action cérébrale des troubles nerveux supérieurs, respecte l’activité des centres bulbaires et protubérantiels qui président à la régulation thermique, soit par la respiration polypnéique, soit par le frisson. En tout cas, s’il y a frisson, la consommation d'oxygène va en augmentant, et il ne peut plus y avoir de respiration périodique. Pour bien observer la respiration périodique, il y a une condilion importante sur laquelle l’un de nous-a insisté (1); c'est le calme absolu, et le silence. Si l’on fait du bruit, si l’on marche, si l’on parle, si des portes s'ouvrent et se ferment ; chacune de ces excitations va déterminer une respiration, ou plutôt empêcher la pause respiratoire d’être pro- longée. Fait bien intéressant, car il nous prouve que l'excitation psychique peut encore être éveillée par un stimumulant réflexe, alors que cependant l’excitation psychique spontanée n'existe pas; il n’y a plus de stimulation respiratoire par les centres psychiques qui agissent spontanément; mais cescentres psychiques sont encore capables d'être misen jeu, si une cause périphérique d’excitation survient qui les met en branle. En définitive, nous pouvons concevoir, grâce à cette expérience, facile à répéter et assez nette pour être montrée comme expérience de cours: 4° Que la respiration périodique survient quand les centres nerveux supérieurs sont paralysés ; 2° Que cette paralysie des centres nerveux supérieurs n'est pas totale, (4) Pachon, Trav, du Laboratoire de physiologie de Ch. Richet, t. II, 1893, p, 130. : SÉANCE DU 11 MARS 289 EE —— "A — ———————— et ne porte, à un certain moment de l’intoxication, que sur leur sponta- néité même, alors que leur excitabilité réflexe peut-être encore mise en jeu; : 3° Que la respiration périodique est le type de la respiration bulbo-pro- tubérantielle, étant déterminée uniquement par l’automatisme de ces centres, et le défaut d'oxygène dans le sang. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX RÉGULATEURS DE LA FONCTION GLYCÉMIQUE, par MM. A. Cnauveau et KaurMaNN. (Voir Mémoires du pré- sent volume, p. 29.) SUR LA STRUCTURE DES FIBRILLES DES MUSCLES JAUNES DU DYTIQUE ET DE L'HYDROPHILE A L'ÉTAT DE REPOS, par M. F. TourNeux. L'aspect sous lequel se présentent dans les préparations microscopiques les fibrilles des muscles jaunes des insectes, varie non seulement aux différents stades (repos, stade intermédiaire, contraction) mais encore suivant le degré d’extension des fibrilles à chaque stade. L'extension exa- gérée d'une fibrille, en écartant mécaniquement les parties constituantes des segments musculaires, permet de mieux observer certains détails de structure peu apparents dans les conditions ordinaires. Nos recherches ont porté sur les muscles des ailes chez le dytique et chez l'hydrophile; ces fibrilles ont été dissociées par le procédé de la demi-dessiccation de Ranvier, et colorées ensuite à l’'hématoxyline de Bæhmer. Nous n'envisa- gerons dans cette note le segment musculaire qu'à l’état de repos. La structure des segments musculaires a été décrite et figurée par tous les observateurs : le disque large possède une teinte uniformément foncée dans toutes ses parties, on présente en son milieu une bande transversale plus claire. Sur les fibrilles étirées, facilement reconnaissables à leur tra- jet rectiligne et à la longueur plus considérable des segments, l'aspect du disque large s’est sensiblement modifié. La substance foncée ou chroma- tique (se colorant par l'hématoxyline) s'est, en grande partie, condensée en deux bandes ou stries opaques, dirigées transversalement, plus ou moins espacées, mais n’occupant plus les extrémités mêmes du disque large qui les déborde dans une étendue variable. La limite de ce disque est indiquée par une cloison transversale mince, mais nelte, que nous pros posons de désigner sous le nom de cloison limitante, pour la distinguer de la cloison terminale proprement dite, ou disque d'Amici. D'autre part, la substance moins foncée interposée aux deux bandes obscures, laisse apercevoir en son milieu, sur les fibrilles fortement étirées, une ligne transversale répondant à une cloison médiane qui divise le segment mus- 290 SOCIETÉ DE BIOLOGIE culaire en deux moitiés symétriques superposées, contenant chacune une bande obscure. Nous ignorons si cette cloison médiane admise par Merkel, mise en doute par Engelman et par Ranvier, répond à la strie décrite par Hensen dont nous n’avons pu nous procurer le mémoire : elle a élé figurée dès 1850 par Lebert (Annales des sciences natur. 1850, t. XIII, fig. 49 B). La substance du disque large interposée aux deux stries foncées, et celle qui les déborde jusqu’aux cloisons limitantes, apparaissent plus ou moins claires, selon le degré d’extensiondes fibrilles, et selon, aussi, l'inten- sité de la coloration. Tantôt ces différentes couches sont également trans- parentes, et l’on distingue neltement la cloison médiane et les cloisons limitantes, tantôt la partie médiane est plus foncée, et la cloison médiane se trouve alors effacée. Les données qui précèdent tendent à confirmer d'opinion de Mer- kel (1881) d'après laquelle les disques larges résulteraient de l’associa- tion de deux substances : l’une obscure, fixant le carmin et l’héma- toxyline (substance kinélique), et l’autre transparente (substance disdiaklastique). La structure du segment musculaire à l’état de repos, mais étiré, peut être représenté par la figure schématique ci-dessous. | Ligne de Dobie; ligne opaque (Amici); ligne de Krause; cloison transversale (Flôgel); cloison terminale (Merkel); disque mince (Ranvier); disque inter- médiaire (Frédéricq, Engelmann). Disque mince. Bande claire, intermédiaire. Bande ou strie obscure. Cloison médiane, intermédiaire — strie de Hensen. Bande ou strie obscure. Cloison limitante. Disque large, épais, opaque. Bande claire, intermédiaire. Disque mince. Segment musculaire d'une fibrille des muscles jaunes du dytique à l'état de repos Gr. ——) (extension). Lorsque la fibrille musculaire revient sur elle-même, les cloisons limi- tantes s’accolent aux bandes transversales foncées, la substance kinétique ou chromatique qui compose en majeure partie ces bandes obscures, se répand dans leur intervalle et vient masquer la cloison médiane. - Les photographies que nous avons l'honneur de soumettre à la Société de Biologie, à l'appui de cette note et d'un mémoire plus complet paru récemment dans le Journal de l'Anatomie (nov.-déc. 1892) mais ne con- cernant que le dytique, malgré leur imperfection, ne laisseront aucun doute, nous l’espérons, sur l'existence de trois cloisons transversales Hmitant et divisant le disque large en deux compartiments symétriques. CRE SÉANCE DU 11 MARS 291 DE LA GALVANOCAUSTIE INTERSTITIELLE. EXPOSÉ D'UNE NOUVELLE MÉTHODE DE THÉRAPEUTIQUE, par M. le D' Grces (de Marseille). Ï. — PRINCIPE DE LA MÉTHODE. La destruction des tissus par la chaleur, entreprise dans un but de révulsion ou d’exérèse, n’a pu se faire pendant longtemps que sur la sur- face de la peau, en une partie très limitée de certaines muqueuses ou sur les surfaces découvertes par le trauma ou le bistouri du chirurgien. On a cherché dans ces dernières années à l’aide de procédés nouveaux à déterminer des modifications substitutives ou sclérogènes dans l’inté- rieur même des tissus en agissant sur un ou plusieurs points déterminés. Laissons de côté l’action élective de certaines substances médicamenteuses absorbées par les muqueuses ou par la peau et les injections dans les séreuses qui répondent à une autre idée thérapeutique. Les voies d’ac- tion interstitielle sont actuellement : 1° Les ingections interstitielles. — Ce procédé est simple d'exécution mais il peut amener des accidents consécutifs ; il introduit des substances étrangères dans l'organisme, et s’il paraît exempt de dangers du côté des intoxications, on peut lui reprocher la douleur vive ressentie par les malades, l'eschare possible et l’antisepsie rigoureuse exigée. 2 L'électrolyse. — Ce procédé expose, lui aussi, à des eschare cuta- nées, surtout si l’on veut PECASIRE dans les lissus des modifications pro- fondes pour être durables. C’est un procédé chimique dont on est loin d’avoir épuisé les ressources. Il consiste essentiellement dans l’action des acides et des bases de l'organisme (à l’état naissant) sur les tissus voisins du point d'application : on doit ajouter aussi les effets des produits de décomposition des électrodes et des solutions préalablement injectées. La chaleur n’y entre pour rien, et les conditions d'action d’une bonne élec- trolyse comportent seulement une force électro-motrice minimum et un débit toujours insuffisant pour produire le moindre effet calorifique. Nous avons, d’ailleurs, sous l'inspiration de le M. le professeur Boinel, commencé des études sur l’électrolyse sclérogène. 3° La cataphorèse électrique ou le transport des médicaments dans cer- tains points de l'organisme par l'influence du courant galvanique. — C'est une méthode physique par définition, bien que, en fait, on use des ressources de l’électrolyse pour obtenir autant Le possible l'agent actif à l’état naissant. Il existe enfin une action trophique dite interpolaire qui est produite par le passage des courants au travers des tissus. Gette action paraît n'être ni physique, ni chimique, mais plutôt dynamique, en employant ce mot dans son acception médicale. L’électricité nous fournit un moyen de modifier les tissus én situ, dans 292 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE des points rigoureusement déterminés par le chirurgien, sans amener des lésions durables, soit dans les tissus voisins, soit dans le tégument (peau ou muqueuse). Cette modification artificielle sera rigoureusement asep- tique et antiseptique dans une aire déterminée et amènera la formation de tissus scléreux. L'agent de la lésion sera la chaleur seule, agent physique dont l’action sur les organes profonds est encore mal connue parce qu'on ne savait pas la localiser. Ce n’est plus ici un instrument aveugle comme le galvano ou le thermocautère dont la température peut varier de plusieurs cen- taines de degrés sans qu’il soit possible de lerégler, mais plutôt un ins- trument docile et la température de la portion active peut varier de la température normale à celle de la volatilisation du Dore Le principe de la méthode est celui du galvanocautère. II. —— DESCRIPTION DES INSTRUMENTS ET TECHNIQUE OPÉRATOIRE. Les instruments dont nous avons fait usage comprennent : 41° Une pile à galvanocaustique de Chardin dite à grands effets à élé- ments en tension donnant de 2 à 10 ampères; 9° Un galvanomètre médical gradué de 0 à 50 milliampères monté en dérivation sur les bornes de prise de la pile; le circuit dérivé comprend un rhéosiat sur lequel on ouvre une résistance de 200 w; 3° Le cautère comprenant quatre parties soudées ensemble : RE fire Pc SC Het GTS D OL 1e 10 ln ions dde avides Sade db DA Pose D Ce à Lune at je RER NE A RE À, une aiguille d'acier pour embrocher les tissus; B, un til de cuivre dont le diamètre peut varier entre 6 et 14/4106 de millimètre; C, un fil de platine de 3 à 8/10 de millimètre de diamètre et une longueur variant de 1/2 à 4 4/2 centimètre; D, un fil de cuivre semblable à 6. Les longueurs respectives des parties de l'instrument varient avec les organes à cautériser. Le cautère est relié à un manche par les parties b et d, une fois en place dans les tissus. Le circuit étant fermé, l'électricité rencontre dans le platine un conducteur relativement résistant, l’échauffe, se transforme en chaleur disponible. Des expériences préliminaires ont démontré : 1° Que les gaz dégagés autour du platine sont à peu près exclusivement composés de vapeur d'eau et en quantité pratiquement négligeable, bien inférieurs aux gaz produits par l’électrolyse médicale. 2° Que les courants dérivés, bien que présentant une intensité suffi- SÉANCE DU 11 MARS 293 sante pour provoquer à la fermeture des contractions musculaires dans la région soumise à l’expérience, peuvent être négligés. 3° Que l’on peut pratiquement prendre pour intensité (base de l'évalua- tion thermique) le produit de la déviation galvanométrique par la résis- tance introduite au moyen du rhéostat, soit : =: 200 >< i. Il est assez difficile de construire des instruments à soudures solides pour la galvanocaustie interstitielle. Après plusieurs essais infructueux, nous avons pu obtenir de la maison Arvel-Touvet, de Marseille, des instru- ments suffisants quoique perfectibles. La difficulté de construction de ces appareils réside en deux points : D'abord le fil de cuivre, pour ne produire qu’une perforation chirur- gicalement négligeable, ne doit pas avoir plus de 41/10° de milli- mètre de diamètre ; en deuxième lieu, les soudures sont difficiles à effectuer et elles fondent quelquefois, ce qui met une portion de l'organisme en circuit. La coupe-circuit prévient en général cet accident, mais il peut se produire quand même si la soudure est mal faite, ce qui est difficile à vérifier, la résistance à la traction ne constituant pas un élément suffisant. La technique de l’opération sera nécessairement toujours délicate et ne peut être réalisable qu'entre les mains d'un électricien, spécialiste rare dans le corps médical. Il sera intéressant de déterminer la température exacte du fil de platine dans les tissus, car il ne s’agit pas de brüler à l’aveuglette et, dans de nombreux cas, il y aurait intérêt à chauffer seulement les tissus (ané- vrismes, tumeurs vasculaires, tumeurs malignes et infectieuses). Gette méthode remplit plusieurs desiderata physiologiques et théra- peutiques ; citons parmi les premiers l’action de la chaleur sur le système nerveux, sur les sécrétions ; parmi les seconds, celle de la chaleur sur les cartilages, les liquides et, en général, tous les produits pathologiques. Ces études commencées dans notre laboratoire, exigeront de longs mois et nous serions heureux d’être aidés ou même devance dans ces recher- ches. LIL. — RÉSULTATS. Toutes nos expériences ont porté sur le lapin ou sur le chien. Dans les premières, le résultat cherché a été souvent dépassé : nous avons eu des accidents de divers ordres ; septiques par défaut de soin des instruments, dans une opération sur le poumon d’un lapin, la ponction fut faite un peu bas et la brûlure trop énergique ; l'animal mourut, cinq jours après l'opé- ration, de péritonite suraiguë : on trouva une eschare hépatique, le diaphragme perforé et une perforation stomacale récemment produite par la chute de l’eschare. Une fois, le fil de platine s’est partiellement détruit dans le testicule d’un chien; il n’en est cependant rien résulté de fâcheux ; nous sommes devenus peu à peu maîtres de nos instruments, el voiei les conclusions que nous considérons comme acquises : 294 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Première conclusion. — La galvanocaustie interstitielle donne naissance à des produits scléreux. Deuxième conclusion. — Elle est remarquablement inoffensive tant au point de vue local que général, mais elle semble douloureuse. Troisième conclusion. — Il est difficile de mesurer la chaleur produite dans le poumon à cause de l’air contenu dans les bronches. Quatrième conclusion. — Les produits de la combustion ou du chauffage (0 | t L AN $ x RE ee re op ee = Schéma de l'appareil par galvanocaustique interstitielle. P, pile génératrice. — R, rhéostat. — G, galvanomètre. — C, coupe-circuit. — Pointillé, portion en cuivre du cautère, t, trait fin, fil de platine. — M, mouche. peuvent se résorber sans laisser de traces appréciables au bout de quel- ques mois : le fait a été constaté sur les muscles et les cartilages. Cinquième conclusion. — Les cautérisations intra-articulaires sont béni- gnes et n’exigent pas l’immobilisation consécutive chez le chien et le lapin. Sixième conclusion. — Nous avons pu impunément cautériser le tes- ticule, le foie, le poumon, les muscles et les articulations. Des cautérisa- tions du muscle ventriculaire cardiaque (pointe du cœur) n’ont pas à elles seules, délerminé la mort. Septième conclusion. — Les opérations, au bout de quelque temps, ne laissent aucune trace sur les points non chauffés, excepté sur la plèvre. LA SUBSTANCE TOXIQUE QUI ENGENDRE LE TÉTANOS RÉSULTE DE L'ACTION SUR L'ORGANISME RÉCEPTEUR D'UN FERMENT SOLUBLE FABRIQUÉ PAR LE BACILLE DE NICOLAÏER, par MM. J. Courmont et M. Doxon. (Travail des laboratoires de M. Arloing et de M. Morat.) Il est actuellement surabondamment démontré que le bacille de Nico- laïer produit le tétanos à l’aide des substances solubles qu'il fabrique SÉANCE DU 11 MARS 295 Knud Faber, Brieger et Frænkel, Weyl et Kitasato, Tizzoni el Cattani, Vaillard et Vincent etc., ont tenté l'isolement et l’étude du principe télanisant contenu dans les cultures filtrées de ce microbe. Pour eux, le bacille de Nicolaïer fabrique une substance soluble, de nature albumi- noïde, se rapprochant des diastases par plusieurs caractères chimiques, mais agissant sur l'organisme comme un foxique pour produire le tétanos. Cetie substance (foxine létanique, poison létanique), engendrerait direc- tement les contractures (par son action sur les extrémités des nerfs sensi- tifs, Courmont et Doyon) et serait done comparable à la strychnine. Tel est le résumé de nos connaissances actuelles sur la pathogénie du télanos. Ajoutons que Tizzoni et Cattani, Vaillard et Vincent ont signalé dans les cultures filtrées la présence d’un véritable ferment digestif, distinct de la toxine pathogène. De très nombreuses expériences, dont nous ne donnons aujourd’hui qu'un aperçu très résumé, nous ont conduits à modifier profondément cette conception. Nous pensons pouvoir démontrer que les cultures filtrées du bacille de Nicolaïer ne contiennent pas de subslance tétani- sante, comparable à la strychnine, mais simplement un ferment soluble capable de fabriquer cette substance aux dépens de l'organisme récep- teur. Pour nous, la soi-disant toxine (poison tétanique), extraite des cultures filtrées est pathogène par son action fermentative et non par ses propriétés toxiques. Il existe toute une phase chimique, intermédiaire entre l'apparition des produits microbiens et celle des symptômes mor- bides. Une fraction de goutte de culture filtrée ne contient pas la dose de toxine suffisante à tétaniser le cobaye, mais bien la quantité de ferment suffisante pour engendrer aux dépens de l'organisme du cobaye la toxine qui produira le tétanos. Le tétanos devient ainsi le résultat d'une auto- intoxication à la suite d'une fermentation spéciale de certains tissus causée par un ferment soluble qu’a élaboré le bacille de Nicolaïer (1). I. — Nous avons été frappés de l'incubation constante et nécessaire de la maladie, chez les animaux injectés soit dans le sang, soit dans les lissus conjonctif ou musculaire avec les seuls produits solubles du bacille de Ni- colaïier. Il existe toujours une période silencieuse notable, variable sui- vant les espèces, entre l'injection et l'apparition des premiers symplômes; puis (cela est surtout remarquable chez les Solipèdes), le tétanos se géné- ralise brusquement et devient mortel parfois en quelques heures. _ Voici les moyennes de cette période d’incubation d'après nos expé- riences : (1) Arloing, Rodet et Courmont avaient supposé une action analogue de la tuberculine sur les tissus tuberculeux pour expliquer la formation d’une substance pyrétogène. 206 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE INCUBATION. Cobaye . … . -Iujecté-Sous Japeau. +... 19 à 48#heures: Papin ROME ES OUS AIO DEEE OCR 1 LE. Injecté-dansdle-Sangsiits 051: 1) 24 AFS Anes 1... 1lnjecté dans unmuscles 7 Hours? Cnen- Ph Injecté sous labeur RO DNA ON NEO Injectér dans lens CES Cheval . . . Injecté dans un muscle Her jouss Grenouille, . Injectée sous la peau . , . . . 6 à 8 jours. La contracture, phénomène réflexe, ne suivrait donc pas immédiate- ment la mise en présence de la loxine et du nerf sensitif? Nous avons ainsi été conduits à supposer que cette soi-disant toxine n’agissait pas directement et qu'il devait exister une période chimique intermédiaire entre l'injection et les contractures, pendant laquelle se formait le véri- table poison tétanique. IL fallait d’abord savoir si cette période d'incubation ne pourrail pas être supprimée par l'introduction d'emblée dans le sang de doses consi- dérables des produits bacillaires. Un chien de 15 kilogrammes reçoit progressivement et régulièrement en trois heures 358 centimètres cubes d'une culture filtrée (tuant le cobaye à des doses infinitésimales), c'est-à-dire plus de cent fois la dose suffi- sante pour le rendre tétanique après incubation. Aucun symptôme rap- pelant le tétanos ne se produit pendant l'expérience et les heures sui- vantes. L'animal, une fois détaché, ne présente rien d’anormal. Les contractures, la dyspnée, ne surviennent qu'après uneëncubation de vingt- deux heures. Un chien de 6 kilogrammes reçoit de même 200 centimètres cubes de la méme culture filtrée sans. aucun inconvénient immédiat. Z'incubation dure trois jours. IL est donc impossible de supprimer la période neue en aug- mentant les doses: La culture filtrée, introduite dans le sang, parait pendant l'expérience remarquablement dépourvue de toxicité et ne reproduit aucun des symptômes du tétanos (contractures, dyspnée, etc.). Ce n'est pas ainsi que se comportent les substances directement toxiques. II. — Fn été (28 à 30 degrés), la grenouille devient tétanique après une ineubation de six à huit jours. Zn hiver, la même injection reste sans effets. Nous n'avons pas pu, pendant l'hiver qui vient de finir, obtenir le tétanos de la grenouille en opérant comme pendant l'été de 1892. Nous passons sous silence pour le moment les expériences où nous avons chauffé artificiellement les grenouilles avant ou après l'injection. Qu'il nous suffise de mettre en lumière ce fait, intéressant à connaïtre pour ce qui va suivre; que la grenouille est réfractaire, en hiver, aux produits du bacille de Nicolaïer, et de faire remarquer combien il est difficile à expliquer si on admet une action directe de la substance bacil- laire sur la fibre nerveuse sensitive, comme origine de la contracture. SÉANCE DU 11 Mars 297 III. — Arrivons aux preuves indiscutables. On injecte dans le sang d’un chien 3 ou 4 centimètres cubes de culture filtrée de bacilles de Nicolaïer ; cet animal devient tétanique après une période d’incubation minima de vingt-quatre heures. (Le même liquide, injecté à une dose cent fois supérieure ne produit aucun symptôme immé- diat.) Lorsque l’animal est envahi par un tétanos généralisé, on transfuse d’artère à veine une partie de son sang à un autre chien neuf saigné au préalable. Zmmédiatement, ce chien transfusé accuse des symptômes téta- niques, moins intenses naturellement que ceux du premier, mais très nets : hyperexcitabilité, raideur intermittente des membres, manifeste surtout à la moindre excitation, démarche embarrassée, secousses mus- culaires. Rien de comparable ne s’observe à la suite d’une transfusion de sang normal. Ces accidents subsisient ou même s’accentuent pendant plusieurs heures, puis s’amendent progressivement pour disparaître complètement en vingt-quatre heures. IL existe donc, dans le sang de l’animal tétanique, une substance à effets tétanisants immédiats, qu’on ne retrouvait pas dans les produits du bacille de Nicolaïer. Il peut arriver que la transfusion introduise dans le corps de l'animal neuf non seulement la substance immédiatement tétanisante, mais aussi du ferment non encore employé chez le premier animal. Le transfusé présente alors trois phases successives : 1° le létanos immédiat décrit plus haut, qui cesse avec l'élimination de la substance ; 2° une période de guérison apparente on d'incubation, pendant laquelle le ferment injecté agit silencieusement; 3° une période de létanos intense, généralisé, mor- tel, le ferment fabriquant aux dépens de l'animal des doses considérables el renouvelées de substance tétanisante. IV. — Les muscles tétaniques sont plus riches que le sang en subs- tance tétanisante. Nous sommes arrivés, par un procédé spécial, à extraire des musles tétaniques du chien et du lapin, saignés ou non, une substance soluble dont les effets sont rigoureusement comparables à ceux de la stry- chnine. Si on injecte sous la peau du dos de la grenouille, en hiver (c’est-à-dire à une époque où la grenouille est réfractaire aux produits du bacille), les substances extraites de 6 ou 7 grammes de muscle lélanique, on observe immédiatement une prostration notable de l’animal. Au bout d’un quart d'heure environ, apparaissent quelques secousses musculaires, et en quelques minutes un tétanos absolu et généralisé s'établit. Ce sont exactement, dans toute leur intensité, les symptômes que présente la gre- nouille strychnisée; nous nous dispenserons de les décrire. La grenouille meurt quelquefois au bout de trois quarts d'heure environ, avec une phase ultime de paralysie, absolument comme une grenouille fortement 298 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE — strychnisée ; d'autres fois, elle survit et tous les accidents s’amendent pro- gressivement ; le lendemain, on peut encore constater de l'hyperexcita- bilité ; le surlendemain, tout est rentré dans l’ordre. Il est inutile d'ajouter que le muscle normal, traité de la même façon, fournit un extrait toxique mais sans la moindre propriété tétanisante, La substance précédente résiste à une ébulition prolongée, tandis que les produits du bacille de Nicolaïer sont détruits ou rendus inactifs par un chauffage à + 65 degrés; nous venons de voir qu'elle agit sur la gre- nouille à une température où les produits bacillaires sont inoffensifs. On remarquera enfin que son action est aussi rapide que celle de la stry- chaine (1). V. — On peut quelquefois observer chez la grenouille un tétanos 2mmé- diat, après une injection de 2 centimètres cubes d'urine d’un animal téta- nique. Conclusions. — 1° Le bacille de Nicolaïer engendre le tétanos par l'intermédiaire d’un ferment soluble qu’il fabrique. 2 Ce ferment, qui n’est pas toxique par lui-même, élabore, aux dépens de l’organisme, une substance directement tétanisante, comparable par ses effets à la strychnine. 3° Cette dernière substance se retrouve en abondance dans les muscles tétaniques; elle existe aussi dans le sang et quelquefois dans les urines. 4° Elle résiste à une ébullition prolongée, tandis que les produits bacil- laires deviennent inaclifs après un chauffage à + 65 degrés. 8° Elle exige pour se former des conditions favorables de température. Ainsi s'explique l’immunité de la grenouille en hiver vis-à-vis du ferment bacillaire. 6° L'immunité naturelle ou acquise, l’immunisation contre le tétanos peuvent être considérées comme les résultats des causes qui empêchent, ralentissent ou arrêtent la susdite fermentation. 7° Il est probable, que d’autres substances microbiennes, dites toxiques, doivent également agir comme des ferments solubles pour produire des toxiques aux dépens de l'organisme. Peut-être faudra-t-il expliquer ainsi les paralysies et autres accidents tardifs de la diphtérie. (4) Plusieurs expérimentateurs (Catterina, Kitasato, Nissen, Pestana, Brus- chettini, etc.) ont injecté avec succès des extraits de tissus d'animaux tétani- ques, mais à un point de vue bien différent. Quant à la toxalbumine retirée par Smmerwahr des muscles tétaniques, on ne sait pas si elle agit avec ou sans incubation. SÉANCECDU, 110 MARS 299 ATTÉNUATION DE LA BACTÉRIDIE PAR DES PRINCIPES MICROBIENS ; ORIGINE DE CES PRINCIPES, par MM. CuaRriN et CourRMonr. Le sang des animaux en pleine infection pyocyanique acquiert des propriétés peu favorables à l'évolution du microbe de la suppuration bleue ; il devient, suivant l'expression consacrée, bactéricide. Ces pro- priétés se manifestent-elles à l'égard d'agents pathogènes différents, à l'égard, par exemple, de la bactéridie ? Telle est la question posée. On inocule, par voie intra-veineuse, des lapins, avec le virus pyocya- nique. Après 418,20, à 30 heures, on les saigne en même temps que des sujets sains; on recueille, en s'entourant de précautions antiseptiques, le sérum des premiers comme des seconds. — Notons, incidemment, que dans le cas d'infection, au moins dans des circonstances particulières, il est parfois assez difficile d'obtenir un sérum parfaitement clair ; l'hémo- globine se mélange fréquemment à ce liquide. Dans des volumes égaux de ces sérums, on sème la même quantité de la même culture charbonneuse. La bactéridie se développe dans tous les tubes. Toutefois, dans ceux qui renferment l'humeur des animaux neufs, ces cultures sont, ordinairement, plus riches en flocons, en grumeaux plus distincts, plus nombreux, rappelant ce qui se passe dans le bouillon de bœuf. Au contraire, le liquide des malades est pius uniformément louche. Au bout d'un nombre d'heures qui varie de 10 à 24, à 48, on inocule des cobayes ou lapins, en ayant recours à ces deux genres de culture. On se place, évidemment, dans des conditions identiques de doses, de portes d'entrée, d'espèce, etc. On serve des résultats variés. Tantôt, les uns et les autres de ces sujets succombent sensiblement dans des délais pareils; tantôt, et cette donnée découle de plusieurs séries de recherches portant sur 18 animaux, 42 cobayes et 6 lapins, tantôt les êtres qui ont reçu la culture faite dans du sérum de lapins pyocyanisés ont une survie de 3 à 28 heures, sur une durée de 2, de 4, de 5 journées ; les moyennes sont de 13 heures pour cette survie, de 74 pour cetle durée lotale. À coup sûr, ces chiffres, le premier surtout, sont faibles; ces écarts se rencontrent, incidemment, sans aucune intervention ; néanmoins, ces ré- sultats sont basés sur un nombre d’expériences qui nous semble suffisant. pour légitimer une conclusion. Qu'on note, d'un côté, qu’il s’agit d’infections es rapides, aiguës ; qu’on songe, d'un autre côté, que ces principes offensifs ne sauraient posséder l'énergie de certains antiseptiques, tels que le sublimé, par exemple; dans l'hypothèse de ces antiseptiques parfaits, les cellules de l'organisme souffriraient autant et plus que les cellules parasitaires. Done, le sérum des lapins inoculés avec le bacille pyocyanogène contient 300 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE des éléments qui atténuent, dans une mesure mobile, sans jamais être excessive, la bactéridie. C’est là une notion quicadre avec les découvertes du professeur Bou- chard, établissant, avec preuves à l'appui, l'antagonisme relatif de ces deux virus, découverte vérifiée de toutes parts (Wood Head, Cartwright Wood, Freundenreich, Blagovestchensky, etc.\. D'où procèdent les matières capables d'imposer celte atténuation ? Elles peuvent, entre autres origines, dériver du microbe lui-même ou de l’économie contaminée, etc. On sait, en effet, que dans le corps de l’animal, ce bacille fabrique, comme in vitro, différents toxiques. On le sait, parce que, en injectant le sang ou les urines des sujets inoculés, on reproduit des accidents analogues à une partie de ceux qu’engendre l'introduction de la culture stérilisée. On le sait, parce que, dans les tissus, on retrouve quelquefois les pigments caractéristiques, le vert, plus rarement la pyocyanine, qui a ses cristaux, sa formule, ses réactions aussi précises que faciles. La. constatation d'un pareil élément suftirait, à elle seule (voir à cet égard l'observation de Pineau et Lesage, Soc. anat., févr., mars, 1893), pour éta- blir, d’une façon irréfutable, l'intervention directe de l'agent pathogène, Dans le cas du bacille pyocyanique, nul n’ignore que la diarrhée, l’enté- rite, la mort, etc., peuvent être provoquées de suite, sans incubation, avec des degrés proportionnels aux doses. Toutefois, la rigueur de cette démonstration est inférieure à celle de la précédente; l'isolement de la pyocyanine, à la fois dans le bouillon, sur l’agar et dans l’économie, constitue la preuve la plus péremptoire que l’on possède du phénomène de la sécrétion de substances chimiques, chez les êtres envahis, par les agents envahisseurs; la valeur de cet argument dépasse celle de la reproduction des lésions, des symptômes, par l'injection des urines des lapins infectés, injection que nous avons rappelée. On sait, également, que la bactérie du pus bleu ou ses sécrétions incitent les tissus à créer de nouveaux principes, en particulier des prin- cipes microbicides, principes qui: ne découlent pas en ligne droite de l'infiniment petit ou de ses toxines, attendu que leur apparition n'est pas en raison des quantités qui pénètrent, attendu que leur formation exige un certain temps, attendu que leurs propriétés chimiques ou physiques diffèrent de celles des cultures, attendu que la transfusion les transmet sans relard. On sait encore que les cellules organiques lésées, analomiquement ou fonctionnellement, donnent lieu à des troubles d’auto-intoxication, à des modifications humorales (lymphe plus abondante, albuminurie, entérite, oxygène moindre, etc.), et cela à une époque où microbes et toxines ont disparu. Il a fallu une durée voulue pour perturber ces éléments ; leur perturbation se poursuit au delà de l'application du facteur. Ainsi évolue la sclérose, alors qu’on a cessé d'introduire du plomb ou de l'alcool. SÉANCE DU 11 Mars 301 Telles sont les sources possibles des matières qui altèrent le sérum et font de lui un liquide offensif pour la bactéridie. Or, d’un côté, il a été mis en évidence par le professeur Bouchard, que les propriétés bactéricides, autrement dit, que les propriétés engendrées par l’économie soumise à l'influence des agents pathogènes ou de leurs sécrétions exigeaient une durée de trois jours au moins pour devenir manifestes. — Cette durée est plus grande encore, si l’on s'adresse aux poisons qui sont la conséquence des désordres cellulaires. Comme, d’un autre côté, la modification étudiée est réelle dès la première journée, il en résulle qu'il est permis, pour une part, sinon pour sa totalité, de l’attribuer à l’action personnelle des germes. En faveur de celte hypothèse, il est possible de rappeler les recherches de Guignard et Charrin, recherches montrant que les produits du microbe du pus bleu atténuent, in vitro, la bactéridie charbonneuse ; ils influen- cent sa forme, sa pullulalion, sa virulence, etc. | Il est, en outre, légitime d’invoquer parmi les facteurs possibles qui tous ne peuvent être passés en revue, la concurrence vitale, la disparition des aliments nécessaires, etc. MORPHOLOGIE COMPARÉE DE L'OS CARRÉ, par M. Remy Saint-Loup. (Travaux de l'Ecole pratique des Hautes-Etudes. — Anatomie comparée.) L'absence d’un os carré différencié dans le crâne des mammifères a provoqué parmi les anatomistes et les embryologistes plus d'une tenta- tive d'explication, mais il ne semble pas que jusqu'ici, une solution satis- faisante ait été proposée. C’est toujours en vertu des lois des connexions que, dans les divers systèmes d'homologation, telle ou telle autre pièce osseuse du crâne a été considérée comme représentant l'os carré; il faut donc que, quelquefois, cette loi ait été mal comprise ou mal appliquée. Nous voyons, en effet dans le système d'Huxley que l'os carré est repré- senté par l’enclume, et cela en raison des rapports de l’enclume avec le carlilage de Meckel. MM. Pouchet et Beauregard, dans leur traité d'ostéologie comparée, désignent l'opinion par laquelle l’os carré est représenté par le marteau. Dans le système de Hertwig qui se prononce après examen des travaux de Salinsky, de Gradenigo, de Rabl, l'expression os carré est synonyme de palato-carré de sélacien; palato-carré de sélacien est représenté par une pièce de l’oreilie des mammifères. La difficulté est tournée assez habilement, mais la morphologie comparée ne gagne pas en clarté. Les anciens travaux de Geoffroy Saint-Hilaire conduisaient à entendre sous le nom d'os carré une pièce formée de la fusion de l'os tympanique 302 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE et de l’apophyse styloïde. Cette interprétation, abandonnée comme celles de Cuvier et d'Owen, était moins tourmentée que les précéilentes; elle a été rejetée surtout en raison de ce fait que les observateurs plus modernes, connaissant les méthodes embryologiques et leurs ressources, sont consi- dérés comme plus experts. Or l'objection principale opposée à l'explication des anciens anato- mistes, a été formulée ainsi : « Les formes de passage entre le cadre tympanique et l’os carré font réellement défaut; aussi ne faut-il pas s'étonner qu'on ail cherché autre chose. » Cette objection a du moins l'avantage de signaler le point faible des anciennes théories; mais si les formes de passage ne sont pas signalées, ne doit-on pas les chercher? Si la connaissance du développement embryonnaire peut servir à la démonsiration du processus ontogénétique de la structure définie, elle ne peut suffire à la démonstration du processus philogénétique et la mor- phologie comparée est aussi nécessaire. Considérons l'os carré chez les Sauriens. Nous voyons chez le Varran latéralement et à l'arrière du crâne un os nettement différencié et qui, altaché d’une part à la région occipitale est lié d'autre part à la mâchoire inférieure. Quelles sont les connexions de cet os? En haut il touche un pilier formé de trois éléments qui appartiennent d'avant en arrière au quadrato-jugal, au squamosal et à l’occipital. Son bord externe soutient la membrane du tympan qui, en arrière, est tendue par des ligaments auxquels se retient aussi l'hyoïde (corne styloïdienne). Chez Uromastryx, nous trouvons le même os avec les mêmes rapports, seulement il a pris une dimension externe-interne plus considérable, il commence à former la paroi antérieure, d’une chambre située derrière le tympan. Chez le Gecko l'os carré se développe en une pièce plus incurvée, d’une dimension interne-externe plus considérable que précédemment et formant une portion plus importante de la chambre tympanique. Dans les trois cas précédents, l'os carré prend en même temps des rapports de contact avec l'extrémité postérieure des ptérigoïdes. Chéloniens. Chez Testudo Virginiana, l'os carré prend la forme d'un cornet incomplet dont le bord externe figure un demi-cercle, la pointe du cornet est interne, la paroi d'arrière est membraneuse. Le demi-cercle osseux du cornet et le bord de la portion membraneuse supportent le tympan. Les rapports sont toujours avec le quadralo-jugal, le squamosal et par son intermédiaire avec l'occipital, d’autre part avec le maxillaire inférieure et le ptérigoïde. Chez Podocnemis expensus, au lieu d’un demi-cercle osseux, tout le cercle tympanal s’est ossifié, le cornet est complet, sa cavité forme la chambre tympanique de manière que l’os carré constitue à la fois un cadre du tympan, un support du maxillaire inférieur et une chambre SÉANCE DU 11 Mars 303 tympanique. Quand à l'arc styloïde, il prend des rapports plus ou moins internes avec cet os carré, suivant que les branches hyoïdiennes à leurs extrémités vertébrales sont plus ou moins éloignées les unes des autres. . I ya donc des formes de passage entre l’état d’un os carré cranio- maxillaire simple et un os carré représentant, comme le voulait Cuvier, un cercle tympanique, comme le voulait Geoffroy Saint-Hilaire une réunion du tympanique avec l’apophyse styloïde, mais ceci à la condi- tion que l'arc hyoïdien se soit assez rapproché du suspensorium de la mâchoire pour que les formations osseuses aient réuni en un seul groupe les ébauches primordiales de l'arc maxillaire et de l'arc styloïdien. Remarquons, en outre, que par suite des rapports de l'os carré chez les Chéloniens et de la tendance du quadrato-jugal à prendre contact avec l'articulation du maxillaire inférieur, nous sommes conduits à considérer l’apophyse zygomatique des mammifères comme un quadrato-jugal. Il y a donc là encore une forme de passage entre l'articulation du maxillaire inférieure avec le carré et son articulation avec le lemporal, qui n'est autre qu'un quadrato-jugal uni au squamosal. IL nous reste à exposer avant de formuler des conclusions générales, dans une prochaine communication, les comparaisons avec les pièces hyomaudibulaires des Sélaciens el des Batraciens. DE LA TACHYCARDIE SYMPTOMATIQUE DANS LE COURS DE LA TUBERCULOSE, par M. FERNAND BEZANCON. J'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie deux observations P de tachycardie symptomatique dans le cours de la tuberculose, Dans ces deux cas, la cause de la tachycardie était une compression du pneumo- y gastrique par des ganglions tuberculeux. Voici ces deux observations résumées : Dans Le premier de ces cas, observé dans le service de M. Dreyfus-Brisac, à l'hôpital Laënnec, il s'agissait d’une fillette de seize ans, chez laquelle la tu- berculose évolua en trois mois environ. La malade avait une fièvre modérée, mais le pouls n’était nullement en rapport avec la température, oscillant entre 160 et 140 pulsations. Les battements du cœur étaient assez vigoureux, le pouls très faible, très difficilement perceptible, pas d’arythmie, pas de bruits orificiels. A l’autopsie, à côté des lésions banales de bronchopneumonie tuberculeuse, on constata une adénopathie trachéo-bronchique considérable, des ganglions enserraient les divers organes du médiastin et en particulier les pneumogas- triques, qui sur un point étaient aplatis et unis intimement aux ganglions. Dans le deuxième de ces cas, observé dans le service de M. Faisans, à l'hôpital de la Pitié, il s'agissait d'une femme de trente-trois ans, atteinte de tubercu- lose pulmonaire chronique, sans emphysème concomitant. . Cette malade, qui avait tout à fait le faciès d'une cardiaque, était en proie à une dyspnée intense; le pouls quoique la malade n'eût pas de fièvre, battait 10. 304 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 140 à 150 fois par minute; il n'y avait pas de lésions appréciables d’orifice, la malade mourut en asystolie, ayant présenté dans les derniers moments le type d'un cardiaque à la dernière période. | Il y avait à côté de lésions tuberculeuses banales, de l'adénopathie trachéo- bronchique, avec compression du pneumogastrique gauche dont les fibres étaient atteintes de névrite parenchymateuse. Ces deux cas nous ont paru devoir être rapportés, car la pathogénie de la tachycardie symptomatique de la tuberculose n’est pas encore bien établie. Nos observations doivent êlre rapprochées de celles de Peter (France méd., 1887), de Proebsting, 1882, de Merklen {Société méd. des H6p.,1881), de Jouanneau (Thèse, 1890), de Luzet (Revue de méd., 1891). Dans ces différents cas, la tachycardie notée pendant la vie a été expli- quée, à l’autopsie, par des compressions du pneumogastrique dues à des ganglions dégénérés tuberculeux. Dans les cas où l’on ne trouve pas de compression nerveuse, on en est réduit à des hypothèses pour expliquer la tachycardie. Parmi ces hypothèses, il faut citer celle de Klippel qui, dans sa Thèse, attribue la tachycardie à l’excitabilité exagérée du myocarde, comparable à l'hyperexcitabilité trouvée dans les autres muscles, et qu'il appelle réaction de débilité des muscles. Il faut aussi citer l’opinion de Marfan dans le nouveau traité de méde- cine, attribuant cette tachycardie à des compressions des voies aériennes et invoquant à ce propos la loi de Marey. « Si l’on respire par un tube étroit, les rapports des battements du cœur et des mouvements respira- toires changent, la respiration devient plus rare, et les battements du cœur deviennent plus fréquents. Enfin nous nous demandons si l'on ne doit pas faire jouer aussi un rôle, à la névrite du pneumogastrique due soit à la tuberculose, soit aux toxines d'infection secondaire si fréquentes chez les tuberculeux. Pitres et Vaillard, dans leur étude sur les névrites périphériques chez les tuberculeux, signalent sans y insister la névrite du pneumogastrique ; cependant parmi les observations citées, il en est une de Vierhordt dans laquelle, à côté des phénomènes de tachycardie notés pendant la vie, l’auteur a trouvé à l'autopsie des lésions de névrite parenchymateuse du pneumogastrique. ACTION PHYSIOLOGIQUE DE LA MORPHINE CHEZ LES BOVINS, par M. L. Guinarp. (Travail du laboratoire de M. Arloing.) Dans un travail antérieur (1), nous avons établi que la morphine, loin d’être un calmant et un hypnotique pour le chat, est, au contraire un (1) L. Guinard. Action de la morphine chez le chat. Comptes rendus, décem- bre 1890. SÉANCE DU 11 MARS 305 EEE RTS excitant des plus remarquables de cet animal. Dans l’étude détaillée que nous avons faite de cette particularité, nous avons annoncé que celte exception n'était pas unique, et que dans la série des animaux domes- tiques, on pouvait en trouver d’autres pour lesquels le principal alcaloïde de l'opium, manifestait encore des propriétés différentes de celles qui lui sont communément reconnues (1).. Depuis plus de trois ans, nous poursuivons ces études presque sans interruption, les généralisant sur un grand nombre d'animaux, et nous sommes à peu près arrivés au terme d’un travail de physiologie com- parée dont les considérations générales pourront avoir quelque intérèl. Si nous avons ainsi multiplié les expériences, c'est que, nous trouvant dans l'obligation de modifier beaucoup la physiologie d’une substance, qu'un grand nombre d'auteurs ont considérée comme calmante et narco- tique pour toutes les espèces (2), nous avons tenu à présenter des faits bien acquis et non des particularités justiciables de la grande loi d'indi- vidualité et de l’idiosyncrasie physiologique. Nous publierons d'abord les faits, tels que nous les avons observés, nous réservant ensuite d'en reprendre quelques détails et d'en tirer les déductions qu'ils comportent, embrassant même l'action de la morphine chez les animaux qu'elle fait dormir. Chez les bovins de race, de taille et d'âge assez différents, nous avons injecté des doses très diverses de chlorhydrate de morphine, et jamais, à quelque moment que ce soit, nous n’avons pu saisir une phase de narcose opiacée, analogue à celle que l’on étudie si facilement chez le chien. Nous avons toujours vu se succéder l'ivresse agitante et l’agitation avec hyperexcitabilité, durant un temps proportionnel aux doses. Quand les animaux ont présenté du calme, c'était seulement neuf ou dix heures après le début de l'expérience, quelquefois plus; encore ce calme ne res- semblait-il en rien à celui que l’on est convenu de qualifier de sommeil opiacé. J'aurai, d’ailleurs, à m'expliquer plus tard sur les contradictions qui semblent exister entre ce que j'ai vu et ce qu'ont cru voir quelques auteurs vétérinaires, qui se sont mépris sur des apparences de sommeil dont les caractères essentiels étaient mal choisis. D'ailleurs, même dans l'opinion des thérapeutistes vétérinaires, on trouve des désaccords nombreux et le pressentiment non équivoque des faits que nous avons étudiés (3). A titre d’exemple, nous résumerons ici trois de nos expériences ; toutes les autres leur ressemblent plus ou moins et diffèrent seulement par l'intensité des symptômes, qui varient naturellement avec les doses administrées. (1) L. Guinard. Étude du morphinisme aigu et chronique chez le Chat, in Lyon médical, 1891. (2) Dictionnaire de thérapeutique, article « Opium », t. IV, 44, 1889. {3) Kaufmann. Traité de thérapeutique et de matière médicale vétérinaires. 306 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE A. — Bouvillon de 95 kilogrammes, en parfait état de santé ; injection hypodermique de 0,40 centigrammes de chlorhydrate de morphine. Vingt à vingt-cinq minutes après, des mâchonnements réitérés, avec salivation, apparaissent, suivis rapidement de phénomènes de surexcitation non douteux ; l'animal ne peut rester en repos et piétine sans cesse, montrant cependant une certaine raideur dans ses mouvements. L’agitation a persisté pendant plus de huit heures, paraissant seulement diminuer par suite de l’affaiblissement du sujet, qui, cependant, n'avait en rien la phy- sionomie somnolente. Le lendemain, cet animal était calme, triste, indif- férent aux excitations; il était comme abruti, mais non endormi. B. — Génisse de 186 kilogrammes; injection de A gr. 50 de chlorhy- drate de morphine. L'agitation déterminée a été à son comble, la bête était comme folle, se déplaçait constamment, entraînée dans un mouve- ment de va-et-vient désordonné devant sa mangeoire, contre laquelle elle se frottait au point de s’excorier la peau. Toutes les fonctions étaient accélérées ; la salive et les larmes coulaient abondamment et cet état de surexcilation a duré ainsi plus de onze heures. Quand nous avons quitté le laboratoire il persistait encore. C. — Deux jours après, sur cette même génisse, nous sommes allé jusqu’à 2 gr. 50. Nous avons vu alors apparaître, comme complément des symptômes précédents, qui n’ont pas fait défaut, des tremblements mus- culaires avec affaiblissement du train de derrière. Pendant ce temps, la bête se débattait avec une violence telle, que nous avons cru avoir atteint la dose mortelle. Cependant, nous l’avons retrouvée, le lendemain de l'expérience, encore un peu excitée, maïs assez bien rétablie, quoique paraissant manifestement fatiguée. | À ceux qui pourraient nous objecter que nous nous sommes servi de doses trop fortes, nous répondrons qu’à différentes reprises, sur quatre animaux pesant de 250 à 400 kilogrammes, nous avons injecté des doses variant entre 10 centigrammes et 20 centigrammes de chlorhydrate de morphine, et n’avons déterminé chez eux qu’un peu d’excitation ou sim- plement de l’horripilation, avec hypersécrétion salivaire et lacrymale. Quand on atteint 5 ou 6 grammes, on voit les effets précédents s'exagérer promptement et l'animal mourir dans une crise convulsive. Jusqu'ici, jé n’ai rapporté que des faits de simple observation, dans une prochaine note j’exposerai les résultats qui m'ont été fournis par l'emploi de méthodes d'investigation physiologique plus rigoureuses. Le Gérant : G. Masson. > Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marerneux, directeur, 1, rue Cassette. Pr - G a > 307 SIEAINICIE D UNIS MARS 118958 M. Browx-Séquaro : Remarques sur l’innocuité du liquide testiculaire, — M. Rocer : * Action de la bactéridie charbonneuse sur le lait: — M. Laveran : Au sujet de l'hématozoaire du paludisme. — MA. les Drs MariNesco et PAUL SÉRIEUX : Sur un cas de lésion traumatique du trijumeau et du facial, avec troubles trophiques consécutifs — M. le D' Bzarzor : Toxicité et emploi thérapeutique du fluorure de sodium. — M. Cnarrin : Variations microbiennes. — MM. Cnarnin et Device : Nerfs et microbes. — MM. Noëz HaLré et A. Dissarp : Note sur la culture du bacterium coli dans l’urine (Fermentation coli-bacillaire). — M. J. Grrone : Charbon humain inoculé par une brosse. — MM. A. Gizgerr et G. Lion : Contribution à l'étude des bactéries intestinales (Mémoires). — M. Maurice Artuaus : Sur les caséines et les fibrines. — M. G. Neumann : Note préliminaire sur le Psorergates simplex, aca- rien parasite de la Souris. Présidence de M. Chauveau. CORRESPONDANCE MANUSCRITE S. À. ALBERT, prince de Monaco, remercie la Société de l’avoir élu Membre honoraire. REMARQUES SUR L'INNOCUITÉ DU LIQUIDE TESTICU:AIRE, par M. BROwN-SÉQUARD. M. Aimé Guinard a fait à la Société, le 4 mars dernier (Voy. Comptes rendus, p. 261}, une communication extrêmement digne d’attention à plusieurs égards. En premier lieu, tout en blâmant vivement ce chirurgien d’avoir violé une des principales règles relatives aux injections de matières organiques, règle qu’il connaissait parfaitement, je le remercie et je le félicite d’avoir eu le courage et l'honnêteté de venir publiquement s’accuser de s'être servi d’un liquide trouble et qu'il savait pouvoir produire, conséquem- ment, des effets extrêmement graves, sinon même meurtriers. Après avoir fait une injection de liquide testiculaire trouble, chez un malade, il a constaté l'apparition d’une hémiparésie très accentuée, accompagnée d'aphasie. Une expérience faite par M. Roger ayant montré que le même liquide a rapidement produit la mort d'un cobaye, nous n'avons guère Brorocie. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. A1 308 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE besoin de discuter la question de savoir s’il y a eu, chez le malade de M. Guinard, simple coïncidence d’un état morbide du cerveau, dû à une autre cause que l'injection, ou si c’est celle-ci qui a produit la paralysie. Toutes les probabilités sont du côté de cette dernière supposition. L'usage des injections de liquide testiculaire est devenu tellement géné- ral que je crois devoir redire ici, avee M. Guinard, qui l’a si honorable- ment avoué, que c’est lui et non ce liquide qui a été coupable. Répétant ce que M. d’Arsonval et moi avons constamment ait, ce chirurgien fait la déclaration suivante : « Je veux seulement appeler l'attention des prati- ciens sur les dangers qu'il peut y avoir à s’écarter des recommandations de M. d'Arsonval, et, en particulier, à ne pas s'assurer que le liquide est d'une limpidité absolue. » En second lieu, il importe de montrer à l’aide de la Note de ce chirur- gien que, sur des points moins importants, il a aussi violé nos règles. Ainsi, nous avons dit (et le feuillet imprimé qui accompagne les flacons le montre) que les injections doivent être faites à l'abdomen, entre les épaules ou aux fesses, pour éviter des douleurs souvent assez vives, et je vois que M. Guinard a fait son injection au bras. En outre, nous avons dit et répété que les injections doivent être faites tous les jours ou au moins très souvent chaque semaine et que au moins de 25 à 30 grammes de liquide doivent être employés en sept ou huit jours. Enfin, nous avons insisté sur cette importante particularité que, même lorsque le liquide est injecté tous les jours et à dose considérable, il peut ne produire aucun effet favorable même durant les quatre premières semaines de traitement, ou même un temps encore plus long. Or, M. Guinard n’a fait aucune attention à tout cela. En effet, c'est le même flacon qui lui a servi à faire des injections chez trois malades successivement. Il dit (p. 261) que le flacon employé pour le malade qui a couru de si grands dangers, lui avait servi, deux mois auparavant, sur un autre malade et (p. 262) lui avait encore servi quinze jours auparavant aussi sur un autre malade. [l dit, à propos du premier de ces trois malades, que « les injections n’ont produit aucun effet, ni en bien, ni en mal ». Cela montre bien que le liquide sorti du Laboratoire du Collège de France n'était pas primutive- ment impur, mais cela montre aussi que le chirurgien qui s’en servait ne savait pas ni à quelles doses, ni combien de temps il faut l'employer pour arriver à être sûr qu’il n’est pas capable de produire de bons effets. * Je saisis cette occasion pour dire que, malgré les efforts de M. d’Ar- sonval et les miens, l'ignorance dont M. Guinard donne de si claires preuves, dans sa communication à la Société, est partagée par l'immense majorité des médecins et même des plus éminents, qui emploient le liquide testiculaire. Ainsi, par exemple, à Marseille, où des praticiens, en nombre considérable, font usage de ce liquide, leurs injections ne sont faites que deux ou trois fois par semaine et à la dose insignifiante de 50 centigrammes à À gramme. SÉANCE DU 18 MARS 309 a ERREEEREEEE—— On emploie de si faibles doses parce qu’on considère le liquide comme capable de produire des effets toxiques ou au moins excitants. Or, il est si peu toxique que j'ai pu, en vingt-quatre ou vingt-cinq heures et dans nombre de cas, injecter impunément, sur de petits animaux, jusqu'au huitième ou dixième de leur poids de liquide, non glycériné, ce qui équi- vaut, pour un homme de 60 kilogrammes, à une quantité de 5 à 6 mille grammes par jour. Après son entrée dans le sang, le liquide n'excile aucune partie du système nerveux, excepté chez des individus à l’état morbide. L'innocuité du liquide testiculaire pur est donc absolue, et si l'on doit, avec la préparation faile par M. d’Arsonval, ne pas employer plus de 10, 12 ou 45 grammes par jour, c'est d’abord parce que des doses quotidiennes de 2 à 10 grammes (1) suffisent presque toujours et ensuite parce que la glycérine, à doses plus grandes, pourrait, comme l’a bien montré Bou- chard, produire des effets nuisibles, ACTION DE LA BACTÉRIDIE CHARBONNEUSE SUR LE LAIT, par M. RoGer. Parmi les microbes qui sont capables de coaguler le lait, les uns aci- difient ce milieu, les autres le laissent neutre, d’autres le rendent alcalin. Cette dernière éventualité est réalisée par la bactéridie charbonneuse. Si l’on prend un tube à essai, si l’on y verse 15 ou 20 centimètres cubes de lait et qu'on y sème la bactéridie, on constate qu’au bout de deux ou trois jours, le lait est transformé en une masse solide, grume- leuse, occupant le fond du tube et surmontée d’un liquide clair, incolore, fortement alcalin. Les jours suivants, le coagulum se tasse iégèrement et la quantité de sérum augmente un peu; mais l’aspect reste le même. Or, si l'on répète l'expérience en modifiant la forme du vase dans lequel on opère, on observe des faits bien différents. Supposons qu'au lieu de tubes, on se serve de ballons triangulaires à fond plat, comme ceux qu’on emploie journellement pour cultiver les microbes ; on y introduit 15 ou 20 centimètres cubes de lait et on y sème la bactéridie charbonneuse, Dans ces conditions, la coagulation ne se produit pas; le lait reste liquide, quelle que soit la durée de l'expérience; (4) Cependant le liquide à une telle puissance que quelques malades ont eu des effets favorables même avec une dose de 50 centigrammes, deux fois par jour. C’est ce qui a été quelquefois observé, à ma connaissance personnelle, à Paris, à Marseille et à Londres, surtout dans des cas d’ataxie locomotrice, cas qui, au contraire, réclament en général plus de liquide que la plupart des autres maladies. 9310 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE seulement il se modifie profondément ; il se transforme en un liquide trouble d’un jaune brunâtre. On est donc conduit à cette première conclusion : la bactéridie coagule le lait, quand il est contenu dans un tube; elle ne se coagule pas, quand il est contenu dans un ballon ; dans le premier cas, le coagulum est sur- monté d’un liquide séreux, clair, incolore ; dans le deuxième cas, le lait ‘se transforme dans sa totalité en un liquide jaune brun. Il est facile de saisir la cause de celte différence : quand le lait se trouve dans un tube, l’air n’est en contact qu'avec une petite surface du liquide, c'est-à-dire avec un cercle ayant 1 cent. 5 de diamètre; il ne peut parvenir dans les partiesiprofondes ; quand le lait est dans un ballon, il forme une couche fort mince n’atteignant pas un centimèlre, etse trouve répandu sur une large surface, abondamment aérée. C’est done à une différence dans l’aération qu'il faut rapporter la différenee dans les ré- sultats. En effet, si on augmente la quantité de lait contenue dans le ballon, on voit que lorsque la couche de liquide atteint une hauteur de 4 ou 5 centimètres, la coagulation se produit, au moins partiellement, dans les parties profondes ; à mesure qu’on élève le niveau du liquide, le coagulum est plus abondant; mais le sérum qui le surmonte est toujours jaune, ce qui lient à l’action de l'air s’exerçant sur une large surface. Qu'on diminue le diamètre du ballon, le liquide surnageant sera de moins en moins coloré, jusqu'à devenir complètement incolore. On obtient donc facilement tous les é'ats intermédiaires entre la coa- gulation du lait et sa transformation en un liquide jaune brun : il suffit de faire varier l'apport de l'air. Reste à savoir pourquoi l’air atmosphérique empêche la bactéridie de coaguler le lait; cette question ne peut être résolue que si l’on sait par quel procédé la coagulation peut se produire dans un tube. La coagulation du lait ayant lieu dans un milieu alcalin, on est conduit à admettre qu’elle est due à un ferment soluble, à une présure micro- bienne. Pour vérifier cette hypothèse, il fallait reprendre le lait coagulé e le faire agir sur un nouvel échantillon de lait en empêchant le dévelop- pement des microbes. Après bien des essais, j'ai reconnu que le meilleur procédé consistait à additionner le lait d’un antiseptique; j'ai été conduit à donner la préférence au naphtol B qui s’oppose à toute végétation microbienne et n’entrave nullement l’action du ferment soluble. Voici comment j'opère : le lait coagulé est additionné de naphtol qu’on lui mélange intimement; le tout est jeté sur un filtre en papier : le liquide qui passe est recueilli; on en verse une petite quantité dans du lait préa- lablement additionné de naphtol et on place à l’étuve, le lendemain la coagulation est complète; avec À centimètre cube du liquide filtré, on peut amener la coagulation de 30 centimètres cubes de lait. Il est évident qu'il faut toujours s'assurer, par l'examen microscopique, que le milieu est resté stérile. : SÉANCE DU 18 MARS 311 . Puisque la coagulation du lait est due à une zymase, on est conduit à supposer que cette zymase ne se produit pas quand le lait reste liquide, c’est-à-dire quand la culture est faite dans un milieu largement aéré. Cette hypothèse, fort simple, n’est pas exacte : si l’on prend le liquide qui ne s’est pas coagulé, si on le fait agir comme précédemment sur du lait naphtolé, on constate qu'il possède le même pouvoir coagulant et le possède au même degré. Le ferment existe donc dans ce liquide; j'ajou- terai que son action n’est pas entravée par le contact de l’air; car, con- trairement au microbe vivant, il produit la coagulation aussi facilement dans les ballons et dans les tubes, en présence ou en l’absence d'oxygène. Il est également impossible d'attribuer la transformation du lait à une caséase qui s'attaquerait à la caséine et masquerait ainsi l'action de la présure ; si cette caséase existait en quantité suffisante pour produire un pareil effet, son influence devrait se faire sentir quand on transporte le liquide dans du lait naphlolé; au lieu de se coaguler, la caséine serait digérée, à moins d'admettre que le naphtol empêche l’action de la ca séase sans entraver celle de la présure. Mais il est plus rationnel de supposer que la différence dans les résul- tats tient à l’activité différente de la bactéridie, suivant les milieux dans lesquels elle végète. Plus le liquide est aéré, plus la bactéridie se déve- loppe abondamment, plus sa vitalité est grande ; elle s'attaque alors à la caséine du lait, la fait servir à sa nutrition et la transforme en une subs- tance nouvelle; le ferment a beau être sécrété, il ne peut agir sur les produits de la digestion de la caséine. Ce qui confirme cette hypothèse, c'est que le lait, où a vécu la bactéridie, ne contient plus que des traces de caséine ; puisque celle-ci ne s’est pas coagulée, il faut bien admettre qu’elle s’est transformée. Quand à la petite quantité de caséine qui se retrouve encore dans le liquide, on ne doit pas s’étonner de sa présence. Si l’on reprend du lait coagulé soit par la bactéridie vivante, soit par la présure bactéridienne, si on filtre, on constate que le liquide qui passe contient également des traces de caséine; dans tous les cas, l'addition d'acide acétique à froid détermine un trouble facilement appréciable ; il y a donc toujours une petite quantité de caséine qui échappe à l’action de la présure. En résumé, la bactéridie charbonneuse sécrète un ferment qui coagule la caséine ; l’action de ce ferment n’est manifeste que si la culture est faite dans un tube contenant assez de liquide pour que l’air ne puisse parvenir aux couches inférieures ; la bactéridie végète à la surface et le ferment qu'elle produit diffuse vers les parties profondes dont il amène la - coagulation, Si le lait est disposé sur une couche mince, la bactéridie se développe dans toute la hauteur du liquide, et consomme la caséine : le ferment est sécrété, mais il ne peut agir; au lieu de se coaguler le lait se transforme en un liquide jaune brun. -Puisqu'il suffit de faire varier la forme d’un vase ou la quantité de 912 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE liquide employée pour observer des phénomènes tout à fait différents, on conçoit à quels résultats discordants on aurait pu être conduit en étu- diant l’action de la bactéridie sur le lait. Des expérimentateurs qui se seraient placés dans des conditions en apparence identiques, auraient pu observer des faits complètement dissemblables. Il est probable que bien des contradictions doivent tenir à des causes aussi légères. AU SUJET DE L'HÉMATOZOAIRE DU PALUDISME, par M. LAVERAN, Professeur à l'École du Val-de-Grâce. M. le D'F. Fajardo, assistant de clinique à la Faculté de médecine de Rio-Janeiro, m’a envoyé récemment des préparations du sang recueilli à Rio-Janeiro sur des malades atteints de différentes formes du palu- disme. Le sang desséché avec soin avait été coloré par l’éosine et le bleu de méthylène, puis monté dans le baume, ce qui constitue la meilleure technique pour la conservation du sang palustre et pour la coloration des hématozoaires. J'ai examiné ces préparations et j'ai constaté, dans la plupart d’entre elles, la présence des parasites caractéristiques du palu- disme. Ces hématozoaires, d’origine brésilienne, ne diffèrent en rien de ceux que l’on trouve chez les malades qui ont contracté la fièvre en Algé- rie ou en Italie, par exemple; ils se présentent avec les deux formes prin- cipales que j'ai décrites sous les noms de corps sphériques et de corps en croissant. En même temps que ces préparations, M. le D' Fajardo m'adres- sait un résumé des observations des malades ayant fourni le sang; je crois inutile de reproduire ici ces observalions qui ne présentent aucune parti- cularité remarquable. L’'hématozoaire du paludisme a été observé, aujourd'hui, sur un si grand nombre de points du globe, qu’on est autorisé à admettre qu'il existe par- tout où règne le paludisme; mais des faits précis étant toujours préfé- rables aux inductions les plus légitimes, il m’a paru intéressant de cons- tater que cet hématozoaire avait été retrouvé au Brésil et que les prépara- tions de M. le D' Fajardo ne laissaient aucun doute sur l'exactitude de ses observations. 4 Je rappellerai que l'existence de l’hématozoaire du paludisme avait été constatée déjà sur un grand nombre de points des deux Amériques. Sternberg, Councilman, W. Osler ont retrouvé ce parasite aux États- Unis et ont publié, dès 1886 et 1887, de très intéressants travaux à son sujet; James et Dock ont fait la même constatation; M. le Dr Allen Smith, professeur de pathologie à l’Université de Galveston (Texas), m'écrivait récemment que depuis 1885 il avait réussi à retrouver mon hémalozoaire. PSP SÉANCE DU 18. MARS 313 M. le D' A. Matienzo, sous-directeur de l'hôpital militaire de Tampico (Mexique), a publié l'an dernier un travail dans lequel l'hématozoaire du paludisme est très bien décrit et figuré sous ses différents aspects ; M. le D’ Matienzo dit avoir retrouvé l’hématozoaire chez tous les malades atteints de fièvre palustre qu’il a examinés à Tampico. (Æ'xiste el hematozoario de Laveran en la Sangre de los paludicos en Tampico. Mexico, 1892.) A Cuba, MM. les D" E. Morado et T. Coronado ont publié des travaux importants sur le même sujet, et la recherche de l’hématozoaire du palu- disme est pratiquée couramment depuis plusieurs années par ces obser- vateurs, dans les cas où le diagnostic des fièvre palustres présente quelque difficulté. M. le D' E. Canton, professeur à la Faculté de médecine de Buenos- Ayres a constaté l'existence de l’hématozoaire chez les palustres de la République Argentine. (ZT hematozoario del Paludismo, in Annales du _ Cercle médical Argentin, Buenos-Ayres, 1892.) SUR UN CAS DE LÉSION TRAUMATIQUE DU TRIJUMEAU ET DU FACIAL, AVEC TROUBLES TROPHIQUES CONSÉCUTIFS, par MM. LES D's MARINESCO ET PAUL SÉRIEUX, par MM. les D'° MaRiNesco et PAUL SÉRIEUX. La malade que nous avons l'honneur de présenter à la Société et qui provient du service de M. Briand (asile de Villejuif), s’est tiré, il y a quatre ans, un coup de revolver dans l'oreille droite; la balle, disons-le de suite, paraît avoir sectionné le facial et les deux premières branches du trijumeau et avoir lésé, d’une façon incomplète, la troisième branche. On peut constater actuellement trois groupes différents de symptômes, à savoir : 1° une paralysie du nerf facial ; 2° une paralysie motrice et sensitive du trijumeau; 3° des troubles trophiques. Paralysie faciale : elle est totale; la déviation de la moitié droite de la face est des plus accentuées, les sillons et les rides sont effacés, la langue est déviée à gauche, sa moitié droite est atrophiée. Paralysie du trijumeau. Branches sensitives : la sensibilité est complètement abolie pour le contact, la dou- leur, la tempéralure sur une zone qui correspond à la distribution des deux premières branches du trijumeau et d’une partie de la troisième ; c'est-à-dire que la moitié droite de la face, de la partie antérieure du cuir chevelu, des muqueuses Jlinguale, buccale, nasale, la cornée du même côté sont insensibles ; seule, la partie des téguments correspondant à l'os maxillaire inférieur droit est sensible ; la sensibilité est émoussée au ni- veau de la zone intermédiaire aux deux territoires sensible et anesthésié. D'ailleurs, l'examen de la malade permet de se rendre compte de la 914 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE me délimitation de l’anesthésie; car en excoriant sans cesse les téguments insensibles, le sujet a dessiné, pour ainsi dire, le territoire privé de sen- sibilité. Deux points importants méritent d’être signalés : ce sont, d’une part, la persistance de la sensibilité à la pression, dans les parties insen- sibles au contact, à la douleur et à la température; d’autre part, /a perte de la sensibilité qustative au niveau de la moitié droite des deux tiers antérieurs de la langue. La sensibilité olfactive est en outre très diminuée du côté droit. Ajoutons, pour en finir avec les troubles de la sensibilité que nous résumons à dessein, qu'il existe des paresthésies; la malade se plaint de douleurs spontanées ou provoquées au niveau des parties anes- thésiées (fourmillement, brülure). Branche motrice : celle-ci n’est atteinte que d'une façon incomplète. Le masséter et le temporal se contractent, la mastication s'effectue; mais les mouvements de diduction de la mä- choire vers le côté sain sont diminués d'amplitude. Troubles trophiques. Du côté droit, la peau est lisse, épaissie, a perdu son élasticité et semble infiltrée, le derme et le tissu cellulaire sous-cutané, les muqueuses sont plus dures et plus épaisses que du côté gauche. Ce fait est très évident au niveau du lambeau cutané emprunté au bras pour la rhinoplastie. On note de la dépigmentation des paupières et de la peau avoisinant la commissure interne. Les poils sont plus développés; le sour- cil droit, au lieu de former un are, s'étale en une plaque à poils clairsemés, qui va rejoindre les cheveux ; sur le lambeau de la face interne du bras qui a servi à la rhinoplastie, on observe également un développement anormal des poils. La région du cuir chevelu, privée de sensibilité, est presque dépourvue de cheveux, mais les ulcérations dont elle est le siège ont pu déterminer l’atrophie des follicules. La deuxième grosse molaire supérieure est cariée. OEil droit : la conjonctive est hyperhémiée, la cor- née présente une taie; la pupille est rétrécie et l’on constate les traces d’une iritis qui a dû coexister avec la kératite. La papille est blanche, à contours peu nets, donnant l'aspect d’un soleil (névrite optique). L’os maxillaire inférieur droit est plus volumineux que celui du côté gauche. Les muscles innervés parle facial et-le masséter présentent la réaction de dégénérescence (examen du D' Vigouroux). Les muscles de la face sont atrophiés ainsi que ceux de la moitié droite de la langue. Les téguments du côté lésé présentent un abaissement de température de 0°,7 ; en outre le maximum de température n’est atteint qu'après vingt-cinq minutes pour la joue malade au lieu de dix à quinze minutes pour la joue saine. Les sécrétions sont exagérées et la pilocarpine provoque la sueur plus rapide- ment et en plus grande abondance du côté lésé, principalement sur le lambeau transplanté. L'ouïe est abolie du côté droit, La sensibilité du pharynx et de la partie postérieure de la langue persiste. Pas de troubles moteurs de la langue. Réflexions. — Nous n'insisterons pas sur les troubles de la sensibilité gustative puisque, le facial et le trijumeau se trouvant tous deux lésés, SÉANCE DU 48 MARS 315. notre observation ne peut servir à préciser lequel de ces deux nerfs fournit les fibres gustatives. Quelle interprétation peut-on donner des (troubles de nutrition que nous avons observés et de ceux qui ont été signalés depuis longtemps dans les lésions expérimentales où pathologiques du triju- meau? Nous ne ferons que rappeler la théorie bien connue de Snellen, qui attribue les modifications organiques constatées aux traumatismes aux- quels ne peuvent se soustraire des parties privées de sensibilité. Cette théorie est infirmée par ce fait d'observation, à savoir que les troubles dits trophiques se montrent aussi bien quand il y a hyperesthésie qu'a- nesthésie. Rappelons aussi que MM. Laborde et M. Duval ont démontré que l’altération de la cornée n’était pas le phénomène primordial, ce qui devrait être dans le cas d’une lésion traumatique ; la kératite n’est que consécutive à l’épanchement de la chambre antérieure. Signalons aussi le rôle attribué aux troubles vaso-moteurs causés par la section des fibres vaso-motrices contenues dans le trijumeau, qu’il s'agisse d’une paralysie des vaso-constricteurs ou des vaso-dilatateurs ; ces troubles sont insuffisants pour expliquer à eux seuls les altérations observées. Les troubles de nutrition sont-ils la conséquence de lésions de nerfs spéciaux centrifuges, dits trophiques, qui, analogues aux nerfs sécréteurs, maintiendraient l'équilibre normal des échanges nutritifs. Pour les tissus à fonctions très spécialisées, tels que les muscles et les épithéliums glan- dulaires, l'existence de nerfs centrifuges influençant Ja nutrition est aujourd'hui un fait bien démontré. La nutrition de ces éléments est sous la dépendance de deux espèces différentes de nerfs : les vaso-moleurs, d’une part et les nerfs moteurs et glandulaires de l’autre. Cette double source de l'influence trophique s'explique par ce fait que la nutri- tion de ces tissus doit, non seulement entretenir les échanges nutritifs nécessaires à la permanence de l'élément anatomique (et c’est le rôle dévolu aux vaso-moteurs), mais encore donner lieu, soit à un déga- gement d'énergie mécanique sous l'influence de certains processus chimi- ques (action des nerfs moteurs), soit à l'élaboration de produits spéciaux, par la transformation d’une partie du protoplasma glandulaire en subs- tance sécrétée (nerfs glandulaires). Mais il ne saurait en être de même pour les tissus épithéliaux ordinaires (simples organes de revêtement), non plus que pour les tissus conjonctifs, osseux et cartilagineux ; ces divers éléments anatomiques ne possédant point de fonction spécialisée n'ont point de nerfs centrifuges correspondants (du moins l'existence de ces nerfs trophiques n'a pas été démontrée); leur nutrition est donc uniquement sous la dépendance des vaso-moteurs, mis eux-mêmes en action par l'intermédiaire de fibres centripètes dont l'existence est bien établie (cornée, épithéliams). | Ces faits étant admis, quel es: le mécanisme des troubles de nutrition des tissus qui ne possèdent pas de fibres centrifuges? La comparaison des 316 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cas analogues au nôtre nous montre l'association Ge deux ordres de symp- tômes: les troubles de la sensibilité et les troubles trophiques, qu'il s'agisse de troubles sensitifs en plus ou en moins, d’anesthésie ou d’hy- peresthésie. Rapprochons de ce fait les données fournies par l’étude de la lèpre, de la syringomyélie, des amyotrophies d’origine articulaire, des arthropathies tabétiques, et nous serons amenés à conclure que toutes ces maladies caractérisées par des troubles de la sensibilité sont aussi des maladies à désordres trophiques. Ces derniers peuvent donc survenir par voie réflexe consécutivement à des lésions des nerfs centripètes. A l'état normal, les centres nerveux manifestent leur rôle trophique sous l'influence des excitations périphériques résultant de l’action des agents extérieurs (sensations de tact, de pression, de température, de douleur) et des processus chimiques de nutrition. Ces impressions sont continuel- lement transmises aux centrés vaso-moteurs, moteurs proprement dits, et trophiques (ganglions spinaux et leur homologues), qui à leur tour main- tiennent dans les tissus l’équilibre des échanges nécessaire à leur inté- grité. Le trouble des rapports entre les systèmes centripète et centrifuge par suite des modifications en plus ou en moins de la sensibilité, amène des désordres dans la nutrition. Dans la lèpre anesthésique par exemple, les impressions thermiques et douloureuses sont abolies: le tonus normal des centres spinaux en est troublé, l’action des vaso-moteurs n’est plus régularisée et les échanges nutritifs ne sont plus réglés au fur et à mesure des besoins provoqués par l'intervention des excitalions périphériques. On comprend ainsi que les traumatismes aient dans des cas déterminés une certaine part dans la production des troubles trophiques. Dans notre observation, les rapports des troubles de nutrition avec l'abolition de la sensibilité sont mis en évidence non seulement par les altérations de la peau et de la cornée, mais par l'hémiatrophie de la langue. Celle-ci se montre bien ici d’origine réflexe et sous la dépendance étroite de l’anes- thésie, puisque d’une part le nerf hypoglosse est indemne, et que d'autre part l’hémiatrophie correspond au territoire de la muqueuse linguale privé de sensibilité tactile et gustative. TOoXICITÉ ET EMPLOI THÉRAPEUTIQUE DU FLUORURE DE SODIUM, par M. le D' BLarzor. Note présentée par M. CHARRIN. P P L’acide fluorhydrique possède, comme on sait, un très grand pouvoir bactéricide, et cependant il est fort peu employé comme antiseptique externe; cela tient évidemment à son élat physique, qui le rend peu maniable et à la causticité de ses solutions. Ces deux inconvénients n’exis- ne : SÉANCE DU 18 MARS 317 tant pas pour le fluorure de sodium, dont MM. Artus et Huber ont démontré le pouvoir antiseptique (Académie des sciences, 16 novembre 1892); nous avons essayé d'introduire ce corps dans la thérapeutique externe. Nous avons d’abord cherché à déterminer sa toxicité chez le lapin, suivant la méthode de M. Bouchard. Des doses progressivement crois- santes d’une solution de fluorure de sodium à 2 p. 100, dans l’eau dis- tillée, ont été injectées dans les veines auriculaires. Nous n’avons rien observé d’anormal jusqu'à 5 centigrammes par kilogramme; l’expé- rience arrêtée à cette dose laisse l'animal en bonne santé, avec augmen- tation de l’appétit les jours suivants. Après injection de 8 centigrammes par kilogramme, le lapin accuse de la dyspnée, un peu de salivation, une légère augmentation de la lempérature, mais il est complète- ment rélabli deux à trois heures après. Tout autre est le tableau après injection de 4 décigramme par kilogramme ; on observe alors successive- ment : une dyspnée intense, une salivation et une polyurie abondantes, une soif inextinguible, des selles diarrhéiques, une augmentation notable de la température. Puis, dix à quinze minutes après la fin de l'o- pération, le train postérieur s’affaisse brusquement ; du tremblement, des convulsions fibrillaires généralisées se produisent, quelquefois des sauts violents de tout le corps. Enfin, quelques cris, l’affaissement du train antérieur, la chute de la tête et la contracture des membres dans l’exten- sion précèdent de quelques minutes la mort, qui a lieu dans le coma. Ces phénomènes se sont toujours déroulés sensiblement dans le même ordre et dans le même temps, après injection intra-veineuse de 1 déci- gramme de fluorure de sodium pur, par kilogramme de lapin; mais il est important de savoir que les différents fluorures de sodium existant actuel- lement dans le commerce n'ont pas, par suite, sans doute, de leur impu- reté, le même pouvoir toxique. Nous avons dû, avec certains d’entre eux, employer des doses triples de celles relatées plus haut, pour obtenir les mêmes effets. La note de MM. Artus et Huber ne relatant pas d'expériences directes sur les bactéries pathogènes, nous avons jugé utile de vérifier le pouvoir microbicide du fluorure de sodium sur quelques-unes de ces espèces. Nos expériences, sur ce point, sont en cours d'exécution ; mais nous pouvons déjà affirmer que des bouillons de culture contenant 1 p. 100 de fluo- rure de sodium et ensemencés par piqüre avec : divers microbes, Micro- coccus pyogenes aureus, M. tetragenus, M. prodigiosus, streptococcus bacillus thyphosus, B. de la diarrhée verte infantile, B. violaceus et spiril- lum Finkleri, sont restés stériles, après huit jours de séjour dans l’étuve à 37 degrés, tandis que les bouillons témoins avaient tous cultivé au bout de un ou deux jours. RÉ Nous avons employé le fluorure de sodium comme antiseptique externe, en solution dans l’eau ordinaire à 1/2 et 1 p. 100, chez cent cinquante 318 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE malades environ. Nous n'avons observé aucun cas d'intoxication, de brû- lure ou même dirritation. Deux malades seulement, atteintes de vagi- nite aiguë, ont éprouvé de la cuisson, après la quatrième et la cinquième injection (à 4 p. 100) : elles n'avaient d'ailleurs pu supporter ni les lavages au sublimé à 1/4 p. 1000, ni ceux à l'acide phénique à 4 p. 400. C'est pour les lavages de la figure, de la bouche, du nez, de l'anus, ete., chez des malades atteints de maladies infectieuses (fièvre typhoïde, grippe, varioloïde, etc...) que nous avons le plus souvent (50 fois environ) employé le fluorure de sodium à 4 p. 100 et 1/2 p. 100 pour les gargarismes. Les malades aceusaient toujours après ces lavages, spécialement pour la bouche et le nez, une sensation agréable de fraîcheur. La solution, ayant _peu de goût, a toujours été facilement acceptée, même des enfants. Dans la fièvre lyphoïde, particulièrement, la bouche, même dans des cas très graves, s'est toujours maintenue humide et propre, quand les lavages étaient régulièrement faits toutes les heures. Nos cent autres malades comprennent des affections de la peau et des muqueuses les plus variées : 15 fois, il s'agissait d’angines, pseudomem- braneuses(maisnon diphtéritiques), pultacées, ou simplement catarrhales, dans lesquelles la solution à 1/2 p. 100 en gargarismes et des collutoires à 1 p. 100 nous ont donné des résultats aussi satisfaisants qu'avec l’em- ploi du sublimé; 16 fois, nous avons pansé des plaies d'origines diverses (traumaliques et opératoires) de la façon la plus simple (lavage et appli- cation d'ouate hydrophile fluorée) à l’aide de la solution à 1 p. 100, sans jamais observer de suppuration; 43 fois les injections vaginales con- sécutives à l'accouchement ont été faites avec la solution à 4/2 p. 100. Dans cinq de ces cas, il y avait eu intervention opératoire (3 applications de forceps et 2 versions) et c'était la solution à 1 p. 100 qui nous avait servi à désinfecter nos mains et nos instruments : ces 43 accouchées n’ont présenté aucun mouvement fébrile — 10 fois nous nous sommes servis du fluorure dans le traitement externe de l'impétigo, en lavages et en pom- mades (| p. 100) et il nous a réellement paru que ces dermatites, souvent si rebelles, étaient très heureusement influencées. Dans 5 à 6 de ces cas, la guérison a été des plus promptes. Mais c’est surtout contre l’érythème des nourrissons que le médicament que nous préconisons nous a donné des résultats inespérés : sous l'influence de simples lavages et de l’appli- cation de la pommade à 1 p. 400, nous avons vu 5 fois, des érythèmes, ayant résisté à d'autres traitements, disparaître en deux ou trois Jours. Nous avons encore employé la solution à 1 p. 100, avec des résultats qui nous ont paru aussi satisfaisants que ceux obtenus avec le sublimé:: 6 fois en injections vaginales chez des leucorrhéiques de causes diverses; 5 fois, en lavages du nez (sans irrilation consécutive, 4/2 p. 100) ; 5 fois pour lavages de la verge, dans la blennorrhagie; 4 fois pour vaginite; 3 fois en applications sur des phlegmons circonscrits; 1 fois pour un anthrax; 1 fois pour des hémorroïdes enflammées; 1 fois pour un érysi- miens: SÉANCE DU 18 MARS 319 pèle spontané (?) de la moitié du tronc et d'un bras, lequel érysipèle nous a paru très favorablement influencé par les applications de la solution à 4 p. 100, et comme marche et comme durée; enfin 4 fois en pansement d’un épithélioma ulcéré du voile du palais. Nous devons encore ajouter que, dans trois cas de prurigo, des lotions pratiquées malin et soir avec la solution à À p. 400, procuraient un grand soulagement aux malades. Nous avons commencé à administrer à l'intérieur le fluorure de sodium, mais les observations de ces malades sont loin d’être complètes : elles seront publiées ultérieurement. Conclusions. — 1° Le fluorure de sodium a pour équivalent thérapeu- tique, chez le lapin, 8 centigrammes, et, pour équivalent loxique 1 déci- gramme. Il est donc 16 fois moins toxique environ que le sublimé et le sulfate de cuivre, et 2 fois moins toxique que l'acide phénique. (Tarnier et Vignal, Thèse de Duloroy, Paris, 1893.) 2° La solution à 4 p. 400, et même à 1/2 p. 100, empêche le dévelop- pement des bactéries pyogènes (staphylocoques et streptocoque) et de quelques autres. 3° Les solutions à 4 et à 1/2 p. 100 peuvent être employées avec avan- tage : a.) pour les soins hygiéniques de la peau et des muqueuses ; b.) pour la désinfection de l'opérateur, de l’opéré et des instruments (les solutions de fluorure altèrent le fer et l'acier, mais elles n’altèrent pas le nickel, au moins pendant un certain temps); .c.) pour le pansement des plaies de toute nature; d.) pour le trailement de certaines dermatoses : érylhèmes, impétigo, prurigo. VARIATIONS MICROBIENNES, par M. CHARRIN. Plus on étudie les microbes ou mieux un microbe en particulier, plus on arrive à se convaincre de l’excessive mobilité de ses caractères. Pour le bacille pyocyanique, il y a longtemps (1) que nous avons mis en évi- dence ses variations de forme, de fonctions de toutes sortes : fonctions pig- menlaires, sécrétoires, pathogènes, fermentatives, pyrétogènes, etc., ete. La plupart des auteurs déclarent que, si on sème ce bacille sur pomme de terre, il pousse en donnant naissance à une teinte brune, jaunâtre, marron; c'est, en effet, ce que j'ai constaté fort souvent. Or, voici une pomme de terre sur les faces de laqueile on distingue nettement cette coloration brune, jaunâtre, marron; puis, tout à côté, une zone de pigment d’un vert bleu des plus indiscutables; c’est la troisième fois que je note ce signe; à ces niveaux, un seul germe, celui (1) Soc. Biol., 1887, 1889, 1890. 9320 : SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de la pyocyanine, a été déposé. Pourquoi fabrique-t-il le principe habituel en même temps qu'un produit inusité? La particularité ne parait pas attribuable, suivant la règle, à une propriété du terrain, attendu que les deux substances sont engendrées sur la même face, sur le même plan, sur la même coupe, sur le même point, en quelque sorte, de la pomme de terre, soumise à l’examen de la Société. [Il convient plutôt de songer à une modification dans la vitalité du ferment. NERFS ET MICROBES, par MM. CnarRiN et DEvic. Si on introduit, sous l'enveloppe dusciatique, une, deux, trois, quatre gouttes de culture pyocyanique, en évitant, autant que possible, de blesser les fibres, d'exercer une action traumatique de quelque impor- tance, il se peut qu'aucun accident ne se produise. Ainsi se passent habi- tuellement les choses, lorsqu'on fait pénétrer, non plus cette culture, mais du bouillon pur, dans les mêmes proportions. Telles sont, du moins, les conclusions qui se dégagent d’ expériences, encore peu nombreuses, à la vérité, En revanche, on observe parfois de la paralysie, de l’œdème, des ulcérations, dans le membre opéré. A l’autopsie, dans un de ces cas, nous avons rencontré, près du point inoculé, une petite tumeur du volume d’une lentille; le nerf était moni- liforme. Des dissociations ont permis de mettre en évidence des lésions mani- festes de dégénérescence. Les noyaux étaient en voie de prolifération, la myéline segmentée ; le cylindre-axe avait disparu. Il s’agit simplement là d’un phénomène de compression, suivie des conséquences physiologiques. — Il convient d’'écarter, en se rappelant l’absence d’altérations caractéristiques dans la maladie pyocyanique, l’idée d’un processus spécifique. L’unique côté intéressant réside peut-être dans la nature de la cause, dans l’origine infectieuse de cette compression. NOTE SUR LA CULTURE DU BACTERIUM COLI DANS L'URINE. (Fermentation coli-bacillaire), par MM. Norz HaALLé et A. Dissarp. Tous les auteurs qui ont étudié l'infection urinaire ont cultivé dans l'urine l'agent le plus fréquent de cette infection, le bacille non liquéfiant, c’est-à-dire : le bacterium coli. SÉANCE DU: 18 MARS 321 Ces auteurs diffèrent d'opinion sur les caractères de ces cultures et les modifications que le microbe provoque dans le milieu. Bouchard (1), Albarran et Hallé (2), Krôgius (3), Reblaub (4) disent que le coli bacille fait apparaître l’ammoniaque dans l'urine. La réaction change ; d'acide, elle devient neutre ou alcaline. Au contraire, d'après Morelle (5) qui s pb sur l'autorité de Miquel, d'après Achard et Renault (6), Barlow (7), l'urine acide ensemencée avec le coli bacille ne change pas de réaclion. Pour Achard et Renault, pour Renault (8), l’urée n’est pas altaquée par le bacille : elle ne sert pas à sa nutlrilion, mais nuit à son dévelop- pement et met obstacle à quelques-unes de ses fonctions. L'urine pure, disent ces auteurs, est pour ce microbe un milieu de culture peu favo- rable, opinion déjà émise par Clado (9). Malgré ces divergences sur le lLerrain expérimental, l'accord est com- plet en clinique : tous ceux qui ont examiné un grand nombre d'urines infectées dans la vessie par le bacterium coli seul, ont reconnu que ces urines purulentes présentent à l'émission la réaction acide (Albarran et Hallé, Krôgius, Morelle, Denys). Depuis cinq ans, l’un de nous a fait de très nombreuses cultures sur urine du bacille non liquéfiant, cultures dont beaucoup ent été poursui- vies pendant des mois et jusqu'à une année : les résultats ont toujours élé identiques. Nous avons pie récemment cette étude pour vérifier et préciser ces résullats. Le milieu de culture est l’urine claire provenant de sujets sains. stéri- lisée par filtration sous pression a filtre Chamberland, et éprouvée DE un séjour de 4 à 8 jours dans l'éluve à 37 degrés. La semence est empruntée à des cullures de coli bacille sur gélaline ou gélose de provenance très diverses : bacterium coli isolé des selles nor- males, de l’urine purulente, de lésions infectieuses humaines diverses, de lésions expérimentales du lapin, du cobaye, de la souris. - (© Bouchard. Lecons sur les maladies par ralentissement de la nulrilion. 3° édition, p. 250. (2) Albarran et Hallé. Note sur une bactérie pyogène, elc., Bull. Acad. méd., 1388. (3) Krôgius. Recherches bact. sur l’infeclion urinaire, Helsinglors, 1892. (4) Reblaub. Des cystites non tub. chez la femme, Th. Paris, 1892. (5) Morelle. Etude bactériologique sur les cystites. La Cellule, t. VIT, 1892. (6) Achard et Renault. L'urée et les bacilles urinaires. Soc. Biologie, 3 dé- cembre 1892. (7) Barlow. Ætiologie, Prophylaxe und Therapie der Cystites. Thèse Munich, ÉCÉ Len (8) Renault, Du bacterium coli dans l'infection urinaire. Th. Paris, 1893. {9) Clado. Etude sur une bactérie septique de la vessie. Th. Paris, 1887. 322 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Toujours l’ensemencement produit, à l'étuve à 37 degrés, une culture rapide et abondante. Après douze heures, le trouble de l'urine est déjà très marqué; total, uniforme; après trois à quatre jours, il se forme un dépôt blane, grisâtre, puis un voile de surface blanchâtre ; l'odeur est fétide, particulière. Tardivement, après un mois en moyenne, le liquide se clarifie en brunissant, le voile tombe au fond et se mêle au dépôt. Tels sont les phénomènes constants, avec des variations qui portent sur l'abondance de la culture, la coloration du liquide, le voile, suivant la semence employée. En même temps, la réaction du liquide change : l'urine ensemencée perd graduellement son acidité, devient neutre, puis passe enfin à la réaction alcaline faible qu'elle conserve. Le temps nécessaire à ce changement de réaction est très variable : une urine normalement acide met 7, 40, 15, 20 et même 30 jours à passer à l'état alcalin faible; une urine faiblement acide ou neutre peut être alcaline déjà après 2, 3, 4 jours. Dans la même urine, le changement peut être, toutes conditions égales d’ailleurs, plus ou moins rapide pour des semences différentes. Le degré d'acidité de l’urine, la qualité des microbes ensemencés sont donc les deux facteurs de ces varialions, lrès bien indiquées déjà par Krôgius avant nous. Nous avons vérifié souvent, par des ensemencements sur plaques, la pureté des cullures alcalines du coli bacille. Nous avons constaté également que dans les mêmes conditions de tem- pérature et de durée l'urine stérile témoin conserve sa réaction primitive. Quels changements de constitulion chimique accompagnen', dans ces cultures, le changement de réaction? Est-il lié à une transformation de l’urée en carbonate d’ammoniaque, comme dans la fermentation ammo- niacale classique de l'urine? : | On peut employer deux méthodes pour résoudre la question : 1° Constater la diminution du chiffre de l’urée; 90 Constater la production du carbonate d'ammoniaque dans les cul- Lures devenues alcalines. Ces deux méthodes sont d’ailleurs absolument connexes dans leurs procédés comme dans leurs résultats. Pour doser l’urée, il était naturel d’avoir recours, tout d'abord, à la mé- thode classique de l’uréomètre (hypobromite de soude). Les recherches multiples déjà anciennes de Pflügger (1) et ses coila- borateurs ont établi que cette méthode donne des résullats approximalifs suffisants, quand elle est appliquée à une urine normale. Mais ces auteurs ont montré que le carbonate d'’ammoniaque et d’autres produils azolés sont attaqués par la liqueur bromée et donnent un déga- (1) Pflügger, etc. Arch. de Pflügger, 1872 SÉANCE DU 18 MARS 323 gement gazeux capable de majorer le chiffre de l’urée: il en est de même des matières albuminoïdes solubles ou insolubles (albumines, protéines, ptomaïnes, etc.), ainsi que l'ont indiqué Schutzenberger et plus récem- ment M. Pœhl (1). Pour ces deux raisons, le dosage brut par l’uréométre ne peut fournir un résultat valable dans une urine fermentée. Il faut, au préalable, se débarrasser de ces deux causes d'erreurs : car- bonate d'ammoniaque et matières albuminoïdes. Pour constater la présence des matières albuminoïdes produites dans l'urine par la culture et les éliminer, nous avons eu recours au procédé de M. Pœhl (précipitation par l'acide phosphotungstique en présence de l'acide chlorhydrique). Pour constater la présence du carbonate d’ammoniaque et l’éliminer, nous avons employé comparativement les deux procédés suivants: 1° Réduction par le chauffage ; 9° Évaporalion dans le vide après addition d’un lait de chaux (procédé de Wurtz). Voici les résultats fournis par ces divers procédés. Le chiffre durée donné par l’uréomètre pour une culture traitée par réactif phosphotungstique, est toujours inférieur à celui que fournit le dosage brut de cette culture. Cette différence, qui peut ivarier de 4 à 5 grammes par litre, est en moyenne de 3 grammes (moyenne établie sur quatre expériences); elle correspond à Ia quantité des matières albumi- noïdes éliminées par le réactif. Par le chauffage, on constate un dégagement notable et prolongé de vapeurs ammoniacales avec le papier de tournesol mouillé d’eau distillée. Le liquide primitivement alcalin redevient acide; le chiffre de l’urée donné par l’uréomètre pour une culture réduite par le chauffage, est toujours inférieur à celui que fournit le dosage brut de cette culture. La différence, qui varie de À à 8 grammes par litre, est en moyenne de 3 gr. 80 (moyenne établie sur vingt expériences), elle correspond au car- bonate d’ammoniaque éliminé. Les résultats obtenus par Le procédé de Wurtz sont analogues. La dif- férence varie de 4 à 7 grammes par litre, elle est en moyenne de 2.50 (moyenne établie sur vingt-quatre expériences). Nous nous en tenons aux chiffres donnés par ce dernier procédé, plus rigoureux.que le précédent. Nous avons dosé, pour contrôle, l’urée des urines stériles lémoins, trai- tées par ces divers procédés. En comparant les résultats de ces dosages à ceux des dosages bruts, onne trouve que de très minimes différences imputables en grande partie aux difficultés techniques. Des urines stériles acides peuvent, au début du chauffage, dégager (1) Pœhl. Méthode clinique simplifiée d'analyse d'urine, etc. Soc. Biologie, 18 février 1893. 11% 394 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE momentanément une très faible quantité de vapeurs ammoniacales, trop faible pour se gate au dosage par une diminution appréciable du chiffre d'urée. . Ces faits nous montrent, comme on pouvait le prévoir, que le dosage brut de l’urée par l’uréomètre donne pour une culture un chiffre d'urée supérieur à la quantité réelle; ce chiffre est majoré, en effet, de tout l'azote dégagé parles malières albuminoïdes et par le carbonate d’ammoniaque. Pour obtenir le chiffre vrai, il faut d'abord traiter une partie du liquide par le réactif phosphotungstique, une autre par le procédé de Wurtz; les différences obtenues doivent être additionnées, et la somme soustraite du chiffre fourni par le dosage brut. En opérant ainsi, on peut constater que dans les cultures du bacterium coli devenues alcalines, âgées de 3 à 30 jours, Le chiffre d’urée a notablement diminué. Cette diminution peut varier de 2 à 12 grammes par litre (moyenne obtenue sur le total de nos expériences : 5.50). Pour contrôler les résultats fournis par la méthode indirecte de l’uréo- mètre, nous nous sommes adressés à une méthode directe de dosage de l’urée — précipitation par l'acide azotique sous forme de nitrate d'urée, pesée et déduction par le calcul de la quantité d’urée. — Voici le résultat de deux expériences: I. — Culture de B. coli, âgée de huit jours : Dosage brut par Thypobr TUE) SEEN dE PU Un LE US 1 Dosage PATAerDILEATEAURÉ RE CEE CESSE Urée disparue par litre. : : . . . NAT GER "RMOoAUE IL. — Culture de B. coli, âgée de cinq jours: Dosage brut par l'hypobromité "5,0. °5 2 0,0026m901 Dosage:parle nitrate durée: ne. tree Mel Hréesdisparue par litre en NON RES De ces recherches nous concluons: Le bacterium coli cultive bien sur l'urine humaine normale stérilisée “par filtration. - Cette culture détermine le changement de réaction de l'urine, qui de- vient faiblement alcaline. Le microbe attaque lentement et partiellement l’urée. À la quantité -d'urée disparue correspond la formation d’autres corps azotés : carbo- nate d'ammoniaque, matières albuminoïdes. Nous sommes donc bien en -présence d’une véritable fermentation de l’urée, fermentation lente par- : tielle, différente de la fermentation ammoniacale classique que produi- sent rapidement les microorganismes ammoniogènes déjà connus. (Travail du laboratoire de la Cho des voies urinaires à l'hôpital Necker.) SÉANCE DU 18 MARS 325 CHARBON HUMAIN INOCULÉ PAR UNE BROSSE, par M. J. GIRODE. _ Les études modernes concernant l’étiologie de l'affection charbonneuse ont bien mis en relief la diversité du mécanisme de l'infection chez l’homme ; elles ont établi la persistance, à un degré vraiment excessif, de la virulence dans certains produits provenant d'animaux charbonneux, produits parfois plus ou moins transformés où même défigurés par le fait de l’utilisation industrielle. La notion de la spore charbonneuse, de sa résistance vitale extrême, donne l'explication de ces faits. Entre tous les produits susceptibles de conserver longtemps cette no- cuité spéciale, les crins occupent une des premières places ; les exemples de pustule maligne sont loin d’être rares chez les criniers et les brossiers. M. Le Roy des Barres en a rapporté récemment de nombreux exemples(1). Une épidémie d'atelier était tout dernièrement observée dans une localité du département du Nord (2). - Voici un exemple d'infection charbonneuse humaine qui se rapproche des faits précédents, avec en plus une modalité véritablement inouïe des conditions d’inoculation. Il s’agit d’un cas de charbon inoculé chez un coiffeur par une brosse de crin. M. X..., quarante-cinq ans, passe le 19 mai chez son coiffeur ; au moment où l’on termine sa toilette par un coup de brosse, il éprouve tout d’un coup une sensation de vive piqûre au milieu du front, et fait remarquer qu'on vient de le blesser avec la brosse. Il prend une glace à main, constate qu'il ne s’est pas écoulé de sang et qu’il y a simplement une légère éraflure épidermique. Le soir, il existe une violente démangeaison dans le point blessé. Dès le 20, il s'est développé un petit bouton saillant, rougeâtre, croûtelleux, non douloureux mais fortement prurigineux. Le lendemain, la région est saillante, œdémateuse, généralement pâle. Les jours suivants, le gonflement augmente considérablement; il empiète en haut sur la racine du cuir chevelu, en bas sur les sourcils, et à gauche sur la tempe et la région pré-auriculaire. Il s’est développé, vers ce dernier point, deux ganglions de volume moyen et peu sensibles. La région blessée est plus indurée que les autres parties tuméfiées, relativement moins saillante ; elle montre, en deux points très voisins, deux groupes de petites vésicules claires formant aréole avec un centre encore pâle. La douleur locale est presque nulle, mais les démangeaisons sont très vives. L'état général est un peu im- pressionné : malaise, anorexie, agilation nerveuse. Le 25 mai, la tuméfaction œdémateuse a considérablement progressé ; elle envahit les paupières et les conjonctives, le nez, les joues et un peu l'oreille gauche. Les ganglions auriculaires de ce côlé sont masqués par le gonfle- ment, moins accessibles, encore douloureux. Les groupes vésiculeux sont (1) Annal. d’'Hyg. publ. et de Méd. lég., juin 1890. (2) L'histoire de cette épidémie est relatée par MM. Arnould et Surmont dans un travail sous presse. 326 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE louches; au centre, se voit une tache légèrement violacée. Le malade est anxieux et agité par instants et à d’autres moments très abattu. Cependant l'appétit est relativement conservé et la température normale. Le 26, on aperçoit au centre de chaque groupe vésiculeux une petite eschare noire qui semble s’enfoncer en cône dans toute l'épaisseur du derme. L'affec- tion charbonneuse s'affirme donc nettement. Le malade ayant pris un peu de chloroforme, on cautérise largement et profondément la lésion centrale au thermo-cautère en dessinant des raies transversales qui comprennent tout le foyer initial, On ajoute quelques pointes profondes tout autour et l’on termine par un pansement phéniqué. Dès le soir, on circonscrit encore la région par des injections d’une solution phéniquée à 1/50e. Le 27, la région du front a bon aspect. Mais le gonflement œdémateux a fait encore un peu de progrès du côté de la joue et de l'oreille droites ; cepen- dant, il diminue un peu à gauche. Les paupières restent Lrès tuméfiées, closes, violacées. On renouvelle les injections phéniquées. Le 28, on continue, l'ædème ne paraissant pas céder; on note un peu les caractères des urines phéniquées. C'est à partir du 29 que l'amélioration s’accuse nettement. L'œdème diminue partout, les troubles généraux sont disparus. Dès le 10 juin, il ne reste plus que la trace de l'intervention; l'eschare évolue et se détache d’une facon régu- lière mais très lente. Au 15 juillet, on a une plaie bourgeonnante qui se répare dans les semaines suivantes. Il ÿ a eu seulement un petit accident local. Un rameau nerveux sus-orbitaire ayant été détruit pendant la cautéri- sation, on constatait l'existence d’une petite zone anesthésique sus-jacente à la lésion charbonneuse, et empiétant dans une petite étendue sur le cuir chevelu. À ce niveau, il s'était développé une alopécie en clairière exactement superposée à la topographie du trouble sensitif. Tout cela a disparu régulière- ment. Le retour de la sensibilité s’est fait bien avant que la cicatrisation fut complète, et la repousse des cheveux était nettement dessinée au bout d'un mois. Étant donné cet ensemble et la netteté du renseignement étiologique, l’idée d’une infection charbonneuse devait naturellement venir à l'esprit. MM. Quénu et Terrier, qui étaient appelés à voir le malade, confirmaient le diagnostic et dirigeaient l'intervention. Il s'agissait bien d'une pustule maligne du front, à deux foyers presque juxtaposés, à évolution relati- vement lente. Les conditions dans lesquelles le cas était observé ne rendaient pas facile l'institution des recherches complémentaires. C’est seulement le 26, que j'ai pu recueillir sur des lamelles un peu de lymphe pour l'examen microscopique. La moitié des préparations a montré nettement la pré- sence de bacilles charbonneux. Le 27, je prenais un peu de lymphe éliminée des cratères de cautérisation, et de sang recueilli à l’occasion des injections hypodermiques. Ces produits ont été inoculés au cobaye sans résultat; Enfin j'ai examiné la brosse suspecte. La plus grande partie des crins a été ébarbée à l'extrémité ; les fragments, recueillis et amenés à l’aide de bouillon stérile à la consistance d’une pâle molle, ont été insérés sous la peau d’un cobaye. L'animal est resté bien portant. SÉANCE DU 18 MARS À 3927 EE —— " "— "— — —— " — " — Ïl n’y a pas trop lieu de s'étonner du caractère négatif de quelques- unes de ces explorations. Elles étaient faites dans des conditions peu favorables, et il est à remarquer, en particulier en ce qui concerne l’objet incriminé, que la nocuité spéciale des crins, examinés à la suite d’un accident analogue, n’a jamais pu être démontrée. Il n'était pas moins intéressant, au point de vue de l’hygiène générale, de souligner un fait qui contribue à montrer dans quelles limites extrêmes les produits charbonneux peuvent conserver un certain degré de virulence, suffisant pour provoquer une inoculation charbonneuse chez l'homme. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES BACTÉRIES INTESTINALES, par MM. A. GILBERT et G. Lion. (Voir Mémoires du présent volume, p. 55.) SUR LES CASÉINES ET LES FIBRINES, par M. MAURICE ARTHUS. (Travail du laboratoire de physiologie de la Sorbonne.) Le travail, que j’ai l'honneur de communiquer à la Société de Biologie, consiste essentiellement en une étude des solubilités de la caséine et de ses dérivés, et de la fibrine dans les solutions de sels neutres et en parti- eulier dans les solutions de fluorure de sodium. Il a pour conséquence de déterminer les caractères fondamentaux de la classe des caséines et de la famille des fibrines, de fixer la place que doit occuper la fibrine dans le groupe des substances albuminoïdes, et d’opposer dans ce groupe des substances albuminoïdes, les caséines aux albumines-globulines. On a jusqu'ici étudié les propriétés de la caséine dans sa solution natu- relle, le lait, ou dans ses solutions artificielles, alcalines, terreuses, phos- phoalcalines et phosphoterreuses, préparées d’après les procédés indiqués par Hammarsten. Ces solutions ne sont pas précipitées par la chaleur d’ébullition; elles ne sont précipitées, ni par la dilution, ni par le gaz car- bonique ; elles sont complètement précipitées par le chlorure de sodium, le sulfate de magnésie, le sulfate d’ammoniaque dissous à saturation. Le lait ou les solutions phosphocalciques de caséine sont caséiliés par le lab ferment : sous l'influence de ce ferment, la caséine est chimique- ment modifiée; un précipité se forme, c’est le caséum. Le caséum se dis- tingue de la caséine par son insolubilité dans le phosphate de chaux, par sa solubilité moindre dans les alcalis et dans les acides, par sa leneur en calcium. Le lait décalcifié ou lessolutions phosphosodiquesde caséinesont modifiés mais non précipités par le lab ferment : la caséine est transformée en subs- tance caséogène. Cette substance caséogène se distingue de la caséine par sa précipitabilité dans le lait décalcifié porté à la température d’ébullition, par sa précipitabilité par de faibles quantités de sels alcalino-terreux. Elle se 328 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE distingue du caséum parsa solubilité plus grande danslesalcalisetles acides. Les solutions phosphosodiques de caséine ou le lait décalcifié, trans- formés par le labferment, ou les solutions phosphosodiques de caséogène donnent, par les sels alcalinoterreux, des précipités de caséums qui ont les propriétés du caséum ordinaire. Le fluorure de sodium en solution aqueuse dissout la caséine et ses dérivés (caséogène et caséums) lentement à 15 degrés, assez rapidement à 40 degrés, en quelques minutes à 100 degrés. Ces solutions, qui peuvent contenir À gramme et plus de caséine pour 100 centimètres cubes, sont des liqueurs laiteuses ou opalescentes, ayant les propriétés suivantes : elles sont précipitées après dilution par le gaz carbonique (la dilution seule les précite lorsque les proportions de fluorure dissolvant et de caséine dis- soute sont comprises entre certaines limites) ; précipitées par les acides étendus, et totalement précipitées pour une dose convenable d’acide, variable avec la nature de l'acide, et avec la température et la richesse en sel et en caséine de la solution; totalement précipitées par le sulfate de magnésie et par le sulfate d’ammoniaque dissous à saturation à froid; non précipitées par le chlorure de sodium dissous à saturation à froid, totalement précipitées à l’ébullition par le chlorure dé sodium dissous à saluration. Ces solutions fluorées des caséines diffèrent donc des solutions alcalines, terreuses, phosphoalcalines et phosphoterreuses correspon- dantes par deux caractères : leur précipitabilité par la dilution et le gaz carbonique, leur non-précipitabilité par le chlorure de sodium dissous à saturation à froid. Elles présentent avec ces solutions quelques caractères communs : leur précipitabilité totale par le sulfate d'ammoniaque, le sulfate de magnésie et les acides dilués. Les caséines se dissolvent aussi dans quelques autres sels neutres, notamment dans l’oxalate neutre d’ammoniaque et dans l’oxalate neutre de potasse, Le sulfate d'ammoniaque et le chlorhydrate d’ammoniaque peuvent dissoudre plus ou moins abondamment certaines caséines, mais sont incapables d'en dissoudre certaines autres. Le chlorure de sodium dissout en général les caséines, mais souvent en très petite quantité. Ces solutions salines ne sont jamais précipitées par la dilution seule, ce qui les distingue des solutions fluorées; elles sont précipitées par la dilulion et le gaz carbonique, par le sulfate de magnésie et par le sulfate d’ammo- niaque dissous à saturation. Le chlorure de sodium dissous à saturation à froid ne précipite pas les solutions oxalatées ; il précipite totalement les solutions dans le sulfate et le chlorhydrate d’ammoniaque et dans le chlorure de sodium. En résumé, les caséines sont insolubles dans l’eau distillée, solubles dans les alcalis, les terres alcalines,les phosphates d’alcalis, et d’alcalino- terreux, le fluorure de sodium, les oxalates de potasse et d'ammoniaque; précipitées tolalement par le sulfate d'ammoniaque et le sulfate de ma- gnésie dissous à saturation à froid. — Ces propriétés de solubilité et: de [EN SÉANCE DU 18 MARS 399 précipitation sont insuffisantes pour caractériser un groupe naturel de substances. Les caséines ont un caractère chimique beaucoup plus impor- tant : elles sont incoagulables. Bouillies en présence de l’eau, des solu- tions salines concentrées, des acides dilués, de l'alcool, elles restent solubles dans les solutions salines. Elles peuvent donc être précipitées par différents agents, mais non coagulées. Si donc on divise les substances albuminoïdes en deux groupes : le groupe de substances albuminoïdes naturelles des tissus et liquides orga- niques et le groupe des substances albuminoïdes transformées, résultant de l’action d’agents énergiques sur les premières, il faudra diviser le groupe des substances albuminoïdes naturelles en deux classes : la classe des caséines incoagulables, et la classe des albumines-globulines coagu- lables, celte dernière classe se subdivisant en deux sous-classes, celle des albumines et celle des globulines. On peut dès lors démontrer d’une façon irréfutable l'existence dans le lait et le colostrum, de substances albuminoïdes autres que la caséine; il est facile en effet, par diverses manipulations, de prouver que le lait et le colostrum contiennent des substances albuminoïdes coagulables. On sait que la fibrine, insoluble dans l’eau, se dissout dans les solutions “de sels neutres assez fortement salées. Les solutions ainsi oblenues sont coagulées par la chaleur, précipilées par la dialyse, par la dilution, par le chlorure de sodium dissous à saturation, totalement précipitées par le sulfate de magnésie dissous à saturation. Elles renfermeraient, d’après certains auteurs, deux substances albuminoïdes coagulant respectivement à 9 degrés et vers 70 degrés. La fibrine se dissout dans le fluorure de sodium à 4 p. 100, lentement à 15 degrés, rapidement et abondamment (1 gramme à 4 gr. 25 pour 100 centimètres cubes) à 40 degrés. Ces solutions chauffées donnent un premier coagulum à 52-56 degrés et un second moins abondant à 64-75 de- grés. Il n'en faut pas conclure que la solution fluorée contient deux subs- tances albuminoïdes; la fibrine, comme le fibriogène est dédoublée à 56 degrés en deux substances albuminoïdes, l'une coagulée à la tempé- rature de dédoublement, l’autre coagulable à une température plus élevée. Les solutions fluorées de fibrine, comme ses solutions salines sont pré- cipitées par dilution, par dialyse, partiellement précipitées par le chlorure de sodium dissous à saturation, totalement précipitées par la sulfate de magnésie dissous à saturation. La fibrine est donc une globuline. _ Dans la sous-classe des globulines, le fibrinogène et la fibrine présen- tent un caractère commun extrêmement important : leur dédoublement à 56 degrés. Cette propriélé permet de caractériser la famille des fibrines. La fibrine se trouve ainsi rapprochée de son générateur le fibrinogène par une propriété chimique remarquable, comme le caséum est rattaché à la caséine génératrice par l’ensemble de ses propriétés. 330 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE NOTE PRÉLIMINAIRE SUR LE Psorerqates simplex, ACARIEN PARASITE DE LA SOURIS, par M. G. NEUMANN, Professeur à l'École vétérinaire de Toulouse. Il n’est pas rare de rencontrer sur la Souris un acarien particulier, logé dans une dépression croûteuse de la surface de la conque ou dans de pelits kystes sous-cutanés du dos, des flancs, de la poitrine, des épaules ou de la tète. Signalé d’abord par Gerlach (1857), il a été retrouvé et décrit par Tyrrell, au Canada (1883), G. P. Piana, en Italie (1886) et A. D. Michael, en Angleterre (1889). A l'exception de Piana, qui a cons- taté les kystes parasitaires sous-cutanés, les autres observateurs n’ont vu que les croûtes psoriques de l'oreille, Gerlach et Tyrrell sur la Souris, Michael sur le Campagnol des champs. La petitesse de cet acarien, sa transparence, la simplicité de son orga- nisation en rendent l'élude difficile et ont donné lieu à de grandes diver- gences et à des erreurs sur l'interprétation de ses formes et de ses véri- tables affinités toxinomiques. Piana l’a rattaché aux Sarcoptes et Tyrrell, avec plus de raison, l’a rapproché du Myobia, sous le nom de Psorer- gates simplex. Mais aucun n’a reconnu le mâle véritable, et ces deux auteurs ont décrit comme tel la femelle, Tyrrell considérant celle-ci comme représentée par ce qui est, en réalité, la nympbhe. À maintes reprises, j'ai trouvé sur la Souris le Psorergates simplex soit dans des kysles sous-cutanés, soit dans des croûtes de l'oreille. Le mâle et la femelle ont la même forme générale, la femelle étant un peu plus . grande (140 u sur 110 & environ) que le mâle. La première se reconnaît à la présence d’une vulve préanale, bordée de renflements chitineux qui ont été pris pour une armure périgynienne. Le mâle se distingue par l’exis- tence d’un long pénis dorsal, dont l’orifice de sortie est à une faible dis- tance en arrière du rostre. Celui-ci est formé principalement de deux maxilles styliformes, d'une languette et de deux palpes maxillaires à quatre articles, sans crochet terminal. Les pattes sont courtes, toutes semblables, à quatre articles, recourbées en avant et terminées par deux ongles divergents. Les nymphes et les larves hexapodes ont le même rosire que les adultes, mais des pattes courtes, en moignon, et réduites à deux articles. L'ensemble des caractères place les Psorergates dans la sous-famille des Cheylétinés, à proximilé des Æarpirynchus, dont les rapproche encore le genre de vie sous-cutané. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marerxeux, directeur, 1, rue Cassette. 391 SÉANCE DU 25 MARS 1893 MM. J. Deyenine et Sorras : Sur la névrite interstitielle, hypertrophique et progres- sive de l'enfance (Mémoires). — M. A. Cuarrn : L’infection chez les poissons. — M. Capror : Note sur la tuberculose du chien. — MM. LAveraAN et VAILLARD : Au sujet. de la désinfection par pulvérisation de liquides antiseptiques. — MM. »’Ar- SONVAL et CHARRIN : Conditions de l’action du bacille pyocyanique sur la levure. — M. p’ArsoNvaL : Dosage de l'excitation électrique des tissus vivants. — MM. A. Le- MOINE et G. Linossier : Note sur le mécanisme de la rumination chez l’homme atteint de mérycisme. — M. Gusrave Prorro wski : Sur la névrose de la langue. — M. Gasrox Bonner : Note sur les cultures à la lumière électrique continue, — M. L. Durour : Note sur le développement des tubercules des Crosnes du Japon (Stachys luberifera). — M. Prier : Note sur l'appareil salivaire des oiseaux. — MM. Nicozce et J. CANrAGUzÈNE : Note sur les propriétés colorantes de l’oxychlorure de ruthénium ammoniacal. — MM. Baraiczon et Dusarp : Sur une maladie de la truite et des œufs de truite. — M. BararzLon : Note préliminaire sur la peste des eaux douces. — M. le Dr L. Haskovec (de Prague) : Note sur quelques altérations de divers organes chez les chiens thyroïdectomisés. Présidence de M. Chauveau. SUR LA NÉVRITE INTERSTITIELLE, HYPERTROPHIQUE ET PROGRESSIVE DE L'ENFANCE, par MM. J. DEJERINE et Sorras. — (Voir Mémoires du présent volume, p. 63.) L'INFECTION CHEZ LES POISSONS, par M. A. CHARRIN. J'ai observé, en septembre 1892, une sorte d’épidémie décimant les poissons d’un bras du Rhône. J'ai reconnu, dans ces poissons, l'existence de plusieurs microbes : l'un d’entre eux s’est révélé pathogène. C'est un bacille qui se cultive sur la plupart des milieux habituels. Sur l’agar, il détermine l'apparition d’une couche mince, à reflets bleuâtres, irrisés; parfois, on aperçoit, autour d’une colonie, disposées en rayons de roue, des traiînées bactériennes. Ge parasite liquéfie la gélatine avec une certaine lenteur. Déposé à sa surface, il provoque la formation d’un cône liquide à sommet inférieur. Sur la pomme de terre, une zone saillante, mamelonnée, humide, jaune, brunâtre, naît promptement au niveau des points ensemencés. Le lait se coagule dans les quarante-huit à soixante-douze heures; il devient acide. Le bouillon offre un louche B10LOGI1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 12 382 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE blanchâtre assez uniforme; ces cultures exhalent une odeur marquée de triméthylamine. — Ajoutons que ce parasite, qui se multiplie aisément en plein contact de l'air, n’a plus qu’une faible vitalité, si on l’emprisonne sous l'huile. — Ajoutons encore que ce bacille, mobile, mesure environ 2 & de longueur sur 0 w,8 de largeur. — Ces caractères, pour intéressants qu'ils soient, sont moins particuliers que d’autres propriétés de ce germe. C'est ainsi que sa pullulation, qui n’est pas entravée à 35 degrés, est encore très active à 20. Le fait, il est vrai, n’a rien de surprenant, étant donnée l’origine de cet agent. Inoculé à la carpe, au barbillon, Ü les tue en faisant naître fréquem- ment des hémorragies, soit dans les muscles, soit dans les écailles. Ses produits, ceux qui sont insolubles dans l’alcool principalement, agissent de même. Toutefois, il convient d'user d'assez grosses doses de cultures ou de toxines : À centimètre cube des premières Do un animal de 200 grammes ; 6 centimètres cubes des secondes; nous n'avons pas réussi à exalter davantage cette virulence. Cette virulence est encore plus atténuée, si on s'adresse, d’un côté, à la grenouille, de l’autre, au cobaye ou au lapin. Là, il est nécessaire d'employer 3 et 4 centimètres cubes, pour aboutir à des accidents mortels. : L'eau, comme il fallait s’y attendre, est un excellent vecteur de ce virus. L'expérience le prouve. Il suffit pour cela d'introduire 3 grammes de culture dans 4 litres et de faire vivre, dans cette eau contaminée de la sorte, 40 ablettes, tandis que. 10 autres sont placées dans un bocal sem- blable, mais non souillé, La mortalité des premières est considérable. Dans un cas, 7 ont péri en moins de trois semaines, alors que 2 seu- lement succombaient dans le récipient témoin, et encore ces dernières ne renfermaient pas le bacille, qui se rencontrait dans les muscles et le sang des poissons du bocal infecté. Ces recherches établissent que, chez les poissons,les bactéries agissent par des procédés analogues à ceux qui ont été constatés chez les sujets à sang chaud. Elles utilisent, pour créer symptômes et lésions, leurs sécrétions, spécialement celles que l'alcool précipite. En outre, la température, qui modère l’activité pathogène d’un grand nombre d'espèces, lorsqu'elle s’abaisse, ne semble pas ici avoir cette même influence. Enfin, la contagion, si facile par l’eau, montre avec quelle rapi- dité le mal est capable de se diffuser. Rappelons, en terminant, que, dans une étude antérieure sur les alté- rations anatomiques et fonctionnelles, causées par le bacille pyocyanique dans la série animale, nous avions mis en évidence ce fait, à savoir que l'hémorragie était une des manifestations les plus constantes de l'infection aiguë aux divers degrés de l’échelle; nous retrouvons ici une nouvelle preuve de cette affirmation. (SÉANCE DU 25 MARS 3933 Dars l'histoire de l'épidémie des carpes de Fontainebleau, M. Rousseau a noté ces hémorragies. Malheureusement, dans ce cas, la bactériologie, de même que dans d’autres faits relatifs aux poissons, est trop rudimen- taire, pour que l’on puisse établir des comparaisons suffisantes. . NOTE SUR LA TUBERCULOSE DU CHIEN, par M. Capror. La tuberculose du chien a été considérée, jusqu’à ces derniers temps, comme une affection extrémement rare. En raison des caractères qu'of- frent ses lésions, on l’avait confondue, suivant ses localisations, avec la pneumonie et les tumeurs malignes généralisées. MM. Chantemesse et Le Dantec (1) ont fait justement remarquer que les lésions viscérales revêtent l’apparence sarcomateuse ou carcinomateuse. M. Charrin (2) a signalé également des faits de tuberculose canine. Au cours des recherches que nous pousuivons sur la tuberculose, MM. Gilbert, Roger et moi, j'ai porté mon attention sur la tuberculose canine et je n'ai pas tardé à en trouver d'assez nombreux cas. En octobre 1891, j'en ai recueilli 4, 3 en deux jours. La même occasion vient de se représenter. Depuis huit jours j'ai rencontré 4 nouveaux exemples de tuberculose sur des chiens entrés dans mon service, reconnus incurables et abandonnés. Dans l’espace de vingt mois, j'en ai observé 27 cas à la clinique d’Alfort; pour quelques-uns le diagnostic a été fait pendant la vie (inoculation du liquide pleurétique, injection de tuberculine) ; pour tous, il a été établi à l'autopsie par la constatalion du bacille ou par l’inoculation. Pendant ce laps de temps, environ 7,000 chiens ont été amenés à la consultation de l’école, ce qui donne un tuberculeux sur 250 malades; et, bien des cas bénins ont dû passer inaperçus. — Le fréquence relative de la tuberculose canine dans plusieurs autres pays de l’Europe, a ie signalée Le Bang, Jensen, Frôhner et Müller. Voici Les lésions trouvées à l’autopsie de mes quatres derniers tubercu- leux. Trois avaient les poumons profondément envahis, creusés de ca- vernes multiples ; sur deux les altérations pulmonaires étaient accompa- gnées de pleurésie purulente, de tuberculose pleurale et de quelques gra- nulations dans le foie et les reins. Chez le quatrième, où la tuberculose avait été nettement dénoncée par une injection de 10 cent. de tubercu- line (réaction de 106), les poumons ne renfermaient que quelques granu- (1) Chantemesse et Le Dantec. 2° congrès de la tuberculose. (2) Charrin et Gley. Soc. de Biol., mars 1893. 994 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE = D EE ESS lations, mais les ganglions bronchiques formaient une énorme masse tuberculeuse dégénérée dans sa partie centrale, creusée d’une vaste cavité remplie d’un liquide rougeâtre, riche en globules rouges, particularité évidemment due à des ruptures vasculaires provoquées par la tubercu- line (ectasine). Chez le chien, l'infection tuberculeuse revêt les diverses formes qu’elle présente dans les autres espèces. Elle a une prédilection marquée pour le poumon, la plèvre, le foie, le rein et les ganglions lymphatiques. Con- sidérées au point de vue des localisations tuberculeuses, mes 27 observa- tions donnent les chiffres suivants : altérations du poumon, 21 cas; de la plèvre, 14; des ganglions bronchiques et médiastinaux, 14; du péri- carde, 3; du cœur, 1 ; du foie, 13 ; des reins, 12; du péritoine et de l'épi- ploon, 6; de la rate, 4 ; de la muqueuse intestinale, 2. On a aussi trouvé des altérations tuberculeuses du testicule, de la vessie, de l’urètre. Cramer a relaté un cas de tuberculose de l'ovaire et Müller un cas d’ulcération tuberculeuse de la peau. — Voici le cœur d’un chien mort de tuberculose généralisée chronique; le myocarde renferme de nombreux tubercules dans lesquels j'ai constaté des bacilles sporulés. Cette autre pièce provient d’un sujet chez lequel les séreuses abdominale et thoracique étaient couvertes de tubercules : c’est l’épiploon considé- rablement et uniformément hyperplasié : il a plus de 2 centimètres d'épaisseur, sa coupe est fibreuse et son tissu, infiltré de tubercules, renfermant des bacilles en très grand nombre. Dans toutes mes observations je me suis attaché à éclairer la question étiologique. Pour une partie d’entre elles, les renseignements obtenus ont été très vagues et n° ont donné aucune indication sur le mode d'in- fection. Mais, dans la plupart des cas, la contamination paraît avoir eu pour cause la fréquentation de personnes phtisiques, l’ingestion de cra- chats virulents ou l’inhalation de poussières tuberculeuses. Sur 27 tuber- culeux, 6 appartenaient à des restaurateurs, cafetiers ou marchands de vins; ils vivaient par conséquent dans les salles où les crachats infectieux ne sont pas précisément rares et où le balayage répand les poussières virulentes dans les couches inférieures de l'atmosphère. Il est à noter, d'autre part, que le poumon est l'organe le plus alléré chez la grande majorité des chiens tuberculeux. - Sile chien est habituellement contaminé par l’homme, en revanche, il peut devenir pour celui-ci un hôte dangereux. L'animal tuberculeux qui vil dans l'appartement de ses maîtres, qui est longtemps traité pour une affection vulgaire des bronches et du poumon, auquel les enfants prodiguent d'aulant plus de soins et de caresses qu'il est plus souffrant, est un agent d'infection rare sans doute, mais moins exceptionnel qu'on ne l’a cru jusqu’à présent. À SÉANCE DU 25 MARS DO AU SUJET DE LA DÉSINFECTION PAR PULVÉRISATION DE LIQUIDES ANTISEPTIQUES, par MM. LAverAN et VAILLARD. Nous avons fait récemment des expériences dans le but de rechercher quel était le meilleur antiseptique à employer dans la désinfection que l’on opère journellement, aujourd’hui, à l’aide des pulvérisateurs. Les résultats auxquels nous sommes arrivés nous paraissent présenter un cer- tain intérêt, surtout au point de vue pratique. Technique. — Nous avons fait mouler des briquettes de plâtre ou de mortier de 10 centimètres de côté et de 4 à 2 centimètres d'épaisseur. Sur l’une des faces de chaque briquette, on creuse cinq petites cupules qui sont numérotées. La surface ainsi préparée est recouverte avec une lame de verre de même étendue que la briquette; le tout est enveloppé dans du papier à filtrer et stérilisé dans le four à flamber. Dans chacune des petites cupules de deux de ces briquettes on dépose une goulte d’un des liquides à stériliser (cultures pures de différents microbes, pus, crachats), en ayant soin d'employer pour les deux bri- quettes les mêmes liquides et de noter dans quelle cupule chaque goutte de liquide a été déposée. Après avoir remis en place la lame de verre et l'enveloppe de papier, on laisse sécher. Au bout de vingt-quatre heures, une des briquettes souillées est placée contre un mur et soumise, pendant un temps donné, à l’action du liquide pulvérisé qu’on veut expérimenter. On remet de nouveau le verre en place, ainsi que le papier d’enveloppe, et au bout de douze à vingt-quatre heures, on ensemence dans du bouil- lon les impuretés déposées sur la plaque soumise à la désinfection et celles qui ont été déposées sur la plaque témoin. A cet effet, on gratte légèrement le plâtre au niveau des petites cupules, en se servant d’un scalpel flambé et au moyen de l'aiguille de platine stérilisée et mouillée ensuite dans le bouillon, on transporte facilement un peu de la poussière de plâtre dans les tubes renfermant le bouillon de cullure. Pour éviter de transporter dans le bouillon la petite quantité de désin- fectant qui reste à la surface du plâtre, on peut laver à l'eau stérilisée -avant de procéder au grattage. Cette technique nous a permis de constater rapidement quelle était l’action des désinfectants les plus employés, sur différents microbes pa- thogènes, en procédant dans des conditions tout à fait semblables à celles de la pratique. Les microbes choisis pour ces expériences ont été: Le bacille d Eberth, le bacille de la diphtérie, le streptocoque de l’érysipèle, le bacille du pus bleu et la bactéridie du charbon pourvue de Do nous avons aussi expérimenté sur des crachats. 3930 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les pulvérisateurs employés ont été le pulvérisateur Géneste et Hers- cher et le pulvérisateur Vermorel. Des expériences comparatives ont été faites avec les liquides désinfec- tants qui suivent : 1° Lysol, solution aqueuse à 4 ou 5 p. 100; 2 Crésyl en émulsion dans l’eau (4 à 5 p. 100); 3° Acide phénique cristallisé en solution dans l’eau à 3, 4 ou 5 p. 100; 4° Sublimé en solution au 1/1000°. Le lysol (solution à 5 p. 100) a détruit constamment le bacille d'Eberth, le bacille de la diphtérie et le streptocoque de l'érysipèle. Avec le bacille du pus bleu les résultats n’ont pas été constants; quant à la bactéridie charbonneuse avec spores, elle a résisté dans toutes les expériences. La désinfection des crachats de bronchite simple a été complète. Le crésyl en émulsion dans l’eau à 4 p. 100 a donné des résultats ana- logues; la bactéridie charbonneuse a seule résisté constamment. L’acide phénique en solution aqueuse à 5 p. 100, après une pulvérisa- tion de 30 à 60 secondes, a détruit d’une manière constante: le bacille d'Eberth, le bacille de la diphtérie, le streptocoque de l’érysipèle et le bacille du pus bleu; il a stérilisé les crachats, mais il n’a pas détruit les spores de la bactéridie charbonneuse. L’acide phénique en solution à 3 p. 100 a donné des résultats moins satisfaisants : la pulvérisation pendant une minute de cette solution n'a pas suffi à détruire, dans une de nos expériences, les bacilles d'Eberth et de Lüffler. La solution acide de sublimé au 1/1000€ a donné des résultats médio- cres, dans les cas où on a pris soin de neutraliser l'excès de sublimé en Javant les places souillées avec une solution étendue desulfhydrate d’am- moniaque d’abord, puis avec de l’eau stérilisée. Dans ces conditions, nous avons constaté que, non seulement la bactéridie charbonneuse sporulée résistait toujours, mais que souvent, les autres microbes (bacille d'Eberth, strentocoque, bacilles du pus bleu et de la diphtérie) n'étaient pas détruits. Il résulte de ces expériences que l’acide phénique en solution à 5 p.100, est un excellent désinfectant et que, pour les pulvérisations, il doit être préféré même au sublimé. L’acide phénique a d’ailleurs un grand avan- tage sur le sublimé, c’est qu’il n’altère pas les parties métalliques des pul- vérisateurs. | Ajoutons que la solution d'acide phénique se conserve bien et ne s’ap- pauvrit pas sensiblement quand on la laisse dans le pulvérisateur, tandis que la solution de sublimé s’appauvrit rapidement dans ces conditions. L’acide phénique répand, il est vrai, une odeur assez persistante; mais c’est là un léger inconvénient. En ventilant fortement les locaux désin- fectés, on se débarrasse assez rapidement de cette.odeur. Le lysol et le crésyl, qui sont de bons antiseptiques, ont de grands incon- SÉANCE DU 29 MARS 391 vénients pour la désinfection des locaux au moyen de la pulvérisation; les solutions de lysol et les émulsions de crésyl encrassent rapidement les pulvérisateurs, qu'il faut nettoyer sans cesse; elles attaquent les pièces métalliques des pulvérisateurs (le cuivre surtout); elles donnent lieu à des taches sur les murs; enfin elles répandent une odeur plus persistante et plus désagréable que celle de l’acide phénique. . Nous croyons donc pouvoir conclure de ces recherches que le meilleur liquide désinfectant à conseiller pour la pulvérisation est la solution d'acide phénique à 5 p. 100. CONDITIONS DE L'ACTION DU BACILLE PYOCYANIQUE SUR LA LEVURE DE BIÈRE, par MM. D’ARSONVAL et CHARRIN. Nous avons indiqué, en premier lieu, que le bacille pyocyanique était capable de s ‘opposer au fonctionnement de la levure de bière ; nous avons ensuite reconnu que cette action n'avait pas lieu, lorsque ce bacille était atténué, lorsqu'il avait cessé d’être pathogène; nous avons, en outre, établi que cette propriété était indépendante des fonelions pigmentaires ou chromogènes. - En présence de ces résultats variés, il était utile de rechercher les con- ditions dans lesquelles le microbe de la suppuration bleue pouvait ou ne pouvait pas empêcher la pullulation de la levure en question. Il est clair que ces conditions sont innombrables ; il est clair qu'on peut les concevoir aussi mulliples, aussi différentes ou aussi rapprochées qu'on le désire, sans jamais les avoir épuisées toutes. - Pour le moment, notre attention s’est bornée à des études successives du bacille cultivé sur des milieux distincts : agar, gélatine, bouillon de bœuf, sérum liquide, sérum gélatinisé, lait, pommes de terre. Sur ces milieux, le germe est loin de pousser de la même façon; en ce qui concerne les pigments, la pyocyanine, le sérum est, en général, le plus favorable. Pareilles distinctions se manifestent relativement à la puissance d’inhi- bition que nous nous efforçons de préciser. Il n’y a guère que le bacille vivant dans la gélatine qui nous ait donné des résultats à peu près cons- tants: avec les autres cultures, la fermentation a suivison cours ou même a été activée. Il est probable, ainsi que nous l’avions signalé, qu’il ne s’agit point là d’une propriété spécifique, car, dans ce cas, nous aurions des faits posi- tifs en plus grand nombre ; il s’agit simplement d’une concurrence vitale qui ne se réalise dans le sens positif que dans un nombre très limité de circonstances. Ces circonstances sont d’autant plus difficiles à saisir toutes que, si les oscillations de la vitalité du microbe entrent en ligne de compte, celles de la levure ne sont pas négligeables. 398 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DOSAGE DE L'EXCITATION ÉLECTRIQUE DES TISSUS VIVANTS, Note de M. D’ARSONVAL. On doit à M. Chauveau l’idée de doser l'excitation électrique des tissus vivants au moyen de capacités déterminées chargées à des potentiels connus. C’est la méthode du condensateur bien connue des physiologistes, surtout depuis les publications de M. Marey et de ses élèves. Cette méthode de dosage est irréprochable au point de vue physique, mais elle ne réalise pas toutes les conditions d'ordre physiologique néces- saires pour définir complètement une excitation. J'ai insisté sur ce point à différentes reprises, en montrant qu'une excitation n’est physiologiquement définie que lorsqu'on connaît la courbe que j'ai appelée caractéristique de l'excitation. L'onde électrique que représente cette courbe n’est nullement définie dans la méthode du con- densateur. Sa forme reste inconnue et varie énormément avec le même condensateur chargé au même potentiel, suivant la résistance propre du tissu excité. Cette résistance est variable, non seulement d’une expérience à l’autre mais aussi dans le cours d’une même expérience, et influe par conséquent sur la caractéristique d’'excitation, qui ne reste pas compa- rable à elle-même. Pour éliminer cette cause d’erreur, il faut décharger le condensateur suivant une loi constante parfaitement connue. J’emploie pour cela deux procédés différents consistant à faire varier, suivant la loi adoptée, soit la capacité du condensateur, soit la force électro-motrice de la source de charge. Pour faire varier la capacité suivant une loi connue, on peut employer un des dispositifs suivants que j'ai signalés dans la communication. verbale que j'ai faite, à propos d’autres recherches, il y a un mois, à la Société (explication du phénomène de la lacune par la décharge oscillante). Supposons que les deux armatures d’un condensateur à air, reliées à une pile de charge, soient fixées parallèlement aux extrémités des branches d’un diapason vibrant, la capacité étant fonction de la dis- tance des deux plateaux variera sensiblement suivant la loi du sinus. J'ai également fait varier la capacité, suivant une loi connue et constante, en modifiant la surface du condensateur rendu rotatif, suivant une loi connue. Pratiquement, mieux vaut faire varier, suivant la loi adoptée (loi du sinus), la force électro-motrice de la source de charge. J'ai signalé anté- rieurement divers moyens que je rappellerai brièvement. Pour l'onde unique : 4° l’emploi du plongeur (i* avril 4882); 2° un court barreau, aimanté, lombant d'une hauteur connue et traversant dans sa chute une bobine fixe (Biologie, 4890, procédé repris récemment par M. Marès, de Prague); 3° une variante plus pratique du même procédé consistant à faire tomber toujours de Ja même hauteur, une petite masse de fer doux, SÉANCE DU 25 MARS 339 devant un barreau aimanté fixe, portant une petite bobine ou inverse- ment. La masse de fer doux est portée à l'extrémité d’un levier que sou- lève à chaque tour, le cylindre enregistreur; 4° pour les ondes périodiques puissantes, le meilleur dispositif consiste à employer l'alternateur sinu- soïdal que j'ai décrit à l’Académie des sciences (27 juin 1892) et à inter- caler sur le trajet du courant un condensateur étalonné, qui limite l'intensité. Avec ce dernier dispositif, tout est connu au point de vue physique et au point de vue physiologique. C’est à lui qu’on doit donner la préférence pour avoir des observations comparables et nettement définies, tant en physiologie qu’en électrothérapie. NOTE SUR LE MÉCANISME DE LA RUMINATION CHEZ L'HOMME ATTEINT DE MÉRYCISME, par MM. G. LEMoOINE ET G. LiNossier. Le mécanisme de la rumiuation a été étudié et élucidé par MM. Chau- veau et Toussaint chez les animaux. Est-il le même chez l'homme atteint de mérycisme? Toussaint l'avait admis, mais il l'avait fait en partant de celte supposition que l'acte du mérycisme doit être, au point de vue mécanique, identique à l’éructation, et, jusqu'à ce jour, aucune obser- valion attentive de la rumination chez l’homme n'avait confirmé ou infirmé ces vues théoriques. Nous avons eu récemment l’occasion de reprendre cette étude sur un mérycule à l’aide de tracés multiples qui ont confirmé entièrement l'opi- nion émise par Chauveau et Toussaint sur le rôle joué par la diminution de la pression intra-thoracique. Ils mettent en outre en évidence un fait nouveau, au point de vue du mécanisme par lequel se produit cette dimi- nution de pression : ce n’est pas seulement, en effet, l’abaissement du diaphragme, qui tend, la glotte étant fermée, à produire dans la cavité thoracique un vide relatif; les muscles inspirateurs entrent aussi en jeu pour accentuer le phénomène. En résumé, la rumination chez l’homme comprend deux périodes : 4° Le diaphragme s’abaisse, la glotte restant fermée, il en résulte quatre phénomènes : a.) Diminution de la pression intra-thoracique; b.) Dilatation de l’œsophage, dans lequel entre l’air extérieur ; c.) Rétraction du thorax sous l'influence de la pression atmosphé- rique ; d.) Traction en bas de l'extrémité inférieure de l’ œsophage, qui, avec le pharynx, forme alors un conduit rigide. 2° Les muscles abdominaux et les muscles inspirateurs entrent en action : 340 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE . a.) Les muscles grand droit de l'abdomen compriment fortement l'es- tomac, qui se trouve ainsi pris entre deux plans musculaires [een tous les deux à en expulser le contenu. b.) Les muscles inspirateurs, surtout ceux qui président à la respiration costo-supérieure, dilatent encore plus le thorax, augmentent le vide intra-thoracique, et font un appel énergique sur le contenu stomacal. C'est immédiatement après celte série d'actes préparatoires que le bol alimentaire arrive dans la bouche, avec une force plus ou moins grande, en rapport avec l'énergie des contractions musculaires qui ont contribué à produire la réjection. SUR LA NÉVROSE DE LA LANGUE, par M. GusraAvEe PI0TROWSKI. L’attention des eliniciens s'était dirigée dernièrement vers un symptôme singulier, c’est-à-dire : des picotements désagréables ainsi que des sensa- tions de brülure à la langue, qui se manifestent sans cause exactement déterminée. Ce symptôme se manifeste dans des différentes conditions. M. Albert (1) décrit ce symplôme comme provoqué par des excrois- sances semblables à celles des condylomes blennhorragiques. M. Ver- neuil (2) lui donne le nom de « ulcérations imaginaires ». MM. Four- nier, Labbé, Laborde, Perrin, Hardy et Diday prétendent que c’est un. des symptômes propres aux névropathes, aux individus sujets aux rhuma- tismes et à la goutte, enfin le symptôme initial d’ataxie locomotrice et de la paralysie générale. M. Luys partage également celte opinion. M. Magitot (3) distingue la forme névralgique et rhumatique, qui gêne et paralyse même les mouvements de la langue. Lefferts (4) et Hadden (5) ont observé ce symptôme chez les personnes qui s’imaginaient être. atteintes par le cancer. Parmi les cas cités par M. Bernhardt (6) un des malades élait atteint d’hémorroïdes. Enfin M. Galippe (7) trouve quel- ques cas de ce symplôme chez les femmes s’imaginant d’être atteintes du cancer et plusieurs résultant d’un traitement mal dirigé des maladies des dents chez les hystériques. La plupart des auteurs constatent, que (4) Albert. Zunge, dans la Real Encyklopedie d'Eulenburg. (2) Verneuil. Des ulcérations imaginaires de la langue (Bull. de l'Acad. de méd., 27 Sept. 1887). (3) Magitot. De la glossodynie (Gazette hebd., n° 48, 1887). (4) Lefferts. Imaginary lingual ulcerations (Med. News, 17 nov. 1888). (5) Halden. On a subjective sensation on the mouth in women (Lancet, 1890). (6) Bernhardt. Ueber eine weniger bekanute Neurose der Zunge und der Mundhole (Neurologisches Centralblutt, n° 13, 1890). (1) De l’obsession dentaire (Arch. d. Neurol., t. XXI, 1891). SÉANCE DU 25 MARS 341 cette maladie est assez rare et qu’elle atteint avant tout les femmes. J'ai eu l’occasion d'observer, à Lemberg, 8 cas de cette maladie, que je décrirai succinctement. Os. I. — T. M..., soixante-quatorze ans, veuve, toujours bien portante, pas nerveuse. Elle souffre depuis cinq ans des picotements et sensations de brû- lure aux mains et aux pieds. Sur les jambes, varices prononcées. Depuis trois ans, sensations de brûlure et picotement de langue, surtout à la partie anté- rieure, moins sur la partie postérieure et à la base. Les sensations ne cessent jamais, et augmentent quelquefois, au point que la malade est privée complè- tement de sommeil. Les acides, le sel, l’eau chaude et le tâtonnement augmen- tent cette souffrance. L'eau froide provoque un soulagement momentané. À l'examen de la langue, on trouve les veines tordues et dilatées sur les côtés et sur la base de la langue. Manque complet des dents et atrophie des al- véoles. " Ogs. II. — T, M..., soixante-quatorze ans, veuve. Elail toujours bien por- tante. Sur les jambes, varices prononcées. Depuis trois ou quatre ans, sensa- tions de brûlure et picotements aux mains. Depuis huit mois, mêmes sensa- tions dans la langue et dans la cavité buccale. Dilatation des veines de la langue. Os. II. — R. S.., soixante-seize ans, veuve, Israélite. Elle a souffert d’une fièvre typhoïde et d’une fièvre paludéenne. Depuis douze ans, elle est atteinte d'un rhumatisme articulaire. Elle souffre depuis huit ans des picotements et des sensations de brûlure aux pieds. Depuis huit mois, les mêmes symptômes dans la langue, qui présente les mêmes altérations pathologiques que dans les deux cas précédents. Porte des dents artificielles. Ces trois cas (que j'ai déjà publiés dans la Revue médicale à Cra- covie, 1890) n’entrent dans aucun schéma cité par les auteurs précédents. Aucune de ces femmes n'était nerveuse et aucune d'elles n’avait non plus des appréhensions d’être atteinte par le cancer. Ge qui est frappant dans ces 3 cas, ce sont les picotements et les sensations de brûlure aux pieds et aux mains, propres aux vieillards et qui précédaient les symptô- mes correspondants dans la langue. Quant à la dilatation des veines de la langue, qui n’était pas trop développée, ces manifestations ne sont pas très rares à cet âge et ne causent aucun trouble. En s'appuyant sur ces observations il serait difficile de le considérer comme cause de ce symp- tôme. Pourtant le cas suivant parle en faveur de cette opinion : Ogs. IV. — M. F.…., quarante-cinq ans, veuve. Anémique, débile peu ner- veuse. Souffre, depuis deux ans, d’un picotement et des sensations de brûlure du côté gauche de là langue, qui augmentent de plus en plus. Dilatation des veines sublinguales, surtout au côté gauche, où elle arrive jusqu’à la grosseur d’une plume d’oie. Elle arrive jusqu’à un centimètre du bout de la langue où elle augmente du double de son volume. En outre, sur les deux côtés de la langue, on voit, disséminées, des petites taches de la grandeur d’un grain de millet. Les dents, outre les trois incisives, manquent, ou bien sont complète- ment cariées. 349 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Dans ce cas nous devons considérer la dilatation des veines de la lan- gue comme cause de la malade. Il faut ajouter que la fille de la malade est alteinte aussi de la même maladie, avec les mêmes altérations pathologiques. Il est possible que l’hérédilé joue aussi un certain rôle dans ce symptôme. Je cilerai ici une observation qui est le second cas de cette maladie dans la même famille. C’est la nièce de la malade dont j'ai décrit le cas dans la première observation. OBs. V. — A. G.…, quarante-deux ans, mariée, sans enfants. N'a eu aucune maladie grave. Nerveuse. Souffre depuis trois ans de maux de tête, et pendant ces trois ans elle ne fut réglée que cinq fois. À cette époque, com- mencent les sensations de brülure et de picotement sur les deux côtés de la langue et dans la muqueuse de la cavité buccale. Cetle sensation persiste continuellement, et les aliments, trop épicés, l'augmentent. Elle craint d’être atteinte par le cancer. Pas d’altérations pathologiques. Chez cette malade il faut attribuer cette souffrance à sa nervosité géné- rale et probablement à la suggestion, puisqu'elle s'était manifestée bientôt après le commencement de cette affection chez sa tante. Cette souffrance est évidemment le symptôme de la névrose générale dans le cas que voici : OBs. VI. — E. J..., soixante ans. Israélite, veuve, d’une famille affectée des maladies nerveuses, Elle-même aussi très nerveuse, et cet état s’est aggravé considérablement après la mort de son mari. Il y a douze ans, elle a été atteinte, à la jambe gauche, de douleurs qui l'ont obligée de suivre un traite- ment par les bains sulfureux en Galicie ; mais l’état général s'était aggravé considérablement. Les douleurs dans la jambe ont augmenté, et, en outre, la sensation de brûlure de la langue se montra. Elle a consulté plusieurs méde- cins, à suivi le traitement à Teplitz, Baden, etc., et elle s’est soumise au trai- tement des bains électriques, mais sans résultat. À présent, elle est une hypo- condriaque très prononcée. Elle pleure et se plaint continuellement des souffrances qu'elle ne peut pourtant pas définir. Il existe une dilatation de l'estomac et atonie viscérale. L'appétit et le sommeil bons. Symptôme unique, picotement et sensation de brûlure dans la langue et sécheresse dans la cavité buccale (dry mouth). Porte des dents artificielles. Une dilatation peu prononcée des veines de la langue. Ici, la névrose de la langue est évidemment le symptôme de névrose générale. Os. VIL. — H. 0... quarante ans, célibataire. Outre la rougeole, aucune autre maladie. Depuis trois ou quatre ans, rhumatisme musculaire de la jambe gauche. Depuis cinq mois, sensation de brülure et picotement dans la langue et palais. Aucune autre altération. Dents inattaquées. Elle fume. Ons. VIIL. — M. N.., quarante-neuf ans, d'une famille très nerveuse, elle aussi très nerveuse. À passé la ménopause accompagnée de très graves troubles psychiques, comme manie de persécution, etc. Simultanément son mari est SÉANCE DU 25 MARS 349 ——_—_—_———————————————————— mort après une longue maladie — il avait un cancer de la langue et de la mâchoire inférieure. Alors, la malade commenca à se plaindre de sensations de brûlure et des douleurs dans la langue et dans la mâchoire inférieure, et elle prétendait même avoir une excroissancé douloureuse dans la mâchoire inférieure. L'examen ne révéla aucun changement pathologique. Néanmoins la malade s’en plaignait durant deux ans, prétendant que c'était le commen- cement du cancer. Cette maladie, appelée par Bernhard avec raison « cancro- phobie » a cessé complètement avec la disparition des troubles psychiques provoqués par la ménopause. Mes cas confirment l'opinion des autres auteurs, que ce sont surtout les femmes qui sont atteintes par cette maladie. ILfaut, d'après moi, quant à la nature de cette maladie, distinguer avant tout deux formes de celle- ci. C'est-à-dire 4° réelle, ® imaginaire. Dans le premier cas, cette maladie existe réellement, et avec le temps elle commence à inquiéter le malade et à lui suggérer l’idée de cancer, ce qui, du reste, est très facile à com- prendre. Dans le second, cette maladie n’est pas la cause mais la consé- quence de. la crainte du cancer. Une personne nerveuse qui voit cette ter- rible maladie dans son entourage commence à la redouter, elle aussi, et cette crainte suggère ensuite les douleurs, et les sensations de brûlure dans la langue. C'est dans ces cas qu’on peut parler justement d’une cancrophobie ou des ulcérations imaginaires. | Quant aux causes de la maladie réelle, elles peuvent être différentes. Les trois premières observations démontrent qu’elle peut se manifester chez les vieillards, avec les sensations de brülure aux mains et aux pieds, ces trois cas, ainsi que le cas IV démontrent que la dilatation des veines y joue un certain rôle. Dans les cas IIT et VIT, on trouve ce symptôme chez les personnes alteintes du rhumatisme, ainsi que d’autres auteurs l'ont observé. Dans les cas V et VI, cette douleur est un des symptômes, d'une névrose générale. Nous concluons par conséquent qu'il est impos- sible de considérer cette affection comme une maladie parliculière; mais il faut la considérer plutôt comme étant un symptôme de plusieurs affec- tions. Le traitement doit donc être dirigé contre la maladie qui est la base de ce symptôme. Le traitement local et sans effet est même nuisible pour la plupart du temps. Il faut recommander seulement une grande propreté de la cavité buccale et faire tenir dans la bouche, pendant quelques minutes plusieurs fois par jours une solution de bromure de 10 à 15 p. 100. Contre la sécheresse de la houche qui se manifeste parfois simultanément il faut recommander la pilocarpine. Ainsi l’on peut obtenir un soulage- ment sensible et même une disparition complète de ce symptôme, comme je l’ai obtenue dans la première observation. Dans tous les cas, il faut s’at- tendre à ce que cette affection devienne persistante. 344 SOCIÉTÉ DE Bi0LOGIE NOTE SUR LES CULTURES A LA LUMIÈRE ÉLECTRIQUE CONTINUE (1), par M. Gaston BonNier. J'ai l'honneur de présenter à la Société quelques-uns des résultats que j'ai obtenus en {comparant les mêmes plantes, placées sensiblement dans les mêmes conditions, sauf l’éclairement. Dans plusieurs de ces essais expérimentaux, un lot de plantes a été exposé à la lumière élec- trique continue, sans aucune interruption le jour ni la nuit; un second lot semblable a été soumis à la même lumière, mais au moyen d'écrans convenables maintenus à l'obscurité, tous les jours, de six heures du soir à six heures du matin; un troisième lot a été installé dans la serre de l'École Normale Supérieure dans les mêmes conditions de température et d'état hygrométrique que celles des Halles. Ces plantes étaient, en général, au moment où l’on commençait les expériences, à l’état de rhizomes, tubercules, graines, ou bien € ‘étaient de petits arbres non encore feuillés et des végétaux aquatiques. Je citerai les plantes suivantes : Jacinthes, Crocus, Tulipes, Anémones, Renoncules, Éres de fontaine, Mâche, Laitue, Cresson alénois, Sarrasin, Vesce d'hiver, Lupin blanc, Hellébores, Blé, Orge, Pâquerette, Maïs, Fève, Haricots, Gesce blanche, Millepertuis, Fraisier, Potentilles, Digitale, Primevères, Bouillon-blanc, Tanaisie, Euphorbes, Hëêtre, Frêne, If, Pins, Epicéa, she Bouleau, Potamots, etc. La lumière électrique était produite par des lampes à arc dont E rayons ultra-violets étaient éliminés à l’aide de verres d'une épaisseur convenable. On peut voir par les dessins et les photographies que je soumets à la Société, combien | éclairage continu modifie la forme et la structure des plantes. Dans ces conditions, où la plante se trouve toujours sé bent à la même lumière, au même état hygrométrique et à la même température, pendant de nombreux mois consécutifs, elle assimile, d’une manière continuelle et sans période de repos. Alors elle modifie sa forme extérieure et devient très riche en chlorophylile. La lumière n'étant pas très intense, on serait Lenté au premier abord de comparer ces plantes à des plantes éliolées; ce serait une sorte d’étiolement vert. Mais la comparaison n'est pas rigoureuse, et ni la forme, ni la structure du végétal ne sont exacte- ment celles d’une plante étiolée de la même espèce, dans laquelle les cellules seraient supposées pleines de chlorophylle. (4) Ces recherches ot été faites au Laboratoire de Physiologie végétale que, grâce à la bienveillance du Conseil municipal de Paris, j'ai pu installer au pavillon d'électricité des Halles centrales. SÉANCE DU 25 MARS 345 On pense souvent que le changement des conditions extérieures influe beaucoup plus sur la forme générale que sur la structure et l’organisation interne. Cela est souvent vrai, mais le contraire peut avoir lieu, par exemple dans le cas actuel. Il semble que la plante, dans ces condilions constantes a non assimile, sans pouvoir utiliser ses réserves et différencier ses tissus de la manière normale. Aussi trouve-t-on la structure très simplifiée, alors même que la forme extérieure n’est pas changée d’une façon très notable. Je citerai, par exemple, des branches de Frêne ou d'If développées pen- dant six mois comparativement. Dans celles éclairées à la lumière discontinue, on voit autour de la moelle un anneau libéro-ligneux continu, dont le bois est très développé, en dehors une écorce différenciée. À la lumière continue, la coupe présente un tout autre aspect, et l’on ne dirait pas que l'organe étudié appartient à la même plante; l'écorce est épaisse et bourrée de chloro- phylle qui se développe parfois jusque dans les rayons médullaires, les faisceaux libéro-ligneux sont isolés, le bois est peu développé, en général les fibres sont disparues ou sont à peine lignifiées. Des caractères anatomiques considérés comme propres à certains genres ou à certaines sections d'espèces peuvent même disparaître lorsqu'on soumet les plantes à la lumière continue; c’est le cas, pone les Pins et les Épicéa avec lesquels j'ai expérimenté. On pourrait être tenté de comparer l’éclairement ininterrompu à celui qui se produit en été dans les hautes latitudes; mais il faut remarquer que dans ces pays la lumière est bien loin d’être constante; le minimum d’assimilation à minuit y est toujours très différent du maximum de midi et il y a chez ces plantes, même en été, une période de repos relatif qui n'existe pas dans celles de mes expériences. Je me borne, pour le moment, à ces quelques indications au sujet de recherches qui sont en cours d'exécution et qui donnent déjà des résultats qui m'ont semblé avoir une certaine importance au point de vue de la Biologie générale. NOTE SUR LE DÉVELOPPEMENT DES TUBERCULES DES CROSNES DU JAPON (Stachys tuberifera), Note de M. L. Durour, présentée par M. GASTON BonNiER (1). Une plante alimentaire dont la culture s'étend de plus en plus depuis quelques années est le Crosne du Japon (S{achys tuberifera). (1) Ce travail a été fait dans le laboratoire de Physiologie végétale des Halles, mis à la disposition de M. Gaston Bonnier, professeur à la Sorbonne, par le Conseil municipal de Paris. 346 . SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE La partie alimentaire et tuberculeuse est formée par une portion de tige souterraine, une demi-douzaine, environ, d’enlre-nœuds renflés. Dans ses conditions habituelles de végétation, le Crosne du Japon pousse une tige feuillée et le tubercule se vide peu à peu pour nourrir celte tige aérienne. En outre, un certain nombre de rameaux, restés souterrains, sont grêles, allongés, mais se terminent par des tubercules identiques à celui qui a fourni la plante entière. On a déjà signalé que, dans quelques cas, les choses se passent différem- ment. Par exemple, M. Seignette (1) a montré que des ramifications sou- terraines, nées à l’aisselle des écailles qui, sur les tubercules, représentent les feuilles, peuvent se renfler et donner de nouveaux tubercules. Bien plus, il a fait voir qu’en forçant le tubercule, en le cultivant dans une serre, au lieu d'obtenir hâtivement une plante feuillée, on obtenait, dans le pro- longement du tubercule planté, un nouveau tubercule semblable au pré- cédent et à peu près de même taille. Les matières de réserve ont émigré de l’ancien tubercule pour venir en former un autre. Le but de cette note est de montrer que, dans des conditions particu- lières, on peut même obtenir des tubercules aériens. L'expérience a été faite dans le sous-sol des Halles de Paris, éclairé à la lumière électrique d’une manière continue. Des tubercules de Crosnes ont été plantés dans trois conditions diffé- rentes : 1° À une lumière électrique continue assez vive; une lame de verre était interposée entre la source lumineuse et les plantes. Des expériences préa- lables avaient fait voir que la lumière électrique directe est nuisible à la végétation ; 2° À une lumière électrique continue faible, sous une table ou la lumière n’arrivait que diffusée et très atténuée ; 3° À l’ obscurilé sous un écran noir, mais dans le même local. Les plantes se sont développées d’une façon très particulière. Au-dessus du sol, il s’est formé, dans ces trois cas, des tiges à entre- nœuds très courts et renflés, portant, comme les tubercules souterrains habituels, de petites écailles au lieu de feuilles; en un mot, il s’est formé des tubercules aériens. Ils sont simples ou ramifiés et leur diamètre est plus faible que celui des tubercules souterrains. Progressivement, les réserves des tubercules plantés ont été résorbées pour nourrir les parties aériennes. | Fait remarquable : 2! ne s'est formé aucune racine; quand les tuber- cules souterrains ont été suffisamment épuisés, le tubercule aérien n'ayant pas de soutien, s’est détaché et est tombé sur le sol. Tel est le fait commun à ces Crosnes, placés dans le sous-sol des Halles. Les échantillons placés en vive lumière étaient très verts, bourrés de (4) Recherches sur les tubercules (Revue générale de botanique, t. I, 1889). SÉANCE DU 25 MARS SAT chlorophylle. 11 y en avait dans l'écorce, dans les cellules parenchy- mateuses du bois, jusqu’au centre de la moelle. Dans l'écorce, les grains de chlorophylle étaient assez gros, épars dans les cellules; dans la moelle au contraire, les grains étaient beaucoup plus petits et groupés autour des noyaux; tantôt contre les parois des cellules, tantôt au centre, suivant la position du noyau dans la cellule. Signalons encore un fait intéressant : il y avait beaucoup d’amidon dans ce tubercule aérien, surtout dans l'écorce; la moelle en contenait également, mais d'autant moins qu'il s'agissait de cellules plus rappro- chées du centre du tubercule. Voici ce qui constitue l'intérêt de cette remarque. La substance de réserve, dans les tubercules normaux, est une sorte de sucre étudié tout récemment par MM. Schulz et De Planta (1). Ils lui ont donné le nom de S{achyose. Cette substance appartient au groupe de ce que l’on appelle parfois les polysaccharides cristallisables, Gomme la raffinose, en effet, dont elle se rapproche beaucoup, la stachyose est interverlie par l’ébuilition avec des acides et donne comme produits du galactose, du glucose et du lévulose, mais ces trois substances dans d’autres proportions que la raffinose. Le tubercule de Sfachys ne contient pas d’amidon. Par conséquent, les tubercules aériens de Séachys contiennent, comme réserve, une substance qui n'existe pas dans les tubercules souterrains. Les réserves, au lieu de servir à former une tige normale et des feuilles, ont été employées à constituer un nouveau tubercule; mais la stachyose, substance soluble dans l’eau, n’a pas été simplement déplacée; il y a eu changement de substance et formation d’amidon. Les échantillons qui ont été soumis à une lumière faible, ont aussi verdi et formé de la chlorophylle ; mais ils sont d’une couleur beaucoup plus pâle. Quant aux échantillons développés à l'obscurité, ils sont restés naturel- lement blancs. Pendant que ces plantations se développaient dans le sous-sol des Halles, d’autres tubercules étaient placés aux conditions ordinaires de nuit et de jour alternatifs, dans la serre de l'École Normale Supérieure, dans les mêmes conditions de température qu'aux Halles. . Leur développement a été normal. On a obtenu une tige et des feuilles normalement constituées ; dans la partie de cette tige située sous le sol, il s'est développé un grand nombre de racines, et la plante continue actuellement à se développer. Dans cette Lige, il n’y avait de chlorophylle que dans l'écorce ; les vais- seaux étaient plus nombreux dans les tiges Luberculeuses des Halles, et aux quatre coins de cette tige carrée il y avait des paquets de collen- (1) Ueber einige Bestandteile der Wurzelknollen von Stachys tuberiferæ (Landwirth schaftliche Versuchsstationen, vol. XL, 1892). 12. 348 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE re 0 0 0.00 OS 00 00 OU: 0FU | chyme qui faisaient totalement défaut aux entre-nœuds tuberculeux, courts et à section arrondie. Dans une autre expérience, effectuée de la même façon et dans le même local, les caractères tuberculeux des parties aériennes a été moins accen- tué. Les entre-nœuds ont été moins larges et plus allongés ; en outre, les feuilles, quoique restant Lrès petites, avaient un peu plus le caractère d'organes aériens et assimilateurs pour les échantillons éclairés. Un petit nombre de racines ont pris naissance. Les résultals de cette seconde expé- rience, moins accentués que ceux de la première, tiennent sans doule à l’état de maturité des tubercules plantés, car les conditions extérieures sont restées identiques. Il y a eu deux mois d'intervalle entre les deux plantations. Mais, ici encore, rien de plus dissemblable que les plantes obtenues aux Halles et dans une serre à l’alternalive de jour et de nuit. Dans cette série d'expériences, on s'était proposé de chercher quelle est l'influence sur le système radiculaire de la profondeur à laquelle sont plantés les tubercules. D'une part, les tubercules sont enterrés complètement, la partie supé- rieure du tubercule étant à 4 ou 2 centimètres au-dessous du niveau du sol. D'autre part, les tubercules sont incomplètement enterrés, un ou deux de leurs entre-nœuds faisant saillie au-dessus du sol. Il est bien facile, même sur un échantillon une fois arraché, de voir comment il à été planté, car dans toutes les parties exposées à la lumière, il se développe de la chlo- rophylle. Quant aux racines, sur les échantillons complètement enterrés, elles se développent surtout aux nœuds des tubercules les plus voisins du sol et aux inférieurs de nouvelle formation qui sont sous le sol. Au contraire, pour Les tubercules incomplètement enterrés, ce sont les entre-nœuds inférieurs du tubercule qui portent la majeure partie des racines. En d’autres termes, les racines se développent sensiblement à un niveau constant au-dessous du sol. La chose est surtout apparente pour les plantes qui fournissent un développement normal. Pour ces dernières on constate, en outre, que ce sont les tubercules le moins profondément enterrés qui ont fourni les plantes les plus hautes, les plus rameuses, en un mot, les plus vigoureuses. - En résumé, on voit qu’en variant les conditions dans lesquelles on fait croître les plantes, on peut, dans certains cas, amener un dévelop- pement tout à fait particulier, par exemple, obtenir des organes (tuber- cules nouveaux aériens) qui habituellement, ne se forment pas. La profondeur seule à laquelle on plante un tubercule exerce une influence marquée : les racines ne se forment pas dans la même région du tubercule, et les plantes obtenues présentent des degrés de vigueur très différents. SÉANCE DU 29 MARS 349 ————————_————…—…—…—…—…—"—…—" —"— —…"…"…—…— ….….… …" — — … …——— NOTE SUR L'APPAREIL SALIVAIRE DES OISEAUX, par M. le D' A.-H. PrcLiET. Le système des glandes salivaires parait assez peu développé chez les oiseaux, et il n'existe guère sur ce sujet d’études d'ensemble. La difficulté d'isoler des groupes glandulaires très petits enfouis sous des membranes cornées, dont la surface sèche, et non lubréfiée en appa- rence, Ôte l’idée même d’une sécrétion salivaire en est la cause. Milne Edwards consacre à peine quelques lignes à ce sujet; ces organes excré- teurs n’ont, dit-il, que peu d'importance et ne sont que très imparfaite- ment connus. Le fait est que Duvernov, Meckel, Muller, Sebold, Stannius Chauveau, Widersheim, n’ont décrit que les glandes assez volumi- neuses pour être isolées au scalpel; telles que la glande sublinguale de l’oie, lies palatines de l’autruche; les groupes glandulaires du pic, ceux des perroquets et des grimpeurs ; et de leurs descriplions mêmes se dégage l'impression de faits isolés, non coordonnés. M. le professeur Ranvier a repris dans son cours de 1883 (1), l'étude de ces glandes et en à donné une description générale en insistant sur ce fait que les classifications des anciens anatomistes étaient trompeuses en vertu même de leur méthode. En effet, par analogie avec les animaux supérieurs, on décrit chez les oiseaux en anatomie comparée des parotides, des u sblinguales et des sous-maxillaires. Or, le type morphologique de l’oiseau, très éloigné de celui des mammifères, se rapproche au contraire beaucoup de celui des sauriens et des chéloniens. C'est avec ces animaux, chez lesquels les glan- dules de la bouche et du pharynx se placent où elles peuvent, s’étalent et se dissimulent sous une muqueuse plus ou moins rigide, qu'il faut com- parer l'oiseau. Nous avons étudié les glandes salivaires des oiseaux au double point de vue de leur siège et de leur structure. Le procédé d'examen était le suivant : Fixation de la tête par un liquide conservateur, décalcification par l'acide picrique additionné d'acide formique, durcissement et coupes. Ces manipulations successives ne sont pas sans nuire à l'étude du plasma cellulaire, mais elles permettent très bien de se rendre compte de la situa- tion des groupes glandulaires ; et des coupes faites sur des lambeaux de muqueuse excisés ont permis de préciser les renseignements topographi- ques fournis par les coupes larges. 1° DISPOSITION DES GLANDES. — a) Bec supérieur. — Les glandes forment, chez le canard, des groupes très abondants dans le bec supérieur, surtout à son milieu. A l'insertion du bec elles n'existent plus. Ces groupes ces- sent lorsque l’on avance vers la pointe du bec. Ils sont alors remplacés par des corpuscules de Herbst si nombreux que, sur certaines préparas (1) L. Ranvier, In Journal de micrographie, 1884, p. 146. 390 SOCIÊTÉ DE BIOLOGIE tions, on les voit combler entièrement les cavités de l’os spongieux qui forme la charpente du bec. Chez la corneille le bec, dans son tiers moyen ne présentait pas de glandes; en revanche, le poulet montre bien les deux groupes glandulaires palalins, qui sont au contact l’un de l’autre sur la ligne médiane. b) Bec inférieur et langue. — L'étude des glandules de la ler: est inséparable de celle du bec inférieur. Ge sont ces organes qui, dans les espèces où elles sont apparentes, ont été décrites sous le nom de glandes sublinguales et sous-maxillaires. Chez le poulet à la naissance, les coupes frontales portant sur la base de la langue montrent deux groupes consi- dérables de glandes et un plus petit. Le plus important vient déboucher par une série d'orifices dans le sillon qui sépare la langue de la mâchoire. Ce groupe est formé de lobes glandulaires qui sont développés, non sous la langue, mais dans le plancher buceal, sous la muqueuse qui recouvre le maxillaire, et arrivant presque au contact de los. Le second groupe, plus faible occupe les deux coins de la langue, qui présente naturellement sur les coupes frontales, l'aspect d’un triangle à base supérieure, à som- met inférieur servant à l'insertion de l'organe. C’est aux deux coins libres de la langue que se trouvent les groupes de glandes qui pénètrent dans la profondeur jusqu'aux trois os encore cartilagineux qui forment la charpente de l'organe. Le troisième groupe est situé dans l'épaisseur même du bec, au niveau de son bord libre et en dedans du bord interne du maxillaire supérieur ; il se compose de lobes assez pelits qui s'ouvrent en face des bords latéraux de la langue et correspondent, par conséquent, aux glandes du deuxième groupe. Sur la langue du canard adulte, les deux îlots qui forment notre deuxième groupe sont très développés à la base, au niveau du coussinet fibro-graisseur qui double la muqueuse; ils n'existent pas à la pointe, comme l’a moniré M. Ranvier. c) Pharynx et æsophage. — Les fœtus de poulet assez jeunes ne mon- trent dans le pharynx que des bourgeons épithéliaux très volumineux et très renflés, comparables aux bourgeons de plumes, mais, s’enfonçant en profondeur au lieu de faire saillie au dehors. Ils forment deux groupes, l’un antérieur, qui occupe le côté pharyngien de la cloison laryngo-æso- phagienne, l’autre postérieur, qui est composé de deux masses latérales, venant au contact sur la ligne médiane. Le moineau franc nous fournit le développement complet de cette ébauche. On y peut compter jusqu’à six groupes glandulaires distincts : deux médians et quatre latéraux. Le groupe médian antérieur est situé entre l’œsophage et le larynx; il est de forme carrée, et s'étend en largeur d’une muqueuse à l’autre, en sorte que, sans avoir pourtant pu voir d'orifices glandulaires dans le larynx, nous pouvons penser qu'il est commun aux deux muqueuses aux- quelles il est intermédiaire. Le groupe médian postérieur est également SÉANCE DU 29 MARS 594 EEE —— — — — EE quadrilatère sur les coupes. Les deux groupes latéraux sont tout à fait inégaux comme volume et comme forme. Le plus volumineux occupe la commissure pharyngienne, il #st donc franchement latéral et composé de lobes développés, très volumineux. Le second est situé entre ce groupe et le groupe postérieur, il est composé de lobes aplatis et forme une nappe étalée, qui, sur quelques pièces, peut rejoindre le groupe postérieur. De ces glandes, les groupes latéraux des commissures sont de beaucoup les plus importants et descendent dans l’œsophage où ils forment deux masses admirablement développées, surtout chez le canard où elles se continuent jusqu'aux glandes du jabol, reconnaissables aux caractères spéciaux qu'y a décrits M. le professeur Renaut. De cette étude anatomique, on peut déduire que l'appareil salivaire des oiseaux n’est que rarement disposé en glandes volumineuses, mais qu'il n’en exisle pas moins, très développé, formant des nappes sous-mu- queuses parfois confluentes. Le tissu adipeux étant absolument rare dans la tête des oiseaux, on saisit parfaitement le caractère anatomique de ces glandes. Elles se logent où elles peuvent, entre la muqueuse, l'os et le muscle . C’est ce qui explique leur défaut d'apparence et le dédain des anatomistes pour elles. Quoique ceci s'éloigne de notre sujet, nous pour- rions ici noter la présence de groupes glandulaires restreints dans les fosses nasales du poulet. 2° STRUCTURE DES GLANDES. — Ce sont, nous l’avons dit, des glandes en tube composées. Elles se développent par un bourgeon plein qui se creuse, et, au lieu de fournir des renflements agminés à sa périphérie, comme dans les glandes salivaires des mammifères se transforme en une poche, que hérissent des saillies papillaires, d’où trois états dans ces glandes, élats que l’on peut suivre facilement sur le même animal, car il existe toujours des lobules très petits à côté des lobules adultes (fait qu’on ne rencontre pas non plus chez les mammifères). À son premier stade, la glande est utriculaire, à peine formée de saillies, c’est, en petit, le bonnet de l'esto- mac du bœuf. A un stade plus avancé, ces saillies ont monté; elles ont rétréci la lumière de la cavité glandulaire et elles sont chargées de cel- lules sécrétantes, ce qui fait que chaque saillie ou cloison papillaire déli- mite une courte glande en tube. Enfin, un troisième état montre ces glandes, individualisées et se réunissant dans un canal excréteur commun à épithélium différencié. Le développement de ces charpentes villeuses, très vasculaires, explique peut-être ce fait, signalé par M. Ranvier, que chacun des lobes ainsi formés et qui atteignent le volume d’une tête de petite épingle, ne se présente pas enveloppé dans une membrane basale distincte. On peut trouver chez l’homme, à un degré très incomplet, des forma- tions glandulaires comparables, avec saillies papillaires extra-glandu- laires; citons les glandes du col utérin (Gornii) et celles de la prostate (Regnauld). 352 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les cellules varient suivant les glandes. Nous avons dit que M. Ranvier avait constaté l'existence de glandes séreuses. En général, les glandules les plus petites, celles qui sont utriculaires, sont tapissées par des cellules caliciformes très étroites et très allongées, comparables aux éléments des glandes muqueuses cutanées de la grenouille. Les glandes volumineuses, celles de la base de la langue et de la commissure pharyngienne, se mon- trent très granuleuses après l’action de l'hématoxyline ; quelques-unes sont même opaques et graisseuses après montage dans la glycérine. Nous avons montré dans un autre travail (1), que le mélange de sécrétions aqueuse et graisseuse pouvait se constater dans les glandes cutanées de l'oiseau. Il n'est done pas surprenant de retrouver ce fait dans une dermo-muqueuse. . Mais cette analogie avec les glandes sébacées vient à cesser si l’on consi- -dèreles canaux excréteurs. Ils sont en effet tapissés d’un épithélium cubi- que qui se continue à travers les couches toujours très épaisses de l’épithé- lium de la muqueuse. Les cellules en sont striées longitudinalement, comme chez les mammifères, mais leur cytoplasma est beaucoup plus opaque. Les canaux sont fort larges et présentent assezsouvent des saillies papillaires. Ils viennent s'ouvrir au fond des plis de la muqueuse par des goulots évasés. Le conlenu des canaux est formé surtout de cellules des- quamées constituant des masses granuleuses fixant les réactifs et n'ayant pas les caractères d'une secrélion muqueuse, bien que les cellules qui chargent les villosités glandulaires soient presque toutes ovoïdes et caliciformes. La forme des glandes salivaires de l’oiseau est donc spéciale et les cel- lules en paraissent chargées de fonctions très complexes, puisqu'elles sécrètent du mucus, des ferments et des corps gras. Conclusions. — 1° Les glandes salivaires sont abondantes chez les oiseaux, quoique dissimuiées sous la muqueuse. 90 Il faut renoncer à les classer suivant les caractères des glandes sali- vaires des mammifères el les rapprocher au contraire des glandes des -verlébrés inférieurs, comme l’ont déjà proclamé Widersheim et M. Ran- -vier. 3° Leur type glandulaire est tout à fait semblable au type glandulaire général de l'oiseau, qui est très particulier et sa structure permet, comme sa morphologie, de le rapprocher de celui des reptiles, en l’éloignant ce celui des mammifères. C’est la confirmation au point de vue de l'anato- mie générale des ressemblances que les zoologistes ont depuis longiemps établie entre les oiseaux et les reptiles. (1) A. Pilliet. Note sur la glande sébacée des oiseaux et sur le type glandu- aire dans cette classe de vertébrés. Société zoologique de France, 11 juin 1889. SÉANCE DU 25 MARS 393 NOTE SUR LES PROPRIÉTÉS COLORANTES DE L'OXYCHLORURE DE RUTHÉNIUM AMMONIACAL, _par M. Nicozce et J. CANTACUZÈNE. Lorsque M. Joly fit connaître, le 26 décembre dernier, l'oxychlorure de ruthénium ammoniacal et annonça qu'il possédait un grand pouvoir tinetorial vis-à-vis des fibres textiles, il nous parut intéressant d'étudier ce composé, au point de vue histologique. Nous présentons, ici, simplement le résumé de nos recherches, que nous avons pu entreprendre dès le mois de janvier, grâce à l’obligeance de M. Joly; notre travail in extenso devant paraître dans les Annales de l'Institut Pasteur. En solution aqueuse à 14/1000, l’oxychlorure colore le tissu en se fixant principalement sur les noyaux; additionné d’une faible quantité d'acide acétique, il constitue un réactif purement nucléaire ; si la quantité d'acide est suffisamment grande, il colore exclusivement les granulations des Mastzellen. Grâce à son insolubilité dans l'alcool, il peut donner rapidement et très simplement de belles préparations. Ces propriétés, jointes à l'absence d’affinité pour l'hémoglobine et les granulations éosinophiles, montrent clairement qu'il s’agit d’une matière colorante basique typique. L'oxychlorure peut être employé, après toute espèce de réactifs fixa- teurs, à l'exception de la liqueur de Flemming. Dans la coloration des pièces fixées par l'acide osmique, il donne des résultats supérieurs, croyons-nous, à n'importe quel autre réactif colorant. A l’exception des bacilles tuberculeux et lépreux, l’oxychlorure colore soit sur lamelles, soit, dans les coupes, les micro-organismes courants. Il peut même fournir de belles colorations de micro-organismes qui ne prennent pas le Gram (fièvre typhoïde, choléra des poules). C'est donc le premier exemple d'un composé minéral soluble doué de propriétés colorantes analogues à celle des couleurs végétales ou arti- ficielles. 11 est permis de supposer que les fonctions basiques de l'oxychlo- rure sont dues à un groupement azoté analogue à celui qui caractérise les couleurs basiques d’aniline. SUR UNE MALADIE DE LA TRUITE ET DES ŒUFS DE TRUITE, par MM. BaTaïzcLon et DuBarp. (Note présentée par M. A. Giarp.) Des élevages de truites, installés par l’un de nous sur la commune de Velars-sur-Ouche (Côte-d'Or), ayant donné, cette année surtout, une mortalité considérable des œufs aux divers stades de leur évolution embryonnaire, nous avons recherché les causes du mal. 304 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les fécondations sont pratiquées suivant la méthode russe; le dévelop- pement s'effectue sur des claies disposées à peu près suivant les indica- tions de Coste dans un ruisseau alimenté par une source. Les conditions paraissent assez bonnes, la source étant captée pour cet usage immédia- tement à sa sortie de terre, l’eau ayant en hiver une température à peu près fixe de 10 degrés, en été ne dépassant jamais 12 degrés. L’infection des œufs commence par l’apparilion dans le vitellus d'une tache blanche dont le développement évolue rapidement. Au bout de quelques jours, l’œuf mort est devenu complètement opaque comme un œuf non fécondé. L'œuf malade est lavé soigneusement au sublimé et à l’eau stérile, puis on le fait éclater au moyen d’une pince dans un tube également stérilisé. La bouiliie ainsi obtenue est inoculée sur gélatine et donne après douze heures soit en piqûre, soit en strie, une liquéfaction très marquée à la tem- pérature de 24 degrés. Des cultures ainsi obtenues, nous avons isolé une bactérie pathogène très mobile, mesurant de 3 à # y de long et de 0 p,9 à À Lu. de large. La forme est celle d'un diplobacille légèrement recourbé en arc, un peu étranglé en son milieu avec deux extrémités arrondies. On trouve des formes plus courtes, plus trapues chez lesquelles la courbure et l’étranglement moyen sont moins accentués. Cette bactérie a évolué à la température du laboratoire (9 degrés en moyenne) au point que la liquéfaction était déjà manifeste au bout de vingt-quatre heures. La morphologie de sa culture rappelle celle de beau- coup d’autres microbes liquéfiants, en particulier celle de la bactérie décrite en 1888 par Legrain chez la grenouille. Le développement est rapide, le liquide est floconneux et on observe un abondant dépôt blanchâtre. Pour mettre en évidence la réaction des cultures nous avons songé à utiliser les propriétés de la phtaléine du phénol. Une goutte du réactif ajoutée aux tubes à la limite de l’alcalinité nous donnait une teinte rouge. Cette teinte disparaît rapidement au voisinage de la partie liquefiée qui se montre entourée d’une auréole claire. Cette apparence induirait en erreur : si l’on fait la réaction du tournesol, on constate une alcalinité bien marquée. Il est probable que la phtaléine est décomposée par les micro- organismes, car si on en ajoute une quantité suffisante, la teinte rouge réapparaît. ; Notons que certaines des formes non pathogènes, isolées de nos cultures, ne produisent pas cette décomposition : une forme non liquéfiante en par- ticulier donne au substratum une réaction alcaline nettement marquée par une teinie rouge foncé. Sur la pomme de terre, on voit, au bout de douze à vingt-quatre heures sur la strie d'inoculation, une traînée d’un jaune brunâtre qui s’épaissit rapidement. Sur sérum gélatinisé, l'évolution est au moins aussi active que ht #e «| SÉANCE DU 29 MARS 3535 —_——————————aééégUZéZUZZLZUZLUZU sur gélatine : au bout de quelques heures à 24 degrés les colonies ont creusé des cupules de plusieurs millimètres de profondeur. Nous avons songé à rapprocher cette bactérie de celle de la septicémie gangreneuse de la grenouille, étudiée par Legrain, parce que nous l'avons trouvée chez des truites adultes mortes avec des lésions locales du système musculaire, rappelant ce qui s’observe dans la maladie bien connue de la grenouille. Le poisson mort présente dans les masses musculaires de la queue et du dos des points profondément rongés et des cuitures faites avec le sang des branchies, le tissu du rein, les masses musculaires désagrégées, nous isolons la forme tirée de l’œuf. En effet, la bactérie de l'adulte présente les mêmes caractères morphologiques, même taille, même allure, même forme et même réactions de culture. Elle donne à l’inoculalion les mêmes résultats positifs. Nous ne pouvions songer à pratiquer des inoculations en aquarium sur un poisson aussi délicat que la truite. Nous nous sommes adressés à des espèces plus résistantes, le brochet, le gardon, l’'épinoche. Des brochets et des gardons pesant en moyenne 250 grammes reçoivent dans les masses musculaires dorsales un centimètre cube d’une culture diluée et meurent dans les trente-six heures qui suivent l’opération. Des épinoches ponc- tionnées avec l’aiguille de Pravaz meurent en trois jours. Les accidents sont les mêmes. La région caudale est paralysée et quelques heures avant la mort l'animal progresse en sautillant dans son réservoir, n'utilisant plus, pour la locomotion, que ses nageoires pectorales (1). À l’autopsie, le long de la ligne latérale, on trouve une véritable culture de microbes; tous les viscères sont byperhémiés. Des coupes pratiquées dans les muscles lésés montrent un vérilable émieltement des faisceaux. Les bactéries sont accumulées dans les interstices du tissu cellulaire et dessinent par double coloration au bleu de méthylène et à l’éosine un élé- gant réseau autour des faisceaux musculaires. Les grenouilles inoculées meurent également au boul de quelques jours avec des accidents seplicémiques, une vascularisation exagérée des téguments et des viscères, des hémorrhagies sous-cutanées et sous-mu- queuses, etc... Le diplobacille en question, malgré quélques analogies morphologiques de cultures, paraît nettement distinct de la bactérie de Legrain, par sa forme et surtout par sa taille. Les expériences entreprises pour établir si ce microorganisme est patho- gène pour les animaux à sang chaud n’ont pas encore donné de résullats positifs. (Laboratoire d'atanomie et de physiologie de la Faculté des sciences de Dijon.) (1) Dans toutes ces expériences, plusieurs témoins recevaient la même lésion et l'inoculation d'une quantité égale d'eau stérile. Ils ont résisté régu- lièrement. : 3506 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE a —————————"—…—…—"—”—”"”—”—"”—”"”"’"—…"…"…"”"’"—…" ’…’—.…”…”"”"— — —…" NOTE PRÉLIMINAIRE SUR LA PESTE DES EAUX DOUCES, par M. E. BATAILLON. (Note présentée par M. A. Grarp.) L'étude de la maladie de la truite et des œufs de truite entreprise en col- laboration avec M. le D° Dubard m'a conduit à rechercher si la bactérie qui attaque une forme adulte et ses œufs, dans un milieu où la propaga- tion est éminemment favorisée, ne serait pas pathogène pour d'autres formes aquatiques. La question m'a paru présenter quelque intérêt, à un moment où se pose, pour certaines espèces, presque disparues, le grave problème du repeuple- ment des cours d’eau. La cause de la maladie des écrevisses peut être considérée comme inconnue. Une communication faite récemment à la Société de Biologie (1) par M. Raphaël Dubois ajoute quelques observations curieuses aux essais infructueux donnés jusqu'ici. Mais cette note ne nous dit pas si les deux formes parasites signalées, formes qu'il sera intéressant de rattacher, sont pathogènes où non. J'ai inoculé à plusieurs reprises le bacille de la truite à des lots d'écre- visses. Les sujets en expérience étaient isolés dans des vases, avec une eau cons- tamment aérée par la trompe.Jamais dans mes opérations, il n’y a eu mort d’un témoin (ces témoins étant placés dans les mêmes conditions, après injection, à quantité égale, d’eau stérilisée); jamais un des sujets inocu- lés n’a résisté plus de deux jours. Les symptômes observés sont ceux donnés pour la peste. L'animal semble éprouver de la douleur à s'appuyer sur les pattes. Si on lui saisit la pince, on sent que la contraclion se fait par secousses successives. L’anus est tuméfié et béant; et en sortant de leurs vases les animaux morts, j'ai compté jusqu'à huit pinces détachées pour douze sujets. Sur les écrevisses tenues en réserve dans un aquarium avec un léger courant d’eau, j'avais quelques cas de mort avec les mêmes accidents. Or, un fait avait frappé mon attention depuis plusieurs années. Les écrevisses mortes dans ces conditions présentent souvent, dans la région caudale, des faisceaux musculaires opaques. Si l’on prépare un de ces faisceaux avec double coloration au bleu de méthylène et à l’éosine, on y trouve une quantité de bacilles identiques à celui de la truite. Grâce à cette indication, il est possible de tirer des muscles d’écrevisses malades les mêmes cultures, la même forme microbienne étudiées dans une précé- dente communicalion. (1)R. Dubois. Recherches de pathologie comparée sur la peste des Ecre- visses; séance du 11 février 1893. SÉANCE DU 295 MARS 301 J'ajoute que ces cultures ont donné, sur plusieurs lots d’épinoches comme sur les grenouilles, les mêmes résultats positifs et les mêmes symptômes. Il importe de noter ici que les écrevisses étudiées sont de ÉHONENENNS quelconque. Les moyens dont je dispose ne m’ont pas permis jusqu'ici d'observer sur place, et je ne puis dire jusqu'à quel point ce genre d’infeclion est général. De plus, dans les conditions où j'ai opéré, il n’y a pas de critérium pour affirmer que les sujets sont sains avant l'apparition des troubles. Mais je doute fort qu’on puisse avoir sur ce point des garanties bien sérieuses. En tout cas, le résultat expérimental paraît net si l’on considère la résistance constante de nombreux témoins. Il n’est pas rare de rencontrer en cette saison des pontes de Aana tem- poraria complètement infestées. Les œufs sont déformés, les sphères vitel- lines qui font hernie de toutes parts semblent constituer un excellent milieu de culture pour une forme que j’ai également isolée et sur laquelle il est inutile d’insister davantage. Elle est pathogène pour les mêmes espèces et présente des caractères morphologiques identiques. - En résumé : 4° Le bacille isolé de la truite a donné à l’inoculation des résultats positifs sur divers poissons, sur la grenouille et sur l’écrevisse ; 20 Le bacille isolé de l’écrevisse malade a donné des résultats positifs sur les mêmes poissons et sur la grenouille; il a été inoculé avec succès à d’autres écrevisses : 3° Le bacille isolé des pontes de grenouille infestées s’est montré patho- gène pour toutes les formes précédentes. La bactérie présentant dans tous les cas les mêmes caractères de forme, de dimensions et de cultures, on peut se demander s’il n’y a pas là une véritable peste, des eaux douces, attaquant des formes nombreuses et trouvant des milieux de culture particulièrement riches dans les pontes de poissons et surtout d'amphibiens. La question, ainsi posée, rendrait peut-être explicable bien des points obscurs; par exemple, en ce qui concerne la maladie de l’écrevisse : la marche de la contagion d’aval en amont, l'influence des barrages, la relation supposée entre la maladie et la présence de certains poissons, etc. (Laboratoire d'Anatomie et Physiologie de la Faculté des sciences de Dijon.) NOTE SUR QUELQUES ALTÉRATIONS DE DIVERS ORGANES CHEZ LES CHIENS THYROIDECTOMISÉS, par M. le D' L. Haskovec (de Prague). Le grand intérêt qui s'attache aujourd'hui à la glande thyroïde au point de vue clinique, en ce qui concerne le myxœdème, la maladie de Base- 398 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE dow et l’acromégalie, m’a engagé à suivre au laboratoire de la Faculté de médecine, à l'Hôtel-Dieu, les expériences de M. Gley, concernant la physiologie de la glande thyroïde. J'ai eu l’occasion, ces temps derniers, d'examiner les organes de quatre chiens thyroïdectomisés, dont lrois sont morts, trente-cinq à quarante heures après l'opération, et un a survécu six jours. J'ai l'honneur de vous montrer les préparations qui peuvent présenter quelque intérêt. Pour le rein, je confirmerai les recherches de Alonzo (1), du moins en ce qui concerne la néphrite superficielle aiguë. On voit dansles canalicules une desquamation de l’épithélium, au stade de dégénérescence paren- chymateuse. Dans les corpuscules de Malpighi, ainsi que dans quelques endroits dans Les espaces intercanaliculaires, on voit une agglomération de leucocytes. Les capillaires des glomérules sont dilatés. Dans les tubes droits et dans les anses de Henle on voit des cylindres hyalins et grenus. Dans la rate, on remarque une augmentation de leucocytes, variable suivant le cas, mais toujours notable. M. le professeur Cornil, qui a bien voulu examiner ces préparations, m'a fait observer la distension des folli- cules, semblable à celle qu’il a lui-même Poe dans les amygdales, dans des cas d’inflammation aiguë. Dans le foie, on observe une dilatation extrêmement marquée des veines centrales, et une infiltration Sue autour d'elles et dans les espaces intertrabéculaires. Dans les poumons qui présentent de la bronchite plus ou moins intense et, sur les bords, de l'emphysème, on constate la dilatation des capillaires, l'infiltration sanguine quelquefois très intense. En résumé, on peut dire que dans les organes des animaux morts dans un. court délai, après l’opération, il y a une tendance aux hémorragies beaucoup plus prononcée que chez le'chien, qui a survécu plusieurs jours après l'opération. Dans tous les organes on peut constater la présence de cristaux d'hémo- globine et d'hématoïdine en quantité considérable, principalement dans les poumons, de petits grains d'hémoglobine et une coloration jaune rougeâtre, marquée principalement à la périphérie de l'organe et tenant: à la présence de la matière colorante du sang. Mais nous ne pouvons tirer de cette recherche aucune conclusion, car on trouve la même altération, quoique moins marquée, dans les organes traités par les mêmes réactifs. (durcissement par l’alcool), chez un chien non thyroïdectomisé. (Travail fait au laboratoire de la Faculté de médecine à l'Hôtel- Dieu, à Paris.) (1) Voir Sicilia medica, 1890, et surtout Rif. med., 1891, n° 29. Le Gérant : G. MASsson. = Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MaretaEux, directeur, 1, rue Cassette. PAS ral DE 299 SÉANCE DU 15 AVRIL 1893 .M. J. Sorras : Sur la nature des lésions médullaires dans la paraplégie syphilitique. — M Browx-Séouarp : Note sur les conclusions physiologiques et cliniques qui ressortent de certaines expériences dans lesquelles l'ataxie locomotrice ou la paralysie, dues à des lésions de la moelle épiuière, ont été guéries ou améliorées par des injections de liquide testiculaire. — M. le professeur H.-N. Vrrzou (de Bucarest) : Influence dynamogénique puissante du liquide testiculaire, chez deux singes paralysés. — MM. À. Rémonp (de Metz) et A. Rispac : Sur un cas de diabète maigre, traité par: des injections de suc pancréatique. — MM. Browx-Séquarp et D'ARSONVAL : Remarques sur le traitement du diabète par les liquides pancréa- tique et testiculaire. — M. Cu. Féré : Note sur les paralysies systématiques. — M. le Dr Van DER Srricut : Modifications anatomiques et lésions anatomo-patholo- piques du rein dans le choléra asiatique. — MM. Armano Rurrer et J.-H. PLIMMER ‘de Londres) : Sur le mode de reproduction des parasites du cancer. — M. PrerkE Bonxiur : Sur les fonctions otocystiques. — MM. SaBnazès et CnamereLent : Nou- velles recherches expérimentales sur le passage des microbes de la mère au fœtus (Séreptocoques. Staphylocoque doré. Coli-bacille). — M. G. Moussu : Sur la fonction thyroïdienne. — M. Gzex : Nouvelle preuve de l'importance ionctionnelle des glandules thyroïdes. — M. le Dr Mrmonorr (de Kharkoff) : L'immunisation des lapins contre le streptocoque et traitement de la septicémie streptococcique, par le sérum du sang des animaux immunisés. — M. E. LaGuesse : Sur les bourgeons paucréatiques accessoires et l’origine du canal pancréatique chez les poissons. — M, Poucuer : Notes ectologiques, du 1x2 au xvrre siècle (Mémoires). — MM. RAïILLIET et Lucer : Notes sur ‘le sarcopte des Muridés (Sarcoples alepis, sp. n.) — MM. Rauer et Moror : Ascaride dans le pancréas d’un porc. — M. Pauz JaccaRn : Influence de la pression des gaz sur le développement des végétaux. — M. R. Dugots : A propos d’une note de M. Bataillon sur la « Peste des eaux douces ». — M. Lougroso : La fossette occipitale selon M. Debierre. — MM. J. Héricourt et Ricner : Deux expériences sur la tuberculose expérimentale chez le chien. — M le D' A.-H. Prurer : Note sur l’évolution histologique du placenta aborlif. — M. Gusrave Piorrowskr : Note sur un cas d'hystérie traumatique, accompagnée d’astasie et abasie. — M. Gusrave Prorrowsxr : Bleu de Méthylène comme analgésique. Présidence de M. Chauveau. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE M. ANDRÉ SANSON fait hommage à la Société de l'ouvrage qu'il vient de publier sur l'Hérédité normale et pathologique. SUR LA NATURE DES LÉSIONS MÉDULLAIRES DANS LA PARAPLÉGIE SYPHILITIQUE, par M. J. Sorras, Interne des hôpitaux. . Les manifestations de la syphilis médullaire sont multiples, et de:beau- coup la plus commune est celle qui s2 tradait par le syndrome. de la paraplégie shasmodique acquise. Gette forme est actuellement bien connue Brorocir, COMPTES RENDUS. — 9° SÉRIE. T. V. 15 300 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE au point de vue clinique, mais la lésion anatomique qui correspond à cet état, désignée sous le nom générique de myélite transverse est certaine- ment bien moins élucidée. Dans les autopsies rapportées en 1884 par M. Dejerine, et concernant des faits de myélite syphilitique survenus à une époque très rapprochée du début de l’infection, il est fait mention de lésions vasculaires très mar- quées, lésions vasculaires dont M. Lancereaux a bien pressenti toute l’im- portance. Cependant Erb, qui s’est occupé récemment de la paraplégie syphilitique ne s’est pas prononcé entre une infiltration spécifique ou une dégénération secondaire, consécutive à une artérite syphilitique. | J'ai eu l'occasion d'observer un certain nombre de moelles provenant d'individus atteints de paraplégie syphilitique, moelles que j'ai recueillies pour la plupart dans le service de M. Dejerine. Je choïsirai parmi ces cas trois types qui montrent l’altération à différentes périodes de son évolu- tion el permettent, je crois, une interprétation qui mérite d'être précisée. Dans ces cas, en effet, le gros fait anatomique, celui qui produit la para- plégie ne relève pas d’un processus inflammatoire (myélite) mais d’un processus de dégénérescence (ramollhissement). Voici l’exposé succinct de ces trois observations : Dans le premier cas, il s’agit d’un sujet qui contracta la syphilis en 41890, à l’âge de trente-deux ans. En 1892, à la fin du mois de juin, il éprouve des douleurs lombaires en même temps qu’un sentiment de lourdeur dans les jambes et quelques troubles des sphincters. Cet état se prolonge quelques semaines. Le 28 juillet, le malade tombe paraplégique dans la rue, et est transporté dans le service de M. Dujardin-Beaumetz dans un état demi-comäteux avec une paraplégie absolue et de l’incontinence d'urine. Il meurt en deux jours, le 30 juillet. A l’autopsie, je trouvai un ramollissement de la porlivn dorsale supérieure de la moelle, s’étendant sur une longueur de 10 à 12 centimètres. Il n'existe pas de dégénérescence secondaire, ascendante ni descendante, ce qui est en rapport avec la précocité de la terminaison fatale. L'examen microscopique du foyer montre une altération très prononcée des vaisseaux et surtout des veines de la pie-mère. La paroi du vaisseau est infiltrée de noyaux, la lumière presque oblitérée. Pour un grand nombre, l'oblitération est complète. Dans d’autres, on trouve un caillot stratifié. Il existe de plus, en certains points de la pie-mère, des amas de noyaux qu'on peut considérer comme des gommes microscopiques. Ces gommes miliaires se retrouvent également sur les tractus piemériens qui pénètrent dans la moelle mais ne s’éloignent toutefois pas beaucoup de la périphérie. Les vaisseaux de la moelle sont également malades, leur altération est seulement moins prononcée. Quant au parenchyme médullaire, il présente, de la façon la plus nette, les aspects de la nécrobiose. Il n'existe aucune trace d’inflammation de la moelle même, l’infiltration embryonnaire est limitée autour de certains vaisseaux, et encore est-elle discrète. SÉANCE DU 15 AVRIL 301 Les parois des vaisseaux et la substance conjonctive qui les accompagne, ainsi que la névroglie, participent d’ailleurs à cette dégénération. En effet, les noyaux qui infiltrent les parois vasculaires résistent à l’action de l’'hématoxy- line alunée et ne se colorent pas pour la plupart; la couche névroglique de Gierke, sous la pie-mère est granuleuse, ainsi que celle qui accompagne les tractus conjonctivo-vasculaires. Les cellules araignées sont gonflées, arrondies, d'apparence vitreuse. Enfin il existe quelques petits foyers hémorragiques infiltrés entre les tubes ner- veux. La substance grise qui a perdu sa disposition normale forme une masse centrale irrégulière à bords diffus. Les tubes à myéline de la substance blanche sont en voie de dégénération. Ils sont très irréguliers, variqueux, la myéline fragmentée. Cette disposition est surlout manifeste sur des coupes longitudinales de la moelle. Mais ce pro- cessus de dégénérescence n’en est qu’à son début : malgré la déformation de tous les tubes, la myéline persiste in situ, les coupes colorées par la méthode de Weigert ont la teinte normale, les champs des tubes sont seulement irré- guliers et ont tendance à se fusionner. Les corps granuleux n'existent pas encore. Le parenchyme de la substance grise est complètement bouleversé, les cel- lules sont globuleuses, en voie de dégénération granuleuse. En somme, altération vasculaire très prononcée et ramollissement de la moelle surpris au début de son évolution. Le deuxième cas a trait à un homme qui eut un chancre syphilitique à l’âge de vingt-cinq ans, en septembre 1890. La paraplégie débuta en novembre 1891, elle fut excessivement grave, et le malade entra dans le service de M. Dejerine. La mort survint le 3 mars 1893, seize mois après le début de l'affection. A l’autopsie, on trouva dans la moelle deux foyers principaux d’altération : l’un siégeant au niveau des IV® et Ve racines dorsales, l’autre s'étendant de la VIIS à la XI° dorsale. Dégénérescence secondaire du cordon de Goll et du faisceau pyramidal. Les coupes pratiquées dans les points où la lésion primitive atteint son plus haut degré, montrent une disparition presque totale des tubes nerveux. Les corps granuleux sont excessivement nombreux, ils sont tassés les uns à côté des autres et forment même, en certains points, des amas compacts qui appa- raissent à l'œil nu sur les coupes de la moelle fraiche comme de petits foyers jaunâtres, d'apparence caséeuse. Les cellules de la substance grise sont également atrophiées, mais il en per- siste un grand nombre encore; en tous cas, leur altération n’est pas aussi accentuée proportionnellement que celle de la substance blanche. Les vaisseaux sont tous extrêmement épaissis, la plupart oblitérés, mais l’altération est beaucoup plus ancienne que daus le premier cas, les parois épaissies sont fibreuses, pauvres en noyaux et on peut constater de plus une particularité très importante : chaque moignon fibreux qui représente un vaisseau oblitéré un peu volumineux est entouré d’une zone de capillaires dilatés logés dans la tunique externe et représentant probablement les vasa- vasorum qui suppléent par leur développement au fonctionnement du vaisseau 302 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE oblitéré. Les gaines périvasculaires sont remplies de corps sranuleux, Cà et là, on trouve encore dans ces gaines des granulations brunes de pigment san- suin provenant sans doute de la résorption de petits foyers hémorragiques. La réaction de l'élément conjonctif et de l'élément névroglique s’est mani- festée à cette période. Les yros vaisseaux sont accompagnés par une gaine de tissu conjonctif épaissi et, dans tout le champ de la coupe, de nombreux noyaux embryonnaires sont décelés par l’hématoxyline. La disposition et l'hyperplasie de la névroglie apparaissent clairement sur des coupes qui ont été débarrassées des corps granuleux par l’action de l'acide acétique, de l'alcool et de l’éther. Dans ces conditions, on a sous les yeux une préparation de névroglie presque pure. La place occupée par chaque corps granuleux est entourée d'un réseau névroglique. Là où les corps granuleux forment des amas la névroglie s’est elle-même tassée en constituant un chevelu épais et très dense, mêlé de noyaux. Enfin, autour de chaque vaisseau, en dehors de la saine conjonctive, existe une zone dense de filaments névrogliques concen- triques mêlés de nombreuses cellules araignées. Il faut, pour compléter cette description, indiquer les lésions constatées dans le troisième cas. Il s'agit d'un homme qui, à l’âge de cinquante el un an, en 1879, contracta la syphilis. Un an après apparaissent les premiers symptômes d'une para- plégie spasmodique d'intensité moyenne. Ce malade entra à Bicêtre dans le service de M. Dejerine. Il succomba à une pleurésie, en 1890, dix ans après. La lésion transverse de la moelle siège dans la région dorsale moyenne; il existe une dégénérescence secondaire du cordon de Goll'et du faisceau latéral. L'altération est beaucoup moins étendue que dans les deux cas précédents ; elle est, en outre, différente d'aspect, car elle est plus ancienne, et arrivée à la période de cicatrisation. Les vaisseaux sont très épaissis ; leurs parois, qui ont pu être au début le siège d'une infiltration embryonnaire, sont actuelle- ment fibreux et entourent une lumière très petite; ceux qui sont oblitérés forment des cordons fibreux d'apparence hyaline. La pie-mère n’est pas notablement épaissie,les vaisseaux présentent Îles mêmes altérations que ceux du parenchyme médullaire, mais à un moindre degré. Les régions altérées sont envahies par la sclérose qui a remplacé le parenchyme dégénéré. A cette période, le processus de réaction inflammatoire est éteint, la sclérose est constituée et il n'existe pas d'infiltration embrvon- naire. Les corps granuleux ont presque complètement disparu; la névroglie, qui s’est développée, a peu à peu envahi les loges qui les contenaient et pris la place des tubes nerveux. La névroglie, en effet, semble à elle seule faire presque tous les frais de ce travail de cicatrisation; le tissu conjonctif ne se distingue qu’au pourtour des vaisseaux et dans les prolongements qui se détachent de la pie-mère. ._ La continuité de la moelle n’est interrompue en aucun point dans toute sa largeur, il persiste sur les coupes des régions'où les tubes sont conservés avec leurs caractères normaux. Ces régions tranchent sur la sclérose, bien que les limites de cette dernière ne soient pas aussi nettes que dans la sclérose en plaques, par exemple. SÉANCE DU 19. AVRIL 303. Dans la substance grise, les altérations sont de même nature, elles pré- sentent de plus une particularité : le tissu, en certains points, a perdu de sa densité, la névroglie y est plus rare, le durcissement par les liquides conser- vateurs y détermine facilement par rétraction un état aréolaire. Cette ten- dance pseudo-cavitaire ne se retrouve qu'au niveau de la substance grise, et je l'ai constaté dans deux cas. Il ne s’agit pas d’une vraie cavité comme dans la syringo-myéline, car à l’état frais elle n'existe pas, mais plutôt d’une sorte de tissu délicat, de dentelle, qui s'effondre facilement par le fait du durcis- sement dans le bichromate, et donne une apparence pseudo-cavitaire. Ces apparences cavitaires peuvent quelquefois se montrer dans la période de début; dans ce cas, elles ne sont que la conséquence d'anciennes infiltrations hémor- ragiques dont on reconnait toujours l’origine à la présence d’un grand nombre de globules rouges. L'évoiution anatomo-clinique du ramollissement médullaire syphilitique peut se résumer en quelques lignes. Au début, altération vasculaire qui produit l’ischémie de la moelle avec les symtômes prodromiques : lourdeur des jambes, troubles légers des sphincters, etc. Cette altération porte sur les artères et sur les veines avec prédominance souvent sur ces dernières ; elle consiste en une inflammation qui débute tantôt par la tunique externe, tantôt par la tunique interne. La pie-mère présente souvent de plus de petites gommes miliaires. (Période d'allérations méningo-vascu- laires.)\ Cette période de début est peut-être la seule où les lésions aient, dans une certaine mesure un caractère spécifique. Puis survient l’oblité- ration vasculaire suivie du ramollissement d’un territoire plus ou moins étendu de la moelle. (Période de ramollissement.) L'importance des obli- térations vasculaires est prouvée par l’expérimentation: les injections d’air ou de poudres inertes dans le système artériel pouvant produire une paraplégie par embolie vasculaire de la moelle. Si la lésion est très étendue, la mort suit à brève échéance; si elle permet la survie, l’inten- sité des symptômes est proportionnelle à son étendue; et dans ce cas la lésion continue son évolution. Le parenchyme anémié dégénère in situ (période de dégénérescence), la myéline se fragmente, les cylindraxes, les cellules se gonflent, Les corps granuleux abondent, etc. En même temps, les fibres interrompues dégéne- rent dans le sens de leur direction (cordon de Goll, faisceau pyramidal). Puis survient une période de réaction inflammatoire: les vaisseaux obli- térés sont suppléés par le développement des vasa-vasorum ; le tissu con- jonctif et surlout la névroglie entrent en activité, remplacent le paren- chyme nerveux et la lésion scléreuse, une fois constituée, reste incurable (période de sclérose). Le malade présente aiors les signes d’une paraplégie spasmodique persistant à l’état chronique. De toutes ces altérations, les seules qui soient justiciables du traitement spécifique sont celles du début; lorsque l’inflammation des vaisseaux et les néoplasies gommeuses des méninges traduisent l'irritation produite par 304 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE le virus syphilitique. Une fois le ramollissement produit, la lésion est irré- médiable, la cicatrice persistera. Le ramollissement médullaire peut donc être rapproché du ramollissement cérébral. Lorsqu'un individu jeune, syphilitique, fait une hémiplégie, on ne dit pas qu'il est atteint d’une encéphalite syphilitique, mais on porte le diagnostic de ramollissement cérébral par artérite syphilitique. De même, dans la myélopathie syphili- tique, le ramollissement est l’accident capital au même titre que le ramollissement cérébral. Toutefois, certaines particularités distinguent le ramollissement cérébral du ramollissement médullaire. On n’observe jamais dans la moelle ces pertes de substance qui succèdent aux foyers de nécrobiose cérébrale, et cela pour deux raisons: d’abord un ramollis- sement étendu de la moelle amène rapidement la mort, il n’y a donc que les foyers de peu d’étendue qui puissent évoluer. De plus, le régime cireu- latoire de la moelle, encore aujourd’hui incomplètement élucidé, diffère de celui du cerveau; au moins, les artères n’y sont-elles pas terminales au sens strict du mot. Un fait certain, c’est que la circulation et la vitalité sem- blent reprendre au bout d’un certain temps dans le territoire ramolli et fournir les éléments du processus de réaction du tissu interstitiel. La preuve de cette nouvelle activité circulatoire est dans la présence des capil- Jaires néo-formés très dilatés qui entourent les anciens vaisseaux oblitérés qu'ils suppléent, particularité qui ne me paraît pas avoir été signalée Jjus- qu'ici. Cette activité se manifeste par la production de la sclérose cica- tricielle, consécutive à la dégénération du foyer nécrobiotique. En résumé, dans la paraplégie syphilitique, l’altération primitive est constituée par une lésion vasculaire, produisant par ischémie le ramollis- sement de la moelle. Le ramollissement médullaire peut d’ailleurs reconnsître une origine infectieuse autre que la syphilis. J'ai eu l’occasion, pour ma part, d'étudier deux moelles recueillies l’une dans le service de M. Dejerine, l’autre dans le service de M. Debove, et dans lesquelles il existait un ramollissement étendu par artérite tuberculeuse. l Il est enfin probable que bien des cas publiés sous le nom de myélite aiguë centrale diffuse ne sont en définitive que des cas de ramollissement médullaire. Je rappelle en terminant que ces idées ont été exposées, il y a juste deux ans, par M. Lancereaux dans une clinique de la Semaine médicale, mais cet éminent maître ne possédait pas alors de faits anato- miques. Ceux que je viens d'exposer sont très succincts; je me réserve d'en faire une description plus complète dans un travail ultérieur. SÉANCE DU 15 AVRIL 309 NOTE SUR LES CONCLUSIONS PHYSIOLOGIQUES ET CLINIQUES QUI RESSORTENT DE CERTAINES EXPÉRIENCES DANS LESQUELLES L’ATAXIE LOCOMOTRICE OU LA PARALYSIE, DUES A DES LÉSIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE, ONT ÉTÉ GUÉRIES OU AMÉLIORÉES PAR DES INJECTIONS DE LIQUIDE TESTICULAIRE, par M. BRoww-SÉQuARD. Je veux seulement prendre date aujourd’hui des faits suivants que j'ai observés depuis très longtemps déjà, mais avec plus d'attention, l'été et l'hiver derniers. I. — On sait que j'ai trouvé depuis plus de trente ans, que l’on ne peut piquer ouirriter d’une autre manière le ventricule spinal des Oiseaux, ou plutôt les méninges qui le recouvrent, sans déterminer de l’ataxie loco- motrice. Je me suis servi de ce fait pour considérer cette affection chez l’homme comme un effet réflexe d’uneirritation périphérique. Les Oiseaux ainsi atteints restent toujours ataxiques, mais à un moindre degré que durant les premiers Jours après la lésion. Sur des Pigeons opérés depuis une ou deux semaines et étant ataxiques à un degré très marqué, j'ai constaté que sur ceux auxquels je faisais des injections journalières de liquide testiculaire (préparé à la manière ordi- naire par d’Arsonval) et que je comparais à d'autres laissés comme témoins sans traitement, il y avait, au bout de quelques jours, une amélioration el que finalement, après un mois, on constatait chez eux presque une gué- rison, tandis qu’il y avait à peine du changement chez les témoins. Il est clair, conséquemment, que le liquide testiculaire (à la dose d’un demi centimètre cube chaque jour, dose énorme comparée à celle que nous employons chez l’homme) a produit dans ces expériences, répétées sur plus de vingt pigeons, des effets curatifs extrêmement marqués, sembla- bles à ceux que l’on obtient chez l’homme à l’aide de doses beaucoup moindres. | IT. — Après avoir produit des paralysies par l’une ou l’autre des deux espèces de lésion que je vais mentionner, chez des Mamnifères, j'ai cons- taté, sous l'influence d'injections de liquide testiculaire, la disparition rapide des phénomènes paralytiques. Je ne donnerai ici qu’une brève indication des dernières expériences de cette espèce que.j'ai faites. ExPÉRIENCE Î. — Au mos d'octobre dernier, j'ai essayé de couper, à travers le crâne, en avant du cervelet, et à travers l'extrémité postérieure de l’hémis- phère cérébral droit, chez 6 cobayes de dix à douze mois, le tubercule nates et le pédoncule cérébral, à droite aussi. Après des troubles variés que je n'ai pas à décrire, ces 6 animaux ont pu se tenir assez bien sur leurs membres, mais ils présentaient dans la marche le mouvement de manège appartenant à cette lésion. Le lendemain malgré la continuation du tournoiement, il était possible de distinguer de la parésie des membres gauches. Trois jours après, 366 SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE la parésie, peu marquée cependant, se dislinguait davantage, le tournoiement ayant encore diminué, Je commencai alors à faire, chez 4 de ces 6 cobayes, des injections journalières de la dose énorme d’un gramme de liquide testiculaire, préparé par d’Arsonval (1). Je gardai comme témoins les deux cobayes ayant le moins de parésie et qui ne tournaient presque plus. De ces deux individus, l'un n’a cessé de montrer de parésie, qu'après 45 jours, l’autre qu'après près d'un mois. Les 4 autres, au contraire, étaient guéris complètement, l’un 6 jours après la première injection, un autre 8 jours et les deux autres 10 ou 11 jours après. Le tournoiement a disparu, chez tous ces derniers, dès le len- demain de la première injection. EXPÉRIENCE IL. — En novembre 1892, répétant des expériences que j'avais déjà faites en 1890, j'ai coupé transversalement presque la totalité de la moitié droite de la moelle épinière, au niveau de la 10° dorsale, chez 3 cobayes de 5 à 600 grammes. Les phénomènes ordinaires de cette lésion se sont montrés : paralysie et hyperesthésie au membre postérieur droit, avec anesthésie com- plète chez l'un el incomplète chez les deux autres, au membre postérieur gauche. Je choisis alors les deux cobayes chez lesquels les phénomènes (para- lysie, hyperesthésie, anesthésie) étaient le plus marqués et je fis chez chacun d'eux, quelques heures après la lésion de la moelle, une injection de 1 gramme de liquide testiculaire. Chaque jour, pendant une semaine, la même quantité de liquide fut injectée. Au bout de ce temps l'animal gardé sans injection, comme témoin, avait encore au membre postérieur gauche une anesthésie assez inarquée et presque autant que le lendemain de l'opération, la paralysie incomplète (il n'y à jamais de paralysie complète après une hémisection de la moelle dorsale, chez les cobayes) avait à peine diminué et l’hyperesthésie affaiblie persistait. Tout au contraire, chez les deux animaux injectés il y avait à bien peu près l’état normal dans les deux membres postérieurs. L'équilibre de la sensibilité s'était presque rétabli, l’anesthésie persistant à peine et l’hy- peresthésie n’existant plus. Quant à la paralysie, j'ai cherché vainement à la constater. Sans faire de nouvelles injections l’état normal était revenu au bout d'un mois et, chose remarquable, l’épilepsie qui survient si souvent chez les cobayes après une hémisection de la moelle épinière ne s’est pas montrée, tandis que chez l'individu non injecté, non seulement de l’épilepsie (à un faible degré) a paru au bout de près d'un mois, mais les troubles sensitifs et moteurs persistaient encore, bien que diminués. Ils durent encore mais amoindris nota- blement, à l'heure actuelle, plus de cinq mois après la lésion et l’on peut eucore provoquer de légères attaques d’épilepsie par l’irritation de la zone épileptogène. Je laisserai de côté dans cette brève communication ce qui est relatif à l'influence exercée sur les centres nerveux quant au tournoïiement et à 1) Ces animaux pesaient de 450 à 550 grammes, d’où il suit que leur poids moyen étant de 500 grammes, chacun d'eux recevait le cinq centième de leur poids de liquide testiculaire, ce qui pour un homme de 50 kilogrammes, don- nerait une proportion de 100 grammes de liquide par jour. On sait que chez l’homme le maximum injecté par jour a été de 5 à 10 grammes, c’est-à-dire du vingtième au dixième de la dose employée chez ces cobayes. L 2 SÉANCE DU 19 AVRIL 307 Vépilepsie (1). Mais je ne puis pas ne pas lirer de ces dernières expé- riences et de celle relative à l’ataxie les conclusions suivantes, quant à la puissance du liquide testiculaire : 1° Il peut faire diminuer, chez les pigeons, les phénomènes d'ataxie locomotrice causés par une irritation périphérique (celle des fibres ner- veuses des méninges spinales); 2° Il peut faire disparaître la paralysie causée par une lésion de la base de l’encéphale, chez le cobaye ; 3° Il peut faire cesser la paralysie, l’anesthésie et l’hyperesthésie, cau- sées par une hémisection de la moelle dorsale et donner par là, aux physiologistes comme aux cliniciens, la preuve que l’hémisection de la moelle ne fait pas apparaître la perte du mouvement ou de la sensibilité par suite d’une section de conducteurs, car le retour des fonctions perdues est beaucoup trop rapide pour qu’on puisse supposer que ceretour est dû à la réunion des conducteurs coupés. INFLUENCE DYNAMOGÉNIQUE PUISSANTE DU LIQUIDE TESTICULAIRE, CHEZ DEUX SINGES PARALYSÉS,' par M. le professeur H.-N. Virzou (de Bucarest). (Note présentée par M. BROWN-SÉQUARD.) (L'auteur a souvent constaté que des singes exposés à un froid intense sont devenus paraplégiques par suite de myélite. Il croit que les deux singes dont il donne l’histoire ont été atteints d’un ramollissement inflammatoire de la moelle épinière. Quoi qu'il en soit de ce diagnostic, voici l’histoire abrégée de ces deux faits et les conclusions qu'en tire l’auteur. B.-S.) Os. I. — Singe (sapajou) mâle, qui avait été très vigoureux; fut atteint en octobre 1889 de paralysie des membres postérieurs et plus tard des anté- rieurs, Comme d’autres singes attaqués de la même façon, il se traînait avec grande difficulté et ne pouvait grimper, ni prendre sa nourriture avec ses pattes. Le 7 décembre 1889, on lui fait une première injection de 1 centimètre cube sous la peau de l'abdomen, du liquide provenant de la trituration dans 10 cen- (1) Sur de nombreux cobayes, ayant de l’épilepsie à la suite de la section _du nerf sciatique, j'ai constaté que des injections de liquide testiculaire, à fortes comme à faibles doses, n’ont pas modifié cette affection d’une manière notable. Peut-être y a-t-il eu un peu de diminution dans la violence des attaques, mais ce serait là tout le bien obtenu. 308 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ———————————@—ZàZ2—2————— ere timètres cubes d’eau distillée de deux testicules frais d’un lapin très vigou- reux. — Ilne semble pas souffrir de l'injection. Le 3 décembre, on lui fait une deuxième injection de 2 centimètres cubes de liquide testiculaire (lapin) sous la peau de l'abdomen. Le lendemain, il est plus gai, semble prendre part aux caresses qu'on lui prodigue et l'appétit lui est revenu de manière qu'il mange le double de ce qu'il prenait d’habitude depuis sa maladie. Le 13 décembre, on fait une autre injection de 2 centimètres cubes de liquide testiculaire (lapin) à l’aisselle du membre antérieur gauche. Le 19 décembre, on fait une autre injection de 2 centimètres cubes du liquide testiculaire (lapin) en deux fois : { centimètre cube est injecté sous la peau de l’aisselle du bras gauche et 1 centimètre cube sous la peau de l’aisselle du bras droit. L'animal se porte mieux qu'auparavant, a un bon appétit et commence à se servir de ses membres antérieurs pour prendre les morceaux de pain et des carottes qu'on lui donne. Le 27 décembre, on fait une autre injection (la cinquième) à l’aisselle du bras droit de 2 centimètres cubes du liquide testiculaire frais du lapin. J'inter- romps alors les injections après avoir remarqué une grande amélioration dans l'état général de l'animal. Les membres antérieurs ne sont plus paralysés ; le singe s’en sert et se déplace avec une grande facilité tout en se traînant sur les membres postérieurs qui sont encore paralysés. Le 27 janvier (1890), on fait une autre injection de 1 c. c. 1/2. L'animal donnait très facilement les pattes, l’état général était satisfaisant et il pouvait se tenir debout sur ses quatre pattes, cependant la paralysie des membres postérieurs persistait. Le 26 février, le singe est très gai, mange d’un bon appétit et les membres antérieurs ne sont pas paralysés. Ce jour-là on lui fait une autre injection (la septième) de 1 c. c. 1/2 de liquide testiculaire (lapin). Les injections ont été suspendues à partir de ce jour, l’état général s’est maintenu jusque vers la moitié du mois de mars lorsque le singe, déjà phti- sique, a été atteint d’une forte pneumonie a la suite de laquelle il a succombé. L'autopsie n'a malheureusement pas pu être faite. Pendant que le singe n’était atteint que de la paralysie des membres, les injections du liquide testiculaire de lapin ont eu une grande puissance sur la moelle. Après la quatrième injection, la paralysie des membres antérieurs avait disparu, et à la sixième injection il pouvait se tenir debout sur ses quatre pattes quoique la paralysie des membres postérieurs n’eût pas complètement disparu. Il n’est pas douteux pour moi, que si les injections avaient été suivies et répétées à des intervalles moins longs, les progrès de l’amélioration des membres postérieurs auraient été plus grands que ceux que j'ai pu enregistrer. Ors. II. — Singe mâle (Papillon), atteint de paralysie des membres posté- rieurs depuis six mois. On lui fait seulement deux injections à l’aisselle droite, chacune de 2 c. c. 1/2 de liquide testiculaire d’un chien très vigoureux et jeune. La première injection a été faite le 14 mars 1890 et la seconde le SÉANCE DU 415 AVRIL 3069 16 mai. Après ces deux injections, l’animal se portait assez bien, l'appétit lui était revenu et il pouvait grimper avec grande facilité sur la grande cage des singes lorsqu'on le mettait en liberté. Au mois de juin et les mois suivants, l'animal pouvait marcher sur les membres postérieurs qui n'étaient plus paralysés. Get état s’est maintenu jusqu'au mois de novembre sans avoir eu recours à d’autres injections. Ce singe est encore vivant (20 mars 1893). Depuis octobre 1892 il se traine sur ses membres supérieurs et j'ai recommencé à lui faire des injections. Conclusions. — Les injections sous-cutanées du liquide testiculaire frais de lapin ou de chien, préconisées pour la première fois par M. Brown-Séquard ont une puissance dynamogénique considérable sur la moelle des singes atteints de paralysie dans les membres antérieurs el postérieurs. SUR UN CAS DE DIABÈTE MAIGRE TRAITÉ PAR DES INJECTIONS DE SUC PANCRÉATIQUE, par M. À. RÉmonp (de Metz), Agrégé à la Faculté de Toulouse, et M. A. RisPar, Chef de clinique médicale. (Note présentée par M. BRowN-SÉQUARD.) Nous avons eu l’occasion, au mois d’octobre 1892, d’expérimenter, sur un sujet atteint de diabète maigre, les injections de suc pancréatique. Il s'agissait d’un garçon de vingt et un ans, qui entra à l'hôpital en se plaignant d’avoir commencé a maigrir depuis trois ans. Le 95 juillet 1892, jour de son entrée il ne pesait en effet que 45 kilogrammes, et pré- sentait tous les symptômes du diabèle, polydipsie, polyphagie et po- lyurie. Il séjourna pendant quelque temps à la salle Notre-Dame (Hôtel-Dieu de Toulouse), puis passa dans le service d’ophtalmologie de M. Terson qui l’opéra pour une cataracte double. Cette opération, faite dans le cou- rant du mois de septembre, ne fut suivie d'aucun accident. À ce moment il pesait 44 kilogrammes et la quantité d'urine émise pen- dant les vingt-quatre heures variait de 2,700 à 6,000 centimètres cubes avec une densité de 1031 à 1045. Déjà, avant de quitter le service de médecine, nous avions noté chez lui une extrême lenteur du pouls qui, sans intermittences, régulièrement, battait de 45 à 55 fois à la minute. Le 6 octobre il rentrait dans le service de clinique. À ce moment il pesait 42 kilogrammes, et urinait 4,500 centimètres cubes de 1027 de densité. Pouls à 42. 310 SOCIËTÉ DE Bi0LOGIE Nous résolûmes alors de le soumettre au traitement par les injections de sue pancréatique. Un chien fut éventré sous le chloroforme et la glande extirpée, puis écrasée dans un mortier stérilisé avec du sable qui avait été préalablement porté au rouge. La pâte fut broyée avec 6 à 7 centimètres cubes de glycérine neutre, étendue d’eau à moitié, et stéri- lisée. Nous employämes un filtre en papier: Le flacon, l’entonnoir et tous les instruments avaient été rigoureusement purifiés. Cette manœuvre nous donna environ 5 centimètres cubes de liquide. Le 9, nous fimes une première injection de À centimètre cube; Le 10, l'urine mesurait 3,700 centimètres cubes ; densité, 1024, et le pouls battait 60 fois par minute. Le 11, urine 4,100. Densité, 1024. Pouls, 80. Nouvelle injection. Le 12, urine 3,500. Densité, 1023. Pouls, 80. Nouvelle injection. Le 13, urine 2,700. Densité, 1023. Pouls, 80. Nous cessâmes alors de faire des injections jusqu'au 19. A ce moment le malade, dont l'appétit ni le régime n'avaient varié, pesait 45 kilogrammes, et le pouls, qui était à 80 le 13 octobre, était suc- cessivement retombé à 60 le 14, 52 le 16, 44 le 18. Le 19, un nouveau chien nous ayant fourni une nouvelle provision de liquide, nous fimes une nouvelle injection. Le lendemain la quantité d'urine était de 3,800. La densité 1023. Le pouls à 60. Le 21 et le 22, injections de 1 centimètre cube. Le 93, urine 3,500. Densité, 4024. Pouls, 80. Le 24, urine 3,500. Densité, 1024. Pouls, 84. À partir de ce moment, nous avons cessé les injections, car nous devions quitter le service au 1° novembre. Le jour de notre départ le malade ne pesait plus que 44 kilogrammes et le pouls était retombé à 45. Il est certainement regrettable que nous n’ayons pas pu continuer cette expérience, mais les résultats qu’elle nous a donnés ne sont pas cepen- dant, croyons-nous, dépourvus d'intérêt. Sous l'influence des injections, en effet, la quantité et la densité des urines ont notablement diminué. Le pouls qui était ralenti depuis au moins trois mois s’est relevé, la température restant constamment nor- male. Enfin, le poids, qui depuis le mois de juillet jusqu’au mois d’oc- tobre avait diminué de 3 kilogrammes, est remonté de la même quantité sous l'influence du traitement, en seize jours, et sans aucune modifica- tion de régime, pour diminuer de nouveau quand les injections furent sup- primées. Il nous semble donc au moins logique de renouveler la même tentative thérapeutique, dans les cas analogues dont on connaît l'extrême gravité au point de vue du pronoslic. FEES SÉANCE DU 195 AVRIL 311 REMARQUES SUR LE TRAITEMENT DU DIABÈTE PAR LES LIQUIDES PANCRÉATIQUE ET TESTICULAIRE, par MM. BROWN-SÉQUARD et D'ARSONVAL. Nous croyons devoir dire, à l’occasion de l’observation si intéressante de MM. Rémond et Rispal, que ce qu'ils ont constalé est exactement ce que nous espérions qu’on obtiendrait dans le diabète maigre lorsque nous avons proposé, il y aura bientôt un an, d'employer le liquide pancréatique contre celte affection. Nous avons fourni à nombre de médecins depuis la fin de mai 1892, du liquide pancréatique, préparé tantôt par l'un de nous, tantôt par notre collègue M. Hénocque. : Nous ferons bientôt connaître les résultats obtenus dans toutes les formes de diabète, soit par le liquide pancréatique seul, soit par ce liquide employé simultanément avec du liquide testiculaire, soitenfin par du liquide testiculaire seul. Nous nous bornerons à dire maintenant que ce dernier liquide possède une très grande influence non seulement sur les formes ordinaires du diabète sucré, mais aussi sur le diabète maigre. Néanmoins nous croyons que, dans cette dernière affection, il convient ‘d'employer à la fois les deux liquide+, pancréatique et testiculaire. NOTE SUR LES PARALYSIES SYSTÉMATIQUES, par M. Cu. FÉRÉ. J'ai insisté depuis plusieurs années dans diverses publications sur l'intérêt de l'examen des conditions physiques dans l'étude des phéno- mènes psychologiques, tant normaux que pathologiques, et j'ai soutenu “qu'en dehors des signes physiques, il n’y à qu'incertitude. Cette propo- silion qui me parait bien mériter la qualification de banale, n'est cepen- dant pas généralement admise (1); il n’est donc pas inutile de multiplier les études de faits particuliers. Depuis longtemps, les auteurs qui se sont occupés d’hypnotisme, ont ‘signalé des impotences des mouvements adaptés à un acte spécial, des anesthésies pour un objet déterminé. Ces paralysies de la motilité et de la sensibilité, nous avons pu, sans craindre des protestations, les qualifier de systématiques ou systématisées (2). Du reste, le caractère de systéma- (4) Gilbert Ballet. La pathologie. mentale, son domaine, la méthode des visées (Revue scientifique, 31 décembre 1892, n° 27, p. 836). (2) Binet et Féré. Les paralysies par suggestion (Revue scientifique, 188%, 3e série, t. XXXIV, pp. 46, 48), 312 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE EE tisation fut aussi reconnu aux troubles de la sensibilité et du mouve- ment qui, en conséquence de lésions organiques, entravent l'expression et la perception des signes. Cependant dans la plupart des cas d'aphasie sensorielle où l'examen du sens est fait avec précision et sans rien négliger, on a trouvé des troubles de l’audition, s’il s'agissait de surdité verbale, des troubles de la vision dans le cas de cécité verbale. Il ne s’agit donc pas, en général, d’une anesthésie sy stématique. Le même défaut de systémalisation peut se retrouver dans les anes- thésies par suggestion : quand la perte de la vision d’un objet donné paraît être un trouble isolé, on peut quelquefois mettre en évidence un rétrécissement marqué du champ visuel, et des phénomènes analogues peuvent se retrouver pour l’audition. Du reste, on sait qu'un phénomène inverse se produit dans le cas d’hallucination provoquée d’un sens anes- thésique ; ce sens peut recouvrer alors en partie sa sensibilité spéciale, et même, ses téguments ordinairement anesthésiques, peuvent aussi rede- venir sensibles. Donc, pour établir la réalité de la systématisation d’une anesthésie, il faut faire un examen complet de la sensibilité spéciale en question. La plupart des cas d’anesthésie soi-disant systématique ne résistent pas à un examen, même superficiel. De même la réalité de la systématisation d’une paralysie ne peut être établie que lorsqu'on a prouvé l'intégrité du mou- vement de l'organe en question pour tout autre acte que celui qui est supposé exclusivement aboli. Or, l'intégrité d’un mouvement ne peut être mise en évidence que par l'exploration de son énergie, de sa vitesse, de sa précision. Cette exploration fait défaut dans la plupart des cas de paralysie dite systématique, et quand elle a été faite elle a souvent montré l'absence de systématisalion réelle. L'aphasie passe pour une paralysie systématique; mais même lorsque les mouvements de projection, de cireumduction, etc., de la langue sont possibles et paraissent intacts, l'étude de leur énergie, de leur rapidité et de leur précision ou de leur stabilité, montre qu'ils sont considérable- ment affectés (1). De même dans l’agraphie, lorsque tous les mouvements non adaptés paraissent possibles et même faciles, on peut, à l’aide de l'étude du temps de réaction et de l'énergie des différents mouvements avec un appareil approprié, mettre en évidence des troubles de la motilité du pouce et, en particulier, du mouvement d'opposition (2). (1) Ch. Féré. Note sur l'exploration des mouvements de la langue (C. R. de la Société de Biologie, 1889, p. 278). — L'énergie et la vilesse des mouvements volontaires (Revue philosophique, 1889, t. XXVIIL, p. 37). — Étude physio- logique de quelques troubles d’articulation (Nouv. Iconographie de la Sal- pétrière, 1890, p. 168). (2) Ch. Féré. La distribution de la force musculaire dans la main et dans le SÉANCE DU 15 AVRIL 313 L'impotence des sourds-muets a été considérée aussi comme une impo- tence systématique, c’est-à-dire que la motilité n'y est supposée affectée que dans l’acte spécial de l'articulation des mots; les autres mouvements paraissent en effet libres à un examen superficiel. L'examen méthodique de l’énergie et de la vitesse des mouvements de la langue et des lèvres montre que la motilité générale est affectée (1). J'ai fait plusieurs fois la même constatation chez des bègues. Dans la paralysie faciale hystérique, on admet aussi l’existence d’im- potences systématiques, soi-disant limitées à une des fonctions d'un muscle; mais, jusqu’à présent (2), on n’a pas du tout démontré par l'expé- rience l'intégrité de l'énergie, de la vitesse et de la précision des autres mouvements. Il reste à prouver que quelques-unes de ces paralysies soi-disant systématiques ne sont pas des paralysies partielles, c’est-à-dire des paralysies limitées non pas à un pionnement coordonné, mais à un ou à plusieurs muscles. MM. Charcot et Richer ont insisté sur un trouble de la motilité dont l'existence avait été brièvement signalée par plusieurs auteurs et notam- ment par M. Jaccoud (3), et qui consiste en ce que le malade, capable de faire des mouvements assez énergiques lorsqu'il est au lit, est incapable de se tenir debout ou de marcher. Ce trouble a été, dans ces dernières années, l’objet de plusieurs travaux et, en particulier, de la part de M. Blocq qui l’a désigné sous le nom d’astasie-abasie. M. Richer fait remarquer que le plus souvent l’astasie et l’abasie coexis- tent, mais que, tandis que l’abasie peut exister seule, l’astasie sans abasie n'existe pas: il n'existe pas de cas de malade pouvant exécuter normale- ment les mouvements de la marche en même temps qu'il serait incapable de se tenir debout (4). Malgré la réserve que pourrait faire naître cette remarque pleinement justifiée, on considère l’astasie-abasie, non pas comme une paraplégie incomplète, mais comme une paralysie systéma- tique des mouvements adaptés à la marche et à la station : la caracté- ristique serait l'intégrité des mouvements lorsque le malade est au lit. Mais cette intégrité ne peut être mise en évidence que par la mesure des qualités des mouvements. Chez un épileptique qui présente une impossibilité à peu près com- plète de marcher pendant certaines périodes et est même incapable quel- pied étudiée au moyen d’un nouveau dynamomètre analytique (C. R. Société de Biologie, 1889, p. 406). — Note à De l'aphasie el de ses diverses formes, par D. Bernard, 2° éd., 1883, p. 231. {1) Ch. Féré. Note sur les troubles de la motilité des organes de la voix et de l'articulation chez les sourds-muets (Revue névrologique, 1893). (2) Gasnier. Étude sur la paralysie faciale hystérique. Thèse, 1893. (3) A. Duprat. Contribution à l'étude des troubles moteurs psychiques (syn- drome de Jaccoud). Thèse, 1892. (4) P. Richer. Paralysies et contractures hystériques, 1892, p. 49. 314 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quefois de se tenir debout, quoiqu'il puisse marcher à quatre pattes et qu'au lit il puisse opposer une grande résistence, j'avais trouvé des temps de réaction des pieds qui ne différaient que peu de ceux d'un autre malade non paralvtique qui lui était comparé, et j’en avais conelu à l'absence de troubles de la motilité générale et par conséquent à la réalité de la systématisation de la paralysie (1). L'expérience était insuffisante et la conclusion illégitime. On avait choisi comme terme de comparaison un sujet épileptique, et de ce que le malade en question n’avait pas eu temps plus long, on avait déduit que l'allongement du temps qui leur élait commun n'avait rien à faire avec l’impotence, soi-disant systé- matique. En réalité, l'expérience ne donnait aucun renseignement sur l'état normal du malade, car l’allongement du temps de réaction chez les épilepliques n’est pas un fait général. Quant à l'étude de l'énergie, elle n’avait pas été faite à l’aide d'un appareil dynamométrique. Du reste cette explorat’on indispensable manque dans toutes les observations d’astasie-abasie où il n’est question ni de dynamomètre, ni de chrono- mètre. [len est ainsi en particulier dans le mémoire de M. Blocq, qui dit cependant expressément que la puissance dynamométrique des muscles persiste ; cette expression est évidemment, sous sa plume, syno- nyme de puissance motrice dans les mouvements non adaptés. Si l’examen dynamométrique avait été fait, on n’eût pas manqué de donner des chif- fres. Les dynamométrie du membre inférieur n’est pas une exploration banale : on ne connaît guère en France que peu d'instruments qui per- mettent le mouvement de flexion de la jambe sur la cuisse et celui d’ad- duction de la cuisse, ie dynamomètre universel d’Onimus, et l'instrument dont se sont servis MM. Pitres et Dignat, et le mien. Une exploration spé- ciale ne pouvait manquer d’être signalée si elle avait été faite. Du reste, j'ai déjà eu occssion de relever la contradiction qui existe entre cette expres- sion «dynamométrique » et l'absence de mention d'examen spécial dans un livre (2), que M. Blocq lui-même s’est chargé de critiquer sans négliger les détails (3) et bien que le ton général de cette critique ne puisse pas faire soupconner son auteur d’une bienveillance allant jusqu’à l’abnéga- tion, mon objection ne lui a pas inspiré de réponse contradictoire. Donc il n'existe pas actuellement de fait d’astasie-abasie contrôlé par un exa- men dynamométrique. L'examen dynamométrique des membres inférieurs peut être pratique à l’aide de l'instrument de M. Pitres, du dynamomètre universel d'Onimus, des dynamomètres de Birdsall (4), de mon dynamomètre analytique pour la flexion et l'extension du pied; mais tous ces instruments ne sont pas Les épilepsies et les épileptiques, 1890, p. 479. La pathologie des émotions, 1892, p. 273. Gazette hebdomadaire de méd. et de chir., 1893, n° 9, p..107. Sr: à édit SÉANCE DU 45 AVRIL 319 indispensables, et comme aucun ne permet d'explorer à la fois tous les mouvements, il vaut mieux recourir à un procédé très simple qui peut être appliqué partout, et qui consiste à disposer les malades dans un cadre solide comme celui qui est fourni par les lits en fer à côtés élevés qui servent à maintenir les malades agités. Le sujet peut y être fixé avec des alèzes par le périnée et les épaules, soit dans le décubitus dorsal, soit dans le déeubitus latéral, et le dynamomètre à traction ordinaire est attaché au cadre dans une direction perpendiculaire à celle du mouve- ment qu'il s’agit d'explorer : la traction se fait par l'intermédiaire des bandes plus ou moins longues. On peut facilement d’ailleurs suppléer à ce cadre tout autre moyen de fixation, à condition qu’il soit bien déter- miné. La rapidité des mouvements est constatée, en prenant le temps de réac- tion simple (moteur) avecle chronomètre de d’Arsonval (1); les mouvements explorés dans les cas actuels sont, pour le membre supérieur, la flexion du pouce, pour les membres inférieurs, la flexion du gros orteil. Comme daus toutes nos expériences de ce genre, l'exploration est faite les yeux clos. L... P..., âgé de vingt ans, est entré dans mon service le 12 août 1892. Son hérédité est assez chargée, son père est alcoolique, sa mère a des accidents hystériques bien caractérisés qui existent aussi chez un frère et une sœur; un autre frère, plus jeune, est idiot. Dans ses antécédents personnels, on relève cette circonstance intéressante qu'il n'a pas marché avant cinq ans et que jusqu’à huit ans sa marche est restée défectueuse. En 1881, il a commencé à avoir des éblouissements et des crises vertigineuses. Depuis qu’il a eu la fièvre typhoïde, en 1883, Les crises convulsives ont apparu; le malade, mal- traité par son père, et du reste d’un caractère difficile, a quitté à plu- sieurs reprises la maison paternelle, a fait des excès alcooliques, s’est fait pître forain. Depuis un an ou dix-huit mois, ses grandes attaques sont de temps en temps suivies de troubles paralytiques des membres inférieurs qui, sans le rendre complètement impotent, empêchent la marche et même la station. A plusieurs reprises, ces troubles ont été durables, et il les présentait depuis plusieurs semaines, quand il est entré. Il présente une déformation bilatérale du thorax constituée par une saillie au niveau des cartilages costaux. Cette déformation, plus marquée à droite coïncide d’un côté avec l'absence des faisceaux costaux supérieurs et du faisceau claviculaire du grand pectoral. Du reste, il est assez bien conformé, mais il est imberbe et sa physionomie évoque l'idée de juvénilité persistante, mais ses organes génitaux sont bien développés. 1l est maigre; taille, 162; envergure, 1,64; poids, 52 kilogrammes. (1) On a beaucoup critiqué en Allemagne l'appareil de d’Arsonval, auquel on reproche des variations, mais il est facile de contrôler la régularité du mouvement avec le chronographe et de se rendre compte des différences. D'ailleurs une erreur de un centième à la seconde ou même une plus grande n'aurait aucune importance dans les recherches cliniques où on a à apprécier des différences en général assez considérables, 13. 370 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Entre autres stigmates permanents de l'hystérie, il présente une anesthésie sensitivo-sensorielle variable, prédominant à gauche, avec amyosthénie du même côté et anesthésie pharyngée. Il est Hs cale Au moment de son entrée, P... présente tous les caractères assignés à l’as- tasie-abasie. Il se tient hello debout lorsqu'il n’élargit pas sa base en écartant les pieds, il peut marcher avec des béquilles mais en steppant. Lors- qu’il est debout avec un soutien, l’occlusion des yeux diminue l'équilibre qui n’est pas sensiblement modifié lorsqu'on se contente de lui cacher le sol avec un écran placé au niveau du cou. Lorsqu'il est couché, tous les mouvements s'exécutent en apparence avec force. Si on lui ferme les yeux, non seulement il reconnaît la position de ses membres inférieurs, mais il peut prendre celle qu’on lui demande de prendre; i! porte sans hésiter ses deux index sur le bout de son nez, l'index droit arrive seulement avec un peu plus de précision. Il est parfaitement capable de marcher à quatre pattes. Quand on le met debout, même les yeux fermés, il n’éprouve aucune anxiété même lorsque ses jambes fléchissent sous lui. Avec des alternatives de mieux et de pis, ces troubles persistèrent jusqu’au 10 décembre. On lui avait fait, le 8, deux injections avec le liquide de Brown-Séquard. Le 9, il refusa le traitement, ce qui motiva une peine disciplinaire à la suite de laquelle il eût une violente colère et une attaque qui se termina par la gué- rison. Que l'impotence diminuât ou augmentât, on constatait toujours que c'était la jambe gauche qui cédait le plus facilement. L'examen dynamométrique et chronométrique a été répété deux fois dans la période d'état, le 9 et le 19 novembre, et deux fois après la guérison, le 13 et le 20 dconhre: Les deux premiers examens donnent des chiffres concordant à quelques unités près, et leur moyenne paraïitra caractéristique si on les compare aux chiffres fournis parles deux autres. Le tableau suivant rend cette comparaison facile. PÉRIODE D'ÉTAT APRÈS GUÉRISON DYNAMOMÉTRIE Re Soie ocre Flexion des doigts. . : . . . . 40 19 45 35 Flexion de la cuisse . : +: : . : 38 24 59 54 Extension de la cuisse. . . . . 39 26 65 63 AdAUCtIONs À MAMAN ATE 32 24 45 43 Mbduction:rp en AMENER 30 25 45 40 Flexion de la jambe”. 1; 30 24 45 40 Extension de la jambe. . . . . 30 20 50 55 Hexion/du pied 50-0040 0m 3 8 8 Exlension du pied: Eee b) 4 ïl 6 CHRONOMÉTRIE Main tem GE, 4011 LUN 9e 0233 21810, 37 0,435 0.164 Pied salue bre 0,599 0,77 0,34 0,39(1) (1) Dans ce cas comme dans le suivant, on voit qu'après la guérison le temps de réaction reste plus long, surtout du côté le plus anesthésique et le SÉANCE DU 19 AVRIL SUR Dans un autre cas qui s’est présenté presque en même temps et où il s’agit d’une forme d’astasie-abasie trépidante, les troubles de la motitité générale ne sont pas moins évidents. B..., trente-sept ans, journalier, enfant trouvé, prétend n'avoir jamais eu de troubles nerveux jusqu'à l’âge de vingt et un ans, époque à laquelle à la suite d'un choc à la fois traumatique et moral (il avait été poursuivi ét piétiné par un cheval), il eut une première attaque d'hystérie suivie de délire. Depuis il n’a jamais cessé d'en avoir à intervalles plus ou moins éloignés. Pendant les quelques heures qui précèdent son attaque, il a souvent des tremblements des membres inférieurs qui, quelquefois se dérobent sous lui; l'attaque est presque constamment immédiatement précédée d'un tremble- ment qui prédomine dans le côté gauche, et il sent une boule qui lui monte derrière le sternum. Cette sensation isolée n’est pas toujours suivie-d’attaque, À plusieurs reprises, il a eu des attaques de contracture; et au mois de mars 1892, il a eu à la suite d’une.attaque, une hémiplégie gauche qui a duré quinze jours, avec contracture. Dans le mois d'août, son premier mois de séjour, il a eu 29 attaques, depuis elles sont devenues moins fréquentes. Anesthésie générale avec analgésie très marquée, prédominant à gauche, avec amyosthénie, diminution de la sensibilité spéciale, anesthésie pha- ryngée, point douloureux dans le flanc gauche, hypnotisable: apophyses lémuriennes, pas d’autre stigmate physique grossier. Le 12 novembre, il est pris de iremblement dans les membres inférieurs qui aboutit à une contracture très intense dans l'extension et l’adduction. Cette contracture est restée stationnaire pendant quatre jours, puis elle a commencé à décroître. Le 19 novembre, la contracture a disparu, mais le malade est astasique et abasique. Tandis qu’il est capable de faire dans son lit tous les mouvements possibles avec une énergie en apparence nor- male et de marcher à quatre pattes assez longtemps, la station et la marche sont complètement impossibles. Dès qu’on le met debout ses membres infé- rieurs et principalement le droit se mettent à trépider, et la trépidation se propage aux membres supérieurs, si on ne le retenait la chute serait cer- laine; en outre, de temps en série, il fléchit brusquement sur son membre inférieur droit. Dans les essais de marche, il lance ses pieds latéralement, le tronc se fléchit en avant et il tomberait sur la face si on ne le contenait; sitôt remis au lit, tout rentre dans l’ordre, A partir du 24 novembre, B... a recu chaque jour deux injections de liquide de Brown-Séquard. Le 7 le le malade peut se tenir un peu debout et faire quelques pas, mais letremblement revient vite. Les jambes sont très sensibles au froid, et quand il souffre du froid il sent ses jambes plus faibles, surtout la gauche, Le 9 décembre, à la suite d’une attaque, les troubles de la station et de la marche sont revenus à leur maxi- mum. À partir du 15 décembre, il se fait une nouvelle amélioration, mais très plus amyosthénique, qu'à l’état normal; c’est un fait probablement constant chez les hystériques qui ont des troubles de la sensibilité et de la motilité. IL ne sera pas sans intérêt de rechercher quelle est dans ce retard, la part res- pective de la sensibilité et de la motilité. 318 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE lente et qui s'arrête au bout de quelques jours ; le malade ne peut toujours se tenir debout et faire quelques pas qu’à l’aide de béquilles. Le 23 décembre, on cesse les injections dont l’action paraît, en somme, nulle. Le 30 décembre, à la suite d'une discussion, une amélioration considérable s’est manifestée, et à partir des premiers jours de janvier, la marche est devenue possible sans secours. L'examen dynamométrique a été répété trois fois dans la période d'état, le 19 et le 23 novembre et le 7 décembre ; et deux fois après que la marche est redevenue possible, le 7 et le 12 janvier 1893. Le tableau suivant donne la moyenne des deux groupes de résultats : PÉRIODE D'ÉTAT APRÈS GUÉRISON CE Re. DYNAMOMÉTRIE à droite. à gauche. à droite. à gauche. *Flexion des doigts. 30 22 51 35 Flexion de la cuisse . 27 25 53 45 Extension de la cuisse. . . . . 45° 42 60 55 AU ETO NA MR RS 35 Dr 45 45 AND AUCELO NE PR UE PIN 25 22 33 26 Flexion de la jambe . . . . . . 35 25 D2 45 Extension de la jambe. . . . . 33 26 48 42 MleOMAUIpLed EEE RE EE 3,9 3 1000 7 Extensiontdu pied He 4 + 1 6,9 CHRONOMÉTRIE Mn ee te RS er SE NEA 0, 509 0,371 0,217 0, 251 DIEU NOM sense 0,806 0,637 0,439 0,403 En somme, dans ces cas d’impotence comme dans ceux que J'ai étudiés précédemment par des procédés analogues, la spécialisation de la para- lysie à un mouvement adapté n'existe pas; les autres mouvements sont aussi affectés. L'étude de quelques faits particuliers ne permet pas d'affirmer d'une ; manière générale qu'il n'existe pas de paralysies systématiques; mais elle montre qu'un examen superficiel peut conduire à une conclusion fausse. Pour démontrer l'existence de la systématisalion d’une paralysie - d’un mouvement adapté, il faut de toute nécessité mettre en évidence, par des mesures, l'intégrité des mouvements non adaptés des muscles en jeu. Cette démonstration me paraît manquer jusqu’à présent. On a décrit dans la neurasthénie et les états analogues des craintes anxieuses de l'exécution de certains actes, et entre autres la peur de la. station verticale (atrémie de Neftel, stasophobie de Bouverel), ce serait . une soi-disant forme d’astasie-abasie qu'on a qualifiée d’émotionnelle (Binswanger). À défaut de mesures, cette forme d'’astasie-abasie doit être considérée comme une paralysie émotionnelle incomplète avec anxiété. RETOURS SÉANCE DU 49 AVRIL 319 MODIFICATIONS ANATOMIQUES ET LÉSIONS ANATOMO-PATHOLOGIQUES DU REIN DANS LE CHOLÉRA ASIATIQUE, par M. le D' O. VAN DER STRICHT, Assistant à l'Université de Gand. (Note présentée par M. A. CHARRIN.) (Travail du laboratoire d'histologie de l’Université.) Nous avons pratiqué l’autopsie de trois cas de choléra asiatique, à peu près immédiatement après le décès. Des fragments du rein ont été fixés pendant une dizaine de jours dans la liqueur de Flemming ou bien dans la liqueur de Hermann. Après un lavage dans l’eau courante avant et après l’action du vinaigre de bois non purifié (24 heures), nous avons déshydraté les pièces et nous les avons encastrées dans la celloïdine. Les coupes ont été colorées par la safranine. Le diagnostic clinique de choléra asiatique a été confirmé par l'examen bactériologique des selles ainsi que par l’autopsie. Le premier cas a eu une durée de vingt heures, le second de un jour et le troisième de deux jours. Le premier cas seul a été accompagné d’anurie complète. Un examen microscopique attentif des préparations de ces reins permet de constater deux espèces de modifications dans les cellules du paren- chyme rénal: des modifications anatomiques en rapport avec l’activité physiologique des éléments glandulaires et des lésions anatomo-patholo- giques véritables. I. Modifications anatomiques du parenchyme glandulaire. — Dans un travail antérieur (1), nous avons signalé les caractères propres aux cor- puscules de Malpighi et aux cellules glandulaires du rein pendant le stade de repos, d'activité et d’hyperactivité. L'étude du rein cholérique con- firme nos recherches antérieures. Ces modifications morphologiques se manifestent dans tous les reins examinés, mais sont surtout accentués pour le premier cas accompagné d’anurie totale. Du côté des corpuscules de Malpighi, on constate généralement que l'anse vasculaire remplit exactement la cavité circonscrite par la capsule de Bowman. L'espace périglomérulaire, compris entre le glomérule et la -capsule, est ordinairement à peu près effacé. Il en est de même pour les espaces intra-glomérulaires compris entre les différents lobules de l’anse vasculaire. À côté de ces corpuscules au stade du repos complet, au point de vue de la sécrétion urinaire, on en rencontre quelques-uns dans les- (1) O0. Van der Stricht. Contribution à l’étude histologique du rein.Modifica- tions de cet organe après extirpation de ‘celui du côté opposé (Annales de la Société de médecine de Gand, 1892). 380 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quels ces espaces sont légèrement indiqués. Ceux-ci doivent par consé- quent être envisagés comme étant encore plus ou moins actifs. Les canalicules contournés se présentent sous des aspects différents. Si on fait abstraction des tubes dont les cellules ont subi la dégénérescence graisseuse à peu près totale, on trouve dans le rein de notre premier cholérique, que la lumière de ces canaux est très réduite, surtout au niveau d’une large zone de la substance corticale la plus rapprochée de la couche limite. A la périphérie du rein, il existe une bordure relativement étroite où les canalicules possèdent une lumière de calibre normal. Les canalicules à lumière réduite ou effacée sont munies de cellules petites, à noyau arrondi central, à protoplasma très compact à peu près homogène, garni du côté de l'extrémité libre d'un plateau dans lequel on n'aperçoit plus une trace de striation. Ges éléments glandulaires pré- sentent donc les caractères propres aux cellules, qui sont au stade de repos à peu près absolu et que nous avons décrites dans le rein de la chauve-souris sacrifiée vers la fin de l'hiver. Nous n’avons observé ces éléments que dans le rein de notre premier cholérique mort au bout de vingt heures, Dans les deux autres cas, les tubes contournés présentent un aspect ._ analogue à ceux de la périphérie de la couche corticale du rein du pre- mier cholérique. Ils possèdent une lumière relativement large ou bien distendue. Dans le rein du troisième cas, la plupart des canalicules con- tournés sont fortement élargis et toutes les cellules, même-celles au pre- mier stade de la dégénérescence graisseuse, offrent des caractères iden- tiques. Elles sont peu élevées, petites et munies d’une bordure en brosse, c’est-à-dire d’un plateau manifestement strié. Le noyau est central et le protoplasma, tout en ayant un aspect compact, est plus clair et moins homogène que celui des cellules au stade de repos complet. D’après Disse (1),ces éléments seraient exempts de tout produit de l’activité sécrétoire. D'après nous (loc. citat.), ils doivent être envisagés comme étant au premier stade de l’activité fonctionnelle, tant au point de vue de l’accumulation du produit de la sécrétion à l'intérieur de la cellule, qu’au point de vue de l'évacuation de ce produit. En d’autres termes, une très faible quantité de liquide clair imprègne les cellules et entre dans la lumière du canal à travers la bordure striée. Quoiqu'il en soit, nulle part on n’observe dans le protoplasma la présence de stries ou de vésicules claires, propres aux cellules glandulaires du rein au stade d'activité et qui ont été signalées par moi (2) et par A. Nicolas (3). (1) J. Disse. Ueber die Veranderungen der Nierenepithelium bei der Secre- tion (Anatomische Hefte von Merkel und Bonnet. I Abtheil., heft V, 1892). (2) O0. Van der Stricht. Contribution à l'étude du mécanisme de la sécré- tion urinaire (Académie des Sciences de Paris, 1894). (3) A. Nicolas. Contribution à l'étude des cellules glandulaires (Journal international d'anatomie et de physiologie, 1894, t. VIT, fase. 7). SÉANCE DU 15 AVRIL 381 À côté de ces tubes contournés munis de cellules à plateau strié, on rencontre quelques autres segments à lumière élargie et à cellules un peu plus élevées, dépourvues de plateau. Ces dernières possèdent un proto“ plasma un peu moins compact encore, et correspondent à la troisième variété de cellules que j'ai décrite et par conséquent à un stade d'activité plus prononcée que les précédentes. Toutefois leurs limites sont toujours très régulières et très nettes du côté de la lumière. Elles ne présentent à leur surface aucun signe d’une transudation, ni d’une évacuation de liquide à l’intérieur de la lumière glandulaire. Si elles sont donc plus actives au point de vue de l'accumulation d’un produit de la sécrétion dans leur intérieur, elles doivent être envisagées comme étant au repos au point de vue de l’élimination de cette matière. Cette variété de cellules est abondante dans le rein du second cholérique. Dans les anses de Henle nous avons à considérer la branche descen- dante et une branche ascendante. La branche descendante se présente à peu près de la manière dans les trois reins cholériques. Sa lumière est très réduite, le plus souvent com- plètement effacée. Ces branches affectent l’aspect de cordons à paroi propre, tapissée de cellules aplaties, à noyaux fusiformes entourés de peu de protoplasme, dont les limites sont difficiles à voir. Le rétrécissement si prononcé de ces canaux nous semble devoir exercer une influence sur la stagnation de la faible quantité de liquide éliminé au niveau des glo- mérules de Malpighi et par les canalicules contournés. La distension de ces derniers, dans le rein du deuxième et du troisième cholérique, trouve ainsi son explication. La branche ascendante de Henle présente deux portions distinctes : Une portion papillaire, tapissée de cellules munies d’un plateau et ana- logues à celles des canalicules contournés, et une portion glomérulaire à cellules toujours dépourvues de plateau (voyez mon premier mémoire cité plus haut). La lumière de la portion papillaire est généralement très réduite. Les cellules munies d’une bordure homogène ou bien striée pos- sédent un protoplasma compact, pareil à celui des canalicules contournés. Elles doivent donc aussi être envisagées comme étant au stade de repos. Il en est de même pour celles de la portion glomérulaire de l’anse ascendante. Normalement elles sont volumineuses, claires, globuleuses, et possédent souvent une limite irrégulière du côté de la lumière glandu- laire. Dans le cas actuel elles sont petites, à limites très nettes ne présen- tant pas une trace d'une évacuation d’un produit sécrété. De plus, la lumière de la glande est très petite et dans le rein de notre troisième cholérique, elle est effacée. IL. Lésions anatomo-pathologiques. — L’intensité de ces altérations est en rapport avec la durée de l’affection. 1° La dégénérescence graisseuse apparaît d’abord au niveau de quelques 382 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE canalicules contournés. Dans les trois reins examinés, on trouve à toutes les hauteurs de la couche corticale en dehors des rayons médullaires, quelques segments tapissés de cellules à peu près cubiques, à noyau faci- lement colorable et à protoplasma clair, parsemé dans toute son étendue de granulativns graisseuses de grandeur très variable. Ces cellules sont toujours dépourvues de plateau. En même temps apparaissent de très fines granulations graisseuses dans toute l'épaisseur du protoplasma des cellules claires de la branche ascendante, ainsi que dans celles de la branche descendante de Henle. Des granulations de même nature se montrent aussi dans les éléments glan- dulaires de la portion papillaire, mais seulement à la base des cellules, où elles forment une bordure basale continue, parallèle à la paroi du tube. Le plateau homogène ou bien strié persiste toujours dans ces derniers canaux. Le noyau de toutes ces cellules ne subit pas de modifications spéciales. Le rein du premier cholérique, dont l'affection a duré vingt heures, ne présente donc qu'un début de dégénérescence graisseuse entamant les anses de Henle dans tout leur parcours, et une dégénérescence graisseuse franche de quelques rares segments de canalicules contournés. Les cor- puscules de Malpighi sont intacts, à part quelques rares granulations graisseuses dans l’épithélium de la capsule de Bowman. Il en est de même pour les canaux collecteurs et les canaux papillaires. Dans le rein du second cholérique (durée : un jour) on observe une dégénérescence graisseuse des anses de Henle, un peu plus prononcée que dans le premier cas. Les segments des canalicules contournés, ayant subi une dégénérescence graisseuse complète, sont plus nombreux. De plus, il y a un début d’une altération de ce genre dans l’épithélium de la capsule de Bowman de quelques corpuscules de Malpighi. Enfin les canaux papil- laires présentent des cellules à caractères spéciaux. Toutes les cellules cylindriques possèdent un noyau bien colorable, dans le voisinage duquel il existe un amas volumineux, arrondi ou plus ou moins irrégulier, se colorant en noir par l'acide osmique. L’essence de térébenthine fait dispa- raître cette teinte noirâtre. Souvent il existe deux ou trois amas sem- blables et de préférence on observe ceux-ci dans un espace compris entre le noyau et la surface libre de la cellule. Les cellules tapissant la surface rénale du côté du bassinet présentent des lésions analogues. La dégénérescence graisseuse des éléments parenchymateux est beau- coup plus prononcée dans le rein de notre troisième cholérique. Les cellules de la portion glomérulaire de la branche ascendante de Henle possèdent un noyau normal; mais le protoplasma est rempli de fines granu- lations graisseuses. Il en est de même pour la branche descendante. Toutes les cellules de la portion papillaire de la branche ascendante de Henle, ainsi que celles de la plupart des canalicules contournés offrent un aspect identique. Elles sont munies d’un plateau strié. Elles possèdent un proto- SÉANCE DU 19 AVRIL 383 plasma compact et un noyau central normal. Au niveau de la zone des bâtonnets de Heidenheïim, il existe une bordure protoplasmique chargée de granulations graisseuses très nombreuses. D’autres canalicules con- tournés sont tapissés de cellules d’un aspect plus clair, et dont le proto- plasma est totalement transformé en granulations graisseuses volumi- neuses. Les corpuscules de Malpighi sont altérés. L’épithélium de la capsule de Bowman a subi la dégénérescence graisseuse. Quelques noyaux sont gon- flés et en voie de fragmentation. L'épithélium glomérulaire présente aussi un début d’une dégénérescence de même nature. Les anses vasculaires sont remplies de globules rouges et d’un très grand nombre de globules blancs, remplis de granulations graisseuses. Les cellules des canaux collecteurs du rein sont gorgées de fines granu- lations graisseuses. Les conduits papillaires présentent les mêmes altéra- tions que ceux du cas précédent. 2 Dégénérescence granuleuse ou état trouble des cellules rénales. À côté de la dégénérescence graisseuse, apparaissent d’auires altérations proto- plasmiques. Quelques segments de tubes contournés et surtout ceux faisant suile à la capsule de Bowman sont tapissés de cellules dont le protoplas- ma est transformé totalement en grains et en boules jaunâtres de volume très variable. Les limites de ces cellules sont vagues et les noyaux arron- dis ou bien ratatinés sont refoulés’ du côté de la membrane propre du tube glandulaire. On observe parfois les produits d'une dégénérescence de cette nature à la surface interne de la capsule de Bowman, là où elle se continue avec le canalicule contourné. Les reins de trois cholériques pré- sentent des altérations analogues. 3° Desquamation des cellules épithéliales. Les cellules des canalicules contournés ont une tendance à se desquamer. Plusieurs se détachent de la membrane propre et tombent dans l’intérieur de la lumière, qu'elles obstruent souvent et contribuent ainsi à la stase de l'urine dans ces canaux, ainsi qu'à la dilatation de ces tubes. Cette desquamation est accompagnée souvent de modifications nu- cléaires de nature dégénérative, sur lesquelles nous avons attiré l’atlen- tion dans un mémoire précédent {/oc. cit.), et d'une fragmentation nu- cléaire directe. Plusieurs cellules des canalicules contournés possèdent de deux à dix noyaux de même volume, isolés ou bien reliés entre eux. Des amas de noyaux accolés se rencontrent également à l’intérieur de la lumière des canaux. 4° Cylindres rénaux. Les canaux urinifères montrent deux espèces de cylindres : Des cylindres cellulaires dont les parties constituantes offrent un aspect normal ou bien ont subi les altérations décrites plus haut, et des cylindres homogènes compacts renfermant souvent des granulations graisseuses. Plusieurs canaux contiennent aussi des globules rouges. Au point de vue des modifications du tissu interstitiel rénal, nous 384 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE n’avons à signaler qu'une particularité. Dans le rein du premier cholé- rique, nous avons constaté la présence d’un grand nombre de cellules volumineuses, c'est-à-dire à granulations safranophiles. Autour de ces éléments, on rencontre souvent des granulations de même nature épar- pillées jusqu’à une certaine distance. SUR LE MODE DE REPRODUCTION DES PARASITES DU CANCER, par MM. ArmaAND RurreRr et J. H. PLIMMER (de Londres). (Note présentée par A. CHARRIN.) On sait, depuis les travaux récents qui ont paru en France, en Angle- terre et en Allemagne, que l’on trouve dans tous les cancers de l’homme des parasites appartenant à la famille des protozoaires. Dans un travail qui vient de paraître dans le Journal of Pathology, vol. I, n° 4, nous avons décrit divers étais du parasite vivant soit dans le noyau, soit dans le protoplasme de la cellule cancéreuse. Ges observations sont basées sur l'étude de plusieurs cancers de la langue, de la peau, du foie, de l'estomac, de l'utérus, et sur quarante-sept cancers du sein, opérés à l'hôpital des cancéreux de Londres. Dans tous ces cas, sans exception, nous avons trouvé les parasites en nombre plus ou moins grand, quelquefois en quan- tité considérable. | J Sans vouloir nous arrêter à la structure de ces parasites, nous ferons remarquer qu’ils sont formés : 1° d’un petit noyau; 2° d’une quantité plus ou moins grande de protoplasme granuleux ; 3° d’une capsule à double contour. Nous avons pu voir ces parasites à l’état vivant, sur des prépa- rations fraiches. Leur réaction avec les couleurs d’aniline, la fuchsine, l’éosine, l’hématoxyline, la cochenille et le carmin, sont absolument diffé- rentes des réactions du noyau, du protoplasme de la cellule cancéreuse, et de ses produits de dégénérescence. Avec l'hématoxyline et la cochenille, par exemple, on obtient facilement des réactions très nettes et caractéris- tiques. Ils diffèrent du reste absolument des parasites décrits par MM. Da- rier, Malassez, Wickham, L. Pfeiffer, Podroyssoszky, et Sawtschenko, mais nous paraisssent identiques avec certaines figures décrites par Soudakiewilch, et Joa. MM. Soudakiewitch, Sawtschenko et Joa ont décrit dans leurs mémoires la formation des spores par le parasite du cancer. M. Metchnikoff et nous- mêmes nous sommes élevés contre cette manière de voir, et dans notre mémoire détaillé nous montrerons que l'existence des spores décrites par Soudakiewitch et Sawtschenko n’est nullement démontrée. Nous faisons pourtant quelques réserves à l’égard de M. Joa, dont le mémoire détaillé n’a pas encore paru. SÉANCE DU 15 AVRIL 389 Nos observations personnelles sur le mode de division du parasite sont basées exclusivement sur l’étude de quarante-sept tumeurs du sein. Le parasite se multiplie par simple division, en deux parties égales, sans que nous ayons pu démontrer des phénomènes de karyokinèse. Les deux parties sont absolument identiques, et les deux noyaux sont reliés par un petit réseau de fils extrêmement minces. Les deux jeunes êtres sont en- core contenus dans la même capsule, mais la capsule se divise aussi; enfin chaque parasite est contenu dans une capsule séparée. Dans d’autres cas, le parasite entravé, au lieu de se diviser en deux, se divise en quatre, huit; nous avons compté jusqu’à trente-deux jeunes parasites dérivés d’un seul. Chaque petit protozoaire comprend alors un petit noyau, une couche mince de protoplasme et une capsule bien marquée. Le corps de reliquat qu’on trouve dans d’autres sporozoaires se voit souvent sans aucune dif- ficulté. Nous ne nions pas la possibilité de la formation des spores, mais nous constatons que le parasite du cancer se multiplie le plus souvent par simple fissiparite. M. Metchnikoff, directeur de l'Institut Pasteur, qui a bien voulu con- trôler nos observations et nous donner l’appui de sa haute compétence, nous à fait remarquer la ressemblance frappante qui existe entre les stades décrits par nous et les corps en rosace du parasite de la malaria découvert par M. Laveran. SUR LES FONCTIONS OTOCYSTIQUES, par M. PIERRE BONNIER. Les appareils neuro-épithéliaux simples à fonction Lactile sont réalisés par des formations planes, convexes ou concaves. Dans toutes ces forma- tions, la fonction tactile élémentaire apparaît assez uniforme. Des corps rigides, plus ou moins inertes, surmontent la papille neuro-épithéliale : ce sont ou des cils ou des otolithes, le plus souvent on trouve l'un et l’autre. Le rôle de ces corps solides et inertes est de rendre très sensibles à la paroi tactile soit les contacts des corps étrangers solides, soit les ébranlements du milieu liquide ambiant (1). L'exercice de la fonction organique de localisation, qui, définissant à l'organisme le lieu des points tactilement perçus, lui révèle sa position propre par rapport à l’espace tangible, — orientation objective et subjec- tive, sens de l’espace, — varie avec le dispositif adopté par l'appareil sensoriel. (4) Conf. Note sur les fonctions otolithiques, 18 févr. 1893. 3806 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les formations tactiles planes perçoivent le corps étranger sans inter- médiaire, et le localisent objectivement au point précis du contact. Leur orientation objective ne dépasse pas la périphérie de l’organisme, le lieu des points perçus est la surface tégumentaire. L'orientation subjective correspondante est forcément assez obtuse. Les formations tactiles convexes étendent la sphère de tactilité plus ou moins loin au delà de la périphérie de l’animal, selon leurs dimensions; car si les boutons tactiles à peine saillants ne peuvent opérer beaucoup au delà des téguments, les longs prolongements protoplasmiques des protozoaires, les immenses filets, les tentacules de certains invertébrés créent autour de l’animal une sphère d'investigation énorme par rapport à son volume. Ces appareils convexes sont fixes ou mobiles. Les premiers opèrent à -peu près comme les appareils plans, leur orientation est peu développée, leurs images sont droites et localisées au contact, les appareils mobiles, cils, pseudopodes, palpes, tentacules, bras, ne localisent plus de même et leur analyse d'orientation objective est rendue plus complexe par leur mobilité. Jusqu'ici l'animal a localisé le contact par la connaissance du -point touché; il ne connaîtra maintenant la situation dans l’espace du corps touché que par deux opérations : La première, lui révélant quel est celui de ses organes tactiles mobiles qui aété touché, la seconde lui fait connaître la position, l'attitude qu'affec- tait cet organe mobile au moment du contact. En d’autres termes, l’orga- nisme ne localise objectivement les corps étrangers que parce qu’il localise objectivement la partie de lui-même qui perçoit. Gette loi est générale pour toutes les perceptions d'espace, externes et internes. L'orientation extra-organique implique et exige une orientation intra- organique. Le sens de l’espace objectif se définit par le sens de l’espace subjectif, celui-ci exercé inconsciemment presque toujours. Pour les appareils mobiles, cette orientation intra-organique indispensable révèle -les attitudes et les mouvements par des perceptions d’espace qui doublent les sensations tendineuses, articulaires, viscérales. Ce sens de l’espace à domaine intra-organique et segmentaire, auquel le terme de sens muscu- laire convient si peu, contribue, avec les sens périphériques de l’espace, à former dans les centres des images d’espace indispensables à l’appro- priation, à la coordination, à la composition et à la mesure des mouve- ments réflexes ou voulus. Au delà de la portée des organes tactiles convexes, fixes ou mobiles, cesse Le tact immédiat. Le corps étranger n’est plus perçu que par les ébranlements qu’il communique au milieu intermédiaire qui seul est senti par tactilité directe. Ce milieu interposé étant fluide, il est nécessaire que ses ébranlements soient rendus perceptibles par un procédé de renforce- ment, au moyen de corpuscules rigides et inertes, cils et otolithes. Les formations tactiles concaves les plus simples sont de petites macules SÉANCE DU Â9 AVRIL 387: EEE neuro-épithéliales ciliées, disposées au fond d’un retrait épidermique ou même surmontés d’un tube de même formation. Ces appareils perçoivent l'ébranlement par tactilité directe, quandil leur parvient normalement; ils restent fermés et insensibles aux ébranlements trop obliques ou parallèles au plan ectodermique. Chacun d'eux a son domaine tactile propre. Tels sont les organes latéraux des vertébrés inférieurs, dont la distribu- tion, remarquablement régulière à Îla surface de l'animal, lui fournit l'analyse de l'espace ébranlé selon un grand nombre de secteurs distincts, permettant une orientation objective et par conséquent subjective d’une grande précision et d'une grande rapidité. Ils sont accumulés par la condensation des métamères vers le segment céphalique, et l’un d'eux, appartenant à la fente branchiale auriculaire, deviendra l'oreille des ver- tébrés, dont toutes les fonctions dérivent de celles des organes latéraux. Cet organe latéral auriculaire, devenu rapidement otocystique, puis laby-: rinthique, doit sa fortune organique à son siège céphalique, à ses rapports immédiats avec le cerveau postérieur, à l'apparition des sillons, puis des canaux semi-circulaires, à ses rapports soit avec l’air de la vessie nata- toire dont il apprécie la tension par rapport à la pression extérieure qu'il mesure également (4), soit avec le pharynx respiratoire des animaux aériens, enfin à la fonction auditive qui va se développer à la suite de la formation cochléaire. L'otocyste auriculaire cumule donc jes analyses d'espace, de tension, des ébranlements sous forme de trépidations ou de sonorités. Certains de ces appareils latéraux sont munis d’otolithes el fournissent des images tactiles, simples, punctifermes, et par conséquent ni droiles, ni renversées. Ces oreilles simples ne s'unissent jamais pour former des oreilles composées, analogues aux yeux à vision mosaïque. Dès les premiers invertébrés sont apparues des formations concaves qui, généralement adoptent la forme sphérique en se refermant sur une masse liquide communiquant indirectement avec le milieu extérieur dont elle garde la composition et la tension. Ces appareils otocystiques, dont la forme parfaite est réalisée par Unio, Petrotrachæa, sont tout à fait compa- rables à des grelots dont les parois resteraient insensibles, soit aux ébran- lements qui parviendraient à l'animal, soit aux mouvements exécutés par lui, si leur cavité n’était habitée par l’otolithe, dont les mouvements solidiens et l’inertie sont gênés par les appareils ciliés qui recouvrent comme d’une rétine la paroi interne. Le moindre ébranlement intéressant l'animal circule à travers sa masse sans l'émouvoir, et traverserait éga- lement l’otocyste sans s’y rendre perceptible, s’il ne rencontrait l'otolithe, solide et inerte, relativement libre, qui réagit à l’ébranlement par une oscillation en totalité, d’une force et d’une direction correspondant à celles de l'ébranlement, et intéressant la tactilité de la paroi. De même, (1) Sur les fonctions tubo-lympaniques, 26 nov. 1892. 388 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE les mouvements actifs de l’animal sont perçus tactilement par les conflits qu'ils provoquent entre l’inertie du solide enfermé et sa paroi otocystique. De plus, les chutes incessantes de l'otolithe pesants sur certains points de la paroi révèlent à celle-ci la notion de verticalité et servent à l'équi- libration réflexe. Les appareils concaves ont des images renversées. En résumé, nous pouvons donc dire des appareils otocystiques ce que nous disions des formations otolithiques. Ce sont des organes périphé- riques du sens de l’espace, opérant dans le monde des ébranlements par tactilité. Ils fournissent aux centres les images d'espace sans lesquelles il n’est pas d’appropriation volontaire ou réflexe des mouvements et, par conséquent, ni coordination, ni équilibration, ni locomotion proprement dite dans le domaine de la motilité, ni objectivité, ni forme dans le domaine sensitif. Leur tactilité exquise et subtile les rend accessibles aux moindres trépi- dations, —— ils ne sont pas des organes auditifs, si l’on entend par audi- tion la faculté de percevoir les ébranlements rapides sous forme de sensations continues, définies particulièrement par leur hauteur, faculté liée à la formation cochléaire. NOUVELLES RECHERCHES EXPÉRIMENTALES SUR LE PASSAGE DES MICROBES DE LA MÈRE AU FŒTUS (Streptocoques. Staphylocoque doré. Coli-bacille), par MM. SABRAZÈS et CHAMBRELENT. (Travail du laboratoire des cliniqnes de la Faculté de médecine de Bordeaux.) Nous avons étudié, au point de vue de leur passage à travers le pla- centa et de l’action qu’ils exercent sur les produits de la conception, les microbes que l’on trouve le plus communément dans l'infection puerpé- rale, streptocoques, staphylocoques, Pacterium coli commune. I. Streptocoques. — Nos premières expériences ont porté sur un sirep- tocoque isolé au laboratoire de M. le professeur Straus par M. Würtz; sa virulence a été établie par une inoculation à un lapin qui présenta, au sixième jour, un érysipèle de l'oreille suivi, à brève échéance, d’une infection généralisée à streptocoques. Expérience I. — Le 21 novembre 1892, on injecte dans la veine auriculaire d'une lapine pleine, un centimètre cube d’une culture en bouillon de ce strep- tocoque ; quelques gouttes de cette culture pénètrent dans le tissu cellulaire de l'oreille. Cinq jours après, la lapine est très affaissée ; l'oreille est tom- HE ps SÉANCE DU 15 AVRIL 389 —.._ ai bante, rouge, chaude, lourde, œdématiée; le sang ensemencé sur divers milieux (agar, gélatine, bouillon) donne des cultures pures de streptocoques. Le 27 novembre, l'animal succombait. L'examen sur lamelles du sang du cœur, da frottis de divers organes (foie, utérus de la mère) montrait des strepto- coques; ces microbes infiltrent les fœtus qui sont âgés de vingt-cinq jours environ. Sur les milieux usuels énumérés ci-dessus, le sang du cœur de la mère, la paroi utérine, la pulpe fœtale ont fourni des cultures pures d’em- blée. A l'examen microscopique de l'utérus, au niveau de l'insertion placentaire, ilnous a été facile, après collage sur lame et double coloration par le carmin de Gibbes et la méthode de Weigert, de déceler de nombreux streptocoques. M. Mathias Duval, dont on connaît les remarquables travaux sur le placenta des rongeurs, nous a fait l'honneur d'étudier, sur nos coupes, la topographie. de ces microbes : ils sont très abondants dans la paroi ulérine proprement dite, dans cette partie du placenta maternel que M. Mathias Duval désigne sous le nom de région intermédiaire des cotylédons utérins; sur les prépara- tions, cette partie est représentée par des éléments indistincts, mêlés à du sang coagulé et à des débris de membranes fœtales qui contiennent des streptocoques en grand nombre et distribués sans systématisation. ExpéÉRiENCE II. — Une lapine arrivée au terme de la gestation recoit, le samedi 10 décembre, à six heures du soir, dans la veine marginale d’une oreille, un centimètre cube d’une culture pure de streptocoques dans du bouillon, provenant de l’ensemencement du sang de la lapine précédente. Le lendemain, la lapine est très affaissée et ne mange pas; le 12 décembre, elle est en travail, pousse des gémissements plaintifs et met bas, à neuf heures du soir, un premier fœtus mort avec son placenta. On examine immédiatement le sang recueilli dans le cœur du fœtus et on y trouve des microcoques en abondance ; on en trouve avec la même facilité dans le foie et dans le placenta. Des cultures faites, avec ce sang, sur milieux variés ont donné les réactions typiques du streptocoque pyogène (fin pointillé sans liquéfaction sur gélatine, longues chaines enchevêtrées dans le bouillon, etc.). Quelques minutes après avoir mis bas ce premier fœtus, la lapine succombait au milieu de convul- sions. , A l’autopsie, pratiquée sur le champ, l'utérus contient trois fœtus morts; les placentas sont décollés ; il existe dans la cavité utérine un épanchement séro-sanguinolent. Streptocoques dans le sang du cœur et dans le frottis du foie de la mère aussi bien que dans le frottis des divers organes fœtaux. Toutes les cultures provenant de la mère (sang du cœur, foie) et des fœtus (cœur, foie) se sont montrées fertiles et ont reproduit des colonies caractéris- tiques de streptocoques ; ces microbes, retrouvés aussi dans le sang du pla- centa et dans le liquide amniotique, y ont été isolés à l’état de pureté. Les placentas, après fixation par l'alcool absolu, ont été placés dans la paraffine, coupés au microtome de Viallanes et, après collage sur lame, traités par une double coloration (carmin de Gibbes, méthode de Weigert). Il est facile de voir, à un examen même superficiel, beaucoup de microcoques disposés deux par deux, en chaînettes, en amas formés de chainettes. M. Mathias Duval a fait les observations suivantes sur nos préparations : il a 390 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ro constaté que les tissus maternels contenaient des streplocoques groupés par petites colonies et sans ordre ; ils forment des trainées au milieu de la pulpe nücléée provenant de la transformation des cellules vésiculeuses dites inter- médiaires. Dans l’ecto-placenta (complexus tubulaire), ils sont surtout dans tout ce qui est interstice, entre les lobules, mais surtout à la surface ou dans la couche limite de l’ecto-placenta ; enfin ils sont prodigieusement abondants entre les lambeaux de membranes fœtales. Sur de nouvelles coupes que nous avons faites intéressant l’utérus et les parties fœtales, M. Mathias Duval a noté les faits suivants : les préparations montrent la paroi utérine, des débris de membranes, la peau et diverses parties du corps du fœtus parmi lesquelles on découvre un gros vaisseau plein de globules rouges et blancs. Il y à des microbes à la surface externe de l'utérus et à sa surface interne où ils sont très distincts et pénètrent dans les cavités des glandes. Tous les interstices des membranes fætales sont bourrés de microorganismes bien nets. Dans les parties fœtales, on retrouve ces micro- organismes dans certains débris épidermiques; on n’en voit pas dans les vaisseaux, dans les muscles, dans le cartilage hyalin pur; mais il yena dans le cartilage en voie d'ossification et là ils sont très régulièrement dans les débris de travées directrices de substance cartilagineuse. ExPériENce I. — Le 25 décembre, à dix heures du matin, une lapine pleine recoit, dans le tissu cellulaire de l'oreille, trois gouttes d’une culture pure de streptocoques provenant de l’ensemencement du sang d'un des fœtus de la dernière lapine. Deux jours après, débute un érysipèle qui s'aggrave jusqu’au 31 décembre, date de la mort; l’autopsie a été pratiquée immédiatement après. On sème sur divers milieux le sang du cœur, le parenchyme du rein et de l'ovaire gauche de la mère et on fait des prises au centre des embryons qui sont âgés d'environ vingt-cinq jours. Ces cultures ont toutes, sans exception, fourni le streptocoque à l’état de pureté, éprouvé par des passages sur gélatine et dans le bouillon et par des cultures sur plaques. L’oreille érysipélateuse est farcie de streptocoques. Il en est de même de l'utérüs gravide. Les coupes ont été soumises à la haute appréciation de M. Mathias Duval qui s'exprime ainsi : on trouve la paroi utérine, puis ses épaississements formant les cotylédons maternels, les débris du placenta fœtal et des membranes fætales, Le tout con- fondu en un détritus informe, enfin la cavité utérine et la paroi non cotylé- donaire de l’utérus revenue sur elle-même, de sorte que cette muqueuse très plissée dessine comme d'innombrables culs-de-sac glandulaires. Il y à une sorte de merveilleuse injection de ces cavités glandulaires par les microbes. Ceux-ci infiltrent pareillement tous les interstices entre les membranes fætales et les fragments de placenta fœtal. Dans les cotylédons maternels, il n'ya qu'un endroit où deux ou trois sinus sanguins sont pleins de microbes. ExPérience IV. — Le 20 février, une lapine pleine recoit dans une veine auri- culaire, 1 centimétre cube d'une culture pure de streptocoque provenant d’une arthrite puerpérale du genou. L'animal est sacrifié au cinquième jour. A l'autopsie, utérus peu développé, il contient des embryons, au nombre de huit, du volume d'une grosse lenulle, adhérents à la paroi. Pas d'hémorragie. Ces embryons sont âgés de douze jours e SÉANCE DU 45 AVRIL 391 —————_—————_—_——__————————_—_—_—_—_——————————————————————————————…—…—…—_—_…_ “Cr environ. Les ensemencements des organes maternels (cœur, foie, rein), et du centre des petits embryons ont reproduit le streptocoque à l’état de pureté; la présence de ces microbes fut constatée dans le frottis des organes énumérés. Les coupes des embryons après collage sur lame et coloration appropriée se montrent bourrées de chainettes de streptocoques. Les tissus de ces embryons sont en grande partie nécrosés. M. Mathias Duval a bien voulu confirmer encore ce fait sur nos préparations. Dans la paroi utérine, ces microbes sont en nombre restreint. Au cours de ces quatre expériences, l’autopsie a eu lieu au moment même de la mort; les fœtus avaient loujours succombé, quelque fut l’époque de la gestion. Dans tous les cas, l’infection des fœtus n’est pas douteuse, non seulement proche du terme, lorsque le placenta est défini- tivement constilué, mais encore pendant les premiers jours de la vie fœtale. IL. Staphylocoque doré. — Les cultures pures provenaient d’une pustule d'impétigo. Leur virulence a été démontrée par une injection intra-vei- neuse faite le 3 février à un lapin; cette inoculation a amené la mort de l'animal en quarante-huit heures. Tous les organes étaient infectés de staphylocoques. Les cultures pures obtenues par l’ensemencement du sang du cœur ont été délayées dans du bouillon et injectées, à la dose de À centimètre cube dans la veine auriculaire d’une lapine pleine, le 7 février. Le surlendemain, cette lapine succombait, avec des phénomènes de dyspnée intense. L’autopsie, faite sur-le-champ, montre que l'utérus con- tient neuf fœtus, qui paraissent âgés de trois semaines; tous les placentas sont décollés ; la cavité utérine est remplie de sang. Des cultures sur divers milieux sont faites avec des prises : 1° au centre du placenta ; 2 dans l’encéphale des fœtus; 3 dans la cage thoracique des fœtus: 4° dans le cœur de la mère; 5° dans les reins de la mère; 6° dans le foie de la mère. Tous les milieux ensemencées ont donné des colonies caractéristiques de staphylocoque doré; leur examen microscopique ne laissait aucun doute sur leur pureté. Le frottis des placentas et des organes maternels et fœlaux (cœur, foie, reins) contenait des amas de microcoques. Des coupes de placenta, après fixation par l'alcool absolu et coloration appropriée permettent de constater la présence de staphylocoques dans cet organe; ces microbes ne paraissent pas contenus dans les vaisseaux sanguins; ils sont dans les interstices. Leur topographie semble dépourvue de toute systématisation. Leur abondance est moins grande que celle des streptocoques dans les expériences précédentes. M. Mathias Duval a examiné nos préparations et contirmé ces résullals. XII. Bacterium coli commune. — Expérience I. — Le coli-bacille que nous avons injecté provient d’un péricarde d’éclamptique du service de M. le pro- 13. 392 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE fesseur Moussous. L'autopsie de cette femme a été faite quinze heures après la mort. Isolé sur plaque de gélatine où il formait des colonies rondes, lustrées, -un peu chagrinés, ne liquéfiant pas, il se présentait sous l'aspect d'un bacille assez mobile, arrondi aux deux bouts, ne prenant pas le Gram ; ses extrémités se coloraient avec plus d’intensité par le bleu de méthylène, la fuchsine, ete., que le centre généralement clair. Sur pomme de terre, il donnait une couche olivâtre, devenant rapidement brun-chocolat; en strie, sur gélatine, un très large enduit à bords dentelés, luisant et légèrement chagriné sans liquéfac- tion. Le bouillon lactosé à 1/100°, additionné de carbonate de chaux, se cou- vrait au bout de dix heures environ, d'une abondante mousse de fines bulles gazeuses. L’urine restait acide, le lait se coagulait en vingt-quatre heures. Le 6 mars 1893, on délaie dans un centimètre cube de bouillon une anse de platine de l’enduit sur gélatine et on inocule par injection veineuse, une lapine proche du terme de la gestation. Quelque temps après l'iñoculation, l'animal est affaissé, ne réagit pas lorsqu'on veut le saisir; il prend bientôt une attitude accroupie à laquelle succède un état de torpeur accompagné de dyspnée. Au bout de douze heures, la lapine était encore vivante, mais paraissait très malade. Le lendemain 7 mars, de grand matin, elle est trouvée morte. L'autopsie est faite sans retard, trois heures environ après la mort. L'utérus contient neuf fœtus morts, à peu près à terme, entourés de membranes intactes. Les placentas sont décollés et humectés de sang. On fait des prises au centre de deux placentas avec l’anse de platine que l’on frotte sur deux tubes de gélatine et un tube d’agar peptonisés. On fend, à l’aide d’un couteau stérilisé la cavité abdominale d’un fœtus et on ensemence un tube d’agar peptonisé, sur tube de gélatine. Le tissu hépatique d’un em- bryon est semé sur un tube d'agar, le sang du cœur dans du bouillon; les centres nerveux, les poumons sur gélatine. On sème également sur divers milieux le sang du cœur de la mère (deux tubes de gélatine, un tube de bouillon), les reins de la mère (trois tubes de gélatine), la rate (un tube de bouillon). Le sang du placenta délayé dans une goutte de bleu de méthylène à solu- tion aqueuse contient des bacilles courts, mobiles, à centre clair. De nom- breuses lamelles faites avec le frottis du placenta, du rein, de la rate, du sang du cœur des embryons montrent ce même bacille; il est surtout abondant dans le placenta; on le retrouve dans le sang du cœur, le frottis de la rate et des reins de la mère. Il ne prend pas le Gram. Tous les milieux liquides présentaient le soir même un trouble et un fin dépôt pulvérulent. À l'examen, bacille court, arrondi aux deux bouts, parfois disposé par couples assez mobile, décoloré par le Gram. Transporté dans le bouillon lacto-carbonaté, il détermine une fermentation rapide; sur pomme de terre, il forme un enduit olivâtre. Les tubes de gélatine ont fourni sur la strie un enduit étalé, luisant, légère- ment chagriné, de la couleur du milieu, à reflets bleutés, à bords dentelés mesurant À centimètre en largeur eu bout de vingt-quatre heures. Pas de liquéfaction. La culture est plus particulièrement étendue dans les tubes pro- venant du sang maternel et du placenta. Sur agor, large enduit muqueux, étalé jusqu'aux parois. Par piqüre, cul -ture en clou et développement de gaz. SÉANCE DU 19 AVRIL 593 A l'examen de ces diverses cultures, on trouve à l’élat de pureté, le bacille décrit plus haut qui devient polymorphe sur les colonies un peu âgres. Les tubes fertilisés par le foie de la mère, le poumon et le cœur de l'embryon ont servi à des cultures dans le bouillon lacto-carbonaté dont ils ont prova- qué une fermentation active et à des semis sur pomme de terre où s’est produit un enduit brunâtre. Le placenta, coupé dans toute son épaisseur, après fixation par l'alcool absolu et inclusion dans la paraffine, est coloré sur lame par les diverses méthodes de Kühne ; le bleu phéniqué nous a surtout donné de bons résultats. Les bacilles à espace clair central se trouvent très clairsemés dans les lacs sanguins et sur toute l'étendue de la coupe; on en rencontre aussi en dehors des vaisseaux et particulièrement dans l’interstice des colonnes qui forment l’ecto-placenta de M. Duval. Le foie, le rein de la mère, soumis aux mêmes procédés de fixation et de coloration, contiennent également les mêmes bacilles; ils sont surtout abon- - dants dans le premier de ces organes. Le rein des fœtus en contient égale- ment mais en plus petit nombre ; il est nécessaire de faire un examen prolongé des préparations pour constater leur présence. Les coupes de ces divers organes traitées par les méthodes de Gram et de Weigert ne montrent pas de bactéries. En résumé, peu de temps avant le terme de la gestation, une infection coli- bacillaire a été mortelle pour la mère et pour les fœtus et s’est accompagnée de décollement placentaire. - ExPÉRIENCE Il. — Le coli-bacille inoculé provenait de l’enduit sur gélatine d'une culture faite avec le sang de la précédente lapine; délayé dans 2 centi- mètres cubes de bouillon de bœuf peptonisé, il a été injecté dans les veines auriculaires d’une lapine pleine, le 15 mars à cinq heures du soir. À six heures; l'animal est accroupi dans un état de torpeur très accentuée; à six heures et demie, il est en proie à un accès convulsif qui dure quelques minutes; peu après, nouvelles convulsions auxquelles il succombe. L’autopsie a été faite au moment même de la mort. L’utérus contient dix fœtus au vingtième jour envi- ron, revêtus de leurs membranes intactes ; les placentas ne sont pas décollés : pas d’hémorragies dans la cavité utérine. Les œufs sont rapidement ouverts avec un fin bistouri stérilisé, les embryons incisés avec une mince lame chauffée au rouge, leur centre semé sur agar, sur gélatine, dans du bouillon. Le sang du cœur, le parenchyme du foie et des reins maternels sont ense- mencés sur les milieux usuels. Le lendemain on constate que bon nombre de tubes sont restés stériles cependant deux provenant de la pulpe fœtale (gélose, bouillon), donnent le coli-bacille à l’état de pureté, bien que la culture soit relativement peu floris- sante. Un seul tube provenant du foie de la mère a également reproduit ce microbe en culture pure. Ces cultures, maternelles et fœtales, transportées dans le bouillon lacto- carbonaté, sur gélose et gélatine par piqûre et en strie, sur pomme de terre, dans le lait, dans l'urine, sur les milieux lactosés colorés au bleu de tournesol suivant le procédé de M. Würtz, affirment hautement le diagnostic coli- bacille. L'examen montre, dans ces milieux, ce bacille mobile, rapidement 394 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE polymorphe, avec de nombreux éléments en navette, se décolorant par le Gram. 11 s’agit, dans ce dernier cas, d'une septicémie suraiguë et quasi foudroyante produite par le coli-bacille au début de la gestation. La transmission intra- placentaire s’est effectuée sans qu'il nous ait été possible de constater dans l'utérus et les placentas des lésions vasculaires appréciables. De ces expériences on doit conclure à la transmission de la mère du fœlus, à diverses périodes de la gestation et à brève échéance après l'in- fection de la mère, des streptocoques du staphylocoque doré, du coli- bacille. Le passage ne semble pas, d'après M. Mathias Duval, être toujours sous la dépendance de lésions grossières des vaisseaux. La dissémination de ces microbes dans le placenta et l'organisme fœtal paraît dépourvue de systématisation : c’est encore là l’opinion qui se dégage des observa- tions de M. Mathias Duval. Il est un point qui mérite plus particulièrement de fixer l'attention, à savoir l'abondance extrême dans les tissus des embryons tout jeunes des microorganismes inoculés; il semble qu’il y ait là plus qu'un simple semis se faisant par la voie sanguine mais bien un développement sur place et des plus actifs du microbe expérimenté. Il nous serait facile de laisser entrevoir combien l'étude de la pathologie de la grossesse et de certaines lésions congénitales pourrait bénéficier de ces remarques sur Le passage, la colonisation et la topographie des mi- crobes dans l'organisme fæœtal. Nous préférons néanmoins, dans ces recherches purement expérimentales, nous borner à un exposé précis et sans commentaires hypothétiques. SUR LA FONCTION THYROÏDIENNE, par M. G. Moussu. Au sujet de la dernière communication que j'ai eu l'honneur de faire à la Société, sur la fonction thyroïdienne, M. Gley a répondu qu'en prati- quant la thyroïdectomie chez le chien, on ne pouvait pas ne pas enlever les glandules parathyroïdes, parce qu’elles se trouvaient enchâssées dans l’épaisseur de la glande principale. Les données anatomiques de Sandstrôm, sont sur ce point parfaitement explicites et les communications de M. Gley (Société de Biologie, 25 février 1893) n’y ont rien ajouté, pas plus au point de vue histologique qu'au point de vue anatomique. On ne saurait donc nier qu’en pratiquant la thyroïdectomie ordinaire, on enlève à la fois les corps thyroïdes et les glandules, et ce serait, dit-on, pour cette raison que là mort arrive dans tous les cas. SEANCE DU 15 AVRIL 395 EEE — — ee Cu Je tiens à faire remarquer aujourd’hui, qu’en plus des deux parathyroïdes normales, il existe fréquemment des parathyroïdes supplémentaires, jusqu’à deux et trois d’un même côté. Ces glandules peuvent non seule- ment être accolées au corps thyroïde mais peuvent encore se rencontrer à son voisinage, dans le tissu conjonctif périthyroïdien, dansle tissu con- jonctif prétrachéal, ou le long des ramifications des artères thyroïdiennes. Je n’en veux pour preuves que les deux pièces injectées que j'ai pré- parées ce matin et que je mets à la disposilion de ceux qui vondront les examiner. Sur six chiens sacrifiés et injectés ce matin, quatre ont présenté les dispositions anatomiques décrites par Sandstrôm. Des deux autres, le premier offrait deux glandules parathyroïdes à droite, l’une au milieu de la surface externe de l'organe principal, l’autre tout à fait à l'extrémité supérieure, et isolée. A gauche, il existe, ainsi qu’il sera facile de s’en assurer par l'examen de la pièce, une glandule parathyroïde isolée, au point de pénétration de l'artère thyroïdienne supérieure, et deux autres dans le tissu conjonctif prétrachéal irriguées par des ramuscules de l'artère thyroïdienne. Sur le second chien, la disposition était normale à droite, mais à gauche, il y avait encore deux glandules; l’une au point de pénétration de l'artère thyroïdienne, l’autre le long de cette artère. Si donc on avait thyroïdectomisé ces deux chiens, on aurait dans les deux cas laissé une ou deux glandules le long des artères thyroïdiennes, et si la théorie de la suppléance est vraie, ces deux chiens auraient dû survivre, ce qui ferait une proportion de deux sur six, puisque ce matin je n'ai examiné que six chiens. Comme je n’y puis croire, je ne vois plus qu’un seul moyen de démon- trer si, oui ou non, les glandules parathyroïdes jouent le rôle de sup- pléance qu’on leur atlribue. Ce moyen consiste à extirper les corps thyroïdes, tout en laissant les glandules. Quoi qu’en ait dit M. Gley, l'opération est parfaitement réalisable lorsque la glandule parathyroïde se trouve à l'extrémité supérieure de l'organe principal, position dans laquelle son isolement est relativement facile. J'ai réalisé cette expérience il y a deux jours, je me propose de la répéter plusieurs fois, et les résultats diront si la suppléance est effective ou imaginaire. Je serai sans doute obligé de sacrifier un assez grand nombre de sujets, parce que les glandules parathyroïdes ne se trouvent pas toujours à l'extrémité supérieure de l'organe principal, mais c’est chose nécessaire, car lorsque ces glandules se trouvent enclavées dans l'épaisseur de l’organe, soit sur la face interne, soit sur la face externe, l’énucléation est extrêmement difficile, et il est, je crois, impossible de la réaliser sans laisser autour une certaine quantité de tissu thyroïdien. 396 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE NOUVELLE PREUVE DE L'IMPORTANCE FONCTIONNELLE DES GLANDULES THYROIDES, par M. E. Gzey (1). J'ai récemment montré qu’il existe chez le chien des glandules thy- roïdiennes analogues à celles que j'ai antérieurement décrites chez le lapin (2). Or, il est possible de prouver que ces organes peuvent remplir la même fonction que chez ce dernier animal, c’est-à-dire suffire à rem- plir la fonction thyroïdienne, quand la glande thyroïde proprement dite a été extirpée. J'ai réussi en effet à conserver sur plusieurs chiens les glandules avec les vaisseaux qu’elles reçoivent, tout en pratiquant l’extirpation des deux (1) Je ne voulais pas publier encore les faits dont il s’agit dans cette note, désirant avoir un plus grand nombre d'expériences. Mais la communication de M. Moussu m'oblige à les relater dès maintenant. Gomme, retenu par l’ensei- gnement que je donne en ce moment à la Faculté de médecine, je suis arrivé en retard à la Société, la séance étant commencée et M. Moussu faisant sa communication, et que je crains que certaines parties de celle-ci ne m'aient échappé, j'ai prié le secrétaire en fonction, M. le D' Capitan, de vouloir bien me transmettre le procès-verbal de la séance. Voici la partie de ce pro- cès-verbal qui m'intéresse : « M. Moussu. J'ai constaté sur de nombreux chiens l'existence de glandules parathyroïdiennes multiples et occupant des situations variables ; de-sorte que, si on avait opéré ces animaux, on aurait pu laisser sans s’en apercevoir des glandules aberrantes. Si, systématiquement, on enlève le corps thyroïde en respectant les glandules dont on a nettement constaté la présence, on peut alors observer ce qui se passe. L'expérience ainsi réalisée peut seule donner des indications valables. Je viens de la pra- tiquer sur un chien et j'attends les résultats qui seuls permettront d'accepter ou d’infirmer la théorie soutenue par M. Gley. » À quoi j'ai répondu, d'abord, que j'étais heureux de voir M. Moussu confirmer ce que j'ai dit au sujet de l'existence et des dispositions variées des glandules thyroïdes chez le chien (Soc. de Biol., 25 février 1893, p. 217). Puis, j'ai ajouté que j'avais réalisé depuis plusieurs mois l'expérience qu'il se proposait de pratiquer.—Je remar- querai, à ce propos, que je n'ai jamais dit qu’on ne peut pas enlever le corps thyroïde sans enlever en même temps les glandules. J'ai dit, ce qui est bien différent, que, quand on pratique la thyroïdectomie sur le chien, on enlève glandules et glande à la fois. « Quand on pratique la thyroïdectomie », cela s'entend évidemment de tous les physiologistes qui ont fait cette opération jusqu’à ce jour, l'existence des glandules et & fortiori leur importance n'étant pas encore connues. Pour moi, j'étais fixé sur ce point, puisque, lorsque j'ai présenté le 25 février dernier à la Société ma note anatomique, et lorsque j'ai répondu le 41 mars à une note de M. Moussu, j'avais déjà plusieurs fois réalisé l’extirpation de la glande avec conservation des glandules; opération dont M. Moussu vient nous signaler théoriquement la possibilité dans quelques cas. (2) Soc. de Biol., 1891, p. 841 et 843; Arch. de physiol., janvier 1892, p. 135. SÉANCE DU 19 AVRIL 397 — ————————_—_—_—_—_____—_——————_——_—_——————————2ZL lobes du corps thyroïde. Quand les glandules sont isolées à l'extrémité supérieure ou à l'extrémité inférieure des lobes de la glande, lopération n'est pas difficile. Mais cette disposition, comme je l’ai montré (loc. cit.) n'est pas la plus fréquente, il s’en faut; et, si on voulait attendre de l'avoir trouvée pour tenter l'opération, il faudrait sans doute mettre à la fois en expérience un assez bon nombre d'animaux sur lesquels on prati- querait d’abord en quelque sorte une opération exploratrice. Il est plus malaisé et plus délicat à la vérité, mais aussi plus simple, d'essayer de réaliser l’énucléation des glandules. Il s’agit effectivement ici d'une véri- table énucléation, puisque chez la majorité des animaux ces organes sont enchâssés dans les lobes de la glande. Voici comment en général j'ai procédé. Je pose un premier fil à l’extré- mité inférieure d’un des lobes, puis un deuxième fil à l'extrémité supé- rieure. On peut très souvent comprendre dans cette ligature l'artère thy- roïdienne, mais il faut avoir soin de ménager un petit vaisseau qui s’en détache et qui fournit à la glandule. Grâce à ces deux fils, un aide peut tendre le lobe de telle sorte que la glandule soit bien visible. Dans ces conditions, on l’isole avec un instrument mousse quelconque et on la détache peu à peu du tissu sous-jacent; on passe alors un fil fin par- dessous, mais de manière à ne pas embrasser dans ce fil une veinule et une artériole qui, pour aborder la glandule par sa face inférieure, se détachent de vaisseaux pénétrant dans le lobe à ce niveau (vaisseaux venus de cette branche de l'artère thyroïdienne, que j'indiquais tout à l’heure). On fait la ligature le plus près possible de la glandule. À supposer d’ailleurs qu’il reste quelquefois dans cette ligature une toute petite par- celle du tissu du lobe lui-même, la chose est sans importance au point de vue physiologique, puisqu'on sait — de nombreuses expériences nous l'ont appris — qu'il faut laisser aux animaux opérés au moins le tiers supérieur d’un lobe pour qu’ils survivent à la thyroïdectomie. Ceci fait, la glandule ainsi énuclée avec ses vaisseaux (grâce aux précautions indi- quées, on n’a, pendant lout ce temps de l'opération, qu'un léger suinte- ment sanguin qui résulte de l’énucléation même), et restant simplement suspendue à ceux-ci, on procède à l’extirpation du lobe qui se fait aisé- ment. On procède de la même façon sur l’autre lobe. J'ai jusqu’à ce jour pratiqué cette énucléation sur six chiens. Voici résumés les résultats de ces expériences. | : Expérience I. — Chien bâtardé, encore jeune, 14 kil. 200. Enucléation pra- tiquée le 7 janvier 1893, après anesthésie par injection de chloral dans le péritoine, suivant le procédé de Ch. Richet ; puis extirpation des deux lobes. 9 janvier. — À 3 h. 45 après-midi, l'animal présente les troubles suivants : polypnée intense, salivation, conjonctivite, secousses dans les muscles des cuisses, contracture des quatre membres. 10 janvier. — Trouvé le matin bien portant ; mange dans la journée. 11 janvier. — À 8 heures du matin, secousses musculaires, polypnée, sali- 398 SOCIÉTÉ DE BIOLUGIE vation. Accidents complètement dissipés à 11 heures. Albumine dans les urines et matières colorantes biliaires; pas de sucre. Mange bien. 12-13 janvier. — Albumine dans les urines. État général bon. 16-18 janvier.— À plusieurs reprises, dans la journée, véritables crises d'éternuement. 19 janvier. — Traces d’albumine seulement. On observe encore quelques éternuements. 20 janvier-18 février. — Très bien portant. 18 février. — P — 13 kil. 500. Opération exploratrice, après chloralisation. On trouve sur la trachée, à la hauteur du 2° anneau, un fragment de glande richement vascularisé ; on l’extirpe entre deux ligatures; ce fragment pèse 0 gr. 120. On laisse sur le côté droit de la trachée une très pelite masse dans laquelle on distingue des restes de fils ayant servi aux ligatures de la pre- mière opération, mais paraissant constituée aussi par du tissu glandulaire. 18 février-15 avril. — L'animal n’a pas présenté le plus léger accident à la suite de celte seconde opération. ExPÉRIENCE II. — Jeune chien bull, 9 kilogrammes. Enucléation des deux slandules et extirpation des deux lobes, pratiquée, après choepessone le jer février 1893, de 2 h. 30 à 3 h. 25 après-midi. - 4 février. — On observe, vers 4 heures, des secousses assez fortes dans les muscles des cuisses. 6 février. — Un peu de parésie des pattes postérieures. 13 mars. — Très bien portant jusqu’à ce jour. Après chloralisation, opération exploratrice. Sur le milieu de la trachée, au-dessous du larynx, on trouve un corps ovalaire, très vascularisé; on l'enlève; son poids est de 0 gr. 050. On laisse à la même hauteur, sur le côté droit de la trachée, un tout petit nodule dans lequel on distingue des fragments de fils. 13 mars-15 avril. — L'animal reste très bien portant jusqu’à ce jour. ExrérieNnceE III. — Chien terrier, adulte, 14 kil. 200. Le 2 février 1893, anes- thésie par le chloral (au cours de l'opération on donne un peu de chloro- forme). On sépare aisément de son lobe la glandule droite qui est isolée à l'extrémité supérieure de ce lobe; il faut énucléer la gauche, enchâssée au milieu du lobe du même côté; on extirpe immédiatement après les deux lobes. Après l'opération, jusqu'à ce jour, 15 avril 1893, on n’a observé aucun acci- dent d'aucune sorte, Exrérience IV. — Chienne bâtardée, adulte, 9 kil. 950; paraît très souf- frante ; est triste et abattue: énucléation des glandules, puis ablation des deux lobes sur l'animal chloralisé, le 16 février 1893. 17 février-17 mars. — Triste; reste couchée dans un coin de sa cage; mange cependant une partie de sa pâtée. 18 mars. — Parésie marquée. Peau froide. 21 mars. — Paralysie avec contracture; ne peut se tenir debout. 22 mars. — Trouvée morte ce malin. Aulopsie. — On trouve, à droite, contre la trachée, un petit nodule qui ne paraît contenir que les nœuds des fils de soie abandonnés dans la plaie; à gauche. dans un semblable nodule, on distingue un fragment de tissu glandu- laire de la grosseur d’une lentille. SÉANCE DU 45 AYRIL 399 Le thorax est rempli par un litre et demi au moins d'un liquide purulent ; masses caséeuses énormes dans les deux poumons; le poumon droit est presque complètement détruit. EXPÉRIENCE V. — Chien bull, jeune (2 ou 3 ans), de 14 kil. 100. Après chlo- ralisation, énucléation des glandules, puis extirpation des deux lobes (1), le 17 février 1893. 18 février. — Secousses fibrillaires dans les muscles des cuisses, constatées à 4 heures de l’après-midi. De 5 à 6 heures les accidents s’aggravent : les se- cousses deviennent très fortes, la polypnée se produit; salivation. À 7 heures, état très grave. 19 février. — Trouvé mort le matin. Aulopsie, pratiquée le 20. On trouve les organes énucléés à la place où on les à laissés. EXPÉRIENCE VI. — Jeune chienne bull, 10 kilogrammes. Le 3 mars 1893, chlo- ralisation (un peu de chloroforme au cours de l'opération); la glandule droite, située à l'extrémité supérieure du lobe, est très aisément isolée; énu- cléation laborieuse de la glandule gauche; extirpation des deux lobes. Depuis l'opération jusqu’à ce jour, 15 avril, l'animal s’est très bien porté. Ainsi sur ces 6 animaux, 4 ont survécu. Il est très intéressant de remar- quer que deux d’entre eux (n° I et Il), ont présenté pendant quelques jours des accidents qui se sont atténués rapidement, comme si tout. d'abord les glandules avaient été à peinesuffisantes pourremplir la fonction thyroïdienne. Quant aux deux chiens qui sont morts, malgré la conserva- tion des glandules, je ferai observér que le premier (n° IV) était malade avant l'opération, ayant été amené au laboratoire profondément tuber- culeux. De fait, on a constaté à l’autopsie que sur cet animal les glan- _dules ne s'étaient pas développées après l'opération. D'ailleurs les trou- : bles qu'il a présentés ne sont pas des plus nets comme accidents consé- culifs à la thyroïdectomie. D'autre part, le second chien (n° V) n'avait peut-être gardé qu'une seule de ses deux glandules;: il est permis du moins de se le demander, étant donné le résultat de l’autopsie (voir la note ci-dessus). : Aussi bien, qu'arrive-t-il quand on ne laisse sûrement qu'un seul de ces organes à l’animal thyroïdectomisé? Je n’ai encore fait cette expé- rience qu'une fois. ExPÉRIENCE VII. — Chien terrier bâtardé, adulte, 12 kilosrammes. Opéré de 3 heures à 3 heures 1/2, après chloralisation, le 28 mars 1893. On laisse la glandule droite, bien isolée à l'extrémité inférieure du lobe; on enlève le lobe droit et le lobe gauche avec sa glandule, enchässée dans la face externe, au tiers supérieur. (1) A la partie supérieure du lobe droit, examiné après l'ablation, on trouve un corpuscule semblable à une glandule. L'’organe qu'on a laissé après énu- cléation était situé sur le milieu de la face externe. 400 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 30 mars. — Secousses à 7 heures du matin. Attaque clonique et tonique à 8 heures; dyspnée. 31 mars. — Vomissements; secousses musculaires. 1er avril. — Affaiblissement extrême; n’a bu ni mangé. 2 avril. — Trouvé mort à 6 heures du matin. Il semble donc, d’après cette expérience, que la conservation d’une seule glandule n'empêche pas les accidents consécutifs à la thyroïdec- tomie et la mort. Inversement, on peut enlever sur un chien les glandules seules, les deux lobes étant intégralement conservés, sans que se produise le moindre accident. J'ai tenu à faire cette expérience sur le chien, que j'avais autrefois réalisée déjà sur le lapin. Il est, je crois, permis de conclure de ces faits (1) que l'importance fonctionnelle des glandules thyroïdiennes (2), organes dont j'ai déterminé, il y a deux ans, le rôle chez le lapin, est bien réelle. Ces résultats, obtenus sur le chien, c’est-à-dire sur un animal qui n’échappe presque jamais aux conséquences mortelles de la thyroïdectomie, en constituent une nouvelle preuve certaine. Une autre conséquence paraît sortir de ces faits. On a vu que les deux animaux sur lesquels j'ai enlevé les glandules, cinq et six semaines après l’extirpation des deux lobes, ont survécu sans accidents à cette nouvelle opération. Ai-je bien enlevé tout le tissu restant? Si l’autopsie, à faire ultérieurement, permet de répondre à cette question par l’affirmative, force sera bien de se dire que la conservation des glandules donne à d’autres organes vicariants le temps de se développer, de sorte que, ces _glandules extirpées à leur tour, ces organes suffisent à la fonction nor- malement dévolue au corps thyroïde. Et ainsi cette étude des glandules thyroïdes ne conduirait pas seulement à la question si intéressante du rôle des organes embryonnaires, mais encore à celle, non moins impor- tante au point de vue de la physiologie générale, des organes vicariants. L’IMMUNISATION DES LAPINS CONTRE LE STREPTOCOQUE ET TRAITEMENT DE LA SEPTICÉMIE STREPTOCOCCIQUE PAR LE SÉRUM DU SANG DES ANIMAUX IMMUNISÉS, par M. le D' Mironorr (de Kharkofi). Pour voir jusqu’à quel point il est possible d’immuniser les lapins contre le streptocoque et d'utiliser le sérum des animaux ainsi vaccinés (1) La seule objection possible serait que ceux des animaux opérés qui ont survécu possédaient des thyroïdes accessoires. Mais étant donnée la, rareté relative de l'existence de glandes accessoires, il est bien peu preblable que ces quatre chiens présentent tous cette disposition. Il faudra néanmoins s’en assurer à l’autopsie. (2) Les résultats de l'étude histologique de ces organes hypertrophiés sur les chiens survivants seront ultérieurement publiés. SÉANCE DU 15 AVRIL 401 EE _— dans le traitement de la septicémie, j’ai commencé en octobre 1892 au laboratoire de M. le professeur Straus une série d'expériences, qui ont duré jusqu’au mois d'avril 1893. Ne pouvant donner dans cette note les détails des expériences, je me contenterai de rapporter ici brièvement les résultats que j’ai obtenus. Après avoir essayé sans succès plusieurs procédés d’immunisation des lapins contre le streptocoque, je me suis, en dernier lieu, arrêté à une méthode qui m’a paru donner les meilleurs résultats. Voici en quoi elle consiste. Les lapins qu’on choisit doivent être vigoureux, gros et peser 2 kilo- grammes. On commence par injecter à ces lapins, sous la peau, 3 à 6 centi- mètres cubes d’une culture sur bouillon du streptocoque vieille de 3 jours et chauffée pendant 20 minutes à 120 degrés. Au bout de 10-15 jours, quand l'animal est complètement rétabli, on lui fait une nouvelle injection sous-cutanée de la même culture chauffée, maïs à la dose de 6 à 12 centi- mètres cubes, c’est-à-dire deux fois supérieure à la précédente. 10-15 jours après, on fait une injection de 2 centimètres cubes de culture vivante et virulente et l'injection est répétée tous les 10-15 jours en augmentant de 1-2 centimètres cubes la dose à chaque nouvelle injection. On obtient ainsi un animal qui supporte presque sans réaction des doses cinq fois supérieures à la dose mortelle pour un animal non vacciné. Mais je dois ajouter que même avec ce procédé, plus de la moitié des animaux succom- bent sans contracter une immunité tant soit peu accusée. En conférant au lapin une immunité même assez grande contre le sireptocoque, on ne le garantit pas davantage contre les processus septiques locaux. Ceux-ci sont précisément très souvent la cause de la mort de l'animal qui succombe soit à la suppuration développée aux points d’inoculation, soit, plus souvent encore, à l'inflammation septique des membranes séreuses (péritoine, péricarde, méninges, etc.). Le sérum des animaux qui ont acquis une immunité plus ou moins grande contre le streptocoque, c’est-à-dire qui supportent sans danger des doses 5 à 10 fois supérieures à la dose mortelle, le sérum de ces ani- maux, disons-nous, possède des propriétés vaccinantes et curatives. Injecté sous la peau à la dose de 1 c. c. 5 par kilogramme de poids de l'animal, ce sérum lui confère un certain degré d’immunité contre le streptocoque. En portant la dose à 3 centimètres cubes par kilogramme de poids, on obtient une immunité nettement accusée. D'une façon générale, le degré de l'immunité conférée par les injections de sérum croît proportionnel- lement à la dose employée. L’immunité conférée aux animaux par l’in- jection de sérum des animaux immunisés n'empêche pas non plus le développement des processus locaux septiques. -Le sérum du sang de l’animal en puissance du premier degré d'immu- nité, c’est-à-dire capable de supporter une dose simplement mortelle de cultures virulentes, ne possède pas à petites doses de propriétés curatives. 402 -__ SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ainsi l'injection sous-cutanée de ce sérum à la dose de 1 centimètre cube par kilogramme d’animal infecté n’exerce aucune influence sur la marche de la septicémie et son action reste nulle, quand même l'injection est répétée à la même dose pendant trois ou quatre jours consécutifs. Par contre, l'injection de sérum des animaux auxquels on a conféré une immunité plus grande, exerce déjà une influence manifeste sur la marche de la septicémie. L'action curative de ces injections augmente proportionnellement à l'accroissement de la dose du sérum injecté. Ainsi on arrive à arrêter la marche d’une septicémie dans trois à quatre jours, en faisant tous les jours à l'animal malade une injection de sérum à la dose de 2 c. c. 5 par kilogramme. A une dose moins élevée, le même sé- rum agit déjà moins énergiquement : l’animal continue alors à être malade pendant plus ou moins longtemps, mais finit pourtant par se rétablir. Malgré les injections de sérum, les processus septiques inflammatoires locaux continuent à se développer et, sous ce rapport, le sérum des ani- maux immunisés est presque sans aclion. Des expériences faites jusqu'à présent on peut donc conclure, que le sérum des animaux immunisés contre le streptocoque peut à dose élevée (3 à 4 centimètres cubes par exemple par kilogramme de poids), ou bien arrêter complètement une septicémie aiguë, ou bien imprimer à l'infec- lion une marche chronique avec formation de processus locaux septiques et mettre ainsi l'organisme en état de combattre victorieusement l'infec- tion streptococcique. SUR LES BOURGEONS PANCRÉATIQUES ACCESSOIRES ET L'ORIGINE DU CANAL PANCRÉATIQUE CHEZ LES POISSONS, par M. E. LAGUESSE. (Laboratoire d'histologie de la Faculté de médecine de Lille.) Lorsque, dans la séance du 18 mai 1889, je décrivais devant la Société de Biologie le développement du Pancréas chex les Poissons osseux, j'avais simplement pour but de donner la preuve embryologique de l'existence de cet organe, non admis chez les Téléostéens par la majorité des auteurs. Je n'avais pas alors le loisir de suivre en détail son évolu- lution. Lorsque Goeppert en 1891 chez les Amphibiens, Stoss en 1892 chez les Mammifères, eurent montré l’existence de deux bourgeons pan- créaliques accessoires ventraux aux dépens desquels se forme le canal de Wirsung, il devint indispensable de reprendre, de suivre de plus près : le développement, et de rechercher ces bourgeons chez la Truite qui m'avait servi de type. Occupé ailleurs, je me suis laissé devancer dans cette tâche par le professeur Stœhr, de Zurich, qui, dans le numéro de février de l’Anatomischer Anzeiger, signale l'existence des bourgeons SÉANCE DU 19 AVRIL 403 ventraux chez la Truite; je ne puis que confirmer sa découverte et cher= cher à préciser l’époque et le mode d'apparition d'après mes séries. Comme je l’ai indiqué précédemment, le bourgeon pancréatique prin- cipal apparaît comme une excroissance pleine de la paroi dorsale de Fintestin, quelques jours après la fermeture du blastopore vitellin, et immédiatement après l'achèvement de l’invagination intestinale, au 25° jour après la fécondation dans la plus complète de mes séries d’em= bryons. Je puis maintenant le retrouver, moins bien indiqué, dès le 23° jour, et avant la fermeture de l'intestin. Le foie est visible sur la même série, non sous forme de bourgeon limité, mais comme une masse endoder- mique plus épaisse qui restera toujours adhérente au vilellus. Par compa- raison avec les stades postérieurs celle masse est facilement reconnais- sable comme la matière première du foie. Ce n’est guère qu’à partir du 28° jour que les deux bourgeons du pancréas ét du foie sont nettement détachés de l'intestin, le premier dorsal et un peu à droite, le second ventral et un peu à gauche. Le premier commence à 0®%,4 environ en arrière de la paroi postérieure de la vésicule auditive; le second à environ 0"",35 en arrière du même point, non sous le milieu de cette vésicule comme Je dit Stæœhr, par lapsus sans doute. Comme il le fait remarquer, les deux bourgeons, depuis leur première apparition se déplacent d’avant en arrière, l’hépatique plus que le pancréatique. Tous deux passént franchement au côté droit de l'intestin, de sorte que le canal pancréatique primitif, formé par la pédiculisation du bourgeon, tend à se rapprocher du cholédoque. * Sur un embryon du 40° jour, le canal pancréatique était en régression, presque atrophié au 44°, disparu sans laisserÏde traces au 47°, et la masse pancréatique dorsale issue du bourgeon, principal et très développée maintenant, se trouverait isolée de l'intestin si elle n'avait dès lors con- tracté adhérence avec les bourgeons accessoires. _ Au 36° jour, en effet, on remarque déjà sur le canal cholédoque, un bour- relet demi-circulaire embrassanten arrière (c’est-à-dire du côté caudal) son point d'implantation, et renflé latéralement à droite et à gauche en deux mamelons, ébauches des deux bourgeons pancréatiques accessoires ven- traux droit et gauche. Ils se forment donc plutôt sur le cholédoque même, comme le montrait Stoss chez le mouton, que sur l'intestin. Le modèle en cire que je présente à la Société, reconstitution d’après des coupes en série au 1/200”, les montre un peu plus développés mais encore pleins, au 40° jour. On voit qu’il s’agit ici d’un bourgeon bilobé plutôt que de deux. A cette époque, le lobe droit, plus marqué, est déjà par sa pointe presque au contact du bord inférieur de la masse pancréa- tique principale, .et bientôt se soude et se confond avec elle. Plus tard, vers le 50° jour, la base du bourgeon se creuse d’une cavité unique (envoyant des diverticules dans les deux mamelons). Cette cavilé 404 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE s'ouvre d’abord dans l'intestin par un orifice commun avec celle du cho- lédoque (ampoule de Water rudimentaire), s’en sépare plus tard. C'est la lumière du canal pancréatique permanent, visible sur une simple dissec- tion dès le 67° jour. Il correspond donc au canal de Wirsung des mam- mifères, tandis que le canal primitif atrophié répond au canal de Santo- rini. Sur l’alevin éclos de deux et trois mois, le canal pancréatique, sensiblement égal en diamètre au cholédoque, lui est accolé en arrière; resté très court, il se renfle en cæcum à son extrémité distale et constitue ainsi une ampoule pancréatique (qui a échappé à Legouis). Il n’y a pas concordance entre les chiffres de Stæœhr et les miens rela- tivement à l’âge; cela montre une fois de plus que l’âge des embryons exprimé en jours n’a qu'une valeur relative vu la durée très inégale de l'incubation. Pour préciser davantage, j’ai essayé dans un autre travail (Journal de l'Anatomie, 1890, p. 352) d'établir un certain nombre de stades à la suite de ceux déterminés par Henneguy. D’après ces données, l’ap- parition du bourgeon pancréatique remonte au commencement du stade I: c'est seulement au début du stade K (caractérisé en outre par l'apparition du glomérule du rein céphalique) que les deux bourgeons hépatique et pancréatique se détachent nettement de l'intestin. Au début du stade L apparaît le double bourgeon accessoire ; à la fin du même, le canal pan- créatique primitif a disparu. La lumière du canal permanent apparaît au début du stade M (1). Chez les Sélaciens, l'existence de bourgeons accessoires me paraît très douteuse ; en effet, chez l’Acanthias, depuis l'apparition du bourgeon pan- créatique principal dorsal, bien décrit par Balfour, jusque sur des sujets de 42 millimètres, je n'ai pu rencontrer ces bourgeons, quoique possé- dant une série à peu près complète d'embryons. NOTES ECTOLOGIQUES, DU IX° AU XVIL® SIÈCLE, par M. Poucaer. — (Voir Mémoires du présent volume, p. 97.) | NoTE SUR LE SARCOPTE DES MURIDÉS (Sarcoples alepis sp. n.), par MM. Rarcuer et Lucer. On observe fréquemment, chez les Muridés, une forme de gale localisée aux oreilles et aux parties génitales. Legros (2) paraît l’avoir observée le (1) Chez l'embryon de Syngnathe je retrouve le pancréas ventral avec des particularilés dans le détail desquelles je ne puis entrer ici. (2) Legros. Du Sarcopte de la gale chez le Rat (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 4° série, 1. I, p. 22, 1865). SÉANCE DU 15 AVRIL 405 premier, sur des Rats capturés au Jardin des Plantes; il donna une description sommaire du Sarcopte qui la détermine, et qu'il regardait comme une espèce à part. G. Colin, qui avait souvent l’occasion de constater cette affection à Alfort, sur les Surmulots, rattachait l’Acarien au Sarcopte notoèdre de Delafond. Mégnin (1) l’étudia également sur les Rats d’égout, et rapporta de même le parasite au Sarcoptes notoedres (S. minor Fürstenberg), dont il représenterait une simple variété (var. muris), caractérisée par ses grandes dimensions, les ongles tarsiens forts et aigus, les soies des pattes courtes et raides, les épimères des pattes K ar mn MIN 4 Sarcoples alepis. postérieures du mâle convergents et réunis au sternite de l’armure géni- tale. Plus récemment, nous avons signalé la présence du même parasite sur le Rat d’eau ou Campagnol amphibie (Arvicola amphibius L.), et, suivant les errements des auteurs précités, nous l'avons considéré comme une simple variété du Sarcoptes minor. Enfin, nous l’avons retrouvé depuis lors sur un nouvel hôte, le Rat noir de grenier (WMus Rattus L.), et une étude plus attentive nous a mon- tré qu'il offre des caractères constants, permettant de le distinguer d’une facon bien nette du Sarcoptes minor, et de le considérer par suite comme une espèce particulière, pour laquelle nous proposons le nom de Sar- coples alepis. (1) Mégnin. Monographie des Sarcoptides psoriques (Revue et Magas. de zool., 1871). 406 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cette espèce appartient en réalité au même type que fe Sarcoptes mi- nor, de sorte qu’on pourrait établir pour ces deux formes une section dans le genre Sarcoptes, sous le nom de « Sarcoptes notoèdres ». Nous nous bornerons à donner en quelques mots, pour aujourd’hui, les prin- cipaux caractères de cetteisection, et les caractères distinctifs des deux espèces. Les Sarcoptes notoèdres ont le corps orbiculaire, prolongé en avant par un épistome très saillant, qui recouvre en grande partie le rostre et forme des joues très larges. A la face dorsale du céphalothorax existent de chaque côté de la ligne médiane quatre spinules (et non pas trois, comme on l'a dit jusqu’à présent). De même, à la face dorsale de l’abdo- men, on trouve de chaque côté six spinules. Pattes terminées par des ventouses larges, à pédicule relativement court. Anus situé sur le noto- gastre. Le Sarcoptes alepis est caractérisé tout d’abord par l'absence complète des écailles mousses qui se montrent sur la face dorsale du S. minor, et c'est de là que nous avons tiré le nom spécifique (x privatif; Aexk, écaille). Ces écailles sont remplacées par de simples plis cuticulaires concentriques, disposés d’une façon assez régulière. D'autre part, lesispinules du notothorax et du notogastre sont infini- ment moins développées et offrent une situation un peu différente. L’anus, chez la femelle ovigère, est plus rapproché du bord postérieur et se montre limité seulement en arrière par un rebord en demi-circonférence. Il est flanqué latéralement de deux paires de spinules, l’une située vers le milieu de sa longueur, l’autre au niveau de sa commissure postérieure. Plus en dehors, on en trouve deux autres paires, l’une reportée au niveau de sa commissure antérieure, l’autre en arrière de la postérieure. Enfin, plus en avant et plus près de la ligne médiane que ces dernières, on en observe deux autres paires. Il faut ajouter que, immédiatement en avant de la commissure antérieure, il existe une soie grêle et générale- ment ondulée, que nous n’avons pas observée dans le S. minor. Ge sont les seules productions que nous ayons pu découvrir à la face dorsale. Il nous a été impossible de voir les deux grandes soies de l’épistome qui apparaissent si nettement chez le S. minor, ni les deux courtes soies post-anales qu’on a figurées ou indiquées dans les deux formes, et que nous n'avons pas retrouvées davantage dans le S. minor. Quant aux autres caractères, tirés des crochets tarsiens, des dimen- sions relatives des ambulacres à ventouse, de l’armure génitale mâle, ils ont pour la plupart été déjà signalés, et nous aurons l'occasion d'y revenir dans un autre travail. Mais un fait sur lequel nous devons attirer l’attention, c'est la présence assez fréquente d’un embryon complètement formé dans le corps même de la femelle ovigère. Le plus souvent, celle-ci ne porte qu’un seul œuf, à un degré variable de développement, depuis la segmentation avancée SÉANCE DU 19 AVRIL 407 jusqu’à la formation de la larve hexapode; plus rarement on trouve en même temps deux œufs, l’un en segmentation, l’autre contenant une larve bien développée. : Enfin, les dimensions de cette espèce sont notablement supérieures à celles du $S. minor, ainsi qu'on peut en juger par le tableau ci-dessous : SARCOPTES ALEPIS SARCOPTES MINOR TR TS RRQ | long. lat. long. lat. Mâle. . . . . . . 170 à 180 pu 130 à 140 pp. 145 à 155 pr 116 à 125 p Femelle ovigère. . 300 à 450 230 à 400 215 à 235 165 à 175 En résumé, le Sarcopte des Muridés représente bien une espèce parti- culière, du groupe des Sarcoples notoèdres (Delafond et Bourguignon); il vit sur les oreilles et les organes génitaux externes du Surmulot (Mus decumanus Pall.), de la variété albinos de cette espèce, du Rat noir de grenier (Mus rattus L.), du Campagnol amphibie (Arvicola amphibius L.). La gale qu’il détermine paraît être constamment bénigne. ASCARIDE DANS LE PANCRÉAS D'UN PORC, par MM. RaïLziEer et Morot. On n’a signalé jusqu’à présent que d'une façon très exceptionnelle la présence de parasites dans le pancréas, soit chez l’homme, soit chez les animaux. La liste de ces parasites est donc très courte, et ne parait guère com- prendre que les formes suivantes : Échinocoques. — Très rares chez l’homme (Chambon, Portal, Turner, Hunter, Meissner); rares également chez les ruminants. Cysticerques. — Le Cysticercus cellulosæ a été signalé chez l'homme et chez le chien. Sclérostomes. — Des exemplaires du Sclerostoma equinum à l'état agame ont été vus assez fréquemment dans le pancréas du. cheval (Flor man, Otto, Gurlt, Goubaux, Delafond, G. Colin, Liénaux, Montané). Ascarides. — L’Ascaris lumbricoides n’a été rencontré que d’une façon tout exceptionnelle chez l’homme (Bonet? Lieulaud, Bartholin, Gmelin, Hayner, Brera, Engel, Klebs, Shea, Nash). Il n’existe pas encore, à notre connaissance, une seule observation d’Ascarides du pancréas chez les animaux, et c’est ce qui nous engage à QUE 408 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE faire connaître celle que nous avons recueillie, bien que les circonstances en soient peu significatives. Nous dirons simplement qu’à l’autopsie d’un pore gras, mort d’apo- plexie dans une porcherie de l’abattoir de Troyes, nous avons rencontré un Ascaride (Ascaris suilla Dujardin) dans un canal légèrement dilaté du pancréas. Il est presque superflu de faire remarquer que ce ver n'a pu s’intro- duire dans le pancréas que par le canal de Wirsung; sa pénétration était peut-être de date récente, car il n’existait aucune trace d’inflammation dans l'organe. : INFLUENCE DE LA PRESSION DES GAZ SUR LE DÉVELOPPEMENT DES VÉGÉTAUX, par M. PAUL JaccaRD (1). (Note présentée par M. GASTON BONNIER.) Comme complément de ses belles recherches relatives à l'influence de la pression barométrique sur les phénomènes de la vie, Paul Bert a étudié l’action de la pression sur la germination des graines. Il en conclut que la pression n’agit que par la tension de l'oxygène et par les changements qui en résultent dans les phénomènes chimiques de la nutrition (2). D’après lui, le phénomène est le même chez les végétaux et chez les animaux. Aucun travail ayant une portée physiologique générale n’a paru depuis sur la question. Il est vrai que MM. À. Wieler (3) et S. Jentys (4) ont examiné l'influence que les tensions d’oxygène inférieures et supé- rieures à la tension normale exercent sur l’allongement des végétaux; mais les deux intéressants Mémoires publiés par ces auteurs visent un point très spécial; de plus, ces travaux n’ont porté que sur les plantules d’une dizaine d'espèces ou sur leurs graines en germination. Il était donc intéressant de soumettre à l'expérience un nombre d'espèces plus considérable, prises à des âges différents, de les étudier (1) Ce travail a été fait au Laboratoire de botanique de la Sorbonne sous la direction de M. Gaston Bonnier. (2) Biblioth. des Hautes-Études (Sec. sc. nat., t. X, p. 121-126, 1874). Voyez aussi P. Bert : C. R., t: 76 et 77 (1873) et La Pression barométrique. (3) A. Wieler. Die Beeinflussung des Wachsens durch verminderte, 1878. Par- tiärpressung des Sauerstoffs. (Unters. a. d. bot. Inst. zu Tübingen. Bd I, heft 2, 1883.) rs | (4) Stefan Jentys. Ueber den Eïinfluss hoher Sauerstoffpressungen auf das Wachsthum der Pflanzen. (Unters. a. d. bot. Inst. zu Tübingen. Bd II, heft:3, 1888.) SÉANCE DU 15 AVRIL 409 pendant un temps relativement long et de les comparer avec des plants : servant de témoins, à la fois dans leur accroissement, leur morphologie externe et leur structure anatomique. Les nombreuses expériences que j'ai entreprises en vue de résoudre ces diverses questions ont porté sur une cinquantaine d'espèces environ. C'étaient des graines, des plantules repiquées, des bulbes, des tuber- cules, des plantes des champs mises en pots (Cardamine, Primevère, Pâquerette, etc.), des plantes adultes lignifiées (Pélargonium), enfin des plantes aquatiques ou amphibies (Alisma, Véronique, Joncs, Iris). Les cultures expérimentales peuvent être groupées en trois séries de la manière suivante : I. Air ordinaire : 1° à la pression normale ; 2 avec dépression; 3° avec compression. Il. Oxygène ou air suroxygéné : 1° à la pression normale; 2° avec . dépression ; 3° avec compression. III. Mélange d'hydrogène, d'azote et d'oxygène ayant une proportion d'oxygène inférieure à celle de l'air atmosphérique : 1° à la pression normale ; 2 avec compression (1). Résultats des expériences. — Considérons d’abord les cultures faites dans l’air déprimé. Entre les pressions de 10 à 40 centimètres, la crois- sance peut être deux fois, trois fois ou même six fois plus grande que dans l’air ordinaire. À cet accroissement rapide, correspondent de grandes variations de forme. Dans l’air déprimé, les tiges sont plus longues et plus minces, ont une tendance manifeste à se ramifier et donnent souvent naissance à des racines aériennes allongées; les feuilles sont plus grandes et plus étalées ; la plante tout entière est plus élancée. Dans les cultures à l'air comprimé entre 3 et 6 atmosphères, il se produit aussi fréquemment une accéiération de la croissance, mais tou- jours bien plus faible que celle qu'on observe dans l'air déprimé. Pour les plantes que j'ai étudiées, je n’y ai pas observé de variations morpho- logiques sensibles. La très grande raréfaction de l’air entraîne un ralentissement de la croissance ; il en est de même pour l’air comprimé au delà de 8 atmos- phères, mais on peut encore obtenir, même à 10 et 12 atmosphères de pression, le lent développement de certaines plantes telles que les Pois et les Gesses, par exemple. Quelques mots maintenant sur les cultures expérimentales que j'ai élablies dans des mélanges gazeux autres que l'air. J'ai d’abord constaté (1) Plusieurs des appareils employés pour la compression avaient servi à Paul Bert dans ses recherches et avaient été mis à la disposition du Labora- toire de botanique de la Sorbonne, grâce à l’obligeance de M. Dastre. 410 SOCIETÉ DE BIOLOGIE que l’air surchargé d'oxygène de 35 à 90 p. 0/0, à la pression normale, n’a généralement pas d'influence fâcheuse sur le développement, et sou- vent même la croissance est accélérée. Si on fait croître les plantes dans de l’air suroxygéné, mais dont la pres- sion est diminuée de manière à lui donner la même tension d'oxygène que celle de l’air atmosphérique normal, on oblient non pas les mêmes résultals que dans l'air, mais une accélération de croissance et des chan- gements de forme absolument comparables à ceux que provoque l’air déprimé. Enfin si l’on comprime un mélange d'oxygène, d'hydrogène et d’azote de façon à obtenir la même tension d'oxygène que dans de l'air à 1/2 atmosphère de pression, on ne voit pas se produire un développement comparable à celui qu'on obtient qans les cultures faites dans l'air à 1/2 atmosphère. Au point de vue anatomique, contrairement à ce que l'on pouvait prévoir, je n’ai trouvé aucune différence constante entre la structure et des organes dont la forme est si diverse. En somme, de tout ce qui précède, on peut conclure que : 1° D’une manière générale, les changements de pression dans l'atmosphère qui entoure la plante exerce une influence considérable sur son dévelop- pement. 2° L’intensité et la nature du phénomène varient naturellement plus ou moins suivant les espèces, mais la courbe générale qui représente les varia- tions du développement avec la pression a ordinairement deux maxima : le premier, de beaucoup le plus marqué, dans l'air déprimé, le second dans l'air comprimé ; la pression normale se trouve donc comprise le plus souvent entre les deux maxima. 3° Bien que la tension de l'oxygène joue un rôle prépondérant dans le phénomène, la pression absolue a aussi une action manifeste. On peut dire, en résumé, que l’action qu’exerce la pression de l'air dans les limites compatibles avec les développements des êtres, n’est pas la même chez les végétaux pourvus de chlorophylle, que chez les animaux. À PROPOS D'UNE NOTE DE M. BATAILLON SUR LA « PESTE DES EAUX DOUCES », par M. R. DuBors. Dans une note de M. Bataillon insérée dans le numéro du 31 mars der- nier du Bulletin de la Société de Biologie et intitulée « Note préliminaire sur la-peste des eaux douces », j'ai été surpris de rencontrer la phrase suivante : « La cause de la maladie des écrevisses peut être considérée SÉANCE DU 19 AVRIL 411 comme inconnue, une communication faite récemment à la Société de Biologie par M. Raphaël Dubois ajoute quelques observations curieuses aux essais infructueux donnés jusqu'ici, mais cette note ne nous dit pas si les deux formes de parasites signalées, formes qu’il sera intéressant de rattacher, sont pathogènes ou non. » Il est regrettable que M. Bataillon ne dise pas de quelle maladie des écrevisses il veut parler. Pour quiconque possède quelque notion sur la pathologie de l’écrevisse, tant au point de vue bibliographique qu'au point de vue expérimental, il est évident qu'il existe plusieurs maladies. différentes de l’écrevisse, ce qui n’a rien, en somme, de bien surprenant. Si M. Bataillon a voulu parler de la maladie épidémique que l’on a désignée sous le nom de « peste des écrevisses », peut-être eût-il été con- venable, en affirmant que personne avant lui n’avait compris quelque chose à cette maladie, de donner des preuves ou tout au moins d’indi- quer les motifs d’une semblable affirmation. Il existe, en effet, des recherches importantes de Hack, de Hallier, de Bollinger, de Harz et d’autres encore que je suis heureux de signaler à M. Bataillon. Si je ne partage pas l'opinion de Harz sur la cause de la peste des écrevisses, j'ai du moins indiqué dans ma communication sur quels faits je m’appuyais. M. Bataillon annonce que je n'ai fait qu’ « ajou- ter quelques observations curieuses aux essais infructueux donnés jus- qu'ici ». Mes premiers essais sont si peu infructueux qu’ils ne permettent pas de douter que « la peste des eaux douces » que M. Bataillon a vue dans son aquarium n’a rien de commun avec celle que l’on a désignée sous le nom de « peste des écrevisses » qui, après avoir sévi épidémiquement, est devenue endémique dans les cours d’eau où je l’ai étudiée. Cette dernière a détruit les écrevisses et respecté les poissons, et, à l'heure actuelle, il existe encore et il a toujours existé, en assez grande abondance, des truites et des grenouilles là où les écrevisses ont complètement disparu en quel- ques jours. J'ai nourri pendant plusieurs mois des écrevisses, dans un cours d’eau, avec des débris de truites sans jamais observer de contagion, tandis que j'ai rencontré chez toutes les écrevisses malades et chez celles- là seulement l’une ou l’autre des deux formes décrites et figurées dans ma communication. Ce que je m'explique le moins dans la note de M. Bataillon c’est que son auteur prétende que je n’ai pas dit si les para- sites que j'ai rencontrés exclusivement chez des sujets malades étaient « pathogènes ou non ». Peut-être M. Bataillon a-t-il voulu dire « contagieux », à moins auil n’attribue au mot « pathogène » une signification nouvelle, mais je pense avoir été compris de tous ceux qui ont l’habitude du langage médical. Il est très important, pour terminer, de rappeler que plusieurs observateurs qui ont eu l’occasion d'étudier la peste des écrevisses au moment où elle sévissait épidémiquement ont été frappés de ce fait, c'est qu’elle n’était 412 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE pas directement contagieuse d'écrevisse à écrevisse, même parinoculation, C’est un des principaux arguments dont se sont servis Harz et Zundel en faveur de la distomatose. Avec les écrevisses malades du Merloz contenant les parasites que j'ai décrits, je n’ai pas pu non plus obtenir la contagion par inoculation. Il est donc bien évident que le microbe de M. Bataillon n’est pas celui qui a produit la « peste des écrevisses », ce qui n'empêche pas qu’il puisse tuer, comme beaucoup d’autres sans doute, les crustacés et d'autres animaux encore, sans que pour cela une peste générale menace tous les habitants de nos eaux douces. LA FOSSETTE OCCIPITALE SELON M. DEBIERRE, par M. LouBRoso. Avec des adversaires tel que M. Fardo ou M. Manouvrier, qui me font des objections théoriques, presque théologiques, et n’apportent pas des faits, il me paraît tout à fait inutile de discuter; mais il serait injuste de ne pas discuter avec ceux qui m'opposent, ou qui cherchent à m’op- poser des faits. Ainsi je vois que M. Debierre a essayé (1), il y a peu de temps, de com- battre mes études sur la fossette occipitale moyenne par des faits. Il admet que M. Lucy a rencontré cette fossette 14 fois p. 100 dans 300 cränes anciens; chez les sauvages, 30 fois p. 100; et dans 26 crânes de criminels déportés, 19.2 fois p. 100. Mais il fait remarquer qu'il a aussi porté son attention sur celles que j'appelle demi-fossettes. En acceptant celte critique, je lui ferai observer qu'il ne voit pas que sont ainsi modifiés même les chiffres de M. Lucy; on a le 11.5 p. 100 de fossettes complètes dans les criminels, et 4.5 p.100 dans les honnêtes gens, chiffres qui se rapprochent très bien de ceux de mes calculs, tandis qu'il fait, je ne vois comment, le calcul de 4.5 p. 100. Plus étrange c’est lorsqu'il se fait la question pourquoi les criminels ont 16 fois p. 100 une fossette vermienne, tandis que les femmes criminelles n’en présentent que 3.4 fois p. 100? Évidemment il ignore que les femmes ont toujours un nombre bien moindre de caractères dégénératifs du mâle, même dans l’idiotie, dans le crétinisme. Dans 23 crânes d’aliénés il a rencontré la fossette 3 fois, c’est-à-dire 13.1 p. 100; c’est presque la même proportion que j'ai donnée {14p. 100). Comment peut-il dire que la proportion est de 2 à 8 p. 100? (4) Debierre. Valeur de la fossette occipitale moyenne en anthropologie. (Société de Biologie, octobre 1892.) SÉANCE DU 195 AVRIL 413 Mais le plus étrange c’est que ses calculs sur la fréquence de la fossette dans les criminels sont tous erronés. Il dit avoir examiné 406 crânes de criminels, soit 231 criminels de Gand, avec 8 fossettes ; 24 décapités, avec 1; 25 assassins, avec 3 ; 17 assassins, avec 1 ; et après il écrit : « Bref, en réunissant tous les crânes de criminels que j'ai examinés, j'arrive au chiffre déjà imposant, plus de 406 crânes qui m'ont, en moyenne, présenté 3 fois p. 100 une fossette vermienne, » Eh bien je fais la somme des crânes, et je trouve que ce sont 303 et non 406, et alors la proportion c’est de 4.2 et non de 3 p. 400. Que dire de cette exactitude mathématique ? Est-ce que cela ne peut pas faire présumer d’une parlialité dans l'examen des faits ? Il reporte encore que M. V. Rossi a, tout récemment, relaté une obser- vation dans laquelle on voit, à côté d’une fossette vermienne, qu’il n'exis- tait pas de lobe moyen du cervelet. Mais M. Rossi n’a pas relaté un fait qui suffirait à confirmer plus encore ma théorie des rapports de la fossette avec le vermis, c’est-à-dire que cette fossette était remplie complètement d’ostéophites. Je n’ai pu jamais ni écrire, ni imaginer, comme M. Debierre me le fait dire, que le cervelet fût l'organe de l’amour ou de l'instinct brutal: ce serait de la physiologie cérébrale mythologique. DEUX EXPÉRIENCES SUR LA TUBERCULOSE EXPÉRIMENTALE CHEZ LE CHIEN. Note de MM. J. HéricourT et CH. RICHET. Nous désirons présenter à la Société de Biologie deux chiens dont l’his- toire est assez intéressante; car elle fournit la démonstration de deux faits que nous avons indiqués précédemment. Il s’agit d’abord de la vaccination par la tuberculose aviaire contre la tuberculose humaine, fait que nous avons indiqué avec quelques réserves en 1892 (Bull. Soc. Biol., 23 janv. 1892, et Études sur la tuberculose, tome III, fase. 2, p. 365-389). Dans une expérience faite le 14 avril 1892, nous inoculâmes avec la même quantité de virus tuberculeux humain IV chiens témoins et IV chiens vaccinés préalablement par des injections de virus tuberculeux aviaire. Les IV chiens témoins moururent rapidement; le premier le 18° jour; un autre le 23° jour; un autre le 33° jour ; un autre le 45e jour. La moyenne de la survie a donc été chez eux de 30 jours, ce qui est, d’après une statis- tique que nous publierons bientôt, et qui porte sur XXXV chiens environ, la durée moyenne de la survie après inoculation de tuberculose humaine. Sur les IV chiens vaccinés, un mourut le 9 septembre, c’est-à-dire le 414 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 148° jour; un autre le 4* octobre, c’est-à-dire le 169° jour. Tous deux présentaient dans le poumon des granulations fréquentes, de nature tuberculeuse, mais fibroïdes, ét pour aïnsi dire en voie de cicatrisation. Nous sacrifiâmes le troisième chien le 3 novembre, c'est-à-dire le 203° jour, et nous le trouvâmes presque absolument sans tuberculose ; au lobe infé- rieur du poumon droit quelques rares granulations fibreuses sans con- gestion ni hépatisation périphériques. Enfin voici le quatrième qui est encore vivant, quoique l'inoculation tuberculeuse date d'un an (du 14 avril 1892 au 15 avril 1893). Son état n’est pas très brillant. Il est assurément fort maigre, et nous n’oserions pas le signaler comme un animal guéri; mais, en somme, nous avons, par la vaccination, retardé l’évolution de la maladie dans la pro- portion colossale de 1 à 12. Sur une cinquantaine de chiens environ ayant reçu de la tuberculose humaine, aucun n’a atteint un aussi long terme. Si nous n’avons pas, dans les expériences ultérieures, réussi à obtenir de nouvelles vaccinations aussi démonstratives, c'est parce que nous avons suivi une fausse voie; et, en pareille matière, suivre une fausse voie peut entrainer dans les résultats un long retard. En effet, nous avons voulu mieux vacciner les chiens, et, pour cela, nous avons tâché de leur donner comme vaccins des virus tuberculeux plus actifs. Nous étions, il y a un an, disposés à croire que la tuberculose aviaire est inoffensive, ou à peu près, chez le chien. Mais il a bien fallu en rabattre. De fait, la tuberculose aviaire tue parfaitement les chiens ; de sorte que tous les chiens auxquels nous injectons du lubercule aviaire comme vaccin, ont fini par mourir, mais par mourir du vaccin. En effet, au bout de trois, ou quatre, ou cinq mois, qu'on leur donne ou non dela tuberculose humaine, les chiens qui ont reçu une assez forte dose de tu- bercule aviaire (0°°,1 de culture par kilogr. d'animal) meurent avec des lésions tuberculeuses étendues. Mais ils n’en étaient pas moins vaccinés ; Car l’inoculation de tubercu- lose humaine ne hâtait pas l’évolution de la maladie. < Nous avons donc pu établir les trois propositions suivantes : 4° La tuberculose aviaire rend les chiens tuberculeux et finit par les faire mourir. 2° L'évolution de cette maladie est de 2 à 5 mois environ; et pendant cette période, ils sont vaccinés contre la tuberculose humaine qui ne hâte pas leur fin. - = 3° Quand la tuberculose aviaire n’a pas été donnée à dose infectieuse, les chiens n’en sont pas moins vaccinés, et ils résistent à l'infection par la tuberculose humaine. En tout cas, nous pensons avoir bien établi ce fait fondamental qu'il y a une vaccinalion contre la tuberculose. Nous cherchons en ce moment à , SÉANCE DU 15 AVRIL 415 rendre cette vaccination à la fois efficace et inoffensive, et nous espérons y arriver bientôt. Mais l'essentiel était de prouver qu'elle est possible, et l'exemple de ce chien qui a survécu plus d’un an, est tout à fait démons- tratif à ce point de vue. L'autre expérience porte sur le traitement de la tuberculose par la transfusion du sang de chien vacciné. Voici une chienne qui a été ainsi traitée, et qui est en parfait état de santé, quoiqu'elle ait été infectée par la tuberculose humaine le 5 août 1892, c'est-à-dire il y a plus de huit mois. Elle pesait le 5 août 1892 7 kil. 500 ; elle pèse aujourd'hui 11 kil. 600. Sans entrer dans tous les détails de cette expérience que nous publie- rons complètement dans un prochain Mémoire, nous devons mentionner comment elle a été faite. Le 5 août, nous inoculons la même quantité de tuberculose humaine à XI chiens, dont V témoins. Les V témoins meu- rent avec une survie de 12, 29, 35, 48, 56 jours; soit en moyenne 36 jours. Deux chiens vaccinés meurent (probablement de leur vaccin) le 72 et le 132° jour. Quatre chiens sont transfusés avec du sang de chien vacciné ; mais l’un d'eux ne reçoit que 10 grammes de sang; il meurt le 22° jour. Des trois autres, deux meurent; le 45° el le 117° jour; el voici le quatrième qui est vivant et bien portant. Nous n’avons assurément pas la prétention de présenter cetle expé- rience comme décisive; elle est très défectueuse, et les résullats en sont médiocres, quant à la perfection de la méthode. Mais elle démontre rigoureusement que le traitement de la tuberculose (du moins chez le chien) par la transfusion du sang d'animaux vaccinés peut être efficace, et qu’il faut chercher dans cette voie. En effet, jamais un chien normal ne peut survivre plus de deux mois à l'infection par la tuberculose humaine, et cependant, quand on transfuse à ces chiens infectés du sang d'animaux vaccinés, on retarde la maladie au point de les faire vivre tantôt quatre mois, tantôt huit mois, et probablement davantage, comme le chien que nous présentons ici. é C’est là une nouvelle application de cette méthode de l’hématothérapie que nous avions formellement indiquée avec expériences à l’appui, dans notre Mémoire du 5 novembre 1888 (1) (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 5 novembre 1888). (1) À ce propos signalons, pour n’y plus revenir, le procédé de M. Behring, qui, deux ans après nous, en 1890, découvre de nouveau cette même héma- tothérapie, et, sans doute pour qu’on lui en attribue la paternité, affecte d'ignorer notre travail pendant longtemps. Puis, en 1892, il mentionne nos recherches, mais seulement d’après des citations incomplètes. Il faut croire, en effet, ou qu'il n’a pas lu, ou qu'il n’a pas compris, ou qu'il v’a pas voulu comprendre. Il choisira entre l’une ou l’autre de ces trois hypo- thèses. Qu’on en juge. Nous avions dit ceci : 1° Le sang des chiens inoculés précédem- 416 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE NOTE SUR L'ÉVOLUTION HISTOLOGIQUE DU PLACENTA ABORTIF, par M. le D' A.-H. PrLLIET. J'ai souvent l'occasion, comme tous les histologistes, d'examiner des produits de raclage ou de curettage utérin, de même que des caillots expulsé de la cavité utérine. Ces pièces sont apportées au laboratoire par des médecins désireux d’avoir, autant que possible, un diagnostic exact. Parmi les endométrites fongueuses et les cancers, j'ai recueilli, ces temps derniers, deux pièces que je soumets à l’examen de la Société. Elles me paraissent, en effet, pouvoir servir à éclairer une question que les gyné- cologistes se posent souvent, celle de l’avenir des débris placentaires restés dans l'utérus. Dans le premier cas, la maladie remonte à plusieurs années, et l’on retrouve dans les commémoratifs la trace d’une fausse couche probable. Après une série de traitements tous impuissants, la malade se confie aux soins d’un docteur de la ville qui pratique un curettage explorateur et m'apporte les débris recueillis. L'examen à l’œil me suffit, lorsque ces débris eurent flotté dans l'alcool au tiers, pour faire porter le diagnostic de villosités placentaires en dégénérescence hydatiforme. Ge diagnostic imposait une intervention, le curettage complet, qui ramena des débris abondants de môle hydatique dont j’apporte ici un spécimen. Une chose me frappa dans l’examen histologique de ces débris, c’est l'abondance de fragments placentaires non myxomateux ; et j'en fus amené à conclure que la transformation hydatiforme des villosités choriales n’était que partielle. Voici, du reste, le résumé de cette observation : Os. I, due à l'obligeance de M. le D' Boureau. Me Ernestine D..., quarante ans, demeurant près du Mans. Antécédents hérédituires. — Aucune affection abdominale du côté de la grand'mère, des tantes et de la mère. La malade est fille unique et n’a jamais eu de maladie sérieuse. Réglée à quatorze ans. Mariée à vingt ans. Elle a eu deux filles : la première onze mois après le mariage, la deuxième sept ans plus tard. Trois ans après le dernier accouchement, la malade commenca à souffrir du côté du rectum (élance- ments, cuissons, douleurs, constipation opiniâtre). Ces troubles sont accom- pagnés d’un retard de six semaines environ, de nausées, de démangeaisons ment avec le Staph. pyosepticus, puis absolument guéris, confère (aux lapins) une immunité plus complète que le sang des chiens intacts. 2° Celte influence du sang de chien donnant aux lapins une sorte d'immunité pour les maladies auxquelles résiste le chien, s'étend peut-étre à d’autres microorganismes. C’est cette méthode d'immunisation par le sérum, absolument nouvelle alors, que M. Behring appelle une méthode de suralimentation (!). Il est inutile d’insister, ne füt-ce que par indulgence pour lui. SÉANCE DU 19 AVRIL 417 anales et de sensation de pesanteur sur le fondement. La sage-femme admi- nistre un purgatif de sa composition qui, au dire de la malade, l'a beaucoup fatiguée. (C'est sans doute l’époque de la fausse couche.) De 1883 à 1889, elle a tour à tour consulté les D's Le Bail, Garnier et Bourdy. Ce dernier, entre autres, lui a fait des caulérisations au fer rouge qui ont amené des perles aqueuses pendant huit à dix jours, puis une métrorrhagie abondante ayant nécessité l'intervention du médecin et un repos absolu pen- dant trois semaines. Aucune amélioration n'étant obtenue, elle vient, en 1889, voir le D' Geny, de Paris, qui la conduit chez M. Marchand; celui-ci porte le diagnostic de fibrome utérin et propose l’ablation des ovaires. On va ensuite consulter le D' Péan qui porte le même diagnostic et propose l’énucléation de la tumeur par la voie vaginale, car, dit-il, la tumeur pourrait devenir cancé- reuse. À cette époque les règles étaient plus abondantes, plus fréquentes et sentaient mauvais. En juin 1889, M. Péan fait l’énucléation de la tumeur et l’amputation totale du col. L'opération n'apporte aucun soulagement à la malade et n’a modifié en rien le douleurs et les troubles du côté du rectum. En 1892 elle vient de nouveau consulter M. Péan qui, attribuant les douleurs rectales à des hémorroïdes, propose de faire la dilatation anale. Encore une fois pas d'amélioration. C'est dans ces conditions peu brillantes que la malade vint me consulter en mars dernier. À ce moment les règles étaient plus abondantes et plus fré- quentes ; leur mauvaise odeur avait reparu; les pertes blanches, peu accusées, n'avaient aucune odeur. A l'examen bi-manuel on trouve un utérus volumineux et globuleux; la pression ne détermine qu’une douleur vague et mal définie; ou constate la disparition complète du col, surtout du côté du cul-de-sac latéral droit. L'utérus mesure 3 centimètres. L’hystéromètre donne la sensation d’une cavité remplie de fongosités; de toutes parts on ne touche que des parties molles et friables. Cette exploration donne beaucoup de sang. En la présence des antécédents, des choses existantes et de la difficulté d'établir un diagnostic précis, je songe à pratiquer un curage explorateur qui ramène des fragments ressemblant à des débris placentaires. Je prends égale- ment un morceau du col et je porte le tout au D° Pilliet pour en faire faire l'examen histologique. Examen histologique. — Les produits de grattage contiennent exclusivement des caillots sanguins et des villosités placentaires arborisées, présentant les renflements échelonnés caractéristiques de la môle hydatiforme. Le curettage définitif ramène en abondance des débris semblables, avec de véritables grappes de vésicules enchâssées en partie dans des caïllots; maïs on y ren- contre, de plus, un grand nombre de houppes placentaires vasculaires ou fibreuses, mais non dégénérées. L'examen a été fait sur des coupes après dur- cissement par l'alcool absolu, et sur des fragments macérés dans l'alcool au tiers de M. Ranvier et colorés au picro-carmin. Nous relevons dans ce cas la longue durée de la maladie (six ans), la persistance des pertes, la dégénérescence hydatiforme partielle du pla- centa. 418 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ces caractères se retrouvent dans l’observation suivante, due à un confrère de la ville. Ici la fausse couche, reconnue par la malade, remonte encore à une époque éloignée ; et c’est l'emploi des crayons utérins qui a déterminé l'expulsion des produits hydatiformes caractéristiques de la présence du placenta altéré. Les détails de l’observation font d’ailleurs penser que le gâteau placentaire était situé non dans l'utérus, mais dans la trompe gauche; qu'il s'agissait en un mot d’un placenta abortif tubaire. O8s. II. — Me D... quarante-six ans, deux grossesses à terme, la dernière il y a 19 ans; depuis, une fausse couche, il y a 15 ans, Mne D... n’a souffert du ventre qu'il y a # ans, à la suite d’une chute. Examinée pour la première fois, il y a 8 mois, nous constatämes l'existence dans le cul-de-sac vaginal gauche d'une tumeur arrondie, douloureuse à la pression vaginale; plus douloureuse à la pression bi-manuelle. Diagnostic : salpingite catarrhale, à cause de l'écoulement nettement muqueux qu’elle décrit et qui survient par- fois comme une poche qui se vide. Les règles, abondantes, n’ont jamais pré- senté ni caillots, ni membranes. Traitement : Douches internes; crayons d’iodoformes. Révulsion dans la fosse iliaque gauche. Depuis lors le liquide, toujours muqueux, s'écoule facilement; la poche a diminué de volume et n’est plus douloureuse à la pression. La malade remarque depuis les trois dernières époques menstruelles l'issue de membranes mélangées au sang; la sortie de ces membranes mélangées au sang des règles coïncide absolument avec l'emploi des crayons intra-utérins, et la diminution des douleurs de la fosse iliaque gauche. L'examen anato- mique de ces fragments montre qu'ils sont composés de plaques larges comme une pièce de 1 franc, d’où se détachent des villosités choriales rami- fières et présentant les renflements sphériques ou ovoïdes, étagés sur le trajet d’une même branche vasculaire, qui caractérisent la môle hydatiforme. Les caillots sanguins étaient d’ailleurs beaucoup plus abondants dans ce cas que dans le premier, et ils renfermaient également des villosités en transfor- mation fibreuse. En présence de ces faits, je me suis demandé quel rapport existait entre la dégénérescence hydatiforme et la persistance du placenta. On sait que cette dégénérescence peut n'être que partielle, même dans les cas de môle utérine proprement dite. J'ai examiné une série de prépara- tion de grossesses tubaires, ou salpingites hémorragiques, dont j'avais eu l’occasion de faire l'examen l’an dernier et que je dois à la complaisance de plusieurs chirurgiens des hôpitaux. Une chose qui m’a frappé dans ces coupes, qui m'avait passé inaperçue et qui n’est pas mentionnée dans les notes que j'ai publiées en 1892 où je n'avais en vue que l’atrophie fibreuse des villosités placentaires, c’est qu'un certain nombre des villosités incluses dans le caillot sont en dégé- nérescence myxomateuse, plusieurs même tout à fait hydropiques. Il faut SÉANCE DU 15 AVRIL 419 joindre à cette notion histologique celle qui résulte d’un signe commun à la grossesse tubaire et à la persistance d’un placenta abortif utérin. Ce signe, c’est l’expulsion à certains intervalles, correspondant en général aux poussées congestives physiologiques des organes pelviens, de caillots contenant des débris placentaires plus ou moins abondants ; on est alors amené à conclure que, dans le placenta qui s’atrophie, un certain nombre de villosités subissent la transformation muqueuse ; que ce sont ces villo- sités augmentées de volume qui sont expulsées à chaque poussée hémor- ragique, et que leur présence dans un caillot constitue le signe patho- gnomonique de l'affection, quel que soit son siège. Il restera pour le médecin l'obligation d'établir ce siège, ce que l’exa- men chimique permel. La grossesse tubaire est latérale dans le bassin, la grossesse interstitielle forme une poche latérale dans l'utérus. Le placenta peut aussi persister longtemps dans ces poches, et une observalion de Grandin (American Journ. Of. Obstetr., janvier 1891) est relative à une grossesse interstitielle datant de dix-huit mois. Enfin le placenta intra- utérin se reconnaît à l’augmentation de volume du corps de l’utérus, comme dans notre première observation. Nous résumerons cette note par les conclusions suivantes ; Le placenta abortif peut séjourner plusieurs années sur un point quel- conque du conduit tubo-utérin. Il détermine, d’après son siège, trois variétés de maladies qui ont même origine, la placentation abortive tubaire, instertitielle et utérine. Cette origine commune se traduit par un signe commun, l'expulsion répétée de fragments placentaires mêlés à des caillots, et ces fragments qui se détachent ainsi, quand le gâteau placentaire est maintenu en place par ses rilles fibreuses ou non, contiennent des villosités en transforma- tion myxomateuse ou hydatiforme. On peut donc, par l'examen histologique des caillots expulsés sponta- nément, ou provenant d’un curettage explorateur, faire le diagnostic exact de l'affection et intervenir en temps utile. Il est done contre-indiqué de faire d'emblée des grattages préventifs de l’utérus après chaque couche ou fausse-couche, chez lous les sujets, puisque l’on pourra reconnaitre la maladie chez ceux qui en seront atteints. Enfin nous pensons que l'examen histologique montrera plus qu'on ne le pense actuellement des débris placentaires dans les métrites hémorra- giques et les endométrites fongueuses. Il existe des types de métrites consécutives à la gestation, déjà décrites, mais qui se rapportent surtout à l'expulsion de débris de caduque. Tel est le déciduome, ou endométrite déciduale de Kutsner de Rud. Mayer, etc., dans lequel la malade expulse des fragments de caduque reconnaissables à leurs grandes cellules. Ces caduques, restées incluses dans l'utérus peu- vent végéter et donner lieu au déciduome malin, ou sarcomateux de Sanger. 420 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE « Mais dans nos cas il ne s’agit pas de caduque, c’est du placenta que nous rencontrons, et du placenta en dégénérescence hydatiforme, on peut rapprocher de ces faits, sans les assimiler toutefois, le cas de polype placentaire, envahissant la paroi interne qui a été signalé par Zahn et Kahlden en 1891, et dans lequel on rencontre la mention de villosités choriales hypertrophiées. NOTE SUR UN CAS D'HYSTÉRIE TRAUMATIQUE ACCOMPAGNÉE D'ASTASIE ET ABASIE, par M. GUSTAVE PioTRowsKi. Le syndrome pathologique appelé astasie et abasie est extrêmement bien étudié et décrit par M. Charcot, son élève M. Blocq et d’autres, je considère done comme inutile de donner sa définition ici. Les troubles concernant ce cas sont assez fréquents et les descriptions qu'on en fait augmentent de jour en jour. Le cas que je veux décrire mérite d'attirer l'attention non seulement au point de vue du syndrome déjà indiqué, mais à bien d’autres points de vue. Voici le résumé de l’histoire de la maladie : M. C..., âgée de dix-sept ans, servante à l’École allemande-protestante à Lemberg. Après avoir balayé et lavé le parquet d’une pièce attenante à cette école par une soirée froide et au milieu des courants d'air, ressentit le même jour une douleur à la face et éprouva une déviation de la face. Au bout de trois à quatre semaines, la malade vint me consulter. À part les détails déjà énumérés, la patiente n’en avait pas d’autres à me révéler; mais quelques jours plus tard, sa mère m'a raconté que l'oncle de sa fille, en état d'ivresse, lui avait appliqué un coup d’abord sur épaule, puis avait cherché à l’atteindre à la tête; cependant la malade a pu se retirer à temps et elle ne se rappelle pas avoir été atteinte à la tête ou tout au moins le coup fut extrêmement léger. Poursuivie par son agresseur armé d'un crochet de fer, la malade en courant cria au secours et s’enferma dans sa chambre, où elle s’évanouit de peur. Je n’ai jamais pu savoir si la scène en question avait eu lieu avant ou après les premiers symptômes de la paralysie faciale. En général, il fut impos- sible de tirer de la malade des renseignements précis à ce sujet. L'examen démontra la paralysie complète du côté gauche de la face. Il fut possible de diagnostiquer une réaction de dégénérescence partielle. Selon M. Erb c'était la forme moyenne de la paralysie. J'ai appliqué alors sur la partie atteinte le traitement par l'électricité statique, sous la forme d’aigrettes, ensuite sous forme de faibles étincelles et j'ai obtenu d'excellents résultats, comme du reste dans la plupart des cas analogues de paralysie faciale. Au bout de trois semaines de ce traitement, la face revint à son état normal, elle guérit com- plètement, tandis que pour obtenir la guérison radicale de la forme moyenne, tout autre traitement demanderait au moins six semaines. — J'ai remarqué SÉANCE DU 15 AVRIL 421 pendant la période de traitement une singulière attitude de la part de la ma- lade : elle répondait toujours le contraire aux questions posées, ou bien elle se mettait à rire ou à pleurer, faisant des gestes désordonnés, des grimaces. Enfin sa marche devint chancelante et de plus en plus difficile. Ces symp- tômes progressaient toujours, si bien qu'au bout de deux semaines après la guérison de la paralysie faciale, c'est-à-dire huit semaines environ après le début de la maladie, il lui était impossible de marcher seule, à tel point qu'il fallait deux personnes pour la faire monter au premier. L'état présent était le suivant : La malade de taille moyenne, assez bien constituée mais pâle. Lèvres, gencives, et conjonctives très pâles. Bruits du cœur normaux mais faibles, pouls faible et lent. Souffle anémique très prononcé. Aménorrhée depuis quelques mois. Inquiétude constante, humeur très changeante se manifestant tantôt par des rires, tantôt par des pleurs; impossibilité de se faire comprendre, car la malade donne des réponses absolument contradictoires sur ce qu'on lui demande; sommeil extrêmement irrégulier. La patiente passe parfois des nuits blanches, d’autres fois son sommeil ne dure que quelques heures à peine, et il lui arrive souvent de se redresser brusquement sur son lit comme épouvantée; céphalalgie intense de temps à autres. Le goût, l’odorat, l’ouie sont normaux ; le rétrécissement du champ visuel est peu prononcé; anesthésie complète du pharynx. Sur l’omoplate droite, dans une étendue large comme la main, la sensibilité est diminuée; au niveau de la sixième vertèbre thoracique on constate une plaque anesthésique de la grandeur d’une pièce de dix centimes. La pression sur les ovaires éveille une douleur très vive. La marche, au début chancelante, comme si la malade était étourdie, devenait, avec le progrès de la maladie, de plus en plus difficile, de telle sorte que la malade ne pouvait marcher qu’en ayant les jambes écartées, oscillant de droite à gauche comme font les canards, se tenant toujours pliée en deux et ayant les mains étendues comme une personne peu accoutumée marchant sur le pont d’un vaisseau. Enfin elle arriva à la période où elle ne pouvait ni marcher ni se tenir debout toute seule. C'était donc bien le véritable cas d’as- tasie et d’abasie. Mais on pouvait constater aussi d’autres troubles des mouve- ments : la malade faisait de temps à autre des grimaces avec le côté droit de sa figure, inclinant sa tête du côté gauche et soulevant en même temps l'épaule droite. De temps en temps, elle lançait ses bras dans toutes les directions et cherchait à pincer avec les extrémités des doigts. Elle ne pouvait pas mai- triser volontairement ces mouvements choréiformes. Nous avons donc à faire à une hystérie dont les principaux symptômes se caractérisent par les troubles des mouvements appelés astasie et abasie, et par les mouvements choréiformes. Le cas qui nous occupe mérite donc l'attention à divers points de vue. Son étiologie seule est déjà intéressante, la maladie ayant évolué après le traumatisme. C’est un argument de plus à ajouter pour 422 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE confirmer l'opinion de l’École de la Salpétrière soutenant que le trauma- tisme, dans l’hystérie, constitue un phénomène étiologique très important, et que la névrose résultant d’un traumatisme ne peut être considérée comme une maladie spéciale, ainsi que le veut M. Oppenheim et certains autres auteurs. La première complication constitue la paralysie faciale. La paralysie centrale causée par le traumatisme fut exclue. Ne tenant pas compte de ce que je ne pouvaissavoir si le traumatisme élait survenu avant ou après le commencement de la paralysie et qu’il avait été en tous cas très faible — la paralysie porte le caractère essentiel de la paralysie périphérique, c'est-à-dire : paralysie de toutes les branches du facial avec la réaction - de dégénérescence. Il s’agit donc de savoir si cette paralysie était d'ori- sine rhumatismale ou hystérique. La paralysie faciale hystérique, dans la plupart des cas, n’est pas à proprement parler la paralysie flasque mais bien une contracture des muscles de la face. La véritable paralysie flasque est extrêmement rare. MM. Lombroso, Gordon, Lawson, Descroizilles et Pasquier ont décrit quelques cas d’une vraie paralysie. Dans le cas qui nous occupe la réaction de dégénérescence nous fait croire et admettre sans hésitation une paralysie rhumatismale. IlLconvient d'attirer l'attention sur le syndrome d’astasie et d’abasie au point de. vue de son évolution. Dans la majorité des cas, déjà mentionnés il se manifeste brusquement, tandis que dans notre cas son évolution est lente et progressive, comme le décrit fort bien M. Zhyssen dans ses trois cas. La thérapeutique présente ici des résultats bien curieux. La malade, une fois guérie de sa paralysie faciale par l'électricité statique, a eu en elle une grande confiance, de sorte que je suis parvenu à la convaincre que l'infirmité dont elle se trouve atteinte disparaîtra également vite. J'ai dù avoir recours à l’application d’électricilé statique sous une forme très rapprochée de la précédente, c’est-à-dire sous la forme de douche à la tête. Après la première séance il y avait déjà une amélioration, la malade marchait quoique difficilement; la seconde séance nous a donné des résul- tats bien plus satisfaisants : la patiente marchait toute seule pendant un temps relativement long ; enfin au bout de la troisième séance les troubles les mouvements disparurent complètement et notre malade fut tout à dans fait rétablie. Naturellement nous avons à faire ici à une pure sug- gestion. J'ai conseillé ensuite le sulfona! contre l’insomnie; puis le brôme et les bains tièdes, enfin comme traitement définitif le fer et une nourri- ture fortifiante. A la suite de cette médication les règles et le sommeil étaient revenus, les céphalalgies disparurent et au bout du cinquième mois l'état général de la patiente était excellent, la malade était devenue méconnaissable. SÉANCE DU 19 AVRIL 423 BLEU DE MÉTHYLÈNE COMME ANALGÉSIQUE. par M. GusTAVE Piorrowskt. En se basant sur le principe que certaines matières colorantes, telles que Ja fuchsine el les matières colorantes d’aniline que l’on appelle les pyoctanines, possèdent une grande affinité pour certains tissus, on s’est efforcé de les appliquer comme moyen de (raitement dans les cas con- formes. Ce même raisonnement a conduit à admettre dans les rangs des médicaments le Bleu de Méthylène. Celle matière colorante possède, comme l’a démontré M. Æ£hrlich, une grande affinité pour certains éléments des nerfs et surtout pour les cylindre-axes des nerfs sensitifs. Ce moyen de traitement fut essayé par MM. Z'hrlich et Leppmann tantôt sous forme d’injections hypodermiques, tantôt sous forme de poudre prise à l’intérieur contre les douleurs rhu- matismales et articulaires, aiusi que dans les cas de névralgie. Le traite- ment fut suivi de succès, car les douleurs disparurent très rapidement, comme par exemple dans le cas d’ischias après 0.1 — 0.2 grammes de bleu de méthylène. ; Les observations plus récentes de MM. Gutimann et Zhrlich ont démontré des résultats positifs par application de ce traitement dans la malaria. M. Lué a également confirmé les propriétés analgésiques de cette médica- tion. M. Zmmervahr constata son action heureuse dans le cas de névralgie du trijameau, ainsi que dans l’hémircanie angiospastique, par contre sans aucun résultat dansles six cas d’ischias. M. ya d'ailleurs en appliquant ce traitement observa une certaine amélioration dans les cas de malaria ; il trouva cependant qu'il est nécessaire de prolonger celte médication bien plus que ne veut MM. Guttmann et Zhrlich, et que son adminis- tration provoque malheureusement des troubles du côté de l’estomae, la gastralgie et enfin la strangurie. Le Bleu de Méthylène, comme a démontré M. Combemale, possède la propriété de changer l'hémoglobine en méthémoglobine. Le Bleu de Méthylène ne perdant à la longue, selon M. Guttmann, rien de sa propriété analgésique et les malades ne s'y habituant point, en pourrait donc bien le substituer à l'usage de la morphine et, par suite, supprimer les mauvaises habitudes auxquelles les malades s'accoutument très volontiers. C’est pour cela que j’administrai ce traitement à l'Hôpital Universel à Lemberg. J'employais personnellement, ainsi que Zhrlich, le Bleu de Méthylène absolument libre de chlorure de zine, c’est-à-dire Methylenbl. med. d'Ehrlich, Lucius et Brunning, vorm. Meister. Hüchst a Mein. Je pratiquais les injections hypodermiques avec une antisepsie très rigoureuse, au moyen d’une solution à 2 p. 100 — 4 p. 400 dans l’eau distillée. J'injectais depuis 0.04 — 0.05 grammes de cette substance à la laéceo 494 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE fois et je prescrivais également à l’intérieur, sous forme de poudre, dans les capsules gélatineuses à partir de 0,2 grammes dans les 16 cas sui- vants : 4 cas Poliarthritis rheumatica, À cas Rheumatismus musculorum, 1 cas Coxilis tuberc., À cas Lumbago, À cas Ischias, 1 cas Neuralqia inter- costalis, À cas Neuralgia trigemini, et 2 cas Neuralqia supraorbicalis. Souvent après l'injection, apparaissait un gonflement douloureux de eou- leur rougeâtre avec élévation de température. Tandis que, par l'adminis- tration par la voie digestive, on pouvait observer de l'inappétence, des douleurs dans la région épigastrique, des nausées ou des vomissements. Dans tous les cas, l’urine était plus ou moins colorée en vert, ainsi que les matières fécales, la salive et même la sueur. Mais dans aucun des cas, je ne pouvais observer le moindre soulagement dans les douleurs contre lesquelles je prescrivais celte substance; au contraire, J'ai pu sou- vent constater que les douleurs augmentaient d'intensité. Les malades prenaient cette médication avec dégout et répugnance, de sorte qu'il était fort difficile d'arriver à leur faire suivre ce traitement. Me basant donc sur mes propres expériences, je ne pouvais accorder au médicament en question aucune propriété analgésique et je fus obligé de le suspendre totalement. Le Gérant : G. MAssoN. EEE = Paris. — Imprimerie de Ja Cour d'appel. L. MARETHEUX, directeur, 1, rue Cassette. 425 SÉANCE DU 22 AVRIL 1893 M. Eu. BourQuELor : Sur un ferment soluble nouveau, dédoublant le tréhalose en glucose. — MM. A. Girserrt et G. Lron : Sur la pluralité des lésions de la syphylis médullaire. — M. DEJERINE : Sur les lésions de la moëlle dans la paraplégie syphi- litique. — M. Gusrave Prorrowski : Pendant combien de temps peut-on retrouver l’oxyde de carbone dans le sang après l’empoisonnement. — M. MAuriCE ARTaus : Parallèle de la coagulation du sang et de la caséification du lait. — M. le Dr Rous- SEAU : Le paradoxe de Weber et le tétanos d'ouverture. — MM. Curris et ComBEMaALE : Première note sur les microorganismes qu’on rencontre dans la rate et le cerveau des malades, morts de typhus exauthématique. Présidence de M. Dareste. CORRESPONDANCE MANUSCRITE M. le D' Prorrowskt adresse une leltre de candidature au titre de Membre correspondant de la Société, avec la liste de ses travaux scienti- fiques. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE M. BourqueLor fait hommage à la Société d’un exemplaire de son travail sur Les Hydrates de carbone chez les champignons. M. ArTaus dépose sur le bureau : 1° Sa thèse de docteur ès sciences physiques : Æecherches sur quelques substances albuminoïdes. (La classe des caséines, la famille des fibrines) ; 20 Sa thèse de docteur ès sciences naturelles : Recherches sur la coa- gulation du sang. SUR UN FERMENT SOLUBLE NOUVEAU DÉDOUBLANT LE TRÉHALOSE EN GLUCOSE, par M. Em. BouRQUELOT. Le tréhalose est, comme on sait, une malière sucrée analogue au sucre de canne qui n’a été trouvée jusqu'ici que dans les Champignons et dans une sorte de manne appelée tréhala, constituant un nid d'insectes (1). Son (4) Em. Bourquelot. Matières sucrées contenues dans les champignons. Buil. de la Société mycologique de France, 1889 à 1893,t, V à IX. BIoLOG1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 14 rs 9 [æp] SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE importance physiologique est plutôt supérieure à celle du dernier de ces deux sucres puisque, comme mes recherches antérieures l'ont établi, sa présence dans les champignons est à peu près générale. Sur les 212 espèces que j'ai examinées je l'ai rencontré en effet 142 fois. Il n'y a pas un genre, parmi ceux dont j'ai pu trailer plusieurs espèces dans des conditions con- venables (sauf le genre Zlaphomyces) qui ne m'en ait fourni à l'analyse au moins pour uné de ces espèces. Le plus souvent même, j'en ai reliré de la totalité (11 genres) ou de la majorilé des espèces (7 genres). On trouve encore dans les Champignons, et souvent en même temps, deux autres sucres dont la présence est aussi fréquente que celle du tréha- lose: ce sont le glucose et la mannile. Mais en général, ces deux derniers n'apparaissent pas dans la même période végétalive que le premier. Ainsi pour ne parler que du tréhalose et du glucose, toutes les fois que j'ai pu, dans une espèce déterminée, suivre l'ordre d'apparition de ces deux sucres, j'ai constalé que l'analyse ne révélait la présence de traces de glucose que lorsque le tréhalose existait déjà en notables quantités. On était donc fondé à supposer que dans les cas précilés le glucose élait le résultat d’une transformation du tréhalose préalablement existant, ce qui conduisait à rechercher si celte transformation ne se produisait pas sous l'influence d’un ferment soluble analogue à l’invertine qui, dans certaines plantes, dédouble le sucre de canne en glucose et lévulose et le rend ainsi assimilable. Il existe en effet un ferment soluble possédant la propriété de dédoubler le trébalose en glucose. Je l'ai rencontré pour la première fois dans une moisissure commune }’Aspergillus niger qui renferme d’ailleurs, au moment de la formation des spores, d'assez fortes proportions de tréhalose. Pour obtenir ce ferment, on cultive la moisissure sur le liquide de Raulin. Lorsque la culture est couverte de fructifications noires, c'est-à- dire au commencement du quatrième Jour si l’on a opéré à 30 ou 32 dé- grés, on l’enlève après en avoir lavé la face inférieure avec de l’eau dis- tillée. On la broie avec du sable sec, on met le tout dans de l’alcoo!l à 95 degrés et on laisse macérer pendant six heures environ. On Jette alors sur un filtre. Quand le liquide est filtré on essore le résidu entre des feuilles de papier Joseph et on fait sécher dans le vide. Lorsque la dessiccation est complète, on broie la masse avec de l’eau distillée pour dissoudre le ferment; on laisse macérer quelque temps, on exprime, on filtre le liquide qu’on précipite ensuite par l’alcool. Le préci- pité est finalement recueilli sur un filtre, lavé à l'alcool et desséché dans le vide, Ce produit renferme, outre le ferment du tréhalose, toutes les subs- lances précipitables par l'alcool et parmi celles-ci d’autres ferments solu- bles, notamment de l’invertine ou sucrase et de la maltase, ferment que j'ai signalé en 1883 comme dédoublant le maltose en deux molécules de * SÉANCE DU 22 AVRIL 497 glucose (1). Je reviendrai plus loin sur la distinction de ces divers ferments. Si d’ailleurs on désire simplement avoir à sa dispostion, pour l'utiliser de suite, une solution active du ferment du trébalose, il est inutile de recourir à la manipulation compliquée que je viens de décrire et il est préférable d’opérer ainsi qu'il suit : Lorsque la culture de l’'Aspergillus est arrivée à maturité complète (commencement du cinquième jour dans les condilions de température indiquées précédemment), on retire la cuvette de l’étuve, on siphone le liquide nutritif, on le remplace par de l’eau distillée et on abandonne à la température du laboratoire. Au bout de douze heures on jette cette pre- mière eau qu'on remplace par une quantité à peu près égale de nouvelle eau. Le ferment excrété par la plante se dissout dans l'eau sous-jacente et au bout de deux ou trois jours ou a une solulion très active qui, après filtration, est d’une limpidité parfaite. La première eau n’acquiert jamais qu'une activité très faible, même si on attend plusieurs jours. Il est possible que la présence de petites pro- portions d’acide provenant du liquide nutritif qui imprègne la face infé- rieure de la culture et se répand dans cette eau, mette obstaele à l’action du ferment; c'est un point que je n'ai pas examiné. Dans tous les cas plusieurs lavages successifs par introduction, sous la moisissure, d'eau qu'on enlève aussitôt donnent de moins bons résultats que le séjour pro- longé dans la cuvette d’une seule eau de lavage. Quoi qu’il en soit, la solution ainsi préparée détermine le dédoublement complet du tréhalose en glucose (dextrose). C’est ce qui se trouve établi par l'essai suivant effectué sur du tréhalose retiré du tréhala. On a ajouté 10 centimètres cubes de solution de ferment à 10 centimè- tres cubes d’une solution de tréhalose renfermant 1 gr. 828 de tréhalose anhydre p. 100. Examiné au polarimètre dans le tube de 20 centimètres sitôt le mélange fait, ce liquide accusait une déviation de 3°,36”. Le dédou- blement a commencé aussilôt et, dix-huit heures après, le mélange étant abandonné à la température du laboratoire (12 à 15 degrés), la déviation n'était plus que 2°,20/. — Celle-ci est allée ainsi en diminuant jusqu’au sixième jour, après quoi elle est resté stationnaire. Elle était alors de 1 degréet le dosage du sucre réducteur formé dans la solution indiquait que ce sucre, en supposant qu'il fût du dextrose, y était dans la proportion de © gr. 980 pour 409 centimètres cubes. Or, si nous admettons que le tréhalose s’est entièrement dédoublé en dextrose et que le dédoublement s’est passé conformément à l'équation suivante : C°? H?° 0! + H? 0—92 CS H° 0, le calcul nous apprend : 1° que la solution doit donner une déviation de 1°,043 et renfermer 0 gr. 962 de sucre réducteur. Les chiffres trouvés dans l'expérience sont, comme on (1) Comptes rendus de l'Acad. des sciences, séance du 3 décembre 1883. 428 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE voit, suffisamment approchés de ceux que donne le calcul pour qu'il soit permis de conclure que le processus du dédoublement est exactement celui qu'indique la formule. C'est là une nouvelle preuve que le tréhalose est bien un diglucose, comme l’a affirmé Berthelot lorsque, en 1857, il a découvert cette matière sucrée (1). Si, au lieu d'opérer sur du tréhalose retiré du tréhala on opère sur du tréhalose extrait des Champignons, on arrive aux mêmes résultats. Il y a plus : si on suit parallèlement au polarimètre le processus sur des solu- tions d’égale concentration des deux sucres, on voit le phénomène se passer de part et d'autre de la même façon, ce qui est encore un argu- ment en faveur de l'identité des deux corps. La solution du produit obtenu par précipitation à l’aide de l'alcool et celle qui est préparée plus simplement en faisant séjourner de l’eau dis- tillée sous le thalle de l’Aspergillus n'agissent pas seulement sur le tré- halose: elles agissent également sur le sucre de canne et le maltose qu'elles dédoublent; elles agissent encore faiblement sur l’empois d’amidon au’elles liquéfient. Elles renferment donc, comme je l’ai déjà fait remarquer, de l’invertine ou sucrase, de la maltase ainsi qu'une petite proportion de diastase ou amylase, et, pour savoir si ce n'était pas l’un de ces ferments qui dédoablait le tréhalose, il fallait essayer sur celui-ci l'action de chacun d'eux pris isolément. C'est ce qu’il a été facile de faire avec l'invertine et ia diastase qu’on peut obtenir aisément d'autre part. Or, j'ai constaté que ni l'invertine retirée de la levure de bière, ni la diastase salivaire n’agissent sur le tréhalose. incidemment j'ai fait la même constatation avec un ferment de certains glucosides : l’émulsine. Il était donc établi par là que le ferment qui dédouble le tréhalose diffère des trois ferments qui viennent d'être nommés. Restait la maltase. lei j'ai rencontré plus de difficultés, n'ayant pas jusqu'à présent trouvé de végétal fournissant ce ferment isolé. J'ai d’abord essayé une séparation en ayant recours à des précipitations frac- tionnées à l’aide de l’alcool; mais, comme on pouvail s’y attendre, cette tentative n’a donné aucun résultat positif. Je me suis adressé alors à l’action de la chaleur. On sait aujourd’hui que les différents ferments solubles sont détruits à des températures différentes et l’on pouvait espérer qu'en exposant la solution fermentaire à une température progressivement croissante, on atleindrait un degré où l’un des ferments serait détruit, l’autre conservant son activité. C’est, en effet, ce qui s’est produit comme je vais l'indiquer. Des prises de 25 centimètres cubes de solution fermentaire ont été introduites dans des tubes à essai, portant des numéros de 1 à 18. Ceux-ci ont élé placés, en compagnie d'un tube témoin contenant 20 centimètres (4) Comptes rendus de la Société de Biologie, août 1857. SÉANCE DU 22 AVRIL 4929 cubes d’eau et un thermomètre, dans un vase de Bohème renfermant de l’eau et plongé lui-même dans l’eau d’un bain-marie. Le bain-marie était chauffé de telle sorte que la température de l’eau s'élevait environ de A degré par minute. Les tubes ont été retirés successivement à partir du moment où le thermomètre du tube témoin a accusé 44 degrés et cela dans l’ordre snivant : le tube n° 4 à 44 degrés, le tube n° 2 à 46 degrés; le n° 3, à 48 degrés, et ainsi de suite, de 2 en 2 degrés jusqu’au n° 18 qui a été retiré à 78 degrés. Après refroidissement, on a mélangé 10 centimètres cubes de liquide pris dans chacun des tubes, d’une part avec 10 centimètres cubes d'une solution de tréhalose à 2 p. 100 (tréhalose non desséché) et d’autre part avec 40 centimètres cubes d’une solution de maltose à 2, 5 p. 100 (mal- tose non desséché). La déviation de chacun de ces mélanges avant toute action du ferment était, pour ceux qui renfermaient du tréhalose : 3°,40° et pour ceux qui renfermaient du maltose 3°,16°. Après trente-six heures de contact environ à la température ordinaire on à examiné tous ces mélanges au polarimètre. Les résultats de ces diverses observations sont consignés dans le tableau suivant, dans lequel les chiffres de la première colonne représentent les degrés atteints par la solution fermentaire. MÉLANGE TRÉHALOSE MÉLANGE MALTOSE 440 10,107 10,32! 46° Es = 480 _ ses bQo Re ME 520 = à 54° 10,20! == 56° 19,24 is 580 19,38 = 600 20,18 5 620 20,30/ sa 640 30,40" _ 66° 30,40" 19,507 68° — ATEN 70° 20,42 729 —— 20,24" 749 RELS 20,541 76° — 30,16" 18° — —_ Ces chiffres nous apprennent que la solution n’exerce plus d’action sur le tréhalose lorsqu'elle a été chauffée à 64 degrés environ, tandis qu'il faut chauffer vers 74 à 75 degrés pour la rendre inactive à l’égard du maltose. D'ailleurs l’action nuisible de la chaleur sur la solution fermen- 430 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE taire se fait déjà sentir à des températures inférieures et particulières également pour chacun des sucres : vers 54 degrés pour le tréhalose, vers 66 degrés pour le maltose. Dans ces conditions, il semble bien que l’on doive admettre l’ saines à côté de la maltase, d’un autre ferment soluble exerçant son action sur le tréhalose. C'est à ce ferment que, conformément à à la nomenclature adoptée, je donne le nom de tréhalase. Ajoutons que la découverte de ce nouveau ferment porte à trois le nombre des ferments solubles actuellement connus des saccharoses ou bioses, savoir : Invertine ou sucrase, maltase et tréhalase. SUR LA PLURALITÉ DES LÉSIONS DE LA SYPHILIS MÉDULLAIRE, par MM. A. GILBERT et G. Lion. Dans un mémoire publié en 1889 sur la syphilis médullaire précoce, nous avons Cru pouvoir distinguer, en nous fondant sur les faits alors con- nus, quatre types anatomo-pathologiques auxquels nous avons appliqué les désignations de méningo-myélite hyperhémique et nécrobiotique, de méningo-myélite diffuse embryonnaire, de méningo-myélite diffuse sclé- reuse et de méningo-myélite gommeuse. D'après les faits de Pierret et de Jarisch, nous décrivions la méningo- myélite hyperhémique et nécrobiotique connue caractérisée par une con- gestion et une multiplication des vaisseaux de la moelle et de ses enve- loppes accompagnées d’hémorragies interstitielles et le ramollissement de la substance nerveuse. La méningo-myélite embryonnaire diffuse apparaissait, d’après l’exa- men approfondi d'un cas personnel, avec des lésions macroscopiques pouvant être nulles ou presque nulles et des lésions histologiques repré- sentées par une prolifération luxuriante de jeunes cellules dans les parois vasculaires dans la trame et dans les prolongements intra-médullaires de la pie-mère ainsi que par la production d’un dépôt fibrino-leucocytique sous-piemérien. A la méningo-myélite gommeuse appartenaient les cas assez rares de productions nodulaires possédant les caractères histologiques de la gomme. Enfin, sous le nom de méningo-myélite diffuse scléreuse, nous rangions les cas dans lesquels la sclérose représentait l'élément anatomique prin- cipal, cette sclérose étant le plus souvent associée au ramollissement et siégeant principalement au voisinage de vaisseaux épaissis et en partie oblitérés. Cette division établie sur les observations de syphilis médullaire pré- SÉANCE DU 22 AVRIL 131 coce pourrait s'appliquer à l’ensemble des faits de syphilis médullaire. Il y a lieu, toutefois, de la compléter et d'y faire une place importante à l’artérite syphilitique. Celle-ci étudiée déjà par Greiff({) et Schmaus (2), a élé particulièrement bien décrite par Müller (3) et Sottas (4). 11 résulte de cet ensemble de faits, que les lésions déterminées par la localisation de la syphilis sur la moelle sont très diverses; elles com- prennent l’artérite et la phlébite, l’ectasie et la multiplication des eapil- laires, l'infiltration embryonnaire diffuse, la gomme, le ramollissement et la sclérose. | Parmi ces lésions il en est qui sont incontestablement primitives et d’autres secondaires. L'artérite et la phlébite se rangent certainement dans la première caté- gorie. Mais faut-il admettre, suivant une tendance qui se fait jour actuel- lement, qu'elles résument en elles le processus primordial des myélites syphilitiques ? Un certain nombre d'observations démontrent que la méningo-myélite embryonnaire diffuse et la gomme peuvent constituer la manifestation primitive (5). Gajkiewiez (6) qui décrit trois variétés anatomiques de syphilis médullaire, l’artérite et la phlébite oblitérante, la gomme et l'in- filtralion diffuse des méninges, admet même que cette dernière est la plus fréquente. A la vérité, les vaisseaux dans cette forme ne sont pas sains; les cellules rondes s’agglomèrent principalement autour d'eux, pénètrent et dissocient leurs tuniques, diminuent et obstruent quelquefois comple- tement leur lumière. Mais la même infiltration s'étend à la pie-mère et à ses prolongements intra-méedullaires, et, s’il existe une corrélation entre l’altération vasculaire et l’altération méningée, il ne saurait êlre question de subordination de l'une à l’autre. Il y a loin d'une semblable lésion à celle de l’artérite typique telle qu'elle est décrite dans le cas de Müller. [ci nous voyons un processus dif- fus s'étendant à la totalité de la trame pie-mérienne et aux parois vascu- (1) Greiff. Ueber Rückenmarks Syph. Arch. f. Psych. und Nervenkr., 1882, XI, 3. (2) Schmaus. Zur. Kenntniss des Rückenmarkes Syphilis. Deutsch. Arch. f. Kl Med., 1889. Bd 44, H. 2, u. 3. (3) Müller. Studier ôfver ryggmärgssyflis. Nordiskt-Medicinskt. Aïkiv., Bd XXII, n. 22. : (4) Sottas. Soc. de Biologie, 15 avril 1893. (5) Voir l'observation I de notre mémoire. De la syphilis médullaire précoce Archive générale de médecine, 1889 et l'observation plus récente de Siemerling, Zur Syphilis des centralnervensystems, Arch. f. Psych. u. Nervenkr., 1891, Bd XXII, S. 191, u. 257. (6) W. Gajkiewiez. Syphilis du système nerveux. Paris, J.-B. Baillière et fils; 1892. deu 439 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE laires qui y sont contenues, là un processus local limité à la seule paroi vasculaire. Lei il s'agit d’une véritable production néoplasique qui envahit vaisseaux et méninges, Là d’une artérite portant sur les seules tuniques artérielles. L’ectasie et la multiplication des capillaires de la moelle peuvent-elles être également la conséquence initiale de l’action du poison syphilitique? L'affirmative est-elle imposée par les examens histologiques de Pierret et de Jarisch, ou faut-il admettre que l’artérite peu connue à l’époque où ces auteurs ont écrit leur a complètement échappé? La question est assez difficile à trancher en l’absence de nouvelles recherches faites dans estte direction, mais, pour notre part, il ne nous répugne pas d'admettre la possibilité d’une telle altération. Chez un animal que nous avions inoculé avec du bacterium coli commune nous avons vu au bout de sept mois se développer des troubles médullaires que l'examen microscopique a montré être sous la dépendance d’une simple dilalation des capillaires de la subs- tance grise de la moelle accompagnée de pelites hémorragies intersti- tielles sans artérite concomitante. La syphilis n'est-elle pas capable de frapper les vaisseaux de la moelle de la même facon que celte infection expérimentale? En résumé, s'il en élait ainsi, la syphilis pourrait occasionner initiale- ment dans la moelle les quaire altérations suivantes : artérite et phlébite, infiltration embryonnaire des méninges et de leurs prolongements intra- médullaires, gomme, hyperhémie avec dilatation de vaisseaux. Quant au ramollissement et à la sclérose, ce sont vraisemblablement des lésions secondaires. Encore n'est-il pas sûr que la sclérose ne puisse être quelquefois initiale. Le ramollissement est la conséquence le pius souvent de l'oblitération conséeutive à l’artérite ou de l’étouffement des vaisseaux par l'infiltration embryonnaire diffuse ou nodulaire. Ne peut-il pas également succéder à l'hyperhémie et aux hémorragies interstitielles qui l’accompagnent? La sclérose est le terme ultime du processus de ramollissement ou l’aboutissant de l'infiltration embryonnaire et de la gomme. SUR LES LÉSIONS DE LA MOELLE ÉPINIÈRE DANS LA PARAPLÉGIE SYPHILITIQUE, par M. J. DuJERINE. Les faits rapportés par M. Sollas à la précédente séance et dont deux proviennent de mon service ont trait à la forme de paraplégie syphilitique banale et ordinaire qui est de beaucoup la forme de syphilis médullaire SÉANCE) DU 29 AVRIL 433 la plus communément observée. Dans cette forme la paraplégie apparaît brusquement, souvent même survient d’une manière foudroyante et, lors- que les lésions ne sont pas trop étendues en hauteur, ce qui est ie cas habituel, la paraplégie évolue par la suite sous les traits de la paraplégie spasmodique. Lorsque la moelle épinière est atleinte sur une grande partie de sa hauteur, l’évolution est alors différente et, ou bien le malade reste complètement paralysé ei sans pouvoir marcher pendant un temps souvent considérable, parfois même indéfiniment, ou bien il succombe à la suite de complications et en particulier d’eschares. Dans celte forme de syphilis médullaire, à début brusque, la lésion relève du même processus que dans l’hémiplégie syphilitique, à savoir de l’arlérite. Les cas observés par M. Sottas dans mon service, et ceux que j'ai observés de mon côté qui sont au nombre de trois et dont M. Sottas donnera la relation détaillée dans sa thèse inaugurale, me paraissent absolument démonsiratifs, et il est certain que ce que l’on désigne com- munément sous le nom de myélite transverse syphilitique, n'est autre chose qu'un ramollissement de la moelle par endartérite avec sclérose consécutive. Que la syphilis médullaire puisse, ainsi que l’indiquent MM. Gilbert et Lion, se lraduire par d’autres lésions que celles dues au ramollissement de la moelle épinière par endartérite, la chose est certaine, mais il n’en est pas moins vrai que, dans la paraplégie syphilitique ordinaire, banale, à début brusque, les lésions médullaires sont la conséquence de l'endar- térite. PENDANT COMBIEN DE TEMPS PEUT-ON RETROUVER DE L'OXYDE DE CARBONE DANS LE SANG APRÈS L'EMPOISONNEMENT, par M. GusrAvE PIoTROwSKI. (Travail du laboratoire de physiologie au Muséum d'histoire naturelle.) Les principaux travaux de Claude Bernard sur l’intoxication oxycarbo- nique ont élé considérablement élargis par son élève distingué M. Gréhant. Ses nombreuses recherches ont jeté une lumière sur beau- coup de questions jusqu’à présent obscures, et surtout c’est à lui que nous devons les méthodes d'investigations rigoureusement strictes et exactes. Ayant profilé de l'hospitalité de M. Gréhant dans son laboratoire, nous avons établi d’après ses conseils une série d'expériences sur des questions qui ne sont pas sans imporiance pour la physiologie ainsi qu'au point de vue médico-légal. Les expériences ont été faites exclusivement sur les chiens. La déter- 434 SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE mination d'oxyde de carbone était effectuée par la méthode de M. Gréhant, c’est-à-dire par l'extraction des gaz dans le vide à l’aide de sa pompe à mercure à la température de 106 degrés et avec l'acide acétique à 8 degrés. Après l'absorption de l'acide carbonique et de l'oxygène par les procédés employés habituellement, on absorba l’oxyde de carbone à l’aide du protochlorure de cuivre. Nous donnons ici les résultats. 1° La première série de recherches avait pour but d'étudier la dispari- tion spontanée de l'oxyde de carbone du sang. Le chien était empoisonné par un mélange de l'oxygène et de l’oxyde de carbone, et Le sang recueilli de la carotide après la cessation des mouvements respiratoires et avant que le cœur n'ait cessé de battre. Le sang était conservé dans les flacons fermés avec des bouchons de liège mais pas hermétiquement. Voici une série d'analyses failes successivement : 12 janvier 1893. 24.7 p. 100 CO 20 — — DOM — 28 — — 22.2 — — 8 février — 20,3 — — 10 = Dur — 26 — — JDA EE 3 MAS — 6.3 — — 14 — — 4.6 — — T 22 — — 18 — — Nous voyons que la disparition progressive d’abord lente de l’oxyde de carbone devient brusque après un certain temps. C'était en relation avec la décomposition du sang accélérée à cause de la belle saison. Le sang jusque-là rouge est devenu presque noir et exhalait l'odeur d'acide sulfhydrique. Nous avons enterré ce chien dans une boîle, et le 28 mars, après l’exhu- malion, nous avons recueilli le sang du cœur el des grands trones vei- neux. L'analyse nous a donné 11,7 p. 100 d'oxyde de carbone. L'élimi- nation de ce gaz a donc été beaucoup plus lente dans ces conditions que in vitro, ou l’accès de l’air était beaucoup plus facile. Cette circonstance a une importance pour la médecine légale. 2° D’après Claude Bernard et M. Gréhant, l'élimination de l’oxyde de carbone par les poumons est très rapide, surtout chez les lapins — il dis- paraît en moins d'une heure déjà — tandis que MM. Ogier et Pouchet pouvaient constater sa présence chez des personnes empoisonnées par les émanations des poêles mobiles soixante heures après l'éloignement des atmosphères toxiques. D’après Donders, l'oxyde de carbone est éliminé du sang in vilro assez rapidement par l'air, l'acide carbonique, l'oxygène et l'hydrogène à la température de 38 degrés. Hermann, au contraire, pré- tend que c’est l'oxygène qui peut être éliminé du sang par l'oxyde de carbone, mais pas l’oxyde de carbone par l'oxygène. SÉANCE DU 2% AVRIL 435 Pour résoudre cette question, nous avons empoisonné un chien par le gaz d'éclairage et sacrifié en saignant par la section de la carotide. Nous avons fait barboter l'air à travers le sang assez lentement afin d'éviter la formation d'une mousse trop abondante. Nous avons pris une portion du sang de temps en temps et nous l’avons analysé de la manière décrite plus haut. Voici les chiffres obtenus : DOPTISOPNEUTC SOUS RES SOON AI00AGO Burbotage de l'air — A1 — PROPRES RNE — 12 — 6.5 = — nt D ee 2 — 2 — 146 —. — — 3 — 0 rte Cette expérience prouve que l'air élimine l’oxyde de carbone du sang assez rapidement. Ce gaz disparaît in vitro par le barbotage de l'air dans un temps très rapproché de celui qui a été trouvé par M. Gréhant pour les chiens par la ventilation naturelle des poumons. 3° Nous avons établi enfin quelques expériences pour savoir si on peut constater la présence de l’oxyde de carbone dans les muscles des sujets empoisonnés. Nous avons employé les muscles des cuisses des chiens après la saignée aussi complète que possible. En isolant les muscles soi- gneusement, on peut les avoir avec des traces insignifiantes de sang. Nous avons mis des quantités assez considérables (200-300 grammes) dans l: balion et après l’évacuation de l’air nous avons introduit de l’acide acétique et nous avons extrait les gaz. Les analyses n’ont donné que des traces insignifiantes de l’oxyde de carbone, dues probablement aux traces du sang, dont on ne peut jamais se débarrasser totalement. PARALLÈLE DE LA COAGULATION DU SANG ET DE LA CASÉIFICATION DU LAIT, par M. MAURICE ARTHUS. (Travail du laboratoire de physiologie de la Sorbonne.) Si l’on examine un sang extrait des vaisseaux, coagulant spontané- ment, et un lait caséifié par le labferment, on est nécessairement frappé de la ressemblance que présentent les deux phénomènes de coagulation du sang et de caséification du lait. 436 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Le sang coagule en masse, donnant une gelée peu résistante à la pres- sion, à brisure irrégulière, vitreuse ; le lait de vache donne un caséum massif présentant la même apparence que le caillot sanguin. Les deux caillots se rétractent plus ou moins rapidement, plus ou moins, énergiquement suivant la température, suivant la réaction et la salure du milieu dans lequel ils ont pris naissance. Ils expulsent un sérum clair tenant en solution des sels et des substances albuminoïdes. Les caillots sont, dans les deux cas, essentiellement constitués par une substance fondamentale, fibrine et caséum, englobant les éléments en suspension, globules du sang et globules du lait. La coagulation du sang et la caséification du lait sont des phénomènes de fermentation chimique, retardés ou arrêtés par une tempéraiure basse, accélérés par une température voisine de 40 degrés. Les agents de ces transformalions, fibrin-ferment et labferment s’obtiennent par les pro- cédés généraux de préparation des ferments solubles. La production de la fibrine et celle du caséum exigent l'intervention de deux substances génératrices : une substance albuminoïde et un sel de chaux, ce dernier jouant le rôle de substance fibrinoplastique et de substance caséoplastique. Le sang décalcifié et le lait décalcifié ne don- nent pas de fibrine et pas de caséum. Le phénomène de fermentation qui s’accomplit dans le sang et dans le lait qui coagulent est un phénomène de dédoublement. Le fibrinogène et la caséine sont dédoublés en deux substances albuminoïdes : le poids de la fibrine et du caséum sont toujours moindres que le poids du géné- rateur fibrinogène et caséine. L'un des produits de dédoublement, fibrine ou caséum, est précipité ; l’autre reste en solution dans le sérum. Les produits principaux du dédoublement, fibrine et caséum, présen- tent une constitution chimique comparable : ce sont des composés albu- minoïdo- métalliques; ils ont les propriétés des substances albuminoïdes; leur molécule renferme du calcium. La fibrine et le caséum ont des propriétés chimiques qui les rattachent directement à leur générateur, fibrinogène et caséine : la fibrine comme le fibrinogène est une globuline coagulable à 56 degrés ; le caséum comme la caséine est une caséine. Il faut cependant signaler quelques différences entre les deux phéno- mènes de coagulation du sang et de caséification du lait. Par battage du sang, on peut séparer des globules la fibrine sous forme filamenteuse; le baltage du lait soumis à l’action du labferment ne permel pas de séparer le caséum, sous forme de filaments. Le fibrinferment ne transforme pas le fibrinogène des liquides décal- cifiés; le labferment transforme en caséogène la caséine du lait décalcifié. Les sels de strontium peuvent être substitués aux sels de calcium dans la coagulation du sang ; les sels de baryum et de magnésium ne peuvent SÉANCE DU 22 AVRIL : 437 pas être substitués à ces sels; il n’y a donc que deux fibrines. Dans la caséification du lait, les sels de strontium, de baryum et de magnésium peuvent être substitués aux sels de calcium : il y a donc quatre caséums. Enfin, le dédoublement du fibrinogène par le fibrinferment donne lieu à la production de deux globulines, c'est-à-dire de deux substances appartenant à la classe de leur générateur ; le dédoublement de la caséine par le labferment donne lieu à la production d’une caséine et d'une protéose, c’est-à-dire de deux substances dont l’une appartient à la classe de son génératenr, et dont l’autre appartient à une classe essentiellement distincte. LE PARADOXE DE WEBER ET LE TÉTANOS D OUVERTURE, par M. le D' A. RouxEAU, Professeur-suppléant à l'École de Médecine de Nantes. J'ai montré récemment (1) que, si l’on excile en masse le contenu d’une pince d’écrevisse ou de crabe au moven de courants faradiques ou galvaniques, il peut se produire un concours de circonstances tel que la contraction de l’abducteur, bien grêle cependant, si on le compare à l’adducteur, ou bien contrarie d’une façon appréciable celle de son antagoniste plus puissant, soit même se produise seule sous l'influence de l'excitation. J'ai montré qu'il faut même tenir compte de l’aclion des fibres musculaires lisses qui peuvent se trouver en quantité plus ou moins grande dans l’intérieur de la branche fixe de la pince; leur action, en effet, est dilatatrice et vient en aide à l’abducteur. On ne peut donc regarder, comme exemples posilifs du paradoxe de Weber, les expériences faites sur les pinces des crustacés et à la rigueur peut- être pourrait-on conclure qu'on ne peut accepter comme tels que les observations concernant des muscles isolés ou des faisceaux de fibres musculaires qui concourent toutes à un but unique. Je ne suis pas allé plus loin dans mes conclusions. Il se peut parfaitement, en effet, que les expériences fondamentales de Weber soient à l'abri de cette critique. Weber, c'est vrai, opérait sur l'hyoglosse de la grenouille détaché avec l'orifice glottique et la langue, c’est-à-dire sur un organe composé, uon seulement de fibres longitu- dinales, mais aussi de fibres transversales puissantes dont l’action brusque a pour résultat de l’allonger subitement et considérablement el d'en faire un organe efficace de préhension. Mais si l’on en juge par le dis- (1) Arch. de physiol., 1893, p. 47. 438 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE positif de l'expérience tel qu'il est figuré dans le 7railé de physiologie de Béclard, il est à croire que le muscle hyoglosse seul était bien réelle- ment en jeu dans l'expérience de Weber. Je me trouvais d’ailleurs d'autant moins porté à élendre mes conclu- sions qu'il n’est pas douteux que l'allongement d'un muscle au moment d'une excitation s'observe parfois. On peut même dire que, dans certaines conditions expérimentales, lorsqu'on opère sur cerlains muscles, c’est un phénomène aussi constant, aussi fatal, pour ainsi dire, que le raccour- cissement. Je me proposais seulement, pour ne point compliquer l'exposé d'un fait bien simple, de revenir ultérieurement sur ce côté spécial de la question. Mais d'abord, je crois devoir éliminer certains faits, analogues à ceux que M. de Varigny relate dans ses intéressantes études sur la contraction musculaire chez les invertébrés. L'allongement brusque d’un musele après une contraction musculaire, allongement tel que le musc'e devienne plus long qu'auparavant, ne me semble pas, en effet, conslituer un fait paradoxal (1). Dans mon étude sur le paradoxe de Weber, je n'ai pas rapporté les faits de ce genre, c'est-à-dire avec ce degré d'accentuation, que j'ai observés; ils élaient manifestement dus à la contraction des antagonistes. Mais j'admets que ceux de M. de Varigny ne peuvent être passibles d’objections basées sur des considérations anatomiques. Eh bien! je crois qu’on n’y pourrait guère voir autre chose que ceci : des muscles, qui, au début de l'expérience, se trouvent contracturés du fait de la préparation plus ou moins compliquée qu’ils ont subi, des muscles que la tétanisation expérimentale au moyen de courants faradiques fatigue et épuise plus ou moins vile et qui, consécutivement, se décon- tracturent aussitôt après et plus ou moins rapidement. Seuls les faits d'allongement du muscle pendant la période d’excitation me semblent devoir être pris en considération. Toute la question est de savoir jusqu'à quel point ils peuvent servir à étayer la proposition si paradoxale de Weber, à savoir que l'augmentation d'extensibilité que développe dans un muscle le passage à l’état actif peut être portée à un point tel qu'il puisse en résulter un allongement au lieu d'un raccourcis- sement. Il y a tout avantage, en effet, à poser nettement la question. Or, je crois qu'il n’en est rien. C’est à l'aide des courants continus que Weber a observé le phénomène en question. Or l'emploi des courants continus peut devenir la cause d'une illusion curieuse et faire croire à une augmentation d’extensibilité là où en réalité il n’y en a pas. Je m'explique. Lorsqu'on fait passer, pendant un temps assez long — une demi-heure et plus, — un courant ascendant ou un courant descendant intense à travers (1) H. de Varigny. Recherches expérimentales sur la contraction musculaire chez les invertébrés, 1885, p. 147. SÉANCE DU 22 AVRIL 439 le nerf moteur d’un muscle, il se produit souvent, à la rupture du circuit, un tétanos qui dure huit à dix secondes. C’est le tétanos de Ritter ou télanos d'ouverture. Il disparaît quand on ferme le courant dans le même sens mais se renforce, au contraire, quand on le ferme dans un sens opposé. Ce curieux phénomène peut s’observer tout aussi bien avec des courants faibles, descendants ou ascendants, quand on excite directement le muscle lui-même. M. Boudet de Paris l’a démontré sur le gastro- cnémien de la grenouille en excitant le muscle dans toute sa longueur au moyen d’une large électrode qui recouvrait la partie supérieure du corps de l'animal et d’une plus petite qui enveloppait le tarse. Avec une inten- silé de 2 milliampères, il lui a suffi d’une minute. Avec { milliampère il a pu observer le phénomène au bout de 22 minutes (1). J'ai répété ces expériences sur le constricteur de la pince de l’écrevisse. On peut réussir sur ce muscle avec des intensités électriques encore plus faibles, 2 à 5 dixièmes de milliampère, par exemple. Il n’y a même pas besoin d'attendre longtemps pour cela : une minute suffit amplement, pourvu qu'on se serve de ccurants descendants. Et le tétanos qu’on obtient alors dure bien quelques secondes ; la courbe présente un plateau descendant très régulier. On réussit fort bien aussi, soit avec le muscle hyoglosse de la grenouille, soit avec des tranches de la langue expérimentées dans divers sens. Mais ce qui fait le côté plus particulièrement intéressant de l’expé- rience, c'est qu'une fois le tétanos d'ouverture obtenu, le muscle, à chaque nouvelle rupture du cireuit, va donner une contraction presque semblable à celle qu’il aurait fournie au début de l'expérience pendant le passage du courant, et, à chaque fermeture, ilse relâchera, comme il aurait fait au début lors de la rupture du cireuit. L'expérience peut se répéter presque irdéfiniment el avec une régularité admirable. Il n’y a qu'à ne pas prolonger trop longlemps à chaque fois la durée de la fermeture et de la rupture du circuit. Un graphique obtenu dans ces circonstances, analogue à celui qui est figuré ci-contre, peut, à bon droit, faire illusion et faire croire à un allon- gement du muscle qui se produirait au moment d’une excitation. Mais que l’on considère l’abseisse tracée par la plume du myographe au début de l'expérience, alors que le muscle, à peu près complètement relàché, se trouvait en équilibre à peu près stable entre les deux influences contraires de sa rétractilité et de la traction exercée par le poids tenseur. On se rendra compte alors qu'au moment de la fermeture du circuit, quand le muscle se relâche, il reste encore beaucoup plus court qu'au début de l'expérience, qu’il est par conséquent toujours contracté. Ce n’est pas un muscle au repos qui s’allonge en passant à l’état actif, (1) Electricité médicale, 1888, p. 34 et suivantes. A , G 440 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ER CR A sous l'influence d’une excitation. C’est un muscle actif qui se décontracte légèrement quand le courant passe. Il y a là un vérilable trompe-l'œil. Car, en somme, une expérience de ce genre ne pourrait pas plus être invoquée à l’appui de la proposition de Weber que le fait, bien connu également, de l’arrêl d’un tétanos musculaire de cause quelconque sous JINCE D ÉCREVI-SE Le tendon de l’abducteur a éfé sectionné; le pôle négatif du courant est introduit par un trou fait à la base de la branche fixe; le pôle positif par la tranche de section de la pince. Poids tenseur, 10 grammes. Courant fourni par deux éléments Callaud de moyenne taille. SD, signal de Desprès. F, le courant passe par le muscle constric- teur de Fen R. En À, première contraction; en B, le muscle a été polarisé pendant 1 minute, le galvanomètre donnant une intensité de 4 dixièmes de milliampère au début et de 3, surtout à la fin de la première minute. la seule influence de la galvanisation du nerf moteur par un fort courant de pile (4). On voit aussi dans ce cas, à chaque fermelure du circuit, le muscle se décontracter en partie et le lélanos reparaitre à chaque rupture. En revenant encore aujourd'hui sur cette question du paradoxe, je n'ai voulu que montrer une cause d'erreur dans l'interprétation d'un fait par- faitement exact, cavse d’erreur qui ne me semble pas avoir été signalée jusqu’à présent. Étant donné qu'on expérimente sur un muscle dont la disposition ana- tomique ne peut donner prise à aucune critique, je crois quil sera sage de n’accepter comme exemples du paradoxe de Weber qu'une expérience (1) Voir en particulier le beau tracé publié par M. Marey dans le Mouvement dans les fonctions de la vie, p. 408. SÉANCE DU 22 AVRIL 441 dans laquelle on n’aura pas employé le courant continu comme agent d’excitation. Quelle que soit, en effet, la discrétion et la réserve qu’on mette à manier cet agent, il peut devenir difficile, à un moment ou à l’autre de l'expérience, de savoir si on n’a pas affaire à un muscle pola- risé, et cela doit suffire pour rendre l'expérience peu probante. PREMIÈRE NOTE SUR LES MICROORGANISMES QU'ON RENCONTRE DANS LA RATE ET LE CERVEAU DES MALADES MORIS DE TYPHUS EXANTHÉMATIQUE, par MM. CurrTis et COMBEMALE, Professeurs agrégés à la Faculté de médecine de Lille, L’épidémie de typhus exanthématique qui a déjà sévi à Lille depuis deux mois, nous a permis d'entreprendre quelques recherches sur les microorganismes que l’on rencontre chez les individus infectés par cette maladie. Dès le 23 mars nous possédions les éléments de la présente note, nous aurions cependant hésité à faire connaitre le résultat de nos invesliga- tions si la récente communication de MM. Dubief et Bruhl ne nous eût mis dans la nécessité de publier des faits dont il serait prématuré de tirer des conclusions définitives. Nous nous empressons d’ailleurs de constater qu'une certaine concordance semble exister entre les faits signalés par MM. Dubief et Bruhl et ceux qu'il nous reste à relater. Pour élucider la question, nous n'avons pas fait d'examen microsco- pique du sang frais, mais seulement des cultures sur milieux nutritifs : 1° Sur le vivant; à l’aide de sang pris chez ies malades; 90 Sur le cadavre avec la pulpe splénique, le cerveau et le liquide ven- triculaire. Nous consignerons tout d'abord une série de résultats négatifs qui ne sont pas sans intérêt. Les cultures faites à l’aide de sang recueilli sur le vivant Dan piqüre digitale ont été toutes absolument stériles. Nous les avons pratiquées avec le sang de douze malades, à tous les stades de la maladie et dans toutes les formes, mais en choisissant de préférence les individus dont l’élat était nettement infectieux. Les cultures ont été faites sur gélatine, sur agar, sur sérum de mouton, sur sérum de Lœffler, soit à la température ambiante, soit à l’étuve. Les résultats ont toujours été nuls. Nous avons conservé des tubes vierges jusqu'au vingtième et vingt-cinquième jour. Parmi les malades soumis à cet examen, l’un a été suivi journellement pendant une semaine. Les cultures cadavériques ont élé pratiquées avec des organes aussi 14. 442 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 3 frais que possible. Dans un cas, nos ensemencements ont pu être faits deux heures après la mort, le cadavre étant encore chaud. Nous avons pratiqué en tout neuf autopsies dont six seulement ont pu être suivies de recherches bactériologiques. Parmi ces six autopsies, trois seulement nous ont fourni des résultats positifs qui sont les suivants : La pulpe splénique et la substance cérébrale portées sur gélatine et laissées à la température de 18 à 20 degrés sont dans tous les cas restées stériles. Les cultures de premier jet, en un mot, avortent sur gélatine à la température ambiante. La pulpe splénique et la substance cérébrale ainsi que Je liquide ven- triculaire ensemencés sur sérum, sur agar ou sur bouillon maintenus à l’étuve entre 35 et 37 degrés, nous ont donné au bout de deux à trois jours des enduits grisâtres qui, reportés ensuite sur divers milieux, végétent dans des conditions où les cultures de premier jet avortaient. Nous avons pu ainsi isoler un microorganisme qui se présente sous forme d’un diplocoque très petit se trouvant presque aux limites de la visibilité avec des grossissements de 1,000 diamètres. Sur places dans nos préparations, ces diplocoques se groupent en petits amas ou en fausses chaïnettes simulant le staplylo ou le streptocoque, mais les éléments sont cependant plus petits. Nous précisons ici les cas où ce microorganisme a été isolé : 1° Dans la rate et le cerveau. — Autopsie du 13 mars, douze heures après la mort; 2° Dans le cerveau seul, la rate ne donnant rien. — Autopsie du 16 mars, deux heures après la mort; 3° Dans la rate et dans le cerveau. — Autopsie du 27 mars, huit heures après la mort. Nous ajouterons que les cultures de rate ne nous ont donné des résul- tats que lorsque cet organe était notoirement gonflé; celles du cerveau, lorsqu'il existe de l’'œdème et de la congestion des méninges, c’est-à-dire pendant la période vraiment infectieuse de la maladie. Comme nous n'avons pas encore la certitude d'être iei en présence du bacille spécifique du typhus exanthématique, nous nous abstenons de toutes conclusions définitives et nous bornons à relater les faits. Ces recherches sont d’ailleurs continuées par de nouvelles séries d’autopsies et de cultures. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'Appel. L. Marermeux, directeur, 1, rue Cassette. 443 SÉANCE DU 29 AVRIL 1893 M. Marassez : Sur les parasites du cancer. — M. Pauz Lan@Lois : Destruction des capsules surrénales chez le chien. — M. Browx-SéQuaARD : Influence heureuse de la transfusion de sang normal après l’extirpation des capsules surrénales chez le cobaye. — M. Juces Héricourr : Sur une action spéciale des injections sous-cuta- nées de liquide orchitique. — M. Cu. Cornevin : Vénénosité de quelques légumi- neuses exotiques appartenant aux genres Templetonia et Sophora. — M. le Dr Bus- quer : De l’action des essences sur le développement de champignons des teignes dans les cultures. — M. E. BaraizLon : Réponse à M. Dubois, à propos de la « peste des eaux douces ». Présidence de M. Dareste. SUR LES PARASITES DU CANCER, par M. MaLassez. MM. Armand Ruffer et J. H. Plimmer, de Londres, ont fait paraître récemment dans les comptes rendus de l’Académie des sciences (1), puis dans les bulletins de notre Société (2), une note « sur le mode de repro- duction des parasites du cancer », où ils disent que leurs parasites diffé- rent « absolument » de ceux dont j'avais parlé antérieurement. Il me semble, au contraire (je ne saurais rien affirmer, n’ayant pas vu leurs préparations), que leurs parasites se rapprochent beaucoup de l’une des formes que j'ai indiquée dans mon travail « sur la prorospermose du foie chez le lapin domestique (3) ». Dans ce travail, entrepris dès 1876, précisément dans le but de m'é- clairer sur la nature de certains corps d'apparence cellulaire que j'avais remarqués dans les cancers épithéliaux, et que je supposais, dès cette époque, pouvoir être des protozoaires encore inconnus, j'ai signalé plusieurs formes de coccidies qui n'avaient pas encore été décrites et qui réssemblaient extrêmement à plusieurs de ces corps que je cher- chais à définir. Or, parmi ces nouvelles formes, j'en cite et figure une qui est constituée, comme les parasites de MM. Ruffer et Plimmer, par de (1) Séance du 10 avril 1893. (2) Séance du 15 avril 1893. (3) Archives de médecine expérimentale, numéro du 10 janvier 1891. BIoLOGIE. COMPTES RENDUS, — 9€ SÉRIE. T, V. 45 444 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 0 très petites coccidies, les unes isolées, les autres réunies en plus ou moins grand nombre dans des cavités intra-épithéliaies et j'ajoute ensuite : « j'appelle encore toute l’attention des observateurs sur cette forme parce que j'ai souvent rencontré des éléments analogues dans beaucoup d'épithéliomas, sans pouvoir cependant me prononcer avec certitude sur leur nature (1). » Puis, cherchant à me rendre compte de la signification de ces petites formes parasitaires, j'émets l'hypothèse (2) qu'elles doivent correspondre à un mode de reproduction non encore décrit, dans ce genre de proto- zoaires. Ce mode serait tout différent de la sporulation bien connue qui s'observe dans les formes dites enkystées ; il consisterait, soit en une simple division, soit en un bourgeonnement de coccidies; ce qui res- semble à la manière de voir de MM. Ruffer et Plimmer. Il est vrai de dire que je suis toujours resté sur une grande réserve touchant la nature de la plupart de ces formes cellulaires, ne m’avançant réellement qu’au sujet de celles qui ressemblaient le plus à quelqu'une des formes parasitaires bien connues et dont, par suite, la nature était plus évidente et plus certaine; telles sont celles que j'ai trouvées dans l’épithéliome du maxillaire de M. Albarran et dans la psorospermose fol- liculaire de M. Darier, formes que ces distingués observateurs ont parfai- tement décrites depuis. Je rappellerai aussi que le D' Ed. Hache, de Reims, a vu (3), dans quatre cas de cancer : un carcinome du sein et trois épithéliomes dont un de la lèvre, un de la langue, un de l’anus, de très petit corps qu'il a considérés comme étant de jeunes protozoaires nés par sporulation. Peut-être sont- ils semblables à ceux de MM. Ruffer et Plimmer, DESTRUCTION DES CAPSULES SURRÉNALES CHEZ LE CHIEN, par M. Pauz LanGLois. Poursuivant nos recherches sur les fonctions des capsules surrénales dans la série animale, nous avons, l’année dernière, opéré, avec M. Abelous, : plusieurs chiens d’une capsule; depuis cette époque j'ai opéré un cerlain nombre de ces animaux soit seul, soit avec le concours de MM. Contejean, Carvalho et Maurange. (1) Archives de médecine expérimentale, numéro du 10 janvier 1891, p. 9; pl. 1, fiod,.e,d, (2) Loc. cit., p. 10 et 11. (3) Les coccidées dans les cancers épithéliaux, Société de Biologie, 15 novem- bre 1890. SÉANCE DU 29 AVRIL 445 Le manuel opératoire varie suivant que l’on veut enlever une seule capsule ou les deux dans un même temps. Quand il s’agit d'une capsulotomie double, l’incision médiane, faite sur la ligne blanche, est préférable, il faut alors se résoudre presque toujours à recueillir une partie de la masse intestinale dans un linge aseptique maintenu chaud par addition continuelle d’eau salée (7 p. 1000) stérilisée. Pour la capsulotomie simple, jai toujours préféré l’incision latérale, à l'ouverture par la voie lombaire préconisée par quelques opérateurs. Une . incision de 6 centimètres partant des dernières côtes est suffisante, les intestins sont refoulés à l’aide de grands écarteurs en forme d’abaisse- langue, très large, à long manche qui peuvent au besoin être tenus par un aide dont les mains ne sont pas absolument aseptiques. Ces écarteurs nickelés ont en outre l'avantage, non négligeable dans l'espèce, de faci- liter l’éclairage du champ opératoire. La ligature d’une veine pré-capsulaire, volumineuse et qui recoit deux veines de la capsule, est un des temps les plus importants de l’opération. Cette veine une fois sectionnée entre deux ligatures, la capsule peut être isolée du tissu connectif qui l’entoure à la sonde et aux ciseaux sans qu'il soit nécessaire de lier d’autres vaisseaux. Le voisinage de la veine cave rend l’énucléation de la capsule droite plus difficile, il est souvent impos- sible d’enlever en totalité la glande, les parties restantes sont alors cautérisées au thermo ou au galvano-cautère. 95 chiens ont été opérés. 7 ont subi l’ablation des deux capsules. La mort arrivant toujours dans un délai très court après la destruction des deux glandes, il est impossible dans ce cas de faire la part du trauma- tisme, sauf dans le cas d'hémorrhagie grave. Des 18 chiens opérés d’une seule capsule dans la première opération, deux ont succombé des suites opératoires : hémorrhagie dans un cas, péritonite dans un autre. Les 16 autres ont survécu. Parmi ces derniers, un est resté en observation cinq mois. Il n’a présenté pendant cette période aucun trouble appré- ciable. L'animal étant mort pendant l'opération de la seconde capsule, nous avons trouvé du côté opéré (côté droit) une dégénérescence kystique complète du rein qu'il faut attribuer, croyons-nous, aux lésions opéra- toires (c'était notre seconde opération sur le chien avec M. Abelous). La capsule gauche n’était pas hypertrophiée. Les 16 autres ont été opérés de la seconde capsule après des intervalles variant entre 15 et 66 jours. Chez aucun d'eux il n’a été observé après la première opération de troubles moteurs ou autres qui aient été indépendants du traumatisme opératoire. Le poids de ces animaux a généralement peu varié, il a toujours baissé après l'opération, mais tant de facteurs entrent en jeu à la suite du trau- matisme qu'on ne saurait conclure à cet égard. L’ablation de la seconde capsule, quelle qu’ait été l'intervalle compris 446 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE D D a ES er RE PR RC NE Re En entre les deux opérations, a toujours été suivie d’une mort rapide, quand la destruction a été totale. Au contraire, si on laisse, intentionnellement ou non, une petite partie de l'organe, la survie peul avoir lieu. Il est diffi- cile de fixer la proportion de capsule compatible avec la survie de l'animal. C'est ainsi qu’un chien de 44 kilogrammes, opéré des deux capsules à trente-cinq jours d'intervalle, après avoir présenté des troubles très marqués de la motilité, une véritable parésie du train postérieur, parésie s’accentuant quand on forçait l’animal à marcher quelque temps, se rétablit vers le sixième jour de son opération, et quinze jours après ne présentait rien d’anormal. Cet animal dut être sacrifié le 44 avril, quarante-cinq jours après la seconde énucléation, par raison d'hygiène, un chien suspect de rage ayant été en contact avec lui. A l’autopsie, on découvrit qu'il restait à gauche un fragment de capsule intact, et à droite, un fragment plus volu- mineux. Bien que l'examen histologique n’ait pas encore été fait, la coupe présente à l’œil nu un aspect normal, mais les deux fragments réunis ne pesaient que 20 centigrammes, alors que chez un chien de 44 kilo- grammes, le poids moyen des deux capsules est de 2 gr. 25 environ. Il a donc suffi de laisser la onzième partie des capsules pour assurer la survie. Je dois ajouter que chez d’autres animaux la mort est survenue, avec tous les accidents ordinaires, el sans que l’on pût invoquer le traumatisme même quand un sixième environ des deux capsules était resté; mais il est toujours difficile d'affirmer, dans ce cas, si l'irrigation de la portion restante continue à se faire normalement et il nous faut conclure seule- ment des résultats posilifs, c’est-à-dire des cas de survie. Malgré de nombreuses recherches, je n’ai jamais jusqu'ici trouvé sur le chien de glandes accessoires dans le voisinage des glandes normales. Les animaux privés de capsules surrénales meurent à la suite d'une auto-intoxication. En opérant sur la grenouille, nous avons montré, M. Abelous et moi, que le sang d’une grenouille mourant de l'ablation des capsules est toxique pour une grenouille récemment acapsulée; M. Zucco, en Italie, a confirmé ces recherches en montrant que le sang des lapins privés de capsules a des propriétés curarisantes. Le temps de survie des chiens privés de capsules surrénales est supé- rieur à celui observé chez les cobayes, et bien que ce temps ait oscillé dans d'assez grandes limites, 12 heures à 52 heures, mes expériences permettent d'établir comme moyenne une période de 24 heures à 36 heures entre l’opération et la mort. Or, si l’on injecte à un animal, qui vientfd’être opéré des deux capsules, du sang défibriné pris sur un chien mort de l’ablation des deux capsules, la mort survient beaucoup plus rapidement. Des quatre chiens qui ont reçu du sang toxique, aucun n'a survécu plus de 42 heures. Le tableau suivant montre la différence. La première colonne indique la 2 HE SÉANCE DU 29 AVRIL 447 ie ————————————— ——— —————— durée de survie du chien transfuseur; la seconde, la durée du chien trans- fusé. Je dois ajouter que les chiffres donnés ne sont souvent qu'approxi- maiifs, deux chiens étant morts pendant la nuit; il en est de même des deux premiers chiens de la seconde colonne. Opérés le soir, ils ont été trouvés morts et complètement froids le lendemain matin vers septheures et demie. CHIEN TRANSFUSEUR, CHIEN TRANSFUSÉ. Survie. Survie. Exr. À. — 36 heures, moins de 12 heures. Exp. B. — 40 — moins de 12 heures. Exp. C. — 25 — 8 heures. Exp. D. — 20 — 9 heures. La quantité de sang injecté a varié de 50 à 80 centimètres cubes pour des animaux d'un poids de 9 à 12 kilogrammes. Deux séries d'expériences de contrôle ont été poursuivies simultanément : Injection du sang de chien mort de la destruction des capsules à un chien normal. Injection de sang d’un animal mort par traumatisme simple à un chien acapsulé. La première série comporte deux expériences. 120 centimètres cubes de sang défibriné avaient été recueillis sur un chien mort de la destruc- tion des capsules : 80 centimètres cubes ont été injectés au chien de 14 kilogrammes que j’ai cité plus haut et sur lequel un sixième des cap- sules avait été laissé sans le vouloir. L'animal était alors bien portant (dix-sept jours après la seconde ablation). Après l'injection, l'animal a présenté une certaine somnolence, de la parésie dans les mouvements, mais l'excitation électrique des nerfs à tra- vers la peau ne présentait rien de spécial, el je n'ose, faute de preuves suffisantes, prononcer le mot de curarisation. Cet état a persisté dans la soirée; le lendemain matin, il était complètement remis. Les 40 centi- mètres cubes restant avaient été injectés à un chien normal de 9 [los grammes qui n’a présenté aucun symptôme. L'injection du sang d’un animal non privé de ses capsules injecté à un chien privé de ses capsules n’a amené aucune modification ni dans les symptômes, ni dans la durée. Mort trente-six heures environ après l’abla- tion (4). (4) M. le professeur Brown-Séquard nous a rappelé, au moment de cette communication, qu'il avait réussi à obtenir sur le cobaye une prolongation de survie en injectant à des cobayes acapsulés du sang de défibrinés. Mais dans notre expérience la quantité était trop minime pour espérer cet effet, nous poursuivrons les recherches dans la direction qu'a bien voulu nous indiquer notre excellent maitre, en cherchant à pratiquer une véritable trans- fusion. 448 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En résumé, l'injection d’une quantité assez faible de sang d'un animal mort des suites de la suppression de la fonction surrénale accélère l’ap- parition des accidents mortels chez les animaux acapsulés, reste sans effets sur les animaux normaux et ne paraît présenter que des troubles passagers chez les animaux qui ont subi une destruction importante, mais non totale de leurs capsules surrénales. Travail du laboratoire de physiologie de la Faculté de Médecine de Paris. INFLUENCE HEUREUSE DE LA TRANSFUSION DE SANG NORMAL APRÈS L'EXTIRPATION DES CAPSULES SURRÉNALES CHEZ LE COBAYE, par M. BROWN-SÉQUARD. A propos de l’intéressante communication de M. Langlois, je crois devoir rapporter les résultats d'expériences différentes de celles qu'il a faites, mais qui conduisent aux mêmes conclusions. Sachant que la durée de la vie varie considérablement chez les Cobayes (1) après l’ablation des capsules surrénales, j'ai attendu pour faire la transfusion de sang fourni par des animaux sains, de cette espèce, que la mort fût proche, chez deux cobayes d’un an environ, qui avaient été soumis à cette opéra- tion. L'un d’eux avait été opéré douze heures, l’autre quinze heures et demie avant la tranfusion. Tous les deux présentaient les symptômes ordinaires qui précèdent la mort d'environ trente à quarante minutes; — faiblesse paralytique très considérable, gène marquée de la respiration, affaiblissement du cœur, abaissement de température (2 degrés chez l’un, 2° 1/2 chez l’autre, de moins qu’à l’état normal). Après avoir coupé l’ar- tère fémorale et pendant que le sang s’écoulait du bout supérieur, on injecta, par le bout inférieur, du sang défibriné par le baltage et prove- nant de cobayes sains. La quantité de sang perdue par chacun des ani- maux sans capsules n’a pas pu être mesurée exactement, mais elle ne dépassait pas 14 grammes; celle du sang transfusé a été exactement de 13 grammes pour chacun d’eux. Non seulement dans cette expérience les cobayes décapsulés ont perdu du sang plus ou moins chargé des principes toxiques qui se trouvent daus ce liquide lorsque les capsules manquent, mais ils ont reçu du sang nouveau contenant les produits de la sécrétion interne normale des cap- sules. Ces deux cobayes bénéficièrent rapidement du remplacement de (4) Voyez mon travail montrant l'influence heureuse des injections sous- cutanées de l'extrait liquide de capsules surrénales chez des cobayes privés de ces organes (Comptes rendus de la Soc. de Biol., 1892, p. 410). D x: SÉANCE DU 29 AVRIL 419 leur sang intoxiqué par du sang frais. Celui des deux qui n'avait perdu ses capsules que depuis douze heures, ne mourut que trois heures et demie après la transfusion, l’autre que quatre heures et demie après. Ces faits, que je n’ai pas publiés jusqu'ici, bien qu’ils eussent été observés l'hiver avant-dernier (j'attendais pour les faire connaitre d'avoir répété l'expérience un grand nombre de fois), viennent tout à fait à l’appui des démonstrations de MM. Abelous el Langlois, en faisant voir que le sang des animaux privés des capsules surrénales est chargé d’un poison. Si nous comparons les résultats des deux expériences que je rapporte aujourd’hui à ceux des injections de l’extrait liquide de capsules surré- nales chez les ciny cobayes privés de ces organes (voyez ma note de l’an dernier, p. 410), nous voyons que ces derniers ont survécu plus longtemps que les deux premiers, ce qui montre bien la puissance du suc retiré des capsules, contre le poison accumulé dans le sang après l’ablation de ces organes. SUR UNE ACTION SPÉCIALE DES INJECTIONS SOUS-CUTANÉES DE LIQUIDE ORCHITIQUE, par M. Jures HÉRicourr. (Note présentée par M. Brown-Séquard.) Dans le débat actuellement ouvert sur la valeur thérapeutique des injections sous-cutanées de liquide orchitique, une des premières ques- tions à résoudre serait de savoir si, dans ce liquide, ce sont de minimes quantités de phosphates qui agissent, et si, comme l’affirment quelques médecins, on obtient avec des injections de solutions de phosphate de soude ou de quelques autres sels minéraux, les mêmes ellets qu'avec les injections de M. Brown-Séquard. Parmi les malades à qui j'ai fait de ces injections, il en est un qui, par la nature spéciale de ses réactions, pouvait fournir quelques éclaircisse- ments eur cette prétendue similitude du liquide orchitique et des diverses solutions minérales qui ont été proposées. Ge malade, M. X..., âgé de trente ans, de bonne santé Dehitielle était seulement atteint d’une neurasthénie de convalescence, consécutive à la grippe, et caractérisée par un sentiment accenlué de faiblesse musculaire et d'inaptitude au travail intellectuel. Contrairement à ce que j'ai observé chez le plus grand nombre des malades qui ont été soumis aux injections de liquide orchitique, celles-ci ne produisaient pas chez M. X... d'effets persistants, plus ou moins du- rables. Chaque injection était suivie cependant d’une réaction très marquée, très caractéristique, mais d’une durée très courte, de trais à 450 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cinq heures, et après une vingtaine de ces injections, les effets en étaient toujours les mêmes, toujours aussi vifs et toujours aussi courts. Cette réaction, que l'on pourrait appeler physiologique, — car elle à paru ne guère modifier l’état nerveux du malade en dehors du temps où elle se produisait, — consistait en un état @e bien-être et de gaieté, sorte d'ivresse psychique, qui apparaissait une heure environ après la piqûre. Alors M. X... éprouvait un grand besoin d’activité musculaire, une sen- sation de force tout à fait inaccoutumée, et son état psychique, quelque peu mélancolique et pessimiste à l'état normal, se transformait du tout au tout. L'injection étant faite vers deux heures de l'après-midi, cet état, qui commençait à apparaître vers trois heures, persistait jusque vers huit ou neuf heures, quelque fois plus tard; mais le lendemain matin, il n’en restait rien. Il était donc intéressant, pour juger la question que nous avons indiquée, de voir si les injections de sérum artificiel ou même d'extraits de substance nerveuse, produiraient chez notre sujet des effels analogues à ceux que nous venons de rapporter, lesquels étaient absolument cons- tants et caractéristiques. Sans prévenir M. X..., j'ai donc substitué, à des intervalles irréguliers, aux injections de liquide orchitique, des injections : 1° De phosphate de soude, à 2 p. 100, dans de l’eau de laurier-cerise, suivant la formule de M. Crocq; % De sérum artificiel, dans lequel entrait du chlorure de sodium, du phosphate de soude et du sulfate de soude, suivant une formule analogue à celle de M. Chéron; 3° De l’extrait de cerveau de mouton, suivant la formule de M. Cons- tantin Paul ; 4° De la spermine en solution aqueuse (à 2 p. 100) que m'avait adressée M. Pœhl, de Pétersbourg. Or ces substitutions, qui ont été faites deux fois pour chacune des pré- parations, ont donné les résultats suivants : Pour les injections de M. Crocq, de M. Chéron et de M. Constantin Paul, les effets ont été absolument nuls. Pour les injections de spermine de M. Pœhl, une fois les effets physio- logiques ont été de tous points les mêmes qu'avec le liquide orchitique, et la seconde fois les effets ont été à peine sensibles. Sans traiter :a question de la valeur thérapeutique du liquide orchi- tique, il me paraît donc possible de conclure de ces essais qu’il existe réellement, dans ce liquide, une substance qui agit comme un excitant spécial du système nerveux, et que cette substance n’est ni la glycérine, ni le phosphate de soude, ni aucun des autres sels minéraux existant dans le sérum artificiel. En même temps la suggestion, invoquée par quelques médecins pour SÉANCE DU 29 AVRIL 451 expliquer les effets des injections sous-cutanées du liquide orchitique, se trouve éliminée, puisque les effets physiologiques des injections ne se produisaient que pour ce liquide, alors que le sujet était dans l'ignorance de la nature des injections faites, et qui toutes étaient également con- tenues dans des ampoules de verre du même modèle. Je dois ajouter que ces effets étaient toujours plus marqués pour le liquide orchitique non filtré, préparé avec toutes les précautions asep- tiques requises, que pour le liquide filtré suivant le procédé de M. d’Ar- sonval (1). Ë VÉNÉNOSITÉ DE QUELQUES LÉGUMINEUSES EXOTIQUES APPARTENANT AUX GENRES l'empletonia ET Sophora, par M. CH. CORNEVIN, Chaque année nos parcs s’enrichissent d'espèces exotiques, mais, dans les importations le côté ornemental n’est pas le seul à considérer, il faut savoir si les nouvelles venues ne possèdent aucune propriété toxique et ne peuvent occasionner d'accidents ni dans l'espèce humaine ni sur les espèces animales domestiques. De temps à autre on me demande d'examiner ce qu'il en est pour quelques végétaux dont des échantillons sont envoyés à mon laboratoire. Voici le résumé de recherches sur quelques Légumineuses des genres Templetonia et Sophora. I. Des Templetonias. — Originaires de la Nouvelle-Hollande les Temple- tonias sont des arbrisseaux de serre froide sous le climat de Paris, mais qui supportent le plein air dans la région méditerranéenne, On les cultive à titre ornemental pour leur abondante et brillante floraison et pour leur feuillage persistant. Les botanistes classificateurs en distinguent sept espèces. Deux d’entre elles, les plus répandues en France, m’ont été expédiées, ce sont : Z'empletonia retusa R. Br. (Syn. Rajnia retusa Vent.) et Tem- pletonia glauca Sims. Pour l’une et l’autre, j'ai eu à ma disposition des ramilles feuillues. La quantilé n’en étant pas assez considérable pour que je les fisse ingérer par les herbivores domestiques, j'en ai fait des extraits par macération, ébullition et pression que j'ai injectés sous la peau de chiens, de chats et d'oiseaux de basse-cour. Les effets oblenus avec le T. retusa ont été à peu près insignifiants : (1) Tous les liquides injectés, sauf la solution de spermine, que je devais à l'obligeance de M. Pæhl, avaient été préparés au laboratoire de physiologie de la Faculté de médecine. 452 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quelques tremblements suivis d'une période de somnolence avec respira- tion ralentie; ce fut tout. Très différents sont les effets du 7. glauca. Cinq minutes après une injection hypodermique, le chien est pris de vomissements qui se pour- suivent à intervalles réguliers longtemps après que l'estomac est vidé et qui aboutissent à l'expulsion de matières spumeuses abondantes. La res- piralion s'accélère, des mouvements cloniques se montrent aux muscles cervicaux, puis il y a des tremblements de tous les membres; l'animal ne peut plus se soutenir, il s'étend en position sterno-abdominale. Inutile d'essayer de le relever, sitôt qu’on l’abandonne il se laisse choir de tout son long. Les tremblements deviennent des secousses tétaniques, la respi- ration s’'embarrasse, la membrane nictilante voile l’œil, le souffle labial apparait et la mort survient par arrêt de la respiration. Lorsque la quantité injectée sous la peau est insuffisante pour amener la mort, le tableau symptomatique s’arrête d'ordinaire au moment où l'animal ne peut se soutenir ets’étend de son long. Il entre alors dans une période de coma qui dure de six à huit heures, puis il revient peu à peu à l’état normal. Le pigeon qui a recu une injection de Templetonia glauque soulève alternativement les pattes et les tient étendues dès la troisième minutes après l’opération, puis il chancelle, se défend quelque peu de tomber, enfin s’abat, les pattes jetées en arrière et complètement tétanisées. Impossible de le remettre debout; maïs la tétanisation n’atteint pas les ailes, car si on lance l'oiseau en l’air, il les agite et vole passablement, les membres postérieurs continuant à ne pas faire un seul mouvement. Bientôt Ja tétanisation s'étend aux muscles du tronc, la respiration ne se fait plus qu’à de longs intervalles, l'oiseau ouvre le bec pour aspirer l’air et meurt de la vingt-cinquième à la trente-cinquième minute après l'injection, suivant la dose. D'après des renseignements qui m'ont été fournis, l’infusion des feuilles du 7”.egena amène les mêmes phénomènes que ceux que j'ai obtenus avec la T. glauque. . La conclusion qui ressort de tout ceci est que sur trois espèces de Tem- pletonies essayées au point de vue toxicologique, deux sont très véné- neuses, 7. glaucu et T. egena et une ne l’est à pas ou l’est à peine, T', retusa. Plusieurs botanistes pensent que le Templetonie glauque n’est qu'une variété de T. retusa dont elle ne différerait que par la teinte de ses feuilles qui sont vert glauque au lieu d’être vert franc comme dans celle-ci. Admet-on ce point de vue toxinomique, il faut se demander si le glau- cicisme est causal de la toxicité, et la physiologie végétale aura à recher- cher s’il existe dejnotables différences dans la respiration et l'assimilation des deux formes’ qu'on dit parentes. Peut-être cela jettera-t-il quelques jours sur le déterminisme du poison dont il s’agit. SÉANCE DU 29 AVRIL 453 II. Des Sophoras. — Arbres, arbustes ou herbes vivaces, les Sophoras sont originaires des régions chaudes, et les botanistes en distinguent plus de vingt espèces. Deux ont été mises à ma disposition : Sophora japonica et S. secundiflora. Sophora japonica. — Il s’agit d'un arbre bien acclimaté chez nous et passablement répandu dans les parcs aujourd’hui. La pulpe de ses fruits est parfois utilisée pour la teinture en jaune. M. L. Henry, du Muséum de Paris, m'a adressé un bon lot de ramilles et de fruits. J’ai expérimenté successivement avec les écorces, les gousses et les graines. L’injection hypodermique, à doses croissantes, des sucs extraits de ces diverses parties n’a provoqué aucun effet morbide sur les sujets d'expériences. Le Sophora du Japon n'est donc pas un arbre vénéneux. — Bien plus, j'ai fait distribuer à des moutons, ce qui restait de brindilles et de gousses ; ils les ont consommées sans hésitation comme sans malaise consécutif. Sophora secundiflora. — Originaire du Texas et du Mexique, porteur de fleurs bleues en grappes, puis de gousses dures et un peu comprimées, ce Sophora est un arbrisseau de port assez gracieux. Son introduction en France est toute récente. | M. Naudin, de l’Institut, m'en a envoyé, de la villa Thuret, un échan- tillon formé de ramilles feuillues, L’extrait de 50 grammes de ces feuilles et brindilles fut injecté sous la peau à un chien de 7 kilogrammes. Moins d’une minute après l'injection, des vomissements apparurent, puis il y eut de l'agitation, le faciès exprima l'anxiété, l’œil fut retiré au fond de l'orbite et la membrane nicti- lante le recouvril en grande partie, la respiration fut profondément trou- blée, les côtes se tordaient en se soulevant. Vingt-cinq minutes après, il y eut titubation, puis chute et decubitus sur le sternum, en même temps que mouvements désordonnés des pattes et mouvements rythmés de la tête et du cou. Impossibilité de se relever; on plaça le sujet debout, il ne put faire un pas et se laissa choir lourdement. Peu à peu, la respiration se ralentit, le souffle labial apparut et la mort survint à la trente-huilième minute après l'injection. M. Naudin eut donc raison d’avoir des soupçons, le Sophora secundi- flora est un arbrisseau très vénéneux. Une réflexion pour finir. — En suivant cette expérience et en la renou- velant, j'ai été frappé de l'identité de la symptomatologie de cet empoi- sonnement avec celle de l’intoxication par le Uytise Aubour. S'il était permis de conclure de l'identité des symptômes à l'identité des principes toxiques, on pourrait affirmer aux chimistes qui s’occuperont d'isoler la toxine du Sophora secundiflora qu’ils rencontreront la cytisine ou un corps isomère. 454 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DE L'ACTION DES ESSENCES SUR LE DÉVELOPPEMENT DES CHAMPIGNONS DES TEIGNES DANS LES CULTURES (1), par M. le D' Busouer, Aide-major de {re classe. Les essences, à l’état de vapeurs, exercent, sur la vitalité des champi- pignons des teignes, une action énergique qui se traduit, suivant l'es- sence essayée, soit par un simple ralentissement, soit par un arrêt com- plet dans le développement de la culture. Dans une première série d'expériences à 22 degrés, à l’aide de cultures sur gélatine, gélose et pomme de terre, nous avons pu constater les faits suivants que nous résumons sous forme d'un tableau : ACHORION SGHŒNLEINI (Remak). Essence. Développement. À, — Sur pomme de terre. Serpolet , . DE CA ETES Table Ares Talent Cannelle de Chine 0 Faible, ralenti. Mintergreentai sit 2006 ue te 4 'lEdible ralenti Berg samotte ee ES ee ADI Faible, ralenti. Tube CÉMONNE Ce eee Re ce Étendu en nappe sur trois faces tr rapide. B. — Sur gélose. Bercamottes he ce rap haiblelct ralenti Cannelle de Chine. . . . . . . . . Faible, très ralenti, C. — Sur gélatine. Cannelle deChine 2-7 Nul Mintercreen eee NUE SÉFPOlE TS MP RE Tres tie Mrs ralentie Anis Te AVR PE ro rhmlrestaible strèssalenti Beérgamotte et Re dm eTataiDIe ralentie Tubes témoins . . . . . . . . . . Rapide et très étendu. TRICOPHYTON TONsURANS (Malmsten). Sur gélatine. Bergamotte 0-10 ic NUL (oué peu pres) Cannelle de Chine . ee er diDle re ttralentie (4) Ces recherches, commencées en 1889 et publiées, en partie, en mars 1892, dans les Annales de dermatologie, ont été reprises récemment dans le labora- toire de M. le professeur Ferré, à la Faculté de médecine de Bordeaux, à la suite de la communication de M. le professeur Hallopeau à la Société de Thé- rapeutique (22 mars 1893), sur le traitement de la Pelade par l'essence de Wintergreen. Elles confirment complètement nos premières Lentatives et ses expériences. SÉANCE DU 29 AVRIL 455 Il semblerait donc que sur gélatine, les cultures soumises à l’action des vapeurs des essences de Bergamotte et de cannelle de Chine, pourraient fournir un précieux moyen de diagnose pour les deux genres Achorion et Tricophyton, dont la différenciation n’est pas toujours aisée dans les cultures. Un autre point important, et qui a tout d’abord attiré notre attention, ce sont les modifications macroscopiques et microscopiques que font subir, dans les cultures, telle ou telle essence à l’Achorion et au Trico- phyton. Ces modifications sont assez profondes, pour qu’on put croire, si l'on n’était prévenu, avoir affaire à des espèces différentes et nettement distinctes. es caractères, encore à l'étude, seront minutieusement décrits et com- plétés dans des communications ultérieures. En résumé, nous conclurons que : 1° Parmi les essences, celles de Cannelle de Chine et de Wintergreen semblent arrêter complètement le développement de l’Achorion Schœn- leini (Remak) dans les cultures sur gélatine; . 2° Celle de Bergamotte paraît agir de la même façon sur le Tricophyton tonsurans (Malmsten); 3° Il y aurait peut-être lieu de rechercher si l’on n'est pas en présence d'un bon signe différentiel pour les deux espèces; 4° Les essences modifient l’aspect macroscopique et microscopique des champignons du favus et de la teigne tondante, chacune d'elles leur don- nant un faciès particulier. RÉPONSE A M. DUuBors. A PROPOS DE LA «PESTE DES EAUX DOUCES », par M. E. BATAILLON. M. Dubois m'impose un examen critique auquel j'avais cherché à échapper dans ma Communication sur la « peste des eaux douces ». Il s’agit des faits signalés par lui à propos de l’Ecrevisse. Ordinairement, une note préliminaire dispense provisoirement de Bibliographie, surtout quand le sujet qu’on aborde est vaste, surtout - quand on apporte une idée et des faits nouveaux. J'ai pensé que la rai- son d'actualité justifierait une exception en faveur de mon contradicteur dont j'hésitais à passer les recherches sous silence. On relève dans ma note des lacunes concernant Hack, allier Harz etc... Ces savants, j'en ai la conviction, voudront bien nenete que je leur rende justice dans un travail plus étendu. 456 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ceci dit, je vais donner satisfaction à M. Dubois. Je trouve d’abord un desideratum : Il ne sait pas de quelle maladie il s’agit dans ma Com- munication, J'ai parlé d'une maladie acompagnée des symptômes donnés pour la peste. Cette maladie, je l’ai observée et provoquée et n'ai pas affirmé autre chose. M. Dubois ne doute pas que cette maladie n’ait rien de commun avec la peste des écrevisses, Après m'avoir signalé dans sa note tant de choses que je connais, il m’eüt faitplaisir en m’apprenant quel symptôme décisif et nouveau lui a présenté l'écrevisse de Nantua pour dissiper tous les doutes possibles sur son cas et sur le mien. Je réponds à une objection, la seule que je puisse relever dans cette discussion. Les écrevisses sont mortes à Nantua en quelques jours : et pourtant les Poissons et les Grenouilles ont résisté. Mais l'Ouche est dans le même cas. De ce que les pontes de Truite sont altérées par un bacille, de ce que les adultes, peut-être à la suite d’une morsure ou d’une blessure quelconque, prennent la même mâäladie, de ce que les pontes de Grenouille sont souvent infestées, il ne résulte pas qu'il ne doive plus y avoir aujourd’hui ni Poissons, ni Grenouilles. Mais mon plus grand tort est d'avoir écrit à propos de la note de M. Dubois : «.. Cette note ne nous dit pas si les deux formes parasites signalées, formes qu’il sera intéressant de rattacher l’un à l’autre, sont pathogènes ou non. » Et M. Dubois ne s'explique pas ce que j'ai voulu dire. Peut-être, insi- nue-t-il, ai-je voulu écrire « contagieuses ». Précisons, et on appréciera la portée de mon objection. J'ai dit patho- gènes, et, à défaut d'un autre guide je consulte l’étymologie. Suffit-il de trouver, même exclusivement sur des écrevisses malades, une forme parasite pour affirmer que cette forme engendre la maladie? En somme, les parasites décrits permettent-ils de reproduire la maladie d'une façon quelconque? La communication de M. Dubois ne touchait pas à la question. Sa critique répond par la négative. Le passage mérite d’être cité. « Il est très important, pour terminer, de rappeler que plusieurs obser- vateurs qui ont eu l’occasion d'étudier la peste des écrevisses au moment où elle sévissait épidémiquement, ont été frappés de ce fait, c’est qu’elle n'était pas directement contagieuse d’écrevisse à écrevisse, même pat inoculation, C’est un des principaux arguments dont se sont servis Harz et Zundel en faveur de la distomatose. Avec les écrevisses malades du Merloz contenant les parasites que j'ai décrits, je n'ai pas pu non plus obtenir la contagion par inoculation. » Ajoutez à cela le fait qu'il reste des Poissons et des Grenouilles à Nantua ; ajoutez cet autre fait que des écrevisses nourries avec des débris de Truites (malades ou saines?) n’ont pas été infestées; et M. Dubois conclut SÉANCE DU 29 AVRIL 4517 « Il est donc bien évident que le microbe de M. Bataillon n’est pas celui qui à produit la peste des écrevisses. » Cetle argumentation puissante ne suffit pas àme convaincre. Ne serait-ce pas parce que tous les agents de la peste indiqués jusqu'ici ont échappé au critérium de l’expérimentation qu'on a pu dire la cause du mal inconnue? De bons esprits ont porté ce jugement et l’ont écrit avant la communica- tion de M. Dubois; en le portant après, je n’espérais pas rencontrer de contradicteurs. Mais, puisqu'il faut parler très clairement, j'irai plus loin. Une forme animale ou végétale supposée pathogène ne se cultive pas, ne s’inocule pas. Encore faut-il voir et suivre son accroissement, sa mulliplication, une manifestation vitale quelconque. Lorsque tout caractère positif fait défaut, je me résigne à une circonspection que M. Dubois trouvera peut- être exagérée. Je me demande : cette forme est-elle bien vivante (j'entends: au moment où je l’observe). Et tout cela s'applique spécialement au premier parasite indiqué par mon adversaire et trouvé dans l'intestin. Le deuxième me paraît hors de cause. En effet, ce parasite anormal observé dans l'abdomen et les muscles d'écre- visses saines nourries pendant trois mois avec de la chair de Gardons ne présente, d’après la note en question, aucun rapport avec la maladie, si ce n’est une relation hypothétique avec la première forme. Voilà nettement indiquées, j'espère, les questions que j'ai voulu soulever par cette simple phrase, n’espérant pas qu’on m'obligerait à préciser. J’ose penser que « tous ceux qui ont l'habitude du langage médical » et même ceux qui ne l’ont pas pourront suivre cette critique aussi facilement que celle de mon adversaire. Et je considère, pour ma part, cette discus- sion comme close. Les faits que j'ai signalés et que l'attaque en question ne touche pas, ne prendront corps qu’à la suite d'expériences nombreuses et suivies. Jusque- là, mon interprétation conservera la forme dubitative que je lui ai donnée. (Laboratoire d'Anatomie et de Physiologie de la Faculté des sciences de Dijon.) Le Gérant : G. MASsson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarETHEUXx, directeur, 1, rue Cassette, (0 di 159 SÉANCE DU 6 MAI 1893 M. Rocer : Produits solubles du Bacillus coli communis, leur action sur la gre- nouille. — M. H. Vincent : Contribution à l'étude bactériologique de l’ictère grave. — M. Cu. DEBIERRE : A propos de la fossette vermienne de l’occipital. — M. n’Ar- SONVAL : Sur la mesure rapide des champs magnétiques à haute fréquence. — MM. p’Arsonvaz et Cnarrin : Électricité et microbes. Action des courants indirects de haute fréquence sur le bacille pyocyanique. — M. V. Haxor : Note sur les taches blanches du foie infectieux. — M. N. Grénant : Mode d'emploi du grisou- mètre dans le dosage de mélanges renfermant un centième de gaz combustible, M. AzrreD Gran : Sur un type nouveau et aberrant de la famille des Sabellides (Caobangia Billeti). — MM. Pnisarax et Bertrann : Toxicité comparée du sang et du venin de crapaud commun, considérée au point de vue de la sécrétion interne des glandes cutanées de cet animal. — M. Jacques Passy : L'odeur dans la série grasse. — M. Eu. BourqueLor : Inulose et fermentation alcoolique indi- recte de l’inuline., — MM. BourqueLor et GazrppE : Sur la perméabilité des filtres en terre poreuse à l'égard des bactéries. — M. GupenpaG : Décanteur à force cen- trifuge. Présidence de M. Chauveau. PRODUITS SOLUBLES DU Bacillus coli communis, LEUR ACTION SUR LA GRENOUILLE. par M. RocGer. Un intérêt considérable s'attache à l'étude des produits toxiques sécrétés par les microbes de l'intestin. Les travaux de Denys et Brion (1) sur le Bacillus lactis aerogenes, de Gilbert (2) sur le Bacillus coli com- munis, nous ont fait connaître les accidents que leur injection détermine chezles mammifères ; mais, pour pousser plus loin l’analyse expérimentale, il est nécessaire d'opérer sur des animaux inférieurs; c'est ce qui m'a engagé à entreprendre quelques recherches sur des grenouilles. . Je me suis servi d’un échantillon de B. coli, qui provenait des matières fécales d’un homme bien portant et se montrait doué d'une assez grande virulence pour le lapin. Avec une deuxième culture, j'ai ensemencé un ballon de bouillon de bœuf; au bout de vingt jours le bouillon a été filtré (1) Denys et Brion. Étude sur le principe toxique du Bacillus lactis aero- genes. La Cellule, t. VIIT, 2° fascicule, p. 305. (2) Gilbert. Des poisons produits par le bacille intestinal d'Escherich. Société de Biologie, 25 février 1893, p. 214. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 16 460: SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE et évaporé dans le vide à basse lempérature, de façon à le réduire au sixième de son volume primitif. Si l’on injecte dans la cavité abdominale d’une grenouille 0 c. c. 75 du liquide ainsi obtenu, on voit presque aussitôt l'animal devenir immobile; au bout de (rois à cinq minutes, il ne se retourne. qu'avec difficulté quand on le met sur le dos; puis les mouvements diminuent progressivement et deviennent de plus en plus obscurs. Cet état.de parésie se prolonge une ou deux heures, ensuite l’ animal revient à Lui et ne tarde pas à se rétablir. : Si l'on force la dose, on observe encore la période parétique que j'ai décrite: mais à celle-ci l'ait suite une deuxième période, bien différente de’ la première ; elle survient d'autant plus rapidement que la quantité injectée est plus considérable ; elle apparaît au bout de # h: ou 1 h. 1/2 si l’on a introduit { centimètre cube, de 25 ou 30 minutessil’onaintroduit 1 c.e.75 ou 2 centimètrescubes. Elle est caractérisée par la production de secousses con- vulsives, assez violentes, occupant toutle corps et prédominant au niveau du tronc et des membres postérieurs; ces secousses sont continuelles; on- en compte 7 à 42 par minute. Si l'on met à nu le lendon_«d’Achille et si on le relie à un myographe enregistreur, on constate que les contractions éièvent le style de 8 à 15 el même 18 millimètres. Le plus souvent les secousses se succèdent sans ordre; elles sont inégales et irrégulières; pour- lant il n’en est pas toujours ainsi et j'ai recueilli des tracés où les contrac- lions se suivaient d'une façon presque rythmique et s’élevaient loutes à la même hauteur. Ces phénomènes convulsifs sont accompagnés ou plulôt précédés d'une hyperexcilabilité réflexe, extrêmement intense, analogue à celle qu’on observe dans l’'empoisonnement par la strychnine. Le moindre attouche- ment est suivi de secousses brusques, parfois de convulsions toniques, rappelant celles du strychnisme, mais durant moins longtemps; elles ne représentent qu’un degré plus marqué des secousses musculaires que j'ai décrites. Pour étudier d’une façon plus précise l'hyperexcitabilité réflexe déter- minée par les toxines coliennes, J'ai eu recours à la méthode graphique. Le gastro-cnémien d’un côlé est fixé à un myographe; puis la patte antérieure du côté opposé est mise en communicalion avec un excitateur relié à un chariot de du Bois-Reymond. On y fait passer des secousses faradiques et on détermine à quelle distance on doit placer les bobines pour obtenir des mouvements réflexes dans la patte postérieure de l’autre côté, il faut, en général, 12 ou 43 centimètres. On empoisonne ensuite l'animal et on constate qu'à la deuxième période de l’intoxication, on obtient des effets semblables alors que les bobines sont éloignées de 15, 16 et même 18 centimètres. Ainsi, dans une de mes expériences j'ai obtenu les chiffres sui- vants : SÉANCE DU 6 MAI 467 que © DISTANCE _ HAUTEUR des du BOBINFS TRACÉ MYOGRAPHIQUE 12 centimètres. 6 à 7 millimètres, Dia DORE MANS ONE) == DE 7 = INSEE 0 à 1 — be RS AE ARTS EP qe ntoxication , , .....) 9 et 6àa11 or Cette exagération des réflexes indique un trouble médullaire, comme le démontre également la section de la moelle ou des nerfs qui en partent. L'exploration directe des muscles établit que leur contractilité n ’est guère modifiée pendant la première période; au commencement de la deuxième, on observe une légère hyperexcitabilité, mais ce phénomène est peu marqué et transitoire ; à la fin de la deuxième période, les décon- tractions se produisent avec une lenteur remarquable ; quand on déter- mine une série d’excitations, soit en agissant directement sur le muscle, soit en plaçant les électrodes sur un point du corps plus ou moins éloigné, on voit que le style ne retombe pas sur l’abscisse aussi vite que norma- lement: il en résulte une tendance très marquée à la fusion des contrac- tions et à la production du tétanos, à partir de ce moment, le muscle s’affaiblit rapidement même si on le laisse au repos, et il faut considéra- blement augmenter l'intensité des courants pour obtenir de nouvelles contractions. ui La deuxième période ou période d’hyperexcitabilité peut durer plu- sieurs heures; puis les accidents diminuent peu à peu et, sila quantité injectée ne dépasse pas A centimètre cube, l'animal se rétablit. | Si, au contraire, on emploie une dose plus élevée, l'animal succombe au milieu de phénomènes paralytiques qui s’accentuent progressivement. C’est la troisième période. Pendant que se déroulent les différents troubles que je viens de décrire, le cœur présente de notables modifications. Trois ou quatre minutes après l’injection, le tracé cardiographique est déjà altéré. Au lieu d’une ligne systolique verticale, on observe une ligne oblique, coupée par un crochet. Bientôt le tracé se simplifie; la ligne systolique, obliquement ascendante, est suivie d’un léger plateau; puis se produit une décontraction assez rapide. En même temps Les battements cardiaques se ralentissent légèrement : de 56 ils tombent à 30 au bout d’une demi-heure; pendant toute la deuxième période, ils se main- tiennent à ce chiffre relativement élevé; mais, à la troisième période, on ne compte plus que 15, 12 et même 6 pulsations à la minute. Les excitations faradiques portant directement sur le myocarde déter- minent un arrêt plus ou moins prolongé des battements du cœur, après 462 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE avoir produit parfois une accélération momentanée. Le cœur s’arrêle en diastole et, pendant cette période de repos, toute excitation faradique est aussilôt suivie d’une systole. C’est exactement ce qu’on observe à l’état normal, quand le cœur a cessé de battre à la suite d’excitalions élec- triques (1). ue | Voilà donc un poison microbien qui produit encore des modifications du côté du cœur; mais ces modifications diffèrent notablement de celles que déterminent les autres toxines que j'ai étudiées (2. septicus putidus, Pro- teus vulgaris, bacille diphtéritique). Un seul effet semble appartenir à tous les produits microbiens expérimentés jusqu'ici : c'est le ralentis- sement des battements cardiaques. EN RÉSUMÉ, les toxines produites par le Bacillus coli communis déter- minent chez la grenouille un empoisonnement dans lequel on peut dis- tinguer trois périodes : période de parésie initiale, période d’hyperexci- tabilité médullaire, période de paralysie terminale. Le poison agit sur la moelle et, accessoirement, sur les muscles striés et sur le cœur. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE BACTÉRIOLOGIQUE DE L'ICTÈRE GRAVE, par M. H. VINCENT, Aide-major de re classe. Les recherches pratiquées jusqu'ici dans un certain nombre de cas d'ictère grave, n’ont pas toujours réussi à élablir, d'une manière suffi- sante, l’origine bactérienne de ce processus. Les résultats quasi-négatifs obtenus par Aufrecht, par Rosenheim, la diversité même des microorga- nismes qui ont été isolés dans les tentatives faites par Klebs, Eppinger, Boinet et Boy-Tessier, Hlava, Balzer, Le Gall, Girode, etc., ne peuvent encore, en effet, permettre de tirer une conclusion définitive de l’ensem- ble de ces travaux. Cependant une communication récente de M. Hanot à la Société médi- cale des hôpitaux est venue, de nouveau, appeler l'attention sur cette question toujours ouverte. Dans trois cas d’ictère grave hypothermique, dont deux suivis de mort, M. Hanot a rencontré le Bacillus coli communis dans l'organe hépatique et dans le sang. J'ai eu moi-même l’occasion d'étudier, au mois de janvier 4893, un cas d’ictère grave à marche suraïiguë, très favorable pour l'examen bac- (1) Roger. Poison cardiaque d'origine microbienne. Archives de Physiologie, avril, 1893, p. 226. SÉANCE DU 6 MAI 463 RS ———————"" —]— ———— "— —"" "—"—"—""—""—""—"—"—"—"" tériologique, et dans lequel les cultures ont également décelé la présence, à l'état pur, du coli bacille dans le foie, la bile, ainsi que dans tous les viscères, le sang et le système nerveux central. Le malade avait succombé à cet empoisonnement généralisé moins de quarante-huit heures après le début des phénomènes aigus. C'était un soldat vigoureux de vingt-deux ans, présentant, depuis trois ou quatre jours, une jaunisse insignifiante qui ne l'avait pas autrement préoccupé. Mais, brusquement, et sans cause appréciable, l’affection revêtit un caractère de gravité considérable. Les téguments, les muqueu- ses prirent une teinte ictérique très foncée. En même temps, le malade tomba dans une stupeur profonde entrecoupée de délire et de phases d’agitation extrême. Pupilles dilatées, soubresauts tendineux, vomisse- ments bilieux, constipation absolue et incontinence d'urine. La région du foie était très douloureuse à la pression. La matité hépa- tique mesurait verticalement à peine 5 centimètres. Rate un peu tuméfiée et sensible. Rien au cœur ni aux poumons. La température, qui était de 35°,8 le matin de l’arrivée du malade à l'hôpital, atteignit 38°,6 le soir. Cet homme mourut dans la nuit. À l’autopsie, faite six heures après la mort, on a trouvé les lésions classiques de l'ictère grave. Le foie très mou, très affaissé, pesait seule- ment 970 grammes. La vésicule biliaire, remplie d’une bile grisâtre, très fluide, ne renfermait aucun calcul; mais sa muqueuse était fortement vascularisée. Le canal cholédoque était perméable. Rate grosse (340 grammes) et molle. Injection de la substance corticale : des reins. Nulle lésion de l'intestin, du cœur, ni des poumons. Hyperémie du cerveau et de la pie-mère. Les cultures et l'examen microscopique du foie, du liquide biliaire ont montré une prolifération exceptionnellement abondante du Bacillus coli communis. Le même microbe a été retrouvé, toujours à l’état de pureté, dans la rate, les reins, le sang, les poumons, le lissu cérébral et le bulbe. L'extension si remarquable du développement de ce microbe aux centres nerveux explique, peut-être, l'intensité des phénomènes ataxo-adyna- miques présentés pendant la vie. Il s’agit donc là d’un fait d’atrophie jaune aiguë primitive, d'origine coli-bacillaire. Nous croyons cependant utile d’'insister spécialement sur certaines particularités offertes par le Bacillus coli que nous avons isolé dans ce cas d'ictère infectieux. Bien que l’ensemble des caractères de ce microbe, de ses réactions vis-à-vis des milieux de culture, etc., ne permette pas de douter qu’on ait eu affaire au bacille d'Escherich, ce bacille n’a pas laissé de présenter quelques anomalies qui semblent l’éloigner un peu du Bacillus coli proprement dit pour le rapprocher du bacille d'Eberth. 464 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ————————….… —… —. —.— —.— . . — — —.……—… … —…"…… —…"… … …—… …"…"—.—…—"….— —…"….…—…— —.…—— —..…—…—….…—……——__—_____——————— Il est, en effet, extrêmement mobile. Sa culture en gélatine inclinée ou sur plaque n’est ni opaque ni envahissante, mais au contraire translucide et discrète. Sur la pomme de terre, la traînée est jaune clair, humide, peu saillante. Enfin il fait à peine fermenter le sucre de lait, et ses cultures soit en bouillon de bœuf ordinaire, soit dans la solution simple de peptone, ne développent pas la réaction de l’indol. J'ajouterai que, comme le bacille typhique et contrairement au bacille du colon qui est très virulent pour les animaux, notre bacille, inoculé en culture récente, n’a montré qu’un pouvoir pathogène modéré. A côté du cas d’atrophie jaune aiguë du foie qui vient d’être étudié, il convient de signaler les résultats que nous ont fournis les ensemencements dans un deuxième cas d'’icière grave observé en 1892, chez un homme de quarante-deux ans atteint de cirrhose hypertrophique. Les symptômes principaux étaient, outre un ictère assez caractérisé, une profonde dépression nerveuse, du délire et un retentissement fébrile. de moyenne intensité. Après des alternatives de rémission et d’aggra- vation, le malade succomba au bout de douze jours. Les cultures du foie, de la bile, de la pulpe de la rate, fournirent le Staphylococcus pyogenes albus seul. Le sang était stérile. Il semble donc résuller, du rapprochement de ces deux observations avec celles qui ont été déjà publiées, et de l'examen bactériologique auquel elles ont donné lieu, que le processus infectieux hépatique ne semble pas avoir une origine microbienne univoque et qu'il peut être subordonné au développement de bactéries d'espèces différentes. Les notions que nous possédons sur l’étiologie générale des maladies virulentes ne viennent nullement à l'encontre de cette opinion. Il n’est donc pas invraisemblable de penser que l'ictère grave n'est pas tributaire d’une. seule et même infection, mais que plusieurs microbes pathogènes — parmi lesquels le Bacillus coli communis semble être le plus fréquent — peuvent se partager la genèse de cette maladie. À PROPOS DE LA FOSSETTE VERMIENNE DE L'OCCIPITAL (Réponse au professeur Lombroso), par M. Cu. DeBierRe (de Lille). Le professeur Lombroso ayant fait la crilique (1) des résultats que j'ai annoncés à la Société au mois d'octobre 1892 (2), relativement à la fré- (4) Lombroso. La fossette occipitale selon M. Debierre (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, p. 412, 1893). (2) Ch. Debierre. Valeur de la fossette occipitale moyenne en anthropologie (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, p. 787, 1892). SÉANCE:DU. 0 MAI 469 rene meer quence de la fossette vermienne chez l'homme criminel et chez l’homme non criminel, — résultats que le célèbre professeur de Turin semble n'ac- _cepler qu'à contre-cœur, -— je me vois dans l'obligation de revenir sur la question. Ma réponse sera d’ailleurs brève, et assez catégorique, je l'espère, pour ne prêter le flane à ancune ambiguïté. Prenons en premier lieu la fréquence relative (pour 100) de la fossette vermienne selon Àl. Lombroso (4). HOMMES FENMES SAUVACES ALIÉNÉS ne RQ normaux. criminels. normales. criminelles. 4.1 16.0 D 3.4 26.0 14,0 De ces chiffres, il ressort que les criminels 4 ont une fossette vermienne 16 fois sur 100, tandis que les sujets non criminels ne présentent cette anomalie de l'os occipilal que 4 fois pour 100. Je pourrais demander à M. Lombroso pourquoi les criminelles 2 n'ont presque pas plus souvent que les femmes non criminelles une fosselte occipilale, mais j'ai hâte d'arriver à mes propres résultals qui contredisent formellement, on le sail, ceux du professeur Lombroso. Ces résultats, les voici, et j'ai soin de faire remarquer que, pour les obtenir, je reprends les chiffres que j'ai fournis dans ma première note. NO;BR£ PRÉSENCE ve de la CRANES EXAMINÉS FOSSETIE VERMIENNE Crânes de sujets non: criminels (Muséum DOMMOTN Pnnnee ce Pe Yen eee 141 4 Criminels 4 (Musée de Gand). . . . . 231 8 ee (Muse Op) Re 24 L — MUSÉUMAIERBARIS) EE 25 3 — (Musée de médecine lé- vale den yon) nee et 16 Î — (Musée de Liège). . . . . 9 0 — (Musée de Bruxelles). . . 11 1 — (Les assassins Esposito, HécaniettBanlle lee 3 0 Ce qui fait que 141 sujets normaux m'on£ présenté 4 fois une fossette vermienne, et que 319 criminels me l'ont fournie 418 fois (2). Je laisse au lecteur le soin de faire lui-même le pourcentage. Voilà la vérilé. Je (1) Lombroso. L'homme criminel. Paris, 1887, p. 170. (2) Je rappelle que je me refuse à confondre, comme l'ont fait certains auteurs, le méplat triangulaire postopisthiaque avec une ébauche de fossette -vermienne..Ce méplat a une tout autre origine que la fossette. 466 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE regretle vivement qu’elle contrarie les idées du célèbre psychiâtre italien, pour lequel j'ai la plus sincère admiration. En terminant, je tiens à faire remarquer que si j'ai dit {Société de Bio- logie, 15 oct. 1892) que j'ai étudié 406 crânes de criminels, je n'ai pas dit que je comprenais fous ces crânes dans ma statistique de la fossette ver- mienne. Je n'ai compris dans celle-ci que les crânes dont j'avais à cet égard une indication explicite dans mes notes. Pas davantage je n'ai fait dire au professeur Lombroso qu'il avait «écrit ou imaginé » que le cervelet fût l’organe de l'amour ou de l'ins- tinct brutal. Celte allusion va au célèbre phrénologue Gall etnon à M. Lom- broso. | Enfin, j'ajoulerai qu'il ne m'est pas démontré que la présence d’une fosselte vermienne dans un crâne humain soit un cachet de dégénéres- cence (atavistique, — j’admets que la fossette vermienne l'est, — n'est pas synonyme de dégénérescence), pas plus qu'il ne me paraît prouvé que cette fosselle coïncide toujours avec un vermis cérébelieux hypertrophié. Je sais bien qu’on m'opposera la fréquence de la fossetle chez les fous, mais là encore il faut distinguer. Il y a aliénés et aliénés, et si un idiot, un crétin, un imbécile, un dément, un épileptique aliéné, est assurément un dégénéré, il n’est pas sûr, — loin de là, — que tous les fous appar- tiennent à la calégorie des dégénérés. Pour juger de la valeur de la fos- sette vermienne chez les aliénés, il faudrait donc des statistiques par catégories ; jusque-là il est prématuré, je crois, de proposer une conclu- sion quelconque à cet égard. Que les femmes, enfin, aient «toujours un nombre bien moindre de caractères dégénératifs» que l’homme, cela n'explique pas pourquoi les © criminelles ne présentent pas plus souvent que les © non criminelles (opinion de M. Lombroso) une fosselte dans leur occipital. SUR LA MESURE RAPIDE DES CHAMPS MAGNÉTIQUES A HAUTE FRÉQUENCE, par M. D'ARSONVAL. J'ai fait connaître antérieurement à la Société (4 février 1893) un pro- cédé d’électrisation particulier, qui permet de faire passer à travers le corps d’un animal des courants extrêmement puissants sans être obligé de le mettre directement en rapport avec une source électrique. Ce pro- cédé consiste essentiellement à faire passer un courant de haute fré- quence, produit par un des moyens que j'ai indiqués, à travers un solé- noïde. L’êlre en expérience est plongé simplement dans ce solénoïde, sans aucune communication électrique avec lui. Grâce à la fréquence très élevée (800,000 oscillations par seconde environ), le solénoïde en- gendre un champ magnétique oscillant, extrêmement intense. Tout corps conducteur plongé dans ce champ devient le siège de cou- : vs î SÉANCE DU 6 MAI 467 rants induits dont on peut facilement mettre l'énergie en évidence. Ainsi l'induction produite dans un seul tour de fil de cuivre plongé dans le solénoïde est suffisante pour porter au blanc éblouissant une lampe à incandescence prenant 50 volts et 1 ampère, avec la source électrique dont je dispose. Pour mesurer l'intensité de ce champ électrique rapidement et commo- dément, on ne peut songer à employer les méthodes connues, à cause de la très haute fréquence des courants engendrés. Il est néanmoins très important pour les recherches physiologiques que je poursuis, d'avoir une mesure suffisamment approche de l'énergie mise en jeu ou tout au moins la possibilité de s'assurer qu'on se place dans des conditions iden- tiques. Le dispositif que je vais indiquer a le grand avantage d’être simple et de ne pas nécessiter d'appareils de mesure électrique proprement dits. Pour évaluer l'intensité du champ magnétique oscillant qui prend naissance dans le solénoïde, je plonge tout simplement dans son intérieur un lhermomètre à mercure. Les courants induits (courants de Foucault) qui se produisent dans le mercure font monter très rapidement le thermomètre à 60 ou 70 degrés centigrades avec l'instrument dont je dispose. On a ainsi un moyen simple de mesurer l'énergie du champ. Pour tarer l'instrument, il suffit de faire traverser le solénoïde par des courants induits à basse fréquence, que l'on mesure par les procédés et avec les instruments industriels cou- rants. On élimine les causes d’erreur provenant de l'échauffement de l’air dans ce cas, en plaçant à côté du thermomètre à mercure un thermomètre à alcool, ou en }renant un thermomètre différentiel à air dont l’un des réservoirs contient un tube métallique. Je reviendrai ultérieurement sur ce sujet. ÉLECTRICITÉ ET MICROBES. ACTION DES COURANTS INDUITS DE HAUTE FRÉQUENCE SUR LE BACILLLE PYOCYANIQUE, par MM. D'ARSONVAL et CHARRIN. L'un de nous a fait connaitre un procédé d’électrisation tout particu- lier. Ce procédé consiste essentiellement à faire passer dans un solénoïde un courant à très haute fréquence (800,000 oscillations par seconde envi- ron) et à plonger, dans l'intérieur de ce solénoïde, les êtres vivants sur lesquels on veut expérimenter. Grâce à l'énorme induction que développe un pareil système, les corps plongés dans ce solénoïde deviennent le siège de nouveaux courants induits qui se ferment dans l'intimité des tissus et circulent autour de chaque molécule avec la fréquence que nous venons d'indiquer. Il était intéressant de savoir si les faits signalés par M. d’Arsonval, à 468 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE propos des animaux supérieurs et de la levure de bière (voir Société de Physique, séance du 17 mars 1893), se vérifieraient sur le bacille pyocya- nique, bacille sur lequel nous nous proposons d'étudier l’action des dif- férentes modalités de l'énergie électrique actuellement connues. Du reste, les notions que nous possédons relativement à l’influence que l'électricité exerce sur les microbes, quoique des plus rudimentaires, ren- ferment des contradictions. Peu d'auteurs ont abordé cette question. Le plus souvent même, ce fluide n’est intervenu qu'indirectement, en déga-. geant de la chaleur ou en mettant en liberté un corps à l’état naissant. Dans nos recherches, le courant agit par lui seul et d’une manière immé- diate. Une culture de la bactérie pyocyanogène est placée dans le solénoïde dont nous avons parlé. Au début de l’expérience, on sème sur un premier tube d’agar deux gouttes de cette culture. On fait ainsi après 10, 20, 60 minutes; on reporte la culture sur un second, sur un troisième, sur un quatrième tube; puis, on met ces quatre tubes à l’étuve. Ge sont des tubes traités de la sorte que nous montrons à la Société ; le séjour à 35 degrés -a durétrois jours. Leur simple examen montre que dans tousle bacille a largement poussé ; sa pullulation est sensiblement égale; sa forme n'a pas subi de grands changements; il en est de la sorte pour ses fonctions pathogènes. Toute- fois, le pouvoir sécrétoire des pigments a été modifié. Tandis que les deux premiers tubes offrent une teinte d’un bleu-vert intense, à peine affaiblie dans le second, les deux derniers présentent un reflet verdâire peu accentué. An'en pas douler, sa puissance chromogène a été Llouchée. Ce résultat est intéressant en lui-même, parce qu’il prouve le rôle d’un agent physique sur le monde des bactéries, sur les cellules vivantes, il y a là un côté théorique. Il y a aussi, dans celle question de biologie, possibilité à d’autres considérations. — Nous comprenons, en effet, grâce à ces données, comment l’état électrique de l'atmosphère devient capable d’avoir action sur les virus, au besoin sur le génie épidémique qui dépend, en partie, des conditions cosmiques; nous comprenons comment celte électricité agit tant sur ces virus que sur la vitalité de nos tissus, autre- ment dit, sur le terrain, et, comme conséquence, sur la gravité ou la béni- gaité de certaines maladies. De plus, nos recherches éclaircissent, expliquent des désaccords. — Sup- posons que le bacille étudié n’engendre pas de substances pigmentaires; sa multiplication, sa forme demeurent sensiblement aralogues avant et après le passage du courant; ces bacilles, placés dans des milieux très : favorables, si on les inocule, récupèrent en quelques instants le peu qu'ils avaient perdu; ils se régénèrent promptement, comme le fait l'homme simplement courbaluré, mais en quelques heures, au lieu de quelques (4) Voir le Mémoire de Spilker et Gottslein, etc. SÉANCE DU 6 MAI 469 jours; dès lors, les animaux succombent dans des délais suffisamment rapprochés, ne laissant pas entrevoir de distinctions réelles; dès lors, on conclut à l'innocuité absolue de l'électricité. Nos expériences démontrent définitivement que cette opinion est inexacle. _ On voit par là quelles difficultés entourent parfois la solution des pro- blèmes expérimentaux ; en dehors de la puissance du fluide, de l'énergie, ici considérable, de l’agent mis en jeu, de la durée, du mode d’applica- tion de cet agent, la délicatesse du réactif permet de pousser plus avant les investigations, de saisir les oscillations de la vitalité cellulaire jusque dans leurs moindres nuances. Nous verrons bientôt, soit les différences dépendant des variétés de courants, soit les résultats de leur passage chez l’animal inoculé. NOTE SUR LES TACHES BLANCHES DU FOIE INFECTIEUX, par M. V. Hanor.. J'ai l'honneur de présenter à la Société quelques dessins qui repro- -duisent une lésion macroscopique du foie infectieux que je désigne sous le nom de faches blanches du foie infectieux. M. le professeur Hayem les avait déjà observées dès 1871 à l’autopsie d'individus morts d'infection purulente et les appelait taches anémiques. Je les ai notées sur tous les foies infectieux que j'ai vus et ceux que je montre ici ont été trouvés dans des cas de pneumonie grippale, de choléra, de diphtérie, de méningite aiguë suppurée, de phlegmon gangré- neux du pharynx. On les trouve aussi sur les foies de fièvre typhoïde, variole, rougeole, scarlatine, fièvre puerpérale, pleurésie purulente, : tuberculose, rage, etc. La tache blanche est donc une lésion immanquable, absolument carac- téristique du foie infectieux. Ces taches siègent de préférence à la face convexe du foie. Elles sont de formes et de dimensions variables, circulaires quand elles sont petites; plutôt ovales, quadrangulaires à prolongements, si elles sont grandes. Leurs dimensions varient du diamètre d’une lentille à celui d’une pièce de cinq francs et plus. Le tissu hépatique qui les entoure fait ressortir par sa teinte foncée leur blancheur. Elles ne font pas une saillie apparente; cependant le doigt glissant sur le foie sent un léger soulèvement à leur niveau. Parfois, quand elles sont petites, elles constituent des granulations, et, cette apparence est telle, dans certains cas, qu’on peut appeler le foie qui les portent foie granuleux infectieux. Elles se distinguent cependant des granulations cirrhotiques, par leur pâleur jaunâtre, leur mollesse et 470 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : leurs dimensions toujours plus considérables. Elles sont d’ailleurs rares - dans l'hépatite infectieuse aiguë. Les ilôts blancs, si le foie se congestionnant donne la sensation d’œdème, peuvent paraitre déprimés. Sur les coupes du tissu hépatique, l'apparence de ces taches est la même qu'à la surface. Je dirai d’une façon générale que les lésions du foie infectieux pré- sentent leur maximum au niveau des taches blanches. A l'examen microscopique on note une dilatation des capillaires infil- trés de leucocytes; cette infiltration ne s’observe pas seulement à l’inté- rieur du lobule, mais aussi dans les espaces inter-lobulaires, surtout autour des veines portes et des canaux biliaires. Des microbes, variables selon les cas, sont interposés en plus ou moins grand nombre aux élé- ments cellulaires. Par places, la travée est disloquée et les jeunes cellules entourent complètement des blocs de plusieurs cellules altérées. Sur les taches blanches, toutes les cellules hépatiques sont plus ou moins modifiées dans leur constitution et présentent des altérations di- verses. Sur les unes, tuméfaction protoplasmique avec multiplication des noyaux; sur d’autres, dégénérescence granulo-graisseuse, pigmentaire, hyaline ou vitreuse. Un certain nombre de ces cellules ainsi dégénérées sont manifeste- ment atrophiées. Sur les taches blanches du foie cholérique, on observe cette altération cellulaire que nous avons décrite, le D' Gilbert et moi, sous le nom de tuméfaction transparente. Sur certaines coupes, on remarque dans le tissu qui entoure les taches blanches une formation abondante de néo-canalicules biliaires. En pas- sant, je signale l'importance de la néo-formation canaliculaire dans le processus anatomique du foie infectieux. En un mot, à l’intérieur des lobules qui constituent la tache blanche: dilatation des capillaires avec infiltration leucocytique et microbienne; dislocation plus ou moins accusée de la travée hépatique; altérations cellulaires, les unes irritatives, les autres dégénératives. De plus, au voisinage des groupes de cellules en processus irritatif, les cellules endothéliales des capillaires offrent parfois des figures karyo- kinétiques très nettes. Tout ce complexus histologique témoigne du double travail de des- truction et de réparation qui se fait dans les éléments anatomiques sou- mis à l’action des microbes pathogènes. Les SÉANCE DU 6 MAI 47 MODE D'EMPLO1 DU GRISOUMÈTRE DANS LE DOSAGE DE MÉLANGES RENFERMANT UN CENTIÈME DE GAZ COMBUSTIBLE, par M. N. GRÉHANT (1). Le grisoumètre de M. Coquillion que M. Haton de la Goupillière, membre de l’Institut, Directeur de l’école des Mines, a eu l'obligeance de me faire connaître il y a plus d’un an, est un instrument très sensible et très exact qui m'a permis de réaliser un certain nombre de recherches que je n'avais pas pu faire jusqu'ici. J'ai reconnu la nécessité de faire toules les mesures de volumes de gaz dans le grisoumètre complètement immergé dans un bocal rempli d'eau, qui est constamment renouvelée et dans laquelle flotte un thermomètre soutenu par un flotteur de liège; la température de l’eau doit rester inva- riable; en effet, l'instrument dont je me sers et que j’aifait construire par M. Chabaud est un véritable thermomètre à air; le volume de l’ampoule de verre est de 33 centimètres cubes et les 86 divisions du long tube de verre ont un volume total de 6 c. c.3, ce qui fait pour chaque division 0 c. c. 07575 ; il en résulte que le rapport du volume d’une division au volume de la partie graduée est égal à 1/519; désignons par v le volume de l’ampoule et immergeons le grisoumètre plein d'air dans l’eau dont la température est 15°,1, nous lisons par exemple v + 30,5; faisons circuler de l’eau un peu plus froide autour de l'instrument et attendons cinq mi- nutes, le volume de l'air se réduit à v + 27,9, la température de l’eau étant 14 degrés: il y a donc uné réduction de 2,6 divisions lorsque la température s’abaïisse de 1°,1 ce qui ferait 2,4 pour un changement de température de 1 degré. - : Il résulte de là qu'il est absctument nécessaire de faire toutes les lectures de volumes un milieu conservant rigoureusement la même température. Le fil de platine dans mon instrument traverse l'ampoule et se termine par deux tubes de verre pleins de mercure soudés aux parois opposées du verre ; l'expérience a montré que pour obtenir la combustion complète d'un gaz mélangé avec l'air, il faut faire rougir le fil de platine un grand nombre de fois, jusqu’à 300 fois, ce que j'obtiens soit par un interrupteur à main, soit mieux par un cylindre d'ébonite mis en mouvement par un moteur quelconque; le cylindre porte cinq cereles de laiton et cinq dents convenablement placées pour que des ressorts métalliques permettent de produire à chaque tour cinq fois le passage d'un courant de 12 ampères et cinq fois l'interruption de ce courant. (4) Travail du laboratoire de physiologie générale du Muséum d'histoire naturelle. F-74 1% Ex 412: SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ces alternatives d'échauffement et de refroidissement sont favorables au mouvement des molécules gazeuses qui doivent toutes venir rencontrer le platine rougi. J'ai fait souder au grisoumètre deux robinets de verre, l’un à la partie supérieure de l’ampoule, l’autre à la parlie inférieure da long tube gra- dué; le robinet supérieur doit garder parfaitement; il faut le graisser souvent et comme il est transparent, si la moindre bulle du gaz comprimé par l'échauffement s’échappait par le robinet, on s’en apercevrait et l'analyse serait manquée; je ferme en outre le tube qui surmonte le robinet après l’avoir-rempli d’eau avec un tube de Sonate et une baguette de verre plein. Analyse d’un mélange renfermant À centième de formène. Dans une cloche graduée à robinet retournée sur l’eau, on introduit 990 centimètres cubes d’air et 10 c. c.i de formène renfermant exacte- ment 10 centimètres cubes de gaz pur; on agiteet on obtient un mélange homogène à 4 p. 100; pour faire passer une partie de. ce gaz dans le gri- . soumètre plein d’eau, j'emploie un tube de caoutchouc qui est d'abord. rempli du mélange et qui réunit le sommet de la cloche au robinet du grisoumètre; il est bon de soulever toujours l'instrument de la même quantité de manière par exemple à ce que la division 40 affleure le niveau de l’eau qui se déverse constamment à la partie supérieure du bocal. On opérera ainsi toujours à peu près sur le même volume de gaz qui, mesuré après immersion, est égal à : Ù + 22.1. On fait rougir le fil : AOOSTOIS LES AR ER Rene REA 100 fois nd doi ra HE 100 fois RS Re ELLES a —— RÉdUELION FAMNMENMARE ER METES Ainsi 4 centième de formène dans l’air donne dans mon grisoumètre une réduction de 7.3 divisions; { millième aurait donné 0.7, ce qu’il est encore très facile d'apprécier. Analyse d'un mélange renfermant À centième d'hydrogène pur. J'ai opéré exactement de lamême manière avec l'hydrogène pur et j'ai obtenu : ù + 25.1 200. FOIS AE NO NE EE DE A0D CIS SES Cr RER Fil rougi : RÉCUC FO NAPPES 5.5 SÉANCE DU 6 MAI 413 Pour | centième d'hydrogène, la réduction est 5. 5; elle serait égale à 0 55 ou une démi-division pour 1 FEES Analyse d'un mélange renfermant 1 centième d'oxyde de carbone. En opérant sur un pareil mélange, j'ai obtenu une réduction égale à 1.8, ce qui ferait, pour 1 millième 0.18 ou presque 2 dixièmes de division, diminution de volume qui est encore appréciable à la lecture. Conclusion. — Les nombres 7.3, 5.5, 1.8 so:l entre eux dans les rap- ports déterminés par les lois de la combustion des différents gaz : en effet, un volume de formène absorbe deux volumes d'oxygène et donne un volume d'acide carbonique; un volume d'hydrogène absorbe un demi- volume d'oxygène et se transforme en eau, la réduction est égale à 1.5; un volume d'oxyde de carbone absorbe un demi-volume d'oxygène et donne un volume d'acide carbonique, la réduction est égale à 0.5. Dans le grisoumètre tel que je l’emploie, l'acide carbonique n’est point absorbé, le volume des gaz demeurant à peu près fixe dans l'instrument, et la surface de l’eau qui est fort petile étant éloignée de ampoule. Les nombres trouvés par l'expérience, 7.3, 5.5, 1.8, sont entre eux comme 2, 1.5 el 0.5. L'accord entre la théorie et la pratique est parfait. Dans une prochaine communication, j'anrai l'honneur dé présenter à la Société de Biologie les résultats que j'ai obtenus en utilisant le grisou- mètre pour résoudre plusieurs problèmes de physiologie. SUR UN. TYPE NOUVEAU ET ABERRANT DE LA FAMILLE DES SABELLIDES (Caobangia Billeti), par M. ALFRED GraRDb. En poursuivant les études sur les Trématodes du Tonkin dont nous avons déjà entretenu la Société (1), M. le D' Billet a été conduit à recher- cher les états larvaires de ces parasites dans les Mollusques d’eau douce. En examinant à cet effet une grande Melania vivipare commune aux environs de Caobang, il a observé que la coquille de ce Gastéropode est souvent criblée de trous habités par une curieuse Annelide dont il m’a donné une description sommaire. L'existence d’un panache de tentacules disposés en fer à cheval me fit supposer aussitôt qu'il s'agissait d’une Sabellide d’eau douce, et comme la seule espèce de ce groupe décrite jus- (1) Giard et Billet. Sur quelques Trématodes du bœuf du Tonkin. C. R. de la Société de Biologie. 2 juillet 1892. 474 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE qu'à présent, Manayunkia speciosa Leidy, originaire de l'Amérique du Nord, est encore imparfaitement connue, je priai M. Billet de m'adresser un certain nombre de Melania infestées (1). Les observations que j'ai pu faire ainsi, jointes aux renseignements que M. Billet a pris sur le vif, me permettent de signaler dès aujourd’hui aux zoologistes un type nouveau d'Annelides présentant, au point de vue morphologique, un intérêt considérable. Tout en se rapprochant, comme je l'avais supposé, de Manayunkia, la Sabellide du Tonkin en diffère par des caractères assez importants pour constituer un genre et même sans doute une famille distincte. Je l’appel- lerai Caobangia Billeti. Tandis que Manayunkia habite des tubes libres, agrégés, fixés aux corps submergés, C'aobangia creuse son habitation dans les parties les plus épaisses de la coquille de Melania. Le tube, long de 5 à 6 millimètres, a la forme d’une larme ou d’une fiole rétrécie en goulot à son extrémité libre. Cette forme élargie postérieurement tient à ce que l’animal n'est pas placé en ligne droite dans son habitation comme les autres Sabelles libres ou perforantes. Le canal digestif est recourbé du côté ventral, de sorte que l’anus vient s'ouvrir à quelque distance de la bouche vers la partie rétrécie ou goulot de la bouteille. Parfois plusieurs tubes débou- chent sur la même ligne d’accroissement de la coquille, l'extrémité aveugle étant toujours dirigée vers le sommet. C’est dans le voisinage de ce der- nier et dans l’intérieur de la columelle que les perforations sont surtout abondantes. Les lophophores sont soutenus par un squelette cartilagineux hyalin et portent d'élégants tentacules ciliés renfermant chacun un vaisseau sanguin. Le sang est vert comme chez Manayunkia. Les tentacules sont au nombre de 24 à 32, quelquefois plus. Le corps est transparent : on ne peut distinguer, comme chez les autres Sabelliens, une région thoracique et une région abdominale. Je n’ai pu non plus trouver trace de dissepi- ments et le tube digestif ne présente pas, au moins chez l'animal adulte, les renflements successifs qu'on observe chez la plupart des Sabelles et même chez Manayunkia. On trouve seulement un renflement stomacal situé dans la partie élargie vers le point où le tube digestif se recourbe sur lui-même. Les segments sont indiqués extérieurement par des faisceaux de soies. Sur les sept ou huit premiers anneaux, les soies sont uniquement dorsales eton ne trouve rien (exceplé peut-être sur le premier sétigère) qui rappelle les crochets ventraux à long manubrium si caractéristiques des Sabelles (1) Envoyé en colonne expéditionnaire et appelé à prendre part au combat de Dong-da où il a été mis à l’ordre du jour pour sa brillante conduite, le Dr Billet n’a pu m'expédier que tout récemment les mollusques que je lui demandais. Je les ai recus le 25 avril. SÉANCE DU 6 MAI 475 et de Manayunkia. Les quatre premiers faisceaux sont très rapprochés les uns des autres et situés sur le col étroit de l’animal; les cinquième, sixième, septième et huitième vont en s’espaçant de plus en plus. A partir du huitième ou neuvième segment, c’est-à-dire vers le tiers postérieur du tube, apparaissent les crochets aviculaires qui existent sur trois segments (exceptionnellement sur quatre). Ces crochets sont dorsaux en raison de l'inversion ordinaire des soies dans cette région du corps des Sabelles. Ils sont accompagnés de soies ventrales peu nombreuses, capillaires, à Jimbe très étroit. Les segments porteurs de crochets aviculaires sont terminaux chez Manayunkia et chez Fabricia (le genre marin le plus voisin). Chez Caobangia, au contraire, ils sont suivis d’une série de segments courts dont l'existence se manifeste exclusivement par des faisceaux de soies ventrales en très petit nombre dans chaque faisceau. J'ai compté une dizaine de segments présentant des soies à limbe symétrique et mucro- nées, puis sept ou huit segments portant des soies limbées asymétrique- ment : ces deux sortes de soies sont analogues à celles qu'on rencontre souvent associées sur les mêmes anneaux dans la région thoracique des Sabellides ordinaires. L'armature du premier sétigère mérite d'attirer particulièrement notre attention. On y trouve, du côté dorsal, un faisceau de six à sept soies capil- laires minces et, immédiatement au-dessous, cinq grosses soies (accompa- gnées d’une ou deux soies de remplacement) peut-être homologues des cro- chets à long manubrium des Sabellides normales. Cependant, ilimporte de remarquer que justement ces crochets manquent ordinairement chez les Sabelles au premier sétigère et ne se montrent qu'à partir du second. D'ailleurs, la forme de ces soïes chez Caobangia est tout à fait extraor- dinaire et je ne puis les comparer qu'aux soies en palmes si étonnantes de Psammorycies barbatus Grube (Sænuris umbellifera Kessler). Ce rap- prochement avec une Oligochæte n’est pas un des traits les moins singu- liers de l’organisation de Caobangia. Les faisceaux des segments suivants jusqu’au huitième ou neuvième présentent uniquement des soies capil- laires étroitement limbées, les unes droites, les autres coudées comme chez beaucoup de Sabellides. A partir du quatrième segment, quelques- unes de ces soies sont à double courbure. Les crochets aviculaires des anneaux 9, 10 et 41 sont bien plus nom- breux que chez Manayunkia, où il en n’existe que 15 ou 16 par tore uncini- gère. On en compte une centaine et même plus de chaque côté sur le premier segment uncinigère. Leur nombre décroitsur les anneaux suivants, Ces crochets sont plus courts que ceux de Manayunkia et d’une forme assez différente. Ils sont supportés par de fines soies de soutènement. A la partie ventrale des quatre premiers segments, cn observe une large tache pigmentaire d’un noir violacé, due à des cellules glandulaires analogues à celles qui constituent les boucliers ventraux des Sabelliens 16. 476: SOCIÉTÉ. DE’ BIOEOGIE typiques : ces cellules existent en moins grande quantité sur les anneaux: suivants ; on les retrouve sous forme de deux lignes parallèles à la partie courbée de l'animal vers le fond du tube. Le système vasculaire forme un manchon qui entoure l'intestin et: envoie des rameaux aux tentacules et aux organes génitaux. Je n'ai pu distinguer les testicules ; cependant, comme tous les exemplaires que j’ai étudiés portaient des œufs je suis convaincu que Caobangia est herma- prodite comme Manayunkia, Amphiglena et nombre d’autres Sabelliens. L'ovaire est situé dans l’anse de l'intestin. Le D' Billet a observé fré-. quemment plusieurs larves ciliées déjà très développées se mouvant aans le tube; il-existe done une ‘cavité incubatrice, et j’incline à penser, sans pouvoir le démontrer d'une façon suffisante, que cette cavité est formée par l’homologue exagéré de la rima ventralis des Euchone. Les larves sontciliées surtout-sur Les deux extrémités ; les plus avan- cées présentent sept ou huit anneaux et un tube digestif droit, nettement métamérisé.- Le prostomium porte deux yeux pourvus de cristallins. Ces: larves ressemblent beaucoup à celles de Manayunkia figurées par Leidy. Les yeux disparaissent chez l'adulte, tandis qu'ils persistent chez Manayunhia. | Les vieilles galeries de Caobangia sont souvent occupées par un Z'ubifex de petite taille (1 centimètre au plus) que je désignerai provisoirement : sous le nom de 7ubifex contrarius. Gontrairement à ce qui a lieu pour notre vulgaire :7ubifex rivulorum, les soies dorsales à crochets associées aux soies capillaires sur les quinze premiers anneaux sont obscurément bidentées à dents très courtes ; les soies ventrales sont neltement biden- tées etelles offrent parfois l'aspect pectiné (dû à la déchirure de la mem- brane qui unit les dents) dans la partie postérieure du corps principale- ment. A l’état vivant, les coquilles de Melaniu attaquées par Caobangia ont une teinte verdâtre due à une belle Cyanophycée (Lyngbya sp.) dont on retrouve les touffes épaisses décolorées au voisinage des ouvertures de la Sabellide sur les exemplaires conservés dans l'alcool. En raison de la rareté des Polychætes d'eau douce et de j'intérêt excep- tionnel que présentent ces Annélides, je ne saurais trop engager les voyageurs à rechercher les formes voisines de Caobangia qui pourraient habiter les coquilles thalassoïdes des pays tropicauxs et en particulier celles de la faune si riche du Tanganika. om SSBANCE DU 6 ET AT ToxICITÉ COMPARÉE DU SANG ET DU VENIN DE CRAPAUD COMMUN CONSIDÉRÉE AU POINT DE VUE DE LA sécrélion interne DES GLANDES EUTANÉES DE CET ANIMAL, ; ; a CRIE | a par MM. Pnisauix et BEnrRAND. La résistance considérable que les Eatraciens et en général les animaux à glandes venimeuses opposent à l’empoisonnement par leur propre venin a été allribuée à l’accoutumance par suite d'une résorplion par le: sang d’une partie des produits glandulaires. Aussi la destruction des. glandes spécifiques comme l'a réalisée M. Brown-Séquard chez le serpent à sonnettes a-t-elle pour effet d'abolir Pimmunité de cet animal pour son propre venin. Cependant, la démonstration directe de la sécrélion interne, c’est-à-dire la constalation de la pénétration dans le sang des produits venimeux de la glande n’a pas encore élé donnée. C'est dans le but d'éclairer cette question que nous avons entrepr is les présentes recherches sur le crapaud. Le poison des glandes cutanées de cet animal a une action physiolo- gique si bien déterminée qu’on pouvail espérer le mellre en évidence dans le sang et le distinguer nettement de tous les autres principes ordinaires de ce liquide. Le sang de crapaud est toxique. Les petits mammifères tels que les co- bayes ne résistent pas à l’inoculation sous-cutanée ou péritontale de sang de crapaud, mais comme ilen faut des quantités assez grandes pour amener. des accidents rapides (5 centimètres cubes), c'est la grenouille surtout qui a servi à nos expériences. La dose nécessaire pour provoquer l’empoi- sonnement chez la grenouille est de 1 centimètre cube environ, mais il est évident que celte quantité varie un peu suivant ie poids et la vigueur de l’animal. Nous avons toujours employé du sang frais extrait du cœur. Les résultats ont été les mêmes avec le sang entier ou avec le sérum légè- rement teinté en rose. Expérience. — On injecte dans la peau du dos d'une grenouille très vigou- reuse 2 centimètres cubes de sang de crapaud. Quelques minutes après li in) ec- tion, les mouvements s’affaiblissent, le saut devient pénible ; au bout d’un quart d'heure, les membres postérieurs sont paralysés, l'animal mis sur le dos a beau- coup de peine à se retourner malgré les efforts du train antérieur. La respira- tion, quoique affaiblie et intermittente persiste. La pupille est rétrécie. La sensibilité est conservée. Dès le début, les mouvements du cœur, d'abord considé- rablement ralentis, ne tardent pas à s'arréter tout à fait. Le ventricule reste contracté et pâle, les oreillettes dilatées, flasques. D'après nos expériences, le venin agit de la mê ne manière quele sang: il produit des résultats identiques : paralysie du train postérieur, ralen- tissement et arrêt du cœur, rétrécissement de la pupille. 478 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cet arrêt du cœur, avec paralysie des membres postérieurs, alors que la respiration reste intacte, est la caractéristique physiologique du venin de crapaud à peu près telle que Vulpian l'avait établie et permet d'affirmer sa présence dans le sang de cet animal. En raison de cette identité phy- siologique nous nous sommes demandé si les principes actifs ne se trou- veraient pas sous la même forme dans le sang et dans le venin. Pour extraire du sang les matières aclives, on a opéré de la facon suivante : 50 centimètres cubes de sang extrait du cœur de 150 crapauds ont été addi- tionnés peu à peu de 3 à 4 volumes d’alcool à 95 degrés. Après 24 heures, on filtre. Le résidu est pressé et broyé avec de l'alcool à 95 degrés, à plusieurs reprises en filtrant chaque fois. On a ainsi obtenu 300 centimètres cubes de solution alcoolique, qui ont été évaporés dans le vide pour en chasser l'alcool; le résidu a été ramené par addition d’eau à 50 centimètres cubes, volume primitif du sang. Le venin a été traité de la même manière et les solutions ainsi obte- nues étudiées parallèlement sur la grenouille. Ces solutions qui repré- sentent la totalité des principes actifs ont donné des résultats physiolo- giques identiques : arrêt du cœur, paralysie des membres postérieurs, rétrécissement de la pupille. D'après ces résultats, on pouvait supposer que les principes actifs du sang et du venin étaient de même nature chimique. En réalité, il n’en est pas absolument ainsi : En effet, les deux extraits alcooliques dont nous venons de parler ont été agités successivement avec de l’éther et du chloroforme avec ou sans addition d'ammoniaque. Dans ces conditions, l'extrait préparé avec le sang n'a cédé aucune substance toxique aux dissolvants employés, tandis que celui provenant du venin leur a abandonné des produits nettement alcaloïdiques. Ces produits à réaction alcaline et dont la solution chlorhydrique précipite par l’iodure de mercure et de potassium, l'acide picrique, le chlorure de platine, etc., ont une action physiologique ue différant en rien de celle obtenue avec l'extrait alcoo- lique du sang. Cette identité physiologique des principes toxiques, malgré la dis- semblance chimique qui les sépare peut s'expliquer en supposant qu'un même noyau soit associé dans les deux humeurs à des fonctions chimi- ques différentes, ne modifiant pas son action physiologique, mais suffi- santes pour en empêcher la séparation par une même méthode chimique. Quoi qu'il en soit, la présence de principes actifs du venin dans le sang explique suffisamment l'immunilé relative du crapaud pour son propre venin. Nous basant sur la facilité avec laquelle on peut faire absorber par le réseau capillaire des glandes le venin qu'elle contiennent et sur les résultats physiologiques précédents, nous arrivons à cette conclusion, que les glandes venimeuses, indépendamment de leur sécrétion externe, four- nissent au sang une partie des éléments qu'elles élaborent et apportent SÉANCE DU 6 MAI 419 ainsi dans ce liquide des modifications et des qualités particulières qui jouent sans doute un rôle considérable dans la biologie de l'espèce. L'ODEUR DANS LA SÉRIE GRASSE, par M. JaAcQuESs Passy. J'ai publié antérieurement (1) les minimums perceptibles d’un certain nombre d’alcools de la série grasse. J'avais noté pour les premiers termes un accroissement graduel du pouvoir odorant, et j'avais émis l’idée que cet accroissement se continuait vraisemblablement au delà des termes examinés. L'expérience n’a pas confirmé cette supposition, En complé- tant, comme je l’ai fait depuis, mon tableau par l'examen de lermes plus élevés, ainsi que par l'étude des aldéhydes et acides correspon- dants, on s'aperçoit qu'avec le 5° terme le pouvoir odorant recom- mence à décroitre et qu’il présente pour l’ensemble des variations périu= diques. Je me borne à publier aujourd'hui le tableau relatif aux acides gras normaux ; il comprend les 44 premiers termes, moins le 14e et le 43° qui me manquent encore. Les alcools et les aldéhydes donnent des résultats parallèles. Acides gras normaux. Minimum perceptible. Millionnième de gramme. 1. Acide formique. 25 à 50 2. — acétique. 5 à 10 3. — propionique. 0,05 4, — butyrique. 0,001 5. — valérique. 0,01 6. — caproïque. 0,04 7. — œnanthylique. 0,3 8 — caprylique. 0,05 9. — pélargonique. 0,0? 10. — caprique. 0,05 11. : 142. — laurique. 0,01 13. 14 — myristique. inodore. etc. FNCUCS efc. Les pouvoirs odorants de ces acides sont donc comme : 1, 5, 500, 250,000, 25,000, 600, 80, 500, 1000, 500 ….. 250... (1) Société de Biologie, 21 mai 1892. 0 :480 SOCIÉTÉ :DE: BIOLOGIE Ces chiffres se-décomposent nettement en trois séries : Première. : Gomprend des termes de 1 à 7; le pouvoir odorant croit jusqu’au 4° terme, puis diminue. Deuxième : Est analogue. à la première; il y accroissement jusqu'au 3° terme, puis décroissance. Troisième : Comprend le 14° terme et les suivants; elle est inodore. On remarquera qüe les éèarts entre certains lermes, par exemple du 8° au 9° et au 10°, sont de l’ordre des erreurs d'expérience; cependant l'écart ayant été constamment de même sens, on peut en admettre la réalité. On remarquera ainsi que les varialions sont beaucoup moins ‘considérables dans la seconde période que dans la première ; d’ailleurs Pexamen des 11° et 13° termes viendra peut-être infirmer dans une cer- taine mesure la régularité de la progression; ainsi je me garde bien ‘de “lui attribuer une régularité mathémalique qui n’est pas dans Îles faits; néanmoins à regarder l’ensemble, le sens du phénomène est très net. Reste une question fort intéressante : Pourquoi l'odeur disparait-elle dans la 3° série? question qui se raltache à celle-ci, plus générale: Pour- quoi certains corps sont-ils odorants et d’autres inodores ? Écartons d'abord la considération de volatilité; tous ceux qui ont abordé ce genre de recherches savent qu'il n'y a pas de corrélation “entre l'odeur et la volatilité, et que les corps non volatils sont spot les plus odorants. L’explication doit être cherchée ailleurs. Nous avons ici sous les yeux une série assez complète, dans laquelle l'odeur, après des oscillations régulières, disparaît complètement. Sans chercher à établir une théorie générale qui serait prématurée,il me paraît possible d'en donner une explication. J'ai distingué dans l'odeur, deux propriétés, deux modes d'action bien distinets sur la sensibilité: l'intensité et la puissance. Pour qu’une odeur soit perçue, il faut : 1° qu'il y ait assez de substance ; 2 que l’odeur scit assez forte. Or à mesure qu'on s'élève dans la série, l'intensité va en diminuant; les derniers termés n'ont plus qu'une odeur très faible, et les 9 ct 10e termes, par exemple, sont facile- ment masqués — même à dose forte — par une faible dose d'acide buty- rique ou caproïque. J'en conclu qu'à mesure que nous nous élevons dans cette série, l'odeur se rapproche peu à peu de notre limite de perceptibilité, et qu'avec le 14° terme, elle atteint cette limite. Elle disparaît comme la sensation lumineuse disparaît dans l’ultra-violet et dans l’infra-rouge, comme le son cesse d’être perceptible au-dessus et-au-dessous d'un certain nombre de vibrations. Je remarque à ce propos, que l'on pourrait probablement rencontrer des séries organiques dans lesquelles ce seraiént les premiers termes qui seraient inodores; l’alcool méthylique, par exemple, est bien voisin de cette limite, car: lorsque absolument pur, il n’est plus à DO PDesens parler odorant, et n'exerce plus sur la muqueuse olfactive qu une sorte d’irritation, d’excitation non spécifique. 2: :SÉANGE ‘DU :0 MAT: ‘481 En résumé, je ne pense pas que le: phénomène odeur. cesse à:partir du A4° Lerme; il me paraît assez vraisemblable que. les ‘acides gras au delà du: 14° sont simplement inodores pour nous et peut-être neile seraient-ils -pas pour un appareil olfactif différent, celui du-chien, par. ous L'ex- périence est malheureusement difficile à instituer. } > INULOSE ET FERMENTATION ALCOOLIQUE INDIRECTE DES INULINE, Par M. Ex. Her - a ess one de danté de la famille des Cousposdeat nolamment dans les dahlias, les artichauts, les topinambours, l’aunée, le chamæ- Jéon blane (Atractylis qummifera L.), Phydrate de carbone de réserve est de l’inuline, et non de l’amidon. L'inuline se rencontre dans les divers organes de ces: eo mais Pie Ai 00e dans . racines et les tubercules. : DAS RO Au point de vue noie E id et l diffèrent en Ce sens que, sous l'influence des agents hydratants (acides minéraux étendus), le pre: mier donne naissance à du dextrose, tandis que l'inuline fournit du lévu- Jose ; mais, au point de vue physiologique, on peut dire qu’ils remplissent Je même rôle: en effet, au moment de la germination des organes qui les contiennent, ces deux principes se transforment en leur sucre do c'est-à-dire en des sucres assimilables. Fi: On sait depuis longtemps que la saccharification dé atidis est déter: minée par un ferment soluble, la diastase (amylase), qui apparaît à l'é- poque convenable; mais l'agent de la saccharification de l’inuline était resté inconnu jusque dans ces derniers temps, et ce n’est qu'en 1888 qu'un botaniste anglais, J. R. Green, a réussi à l’extraire de quelques-unes des plantes désignées ci-dessus (1): Cet agent est aussi un ferment soluble auquel le savant qui l'a découvert-a donné le nom d’inulase. . En 1885, j'avais observé que lorsqu'on ensemence des spores d'A sper- güllus niger dans un liquide nutritif dont l’hydrate de carbone est l’inuline, ces spores germent rapidement et donnent une récolte aussi abondante que quand l'hydrate de carbone est du glucose ou du sucre de canne (2). J'en avais conclu, sans toutefois pousser plus loin mes investigations sur ce point, que très probablement l’Aspergillus produit un ferment soluble capable de saccharifier l'inuline. > (1) Annals of Botany, vol. I, 1888. (2) Recherches sur: les propriétés physiologiques du HE Journ. de l’Anatomie et ce la io p. 193, 1886. U% : 482 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 0 Récemment, à propos de mes recherches sur la tréhalase, je suis revenu sur ce sujet. Ainsi que je l'avais pensé, l’Aspergillus renferme de l’inulase que l’on peut obtenir, mélangée toutefois à d’autres ferments solubles, en suivant le procédé que j'ai indiqué dans une précédente communica- tion (4). Ce ferment, pouvant être porté en solution aqueuse à 64 degrés sans rien perdre de son activité, diffère par conséquent de la tréhalase qui est détruite à cette température. Il diffère également de l’invertine et de l’a- mylase, car ces deux derniers ferments n’exercent pas d'action sur l’inu- line (2). Il est donc très probable qu’il constitue un ferment spécifique. Son action sur l’inuline se poursuit très régulièrement, mais pour l'étu- dier il est indispensable de prendre quelques précautions. L'inuline n’est soluble que dans l’eau chaude et elle se dépose peu à peu par refroidissement. Il convient donc de n’opérer que sur des solu- tions peu concentrées et de ne pas attendre le refroidissement complet avant d'ajouter le ferment, sans quoi l’hydrate de carbone se précipite, et l’action de l'inulase est notablement ralentie. On réussit très bien en ajoutant un volume de solution aqueuse d'inu- lase à deux volumes de solution d’inuline à 2 p. 400 au moment où la température de cette dernière solution est encore comprise entre 45 et 50 degrés. Dans ces conditions, et en opérant sur de l’inuline de lAtractylis gum- mifera (3), je n'ai pas observé de précipitation même après refroidisse- ment à la température du laboratoire (18°), température à laquelle le mélange a été abandonné durant la suite de l’expérience. La solution d'inuline primitive déviait la lumière polarisée à gauche de 4°,30”; par conséquent le mélange, dans lequel cette solution se trouvait addilionnée de la moitié de son volume d’un liquide inactif, devait dévier à gauche de 4 degré. L'action de l’inulase se manifeste par une augmentation con- tinue de la déviation gauche. Au bout de 36 heures, celle-ci était de 2°,12”. Elle est restée ensuite stalionnaire. Il est facile de voir par le calcul, en tenant compte de l’influence de la température sur le pouvoir rotatoire du lévulose, que cette dernière dévia- tion correspond, à un dixième près environ, à la transformation de l'inu- line en lévulose. Peut-être doit-on rapporter cette différence à ce fait qui a été tout récemment avancé par M. Tanret que l'inuline, contrairement à ce qu’on a admis jusqu'ici, donne, sous l'influence des agents hyura- tants, une petite quantité de glucose. C'est un côté de la question que je (4) Comptes rendus des séances de la Soc. de Biologie, p. 426, 1893. (2) Em. Bourquelot. La digestion chez les Céphalopodes. Thèse, Paris, 1885. . 46. (3) L'inuline sur laquelle ont porté mes expériences PHOCUSN 2e. la gone tion de M. le professeur Jungfleisch. SÉANCE DU 6 MAI 483 n'ai pas examiné, n’ayant eu en vue que l'étude de l'allure générale du phénomène. Je n’ai pas non plus recherché si, durant l'action de l'inu- lase, il se forme des dérivés de l’inuline analogues aux dextrines. Mais il y avait un point qui méritait d'allirer l’attention. On sait que l’inuline n’éprouve pas la fermentation alcoolique au contact de la levure de bière. Le lévulose étant au contraire un sucre éminemment fermen- tescible; en ajoutant à une solution d'inuline à la fois de l’inulase et de la levure, on devait provoquer une fermentation alcoolique. C’est en effet ce qui a lieu. J'ai obtenu ainsi une fermentation très active avec de la levure basse. On conçoit enfin que si, dans un liquide nutritif renfermant de l’inuline, on ensemence à la fois des spores d’Aspergillus et de la levüre, on cons- tituera ainsi une sorte d'association d'organismes dans laquelle la levure pourra déterminer, grâce à la présence de l'Aspergillus, la fermentation d’une partie de l’inuline. : Peut-être trouvera-t-on là une idée qui conduira à tirer un meilleur parti des tubercules du topinambour. Dans tous les cas, au lieu de se servir d'acide sulfurique étendu pour transformer l'inuline en sucre fermentescible, il est évident qu’on pourra employer des cultures d'Asper- gillus de la même façon qu’on emploie l’orge germé pour saccharifier l’amidon, d'autant mieux qu’en portant ces cultures à 64 degrés on les détruit sans nuire à l'inulase qu’elles renferment. SUR LA PERMÉABILITÉ DES FILTRES EN TERRE POREUSE A L'ÉGARD DES BACTÉRIES ? par MM. BoURQUELOT et GALIPPE. En février 1885, nous avons fait connaître à la Société de Biologie des expériences décisives montrant la perméabilité des filtres en terre poreuse à l'égard de différents parasites (4). Cette communication, faite à une époque où la perfection de ces filtres passait pour indiscutable, fut accueillie avec une certaine réserve. Depuis, nos recherches ont été plei- nement confirmées par différents expérimentateurs. Ceux-ci, pour nous punir sans doute d’avoir eu raison avant l'heure, passent sous silence les travaux que nous venons de rappeler. Nous avons cru devoir protester contre cette omission. (1) C. R. de la Société de Biologie, 8° série, t. II, p. 3, 1885. 484. SOGHÈTÉ DE! BIOLOGIE © DÉGANTEUR À FORGE CENTRIFUGE. Note.de M. GUDENDAG (de Paris), présentée par M.le D: Caprran. La centrifugation constitue un procédé très commode pour séparer rapidement les éléments solides en suspension dans un liquide quelconque: En clinique et en physiologie, ce procédé permet par exemple de doser en quelques minutes ja crème du lait, deséparer dans le sang les globules: 7/22 nl PAMEWARER du sérum, en même temps qu’on en obtient la fibrine, enfin, d’isoler tous les éléments figurés tenus en suspension dans une urine,dans de la salive, ou encore de recueillir rapidement la plus grande partie des microbes disséminés dans un liquide quelconque etc. Les applications de ce procédé à la clinique et à la physiologie sont: donc aussi nombreuses et aussi intéressantes que celles qu’on peut utili- ser en physique et en chimie. Malheureusement tous les appareils centrifugeurs proposés jusqu'ici sont beaucoup trop volumineux, trop compliqués, nécessitent une force motrice mécanique, ou comportent une série d’engrenages qui en rendent l'emploi peu commode. Le professeur Gaerlner, de Vienne, a eu l’idée de l’appareil que nous SÉANCE DU 6 MAI 485 à présentons aujourd’hui. Mais le nôtre se différencie du sien par une série de perfectionnements qui l'ont simplifié et amélioré. Citons entre autres la rotation de l'extrémité inférieure de l'axe dans une cupule à billes d'acier, le mode de fermeture du récipient, etc. L'appareil se compose essentiellement d'une grande boîte ronde, plate, en tôle, recouverte d'un couvercle qui s’y emboîte exactement. Cette boîte est traversée en son centre par un axe en acier maintenu par une arma- ture en fonte et qui permet d'imprimer à la boîte un mouvement de rota- tion rapide au moyen d’une forte corde en boyau qu'on tire brusquement après l’avoir enroulée autour de l'extrémité supérieure de l'axe. . Le simple examen de cette figure nous dispensera de plus amples explications. L'appareil est représenté ouvert, avant l'expérience. On place sur Je plateau inférieur les petits récipients (enveloppés d’un étui pro- tecteur de laine), dans lesquels on à versé les liquides à centrituger. L’orifice du récipient est tourné vers le centre; il est inutile de le bou- cher. Lorsqu'on a ainsi placé des petits tubes ou petits flacons, on abaisse le couvercle que l’on fixe solidement sur la partie inférieure au moyen d'un pas de vis, et on met l'appareil en rotation par le moyen indiqué ci-dessus. Il tourne alors avec une vilesse de 3,000 tours par minute et la rotation dure de 10 à 15 minutes. Suivant les liquides que l'on a à centrifuger, l'opération se fait en une ou deux fois. Mais bien souvent, après une rotation de quelques minutes, on a déjà obtenu un dépôt très appréciable : tel est le cas, par exemple, pour une urine même absolument normale. Ce petit appareil simple, robuste, est d’un maniement facile, il permet de porter ses recherches sur des quantités de liquides même très minimes: ainsi une goutte de sang suffit pour doser la teneur de ce sang en glo- bules rouges et blancs et en fibrine. C’est donc essentiellement un appa- reil d'analyses courantes qui a sa place marquée aussi bien dans les laboratoires de recherches physiologiques, anatomo-pathologiques ou bactériologiques que dans les laboratoires de cliniques où son emploi peut rendre de continuels et très réels services. À tous ces points de vue, il méritait d’être présenté à la Société de Biologie. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarerHEux, directeur, 1, rue Cassette. 487 SÉANCE DU 13 MAI 1893 M. HucounexQ : Composition chimique du liquide de la périostite albumineuse. — M. L. Guinarp : À propos de la technique expérimentale, relative à la détermina- tion du degré de la toxicité des urines. — Note sur la toxicité des urines normales de l’homme et des mammifères domestiques. — M. Cn. Boucuarn : Observations sur l’albuminurie choréique. — M. L.-F. HenneGuy : Sur la fragmentation parthé- pogénésique des ovules des vertébrés pendant l’atrésie des follicules de Graff. — M. A. H. Prier : Destruction expérimentale des cellules hépatiques. — M. le Dr A. Bret : Sur le Distome sinense Cobbold. — MM. CosranriN et SABRAZES : Étude morphologique des Champignons du Favus. — M. le Dr Dspoux : Observation d’ataxie locomotrice guérie par les injections sous-cutanées de suc testiculaire. — M. E. Grey : Sur la polypnée des chiens thyroïdectomisés. — MM. E. GLey et P. Ronprau : De la non-absorption de l’eau par l'estomac. — M. P. Méenx : Effet du liquide testiculaire sur un chien paraplégique et atteint de fibro-sarcome géné- ralisé. — M. Brown-Séouaro : Remarques à l’égard des cas d'ataxie, chez l’homme et chez les chiens, communiqués par M. Depoux et M. Mégnin. — M. A. CHARRIN : Toxines et lésions cellulaires. — M. Mercr: Résistances métalliques pour la mesure des résistances électriques du corps humain et des liquides organiques. Présidence de M. Laveran. COMPOSITION CHIMIQUE DU LIQUIDE DE LA PÉRIOSTITE ALBUMINEUSE, par M. L. HUGOUuNENQ. M. Ollier a décrit ure variété de périostite dans laquelle on observe, entre le périoste et l'os, la formation de collections liquides, constituées par un exsudat transparent ou à peine trouble, légèrement ambré, de consistance visqueuse, comme le blane d'œuf et tenant quelquefois en suspension des gouttelettes huileuses qui proviennent sans doute de Jan moelle osseuse. J'ai eu l’occasion d'analyser ce liquide dont M. Ollier m'avait confié l’examen, voici le résultat de celle analyse. La collection liquide mesurait environ 200 centimètres cubes et consli- tuait une humeur limpide, faiblement colorée en jaune, de consistance visqueuse, d'odeur nulle, de densité 1035 ; réaction alcaline. À chaud, en présence d’acide acétique, l’exsudat se prend en masse et on peut renver- ser le vase sans que la substance s’en échappe. En desséchant le coagu- lum, on obtient une matière transparente, cornée, avant toutes les pro- priétés de l’aibumine sèche, et qui, épuisée par l'alcool bouillant, lui cède une matière que celui-ci abandonne en cristaux incolores que l'hy- pobromite décompose avec dégagement gazeux. Ces cristaux, dissous dans l’eau, donnent une solution que les acides nitrique et oxalique BiocociEe. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 17 488 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE précipilent en une poudre cristalline où l’on recunnaît aisément l’azotate d'urée. Le liquide primitif renferme donc de l’urée. Si, au lieu d'épuiser par l'alcool le coagalum desséché, on le traite par l’éther, on lui enlève une petite quantité de matières grasses. Enfin, le produit obtenu en desséchant l’exsudat déjà épuisé par l’al- cool et l’éther, abandonne à l’eau un peu de matières organiques azotées. Par incinération du résidu, on oblient des cendres où domine le chlorure de sodium, comme le prouve l'analyse quantitative suivante : Eau super state Ra ae ROMA GAS OR DEUPAREEREr Malièrestalbuminoides het Ce OR PR Eee PNEU -— Dréer er RAT QE 0 20 — Matières dites a lubLee dene l oo et graisse, 10 — SELS DLINÉTAUX NU Re NUR ee MNUAR A0 — Ces derniers ce répartissent comme suit : Chlorure de sodium . 4 59 — Chlorure de potassium . À 25 — Phosphate de chaux . 0 53 — Sulfate de soude. 0 48 — Carbonate de soude. . 0 08 — Une ponction pratiquée quelques jours après chez le même malade a donné 86 centimètres cubes de liquide. Densité 1014. Le résidu fixe était de 97 gr. 28 par litre, au lieu de 73 gr. 23 comme précédemment. Les matières albuminoïdes figuraient dans ce résidu pour 88 grammes envi- ron, au lieu de 64 gr. 20 et les sels étaient représentés par 7 gr. 66, au lieu de 7 gr. 10. Leur composition était à peu près la même. Deux faits sont à retenir dans cette analyse, c'est d’abord la faible teneur de ce liquide en phosphate de chaux; elle démontre que, dans ce cas du moins, l'os n'avait aucune part dans la genèse de l’exsudat; car la faible proportion de phosphate trouvé (0 gr. 53 par litre), ne dépasse pas la quantité de ce sel qu’on rencontre habituellement dans les humeurs de l’économie, qui n’ont aucune relation avec le tissu osseux. Peut-être n’en est-il pas toujours ainsi dans la périostite albumineuse, car plusieurs auteurs attribuent à l'exsudat en question une teneur élevée en phosphate de chaux. Il est vrai de dire que cette assertion n’est appuyée sur aucune donnée analytique précise, mais rien n'empêche de comprendre que, dans certains cas, si l'os est intéressé, le liquide de la périostite peut s'enrichir en phosphales calcaires, et tenir en solution ou en suspension une proportion de ce sel, bien supérieure à celle que j'ai trouvée. Peut-être même l’analyse pourrait-elle fournir à la clinique des renseignements utiles sur l'intégrité de l'os. Le second point qu’il convient de mettre en lumière, c’est la nature de la matière albuminoïde qui donne au liquide de la périostite sa consis- SÉANCE DU 13 MAI 489 tance visqueuse. Sa coagulabilité par la chaleur et l'acide acétique la rapproche des sérum-globulines des épanchements pleuraux et périto- néaux : elle s’en éloigne cependant par sa grande solubilité dans l’eau chargée de sels. La matière albuminoïde dont l’albumine de la périostite albumineuse se rapproche le plus par sa viscosité, sa solubilité et ses caractères de coagubilité, c'est encore la synovine ou albumine de la synovie. Il est curieux de voir l’analogie d’aspect, présentée par la synovie et le liquide de la périostite albumineuse, s'accompagner d’analogies chi- miques plus profondes. À PROPOS DE LA TECHNIQUE EXPÉRIMENTALE RELATIVE A LA DÉTERMINATION DU DEGRÉ DE TOXICITÉ DES URINES, par M. L. GuinaRp. Chef des travaux de physiologie à l'École vétérinaire de Lyon. (Travail du laboratoire de M. Arloing.) Sur les conseils de mon maître M. le professeur Arloing, j'ai entrepris une série de recherches relatives à la toxicité des urines normales des mammifères domestiques, afin de compléter le tableau des coefficients urotoxiques. Je n'ai pas à m'attarder sur tout ce qui a été déjà fait sur cette intéressante question, car, tout récemment, une excellente brochure, ‘due à la plume très autorisée de M. Charrin, a donné au monde des biologistes et des médecins l'analyse et la somme de tous les matériaux déjà accumulés. Grâce au livre de M. Charrin, j'ai la conviction que mes notes biblio- graphiques sont très complètes et je peux, sans me tromper, je crois, rappeler qu'actuellement les seules déterminations qui ont été faites portent sur les urines de l’homme, du chien, du lapin et du cobaye. Je me suis occupé plus spécialement des urines du cheval, de l’âne, du bœuf, de la chèvre, du mouton, du porc et du chat. Ayant l'intention d’infuser les urines dans la veine du lapin, avec plus de lenteur qu'on ne l’avait fait jusqu’à présent, j'ai modifié un peu le manuel opératoire de M. le professeur Bouchard. C'est ce qui m'a amené à faire quelques constatalions que je vais rapporter dans cette note, en indiquant, en même temps, le modus operandi auquel je me suis exacte- ment conformé dans tous mes essais. La canule en verre d’une sorte de compte-gouttes en caoutchouc, préa- lablement rempli d’eau, était introduite et fixée à demeure dans la veine jugulaire du lapin, au-dessus du point d’insertion de la faciale. La petite 490 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE opération préliminaire à l'introduction de la canule occasionne fort peu de délabrements el n’a aucune influence sur les résultats de l'expérience; j'ai vu souvent et depuis longtemps M. Arloing employer ce procédé, et nombre de fois je l'ai utilisé moi-même sans jamais avoir d’acei- dents. C'est dans le caoutchouc du petit compte-gouttes, ainsi placé, que on introduit l'aiguille fine de Pravaz, et celle-ci se trouvant reliée par un tube avec la burette à robinet qui contient l'urine, on.est dans d'excellentes conditions pour régler l'écoulement et prolonger | ÉRDÉHEneE, aussi long- temps qu’on le désire. Quant à la vitesse d'injection, je me suis écarté encore de la technique de M. Bouchard, suivant en cela l’exemple de MM. Mairet et Bose, qui ont déjà adopté une moyenne de 4 centimètres cubes par minute, quand ils expérimentaient sur le lapin. Je suis allé encore plus lentement et ai injecté l’urine à raison de 1 cen- timètre cube par vingt ou vingt-cinq secondes en moyenne. Je fixe ces deux extrêmes parce que, pour une foule de raisons qui n’ont pas besoin d’être exposées ici, le réglage mathématique de la vitesse d'écoulement est impossible. Généralement je me suis toujours efforcé d'obtenir un écoulement moyen de 4 centimètre cube toutes les vingt secondes. Avec ce procédé et quand il s’agit d’urines peu toxiques, les expériences sont très longues; elles peuvent durer parfois deux heures et demie et plus, suivant le poids du lapin, mais elles sont, à mon avis, beaucoup plus démonstratives. | Pour tous les autres points, je me suis conformé complètement à he, technique de l’éminent professeur de Pathologie générale de la Faculté: de Paris, filtrant el neutralisant les urines; les injectant ensuite à la température ambiante. Cependant, quant à la température et à la neutralisation préalable des humeurs à essayer, j'ai constaté, comme M. Bouchard, qu'elles n'ont pas une bien grande importance ; il m'est arrivé souvent d'injecter les mêmes urines, soit acides, soit alcalines, avec et sans neutralisation, aux tempé- ratures moyennes de 16 à 20 degrés et à celles de 30 à 35 degrés, sans constaler de variations notables dans mes résultats. Le facteur vitesse est autrement influent, et c'est à lui seul qu'il faut attribuer les différences qu’on trouvera entre les chiffres que j'ai obtenus et ceux de mes devanciers. D'ailleurs MM. Mairet et Bosc, qui ont eu aussi certaines divergences entre leurs expériences et celles de M. Bouchard, les attribuent également à la même cause, j Ex C’est à la suite d'essais comparatifs nombreux que j'ai adopté deñaite vement la vitesse que j'indique plus haut, et que je crois la bonne pour tous les essais ayant quelque analogie avec les recherches d'uroloxicité, SÉANCE DU 13 MAI 491 car s’il importe de ne pas aller trop vite, il importe aussi de ne pas aller trop lentement. En effet, dans le cas particulier des urines peu toxiques, pour lesquelles le facteur vitesse a le minimum d'importance, la lenteur de l'injection doit avoir forcément une limite au delà de laquelle le poison, arrivant très dilué et en petite quantité, peut avoir le temps de s’éliminer partiel- lement au fur et à mesure de son introduction. Les troubles observés dans ces conditions, car finalement on arrive tou- jours à en avoir, doivent être rapportés aussi bien aux toxiques urinaires qu’à la circulation prolongée d’un liquide étranger dans le sang. P our les injections intraveineuses et pour les substances qui, comme l'urine, mettent en jeu l’activité du rein, il faut, dans le rapport de la vitesse d'injection aux effets, admettre un point zéro. Ce rapport, je n’ai pas pu le déterminer exactement, mais, entre lui et la vitesse maxima, on doit trouver un intermédiaire présentant les avantages suivants : 1° L'absence de troubles pouvant se rattacher à l’arrivée trop brusque d’un liquide étranger dans le sang. Ces troubles surtout cardiaques et. vasculaires peuvent ne pas être mortels immédiatement, mais, introdui- sant dans l’expérience des facteurs étrangers, ils sont à éviter. Je les ai étudiés d’une façon spéciale en m'’aidant de la méthode graphique et y reviendrai dans une note particulière. 2 L’imprégnation lente et graduelle de l'organisme, mettant à l'abri des chocs nerveux, consécutifs à l’arrivée trop brusque d'une substance étrangère au contact des grands centres fonctionnels. 3° Le développement progressif des symptômes, permeltant de les analyser tous, et conduisant presque insensiblement à la mort du sujet. Dans la détermination de la toxicité urinaire, cette dernière condition est celle qui peut le mieux nous donner l’image de ce que doit produire l’urémie. Or la vitesse que j'ai adoptée, après expérience, est celle qui le mieux m'a permis d'analyser le tableau symptomatique de l’empoisonnement déterminé par chaque urine. Je disais plus haut que le réglage de la vitesse d'injection a une grande importance, particulièrement quand il s’agit des urines peu toxiques; c'est dans ces cas, en effet, qu'il y a surtout à craindre les troubles con- sécutifs à l’arrivée d’une trop grande quantité de liquide dans le système veineux, car parfois on est obligé d’en injecter des proportions énormes. Ceci provient de ce que le poison étant lrès dilué, il faut introduire beaucoup de la dilution pour déterminer la mort; on a à craindre alors les effets mécaniques de la masse liquide et on doit, en injeetant lente- ment, laisser à l'organisme le temps d'éliminer l'excès de dissolvant. C'est le rein qui se charge de cette élimination; il le fait d'autant mieux que dans les urines se trouvent des substances diuréliques, auss voit-on dans ces expériences le lapin avoir des miclions abondantes et 492 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE rejeter une urine claire presque en quantité égale à la quantité introduite dans la veine. Cependant il ne faudrait pas croire que cette élimination entraîne aussi les poisons ; ceux-ci ne sortent pas en même temps que leur véhicule liquide; ils se fixent dans l'organisme, l’imprègnent et s’y accumulent peu à peu jusqu’à la dose toxique. Je m'en suis assuré de la façon suivante : Dans deux essais faits avec l’urine humaine, j'ai récolté d’abord l’urine qu'excrétaient les deux lapins mis en expérience; j'ai ainsi recueilli 642 centimètres cubes d’un liquide clair, ayant une densité un peu supé- rieure à 1001 et contenant une quantité négligeable d’urée. Ce liquide a été injecté entièrement dans la veine d’un troisième lapin pesant 4 kil. 410, sans déterminer la mort immédiate du sujet, qui, pendant toute la durée de l'expérience, n’a présenté aucun des symptômes typiques de l’intoxi- calion urinaire el a eu des mictions qui étaient loin d’être proportion- nelles à la masse du liquide injecté. Ce lapin est mort cinq heures après, montrant, à l’autopsie, l'infiltra- tion des tissus et des épanchements abondants dans les cavités abdomi- nale et thoracique. à J'ai obtenu des effets très semblables avec de l’eau distillée, à laquelle j'avais ajouté du chlorure de sodium, dans la proportion de 2 p. 4000. L'’urine humaine qui avait provoqué Pélimination des 642 centimètres cubes employés dans l'expérience ci-dessus rapportée, avait tué à raison de 127 centimètres cubes par kilogramme. L'organisme des deux premiers lapins avait donc retenu la plus grande partie des substances toxiques, de telle sorte que la mort äu lroisième animal doit être attribuée surtout aux suites de l'injection, ce que démon- traient du reste les symptômes et les lésions bien {ypiques qui ont été observés. Enfin on peut trouver une démonstration de ce que j'avance et de l'im- portance de la vitesse d'injection, dans ce simple fait que mes résultats ne diffèrent de ceux qu’on a obtenus jusqu'à présent, que précisément dans les cas où il s’agit des urines les moins toxiques, celle du chien et de l’homme en particulier. — Quant aux urines de lapin et aux urines de cobaye, au contraire, l'écart n’est pas bien grand, parce que, sous un faible volume, la quantité de poison est relativement considérable et, quelle que soit la marche de l’écoulement, on arrive toujours assez vite à la dose mortelle. Dans une note particulière, je donne le résumé des expériences que j'ai faites, en me conformant au manuel opératoire ci-devant exposé. Ces expériences ont été étendues aux urines de l’homme et des mammifères. domestiques pour qu'elles soient comparatives. On verra que si quelques- uns de mes chiffres s’éloignent de ceux qui ont été indiqués par M. le professeur Bouchard et par ses élèves, pour les urines de l’homme, du chien, du lapin et du cobaye, ils ne modifient pas les conclusions géné- SÉANCE DU 13 MAI 493 rales de ces auteurs et laissent absolument chacune des urines précitées, au rang qui lui a été assigné déjà par les chercheurs distingués qui ont fait ces premières études. NOTE SUR LA TOXICITÉ DES URINES NORMALES DE L'HOMME ET DES MAMMIFÈRES DOMESTIQUES, par M. L. Guinarp, (Travail du laboratoire de M. Arloing.) Tous les résultats cantenus dans ce travail ont été obtenus par l'emploi, aussi rigoureux que possible, du manuel opératoire que j'ai décrit dans ma note sur la technique relative à la détermination du degré de toxicité des urines. Je me propose simplement, dans l'exposé suivant, d'indiquer les carac- lères et le degré moyen de toxicité de chaque urine, me réservant de faire connaitre bientôt, pour les urines que j'ai nouvellement essayées, quelles sont les causes des différences qu'elles présentent, En suivant exactement les méthodes du professeur Bouchard et de ses élèves, j'ai commencé, en collaboration avec M. Stourbe, répétiteur de chimie, une série d'expériences qui nous permettra, j'espère, de déter- miner la part qui revient aux divers éléments toxiques contenus dans chaque Lype d'urine. Pour présenter les faits que J'ai recueillis, je classe les urines par ordre dé toxicité croissante. J. URINES DU CHIEN. — Urines des vingt-quatre heures, provenant de chiens au régime de la soupe grasse, avec un peu de viande; pas d'eau en plus de celle contenue dans la soupe. Densité : 1015 à 1020 — UÜrée : 15 à 16 grammes par litre; exceptionnellement beaucoup moins : 5 à 6 grammes seulement. Caractères de toxicité. — Mictions abondantes, apparaissant ordinaire- ment après l'injection de 45 ou 60 centimètres cubes d'urine. Défécations assez nombreuses, d'abord normales puis diarrhéiques. Myosis tardif, commençant entre 260 et 280 centimètres cubes, pour un lapin de 2 kilo- grarames en moyenne. Hypothermie. — Vers la fin de l’expérience on ob- serve une accélération marquée de la respiration, avec tremblements généraux, insensibilité cornéenne, exorbitisme; mort par arrêt primilif de la respiration. Degré moyen de toxicité. — Peu de variations dans les résullats; la moyenne des expériences oscille autour de 193 centimètres cubes par kilogramme de lapin. 494 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE IT. URINES DE L'HOMME. — Urines des 24 heures. — Densité et propor- tion d'urée normales. Caractères de toxicité. — Polyurie; quelques défécations molles; hypo- thermie; myosis très marqué à 200 centimètres cubes, pour un lapin de 2 kilogrammes. Ralentissement et gène de la respiration ; accélération el renforcement du cœur. — Vers la fin: tremblements généraux avec secousses convulsives ; insensibilité cornéenne, exorbitisme. Mort. Degré de toxicité. — Cinq essais faits avec trois urines différentes, mais recueillies dans les mêmes conditions, montrent que la toxicité des urines de l'homme oscille entre 422 et 1#4 centimètres cubes. La moyenne des essais indique 132 c. c. 69, par kilogramme. III. UrINES pu porc. — Urines provenant de vessies enlevées à l’abat- toir à différents moments du jour, sur des animaux à jeun depuis 12 heures environ {1). — Densité : 1022. — Urée : 17 à 19 grammes par litre. Caractères de ‘toxicité. — Myosis apparent à 10 ou 20 centimètres cubes ; miclions fréquentes, moins abondantes qu’avee les urines de l'homme et du chien. Défécalions molles; mouvements péristaltiques exagérés. Insensibilité cornéenne ; coma et somnolence dans les derniers moments. Exorbitisme très marqué à l'approche de la mort qui survient au milieu d'une légère crise convulsive. — Dans mes expériences, 7 fois sur 9, j'ai constaté une hypersécrétion salivaire qui paraissait d'autant plus abondante que le lapin urinait moins. L'’humeur du pore doit con- tenir en plus grande quantité que les autres, le principe sialagogue, que M. Bouchard a signalé dans l’urine humaine et retrouvé dans les extrails alcooliques de ces urines. Degré de toxicité. — Le degré de toxicité des urines de porc oscille assez régulièrement, entre 44 et 58 centimètres cubes par kilogramme ; la moyenne des expériences donne 53 centimètres cubes. à IV. URINES DU BŒUF. — Pour avoir l’urine des bovins, j'ai eu recours exactement au procédé que j'ai employé pour le pore, faisant enlever des vessies pleines à l’abattoir, à différents moments de la journée, sur des animaux se trouvant dans les mêmes conditions de repos et de jeüne. Ces vessies étaient apportées au laboratoire dans la soirée, l'urine qu’elles contenaient élait mise en filtration et essayée le lendemain. Densité : 1025 à 1029. — Urée : 33 à 41 grammes par litre. Caractères de toxicité. — Myosis apparaissant dès le début, lentement (1) C’est grâce au précieux concours de M. Gentet, contrôleur principal des viandes à l’abattoir de Vaise, que j'ai pu obtenir toutes les vessies dont j'ai eu besoin. C’est lui qui a bien voulu se charger de me les faire extraire et parvenir dans les meilleures condilions possibles. SÉANCE DU 13 MAI 495 et progressivement, rarement exagéré. La respiration diminue d'ampli- tude; le cœur se ralentit et se renforce. Exagéralion du péristallisme; défécations et mictions pendant toute la durée de l'expérience. Vers la fin, agitation convulsive, pas de coma ni de somnolence. Mort dans une crise peu violente, sans exorbitisme. Degré de toxicité. — Ce degré a oscillé entre 36 et 40 centimètres cubes. Le degré moyen de tous mes essais est de 38 c. c. 51 par kilo- gramme. V. URINES DU COBAYE. — Liquide des 24 heures, fourni par 25 cobayes, pesant ensemble 11 kilos et ayant donné 495 centimètres cubes. — La nourriture de ces animaux comprenait : Avoine, choux, salade et carottes. — Densité : 1020. — Urée : 23 grammes par litre. Caractères de toxicité. — Dès le 5° ou 6° centimètre cube, myosis exa- géré; mouvements convulsifs fréquents; ralentissement du cœur et de la respiration, avec expiration brusque et saccadée. Mictions assez fré- quentes; pas de défécation. Au moment de la mort, précédée d’une crise tétanique assez violente, le cœur s'arrête très rapidement. — Pas d’exophtalmie. Degré moyen de loxicité. — Il oscille assez peu autour de 35 centimètres cubes. VI. URINES DU MOUTON. — J’ai escavé des urines venant de l’abattoir et des urines obtenues par sondage, à différentes reprises, de trois brebis en bon état, au régime de la luzerne sèche. — Densité : 1022 à 1028. — Urée : 25 à 37 grammes par litre. Caractères de toxicité. — Myosis rapide et exagéré; ralentissement et renforcement du cœur; troubles respiratoires. Agitation convulsive; sensibilité cornéenne conservée jusqu'à la crise tétanique finale. Mictions rares et peu abondantes. Mort soudaine en tétanisme ; pas d’exorbi- tisme. Degré de toxicité. — Les urines récoltées à la sonde étaient moins toxiques que les autres. Le chiffre moyen de mes délerminations fixe autour de 33 c. c. 80, le degré de toxicité des urines du mouton. VIT. URINES DE LA CHÈVRE. — Ces urines ont été obtenues en sondant à des moments différents de la journée, trois chèvres soumises au régime de la luzerne sèche. — Densité : 1023. — Urée : 26 grammes par litre en moyenne. Caractères et degré de toxicité. — Ils rappellent presque complètement ceux des urines du mouton; la seule différence, s'il y en a une, porte sur le pouvoir convulsivant et l’action diurétique qui semblent plus mani- festes avec les urines de la chèvre. — Le degré moyen de toxicité oscille autour de 32 centimètres cubes par kilogramme. 496 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE VIII. URINES DE L’ANE. — Ces urines ont été recueillies dans un seau en toile imperméable, suspendu au dessous du penis des animaux.—- Liquide trouble, très chargé, ayant tous les caractères de l’urine dite jumenteuse, parfaitement clair après filtration, ayant alors l'apparence et la teinte du rhum vieux. — Densité variable de 1033 à 1040. Urée : 24 à 26 grammes par litre. — La ration journalière des animaux auxquels je me suis adressé comprenait : foin 2kilos 500 ; paille, 6 kilos; farine, 500 grammes; son, 500 grammes. Caractères de toxicité. — Dès les premiers centimètres cubes injectés, la pupille devient punctiforme. Agitation convulsive; troubles respiratoires ; ralentissement et renforcement du cœur dont les battements sont à la fin rares et faibles. Mictions peu fréquentes, parfois copieuses. Hypersé- crétions salivaire et lacrymale. Ce dernier symptôme n’est pas constant. Pas de coma, pas d'insensibilité cornéenne. Mort assez soudaine dans une violente crise télanique, sans exorbilisme. Degré de toxicité. — Les urines d’âne, comme d’ailleurs celles de cheval, sont remarquables par les résultats assez discordants auxquels on arrive en déterminant leur degré de toxicité. Je n'ai jamais vu pareille chose avec les autres et ne sais pas encore comment expliquer celte particu- larité. Ceci m'a obligé à multiplier beaucoup mes essais afin d’avoir une moyenne qui comprenne la plupart des oscillations. La moyenne exacte de toutes mes expériences est de 29 centimètres cubes 39 par kilogramme. C'est donc autour de ce chiffre qu’oscille le degré de toxicité des urines de l'âne. IX. URINES DU CHEVAL. — J'ai étudié onze échantillons de ces urines, échantillons récoités, les uns, avec l'appareil dont je me suis servi pour l’âne, les autres, en sondant des juments. Densité assez variable : 1028 à 1041. — Urée : 20 à 38 grammes par litre; quelquefois moins. La ralion des animaux comprenait : foin, 5 kilos; paille, 6 kilos: avoine, 2 kilos; farine, 500 grammes; son, 500 grammes. Caractères de toxicité. — Presque identiques à ceux de l'urine d'âne. Action marquée sur l'élément musculaire; manifestations convulsives et mort en tétanisme. Les urines peu toxiques déterminent des miclions plus fréquentes que les autres. J'ai rarement vu l’hypersécrélion sali- vaire. | Degré de toxicité, — Très variable; j'ai trouvé des urines qui tuaient à 12 centimètres cubes par kilogramme, alors que d’autres avaient un pou- voir toxique oscillant entre 38 et 55 centimètres cubes. Cependant, l’en- semble de mes essais m’a appris qu'en somme il y avait balancement assez régulier entre les extrêmes. C’est ce qui m'a autorisé à considérer comme bonne la moyenne de toutes mes analyses, qui, chose curieuse, se rapproche de celle que j'ai déja donnée pour l’âne. Cette moyenne SÉANCE DU 13 MAI 497 autour de laquelle oscille le degré de toxicité des urines de cheval, est de 29 centimètres cubes 49 par kilogramme. De l’ensemble de mes essais, je peux tirer encore les conclusions sui- vantes : 1° Les urines de jument sont généralement plus toxiques que celles du cheval; — 2° Toutes choses égales d’ailleurs, les urines de che- vaux adultes, en bon état de santé, sont plus toxiques que celles des ani- maux jeunes. Les urines des animaux âgés, débilités et se nourrissant mal sont celles qui ont le degré de toxicité le plus faible; — 3° Une bête pleine se trouvant à l'Ecole au moment où je terminais mes expériences, il m'a été possible de constater que l’état de gestation ne modifie pas sensiblement le pouvoir urotoxique d’une urine de jument. X. URINES DU LAPIN. — Suivant l'exemple de MM. Charrin et Roger, J'ai opéré sur des urines émises en 2% heures par des animanx dont le poids m'était connu. — Leur ration comprenait : avoine, choux, salade et carottes. Caractères et degré de toxicité. — Ces urines sont très toxiques et tuent avec des symplômes que je n’ai pas à décrire ; d’abord parce que la chose a élé très bien faite par les auteurs précités; ensuite, parce que je n'ai rien vu de plus. Comme je l'ai dit autre part, c’est avec ces urines que j'ai constaté le moins de divergence entre mes résultats et ceux déjà con- nus. Même pour les urines de cobaye, l'écart était peu important; pour celles de lapin il est nul, car la moyenne de mes essais fixe, autour de 16 centimètres cubes par kilogramme, le pouvoir toxique des urines de lapin. M. Charrin a trouvé 15 centimètres cubes environ. XI. URINES Du CHAT. — Urine des 24 heures d’un chat et d’une chatte pesant ensemble 5 kil. 400. — Régime exclusivement carnivore. — Total, de l'urine : 237 centimètres cubes. — Densité : 1060. — Urée : 118 gram- mes par litre. — Cette proportion très élevée d’urée n’a rien qui puisse surprendre, étant donné que ces animaux ont un régime spécial et urinent assez peu. D'ailleurs M. Yvon a déjà indiqué 82 grammes d’urée pour les urines de chat, et Hieronymi fixe à 132 grammes la proportion du même élément dans les urines du lion et du tigre. Caractères de toxicité. — Dès le 3° ou le 4° centimètre cube, le lapin en expérience s’agite et montre des mouvements convulsifs d’une grande violence, qui se continuent pendant toute la durée de l'essai. Le resserre- ment pupillaire se produit très vite aussi et à vue d'œil; la pupilie est rapidement réduite aux dimensions d’une pointe d’aiguille. Des mictions, d’ailleurs peu abondantes, se constatent dès le 5° ou 6° centimètre cube. J'ai observé aussi l'hypersécrétion salivaire. Pendant la marche de l’em- poisonnement, le cœur bat avec force, la respiration est profonde, sac- cadée; le coma et l’insensibilité cornéenne surviennent assez vite, ordi- nairement après une petite crise. #98 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Finalement le sujet meurt dans une dernière convulsion tétanique; sans exophtalmie, et à ce moment on voit souvent la pupille se dilater brusquement. Degré de toxicité. — 11 est considérable, oscille ordinairement entre 10 et 14 centimètres cubes par kilogramme, avec quelques variations, irès peu importantes d’ailleurs. La moyenne de mes essais donne 13 centimètres cubes comme chiffre représentant le degré de toxicité des urines de chat. Conczusions. — D’après le pouvoir toxique de leurs urines et par ordre de toxicité croissante, l’homme etles mammifères domestiques se classent donc ainsi : Chien, Homme, Porc, Bœuf, Cobaye, Mouton, Chèvre, Ane, Cheval, Lapin, Chat. C'est à cela que je devrais limiter mes conclusions, ne devant pas revenir sur des faits dont la présentation a été un peu longue, bien que considérablement écourtée cependant, par le style bref que J'ai adopté. Malgré ça, je ne peux pas me dispenser de faire remarquer que cetle étude de physiologie comparée, lorsqu'elle sera complétée par l'analyse des urines, la séparation et le dosage de leurs éléments actifs, fournira peut-être quelques éclaircissements nouveaux aux théories de l’urémie. __ Je ne peux pas résister non plus à la tentation de montrer combien est naturelle la classification des urines des animaux, d’après leur degré de toxicilé. — A part les urines du chat qui font exception et se séparent des autres, nous descendons du chien, animal carnivore, aux espèces omnivores, comprenant l’homme et le porc. Après, arrive la série des herbivores dont les principales espèces se groupent et se rapprochent suivant leurs affinités anatomiques et physiologiques; ainsi la chèvre est à côté du mouton, l’âne à côté du cheval. Les chimistes, qui, depuis longtemps, ont conslaté qu'au point de vue de leur composition, les urines de l’homme présentent des caractères qui les placent entre celles des carnivores, plus près cependant de ces der- nières, ne seront pas surpris du classement que nous donne la détermi- nation du degré de toxicité. — I] a été également dit que l’urine de porc tient le milieu entre celle des carnivores et celle des herbivores; notre classification n’a encore rien changé à cette constatation. Les urines de chat qui sont hors de comparaison, rentreront peut-être dans une série nouvelle qui complélera la première et comprendra les urines des fauves. Grâce à l'obligeance de M. Pianet, dont la ménagerie est actuellement à Lyon, il m'est possible d’avoir les urines des différents animaux de sa collection. J'ai déjà pu constater que les urines de l’ours se rapprochent, comme toxicité, de celles du chien, tandis que celles du lion et du tigre ont plus SÉANCE DU 13 MAI 499 de ressemblance avec les urines du chat. Mais ce sont des expériences actuellement en train, sur lesquelles je reviendrai dans une note ulté- rieure. OBSERVATIONS SUR L’ALBUMINURIE CHORÉIQUE, par M. Cu. Boucnarp. Il y a des albuminuries à la fois chroniques et intermittentes, généra- lement peu graves, la plupart facilement curables, d’autres résistant des mois et des années et même pendant toute l'existence sans que la vie soit abrégée ni par cet accident morbide, ni par la maladie qui l’engendre. Un caractère de ces albuminuries, c’est qu’elles s’interrompent pendant la nuit, qu'elles reparaissent le matin, augmentent pendant la journée pour diminuer seulement lorsque le malade est couché et devenir nulles au réveil. Ce qui les fait disparaître périodiquement, c’est moins la nuit ou le sommeil que le repos. Ce qui les ramène périodiquement, c’est moins le jour ou l'état de veille que l’activité : activité intellectuelle, sensorielle, digestive; mais, par-dessus tout, activité musculaire. Un assez grand nombre de ces albuminuries se développent chez des adolescents dans les périodes de croissance rapide surtout si un vice du régime alimentaire ou une maladie du tube digestif empêche l'organisme de puiser en quantité suffisante dans les aliments les matériaux néces- saires à cette croissance rapide. Dans ces conditions, les cellules de nou- velle formation se forment à l’aide de substances fournies par les cellules préexistantes. Le tissu des centres nerveux subit ainsi une spolialion au profit du tissu osseux en formation. L'une des conséquences de cette altération du système nerveux est que la fatigue musculaire même modérée suffit pour provoquer l'apparition d'albumine dans l'urine. L’appauvrissement du système nerveux dans ces cas de croissance rapide avec récrémentition insuffisante peut avoir aussi pour conséquence les céphalées des adolescents, les tics, la chorée. Chez un jeune garcon de dix-sept ans atteint de dilatation gastrique avec troubles dyspeptiques et qui vient de subir une croissance énorme à ne juger que par la disproportion grotesque que présente son pantalon comparé à la longueur actuelle de ses jambes, une chorée s'est déve- loppée dans les conditions pathogéniques que je viens d'indiquer et en même temps une albuminurie. On peut reconnaitre par l'examen de quatre échantillons de l’urine de ce malade que l’albumine est nulle dans l'urine du réveil, qu'elle existe en quantité notable dans l'urine de la matinée, qu'il y en a beaucoup plus dans l’urine du soir et que, enfin, l'urine de la nuit n'en renferme qu’en faible proportion. 500 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On a pu constater une fois que, le malade ayant été obligé de se lever à deux heures de la nuit, les urines du matin contenaient de l’albumine. On a reconnu aussi que, à partir du réveil, même s'il neselève pas, l'urine devient albumineuse, ce qui n’est pas la règle dans les albuminuries intermittentes, mais ce que j’ai cru pouvoir expliquer par le retour des convulsions qui se produit dès le réveil. Ce fait n’est pas isolé. Je considère les albuminuries intermittentes qui se produisent en pareil cas, comme liées à la faiblesse nerveuse causée par la spoliation qu'a subie le système nerveux pendant une croissance très rapide opérée dans des conditions défavorables en raison du mauvais état du tube digestif. La cause déterminante du retour périodique de cette albuminurie me paraît être le travail musculaire, soit volontaire, soit convulsif. SUR LA FRAGMENTATION PARTHÉNOGÉNÉSIQUE DES OVULES DES VERTÉBRÉS PENDANT L'ATRÉSIE DES FOLLICULES DE GRAAF, par M. L.-F. HENNEGUY. Dans le cours de mes recherches sur le corps vitellin de Baïlbiani (1) j'ai examiné un grand nombre d’ovaires de Vertébrés et j'ai pu étudier plusieurs cas de régression des follicules de Graaf. On sait, depuis les tra- vaux de Pflüger, Spiegelberg, Waldeyer, Slavjansky et de beaucoup d’autres auteurs plus récents, qu’un grand nombre de follicules ovariens n'arrivent pas à maturité et subissent une dégénérescence atrophique qui amène la disparition de leur contenu. Cette atrésie, normale et physiolo- gique, éludiée surtout chez les Mammifères, peut se faire par des pro- cessus différents, soit par dégénérescence graisseuse, soit par dégéné- rescence hyaline, soit par atrophie simple. Flemming, en 1885, a fait connaître, sous le nom de dégénérescence chromatolytique, des phéno- mènes importants dont peuvent être le siège l’ovule et les celiules épithé- liales du follicule. Il a constaté que dans celles-ci la chromatine du noyau se condense en grains irréguliers, se disperse dans la cellule dont le corps protoplasmique finit par disparaitre en se liquéfiant ; dans l’ovule, il a vu, à la place de la vésicule germinative, apparaître un fuseau de direction et se produire quelquefois une sorte de globule polaire. Mes observations sur les ovaires de différents Mammifères, Rat, Souris, Chatte, Rhinolophe, m'ont montré que la chromatolyse, dans les ovules, (4) Henneguy. Le corps vitellin de Balbiani dans l'œuf des vertébrés. Journ. de l’Anat. et de la Physiol., XXIX, n° 1, 1893. SÉANCE DU 13 MAI 501 peut s'accompagner d’une fragmentation du vitellus, déjà signalée par Pflüger, qui dans certains cas ressemble à une véritable segmentation. A côlé de follicules renfermant un ovule qui présente un fuseau de direction, on en trouve d’autres dans lesquels l’ovule a perdu entièrement ou en partie sa zone pellucide et dont le vitellus est divisé en quatre, cinq, six segments, tantôt à peu près égaux, tantôt de volume très différent. Plusieurs des fragments renferment des éléments chromatiques, répartis très irrégulièrement. Dans quelques-uns on reconnait un noyau à contour net, dont la chromaline condensée tapisse la face interne de la membrane d’enveloppe, ou est dispersée au contraire dans le suc nucléai-e, sous forme de fines granulations isolées. Dans d’autres, on observe de petits chromosomes arrondis, disposés en plaque équatoriale au milieu d'un fuseau achromatique. D’autres segments, enfin, ne contiennent aucun élé- ment chromatique. La fragmentation du vitellus ne paraît pas se faire par une bipartition répétée, comme dans la segmentalion normale, mais plulôt par gemma- tion. Bien que cette fragmentation soit précédée de celle de la vésicule germinative, les deux phénomènes sont indépendants, ainsi que le prouve l'existence de segments dépourvus d'éléments nucléaires. La chromatine de la vésicule germinative se résout en petites masses irrégulières qui se dispersent dans le vitellus, de même que dansla chro- matolyse des cellules folliculaires. Chaque masse chromatique se com- porte alors comme un petit noyau et donne naissance à une figure karyo- diérétique rudimentaire, composée d'un petit nombre de chromosomes et d'un nombre correspondant de filaments achromatiques. Je n'ai pu décou- vrir de centrosomes en rapport avec les masses chromatiques ou avec les fuseaux achromatiques. À un stade plus avancé de l’atrésie folliculaire, lorsque les cellules de la granulosa ont disparu, soit par chromatolyse, soit par transformation en éléments conjonctifs, le vitellus de l’ovule est divisé en un grand nombre de petits segments, dans lesquels les éléments chromatiques ne sont plus visibles, et qui deviennent la proie de phagocytes, cellules épi- théliales du follicule et leucocytes. Les phagocytes se transforment ulté- rieurement en un nodule de tissu conjonctif. Quelques ovules d'apparence normale, ou manifestement en voie de chromatolyse, présentent une structure du vitellus tout à fait particulière. Le contenu de l'œuf, au lieu d’être constitué par un protoplasma finement granuleux ou réticulé, suivant le procédé de fixation employé, est cons- titué par une quantité considérable de petits bâtonnets orientés dans tous les sens, mais souvent parallèles entre eux, au nombre de trois ou quatre, et réunis en faisceaux ayant l'apparence de petits fuseaux achromatiques, dépourvus de chromosomes.Examinés à un fort grossissement, ces bâton- nets paraissent être formés de granulations disposées en série. Gette structure du vitellus, qui peut s’observer dans l’atrésie folliculaire avec 502. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE fragmentation de l’ovule, doit être considérée comme un mode spécial de dégénérescence. Différents processus dégénératifs peuvent se rencontrer associés dans un même ovule : dégénérescences chromatolytique et graisseuse ; dégénéres- cences chromatolylique et hyaline; dégénérescence chromatolytique et fragmentation ; dégénérescence graisseuse et fragmentation, etc. Je ne parlerai pas, dans cette note préliminaire, des phénomènes de régression qui se passent dans les cellules de la granulosa et dans les parois du follicule, phénomènes que j'exposerai dans un mémoire plus étendu. Mes observations sur la dégénérescence des ovules des Mammifères con- firment et étendent celles de Flemming et celles plus récentes de Schott- länder. Elles établissent que l’ovule des follicules en voie d’atrésie peut présenter non seulement une maturité précoce, se traduisant par l'appa- rition du fuseau directeur et d’un globule polaire, mais aussi un commen- cement de segmentation irrégulière, parthénogénésique. Elles offrent également un certain intérêt au point de vue cytologique ; elles montrent que la substance chromatique du noyau, dispersée dans le cytoplasma, continue à exercer une action sur ce dernier; chaque fragment chroma- tique se comporte comme un petit noyau rudimentaire pouvant donner une figure karyodiérétique. En l’absence de centrosomes, les chromosomes deviennent des centres d'attraction ou d'orientation pour les filaments achromatiques. Von Brunn, chez les Oiseaux, Ruge, chez les Amphibiens, récemment Strahl, chez les Reptiles, ont décrit la fragmentation du vitellus des œufs ovariens pendant la régression des follicules. J'ai pu vérifier les faits signalés par ces auteurs, et constater que dans ces œufs, riches en maté- riaux nutritifs, la fragmentation s'accompagne de la pénétration dans le vitellus d’un grand nombre de cellules migratrices, qui en activent la destruction. (Travail du laboratoire de M. Balbiani, au Collège de France.) DESTRUCTION EXPÉRIMENTALE DES CELLULES HÉPATIQBES, par M. A.-H. Picuter. Les lésions expérimentales du foie ont été l’objet d’une série déjà nom- breuse de recherches, mais toutes ont pour but d'observer la régénération du tissu hépatique détruit. Elles remontent assez loin, car Holm s’occupait déjà, en 1867, de la résistance des cellules hépatiques aux agents irrilants expérimentaux. Il n'avait pour but, comme ses successeurs, Koster, SÉANCE DU 13 MAI 503 Joseph, Mager, Frôülich, etc., que de rechercher la participation des cellules hépatiques à la sclérose conjonctive et à la formation du tissu de cicatrice dans le foie. D’autres auteurs recherchèrent plus tard, non pas la formation de la sclérose, mais la régénération du foie lésé. C’est ainsi que Colucci, Tizzoni en 1883, Griffini en 1884, étudient la régénération du tissu hépatique écrasé, dilacéré ou sectionné. Le travail le plus remar- quable à ce point de vue est celui de Podwissozki, qui a constaté les diffé- rents stades de la division indirecte sur les cellules hépatiques en voie de prolifération. Un nouveau moyen d'investigation fut trouvé par C. Lapeyre, qui, d'après les conseils de M. Keiner, eut l’idée d’injecter dans le foie de l'acide phénique dans le but d'y produire des lésions aseptiques. Les résultats obtenus par cet auteur sont consignés dans sa thèse (Montpellier 1889). Nous nuus sommes servi de sa méthode, mais dans un but tout à fait différent. Il ne s'agissait pas en effet pour nous d'étudier la régénération du foie, mais sa destruction, et d'observer comment mouraient les cellules au contact desquelles arrivait un agent toxique, mais non microbien, de facon à pouvoir comparer les différents processus que pouvaient présenter ces morts de cellules avec les nécroses que l’on observe couramment dans les hépatites infectieuses. Dans cette première note, nous n'avons envisagé qu’un certain nombre d'agents ayant seulement entre eux deux propriétés communes, la pre- mière, d être antiseptique, et cela pour éviter un mélange de différentes lésions, la seconde d’être assez caustique pour déterminer des lésions très rapides. L'opération consistait à injecter à travers la peau, dans le foie d’un cobaye, le quart au plus d’une seringue de Pravaz chargée du liquide caustique. Il est assez facile, en piquant immédiatement au-dessus du rebord eostal, l'animal maintenu par un aide, de faire pénétrer l'injection dans le foie. Seulement on doit avoir soin de ne pas enfoncer (oute l'aiguille, sous peine d'envoyer l'injection dans le cœur ou dans le poumon du côté opposé. Les animaux étaient sacrifiés deux heures après l'injection, les frag- ments de foie présentant les traces de la piqüre, isolés nettement au rasoir étaient fixés par l'alcool absolu, coupés et colorés soit au carmin d'alun, soit à l'hématoxyline, puis montés dans un véhicule légèrement teinté d’éosine. Nous avons essayé quelques substances qui nous ont donné les résultats suivants : 1° Mitrate d'argent. -— Solution saturée. Les foyers de destruction dus au nitrate d'argent se retrouvent avec la plus grande facilité sur les coupes qui sont restées exposées à la lumière et dans lesquelles l'argent s'est réduit. Le centre du foyer est constitué par une masse serrée, uni- formément colorée en jaune brun, et dans laquelle on distingue de temps en temps le contour ratatiné d’une cellule hépatique. Puis vient une A 504 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE seconde zone, plus étendue que Ia première, et beaucoup plus intéres- sante, car la forme des éléments y est conservée. Dans celte zone, les capillaires sont uniformément colorés en jaune foncé ou en noir; la réduction de l'argent s’est donc opérée d'une facon beaucoup plus active sur les vaisseaux, et en particulier sur les globules rouges contenus dans ces vaisseaux. Ce fait a quelque importance puisque l’on sait quelles sont les difficultés qu'éprouvent les histologistes à déceler, par le nitrate d’ar- gent injecté à très faibles doses et mêlé à la gélatine, l’endothélium des capillaires sanguins du foie. Comme ces capillaires réduisent l’argent plus que tout le reste du tissu, et forment des réseaux tout à fait noirs dans les injections massives et directes telles que nous les avons pra- tiquées, il faut en conclure que la difficulté d’imprégner à l'argent un capillaire du foie ne provient pas de propriétés spéciales à son endothé- lium, mais du sang qu'il contient et qui réduit pie activement le sel d'argent que les cellules de Ja paroi. Les cellules circonscrites par ces réseaux sont groupées en travées dont quelques-unes ont nettement la forme de glandes en tubes, ieur mem- brane est nette, épaissie et accusée par l'argent, en sorte qu’elles parais- sent parfaitement délimitées, encadrées d’une bordure brune assez épaisse, ressortant d'autant plus que les cellules hépatiques du cobaye sont en général peu granuleuses. Les noyaux se colorent encore dans une partie de ces éléments qui contiennent une fine poussière noire d'argent réduit. Dans les autres, il n’existe pas de noyau et l'élément est réduit à une petite vésicule claire. Le pourtour de ces foyers est circonscrit par une ligne nette dans laquelle les noyaux des cellules sont en multiplication. Puis, au delà, l'influence du sel d'argent se fait encore sentir en accentuant les contours des cellules; en sorte que ces éléments polyédriques, à contours clair, à paroi très accusée, ressemblent beaucoup aux cellules de l’épiderme du fœtus. Les vaisseaux biliaires qui ont subi l’action du nitrate d'argent, pré- sentent leurs cellules en place, mais elles sont jaunes et un peu ratatinées. On observe donc en résumé : imprégnation portant surtout sur les vaisseaux, momification du tissu dans les points les plus atteints, et, dans le reste, apparition d’une coque, qui est épaisse autour des cellules en voie de transformation vésiculeuse et se réduit aux proportions d’une simple membrane d’enveloppe dans les cellules les plus éloignées du centre du foyer. 2° Acide phénique. — C’est le réactif employé par M. Constant Lapeyre. Nous n'avons pu contrôler ses résultats, puisque nous ne poursuivions pas le même but et que les survies de nos animaux ont été beaucoup plus courtes. Voici ce que nous avons observé avec Le mode de faire indiqué plus haut. Il existe d’abord sur le trajet de l'injection de grandes déchi- rures traumatiques remplies de débris granuleux coagulés par l'alcool. SÉANCE DU 13 Mal 505 Le pourtour de ces déchirures est bordé par des ratée cellulaires iné- gales. Les unes sont composées d'éléments tassés, à cyle plasma réduit, à noyau volumineux. Les autres sont en transformation vésiculeuse. Leur membrane apparait, par contraste avec le corps de l'élément qui reste absolument transparent, sans une graaulation protéique. Dans certaines cellules le noyau subsiste, très petit, et se colorant fortement par le carmin d'alun. Quand ces cellules sont groupées en foyers, elles offrent une certaine ressemblance avec les foyers de désintégration que l’on observe dans l’éclampsie el dont j'ai eu déjà l’occasion d'entretenir la Société de Biologie. [1 y manque seulement les épanchements sanguins et les réseaux fibrineux qui sont si remarquables dans cette affection. Cette vacuolisation complète des cellules ne s'étend pas d’ailleurs très loin, mais la masse du foie tout autour des foyers reste lassée, comme si la déshy- dratation avait réduit le volume des éléments restés vivants. Nous avons recherché, à l’aide de la solution de gomme iodée de M. Ranvier, si les cellules vacuolisées contenaient du glycogène. Cette recherche a été négalive. 5° Acide formique et teinture diode. — Nous ne citons que pour mémoire ces deux réaclifs, afin d'épargner aux expérimentateurs les mécomptes qu'ils nous ont donnés. En effet, on n’observe pas d'action bien nelle, bien caractéristique; comme avec les deux réactifs précédents, l’ordination générale du foie est troublée, mais d’une manière confuse et difficile à fixer. La teinture d'iode en particulier s’absorbe avec une telle rapidité qu'on ne retrouve plus trace de sa coloralion Jaune en ouvrant l'animal une heure après l'injection. Nous réprendrons d’ailleurs ces expé- riences avec des caustiques plus érergiques. Nous pouvons pourlant résumer ainsi ces premières recherches. Le nitrate d'argent frappe les éléments d’une momification, d’une espèce de nécrose sèche que l'on pourrait comparer à la nécrobiose. Quand les cellules deviennent vésiculeuses, elles restent petites, plus petites qu'à l’état normal. L’acide phénique donne au contraire des altérations vésicu- leuses, analogues à celles de l’éclampsie. Mais ces deux sortes de lésions ne sont pas spéciales aux agents toxiques et l’on retrouve leurs équiva- lents dans les foies infectieux; ce qui tendrait à établir qu’au point de vue anatomo-pathologique l'agent infectieux ne diffère de l’agent toxique qu’en ce qu'il peut se reproduire et se multiplier, et non parce qu'il peut déterminer des lésions cellulaires différentes. Le nilrate d'argent nous a paru très ulile pour ces recherches, car les points atleints par le réactif prennent assez vite une teinte caractéristique qui permet de ne pas décrire des lésions purement traumatiques comme résultant de l’action du caustique. 506 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SUR LE Âisloma sinense COBBOLD, par M. le D' A. BILLET, Médecin-major à Caobang. (Note présentée par M. A. Giurd.) Au mois de février mourait subitement à Caobang un coolie annamite, et son cadavre était amené à l’infirmerie-ambulance, où nous devions en faire l’autopsie médico-légale. Un assassinat était soupçonné et les aulo- rités annamites avaient déjà mis à la cangue trois individus fortement compromis à ce qu'on affirmait. Or l’autopsie révéla deux sortes de lésions bien distinctes : 1° Un vaste abcès du poumon gauche ayant détruit les trois quarts de ce poumon, avec pleurésie et péricardite purulentes, cette dernière ayant cerlainement déterminé la mort subite ; 2° Un foie énorme pesant 2 kilogr. 450. La surface est comme éraillée à la partie qui s'appuie à gauche contre le diaphragme. Partout ailleurs, la capsule de Glisson est fortement adhérente au lissu hépatique. La vési- cule du fiel est distendue au maximum par la bile. Extérieurement le foie a conservé son aspect lisse et sa teinte normale. À la coupe, il crie forte- ment sous le scalpel et l’on voit nettement un grand nombre de tractus fibreux s’irradiant en tous sens. La lumière des vaisseaux inter et intra- lobulaires paraît normale, mais celle des canaux biliaires est fortement dilatée sans toutefois présenter d’incrustations calcaires comme j'en avais observé dans le foie du bœuf infesté par Distoma hepaticum. Les eanali- cules biliaires eux-mêmes, et les plus éloignés, sont distendus à l'excès et se dessinent nettement à la surface de la glande hépatique. Ils sont gorgés de bile et par la pression on fait sortir une grande quantité de Distomes dont suit la description. J'ai compté jusqu’à 210 exemplaires de ces parasites et j'en ai certainement laissé plus de la moitié. Un grand nombre se trouvaient également dans le duodénum à l’entrée du cholé- doque, mais je n’en ai pas rencontré ailleurs. Tout l'intestin était conges- tionné et le mésentère turgescent. La rate hypertrophiée pesait 470 gram- mes. Les reins offraient des lésions de néphrite interstitielle légère, mais rien d’anormal dans les bassinets ni dans la vessie. D'après la description des auteurs, ce Distome doit être rapporté cerlai- nement à Distoma sinense Cobbold. - La plupart des exemplaires sont très aplatis; ils ont une forme ova- laire lancéolée et mesurent 17 millimètres de long sur 3", 5 de large. Toutefois il y en a de plus petits qui n’atteigunent que 12 millimètres et d’autres plus grands qui peuveñt avoir une longueur de 20 millimètres. En général, ils sont d’une couleur brun olivâtre foncé, ce qui est dû à une SÉANCE DU 13 MAI 507 quantité considérable de pigment noir répandu dans tout le corps. D'au- tres, au contraire, mais en moins grand nombre, sont jaunâtres ou rougeà- tres et presque transparents. La ventouse antérieure ou buccale v a est située à l'extrémité effilée du corps; elle est suivie d’un pharynx ou œsophage bulbeux oe à fortes fibres radiées très apparentes d'où part vœ F1. 1. — Distoma sinense. va, ventouse antérieure; — vp, ven- touse posiérieure; — æ, œsophage; — ci, cæcum intestinal gauche; — «+, cæcum cd intestinal droit ; — pg, pore génital; — ovd, oviducte; —ger, germigène: — gle, glande coquillière ; — vs, vésicule sémi- gle nale ; — cb, canal de Laurer ; — vi, vitello- gène ; — f, testicule antérieur; — !’, testicule postérieur ; — cd', canal déférent du tes- DE ticule postérieur; — cd/, canal déférent commun aux deux testicules ; — cex, canal excréteur médian; — cex', canal excréteur gauche; — pc, pore excréteur. | YL cex’ gr V5 D a cd QT STE] HUE TL la bifurealion de l'intestin en deux cæcums ct, ci'quilongent les côtés du corps et descendent jusqu’à l'extrémité postérieure. En arrière et à # mil- limètres environ de la ventouse antérieure se trouve la ventouse posté- rieure ou ventrale v p plus petite que la précédente, à fibres annulaires et radiées puissantes. Un peu au-dessus de celle-ci le pore génital p g où aboutissent à la fois l'extrémité de l’oviducte et le canal séminal. Entre les deux cæcums intestinaux, la masse du corps jusqu’à l'union de la moitié antérieure avec la moitié postérieure, est occupée par les replis 508 SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE tortueux de l’oviducte remplis d'œufs à coque brune très épaisse et oper- culés, longs de 35 à 37 u sur 12 à 415 x de large. Le long de la face dorsale de l’oviducte court un gros canal rempli de spermatozoïdes, c'est le canal séminal c d'’. La partie centrale du corps renferme une glande trilobée, la germigène ger, autour de laquelle on remarque des glandes monocellulaires dont l’ensemhle constitue la glande coquillière g/c ; au- dessus du germigène et comme coiffé par ce dernier, apparait un sac ovoïde très foncé, rempli de spermatozoïdes fort actifs, c’est le réservoir spermalique v s. IRC 2 À, face dorsale: — B, face ventrale; — 0, orifice dorsal du canal de Laurer: — evi, conduit de la glande vilellogène; — co, confluent génital où se déversent les produits des glandes vitrllogènes, du germigène (ger) et des glandes coquillières (g le). (Les autres lettres comme dans la figure 1.) Sur les côlés du corps, en dehors des cæcums intestinaux, courent, sous forme de deux glandes étroites en grappes, les vitellogènes v?, qui aboutissent chacun par un canal spécial cv l’un droit, l’autre gauche, à l'intersection du germigène et du réservoir spermatique. De ce dernier, sort un canal cL, assez volumineux, qui se dirige vers la partie postérieure du corps et vient s'ouvrir sur la face dorsale par un petit pore o. Je crois que c’est l’homologue du canal de Laurer décrit par les auteurs chez D. hepaticum, etc. En outre, leréceptacle spermatique, à sa partie effilée supérieure, communique par un autre petit canal à fibres annulaires très neltes avec le confluent c g où se déversent les produits des glandes vitel- logènes, du germigène et des glandes coquillières dans le commence- ment de l’oviducte. Cela se voit bien surtout sur une coupe longiludi- nale (fig. 2). Le canal de Laurer est, corame je l’ai dit, assez large el pourvu de fibres annulaires puissantes. Il doit remplir une fonction importante et SÉANCE DU 13 MAI 509 peut-être, contrairement à l'opinion actuelle, mais d'accord avec celle des anciens observateurs, joue-t-il un rôle considérable dans l’acte de la fécondation. En tous cas, ni lui, ni le réservoir spermatique ne renferment de granules vitellins et, par conséquent, ne peuvent servir à l'expulsion du trop-plein des vitellogènes, comme l’ont supposé Macé et Poirier. Les glandes coquillières sont un amas de glandes unicellulaires disposées en éventail munies chacune d’un fin canal, en tout semblables aux glandes décrites par Sommer chez D. hepalicum, par Sommer et Landois chez Botriocephalus, et considérées par Moniez comme un ovaire, chez ce Ces- tode. La dernière partie du corps au-dessous des germigènes et du réser- voir spermatique, et jusqu’à l'extrémité postérieure est occupée par deux glandes dendritiques que l'on voit par transparence à l’œil nu, et qui sont les deux testicules {, t’, situés l’un au-dessus de l’autre. De chacun d’eux part un canal déférent, et ces deux canaux cd, cd’ viennent se fusionner sur la face dorsale au niveau des premières circonvolutions de l’oviducte pour former le canal séminal c d'”. A l'extrémité du corps se trouve Îe pore excréleur pe, qui termine un canal excréteur médian cex, très appa- rent sur le vivant sous forme d’une traînée tortueuse claire. À la base du réservoir spermatique, ce canal médian se renfle en forme de poire et dans ce renflement viennent aboutir, de chaque côté, de plus fins canaux cex',placés en dehors des cæcums intestinaux, et qui remontent jusqu'aux environs de la ventouse antérieure. Quant au pigment noir qui donne sa caractéristique à cette espèce, il est répandu surtout au dessous du tégument externe et localisé dans les lacunes du cœlome. Il est formé de granulations noir foncé de dimensions très diverses. Ne serait-ce pas du pigment biliaire absorbé par le parasite et les différences de teintes que j'ai observées ne tiendraient-elles pas pré- cisément à l’absorption plus ou moins grande de bile par le Distome ? Mes observations rectifient, ce me semble, plusieurs erreurs anatomi- ques commises par nos prédécesseurs, notamment par Cobbold et Mac Connell. La vésicule spermatique ne communique pas avec les testicules. Son canal (canal de Laurer), que les auteurs précédents fontcommuniquer avec le testicule, s'ouvre au dehors. Le germigène ne recoit pas les con- duits vitellins. Ces conduits débouchent et versent leurs produits au con- fluent dont j'ai parlé. Enfin, il existe deux canaux déférents qui viennent s'unir sur la face dorsale en un gros canal séminal, lequel aboutit avec Poviducte dans un seul pore génital. J'incline à penser que les deux espèces si voisines, décrites par Bälz, sous le nom de D. hepatis perniciosum et D. hepatis innocuum, réunies déjà par R. Blanchard sous le nom de ). japonicum, doivent se confondre avec /). sinense. Ces espèces sont caractérisées par des différences de taille et de coloration que nous avons retrouvées chez D. sinense. L'œuf de ce dernier renferme aussi le pelit globule signalé par Bälz chez le Distome du Japon, au pôle opposé à celui de l’opercule. : 510 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Enfin, comme étiologie, je crois que le Ÿ. sinense pourrait bien vivre à l’état embryonnaire dans la Melania qui héberge Caobangia, ou peut-être dans une autre coquille d’eau douce où j'ai rencontré des cercaires à queue bifide. Les Chinois et les Annamites sont très friands de ces deux coquillages et contrairement à leurs habitudes culinaires pour les autres plats, ils les avalent très souvent crus. ÉTUDE MORPHOLOGIQUE DES CHAMPIGNONS DU FAVUS, par MM. COsTANTIN et SABRAZES. FAVUS DE L'HOMME. Oidium porriginis Mont. Achorion Schünleinii Reinak. Oospora porriginis (Mont. et Berk). Sacc. 1° Aspect de la culture. — Le plus ordinairement, la culture sur gélose à 1/100° du champignon isolé dans dix-sept cas de Favus de l’homme a l’as- pect d'une croûte saillante de contour nettement défini et irrégulier, légèrement translucide, rappelant un peu de la cire. La consistance de celte masse, qui n’atteint guère plus de 1 centimètre de large, est assez ferme, elle se brise par petits morceaux avec l'aiguille de platine. Le même aspect s’observe sur carotte. Assez rarement, l'aspect se modifie un peu (en général quand l’atmos- phère est très humide), le mycélium en arborisation apparaît sur le substratum et sur les côtés de la croûte; cette dernière perd son contour net, elle se hérisse d’une multitude de petites pointes. 2° Mycélium. — La largeur des filaments du mycélium est variable. On voit assez fréquemment ces tubes d’abord grêles se renfler en massue à l'extrémité, puis se ramifier dichotomiquement à plusieurs reprises. La dichotomie n’est pas toujours régulière, dans certains cas les rameaux avortent d'un côté. Cet aspect du mycélium est assez remarquable et assez caraciéristique quand on peut l’observer. 3° (remmes. — Les filaments mycéliens en s’enchevêtrant forment le tubercule qui constitue la croûte signalée précédemment. A la surface de cette masse se dressent des filaments irrégulièrement ondulés et ramifiés. Bientôt leurs extrémités se renflent et se séparent en chapelets irréguliers de cellules ovoïdes que nous désignerons sous le nom de gemmes. Ce sont des organes assez souvent peu différenciés des cellules végétatives mais qui dans quelques cas se disposent en chapelets assez réguliers, allongés et ramifiés, que l’on peut presque considérer comme des spores. Ces gemmes sont rarement sphériques, ordinairement aplaties trans- versalement ou allongées longitudinalement ; certaines présentent des saillies latérales ou de petites proéminences coniques terminales. En général, les chapelets sont courts. Deux fragments de chapelets sont séparés souvent par des parties le long desquelles les cellules ont l'aspect SÉANCE DU 13 MAI 511 normal de cellules végétatives. Ce cas fait transition vers celui où les cellules renflées se rencontrent quelquelois sur le mycélium. Dans les cultures vieilles, les gemmes s’accroissent beaucoup, prennent une teinte jaunâtre ocracé et se flétrissent ; elles rappellent à ce moment des outres à moitié vidées ; Ces caractères se maintiennent constants après des passages successifs sur la souris et sur l'homme. FAvus DU CHIEN. Vospora canina Cost. et Sabrazès. 1° Aspect de la culture. -— La culture qui se développe très bien avec la plus grande facilité à une température de 12 à 13 degrés — ce qui n'arrive pas pour le Favus de l’homme — ne présente ni sur gélose, ni sur carotte, ni sur pomme de terre, l'aspect de croûte cireuse signalé plus haut. Le contour n’est pas nettement défini, c’est une culture enva- hissante dont la partie superficielle blanche est soit poudrée, soit tomen- teuse. De plus, et c’est là un caractère important par sa constance, le substratum, quel qu'il soit, se colore constamment d'une teinte rosée ou violacée, teinte qui s'étend en profondeur et en lapaeu à une certaine distance du point où le semis a été fait. 2° Mycélium. — Le mycélium ne présente pas les terminaisons renflées et ramifiées dichotomiquement que nous avons signalées dans le précé- dent Favus. On remarque sur les bords de la culture des filaments assez différenciés composés de cellules courtes soit cylindriques, soit rétrécies vers le milieu, soit enfin, mais rarement, légèrement bombées. A l'endroit de la partie rentrante ou saillante apparait d'ordinaire une fine cloison de sorte que la plupart des éléments de la file paraissent bicellulaires. Les cloisons anciennes se gélifient communément et des fragments de filaments arron- dis aux extrémités peuvent s’isoler en comprenant deux ou un petit nombre de cellules. Enfin, la partie du mycélium qui contribue à teinter le substratum se présente dans l'acide lactique comme composée de filaments se teignant en jaune dans ce milieu. 3° Gemmes. — Le Favus du chien est capable de produire, comme le Favus de l’homme des gemmes tout à fait semblables à ceux qui ont été dé- crits plus haut disposés assez régulièrement dans quelques cas et affectant la disposition en longs chapelets; les éléments qui composent ces derniers font alors transition vers des spores. Dans certaines formes dégradées d'Oospora, on trouve des transitions analogues des cellules végétatives aux cellules reproductrices ; aussi pro- posons nous d'appeler ce champignon Oospora canina se distinguant de l'Oospora porriginis de l’homme par les caractères tirés de l'aspect des cultures et de l’organisation du mycélium. On a déjà invoqué des caractères de cet ordre pour distinguer certains 52 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE champignons, par exemple le Botrytis Bassiana et le Botrytis tenella. Les différences cultures se maintiennent avec constance après passage sur la souris, sur l’homme, sur le chien. FAVUS DE LA POULE. — Æpidermophyton gallinæ. Mégnin. Aspect de la culture. — Ge champignon produit sur l’agar ou gélatine de larges taches blanches tomenteuses. Sur la pomme de terre, l'aspect est assez caractéristique. Ce sont des croûtes blanches, farineuses, peu étendues, présentant une série de mamelons et de sillons irréguliers; les premiers se crevassent à la fin irrégulièrement. 2° Caractères microscopiques. — a) Sur pommede terre, on remarque au milieu des filaments mycéliens étroits des sortes de grands articles allon- gés mesurant de 45 à 60 y de leng sur 4 à 6 u de large. Ces grands élé- ments sont cloisonnés transversalement cinq à six fois, ils sont assez souvent portés sur un pédicelle étroit; ils rappellent assez les grandes spores épaisses de certaines Mucédinées phragmosporées. Assez souvent ces grands articles sont brusquement tronqués au sommet ou à la base. b). Sur gélatine addilionnée de bouillan de veau, la nature sporifère des articles précédents se révèle avec netteté. Les longs filaments minces qui se dressent sur le milieu se terminent par des corps ovoïdes très net- lement différenciés du mycélium. Ces spores sont assez variables de forme et de structure, quelques-unes sont bicellulaires et très renflées, mesurant 18 x de long sur 11 x de large, d’autres sont unicellulaires et plus étroites (27 & sur 7 g); enfin, on peut en voir un certain nombre se rapprochant tout à fait de celles qu’on observe sur la pomme de terre de 45 L de long sur 7 u de large et pluricellulaires. c). Les cultures sur bouillon de veau permettent de faire une autre re- - marque. Les pédicelles qui se terminent par des spores semblables aux précédentes peuvent différencier des éléments analogues sur leur longueur; ces articles, séparés entre eux par des cellules stériles, seront tronqués à leur sommet et à leur base quand ils s'isoleront. L'existence de spores terminales et de spores intercalaires n’est pas extraordinaire chez les champignons et on pourrait en citer des exem- ples nombreux (Wyctalis, Mucor, etc.). Ce qui ressort surtout de ce qui précède, c’est l’analogie de ces spores avec les chlamydospores. En somme, jamais on n'observe dans le champignon du Favus de la poule les gemmes si caractéristiques des deux premières espèces. Il n’y a donc aucune ressemblance entre celte espèce et les deux autres ; il y à donc lieu de la placer dans un autre genre et le nom d’Æ£pidermophyton gallinæ donné par M. Mégnin mérite d'être conservé : les caractères microscopiques ne faisant qu’accuser les dissemblances déjà révélées par l’aspect extérieur de la culture entre les Favus de l’homme et du chien et celui de la poule. En somme, l'étude morphologique des trois Favus conduit à en faire SÉANCE DU 13 MAI 913 trois espèces distinctes (1). Les Favus de l’homme et du chien sont très voisins, ils se distinguent l’un de l’autre, 1° par l'aspect constant des cul- tures, 2 par la structure invariable du mycélium et par sa coloration. Le Favus de la poule est un champignon tout à fait différent des deux précé- dents et qui mérite de constituer un genre à part. OBSERVATION D'ATAXIE LOCOMOTRICE GUÉRIE PAR LES INJECTIONS SOUS-CUTANÉES DE SUC TESTICULAIRE, par M. le D' Depoux. M. F..., âgé de quarante-six ans, marié et sans enfant, habitant Régina (Canada), vient me consulter le 27 mars 1893. IL se dit atteint d'ataxie locomotrice. Antécédents héréditaires. — Père mort à soixante-cinq ans de diarrhée aiguë. Mère morte à cinquante-huit ans d’un cancer au sein. — Aucune trace d’hérédilé au point de vue nerveux. Antécédents personnels. — M. F... est malade depuis le mois d'octobre 1889. À cette époque il faisait un voyage avec des sauvages, dans un canot d’écorce. Au cours de ce voyage, il s’est mouillé plusieurs fois et a subi deux tempêtes de neige des plus violentes. À ce moment, il ressentit tons les soirs, dans les jambes, les premières douleurs fulgurantes; il crut que ces douleurs étaient le résultat de la fatigue. Rentré à son domi- cile, M. F... continua, pendant quinze jours encore, à avoir des douleurs fulgurantes tous les soirs. Ses douleurs étaient un peu moins vives que pendant le voyage qu'il venait de faire, mais assez considérables cepen- dant pour le lenir éveillé jusqu'à quatre heures du matin. Ces douleurs cessèrent graduellement et le malade resta même toule une semaine sans souffrir. Après ce temps, survint une crise très forle et, périodiquement, les douleurs revinrent toujours très violentes une ou deux fois par semaine. Un médecin ordonna alors successivement l'antipyrine et le chloral qui ne donnèrent aucun résultat. On eut recours alors, en déses- poir de cause, aux injections sous-cutanées de morphine qui calmèrent les douleurs mais ne les empêchèrent pas de revenir régulièrement. Cet état persista jusqu'au 410 février 1890, date à partir de laquelle les dou- leurs fulgurantes disparurent des membres inférieurs pour apparaître dans la région abdominale. Cet état dura pendant un mois et força le malade à garder le lit tout le temps. Il n’y avait pas cinq jours qu'il com- mencait à se lever, lorsque les douleurs fulgurantes réapparurent dans les Jambes avec moins de violence qu'au début, mais pour reprendre (1) Nous ne croyons pas devoir énumérer, dans cette courte note, les nom- breux milieux de culture sur lesquels s'accusent ces différenciations. 914 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE petit à petit l’intensité et la périodicité premières, Depuis cette époque M.F... a dü prendre, pour se calmer, des injections sous-cutanées de mor- phine, en moyenne tous les quinze jours et même plus souvent, malgré la vie la plus régulière et l'absence de toute fatigue physique. La diminution de la sensibilité plantaire date de février 1890, il en est de même de la faiblesse de la vessie, des pertes séminales et de la faiblesse musculaire. La difficulté de marcher est tellement grande que le malade, même avec le secours du bras de sa femme, ne peut pas aller faire visite à un de ses amis ne demeurant pourtant qu'à cinq cents mètres de chez lui. La puissance génitale disparait peu à peu et la marche dans l'obscurité est extrêmement difficile. Le malade, voyant son état empirer, prend la résolution de venir se faire soigner en France où il arrive au commencement de mars 1893. Aussitôt débarqué à Paris, M. F. se renditchez le professeur Charcot qui diagnostiqua une affection tabélique n'ayant pas une origine syphilitique. Notre éminent confrère prescrivitle traitement qu'il emploie d'ordinaire contre l’ataxie locomotrice, à savoir : 1° applications de petites pointes de feu sur la région spinale, faitesavec le thermocautère ; 2° en cas de douleurs vives, de 4 à 6 cachets de phénacétine de 0,90 centigrammes par cachet (2 à 3 grammes par jour) ; 3° de la poudre de seigle ergoté fraichement pulvérisé, à prendre, en cachets, à la dose de 0,40 centigrammes, trois fois par jour après les repas, pendant les quatre premiers jours de chaque semaine; 4° deux granules de phosphure de zinc de Vigier, avant chaque repas, pendant les trois premières semaines de chaque mois. M. F..., ayant entendu parler de l'efficacité des injections sous-cutanées du suc testiculaire dans le traitement de l’ataxie locomotrice et n’ayant plus de doute sur la nature de sa maladie, après sa visite au professeur Charcot, s’est dit qu'il aurait toujours le temps de suivre, au Canada, le traitement de l'éminent maître et qu’il fallait mettre à profit son séjour à Paris pour se faire faire des injections sous-cutanées de liquide organique. Poussé par cette idée, il vint me trouver le 27 mars dernier. Les injections sont commencées le même jour, et, depuis cette époque, M. F. a reçu quo- tidiennement 6 centimètres cubes de suc testiculaire au cinquième. Après le huitième jour de traitement, les douleurs ont disparu pour ne plus revenir. M. F... est maintenant à l’état normal, non seulement quant aux douleurs, mais quant aux autres symptômes mentionnés ci- dessus (la sensibilité plantaire, l’état de la vessie, la puissance de marcher les yeux fermés, la puissance sexuelle, les pertes séminales). Seul, le réflexe rotulien n’est pas revenu, ainsi que MM. les membres de la Société de Biologie peuvent s’en convaincre en examinant le sujet de cette commu nication qui a bien voulu consentir à ce que je le présente aujourd’hui devant eux. SÉANCE DU 13 MAI 515 SUR LA POLYPNÉE DES CHIENS THYROÏDECTOMISÉS, par M. E. GLEy. J'ai signalé, il y a déjà assez longtemps, les troubles de la respiration que l’on peut observer sur les chiens thÿroïdectomisés. Parmi ces troubles, il en est un sur lequel j'ai particulièrement attiré l'attention, c’est la polypnée (1). J'ai montré que la fréquence des mouvements respiratoires est souvent très grande et que cette accélération de la respiration est en rapport avec l’augmentation de la lempérature observée chez les ani- maux opérés. Sur plusieurs de ceux-ci, en effet, j'ai constaté que la polypnée se produit, quand la température rectale s’est élevée à 41°,95,° 419,45, 41°,5. Or, on sait par les recherches de M. Charles Richet (2) que la polypnée, que ce physiologiste a appelée thermique, se montre toujours, dès que la température atteint 41°,5 environ. Mais dans un certain nombre de cas j’ai vu l'accélération respiratoire survenir, la température rectale étant encore relativement peu élevée. Ainsi sur un chien opéré le 18 juillet 1890, j'ai constaté Le 19, à 7 heures du matin, une température reclale de 39 degrés et à midi, de 40°,6 (la température s'élevait donc assez lentement, les secousses convulsives n'élant pas encore très fortes); à 10 heures, une polypnéeintense ne s'en était pas moins établie. Sur un autre chien, thyroïdectomisé le 2 mars 1891, je note, le Æ mars, la polypnée avec une température de 39°,8; sur un autre, opéré le 23 mai 1891, polypnée le 25 (108 respirations par minute), avec une température de 40°,5; sur un autre encore, opéré le 23 mai, polypnée constatée le 24, la température n'étant que de 40°,15. Tout récemment, j'ai eu l'occasion d'observer de nouveau ce fait. Il s’agit d’un chien opéré le 8 mai 1893. Le 9 mai, je note la polypnée (104 respira- tions par minute); à 11 heures du matin, la température rectale n’est que de 40 degrés; le 10 mai, à 10 h. 45 du matin, 414 respirations par minute, la température étant de 39°,65. On est done amené à distinguer chez les chiens thyroïdectomisés deux sortes de polypnée : l’une qui paraît dépendre directement de l’hyper- thermie, c’est la polypnée thermique de Charles Richet; et l’autre qui se produit quand la température ‘est encore relativement basse, c'est la polypnée que l’on peut appeler {oxique. Il est probable, en effet, qu’elle résulte de l’excitation du bulbe par les substances toxiques qui se trouvent dans le sang des animaux opérés. On connait d'ailleurs déjà la possi- bilité de cette polypnée de cause toxique. (1) Voy. Archives de physiologie, ianvier 1892. (2) Charles Richet. La chaleur animale, Paris, 1889. 516 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DE LA NON-ABSORPTION DE L'EAU PAR L'ESTOMAC, par MM. E. GLey et P. RONDEAU. On s’est demandé souvent si les liquides, et tout d'abord et particuliè- rement l’eau, sont résorbés dans l'estomac et en quelle proportion. Nous avons, il y a déjà cinq ans (4), fait des expériences de deux sortes pour essayer de résoudre la question. 1° Après avoir pratiqué une large ouverture du duodénum, à 2 ou 3 centimèlres au-dessous du pylore ‘sur des chiens anesthésiés par le chloroforme, et fixé l’orifice duodénal par des sutures à la plaie cutanée, on introduisait dans leur estomac, au moyen de la sonde œ*ophagienne, 5 à 700 centimètres cubes d’eau, par quantilés successives de 100 centi- mètres cubes. Nous n'avons jamais vu l’eau arriver, dans ces conditions, à l’orifice duodénal. Cette expérience fut faite sur deux chiens. On la répéta sur un autre animal non anesthésié. Le résultat, dans ces trois expériences, fut le même, que le chien fût laissé dans le décubitus dorsal ou redressé, par un mouvement de bascule imprimé à la table sur laquelle il était attaché. Il est clair que l’expérience ainsi disposée présentait de graves causes d'erreur, tenant à la chloroformisalion, aux tiraillements exercés sur l'estomac pendant l'opération préalable, à l'introduction de la sonde sur des animaux attachés, etc. Par suite de phénomènes réflexes consécutifs à ces manœuvres, l'estomac pouvait se distendre. D'autre part, le pylore se contractait presque toujours énergiquement, ce que nous avons pu constater directement. 2° Aussi modifiämes-nous tout de suite l'expérience. L'un de nous avait eu déjà l'occasion de remarquer sur deux chiens, sur lesquels il avait praliqué une fistule duodénale dans un autre but, que, lorsque ces ani- maux buvaient, toute l’eau absorbée sortait presque immédiatement par la canule fixée dans l’orifice duodénal. Nous avons alors, après chloro- formisalion, pratiqué sur un chien une large fistule du duodénum, au-des- sous du pylore, et fixé dans la fistule une grosse canule. Le lendemain et les iours suivants on faisait boire l’opéré. Nous avons loujours cons- taté que l’eau s'écoulait très rapidement par la canule laissée ouverte. Aussi une soif très vive s’'emparait-elle bientôt de ces animaux qui buvaient fréquemment, mais toujours sans résultat. Ce fait vient d’être signalé de nouveau par von Mering dans une com- munication au 12° Congrès allemand de médecine interne, tenu à Wies- baden du 42 au 45 avril courant (2). A ce propos, von Mering a étudié (4) Voy. E. Gley et P. Langlois : Estomac (physiologie), in Dictionnaire ency- oo sciences médicales, t. XXXVI, p. 122, Paris, 1888. (2) Voir une analyse de in Semaine médicale du 19 avril 1893, p. 191. SÉANCE DU 13 Mat 917 très soigneusement la question de la résorplion dans l’estomac et déter- miné les curieux accidents qui se produisent, quand on laisse ouvert l'orifice duodénal artificiellement créé. Ge physiologiste n’a évidemment pas eu connaissance de nos recherches, concernant le phénomène fonda- mental, le fait de la non-absorption de l’eau par l’estomac. Il faut dire du reste que nous n'avons relaté ce fait, d’une façon sommaire, mais très nette, que dans une publication bien connue et très répandue en France, le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, mais sans doute peu lue à l'étranger. Voici en effet ce que nous disions à l’article £’stomac de ce Dictionnaire, dans le volume publié en 1888. « D'après des recherches que nous avons entreprises avec M. P. Rondeau, si sur un chien, anes- thésié ou non, on pratique une fistule duodénale, et qu’on injecte une certaine quantité d'eau dans l'estomac par la sonde œsophagienne, on remarque que le liquide ne s'écoule pas par la canule duodénale. Dans ces conditions l’eau peut rester dans l'estomac fort longtemps. Mais sur plusieurs chiens, auxquels une fistule duodénale avait élé pratiquée dans un tout autre but par l’un de nous, il a été nettement constaté à maintes reprises que, lorsque ces chiens buvaient, l’eau s’écoulait immédiatement par la canule intestinale. Nous nous garderons cependant de généraliser ce fait, car on conçoit aisément qu'il puisse y avoir des conditions variées dans lesquelles l’eau reste un certain temps dans l'estomac. » (P. 145.) Ainsi le procédé même d'expérience et le résultat obtenu ont été les mêmes que dans les recherches auxquelles von Mering, de son côté, et sans connaître assurément nos anciens essais, vient de se livrer. EFFET DU LIQUIDE TESTICULAIRE SUR UN CHIEN PARAPLÉGIQUE ET ATTEINT DE FIBRO-SARCOME GÉNÉRALISÉ, par M. P. MÉGNIN. Il s’agit d’un gros chien de montagne, de la race dite « de Léonberg », ayant une taille de 80 centimètres au garrot, appartenant à une dame de la colonie russe de Paris, M®° K..., qui m'a donné les renseignements suivants : Ce chien est arrivé à Paris en septembre 1889, à l’âge de onze mois. Il était bien portant, mais maigre et avait peu d’appélit. À partir du mois d'août 1891, l'appétit devint meilleur et le chien com- mença à engraisser. En décembre de la même année il fut pris d’une bronchite et traité en conséquence. Il commencait à se remettre lorsqu'un soir, après un repas très gras, croit-on, il fut pris de malaises, d'insom- nie, de fièvre continue, de plaintes lorsqu'il était couché sur le côté; il était plus tranquille et assez gai pendant le jour. Peu à peu, ses mouve- NPs ‘= ANR ’ É 1 518 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ments devinrent gênés; il pouvait à peine courir, boitant de la jambe gauche, traînant ses membres postérieurs el ayant toujours l’air d'être très fatigué. On le traita pour anémie et faiblesse générale, en lui administrant des stimulants, et des fortifiants. Malgré cela, le chien dépérissait progressivement, et cela malgré une nourriture très substantielle et très abondante : il mangeait 2 kilogrammes à 2 kilograinmes 1/2 de viande par jour, avec du pain quil n’absorbaïit qu'en employant mille ruses. Il avait fréquemment des vomituritions, qu'on rendait plus rares par l'usage du bicarbonate de soude. Au mois de mai de l’année dernière il eut une attaque de dysenterie qui dura deux mois, et qui l’exténua tout à fait, lamenant à un degré de maigreur effrayant : il n'avait plus littéralement que la peau sur les os. Il avait perdu entièrement ses forces; il titubait et tombait après avoir fail avec peine quelques pas, en trainant son train de derrière; il lui était impossible de monter et de descendre une marche d'escalier. À ce moment on le nourrissait presque exclusivement de lait coupé d’eau de Vichy, 2 à 3 litres par jour, et d'un peu de viande. Quand il était debout ou assis, si on lui relevait la tête il tombait comme dans un accès de vertige. Me K... ayant beaucoup entenau parler des injections Brown-Séquar- diennes et de leur puissance reconstituante, voulut en essayer pour son chien. Le liquide testiculaire, préparé chez un pharmacien suivant les indications données par les journaux de médecine, fut d'abord donnéen lavement. Presque immédiatement on remarqua un relèvement de lap- pétit et de l'énergie. Encouragée par ce commencement de succès et craignantdes accidents avec un liquide plus ou moins pur, M®° K... sollicita, par mon intermé- diaire, M. d'Arsonval, qui voulut bien lui délivrer du liquide organique préparé à son laboratoire, en raison de l'intérêt qu'il y avait à poursuivre celle expérience sur un animal; le cas étant jusqu'à présent presque unique. À partir du mois d'octobre, des injections sous-cutanées furent faites régulièrement selon les prescriptions, et on put constater pres- qu’aussitôt une amélioration croissante et constante : l'appétitaugmente, les éructations diminuèrent, et les forces revinrent assez rapidement. Après quinze jours de traitement, le chien pouvait de nouveau monter les escaliers; il ne tombait plus sur son train de derrière, excepté après de grandes émotions, où une faiblesse momentanée s’accusait ; il dormait tranquillement, ne se plaignait plus que rarement et recommençait à courir. | Bref, au commencement de janvier de cette année, il était comme trans- formé et tous ceux qui l’avaient vu dans son état de délabrement physito- logique extrême, n'en pouvaient croire leurs yeux : il avait de nouveau de l’'embonpoint, un beau poil bien fourni et montait gaillardement les SÉANCE DU 43 MAI 519 deux élages de l'hôtel de la rue Jean-Goujon qu'habite sa maîtresse ; lorsqu'un accident, une indigestion avec hémorragie gastrique, est venu terminer son existence et donner l’occasion de faire son autopsie. Elle fut pratiquée par un vétérinaire du quartier, et les pièces inléres- santes examinées au laboratoire d’histologie du service de l'inspection de la boucherie, Nous transerivons ici la note fournie à cette occasion par le vétérinaire en question, M. Lesecq. Poumons. — Tubercules nombreux à la surface du poumon formant des élevures de la grosseur d’un grain de plomb à celle d’une lentille, Péricarde. — Tapissé intérieurement et extérieurement d'une quantité considérable de tubercules aplatis à la face interne de la séreuse, presque lisses, et formant sur la face externe des élevures plus saillantes et plus ou moins volumineuses, plus ou moins rapprochées, quelquefois réunies en forme d’agglomérats. Cœur. — Sa surface est tapissée de petites néoplasies disséminées don- nant au toucher la sensation d’une râpe ; au niveau des oreillettes les tubercules sont plus nombreux, plus rapprochés, plus volumineux et forment des masses plus ou moins développées. Rien dans les cavités auriculaires et ventriculaires, Mésentère. — Couvert de tumeurs assez grosses, isolées ou agglomé- rées ; quelques-unes atteignent le volume d’un œuf de poule et même plus. Estomac. — Face interne parsemée de nombreuses petites élevures de la grosseur d’un grain de mil ; nombreuses petites déchirures et rupture hémorragique de la muqueuse. Moelle. — Enveloppe de la moelle, dures, sèches. Rien dans le foie, dans l'aorte, dans la trackée, dans l'œsophage ou les autres organes non signalés. En général, les tumeurs généralisées se présentent sous forme de mas- ses, dures, résistantes, difficiles à inciser. À la coupe, elles ont un aspect blanc jaunâtre et peraissent formées de petits tubercules réunis par du tissu conjonctif ; il est impossible de les triturer pour en obtenir du sue, tellement elles sont dures el fibreuses, L'examen microscopique au point de vue de la tuberculose est négatif. En somme, c'est du fibro-sarcome généralisé, compliqué de paraplégie et l’ effet des injeclions Brown- Séquardiennes a été remarquable dans.ce cas. due, 520 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE REMARQUES A L'ÉGARD DES CAS D'ATAXIE, CHEZ L'HOMME ET CHEZ LE CHIEN, COMMUNIQUÉS PAR M. DEpoux ET M. MÉGNIN, par M. BROwN-SÉQUARD. J'ai eu l'occasion d'examiner, il y a quelques semaines, l’intelligent Canadien que M. Depoux nous montre aujourd'hui, complètement guéri d’ataxie tabétique. A part les troubles oculaires dont il n’y a jamais eu trace dans ce cas, les symptômes étaient incontestablement ceux de cette affection, comme l’a constaté notre collègue M. Charcot, d’après la con- sullation rédigée par lui et que j'ai vue. Ce diagnostic n’est done pas plus douteux que celui qui a été donné à l’égard des quatre individus guéris d’ataxie locomotrice, déjà montrés à la Société par M. Depoux (Voy. Comptes rendus de la Soc. de Biol., 1891, p. 399, et 1899, p. 501, 794 et 860). Voilà donc maintenant cinq ataxiques, traités par M. Depoux avec du liquide orchitique et guéris au bout de six semaines à trois mois. Dans les cinq cas, la guérison est complète, à part l’absence du réflexe rotulien qui a persisté chez quatre d’entre eux. Ce réflexe n’est revenu que chez le premier de ces cinq individus (C. R., 1891, p. 399). Il n’a pas reparu aussi chez un grand nombre d'ataxiques guéris dont nous connaissons l’histoire, M. d’Arsonval et moi. Il n’était pas revenu dans le cas intéressant du D° Gibert (du Havre), que j'ai communiqué à la Société (C. À., 1892, p. 505). Il en a été de même chez un autre individu traité avec le même succès par ce médecin. à Les guérisons et les améliorations sont tellement la règle dans l’ataxie locomotrice traitée par le liquide orchitique que si J'ajoute aux 342 cas dont j'ai parlé à l’Académie des sciences, il y a trois semaines (Comptes rendus Acad. sciences), ceux du tableau que j'ai publié (C. À. Soc. Biol., 1892, p. 507), il y a près d’un an, nous avons les chiffres suivants : AUTEURS NOMBRE FAITS FAITS de cas. favorables. nuls. VICÉOTO Sd TU A NE ER 7 ÿ 2 OUSDENSK YA CMP SEAT 4 3 1 DeDOUXAPAME NES RER PRES 13 11 2 Brainerdii 1008, 20, Sens 3 3 0 Gibert rire Sp A 2 2 0 GHISONESCU RE CC 2 2 0 DIVETS 2 PS eee 18 1% 4 D'Arsonvaliet moi Er 342 314 28 391 354 37 La proportion de guéris ou améliorés est donc de plus de 90 p. 400. Je ne sache pas que l’on connaisse de maladie organique des centres ner- SÉANCE DU 13 MAI 521. veux dont les symptômes disparaissent aussi souvent sous l'influence d’un traitement quelconque. À propos de la communication de M. Mégnin, qu'il y ait eu une véri- table ataxie locomotrice ou une méningomyélite avec des phénomènes d’ataxie, le fait qu'il ya eu une très grande amélioration n’en est pas moins très remarquable et répond clairement à ceux qui demandent encore si les guérisons sous l'influence d'’injections de liquide orchitique ne dépendent pas d’une suggestion, puisqu'il s’agit d’un chien. L'idée de la suggestion, du reste, peut-elle vivre un seul instant en présence de ce fait, que les malades si nombreux qui ont été guéris après des injections, avaient été vainement traités par des traitements variés, sans profit aucun. Pourquoi donc la suggestion agirait-elle si souvent dans les cas d'emploi du liquide orchitique et si rarement ou si peu dons les cas d’autres traitements ? TOXINES ET LÉSIONS CELLULAIRES, par M. A. CHARRIN. . Dans une série de communications, j'ai élabli que le bacille pyocya- nique délerminait du côté des viscères des lésions variées (congestion, hémorragies, infarctus, altéralions épithéliales, scléreuses, vasculaires, dégénérescence amyloide, etc.) ; j'ai montré que ces lésions étaient l’œuvre du microbe lui-même, surtout de ses sécrétions; que, parmi ces sécrétions, il en existait de plus ou moins actives; que les principes insolubles dans l’alcool avaient un pouvoir toxique supérieur à celui des substances solubles ou volatiles. . Les recherches, dont je publie aujourd’ hui les résultats, ne sont pas IE chose que la continuation de ces expériences ; elles prouvent, en effet, que l'injection des cadavres microbiens provoque, dans le foie ou dans le rein, de notables modifications anatomo-pathologiques, plus marquées, par exemple, que celles qui dérivent de l'emploi des parties filtrées. Pour réaliser ces modifications, on cultive la bactérie dans un demi- litre de bouillon de bœuf neutre pendant un mois environ. On filtre sur la bougie; on reprend dans 50 centimètres cubes d’eau bouillie tout ce que cette bougie a retenu; on chauffe cette eau à 65 dégrés, durant 3 heures chaque fois, huit jours de suite; puis, on l’injecte dans l’uretère, dans la veine porte, ou dans le canal cholédoque. . (4) IL est permis de rappeler que les propriétés du bacille pyocyanogène ont grandement contribué à prouver ces diverses propositions. (Voir Société Biologie; 1885 à 1893, et 1° volume Traité Médecine Charcot-Bouchard. 599 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En dehors des accidents opératoires, on obtient une survie propor: tionnelle aux doses introduites. Les dessins que je présente ont élé faits, avec une entière exactitude, d'après les préparations du foie et du rein droit de deux lapins. Le premier avait recu 7 centimètres cubes du mélange indiqué dans les voies biliaires ; il a résisté pendant 16 jours; le second n'avait reçu qué 2 centimètres cubes de ce mélange dans l'uretère ; la survie a été de trois semaines. A l’autopsie, ces organes, d’un volume sensiblement normal, avaient une consistance plus considérable qu’à l’état habituel. Sur des coupes colorées au picro-carmin, après durcissement dans l'alcool, on a décelé une série d’altérations. Ge qui frappe, avant tout, c’est l'existence, dans ces deux viscères, d'un nombre énorme de cellules embryonnaires, notes entre les lobules ou entre les tubes. La lésion est principalement interstitielle. Dans le foie, ces cullules se rencontrent au niveau de l’espace-porte, cherchant à pénétrer entre les îlots, à les disséquer. Cà et là, elles entament ces ilots; on aperçoit même quelques colonies plus ou moins arrondies, isolées au, milieu du parenchyme, formées par les éléments inflammatoires, complètement séparées des organites qui prolifèrent autour du système porto-biliaire et rapprochées à des degrés divers de la veine centrale. Les vaisseaux paraissent, sur plusieurs points, légèrement dilatés, sur plusieurs points, également, les conduits biliaires offrent des signes manifestes de péri-angiocholite. C’est là, du reste, le résultat, en partie du moins, du choix de la porte d'entrée; on obtient, en effet, de la péri- phlébite, si on introduit les (oxines par les canaux veineux. Les cellules hépatiques ne s’altèrent que dans la suite. Sur un second dessin, calqué sur la préparation du foie d’un lapin qui avait survécu plus longtemps que le premier, on voit que ces cellules ont partiellement disparu ; le tissu conjonctif les a remplacées; celles qui persistent sont granuleuses, graisseuses ; leur parenchyme est trouble. Un troisième dessin établit que, dans le rein, autour des collecteurs comme dans la région des tubes contournés, une intense prolifération d'éléments embryonnaires survient après l'injection de semblables toxines. Tantôt ces éléments, accumulés entre les conduits, augmentent l'épaisseur du tissu qui les sépare; tantôt ils se répandent sous l'aspect de fusées inflammatoires. Les revêtements tubulaires, ici incomplets, là granulo- graisseux, de même que dans la glande biliaire, ne sont atteints que secondairement. On retrouve, dans ces modifications histologiques,les variétés observées à propos des altérations macroscopiques. Il est des viscères qui résistent, qui ne sont pas impressionnés ou qui ne le sont que faiblement. Il en est d'autres qui offrent des lésions cellulaires prédominantes. —- Sur un qua- trième dessin, on voit, par exemple, que ce qui frappe, dans le rein d’un æ SÉANCE DU. 13 MAI 923 chat soumis au virus pyocyanique, c’est la dégénérescence graisseuse de l'épithélium. A vrai dire, normalement, chez cet animal, cet épithélium possède quelques-unes de ces granulations; l’état pathologique ne serait que l’exagération de l’état physiologique. C’est peut-être là une des causes de la diversité des changements qui se développent. La quantité, la qualité des produits, mobiles d’une culture à l’autre, la nature de la porte d'entrée, le fractionnement de la dose ou sa brusque et massive pénétration, l’espèce choisie, la puissance de réaction des tissus, etc., elc., entrent aussi en ligne de compte. Ce qu'on note le plus souvent au sein des viscères, c'est cet afflux ceilu- laire qui se retrouve, quand on dépose les toxines dans les mailles sous- cutanées, surtout chez les sujets vaccinés. Quel est, ou plutôt quels sont les mécanismes de ces lésions? Il est pro- bable que plusieurs processus interviennent : actes chimiotactiques ou directs, phénomènes réflexes, effets vaso-moleurs, spasmes suivis de dilatation, etc. Les recherches de M. Bouchard, celles de Gley, de Char- rin, ont, les premières, en effet, prouvé que les produits microbiens actionnaient le système nerveux vaso-moteur. Quelle est la substance chimique qui agit? Dans le liquide injecté, il y a les cadavres bactériens, mais il y a autre chose. Arnaud et Charrin ont montré que ces. cadavres, en dehors de toule intervention vitale, dédoublaient l'asparagine, possédaient une puissance diastasique ; ils ont mis en évidence la genèse de ces principes diastasiques dans des bouillons privés, à l’origine, de substances albumi- noïdes, comme dans ceux qui en possèdent, dans des cullures dont le pouvoir sur l'animal, contrairement à ce qu'on a récemment écrit, avait élé établi (1). Toutefois, s'appuyant sur l'expérience de Wurlz, expérience relative à l’adhérence de la papaïne à la fibrine, expérience que beaucoup d'auteurs semblent ignorer, ils se sont demandés si la matière aclive était. réellement le protoplasma,les alcali-albuminates de Buchner,ou une dias- tase soudée à ce protoplasma. Pour trancher la question, des progrès chimiques sont nécessaires. Aïñsi, après avoir prouvé que les microbes, pour réaliser les lésions des tissus, des organes, se servaient surtout de leurs sécrétions, l'expérimen- talion, logiquement poursuivie, permet de pousser plus avant l'analyse; elle nous conduit à désigner, dans ces sécrétions, les parties les plus nocives. (1) Voir à ce sujet : 1* vol., Traité méd., Gharcot-Bouchard, p. 194 à 199. 524 SOCIÉTÉ DE BIOLUGIE RÉSISTANCES MÉTALLIQUES POUR LA MESURE DES RÉSISTANCES . ÉLECTRIQUES DU CORPS HUMAIN ET DES LIQUIDES ORGANIQUES, par M. MERGIER. La mesure des résistances électriques des liquides organiques, comme d’ailleurs celles des solutions salines en général, ne peut se faire exacte- ment, par les méthodes ordinairement usitées pour les conducteurs métalliques, telle que celle du pont de Wheatstone, par exemple, à l’aide des courants continus. Une cause d'erreur qui ne saurait être négligée, car elle peut facilement faire varier les résultats du simple au double et même plus, provient de la polarisation des électrodes qui plongent dans le liquide à mesurer. Ce phénomène de polarisation consiste dans ce développement d'une force contre l’électromotrice qui provoque une perturbation dans l'équilibre électrique des branches du'pont, perturbation qui fausse complètement la mesure. Cette même cause d'erreur existe en ce qui concerne la mesure de la résistance électrique du corps humain par cette même méthode, comme d’ailleurs par celle de substitution qui est à rejeter en l'espèce d’une facon absolue. C’est ce qui explique les chiffres plus ou moins extraor- dinaires obtenus par les expérimentateurs qui s'en sont servis, sans tenir compte de la polarisation. Pour éviter cette cause d’erreur, on se sert depuis longtemps en physique, en ce qui concerne les liquides, de la méthode indiquée par Kohlrausch. Cette méthode consiste à remplacer, dans la méthode du pont, le courant continu par des courants alternatifs, et le galvano- mètre par un téléphone. On reconnaît que l’équilibre électrique est établi dans les branches du pont, par ce fait que le téléphone est au silence. | | La difficulté, dans cette méthode, résidé dans le choix des résistances étalonnées qui doivent servir de terme de comparaison. On ne peut, en effet, se servir des résistances métalliques de construction courante qui se trouvent dans tous les laboratoires. Ces résistances ne sont pas exemptes de self-induction, et pour ce fait le téléphone ne peut être amené au silence. Tout au plus obtient-on un minimum de bruit relatif, et encore celui-ci ne correspond-il nullement à la posrion d’ “eu Moe des brançhes du pont. 1 Pour obvier à cet inconvénient, plusieurs expérimentateurs se sont servi de résistances liquides (solutions de sulfate de cuivre, de chlorure de sodium, etc.). Mais il faut graduer ces résistances et les vérifier à chaque mesure, car elles sont soumises à des variations continuelles, provenant, soit des variations de température, soit de l’évaporation. Aussi, dans ces conditions, la méthode de Kohlrausch ne peut-elle servir que dans les . SÉANCE DU 13 Maï 025 mesures ie laboratoire et ne saurait devenir une méthode pratique au point de vue clinique. Chaperon, il y a quelques annéex, réalisa des bobines de résrdianee qui supprimaient les inconvénients de la self-induclion. Mais il est encore impossible de trouver chez les constructeurs des boîtes de résistance établies d’après les indications de ce physicien. Nous avons pensé qu'il n'était pas impossible d'arriver aux mêmes résultats par un dispositif simple, à la portée de tous, et d'obtenir des résistances métalliques offrant les mêmes qualités que les résistances liquides sans en avoir les inconvénients. Nous avons résolu la question de la façon suivante : Sur une plaque d'ébonite sont disposées sur deux extrémités opposées deux rangées rectilignes de petites chevilles d'ivoire espacées d’une distance égale à leur diamètre. Un fil de platine iridié, attaché par son extrémité à une borne métallique placée sur le côté, est passé autour de la première cheville de l’une des rangées, descend contourner la cheville correspon- dante de l’autre rangée pour remonter vers la première et ainsi de suite jusqu’à l’extrémité de la plaque où le fil est arrèté à une seconde borne métallique. On a ainsi sur toute la surface de la plaque un fil métallique tendu selon des lignes parallèles équidistantes et disposé de telle sorte qu'un courant marchera en sens inverse dans deux fils consécutifs. Grâce à cette disposition, la self-induction est nulle et la capacité négligeable, Des résistances de ce genre placées dans les branches d’un pont de Weasthone, disposé pour la méthode de Kolrausch, font équilibre à une résistance liquide en laissant le téléphone au silence. Nous devons ajouter que la position d'équilibre n’est pas modifiée par cet enroulement. La résistance électrique d’une de ces bobines a exactement la même valeur mesurée avec un courant continu ou avec des courants alternatifs, ce qui n’a pas lieu avec les résistances métalliques ordinaires. En variant le diamètre du fil on peut obtenir facilement des bobines allant depuis 4 ohm jusqu’à 1,000 ohms et plus, sans excéder les dimen- sions voulues pour constituer des boîtes de grandeur ordinaire. De plus, on peut utiliser les deux faces de la plaque d’ébonite, en lais- sant les chevilles d'ivoire saillir des deux côtés. Le fil, après avoir été enroulé autour de la première cheville, descend contourner le bord infé- rieur de la plaque pour venir s'enrouler autour de la même cheville mais du côté opposé, redescend de nouveau vers le bord inférieur pour passer sur la première face, prendre la deuxième cheville et ainsi de suite, On a ainsi deux séries de fils parallèles et équidistants et donnant le même résultat que l’enroulement précédent. - La bobine que nous présentons à la Société est construite sur ce der- nier modèle. Elle porte seixe rangées doubles de fil de platine iridié au 1/20° de millimètre. Sa résistance esl de 1,000 ohms à 41/1000: d'ohm près. 526 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Nous vous présentons également une boîte renfermant deux bobines de 5 ohms, construite par M. Gaiffe. Ces bobines peuvent être prises en série ou en surface, de façon à avoir 10 ohms ou 2, 5 ohms. Leur résis- tance n’a pas varié depuis plus d’un an qu’elies sont construites. Une précaution indispensable pour assurer le bon fonctionnement de ces résistances, c’est d'isoler les fils sur la plaque d’ébonite d’une façon parfaite. Ce résultat est obtenu en passant sur toute la surface de la plaque une couche de gomme laque qui recouvre les fils et Les fait adhé- rer à la plaque, et séchant à l’étuve. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MARETHEUX, directeur, 1, rue Cassette. 7 Ê VE 921 SÉANCE DU 20 MAI 1893 M. BrowN-Séquarp : Traitement de l'acromégalie par certains liquides organiques. — M. Browx-Séquarp : Note additionnelle à propos de la communication de M. De- poux, sur un cas de guérison d'ataxie locomotrice. — MM. Lavera et CATRIN : Recherches bactériologiques sur les oreillons. — MM. R. Wurrz et R. Leuper (de Rouen) : Note sur l'identité du bacille lactique de Pasteur avec le Bacillus lactis aerogenes. — MM. D’ArsonvaL et CHarrix : Pression et microbes. — MM.N. GRÉHANT et Louis D'HEexry : Perfectionnement apporté à la manœuvre de la pompe à mercure. — M. Auc. Crarpenrier : L'excitation faradique unipolaire, son action sur les nerfs moteurs. Présidence de M. Chauveau. TRAITEMENT DE L'ACROMÉGALIE PAR CERTAINS LIQUIDES OBGANIQUES, par M. BROWN-SÉQUARD. Me servant de la publicité de la Société, je veux signaler aux médecins qui auraient un cas d'acromégalie à soigner, que nous sommes disposés, M. d’Arsonval et moi, à donner les liquides organiques qui nous semblent devoir être d’une grande utilité contre cette affection, à tous ceux de nos confrères qui désireraient s’en servir. Ce sont les liquides retirés de la rate, de la thyroïde et de la moelle des os, qui paraissent certainement devoir posséder le plus de puissance contre celte terrible maladie. On peut employer ces trois liquides simultanément, après les avoir mèlés dans la seringue, ou préalablement dans le flacon. Il faudra injecter 4 gr. 1/2 ou 2 grammes de chacun des trois liquides, avec autant d’eau fraîchement bouillie, chaque jour. Il sera utile, sinon essentiel, d'employer simultanément le liquide orchi- tique à la dose quotidienne de 2 grammes, avec autant d’eau. NOTE ADDITIONNELLE A PROPOS DE LA COMMUNICATION DE M. DEPOUX, SUR UN CAS DE GUÉRISON D'ATAXIE LOCOMOTRICE, par M. BROWN-SÉQUARD. L'observation de M. Depoux, telle qu’elle a paru (Comptes rendus, p. 513), ne contient pas la mention qu'il a faite verbalement à la séance, que la disparition des symptômes n’a été extrêmement rapide que pour les douleurs fulgurantes, et que les autres symplômes nese sont amendés BIOLOG1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 18 528 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE que graduellement, la guérison complète n'ayant été obtenue qu’au bout de quarante-huit jours d’injections quotidiennes. Lorsque j'ai vu le malade, après un peu plus d’un mois de traitement, il ne se tenait encore qu'avec difficulté debout sur un pied, les yeux fer- més, et sa marche était encore plus hésitante que celle d’un homme à l’élat de santé, lorsque ses yeux étaient clos. La Société a vu, samedi der- nier, que l’état normal, à cet égard, est complètement revenu. Il en est de même quant à sa puissance de se tenir debout sur un seul pied, les yeux fermés. Il peut le faire parfaitement maintenant. Il est évident qu'il ne reste plus trace, chez lui (à part l'absence du réflexe rotulien) d'aucun des divers symptômes tabétiques dont l'existence avait servi à établir, d'une manière incontestable, le diagnostic d’une ataxie locomotrice typique à plusieurs égards. RECHERCHES BACTÉRIOLOGIQUES SUR LES OREILLONS, par MM. LAvErRaAN et CATRIN. (2° note.) Dans une communication faite à la Société de biologie le 28 janvier dernier, nous avons donné les premiers résultats de nos recherches bac- tériologiques sur les oreillons. Depuis lors nous avons continué ces recherches chez les malades atteints d’oreillons et nous avons étudié sur différents animaux l’action du diplocoque précédemment décrit. Nous avons trouvé ce diplocoque 67 fois sur 92 chez les malades atteints d’oreillons, dans le sang, dans les exsudats des parotides, des orchites ourliennes, du tissu conjonctif (œdème ourlieu), ou des articu- lations (arthrites ourliennes). Les exsudals des tumeurs parotidiennes ont donné 39 fois sur 56 des cultures pures de diplocoques, deux fois des cultures impures, 15 fois le résultat des ensemencements a été négatif. Les exsudats de l’orchite ourlienne ont donné 12 fois sur 16 des cul- tures pures de diplocoques, une fois une culture impure, 3 fois le résul- tat des ensemencements a été négatif. Le sang des malades atteints d'oreillons avec fièvre a donné 10 fois sur 45 des cultures pures de diplocoques, 5 fois le résultat des ensemen- cements a été négatif. Les exsudats des œdèmes ourliens sous-cutanés ont donné 3 fois sur 3 des cultures pures de diplocoques. La sérosilé extraite du genou dans deux cas d’arthrite ourlienne a donné dans les deux cas des cultures pures de diplocoques. L'examen direct de ce liquide et de la sérosité de l’œdème ourlien a permis de constater la présence de microcoques et de diplocoques identiques à ceux des cultures. SÉANCE DU 20 vai 029 a ——_—_—_—_—_— —— L'examen du sang des convalescents d’oreillons a révélé chez quelques malades la présence des diplocoques, quinze jours ou trois semaines après guérison apparente des oreillons; après un mois, le sang s’est tou- jours montré stérile. La persistance des microbes dans le sang et proba- blement aussi dans les parotides et dans la salive explique pourquoi des malades convalescents d'oreillons peuvent transmettre la maladie. Du pus recueilli dans un abcès du cou chez un malade atteint d'oreil- lons, a donné des cultures pures du s{aphylococcus pyogenes aureus ; cela montre bien que dans les cas, assez rares d’ailleurs, où des suppurations se produisent comme complications des oreillons, il s’agit d'infections secondaires; on s'explique ainsi que les observateurs qui ont recherché le microbe des oreillons dans le pus de ces suppurations accidentelles aient été induits en erreur, surtout à une époque où les caractères des microbes de la suppuration étaient peu connus. Au sujet de la description du diplocoque et de sa culture dans le bouil- lon, dans la gélatine ou sur gélose, nous n'avons rien à ajouter à ce qui a été dit dans la note précédente. Ce microbe se développe très lentement sur gélatine à la température de 20 à 22 degrés, tandis qu’il croît rapide- ment dans le bouillon et sur gélose à 35 degrés. La liquéfaction de la gélatine est très tardive et très lente. Sur le sérum, le diplocoque donne des cultures blanchâtres, peu caractéristiques. Inoculalion aux animaux. — Nos expériences ont porté sur des lapins, sur des cobayes, sur des souris et sur des chiens. Les inoculations sous-cutanées ou intra-péritonéales (1/2 centimètre cube à 1 centimètre cube du bouillon de culture) n'ont donné chez le cobaye et chez le lapin que des résultats négatifs, il en a été de même des injections intra-veineuses faites chez deux lapins (injection de 1 centi- mètre cube du bouillon de culture dans la veine marginale de l'oreille). L'injection du bouillon de culture faite dans le tissu conjonctif sous- cutané ne produit pas en général d’inflammation; nous nous en sommes assurés en pratiquant des injections dans le tissu conjonctif de l’oreille chez des lapins blancs, c’est-à-dire dans des conditions où le processus inflammatoire consécutif à l'injection aurait été facile à constater. Jamais à la suite des injections il n’y a eu de suppuration. Les injections faites dans les testicules provoquent au contraire une inflammation vive. Le lapin est très commode pour cette expérience, Les testicules sont faciles à ponctionner et les bourses, très lâches, permettent d'apprécier facilement leurs changements de volume. Supposons qu'on a injecté 1 demi-cenlimètre cube du bouillon de cul- ture du diplocoque dans un testicule; au bout de vingt-quatre heures on observe tous les signes d’une orchite aiguë plus ou moins intense, le tes- ticule à doublé ou triplé de volume, la bourse qui renferme le testicule malade est rouge, tuméfiée. Les phénomènes inflammatoires s’accentuent les jours suivants, mais bientôt la tuméfaction du testicule, l'œdème et la 530 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE —_——— ——— _———————“—_———— — —_—— rougeur de la bourse correspondante diminuent, puis disparaissent. En général, le huitième jour après l'injection, le testicule a repris son volume normal; dans un cas la tuméfaction du testicule qui était énorme a persislé beaucoup plus longtemps. Dans aucun cas il n'y a eu de suppuration du teslicule à la suite de ces injections. Chez le chien nous avons constaté également l'apparition d'orchites à la suite de l'injection intra-testiculaire des cultures du diplocoque. Ces orchites se sont terminées comme chez le lapin par résolution complète vers le huitième jour. L’atrophie testiculaire consécutive à l’orchite n’a pas été notée jus- qu'ici chez les animaux en expérience, mais il y aura lieu de revoir à ce point de vue les animaux chez lesquels des orchites ont été provoquées. Chez les souris blanche, les injections sous-cutanées du bouillon de culture du diplocoque ont été suivies de mort 4 fois sur 26. Les souris qui sont mortes avaient reçu de 1/2 centimètre cube à 1 centimètre cube du liquide de culture ; la rate était tuméfiée et on trouvait des diplocoques dans le sang. Les injections intra-péritonéales ont déterminé la mort 3 fois sur 4; à l’autopsie le péritoine présentait des traces d'in- flammation et le sang recueilli dans le cœur contenait des diplocoques. Nous n’avons pas constaté l’exaltation de la virulence du microbe après son passage par l'organisme de la souris. En résumé, le diplocoque que nous avons décrit précédemment a été trouvé 67 fois sur 92, soit dans 72 p. 100 des cas ; sa présence a été constatée : dans les exsudats des parotides et des orchites ourliennes, dans le sang, dans l’œdème ourlien sous-cutané, dans deux cas d’arthrite ourlienne. L’expérimentation sur les animaux n'a pas fourni de résultats bien probants en faveur de l’action pathogène du diplocoque ; il fallait d’ail- leurs s'attendre à ce résultat, car on ne connaît pas d’animaux suscep- tibles de contracter les oreillons. Si de nouvelles recherches, venant confirmer celle-ci, montrent que le diplocoque observé par nous se rencontre toujours chez les malades atteints d’oreillons et seulement chez eux, on pourra admettre avec toute vraisemblance que ce microbe est bien l'agent pathogène des oreillons comme nous inclinons à le croire. ÿ: sd Ék AT par M. RoGERr. 7 MAS? NY s J'ai eu l'occasion d'observer une épizootie qui, le mois dernier, à fait —" périr un lot de vingt grenouilles apportées au laboratoire de M. le pro- fesseur Bouchard. Chaque jour je voyais succomber deux ou trois de ces animaux ; je pensai donc qu'il s'agissait d'une maladie infectieuse, dont les germes avaient pu être puisés dans l’eau de l'aquarium. L'examen micros- copique confirma cette hypothèse : les viscères et le sang renfermaient un petit bacille que j'obtins, dès la première culture, à l’état de pureté; le même bacille se trouvait en abondance dans l’eau que contenait l’aqua- rium et dans celle qu'apportaient les conduites du laboratoire. En pour- 7110 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE suivant l'étude de ce microbe, je reconnus que j'élais en présence de l’agent pathogène que Sanarelli avait rencontré dans un cas analogue et qu'il avait décrit sous le nom de Bacillus hydrophilus fuscus (4). Je n'insisterai pas sur l’aspect morphologique de ce bacille ou sur les caractères de ses cullures; je n'aurais qu’à reproduire les descriptions très exactes de Sanarelli. Voici un résumé succinct des observations que j'ai faites. 41° Cultures sur agar, à 37 degrés : Apparition, au bout de 24 heures, de petites colonies isolées, si l’ensemencement est fait avec le sang d'un animal infecté ; les colonies ne tardent pas à s'unir et à se présenter sous l'aspect d'une strie blanche, assez épaisse. Apparition d'emblée d'une ligne épaisse, si on étend avec l'aiguille de platine une petite quantité de semence empruntée à une culture antérieure. 2 Aqar glycériné : Mème aspect si l'ensemencement esl fait en strie ; apparition de bulles gazeuses si l'ensemencement est pratiqué en piqûre. 3° Gélatine (ensemencement par piqüre) : liquéfaction commençant vers la 20° heure, sous forme d’un canal terminé supérieurement par une cupule ; en trois jours, liquéfaction complète. 4° Pomme de terre : Culture épaisse, d’abord jaune, puis bistre, deve- nant brune vers le quatrième ou le cinquième jour. 5 Bouillon : Trouble uniforme, puis léger dépôt au fond du vase. 6° Lait : Coagulalion en 48 heures; le milieu reste neutre ou deviens très légèrement acide. 7° Morphologie : Petits bâtonnets mobiles, à extrémités arrondies, ayant de À à 2 y de long; dans les milieux liquides, on observe souvent quelques éléments filamenteux. 8° Action pathogène : Inoculation de cultures dans le bouillon, âgées de L8 heures. a. Grenouilles : 4 à 5 gouttes introduites dans la cavité abdominale entraînent la mort en 24 ou 30 heures. b. Poissons (cyprins) : mort en 24 heures après une injection de 2 ou 3 gouttes. ce. Lapins : Mort en 44 ou 15 heures après introduction de 3 ou 4 gouttes dans une veine. d. Gobayes : 5 à 10 gouttes-injectées sous la peau font périr les animaux en un temps qui varie de 18 à 48 heures. L’autopsie révèle chez loutes les espèces des suffusions hémorragiques ; chez le lapin, elles sont surtout appréciables au niveau de l'intestin et de certains muscles, particulièrement du psoas; une fois, le péricarde ren- fermait un épanchement sanguin abondant. Chez le cobaye, quand la survie à atteint 36 ou 48 heures, on trouve au point d'inoculation un (1) Sanarelli. Ueber einen neuen Mikroorganismus des Wassers, Centralbl. für Bakteriologie, Bd IX, S. 193, 1891. SÉANCE DU 8 JUILLET 711 œdème sanguinolent qui infiltre le tissu cellulaire sur une étendue consi- dérable. L'examen microscopique démontre que les viscères et le sang ren- ferment une quantité considérable de bacilles. Si j'ai rapporté brièvement les quelques expériences que j'ai faites, ce n’est pas à cause de leur nouveauté : elles n'ajoutent rien aux recherches de Sanarelli. Mais il m'a paru intéressant de relater celte épizootie : le haut pouvoir pathogène du 2. hydrophilus fuscus doit fixer l’attention des observateurs. Voilà un microbe qui lue les mammifères aussi rapi- dement que les batraciens et les poissons et qui, en réalité, semble très répandu; je l’ai trouvé en abondance dans l'eau et on peut se demander s’il ne pourrait pas produire, directement ou indirectement, des accidents chez l’homme, COURANTS ALTERNATIFS DE HAUTE TENSION PRODUITS A L'AIDE DES MACHINES ÉLECTROSTATIQUES, par M. le D' Lepuc (de Nantes)’ Messieurs, on peut, à l’aide des machines électrostatiques, produire des courants alternatifs de haute tension possédant des propriétés assez par- ticulières pour rendre leur étude digne d'intérêt. Lorsqu'une machine électrostatique fonctionne et qu'une série d’étin- celles, continue en apparence, se produit entre les boules de ses excila- teurs, les conducteurs de la machine sont le siège de variations de poten- liel, de vibrations électriques, aujourd'hui bien connues. Ge sont ces vibrations électriques que nous utilisons pour la production de courants alternatifs. Nous suspendons par son armature interne une bouteille de Leyde à chacun des pôles de la machine, et nous réunissons les armatures externes par un circuit d'une très grande résistance. Les armatures in- ternes font ainsi partie des conducteurs de la machine, et leurs vibrations électriques qui, au même instant, se font en sens inverse dans chaque armature, le potentiel s’élevant d'un côté lorsqu'il s’abaisse de l’autre, leurs vibrations électriques se transmettent aux armatures externes, dans lesquelles elles déterminent alternativement des appels et des reflux d'électricité d'où résulte la production du courant alternatif dans le circuit qui unit ces armatures. Les courants alternatifs de haute tension, oblenus avec les machines staliques, excitent les nerfs sensitifs et moteurs. Pour leur emploi, une seule électrode suffit. Nous nous servons d’une pointe métallique mousse, tenue par un manche de verre, et fixée à la chaine libre de l'une des armatures externes ; cetle pointe promenée sur la peau, lorsqu'elle passe 119 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sur un nerf sensitif ou moteur, l’excite dans toute sa distribution au-des- sous de l’électrode. La sensation, dans la région innervée par un nerf sensitif, est tellement nette, qu'elle permet de dessiner sur la peau, la surface innervée. Un de nos collègues, M. le D' Vignard, nous a même fait remarquer qu’en dé- placant l'électrode sur le trone du nerf médian au poignet, on pouvait exciter successivement les nerfs collaléraux qui naissent de ce tronc. Le moindre déplacement de l'électrode suffit d’ailleurs pour faire cesser toute sensation. Ces courants constituent done un moyen de localiser l'excitation nerveuse mieux qu'on n'a pu le faire jusqu'ici; et cette pro- priété fait espérer qu'ils seront utiles aux physiologistes pour déterminer les localisations fonctionnelles du système nerveux périphérique ou cen- tral. Par suite de leur haut potentiel, la puissance inductrice de ces courants est tellement grande, qu'il n’est point nécessaire, pour exciter les nerfs, de mettre l'électrode en rapport avec la machine, il suffit de l’attacher à une prise de terre, pour qu'à distance elle devienne le siège de courants induits, suffisants pour exciter les nerfs. On peut même, avec ces courants, exciter les nerfs sensitifs et moteurs sans électrodes el sans conducteurs. Dans les recherches qui jusqu'iei ont été faites pour apprécier l’action du champ magnétique sur l'organisme humain, les sujets ont été placés dans le champ magnétique créé par un aimant (M. Charcot}: par un solénoïde (M. Boudet, de Paris); par un électro-aimant (M. Edison); et dans toutes ces expériences, que le champ magnétique fût fixe ou qu'on le fit varier, en dehors des faits observés chez Les hystériques, les résul- tats furent négatifs. Si l’on remarque que les expérimentaleurs ne mentionnent aucune recherche pour apprécier l'action du champ magnétique sur les phéno- mènes chimiques de l'organisme, on conclura qu’ils recherchaient une sensation, c'est-à-dire une excitation nerveuse. Or, pour exciter un nerf, il faut : 4° Une variation de potentiel; 2° Il faut que le courant produit par cette variation de potentiel ait dans le nerf une densité suffisante. Nous avons obtenu ce résultat en plaçant nos sujets dans le voisinage de notre courant alternatif, ce qui nous donne la variation de potentiel; pour avoir dans le nerf une densité suffisante du courant, nous agissons simultanément sur deux ou plusieurs sujets, l’un des sujets appliquant seulement l'extrémité du doigt sur le nerf de l’autre qui doit être excité. De plus, il est avantageux d'isoler les sujets, pour éviter l’affaiblisse- ment du courant qui résulte de sa dérivation vers le sol. Dans ces condi- tions, on oblient, sans élecirodes, sans conducteurs et sans contact, par SÉANCE DU 8 JUILLET 113 induction directe dans le corps humain, l'excitation électrique des nerfs superficiels, sensitifs et moteurs, et la production d’étincelles entre les sujets en expérience. Les tubes de Tesla permettent également de mettre en évidence l'action du champ électrique, oscillant sur l'économie, puisque un tube, tenu par deux personnes, devient lumineux ou obscur, suivant que la personne la plus près du courant alternatif approche ou éloigne la main du conduc- teur. En collaboration avec notre collègue, M. le D' A. Rouxeau, professeur suppléant de physiologie à l'École de Médecine de Nantes, nous avons recherché l'action de nos courants sur le nerf sciatique de la grenouille. Que le nerf communique avec les centres nerveux ou qu'il soit sec- tionné, le passage du courant détermine un tétanos parfait. Ces courants permettent d'obtenir l'excitation par induction du nerf de la grenouille. L'animal et l’expérimentateur étant placés à plusieurs mêtres (jusqu’à 4 mètres) de la machine, et n'ayant avec elle aucun rapport de conductibilité, si l’expérimentateur touche avec une tige métallique le crochet qui supporte le nerf, il obtient une contraction musculaire. S'il laisse sa tige métallique en contact avec le crochet, le muscle trace sur le myographe une courbe formée de dents très pronon- cées où se trouvent indiquées toutes les intermittences de l’étincelle jail- lissant entre les excitateurs. Les muscles sont également excités par ces courants, car la contraction s'obtient encore en excitant les muscles d'animaux complètement cura- risés. Enfin l'expérience qui nous a causé le plus de surprise a été la con- traction par induction à distance, à l’aide des courants développés eux- mêmes par induction dans le corps humain. L’observateur étant placé entre la machine et la grenouille, s’il approche la main de l'animal comme pour le montrer de l'index, dès à une distance qui peut atteindre jusqu’à un mètre, les muscles entrent en contraction; si l’on approche et si l’on éloigne la main, tous ces mouvements sont inscrits sur le myographe par la patte galvanoscopique. Tels sont, Messieurs, les faits que nous avons observés; nous n'avons point la prétention de vous présenter un travail achevé, pensant d’ail- leurs qu'il n’en existe point, mais nous espérons que la divulgation de faits nouveaux ne peut qu'accélérer les progrès de la science. 714 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DE L'EXISTENCE D'UNE SUBSTANCE STRYCHNISANTE DANS LES MUSCLES DES ANIMAUX TÉTANIQUES, par MM. J. Courmonr et M. Doyon. (Travail des laboratoires de M. Arloing et de M. Morat) Le muscle rendu létanique par l'injection sous-cutanée, intra-muscu- laire ou intra-veineuse des produits solubles du bacille de Nicolaïer (après une période constante d’incubation) contient une substance strychnisante, c'est-à-dire capable de produire des contractures sans incubation (1). L'isolement chimique de cette substance rencontre les plus grandes diffi- cullés, mais nous pouvons indiquer les moyens de la mettre en relief à l'aide d’un simple extrait aqueux. Dans les expériences que nous allons résumer, les muscles tétaniques ont été empruntés à des chiens et des lapins, saignés ou non, et l’injec- tion de l'extrait a élé faite uniquement à des grenouilles. I. —- L'exlrail aqueux à chaud est celui qui nous a donné les meilleurs résultats. On sacrifieun animal tétanique,etonrecueille une masse muscu- laire de la région contracturée. Cette masse dégraissée et finement hachée, additionnée d’eau, est soumise à l’ébullition pendant trois quarts d'heure à une heure jusqu’à siccité. Le résidu est repris par l'eau, passé à la presse et filtré. Le liquide ainsi obtenu est alorsinjecté àla grenouille, de préfé- rence sous la peau d’une patte postérieure, afin que les premières contrac- tures soient plus apparentes. Suivant la dose employée, la grenouille présente soit simplement de l’hyperexcilabilité, soit un véritable strych- nisme, soit une courte phase d'hyperexcitabilité bientôt suivie de coma paralytique et de mort. Nous avons obtenu les plus beaux effets avec des doses d'extrait correspondant à 5 et 7 grammes de muscle tétanique pour une grenouille. On peut alors observer pendant assez longtemps, pendant plusieurs heures si l'animal doit survivre, des symptômes superposables à ceux de l'empoisonnement strychnique. Il faut en somme, en Lâtennant pour chaque expérience, injecter un volume voisin de la dose mortelle. Citons un exemple parmi les plus nets : Expérience. — 9 février 1893. Une grenouille recoit un centimètre cube d'ex- trait musculaire de chien tétanique (correspondant à 7 grammes de muscle) à 4 h. 5. L'arimal est immediatement dans un état semi-comateux, immobile, ne se défendant pas. À # h. 1/2 les pattes antérieures se raidissent nota- blement et quelques convulsions apparaissent, À 4 h. 35 : tétanos généralisé absolu. Mise sur le dos la grenouille reste dans cette posilion avec une rigidité complèle des quatre membres en extension, des muscles du tronc. Spontané- (4) Courmont et Doyon, Société de Biologie, 11 mars 1893. SÉANCE DU 8 JUILLET 745: ment ou au moindre contact elle est animée de convulsions généralisées. À 5 heures le tétanos est au maximum; la raideur est telle que l'animal reste horizontal en reposant seulement sur deux supports par ses extrémités. Les convulsions sont continuelles, À 5 h. 45 les convulsions ont encore augmenté. Dans les périodes de repos l'animal est dans le coma complet. Le lendemain il est remis, conservant néanmoins un peu d'hyperexcitabilité. : Il peut arriver que la grenouille injectée paraisse simplement dans le coma, il faut alors une excitation sérieuse pour que contractures et con- vulsions apparaissent, Lorsque la mort survient, elleest Loujours précédée d'une phase ullime paralytique. Si la dose d'extrait est trop élevée, la pé- riode d’excilation est très courte, à peine appréciable, et la mort survient dans le coma, quelquefois en moins d'un quart d'heure. Remarquons que les extraits précédents ne peuvent contenir aucune trace des produits solubles du bacille de Nicolaïer, lesquels sont rendus inactifs par un chauffage à + 65 degrés ; remarquons aussi que toutes nos expériences ont été faites en hiver, c’est-à-dire à une température ambiante où la grenouille est insensible à ces produits. L'extrait identiquement obtenu des muscles d'un chien normal n'est toxique pourla grenouille qu'à des doses élevées (correspondant à 20 gram- mes, 30 grammes de muscles et quelquefois plus) et n’occasionne jamais de phénomènes d’excitation. IT. — Nous avons injecté à des grenouilles l'extrait aqueux de muscle tétanique préparé à froid. Les résultats cnt été identiques; cependant l'intensité des effets obtenus a généralement été moindre que dans les expériences précédentes. Il élait important de montrer que la substance strychnisante n’est pas un produit artificiel dû à l’emploi de l’ébullition. L’extrait agueux à froid de muscle emprunté à un chien normal est encore moins toxique pour la grenouille que l’extrait à chaud ei n'’en- traîne jamais d'hyperexcitabilité. IT. — On pourrait objecter que la substance strychnisante des muscles tétaniques est le résultat et non la cause de la contracture prolongée du muscle. Pour y répondre nous avons institué l'expérience suivante : une même injection de culture filtrée du bacille de Nicolaïer est faite simulla- nément dans une palte postérieure à deux chiens; sur l’un d’eux on a au préalable sectionné les racineslombaires correspondant à la patteinjectée. Lorsque la patte du chien dont les nerfs sont intacts est en contracture on sacrifie les deux animaux et on essaie sur la grenouille l'extrait mus- culaire des deux pattes injectées. Celui de la patte énervée et qui est nalu- rellement restée flasque se comporte comme celui de la patte contrac- turée. La substance strychnisante qui existe dans un muscle d'animal téta- nique n’est donc pas un produit de la contracture ; elle en est la cause. 716 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ACTION ANTIPYRÉTIQUE DES BADIGEONNAGES DE GAIACOL SUR LA PEAU, par M. E. RoOBILLARD. Quelques recherches entreprises dans le service de M. le professeur Lemoine (de Lille), particulièrement sur des tuberculeux fébricitants, ont donné des résultats tout à fait remarquables. Plusieurs malades ont été soumis aux badigeonnages de gaïacol à des doses variant de 0 gr. 50 à 2 grammes. Ces applications ont été faites sur toutes les parties du corps, sur des surfaces cutanées de différentes grandeurs variant de moins de 1 décimètre carré à 3, 4 ou 5 décimètres carrés. Dans tous les cas observés, la température a rapidement baissé de 1 et quelquefois de plusieurs degrés. Ces badigeonnages agissent beaucoup plus rapidement que le sulfate de quinine et cela d’une façon constante. Cet abaissement de température est très durable. L'endroit de la surface cutanée choisie de même que son étendue n’ont aucune importance. Nos recherches le démontrent d’une façon irréfutable. Nous avons fait des applications sur le dos, la poitrine, les bras, les cuisses sans remarquer de différences notables. La dose de médicament employée peut varier, mais il nous semble certain, d'après ce que nous avons observé, que l’ap- plication de 0 gr. 50 suffit pour obtenir l'effet maximum. De plus cette dose peu élevée permettrait de continuer indéfiniment l’usage du médi- cament. Les malades cependant ressentent quelques petits inconvénients. Ils se plaignent entre autres d’un goût prononcé de gaïacol dans la bouche et de sueurs extrêmements abondantes. Il est donc fort probable que le médicament est absorbé par la voie cutanée. Les urines sont plus abon- dantes qu'à l’état normal; nous n’y avons pas trouvé de gaïacol, peut- êlre parce que cette rechercne est très difficile. Nous faisons en ce moment des recherches sur des sujets sains et sur des animaux, nous ne pouvons pas publier de résultats, nos expériences étant trop peu avancées. Nous avons de plus essayé d’autres liquides, entre autres l’eau colorée par le carmin. Nous n'avons obtenu aucun résultat. DU ROLE DU LIQUIDE CÉPHALO-RACHIDIEN DANS LA CIRCULATION CÉRÉBRALE, (Première note) par M. H. Joryxr. La continuité du courant sanguin dans l'intimité des tissus, condition de leur fonctionnement, est, comme on sait, la conséquence de la dilatation SÉANCE DU 8 JUILLET 117 artérielle. Il semble donc que la circulation iulra-organique n'est possible qu’à la condition que nos organes puissent se prêter à l'expansion des vaisseaux par des changements correspondants dans leur volume. Si l'expansion se comprend bien dans les organes dont le tissu est élas- tique et extensible, comme la peau, les muqueuses, les muscles, il n’en est plus de même pour un certain nombre d’autres organes, pas ou peu extensibles, comme les os, le foie, le cerveau. Pour ce dernier l’expansion artérielle cependant est de toute nécessité, car on ne saurait comprendre le fonctionnement cérébral sans une excitation régulière et continue du sang. D'un autre côté, en supposant même que le lissu nerveux puisse se prêter aux variations de volume rythmées de ses artères, on peut se demander si son fonctionnement s’accommoderait avec les chocs inces- sants produits ainsi sur la pulpe cérébrale. Néanmoins presque tous les physiologistes, aujourd'hui, admettent formellement l'existence des mouvements cérébraux, chaque afflux du sang artériel produisant une expansion du cerveau, le retrait consécutif des artères produisant l’affaissement de la pulpe cérébrale; ces mouve- ments alternalifs de l’encéphale renfermé dans la boîte cranienne inexten- .sible étant d’ailleurs rendus possibles par un écoulement du liquide céphalo-rachidien de la cavité cranienne dans la cavité rachidienne et vice versa. Constatant les nombreuses impossibilités des mouvements du cerveau, tout en reconnaissant la nécessité des expansions et des retraits vascu- laires alternatifs pour la circulation régulière de l’organe, j'ai cherché si avec les données anatomiques connues, et par l'institution d’expériences physiologiques et hydrauliques, on ne pourrait pas expliquer la cireula- Lion cérébrale sans admettre de changements de volume de l’encéphale proprement dit. C’est cette explication que je soumets à la Société. Il importe au préalable de bien se représenter au point de vue anatomi- que et physique, la situation du cerveau, des vaisseaux et du liquide cé- phalo-rachidien dans la cavité cranienne inextensible, et pour simplifier les choses, je supposerai la respiration suspendue {{) et un régime circula- toire régulier établi, produisant un écoulement continu du sang dans les capillaires et les veines encéphaliques. Si donc le sang artériel augmente le liquide encéphalique devra diminuer d’une façon correspondante dans le crâne. On sait que le liquide céphalo-rachidien a ses sources dans les parties les plus intimes des centres nerveux, dans les gaînes lymphatiques des (1) L'influence de la respiration sur la cireulation encéphalique et les mou- vements du liquide centralo-rachidien, qui est facile à comprendre, n’inter- vient pas d’ailleurs pour les explications que je vais donner, 718 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE artérioles corticales et médullaires, Ces gaines s'ouvrent à la surface du cerveau, dans les aréoles de la pie-mère. Issu de ces sources le liquide sous-arachnoïdien se rassemble dans les sillons des circonvolutions en formant successivement des rivuli, des rivi, des flumina, qui débouchent, ceux de la face externe des hémisphères dans les lacs sylviens ; ceux de la face interne dans le lac calleux. Ces lacs s'unissent pour former le lac central qui, par l'intermédiaire des canaux péripédonculaires et du lac cérébelleux supérieur, reçoit d'autre part le liquide céphalo-rachidien des flumina de la partie inférieure et postérieure des hémisphères,; et il a lui-même par les canaux basilaire et vertébraux son débouché médul- laire dans le sillon central de la moelle et la pie-mère rachidienne. Le lac bulbo-spinal auquel aboutissent également les flumina du cervelet et le liquide ventriculaire, constitue donc la voie d'échappement du liquide sous-arachnoïdien encéphalique et ventriculaire. Les artères du cerveau, les vertébrales et les carotides, pénètrent dans la cavité cranienne par les voies d'échappement du liquide encéphalique, el remontant en quelque sorte le courant de ce liquide, elles vont se ramifier à la surface des circonvolutions en formant les arborisations de la pie-mère, pour de là pénétrer dans la substance cortlicale et médullaire, avec les gaines lymphaliques, jusque dans les parties les plus profondes du centre ovale. 1 Ces notions rappelées d’après Duret, voici comment les choses se passent : Le sang qui afflue dans les artères encéphaliques, les dilate à chaque ondée envoyée par le cœur, mais ce qu’il faut bien savoir c’est que cette dilatation se fait ici comme dans toutes les autres artères, par la production d'une onde qui se propage rapidement le long des vaisseaux, à a manière d'une vague circulaire qui atteint successivement les diverses sections du système artériel encéphalique pour les dépasser ensuite, en se fractionnant comme les vaisseaux jusqu'aux dernières ramifications artérielles intra-cérébrales, où elle vient mourir en s’aplanissant par suite de l'écoulement continu du sang au travers du système capillaire. L'onde pulsatile etsa propagation dansles artères du cerveau plongées dans le liquide céphalo-rachidien ne peut se produire qu’à la condition de développer dans ce liquide une onde parallèle et opposée qui amènera dans la cavité encéphalique inextensible le dégagement graduel mais extrêmement rapide de la pression intra-cérébrale au fur et à mesure de la pénétration de l’onde pulsatile et de la dilatation artérielle. SÉANCE DU 8 JUILLET 719 RECHERCUES SUR LA FÉCONDATION ET LA GESTATION DES MAMMIFÈRES (1), par M. J. Oxanorr. (Conclusions.\ Première série d'expériences. — La femelle de lapin ou de cobaye séparée du mâle pendant quinze jours contient ordinairement plusieurs ovules non fécondés dans l'utérus. Ces ovules pris dans l'utérus et trans- portés sur une lame de verre sont susceptibles d’être fécondés, et leur évolution s'est arrêtée, dans mes expériences, au stade de huit sphères _de segmentation. Deuxième série d'expériences. — Les ovules fécondés en dehors de l’or- ganisme, transportés dans la cavité abdominale d’une femelle de la même espèce, continuent leur développement. Jusqu'ici, j'ai sacrifié l'animal au bout de sept jours et j'ai trouvé l’embrvon au stade de la formation de la ligne primitive. Troisième série d'expériences. — Les ovules fécondés en dehors de l’or- ganisme, transportés dans la cavité abdominale d’un mâle de la même espèce, continuent leur évolution et arrivent également au slade de la formation de la ligne primitive. Quatrième série d'expériences. — Les ovules fécondés en dehors de l'organisme, transportés dans la cavité abdominale d’une autre espèce, continuent encore leur développement (Expériences faites du lapin au cobaye et inversement). Cinquième série d'expériences. — J'ai obtenu expérimentalement la grossesse extra-utérine chez les mamnifères, en enlevant les trompes à des femelles que j'ai laissées ensuite avec le mâle ou auxquelles j'ai injecté du sperme dans la cavité abdominale. DE LA SENSIBILITÉ COLORÉE, par M. le D° LE Danrec, médecin de première classe de la Marine, répétiteur à l’école de Médecine navale et coloniale, à Bordeaux. Le hasard nous a mis en présence d’un phénomène curieux dont nous n'avons trouvé aucune trace dans la littérature médicale. Ce phénomène, (1) Cette note est le contenu d'un pli cacheté déposé à l’Académie des sciences, le 30 novembre 1891, par M. J. Onanoff, mort depuis du choléra, en Russie, victime de son devoir professionnel. Sur le désir de sa veuve, nous publions aujourd'hui les conclusions de M. Onanoff, dont quelques-unes, con- traires aux données admises généralement, attireront l'attention des embryogé- nistes. F. H. 25. 120 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE REP RE 18 on dep RE ER © GSM RNA EP EE CURE ESSECSssEsS que nous appellerons sensibilité colorée, est absolument ignoré des per- sonnes qui l’éprouvent et se rencontre chez les hystériques anesthésiques. Voici, par exemple, une hystérique anesthésique générale et totale, c’est- à-dire dont la peau est insensible à toute espèce d’excitation; je lui place un bandeau sur les yeux, puis je la pince; elle voit immédiatement vert. Je cesse de la pincer, instantanément la vision colorée disparaît, Les yeux étant toujours bandés, je la pique profondément avec une épingle, immédiatement elle voit rouge. Je lui place une cuiller chaude sur la peau, celte fois c’est du jaune qui apparait. En un mot, chaque mode d’excitation de la peau se révèle au sujet par une couleur différente. Cette couleur, nous l’appellerons spectre. Aïnsi, dans le cas actuel, nous dirons que le spectre de la sensibilité à la piqûre est rouge, le spectre de la sen- sibilité à la chaleur est jaune. Ce mot spectre convient d'autant mieux que la couleur perçue n’est pas toujours unique. Ainsi, chez une de nos malades, le spectre que provoquait la piqûre d’épingle était presque aussi compliqué que le spectre solaire. Il était caractérisé par deux larges bandes jaunes, une bande rouge, une bande verte, une bande bleue et une bande blanche. Le spectre présente rarement des bandes aussi nettes, quelquefois ce sont des taches multiples qui rappelent les cartes de géo- graphie multicolores. Le plus généralement, les malades comparent leurs impressions à des éclairs ou à des phosphorescences colorées. Quoi qu'il en soit, le phénomène existe d'une façon constante dans lous les cas d'hystérie anesthésique, mais nous devons immédiatement ajouter qu'il varie suivant les individus. Ainsi, telle personne aura la sensibilité à la chaleur (thermesthésie) colorée en rouge, telle autre en jaune. Il en est donc de la sensibilité colorée comme de l'audition colorée : la lette 0, rouge pour certains audito-coloristes, est jaune pour d’autres. Dans l'hystérie, il est rare de voir l’anesthésie frapper le corps tout entier ; habituellement, elle n’atteint qu'un membre ou la moitié du corps. Dans ces cas, l'excitation des zones sensibles ne donne lieu à aucune vision colorée ; au contraire, toute excitation dans une région anesthésique donnera naissance à un spectre variant avec le genre d’excitation. {1 était curieux de rechercher le phénomène de la sensibilité colorée que nous appellerons aussi le phénomène du spectre dans d’autres affections comme la lèpre, la syringomyélie, le tabes, les empoisonnements, etc. IL est facile de prévoir que le phénomène n'aura pas lieu toutes les fois que les fils conducteurs, c’est-à-dire les nerfs, seront lésés au point de ne pou- voir transmettre au cerveau les excitations produites sur la peau. Pas de communication, pas de spectre. Le phénomène du spectre indiquera donc . une intégrité complète des nerfs périphériques sensitifs et sa recherche deviendra indispensable toutes les fois que le diagnostic sera hésitant entre une anesthésie essentielle ou sine materia. La sensibilité colorée peut-elle exister normalement en dehors de tout état pathologique? Nous en sommes convaincu sans pouvoir cependant SÉANCE DU 8 JUILLET 721 apporter une preuve probante à notre assertion. Peut-être les audito-colo- ristes la possèdent-ils sans s’en douter. Il leur sera facile de s’en assurer. Ce qui nous fait croire que le phénomène du spectre peut se produire chez les personnes les plus normales, c’est qu'il prend naissance toutes les fois qu'on recoit une excitation violente de la peau comme un coup, un choc, d’où l’expression populaire : voir trente-six chandelles. La vision colorée, scintillante, perçue par les malades atteints de migraine opthalmique n'est probablement qu’un phénomène du même genre. On pourrait en dire autant, des auras sensorielles de l’épilepsic partielle (visions colorées, phosphènes) et des visions colorées du vertige stomacal. Comme on le voit, la sensibilité colorée doit être un phénomène géné- ral commun à l'espèce humaine ; chez les hystériques anesthésiques, une simple piqüre d'épingle suffit à le déceler; chez les normaux, il faut une violente secousse pour produire un spectre à peine appréciable. Pour rechercher la sensibilité colorée, nous opérons de la facon sui- vante : à défaut de chambre noire, on place un bandeau épais sur les yeux, sans loutefois exercer de compression sur les globes oculaires. On intercepte ainsi les rayons lumineux qui pourraient traverser les pau- pières, les yeux étant simplement fermés. On prie le sujet äe regarder à 20-30 centimètres, comme s’il voulait lire. Chez les sujets peu intelligents, nous leur prenons une main que nous plaçons à 20-30 centimètres devant les yeux, avant de leur placer le bandeau. Les yeux étant obturés, nous leur demandons quelle est la couleur de leur main. Cette manœuvre les force à regarder à la distance normale de la lecture. Ceci fait, on pra- tique sur les régions anesthésiées les diverses excitations que l’on veut étudier. Dès l’abord, les réponses du sujet ne sont pas catégoriques, car il ne comprend pas bien ce qu’on lui demande, mais peu à peu, dès qu'il esl habitué au phénomène et que son attention est concentrée sur ce point, il répond sans sourciller. On est alors obligé de se rendre à l'évidence quelque méfiance que l’on témoigne vis-à-vis des hystériques qui ont un penchant si marqué pour le mensonge et la supercherie, car, à telle exci- tation de la peau, répond inimédiatement tel spectre toujours identique. Quand le sujet s’est habitué au phénomène on peut opérer en fermant simplement les yeux, sans appliquer de bandeau. Les meilleurs sujets sont ceux qui n'ont subi aucune pratique d'hypno- lisme, car ils ne subissent aucune suggestion et racontent exactement ce qu'ils voient. Nous recommandons de commencer par une forte excitation, par exemple en pinçant à pleines mains la peau d'un membre, de manière à rendre le spectre plus apparent pour les malades. Nous publierons ultérieurement plusieurs observations et nous tente- rons une interprétation théorique des faits. Conclusions. — La sensibilité colorée est la transformation d’un phé- SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE =] 19 19 nomène de la sensibilité générale non différenciée en un phénomène de sensibilité spéciale différenciée. Ce phénomène se rencontre d’une facon remarquable chez les hysté- riques anesthésiques, mais la couleur du spectre varie, non seulement suivant le genre d’excitation de la peau, mais en“ore suivant les indi- vidus. Ainsi le pincement de la peau, rouge pour beaucoup de sujets, est vert pour d’autres. La vision colorée peut être différente suivant que l’on porte l’excita- tion sur le membre supérieur ou sur le membre inférieur, mais souvent elle est la même. Le spectre est d'autant plus co'oré que l'excitation est plus forte. Il est en général plus intense dans l'œil correspondant au côté excité, de sorte qu'une malade anesthésique peut dire, les yeux fermés, de quel côté porte l'excitation. Le signe de la sensibilité colorée ou signe du spectre est caractéristique d’une anesthésie essentielle, sine materid, comme cela a lieu dans l’hys- térie anesthésique. La sensibililé générale n’est qu’endormie, et on peut dire que les hystériques anesthésiques sentent par leurs yeux. La consta- tation de ce signe permettra de poser un diagnoslic précis entre une lésion organique et une lésion essentielle. Certains phénomènes pathologiques, comme les auras sensorielles de l’épilepsie partielle (visions colorées, phosphènes), comme la vision colorée de la migraine opthalmique, celle du vertige stomacal, rentrent probablement dans la catégorie des phénomènes de la sensibilité colorée. Le phénomène du spectre peut s'expliquer par la transmission de l’ex- citation périphérique au centre de la sensibilité générale d’abord, puis par son irradiation au centre de la vision qui doit être placé dans le voi- sinage. Il sera curieux d'étudier ce phénomène dans la surdité hystérique, car l'audition colorée n’est qu’un chapitre de la sensibilité colorée. SUR L'INNERVATION CARDIAQUE ET LES VARIATIONS PÉRIODIQUES DES RYTHMES DU COEUR AU COURS DE L'ASPHYXIE CHEZ LE CHIEN, par M. LAULANIE. Les travaux successifs de Burdon Sanderson, Frédéricq Wertheimer ont établi les points suivants : Chez le chien, le rythme du cœur est soumis à un ralentissement pério- dique. SÉANCE DU 8 JUILLET 793 Ce ralentissement a lieu pendant l'expiration et il entraîne une chute de la pression artérielle. | Par corrélation, la pression du sang dans les artères et la pression de l'air dans le poumon subissent chez le chien des variations inverses sous l'influence de la respiration. Le ralentissement du cœur pendant l'expiration n’a plus lieu après la section double des nerfs vagues. On en conclura légitimement que l’ac- Livité rythmée des centres respiratoires éveille par influence et par irra- diation l’activité du centre d'arrêt au cœur. | L'inhibition périodique du cœur entre donc dans la catégorie de ces phénomènes désignés sous le nom de synesthésies et dans lesquels l’impres- sion initiale sollicite deux mouvements réflexes absolument éloignés par leur but et par leurs organes d'exécution. Or, la synesthésie pnéocardiaque acquiert sous l'influence de l’asphyxie une intensité extraordinaire. Nous procédons à l’asphyxie en faisant res- pirer l’animal dans un sac de caoutchouc et nous inserivons simultané- ment la pression de l’air dans la trachée, à l’aide d’un tube collatéral relié à un tambour inscripteur, et les pulsations de l'artère fémorale à l’aide de notre plaque sphygmographique. Ces préliminaires suffisent déjà à montrer sous un nouvel aspect l’étroite subordination de l'inhibilion cardiaque au fonctionnement de l’innerva- tion respiratoire. Il arrive, en effet, très fréquemment que la trachéo- tomie est suivie chez le chien d'une altération plus ou moins grave du rythme respiratoire, et on oblient souvent ce trouble typique désigné sous le nom de respiration de Cheyne-Stokes. Or, ce trouble se reflète immédiatemannt sur le rythme cardiaque dont les périodes de ralentisse- ment se mesurent exactement à la durée très variable de la pause expi- ratoire. Dès les premiers moments de l’asphyxie, le rythme respirateur reprend sa régularité s’il avait été troublé, et on ne tarde pas à constater l’exagé- ration ou l’inhibition périodique du cœur. Cette exagéralion va croissant avec les progrès de l’asphyxie et la courbe sphygmographique revêt une physionomie de plus en plus singulière. Elle est formée de groupes successifs de pulsations, et ces groupes deviennent de plus en plus nombreux, de plus en plus saillants, et sont .Séparés par des mesures de plus en plus profondes. C’est que l'intensité et le rythme de l'excitation périodique des nerfs vagues se règlent exactement sur l'intensité et le rythme du fonctionnement des centres de l'expiration. Aussi, quand la respiration est devenue très fréquente, les périodes d'accélération du rythme cardiaque sont-elles très abrégées et vers la fin les groupes ne contiennent plus que deux pulsations qui attei- gnent, il est vrai, une hauteur exceptionnelle. Cetle prédominance alternative des deux innervations antagonistes du 724 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cœur et l’exagération de leur puissance imposent à la pression artérielle des fluctuations d’une amplitude et d'une fréquence inaccoutumées. Ses chutes atteignent une telle profondeur qu'on pourrait soutenir que chaque inhibition produit un arrêt du cœur. Maïs ses relèvements ont une sou- daineté el une amplitude qui compensent et au delà les effets de l’inhibi- tion périodique au point que la pression moyenne s'élève progressi- vement. Il y a dans cette dernière circonslance, et dans l’extrême amplitude despulsations artérielles la double démonstration de la puissance exagérée des systoles cardiaques et de l’innervalion accélératrice. Comme on le voit, l’action inhibitoire apportée sur le cœur à chaque expiration borne son influence au rythme des mouvements cardiaques sans toucher à leur puissance. Nous trouvons là un exemple naturel de la dissociation des effets inhibitoires du nerf vague que M. Fr. Franck a étudiée. Nous ajoutons que rien n’est plus aisé que de la produire artificiellement. En graduant mé- thodiquement l'intensité des excitations centrifuges du pneumogastrique sectionné, on trouve bientôt la mesure pour laquelle les pulsations arté- rielles, rares mais très hautes, atteignent ou dépassent le niveau normal des maxima. La dernière période de l’asphyxie est caractérisée par le rapide épuise- ment de la puissance motrice du cœur, mais il arrive très fréquemment que l'animal meurt d’une syncope à la fin de la première période. Le cœur s'arrête brusquement en diastole au cours d’une phase d’inhibition. Quand on procède à l'asphyxie après la section double des nerfs vagues, les phénomènes sont beaucoup plus simples. Le rythme du cœur demeure absolument uniforme pendant toute la durée de l’asphyxie et les chan- gements de la puissance motrice du cœur apparaissent avec la plus grande netteté. On assiste tout d’abord à l'accroissement rapide de la pression et de l’amplitude des pulsations artérielles. Mais bientôt survient une longue période de dépression caractérisée par la chute progressive de la courbe au voisinage de l’abscisse et par la diminution de l’amplitude des pulsa- tions qui deviennent à peine perceptibles et finissent par s’éteindre com- plètement. | Dans les deux cas, avant et après la section des deux nerfs vagues, l’asphyxie fait passer la motricité cardiaque par deux phases : une phase d'énergie croissante et une phase d'énergie décroissante, mais la durée - relative de ces deux phases est très différente, selon que les nerfs vagues sont intacts ou ont été sectionnés. La période de défaillance très tardive et très courte quand les vagues sont intacts est au contraire très précoce et très durable après la double névrotomie. On pourrait croire dès lors que l’inhibition périodique du cœur qui acquiert pendant l’asphyxie une telle exagération règle la dépense de SÉANCE DU 8 JUILLET 725 ne de LU en en eh MN à l'innervation motrice et lui permet de se distribuer avec plus d'économie, plus de fruit et plus de durée. Dans ce cas l'innervalion modératrice serait pour le cœur un instru- ment de lutte et de résistance. SUR LA VALEUR MORPHOLOGIQUE DES CORNES CHEZ LE CHEVAL, par M. Lours BLanc. (Travaux du Laboratoire d'anatomie de l'école vétérinaire de Lyon.) Depuis longtemps on a signalé chez le cheval la présence de petites cornes frontales, et Goubaux a donné, dans les Mémoires de la Société de Biologie (1852), un historique sur ce sujet; en même temps il citait quelques observations personnelles. Depuis, M. Lesbre a signalé à la Société d’Anthropologie de Lyon (1885), un certain nombre de cas qu'il avait observés sur le vivant. M. Thierry a également publié une obser- vation de cheval cornu dans le Bulletin de la Société de Biologie (1884). Le seul fait qui résulte de ces travaux est que le cheval présente quelquefols sur le frontal, au-dessus.et en-dedans des orbites, une paire de protubérances osseuses ou cartilagineuses, de 1 à 2 centimètres de saillie, et recouverte par une peau normale, ou par un petit étui corné. Mais, à notre connaissance, rien n’a été publié sur la structure et la valeur morphologique de ces appendices. L'étude d’une série de crânes provenant de sujets adultes et de poulains, nous a fourni sur ce sujet des résultats qui semblent dignes d'attention. Les cornes du cheval sont constituées par une base squelettique recouverte par la peau normale ou cornée. Ces appendices se trouvent placés sur le frontal, en dedans de la base de l’apophyse orbitaire, au- dessus du trou sourcilier, en un point qui correspond très exactement à l'emplacement des cornes chez les ruminants du type ovin. L’axe squelettique est formé par un nodule cartilagineux, qui s’ossifie chez les sujets avancés en âge: en forme d’arc de cercle à concavité intérieure, saillant ou presque au niveau du frontal, il est enclavé dans cet os à la facon d’une dent dans l’alvéole. Le tégument est le plus souvent normal au niveau de cette corne. Quelquefois son épiderme subit la transformation cornée, et il existe alors un étui conique, long de 2 à 3 centimètres, d'apparence fibreuse, et ayant la structure de la corne jeune du sabot du cheval. Ces cornes ne font point partie, par leur axe, de l'os frontal; elles appartiennent au squelette primordial du crâne, et sont formées par l'extrémité des apophyses d'Ingrassias. Chez un poulain quelconque, l'aile du sphénoïde antérieur se prolonge 126 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE en dehors et en haut par une lame cartilagineuse en forme d’éventail. Cette lame s'enfonce dans une dépression de la portion orbitaire du fron- tal, puis, un peu plus haut, dans une rainure profonde creusée entre les deux lames de cet os. L’apophyse d’Ingrassias, encore carlilagineuse, pénètre ainsi dans le frontal el arrive au contact de la lame externe, qu’elle touche par le sommet de sa convexité. Quelquefois eile perfore le frontal, apparaît à l'extérieur, et alors le cheval est cornu. Geite lame cartilagineuse n’est pas contenue tout entière dans l’épais- seur de la portion orbitaire du frontal. Sa moitié antérieure déborde dars le sinus frontal où elle forme une travée complètement entourée de tissu osseux ; celle travée se retrouve chez tous les sujets, même très vieux. Lorsque le sujet vieillit, l'extrémité de l’apophyse d’Ingrassias s’ossifie peu à peu, du centre à la périphérie. Chez les chevaux cornus, âgés de trois à quatre ans, on trouve dans le frontal une cheville osseuse conique, surmontée d’un noyau cartilagineux, et prolongeant l'aile du sphénoïde antérieur. À ce moment ces pièces sont parfaitement distinctes du frontal, avec lequel elles se confondent plus lard. L'axe des cornes du cheval appartient donc au crâne primordial ; il est formé par le sommet des ailes du sphénoïide antérieur qui sont entourées par le frontal lors de la formation de cet os. La similitude de position qui existe entre les cornes du cheval, et celles des ruminants ovins, permet de croire qu'il y a peut-être commu- nauté d’origine entre ces appendices. Chez le mouton, la chèvre et les autres ruminants du même type, le point du frontal où se développent les cornes se trouve exactement au niveau du sommet de l’aile du sphé- noïde antérieur. Chez les bovidés, le point d'insertion des cornes est très remonté par rapport au sphénoïde ; mais l’élongation du frontal est un caractère/acquis, que l’on ne retrouve pas à toutes les périodes de la vie fœtale, et vers le quatrième mois de la gestation, le point kératogène se trouve exactement dans la même situation, par rapport au sphénoïde, que chez les ruminants ovins et chez le cheval. On peut donc se demander si les cornes des ruminants, que l’on a jus- qu'ici considérées comme des dépendances du frontal, n'ont pas pour point de départ, comme cela a lieu chez le cheval, les ailes du sphénoïde antérieur. —{ SÉANCE DU 8 JUILLET 79 RECHERCHES SUR UN MICROBE NOUVEAU DE L'ICTÈRE GRAVE, par M. RanGLarer et J. Manu. Le 29 décembre, la nommée Mirabel (Yvonne), âgée de vingt-cinq ans, entre à l'Hôtel-Dieu dans le service du D' Ferrand (lit 28 de la salle Sainte-Anne). Cette malade est apportée dans le coma le plus complet, le pouls donne 120 à 125 pulsations, la tempéralure est de 40 degrés. Les urines ne contiennent ni sucre, ni albumine. On apprend qu’elle n’est malade que depuis deux jours. Le surlendemain, la température tombe à 37 degrés, le pouls reste à 120, il est petit et dépressible. On remarque un peu de subictère. L'état comateux est moins prononcé. Le 27 décembre, teinte ictérique très prononcée, pigments biliaires et albumine dans les urines. Le 28, mort avec hémorragie. À l’autopsie, les principales lésions portent sur le foie qui est légère- ment atrophié et dont les cellules hépatiques sont dégénérées. Examen bactériologique. — Les recherches portent sur le foie, la rate et les poumons. Nous trouvons les trois microbes suivants : 1° Bacterium termo, ® Staphylococcus pyogenes aureus, 3° Bacille de la pneumonie. Enfin un 4° microbe que nous retrouvons dans Îles trois organes examinés et que nous avons étudiés en détail. Culture sur plaque. — Sur plaques, les colonies mettent de vingt- quatre à quarante-huit heures à se développer, examinées avec un gros- sissement de 30 diamètres, elles ont au bout de vingt-quatre heures, l'apparence d’un disque légèrement (transparent. Après vingl-six heures, il se forme à l’intérieur de ce disque transparent un noyau opaque s'étendant de plus en plus à mesure que la culture vieillit; ce noyau est ridé à sa surface. C’ 2 alors que la culture devient saillante. Ces colonies blanches sont composées de bacilles, elles liquéfient la gélaline en trois ou quatre jours. Bacilles. — Les bacilles mesurent 4 & à 2 uw de long, sur 0 u,5 de large, et sont droits ou très légèrement incurvés et ont les bouts ronds, quelquefois ils sont groupés à la suite les uns des autres et forment des chainettes de bacilles (streptobacillus). Ils sont aéro-anaérobies mais plus encore aérobies et sont dénués de mouvements, S. | Colorants. — Ces bacilles se colorent par le violet de méthyle, par le violet de gentiane, la méthode de Lubimoff. Z{s prennent le Graim dans les coupes, ils se colorent bien par la méthode de Kuhne. Culture sur gélatine. — Sur gélatine ensemencée par stries on obtient SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE = [RQ do au bout de 48 heures un sillon blanc qui prend du relief au bout de 2 à 3 jours ; il est formé par la réunion d'une quantité de colonies rondes et ses bords sont comme taillés à l’emporte-pièce ; au bout de 4 à 5 jours la gélatine est complètement liquéfiée. Sur gélatine ensemensée en profondeur, on obtient un léger entonnoir au bout de 38 à 52 heures. L’entonnoir se trouve rempli par les colonies et forme clou, autour de ce clou blanc brillant se forme une zone ronde, plus claire, n’atteignant jamais les parois du lube. La traînée est très accentuée au 3° jour. La liquéfaction commence alors et se termine au 6° jour. Alors les colonies se rassemblent au fond du tube, et le dépôt remis en suspension si l’on agite affecte la forme de flocons. D'autres fois, dans les ensemensements en profondeur dans de grandes quantités de gélatine, la traînée présente sur son parcours de grosses boules lui donnant la forme d'une véritable corde à nœuds. Ces boules sont blanches et analogues aux autres colonies. Culture sur gélose. — Sur gélose il se forme, sur toute la surface, une couche blanche légèrement crémeuse, ridée à sa surface. Culture sur pomme de terre. — Au bout de 26 heures on à des colonies en plaques blanches, plissées, sèches et saillantes, se détachant pour tomber dans l’eau de cuisson. Ces colonies se composent de bacilles primitifs, mais on voit cependant de la tendance à l'allongement. Cultures dans le bouillon. — Après 48 heures, à 33 degrés, le bouillon est troublé et renferme des bacilles en filaments et plus gros que les primitifs. Culture en milieu sucré. — Dans l’eau renfermant 30 p. 100 de sucre ou dans les bouillons préparés suivant la formule suivante : Par litre de bouillon : Viande de Veau ee Ne ER CE D ODICTAnMnNesE Chlorure de sodium AE PURE 5 — SUCrecand ca ie PNR RSR PEpPLONE MES TENTE LES EEE EE 5 — Phosphaterde soude nc An ACeS Après quarante-huit heures d'incubation à l’étuve à 35 degrés il se forme dans le bouillon des trainées blanchâtres gélatineuses. Quinze heures après l’ensemensement, le liquide ne renferme que des types primitifs ; vingl-quatre heures après on ne trouve que des chaïnettes de bacilles ; enfin après quarante-cinq heures on ne voit plus que de longs filaments affectant la forme d'S et présentant des ramifications. Après cinq jours de culture les filaments s’enchevêtirent pour former des arabesques puis tout disparait. Si on inocule des tubes de gélatine avec la cullure sucrée renfermant les filaments on n'obtient que des bacilles primitifs. SÉANCE DU S JUILLET 729 Ces expériences nous ont montré que ces microbes se reproduisaient par ségmentations. Ils ne produisent pas dans les bouillons de fermenta- tions putrides. Sur quatre souris inoculées avec les cultures en bouillon, 3 sont mortes avec tous les caractères d’une seplicémie généralisée. Inoculations aux animaux. — Les expériences faites sur les animaux nous ont donné les résultats suivants : ; Inoculations par scarification produisent un œdème aux points d’ino- culation. Les inoculations péritonéales faites avec les bouillons sucrés : résultats négatifs. Deux cobayes sur 4 sont morts en quarante-huit heures. L’autopsie des cobaves montre les lésions suivantes : OEdème au point d’inoculation ; à partir de cet œdème et pénétrant dans la peau, une traînée purulente qui pénètre dans le foie. Le foie est atrophié, gris à la coupe ; les cellules hépatiques sont détruites dans les parties superfi- cielles. La bile est fluide; examinée après fixation à l’alcool et l’éther et colorée sur lamelles, on remarque une grande quantité du microbe que nous avons étudié. La rate et le poumon renferment aussi ce même microbe (autopsie faite cinq heures après la mort). Un lapin sacrifié après cinq jours offre des lésions à peu près analo- gues. Les ensemensements des différentes parties provenant de ces autopsies (rate, bile, foie, poumon) ont reproduit des cultures presque pures de notre microbe. Pendant le vivant de ces animaux, leur sang n’a pu don-. ner lieu à des cultures. Conclusions. — Nous nous sommes donc trouvés en présence d’un microbe spécial que nous avons pu isoler complètement et nous croyons ? avoir montré qu'il a des caractères morphologiques absolument distincts. Les inoculations ont d’ailleurs été positives puisqu'elles ont produit l’atro- phie des cellules hépatiques. Est-ce à dire que nous considérons ce microbe comme spécifique de la maladie. Assurément non, car nos recher- ches ne portent que sur un seul cas. Néanmoins il nous a paru intéres- sant de faire connaître ces faits qui peuvent ouvrir de nouvelles voies aux bactériologistes. De notre côté, nous travaillons en ce moment à un deuxième cas d’ictère grave recuilli dans le service du D' Ferrand de l’Hôtel-Dieu. 130 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE CAUSES DES VARIÉTÉS DES LÉSIONS D'UN MÊME ORGANE DANS UNE MÊME INFECTION CHEZ UNE MÊME ESPÈCE ANIMALE, par A. CHARRIN. L'observation a, depuis longtemps, appris qu’un organe, dans une maladie donnée, pouvait présenter les lésions les plus différentes les unes des autres. L'expérimentation, qui a pour but, en partie, de reproduire les faits enseignés par la clinique, afin de faciliter leur étude, l’expéri- mentation, de son côté, a réalisé cette variété dans les altérations d’un unique viscère, soumis aux efforts d’un seul virus. Tandis que, chez l'homme, pour prendre un exemple, toutes les des- criptions ont vu le jour à propos des reins scarlatins, J'ai montré, il y a plusieurs années, à la Société (1}, une collection comprenant une série de ces glandes urinaires, recueillies sur des lapins ayant succombé, du premier au dernier, à l'inoculation du bacilie pyocyanogène. La simple inspection de cette collection montrait l’excessive diversité des modifications subies par les Lissus, diversité et modifications con- firmées par l'examen microscopique, par les cultures, par les réactions histochimiques. Hypertrophie, atrophie de ces glandes, état lisse ou irrégulier des surfaces, adhérences ou détachement aisé de la capsule, granulations, petits abcès, infarctus, hémorragies, cicatrices, néphrites aiguës ou chroniques, épithéliales ou scléreuses, glomérulaires ou tubu- laires ; processus inflammatoires ou dégénératifs; dégénérescence grais- seuse ou amyloïde, elc., toutes les allérations possibles, sans parler de ‘celles du voisinage ou des autres appareils affectés secondairement, peuvent se rencontrer. — Je les avais déjà notées à l’époque où j'insistais sur ces données; quelques-unes, cependant, depuis lors, sont venues s'ajouter à cette nomenclature (2). Cette notion est donc aujourd’hui définitivement établie, d'autant plus que les publications confirmatives n’ont point fait défaut. Devant de telles constatations, il est peut-ètre bon de pousser plus loin la question, en s’efforçant de déceler les causes de pareilles dissemblances. Ure des plus faciles à saisir n’est autre que la durée de la survie. — Pour aboutir au rein scléreux, atrophié, granuleux (3), avec hypertrophie du ventricule gauche, il faut qu'un temps relativement considérable, 44 et 13 mois dans deux de nos cas, s'écoule entre le moment de la contami- (1) Juin 1888. (2) Les propositions formulées reposent sur une expérimentation pour- suivie depuis douze avs sur le lapin à l’aide du bacille du pus bleu. Ce que nous disons s'applique à cette infection, à elle seule, pour certaines particula- rités. (3) Voir Charrin. Soc. Biol., juin 1893. SÉANCE DU 8 JUILLET 731 nation et celui de la mort; celte durée implique soit une résislance assez grande de la part du sujet, soit une atténualion qualitative ou quantita- tive portant sur le germe. Un virus abondant ou très actif entraîne une fin rapide; le plus sou- vent, dans ces conditions, les altérations sont, avant tout, parenchyma- teuses: elles frappent de préférence les glomérules ou les tubes con- tournés. Dans ces mêmes conditions de cultures énergiques ou introduites en masse, on observe des hémorragies, hémorragies beaucoup plus fré- quentes, lorsque le bacille pénètre par les vaisseaux que par toute autre voie ; ici, intervient le choix de la porte d'entrée. Une situation inverse, un parasite affaibli, parfois, provoque la forma- tion du pus; ce mode de dégénérescence est, en partie, sous la dépen- dance de l’action du protoplasma bactérien (1) ou de l'association des pyogènes. L'apparition de la substance amyloïde est chose exceptionnelle (2). Là, encore, l’évolution doit être lente; là, encore, il est nécessaire de se trouver en face d'agents atténués ou de terrains solides à l’origine. Les infarctus sont la conséquence d’obstructions vasculaires, obstruc- tions déterminées par des thromboses, par des embolies. Or, dans le parenchyme rénal des lapins pyocyanisés, le même bacille se rencontre toujours au sein des mêmes éléments anatomiques. Pourquoi donc voit- on ces infarctus tantôt se produire, tantôt manquer totalement? On peut répondre que, dans celle maladie pyocyanique, il y a des changements dans le sang (diminution de l'oxygène, hypoglycémie, allérations du sérum, etc.), et chacun sait que les coagulations dépendent, pour une part, de ces changements; que, d'autre part, ces changements eux-mêmes sont en rapport avec l’activité du virus ou la puissance de l’économie. Mais, il y a autre chose. — Sur une statistique de 27 lapins, chez lesquels on a relevé la présence de ces infarctus, 21 fois ils existaient des deux côlés (2). — Rappelons, à ce propos, que la symétrie, dans les lésions, indique une influence nerveuse ; rappelons que les traumatismes expéri- mentaux des centres ont une aclion sur le passage des bactéries au travers du tissu rénal; rappelons que les toxines pyoeyaniques jouissent de pro- priélés vaso-motrices, propres à resserrer les vaisseaux au point d'arrêter les hémorragies, propres à déterminer des spasmes, qui, à la longue, sont suivis de dilalations favorables à la lenteur du courant, partant, également, à la thrombose; en outre, ces toxines agissent sur la vitesse, sur la pression, elc. (1) Voir Bouchard et Charrin. So:. Biol. 1889. (2) Si ces infarctus sont par trop exigus, il est possible qu’ils échappent à l'inspection macroscopique. AD SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En présence de ces notions positives accumulées, il est difficile de ne pas admettre une intervention vaso-motrice, ayant pour origine l'axe cérébro-spinal, d'autant plus que les lésions pyocyaniques qui atteignent les articulations, c’est-à-dire des tissus qui, beaucoup moins que les reins où les poumons, subissent les influences des centres vasculaires, tro- phiques ou autres, sont rarement symétriques. La question est simplement reculée,fdira-t-on ! Pourquoi, dans un cas, celte intervention, alors que, dans un autre, elle manque? On peut ré- pondre que, suivant les milieux ou les virus, l'analyse le prouve (1), Les toxines capables d'agir sur ces centres, diffèrent en qualité comme en quantité. — Un microbe ne donne pas toujours naissance à toules ses sécrétions; c'est encore là une des sources de différences pour les lésions; ici, le principe inflammatoire est absent; plus loin, l'élément qui fait dégénérer. Telles sont, parmi celles que nous parvenons à saisir, quelques causes propres à nous faire comprendre la diversité de ces lésions. Les affections, les intoxications, les tares antérieures, créant des lieux de moindre résistante, n’ont point, chez l'animal, l'importance qu'elles revêtaient chez l'homme. En somme, la plupart de ces causes sont liées aux qualités du virus ou duterrain. — Assurément, nous apprécions les oscillations du premier ; mais nous ne voyons que les plus grossières; beaucoup nous échappent. — Quant au second, on a beau choisir des sujets de même espèce, de même âge, on a toujours devant soi des différences, fruits de l’hérédité (1), de l’innéité, de l’alimentation, des conditions ambiantes, etc. À en juger par l’énormité des distinclions que l’on note, quand on passe d’une fa- mille à une autre, on peut admeltre qu’il y a, néanmoins, des motifs sans nombre, susceptibles d'expliquer ces variétés, alors qu’on ne change pas de famille. | (1) Chez le chat, le bacille pyocyanique détermine la fonte graisseuse du rein; or, il est bon de remarquer que normalement les cellules des tubuli renferment des gouttelettes de graisse; la pathologie n’est que l’exagération de la physiologie. SÉANCE DU 8 JUILLET 7233 Election d'un membre tilulaire. Nombre des votants : 40. MÉREUICHERMODUENtEMEMARCE ANT .. . 24 suffrages. MPRPILLIERIA EE RUE" Den oer 404 — MÉSROUMIEREN EE RNA re entr NA 4 == M. RicHER ayant obtenu la majorité absolue des suffrages est élu membre titulaire de la Société de Biologie. Le Gérant : G. MASssoNn. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarerHeux, directeur, 1, rue Cassette, IMOBSAUE. 074 NET Lie nr NO pres rh des A one an Fes arsté RU 1 Re L sstoetib 25 PARAITRE 2 Hague aaoël at si à sh SÉANCE DU 15 JUILLET 1893 M. A. Racer : De la gale du lapin causée par le Sarcoptes scabiei: sa transmissi- bilité au Cobaye et au Furet. — M. ArPHonsE LABBé : Sur les parasites endoglobu- laires du sang de l’Alouette. — MM. V. Haxor et P.-L. Gasrou : Note sur les néo- canalicules biliaires dans le foie infectieux. — M. Cu. FéRé : Note sur la toxicité des urines des épileptiques. — M. Cu. Féré : Note sur l'influence de la lumière blanche et de la lumière colorée sur l’incubation des œufs de poule. — M. Cu. FéRé : Note sur l'influence de l’éthérisation préalable sur l’incubation des œufs de poule. — MM. P. Reccus et En. RerterER : Structure et pathogénie d’un kyste dermoïde du raphé périnéal et du serotum.— M. Henrr Mar : Note sur l’exis- tence des vaisseaux nourriciers du muscle cardiaque chez la grenouille. — MM. R. Wüorrz et Marcez Lermoyez : Du pouvoir bactéricide du mucus humain et en particulier du mucus nasal. — M. Aueren RouxEAU : Sur l’action des courants de polarisation musculaire comme excitant de la contractilité. -— M. A. CHARRIN : Formes hémorragiques de l'infection expérimentale; formes diffuses ; formes localisées; reproduction des types cliniques. — MM. D'ARSONvVAL et CHARRIN : Électricité et microbes. Conditions expérimentales. — M. F. Joryrr : Du rôle du liquide céphalo-rachidien dans la circulation cérébrale. Présidence de MM. Chauveau et Dareste. a— DE LA GALE DU LAPIN CAUSÉE PAR LE Sarcoples scabiei; SA TRANSMISSIBILITÉ AU COBAYE ET AU FURET, par M. A. RAILLIET. (Communication faite dans la séance précédente.) Le Lapin domestique peut être envahi par deux formes différentes de gale sarcoptique : l’une, connue depuis longtemps et due au Sarcoptes minor Fürst.; l’autre, observée récemment par G. Neumann et due au Sarcoptes scabiei Latr. (1). J'ai déjà entretenu la Société de la pre- mière (2); quant à la seconde, qui paraît être fort rare, je ne l’ai rencon- trée qu'une seule fois, mais j'ai profité de cette occasion pour tenter quelques expériences sur sa contagion. Le 6 avril 1892, on me reinettait deux pattes de Lapin domestique expédiées l’avant-veille par un éleveur dont le clapier était envahi depuis quelques mois par une affection cutanée à marche très envahis- (1) G. Neumanx. Sur une nouvelle forme de gale sarcoptique (Surcoptes sca- biei) chez le Lapin domestique. Revue vétérinaire, mars 1892, (2) A. Rarzrrer. Recherches sur la transmissibilité de la gale du Chat et du Lapin, due au Sarcogtes minor Fürst. Comptes rendus de lu Soc. de Biologie, 9e série, t. IV, p. 315. 1892. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 26 136 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sante, dont il ne parvenait pas à se débarrasser. « Elle débute, disait-il, par les pattes, de là gagne le nez, les joues et enfin tout le corps... Nous nous sommes défaits de tous nos Lapins sans exceplion; nous avons lavé les cages avec de la lessive et de la potasse, puis blanchi les murs à la chaux; nous n’y avons remis des Lapins qu’un mois après, et ils ont de nouveau celte maladie. » Les pattes examinées étaient recouvertes sur toute la surface plantaire, et jusqu’à l'extrémité des doigts, de croûtes grisâtres, épaisses, adhé- rentes, dans lesquelles grouillaient des milliers de Sarcoptes scabiei de tout âge et de tout sexe. Le jour même (6 avril), je place chacune des deux pattes dans une cage où se trouvent deux Lapins sains. Pendant quelques jours, je suis attentivement ces animaux : ils se grattent le nez et se lèchent de temps en temps les pattes, surtout à la face plantaire et entre les doigts. Mais il n’y a là rien de bien marqué, et nombre de Lapins sains se comportent de la même manière. Pendant trois mois, les animaux sont conservés dans mon laboratoire même, sans présenter aucun symptôme, aucune altération propre à atlirer l'attention, et trois d’entre eux sont utilisés pour d'autres études. C'est seulement au mois de septembre, soit cing mois après le dépôt des pattes galeuses, que le garçon chargé de soigner mes animaux constate sur le nez et les pattes du survivant la présence de eroûtes bien appa- rentes. L'animal ne tarde pas à perdre l'appétit; il maigrit beaucoup et finit par succomber le 30 septembre, avec les pattes complètement envahies, et des griffes atteignant une longueur considérable. Le développement de la maladie avait donc offert une période d'incu- bation extrêmement longue, ce qui est dû sans doute au petit nombre de Sarcoptes (adultes ou larves successivement écloses) ayant émigré des pattes galeuses sur le sujet d'expérience. Vers le milieu de septembre, une Lapine avait été amenée au labora- toire pour être accouplée avec le Lapin précédent; elle avait passé avec lui un jour et une nuit seulement. Un mois après (15 octobre), elle a déjà des croûtes très nettes sur les lèvres et les pattes. Elle donne alors naïis- sance à deux petits, qui meurent le 2 et le 5 novembre en présentant déjà un peu de gale aux lèvres. La Lapine elle-même succombe le 7 no- vembre, avec des lésions s'étendant aux lèvres, au chanfrein, au pour- tour des yeux, ainsi qu'aux pattes jusqu'au tarse et au carpe. Depuis cette époque, j'ai répété les expériences en sens divers, et j'ai pu contaminer les Lapins, soit par cohabitation avec des galeux, soit par simple séjour dans des cages précédemment habitées par ceux-ci. La période d’incubation a été assez variable; dans le premier cas, je lai vue varier d'une huitaine de jours à un mois; dans le second, la durée moyenne à été d'un mois environ. Cependant, une exception mérite d'être signalée, Il s’agit d'un Lapin russe qui avait cessé Lout contact avecles SÉANCE DU 13 JUILLET 737 galeux depuis le 42° octobre 1892. Transporté à Paris dans le courant de novembre, il fut surveillé attentivement dans le laboratoire de M. Laborde, et ne laissa voir d'altérations psoriques aux pattes d’abord, puis aux lèvres, qu’au commencement de février 1893, c'est-à-dire quatre mois après la fin de la cohabitation. Ge sujet succomba le 18 mars. Dans un autre cas, j'ai vu un lapin, dans la cage duquel j'avais placé pendant deux jours le cadavre d'un galeux, ne présenter de lésions dis- tinctes qu’au bout de deux mois. L'étendue des parties envahies par les Acariens s’est montrée assez variable. Au moment de la mort, on trouvait généralement des croûtes sur toute la région inférieure des pattes, depuis les tarses et les carpes jusqu’à l'extrémité des doigts; mais il m'est arrivé, dans quelques cas, de n’en rencontrer que sur ce dernier point, et d’autres fois je les ai vues remonter sur les régions supérieures des membres. Parfois les ongles conservaient leurs dimensions normales, mais souvent ils subissaient, au contraire, un allongement remarquable et présentaient en outre à leur base un véritable manchon de croûles. A la tête, les lésions se montraient d'abord aux lèvres, qu'on voyait d'ordinaire se détacher par lambeaux, puis gagnaient le chanfrein, provoquant facilement des plaies profondes, enfin le pourtour des yeux. Rarement j'ai rencontré les croûtes dissé- minées sur toute la surface du corps. Si on abandonne la maladie à elle-même, les animaux succombent assez rapidement, en général trois à six semaines après l'apparition des croûtes. Ils sont alors dans un état de maigreur extraordinaire, ce qui lient en partie à la difficulté qu'ils éprouvent de prendre les aliments. On prolonge en effet la vie de quelques semaines en traitant les altérations des lèvres au moyen de substances antipsoriques. Le Sarcopte du Lapin (Sarcoptes scabiei var. cuniculi) est remarquable, ainsi que l'avait déjà montré Neumann, en ce que la femelle ovigère ren- ferme souvent un embryon bien développé. J'ai noté, en outre, une grande abondance d'individus mâles. Au point de vue de la taille, j'ai relevé les chiffres suivants : — Mdle long de 210 à 228 y, large de 155 à 178 uw. — Femelle ovigère longue de 340 à 400 w, large de 260 à 300 J'ai essayé de transmettre cette gale à des Cobayes. J'y suis parvenu au prix d’une cohabitation prolongée. Le 6 janvier 1893, j'introduis un premier Cobaye dans une cage de Lapins galeux. Le 1* février, ce Cobaye montre déjà une légère dépilation au bout du nez. Le 10, il a Le chanfrein envahi. Le 4 mars, on constate que la gale s’est développée aussi dans les régions postérieures du corps, particularité due à ce que le petit animal se tient souvent assis sur les Lapins. 11 meurt le 5 avril, avec une gale étendue aux lèvres, au pourtour des yeux, aux oreilles, aux pattes (dans toute la longueur), aux cuisses, aux flancs et à la ligne médiane dorsale. Les croûtes sont relativement 138 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE peu épaisses, blanchâtres, comme furfuracées. Les Sarcoptes s'y montrent sans modification appréciable. Le 23 février, je répèle la même expérience. Le 5 mars, apparaissent au bout du nez les premières traces de dépilation, et le Cobaye meurt le 8 avril avec une gale localisée aux lèvres et aux pattes. Il m'a paru intéressant, d'autre part, de rechercher si la gale da Lapin était transmissible au Furet. Ce dernier animal est souvent affecté, en effet, d’une forme de gale produite également par le Sarcoptes scabiei et offrant une certaine similitude avec celle du Lapin, puisqu'elle attaque plus spécialement les pattes et le museau, et qu’elle provoque parlois aussi un allongement exagéré des ongles. Or, en raison de la destination habituelle des Furets, on peut être porté à se demander si ces animaux ne sont pas susceptibles de contracter leur gale au contact des Lapins. J'ajoute que cette hypothèse pourrait s'appuyer encore sur les analogies morphologiques que présentent les Sarcoptes du Lapin et du Furet. Voici en effet les dimensions que j'ai reconnues au Sarcoptes scabiei var. furonis : — Mûle long de 220 à 225 y, large de 165 à 178 &. — Femelle ovigère longue de 330 à 420 y large de 270 à 300 &. Je me suis donc procuré un Furet, que j'ai suivi pendant quelques semaines afin de m'’assurer qu'il n'était pas atteint de gale. Puis, imitant le procédé des chasseurs, qui livrent de temps en temps à ces animaux une tête de lapin pour les rendre plus ardents, je lui ai donné, le 5 janvier, une tête de lapin galeux, qu’il a immédiatement entraînée au fond de sa iitière. Le 13 janvier, je lui en ai rendu une seconde. Les premières traces de gale ont été constatées le 1° mars aux doigts antérieurs. Le 8, les lésions étaient déjà bien apparentes. Elles se sont ensuite développées de plus en plus, et le Furet a succombé le 6 mai, avec une gale s'étendant non seulement sur loute la longueur des pattes, mais jusque sous le ventre. Le museau n’élait que faiblement envahi, quoique montrant aussi des Sarcoptes. Les ongles avaient à peine augmenté de longueur. Pour résumer en quelques mots les résultats de ces recherches, je noterai : 1° Que la gale du Lapin, causée par le Sarcoples scabiei, est très con- tagieuse de Lapin à Lapin, mais que son développement comporte quel- quéfois une période d’incabation extrêmement longue ; 90 Qu'elle se transmet du Lapin au Cobaye par cohabitation; 30 Qu'elle est également transmissible au Furet. Je dois ajouter qu'aucune des personnes qui ont manié les Lapins galeux dans mon service depuis plus d'un an n’a présenté la moindre apparence de lésions psoriques. SÉANCE DU 19 JUILLET 7139 SUR LES PARASITES ENDOGLOBULAIRES DU SANG DE L'ALOUETTE, Note de M. ALPHONSE LABBÉ. (Travail du laboratoire de Zoologie expérimentale de la Sorbonne.) Chez les Alouettes (Alauda arvensis), les Pinsons (Fringilla cælebs), les Étourneaux (Sturnus vulgaris) des environs de Paris, on trouve assez fré- quemment des hématozoaires dont nous avons pu étudier la morphologie et l’évolution. Ces hématozoaires donnent lieu à deux sortes d'infection parasitaire : 1° Une forme aiquë, causée par un parasite à développement rapide (trois ou quatre jours). Nous ne nous occuperons pas ici de cette pre- mière forme, qui, par sa structure amæbiforme,son mode de sporulation, le refoulement du noyau de l’hématie, son action pathogène souvent mortelle sur l'organisme, doit être placée très près des parasites mala- riques de l’homme. 2° Une forme chronique, à développement lent, beaucoup plus fré- quente que la première et dont nous allons décrire l’évolution chez l'Alouette, les formes de l'Étourneau et du Pinson étant, en somme, peu différentes. Chez l’Alouetle (1), la durée du cycle évolutif du parasite est exacte- ment de sept jours. D'abord apparaissent de petites formes endoglobu- laires pigmentées, comme des taches claires, réfringentes, ovalaires ou fusiformes, quelquefois étranglées au centre (2) et pourvues d’une tache sombre que les réactifs dénoncent être un noyau. Puis, ces formes grandissent, en se plaçant latéralement au noyau de l'hématie, deviennent ovalaires et un peu recourbées aux extrémités (formes dites en croissant), montrent des granulations protéiques qui se colorent très fortement par les réactifs nucléaires et paraissent être de même nature que celles déjà signalées chez les Coccidies et les Hémo- sporidies des Reptiles et des Batraciens, enfin présentent des grains de pigment noir ou Jaune-ccre, fortement réfringents et répartis irrégulière- (1) M. le D' Laveran a déjà signalé les parasites de l’Alouette aux environs de Paris ; il ne distingue pas les deux formes (V. Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 189, et article « Paludisme », in Encyclop. scient. des Aide-Mémoire). Les descriptions de Celli et de San Felice (Forschritte der Medicin, 1891), ne s'appliquent qu’à la forme à développement rapide. (2) Ces petites formes en 8, déjà vues par Celli et San Felice chez la Co- lumba livia, se présentent comme les petits corps conjugués décrits par Mannaberg et figurées par Korolko dans la malaria. CF. Mannaberg. Beitræge zur Kenntniss der Malariaparasiten, in Verhand- lungen des XI Congresses für Innere Medicin zu Leipzig, 1892, — et Korolko, Thèse de Pétersbourg, 1892 (en russe). 740 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ment au centre ou aux extrémités du parasile. Un noyau central, entouré d’un espace clair, est toujours visible au centre du croissant. Vers le quatrième ou cinquième jour se montrent les grandes formes, eucore endoglobulaires, que nous considérons comme caractéristiques de ces parasites, et qui ont la forme d’une haltère : cette forme halléri- dienne présente deux extrémités renflées séparées par un pédoncule et possédant chacune un noyau, produit de la division du noyau primitif. Chacun de ces noyaux prolifère à son tour, le bord des extrémités du parasite devient crénelé, et, lorsque le développement est achevé, on se trouve en présence de deux petites rosaces ou de deux petites morula, formées d’un certain nombre de spores nucléées, groupées autour de deux centres qui sont les extrémités de l’haltère. Entre ces deux sporoblastes s'étend le reste du corps parasitaire, qui forme un vrai sporophore à protoplasme rare, pourvu de pigment, et toujours placé latéralement au noyau du globule sanguin qui lui reste accolé, même si le globule est détruit. En résumé, la forme haltéridienne, caractéristique de ces héma- tozoaires, est formée de deux sporoblastes, à spores nues, séparés par un intervalle protoplasmique de la longueur du noyau de l’hématie. Faut-il considérer cet espace entre les sporoblastes comme un reliquat de sporulation? Pas absolument. Chez les Pinsons, en effet, les crénelures sont continues d’un bout à l'autre du parasite, sans que nous puissions affirmer si les crénelures centrales se métamorphosent en spores. La coloration des noyaux de la forme haltéridienne et des spores est assez difficile; les granulations chromatoïdes périphériques se colorent, en effet, aussi bien que les noyaux, par l’hématoxyline et le bleu de méthylène. Le meilleur procédé consiste à employer, après fixation au liquide de Flemming, ou au mélange picro-acétique, une triple colora- tion : hématoxyline ou bleu de méthylène, puis un mordant : le perman- ganate de potasse; ensuite fuschine acide ou fuschine aniline, aurantia ou acide picrique. Par ce procédé, on distingue bien les noyaux des gra- nulalions chromatoïdes et on peut même voir des noyaux en voie de divi- sion, Nous ne parlerons pas de la phase à Flagella ou Polymitus sur laquelle nous reviendrons prochainement : nous pensons que c’est une forme anormale qui n'existe pas dans le sang vivant, à la température du corps de l’animal. Nous avons dit que le parasite déplaçait latéralement le noyau de l’hématie; ce déplacement n'a du reste lieu que si le parasite est de grande taille. C’est donc un phénomène tout mécanique. Quant au globule lui- même, il paraît toujours décoloré, de telle sorte que sans la présence du pigment, il serait difficile d’apercevoir le parasite; une simple bordure d'hémoglobine reste seule autour de l'hématie. À l’autopsie, on constate une rate très hypertrophiée, très mélanique, mais si cet organe contient beaucoup de pigment, provenant de la SÉANCE DU AD JUILLET 741 destruction des hématies, en revanche il contient peu de parasites, pas plus que la moelle des os, les reins ou le foie : c’est le contraire de ce qui arrive pour les Hémosporidies des Reptiles et des Bratraciens. L'infection se reproduit de sept jours en sept jours avec une grande régularité : quelquefois les parasites disparaissent presque complètement. Par injection intra-veineuse, nous avons pu réussir à transmettre le parasile à d’autres alouettes; mais il nous a été impossible de transmettre à des pinsons des parasites de l’alouette ou réciproquement. Nous avons constaté que chez les oiseaux dont nous avons pu étudier les hématozoaires, il y a toujours deux types de parasites dont l'action, la forme et la sporulation sont très différentes : Une forme chronique ou haltéridienne ; Une forme aiguë ou amæbidienne. Quelles que soient les différences qui existent entre ces deux formes et bien que l’une d’entre elles soit indépendante de l'autre, pouvant se rencontrer sur des individus différents, cependant leur parenté est assez grande pour qu'on puisse envisager l'hypothèse d’un dimorphisme dans l’évolution. Nous trouvons-nous en présence de deux parasites différents, ou d'un même parasite à double évolution? La question est assez importante pour que, en l'absence de données suffisantes, il soit permis de se réserver (1). NOTE SUR LES NÉO-CANALICULES BILIAIRES DANS LE FOIE INFECTIEUX, par MM. V. Haxor et P.-L. Gasrou. L'un de nous a étudié dans une note précédente (2) les altérations de la cellule hépatique dans le foie infectieux, altérations qui témoignent d’an double travail d’abord irritatif, puis dégénératif avec prédominance variable, soit des lésions irritatives, soit des lésions dégénératives, suivant la nature du microbe pathogène et ses modes d'intervention. D'ailleurs, ce processus n’est pas propre à l'infection. Des modifications semblables sont produites par les divers irritants chimiques. Il ne saurait en être autrement, puisqu'il est établi aujourd’hui que les microbes agissent. surtout par les produits qu’ils sécrètent, par leurs toxines. Or, poisons et toxines sont des agents de mème ordre. Les toxines peuvent même avoir la même intensité d'action que les poisons les plus violents. Aïnsi, par (1) Nous devons dire ici que M. Danilevsky distingue aussi les parasites de l'infection aiguë de ceux de l'infection chronique (Voir Annales de l'Institut Pasteur, 1891). (2) V. Hanot. Note sur les altérations cellulaires du foie infectieux, Société de Biologie, séance du 17 juin 1893. 742 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE exemple, les toxines des bacilles de Koch et de Gafky peuvent même produire, comme l’arsenic et le phosphore, la dégénérescence graïisseuse du rein et du foie (1). Parmi les lésions irritatives déterminées par les toxines microbiennes, il faut placer la transformation des cellules hépatiques en néo-canali- cules biliaires. Sur les dessins présentés à la Société dans la séance du 17 juin, on voit nettement cette transformation. Nous avons étudié les néo-canalicules biliaires dans 67 cas d'infections aiguës, 41 cas d'infections chroniques et 21 cas de maladies du foie d'origine infectieuse : hépatites ou cirrhoses infectieuses. Ces nombreux examens nous conduisent à conclure, d'une facon géné- rale, que dans les cas où le processus est suraigu, lorsque les cellules se détruisent rapidement et profondément, les néo-canalicules n’ont pas le temps en quelque sorte de se produire. D'autre part, si la toxine est peu irritante, le processus lent et chronique, la modification cellulaire n'ira pas jusqu’à la formation de néo-canalicules biliaires. On les trouve surtout si le processus est aigu ou subaigu. Ainsi, ils ne sont jamais aussi nombreux, aussi développés que dans la cirrhose hypertrophique avec ictère chronique, ce type de cirrhose infectieuse, dont le développement se fait par poussées subaiguës. Par contre, ils sont rares dans l’atrophie jaune suraiguë du foie comme dans la cirrhose infectieuse chronique. Nous avons dit que, d’une facon générale, les néo-canalicules sont plus rares dans les infections chroniques que dans les infections aiguës. Encore faut-il distinguer. Ainsi sur 7 foies de fièvre typhoïde, nous n'avons point trouvé de néo-canalicules, tandis que sur 9 foies de rou- geole, nous les avons trouvés dans 4 cas. La nature du microbe, les con- ditions qui atténuent ou augmentent sa virulence, la durée de son action, expliquent les variantes observées dans les diverses infections et même dans les cas particuliers d’une même infection. | € que nous disons des néo-canalicules dans le foie infectieux n’est qu’en apparence en contradiction avec ce qui a élé observé à la suite de la ligature aseptique du canal cholédoque : on sait qu'on a trouvé alors dans le tissu hépatique des néo-canalicules biliaires. La ligaiture du canal cholédoque, en empêchant l’arrivée de la bile dans l'intestin, favorise l'infection intestinale. Et les agents microbiens qui interviennent dans cette infection, arrivant au foie par la veine porte restée perméable, y produisent un processus irritatif d'autant plus actif que l'organe aura été mis dans un état de moindre résistance du fait même de l’expérience. (1) Hanot et Legroux. Néphrile dans la fièvre typhoïde, Arch. gén. de méd., 1876, — Hanot et Lauth, Sur le foie gras des tuberculeux, Etudes sur la tuber- eulose, t, I. SÉANCE DU 15 JUILLET 743 En analysant, au point de vue histologique et clinique, les 129 foies infectieux que nous avons examinés, on voit que le développement des néo-canalicules biliaires est en rapport étroit avec le degré d'intensité des lésions irritatives, avec l'augmentation de volume du foie et la pré- sence plus ou moins accusée de l'ictère. C’est là une loi générale dont la connaissance peut avoir son utilité en pratique. On se rend aisément compie de ces diverses particularités. L’ictère lui-même est évidemment dû en partie à une hypersécrétion, résultat de l'irritation cellulaire; nous disons en partie, car d’autres facteurs y prennent part, ainsi que l’un de nous essaiera de le démontrer dans un travail sur l’ictère infectieux qui doit paraître prochainement (1). Nous ferons remarquer encore que, sur 67 cas d'infection aiguë, 24 fois nous avons trouvé nettement sur les coupes différents microbes, soit dans un tiers des cas, tandis que sur #1 cas d'infection chronique, nous ne les avons trouvé que quatre fois, soit dans un dixième des cas. Ce qui concorde pleinement avec ce que M. Roger a observé dans ses expé- périences avec le Bacillus septicus putidus, à savoir que « dans les cas aigus d'infection, l'agent pathogène se trouve en grande abondance dans les divers organes et notamment dans le foie, tandis que dans les cas chroniques il n'y a plus de microbes dans l'organisme » (Soc. Biol., 7 juillet 1895). NOTE SUR LA TOXICITÉ DES URINES DES ÉPILEPTIQUES, par M. Cu. FÉRÉ. J'ai déjà rapporté à la Société de Biologie les résultats de plusieurs expériences sur les effets des injections inira-veineuses des urines d’épi- leptiques (2), qui montraient des différences de toxicité de l'urine suivant qu'on la recueillait avant, pendant ou après la période paroxystique. Les urines pré-paroxystiques m'ont paru plus toxiques, en général, que les urines post-paroxystiques. M. J. Voisin et A. Péron ont publié une note dans laquelle ils donnent des conclusions diamétralement opposées; mais leurs conclusions ne sont pas légitimement déduites de leurs expé- riences où on relève une négligence qui les annule nécessairement. Ces auteurs n’ont tenu aucun compte de la rapidité de l'injection qui doit être fixe pour toutes les expériences comparées et qui varie dans toutes les leurs (3). (1) V. Hanot. Considérations générales sur l'ictère grave. (Sem. méd., juil. 1893). (2) Comptes rendus de la Société de Biologie, 1890, p. 205, 257, 514. (3) J. Voisin et A. Péron. Recherches sur la toxicité urinaire chez les épi- leptiques, Archives de neurologie, 1892, t. XXIV, p. 178; 1893, t. XXV, p. 65. 744 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE La vitesse d’injeclion dont on se sert habituellement est de 10 centi- mètres cubes à la minute; elle a été de règle dans toutes mes expériences. Dans les expériences de MM. Voisin et Péron, nous voyons des urines pré-paroxystiques injectées à raison de 580 centimètres cubes en { h.30, de 200 centimètres cubes en 1 h. 5. Il est facile de comprendre, qu'avec cette lenteur opératoire, sans compter les interruptions qu'ils signalent, ils obtiennent des hypotoxicités tout à fait remarquables que l’on trouve dans les conclusions, mais qui en réalité n'existent pas dans les expériences. Cependant l'hypotoxicilé peut exister réellement pendant toute la période de l'accès épileptique. Le nommé M..., vingt ans, épileptique depuis l’âge de douze ans, transféré du service de M. Bourneville dans la division des épileptiques adultes le 13 septembre 1891, a toujours plusieurs accès par mois. Il à été mis en expérience le 9 février 1893, il n'avait pas eu d'accès depuis sept jours. Les urines ont été recueillies à partir de 7 heures du soir. Le 14 février, le malade a un accès à 6 heures du soir, il en a eu un autre à 9 heures et un autre à 11 heures. L’urine a encore été recueillie le 42 et le 13, puis le 22 (pas d'accès du 11 au 26). Les injections ont été faites avec des urines neutralisées, maintenues à 37 degrés, et la vitesse a été constamment de 10 centimètres cubes à la minute sans interruption. Les coefficients urotoxiques out été les sui- vants : 9: février: —-Urine de nuit 2e eee SORTE 10 — Ürimerdetouretide nuit eee 0.131 AL — Ürinerde Jour Etide Beer 0.132 12 — Urine deJouretdemuit mere RO 50 13 — Urine de jour et de nuit. 040 ONDES? 22 — Urine detjourtet de nuit 4140 eee Pn0E 220 Ces résultats, en contradiction formelle avec ceux qui ont été obtenus précédemment avec la même méthode d’expérimentation, montrent qu'il faut se lenir sur la réserve quant aux déductions théoriques ou pratiques à en tirer. NOTE SUR L'INFLUENCE DE LA LUMIÈRE BLANCHE ET DE LA LUMIÈRE COLORÉE SUR L'INCUBATION DES OEUFS DE POULE, par M. Ch. FÉRÉ. L'influence de la lumière et des couleurs sur la nutrition des végétaux et des animaux a été l’objet de nombreux travaux; mais en ce qui con- cerne les animaux en particulier, le résultat des expériences n’est pas bien SÉANCE DU 15 JUILLET 745 décisif, j'ai pensé que peut-être l’expérimentation sur les œufs de poule en incubation pourrait fournir quelques faits intéressants. M. Blanc a déjà fait connaître Les résultats d'expériences sur l'influence de la lumière blanche appliquée localement dans la région de la cicatri- cule sur l’incubation (1); mais dans ses expériences, il n’est point question d'épreuves comparatives sur des œufs témoins; d'autre part, dans les unes où la lumière agissait avant l'incubation, la source lumineuse provoquait un échauffement de 35 degrés, et dans les autres, où la lumière agissait pendant l’incubation, la moitié supérieure de l'œuf était noircie à l'encre de Chine, condition qui peut elle-même influencer l'incubation. Les résul- tats obtenus par M. Blanc montrent des troubles tellement importants, qu'il eût été intéressant d'être assuré qu'à la cause tératogénique qu'il indique, il ne s’en ajoutait point d'autres, telles que la date reculée de la ponte, les trépidations d’un transport récent, etc. Ces réserves sont peut-être de nature à expliquer les différences qui se manifestent dans les résultats de celles de mes expériences qui pourront ètre rapprochées de celles de M. Blanc, bien que le mode d'éclairage em- ployé ait été tout différent. Les œufs n’ont jamais été mis en incubation plus tard que le huitième jour de la ponte; ils me sont apportés dans des caisses remplies de son, et ils restent dans l’obscurité et au repos dans cette boîte au moins qua- rante-huit heures avant d’être introduits dans l’étuve. L’étuve dont je me suis servi est l’éluve de Roux, où les œufs sont largement éclairés d’un côté; elle est maintenue à une température constante de 38 degrés. Pour obtenir un éclairage coloré, j'interpose devant un des compartiments de l’étuve des lames de verre monochromatiques que je dois à l'obligeance de M. Ch. Girard, chef du Laboratoire municipal. Les œufs sont restés immobiles pendant l’incubation. I. — Dans une première expérience, j'ai placé dans le compartiment supé- rieur de l’étuve, muni de verres orange, trois œufs, tandis que trois autres œufs du même jour étaient placés dans un autre compartiment éclairé par la lumière du jour {à laquelle il n’est pas suppléé la nuit par un éclairage arli- ficiel). É Le 19 jour au mativ, un des œufs laissés à la lumière ordinaire était percé, et le 20° jour, exactement à l'heure où il avait été mis à l’étuve, un poussin fort el bien conformé était éclos avec un jour d'avance. Ce même 20° jour, on entendait des mouvements dans un autre œuf resté à la lumière ordinaire, mais le 21° jour, ces bruits avaient cessé et,en ouvrant l'œuf, nous avons trou- vé un poussin mort, mais moins volumineux que le précédent et bien conformé. (1) L. Blanc. Note sur l'influence de la lumière sur l'orientation de l’em- bryon dans l'œuf de poule, Comptes rendus Soc. de Biol., 1892, p. 174; — Note sur les effets tératogéniques de la lumière blanche sur l'œuf de poule, ibid.» p. 969. 746 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Le troisième œuf, laissé à la lumière ordinaire, contenait un embryon mort au 40° jour environ. Dans le compartiment aux verres oranges, tous les embryons étaient mort, l’un au quinzième jour environ, les deux autres vers le dizième, sans malformation. Cette expérience montre que la lumière et l’immobilité peuvent per- mettre un développement complet; mais cette circonstance que les em- bryons dont le développement était peu avancé élaient accolés à l’écaille, permet d'admettre que l’immobilité a joué un rôle important dans l'arrêt de l’évolution, rôle signalé par M. Dareste (1) et par Preyer (2). Toutefois, celte influence troublante dont nous retrouverons plus loin les effets, ne doit pas diminuer la valeur des autres expériences, car, comme l’aremar- qué M. Mathias Duvai (3), l'immobilité ne paraît avoir aucune influence nocive sur le développement pendant les premiers jours. IL. — Dans la seconde série d'expériences, les œufs ont été placés au nombre de 108 par séries de mêmes dates, moitié dans un compartiment de l’étuye muni de verre rouge, moitié dans un autre compartiment éclairé à La lumière ordinaire. Ces œufs ont été ouverts du 5e au 6€ jour, en prenant alternative- ment un œuf de chaque case; on a comparé les couples d’embryons par la mesure à la fois de l'embryon et de l'aire vasculaire et par la confrontation avec les figures de l'Atlas de M. Duval, nous avons obtenu les résultats sui- vants : 1° 2 fois le développement étail aussi avancé à la lumière rouge qu'à la lumière blanche; 2 28 fois il était plus avancé à la lumière blanche, 24 fois il était plus avancé à la lumière rouge. L'absence complète de déve- loppement s'est montrée 10 fois à la lumière rouge et 9 fois à la lumière blanche. Tous les embryons examinés le 3° jour offraient un retard de déve- loppement de 12 à 30 heures. Pour ceux qui ont été examinés dans le 4° jour, le défaut de développement n'existait plus que 70 fois sur 100 pour les œufs à la lumière ordinaire et 80 fois sur 100 pour les œufs à la lumière rouge. Pour ceux qui ont été examinés le 5° jour, le retard n'existait plus que 35 fois pour 100 pour les œufs à la lumière blanche, et 50 fois pour 100 pour les œufs à la lumière rouge. Au 6° jour, les embryons en retard étaient encore moins nom- breux, 20 pour 100 pour les œufs à la lumière blanche et 30 pour 4100 à la lumière rouge. Parmi les œufs du 5° et du 6° jour, plusieurs embryons avaient dépassé le développement ordinaire. Je n’insisterai pas maintenant sur les nombreuses anomalies de l'aire vasculaire et sur quelques anomalies de l'embryon rencontrées dans ces expériences. Je relèverai seulement la fréquence des inclinaisons de l'embryon, qui tend à prendre une position parallèle au grand axe de (1) Dareste. Recherches sur la production artificielle des monstruosités, 2° édit., 1894, p. 163. * (2) W. Preyer. Physiologie spéciale de l'embryon, trad..Wiet, 1887, p. 10. (3) Mathias Duval. Atlas d'embyologie, 1889, p. 11. mer SÉANCE DU 15 JUILLET 741 ——— "| l’œuf, ou même se renverse bout pour bout. J'ai cru remarquer que cette inversion était en rapport avec une certaine position de l’œuf dans l'éluve, où il était placé, le gros bout à gauche, c'est-à-dire qu'il était éclairé par le côté où d'ordinaire se trouve l'extrémité caudale. On pouvait voir là une confirmation des résultats obtenus par M. Blanc, à l'éclairage local de la région de la cicatricule. IL. — Dans la troisième expérience, 24 œufs de même date ont été placés le gros bout à gauche, 12 dans un compartiment muni de verres violets, et 12 dans un compartiment à la lumière ordinaire. Voici le résultat de l'examen des 12 couples fait le 3° et le 4e Jour : 6 fois le développement était plus avancé dans les œufs à la lumière blanche, 6 fois aussi il était plus avancé à la lumière violette; mais 3 fois le développement était nul à la lumière blanche ; il ne l'était qu'une fois à la lumière violette. La position de l'embryon était déviée 8 fois sur 9 dans les œufs à la lumière blanche, 7 fois sur 11 dans les œufs à la lumière violette. La déviation était de 30 à 45 degrés 5 fois pour chaque catégorie; il y avait inversion complète 2 fois dans la lumière blanche, 1 fois dans la lumière vio- lette ; 4 fois sur 12 seulement l'inclinaison partielle était à droite. Il faut noter que la lumière vient de gauche. IV. — La quatrième expérience est la répétition de la troisième : elle a donné les résultats suivants : 5 fois le développement est plus avancé à la lumière blanche, 4 fois il est plus avancé à la lumière violette; 3 fois il est égal dans les 2 catégories. Mais le développement est nul 3 fois à la lumière blanche, une fois seulement à la lumière violette. Quant à la direction des embryons, elle est normale 7 fois sur 9 à la lumière blanche, et seulement 3 fois sur 11 à la lumière violette. L'inclinaison ne dépasse pas 45 degrés à la lumière blanche, il en est de même à la lumière violette, sauf dans le cas où il y a ren- versement complet. Dans les deux dernières expériences comme dans les précédentes, il y a un retard général de l'évolution qui peut peut-être être attribué à l’âge des œufs, et à la température élevée qu'ils ont eu à subir avant l’incuba- lion. V. — La cinquième expérience a porté sur 46 œufs du même jour, qui ont été placés le gros bout à gauche, 23 dans un compartiment de l'étuve garni de lames de verre peints en noir et tout à fait opaques et 23 à la lumière du labo- ratoire. 1° 24 de ces œufs ont été examinés par couples du 2° au 4° jour avec les résultats suivants : 9 fois le développement était plus avancé à la lumière, 3 fois il était plus avancé dans l'obscurité ; 3 fois le développement était nul à la lumière, 2 fois il élait nul à l'obscurité. Quant aux déviations qui ne dépassaient pas 35 degrés il y en avait 5 sur 9 à la lumière, et # sur 10 à l'obscurité. 2° Douze œufs ont été examinés à partir de la 120e heure et ont donné les 718 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE résultats suivants : 5 fois le développement est plus avancé à la lumière blanche, 1 fois le développement est égal à l'obscurité et à la lumière. Il y a deux absences totales de développement, c’est dans des œufs à l'obscurité. Quant à la direction de l'embryon, + fois elle est normale, 2 fois dans chaque catégorie; 6 fois 1l n’y a qu'une déviation n'atteignant pas 35 degrés, 4 fois à la lumière blanche (4/6), et 2 fois dans l'obscurité (2/4). Dans ces œufs, examinés au commencement du 6° jour, le développement est normal à la lumière, il est même plus avancé que les spécimens de M. Duval, dans deux cas. Dans l’obscurité, au contraire, le développement n'avait atteint la normale qu'une seule fois, et 2 embryons sur # sont anormaux. 3e Les 10 œufs restants ont été laissés jusqu’au terme de l’incubation. Ils ont été ouverts le 22 jour : aucun produit vivant. Dans chaque catégorie il y avait À œuf sans trace de développement. Dans chaque catégorie, on a trouvé 4 œuf contenant des débris d'embryons peu développés. Les 3 œufs restants incubés à l'obscurité contenaient un embryon arrivé au 40° jour environ ne montrant pas de malformation apparente, les doigts sont distincts et en nombre normal. Un embryon arrivé au 16° jour environ a un arrêt de développement du bec supérieur qui se croise avec l'inférieur beaucoup plus long. Les 3 autres œufs incubés à la lumière contenaient deux embryons arrivés au 15e jour environ dont l'un a un doigt dont la dernière phalange est bifide avec deux ongles,et un autre a un arrêt de développement d'un doigt. Le troisième contenait un poulet arrivé à peu près à terme, avec un arrêt de développement d’un doigt. Il faut remarquer que tous les embryons, et principalement ceux qui étaient morts à une période précoce, étaient fortement adhérents à la membrane coquillière. VI. — La sixième expérience a été faite dans les mêmes conditions que la précédente avec 24 œufs, 12 à l'obscurité et 12 à la lumière du jour, toujours le gros bout tourné à gauche. 1° L'examen de 10 œufs, fait le 3° jour, donne les résultats suivants : 4 fois le développement est plus avancé à la lumière; 1 fois il est plus avancé à l'obscurité. Dans trois cas le développement était nul, c'était à l'obscurité. Quant à la direction elle est normale dans trois cas (3/5) à la lumière, il y à une inclinaison de moins de 45 degrés deux fois à la lumière (2/5) et deux fois à l'obscurité (2/2). 20 Les autres œufs ont été laissés à l’étuve jusqu’à la fin de l'incubation. Ils ont été ouverts le 22e jour. Parmi les œufs laissés à la lumière, 3 sur 7 ne présentaient aucune trace de développement; 2, arrivés à peu près au 14° jour, présentaient une déviation du bec supérieur à droite et un arrêt de développement de l'œil droit; 1, arrivé au 16° jour environ esl normal; un autre, arrivé à peu près à terme, n'a que 4 doigts aux deux pattes (l'œuf a été fourni par le Jardin d’Acclimatation comme un œuf de Houdan). Parmi les œufs incubés dans l'obscurité, il n’y en a eu aussi qu'un seul arrivé à terme ou à peu près; 1 est mort vers Le 10° jour; 2 vers le 15°; 1 au SÉANCE DU 15 JUILLET 749 162 jour, présente un doigt rudimentaire à une patte; un au 18° jour; et 4 du 15° au 18° jour, exencéphale avec un arrêt de développement du bec supérieur, absence d'yeux et célosomie. VII. — La septième expérience a porté sur 24 œufs : 12 ont été placés dans l'obscurité, 12 à la lumière blanche, tous le gros bout à droite, c’est-à-dire posés de telle sorte que le côté où se trouve normalement la tête est exposé à la lumière. Ces œufs ont été examinés comparativement par couples comme précédemment de la 48° à la 96° heure. Les résultats ont été les suivants : 9 fois le développement est plus avancé à la lumière; 1 fois il est égal à l'obscurité et à la lumière, 3 fois il est plus grand à l'obscurité. 2 fois les œufs incubés à la lumière examinés à la 96° heure ont présenté un développement plus grand que les types de M. Duval (2/4). Le développement a fait défaut dans 2 œufs de chaque catégorie. Quant à la direction des embryons, elle était normale 9 fois sur 10 dans ces œufs, à la lumière et 8 fois sur 10 dans les œufs à l'obscurité. Les trois déviations étaient très légères atteignant à peine 25 degrés. En somme ces expériences tendent à montrer que la lumière blanche est plus favorable au développement que la lumière orange, rouge ou violette. IL n’est nas prouvé que la lumière blanche soit plus défavorable au développement que l'obscurité sauf peut-être Lout à fait au début de l'incubation. Quant aux anomalies et à la mort qui survient chez les em- bryvons avancés, on peut l’attribuer à l’immobilité des œufs. La lumière parait influer sur la direction de l'embryon qui présente des déviations plus fréquentes; quand l'œuf est éclairé par le côlé où ne doit pas se trouver la tête de l'embryon. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'ÉTHÉRISATION PRÉALABLE SUR L'INCUBATION DES OEUFS DE POULE, par M. Cx. FéRé. J'ai pris 12 œufs de poule au 7° jour de la ponte et conservés à l’obs- curilé dans une boîte pleine de son et au repos depuis 4 jours dans mon laboratoire, je les ai placés pendant une demi-heure sous une cloche de verre, de la capacité de 30 litres, peinte en noir et bien opaque, avec un verre à boire contenant 30 centimètres cubes d’éther (les œufs et la cloche reposant sur une épaisse couche d’ouate). Ces œufs ont été ensuite placés dans l’étuve de Roux en même temps sur 12 autres œufs tirés de la même boite mais non éthérisés. Tous étaient orientés le gros bout lourné vers la droite c’est-à-dire que les œufs étaient éclairés par le côté vers lequel tourne ordinairement la tête. Ces œufs ont été ouverts en deux 7150 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE séries à partir de la 48° et de la 72° heure en en prenant un alternative- ment dans chaque catégorie pour pouvoir les comparer par paire à la même période de l’incubation. D'ailleurs chaque embryon était comparé aux figures de latlas de M. Duval pour déterminer approximativement la période de développement. Parmi les œufs non éthérisés il y a eu trois fois défaut complet de développement; parmi les œufs éthérisés il y a eu deux fois absence complète de développement et un embryon cyciope dont le développement n'a pas pu être déterminé exactement. Sur les 12 couples, nous avons trouvé 8 fois un développement plus grand dans les œufs non éthérisés, et 4 fois un développement plus grand dans les œufs éthérisés. Les œufs non éthérisés ouverts de la 48° à la 50° heure avaient un développement correspondant en moyenne à la 34° heure; pour les œufs éthérisés, la moyenne était de 30 heures. Les œufs non éthérisés ouverts de La 72° à la 74° heure avaient un développement de 68 heures en moyenne; les œufs éthérisés, de 60 heures seulement. En dehors des anomalies de développement de l'aire vasculaire sur lesquelles nous aurons à revenir, ces embryons ne présentaient que de rares anomalies de position : À fois pour chaque catégorie l’axe de l'embryon était paral- lèle au grand axe de l’œufet 4 fois parmi les œufs éthérisés il y avait une déviation de 25 degrés vers le petit bout. Une deuxième expérience a été faite après une exposition de 10 œufs aux vapeurs d’éther pendant deux heures un quart. Elle à donné les résullats suivants : 6 fois dans les œufs témoins l'embryon était plus avancé que dans les œufs éthérisés; 3 fois, le développement était égal dans les 2 catégories ; 1 fois seulement il était plus avancé dans l'œuf éthérisé (dans ce cas on a remarqué que la coquille avaitune épaisseur et _ une résistance de beaucoup supérieure à celle des autres œufs). Il y a un cas de défaut complet de développement dans chaque catégorie. Pour les œufs examinés de la 48° à la 50° heure, le développement indiquait 49 heurês en moyenne pour les œufs témoins et 28 heures par moyenne pour les œufs éthérisés. Pour les œufs examinés de la 72° à la 74° heure, le développement des embryons des témoins indiquait 72 heures en moyenne; pour les œufs éthérisés il n’était que de 55. Il y avait 3 embryons anormaux : 2 parmi les témoins; 1 dans les œufs éthérisés. Quant à la direction, elle était normale dans les 9 embryons dans la catégorie des œufs témoins. Dans la catégorie des éthérisés, il y avait | fois inversion totale, la tête ayant pris la place de la queue; en outre dans ce cas d'inversion et dans 2 autres cas où la tête avait sa direction ordinaire l'embryon élait couché sur le côté droit. Dans une 3° expérience, 2 œufs qui avaient séjourné 4 heures dans les vapeurs d'éther ont été mis à l’étuve en même temps que 2 témoins de même date. Il ont été ouverts au bout de 72 heures. Les œufs incubés à la lumière et non éthérisés avaient un développement comparable pour l’un SÉANCE DU 15 JUILLET 751 à la fig. 120 de M. Duval, l’autre à la fig. 115, c'est-à-dire que leur déve- loppement pouvait être évalué à 82 heures pour l’un et à 68 heures pour le second. Les embryons des œufs éthérisés avaient un développement comparable aux fig. 107 et 109, c'est-à-dire que leur développement pouvait être évalué à 46 heures pour l’un et à 48 heures pour l’autre (15 heures en moyenne pour les premiers, #7 pour les seconds). Dans les & œufs la tête de l'embryon avait la position normale; 1 fois dans chaque catégorie l'embryon était couché sur le côté droit, c'était l'embryon le plus développé. Les résultals de ces 3 expériences concordent pour montrer que l’éthérisation préalable produit un retard de développement. En ce qui concerne les anomalies qui se rencontrent avec une fré- quence plus grande dans les conditions où le développement est plus retardé, elles n’ont pas de caractère spécifique qui les rattache à la cause qui les a produites ; c’est un fait qui a déjà été relevé par M. Dareste ; et qui concorde avec ce que nous observons dans les dégénérescences humaines ; les stigmates de dégénérescence, qui n'ont rien à faire avec l’atavisme, mais sont des tares tératologiques, sont les mêmes chez les dégénérés héréditaires que chez les fils d’alcooliques ou de saturnins, que chez les enfants issus de mères dont la grossesse a été troublée par des chocs physiques ou moraux, ele. STRUCTURE ET PATHOGÉNIE D'UN KYSTE DERMOÏDE DU RAPHÉ PÉRINÉAL ET DU SCROTUM, par MM. P. Reccus el Ep. RETTERER. Il s’agit d’une tumeur probablement congénitale, dont l’un de nous (1) a déjà donné une relation anatomique et clinique. Située dans le raphé périnéo-scrotal, chez un homme de vingt-neuf ans, cette tumeur repré- sentait un kyste à trajet canaliculaire, moniliforme, où l’on compte-cinq bosselures du volume d’un petit pois, séparées les unes des autres par des parties étranglées dont le diamètre ne mesure guère que 2 à 3 mil- limètres. Elle offrait deux prolongements, l’un antérieur, l'autre pos- lérieur suivant exactement le raphé. Si nous revenons ici sur la structure de ce kyste, que notre collègue M. BRAULT avait examiné avec sa compétence bien connue, c’est qu'il nous semble intéressant de montrer comment l’évolution de la région périnéale peut donner naissance à des malformations pareilles. 4° Structure. À. Portions dilatées du kyste. Les parois de la poche sont (1) Gazetle hebdomadaire de médecine et de chirurgie, 15 juillet 1893, n° 28, 59 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE formées par une enveloppe mésodermique, épaisse de 0%,5 à À milli- mètre, constituée par une trame conjonctive très vasculaire et renfermant un certain nombre de faisceaux musculaires lisses. Sa surface extérieure présente des papilles, recouvertes par un épiderme-normal, avec une couche pigmentaire très accentuée. Sa surface intérieure, lisse, est tapissée d’un épithélium pavimenteux stratifié, épais de 0®",04 à 02,06, dont la moitié superficielle est formée par des assises aplaties et cornées. Les lamelles les plus internes de cet épithélium sont détachées et forment un magma de détritus épithéliaux. B. Sur la plus grande étendue des parties élranglées, la structure du kyste est plus intéressante : la surface extérieure de la paroi offre la structure de la peau; la surface intérieure présente quelques saillies, mais dans leur intervalle, elle est lisse et recouverte d’un épithélium pavimenteux stratifié de 0"",120 en moyenne. Quant à la portion méso- dermique et vasculaire de la paroï,-elle est remarquable, dans sa portion supérieure (dorsale et adhérente) et ses parties latérales, par une trame musculaire énorme. Celle-ci est constituée par l’entrelacement de gros faisceaux (épais de 0"%,04 à 0,08) de muscles lisses, dont la direction générale est concentrique par rapport à la lumière du kyste. Ces fais- ceaux sont contigus, séparés les uns des autres par de minces tractus de tissu conjonctif. En approchant de la paroi inférieure (ventrale) du kyste, _les faisceaux musculaires deviennent plus rares et la paroi est essentielle- ment formée par une trame conjonctive et élastique. Sur une cerlaine longueur du kyste, on remarque une ligne saillante partant de sa parot inférieure et formant le long de la ligne médiane un véritable raphé faisant saillie dans l'intérieur de la poche. Le prolongement postérieur du kyste présente, sur sa paroi profonde (dorsale) de nombreux faisceaux de fibres musculaires striées, dépendant du bulbo-caverneux. Nous sommes donc en présence d’un conduit épithélial elos, limité par le tissu conjonctif et musculaire du périnée, s'étendant dans le raphé périnéo-scrotal et terminé en cul-de-sac en avant et en arrière. Ajoutons que l’urètre et le reste des organes génitaux externes avaient une confor- mation normale, 2 Pathogénie. Si nous nous reportons aux phénomènes de développe- ment qui se passent daus la région ano-génitale des mammifères, nous nous rendrons aisément compte de la facon dont ce‘kyste dermoïde a pu se produire (1). La poche commune, ou cloaque, où aboutissent, chez l'embryon, le tube digestif d’une part, les conduits génito-urinaires, de l’autre, se divise en deux canaux distincts, sinus uro-génital et rectum, par la formalion de deux replis latéraux. Les bords de ces replis se (4) Voy. Origine et évolution de la région ano-génitale des mammifères, Jownal de l'anat. et de la physiol., 1890, p. 126 et suiv. SÉANCE DU 15 JUILLET : 153 rapprochent et se fusionnent, de la même facon que les replis médul- laires à l’époque où se ferme Ja gouttière médullaire. Plus tard on observe un processus analogue chez les embryons fémi- nins (1), au niveau du sinus uro-génital, qui se cloisonne en un canal ventral (l'urètre) et en un conduit dorsal (segment postérieur du vagin). Chez les embryons masculins, le sinus uro-génital ne se cloisonne pas, mais son orifice postérieur s'ouvre dans une gouttière formée par deux replis ventraux du tubercule génital. Ces derniers ne sont que des épais- sissements cutanés, revêtus, par conséquent, d'assises épithéliales d’ori- gine ectodermique et ne présentant, comme le reste de l'épiderme à cette époque de la vie embryonnaire, aucune trace de bourgeons glandulaires ni pileux. Dans le développement normal, les bords de ces replis (uro-génitaux ou simplement urétraux) se soudent comme dans le cloaque et prolon- gent le canal jusqu’au niveau du gland. A la base de ce dernier, on remarque (2) cependant un cloisonnement partiel de l’urètre balanique, aboutissant à la formation du sinus de Guérin. Déjà en 1892 (loc. cit., p. 247) l’un de nous s'est fondé sur les faits évolutifs qu'il a observés au niveau du gland pour donner une idée de la formation des urètres doubles dont il a vu un cas dans le service du pro- fesseur LANNELONGUE à l'hôpital Trousseau. Le tout se réduit à un cloison- nement analogue à celui du cloaque et du sinus uro-génital féminin. Dans le cas particulier qui nous occupe, le cloisonnement de l’urètre n’a été que partiel, c’est-à-dire qu'il porte sur une région limitée de l’urètre. Voici comment on peut se rendre compte de la façon dont notre kyste s’est produit, lorsqu'on rapproche les faits de développement normal de ceux que présentent la structure et le siège de la tumeur. Les replis urétraux (de la région périnéale) se sont formés et rap- prochés par leur face interne comme à l'ordinaire; mais au lieu de se souder sur toute leur hauteur, sauf à l’extrémité profonde (urètre), la réunion n’a eu lieu qu’en deux points : à leur extrémité profonde et au bord libre. Dans la partie moyenne, les deux replis n’ont fait que s’ac- coler, de façon que leur face interne est restée revèlue d’épithélium et que le tissu mésodermique et vasculaire n’a pas passé d’un repli à l’autre. De cet arrêt de soudure dans la partie moyenne des replis, ou ce qui revient au même, de la soudure partielle portant sur une partie profonde et sur le bord libre des replis, résulte un canal tapissé par des assises ectodermiques, qui ont continué à évoluer comme l’épiderme, mais sans former ni follicules pileux ni glandes sébacées. Supposons que le processus ait débuté au sinus uro-génital et se soit (4) Voy. Comptes rendus de la Société de Biologie, 1891, p. 291 et 312. (2) Sur le développement du pénis et du clitoris, etc., Journal de l'anat. et de la physiol., 1892, p. 244 et suiv. 754 £ SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE —————_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—…—…—…—….….….….…—.—….…—.—.—.—.—.—.—_—_—….—.—.—..—.-—…—…—_—.—_—.—.-—.————_—_—_—_—_—_—_——— continué jusqu’au gland, nous aurions un urètre double; dans notre observation, il s'est limité à la région périnéele, c’est-à-dire que nous sommes en présence d’un kysle terminé en cul-de-sac en avant et en arrière. Ce dernier canal suit nécessairement le raphé périnéal ; il est tapissé par un revêtement épithélial semblable à celui de la peau et sa paroi mésodermique est consliluée par une trame musculaire et conjonctive rappelant celle du corps spongieux, mais les vaisseaux ne s’y sont pas développés jusqu’à la transformer en tissu érectile. NOTE SUR L’EXISTENCE DES VAISSEAUX NOURRICIERS DU MUSCLE CARDIAQUE CHEZ LA GRENOUILLE, par M. HENRI Marti. Le cœur des Batraciens est généralement regardé comme une éponge vasculaire, c’est-à-dire que le muscle cardiaque ne recoit pas de vaisseaux sanguins propres. C’est ainsi que Cuvier et Miive Epwarps le décrivent. Cependant Hyrrz (1), en 1855, décrit une artère coronaire, comme venant de la carotide droite. . Ecker (2), en 1881, reproduit ses travaux. Dans le bel ouvrage de SABATIER (3), sur le cœur des vertébrés, l'artère coronaire n’est point représentée, malgré l'exactitude qui caractérise, en général, les détails si précis de ses figures. Procédés d'études. — J'ai repris cette étude à l’aide d’injections et de coupes en séries. Les injections ont été faites avec de la gélatine carminée, et poussées dans le ventricule, préalablement le sinus veineux et les arcs du bulbe ont été liés. Résultats. — J'ai pu m’assurer que le vaisseau de HYRT£ n'était jamais injecté par ce procédé; en effet, les ligatures étaient placées entre son point d’origine et le cœur. Malgré cela, le bulbe, l’oreillette et le ventri- cule laissaient voir de nombreux capillaires. Un cœur ainsi injecté, exa- miné par sa face postérieure montre, au niveau du sillon de Haller, entre le bulbe et le ventricule, un vaisseau qui contourne le bulbe en passant sur son côté droit, abandonnant là une branche pour sa face postérieure el la région correspondante de l’oreillelle, arrivé à la face antérieure ce vaisseau se divise en trois branches ; l’une, la plus importante, monte sur la face antérieure du bulbe, la seconde suit d’abord la même direction, (1) Hyrtl. Ueber die Selbststeurung des Herzens. Wien, 1855, p. 15. (2) Ecker. Anatomie des Frosches. Braunschweiïz, 1881, 2° Abth., p. 66 et 97. (3) Sabatier. Etude sur le cœur des Vertébrés. Montpellier, 1873. uw SÉANCE DU 15 JUILLET 755 0 puis se répand sur l'oreillette, la dernière plus courte se dirige sur la base du ventricule. Ces deux dernières branches contribuent à la vascu- larisation du ventricule, on peut les suivre sur un trajet de 2 millimètres sur un cœur ayant 6 millimètres de haut. Sur les coupes la disposition est encore plus frappante. L’artère coro- naire dont nous avons signalé l’origine apparente, prend naissance dans le ventricule entre la valvule auriculo-ventriculaire et l’abouchement du bulbe dans le ventricule, elle est munie d’une valvule dont la concavité est au contact du tissu lacunaire du ventricule. Dans le sillon bulbo-ventriculaire elle est entourée de tissu conjonctif. Arrivée sous le péricarde viscéral, elle se divise en deux trones d’égale grosseur, celui de gauche reste à la face postérieure et fournit de nom- breux capillaires au péricarde et au ventricule, la branche droite est celle que nous avons déjà décrite, mais outre les branches superficielles qu’elle fournit, il en existe de profondes, très grêles et très nombreuses qui pénètrent dans la région bulbaire, en ce point exactement où la fibre musculaire cardiaque se différencie en fibre striée, particularité spéciale au bulbe des Batraciens. Près de la valvule de la coronaire existent quelques capillaires allant à la valvule auriculo-ventriculaire. Dans les trois quarts inférieurs du ventricule, nous n'avons vu aucun vaisseau, là le tissu spongieux est en rapport avec la surface cardiaque. Cette étude repose sur quatre cœurs de ana esculenta, coupés à la paraffine, dont toutes les coupes ont été montées. Je me suis mis à l’abri des causes d'erreurs que la gélatine pouvait donner par diffusion dans les lacunes, en m'’assurant que partout la structure des vaisseaux était manifeste, et que l’endothélium des capil- laires contenait, en plus de la masse colorée, des globules sanguins. La lacune veineuse située à la face antérieure de la racine du bulbe, dans le sillon de Haller, n’était pas injectée. Il me semble qu'on peut regarder l'artère de Hyrtl comme une artère du péricarde, ne fournissant aucune branche au cœur, puisque sur un cœur lié à sa base, l'injection étant poussée dans le bulbe, aucune branche de la coronaire n’était pénétrée, alors que l'artère de Hyrtl l'était très nettement. Autre vaisseau à signaler. — Il existe encore un autre vaisseau nourri- cier du bulbe. Au-dessous de la bifurcation du bulbe une coupe le montre constitué par six cavités correspondant à deux groupes de canaux placés par trois dans le plan antéro-postérieur. Le canal postérieur de chaque côté repré- sente le tronc pulmo-cutané. Sur ce tronc du côté gauche j'ai trouvé sur toutes les séries l'origine d'un vaisseau. Il prend naissance sur la paroi postérieure, près de la ligne médiane, et reste dans cette paroi. Il n’est point visible à l'extérieur, son trajet est descendant, il se divise en trois 156 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE branches qui se ramifient dans la couche musculaire striée du bulbe. Ses dernières ramifications finissent dans la région où commencent à se voir celles venues de la coronaire dans un trajet ascendant. Le nombre des coupes, où ce système est visible, peut faire estimer sa longueur à 12,5. Nous concluons donc : que ce vaisseau contribue à la nutrition du bulbe, qu’il apparaît à la limite supérieure du tissu musculaire strié, et que son trajet est descendant. En résumé : | 1° Il existe chez la ana esculenta un vaisseau nourricier propre, cor- respondant, comme origine et trajet, à l'artère coronaire des vertébrés supérieurs. 2° Le bulbe reçoit une artériole ten l’origine se trouve près de la bifurcation du bulbe. 3° L'artère de Hyrtl n’est qu'une artère s’épuisant dans le péricande (4): Du POUVOIR BACTÉRICIDE DU MUCUS HUMAIN ET EN PARTICULIER DU MUCUS NASAL, par MM. R. Wurrz et MARCEL LERMOYEZ. Les cavités naturelles sont îes seuls points du corps où l’on trouve, à l’état normal, des microbes. Ceux-ci, venus du monde extérieur, y vivent pour la plupart à l’état d'hôtes inoffensifs; un certain nombre d’entre eux sont cependant capables de devenir, à un moment donné, des agenis pathogènes. Ces cavités sont donc, en dehors même de tout traumatisme, les portes d'entrée habituelles de certaines infections. Contre ces infections, l'organisme humain se défend par divers moyens qui ont pour résultante la résistance de l'individu. Ilest un point qui, dans cette question si importante de la résistance à l'infection et de l’immunité, nous a paru jusqu’à présent laissé dans l’ombre. C'est la nature intime du mécanisme par lequel les agents patho- gènes, pénétrant dans les cavités nalurelles, y sont détruits ou devien- nent inoffensifs. Le rô'e du mucus nous a semblé être capital dans l'espèce. En effet, à la surface de l’épithélium de toutes les muqueuses, on trouve à l’état permanent une couche de mucus, le plus souvent trop mince pour couler et qui n’est souvent visible que sur les coupes de ces membranes, après l’action des agents fixateurs. L'importance de cette couche de mucus en tant qu'agent défensif, avait déjà été entrevue par quelques auteurs. Pour les uns, c'est un vernis protecteur de l’épithélium sous-jacent, sur lequel viennent s’englober les poussières pénétrant du dehors dans les voies res- (1) Ces recherches ont été faites au laboratoire d'histologie du professeur Mathias-Duval. SÉANCE DU 19 JUILLET Ton piratoires; à un moment donné, la quantité de mucus augmentant excite un acte d'expulsion réflexe, éternuement ou toux, qui chasse mécanique- ment les éléments nuisibles. Pour d’autres auteurs, le mucus agirait comme stimulant les mouvements de l’épithélium cilié. En somme, le rôle protecteur du mueus n'avait guère été signalé que comme un phéno- mène mécanique, résultant surlout de sa viscosité. Nous avons pensé que le mucus posséderait peut-être un pouvoir bac- téricide analogue à celui du sérum sanguin cu de l’albumine de l’œuf, Nous avons, pour voir si cette hypothèse était justifiée, institué la série d'expériences qui va suivre. Nous n'avons employé, jusqu'ici, que le mucus nasal de l’homme et nous avons lout d’abord étudié son action sur la bactéridie charbonneuse. Le mucus dont nous nous sommes servis provenait de différentes sources. Les personnes qui l'ont fourni présentaient, à l'examen rhinoscopique, une intégrité absolue de la muqueuse des fosses nasales. Pour le recueillir, après avoir aseptisé avec soin le vestibule des narines, on excite la sécrélion de la pituitaire en introduisant dans le nez de petites boulettes d'ouate stérilisée. On obtient ainsi un liquide transparent, filant, très visqueux, donnant au papier de tournesol une réaction neutre ou très fai- blement alcaline. Il est presque amorphe à l'examen microscopique. Il ne montre que quelques cellules épithéliales et quelques leucocytes ex- trèmement rares. Si l'on a soin de rejeter les premières gouttes qui s’écoulent et qui ont balayé le nez, le mucus se montre presque toujours stérile, ainsi que nous nous en sommes assurés par l’ensemencement. On peut, au surplus, le stériliser par la méthode de Tyndall. Les expériences faites avec le mucus de même source, stérilisé ainsi ou non, nous ont donné constamment les mêmes résulats. Dans ce mucus nous avons semé des traces de culture récente sporulée de charbon dans le bouillon (l'extrémité de la pointe d’un fil de platine). En même temps, nous semions la même quantité de charbon dans des tubes de bouillon témoins. Puis nous placions le tout à l’étuve à 38 degrés, pendant un laps de temps variant de trois heures à (rois semaines. Au bout de ce temps, nous versions de la gélatine dans les tubes de muecus, et nous faisions des plaques avec la lotalilé du mélange. Ces plaques se sont foujours montrées stériles, quelle que füt la durée du séjour du mucus ensemencé à l’étuve. Au contraire, des colonies innombrables se sont montrées dans les plaques faites avec une anse du bouillon témoin. Nous avons aussi procédé à des inoculations chez le cobaye. Le mucus, ensemencé avec des traces de B. anthracis, placé à l’étuve à 38 degrés pendant vingt-quatre et quarante-huit heures, a été inoculé sous la peau à des cobayes à des doses variables (allant jusqu’à 3 centimètres cubes de 158 SOCIËÈTÉ DE BIOLOGIE mucus). Ces inoculations se sont constamment montrées inoffensives. Les cobayes témoins inoculés avec la même dose de bouillon charbonneux, ensemencé avec la même quantité de culture, sont tous morts du char- bon, en deux, trois et quatre jours. Il résulte donc de ces expériences que le mucus nasal jouit, vis-à-vis du bacillus anthracis, d’un pouvoir bactéricide extrêmement marqué. Nous avons étudié cette action sur une série d’autres microorganismes et nous nous réservons de revenir prochainement sur ces expériences. Dès maintenant, nous pouvons dire que l’action bactéricide du mucus nasal semble s'exercer d’une manière très inégale sur les différents microbes pathogènes. Sur plusieurs d’entre eux, cette action est moins marquée que sur la bactéridie charbonneuse, mais, sur tous ou presque tous, elle s'exerce de [a même facon et dans le même sens que celui que nous venons d'indiquer. Seule, l'intensité de ces effets varie. Ces expériences nous paraissent présenter un certain intérêt au point de vue physiologique. L’air inspiré, comme on sait, se dépouille au niveau des voies respiratoires supérieures et, en particulier, au niveau des anfractuosités des cavités nasales, de la plupart des particules solides qu'il peut tenir en suspension, y compris les microbes. Ces microbes, ou leurs spores, déposés à la surface de la muqueuse pituitaire, s’y dévelop- peraient abondamment s'ils y rencontraient un terrain de culture favo- rable. Étant donné la multiplicité de ces germes, il y aurait là des condi- tions pour ainsi dire incessantes d'infection. Grâce au pouvoir bactéricide du mucus nasal, cet enduit muqueux ne joue pas seulement, comme on voit, un rôle d'arrêt mécanique à l’égard des particules flottantes dans l'air inspiré; son rôle défensif est plus directement actif; il s'exerce en entravant et en détruisant la vitalité d’ur grand nombre d’espèces bacté- riennes SUR L'ACTION DES COURANTS DE POLARISATION MUSCULAIRE COMME EXCITANTS DE LA CONTRACTILITÉ, par M. ALFRED ROUXEAU, Professeur-suppléant à l'École de Médecine de Nantes. Pour produire les excitations galvaniques, on peut se servir soit d’un interrupteur ordinaire, soit du levier-clef de Dubois-Reymond. Ces deux instruments sont, je crois, trop connus pour que j’en rappelle ici la des- cription. Mais, en les employant tous les deux comparativement, j'ai pu me rendre compte qu'iis n’ont pas tout à fait la même action physiolo- gique. En particulier, le muscle de la pince de l’écrevisse réagit d’une façon très différente suivant que l’excitant galvanique lui est fourni par l’un ou par l’autre. Quel que soit l'instrument employé, ce muscle, exeité par un courant SÉANCE DU 15 JUILLET 7159 galvanique, réagit par un tétanos, qu'il est absolument impossible, comme Va si judicieusement fait observer M. Richet, de distinguer du tétanos expérimental vulgaire produit par les courants faradiques à interruptions suffisamment fréquentes. Mais avec l'interrupteur ordinaire, la rupture du courant n’amène que la décontraction pure et simple du muscle, tandis qu'avec le levier-clef, la secousse de rupture est la règle. De plus, avec le levier-clef, le tétanos de Rilter s'obtient très facilement, d'une facon très nette; tandis qu'avec l'interrupteur ordinaire, il faut galvaniser le muscle plus longtemps, le phénomène est moins accentué, et encore ne réussit- on pas toujours. À quoi attribuer cette différence d'action des deux instruments? Lors- qu'on ferme le levier-clef, on ne met pas seulement la pile en court cireuit, ce qui a pour résultat de soustraire le muscle à l’action du courant excita- teur, mais on réunit aussi par un conducteur les deux extrémités du muscle qui vient d’être excité. Or, c’est là une circonstance importante. Un courant galvanique, qui traverse un muscle quelconque, y déve- loppe des forces électromotrices, dites de polarisation électrolytique, de sens contraire et d'intensité graduellement croissante, dont le résultat est de le neutraliser plus ou moins: l'aiguille d’un galvanomètre très sensible, intercalé dans le circuit, revient peu à peu vers le zéro. C'est là un fait qui a été traité d’une facon très claire, il y a quelques années, par Bou- det de Paris, à l’intéressant travail duquel nous renvoyons le lecteur. J'en ai, pour ma part, vérifié l'exactitude avec le muscle de la pince de l’écre- visse, et,comme conséquence de la diminution graduelle de l'intensité du courant excitateur, j'ai vu collatéralement la contraction du muscle dimi- nuer parallèlement. Au moment de la rupture du courant de pile, les forces électromotrices de polarisation n'étant plus neutralisées deviennent libres et on se trouve en présence d’une pile secondaire, d’un véritable accumulateur qu’on vient de charger. Si l’on s’est servi pour cela du levier-clef de Dubois- Reymond, le muscle se comporte comme un accumulateur qu'on décharge brusquement en metlant les pôles de celui-ci en court circuit et qui débite par conséquent en peu de temps une grande quantité d'électricité, produisant des effets d’excitation d'autant plus accusés et plus prolongés que la charge aura été plus longue. Si l’on s'est servi de l'interrupteur simple, il en sera du muscle comme d'un accumulateur qu'on abandonne à lui-même après l’avoir chargé. Ses forces électromotrices vont s’y com- biner peu à peu en produisant des courants locaux dont l'intensité et par conséquent la puissance excitatrice seront beaucoup moins puissantes. Voilà ce que la théorie pouvait faire prévoir et ce que j'ai pu vérifier. J’ai fait fabriquer un instrument qui tient à la fois de l'interrupteur simple et du levier-clef. Comme le premier il ferme et rompt un circuit de pile en produisant les mêmes extra-courants. Il tient du second, en ce qu'il réunit, aussitôt après la ruplure du circuit de pile, les extrémités du 7160 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE muscle en expérience aux bornes d’un galvanomètre très sensible. Sui- vant le plus ou moins de rapidité avec laquelle on manœuvre l'instrument, on peut faire varier la durée de l'intervalle qui sépare la rupture du cir- cuit de pile de la fermeture du circuit musculaire et la ruplure du circuit musculaire de la fermeture du circuit de pile. Au moyen d’un dispositif très simple, un signal de Desprès peut, avec une approximation très suf- fisante, tracer sur le cylindre enregistreur les moments précis de ces quatre phases. Si l’on manœuvre l'appareil avec rapidité, on obtient exactement les mêmes résullats physiologiques qu'avec le levier-clef; c’est-à-dire que la secousse de rupture est aussi constante et Le tétanos de Ritter aussi facile à obtenir. Manœuvrons l'instrument avec plus de lenteur, en décomposant le mouvement. Si on a fait passer le courant de pile, un courant descendant par exemple, et d’une intensité de 0,4 à 0,5 de M. A., peudant uu lemps très court, une à deux secondes, on voit très neltement qu'au moment de - la rupture du circuit de pile le muscle se décontracte purement et simple- ment; mais au moment précis où les deux extrémités du muscle sont réunies, il se produit une secousse plus ou moins accentuée qui se tra- duit, sur le tracé, par un ressaut d'autant plus marqué que l'intervalle est moindre entre la rupture du circuit de pile et la fermeture du circuit musculaire, et d'autre part, l'aiguille du galvanomètre subit en même temps une déviation franche qui accuse la formation d’un courant de 0,2 à 0,3 de M. A. dirigé en sens inverse du courant de pile. Cette inten- sité, bien suffisante pour produire un effet moteur, n'est qu'éphémère, car l’aiguille revient aussitôt vers le zéro. Excitons maintenant le muscle en expérience, non plus pendant une à deux secondes, mais pendant un temps plus long. Nous allons assister à la décontraction graduelle du muscle et au retour proportionnel de l’ai- guille du galvanomètre vers le zéro. Au bout d'une minute, rompons le circuit de pile. Rien ne se produit. Réunissons les extrémités du musele aux bornes du galvanomètre; aussitôt le tétanos de Ritter s'accuse net et franc, en même temps que l'aiguille du galvanomètre indique la forma- tion du courant museulaire de sens contraire. Rompons le cireuit musceu- laire, l’aiguille revient au zéro et le muscle se décontracte aussitôt. La fermeture du circuit de pile n’ajoute rien au graphique de décontraction. Le courant secondaire indiqué par le galvanomètre est plus intense que si la polarisation n'a duré qu'une à deux secondes, mais il est surtout plus durable. Pendant une minule environ on pourra en constater les effets : il n’y a qu'à manœuvrer incomplètement l'instrument de façon à n’agir que sur le courant musculaire sans toucher au courant de pile : pendant une minute on pourra constater, à chaque nouvelle fermeture du circuit musculaire, une reprise, de plus en plus légère, du tétanos et une déviation, de moins en moins marquée, de l'aiguille du galvanomètre; à RE SÉANCE DU 15 JUILLET 7161 chaque nouvelle rupture un arrêt du tétanos et le retour de l'aiguille vers le zéro. Mais continuons l'expérience. Prolongeons la polarisation, cinq, dix minutes el plus. On pourra voir alors — je dis on pourra, car le phéno- mène est loin d’être constant — le tétanos débuter avec la rupture du cir- cuit de pile, mais lentement et faiblement; au moment de l& fermeture du cireuit musculaire il s’accentue brusquement, d’une facon franche et nette, et le style atteint immédiatement son élévation maximum. Avec la rupture du circuit musculaire commence la décontraction, qui s'accélère el s'accentue notablement au moment de la fermeture du circuit de pile. Au moment de la rupture du circuit de pile, le muscle n’est excité que par les forces électromotrices développées dans son tissu par la polarisa- tion, forces qui agissent peut-être par leur seule tension, peut-être aussi par les courants locaux qu'elles y déterminent en s’y combinant graduel- lement, excitation en somme assez faible malgré la longue durée de la polarisation. Lorsque les extrémités du muscle sont réunies, les forces électromotrices agissent d’une facon beaucoup plus puissante en formant un courant intense de décharge. Lors de la rupture de ce courant de décharge, l'énergie de excitation diminue, et par conséquent la hauteur du tétanos. Mais les forces électromotrices agissent encore un peu comme agent d’excitalion tant qu’elles ne sont pas neutralisées par une nouvelle fermeture du courant de pile qui termine la décontraction. En somme, ces expériences me semblent prouver la réalité de l’action des forces électromotrices de polarisation comme excitants efficaces de la contraction musculaire. Elles viennent à l'appui de l'opinion de Grützner et Tigerstedt qui regardent la secousse de ruplure comme due en partie au développement des courants secondaires de polarisalion et de celle de Boudet de Paris, qui altribue la même eause au tétanos de Ritter. Elles montrent qu'il ne faut, pour produire des effets marqués de polarisation, ni une granile intensité de courant polarisateur, ni une longue durée d'application. Une plus ample connaissance de ces faits intéressants et trop peu connus me paraît susceptible de jeter un peu de clarté dans le chaos des idées actuelles sur l’action physiologique des courants galva- niques. Jusqu'iei je n’ai vu nulle part mentionner cette différence dans l’action physiologique de l'interrupteur simple et du levier-clef de du Bois- Reymond. J'ai cru devoir la signaler, car elle peut expliquer peut-être certaines divergences dans les diverses lois des secousses. Très accenltuée sur le muscle de la pince de l'écrevisse, elle l’est moins pour les autres muscles que j'ai étudiés, ceux du crabe, de la grenouille, etc. Elle me paraît Loutefois suffisante pour me permettre de conclure d’une façon générale que l'emploi du levier-clef doit être évité, car il accentue encore les effets de polarisation qui font des courants galvaniques un excitant si perfide. 762 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE FORMES HÉMORRAGIQUES DE L'INFECTION EXPÉRIMENTALE; FORMES DIFFUSES ; FORMES LOCALISÉES. — REPRODUCTION DES TYPES CLINIQUES, par A. CHARRIN. La Société se souvient peut-être que, pièces en mains, j'ai montré les propriétés hémorragipares du virus pyocyanique. J'ai même établi (4) que ce virus conser vait celte propriété chez un bon nombre d'espèces animales placées à des degrés fort différents de l'échelle zoologique (poissons, grenouilles, couleuvres, souris, oiseaux, cobayes, lapins, chats, chiens, chevaux, pores, hommes, etc.) Si je reviens sur celle question, c’est qu’en collalionnant des expériences tant anciennes que nouvelles, comme on le fait pour les observations prises au lit du malade, je me suis convaincu que les formes de l’affection, envisagée à titre d'infection hémorragique, se superposaient à celles qu'enseigne la pathologie humaine. Or, on le sait, un des buts de l’expé- rimentation est de reproduire, aussi exactement que possible, ce qui se passe en clinique, non pas uniquement pour satisfaire un simple sentiment, légilime d’ailleurs, de curiosité scientifique, mais pour fournir les moyens d'étudier à son gré un phénomène, d’en préciser les données, les causes, le mécanisme, etc. — Il est clair que la condition première, en pareille situation, est de pouvoir faire apparaître l'accident à volonté sur les animaux de laboratoire. Alors, on est vite persuadé que, si on réalise des symplômes, on fait, en outre, évoluer de véritables maladies, qui, dans les moindres détails aussi bien que dans les grandes lignes, sont compa- rables à celles qui se déroulent à l'hôpital. Lorsque les lapins succombent à l'infection pyocyanique, 1ls présentent parfois, à l’autopsie, des hémorragies; ces extravasations sanguines, cependant, sont loin d’être constantes. On les rencontre, surtout, comme chez l’homme, dans les cas suraigus; là, elles deviennent assez fré- quentes; on les note dans des proportions oscillant entre un quart et un cinquième, Le pius ordinairement, ces lésions sont multiples; elles occupent le tube digestif, de préférence le derniers tiers de l’iléon, le cœcum, plus rarement, l’estomac, plus rarement encore le colon, le rectum. Tantôt, eiles se bornent à des ecchymoses, à des infiltrations sous-muqueuses, recherchant les organes lymphoïdes, les plaques de Peyer (2); tantôt, elles sont accompagnées d’ulcérations superficielles; tantôt, enfin, il y a du sang dans la lumière du canal alimentaire. (1) Charrin. Société de Biologie, mai 1892. (2) Le maximum des altérations a lieu à ce niveau, qu'il s'agisse d'altéra- tions engendrées par l'agent figuré ou de celles que déterminent les toxines; dans ce dernier cas, on ne saurait invoquer l'influence du milieu de culture, des phagocytes, des embolies, etc. SÉANCE DU A5 JUILLET 763 Dans la majorité des expériences, ces hémorragies sont restreintes à ce tube digestif. Néanmoins, je les ai vues existant à la fois et dans cet appa- reil et dans d’autres organes, systèmes ou tissus. Je les ai remarquées dans les poumons, dans les reins, exceptionnelle- ment dans les muscles, dans le myocarde, dans le foie, dans la rate, dans les séreuses, dans la plèvre, dans la chambre antérieure de l'œil, dans le cerveau, dans les ganglions, en outre, dans l'épaisseur de la peau, chez les sujets dépourvus de poils; on aboulit alors à la production du pur- pura expérimental. Avec M. Laborde, j'ai diagnostiqué le siège pédonculaire de l’un de ces foyers sanguins, en prenant pour base l'attitude, les mouvements de rotation de l’animal; ce diagnostic fut vérifié par la nécropsie. À ces formes gastriques, intestinales, accompagnées ou non de melæna, à ces formes cutanées, à ces localisations cérébrales, oculaires, je tiens à ajouter, en m’appuyant sur trois observations des plus nettes, une forme rénale, hémalurique, non seulement à cause de sa pureté, mais aussi à cause de son importance, chez l’homme, au cours de la variole maligne, par exemple. Je présente, du reste, des coupes de l’un des reins de ces trois lapins. Il est aisé de voir, même à l’œil nu, l’extravasation sanguine intra-pa- renchymateuse. — Le sujet urinait du sang; — à l’autopsie, on a cons- taté que ce liquide emplissait les calices, les bassinets, les uretères, etc. — Nulle part ailleurs on n’a décelé trace d'épanchement. — Il s’agit là d'un type précis, absolument limité. Je ne m'altarderai ni à décrire les autres lésions rénales, ni à revenir sur le rôle des toxines, sur l'intervention du système nerveux, sur celui des glandes urinaires ou hépatiques (1), dans la genèse de ces phéno- mènes, pas plus que je ne ferai de rapprochements (2), du reste faciles, entre ces hémorragies dues à ces poisons bactériens et celles qui sont attribuables à des sels mercuriels, par exemple. Un des buts de ce travail est, en partie, de rappeler que si, chez l’homme, les fièvres ont des types hémorragiques divers, types généra- lisés ou localisés, types purpurique, pleural, intestinal, urinaire, chez l'animal, il n’en va pas autrement. À chacun de ces types décrits en cli- nique, il est possible d'en opposer un semblable emprunté à l’expéri- mentation. L'œil du variolique peut être le siège d’un épanchement sanguin; en revanche, le liquide hématique, quelquefois, fait irruption dans la chambre antérieure du lapin pyocyanisé. — Durant ces fièvres, on découvre, de temps à autre, des pleurésies avec épanchements plus ou (1) Ces organes sont presque toujours malades dans l'infection pyocyanique ; or, personne n'ignore leur influence sur les dyscrasies sanguines. (2) Voir Charrin, Société de Biologie, mai 1892. 1064 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE moins riches en globules rouges, des paralysies relevant de foyers cen- traux; de son côté, le sujet en expérience offre pareils accidents; ces désordres, il est vrai, sont rares, mais, en pathologie humaine, ils sont également exceplionnels. Si, au lit des malades, l'urine ou les selles sont teintées par l’hémoglobine, dans la cage des animaux, il en est de même. En clinique, on invoque le génie épidémique, des détériorations anté- rieures, diffuses ou circonserites. — En expérimentation, les choses, pour une part, sont moins vagues; elles permettent de saisir d’une facon posi- tive quelques-uns des éléments de ce génie épidémique, et c'est là une autre raison de cette communication. — L’inconnu, le mystérieux de ce génie se réduisent partiellement aux doses du virus, à son énergie, à la porte d'entrée, à des prédispositions, à des tares préalables, générales ou locales, qui sont sous la dépendance, les faits le prouvent, de la faim, de la soif, du froid, du surmenage, des traumatismes, des intoxications propres à altérer le sang, le rein, le foie, viscères dont ie mauvais fonc- lionnement favorise les hémorragies, ete. — Malheureusement, à côté de ce que nous connaissons, i! reste une large part à réserver pour des éléments encore totalement ignorés. ÉLECTRICITÉ ET MICROBES. — CONDITIONS EXPÉRIMENTALES, par MM. D’ARSONVAL et CHARRIN. Le Société se souvient que nous avons réussi à mettre en évidence la réalité des effets que l'électricité est capable d'exercer sur les germes, et cela en intervenant elle-même, sans le secours de la chaleur ou des actions polaires, sans l’aide des corps à l'élat naissant, mis en liberté par le fluide. Dans toute recherche, le déterminisme expérimental importe. Mais, ici, cetle importance acquiert toute sa valeur, en raison de la variété des observations qui nous ont été communiquées à la suite de nos premiers travaux, en raison, surtout, des différences considérables qui peuvent séparer telle ou telle source électrique ou distinguer l'énergie des agents mis en œuvre. Aussi, croyons-nous devoir donner quelques indications techniques. Le dispositif employé se compose d’un alternateur Siemens, d'un transformateur et de quatre grandes bouteilles de Leyde; chacune de. ces bouteilles mesure 30 centimètres de haut sur 12 de large. — L’alter- nateur fournit au circuit primaire du transformateur un courant alter- natif de 60 périodes à la seconde, donnant 17 ampères sous 100 volts. — Le courant du secondaire est à 10,000 volts, au minimum. — La force du moteur à gaz vaut 4 chevaux. Le fluide aboutit à un solénoïde, composé de 15 à 20 tours de fils de cuivre de 3 millimètres de diamètre. SÉANCE DU 19 JUILLET 765 La culture est placée dans un tube, au centre de ce solénoïde. — Il est cäpital de faire agir l'électricité sur des couches minces; si la colonne de liquide est épaisse, des courants prennent naissance à la périphérie, se ferment sur eux-mêmes, font écran vis à vis de la partie centrale, qui échappe de Ja sorte à l’action électrique. Pour parer à cet inconvénient, nous avons utilisé deux tubes à épreuve parfaitement concentriques ; le bouillon fertile est emprisonné entre leurs parois, séparées entre elles par un espace des plus élroits. On ne peut songer à faire passer directement le courant dans ce bouulon, car ce procédé conduit à une élévation thermique, aussi intense que rapide; ce n’est plus l'électricité, c’est la chaleur qui devient l’agent d'atténuation. On doit même, malgré l’usage de notre dispositif, surveiller avec soin la température et porter le tube sous l’eau froide dès que le thermomètre en fournit l'indication, quitte à reprendre l'expérience. Il est possible de retarder cette ascension thermique, en introduisant un liquide froid dans le tube central qui, on le comprend aisément, est naturellement vide. C'est en nous adressant à un courant aussi puissant, courant de haute fréquence; c’est en utilisant les divers détails techniques, à l'instant mentionnés, que nous avons définitivement établi que l'électricité par elle-même, par action directe, influençait l’évolution des microbes, du bacille pyocyanogène en particulier. Cette influence se traduit, d’abord, par une diminution du pouvoir sécrétoire, du pouvoir sécrétoire des pigments plus spécialement; plus tard, la pullulation du germe est atteinte à des degrés en rapport avec la durée, avec l'énergie du fluide. Du ROLE DU LIQUIDE CÉPHALO-RACHIDIEN DANS LA CIRCULATION CÉRÉBRALE (Deuxième note), par M. F. Joryer. L'ébranlement ondulatoire du liquide céphalo-rachidien est rendu pos- sible par ce fait que les artères du cerveau pénètrent dans la cavité cra- nienne par les voies d'échappement du liquide encéphalique. L'onde pulsatile qui se produit d’abord dans les vertébrales, puis le trone basi- laire, les carotides, et se propage à leurs ramifications successives, à la surface du cerveau et dans sa profondeur produira donc un échappement ondulatoire correspondant du liquide encéphalique des canaux verté- braux et basilaire, des lacs, des affluents des lacs, et cela jusque dans le liquide des gaines lymphatiques des artères corticales et médullaires. Cette théorie de la circulation cérébrale, qui explique lampliation artérielle sans qu’il y ait de changements de volume du cerveau propre- ment dit, sans chocs par conséquent sur l’élément nerveux à chaque 766 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE svstole cardiaque est seule compatible avec un fonctionnement cérébral normal. Physiquement, J'en ai démontré la réalilé par des expériences variées, faites à mon cours. J'ai particulièrement étudié sur des schémas repro- duisant les dispositions anatomiques et physiques des vaisseaux dans la cavité cranienne, la propagation de l’onde pulsatile dans des tubes élas- tiques renfermés dans des gaines remplies de liquide, comparativement avec celle qui se produit dans le liquide du manchon, lorsque l’échappe- ment de celui-ci a lieu au point de l'entrée du tube élastique dans la gaine. Dans le cas d’afflux intermittents, les deux ondes sont parallèles el opposées, et produisent, par l’ajutage du tube élastique, un écoulement continu et régulier. L'écoulement devient intermittent si on ferme la voie d'échappement du liquide de la gaine, ou si on la transporte à l'extré- mité opposée. La nature du liquide de la gaine a une influence très marquée sur la propagation de l'onde pulsatile, et par suite sur la régularité de l’écoule- ment par l’ajutage du tube élastique, ainsi que sur le débit. Le liquide céphalo-rachidien, par sa grande fluidité et la mobilité de ses molécules, par sa faible tension superficielle, semble se prêter mieux que tout autre liquide à la propagation de l'onde pour produire un débit régulier et maximum. Ces faits suffisent à montrer les conséquences, relativement à la circula- tion cérébrale, des modifications du liquide céphalo-rachidien, soit dans sa quantité et sa tension, soit dans ses qualités, soit dans ses mouvements. Sa soustraction, en rendant la circulation intermittente, produit des troubles remarquables (hébétude, litubation, etc.), déjà constatés par Magendie, et absolument exacts. Dans l'exposition du mécanisme de propagation de l'onde pulsatile dans les artères du cerveau, je n’ai parlé que de l’ébranlement ondulatoire correspondant du liquide céphalo-rachidien qui en produit l'échappe- ment du côté du rachis. Mais il est facile de comprendre, comme le mon- trent mes schémas et des observations directes, que les veines cérébrales plongées dans le liquide sous-arachnoïdien, contribuent pour une large part, et par un mécanisme identique, à l’échappement de la pression intra-cranienne, par un renforcement de l’écoulement du sang qu'elles contiennent en dehors du crâne et dans les sinus. Dans une autre communication, je compléterai ce travail el je montre- rai la généralité du mode circulatoire indiqué pour les organes qui ne peuvent se prêter à l'expansion de leurs vaisseaux, soit chez les animaux supérieurs, soit chez les animaux inférieurs. Le Gérant : G. MASSON. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Mareraeux, directeur, 1, rue Cassette. 167 SÉANCE DU 29 JUILLET 1893 MM. Kaurmanx et Cnarri : Origine toxique de l'hypoglycémie pyocyanique. — MM. Cuarrin et Le Lorr : Propriété vaso-dilatatrice des urines des tuberculeux. — MM. Canior et Rocer : Action de la fuberculine et de la malléine sur la sécrétion sudorale. — M. Cu. FÉRé : Note sur l'influence de l'exposition préalable aux vapeurs d'alcool sur l'incubation de l'œuf de poule. — M. FERNAND LarasTe Rythme vaginal des mammifères (Mémoires). — M. Cuarces Ricaer : Note sur le rapport entre la toxicité et les propriétés physiques des corps. — M. J. TarGowea : Application de la méthode de M. Gréhant à la recherche de l’oxyde de carbone dans les appareils de chauffage; présentation d’un nouveau poêle. — M. A. GILBERT : De l'action du bicarbonate de soude sur le chimisme stomacal (Mémoires). — MM. Prier et Dex : Note sur un cas d'érosions hémorragiques du duodénum. MM. Ed. Rerrerer et H. Rocer : Rein unique et utérus unique chez une lapine. — M. H. Brsaurecarn : Note sur deux lois que fait ressortir l'étude morphologique du système dentaire des Carnivores. Présidence de M. Dareste. ORIGINE TOXIQUE DE L'HYPOGLYCÉMIE PYOCYANIQUE, par MM. Kaurmann et CHARRIN, Au cours de l'infection pyocyanique, la glycémie subit des modifica- tions, qui se présentent toujours dans le même sens, dans celui de la diminution. Si on calcule la moyenne des résultats obtenus en dosant le sucre de la circulation avant et après l’inoculation, on {rouve, en prenant pour base les expériences réalisées par nous (|), que cette moyenne indi- que, en somme, un abaissement oscillant autour d’un tiers. C'est là, nous l’avons remarqué, une donnée importante, soit en raison des multiples propriélés de la glycose, soit à cause de son influence spéciale sur le développement des bactéries. Aussi, avons-nous pensé qu il serait peut-être utile de pousser plusavant la question, de rechercher, dans la limite du possible, les conditions qui régissent ce phénomène, d'étudier, en particulier, son mécanisme. Le premier point à résoudre consistait dans la part à réserver aux produits solubles. Les microbes, le plus souvent, agissent grâce à ces produits; de plus, le taux de la glycémie varie dans nombre d’inloxica- tions. [l était donc indiqué de diriger dans cetle voie les tentatives concernant ce problème de physiologie pathologique. C’est ce que nous (1) Kaufmann el Charrin, Soc. Biol., 1e juillet 1893. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9e SÉRIE. T. V, ACT 168 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE avons fait, ainsi que le prouve le résumé des expériences que nous allons relater. Exr. I. — Le 13 juillet 1893, un chien jeune, vigoureux, n’ayant pris aucun aliment depuis la veille, pesant 13 kilagrammes, recoit, dans la veine jugulaire, 60 centimètres cubes, soit 4 p. 1000, d’une culture pyo- cyanique riche en pigments et stérilisée par la chaleur à 110 degrés. Pendant l'opération, on note des mâchonnements, des nausées, puis des vomissements, vomissements qui se sont reproduits durant les heures suivantes. Voici les résultats relatifs à la température rectale et au sucre. —T.R., avant cette injection, 38,9; de suite après, 40,7. — Glycose, par litre, 0,946 et 0,849, au bout de six heures; la diminution — 0,097. Ce chiffre de 0,097, assurément, est un peu faible; il serait peut-être insuffisant, s’il était isolé; mais, il s'appuie sur d’autres résultats de même sens. Exp. II. — Le 18 juillet 1893, à neuf heures du matin, on injecte dans le sang veineux d’un griffon, à jeun depuis un jour, du poids de 11 kilo- grammes et demi, 50 centimètres cubes, soit 5 par kilogr., de la culture pyocyanique utilisée dans la précédente expérience. De nouveau, on observe des vomissements. De nouveau, on trouve des changements et dans la température et surtout dans la glycémie. T. R. 38,9, avant l'opération; 39,6 après. — Sucre, toujours pour 4000, 0,870 et, à la cinquième heure qui suit cette injection, 0,615. La diffé- rence est de 0,255. Les résultats obtenus sont tous dans le même sens; constamment il y a absissement dans la teneur en sucre du sang, absolument comme dans les expériences au cours desquelles on avait inoculé le bacille pyocyano- gène, au lieu d'introduire ses substances solubles. Entre ces deux séries de recherches, il existe pourtant quelques dis- tinctions. : À doses égales, l’hypoglycémie est moindre si on s'adresse aux toxines etnon aux agents figurés. La chose est aisée à comprendre; dans l’éco- nomie contaminée les germes continuent à fabriquer de nouvelles toxines, dont les effets s'ajoutent à ceux des produits qui préexistaient. Si la mort survient, si ces germes vont sans cesse croissant, cette hypo- glycémie, de son côté, va constamment en progressant; inversement, le retour à la dose normale s'effectue plus ou moins vite et proportionnelle- ment aux volumes injectés, quand on a eu recours aux cultures inertes. En dehors du domaine bactérien, on décèle des corps capables d’influencer la glycémie, surtout, il est vrai, dans le sens de l’accroisse- ment. Néanmoins, entre ces corps et ces toxines, nos expériences établis- sent un point nouveau de rapprochement. Nul n’ignore quel intérêt SÉANCE DU 22 JUILLET 769 EEE] s'attache à nettement mettre en évidence les ressemblances fonctionnelles ou autres entre la cellule organique ou inorganique et la cellule miero- bienne. PROPRIÉTÉ VASO-DILATATRICE DES URINES DES TUBERCULEUX, par MM. CuarriN et LE Norr. Le professeur Bouchard a démontré (Acad. Sc., k juin 1888) que les matières solubles fabriquées par les microbes, dans le corps des animaux infectés, s’éliminaient par la voie rénale. Ce principe nous a conduits à rechercher, au laboratoire de pathologie générale, comment se faisait cette élimination au cours de la phtisie chronique, d'autant plus que ce maître nous a fait savoir qu'il avait étudié Les éléments soit thermogènes soit vaso-moteurs des urines, dans celte affection. Les malades observés dans son service étaient atteints de tuberculose pulmonaire fébrile, sans autre localisation. Les liquides urinaires, recueillis séparément, avec les précautions aseptiques requises et pen- dant la période d’hyperthermie et durant les heures où la chaleur était le moins élevée, ont été évaporés dans le vide, à basse température. On a repris les résidus par l'alcool; ces solutions éthyliques ont été, à leur tour, soumises à complète évaporation. On a dissous dans l’eau les extraits ainsi obtenus, en outre, ceux que cet alcool avait laissés. Parallèlement, des urines normales ont été traitées suivant des pro- cédés identiques, pour être expérimentées comparativement avec les humeurs pathologiques. On possédait donc, de la sorte, deux séries de solutions aqueuses; les unes contenaient les matières solubles, les autres, les corps insolubles dans l'alcool. Des lapins ont recu, dans le sang, ces diverses solutions. — A cet égard, nous nous bornerons à signaler l’action des sécrétions rénales des tuber- culeux sur ies vaisseaux. On sait, en effet, que les cultures du bacille de Koch contiennent un produit provocateur de la dilatation vasculaire {Acad. Sc., 26 oct. 1891, Comm. de M. Bouchard), produit qui n’est autre que la tuberculine. — Il était légitime de se demander, si les extraits urinaires des phtisiques aurajent sur le centre vaso-moteur une influence analogue à celle de cette tuberculine. Rappelons d'abord que toute injection intra-veineuse peut déterminer des modifications circulatoires. — Examinée par transparence, l'oreille du lapin habituellement rougit et pâlit tour à tour; mais, ces étais variés se succèdent très rapidement; chacun d’eux n’a qu’une durée des plus courtes ; les capillaires reprennent assez vite une position moyenne. — La pénétration des urines normales occasionne ordinairement ces phéno- 710 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mènes; ces humeurs ne paraissent done pas avoir une action bien spé- ciale sur les vaisseaux. Il n’en est pas de même, si on s'adresse au contenu vésical des bacil- laires. — Au début de l'expérience, tant que la quantité injectée est infé- rieure à 40 ou 45 centimètres cubes, Les oscillations se produisent ; puis, à un instant donné, la congestion devient assez marquée; elle persiste; l'oreille reste rouge juqu’à la fin de cette injection. Les vaisseaux sont extrêmement dilatés; les capiilaires sont très appa- rents. On observe parfois (dans un cas nous avons noté le fait) des bat- tements artériels fort sensibles. — Dans une autre expérience, quoique les doses administrées fussent relativement faibles, la dilatation s’est : maintenue durant 30 minutes après l'introduction de la solution. Il existe donc, quatre séries d'expériences l'attestent, dans les urines des phlisiques, une substance vaso-dilatatrice. Celte substance est con- tenue en grande quantité dans les parties insolubles dans l'alcool; elle paraît se trouver en proportions un peu plus marquées dans les sécré- tions de la période hyperthermique. Cette matière est-elle la même que celle dont M. Bouchard a démontré l’existence dans la tuberculine, matière qu'il appelle ectasine? Est-elle identique au principe congestionnant que les injections de lymphe de Koch, entreprises dans un but thérapeutique, ont mis en évidence? IL n’est pas possible d'identifier deux éléments, en se fondant sur une seule réaclion physiologique commune. Toutefois, il paraît vraisemblable d’ad- mettre que les bacilles tuberculeux sécrèlent, dans l’économie malade, un corps analogue, sinon absolument pareil, à celui qu'ils fabriquent dans les bouillons de culture, corps qui s’élimine par la voie rénale. En tout cas, ces résultats établissent à nouveau les bénéfices que l’on peut retirer de cette méthode des injections intra-veineuses d'urine, méthode que l’on doit au professeur Bouchard. — Ils montrent encore com- bien sont multiples les qualités communes et aux substances bactériennes et à celles qui procèdent d’une autre origine; dans tous les groupes d’élé- ments chimiques, on rencontre, nos recherches contribuent à le prouver, quelques produits capables d'agir sur les vaso-moteurs. À ACTION DE LA TUBERCULINE ET DE LA MALLÉINE SUR LA SÉCRÉTION SUDORALE, par MM. Capior et ROGER. On sait que les toxines microbiennes peuvent troubler certaines sécré- Lions; mais on n’a pas recherché jusqu'ici leur action sur la sueur. Pour étudier les modifications de la sécrétion sudorale, il faut naturel- lement opérer sur des animaux capables de transpirer facilement ; c'est assez dire que le chien, le lapin, le cobaye ne peuvent servir aux recher- ches de ce genre; on doit s'adresser au cheval et au chat. C’est sur le: cheval que nous avons obtenu les résultats les plus démonstratifs. SÉANCE DU 22 JUILLET 771 Nous avons d’abord étudié la fuberculine ; la fréquence des sueurs chez les phtisiques commandait ce choix; on pouvait supposer en effet que la diaphorèse était due à l’action des produits sécrétés par le bacille de Koch, ou par les microbes qui, dans la plupart des cas, lui sont associés. Nous avons injecté dans les veines de trois chevaux, 2, 3 et 5 grammes de tuberculine ; les résultats furent négatifs, il n’y eut aucune manifesta- tion sudorale. Si ces expériences établissaient qu'il n’y avait pas de substance sudo- rifique dans l'extrait employé, elles ne démontraient pas qu'il ne s’en formait point chez le phtisique; il fallait done opérer avec des toxi- nes provenant de l'organisme malade : nous avons recueilli les urines d’un tuberculeux transpirant abondamment : un cheval pesant 378 kilos a reçu dans les veines 670 centimètres cubes de ces urines ; il ne se pro- duisit aucun phénomène notable. Il est intéressant de remarquer, à ce pro- pos, qu'un cheval de 370 kilos, qui servait de témoin, fut pris de phéno- mènes convulsifs très graves après avoir reçu 300 centimètres cubes d’une urine normale ; mais, pas plus que le précédent, il ne présenta de mani- festations sudorales. Avec la malléine, les résultats ont été bien différents. Ce produit micro- bien, étendu de son poids d’eau stérilisée, a été injecté, par voie intra- veineuse, à quatre chevaux. Voici le résumé de nos expériences : Exp. 1. — Cheval hongre, 382 kilos. 4 h. 26: injection intra-veineuse de 1 gramme de malléine, dilué dans 1 centimètre cube d’eau stérilisée. 4 h. 29 : apparition de sueurs au niveau de l’encolure, de l'épaule, du pli inguinal. 4 h. 35 : les sueurs ont cessé. 4 h. 36 : nouvelle injection de 1 gr. 30 de malléine. 4 h. 39 : apparition de sueurs qui se généralisent et persistent jusqu’à 4 h. 55. La température, prise toutes les trois minutes, s’est constamment maintenue à son chiffre initial de 38°, 8. Sauf la transpiration, il n’y a eu aucun phénomène morbide. Exp. Il. — Cheval hongre, 378 kilos. 8 h. 55 : injection intra-veineuse de 2 grammes de malléine. 8 h. 58 : légers frissonnements et sudation généralisée; ces phénomènes per- sistent jusqu'à 9 h. 10. La température se maintient au chiffre initial de 37°, 2. Exe. II. — Cheval hongre, 370 kilos. 10 heures : injection intra-veineuse de 2 grammes de malléine. 10 h. # : transpiration généralisée qui persiste jusqu’à 10 h. 45. La température reste à 37, 6 pendant toute la durée de l'expérience. 772 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Exe. IX. — Cheval hongre, 380 kilos. Injection, de 2h. 50 à 2 h.55, de 2 gr. 5 de malléine. 2 h. 58 : transpiration extrêmement abondante, s'étendant à tout le corps et persistant jusqu à 3 h. 40. En même temps, frisonnements, malaise jusqu'à She 10 La température, qui était primitivement à 38°, 3, tombe à 38°, 2 à la fin de l'injection et se maintient à ce chiffre. Ces quatre expériences sont concordantes; elles montrent que la suda- tion apparaît trois minutes après l'injection intra-veineuse de la malléine, qu’elle est d’autant plus abondandeet plus persistante que la quantité injectée est plus considérable. On ne peut attribuer le résultat à l'hyperthermie ; chez trois animaux, la température est restée normale et, chez un, elle s’est abaissé de 09,1. IL ne semble pas non plus que la sudation représente la manifestation banale d’un empoisonnement; si les chevaux IE et IV ont éprouvé quelques phé- nomèmes morbides, les chevaux I et IIT n’ont pas paru incommodés par l'injection. On est donc conduit à admettre que la malléine agit directement sur l'appareil sudoral ; mais sur quelle partie de cet appareil porte-t-elle son action ? Pour répondre à cette dernière question, nous avons opéré sur des chats et nous avons répété l'expérience qui a permis d'établir le mode d’action de la pilocarpine. Trois jeunes chats ont subi la section du sciatique gauche; puis, de 2 à 6 jours plus tard, ces animaux ont reçu la malléine; à l’un d'eux on injecta dans une veine 0 gr. 10 de cette substance; aux deux autres, 0 gr. 5; chez tous les trois, on vit apparaître des gouttes de sueur au niveau des puipes sous-digitales; seule la patte énervée resta sèche. La sudation, peu marquée chez le premier chat, a été très abondante chez les deux autres. Voici, à litre d'exemple, une de ces expériences : Exp. V. — Jeune chat ayant subi 4 jours auparavant la section du sciatique gauche. À 3 h. 40, on injecte dans une veine de la jambe gauche 1 centimètre cube d'une dilution de malléine à 50 p. 100, soit 0 gr. 5 de la substance active. Aussitôt, apparition de gouttes de sueur sur les extrémités digitales; seule la patte postérieure gauche reste sèche. Cette sudation persiste jusqu'à 4 heures, c’est-à-dire pendant 20 minutes. Il va sans dire que, pendant toute la durée de l'expérience, on a eu soin d’essuyer constamment les pattes. La malléine produit donc la diaphorèse par un mécanisme bien diffé- rent de celui que la pilocarpine met en œuvre. Cette dernière substance porte ses effets sur les parties terminales de l'appareil sudoral; la section du sciatique n'empêche pas son action. Avec le poison microbien, le résul- tat est inverse; la malléine agit en actionnant les centres sudoraux. 111 SÉANCE DU 22 JUILLET 713 Nous ferons remarquer que, chez le chat, les excitations douloureuses sont capables de provoquer la sudation; il suffit d'injecter n'importe quelle substance dans une veine ou de piquer simplement l'animal, pour voir des gouttelettes de sueur sourdre au niveau des pulpes sous-digi- tales. Mais la sudation ainsi provoquée est passagère; elle ne dure pas plus de 3 ou 4 minutes. Ce qui prouve du reste que les manifestations sudorales doivent bien être mises sur le compte de la malléine, c'est qu'elles sont d'autant plus marquées que la dose introduite est plus con- sidérable et, d'autre part, c'est que la tuberculine ne produit pas les mêmes effets. Nous avons injecté jusqu’à À gramme de tuberculine; la sudation s’est montrée, mais elle n’a persisté que 4 minutes, elle n’a pas duré plus longtemps qu’à la suite d’une irritation quelconque. Les faits rapportés dans cette note permettent, croyons-nous, de poser les conclusions suivantes : La tuberculine n’exerce pas d’action appréciable sur l’appareil sudo- ripare. La malléine produit chez Le cheval et chez le chat une diaphorèse d’au- tant plus abondante et d'autant plus persistante que la dose injectée est plus considérable. La sudation ne peut être attribuée à de l’hyperthermie: elle est due à une action exercée par Le produit microbien sur les centres nerveux; car la section préalable du sciatique, chez le chat, empêche la sudation au niveau de la patte énervée. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'EXPOSITION PRÉALABLE AUX VAPEURS D'ALCOOL SUR L'INCUBATION DE L’OEUF DE POULE, par M. Cu. FÉRÉ. I. — J'ai placé 12 œufs au 6° jour de la ponte sous une cloche noire d’une capacité de 30 litres, en même temps qu’un verre contenant 100 grammes d'alcool absolu; le tout reposant sur une épaisse couche d’ouate. 26 heures après, ces œufs ont été mis à l’étuve, en même temps que 12 œufs témoins de même date conservés dans le son et à la même température que les autres {la température du laboratoire n’a pas dépassé 22°). a. — 6 œufs de chaque catégorie ont été examinés successivement par couples de la 47° à la 50° heure de l’incubation, qui s’est faite à la lumière, tous les œufs étant tournés le gros bout à droite, c'est-à-dire dans les conditions indiquées précédemment. Quatre fois l'embryon des œufs témoins était plus développé. Deux fois il était plus développé dans les œufs alcoolisés. Deux fois le développe- ment était nul, c'était dans les œufs témoins. Il n’y avait aucune déviation de l'embryon sur les 40 cas; il n'y avait qu'un embryon monstrueux, 114 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE c'était dans un œuf alcoolisé. L'évaluation de la moyenne de l’âge des embryons faite par comparaison aux figures de l’atlas de M. Duval, était de 28.7 pour les œufs témoins et de 24.5 pour les œufs alcoolisés. b. — Les 6 autres œufs de chaque catégorie ont été ouverts de la 71° heure à la 74°. Trois fois l'embryon des œufs témoins est plus déve- loppé. Une fois le développement est plus avancé dans l’œuf alcoolisé. Deux fois il est nul dans les deux œufs du même couple. Il y a en tout 3 développements nuls dans chaque catégorie. Sur les 3 embryons développés dans les œufs alcoolisés, il y en a 2 monstrueux. Il n’y a qu’une déviation où la têle est à la place de la queue, c’est dans un des œufs témoins. L'évaluation de la moyenne de l’âge des embryons était de 67 heures pour les œufs témoins (dont un correspondant à un développe- ment régulier de 82 heures), et de 52 heures pour les œufs alcoo- lisés. II. — La deuxième expérience est la répétition de la première, sauf que les œufs sont restés exposés aux vapeurs d’alcool pendant 48 heures au lieu de 26. a. — 3 œufs alcoolisés et 3 œufs témoins ont été ouverts entre la 37° et la 48° heure. Dans les trois paires, le développement est plus avancé dans les œufs témoins ; il est nul une fois dans les œufs alcoolisés. Pas de déviation, ni de monstruosités. Les 3 embryons témoins ont un dévelop- pement uniforme de 33 heures, les 2 embryons des œufs alcoolisés un développement de 26 et 27 heures. b. — 5 œufs de chaque catégorie ont été ouverts de la 71° à la 73° heure. Dans les cinq paires, le développement est plus avancé dans l'œuf témoin. Deux fois il n’y avait aucun développement dans les œufs alcoolisés. Il y avait un monstre, c'était dans la catégorie des alcoolisés. Une fois il y avait une rotation de 90 degrés de la tête, parmi les témoins ; une fois dans chaque catégorie il y avait une déviation de moins de 45 degrés. Le développement des 5 embryons témoins peut être évalué en moyenne à 76 h. 4 (il y en a 2 qui représentent 96 et 82 heures de déve- loppement); les embryons des œufs alcoolisés n’ont en moyenne qu'un développement de 19 h. 6. c. — Les 4 derniers œufs de chaque catégorie ont été ouverts après la 96° heure. Dans trois couples, le développement est plus avancé dans les œufs témoins. Dans le quatrième, il n’y avait aucun développe- ment dans les deux œufs. Parmi les 6 embryons, il n’y en a qu’un légè- rement incliné vers le gros bout de l’œuf. C’est un embryon non alcoolisé. Le développement des 3 embryons témoins est en moyenne de 86 h. 6; landis que le développement des 3 embryons des œufs alcoolisés n’est en moyenne que de 24 heures. On voit que l'influence de l’alcool se manifeste à la fois par l'importance du retard de développement et par la fréquence des monstruosités. C'est un fait qui mérite d’être rapproché de la fréquence de la stérilité et des SÉANCE DU 22 JUILLET 715 avortements précoces qui se manifestent dans l'espèce humaine sous l’in- fluence de l’alcoolisme, et aussi des monstruosités (Vousgier) par arrêt de développement qu'on attribue à juste titre à la même cause (1). Ces expériences montrent que l'alcool peut agir sur le développement de l’embryon, même en l'absence des troubles propres à l’alcoolisme chronique des générateurs. Dans le cas d’alcoolisme chronique, en effet, il existe une dégradation générale de l’organisme, qui n’a rien de spéci- fique, el qui une fois acquise peut à elle seule troubler l’'embryogenèse, au même titre que les dégradations provenant de toute autre cause. L'action de l'alcool, comme celle de l’éther, peut se manifester et même avec plus d'intensité si on fait agir ces substances pendant l’incu- bation; mais l’action préalable se prête seule à l'incubation de témoins dans la même étuve. C’est pour cette raison que je lui donne la préférence au point de vue de l'étude. RYTHME VAGINAL DES MAMMIFÈRES, par M. FERNAND LATASTE. — (Voir Mémoires du présent volume p. 135). NOTE SUR LE RAPPORT ENTRE LA TOXICITÉ ET LES PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES CORPS, par M. CHARLES RICHET. J'ai appelé il y a quelques années l'attention sur ce fait remarquable que les propriétés toxiques des corps étaient en quelque sorte fonction de leur solubilité. Bien entendu, on ne peut comparer entre elles que les substances ayant des propriétés chimiques voisines et une constitution moléculaire ana- logue. Ainsi faut-il séparer les sels minéraux, les alcaloïdes, et les alcools (avec leurs dérivés), en trois groupes évidemment peu homogènes, mais qui suffisent pour une première classification rudimentaire. Les alcools et éthers sont les seuls corps dont il sera question ici. Or, en étudiant leurs propriétés physiologiques, on trouve un paral- lélisme entre leur solubilité et leur toxicité. Plus ils sont solubles, moins ils sont toxiques. Comparons, par exemple, l'alcool éthylique, l’éther (oxyde d’éthyle), l'alcool amylique et l’essence d’absinthe. L'alcool éthylique est soluble en toutes proportions, sa loxicité est très faible, comme on le sait depuis longtemps, et en particulier depuis les (1) Langdon Down. Case of arrested development, Trans. of the path. Soc. of London, 1869, XX, p. 419. 716 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE expériences intéressantes de Rabuteau et de M. Laborde, mentionnées ici même. ë L’éther, assez soluble dans l’eau (10 p. 100) est plus toxique que l’al- cool. L'alcool amylique, moins soluble, est plus toxique encore ; et enfin l’es- sence d’absinthe, tout à fait insoluble, est extrêmement toxique. Pour donner une démonstration de ces propriétés toxiques, les poissons se prêtent très bien à l'expérience. On place de toutes petites tanches ou ablettes (pesant de 2 à 5 grammes) dans 1 litre ou 1 litre 1/2 d’eau mélangée à ces alcools ou éthers dans des proportions déterminées, et on établit ainsi la dose d’alcool ou d’éther qui permet à l'animal de vivre plus d'une heure, ou plus de quarante-huit heures. J'ai fait récemment étudier cette question par un de mes élèves, M. G. Houdaille, qui en a fait le sujet de sa thèse inaugurale (Æ£tude sur les nou- veaux hypnotiques), et il est arrivé aux chiffres suivants. DOSE MINIMUM DOSE MAXIMUM mortelle non mortelle en À heure en 48 heures (pour 1 litre). (pour 1 litre). grammes grammes Alcoo DE QUe RE 40 20 Ether (oxyde c'éiaule) : 9.0 2 UTÉthane PE RENE 5.0 g Paraldéhyder crime. 3.2 1.8 Alcool amylique . . : 1.0 0.5 ACÉLOPhENONEN FMI 0.25 0.15 Essence d'absinthe. . . . . . 0.005 0.0025 Il faudrait d’ailleurs entrer dans detrop longs détails pour discuter cette loi d’une manière approfondie. Cependant, sous cette forme simple, elle parait relativement exacte, et on peut dire que les corps volatils, alcools el éthers, sont d'autant plus toxiques qu’ils sont moins solubles. APPLICATION DE LA MÉTHODE DE M. GRÉHANT A LA RECHERCHE DE L'OXYDE DE CARBONE DANS LES APPAREILS DE CHAUFFAGE; PRÉSENTATION D'UN NOUVEAU POËLE, par M. J. TarGowLA (1). Dans un travail récent, M. Gréhant (2) a établi que la combustion du coke dans le brasero ne dégage aucune trace d'oxyde de carbone, c’est- à-dire que la combustion dans cet appareil est complète. (1) Travail du laboratoire de physiologie générale du Muséum d'histoire naturelle, (2) M. Gréhant. Communication à la Soc. de Biol., séance du 24 juin 1893. SÉANCE DU 22 JUILLET rl vf — J'ai l'honneur de présenter le dessin d’un poêle à combustion lente qui se rapproche.par certains points du brasero. Voici la description sommaire du poêle et le résultat d’une expérience : Le poêle est composé de trois cylindres en métal et d’un cylindre en brique, qui s'emboîtent. Entre le cylindre extérieur T et le cylindre moyen M existe un espace libre G, où circulent les produits de la combustion ; ceux-ci se déversent au dehors par le tuyau de dégagement D. Entre le cylindre moyen et le cylindre intérieur À, est inclus un cylindre en brique B percé de canaux longitudinaux E; dans ces canaux se dirigent les gaz de la combustion qui viennent du foyer F. Le cylindre intérieur n’atteint que les 2/3 de la hauteur totale du poêle. Le foyer est formé par une brique spéciale G percée de trous latéraux H, et repose sur une grille. La combustion dans le foyer s’accomplit dans des conditions analogues à celles où elle se produit dans le brasero. La brique-foyer étant à une certaine distance de la paroi interne du cylindre moyen, l'air qui arrive par la grille circule librement et pénètre par les trous latéraux dans les couches du charbon en combustion. Le cours de l’air est indiqué sur le dessin par des flèches. La combus- tion dans le foyer est très active; la terre réfractaire étant un mauvais conducteur de la chaleur, la température s’y élève au-dessus de 4000 de- grés; dans ces conditions tous les gaz combustibles devraient être brülés. La couche de charbon qui est au-dessus de la portion qui brüle sert pour l'alimentation du foyer. Comme les gaz de la combustion sont com- plètement séparés de Ja masse de charbon dans le cylindre intérieur, la température s’y élève peu. Les parois du poêle, par contre, s’échauffent lentement, d'une part par les produits de la combustion qui circulent entre le cylindre extérieur et le cylindre moyen et, d'autre part, par les briques qui sont directement ou indirectement en contact avec le foyer de la combustion. Quant à la présence de l’oxyde de carbone dans les produits de la combustion dans ce poêle, les analyses chimiques jusqu'ici ont toujours été négatives, La méthode physiologique que M. Gréhant a fait connaître (4) per- mettant de découvrir, et même de doser dans certaines limites, des quantités minimes de CO dans l'air, nous avons appliqué ce procédé, sous la bienveillante direction de M. Gréhant, à la recherche de C0 dans ce nouveau poêle. Le poêle fut placé dans un grand hall, le tirage fut établi par un tuyau de 2 mètres de hauteur; on versa du charbon de bois allumé sur la grille et on a rempli le poële avec de l'anthracite concassé. (1) M. Gréhant. Les poisons de l'air, 1890 ; — Médecine scientifique, 1893, n° 1. 718 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Le tuyau de dégagement, où un trou latéral est pratiqué, a élé mis en communication avec un gazomètre de Sainte-Claire Deville rempli d'eau. La température extérieure étant de 20 degrés. On commença à produire : l'aspiration dans le gazomètre, deux heures après avoir allumé le poële. On obtint ainsi lentement (le débit étant de 1 demi-litre par minute), 125 litres de gaz de la combustion. Ce gaz examiné chimiquement était ainsi composé ; | CO? 14 c. c. 5 p. 100 (9) DNCRCe — CO traces — On ajouta à ce gaz 20 litres d'oxygène et on le transvasa dans le gazo- mètre de M: de Saint-Martin. On mit un chien en communication avec le gazomètre et on fit respi- rer ce gaz. Au bout de dix-sept minutes, 47 centimètres cubes de sang furent pris dans l’artère fémorale et analysés d’après le procédé de M. Gréhant (1). On trouva pour 400 centimètres cubes de sang, 13 c. c. 8 d'oxyde de carbone pur. Gette dose correspond, d’après les recherches antérieures de M. Gréhant, à 1/400° d'oxyde de carbone dans le mélange gazeux. x Le chien, en respirant, à épuisé le contenu du gazomèlre et resta vivant. | On voit donc que par le procédé physiologique, nous avons pu déceler une quantité très appréciable d'oxyde de carbone et en déterminer la proportion dans le mélange gazeux provenant de la combustion, ce qui était presque impossible par les moyens chimiques. Pour prendre un terme de comparaison, nous avons institué une expé- rience, à peu près dans les mêmes conditions, avec un autre poêle très usité. 125 litres de gaz de la combustion venant du tuyau de dégagement de ce poêle furent recueillis dans le gazomètre. Ce gaz examiné par des procédés chimiques était ainsi composé : Acide carbonique : 4 p. 100 (le gaz ayant traversé une grande masse d’eau a pu perdre une quantité notable de CO?). Oxygène : 10 p. 100. Oxyde de carbone : 1 p. 100. Un chien qui a respiré ce mélange gazeux a présenté plusieurs phéno- mènes d’intoxication oxycarbonée et est mort au bout de 30 minutes après avoir absorbé 80 litres du mélange gazeux. 47 centimètres cubes de sang furent pris dans la veine cave et ana- (1) Loco cit. SÉANCE DU 22 JUILLET : 719 lysés. On trouva, pour 100 centimètres cubes de sang, 18 c. c. 3 d'oxyde de carbone. Nous ferons remarquer que ce chiffre, tout en étant relativement con- sidérable, n’est pas en rapport direct avec la proportion d'oxyde de car- bone dans le mélange gazeux, car on sait que lorsque la dose d'oxyde de carbone devient très toxique, la loi de dissolution de CO dans le sang, établie par M. Gréhant, n'est plus applicable. Le procédé physiologique appliqué à la’ recherche de CO est encore utile parce qu’il permet de juger de la toxicilé des mélanges gazeux, par l’observation des symptômes de l’empoisonnement. Ainsi, il a suffi de 70 litres de gaz venant de la combustion dans ce dernier poêle pour tuer un chien, tandis que pour le poêle précédent, un chien est resté vivant, après avoir absorbé 195 litres de gaz de la combustion. Il résulle de ce qui précède : 1° que la méthode physiologique destinée à la recherche de l’oxyde de carbone peut servir de précieuse indication dans l'appréciation de différents appareils de chauffage; 2° qu'elle est la seule applicable aux appareils, qui, comme le poêle décrit plus haut, ne donnent que des traces de CO dans les produits de la combustion. DE L'ACTION DU BICARBONATE DE SOUDE SUR LE CHIMISME STOMACAL, par M. A. Gigert. — (Voir Mémoires du présent volume, p. 147. NOTE SUR UN CAS D'ÉROSIONS HÉMORRAGIQUES DU DUODÉNUM, par MM. Puzrer et DENYy. L’érosion hémorragique de l’estomac est une lésion qui a élé signalée et décrite comme l’ulcère rond, dont elle semble n'être qu'une miniature, par Cruveilhier dans son Anatomie pathologique du corps humain. On la rencontre dans un certain nombre de gastrites, sous forme de pelites ulcérations cupuliformes, à fond rosé. Elles ont été étudiées depuis par un certain nombre d’auteurs et leur histologie est aujourd’hui connue. On sait qu'elles résultent de l’action du suc gastrique sur les villosités stoma- cales infiltrées de cellules rondes au cours d'une gastrite quelconque et transformées en bourgeons charnus que le revêtement de cellules mu- queuses ne suffit plus à protéger. Il se forme ainsi une petite escarre vite digérée et dont la chute laisse à nu les culs-de-sac des glandes et les capillaires béants des villosités. Aussi, quelque faibles que soient ces érosions, elles peuvent donner lieu à des hémorragies très abondantes 780 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quand elles sont nombreuses. Elles peuvent passer inaperçues et l’au- topsie ne révélant ni cancer, ni ulcère rond, ni lésion de gros vaisseaux, la provenance du sang contenu dans l’estomac reste difficile à établir. L'un de nous a rapporté une observation d'éclampsie qui est démons- trative à cet égard (1). Dans l'observation dont nous présentons aujourd’hui le résumé à la Société, les érosions hémorragiques siégeaient non dans l'estomac, mais dans la première partie du duodénum, et avaient donné lieu à des troubles assez graves pour entrainer la mort, OgservarTion (M. Deny). — Folie à double forme : démence maniaque. Ch... est un homme très grand et très vigoureux, il est âgé de cinquante- huit ans, et n’a pas quitté la Sûreté de l'hôpital de Bicêtre depuis l’année 1880. Atteint depuis sa jeunesse de folie à double forme, il à fait un premier séjour à Bicêtre, en 1852, à l’âge de dix-sept ans, puis y est rentré à diverses reprises, toujours pour les mêmes accès mélancolico-maniaques. Entre temps, il a fait, au dire de sa femme, de nombreux excès alcooliques. Son père et un de ses frères étaient également alcooliques. Depuis plusieurs années, ce malade était continuellement excité et pré- sentait tous les caractères de la démence maniaque. Le 15 mai dernier, Ch... fut pris subitement d’un évanouissement et s’affaissa dans le préau où il était avec d’autres malades. Quand on le releva, à peu près sans connaissance, et qu'on voulut le faire marcher pour gagner son lit, on s’apercut que du sang découlait de son pantalon. Arrivé à son lit, il vomit du sang rutilant à pleine bouche et perdit complètement connais- sance. En le déshabillant, on s'’apereut qu'il perdait également du sang par l'anus. Une demi-heure après, nouvelle hématémèse avec selle sanguino- lente. Le reste de la journée se passa sans nouvelle hémorragie. On avait appliqué - de la glace sur le ventre et pratiqué plusieurs piqûres d’ergotine. Dans la nuit du 15 au 16, il y eut encore plusieurs selles composées de matières teintées de sang. Le 16 au matin, on trouva Ch... en train de fumer sa pipe, il ne se rend aucun compte de ce qui lui est arrivé la veille, ne souffre nullement et demande à manger. On l’oblige avec beaucoup de difficulté à garder le lié et on lui prescrit le régime lacté absolu. Le 17, en examirart les selles rendues, on y trouva cinq corps étrangers, gros comme des mandarines, qui, après lavage, furent reconnus pour de la laine provenant du matelas du malade. Du 17 au 22 mai, l’état de Ch... est très satisfaisant, mais le 22 au matin il est pris subitement d'une nouvelle hématémèse, il perd une quantité de sang < PET) Lie .. TPE AEURS F 4 . (4) Pilliet. Etude d histologie sur l'érosion hémorragique de la muqueuse de l'estomac dans les gastrites, Sociélé analomique, 1892, p. 693. SÉANCE DU 22 JUILLET 781 rouge qu'on évalue à 1 litre. On fait une nouvelle application de glace et on pratique plusieurs piqüres d’ergotine. Malgré ce traitement, le malade a encore plusieurs selles sanglantes ; le soir, une nouvelle hématémèse se déclare et la mort a lieu le 23 au matin. A l’autopsie, on trouve l'estomac et le duodénum rempli d'énormes caiïllots de sang; on constate en outre au niveau de la deuxième porlion un amincis- sement des tuniques inteslinales qui paraissent réduites à un simple feuillet séreux. L'examen direct montre quelques érosions hémorragiques dans la portion pylorique de l'estomac, mais le duodénum en était particulièrement criblé. A l’examen histologique, la muqueuse de la région pylorique montre des glandes réduites, très courtes, non pelotonnées, et des villo- sités allongées et renflées en massue. IL y a donc une gastrite chronique évidente. Les érosions présentent leur caractère habituel. Le duodénum montre également l'atrophie des glandes et l'allongement des villosités. Les érosions sont comme découpées à l’emporte-pièce dans la muqueuse, les capillaires sectionnés net dans chaque villosité, par suite du déta- chement de l’escarre, comme si l’abrasion avait été faite avec un instru- ment tranchant. Le processus pathclogique débute évidemment par la surface de la muqueuse, car les glandes de Brunner situées sous la mus- culaire muqueuse ne présentent pas même de traces d'inflammation. Il s’agit donc bien d’érosions hémorragiques multiples, superficielles, ayant déterminé des pertes de sang abondantes et siégeant surtout dans le duodénum. Réflexions. — 1° Au point de vue pathogénique, il importe de faire remarquer que le malade était interné depuis douze ans et que l’alcoolisme doit être éliminé comme facteur d’un processus aussi aigu. Il faudrait plutôt incriminer les corps étrangers difficiles à éliminer et très proba- : blement septiques, tels que la laine des matelas d’hospice que le malade avalait. 9° Au point de vue anatomo-pathologique, il est important de constater dans le duodénum l'existence de lésions tout à fait semblables à celles que l’on observe dans l'estomac. L’étude de l’ulcère rond nous montre le même fait. La raison en est aisée à comprendre. Cest le suc gastrique dans l'estomac, c’est le mélange de ce suc au suc pancréatique versé dans le duodénum qui attaquait dans ces deux segments du tube digestif les portions de la muqueuse nécrosée par les processus inflammiatoires ou toxiques, et donnent ainsi un air de famille aux lésions ulcératives de l'estomac et de l'intestin. 3° Au point de vue clinique enfin, il n’est pas inutile de constater que les érosions hémorragiques peuvent déterminer des pertes de sang consi- dérables que l’on est porté à attribuer à des ulcérations plus étendues, ce qui peut conduire à des erreurs de diagnostic. EEE nl O0 LS SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE REIN UNIQUE ET UTÉRUS UNIQUE CHEZ UNE LAPINE, par MM. Ep. RetTeRER et H. RoGer. Nous avons eu l’occasion d'observer chez une lapine une malformation des organes génito-urinaires, dont on a signalé de nombreux exemples dans l'espèce humaine, mais peu connue chez les mammifères domes- tiques. | Cette lapine, apportée au laboratoire au mois de mars 1893, recut à cette époque une première injection alténuée de streptocoques. Cette inoculation n'ayant produit aucun trouble, l'animal servit à une autre expérience : on lui injecta sous la peau, le 30 mai et le 1% juin, 2 milligrammes de bichlorure de mercure. Enfin le 27 juin, la lapine reçut, dans une veine de l'oreille, 8 cen- timètres cubes de sérum de sang de chien. Un autre lapin du même poids reçut une quantité semblable de ce sérum; ce dernier ne présenta aucun trouble, tandis que la lapine fut trouvée morte le lendemain matin dans sa cage. À l’autopsie nous avons trouvé une absence congénitale du rein droit. Ainsi une injection intra-veineuse de sérum incapable de tuer un lapin normal a suffi à faire périr celte lapine. La mort est évidemment le résultat d’une insuffisance rénale. L'examen du rein gauche nous permettra peut-être de faire la part de ce qui est attribuable à l'absence congénitale d'un rein et aux lésions que les injections antérieures du sublimé ont pu déterminer dans le seul rein existant. En tout cas, l'intestin ne présentait pas les ulcérations qui caractérisent l'intoxication par cette substance. ANOMALIE DES ORGANES GÉNITO-URINAIRES. Côté gauche. — Le rein, l’uretère, l'ovaire, le pavillon de la trompe, l’oviducte et la corne utérine ont une conformation normale. L'utérus s’ouvre dans le vagin par une extrémité de forme normale, que les vété- rinaires comparent à une « fleur épanouie » et qui rappelle plus exacte- ment une « anémone de mer ». L’uretère gauche s'ouvre par un orifice d'aspect normal. Le rein gauche est à sa place habituelle; il s'étend, en effet, de la deuxième à la cinquième vertèbre lombaire. Il est sensiblement plus volumineux que celui d’un lapin ordinaire. Ajoutons que la capsule surré- nale gauche se trouve à sa place normale. Côté droit. — Absence de rein et d’uretère; la vessie ne présente aucune trace d'orifice uretérin. L'ovaire droit existe, mais il n’est pas à sa place normale. Chez une lapine ordinaire, les deux ovaires se trouvent dans la cavité SÉANCE DU 22 JUILLET 183 abdominale au niveau d’une ligne qui passerait à 6 millimètres environ en arrière du rein gauche. Dans notre cas, l’ovaire droit était placé plus en avant : il se trouvait dans la portion de la région lombaire occupée à gauche par le rein. En outre, l'ovaire droit avait des dimensions plus notables que le gauche ; ce dernier était long de 14 millimètres, tandis que l'ovaire droit avait une longueur de 27 millimètres. Les autres dimensions étaient à peu RIVE les mêmes dans les deux ovaires. Un ligament tubo-ovarien d'aspect normal rattachait l'extrémité anté- rieure de l'ovaire droit à un pavillon également normal. Mais l’oviducte qui faisait suite au pavillon se dirigeait en avant et en dehors pour se terminer par un renflement imperforé, situé en dehors et en avant ie l'ovaire. Plus loin, il n’y avait plus de vestige ni de l’oviducte, ni de la corne utérine et le vagin, normalement conformé, ne recevait que la terminai- son de l'utérus gauche. L'examen microscopique nous a montré que le rein, l'ovaire et l’oviducte gauches avaient leur structure ordinaire. Les dimensions plus notables de l'ovaire droil étaient dues au développement de sa trame (cellules in- terstitielles formantles cordons médullaires); les ovisacs avaient leur con- stitution normale, mais semblaient exister en moins grand nombre qu’à gauche. Nulle part nous n'avons trouvé des débris du corps de Wolff, Remarques. — L'anomalie dont nous venons de résumer les points essen- tiels nous paraît très propre à montrer les faits suivants : L'absence de tout débris du corps de Wolff semble indiquer que ni ce dernier, ni son conduit excréteur n’ont existé chez l'embryon. l La conséquence de l'arrêt de développement du canal de Wolff a entrainé l’absence du rein droit, qui, comme on sait, provient en tout ou en partie d’un diverticule du canal de Wolff. La présence de l’ovaire et de l’extrémité antérieure de l’oviducte droits prouve que la glande génitale et le canal de Muller peuvent prendre nais- sance, l’une (ovaire) aux dépens de l’épithélium germinatif interne et l’autre (trompe) aux dépens de l’épithélium germinalif externe, selon la nomenclature de M. Matuias-Duvaz, même si le corps de Wolff ne se développe pas. Quant à l'allongement du canal de Muller, c’est-à-dire au développe- ment de la portion qui va atteindre le sinus uro-génital, il estintimement lié à l'existence du canal de Wolff. En effet, les embryologistes ne sont pas arrivés à élucider complètement la question de savoir si le canal de Muller s'accroît, c'est-à-dire s’allonge par bourgeonnement des cellules propres de son extrémité pelvienne, ou bien s’il résulte d’une scission du canal de Wolff. La malformation que nous décrivons ne donne pas la solution du problème, mais elle met hors de doute le fait suivant : l’allon- 27. 184 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE gement du canal de Muller n’a pas lieu, quand le canal de Wolff fait défaut, que ce dernier prenne une part active à la formation du premier ou qu'il lui serve seulement de soutien ou de tuteur. NOTE SUR DEUX LOIS QUE FAIT RESSORTIR L'ÉTUDE MORPHOLOGIQUE DU SYSTÈME DENTAIRE DES CARNIVORES, par M. H. BEAUREGARD. Je me suis livré depuis quelque temps à une étude détaillée du système dentaire des Carnivores et j’ai pu relever certaines particularités parmi lesquelles je citerai seulement les suivantes, qui affectent le caractère de lois générales au moins pour le groupe de Mammifères dont il s’agit : 4° C’est toujours à la mâchoire inférieure que se manifeste le plus net- tement le caractère propre à la dentition d'un genre déterminé. C'est-à-dire que si l’on passe, par exemple, d'un carnivore à régime essentiellement carnassier à un carnivore moins carnassier et ayant une tendance à la forme insectivore ou frugivore des dents, c’est à la mâchoire inférieure que cette tendance s'affirme le plus nettement. Bien plus, si en dehors de l’adaptation des dents au régime on considère seulement les caractères morphologiques ou les particularités d'implantation des dents propres à un groupe, c'est encore à la mâchoire inférieure qu'on peut noter, à ces divers points de vue, les caractères les plus nets, tandis qu'à la mâchoire supérieure les dents s’écartent beaucoup moins du type général. Entre autres exemples, je mentionnerai les suivants: a. Si l’on compare les prémolaires du chat et celles du chien, on constate que les supérieures du chat, carnassière comprise, tendent à se rappro- cher des mêmes dents inférieures du chien.Ceci donne à penser que chez le chien les prémolaires de la mâchoire inférieure ont un caractère plus franchement carnassier que celles de la mâchoire supérieure; or, la den- tition du chien est dans son ensemble une dentition de carnivore propre- ment dit, mais c'est, comme on le voit, à la mâchoire inférieure que ce caractère ressort le plus nettement. b. Chez les Civettes, c’est à la mâchoire inférieure surtout que se défi- nit le caractère de la dentition qui devient tuberculeuse; alors en effet qu'entre les chats et les chiens il était encore possible de comparer entre elles les quatrièmes prémolaires aussi bien que les caruassières inférieures, chez les civettes, ces mêmes dents affectent un caractère tuberculeux des SÉANCE DU 22 JUILLET 785 plus marqués, tel qu'aucune dent de la mâchoire supérieure n'offre une semblable différenciation. De même chez la Genette (1). c. La loi apparaît plus nettement encore chez le Paradoxure. Get animal, par ses dents supérieures, se place immédiatement à côté de la Mangouste, espèce carnassière; cependant le Paradoxure n'est point essentiellement carnassier, et c'est encore à la mâchoire inférieure qu’on trouve les parti- cularités qui le distinguent de tous les carnivores voisins. Les prémolaires etles molaires y affectent un caractère tuberculeux tel qu’on ne peut les comparer qu’à celles des ursidés ou autres carnassiers frugivores. d. La Hyène, qui est intermédiaire, au point de vue du régime, entre les chiens et les félidés, le manifeste, entre autres caractères; par le dévelop- pement d’une partie tuberculeuse à la carnassière Hô ieure, nulle chez les félidés, plus développée chez les chiens.’ e. Enfin les mustélidés et les ours ont un caractère commun dans leur dentition, qui montre bien les rapports qui les unissent malgré les nom- breuses différences que présentent les dents. Or c’est encore à la mâchoire inférieure qu'on observe ce caractère consistant dans le mode d’implanta- tion des incisives disposées sur deux rangs, les intermédiaires étant pla- cées en arrière de la rangée formée par les incisives internes et externes. 2° Chez tous les carnivores à régime purement carnassier, il existe sur la voûte palatine, de chaque côté, entre la carnassière et la molaire suivante une fosse profonde (2) qui reçoit le tubercule principal de la carnassière inférieure. Cette fosse disparaît chez les espèces à régime plus ou moins complètement frugivore. Cette particularité est intéressante à noter à plus d’un titre; elle per- met, à défaut même de mâchoire inférieure, de déterminer si celle-ci pos- sédait des carnassières à lobes tranchants et aigus ou des tubercules bas et mousses. Elle est si bien liée avec le caractère propre de la carnassière inférieure qu'elle se retrouve, dans chaque groupe de l’ordre des carnas- siers, lorsque ce groupe comprend des genres à régime frugivore. Ainsi chez le Paradoxure, parmi les Viverridés, la fosse est absente; de même aussi chez les Coati et les Ratons; chez le Blaireau parmi les Mustélidés ; enfin chez l'Ours. (1) Les détails relatifs à cette loi seront exposés dans un ouvrage que nous préparons sur le système dentaire des Mammifères. (2) Cette fosse a été indiquée par Rousseau (Anatomie comparée du système dentaire, 1827) comme n’existant que chez les félidés et faisant défaut chez les Canidés. Elle existe chez ces derniers mais reportée plus en avant en raison du plus grand nombre des molaires tuberculeuses. 786 SOCIÉTÉ DE ‘BIOLOGIE _ La Commission du titulariat a présenté le classement suivant : En 4'° ligne. °°: 012. M. PILLIET. En ® ligne. ...... MM. ARTHUS. Bouvier. ARTAUD. En93: ligne HE PA DRE MM. à DoLéris. SANCHEZ TOLEDO. L'élection aura lieu le samedi 29 juillet 4893. Le Gérant : G. Masson. —————————————— —"——— a ———— Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MareTHEUX, directeur, 1, rue Cassette. 187 SÉANCE DU 29 JUILLET 1893 M. CH. FÉRÉ : Note sur l'influence des injections de liquides dans !’albumen sur l'in- cubation de l'œuf de poule. — MM. Deserwe et VraLer : Contribution à l'étude de la localisation anatomique de la cécité verbale pure. — M. le Dr Vrazer : Note sur l'existence, à la partie inférieure du lobe occipital, d'un faisceau d'association distinct, le faisceau transverse du lobule lingual. — M. le Dr G. Loisez : Dévelop- pement des fibres élastiques dans l’épiglotte et dans le ligament cervical. — M. le Dr O. VAN DER SrRicuT : La signification des cellules épithéliales de l’épididyme de Lacerta vivipara. — M. P. Taéconan : Sur certains faits de dégénérescence cellu- laire. — M. Eu. Bouraueor : Présence et rôle de l’émulsine dans quelques cham- pignons parasites des arbres ou vivant sur le bois. — M. J. HENroTAY (d'Anvers): Précipitations des couleurs d'aniline dans certaines conditions de réactions histo- chimiques; possibilité de causes d'erreur. — M. A. VgiLcon : Sur un microcoque anaérobie trouvé dans des suppurations fétides. — M. N. Gamazeïa : Du choléra viru- lent et de la genèse des épidémies. — MM. Lanccois et CnarRiN : Lésions des capsules surrénales dans l'infection; — Le foie chez le cobaye pyocyanique. — M. A. HerzeN : Rate et pancréas. — M. A. Dasrre : Digestion pancréatique. Observation à l’occasion de la note de M. Herzen. — M. E. LaGuEssE : Sur la for- mation des îlots de Langerhans dans le pancréas. — MM. Meyer et Brarnës : Sur l'oxygène du sang artériel dans les variations de la capacité respiratoire. Présidence de M. Dareste. — NOTE SUR L'INFLUENCE DES INJECTIONS DE LIQUIDES DANS L’ALBUMEN SUR L'INCUBATION DE L’OŒUF DE POULE, par M. Cu. FÉRÉ. Les substances qui peuvent agir sur l'œuf à l’état de vapeurs étant peu nombreuses, j'ai pensé qu’il y aurait intérêt à tenter l'introduction de solutions de substances actives dans l’intérieur de l’œuf. J’ai fait quelques essais d’injections dans l'albumen. On perfore la coquille préalablement lavée, avec une aiguille flambée, vers la grosse extrémité, de manière à pénétrer dans l’albumen, sans atteindre la chambre à air; et en prenant les précautions antiseptiques nécessaires, on pratique l'injection avec la seringue de Malassez. On a soin de pratiquer la perforation et de faire l'injection en maintenant l’œuf dans une position telle que l’albumen s'échapper par l’orifice pour faire place au liquide. Lorsqu'on pousse l’in- jection, après avoir enfoncé profondément la canule, il arrive souvent, si la quantité de liquide injecté ne dépasse pas un quart ou même un demi-centimètre cube, qu’elle trouve sa place sans que l’albumen soit rejeté au dehors, en refoulant la chambre à air. S'il s’écoule ane petite quantité d’albumen, on essuie l’orifice que l’on obture rapidement avec la cire bouillante. I. Dans la première expérience, sur 10 œufs au deuxième jour de la ponte ct apportés d'une ferme au voisinage de l’hospice, 5 ont reçu un demi-centi- mètre cube d’une solution stérilisée de chlorhydrate de morphine à 1 p. 100. . BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9e SÉRIE. T. V. 28 7188 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 0 Ces œufs et les cinq témoins mis ensemble à l’étuve, le gros bout à droite, donnent un développement plus rapide que les œufs plus anciens que nous employons ordinairement dans nos expériences. Ils ont été ouverts de la 71e à la 74° heure par couples, un témoin et un œuf morphiné. Les 10 œufs contenaient un embryon vivant. L'âge des embryons déterminé comme il a été dit précédemment était de 77 heures en moyenne pour les œufs témoins et de 70 heures en moyenne pour les œufs morphinisés. -Deux fois dans les œufs morphinisés il y avait une anomalie de l'aire vas- culaire qui présentait une forte échancrure, du côté où a été faite l'injection : dans un de ces œufs, l'embryon est monstrueux, il n’y a pas de vertèbres pri- mitives, mais la tête est développée et le cœur bat. Les 5 embryons des œufs morphinisés ne présentent que deux déviations de la tête, qui une fois est déviée vers la pointe de 45 degrés et une fois vers le gros bout de 30 degrés environ. Parmi les témoins, il y a deux déviations notables : une fois la tête a pris la place de la queue (déviation de 180 degrés), et une fois la tête est déviée vers le gros bout, mais a dépassé le grand axe (déviation de 40 degrés environ). Ces dernières déviations, si on tient compte de la position des œufs dans l'étuve montrent bien que l'influence de l'éclairage sur la direction de la tête est loin d’être constante. II. Dans uue seconde expérience, 5 œufs au septième jour de la ponte ont recu un demi-centimètre cube d’eau distillée et stérilisée. 5 autres ont recu un demi-centimètre cube d’une solution de chlorhydrate de morphine, à 4 p. 1004 5 autres onl recu un demi-centimètre cube d’une solution de nitrate neutre de plomb à 4 p. 100 aussi stérilisée. Ils ont été mis à l'étuve en même temps, à la lumière, le gros bout à droite. a). 12 œufs, 4 de chaque catégorie, ont été ouverts à partir de la 70° heure. 1° Les 4 œufs injectés à l’eau contiennent des embryons normaux et vivants arrivés à un développement moyen de 43 h. 7. Deux fois l'aire vasculaire est à peine développée, une fois elle est fortement échancrée vers le gros bout. Une fois la tête de l'embryon est déviée vers le gros bout, le corps dans l’axe lon- gitudinal de l'œuf. 20 Dans les quatre œufs morphinisés, il y a trois embryons vivants, arrivés à un développement moyen de 39 heures 2. Un des embryons et monstrueux. Pas de déviations. Dans le quatrième œuf il n’y a aucun développement. 3° Parmi les quatre œufs injectés au nitrate de plomb, il n’y en a que deux qui contiennent des embryons vivants. Dans l’un d'eux, l'aire vasculaire n’est pas du tout développée. Dans l’autre, elle commence à peine à la périphérie sur une pelite étendue; l'aire transparente a la forme d’un chapeau de gen- darme et contient deux embryons accolés par le côté de la tête: un seul a un cœur et est arrivé à la 33° heure environ, l’autre plus petit est à peu près à la 29e heure. L'embryon de l’autre œuf est à peu près à la 26° heure, Les deux autres œufs contiennent des embryons monstrueux qui n’ont guère dépassé le développement du premier jour. Dans l’un, l'aire vasculaire s’est: développée sous forme d’une bande étroite perpendiculaire au grand axe de l'œuf. b). Les trois œufs restants onl été ouverts après la 96e heure. SÉANCE DU 29 JUILLET 789 1° L’œuf injecté à l’eau a une aire vasculaire assez bien développée, tous les vaisseaux y sont bien marqués; mais elle est fortement échancrée en ligne droite vers le gros bout. L’embryon mort est couché sur le côté droit; cyclopie, torsion. 20 Dans l'œuf injecté à la morphine, l’aire vasculaire est à peine indiquée par des îles de sang. Embryon cyclope, pas de protovertèbres, . 3° L'œuf injecté au nitrate de plomb a une aire vasculaire formant seule- ment une bande étroite sur l'axe transversal de l'œuf, mais l’embryon est normal, normalement placé, et arrivé à peu près à la 46° heure. III. — Deux œufs injectés avec un quart de centimètre cube de la solution de nitrate de plomb, ont été ouverts après 72 heures d’incubation. Dans l’un, l'aire vasculaire est bien développée, l'embryon arrivé à la #1° heure environ, est fortement tordu, Dans l’autre, l'aire vasculaire indiquée seulement par des iles de sang, est en forme de bande transversale, sur le bord de laquelle, vers le petit bout de l'œuf, est un embryon acéphale dans lequel on ne distingue que quatre paires de protovertèbres. IV. — Dans trois œufs où j'avais injecté 1 centimètre cube de la solution de morphine, il ne s’est produit aucun développement; mais ces œufs étaient arrivés au 14, au 23° et au 25° jour de la ponte. V. — Dans un œuf au huitième jour de la ponte, que j'ai mis en incubation après injection de 1 centimètre cube d’eau, j'ai trouvé à la 72° heure un embryon bien conformé et vivant, de 52 heures environ, ayec une aire vascu- laire parfaitement arrondie et régulière. VI. — Dix œufs dont cinq ont été injectés avec un demi-centimètre cube d'eau; et cinq ont été injectés avec un demi-centimètre cube d’une solution de codéïne au 1/100°, et ont été ouverts de la 71° à la 74° heure de l’incuba- lion, pendant laquelle ils étaient placés le gros bout à gauche. On a trouvé une fois une absence complète de développement dans chaque catégorie. Dans les œufs injectés à l’eau il y avait {rois embryons normaux, dont deux déviés à 45 degrés environ vers le gros bout, et un embryon couché sur le côté droit avec un développement moyen de #7 heures. Deux ont leur aire vasculaire échancrée vers le gros bout. Dans les œufs injectés à la codéine, il y a quatre embryons monstrueux avec des aires vasculaires à peine indi- quées à la périphérie et déformées. Ces expériences montrent qu’on peut injecter dans l’albumen au moins 1 centimètre cube d'eau distillée et stérilisée sans empêcher le développe- ment. Les injections de solutions de substances actives provoquent plus souvent que les injections d’eau des retards de développement et des monstruosités. Le mode d’action de ces substances n’est pas déterminée : il est bon de remarquer que si le chlorhydrate de morphine et surtout le nitrate de plomb précipitent légèrement l’albumine, la codéïne n’a pas du tout cet effet. Les œufs les plus frais résistent le mieux à l'influence perturbatrice ; c’est là, du reste, un fait général. 790 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA LOCALISATION ANATOMIQUE DE LA CÉCITÉ VERBALE PURE, par MM. DÉJERINE et ViALeï. L'un de nous a montré dans des communications antérieures que les deux formes actuellement connues de cécité verbale, correspondent à des localisations différentes. Dans la première forme, — cécité verbale avec troubles de la parole et agraphie, — la lésion siège au niveau du pli courbe, tandis que dans la deuxième, — cécité verbale pure avec inté- grité du langage et de l'écriture spontanée et sous dictée, et difficulté de la copie — la lésion interrompt les communications entre le centre visuel cortical et la zone du langage (1). Nos recherches actuelles ont pour but de préciser le siège de la lésion dans la cécité verbale pure en délerminant quelles sont les fibres d’asso- ciation qui sont lésées dans cette forme. On trouvera dans le travail pré- cédemment cilé l’histoire détaillée du malade, nous nous bornerons actuellement à esquisser à grands traits les symptômes que il présentait ainsi que les lésions constatées à l’aultopsie : OBsERvATION. — Cécité verbale totale, littérale et verbale, durant depuis quatre ans, chez un homme de soixante-huit ans, très intelligent et très cul- tivé. Perte totale de la compréhension des signes figurés de la musique, cécité musicale. Conservation complète de la lecture des chiffres ainsi que de la faculté de calculer. Pas trace de surdité verbale. Pas trace de troubles de la parole articulée. Langage intérieur intact. Pas de cécité psychique ni d'aphasie optique. Mimique parfaite et très expressive. Conservation parfaite de l'écriture spon- tanée et sous dictée; le malade peut écrire correctement des pages entières, soit spontanément, soit sous dictée. Ecriture d'après copie, pénible et défectueuse. Hémianopsie homonyme laté- rale droite avec hémiachromatopsie du même côté. Intégrité de la motilité, de la sensibilité générale et spéciale, ainsi que du sens musculaire. Persistance des mêmes symptômes pendant quatre ans. Mort subite, après avoir présenté pendant dix jours de la paraphasie avec agraphie totale, sans trace de sur- dité verbale. Conservation parfaite de l'intelligence et de la mimique. Aulopsie, — Hémisphère gauche. Lésions récentes de ramollissement rouge dans le lobe pariétal inférieur et le pli courbe. Lésions anciennes, plaques jaunes atrophiques, siégeant dans le lobule lingual, le lobule fusiforme, le (1) J. Déjerine. Sur un cas de cécité verbale avec agraphie, suivi d’autopsie (Soc. de Biologie, 1891, p. 197). J. Déjerine. Contribution à l'étude anatomo-pathologique et clinique des différentes variétés de cécité verbale (Mém. de lu Société de Biologie, 21 fé- vrier 1892). à pd SÉANCE DU 29 JUILLET 191 cunéus et la pointe du lobe occipital avec dégénérescence secondaire du bour- relet du corps calleux. Atrophie très prononcée des radiations optiques. Hémi- sphère droit intact. Examen histologique (Méthode de Pal). L’hémisphère gauche une fois durci, nous pratiquâmes sur toute sa moitié postérieure des coupes microscopiques en série (900 coupes) comprenant non seulement le foyer primitif cortical, mais encore les noyaux gris de la base. La description de ces coupes et les figures correspondantes se trouvent dans la thèse: inaugurale de l’un de nous (1). Il suffira de rapporter ici les constata- tions que l’examen microscopique permet de faire sur la topographie exacte de la lésion. Les premières coupes pratiquées au niveau de l’extrême pointe du lobe ocei- . pital montrent déjà la participation de cette région au ramollissement. Quoi- que les circonvolutions aient conservé leur disposition extérieure habituelle, le microscope permet de constater une altération profonde, siégeant à l’extré- mité postérieure des lobules lingual et fusiforme, particulièrement dans le sillon collatéral. L'écorce de ces lobules est complètement sclérosée ; la structure cellulaire disparue est remplacée par un tissu cicatriciel surtout marqué dans le fond du sillon, mais qui s’atténue à mesure que l’on approche de la surface visible de ces circonvolutions. Toute la substance blanche de ces deux circonvolu- tions est détruite, remplacée par un tissu seléreux et lacunaire dans lequel un fort grossissement pèrmet de reconnaitre, perdus au milieu de nombreux corps granuleux, quelques rares débris de fibres nerveuses encore imprégnées par l'hématoxyline. Il en est ainsi de toute la région de la pointe siluée en arrière de la corne oceipitale. A mesure que l'extrémité postérieure de la corne occipitale apparaît, on se rend mieux compte de la topographie de la lésion et l’on voit que la circon- volution la plus atteinte est le lobe fusiforme. Ce lobule est complètement atrophié et sclérosé; il a subi une rétraction considérable, Toute sa substance blanche a disparu à l'exception de quelques rares fibres d'association courtes, reconnaissables à leur direction arciforme. Le lobe lingual, moins profondément atteint en apparence, montre au microscope une disparition presque totale de ses fibres blanches; cependant, au niveau de la lèvre inférieure de la scissure calcarine, on voit une portion du stratum calcarinum qui a résisté à la destruction. A mesure que l’on remonte vers le cuneus, l'écorce reprend ses caractères normaux, le ruban de Vicq-d’Azyr réapparaît ainsi que les stries verticales de la substance grise; les fibres de la substance blanche sont fortement co- lorées. Ces caractères indiquent que la lésion s’atténue au niveau de la lèvre infé- rieure de la calcarine et qu’elle est surtout limitée aux lobes lingual et fusi- forme. (1) Vialet. Les-centres cérébraux de la vision et l'appareil nerveux visuel intra-cérébral ; Thèse, Paris, 1893, p. 266. = © 19 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Si nous portons notre attention du côté de la cavité ventriculaire, nous voyons que toute sa partie inférieure est également envahie par le foyer de ramollissement. Les faisceaux blancs de la substance sagittale qui forment un triple annea u autour de cette dernière, le tapetum, les radiations optiques de Gratiolet et le faisceau longitudinal inférieur de Burdach sont complètement détruits. La lésion va en s’atténuant à mesure que l’on remonte sur la face externe du ventricule, où il devient alors possible de reconnaitre les trois couches que nous venons de mentionner. Cette lésion persiste avec les mêmes caractères dans toute la partie qui correspond à la branche descendante de la scissure calcarine. Cette dérnière a surtout souffert dans sa portion inférieure, c’est-à-dire au niveau du lobe lingual, tandis que sa partie supérieure, correspondant au cuneus, est moins atteinte. Ilest malheureusement à regretter que la coupe de Flechsig, pratiquée sur l'hémisphère et passant précisément par la scissure calcarine, ne nous per- mette pas une vue d'ensemble sur toute l'étendue de cet important sillon. Un fait certain c’est que, dans la région calcarinienne proprement dite, la lésion est loin de présenter l'intensité que l’on observe dans les lobes lingual et fusiforme. C’est ainsi que ruban de Vicq-d’'Azyr est encore reconnaissable ainsi que les fibres radiées de l’écorce ; de même le faisceau d'association qui unit le lobe lingual au cuneus est en grande partie conservé. Dans toute la portion horizontale de la scissure calcarine, le ramollissement est toujours localisé aux deux lobules précédemment cités ainsi qu'à la partie inférieure de la corne occipitale dont il détruit la”triple ceinture de fibres jusqu’à l’épendyme. Il se poursuit avec cette régularité jusqu’au pied du lobule lingual et jusqu'à l'insertion de ce dernier sur le lobe limbique. L'examen microscopique permet donc de se faire une idée nette des dégâts causés par la plaque jaune ancienne du sillon collatéral. Cet examen nous montre que le ramollissement ne s’est pas borné seule- ment à l'écorce, mais qu’il a fusé profondément dans la substance blanche sous-jacente, dans toute l'étendue de la scissure calcarine, et qu'il a pénétré jusqu'à l’'épendyme ventriculaire en provoquant une destruction absolue du tapetum des radiations optiques et du faisceau longitudinal inférieur, au niveau de la paroi inférieure de la corne occipitale. La lésion, dans le cas présent, revêt un caractère bien spécial ; elle ne se borne plus à l’écorce, mais pénétrant dans les faisceaux blancs qui entourent la demi-circonférence inférieure du ventricule, elle les détruit complètement, en agissant surtout sur les fibres du faisceau longitudinal inférieur. Nous pensons que ce n’est pas interpréter faussement les faits anatomiques que de voir une relation étroite entre la lésion de ce gros faisceau d’association et le symptôme cécité verbale. L'interruption que l'analyse clinique seule amenait à placer hypothétique - ment sur le trajet des-fibres conduisant les impressions visuelles du centre visuel cortical à ceux des mémoires visuelles et auditives des mots, c'est-à- dire à la zone du langage, l'examen anatomique la localise sur le faisceau d'association occipito-temporal ou longitudinal inférieur. Ceci revient à dire que la partie inférieure du faisceau longitudinal inférieur SÉANCE DU 29 JUILLET 793 renferme des fibres d'association chargées de mettre en communication le centre cortical de la vision avec la zone du langage, et que la cécité verbale pure a pour formule anatomique la lésion de la partie inférieure de ce faisceau. Nous ne voudrions pas dire par là, ce serait dépasser la portée des faits anatomiques, que ce type clinique ne puisse être réalisé par une lésion qui intéresserait d’autres fibres d'association. Nous savons en-effet que les rela- tions qui unissent le centre cortical de la vision avec les centres de la mé- moire visuelle commune et la zone du langage sont multiples. Toutefois, ce qu'il y a de remarquable dans ce cas, et c'est un point sur lequel nous devons insister particulièrement, c’est que, chez uotre malade, il ne s’est pas produit de suppléance. Le symptôme cécité verbale est apparu brusquement, et s'est conservé avec la même pureté pendant quatre années consécutives, sans amélioration aucune: La voie de conduction des impressions visuelles qui part de la sphère cor- ticale visuélle gauche, une fois détruite, n’a pas été remplacée. Pour parvenir à la zone du langage, les impressions visuelles n’ont pu trouver un chemin, ni dans les faisceaux anatomiques analogues de l’hémisphère droit, ni dans d’autres faisceaux d'association de l'hémisphère gauche. Cependant le malade voyait très bien les objets avec son hémisphère droit, emmagasinait parfaitement les souvenirs visuels auxquels ils donnaient lieu. I n'y avait pas trace de cécité psychique, ni d’aphasie optique; en un mot de tout l'appareil si complexe préposé à la vision cérébrale, une seule voie était détruite. Or cette voie n’a pu être remplacée. Ces considérations nousjamènent à admettre que, dans l'hémisphère gauche, la partie inférieure du faisceau longitudinal inférieur de Burdach contient des libres physiologiquement différenciées, mettant en commu- nication la zone visuelle avec la zone du langage. NOTE SUR L'EXISTENCE, A LA PARTIE INFÉRIEURE DU LOBE OCCIPITAL, D'UN FAISCEAU D'ASSOCIATION DISTINCT, LE FAISCEAU TRANSVERSE DU LOBULE LINGUAL, par M. le D' Vrarer. Au cours de nouvelles recherches microscopiques sur la structure fine du-lobe occipital et le trajet intra-cérébral des conducteurs optiques, nous avons constaté à la partie inférieure du lobe occipital l'existence d'un faisceau de fibres d'association dont nous n’avons pas trouvé la des- cription dans les auteurs. Ce faisceau est visible sur des coupes vertico-transversales du lobe -occipital, traitées par la méthode de Weigert-Pal. 794 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On sait que la corne occipitale est entourée d’une triple ceinture de fibres blanches disposées en zones concentriques. Ce sont, en procédant de dedans en dehors, les fibres calleuses formant le tapetum; les radiations optiques ou fibres de projection, enfin des fibres d'association à long tra- jet, formant à la partie inférieure de la corne occipitale le faisceau longi- Cun., Cuneus; Fusif., lobule fusiforme; Ling., lobule lingual; Pi., lobule pariétal supérieur; Pre., Præcuneus; Pc, pli courbe; 03, troisième occipitale; Calc., scissure calcarine; ip., sillon interpariétal; po, sillon pariéto-occipital; O3, 2e sillon occipital: O3, 3° sillon occipital; {o, sillon collatéral; Tap., tapetum; Ro, radiations optiques: Fli., faisceau longitudinal inférieur; Sér. calc., Stratum calcarinum; F. tr. Cun., fais- ceau transverse du Cuneus;F. tr. ling., Faisceau transverse du lobe lingual. tudinal inférieur de Burdach. Dans leur ensemble, ces fibres constituent ce que Wernicke a appelé la substanche blanche sagittale du lobe occi- pital. En dehors de ces trois couches, se trouve la substance propre du lobe, composée de fibres d’associalion courtes, réunissant soit des circonvolu- O8 SÉANCE DU 29 JUILLET 79 lutions voisines d’une même face, soit des groupes de circonvolutions de différentes faces. Quelques-unes se groupent en faisceaux distincts, faciles à reconnaître ; elles forment ainsi le sératum calcarinum, dans le fond de la scissure calcarine et le s{ratum cunei transversum à la partie supérieure du ventricule (Sachs). Dans une série de coupes où la différencialion des éléments était parti- culièrement heureuse, nous avons pu constater à la paroi inférieure de la corne occipitale, en dehors de la substance blanche sagittale, une couche de fibres à direction transversale organisées en faisceau distinct. L'étude des coupes sériées depuis la pointe du lobe occipital, montre que ce faisceau n’acquiert une individualité bien nelte qu’au niveau de l'extrême pointe du ventricule et qu’il la conserve dans toute l'étendue du lobe lingual, jusqu’à la fusion de ce dernier avec la circonvolution de l’hippocampe. Un grossissement moyen permet de voir que les fibres qui le composent tirent leur origine de la lèvre inférieure de la scissure cal- carine et de la substance blanche du lobe lingual, où elles se confondent avec les fibres du longitudinal inférieur, les fibres calleuses et les fibres de projection. Elles s'organisent en faisceaux distincts au niveau de la paroi interne du ventricule, contournent le coude inféro-interne du faisceau longitudinal, suivent la paroi inférieure du ventricule, situées entre la substance blanche du lobule fusiforme et le faisceau de Bur- dach, contournent ensuite l'angle inféro-externe de ce dernier en formant un second coude moins accusé que le premier et s’épanouissent dans la substance blanche des deuxième et troisième occipitales de la face externe, où i! devient très difficile de les suivre. Nous proposons de donner à ce faisceau le nom de faisceau transverse du lobe lingqual, qui n’est que l'expression de sa disposition anatomique. Quant à sa signification physiologique, il est à prévoir que ce faisceau joue un rôle d'association entre la région calcarinienne inférieure et Ja convexité. Si le centre visuel cortical doit être localisé dans la partie interne du lobe occipital et dans toute l'étendue de la scissure calca- rine (1), on peut admettre que le faisceau transverse du lobe lingual est destiné à relier le centre visuel de perception placé à la partie interne du lobe au centre visuel des souvenirs situé au contraire dans les circon- volutions de la convexité. Ce faisceau complète à la partie inférieure du ventricule le rôle que Sachs attribue au faisceau transverse du cuneus à la partie supérieure de ce dernier. (1) Vialet. Les centres cérébraux de la vision, Thèse, 1893. 1 le] © SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DÉVELOPPEMENT DES FIBRES ÉLASTIQUES DANS L'ÉPIGLOTTE ET DANS LE LIGAMENT CERVICAL, par M. le D' G. Loisez. L'origine des fibres élastiques est une des questions les plus étudiées et en même temps les plus obscures de toute l’histologie. Les derniers pro- grès de la technique ont donné lieu à des travaux remarquables, surtout en Allemagne ; cependant on peut dire qu'actuellement, aucune des deux grandes théories, relatives à cette origine, ne peut être considérée comme.exclusivement vraie. J'ai voulu reprendre cette question, pensant qu'il était possible, sinon facile, d'arriver à la vérité en suivant pas à pas, dans leur évolution, plusieurs organes élastiques traités par diffé- rents réactifs fixateurs. Voici les premiers résultats auxquels je suis arrivé en étudiant l’épiglotte du mouton et du cheval et le ip cervical du cheval, conservés dans le liquide de Müller. a.) £piglotte du mouton. — Chez un fœtus de mouton, long de 8 à 10 centimètres (1),c’est-à-dire à un âge où le tissu cartilagineux du larynx n’est encore formé que de cellules accolées les unes contre les autres, le tissu de l’épiglotte se présente comme une lame compacte creusée déjà de diverticules glandulaires. L'examen microscopique ne montre que des noyaux sphériques très nombreux, rapprochés des uns des autres et plongés dans une masse indivise de protopiasma granuleux se colorant presque autant que les noyaux; il est impossible de trouver ici aucune démarcation netle entre chaque masse cellulaire. Chez des fœtus de 19 à 13 centimètres, le protoplasma a diminué d'abondance ; il paraît éclairci ou plutôt ne se colore énergiquement que dans les régions péri-nucléaires. On pourrait décrire, à ce stade, des masses protoplasmiques nucléées et des régions intercellulaires; les masses cellulaires présentent les formes les plus irrégulières (en général fusiformes ou triangulaires), le protoplasma qui entoure le noyau est peu abondant, plus ou moins compact et prend énergiquement les substances colorantes ; les régions intercellulaires renferment des granulations pro- toplasmiques isolées ou réunies en groupes, se colorant moins fortement que le protoplasma périnucléaire. Cette distinction en deux régions ne répond pas absolument à la réalité; l'aspect vrai est celui de cellules nues dont la portion périphérique se serait effritée. Dans les stades suivants on voit ces formations protoplasmiques se condenser et devenir des cellules étoilées dont les prolongements se réu- (4) Ces mensurations ne peuvent donner l’âge exact des fœtus, car la lon- gueur de ceux-ci varie notablement à un même âge, suivant les différentes races. SÉANCE DU 29 JUILLET 7197 nissent en général à ceux des cellules voisines. Sur des fœtus de 18 centi- mètres, les cellules sont le plus souvent écartées les unes des autres, comme si elles avaient été dissociées par le dépôt d’une substance fondamentale. Cette substance, qu’un faible grossissement fait apparaitre grenue .ou fibreuse, se colore de la même facon que les cellules, maïs avec une bien moins grande intensilé; un grossissement de 600 diamètres montre qu’elle est constituée en réalité par une grande quantité de fibrilles très fines, droites ou légèrement flexueuses, disposées souvent en paquets. Ces fibrilles partent très nettement du protoplasma péri- nucléaire ; ce dernier étant très peu abondant, il est difficile de voir s’il y a des fibrilles à son intérieur, mais l'observation d’un, grand nombre de coupes me porte à croire que ces fibrilles se sont surtout formées dans les régions périphériques de la cellule, principalement dans ses prolonge- ments anastomotiques. Quand on examine l’épiglotte d’un mouton de 26 centimètres, on remarque immédiatement que le protoplasma a de plus en plus diminué alors que les fibrilles ont augmenté de nombre et qu’une substance fon- damentale (premier dépôt de cartilagéine) est venue s’interposer au milieu des cellules qui paraissent d'autant plus clairsemées. Ces cellules sont réduites à une pelite masse protoplasmatique irrégulière qui entoure un gros noyau sphérique, mais, dans beaucoup de points, le protoplasma a presque complètement disparu et on voit alors que les noyaux sont très déformés, ils sont allongés, rétrécis et semblent en voie de se désagréger; le picro-carmin accentue encore cette différence d'aspect, dans le premier cas les noyaux gardent la coloration rouge du carmin alors que les noyaux déformés prennent Ja coloration jaune de l’acide picrique. Les fibrilles sont plus longues, plus nettement accentuées que précé- demment et s’anastomosent parfois entre elles ; avec les colorants, elles se comportent à peu près comme les fibres élastiques adultes, mais le permanganate de potasse les altère et semble les réduire à l’état de gra- nulations. À un premier examen, elles paraissent jetées sans ordre au milieu de la substance fondamentale; beaucoup, en effet, sont complète- ment isolées au milieu de cette substance, mais ceci tient certainement au hasard des coupes, car il est très facile de voir que le plus grand nombre provient des cellules ; parfois elles apparaissent comme des prolonge- ments protoplasmiques très fins qui se changeraient insensiblement en fibrilles, d’autres fois elles forment des bouquets qui s'échappent du pro- toplasma et vont se perdre dans la substance fondamentale. En plus de ces fibrilles, on trouve un assez grand nombre de fines granulations sphériques qui se comportent avec les colorants de la même facon que les fibrilles ; il est presque toujours facile de voir que ces aspects sont produits par la coupe (réelle ou optique) de fibrilles, mais je ne saurais nier d’une façon absolue l'existence de grains véritables. b.) £piglotte du cheval. — Les quatre âges différents de l’épiglotte 798 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE que j'ai étudiés jusqu'ici chez le cheval (11, 12, 18 e& 28 centimètres) ne font que confirmer ce que je viens de décrire pour l'épiglotte du mouton; je n’y insiste donc pas ici. c.) Ligament cervical du cheval. — Les premiers stades de la forma- tion du tissu élastique dans le ligament cervical montrent une grande res- semblance avec ce que je viens de décrire dans l’épiglotte. Sur un fœtus de cheval, long de 11 centimètres, une coupe longitudinale du ligament cervical ne montre, dans le champ du microscope, qu'une nappe de protoplasma d'aspect fibro-granuleux contenant un grand nombre de noyaux ovoides ordonnés dans le sens de la longueur du ligament; aux environs du noyau, le protoplasma paraît surtout granuleux, mais il se colcre partout avec la même intensité. Chez un fœtus de 12 centimètres, les cellules qui composent le ligament cervical sont beaucoup plus nettement individualisées ; elles se composent d’un gros noyau ovoïde, situé au milieu d’une masse fusiforme de proto- plasma dont le grand axe est dirigé suivant la longueur du ligament; sur toute la périphérie, principalement aux extrémités du fuseau, le pro- : toplasma se change en faisceaux de fibrilles ondulées, dirigées presque toutes dans le sens de la cellule et servant d'union entre les cellules; il est à remarquer que ces fibrilles se colorent beaucoup moins que le pro- toplasma proprement dit. Une coupe transversale du ligament montre des noyaux plus ou moins sphériques, disséminés au milieu d’un semis de fines granulations, mais il est difficile de reconnaitre la partie protoplas- mique qui entoure le noyau. Chez un fœtus de 18 centimètres, les coupes longitudinales, de même que les dissocialions et les coupes transversales, montrent que le liga- ment cervical est formé de nombreux faisceaux parallèles lesquels sont constitués par les mêmes éléments que je viens de décrire. A 28 centi- mètres, la différence porte surtout sur la constitution même de la cellule ; le protoplasma n’est plus représenté que par une mince languette dans laquelle on trouve un noyau qui s’est rétréci de moitié au moins et qui paraît sur le point de disparaitre; tout le reste de la cellule est fibrillaire et on ne voit aucune trace de substance fondamentale. En résumé, dans le ligament cervical, comme dans l'épiglotte, les cel- lules qui composent primitivement ces organes se changent peu à peu en fibrilles, tandis que leur noyau tend à disparaître. Et les auteurs qui écrivent que le cartilage réticulé est primitivement du cartilage hyalin, négligent de parler de ces premiers stades dont l'étude peut être d'un grand secours pour la connaissance des stades ultérieurs. SÉANCE DU 29 JUILLET 799 LA SIGNIFICATION DES CELLULES ÉPITHÉLIALES DE L'ÉPIDIDYME DE Lacerta vivipara, par M. le D' O. VAN DER STRICHT, Assistant à l'Université de Gand, (Travail du laboratoire d'histologie.) On est généralement d'accord pour admettre l'existence d’un épithélium vibratile à l’intérieur des canaux de l’épididyme. Il résulte de nos recher- ches que ce principe n’est pas applicable à tous les vertébrés. Nous avons eu l’occasion d’examiner l’épididyme d'un ZLacerta vivipara pris aux environs de Gand le 7 avril 1892. Le testicule et l’épididyme ont été fixés immédiatement par la liqueur de Hermann, traités ensuile par l'acide pyroligneux et enrobés dans la celloïdine. Les préparations ont élé colorées par la safranine. . En examinant attentivement les coupes de l’épididyme, on trouve deux espèces de canaux. 1° Des canaux élroits peu nombreux, lapissés de cellules cubiques ou cylindriques, à noyau unique. Elles sont munies d'une bordure de cils vibratiles, dont les uns sont courts, les autres très longs. Quelques cel- lules renferment un certain nombre de granulations graisseuses. Dans la lumière du canal on rencontre des spermatczoïdes. 20 Des canaux très épais, à structure toute différente. La membrane propre est tapissée d’une double couche de cellules. a) Immédiatement en contact avec sa surface interne, on trouve une rangée de cellules peu élevées, aplaties, pourvues d’une mince bordure de protoplasma clair et d’un noyau ovalaire, légèrement allongé, à grand axe parallèle à la membrane propre. b) Plus en dedans, on rencontre une rangée de cellules cylindriques, très longues, dépourvues de cils. Chaque cellule possède deux, trois ou quatre noyaux siégeant ordinairement au niveau du point d'union de son tiers inférieur avec ses deux tiers supérieurs. Ils sont donc plus rapprochés de la périphérie que de la lumière. D’autres fois le noyau est unique, plus ou moins arrondi, ou bien il présente deux ou trois lobes de mème gran- deur; et on constate tous les stades intermédiaires entre ces noyaux lobés et les noyaux multiples. De sorte que ces derniers doivent êire envisagés comme le résultat d’une division directe du noyau mère. Nulle part, on ne rencontre une trace de figure mitosique. Le protoplasma cellulaire est relativement compact et présente à cer- tains endroits, surtout du côté de la périphérie, un fin strié, perpendi- culaire à la membrane propre. Dans la zone comprise entre le noyau et la lumière du canal, on rencontre un très grand nombre de boules, arrondies, rarement irrégulières, très safranophiles et de volume très 8300 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE variable. Elles sont entourées d’une bordure claire, correspondant à un liquide hyalin, renfermant parfois un amas compact, semi-lunaire, adossé à la boule. Plusieurs de’ ces granulations et de ces boules safranophiles sont éliminées et entrent dans la lumière du canal. Coupe transversale d’un canal efférent de l'épididyme de Lacerta vivipara. in, membrane propre; c, cellules basales; », noyaux multiples des cellules épithé- liales; b, boules safranophiles; v, vésicules hyalines; s, contenu de la lumière du canal. : Du côté de la lumière, il n'existe point de bordure de cils. La limite cellulaire y est très irrégulière, ordinairement bosselée. On y trouve des vésicules claires, byalines, qui à un moment donné se rompent et sont déversées dans la lumière du canal. Au centre du tube, on rencontre un amas compact de spermatozoïdes au milieu d’un liquide, teaant en suspension un nombre considérable de boules safranophiles, éliminées par les cellules épithéliales. Il ressort de ces données, qu’il faut attribuer aux cellules des canaux efférents de l’épididyme de Lacerta vivipara une signification physiolo- gique spéciale. Llles évacuent manifestement des boules safranophiles entourées souvent d’un liquide clair, ainsi qu’une substance hyaline, parsemée parfois de quelques granulations protoplasmiques. Cette subs- tance apparait à la surface cellulaire libre sous forme de vésicules qui SÉANCE DU 29 JUILLET SOL éelatent et coulent à l’intérieur du canal. Cette sécrétion et cette élimina- tion du produit élaboré s’accompagnent d’une division directe du noyau cellulaire. Nous n'avons pas cherché à connaître la nature chimique des boules safranophiles et du liquide clair sécrété. Nous devons cependant nous demander quel est le but de cette sécrétion. Dans un travail fort remar- quable sur la spermatogenèse chez les mammifères, V. von Ebner (1) a mis en lumière l'existence de granulations tingibles et de granulations graisseuses dans les canalicules séminifères du testicule. Dans le lesticule de Lacerta ces granulations sont très rares. Les cellules tapissant les ca- naux de l’épididyme fournissent ici les matériaux nutritifs nécessaires aux spermatozoïdes pendant leur séjour et leur passage à travers cet organe. Dans le testicule d’un Anguis fragilis, sacrifié le 25 mai 1892, les gra- nulations graisseuses sont très nombreuses à l’intérieur des canalicules séminifères. On les retrouve encore entre les spermatozoïdes contenus dans les canaux efférents, dont les cellules, dépourvues également de cils vibratiles, ne renferment point de granulations safranophiles. Avant de terminer, rappelons encore que J. Schaffer (2) décrit la pré- sence d’alvéoles glandulaires isolées à l’intérieur des canaux efférents chez l’homme. Chez le Lacerta vivipara, chaque cellule tapissant les canaux efférents est de nature glandulaire, et les cellules à cils vibratils font défaut. SUR CERTAINS FAITS DE DÉGÉNÉRESCENCE CELLULAIRE, par M. P. THÉLOHAN, (Travail du laboratoire de M. le professeur Le Dentu à l'hôpital Necker.) J'ai eu l’occasion, au laboratoire de M. le professeur Le Dentu, d’obser- ver dans un carcinome de la parotide toute une série de dégénérescences cellulaires qu’il me semble intéressant de signaler. La plus largement représentée de ces altérations se rapportait à la dégénérescence hyaline. Les coupes de la tumeur en question présen- taient un aspect spécial et tout à fait insolite dû à la présence dans les alvéoles, au milieu des cellules épithéliales, de formations particulières : celles-ci, plus ou moins régulièrement arrondies, présentaient des couches concentriques très nettes et alteignaient de très grandes dimensions rela- (1) V. von Ebner. Zur Spermatagenese bei den Saugethieren, Arch. f. mikr. Anat., Bd XXXI, 1888, p. 236. . (2) J. Schaffer. Ueber Drüsen im Epithel der Vasa efferentia Testis beim Menschen, Anatom. Anzeiger, t. VII, 1892, p. 711. 802 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tivement à la laille des alvéoles (V. fig. M, »); elles avaient un aspect vitreux, souvent craquelé. C’étaient de véritables blocs de substance hyaline; leur partie centrale présentait le plus souvent les réactions de la substance amyloïde : il s'agissait donc ici d’une combinaison des deux dégénérescences byaline et amyloïde, combinaison qui a été d’ailleurs maintes fois constatée (1). Explication de la figure (2). Carcinome dé la parotide accessoire. — Coupe d'une des alvéoles. t, travées conjonctives séparant les alvéoles; n, noyaux des cellules conjonctives; c, cellules du carcinome; M, masse stratifiée formée de cellules en dégénérescence hyaline ; m, masses irrégulières de même nature. Les couches concentriques de ces masses sont plus ou moins régulière- ment distribuées, leur partie centrale fixe en général assez fortement les couleurs d’aniline : çà et là quelques points, après l'usage de ces réactifs, présentent aussi une coloration plus vive. Après quelques lâtonnements, j'ai pu, je crois, me rendre un compte exact de leur origine : elles sont produites par la dégénéresrence des cellules épithéliales qui deviennent vibreuses, s’accolent les unes aux autres et finissent par ne plus former qu'un bloc informe; les couches concentriques sont dues à l’adjonction à (4) Ziegler. Traité d'analomie pathologique, trad. francaise, t. I, p. 164. Wild. Beitrage zur Kenntniss der amyloiden und der hyalinen Degeneration des Bindegewebes. Beilräge zur pathol. Anat. und Physiol., Bd I, 1886. (2) Cette figure a déjà paru dans les Études de clinique chirurgicale de M. le professeur Le Dentu (Masson, 1892). Mon excellent maitre ayant bien voulu m'autoriser à la reproduire ici, je le prie d'agréer mes respectueux remer- ciement(s. SÉANCE DU 29 JUILLET 803 celui-ci de nouveiles cellules produites par la paroi de l’alvéole et frappées à leur tour du même processus dégénératif. Dans ces cellules, le noyau reste assez longtemps reconnaissable et j'ai pu retrouver de ces éléments encore tres nettement caractérisés dans des parties des blocs hyalins voisines de leur centre. Toutefois ces noyaux présentent d’assez bonne heure certaines altérations : leur aspect devient plus homogène, ils se colorent d’une façon plus diffuse, la chromatine ne se présente plus sous forme d'éléments figurés mais semble dissoute dans le sue nucléaire. Bientôt ils sont réduits à l’état de petites masses réfringentes, se colorant vivement et uniformément par les couleurs d’aniline; puis ils se fragmen- tent, subissent une sorte de chromatolyse et leurs débris constituent au sein de la substance hyaline de petits amas de granules vivement colorés et groupés d’une façon très variable. Le tissu conjonctif de la tumeur était en beaucoup de points affecté de la même dégénérescence. De plus les cellules de ce tissu présentaient souvent une altération par- ticulière consistant dans l'apparition au sein du protoplasma de granules réfringents, de couleur jaune, qui, par leur multiplication, finissent par envahir toute la cellule et la transforment en un amas granuleux, réfrin- gent. Parmi les cellules épithéliales, en dehors de celles frappées de dégéné- rescence hyaline, un très grand nombre étaient le siège de phénomènes anormaux. La description détaillée de ceux-ei m'entrainerait au delà des limites de cette Note et l'absence de figures rendrait forcément cet exposé fastidieux et peu clair : je le réserve donc pour un travail plus étendu. Je mentionnerai seulement ici la fréquence de la chromatolyse, de la dégénérescence muqueuse, la présence dans certaines cellules d'’altéra- tions analogues à celle que je viens de signaler dans les cellules conjone- lives. À propos de ces dégénérescences dans des cellules de tissus néopla- siques, je signalerai certains faits du même ordre que j'ai constatés dans des organes chez certains animaux. Au cours de mes recherches sur les Sporozoaires parasites des Poissons au laboratoire de M. le professeur Balbiani, j'ai en effet observé chez des individus normaux et en l’absence de parasites des dégénérescences cellulaires survenues sans cause appré- ciable et tout à fait comparables à celles que j'ai signalées plus haut. Ne pouvant entrer ici dans le détail de ces faits, je mentionnerai parti- culièrement une dégénérescence que j'ai observée dans les cellules con- Jonctives du rein chez le Ælennius pholis et qui me semble identique à celte altération des cellules conjonctives caractérisée par l'apparition dans le plasma de globules jaunes réfringents que j'ai rencontrée dans la tumeur dont J'ai parlé au début de cette Note. Je ne fais ici que signaler ces faits, me réservant d’y revenir avec plus 28. 804 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de détails dans un travail plus complet où je pourrai insister sur les con- clusions à tirer de leur rapprochement au point de vue de l'étude encore si peu avancée des altérations cellulaires. PRÉSENCE ET RÔLE DE L'ÉMULSINE DANS QUELQUES CHAMPIGNONS PARASITES DES ARBRES OU VIVANT SUR LE BOIS, par M. Eu. BouRQuELor. Malgré d'assez nombreuses recherches, nos connaissances sur les agents à l’aide desquels les champignons parasites tirent leur nourriture des arbres sur lesquels ils vivent, et en déterminent la mort et la destruction sont encore peu avancées. En réalité nous n’avons sur cette question que des hypothèses. Parmi ces hypothèses, il en est deux surtout qui se partagent l’opinion. D'après l’une, le champignon sécréterait un acide capable de dissoudre la substance du bois ou tout au moins de la désagréger; d’après l’autre, il produirait des ferments solubles ayant pour fonction de transformer cette même substance en composés assimilables. Ce qui a donné nais- sance à la première, c'est l’existence, à certains moments, sur le mycélium des champignons lignicoles d’une sorte d’exsudation acide; quant à la seconde, elle a été formulée par analogie avec ce qui se passe dans la digestion animale et aussi en se basant sur l'apparence que présentent les tissus envahis par ce mycélium. Malheureusement, on n’a pu jusqu'ici reproduire dans les laboratoires et en dehors du champignon vivant les phénomènes de dissolution et de digestion que supposent ces deux hypothèses, en sorte que la preuve expérimentale reste toujours à faire. Les aliments que peut utiliser un champignon qui se développe sur un arbre vivant appartenant à des groupes divers, il m’a semblé que, pour être résolu, le problème devait être décomposé et qu'au lieu d’expéri- menter sur la totalité de ces aliments il était préférable d’étudier tour à tour l’action du cryptogame sur chacun d’entr'eux. Je me suis occupé tout d’abord des glucosides, et j'ai cherché si les champignons parasites d'arbres ou vivant sur du bois mort sécrètent réellement un ferment soluble capable de les hydrolyser, c’est-à-dire d’en séparer un glucose assimilable. Pour séparer ce ferment hypothétique, j'ai eu recours à deux procédés qui m'ont également réussi. Dans l’un, le champignon frais récemment récollé était placé dans une atmosphère d’éther ou de chloroforme, ce qui amène, comme on sait, une exsudation abondante de liquide. Ce liquide était mis directement en contact pendant vingt-quatre à SÉANCE DU 29 JUILLET 805 trente-six heures à la température ordinaire avec une solution de gluco- side, ou bien il servait à préparer, par précipitation à l’aide de l'alcool, un produit dont on faisait une dissolution aqueuse pouvant être utilisée comme le liquide lui-même. Dans le second, le champignon était trituré avec du sable et transformé en une pâte que l’on délayuit dans l’eau distillée. On jetait sur un filtre et le liquide tiltré était employé comme dans le premier procédé. Je n’ai essayé l’action de ces liquides que sur deux glucosides : l'amyg- daline et la coniférine, et même je n'ai fait que deux essais avec cette dernière substance, les résultats ayant été les mêmes que ceux que j'avais obtenus avec l’amygdaline. Pour chaque essai je faisais agir sur 0 gr. 20 de glucoside une quantité de liquide correspondant à quelques grammes de champignon frais. Dans une première série d'expériences, mes recherches ont porté sur les champignons suivants : Auricularia sambucina Martius, espèce qui se développe surtout sur le sureau vivant. — Amygdaline dédoublée : 24 p. 100; coniférine dé- doublée : presque 100 p. 100. Polyporus sulfureus Bull., espèce qui se développe sur les blessures de divers arbres : chêne, frêne, robinier, cerisier. — En faisant agir direc- tement le liquide exosmosé à l’aide de la vapeur de chloroforme, j'ai obtenu le dédoublement de 47. 1 p.100 de l’amygdaline traitée. Avec le fer- ment précipité de ce liquide à l’aide l'alcool, j'ai obtenu dans le même temps un dédoublement de 45. 7 p. 100. La coniférine a été également dédoublée. Pholiota ægerita Fr. espèce qui pousse surtout sur les peupliers. Amyg- daline dédoublée : 19. 4 p. 400. Collybia fusipes Bull., espèce qui se développe en touffes à la base des troncs d'arbres. Amygdaline dédoublée : 47. 5 p. 100. C'ollybia radicata Relh., espèce dont le stipe se prolonge profondément dans la terre et paraît s'implanter sur les racines des arbres. Amygdaline dédoublée : 28,1 p. 100. Pholiota mutabilis Schaeff., espèce qui se développe sur les souches. Amygdaline dédoublée : 14. 3 p. 100. Claudopus variabilis Pers., champignon poussant sur les trones morts des arbres tombés. Amygdaline dédoublée : 20. 4 p. 100. On voit que toutes ces espèces produisent un ferment analogue à l’émul- sine. J'ai étudié également, par comparaison, trois espèces terrestres : Lac- tarius vellereus Fr., Russula cyanoxantha Schaeff. et delica Fr. Aucune d'elles n’a déterminé de dédoublement de l’amygdaline. Même après un contact de quarante-huit heures, l'odeur d'essence d'amande amère, si caractéristique, n’a pu être perçue. Il est facile maintenant de se rendre compte du rôle de l’émulsine chez 806 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE les champignons qui vivent sur les arbres. Elle leur sert à dédoubler les glucosides que ces arbres peuvent produire et qui sont le plus souvent ou dans l'écorce ou dans le cambium. C'est ainsi que sur les peupliers et les saules, si souvent envahis parles polypores, les champignons peuvent tirer parti de la populine et de la salicine ; que sur les pommiers ils peu- vent utiliser la phlorizine, etenfin que sur les pins et les sapins ils peuvent assimiler le glucose de la coniférine qui se trouve dans le cambium. PRÉCIPITATIONS DES COULEURS D ANILINE DANS CERTAINES CONDITIONS DE RÉACTIONS HISTO-CHIMIQUES ; POSSIBILITÉ DE CAUSES D'ERREUR, par M. J. HenRorAy (d'Anvers). Note présentée par M. A. CHARRIN. Différents auteurs, parmi eux Ehrlich, ont signalé certains phéno- mènes capables d’entrainer de fausses interprétations dans les examens bactériologiques. J'ai observé quelques accidents de cet ordre qui méritent peut-être d’é‘e indiqués. On dépose sur un porte-objet une goutte de solution phéniquée à 5 p. 4100. A l’aide du fil de platine terminé en œillet, on ajoute une faible quantité de solution alcoolique concentrée d’une couleur d’aniline (fuchsine, violet de gentiane, bleu de méthylène, etc,). On mélange les deux liquides au moyen de ce fil de platine ; on recouvre avec une lamelle. La préparation ainsi examinée, aussitôt que possible, montre alors une infinité de petits corpuscules colorés, sphériques, réquliers, doués de mouvements propres assez étendus. Ges corps ont presque tous le même volume au centre de la préparation. Maïs, sur les bords, surtout dès que cetle préparation commence à se dessécher, on a les divers inter- médiaires, des plus fins corpuscules aux plus grosses précipitations de la couleur employée. L'aspect présente uue telle analogie avec celui d'une réunion de cocci mobiles que plus d’un observateur pourrait hésiter. J'ai observé la première fois le phénomène en additionnant une goutte de solution alcoolique de fuchsine d’une goutte d'urine que j'examinais dix minutes après son émission. Cette urine n'’offrait d’autres particu- larités que de contenir des cellules de la muqueuse vésicale sans globules blancs et d’être riche en urates. C’est surtout ab absurdo que j’ai éliminé la nature bactérienne des myriades de petits corpuscules mobiles qui remplissaient le champ du microscope. J'ai été amené à examiner mes matières colorantes, — Je me suis SÉANCE DU 29 JUILLET 807 aperçu que la fuchsine phéniquée de Ziehl étendue d’eau stérilisée (en vue d'augmenter la transparence) donne le phénomène décrit ci-dessus. Ehrlich a déjà fait connaître les précipitations sphériques des couleurs d’aniline en présence des liquides à réaction alcaline. Je ne sache pas qu’il ait parlé de la mobilité des précipitations que j'ai obtenues d’ail- leurs dans un milieu acide. J'ai répété en quelque sorte l'expérience en recouvrant d'une lamelle une goutte de solution phéniquée à 5 p. 100 mise sur un porte-objet, et en déposant une goutte de colorant alcoolique sur les bords de la lamelle. Quand la préparation commence à se dessécher, on voit encore très net- tement par places des corpuscules mobiles entre les précipitations déjà fixées. Outre le mouvement de translation dû au courant de dessiccation, on observe parfaitement les mouvements propres (probablement mouve- ments browniens) de ces corpuscules. Il est désirable que la quantité de liquide soit suffisante pour que la lamelle soit légèrement mobile sur le porte-objet. La couleur qui reproduit particulièrement bien ce phéno- mène est la fuchsine. L’immersion homogène n’est pas nécessaire pour obteuir le processus. Un système à sec, donnant en moyenne D 400, est même préférable ; celte immersion, en effet, rend quelquefois la mise au point difficile, en produisant le soulèvement du couvre-objet. SUR UN MICROCOQUE ANAÉROBIE TROUVÉ DANS DES SUPPURATIONS FÉTIDES, par M. A. VEILLON. Note présentée par M. A. CHARRIN. Il n’est pas rare de trouver, chez l’homme, certains abcès dont le pus contient de nombreux microbes, colorables et nettement visibles au microscope, ce pus néanmoins restant stérile lorsqu'on le soumet à l'épreuve de ia culture. On explique généralement ce fait en disant que les microbes de ces abcès sont morts sous l'influence de l'épuisement, de la phagocytose ou de l’action bactéricide du sérum du pus. Cependant on peut encore supposer que certains agents du pus ne se développent pas parce que les milieux de culture employés ne leur con- viennent pas, ou parce qu'ils ne sont pas ensemencés dans les conditions voulues. Je viens d'observer, dans le service de M. P. Bouchard, suppléé par M. Charrin, une malade, atteinte d'une bartholinite suppurée, dont le pus, très fétide, a été recueilli purement et soumis à l'examen bactério- logique. 808 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les préparations colorées, faites avec ce liquide, contenaient en grande quantité un microcoque ayant à peu près la grosseur du streptococcus pyogenes. Ce microbe se présentait soit à l'état de cellules rondes isolées, soit sous forme de courtes chaïnettes, de quatre à cinq grains au plus, ou bien enfin en diplocoques. A un très fort grossissement (Ob)j. immersion 1/12 de Leitz, ocul. 5), on s’apercevait que la plupart de ces cocei n'étaient pas ronds, mais le plus souvent ovoïdes. Quelques-uns formaient des bacillesextrèmement courts, dont une extrémité était renflée; fréquemment ils étaient unis deux par deux par leur petite extrémité. D'ailleurs leur grosseur n’était pas uniforme, certains éléments étant plus fins que d’autres, et cependant on trouvait tous les intermédiaires entre les plus fins et les plus gros. Ce microcoque prend facilement les couleurs d’aniline et se colore par la méthode de Gram. Ce pus a été semé à la surface de gélose inclinée et sur gélatine; tous ces milieux sont restés stériles. Au contraire les ensemencements faits dans la gélose sucrée et dans des conditions d'anaérobiose rigoureuse, ont permis d'obtenir des cultures pures de l'organisme qu'on voyait dans le pus. | Les colonies se développent, dans l'épaisseur de la gélose, sous forme de petites colonies, rondes, d’un blanc grisâtre; le plus souvent il n’y a pas production de bulles gazeuses. Ce microcoque se développe dans le bouillon qui est troublé uniformément. Toutes les cultures répandent une odeur fétide, rappelant celle du sang putréfié ou de la dent cariée. En culture la morphologie de ce microcoque est la même que celle que J'ai décrite dans le pus. Par l'inoculation sous-cutanée de cultures pures, on obtient chez la souris, et surtout chez le cobaye, la production d’un abcès chaud, dans le pus duquel, on retrouve ce même microcoque avec toutes ses pro- priétés. Ainsi le pus fétide de cette bartholinite contenait à l’état de pureté un microcoque pyogène, fétide et rigoureusement anaérobie. Si on n’avait pas employé les méthodes qui permettent de cultiver à l'abri de l’air, on aurait pu croire que les microbes contenus dans ce pus étaient morts. Antérieurement j'avais déjà trouvé ce même microcoque dans trois cas (angine Ludwig mortelle, phlegmon périnéphrétique et bartholinite), mais il était associé au streptocoque pyogène. Dans tous ces cas, le pus était fétide. Ce micrococcus fetidus est peut-être le même que celui que Rosen- bach (1) avait trouvé dans une dent cariée; malheureusement les carac- (1) Rosenbach. Mikroorganismen bei der Wand-infectionskrankheiten. Wies- baden, 1884. SÉANCE DU 29 JUILLET 809 tères que cet auteur donne sont insuffisants pour permettre de l'identifier avec celui que je déeris. En résumé il existe dans certaines suppurations fétides un microcoque soit seul, soit associé à d’autres bactéries; ce microcoque, rigoureusement anaérobie, doit être distingué des autres microbes pyogènes. Seul, ou associé aux microbes habituels de la suppuration, il est capable de faire du pus, et c’est lui qui cause la fétidité de ce pus. Grâce à ses propriétés de microbe anaérobie, il a dû échapper souvent à l’observateur. Du CHOLÉRA VIRULENT ET DE LA GENÈSE DES ÉPIDÉMIES, par M. N. GAMALEïA. I. — Il y a cinq ans, dans un mémoire présenté à l’Académie des sciences (20 août 1888), nous avons décrit une virulence jusqu'alors inconnue du vibrion cholérique. Dans nos cultures le vibrion était devenu capable d’infecter les différents animaux d'expérience et de se multiplier considérablement dans leur corps, en envahissant le sang et tous Îles autres tissus et en produisant une septicémie mortelle. Il était si abondant dans le sang des animaux infectés, qu’une goutte de ce sang inoculée aux animaux sains, suffisait pour reproduire chez eux la même maladie. Nous avions obtenu ainsi une septicémie cholérique, indéfiniment réinoculable. Nous sommes très heureux de pouvoir affirmer aujourd’hui que tous les faits que nous avions annoncés se trouvent à l'heure qu'il est démontrés. Il est vrai que d'abord, en voulant reproduire les résultats obtenus, à Odessa, avec d’autres cultures trouvées ici à Paris, nous n’avions pas réussi. Mais, nous n’entrerons pas dans les détails peu intéressants en somme de ces résultats négatifs et de leurs causes multiples. Nous tenons surtout à exposer ici les recherches qui permirent à nos résultats de 1888 de ne pas rester isolés dans la science. Il. — Cest l’épidémie actuelle de choléra qui avait mis dans les mains de plusieurs expérimentateurs des cultures qui avaient tous les caractères que nous avions décrits pour le vibrion cholérique exalté. Ce fut d’abord M. le D' Vlaeff, de Saint-Pétersbourg, qui travaillant sous notre direction a isolé des selles d’une malade cholérique le vibrion pro- duisant une septicémie réinoculable chez les pigeons (voir Vratch, 1893, n° 17). Dans une thèse consacrée spécialement à celte question, il a étudié en détail les particularités de ce vibrion. Bientôt après, M. le professeur Vincenzi (de Sassari) a décrit une cul- 810 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ture de choléra obtenue du professeur Weichselbaum de Vienne. Au moyen de cette culture M. Vincenzi a produit la septicémie réinoculable chez le cobaye. M. Vincenzi indique explicitement que ses expériences confir- ment les faits que J'avais annoncés en 1888 (voir Deutch med. Woch., 1893, n° 14 et Arch. per le Scienze med., t. XNIX, n° 71). Enfin, M. le D' Sawtschenko, travaillant au laboratoire du professeur Padwyssotzky, à Kieff, a décrit une culture des vibrions qu’il avait isolée lors de l’épidémie de 1892, à Kieff. Cette culture produit une septicémie réinoculable chez les cobayes et les pigeons (Vratch, 1823, n° 21). Toutes ces publications venant de différents côtés aboutissent au même résultat, qu'il existe en réalité dans la nature des vibrions cholériques pathogènes avec les propriétés que nous leur avons attribuées. Mais comment doit-on considérer ces vibrions pathogènes? Sont-ce des : espèces différentes du vibrion ordinaire de Koch ou bien des races qui en proviennent et lui donnent à leur tour naissance? En d’autres termes, pourrait-on obtenir artificiellement un vibrion septicémique en partant d’un vibrion banal du choléra? Nos recherches nous permettent de donner une réponse affirmative à cette dernière question, car nous avons trouvé une méthode nouvelle pour exalter la virulence des vibrions. IT. — Déjà notre culture virulente de 1888 était une culture artificiei- lement exaltée. Mais, d'après une expérience unique, nous n’avons pas pu saisir le déterminisme de cette exaltation de la virulence et nous l’avions attribuée au passage à travers les animaux. Plus tard, nous nous sommes assuré que les passages ne constituent pas un facteur puissant pour l’exaltation de la virulence des microbes (voir Société de Biologie, 30 nov. 1889). Depuis, nous avons encore une fois observé cette exalta- tion spontanée du vibrion cholérique dans une vieille culture, abandonnée à elle-même. À quoi était-elle due cette exaltation spontanée de la viru- lence? Question d'autant plus difficile à résoudre que la règle générale établie par M. Pasteur, veut que les micrcbes pathogènes s'atténuent au contraire dans les cultures anciennes. Je ne relaterai pas ici les nom- breuses expériences faites au courant de cinq années pour réaliser les conditions de cette exaltation spontanée. Je suis enfin arrivé à voir dans cette exaltation le résultat d’une sélection s’opérant parmi les vibrions cholériques grâce à la concentration du milieu nourricier. Des recherches spéciales m'ont montré que cette concentration opérant la sélection des vibrions pathogènes, n’était due ni aux substances nutritives albumi- noïdes ou hydrocarbonées, ni aux produits régressifs de la métamorphose vitale. La virulence s’exaltait grâce à la concentration dans la teneur des substances minérales et plus particulièrement du chlorure de sodium. En faisant pousser le vibrion cholérique de différente provenance dans les riilieux de culture contenant 3, 4, 5 p. 100 de chlorure de sodium, nous avons vu sa virulence s'exalter manifestement et rapidement. De cette SÉANCE DU 29 JUILLET S1L manière, nous avons réussi à préparer plusieurs races différentes des vibrions cholériques qui produisent Loutes la septicémie réinoculable chez les animaux, mais qui diffèrent entre elles suivant leur origine par cer- lains caractères morphologiques et physiologiques. Nous en citerons quelques exemples. Notre race M provient du choléra de Massaua. Comme celui-ci, elle liquéfie rapidement la gélatine et se compose des vibrions quasi droits. Elle donne la septicémie au pigeon et au cobaye, mais c’est surlout pour celui-ci qu'elle est exltraordinairement pathogène. La race P provient d'une culture du choléra isolée à Saint-Pétersbourg, par M. le D' Popoff. Elle est plus pathogène pour le pigeon que la précé- dente et moins pathogène pour le cobaye. En outre, elle est caractérisée par sa liquéfaction quasi nulle de la gélatine. Notre race K provient du choléra cultivé par M. Koch, en Égypte. Elle ne s’en distingue pas morphologiquement, mais elle donne la seplicémie aux cobayes et aux pigeons. Nous citerons encore la race V qui a été isolée par M. Wlael, et dont nous avons déjà parlé. Elle est caractérisée par sa virulence extraordi- naire pour les pigeons et par sa virulence comparativement faible pour les cobayes. Ces exemples suffisent pour prouver qu'on réussit à exaller la viru- lence du vibrion cholérique au point de le rendre apte à produire la sep- ticémie réinoculable telle que je l’avais décrite en 1888. IV. — Avant de terminer celle communication, nous devons dire deux mots de l’épidémiologie du choléra. Ne pourra-t-elle être expliquée au moyen des fails que nous venons de relater ? Gelte exaltation se produisant sous l'influence des substances minérales devenant plus concentrées, ne présente-t-elle pas une grande analogie avec une maladie qui devient envahissante et épidémique. Et c'est peut-être plus qu'une analogie. On ne connait jusqu'ici que très peu au sujet des grandes causes qui influencent l'apparition et la propagalion des maladies épidémiques. Expérimenta- lement, on en avait surtout étudié une — c’est l'exaltation des microbes pathogènes au moyen de leur passage à travers les animaux infectés (1). Mais ce principe très fécond dans les laboratoires ne comportait qu'une application très restreinte dans les choses de la médecine humaine et de l’épidémiologie. Tout laissait prévoir que pour celles-ci doit exister dans la nature une influence tout autrement puissante que le passage à travers les animaux. En revenant au choléra, voilà ce que son épidémiologie nous apprend. L'apparition du choléra épidémique aux [Indes comme en (1) Ajoutons que les passages sur les animaux se font par l'inoculation intramusculaire du sang, et que les pigeons de Paris m'ont paru plus résis- tants au choléra que ceux de Pétersbourg. 812 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Europe est partout mystérieusement liée au desséchement d’un so! humide. La mortalité par le choléra augmente quand baisse le niveau de l’eau souterraine. Ce fait, trouvé empiriquement, restait jusqu'ici inex- plicable poar les bactériologistes. Il ne fait pourtant que traduire en d’autres termes le même facteur que nous venons d'établir expérimenta- lement : la concentration du milieu nutritif opérant l’exaltalion du mi- crobe cholérigène. Nous n'insisterons pas sur d’autres faits encore qu’on pourrait expliquer au moyen de nos recherches (le berceau indien du choléra, l'épidémie de Hambourg, l'infectiosité deslinges contaminés, etc.). Nous répéterons en terminant que nous sommes heureux de pouvoir non seulement confirmer sur tous les points nos résultats d'il y a cinq ans, mais de les appuyer encore par un nouveau principe d'exaltation de la virulence. LÉSIONS DES CAPSULES SURRÉNALES DANS L'INFECTION; — LE FOIE CHEZ LE COBAYE PYOCYANIQUE, par MM. LanGLois et CHARRIN. Le plus souvent, en dehors de conditions spéciales, on néglige d’exa- miner les capsules surrénales au eours des recherches bactériologiques poursuivies sur l’animai. Parfois, on indique leur aspect, en se bornant, en général, aux apparences macroscopiques. Cette indifférence, assurément blämable, trouve, ou, plutôt, trouvait peut-être son excuse dans notre ignorance à l’endroit de la physiologie de ces organes. Toutefois, les récentes découvertes d’Abelous et Langlois, en harmonie, pour une part, avec l’opinion jadis émise par Brown-Séquard, obligent en quelque sorte à combler désormais cette lacune. — Ces viscères jouent un rôle dans la chimie, dans la composition des humeurs de l’économie. Dès lors, tonte perturbation, touchant de près ou de loin à l'infection, pourra les intéresser. . On s’occupe du foie, dans les affections microbiennes, parce que, ses autres propriétés mises à part, il amoindrit l'effet des toxines; on songe au rein, parce que c'est là, pour le moins, une voie d'élimination, de même que l'intestin, de même que la peau, de même que le poumon, pour les principes volaliles, etc. Dorénavant, des motifs analogues con- duiront à placer les capsules surrénales sur le même rang. — Les résul- tats obtenus justifient cette proposition. Quand on pratique l’autopsie d’un cobaye qui vient de succomber à une infection pyocyanique aiguë, on remarque que ces organes offrent, l’un et l’autre, un volume légèrement augmenté. — Mais, ce qui frappe SÉANCE DU 29 JUILLET 813 davantage, c’est la teinte un peu foncée de la surface; c’est, principale- ment, la facon nette dont sont dessinés les capillaires qui rampent sur cette surface ; ils sont remplis ; la congestion est manifeste. Si on sectionne suivant le grand diamètre, on note que les pigments normaux sont accentués. De plus, si on sème le suc sur agar, habituellement, on voit apparaître la pyocyanine; donc le bacille est présent. Les coupes, après durcisse- ment, révèlent des altérations qui ne sont pas sans intérêt. — La zone centrale est gorgée de sang; les vaisseaux sont dilatés ; quelquefois on décèle de véritables hémorragies. — En outre, les tubes, dans la partie qui touche à cette zone centrale, ont un diamètre élargi; les cellules contiennent des granulations teintées plus ou moins nombreuses. A l’état sain, ces cellules, au milieu du tissu, sont privées de pigments. Dans ces conditions pathologiques, cette substance tend à se montrer. Comme au fond l'infection est une intoxication, comme ces lésions se révèlent, soit lorsqu'on inocule le bacille, soit quand on injecte ses pro- duits solubles, dont une fraction se rapproche vraisemblablement des amines, on ne peut s’empêcher de comparer ces modifications à celles qu'a décrites Pilliet dans des capsules surrénales de chiens tués par la toluylène-diamine, d'autant plus que, dans les deux cas, il s’agit de poisons hématiques. Chez les chiens, on découvre des changements identiques ; la différence réside dans l'intensité du processus beaucoup plus accentué chez ces carnivores ; mais, cette distinction tient peut-être aux variations dans les quantités administrées. Quoi qu'il en soit, nous signalons ces lésions, d'autant plus qne des expériences, que nous publierons prochainement, ont établi qu'il conve- nait, pour d’autres raisons, de tenir compte du rôle de ces viscères dans l’évolution des maladies microbiennes. Ajoutons que, chez ces cobayes, nous avons rencontré des foies très altérés à cellules dégénérées ; les reins étaient beaucoup moins touchés. L’inverse a lieu, ordinairement, chez le lapin. Les lésions hépatiques retentissent-elles, chez le premier animal, sur le tissu rénal? Les modifications de la glande urinaire, chez le second, agissent-elles sur la cellule biliaire? Ou bien, les unes et les autres dépendent-elles d’une cause commune influencant à divers degrés tel ou tel appareil suivant les espèces? — Ces diverses hypothèses sont toutes possibles. On sait, en effet, que le rein malade provoque des changements dans le foie, et réciproquement. — L'un de nous, en introduisant des ca- davres bactériens dans le cholédoque, a déterminé des hépatites intenses ; or, chez ces sujets, les reins n'étaient pas indemnes… Toutefois, c'est là, pour le moment, une question accessoire. Le point important de notre communication réside dans la démonsiration des lésions des capsules surrénales au cours de l'infection. 814 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE RATE ET PANCRÉAS, par M. A. HERZEN. La note communiquée par MM. Carvallo et Pachon, dans la séance du 17 juin, de la Société de Biologie, m'oblige à revenir brièvement sur cette question. Nous ne prétendons pas, M. Schiff et moi, que les extraits des glandes digestives (estomac et pancréas), prises chez un animal à jeun, n’ont « aucune action sur les aliments, sur la fibrine en particulier », — ni sous une autre forme que ces extraits « ne sont actifs que si les glandes ont été prises sur un animal en pleine digestion ». Get énoncé ne corres- pond ni aux faits ni à notre manière de voir ; les choses sont loin d’être aussi simples ; d’abord il s’agit de différences relatives dans le pouvoir digérant des infusions qu’on compare ; ensuite, la comparaison peut être faite à deux points de vue : au point de vue de la rapidité initiale de la digestion, et à celui de la quantité totale que les infusions totales sont capables de digérer ; enfin, il est essentiel de distinguer entre les pro- priétés digérantes des sucs fournis par les glandes vivantes et celles des extraits de ces glandes. Toutes choses dont MM. C. et P. n’ont tenu aucun compte, pas plus que des conditions expérimentales dans lesquelles il est indispensable de se placer pour obtenir des résultats de quelque valeur. Généralement, quelques heures après la digestion d’un repas très copieux et composé d'aliments très résistants, les sucs gastrique et pancréa- tique ne digèrent pas l’albumine, et ne digèrent même souvent que fort peu ou point de fibrine ; mais les extraits d'estomac et de pancréas digè- rent toujours, même dans ces conditions, dans lesquelles, il est vrai, ils digèrent lentement et peu. Si, au contraire, on néglige de faire précéder l'expérience d’un tel « repas préparatoire », les infusions stomacale et pancréatique provenant d'animaux à jeun digèrent beaucoup plus que celles qui proviennent d'animaux dans une phase avancée de la digestion, bien qu'au début elles le fassent lentement (1). Il est bien clair que le repas préparatoire force l'estomac et le pancréas à dépenser la plus grande partie de leur provision de proferments, tandis que chez un animal simplement à jeun les proferments sont accumulés en grande quantité ; cetle qnantité augmente, dans de certaines limites, avec la durée du jeûne ; MM. C. et P. en prolongeant inutilement et énor- mément le jeûne de leurs animaux (5 jours!) se sont placés dans les meilleures conditions pour avoir des estomacs et des pancréas chargés (1) L'importance capitale du « repas préparatoire » est exposée dans mon volume sur La Digestion stomacale, Paris et Lausanne, 1886. SÉANCE DU 29 JUILLET 815 au maximum de leurs proferments ; quoi d'étonnant que leurs extraits aient digéré ? Mais la différence importante dans la question qu'ils ont soulevée se rapporte à la rapidité avec laquelle les infusions digèrent au début de leur séjour à l’étuve; de cette différence-là, ils n’en parlent même pas. Or, voici en quoi elle consiste : Les infusions provenant d’animaux en pleine digestion commencent immédiatement à digérer, digèrent rapidement au début, et puis de plus en plus lentement ; les infusions provenant d'animaux jeünant ne com- mencent à digérer que tardivement, digèrent lentement au début, et puis de plus en plus vite, pour ne ralentir que beaucoup plus tard. En général, les dernières mettent cinq ou six heures, et quelquefois plus encore, à digérer une quantité de fibrine que les premières digèrent en une ou deux heures et quelquefois en un temps encore plus court. Cette différence indique que dans des viscères au repos il n’y a que des pro- ferments, tandis que dans les viscères en pleine activité, il y a des ferments définitifs ; elle est d'autant plus frappante que le lemps d’obser- vation est plus court; elle s’efface en apparence si on prolonge ce temps au delà du nécessaire; elle semble disparaitre tout à fait si on attend que toutes les infusions aient fini de digérer; la période de vingt-quatre heures adoptée par MM. GC... et P... est beaucoup trop longue; c’est pour cela qu’ils n’ont pas vu la différence en question. De plus, leurs digestions sont des types de digestions lentes, telles que les fournissent les viscères pris sur des animaux à jeun;ils n’ont pas même essayé de les comparer à celles que fournissent les mêmes viscères en pleine activité; s'ils l'avaient fait, ils auraient vu leur dose de fibrine, d’ailleurs excessivement petite, disparaitre en une heure, une demi-heure et moins encore, au lieu de six heures (leur chiffre minimum), {tandis que dans l’espace de six heures, ils auraient vu disparaître plusieurs doses. successives de fibrine. Je laisse maintenant complètement de côté tout ce qui concerne l’esto- mac ; aussi bien MM. GC... et P... n’en parlent pas, et, pour ma part, je n'ai rien d’essentiel à ajouter à ce qui est exposé dans ma Digestion stomacale citée plus haut. Mais je tiens à m'’arrêter un instant sur l'influence exercée par la rate sur la transformation de la protrypsine en trypsine active (1). (4) M. Schiff, Ueber die Function der Milz (Schw. zeitschr. für wissensch. Medicin, 1862); A. Herzen, Digestione dell'albumina e funzione della milza (Imparziale, Florence, 1870); A. Herzen, La funzione digestiva della milza (ibid., 1877, et, en allemand, in Moles-hotts’ Untersuchugnen) ; M. Schiff, Fonc- tions de la rate (5° Congrès international des Sciences médicales, Ge## ADN nève, 1877); A. Herzen, Influence de la rate sur la digestion PANCTÉQHARE ri LAN (Revue scientifique, Paris, 1882); À, Herzen, Observations sur la formation, dé 6€ HG \ NR>/0 816 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Tout ce que nous prétendons, M. Schiff et moi, c’est que le pancréas d'animaux (chiens) dératés se comporte, même en pleine digestion, comme le pancréas d'animaux normaux à jeun, c'est-à-dire que même si on en fait l’infusion au moment où il est au maximum de son activité chez les animaux (environ six heures après le repas), il ne digère que très lente- ment, comme si on l'avait pris sur un animal jeünant. De plus, j'ai fourni la preuve directe que la transformation rupide et copieuse de la pro- trypsine en trypsine active a lieu sous l'influence d’une substance qui se produit dans la rate pendant sa congestion périodique et la quitte avec le sang veineux, — et cela, au moyen d'expériences extrêmement simples, que je montre chaque année à mes élèves; ce sont ces expériences-là qu'il faut répéter, sans négliger les conditions essentielles dont le résultat dépend, si on veut contrôler mes conclusions (1). On trouvera tous les détails y relatifs dans les publications que j'ai citées plus haut en note; je ferai seulement observer qu'il est prudent de ne prendre au pied de la lettre que le texte de celles qui datent de l'introduction de la glycérine comme véhicule des extraits, c'est-à-dire de celles qui sont postérieures à 1870 (2). Je ne veux pas répéter ici le contenu de mes travaux précédents; mais je donnerai, pour terminer, la description sommaire d’une expérience typique, que j'ai répétée encore tout récemment : On sacrifie trois chiens : Le chien À est normal, et à jeun depuis douze à vingt-quatre heures ; Le chien B est normal, et a mangé une soupe de viande et de pain six heures auparavant. la trypsine (Bulletin de la Société vaudoise des Sciences naturelles, 1883, et, en allemand, in Pfluger's Archiv, 1883) ; À. Herzen, Rate et Pancréas (Semaine médi- cale, 1887, p. 324). (4) MM. C. et P. conviendront avec moi que le résultat négatif de leur seule tertative d’imiter mes expériences (p. 642) ne saurait infirmer les résultats constants fournis par des séries entières d'expériences variées. Ils sont tombés sur une rate inactive, voilà tout; et, dans ces conditions, elle ne peut, natu- rellement, que gèner la digestion pancréatique, en lui fournissant un aliment de plus à digérer. (2) N. B. A la page 299 du volume XXX du Pflüger’s Archiv, il y a une impor- tante correction à faire à la deuxième figure de mon mémoire, celle qui repré- sente la digestion de l’albumine : les numéros, à droite, sont placés trop haut; il faut mettre le n° 4 à la place du n° 3, remplacer par le n° 3, les n°° 4 et 2, et placer ces derniers au niveau de l’angle inférieur, puisque, dans ce cas, il n’y a pas eu de digestion du tout. L’albumine offre en général, une très grande résistance à la trypsine, tandis que la fibrine lui cède facilement; ce n'est donc nullement « sur la fibrine en particulier » que les extraits de viscères au repos n’ont « aucune action ». SÉANCE .DU 29 JUILLET 817 Le chien Cest dératé depuis longtemps, tout à fait rétabli de la splé- nectomie, et a, lui aussi, mangé comme le chien B. Les trois pancréas et les deux rates (celle de À contractée et anémique, celle de B congestionnée et dilatée) sont hachés et infusés dans la glycé- rine ou, mieux encore, dans de l’acide borique à 5 p. 100. Digestion à l’étuve : Les infusions des pancréas de À et de G mettent plusieurs heures à digérer une quantité de fibrine que l'infusion du pancréas de B digère en trente-cinq ou quarante minutes. Les infusions pancréatiques À, B et C, mélangées à des volumes égaux d’infusion splénique A, digèrent plus lentement et moins qu'à elles seules. Les infusions pancréatiques À et CG mélangées à l’infusion splénique B, digèrent beaucoup plus vite que dans ce mélange, à peu près comme l'in- fusion pancréatique B à elle seule. L'infusion pancréatique B mélangée d’infusion splénique B digère plus lentement et moins qu’à elle seule. Je conserve dans de l’alcool les restes d’albumine et de fibrine que ces différents liquides ont laissés au bout de deux à trois heures d’étuve pour la fibrine, six à douze heures pour l’albumine. Jamais ce résultat ne m'a fait faux bond, à la condition expresse, tou - tefois, que la rate de l'animal digérant se trouve réellement en activité, c’est-à-dire qu’elle soit manifestement dilatée et gorgée de sang; cela n'arrive pas toujours à la même phase de la digestion, et quelquefois pas du tout, mais habituellement vers la sixième heure après l’ingestion du repas. Lorsque la rate est bien congestionnée, on peut faire précéder l’expé- rience que je viens de relater de l’expérience supplémentaire suivante : on recueille dans de la glycérine ou dans de l’acide borique au 35/1009 d’abord du sang splénique veineux, puis du sang splénique artériel ; on mélange ensuite ces deux infusions de sang avec deux portions d’infusion pancréatique « inactive » (c’est-à-dire provenant d’un animal à jeun, et contenant par conséquent beaucoup de protrypsine et très peu ou point de trypsine active). On voit alors que la portion qui a été mélangée au sang splénique veineux digère beaucoup plus vite que l’autre sa dose de fibrine ; — preuve que la transformation du proferment en ferment défi- nitif n’est pas due à l’oxydation du premier par l’oxygène de l’hémoglo- bine, mais bien à une substance inconnue qui se forme dans la rate et qui est entraînée avec le sang des veines spléniques. Conclusion. — Les infusions relativement inactives de pancréas d’ani- maux normaux à jeun et d'animaux dératés même en pleine digestion, sont rendues aussi actives que celles qui proviennent d'animaux normaux en pleine digestion, si on les additionne d’infusion de rate congestionnée ou de sang splénique veineux revenant d’une rate congestionnée. 818 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE DIGESTION PANCRÉATIQUE. OBSERVATION A L'OCCASION DE LA NOTE DE M. HERZEN, par M. A. DASTRE. J'ai annoncé en même temps que MM. Carvallo et Pachon, et préci- sément dans la même séance de la Société de Biologie, un résultat qui est d'accord avec l’un des leurs, c’est à savoir que : « Chez les animaux ina- niliés la puissance digestive des macérations pancréatiques relativement aux albuminoides (fibrine) ne paraît pas sensiblement altérée. » J'ai eu garde de conclure, sans plus ample informé, de la manière d’être des macérations à celle des sucs naturels ; non plus que de partir de là pour contester les résultats de MM. Schiff et Herzen relativement aux premières phases de celte opération. J'ai comparé les macérations pan- créatiques de porcs à jeun depuis # et 5 jours, avec les macéralions de porcs sacrifiés 4 heures après un repas copieux. — De même pour les chiens, sur lesquels mes observations ont été moins fréquentes. Je ne prétends pas qu’au point de vue du ferment protéolÿtique tout soit égal chez l'animal inanilié et chez l'animal normal. Les comparai- sons sont rendues incertaines par la difficulté de juger de l'identité des macérations mises en œuvre dans l’un et l’autre cas (1). Je dirai seule- ment'que je n’ai pas aperçu de différences sensibles dans ces deux espèces de digestions, ni au bout d’une et deux heures, ni au bout de vingt-quatre heures. S'il y a quelque différence dans la marche du phénomène, elle est sûrement très faible. Surtout, je ne crois pas à une différence quitiendrait à une transformation plus ou moins aisée d’un proferment en ferment. Je m'appuie pour contester celte explication sur le fait que j'ai conservé mes liqueurs de macération après filtration pendant trois semaines à un mois, à des températures variées, et que j'ai obtenu avec ces liqueurs vieillies des digestionsidentiques à celles du début. Je reviendrai d’ailleurs prochainement sur cette question des proferments. Tout ce que je veux ajouter ici, c'est qu’à côté de ce premier résultat qui m'est commun avec MM. Carvallo et Pachon, j'en ai signalé un autre qui le complète et l’éclaire singulièrement, U’est que « Chez les ani- maux inaniliés (dans les conditions précédemment indiquées) la puissance digestive relativement aux amylacés est considérablement atténuée et peut même êlre entièrement détruite. A la vérilé, il est difficile d'apprécier exactement la puissance diges- (4) 11 importe surtout de tenir compte de la réaction du milieu qui, pour la comparaison, doit toujours être neutre. Des différences que l’on attribue sou- vent à l'activité de l'organe tiennent seulement à des degrés dans la réaction acide ou alcaline du milieu. SÉANCE DU 29 JUILLET 819 tive relativement à l’amidon, parce qu’une partie de l’amidon se trans- forme en sucre, en présence des macéralions de foie et de pancréas alors même que l’on opère sur des liqueurs préalablement bouillies. Cepen- dant on peut obtenir des résultats suffisants pour la comparaison. Il est d’ailleurs commode d'apprécier l’amidon qui a échappé à l’action fer- mentative au bout de vingt-quatre heures, par la réaction de l’iode. Il ne semble donc pas que les phénomènes qui s’accomplissent pendant l'inanition puissent se résumer en une simple acenmalation dans le tissu glandulaire des ferments ou proferments de l’état normal. SUR LA FORMATION DES ILOTS DE LANGERHANS DANS LE PANCRÉAS, par M. E. LAGUESSE. Langerhans le premier, en 1869, a signalé dans le pancréas adulte de petits amas ou groupes de cellules spéciales, disséminés de place en place entre les acini, et à signification inconnue. Revus par Saviotti, Külliker, ils ont été décrits depuis par Kühne et Lea puis Heidenhain sous le nom d’amas intertubulaires, par Renaut sous celui de points folliculaires, par Podwyssotski sous le nom de pseudo-follicules, enfin par Heneage Gibbes, et Lewaschew. Ce dernier (1886) a montré leur variabilité suivant l’état de nutrition de l'animal, d’excitation de la glande, et les considère comme des acini modifiés, probablement en voie de régénération après l'épuisement causé par une longue période de sécrétion. Je ne crois pas qu'ils aient été signalés chez l'embryon (peut-être les Zellengruppen de Schenk). Dans le pancréas d’un homme adulte (supplicié) je retrouve ces ilots très nombreux et volumineux (je les désignerai provisoirement sous le nom d’ilots de Langerhans); dans celui d'un enfant mort quelques heures après la naissance, sans avoir pris de nourriture, ils sont plus nombreux encore. Ils ne sont donc pas l’expression d’une régénération d’acini fati- gués. Le développement du pancréas, suivi chez l'embryon de mouton, nous donne à leur égard quelques notions, encore bien incomplètes, dont je me bornerai, dans cette communication préliminaire, à indiquer les principales. a. — Lesilots de Langerhans existent chez le fœtus; ils y sont beaucoup plus abondants que chez l’adulte. b., — Le pancréas est au commencement du deuxième mois une véri- table glande tubuleuse ramifiée (état persistant chez les poissons), à tubes largèment ouverts. Sur des fœtus encore très jeunes, vers la fin du même mois, les culs-de-sacs terminaux se dilatent un peu et forment des acini à peu près hémisphériques, dont les cellules, devenues pyramidales ou 28. 820 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE cylindriques, se chargent dans leur zône interne de grains réfringents ayant déjà l'aspect du zymogène. De semblables acini bourgeonnent laté- ralement sur les tubes. Des centro-acineuses y forment une deuxième couche, discontinue sauf à l’entrée. c. — Peu après, chaque acinus ou petit groupe d’acini confluents commence à se transformer en un îlot de Langerhans, c'est-à-dire en une masse pleine à peu près sphérique de cellules polyédriques serrées. Dans chaque élément les granules de sécrétion se sont pour cela disséminés dans tout le corps cellulaire, perdant leur réfringence et, changeant d'état, la cellule a pris un aspect homogène, un peu trouble, caractéristique. La lumière centrale a disparu; les centro-acineuses, exclues de l’ilot, lui forment un pédicule plein. d. — La masse pleine se lobe, se ramifie, dissociée par les vaisseaux sanguins. Généralement elle se creuse, en quelques points au moins, de cavités qui se mettent en communicalion avec les vaisseaux et où s’épan- che le sang (sortes de vésicules closes); des cellules troubles s’y dissolvent,. e. — Chaque ilot de Langerhans accru (cariocinèses) pendant ce temps, finit par reconstituer une grappe tout entière d’acini, un lobule pri- maire. Chaque lobe de l’ilot reforme un acinus qui peut se lober à son tour; dans les éléments périphériques, les granules reparaissent sous leur forme première, dans les centraux ils disparaissent complèlement, et ces cellules devenues claires forment de véritables tiges centro-acineuses (Renaut), mais de nature épithéliale, qe de nouveau se creusent d’une lumière et continuent les canaux jusqu’au centre des culs-de-sac. f. — Ce processus n’est pas tout à fait simultané pour tous les acini, il se reproduit plusieurs fois au cours du développement, À la naissance (fin du 5e mois), les îlots sont devenus plus rares, ils diminuent encore chez l’adulte. g. — Ge processus représente donc un mode d’aceroissement de la glande. Mais en outre, bien avant que le pancréas ne fonctionne comme glande digestive, des granules de sécrétion se sont accumulés dans la zone interne des cellules, puis, au moment où dans l’ilot de Langerhans (sorte de petite glande vasculaire sanguine par sa structure) les cellules sont entrées en contact intime avec le sang, une partie d’entre elles s’y sont comme dissoutes, dans d’autres les granules se sont résorbés. IL semble donc logique de supposer, sous toutes réserves, que nous sommes ici en présence d’une manifestation de la sécrétion interne, sécrétion se conlinuant pendant toute l’existence, mais très développée et précédant l’externe au cours de la vie fœtale. Plus tard, chaque groupe cellulaire passerait successivement de l'état acineux à l’état d'ilot plein (endocrine), et réciproquement, fournissant ainsi alternativement, par une sorte de balancement régulier, sécrélion interne et sécrétion externe. SÉANCE DU 29 JUILLET 821 SUR L'OXYGÈNE DU SANG ARTÉRIEL DANS LES VARIATIONS DE LA CAPACITÉ RESPIRATOIRE, par MM. E. Meyer et G. BIARNÈS. Le sang artériel dans les conditions normales et avec une bonne venti- lation pulmonaire renferme en moyenne chez le chien de 16 à 18 p. 100 _ d'oxygène. D'autre part, nous savons que la capacité Reine, c'est-à-dire la plus grande quantité d'oxygène que ce sang est capable de fixer, peut en moyenne être évaluée à 25 p. 100. L'animal v’utilise donc dans les conditions normales qu’une partie du pouvoir absorbant de son sang pour l'oxygène, et il reste, en réserve pour ainsi dire, disponible pour une saturation plus complète, une quan- tité d'hémoglobine théoriquement représentée par la différence entre l'oxygène du sang artériel, 16 à 18, et celui de la capacité respiratoire, 25. Déjà les recherches de Paul Bert et celles de M. Gréhant ont montré que, lorsque les animaux respirent dans l'air comprimé ou dans l’oxy- gène pur, l’hémoglobine du sang artériel fixe une plus grande quantité d'oxygène que-dans les conditions normales. Nous plaçant à un point de vue différent, nous avons essayé de recher- cher, si l'hémoglobine disponible dans le sang n'est pas utilisée par l’ani- mal, dans le cas où la masse totale de l'hémoglobine vient à diminuer, et si l’utilisation de cette réserve de matière colorante ne lui sert pas à maintenir constante, aussi longtemps que possible, [a quantité d'oxygène mise par le sang artériel à la disposition des éléments anatomiques. Dans ce but nous avons institué une série de recherches dont nous ne voulons donner dans cette note qu’un aperçu sommaire. Nous avons en conséquence anaiïysé à l’aide de la pompe à mercure les gaz du sang artériel avant et après la réduction de la capacité respi- raloire. Nous avons diminué la capacité respiratoire : 1° En faisant subir à l'animal de copieuses saignées. 2 En lui faisant respirer de l’air oxycarboné qui, comme on le sait, rend impropre à l’hématose la partie de l’hémoglobine dre TRennée en carboxyhémoglobine. I. — Réduction de la capacité respiratoire par la saignée. ExPÉRIENCE. — Chien de 5 kilogrammes auquel on retire par l'artère fémo- rale 150 centimètres cubes de sang dont une partie sert à déterminer les gaz du sang (A) et la capacité respiratoire (B). ; 822 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ——————_—_——_—_— Les gaz du sang A sont extraits immédiatement par le procédé classique. Le sang B est défibriné, agité vivement pendant dix minutes avec un grand excès d'oxygène pur, passé à travers un linge pour enlever la mousse, placé une minute dans un appareil centrifugeur pour rassembler les bulles gazeuses à la surface et introduit rapidement dans la pompe. Résultats : GAZ DU SANG ARTÉRIEL À CAPACITÉ RESPIRATOIRE SANG B azttolalesri A RE TR EC Gaz total TESTS Acide carbonique . + . . 43.5 Acide) carbonique NP OxySene dense en er10 OxygénerKre EURE SERRES DAPAEN HS a AR BE D RENE EE IAE PES AzOte en RES RES Le lendemain, vingt-quatre heures environ après la saignée, on refait les mêmes opérations sur des sangs A' et B'. Résultats : GAZ DU SANG ARTÉRIEL A’ CAPACITÉ RESPIRATOIRE SANG B' CAZATO ANR PETER 70 Caz tolal er RER Acide carbonique ete Acide carbonique MERE? OxXVSENEMMEUMHPAUEEMER 479 Oxygène, rte Un AZ O PO AR Eee A NA AU AOC ET AR URL ARRETE Les quantités d'oxygène du sang artériel ont donc été respectivement : A—19—AÀ'— 17.5; pour les capacités respiratoires B = 25 — B' —20.5. : ; 0’ Nous appelons coefficient de saturation du sang le rapport © dans lequel O' représente la quantité d'oxygène fixée dans le sang artériel et O le maximum d'oxygène absorbé par un sang déterminé, c'est-à-dire sa capacité respira- toire. Dans l'exemple cité le coefficient de saturation tend vers l'unité. En effet, normalement avant la saignée nous trouvons : | 0"_ 19 Hi) D = 5 — 0.16. (4) après la saignée le rapport est devenu : 047.5 5 = 30 3 — 0-85. (2) L'animal a donc utilisé dans ce cas une proportion plus forte de son hémo- globine totale. SÉANCE DU 29 JUILLET 823 IT. — Réduction de la capacité respiratoire par l’oxyde de carbone. A la suite de la respiration de l’oxyde de carbone et en pratiquant l'ex- traction des gaz comme ci-dessus, nous avons obtenu les mêmes résultats, O0’ et observé que le rapport & tendait également vers l'unité. Exemple : Coefficient de saturation normal: Nous savons très bien que ces différences, en volume, dans l'oxygène absorbé ne peuvent être transformées en poids d'hémoglobine, puisque les recherches de Ch. Bohr ont montré l'existence de combinaisons «, B, y, à d'hémoglobine avec l'oxygène dans lesquelles le pouvoir absorbant varie de 0 c.c. 4 à 2 c.c. 7 par gramme de matière colorante. Mais quelles que soient les différences du pouvoir absorbant de ces diverses hémoglobines, il est évident que les quantités d'oxygène fixées peuvent nous renseigner sur la valeur de l'effet utile produit soit par la ventilation pulmonaire (gaz du sang), soit par l’agitation à l'air (capacité respiratoire), et c’est en définitive cet effet utile qui est intéressant au point de vue physiologique. Ces expériences dont le détail sera consigné dans la thèse que l’un de nous prépare sur ce sujet, montrent que l'animal, lorsque sa quantité totale d'hémoglobine a été accidentellement diminuée, utilise au maxi- m um et contrairement à ce qui se passe dans les conditions normales, le pouvoir absorbant de l’'hémoglobine qui lui reste. 11 semble donc qu’il existe un mécanisme régulateur de l'apport d’oxy- gène aux tissus et qui est dans une certaine mesure indépendant de la ventilation pulmonaire. Ce dernier fait, sur lequel nous reviendrons, concorderait avec les idées nouvelles de Ch. Bohr sur le mécanisme des échanges gazeux au niveau de l’épithélium pulmonaire. (Travail du laboratoire de physiologie de la Faculté de Médecine de Toulouse.) 824 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Election d'un membre titulaire. M: Panier ae 0 DENON 0 SUITE M BOUVIER SR nee — a — : M: ARTHUS MASON TEUMPEERERIQUE — 1 — MSDOLERIS ESC ne Sete — Î — En conséquence M. Pilliet ayant obtenu la majorité absolue des suf- frages est élu membre titulaire de la Société de Biologie. La Société de Biologie, entrée en vacances le 17 août, reprendra ses séances hebdomadaires à la date du samedi, 21 octobre. Le Gérant : G. MASssoN. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marerneux, directeur, 1, rue Cassette. 825 SÉANCE DU 2{ OCTOBRE 1893. M. Cnauveau : Décès de M. Charcot. — M. Mazassez : Décès de M. Vignal. — M. Nicozas : Sphex splendidulus da Costa. — M. Cn. Féré : Note sur l'influence de l’érysipèle sur la marche de l’épilepsie. — M. Cu. FÉRÉ : Note sur la motilité de l’orbiculaire des lèvres dans la paralysie faciale des hémiplégiques. — M. Cn. Féré : Note sur l'influence, sur l’incubation de l’œuf de poule, d'injections préa- lables, dans l’albumen, de solutions de sel, de glucose, de glycérine. — M. GELLÉ: Un point de physiologie de l'étrier. — MM. Gzey et Cnarnin : Diabète expéri- mental et diabète de l'homme. — M. le Dr Vrcenrini : Flore cryptogamique de la bouche et des crachats. — MM. J. Courmonr et M. Doyon : De la production du tétanos chez la poule et de la création artificielle de l'immurité chez cet animal. — M. Nrcoras : Sur un cas de tétanos chez l’homme par inoculation accidentelle des produits solubles du bacille de Nicolaïer. — M. p’ARSONVAL : Présentation d'instrument. — M. Mazassez : Présentation d'appareil. Présidence de M. Chauveau. DÉCÈS DE M. CHARCOT M. CHAUvVEAU. — Messieurs, la science française a perdu pendant ses vacances un de ses représentants les plus illustres, le professeur CHARGOT. Bien que notre regretté collègue ait demandé qu'aucun discours ne füt prononcé à ses obsèques, je crois de mon devoir de dire devant la Société de Biologie la grande émotion qui a été éprouvée dans le monde savant à la nouvelle de la mort subite de Charcot. Je n’ai pas à rappeler ici la valeur de ses travaux, vous savez qu’elle élail considérable. Charcot restera un des représentants les plus auto- risés de la médecine moderne et je suis assurément l'interprète des senti- ments de la Société de Biologie en rendant hommage à la mémoire de notre regretté collègue. DÉCÈS DE M. VIGNAL M. MaLAssez. — J'ai la douleur d'annoncer à la Société une autre perte qu’elle a faite également cet été, mais qui, elle, est restée à peu près ignorée (la famille n'ayant pas encore envoyé de billets de faire part). Notre collègue M. Vignal est mort le 14 août dernier, à Erquy, en Bre- BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 29 826 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tagne, succombant à une tuberculose qui depuis deux ans avait fait de très rapides progrès. Il y a longtemps, paraît-il, qu'il avait été atteint; mais il semblait s’être complètement remis; aussi nous nous demandons avec angoisse s'il ne s'est pas réinfeclé dans les nombreuses et longues recherches qu'il a faites sur cette terrible maladie. C'est à lui, je crois, que nous devons les premières coloralions et les premières cultures qui aient été faites en France du bacille de Koch. Il a été mon collaborateur actif et dévoué dans jies études qui ont abouti à la découverte de la tuberculose zoogléique, dans les expériences qui ont mis en relief l’effrayante persistance du pouvoir pathogénique des crachats tuberculeux, expériences particulièrement dangereuses, qui nous avaient enlevé déjà notre collègue Thaon, de Nice. Et il avait toujours continué à travailler ces questions si importantes. Il avait encore étudié bien d’autres points de la microbiologie. Je citerai, par exemple, ses recherches si remarquables sur les parasites de la bouche et du tube intestinal. 11 n’avait pas délaissé pour cela ni lhisto- logie normale, ni l’histologie pathologique; est-il besoin de rappeler ses travaux sur les noctiluques, sur le système nerveux, ses collaborations avec Rutherford, Lannelongue, Tarnier, Budin, Galippe, Rigal, etc. Nous avions aussi commencé, il y a deux ans, une sé’ie de recherches sur les variations des globules blancs dans le sang. Et au milieu de tous ses tra- vaux si divers il avait encore trouvé le moyen de préparer et passer sa licence, puis son doctorat ès sciences naturelles, de publier des revues très intéressantes, de donner des conférences au laboratoire, de venir en aide à tous. C'était le dévouement, l’obligeance même. Le matin à l'hôpital de clinique, l'après-midi au laboratoire d’histologie du Collège de France, le soir chez lui, il travaillait sans relâche. Et vrai- ment s’il ne s’est pas infecté, on peut dire qu'il s’est épuisé de travail. IL est vraiment mort à la peine, n'ayant pas achevé son œuvre, avant déjà beaucoup semé, n’ayant malheureusement pas eu le temps de récolter. SPHEX SPLENDIDULUS (da Costa), par M. Nicozas. (Communication faite dans la séance du 29 juillet.) L'étude complète du développement larvaire de cet hyménoptère, nous fait connaître les modifications profondes qui s’opèrent dans les diverses phases de son existense, depuis l'œuf jusqu’à l’insecte parfait. Dans un mémoire spécial qui sera sous peu publié avec figures à SÉANCE DU 21 OCTOBRE 897 l'appui, nous décrivons ces stades si intéressants et tous les détails qui s'y rattachent. Nous nous limiterons ici à en donner un rapide aperçu. Le nid, fort original, est établi par la & dans un roseau dont elle a fait choix, dans lequel elle entasse des orthoptères, elle obture ensuite par un feutrage soyeux terminé à sa partie supérieure d’un entassement d’ai- grettes dures, graines de certaines plantes. Ces orthoptères que je n'ai pu déterminer avec soin, se rapprochent beaucoup du Conocephalus mandibularius, peut-être même est-ce lui? L'œuf est pondu sur celui en-dessous, sans pouvoir préciser avec exac- titude sa position, de même je n'ai pas ses dimensions. A l’éclosion, la larve se repaît des victuaillés approvisionnées et bientôt la première larve atteint son développement. Celle-ci est très allongée. Les premiers anneaux paraissent s'emboîter, et ils sont susceptibles de se distendre à volonté, ou de se contracter suivant les besoins pour atteindre les parties charnues des criquets au milieu de l’encombrement des longues pattes enchevêtrées, de ceux dévorés, qui restent intactes. Cette première larve se tisse un cocon parcheminé, résistant, allongé, un peu en massue, en forme de noyau de datte, contenu dans une enve- loppe plus large, comme dans un sac suspendu. On ne peut ici saisir ce qui s’opère dans celle première larve ayant épuisé la matière qu’elle dégorge pour former la grande enveloppe soyeuse et construire son cocon, mais la deuxième larve ne lui ressemble nullement. Contenue dans ce cocon, elle n’en occupe que la partie infé- rieure, la plus renflée, où elle repose sur le fond. Dans cette nouvelle position, elle a ses extrémités repliées, légèrement aplaties s'appliquant sur la région ventrale, ce qui n’est pas un cas isolé. D'autres larves de Pompilus et Priocnemis offrent cette double coudure des premiers el derniers anneaux ainsi ramenés. Elle ne rappelle en rien la première forme, et c’est dans cet état qu’elle passe tout l'hiver et le prin- temps jusqu’au 15 mai. C’est à ce moment qu'une nouvelle modification se produit. De pliées qu'elles étaient, les deux extrémités se redressent alors, la larve se détend comme un ressort abandonné à lui-même, pour occuper tout le volume du cocon; puis c’est une transformation rapide qui de proche en proche, en sectionnantla larve, ne demande que quinze jours pour donner une nymphe en fin mai (Pseudo-nymphe). Pendant tout le mois de juin, elle continue ses évolutions qui l’amènent à une forme nymphale plus précise rappelant l’insecte parfait. En fin jun, le Sphex splendidulus quitte son nid pour la vie aérienne. Dans une observation faite par M. Marchal sur un sphex bien voisin sans doute de celui-ci, qui a été soumis à M. Perez, de Bordeaux, les nids sont approvisionnés avec l'Æanthus pelluscens. Sous ce rapport, ils diffé- reraient. M. le capitaine Ferton a recueilli à Simiane, aux environs de Marseille, 828 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE un nid de Sphex splendidulus dans un roseau de 0®,57 de longueur, con- tenant 17 loges habilées sans espace perdu, dans lequel une chambre contenait des provisions non mangées, appartenant à un locustaire, qui n'est pas déterminé, ni le mien non plus quoique je le suppose être le Cono- cephalus mandibularius. Enfin, le premier de ces nids que j'ai observé de ce Sphex splendidulus remonte en juillet 1883. Il était aussi construit dans un roseau de 0,95 de longueur dont les cloisons des nœuds étaient perforées par cet hyménoptère. La partie supérieure était fermée sur 0®,25 de longueur par un tampon de feutrage léger, composé de soyeuses aigrettes fortement tassées vers l'ouverture; un vide de 0,25 succédait à ce matelas de graines végétales, et venait en dessous sur 0,24 de longueur encore un peu de cette bourre, où je trouvais, en dessous de huit à neuf criquets verts, une larve de 16 à 18 millimètres de longueur — en train de les dévorer — puis un cocon, et enfin au dernier nœud de 6*,23 de longueur se trouvait encore cinq à six criquets desséchés. Depuis cette époque j'en ai retrouvé d'autres dans les mêmes conditions, ne différant entre eux que par un choix varié des graines pour combler les vides des roseaux et les dissimuler ainsi, néanmoins un anthrax ne se prend pas à ce piège et trouve moyen, malgré ces précautions, de vivre en parasite sur le Sphex splendidulus. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'ÉRYSIPÈLE SUR LA MARCHE DE L'ÉPILEPSIE, par M. Cu. FÉRÉ. Dans une note antérieure (1), j'ai déjà fait remarquer que l'influence des maladies intercurrentes sur la marche de l’épilepsie était trop incons- tante et trop variable pour servir de base à une méthode thérapeutique. Je faisais même une réserve particulière pour les agents infectieux qui paraissent avoir une prédilection marquée pour les éléments nerveux. Cette réserve visait la rage, et elle peut s'appuyer aujourd’hui sur une nouvelle observation de M. Ballet, qui a vu l’épilepsie subir une aggra- vation à la suite d’un traitement antirabique (2). Tirant de cette notion ancienne que l’épilepsie succède souvent à des maladies infectieuses, la conclusion, à laquelle il manque une base expé- (4) Note sur l'influence des maladies intectieuses sur la marche de l'épi- lepsie (C. R. de la Soc. de Biologie, 1892, p. 494). (2) G. Ballet. De l'influence du traitement antirabique sur l’évolution de l'épilepsie (Bull. et Mém. de lu Soc. méd. des hôpitaux, 1893, p. 562). Le. SÉANCE DU 21 OCTOBRE 829 rimentale, que l’épilepsie dite idiopathique est presque toujours d’origine infectieuse, M. Marie a proposé d’inoculer des toxines pour traiter l’épi- lepsie (4). Pour s’autoriser à mettre cette méthode en pratique, M. Lan- nois n’a pu trouver que l’ancien adage : Melius anceps quam nullum reme- dium, car l'observation montre, je le répète, que l'influence des ma- ladies intercurrentes sur l’épilepsie est tantôt bonne, tantôt mau- vaise, tantôt nulle. Quoi qu'il en soit, il a tenté chez des épileptiques l'injection sous-cutanée des produits solubles du staphylococeus pyogenes aureus (2). Dans un mémoire récent, le mème auteur rapporte l'observation d’une malade atteinte d’hémiparésie dont les attaques d’épilepsie ont été sus- pendues au cours d’un érysipèle, ont subi une recrudescence pendant une fièvre typhoïde qui succédé à la première affection, mais ont continué au cours d’un second érysipèle survenu lorsque la fièvre typhoïde allait s’améliorant. Cetle unique observation n’autorise aucune des conclusions qu’on en tire (3) ; il suffit de les citer pour les réfuter. « 4° Les maladies intercurrentes, dit-il, ont très fréquemment un rôle sus- pensif ou curateur vis-à-vis de l’épilepsie; 2° il y a sans doute lieu de faire exception pour la fièvre typhoïde puisque chez une même épileptique (dans l'espèce l’épilepsie était symptomatique), l’érysipèle a suspendu et la fièvre ty- phoïde augmenté les accès convulsifs; 3° ce n’est donc pas, comme on le croit généralement, à l'élévation de température qu'il faut attribuer l’action des maladies intercurrentes ; 4° cette action paraît plutôt devoir être rapportée aux toxines des microbes infectieux. Dans cette hypothèse, les toxines du strepto- coque de l’érysipèle auraient une action suspensive plus ou moins durable; celles de la fièvre typhoïde, au contraire, favoriseraient les décharges nerveuses qui constituent les crises épileptiques. Dans l’épilepsie, les suspensions des attaques se produisent sous les influences les plus banales, à tel point qu'on peut souvent les croire spon- tanées, et elles sont fréquemment suivies de recrudescences non moins banales. J'ai observé à la fin de l’année dernière deux faits qui montrent bien que l’érysipèle n’a pas sur l'épilepsie une action sur laquelle on puisse compter. 1° Un malade, qui avait eu trois accès en septembre et trois accès en octobre, fut envoyé le 5 novembre à l’hôpital d'Aubervilliers pour un érysipèle de la face ; il est revenu à Bicêtre le 23. Pendant son séjour à (1) P. Marie. Infection et épilepsie (Semaine médicale, 1892, p. 284). (2) M. Lannoïis. Traitement de la chorée et de l’épilepsie par des produits microbiens (Lyon médical, 1892, t. LXXI, p. 267). (3) M. Lannoïs. Épilepsie et fièvre typhoïde (Revue de Médecine, 1893, p. 502). 830 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Aubervilliers, il a eu deux accès, et il en a eu deux autres avant la fin du mois à Bicètre. 2% L'autre malade avait eu 2 accès en septembre, 7 en octobre, 3 en novembre. Il n’avait pas eu d'accès jusqu’au 18 décembre, date à laquelle il fut envoyé à Aubervilliers avec un érysipèle de la face. Il a eu 5 accès jusqu’à la fin du mois, il n’en a eu qu'un seul en janvier, mais depuis, il én a eu en moyenne 7 par mois. Par conséquent, on peut dire que, dans les deux cas, l'influence a été nulle, sinon nuisible. NOTE SUR LA MOTILITÉ DE L'ORBICULAIRE DES LÈVRES DANS LA PARALYSIE FACIALE DES HÉMIPLÉGIQUES, par M. Cu. FÉRé. Dans une note précédente (1), j'ai relevé qu'il était possible de mesu- rer l'énergie aussi bien que la rapidité des mouvements volontaires de l’orbiculaire des lèvres, et d'apprécier la diminution de la motilité de ce muscle dans l’hémiplégie. J'avais noté seulement l’existence de la dimi- nution de l’énergie et de la rapidité de ces mouvements dans l’hémiplégie. Depuis cette époque, j'ai observé un certain nombre de faits qui m'ont montré que les troubles de la motilité de l’orbiculaire des lèvres chez les hémiplégiques ne sont pas nécessairement en rapport avec les troubles de la motilité des autres muscles de la face : quelquefois, avec une paralysie faciale très prononcée, on constate une motilité à peu près normale de l’orbiculaire ; d’autres fois, au contraire, la paralysie de l’orbiculaire paraît aussi marquée que celle des autres muscles de la face. Le plus sou- vent, elle est moins intense. L'importance relative des troubles de la motilité de ces différents muscles peut surtout être appréciée par l'étude comparée du temps de réaction simple des mouvements qu’ils exécutent (élévation de la màâ- choire inférieure (2), élévation de la commissure des lèvres, propulsion des lèvres ou moue). | Le temps de réaction pour la propulsion des lèvres (orbiculaire) qui, à l’état normal, est plus long d'environ 0’’,01 que celui de l'élévation de la mâchoire, et plus court d’environ 0'’,01 que celui de l'élévation de la (1) Ch. Féré. Note sur l'exploration des mouvements des lèvres (C. R. Soc. de Biologie, 1891, p. 617). (2) Ch. Féré. Note sur un dynamomètre maxillaire (C. R. Soc. de Biol., 1891, p. 619). Dynamométrie comparée des fléchisseurs des doigts et des élévateurs de la mâchoire (Ibid., p. 653). SÉANCE DU 21 OCTOBRE S31 commissure, est, en général, moins allongé dans la paralysie faciale des hémiplégiques que le temps de réaction considéré dans les autres mouve- ments. Dans 3 cas sur 16, le retard est aussi marqué que celui des autres mouvements du côté paralysé. Dans un cas, il est resté aussi court que pour les autres mouvements du côte sain. Ces différences offrent un certain intérêt théorique. Que la paralysie de l'orbiculaire soit moins marquée en général que celle des muscles du côté paralysé, on peut s’en rendre compte par cette circonstance que l’orbiculaire des lèvres est constitué de fibres dont un bon nombre traversent la ligne médiane, et ont une innervation bilatérale qui s'oppose à la paralysie totale. Quant à l'absence apparente de paralysie de l'orbiculaire, absence exceptionnelle d’ailleurs, on peut l'expliquer de deux manières: soit en admettant qu’il existe un centre cérébral de l’orbiculaire des lèvres susceptible d'être épargné isolément; soit en admettant que les deux moiliés de l’orbiculaire peuvent être sous la dépendance d'un centre céré- bral unique chez un sujet donné. Gette dernière explication conviendrait peut-êlre seule aux cas dans lesquels l'orbiculaire est pris des deux côtés. NOTE SUR L'INFLUENCE, SUR L'INCUBATION DE L'OŒUF DE POULE, D'INJECTIONS PRÉALABLES DANS L’ALBUMEN DE SOLUTIONS DE SEL, DE GLUCOSE, DE GLYCÉRINE, par M. Cu. FéRé. I. — Neuf œufs, au 7° jour de la ponte, ontreçu, comme il a été dit dans une autre note {l),un centimètre cube d’une solution de chlorure de sodium à 40 p. 100, et ont été mis à l’étuve de Roux, le gros bout à droite, en même temps que neuf autres œufs de même date qui avaient recu un centimètre cube d’eau distillée. 1° Un couple a été ouvert à la 48° heure. Dans l'œuf qui a recul'injection d’eau, l'embryon a atteint environ la 33° heure du développement. Dans l'œuf qui a recu la solution de sel, l'embryon en est à la 29° heure. Pas de déviations, ni d'anomalies : 2° Un deuxième couple a été ouvert à la 72° heure. L’embryon de l'œuf qui a reçu l’injection d’eau est arrivé à la 52° heure du développement, il est normal, mais la tête a pris la position de la queue. L'embryon de l'œuf qui a reçu l'injection de sel est mort et difforme (cyclopie, hétérotaxie). (1) Ch. Féré. Note sur l'influence des injections de liquides dans l’albumen sur l’incubation de l'œuf de poule (C. R. Soc. de Biologie, 1873, p. 787). 832 : SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 3° Quatre couples ont été ouverts à partir de la 96° heure. Dans un œuf de chaque catégorie il n’y a eu aucun développement. Dans les 3 œufs restant qui ont reçu l'injection d’eau, il y a 3 embryons normaux, dontun seul aune aire vasculaire légèrement échancrée vers la grosse extrémité de l'œuf et n’est arrivé qu’à la 82 heure; les deux autres sont compa- rables à des embryons de 96 et de 120 heures. Pour les trois œufs restants qui ont recu la solution salée, il n’y a qu’un embryon normal arrivé à la 68° heure, et deux embryons monstrueux dont un est mort. 4° Les trois derniers couples ont été ouverts à partir de la 120° heure. Les 3 embryons des œufs injectés d’eau ont un développement égal et comparable à la figure 135 de M. Duval, c'est-à-dire équivalent à la 144° heure; ils sont normaux de forme et de direction, sauf un qui a un arrêt de développement d’un œil. Pour les trois œufs injectés d’eau salée, il y a eu une fois absence de développement, un embryon mort au 2° jour, et un embryon monstrueux. Il. — Vingt-quatre œufs au huitième jour de la ponte ont été mis ensemble à l’étuve le gros bout à droite, après que chaque tiers eut reçu une injection, soit de 1 centimètre cube d’eau distillée, soit de 1 centi- mètre cube d'une solution de glucose pur au 1/10e, soit de 1 centi- mètre cube d’une solution de glycérine neutre au 1/10°. 1° Cinq œufs de chaque catégorie ont été examinés de la 71° à la 74° heures. Les.cinq œufs qui ont reçu une injection d’eau distillée contiennent tous un embryon, deux sont inclinés vers la grosse extrémité de l'œuf à 45 degrés environ, un est tordu. La moyenne de leur développement est de 51 heures. Les cinq œufs qui ont recu l'injection de glycose ne contiennent que 2 embryons, le développement est nul dans trois œufs; un des em-. bryons, dont la moyenne de développement est de 55 heures, a son axe dans le grand axe de l'œuf, la tête déviée à 90 degrés vers la petite extrémité. Dans les cinq œufs injectés à la glycérine, deux fois le développement est nul. Il y a deux monstruosités : une omphalocéphalie, et une absence de vésicules opliques chez un embryon arrivé à la 38° heure environ; les 2 embryons normaux ont un développement de 43 et de 25 heures, soit en moyenne de 34 heures. 2° Les trois œufs restant, de chaque catégorie, ont été ouverts à la 96° heure. Dans les œufs injectés à l’eau, il y avait un développement nul et 2 embryons normaux de 96 et de 82 heures. Dans les œufs injectés avec la solution de glucose, il y a un développe- ment nul et 2 embryons monstrueux, un omphalocéphale, el une atrophie de la tête avec une anophtalmie. Dans les œufs injectés avec la solution de glycérine, nous trouvons : SUP SÉANCE DU 21 OCTOBRE 833 4 embryon de 68 heures avec une atrophie d'un œil et une torsion du tronc; À embryon de 82 heures avec absence de vésicules optiques; À embryon double dans un même blastoderme ‘un embryon qui a environ 33 heures, a un cœur double, l’autre qui lui est juxtaposé par la lête n’a que 25 heures ; chacun d'eux a un sinus rhomboïdal considérable). III. Vingt-sept œufs au 7° jour de la ponte ont été mis à l'étuve de Roux, la grosse exlrémité à droile, après que chaque tiers eut recu une injection, soit de À centimètre cube d’eau distillée et stérilisée, soit 4 cen- timètre cube d’une solution de chlorure de sodium au 41/10°, soit 1 cen- timètre cube d’une solution de glucose pur au 41/10°. 1° Quatre œufs de chaque catégorie ont été ouverts par séries, de la 70° à la 72° heure. Dans les œufs injectés d’eau, il y avait-4 embrvons vivants arrivés en moyenne à la 51° heure du développement, un seul présentait une anomalie, la duplicité du cœur. Dans les œufs injectés avec la soiulion salée, il y avait un développe- ment nul, deux embryons monstrueux ; un seul embryon normal arrivé à la 43° heure du développement. Dans les œufs injectés avec la solution de glucose, il y a aussi un développement nul, et deux embryons monstrueux ; un seul embryon normal, couché sur le côté droit, est arrivé à la 48° heure du dévelop- pement. 2 Cinq œufs de chaque catégorie ont été de la 118° à la 121° heure. Dans les œufs injectés d’eau, il y avait un blastoderme sans embryonet 4 embryons normaux arrivés en moyenne à la 96° heure. Dans les œufs injectés avec la solution salée, il y a deux développe ments nuls et trois embryons monstrueux, deux hydropiques et un avec atrophie de la tête. Dans les œufs injectés de glucose, il y avait aussi deux développements nuls et trois embryons monstrueux, dont l’un est incliné, à 45 degrés la tête vers la grosse extrémité. En somme, ces expériences sont confirmatives des précédentes pour montrer l’innocuité relative des injections d’eau, et l’action tératoiogique des substances actives, même lorsqu'elles existent dans une certaine pr'oporlion dans l’œuf normal, comme le sel. L'action nocive très active du glucose mérite peut-être d’être rapprochée de la fréquence de la sté- rilité chez les diabétiques (1). (1) Trouillard. Contribution à l'étude du diabète et de la glycosurie physio- logique dans l’état puerpéral (Thèse, 1893). 834 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE UN POINT DE PHYSIOLOGIE DE L'ÉTRIER, par M. GELré. Que les vibrations sonores pénètrent dans l'oreille par la voie aérienne ou par la voie-osseuse (vibrations solidiennes), c’est la platine de Lens qui leur donne accès dans le labyrinthe. Cette mince lamelle mobile recoit de la chaîne des osselets les ondes qu’elle transmet au liquide intra-labyrinthique qui baigne sa face interne. La mobilité de la base de cet osselet dans le cadre de la fenêtre ovale due à son ligament circulaire, et qui ne permet pas un déplacement de plus de 1/10° de miilimètre, cependant, assure sa parfaite conduction; mais dès qu'il y a un obstacle au mouvement, la transmission des vibra- tions s'arrête. La démonstration en est facile : l'expérience, dite des pressions centri- pètes, rend manifeste cette possibilité de diminuer ou d'arrêter le courant sonore en agissant sur l’étrier. Le dispositif de l'expérience est celui-ci, classique maintenant : Au moyen de la poire à air, adaptée au méat auditif, on comprime d’un coup léger et sec, l’air du conduit, la pression se propage du tympan, par la chaîne des osselets à la base de l'étrier, qui se porte en dedans, vers le labyrinthe : le phénomène a été démontré par Politzer sur le cadavre. Le patient sur lequel on opère annonce, à chaque pression de la poire à air, que le son du diapason vibrant sur le crâne est atténué brusquement, pour renaître dès que la pression cesse. Ainsi, la pression meut l’étrier, le pousse en dedans; or, la limite de son déplacement est vite atteinte; el la pression le fixe et l’immobilise. En même temps, le fait d'une diminution brusque du son perçu, s’observe à chaque poussée d’air. Les deux phénomènes sont simultanés; et il est logique de conclure que l’immobilisation de l’étrier et l’affaiblissement immédiat et passager, reconnaissent la même cause, la pression artificiel- lement exercée, qui se transmet à la base de l’étrier. On peut donc com- prendre comment cette fixation de l’osselet, si elle est rendue durable par une lésion pathologique, cause la dureté de l’ouie. Mais le fait acquis, son explication offre quelque intérêt à être connue. Comment expliquer cet affaiblissement de son solidien par la propulsion de la base de l’étrier? Que le mouvement de cet osselet résulte de l’action musculaire, comme cela a lieu dans l’accommodation auriculaire, ou bien qu'il soit passif et expérimental {ce qui, par parenthèse, dénonce la nature mécanique et physique de l'arrêt de conduction) comme dans l'épreuve des pressions centripètes, c’est dans la pression elle-même qu’il faut chercher l’expli- SÉANCE DU 21 OCTOBRE 835. cation de l’abaissement de la conductibilité coïncidant avec limmobilisa- tion de la platine. La platine de l’étrier, cette mince : bre, mobile dans le cadre de la fenêtre ovale, transmet ses vibrations et ses mouvements à la Hé ntes qui la touche; comme le ferait une membrane. On sait avec quelle facilité on peut éteindre les vibrations des mem- branes tendues : or, le labyrinthe ne vibre que sous l'influence des ondes propagées par l’étrier. La largeur de la base de celui-ci comparativement à l'étendue de la fenêtre ovale, et à l’étroitesse de la bande membraneuse flexible qui unit l’un à l’autre, indique la puissance et l’énergie de la pression exercée, et explique l’effet instantané, l'arrêt brusque de la transmission, la charge s'étendant du même coup à toute la membrane conductrice. L'expérience suivante de mes cours à l’école pratique met le fait en évidence : Une vessie de porc remplie d’eau est posée dans un plateau, on l’en- veloppe d’une couche de plâtre fin, qui se solidifie; on a laissé un orifice pour adapter l’otoscope; et un cercle plus grand sur le haut, dans lequel est fixé un disque de plâtre, laissant à nu un demi-centimètre de la mem- brane tout autour de lui : ce disque est donc mobile. La montre posée à son contact est perçue au moyen de l’otoscope ; mais dès que l’on charge le disque de poids suffisants, on s’aperçoit que le tic-tac s’affaiblit et disparaît : La pression immobilise le disque, charge la membrane, et affaiblit ou éteint la conduction. On reconnait à ce dispositif simple, l'image de l’étrier et du labyrinthe amplifiés. C’est donc toujours la loi de conductibilité des membranes tendues qui règle celle de l'appareil auriculaire, instrument acoustique par excel- lence. La charge imposée à l’étrier coupe le courant sonore. La pathologie réalise trop souvent ces conditions de fixation de cet osselet, obstacles à la propagation des ondes au labyrinthe, et cause de surdité. Cela établi, on conçoit de reste que le sens dans lequel s'opère le déplacement de l’étrier et de sa base dans le cadre de la fenêtre ovale, le point juste de la portion flexible de la fenêtre qui se déprime ou se relève, importent bien moins que l’étendue du mouvement en dedans et la conservation de cette mobilité. Cependant les auteurs ont discuté ce point de physiologie; les uns ont admis un mouvement de la base de l’étrier en volet, c'est-à-dire une extrémité de l’ovale se portant en dedans, l’autre restant fixe; d’autres ont cru à un mouvement de bascule sur le petit diamètre ver- tical de cette platine ovalaire. Pour ma part, sur le cadavre et sur les ani- maux, je n'ai jamais vu ces sortes de déplacements à l’état sain; et j'ai au contraire été conduit à admettre un simple glissement de l'os dans 836 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE son cadre, de dehors en dedans sous l'action des pressions, et dans les limites qu'Helmholtz a fait connaître. Pour rendre le fait manifeste, jai construit un ensemble de leviers articulés représentant les proportions et les attaches fixes des osselets de l’oreille. En voici un spécimen; une bande de carton est fixée par son bout supérieur sur une planchette; elle figure l’enclume et son extrémité inférieure s'articule avec une bande de carton horizontale, glissant dans une rainure, qui représente l'étrier. Le marteau et le tympan sont figurés par une pièce faisant corps en haut avec la première (enclume). Or, tout mouvement imprimé au manche du marteau se transmet à l’étrier qui glisse horizontalement dans la rainure : c'est-à-dire que ces leviers articulés transmeltent un mouvement recti- ligne en dedans. La charge est donc directe; l’immobilisation est instantanée et l'affai- blissement du courant sonore immédiat. J'ai appliqué à la séméiotique auriculaire, ces notions de physiologie ; ce n’est point le lieu de l’exposer ici. Je ne voulais que toucher ce petit point de physiologie de l'organe de l’ouie. DIABÈTE EXPÉRIMENTAL ET DIABÈTE DE L'HOMME, par MM. Gcey ET CHARRIN. On s’est plu à répéter longtemps que l’expérimentation créait des symptômes, des lésions, mais qu'elle était impuissante à réaliser la maladie proprement dite. La bactériologie a réduit à néant une pareille affirmation, de même, d’autres tentatives, telles que la reproduction du myxædème par l’ablation du corps thyroïde, elc. IL est des plus aisé de faire naîlre la glycosurie, en tant que signe ou phénomène plus ou moins passager. — Peut-on également provoquer l’ap- parition d’un état neltement comparable au diabète sucré de l’homme? Les faits ont déjà répondu à cette question.— Néanmoins, considérant les animaux rendus souffrants par la destruction du pancréas, nous nous sommes efforcés d'établir entre les processus des diverses espèces une série de rapprochements. On sait que ces animaux, habituellement, offrent une symptomatologie plus ou moins comparable à ce qui se passe, dans des conditions ana- logues, en pathologie humaine. Il était légitime de se demander, si, en outre, ces chiens diabétiques, à l'exemple de l’homme, présentaient un terrain favorable à l’infection. L'observation a suffi pour résoudre le problème.—Dans plusieurs cas, "ALLIE SÉANCE DU 21 OCTOBRE 837 des suppuralions ont été notées; chez un seul sujet, nous avons constaté l'existence de quatre microbes : aureus, albus, bacille de la tuberculose, bacille spécial (1); tous s'étaient multupliés spontanément; nous n'avons pas eu besoin de recourir à l’inoeculation. Le parallèle devait être poursuivi sur le Lerrain anatomo-pathologique. Le plus souvent, les lésions sont nulles ou peu marquées : légère con- gestion hépatique, entérite superficielle, et c'est tout. Toutefois, on rencontre aussi de profondes allérations, dont les moins rares sont celles de l'intestin, du foie, du rein, du système nerveux. Le commencement de l'intestin grêle, particulièrement, porte les traces d’une inflammation qui consiste en une infiltration abondante d'éléments embryonnaires entre les glandes et jusque sous les culs-de-sac; la surface de la muqueuse est irrégulière, déchiquetée, parfois exulcérée. La dégénérescence graisseuse de l'organe biliaire s’observe; elle offre ceci de remarquable, qu’elle se développe, dans certains cas, suivant une systématisation double. Tout autour de la veine sus-hépatique, on note celte dégénérescence, de même à la périphérie du lobule ; entre ces deux zones, complètement noires sur des préparations à l'acide osmique, existent des cellules granuleuses, dont un bon nombre sont relativement saines. Le processus est simultanément péri-hépatique et péri-portal. Chez l'homme, M. Hanot nous a dit avoir rencontré cette topographie. M. Kaufmann, dans une communication orale, nous a également affirmé que, sur des chiens glycosuriques, il avait décelé semblables lésions. Nous avons vainement cherché le glycogène dans les épithéliums du rein. En revanche, plus d’une fois, ces épithéliums se sont montrés gra- nuleux, irréguliers, à bords internes non uniformes ; le revêtement, çà et là, faisait défaut; çà et là, la lumière des canaux était obstruée par des cylindres. La participation du tissu conjonctif a paru sans importance ; les modifications des glomérules, indiscutables cependant, sont peu in- tenses ; celles des vaisseaux sont nulles ; les collecteurs ont un catarrhe qui doit être secondaire. Nous n’avons pas vérifié la réalité des altérations nerveuses indiquées par plusieurs auteurs. Divers organes ou lissus, les muscles par exemple, nous ont paru nor- maux. En somme, sans prétendre fixer les cadres de ces désordres anato- miques, puisqu'ils varient d’un animal à l’autre, on peut dire que ces chiens, privés de pancréas, sont non seulement glycosuriques, mais dia- bétiques. (1) Voir Société de biologie, 4 mars 1893. — Ce chien a survécu trois mois à l'extirpation du pancréas, éliminant par jour jusqu'à 70 et 110 grammes de glycose; il est mort dans une cachexie profonde. — (Voir Société de biologie, 21 janvier et 4 mars 1893, pages 56 et 237.) 838 © SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les plus grandes analogies existent entre leur symptomatologie, entre leurs prédispositions à contracter des infections, entre les changements survenus dans leurs viscères, entre la marche, la terminaison du mal, et ce quise voit chez l’homme atteint de cette même affection diabétique. Chez l’homme, en effet, à ne rappeler que le côté anatomique, les lésions ne sont pas univoques, et, en dehors des complications, en dehors de l’action des bactéries qui, dans un cas comme dans l’autre, peuvent créer nombre d’altéralions et fausser des interprétations, en dehors de ces accidents, les organes les plus fréquemment touchés sont le tube digestif, le foie, le rein, l'appareil nerveux, etc. FLORE CRYPTOGAMIQUE DE LA BOUCHE ET DES CRACHATS, par M. le D' VicENTINi. J'ai publié, dans les Comptes rendus dé l’Académie médicale de Naples, trois mémoires sur la Flore cryptogamique de la bouche et des crachats, que j'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie, et dont je résume les conclusions dans cette note. Dans le premier mémoire (Sur les crachats de la coqueluche, 1890), j'ai rappelé, en premier lieu, l’attention des observateurs sur l'abondance de petites masses, particules, fils ou graaules de myéline, dans les crachats de plusieurs cas; ce qui pourrait dépendre, suivant moi, d'une désagré- gation ou dégénérescence transitoire de la gaine à myéline des terminai- sons nerveuses de la muqueuse aérienne, dans cette affection. Je décris ensuite les champignons et les moisissures des crachats (depuis Pransome jusqu’à Letzerich et Tschamer) avec les fructifications que j'en ai obtenu, ainsi que les tormes différentes de bacilles de bacté- ries et de coccus {depuis Poulet jusqu’à Afanasieff), qui, suivant moi, n'auraient rien de particu:ier pour l’étiologie de la coqueluche, de même que les autres bactéries des crachats, qui, dès lors, me semblaient, au contraire, procéder de la bouche et se rapporter, aussi bien que les pré-. cédentes, à une même espèce microbienne normale, le Leptothrix buccalis -de Ch. Robin. Ce serait donc le cas d’un pléomorphisme le plus étendu des bactéries -de la bouche et des crachats; mais, dans la signification d’une simple succession d'états ou phases de développement d'une même espèce micro- bienne, suivant les derniers morphologistes, plutôt que d'une transforma- lion d'espèces, suivant la conception primordiale du pléomorphisme. Dans le deuxième mémoire (Vouvelles études bactériologiques sur les -crachats, sur la morphologie et la biologie des microbes buccaux, 1892), J'ai été ramené, à l'égard de ces microbes, aux vues de Ch. Robin, con- Me SÉANCE DU 21 OCTOBRE 839 traires à celles, plus en crédit aujourd'hui, de M. W. D. Miller, de Berlin, suivi par M. Th. David. Après avoir résumé en particulier les différentes espèces de Miller (dans la partie historique et bibliographique, depuis Leeuwenhoek jusqu’à présent), je les ai respectueusement réfutées. Par des observations attentives, j'ai été amené à apercevoir l'unité fondamentale de toutes les formes microbiennes de la bouche et des cra- chats, avec les phases rudimentaires et supérieures du microorganisme (champignon ou algue), qui en serait le commun et unique ancêtre : le Leptothrix buccalis de Ch. Robin. J'ai aussi aperçu, au dehors de certaines tiges (femelles), les fructifica- tions; dans leur intérieur les gemmes de réserve, et, au dehors d’autres tiges (mâles) les organes fécondateurs de ce parasite. Cependant, avec le 1/18 homogène, je n'avais pas encore aperçu les pédoncules ou fils de jonction des spores avec la tige centrale; mais je les ai vus très nettement avec le 1/25 homogène (éclairage de Abbe, 1.40 ouverture numérique). La fructification du Leptothrix buccalis serait donc façonnée à grappes de raisin, par des spores disposées, au dehors de la tige fertile, sur six files longitudinales. Parmi les bactéries dites pathogènes, les pneumococcus ne seraient, suivant moi, que l'état zoogléique du Leptothrix (état commun, selon M. A. Billet, à plusieurs espèces de bactériacées); tandis que les bacilles dits de la tuberculose ne seraient que des spores ou fragments du même Leptothrix, répandus dans des terrains spéciaux. Le troisième mémoire (Du Leplothrix racemosa, 1893) est le déve- loppement et la continuation des deux précédents. La première partie renferme un résumé des notices bibliographiques sur les microbes de la bouche, et une exposition des analogies entre d’autres bactéries (Cladothrix dichotoma, Bact. Balbiani, Bact. osteophi- lum et Leptothrix parasitica Kützing), suivant la description de M. A.Billet et les phases inférieures (les seules formes connues jusqu’à présent) du Leptothrix buccalis. Dans la deuxième partie, je propose de changer la dénomination de Leptothrix buccalis en celle de Leptothrix racemosa, pour indiquer ses frucüufications ou sporulations que j'ai aperçues au dehors des tiges fer- tiles. Successivement, je décris mes nouvelles observations sur les élé- ments différents de cette fructification, qui seraient au nombre de quatre, c'est-à-dire : 1) la tige fertile ou filament central, avec des gemmes de réserve dans son intérieur; 2), les pédoncules ou stérigmates, sur six files longitudinales ; 3), les spores, et 4), la glia, ou enveloppe gélatiniforme, qui semble protéger la texture très délicate des fruits. - Avec des objectifs inférieurs à 1/25 homogène, on ne peut apercevoir les pédoncules coniques, stérigmates ou fils de jonction des spores avec la tige centrale, qui se placent sur six files au dehors de cette dernière. 840 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Je décris ensuite d’autres formes spéciales de filaments et de fructifica- tions, et certaines autres structures que je crois des organes mâles nais- sants (anthéridies ou spermogonies) de ce microorganisme très complexe et analogues aux algues en même temps-qu’aux champignons. Les bactéries ou bacilles ordinaires de la bouche, connus jusqu’à pré- sent, devraient, suivant moi, se rapporter : a) aux phases inférieures de la vie du même microorganiseme (c’est-à-dire l’éfat filamenteux, ou l’état dissocié, ou l’état zoogléique), ou, b) aux spores détachées des tiges femelles, ou bien, c) aux éléments fécondateurs (anthérozoïdes ou sperma- ties) détachés des organes mâles adultes et nageant très vivement dans le milieu. : Au premier groupe, a), se rapporteraient les formes rectilignes de la bouche (les filaments, les bacilles et les bactéries) aussi bien que les formes courbes (en vibrio, en spirillum et en spirochaele); au deuxième groupe, à) les coccus, et au troisième, c) les bacilles en virgule, le Bacillus tremulus de Rappin et quelques autres formes décrites par moi. | Parmi les bactéries dites pathogènes, plusieurs ne seraient que de simples dérivations du même microorganisme normal; entre autres le pneumococcus, Le bacille de Koch et le gonococcus de Neisser, qui ne serait qu'une modificalion particulière du dernier stade (en forme de sarcina) du même état zoogléique ci-dessus. La méthode pratique pour l'étude des faits que je viens d'exposer peut se résumer de la façon suivante : : Pour l’observalion des phases supérieures du Leptothrix buccalis, il faut prendre le matin, à jeun, un échantillon de l’enduit dentaire (materia alba, patina dentaria, tartar, enamel cuticle, Zahnbelag), des dents nt dépolies ni brossées. Les fructifications demeurent dans la couche plus superficielle, tandis que les vieux filaments (Leptothrix buccalis maxima et Bacillus buccalis maximus de Miller) demeurent dans la couche inférieure. Il faut, pour cela, enlever délicatement un morceau très petit (un quart de grain de millet) de la surface de l'enduit, avec la pointe d'une aiguille courbe, dissocier ce fragment, au moyen des deux aiguilles, sur le porte-objet, au milieu d’une gouttelette d'eau d’aniline, puis colorer faiblement avec le violet de gentiane et monter sans lavage. On comprime légèrement la préparation pour étaler les paquets de filaments et de fruclifications. | On peut également se servir de l'acide lactique au lieu de l’eau d’ani- line, et de la solulion iodo-iodurée au lieu du violet de gentiane. Ces préparations à l’iode sont des plus démonstratives pour montrer la forme à grappes de raisin, avec le 4/25 homogène, éclairage de Abbe, 1.40 ouverture numérique. On peut bien rencontrer, même sans coloration, des fructifications sem- blables dans lés crachats de la pneumouie, de la tuberculose, etc., surtout sur les bords de la préparation, lorsqu'on en a écrasé un petit fragment. SÉANCE DU 21 OCTOBRE 841 L'observation des organes mâles adultes est très délicate ; il ne faut ni colorer, ni écraser la préparation, mais examiner directement sans couvre-objet. Cependant, pour voir ces organes au moment de leur appa- rition, il faut avoir recours à la coloration par le violet de gentiane et à de forts objectifs. DE LA PRODUCTION DU TÉTANOS CHEZ LA POULE ET DE LA CRÉATION ARTIFICIELLE DE L'IMMUNITÉ CHEZ CET ANIMAL, par MM. J. Courmont et M. Doyon. (l'ravail des laboratoires de M. Arloing et de A. Morat.) Tous les expérimentateurs (Kitasato, Vaillard, Roux) qui ont essayé de tétaniser la poule en lui injectant des cultures complètes ou filtrées du bacille de Nicolaïer ont échouédans leurs tentatives. Ils l'ont donc décla- rée réfractaire au tétanos. Or, Vaillard ayant démontré que le sérum de la poule n’est pas naturellement antitétanique, maïs le devient seulement après une injection de fortes doses de cultures filtrées; ce fait n’a pas manqué d’être exploité contre les théories chimiques de l’immunité. L'état réfractaire existait dans ce cas en dehors de toute propriété antité- tanique des humeurs. Sans vouloir prendre parti dans le débat, nous pouvons cependant affirmer que la poule est peu sensible. maïs n’est pas réfractaire aux pro- duits solubles du bacille de Nicolaïer. On engendre facilement un tétanos mortel chez cet animal en lui injectant des doses massives de culture filtrée d’activité moyenne ou des doses relativement faibles de culture filtrée très active. Bien plus, la vaccination de la poule s'obtient par l'injection de quantités de culture filtrée insuffisantes à produire le tétanos; c'est-à-dire que le procédé par lequel les auteurs obtiennent un sérum antitétanique est précisément celui qui confère l’état vaccinal. I. Symptômes du tétanos chez la poule (4). — Les contractures débutent par la région inoculée (par une palte dans nos observations). L'animal boite et ne peut échapper aux poursuites. L'autre patte se prend, puis les ailes. La poule offre alors une allure très curieuse d’échassier : les pattes sont droites et raides, les doigts écartés. La soulève-t-on en l’air par les ailes, les pattes s'étendent et sont animées de secousses continuelles. Si on la jette en l’air, elle tombe lourdement comme une masse ne pouvant (1) La poule I a été présentée vivante en pleine période tétanique à la séance du 21 juin 1893 de la Société des sciences médicales de Lyon. 29. 842 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ni étendre les ailes ni se recevoir sur ses pattes. Le plus petit contact, le moindre bruit exagèrent les contractures. Une dyspnée manifeste s'établit rapidement. | | Ces symptômes peuvent s’amender progressivement et la poule guérir. Si le tétanos est mortel, on observe bientôt le tableau suivant : couchée sur le côté ou sur le dos, en tous cas incapable de se tenir debout, la poule est animée de secousses continuelles des pattes et des ailes, pous- sant des cris plaintifs à la moindre excitation. De temps à autre un véri- table opistothonos s'établit, le cou se raidissant et venant s'appliquer sur le dos de l’animal. L'aspect de cette poule dénote les plus vives souffrances. La dyspnée effrayante s'accompagne de cyanose intense. La température oscille entre 40 et 41 degrés. La poule peut vivre de trois à huit jours dans cet état; elle meurt squelettique emportée par un dernier accès dyspnéique. IT. — Nous avons d’abord obtenu le tétanos de la poule en lui injectant quelques centimètres cubes d’une culture en bouillon de bacilles de Nicolaïer filtrée, extrêmement active. Cette culture, injectée sous la peau à la dose de 4 centimètre cube, tuait le lapin en trente-six heures après une incubation inférieure à vingt-quatre heures, c’est-à-dire son acti. vité (1). Voici un tableau de ces expériences : Culture filtrée très active. DOSE | RÉGION POULES RÉSULTATS |INCUBATION INJECTÉE | INJECTÉE I 8 c. ©. | Cuisse. 6 jours. II 9,2 Cuisse. —- + + Cuisse. IT. — Il est très rare de posséder une culture filtrée aussi aclive que la précédente. Voici les résultats obtenus avec une culture d'activité moyenne, qui tuait le lapin (1 centimètre cube injecté sous la peau) en (4) Pour avoir un terme de comparaison dans l'appréciation de l’activité de nos cultures filtrées, nous nous servons de l'injection sous-cutanée au chien ou au lapin: Le cobaye est trop sensible, 1 centimètre cube d’une culture filtrée d'activité moyenne tue lentement le lapin après une incubation de 36 à 48 heures. SÉANCE DU 21 OCTOBRE 843 cinq jours avec une incubation de quarante heures. Il a fallu des doses considérables pour produire le tétanos, mortel ou non, de la poule. IV. — La poule qui a recu des doses même minimes de culture filtrée est devenue réfractaire aux produits solubles du bacille de Nicolaïer. Pour Culture filtrée d'une activité ordinaire. DOSE |RÉGION DURÉE POULES RÉSULTATS |INCUBATION du ÉVOLUTION INJECTÉE | INJECTÉE TÉTANOS Cuisse. Cuisse. V. axil. Cuisse. » Cuisse. 6 jours. 1i jours.| Guérison. Cuisses De D Mort. et dos. nous en assurer, nous avons soumis les quatre poules (IV, V, VI, VIT) du = second tableau ci-dessus qui avaient résisté, à une seconde injection Culture filtrée trés active. DOSE | RÉGION DURÉE |. POULES RÉSULTATS |INCUBATION| du |ÉVOLUTION INJECTÉE | INJECTÉE TÉTANOS 9 c. c. | Cuisse. 9 Cuisse. 9 Cuisse. 1 jours. 10 jours.| Guérison. _ un + SE e & 52 PE a ie D Ge) Cuisse. 9 Guérison. Cuisse. 8 Mort. d’une dose suffisante de la culture filtrée si active du premier tableau, c’est-à-dire devant produire à coup sûr un tétanos mortel. Une poule neuve (X) servira d’ailleurs de témoin. Les 4 poules ont résisté ; 2? n'ont 844 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE jamais rien présenté, 2 ont eu quelques symptômes très légers de tétanos et ont guéri. Le témoin est mort tétanique. V. — La poule est donc peu sensible aux produits solubles du bacille de Nicolaïer, mais ne leur est pas réfractaire. On peut lui donner un tétanos mortel. Il y a, comme pour tous les animaux, une période cons- tante d’incubation entre l'introduction des produits solubles et l’appari- tion des premières contractures. Celles-ci débutent par la région infectée. Une dyspnée et une cyanose considérables les accompagnent. La tempé- rature est élevée. La guérison peut s’observer. La vaccination de la poule s’obtient par l'injection de doses de cultures filtrées insuffisantes à produire le télanos, c’est-à-dire par l'opération qsi, d’après les auteurs, rend le sérum de la poule antitétanique. Les expérimentateurs qui ont échoué dans la production du tétanos chez la poule ont employé des doses trop minimes de cultures trop peu actives. Kitasato n'injectait que 45 centimètres cubes dans les muscles et en plusieurs fois. Vaillard a bien injecté 60 centimètres cubes mais dans le péritoine et en trois doses, à des dates éloignécs, c’est-à-dire en réalité 20 centimètres cubes à la fois; or 20 centimètres cubes d’une culture d'activité moyenne constituent la dose limite que l’on doit habituellement dépasser pour engendrer le tétanos. Enfin, on peut encore dire que la première dose avait produit l’état réfractaire. SUR UN CAS DE TÉTANOS CHEZ L'HOMME PAR INOCULATION ACCIDENTELLE DES PRODUITS SOLUBLES DU BACILLE DE NICOLAÏER, par M. J. Nicoras, Interne des hôpitaux de Lyon, Préparateur attaché au laboratoire de M. le professeur Arloing. Il s’agit d’un tétanos typique dont j'ai failli être victime à la suite de l'injection accidentelle d’une dose très faible de culture iltrée du bacille de Nicolaïer. Cette culture filtrée était extrémement active. Injectée sous la-peau du lapin à la dose de 1 centimètre cube, elle tuait cet animal en 36 heures, après une période d’incubation inférieure à 24 heures. Le liquide qui m'a contaminé provenait du lube même employé par MM. Courmont et Doyon pour lélaniser la poule à la dose de 8 centi- mètres cubes (1). (4) Courmont et Doyon. De la production du tétanos chez la poule et création artificielle de l’immunité chez cet animal. (Sociéte de Fbiologie, 21 octobre 1893). SÉANCE DU: 21 OCTOBRE 845 — ———— L'accident a consisté en une simple piqüre assez profonde faite à la main avec une aiguille de Pravaz stérilisée au préalable, qui venait de servir à l'injection de cette culture filtrée, et n'en contenait donc qu'une dose inappréciable. Voici d’ailleurs mon observation : 26 juillet. — Piqüre à 5 heures du soir dans l’éminence thénar de la main gauche avec une aiguille stérilisée, humide des produits solubles du bacille de Nicolaïer, qui venait de me servir à inoculer les poules des expériences de MM. Courmont et Doyon. Le sang coule en abondance de la blessure. 30 juillet. — Rien à noter ni localement, ni dans l’état général jusqu’à ce jour. À 8 heures du matin plongeant les mains dans de l’eau froide : brusque- ment contracture du pouce gauche en adduction. État stationnaire jusqu'au soir : pas d'élévation de température. 31 juillet. — Les contractures se généralisent à toute la main gauche et à l’avant-bras (flexion forcée des doigts et de la main avec inclinaison sur le bord cubital) à l’occasion d’un nouveau contact avec l’eau froide. — Bon état général — ni douleur, ni élévation de température. 2 août. — Les contractures du membre supérieur gauche s’accentuent sans se propager à d’autres muscles. — Le soir, apparition d’un érismus léger. 8 août. — Contracture absolue de la main et de l’avant-bras gauche. -- Le trismus a considérablement augmenté; la mastication est impossible. — Un peu d’amaigrissement, pas d’élévation de température. 9 août. — Jusqu'à ce jour rien n'avait été changé dans mes habitudes, sauf pour l'alimentation qui était difficile. — Les mouvements de la langue étaient également gènés. À 8 heures du soir, crise brusque d’Opistothonos très pénible avec dyspnée pendant un quart d'heure environ. — Agitation, pas d’élévation de tempéra- ture. A partir de ce moment : repos absolu au lit à l’abri du bruit et de la lumière, el administration buccale de hautes doses de chloral. à 10 août. — Sommeil presque continuel ; 14 grammes de chloral. — Au réveil: agitation, contractures généralisées à la moindre excitation, — Pas d’élévation de température, 13 août. — Chloral: 8 à 12 grammes par 24 heures. — État stationnaire, agitation extrême. Névralgies dans le domaine des deux fessiers. Pas d’albu- mine dans les urines. Frissons. Pouls : 80. Pas d’élévation de température. 44 août. — Douleurs rachidiennes et lombaires, avec signe d’Epilepsie spi- nale. — Etat stationnaire — Agilation. Chloral: 7 grammes. Bromure de sodium, 3 grammes. 16 août. — M'étant levé pour la première fois le trismus et les autres con- tractures ayant paru diminuer, le soir: frissons, sueurs, profuses, crise pénible d’Opistothonos qui dure quelques minutes. CH al. 18 août. — Les contractures semblent diminuer. Signes de congestion médul- laire : exagération des réflexes rotuliens, trépidation épileptoïde des membres | fu inférieurs. Agitation. AS ; 846 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 20 août. — L'amélioration commence définitivement. Cependant, persistance du frismus, des contractures de la nuque, de la main et de l’avant-bras gauche. Chloral : 4 grammes. 21 août. — L'amélioration continue. — La marche se fait par mouvements incoordonnés et convulsifs (démarche ataxique).— Grande susceptibilité au froid. Sueurs profuses. Affaiblissement de la vue. Chloral : 6 grammes. 1 septembre. — Grande amélioration. Une première sortie d'un quart d'heure ramène des confractures généralisées pendant quelques heures. 3 septembre. — Suppression du chloral. 43 septembre. — Amélioration continue. Il ne reste que les contractures de la main gauche et le trismus, surtout à la suite des excilations. Grande excitabilité médullaire. 19 septembre. — La guérison peut être considérée comme définitive sauf un peu de gène dans les mouvements de la main gauche. 15 octobre. — La guérison est complète. Il existe cependant encore des signes de congestion spinale. En résumé : un tétanos généralisé ayant duré quarante et un jours a été la conséquence de l'introduction sous-cutanée d’une dose infime de cullure filtrée du bacille de Nicolaïer. U'esl, je crois, le seul cas observé de tétanos expérimental chez l’homme, qui se place ainsi en tête des espèces animales par ordre de sensibilité aux produits solubles du bacille de Nicolaïer. Les seules particularités cliniques à rappeler sont l'absence constante de température et les symptômes très nets de congestion spinale et de sensibilité au froid à la dernière période. La région injectée a été le siège des premières contractures qui ont été également les dernières à disparaître. Au point de vue expérimental, on remarquera l'existence d’une période silencieuse d'incubation de quatre jours, bien que l'injection ait contenu les substances solubles toutes formées. L'homme se comporte donc à ce point de vue comme tous les animaux ; les contratures n'apparaissent pas chez lui immédiatement après l'introduction du poison tétanique, ce qui tend à confirmer la théorie de MM. Courmont et Doyon. Ce poison n’est pas toxique par lui-même, mais fabrique la substance strychnisante aux dépens de l'organisme; cette phase indispensable de fermentation constitue la période d’incubation. PRÉSENTATIONS. . M. »'ARsoNvaL présente, de la part de M. Waseige, constructeur, une seringue hypodermique dont l’étui, entièrement métallique, contient une lampe d'alcool pour le flambage des différentes pièces de l’instrument. SÉANCE DU 21 OCTOBRE 847 M. Marassez. — M. Aubry a construit sur mes indications une boîte métallique permettant de stériliser la seringue et les aiguilles qu’elle ren- ferme, en y mettant de l’eau qu’on fait bouillir. C'est une boîte plate dont le couvercle supérieur s’enlève complète- ment mais peut être relié à la boîte par une petile tige. Selon la façon dont cette tige est placée, le couvercle peut servir de poignée, si l’on veut maintenir la boîle au-dessus d'une flamme quelconque ; ou bien être mise à quelque distance au-dessous d'elle, de façon à y faire brûler de l'alcool. L'ébullition commence au bout d’une minute, et dure deux minules si l’on a versé une cuillerée à café d'alcool, trois minutes si l’on en a versé trois. La seringue et les aiguilles sont maintenues par une sorte de tuteur que l’on peut faire basculer au dehors de la boite, ce qui permet de les faire refroidir plus vite et de les saisir plus facilement. Grâce à une petite pince qui se trouve dans la boîte, on n’a pas à y toucher avec les doigts. A propos des pistons d'amiante que j'ai beaucoup essayés, il y a une dizaine d'années et que M. Waseige a adoptés, je dirai que ceux en amiante pure et comprimée sont parfaits de douceur et d'étanchéité, ils ont seule- ment le grave défaut de s’effilocher. On peut y remédier sans trop nuire à leurs qualités en les entourant d’une très fine mousseline; celle-ci doit être assez lâche pour que l'amiante, en s’imbibant de liquide, puisse prendre tout son développement. Ceux en carton d'amiante s’effilochent beaucoup moins, mais ils sont moins souples et par suite exigent des corps de . pompe très réguliers et un ajustement plus parfait pour être bien étanches. Ils demandent aussi un peu plus de temps pour s’humecter et reprendre leur volume quand ils ont été desséchés. M. Luër m'en a cons- truit autrefois qui nous ont fait un excellent usage. Ceux dont je me sers surtout maintenant sont, soit en caoutchouc très chargé d’amiante, soit en fibre vulcanisée. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MarerHEux, directeur, 1, rue Cassette. * LDRNACRR LE R TN rats Dr Fee LME LE CNOTR OEELE den des 2 AL SREEEN MST IST Au55 D xumaTrRAÎE (1 OUEN TE DE 00 SE: ET 849 SÉANCE DU 28 OCTOBRE 1898 M. Cu. Féré : Note sur l'influence de l'exposition préalable aux vapeurs de chloro- forme sur l’incubation des œufs de poule. — M. Cu. Fé£ré : Note sur l'influence de l'exposition préalable aux vapeurs d'essence de térébenthine sur l’incubation des œufs de poule. — M. Henri Martin : Sur les mouvements produits par la queue du lézard, après anesthésie. — M. V. Haxor : Note sur les nodules du foie infec- tieux; nodules infectieux dans la fièvre typhoïde et la tuberculose intestinale. — M. A. Conte : Sur l'absorption des virus par les muqueuses.— M. À. GraRD : À propos de l’animal de la Spirule (Spirula australis Lamk). — M. ArPnonse LABBÉ : Sur la signification des formes à flagella de la malaria de l’homme et des oiseaux. — M. Lavera : (Remarques). — M. A. Dasrre : À propos de la vitesse toxique des injections. — M. N. Gréuanr : Nouvelles recherches sur les produits de la com- bustion du coke dans le brasero. Ï Présidence de M. Galippe. M. Sanson fait hommage à la Société, au nom des auteurs, des ou- vrages suivants : 1° Étude histologique de la sécrétion du lait, par M. le D' Duc; 2 Recherches de l'influence de l'alimentation sur la richesse du lait, par M. Gay. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'EXPOSITION PRÉALABLE AUX VAPEURS DE CHLOROFORME SUR L'INCUBATION DES OEUFS DE POULE, par M. Cu. FÉRé. J'ai déjà appelé l’attention de la Société sur l'influence nocive de l’ex- position préalable des œufs de poule aux vapeurs d’éther sur l’incuba- tion ; il y avait lieu de penser que les mêmes effets seraient produits par les vapeurs de chloroforme. Cependant l’expérience ne manquait pas d'intérêt, ne fût-ce que comme contre-épreuve. I. — J'ai pris douze œufs au cinquième jour de la ponte, et je les ai placés pendant 2 h. 20 m. sous une cloche de verre de la capacité de 30 Litres, peinte en noir et bien opaque, avec une assietté contenant ‘BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V, 30 850 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 200 grammes de chloroforme, dont il s'est évaporé 30 grammes pendant l'expérience. Ces œufs ont été mis à l’étuve de Roux en même temps que douze œufs témoins de même date, tous orientés la grosse extrémité à droile. 4° Deux œufs, un témoin et un œuf chloroformisé ont été ouverts après 24 heures ; le témoin avait un développement de 15 heures environ, l'œuf chloroformisé de 10 heures seulement. 2° Six œufs de chaque catégorie ont été ouverts, en alternant, de la 47° à la 50° heure. Cinq fois le développement était plus avancé dans l'œuf témoin, une seule fois il était un peu plus avancé dans l’œuf chlo- roformisé. Le développement moyen des six Lémoins était de 25 h. 1/2. Le développement moyen des œufs chloroformisés de 15 h. 1/2. De même que dans les œufs ouverts le premier jour, il n'y avait aucune anomalie de direction de l'embryon. Nous reviendrons plus tard sur les anomalies de l’aire vasculaire. Il y avait un embryon monstrueux dans les œufs chloroformisés. 3° Quatre œufs de chaque catégorie ont été ouverts de la 71° à la 73° heure. Dans deux couples le développement est plus avancé dans les. témoins. Dans deux il est plus avancé dans les œufs chloroformisés, mais. l'embryon d’un témoin est mort et monslrueux. Le développement moyen des trois embryons témoins est de 43 h. 1/2, le développement de quatre embryons des œufs chloroformisés est de 40 heures. Il n’y a qu'une déviation de la direction de la tête de l'embryon à 45 degrés vers la grosse extrémité, c’est dans un œuf témoin. = 4° Le dernier couple a été ouvert à la 96° heure. Le témoin avait un développement normal de 90 heures, l'embryon de l'œuf chloroformisé était dévié à 45 degrés vers la grosse extrémité et n'était parvenu qu'à la 68° heure environ. L'ensemble de ces examens montre en somme-un arrêt de développe- ment important sous l'influence de la chloroformisation préalable. L’ex- périence suivante est tout à fait confirmative de la première. II. — Dix œufs ont été exposés comme précédemment, mais pendant 4 h. 45, aux vapeurs de chloroforme, et mis à l’étuve en même temps que 10 témoins dans les mêmes conditions que dans la première expérience. i° Cinq paires ont été ouvertes de la 91° à la 94° heure. Une seule fois il n’y avait aucun développement, c'était dans un œuf exposé au chloroforme. Dans trois autres couples le développezment était. plus avancé dans les témoins. Une seule fois il y avait égal développe- ment dans le témoin et dans l’œuf chloroformisé. Les quatre embryons des œufs exposés aux vapeurs de chloroforme avaient un développement uniforme de 52 heures environ, tandis que ceux des œufs témoins étaient en moyenne de plus de 88 heures. Parmi les témoins, un embryon était mort récemment, un aulre présentait une hétérotaxie et une torsion du SÉANCE DU 28 OCTOBRE . 81 tronc, un autre était dans le grand axe de l’œuf, la Lête vers la grosse extrémité. Dans les œufs chloroformisés, il y avait deux déviations à 45 degrés dans le même sens. 2 Les cinq autres paires ont été ouvertes de la 1399 à la 449° heure. Parmi les œufs témoins, un embryon mort au deuxième jour ; les quatre autres ont un développement moyen de 118 heures; et l’un présente une hydropisie de l’amnios. Parmi les œufs soumis aux vapeurs de chloro- forme, il y a une absence complète de développement, deux embryons monstrueux et morts; les deux embryons normaux sont arrivés au 120° et à la 52° heure du développement (en moyenne 86). On voit par ces faits dans quelle mesure l’exposition de courte durée aux vapeurs de chloroforme peut ralentir et.troubler le développement ; mais l'arrêt de développement définitif est au moins exceptionnel. M. Troyon a soumis à l'analyse chimique quatre œufs qui avaient été exposés pendant 2 h. 20 m. aux vapeurs de chloroforme. Il y a trouvé la réaction du chloroforme qui existait toutefois en trop petite quantité pour être dosé. III. — Si on augmente considérablement la durée de l'exposition aux vapeurs de chloroforme, on peut supprimer complètement le développe- ment. Douze œufs qui étaient restés 24 heures dans la cloche avec du chloroforme n’ont donné lieu à aucun développement, bien queles témoins aient présenté un développement normal : 1° six couples ont été ouverts après la 48° heure. Dans les œufs témoins, il y avait une seule absence de développement ; les cinq embryons avaient un développement moyen de 36 heures et deux présentaient une déviation de 43 degrés; 2° Les six autres ont élé ouverts après la 96° heure. Il y avait six embryons de 13 heures en moyenne dans les œufs témoins, un seul était fortement tordu. IV. — Du reste il est vraisemblable que tous les agents qui sont capables de retarder le développement, peuvent, si on prolonge la durée de leur action, le supprimer complètement; il en est ainsi encore pour l'alcool. En exposant douze œufs aux vapeurs d’alcool absolu pendant 72 heures au lieu de 24 et 48 comme dans les expériences précédentes (1), le déve- loppement a été complètement supprimé : 1° Quatre œufs et un même nombre de témoins ont été ouverts après 72 heures; tandis qu'il n’y avait aucun développement dans les œufs (1) Ch. Féré. Note sur l'influence de l'exposition préalable aux vapeurs d'alcool sur l’incubation de l'œuf de poule, Comptes rendus de la Soc. de Biol., 1893; p. 173. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE (@e) (æyd re alcoolisés, il y avait 4 embryons normaux de 49 heures en moyenne dans les témoins; | 2° Huit couples ont été ouverts après la 965 heure. Dans les œufs alcoo- lisés, il n'y avait qu'un blastoderme sans embryon et cinq absences de développement. Dans les témoins, il y avait deux absences de déve- loppement, un embryon kystique et cinq embryons normaux d’un déve- loppement de 102 heures en moyenne (deux d'entre eux élant beaucoup plus développés que leur âge ne le comportait). Les deux premières expériences comme celles que nous avons rappor- tées précédemment et relatives à l’éther (1) montrent bieu que le déve- loppement peut être suspendu sans être arrêlé définitivement par l’expo- sition aux vapeurs anesthésiques. Cl. Bernard, à la suite d'expériences rapportées sans détails d’ailleurs (2), avait conelu à l'arrêt définilif qui ne se produit qu'à la suite d'une exposition prolongée. Ces expériences con- firment donc la loi générale de CI. Bernard, à laquelle il avait eru trou- ver une exception. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'EXPOSITION PRÉALABLE AUX VAPEURS D'ESSENCE DE TÉRÉBENTHINE SUR L'INCUBATION DES OEUFS DE POULE, par M. Cu. FÉRÉ. Les observations et les expériences de Mialhe et de Marchal, de Calvi, ont bien montré l'influence pathologique sur l’homme et les animaux des vapeurs d’essence de térébenthine ; et des faits de même ordre ont été observés assez souvent depuis (3). Dans un cas de Potain, il y eut un avortement, tardif il est vrai. I. J'ai placé douze œufs, au cinquième jour de la ponte, sur un eristal- lisoir peint en noir et bois opaque, de 10 litres de capacité, en même temps qu’une assielte contenant 480 grammes d’essence de térébenthine, dont il s’est évaporé 10 grammes pendant la durée de l'exposition, qui a duré 2 h. 20 m. Ces œufs ont été placés, orientés le gros bout à droite, (4) Note sur l'influence de l’éthérisation préalable sur l’incubation des œufs de poule, Comptes rendus de la Société de Biologie, 1893, p. 749. (2) CL. Bernard. Leçons sur les phénomènes de la vie commune aux animaux el aux végétaux, t. X, p. 275. (3) Potain. Accidents produits dans une fabrique par l'emploi de l’essence de térébenthine, Gaz. des hôp., 1819, p. 761. — L. Hahn, art. « Térébenthine », Dict. encyclopéd. des sciences mèd., 1886, 3° série, t. XVI, p. 424. SÉANCE DU 28 OCTOBRE 853 dans l’étuve de Roux, en même temps que des œufs exposés au chloro- forme et des témoins du même âge. 1° Un couple a été examiné après 24 heures, l'œuf témoin montrait un développement de 15 heures, l’œuf exposé aux vapeurs de térébenthine un développement de 10 heures. 90 Six œufs de chaque catégorie ont été ouverts en alternant de la 47° à la 50° heure. Dans trois couples l'embryon témoin était plus déve- loppé; dans un, il y avait égalité de développement ; dans deux, l’em- bryon de l’œuf exposé aux vapeurs de térébenthines était plus développé. Parmi les œufs térébenthinés, il y avait un embryon difforme et un autre mort. Tandis que la moyenne du développement dans les 6 œufs témoins est de 25 h. 1/2, elle dépasse 26 h. 1/2 dans les 5 œufs térébenthinés cu l'embryon est vivant. Il n’y a aucune anomalie de direction. 3° Quatre œufs de chaque catégorie ont été ouverts de la 71° à la 73e heure. Dans un seul couple le développement est plus avancé dans l’œuf témoin ; dans les trois autres, il est notablement plus avancé dans l’œuf térébenthiné. En effet, tandis que le développement moyen n'est que de 43 h. 1/2 dans les 3 œufs témoins (où il y a un embryon mort et monstrueux), il est de 50 heures dans les 4 œufs térébenthinés qui n'of- frent aucune anomalie ni déviation. 4° Le dernier couple a été ouvert à la 98 heure. Le témoin avait son développement normal de 96 heures, tandis que dans l'œuf térébenthiné le développement atteignait à peine la 82% heures. Les résultats de cette expérience montrent que l’exposilion de peu de durée aux vapeurs de l'essence de térébenthine ne trouble pas le déve- loppement de l'embryon dans l'œuf de poule. On pourrait mème être tenté de dire qu’elle lui est favorable. IT. — Dix œufs ont été placés comme précédemment dans un récipient où se dégageaient des vapeurs d'essence de lérébenthine, ils y sont restés 27 heures, ils ont été ensuite mis à l’étuve en même temps que 10 témoins du même âge. 4° Cinq couples ont été ouverts entre la 91° et la 94° heure, Tandis que dans les témoins le développement est de 88 h. 3/4, il est de 54 h. 1/2en moyenne dans les œufs exposés aux vapeurs de térébenthine, où on trouve un monstre mort (acéphalie, duplicité du cœur). Parmi les témoins il y avait un embryon récemment mort, une hélérotaxie avec lorsion du tronc, et une déviation à 90 degrés. 20 Les cinq autres couples ont été ouverts de la 13Q° à La 142° heure. Dans les œufs témoins, il y a un embryon mort au 2° jour; les & autres ont un développement moyen de 118 heures et l’un présente une hydropisie de l’amnios. Parmi les œufs soumis aux vapeurs de l'essence de térébenthine, il y a un développement nul, 3 embryons monstrueux 854 SOCIÔTÉ DE BIOLOGIE (2 omphalocéphales et un arrêt de développement de la tête) et 1 seul embryon normal arrivé à la 140° heure du développement. III. — Neuf œufs ont été exposés pendant 72 heures aux vapeurs de l'essence de térébenthine dans les mêmes conditions que précédemment, et mis à l'étuve en même temps que 9 témoins de même date. 1° Trois couples ont été ouverts de la 47° à la 49° heure. Il y avait un défaut de développement dans chaque catégorie. Les deux embryons des œufs témois avaient un développement moyen de 33 heures. Ceux des œufs soumis aux vapeurs d'essence de térébenthine, un développe- ment moyen de 27 heures. 2° Quatre couples ont été ouverts de la 50° à la 72° heure. Il y a encore un développement nul dans chaque catégorie. Dans les œufs témoins, le développement moyen est de 68 heures, les trois embryons sont normaux, sauf que l’un est dévié à 90 degrés. Dans les œufs soumis aux vapeurs de térébenthine, il y a un embryon kystique; les deux autres, dont l’un est hétérotaxique, ont un développe- ment moyen de 52 heures. 3° Deux couples ont été ouverts à la 96° heure. Dans les œufs témoins, il y a un embryon kystique et un embryon arrivé à la 88° heure. Dans les œufs soumis aux vapeurs de térébenthine, il y a un embryon omphalo- céphale et ua embryon arrivé à la 96° heure. Ces faits montrent qne, si lexposilion prolongée aux vapeurs d’es- sence de térébenthine peut causer un cerlain retard de développement et des anomalies, il n’en est pas toujours ainsi, puisque le développement est quelquefois normal, à la fois au point de vue morphologique et au point de vue chronologique. Nous retrouverons des exemples d’immunité du mêne genre dans d’autres expériences. SUR LES MOUVEMENTS PRODUITS PAR LA QUEUE DU LÉZARD, APRÈS ANESTHÉSIE, par, M. Her MARTIN. Sur un lézard soumis à l’anesthésie du chloroforme, de la benzine ou de l'alcool, la résolution complète élant oblenue, j'ai observé un phéno- mène curieux, qui, je crois, n’a pas encore été signalé. 1° L'xpérience. — Si on tranche la queue de l'animal en un point quel- SÉANCE DU 28 OCTOBRE 855 conque de son étendue, sauf à sa terminaison extrême, on voit le seg- ment coupé se mouvoir immédiatement el spontanément, el décrire des courbes alternativés à droite et à gauche, mouvements semblables à ceux que produit l& queue dans la marche d’un de ces reptiles non mutilé. A la résolution anesthésique peut se substituer l'immobilité obtenue par un choc violent sur la tête. Dans ces conditions, l'expérience réussit aussi bien qu'après les anesthésiques. C'est en me voyant faire la pre- mière expérience, que M. le professeur Mathias Duval me donna l'idée de substituer le choc aux anesthésiques. 2 Expérience. — Si la queue est fractionnée par segments de À cen- timètre en commençant par l'extrémité effilée, on constate qu’il existe une zone non mobile représentant 1 ou 2 centimètres, suivant la taille de l’animal. Cette portion cerrespond peut-être à la limite de l’axe neu- ral ? C’est ce que je chercherai à déterminer plus tard. 3° Expérience. — Si le segment mobile qui vient d’être coupé est sou- mis à l’anesthésie, il résiste très longtemps, et quand immobile, il est mis à l’air libre, les mouvements ne reparaissent pas, il est donc tué. 4° Expérience. — Sous l’anesthésie, la queue encore rattaehée au corps n'est point sensible aux piqürés. k 5° Expérience. — Si on détruit la moelle en un point de la queue avec une aiguille rougie au feu, le bout périphérique s’agite comme dans l’ex- périence précédente, tout en restant attenant au corps immobile. — On sait d'après les recherches de Claude Bernard, que les anesthé- siques agissent d’abord sur les hémisphères, puis sur la moelle et enfin sur le bulbe, et que, d’après M. le professeur Dastre, la résolution muscu- laire est obtenue lorsque la moelle est profondément imprégnée, période à laquelle il n’existe plus ni mouvements volontaires, ni mouvements pro- voqués. Ces données peuvent expliquer en partie cette expérience, et sans con- clure d’une facon définitive, je me résumerai en ces termes : Tant que la queue reste en continuité avec le corps, et par l'intermé- diaire de celui-ci avec les centres céphaliques, elle reste immobile, je dirai même anesthésiée indirectement. Dès que la queue est séparée, toute connexion avec le système nerveux central disparaissant, les centres nerveux qui se trouvent dans l’extrémité caudale retrouvent leur autonomie. La queue recouvre ses fonctions, mais sans ordre et sans direction, et se meut jusqu’à épuisement. On peut donc la considérer comme maintenue immobile, mais non imprégnée ou ébranlée chez le lézard en état d’anesthésie ou de choc. 856 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On pourrait croire que les phénomènes observés ‘sont le résultat d’un réflexe déterminé par le traumatisme du scalpel. Il n’en est rien, puisque si on pique la queue de l’animal entier et anesthésié, il ne se produit aucun mouvement. NOTE SUR LES NODULES DU FOIE INFECTIEUX. Nodules infectieux dans la fièvre typhoïde et la tuberculose intestinale, par M. V. Hanot. J'ai déjà présenté l’année dernière à la Société trois Notes sur l'anatomie pathologique du foie infectieux, c’est-à-dire du foie altéré par les divers microbes pathogènes et leurs toxines. Dans toutes les maladies infectieuses, le foie est modifié suivant un même processus général, abstraction faite des incidentsliés à des conditions de second ordre. Ce qui caractérise surtout le foie infectieux, en dehors de la présence du microbe pathogène, c’est l’universalité de la lésion : tous les éléments constitutifs de l’organe : cellules, vaisseaux sanguins, lymphatiques et biliaires, tissu conjonctif, enveloppes fibreuse et péritonéale, y sont plus ou moins lésés. Un autre grand caractère du foie infectieux, c’est de se présenter sous deux formes : la forme aiguë et la forme chronique. Cette dernière résulte de la transformation fibreuse du tissu conjonctif préexistant ou de nouvelle formation et peut succéder à la forme aiguë ou se produire en quelque sorte directement pas transformation lente et progressive, avec ou sans poussées aiguës ou subaiguës intercurrentes. C'est ainsi que se trouve constitué le type de la cirrhose infectieuse, nouvellement admise en pathologie générale et dont une des variétés est représentée par la cirrhose hypertrophique avec ictère chronique que j'ai décrite en 1875. Je désire entretenir aujourd’hui la Société d’une lésion particulière du foie infectieux, qu’on a désignée sous le nom de nodule. Je dépose sur le Bureau de la Société des dessins qui montrent la consti- tution histologique du nodule infectieux dans la fièvre typhoïde et la tuberculose avec ulcérations intestinales. Je dirai d’abord que si on les rencontre dans d’autres circonstances, ce ne doit être qu'exceptionnellement. L’ulcération intestinale semble donc être une condition nécessaire à la formation du nodule infectieux; il est possible que l'organe pathogène SÉANCE DU 28 OCTOBRE 857 s’y modifie et qu'ainsi s'expliquent les réactions hépatiqnes toutes spé- ciales qu’il détermine. Le nodule typhique du foie se rattache à la lésion décrite pour la première fois par Friedreich (Virchow, Archiv, t. XII, p. 53) et par E. Wagner (Archiv der heikunde, 1860, p. 322). Dans son Zraité des tumeurs, t. IL, p. 27, Virchow s'exprime ainsi à ce sujet : « Il peut aussi, ainsi que Friedreich et E. Wagner l’ont montré, se produire, dans le typhus des proliférations de ce genre dans d’autres organes, par exemple dans le foie; seulement elles n'atteignent pas en général! un grand déve- loppement. On ne saurait ici méconnaïître une certaine analogie avec la leucémie. » « Dans le foie, dit M. Jaccoud (7raité de pathologie, t. I, p. 598) on trouve parfois de petits foyers de formations celluiaires et nucléaires ; ces produits sont semblables à ceux qui infiltrent les glandes. et les plaques de l'intestin, et méritent comme eux le nom de néoplasies typhiques. » Depuis, les nodules typhiques ont été étudiés par MM. Siredey et Legry. De mon côté depuis 1884, je les ai recherchés et décrits sur tous les foies typhiques des malades morts dans mon service. À l'examen microscopique de coupes colorées au carmin les nodules typhiques apparaissent comme des taches rougeâtres dont la forme est tantôt arrondie, tantôt ovalaire, d’autres fois triangulaire allongée ou même offrant des contours sinueux et absolument irréguliers. Ils siègent ordinairement à la périphérie du lobule à la limite des espaces portes, près des fissures et des veines sus-hépatiques. On les observe aussi en plein lobule à égale distance de la périphérie et de la veine centrale. Parfois ils occupent le milieu d’une fissure interlobulaire et empiètent également sur les deux lobules contigus. Leur nombre varie; certaines coupes n’en contiennent pas; d’autres en contiennent jusqu'à 12. Leurs dimensions sont de un quinzième à un vingtième de millimètre, pour les plus gros; de sept à huit centième de millimètre pour les plus petits. M. A. Siredey (1), qui a donné l’une des premières études histolo- -&iques de ces nodules, les a décrits comme constitués par des amas de leucocytles distendant les capillaires et refoulant les cellules voisines. Mon élève le D' Legry (2) admet que « les nodules sont constitués, en majeure partie tout au moins, par des noyaux et des débris de proto- plasma provenant des cellules hépatiques tombées en détritus. » L'infiltration leucocytique y prend certainement une grande part. (1) A. Siredey. Des altérations du foie dans les maladies infectieuses, Revue de médecine, 1886. (2) Th. Legry. Contribution à l'étude du foie dans la fièvre typhoïde, Thèse de Paris, 1890. 858 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE M. Legry, qui a trouvé le bacille d'Eberth 6 fois sur 11 cas de foie infec- lieux, généralement disposé en groupe au nombre de #4, 5, 6, 7 et même davantage dans les capillaires, ne l’a jamais observé dans l'intérieur des nodules, ni même dans les capillaires immédiatement voisins. Dans des recherches plus récentes que j'ai faites à ce sujet, le résultat a été également négatif. Voici un dessin qui représente la constitution histologique d'un nodule typhique. En voici un autre qui représente un nodule infectieux provenant du foie d’un phtisique mort avec des ulcérations intestinales. C’est un amas de leucocytes, de cellules hépatiques désagrégées, émiettées, parsemées de granulations noires, de granulations brillantes, de noyaux devenus libres et de nombreux bacilles de Koch. | À la périphérie de ces nodules les cellules hépatiques présentent un vif processus irritatif et contiennent plusieurs noyaux. On ne peut observer sur, ces nodules aucune ébauche de tubercule proprement dit, nulle trace de caséification. Ils peuvent coexister avec des tubercules typiques ou représenter la seule manifestation infectieuse. Le nodule infectieux n’est pas le tubercule élémentaire des auteurs puisqu'on n’y trouve pas de cellules géantes et quand il est allongé à contouis sinueux et irréguliers; il diffère encore de l’infiltration tubercu- leuse de Grancher puisqu'il n’est pas constitué uniquement de jeunes cellules et que les altérations des cellules hépatiques concourrent ample- ment à sa formation. Le nodule tire probablement encore une fois ses caractères spéciaux de son mode d’origine et, j'ajoute, probablement aussi de la constitution anatomique du foie; c’est évidemment, en tous cas, une lésion tuberculeuse moins hautement différenciée que la tuber- cule proprement dit. Ainsi donc : 1° Le nodule infectieux est une des lésions du foie infectieux ; 2° Le nodule infectieux s’observe presque exclusivement, sinon exclu- sivement, dans les maladies infectieuses avec ulcérations intestinales, la fièvre typhoïde et la tuberculose intestinale ; 3° Il faut donc tenir compte dans sa genèse, de son origine intestinale, et aussi du lissu où il se développe. 4° Dans la tuberculose hépatique on trouve, en dehors des tubercules typiques, le nodule infectieux qui peut s’y présenter seul. On ne doit donc pas juger de la tuberculose hépatique, sur la seuie présence des .tubercules proprement dits, et surtout en dehors de l’examen microsco- pique qui seul peut déceler le nodule infectieux. SÉANCE DU 28 OCTOBRE 859 SUR L'ABSORPTION DES VIRUS PAR LES MUQUEUSES, par M. A. CONTE. (Travail du Laboratoire de bactériologie de l'école vétérinaire de Toulouse.) Le rôle des muqueuses intactes dans l'absorption des virus est encore très incomplètement déterminé. On admet, en général, que les virus ne peuvent pénétrer à travers les muqueuses revêtues d’un épithélium stra- tifié qu'à la faveur d’une érosion; toutefois, au niveau de la muqueuse oculaire, « la pénétration s'accomplirait sans le secours d’un trauma- tisme ». (Arloing.) Les recherches entreprises portent exclusivement sur le degré de per- méabilité de la muqueuse conjonctive; elles ont été réalisées avec les virus de la rage, de ia morve et du choléra des poules. Les matières virulentes ont été déposées, par instillation, sur le globe oculaire, sans que la muqueuse subisse aucun contact capable de lal- térer. — Dans toutes les expériences, je me suis efforcé d’éviter cette cause d'erreur qui résulterait d'une effraction accidentelle de la muqueuse pendant les contacts viru!ents. Dans ce but, les animaux, lapins et cobayes, étaient fixés étroitement par les membres sur une planchette; ce dispositif empêche tout traumatisme de la muqueuse par les pattes des sujets ou par les divers corps vulnérants, Après chaque contact, la muqueuse était débarrassée, aussi complètement que possible, de la matière virulente, par un arrosage de cinq à dix minutes sous un filet d'eau bouillie. I. Rage. — On laisse tomber, entre les paupières légèrement écartées des lapins d'expérience, quelques gouttes d’une dilution épaisse du bulbe rachidien d’un lapin mort de la rage, Les résultats obtenus sont indiqués ci-après : DURÉE NOMBRE BÉSULTATS RÉSULTATS du contact. des animaux. positifs. négatifs. SOMMES ER ORE À » 2 1 heure . 2 » 2 AMNEUTES ENS 2 il 1 d HET AMEN 2 1 il fie ne ALAN ALES 4 ? 2 lOMEUTE SRE NE 4 2 2 Les lapins contaminés ont succombé en 23, 27, 28, 35, 40 et 42 jours. 860 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Il résulte de ces constatations que l'absorption de la dilution est possible après un temps de contact qui dépasse une heure. Déjà, M. Galtier avait émis cette opinion que « si la conjonctive intacte se prèle rarement à l'absorption du virus rabique, il est exact de dire qu'elle peut, même saine, l’absorber parfois ». IT. Morve. — On se sert comme matière d’épreuve d’une dilution très riche opérée dans du bouillon stérilisé avec une culture sur pomme de terre du bacille morveux. Quelques gouttes sont instillées dans l’œil des cobayes suivant le mode indiqué ci-dessus. Les résultats sont résumés dans le tableau suivant : DURÉE NOMBRE RÉSULTATS RÉSULTATS du contact. des animaux. positifs. négatifs. DÉNDINULE SAME 2 » 2 10 minutes . 4 » "1 SOMINUTE SAR 3 1 2 LE SU tAn " 2 oi 6 h. 1/2. 4 4 » Les cobayes injectés ont succombé en 18, 27, 98, 29, 32 et 38 jours; les animaux indemnes ont été conservés pendant quatre mois et ils n’ont rien présenté à l’autopsie. D'après ces faits, l'absorption serait possible après un temps de contact de trente minutes environ. IT. Choléra des poules. — Des lapins recoivent dans l'œil quelques goultes d’une culture en bouillon très viruiente, avec les résuitats sui- vants : DURÉE NOMBRE RÉSULTATS RÉSULTATS du contact. des animaux. positifs. _ négatifs. AÉHINULE Re 2 2 » 5 minutes . 3 2 1 10 minutes . Le " » 20 minutes , 2 2 » 30 minutes . À 2 » 1 heure . 6 5 1 Il résulte de ces faits que l’absorption du virus du choléra des poules s'effectue avec une extrême rapidité et avec une quasi-certitude. Cette première série de recherches, destinée simplement à fournir des indications générales, ne saurait permettre, à coup sûr, aucune conclu- SÉANCE DU 28 OCTOBRE 861 sion définitive. Cependant, ainsi qu'on pouvait le prévoir a priori, l’im- minence de l'infection se montre assez régulièrement proportionnelle à la durée des contacts virulents. Il semble évident d'autre part que le véhicule du virus joue un grand rôle dans le mécanisme de la pénétration, et l’on n'obtiendra des résullats comparables qu’en expérimentant un même virus sous divers états d'association (eau, bouillon, glycérine, corps gras, etc...). Enfin il convient d'observer que le choix de la con- jonctive comme terrain d’épreuve présente, avec des avantages considé- rables, un grave inconvénient. Les matières virulentes déposées se trou- vent entraînées en partie par les voies lacrymales où elles peuvent sé- jJourner un certain temps et.elles souillent aussi la pituilaire. Les modes de l'infection, lors de résultat positif, ne doivent donc être interprétés que sous cerlaines réserves. À PROPOS DE L'ANIMAL DE LA SPIRULE (Spirula australis Lamk), par M. A. GrARD. Les mollusques que j'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie sont au nombre des plus grandes raretés zoologiques. Autant la coquille de la Spirule est abondante dans les Musées, autant il est rare d’y ren- contrer l’animal de ce Céphalopode. Deux exemplaires malheureusement imparfaits du Spirula australis ont été recueillis par feu M. Eudel, de Nantes, capitaine au long cours, qui pendant ses longues traversées et au milieu d’une vie très agitée, avait trouvé le moyen d’amasser une impor- tante collection de Mollusques, particulièrement de Ptéropodes et de Céphalopodes. Pendant le Congrès de l’Association française pour l’avan- cement des sciences, tenu à Nantes en 1875, j'eus occasion de voir cette collection, et j'avais pensé qu’un de nos grands établissements scienti- fiques en ferait l'acquisition. Mais le Muséum ayant laissé disperser au vent des enchères ce riche matériel comme il a laissé partir à l'étranger la collection d'Hémiptères de Signoret, la collection de Diptères de Bigot, ete., j'ai cherché à sauver au moins une partie des récoltes d’Eudel, autant que me le permettaient les modestes ressources dont je dispose. Je profite de cette occasion pour réunir en une courte note tous les documents relatifs aux quelques spécimens de Spirula connus jusqu’à ce jour, documents très dispersés dans des recueils parfois peu accessibles, quelques-uns même introuvables dans nos Bibliothèques publiques. Nous les énumérons ci-après, dans l’ordre chronologique. 862 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ï. — Rumphius est sans doute le premier naturaliste qui ait vu l'animal de la Spirule (d'Amboinsche Rariteit Kamer,1705,p.68. PI. XX, n. 1). IIne semble pas qu'il ait eu en sa possession un individu complet. Cependant il avait observé la petite ventouse qui termine le corps de l’animal et il supposait que grâce à cet organe la Spirule pouvait se fixer solidement sur les rochers « £'n sit aan de Klippen ». II. — Le premier individu représenté fut pris par Péron et Lesueur. Nous avons de cet exemplaire deux figures originales. « On doit s’en rapporter, dit A. d'Orbigny, à celle que M. Lamarck a donnée dans l'Encyclopédie mélhodique. PI. 465, Gg. 5 a; car ce savant l'avait faite eæ visu à la plume pour servir de démonstration dans son cours et c'est cette figure qu'il a ensuite fait graver dans l'Zncyclopédie. Cest à M. Latreille que nous devons ces renseignements importants » (1). L'autre figure, due à Péron lui-même, fut publiée un peu plus tard dans l’atlas du Voyage aux terres australes (PI. XXX, fig. 4). Elle est qualifiée par Lesueur, compagnon de voyage et collaborateur de Péron : « figure coloriée de fantaisie ». (Vouvelles Archives du Muséum, t, IT, p. 19.) On a été plus loin et l’on a taxé d'inexactitude le dessin du voyageur. D'après cette figure, l'animal aurait dix bras presque égaux entre eux, tandis que Lamarck représente deux bras beaucoup plus grands que les autres comme chez les Sèches. En réalité, les deux figures sont moins différentes qu’on ne l’a dit. Péron, plus arliste que zoologiste, a figuré les bras tels qu'il les voyait chez l'animal conservé et contracté où les deux grands bras dépassent à peine les autres. Lamarck, dans son dessin schémalique destiné à l’enseignement a remis les choses dans l’état naturel et insisté sur le caractère essentiel des Décapodes. Malheureusement le dessin de Péron a été reproduit beaucoup plus souvent que celui de Lamarck et même par les auteurs qui ont décrit les bras comme inégaux. C'est ce qu'ont fait notamment de Blainville dans son Manuel de malacologie, 4825. PL. IV, fig. 4 et plus tard Owen (Voy. du Samarang, 1850. PL. IV, fig. 1). Mais il est facile de justifier Péron du reproche d'avoir mé- connu l'un des traits principaux de l’organisation de la Spirule. En effet de Blainville dans la première diagnose qu'il a donnée du genre Spirula (1. c. p. 381) dit expressément : « Tête pourvue de cinq paires d'appen- dices tentaculaires, dont deux plus longs à peu près comme chez les Sépia- cées, » et il ajoute en note : « D’après une lettre écrite dernièrement par M. de Fréminville à M. Brongniart, il paraîtrait que l’animal de la Spirule serait tout différent de cette description que nous devons à Péron. Cependant M. de Roissy qui a vu l'individu rapporté par celui-ci, nous a confirmé la caractéristique que nous venons de donner. » De celte note (1) A. d'Orbigny. Tableau méthodique de la classe des Céphalopodes, Ann. des sciences nat., 17° série, t. VII, 1826, p. 158. - SÉANCE DU 28 OCTOBRE 863 il résulte que Péron était d'accord avec Lamarck et avec de Roissy. C’est donc à tort que certains malacologistes, par exemple Deshayes (article Spi- rule de l’£ncyclopédie, 1832, IT, p. 974), ont cherché à opposer à Péron la description donnée par de Roissy, dans les Mollusques du Buffon de Son- mini. Lamarck (Antüm. sans vert., VIT, p. 601) a nommé la Spirule Spirula Peronii ; la figure de l’£ncyclopédie et celle de la Malacologie de Blain- ville portent ie nom de Spirula australis, bien qu’elles se rapportent au même individu. Un passage intéressant de Férussac et d'Orbigny, relatif à cet individu, montre quelles étaient déjà à cette époque (1835) les habitudes de notre Muséum : «Malheureusement, le seul et précieux individu qu'ils (Péron et Lesueur) rapportèrent conservé dans la liqueur et trouvé flottant et mort en pleine mer, s'est perdu au Muséum où ils l'avaient déposé avant même qu'une bonne description püt nous consoler de cette perte! » (Hist. nat. des Céphalopodes acétabulifères, p. 55.) IT. — De Blainville eut évidemment à cœur de réparer le plus tôt pos- sible cette déplorable incurie. Nous trouvons, en effet, dans le compte rendu de la séance de l’Académie des sciences du 28 mars 1836, l'extrait suivant d’une lettre de M. Robert à M. de Blainville datée de la barre du Sénégal, le 19 janvier 1836, concernant l'animal de la Spirule : « Je m'empresse de vous faire savoir que nous avons déjà recueilli, M. Leclencher, chirurgien-major de la Recherche et moi, la Spirule que vous m'aviez recommandée. Dès que nous eûmes atteint les îles Canaries, le calme nous permit de voir flotter un grand nombre de coquilles appar- tenant à ce Mollusque. Nous nous mimes immédiatement à pêcher avec un filet d’étamine, et deux ou trois jours après avoir pris bon nombre d'animaux mous, de très petits poissons et de crustacés que nous n’avons pas négligé de conserver, M. Leclencher eut la satisfaction de saisir quatre ou cinq Spirules avec l'animal plus ou moins conservé par 24° 93' de latitude nord et 20° 22” de longitude ouest. Chaque individu conserve fort heureusement intacts un ou plusieurs de ses organes de manière que tous réunis pourront donner l’animal probablement complet qui est bien loin de ressembler aux figures que aous possédons à bord. J’ai dessiné avec le plus de soin possible l'individu le mieux conservé. « Nous avons reconnu également que les Physalies font leur proie habituelle de ces Spirules, ce qui pourrait expliquer la grande rareté de l’animal entier et la grande abondance de sa coquille vide. » Une seconde lettre de M. Robert lue à la séance du 14 avril complète ces renseignements sur les cinq Spirules recueillies entre les Canaries et le cap Blanc. L’habile observateur signale Les expansions natatoires de la partie postérieure, la forme en bouton de cette partie, la couleur blanc jaunâlre ou café au lait pointillé de brun du manteau, la ressem- 864 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE blance générale de l'animal avec Loligo sepiola : enfin il indique qu'un des individus conservait encore un œil très gros relativement au volume du mollusque, le reste de la tête faisant défaut (1). Ce sont ces exemplaires incomplets qui ont servi à de Blainville pour le mémoire publié l’année suivante : Sur l'animal de la Spirule et sur l'usage du siphon des coquilles polythalames (Ann. franç. et élrang. d'Anat. et de Phys., 1, 1837, p. 369-382). IV. — Un exemplaire privé de tête comme les précédents a été recueilli dans l'archipel indien par le capitaine Edward Belcher et étudié par Owen (Pescription of two mutilated specimens of Spirula Perontû with some observations on S. australis and reticulata, Zool. of the voyage of H. M. S. Samarang : Mollusea, I, p. 6-17, pl. IV, fig. 4, 4, 5,6, 7 et 14-15). Cet exemplaire étant également dépourvu des nageoires et de la ven- touse postérieure (comme celui de Péron), Owen supposa qu'il y avait peut-être dans l'absence de ces organes un caractère spécifique et pro- posa de nommer Spirula Peront les individus recueillis par Péron et par Belcher, réservant le nom de Spirula australis pour la forme décrite par Rumphius (2). V. — Dans le même mémoire, Owen cite d’ailleurs un spécimen com- plet de S$S. australis recueilli en Nouvelle-Zélande par Percy Earl et appartenant à M. Hugh Cuming; il en figure avec soin l'ensemble et la partie terminale (1, c, pl. IV, fig. 2 et 8). Ce bel exemplaire, conforme aux descriptions de Rumphius et de Blainville, avait été antérieurement figuré par Gray (Ann. of nat. hist., XV, p. 257, pl. XV) et par Lowell -Reeve (Ælements of conchyliology, p. 16, pl. A) (3). Owen eut plus tard (après trente ans d'attente) la satisfaction de pouvoir le disséquer et il publia le résultat de ses recherches dans un travail intitulé Supplemen- (1) Ces deux lettres de M. Robert ont été publiées dans les Annales des sciences naturelles, 2 série (Zoologie), t. V, 1836, p. 224-226. Des débris des Spirules de Robert existaient encore au Muséum en 1865 d’après le témoi- gnage de Steenstrup (Sepiadarium og Idiosepius, 1881). (2) On the hypothesis of the terminal dise and appendages being a specific character, the Spirulæ devoid of them and with the last whorls of the shell exposed behind, might be indicated under the name of Spirula Peronii and the second synonym of Lamarck be restricted to such individuals. Owen, Nc, p.15: (3) Les figures du spécimen de Percy Earl par Gray et Lowell Reeve repré- sentent l'animal contracté comme celle de Péron, ce qui fait dire à Owen que l'exactitude de Lamarck est en défaut en ce qui concerne les deux longs bras. Mais le dessin fait depuis par Huxley d’après un exemplaire en parfait état (voir ci-contre X),confirme absolument la véracité de notre grand zoologiste, SÉANCE DU 28 OCTOBRE 865 Lary observations on the anatomy of Spirula australis (Ann. a. Mag. of nat. hist, sér. 5, t. IT, 4879, p. 4-16, pl. [-IIT). VI. — Owen représente encore dans le Voyage du Samarang un exem- plaire de Spirule pris par George Bennett à Timor (1, c, pl. IV, fig. 3, 9 et 10). Cet exemplaire très mutilé possédait cependant les nageoires et la ventouse terminales. De plus la peau, au lieu d’être lisse comme dans l’'exemplaire de Cuming, présentait des cavités aréolaires polygonales. En raison de ce caractère, Owen propose pour ce spécimen un nom spéci- fique nouveau, $. reticulata, et il croit pouvoir rapporter au même type les Spirules recueillies par Robert, d’après la figure donnée par Blain- ville et reproduite dans la planche IV du Samarang (fig. 45 bis). VIT. — Une Spirule entière appartenant au musée de Sydney est citée par Angas (On the marine molluscan Fauna of the Province of South Aus- tralia.… Proc. zool. Soc. London, 1865, p. 157). VIII. — En 1880, Owen décrit un nouvel exemplaire mâle (On the external and structural characters of the male Spirula australis., Proc. zool. Soc. London, 1880, p. 352, pl. XXXII). IX. — Pendant le voyage du Challenger, une Spirule fut draguée par 360 brasses de profondeur aux îles Banda. D'intéressants détails sont donnés sur cette capture par Willemoes-Subm. (La spirule avait été avalée par un poisson). Le professeur Huxley devait examiner cet exem- plaire. Maïs l’état de santé de l'illustre zoologiste ne lui permettant pas d'entreprendre un travail de cette nature, il a confié le soin d'étudier un si précieux matériel à notre ami et ancien élève le professeur P. Pelseneer (de l'École normale de Gand) dont les belles recherches sur les Ptéropodes du Challenger sont connues de tous les zoologistes. X. — Pendant la campagne du Blake (déc. 1878 à mars 4879) Alex. Agassiz a dragué une Spirule entière par une profondeur de 950 brasses dans la mer des Antilles au voisinage de l'ile Grenade. Ce magnifique exemplaire est signalé avec un dessin de Huxley dans : Zhree cruises of the steamer Blake IT (Bull. Mus. Comp. zool., vol. XV, 1888, p. 61, fig. 280) (1). XI. — Enfin les exemplaires de la collection Eudel ont été pris en 1861, pendant la deuxième campagne de l'Armorique. Ce trois-mâls navi- (1) Agassiz ne dit pas si le dessin de Huxley est exécuté d’après l’exemplaire du Blake ou d’après celui du Challenger. 30. 866 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE guait de Saint-Nazaire à la Réunion et Calcutta (1). Les Spirules déca- pitées flottaient en haute mer et ont été pêchées au filet fin dans le voisinage de la mer des Sargasses, si l’on en juge par les divers animaux recueillis à la même époque qui se trouvaient dans la collection Eudel. Il est probable que ces exemplaires ont été pris dans les mêmes paragés que ceux envoyés naguère à de Blainville par Robert et Leclencher. Comme ces derniers, ils portent les traces de mutilations dues aux Siphonophores. Comme ces derniers aussi, ils ont le tégument aréolé et appartiennent par conséquent à la $. reticulata Owen. Mais ce caractère, résultant peut-être de l’action du liquide conservateur, ne nous paraît nullement suffisant pour l'établissement d’une espèce. Nous avons vu d’ailleurs qu'il se retrouvait chez certains exemplaires de l’archipel malais (ex. de G. Ben- nett, n° VI). L'un des individus mesure 3 cent. 5, l’autre 4 cent. 7 (sans la tête). Le plus grand possède encore les nageoires et le disque terminal; le plus petit en est dépourvu. L'un serait donc une Spirula australis ou reticulata, l'autre une Spirula Peroni si l’on admettait les espèces nomi- nales si légèrement établies par R. Owen. Pour éviter que les Spirules d’'Eudel aient le même sort que celle de Péron et Lesueur, nous les avons confiées à M. le professeur P. Pelsencer, qui les étudiera d’une façon comparative avec l’exemplaire du Challenger. En résumé, les rares individus de Spirula australis, que les zoologistes ont vus depuis le commencement du xvrr° siècle et dont aucun (sauf peut être celui d'Agassiz) n’a été pris vivant, proviennent de trois régions diffé-. rentes : | 4° L'’océan Atlantique, de part et d'autre de la mer des Sargasses : mer des Antilles (exemplaire d’Agassiz); côte occidentale d'Afrique (exem- plaires de Robert et Leclencher, et d’'Eudel). 2% L'archipel Indien : Exemplaires de Rumphius, de Péron et Lesueur, de E. Belcher, de G. Bennett, du Challenger. 3° L’océan Pacifique, entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande : Exem- plaires de H. Cuming et du musée de Sydney. Il résulte de ces indications que les Spirules vivent dans les grandes profondeurs de la mer, dans les fosses de 4,000 à 7,000 mètres, d'où on a pu les ramener à la drague soit directement (Agassiz) (2), soit indirec- tement dans l'estomac des poissons (Challenger). On les a trouvées parfois rejetées à la côte (spécimen de Cuming, du Musée de Sydney, etc.), mais le plus souvent on les a recueillies flottant au large et mutilées par des (4) Voir la notice sur Eudel, publiée par M. Ed. Bureau, dans le Catalogue des collections d'ethnographie, de Ptéropodes, etc., de feu Eudel. Paris, Deyrolle, 1893, p. vi. (2) D'après l'examen des Chromatophores, Agassiz pense que l’animal se tient la partie inférieure du corps enfoncée dans la vase (4. c., p. 61). SÉANCE DU 28 OCTOBRE 867 Physalies ou autres Siphonophores (Ex. de Péron, de Robert, d'Eu- del, etc.). Sur quatre individus examinés (V, VIII, IX et X), un seul était un mâle. On sait d’ailleurs que l'hyperpolygynie est la règle chez les Géphalopodes. SUR LA SIGNIFICATION DES FORMES A FLAGELLA DE LA MALARIA DE L'HOMME ET DES OISEAUX (1), par M. ALPHONSE LABBÉ. Une des formes les plus intéressantes des parasites malariques, tant chez l'homme que chez les oiseaux, est sans contredit celle que M. Laveran, qui l'a découverte, a dénommée corps à flagella, et que M. Danilevsky, qui l’a trouvée chez les oiseaux, nomme Polymitus malariæ. Elle se présente sous l'apparence d’un corps protoplasmique sphérique, porteur de granulations mélaniques, présentant un noyau, et sur ses bords ordinairement trois ou quatre flagella (de un a dix) qui s’agitent d'un mouvement très vif et très rapide, fouettant sans relâche le sang et les globules environnants. L'intervention de cet organisme flagellé dans l’évolution des parasites malariques, qui sont nettement des Sporozoaires, a fort intrigué les obser- vateurs et donné lieu à de vives diseussions. Tandis que les uns (Laveran, Danilevsky, Pfeiffer) considèrent le Polymitus comme une individualité zoologique, d’autres (la plupart des auteurs italiens) veulent y voir une forme de dégénérescence. Deux questions se posent : Fani-il considérer la forme à flagella comme une individualité spéci- fique, ayant un développement propre? Si cette forme à flagella n’est qu’une forme dans l'évolution des para- sites malariques, est-ce une une forme normale ou une forme de dégéné- rescence ? Avant de répondre à ces deux questions, constatons que les formes à flagella se rencontrent chez l'homme avec les autres formes, et aussi bien chez les malades atteints de fièvre quotidienne que de tierce ou de quarte; chez les oiseaux aussi bien avec les formes haltéridiennes qu'avec les formes amæbidiennes (2). (1) Travail du laboratoire de M. de Lacaze-Duthiers à la Sorbonne. (2) Labbé. Sur les parasites endoglobulaires du sang de l’Alouette. Comptes rendus de la Société de Biologie, 15 juillet 1893. S68 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Prenons un exemple. Examinons le sang d’un oiseau, d’un Pinson, par exemple, contenant des formes haltéridiennes encore intraglobulaires. Surveillons l’une d’elles. Au bout de quelques minutes, elle s’aplatit brusquement, la membrane globulaire s’étant rompue, l'hémoglobine se dissout dans le plasma, puis brusquement le parasite s’arrondit. Une seconde a suffi pour cette transformation, el nous sommes en présence d'un Polymilus encore sans flagelles. Parfois, le parasite, s’il est de taille moyenne, s’arrondit ainsi brusquement sans rompre la paroi du globule ; on observe alors un Polymitus intraglobulaire (c’est le fait qui arrive le plus souvent dans les formes amæbidiennes). La forme ronde, une fois formée, apparait comme une sphère d'un protoplasma grisâtre, et non réfringent, avec des granules protéiques et chromaloïdes, un noyau clair, quelques grains de pigment qui ne tardent pas à s’agiter d'un mouvement brownien très vif, et souvent quelques vacuoles. Lorsque la membrane du globule s'est rompue, quelques travées de globuline retiennent encore le parasite au noyau de l'hématie. Le Polymitus montre bientôt des mou- vements saccadés d’oscillation; des pseudopodes ou des expausions sarcodiques semhlables à des bourgeons naissent sur ses bords, y rentrant aussitôt; enfin apparaissent quelques flagelles fins, vifs, se ramifiant ou s’anastomosant entre eux, parfois se détachant du corps du parasite pour courir dans les préparations, où leurs mouvements continuent quelque temps (Pseudospirilles de Danilevsky). Au bout d’une heure ou deux, le Polymitus se désagrège. Remarquons tout de suite deux faits importants : Le premier, connu dès longtemps, c’est qu'on trouve tout à fait rarement des Polymitus dans le sang au sortir des vaisseaux, et que d’or- diraire il faut attendre quelques minutes après le lulage d’une prépa- ration pour voir apparaître les flagelles. Si on trouve des flagelles dès le premier examen, on peut expliquer ce fait par la rapidité extrême de leur formation : mais le cas est rare, el généralement le Polymitus se forme sous les yeux de l'observateur. Le second fait, c’est que, bien que chez l’homme les corps à flagrlles se trouvent surtout chez les individus en imminence d'accès (Laveran et C. Terni et Giardina), c'est-à-dire associés aux grandes formes sphériques (et de même chez les oiseaux). Cependant les formes moyennes des para- sites se transforment aussi en Polymitus : c'est ce qui explique la diffé- rence de taille de ces formes. : Un des arguments de Danilevsky (1) était que les Polymilus sont lous de même taille et de plus ganz regelmässig kugelfürmig. Gette sphéricité est, de même que la laille, un caractère des plus variables; beaucoup sont (1) Ueber Polymitus malariæ. Centralblalt für Bakter. und. Parasitenk., 28 mars 1891. de + dé ef LS SÉANCE DU 28 OCTOBRE 869 irréguliers, amœæboïdes, et j'ai même vu des flagella se former chez des individus en haltère. Danilevsky attribue deux modes spéciaux de développement au Polymi- tus : par segmentation en plusieurs sphérules dans des leucocytes de la moelle des os, et par division en deux dans le sang. Sur le premier mode d'évolution, nous n'avons que la description de Danilevsky, qui semble plutôt se rapporter à quelque stade d’évoiution de ses Pseudovermiculi gregarinosi. Quant au deuxième mode, nous avons souvent vu des pseu- do-divisions; mais jamais, et Danilevsky avoue le fait lui-même, les deux parties du Polymutus ne se séparent ; le noyau ne se divise pas, c’est un simple mouvement sarcodique, et un Polymitus unique se reforme aussitôt. Nous ne pensons donc pas que le Polymitus soit un stade d'évolution propre. Comme il accompagne les autres formes des parasiles malariques, c’est certainement un stade d'évolution de ces parasites. Est-ce un stade nor- mal, une forme adulte ? Nous ne le croyons pas. En premier lieu, ce n’est pas un stade nécessaire, puisque le cycle évolutif des parasites malariques de l'homme et des oiseaux se conçoit parfaitement, et même mieux, sans qu'on le fasse intervenir. En second lieu, si l’on se rappelle ce que nous avons indiqué plus haut, à savoir que les formes à flagelles ne sont pas préformées dans le sang, sont variables de forme et de grandeur, se déve- loppent aux dépens de tout parasite intraglobulaire des Vertébrés à sang chaud, on peut les considérer comme des stades anormaux des parasites malariques, des formes de dégénérescence. Quelles sont les influences qui déterminent la formation des corps à flagelles ? Ce sont toutes les influences physico-chimiques qui modifient l'état du sérum et des hématies au sortir des vaisseaux. Ces influences sont diffi- ciles à déterminer. Deux surtout sont considérables. 1° L'influence du changement d'oxygénation. — Danilevsky, chez l Hæmo- gregarina Stepanowi, du sang des tortues, a déjà constaté que l'excitabi- lité est augmentée par l'insuffisance d'oxygène. En faisant agir du pyro- gallol, qui absorbe l'oxygène, nous avons constaté la formation immédiate de nombreux corps flagellés doués d’actifs mouvements browniens et sarcodiques. Mais la désagrégation, suile de ce manque d'oxygène, survient aussi plus vite. 2° L'influence du changement de température. — On peut, par le refroi- dissement, hâter la formation des flagelles dans une préparation (il y a un optimum, au delà duquel les flagelles ne se forment plus). Du reste, il y a entre la température du sang sorti des vaisseaux et celle du sang de la préparation un écart énorme qui explique naturellement la dégéné- rescence. Il faut noter ici que jamais on n’a observé de Polymitus chez les para- 870 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sites du sang des Vertébrés à température variable. Même chez nos Cyta- mœæbiens, si voisins à d’autres points de vue des parasites malariques, il ne se montre pas de formes à flagelles. Il faut compter encore avec les influences qui modifient la composition chimique du sang. En résumé, les formes à flagelles Polymitus de la malaria de l’homme et des oiseaux ne sont que des formes dégénératives qui se forment aux dépens des äutres formes malariques par l'action du changement de milieu, du changement de température, du changement d’oxygénation et des modifications physico-chimiques du sérum et des hématies sous ces diverses influences. On ne peut nier du reste l'importance ontogenétique et morphologique de ces formes à flagelles. M. LAVERAN. — J'imagine que M. Labbé a dû bien rarement observer les flagella de l’hématozoaire du paludisme, car la plupart des assertions qu'il émet au sujet de ces éléments sont inexactes. Il est inexact que les flagella ne s’observent dans le sang palustre que lorsque la préparation a été faite depuis quelque temps; j'ai constaté l'existence des flagella dans le sang aussitôt après sa sortie des vais- seaux. : Il est inexact qu'il faille refroidir le sang pour voir apparaître les flagella et que les flagella ne se montrent pas quand on se sert de la pla- tine chauffante. J'ai même observé tout le contraire; j'ai vu en Algérie que les flagella se montraient avec une plus grande fréquence par les temps chauds, lorsque la préparation de sang se refroidissait très peu, ou pas du tout, que par les Lemps froids; j'ai observé les flagella en me servant de la platine chauffante. Il est inexact que les flagella se montrent sur les bords de toutes les formes de l'hématozoaire du paludisme; jamais je n’ai vu les flagella apparaitre sur les bords des corps sphériques de petit volume, ni sur les bords des corps en croissant. Dans le sang des oiseaux les flagella ne se montrent pas sur les bords des corps allongés qui correspondent assez bien aux corps en croissant du sang palustre. Il est inexact que les flagella se ramifient ou s’anastomosent; dans leurs mouvements très vifs ils peuvent seulement se nouer, se pelo- tonner. La quinine fait rapidement disparaître du sang palustre les flagella, ce qui serait incompréhensible s’il s'agissait d’un phénomène cadavérique ou de dégénérescence. Les hématozoaires endoglobulaires des animaux à sang froid (lézards, tortues, grenouilles) ne présentent pas de flagella, mais ces hématozoaires appartiennent à des espèces très différentes de l’hématozoaire du palu- SÉANCE DU 28 OCTOBRE : 871 disme et ce fait même tendrait à démontrer que la production des flagella n’est pas un phénomène cadavérique, car un phénomène cadavériqué devrait se produire indifféremment sur tous ces hématozoaires. . L'explication que propose M. Labbé pour la formation des flagella de l’hématozoaire du paludisme me paraît inacceptable. À PROPOS DE LA VITESSE TOXIQUE DES INJECTIONS, par M. A. DASTRE. M. L. Guinard, chef des travaux de physiologie à la Faculté de méde- cine de Lyon, a présenté à la Société de Biologie, dans la séance du 13 mai dernier, d’intéressantes recherches sur l’urotoxie. Ce travail m'avait complètement échappé au moment de sa publication et c’est en pratiquant la revision de nos Comptes rendus, pendant les loisirs de ces vacances, que j'ai eu l’occasion de le lire. Bien entendu, l’auteur confirme en général les résultats fondamentaux obtenus par les recherches de M.Bouchard et ses élèves : il les complète et il rectifie quelques valeurs numériques. Ces rectifications ont leur source, dans l’amélioration de la technique de l'injection, et, particulièrement dans le choix d’une bonne vitesse. C'est là un point essentiel. L'auteur a insisté et avec beaucoup de raison, à plusieurs reprises sur l’importance du facteur vitesse. IL dit très excel- lemment : « Le réglage de la vitesse d'injection a une grande impor- tance, particulièrement quand il s’agit des urines peu toxiques, p. 494). Et ailleurs : « Le facteur vitesse est autrement influent, et c’est à lui seul qu'il faut attribuer les différences qu’on trouvera entre mes chiffres et ceux de mes devanciers » (p. 492). Un second point est encore indiqué très exactement par l’auteur, c'est le parallélisme de l'introduction veineuse et de l'élimination rénale; dans le cas d’injections diurétiques abondantes, et d’eau faiblement salée : « Aussi voit-on, dit-il, dans ces expériences le lapin avoir des mictions abondantes et rejeter une urine claire presque en quantité égale à la quantité introduite » (p. 4992). Je retiens enfin un troisième point relatif à l'impuissance curative du lavage du sang. « Cependant, il ne faut pas croire que cette élimination entraîne aussi les poisons ; ceux-ci ne sortent pas en même lemps que leur véhicule liquide; ils se ffxent dans l'organisme, l’imprègnent et s’y accumulent peu à peu jusqu’à dose toxique » (p. 492). Je suis d'autant plus disposé à me trouver d’accord avec l’auteur de- ces propositions que j'ai eu l’occasion d'en apprécier l'exactitude il y a 812 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quelques années (1887-1888). Mes observations se trouvent consignées dans deux mémoires sur le Lavage du sang et sur l'injection d'eau salée publiés dans les Archives de Physiologie et dans des notes présentées ici même, en collaboralion avec mon regretté préparateur P. Loye : 1° Et d’abord, pour ce qui concerne la vitesse de l'injection, j'ai signalé avec insistance l'importance de ce facteur. L'une des conclusions de notre travail élait la suivante : ; « L'expression de dose loxique n’a point de sens certain en ce qui con- cerne la solution salée (et la plupart des liqueurs improprement qua- lifiées de faiblement toxiques). Il n'y a point de dose toxique (en ce sens que l’animal ne meurt pas pour un certain degré de saturation); mais il y a une vitesse toxique. » On peut faire passer une dose considérable de matière dans l'organisme de l’animal (chien) sans lui nuire, On pourra le tuer avec une dose dix fois moindre. Le résultat dépend de la vitesse au moins autant que de la quantité. La notion de toxicité est une notion complexe et relative. La toxicité ne dépend pas seulement d’une qualité spécifique de la substance; elle dépend encore de sa capacité d’action sur un composé de l'organisme plus ou moins spécial {exemple : oxyde de carbone et hémoglobine); elle dépend dans une certaine mesure du point de pénétration; elle dépend enfin de la vitesse d'introduction. — Ce sont là autant de conditions qui restreignent la signification des chiffres et des valeurs numériques. En ce qui concerne la solution salée (faiblement toxique), nous avons dit que la vitesse toxique commencail à 3 (c’est-à-dire à 3 centimètres cubes par minute). C’est précisément le chifire-limite que M. Guinard a adopté (! centimètre cube toutes les 20 secondes). 2° Quant au second point, le parallélisme de l'excrétion urinaire et de l'injection, c'élait encore là une conclusion expresse de nos recherches. « 5° Lorsque l’on suit la marche de l'élimination urinaire, on constate, en général, un parallélisme parfait de cette excrélion d’une part et de l'introduction d’autre part. Les graphiques traduisent matériellement ce parallélisme. À partir d’un certain moment, la quantité qui pénètre est équilibrée par la quantité qui sort. » 3° Reste la troisième observation sur l'importance curative du lavage du sang. Ici il y a quelques restrictions à faire. Il n’est pas absolument certain que tous les poisons résistent à l’élimination urinaire et qu'ils se fixent dans l'organisme, en abandonnant leur véhicule liquide. Il est sûr, comme le dit M. Guinard, que quelques-uns de ces poisons se refusent à suivre leur véhicule à travers le rein. Il n’y a plus de doute en ce qui con- cerne les toxines que Loye et moi avons expérimentées. Les résultats de ces essais ont été, en leur temps, exposés devant la Société de Biologie. Mais la démopstralion n’a pas été donnée pour tous les cas. Il est possible que certaines toxines soient entrainées. J'ai commencé des expériences dont je compte exposer les résultats devant la Société, et en modifiant SÉANCE DU 28 OCTOBRE 873 convenablement la nature du véhicule, je crois que l’on pourra obtenir des injections qui, au point de vue de la thérapeutique expérimentale, : mérileront réellement le nom de curalives. NOUVELLES RECHERCHES SUR LES PRODUITS DE LA COMBUSTION DU COKE DANS LE BRASERO (1), par M. N. GRÉHANT. Dans une communication que j'ai faite à la Société de Biologie le 24 juin dernier, j'ai indiqué que la combustion du coke dans le brasero employé par les ouvriers en plein air, ne paraît pas donner trace d'oxyde de carbone; j'avais fait respirer par un animal le gaz pris au-dessus du brasero, j'avais extrait les gaz du sang et la recherche de l’oxyde de car- bone avec mon grisoumètre m'avait donné une si faible réduction que je l'avais considérée comme négligeable. Depuis, j'ai eu l’occasion de rencontrer notre savant collègue M. le pro- fesseur Nocard, qui m’apprit que pendant l'hiver on chauffait une salle de démonstration de l'Ecole d’Alfort avec des braseros; je me suis demandé sice mode de chauffage est vraiment hygiénique, j'ai repris mes expé- riences avec le plus grand soin et je communique aujourd'hui les résultats que. j'ai obtenus et qui conduisent à des conclusions tout à fait différentes de celles que j'avais tirées de mon premier travail. Expérience 1. — Le brasero rempli de coke étant complètement allumé en plein air, on fixe à 50 centimètres environ au-dessus du com- bustible, l'extrémité d’un long tube de jaiton enveloppé d'un réfrigérant à eau froide; ce tube est uni à deux soupapes, et un chien, fixé sur une gouttière, respire les produits de la combustion; l'animal s’est agité à plusieurs reprises; au bout d’une heure, on a fait dans l'artère carotide une prise de 46 centimètres cubes de sang qui a été injecté dans un réci- pient vide contenant 100 centimètres cubes d'acide acétique à 8 degrés ; les gaz obtenus par les manœuvres de la pompe à mercure renfermaient peu d'oxygène; ils ont donné dans mon grisoumètre une réduction de 5.9 divisions; or, À centimètre cube d'oxyde de carbone donne une réduc- tion de 7.6 divisions; donc le sang contenait 0 c. ce. 72 d'oxyde de car- bone; ce qui répond, en appliquant la loi d'absorption que j'ai fait connai- tre, à un mélange gazeux renfermant 1/3500° d'oxyde de carbone. Expérience 11. — J'ai fait fixer au-dessus du brasero un vaste enton- noir de tôle ayant 1 mètre de largeur à la base et 0%,80 de hauteur, sur- (1) Travail du laboratoire de physiologie générale du Muséum. O1 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE monté d’un tuyau long de 2,70 ; presque tous les produits de la combus- tion sont entraînés avec de l'air dans ce tuyau; à l’aide d’un long tube de laiton recourbé en forme de crosse, j'ai fait respirer à un chien les gaz pris au sommet du tuyau, en utilisant le tube réfrigérant. Cette fois, l'animal est resté tout à fait calme; au bout d’une heure, une prise de 46 centimètres cubes de sang dans l'artère carotide a donné une réduction de 7.1 divisions du grisoumètre, ce qui correspond à 0 c.c. 93 d'oxyde de carbone et à une proportion de ce gaz dans l’air du tuyau égale à 1/2720°. Expérience IIT. — Enfin je me suis placé à peu près exactement dans les conditions de l’expérience de Félix Leblanc; j’ai fait porter dans un magasin fermé d’une capacité de 100 mètres cubes le brasero allumé, après une heure de chauffage de la pièce, j'ai fait passer par un trou percé dans la porte un long tube de laiton dont l'extrémité se trouvait à 2 mètres du foyer et j'ai fait respirer à un chien attaché au dehors les gaz de J’atmosphère confinée ; au bout d'une heure et au bout de deux heures, j'ai fait à l'animal des prises de sang artériel et J'ai obtenu cette fois de grandes quantités d'oxyde de carbone : le premier échantillon a donné au grisoumètre une belle flamme bleue caractéristique et une réduction de 36 divisions correspondant à 4 c.c. 73 d'oxyde de carbone pour 49 centimètres cubes de sang ou à 9,65 d'oxvde de carbone pour 100 centimètres cubes de sang, ce qui représentait à peu près 1/570° d'oxyde de carbone dans l'air. Le deuxième échantillon de sang a donné une réduction encore plus grande, 43.7 divisions; il renfermait 11.6 d'oxyde de carbone pour 100 centimètres cubes de sang, ce qui indiquait 41/4174 d’oxyde de carbone dans l'air. Il est donc nécessaire, si l’on emploie le brasero des gaziers au chauf- fage de vastes salles, de faire disposer au-dessus du cylindre, un enton- noir et un long tuyau conduisant les gaz dans l’air extérieur, et cette disposition doit mème êlre conseillée dans l'emploi du brasero en plein . alr. Le Gérant : G. MAsson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MaretHeux, directeur, 1, rue Cassette. D 2 ET SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 1893 M. A. Laveran : Contribution à l'étude de l'étiologie de la dysenterie. — M. Lan- BERT : Note sur les modifications produites par l'excitation électrique dans les cellules nerveuses des ganglions sympathiques. — M. A.-H. Przrrer : Note sur l'estomac des pleuronectes. — MM. Gzey et CHarnin : Influences héréditaires expé- rimentales. — MM. Durcoco : Seringue à injections hypodermiques aseptiques. — M. C. Paisazix : Physiologie animale. Sur un phénomène d'inhibition chez les céphalopodes : constriction paralytique des chromatophores. Présidence de M. Chauveau. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE L'ÉTIOLOGIE DE LA DYSENTERIE, par M. A. LAVERAN, Professeur à l’Ecole du Val-de-Grâce. Les causes de la dysenterie sont encore mal connues, malgré les nom- breux travaux qui ont été entrepris à ce sujet. On a incriminé tour à tour des microbes spéciaux, les microbes qui se rencontrent d'ordinaire dans les matières fécales, enfin les amibes intestinales. Les anguillules sterco- rales et intestinales qui ne se trouvent que dans certaines régions (Cochin- chine) n’ont jamais pu être considérées comme étant les agents de la dysenterie, mais seulement ceux de la diarrhée spéciale à ces régions. La dysenterie d’origine amibienne signalée pour la première fois par Lôsch à Saint-Pétersbourg en 1875, a été regardée d'abord comme une rareté pathologique, mais dans ces dernières années un grand nombre de faits tendant à établir la fréquence de cette forme ont été publiés par: Normand, Sonsino, Grassi, Perroncito, Kartulis, Koch, Hlava, Massiutin, Osler, Dock, Nasse, Lutz, Councilman, Lafleur, Eichenberg, Pasquale, Kruse, Kovacs, Quincke, West. En 1889, Kartulis pouvait annoncer qu’il avait constaté en Égypte la présence des amibes dans plus de 500 cas de dysenterie, ainsi que dans le -pus de tous les abcès du foie consécutifs à la dysenterie. W. Osler, Councilman et Lafleur, qui ont retrouvé en Amérique ces amikbes leur assignent également un rôle important dans l’étiologie de certaines dysenteries et dans la pathogénie des abcès du foie consécutifs. D’après Councilman, il faudrait admettre trois formes de la dysenterie: BioLoGie. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T, V, 31 876 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Forme catarrhale ou simple; Forme diphtérique caractérisée par des exsudats fibrineux et par des nécroses ; Forme amibienne due à la présence de l’Amæba coli, les principaux caractères cliniques de cette dernière forme seraient : la tendance à la chronicité et l’intermittence des accidents (7he Boston med. a. Surg. iourn., 1892). Lewis, Cunningham, Grassi, Massiulin, Calandruccio, Pasquale, A. Schuberg ont montré, il est vrai, que dans certaines régions les amnibes se trouvaient avec une grande fréquence dans les selles des individus sains ou atteints d’affections autres que la dysenterie (choléra, fièvre typhoïde, etc.) (1). Quoi qu'il en soit, les importants travaux publiés sur ce sujet principa- lement par Kartulis et par Councilman commandent l’attention, et la re- cherche des amibes s'impose dans les selles des dysentériques et dans le pus des abcès du foie. Pas plus que celle des amibes intestinales, l'étude des microbes des selles dysentériques n’a donné jusqu'ici des résultats certains au point de vue de la connaissance des causes de la dysenterie. La plupart des observateurs pensent que les bacilles décrits par Ziégler, Klebs, Chantemesse, et Widal (2) comme étant les agents de la dysenterie doivent être rapportés au £. coli communis. Maggiora attribue d’ailleurs à ce bacille un grand rôle dans la pathogénie de la dysenterie (Centralbl. f. Bakt., 1892, p. 173). Zancarol admet sans preuves suffisantes que les streptocoques donnent lieu à la dysenterie et aux abcès du foie (Revue de chirurgie, août 1893). Enfin Bertrand et Baucher qui n’ont pas trouvé de microbe spécial dans les selles dysentériques, concluent de leurs recherches que la dysenterie de nos climats est produite par les microbes qui existent à l’état normal dans les voies digestives; ces microbes, inoffensifs lorsque les voies digestives sont à l’état normal, pourraient provoquer dans certaines conditions une inflammation vive de la muqueuse, soit que leur virulence s’exalte, soit qu'une altération préalable de la muqueuse intestinale rende celle-ci plus vulnérable (Gaz. hebdom., 6 octobre 1893). Pendant les mois de juillet et août derniers j’ai eu l’occasion d'observer une petite épidémie de dysenterie qui a régné principalement sur les troupes casernées dans les forts de Bicètre, de Vanves et de Montrouge. Le nombre des militaires entrés au Val-de-Grâce pour dysenterie a été (1) Voyez pour l'historique de la question l'excellent mémoire publié par Councilman et Lafleur, in {he Johns Hopkins Hosp. Reports, Baltimore, 1894, ef la revue critique très complète, publiée en 1893 par Schuberg, in Centralbl, für Bakt. (2) Académie de médecine, 17 avril 1888. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 877 peu considérable, mais dans quelques cas la maladie a pris des formes graves ; plusieurs malades ont même succombé à des dysenteries tout à fait comparables, au point de vue de l’acuité des symptômes, aux dysen- teries des pays chauds. J'ai pensé qu'il serait intéressant de rechercher dans ces cas l'existence des amibes et celle des bacilles décrits par Chantemesse et Widal. J'ai choisi dix malades atteints de dysenterie aiguë bien caractérisée, ét j'ai fait l'examen histologique et bactériologique des selles de ces malades. Pour la recherche des amibes, les selles doivent être examinées très peu de temps après leur expulsion, car les amibes ne tardent pas à mourir dans les matières fécales mélangées à de l’urine en décomposi- tion ; à l’aide d’une pipelte stérilisée, plus large que les pipettes dont on se sert d'ordinaire dans les recherches bactériologiques, je recueillais un peu de la matière dysentérique et je l'examinaïis au microscope (oculaire 1, objectifs 7 ou 9 de Verick), en me servant ou non de la platine chauffante qui n’est pas nécessaire pour voir les mouvements des amibes surtout en été. Sur les dix malades examinés, neuf fois 1l m'a été impossible de trouver des amibes, une fois j'ai constaté la présence d’amibes, en petit nombre qui répondaient aux descriptions qui ont été données de l’Amæba coli. Lorsque ces amibes ont la forme arrondie, elles ont en moyenne 20 & de diamètre, à l’intérieur on distingue des vacuoles non contractiles ; les changements de forme que ces amibes subissent sous l’œil de l’observateur sont très caractéristiques. Lorsque ces amibes sont mortes, il est beaucoup plus difficile de les distinguer dans les selles dysentériques, attendu qu’on trouve dans ces selles des éléments anatomiques qui présentent une grande analogie avec les amibes mortes; ces éléments sont tantôt des cellules épithéliales de la muqueuse intestinale devenues globuleuses, tantôt de grands leu- cocytes granuleux; en traitant la préparation par le carmin on colore facilement ua ou plusieurs noyaux dans ces éléments anatomiques. Un des neuf malades dont les selles ne renfermaient pas d’amibes a succombé à la dysenterie aiguë : j'ai recherché inutilement à l’autopsie des amibes à la surface de la muqueuse intestinale et sur les coupes de l'intestin. À ce sujet, je dirai que je suis surpris de la facilité avec laquelle quelques observateurs reconnaissent les amibes sur les coupes histolo- giques de l'intestin et d’autres organes. Les grands éléments qui se trou- vent notamment dans les vaisseaux sanguins de l'intestin enflammé, ainsi que dans les lymphatiques, ressemblent beaucoup à des cellules endo- théliales devenues plus ou moins globuleuses et il me paraît bien délicat de faire sur des coupes histologiques le diagnostic différentiel de ces éléments et des amibes. On trouve également dans le pus des abcès du foie de grands éléments anatomiques qui ont une grande analogie avec des amibes. Il me semble que dans l’état actuel de la science le diagnostic 878 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ———_—_————————————]——————]—_——————————————pZpZE d'amibes ne peut être tenu pour certain que lorsqu'on à vu ces parasites à l’état vivant et qu’on a pu constater leurs mouvements caractéristiques. Je crois pouvoir conclure de mes recherches que les amibes intestinales rencontrées une seule fois sur dix et en petit nombre dans la dysenterie aiguë de notre pays ne sauraient être considérées comme étant la cause de cette dysenterie, non plus que les cercomonades ou les trichomonades que l'on rencontre également quelquefois dans les selles. Je ne conteste d’ailleurs nullement l’existence d’une dysenterie ami- bienne, j'ai même observé quelques faits qui m'ont paru appartenir à celte espèce, celui-ci entre autres : En même temps que les dysentériques provenant des forts de Paris, je recevais au mois d'août dernier dans mon service un malade qui était atteint de dysenterie chronique contractée au Tonkin. Dans les selles de ce malade, selles qui avaient les caractères des selles dysentériques, je trouvai un grand nombre d’amibes qui avaient des mouvements très vifs; il est probable qu'il existe plusieurs espèces d’amibes intestinales. Pour savoir si les amibes sont véritablement les agents pathogènes de certaines formes de dysenterie et si elles ne trouvent pas tout simplement dans l'intestin des dysentériques un milieu favorable à leur développe- ment, il sera nécessaire de procéder à de nouvelles recherches et à des expériences qui, déjà entreprises par Lüsch, Hlava, Kartulis, n'ont encore donné que des résultats discutables. Ce qui dès aujourd’hui me semble pouvoir être affirmé c’est que la dysenterie saisonnière de nos pays n'appartient pas à la forme amibienne et qu'il faut par suite lui trouver une autre cause. L'examen bactériologique des selles des dix malades dont j'ai parlé plus haut m'a permis de constater la présence de bacilles en grande quantité, mais il m’a été impossible de différencier ces bacilles du 2. coli communis; l'aspect est le même dans les selles fraîches et dans les cul- tures, les colonies sont identiques sur gélatine et sur gélose, enfin le bacille que j'ai isolé faisait fermenter la lactose, j'ai dû conclure par conséquent qu'il s'agissait du 2. coli communs. En dehors de ces bacilles on trouve d'ordinaire dans les selles dysenté- riques une grande variété de microcoques et de bacilles; aucun de ces microbes ne m'a paru par sa conslance ou son abondance dans les selles mériter d’être signalé snécialement. Faut-il admettre avec Maggiora que le B. coli communis est l’agent de la dysenterie ou, avec Bertrand et Baucher, que tous les microbes contenus dans l'intestin jouent leur rôle dans la pathogénie de cette maladie? Cette dernière théorie de la dysenterie saisonnière de nos climats paraît admissible. Les matières fécales, avec tous Jes microbes qu'elles renferment, constiluent par elles-mêmes une cause d’irritation et d’in- . flammation de la muqueuse intestinale; à l’état normal la muqueuse est ? protégée par l’é ithélium ar les sécrétions intestinales et par le mucus. I! 5 Ï 2 P SÉANCE DU # NOVEMBRE 879 On peut concevoir que l'arrêt des sécrétions intestinales et un change- ment dans la composition du mucus facilitent le développement des microorganismes et permettent à ceux-ci de prendre une virulence plus grande qu'à l’état normal. On sait que les selles dysentériques n'ont plus l'aspect fécaloïde, que les sécrétions intestinales sont arrêtées et que le meilleur moyen de guérir la dysenterie consiste à provoquer la diarrhée par l'emploi des purgatifs ; l'odeur infecte des selles dysentériques annonce aussi que les désinfectants physiologiques des matières fécales ne font plus leur office. Il y a donc là des présomptions, mais avant de conclure il faudra déter- miner exactement les causes qui suppriment ou affaiblissent les moyens de résistance de la muqueuse du gros intestin. L'étude du mucus humain au point de vue de son pouvoir bactéricide, entreprise par Wurtz et Larmoyez (Soc. de biologie, 15 juillet 1893) fournira peut-être des indica- tions utiles pour l'étude de cette question. NOTE SUR LES MODIFICATIONS PRODUITES PAR L’EXCITATION ÉLECTRIQUE DANS LES CELLULES NERVEUSES DES GANGLIONS SYMPATHIQUES, par M. M. LAMBERT, Chef des travaux physiologiques à la Faculté de médecine de Nancy. (Note préliminaire.) Quelles que soient les idées que l’on se fasse sur le fonctionnement du système nerveux, on est amené à se demander si ce fonctionnement n'est pas accompagné de changements microscopiques. L'activité de la cellule nerveuse est-elle liée à une modification de sa constitution chimique ou morphologique? C’est là une question que plusieurs auteurs se sont déjà posée, mais les résultats de leurs investigations ne sont pas toujours con- cordants. Les uns ont vu des changements de structure qu’ils considèrent comme liés à l’activité physiologique de la cellule. Fleischl trouva dans le gan- glion de Gasser de la grenouille une issue du noyau hors du corps cellu- laire après traitement par une solution d’acide borique concentrée, et ce phénomène ne dépendrait pas, d'après lui, de l’action chimique du réactif. Magini (1) vit dans les cellules nerveuses motrices de la torpille, après excitation, le nuciéole excentrique et orienté vers le cylindre-axe; le (1) Rendiconti della R. acad. dei Lincei, 1890-1891, 7 4 à 880 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE karyoplasme suivrait ce mouvement, laissant entre la membrane nucléaire et lui un espace méniscoïde. Coggi nie complètement les résultats de Magini et les attribue à l’action des réactifs. Hodge constata qu'après excitation par un courant d'induetion, le noyau cellulaire est ratatiné et d'aspect fortement grenu. Ces transfor- mations avaient disparu après vingt-quatre heures de repos. Pour d’autres auteurs, comme Korybutt Daskiewicz, l’état d'activité du système nerveux serait plutôt accompagné de modifications dans la na- ture chimique de la cellule, si bien que celle-ci réagirait différemment aux matières colorantes, suivant qu'elle serait excitée ou non. Il y aurait dans les cellules excitées plus de noyaux se colorant en rouge par la safranine, dans celles non excitées un plus grand nombre de noyaux se colorant en bleu par l’hématoxyline. Plus récemment, F. Vas (1), en étudiant la structure chromatique (du corps cellulaire) de la cellule nerveuse, s’est occupé des modifications qu'y apporte l’état d'activité. Au début d’un travail que nous nous proposons de faire sur cette ques- tion, nous avons tout d’abord répété les expériences de cet auteur, sous la direction de M. le professeur Nicolas. Nous avons ensuite varié la mé- thode. Ce sont les premiers résultais de ces recherches que nous voulons exposer. Nos expériences ont porté sur les cellules du ganglion cervical du lapin et du jeune chat. L'animal était attaché sans être endormi. Le gan- glion et la portion inférieure du sympathique, sur une longueur de quelques centimètres, étaient mis à découvert de chaque côté en prenant toutes les précautions nécessaires pour ne pas les blesser. Puis l’un des cordons nerveux était excité à l’aide d’un courant induit provenant du chariot de Du Bois Reymond. La distance des deux bobines était de 15 centimètres. L'appareil était actionné par une pile de quatre éléments Leclanché. Au bout d’un quart d'heure environ, on extirpait rapidement les deux ganglions, en ayant soin d'éviter leur rétraction. Ils étaient placés dans le liquide fixateur, inclus dans la paraffine, puis CORDES et colorés au moyen de divers réactifs. Dans une de nos expériences, les ganglions n’ont été extirpés qu'après la mort de l’animal, obtenue par une injection sous-cutanée de cyanure de potassium, tandis que l’on continuait l'excitation. Jusqu'à présent nous avons obtenu les meilleurs résultats à l’aide de la fixation par le liquide de Flemming et coloration par la safranine-violet- orange B. Le protoplasma des cellules des ganglions non exeités est forlement graruleux. Les granulations sont irrégulièrement réparties dans toute la (4) Arch. für micr. An., Bd XXXIIT. SÉANCE DU # NOVEMBRE 881 cellule. Quelquefois cependant elles sont plus serrées vers la périphérie. Les noyaux, au nombre de deux comme on sait, ont généralement des contours peu accentués et occupent une siluation quelconque dans l’in- térieur de la cellule. Dans ies cellules excitées la distinction signalée par Vas du protoplasma en deux zones est très nette, comme on peut le voir sur les dessins que j'ai l'honneur de présenter à la Société. La portion centrale est claire, tantôt homogène, tantôt finement granuleuse. Les dimensions varient d’une cellule à l’autre, et sa forme est généralement celle de la ceilule elle-même; elle est limitée par une couche continue plus ou moins épaisse de gros grains serrés se colorant fortement par le rouge magenta, la safranine, la fuchsine acide. Ils constituent une mince écorce à la cel- iule ou forment par place des ilots irréguliers. Les noyaux sont pour la plupart périphériques. Ils font quelquefois saillie en un point de la cellule. Comme Vas, nous n’en avons pas vu de tout à fait sorti. Souvent ils sont silués aux deux pôles de la portion claire. Leurs contours sont nets; le nucléole et les granulations chromatiques sont fort apparents. Dans certaines cellules le nucléole avait abandonné le noyau, mais ce fait se rencontre également dans les cellules non excitées. Nous n’avons pas réussi jusqu'alors à constater les différences de volume des cellules et des noyaux signalées par Vas(1). Ces dimensions sont su jettes à de trop nombreuses variations dans un même ganglion. En résumé nos observations, comme celles de Vas, semblent montrer que l’excitation des cellules ganglionnaires du sympathique y produit un déplacement du noyau et des granulations vers la périphérie. NOTE SUR L'ESTOMAC DES PLEURONECTES, par M. A.-H. PrILLIET Les poissons osseux présentent entre eux, au point de vue de l’es- tomac, des variations considérables qui sont relatées dans tous les ouvrages d'anatomie comparée. C'est ainsi qu'à côté de poissons dont les glandes gastriques sont très développées, on en rencontre qui manquent tout à fait de ces mêmes glandes. C’est ce qui existe pour la Loche d’étang, les Cyprins, comme l’ont montré les recherches de Leydig, et pour beaucoup de poissons de mer. D'autre part, il se rencontre des espèces de transition qui présentent des glandes gastriques peu déve- loppées, rudimentaires, plus ou moins isolées les unes des autres. C’est le cas des pleuronectes en particulier. Il nous a paru intéressant d'étudier (1) Arch. für micr. An., Bd XL. 882 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE les glandes gastriques de ces animaux. Le Turbot, la Sole, le Flétan, la Limande, le Carrelet ont servi d'objets d'étude, À cause de la rapidité de l’auto-digestion de la muqueuse gastrique, on ne peut obtenir de bons résultats si l'on n’ouvre pas soi-même l'animal encore vivant. Il faut donc opérer au bord de la mer. La muqueuse étant bien fixée, les différences de technique importent peu. Voici les résultats généraux de cette étude. L’œæsophage et l'estomac constituent une poche unique, commençant au dedans des dents pha- ringiennes et s'arrêtant au pylore, quiest muni de deux appendices pylo- riques assez courts. Le cylindre membraneux ainsi constitué est recou- vert d'une muqueuse sillonnée de plis longitudinaux fort élevés sur l'animal à jeun, ce qui permet une ampliation considérable de Forgane. Sur les coupes histologiques, on peut constater des détails de structure assez particuliers. L’œsophage n'est pas, comme chez les vertébrés supé- rieurs, un conduit distinct; il contribue à former la poche stomacale, et sa surface interne est recouverte de cellules caliciformes, sécrétant un mucus très abondant. Les glandes peptiques sont très courtes, isolées de la surface de l’es- tomac par une bande de chorion conjonctif épais, aussi sont-elles pour- vues d’un canal excréteur étroit et long. Chaque glande est constituée par six à dix tubes très courts, aboutissant à un canal commun, et elles sont toutes groupées par petits îlots, comprenant quelques glandes seulement. Ces îlots sont isolés les uns des autres par des tractus conjonctifs, surtout chez les animaux jeunes. Leur nombre peut aussi varier sous l'influence du contenu stomacal; c’est du moins ce qui semble ressortir de la com- paraison d'animaux à jeun avec des animaux à estomac rempli. La por- tion pylorique de l’estomac ne renferme que des cryptes, tapissées par des cellules à mucus. Il en est de même des cæcums pyloriques. Mais le péritoine qui double cette portion pylorique contient un grand nombre de Jobules glandulaires appartenant à ce pancréas diffus des poissons osseux dont Legouis a démontré l’existence. IL s'ensuit qu’à des glandes gastriques rudimentaires correspond un pancréas développé, dont les glandes déversent leur produit dans la poche stomacale elle-même. D'autre part, si rudimentaires que soient ces glandes, elles prennent, dès leur apparition, le type de glandes en tubes composées que l’on retrouve dans l'estomac des mammifères, et qui se montre à son plus complet développement dans le ventricule succenturié des oiseaux. Cette disposi- tion racemeuse des glandes tubulées de la muqueuse gastrique est d’ailleurs fréquente chez les autres vertébrés, c'est un point sur lequel a beaucoup insisté M. Sappey. Elle peut réapparaître chez l’homme au cours de certaines gastrites adénomateuses. SÉANCE DU 4 NOVEMBRE 883 INFLUENCES HÉRÉDITAIRES EXPÉRIMENTALES, par MM. GLEy et CHARRIN. On ne possède pas d'expériences positives suffisantes, permettant d'affirmer la possibilité de transmettre aux descendants tel état anato- mique ou physiologique du fait de l'influence de l'élément mâle. La bactériologie nous a paru capable de faciliter la solution de ce pro- blème. — Il était légitime, en effet, de se demander si, d'une part, on cons- laterait l'existence de l’immunité chez des sujets issus de couples dont le père uniquement était réfractaire au moment de la fécondation, si, d'autre part, quelques phénomènes spéciaux, conséquences de la vacci- nation qui, au fond, consiste à inoculer une infection atténuée, ne se produisaient pas. Dans le but de vérifier cette hypothèse, on vaccine 8 lapins mâles contre le bacille pyocyanogène; ces vaccinations sont pratiquées à trois reprises; le 30 mars 1893, on injecte 1 centimètre cube de culture atté- nuée sous la peau de chaque animal, puis, le 1° et le 3 avril, 5 centi- mètres cubes de toxines. Quinze jours après, on répartit ces animaux, I, I, LI, IV, V, VI, VIT, VIII, entre quatre cages; dans chacune de ces cages, on place deux femelles normales, a, b, c,d,e,f,g,h. Le 27 juin 1893, une des lapines e de la troisième cage accouche de huit petits, qui succombent dans les quarante-huit heures. Le 30 du même mois, la femelle 9, de la quatrième cage, donne le jour à six rejetons; trois périssent; trois survivent; à la date du 2 octobre, ils pèsent : À, 665 grammes; B, 602; C, 610. Le même jour, la seconde femelle L de cette même cage a, de son côté, six nouveau-nés qui semblent arriver avant terme; aucun n'est vivant. Le 2 juillet 1893, une lapine d de la seconde cage a sept pelits; quatre seulement, D, E, F, G, s'élèvent. Le surlendemain, on découvre six cadavres de fœtus dans la première cage. Les femelles a, b, c, f, sont demeurées stériles. Le 3 décembre, la lapine e meurt. Le 26, on inocule les mâles LATE IV, V, VE, VIT, VIT, les femelles a, 6, c, d, f, g, h, plus quatre témoins 1, 2, 3, 4; chaque sujet recoit, dans les veines, 4 centimètre cube d’une culture pyocyanique de virulence modérée. Les témoins 2, 4, et la lapine a succombent le 2 octobre: le témoin 1, vingt-quatre heures après; le témoin 3 et la femelle 9, le 5; les femelles 4 et /, le 7; la femelle À, le 9. — Le 15, la femelle g est malade: elle a maigri, 884 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE néanmoins, elle est encore vivante à la fin d'octobre, ainsi que d, quin’a pas été souffrante ; toutefois, g a un début de paraplégie. Tous les mâles ont résisté, à l'exception de II (première cage) et V [troisième cage), qui ont péri, l’un le 10, l’autre le 17 octobre. Ainsi, l’état réfractaire réel mais variable, chez ces mâles, a été reconnu incomplet, inconstant pour les femelles, quoique indéniable cependant et plus marqué chez celles qui se sont montrées fécondes. — Il en résulte que cet état peut intervenir dans la transmission au fœtus ; la cellule paternelle reste, néanmoins, le primum movens. Cette transmission de résistance s’opère grâce à l’accouplement et à la grossesse. Différents facteurs, qualités du vaccin, intensité de la vacei- nation, dates respectives de cette vaccination et de ces fécondations, la font varier, etc. Le 4 octobre 1893, on inocule de la même façon les sept petits A,B,C,D,E,F, Get cinq témoins nés le 10 juillet, onze jours après À, B, C, huit jours après D, E, F, G. Malgré cette différence, leur poids moyen atteint 882 grammes, celui de À, B, G, 616 grammes, et celui des quatre derniers, 719 grammes. — Les témoins sont désignés par les chiffres 5, 6, 7,8, 9. Le 4 octobre, tous les témoins sont morts; les témoins 5 et 7 ont péri le 8; le témoin 6, le 10 : les témoins 8 et 9, le 11. Le petit lapin B succombe le 10 ; E, le 42; F et C, le 17; G, le 26. Los deux autres sont bien portants à l’heure présente. Inutile de commenter longuement ces expériences : elles parlent d’elles-mêmes. — Quand on accouple des lapins, le mâle étant seul vac- ciné contre le bacille pyocyanogène, on peut voir, dans des cas assez rares, l’immunité transmise aux descendants. Si cette transmission est inconstante, cette immunité des descendants le plus souvent, est incom- plète, peu profonde; néanmoins, il y a là un attribut héréditaire du fait de l'élément mâle. Nous avons rapporté iei une de nos expériences; mais, depuis plus de trois ans, nos recherches ont porté sur trente-quatre animaux, dont vingt-six mères. — En dehors des phénomènes que nous venons d’indi- quer, on observe de la stérilité, des avortements, des morts dans les pre- miers jours. — Si les rejetons s’élèvent, ou bien ils sont normaux, ou bien ils sont atrophiés; les os sont courts, les épiphyses sont volumineuses, tuméfiées, surtout au niveau des membres; le poids général est très infé- rieur. Or, des accidents de même ordre se produisent : lorsque les deux géné- rateurs sont vaccinés, lorsque la mère seule a été rendue réfractaire, ou, lorsque l'infection des parents est subaiguë ; plus d’une fois nous l'avons constaté. Entre l’état des générateurs, du père en particulier, dans les recherches que nous avons résumées et ces accidents, il y a donc des relations certaines. SÉANCE DU # NOVEMBRE 885 Ainsi se démontre cette influence de la cellule mâle ; elle agit comme agit l'élément femelle ou les deux réunis. À ce point de vue, ces consta- tations sont en accord avec les enseignements des cytologistes, tels que Strassburger, Guignard : « Si, chez l’ascendant, la cellule a 12 chromo- somes, chez le descendant, on en compte 12; 6 apportés par le sperma- tozoïde, 6 par l’ovule, » souliennent ces savants. Notons que la fréquence de la stérilité, des morts précoces, de l'in- constance dans la transmission de l’immunité, obligent à poursuivre ur nombre considérable d'expériences, avant de voir se réaliser tous les cas. D'autres travaux, du reste, seraient nécessaires pour étudier l’état bac- téricide, l’état phagocytaire, monstruosités et surtout la descendance des premières générations anormales. Pour le moment, sans vouloir toucher aux explications théoriques, : parfois trop faciles, nous nous bornons strictement aux faits que nous avons résumés. Leur signification ne saurait échapper à personne. En tout cas, ils ébranlent la théorie de Weismann, puisqu'il y à trane- mission d’attribut de l'élément somatique à l'élément sexuel. SERINGUE A INJECTIONS HYPODERMIQUES ASEPTIQUE. par M. Durroco. Note présentée par M. CHARRIN. L'emploi de solutions parfaitement aseptiques serait souvent illusoire, surtout s’il s’agit d'introduire par la voie sous-cutanée des sels difficile- ment tolérés par la peau, si l’on ne pouvait assurer l’asepsie complète de la seringue. Or, l’on sait combien difficilement, dans la pratique, on peut se procurer le récipient, l’eau bouillante, la lampe à alcool nécessaire pour la stérili- sation de la seringue. Aussi, grâce à l’obligeance de M. Collin que je suis heureux de remer- cier ici, J'ai pu faire établir une seringue à stérilisation immédiate qui permet de faire en quelques instants, seul et sans aide, celte petite, mais très importante opération. Cet appareil, qui ne dépasse pas sensiblement le volume de la seringue . ordinaire et qui peut, comme elle,se porter dans la poche, est composé de deux parties : 886 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE La première, qui forme couvercle, est une lampe à alcool dont le bou- chon se dévisse facilement: La seconde est une petite cuve qui contient, sur un support spécial, la seringue, les aiguilles et le tube porte-fils. Cette petite cuve est munie de deux pieds qui se replient sous le fond. Le piston de la seringue et ses ajutages sont en moelle desureau, pour pouvoir supporter l’ébullition; les aiguilles sont en platine irridié pour la même raison. Tout l'appareil est en métal nickelé. La petite cuve est posée sur une table, les pieds dépliés. On la remplit d’eau filtrée de façon à ce que la seringue baigne dans le liquide. Pour remplir la seringue d’eau, on usera du petit artifice suivant : La seringue sortie de la boîte, on tire le piston jusqu’au bout de sa course puis on Ja plonge dans un verre plein d’eau, de manière que tout le corps de pompe baigne dans le liquide. Si on pousse alors le piston, l’eau pénètre de chaque côté de la tige et le cylindre de verre se remplit dans toute sa hauteur au-dessus du piston; on retire ensuite celui-ci de trois à quatre divisions, c’est-à-dire de 3 à 4 millimètres, et l'eau pénètre sous le piston. On remet alors la seringue dans la cuve sur son support. La cuve est disposée de manière à contenir la seringue avec la tige légèrement tirée. Il reste à allumer la lampe à alcool et on la dispose entre les pieds de la petite cuve. Dans ces conditions, il faut trois minutes pour amener l’eau au point d’ébullition ; on maintient celle-ci pendant deux minutes, ce qui fait cinq minutes pour l'opération. On laisse le liquide se refroidir un peu, puis maintenant la cuve d’une main, de l’autre on prend le porte-fils dont l'extrémité, terminée en double crochet, s'engage dans les œillets du sup- port qu’on retire ainsi de la cuve; on vide la seringue de l’eau qu'elle contient et il ne reste plus qu’à la remplir avec le contenu d’un des tubes stérilisés. La petite lampe-couvercle contient assez d’alcool pour que l’on puisse répéter au moins six fois la stérilisation de la seringue ; un telrésultat me parait plus que suffisant pour la pratique. Ce sont là des soins qui paraîtront peut-être un peu méticuleux, mais quand il s’agit de soustraire un malade à la possibilité d’un abcès ou d’un phlegmon, on peut bien lui sacrifier quelques minutes de son temps. SÉANCE DU # NOVEMBRE 887 PHYSIOLOGIE ANIMALE. SUR UN PHÉNOMÈNE D'INHIBITION CHEZ LES CÉPHALOPODES CONSTRICTION PARALYTIQUE DES CHROMATOPHORES, par M. C. PHisazix. Comme je l'ai fait remarquer dans une communication antérieure (1), la dilatation des chromatophores, qui donne à la peau des Céphalopodes une teinte noire intense, n’est pas l’unique manifestation des émotions chez ces animaux. Bien souvent, au contraire, il se produit, sous l’in- fluence de causes diverses, un resserrement extrème des taches pigmen- taires : il en résulle une pâleur considérable de la peau. Ges deux phé- nomènes inverses sont comparables à ceux qui résultent de la dilatation ou du resserrement des vaisseaux sanguins et l’on peut les désigner par les mots de chromato-dilatation et de chromato-constriction. Jusqu'ici le premier phénomène a été seul l’objet de recherches et de discussions; le second a échappé à l’attention des investigateurs. Par opposition à la päleur relative qui succède à la noirceur et qui résulte du relâchement des muscles dilatateurs, la chromato-constriction dont il est ici question est, au contraire, un phénomène actif, dû à une intervention spéciale du système nerveux. Pour nous en rendre compte, analysons ce qui se passe dans le chromatophore au repos. La tache pigmentaire est soumise à deux forces antagonistes, l’une, continue et toujours égale, c’est l'élasticité de l'enveloppe qui tend à la resserrer, l’autre variable et oscillante, c’est la tonicité des muscles radiairee qui tend, au contraire, à la dilater. Cette action tonique est sous la dépen- dance du système nerveux, et, si l’on supprime l’action de ce dernier par la section du nerf, l'équilibre est rompu : le chromatophore, obéissant à la seule force élastique, se rétracte au maximum. Or, la chromato-constriction résulte précisément d'une action para- hysante dont les effets sont analogues à ceux de la section du nerf. C’est un phénomène d'inhibition semblable à celui qui a lisu pour la vaso-dila- tation, avec cette différence qu'ici la force antagoniste agit en sens inverse. Où et comment se produit l'inhibition ? C’est pour résoudre cette question que j'ai entrepris sur la Seiche de nouvelles expériences à la Station zoologique d'Arcachon. Je suis heureux de remercier de nouveau M. le professeur Jolyet du concours bienveillant qu'il m’a prêté. Le premier point à élucider était de savoir s'il existe des filets nerveux chromato-constricteurs agissant directement sur le musele ou sur des ganglions interposés sur leur trajet. La disposition anatomique se prête (1) Comptes rendus, 1891, 888 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE assez facilement à cette recherche. Les nerfs palléaux innervent seuls toute la peau du manteau; on peut les découvrir aisément et agir sur eux de diverses manières. Si, après avoir sectionné l’un de ces nerfs, on excite le bout périphérique, on détermine, quand les électrodes ont été placées aux lieux d'élection, une chromato-dilatation du côté excité. En variant la nature de l'intensité de l'excitation, en exploranl toute la circonférence du nerf, je n’ai pas réussi à produire la chromato-constriction. Il en est de même si l’on excite directement le ganglion étoilé, comme l'ont déjà démontré P. Bert et Chéron, ce ganglion ne fonctionne pas non plus comme centre réflexe, et en excitant un des filets qui s’en échappent, on ne provoque ni chromalo-dilatalion, ni chromato-constriction. Après ces résultats négatifs, il ne restait plus qu'à rechercher dans les ganglions périœsophagiens la cause du phénomène inhibitoire qui amène la chro- mato-constriction. C’est à cette recherche que j'ai consacré le plus grand nombre d'expériences. Existe-t-il un centre dont l'excitation directe ou réflexe amène une chromalo-constriction généralisée el inversement la destruction de ce centre abolit-elle complètement la possibilité de ce phé- nomène ? Tels sont les deux points à la détermination desquels est liée la solution du problème. 1° L’excitation du ganglion sus-æsophagien par un courant faible détermine souvent une pâleur extrème, mais il est probable que cela est dû à un phénomène réflexe, plutôt qu’à l'excitation de la surface céré- brale, car on peut enlever celle-ci sans abolir les réflexes chromalo- constricteurs. Ces réflexes s’obtiennent assez facilement par excitation des ganglions ou du pédoncule optique, ou du bout central du nerf palléal. D'après ces résultats, il est évident qu’il existe dans les ganglions péri-œsophagiens des centres chromato-constricleurs dont la mise en activité peut paralyser les centres chromato-dilatateurs. Il reste à déter- miner dans quelle partie de ces ganglions se trouvent ces centres, 2 On sait que les ganglions sous-æsophagiens sont le siège de centres chromato-dilatateurs dont la destruction entraine la paralysie complète des chromatophores. Il était donc rationnel de rechercher si les centres inhibiteurs étaient localisés dans les ganglions sus-æsophagiens et c’est pourquoi j'ai essayé de les atteindre en faisant des lésions plus ou moins profondes des ganglions cérébroïdes. Après de nombreuses tentatives infructueuses, j'ai été amené à reconnaître que les insuccès étaient dus à ce que les lésions étaient incomplètes, ou bien, si elles étaient complètes, elles étaient unilatérales. En modifiant le manuel opératoire, je suis arrivé, presque à coup sûr, à produire les lésions dont la réalisation entraine la destruction des centres chromato-constricteurs et l'impossibilité pour l’animal ainsi opéré, de réagir aux différentes excitations autrement que par un réflexe chromalo-dilatateur. Il y a une telle corrélation entre les symptômes et la lésion qu'on SÉANCE DU À NOVEMBRE 889 pouvait prédire d'avance les résultats de l’autopsie qui a toujours servi de contrôle dans toutes les expériences. \ Dans tous les cas où la chromatoz=constriction avait été supprimée, les ganglions cérébroïdes étaient hors d'état de fonctionner. Il faut donc en conclure que les centres inhibiteurs des chromato- phores sont localisés dans les ganglions cérébroïdes, et que c’est par une action directe de ces centres sur les centres chromato-dilatateurs que se produit la paralysie momentanée des muscles chromato-dilatateurs et la pâleur qui en résulte. k En résumé, pour les chromatophores comme pour les vaisseaux san- guins, l’inhibition de la fibre musculaire ne se fait pas directement, mais bien par l’intermédiaire des centres nerveux et, en rapprochant les deux phénomènes, j'ai voulu apporter une contribution à la physiologie générale des actions nerveuses inhibitoires. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marerneux, directeur, 1, rue Cassette, Es | ae LS FA M STDE A e et Tele ni ie . 7e 5e +612 280 art hAl URLS 894 SÉANCE DU || NOVEMBRE 1893 M. Cu. Féré : Note sur les oscillations de poids chez les épileptiques. — M. le Dr Laveran : Sur des embryons de Filaire du sang de l’homme. — MM. L. Guinarn et À. Morey : Pseudo-tuberculose microbienne chez le mouton. — M. A.-H. Pir- LIET : Action locale des essences sur la muqueuse gastrique. — MM. C. Cnagrié et A. Dissarp : L’excrétion urinaire chez les animaux soumis aux basses tempéra- tures (— 70 degrés) pendant une courte durée de 8 minutes. — M. L. Dor : Nature infectieuse de certaines arthrites déformantes (lipome arborescent des synoviales). — M. A. CHARRIN : Epidémie chez les Goujons. Présidence de M. Chauveau. NOTE SUR DES OSCILLATIONS DE POIDS CHEZ LES ÉPILEPTIQUES, par M. Cu. FÉRé. On observe souvent chez les épileptiques des modifications profondes de la nutrition, dont la plupart sont en rapport avec la fréquence des manifestations convulsives ou psychopathiques ; mais qui quelquefois ne peuvent être rattachées à une condition appréciable. Les oscillations de l’embonpoint ne sont pas rares : on voit un malade maigrir ou engraisser rapidement à la suite d’une recrudescence des accès, ou à la suite d’une accalmie. L’engraissement à la suite d’un choc nerveux n’est pas spécial aux épileptiques ; on peut voir le même phéno- mène se produire à la suite d’un choc moral (1), aussi bien qu’à la suite d’une maladie aiguë. Plus rarement on voit chez les épileptiques les augmentations ou les diminutions de poids se produire sans aucune mo- dification de la fréquence des paroxysmes. C'est un fait qui m'a frappé plusieurs fois déjà, mais jamais au même degré que chez le malade que je puis présenter aujourd’hui à la Société de Biologie. C’est un grand garçon de vingt-six ans, qui est dans mon service depuis sept ans, et qui présente fréquemment des accès et des vertiges, en moyenne six accès et trois vertiges par mois dans l’année courante, Il a été bromuré pendant plusieurs années avec un succès médiocre et il prend du borax depuis le 5 août 1893. La fréquence de ses accès n’a pas paru modifiée. IL a eu six accès et trois vertiges en septembre, six accès et deux vertiges en octobre. Comme tous les malades du service, il est pesé fréquemment sans vêtements : le 5 août il pesait 53 kilogrammes; le 25 août encore 53 kilogrammes, le 12 octobre il pesait 54 kilogrammes. Depuis cette époque il a éprouvé un engraissement rapide, si bien que le 8 novembre il pesait 70 kilogr. 500 grammes. En vingt-sept jours, il a engraissé de 33 livres. Il paraît maintenant diminuer, il a perdu 1 kilo- gramme depuis le 8. (1) Ch. Féré. La pathologie des émotions, 1892, p. 260. BIOLOGIE. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 32 892 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Cet individu a pris611 grammes par jour pendant près dequatresemaines. Il est resté soumis au régime ordinaire de l’hospice. Il n’a pu y ajouter que le pain abandonné par ses camarades. Les pesées régulières des malades de cette catégorie perméttent d'ob- server de Lemps en temps des oscillations de poids du même genre sinon aussi marquées, variations qui méritent d’être rapprochées des séries et des accalmies des paroxysmes. SUR DES EMBRYONS DE FILAIRE DU SANG DE L'HOMME, par M. le D' LAVERAN. J'ai l'honneur de présenter des photographies d’embryons de filaire du sang humain. Ces embryons que j'ai trouvés récemment dans le sang d'un malade qui revenait du Soudan ont l'aspect général et les dimensions des embryons de la filaire qui est bien connue depuis les beaux travaux de Wucherer, de Lewis, de Bancroft et de Manson; ils mesurent 8 à 9 w de large sur 300 w de long; l’une des extrémités est arrondie, mousse;. l'autre extrémité est effilée, et lorsque les embryons sont animés de mou- vements très vifs on constate que cette dernière extrémilé, ou extrémité caudale, se prolonge en une espèce de flagellum. A l'état vivant, le corps des embryons est transparent et paraît constitué par une substance homo gène; les embryons morts deviennent granuleux, et si on les colore par. le bleu de méthylène on distingue surtout vers la partie moyenne un canal central moins coloré que Les parties latérales. J'ai trouvé ces embryons dans le sang le jour aussi bien que la nuit, contrairement à ce qui arrive pour la filaire de Wucherer et de Lewis et j'ai dû me demander s’il ne s'agissait pas d’une des nouvelles espèces de filaires signalées par Manson: Filaria sangquinis hominis diurna ou Filaria sanguinis hominis perstans (Communic. de Manson au congrès d'hygiène de Londres de 1891). Ces deux espèces de filaires ont été rencontrées sur des nègres de la côte ouest d'Afrique, et le malade dans le sang duquel j'avais trouvé les embryons figurés dans ces photographies revenait pré- cisément du Soudan. Par sa présence nuit et jour dans le sang, la filaire méritait bien l’épi- thète de perstans, mais par les dimensions de ses embryons elle se rappor- tait à Filaria diurna; en effet, d’après Manson les embryons de Filaria perstans sont plus petits que ceux de filaria nocturnaetde Filaria diurna. Il me paraît donc difficile de classer exactement les embryons de filaire que j'ai trouvés dans le sang; les nouvelles espèces décrites par Manson sont d’ailleurs assez mal connues, puisqu'on n’a pas encore vu ces filaires à l’état adulte. Les embryons de filaire que j'ai observés se coloraient bien et très vite par la solution aqueuse de bleu de méthylène au moins après leur mort. SÉANCE DU 11 NOVEMBRE 893 ‘après MM. de Nabias et Sabrazès, les embryons de filaria nocturna se colorent difficilement par ce réactif (Soc. de biologie, 21 mai 1892): il y auraitlà peut-êtreun caractère différentiel de ces deux variétés d’embryons; j'ai aussi constaté que ces embryons mouraient très rapidement dans une solution de chlorhydrate de quinine à 4 p. 1000 et même à 1 p. 10,000. Les photographies que je présente ont été faites sur mes préparations par M. Yvon. L’une de ces photographies représente un embryon qui vivait encore au moment où il a été photographié. On ne distingue qu’une ligne fine de contour; l’autre photographie représente un embryon qui avait été coloré par le bleu de méthylène, on distingue surtout vers la partie moyenne une cavité centrale. L'extension de la colonisation et des voyages d'exploration sur la côte ouest de l'Afrique me paraissent donner à ce fait de filariose un intérêt d'actualité. La filariose n'avait donné lieu dans ce cas à aucun des accidents locaux qui la dénoncent d'ordinaire, tels que hématochylurie, varices lympha- tiques, œdème du scrotum; le malade présentait seulement des accès de fièvre irréguliers qui avaient une grande analogie avec une fièvre palustre. PSEUDO-TUBERCULOSE MICROBIENNE CHEZ LE MOUTON, par MM. L. Guinarp et A. More. Note présentée par M. A.-E. CHARRIN. En 1891, MM. H. Preisz et L. Guinard ont étudié, dans le laboratoire de M. le professeur Arloing, une variété de pseudo-tuberculose dont les lésions siégeaient exclusivement dans les reins d’un mouton et qui fut attribuée par eux à un bacille extrèmement fin, très court, ayant à peine 3 L& de longueur (1). Ce microbe a été isolé, cultivé par les auteurs, qui, de plus, en inocu- lant les produits pathologiques au lapin et au cobave, ont déterminé chez eux des lésions spéciales, toutes comparables et de forme tubercu- leuse. — C'est, à notre connaissance, le premier cas de pseudo-tuber- culose bacillaire qui ait été étudié chez les animaux de l'espèce ovine; il est intéressant, parce que, développé spontanément chez un animal de boucherie, il a contribué à étendre le champ et l'importance des tuber- culoses sans bacille de Koch, qui, pendant quelque temps, ont paru devoir rester des curiosités ooales. Le travail de MM. H. Preisz et L. Guinard, bien que poussé assez loin, n’est pas absolument complet. Il contient la description Hu ieuRe. (4) Voir : Arloing, Leçons sur la FU et certaines septicémies, PAU, 1892, p. 227; H. Preisz et Guinard, Pseude-tuberculose chez le mouton, Journal de l'École vétérinaire de Lyon, octobre 1891. 894 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE macroscopique et histologique, des lésions primitives et expérimentales, les caractères du microbe et les résultats des inoculations pratiquées avec les produits pathologiques; mais une lacune importante existe du côté des résultats fournis par l’inoculation des cultures. Nous avons pu tout récemment reprendre cette étude, grâce à l’extême obligeance de M. Labully, vétérinaire à Saint-Étienne, qui a bien voulu - nous adresser la presque totalité du cadavre ainsi que les viscères d’un mouton présentant des lésions tuberculeuses généralisées (1). L'examen de ces pièces nous a montré partout des tubercules nom- breux : dans le poumon, où ils avaient l’apparence de tubercules vrais ; dans le foie, qui était hypertrophié, et en présentait seulement à sa sur- face; sur le péritoine, notamment le long de l’hypocondre gauche où ils étaient abondants et volumineux ; enfin sur les viscères digestifs, estomacs, intestins, etc. ; Les ganglions bronchiques et préthoraciques étaient hypertrophiés, résistant à la section et renfermaient une substance caséeuse blanchâtre. En un point du lobe antérieur droit du poumon, il existait une caverne du volume d’une grosse noix, contenant une matière caséeuse, épaisse, de couleur grisàtre. : En somme, s’il se fût agi d’un animal de l'espèce bovine, Le diagnostic de phtisie tuberculeuse aurait pu être posé et, au premier abord, nous étions nous-même fort embarrassés pour conclure. L'examen microsco- pique d’un grand nombre de préparations, faites avec des produits de raclage de la plupart des lésions, ne nous a jamais révélé la présence du bacille de Koch, mais en revanche, nous avons pu voir des microbes spéciaux, sur lesquels nous donnerons plus loin quelques renseignements préliminaires. Nous avons procédé d’abord à l’inoculation de plusieurs cobayes et lapins, avec la matière des tubercules, préalablement triturée dans du bouillon stérilisé et filtrée sur linge fin. Ces inoculalions faites soit dans la veine, soit dans le tissu conjonctif sous-cutané, ont reproduit des lésions comparables aux lésions originelles, avec existence du même microbe à leur intérieur. La marche de la maladie que nous avons ainsi développée chez nos animaux d'expérience est généralement lente; nous n'avons jamais observé les formes aiguës étudiées par Preisz et Guinard. La durée a rarement été inférieure à trois semaines et oscillait habituellement entre quatre et six semaines environ. Dans l’étude que nous avons poursuivie jusqu'à présent, nous avons réalisé les conditions nécessaires et suffisantes pour établir d'une façon (4) Nous tenons à rappeler que c'était M. Labully qui avait envoyé les pièces pathologiques qui sont devenues le point de départ du travail de MM. H. Preisz et L, Guinard. SÉANCE DU 11 NOVEMBRE 895 certaine que nous nous trouvons en présence d’une pseudo-tuberculose microbienne bien caractérisée. Nous avons vu l’agent pathogène dans les lésions primitives; nous avons transmis la maladie par inoculation de cés lésions et retrouvé le même germe dans les produits pathologiques expérimentaux. Nous avons ensemencé et cultivé le microbe dans les milieux artificiels, bouillon, agar, gélatine, et reproduit enfin la maladie par inoculation de ces cultures. Quant au microbe lui-même, il paraît avoir les plus grandes analogies avec celui qu'ont déjà décrit Preisz et Guinard, dans le premier cas de pseudo-tuberculose ovine qu'ils ont fait connaître. — Il se présente habi- tuellement sous la forme d’un très fin bacille, excessivement court, et sa finesse est telle qu’en dehors de l'emploi des grossissements puissants, on croirait avoir affaire à un microcoque. Ne voulant pas anticiper sur des recherches en cours, nous nous contenterons d'ajouter ici que ce microbe est essentiellement polymorphe et que les conditions de sa végétation, influent considérablement sur sa forme. Sous quelque forme qu’il se présente, notre microbe, qui, comme nous l’avons dit plus haut, paraît être celui de Preisz et Guinard, se colore très facilement par le violet de gentiane, le bleu de méthylène ou la fuchsine ; il prend le Gram, mais ne se colore pas par la méthode d’Er- lich. — Dans les tubercules jeunes, il est assez abondant et très facile à voir; on le distingue plus facilement, quand, après une bonne coloration, on chauffe légèrement la préparation. L'action de la chaleur produit une décoloration partielle qui, portant surtout sur la trame des tissus, met les éléments microbiens en évidence. Nous ne considérons pas notre étude comme terminée, car prochaine- ment, nous aurons à revenir sur Certaines particularités du microbe que nous avons isolé et sur le résultat d'expériences actuellement en train sur des animaux de l'espèce ovine (1). ACTION LOCALE DES ESSENCES SUR LA MUQUEUSE GASTRIQUE, par M. A.-H. PiLzrer. Les essences, en particulier celles de Cannelle de Bergamotte et de Reine- des-Prés quej'aiexpérimentées, paraissent dénuées de pouvoir caustiquesur la peau et agissent pourtant sur la muqueuse de l'estomac avec une extrême intensité. Les préparations histologiques que je soumets à l'examen de la Société permettent de s’en rendre compte. Elles proviennent de l’estomac d'un lapin qui a succombé en 50 minutes après avoir reçu par l'œsophage 3 grammes d'essence de Reine-des-Prés, injectés avec une seringue de verre. L'estomac était d’un rouge noir, sauf dans la portion pylorique restée blan- (1) Les recherches bactériologiques de ce travail ont été poursuivies par M. Morey, dans le laboratoire de M. le professeur Galtier. 896 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE che, et sa muqueuse boursouflée s’exfoliait en lambeaux. Sans insister surle processus histologique de la formation des eschares, qui fera l’objet d’une description spéciale, nous pouvons en indiquer les principales lignes. La muqueuse superficielle est coagulée comme si elle avait été fixée à l’al- cool absolu, et tous ses éléments sont restés en place. C’est elle qui forme la partie superficielle, blanchâtre et résistante de l’eschare. Au-dessous d’elle, existe une vaste inondation sanguine qui a son point de départ à l’union des glandes et du chorion de la muqueuse. Elle soulève et décolle toute la couche glandulaire, s’infiltrant entre les culs-de-sac des glandes qui se trouvent ainsi isolés et noyés dans le sang. C'est la présence de cette nappe sanguine épanchée au-dessous de la couche glandulaire qui explique le boursouflement de la muqueuse et la facilité avec laquelle elle se détache du chorior. Pour obtenir des lésions aussi étendues avec les agents caustiques, il faut s'adresser à l'acide sulfurique. Employé aux mêmes doses et de la même façon, il tue le lapin en une demi-heure environ. Du reste, les expériences élaient toutes faites sur des animaux dont l'estomac était plein, la substance toxique se trouvait ainsi diluée dans des proportions qu'il est difficile de fixer, et la précision absolue des doses est de peu d'importance. Ce que j'ai obtenu avec 3 grammes d’acide sulfurique ordinaire pourrait sans doute aussi bien s'obtenir avec 2 grammes ou avec 4. L’estomac des lapins ayant ingéré de l'acide sulfurique présente si bien les mêmes caractères que celui des animaux qui ont reçu de l'essence d’ulmaire que l'étiquette est nécessaire pour distinguer les préparations. C’est la même fixation de la partie superficielle de la muqueuse, et la même inondation sanguine profonde, lésions que l’on retrouve chez l’homme dans l’empoisonnement par le vitriol et que leur intensité même rend à peu près caractéristique au point de vue médico-légal. L’acide chlorhydrique, l’acide azotique, tout en détruisant profondément la muqueuse de l'estomac, ne donnent pas des lésions ecchymotiques si prononcées. Ainsi, l’action de l’essence de Reine-des-Prés est telle que, seule, celle de l'acide sulfurique peut lui être comparée. Il ne s’agit pas là d’un simple phénoinène de déshydratation, commun à toutes les essences, car les essences de Cannelle et de Bergamotte produisent des eschares beau- coup moins étendues, mais d’une action spéciale sur la muqueuse gas- trique. La plupart des essences sont des stimulants de l'estomac, ce qui explique le rôle joué dans l'alimentation par les espèces et Îles liqueurs chargées d'essence. (est même en partant de cette donnée que j'avais cherché à me rendre compte de leur action topique, mais je ne pensais pas qu’elle püt aller jusqu'à produire des lésions aussi considérables que l'acide sulfurique, et surtout entièrement semblables à celles que déter- mine ce dernier agent, dont l’action sur la peau et les tissus vivants autres que la muqueuse gastrique, est si différente de celle des essences. Les SÉANCE DU A1 NOVEMBRE 897 muqueuses dermo-papillaires, Lelles que celles de l4 langue et de l'æso- phage, présentent une coagulation des couches superficielles de leur épi- thélium sur les points qui ont été en contact avec l'essenre, mais on n'y retrouve pas la congestion si caractéristique de l'estomac. LA RÉACTION URINAIRE CHEZ LES ANIMAUX SOUMIS AUX BASSES TEMPÉRATURES, par MM. C. CuaBrié et A. Dissarp. Les basses températures ont une influence sur la vie cellulaire. Il était intéressant de rechercher en quoi la biologie de la cellule en est modi- fiée, et par quels processus l'organisme résiste au froid. Pour résoudre ce problème, nous devions nous adresser à l’excrétion urinaire, qui traduit le plus rapidement, avec la respiration, toute évolu- tion dans l’activité cellulaire, tout changement dans les combustions organiques. Nous avions le désir de ne pas publier nos recherches avant de les avoir complètement terminées, mais une publication fort intéressante, parue dans le dernier numéro de la Aevue scientifique (1), dans laquelle l’auteur à cherché à déterminer le point thermométrique où la vie dispa- raît, nous pousse à exposer les premiers résullats de notre travail. Pour produire un froid durable dans une enceinte assez grande pour renfermer un animal toutentier, nous nous sommes servis du Cryogène imaginé par M. Cailletet et que M. Ducretet, qui l'a construit, a mis gracieusement à notre disposition. : L'animal qui a servi à nos expériences est le cobaye : il supporte facile- ment le refroidissement ; sa taille est assez exiguë pour permettre son introduction dans le Cryogène, et, d’autre part, elle est assez considé- rable pour que les phénomènes de résistance soient très appréciables. Les récipients qui contenaient les animaux étaient garnis de coton afin que le refroidissement se fasse par l'air au sein duquel le sujet étudié était plongé, et de manière à éviter les brûlures qui auraient résulté du contact immédiat d’un membre avec la paroi très froide du récipient. On commençait par refroidir le vase qui devait contenir le cobaye. On en prenait exaclement la température, et lorsque celle-ci élait celle qu’on vou- lait étudier, on plongeait brusquement l'animal dans l'enceinte refroidie, Le réchauffement produit par le corps du cobaye était facilement combattu par un jeu convenable de la détente d'acide carbonique, de telle sorte que nous avons pu maintenir la température constante pen- dant les quelques minutes de l'opération. (1) R. Pictet. La vie et les basses températures, Revue scientifique du # no- vembre 1893. 898 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Nous avons résumé dans le tableau suivant les résultats de nos expé- riences : ’URINE émises dans les 24 heures après 'URÉE tées dans les 24 heures après , r TEMPÉRATURES NUMÉROS D'ORDRE des cobayes. en minutes. en gramimes. RECTALES prises à la fin de la réfrigération. TEMPÉRATURES RECTALES prises 1 heure après sécrétées dans les 24 heures après sécré de la réfrigération DEGRÉS CENTIGRADES de la réfrigération. POIDS DES COBAYES la réfrigération. la réfrigération. QUANTITÉS D la réfrigération. QUANTITÉS D'ACIDE phosphorique (P20ÿ) la réfrigération. QUANTITES D 08 0085 0 0126 0 0175 0 0192 0 0165 En jetant les yeux sur ce tableau, on voit que, durant la réfrigération, la température rectale s’abaisse d’une dizaine de degrés, ce qui est consi- dérable si l’on tient compte du peu de durée de l'opération et que, peu de temps après, elle remonte jusqu’à devenir un peu supérieure à la nor- male. L'animal frissonne, il a de l’hyperthermie, il a dela fièvre. Ce phé- nomène est concordant avec les faits signalés par M. Bouchard; faits qui lui ont permis de formuler la loi des compensations : toute phase hyper- thermique est suivie d’une phase hypothermique et réciproquement. La sécrétion de la partie aqueuse de l'urine a varié dans de larges limites pendant la période de réchauffement, mais elle est toujours plus abondante. L'examen de la quantité d’urée éliminée nous a fourni un renseigne- ment plus précieux : elle a toujours été considérable. On peut en dire autant de l’acide phosphorique ; mais il est à noter que les variations de ce dernier élément ne suivent pas celles de l’urée. Nous avons pensé que l’anesthésie précédant etaccompagnant la réfri- gération produirait une modification sur la sécrétion urinaire des ani- maux pendant la période de réchauffement. Un cobaye, d'un poids moyen, anesthésié par le chloroforme, a été refroidi 8 minutes à 70 degrés. La quantité d'urine émise dans les vingt- quatre heures suivantes a été de 96 centimètres cubes; le poids de l’urée excrétée a alteint 0 gr. 512; celui de l’acide phosphorique, 0 gr. 05. Si l’on compare ce résultat avec ceux inscrits dans le tableau précédent, on voit que la proportion d’urée est à peu près la même que chez les animaux simplement refroidis, mais que la partie aqueuse et la propor- SÉANCE DU 11 NOVEMBRE 899 tion d’acide phosphorique éliminées sont beaucoup plus grandes. Comme nous l’avons dit, ce ne sont là que des indications qui auraient besoin d’être multipliées et que les circonstances nous font publier plus tôt que nous ne l’aurions désiré; mais nous tenons à prendre date pour avoir eu la pensée d'employer à la mesure de phénomènes biologiques l’ingénieux appareil de M. Cailletet, et pour avoir signalé ces faits de désassimilation exagérée qui suit l’action d’un froid intense et de courte durée chez des mammifères. On sait d’ailleurs depuis longtemps en clinique, et c’est un fait que M. le professeur Guyon rappelle souvent dans son enseignement, que la sensation de froid favorise l’urination, à tel point qu'il fut un temps où les médecins conseillaient à des malades qui éprouvaient de la difficulté à uriner d’aller dans des endroits frais, dans leur cave par exemple, où la sécrétion leur était toujours plus aisée. NATURE INFECTIEUSE DE CERTAINES ARTHRITES DÉFORMANTES (lipome arborescent des synoviales), par M. L. Dor. Note présentée par M. CHAUVEAU. J'ai présenté au dernier congrès de chirurgie des lésions ostéoarticu- laires chroniques obtenues expérimentalement sur des lapins auxquels j'avais injecté des microbes dans le torrent circulatoire. Deux lapins auxquels j'avais fait une inoculation intraveineuse en juin 1890 avaient présenté en juin 1891 de véritables arthriles déformantes des deux genoux. Les microbes qui avaient produit ces lésions étaient des staphy- locoques qui ne liquéfiaient la gélatine que très tardivement, et qui n'étaient pas pyogènes. Je les considère actuellement comme étant une race atténuée du Staphylococcus pyogenes, mais j’avais cru au premier abord que j'étais en présence du Staphylococcus cereus de Passet. Le côté bactériologique de mon travail laissait à désirer, mais le fait certain que je pouvais avancer, c'était qu'avec des microbes, j'avais produit expérimentalement des arthrites déformantes. Je viens d’avoir l’occasion de trouver des microbes dans un cas d’arthrite déformante chez l’homme, et de corroborer ainsi l'opinion que j'avais déjà formulée-au sujet de la nature infectieuse de cette lésion. Il est vrai que le cas que j'ai étudié est un peu exceptionnel, aussi je ne veux pas sou- tenir que toutes les arthrites déformantes reconnaissent une origine parasitaire ; je prétends simplement démontrer qu'il existe des arthrites déformantes infectieuses. Au mois d'octobre de cette année entrait dans le service de mon maître M. le professeur Poncet, un malade âgé de quarante et un ans, porteur d’une arthrite chronique del’épaule gauche avec hydarthrose considérable. L’affection remontait à quatre mois et s’était développée sournoisement 900 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sans que le malade ait jamais éprouvé de douleurs ni de symptômes fébriles. La tête humérale se luxait très facilement et pouvait occuper successivement les différentes positions de la tête dans les diverses variétés de luxations. Le malade était un arthritique ayant présenté des migraines dès l'enfance et souffrant de douleurs articulaires sous lin- fluence des variations méléorologiques de la température. Son père et son oncle étaient morts de maladies de cœur. Il n'avait jamais eu de rhumatisme articulaire aigu. En raison de ses affirmations très catégoriques, l'hypothèse d’arthrite blennorrhagique ou syphilitique fut écartée. Cependant il est à noler que les quatre premiers enfants de ce malade sont morts en bas âge, et qu’il en à eu trois ensuite qui sont bien portants. Une intervention fut décidée et M. le professeur agrégé Jaboulay, sup- pléant M. le professeur Poncet, ouvrit l'articulation. Il s’écoula environ 150 grammes d'un liquide jaune citrin strié de sang et un peu filant, puis on constata que toute la synoviale était tapissée de végétations papillo- mateuses et qu'il s'agissait en somme d’un cas typique de l'affection dénommée par J. Müller lipome arborescent des synoviales, et qui est bien connue aujourd’hui depuis les travaux de Volkmann, Simon, Riedel, Lauenstein, Saltzmann, Sutton, Schmolch, etc ; or M. Quénu (1) n'hésite pas à considérer cette affection comme une variété rare d’arthrite déformante. En faveur de cette manière de voir, je dois ajouter que la tête humérale du malade était entièrement déformée, et qu'il existait dans l’article un corps étranger cartilagineux. Je dois cependant faire observer que dans la plupart des cas publiés le lipome arborescent des synoviales s’est com- pliqué ultérieurement de lubercule, et même dans le cas de Schmolck, ainsi qu’on peut en juger par les belles planches qui accompagnent son travail (Zeitschrift für Chirurgie, 1886, vel. XXII, p. 273) des granulations tuber- culeuses s'étaient développées en même temps que les végétations papil- lomateuses elles-mêmes. Ce fait n'est pas favorable à l’opinion de M. Quénu, et l’on peut se demander si le lipome arborescent des syno- viales n’est pas une maladie complètement distincte des arthrites défor- mantes ordinaires. Mais ce n’est là qu’une hypothèse, et d'accord avec la plupart des auteurs je crois qu’il s’agit simplement d’une variété anato- mique un peu exceptionnelle d’arthrite déformante. : Quoi qu'il en soit, le fait que je veux signaler ici est que dans les végé- tations de cetle synoviale j'ai constaté par la culture la présence des staphylocoques. Pendant l'opération, M. Jaboulay a excisé avec des ciseaux stérilisés par un séjour dans un bain d'huile à 160 degrés et plongés ensuite dans de l’eau sortant de l’autoclave Chambérland, de volumineux fragments qui (1) Voy. Truité de chirurgie, de Duplaÿ et Reclus, vol. III, p. 420. SÉANCE DU: 11 NOVEMBRE 901 avaient au moins { centimètre cube. Avec un fil de platine ces fragments ont été introduits dans un tube stérilisé, et je les ai portés au laboratoire de la clinique chirurgicale. Là, j'ai procédé à l’ensemencement d'un cer- tain nombre de tubes de bouillon, et pour étre bien à l’abri de toute contamination par l'air, j'ai flambé la surface extérieure des fragments au fur et à mesure que je lés déposais dans les bouillons. Or, dès le troi- sième jour tous les lubes étaient troublés et il résulte des différents erse- mencements que j'ai faits sur gélatine et sur agar, ainsi que des inocula- tions à des lapins, que j'étais en présence du Staphylococeus pyogenes albus, et je puis ajouter d’une variété de ce microbe probablement atténuée, car elle ne liquéfiait la gélatine que lardivement, et il en fallait de fortes doses pour tuer les lapins. - Je crois donc pouvoir conclure que certaines arthrites déformantes de l’homme contiennent des microbes, et comme j'ai déjà produit expérimen- talement des arthrites déformantes au moyen d’inoculations intravei- neuses à des lapins, je crois que la simple constatation de microbes ana- logues chez le malade dont j'ai relaté l'observation est presque suffisante pour m'autoriser à dire que ces microbes avaient engendré la lésion et qu'ils n'étaient pas là par hasard. Je dois ajouter qu'aucun des ballons ensemencés avec le liquide contenu dans l’arliculation n’a été fertile alors que tous les ballons ensemencés avec les végélations ont présenté le développement du même microbe. Ce fait est à rapprocher de l'observation des auteurs qui ont éludié les microbes du rhumatisme articulaire aigu et qui n’en ont jamais rencontré dans les liquides des arthrites, alors que quelques auteurs, au contraire, en ont trouvé dans les tissus périarticulaires. (Travail du laboratoire de la clinique chirurgicale de M. le prof. Poncet.) EPIDÉMIE CHEZ LES GOUJONS, par M. A. CHARRIN. Les circonstances m'ont fait rencontrer vers la fin de septembre 1893, sur les‘bords du Rhône, une série de poissons malades ou morts; j'ai pu en recueillir un jour 4, le lendemain 17; tous, sans exception, étaient des goujons. Extérieurement, ils présentaient un très léger œdème au niveau du tiers antérieur du corps. — A l’autopsie on ne décelait qu'un fort minime épan- chement dans la cavité abdominale. Dans 11 cas, j'ai semé cet œdème sur agar; dans 11 cas, j'ai obtenu un microbe toujours semblable à lui-même. Ce microbe est sphérique, aérobie;, il se cultive aisément dans les différents milieux habituels. Dans le bouillon de bœuf, il fait apparaître une couche uniforme, d'un 902 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE LR mr ue tr ne D ee D RE 2 ES PSS gris jaunâtre, considérable dès le quatrième jour, si les ballons sont placés à l’étuve à 37 degrés. Sur agar, une couche blanchâtre, qui, à la longue, devient plus ou moins dorée, se développe. Cette couche est saillante, modérément humide ; suivant la façon dont la gélose a été fabriquée, la pigmentation s'opère rapidement ou avec une lenteur extrême ; elle est d’une intensité moyenne ou presque nulle; elle disparaît facilement. La gélatine ne tarde pas à se liquéfier sous l'influence de la pullulation de cet agent. — La pomme de terre ensemencée se recouvre d’un enduit jaune. Nous n'avons pas poussé plus loin ces recherches de culture, car l’exa- men histologique, les réactions histo-chimiques, les inoculations nous ont prouvé que nous avions isolé l’aureus ou plutôt une de ses variétés. L'inoculation de ces cultures, chez le goujon, a reproduit la maladie. Nous avons tué, en outre, des mammifères, des lapins ; toutefois, nous avons dû injecter jusqu’à 2 centimètres cubes. Il était naturel de se demander si un aureus type, recueilli sur l'homme, agirait sur ces poissons. Nous avons, d’abord, échoué ; un aureus provenant d’une ostéomyélite a paru inoffensif; mais, nous nous sommes aisément convaincu que ce germe, isolé depuis six mois, était sans effet sur le cobaye. — A l’aide d’une culture exaltée, nous avons obtenu des résultats positifs. Inutile de nous étendre plus longuement. — Le microcoque de nos goujons répond à une variété d’aureus ; ses fonctions chromogènes sont d’une mobilité inusitée, il est vrai; toutefois, on sait que cette mobilité est chosefréquente, au point quecertains auteurs confondentl’aureusetl'albus. Vouloir discuter ici cette question de variétés, savoir si on se trouve en présence du flavus, du citreus, de l’aureus, de l’albus, c’est soulever une discussion difficile à clore utilement. Dans l’une ou l’autre de ces hypothèses, il s’agit bien de la constata- tion d’une bactérie qui, habituellement, vit chez l’homme ; l'intérêt dérive de la différence des températures des espèces, de la distance qui les sépare dans l'échelle zoologique. Ajoutons qu’en contaminant l’eau par les cultures, en versant 1 c.c. de bouillon fertile pour un litre, on réussit à infecter les goujons qui nagent dans cette eau. En outre, on intoxique à l’aide de ces cultures stérilisées. Les procédés de contagion, le mécanisme des accidents, sont donc, eux aussi, analogues à ce qui se passe chez des êtres relativement supérieurs. En terminant, je rappelle que j'ai décrit, il y a un an environ, un bacille spécial qui avait occasionné une épidémie chez divers poissons du Rhône ; ici, le microbe et l'espèce malade étaient autres que le microbe et l'espèce observés cette année. Le Gérant : G. MASSoN. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MaRETHEUX, directeur, 1, rue Cassette. 903 SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 1893 MM. À. Gizsertr et Maurar : Du Gaïacol synthétique. — M. le D' E. TROUESSART 2 Sur la reproduction des Sarcoptides. — MM. J. SasrazÈès et En. Bazin : L’acide carbonique à haute pression peut-il être considéré comme un antiseptique puis- sant? — MM. J. SaBrazès et P. Rivière : Sur les propriétés antiseptiques des extraits orchitiques préparés par la méthode de MM. Brown-Séquard et d’Ar- sonval. — M. n’ArsonvaL : Remarques à propos de la note de MM. Sabrazés et Bazin. — M. RApHAELz Dugois : Sur les mouvements de la queue coupée du lézard anesthésié. Présidence de M. Dareste. Du GAÏACOL SYNTHÉTIQUE, : par MM. A. Gizserr et L. Maurar. Entre les différents corps qui entrent dans la composition de la créosote, il n’en est pas qui ait, plus que le gaïcol, fixé l’attention dans ces temps derniers. Les vertus dont jouit la créosote lui ont été attribuées, et par suite, on s’est efforcé de le séparer des nombreuses substances dont la créosote est composée. A la vérité, par l’analyse, en partant de la créosote, on peut obtenir un gaïacol chimiquement pur. Mais il faudrait bien se garder de considérer comme tel le gaïacol liquide, délivré par le commerce. Il ne s’agit ici, ni d’un produit pur, ni d’un mélange de composition définie, d’une teneur fixe en gaïacol. Ce liquide est par excellence un mélange de crésylols, de gaïacol et de créosol, où domine l’un ou l'autre des composants; le gaïacol peut s’y montrer dans la proportion de 50 p. 100, mais souvent il n'y figure que dans celle de 20 ou même de 10 p.100. Le gaïacol chimiquement pur se présente sous la forme de cristaux rhomboédriques, blancs, durs, fusibles, à 28°.5, bouillant à 205 degrés, d'une densité de 1.143 à 15 degrés. Il est à peu près insoluble dans l’eau; soluble dans l'alcool, l'huile, la glycérine anhydre. Il possède une saveur d'abord légèrement sucrée, puis piquante et brûlante; son contact un peu prolongé poisse les doigts dont la chaleur le fait fondre, ‘Récemment, MM. Béhal et Choay (1), en partant de la pyrocatéchine, (1) Béhal et Choay. Gaïacol synthétique. Bullet. Acad, des scuences. Janv. 1892. BIoLOG1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE, T, V. 33 90% SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ont réalisé la préparation synthétique du gaïacol. Nous devons à leur obligeance une abondante provision de ce corps, grâce à laquelle nous avons pu poursuivre de nombreuses expériences sur l'animal et entre- prendre quelques recherches chez l'homme. * Nous avons choisi le cobaye comme sujet d’études en vue de déter- miner la toxicité du gaïacol et ses effets biologiques. Nous avons eu recours à la voie digestive et à la voie sous-cutanée. Introduit dans le tube digestif, le gaïacol avait subi préalablement un mélange suffisant pour atténuer sa causticité. Pour les injections sous-cutanées, il avait été dissous, tantôt dans la glycérine pure et tantôt dans l'huile d'olives, dans la proportion de 0 gr. 40 à 0 gr. 12 par centimètre cube. En nous fondant sur près de cent expériences, nous avons reconnu que la dose de gaïacof nécessaire pour tuer un kilogramme de cobaye en injection saus-cutanée est comprise entre 0 gr. 85 et 0 gr. 90. Pour amener un semblable résultat par l'introduction du gaïacol dans les voies digestives, il faut en porter la dose au delà de 1 gr. 50. Les animaux inloxiqués par l’une ou l’autre voie, après une certe période d’agitation, s’affaiblissent, se traînent difficilement et ne tardent pas à tomber sur le côté, en proie à de violentes trépidations des pattes; leur sensibilité s’'émousse, leurs pupilles se contractent. Leur cœur bat avec plus de lenteur, et leur température s’abaïsse pro- gressivement. Leur respiration devient plus rare, plus ample, Pinspira- ration étant brusque et l'expiration prolongée. On peut constater chez eux nne augmentalion des principales sécré- tions, notamment de la lacrymale, de la bronchique, de la salivaire, de l’urinaire et parfois de l'intestinale. | Le flux lacrymal est particulièrement accentué ; les animaux versent d'abord des larmes abondantes et limpides, puis leurs yeux se recouvrent d’un liquide purulent. La mort survient dans un coma profond, accompagnée d’une hypother- mie telle que le thermomètre descend au voisinage de 20 degrés. Le cœur s'arrête en diastole, après le diaphragme. A l’autopsie se montrent congestionnés les organes thoraciqueset abdo- minaux ; les poumons sont plus spécialement frappés. Les vaisseaux de l’encéphale sont légèrement injectés. À des doses sub-toxiques, les phénomènes qui se déroulent sont super- posables à ceux que nous venons de décrire sommairement. A celles de 0 gr. 40 à 0 gr. 45 par kilogramme, en injection sous-cutanée, ils sont encore très manifestes et consistent en affaiblissement musculaire, trépidation des membres, ralentissement du cœur, abaissement de tem- pérature de À ou 2 degrés, ralentissement et augmentation d'amplitude de ia respiration, augmentation inconslante des sécrétions. Ces doses peuvent sans inconvénient être administrées à plusieurs re- SÉANCE DU À8 NOVEMBRE 905 prises au même animal; mais la tolérance à leur égard a plus de tendance à décroître qu’à s’affermir. Le gaïacol liquide, étant d'une composition chimique variable, doit pré- senter une toxicité et produire des effets biologiques également variables. À propos des recherches que nous avons poursuivies sur le gaïacol cristal- lisé, nous en avons, par comparaison, entrepris quelques-unes sur un échantillon de gaïacol liquide. Ge produit, d'origine allemande, contenait 46 p. 100 de gaïacol, 3.6 p. 100 de crésylols, 50.3 p. 100 de créosol et homoceréosol. Sa toxicité était inférieure à celle du gaïacol pur. Notam- ment, en injections hypodermiques, il n’amenait la mort des cobayes qu’à la dose de 1 gr. 05 à 1 gr. 10 par kilogramme, c’est-à-dire que sa toxicité était les quatre cinquièmes de celle du gaïacol cristallisé. Il y a done lieu de supposer que le créosol est doué d’une toxicité inférieure à celle du gaïacol, mais de ces expériences il n’y a aucun argument à Lirer en faveur du gaïacol liquide, car si ce produit offrait, dans les conditions où nous nous sommes placés, une toxicilé inférieure d’un cinquième à celle du gaïacol pur, il était deux fois moins riche que lui en principe supposé aclif. Les effets biologiques du gaïacol liquide que nous avons eu entre les mains se sont montrés d'ailleurs peu différents de ceux du gaïacol eris- tallisé. Certaines manifestalions, symptomaliques seulement, nous ont paru moins accusées, à pouvoir toxique égal : telles l’hypothermie, l’aug- mentation des sécrétions, et l’élat spasmodique. Ajoutons que le gaïacol liquide agit plus lentement que le cristallisé. Nous avons traité par le gaïacol synthétique, depuis plusieurs mois, un certain nombre de phtlisiques parvenus à des phases diverses de leur maladie. Nous l’avons administré à des doses quotidiennes de 0 gr. 40 à 4 gr. 20 sous la forme de perles renfermant 0 gr. 20 de principe actif en solution huileuse. D'une facon générale, l’estomac supporte bien ce médicament pris immédiatement avant les repas. Quelquefois les hautes doses sont capables de provoquer des vomissements, que l’on évitera aisément en essayant la susceptibilité des malades et en leur administrant des doses progressives de gaïacol synthétique. 906 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE SUR LA REPRODUCTION DES SARCOPTIDES, par M. le D' E. TROUESSART. On lit encore dans la plupart des ouvrages didactiques français relatifs aux Sarcoptides, que l’accouplement a lieu chez ces Acariens « par l'anus », et que l'organe mâle est introduit, pendant cet acte « dans la fente vulvo-anale » (Mégnin), ce qui suppose l'existence, chez la femelle, d’un cloaque analogue à celui de certains vertébrés. On admet toutefois une exception pour le genre Glyciphagus dont les femelles portent à l'extrémité de l’abdomen un conduit particulier, en forme de tube, reconnu, par Fumouze et Robin (1868), pour un organe spécial de copu- lation, mais en maintenant que cette particularité est exceptionnelle et que « tous les autres Sarcoptides sont fécondés par la fente anale » (1). Je suis en mesure de montrer que c’est le contraire qui est vrai, c’est- à-dire que chez tous les Sarcoptides connus, notamment chez les Sar- coptides psoriques et plumicoles, l’accouplement a lieu, comme dans Glyciphagus, par une ouverture spéciale voisine de l’anus, mais bien dis- tincte. Mes observations ne font d’ailleurs que confirmer les recherches déjà anciennes de Gudden (2) qui datent de 1861, celles de Kramer et de Haller (1881-1882), tout en y ajoutant quelques détails nouveaux. On sait que chez les Sarcoptides plumicoles et psoriques, le mâle s'ac- couple avec les femelles avant qu’elles soient adultes, alors qu'elles pré- sentent encore une forme nymphale désignée sous le nom de femelle nubèle (Mégnin). Dans ces espèces, qui vivent en sociétés nombreuses, les mâles guettent l’éclosion de ces jeunes femelles, et, au moment où elles se dépouillent de leur peau de nymphe, les saisissent et s’accouplent immédiatement avec elles. Cette hâte a sa raison d’être dans la nécessité d'établir une solide adhérence entre les téguments encore mous de la femelle et les ventouses copulatrices du mâle. Cette adhérence est telle que la peau de la jeune femelle s’enfonce profondément, et par une sorte de succion, dans la cavité de ces ventouses, formant deux tubercules plus ou moins allongés dont on retrouve l'empreinte durcie et desséchée sur cette peau, lorsque la femelle s’en dépouille par suite de sa dernière transformation en femelle fécondée et ovigère. C’est précisément sur ces peaux transparentes, véritables robes de noces des femelles, qu'il est le plus facile de voir nettement l'ouverture spéciale : qui constitue la vulve d’accouplement et qui est l’orifice externe d'une poche copulatrice analogue à celle des insectes. Maïs cet orifice est tou- (4) Mégnin. Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1886, t. CIIT, p. 1276. (2) Gudden. Beiträge zur Lehre von der Scabies, Würtzburger medicinische Zeitschrift, 1861, p. 301, avec 3 pl. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 907 jours très petit et se présente comme un point transparent, arrondi, sem- blable à un trou d’épingle, situé immédiatement en arrière de la cominis- sure postérieure de l'anus, c’est-à-dire à l'extrémité même de l'abdomen ou un peu sur le dos. Sur l’animal vivant cet orifice ponctiforme a l’as- pect du petit plateau qui sert de base aux poils, lorsque ces poils se sont détachés par accident, mais il est toujours impair et médian, ce qui le différencie des poils, toujours pairs. Si l’on prend, par exemple, dans le plumage d’un moineau, d’un geai ou de quelque autre oiseau de notre pays, un mâle et une femelle ac- couplés du Proctophyllodes ampelidis (Buch.) ou du P. glandarinus (Robin et Mégnin}, et qu'on les piace, sans les séparer, et la face ventrale en-dessus, sur le porte-objet du microscope, en les fixant à l’aide d’une petite goutte de glycérine, on observera les particularités qui accom- pagnent l’accouplement, car cet acte se continue encore longtemps dans cette position. Il feut éviter de mettre un couvre-objet dont le poids séparerait les deux acariens. A l’aide d'un grossissement de 250 diamètres environ, on examine l’extré- mité postérieure de l'abdomen par laquelle les deux conjoints sont réunis. La fente anale de la femelle se trouve alors précisément dans le milieu du champ du microscope; il est facile de constater que le long pénis du male, qui à la forme d’une épée, ne pénèlre pas dans cette fente, mais à sa pointe enfoncée dans l’extrémité même de l'abdomen, et précisément dans l'espèce de micropyle ou vulve ponctiforme dont j'ai parlé plus haut. Cependant la fente anale prend part, mais d’une manière très indirecte, à l'acte de la fécondation : il se passe iei des particularités curieuses, que je crois être le premier à signaler. Au bout de quelques instants d'observations, on s'aperçoit que les muscles dilatateurs de la fente anale éprouvent des mouvements rhyt- miques d'une nature spéciale. Cette fente s'ouvre lentement, d’abord d’un côté, puis de l’autre, quelquefois des deux côtés en même temps (suivant l'espèce), jusqu'à ce qu’elle ait la forme d’un triangle dans le premier cas, d'un losange dans le second. Ce mouvemeut dure quelques secondes et se reproduit à intervalles réguliers, deux ou trois fois dans l’espace d'une minute. Quelle est l'explication de ce mouvement spasmodique ? La seule pos- sible, à mon avis, est la suivante : les muscles de la région abdominale de Ja femelle se contractent ainsi pour donner plus d'amplitude à cette cavité et dilater le réceptacle séminal situé au-dessus de l'intestin et un peu en avant de l’anus, et qui est destiné à emmagasiner le liquide spermatique. Ce liquide devant passer à travers un pénis très grêle et très étroit, puis à travers le canal non moins étroit et souvent long et recourbé, qui cons- titue le vagin ou poche copulatrice de la femelle, on conçoit que cette sorte d'aspiration, opérée par les muscles abdominaux de cette dernière, soit indispensable pour assurer la pénétration du liquide séminal. Chaque 908 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE LE ———_—_——_—_—_—…—…—…—…—…—…— —…—"…—…—… …—…"…"…"…"…—…—"—…"—…….……"…"…"…"—"—"—…"…"…"—"…"—"…—"—"—"— .—— mouvement de dilatation de l'anus correspond vraisemblablement à une éjaculation du mâle. On sait que, chez les Sarcoptides plumicoles, l’accouplement dure très longtemps, ordinairement jusqu’à ce que la femelle fécondée et déjà ovi- gère, se dépouille de sa robe de noce, qu’elle abandonne souvent entre les pattes du mâle. Ceci explique pourquoi beaucoup de ces femelles ovigères portent à l’extrémité de l'abdomen un tubereule impair, transparent, qui n’est autre chose que le vagin ou poche copulatrice dont les parois se sont durcies et dont l'ouverture s’est oblitérée au moment de la dernière méta- morphose, et quireste comme un témoin irrécusable d’une ouverture dont la femelie ne garde plus d'autre trace. Telle est la signification du tuber- cule abdominal impair que portent les femelles de Z'yroglyphus et Glyci- phagus, des Pterolichus denticulatus et Pt. Canestrini et du Pterocolus corvinus. Chez Pterocolus appendiculatus et Freyana hirsutirostris, ce tubercule se recourbe en crochet par suite de l’oblitération du canal. Enfin, chez Pseudulloptes thoracosathes et Anasicudion Landoisi, le tuber- cule est exceptionnellement long par suite de particularités spéciales sur lesquelles je reviendrai ailleurs. Au contraire, lorsque le conduit est plus court, il se montre seulement sous forme d’une lacune circulaire ou pounctiforme dans la plaque noto- gastrique de la femelle ovigère: c'est ce qu’on observe sur Péerolichus proctogamus, Pt. phænicopteri et d'autres encore, la présence de ce canal empêchant cette plaque de se fermer et de se chitiniser en ce point Jus- qu’au moment où le mâle se sépare de la femelle. En résumé : 1° La présence d'une poche copulatrice à ouverture post-anale bien dis- tincte, est la règle chez les Sarcoptides, notamment chez les Sarcoptides plumicoles et psoriques; 20 L'introduction du sperme dans le réservoir séminal, auquel abouti cette poche copulatrice (ou vagin à canal filiforme) est favorisée par des mouvements d'aspiralion rythmiques qui se lraduisent au dehors par la dilatation de la fente anale ; 3° Le tubercule abdominal impair, ou la lacune circulaire de la plaque notogastrique, que portent beaucoup de femelles de Sarcoptides, sont la trace de la poche copulatrice et tout ce qui reste de ce canal oblitéré sur la femelle ayant subi sa dernière transformation. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 909 L’ACIDE CARBONIQUE A HAUTE PRESSION PEUT-IL ETRE CONSIDÉRÉ COMME UN ANTISEPTIQUE PUISSANT ? par MM. J. SaBrazës et En. Bazin. M. d’Arsonval a recommandé, pour la purificalion des extraits orga- niques, un stérilisateur-filtre qui se compose essentiellement d’une bougie d'alumine, au-dessus de laquelle on fait arriver de l'acide carbo- nique sous une pression de 50 à 60 atmosphères. Ce dispositif permet d'opérer rapidement la filtration à l'abri de l'oxygène et de soumettre les liquides à filtrer à une première stérilisation physiologique indépendam- ment de la stérilisation physique due à l’action du filtre. Il y a avantage, dans certains cas, d’après M. d'Arsonval, à utiliser exclusivement cette action physiologique qui serait, dans l’espèce, un action microbicide, en supprimant la bougie filtrante qui a l'inconvénient de retenir une certaine proportion de matières colloïdes. Dans ces condi- tions, les liquides introduits dans l'appareil ainsi transformé en autoclave à acide carbonique sont-ils stérilisés lorsqu'on a laissé agir sur eux, pen- dant deux heures, une pression de 53 atmosjhères? M. d'Arsonval a résolu cette dernière question par l’affirmative après avoir pratiqué lui-même quelques essais dans ce sens. Ces essais Ont porté sur la conservation de certains liquides organiques tels que le sang, le lait, l'urine; mais l'ab- sence de putréfaction apparente sans le contrôle des cultures avant et après l'épreuve suffit-elle pour affirmer que ces liquides ont été stérilisés? M. d'Arsonval aurait, en outre, réussi à détruire définitivement, en les soumettant à une pression de 50 atmosphères d'acide carbonique, des micro-organismes bien déterminés lels que la levure de bière et le bacille pyocyanique. . Ces conclusions, auxquelles s'attache un grand intérêt pratique, nous paraissaient devoir être corroborées par des recherches nouvelles que nous avons entreprises pour nous faire une opinion personnelle à cet égard. Ces recherches ont été faites à l’aide de bouillons (1) de culture de staphylocoque doré, de bacille typhique, de bacterium coli, de bactéridie charbonneuse. Le stérilisateur-filtre construit par M. Ducretet a été transformé en autoclave, après avoir été examiné par M. Csernowiez, ingénieur des arts et manufactures. Le mamomètre a élé soumis à diverses vérifications qui ont démontré la parfaite exactitude de sa graduation. Les pressions obtenues à l’aide d'acide carbonique, dont M. le professeur Blarez a (1) Ces bouillons constituent un excellent dissolvant pour l'acide carbo- nique. 910 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE garanti la pureté, ont élé prolongées au delà de six et même de dix heures avec des intensités oscillant entre 59 et 60 atmosphères qu'il est d’ailleurs pratiquement difficile de dépasser. L'appareil était préalable- ment purgé de l'air qu'il contenait par une série de décompressions. Dans tous les cas, les micro-organismes expérimentés n’ont été modifiés d’une façon notable ni dans leurs propriétés morphologiques et biologiques ni dans leur développement. Les cultures ont été faites au moment même où le tube, soumis à la compression, était extrait de l'appareil. La quan- tité de liquide à stériliser, placée en couche mince, n’excédait pas 5 centi- mètres cubes. Voici le protocole de ces premières expériences : I. — Le % août 1893, une culture en bouillon d’un staphylocoque doré retiré, le 30 juillet, d'un abcès chaud, est exposée, pendant une heure et demie à une pression de 55 à 59 atmosphères. Un quart d'heure après la décompression, on retrouve, par l'examen direct, de nombreux amas de sta- phylocoques, qui se colorent admirablement par le bleu de méthylène et par le procédé de Gram. Les transports immédiats dans le bouillon de bœuf, sur gélose et gélatine, en couche oblique, reproduisent le microbe expérimenté avec une abondance égale à celle des tubes témoins. Il. — Le 5 août, une culture en bouillon, datant de cinq jours, d’un bacte- rium coli retiré, par des isolements sur plaque de gélatine, le 31 juillet 1893, d’un cas de diarrhée infantile, est soumise, pendant deux heures, à une pres- sion de 59 à 60 atmosphères et réensemencée sur-le-champ dans le bouillon lacto-carbonaté, sur gélose et gélatine. Une demi-heure après, on note la mobilité des germes dans le bouillon comprimé. Tous les transports ont été positifs, aussi fertiles que ceux des tubes témoins; ils ont fourni les réactions habituelles du bacille d'Escherich. IT. — Le 5 août, une culture en bouillon, datant de quatre jours, d'un bacille d'Eberth isolé, le 22 juillet, dans la pulpe splénique d’un dothiénenté- rique, est abandonnée pendant une heure et demie à une compression d'acide carbonique de 58 à 60 atmosphères. On y retrouve, aussitôt après, le bacille parfaitement mobile, se décolorant par la méthode de Gram. Les rétrocul- tures immédiates sur gélatine, sur gélose, dans le bouillon lacto-carbonaté sont toutes positives et ne se différencient pas de celles des tubes témoins. IV. — Le 6 août, une culture en bouillon, datant de vingt-quatre heures, de charbon bactéridien dont les semences issues de l'Institut Pasteur nous ont été transmises par M. le professeur G. Ferré, sont, pendant cinq heures, com- primées à 59 atmosphères. Dans le liquide mousseux qui en résulte, on retrouve sans peine la bactéridie; on fait, au moment même où cesse l'expérience, des ensemencements sur agar, sur gélatine, dans du bouillon, et on obtient, dès le lendemain, des cullures pures de charbon; elles sont, sur les milieux solides, peut-être un peu moins envahissantes que sur les tubes témoins, mais ce n’est là qu'une simple nuance. Une demi-heure après la séance de com- SÉANCE DU 18 NOVEMBRE OL pression, ce bouillon a été inoculé, à la dose d'un quart de centimètre cube, dans le tissu cellulaire de la cuisse gauche d’une souris qui a succombé dans la nuit du 7 au 8 août. A l’autopsie, œdème considérable du membre posté- rieur gauche dont la sérosité contient des bactéridies. Des semis à la pipette sont faits sur agar, sur gélatine, dans du bouillon. La rate est tuméfiée et noirâtre; l'intestin ecchymotique; le sang du cœur noir et visqueux. Ces organes sont ensemencés. À l'examen de leur frottis et de leurs coups, on voit un nombre prodigieux d'éléments bactéridiens. Les cultures ont toutes donné des cultures pures de bactéridie charbonneuse. V. — Le 8 août, un tube de bouillon ensemencé avec lé bacille typhique provenant de l'expérience IIL est, pendant dix heures, laissé sans interrup- tion sous une pression qui à oscillé entre 58 et 60 atmosphères. Immédiate- ment après, on ensemence sur gélose. Au bout d’une heure environ, à l'examen de ce bouillon comprimé, on trouve de nombreux bacilles mobiles ayant les caractères morphologiques et les réactions colorantes du bacille typhique. Des rétrocultures sur gélatine, pommes de terre, dans le bouillon lacto-carbo- naté ont toutes été fertiles et aussi prospères, dans le premier laps de temps, que celles des tubes témoins. Il était intéressant de voir si, en portant la pression beaucoup plus haut, les résultats seraient différents. VI. — Le 12 août, la température du laboratoire étant supérieure à 30 degrés centigrades, nous pouvons exercer, pendant plus de deux heures sur une culture en bouillon de bacille typhique datant de trois jours une pression de 70 à 73 atmosphères que nous laissons ensuite décroître progres- sivement pendant deux autres heures. Le tube retiré de l’appareil ne con- tient qu'une écume mousseuse, qui ne tarde pas à laisser déposer un peu de liquide. Nous ensemencons en strie, sur-le-champ, trois tubes de gélose qui ont donné des cultures pures très abondantes. Une demi-heure après la com- pression, à l'examen du bouillon expérimenté, nous retrouvions le bacille typhique mobile et facilement colorable par les procédés usuels. VIT. — Le 16 août, une culture en bouillon de stapaylocoque doré isolé le 12 août est exposée, pendant six heures, à une pression qui oscille entre 66 et 10 atmosphères. Les rétrocullures immédiates reproduisent le microbe avec une intensité égale à celle des cultures témoins. L'examen du bouillon com- primé fournit de belles préparations de staphylocoques. VIIL et IX. — Grâce à l'extrême obligeance de M. l'administrateur de la Compagnie bordelaise « la Carbouique liquide » et au très précieux concours de M. Bonnet, ingénieur, il nous a été facile d'expérimenter au siège même de l'usine, et d'exercer, pendant quinze à vingt minutes, des pressions d'acide carbonique de 89 à 94 atmosphères sur des cultures de charbon bac- téridieu sporulé, d'une part, et de staphylocoques dorés, d'autre part, dans du bouillon de veau peptonisé. 919 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Les ensemencements immédiats, l'examen microscopique des milieux nous ont prouvé péremptoirement que les microbes en expérience ne subissent pas de modification sensible : leurs rétrocultures sont identiques aux témoins. L'inoculation sous-cutanée, une heure après l'expérience, de 1 centimètre cube de bouillon de culture de bactéridie sporulée, comprimé à 90 aftmos- phères, a produit, chez un lapin pesant 1350 grammes, une infection charbon- neuse mortelle au bout de trente-quatre heures : tous les organes étaient farcis de bactéridies ; les cultures de l’œdème gélatineux du point inoculé, celles de la rate, du sang, du cœur, ont toutes prospéré. Nous sommes donc conduits à des conclusions opposées à celles for- mulées récemment encore par M. d’Arsonval qui s’exprimé ainsi, dans les Archives dé physiologie (1) : « Une pression de 90 atmosphères détruit presque instantanément tous les germes vivants cn respectant les subs- tances albuminoïdes. » De nos expériences il ressort au contraire que des pressions égales et même supérieures à 90 atmosphères ne détruisent ni le staphylocoque doré, ni la bactéridie charbonneuse el n’influent point sur l& virulence de celte dernière. Pratiquement, il pourrait done être dangereux de recourir pour la stérilisation des extraits organiques à l’auloclave à acide carbonique privé de la bougie fillrante. Uet appareil ne saurait, en effet, dans les conditions de temps et de pression fixées par M. d'Arsonval, être considéré, d’une facon générale, comme un stérilisateur. SUR LES PROPRIÉTÉS ANTISEPTIQUES DES EXTRAITS ORCHITIQUES PRÉPARÉS PAR LA MÉTHODE DE MM. BROWN-SÉQUARD ET D'ARSONVAL, par MM. J. SaprazÈs et P. RIVIÈRE. Dans une note présentée à la Société de Biologie (Compte rendus, p. 273, année 1893), M. Laveran fait remarquer que des cultures de divers microbes (streptocoque, staphylocoque, ete.) ensemencées dans le liquide orchitique préparé par M. d’Arsonval, devenaient stériles au bout de vingt-quatre heures. D'autre part, M. Brown-Séquard a publié (Archives de Physiologie, octobre 1893, p. 797) des expériences qui viennent à l'appui des précé- dentes. Il a vu que des poids égaux de viande de même provenance placés dans des volumes égaux de liquide orchitique, de liquide testiculaire : (4) A. d’Arsonval]. Préparation de l'extrait ulaire concentré, Arch. de phy- siol., 1893. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 913 A D RO ee RAP NUERS sans glycérine, stérilisé par l'acide carbonique, de glycérine diluée de trois fois son poids d'eau, et enfin d’eau distillée, émettaient une odeur de putréfaction très évidente dès le sixième jour lorsqu'ils étaient plongés dans l’eau pure ; cette odeur n’apparaissait qu’au bout de douze jours pour les flacons renfermant le liquide testiculaire non glycériné ou la glycérine étendue : enfin les vases contenant le liquide orchitique étaient encore inodores au bout d'un mois. : Nous avons essayé de reprendre la question, en opérant sur le staphy- locoque doré, le coli-bacille, le bacille d'Eberth et la bactéridie charbon- neuse non sporulée. Ces microbes provenaient de cultures récentes sur agar peptonisé. Une anse de platine de chacune d’elles a été transportée dans des tubes de suc testiculaire glycériné préparé. d’après le procédé de M. d’Arsonval et pesant 16 degrés à l’aréomètre de Baumé. Les tubes étaient maintenus à la température de 37 degrés. Nous avons vu, en faisant des transports quotidiens sur gélose, que la bactéridie charbonneuse (sans spores) ne cultivait plus après un jour; qu’au bout de trois jours le staphylococcus aureus ne donnait plus de cui- tures ; mais que le coli-bacille et le bacille typhique vivaient encore au cinquième Jour. Les moisissures s’accommodent aussi très bien des extraits orchitiques : les mucors y poussent très abondamment. En présence de ces résultats, et remarquant que les organismes infé- rieurs qui résistent le plus longtemps à l'influence du liquide testiculaire paraissent être ceux-là mêmes qui peuvent se développer dans des milieux légèrement acides, nous avons voulu voir si le liquide testiculaire utilisé ne présentait pas cette dernière réaction. L'expérience nous à prouvé qu'il en était ainsi. L’acidité constatée dépendait-elle de l’acide Co? dissous à la faveur de la stérilisation, ou d’un produit existant dans les extraits? L'analyse des gaz extraits du liquide par la pompe à mercure ne nous a décelé que des traces de Co’. D'ailleurs, nous nous sommes rendu compte que les liquides non passés par l'acide carbonique et filtrés sur papier étaient acides au même degré que ceux ayant subi l’influence de ce gaz. L’acidité, mesurée par la solution décinormale de soude, nous a donné par litre les résullats suivants, exprimés en HCI : 4e liquide testiculaire, obtenu le 3 novembre, passé par Co?. . . 05710 20 — — — 3 — — Corsa UC Liquide —— —— 29 — —— COR A0 GS = = — 21 octobre, _ COR ER OSATO = — — 23 septembre, — Co?. 0 355 Macération de testicule dans la glycérine, obtenue le 5 novembre, sans addition de Na CI, et sans filtration aucune . . . . . . . . . 0 568 Liquide testiculaire filtré sunplementtSUPIDADIEN EN EE ta 00, 914 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE La glycérine et les solutions de chlorure de sodium ayant servi à la préparation des extraits élaient rigoureusement neutres, ainsi que nous l'ont démontré de nombreux examens. Il est donc probable que l'acidité que nous signalons est la grande cause qui nuit au développement de certains microbes dans les extraits testiculaires. Les germes tels que le coli-bacille et les moisissures, qui normalement supportent un certain degré d’acidité, sont capables d'y prospérer et de s’y conserver vivants (1). Dans un prochain travail, nous essaierons de rechercher la nature du principe acide contenu dans les extraits orchitiques. Nous verrons aussi comment ceux-ci se comportent après neutralisation, vis-à-vis des mi- crobes. Nous rechercherons parallèlement quelle action exerce sur les germes expérimentés la glycérine neutre que nous employons pour la préparation des extraits. REMARQUES A PROPOS DES NOTES DE MM. SABRAZES ET BAIN, par M. d'ARSONVAL, Les conclusions de MM. Sabrazès et Bazin ne sont valables que pour les conditions toutes spéciales où ils se sont placés. Elles sont fausses en ce qui concerne la préparation des extraits organiques concentrés. Quand j'ai supprimé la bougie filtrante dans mon appareil stérilisateur à acide carbonique, j'ai spécifié que l’extrait organique, préparé dans ces conditions, devait contenir assez de glycérine pour marquer 15 à 20 degrés à l’aréomètre Baumé. En opérant, conformément à ce procédé, les extraits organiques sont complétement stérilisés. J'ai constaté le fail nombre de fois et ce fait a été vérifié par plusieurs observateurs et notamment par notre collègue M. Laveran qui l’a signalé déjà à la Biologie. Je proteste donc contre cette phrase imprimée par MM. Sabrazès et Bazin : « Pratiquement, il pourrait donc être dangereux de recourir pour la « stérilisation des extraits organiques à l’autoclave à acide carbonique « privé de la bougie filtrante. » Les expériences citées par les auteurs ne comportent nullement celte conclusion, puisque les extraits organiques sont préparés non dans des (1) Dans une communication récente à la Société de Biologie, M. Grimard a montré qu'un proteus virulent pour l'homme et les animaux (Royer), s'était développé dans un flacon.d’extrait testiculaire. SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 915 bouillons de culture, mais bien dans la glycérine à 15 degrés Baumé au moins. L'action combinée de la glycérine et de l'acide carbonique à 50 atmos- phères permet d'obtenir une stérilisation complète sans bougie filtrante. Voilà ce que j'ai annoncé et ce que je maintiens, d'autant plus qu'une seconde note des mêmes auteurs proclame les vertus antiseptiques de l'extrait organique glycériné; cette seconde note aurait même pu me dispenser de toute réponse. Quant aux conditions de pression, de durée, de température, de com- position chimique et de milieu nécessaires pour tuer les différents microbes pathogènes, c'est là une détermination pour laquelle je ne me suis pas senti une compétence suffisante. C'est pourquoi j'ai entrepris cette étude d’assez longue haleine en collaboration avec M. Charrin dont le nom fait autorité en bactériologie; d’ailleurs, les recherches de Chau- veau sur l’affaiblissement de la bactéridie par la pression sont en plein accord avec nos propositions; ce savant se sert même d’une pression beaucoup plus basse. M. Charrin et moi avons déjà pris date et signalé nos premiers essais, avant les vacances, à la Biologie et dans divers journaux de médecine. Notre étude n’est pas limitée à l’action de l'acide carbonique; nous nous sommes proposés, ainsi que nous l'avons dit, d'étudier l’action des différents gaz et des diverses conditions physiques (chaleur, lumière, pression, électricité, mouvements mécaniques, etc...) sur les microbes pathogènes. Nous avons commencé par le bacille pyocyanique et nous avons déjà signalé l’action qu’exerçait sur lui l’acide carbonique à haute pression et les courants à haute fréquence. Nous croyons devoir rappeler nos droits de priorité à l’occasion de la note de MM. Sabrazès et Bazin. SUR LES MOUVEMENTS DE LA QUEUE COUPÉE DU LÉZARD ANESTHÉSIÉ, par M. RAPHAEL Dupotis. Dans la séance du 28 octobre dernier, M. Henri Martin a communiqué quelques expériences intéressantes sur les mouvements de la queue du lézard anesthésié. Les inductions de l’auteur ne m'ayant pas paru suffisamment justifiées par les faits expérimentaux énoncés, j'ai cru devoir répéter, en les complétant, les expériences de M. Martin. Je me suis servi du Lézard vert (Lacerta viridis L.) et du Lézard Ocellé (L. Ocellata Daud.). J'ai pu constater, comme M. Martin, que sur un Lézard anesthésié par le chloroforme et en état de résolution, on pouvait piquer ou pincer la queue 916 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de l’animal sans provoquer les mouvements qui se produiraient dans les mêmes conditions chez un Lézard normal : qu’en outre, si on coupait la | queue de ce même lézard en résolution, les mouvements ordulatoires et les contorsions se montraient comme si l'animal eût été opéré à l’état | éveillé. Peut-on croire, d’après celte expérience, avec M. Martin, que la queue | est immobile pendant l’anesthésie parce qu'elle est reliée aux centres supérieurs par la moelle dorsale et qu’elle se trouve pour cette raison 4 « anesthésiée indirectement » par quelque action inhibitrice des centres supérieurs ? Pourra-t-on davantage admettre comme conséquence à tirer de cette expérience que, si la queue séparée du corps se meut, c’est qu’elle a retrouvé son autonomie physiologique en échappant à l’action phréna- trice des centres supérieurs ? Et que, si les mouvements se montrent incoordonnés, c’est parce que les centres autonomes de la queue échap- pent à l'influence directrice des centres de coordination des mouvements? Enfin est-on autorisé à dire que la queue du Lézard n’est pas impré- gnée de choloroforme, ce qui serait contraire à tout ce que l’on pense actuellement de cet anesthésique, dont l’action générale est démontrée-et scientifiquement expliquée. Si les inductions de M. Martin étaient justifiées elles apporteraient un appoint important aux théories inhibitrices ettendraient à faire considérer à l'avenir les anesthésiques comme des excitants des centres inhibiteurs, sauf bien entendu chez les végétaux et chez les animaux inférieurs. En dehors des hypothèses ingénieuses, mais complexes, de M. Martin, il y en a deux plus simples qu'il eût été utile d'examiner d'abord. En coupant la queue d’un lézard on fait principalement deux choses : 1° on divise les muscles longitudinaux de la queue ; 2° On excite violem- ment la moelle. Ces deux lésions peuvent-elles provoquer des mouve- ments dans les conditions indiquées ? Si, à l’aide d'un scalpel, on coupe circulairement les muscles de la queue, en respectant la colonne vertébrale, chez un animal en résolution, on observe bien queiques contractions rythmiques sur les surfaces de sections des muscles, mais il n’y a pas de mouvements d'ensemble de la queue. Le même phénomène s'observe quand on enlève un fort lambeau de muscle sur la queue d’un gros lézard ocellé, pour mettre la moelle à nu. Mais la moelle de la queue étant mise à nu, si on la pique on obtient immédiatement des mouvements identiques à ceux que provoque la sec- tion de la queue. Cela indique que la sensibilité tactile consciente n'existe plus alors que la moelle caudale est encore directement excitable et que les réflexes cutanés sont plus difficiles à produire parce que la sensibilité générale a diminué. Je prouve d’une manière indiscutable que les mouvements de la queue SÉANCE DU 18 NOVEMBRE 917 du lézard anesthésié sont dus uniquement à l'excitation de la moelle par la section. Pour cela je découvre la moelle caudale sur un gros lézard anesthésié, et quand l'animal est reposé, je congèle la moelle mise à nu avec le chlorure d’éthyle : il n’y a aucun mouvement. Je pratique la sec- tion au point congelé et la queue reste absolument immobile. Mais si je pratique une section du tronçon détaché au delà du point congelé, les deux morceaux s’agitent; les mouvements sont surtout prononcés et persistants dans le tronçon terminal. J'ai pu constater en outre qu’en enfonçant une aiguille dans le canal médullaire, par le bout central, après que la con- gélation avait cessé, on provoquait facilement des mouvements. On obte- nait le même résullat en excitant le bout terminal du tronçon. On peut donc encore provoquer des réflexes, mais difficilement et en agissant directement sur la moelle: on ne sera donc pas surpris que les excitations périphériques ne produisent rien. Dans la queue détachée d’un animal sain on peut réveiller facilement les mouvements, mais il n’en est plus de même si l'animal a été préala- blement anesthésié, ce qui prouve bien que le chloroforme n'a pas agi « indirectement », seulement son action est moins profonde sur la moelle caudale que sur les centres plus supérieurs. Il est bon de noter également qu’au moment de la section, pendant anesthésie, le bout central exécute souvent aussi quelques mouvements. M. Martin ajoute enfin que, si le segment mobile qui vient d’être coupé est soumis à l’anesthésie, il résiste très longtemps, et quand, immobile, il est remis à l’air libre, les mouvements ne reparaissent pas, donc «ilest tué ». Or, il en est de même quand on laisse le tronçon d’un animal anes- thésié à l’air libre. Les expériences de M. Martin n’ajoutent donc rien à ce que l’on savait déjà, mais elles méritaient d’être examinées avec soin et complétées en raison de leur spéciosité. Le Gérant : G. Masson. Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. Marermeux, directeur, 1, rue Cassette. 919 SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 1893 M. Povcuer : Décès de M. Chabry. — M. G. Poucuer : Poudre de viande de Baleine. — MM. Caarrin et Guey : Action des substances microbiennes sur les appareils nerveux vaso-dilatateurs, chez les animaux vaccinés. — M. Rocer : Influence des injections intra-veineuses de sang artériel sur la température. — MM. Durroco et BerLioz : Application de l’antisepsie à la méthode hypodermique. — M. 3. Sorras : Sur la dégénérescence rétrosrade du faisceau pyramidal. — M. Reuy Samr-Lovwr : Morphologie comparée de l'os carré. — MM. CarvazLo et V. Pacnon : Une obser- vation de chien sans estomac. — M. le Dr Fézix Recnaurr : Des malformations dentaires chez le singe. — MM. J. Saurazës et P. Rivière : Valeur antiseptique de l'extrait testiculaire et de la glycérine. — M. Cu. Cornevin : Sur les instincts frugivores du chien. — M. Lours BLanc : À propos d’une note de M. Féré sur l’action de la lumière sur les œufs de poule en incubation. Présidence de M. Chauveau. Décès DE M. CHABRY. M. G. Poucaer. —- J'ai la profonde douleur d'annoncer à la Société de Biologie la mort de notre collègue L. Chabry, qui fut pour moi un ami et un collaborateur, el qui était aussi, je ne crains pas de le dire, un des maîtres de la physiologie française. Laurent-Marie Chabry était né à Roanne en 1855. C'est en suivant les cours de notre collègue Marey, au Collège de France, que Chabry résolut de devenir physiologiste. [l avait une haute culture mathématique et les connaissances Les plus étendues en chimie et en physique, il a fait même quelques recherches sur la diffusion, dans la voie ouverte par Graham. Chabry appartenait à l’école de ces savants qui, comme Leuwenhoeck, ou les frères Henry de nos jours, construisent les instruments nécessaires à leurs travaux, et il avait pour cela un merveilleux lalent. Tour le monde connaît l'appareil avec lequel il allait tuer à volonté l’une des premières cellules de segmentation de l’œuf des Ascidies. Je n’ai pas à insister sur l'importance des résultats auxquels Chabry arriva dans ces essais pleins d'originalité où il était parvenu à produire des hémi-individus droits ou gauches. Je signalerai encore nos recherches faites en commun sur l'influence de la privation d’un principe immédiat (la chaux), dans le développement BioLOGIE. COMPTES RENDUS, — 9€ SÉRIE. T, V, 34 920 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE des Échinodermes. Dans ce travail, Chabry, qui s’élait chargé de la par- tie chimique, arriva à ce résultat qu'il est actuellement impossible de fabriquer de l’eau de mer artificielle ayant toutes les propriétés physio- logiques de l’eau de mer naturelle. La mécanique animale inspira souvent Chabry. Rappelons sa thèse sur les mouvements respiratoires, ses recherches sur le vol plané des oiseaux, et son étude de la double position d'équilibre de l’aile membraneuse des Coléoptères, étude improvisée en quelque sorte sur ma demande pour les besoins d’une lecon. Le Journal de l'Analomie, dont Chabry était le col- laborateur, publiera d’ailleurs la liste complète de ses travaux. Chabry, d’abord assistant à l’école des Hautes-Études, était devenu directeur-adjoint du Laboratoire marilime de Concarneau. Le gouverne- ment qui avait songé à créer pour lui une chaire magistrale dans une de nos Facaltés de province, finit par l'envoyer simple maître de conférences à Lyon. Chabry ne trouva peut-être plus autour de lui le milieu stimu- lant dans lequel il aimait se mouvoir. Séduit peut-être aussi un peu par les merveilles de prothèse faciale que réalisait Marlin, il résolut d’aban- donner l'Université pour la pratique médicale. Je ne suis pas ici le seul qui ait fait sentir à l'administration de l’Instruclion publique, la grande faute qu’elle avait faite en ne sachant pas retenir Chabry. L'Institut Pasteur, mieux inspiré, lui offrit une situation et Chabry avait recommencé le cours de ses brillants travaux, quand il ressenlit les premières atteintes du mal qui l’a emporté. Notre collègue Malassez vient de nous apprendre que Chabry avait légué en mourant 5,000 francs à l’nstitut Pasteur, et 5,000 francs au Laboratoire marilime de Concarneau, toute sa forlune; mais, comme l’a dit M. Malassez, il avait déjà bien autrement contribué à enrichir ces deux établissements par les travaux mémorables qu'il y avait accomplis. POUDRE DE VIANDE DE BALEINE, par M. G. Poucxer. J'ai l'honneur de présenter à la Société de Biologie un échantillon de poudre de viande faite avec la chair des Balænoptères que l’on chasse sur les côtes d'Islande. On commence, dans l’extrème-Nord, à mêler avanta- geusement cette poudre à l'alimentation du bétail et à celle des chevaux. Je suis autorisé par M. Lauritz Berg, propriétaire de la grande pècherie de baleines du Dyrefiord, à qui je dois communication de cet échanüllon, à informer la Société qu'il sera heureux de faire parvenir gracieusement la quantité nécessaire de celle poudre de viande, à ceux de ses membres qui voudraient l’étudier au point de vue chimique ou en chercher la valeur nutritive. 7 SÉANCE DU 2D NOVEMBRE 921 ACTION DES SUBSTANCES MICROBIENNES SUR LES APPAREILS NERVEUX VASO-DILATATEURS, CHEZ LES ANIMAUX VACCINÉS, par MM. À. Cuarrin et E. GLey. (Communication faite dans la séance du 18 novembre 1893.) Du jour où l’on a montré que les microbes produisent les accidents morbides surtout par les substances qu'ils sécrètent, on a été amené à assimiler l’immunité à l’accoutumance. On à dit, en effet, que, si les bactéries ne provoquent aucun phéno- mène grave chez les animaux vaccinés, cela tient à ce que les cellules de ces animaux, habituées aux substances produites par les bactéries, grâce à la vaccination, sont devenues insensibles à l’action nuisible de ces substances. Or, des expériences de Charrin et Gamaleïa, vérifiées ensuite par divers auteurs, ont infirmé cette manière de voir, plus séduisante d’ailleurs en apparence qu'en réalité; car, au fond, s’il ne survient pas de troubles sérieux chez les sujets rendus réfractaires, c’est parce que chez ceux-ci les germes ne se développent pas suffisamment et ne fonc- lionnent pas activement: d'où il résulte que les conditions requises pour l'infection, quantité et qualité du virus, font défaut; par suite j’intoxi- cation manque, en raison simplement de l'absence à peu près complète du poison; la phagocytose, les humeurs bactéricides, d’autres causes aussi peut-être ne permettent pas aux microbes de le fabriquer libre- ment. Mais on a prétendu que, si l’accoutumance semblait nulle, quand il s’agit de l’ensemble des éléments anatomiques, il en serait sans doute autrement le jour où l’on ferait porter l'effort du virus sur un seul appa- reil, sur le plus important de tous, sur le système nerveux. Nous avons montré, il y a déjà trois ans, qu’une certaine quantité des substances solubles produites par le bacille pyocyanique, injectée dans les veines d’un lapin ou d’un chat, paralyse les centres nerveux vaso- dilatateurs (1). IL était rationnel de se demander si, chez des animaux vaccinés, cet effet se produirait exactement de même. Nous nous étions, dès le début de nos recherches, posé celte question (2) et nous avions, pour la résoudre, fait quelques expériences. Nous en avons fait de nou- velles au mois de juillet dernier. Ce sont les résultats des unes et des autres que nous croyons devoir présenter maintenant, vu l'intérêt de toutes les données qui concernent la nature ou le mécanisme de l’im- munité. (4) Voir surlout Comptes rendus Académie des sciences, 28 juillet 1890, et Archives de physiologie, octobre 1890. (2) Voir Archives de physiologie, octobre 1890. 9929 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Suivant la méthode que nous avons instituée en 1890, nous excitons par un courant induit le bout central du nerf auriculo-cervical sur un lapin curarisé : on sait que cette excitation donne lieu à la dilatation de tous les vaisseaux de l'oreille du même côté (réflexe de Snellen-Schiff). Nous avons constaté d’abord que ce réflexe paraît se produire de la même facon, ni plus ni moins aisément ou énergiquement, chez un animal vac- ciné et chez un témoin. Puis nous avons étudié les variations de ce phé- nomène chez des animaux vaccinés après injection de produits pyocya- niques; nous avions soin de vérifier l’aclion de ces produits, soit en même temps, soit le lendemain, sur un lapin normal (c'est-à-dire non vacciné) placé dans les mêmes conditions. Or, chez les uns comme chez les autres, ces produits, s'ils sont injectés en quantité suffisante (20 à 40 centimètres cubes pour un lapin de 2 kilogrammes environ), suppri- ment le réflexe: l'oreille ne rougit plus, à la suite de l'excitation du bout central du nerf auriculo-cervical, même quand on augmente beaucoup l'intensité du courant (avec un courant six fois plus fort). Une seule fois, nous avons constaté (expérience du 12 janvier 1891) la persistance du réflexe; maïs nous avions injecté cette partie des pro- duits pyocyaniques que nous avons étudiés sous le nom de produits volatils (4) et qui s'altèrent assez rapidement; nous sommes d’autant plus en droit de penser que ces produits, conservés depuis quelques jours, s'étaient altérés ou évaporés, qu’ils se sont de même montrés inefficaces, le lendemain, sur un lapin normal. Ainsi l'on peut conclure que la sensibilité des appareils nerveux vaso- dilatateurs est égale, qu'il y aiteu ou non vaccination ; autrement dit,ces appareils, chez les animaux rendus réfractaires, ne sont nullement accou- tumés aux toxines bactériennes. L'hypothèse de l’accoutumance se trouve done infirmée, dans les conditions du moins où nous nous sommes placés. Il se peut assurément que, dans d’autres circonstances, les choses se passent différemment. Les causes ou conditions de l’immunité sont varia- bles; dans la diphtérie, par exemple, il se forme des antitoxines , subs- tances qui annulent les effets des produits du bacille. Mais là non plus, il est vrai, il n’y a pas accoutumance, quoiqu'on l'ait dit à tort. D'autre part, en agissant avec d’autres substances sur d’autres appareils, on ob- tiendra peut-être des résultats différents. Quelque légitimes que parais- sent ces réserves, il reste néanmoins que le système nerveux vaso-moteur des lapins vaccinés contre le bacille pyocyanique ne réagit pas aux cul- tures stérilisées de ce bacille autrement que ie même système chez des sujets non vaccinés. : (1) Archives de physiologie, janvier 1891. SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 993 Re ——_——————"———— ———————————— —————————— INFLUENCE DES INJECTIONS INTRA-VEINEUSES DE SANG ARTÉRIEL SUR LA TEMPÉRATURE, par M. RoGER. Les extraits de muscles, qu'on les pratique à froid ou à chaud, renfer- ment des substances thermagènes (1); celles-ci augmentant après la mort, on peut se demander si elles ne prennent pas naissance pendant les manipulations nécessaires à la préparation des matières solubles. Cette hypothèse trouve un appui dans les expériences suivantes. Du sang artériel, recueilli au niveau de la fémorale ou de la carotide, est injecté aussitôt dans les veines d’un lapin; dans ces conditions, il se produit constamment un abaissement de la température centrale; l'hypo- thermie, qui tantôt n’atteint que 0°,2, tantôt va jusqu’à 0°,5 et même 0°,6, se prolonge pendant un temps qui varie de trente minutes à plusieurs heures; puis la température remonte au chiffre initial et s’y maintient exactement. Les effets sont les mêmes que le sang provienne du lapin ou du chien, c'est-à-dire d'un animal de même espèce ou d'espèce différente. La quantité de sang injecté a varié de 7 à 10 centimètres cubes (4 à 5 par kilogramme). Si l’on opère avec du sang défibriné ou avec du sérum sanguin, on obtient des résultats bien différents : que ces liquides proviennent du chien ou du lapin, ils élèvent toujours la température, après avoir déter- miné, dans quelques cas, un abaissement initial, d’aïlleurs léger et peu durable. L’hypothermie ainsi produite oscille entre 0°,5 et 1 degré et se prolonge pendant deux ou trois heures. Cette élévation de la température n’est pas due au ferment de la fibrine, car un chauffage suffisant pour détruire ce ferment ne modifie pas les résultats. | dont A côté d'une substance hypothermisante, le sang artériel renferme donc un corps, qui n'est pas thermogène, mais le devient avec la plus grande facilité. La substance hypothermisante quitte l'organisme au niveau du rein; les injections intra-veineuses d’urines normales déterminent, en effet, un abaissement initiai de la température, signalé par M. Bouchard (2); mais elles produisent consécutivement une élévation secondaire (3). Ces (1) Roger. Note sur le pouvoir thermogène des extraits de muscles. Société de Biologie, 17 juin 1895. (2) Bouchard. Action des injections intra-veineuses d'urine sur la calorifica- tion. Archives de physiologie, janvier 1889. (3) Roger. Note sur le pouvoir thermogène des urines. Société de Biologie, 17 juin 1893. 924 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE deux effets différents sont dus à deux ordres de substances distinctes : il suffit, pour s’en convaincre, de précipiter de l’urine au moyen de l’aleool: les matières incolubles dans ce liquide abaïissent la température, les matières solubles l’élèvent. Si l’on rapproche ces résultats de ceux qu’on obtient avec le sang, on est conduit aux conclusions suivantes : 1° Le sang artériel renferme une substance hypothermisante, qui s’éli- mine par le rein et passe dans l'urine, d’où elle peut être précipitée par l'alcool ; cette substance est détruite par la chaleur ; 2° Le sang artériel, tel qu'il est dans les vaisseaux, renferme une subs- tance qui n'influence pas la température, mais donne naissance à une malière Lhermogène, quand on pratique la défibrination ou qu’on laisse se produire la coagulation spontanée ; la même transformation semble avoir lieu dans le rein ; l’urine contient une substance thermegène, ana- logue à celle du sang défibriné ou du sérum. Cette substance est soluble dans l'alcool et résiste à l’action de la chaleur. Elle semble analogue ou identique à celle qu'on peut extraire des tissus ; il est donc probable que ceux-ci ne renferment pas toute formée la matière thermogène ; ce sont les procédés employés pour sa préparation qui lui donnent naissance. En résumé , le rein élimine la substance hypothermisante du sang ; il secrète une substance hyperthermisante, dont le sang ne renferme que les éléments originels. Ces résultats comportent certaines déductions, touchant le mécanisme de la régulation thermique et la physiologie pathologique de la fièvre ; ils expliquent aussi pourquoi l’urémie s'accompagne généralement d’un abais- sement de la température, mais peut produire parfois une élévation thermique. APPLICATION DE L'ANTISEPSIE A LA MÉTHODE HYPODERMIQUE, par MM. Durcoco et BERLIOZ. MM. Duflocq et Berlioz proposent les deux moyens suivants comme application de l’antisepsie à la méthode hypodermique : emploi de tubes slérilisés contenant chacun la dose ordinaire des sels les plus usilés ; stérilisation de la seringue et des aiguilles servant à l'injection. Les tubes, en verre jaune pour éviter l’action de la lumière, présentent la forme d’une petite bouteille. Grâce à un dispositif ingénieux ils sont maintenus avec la solution pendant vingt minutes dans l’autoclave à la température de 120 degrés. Les auteurs se servent de la pression atmos- phérique pour les remplir automatiquement à l’aide de la trompe. Comme toute manipulation est supprimée, à aucun moment les solutions ne peuvent êlre contaminées. Les tubes sont fermés à la lampe. SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 925 Le col étiré du tube se termine par une extrémité brusquement amincie; la brisure se fait donc forcément en ce point plus fragile. L’aiguille de la seringue de Pravaz est introduite dans cette effilure et son extrémité s'arrête au niveau même de la naissance du col; elle suffit à maintenir le tube qu'on abandonne à lui-même. On tient la seringue verticalenient, l'aiguille et le fond du tube qu’elle supporte tournés en haut. En tirant sur le piston on aspire le liquide du tube qui vient ainsi remplir la seringue. L'appareil à stérilisation de la seringue est en métal nickelé; il est com- posé de deux parties : une lampe à alcool formant couverele et une petite cuve munie de deux pieds contenant sur un support la seringue et les aiguilles. On remplit d’eau filtrée la seringue et la cuve en suivant la méthode indiquée par les auteurs : quelques minutes suffisent pour la stérilisation. On vide ensuite la seringue et on la remplit alors avee le contenu d’un des tubes stérilisés. Les auteurs terminent ainsi : « Nous croyons donc pouvoir conclure que par ces deux modifications nous nous sommes efforcés de réaliser les conditions si nécessaires et peut-être trop négligées jusqu'ici de l’asepsie la plus complète dans l'emploi de la méthode hypodermique. » SUR LA DÉGÉNÉRESCENCE RÉTROGRADE DU FAISCEAU PYRAMIDAL, par M. J. Sorras. On sait que, dans les cas d’altération transverse de la moelle épinière, les faisceaux de tubes interrompus dans leur parcours dégénèrent suivant le sens de leur direction d’après la loi de Waller. Au-dessus de la zone des lésions primitives, on trouve la dégénéres- cense ascendante du cordon de Goll et de la zone marginale du cordon latéral (faisceau cérébelleux.direct et faisceau de Gowers). Au-dessous, ce sont les faisceaux pyramidaux directs et croisés qui sont atteints et aussi sur une faible étendue quelques groupes de fibres descendantes du cordon postérieur (dégénérescence en virgule de Schultze). C'est ce que nous avons constaté en particulier dans quatre cas de syphilis médullaire que nous avons recueillis dans le service de M. Deje- rine. Dans ces cas, l’altération principale était représentée par un ramol- lissement suivi de sclérose, occupant un étage et une élendue variables de la moelle dorsale. Mais à côté de la distribution classique des zones de dégénérescence secondaire, nous avons noté la parlicularité suivante : Dans ces quatre cas, il existait au-dessus de l’altération transverse une dégénérescence du faisceau pyramidal latéral, moins prononcée il est vrai que dans la portion sous-jacente à la lésion primitive, mais encore 925 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE très manifeste. Cette sclérose, émanée de la région dorsale, se prolonge dans la région cervicale en diminuant d'intensité pour disparaître dans la partie supérieure de la moelle. A ce niveau, il ne reste plus dans le cordon latéral que la dégénérescence marginale classique. Cette dégéné- rescence est manifestement secondaire de par sa topographie systéma- tique, de par ce fait qu’elle s’atténue en s’éloignant du foyer d’altération primitive, enfin elle diffère par sa constitution des altérations primitives dont elle émane. L'existence de cette dégénérescence rétrograde peut recevoir diverses interprétations : elle peut être considérée comme la conséquence de la destruction de certaines cellules de la substance grise, cellules dites des cordons. Ces cellules fournissent aux cordons latéraux des cylindraxes dont les collatérales suivent un trajet descendant pour les unes, ascen- dant pour les autres. M. Marie, dans une toute récente communication, a eu recours à cetle interprétation pour expliquer certains faits de dégénérescence ascendante du cordon latéral dans la sclérose latérale amyotrophique. Et de fait, dans les cas que nous signalons, la destruction de la substance grise était irès prononcée, mais nous ne croyons pas pouvoir accepter cette explica - tien pour les cas qui nous occupent, car les fibres des cellules des cordons sont répandues dans tout le cordon latéral, tandis que la sclérose ascen- dante que nous avons constatée ne dépasse pas de beaucoup les limites du faisceau pyramidal. : Ce fait en apparence paradoxal nous semble pouvoir s'expliquer par certains résultats de la pathologie expérimentale. En effet, Gudden, Forel, von Monakow ont montré que lorsqu'un système de fibres est séparé de ses centres trophiques, il dégénère dans les deux sens : en plus de la dégénérescence centrifuge du bout périphérique des fibres interrompues, il se produit une dégénérescence centripète du bout central, mais la dégé- nérescence rétrograde n’est manifeste que chez les animaux jeunes et n'apparaît qu'au bout d’un temps assez long. Cette dernière condition a été réalisée dans nos observations, car les malades ont survécu de dix à vingt ans aux premières atteintes de leur affection. Quoi qu'il en soit, le fait que nous avons rencontré méritait d'être signalé, car il peut être quelquefois la cause de fausses interprétations. En effet, les lésions primitives de la syphilis médullaire ne sont pas tou- jours réunies en foyers, elles peuvent être très disséminées. Les tubes dégénérés sont rassemblés dans le cordon de Goll et le faisceau pyra- midal, et l’altération de ce dernier s'étendant sur une grande longueur, la dégénérescence combinée secondaire devient la lésion la plus saillante. Elle simule alors une affection systématique primitive. SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 927 MORPHOLOGIE COMPARÉE DE L'OS CARRÉ (Deuxième note), par M. Remy Sainr-Lour, (Travaux de l'École pratique des hautes-études, laboratoire de M. Pouchet.) Dans une précédente communication (1), l'étude comparative de l'os carré dans ses rapports avec le crâne et l'oreille a été exposée en prenant pour exemple des types de Sauriens et de Chéloniens. Il est nécessaire de compléter la comparaison par l'étude de l'os carré chez les Oiseaux, les Batraciens et les Sélaciens. Chez Gallus domesticus, l'os carré a la forme d’un Y. (Ce rapproche- ment du nom et de la forme nous conduit à faire remarquer que le nom d'os carré a été employé pour la première fois pour désigner le suspenso- rium de la mâchoire inférieure des oiseaux; les anatomistes qui trou- vaient avec peine un os carré chez la grenouille ont donné à la région analogue le nom de région du quadratum, et de région du quadratum on a passé à l'expression cadre du tympan; ces libres traductions semblent avoir eu plus d'influence sur les comparaisons morphologiques que l'étude anatomique.) La branche principale de l’Y porte le maxil- laire inférieur et le quadrato-jugal; la petite branche postérieure s'appuie contre le pétrosal en un point du cercle osseux tympanal et en même temps contre le squamosal ; quant à la branche antérieure, elle se dirige vers le ptérigoïde. Cet os carré est donc, en somme, un suspensorium de la mâchoire, prenant contact d'une part avec la masse osseuse de l'oreille interne, d'autre part, avec le maxillaire inférieur ; le tube mem- braneux audilif externe s'appuie contre lui mais sans adhérence. La comparaison se fait sans difficulté et sans artifice avec un hyoman- dibulaire de Sélacien (Acanthias) ou de Batracien (Axolott), seulement dans le cas de Gallus la branche stylo-hyoïdienne de l’'hyoïde, au lieu de s'attacher à l'hyomandibulaire ou os carré, reste libre et va se placer en arrière de l’occipital. Chez Acanthias, l'hyomandibulaire donne appui au maxillaire infé- rieur et à la pièce qui joue le rôle de maxillaire supérieur. On peut donner à celte pièce indifféremment les noms de palato-carré, quadrato-jugal, ptérigo-palatin, parce que les différentiations qui permettent de distin- guer un palatin, uu jugal, un ptérigoïde, ne sont pas effectuées ici. La branche stylo-hyoïdienne ne se développe pas à l'état cartilagineux Jusqu'au contact du erâne; comme chez Axolott d’ailleurs elle s'arrête à la partie inférieure de l’'hyomandibulaire. (1) C. R. Soc. Biologie, 11 mars 1893. 9928 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En résumé, des exemples précédents il résulte que : l'os carré des oiseaux est analogue à l'hyomandibulaire des squales et des batraciens, établissant la relation de l'oreille interne et du maxillaire inférieur. Dans les oiseaux et les squales, l'arc stylo-hyoïdien n'a aucun rapport avec l'oreille moyenne, le eul-de-sac pharyngien d'Eustache ne dépassant pas vers l'extérieur l'oreille interne des oiseaux, et allant se loger chez les squales, en avant de l’arc hyomandibulaire (évent). Chez les Batraciens, au contraire, le cul-de-sac pharyngien d'Eustache utilise l'arc hyomandibulaire. Or, nou$ avons vu chez les Sauriens et les Ghéloniens l’hyomandibu- laire concourir à la formation de l'oreille moyenne, lui fournir le cadre du tympan chez les premiers, et toute la caisse chez les seconds. Quant au stylo-hyoïde, il reste éloigné de l'oreille, au moins chez les Sauriens. Chez les mammifères, au contraire, nous voyons l’are mandibulaire et l'are hyoïdien enfermés tous deux, à leur extrémité, dans l'oreille moyenne ou plus exactement se développer dans une membrane disposée en spirale à la même place que l'oreille moyenne osseuse des Chéloniens. Cette membrane me paraît devoir être comparée à un hyomandibulaire de Sélacien, mais à une différenciation d'un hyomandibulaire, intéressé par le cul-de-sac pharyngien d'Eustache. Cette membrane est aussi bien le lieu de formation du marteau, de l’enclume, de létrier et du cercle osseux tympanique que de l’extrémité vertébrale du stylo-hyoï- dien. Il n’y a done pas à chercher l'os carré dans un des points d'ossifi- calion nés dans le cartilage de Meckel plutôt que dans l’un quelconque des points d’ossificalion développés dans l’ébauche membraneuse spirale. 4° En général, le cul-de-sac pharyngien d'Eustache prend, au cours du développement dans les principales classes de vertébrés, des rapports variés avec les deùx arcs branchiaux antérieurs. 20 Les arcs branchiaux se modifient, en conséquence, de diverses manières, suivant que leur « vitesse plastique » retarde ou avance sur la vitesse plastique qui fixe dans sa forme le cul-de-sac d'Eustache. (Je demande que l'expression’ vitesse plastique soit excusée, elle sert mieux que toute autre à rendre ma pensée.) IL en résulte que les différencia- tions de l'arc branchial antérieur n’ont pas toujours pour résultat la formation d'un os carré et que le principe de la loi des connections n’est pas rigoureusement applicable dans toute la série des vertébrés. 3° Il semble qu'au point de vue de ces états morphologiques, Île centre philogénétique doive, pour les vertébrés, être cherché parmi les prototypes de Batraciens. Il en part un rayon pour les Sauriens, un rayon voisin pour les oiseaux, d'autre part un rayon pour les Chéloniens et un rayon très parallèle à celui-ci pour les mammifères. SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 9929 UNE OBSERVATION DE CHIEN SANS ESTOMAC, par MM. J. Carvazro et V. PAcHoN. (Travail du laboratoire de physiologie de la Faculté de médecine de Paris.) Nous avons l'honneur de présenter à la Sociélé de Biologie un chien auquel nous avons pratiqué la gastrectomie aussi totale que possible (1), je 22 juin, au laboratoire de M. le professeur Ch. Richet. Ce chien, qui pesait 10 kilogr. 100 le jour de l'opération, pèse aujour- d'hui, cinq mois après, 10 kilogr. 600 et présente l'aspect général de la plus parfaite santé. Gomme l’a déjà démontré Czerny (2), en 1878, la di- gestion et la nutrition peuvent donc s’optrer de la façon la plus parfaite chez le chien privé d'estomac. L'histoire de notre chien peut se diviser en trois périodes, correspon- dant aux trois genres d'alimentation, que nous avons dû successivement lui donner. Première période (22 juin-10 juillet}. Alimentalion liquide. — Dès le quatrième jour de l'opération nous fimes prendre du lait à notre chien. Le lait fat continué pendant les vingt premiers jours, à la dose quoti- dienne de 1 litre À/2, que nous donnämes d’abord, par précaution, bouilli, pendant la première semaine, puis crû. Il nous a été ainsi donné de constater que, chez l'animal privé d'estomac, la digestion du lait était très imparfaite ; Les fèces étaient en grande partie diarrhéiques et l'on y. retrouvait des grumeaux de caséine, d’une façon constante. Toute alimentation solide était alors impossible. Quelques mieltes de pain avalées par l’animal étaient à peine tolérées deux ou trois minules et suffisaient à provoquer un vomissement. Le lait lui-même, du resle, pour être toléré, devait être bu par le chien à petites gorgées, se suc- cédant à des demi-heures, des heures d'intervalle ; si la quantité prise en une fois dépassait 60 à 80 grammes, le vomissement ne tardait pas à se produire. Aussi, à ce moment-là, ne se passait-il pas de jour sans que l'animal dût maintes fois rejeter la nourriture qu’il venait de prendre. Deuxième période (10 juillet-10 août). Alimentation päteuse. — I fallait dès lors obvier à ce double inconvénient d’une nourriture solide impos- sible, et d'une nourriture lactée exclusive, imparfailement digérée. Dans ce but, on donna à l'animal, du 40 juillet au 10 août, la bouillie banale (1) Comme on peut le voir sur la pièce anatomique, que nous présentons, toute la grande courbure de l'estomac a été réséquée, ainsi que le pylore; seule une petite partie de cardia qui a dû être laissée pour permettre les su+ tures avec le bout duodénal. é (2) Czerny. Beilräge zur operativen Chirurgie. Stuttgart, 1878. 4 pa 930 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE des nourrissons (100 à 159 grammes de farine de blé délayée et cuite dans du lait). Cette nouvelle nourriture fut mieux digérée ; les fèces toutefois étaient encore en partie diarrhéiques et Le poids du chien qui était descendu à 8 kilogr. 600 le 10 juillet, n’était remonté qu'à 9 kilo- grammes le 10 août. Pendant toute cette période, comme pendant la précédente, un phéno- mène assez remarquable était l'impression de lassitude, de fatigue, d’abat- tement même ressentie par l'animal, pendant le premier moment qui suivait chaque absorption d’aliments. Cet état avait une durée variable, de dix minutes à une demi-heure. Troisième période (10 août-25 novembre). Alimentation solide. — A la date du 40 août, on put erfin donner une alimentation solide à l’ani- mal, une soupe composée de 250 grammes de viande (de cheval) hachée et cuite et de 150 grammes de pain. Le chien mange cette soupe peu à peu, en prend quelques bouchées, dès qu’on la lui donne, puis se retire, y revient un moment après et l’achève ainsi, à intervalles divers, en douze à quatorze heures ; il est intéressant de voir comme il mâche pendant quelque temps les morceaux de viande, avant de les avaler, ce que ne fait pas le chien normal.Les vomissements alimentaires ont beaucoup di- minué de fréquence, sans toutefois avoir complètement disparu. C’est que l'animal s’est appris, à vrai dire, à régler son bol alimentaire et à ne pas dépasser, chaque fois qu’il mange, la quantité d'aliments tolérée par son. intestin. Les aliments chauds provoquent plus particulièrement le vomis- sement. Dans ces conditions, la digestion de la viande cuite a toujours été par- faite. Cela résulte non seulement de l’état physique des fèces d’aspect absolument normal, mais encore de nombreux dosages d’azote total faits comparativement dans les aliments et dans les fèces. Sur 10 grammes d'azote total alimentaire pris par l’animal on n’en retrouve plus qu’une moyenne de À gramme dans les fèces. La viande cuite est donc bien digérée par notre chien. Il n’en est nas de même de la viande crue. Si la viande crue est donnée non hachée, on trouve dans les excréments des parties de nature entie- rement musculaire. Si la viande crue est donnée hachée, la digestion de la viande crue est plus avancée, mais n’est pas complète ; on retrouve de nombreuses fibres musculaires non atlaquées, qu'il est facile de disso- cier, dans les fèces. Le tissu connectif (tendons, aponévroses) est absolument inattaqué et se retrouve intact, dans les fèces, tandis que chez un chien normal témoin, il est bien digéré. Quant aux phénomènes de réaction générale présentés par notre chien, pendant le moment de la digestion, ils ne se distinguent actuellement en rien de ceux offerts à l'ordinaire par un chien normal, L'état de somno- SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 931 lence, qui succédait à chaque absorption d’aliments, pendant les deux premières périodes, a absolument disparu. Réaction du contenu duodénal. — Notre chien vomissant encore quel- quefois, même maintenant, il nous a été loisible d'examiner la réac- tion du contenu duodénal, à divers moments de la digestion. Si l’on fait prendre au chien, à jeun, une nourriture neutre, le magma des matières vomies après une demi-heure est neutre (examiné au phénol-phtaléine, à la tropéoline et au tournesol}, le magma de matières vomies après deux et trois heures est franchement acide et les réactifs différentiels {rouge du Congo et tropéoline) indiquent qu’il s'agit ici d'une acidité organique et non minérale (4). Réaction de l'urine. — L'urine a toujours donné une réaction franche- ment acide, soit le matin, à jeun, soit au moment de la digestion. Tolérance de la viande corrompue. — Le 22 novembre, 250 grammes de viande de cheval sont mis à l’étuve, à 37 degrés, pendant vingt- quatre heures. La viande, dégageant une forte odeur de putréfaction, est alors donnée par moitié d’une part à un chien normal, d'autre part au chien sans estomac. Aucun signe d'intoxication ne s’est manifesté chez les deux animaux, ni Le jour de l'expérience ni les jours qui ont suivi. Quant aux déduclions d'ordre théoriqüe, auxquelles conduisent ces di- verses expériences, sur les fonctions de l'estomac et de l'intestin, elles seront exposées dans un travail ultérieur (2). DES MALFORMATIONS DENTAIRES CHEZ LE SINGE, par M. le D' Fézix REGNAULT. On s'est beaucoup occupé des déformations dentaires de l'homme. M. Fournier les a très bien décrites dans son livre sur la syphilis hérédi- laire et a pensé qu'elles étaient très fréquentes dans cette maladie. Il généralisait ainsi l’idée d’Hutchinson, qui n’attribuait de valeur diagnos- tique qu à la malformation dentaire qui porte son nom et sur laquelle nous reviendrons. Néanmoins M. Fournier répondait d'avance à une objection, à savoir l'existence de cette malformation chez les animaux : on avait noté des (1) A propos de ce fait, M. Sanson, de la Société de Biologie, nous a rap- pelé que le suc intestinal des animaux carnassiers était acide et que, quant à l’action digestive du pancréas en milieu acide, déjà Corvisart avait signalé la possibilité de cette action. Gley et Lambling ont signalé de leur côté l’aci- dité du suc intestinal. (Revue biologique du Nord de la France, octobre 1888.) (2) Ce travail paraîtra dans les Archives de physiologie, n° de janvier 189%. 932 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE sillons sur les dents des bœufs et des chiens. Les érosions dentaires seraient fréquentes chez le chien, avait indiqué Trasbot, qui en attribuait la cause à la variole. Mais à part ce dernier cas les malformations den- taires semblaient rares chez les animaux. Ainsi avait conclu M. Magitot, qui par l'examen de divers musées, n'avait trouvé qu'un seul cas de déformation dentaire (1!) chez les animaux domestiques. M. Fournier prend ces faits en considération et pense que si les malfor- mations dentaires peuvent avoir d’autres causes que la syphilis, elles ont celte maladie pour facteur Le plus important. Nous nous élevons contre cette théorie, et prétendons, au contraire, que la syphilis n’agit pas plus que loute autre maladie sur le développement du système dentaire. ; L'examen des nombreux crânes de singes conservés au Muséum nous a montré en effet un nombre de malformations dentaires au moins aussi grand que parmi les hommes. Nous allons les passer rapidement en revue. L'atrophie des dents est fréquente. Nous en avons relevé six cas. Le numéro 537 a une incisive latérale droite inférieure atrophiée par rapport à la gauche: son bord libre offre une surface de 8,5 mm. au lieu de 5 millimètres que mesure la dent voisine. Chez le numéro 513 (jeune gorille), les deux secondes incisives latérales supérieures n'arrivent pas à moitié de hauteur des médianes. Les numéros 1231, 1306 (Hg. 4) (semno- pithèques) st 2703 (sajou) ont, les premiers, une incisive supérieure; le dernier, deux incisives supérieures et uneïnférieure lrès atrophiées. Enfin le 2697 (sajou) présente l’atrophie de toutes ses incisives. Souvent il existe des intervalles entre les dents; ils peuvent prendre des proportions considérables. Le numéro 1499 (hurleur noir) a un espace de 8 mm. entre les deux incisives médianes inférieures, de 3 mm. entre l’incisive médiane inférieure et latérale gauche et 3 mm. entre les deux incisives médianes supérieures et ce sans perle de dents. Sur le numéro 41485 (hurleur roux), l'intervalle est de 8 mm. entre Îles incisives médianes inférieures qui paraissent atrophiées. D'autres fois, les dents chevauchent. Ce fait est surtout fréquent chez les cynocéphales, qui possèdent une forte denture. Les dentelures si fréquentes chez l'homme du bord libre des incisives sont plus rares chez les singes : elles doivent en effet s’user rapidement. Cependant le numéro 516 (orang-outang) offre une incisive latérale supé- rieure gauche dont les dentelures très manifestes ont été préservées par la longueur un peu plus grande de l’incisive médiane. Un autre orang jeune offre des dentelures multiples aux quatre incisives médianes. Les irrégularités de surface de la dent formant des facettes multiples existent chez le numéro 537, jeune Chimpanzé dont les canines ne sont (1) Magilot. Traité des anomalies du système dentaire, 1877. SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 933 pas encore poussées. Les incisives supérieure et inférieure offrent une surface tourmentée et irrégulière. Quelquefois l'incisive est divisée par une barre verticale. Sur le numéro 513 (jeune gorille) (fig. 2.), la barre est profonde sur l’incisive médiane supérieure gauche et coupe la dent au tiers de sa hauteur. Il en est de même des numéros 2701 (sajou) et 2850 (nyclipithèque), 2851 (idem), mais surtout du numéro 1485 (hurleur roux) (figure 3), où la barre divise réellementla moitié inférieure de la denten deux parties. Ces malformations doivent être rares dans l'espèce humaine. M. Fournier ne les signale pas, car il ne faut pas les confondre avec des sillons creusés aux dépens de l’émail : ces barres laissent l'émail intact et agissent sur la totalité de la dent. Les érosions dentaires s’observent sur le numéro 537 principalement marquées sur l’incisive supérieure droite où elles se présentent en cupule. Le numéro 520, autre jeune chimpanzé, offre sur toutes ses dents des érosions punctiformes, multiples, légères, blanchâtres. Ces érosions sont fréquentes à un degré léger : tels les numéros 504 (gorille) et 1377 ‘magot). Les sillons ne sont pas rares. Le numéro 516 déjà cité en offre un bel exemple. C'est un sillon unique transverse marqué sur toutes les dents sauf l’incisive latérale supérieure gauche qui est dentelée. Il est à la même hauteur sur toutes les dents sauf la canine qui est plus longue, mais où le sillon persiste à la même distance de la pointe. Ce sillon a une largeur de 2 millimètres et est brunâtre. L’émail n’a pas entièrement disparu du sillon, mais il est piqueté d’un pointillé noir. M. Fournier a décrit des sillons de forme analogue chez l’homme. Le numéro 1362 offre aussi un sillon très marqué sur les incisives supérieures médianes près de leur racine. Les numéros 1414 (magot) et 1362 (cercopithèque) ont des sillons moins profonds, plus légèrement dessinés, mais néanmoins bien marqués. Ils courent transversalement sur les dents dans le premier cas, sur la moitié de la largeur des incisives supérieures, dans le second sur loute la largeur des incisives médianes supérieures. Reste enfin la dent d'Hutchinson, de toutes la plus importante. Si on range comme dents d'Hutchinson toute dent qui s’use davantage sur la partie médiane que sur les parties latérales de son bord et qui offre par suite une surfacee libre concave, la dent d'Hutchinson n’est pas rare chez le singe. Ainsi les incisives du numéro 1232 (semnopithèque) (fig. 3) ont cet aspect. Fait important, la concavité des incisives supérieures ne correspond pas à une convexilé des incisives inférieures, mais ces dernières ont également un bord libre concave. L'usure est ici bien due à un défaut de résistance de la partie médiane de la dent. Au contraire, pour le 934 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE numéro 1362, on peut arguer que la dent supérieure a été usée à sa partie médiane par les inférieures plus solides ; ces dernières emboitent leurs bords libres convexes dans la concavité du bord libre des incisives supérieures. De même, le numéro 515 (orang-ourang) offre à ses incisives supérieures un bord libre alternativement convexe concave. Ces courbures s'emboîtent dans des courbures en sens inverse des incisives inférieures. L'usure de l’émail plus rapide que celle de l’ivoire, peut également s'observer chez les jeunes singes. Nous avons vu ainsi une usure précoce des dents dont la partie extérieure avait presque entièrement disparu. Mais nous n'avons pas trouvé de déformation aussi accentuée que dans la dent d'Hutchinson humaine, type où le bord libre offre un bord concave accentué et taillé principalement aux dépens de l'émail. Mais nous croyons que si nous ne l'avons pas observé, cela tient simplement qu’un singe porteur de dents aussi lésées ne peut lutter pour l'existence et est rapide- ment éliminé. Puisque nous avons observé les lésions de la dent d'Hutchinson au premier degré, on doit admettre que les degrés plus avancés pourraient se produire s'ils n'étaient promptement arrêtés par la mort de l'individu devenu incapable de subvenir à son existence. Comme conclusion: les altérations dentaires s’observent aussi fréquem- ment chez le singe que chez l’homme. Même la dent d'Hutchinson s'y retrouve au début de l’usure du bord libre. On doit donc abandonner l’idée qui fait des lésions dentaires un signe de syphilis héréditaire. Cette dernière maladie peut évidemment en amener la formation, mais au même titre que bien d’autres. VALEUR ANTISEPTIQUE DE L'EXTRAIT TESTICULAIRE ET DE LA GLYCÉRINE, par MM. J. SaBrazës et P. RIVIÈRE. Dans une communication précédente, nous avons fait remarquer que l'extrait testiculaire obtenu par le procédé de M. d’Arsonval élait acide. Nous avons dit en outre que cette acidité devrait être sinon la cause, au moins une des causes qui nuisent à la vie d'un certain nombre de germes dans ce liquide organique. Nous désirons aujourd’hui compléter ces expériences et en faire connai- tre quelques autres destinées à vérifier le bien fondé de notre première assertion. Si l’on sème du streptocoque récent dans un tube d'extrait testicalair2 acide, on voit, par des transports journaliers dans du bouillon, qu'il peut encore donner des cultures le deuxième jour. Ce fait montre que ce microbe reste vivant dans l'extrait orchitique pendant un temps plus long que celui indiqué par M. d’Arsonval. Mais il est possible de conserver beaucoup plus longtemps certains SÉANCE: DU ‘25 ‘NOVEMBRE 0935 germes dans le suc testiculaire. On y arrive en le:saturant exactement au moyen d'une solution de soude stérile. Les cultures sont encore possibles après un passage de lextrait neutre ensemencé dans l’autoclave à acide carbonique (30 à 40 atmosphères) pendant deux heures. Dans ces condi- tions, le staphylocoque doré (le même qui a servi dans nos premières expériences) est encore capable de fournir des cultures abondantes dix: jours après l’énsemencement des milieux organiques ; sa fonction chromo= gène n’est pas sensiblement altérée. Nous verrons plus tard si sa virulence est diminuée. Ce qu'il faut retenir pour le moment, c'est que, dans l'extrait testiculaire neutralisé, le staphylocoque vit trois fois plus long- Fu que dans l'extrait acide. . Quant au Bacterium coli, il vit également bien dans les extraits testi- entäir es, qu'ils soient acides ou neutres. Dans les deux cas en effet, nous Pavons cultivé jusqu'au neuvième jour. : Il est maintenant un facteur dont l'influence mérite de nous arrêter. Nous voulons parler de la glycérine qui constitue en grande partie le véhicule de l'extrait orchitique et que Selavo (1), dans un récent travail, préconise pour maintenir vivantes certaines cultures microbiennes. Get auteur aurait pu y conserver virulent pendant plus de deux mois un fragment de la rate d'une souris infectée par le pneumocoque; il aurait obtenu des résultats semblables pour le bacille du choléra des poules ; mais il a vu que la bactéridie charbonneuse y perdait toute virulence vers le neuvième jour. Nous avons pensé qu'il importait d'aborder cette question de la valeur antiseptique de la glycérine non seulement au sujet de l'étude des extraits organiques, mais encore à un point de vue plus général. Cette substance est en effet d’un. emploi quotidien en thérapeutique. Il n’est donc pas indifférent de tenter d’élucider quelques-uns de ses modes d’action. Nous avons étudié l'influence de la glycérine sur le charbon sporulé, le Staphylococcus aureus, le streptocoque, le bacille d’Eberth et le coli- bacille. - Dans des tubes de glycérine chimiquement pure et stérile, nous intro- duisions une anse de platine d’une jeune culture sur gélose des microbes que nous venons de citer; nous transportions chaque jour sur agar, à 37 degrés, un peu de celte glycérine souillée. Lorsque nous n’oblenions plus de cultures, nous ensemencions la culture mère pour nous assurer qu’elle était encore capable de prospérer, et que la mort des germes expérimentés pouvait bien être rapportée au milieu glycériné dans lequel ils étaient placés. En opérant de cette façon, nous avons trouvé que le charbon vivait encore au huitième jour dans la glycérine, ainsi que le staphylocoque orangé. Le streptocoque et le bacille d'Eberth ne poussaient plus au bout - (4) Sclavo. Publ. della direz. di Sanita, Roma, 1892. 34. 936 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de vingt-quatre heures; le bacille d'Escherich mourait le septième jour: Ces faits montrent que la résistance des germes vis-à-vis de la glycérine est très variable. Il est un point sur lequel il convient particulièrement d’insister : c’est sur la façon dont le Bacterium coli et le bacille d'Eberth supportent l’action de la glycérine. Remarquons que le premier résiste septjours ; que l’autre, au contraire, ne vit même pas une journée dans ce: milieu. Ne pourrait-on trouver là un nouveau moyen de différenciation entre ces deux microbes que quelques auteurs s’efforcent de rapprocher et d'identifier ? Nous nous proposons de diriger dans ce sens de nouvelles recherches : nous en ferons connaitre plus tard les résultats. Quoi qu'il en soit, ce pouvoir bactéricide vis-à-vis de certains germes semblerait devoir justifier l'usage de la glycérine comme antiseptique intestinal chez les typhiques, et son utilisation comme topique dans l’érysipèle par exemple et dans d’autres affections à streptocoques.-Le pouvoir osmotique considérable de cette substance, sa puissance de péné- tration plaideraient encore en faveur de son emploi. Si maintenant nous considérons le résultat des expériences que nous avons rapportées, nous sommes amenés à conclure que deux causes con- tribuent à procurer à l'extrait orchitique une certaine puissance micro- bicide ; les deux éléments qui interviennent sont l'acidité des milieux et la présence de la glycérine qui entre pour la plus grande part dans la constitution de l'extrait. Encore ce pouvoir antiseptique est-il médiocre et insuffisant, puisque plusieurs germes, et non des moins redoutables, sont susceptibles d’être longtemps épargnés. SUR LES INSTINCTS FRUGIVORES DU CHIEN. Note de M. CH. CORNEVIN. Je ne me propose point de rappeler que le chien, vraisemblablement par suite de la domestication, est devenu à peu près omnivore, ce serait banal et puéril. Je désire montrer que cet animal, en dehors de toute excitation de la faim, recherche spontanément quelques fruits, qu'il s'en nourrit de préférence aux aliments qu’on lui distribue habituellement, et que ce genre de nourriture lui est très profitable. Cette démonstration à laquelle j'ajouterai quelques réflexions, me semble intéressante non seu- lement au point de vue de la physiologie générale, mais à celui plus particulier de la bromatologie des espèces domestiques. Voici deux années de suite que les fruits sont fort abondants dans l'Est ; le petit domaine, complanté d'arbres fruitiers, où Je passe mes vacances a participé à cette abondance. Or, l’année dernière, quand au matin je me promenais au verger, j'ai rencontré souvent des chiens qui passant à travers les lacunes d’une clôture rustique, happaient les prunes tombées pendant la nuit. Malgré la chasse que je leur faisais, leur persis- SÉANCE DU 25 NOVEMBRE 937 tance à revenir tant qu'il y eut des prunes aux arbres me frappa et je me promis, le cas échéant, d'étudier de plus près cette particularité des mœurs canines. Je fus servi à souhait cette année par l'abondance des fruits. Comme précédemment, je revis sous mes arbres ces maraudeurs d'espèce canine. Quelques-uns appartenant à des parents et à des amis, il me fut facile de m'assurer que ces chiens recevaient chez eux leur ration habituelle consistant en reliefs de cuisine et en soupe, et que ce n'élait nullement la faim qui les poussait. Un de ces animaux, amené chez moi, reçut simultanément du pain imbibé de bouillon et des prunes ; il choisit celles-ci et laissa celui-là. Un autre chien offrit un spectacle peut-être plus curieux. Un matin qu’il faisait sa récolte quotidienne, une guêpe cachée dans une prune-le piqua à la lèvre qui se tuméfia notablement. Cette mésaventure ne corri- gea point sa gourmandise; le lendemain, il revenait, mais il avait la pré- caution de retourner chaque prune avec la patte et de la bien regarder avant de la happer. Les arbres à fruits les plus sucrés étaient visités les premiers et de préférence aux autres. Si la prune est, de beaucoup, le fruit que j'ai vu rechercher le plus avidement par le chien, je l'ai vu aussi, quelquefois, ne pas dédaigner la poire, surtout celle qui appartenait aux bonnes variétés de table. Je ne l'ai pas observé recherchant la pomme, Sous l'influence de cette nourriture, il se porte à merveille. Racontant mes observations à une personne âgée qui posséda toute sa vie des chiens pour la garde de ses animaux, elle me dit que plusieurs de ses bergers savaient très bien que pour vendre un bon prix les peaux de leurs vieux chiens, il convenait de les tuer en octobre après les avoir nourris quelque tem ps de prunes et de poires. Elle ajouta tenir de l’un d'eux que la viande des chiens ainsi alimentés est très comestible et a perdu l’odeur de chenil qui nous répugne. En recueillant mes observalions, je réfléchis que dans l’espèce canine, qu'on donne comme ayant élé primitivement carnivore, nombreux sont les sujets qui recherchent peu la viande, qu’il en est qui sont pris de vomissements quand le régime à la viande est le seul auquel il sont soumis, que tous deviennent eczémateux et atteints de démangeaisons dans ces conditions, et je me rappelai que vis-à-vis des toxines provenant des viandes gâtées, de la saumure et de la septicémie gangreneuse, ils sont d’une sensibilité qui m'a toujours frappé. Sans chercher à résoudre la question à peu près insoluble de savoir si primitivement les canidés étaient exclusivement carnivores, on ne peut s'empêcher d'admirer l’étonnante souplesse de leur organisme, et de cons- tater que la conformation anatomique ne semble point gouverner le régime alimentaire aussi despotiquement qu’on l’a répété depuis CGuvier. C'est une constatation des plus encourageantes pour tous ceux qui ont à ‘occuper des questions d’alimentation et de substitutions alimentaires. 938 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE _: A PROPOS D'UNE NOTE DE M. FÉRÉ SUR L'ACTION DE LA LUMIÈRE SUR LES OŒUFS DE POULE EN INCUBATION, TA par M. Louis BLANC. M. Féré (1), exposant les résultats obtenus en faisant agir sur des œufs en incubation diverses lumières:colorées, a émis quelques doutes, que nous devons dissiper, au rejet des désordres constatés par nous dans des expériences de même ordre. Nous avons observé chez l'embryon de poule soumis à l'action de Ë lumière blanche, des troubles remarquables par leur gravité (2),:e M. Féré suppose que l'intensité de ces désordres est peut-être due à . causes d'erreur telles que le vernissage, l'agitation des œufs, l’incubation tardive. s Les travaux de M. Dareste sont trop connus pour qu'il 0 permis de commettre de semblables méprises. Les œufs employés dans nos expé- riences provenaient d’une basse-cour éloignée de moins d'un kilomètre du laboratoire où ils étaient apportés à la main chaque jour, quelques heures après la ponte. D'autre part M. Dareste a montré que les enduits imperméables étaient seuls nuisibles; la coloration superficielle de la coquille avec l'encre de Chine est inoffensive, ce que nous avons d’ailleurs constaté dans les expériences de contrôle. Si M. Féré a obtenu des résultats bien moins accusés que les nôtres, cela tient uniquement à ce qu’il a employé la lumière diffuse, tandis que nous nous sommes servi d’une source lumineuse intense, grâce à un dispo- sitif que nous décrirons en temps opportun. Dans nos notes précédentes nous avons d’ailleurs indiqué : 1° Que l'agent lumineux était très intense; 2 Que son action était en quelque sorte brutale; 3° Qu'il semblait y avoir proportionnalité entre l'intensité de la source lumineuse et la gravité des désordres constatés. Ceci suffit à expliquer les différences qui existent entre les résultats de M. Féré et ceux que nous avons décrits. (Laboratoire d'anatomie de l'École vétérinaire de Lyon. (1) Sce. dé Biol., 15 juillet 1893. (2) Id., 15 octobre et 17 décembre 1892. Le Gérant : G. MAsson. Paris. — annee de la Cour d'appel. L. MArerHEUx, directeur, 1, rue Cassetle. 939 SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 1893 ne Henri FRenKEL : Sur l'existence dans certaines urines dé l’homme de propriétés _antidiurétiques. — M. B. ve Nagras : Structure du système nerveux des gastéro- podes (Mémoires). — M. Cu. Féré : Réponse à M. Blanc à propos de ses expé- riences sur l’action de la lumière sur l'incubation de l’œuf de poule. — M. Cn. FEré : Note sur l'influence de l'exposition préalable aux vapeurs des essences sur l’incubation de l'œuf de poule. — M. Ca. Féré : Note sur l'influence de l'exposition préalable à la fumée de tabac et aux vapeurs de nicotine sur l’incubation de l'œuf de poule. — M. Cu.-E. Quixquaun : Note sur le dosage de l’urée du sang. — MM. A. Gicsertr et J. Gone : Cholécystite purulente provoquée par le bacille d'Eberth. — M. le Dr J. Pevrou : Du traitement du saturnisme par le monosul- fure de sodium. — MM. CosranriN et Marrucuor : Avantages théoriques et pra- tiques de la nouvelle méthode de culture du Champignon de couche. — MM. J. Héricourr et Caarzes Ricuer : Modifications dans le nombre des leucocytes du sang après injection de diverses substances. — M. Marassez (Discussion). — MM. MauRICE Arraus et Anozpne HuBer : Procédé permettant d'obtenir des cris- taux d’oxyhémoglobine. — M. le Dr Férix ReGnaurr: Variations dans la forme des dents suivant les races humaines. — M. P. Méen : Sur la reproduction des Sarcoptides. — M. CL. Saza y Pons : L’écorce cérébrale des oiseaux. Présidence de M. Dareste. CORRESPONDANCE IMPRIMÉE M. Rapnaez Dupois fait hommage à la Société de son livre sur l'anes- thésie physiologique et ses applications et donne de son œuvre l'ana- lyse suivante : Le petit livre que j'ai l'honneur d'offrir à la Bibliothèque de la Société s'adresse surtout aux praticiens. Le côté scientifique proprement dit n’a cependant pas été laissé dans l’ombre. J'ai rappelé brièvement les prin- cipes sur lesquels repose la théorie que j'ai donnée du mécanisme intime des anesthésiques généraux, théorie appuyée sur de nombreux fails expérimentaux consignés en détail dans le Bulletin de la Sociélé de Biologie, dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences et dans la Jievue générale des sciences pures et appliquées (n°% 11 et 17, 1891). IL ne s’agit pas d’une simple hypothèse, comme d’aucuns ont cherché.à l’insinuer, sans même essayer de le démontrer, car on a pu, par l’action déshydratante des anesthésiques sur le protoplasme, que j'ai prouvée expérimentalement, non seulement expliquer les faits antérieurement connus, mais encore en découvrir de nouveaux, ce qui est le critérium de BIOLOG1E. COMPTES RENDUS. — 9€ SÉRIE. T. V. 39 940 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE toute théorie véritablement scientifique. Le fait si curieux de l’anesthésie de la sensitive découvert et si bien étudié par deux de mes maitres, Leclerc {de Tours) et Paul Bert, ainsi que l’anesthésie de la graine démontrée par Claude Bernard, s'expliquent aussi facilement que l’anes- thésie générale chez l’homme, considérée dans ses samtes lignes. C'est en m'appuyant sur la physiologie générale que j'ai pu montrer que les anesthésiques et le froid agissent comme insensibilisateurs et antiseptiques temporaires par le même mécanisme interne, la déshydra- tation du protoplasme, qui détermine également l’état de vie latente chez les rotifères, les anguillules, les végétaux pendant l'hiver, etc. En partant de ces principes généraux, j’ai pu donner une théorie de l’anesthésie dans les organismes différenciés et chez l’homme servant de fondement solide aux applications cliniques, qui se déduisent facilement de l’expérimentation, comme on pourra s’en convaincre par la lecture de l'ouvrage. J'ai cru utile de rappeler, à cette occasion, que tout ce qui a été produit d'utile et de durable en anesthésie est sorti des laboratoires, depuis la découverte de l’action physiologique du protoxyde d'azote, de l’éther, du chloroforme, de la cocaïne, du froid, comme anesthésique local et des procédés mixtes jusqu’à la méthode des mélanges titrés mécaniquement, la seule qui soit à la fois pratique et rigoureusement scientifique. Les recherches expérimentales auxquelles j'ai eu l'honneur d’être associé pendant plusieurs années à la Sorbonne, en qualité de prépara- teur de Paul Bert, m'avaient convaincu de la nécessité de faire bénéficier, encore une fois, la clinique des recherches du laboratoire et c’est ce qui m'a conduit à m'efforcer de rendre pratiques les données fournies par l’expérimentation, par l'invention de divers procédés et instruments, dont le présent livre doit vulgariser la connaissance. Les expériences cliniques entreprises avec succès dans divers grands hôpitaux de Paris, de la pro- vince et de l’étranger, ont d’ailleurs justifié l'exactitude des prévisions scientifiques. J'ai voulu, avant tout, par la publication de V'Anesthésie physiolo- gique el ses dns, dégager du chaos des procédés empiriques, actuellement préconisés, les méthodes les plus en rapport avec la con- naissance du mécanisme physiologique. J'ai combattu énergiquement, parce que je les crois très dangereuses, certaines hérésies physiologiques telles que celle qui consisterait à vouloir donner au patient à la fois le moins d’air et le plus de chloroforme possible. Pour diminuer l'embarras du praticien appelé à prendre une détermi- nation parfois rapide, j'ai éliminé tous les anesthésiques qui n'avaient pas reçu à la fois la sanction de l'expérience et celle de la clinique et je n'ai cité que pour mémoire les agents tombés en désuétude, sans m'at- tarder à en faire la critique. J'ai consacré plusieurs chapitres aux diverses spécialités médicales, | | | \ | k | | SÉANCE DU © DÉCEMBRE JA obstétrique, odontologie, oculistique, vétérinaire, etc., et enfin un cha- pitre particulier à l’anesthésie expérimentale appliquée aux recherches de laboratoire. | Je n'ai pas cherché à faire œuvre d’érudition, mais seulement à offrir à ceux qui m'en jugeront digne le concours d’une ‘expérience déjà longue, acquise à la fois dans le laboratoire et dans la clinique, et à for- muler d’une manière simple et concise, quoique suffisamment complète, les règles qui doivent être observées dans l’application des méthodes d’insensibilisation basées sur des données véritablement scientifiques. Puisse ce petit livre, destiné surtout au grand public médical, servir à Ja fois à faire ressortir davantage l'importance de l'expérimentation pour la clinique tout en diminuant les incertitudes des praticiens avec les risques des patients! SUR L'EXISTENCE DANS CERTAINES URINES DE L'HOMME DE PROPRIÉTÉS ANTIDIURÉTIQUES, par M. HENRI FRENKEL, Chef des travaux du laboratoire de M. Gayet, à Lyon. (Communication faite dans la séance précédente.) Parmi les propriétés physiologiques des urines de l’homme mises en lumière par les travaux classiques de M. Bouchard, M. Charrin, et depuis par bon nombre d'auteurs, celle de déterminer la diurèse est, sinon la plus constante, du moins la plus importante. On sait aujourd’hui, grâce à M. Bouchard, que le principe le plus actif de l'urine qui excite la sécrélion rénale est l’urée. Dans la pratique des expériences sur les pro- priétés physiologiques de l'urine, il intervient encore un deuxième fac- teur, c’est la quantité de liquide injectée. Nous voulons aujourd’hui attirer l'attention sur quelques faits d'observation tendant à montrer que, malgré l’abondance du liquide injecté et malgré la richesse de ce liquide en urée, la diurèse peut faire défaut, et que, partant, il faut admettre l’existence dans ces urines des propriétés antidiurétiques, sans préjuger de quelle manière ces urines agissent sur l'appareil excréteur. On peut étudier l’action diurétique des urines de deux manières. La première consiste dans la comparaison de la quantité et de la composi- tion de l'urine injectée dans le système circulatoire de l'animal en expé- rience (lapin) avec la quantité et la composition de l’urine émise par cet animal dans un laps de temps bien déterminé. La deuxième consiste dans la comparaison d’un grand nombre d'expériences instiluées d’après le même plan et dans l’observation du moment où l'animal commence à rendre les urines. Mais'il vaul mieux encore de combiner Les deux pro- cédés. 942 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE: . Voici les condilions de nos expériences. Pour observer les variations du moment de la première apparition de l'émission de l'urine par l’ani- mal, il faut se servir, pour les injections, d’une urine dont.la toxicité est faible, mais dont la teneur en urée n’est pas au-dessous de la normale. De celte manière, on peut injecter de grandes quantités de liquide dans la veine de l’animal (lapin), el en même temps lui injecter une forte dose durée. Nous nous sommes servi des urines dont la quantité en 24 heures variait entre 550 centimètres cubes et 1600 centimètres cubes, dont le taux d’urée allait de 12 à 30 grammes par litre et dont le coefficient urotoxique variait de 57 à 400. L’urine de 24 heures filtrée, mais non neutralisée et non décolorée, fut injectée dans la veine marginale du lapin avec une vitesse de cinq centimètres cubes par minute. En règle générale, on pous- sait l'injection jusqu'à la mort de l'animal; dans quelques cas, l’animal survivait 24 heures. Dans cette série d'expériences, on observait l'émis- sion de l'urine de la vessie, au lieu d'observer directement la sécrétion rénale, afin d’éviter les complications dues aux réflexes opératoires (anurie réflexe). Nous disposons actuellement de 50 observations de ce- genre. Sur ces 50 cas, 9 présentent de Ja polyurie manifeste et hâtive, 26 présentent une diurèse plus ou moins abondante et dont la première apparition coïncide avec le moment où on a injecté une quantité d'urine variable entre 50 et 200 centimètres cubes. Ces 35 cas réunis donnent une preuve mani- feste et irréfutable de l’action diurétique des urines de l'homme. Sur les autres 45 cas, il y en a 12 dans lesquels on n'a pas observé de diurèse et: 3 dans lesquels la diurèse a été très tardive et peu abondonte. Ce sont ces 15 cas qui nous intéressent ici plus particulièrement. En rangeant ces 45 cas d’après la quantité d’urines injectée jusqu à la mort de l’animal, nous oblenons les données suivantes : 12 animaux sont morts sans avoir émis de leur vessie une seule goutte d'urine. L'au- topsie a révélé la présence dans la vessie d’une quantité d’urine variable, mais ne dépassant généralement pas 100 à 150, maximum 200 centimètres cubes d'urines. Or, la quantité d'urines injectée a été pour ces animaux en centimètres cubes : 112, 140, 170, 180, 180, 180, 185, 210, 210, 300,345, 625. Il y a donc 5 cas dans lesquels l'appareil circulatoire a logé des quantités d’urines variables, mais pouvant aller jusqu’à 425 centimètres cubes et que les reins se sont refusés à laisser passer. Les trois derniers cas sont ceux où la quantité d'urines rendue par les animaux a élé faible et très tardive. Dans le premier, le lapin mort après avoir reçu 250 cen- timètres cubes a rendu 25 centimètres cubes et a présenté à l’aulopsie 15 centimètres cubes dans la vessie ; il a donc gardé dans l'organisme 210 centimètres cubes. Dans le deuxième cas, le lapin qui est mort à 330 centimètres cubes rend, au moment de sa mort, quelques centimètres cubes d’urines et présente la vessie à moilié vide. Dans le troisième cas,. la quantité injectée est de 750 centimètres cubes, le lapin pisse au moment SÉANCE DU ® DÉCEMBRE 943 où il a déjà reçu 550 centimètres cubes, mais la diurèse n’est pas exces- sivement abondante. Le lapin reste vivant encore dix-huit heures, pen- dant lesquelles il vide peu à peu l’énorme quantité de liquide reçu. Assurément, ces 15 observations sont, au point de vue qui nous inté- resse, d'inégale valeur. Une partie de ces observations présente des exemples où les propriétés diurétiques des urines tendent à contreba- lancer les propriétés antidiurétiques. Celles-ci ne se manifestent d’une manière bien nelle que dans quelques cas, sur lesquels nous croyons devoir insister plus particulièrement. C’est d'abord ce cas bien intéressant d’un lapin qui a recu 750 centi- mètres cubes d’une urine dont le coefficient urotoxique était 94 et qui a survécu dix-huit heures. Toute l'opération d'injection a duré deux heures et demie. Pendant près de deux heures le lapin n’a pas rendu une seule goutte d'urine et ce n’est qu'au 550° centimètre cube que la vessie s’est vidée en partie, en laissant apparaîlre une faible quantité d'urine. Par l'expression, on obtient encore une faible quantité d'urine, mais le tout ne dépassait guère 100 centimètres cubes. Or, l'urine injectée contenait 16 grammes d’urée par litre. Le lapin a donc reçu 550 centimètres cubes de liquide contenant 8 gr. 8 d'urée et toute l’action diurétique s’est bornée à la sécrétion d’une centaine de grammes d'urine. L'animal était gonflé comme un ballon, mais pendant les deux premières heures ses reins ne laissèrent passer qu'une partie de la solution circulante. Deuxième fait. Un lapin reçuit 625 centimètres cubes dans l’espace de deux heures et meurt. sans avoir uriné. La vessie contient 100 à 125 cen- timèlres cubes d'urine. Un demi-litre de liquide injecté est resté dans l'organisme. Où a-t-il passé? En partie dans les séreuses, ainsi que l’a montré l'autopsie, mais la plus grande partie est venuc distendre jusqu'à l'extrême l’appareil circulatoire. Ce n’est pas la pression qui a manqué pour provoquer la diurèse; ce n’est pas non plus la substance diurétique, Purée, dont le taux était normal. Force est donc d'admettre l’existence d’une propriété antidiurétique dans le liquide injecté. Troisième fait. Le lapin reçoit dans l’espace de une heure et dix minutes 330 centimètres cubes d'urine, et meurt. Au moment de la mort, le sphinc- ter de la vessie se relâche et la vessie se vide à moitié. La quantité sécrétée par les reins s'élevait à une cinquantaine de centimètres cubes, Quatrième fait. Le lapin reçoit 250 centimètres cubes d’urines en cin- quante minutes et meurt. Cinq minutes avant la mort, il reud 25 cenli- mètres cubes d'urine; l’autopsie révèle 15 centimètres cubes dans la vessie. L'organisme a donc retenu 210 centimètres cubes du liquide injecté. ton Es Les autres faits sont des exemples de transition et présentent pour le moment moins d'intérêt. Oa ne peut pas incriminer la congestion rénale d’être la cause de cette rétention d'urine, car on voit bien souvent de la congestion rénale, sans 944 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE - — observer cette énorme distension des vaisseaux avec transsudation dans les séreuses. Si la congestion rénale pouvait à elle seule provoquer cet effet, il n’y aurait pas moyen de constater l’action diurétique des urines. Il faut donc admettre que la cause de ce phénomène réside non pas dans l'animal, c'est-à-dire dans ses reins, mais bien dans les propriétés du liquide injecté. Si nous désignons ces propriétés sous le nom d’antidiuré- tiques, c'est pour la commodité du langage et sans préjuger s’il y a une ou plusieurs substances qui ont ces propriétés, si elles agissent sur l’épi- théliome rénal, sur les vaisseaux ou autrement. STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX DES GASTÉROPODES, par M. B. DE Nagias. — (Voir Mémoires du présent volume, p, 155). RÉPONSE À M. BLanc (1) A PROPOS DE SES EXPÉRIENCES SUR L'ACTION DE LA LUMIÈRE SUR L'INCUBATION DE L'OŒUF DE POULE, par M. Cu. FÉRÉ. M. Blanc a rapporté des faits d'anomalies de développement provoqués soi-disant par l'application locale de lumière vive. Aux conclusions de l’auteur, j'ai objecté l'absence d'expériences comparatives sur des œufs témoins, l’action de la chaleur s'exerçant concurremment à celle de la lumière, et celle d’un enduit d’encre de Chine. M. Blanc ne répond dans sa note explicative à aucune de ces objections. IL accepte sans réserve une affirmation sur l’innocuité des enduits soi- disant non imperméables, affirmation qui ne s’appuie pas non plus sur des expériences comparatives avec des témoins. M. Blanc parle d’expé- riences de contrôle; mais des expériences de contrôle n’ont de valeur que par les circonstances bien déterminées où elles ont été faites : M. Blanc ést muet sur ces circonstances. Par conséquent, mes réserves qui ne s'adressent pas aux faits s'appliquent parfaitement à ses conclusions. Si ses conclusions se trouvent démontrées vraies par la suite, ce ne sont pas les expériences qu'il a rapportées qui l’auront établi. | (1) C. R. Soc. de Biol., p. 938. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 945 NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'EXPOSITION PRÉALABLE AUX VAPEURS DES ESSENCES SUR L'INCUBATION DE L'ŒUF DE POULE, par M. Cu. FÉRÉ. Il n’est pas sans intérêt de remarquer que la plupart des agents que nous voyons exercer une action troublante sur le développement de l'embryon de poulet, ont une action analogue sur un certain nombre de microbes (1) ou de champignons (2). C'est un fait qui ne peut guère exciter l’étonnement, car dans le développement de l'embryon comme le, développement des colonies microbiennes et des champignons, il s’agit, du même processus, la multiplication des cellules. Parmi les agents, qui sont susceptibles d’entraver le développement des microbes et des champignons, les essences jouent un rôle assez inté- ressant. J'ai cru qu'il ne serait pas sans utilité d'étudier leur influence sur le développement de l'embryon de poulet. | A. — Essence de lavande. I. — Douze œufs, au 3° jour de'la ponte, ont été placés sous une cloche de verre opaque de 30 litres de capacité, avec un récipient contenant de l'essence de lavande. Après 24 heures de séjour dans cette cloche, ils ont été mis à l’étuve de Roux, la grosse extrémité à gauche, en même temps que douze œufs témoins de même dale conservés à l'obscurité jusque-là, 10 Six œufs exposés aux vapeurs d'essence et six œufs témoins ont été ouverts alternativement à partir de la 48° heure. Les œufs témoins contiennent tous un embryon vivant d’un développement moyen de 37 heures environ. Les œufs exposés aux vapeurs contiennent aussi. tous un embryon vivant, mais dont le développement moyen n’est que de 33 heures; il n’y a que deux légères anomalies de position (déviation de 25 degrés environ). 2e Les six autres couples ont été ouverts à partir de la 78° heure. Dans les six œufs témoins, il y a six embryons normaux et vivants d’un déve-. loppement moyen de 57 heures; tous présentent une déviation de leur grand axe variant de 15 à 160,degrés (55 degrés en moyenne). Dans les six œufs exposés aux vapeurs d'essence de lavande, il y a aussi six embryons normaux, dont un seul a une déviation de 50 degrés, mais leur (4) Chamberland. Les essences au point de vue de leurs propriétés antisep- tiques. Ann. de l'Inst. Pasteur 1887, t. I, p. 153. — Forné. Contrib., à l'étude des essences au point de vue de leurs propriétés antiseptiques. 1bid., 1893. t. VII, p. 529. (2) Busquet. De l’action des essences sur le développement des champi- gnons dans les cultures. C. R. Soc. de Biol., 1893. — Hallopeau. Sur le traite- mént de la pelade par l’essence de Wintergreen. Soc. fr. de derm. et de syph., mai 1893. 946. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE développement moyen n'est que de 49 heures. Dans un seul cas, il existe une échancrure de Paire vasculaire. ; IT. — Douze œufs, au 4 jour de la ponte, ont été mis sous un cristallisoir de verre opaque de 10 litres de capacité avec un récipient contenant de l'essence de lavande. Ils ont été mis à l’étuve de Roux après 24 heures, la grande extré- mité à gauche, en même temps que douze témoins de même date. 10 Six témoins et six œufs exposés aux vapeurs d'essence ont été ouverts alternativement à partir de la 48° heure. Les six témoins contiennent cinq embryons normaux de 30 he A2 Men moyenne de développement, et il y a une absence de développement. Dans les œufs exposés aux vapeurs, il y a une absence de développement, et cinq embryons de 25 h. 1/2 environ. Aucune déviation de l’axe de l'embryon dans les deux catégories. | 2° Les six autres couples ont été ouverts à partir de la 78° heure. Dans les témoins, il y à deux absences complètes de développement, trois dans les œufs exposés aux vapeurs d'essences. Les quatre embryons des œufs témoins ont 53 heures en moyenne; les trois embryons de l’autre catégorie n’ont en. moyenne que 46 heures. Dans la première catégorie,il y a une déviation à 180 degrés et dans le seconde deux déviations à 45 degrés. Pas d'anomalies. B. — Essence d'anis. Douze œufs, au 4° jour de la ponte, sont exposés sous une cloche de 30 litres aux vapeurs d'essence d’anis (évaporation de 6 grammes sur 20) pen- dant 48 heures; puis ils sont portés à l’étuve de Roux, la grosse extrémité à gauche, en même temps que douze œufs témoins. 1° À partir de la 48 heure, on ouvre deux œufs de chaque catégorie. Dans les œufs témoins on trouve un développement moyen de 17 heures; dans les œufs exposés un développement commun de {10 heures. 2° Quatre couples sont ouverts à partir de la 72° heure. Il y a quatre embryons d’un développement moyen de 32 heures dans les témoins. Dans les œufs anisés, il y a un développement nul et trois embryons d’un développe- ent moyen de 23 heures. Dans chaque Ca IéEOTReS deux embryons présentent. une déviation de 25 à 45 degrés. 3° Les six derniers couples ont été ouverts à partir de la 96° heure. Dans les témoins il y à une absence de développement et cinq embryons dont le déve- loppement moyen est de 61 heures. Quatre présentent une déviation : trois à 45 degrés et 1 à 160 degrés; ce dernier présente une torsion du tronc. Dans les œufs anisés, trois fois le développement est nul; ily a trois embryons d'un Fa bouc, moyen de 53 heures, l’un Drébnte une déviation de 45 degrés. et l’autre de 435 degrés. ) ic C. — Essence de girofle. : I — Douze œufs au 6°:jour sont exposés pendant 24 heures sous une cloche: opaque de 30 litres reposant sur une épaisse couche d’ouate aux vapeurs de’ SÉANCE DU ® DÉCEMBRE 947 l’essence de girofle. Mis à l'étuve de Roux, la grosse extrémité à gauche, en même temps que douze témoins. 4° Un seul couple a été ouvert après la 48° heure. Dans l'œuf témoin, le déve- loppement en était à la 19° heure ; dans l’autre, à la 10° heure. - 2° Sept couples ont été ouverts à partir de la 72° heure. Dans les témoins, il y avait sept embryons vivants d'un développement moyen de 47 heures; un seul était dévié à 160 degrés. Dans les œufs exposés aux-vapeurs d'essence, il y'avait un développement moyen de 4{ heures, sans aucune déviation. 3° Les quatre derniers couples ont été ouverts après la 144 heure. Il y avait une absence de développement dans un des œufs exposés à l'essence. Les sept autres embryons avaient un développement normal et régulier. II. — Douze œufs ont été exposés aux vapeurs d'essence de girofle pendant 48 heures et mis en incubation comme précédemment en même temps que des témoins, tous la grosse extrémité à gauche. lo Neuf couples ont été ouverts à partir de la 96° heure. Huit des œufs témoins contenaient un embryon. de 96 heures environ, un seul était tordu. Le neuvième était un embryon kystique. Parmi les œufs exposés aux vapeurs, cinq avaient un développement de 96 heures, trois un développement de 82 heures, l'un de ces derniers était tordu et en hétérotaxie, le neuvième œuf contenait un blastoderme sans embryon. Il y avait dans cette catégorie trois déviations, deux à 25 degrés, une à 45 degrés. - 20 Trois couples ont été ouverts après la 120° heure. Deux des œufs témoins contenaient un embryon à développement normal; l'autre contenait un embryon kystique. Parmi les œufs exposés aux vapeurs, deux ne présentaient. aucune trace de développement et le lroisième contenait un embryon kystique. D. — Essence d'absinthe. U TI. — Douze œufs, au 5° jour, sont exposés pendant 24 heures sous une cloche de 30 litres aux vapeurs de l’essence d’absinthe, et ils sont mis à l’étuve- la grosse extrémité à droite en même temps que douze témoins. - 4° Six couples ont été ouverts après la 48° heure de l’incubation. Les En témoins contenaient cinq embryons normaux de 23 h. 1/2 de développement en moyenne, dout un seul dévié à 45 degrés ; il y avait un défaut de déve- loppement. Dans les œufs absinthisés, il yavaitaussi une absence de développement, et cinq monstres, deux avec des arrêts de développement de la tête et trois avec des anomalies de la gouttière. Un seul était dévié à 45 degrés. à - 2° Les six autres couples ont été ouverts après la 72° heure de l'incubation. Dans les œufs témoins, il y a un développement nul et cinq embryons nor- maux de 37 heures en moyenne dont un seul a une déviation de 45 degrés. . Dans les œufs absinthisés, il y a aussi un développement nul; il y a un monstre double qui n’a rien à. voir avec la cause troublante, et quatre monstruosités : un blastoderme sans embryon, un arrêt de développement de l’amnios avec torsion de l’'émbryon, une atrophie de la têle, une hétérotaxie avec one de la tête. Il y a aussi une déviation à 45 degrés. 948 - SOCIETE DE BIOLOGIE “ II, — Douze œufs, au 7° jour, sont mis à l'étuve après avoir séjourné 48 heures sous la cloche exposés aux vapeurs de l’essence d’absinthe en même temps que douze témoins de même date. Tous sont orientés la grosse extrémité à gauche. î 1° Quatre couples sont ouverts après la 48° heure. Dans les œufs ténioins, il y a quatre embryons normaux arrivés à la 37° heure en moyenne; un seul est dévié à 45 degrés. Dans les œufs soumis aux vapeurs d’absinthe, il y a deux développements nuls, deux embryons normaux de 34 heures en moyenne, dont un dévié de 45 degrés etun monstre kystique. 2° Les huit autres couples ont été ouverts à partir de la 52° heure. Dans les œufs témoins,il y a un développement nul, un monstre double, et six embryons normaux de 50 heures en moyenne : deux sont déviés à 45 degrés et un à 180 degrés. Dans les œufs soumis aux vapeurs de l'essence d’absinthe, il n’y a que deux embryons normaux : un de 25 heures et un de 52. Dans un autre embryon de 52 heures, qui n’a aucune déformation et dont le cœur bat régulièrement, on remarque l'absence complète de corpuscules colorés. Il y a cinq monstres: deux arrêts de développement de l'amnios avec atrophie de la tête. Un arrêt de développement de l'amnios avec atrophie de la tête, anophtalmie et torsion. Un arrêt de développement de la tête avec anophtalmie et absence de protovertèbres. NOTE SUR L'INFLUENCE DE L'EXPOSITION PRÉALABLE A LA FUMÉE DE TABAC ET AUX VAPEURS DE NICOTINE SUR L'INCUBATION DE L'OŒUF DE POULE, par M. Cu. Féré. Tassinari, Miller, Wernicke ont constaté que la fumée de tabac est capable, comme les infusions à 5 p.100, de tuer assez rapidement le bacille cholérique. Cette action, comme l'a vu Falkenberg, est beaucoup moins évidente sur les autres microbes pathogènes. Ce dernier auteur a cependant observé que la fumée de tabac influence la surface des milieux solides en les rendant plus ou moins impropres au développement des microbes. J'ai voulu voir ses effets sur le développement de l'embryon de poulet. I. — Un cristallisoir de 10 litres peint en noir est renversé et placé surune couche épaisse d’ouate, il recouvre douze œufs au 3° jour de la ponte. On fait pénétrer, à l’aide d'un tube, dont une extrémité est introduite à travers l’ouate, dans la cavité du cristallisoir, la fumée produite par la combustion lente de 4 grammes de cigare. On retire le tube etles œufs restent 24 heures au contact de la fumée. Leur partie inférieure de même que l'ouate, a une teinte légère- ment jaune. Ces œufs sont mis à l’étuve de Roux, la grosse extrémité à gauche. On met dans la même étuve douze œufs pondus le même jour et main- tenus aussi jusqu'alors dans l'obscurité. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 949 10 Six œufs exposés à la fumée et six témoins sont alternativement ouverts à partir de la 48° heure d'incubation. Il y a un embryon vivant dans tous les œufs témoins: trois ont environ 33 heures, deux ont environ 41 heures, uu 43 heures; tous cesembryons ontla direction normale. Dans les six œufs exposés à la fumée de tabac, trois fois il y a absence: complète de développement, deux- embryons ont 33 heures environ et un 29, soit en moyenne 31 heures au lieu de 37 dans les ‘œufs témoins; en outre,les trois embryons sont déviés à 90 degrés, leur grand axe est dans le grand axe de l'œuf, 2° Les six autres couples d’œufs ont été ouverts à partir de la 72 heures, alternativement un œuf témoin et un œuf enfumé. Dans les six œufs témoins, il y a six embryons normaux et vivants, deux de 68 heures et quatre de 52 heures environ. Aucun de ces embryons n’est dans l'axe normal : deux fois la déviation est légère, 15 à 20 degrés; trois fois elle est de 45 degrés et une fois la tête a pris la place de la queue. Dans les six œufs enfumés, il n'y a que trois embryons normaux dont un a une déviation de 45 degrés et un autre une déviation moindre de son grand axe. Une fois il n’y a aucun développement. Deux œufs contiennent un embryon monstrueux, arrêt de développement de l’amnios, Lorsion du tronc et cyclopie, atrophie de la tête et anophtalmie double. Les embryons normaux ont l’un 46 heures environ, et les deux autres 68 heures, Nous avons remarqué que tous les œufs enfumés où le développement était nul ou anormal avaient été trouvés dans l’étuve reposant sur le côté non en- fumé. Cette dernière circonslance suggérait l’idée que les troubles du déve- loppement pouvaient être attribués à l’enduit déposé sur l’écaille et modi- fiant sa perméabilité, et non à la pénétration de corps provenant de la combustion du tabac. Hi II. — Dans une seconde expérience, douze œufs ont été enfumés comme précédemment sous une cloche peinte en noir de 30 litres et, après 24 heures de séjour, mis en incubation dans l'étuve de Roux avec douze témoins. Tous les œufs sont orientés la grosse extrémité à gauche, et les œufs enfumés reposent sur l'hémisphère coloré par la fumée. 1° Six témoins et six œufs enfumés sont ouverts alternativement à partir de la 48° heure. Il y a un développement nul dans chaque catégorie: dans les cinq œufs témoins, les embryons ont environ 30 h. 1/2 de développement; dans les cinq œufs stars environ 34 h. 1/2. Il n’y a parmi les œufs enfumés. qu'une seule déviation de 45 degrés, aucune dans les témoins. 2° Les six autres couples ont été ouverts après la 72° heure. Il y a deux absences de développement parmi les témoins; une absence de développement et un embryon monstrueux kystique dans js œufs enfumés. Dans les œufs témoins, le développement des quatre embryons normaux est de 53 h. 1/2 environ; il est de 71 h. 1/2 dans les œufs enfumés. Parmi les témoins il y a deux déviations de l’axe de l'embryon, une à 45 degrés, l’autre à 180; dans les œufs enfumés, il y a deux déviations à 45 degrés. 950 © SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE HIT. — Douze œufs ont été enfumés comme précédemment sous la cloche et, après 24 heures, mis à l’étuve en même temps que douze témoins avec la même orientation que dans les deux expériences précédentes, mais de telle facon que la partie jaunie par la fumée soit placée en haut, c'est-à-dire cor- responde à la cicatricule. - 1° Six œufs enfumés et six témoins ont été ouverts à partir de la 72° heure. Les douze œufs contiennent un embryon sans déformation, mais tandis que leurs œufs témoins ont un développement de 48 h. 1/2 en moyenne, ceux des œufs enfumés n'ont que 37 h. 1/2. Il existe exactement autant de déviations de l’axe de l'embryon dans les deux catégories; trois déviations à 45 degrés et une à 135 degrés dans chacune. 2° Six œufs enfumés et six témoins ont été ouverts à partir de la 96° heure. Dans les œufs témoins, il y a six embryons normaux d’un développement moyen de 94 heures, aucune anomalie. Dans les œufs enfumés, il y a un déve- loppement nul,-trois monstres (une atrophie de la tête avec anophtalmie double et torsion dun tronc, deux omphalocéphales avec hydropisie de l’amnios) et deux embryons normaux, l'un de 82 heures et l’autre de 52 heures de déve- loppement. Parmi les témoins, il y a trois déviations à 45 degrés et une dévia- tion à 135 degrés; les deux embryons des œufs enfumés sont déviés de leur axe de 45 degrés. Ces trois expériences concordent pour montrer que le léger enduit de fumée qui recouvre les œufs dans les conditions indiquées suffit pour pro- duire un ralentissement général du développement, et des monstruosités. Il s'agit d’une action mécanique. La deuxième expérience semblait mon- trer que le vernissage des œufs sur leur moitié inférieure favorise le dévelnppement. Le fait méritait d’être vérifié. H IV. — Douze œufs, au sixième jour, sont enduits de collodion par moitié sui- vant leur axe longitudinal et placés dans d'étuve le côté enduit en bas, en même temps que douze Lémoins de même date. Tous sont orientés la grosse extrémité à droite. 4° Six couples sont ouverts après la 76° heure. Dans les œufs témoins, il ya deux absences de développement et quatre embryons normaux de 46 heures en moyenne. Dans les œufs vernis, il y a une absence de développement et quatre embryons de 52 heures en moyenne dont un en hétérotaxie. 2° Les six autres couples sont ouverts à partir de la 100€ heure. Dans les, œufs témoins, il y a un défaut de développement, un blastoderme sans embryon, et quatre embryons normaux de 70 heures en moyenne, dont un dévié à 45 degrés. Dans les œufs vernis, il y à aussi un défaut de développement, un embryon kystique et quatre embryons normaux de 92 heures en moyenne. Il paraissait donc avéré que le vernissage de la partie inférieure de l'œuf favorise le développement de l'embryon pendant les premiers jours du déve- loppement au moins. Peut-on, par lè même procédé, compenser les effets d'un trouble provoqué ? V. — Vingt- “quatre œufs au 4e jour dela ponte ont été placés sous la cloche en même temps qu'un flacon débouché contenant 20 grammes de nicotine. SÉANCE DU ® DÉCEMBRE 951 EE Après 24 heures de séjour sous la cloche de 30 litres, douze de ces œufs ont été enduits sur la moitié de leur surface, suivant un plan passant par le grand axe, d’une couche de vernis fixateur. Les vingt-quatre œufs soumis aux vapeurs de nicotine ont été mis à l’étuve la grosse extrémité à gauche, en même temps que douze témoins du même âge. Les œufs vernis sont mass la face non vernie en haut. " 1° Six œufs de chaque catégorie ont été ouverts à partir de la 48° heure. Dans les œufs témoins, il y avait cinq embryons ayant atteint en moyenne 36 heures de développement ; un seul de ces embryons avait une déviation de 160 degrés; il y avait un développement nul. Dans les six œufs exposés à la nicotine et non vernis, il y avait quatre développements nuls et deux embryons arrivés en moyenne à la 31° heure, et tous deux déviés à 45 degrés. Dans les six œufs exposés à la nicotine et vernis avant l’incubation, il y a deux déve- loppements nuls, un embryon monstrueux (omphalocéphale), et trois embryons d'un développement moyen de 41 heures, dont un seul est dévié à 45 degrés. 20 Six œufs de chaque catégorie ont été ouverts à partir de la 72° heure alternativement un de chaque catégorie comme toujours. Dans les œufs témoins, il y a cinq embryons normaux d'un Cbonenent moyen de 51 h . 1/2, dont irois sont déviés à 45 degrés, le sixième œuf con- tient deux embryons dans le même blastoderme, accolés par le derrière, de la tête, l’un de 46 heures, l’autre de 43, ce dernier ayant une atrophie de la tête avec anophtalmie. Dans les œufs exposés à la nicotine et non vernis, 1l y à trois absences de développement et trois embryons d’un déve- loppement moyen de 42 heures, l'un est dévié de 160 degrés, un autre de 45 degrés. Dans les œufs exposés à la nicotine et vernis, il ya quatre embryons normaux et sans déviation d'un développement moyen de 71 heures, et deux absences de développement. Cette expérience montre que le vernissage de la partie inférieure de l'œuf peut compenser l’action troublante de la nicotine qui est mise en évidence encore par les expériences suivantes, VI. — Douze œufs au quatrième jour sont exposés comme précédemment aux vapeurs de nicotine pendant 48 heures, puis mis à l’étuve avec douze témoins de même date, la grosse extrémité à gauche. 1° Les quatre premiers couples sont ouverts après la 48° heure. Dans les œufs témoins, il y a quatre embryons normaux, de 34 heures environ, Dans les œufs exposés à la nicotine, il y a un défaut de développement, et trois embryons normaux de 31 heures en moyenne. Dans chaque catégorie, il y a deux développements à 45 degrés. 29 Les huit autres couples ont été ouverts après la 72° heure. Dans les œufs témoins, il y a deux défauts de développement et six embryons normaux de 52 heures en moyenne. Dans les œufs exposés à la nicotine, il y a trois défauts de développement, un embryon kystique, deux embryons avec arrêt de développement de l’am- nios, atrophie de la tête, cyclopie et torsion, et deux embryons normaux, l’un de 68 et l’autre de 52 heures, ce dernier dévié de 45 degrés de la direction normale. 952 © SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE VII. — Douze œufs au septième jour, contenus en incubation après avoir séjourné #8 heures dans la cloche de la nicotine, en même temps que douze témoins de même date, tous orientés la grosse extrémité à gauche. 1° Six couples sont ouverts après la 48° heure. Dans les témoins, il y a six embryons normaux sans déviations notables, de 28 h. 1/2 en moyenne. Dans les œufs exposés à la nicotine, il n'y a qu’un embryon normal de 38 heures. Il y a une absence de développement et quatre monstres, un kys- tique, un spina bifida; un arrêt de développement de la tête, un arrêt de développement des vésicules optiques. 20 Les six autres couples ont été ouverts après la 72° heure. Dans les œufs témoins il y a une absence de développement, un omphalocéphale et quatre embryons normaux de 48 heures en moyenne. Dans les œufs exposés à la nicotine, il y a aussi un défaut de développement, un omphalocéphale, une atrophie de la tête avec cyclopie, une hétérotaxie de 46 heures environ, un embryon de #8 heures dont les dimensions sont de moitié moindres que ceux qui lui sont comparables au point de vue de la forme, et enfin un embryon normal de 52 heures. Si la fumée de tabac n’a d'influence que comme un enduit, la nicotine 3 cependant a une action nocive évidente sur l’incubatlion. NOTE SUR LE DOSAGE DE L'URÉE DU SANG, par M. Cu.-E. Quinquaur. Dans le procédé de Dumas, après avoir fait dessécher le sang, on le traite par l’eau bouillante; les lavages sont repris par l'alcool, évaporés; les résidus mélangés à l'acide nitrique, etc., on dose le nitrate d’urée. Bareswill et Bernard ont modifié ce procédé : le sang encore chaud est projeté dans l'alcool et exprimé dans un linge; les produits, évaporés au bain-marie, sont repris par l'alcool concentré, enfin évaporé, redissous dans l’eau, traité par l’acide nitrique, etc.; puis on dose le nitrate d’urée. Picard et Gscheidlen versent le sang dans l’eau bouillante, acidulée par l'acide sulfurique, filtrent le liquide, évaporent à moitié... ajoutent de l'alcool absolu, filtrent et évaporent au bain-marie, etc., puis ils dosent par le procédé Liebig. Bunsen met le sang dans l'alcool, filtre, lave à l'alcool, épuise le résidu par l’alcool absolu, filtre, évapore au bain-marie et dose en chauffant pendant quelques heures à 180 degrés en tubes scellés. Ces citations montrent que, pour doser l’urée du sang, des chimistes de premier ordre évaporent au bain-marie les liquides alcooliques; je dois en excepter Schrüder, qui conseille de distiller à une température infé- rieure à 70 degrés et Yvon qui évapore au bain-marie et dans le vide (C. R. de la Société de biologie, 1876, p. 355). SÉANCE DU ® DÉCEMBRE 953 D’après les premiers auteurs, il semble donc que l’évaporation au bain- marie donne de très bons résultats. Toutefois, quand on examine l'extrait alcoolique du sang, évaporé au bain-marie, on remarque sur les parois de la capsule une couleur brunâtre, qui fait soupçonner une décomposition partielle de la carbamide. Afin d’élucider cette question, nous avons construit dans notre labo- ratoire un appareil à évaporation dans le vide, qui se compose d’un cylindre de cuivre ayant 2 millimètres d'épaisseur, formant une cuve de 50 centimètres de diamètre, terminée en haut par un rebord horizontal de 5 centimètres, rebord perforé de trous; la hauteur du cylindre est éga- lement de 50 centimètres. La cuve est fermée par un couverele de cuivre ayant 3 millimètres d'épaisseur avec un rebord horizontal de 5 centi- mètres perforé de trous qui correspondent à ceux du rebord de la cuve et qui sont espacés de 6 centimètres les uns des autres; des boulons et des écrous traversent deux rondelles de fer circulaires de 1 centimètre d'é- paisseur, de 5 centimètres de largeur et servant à fermer hermétiquement l'appareil. Entre les deux rebords, on dispose deux autres rondelles ayant chacune 4 centimètres de largeur et 1 centimètre d'épaisseur, l’une de caoutchoue, l’autre de cuir graissé avec du suif et mis pendant plusieurs heures dans l'huile à 50 degrés. Le couvercle est perforé de trois orifices : le premier sert à laisser passer un thermomètre, au second est adapté un robinet qui met en communication la cuve avec une trompe de Golaz. Entre l'appareil et la trompe, on place un récipient en verre ou en fer-blanc étamé de 925 à 50 litres, ce qui évite un grand écoulement d’eau. Le troisième orifice sert à mettre en rapport la cuve avec un manomètre. Nous avons disposé dans la ‘cuve une double étagère, formée de plaques en tôle, perfo- rées, permettant de recevoir huit à neuf capsules de porcelaine, qui con- tiennent chacune 250 à 300 centimètres cubes de liquide alcoolique; lorsque les huit capsules sont dans l’appareil, on a 2 litres d'alcool qui s'évaporent en trente-six à quarante-huit heures. Le tout est placé sur des supports en brique; le bec Bunsen, à flamme de 12 centimètres de hauteur, maintient une température variant entre 35 à 40 degrés (celle du laboratoire étant à 14 degrés). Si, pour d’autres usages, on veut une régularité calorique plus parfaite, on place le cylindre dans un bain d’eau, dont la température est maintenue constante par un régulateur d’Arsonval. Pour faire fonctionner l'appareil, on ouvre le robinet de la trompe et le robinet de la cuve. Si l’on interpose entre la trompe et la cuve un vase, le vide se maintient. C'est avec ce dispositif que nous avons pu déterminer exactement les pertes d’urée, en distillant les liquides alcooliques dans le vide et au bain- marie. Dans une première série d'expériences, nous plaçons 2 centimètres cubes d’une solution d’eau pure dans 250 centimètres cubes d'alcool; 954 _: SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE: nous évaporons au bain-marie : la première analyse donne 6 c. c. d'azote; la deuxième, 6 c. c. 5 à 15°,8 et à 766; la moyenne est de 6.3 (2 centi- mètres cubes de la solution d'urée donnent 7.5 et 7.45 à 15 degrés et à 765 ; moyenne, 7.47). Un simple caleul montre que l’on retrouve seule- ment 85 p.100. Nous avons donc une perte de 15 p. 100. Dans une seconde série de recherches, nous introduisons 2 ceatinelres cubes d’une solution d’urée pure dans 250 centimètres cubes d'alcool: la. distillation se fait à une température de 35 à 40 degrés ; une première ana- lyse donne 7.2, une deuxième 7.4 : la moyenne est de 7.3, c’est-à-dire que l’on retrouve 97.2 p. 100, ou une perte de 2.8 p. 100. On peut con- clure que l’on obtient la totalité, puisque les causes d'erreur peuvent être de la grandeur de la perte. La distillation dans le vide doit done être préférée à l'évaporation au bain-marie. On verse dans 100 centimètres cubes d'alcool 2 centimètres cubes d’une solution d’urée, donnant 10 c. c. 8 d’azote à 23 degrés et à 756; on éva- pore dans le vide à la température ordinaire sur SO*H?; on reprend le résidu à l’eau distillée et l’on obtient 10 c. c. 4. Dans un second essai, on verse encore 2 centimètres cubes de la même solution d’urée dans 100 centimètres cubes d'alcool; on évapore dans le vide sur l’acide sulfurique et l’on obtient 10 ce. c. 6. La moyenne des deux expériences est de 40:c. c. 5; on retrouve 96 p. 100. Je poursuis la démonstration. On épuise par l'alcool (250 centimètres cubes) 25 centimètres cubes de sang de chien défibriné, on évapore les liquides alcooliques dans le vide entre 35 et 40 degrés; on ajoute au résidu sec, toujours peu coloré, 10 centimètres cubes d’eau distillée, l’on dose l’urée avec notre appareil (Tribune médicale, 1893); on obtient 2 c. c. 9 d'azote à 15 degrés et à 765. D'un autre côté, on épuise la même quantité de sang de la même manière, mais on évapore au bain-marie; la quantité d'azote est, dans ce cas, égale à 2.2; on retrouve 75 p. 100, d’où une perte de 25 p. 100. Voici d’autres séries d'analyses qui font voir l'influence défavorable de l’évaporalion au bain-marie. On prend 25 centimèlres cubes de sang de chien défbriné, on y ajoute 1 centimètre cube d’une solution d’urée (donnant 3 ce. c. 7 d'azote à 15 degrés et à 765), on fait l'extraction avec 250 centimètres cubes d'alcool, on évapore dans le vide à 40 degrés, on reprend comme toujours l'extraction par 10 c. c. d’eau distillée, on dose par l’hypobromite titré et l’on obtient 6 c. c.5 à 15 degrés et à 763. D'une manière comparative, on fait l’extraction alcoolique de 25 centi- mètres cubes de sang de chien défibriné, auquel on ajoute un centimètre cube de la mème solution d’urée; on évapore au bain-marie, le dosage donne 5 c. c. 9; on obtient au bain-marie 90 p. 106, ou une perte de 10 p. 100. Voici d'autres preuves de ces pertes d’urée. À 25 centimètres cubes de sang de chien défibriné, on ajoute 1 centimètre cube d’une solution SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 955 ———] —————————..—-———————————————————————————— "1 d’urée donnant 3 c. c. 7 à 15 degrés et à 765, on fait l'extraction alcoo- lique, on évapore dans le vide, on dose par l’hypobromite et l'on obtient 7 c. c. 7 d'azote à 15 degrés et à 765. À 95 centimètres cubes du même sang défibriné, on ajoute À centi- mètre cube de la même solution, on évapore au bain-marie et l’on obtient 6 c. c. 5; on retrouve 84 p. 100 ou une perte de 16 p. 100. Dans d’autres expériences, on arrive aux mêmes conclusions; ainsi, on épuise 20 c. c. de sang de chien non défibriné, on évapore le liquide alcoolique dans notre appareil à vide; on obtient dans une première analyse 4 c. c. 3 d’azote, dans une seconde 1 c. c. 4; moyenne 1 ec. c. 35. Parallèlement, on fait un extrait alcoolique de 20 c. c. du même sang de chien, on évapore au bain-marie à 100 degrés ; le premier échantillon donne 4 centimètre cube et le deuxième 1 e. c. 4, moyenne 1 c. c. 05; on retrouve 77 p. 100 ou une perte de 23 p. 100. Autres analyses : on prend 30 grammes de sang de cheval, que l’on épuise par l'alcool, on évapore au bain-marie, on obtient 0 c. e. 4 à 15 degrés et à 767. A 30 grammes du même sang, on ajoute 3 centimètres cubes d’une solution d’urée (1 centimètre cube donnant 4.4 à 13 degrés et à 763), on épuise par l'alcool, on évapore au bain-marie, on obtient 9 c. c. 4 à 14 degrés et à 765 ; les rapports sont donc 9 c. c. 4— 0 &. c. 4 —9 centi- mètres cubes et 13 e. c. 6—0 c. e. 4 = 13 c. ce. 2; on retrouve 68 p. 100 ou une perte de 32 p. 100. Ailleurs, on a pris 20 grammes de sang de cheval, on l’a broyé et traité par la méthode Seegez; le résidu de l’évaporation au bain-marie a été repris par 10 centimètres cubes d’eau distillée et soumis à l’action de l’hypobromite; ona 2 c.c. 2 à 12 degrés et à 764. D'autre part, à 20 cen- timètres cubes du même sang on ajoute 2 centimètres cubes d’une solution d'urée (1 centimètre cube donne 4 c. c. 3 à 12 degrés et à 764), on évapore au bain-marie, on obtient 9 ce.c. 1 ou 9,1—2,2—6,9, soit 6,9 : 8,6 —80 p. 100 ou une perte de 20 p. 100. Dans certaines expériences, on épuise par l'alcool 20 grammes de sang de chien non défibriné et l’on obtient, après évaporation au bain-marie, 2 c. c. 1; puis on met 2 c. c. d’une solution d’urée (1 centimètre cube donnait 4.1 à 23 degrés et à 756) dans 20 grammes de ce même sang, on épuise par l'alcool, on évapore au bain-marie, on retrouve 51 p. 100. On verse, dans 200 centimètres cubes d’alcool, 2 centimètres cubes d’une solution d'urée (2 centimètres cubes donnant 8 c. ce. 3 à 23 degrés et à 756),on épuise par l'alcool, on évapore au bain-marie et l’on obtient 6 c. c. 1 à 23 degrés; on retrouve 73 p. 100 ou une perte de 27 p. 100. On répète l'expérience en versant ® centimètres cubes de la même solu- tion d’urée dans 200 centimètres cubes d'alcool; on évapore au bain- marie, on obtient 5 c. c. 7 ou 68 p. 100 ou 32 p. 400 de perte. On opère ensuite avec des solutions aqueuses d’urée; ou verse 2 centi- 35. 956 - © SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE. nm = _ = = - - — = = — = mètres cubes d'une solution d’urée (donnant 8 c. c. 2 à 18 degrés el à 758) dans 250 centimètres cubes d’eau des on évapore au bain- marie: et l'on obtient 6 c. c. 7 à 18 degrés et à 758); on retrouve 82 P- 100 ou- une perte de 18 p. 400. - Dans une seconde expérience, on verse 2 centimètres cubes de la même: solution d’urée dans-250 centimètres cubes d'eau distillée, on évapore au bain-marie à 106 degrés; on retrouve 5 e. c.9 à 18 degrés et à 758 ou 72 p. 400; perte : 28 p. 100. On voit donc que la destruction de l’urée au bain-marie n'est pas régu- lière.: on a une perte, tantôt de 32, tantôt de 40 p. 100 ; il-serait impos- sible de faire ainsi des expériences comparatives. Il est facile de démontrer, en analysant les produits de la distillation dans le vide au bain-marie (91 à 95 degrés!, que l’uré: donne de l’'ammoniaque en se décomposant. Les dosages do eee dans le vide et au bain-marie faits d'après le procédé de Gréhant donnent des pertes analogues. Enfin, lorsque la quantité d'urée du sang est un peu plus élevée, il faut faire l'épuisement alcoolique avec le plus grand soin: il faut savoir que Pextraction n’est jamais complète, et que l’on trouve toujours une légère perte par rapport à l’urée introduite dans un poids connu de sang, même en évaporant dans le vide. Concluons que, dans le dosage de l’urée du sang par l'extrait alcoo- ique,.il est indispensable de distiller dans le vide à une basse tempéra-: ture, à 30 ou 35 degrés par exemple. On peut avec avantage: sé servir de notre appareil ou d'un dispositif analogue, puis doser par l'hypobromite suivant les règles que nous avons indiquées dans le Moniteur scientifique Quesneville, en 1880, et dans la Tribune médicale, en 1893. CHOLÉCYSTITE PURULENTE PROVOQUÉE PAR LE BACILLE D ÊBERTH, par MM. A. GILBERT el J. GIRODE. L'infection suppurative des voies biliaires constitue une des modalités principales de l’action de la fièvre typhoïde sur le foie. U'est un point que nous avons. établi (1), en rapportant à la Société le premier exemple de cholécystite purulente provoquée par le bacille d'Eberth. Ce fait correspondait à une infection biliaire réalisée pendant la période aiguë de Ia maladie typhique. Il a été confirmé par d’autres observateurs. C'est ainsi que M. E. Dupré a constaté la présence du même microbe dans la vésicule biliaire d’un sujet mort vers le 15° jour d’une dothiénen- iérie (2). Plus récemment Chiari (3), faisant l’autopsie d’un typhique mort à la période d’élat d’une dothiénentérie compliquée de pneumonie - (4) Soc. de Biol., 27 décembre 1890. (2) Thèse de Doct, Paris, 4891, Obs. VIT. - (3) Voy. Mercredi médical, 1893, n° 26, p. 309. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 957 LE droite, trouvait la vésiculé biliaire remplie de pus et présentant à sa sur- face interne plusieurs plaques de nécrose de 2 centimètres de large; il y avait aussi un peu de péricyslite fibrineuse; l'examen du pus montra que le bacille d'Eberth y existait en culture-pure; de plus, le même microbe était observé dans les parois de la vésicule. : C'est M. E. Dupré (1) qui a relaté le premier cas d'infection vésiculaire éberthienne ayant survécu à une fièvre typhoïde dès longtemps Lerminée, et paraissant développée à la faveur de la lithiase : l'examen a porté sur la bile recueillie au cours d’une cholécystentérostomie, et montré la présence du seul bacille typhique. Le bile dans ce cas élait vert foncé, et la paroi vésiculaire épaissie. Voici un nouveau fait qui est très comparable au précédent en ce qui concerne la chronologie des accidents ayant survécu à la fièvre typhoïde, et peut-être l'influence prédisposante de la lithiase biliaire. On y verra de plus qu’il s'agissait d'une cholécystite suppurative, et que l’inflam- mation chronique de la vésicule en avait profondément altéré la texture, sous l’action du bacille pathogène dont les amas infiltraient toute la paroi de l'organe. D À Il s'agit d'une malade de quarante-cinq ans, qui avait été atteinte d’une fièvre typhoïde moyennement sévère, au cours de laquelle des mani- festations importantes avaient attiré l'attention du côté de la vésicule biliaire, en particulier de vives douleurs, et le développement d’une tumé- faction qui par ses caractères imposait l’idée d’une affection de la vési- cule. Cette tuméfaction avait paru diminuer en même temps que s’amen- daient les symptômes typhiques. Mais, après une assez longue accalmie, les douleurs redevenaient très‘intenses, et cinq mois après la terminaison de la fièvre typhoïde, la malade était admise dans le service de M. Ter- rier, où l’on portait le diagnostic de cholécyslite caleuleuse. La cholé- eystectomie ayant été pratiquée par MM. Terrier et Hartmann, le con- tenu vésiculaire et la vésicule nous ont été confiés pour être soumis à l'examen. Le liquide prélevé au moment de l’ouverture de la vésicule est inodore et a l’aspect d'une bile purulente. Soumis à l'examen microsco- pique, il montre un grand nombre de leucocytes el d'hématies ; examiné immédiatement en goutte suspendue, ce pus montre des micro-organismes de forme bacillaire, présentant dans la culture de vingt-quatre heures une mobilité très nelte. La vésicule contient un calcul du volume d’une noisette; sa paroi est très épaisse et mesure en certains endroits un centimètre. La surface externe est masquée par de volumineux amas de graisse. La surface interne est rouge assez unie. Sur les sections, les couches internes sont rouges, un peu friables, rappelant l'aspect de bourgeons charnus ; les couches externes sont fermes et ont une apparence fibroïde. À l'examen (1) Loco cit., Obs. IX. 958 SOCIËTÉ DE BIOLOGIE microscopique, la muqueuse présente sur toute sa surface une nappe embryonnaire uniforme et très épaisse; des ilots et traînées de cellules lymphatiques infiltrent tout le reste de la muqueuse et même une partie de la musculeuse épaissie. L'examen bactériologique du contenu vésiculaire et du produit de raclage de la muqueuse a montré la présence du bacille typhique en culture pure : ce microbe a élé régulièrement spécifié par l’ensemble des réactions habituelles. Les coupes de la paroi vésiculaire, colorées au bleu alcalin, montrent des amas baciilaires caractéristiques occupant non seulement l'épaisseur de la nappe embryonnaire de la surface muqueuse, mais encore la pro- fondeur de cette couche; les groupes bacillaires profonds correspondent * souvent mais non toujours aux ilots et traîinées embryonnaires précités. Ainsi le fait précédent se présente avec toute la netteté désirable. Il met une fois de plus en évidence les relations qui existent entre la fièvre typhoïde et la pathologie de l'appareil biliaire. Les exemples de ce genre, surtout ceux qui ne vont pas jusqu'aux processus suppuratifs et qui d'autre part évoluent lentement, sont peut-être de nature à être utilisés plus tard pour interpréter la pathogénie de certaines altérations chroniques du foie. Notre nouvelle observation confirme d’autre part la longue persistance de lésions éberthiennes suppuratives, indépendantes des localisations typhiques normales, et restées en activité longtemps après la terminaison de la fièvre typhoïde, comme cela a été observé pour d’autres déterminations (Cornil, Chantemesse et Widai). F] n’est pas sans intérêt de faire remarquer encore que, parmi les faits précédents, ceux qui étaient observés indépendamment de la cholélithiase sont d’une interprétation facile, qu’on admette l'infection biliaire ascen- dante ou descendante ; mais il en est tout autrement des cas accompagnés de lithiase.On peut faire au sujet de ces derniers deux hypothèses. Ou bien la lithiase préexistait à la fièvre typhoïde et les bacilles d'Eberth parvenus dans la vésieule ont trouvé dans les calculs des auxiliaires capables non seulement d’y faciliter leur séjour, mais encore de les aider dans la réali- sation de la cholécystite. Ou bien l'invasion de la vésicule par le bacille d'Eberth a été le point de départ de l’altération de son contenant et de son contenu, et il y aurait aussi lieu d'admettre l'existence d'une cholé- cyslite typhique lithogène. Il est impossible de se prononcer dans un sens ou dans l’autre. Toute- fois, on ne peut s'empêcher de remarquer que le nombre des cas où une cholélithiase se révèle après la fièvre typhoïde est déjà notable. Tout récemment, M. Tuffier nous a communiqué un fait de fièvre typhoïde qui s'était accompagné de manifestations douloureuses du côté de la vésicule, Un mois plus tard, on était appelé à intervenir chirurgi- calement, et l’on trouvait un état subinflammatoire de la vésicule avec un petit calcul. SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 959 Jamais la malade n'avait présenté aucune manifestation du côté du foie, et il n’est pas impossible que le développement du calcul ait été FOISSeNE à l'infection éberthienne de la vésicule, comme on peut égale- ment le supposer dans les faits que nous avons rapportés. En résumé : 4° L’infection des voies biliaires et surtout de la vésicule peut se produire au cours de la fièvre typhoïde; 2° La complicatiou peut êlre favorisée par l’antécédence de la choléli- thiase, ce qui est une loi des infeclions biliaires proprement dites; mais elle peut comporter aussi l'effet inverse, l'infection favorisant le déve- loppement des calculs; 3° L’inflammation des voies biliaires peut revêlir le caractère suppuratif ou non suppuratif, mais elle lient communément à l’envahissement de ces organes par le bacille d'Eberth; 4° L'infection peut se produire et évoluer sous une forme aiguë; mais elle peut aussi survivre à l’évolution typhique et être retrouvée en pleine activité plusieurs mois après la terminaison de la dothiénentérie. Du TRAITEMENT DU SATURNISME PAR LE MONOSULFURE.DE SODIUM, par M. le D' J. PEyrou. Dans un mémoire que j'ai publié en 1891 (1), j'ai consigné les expé- riences que j'ai faites sur les animaux pour rechercher un contrepoison du plomb. J'ai montré par des faits nombreux que le sulfure de sodium donne d'excellents résultats dans les cas d'intoxication aiguë. Depuis cette publication, j'ai fait de nouvelles recherches pour les cas d’empoisonnements chroniques qui en somme sont ceux qu'on a, dans a pratique, le plus souvent à traiter. J'ai voulu voir si le traitement par le sulfure de sodium, que j'ai indiqué pour les cas aigus 5 DOI IL encore ici de bons effets. Les résultats que j ‘ai obtenus ont été des plus encourageants. Voici Les faits : Le 29 décembre 1891, j'ai pris deux chiens de même poids : chien À, 12 kil. 500 et chien B, 12 kil. 600, tous les deux bien porlants. J'ai admi- nistré à lous les deux et tous les jours jusqu’au 21 janvier suivant, 30 centigrammes de céruse mélangée aux aliments. Le chien B a paru d’abord souffrir beaucoup plus que À : l’amaigrissement a élé plus rapide. Du 21 janvier au 6 février, j'ai porté la dose de céruse à 1 gramme par jour. Le 6 février, le chien A DÈse 11 kil. 500, et B 11 kilogrammes seulement. SANTE J'arrête ce jour-là même l'administration du plomb et je prends à chacun des deux chiens, au moyen de la sonde, de 10 à 13 grammes (1) Thèse de la Faculté de médecine de Paris, novembre 1891. RES 960 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE | d'urine pour y rechercher le plomb. J'en ai trouvé des traces dans les deux échantillons, mais des lraces seulement ; ce qui montre que l’élimi: nation de ce métal par les voies urinaires est très faible. Le chien B paraît beaucoup plus malade que A ; il reste couché re là journée, ne se lève que quand on l’excite et encore, aussitôt qu’il est debout, il retombe ; en outre, les deux membres gauches sont animés de mouvements convulsifs qui se reproduisent à peu près loutes les dix s3- condes. L'animal paraît triste, menace de mordre qui l'approche, même la personne qui est chargée de sa nourriture quotidienne. Le chien A, quoique triste, se couche rarement pendant la journée, il a conservé l'appétit. Du 6 au 95 février, j'ai donné au chien B {le plus malade), À gramme de sulfure de sodium par jour, dans des boulettes de viande ; le chien A a élé abandonné à lui-même. Sous l'influence du trailement sulfuré, les troubles nerveux du chien B ont disparu au bout de huit jours, les autres symplômes morbides ont disparu aussi et il était revenu plus rapidement à l’état normal que A. Le 26 février, j'ai pris une seconde fois de l'urine aux deux animaux et j'y ai constaté des traces de plomb. Le lendemain j’ai sacrifié les deux chiens par la section du bulbe et j'ai pris à chacun 120 grammes de foie dans le lobe gauche ponr y rechercher le plomb. A cet effet, j'ai incinéré séparément les deux échantillons de ces deux viscères dans une grande capsule en platine, j'ai ensuite traité le résidu par de l’acide azotique, j'ai fait évaporer à petit feu et j'ai repris par 100 centimètres cubes d’eau distillée, dans laquelle après filtration j'ai fait passer un courant prolongé d' hydrogène sulfuré pour précipiter le plomb. J'ai trouvé, ainsi, que le foie du chien B qui avait été trailé par le sulfure de sodium ne renfermait que des traces de plomb, tandis que le foie du chien À en contenait relativement de grandes quantités. J'ai re- marqué en outre que le faible précipité qui s’était formé dans le liquide provenant du chien B traité par le sulfure alcalin, était à l'état très ténu sous forme de poudre très fine en suspension dans le liquide qui ne s’est déposé complètement au fond du vase qu'après trois jours de repos. IL présentait alors une couche fort mince, quelques fractions de millimètres; tandis que le précipité fourni par le foie du chien témoin élait représenté dans un vase identique par une couche de plus de 1 centimètre d'épais- seur. L’oxydation du premier précipité a été beaucoup plus rapide que l’autre, ce qui, à mon sens, représenterait un état particulier, favorable à l'élimination. D'après ces résultats, il me paraît naturel de conclure que le sulfure de sodium agit dans l’organisme comme agent éliminateur du plomb. . Une autre série de deux chiens traités d’une façon analogue du 17 mars. au 13 mai m'a ion des SésniTs tout à Et comparables aux précé- dents. SÉANCE -DU © DÉCEMBRE c961 Enfin une dernière série de ‘eux autres chiens mis- en expérience du 21% mai au 13 juin n’a fait que confirmer mes‘expériences antérieures. Dans ces deux dernières séries j'ai recherché aussi le plomb dans le .cerveau et.là encore, chez le chien soumis au sulfure de sodium, jet «trouvé beaucoup moins de plomb que chez le témoin. 3 .: J'ai constaté en outre à l’autopsie que toujours le foie de l'animal non traité était stéalosé, couleur feuille morte sur loute sa surface, tandis que -celui du chien ol javais administré le sulfure alcalin ne présentait .que quelques points “ stéatose, le reste de sa surface avait une couleur normale ; il semble qu'ici le processus morbide a été arrêté dans sa marche progressive par le traitement établi. En somme, ces expériences m'ont donné des preuves matérielles des bons résultats que j'avais obtenu dans mes recherches antérieures par l'administration du sulfure de sodium dans l’intoxication saturnine. : L'innocuité du traitement que je propose contre le salurnisme m'a été - démontré par un grand nombre de faits résultant de mes recherches, que je poursuis depuis plus de irois ans. Après des résultats aussi concluants, -je n’ai pas hésité à l'appliquer à l'homme et jen’ai eu qu'à me féliciter de - ma décision ainsi que je me propose de le démontrer dans une prochaine communication. … Ce travail a été faitau Muséum d'histoire naturelle dans le laboratoire . de physiologie générale dirigé par le professeur Rouget. . AVANTAGES THÉORIQUES ET PRATIQUES DE LA NOUVELLE MÉTHODE DE CULTURE DU CHAMPIGNON DE COUCHE, par MM. CostanTIN et MATRUCHOT. - Note présentée par M. Gasron BonNier. La nouvelle méthode de culture du Champignon de couche, publiée “par nous en juillet dernier (1), méthode dont le principe est de prendre -la spore comme point. de départ, nous fournit à l'heure actuelle divers -résultats théoriques et HDrebtues qui nous paraissenl intéressants. I. — Fixation de l’origine de quelques maladies du Champignon. 21 cette neo nous à permis — ce que nous n'avons pu faire jusqu’ ici -avec cerlilude — de déterminer quel rôle joue le fumier dans l extension _de certaines maladies du Champignon. Dans des meules où nous n° avions semé que du blanc pur, préparé comme il à été dit, nous avons vu (1) Comptes réndus de T'Acad. des Sciences, 5 juillet 1893. é -062 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ‘apparaître deux maladies bien connues, le vert-de-gris et le plâtre. C'est donc, — et là est le point important que nous voulons souligner, — c’est donc du fumier lui-même que ces deux affections tirent leur origine pre- mière. On comprend dèslors quel est le mécanisme de leur propagation : si, de la meule précédente, nous voulons extraire du blanc pour féconder des meules nouvelles, il y a toutes probabilités pour que nous introdui- sions, du même coup, les deux maladies qui viennent d’être mentionnées. Il faut donc renoncer à cette façon de faire, aujourd’hui universelle- ment suivie par les champignonnistes, et n'employer à chaque culture que du blanc neuf ou vierge. Lui seul, comme nous le verrons plus loin, est capable de lutter avec avantage contre les moisissures du fumier. Nous avons profité de l'occasion que nous fournissait la rencontre de ces deux maladies pour compléter les données publiées sur leur histoire, l'an dernier, par l'un d’entre nous (1). Vert-de-gris. — Le Myceliophthora lutea Cost. peut vivre en sapro- phyte : nous le cultivons en particulier sur de la pomme de terre stéri- lisée et sur du fumier préparé à la facon des champignonnistes. Lorsqu'on ensemence les spores sur une culture de blanc pur en milieu - stérile, le mycelium de la moisissure se développe plus rapidement que si celle-ci avait élé semée seule sur le substratum. Le Myceliophthora jeune est de couleur blanche, et, sous cet aspect, beaucoup de champignonnistes ne savent pas le reconnaître. Quelques- uns cependant ont distingué cette forme non colorée, et la regardent comine la cause d’une maladie qu’ils appellent la maladie du blanc et qui leur semble beaucoup plus à craindre que le vert-de-gris. Nous avons “pu acquérir la certitude qu'il s’agit d’une seule et même affection, mais on conçoit qu'elle soit beaucoup plus redoutable à cet état, et cela pour deux raisons : parce que le cryptogame est jeune, et parce qu'il est blanc. Jeune, il est dans sa période de végétation active, c’est-à-dire dans sa période de plus rapide extension. Blanc, il est par sa couleur diffici- lement visible au milieu du blanc lui-même. Quant aux modes de reproduction de la moisissure, en plus des spores en chapelets déjà décrites, la culture en milieu stérilisé nous a révélé l'existence de chlamydospores à paroi épaissie, cutinisée, d’un jaune sale. Ces organes de conservation, de forme arrondie, de 8 à 12ude diamètre, naissent, soit sur le mycélium, soit à l'extrémité de courts rameaux. Plätre. — Le plâtre était, dans ces derniers temps, une maladie assez rare. L'an dernier, aucun champignonniste n’a pu parvenir à en pro- curer à l’un de nous; seuls, des maraîchers, cultivateurs de blanc, avaient fourni une moisissure qu'ils désignaient sous ce nom. Il semble malheu- (1) Costantin, Les maladies du blanc de ‘Champignon. (C- R. de re des Sc., 4 avril 1892.) SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 963 reureusement que le plâtre soit sur le point de réapparaître cette année, par suite de la mauvaise qualité des fumiers, résultant de la disette des fourrages. Nous avons observé récemment cette maladie dans notre carrière : plusieurs champignonnistes expérimentés ont reconnu en elle ‘le plâtre authentique. Elle diffère d’ailleurs essentiellement de l'affection désignée sous ce nom par les maraïchers. Le plâtre vrai forme, à la surface de la terre des meules, une efflores- cence compacte, d’un blanc grisâtre, en plaques pouvant atteindre plu- sieurs centimètres de large; des croûtes analogues se retrouvent dans la meule autour des pailles, et peuvent acquérir la grosseur du doigt : leur couleur est alors plus blanche qu’à la surface de la couche. Ces croûtes sont irrégulières, chagrinées, bosselées, recouvrant une muititude de grains de sable et se modelant sur eux. Au microscope, cette moisissure se révèle comme un feutrage dense de -filaments dressés, plus ou moins ramifiés, à ramifications secondaires, -enchevêtrés les unes dans les autres; l’ensemble des arbuscules mesure de 40 à 70 x de haut, la largeur d’un filament étant de 4 à 5 w. Chaque rameau se termine par un chapelet de spores ovoïdes, acuminées aux deux extrémités, mesurant de 6 à 8 u de long sur 5 & de large. C’est une forme que nous proposons d'appeler Monilia fimicola. IT. — Choix des variétés. Dans notre Note aux Comptes rendus de l’Académie des Sciences, nous avions annoncé que notre méthode permettrait probablement le choix, parmi les nombreuses variétés de Champignon, des plus productives ou “des plus appréciées. Pour confirmer cette hypothèse, il nous fallait reconnaître, chez les races cultivées, une certaine stabilité dans les caractères extérieurs. L'expérience vérifie jusqu'ici nos prévisions. Les Champignons qui nous ont servi à faire nos premiers ensemencements “étaient à chapeau blond; à lroïis reprises différentes (les deux premières dans le jardin du laboratoire, la troisième dans une carrière), nous avons obtenu des Champignons blonds, etces chapeaux étaient à un tel point identiques aux premiers, que le champignonniste, ron prévenu, a reconnu dans les produits de notre récolte le Champignon initial qu’il nous avait fourni et qui avait servi aux semis. Nous avons, en ce moment même, en observation une deuxième race, “à chapeau blanc : nous saurons bientôt si elle se maintient avec une aussi grande constance de caractères. UT. — /mportance de la récolte. Nous avions lieu de penser que notre blanc, vigoureux el jeune, se développerait bien dans les meules. À ce point de vue, le résultat de la 064 ©: SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE première cullure faite par notre méthode dans les carrières, dépasse toutes nos espérances. Plusieurs champignonnistes, qui ont examiné notre expérience à ses débuts, ont été frappés de la régularité qu'offre le développement du mycélium. Autour de chaque mise de blanc se pro- ‘duisent des couronnes de fructifications, analogues aux onds-de-sorcières que présentent parfois les Champignons des bois. Il n’y a pas de places -infécondes, eomme on en observe trop souvent dans les meules ense- -mencées avec du blanc naturel. Les praticiens les plus expérimentés nous ont dit qu'ils observaient parfois des cultures s’annonçant aussi bien, mais jamais mieux. ; Ces résultats se vérifieront-ils dans les essais nouveaux et nombreux que nous allons entreprendre? Nous n'oserions l’affirmer. Nous avons cependant bon espoir, car la culture précédente, aujourd’hui si belle, s’est faile dans des conditions tout à fait ordinaires, plutôt même défec- tueuses, si l’on tient compte de la mauvaise qualité du fumier employé. Toutefois, nous devons dire que la cave avait été au préalable désin- fectée avec le plus grand soin au lysol à 2.5 p. 100: jusqu'ici nous n'avons pas vu un seul Champignon malade, pas une môle, pas un -moucheron (Sciara ingenua L. Dufour), pas une mite (acarien, A à fungorum Mégnin). De tout ce qui précède, il résulte qu'on peut se mettre presque com- plètement à l'abri des maladies venant de la carrière et du blanc. Il reste une dernière cause de contamination, le fumier, qui, comme nous l'avons vu, peut apporter âvéc lui plusieurs affections. Nous chercherons bientôt à porter nos efforts de ce côté. Avec un fumier de meilleure qualité, on se mettra cerlainement à l'abri du plâtre. Quant au vert-de-gris, nous avons fait une remarque qui pourra nous guider dans la lutte à entre- prendre contre lui. Jamais aucun mycologue n’a signalé la présence de -ce Champignon dans les fumiers venant directement des étables. I! paraît par conséquent vraisemblable que la maladie dont il est la cause se dé- veloppe surtout par contagion. Les champignonnistes préparent et ma- nipulént les fumiers toujours au même endroit : si le fumier destiné à une première culture est envahi par le vert-de-gris, il doit laisser, quand on l’enlève pour le descendre dans la carrière, des spores de Mycelio- phthora sur le sol, et ces spores contaminent tout naturellement le fumier suivant, entassé et travaillé à la même place. Il y a donc lieu de penser qu'en neltoyant et désinfectant l'endroit où l’on dépose le fumier, ainsi que les outils de travail, on arrivera à réduire, peut-être même à suppri- mer celte maladie du Champignon. (æ) SÉANCE DU 2? DÉCEMBRE 965 "MODIFICATIONS DANS LE NOMBRE DES LEUCOCYTES DÜ SANG APRÈS INJECTION DE DIVERSES SUBSTANCES, par MM. J. HéRricourT et CHARLES RICuErT. Les recherches de M. Werigo (1) ont montré ce fait remarquable que, ‘très rapidement, après injection de subslances pulvérulentes inertes ou de microbes, les leucocytes disparaissaient du sang. Nous avons pensé — c'élait une hypothèse « priori — que peut-être l'injection de substances chimiques solubles quiet le même effet, ëb l'expérience a confirmé nos prévisions. Au lieu de faire le dénombrement des globules rouges et (‘es globules blancs, nous avons préféré nous contenter de déterminer le rapport des uns aux autres. Car, par ce procédé beaucoup plus expéditif, on peut faire de bien plus nombreuses numérations; et, dans l’espèce, la répéti- tion des mesures est plus importante que.la fixation d’un chiffre absolu, si tant est qu'on puisse en donner un. On peut-admeltre que, dans le cours d’une expérience, où il n’y a ni hémorragie, ni injection intra- veineuse d'une grande quantité de liquide, le nombre des globules rouges ne Varie que modérément. Au demeurant, nos chiffres ne portent que sur la relation entre les hématies et les rc ytes. Nous avons procédé de la marière suivante. À un chien attaché, on fait une section de l'oreille. Une petite quantité du sang qui s'écoule est mélangée à du sérum artificiel (chlorure de sodium, 5 gr.; sulfate de so- dium, 25 grammes par litre). On compte au micromètre le nombre des globules rouges ; et, après trois ou quatre numérations, on a un chiffre assez exact, Alors nous faisons cinquante examens des diverses parties de la préparation ; et nous comptons Îles globules blancs que nous avons rencontrés dans ces cinquante examens. Soit, pour fixer les idées, le nombre des globules rouges égal dans 4 numérations à 62 — 64 — 68 — 65 : cela nous donne une moyenne de 65 par carré du micromètre. Dans cinquante carrés du micromètre pris au hasard dans la préparation, nous aurons, supposons-nous, 8 glo- bules blancs. Cela fait 8 leucocyles pour 3,250 globules rouges, soit une proportion de 1/406; ou en chiffres ronds 1/400. Sur divers chiens, nous avons trouvé les chiffres suivants, indiquant les proportions des leucocytes avec hématies : 1/200, 1/380, 1/470, 1/360, 1/300, 1/380, 1/450, 1/220, 1/270, 1/280 1/300, 1/370, 1/470, 1/250, 1/440, 1/500, 1/230, 1/275, 1/1750, 1/540 (1) Annales de l'instilut Pasteur, 1892. 966 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ce qui nous donne une moyenne de 1/310 (1). Or, par l'injection de certaines substances dans le sang, on fait pour ainsi dire disparaître complètement les leucocytes. Nous avons employé l'essence de térébenthine en solution alcoolique (20 grammes pour 100). On va voir quels sont les résultats de l'injection intraveineuse de cette substance. A. — Chien (de 9 kilogr.) ayant une légère suppuration due à une opération antérieure : ADI TE LG Pr M MN OC NA 1/180 1 45 Injection de 2 c. c. 5 de la solution. 0 de de te 1/680 DR Ne den ME SEMI 1/450 DD NAME et 1/190 B. — Même chien. 2h32 Injection de 5 c. c. de la solution. 2'BBnodesl's tonne dslron lise 1/550 Se M ee UC /2000 te RU Ste ee 1/340 OO ee NU EE 1/310 C. — Chien de 5 kilogrammes. BIENS RENTAL PR TRI RORS QE SANS ARNO ST) 5 28 Injection de 3 c. c. 5 de la solution. Bout À otenue eine et ah 1/330 Bnkarrr a ifirten Dust dette 1/950 B2insibeesb ruroidos tel 1/480 Hans Rat ele ose 1/70 Le lendemain ee 1/230 D. — Chien de 7 kil. 500. f De M 1/380 1/350 JADE" Re Re ROME 0 M 7/E20 $ 30H60 26h DAME NO PASEO 3 30 Injection de 2 c. c. de la solution. 3832 Aoupaer 400 #4 RAR 1/1000 Bb 2e eo Mo AGE 1/1750 Babe ME eu 13000 BED parade Ci 012150 DO en na RS AR 1/1500 D AO PUR ee he du EE TUE Ne 4 4250 BAD et Ne An AN TU A Due Fo NA RATS PAR PERS 1 /290 70 PAU AE SE ES . 1/440 (1) Nos chiens élaient en digestion, de sorte que la proportion de globules blancs est peut-être un peu forte. D’après M. Haäyem (Le sang, 2° édit., 1889, SÉANCE DU 2 DÉCEMBRE 967 E. — Chien de 5 kilogrammes (le même que C). HROORUTHENIASEIONINE, NE ERP" 14)230 4 30 Injection de 2 c. c. de la solution. HS RU den de « 1 /500 FN ETES D RE ARE 1/1100 A ne nm. 41000 ADoute en btimanau sas sl 1/600 SR NU nee à . 1/500 CR el et paca calit = à 2 1072 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Foie infectieux. — Nodules dans la fièvre Re et la tuberculose intestinale, par M. Hanot. Foie. — Lésions d'origine infectieuse, par M. ne Formes hémorragiques de l'infection expérimentale; formes diffuses; formes localisées. — Reproduction des types cliniques, par M.Charrin. Folie communiquée de l’homme aux animaux, par M. Féré. . . . . n à Fonction glycémique. — Le pancréas et les centres nerveux régula- teurs de la fonction glycémique, par MM. Chauveau et Kaufmann. . Fonction thyroïdienne, par M. Moussu . . . . . . . . . 5) SOON Fonctions otocystiques, par M. Pierre Bonnier. Fonctions otolithiques, par M. Bonnier. SIN S RIRE Formule urinaire de l’hystérie (Note sur la soi- disant), par M. Royer. Fossette occipitale. — Remarques critiques, par M. Lombroso . Fossette vermienne de l’occipital, par M. Debierre. Fossette occipitale chez les prostituées, par M. Lombroso. Fragmentation parthénogenésique des ovules des vertébrés don l’atrésie des follicules de Graaf, par M. Henneguy . Frisson. — Phénomènes chimiques, par M. Ch. Richet . G Gaïacol. — Action. antipyrétique de ses badigeonnages sur la peau, par M. Robil lard. FLE e Gaïacol synthétique, par MM. be ci Mana Galvanocaustie interstitielle, par M. Gilles. : Gale du lapin par le Sarcoples scabiei, but au à cobaye et au AS DEP IREM TEL a toto ol ui o bol on o46n 0 o Ganglions sympathiques. — Action de l'excitation décteiete sur 158 cellules des ganglions sympathiques, par M. Lambert. : Ganglions du plexus nerveux de l'intestin, par M. Ramon y Cajal . Gastéropodes. — Structure du système nerveux, par M. De Nabias. Gastrite sous-muqueuse expérimentale, par M. Pilliet. Gaz du sang efférent des capsules 7 par MM. Ge cl nel So sole to lola oo Glande et Élendales thyroïdes-du chien, par M Co Glandules thyroïdiennes du chien, par MM. Gley et Phisalix . Glande thyroïde. — Sa fonction, par M. Moussu. Glande thyroïde. — Remarques, par M. Gley . LH LES EEE Glandules thyroïdiennes. — Nouvelle preuve de ue M fonctionnelle SpareMAGIE PMR SE ER 6. 0 Graisse dans le tissu cellulaire sous-cutané, aceumulée par nee de la compression temporaire, par M. pere. DO Ce D ; Graisses. — Leur passage dans Les urines, par M. Chabrié . : Grisoumètre. — Son emploi dans le dosage de mélanges incl. un centième de gaz combustible, par M. Gréhant . Ro Grossissements considérables obtenus par combinaison oplique, par M. Gavino . H Hématopoiïèse.. — Influence de la stase sanguine, par M. Grigorescu. Hématozoaire du paludisme, par M, Laveran. 219 283 989 197 312 TABLE DES MATIÈRES l Hépatite expérimentale, par M Charrin "1 0 EN ONE Hernie expérimentale de l'intestin dans l'estomac, par M. Contejean . Hydrogène et protoxyde d'azote introduits par les poumons. — Leur absorption par le sang. — Élimination de ces gaz, par M. Gréhant . Hypoglycémie pyocyanique, par MM. Charrin et Kaufmann . . . . . Hypoglycémie pyocyanique. — Son origine toxique, par MM. Kauf- mann et Charrin. . . . . . . Oo ANS DE HO A ANUS Ar DAS SAV . Hystérie. — Abaissement de la pression artérielle dans Te lee MYSTÈRE, Der MEME MONT ONE SM AMEN EN RE Re Hystérie. — Nutrition dans l’hystérie, par MM. Gilles Fe la Tourette CAC MENINE QUANTUM ARS RE AT Ent NT nee Es Hystérie. — Prétendue formule urinaire de l'hystérie, par M. Féré. Hystérie traumatique compliquée d'astasie et d’abasie, par M. Pio- CROSS RM SAM RS ME 8 BRENT SRE TD ed EE 20 Ictère grave. — Contribution à son étude bactériologique, par M. Vin- CONTRE NANEE SAT GUESS EE ER seu AN RE EE NT Ictère grave. — Microbe nouveau, par MM. Ranglaret et Mae Ictère grave. — Microbiologie, par M. Ranglaret et Maheu. . . œib Ilots de Langerhans. — Leur formation dans le pancréas, par M. La- BCÉÉO 5010 00 AIDER ÉRANENTE APR SET SAN E ASE 0 AE SR PARLE EG Incubation de l'œuf de poule. — Influence de l'exposition préalable de lent aux véneuts d'en neeIUNtERS Ts SE PES Incubation de l'œuf de poule. — Influence des injections de liquides dans l'aloutien, ae MOMÉRÉNM SENS EM SENS DS SE ee Bons Incubation de l'œuf de poule. — Action de la lumière, par M. Féré. Infection expérimentale. — Humeurs et sécrétions, par M. Charrin . Infection chez les poissons) par M. Charrin. 00e NN UN Influences héréditaires expérimentales, par MM. Gley et Charrin. Inhibition due à l'excitation électrique simultanée d’un nerf en deux pointsidesaloncneur, par MACharpentien See Er Enr Inhibition chez les Den baies. — Constriction D aldtique des chro- INelOpITones, par M PNISa CE EEE EN RS PU Sn ne Injection de liquides (de l'organisme sain) donioant ja réaction fébrile chez des sujets tuberculeux, par M. Daremberg. . . . . Injections intra-pulmonaires, par M. De La Jarrige. . . . . . . © Injections hypodermiques. — Antisepsie, par MM. Duflocq 2 Bodo Innervation cardiaque. — Variations périodiques des rythmes du cœur au cours de l’asphyxie chez le chien, par M. Laulanié. . . . . . . . Inulose et fermentation alcoolique indirecte de l'inuline, par M. Bour- QUElO A CCR AR nn ee re ae te elles eue : Iris des Oiseaux. — Danse des muscles de l'iris, par M. Durand . Iris. — Développement des muscles de l'iris chez lan yon du poulet, par M. Durand. OH EE are dOD PI OT UD OO TE Pi lo PE ON ETATS . K Kyste dermoïde du raphé périnéal et du scrotum. — Structure et patho- séme pareMMSReclusetiRetterenne em CR Ne ter 1073 C. R. M 1016 » 1061 » 616 » 684 » ACTE 102 » 127 » 151 » 420 » 62 » rex » » 9207 819 » 173 » 187 » 94% » ANS » 391 » 883 » 551 » 881 » 1048 » 491 » 92 » 722 » 481 » 137 » 242 » 151 » 1074 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE L Lælaps stabularis sur une femme.— Pseudo-parasitisme, par M. Neu- LA) RE SE MR EE DE A St ee ee a D Langue noire, par M. Morelli. . . . . DR ARENA LA me GENE : Lèpre et injections de liquide orchitique. — Heureux résultats, par EM POUDINELHES AN RER DENIS SR ER RP REA Lésions de la moelle épinière guéries ou améliorées par les injections de liquide testiculaire. — Etude expérimentale, par M. Brown-Sé- Qquar dé Rte a Rte er A le ee DC CRE o Liquide testiculaire. — Règles relatives à son empioi, par MM. rome Sédquard' ét dArSOoNval PERS PE RE ES RTE Liquide testiculaire stérilisé. — Son innocuité, par M. d’Ar Sel Liquide testiculaire, par M. Laveran . . . . . . . . Liquide testiculaire, par M. Dumontpallier . . Liquide testiculaire. — Innocuité, par M. Brown- re APN AE c Liquide testiculaire. — Influence dynamogénique chez deux singes para- 1ysés; par Me NItZON nel EEE D NEO M RER o Liquide orchitique. — Action spéciale des injections sous-cutanées, par Mi Héricour Ce nn AD RER CURE EN OST PER Liquide testiculaire. — Action favorable sur un chien paraplégique et atteint de fibro-sarcome généralisé, par M. Mégnin. . . . . . . . . Liquides organiques non limpides. — Dangers de leur injection sous- cutanée PALM GUINATAE PEN SEP RP NRENENERENES OCRRrR : Leucocytes et hématies dans le sang du chien. — Leur Oro relative à la suite de quelques expériences, par MM. Héricourt et Richet ee ANTENNES eee ae PS EN Leucocytes du sang diminués de nombre après dede 4e diverses substances par MMAHÉLICOURHEMRICRE AMENER SRE NEC Lumière électrique continue (action de la) sur les cultures, par M. Bon- MOT ue do rer en arte D Ne LU PR e ES SE LR CAN PR RE Lumières blanche et colorée. — Influence sur l’incubation des œufs de poule par MP MÉTÉO EAP EEE RER SEE Lumière. — Son action sur les œufs de poule en incubation, par M. Blanc Luminosité du pholobacterium sarcophilum éteinte par la lumière, par M. Dubois Maladie de Parkinson. — Troubles de l'appareil de la vision, par Maladies infectieuses microbienres traitées au moyen de Menaonts figurés, par MM. de Backer et Bruhat Malformations dentaires chez le singe, par M. Regnault. . . . . . . Mer vermeille du golfe de Californie, par MM. Pouchet et Diguel . . Méthode de Brown-Séquard. Remarques, par M. Féré Microbiologie. — Action des substances microbiennes sur les appareils nerveux vaso-dilatateurs, chez les animaux vaccinés, par MM. Charrin CORGIE VS RE EMEA 161 23 144 160 562 241 931 562 518 924 L'A ae-d TABLE DES MATIÈRES 1075 CRETE Microbe du Béribéri, par MM. Musso et Morelli. . . . . . . . . . . . 18 » Microbes étrangers dans le sang et les tissus des malades du Béribéri, per Me Mori one es te RS EN RPe o een eo 2 » Microbes. — Variétés microbiennes, par M. Charrin. . . . . . . . . . 319 » Microbes pathogènes. — Leur action sur la cellule végétale, par MM. d'Ar- sonval et Chaine tés RER AR EN io Dore PE NO anEe 31 » Microbes. — Poison cardiaque d'origine microbienne, par M. Roger. . 103 » Microbes. — Passage des microbes de la mère au fœtus. (Recherches expérimentales), par MM. Sabrazès et Chambrelent. . . . . . . . . 388 » Microorganismes dans la trachéo-bronchite simple, par M. Queyrat. 211 » Microorganismes de la rate et du cerveau chez les malades morts du typhus exanthématique, par MM. Curtis et Combemale. . . . . . . . 441 » Microcoque anaérobie trouvé dans des suppurations fétides, par M. V@ill@no. 01 010-010 0100 00 SES LS PO Bt a to CU Me 807 » Moelle épinière dans deux cas de compression des racines postérieures, DA RMES OLIS RE Re CS CP CNP CRT CL 246 » Moelle épinière, remarques, par M. Déjerine. à . : + + . .. . . . 248 » Mollusques. — Pièces de soutien de la Radula chez les Céphalopodes et le tissu cartilagineux des Mollusques, par M. Loisel . . . . . . . 244 » Morphine chez les Bovins. — Son action physiologique, par M. Guinard. 304 » Morphologie comparée de l’os carré, par M. Remy Saint-Loup. . . . 301 » Morphologie comparée de l'os carré, par M. Remy Saint-Loup . . . CET » Morve chronique. — Histogenèse du tubercule dans la morve chronique, pariMMPMeclaincene etiMOontAanÉMerENME RE EC Cr ECC RCA 117 » Morve pulmonaire chez le cheval. — Lésions particulières, par MM. Le- dlainene ét Mon ER NEEAONRSCRS US SEE EURE Ô 146 » Morve chronique. — Altérations vasculaires et bronchiques, par MM. La dlañinche et Nomiané LP a too ol Es SE eo oo 232 » Mouvement singulier de rotation de la tête chez une larve de Culicide, par ML Journee 249 » Mouvements os — Mesure de leur vitesse, par MM. Binet et CoOuIEPS +01 2010 RAS TRE Tete ere ee de Menteneu elle de de ee 219 » Mouvements de la bte he Ge d après anesthésie, par M.H.Martin. 854 » Mouvements de la queue du lézard anesthésié, par M. Raphaël Dubois. 915 » Mucus humain, et en particulier mucus nasal. — Leur pouvoir bacté- ricide, par MM. Wurtz et Lermoyez . . . . . . . RTE 68: : 100 » Myélite aiguë expérimentale produite par l'Erysipélocoque, par MÉMPOURES ESRI NE er CT M ete cc Ce 18% » N Nerîfs et microbes, par MM. Charrin et Devic . . . . . . . . . . . . 320 » Névrite interstitielle, hypertrophique et progressive de l'enfance, par MU Dacrine 66 SOUS lo) ob 8 te lo 010 67 dolo toto bodob D olono 65 » Névrose de la langue, par M: Piotrowski. + . à . . « & . . : . : . 340 » Nicotine. — Son action sur quelques fermentations indirectes, par MePMorat mnt Do 5 0 GAinMb ON PE SA PT Dh SOI O1 0 D 01e HAE 116 » Nutrition et cicatrisation après la section du nerfsciatique très haut, Ë et amputation de la cuisse, par M. Brown-Séquard . . . . . . . . . 688 » Nutrition. — Régime alimentaire chez le chien dansles expériences surslatnutrition epariMMSéÉeleL Camus Pete RER EN EEE 1007 » 1076 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE O Odeur dans la série grasse, par M. Passy . . . . . . . . . . . . à . Œil. — Photographie instantanée du fond de l'œil RE , par M. Guilloz. Ophtalmologie. — Emploi de mélanges de plusieurs PROMIS pharma- ceutiques en ophtalmologie, par M. Berger. . . . . . . BEM 6 Ophtalmotonomètre nouveau, par M. Nicati . . . . . . . . . ei Optomètre portatif. — Ses avantages pratiques, par M. Mergier . . . Orchinocoque de l’orchite blennorrhagique et diplocoque de l’orchite ourlienne, par MM. Eraud et Hugouneng. . . . . . . . . . 06e 0 Oreillons. — Diplocoque trouvé chez des malades, par M. Laveran . . Oreillons. — Recherches bactériologiques, por MM. Laveran et Catrin. Oxyde de carbone. — Recherche médico-légale au moyen du grisou- Met. Den le Catane alor 6 da sodo: 6001010 0 0 9 oo 0 010 Oxyde de carbone. — Temps pendant lequel il peut être retrouvé dans le sang après empoisonnement, par M. Piotrowski . . . . . . . . . Oxyde de carbone dans les appareils de chauffage. — Méthode de Gréhant par MESA O MIA RE NE NC PRE CE o © Oxyhémoglobine (cristaux d'). — Procédé pour les obtenir, par MMA ENUSRE AUDE TERRE EE dé à Oxygène du sang artériel dans les variations de capacité respiratoire, DATEMMAMEVE LE DABIA EN CSA REC RE CECI Gao 0. 0 6 Pancréas. — Histogénie. — Cellule centro-acineuse, par M. Laguesse . Pancréas. — Ses ferments. — Leur indépendance physiologique, par MU DEEE oo 010: 0110 0 DUT En ro M EL b VaLmouo toi diolnia co e ü 0 Pancréas. — Activité digestive chez les animaux à jeun normaux et dératés, par MM. Carvallo et Pachon. . . . . . . dd10:0 6 0 9 a 0 Pancréas. — Cellule pancréatique, histogénie, par M. Laguesse RUE Parachloralose. — Action physiologique, par MM. Hanriot et Richet. Paradoxe de Weber. — Remarques, par M. de Varigny. . . . . . . Paradoxe de Weber et tétanos d'ouverture, par M. Rouxeau . . . . . Paralysie faciale des hémiplégiques. Motilité de l'orbiculaire des lèvres, Dr ML IBÉME Lo 6 00 0 9 06 0 0 0 6 0 DO co 9 NO LOU 0 aimer te Paralysie générale. — Anatomie pathologique, par M. Dagonet . . . . Paralysies systématiques, par M. Féré. . . . . . . . MORT cn 0 0 Paraplégie syphilitique. — Lésions médullaires, par M. Sottas . . . . Paraplégie syphilitique. — Lésions de la moelle épinière, par M. Deje- TE ARNO eo MN ER net AE Oo ee HART Co c Parasites endoglobulaires du sang de l'alouette, par M. Labbé. . . . . Pêche au câble creux, par M. Regnard . . . . . . . . . DR Cite 0 © Peptonurie dans la scarlatine, par M. Arslan Ervant . . . . . . . . . Périostite albumineuse. — Composition chimique du liquide, par MÉRHUS OUEN ee SES CN ARE TE SoMoo Goo 0 Péritonite à le sans pneumonie. — Substitution du bacte- rium coli au pneumocoque au moment de la mort, par MM. Charrin. ÉbNelllOn. ss An MD APN Ne SANTE te. d'OS 00 © 6 00 0 Peste des écrevisses. Recherches de pathologie comparée, par M. Dubois. 487 1057 158 TABLE DES MATIÈRES Peste des eaux douces, par M. Bataillon. . . . . . . . . . . . . . . . Peste des eaux douces. — Remarques par M. Dubois. . . . . . Peste des eaux douces. — Réponse à M. Dubois, par M. B sta HE Phlébite traumatique de la jambe droite. — OEdème réflexe de la jambe cauche, par ML VAGUES SOS NEUVE NOM Pholade smetien — Anatomie et physiologie scans par | M Raphël Bros. 5,86 EE MR en PE Placenta.-- Respiration placentaire à l’état normal et à la suite d'une hémorragierde lamère, par M Butte "run ne Placenta abortif. — Evolution histologique, par M. Pilliet. Placenta des carnassiers, par M. Mathias Duval . . . . . Pneumocoque. — Infection lente, par MM. Lesage et Pine : Pneumobacilline comme réactif révélateur de la morve, par M. Ar- Don or RE AE SR ee ane Sfr Pneumobacilline. Remarques, par M. Charrin nee Poisons produits par le bacille intestinal d'Escherich, par M. Gilbert. Poissons. — Résistance à l'asphyxie dans l'air, par M. Noé Poly pnée des chiens thyroïdectomisés, par M. Gley. . . . . . . . . . Pompe «le roulis utilisable pour l'analyse des gaz de l’eau à bord des navires, nor NL IRCSmEmIO ENS ON Dto Sea EME PE To hote Pompe à mercure. — Perfectionnements, par MM. Gréhant et d'Henry. Pou!s lent permanent, considérations physiologiques et cliniques, par MMA a Que ze BUREAU ER ee EC NC RC IP AE Pression et microbes, par MM. d’Arsonval et Charrin. . . . . . . : Produits de la combustion du coke dans le brasero, par M. Gréhant. . Pseudo-tuberculose microbienne chez le mouton, par MM. Guinuard ET MORE lo 0 No 5 ee DÉC ÉME A o R A E P ETUnt or ar E de Psorergates simplex, par M. Neumann. . . Bsychenoine par NME GIE EEE EL PU NET EE CN NO Rate. — Dtratement et croissance, par M. Dastre . . . . . . . . Rate et pancréas, par M. ave a 0 0, D 6 np o 0 0 0 Récurrence nerveuse. — Démonstration anatomique, par M. K none Régime alimentaire des Abyssins. — Etude quantitative, par M. La- Dieter Tree AN Sn oo a 01000 no lo: h08 6 bio la loi min Rein dans le choléra asiatique, lésions anatomo-pathologiques, par Van Gler Éttients os Do ds ac 0e BU ie SO D Le PAS AR OUI Al AO AE OS Vo Rein. — Suc rénal injecté dans le cas d'urémie expérimentale. — Succès des injections démontré par les tracés de la respiration, par MÉMMEVERPN ONE Bee ed OA tE RO nl a leettatues Rein unique et ulérus unique chez une Le par MM. Retterer et ROSSP So 2° Boo d oupio lan otalorotolols "on à 10 oo 1e HA Rein. — Influence des excitations thermiques de la peau sur la circula- tion du rein, par M. Wertheimer. . . . . . . . . Respiration des Cétacés, par M. Jolyet. . . . . . . . . . . . . . . . Rumination chez l'homme atteint de mérycisme, par MM. Lemoine et Pinossier-t nn eue SU Monte pen Eee eee Ne Un HMS 1078 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ruthénium ammoniacal. — (Propriétés colorantes de l'oxychlorure de) par MM:Nicolle*et:Cantacuzène PRE NE EE Rythme vaginal des mammifères, par M. Lataste eee. 10.70 0er elle lettie S Sabellides. — Type nouveau et aberrant de cette famille, par M. Giard. Salol dansie choléra; pan MAGirode "ne CRE Sang. — Incoagulabilité du sang et réapparition de la fibrine chez l'animal qui a subi la défibrination totale, par M. Dastre . . . . . . Sang. — Influence des congestions diverses sur la richesse du sang en globules rouges ; fonctions hématopoïétiques de la rate, par M. Ma- assez Es BONE RCE NES EE CS RRR PATATE PER Sang et venin de crapaud commun. — Leur toxicité comparée con- sidérée au point de vue de la sécrétion interne des glandes cutanées decet\anmal, par MM--Phisalixiet#Bentrand EME RER Sang arlériel injecté dans les veines. — [Influence sur la température, Or MNNOUR. 0018: 6 00 ab loool oto era longe 0.0 0 10 Sang. — Sa toxicité à l’état normal et à l’état pathologique, par M. pe claincheset/RémondEESS TN SENS URSS ER Sarcopte des Muridés, par MM. Railliet et Lucet. . . . . . . . . . Se Sarcoptides pilicoles parM:IroUuessSan tee EN NON EE Sarcoptides. — Reproduction, par M. Mégnin . . . . . . . . . . . . Sarcoptides. — Reproduction, par M. Trouessart. .-. . . . . . . . - Sarcoptides. — Sur la reproduction ‘des sarcoptides, par M: Troues- CAPE LE NOM Velo or onlo ral ho to toaos 9-0 Orbodo 9 a Saturnisme traité par le monosulfure de sodium, par M. Peyron . Scarlatine. — Sa pathogénie, par M. Bergé. ... . . A AU die Scarlatine pathogénie, par M. Ricochon . . . . . : . - - . Scarlatine. — Remarques, par M. Chouppe. ... . : . : : . . : - - | Scorpion. — Sa résistance aux mauvaises conditions d'existence, par JA TE PRINT A AU A ego © © oo € Sécrétion pylorique du chien, par M. Contejean. . . . . . . . . . . . Sécrétion sudorale. — Action de la tuberculine et de la malléine, par MMECadiote ROSE MER MEN NRA EE PME LÉRRT IR CAPI ERUEES Sensibilité colorée, par M. Le Dantec.‘. ... . 1. en 0 Septicémie streptococcique. — lraitement par le sérum du sang des animaux IMMUNISÉS, parM-MiITONOHEM EM NNREN ENE NEC Seringue stérilisable de M. Debove. "00005... 07 Seringue à injections hypodermiques, par M. Duflocd A DU Sphex splendidulus, par M. Nicolas... ... ... . di di DE DAT ES Lo Spirule.— Animal de la spirule, par M. Giard. . . - . . . . . . . . Station verticale. — Rôle des muscles triceps fémoraux et fessiers, par MÉTODO Di ONU Ci Gi oceo le D or o Streptocoque à courtes chaînettes, trouvé dans un abcès pelvien, par MMADOlÉRSRELIBOUrL ES ERREUR ECS RER : Structure des fibrilles des muscles jaunes du one et de Mode phile à l’état de repos, par M. Tourneux,. . . . . . . . : . . + - Substances thermogènes extraites des tissus animaux, par M. Rouquès. Substance strychnisante dans les muscles des animaux tétaniques, par MM’ Courmont et DOYOnN- Me D A IE ve Re 199 TABLE DES MATIÈRES 1079 C. R. M. Sucs digestifs. — Leur action microbicide sur le bacille de Koch. — Transmission de la tuberculose par les matières oi, par MM. Ca- ÉRS Et HouPnEnT L' 6 0,6 dlo oo la otorotalor oo : duo 0 0 EN »” Syphilis médullaire. — Pluralité des lésions, par MM. Gilbert et Lion. 430 » Système dentaire des Carnivores. — Lois que fait ressortir l'étude mor- phologique, par M. Beauregard. . . . . . . . . . . , . . ee TS » Système nerveux. — Micro-photographie, par M. Marinesco. . . . . . 151 » T Tabac. — Fumée de tabac et vapeurs de nicotine. — Leur influence sur l’incubation de l'œuf de poule, par M. Féré . . . . . « « + + « + + 948 » Taches blanches du foie infectieux, par M. Hanot . . . . . . TE GO « Tachycardie | dans le cours de la bemnléees RG M. Bezancon. . . . . DO or SO OC Eu DE DE LAELe b Du 2:01 D Teinture de cantharides. — Son action sur les reins, par M. He. 603 » Térébenthine. — Influence de ses vapeurs sur l'incubation des œufs deRpoule DAMERÉRÉR RS CC Ro CCE AO OO AT D bo do VE » Tétanos (Accidents tétaniques) d'origine infectieuse chez la salle, pareMMPe Gleyiet Lapicque CN RSS RS - 89 » Tétancs résultant de l’action de la substance toxique d'un Fc soluble fabriqué par le bacille de Nicolaïer, par MM. Courmont et DOMONER D Late te Se Le D GENS RCE RS ee cn OO LN TES Tétanos de la grenouille et conditions de ie Sable néces- saires à son apparition, par MM. Courmont et Doyon . . . . . . . 608 » Tétanos expérimental chez la poule. — Immunité expérimentale, par MNACourmontiet DOYON EMMA 0 8701 0-0 0 co tro ti OM » Tétanos chez l’homme par inoculation accidentelle des produits INDIE du bacille de Nicolaïer, par M. Nicolas. . . . . . . . . . eee 824 » Thermogenèse. — Physiologie comparée, par M. Dubois (Raphaël) . . 182 » Thyroïde. — Recherches sur les organes thyroïdiens des rongeurs, par MENELIS LAN TENUE EE 0010 0N0 D 10 eo olnelte Dolhtelieioliellte ee A » Thyroïdectomie chez le lapin. — Nouvelle note, par M: Gley . . . . 691 » Tissu musculaire. — Altérations dues à la présence de Myxosporidies et de microbes chez le Barbeau, par M. Thélohan. . , . . . . . . 2 ON » Toxicité et propriétés physiques des corps, par M. Richet . . . . . . 715 » Toxicité du sang de la vipère, par MM. Phisalix et Bertrand. . . . . . 997 » Toxicité des urines. — Technique expérimentale (relative à la détermi- + nation tdurdesre de) pareM- Guinarde Mn EN EN 489 » Toxicité des urines normales de l'homme et des mammifères domes- RUES MPaARMENGUINArTEME ES NN NE Bio ta bib an a ro age ITR » Toxicité des urines des épileptiques, par M. Féré. . . . . . . . . .., 143 » Toxines microbiennes. — Action sur le cœur, par M. Roger . . . . . . 475 » Toxines et lésions cellulaires, par M. Charrin. . . . .. . . . . . .. no 2/ » Transfusion du sang immédiate du chien à l'homme, er M. de Domi- NCIS Med TAN RE ete GOUT ASS O ENS iles PEN CEE G 0.00 ob a 843 » ‘Tremblement Parkinsonien symptomatique d'une tumeur du pédoncule cérébral, par MM. Blocq et Marinesco . . . . . . . 0 6) 04 0 pb . » 105 Trépanation, éleetion du siège opératoire dans les cas où les symptômes ne sont pas superposables à la contusion du crâne, par M. Cassaet. 1009 » Trichinose expérimentale chez le furet, par M. Railliet. . . . . . . . 1043 » BIOLOGIE. — TABLES. Al 1080 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Trijumeau et Facial. — Traumatisme avec troubles trophiques, par MM: MarinescotethSénieux IE NC CU CET CICR PTE CT Truite et œufs de truite. — Maladie, par MM, Ba les et Der Tuberculose irido-ciliaire à marche rapide, sans bacilles et non inocu- lable :parMA Ra lE TRE pe EE EE EEE Ge EE PRE : Tuberculose. — Vaccination du singe contre la tuberculose, par MMPMHéricourt ie ORTChNE PEN EN EN EN EE EE EC PP Tuberculose du chien, par M. Cadiot . . . . . . . . . . . . . . . . Tuberculose expérimentale chez le chien, par MM. Héricourt et Richet. Tumeurs épithéliales. — Processus hyperplasique. — Applications, par NL NO DOMERELE ENS bo 016 Hi0 50 0100 010 à 0 9 0 9 à o ° Urée dans le sang. — Dosage, par M. Quinquaud . . . . . . o Urine albumineuse ne renfermant pas de sulfates solubles, par M. ere Din RE M Sen e e e lt Deer Rare JHElo ME 006 600.0 0 0 © Urines Bilharziennes, par M. Moty . . . . . . . . . . Dé ADeA OS. 00 Urines. — Pouvoir thermogène, par M. Boyer . . . . . . . . de 0 0 Urines. — Réaction urinaire chez les animaux soumis aux basses tem- pératures, par MM. Chabrié et Dissard. . . . . . . . . . . Ga e 0 Urines des tuberculeux. — Leur propriété vaso-dilatatrice, par MN iCharnmnrtet re NOT NN ES CRTC TERRE RENE REC 6 V Variole. — Complications péritonéales, par M. Auché. . . . . . . . . Vapeurs mercurielles. — Influence sur le développement de l'embryon, par Mi Dareste Ciel RE ACER SCT PEUR Vapeurs d'essences. —Leur influence sur l'incubation de l'œuf de poule, par MA HÉTÉN SERA T I NCIS CPR ESC Variétés de lésions d'un même organe dans une même infection chez une même espèce animale, par M. Charrin. . . . . . . . . . . . . Vénénosité de quelques légumineuses exotiques appartenant aux genres Templetonia et Sophora, par M. Cornevin . . . . . . . Virus. — Influence des portes d'entrée, par M. Charrin. . . . . : Virus. — Leur absorption par les muqueuses, par ME TONIE, + & 010 0 Vitesse toxique des injections, par M. Dastre. . . . . . . . . . . . . Vitesse de translation d'un poisson se mouvant dans l’eau. — Dispositif pour mesurer cette vitesse, par M. Renard SEP ECC 952 258 51 633. 897 169 83 683 945 130 451 627 859 871 TABLE DES MATIÈRES MARTHUS TRE de ARSLAN ERVANT . ARSONVAL (D). . ARsonyaL (D) et CHarrix. Action des microbes pathogènes sur la cellule PAR NOMS D'AUTEURS (1) De la pneumobacilline comme réactif révélateur ae lAFMOPMER US PSE Steele es Ur nee ES MPepironurierdansrlarscarialitne Pr are . Production de courants de haute fréquence et de grande intensité, leurs effets physiologiques. . . Remarques sur l'emploi des injections de liquide tes- DOUTER ENS NAS PES SR EE eee Dosage de l’action électrique des tissus vivants . . . Mesure rapide des champs magnétiques à haute fré- ŒUICTIC ERA AAA NRC PE DES PE Een a AR EE Remarques à propos des notes de MM. Sabrazès et MÉ Dé LAC MEME RUE PURE ER RETRO nee Concurrence vitale entre le bacille pyocyanique et la levure tdetbiere TA AE EAN EeTat Bacille pyocyanique et levure de bière. . . . . . . : Relations entre les fonctions chromogène, pathogène, antifermentative du bacille pyocyanique. . . . . . Conditions de l'action du bacille pyocyanique sur la levure dePhière eme ETAT RE NE ARE Electricité et microbes; action des courants indirects de haute fréquence sur le bacille pyocyanique. . . PRESSIONNE CÉMICRONES EM NON PME NES Electricité et microbes. — Conditions expérimentales. Action des divers agents sur les bactéries . . . . . . ArrauLt (Stephen). Le bacille pyocyanique dans un œuf de poule. . . . AIRTHUSE Mans ei Cas ins RADEON NES er En Parallèle de la coagulation du sang et de la caséifica- LAON LOL EN MS 2 SN ES RENTE EE Pa Lt A I SES Arraus et Huser . Procédé permettant d'obtenir des cristaux d'oxyhémo- GODIN ANR DER EEE SEE ep ee . Complications péritonéales de la variole. . . . : . . 271 338 83 (1) Les pages indiquées à la marge sont celles des Comptes rendus (c. r.) et des Mémoires {m.). 1082 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Bacxer (pe) et BrumaT. Traitement des maladies infectieuses de nature microbienne, au moyen de ferments figurés. . . . BATAILLON- Li Peste des eaux douces. FRERE ARE — Peste des eaux douces. — Repose à M. Dubois . . . BaraizLon et DuBarv. Maladie de la truite et des œufs de truite . Beaurpoarp. . . . Note eur une Balænoptera Sibbaldii échouée à Oues- CN NE AR M ete lu 0 4 0 © 0 — Note sur deux lois déterminées par l'étude morpho- logique du système dentaire des Carnivores . . . . DERGÉ ee Pathogénierde la scarlatinen PRE BERGER. . . . . .« Remarques sur l'action physiologique de la cocaïne. — Emploi en ophtalmologie de mélanges de plusieurs produitspharmaceutiques PR CT BertiN-Sans. . . . Modifications que subissent, sous l'influence de l’âge, l'indice et les rayons de courbure du cristallin. . . BEZANCON. . . . . Tachycardie symptomatique dans le cours de la tuber- QUulOse enr RES EeRee PR Ar On lo la o é BIPLE DE MA UNE Distomaismense (CObbOlT AMENER EN EMENRENR Biner et Courtier. Mesure de la vitesse des mouvements graphiques . . BIRAUD ES = 07 . Electricité. — Mort et accidents causés par les cou- rants électriques de haute tension. . . . . . . . . BTAIZOT Neue Toxicité et emploi thérapeutique du fluorure de Sodium ie fe pr DS AN ER RER nee o BLaizor et CazpaAGuËs. Pouvoir bactéricide de quelques essences. . . . BLanc « .« . . « .« Valeur morphologique des cornes chez le cheval. . . — Action de la lumière sur les œufs de poule en incu- Dations ANSE TES RE RERA RER RER eee 2-0 Bcoco et Mariesco. Tremblement Parkinsonien et tumeur du Dé Cérébra lise re ET En RER En o a DE Do pdt 0-0 Action hypothermisante du Bacillus coli communis . Bonnier (Gaston). . Fonctions otolithiques . . . . . . . . . . . . . oo — Cultures à la lumière électrique continue . . . . . . Bonnier (Pierre). . Fonctions otocystiques . . : . . : : . … . - . . Boucxarp. . . . . Observations sur l’albuminurie choréique . . . . . . BOURGES NE Myélite aiguë expérimentale produite Des l’érysipélo- COQUE 1. TETE RENÉE Pr NCA TRE SUR 2 BourQueLor. . . . Ferment soluble nouveau dédoublant la trébulose en BIUCOS CR NE CT CCE CE - — Inulose et fermentation alcoolique indirecte de l'inu- line: 22 Ne UN nee b to co oïo die 6 € — Ferments solubles sécrétés par l’Aspergillus niger et le Penicillium glaucum, . +: . — Présence et rôle de l'émulsine dans quelques cham- pignons parasites des arbres ou vivant sur le DOIS REA TENTE ACAICIE Gio oLGin 0 ko don te 0 BourqueLor et GauiPre. Perméabilité des filtres en “érre D à l'égard desibacténes PEN NC CRE EP ECC EC . BOUMVIER, ... -.. . Organisafion des ACIEONS M -e-- EN O CC CN RE 241 356 455 33 214 184 1012 TABLE PAR NOMS D'AUTEURS 1083 C. R. M. BROWN-SÉQUARD. . Remarques sur l’innocuité du liquide testiculaire . 309 » —_ Conclusions physiologiques et cliniques qui res- sortent d'expériences dans lesquelles l’ataxie loco- motrice ou la paralysie, dues à des lésions de là moelle épinière, ont été guéries ou améliorées par les injections de liquide testiculaire. 365 » = Influence heureuse de la transfusion du sang nee] après l’extirpation des capsules surrénales chez le CODAVEN ANA AREAS LE RNA TN EEE ne 448 » — Remarques à l'égard des cas d’ataxie, chez l’homme et chez le chien, communiquées par M. Depoux et par MeMéeninbUE Serena. CR 020) » = Traitement de l’ Don à par sorierras oies orga- MIQUES NÉS ANEEUR EN ANT UNE IT 521 » = Note cer ole à propos de la nn ion e M. Depoux, sur un cas de oo d’ataxie locomo- CELCONR RASE DE A0 PAR RMS Per ae NE so El » — Nutrition et Sonetnition après la section du nerf scia- tique très haut, et amputation de la cuisse. . . . . 688 D Brown-Séquarp et p'ArsonvaL. Règles relatives à l'emploi du liquide tes- HICUTAIRENE ESS ET EAP EURE ER RAT UE UE 39 » Busquer . . . . . De l’action des essences sur le développement des Champignons des teignes dans les cultures. . . . . 454 » BUTTE . . . . . . Respiration placentaire à l’état normal et à la suite dune hémorrasierde lameret NN TE C0 222 » C Canéac et Bournay. Rôle microbicide des sucs digestifs sur le bacille de Koch. Transmission de la tuberculose par les MATIERE TÉCALES AN MAP 599 » CaprorT . . . . . . Tuberculose du chien. . pre 333 » Capior et RoGer. . Tumeur du cervelet chez un Sen QU 6 go CO » — Action de la tuberculine et de la malléine sur Te sécré- ON. AU DAINE 020 161800 Lo or PME NON EST MS RCE 110 » CAMPANA . . . . . Phtisie laryngée traitée avec succès par le liquide HOHONAIES crooromedo oo. 0106016 0170 dRomol oo c 13 ” Camus . . . . . . Anomalies du canal thoracique chez le chien. . . . . 1021 » CarRvaLLoO et PAcnon. Activité digestive du pancréas des animaux à jeun normaux et dératés. . . . . . Ge SUR AE EPA » = Chien isans estomac Er PEN NRC NET 929 » CASSAET ANAL EE Fonctionnement de la cellule hépatique dans certaines infections du tube digestif . . . . . . . . . . . . 215 » — Action de la teinture de cantharides sur les reins. 603 » — Du point de trépanation, dans les cas où les sym- ptômes ne sont pas superposables à la contusion dUNCTANE SE RENE SP Ce die Rai 1009 » CHABRIÉ. . . . . . Passage des graisses dans Tate ao Bu DUO qi GA Le 0 43 » CHABRIÉ et Dissarp. Réaction urinaire chez les animaux soumis aux basses ÉeMPÉTAEMEES AE EE ERP E PSREErErn SANS 8971 D Csarcor et Duriz. Agraphie motrice. — Autopsie . . . . . 129 » 1084 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE CHARPENTIER . . . ExCitation faradique unipolaire. — Son action sur ES Mol MOTS "0 00e 800 do 60 9 à € 0 € _— Inhibition due à l'excitation électrique simultanée d'un nerf en deux points de sa longueur. . . . . . — Conduction des excitations faradiques unipolaires par le nerf et par les tissus . . . … . . . . MCE — Faits relatifs à l'excitation faradique Hoolei 9 0 0 ŒHARRIN . . . . . Ilumeurs et sécrétions dans l'infection expérimentale. — Variations microbiennes. . . . . . . . . . . . . . . — Infection chez les Poissons . — Toxines et lésions cellulaires . MEME — Influence des portes d'entrée pour les virus. . : — Causes des variétés des lésions d’un même organe dans une même infection chez une même espèce animale. 0 CM NC « D ore 06 0 — Formes hémorragiques île fete dental formes diffuses ; formes localisées. — Reproduction des types cliniques tot Ra I NES = Epidémie chez les goujons . . . . c — Remarques à propos de la note de M. Atos sur . pneumosbacilline, RM ENCEINTE TER — Hépatite expérimentale . ÿ — Lésions digestives d’origine Dane De : ee CnarriN et Courmonr. Atténuation de la bactéridie par des principes micro- biens. — Origine de ces principes. . . . . . . . . €narnrin et DEvic . Nerfs et microbes. . . . . . . CHarriN et Dissarp. Propriétés du bacille orimonine et Toner Fe qualités nutrilives du milieu. . . . . ei 0 Lo CnarriN et GLEY. . Quatre infections distinctes chez un Due ones. — Microbiologie. — Action des substances microbiennes sur les appareils nerveux vaso-dilatateurs, chez les ATMAUXIVACCINÉSE NE NORME PRE PAS CnarRin et KAuruAnN. Hypoglycémie pyocyanique. . . . . . . . . . . . €xarrin et Le Norr. Propriété vaso-dilutatrice des urines des cree. CHarRin et VEILLON. Péritonite à pneumocoque sans pneumonie. — Sub- stitulion apparente du bacterium coli au pneumo- coque au momentide la Mort, NN Cnassevent et LanGLors. Gaz du sang elférent des capsules surrénales . J. CHATIN. . . . . Formation fibrineuse incluse dans un œuf de poule . CHAUVEAU. . . . . Adresse remise au nom de la Société de Biologie à la cérémonie du Jubilé de M. Pasteur . . . . . . . . — Mort du professeur Charcot. — Allocution. . . . . . Gnauveau et KaurMAnx. Pathogénie du diabète . . . . . . : — Le pancréas et les centres nerveux Hana a fonction glycémique. . . . . DD 8 vo Œnourpe . . . . . Remarques sur la pathogénie de de eat SRHoSÉE PATAMPNBerRSÉ RPC RP AA ET CaRériIEN. . . . . Dicrotisme exagéré comme signe Rronoe te de éme ragie intestinale dans la fièvre typhoïde . . . . . . Conte . . . . . . Absorption des virus par les muqueuses . . . . . . . CONTESEAN 0. -_SECrétion PYIOrique dUIChIEN ESC ACT re — Présentation d'un chien hémidécérébré, . . . . . . . 130 D} vw ww 5. #4 TABLE PAR NOMS D'AUTEURS CoNTEJEAN. . . . . Hernie expérimentale de l'intestin dans l'estomac . . CORNEVIN. . . . . Vénénosité de quelques légumineuses exotiques des ; genre Templetonia et Sophora. . . . . . . . . . — Instincts frugivores du chien. . : .: . . . . . . . . . Costa et Mafrucaor. Avantages de la nouvelle méthode de culture du champienontde couche NAS SO EAN RUE CosranriN et SaBrazës.. Étude morphologique des champignons du favus. Courmonr et Doyon. La substance toxique qui engendre le tétanos résulte de l'action sur l'organisme récepteur d’un ferment soluble fabriqué par le bacille de Nicolaïer. . . . . — Tétanos de la grenouille et conditions de température ambiante nécessaires à son apparition. . . . . . . — Existence d’une substance sthrychnisante dans les muscles des animaux tétaniques. . . « . . . . — Production du tétanos chez la poule. — Création he l'immunité chez cet animal. . . . . . . . . . . . 2 CRISTIANI. . . . . Recherches sur les organes thyroïdiens des rongeurs. Curtis et CouBrMace. Microorganismes de la rate et du cerveau chez les malades morts de typhus exanthématique. , . , , . D DAGONET. . . . . Auatomie pathologique de la paralysie générale . . . DANION. . . . . . Démonstration expérimentale de l’action directe du courant voltaïque sur le cerveau et sur la moelle épinière (preuve clinique). ... . . . . bio co 0.016 — Résistance électrique du corps humain. — Son siège et des causes quitlasfontivarien. PARA PEN DAREMBERG. . . . Réaction des sujets tuberculeux sous l'influence des Or liquides de l'organisme sain . . . . . « . . . . . DarEsre. . . . . Influence des vapeurs mercurielles sur le développe- ment de KeMDRyONE RME EN RER EN D'ASTRES NO CNT: Incoagulabilité du sang et réapparition de la fibrine chez l'animal qui a subi la défibrination totale . . . — DératementreticroissSance se een ec ee ee — Ferments du pancréas : leur indépendance physiolo- HITUE 6-00 0 0 810 000 CRD D AO LE SCO DR AU IE — Digestion pancréatique, observation à l’occasion de la note de M. Herzen. . . . . . . EL NS ET = Vitesse toxique des injections . . . . . . . . . — Fibrinolyse dans le sang. . . . . . . . . . . . . . D&BlERRE. . . . . Fossette vermienne de l’occipital. (Réponse au noce SEURALOMIEOSO AN) EEE ANNEE ARTE EAR S DEROVER RO SETINPUeNSLÉLIISANIE ERP ERNE RTE RS cite DEJERINE. . . . . Agraphie motrice. — Remarques. . . . . GB OA TEE — Lésions de la moelle épinière dans la paraplégie syphi- DCS de Eat 7 db oo da LS DE NICE 0 ARRET = Cerveau. — Trajet intra-cérébral des Hbres de de. LTD Pos GR A NO RONA Code No ON nie DeJEeniNe et Sorras. Névrite interstitielle, hypertrophique et ee dérlenfancess ho ser SUNSET 114 1086 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Deserine et Viazer. Contribution à l'étude de la localisation anatomique de la cécité verbale pure. _— Sur un cas de cécité corticale. . : 4. . 2.» à à DEPOUXS CCE Ataxie locomotrice guérie par les injections sous-cuta- nées du suc testiculaire . . . . . . PE on at oi 010 Dissarp. . , . . Les phénomènes anesthésiques chez les vertébrés aqua- HOME tool po D bloio o tour Lo dololo so 0 Doréris et Bourées. Streptocoque à courtes chaïnettes trouvé dans un M MENT ON SN So DR 60 0 0 0 5 0 Dominicrs (de)... Diabètensucré, pathogéniel 4. HMS CEE — Transfusion du sang immédiate du chien à l'homme . DORE LENS Nature infectieuse de certaines arthrites déformantes. Dusois (R.) . . . Anatomie et physiologie comparée de la Pholade dac- AA RE RE AOC SEL RS ESS SU no — Calorification chez les mammifères hibernants. — Influence du système nerveux central. . . . . . . . — Recherches de pathologie comparée sur la peste des ÉCLEMISSES CNE PTE : — Extinction de la luminosité du Photobacterium sarco- Dhilumiparila lumiere Aer — Thermogenèse, physiologie comparée. . . . . . . . . — Influence comparée de la section de la moelle et de sa destruction sur la calorification chez le lapin. . . . — Calorification. — Réchauffement automatique de la mar- motte dans ses rapports avec le tonus musculaire . — Influence du foie sur le réchauffement automatique de IE SMEEMOe B 0010 ü 010.4 oo 0.9 010 0 0 0 — Peste des eaux douces. — Remarques . . . . . . . . — Mouvements de la queue du lézard anesthésié . . — Anesthésie physiologique et ses applications DurLocQ. . . . . Seringue à injections hypodermiques. . . . . . . . . Durzoca et BerLioz. Application de l’antisepsie à la méthode hypoder- MIQUES PA NE EME HR NE 0 5 0 0 DUEOUR ER ENE Développement des tubercules des Crosnes du anne $ DuMONTPALLIER. . Innocuité des injections sous-cutanées d'extraits orga- OEM CMP MO lors d o1 no D did voi 0 ed 0! 0 10 9 0 DURAND . . . . . Disposition des muscles de l'iris des oiseaux . . . . — Développement des muscles de l'iris chez l'embryon ti Honlete 0 0/6» 0 00 0.0 Do 606 c 5 0 lo 6 6 0 0 E Enriouez et Hazrion. Ulcère gastrique expérimental par toxine diphtéri- HEC oo go orloior diplo 01 dlo 0 Go 060 0 0 o © ErauD et HucouneNo. Orchinocoque de l'orchite blennorrhagique et diplocoque de l’orchite ourlienne. . . F FABRE-DOMERGUE. Processus hyperplasique dans les tumeurs épithéliales. — Applications . . . . . . . PP EU CE Bi PO Lo «0 156 160 182 209 210 235 410 945 939 885 924 309 274 137 242 1025 TABLE PAR NOMS D'AUTEURS 1087 C. R. M HAN. à oo oo 6 Fréquence et distribution de quetquese difformités de la peau chez les épileptiques. . «+ «+ .°. . . . . . . 57 » — Influence de la compression temporaire sur l'accumula- tion de la graisse dans le tissu cellulaire sous- GHNNSS 0 oo 4 010 010 0 Go oi ou old ot or 0 000 62 » — Abaissement de la pression artérielle dans l’hémi- PIéSiIe MYS LÉ TIQUE MONS ANNE EUR MENREN EEE 102 » — A propos de la soi-disant formule urinaire de l’hys- (HÉHEo 0 0 oc de Pole LG 0 204 DO UE 151 ” — Du chloralose che Us TP UEs les hystériques et leSRChOTÉIQUE SE ANS A AE eu 201 » — La folie communiquée de l'homme aux animaux. . . 204 » — Influence des agents physiques et des chocs moraux SULAES MIN TOXICATONS EEE NT RAM ENS CIO 211 D 3 — Notes sur les paralysies systématiques. . . . . . . Cor » — Remarques à propos de la méthode de Brown-Séquard. 518 » — Épilepsie et bromisme chez les oiseaux. . . . . . . . 601 » — Toxicité des urines des épileptiques . . . . . . . . . 143 » — Influence de la lumière blanche et de la lumière colorée sur l'incubation des œufs de poule. . . . . ‘144 » — Iufluence de l'hétérisation préalable sur l’incubation des) œufs de poule. à. à. à. . . : 749 » — Influence de l’exposition préalable aux vapeurs date! $ sur lincubation de l'œufde poule 4"0"0 1.2. 1130» — Influence des injections de liquides dans l’albumine | sur l’incubation de l'œuf de poule. . . . . . . . . 187 » — Influence de l’érysipéle sur la marche de l’épilepsie. . 828 » — Motilité de l’orbiculaire des lèvres dans la paralysie faciale des hémiplégiques . . . . . ST rite 830 » — Influence des injections de solutions de sel, de glucose et de glycérine dans l’albumen de l'œuf de poule. . 831 » — Influence de l'exposition préalable aux vapeurs de chloroforme sur l’incubation des œufs de poule. . . 849 » — Influence de l'exposition préalable aux vapeurs d’es- sence de térébenthine sur l'incubation des œufs de DOUTER ENTRÉE Ne er ra ee PAR AMRRRER AS 852 » = Oscillations du poids chez les épileptiques . . . . . . 891 » — Influence de l'exposition préalable aux vapeurs des essences sur l’incubation de l’œuf de poule. . . . . 945 » — . Action de la lumière sur l'incubation de l’œuf de poule. 944 D — Influence de l’exposition préalable à la fumée de tabac et aux vapeurs de nicotine sur l'incubation de l'œuf deRPOUILE PRES RENE SANTE TA ENT AR en Re NANTES 948 » — Action du borax, administré par la voie gastrique, sur lestsécrétions CutanÉes ER EME NC UEN 987 » FRENKEL. . . . . Existence dans certaines urines de l’homme de pro- priétés antidiurétiques. . . . . . . . . . . RON OR MEL » FROMONT. . . . . Démonstration anatomique de la récurrence ner- VOUSS © 610 5 0 PO A EIRE EE FE AIO ES UN Eee PAS 220 » 1088 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE G GaALEz0WSkI . . . Application du diplomètre pour établir la nature et le degré des paralysies oculaires . . . . . . . . . o © GAMALEÏA . . .« . Choléra virulent et genèse des épidémies. . . . . . . ‘GAVINO . . .« « . Combinaison optique, donnant, au microscope, des grossissements considérables. . . . « . . . . . 0.0 EU D 010 000 0 Physiologieidel'Étriens 2 Ce CORRE GERARD Ce Ferment dans le penicillium glaucum agissant comme l'émulsine see annee one LANCE GrARD . . . .« . . Type nouveau et aberrant de la famille des Sabellides. — A propos de l'animal de la Spirule. . . . . . . . . : GITBERTI EN C Action du bicarbonate de soude sur le chimisme sto- M DS re Glen cd plo lb e mio 0e Ce — Poisons produits par le bacille intestinal d'Escherich. -Gicserr et Dommicr. Action de l'acide lactique sur le chimisme stomacal. — Angiocholite et cholécystite typhiques expérimentales. Girgert et Ginone. Cholécystite purulente provoquée par le bacille d'Eberthiste) ARE MP le acte 66 0 -GiLBert et Lion . Contribution à l'étude des bactéries intestinales . . . — Pluralité des lésions de la syphilis médullaire. . . . . GizBert et=MaAURAT. Gaiacol Synthétique CPR NERO GILLES Reine Galvanocaustiennterstitieletete EN RE EE o ‘GILLES DE LA TouretrE et CATHELINEAU. La nutrition dans l'hystérie. . . GIRODE MEET Charbon humain inoculé par une brosse. . . . . . ' — SaloAan Se ChOlÉTARE MR EN RNEEUES nEPATS ES — Cholérasetñevrestyphoide ehAES EP ER EEE EAN HIS Sole 0 Altération de l'œil chez un chien diabétique par extir- patonsdu pancréas ee NPC NE RES PER c — Glandes et glandules thyroïdes du chien. . . . . .. — Glande thyroïde. — Remarques sur sa fonction. . . . — Glandules thyroïdiennes. — Nouvelle preuve de leur importances fonctionnelle ten — Polypnée des chiens thyroïdectomisés. . . . . . . . . — Effets de la thyroïdectomie chez le lapin. — Nouvelle CŒUT APR ae Ut EE Le RME EE Eee eq LEP EER GLEY et CHarix. Dilatations cardiaques expérimentales. . . . . . . . . — Diabète expérimental et diabète de l’homme. . . . . — Influences héréditaires expérimentales. . . . . . . . ‘GLEy et Lapicque. Accidents tétaniques d'origine infectieuse chez la gre- DOUCE need Gt Ler ten ON TARN CS FE IRCUT GLey et Paisarix. Nature des glandules thyroïdiennes du chien. . . . . GLEY et RonpEAU. De la non-absorption de l'eau par l'estomac. . . . . . GRASSET. . . . . Effets physiologiques de l’eau oxygénée. . . . . . . . GRÉHANT. . . . . Application du grisoumètre à la recherche médico- JésalerdenlioxydendetcarDone Rene RP — Mode d'emploi du grisoumètre dans le dosage de mélanges renfermant un centième de gaz combus- 834 l'in GET mx TABLE PAR NOMS D'AUTEURS ÆGRÉHANT. . . . . Absorption par le sang de l'hydrogène et du protoxyde d'azote introduits dans les poumons; élimination de CES CO: 0:60 00h bio) ONE d.0 0 0 — Produits de la combustion du coke dans l ner : ‘GréHANT et D'HeNrY. Perfectionnement re à la manœuvre de la DOMPEANMERCURE NAME ER CHOEUR GriGorescu. . . . Influence de la stase sanguine sur Trana onde 60 GUDENDAG . . .« . Décanteur à force centrifuge. . . . . . . . . . . . . De GuERNE. . . . Dissémination des Pélécypodes d'eau douce par les MERCEDES ONE UN SNTe Ce Re RNA Ness GuILLOZ . . . . . Photographie instantanée du fond de l'œil humain. , “GuINARD. . . . . Dangers des injections sous-cutanées de liquides orga- niques non parfaitement limpides. . . . . . o — Action physiologique de la morphine chez les Done — Technique expérimentale relative à la détermination du degré de toxicité des urines . . . . . . . . Û — Toxicité des urines normales de l’homme et des mam- mifères domestiques. . . .« . ao — Étude physiologique de anonoiéiee “ae — Modifications de la circulation, de la reaninion, îs échanges gazeux et de la température, chez les chiens soumis à l’action de l’apocodéine. . . ne — Apocodéine. — Son influence sur les sereine, sur le péristaltisme intestinal et sur le système nerveux. . — Apocodéine. — Avantages de l’apocodéine sur la codéine . “GuinARD et Morey. Pseudo- berne uses croient he le ton H Harré et Dissarn. Culture du bacterium coli dans l'urine. , “HALLOPEAU. . . . Production, dans l’asphyxie, de convulsions tirées et synchrones aux mouvements d'expiration. ‘Hanor. . . . . . Note sur les taches blanches du foie infectieux. — Altérations cellulaires du foie infectieux — Nodules du foie infectieux dans la fièvre route Gi le tuberculose intestinale. . . . . . ‘Hanor et Gasrou. Néocanalicules biliaires dans le foie Rien ! Hanrior et Cu. Ricuer. Action physiologique du chloralose. . — Effets psychiques du chloralose sur les animaux. — Effets physiologiques du chloralose. . . — Parachloralose. — Action physiologique. : KAskOvEc . . . . Altérations organiques chez les chiens nie Tedonn ss HENNEGUY. . . . . Fragmentation parthénogenésique des ovules des verté- brés pendant l’atrésie des follicules de Graaf. . . . Hexroray . . . . Précipitations des couleurs d’aniline dans certaines conditions de réactions histo-chimiques. . . . . “Héricourr. . . . Action spéciale des injections sous-cutanées de onde OCMIQES 0, 01 Le SE » 1090 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Héricourt et Ricuer. Expériences relatives à la proportion relative des leucocytes et des hématies dans le sang du chien. . — Vaccination du singe contre la tuberculose. . . . . . — Tuberculose expérimentale chez le chien. . . . . . — Modifications dans le nombre des leucocytes du ne après injection de diverses substances. . . . . . . HERZEN. 1. R -Rateret (pancréas MER MER TPE OR HuGOuNENQ. . . . Composition chimique du liquide de la périostite albu- mineuses MAN Pa A (ENANENP EEE J JACGARD. . Influence de la pression des gaz sur le développement des VéSétAUX PILE RARE EE GS DE LA JARRIGE. - Injections intra-pulmonaires. . . . . . . . . . TOLVET RCE Respiration des iCélAcEs RENE — Rôle du liquide céphalo-rachidien dans la circulation CéDÉDrale (Te MmOte) re RENE ARRET Do = Rôle du liquide céphalo-rachidien dans la circulation cérébrale (22n0te)-#e2 NP RES Jocyer et SÉGALAs. Chaleur développée par la coagulation du sang. JOUBIN. . . . . . Appareil photogène d'un céphalopode. . . . . . . . . JOURDAIN. . . . . Mouvement de rotation singulier de la tête chez une larve decide RER EE b 6 0 © K KALT . . . . . . Tuberculose irido-ciliaire à marche rapide, sans bacilles MONANOBNEIN ES 0 bo 0 à 0 c 06 010 00 0 9 6 0 0 KaurmanN et CHarniN. Origine toxique de l'hypoglycémie pyocyanique. . Kiexer et Vizzarp. Fièvre typhoïde et tuberculose aiguë combinées. . . . KogniG. . , . . . Troubles de l'appareil de la vision dans la maladie de Parkinson ete ADO 40 8 cidie à © 0 L'ABBÉ MUR Emme Parasites endoglobulaires du sang de l’alouette. . — Flagella de la malaria de l’homme et des oiseaux (signi- fication des différentes formes). . . . . . . . Go — Flagella des hématozoaires malariques. . . . . . . . LAGUESSE. . . . . Bourgeons pancréatiques accessoires et origine du canal pancréatique chez les poissons . . . . . . . . — Histogénie du pancréas. — La cellule centro-acineuse. — Histogénie du pancréas. — La cellule pancréatique. . = Formation des îlots de Langerhans dans le pancréas. LAMBERT. . . . . Modifications produites par l'excitation électrique dans les cellules nerveuses des ganglions sympathiques. . Lanpouzy.. . . . Effets thérapeutiques du chloralose. . . . . . . . . . 233 761 14 562 139 * TABLE PAR NOMS D'AUTEURS 1091 LanGzois. . . . . Destruction des capsules surrénales chez le chien. . . 444 » É LancLors et CHarrin. Lésions des capsules surrénales dans l'infection. — Foie chez le cobaye pyocyanique. . . . . . . . . . 812 » Lapricoue. . . . . Étude quantitative sur le régime alimentaire des Abys- | SIL S ERA Me D ae AS ebrele 2 dot a ARS MAN OM 0... 0 » - LaTAsTE. . . . . Rythme vaginal des mammifères. . . . . . . . . . : » 0 435 — Recherches sur la fécondation et la gestation des mam- mifères de J. Onanoff, et la théorie de la gestation eXDA-UTÉRINE EN MMS Ne Rate À 971 » LauLantÉ. . . . . Innervation cardiaque et variations Den diques ie rythmes du cœur au cours de l'asphyxie chez le chien. 722 » LAVERAN. . . . . Sur un diplocoque trouvé chez des malades atteints ORCLIONS A PARC A AA An ee ee 0 95 » _ Stérilité du liquide organique préparé suivant la mé- thode de MM. d’Arsonval et Brown-Séquard. . . . . 213 » — Hématozoaire du paludisme 0 EN NOEL NS 312 » — Flagella de la malaria. — Remarques. . . . . . .. . 810 » — Contribution à l'étude de l'étiologie de la dysenterie, 875 » — Embryons de filaire du sang de l'homme. . . . . .. 892 » — Remarques sur la communication de M. Labbé au sujet deshlaselardans/le paludisme eee 1004 » LaverAN et CATRIN. Recherches bactériologiques sur les oreillons. . . . . 598 » LaverAn et VarzLarp. Désinfection par pulvérisation des liquides anti- SE DLIQULE SU M REA Le me te ME nn a ne tale eee Ne 00 D Leerz et Vesescu. Action du curare sur les animaux à sang chaud. . . . 4100 » LecLaINcHe et Monrané. Histogenèse du tubercule dans la morve chro- TU TUE RS A A re AA AR ee tee ae UT » — Morve pulmonaire chez le cheval. — Lésions particu- MÈRES AR AE Se A EE nn GANT TS 146 » — Altérations vasculaires et bronchiques cons la morve CHRONIQUES ES RE REA RER Te ER ee" 232 » LecLance et RéÉmonv. Toxicité du sang et de ses éléments, à l'état nor- maltetia létatipathologique EN AN One) 10 » PERDANREC NE MSENSIbILITÉRCOlORÉE NE ERP NM ANNNET NES 119 » Lee s dou e Courants alternatifs de haute tension produits à l’aide de machines électrostatiques. . . . : . . . . . . . 711 » LEGRAIN. - . . . Origine infectieuse des chéloïdes. . . . . . . . . . . 593 » Lemoine et Linossier. Mécanisme de la rumination chez l’homme atteint HeNMÉBYCISMOSS RC Cl en Mie Aie 339 » LesaGe et PINEAU. Infection lente par le pneumocoque. . . . . . . . . 124 » BESBRE Re Ce Considérations sur la première prémolaire de quelques mammifères, domestiques . . - ... . - . : . . . | 65 » LianièrRes . . . . Note sur deux Acariens de la famille des Sarcoptités . 14 » LOISEL. 0.0 Cartilages linguauxet le tissu cartilagineux chez les Gastéropodes at ERA te en Te 0108 » — Pièces de soutien de la radula chez les Céphalopodes et le tissu cartilagineux des Mollusques. . . . . . . 244 » — Développement des fibres élastiques dans l’épiglotte et dans le ligament cervical. . . . . . . . gt. 010.0: 180 » LomBROSO . . . . Fossette occipitale. Remarques critiques . . . . . . .. 412 » — Fossette occipitale chez les prostituées . . . . . . . . 609 » ÉUYS HE ed . Visibilité directe des effluves cérébraux. . . . . . . . 638 » 1092 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE M Marassez. . . . Influence des congestions diverses sur la richesse du sang en globules rouges ; fonctions hématopoïéliques dela: rate. 70 2reRMnNNneErt Rec ANR — Parasites du Cancer PR IR EE AR RER ETS — Mort du docteur Vignal. — ation, RM 0 0 — Nouveaux modèles d’aiguilles à suture . . . . . . . . Mazgec . . . . . Écoulement du sang par les points lacrymaux, au cours d'une épistaxis, après tamponnement des fosses NASATESS Pre onde ee li se PE Mari. . . . . . Effets thérapeutiques du chloralose. . . . . . . . . . Marinesco. . . . Micro-photographie du système nerveux . . . . . . . Marinesco et Sérieux. Lésion traumatique du trijumeau et du ED avec troubles trophiques consécutifs. . . . . . . . . . . Manrri (Henri). . Vaisseaux nourriciers du muscle cardiaque chez la STENOULIE RACE UE ROMEO MIO MD 0. 0 0 — Mouvements produits par à queue du lézard, après 0 A A NE AU Maruras Duvar. . Placenta des carnassiers. . . . ete Maunus . . . . . Transformation de don tan en sucre D her le bacillefduAcharh one ERP oO MéÉanix . . . . . Effet du liquide testiculaire sur un chien pranésions et atteint de fibro-sarcome généralisé. . . . . . . . —— OEM Na pt do loool dou a 0100 9 0 0 — Affection psorique complexe chez le lapin . . . . . . — Reproduction des SaArCOpHeS Le CT NAN CCE MERGIER. . . . . Résistances métalliques pour la mesure des résistances éleclriques du corps humain et des liquides organi- QUES ENS SA e er a RENE PENSER — Optomètre portatif pour la one on le des amétropies et la mesure de l’acuité visuelle. . . . . MEyEr. . . . . . Tracés de la respiration, montrant l’action favorable du suc rénal injecté chez le chien et le lapin atleints d'urémie après la ligature des vaisseaux des deux ET eo nd ED TS Di ONU OL Oo. Oo. c Meyer et Bionnës Oxygène du sang one) dans les variations de capa- CITÉ TESDIRALOITE NE CN ENT INCARNE SANTE Mironorr . : . . Imimunisation des lapins contre le Ron ocoue et trai- tement de la septicémie streptococcique par le sérum du sang des animaux immunisés. . . : . . . MODINOS RP ASS OCT ON SO XIE SEM NEC ME RER RENTE Morat. . . . . . Action de la nicotine sur quelques fermentations nie ROBOT ME 0 dorcel to lomolbiptouor eo ace 0 Go 0 à Morgau . . . . . Acide picrique. — Son action dans la thérapeutique ES JESNÉPIRÉMONMAS PRET CRTC CRC CN CCR MorezLr. . . . . Microbes étrangers dans le sang et les tissus des maladesNduNBETIDÉTIPEMS AR TRE TE TN RCE LATE MONS 6 oo oo 0 A otdlotaloteloe mio 0e 6 Mon COUT Ines BINA RICE SP RC CE CE —= Lésions anatomiques produites par le distoma sinense. 524 582 » » LE ».. » TABLE PAR NOMS D'AUTEURS Mousse Mtonctoninyroidiennes MM ANNEE PEN Nr — Ron CHonMINyAoiIeNnNe MEANS" Mourarp-MartTix. Effets thérapeutiques du chloralose. . . . . . . . . . MNussolebMorEecr re Microbe AuIBéribéri ee SCO MINE ENT N De NaBras. . . . Structure du système nerveux des gastéropodes. . . . NAGEOTrE . . . | Note sur le cerveau des ataxiques . . . . . . . . . . NEUMANN. . . . . Pseudo-parasitisme du Lœlaps slabularis sur une HÉTNINES © 9:06 0010 01 ob DS RENE LE = Note sur le Psorergates nee 6 NICATT C0 MOphtalmotonometre nouveau... 1. 10: NN Nicocas . . . . . Sphex splendidulus. . . . . . . Do LEE ARE — Tétanos chez l’homme par Con Le des . produits solubles du bacille de Nicolaïer . . . . . . NicoLLe et CANTACUZÈNE. Propriétés colorantes de l’oxychlorure de Ruthe- NUM ON CAE NP ATP SERRE Noé. . . . . . . Résistance du scorpion aux mauvaises conditions HEXISTENC CRC CEE St DONS — Résistance des poissons à l’asphyxie sone, NAT O OnANOrF. . . . . Fécondation et gestation des mammifères. . . . . . . P Pacaon et Ricner Respiration périodique dans l’intoxication par le chlo- RAID SCANS SR ETAPE SUP ET EU ER es AURRE A ie PASSY Odeur danslarsÉriIeleRasSeMMERAOME NEO EEE UN PEYRON « . + . . Traitement du saturnisme par le imonosulfure de SOUMETTRE Û Ua Paisauix. . , . . Inhibition chez les Calais tion para- lytique des chromatophores. . . . . . . ANSE Puisarix et BERTRAND. Toxicité comparée du sang et du venin del crapaud commun, considérée au point de vue de la sécrétion interne des glandes cutanées de cet animal. . . . . — -Toxicité du sang de la vipère. . . . . . . . . TD Le Dear are Appareil salivaire des oiseaux . . . MORE SE — Évolution histologique du placenta abortif . _— Distinction expérimentale des cellules hépatiques. — Adénome kystique aberrant du corps thyroïde . . . . — Élections "0e SOA A NA Lee PE AR — : . -Estomac des enmnentes ; A Fonaies = Action locale des essences sur la muqueuse gastrique. = Gastrite sous-muqueuse expérimentale . . . . . . . Pizrer et DENY . Erosions hémorragiques du duodénum 719 281 479 959 887 471 997 349 416 502 615 824 881 895 99 119 »> 1094 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Prorrowskr . .« . Nouvelle méthode pour démontrer le point de départ d’excitation, ainsi que les phénomènes électrotoni- ques dans l'emploi des courants d'induction . . . . — Névroseide a langue NP EEE AC RENE : — Hystérie traumatique avec FE CHHADASIE ER ES — Bleu de méthylène comme analgésique. . . . . . . . — Temps pendant lequel on peut retrouver l’oxyde de car- bone dans le sang après empoisonnement. . . . . . POŒŒBL 1 0e . Méthode clinique simplifiée d'analyse d'urine dans lauto=imtoxicationM ss CN EN ERP POUCHET. . . . . Anciens échouages de Cétacés du 1x° au xvire siècle. . — Allocution. — Mort du Dr Chabry. . . . . . . . . . : — Poudre de viande de baleine . . . . . . . . 5 Poucuer et Dicuer. Sur l’apparence dite « Mer Vermeille », du golfe de (COMME, 064 6100 81e se ne MAUR EM NE AT : POUPINEL. . . . . Heureux résultats de l'injection du liquide orchitique AE CES IEEE © 5 9 0106 09 0 0 6 0 0 SD Ge o PRENANT. . . . . Développement organique et histologique des dérivés brancMaUx EAN ÉTONUL BNGTS Loi o 0.6 QueyraT. . . . .« Microorganismes dans la trachéo-bronchite simple . . — Appareil à contention pour les cobayes. . . . . . . 6 — Emporte-pièce à pommes de terre . . . . . . . . ... Quinquaup. . . . Note sur le dosage de l’urée dans le sang. . . . . . . R RAIÉCLED ie Gale du lapin causée par le Sarcoptes scabiei; sa transmissibilité au cobaye et au furet. . . . . . . . — Trichinose expérimentale chez le furet. . . . . . . 5 RaAILLET et Lucer. Sarcopte des Muridés. . : . : Rarczier et Moro. Ascaride dans le pancréas du porc . . . . . . . . : Ramon y CayJaz. . Ganglions du plexus nerveux de l’inteslin . . . . . . RanGLaARET et Maneu. Recherches sur un microbe nouveau de l'ictère DTA Mer A HR AN NET LE Le ES Vo — Ictère grave. — Microbiologie. . . . . . . . . . . . | Reczus et Rerrerxr. Kyste dermoïde du raphé périnéal et du Sono. REGNARD. - 0e Action des chromatoblastes chez la carpe et la tanche. — Bathometre Compression d'eau TRE — Bouteille destinée à recueillir l’eau à de grandes pro- TON dEUT SNA TA TEE TRE ARtE Er rn d 9 0 — Pompe de roulis utilisable pour l'analyse des gaz de l’eau à bord des navires . . . . . . . bo 0/0 0 0 — Dynamomètre permettant de mesurer la puissance musculaire de l'appareil caudal du poisson. « + . « — Dispositif pour mesurer la vitesse de translation d'un poisson se mouvant dans l'eau. . . . . . . . . .. — La péche aurcablelcreux ee RE EE RE PE 546 211 262 266 952 TABLE PAR NOMS D'AUTEURS REGNAULT . . + « Malformations dentaires chez le singe . . . . . . . . _ Variations dans la forme des dents suivant les races NHMENNES 5-0 10 016 bo a ET O MON Een Rémonp et RispaL. Diabète maigre faite avee succès par les fodtions de liquide pancréatique . . . . . . . . . . Remy Sant-Lour. Morphologie comparée de l'os carré . « . . . . — Morphologie comparée de l'os carré . . . . . . . ReTTERER et RoGer. Rein unique et utérus unique chez une lapine. . . . Rey-PaILHADE. . . Action de l’alcool et du soufre sur la levure de bière RicHer. . . . . . Rôle des muscles triceps fémoraux et fesssiers dans lasstationéventiealeRRENeEM EE CR ONE ME ECURIES RicHer (Ch.). . . Des phénomènes chimiques du fon PS ee — Rapport entre la toxicité et les propriétés physiques TESICORDS AR Me NAN EMA RON NERE RicocHon . . . . Pathogénie de la Fe bre D doi cn VAE CARE D 1H To RoBiLLARD . . . . Action antipyrétique des badigeonnages de gaïacol SUR AND € LUE RC A EE En Et ROGER. . . . . . Poison cardiaque d'origine microbienne . . . . . . . — Toxines microbiennes. — Action sur le cœur. . . . — Action de la bactéridie charbonneuse sur le Jait . . . — Produits solubles du bacillus coli communis, leur action sur la grenouille. . . . . . . — Pouvoir thermogène des urines . . . . . . — Pouvoir thermogène des extraits de ut = Lésions hépatiques d’origine infectieuse . — Action du bacillus putidus sur le lait. . . — Epizootie observée chez des grenouilles . . . : : — lufluence des injections intra-veineuses du sang ar té- riel sur la température. . . . . EL PA EEE CHEN ONE Rouquès. . . . . Substances thermogènes extraites de tissus animaux. RouxEau. . . . . Paradoxe de Weber et tétanos d'ouverture. . ; a Action des courants de polarisation RON comme excitants de la contractilité. . . . . . . . . . Royer. . . . . . Note sur la soi-disant formule urinaire de Me RüurFer et Pen Parasites du caucer. — Mode de reproduction. S SaBrAzÈs et Bazin. L'acide carbonique à haute pression peut-il être con- sidéré comme un antiseptique puissant? . . . 6 — Valeur antiseptique de l'acide carbonique à haute pres- sion vis-à-vis de l'extrait orchitique glycériné. SapraAzÈs et CHAMBRELENT. Passage des microbes de la mère au fœtus. — Recherches expérimentales. . . . : 4 . . . . . . . SaBrazés et Rivière. Propriétés antiseptiques des extraits orchitiques préparés par la méthode de MM. Brown-Séquard et d’Arsonval . . . . . 0 AE A fn ES ASTUe — Valeur antiseptique de eut sourire et de la MCCAIN 12101600 01 po mrelo te . SALA y Pons , . . Ecorce cérébrale des oiseaux. . . , . . . . . . BroLOGIE. — TABLES. 1 909 011 388 1096 SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE —————_—…—…—…—_—_—_—_—_———_——…—…—…———…——……—…———t Sée et Camcs. . . Régime alimentaire chez le chien dans les expériences SUR AQUCRATION EURE CPE CE : SÉGARDI DEEE Effets thérapeutiques du chloralose. . . . . . . . . . SERGENT... 0. Cas dexophtalmie a VOlOntÉ EN NE SIGALAS. . . . . Action immédiate des bains froids sur les températures et CP NE TT CE RO © on Sorras . . . . . Moelle épinière dans deux cas de compression des ra- CINeS POSTÉREULES EMEA AC ERP EEE — Nature des lésions médullaires dans la paraplégie-sy- DUO eo Em 6 D 0 Cao dla 0 2-0 — __. . Dégénérescence rétrograde du faisceau pyramidal. Van DER Srricut. Choléra asiatique. — Modifications anatomiques et lésions anatomo-pathologiques du rein . . . . . . . — Signification des cellules épithéliales de l’épididyme de Lacerta vivipara DRRCRCIOR ETC NC SO SAME OMEORLIOMEON D O0; TarGowLa . . . . Recherche de l’oxyde de carbone dans les appareils de chauffage. — Méthode de Gréhant. . . . . . . . THÉLOHAN . . . . Altérations du tissu musculaire dues à la présence de Myxosporidies et des microbes chez le barbeau. . . — Note sur une tumeur observée chez l’épinoche . . . . _ Faits de dégénérescence cellulaire DOULOUSE et DynamometNriechez les taliÉNÉSEMEO PA REANENPREPEE TouRNEUXx . . . . Structure des fibrilles des muscles jaunes A Dytique et de l'Hydrophile à l’état de repos. . . . TrouEssarr . . . Note sur les Sarcoplides pilicoles . . . . . … . . . . . — Reproduction des Sarcoptides. . — Reproduction des Sarcoptides efoi Melo liens lei ee er ee) V WAAOUEZ 9 lo tal a Phlébite traumatique de la jambe droite, œdème ré- flexe de la jambe gauche. . . . . . . . . Vaouez et Bureau. Pouls lent permanent, considérations D oeines EHCNIUES RE MEN ETAIENT ERP E DEMNVARIGNN -... ASDrOpOSdumparadoxe dem eLERN MCE NEC RER VAUDIN . . . . . Analyse d’une urine albumineuse ne renfermant pas dersulfates solubles ERP CEE Re Er VEILLON . . . . . Microcoque anaérobie trouvé dans des sUppurattEe fétides. LIeR UPE ET ME ECRE RTE TAC ERNE NEESREC VIALET. . . . . . Faisceau transverse du lobule lingual, faisceau d’asso- DAONICUEINES e0 21 9 8 ed ob lolo © do a oo ce 5 VicenrixI. . . . . Flore cryptogamique de la bouche et des crachats. . Vincent . . . . |. Contribution à l'étude bactériologique de l’ictère grave. ViTzOU. . . . . . Influence dynamogénique du liquide testiculaire chez deux singes /paralys és PU MEN CIEEN E-TUCT TABLE PAR NOMS D'AUTEURS 1097 C.R. M W NWVBES 0 ontordie Résistance du corps humain à l'action électrique . . . 610 » WERTHEIMER. . . Influence des excitations thermiques de la peau sur la GisculatonaduRreIN, Cr 1 RC So oo ME » Wurrz et Lermoyez. Pouvoir bactéricide du mucus humain et en parli- CUNeRAUMUCUSEN AS AI PANNE NN o 156 » RE et Leuper. Identité du bacille lactique de Pasteur avec le Da lue AGE BORMES 0 Lo 0 0 ee PA A Tee 531 » ——@—_—_—_—_———pZr Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel, L. MarerHEUx, directeur, 1, rue Cassette. % pd ag DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE BU CHLORALOSE PAR MM. M: HANRIOT et CH. RICHET TRAVAIL DES LABORATOIRES DE CHIMIE ET DE PHYSIOLOGIE DE LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS (Mémoire déposé dans la séance du 14% janvier 1893.) Nous avons donné le nom de chloralose au corps qui résulte de l’action du chloral anhydre sur le glycose. Ici nous ne parlerons pas des pro- priétés chimiques de cette substance, non plus que de son isomère, le para- chloralose ou chloralose insoluble; mais seulement des effets physiolo- giques du chloralose soluble. C’est une substance cristallisable, soluble dans l’eau bouillante, et qui se dépose par refroidissements en cristaux. L'eau froide la dissout un peu, à peu près 5 grammes par litre; mais une solution de 5 grammes par litre finit à la longue, au bout de plusieurs jours, par laisser déposer de petits cristaux quise redissolvent quand on chauffe de nouveau la solution. Comme c’est une substance très active, on peut, malgré cette dilution, l’employer sous cette forme en injections intra-veineuses ou intra-péri- tonéales, au moins sur de petits animaux. Si l’on veut en faire ingérer des quantités plus grandes, on en mélange la quantité nécessaire à du lait. Par suite de sa faible solubilité. elle se dissout mal; et les animaux, chiens, chats, poules, rats, canards, etc., la prennent ainsi sans répu- gnance. C’est d’ailleurs un corps très amer, qui, sans avoir la saveur âcre et irritante du cheval, est fort désagréable, et laisse un arrière-goût nau- séeux, quand on le prend en solution aqueuse. Nous l'avons expérimenté sur les chiens, les chats et les oiseaux. D’autres expériences ont été faites aussi sur les rats, les cobayes, les lapins et les grenouilles; mais elles ne sont pas suffisamment nombreuses pour que nous puissions les mentionner aujourd’hui. Prenons, pour simplifier, l'expérience faite sur le chien, dans laquelle le chloralose a été ingéré par l'estomac, le chien ayant consenti à en prendre dans du lait ou avec quelques morceaux de viande. Nous süpposerons qu'il s’agit d’un chien de 10 kilogrammes, et que la dose ingérée par lui soit de 5 grammes, c'est-à-dire de 0.50 par kilo- gramme. D'abord, pendant une demi-heure ou trois quarts d'heure, il n’y a pas d'action appréciable. Jamais ou presque jamais de vomissements, puis Brococte. Mémoires. — 9e série, T. V. 1 % MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE l'animal reste comme hésitant dans sa démarche; il a de la peine à avan- cer, les muscles semblent comme raidis, avec un peu de frémissements fibrillaires, presque de la contracture; les mouvements deviennent lents, paresseux, difficiles. Quoique l'intelligence soit conservée, il y a de la somnolence; le chien se couche, ses paupières tendent à se fermer, ani- mées de petites contractions légères. En même temps une notable excilabilité réflexe et psychique; au moindre bruit un peu fortily a comme un tressaillement général. Cependant la respiration n’est pas ralentie, et les mouvements du cœur ont conservé toute leur fréquence normale, et leur force. Peu à peu le sommeil devient plus profond, el le chien se couche pour s'endormir. À ce moment il y a une véritable incoordination musculaire, de sorte que, si l'animal se couche, ce n’est pas seulement paree qu'il est pris d’une envie de dormir irrésistible; mais c'est aussi parce qu'il ne peut plus se tenir debout, butant contre tous les objets alentour, comme ivre, dans un état très analogue à celui des chiens chloralisés, éthérisés, ou chloroformés. Alors, c'est-à-dire une heure et demie environ après l’ingestion, le sommeil est profond; mais il ne ressemble pas au sommeil du chloral, le chien chloralisé n’a plus de réflexes, ou du moins ses réflexes sont énor- mément diminués, tandis que le chien qui a pris du chloralose à gardé toutes ses réflexes, alors qu’il est endormi déjà. Ces réflexes sont même très exagérés. Le moindre attouchement détermine un soubresaut géné- ral, une sorte de convulsion presque strychnique, tandis que, si on le laisse dormir tranquille, le sommeil est assez calme (parfois même l’ani- mal aboie légèrement, comme le font les chiens qui rêvent), sans avoir d'autre réaction que le frisson de chaque inspiration, ce qui indique bien que l’appareil régulateur de la température est intact. Contrairement à ce qui s’observe chez les chiens anesthésiés par le chloral ou le chloroforme, la pression artérielle n’est pas abaiïssée. Chez un chien qui avait pris une dose de 0 gr. 6, et qui dormait profondément, nous avons constaté une pression de 18 centimètres de mercure, et dans deux autres expériences nous avons encore vérifié cette élévation de la, pression sanguine avec des doses de 0 gr. 6 et de 0 gr. 5. D'ailleurs cela ne doit pas nous surprendre, puisque la conservation des mouvements réflexes nous prouve qu'à cette période il n’y a pas abolition de lacti- vité médullaire qui tient sous sa dépendance la COR SAGMNS des peus vaisseaux et la pression du sang. Deux ou trois heures environ après l'ingestion, le sommeil devient plus calme, sans que cependant les phénomènes réflexes cessent jamais complètement. En tout cas, le sommeil est parfaitement établi, l'animal, ronfle, et il ne se réveille qu'au bout de cinq, sept, huit heures, parfois même plus longtemps après; mais au bout de vingt-quatre heures il semble bien remis,;ayant conservé sa gaieté et son appétit. “, ra à # y DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE à Tel est, au moins sur le chien, l'effet des doses moyennes, soit des doses de 0 gr. 5,ou 0 gr. 4, ou 0 gr. 3 par kilogramme. Maïs, si la dose est plus forte, la mort survient dans le sommeil. Les phénomènes du début sont tout à fait les mêmes; seulement, le sommeil devient de plus en plus pro- fond ; le cœur reste intact; mais la respiration est de plus en plus faible, et finalement la mort survient par cessation de la respiration. Si au contraire les doses sont plus faibles, c'est-à-dire de 0 gr. 2 ou 0 gr. 1 par kilogramme, alors on ne voit guère que de la somnolence coïncidant avec une excitabilité réflexe exagérée, et quelque tendance aux contractures, avec de l’incoordination, et probablement du vertige. Nous appellerons d’abord l'attention des physiologistes sur ceci; c’est qu'une substance anesthésique pouvant être prise par ingestion stomacale sera très utile dans certains cas, et surtout qu'il sera très avantageux en maintes occasions de pouvoir faire de l’anesthésie avec la conservation des réflexes vasculaires et l’élévation de la pression artérielle. C’est dans ces cas que nous employons communément le curare; mais le curare a cet inconvénient, très grave (à mon sens), de ne pas abolir la sensibilité de l'animal. C’est donc un moyen assez cruel, et que souvent je n’ai pas voulu employer pour cette seule raison, D'autre part, le curare nécessite Ia trachéotomie, et, sinon toujours, au moins presque toujours, les chiens curarisés ne peuvent pas être conservés, Nous avons pu faire sur des chiens ayant reçu 0 gr. 50 de chloralose des expériences longues et sanglantes sans que l'animal parüt ressentir quelque douleur. - Pour déterminer la dose toxique, je laisserai de côté les diverses expé- riences où le chien, après ingestion de chloralose, a subi une opération quelconque, ou même les cas où il y a eu des vomissements, quoique ces vomissements, très peu abondants, exceptionnels d’ailleurs, ne puissent guère avoir contribué à l'expulsion d’une notable quantité du poison. Voici alors -les chiffres rapportés à l'unité de poids, c'est-à-dire au kilogramme. CSS D RME NS RER ANA EEE E ES URVIE" CE) LÉO an latte reh shipir a sean plierMOont OLA eu di Re AE SE A ERA SUD RES NIAR RAQ RES ROSES urVIe 2000000006 © (je) Le) ot © (1) Il s’agit d’un chien de 35 kilogrammes qui a pris la dose énorme de 30 grammes de chloralose. Nous le comptons comme survivant; car, pour une autre expérience, nous le tuâmes le lendemain. Il était remis de son in- toxication chloralosique. 4 + MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : EEE EEE aa TE TT Te LE 2: LUE DARNNRES LEURS On voit donc que chez le chien, par injeclion stomacale, la dose toxique est voisine de 0 gr.6 par kilogramme. Dans une prochaine communication nous pourrons montrer que ces chiffres sont sensiblement différents, si au lieu de nous servir de la voie stomacale nous donnons le chloralose par voie péritonéale ou par voie intra-veineuse. Nos expériences sur ce point ne sont pas assez nombreuses encore, tandis que nous avons bien défini la dose toxique chez le chat par ingestion stomacale. Voici ces chiffres, toujours rapporlés au kilogramme de poids vif. Ces chats avaient des poidsdivers,depuis 1,800 grammes jusque 3,700 grammes. RRELESAr ER TR SR Re be CE IIOE (nt Ge AS D ne ES rt RE ONG EOT EURE PASTEUR MAR LERE MEME RERREE - One RE ie APR ER nt ne el it M CET SITE OGre AT RTE COS PS CTe EN Or AT PR De en (Re QE PPS QE SUR AT PR AS Re A en 0 gr A0 Er ROUTE DUT. O9 a de bete nee OM OET OPEN MAMIE ER SE Oupr. 080% Sn Me Re SAR SE 0:08. 018. 4 nee de Ne NT DCR NOM RER ES RER ER Dr. 068 :2% 0 5 000 ER ANNEE NE RES te OS 088 ne Lao NP En ER EN OS OU PR RS US où à TR Ainsi, sur le chat, par une sorte de paradoxe assez curieux, la dose toxique est au moins dix fois plus faible que sur le chien; car nous pou- vons admettre une dose voisine de 0 gr. 06, alors que sur le chien cette dose mortelle est de 0 gr. 6. Nous avions d’abord supposé que c’était une différence dans la rapidité de l’absorption; mais cette hypothèse a dû être abandonnée; car, même avec des injections veineuses ou péritonéales, le chat est beaucoup plus facilement tué que le chien. Nous avons alors cherché à connaître la sensibilité du chat à l’action du chloral. On sait que la dose toxique du chloral est, chez le chien, voisine de 0 gr. 5 par kilogramme, plutôt plus forte que 0 gr. 5, ainsi que des expériences nombreuses, consignées ailleurs par l’un de nous, l'ont bien établi. Or, en faisant à des chats des injections péritonéales de chloral, nous avons eu les résultats saivants : DDR AD COS TOR PME ER EMTEC TE OR ET Eee arts ie ET me des Ne Me ES eue ORALE RENE RU ES LTUE 0 gr. 10 vUet el Verre tie elientente- Ds ete Mertieielile RE: Ainsi, qu'il s'agisse du chloral ou du chloralose, le chat est la dose toxique mortelle minimum est pour lui bien plus faible que pour le chien, sans que nous puissions en connaitre la cause. DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE 5 D'ailleurs, quant à la description des symptômes de l’intoxication, nous n’aurions qu'à répéter ce que nous avons dit à propos du chien. Peut-être, chez le chat, les symptômes d’ataxie et d'incoordination motrice sont-ils un peu plus marqués, et le sommeil n'est-il pas aussi calme aux doses qui ne sont pas mortelles. Aux doses mortelles (sur le chat) on voit bien que la mort est due à la cessation de la respiration; car le cœur bat avec force et régularité, même quand l’intoxication est profonde, et la mort, par arrêt respiratoire, imminente. Sur le chat et sur le chien, on peut, avec une très grande netteté, voir une curieuse dissociation de la sensibilité, dissociation qui nous permet de conclure en toute vraisemblance que la conscience des excitations douloureuses dans l’empoisonnement par de fortes doses de chloralose a disparu totalement. _ En effetun chat empoisonné par une dose de 0 gr. 07-environ par kilo- gramme, et placé sur une table, réagit par un soubresaut brusque et total à tout attouchement et surtout à tout ébranlement de la table. Il suffit de donner à la table le plus léger choc pour que l’animal saute en l’air vive- ment. Même quand on frappe du pied par terre, ou qu'on ferme bruyam- ment une porte voisine, c’est assez pour que l'animal tressaute, comme strychnisé, à peu près de la même manière que les grenouilles strychnisées qui sont plus sensibles, comme on sait, aux excitalions mécaniques qu’à toutes les autres. Pourtant ce même chat, qui est si remué par les ébran- lements mécaniques, ne réagit pas aux excitations douloureuses, ou à peine. Que l’on presse fortementses pattes en ayant soin de le serrer sans l’ébranler, il répondra à peine, ou même ne répondra pas du tout, de sorte qu’il ne sent pas les excilations en tant qu'excitations douloureuses; car, sil les sentait, comme le pouvoir de réagir ne lui manque pas, il ré- pondrait certainement par une contraction généralisée ou un soubresaut. On est donc forcé d'admettre ceci, c’est que la bulbe et la moelle sont sensibles à la succession, mais que les autres excitations ne l’ébranlent plus, et en particulier les excitations capables de provoquer de la douleur. Tout se passe comme si le cerveau, où la douleur est perçue, était devenu incapable d'être ébranlé par des excitations qui, à l'état normal, amènent une perception douloureuse. Nous avons le droit de conclure que les animaux chloralosés, — qu’on nous permette ce néologisme, — sont insensibles, puisque le pouvoir moteur n'est pas aboli, et que cependant ils ne réagissent pas aux excita- tions qui sont douloureuses chez les animaux normaux. Une autre observation tend à nous faire admettre que les centres ner- veux cérébraux sont empoisonnés par le chloralose. Si l’on examine avec soin un chien quia pris 0 gr. 5 par kilogramme de chloralose, on le voit, une heure environ après l’ingestion, faire de vains efforts pour marcher, et même pour se tenir debout. Alors il trébuche, 6 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE bute contre tous les objets, et retombe; mais, dans cette chute, il a une attitude qui est caractéristique, et qui ressemble, à s’y méprendre, à l’at- titude des chiens qui ont subi une opération cérébrale, une lésion ou des- truction des zones rolandiques de l’écorce cérébrale. Les pattes postérieures étendues asymétriquement, les pattes antérieures se croisant dans les posi- tions les plus étranges, la marche se faisant sur la face dorsale au lieu de se faire sur la face plantaire, toute l'apparence est caractéristique des chiens qui n’ont plus leur cerveau moteur. Nous nous proposons de voir quel sera alors l'effet des ablations céré- brales et des sections de la moelle. C’est une étude tout à fait nouvelle à entreprendre, et qui nous donnera assurément des résultats intéressants. Nous avons fait aussi d’autres expériences sur les lapins, les rats, et les oiseaux, mais nous réservons cette étude pour une prochaine com- munication. Quelques mots maintenant à propos de l'effet du chloralose sur l'homme dans l’état normal et dans les conditions pathologiques. Nous avons essayé sur nous-même, et tout d'abord avec prudence, car l'expérience sur les animaux ne peut jamais fournir d'indications abso- lues pour la dose toxique, quoique pour les substances qui ne sont pas immédiatement d’origine végétale la dose toxique soit presque toujours la même chez l’homme et l’animal. Alors nous en avons pris d’abord 0 gr. 05, puis 0 gr. 10, puis 0 gr. 20, et, n'ayant pas constaté d’inconvénient, nous avons pris en une seule fois O0 gr. 40. Cette dose nous a procuré un sommeil excellent, sans trouble au réveil, sans diarrhée, sans dyspepsie, sans la sensation pénible qui suit le plus souvent l'absorption de petites quantités de mor- phine ou de chloral. ‘ Une fois l’un de nous, au milieu de la nuit, pendant une période d’in- somnie assez pénible, en a pris d'emblée 0 gr. 75. Au bout de vingt minutes le sommeil est arrivé, sommeil très profond qui a duré, sans une seule interruption, de neuf à trois heures du matin, et le réveil a été facile et subit, sans aucune lourdeur de tête ni état nauséeux. Tout au plus, après l'ingestion de cette dose, qui était évidemment une forte dose, y a-t-il eu un peu de tremblement, mais en somme c'était peu marqué, et la dose était assez forte. On lira plus loin les observations que nous ont données quelques con- frères à qui nous avions remis, pour qu'ils en fissent emploi sur leurs malades, des cachets de chloralose, et on verra que les effets en ont été excellents, Nous pouvons donc dès à présent considérer le chloralose comme une substance hypnotique qui mérite d'être étudiée avec Le plus grand soin. Une expérience prolongée peut seule nous apprendre si elle est supérieure, ou égale, ou inférieure, au chloral, à la morphine, et dans quels casil faudra la prescrire de préférence à ces admirables médicaments. =1 DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE L'effet hypnotique est certain; mais il est fort possible qu'à côté de cette action hypnotique le chloralose en possède d’autres ; car une subs- tance aussi active, qui modifie à tel point l’excitabilité du bulbe et du cerveau est peut être un médicament très précieux. Nous nous permettons donc d'engager nos confrères à l’étudier dans la névrasthénie, dans les névralgies, et autres affections douloureuses, dans les maladies céré- brales, et dans l’ataxie, peut-être même dans le diabète? Quant on a étudié au début l’antipyrine, c'élait pour abaisser la température; or l'expérience a montré que l’action antithermique était peu de chose com- parativement à l’action analgésique. En pareille matière, avec une subs- tance tout à fait nouvelle l'emploi thérapeutique nous réserve peut-être quelques surprises. Mais on n’aura ces surprises que si l’on cherche. Pour terminer, quelques mots sur l’emploi pharmacologique du chlo- ralose. Il eût été intéressant de pouvoir l’administrer en solution, mais il est peu soluble, et, même avec addition de sucre et d’alcool, il faut chauffer pour dissoudre 5 grammes par litre. On pourrait donc en donner 0 gr. 50 dans une potion de 100 centimètres cubes; mais l’amer- tume est insupportable, et la liqueur finit par déposer des cristaux, de sorte que le titre change constamment. Si done on veut le donner sous la forme de potion, il faudra que les pharmaciens cherchent à en mas- quer l’amertume, ce qui, d’après les essais que nous avons faits déjà, ne semble pas devoir être très commode. Le mieux est évidemment de l'employer en cachets, ce qu ’on ne peut faire avec le chloral. Ces cachets sont vite absorbés, car l'expérience a prouvé que les premiers effets se manifestent une demi-heure ou trois quarts d'heure après l’ingestion. Chez certains sujets, qui avaient de la peine à prendre des cachets, on l’a administré en poudre simplement délayée dans du lait. C’est la seule forme qu'il conviendrait d'employer si l’on voulait en faire prendre à des enfants. La dose active minimum paraît être chez l'adulte de 0 gr. 20. Mais cette dose est probablement trop faible, et, dans bien des cas, il n’y aura nul inconvénient à pousser jusqu’à 0 gr. 40, et même 0 gr. 60. Un de nos con- frères a pris en une seule fois 1 gr. 50 sans ressentir d’autre effet qu'un som- meil très prolongé. À vrai dire, cette dose est assurément trop forte, et, le plus souvent, au point de vue de l’action hypnotique, il faudra se tenir au voisinage de la dose de 0 gr. #0. Même, chez les hystériques, il sera prudent d'employer au début des doses plus faibles, et comme jusqu'ici, à notre connaissance, on n’a pas encore donné du chloralose à des enfants, on devra faire les premières tentatives avec beaucoup de circonspection, et ne pas atteindre, au moins dans le début, la dose de 0 gr. 20. Enfin, comme nous ne savons encore rien de précis sur l'élimination du chloralose ingéré, il ne faudra donner des doses réitérées qu'après avoir acquis la preuve de leur innocuité, et de la non-accumulation. 8 - MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Effets thérapeutiques du chloralose, par M. L. LANDouzY. Depuis environ huit mois, j'ai donné, comme somnifère, du chloralose à 13 malades de la ville : A1 femmes, 2 hommes. La dose minima, pro noctu, a été de 0.20 centigrammes. La dose couramment donnée, pro noctu, a été de 0. 30 centigrammes. Parfois la dose a été de 0.40 centigrammes pro noctu: 0.20 centi- grammes donnés dans la première partie de la nuit, vers onze heures du soir, trois heures au moins après le diner ; 0. 20 centigrammes donnés dans la seconde partie de la nuit quand la première dose n’avait apporté qu’un court sommeil. Exceptionnellement, j'ai dû porter la dose à 0.60 cenligrammes. 0.30 centigrammes administrés à 11 heures soir; 0.30 centigrammes administrés à 3 heures malin. Toujours le médicament a été administré à des malades apyrétiques, sans lésions organiques viscérales appréciables, tous neurasthéniques à des degrés divers, chez lesquels les soporifiques classiquement employés échouaient, même à fortes doses. Chez 11 malades sur 13, le sommeil à été oblenu : (antôt (ef cela le plus souvent) le sommeil a été complet, de plusieurs heures, réparateur, calme, avec réveil facile, agréable, sans malaise; tantôt, le sommeil, pour avoir été calme, a élé suivi d’un réveii quelque peu pénible : lourdeur de tête, céphalalgie, sensations de vertige ou de vide dans la tête, inappétence, tous malaises, en somme légers, ayant duré une heure après le réveil. Chez deux malades seulement l'administration du chloralose a été suivie ou accompagnée d’un malaise un peu sérieux caractérisé par de la lourdeur de tête, de l’hébétude, des vertiges, des envies de vomir, une sensation de refroidissement des extrémités, de l'oppression eardia- que, des menaces de syncope, des palpitations. Ces deux malades (deux femmes : vingl-cinq et quarante-cinq ans) sont de grandes neurasthé- niques, sans lésions organiques du cœur, ayant été, déjà, à plusieurs reprises, sous l'influence de causes occasionnelles multiples et diverses, en proie à des accès de cardialgie et de tachycardie. D'ailleurs l’une et l'autre avaient poussé la dose, pro noctu, à 0.60 centigrammes, et cela en prenant la première dose, 0.30 centigrammes, moins d’une heure et demie après avoir mangé, et la seconde dose moins de deux heures après la pre- mière. DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE 9 Le médicament a toujours été lon en cachet qu’on prenait simple- ment. avec un peu d’eau. Le chloralose m'a paru, dans le série de prises effectuées par mes 13 malades (quelques-uns de mes malades ont pris, soit tous les jours, soit un jour sur deux, du chloralose pendant quatre à six semaines sans inconvénient) supérieur, comme effet, à moindre dose, au chloral : ses inconvénients congeslifs vers la tête m'ont paru bien moindres que ceux du chloral. Donné, non plus comme somnifère, mais comme antidouloureux et comme antinévralgique, le chloralose, administré aux doses de 0.20, 0.30, 0.40, 0.50 ‘et 0.60 centigrammes, m'a paru, dans sept expériences, donner des résultats douteux. Sur quelques effets thérapeutiques du chloralose dans l’insomnie, par M. P. Manie. Voici quelques faits relatifs à l’action hypnotique du chloralose. Je donne ici les observations simples. Femme de vingt-quatre ans. Tuberculose au premier degré sans fièvre, se plaignant d'insomnie depuis plusieurs jours, prend, le 25 décembre, deux cachets de 0.20 à 8 heures du soir. S'endort quelques instants après; pendant 10 heures jouit d’un sommeil calme; le lendemain matin à 9 h. 1/2, elle est enchantée de sa nuit et se trouve tout à fait bien; ni céphalalgie, ni ardeur dans la gorge; mais elle accuse encore une très légère sensation de sommeil. Homme de cinquante ans. Artériosclérose, athérome aortique, dyspnée et angine de poitrine à un léger degré, très faible quantité d’albumine dans l'urine. Se plaint d’insomnie persistante. On lui donne le soir deux cachets de 0.20; le lendemain, il se sent bien et se félicite d’avoir beaucoup mieux dormi que d'habitude (près de cinq heures). Garcon de quinze ans. Au 35° jour d’une fièvre typhoïde très grave avec insomnie, prend à 8 heures du soir deux cachets de 0.20; a bien dormi toute la nuit, on a même eu beaucoup de peine à le réveiller le matin. Il se sent bien, et n'accuse aucune espèce de mälaise. Le lendemain soir, on donne de nouveau un cachet, le sommeil fut égale- ment très bon. Le Dr X..., trente-neuf ans, sujet parfois à des insomnies caractérisées d’une part par la difficulté qu'il éprouve alors à s'endormir, et d'autre part par ce fait que même dans les meilléures périodes il ne dort pas plus de sept heures, 10 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ———————————— ———_— —— — —_ ————— ——_—_—_—— prend deux cachets de 0.20 en une seule prise; il s'endort en un laps de temps qui, difficile à évaluer exactement, n’a certainement pas atteint un quart d'heure, la durée du sommeil, très calme, fut de 8 heures. Le lende- main, sensation de bien-être, aucune fatigue, mais un peu d’ardeur de la gorge. A quelques jours d'intervalle, le D' X.. a de nouveau recours pàr deux fois au médicament. Chaque fois il ne prend plus qu'un cachet de 0.20; toujours le sommeil survint en moins d’un quart d'heure, et eut une durée de 7à 8 heures; dans ces deux dernières fois le D' X... n’éprouve plus l’ardeur de la gorge qu'il avait ressentie tout d’abord, et qui, suivant toute apparence, tenait à quelque autre cause (probablement respiration par une seule narine, l'autre s'étant bouchée). Homme de quarante-cinq ans, bronchite, emphysème, toux, dyspnée, insomnie; on lui donne le soir deux cachets de 0.20; le lendemain matin, il se trouve bien et dit avoir beaucoup mieux dormi qu'il ne le fait d'habi- tude. Fille de dix-neuf ans, hystérique, atteinte de vomissements hystériques très fréquents; insomnie. Prend un cachet de 0.20 à 8 heures du soir, dort jusqu’à 3 heures du matin, « ce à quoi elle n’était plus habituée », se félicite de s'être endormie facilement. Femme de vingt-trois ans. Métrite chronique, hystérie. Prend un cachet de 0.20 à huit heures du soir; prétend n'avoir pas bien dormi, mais la veilleuse qui l’a surveillée dit au contraire qu'elle a dormi toute la nuit. Femme de quarante-trois ans. Bronchite chronique, tuberculose pulmo- naire. Prend un cachet de 0.20 à 8 heures du soir, a bien reposé toute la nuit. Le matin dit avoir entendu ce qui se faisait autour d'elle; mais dans un demi- sommeil. Se félicile de n’avoir pas toussé pendant la nuit, contrairemient à son habitude. Fille de vingt-trois ans. Amygdalite subaiguë, en voie de guérison. Un cachet de 0.20 à 8 heures du soir. La malade a bien dormi. Femme de trente-neuf ans. Bronchite chronique et emphysème, cœur secon- daire, présente actuellemeut une dyspnée assez vive, et un certain degré d’asystolie. Prend un cachet de 0.10 à 8 beures du soir; aucun résultat, l’in- somnie est restée la même. Il est vrai que la dose était faible ; mais, vu l’état de la malade, le chef de service aurait craint de donner une plus forte dose. Fille de vingt ans. Chloro-anémie, lymphatisme, tuberculose pulmonaire. Prend un cachet de 0.20 à 8 heures du soir, dort admirablement toute la nuit ; mais ce qu’il y a de très curieux, c’est que vers minuitelle s'est levée et a fait le tour de la salle sans se réveiller ; en fait, il s’agit d’un accès de somnambu- lisme provoqué, suivant toute vraisemblance, par l’administration du chlo- DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE 14 ralose. La malade affirme n’avoir jamais auparavant entendu dire qu'elle fût somnambule. A côté de ces faits positifs, rapportons quelques résultats, négatifs ou médiocres, qui semblent prouver que le chloralose n’agit pas aussi bien que la morphine dans l’insomnie d’origine alcoolique. Femme quarante-cinq ans, alcoolique, présentant du tremblement, des ver- tiges, de l’insomnie, de l'excitation mentale. On lui donne à 8 heures du soir deux cachets de 0.20 centigrammes; elle n’a que peu dormi dans la nuit; mais le matin on la trouve somnolente; elle dit se trouver « abasourdie » et prétend qu'il y a une heure ou deux, elle était tellement engourdie que, bien qu’elle entendit tout ce qui se passait autour d'elle, elle se sentait incapable de bouger. Le lendemain soir on donne de nouveau deux cachets de 0.20; elle dit n'avoir pas mieux dormi cette nuit-là que les autres. Femme de cinquante-cinq ans, atteinte de paralysie alcoolique ancienne des membres inférieurs ; insomnie. On lui donne 2 cachets de 0.20 à 8 heures du soir; résultat médiocre. L’in- somnie et l'agitation ont persisté à tel point que l'infirmière de veille a dû lui faire une injection de morphine; le lendemain matin, cette malade a pré- tendu se sentir « abasourdie ». Le lendemain soir à 5 h. 1/2, on donne de nouveau 3 cachets de 0.20 cen- ligrammes ; le résultat ne fut pas meilleur. Il convient d'ajouter que les lits de ces deux malades, chez lesquelles les résultats furent médiocres, étaient contigus. Effets du chloralose dans l’insomnie. Note de M. R. MouTarD-MaRTIN, Médecin de la Pitié. Le chloralose administré dans le but de provoquer le sommeil pré- sente certains avantages dont les principaux sont les suivants : le som- meil est rapide, léger ; le réveil complet, sans la lourdeur que laissent à beaucoup de personnes les préparations de chloral. Il n’y a pas de cons- tipation, inconvénient que présentent si souvent les préparations d’opium, et l'estomac n’a paru modifié en aucune manière défavorable : l'appétit n'est pas diminué, il a été même augmenté chez quelques personnes. Le médicament est efficace à faible dose (de 20 à 60 centigrammes). Sous forme de cachets ou de perles, il est très facile à absorber et ne 12 = MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE laisse pas le goût spécial désagréable qu’accusent ceux qui font usage des solutions de chloral. Voici d’ailleurs la relation succincte des faits sur lesquels repose notre opinion. Ogs. I. — Plass... (Jean), cinquante-six ans, chauffeur. Salle Rayer, n° 48, hôpital de la Pitié. Depuis trois mois, cet homme a perdu des forces, et commence à éprouver une lassitude habituelle. Il n’a ni amaigrissement ni vomissement. Le sym- ptôme qui attire le plus son attention et la nôtre est une insomnie continuelle accompagnée de rêves. Cet homme ne présente toutefois ni tremblement m pituites matinales qui permettent de le taxer d’alcoolique : il ne fait pas, d'a- près ses aveux tout au moins, d’excès d'alcool et boit seulement un litre de vin par jour. Je constate un atherôme généralisé qui me fait diagnostiquer une insomnie permanente par trouble de la circulation cérébrale. Aucun phénomène de ramollissement cérébral. Le 13 avril 1832, à 4 heures de l’après-midi, je lui fais donner une cuillerée d’une solution de chloralose (cette solution représente 20 centigrammes par cuillerée), léger assoupissement jusqu’à 6 heures ; à ce moment on lui donne une seconde cuillerée. A 8 heures, on doit le réveiller pour lui en donner une troisième. É Le sommeil a été profond jusqu'à 2 heures du matin (soit 8 heures de som- meil). De 2 heures à 4 heures, insomnie, une quatrième cuillerée de la solu- tion lui est donnée, aussitôt un sommeil calme recommence jusqu’à 8 heures du matin (4 heures de sommeil). Aucun rêve, aucun cauchemar. Le réveil est facile, complet, sans lourdeur de tête. Le 14 avril, on ne donne pas de médicament. Le malade dort 8 heures, ce qui ne lui était pas arrivé depuis bien des mois, mais son sommeil est agité et interrompu par des périodes d’insomnie. Le 15 avril, pas de chloralose. Le sommeil est moins bon que la nuit précédente. IL demande à sortir du service. Os. II. — Chilt... (Marie), trente et un ans, entrée salle Trousseau (hôpital de la Pitié), le 14 avril 1892. Cette femme, accouchée le 22 mars, est actuellement en pleine infection puerpérale. Ventre ballonné et sensible, lochies fétides, frissons. Pleurésie gauche qui, ponctionnée le 45 avril, donne un litre de liquide louche assez épais. Nouvelle ponction le 23. Depuis son entrée, la malade a de l’insomnie qui est devenue complète dans les cinq derniers jours. Le 26 avril, à 5 heures du soir, on donne un cachet de chloralose de 30 cen- tigrammes. A 7 heures, la malade s'endort d'un sommeil profond et calme (elle urine sous elle en dormant). Le matin, vers 5 heures, on doit la réveiller, mais elle se rendort immédiatement après jusqu'à 9 heures du matin. À 10 heures je la vois, elle est complètement réveillée et ne ressent aucun trouble stomacal, Le 27, pas de chloralose. Le sommeil est néanmoins beaucoup meilleur que pendant les nuits précédentes, sauf la dernière : il est moins bon que l’autre nuit, pas d’agitation. DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE 413 _— (€... Le 21 avril, à 5 heures du soir, un cachet de 30 centierammes est adminis- tré. Sommeil vers 7 heures, calme et sans rêves. Réveil à 3 heures du matin; puis jusqu'à 7 heures du matin somnolences entrecoupées de réveils. Elle reste un peu somnolente jusque vers 10 heures du matin, puis se réveille complète- ment, sans mal de tête ni fatigue. Le 29 avril, pas de médicament. Sommeil entrecoupé de quintes de toux. Du 30 avril au 2 mai, pas de médicament. 2 mai. La dernière nuit a été plus agitée. Je fais prendre, à 6 heures du soir, un cachet de 30 ceutigrammes de chloralose : à 7 heures environ, la malade s'endort et ne se réveille le matin que vers 5 heures. Nouvelle thoracentèse. L'état général est mauvais. La famille emmène la malade. Ogs. III. — (Note remise par M. C...). M. G..., externe du service, a depuis longtemps un sommeil agité interrompu parfois pendant des heures entières avec rêves où les évènements de la journée, études, occupations, travaux, revêlent un caractère pénible, ennnis de toutes sortes, échecs d'examen, insuccès divers, aventures ridicules. Le 23 avril, il prend un cachet de 40 centigrammes à 10 h. 1/2, étant en omni- bus. Il se couche à 11 heures, et s'endort tout de suite. À une heure qu'il ne peut déterminer, une fenêtre s'étant ouverte, il constate, après s'être levé, un peu d'incertitude dans les mouvements et quelques tournoiements. Reprise im- médiate du sommeil avec rêves sensés, suivis, et restés le lendemain dans la mémoire. Le matin, le sommeil est interrompu parles bruits de la maison et repris chaque fois avec sensation de bien-être et de conscience au matin; pas de fatigue de tête, allègement de toutes les facultés (observation générale à tous les lendemains de prise de cachets). Du 23 au 25, pas de médicament. Sommeil beaucoup meilleur que d’ordi- naire. ; Le 25, un cachet de 40 centigrammes est pris vers 9 h. 1/2. Envie rapide de dormir, non satisfaite par suite de l’arrivée d’un ami. A 10 h. 35, on se couche ;, sommeil profond jusqu'au matin. Réveil complet sans malaise à 7 heures. 25 avril, à 5 h. 1/2, dans la rue, M. C... prend un cachet. À 6 h. 1/4, après plusieurs visites, 1l éprouve en sortant de chez un ami une sensation d’incer- titude dans la marche et des secousses musculaires très prononcées, au point de ne pouvoir compter le pouls pendant 10 à 15 secondes sans être arrêté par un mouvement involontaire du poignet ou de la main. À 7 heures, diner sommaire, par précaution et non par manque d'appétit. Obligé de rester sans se coucher jusqu'à 10 heures, les secousses ayant complètement disparu, il éprouve des envies impérieuses de dormir. Sommeil profond jusqu’au lende- main matin. Du 26 au 27, sommeil bon sans médicament. Depuis cette époque, M. C..., a pris à différentes reprises un cachet de 30 centigrammes, qui chaque fois, lui a procuré un sommeil calme, sans aucune secousse du genre de celle qu’il avait éprouvées le 25 avril, sans aucun malaise. Mais chaque fois il a pris le cachet en se couchant. Os. IV. — M. E. M..., quarante-cinq ans, est atteint de rhumatisme avec douleurs et gonflement très marqué des genoux, articulations tibio-tarsiennes 14 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE droite et gauche, poignet et coude gauche. Il a depuis huit jours un état d'insomnie permanente. Le 10 septembre, il prend vers 9 heures du soir un cachet de chloralose de 30 centigrammes. Peu de temps après il s'endort et repose avec calme jus- qu'au lendemain 6 heures. Réveil complet; aucun trouble d'estomac, aucun malaise, aucune lourdeur. Le 12 et le 16 septembre M.M..., prend de nouveau un cachet de 30 centigrammes de chloralose. Mêmes résultats que le 10 septembre : le sommeil se manifeste environ 30 à 40 minutes après la prise du médicament et est bon jusqu’au matin. Au mois de mai 1892, M. M.., avait déjà essayé de faire usage de cachets de chloralose de 30 centigrammes qui lui avaient procuré pendant les trois jours où il prit le médicament, un sommeil complet, léger, avec Détail sans aucune lourdeur de tête. 3 O8s. V. — Catherine G..., trente-quatre ans, cuisinière. Etat d’insomnie très marqué depuis plusieurs nuits. Je prescris un cachet de 20 centigrammes de chloralose. Au bout de près de deux heures, le sommeil survient. Trois réveils dans la nuit. Au matin, aucun malaise d'estomac, réveil complet. La dose me paraît insuffisante, je prescris de prendre une autre fois deux cachets de 20 centigrammes chacun à une heure d'intervalle ou, si le sommeil survient rapidement, lors du premier réveil. Il est ainsi fait quelques jours après, et le sommeil est cette fois complet après le second cachet pris vers 2 heures du matin : il dure jusqu'à 6 heures du matin, et Le réveil est sans fatigue, sans malaise d’estomac. OBs. VI. — Mie B..., dix-neuf ans. Anémique. À de fréquents maux de tête et des névralgies qui occupent tantôt le ventre, tantôt la tête ou les dents qui sont d’ailleurs en très bon état. Le 16 septembre, elle prend un cachet de chloralose de 30 centigrammes, Depuis huit jours, elle dormait encore plus mal que d'ordinaire. Une heure après la prise du cachet, elle s'endort jusqu’au lendemain matin, et le réveil se fait facilement, sans lourdeur de tête, sans malaise d'estomac. Mile B... nous affirme qu'après avoir pris plusieurs soirs de suite un cachet de 30 cen- tigrammes de chloralose qui chaque fois lui a procuré un sommeil rapide, facile, avec réveil complet, elle n’a éprouvé aucun malaise d'estomac, et même un appétit plus vif et plus ouvert. Os. VII. — X..., soixante ans, terrassier, entré le 16 mai 1892, Salle Rayer (hôpital de la Pitié). Cet homme, qui est un alcoolique manifeste, avec cauchemars, rêves, trem- blement des mains, pituites matinales, a des insomnies fréquentes et prolon- gées. Je lui fais donner le 20 mai une dose de 20 centigrammes de chloralose qui est prise à 7 heures du soir. Sommeil à huit heures. Réveil à minuit. Second cachet de 20 centigrammes. Au bout de 15 minutes environ, le sommeil recom- mence jusqu'au matin 3 heures, Le malade nous dit n’avoir eu ni rêves ni cauchemars. Il est parfaitement réveillé, et n’a éprouvé ni mal à la tête, ni lourdeur ou pesanteur d'estomac. DE L'ACTION PHYSIOLOGIQUE DU CHLORALOSE 15 Le 22 mai. Mêmes doses données de la même manière : mêmes résultats. Pendant la nuit intermédiaire, alors que le malade n’a pas pris de chloralose, le sommeil a été interrompu souvent et accompagnée de rêves et de cauche- mars. k O8s. VIII. — Adeline Cotel, vingt-six ans. Salle Trousseau (hôpital de la Pitié). Métrite. Anémie. Bruit de souffle dans les vaisseaux du cou. Gastralgie. J'institue le traitement ferrugineux combiné avec des douches froides. Au bout de quinze jours, la malade accuse des insomnies qui seraient très fréquentes et très prolongées. Le 18 juin à 5 h. 30 elle prend un cachet de 30 centigrammes de chloralose. Elle s’endort vers 6 h. 1/4 et s’éveille une fois vers 11 heures du soir pour ne plus s'éveiller que définitivement vers 5 heures du matin. Aucune sensa- tion du côté de l'estomac, ni crampe ni douleur à la suite de l’ingestion ou de l'absorption du médicament. Réveil complet et facile. La malade prend de nouveau un cachet de 30 centigrammes de chloralose le 22 juin. Du 19 au 22, le sommeil est resté ce qu'il était avantle 18, c’est-à- dire difficile, léger, ARR en interrompu. Le cachet est pris le 22, à 6 heures. Vers 6 h. 45, la malade s'endort ; elle se réveille à 11 heures, puis à 3 heures du matin et enfin à 8 heures. Elle dit s'être endormie facilement après chaque réveil quoique n'ayant pas pris d'autre cachet de chloralose pendant la nuit (j'avais recommandé de lui en donner un deuxième au besoin). _ En résumé, je constate à la suite des huit observations relatées ci- dessus et de quatre autres dont je n’ai pas relevé le détail, que : 4° Le chloralose est un hypnotique efficace à la dose de 30 à 40 centi- grammes. 2 La dose que je préfère, et le mode d'administration sont les suivants : deux cachets de 20 centigrammes chacun, donnés, le premier, une heure avant le moment où l’on désire s'endormir, et le second, au moment du premier réveil. 3° Le sommeil provoqué par le chloralose est calme, sans rêves. 4° Le sommeil se manifeste de une demi-heure à une heure après l’in- gestion de 20 centigrammes de chloralose. 5° Le réveil à la suite de ce sommeil est complet, lee sans Mornians de tête. 6° Le chloralose ne provoque aucun trouble de l'estomac : quelques personnes même accusent un appétit meilleur après avoir pris pendant quelques jours du chloralose. 7° Le chloralose n’exerce sur l'intestin aucune action, et ne provoque pas de constipation. 8° Après avoir fait usage plusieurs jours de- suite du chloralose et obtenu le sommeil avec les caractères notés ci-dessus, on conserve, si l’on 16 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : reste plusieurs jours sans en prendre, un sommeil moins bon qu'avec le médicament, meilleur qu'avant d'en prendre, et cela pendant une période de deux à quatre jours. Note sur le chloralose, par M. Cn. SÉGARD. J'ai expérimenté le chloralose dans les conditions suivantes : I. — Madame X..., neurasthénique, sujette depuis longtemps à des insom- nies. — À plusieurs reprises, j'ai donné un seul cachel de 20 centigrammes. Chaque fois, la nuit a été calme, le sommeil s’est produit sans les cauche- mars habituels ; au réveil, il n’y a ni somnolence, ni pesanteur, ni dyspepsie. En outre, les bruits otiques et les bouffées congestives (dus à une ancienne lésion de l'oreille) ont chaque fois cédé, après l'administration du cachet donné en vue de l’insomnie. II. — M. X..., soixante-dix-huit ans. Affection mitrale et aortique, suffoca- tion intense, agitation, orthopnée, insomnie; bref, état de crise aiguë, appro- chant de l’angine de poitrine. J'ajoute qu'en temps ordinaire, M. X... dort très peu. Deux cachets de 20 centigrammes, donnés l’un à 9 heures, le second à minuit, ont à quatre reprises, procuré une nuit calme, avec 5 heures au moins de bon sommeil, et la cessation des symptômes angoisseux. III. — M. A.., quatre-vingt-deux ans. Artério-sclérose et myocardite, suffo- cation; insomnie. Mêmes résultats. IV. — M. S.., trente-huit ans. Douleur névralgique (plexus cervico-brachial) atroce, maintenant la veille et arrachant des plaintes au malade. Sommeil obtenu dans la deuxième partie de la nuit, une heure après l’admi- nistration simultanée de deux cachets. C’est du reste en général le temps qu’il faut pour que le médicament opère (de 3/4 d'heure à 1 heure). Au réveil, néanmoins, la douleur existe encore. V.— MwT..., vingt-sept aus. Insomnie due à de vives douleurs de goutte avec surexcitation nerveuse. Un seul essai, infructueux. VI. — M.F..., quarante ans. Paralysie agitante ; il a été donné jusqu’à quatre cachets; somnolence profonde tout le jour, mais plutôt aggravation des trem- blements. Somme toute, il m'a paru que le chloralose : 19 N'a pas d'action analgésique; 20 Que c’est, même à doses minimes, un hypnotique très fidèle. Il agit assez rapidement (3/4 d'heure à 1 heure), il ne provoque aucune lourdeur de tête et aucun trouble digestif. SUR LA PATHOGENIE DU DIABÈTE ROLE DE LA DÉPENSE ET DE LA PRODUCTION DE LA GLYCOSE DANS LES DÉVIATIONS DE LA FONCTION GLYCÉMIQUE PAR MM. A. CHAUVEAU et KAUFMANN (Mémoire présenté à la Société de Biologie dans la séance du 11 février 1893.) Il n’est guère de sujets qui importent plus aux progrès de la physio- logie générale que la pathogénie du diabète, La fonction glycémique joue, en effet, un rôle des plus importants dans les actes nutritifs, en concou- rant à l’alimentation des sources de force vive nécessaire au travail phy- siologique de l'organisme animal. Une théorie nette et précise des troubles qui se traduisent, par le diabèle sucré, dans cette fonction, serait done d’un précieux secours pour l'étude des phénomènes délicats et complexes de la nutrition. Le but de cette nole n’est pas de fournir cette théorie, mais d’en préparer les bases, en montrant quelle est la cause immédiate de la déviation fonctionnelle qui provoque le diabète sucré, c'est-à-dire la glycosurie. Nous rappellerons d’abord, en quelques mots, ce qui est entendu ici par la « fonction glycémique » et ses déviations. Le sang, privé de tout apport alimentaire, c’est-à-dire étudié sur un sujet soumis au jeùne, contient constamment de la glycose. C'est celui des veines sus-hépatiques qui est le plus sucré de toute l’économie, et le sang veineux de la circulation générale est toujours moins riche en glycose que le sang artériel. Ce sucre physiologique est donc en état de formation et de destruction incessantes. Il est formé dans le foie (CI. Ber- nard) et détruit ou transformé dans les réseaux capillaires intermédiaires entre les artères à sang rouge et les veines à sang noir (A. Chauveau), C’est cette condition du sang qui est exprimée par le terme de fonction glycémique. Expression impropre, sans doute, car elle fait entendre une manifestalion d'activité, un mouvement et ne s'applique en réalité qu'à une sorte d'état statique. La vraie fonction glycémique se compose des actes nutritifs intimes qui préparent, (transforment et ulilisent les maté- BioLocie. Mémoires. — 90 série, m. V. 2 18 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE riaux du sucre du sang. Mais il y a grand avantage, en raison de la com- mode simplicité qui en résulte pour l'exposition, à caractériser ces actes, peu connus dans leur mécanisme immédiat, par l'état qu'ils communi- quent au sang, au point de vue de la teneur en glycose. Cet état du sang est communément désigné par l'expression de glycémie. On emploie aussi couramment celles d’hyperglycénie et d'kypoglycémie, appliquées aux cas d'exagéralion ou de diminution de la glycémie nor- male où physiologique. La fonction glycémique représente donc d’une manière assez heureuse l’ensemble des actes qui aboutissent au maintien, à la permanence de la glycose dans le sang, à l'équilibre entre la dépense et la production de cette substance. Prendre ainsi les choses en bloc, ce n’est pas éluder les difficultés que présente l'analyse des phénomènes, mais restreindre, provisoirement, le champ des investigations pour en rendre l’exploration plus facile. On sait que la glysosurie, symptôme essentiel du diabète sucré, est le fait de l’hyperglycémie, c'est-à-dire d’une accumulation anormale de sucre dans le sang. Mais quelle est la cause immédiate de cette hyper- glycémie? Le sang devient. il trop riche en sucre parce que les tissus cessent d'emprunter celte substance au fluide nourricier, pour les besoins des actes nutritifs qui se passent au sein des éléments anatomiques? Ce fluide s’enrichit-il, au contraire, en matière glycosique, parce que le foie en verse davantage dans le torrent circulatoire, ou, même, parce que d’autres organes deviennent alors des auxiliaires du foie dans sa fonction glycoso-formatrice? En d'autres termes, est-ce la dépense du sucre qui s’arrêle ou sa production qui s’exagère, quand cette substance s’accumule dans le sang du diabétique, au point de rendre l’organisme intolérant pour elle et de provoquer une élimination par la voie rénale? C'est le pre- mier problème qui se pose. Les cliniciens et les physiologistes ont cher- ché à le résoudre. Sa solution reste néanmoins toujours en suspens. La méthode à laquelle nous avons eu recours pour essayer de trouver cette solution repose tout entière sur les résultats de l'analyse compara- tive des sangs artériel et veineux de la circulation générale. Trois cas pouvaient se présenter : ou bien le sang veineux serait, comme à l'état normal, moins riche en glycose que le sang artériel, et alors, l'hypergly- cémie devrait être mise sur le compte, non d’un défaut de consommation de la glycose, mais sur celui d’un excès de production; ou bien, les deux sangs se montreraient à peu près également riches en sucre, ce qui impli- querait nécessairement une dépense nulle de celte substance dans les réseaux capillaires et placerait dans ce défaut de dépense la cause de l'hyperglycémie; ou bien enfin, le sang veineux accuserait toujours plus de sucre que le sang artériel, d’où indice certain que l’hyperglycémie est due à une production de glycose sur place, dans tous les tissus de l’éco- nomie. Voilà le principe auquel nous avons demandé la solution du pro- blème de l’hyperglycémie diabétique, SUR LA PATHOGÉNIE DU DIABÈTE 19 Mais il nous a paru que, pour donner à cette solution un caractère vraiment scientifique, nous ne devions pas considérer seulement le cas du diabète. Nous avons pensé que, dans cette étude de la dépense de glycose effectuée par l'organisme troublé, il nous fallait comprendre toutes les déviations de la fonction glycémique, les modifications en moins, comme les modifications en plus, l’'hkypoglycémie avec l'hyperglycémie, à tous les degrés qu'elles peuvent présenter. Nombreux sont les cas dans lesquels l’hyperglycémie et l'hypoglycémie peuvent être provoquées expérimentalement. Nous les avons étudiés à peu près tous. Mais nous nous sommes particulièrement attachés, pour le moment, d’une part, aux espèces où les dévialions de la fonction gly- cémique sont provoquées par une alteinte du système nerveux central, d'autre part à l’hyperglycémie du diabète expérimental de Von Mering et Minkowski. On devinera aisément les raisons de ce rapprochement, et nous espérons être en mesure de les développer prochainement, en mon- trant par quels liens le diabète pancréatique se rattache à l’hypergly- cémie et à la glycosurie de cause nerveuse centrale. Nous croyons inutile de fournir aucun détail sur nos procédés expéri- mentaux. Il nous suffira de donner quelques indications générales à ce sujet. Et d’abord, prévenons que notre étude actuelle vise exclusivement la glycogenèse essentiellement autochtone, indépendante de toute interven- tion des matières sucrées ou saccharifiables fournies au sang par le travail de la digestion. Nos expériences ont donc toujours porté sur des sujets — des chiens — en état de jeûne. Ajoutons que, dans ces expériences, la ceuillette et le traitement des deux sangs qui doivent être comparés ont élé exécutés dans des condi- tions d'uniformité aussi parfaite que possible. Pour assurer l'exactitude des résultats comparatifs des deux analyses, il faut en effet : 1° Que les deux sangs soient recueillis simultanément et en méme quantilé ; 2° Qu'on les traite exactement de la même manière (1); 3° Que les opérations en général, particulièrement le dosage de la glycose par la liqueur titrée soient toujours exécutées par le méme mani- pulateur exercé. (4) La méthode de traitement importe peu. J'ai obtenu jadis d'excellents résultats de l'emploi du noir animal acidulé avec l'acide acétique. Plus tard, les tra'tements au sulfate de soude, ou à l'alcool, nous ont également réussi. Dans les expériences actuelles, c’est le procédé Artus qui a élé mis en œuvre. L'important, c'est d’être parfaitement familiarisé avec la méthode que l’on a adoptée, quelle qu'elle soit, et de l'appliquer toujours de la même manière. Les analyses comparatives sontalors très suffisamment exactes, même quand la méthode de traitement est incapable de donner intégralement le chiffre absolu de la glycose contenue dans le sang, 20 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Il est bien rare qu'avec ces précautions, on n'arrive pas à une constante exactitude. Mais il n'en faut négliger aucune. On doit tenir surtout (ce qui n’est pas très difficile) à ce que les deux sangs soient puisés en même temps dans les deux vaisseaux : il suffit parfois d’un si court intervalle pour que la composition du sang se modifie, surtout dans les expériences où l’on fait intervenir les lésions du système nerveux! Il nous est bien arrivé sans doute d’être obligé de donner quelque accroc à ce principe de l'identité absolue des conditions expérimentales. C'est de peu de con- séquence quand les expériences sont multipliées. En effet, les petites irré- gularités qui peuvent se produire alors, dans le dosage du sucre, se noient dans la masse des résullats irréprochables et n’en modifient pas sensible- ment la moyenne. A l’état physiologique, l'analyse comparative du sang artériel et du sang veineux, pratiquée dans les conditions qui viennent d'être rappe- lées, ne manque jamais de démontrer que le sang veineux est moins riche en sucre que le sang artériel. Pourquoi ce fait, que nous avons pu vérifier des centaines de fois depuis sa première constatation en 1856 (1), (1) On continue encore à commettre l'erreur d'attribuer à Cl. Bernard la démonstration de ce fait et de la conséquence qui en découle, la consomma- tion incessante de glycose qui se fait dans les capillaires de la circulation générale, Je réilérerai ici la rectification: que j'ai faite déjà en 1886, le 22 no- vembre (Comptes rendus, t. CI). Dès 1856, ce fait et plusieurs autres qui y sont connexes avaient été nettement établis par moi. On s’en convaincra en consultant mes mémoires du temps, tout particulièrement les deux publica- tions suivantes : 4° Nouvelles recherches sur la question glycogénique (Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1856, t. XLII, p. 1008). 20 Se forme-t-il du sucre dans l'intestin des animaux nourris exclusivement à la viande? (Moniteur des hôpitaux, 1856, p. 946.) Il est indispensable que je rappelle ici, en quelques lignes les points nou- veaux que je mets en lumière dans ces deux mémoires. 4° CI. Bernard, en 1856, pensait qu'en dehors de l’état de digestion, le sang de la circulation générale est absolument privé de glycose : je démontre que la glycose est un élément constant du sang, non pas seulement sur les sujets qui ne sont pas en élal de digestion, mais sur ceux qui sont soumis à l'inanition. Le sucre ne disparaît du sang qu’au moment où commence, chez les inanitiés, la période de refroidissement qui précède la mort. 2 Sur les animaux à jeun, le sang du cœur droit est sucré, d'après CI. Ber- nard, et celui du cœur gauche absolument privé de glycose : mes expériences, à moi, établissent que le sang des deux cœurs est toujours à peu près égale- ment sucré, chez les sujets soumis au jeûne, et quelle que soit la durée de celui-ci. 3° CI. Bernard admettait done que le sucre formé dans le foie se détruit entièrement dans le poumon : je prouve qu'au contraire, le sucre du sang n’est ni arrêté ni transformé pendant la traversée des capillaires pulmonaires. à ; Ni ; À ÿ 4 SUR LA PATHOGÉNIE DU DIABÈTE de] a-t-il été accepté tardivement el trouve-t-il même encore quelques con- tradicteurs, quoiqu'il n’y ait probablement plus un seul physiologiste qui n’admette la destruction partielle de la glycose du sang dans la traversée des capillaires? [l ne faut accuser, croyons-nous, que l'inobservalion de la prescription dont il vient d’être question, concernant la rigoureuse uni- formilé à introduire dans les conditions des analyses comparatives des- tinées à mettre en évidence la différence de composition des deux sangs. Et malgré cette inobservation possible, il n’en reste pas moins acquis que les physiologistes dissidents qui ont fait un certain nombre de ces ana- lyses arrivent aux mêmes résultats moyens que nous-mêmes. Cest ce qu'il nous serait très facile de démontrer, en citant par exemple les tableaux dans lesquels Seegen expose la composition moyenne du sang Ce sucre arrive intact dans les artères du système aortique, qui le portent aux capillaires de la circulation générale, où il est utilisé en partie par la création de la force vive nécessaire au travail physiologique des tissus vivants. Le sang des veines est, en effet, toujours moins sucré que le sang des artères affé- rentes. 4° J'ajoute que, dans ces mêmes Mémoires, c'est-à-dire en 1856, je donne les résultats des premières analyses qui aieut été faites sur le sang des veines sus-hépatiques recueilli sans avoir subi de stagnation dans le foie. J'avais imaginé pour cela un procédé de cathétérisme de ces veines, par la jugulaire la veine cave supérieure, l'oreillette droite, la veine cave inférieure, l’'embou- chure des principales veines sus-hépatiques du lobe droit du foie. Or, ce pro- cédé, qui permet d'obtenir le sang hépatique presque sans traumatisme, sur l'animal vivant, en plein état physiologique pour ainsi dire, est couramment “attribué en Angleterre, en Allemagne, mème en France, à tel ou tel physio- logiste qui ne l’a mis en œuvre que bien longtemps après moi. CI. Bernard connaissait bien toutes ces contributions importantes apportées par mes travaux à l'étude de la fonction glycogénique. J'ose dire qu'il les estimait : il me l’a souvent témoigné. Dans son cours de 1876, il ne les a pas _oubliées, puisqu'il les cite et qu’il les adopte sans aucune restriction. Peut-être CI. Bernard n'a-t-il pas été clair, ni assez explicite dans ses citalions. Mais était-ce bien nécessaire ? Ne devait-il pas supposer parfaitement connus des travaux publiés depuis près de vingt ans? En tout cas, il est assez singulier que je sois considéré, dans la question actuelle, comme ayant confirmé les faits et les vues de C1. Bernard, lorsque c’est lui, au contraire, qui a été mon confirmateur, ce dont je me trouve très grandement honoré. On ne se méprendra pas sur la signification de ma réclamation actuelle. Elle ne va pas à la mémoire de CI. Bernard, mais à ceux qui interprètent _mal son cours de 1876. J'ai toujours présenté mes contributions en glycogénie — et je les présente encore — comme une conséquence naturelle de la belle découverte due au génie expérimental de CI. Bernard. Je ne m'enorgueillis que d’une chose, c’est de les avoir produites à l'appui de cette découverte à une époque où, de tous côtés, les faits méconnus ou incomplètement vus par CI. Bernard étaient présentés, non sans esprit de dénigrement, comme des arguments plaidant contre la réalité de cette découverte. (A. Cn.) 929 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de la veine porte comparé à celui de l’artère carotide, dans les cas de jeûne ou d'alimentation avec de la viande ou des corps gras. Or, la même supériorité du sang artériel sur le sang veineux, au point de vue cle la teneur en sucre, se retrouve dans toutes les déviations de la fonc- tion glycémique qui sont provoquées par une lésion du système nerveux central. Cette supériorité se montre également dans l'hyperglycémie qui suil l'extirpation du pancréas. La démonstration en sera faite par la pré- sentation des résultats de nos analyses dans chaque cas particulier. 1° Æyperglycémie déterminée par l’assommement. — CI. Bernard a aémontré que les animaux qui recoivent un coup de masse sur le crâne peuvent devenir hyperglycémiques et glycosuriques. Ceci ne change rien aux proportions habituelles de glycose dans le sang artériel et dans le sang veineux : Exe. I. — Gros chien que l'on fait vivre avec la respiration artificielle après l'avoir assommé. Une heure après l’assommement : glycose p. 1000 dans le sang : de artère MéMOorAlC REPORTER TER EC PRIE de la veine fÉMOrAC DE AN EN Re rer aUN) 2° Hyperglycémie déterminée par la piqüre du plancher du 4° ventricule. — Dans l'expérience classique de Cl. Bernard, l'hyperglyÿcémie tempo: raire provoquée par la piqüre bulbaire laisse également subsister la diffé- rence de richesse en glycose existant entre les deux sangs. Exp. IT à V. — Il s’agit de quatre expériences anciennes, exécutées en 1859- 1860 et dont le résultat moyen est exprimé par les chiffres suivants conservés dans un carnet du temps. 2-3 heures après la piqûre : glycose p. 1000 dans le sang : de Ta Carotide. CAMERA ARR SEE AE de la jueulaires TEA ES OR EN UE 3° Iiyperglycémie délerminée par la section sous-bulbaire ou atloïdo-occi- pilale de la moelle épinière. — La section bulbaire est un des moyens les plus sûrs de produire une hyperglycémie généralement décroissante et accompagnée de glycosurie. — La respiration artificielle qu’on est obligé de pratiquer alors n’y est pour rien, comme le prouveront des expériences signalées plus loin. SUR LA PATHOGÉNIE DU DIABÈTE 23 —_————————————————…———————————…——…—— —_ “’û“û“———————…—_—…— —————…———————_——_——_——_—_—.—_——————]— Exp. V1. — Chien ayant déjà servi à une autre expérience. Une heure après la section : glycose p. 1000 dans le sang : deplartèrertémorales. 2 hr 02/2080 dé laveines fénmoralenr 2L.8e eue. CT 6480008 Exr. VII. — Chien sur lequel la section bulbaire n’a pas été tout à fait com- plète. 1 h. 20 minutes après la section : glycose p. 1000 dans le sang : denantéreMémorle MP. er deMaMeineMÉMoOrTleRN A EEE SE Re lEor 621 Exp. VIIL — Chien dont la moelle a été parfaitement coupée. 4 h. 10 minutes après la section : glycose p. 1000 dans le sang : denRantereMemorale. es ue UE AND Er UE0 de le vote moe A Eee Le Pen e R CU n° Hypoglycémie déterminée par la section de la moelle épinière au niveau du renflement brachial et dans les régions avoisinantes. — Cette opération, d'après CI. Bernard (il a en vue surtout la section médullaire entre la 7° vertèbre cervicale et la 1'° vertèbre dorsale), fait disparaître le sucre du sang. C’est une exagération au moins en ce qui concerne le chien. Le sang, chez cet animal, ne cesse jamais de contenir du sucre après la section de la moelle entre la 7° vertèbre cervicale et la 1° vertèbre dorsale. Mais la quantité en est moindre qu’à l’état normal : il y a hypo- glycémie plus ou moins manifeste. Encore faut-il choisir le bon moment pour la ceuillette du sang, si l’on veut constater cette hypoglycémie. Quand on fait cette ceuillette quelques minutes seulement après la sec- tion, on est exposé à trouver de l'hyperglycémie passagère, parfois très prononcée. Mais cette première phase accomplie, l'hypoglycémie s'établit d'une manière définitive, Comme ce n’est pas de ce fait dont nous avons à nous occuper maintenant, nous le laissons de côté pour le reprendre plus tard à l’occasion d’une autre étude. Nous donnerons seulement cette indication que ce n’est pas seulement au niveau de l'origine de la 8° paire cervicale que la section médullaire provoque l'hypoglycémie venant après une période plus ou moins fugitive d’hyperglycémie. On obtient un effet semblable. ou analogue, quand la section porte sur un point quelconque de la portion de la moelle qui est comprise entre la 4° paire cervicale et la 6° paire dorsale. Au delà de celle-ci, la section ne modifie pas sensiblement la fonction glycémique. Au delà de la 4° paire cervicale, la section tend plutôt à produire les effets de la sec- tion bulbaire, c'est-à-dire l'hyperglycémie à marche plus ou moins décrois- Sante. Nous trouverons dans les expériences citées ci-après la preuve que, dans la phase prolongée d’hypoglycémie provoquée par la section cer- MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ D£ BIOLOGIE 19 re z = vico-dorsale de la moelle épinière, la dépense de la glycose se fait comme à l’état normal. Exr. IX. — Section médullaire entre la. 7° vertèbre cervicale et la 1'e ver- tèbre dorsale. 6 heures après la section : glycose, pour 1000, dans le sang : De-lartère fémorale QE DER Delaveine morale A OS utEE De’la’véime jugalaire à, 4 Pen nr Re SE ED EI Exr. X. — Section médullaire entre la 7° vertèbre cervicale et La 1° ver- tèbre dorsale. 5 heures après la section : glycose pour 1000, dans le sang : Dé Fartère fémoralen: 11.0 NORGE ROOPERee) De la veine fémorale.…. 4... 040 "sfene0Ma0terth00p Exe. XI. — Section médullaire entre les 6e et 7° vertèbres cervicales. Respi- ration artificielle, le sujet menaçant d’asphyxier. 5 heures après la seclion : glycose pour 1000, dans le sang: De lartère fémorale, 2 M SEE ES O0 TRS De la veimeémorales PS ee SU ES Exe. XII. — Section médullaire entre les 6° et 7 vertèbres cervicales. 4 h. 50 minutes après la section : glycose pour 1000, dans le sang : De:l’artère fémorale. Sa se RS MO Serbe Deila/veine fémorale LISA IAE RPM eMES 6 heures après la section : glycose pour 1000, dans le sang : De lartère-fémorale:;.1.4 4er re. 2 40P0r2%720 Delaveine fémorale 02080 ntm ee Dern Exp, XIIT, — Section médullaire entre les 5° et 6° vertèbres cervicales. 5 heures après la section: glycose pour 1000, dans le sang: De l'artère fémorale. 19720 RAM 0 CoRebUR Delaveine Témorale PERS EN eMEOERE SRE Exe. XIV. — Section médullaire entre les 3° et 4° vertèbres cervicales. Res- piration artificielle, pour empêcher l’asphyxie. 4 h. 10 minutes après la section : glycose pour 1000, dans le sang: De l’artère.fémorale:% 0.0, tres tAi Aer 0TerEMRES Della yemeifénrorale tente MN Te SR 0e AS Voilà les expériences consacrées à l'étude de la dépense de la glycose hématique dans le cas de déviation de la fonction glycémique sous ‘l'influence de lésions de l’axe cérébro-spinal. Nous en résumerons Îles résultats dans le tableau suivant, auquel nous ajouterons quelques ana- lyses de sang resté à peu près normal, au point de vue de la teneur en sucre, malgré des sections médullaires, généralement mal réussies. SUR LA PATHOGÉNIE DU DIABÈTE 25 5° Tableau des analyses comparatives de sang artériel et de sang veineux, dans les cas de déviations de la fonction glycémique par lésions de l'axe cérébro-spinal, Nos SANG SANG DIFFÉRENCE DIFFÉRENCE des en faveur en faveur EXPÉRIENCES. ARTÉRIEL. VEINEUX. du du SANG ARTÉRIEL. SANG VEINEUX. Lésions déterminant l'hyperglycémie (1). gr. gr. er. gr. RE - 2,076 2,000 + 0,076 à TENTE 2,345 2,207 + 0,138 » Ne Le 2,085 1,998 + 0,087 » MAITRE RL 1,961 1,821 + 0,140 » VAT AB AA 2,040 1,888 0,152 » D RONA 1,700 1,593 — 0,107 Fr Lésions déterminant l'hypoglycémie. NL EEE dr EE 0,713 + 0,120 » NA ee 0,689 0,666 + 0,023 » UT NN AUS 0,830, 0,729 + 0,101 TL EME ER 0,784 0,728 + 0,056 » à, 0,796 0,708 — 0,088 » JUN STORES 0,850 0,822 — 0,028 . NV 0,728 0,645 + 0,083 » Lésions n'ayant pas modifié sensiblement la glycémie normale. DR eee en 0 ce 0,980 0,927 + 0,053 » Di 12 18 DEEE 1,000 0,864 + 0136 ; DR Per ere be 1,900 1,900. » » D A CN OEDEe 1,038 1,057 » + 0,019 D: ONCE 1,186 0,850 + 0,336 » De ele tien de 1,275 1,186 — 0,089 » (4) Nous avons obtenu assez fréquemment des chiffres de glycose beaucoup plus considérables dans les cas de section bulbaire, Si ces chiffres ne figurent pas dans le présent tableau, c’est que le sang artériel seul a été analysé. Mais ils trouveront place ailleurs. Les différences d'intensité de-l’hyperglycémie déterminée par la section bul- baire rappellent, du reste, beaucoup celles qui se manifestent dans le diabète pancréatique expérimental. Dans ce dernier cas, l’hyperglycémie est assez variable, même quand les quantités de sucre éliminé par les-urines, quantités . rapportées à 1 kilog de poids vif, se montrent à peu près égales. Il en est pro- bablement de même dans le diabète spontané observé sur l'espèce humaine. Je n'ai jamais fait qu’une seule analyse de sang d'homme diabétique; cette ana- lyse la première sans doute qui ait été exécutée m'a fourni le chiffre, énorme et très exceptionnel, de 5 gr. 892 de sucre p. 1000. Il s'agissait, il est vrai, d'un cas de diabète grave à marche ultra-rapide. Ce cas était observé en 26 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ce tableau est tout à fait instructif. Sur vingt et une analyses compa- ratives, il n’y en a que deux dans lesquelles le sang artériel ne se montre pas plus riche en glycose que le sang veineux. On ne saurait guère douter que ces deux exceptions, comme tel chiffre un peu exubérant indiquant la supériorité du sang artériel en glycose ne soient le fait du défaut d’uni- formilé absolue des conditions dans lesquelles ont été failes les analyses comparatives. Ces dissidences exceptionnelles ne s’éloignent pas, du reste, des limites des erreurs que l’on ne peut éviter dans ces sortes d'analyses, même quand elles sont soigneusement exécutées. Aussi, répéterons-nous que, dans les questions de la nature de celle qui est traitée ici, la solution ne peut être donnée par tel ou tel cas particulier, mais par l’ensemble d'un grand nombre d'expériences. 6° Hyperglycémie déterminée par l'excision du pancréas. — Nous n'insis- terons pas beaucoup en ce moment sur ce point important. On sera suffisamment renseigné sur la question de la consommation de la glycose dans ce cas particulier par le tableau suivant, dans lequel on a réuni huit expériences d'extirpation du pancréas chez le chien, avec analyses comparatives du sang artériel et du sang veineux. Les sujets; pou la plupart, élaient devenus très fortement glycosuriques. TEMPS SANG SANG DIFFÉRENCE DIFFÉRENCE Nos écoulé depuis DE L'ARTÈRE DE LA VEINE Sn NOTE Dn ver des la FÉMORALE FÉMORALE Ë ee EXPÉRIENCES. DÉPANCRÉATI- glycose glycose du du SATION. p. 1000. p. 1000. SANG ARTÉRIEL. SANG VEINEUX. gr. gr. gr. gr. XNA 28 heures (1) 4,286 4,331 Re LOS XVe 23 heures 2,304. 2,120 +, CASA RS XVIL 18 heures 3,212 2,944 +, 0,268 SR RD) X VIIL.. 48 heures SA 3,121 .» ne 5) XIX. . 24 heures 2,864 2,747 NO ETES) XXPLE 5 heures 2,040 2,000 — 0,040 , . » XXI 19 heures 1,888 1,159 + 0,129 » XXI 19 heures 11923 4,666 Lien 0.257 » 1856, dans le service de clinique du professeur Teissier, à l’'Hôtel-Dieu de Lyon, sur un jeune homme d'une vingtaine d'année, Ce jeune homme était devenu subitement diabétique sous l'influence de l’émotion qu'il avait éprouvée en rencontrant par hasard, sur la grande route, le cadavre de son père qui venait d'être assassiné. On sait, par contre, que certaines substances, comme la phlorydzine, agissent tout à la fois en augmentant la production physiologique de la glycose hématique et en diminuant la tolérance de l'organisme pour celte substance sucrée en sorte que la glycosurie se produit alors sans qu'il y ait hyperglycémie. (A. Cn.) (1) Nous avons choisi, pour nos analyses, des animaux très récemment opérés, parce qu’étant donné notre point de vue, il était important d'agir sur SUR LA PATHOGÉNIÉ DU DIABÈTE 97 Ce tableau montre que, dans un cas seulement, les analyses ont donné une légère supériorité glycosique au sang veineux. Dans un autre cas, il y a eu égalité de teneur en glycose. Mais l’infériorité du sang veineux s’est traduite dans les six autres expériences d'une manière très évidente. Aussi, la moyenne des huit cas donne-t-elle le chiffre de 0 gr. 122 de glycose perdu par chaque 1,000 grammes de sang pendant la lraversée des capillaires : c’est un chiffre fort, quoique les résultats des deux expériences qui font exceplion aient sensiblement abaissé celte moyenne. lei encore les deux exceptions reconnaissent certainement pour cause quelque défaut dans l’uniformité des conditions expérimentales. 7 Conclusion. — L'hyperglycémie diabétique, qu’elle provienne de l'extirpation du pancréas ou d’une lésion de l’axe médullaire, reconnaît toujours pour cause un excès de production glycosique, et non un arrêt ou un ralentissement de la dépense de sucre dans les vaisseaux capil- laires. D'un autre côté, dans les cas d’hypoglycémie déterminée par les seclions médullaires, cette dépense est plutôt moins active qu'à l’état normal. D'où il résulte que toutes les dévialions de la fonction glycé- mique, en quelque sens qu’elles se produisent, doivent être rapportées à la même cause immédiate : un changement dans l’activité de l'organe glycogène, c’est-à-dire l’exaltation ou l’amoindrissement de la production de la glycose. Voilà le point fondamental qu'il fallait établir pour servir de pierre d'attente solide à l'édification d'une théorie générale du diabète. La dépense glycosique qu'entraine le mouvement nutritif n’est ni entravée, ni accrue dans les diverses déviations de la fonction glycémique qui ont fait l’objet de nos recherches. D'où il résulte que ces troubles, malgré leur gravité, ne modifient pas sensiblement les caractères fondamentaux de la nutrition, en ce qui concerne l’utilisation de la glycose pour la création de la force vive nécessaire au travail physiologique intime des tissus animaux. des sujets en état d'embonpoint, chez lesquels il y eùt conservation à peu près intégrale de l’activité du travail physiclogique intime des tissus orga- niques. Ce n’eût point été le cas si nous nous étions adressé aux sujets éma- ciés qui sont près de leur fin. ati 1FD 6 SR Ep nt LP D cm con En ae AL et 14864 250 let jus Sub re 44 4. Sup LE É ” A > f Larson dix destéde Let ‘ ne Sep in38 | its Fr | sata HA fL "Se 3 & re ÉD AUD MEL AS de Le #5 CROSS HOHPINOS IEEE HI O Se 61e SUTRE Cia Toit LT 47 2 FE LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX DE LA FONCTION GLYCÉMIQUE PAR MM. A. CHAUVEAU et M. KAUFMANN (Mémoire présenté dans la séance du 11 mars 1893.) Les déviations de la fonction glycémique sont dues à des modifications de la production autochtone du sucre dans économie animale. En effet, la dépense de cette substance se continue d'une manière incessante dans tous les cas d’hyperglycémie ou d’hypoglycémie provoqués expérimenta- lement. De plus, la surproduction qui engendre l'hyperglycémie, résulte loujours d’une suractivité du foie (Société de Biologie, 13 février 1893); il ne paraît pas, en effet, qu’il s'ajoute à l'influence de cette suractivité, l'intervention d’une production glycosique accidentelle survenant dans les tissus où a lieu la consommation du sucre, et masquant plus ou moins cette consommation. | Ce n’est pas qu'une telle intervention ne soit possible. Les muscles, par exemple, sont le siège d’une réserve de glycogène qui vient certainement d’une fixation, avec hydratation, de la glycose sanguine. Il ÿ a bien peu de chance, en effet, pour que le glycogène soit directement fourni aux muscles par le sang; on sait bien que, chez l’animal à jeun, la réserve de glycogène musculaire, diminuée par un travail prolongé, remonte assez promptement aux environs de son taux primitif; et cependant le sang de cet animal est privé de glycogène ou n’en contient que des traces abso- lument insignifiantes. Or, que faut-il, pour que ce glycogène redevienne de la glycose ? Une simple hydratation, c’est-à-dire un acte chimique des plus simples et des plus faciles. Cette alternance se produit-elle à l'état physiologique? On peut affir- mer qu'elle n'est jamais nécessaire : le muscle, qui prend au sang la glÿ- cose, pour les besoins des diverses formes de travail physiologique dont il est le siège, peut très bien s’assimiler cette substance et la consommer Biococie. Mémoires. — 9e sfri, Tr. V. 3 30 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE dans {ous les cas sous forme de glycogène. Maisil n’y aurait rien d’élonnant à ce que, sous certaines influences pathologiques, il se produisit de la glycose dans les tissus de l’adulte, dans les muscles particulièrement, soit par transformation du glycogène, soit par tout autre mécanisme. Seulement, le fait est à démontrer tout entier. Le sang veineux devrait, en effet, être alors constamment ou à peu près constamment plus riche en glycose que le sang artériel : c’est ce que nous n'avons jamais pu constater; le sang artériel est, au contraire, toujours, ou à peu près toujours, plus riche en glycose que le sang veineux, dans l’état pathologique comme dans l’état de santé (1). De ces préliminaires, il s'ensuit que ce qui est à expliquer dans la pathogénie du diabète, c’est le mécanisme de la suractivité dont la glande hépatique est devenue le siège, et qui engendre la glycosurie, avec l'hyper- glycémie. Il y a peu de temps encore, tous les efforts, pour arriver à cette explication, se concentraient plus ou moins autour de l'expérience d’ailleurs si remarquable de CI. Bernard: la piqûre du plancher du qua- trième ventricule, produisant un diabète passager. Aujourd'hui, notre attention est attirée sur un autre fait non moins considérable. Ce fait, désormais acquis à l’explication de la suractivité hépatique, c'est le résultat de l'expérience de von Mering et Minkowski : le diabète produit par ablation du pancréas. Cette expérience est venue démontrer, de la manière la plus saisissante, ce que certains faits cliniques permettaient déjà d’entrevoir vaguement, à savoir que le pancréas est un frénateur du foie, un modérateur de sa fonction glycémique. Dès à présent, il est donc établi que le pancréas participe au rôle énorme joué par le foie dans les phénomènes généraux de la nutrition, et ceci ajoute à l'intérêt déjà si grand qui s'attache à la démonstration de von Mering et Minkowski. Pour se rendre compte de l'importance de ce rôle, il suffit de consi- dérer ce qu'il advient des sujets atteints du diabète suraigu, très grave, qu’engendre le plus communément l’extirpation complète du paneréas. ils fondent généralement avec beaucoup de rapidité, parce que, chez ces sujets, les pertes de l’économie l’emportent sur les gains, la destruction des tissus sur leur réparation, la désassimilation sur l’assimilation, même quand les sujets reçoivent une nourriture azotée extrêmement abondante. C’est qu'aux excreta habituels, acide carbonique, urée, etc., s'ajoute l'élimination de la glycose en nature par la voie urinaire. L’ab- sence du pancréas n’exerce donc pas seulement son influence sur le foie. Cette influence se répercute sur foule la substance de l'économie. Geci tient à ce que le foie emprunte aux éléments constitulifs de tous les or- (1) Nous saisissons cette occasion pour dire que, d’après nos récentes expé- riences, chez les chiens dépancréatisés arrivés à la dernière période du marasme, la dépense glycosique est, au moins, aussi active que chez les sujets récemment opérés. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 1 ganes les matériaux avec lesquels il fabrique la glycose sanguine. C'est là une des manifestations les plus importantes du mouvement nutritif. Que les sujets soient sains ou diabétiques, quand ils sont à jeun (c’est à cette condition qu'il faut toujours en venir, si l'on veut que les faits et leurs conséquences apparaissent dans toute leur simplicité), ce mouve- ment nutritif entraine, d'une part, l'activité incessante des cellules hépa- tiques chargée de la fonction glycoso-formatrice, d'autre part, la résorp- tion non moins incessante, dans l’économie tout entière, des éléments qui alimentent cette fabrication glycosique. D'oùil résulte que celle-ci met en jeu du travail physiologique de deux sortes : un travail localisé dans le foie, c’est celui des cellules qui procèdent à la fabrication du sucre ; de plus, un autre travail disséminé dans toute l’économie, particulièrement dans les systèmes organiques qui se prêtent le plus à la résorption, c'est celui de la désintégration des tissus d'où viennent les matériaux sur les- quels s'exercera l’activité glycoso-formatrice des cellules hépatiques.:fl arrive ainsi que la fonction glycémique comporte une dépense de force vive non seulement là où cette fonction s’accomplit, c'est-à-dire dans le foie, mais encore dans l’organisme tout entier. Comme cette énergié actuelle, dépensée pour l'exécution du travail auquel elle est consacrée; se résout nécessairement en chaleur sensible, la fonction glycémique se trouve ainsi concourir à la calorification et par les mutations chimiques qui se passent dans le foie, et par celles qui, dans l’ensemble de l'éco- nomie, sont liées à l'exercice de la fonction glycémique (1). Voilà les principes fondamentaux qui se déduisent de l’observation des faits dans les cas de diabète consécutif à l’extirpation du pancréas. En somme, ia fonction glycémique est un élément important de la rénovation nutritive et l’une des causes de la calorification. La fabrication de la gly- cose se prépare dans tous les organes et s'exécute dans le foie, qui est (4) C'est en 1856 que j'ai indiqué pour la première fois les rapports de la glycogenèse hépatique avec la calorification (Moniteur des hôpitaux). J'ai déve- loppé ce sujet en 1886, dans les diverses études entreprises avec la collabora- tion de M. Kaufmann sur la glycose, le glycogène, la glycogénie, en rapport avec la production de la chaleur et du travail physiologique dans l’économie animale, études insérées dans les Comptes rendus de l’Académie des Sciences. La troisième surtout est à signaler (t. CII, 13 décembre 1886), parce qu'on y affirme le rôle du foie dans la calorification. Enfin, en 1888, la Revue scientifique a publié mon mémoire intitulé : Du travail refaite et de son équivalence. On y trouvera développée ma théorie sur la chaleur animale considérée comme un excrelum du travail physiologique de tous les organes, y compris celui qui leur est commun, le mouvement nutritif, avee ses actes incessants de désinté- gration et de on des lissus. . Ces documents sont rassemblés à peu près tous dans mon livre : Le travail ne el l'énergie qu'il HAPHÉSenEs Paris, chez Asselin et Houzeau, 1891. . “(A Drramane 32 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE réglé par le pancréas. Plus de foie (Minkowski) : plus de fonction glycémi- que, disparition du sucre. Plus de pancréas (Von Mering et Minkowski) : suractivité maladive de la fonction glycémique. Les deux glandes sont donc, en quelque sorte, couplées l’une à l’autre, et concourent ensem- ble à l’exercice régulier de la glycoso-formation. Comme les veines du pancréas se rendent dans la veine-porte, on est tenté naturellement d'expliquer l'influence frénatrice de cette glande, sur la fabrication du sucre dans le foie, en supposant une sécrétion pancréa- tique interne, dont les produits, versés dans le sang, sont apportés à la glande hépatique, où ils participent à son fonelionnement. Comment? Le procédé — s’il existe réellement — serait à déterminer tout entier. On ne sait même pas où se prendre pour partir à sa recherche. Agit-il direc- tement sur les matériaux que le foie change en sucre, ou sur es organes élémentaires hépatiques qui opèrent cette transformation ? C’est ce qu'on ne saurait dire (1). En tout cas, en admettant q'une démonstration expérimentale rigou- reuse donne corps, un jour, à l'hypothèse d’une action directe de la sécré- tion pancréatique interne sur le foie, ce ne serait là qu’une partie — et une petile partie — de la vérité. Les faits déjà connus et les faits nouveaux que nous avons à produire tendent à montrer que cette sécrétion pancréa- tique exerce son action frénatrice surtout en agissant sur des centres nerveux régulateurs de l’activité du foie. Cet ensemble de faits nous atta- che de plus à l'idée que le pancréas est influencé lui-même par un appareil nerveux, régulateur de son activité. Sans doute, l’action exercée, dans le cas présent, par ces deux glandes apparait comme un phénomène d'ordre nutritif pur et simple, ne dépen- dant, au fond, que des propriétés inhérentes au tissu propre de chacun de ces organes. Mais le système nerveux ne saurait se dispenser d'interve- nir pour le réglage de cette action. Comment s'opère ce réglage? Nous ne sommes plus au temps où les modifications fonctionnelles du foie pou- vaient être rattachées, à peu près exclusivement, aux modifications de l’activité circulatoire qui sont déterminées par les actions nerveuses vaso- motrices. Il y a, pour les glandes, des nerfs excito-sécréteurs dont le fonctionnement entraîne corrélativement celui de nerfs vaso-dilalateurs ou vaso-constricleurs, suivant les cas. On n'a pas de raison pour refuser au foie, de même qu’au pancréas, ces nerfs excito-sécréteurs (Vulpian, Fr. Franck), ni pour s’abstenir de chercher dans l'axe cérébro-spinal (ce qui nous importe exclusivement pour le moment) les centres cellulaires desquels ces nerfs tiennent leur aclivité. Les enseignements de la physiologie générale nous imposent même (1) En acceptant l'introduction, dans la science, de la notion de la sécrétion interne du pancréas, nous on notre opinion sur la manière dont cette notion a été utilisée par M. Lépine. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 30 l'obligation de prévoir l'existence, non seulement de ces centres excito- sécréteurs, mais encore de centres antagonistes jouant, à l'égard du foie au moins, le rôle d'agent fréno-séréteur. Une telle recherche est environnée des plus grandes difficultés. Elle exige la connaissance exacte des résultats produits par la section trans- versale de l’axe cérébro-spinal en certains lieux d'élection. C'est ce qui a été déjà fait bien souvent. Mais les expériences antérieures n'ont pas été exécutées dans les conditions qui donnent aux nôtres leur originalité. Visant le déterminisme de l’action exercée par le pancréas dans la fonc- tion glycémique, ces expériences ont réalisé des combinaisons variées, entre autres celle des sections médullaires avec l’ablation de la glande pancréatique. A. — Effets produits sur la fonction glycémique par la section de la moelle épinière près de son union avec le bulbe rachidien. — Le tableau des expériences que nous avons à présenter, sur ce sujet, TEMPS ÉCOULÉ GLYCOSE POUR 1000 DEPUIS LA SECTION contenue AUGMEN- SOUS-BULBAIRE p [DANS LE sanG arrérieL TATION jusqu'au momen CAT des prises _ |T Bree ut — | RAPPORTÉE de sang faites après | Au moment Com cie cette même Après à l'unité. section et des prises|de la section| la section. avant. | aprés. de température. ou avant. TEM- PÉRATURE DES EXPÉRIENCES, 2 heures . . . . 18428 4 heure 30 m. . (| III | 4 heure 20 m. IV | 4 heure 10 m. . 1 heure 30 m. 1 heure. . 4 heures . 6 heures . ajoutera peu de chose à ce que nous savons déjà de ce qu’il advient de la fonction glycémique, quand on coupe la moelle épinière près de son ori- gine et qu’on entretient, pendant un certain temps, la vie de l'animal, au moyen de la respiration artificielle. Mais ce tableau constitue, pour ceux qui suivront, un terme de comparaison nécessaire. Les faits qu'ils expose forment, du reste, le premier anneau d’une chaîne, dont tous les élé- 34 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ments, méthodiquement coordonnés, se tiennent étroitement. Nous avons de plus à en tirer nos premières déductions fondamentales. Toutes les expériences de notre étude, répélerons-nous, ont été exécu- tées sur des chiens à jeun. Toutes ont eu pour but de faire connaître l’in- fluence qu’exercent, sur la fonction glycémique, les facteurs particuliers introduits dans ces expériences, influence appréciée par la comparaison du sang artériel, au point de vue de la teneur en glycose, avant et après l'introduclion de ces facteurs. Ce Tableau démontre que la section de la moelle épinière agit dans le même sens que l’extirpation du pancréas, c’est-à-dire que cette section provoque de l'hyperglycémie. Évidemment cette hyperglycémie n'atteint généralement pas l'intensité de celle qui résulte de la suppression du pancréas. L’accroissement de la glycose hémalique, après qu'on a coupé la moelle à son origine, n’en est pas moins très manifeste, Nous rappel- lerons, du reste, que cet accroissement s’accompagné souvent de glyco- surie. Ces caractères communs suffisent à justifier un rapprochement. entre les résultats de la suppression du pancréas et ceux de la section bulbaire de l’axe cérébro-spinal. Il existe pourtant un caractère diffé- rentiel, ayant une réelle importance. Nous voulons parler de l'instabilité de l'hyperglycémie due à cette dernière opération. Après être rapidement arrivée à son maximum et s’y être maintenue un certain temps, l'hyper- glycémie tend à décroître. Peut-être même, si la vie pouvait être suffi- samment prolongée, cette hyperglycémie se changerait-elle en hypo- glycémie. L'expérience VI a été introduite pour montrer cet amoindris- sement. Il a pour cause principale les conditions déprimantes dans les- quelles se trouve le sujet et qui ne tardent pas à amener le refroidis- sement et la mort. Aussi la comparaison doit-elle être poursuivie ici, comme nous le faisons, entre l'animal dépancréatisé et celui qui a subi depuis peu dé temps la section atloïdo-occipitale de la moelle épinière. La ressemblance est telle alors entre les deux sujets qu'on est autorisé à les considérer comme étant placés sous une même influence, ou plutôt sous deux influences de même nature : chez l’un, la suppression du pan- créas; chez l’autre, la paralysie de cette glande ou l'inhibition plus ou moins prononcée de sa sécrétion interne. De l'effet produit par la section bulbaire sur la fonction glycémique, nous pouvons donc conclure que la section a isolé du pancréas un centre qui l’excite : d’où, paralysie de l'organe, entraînant l’hyperglycémie, : comme la suppression même de cet organe. Nous déduisons encore de cel effet, qu’au-delà de la section, il existe dans la moelle épinière un centre “excito-sécréteur pour le foie. La suppression matérielle du pancréas, ou celle de son action physiologique par section bulbaire, ne portent pas d'atteinte à ce centre. Au contraire, il en devient plus actif, parce qu'il n'a plus d’autagonisle. Il y a alors surexcitation de la fonction glycoso- formatrice du foie : surexcitalion qui s’allénue ensuite peu à peu, à cause LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 39 des conditions déprimantes dans lesquelles la section de l'axe médullaire a placé le sujet. Conezusions. — 1° L'action frénatrice que le pancréas exerce sur l’acti- vité glycoso-formatrice du foie paraît être sous la dépendance d'un centre excilo-sécréteur des cellules chargées de la sécrétion interne du pancréas. 90 Ce centre est situé dans la partie encéphalique de l'axe médullaire. 3° L'activité glycoso-formatrice des cellules hépatiques semble régie par un centre excito-sécréteur situé dans une des régions de la moelle épinière. &° L'action frénatrice du pancréas a chance de s'exercer sur ce centre excito-sécréteur du foie plutôt que sur le foie lui-même. Telles sont, à titre provisoire, les déductions, nécessairement incom- plètes, que nous nous croyons autorisés à tirer de notre première série d'expériences. On pourrait sans doute imaginer plus d’une autre explica- tion plausible des effets produits par la section bulbaire sur la fonction glycémique. Celle que nous proposons d'adopter momentanément répond à une inéluctable exigence : la nécessité de tenir compte des deux organes couplés qui constituent l'appareil glycoso-formateur, celui qui règle la production ne doit pas plus être négligé que celui qui l’accomplit. B. — Les effets de la piqûre du plancher du 4° ventricule comparés à ceux de la section de la moelle épinière près de sou union avec le bulbe. — On peut les considérer, les uns et les autres, comme étant à peu près identiques : glycosurie passagère, hyperglycémie décroissante, c'est ce qui se remarque dans les deux cas. L'identité va même si loin qu’elle ne laisse pas que d'étonner un peu, car la section bulbaire, malgré la respiration artificielle, entraîne toujours la mort plus ou moins rapide; l’opération ne semble pas ainsi pouvoir permettre l'évolution de tous les phénomènes qu’entraîne la simple piqüre bulbaire. Cette identité d'effets fait nécessairement penser à l'identité de mécanisme. Aussi est-on amené tout naturellement à considérer la piqüre du plancher du 4° ventricule comme une opération qui inhibe passagèrement le centre excito-sécréteur du pancréas. L'enchaînement logique des faits nouveaux découverts depuis les travaux de CL Bernard conduit, comme on le voit, assez loin de sa théorie des effets produits par sa célèbre opération. Ce n’est pas, du reste, la première fois qu’est émise l'opinion qu’elle agit par inhibition ou para- lysie plutôt que par excitation du centre bulbaire. Ce rapprochement entre le mode d'action de la piqüre du bulbe et Eole de sa section transversale fixe un des points laissés indéterminés dans Les conclusions tirées des effets de celte dernière opération : c'est dans le bulbe rachidien qu'il faut placer le siège du centre excito-sécréteur du pancréas. 30 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : C. — Le bulbe rachidien considéré comme centre fréno-secréteur du foie. — En attribuant le rôle de centre excito-sécréteur du pancréas au bulbe rachidien, nous faisons de cet organe un centre fréno-sécréteur pour le foie. Le bulbe, en effet, ne peut pas exciter le pancréas sans exercer du même coup, une action frénatrice sur le foie. Mais ce n’est peut-être pas seulement ainsi, par contre-coup, que le bulbe modère la fonction glycosique. Les effets de la section bulbaire peuvent, en effet, être interprétés parfaitement comme étant le résultat de l'isolement d’un centre fréno-sécréteur agissant directement sur le foie, ou plutôtsur l'appareil nerveux périphérique de cette glande. Rien ne contredit cette déduction nouvelle. Si on l’acceptait, l’appareil hépato-pancréatique, envisagé comme agent de la fonction glycosique, pourrait être conçu de la ma- nière suivante, au point de vue de ses relations avec ses centres nerveux régulateurs : Ily a dans le bulbe rachidien un centre excitateur du pancréas et un centre frénateur du foie. Un centre excitateur de ce dernier existe dans la moelle épinière. La sécrétion pancréatique interne, à part le rôle indéterminé, qu’elle peut remplir en agissant directement sur le foie, excite le frénateur de la glande hépatique et en modère l’excitateur. Donc, la suppression du pancréas amoindrit l'activité du frénaleur hépa- tique et augmente celle de l'excitateur. C'est peut-être parce que cette double action se produit, que le trouble de la fonction glycémique, déter- miné par la suractivité du foie, est si accentué et si grave chez les sujets privés de pancréas. Si la seclion bulbaire ne trouble pas la fonction glycémique aussi profon- dément que le fait la suppression du pancréas, c'est que cet organe, quoique soustrait à l’influence de son centre excilateur, n'est sans doute pas abso- lument paralysé, et peut, par sa sécrétion interne, continuer à exercer une certaine action modératrice sur le centre excilo-sécréleur du foie. Voilà, au complet maintenant, la théorie qui, lorsqu'on tient compte du pancréas et des effets de son ablation, découle des faits observés dans les expériences de section ou de piqûre bulbaire. Nous affirmons done très franchement le rôle frénateur exercé directement par le bulbe dans la fonction glycoso-formatrice du foie. Comme ce rôle se confond néces- sairement, dans ses conséquences, avec celui que le bulbe remplit en tant qu’agent excito-sécréteur du pancréas, nous pouvons très bien, pour sim- plifier l'exposition de nos faits ultérieurs, nous servir exclusivement de la notion du centre frénateur direct de la glande hépatique, quand nous aurons à parler des influences modératrices que la moelle allongée exerce sur l'activité de celte glande. Donc, nous reconnaïîtrons que cette activité du foie est dirigée par un centre excitateur, placé dans la moelle épinière, en un point à déterminer, LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NER7/EUX 37 et par un centre frénaleur situé dans la moelle allongée : ce dernier à côté (et peut-être confondu avec lui) du centre excilateur du pancréas, dont l'influence, s’exerçant dans le mème sens que celle du centre frénateur du foie, peut être jusqu’à un certain point négligée. Il est important pourtant de ne jamais perdre de vue que la secrétion interne, réglée par ce centre excitateur du pancréas, excite le frénateur de la glande hépatique et en modère l'excitateur. La question est maintenant nettement posée et les démonstrations à donner, très clairement indiquées. Nous pourrons donc parler plus aisé- ment des laborieuses études expérimentales que nous avons ajoutées à ces démonstrations, et des faits nouveaux qui se sont révélés dans ces études. D. — Effets produits, sur la fonction glycémique, par la section de la moelle épinière dans la région comprise entre la 4° paire cervicale et la 6° paire dorsale. — La section médullaire dans ladite région est connue pour amener l’hypoglycémie, en même temps que l’hypothermie. Nous avons rassemblé dans le tableau suivant les expériences que nous avons faites sur ce sujet particulier. Des dix expériences contenues dans ce tableau, il faut retrancher la première et la dernière. Elles n’y ont été incorporées que pour servir de termes de comparaison. La première, en effet, se rapporte à une section pratiquée très près de l'extrémité supérieure de la région cervicale de la moelle épinière ; elle donne plutôt les résultats de la section bulbaire sur la fonction glycémique. Quant à la dernière expérience, elle est destinée à montrer qu'au-dessous d’une certaine bauteur, la section médullaire ne modifie pas sensiblement cette fonction. Mais les huit autres expériences sont tout à fait typiques. L'hypo- glycémie s’y manifeste d’une manière très nette (1). Donc la section médullaire, pratiquée entre la 4° paire cervicale et la 6° paire dorsale, produit des effets inverses à ceux de la section bulbaire, par conséquent contraires aux effets déterminés par la suppression du pancréas. Les résultats de la section médullaire se présentent donc comme si cette opération active le rôle frénateur du pancréas ou affaiblit l’activité du centre excito-sécréteur du foie. Nous adopterons le deuxième terme de cette alternative; il s'adapte plus facilement à l’ensemble des faits. Mais il faut s'expliquer avec plus de détails sur les enseignements que fournissent les sections médullaires au sujet de ce centre excito-sécréteur du foie. Ce centre est placé dans la moelle épinière : voilà ce qu'apprennent les (1) Nous n'avons pas tenu compte, à dessein, de l'hyperglycémie qui s’est montrée parfois d’une manière extrêmement fugitive dans quelques expé- riences, de suite après la section. BIOLOGIE DE LA SOCIETE DE , 2 MÉMOIRES 38 c£ 90G€ « Yo8s£ *sgude "JUPAB RS d'IVIOAU AHALVUHANAL HALHOddVH NOILANINIC “OJTUN Ie SALUOddVAH NOILVINANWINV let LO£SF ‘UO1J99S eJ |‘UOrJ99S e] 9p soude Juatumou ne © THIHALUV ONVS HT SNVA 0007 anuod ASODA'1) HG ALILNVNO ° © * "Ss9an9u 7% ‘UD GF Ssoanou ç ° ‘WU GY oAnou F . 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La section praliquée sur un point quelconque de cette région ne déterminerait pas, à proprement parler, une paralysie du centre, par défaut de conduction de son action à la glande quil régit. Ce serait plutôt par une sorte d'inhibition des cellules constitutives de ce centre diffus qu’agirait la section. Ce qui fait penser à ce mécanisme, plutôt qu’à l’action paralytique, c’est la multiplicité des communications nerveuses qui, dans la région cervico-dorsale, mettent en relation la moelle épinière avec la chaîne du grand sympathique. Les nerfs centri- fuges qui conduisent au foie l’action de la moelle sont nécessairement compris dans ces rami communicantes. Or la section n’en peut atteindre qu'un petit nombre dans leur fonctionnement, et les expériences anté- rieures semblaient avoir établi que ceux qui agissent sur la fonction glycémique apparliennent surtout aux premières paires dorsales. Mais quand on va bien au fond des choses, lorsqu'on examine les faits avec un soin rigoureux, on se convainc facilement que rien n'est moins cerlain. Il y a des distinctions à faire entre les faits, et il reste constant que, si l’on y regarde de près, les nerfs du centre excito-sécréteur du foie peuvent très bien s'échapper, en très grande partie, de la moelle épinière par les racines des paires dorsales de sa région moyenne. Alors, l’expli- cation des effets de la section médullaire, dans la région comprise entre la 4° paire cervicale et la 6° paire dorsale environ, devient très simple. Les sections espacées, pratiquées sur cette région, paralysent le centre excito-sécréteur du foie, parce qu’elles interrompent ses communicalions avec l'appareil nerveux périphérique de cet organe. Comme cet effet para- lytique cesse lorsque la section porte au-dessus de la 4° paire cervicale, il s'ensuit que le centre dont le siège était à déterminer se trouve placé à l'extrémité supérieure de la moelle cervicale, au-dessus de l'origine de la 4° paire. Dans cette série D d'expériences, les faits observés permettent encore une autre détermination, celle des voies latérales par lesquelles s'échap- pent de l’axe médullaireles conducteurs nerveux centrifuges qui relient les centres bulbaires au système du grand sympathique. Ces conducteurs se trouvent nécessairement, nous ne dirons pas tous, mais en très grande majorité, dans les racines des quatre premières paires cervicales, qui les cèdent au ganglion cervical inférieur ou au nerf vertébral.La section mé- dullaire au-dessous de la 4° paire cervicale ne produit d'effet paraly- tique qu'à l'égard du centre excito-sécréteur du foie. Pour obtenir ces 40 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mêmes effets paralytiques à l'égard du centre fréno-sécréteur, il faut faire porter la section au-dessus de la 4° paire, et arriver près du bulbe lui- même lorsqu'on veut avoir cet effet au maximun. ConcLusioNs. — Les sections de la moelle épinière dans la région cervico- dorsale complètent les enseignements de la section bulbaire, relativement au centre fréno-sécréteur du foie, en montrant que ce centre transmet son action au système sympathique surtout par les racines des quatre premières paires cervicales. De plus, lesdits enseignements sont encore complétés sur un autre point : le centre excito-sécréteur du foie siège dans la moelle cervicale, au dessus du point d'émergence des racines de la 4° paire, et ce centre est relié au sys- tème sympathique par les rami communicantes que fournissent les plus antérieures des paires nerveuses émanant de la partie moyenne de la région dorsale de la moelle épinière. E. — Effets produits, sur la fonction glycémique, par la section de la moelle épinière dans la région comprise entre la 4° paire cervi- cale et les 6° ou 7° paires dorsales, quand cette section est suivie de la suppression du pancréas. — Nous appelons tout particulièrement l'attention sur cette série d'expériences et les suivantes, parce qu’elles fournissent de précieux enseignements. Exp. I. — Section médullaire pratiquée entre la 7° vertèbre cervicale et la 1e vertèbre dorsale; puis sans aucune attente, extirpation du pancréas. GLYCOSE À p-. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. Immédiatement après la dépancréatisation. . 08980 36°,2 5 heures — — 1-00 0P07D 33° Exp. II. — Section médullaire pratiquée entre la 7° vertèbre cervicale et la 1" paire dorsale. L’ablation du pancréas suit, sans retard, la première opé- ration. GLYCOSE x p 1.000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. Immédiatement après la dépancréalisation , . 18000 ? 6h." My aprèsatnr tr eee enr the: 0 732 280 Exp. III. — Section médullaire pratiquée entre la 7 vertèbre cervicale et la {re paire dorsale. L’extirpation du pancréas est exécutée 18 heures après. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 41 GLYCOSE ; p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale, sang artériel. Immédiatement avant la dépancréatisation. . , 05809 270 ÉMHELRESIADE SE Ne niet ohne ler 0020 26° Exp. IV. — Section médullaire pratiquée entre les 7 et 8e vertèbres dor- sales. On attend 23 heures pour enlever le pancréas. GLYCOSE p- 1000 dans le sang artériel. Immédiatement avant la dépancréatisation, . . . …. 18133 G HEURES ARS us Re RS Es Sr Re Le 0 927 Pour bien apprécier la signitication de ces importantes expériences, il faut considérer que, chez les sujets qui n’ont pas subi préalablement de section médullaire, les effets de l’excision du pancréas suivent de très près l'opération. Trois ou quatre heures après, l'hyperglycémie est déjà très prononcée. Icic'est tout le contraire. Non seulement, l'hypoglycémie provoquée par la section médullaire persiste, mais elle s'accroît encore après la dépancréatisation. Cette dernière opération est donc entière- ment destituée de son action habituelle. Pourquoi ? La réponse est facile. Toute communication de l'appareil périphériqué excito-sécréteur du foie avec le centre dominateur de cet appareil se trouve interrompue par la section médullaire. Il s'ensuit que la suppression du pancréas, tout en surexcitant ce centre et en amoindrissant l’action modératrice du centre antagoniste, reste nécessairement sans effet (1). Il s'ensuit encore que la dépancréatisation semble incapable de produire par elle-même l’hyperglycémie et le diabète. Elle agit en mettant le système nerveux en élat de provoquer ces phénomènes, lesquels sont empêchés quand l’in- fluence que la suppression du pancréas exerce sur les centres régulateurs de la fonction glycémique est annihilée par une influence neutralisante. ConcLusIoNs. — 41° Cette série E d'expériences confirme donc l'exis- tence des centres frénateur et excitateur de la fonction glycoso-formatrice, du foie, ainsi que l'annihilation de ce dernier centre par une section médul- laire qui l'isole du système sympathique. 2° Cette annihilation se maintient même après l'ablation du pancréas. 3° Donc, l'intégrité.des centres régulateurs de l'activité du foie importe essentiellement à la manifestation des effets de la dépancréatiation. (1) On trouvera ci-après, dans la série F des expériences, un complément d'explicalions. 42 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 4° On en peut conclure que le pancréas n'exerce pas directement son influence sur le foie et la fonction glycoso-formatrice. F. — Effets produits, sur la fonction glycémique, par la section de la moelle épinière dans la région comprise entre la 4° paire cer- vicale et les 6° ou 7° paires dorsales, quand :cette section est pré- cédée de la suppression du pancréas. — Il semble que les conditions de cette nouvelle série d'expériences ne diffèrent pas, au fond, de celles dans lesquelles ont été instituées les expériences de la série précédente. Dans les deux cas, en effet, la section médullaire est combinée avec l'ablation du pancréas. Seulement cette dernière opération suit ou pré- cède la première, suivant le cas. Nous allons voir que cette différence suffit à la manifestation de résultats singulièrement divergents. Voici, en effet, ce qui arrive quand la dépancréatisation a été pratiquée un certain temps avant la section médullaire: nr | Exp. I. — Le sujet subit l’ablation du pancréas. Puis 19 heures après, on pratique la section médullaire entre la 7e vertèbre cervicale et la 1" vertèbre dorsale, GLYCOSE p. 1000: dans le sang artériel. Avant la section médullaire . . AC pr : ne 15888 . 2) heures 4/2 apres 2 SN 1 214 Nous n’attachons qu’une médiocre importance à cetle expérience, dans laquelle l'hyperglycémie provoquée par la dépancréalisation a été, en somme, peu marquée. Aussi la section médullaire semble-t-elle avoir eu son effet dépresseur habituel ; tout au moins a-t-elle fait baisser l'hyper- glycémie. Les autres expériences de la série sont autrementintéressantes. Exe. II — Chien ayant subi la veille l'excision du pancréas. La section médullaire est pratiquée dans la région dorsale, presque assurément un peu en avant du milieu de cette région (la mention exacte de l'intervalle vertébral où l'instrument a pénétré a été oubliée dans le cahier d'expériences.) GLYCOSE p- 1000 : 2 : dans le sang artériel. 23 heures après la suppression du pancréas, .:. , . . 28304 6 heures après la section médullaire. , . |. . . à, 2 450 Exp. III. — La suppression du pancréas a été opérée depuis plusieurs jours sur le sujet de cette expérience. On fait la section médullaire entre la 7e ver- tèbre cervicale et la {re vertèbre dorsale. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX A3 GLYCOSE TEMPÉRATURE p. 1000 ,, rectale Avant section de la moelle. Sang veineux . . . . 38058 38,6 4 h. 50 après la section. Sang artériel . . . . . 3 851 310,2 8 heures après la section. Sang de l’artèrefémorale, 4 894 DAS — — Sang delaveinefémorale. 4 781 re Exp. IV. — Le chien est dépancréatisé depuis la veille. On pratique la ‘Section médullaire entre les 6° et 7° vertèbres cervicales, GLYCOSE AD dans le sang artériel 24 heures après la dépancréatisation, , . .. . . . .. 26864 irbrheures après larsectionsmédullaire 5542245 15 1500 3 925: Dans ces trois dernières expériences, où la suppression du pancréas avait déterminé à un haut degré l’hyperglycémie classique, la section médullaire, pratiquée consécutivement, n’a pas fait baisser le chiffre du sucre du sang. Au contraire, cette dernière opération semble avoir plutôt accentué l’hyperglycémie. On ne saurait imaginer des résultats plus radicalement différents de ceux qui sont observés quand, dans la combi- naison des deux opérations, section médullaire et dépancréatisation, c’est celle-ci qui suit celle-là. S Quelle est la cause de cette différence ? Cette cause doit être cherchée dans le rôle des ganglions sympathiques placés sur le trajet des nerfs viscéraux. Ces ganglions constituent comme des relais pour les excita- tions envoyées par les appareils centraux, maïs des relais qui emmaga- sinent ces excilations au lieu de les réexpédier immédiatement. Pour parler avec précision, on peut considérer les ganglions du sympathique comme les véritables centres d'où rayonnent les excitations nerveuses destinées aux viscères. Mais ces centres périphériques empruntent leur puissance frénatrice ou excitatrice aux centres de l’axe médullaire. Ce sont ceux-ci qui donnent à ceux-là la direction qu'ils ont à suivre et dans laquelle ils continuent à agir, jusqu’à ce que l'intervention du centre antagoniste de celui auquel est due cette direction vienne la modifier. Si cette intervention ne peut plus se produire, l'aptitude imprimée aux ganglions est, pour ainsi dire, aequise définitivement : elle continue à s'exercer, même quand les centres ganglionnaires rendus indépendants par une section médullaire appropriée, ne peuvent plus être influencés par le centre cérébro-spinal qui leur a communiqué leur modalilé phy- siologique actuelle. Dans le cas particulier dont nous nous occupons, les cellules nerveuses des appareils ganglionnaires ont été mises, par l'influence de la dépan- 44 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ER créalisalion sur les centres frénateur et excitateur de la fontion glycé- mique, en élat convenable pour surexciter le foie. La section médullaire, qui supprime ensuite les communications du centre excilateur avec le système ganglionnaire, né saurait rien changer à l’aptitude physiolo- gique que celui-ci a acquise de celui-là, par le fait de l’ablation du pancréas. : L’explication peut s ‘appliquer aussi aux effets inverses qui s ‘observent quand c'est la section médullaire qui est pratiquée la première. Non seu- lement cetle opération paralyse le centre excito-sécréteur du foie en exallant le centre antagoniste, c’est-à-dire le fréno-sécréteur, mais encore elle fixe dans leur état d’inhibition les cellules nerveuses ganglionnaires qui président secondairement à la mise en activité du foie. La dépan- créalisation a beau intervenir ensuite, la paralysie qui en résulte, pour le centre frénateur de, la fonction glycémique, ne peut plus retentir sur les ganglions sympathiques, quoique les voies de transmission qui y amènent les impressions venues de ce centre soient parfaitement intactes. C’est que les cellules des centres secondaires sont en la puissance de l’état qui leur a été imprimé par la première opération. Aucun état contraire ne peut plus se substituer à ce premier occupant. Disons en passant que les faits de même ordre observés par Cl. Ber- nard, Cyon et Aladoff, et qui paraissaient si singuliers, si contradictoires, s'expliquent de la même manière. Par exemple, la section du grand splanchnique empêche la piqûre du plancher du 4° ventricule de pro- duire la glycosurie, parce que l'influence de cette piqüre ne peut plus être amenée aux ganglions semi-lunaires, derniers relais des excitations venues de la moelle épinière, à l'adresse de l'appareil hépato-pancréa- tique. Mais si le splanchnique est coupé après la piqûre, la section n’em- pêche pas la glycosurie de continuer. Gette section, en effet, ne supprime pas, dans les ganglions sympathiques, l’aptitude physiologique qu'ils doivent à l'opération qui a inhibé passagèrement le centre frénateur de la fonction glycémique : ils ont été mis par cette opération en disposition excilatrice et ils y restent. Ils garderaient de même la disposition fréna- trice, si c'était le centre excilaleur qui eût élé mis en inhibition. Nous ne nous étendons pas davantage sur ce point, parce que nous ne voulons pas greffer une question de physiologie générale du système ner- veux sur celle qui fait l’objet de notre travail. Mais nous avons encore une remarque importante à faire, avänt de passer à une autre série de faits. Dans l'expérience IIT de la présente série F, la température rectale a été prise au moment des cueillettes de sang. Or nous constatons que le thermomètre qui était à 38°.,6 avant la section, marquait encore 37°,2 quatre heures cinquante minutes après; il remontait même à 37°,8 à la fin de la huitième heure. C'était à ce moment que la fonction glycémique présentait sa plus grande activité : nouvelle preuve de l’étroite relation qui existe entre cette fonction et la calorifi- LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 45 cation. Si la section médullaire avait entrainé la diminution de l'hyper- glycémie, il y aurait eu abaissement corrélatif de la température, comme dans les cas habituels, où la section médullaire, pratiquée seule, provoque simultanément l’hypothermie et l'hypoglycémie. Conccusions. — Les acquisitions importantes que nous devons aux expériences de la série F peuvent être résumées comme il suit : 4° Les centres nerveux régulateurs de la fonction glycoso-formatrice n’agissent pas directement sur la glande chargée de cette fonction, mais sur les ganglions sympathiques espacés, comme des relais, sur le trajet qe nerfs qui unissent à cette glande les appareils réqulateurs. 2 Ces ganglions forment des centres secondaires actionnant directement le système glandulaire producteur du sucre, en verlu d'une activité qu'ils empruntent aux centres primitifs contenus dans l'axe cérébro-spinal. 3° L'activité actuelle communiquée aux centres secondaires par les centres primitifs ne peut être modifiée que par l'intervention de ces derniers, purti- culièrement. avec le concours du centre antagoniste de eelui dont la supré- malie a créé cette activité actuelle. 4° Si cette influence antagoniste est définitivement supprimée, les centres secondaires, constitués par les ganglions du sympathique, gardent la moda- lité physiologique qui leur a été communiquée par les centres primitifs, même quand l'influence du centre survivant, créateur de cetle modalité, est supprünée à son tour. Ainsi, l'ablation du pancréas porte au maximum l'activité glycoso-for- matrice du foie, parce que les relais qanglionnaires, surtout le centre spécial que forme le ganglion semi-lunaire, ont été impressionnés dans le sens de la sureæcitation, par l'annihilation du centre primitif frénateur et l'exaltation du centre primitif excitaleur. Or, l'isolement de ce dernier, par la section médullaire, ne peut plus rien changer à cette disposition acquise par les centres ganglionnaires. De même, la section médullaire, en isolant le centre excitateur spinal et, en laissant, ainsi toute prépotence au centre frénaleur bulbaire, crée dans les centres ganglionnaires une disposition réfrénatrice, que la suppression de l'activité du frénateur, par l'ablation du pancréas, est ensuite impuis- sante à modifier. _G. — Effets produits sur la fonction glycémique par la combinaison de la section bulbaire avec la suppression du pancréas. — Nous n'avons qu’une expérience à citer : Exp. — Sur un chien qui a subi, vingt-quatre heures auparavant l’ablation du pancréas, on coupe la moelle épinière dans l'intervalle altoïdo-occipital et l’on pratique la respiration artificielle. rs BIOLOGIE. MÉMOIRES. — 9€ SÉRIE, T. V. 46 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE GLYCOSE p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale, sang artériel. Avant la section bulbaire een non 38038 370,5 2Hheures#apresiceHtelSecton ee PR 3 058 379,2 “heures aprés lasection ee 2 MIO ED Comme dans les cas ordinaires, la section bulbaire avec respiration artificielle, a entraîné, à la fin, de l'hypothermie et une baisse de l’hyper- glycémie. Le point le plus important à remarquer, c’est que, à aucun moment, il n'y a eu accroissement de l’hyperglycémie primitive. ConcLusion. — La section bulbaire n'ajoutant rien à l'effet hyperglycé- mique de la dépancréatisation, on en conclut que celle-ci suffit à porter au maximum l'annihilation du centre fréno-sécréteur du foie et à donner ainsi son plus haut degré de suractivité au centre antagoniste, c'est-à-dire le centre excitateur de la fonction glycoso-formatrice. Le mécanisme attribué à l'ablation du pancréas dans la production du diabète se trouve ainsi corro- boré : ily a, de par le fait de la dépancréatisation, action paralysante exercée sur le centre frénateur du foie. H. — Effets produits sur la fonction glycémique par les sections bulbaire et pré-dorsale combinées. — Tout au début de cette étude, nous avons insisté sur la ressemblance qui existe entre les effets de l’abla- lion du pancréas et ceux de la section bulbaire de l’axe cérébro-spinal. Nous avons conclu, de cette ressemblance, à l'identité du mécanisme par lequel les deux opérations agissent sur la fonction glycoso-formatrice du foie. Notre dernière conclusion vient encore de se prononcer dans le sens de cette identité. Il était donc intéressant de savoir si celle-ci se manifes- terait dans toutes les circonstances où la section bulbaire peut être étudiée dans ses effets, comparativement avec la dépancréatisation. Or, nous avons vu, dans les séries expérimentales E et F, ce qui arrive de la fonction glycémique, quand on combine l’ablation du pancréas avec la section de la moelle épinière pratiquée dans la région cervico-dorsale moyenne. Les très remarquables effets obtenus dans ce cas se reprodui- raient-ils si, dans cette combinaison, on substituait la section bulbaire à la suppression du pancréas? La réponse importe beaucoup à la solidité de nos conclusions premières. Nous avons consacréfà la recherche de cette réponse deux séries distinctes d'expériences, en correspondance avec les séries EetF. PREMIÈRE SÉRIE H. (Correspondant à la SÉRIE E.). — Effets produits sur la fonction glycémique par la section de la moelle épinière, dans LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 47 la région cervico-dorsale moyenne, quand cette section est suivie de la section bulbaire.— Nous rappellerons que la section médullaire, pra- tiquée seule au point indiqué, détermine l’hypoglycémie et que cet effet n’est nullement modifié lorsque l’ablation du pancréas s’ajoute à la sec- tion médullaire. ExP. ! — On coupe la moelle épinière entre Ja 7e vertèbre cervicale et la : 4" vertèbre dorsale. L'animal est abandonné pendant la nuit et, le lendemain, on pratique la section bulbaire el la respiration artificielle. GLYCOSE p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. —— Avant la section prédorsale, . . . .:. . . » 390,1 16 heures après la section prédorsale. . . . 0=852 269,4 2 heures après la section bulbaire, . , ,. . 0 800 25° 4 h. 20 après la section bulbaire . . . . . . 0 743 23°, Voilà une expérience qui donne d'une manière très catégorique, le réponse cherchée : la section bulbaire, pas plus que l’ablation du pan- créas, n'empêche l’hypoglycémie déterminée par la section de la moelle épinière dans la région cervico-dorsale moyenne. Exe. IL. — Sur le chien qui a servi de sujet dans cette expérience, la section bulbaire suivit immédiatement la section médullaire. GLYCOSE p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. Avant les deux sections. . d HT ae Ai 18428 » DelsiAte Apres His ARE Porilieite 20 LC agalete 1 666 380,9 DD OMG DrES Ne LR dura 4 250 350,7 SRB ADTESR RE du Nu « 310,9 5 h. 30 après. . Sa AN 0 833 29° Dans celte seconde expérience, l'hypoglycémie, accompagnée d'hypo- thermie, s'est établie comme dans la première, avec une petite particula- rité toutefois qui a marqué la marche de l'hypoglycémie. On voit, en effet, que du sang puisé de suite après les deux sections dans l'artère con- tenait plus de sucre que le sang pris avant ces sections. Mais c’est, comme nous l'avons déjà dit ailleurs, un accident fugitif qu’il n’est pas très rare de constater dans les cas de section médullaire simple. II a été très accentué dans l'expérience suivante de section simple, que nous don- nons à titre de spécimen. . 48 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Exe. IT. — Section médullaire simple pratiquée entre la 7° vertèbre cervi- cale et la 1re vertèbre dorsale. GLYCOSE p. 1000 dans le sang artériel. Avant la Section tete 0 CN TE ee 15063 DMINULeS APrÈS MANS DE RER EE 2 000 ADÉAOEADTES EAP a JE RES MARNE SAME PAR ES 0 833 En résumé, il n’y a guère à douter que la section bulbaire n'ait pas plus d'influence que la dépancréatisation sur l'hypoglycémie provoquée par une section médullaire préalablement exécutée. DEUXIÈME SÉRIE H. (Correspondant à la série F). — Effets produits sur la fonction glycémique par la section de la moelle épinière dans la région cervico-dorsale moyenne, quand cette section est précédée de la section bulbaire. — Dans le cas de cette deuxième série H, nous ne pouvions avoir l'espérance de trouver un parallélisme complet avec la série F. On a vu, en effet, que la section bulbaire simple n’est compa- rable à la dépancréatisation simple que dans la période iniliale de l’état paralylique où la section plonge les sujets. Plus tard, le parallélisme est troublé par la dépression générale qui engendre nécessairement l’hypo- glycémie avec l’hypothermie, chez les sujets à bulbe coupé. Néanmoins, on trouvera, dans les cinq cas que nous allons rapporter, une démons- tration éclatante de l'identité des résultats obtenus avec les deux séries d'expériences. On y verra que la section bulbaire préalable, de même que la dépancréatisation, crée dans les centres secondaires représentés par les ganglions sympathiques un état de suractivité tel, que l’action paralysante ou inhibitrice de la section médullaire, dans la région cervico- dorsale, ne peut plus avoir prise sur eux. C’est, en effet, comme dans la série F, plutôt une suractivité encore plus grande qui est imprimée par la section à ces centres secondaires. Nos chiffres les plus forts de glycose trouvée dans le sang des sujets à bulbe coupé ont été, en effet, rencon- trés dans les expériences que nous avons à faire connaître maintenant. Dans toutes ces expériences, la section médullaire a été pratiquée entre la 7° vertèbre cervicale et la 1"° paire dorsale. Exe. I. — Les deux sections se suivent à 5 minutes d'intervalle. . GLYCOSE | p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. . sang artériel. Immédiatement avant la section bulbaire. . 18214 DS Immédiatement après la section médullaire. 1 888 370,4 2 heures après cette dernière section. . . . 1 457 35°,2 LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 49 Exp. II. — Les deux sections se suivent de très près. L'autopsie pratiquée après l'expérience a démontré que la section médullaire était incomplète: il n’y avait qu'uue hémisection gauche. CA GLYCOSE p. 1000 dans le sang artériel. Immédiatement après les deux sections , , . , . . 38923 heurelapres es deux seclions 2/00 Me 3 923 Exp. IT. — La section médullaire n'est faite que 10 minutes après la section bulbaire. GLYCOSE p. 1000 dans le sang artériel. ANENTeSMSECUONSEN SAR NSPERMEE QE 18000 Mpreslaisectionemedullaire. 4h20 PAIN 3 000 Exp. IV. — La section médullaire n’est faite que 10 minutes après la section bulbaire. GLYCOSE ; p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. vantiasectiontbulbaire sn AIDE MEN As1tl 39°,4 10 minutes après la section médullaire. . . 1 666 360,3 MAO rapréstcettesection. CA VC 1 250 340,5 Jihiorapresicette sections than 0 877 329,3 Exp, V. — Les deux sections se suivent de très près. GLYCOSE p. 1000 TEMPÉRATURE dans le rectale. sang artériel. Au moment de la section bulbaire. . , . , 18133 » Après la section médullaire. . . . . . . » 37° 4 h. 45 après la section médullaire. . . . 0 980 350,5 3 h. 15 après cette section médullaire. . , , 1 593 0e) Nous aurions pu supprimer cette dernière expérience qui présente des résultats un peu anormaux. Il y a eu probablement intervention de quel- que condition particulière qui nous a échappé. En tout cas, comme nous sommes sûrs de l'exactitude des analyses, l'expérience mérite d’être con- servée à titre de document à consulter. Conclusion nécessaire des deux séries expérimentales H. — Ainsi, les résultats obtenus dans ces deux séries d'expériences ont été précisément ceux qui étaient cherchés : la section médullaire, pré- 50 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE nn ————————————2— au cédée ou suivie de la section bulbaire, produit exactement les mêmes effet que la section médullaire précédée ou suivie de l’ablation du pancréas. Donc, au point de vue de l’action physiologique, exercée sur l'appareil formateur du sucre, cette dernière opération se comporte exactement comme la section bulbaire. Or, celle-ci détermine la surac- tivité du foie en supprimant la transmission de l’influence d’un centre frénateur situé dans le bulbe. 77 en résulte nécessairement que l'ablation du pancréas agit par un mécanisme analogue, quand elle provoque l'hy- perqlycémie el la glycosurie : cette opération détermine l’annihilation du centre frénateur de lu fonction glycoso-formatrice. Le pancréas agit donc sur cette fonction par l'intermédiaire de ce centre frénateur, dont il excite l'activité, et sans doute aussi par l'intermédiaire du centre excitateur, qui est au contraire contenu dans son activité quand il est influencé par les produits de la sécrétion pancréalique interne qui sont versés dans le sang. I. — Le pancréas considéré comme agent régulateur direct des phénomènes nutritifs liés à la fonction glycémique. — Les démons- trations expérimentales que nous avons données dans cetle étude, sur la fonction glycémique. ont été appliquées surtout au foie et à ses appareils régulateurs, au nombre desquels nous avons rangé le pancréas. Cet organe n'a-t-il pas d'autre rôle à remplir ? Nous avons vu que, présent, il modère le centre excito-sécréteur du foie ou exalte le centre fréno- sécréteur, et que peut-être il remplit à la fois ces deux offices, dont le but est exactement le même. Quand le pancréas est absent l’action fréna- trice exercée par les centres cérébro-spinaux sur la fonction glycoso- formatrice est plus ou moins abolie et l’action excitatrice, au contraire, considérablement exaltée. Le pancréas se trouve donc indirectement, mais très étroitement lié au foie dans l'exercice de cette fonction, par l'intermédiaire des centres nerveux qui en opèrent la régulation. L’abla- tion du pancréas détermine, en effet, les mêmes résultats que la suppres- sion du centre fréno-sécréteur, et la suppression du centre excilo-sécré- teur empêche toute manifestation des effets de la dépancréatisation. Ce sont là des faits indéniables, prouvant bien que le pancréas est un frein du foie. Mais ils ne s’opposent pas à l'attribution, au pancréas, d'un rôle plus direct, sinon plus actif, dans la fonction glycémique. Revenons sur le terrain où nous nous sommes placés au début de cette étude. Nous avons alors appelé l’altention sur la fonte rapide des sujets qui ont subi l’ablation du pancréas, en faisant ressortir l’importance con- sidérable de ce fait, au point de vue du mécanisme des phénomènes nutri- tifs liés à l'exercice de la fonction glycoso-formatrice. Non seulement les tissus des sujets dépancréatisés ont perdu la plus grande partie de leur aptitude à s’assimiler les aliments réparateurs que peut fournir encore l'absorption digestive; mais, chez ces sujets il y a de plus exagération de LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX o1 la désintégration histolytique incessante qui est la manifestalion perma- nente du mouvement nutrilif. 1l est donc parfaitement légitime d'admettre que les phénomènes nutritifs liés à l'exercice de la fonction glycémique sont dans une large mesure, sous la dépendance du pancréas. Les pro- duits de la sécrétion interne de cette glande, qui sont incessamment versés dans le torrent circulatoire, peuvent très bien produire un effet modérateur direct sur ce mouvement de désintégration qui prépare les matériaux dont le foie opère la transformation en glycose. Cette hypothèse ne peut être démontrée directement. Mais elle a pour elle tous les caractères de la vraisemblance. Ce qui plaide surtout en sa faveur, c’est qu’elle dérive immédiatement du fait fondamental dont il faut expiiquer le mécanisme, nous voulons dire le trouble si profond apporté par l’ablation du pancréas aux phénomènes nutritifs. En résumé, la sécrétion pancréatique interne, n'agit pas seulement sur le foie, en modérant, par l'intermédiaire des centres nerveux régula- teurs de cet organe, la fonction glycoso-formatrice. Cette sécrétion peut être encore considérée comme un modérateur direct du mouvement incessant de désintrégration, qui est entretenu dans les tissus par la fonetion nutritive et qui prépare les matériaux avec lesquels le foie fa- brique la glycose. | Ajoutons que, pour ce travail, comme pour celui qui se passe dans le foie, les vrais régulateurs de son mécanisme ne peuvent être que des centres excito-sécréteur ou fréno-secréteur, résidant dans l’axe cérébro- spinal et dirigeant la sécrétion interne du pancréas. Z{ n'y a pas un seul des faits expérimentaux dont nous avons parlé qui ne s'adapte exactement à cette double conception : sécrétion pancréatique interne réglant la prépa- ration des substances que le foie transforme en sucre, et réglée par des cen- tres excilo-sécrélteur et fréno-sécréleur du pancréas, qui sont conjugués, deux à deux, avec les centres, de nom contraire, régulateurs du foie. Quand on coupe le bulbe, on détruit donc l’action frénatrice du foie et l’action excitatrice du pancréas. D'où exaltation de la glycoso-formation et des phénomènes qui la préparent. Quand on coupe la moelle épinière dans la région cervico- dorsale moyenne, cn abolit les actions frénatrice du foie, excitatrice du pancréas. D'où effet inverse, c’est-à-dire dépression de la fonction glycoso-forma- trice et de son prélude, le mouvement de désintégration nutritive. Enfin, quand on enlève le pancréas, on supprime la sécrétion interne qui modère la désintégration et l’on accélère ainsi la préparation des matériaux sur lesquels s’exerce la glycoso-formation. De plus, on prive les centres régulateurs du foie d’un agent qui favorise le frénateur et déprime au contraire l’excitateur. Ce sont là des influences convergentes concourant toutes à l’exagération de la formation de la glycose. J. — Résumé général, sous forme de propositions dogmatiques, des 52 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE enseiguements fournis par l'ensemble des présentes études expéri- mentales... — 1. La fonction glycoso-formatrice du foie est placée sous l'influence directrice d'appareils régulateurs. 2. Le diabète expérimental de von Mering et Minkowski montre que le pancréas joue un rôle de premier ordre dans la régulation de cette fonction. 3 3. L'influence du pancréas ne s'exerce pas directement sur le foie: elle agit surtout sur des centres nerveux auxquels est départi le rôle de régulateurs de l’activité de la glande hépatique. 4. Ces centres régulateurs sont au nombre de deux : Un centre frénateur situé dans la partie bulbaire de la moelle dllonsce. = Ün centre excitateur silué près de l'extrémité supérieure de la moelle cervicale, entre le bulbe rachidien et l'origine de la quatrième paire spinale. 9. Le centre frénateur du foie transmet son action au système du grand sympathique par les rami communicantes des quatre premières paires cervicales. Le centre excitateur transmet la sienne par les rami communicantes que fournissent les dernières paires de la première moitié de la région dorsale de la moelle épinière. 6. Le pancréas .actionne ces deux centres en sens inverse l’un de l’autre, de manière à produire des effets cumulatifs de même nature sur la fonction glycoso-formatrice. Ainsi, le centre frénateur est activé et l’excitateur modéré par les produits de sécrétion qu'on suppose être versés dans le sang parla glande pancréatique. L’ablation du pancréas, en supprimant cette secrétion, détruit l’action frénatrice et exalte l’action excitatrice des centres nerveux. D'où suractivité considérable de la glycoso-formalion, entraînant l'hyperglycémie et la glycosurie. 7. La section bulbaire entre l’atlas et l’occipital isole le centre fréna- teur, Il y a alors accentuation des effets du centre excitateur. Cette accentuation se manifeste avec toutes ses conséquences, l’'hyperglycémie, la glycosurie, comme dans le cas d’ablation du pancréas, à un moindre degré pourtant, le centre excitateur n'étant pas exalté par la section bulbaire, comme cela arrive avec la dépancréatisation; il est seulement libéré de l’antagonisme du centre frénateur. 8. La section médullaire, en un point quelconque de la région com- prise entre la 4° paire cervicale et la 6° paire dorsale, laisse subsister l'action du centre frénateur, mais détruit celle du centre excitateur. Aussi cette opération entraîne-t-elle toujours l'hypoglycémie, suite de la dimi- nution imprimée à l’activité de la fonction glycoso-formatrice du foie. 9. L'influence exercée par les deux centres nerveux régulateurs du foie ne s'adresse pas directement à cet organe. Elle n’y arrive que par l’inter- médiaire des ganglions placés, comme des relais, sur le trajet des nerfs sympathiques, source directe de l’innervation viscérale. LE PANCRÉAS ET LES CENTRES NERVEUX 53 10. Les ganglions du sympathique ne sont pas de simples agents de transmission. Ils constituent de véritables centres secondaires, tirant, il est vrai, toute leur activité des centres primitifs cérébro-spinaux, mais jouant néanmoins un rôle autonome très imporlant. C’est, en effet, dans les cellules de ces ganglions que les actions frénatrices et excitatrices des centres essentiels se rencontrent et se moditient réciproquement. 11. L'importance physiologique de ce rôle autonome est de premier ordre. En effet, toute suractivité communiquée, par l’un des centres céré- bro-spinaux, aux éléments ganglionnaires tend à s’y maintenir, si le centre antagonisle n'intervient pas pour imprimer à ces éléments une modalité contraire. Le maintien des communications entre les ganglions et le centre cérébro-spinal qui a créé la suractivilé n’est même pas nécessaire au maintien de celle-ci. F5 Ainsi, l’aptitude frénatrice imprimée aux ganglions du système sympa- thique, par la section médullaire qui annihile l'influence du centre exci- tateur, constitue, pour ces ganglions, une possession dont ils ne peuvent être destitués, même quand le centre frénateur est annihilé à son tour par la section bulbaire. De même, l'aptitude excitatrice communiquée aux ganglions par la section bulbaire, qui détruit l'action du centre frénateur, se conserve tout entière après qu'on à supprimé également toute influence du centre excitateur, par la section médullaire dans la région cervico-dorsale. 12. La suppression du pancréas agit exactement comme la section bulbaire, dans toutes les circonstances dont il vient d’être question, relativement à la création et à la conservation, dans les ganglions sympathiques, des aptitudes frénatrice ou excitatrice de la fonction glycémique. Ainsi, sur l'animal privé de pancréas, la section cervico-dorsale de la moelie épinière, quoique entraînant la paralysie du centre excitateur de la production glycosique dans le foie, ne porte pas atteinte à la grande suractivité de celte production. De même, sur le sujet qui a subi d’abord la section médullaire, l’abla- tion ultérieure du pancréas ne modifie pas la dépression profonde provo- quée par la première opération dans l’activité de la production glyco- sique. 13. Le rapprochement ci-dessus, entre les effets de la dépancréatisa- tion ct ceux de la section bulbaire, achève d'établir l'identité du méca- nisme direct qui préside à la manifestation de ces effets. Le pancréas joue donc son rôle de frénateur du foie, par l'intermédiaire des centres ner- veux régulateurs de ce dernier. 44. Ces centres régulateurs agissent comme agents excito-sécréteurs ou fréno-sécréteurs. Mais leur action est nécessairement conjugée avec celle des centres vaso-dilatateurs et vaso-constricteurs : les vaso-moteurs réglant le débit du sang à travers le système hépato-pancréatique et met- 54 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE tant ce débit en rapport avec l’activité fonctionnelle propre des éléments sécréteurs. 13. Le pancréas ne joue pas seulement un rôle dans la régulation de la fonction glycoso-formatrice du foie. Il y a chance pour que sa sécré- tion interne limite le mouvement de désintégration qui constitue l’une des phases nécessaires de la nutrition générale, et d’où résultent les matériaux servant, chez les sujets à jeun, à la formation du sucre dans le foie. | Il y a chance aussi psur que cetle sécrétion pancréatique soit sous la dépendance des centres bulbaire et cervical de la glande hépatique, celui-ci jouant, à l'égard du pancréas, le rôle de frénateur, celui-là le rôle d’excitateur, tous deux harmonisant leur action sur le foie et le pan- créas, de manière à les faire concourir au même but. ; 16. L'ensemble des notions précédentes entraîne l'idée de l’unité dans la pathogénie du diabète. Quelle qu’en soit la cause primitive, les troubles essentiels qui le caractérisent doivent être rapportés au trouble des centres régulateurs de la fonction glycoso-formatrice du foie, particulièrement à la paralysie ou à l’inhibition plus ou moins complète du centre bulbaire, frénateur, à la fois direct et indirect, de l’activité des cellules hépatiques. Ceci nous ramène, par des voies détournées, sans doute, mais très sûres, aux vues générales de CI. Bernard sur la pathogénie du diabète. Nous en avons fini avec cette nouvelle étude de physiologie pure. Les propositions que nous avons déduites, de nos laborieuses recher- ches ne sont pas toutes également justifiées. Certaines d’entre elles auraient besoin d’un complément de démonstration. 1l nous a paru pour- tant utile de les considérer, dès maintenant, comme défininitivement établies et de les réunir dans une construction systématique propre à en mieux faire apprécier la signification et la portée. Dans le même but, nous nous sommes abstenus de tout examen critique des théories et des faits antérieurement acquis. Ceci aurait compliqué notre tâche déjà si difficile. Le motif de cette abstention n'aura pas échappé aux personnes compétentes qui auront suivi avec attention l’en- chaïnement de nos démonstrations. 4 Er CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DES BACTÉRIES INTESTINALES PAR MM. A. GILBERT et G. LION (Mémoire présenté à la Société de Biologie dans la séance du 18 mars 1893.) Caractères attribués par Escherich au Bacterium coli commune. — Sous le nom de Bacterium coli commune, Escherich a décrit un microbe doué d’une faible mobilité, ne liquéfiant pas la gélatine, donnant sur pomme de terre une culture humide, d’une coloration variant du jaune-maïs au jaune-pois, coagulant le lait, faisant fermenter le sucre de raisin et pro- duisant chez les animaux une maladie rapidement mortelle, caractérisée par la diarrhée, la somnolence et le coma. Caractères reconnus depuis Escherich, au Bacterium coli commune. — Les nombreuses études entreprises dans ces derniers temps, et, avant tout, les efforts tentés pour différencier le bacterium coli commune du bacille typhique, tout en diminuant la valeur attribuée d’abord aux carac- tères des cullures sur milieux solides etaux inoculations aux animaux, ont fait attacher une grande importance à certaines propriétés et particuliè- rement à celles de faire fermenter les sucres et de produire de l'indol dans les milieux peptonisés. Actuellement, le Bacterium coli commune, est considéré comme un bacille mobile, ne liquéfiant pas la gélatine, poussant abondamment sur la pomme de terre sous forme d’une culture jaune-maïs ou jaune ver- dâtre, faisant coaguler le lait, fermenter la lactose, et donnant la réac- tion de l'indol. Les microbes auxquels ont eu affaire les nombreux auleurs qui se sont occupés de la question ne répondent pas tous à ce type. — Cependant les Biozocre. Mémoires. — 90 SÉRIE, T. V. ÿ 56 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE différents auteurs qui ont écrit sur la question depuis le mémoire d’Esche- rich, n'ont pas toujours tenu compte de tous les caractères par lui assi- gnés au Bacterium coli commune, et semblent avoir rencontré et utilisé pour leurs recherches des agents qui différaient de ce dernier par une ou plusieurs propriétés. C'est ainsi, que la plupart d'entre eux ne se sont pas occupés de re- chercher la mobilité, et que quelques-uns ont même décrit le Bacterium coli commune comme immobile. La vérité est qu'iln'y a pas un Bacterium coli commune, mais un nombre encore indéterminé de types microbiens voisins dans l'intestin. — La raison de ces divergences réside, et nos recherches ont pour résultat de le mon- trer, dans ce fait, que l'intestin n’est pas l’habitat d'un hôte unique, tou- jours le même, immuable dans ses propriétés morphologiques et biologi- ques, mais qu’à côté du Bacterium coli commune, muni de tous les carac- tères spécifiés plus haut, on y rencontre toute une série de microbes qui s'éloignent, à des degrés variables, du type complet. A ce point de vue, la mobilité est peut-être la propriété qui présente le plus d'intérêt. Elle varie à l'infini d'un échantillon à l’autre: dans certaines cultures, presque tous les éléments sont mobiles et traversent rapidement, par un mouve- ment de reptation ou un mouvement de rotationsur leur petit axe, lechamp du microscope ; dans d’autres, les éléments mobiles en minorité, sont encore assez nombreux pour être facilement reconnus ou tellement rares que leur recherche demande une grande attention; dans d’autres: enfin, il est impossible de découvrir, même par des examens réitérés et pro- longés, un seul élément doué de mouvements (1). La réaction de l’indol présente également tous les degrés. Tantôt elle est très intense, tantôt elle est seulement nette ou même à peine marquée, tantôt enfin, elle manque totalement. IL n’est pas jusqu'à la fonction fermentative, et jusqu’au pouvoir de faire coaguler le lait qui ne puisse, pour cerlains échantillons, plus rares à la vérité, faire complètement défaut. On rencontre ainsi des variétés qui ne s’écartent du type complet, que par l'abolition d’une quelconque de ses fonctions, et d’autres qui s’en éloignent graduellement par l'abolition de deux ou de la plupart d’entre elles. On se rendra facilement compte de ces différences par la lecture du tableau placé plus loin : Recherche méthodique des bacilles dans les selles de 15 hommes adultes. — Les résultats qui s’y trouvent consignés proviennent de l'examen méthodique des selles de 15 individus, dont 12 avaient des ma- (1) De mouvements nôn browniens bien entendu. er. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DES BACTÉRIES INTESTINALES 57 tières normales, 2 des matières diarrhéiques, et 1 des matières dysen- tériques. Sur les plaques ensemencées avec les matières fécales, nous avons pré- levé un grand nowbre de colonies superficielles ou profondes, pouvant passer pour appartenir au Bacterium coli commune, et nous les avons inoculées en strie sur des tubes de gélatine inclinée, et sur des pommes de terre. Nous avons, dans chaque cas, noté l'aspect des colonies des plaques, celui des cultures sur gélatine inclinée et sur pomme de terre, et comparé entre eux les différents échantillons obtenus. Nous avons pu ainsi nous assurer que les caractères extérieurs n'ont qu’une valeur très relative en ce qui concerne la différenciation des divers types. Cest ainsi, pour n’en donner qu'un exemple, que trois cultures notées comme identiques et que nous désignerons par les lettres À, B, C, se sont mon- trées formées d'éléments doués des propriétés suivantes: A. Mobiles. — Font fermenter la lactose et coaguler le lait. — Réaction de l’indol, très marquée. B. Immobiles. — Font fermenter la lactose et coaguler le lait. — Réaction de l’indol, très marquée. C. Très peu mobiles. — Ne font pas fermenter la lactose ni coaguler le lait. — Réaction de l’indol, nette. Il est cependant une certaine forme de culture qui semble assez spé- ciale, et qui nous a paru, dans presque tous les cas, être constituée par des éléments doués de propriétés identiques, c’est celle, qui donne sur plaque des colonies épaisses, opaques, non bleutées par transparence, et sur tubes inclinés, une couche surélevée, blanchâtre, ne gagnant pas ou seulement tardivement les parois du tube. Rencontrée quatre fois, cette forme s’est montrée trois fois l’apanage d'un microbe doué de propriétés identiques. Dans le quatrième cas, une seule propriété, celle de l’indol, différait. Aussi avons-nous cru devoir tenir compte de cette variété dans notre tableau. Extrêmement. 3 fois. f Très mobiles. Font fermenter Réaction { Positive. HS “Leo ï ti la lactose de Re RENTE et coagulent né GED 90 ä le lait. lindol. | Négative. Da ( PFC. Pas de réaction de dégénérescence. 90 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE L'observation précédente résume l’état du malade en 1890. À partir de cette époque jusqu'à aujourd'hui, les phénomènes notés ont été les suivants : Tont d’abord le myosis s’est accentué et le réflexe lumineux est complètement éteint depuis un an. En outre la pupille droite est un peu déformée, allongée dans le sens vertical. L'atrophie musculaire n'a que très peu progressé depuis cette époque, et la force des bras, des jambes, est encore à l'heure actuelle (mars 1893), très développée. : Par contre, les symptômes d'incoordination ont augmenté, le malade se sent moins assuré sur ses jambes. Il peut marcher, aller facilement à pied depuis Bicêtre à l'avenue d'Italie, en s’aidant d'une canne et en regardant attenti- vement le sol. Les yeux fermés, il ne peut se tenir debout et peut encore moins marcher. Depuis près de trois ans il ne peut plus marcher la nuit, aussi rentre-t-il rarement le soir, et il ne peut le faire que si, en descendant du - tramway, il trouve quelqu'un pour le soutenir par un bras et le diriger jusqu’à l'hospice. S'il ne trouve personne, il s’assied par terre jusqu’à ce que passe un camarade qui puisse l'accompagner. Il éprouve très souvent aujourd’hui un symptôme qu'il ne ressentait que rarement autrefois, à savoir, le dérobement des jambes (Giving way of the legs) des auteurs anglais. Ce phénomène se montre chez lui sans aucune raison; étant debout, appuyé sur sa canne, tout à coup il tombe assis à terre. L'incoordination des membres supérieurs a éga- lement augmenté. Les troubles de la sensibilité et les douleurs fulgurantes présentent autant d'acuité qu'autrefois. Lorsqu'il ressent ces douleurs, il tombe généralement à terre. La cypho-scoliose a un peu augmenté. Sens musculaür'e. — Si le malade peut, les yeux fermés, reproduire assez exactement avec un membre les attitudes passives imprimées à l’autre membre, par contre, la notion de position est chez lui très altérée, Lorsqu'on lui dit de toucher, les yeux fermés, une partie quelconque de lun ou l'autre de ses membres, il commet des erreurs de lieu considérables et n'arrive à l'endroit désigné qu'en glissant son doigt sur la peau jusqu'à ce qu'il ait atteint le but. A la face, il existe depuis plus d’un an, des symptômes spéciaux : contractions fibrillaires très nettes des releveurs des commissures avec saillie des lèvres et renversement en dehors de la lèvre inférieure. Le malade peut faire la moue et siffler, mais il siffle beaucoup moins facilement qu'autrefois. Rien du côté du facial supérieur. Ce malade, qui avait déjà autrefois l’ouie dure, est atteint actuellement d'une surdité assez prononcée qui s'est développée progressivement. L'examen des yeux pratiqué par M. Viallet, le 16 mars 1893, fournit les renseignements suivants : OEil gauche et œil droit, hypermétropie et astigmatisme, vision normale après correction. Fond de l'œil normal. Nystagmus dynamique. Pupilles. Myosis double, pupille droite un peu plus dilatée que la gauche, déformée, elliptique à grand axe oblique en bas et en dedans. Réaction pupillaire abolie pour la lumière, conservée pour la convergence. Signe d'A. Robertson. Sens chromatique normal. Champ visuel normal. L'état mental est toujours le même, c’est celui d'un dégénéré vicieux racontant sa vie passée (il a été souteneur jusqu’à l'âge de vingt ans), sans regret comme sans forfanterie, comme une chose SUR LA NÉVRITE DE L'ENFANCE 91 —— toute naturelle, Aucune notion du bien et du mal. Enfin, symptôme impor- tant que nous avons élé amené à chercher chez ce malade après avoir pra- tiqué l’autopsie de sa sœur, tous les troncs nerveux des membres accessibles à la palpation, à savoir, le cubital au coude, le radial dans la gouttière de torsion, le médian à la face interne du bras, le sciatique poplité externe au niveau de la tête du péroné, tous ces nerfs sont augmentés de volume, d’un diamètre double de celui de l’état ordinaire et très durs à la palpation. Ils ne paraissent cependant pas sensiblement blue douloureux à la pression que dans l’état normal. Si nous résumons brièvement les symptômes présentés par nos deux malades nous voyons qu'il s’est agi dans les deux cas d’un affection ana- logue en certains points à l'atrophie musculaire étudiée par les différents auteurs que nous avons cités au commencement de ce travail, mais en différant complètement sur d’autres. C’est ainsi que nous retrouvons chez eux une atrophie musculaire à marche lente et progressive ayant débuté dans le bas âge (Obs. I), vers la douzième année (Obs. Il), par les muscles des extrémités inférieures, puis ayant atteint plus tard ceux des extrémités supérieures, mains et avant-bras, une déformation des pieds en équin (Obs. IT), en varus (Obs. I). Mais, si la déformation générale des pieds estsemblable dans nos cas à celle constatée par les auteurs précédents chez leurs atrophiques, il n’en est pas de même de celle des orteils qui, chez nos deux malades, présentait une attitude particulière imprimant à leurs pieds une forme spéciale. Dans ces deux cas, en effet, la première phalange des orteils, celle du pouce en particulier était en flexion dorsale forcée, les deux autres étant en flexicn palmaire. Cetle griffe des orteils n’est signalée que dans un petit nombre d’observations par les au- teurs qui nous ont précédé. Elle fait défaut chez la plupart des malades dont ils ont donné des reproductions et chez lesquels les orteils sont représentés en flexion plantaire. Si on ajoute aux symptômes précédents l'existence de contractions fibrillaires, l'absence des réflexes tendinenx, l’altération très prononcée de la contractilité faradique et galvanique, J'intégrité des sphincters, tuus symptômes constatés également chez nos deux malades, on voit combien était grande, objectivement parlant du moins, la ressemblance clinique qu'ils présentaient avec l’atrophie mus- culaire du type Charcot-Marie. Mais la ressemblance n'allait pas plus loin, car chez nos deux malades il existait d’autres symptômes que l’on n'a pas rencontrés jusqu'ici dans cette dernière affection et que nous allons passer successivement en revue. Sensibilité. — Dans l'atrophie musculaire familiale débutant par les extrémités, il est de règle que la sensibilité subjective et objective soit intacte dans tous ses modes, et ce n’est que très exceptionnellement qu’elle 92 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE _ a été trouvé altérée et jamais à un degré aussi prononcé que chez nos malades. Dans nos deux cas, en effet, il existait des troubles extrêmement marqués de la sensibilité (voy. schémas) avec retard dans la transmis- sion des impressions, troubles plus accusés aux membres inférieurs qu'aux membres supérieurs et diminuant d'intensité de la périphérie au centre. Dans nos deux cas encore, il existait des douleurs fulgurantes, atteignant un degré d’acuité tel, chez le malade de l’Observation IT, que lorsqu'elles se produisent le malade s’affaisse par terre. Les réflexes cutanés enfin élaient dans nos deux cas abolis. Motilité. — Chez nos malades, il existait une incoordination motrice très nette des quatre membres. Difficile à apprécier dans les membres inférieurs chez le malade del’Observation If qui, du fait, de son atrophie ne pouvait guère marcher; elle était, par contre, facile à constater dans les membres supérieurs de cette malade où elle offrait des caractères aussi accusés que dans le tabès médullaire classique à début dorso-lombaire ayant envahi la région cervicale. Chez le frère, actuellement encore à Bicêtre, l’incoordination présente les caractères suivants : Le malade ne peut marcher qu'avec une canne et en fixant le sol, il ne marche pas en ligne droite, mais festonne en marchant. Ilsteppelégèrement eu marchant _- du fait de son équinisme — mais sa marche est différente de celie d’un atrophique steppeur. En steppant, en effet, il lance ses jambes avec brusquerie et ses pieds retombent lourdement sur le sol, sa démarche a un aspect saccadé caractéristique. Privé de sa canne, il ne peut se tenir debout et encore moins marcher. Lorsqu’en marchant il veut changer de direction, tourner sur place, ille fait avec une grande lenteur et en ap- puyant successivement sa canne tout autour de ses jambes. Les yeux fermés, il est incapable de faire un paset s’affaisse (signe de Romberg), de même si on lui dit de regarder en l’air: En plein jour et avec sa eanne il peut lant bien que mal marcher ün certain temps, dès que la nuit arrive il devient complètement incapable de marcher et même de seLenir debout. Souvent, sans cause appréciable, étant debout, appuyé sur sa canne, ses jambes se dérobent sous lui et il se trouve à terre (giving way of the legs de Gowers). L'incoordination n’est pas moins marquée aux membres supérieurs et, lorsqu'on dit au malade de prendre unobjet, de se toucher l'extrémité du nez, etc., il n’y arrive qu'après avoir commis plusieurs erreurs de lieu successives, erreurs de lieu dont l'amplitude augmente beaucoup par l’occlusion des yeux. Sens musculaire. — La faculté de reproduire les yeux fermés, avec un membre, une attitude passive imprimée à un autre membre, élait con- servée chez ces deux malades, tandis que la notion de position des membres — faculté de pouvoir, les yeux fermés, atteindreexactement une partie de la surface culanée — était par contre profondément lésée. Chez | | | SUR LA NÉVRITE DE L'ENFANCE : 93 nos deux malades enfin il existait des phénomènes pupillaires, myosis avec réflexe lumineux lent (Obs. 1), myosis avec signe d’Argyll Robertson (Obs. IT) et nystagmus dynamique dans les deux cas. Ajoutons enfin l'existence chezces deux malades d'une cypho-scoliose qui, chez lamalade de l'Observation [, élait arrivée à un degré de développement excessif. En d'autres termes, nos malades étaient des atrophiques ataxiques et, c’est en se basant sur cette double symptomatologie, et sur l'existence de la déformation des pieds, qué l’un de nous crut pouvoir diagnostiquer chez eux l'existence d’une forme particulière de maladie de Friedreich avec atrophie musculaire et troubles de la sensibilité et à publier sous ce titre leurs observations (1). L'’autopsie de la malade de l'Observation I nous ayant montré que ce diagnostic ne pouvait être maintenu, nous croyons devoir résumer main- tenant les résultats nécroscopiques constatés dans ce cas. Ces lésions sont de trois ordres, musculaires, nerveuses et médullaires. Dans les muscles, les lésions sont celles de l’atrophie simple, portée à un degré excessif, avec lésions vasculaires très marquées, et plus accusées dans les arlères que daus les veines. Du côté des nerfs, il existe une névrite interstitielle hyper- trophique extrêmement accusée, diminuant légèrement d'intensité de la périphérie au centre, et du côté des racines médullaires il existe une lésion semblable, mais ici, bien que l’état hypertrophique des nerfs soit très aceusé, la lésion est moins avancée en organisation. Ce fait, démon- tré par l'examen histologique (voy. fig. 3), prouve bien que les racines n'ont été atteintes qu'après les nerfs périphériques en même temps qu'il nous explique pourquoi ces racines si hypertrophiées n'avaient pas sen- siblement augmenté de consistance. Du côté de la moelle enfin, il existait une sclérose des cordons de Goll et de Burdach à la région lombaire, diminuant de bas en haut pour les cordons de Burdach qui, au niveau du renflement cervical, ne présentaient que des allérations légères et se limitant dans cette même région à la partie postérieure des cordons de Goll. Toutes les autres régions de la moelle étaient saines et, les ganglions spinaux, atteints également de sclérose hypertrophique, présentaient un élat normal de leurs cellules. Comment interpréter la nature des lésions constatées dans cette autop- sie. Il est incontestable que nous avons affaire ici à un cas de névrite interstitielle périphérique primitive et monolubulaire qui, remontant peu à peu de la périphérie jusqu'aux racines médullaires, a déterminé dans les cordons postérieurs la lésion dont nous avons parlé, et par le même mécanisme que celui suivant lequel se produisent les lésions médullaires dans le tabès dorsal, dans les lésions pathologiques (compressions) ou expérimentales des racines postérieures. En d’autres termes, la lésion des cordons postérieurs, ici, n’est autre chose que la prolongation dans 6 à (1) J. Dejerine. Mém. de la Société de Biologie, 1890, p. 43. 94 5 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ces cordons de la lésion des racines correspondantes. Par contre, la lésion des racines antérieures, qui était tout aussi accusée que celle qui existait dans les racines postérieures, nes’est pas prapagée aux cornes antérieures de substance grise, dont les fibres radiculaires et les cellules motrices ne présentaient pas d’altérations appréciables. C’est là une particularité qui n’a rien de très étunnant, puisqu'’ici la lésion remontait en sens inverse du développement et partant des fonctions de ces racines. Rien ne prouve, du reste, que les cellules des cornes antérieures n'eussent, par la suite, participé au processus, si la durée de l'affection eût été plus longue. Les lésions constatées dans notre cas, sont donc celles de la névrite interstitielle ascendante avec lésion médullaire consécutive. Voyons main- tenant s’il existe des cas analogues déjà publiés. Le cas de Friedreich déjà cité s’en rapproche à beaucoup d'égards ; ici également on a constaté l'existence d’une névrite à marche ascendante avec sclérose secondaire des cordons de Goll; mais, dans ce cas, les nerfs n'étaient pas hypertro- phiés, et si, pendant la vie, l'atrophié musculaire était topographiée de la même manière que chez notre malade, par contre, il n'existait ni trou- bles de la sensibilité, ni incoordination motrice, ni Ho | ni cp scoliose. Le cas suivi d’aulopsie, rapporté par Dubreuilh (Obs. ID), concerne bien cela est évident, un cas d’atrophie musculaire des quatre extrésmités, mais il diffère du nôtre au point de vue anatomo-pathologique — absence d'hypertrophie des nerfs et de lésions médullaires — de même qu'il en diffère complètement au point de vue clinique, car, dans ce cas, comme dans celui de Friedreich, les troubles de la SETOMUrE et l'incoordination motrice faisaient défaut. Nous n’avons trouvé dans la littérature médicale qu ‘une seule observa- tion suivie d’autopsie semblable à la nôtre, c’estle cas rapporté par MM. Gombault et Mallet, en 1889 (1). Dans ce cas, les symptômes et les lésions sont les mêmes que dans le nôtre : Début dans l'enfance, atrophie musculaire prédominant dans les extrémités, troubles très accusés de la sensibilité, incoordination motrice. A l’autopsie, névrite interslitielle avec hypertrophie des troncs nerveux et des racines médulaires et sclé- rose des cordons postérieurs diminuant de bas en haut. MM. Gombault et Mallet ont interprété ieur cas d’une manière différente de celle dont nous interprétons le nôtre et l'ont considéré comme un exemple d’ataxie locomotrice de cause spinale développée dans le jeune âge plutôt que comme une affection spéciale caractériséee par des lésions particu- lières, et dont les symptômes tendraient, il est vrai, à se confondre avec ceux du tabès. Pour nous, il nous paraît évident que le cas des auteurs précédents est tout à fait identique aux nôtres et relève de la même (1) A. Gombault et Mallet. Un cas de tabès ayant débuté dans l'enfance. — Autopsie, avec 1 pl. Arch. de Méd expér., 1889, p. 385. SUR LA NÉVRITE DE L'ENFANCE 05 pathogénie — névrite interstitielle hypertrophique ascendante avec lésions médullaires consécutives. Il est certain que les cas que nous rapportons dans notre travail cons- tituent des exemples d’une affection nouvelle, non encore classée et qui se distingue nettement au point de vue clinique et anotomo-pathologique des cas étudiés par Eulenburg, Eichhorst, Friedreich, Ormerod, Hämmond, Charcot et Marie Brossard, Tooth, Hoffmann, Dubreuilh, etc. Ils n’ont de commun, en effel, avec ces derniers, que l'atrophie musculaire et en dif- fèrent, ainsi que nous l’avons indiqué, par toute une série de symptômes donnant un cachet spécial à l'affection que nous étudions ici, et par la nature même des lésions — absence d’hypertrophie des nerfs. On pourrait toutefois se demander si nos cas ne diffèrent pas de ceux rapportés par les auteurs précédents, simplement par ce fait que nos ma- lades ayant déjà un certain âge, l'affection chez eux aurait pu, par consé- quent, acquérir un développement plus prononcé. Si tous les cas rapportés par les auteurs dont nous venons de parler, se rapportaient uniquement à des enfants, l’objection pourrait paraître spécieuse, mais, comme dans le nombre il se trouve des malades ayant dépassé la vingtième et même la trentième année (cas de Friedreich 37 ans, cas de Dubreuilh 36 ans), sans avoir présenté ni incoordination motrice, ni troubles de la sensibilité, il est évident que cette hypothèse doit être laissée de côté. En résumé, nous croyons que les cas que nous venons de rapporter — et dont un a été suivi d’autopsie — constituent une affection nouvelle relevant d’une lésion particulière des nerfs périphériques, névrite inters- titielle hypertrophique ascendante et se prolongeant dans les cordons postérieurs. Cette affection se présente en clinique avec les caractères suivants : Début, dans le bas âge ou la seconde enfance, par de l’atro- phie musculaire des extrémités avec altération de la sensibilité et dou- leurs fulgurantes, cypho-scoliose, hypertrophie et dureté des troncs nerveux, absence de troubles trophiques cutanés. Puis apparition de symptômes d'incoordination motrice avec signe de Romberg, myosis avec réaction lumineuse lente ou abolie — signe d’Argyll Robertson et nys- tagmus dynamique. Le tableau clinique présenté par les malades est alors celui d’un atro- phique doublé d’un ataxique. Cette affection est, en général, familiale et doit être considérée comme une maladie d'évolution relevant d’une ano- malie de développement du système nerveux périphérique, opinion que vient encore corroborer l’état de dégénérescence mentale présentée par nos malades (1). Le diagnostic ne nous paraît pas devoir soulever de (1) Nous n'avons pas discuté dans nos cas l'hypothèse d’une névrite de cause infectieuse, car l'examen bactériologique des nerfs n’a donné que des résultats négatifs, résultats qui, du reste, étaient plus que probables, étant donné le caractère familial de l'affection, l'absence de troubles trophiques Biozocie. Mémoires. — 9€ série, Tr. V. 8 96 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE difficultés lorsqu'on se trouve en présence de malades présentant une symptomatologie analogue à celle que présentaient les nôtres. On aura soin, dans les cas douteux, d'examiner les troncs nerveux des membres qui sont toujours augmentés de volume et de consistance dans l'affection que nous venons de décrire. Nous désignons cette affection sous le nom de Mévrite interstitielle hypertrophique et progressive de l'enfance. cutanés, etc. Nous tenons à faire remarquer que nos cas, sont jusqu'ici les seuls dans lesquels, en dehors de l'infection lépreuse, on ait constaté jusqu'ici une hypertrophie des tissus nerveux. Dans nos cas, cette hypertrophie était régulière et uniforme sur tout le trajet des nerfs qui ne présentaient de nodosités qu'au niveau des ligaments annulaires du tarse et du carpe. ANCIENS ÉCHOUAGES DE CÉTACÉS DU IX° AU XVII SIÈCLE PAR M. G. POUCHET (Mémoire présenté à la Société de Biologie, dans la séance du 15 avril 1893). Nous avons déjà fait connaître un certain nombre d’échouages de grands Cétacés tant dans l'Antiquité (1) qu'au moyen âge (2) et tant en Orient que sur les côtes d'Europe, qui ne figurent point dans les catalo- gues qu'on a souvent dressés de ces événements zoologiques, — tou- _ jours importants parce qu’ils nous permettent en certains cas de mieux connaitre l'ancienne distribution d'animaux devenus rares depuis que l’homme sait les chasser, et les poursuit sur toutes les mers. I UN ÉCHOUAGE DE CÉTACÉ SUR LA CÔTE D'ARABIE EN L'AN 300 DE L'HÉGYRE (922). C'est grâce à la bienveillance de M. le professeur Carrière, de l'École des Langues Orientales vivantes, que notre attention a été appelée sur le fait suivant. Nous le trouvons relaté dans le Livre des Merveilles de l'Inde (3) dont la rédaction paraît remonter au x° siècle. On y lit: « En fait d'animaux gigantesques, Abou’l-Haçan Mohammed fils « d'Ahmed fils d'Omar, de Siros, m'a raconté qu’il vit à Oman, en l’année « 300, un poisson que les flots avaient jeté et laissé sur une plage. On «s’en empara et on le traina à quelque distance. L'émir Ahmed fils « d'Ibilâl, y vint à cheval avec ses troupes, au milieu d'un concours de (1) Sur un échouement de Cétacé de la 1130 olympiade. Comptes rendus, Acad. des sciences, 9 mai 1892. — Note sur la Baleine observée par Néarque. Soc. de Biologie, 14 mai 1892. (2) Voy. Deux échouages de grands Cétacés aux vu et 1x° Séles Soc. de Biologie, 6 décembre 1890. (3) Livre des Merveilles. Texte arabe par P. A. van der Lith; traduction: française par L. M. Device. Leyde, 1883, 2 vol. in-4°. Cf. p. 14, IX. BioLOG1E. MÉMOIRES. — 9e série, T. V. 9 1 7 œ: RE: “ 98 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE « gens accourus aussi pour voir le monstre. Telle était sa grandeur, que « le cavalier entrait à cheval par la mâchoire et sortait du côté opposé. « L'ayant mesuré, on trouva que sa longueur dépassait deux cents «aunes et son épaisseur, de bas en haut, cinquante. On veadit de l'huile « lirée de ses yeux, suivant ce qu’on a rapporté, pour une somme de dix « à quinze mille dirhems. » Il faut, comme toujours, faire la part de l’exagération orientale, mais la particularité de l’émir venant, suivi de son escorte, visiter l'animal, ne per- met guère de doutes sur la réalité historique de l'événement. S'agit-il d'une Baleine ou d’un Cachalot? Nous avons montré ailleurs (1) que les Balænoptères et en particulier Megaptera Boops, fréquentent le golfe persique; el on sait d’autre part que l’ambre gris n’est pas rare sur la côte d'Oman et que par conséquent les Cachalots visitent aussi ces parages. Il est donc impossible de se prononcer. La mâchoire qui laisse passer l’homme à cheval duit être entendue sans doute des mâchoires dressées en façon de portique. La forme des mâchoires de Baleines semble par elle-même engager à les disposer de cette façon et on l’a fait de tout temps. Nous avons retrouvé ces espèces de portiques en Laponie, aux Feroé. 11 ÿy a quelques années mon collègue. au Museum M. Stanislas Meunier, m'en signalait un au château de Sou- chay-le-Haut, près d’Envermeu (Seine-Inférieure), à plus de 6 kilomètres de la mer et vers 100 mètres d'altitude. Léon l'Africain, le dernier auteur arabe sans doute qu’on puisse citer à propos de Cétacés, et qui écrivait en Italie à la cour du pape Léon X, nous raconte qu'à Messa, sur la côte du Maroc au sud de Mogador, la charpente de la mosquée était toute faite en os de Baleines. On sait qu'encore aujourd'hui les côtes de grands cétacés servent à cet usage dans les pays où ne poussent pas d'arbres et les factoreries d'Islande en tiennent, comme article de commerce pour la bâtisse. Mais Léon l’Africain nous parle aussi d’un jardin proche de la ville, où il y avait une de ces arcades sous laquelle on pouvait passer à chameau sans baisser la tête (2). Pour revenir au Cétacé échoué sur la côte d'Oran, il est assez difficile de comprendre également ce que signifie celte « huile tirée des yeux ». Faut-il y voir une allusion à la quantité d'huile que donne la tête du Cachalot, ou une erreur de copie, ou une simple indication des flancs de l'animal, la partie étant prise pour le tout et pouvant s'appliquer aussi bien à une Baleine ? (1) Loc. cit. (2) « .… et per is trada trovaomm apunto una costa d’una di dette, balene a posta in frggia di arco. Sotto la quale, come per una porta su camelli pas- « saudo, il sommo di lei era tanto alto, che non vi aggiuguemmo con la lesta.» Léon l'Alricain. Della descriltione dell Africa. Dans Ramusio, Delle navigatiomi et viaggi, 4° édit., f°, Venise, 1606. T. I, p. 15, D. : " ANCIENS ÉCHOUAGES DE CÉTACÉS DU IX° AU XVIL® SIÈCLE 99 II DES GRANDS OSSEMENTS DE CÉTACÉS TRANSPORTÉS AU LOIN PENDANT LE MOYEN AGE. Les Paléontologistes, en trouvant parfois loin de la mer, dans le sous- sol des cités, ou dans les alluvions des fleuves qui les traversent, de grands ossements de Uétacés, ont parfois supposé que ceux-ci avaient été appor- tés là par les forces naturelles (1). Nous voulons relater ici deux cas anciens, montrant que de tout temps la curiosité qui s'attache naturelle- ment à des organes aussi gigantesques que les mâchoires de Balænoptères (les plus grands organes premiers que nous connaissions), à engagé à les conserver (2) et même à les transporter au loin. On lit encore dans Le Livre des Merveilles de l'Inde dont il est parlé plus haut : « J'ai oui dire par un Irakien digne de foi qu’il avait vu dansle Yémen, « chez un de ses amis, la Lète d'un poisson dont la chair avait disparu et « dont les os restaient intacts; il avait pu entrer par un des creux des yeux « et sortir de l’autre côté, debout, sans baisser la tête. En l’année 310, la « mâchoire d’un de ces poissons fut portée d'Oman au Khalife Moqtadir. « Ne pouvant passer par la porte, elle fut hissée par la fenêtre. L'Irakien « me disait que des yeux de ce poisson, dont la mâchoire fut portée à « Bagdad, on avait tiré 500 jarres d'huile et plus. » Le second cas de ces transports lointains nous touche davantage, c'est M. le Professeur Carrière qui a bien voulu appeler également sur lui notre (1) Voyez à propos du fragment de crâne trouvé dans la rue Dauphine, Lamanon, Daubenton, Cuvier, Ossements fossiles, nouv. édit., t. V, p.393 ; voyez également Gervais, remarques sur l’Anat. des Cétacés. Nouv. Arch. du Museum (Her APANIIÉeD 67 8 iele retro? (2) C’est Le cas des os du grand Cétacé qu'on pouvait voir à Carthage au temps de saint Augustin (408)et sur lesquels M. Berger a récemment appelé l’at- tion de l’Académie des inscriptions. Il s’agit certainement de maxillaires de Baleines que saint Augustin d’après une erreur souvent commise et encore courante, prend pour des côtes : « Ut enim omittam commemorare, quanta « maguitudo belluarum marinarum ab eis qui experti sunt indicelur; venter « quem costæ illæ muniebant, quæ Carthagine in publico fixæ populo notæ « sunt, quot homines in spatio suo capere posset, quis non conjiciat, quanton Te, « hialu potebat os illud, quod velut janua speluncæ üllius fuit ? » /Bpist. "774 A class. IT. Epist. C. IE, quæst. VI, De Jona propheta. LE ét | fn € D 4 * 1% JAN NT ” D \ k à ; 100 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE attention. Il est tiré du récit d’un voyageur persan venu à Paris, au xv° siècle (1). Il nous dit: « Après un long voyage, nous arrivämes au pays des Français, dans « Ja ville de San-Donij (Saint-Denis). C’est le lieu où se trouve la sépuliure « des évêques, des rois et des reines. C’est une belle et illustre ville, où «il y a beaucoup d’églises. Dans la grande église où sont les tombeaux « des rois, on a placé à gauche quatre côles de poisson, et chaque côte à « cinq brasses et trois palmes de longueur. On dit que c’est dans la mer « que l’on trouve ce poisson énorme. » Ces quatre maxillaires paraissent avoir été descendus plus tard (2) dans les caveaux de l'Abbaye d'où ils furent transportés en 1806 au Museum où on peut les voir aujourd’hui à l'entrée du Cabinet d’Anatomie Comparée(3). Rappelons à propos de ces ossements de Cétacés placés dans les églises, que lors de l’échouage d’un Cachalot à Scheveningen (Hollande) en 1617 (4), la têle de l'animal fut portée dans l’église de la petite ville où on la conserve encore. (1) Relation d'un voyage fait en Europe et dans l'océan Atlantique, à la fin du xv° siècle, sous le règne de Charles VIIT, par Martyr, évèque d’Arzendjan; traduite de l’arménien et accompagnée du texte original, par M. J. Saint- Martin. Paris, Dondey-Dupré, 1827, in-80, p. 41. (2) Ce serait, si nous nous en rapportons à J. Saint-Martin (loc. cit.), peu de temps avant la Révolution. « La tradition, écrit-il en 1827, relative aux objets « dont parle notre voyageur, s’est conservée jusqu’à présent à Saint-Denis. Il « paraît que ces ossements furent mis dans les caves de l’église, où ils se sont « détruits, peu de temps avant la Révolution. » (3) I y a en réalité à cette place huit maxillaires : deux paires provenant de B. Mysticetus (A. 2983 et A. 2984), une paire de maxillaires plus petits (A. 2985) mesurant près de 4,20, que Gervais (Remarques sur l’Anatomie des Cétacés, Nouv. Archives du Muséum, t. VII, 1871, p. 83) attribue à B. biscayen- sis et deux maxillaires de même dimension que ces derniers, dépareillés (A. 2982, A. 3002). Il est difficile de savoir aujourd’hui quels sont les quatre de ces huit maxillaires qui proviennent de Saint-Denis. A s’en rapporter aux dimensions données par notre voyageur, ce seraient les deux grandes paires, mais cela est peu probable, en raison de leur meilleur état de conservation. Nous savons, d'autre part, par Lacépède. (Hist. nat. des Cétacés, an XIT, que l’une des galeries du Muséum renfermait trois os maxillaires de Baleine, et il ajoutait, en exagérant : « La longueur de ces os est de 9 mètres ou envi- ron ». En réalité, ils n’ont que 6,30 en suivant la courbure. Par une confusion difficilement explicable, Gervais (Loc. cit.) croit que ces os viennent de l’église Saint-Denis, actuellement démolie, autrefois dans Ja Cité. La lettre du ministre de l’intérieur, datée du 9 août 1806, qui met ces os de Baleine à la disposition du Muséum, ne laisse aucun doute; il s’agit d’ossements existant « dans les caveaux de l’église de Saint-Denis en France ». (4) Ef non en 1598 comme le dit M. Van Beneden {Les Ziphioïdes, p.38), par suite d'une confusion. $ ANCIENS ÉCHOUAGES DE CÉTACÉS DU IX° AU XVII* SIÈCLE 101 — IT SUR TROIS ÉCHOUAGES DE CÉTACÉS DANS LA MÉDITERRANÉE AU COMMENCEMENT DU XVII SIÈCLE. Les échouages de grands Cétacés dans la Méditerranée ont un intérêt particulier. Si cette mer intérieure fut certainement très peuplée autre- fois de ces animaux, ainsi qu'on peut le conjecturer d’après la connais- sance qu'en avait Arislote, — à une époque où peut-être les Tbériens sa- vaient déjà les chasser mais où certainement les moyens de le faire étaient encore inconnus des Grecs et des Phéniciens, — il est intéressant d’en suivre le dépeuplement progressif et de recueillir tous les documents que l’on pourra trouver sur ce sujet. Les recherches que nous ponrsuivons en ce moment en vue d’une his- toire de l’ambre gris nous ont mis sur la trace de trois échouements de Cétacés dans la Méditerranée au commencement du xvu siècle, tout au moins avant 1625. Ils sont relatés dans les scolies dont Jean Faber fait suivre les dessins de Recchi pour le Z'hesaurus rerum medicarum Novæ Hispaniæ de François Hernandez (1). Les trois échouages que signale J. Faber se rapportent à une Balæna Biscayensis, à un Cachalot et à un grand Cétacé incertain. 1° Le premier de ces échouages eut lieu vers le mois de février 1624 p ès du château de Sainte-Sévère à 30 milles de Rome environ. Les détails donnés sur la grandeur de l'animal, la présence d’une langue bien appa- rente, mais surtout les dimensions des fanons longs de six palmes, et larges à peine de quatre doigts ne peuvent laisser aucun doute; il s’agit évidemment de la Balæna Biscayensis (2). (1) Rer. Medic. Novæ Hispaniæ Thesaurus seu Historia ex Francisei Hernan- dez relationibus a N. A. Recchio collecta, Romæ, 1651. C'est à la suite, avec la même pagination, que se trouve : Aliorum Novæ Hispaniæ animalium N. A. Recchi imagines et nomina J. Fabri. Lyncei expositione, p. 568. L’imprimeur nous apprend que l'ouvrage fut très longtemps sous presse ; cette dernière partie était rédigée en 1625. (2) « Circa Februarij mensem elapsi sexcentesimi vigesimi quarti supra « millesimum anni, ejusmodi Balæna non procal a Castro S. Severæ mari- € timo triginta forsan ab Urse milliaribus distante, inter duos scopulos sed « jam exstincta appulit. Erat hæc bellua longa palmos LXXXXI, crassa L. Os « longum XVHE, latum X, in quo aperto et trabibus suffulto, commodum equo « insidens homo spatium habere poterat. Lingua longa XX palmos, quæ ex « nervosis crassissimisque fibris carne rubra intertextis componebatur.. Dentes « hic nulli, sed horum loco videre erat corneas laminas nigriusculas, splen- « deutes et oblongas, veluti si tot retortorum gladiorum, quos Acinaces appel- « lare solemus, vaginæ coriaceæ essent, eo ordine positas, ut fistulæ illæ 102 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE On ne signalait jusqu'ici que deux échouages ou captures de la Baleine de Biscaye dans la Méditerranée, celle qui vint à la côte près de Tarente en 1877 (1)et celle qui fut prise en 1888 à Alger (2). L'observation de J. Faber les porte au nombre ile trois et i!s ont cela de particulièrement intéressant qu'ils se sont produits tous trois à la même époque de l'année, février 1624, 15 février 1877, 20 janvier 1888. Il semble donc qu'il n’y a point là l'effet d’une simple coïncidence. On peut se demander si ces rares individus signalés depuis deux siècles dans la Méditerranée n’y revien- nent pas subissant la loi des anciens déplacements de leur espèce autre- fois nombreuse, loi qui la ramenait l'hiver dans les parages de l’Atlan- tique du détroit de Gibraltar. Les fanons de la Balæna Biscayensis échouée en 1624 à Saiate-Sévère, enlevés en entier, furent offerts au prince François cardinal Barberino et finalement placés dans l’importante collection d'Histoire naturelle de Cassianus Puteanus, membre de l'Académie des Lynx. 2° Le second échouement dont nous parle J. Faber eut lieu en 1620 sur « stanneæ in Musicis disponi organis solent. Harum brevissima (quarum « duas ex recentibus gengivis, si modo gingivæ dici merentur, abscidi, domique « conservo) semipalmari longitudine erat, cœteris paulatim a:crescentibus, ut « longissima sex palmos etiam superaret, sed crassitie vix digiti minoris « unguem altingeret, latitudine vero ad quatuor vix digitos ascenderet. Hæ « omnes subliliore et (enuiore sui parte secundum totam earum long tu- « dinem pilos etiam semipalmari longitudine adeo hirlos promittebant, ut « imeras porcinas setas esse jurasses... Tota illa dentium ferme compositio « suis adhuc connexa ordinibus Romam delala, ac Illustrissimo et Reveren- « dissimo Principi Francisco Cardinali Barberino (cujus felicibus auspiciis huic « operi jam iucumbimus) oblata, a Nobilissimo Equite Cassiano Puteano Lynceo « cum admirandarum aliis thesauris rerum naturalium, studiose conserva- « tur. » (Loc. cit., p. 568 et 569.) . (4) Capellini, qui a décrit cette Baleine (Della Balena di Tarento, in-4°, Bolo- gne, 1877, p. 10), insiste précisément sur ce fait, que c'est la première Baleine franche signalée dans la Méditerranée : « Non fu mai citata una vera balena « entrata nel Mediterraneo, benche probabilmente ve ne siano intrate in « tempi storici... » (2) Voy. Pouchet et Beauregard. Échouement d’une Baleine à Alger, Congrès de l'Association française d'Alger, 1*° partie, p, 197, 14888. — Sur la présence de deux Baleines prises dans les eaux d'Alger, Comptes rendus de lAcad. des sciences, 19 mars 1888. — Van Beneden (Ostéographie des Cétacés) semble attribuer un os cervical de Balena Biscayensis existant au Cabinet d'anatomie du Muséum sous le n° A 2938 et très bien figuré par Lacépède (His. Nat. des Cétacés, Paris, an XII, pl. VI, p. 130), au cétacé échoué sur l'ile Sainte-Mar- guerite le 30 ventôse, an VI, alors que rien, dans le texte de Lacépède, ne l'in- dique et que le dessin transmis par le gouvernement du Directoire, et que Lacépède nous dit avoir fait graver (pl. V, fig. 126), ne laisse aucun doute sur Ja nature de l'animal, qui était une Balénoptère. ANCIENS ÉCHOUAGES DE CÉTACÉS DU IX° AU XVII SIÈCLE 103 les côtes de Corse. Mais notre auteur ne l’a pas vu et sa description contient d'’évidentes inexactitudes. Il nous dit que l’animal avait 32 ver- tèbres, en ajoutant, il est vrai, qu'on en avait fait des tabourets (sedi/ia). C'est en effet à peu près le nombre des vertèbres d'une baleine qui peu- vent servir à cet usage; l'animal était sans doute un grand Musculus, une femelle avec un petit dans l'utérus, de 30 pieds; la mère en avait 400, c'est la proportion du fœtus à terme, pour ces animaux. 3° À ces deux vraies Baleines, ainsi que les désigne J. Faber en raison de l’absence de dents, il oppose un troisième grand Célacé qui fut observé par le prince de Cœsi. Ce Cétacé avait échoué à Astura, près de l'antique ville de Neptune (Ostie), où le prince académicien était venu lui-même chercher quelques objets rares au bord de la mer; il emporta une ver- tèbre lombaire et une dent que J. Faber compare aux dents des hippopo- tames qu’on pouvait voir à Rome. Ce détail indique sûrement qu'il s’agit d'un Cachalot (1). Faber parle encore d’un quatrième Cétodonte échoué près de la cila- delle de Maccaresio mais plus petit (2). Le seigneur de l'endroit envoya même une côte de l'animal au prince de Cœsi qui la plaça dans sa collec- tion à côté d’autres rarelés parmi lesquelles se trouvait un vase taillé dans un corps de vertèbre de Cétacé analogue aux spécimens du même genre (3) que possède le Cabinet d’Anatomie comparée de Paris. (4) « Non defnerunt tamen nostra quoque memoria aliæ Balænarum « species, dentibus non coriaceis aut corneis, sed veris ac osseis præditæ, « quorum una Asturæ loco non multum ab antiquissimo Nepluni maritimo « oppido distante, in maris liltus projecta occubuit. Hoc cum littus eodem « tempore animi et observandarum simu! quarundam marilimarum gratia « rarilatum, forte fortuna idem Princeps Gæsius legeret, vertebram ex cauda, « et dentem ex eadem Balæna nactus est, non absimilem plane illis, quibus « Hippopotamos hic Romæ instructos vidimus. » (Loc. cit, p. 571.) (2) « Et pauculos ante annos demum, similis cetaceus et dentatus quoque « piscis, sed parvus et, ut apparebat, junior prorsus Maccaresium Arcem mari « contiguam, Illustrissimi D. Hieronymi Matthæi Marchionis louij propriam, « undis jam et maris æstu confectus appulit. Hic etiam Marchio; qui non tam « nobilitate et divitiarum, quibus affluit, quam bonarum literarum Mathema- « ticarum præcipue scientiarum laude clarescere discupit, et ob id Principi « Cœsio amicissimus, mihi benevolentissimus; costam hujus piscis Principi « transmisit, quæ cum rarioribus plurimis Naturæ artisque donis, atque inter « alia cum vasculo quodam ex ipsiusmet Celacei piscis vertebræ cujusdam « interiori spongiosa et medullæ contigua parte faberrime elaborato, in Musæo « suo ab eoilem Ilustris. Principe asservatur. » (Loc. cit., p. 571.) (3) Voy. numéros A. 1200, À. 1202 et 1208. 104 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE IV ECHOUAGE D'UN CACHALOT VERS 1669 SUR LA COTE DE GALICE Bien qu’on connaisse déjà un certain nombre d’échouages de Cachalots sur la côte d'Europe au xvrr° siècle (environ dix-sept) relevés avec soin, nous avons pensé devoir en signaler un particulièrement intéressant et qui semble avoir échappé aux auteurs qui se sont occupés de ces nomen- clatures. Cet échouage est mentionné dans les œuvres d’un théologien espagnol, le P. François Salinas, qui a écrit un énorme in-folio sur le prophète Jonas (1) ; il s’agit d’un-Eachalot échoué ou pêché sur la côte de Galice (2). On aurait trouvé dans son corps un morceau d’ambre consi- dérable, allongé comme le morceau célèbre de la Chambre de Commerce d'Amsterdam, assez semblable à un tronc d'arbre d’après notre auteur, et dont le poids dépassait, nous dit-il, 400 livres. L'intérêt de cette trouvaille, c’est qu’elle fut méconnue par les Baleiniers basques qui ne prennent jamais de Cachalots, au point qu'un procès s’ensuivit. Or, précisément, au milieu du xvur siècle, le principal argument contre ceux qui préten- daient, avec les auteurs arabes, que l’ambre gris prend naissance dans le corps des Cétacés, était qu'en ce cas on le saurait pertinemment à Bayonne, à Saint-Jean-de-Luz et sur toute la côte de Biscaye, où l’on tuait chaque année un certain nombre de Baleines. (1) Je dois à l’obligeance du P. Sommervogel S. J. l'indication exacte du titre de ce livre rare que j'ai pu trouver dans la Bibliothèque de l'école Sainte- ‘ Geneviève : R. P. Franciscus Salinas de la Vinuela Navareusis S. J. Theologi, Commentarii litterales et morales in Jonam Prophetam, quator indicibus illus- trati. Lugdune 1652-1655 2 vol. in folio. (2) « Et diebus hisce in Galleciæ portubus capta fuit Balæna, cujus in ventre « quasi truncus arboris repertum fuit ambarum : ignorabatur autem a pisca- « toribus, quid illud esset, donec lis orta est inter sciolum emptorem et pis- « catores super læsione venditionis. »...… Plus loin, Salinas, rapportant l’opi- nion d’Avicenne : « Sæpe colligitur e ventro piscis, eo devorato, emortui », ajoute : « Quod facile credam, si in capta his diebus Balæna ambari frustum « hominis staturam excedens inventum non dubitamus : cujus pars una ex- « cisa centum librarum pondus excedebal. » Loc. cit., t. IT. Expos. lit. in Cap 11, quæst 11, n. 9, p. 10. à fs CSST SUR UN CAS TREMBLEMENT PARKINSONIEN HEMIPLÉGIQUE SYMPTOMATIQUE D'UNE TUMEUR DU PÉDONCULE CÉRÉBRAL PAR MM. Paul BLOCQ et G. MARINESCO Mémoire lu à la Société de Biologie, dans la séance du 27 mai 1893. Les cas du genre de celui que nous rapportons sont particulièrement intéressants non seulement en ce qu'ils se rencontrent exceplionnelle- ment, mais encore parce qu'ils peuvent contribuer à éclairer Jusqu'à un certain point la pathogénie si controversée du tremblement. L'observation du malade qui séjourna dans la clinique de M. Charcot a été prise avec grand soin par M. J.-B. Charcot, qui nous l’a remise obli- geamment, ainsi que les tracés de tremblement qu'il a recueillis à plu- sieurs reprises pendant la vie du malade. Elle figure résumée, et suivie d’une note succincte relatant Les résultats de l’autopsie pratiquée par l’un de nous, dans la Thèse de M. Béchet (1). C’est sur les données de l’examen histologique et sur les considérations qu’elles comportent au point de vue du rapport des lésions et du trem- blement que nous nous étendrons ici, l’auteur que nous venons de citer ayant déjà insisté sur l'intérêt du cas quant aux difficultés du diagnostic clinique, qui se sont présentées pendant la vie. Il s’est développé chez le même sujet une méningite spinale tuberculeuse dont les lésions que nous aurons à mentionner offrent également un intérêt particulier en raison de leur localisation exactement antérieure et de l'intégrité où elles ont laissé la moelle épinière. (1) Béchet. Formes cliniques et diagnostic de la maladie de Parkinson. Thèse Paris, 1892 (Obs. XIX, p. 135). BiocoGie. Mémoires. — 9€ SÉRIE, T. V. 10 100 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE OgservarION. — Tremblement et parésie du côté gauche pris pendant la vie pour une maladie de Parkinson. — Tubercule duns le pédoncule cérébral dront. Est..., trente-huit ans, salle Prüss, n° 12. Antécédents héréditaires. — Père mort à quarante-deux ans. S'est noyé par accident, Mère morte de vieillesse. Une sœur morte à seize ans de la variole, était paralysée depuis son enfance. Deux frères bien portants. Du côté des col- latéraux, rien à noter. Antécédents personnels. — Le malade n’accuse pas de maladie sérieuse anté- rieure. Histoire de la maladie. — 11 y a-deux ans, il ressentit en même temps de la raideur dans les mouvements, des douleurs sourdes dans la région lombaire puis de chaque côté, enfin dans les membres inférieurs. Ces douleurs allèrent en s’accentuant peu à peu, s’accompagnant de temps à autres d'irradiations fulgurantes dansles membres inférieurs. Il y a un an, Est... commença à res- sentir un engourdissement dans le côté gauche de la face autour de l'œil et au bout des doigts de la main gauche. La raideur s’accentua et petit à petitle malade commencça à trembler. Il y a six mois que le tremblement est net, et il va toujours en s’accentuant. État actuel juin 1891). — Le malade a le regard fixe et brillant, les traits immobiles, l'aspect du visage rappelle le masque parkinsonnien. Il n'y a pas de tremblement des lèvres, ni d’embarras de la parole. A la main gauche on constate l'existence d’un tremblement rythmé, régulier, à oscillations peu étendues quand le malade est au repos, le bras tombant le long du corps ou reposant par le coude sur un plan; leur amplitude est augmentée si on fait tenir la main dans l'attitude du serment; les doigts sont demi-fléchis, accolés les uns aux autres, le pouce est allongé sur l'index, le tremblement remonte au- dessus du poignet et occupe l’avant-bras, mais à certains moments seulement, Le membre inférieur gauche tremble aussi, mais d'une facon moins intense, et surtout lorsque le malade est fatigué : Par un effort de la volonté, Est... peut parfois arrêter son tremblement pendant quelques instants. L'inscription du tremblement à l’aide de l'appareil de Marey à permis de fixer les modifications qu'il subit sous différentes influences et de contrôler la durée des oscillations qui ne sont guère qu’au nombre de cinq par se- conde. Pendant la marche, le malade est courbé en avant et raide. 11 n'y a pas de rétropulsion, mais il se sent quelquefois un peu entrainé en avant : il a de plus une certaine tendance à aller du côté gauche, c’est-à-dire du côté où il tremble. Les mouvements de la tête à droite, à gauche, en avant et en arrière sont possibles. Le malade se trouve très affaibli et amaigri depuis quelques mois. Il sent de temps à autre des fourmillements dans la main gauche; l’explo- ration de la sensibilité ne révèle pas de troubles de ce côté. Les douleurs de jambes sont moins fréquentes et moins violentes qu'il y à quelques mois. Les divers modes de la sensibilité générale ne sont pas atteints. Du côté de la sensibilité spéciale, le malade aurait eu à diverses reprises de la diplopie transitoire. UN CAS DE TREMBLEMENT PARKINSONIEN HÉMIPLÉGIQUE 107 _Le réflexe patellaire gauche parait exagéré. Il n°y a pas de trépidation spi- nale. Pas de sensation de chaleur. Fatigue générale. Le malade tousse depuis quelques mois, on constate à l’auscultation des signes non douteux de tuberculose pulmonaire. Le diagnostic fut : Maladie de Parkinson unilatérale. Auropsie. — À l'ouverture de la cavité thoracique, on constate les lésions de la tuberculose avancée des poumons. Au sommet dü poumon gauche, lésions de tuberculose au deuxième degré. Au sommet droit cavernules et cavernes. Tuberculose génitale, épidydimile tuberculeuse, En procédant à l'examen du rachis, on trouve au niveau de la première et de la deuxième vertèbre lombaire, qui sont presque entièrement détruites par de l'ostéite tuberculeuse, une pachyméningite qui a plus que triplé l’épais- seur de la dure-mère : de ce point partent des abcès par congestion qui s'étendent vers la fosse iliaque droite. A l'ouverture de la cavité cranienne, et après avoir enlevé le cerveau on ne constate rien d’anormal, si ce n’est une augmentation appréciable du volume du pédoncule droit. En pratiquant la coupe des pédoncules pour séparer le cerveau du cervelet et du bulbe, on aperçoit dans l'épaisseur du pédoncule droit une tumeur un peu plus grosse qu'une noisette tendant à s’énucléer spontanément et entièrement comprise dans le pédoncule. Cette tumeur s'étend vers la partie interne et postérieure et à sa partie interne antérieure, elle n'arrive pas jusqu’au pied. Elle est tout à fait invisible à la surface du pédoncule. EXAMEN HISTOLOGIQUE. — Notre examen a porté sur les parties des pédoncules situés au-dessus, au niveau et au-dessous de la tumeur, sur la tumeur elle-même, sur la capsule qui l’entourait, enfin sur la protubé- rance, le bulbe, et la moelle épinière. Les pièces ont été durcies dans la liqueur de Muller, le dureissement a été complété par la celloïdine et l’alcool. Les coupes ont été colorées par le picrocarmin, les méthodes de Pal et Weigert, enfin par l'éosine et lhématoxyline. Pédoncules au-dessus de la tumeur. Ils ne révèlent pas d’altérations appréciables : on n’y découvre notamment aucune trace de dégénération. Pédoncules au niveau et au-dessous de la tumeur. Il n'existe ici non plus aucune lésion dégénérative, ni des pyramides ni du ruban de Reil. L'examen des coupes pratiquées au niveau de la partie inférieure de la tumeur permet de préciser jusqu’à un certain point la topographie de celle-ci. Ses limites dans le pédoncule sont représentées : en avant, par le pied du pédoncule, en arriére par le pédoncule cérébelleux supérieur en ‘dedans, par les filets du nerf moteur oculaire commun, en dehors, par les éléments du ruban de Reil (Untere-Schleife). En somme, la tumeur intéresse principalement la substance de Sæmmering. Il est à remarquer que les divers éléments de la calotte, bien que refoulés et comprimés, ne sont pas détruits, comme le démontre, au reste, l'absence de dégénération des 108 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE pyramides en bas, et du pédoncule cérébelleux en haut. En ce qui con- cerne le ruban de Reil, nous devons toutefois mentionner une légère raréfaction de ses fibres, dans la partie qui avoisine le lobus niger de Sæmmering. Tumeur. — La tumeur s’est énucléée quand on a pratiqué la coupe au moment de l’autopsie. Elle était encapsulée dans une coque formée en grande partie par le tissu ambiant plus ou moins altéré. Elle a Le volume et la forme d’une olive à grand axe dirigé obliquement de haut en bas et de dehors en dedans par rapport à la direction du pédoncule lui-même. Elle est contenue tout entière dans la calotte, et n’intéresse pas le pied du pédoncule. Par sa partie supérieure elle imprime une saillie au pédon- cule dont les fibres la recouvrent néanmoins. Cette partie supérieure de l'ovoïde qu'elle représente est située exactement au-dessous de la couche optique où se creuse en partie sa capsule; mais le ganglion nerveux lui- même n’est pas intéressé, sinon par la compression. Au point de vue histologique, on constate sur une coupe transversale, qui mesure 2 cent. 1/2, que la tumeur est composée de deux parties : l'une corticale, plus claire, mesurant au plus 2 à 3 millimètres; l’autre médul- laire, se distinguant par une coloration plus foncée. Ces deux parties sont séparées l'une de l’autre par un sillon qui s’accuse par une coloration plus intense des réactifs colorants.'Ce sillon se montre irrégulier, formant une circonférence à bords sinueux et alternativement rentrants et sortants. La substance médullaire elle-même est constituée par des couches stra- tifiées dont la limite rappelle, par son aspect, celui du sillon que nous venons de décrire. Elle est formée par du tissu granuleux jaunâtre sans éléments morphologiquement distincts, sans structure, se colorant mal par les réaclifs, et représentant un magma de fibrine et de tissu de nécrose (nécrose de coagulation). La substance corticale est formée par du tissu conjonctif fusiforme, embryonnaire par places, et au milieu duquel sont disséminés en grand nombre des follicules tuberculeux classiques avec cellules géantes caractéristiques. On voit des vaisseaux très abondants à la périphérie. A la limite de la substance corticale nous avons pu dis- tinguer nettement, au milieu du tissu conjonctif embryonnaire, des cel- lules nerveuses, les unes revêtant leur aspect normal et parfaitement reconnaissables à leurs prolongements, les autres, au contraire, plus ou moins modifiées et parfois transformées en des blocs granuleux à peine reconnaissables. Quant aux vaisseaux, la plupart sont entourés de manchons de cellules embryonnaires (artérite tuberculeuse). Capsule. Elle est composée de deux parties : l’une, qui est en rapport immédiat avec la tumeur, est formée de Lissu nerveux très altéré; on y voit des cellules nerveuses et des cellules de Deiters; l’autre, périphérique, est plus riche en fibrilles et en cellules nerveuses. Protubérance. Bulbe. Régions supérieures de la moelle épinière. L'exa- UN CAS DE TREMBLEMENT PARKINSONIEN HÉMIPLÉGIQUE 109 men de la protubérance et du bulbe ne révèle aucune altération : il n’y a pas, notamment, de dégénération ni du faisceau pyramidal ni du ruban de Reil. Il en est de même de la moelle épinière. Moelle lombaire. Au niveau de la moelle lombaire, il existe une pachy- méningite tuberculeuse antérieure portant sur la dure-mère et laissant ana aan arr ann AA nr AA Tremblement : le malade debout, la main gauche le long de la cuisse (tambour appliqué sur le dos de la main). DNA FRERE | A PA PT ST LUE AGP (ll Tremblement : la main étant placée dans l'attitude du serment. tout à fail intacte, non seulement la pie-mère, mais encore la moelle elle- même. La dure-mère présente à ce niveau un épaississement considérable, à la partie antérieure du canal vertébral, allant en s’effilant sur les parties latérales et disparaissant à la partie postérieure. A l'endroit où elle est le plus épaisse, elle mesure sur la coupe 7 millimètres. Son tissu est composé, du côté périphérique externe, de substance caséeuse, et du côté interne médullaire de tissu embryonnaire où l’on distingue des follicules tubercu- leux et des vaisseaux altérés. Néanmoins la pie-mère, la moelle et les racines rachidiennes sont intactes. La lésion a progressé évidemment de dehors en dedans et n’a pas eu le temps d’envahir la moelle. En dehors de l'intérêt que présente ce cas au point de vue des diffi- cultés du diagnostic clinique lequel, ainsi qu’on l’a vu, n’a pas été porté du vivant du malade, et de celui qu'offre l'examen de la pachyméningite tuberculeuse qui, malgré son intensité, a respecté la moelle épinière, sa particularité qui nous paraît mériter surtout d'attirer l'attention est celle | de la coexistence et des rapports du tremblement de type parkinsonien avec une tumeur pédonculaire. On doit se demander tout d’abord s’il ne s’est pas agi d’une simple coïncidence, si l’on n’a pas eu affaire à un sujet atteint en même temps d’une maladie de Parkinson vraie et d’une tumeur du pédoncule. On aurait pu invoquer, en faveur de cette manière de voir, l'existence de la raideur, l’aspect du visage (rappelant, dit l'observation, « le masque par- 110 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE kinsonien »), et les caractères cliniques et graphiques du tremblement, Toutefois l'existence d’une exagération des réflexes du côté gauche, la corrélation exacte du symptôme avec la localisation du néoplasme, nous paraissent suffire à démontrer que le tremblement était symptomatique. Nous y sommes d'autant plus autorisés, croyons-nous, qu'il existe un cas au moins où une lésion similaire a pu produire des désordres cliniques analogues. Nous faisons allusion à une observation de Mendel (1) dans laquelle un enfant de quatre ans et demi, après avoir présenté pendant sa vie du tremblement intentionnel du bras droit, de la faiblesse de la jambe droite, enfin une parésie de la troisième paire, du facial et de l'hypoglosse de l’autre côté, montra, à l’autopsie un tubercule de la partie moyenne de la calotte du pédoncule gauche, tubereule gros comme une amande, qui s’étendait jusqu’au corps sous-thalamique. Dans ce cas il s'agissait de tremblement intentionnel. C'est également le tremblement intentionnel qui a été signalé dans ces observations de lésions pédonculaires, qui se manifestent en outre par des signes ocu- laires, et auxquelles M. Charcot a proposé le nom de syndrome de Bene- dickt. Maïs le tremblement de type parkinsonien a été observé lui aussi; M. Charcot a bien voulu nous communiquer l’histoire d’un sujet qui pré- senta pendant la vie du tremblement parkinsonien avec attitude typique de l’un des membres supérieurs, et à l’autopsie duquel on trouva une tumeur comprimant un des pédoncules cérébraux. | Toutefois, les lésions de la calotte pédonculaire entraineraient plutôt de l’ataxie, Celle-ci a été notée dans ces cas par Butt, Kahler et Pick, et en particulier par Krafft-Ebing. Le fait de ce dernier auteur est relatif à un tubercule qui occupait le corps quadrijumeau antérieur droit envahis- sant aussi la calotte : on constata pendant la vie de l’exagération des réflexes et de l’hémiataxie. Il est très difficile de se rendre compte du mécanisme physiologique du tremblement dans ces cas de lésion du pédoncule cérébral. On sait que l’excitation électrique du pied du pédoncule détermine chez les ani- maux des réactions motrices à type convulsif. La qualité rythmique d’un mouvement constitue en quelque sorte une propriété spéciale à certains muscles, le cœur par exemple. L’excitation du muscle cardiaque se tra- duit en effet par un mouvement rythmique, lequel ne dépend pas, comme on l'avait cru, du système ganglionnaire, puisque, séparée du reste de l'organe, la pointe du cœur, dépourvue de nerfs, se contracte rythmiquement sous l'influence des excitalions chimiques, mécaniques et électriques. Toutefois les muscles de la vie de relation ne posséderaient pas la même faculté dans les circonstances habituelles, et {ils répondent aux excitations, soit par des contractions simples, soit par du télanos. Néan- (1) Mendel. Berliner Klinische Wochenscrift, 1885, n° 29. UN CAS DE TREMBLEMENT PARKINSONIEN HÉMIPLÉGIQUE 411 moins il existe certains désordres de la motilité qui diffèrent de ces deux réactions : tels, l’hémi-tremblement, l'hémi-chorée, et l’hémi-athétose post-hémiplégiques. Ces désordres relèveraient, comme on sait, d'après certains auteurs (Charcot, Raymond), de la lésion de la partie postérieure de la capsule interne. Il semblerait, d'après cela, que les muscles seraient capables, en des circonstances spéciales, de traduire leur énergie fonc- lionnelle par des contractions rythmiques. La condilion qui paraît favoriser ce mode de réaction, c'est la qualité et l’intensité de l'agent excitant. C’est ainsi, par exemple, que lorsqu'il s’agit d’excitations minima dont l'effet, au lieu d’être intense et unique, s'exprime par une série de réaclions, ce mécanisme parait d'autant plus probable que dans les cas où interviennent ces réactions spéciales, il y a intégrité de la plupart des fibres nerveuses centripètes et centrifuges. Dans les cas du genre de celui que nous rapportons, le tremblement est-il dû à une action centrifuge — irritation du faisceau pyramidal — ou à une action centripète? La première hypothèse ne paraît pas invrai- semblable, si l’on lient compte de ce que, en nombre de cas où ce faisceau a été directement comprimé, mais sans présenter de véritables altérations (comme dans le cas de M. Charcot), son trouble s’est manifesté clinique- ment par des phénomènes de même ordre. Si l’on voulait invoquer une action centripèle, il resterait à se deman- der si celle-ci est indirecte, c'est-à-dire résulte de l’irritation des fibres sensitives qui se rendent à la capsule interne? Cette action pourrait en effet être directe c'est-à-dire influencer un centre spécial, — résultérait de plusieurs observations que les iésions des corps oplo-striés pourraient dé- terminer du tremblement —? Les documents que nous possédons jusqu’à présent ne permettent pas encore de résoudre la question. DE L'ACTION HYPOTHERMISANTE DU BACILLUS COLI COMMUNIS PAR ÉMILE BOIX, INTERNE DES HOPITAUX. Mémoire lu à la Société de Biologie, dans la séance du 27 mai 1893. (Première note) Travail du laboratoire de M. Hanot, à l'hôpital Saint-Antoine. Il y a deux mois environ, M. Hanot, notre maître, présentait à la Société médicale des hôpitaux une note sur l'ictère grave hypothermique et _rapportait au bacillus coli communis constaté dans les selles, la bile et même le foie le symptôme hypothermie. Dans la troisième observation de ce mémoire, recueillie par nous quelques mois auparavant dans le service de M. Gilbert Ballet, la recherche du coli bacille avait été faite dans l'idée d'établir une relation causale entre le coli bacille et l’ictère grave, sans que nous ayons osé à ce moment, sur une seule observation, rattacher à l'infection par ce microbe l’abaissement de température constaté chez notre malade. Cependant quelques observations déjà avaient noté cette coïncidence de l'infection coli-bacillaire et de l’hypothermie (1), et d'autre part quelques expérimentateurs avaient signalé accessoirement une période algide chez les animaux qu'ils soumettaient aux injections de coli bacille ou de ses toxines. En nous rappelant ces faits au moment où M. Hanot nous parla de son ictère grave hypothermique, nous acquimes la conviction que l’hypothermie était, dans ces cas, véritablement fonction du coli bacille (2). Mais une objection primordiale était à écarter : celle de l’envahisse- ment cadavérique par le B. C. Cette constatation, renforcée encore de ce fait que le B. C. peut passer dans le sang même quelques heures avant la (1) Voir la thèse de Macaigue, 1892. (2) M. Vincent publiait récemment (Soc. Biol., 1893, fasc. 16 p. 463) une observation d’ictère grave dans laquelle la température était descendue à 35°,8. 114 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mort, réduirait à néant, si elle était prise à la lettre, toute tentative de pathogénie par le coli bacille. Il convient donc de -s’expliquer sur ce point. Si le rôle du B. C. prend tous les jours plus d'importance, ce n’est pas de la faute des bactériologistes. Parce que ce microbe est commun, ce n’est pas une raison pour qu'il soit inoffensif et qu’on ne tienne aucun compte de sa présence en des points de. l'organisme où on ne le rencontre pas d'habitude. | . Ce bacille est, on le sait, doué d’une mobilité remarquable; d’où sa facile généralisation, mais seulement dans des circonstances déterminées. Dans l'état de santé parfaite, il est eantonné dans l'intestin, et, à supposer qu'il envahisse discrètement les organes qui y ont une porte ouverte, comme le foie et le pancréas, son peu de virulence d’une part, d'autre part l’active phagocytose, la destruction par le foie sain de la petite quantité de toxine sécrétée ou sa rapide élimination par le rein, rendent cette petite effraction sans conséquences. Après la mort, si surtout la maladie à laquelle a succombé l'individu a fortement adynamysé les organes et les cellules, le B. C. envahit facile- ment le totalité du cadavre ; mais il faut tout de suite remarquer que cela n'arrive que dans la moitié des cas (1). Eafio, il est des faits certains d’envahissement coli-bacillaire soit du foie tout seul, soit de celui-ci et d'autres organes pendant la vie de l'indi- vidu, et c'est le plus souvent à l'occasion d'une maladie. Ou bien le-foie est déjà malade; ou bien, par suile de circonstances diverses encore incomplètement connues, le B. G. a acquis une virulence plus grande; dans ce cas l’arrivée d'un petit nombre d'individus bacillaires peut avoir les plus graves conséquences : ou bien encore le sujet, malade totius substantiæ, n'offre qu'une faible résistance à l'infection. Dans ces divers cas, comme le dit Girode à propos du bacille vir- gule (2), «s’il est vraisemblable que, le plus souvent, cet envahissement est tardif et sans conséquences anatomiques considérables, comportant dès lors une signification pronostique (et pathogénique) restreinte, il est des cas au contraire où des lésions spéciales et profondes en sont la conséquence et constituent certainement un facteur particulier d’aggra- vation ». Il faut donc prendre en considération le rôle pathogénique du eoli bacille dans les cas où ce microorganisme a été trouvé dans divers organes et dans le foie en particulier ; le prétexte qu'il se diffuse partout après la mort n’est pas une raison suffisante pour méconnaîlre sa nocivité. Ii faudrait, d'une part, établir une sorte de statistique qui réponde à (4) Wurlz et Hermann. Arch. de Méd. Expér., 1891, p. 724. (2) Soc. Biologie, 1892. Mémoires, p. 299. DE L'ACTION HYPOTHERMISANTE DU BACILLUS COLI COMMUNIS 115 cette question : la nature de la maladie qui a déterminé la mort a-t-elle un rapport quelconque avec la facilité et la rapidité de la généralisation du bacille sur le cadavre? (ce que n’ont pas fait MM. Wurtz ét Hermann); et d'autre part chercher à savoir quelle peut être la responsabilité du B. C. dans la pathogénie de certaines affections, où simplement dans l’aggravation de certaines maladies. L'observation dont nous parlions plus haut (embarras gastrique terminé par ictère grave hypothermique) (1) est un bel exemple de maladie ordinairement bénigne terminée par une infection hépatique coli-bacillaire. Déjà Girode, dans son observation d'infection coli-bacillaire avec hypothermie (2), (affection qu'on pourrait désigner sous le nom de coli- bacillie, si ôn acceptait pour les infections microbiennes générales des noms tels que séreptococcie, staphylococcie, etc., ou sous celui de coli- bacillémie par analogie aux septicémie, urémie, toxémie, etc.) repoussait en ces termes celte tendance nihiliste si j'ose dire. «Je ferai remarquerque, dans ce cas, bien que tout füt réuni pour favoriser la diffusion du B. C. après la mort, je n’ai pu constater ce microbe à l’autopsie, ni dans la rate, ni dans les cavités du thorax, ni dans le sang du cœur. » Cette objection écartée, provisoirement tout au moins, il convenait de demander à l’expérimentation des renseignements sur ce prétendu rôle hypothermisant du B. C. C’est le résultat de la première partie d'une pareille étude que nous avons l'honneur de soumettre à la Société. | Nous tenons à citer les constatations failes avant nous sur ce point. Girode-avait cullivé le coli bacille de son malade. . « L'inoculation sous-cutanée d'environ 2 centimètres cubes d’une ceul- ture en bouillon de 48 heures déterminait chez le cobaye un choléra expérimental mortel en 24 à 36 heures. » | Denys et Brion (3) ont injecté dans le péritoine d’un lapin 1 centimètre cube d’une suspension à 10 p. 400 de bac. lactis aerogenes, tout à fait voisin, sinon identique au B. C. (Pour le dire en passant, c’est là une dose très forte comparativement au même volume d’une culture en bouillon.) « La mort, disent-ils, survient en moins de 24 heures après un refroidis- sement considérable. » Et plus loin (p. 308) : « Quant à la marche de la température, nous avons déjà signalé ce fait qu'avant la mort la tempé- rature anale s’abaisse de plusieurs degrés : il y a une véritable période algide. Le lapin se prêtant peu aux expériences d'hypothermie, nous n'avons pas étudié les oscillations de la température au stade antérieur; mais, chez les chiens, les injections du bacille aérogène, même à petites doses, produisent de la fièvre. » (1) Hanot. Soc, Méd. des hôpitaux, 1893, fase. 12, p. 225, obs. IT. (2) Soc. Biol., 1892, p. 192. (3) La Cellule, t. VIIX, 2e fasc., p. 307. 116 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE M. Gilbert (1), étudiant les poisons produits par le bacille d'Escherich, dit que « les animaux meurent fréquemment dans un extrême état de : faiblesse avec de l'hypothermie ». Nous avons voulu donner une démonstration plus parfaite. Au cours de recherches intéressant un autre objet, nous avons été amené à étudier au point de vue bactériologique le contenu intestinal du lapin normal. Nous y avons trouvé constamment le B. C. le plus sou- vent à l’état de pureté. Il s’y présente avec ses caractères les plus tranchés ; particularités de culture, réaction de l’indol, coagulation du lait, fermen- talion de la lactose, et surtout très grande mobilité, ce qui est une garantie de sa vitalité et de sa virulence ainsi que l'ont montré MM. Gil- bert et Lion. Aussi nous sommes-nous volontiers servi de microbes de cette provenance, et voici comment nous les mettons en culture. On recueille une crotte de lapin aussi fraîche que possible, on la coupe en deux à l’aide d’une lame flambée, et on cueille dans son intérieur avec le fil de platine de quoi ensemencer un tube de bouillon. Au bout de douze à vingt-quatre heures, réensemencement dans un autre bouillon ou sur milieux solides. Le plus souvent notre première culture est pure; le réensemencement l’est toujours. Voici quelques-unes de nos expériences. La température a été prise dans le rectum toutes les deux ou trois heures. (Sur les graphiques ci- joints nous ne donnons cette série de températures que quand elle est nécessaire.) La température normale du lapin est assez variable; elle oscille habituellement entre 38°,5 et 399,5. EXPÉRIENCE J (graphique n° 1). — Lapin vigoureux. Le 4 avril 1893, injection dans la veine médiane de l'oreille de 1 centimètre cube de culture pure de B. C. de 48 heures, à # heures du soir. Dans la soirée, attitude en boule, en porc- épic, le poil ayant une tendance à se hérisser, tête basse, abattement, refus de manger. La température monte jusqu’à 4 heures du matin, où elle atteint 400,8. Le lendemain, diarrhée assez abondante, verdâtre ; l'abattement per- siste ; à 4 heures du soir, 24 heures après l'injection, l'hypothermie commence par une température de 38 degrés pour arriver à 36 degrés à 6 heures et 8 heures du matin, le 6 avril, 36 heures après l'injection. A partir de ce moment, la courbe remonte pour revenir définitivement à la normale (38°,4), le 7 avril, à # heures du matin, soit 22 heures après l’hypothermie maxima. Le lapin a triomphé de cette phase algide. ExpÉRIENCE II (même graphique). Le même lapin qui paraît se bien porter dans l'intervalle recoit le 18 avril, dans le péritoine, 3 centimètres cubes de culture de B. C. de 24 heures provenant d'un quatrième réensemencement. Il fait un peu de fièvre, mais pas d’hypothermie. Il paraît se remettre, quoique maigrissant. ExPÉRIENCE IL (même graphique). — Le même lapin reçoit le 3 mai, dans le (1) Soc. Biol., 1893, fasc. 8, p. 216. LC DE L'ACTION HYPOTHERMISANTE DU BACILLUS COLI COMMUNIS 117 périloine, 5 centimètres cubes de culture de B. C. de 24 heures par ensemen- cement direct. Pas d'hypothermie les jours suivants, mais le 12 mai il pré- sente des convulsions généralisées peu intenses, plus marquées dans les muscles de la face. Le lendemain, cessation des convulsions et paralysie des quatre membres. Le lapin est couché sur le flanc; il mange cependant. Les jours suivants, la paralysie diminue, et aujourd’hui 26 mai, le lapin, quoique mal assuré sur ses pattes, se tient debout et marche assez allègrement dans le laboratoire. La température est restée normale pendant tout ce temps. GRAPHIQUE 1. — ExPéRiENCES I, IL et III. &p.T ; me Anil 113 ein ee ï à Ya Sms ms 1 o N & à . Hs ie ai Fe SES. \SRS SN T3 D Nous ne pouvons nous empêcher, à propos de cette expérience, et bien que cela sorte de l’objet de cette note, d’abord de constater l’exac- titude des résultats obtenus par MM, Gilbert et MM. Denys et Brion, ensuite de faire un rapprochement entre ces paralysies coli-bacillaires et les paralysies diphtériques au point de vue de l’échéance relativement longue de leur production après l'acte pathogène lorsque celui-ci n'a pas eu la mort pour conséquence immédiate ou rapprochée. ExPÉRIENCE IV (graphique n° 2). — Le 7 avril 1893, à 3 h. 30 du soir, un lapin vigoureux recoit dans la veine de l'oreille 2 centimètres cubes de con de B. C. au cinquième jour. Après l'injection et les jours suivants, lä tempé- rature s'élève jusqu'à 40 degrés et se maintient constamment au-dessus de 38 degrés, 118 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ. DE BIOLOGIE Expérience V (même graphique). — Le 18 avril, le mème lapin recoit dans le tissu cellulaire sous-cutané, au niveau de l'abdomen, # centimètres cubes d'une culture de B. GC. de 24 heures, provenant d’un quatrième réensemence- ment, Fièvre d’abord, puis hypothermie qui descend, 36 heures après l’in- jection, jusqu'à 34°,5. La température remonte ensuite pour arriver en 60 heures à 39°,6. Nouvelle hypothermie à 36°,8, et mort dans la nuit où on n'a pas pris sa température. L’autopsie, intéressante à d’autres points de vue, serait déplacée ici. Ajoutons que pendant la vie de l'animal, nous avons constaté de l'urobiline dans ses urines, l'urine du lapin normal n’en conte- nant pas, nous nous en sommes assuré; nous en ayons {rouvé également dans l'urine recueillie après la mort dans la vessie. GRAPHIQUE 2. — ExPÉRIENCES IV Er V. lp. T7 ep. T en Fr . BA mahn fois malku Soir eds Son mt sr FR AAA fr ou - Quint Ça 116 an 3 6 à 16911363 Éd PE FÉÉIEESS n 7 ik 3 la ent Le 24 DT du mm . ve Eu eu, e de Trouve CuWa Peye chu ExPÉRIENCE VI (graphique n° 3). — Le 24 mai 1893, un lapin de 1,820 grammes recoit à # heures du soir, dans la veine de l'oreille, 4 centimètres cubes de culture de B. C. de 48 heures. Peu après, il se couche sur le ventre, les pattes étendues, anhélant ; puis il se tient en boule. Il ne mange pas; vers le matin il a un peu de diarrhée et meurt à 7 heures du matin, après avoir présenté des accès de convulsions et de raideur généralisée en opisthotonos, avec une température de 35°,7. A l’autopsie, on trouve l'estomac très congestionné, l'intestin beaucoup moins. Le foie qui pèse 61 grammes est aussi très conges- tionné et présente de petites taches blanches analogues aux taches blanches infectieuses décrites par M. Hanot. DE L'ACTION HYPOTHERMISANTE DU BACILLUS COLI COMMUNIS 119 Exrérrence VIL(graphique n° 4). — Un lapin de 1,855 grammes qui, dans un autre but, prenait avec ses aliments, depuis le 4 mai, un 1/2 centimètre cube de culture de B. C. de 24 heures par ensemencement direct, meurt le 17 mai à 7 heures du matin, ne pesant plus que 1,205 grammes, après avoir présenté la veille au soir une température de 359,2, et à 4 heures du matin 34,6. Depuis la veille il avait de l’opisthotonos par accès. À l’autopsie, le foie ne pèse que 28 grammes et est très friable ; l'examen microscopique en sera fait ultérieurement. L'estomac présente une muqueuse rouge par places, mais non ulcérée, et des parois considérablement épaissies sous la muqueuse, Le sang du cœur contient du B. C. trapu et un ensemencement en donne une culture pure en 24 heures, GRAPHIQUE 3. — EXPÉRIENCE VI. GRAPHIQUE #4. — ExPÉRIENCE VII fai 1645 : Da {oir uk 6 S loi É in&f 14 07 us rh 2:54 SF. C ° ce dd ciutf de NC à ÈS È S Ÿ a. Ces expériences, et quelques autres que nous ne rapportons pas ici car elles concernent des problèmes plus complexes, nous paraissent prêter aux considérations suivantes : 1° Nous constatons qu'après une injection de culture de B. C., quels qu’en soient l’âge, la dose, le milieu de culture et Le lieu d’injection, il y a d’abord une élévation de température assez notable: le stade d'hypo- thermie, qui peut faire défaut si la dose n’est pas suffisante, vient ensuite plus ou moins marqué; enfin, en troisième lieu, même quand l'animal succombe, nous avons vu quelquefois latempérature se relever un instant avant la mort. C’est ce que nous avions constaté chez notre malade de 120 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE l'observation III du Mémoire de M. Hanot. Mais le plus souvent la mort survient en hvpothermie. Le stade de fièvre traduit la défense de l’orga- nisme contre l'invasion microbienne, le stade hypothermique marque la capitulation. 2 En ce qui regar de le mode d'injection, il est certain que la voie veineuse est la plus efficace non seulement pour tuer l’animal, mais encore pour produire l'hypothermie; la voie cutanée vient ensuite, enfin la voie péritonéale nous parait la moins propre à la réussite de l'expérience. 3° Quant à l’âge des cultures, nous nous sommes assuré que les cul- tures de 24 à 48 heures étaient les plus favorables, les plus virulentes, nous ne disons pas les plus toxiques. Dans tous les cas, il vaut mieux prendre les cultures dans lesquelles le voile ne s’est pas encore produit à la surface du bouillon. Comme corollaire, nous pouvons ajouter que l’action des cultures de 24 à 48 heures va diminuant à mesure qu'on fait des réensemencements successifs. : 4° Pour ce qui est des doses, il nous semble que 2 centimètres cubes d’une culture de 48 heuïes injectés dans les veines ou le tissu cellulaire sous-cutané sont suffisants’dans tous les cas pour tuer un lapin de force moyenne ; il en faut certainement davantage, jusqu'à 4 et 5 centimètres cubes, quand on injecte dans le péritoine. Il est évident qu'il faut tenir compte de l'individu, car certains animaux nous ont présenté une résis- tance inattendue aux mêmes doses d'une même culture qui tuaient d’autres lapins de même apparence. 5° Notons enfin que la diarrhée n’est pas constante ni de même abon- dance chez tous les animaux, mais qu'elle se montre peut-être plus sûre- ment par l'injection dans Îes veines ou sous la peau que par l'injection dans le péritoine ou par ingestion. Une prochaine note sera consacrée à l'étude, au point de vue de l'action hypothermisante, des produits de culture du Bacillus coli com- munis. RE NOTES SUR QUELQUES EXPÉRIENCES DYNAMOMÉTRIQUES CHEZ LES ALIÉNÉS PAR #S M. le D' Édouard TOULOUSE MÉDECIN-ADJOINT DE L'ASILE SAINT-YON \, (Mémoire lu à la Société de Biologie, dans la séance du 10 juin 1893.) NY s D On a encore peu étudié les troubles de la contraction musculaire volon- taire chez les aliénés. Je me suis livré à quelques expériences dynamo- métriques, dans le but de combler, dans la mesure de mes moyens, cette lacune. Je n'ai opéré que sur des femmes; le nombre des sujets observés a été de 250 environ, exactement 263. Sur ce nombre il y a : 43 idiotes et imbéciles, 26 maniaques, 39 mélancoliques, 32 persécutées, 26 épileptiques, 30 paralytiques générales, 36 démentes, 31 malades lucides (dégénérées, folies morales, etc.) 263 Je me suis servi du dynamomètre de Régnier. En général, je faisais serrer trois fois l'instrument et je prenais la moyenne de ces pressions. La plupart de ces malades ayant, ainsi que les gens normaux, une con- traction musculaire volontaire assez peu variable, j’ai cru pouvoir me contenter pour chacune d’elles d’une seule épreuve. Chez mes 263 malades, la moyenne de la pression est de : — 17.2 (main droite), — 16.3 (main gauche). Il ÿ a donc une diminution très appréciable de l'énergie psycho-motrice, BIOLOGIE. MÉMOIRES. — 9€ sfrte, T. V. 11 199 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE puisque la plupart des auteurs donnent, comme moyennes dynamomé- triques pour la femme, des chiffres variant entre 25 et 35. D'après mes propres recherches sur 37 femmes normales de différents âges, les moyennes féminines seraient de 33 (main droite), 28 (main gauche). Il faut remarquer en outre qu’il y a presque égalité dans la force de pression de chaque main, phénomène qui, d’après M. Féré, se renconire- rait dans tous les états de fatigue. Ces deux caractères généraux, diminution de la moyenne dynamo- métrique et tendance à l'égalité de la pression des deux côtés, se retrou- vent, le premier surtout rigoureusement, dans chacun des huit groupes de malades que l’on peut ranger dans l’ordre suivant, où l’on suit la pro- gression croissante de la force de pression : MAIN DROITE MAIN GAUCHE DÉMONTRE ne APS 10.3 = Impéclesetiole Ne Re SES 13.1 Paralyliquesisénérales ee LAURE 15.3 Maniaquest 22200 en AN 45.9 Mélancoliques. . 18.1 16.9 PÉTSÉCULÉES RARE 0e 20 Épileptiques te Cd nn 25 22 Malades lucides . PR 24.2 Quelles peuvent être les causes de cette faiblesse constante de la con- traction musculaire volontaire dans chacune de ces classes d’aliénées ? Tiennent-elles à des conditions physiques ? La première hypothèse contient une part de vérité. Car d’abord tous les aliénés ont des troubles plus ou moins profonds ou plus ou moins apparents de la nutrition générale, de la circulation, de la respiration, de toutes les conditions physiques du bon fonctionnement du système musculaire. Rien d'étonnant done à ce que tous présentent une diminu- tion de la force de contraction de leurs muscles. D'autant plus que ce sont les malades qui se trouvent dans le meilleur état physique, c'est-à- dire d’abord celles que j'ai mises sous la rubrique de lucides, puis les épileptiques et aussi les persécutées. Ce sont celles-là qui ont la moyenne de pression la plus élevée. Un autre argument peut être encore tiré de ce fait, que l’âge, qui est la condition première de toutes les fonctions phy- siologiques, établit aussi une division entre les moyennes des pressions des malades adultes de toutes catégories de vingt à quarante-cinaq ans et tm ÉD: “0 EXPÉRIENCES DYNAMOMÉTRIQUES CHEZ LES ALIÉNÉS 199 les moyennes des malades de plus de quarante-cinq ans, également de toutes catégories, ainsi qu'on peut s’en rendre compte par le tableau suivant : MAIN DROITE MAIN GAUCHE Aliénées de 20 à 45 ans , . . . «, 18.2 14 Aliénées au-dessus de 45 ans. . . . do Cette influence de l’âge se manifeste dans toutes les catégories d'alié- nées, ce qui prouve bien qu’elle ne se confond pas avec l'influence de la démence, plus fréquente dans la vieillesse. DE 20 À 45 ANS AU-DESSUS DE 45 ANS TR EN TEA ÉTEND Main droite. Main gauche. Main droite. Main gauche, DÉMENES RS OR RaNS 12.0. 12.4 At MÉMIAUMES MAPS MERMES 1579 Ab 15°9 Mélamcoliques 1150071071 18.3 15.8 14 Épilephiquess 4500/4024 21.7 417.6 19 PÉRSÉGUtÉES EN IN 2172 21.5 49.2 18.4 Puerto 2260 24.5 225 23.4 Les idiotes et imbéciles que J'ai observées, étant, en grande majorité, au-dessous de quarante-cinq ans, ne peuvent figurer dans ce tableau. L’âge avancé diminue donc la force de la contraction musculaire volon- taire, en dehors de tout affaiblissement psychique marqué. Je dis marqué, parce qu'il est probable que, dans la vieillesse, il existe ordinairement, même lorsqu'il n’y a pas de troubles mentaux, un abaissement de l’éner- gie intellectuelle. En définitive, la sénilité pourrait tout aussi bien être rangée parmi les conditions psychiques de la faiblesse dynamométrique, que parmi ses conditions physiques. Il est difficile d'établir un rapport exact entre l’état anatomique et phy- siologique des muscles et la force de la contraction volontaire. D'après mes observations, ce rapport, s’il existe, n'est pas constant. Très souvent, en effet, j'ai rencontré une pression élevée fournie par des muscles très déve- loppés, mais très souvent aussi j'ai rencontré des pressions relalivement : faibles exécutées par des masses musculaires assez volumineuses. Nous venons d'examiner les deux arguments que l’on peut invoquer en faveur d’une relation directe entre l'état physique et l'énergie psycho -mo- trice : l'influence de l’âge avancé, d’une interprétation toutefois équivoque, et la progression dans les maladies mentales de la force de la contraction volontaire en raison inverse de l'étendue des désordres somatiques. Mais cette dernière proposition n’est vraie que d’une facon générale et souffre 194 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE quelques exceptions. Ainsi les imbéciles et les idiotes adultes sont, la plu- part, d'aspect assez robuste, et cependant elles occupent l’avant-dernière place dans le bas de notre échelle dynamométrique. Si donc on peut admettre une certaine influence, difficile à préciser, des bonnes conditions physiques sur la force de la contraction musculaire volontaire, on doit aussi chercher une autre explication des résultats de mes expériences. Or, chacun sait que là pression des mains est un acte à la fois physique, puisqu'il nécessite les changements de volume du musc'e, et à la fois psychique, puisqu'il est la manifestation d’une volition. Il est bon de rappeler, d'autre part, que, d'après des expériences faites dans ces dernières années, notamment par Broca,- M. Manouvrier, M. Féré, etc..., il semble aujourd'hui admissible que la force de la con- traction volontaire soit liée, pour la plus grande part, au degré d'activité cérébrale. C’est ainsi que les personnes adonnées à des travaux intellec- tuels auraient une pression plus grande que les ouvriers exerçant cons- tamment leurs muscles ; et peut-être même y aurait-il un rapport entre l'énergie psycho-motrice et le volume du cerveau ? Je me suis tout d’abord demandé si la forme du délire, gai ou triste, ambitieux ou de persécution, exerçait son influence sur la pression du dyna- momètre.Il ne parait pas en étre ainsi, outout au moinsà un point de vue général, car on verra tout à l'heure que la nature et la direction des idées peuvent modifier momentanément l'énergie de la contraction volontaire. Il semblerait a priori que les délires où prédominent les phénomènes d’excitalion devraient augmenter la puissance de la pression volontaire, et que ceux où apparaissent surtout les phénomènes de dépression devraient inversement l'abaisser. Mais nous constatons, au contraire, que les maniaques ont une moyenne dynamométrique à peu près égale et même inférieure à celle des mélan- coliques. Les premiers marquent, en effet, pour chacune des deux mains, 17°,7 et 15°,9, et les seconds 18°,1 et 46°,9. En observant attentivement mes malades, j’ai cru comprendre la raison de ces résultats quelque peu paradoxaux aux premier abord. Ce qui aug- mente ou diminue l'énergie de la motricité volontaire, c’est, en dehors d’autres condilions physiques, le degré d'attention dont sont capables les sujets. L’attention consiste dans la représentation de l’acte à exécuter ou de la sensation à percevoir. Dans la pression volontaire du dynamomètre, le sujet doit faire appel à ses images motrices qui déterminent la contrac- tion brusque et forte des fléchisseurs de l’avant-bras. Plus l'attention, c’est-à-dire la représentation de cet acte moteur sera inlense, plus l'éner- gie de la contraction sera grande. Dans toutes les maladies mentales comme dans lous les états de fatigue, de neurasthénie, l'attention est diminuée. C’est pour cela queles moyennes dynamométriques de mes différents groupes de malades, y compris les lucides, sont si basses. Mais de même que cetle diminution de l'attention a ee : ; EXPÉRIENCES DYNAMOMÉTRIQUES CHEZ LES ALIÉNÉS 195 ses degrés, de même la diminution de la contraction volontaire a aussi les siens qui sont parrallèles aux premiers. Ainsi s'explique l’échelle progressive que j'ai construite avec les chiffres obtenus dans mes diverses expériences. Au bas tout à fait, se trouvent les démentes avec 11.3 et 10.3, et les idiotes et imbéciles avec 13.5 et 13.1. Toutes ces malades sont les plus déchues intellectuellement, l’atten- tion chez eux est réduite à son minimum. Remarquons que les démentes sont encore plus faibles que les idiotes, parce que la sénilité physique est une cause de plus de l’abaissement de r’énergie des contractions muscu- laires. Notons encore que ce sont les plus démentes et les plus idiotes qui serrent le moins fort. Ainsi les imbéciles marquent 15.5 pour les deux mains, tandis que les idiotes proprement dites ne marquent que 11.6 et 10.7, c'est-à-dire ne dépassent guère les moyennes des démentes. Au-dessus de ces malades, et relativement loin d’elles, sont, se tenant de près, les paralytiques générales, les maniaques et les mélancoliques. Chez toutes celles-là l’attention est encore profondément atteinte, soit par la démence de la paralysie générale, soit par l’état d’excitation et d'inconérence de la manie, soit par la dépression psychique ou au contraire le délire absorbant de la lypémanie. Il est bon de faire remar- quer que si les paralytiques accusent encore une moyenne élevée relati- vement à leur état psychique, c'est probablement dû à leur vigueur d'adultes, et aussi à ce fait que je n’ai choisi comme démentes que des femmes nettement déchues intellectuellement, Landis que mon groupe de paralytiques renferme des malades de toutesles périodes, et sur le nombre certaines dont les facultés mentales sont encore assez conservées. Les maniaques, on l’a vu, ont une presssion à peu près égale à celle des mélancoliques. Chez eux l'attention est aussi considérablement lésée. Gesticulant, criant, parlant sans cesse, ils sont incapables de se fixer un certain temps sur un sujet. Il n’est donc pas étonnant qu'ils ne puissent serrer énergiquement dans un effort volontaire. On met le dynamomètre dans la main, au moment de leur plus grande excitation, et on est tout étonné, quand on arrive à le leur faire serrer — ce qui est parfois impos- sible — on est tout étonné de lire des chiffres peu élevés, nullement en rapport avec leur allure exubérante. Mais que l'on soit assez heureux pour glisser dans sa main le dynamomètre au moment précis où le malade la serre dans un moment de fureur et d’une façon nullement délibérée ni voulue, on sera quelquefois frappé du chemin que parcourt l'aiguille rapidement. C’est qu'il ne s’agit plus là de mouvement volontaire nette- ment prémédité ; on a affaire à une contraction musculaire en quelque sorte automatique et inconsciente. J'ai vu des femmes très excitées et peu vigoureuses extérieurement atteindre les chiffres de 35 à 40. Ainsi une paralytique générale, en état d’excitation maniaque depuis plusieurs mois et très affaiblie physiquement, qui marquait ordinairement 15 au 196 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE dynamomètre, atteignit un jour, dans un moment de fureur, le chiffre de 38. Les mélancoliques ne sont guère supérieures dynamométriquement aux maniaques. Chez elles ce qui trouble l'attention volontaire, c’est tantôt la prostration, la stupeur, tantôt au contraire l'anxiété. Toujours concentrées dans leur délire, elles se prêtent assez mal aux expériences auxquelles on voudrait les soumettre, et leurs pressions ne sont guère énergiques, puisqu'elles n’atteignent que 18.1 et 16.9. Assez loin de loutes ces malades et formant une troisième classe, sont les persécutées épileptiques. Celles-là sont beaucoup plus lucides et capables d'attention que les autres aliénées. Mais il faut encore noter que dans mon groupe de persécutées j'ai rangé toutes sortes de malades à idées de persécution, dont quelques-unes se rapprochent, par certains caractères somatliques et par leur état de concentration délirante, des mélanco- liques placées après elles dans mon échelle dynamométrique. Aussi est-il naturel qu'elles marquent 20.2 et 20, tandis que les épileptiques, toutes assez lucides en dehors de leurs crises, atteignent des chiffres plus élevés, 22.7 et 22. Enfin, au sommet de cette échelle sont placés les malades tout à fait lucides, des dégénérés, des hystériques, des folles morales, des conva- lescentes, toutes personnes qui, bien qu'inférieures aux gens normaux sous le rapport de l'attention, sont cependant bien au-dessus des autres malades. Ce qui semble donc, en dehors des conditions physiques, dominer l'énergie de la contraction volontaire, c’est le degré plus ou moins grand de l'attention. La couleur et la tendance du délire, sa forme exubérante ou déprimante, n'ont qu'une importance secondaire, tandis que Île symplôme vésanique qui est le mieux à même de diminuer l'attention du malade a une influence capitale. Aussi ce symptôme prépondérant varie-t-il avec chaque forme psychopathique; dans la manie, c'est l'excitation; dans la mélancolie, c'est la dépression; dans l'imbécillité, la démence et la paralysie générale, c’est la faiblesse congénitale ou acquise des fonctions intellectuelles; chez les perséculés, c’est la fixité des idées délirantes et l'intensité des hallucinations; dans l’épilepsie, c'est l’état de mal ou la manie comiliale, qui lous, diminuant l’atten- lion, abaisse l'énergie psycho-motrice. J'ai donc bien raison de dire que la forme du délire n’a pas grand effet sur la puissance de la contrac- tion volontaire, puisque ses deux aspects différents, l'excitation et la dépression ont les mêmes résultats, l’une dans la manie et l’autre dans la mélancolie. Je me crois donc autorisé à formuler celte proposition : En dehors des conditions somatiques, dont la part d'influence est dffi- cie à déterminer, la grande cause générale de la diminution de l'énergie de la contraction volontaire chez les aliénés, c'est l’affaiblissement de l'alten- ri LE D af, CE og rs 2 co 204 do ul jé Le LL) A S EXPÉRIENCES DYNAMOMÉTRIQUES CHEZ LES ALIÉNÉS 197 tion volontaire et par suite les symptômes, différents pour chaque groupe d'affections mentales, qui tendent à produire cet affaiblissement. Je dirai maintenant quelques mots sur des causes secondaires qui paraissent influer sur l'énergie psycho-motrice. J'ai noté plus haut que l'effet de la forme délirante était primé en général par l’action prédomi- nante du degré de l'attention. Cependant il est parfois possible de cons- tater, chez le même malade, des variations de la force de pression paral- lèlement à l’évolution de son état vésanique ou de ses idées délirantes. Ainsi j'ai observé deux circulaires, chez lesquelles survenait une augmen- talion ou une diminution de l'énergie psycho-motrice, suivant que Îles malades étaient excitées ou déprimées. Quelques aliénées, qui avaient un délire expansif, des paralytiques générales manifestant des idées ambitieuses et aussi quelques persécutées dans la phase mégalomaniaque m'ont paru avoir un contraction musculaire plus élevée au moment où elles exprimaient les conceptions exubérantes. Au contraire, certaines dégénérées ont présenté, alors qu’elles manifestaient des idées de décou- ragement, de dégoût de la vie, une diminution de leur force de pression, Mais ces faits ne peuvent être généralisés; en outre, il faut pour qu'ils soient susceptibles d’être constatés, des sujets d’une sensibilité particu- lière. S'ils étaient contrôlés, ils confirmeraient l'hypothèse de M. Féré, que la sensation de plaisir se résout dans une sensation de puissance et la sensation de déplaisir dans une sensation d'impuissance. J'ai cherché aussi l'influence que pourraient avoir les hallucinations sur les variations de l'énergie psycho-motrice et n’ai point eu de résultats posilifs. Le caractère impulsif des malades parait avoir un certain effet sur la force de la contraction volontaire. Les maniaques, qui étaient ordinaire- ment sujettes à des mouvements de colère subite, serraient en général davantage. On a vu que les épileptiques, qui sont la plupart des impu.- sifs, ont une pression assez élevée. Un fait intéressant à signaler c’est que dans certaines formes de slu- peur simple sans délire, raltachables à la confusion mentale, les pres- sions étaient fort inégales. Si je me contentais de mettre l'instrument dans les mains du sujet en la priant simplement de serrer, l’aiguille ne dépassait pas cinq. Mais si j'ordonnais avec insistance à la malade de presser vigoureusement, chacune de mes injonclions orales poussait en quelque sorte l'aiguille, qui atteignait souvent un chiffre assez élevé. De mème dans deux cas de confusion mentale avec bavardage et inco- hérence complète, j'obtins par le même moyen des pressions d'une cer- taine puissance. Les malades de ce genre sont par eux-mêmes, élant donné le désarroi de leurs pensées et leur défaut de synthèse mentale, 128 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE incapables de vouloir fermement un acte; mais ils sont, par contre, très aptes à obéir aux idées qu’on leur suggère. Il y a chez eux un degré con- sidérable d’automatisme psychologique, qui explique la facilité avec laquelle on leur fait exécuter certains actes, tout comme parfois on fait garder à leurs membres des positions fixes, — phénomène que l'on a décrit dans ces derniers temps en France sous le nom de catatonie. SUR UN CAS D’'AGRAPHIE MOTRICE SUIVI D’AUTOPSIE PAR MM. J.-B. CHARCOT et A. DUTIL. (Mémoire présenté à la Société de Biologie dans la séance du 1°: juillet 1893). Dans une lecon faite en décembre 1887, à la Salpètrière, M. le pro- fesseur Charcot présenta à ses auditeurs un cas d’agraphie. L'histoire clinique de ce cas a été relatée par M. Pierre Marie dans le Progrès médical du 4 février 1888, dans les termes que nous reproduisons ici textuellement : « La malade dont il s’agit est une femme de soixante-quatre ans, présentant quelques antécédents héréditaires, qui, en 1868, à l’âge de quarante-quatre ans, eut une première attaque d’hémiplégie; cette hémiplégie siégeait à droite et s’accompagna de paralysie de la langue. Au bout de quelque temps la parole redevint normale, ainsi que les mouvements. « Mais depuis cette époque, il a existé une véritable 2mpossibilité d'écrire, quoique la malade pût parfaitement tenir une plume, sût très bien ce qu’elle voulait écrire et eût même conservé nettement la notion visuelle de l’ortho- graphe des mots; mais « l’InÉE (motrice graphique) des LETTRES ne lui revenait pas »; elle ne se rappelait plus la forme qu'il fallait donner aux lettres. On a pu s'assurer d’ailleurs, qu'auparavant elle jouissait d’une instruction assez élendue, grâce à l'examen des feuillets de son livre de dépenses antérieur à l’époque de sa maladie. On sait de plus d’une facon formelle que depuis cette attaque d'hémiplégie la malade lisait son journal tous les jours et parlait distinctement. « En 1879, nouvelle attaque; cette femme tombe subitement dans la rue, frappée d’une hémiplégie gauche, avec perte complète de la parole. Il a per- sisté depuis une parésie du côté gauche; mais la parole était revenue au bout de deux ans, lorsque, en 1885, survint une nouvelle attaque suivie d’un simple embarras de la parole caractérisé par des troubles transitoires de l’articula- tion. Enfin, dans le courant de la même année, une quatrième attaque amena Broogie. Mémoires. — 9€ SÉRIE, T V. 19 130 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ee —_———_—]—]— ———" — ——"—""" ] —— — une perte complète et permanente de la parole. Depuis cette époque, il existe une paralysie labio-glosso-pharyngo-laryngée pseudo-bulbaire tellement mar- quée, qu'à plus d’une reprise il a été nécessaire de nourrir cette femme avec la sonde œsophagienne, tant la déglutition était difficile. Au laryngoscope, on constate très nettement que les lèvres de la glotte ne peuvent être rappro- chées pour produire la phonation. Mais c'est là, en somme, un phénomène surajouté et lout à fait indépendant de l'agraphie, qui a existé seule et à l’état de pureté dès 1868. « On s'assure, du reste aisément, qu’elle n’est atteinte ni de surdité ni de Fig. 1. — Face externe. Hémisphère gauche. La partie pointillée a) indique l’étendue suivant laquelle le ramollissement empiétait sur la frontale ascendante, mais dans sa partie profonde seulement. La surface de cette circonvolution présentait un aspect tout à fait normal. cécité verbale; elle désigne, sans aucune hésitation, les objets dont le nom est prononcé ou écrit devant elle. Si elle-même ne peut écrire, cela ne tient certes pas à la parésie des mains qui n’est pas assez forte pour l'empêcher de tenir une plume et elle copie tant bien que mal les caractères et les chiffres imprimés ou écrits qui lui sont présentés. Mais quand elle veut « composer », écrire de sa propre initiative ce que lui dicte le langage intérieur ou ce qu'on lui communique, c'est uné tout autre affaire; elle en est absolument incapa- ble. En résumé, cette malade a conservé l’image visuelle, l'image auditive et peut-être anssi l’image motrice d'articulation (on ne peut juger de cette der- nière faculté, par suite de la paralysie labio-glosso-laryngée), maïs elle a perdu le mécanisme qui permet de transmettre les pensées par le langage écrit. C’est donc bien là une agraphie vraie. » Depuis l’époque ‘où fut rédigée la note qui précède, la malade a été maintes et maintes fois attentivement examinée par M. Charcot el par l’un de nous, il y a trois mois à peine. Son état n’avait subi aucune modification appréciable. L'agraphie notamment a toujours persisté aussi complète qu’au premier jour, SUR UN CAS D'AGRAPHIE MOTRICE SUIVI D'AUTOPSIE 131 sans que ni l'audition ni la vision «les mots aient jamais été troublées à aucun degré. À en juger par la vivacité et la précision de sa mimique, la malade paraît avoir conservé son intelligence jusqu'à ces derniers temps. Nous pouvons ajouter qu'on n’a jamais constaté chez elle d’hémianopsie ni aucun trouble de la vision commune. Morr le 24 juin 1893. Auropsie (huit heures après la mort). On constate sur l'hémisphère gauche l'existence de deux foyers de ramollissement cortical (plaques jaunes). L'un, de forme arrondie, ayant à peu près les dimensions d’une pièce de vingt Fig. 2. — Face externe. Hémisphère droit. centimes, occupe exactement l'extrémité postérieure ou pied de la 2° circonvo- lution frontale ; l’autre, plus étendue, dont le contour figure assez exactement un triangle à sommets arrondis intéresse : 1° la 2 frontale à sa partie moyenne dont il a détruit le versant inférieur sur une étendue de 3 centi- mètres à 3 cent. 1/2 environ; 2 le pied de la 3e circonvolution frontale qui a disparu entièrement. À sa partie postérieure et inférieure, cette plaque de ramollissement s'enfonce assez profondément sous l'extrémité inférieure de la frontale ascendante dont la surface convexe a conservé son aspect normal, Dans le reste de son étendue, ce foyer, de même que le foyer qui occupe le pied de la 2e circonvolution frontale, est tout superficiel et n’empiète que de quelques millimètres sur la substance blanche du centre ovale sous-jacent. Tout le reste de l'écorce de cet hémisphère est absolument intact; l’insula, le lobule pariétal inférieur, le pli courbe, les circonvolutions du lobe occipital, les circonvolutions temporales ont été minutieusement examinées et recon- nues indemnes de toute altération. — Sur la coupe de Flechsig, intégrité de la capsule, des noyaux du corps strié et de la couronne rayonnante. Hémisphère droit. A1 existe sur la face externe de cet hémisphère trois foyers 132 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ne ——————————————"——————————"—…—"—"—"—"——"——…—…—…—…—"—…—"—…—…"—"—"—"—"…"…——"…—"—…—"…—…—"…—…"…—"—"—"…"…"….…"—"—"———— de ramollissement (plaques jaunes): 1° le plus étendu, ayant à peu près les dimensions d’une pièce de deux francs, occupe exactement les extrémités infé- rieures des circonvolutions frontale et pariétale ascendant ; 2° un second foyer, de forme allongée, intéresse la pariétale ascendantees à sa partie moyenne sur une longueur de 2 centimètres. Ce foyer a détruit seulement la moitié postérieure de l'épaisseur de cette circonvolulion ; 3° un petit foyer lacunaire de la dimension d’un pois situé à la partie antérieure de la 3° fron- tale, à 2 cent. 1/2 de l'extrémité même du lobe frontal. — Sur la face infé- Fig. 3. — Face inférieure de l'hémisphère droit. rieure de l'hémisphère droit on remarque encore deux foyers de ramollisse- ment de coloration jaunâtre. L'un occupe à leur partie moyenne la {re et la 2e circonvolution temporo-occipitale ; sa limite postérieure est distante de 4 centimètres environ de l'extrémité du lobe occipital; l’autre est situé à la face inférieure du lobe frontal, sur le bord externe du sillon crucial. il mesure à peine 4 centimètre de diamètre. Tous ces foyers sont superficiels ; aucun d’eux ne s'enfonce profondément, en forme de coin dans la substance blanche sous-corticale. Les autres parties de l'écorce sont intactes. A la coupe de Flechsig, pas d’altération apparente. Les différentes lésions que nous avons relevées sur la face externe de SUR UN CAS D’AGRAPHIE MOTRICE SUIVI D'AUTOPSIE 133 l’un et de l’autre hémisphère expliquent d’une manière évidente les symp- tômes présentés par la malade. A la destruction de l'extrémité inférieure de la frontale ascendante du côté gauche et de l'extrémité inférieure des frontale et pariétale ascen- dantes du côté droit, doit être rapportée la paralysie labio-glosso-laryngée (pseudo-bulbaire). À la lésion de la pariétale ascendante droite à sa partie moyenne correspond la parésie du membre supérieur gauche; à la destruction du pied de la troisième frontale gauche, l’aphasie d’articulation qui, chez notre malade, se trouvait en quelque sorte masquée par la paralysie labio- glosso-laryngée. Les lésions notées sur la face inférieure de l'hémisphère droite ont été certainement silencieuses. L’agraphie doit done être rattachée à la destruction du pied de la deuxième circonvolution frontale gauche. C’est là le point sur lequel nous voulons particulièrement insister. Dans le cas qui nous occupe, l’agraphie pure a d'abord existé à l’état isolé pendant plusieurs années consécutives ; plus tard, la logoplégie, la paralysie labio-glosso-laryngée sont venues s'ajouter à l'impossibilité d’écrire. Mais à aucun moment la malade n’a présenté de cécité ni de surdité verbales. Et nous avons vu que les centres de vision commune et verbale (le pli courbe en particulier) étaient dans un état d’intégrité anatomique absolue. Nous croyons qu'on peut conclure du fait anatomo-clinique que nous venons de résumer : 1° Il existe, à côté de l’agraphie d’origine sensorielle (par destruction du centre de vision verbale ou interruption des fibres de communication qui relient ce centre au centre moteur du membre supérieur), une agraphie motrice. Cette forme d’agraphie est, au langage écrit, ce que la logoplégie, par lésion de la circonvolution de Broca, est au langage parlé. Elle peut être définie : l’'amnésie des mouvements coordonnés pour l'écriture. 2° Conformément à l'opinion soutenue par Exner et par M. Charcot, le centre de coordination des mouvements spéciaux pour l'écriture doit, selon toute vraisemblance, être localisé dans l'extrémité postérieure au pied de la deuxième circonvolution frontale de l'hémisphère gauche. REMARQUES A PROPOS DE LA COMMUNICATION PRÉCÉDENTE, par M. J. DEJERINE. Dans l'observation précédente la circonvolution de Broca étant altérée, en même temps que la deuxième frontale, on ne peut, à mon avis, consi- dérer ce cas comme établissant l'existence et la localisation d’une agra- phie motrice pure, isolée. Les troubles de l'écriture sont constants dans 134 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE toutes les aphasies motrices ou sensorielles relevant de lésions corticales siégeant dans la zone du langage et ne font défaut que dans les apha- sies produites par des lésions siégeant en dehors de cette zone — aphasie motrice sous-corticale, surdité et cécité verbales pures, — restriction faite pour ces deux dernières variétés de l'écriture sous-dictée dans l’une et de la copie dans l’autre. L'hypothèse d’un centre spécial pour les mou- vements de l'écriture, inconciliable du reste avec ce fait que l’on peut écrire avec le pied au lieu de la main, n’a jamais été démontrée de par l'anatomie pathologique. Pour ce qui concerne l’agraphie accom- pagnant l’aphasie sensorielle, nombreuses sont les autopsies où on a constaté l'intégrité de la deuxième frontale. Quant à l’agraphie motrice pure isolée, pour démontrer qu’elle existe et qu’elle relève d'une lésion à localisation spéciale, il faudrait l’une ou l’autre des preuves suivantes : 1° un cas d’aphasie motrice corticale avec intégrité de l'écriture, parti- cularité qui n’a pas encore été rencontrée jusqu'ici; 2° un cas d’agraphie par lésion de la deuxième frontale gauche, avec intégrité de la parole. Or, dans la seule observation que nous possédons de lésion isolée de la deuxième frontale gauche (cas de Bards, 1878) (1), observation très com- plète au point de vue clinique et anatomo-pathologique, l’agraphie élait accompagnée d’une aphasie motrice extrêmement caractérisée. (4) P. Bards. Aphasie et hémiplégie faciale-passagère, hémorragie cérébrale dans la deuxième circonvolution frontale du côté gauche, France médicale, 1878, p. 609. 27 LS RYTHME VAGINAL DES MAMMIFÈRES PAR FERNAND LATASTE SOUS-DIRECTEUR DU MUSÉE NATIONAL PROFESSEUR DE ZOOLOGIE MÉDICALE A L'UNIVERSITÉ DE SANTIAGO (CHLLI) (Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 22 juillet 1893). ]. —— AVANT-PROPOS. Dans une communication précédente, qui a paru dans ces Comptes rendus (15 oct. 1892, p. 765) et qui avait pour but de démontrer que, chez les Rongeurs, les transformations de l’épithélium du vagin sont non pas accidentelles et déterminées par la gestation, comme l'avait soutenu Retterer (/bid., 1% juillet 1892, p. 567), mais normales et liées à l’ovula- tion dont elles suivent le rythme, je disais en terminant : « En somme, je pense, comme M. Retterer, qu'il y a lieu de chercher à. faire rentrer dans une même loi l’évolution épithéliale du vagin des Rongeurs et des autres Mammifères: mais je crois avoir démontré que la formule de cette loi n’est pas celle qu'a proposée cet auteur. Dans une communication ultérieure, je tâcherai de délimiter nettement le problème, et de le résoudre autant que me le permettront les données dont je puis disposer». La présente communication a pour but de tenir cet engagement. If. —— CAS PARTICULIERS, 1. Rongeurs simplicidentés. D'après mes observations et celles de M. Morau, confirmées en partie par celles de Retterer, chez les Mammifères, les premiers étudiés et les mieux connus à cet égard, c’est-à-dire chez les Rongeurs simplicidentés, les transformations rythmiques de l’épithélium vaginal peuvent se syn- thétiser comme suit. Aux époques de maturation et chute des ovules (époques qui corres- BioLocte. MÉMOIRES. — 9€ SÉRIE, T. V. 15 136 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE pondent à celles des menstrues chez la Fémme, du rut chez les autres animaux), l’épithélium vaginal s’est fort épaissi et se montre tout à fait semblable à l’épiderme cutané. Comme ce dernier, en effet, il présente trois couches distinctes par la forme de leurs éléments, une inférieure, de cellules cylindriques, une moyenne, de cellules polyédriques, et une . supérieure, de cellules aplaties : chacune de ces couches, sauf l’inférieure, étant composée d'assises plus ou moins nombreuses, et les cellules des assises les plus superficielles ayant subi le processus de la kératinisation. Dès qu’elle a atteint ce stade, la muqueuse vaginale subit une véri- table mue. S'il y a intervention du mâle, à chaque coït effectif un certain nombre des strates de la couche cornée s’isole des strates sous-jacentes et adhère au bouchon vaginal pour en former l'enveloppe. En plus ou à défaut de cette mue aidée par le coït, il y a aussi une mue tout à fait spontanée. Tantôt la couche caduque se détache d'une seule pièce et garde assez de consistance pour conserver sa forme propre, présentant l'empreinte des plis et reliefs du vagin et formant ce que j'ai nommé enveloppe vagi- nale. J'ai observé cette production chez le Pachyuromys et chez la Ger- boise, et je l’ai fait figurer dans mes Aecherches de zooéthique (pl. X; fig. e, et pl. XI, fig. p). Elle est tout à fait comparable à la production caractéristique de la soi-disant vaginite exfoliante de la Femme. D'autres fois, la couche caduque manque de consistance et se ras- semble après sa chute en une masse pâteuse informe. Ce cas parait se se produire surtout quand le coït a supprimé les strates les plus superfi- cielles et les plus consistantes de l’épithélium. C'est, du moins, dans ces conditions qu'a été faite, sur le Surmuiot, l'observation suivante que j'extrais de mes Æecherches de zooéthique (p. 362) : « Quant à la production malléable observée dans le vagin d’une femelle qui s'était accouplée la veille et dont, quelques heures auparavant, j'avais recueilli le bouchon vaginal, elle est d'une tout autre nature que celui-ci : je m'en suis convaincu en examinant les deux fragments que j'avais recueillis alors et que j'ai depuis conservés dans l'alcool. Ceux-ci ne sont pas formés par la même substance que le bouchon. Ils présentent une grande analogie avec l'enveloppe et les pellicules vaginales; car ils sont, de même, composés de cellules pavimenteuses, évidemment fournies par l’épiderme de la muqueuse vaginale ; mais ils contiennent aussi du sperme ; et celui-ci provient, {rès cer- tainement, de l'utérus, dans lequel il avait élé porté par le coït de la veille. D'ailleurs, leur consistance aujourd’hui comme à l’état frais, n'est pas supé- rieure à celle du beurre. » Le produit de la desquamation peut même se présenter à l’état liquide. « À côté des parties solides et moulées, — peut-on lire dans le même ouvrage (p. 317, note), — j'ai observé, dans le vagin du Pachyuromys, un liquide épais, RYTHME VAGINAL DES MAMMIFÈRES 137 d'apparence laileuse, qui, examiné au microscope, m'a présenté en nombre, avec des cellules réunies en membranes ou libres et semblables à celles que je viens de décrire (cellules pavimenteuses), d’autres cellules plus petites, de forme très irrégulière, presque réduites à leurs noyaux, qui ne peuvent être que des leucocytes ou des cellules d'inflammation. » Ce cas rappelle, abstraction faite de ce qu’il peut présenter de patho- logique, une observation que je citerai plus loin de mue vaginale de la femme. D'autre fois, enfin, et ce cas parait être le plus général, les parties caduques de l’épithélium se détachent par fragments, sous forme de lamelles, formant la production que j'ai appelée pellicules vaginales. En résumé, chez les Rongeurs simplicidentés, durant et immédiate- ment après le rut, le phénomène caractéristique présenté par l’épithélium du vagin, c'est une mue : la muqueuse vaginale pouvant, d’ailleurs, se desquamer, soit en un seul (enveloppe vaginale), soit en plusieurs temps, et le produit de la desquamation pouvant se présenter, soit à l'état solide et nettement figuré (enveloppe vaginale et enveloppe du bouchon vaginal), soit à l’état solide et sous forme de lamelles irrégulières (pelli- cules vaginales), soit à l’état pâteux et sous forme définie (cas du Sur- mulot), soit même à l’état liquide (cas du Pachyuromys). Dans tous les cas, chez ces Mammifères, la mue intéresse toute l’épais- seur de la couche pavimenteuse. Aussitôt après cette mue, la couche de cellules polyédriques ou mal- pighiennes, laissée à nu, commence à subir la dégénération et la fonte muqueuse, ce processus attaquant d’abord les cellules les plus superf- cielles et se propageant progressivement d’assise en assise jusqu’au voi- sinage de la couche proliférante de cellules cylindriques (1). Survient alors une période d'état ou de repos, durant laquelle la des- truction des cellules anciennes et surperficielles est compensée par la production des cellules nouvelles et profondes. L’épithélium vaginal présente alors sor minimum d'épaisseur ; il peut se trouver réduit à sa couche de cellules cylindriques profondes surmontée d’un ou deux rangs de cellules muqueuses dont la forme se rapproche alors du type régulier dit calyciforme. Mais, bientôt, s'annonce une nouvelle époque génitale ou d'ovulation. La prolifération épithéliale devient plus active et les cellules de nouvelle (4) Je rappelle en passant que, d'après les observations de Morau, pleine- ment confirmées par celles de M. Rettérer, la transformation muqueuse de l’épithélium vaginal progresse de l'utérus vers la vulve tandis que sa transfor- mation épidermique se propage en sens inverse, et que, dans un même seg- ment du vagin, le premier processus commence au fond des replis de la muqueuse tandis que le processus opposé semble débuter au sommet des crêtes ou papilles. s 138 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE formation accélèrent leur développement. C’est ainsi, sans doute, que les nouvelles assises peuvent échapper à la dégénération muqueuse et évo- luer de nouveau vers la forme pavimenteuse et cornée, au-dessous des assises qui ont déjà subi ceite dégénération et qui ne tardent pas à se détacher et disparaître (4). Au moment précis de l'ovulation, manifestée par le rut, l'énithélium (1) Durant l’état de repos et normalement, la production de mucus par l’épithélium vaginal est peu abondante, comme le prouvent le rapprochement intime et la soudure apparente des parois du vagin, au niveau de la vulve, dont l'aspect est alors si caractéristique. Mais, quand l’épithélium épidermique de nouvelle formation soulève et repousse tout ce qui reste de l’ancien épithélium muqueux, on conçoit que celui-ci, en se détachant, puisse former dans le vagin une masse visqueuse plus ou moins apparente. Celte sorte de mue de l'épithélium muqueux peut même se présenter, pathologiquement, en pleine période de repos génital. Je l’ai observée, chez des femelles de souris, soit anormalement (Recherches de zooéthique, p. 545, notes 1 et 2), soit normalement à la veille du coït (Ibid., -p. 585, note 1) ou à la veille de la parturition (Ibid., p. 524, note 1) qui, comme on le sait, chez les Rongeurs, ne précède le rut que de quelques heures. M. Relterer ayant fait une observation semblable chez le Cochon d’Inde (Société de Biologie, 26 mars 1892, Mémoires, p. 104), a eu le tort d’assimiler au bouchon vaginal une telle masse d’épithélium muqueux. En comparant celle-ci à la description que j'avais donnée et qu'il a citée du bouchon vaginal, il semble qu'il aurait dû reconnaitre sa méprise; mais tout en les mentionnant avec éloge, il a fait un peu table rase de mes nombreuses observations sur le sujet; et cela l’a conduit à substituer des hypothèses à des faits déjà démontrés relativement à l’origine et au mode de formation du bouchon vagimal : « J'ai examiné au microscope, — dit-il, — à l’état frais et après fixation et coloration, le bouchon vaginal du cobaye après la copulation. I est formé d’une masse visqueuse présentant les mêmes caractères et les mêmes cellules que l’épithélium superficiel du segment proximal du vagin. D'après cette conslatalion, je m'explique la formation du bouchon de la facon suivante : les frottements du pénis contre la surface intérieure du vagin détachent des amas de cellules muqueuses auxquelles se mêle le sperme du mâle (contenu des vésicules séminales et spermatozoïdes), En un mot, le bouchon vaginal provient essentiellement des cellules muqueuses qui recouvrent, chez cet animal, en couches nombreuses, le segment proximal du vagin... » Quant aux mots après la copulution que j'ai mis en relief dans ce passage, tout ce que je crois avoir appris relativement aux fonctions génitales des Rongeurs m'autorise à soutenir qu'ils résultent soit d'une faute typographique soit d’une erreur d'observation, et que c'est avant la copulation qu'il faut lire à leur place. Je ne connais, d'ailleurs, abstraction faite de la fécondation, qu'un seul critérium du coït effectif chez les Rongeurs : c'est la constatation du bouchon vaginal dans le vagin de la femelle; or Relterer n’a jamais encore observé de bouchon vaginal, puisqu'il à pu prendre pour ce bouchon quelque chose qui ne lui ressemble pas. RYLCHME VAGINAL DES MAMMIFÈRES 139 vaginal a de nouveau repris l'épaisseur et tous les caractères qu'il présen- tait précédemment à la même époque. Revenus ainsi au point de départ, nous en aurions fini avec les Ron- seurs simplicidentés, si, dans tout ce qui précède, nous n’avions fait abstraction de deux phénomènes qui, dans certains cas, succèdent à l'ovulation, et qui- peuvent alors perturber ou compliquer le cycle des transformations de leur épithélium vaginal : j'entends parler de la gesta- tion et de la parturition. En ce qui concerne la gestation, j'ai déjà fait ressortir, dans ces Comptes rendus (15 oct. 1892, p. 765), l'inexactitude de l'opinion de Retterer, qui prétendait subordonner à ce phénomène accidentel la transformation muqueuse de l'épithélium vaginal. Mais, si, comme je crois l'avoir démontré, cette transformation est essentiellement liée au phénomène plus général de l'ovulation, il ne s’ensuit nullement que la gestalion ne puisse exercer sur elle aucune action modilicative acces- soire. _ Et, d’abord, la gestation retarde l'ovulation ultérieure (1) ainsi que les autres manifestations périodiques de l’activité génitale, c'est-à-dire que, tant qu'elle dure, elle suspend le rythme génital. Or, chez la femme par exemple, comme on le sait, la période du rythme génital étant de vingt-sept à vingt-huit jours environ, la gestation comprend dix de ces périodes, et, chez les Rongeurs que j'ai pu suffisamment étudier sous ce rapport, la période du rythme génital étant d'une dizaine de jours environ, la gestation comprend au moins deux de ces périodes, et peut se prolonger davantage si la femelle ailaite en même temps qu'elle porte (Gestation retardée). Cet effet dilatoire de la gestation n’est certainement pas absolu. Sans parler des cas, plus ou moins douteux à mon avis, de superfélalion, on sait, par exemple, que, chez la femme, les menstrues ne sont pas toujours complètement supprimées par la grossesse, et j'ai pu faire des observa- tions analogues chez les Rongeurs. Mais ce sont là des cas relativement exceptionnels, et la suspension des modifications génitalcs périodiques. est de règle dans la gestation. Or cette suspension se traduit au moins, relativement à l'épithélium vaginal, par le maintien provisoire du sfatu quo, c’est-à-dire par la per- sistance de l’état muqueux. Il ne paraît même pas invraisemblable, a priori, que le processus de transformation muqueuse, en pleine activité (4) Le fait a été directement constaté par MM. Van Bambeke et Van der Stricht, auxquels j'avais adressé les ovaires des mêmes souris, sacrifiées au cours de mes observations, dont j'avais remis les vagins à M. Henry Morau. « Pendant la période de gestation, — m'écrivait M. Van Bambeke à la date du 28 janvier 4891, — nous n'avons jamais pu observer de traces d'ovulation. Par contre, les follicules ovariques s’atrophient en grand nombre. IL est très difi- cile de déceler une période dans cette involution folliculaire. » 140 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE ESS quand les ovules se fixent à l'utérus, c'est-à-dire quand la gestation peut commencer à influencer l'organisme maternel, ne mette à profit le nou- veau délai que lui accorde celle-ci pour atteindre, dans ce cas, un certain nombre d'assises profondes de la couche malpighienne qui resteraient indemnes sans cette complication. En d’autres termes, la gestation, en prolongeant la durée du phénomène consécutif à l'ovulation, pourrait également en exagérer l'intensité. Les observations histologiques de Morau, qui ont porté presque exclusive- ment sur des femelles gravides (1), et celles de Retterer, qui n’ont géné- ralement pas été repérées au point de vue du rythme génital, ne nous peuvent donner que des présomptions à cet égard. Ce qui reste bien acquis, dans tous les cas, par les recherches de Morau jointes aux miennes, c’est la forme épidermique de l’épithélium vaginal au moment du rut, la brusque desquamation de la couche pavimenteuse de cet épithélium aussitôt après, et la transformalion muqueuse consécutive d'une partie au moins de sa couche malpighienne : ces divers phéno- mènes se succédant avant la fixation des ovules dans l'utérus, c’est-à-dire avant le commencement de la gestation effective. Examinons maintenant le cas de la parturition. Chez tous les Rongeurs que j'ai étudiés, c'est seulement à quelques heures d'intervalle que le rut suit la parturition. Aussi avais-je d'abord supposé que, chez eux, l'épithélium vaginal reprenait avant la parluri- tion la forme pavimenteuse et cornée qu'on lui trouve constamment au moment du rut. Bientôt, une observation de Henry Morau (l6c. cit., p. 33, & XLII) m'avait fait changer d'avis. Malheureusement, le souvenir s’en était effacé de ma mémoire et j'étais retombé dans mon erreur première quand j'écrivis ma dernière note publiée dans les Comptes rendus (15 oct. 1892, p.765) (2). (4) Des femelles de Souris citées dans la thèse de Morau et ayant dépassé l’époque du début effectif de la gestation, treis seulement n'avaient pas été imprégnées par le coït dont la date servait de point de repère à chaque cas particulier et permettait de comparer les observations fournies par les diffé- rents sujets. Deux de ces femelles avaient été sacrifiées juste au moment où elles entraient de nouveau en rut, & V (loc. cit., p. 26) au neuvième et & XXXI (loc. cit., p. 34) au vingt-unième jour après le coït précédemment observé, cetie dernière ayant eu, très certainement, une époque génitale intercalée au rut directement constaté et au rut révélé par l’autopsie. L'autre femelle, & XIX (loc. cit., p. 28), avait été sacrifiée au onzième jour après le rut observé et, très certainement, trois ou quatre jours après une nouvelle époque génilale. — Dans mes supputations, je compte pour un le jour du coït, à quelque heure qu'il ait eu lieu, et pour un aussi le jour de la mort, à quel- que heure que le sujet ait été sacrifié. (2) Je regarde donc comme erronées et je rétracte les parties que je souligne dans les deux passages suivants de ma susdite note : « La transformation pavimenteuse et stratifiée de cet épithétium se produit à. RYTHME VAGINAL DES MANMIFÈRES LAl Cette observation se rapporte à une Souris sacrifiée exactement entre la parturition et le rut consécutif. Or, chez elle, dit l’auteur, « la prolifé- ration des éléments muqueux a atteint pour ainsi dire son apogée. La muqueuse est, en effet, essentiellement constituée par un plan profond de deux ou trois rangées de petites cellules cylindriques ou ovoïdes, tassées les unes contre les autres. Au-dessus de ces dernières on trouve cinq ou six rangs de grosses cellules muqueuses, dont les plus superficielles sont turgescentes et semblent de ce fait avoir perdu leur forme primitive. » Cette première observation sur la Souris paraît, d’ailleurs, nettement confirmée par celles de Retterer ; car cet auteur a constaté que, chez la Chienne, la Chatte, la Brebis et la Vache (loc. cit., p. 107), la modifica- tion muqueuse alteignait son plus haut degré de développement quelques jours après la parturition, c'est-à-dire quand les sujets examinés avaient été sacrifiés au moment le plus rapproché de la parturition. Ainsi, la parturition, dans l’épithélium de la muqueuse vaginale des Rongeurs, paraît déterminer : d’une part, un excès de prolifération, les cellules basilaires proliférantes se mullipliant elles-mêmes au point dese disposer en plusieurs assises au lieu d’une seule; et, d'autre part, une accé- lération du processus de transformation muqueuse du produit de cette prolifération, les cellules ainsi transformées se présentant alors superpo- sées en nombreuses assises. De cette double cause résulte, à ce moment, un maximum d'épaisseur de l’ensemble de l’épithélium vaginal. En somme, dans le cas le plus complexe, chez les Rongeurs simpliei- dentés, l’épithélium vaginal passe successivement par trois stades maxima ou minima, qui sont: 1° le stade à forme épidermique, avec un maximum d'épaisseur, lequel se présente au moment du rut et n’a qu’une durée éphémère; 2° le stade à forme muqueuse et à minimum d'épaisseur, qui occupe une grande partie de l'intervalle compris entre deux ovulations ou deux ruts consécutifs et dont la durée est encore prolongée par la ges- tation, 3° le stade à muqueuse et à maximum d'épaisseur, qui survient au moment de la parturition et n’a qu’une durée éphémère, le stade n° 1 lui succédant aussitôt et recommencçant la série des mêmes transforma- tions. Reste à savoir si le troisième stade est particulier au cas de la gesta- tion, ou si, dans tous les cas, il précède toujours Le premier. Une de mes lPapproche du rut et avant toute intervention du mâle, chez la femelle vierge comme chez la mullipare, chez la femelle gravide comme chez celle qui n’est pas en élat de gestation. C’est même chez la femelle gravide qu'il est le plus facile d'observer cette transformation; car, en sacrifiant l'animal quand son aspect indique une parturition prochaine, on est sûr de trouver cette transformation plus ou moins avancée, puisqu'elle doit étre accomplie au moment de la mise-bas, qui suivra immédiatement le rut…. « Mais, en premier lieu, s’il veut bien sacrifier des femelles vers l’époque de la mise-bas, il retrouvera chez elles, comme je l'ai dit, le méme processus. 149 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE observations, dans laquelle j'ai constaté une mue de l’épithélium muqueux, à la veille du coït, chez une femelle non gravide (/echerches de Zoo- éthique, p. 585, t. XXIV), me ferait pencher vers la dernière hypothèse; mais cette observation laisse place à des doutes, et le problème attend de nouvelles recherches. Telle est, dans l’état actuel de nos connaissances, la série des phéno- mènes qui constituent le rylhme vaginal chez les Rongeurs simpliei- dentés, y compris la tribu des Hystricomorphes, que mes observalions macroscopiques sur la Gerboise et le Cobaye et surtout les observations microscopiques de Retterer sur le Cobaye (loc. cit., p. 566) nous montrent tout à fait identique, sous ce rapport, à la tribu des Myomorphes (1). 2. Rongeurs duplicidentés. Chez les Rongeurs duplicidentés, qui, sous plusieurs rapports, éta- blissent le passage des Rongeurs aux Ongulés, les observations de Rette- rer sur la Lapine (loc. cit., p. 567) nous montrent que les choses se passent de même, ou à peu près, que chez les Simplicidentés. L’épithélium s’amincit aussi et devient muqueux dans la période du repos génital, tan- dis qu'il devient épais et pavimenteux vers l’époque du rut. Subit-il aussi la transformaiion eurnée? Retterer ne l’a pas constaté; mais rien ne prouve que la femelle qu'il a sacrifiée trente jours après la parturition, et chez laquelle il a observé de nombreuses assises de cellules pavimenteuses stratifiées, eût exactement atteint et n’eût pas dépassé l’époque du rut. La question restera douteuse jusqu'à ce qu’on ait exa- miné le vagin d’une femelle manifestement en rut. 3. Ongulés. Les Ongulés, d'après les seules et très insuffisantes observations que je connaisse, lesquelles sont encore dues à Retterer (loc. cit., p. 567, Brebis, Vache, Jument), nous présentent, au point de vue des modifications rythmiques du vagin, une réduction des phénomènes observés chez les Rongeurs. Chez eux, l’épithélium vaginal subit encore, plus ou moins (1) Je n'oserais cependant pas affirmer a priori que, chez tous les Rongeurs simplicidentés, les transformations rythmiques de l’épithélium vaginal soient aussi exagérées que celles que je viens d'indiquer. Sous ce rapport, comme au point de vue du bouchon vaginal, — dout le rôle, tel que je le concois, me paraît surtout utile aux petites espèces, dont l'existence, d’ailleurs, n’a jamais encore été constatée chez une espèce plus grosse que le Cochon d’Inde et qui perd déjà de sa consistance chez celle-ci, — il y aurait lieu d'étudier directe- ment les Rongeurs de grande taille, soit Sciu'omorphes, soit Hystricomorphes, tels que la Marmotte, le Castor, le Paca, le Cabiai, etc. RYTHME VAGINAL DES MAMMIFÈRES 143 atténuée, la transformation muqueuse; mais dans l'autre sens, il ne paraît pas qu'il aille jusqu’à la kératinisation de ses couches pavimen- teuses. 4, Bimanes. Chez la Femme, le processus vaginal se montre plus effacé. Chez elle, en effet, l’épithélium du vagin paraît toujours rester pavimenteux : d’une part, il est certain que les assises superficielles de cet épithélium ne se kératinisent pas quand survient l’époque génitale; et, en sens inverse, ni durant la période de repos génital ni même au moment de la parturi- tion, on n’a jamais observé la mise à nu et la transformation muqueuse de ses assises malpighiennes. Le seul effet, dans ce cas, de l’époque géni- tale, c’est de déterminer, d’une part et vraisemblablement, un épaississe- ment plus ou moins sensible, par excès de prolifération, de l’épithélium vaginal, et, d'autre part et certainement, une #ue superficielle, dont le résultat nécessaire est d’amincir de nouveau cet épithélium. Cette mue périodique du vagin de la Femme, j'ai pu la constater per- sonnellement. En voici l'observation, telle que je l’ai consignée dans mes Recherches de Zooéthique (p. 804, note) : « Un sujet m'a assuré qu'habituellement il éprouvait à la vulve, la veille du début des menstrues, des démangeaisons, coexistant avec une sécrétion liquide inaccoutumée et d’ailleurs peu abondante. J'ai pu voir cette sécrétion en place et en faire des préparations microscopiques. C’est un liquide blanc, crémeux, très épais mais non filant, qui se ramasse au fond des plis et dans les déclivités de l’orifice vaginal ; sous le microscope, il se montre à peu près exclusivement composé de grandes cellules pavimenteuses, la plupart parfai- tement intactes, à noyaux arrondis ou ovales on ne peut plus nets. Or, dans le liquide menstruel du même sujet, au troisième jour des règles, les cellules pavimenteuses sont relativement assez rares; en outre, elles paraissent, en majeure partie, plus ou moins altérées, comme si elles provenaient d'une desquammation déjà ancienne. » Il s'agit bien là, on le voit, d’une véritable mue de la muqueuse vagi- nale. Dans certains cas, d’ailleurs, les cellules de la couche caduque con- servent leur union réciproque quand elles s'isolent de la couche sous- jacente, et les exuvies se détachent tout d’une pièce, formant une production parfaitement comparable à l'enveloppe vaginale des Ron- geurs : « Chez certaines femmes, —- dit de Sinéty (Manuel pratique de Gynécologie, Paris, 1879, p. 155), — au moment de la période menstruelle où à la suite d’in- jections astringentes, on constate l'expulsion de lambeaux souvent assez étendus de la muqueuse du vagin, figurant même parfois un moule complet de tout le canal. Ces sortes de membranes ont été confondues avec celles qui proviennent de la cavité ulérine. Un simple examen microscopique permettra 144 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE de les différencier. Leur structure, uniquement composée de grandes cellules d'épithélium pavimenteux, ne permet de les confondre avec aucun autre pro- duit. Quelques gynécologistes ont désigné cette desquammation sous le om de vaginite exfoliante. » 5. Carnivores. En dehors de la série qui irait des Rongeurs par les Ongulés et les Quadrumanes jusqu’à la Femme chez les Carnivores, les observations de Retterer (loc. cit., p. 568) nous montrent que la Chienne, au point de vue qui nous intéresse ici, est comparable aux Rongeurs : son épithélium vaginal va jusqu’à la kératinisation à l’époque du rut, tandis qu'il s’amin- cit durant le repos génital et subit la transformation muqueuse au moins au moment de la parturition. Chez la Chatte, au contraire, sous ce rapport plus comparable à la Femme, l'épithélium du rut n’est pas cornifié, et, dans l’épithélium du repos génital, la transformation mu- queuse n’a pas été directement observée; mais elle semble probable au moins au moment de la parturition (loc. cit., p. 105). I[T. — GÉNÉRALISATION. Si peu nombreuses qu’elles soient, les observations qui précèdent nous permettent d'ébaucher la théorie générale du rythme vaginal des Mam- mifères. Voici comment je la conçois et la formule. L'épithélium du vagin des Mammifères subit des transformations qui se reproduisent périodiquement, suivant un rythme (rythme vaginal) concordant avec celui qui régit l'ensemble des modifications périodiques de l’appareil génital femelle (rythme génital). Chaque période du rythme vaginal comprend deux phases alter- nantes, qui ont, respectivement, l’une pour point de départ, l’autre pour point d'arrivée, l’époque génitale, c’est-à-dire l’époque de la maturation et chute des ovules (époque des menstrues chez la Femme, du rut chez les autres Mammifères) : les transformations épithéliales de l’une ou de l’autre des deux phases pouvant, suivant le type du Mammifère con- sidéré, présenter un développement ou une réduction plus ou moins consi- dérables. | Quand survient l’époque génitale, l’épithélium vaginal est toujours très semblable à l’'épiderme extérieur : il présente toujours, alors, un nombre maximum d'assises, composées, l’inférieure, de cellules cylindriques, les supérieures de cellules plates et les intermédiaires, de cellules polyé- driques; mais les strates supérieures, dans certains cas (Rongeurs simpli- cidentés, certains Carnivores), sont de nature cornée, tandis que, dans d’autres cas (Femme, Rongeurs duplicidentés (?), Ongulés (?), certains Carnivores (?),\ elles ne se kératinisent jamais. RYTHME VAGINATL DES MAMMIFÈRES 145 Aussitôt après cette époque, la muqueuse vaginale subit une mue. Dans les cas les plus accusés, celte mue intéresse toute l’épaisseur de la couche pavimenteuse, et la couche malpighienne, laissée à nu, se met aussitôt à subir la transformation et la fonte muqueuse ; “e processus atteignant d’abord l’assise superficielle et se propageant successivement de haut en bas, plus ou moins profondément suivant l’espèce de Mam- mifère (probablement aussi suivant la durée de la période de repos génital), et déterminant ainsi une réduction plus ou moins considérable de l'épaisseur totale de l’épithélium vaginal. Dans les cas les moins accusés, la mue vaginale n’intéresse qu’une faible partie des assises de la couche pavimenteuse, et l’on n'observe aucune dégénération muqueuse des assises sous-jacentes. Ce dernier cas est celui de la Femme; tandis que, chez tous les autres Mammifères étudiés sous ce rapport, chez les Ruminants, chez les Carnivores et surtout chez les Rongeurs, il semble que la desquamation mette toujours à nu la couche malpighienne, qui subit d'ordinaire et plus ou moins profondément la dégénération muqueuse. Remarquons, en passant, que l'exception présentée ici par la Femme est aussi bien physiologique qu’anatomique : seule de toutes les femelles de Mammifères, la Femme est constamment apte au coîït ; seule aussi, elle possède constamment l’éphithélium caractéristique du rut. Après les modifications que nous venons de rappeler, l’épithélium vaginal reste plus ou moins longtemps dans le même état, l'équilibre s’'établissant entre la fonte muqueuse, qui détruit ses assises superticielles et la prolifération de sa couche profonde, qui tend sans cesse à augmenter le nombre de ses assises. Jusque-là, le phénomène est absolument indépendant de la grossesse; mais celle-ci peut intervenir alors. Il paraît vraisembiable qu’elle n’agit d'abord qu'indirectement, en prolongeant la période de repos génital; mais, quand elle touche à son terme, il semble qu’elle a pour résultat d’exagérer l’activité des deux processus inverses de prolifération et de dégénération muqueuse de l’épithélium vaginal : au moment de la parturition, en effet, cet épithélium présente un nombre plus considérable d'assises qu’à tout autre moment du stade muqueux, et, d'autre part, toutes les assises de la couche malpighienne se montrent simultanément atteintes de dégénération muqueuse. Quoi qu'il en soit, à l’approche de la nouvelle époque génitale, la prolifération éphithéliale s’exagère encore, et, cette fois, les nouvelles assises malpighiennes échappent à la dégénération muqueuse; sous les assises plus anciennes qui en sont atteintes, elles évoluent désormais à la façon des cellules de l’épiderme cutané : à mesure qu’elle vieillissent et deviennent plus superficielles, elles prennent la forme pavimenteuse et s’aplatissent, se kératinisant ou non suivant les cas. Quand survient le rut, l'épithélium vaginal a repris exactement l’aspect 146 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE qu'il avait à l'époque génitale précédente, et il va recommencer aussitôt à parcourir le même eycle de transformations. En dernière analyse, nous voyons que le rylhme vaginal consiste essentiellement : d’une part, immédiatement avant l’époque génitale, en une brusque exagération de l’activité reproductrice et de la résistance vitale des cellules de l’épithélium de la muqueuse vaginale, ce qui permet à cet épithélium de reprendre l'épaisseur et la structure de l’épiderme cutané (ses assises supérieures pouvant, d'ailleurs, subir ou non la kératinisation); et, d'autre part, aussitôt après l’époque génitale, en une desquamation subite de tout (cas général) ou partie (cas de la Femme) de ses assises pavimenteuses, desquamation suivie (cas général) on non (cas de la Femme) de la dégénération muqueuse d’un plus ou moins grand nombre de ses assises malpighiennes. - DE L'ACTION DU BICARBONATE DE SOUDE SUR LE CHIMISME STOMACAL PAR M. À. GILBERT (Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 22 juillet 1893). Sur le conseil de M. Hayem, j'ai entrepris au Laboratoire de Thérapeu- tique de la Faculté l’étude de l’action du bicarbonate de soude sur le chi- misme stomacal physiologique. Mes recherches ont été faites sur un chien mâlin vigoureux du poids de 17 kilogrammes, auquel j'ai pratiqué au commencement de l'année 1899 une fistule gastrique. Elles ont été poursuivies pendant deux années sur le même animal, dont [a santé est demeurée constamment excel- lente. J'ai varié mes expériences, en introduisant dans l'estomac des eaux alcalines natureiles (eau de Vichy, source des Célestins; eau de Saint- Yorre, source Saint-Louis n° 1) et des eaux artificielles d'un faible titre (5 gr. 103 de bicarbonate de soude par litre), et d’un titre élevé (20 grammes de bicarbonate par litre), en les administrant seules ou en faisant ingérer simultanément, antérieurement, ou postérieurement, de la viande. L'eau a été introduite dans l'estomac par la voie fistulaire, à la dose de 400 grammes, lorsqu'elle a été donnée seule; dans le cas contraire, sa quantité a été réduite à 200 grammes et un égal poids de viande de bœuf a élé administré. Chaque expérience a été faite dans des conditions identiques, au com- mencement de l'après-midi, l'animal n'ayant pris dans la matinée aucune nourriture. Le contenu gastrique a été extrait de quart d'heure en quart d'heure pour être soumis au procédé d'analyse imaginé par M. Winter. L'extrac- tion n'a pas élé faite au delà de la première demi-heure, après la seule administration de l’eau et au delà de la première heure, après l’adminis- tration de l’eau et de la viande. Mes recherches ne visent, par consé- quent, que l’action du bicarbonate de soude sur le début de la digestion “gastrique. 4145 MÉMOIRES DE LA SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE Pour mesurer cette action, j'ai répété avec de l’eau distillée toutes les expériences faites avec les solutions alcalines, en me plaçant dans les mêmes conditions. Le chimisme stomacal de l'animal expérimenté s'est, à la vérité, modifié peu à peu pour devenir plus intensif, si bien qu’au bout de deux ans, il différait d'une façon appréciable du chimisme initial ; mais comme les expériences faites avec les eaux alcalines et avec l’eau simple, dans les mêmes conditions, ont été poursuivies. parallèlement, leurs résultats deviennent rigoureusement comparables. J'ai tout d’abord envisagé l'influence exercée sur le chimisme gastrique par l'introduction isolée dans l'estomac d’une solution alcaline. Pour celte recherche, j'ai employé l'eau de Vichy-Célestins. L’extraction du contenu gastrique, après un 41/4 d'heure, a donné les chiffres suivants : T — 0.084 HE 0:00% F — 0,080 CAD 0.004 Réaction alcaline. Après une {1/2 heure : T = 0.240 = 0 Fi 0290 C —= 0.014 0.014 Réaction alcaline. D'autre part, avec l’eau distillée j'ai obtenu les chiffres suivants, au bout d’un 1/4 d'heure : == 20/00! HE=N0 À — 0.008% ER 0508 C — 0.008 GET 0.008 Après une 1/2 heure : 107284 He 07007 —, 0.060: F — 0.204 C0 070 OMIS 0.080 L'eau de Vichy-Célestins, il est indispensable de le rappeler iei, ren- ferme, par litre, 4 gr. 049 d'acide carbonique, 5.108 de bicarbonate de soude, 0.462 de bicarbonate de chaux, 0.328 de bicarbonate de magnésie, 0.315 de bicarbonate de potasse, 0.005 de bicarbonate de strontiane, 0.291 de sulfate de soude, 0.002 d’arséniate de soude, 0.001 de phosphate de soude, 0.060 de silice. Elle contient, sn outre, une petite quantité de chlore, principalement combiné à l’état de chlorure de sodium. El résulte: de mes dosagés que le chlore total d’un litre d'eau de Vichy-Célestins Pre + AE DE L'ACTION DU BICARBONATE DE SOUDE SUR LE CHIMISME STOMACAL 149 s'élève à 0.360, et que, par conséquent, 100 grammes en contiennent 0.036. Si l'on veut prendre une idée exacte de la modification apportée au chimisme gastrique par les principes que contient l’eau de Vichy-Céles- tins, il est donc nécessaire de soustraire ce chiffre 0.036 de ceux qui, dans les expériences relatées plus haut, représentent la teneur du suc stomacal extrait au bout d’un quart d'heure et d’une demi-heure en chlore total el en chlore inorganiquement combiné. Cette remarque étant faite, du rapprochement et de la comparaison des chiffres que m'a fournis l'analyse découle cette observation que la digestion de l’eau de Vichy-Célestins (au moins pendant la demi-heure qui suit son introduction dans l'estomac) se différencie de celle de l’eau distillée par l’alcalinité du contenu gastrique, par sa teneur plus faible en chlore total et en chlore combiné aux substances organiques. J'ai recherché ensuite l'influence du bicarbonate de soude sur la digestion gastrique en le faisant ingérer soit une heure après la viande, soit une demi-heure avant. L'eau de Vichy- -Célestins seule encore a été utilisée pour cette étude. L'eau de Vichy ayant été administrée une heure après la viande, j'ai obtenu les résultats suivants, après un 1/4 d'heure : =" 0516 HERO AT 0 1100 07405 CDS QU 0.138 Après une 1/2 heure : = (828 H — 0.007 — 0.210 — 0415 Gr D 170 MN 000 0.153 L’eau distillée m'a donné ces autres résultats après un 1/4 d'heure : 09 on H = 0:022 A — 0,202 F — 0.124 CO 21 = DC 0.233 Après une 1/2 heure : = 10350 H=:002? Ne. 02 ER 0E102 C0 220 = 112 0.248 L’eau de Vichy, d'autre part, ayant été donnée une 1/2 heure avant la viande, j'ai consigné les chiffres qui suivent, après un 1/4 d'heure : T — 0.306 H — 0.066 A — 0.119 F = 0.211 C — 0.029 ax — 1.83 0,095 150 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Après une 1/2 heure : T0 H°—"0:029 I, 0,712 RS ROMEO (Ce; tre COM 0.241 Après 3/4 d'heure : = 0 408 HN 008? — 0,428 == 0 102 GI 0272 PE 0.306 APRES 1 heure : 107459 H 0018 AY 0 595 F==202098 GO — 0.343 TS PT 0.361 En regard de ces chiffres se placent les suivants obtenus à avec l’eau simple, au bout d’un 41/4 d'heure : : M=tO0 28 HE=X0 AE ROME F — 0.219 C0 06e a — 2,63 0.065 Après une 1/2 heure : 1==1070179 H = 0.008 À —,0:351 = 02280 GO — 0.233 Cho 0.241 Après 3/4 d'heure : D = 0.416 H — 0.037 À — 0.428 Hi 012 C2 —=07255 25) 0.292 Après À heure : T — 0.478 HO À — 0.495 Pe=—107091 CAO SEE L'EMs2S 0.387 L’adminislration de l’eau de Vichy une heure après la viande a une action d’une grande netteté, elle abaisse au moins pendant une demi-heure le taux acide du contenu stomacal et les chiffres qui expriment sa teneur en chlore total ei en chlore organiquement combiné. L'administration de l’eau de Vichy une demi-heure avant la viande est également suivie pendant une demi-heure d’une diminution dans l'acidité du contenu gastrique; mais ses autres effets sont peu décisifs. Si l’on tient compte de la présence d’une petite proportion de chlore dans l’eau des Célestins, l’on peut admettre une légère action dépressive sur le chlore total. Les combinaisons organiques du chlore sont également amoindries; mais, par contre, l'acide chlorhydrique libre se produit en quantité anormale. DE L'ACTION DU BICARBONATE DE SOUDE SUR LE CHIMISME STOMACAL 151 En dernier lieu, j’ai étudié l’action du bicarbonate de soude sur le chi- misme stomacal, en l’administrant en même temps que la viande. Une solution de bicarbonate de soude à 20 p. 1000 m'a donné les résul tats suivants, après un 1/4 d’heure : T = 0.266 F — 0.262 Après une 1/2 heure : T—=10:295 F — 0.284 Après 3/4 d'heure : T — 0.365 F — 0.284 Après 1 heure : T — 0.427 F = 0.230 H C n = 10 — 0.00% 0 004 Réaction — 0.011 = 0 0.011 Réaction = 0 A — 0.081 œ 0.081 — 0.008 À — 0.197 (2 0.205 alcaline. alcaline. Il 4 Une solution de bicarbonate de soude à 5.103 p. 1000 (c’est-à-dire con- tenant la même proportion de bicarbonate de soude que l’eau de Vichy- Célestins) m’a donné ces autres chiffres, après un 4/4 d'heure : T = 0.204 F — 0.182 Après une 1/2 heure : T = 0.365 F — 0.182 Après 3/4 d'heure : | T — 0.350 F — 0.131 Après { heure : T = 0.416 F = 0.124 H C — 0 A — 0.022 œ 0.022 — 0.07 À — 0,110 œ 0.183 = 0 — 0.219 œ 0.219 = 0 À — 0.292 & 0.292 — 0.047 12144 0.156 0.75 [I 0.292 1.33 I Il 0.363 1.25 Il L'eau de Vichy-Célestins m'a donné des chiffres très voisins des précé- dents, à savoir, au bout d’un 1/4 d'heure : 13 #52 ï::: : MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE/’BIOLOGIE F= 0,233: H = 0. A — 0.089 F 0.19% 1n2 0uGr—10 0365: œ — 2.41 hr OU a US 0.036 Après une 41/2 heure : : D = 0,8 H—0 — 0:18 F — 0.189 .G — 0.146 & —1V43 0.146 Après 3/4 d'heure : ee tee 110972) 10 UN O0 SEE Hi 0182 C2 107490 & —= 4.34 0.190 at Après À heure :: : T = 0.449 H — 0.008 A — 0.430 : F = 0.097 CO = 0,284 alt= 1.49 | 0.292 Avec l’eau distillée, d’autre part, j'ai obtenu les chiffres suivants, au bout d’un 1/4 d'heure : " A Re T = 0.160 Ho 0 À = 0.113 F — 0:12 C — 0.036 Gi 314 0.036 Après une 1/2 heure : D Er SE AE 0 OLA A 20.194) 5100 XIV 06 LEpi Es 0 42% GUESS 104108! Last s6go ut 5i A 0.124 ; Après .3/k: d'heure : So à: m = 0.401 Ho 0 022 A = -0.292 F — 0.109 C — 0.270 a —1 0.292 Après 1 heure: Me T = 0 401 H = 0 A — 0.365 F — 0.116 C — 0.285 a — 1 28 0.285 J'ai fait deux: essais avec l’eau de Saint-Yorre Saint-Louis n° 4, dont la composition est un peu différente de celle de Vichy-Célestins, puisqu'elle renferme par litre 2 gr. 326 d'acide carbonique, 5.821 de bicarbonate de soude, 0.889 de bicarbonate de potasse, 0.082 de biear- bonate de magnésie, 0.862 de bicarbonate de chaux, 0.326 de sulfate de soude, 0.003 d’arséniate de soude, et. d’après mes dosages, 0.360 de chlore total. J'ai noté les chiffres suivants après une 1/2 heure : T—"0,321 H— 0 A — 0.134 henPes0n1Matists 1 = 044044 cuiloafé= 14087 45 eau DE L'ACTION DU BICARBONATE DE SOUDE SUR LE CHIMISME STOMACAL 1Â53 Après À heure : T — 0.438 H — 0 = 010? DUT) — 0.351 .336 CAO E Ces deux dernières expériences ont été faites à une époque où le chi- misme stomacal de l’animal s'était modifié et les chiffres obtenus doivent être comparés aux suivants recueillis à la même époque et obtenus après l'ingestion de l’eau distillée, après une 1/2 heure : 0.292 H — 0.007 A — 0.209 Le 0101 C0 161 a — 1.95 (3 0.168 Après 4 heure : T = 0.452 H = 0 A — 0.402 G — 0.080 C = 0.372 a = 1.08 0.372 Le bicarbonate de soude introduit dans l’estomac du chien en même temps que la viande, modifie en somme la formule chimique du travail gastrique d’une façon appréciable. À haute dose, il impose pendant la première demi-heure la réaction alcaline au contenu stomacal. L’acidité n'apparaît qu’au bout de ce temps pour augmenter progressivement. L'augmentation du chlore total est initialement, c'est-à-dire pendant le premier quart d'heure, très notable ; elle est moins accusée après une demi-heure et devient nulle au bout de trois quarts d'heure. Les combinaisons organiques du chlore font défaut, de même que l'acidité pendant une demi-heure et se montrent pour augmenter gra- duellement à partir de ce moment. Bref, à haute dose, le bicarbonate de soude a une action telle sur le contenu stomacal qu’au bout d’une heure celui-ci n’est pas beaucoup plus riche en acide et en chlore organiquement combiné que le contenu stomacal normal après une demie-heure. À faible dose, le bicarbonate de soude a sur le chimisme gastrique une action beaucoup moins intense, mais orientée dans le même sens. Il entraîne une diminution de l'acidité qui, notable pendant un quart d'heure, est moins sensible au bout d’une demi-heurz et disparaît après trois quarts d'heure. * Il détermine une augmentation du chlore total, peu considérable à la vérité, mais certaine et se poursuivant de même que l’affaiblissement du degré acide pendant une demi-heure pour disparaître au bout de trois quarts d'heure. Quant à son action dépressive sur les combinaisons organiques du 154 Hi MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE : chlore, elle est minime, inconstante même, et lorsqu'elle existe au bout d’un quart d'heure, devient déjà douteuse après une demi-heure. Grâce au procédé d'analyse que j’ai employé et dont nous sommes redevables à M. Winter, les recherches que j’ai poursuivies m'ont con- duit à des résultats plus précis que ceux auxquels étaient parvenus Blondlot, Cl. Bernard, Rabuteau, Ritter, Herzen, Ch. Richet et les autres physiologistes qui ont envisagé l’action du bicarbonate de soude sur la chimie de l'estomac. Dans leur ensemble, ils sont PUS à ceux qui ont été obtenus chez l’homme, à l’état pathologique. Ayant administré une heure avant les repas de petites. doses de bicar- bonate de soude à des malades atteints d’hyperpepsie, M. Hayem (4) a constaté au bout de plusieurs semaines l'existence d’une excitation sto- macale plus ou-moins prononcée se traduisant par une augmentation de la chlorurie (T) de la chlerhydrie (H + C), et surtout d'H, ( pouvant au contraire être diminué. D'autre part, ayant fait ingérer à des hyperpeptiques des doses fortes de bicarbonate de soude dans le cours des digestions, il a noté presque invariablement, avec une diminution de l'acidité totale, l’abaissement de la chlorurie (T) et de la chlorhydrie (H -E C), H étant presque sûrement affaibli et C beaucoup plus souvent augmenté qu’abaissé. Le bicarbonate de soude peut donc être nuisible ou utile dans l’hyper- pepsie; il est nuisible, quand il est administré avant les repas, puisqu'il exagère le trouble fonctionnel que l’on se propose de combattre; pour être utile, il doit être ingéré pendant ou après le repas et la quantité prescrite doit être proportionnelle au degré de l'état pathologique. Dans l'hypopepsie l’action du bicarbonate de soude n’a pas été étudiée. Mais elle peut être déduite avec vraisemblance des données que nous possédons actuellement, et l'on est fondé de croire que dans cette moda- lilé dyspeptique le bicarbonate de soude pris avant les repas, à petite dose, exercérait une excilalion utile, alors qu’ingéré dans le cours de la digestion il aurait une action nuisible. Le bicarbonate de soude, en résumé, peut être prescrit aussi bien dans l'hypopepsie que dans l'hyperpepsie, à la condition que la dose et le mode d’administration de ce médicament soient en rapport avec l'état gastrique (Hayem). (Travail du Laboratoire de Thérapeutique de la Faculté). (4). G. Hayem. De la médication anlidyspeptique, 1892, p. 387. STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX DES GASTÉROPODES PAR M. B. DE NABIAS (Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 25 novembre 1895.) Des coupes pratiquées dans la totalité des centres nerveux des gastéro- podes, tels que l’Æelixæ, l'Arion, le Zonites et le Limax, montrent qu’il y a lieu de distinguer chez ces animaux deux sortes de cellules nerveuses : 1° Des cellules ganglionnaires proprement dites, à taille variable, se rencontrant dans les centres sous-æsophagiens, dans les ganglions du stomato-gastrique et dans la région postérieure du cerveau. Elles forment l'écorce de ces ganglions où elles sont disposées en rayonnant autour de la trame fibrillaire centrale (substance ponctuée de Leydig). Les globes ganglionnaires les plus volumineux sont à la périphérie. Ceux de moyenne et de petite taille sont en rapport plus immédiat avec la trame fibril- laire (fig. 4). 2 Des cellules petites, de même taille, en apparence sphériques, ne se rencontrant que dans la région antérieure du cerveau et dans les gan- glions terminaux des tentacules (tant inférieur que supérieur) qui sont affectés à la sensibilité spéciale. Ces cellules forment dans la région proto- cérébrale une agglomération très serrée qui se trouve en connexion avec une trame fibrillaire d'une finesse extrême, mais celle-ci n’occupe pas le centre de l’agglomération cellulaire comme partout ailleurs; elle est déjetée entièrement sur le côté et se trouve de la sorte en contact direct avec l'enveloppe névrilemmatique (fig. 2 et 4 Ca). En comparant ces cellules avec celles qui existent chez les vertébrés, on peut rapprocher les premières du type cellulaire de Deiters ou cellules à prolongement long, et les secondes du type cellulaire de Golgi ou cellules à prolongement court. Elles sont toutes unipolaires. Dans les cellules gan- glionnaires ou cellules du type 1, le prolongement d’origine se divise à des distances variables. Lorsque la division se fait à la naissance du pro- longement, la cellule tend à prendre la forme bipolaire, c’est ce que l’on Brococie. Mémoires. — 9€ SÉRIE, T. V, 14 156 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE remarque pour les cellules dont le globe ganglionnaire est immédiatement appliqué contre la trame fibrillaire centrale comme si, en raison même de leur situation, la division ne pouvait pas se faire plus loin. On n’observe point la forme stellaire ou pyramidale telle qu’elle existe dans les centres nerveux des animaux supérieurs. Le prolongement cellulaire est une émanation directe du protoplasma comme le prouvent : 1° les réactions colorantes identiques à celles du protoplasma et différentes de celles du noyau ; 2° l’épaisseur du prolon- gement toujours proportionnelle à celle de la couche protoplasmique qui lui donne naissance; 3° la structure fibrillaire (fig. 1). Les fibrilles constituantes du protoplasma ganglionnaire convergent en ra yonnant vers le prolongement d'origine dans lequel elles se disposent parallèlement. Elles se séparent de distance en distance pour former des rameaux accessoires de plus en plus fins. Les branches de terminaison sont finalement constituées par des fibrilles isolées (1). On n’observe jamais d'anastomose entre ces dernières et les fibres ou fibrilles des cellules ner- veuses voisines, soit qu’on les examine dans la peau, les muscles, etc., ou dans l’intérieur même des ganglions. La cellule nerveuse possède un pro- longement complexe sans doute, mais ce n’est que le protoplasma lui- même éliré et divisé; aussi conserve-t-elle son indépendance comme la cellule indifférente, non ramifiée, qui lui a donné primitivement nais- sance et au même titre qne les cellules des autres organes. Les fibrilles protoplasmiques étant morphologiquement identiques, il n’y a pas lieu de leur assigner à priori un rôle physiologique différent comme on l’a fait pour le type cellulaire de Deiters. Le volume des cellules ganglionnaires est en rapport, non pas précisé- ment avec la distance que doivent parcourir les incitations perçues, mais avec l'étendue du territoire dans lequel l’innervation doit être produite par la même cellule. Les nombreuses fibrilles qui constituent les gros prolongements se séparent à tous les niveaux pour se distribuer dans différentes régions, sans que pour cela une fibrille prise à part soit plus longue que celle d'un prolongement émanant d'une moyenne ou d'une petite cellule (2). Les cellules les plus volumineuses dont les fibrilles protoplasmiques (4) Dans son travail sur le système nerveux des crustacés, G. Retzius a figuré des cellules nerveuses dans lesquelles le prolongement est plus gros, à une certaine distance, qu'au niveau du point d'origine. (Biologische Unter- suchungen. Neue Folge. Stockolm, 1890.) (2) Pierret a signalé ce fait intéressant que, chez l'homme, la dimension des cellules nerveuses était en rapport avec les distances que doivent par- courir les cylindraxes centrifuges pour transmettre les incitations motrices. STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX DES GASTÉROPODES 157 peuvent avoir une aire de distribution très grande, paraissent adaptées à la réception ou à la transmission d’impressions multiples et diverses. Au point de vue de la division du travail physiologique, ces cellules parais- sent peu différenciées. Aussi remarque-t-on que les cellules de même espèce atteignent leurs plus grandes dimensions dans les ganglions sous- œsophagiens alors qu’elles restent relativement petites dans les ganglions Fi. 1. — Coupe praliquée à travers les ganglions viscéraux de l’Helix Aspersa. CV, cellule volumineuse. Le globe ganglionnaire mesure 220 uw. Le noyau 140 p. Le prolongement d’origine 40 x. Les deux branches de division mesurent, l’une 28 pu, l’autre, 12 pu —= 40 p. N, noyau. Les bâtonnets chromatiques sont coupés en travers et apparaissent comme autant de nucléoles arrondis. N’, le noyau, à peine effleuré par la coupe, montre les bâtonnets chromatiques dans leur longueur. CM, cellule moyenne. CP, cellule petite. NV, névroglie avec les petits noyaux ovales qu'elle renferme. SP. Substance ponctuée. cérébroïdes. En outre, ce n’est que dans le cerveau ou dans les ganglions terminaux de la sensibilité spéciale que l’on trouve les petites cellules du type Il, qui sont réduites au minimum fibrillaire. Leur couche proto- plasmique est si mince qu’elles paraissent au premier abord constituées par des noyaux sphériques, tandis qu’elles sont réellement pyriformes. Ces cellules existent aussi chez les arthropodes au voisinage des régions sensorielles du cerveau où elles ont été décrites au début sous le nom de noyaux chromatiques. Elles offrent beaucoup d’analogie avec les cellules de la couche granuleuse interne de la rétine des vertébrés. D'un autre côté, l’histologie comparée montre que l'élément nerveux diminue de volume à mesure qu’on s'élève dans la série zoologique. Il semble donc que la différenciation de la cellule nerveuse soit fonction de sa petitesse . 158 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Le noyau des cellules ganglionnaires des gastéropodes est remarquable par ses énormes dimensions. Les nucléoles déerits par les auteurs comme des corps arrondis au nombre de dix à vingt sont en réalité des bätonnets presque aussi longs que le noyau lui-même, comme le montrent certaines coupes convenablement orientées (fig. 1 NV’). La disposition de ces bâtonnets semble marquer la trace d’une ancienne cinèse que la croissance n’a pas entièrement modifiée. En tout cas, ces bâtonnets ne se fusionnent jamais en un nucléole distinct, comme cela existe dans la cellule stellaire des vertébrés. ‘ Les cellules nerveuses n’ont pas de membrane d’enveloppe. Elles sont en rapport avec la névroglie qui limite le corps ganglionnaire et se pour- suit le long des prolongements en s’infiltrant dans leur intervalle sans jamais former la paroi d’un tube. La névroglie se présente comme un tissu blanchâlre, non colorable par l’hématoxyline, dans l'épaisseur duquel sont disséminés de petils noyaux ovales qui forment comme de petites empreintes sur le protoplasma des cellules nerveuses et sur le prolongement d’origine pour apparaitre plus tard au milieu des fibrilles écartées. Ce tissu ne doit pas être confondu avec l'enveloppe névrilem- malique externe. Les cellules nerveuses offrent une disposition symétrique et une fixité remarquable. Si l’on examine une cellule typique dans le ganglion céré- broïde gauche, on trouve une cellule identique, de même forme, de même volume et occupant exactement la même place dans le ganglion cérébroïde droit (4). On retrouve les mêmes cellules sur tous les animaux de la même espèce à l’état adulte. Nous n'avons pas compté pour cela toutes les cellules du cerveau de l’Æelix pisana, par exemple, mais nous disons que dans le lobe cérébro-pédieux se trouve une cellule géante ayant 120 & environ, alors que les cellules de la même région n’ont pas plus de 20 y. Cette cellule, d'autant plus caractéristique qu’elle est seule possé- dant cette taille, existe aussi bien à droite qu’à gauche, et tous les ani- maux de la même espèce la présentent, lorsque leur système nerveux est définitivement constitué. On peut faire le même raisonnement pour d’autres cellules à caractères également lranchés. Ces cellules répondent à des dispositions anatomiques fondamentales et à des nécessités physiologiques qui, quoique identiques, ne peuvent pas se réaliser avec le même degré de perfection d'un individu à l’autre. Mais ceci devient un problème relatif à la qualité de l'élément nerveux plutôt qu’à la quantité. Si les différences sont d’un ordre trop intime, elles resteront inappréciables à l'examen microscopique. (1) Ce fait est d'autant plus intéressant à signaler que le cerveau des gaslé- ropodes a toujours été considéré comme asymétrique. RE STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX.DES GASTÉROPODES 159 Il est probable qu’on trouvera encore de préférence cette fixité et cette symétrie des éléments nerveux chez les animaux les plus élevés en orga- nisation. Les dissymétries seront d’ordre fonctionnel. On sait que Leydig a cherché à caractériser le système nerveux des Invertébrés en disant qu'il n'existe pas chez ces animaux un rapport direct entre les prolongements des cellules nerveuses et les nerfs qui émanent des ganglions. Pour cet auteur, les prolongements se perdent en fibrilles très fines dans la substance centrale des ganglions nerveux (Punksubstanz) et les nerfs naissent de celte substance. Les nombreux histologistes qui ont étudié, après Levdig, le système nerveux des [nvertébrés, ont admis, tantôt l’origine directe des nerfs, c'est-à-dire la continuation dans les nerfs, sous forme de fibre nerveuse, du prolongement des cellules par analogie avec ce qui existe chez les Vertébrés (Hannover, Will, Bruch, Vedl, Faivre, Owsjannikow, Buchho)lz, Chéron, Brandt, Slieda, Berger, Yung, Claus, Lang, Spengel, Michels, Freud, Kæstler, Rühde, Poirier), tantôt l’origine indirecte se faisant par l'intermédiaire d’une substance fibrillaire interposée entre les cellules et les nerfs, comme l’avait indiqué Leydig (Hermann, H. Schultze, Krieger, Vignal, Pruvot, Viallanes, Wagner, F. Bernard), tantôt enfin l’origine directe dans certains cas et l’origine indirecte dans d’autres (Walter, Sol- brig, Beilonci, Bôhmig, Haller, Rawitz, Nansen). A l'exception de Nansen, ces derniers histologistes suprosent mêmeuuel’origine indirecte est la plus commune (!). Les récents travaux de Retzius, Viallanes, von Lenhôssek tendent à prouver que chez les Invertébrés comme chez les Vertébrés, les fibres centrifuges sont en continuation directe avec les cellules des gan- glions, landis que les fibres centripèles se terminent dans ces mêmes ganglions par une arborisation terminale. En 1892, au congrès de Pau, nous formulions des conclusions analogues (2). Mais nous n’en étions pas moins obligé de nous poser la question suivante : Pourquoi peut-on pra- tiquer à travers les centres nerveux des vastéropodes, un nombre consi- dérable de coupes sans qu'il soit possible de saisir, sur aucunes d'elles, la continuation directe entre les prolongements des cellules et les fibres conslituantes des nerfs? On ne voit qu’exceptionnellement la continua- tion directe, Leydig lui-même l'avait constatée sur certaines cellules. Mais l’on ignore ce que deviennent les prolongements cellulaires pour la presque totalité des éléments nerveux qui forment l'écorce des gan- glions. Nous avons cherché la solution de ce problème dans l'étude des gan- (1) Voir au sujet de ces contradictions : F. Nansen. The structure and combination of the histological elements of the central nervous system. Bergens Museums Aarsberetning, 1886. (2) B. de Nabias. Cerveau de l’Helix aspersa Müller. Congrès de l'Association française pour l'avancement des sciences, Pau, 1892. 160 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE glions viscéraux postérieurs de l’Aplysie (Aplysia punctata) pour les raisons suivantes : 1° ces ganglions, séparés par de longs connectifs des ganglions viscéraux antérieurs, sont parfaitement isolés; 2° ils ne don- nent naissance qu’à un petit nombre de nerfs ; 3° ils sont de petit volume, ce qui permet de les débiter en un petit nombre de coupes sériées. On donne à ces coupes la plus grande épaisseur possible. L’épaisseur est graduée d’après l'intensité de la coloration. Nous avons oblenu ainsi, en choisissant une orientation convenable, Ÿ $ Fi6. 2. — Coupe oblique profonde, pratiquée dans le cerveau de l’Helix Aspersa Müller. La coupe ne prend que le ganglion cérébroïde de gauche. C9, petites cellules sphériques du type II, dans la région protocérébrale; M£, masse de substance ponctuée, fine et homogène, ou masse médullaire terminale; Mi, masse médullaire interne; Me, masse médullaire externe; Mc, masse ganglionnaire commissurale ; Fpd, faisceau pyramidal direct; Com, commissure transverse sus-œæsophagienne; Fa, Faisceau ascendant antérieur du nerf olfactif; Lv, lobe cérébro-viscéral ; Ccv, connectif cérébro-viscéral; Lp, lobe cérébro-pédieux ; Ccp, connectif cérébro- pédieux. les coupes de la figure 3. Ces coupes dont les cylindraxes peuvent être reconnus par le fait même de la coloration sans qu'ils soient en rapport de continuité absolue avec les cellules, montrent : 1° que le passage des prolongements cellulaires p d se fait directement dans les nerfs G& et Br; 2 que les cylindraxes p d n’ont pas un trajet rectiligne. Ils décrivent une anse dans l'épaisseur du ganglion avant de se rendre dans les nerfs correspondants. Ces coupes ont éié instructives pour nous. La présence de ces anses a pu être constatée depuis dans tous les gan- glions des centres nerveux des Gastéropodes, à la condition d'orienter les coupes dans le sens de {eur longueur ou de faire des coloralions intenses à l'hématoxyline. Dans la plupart des sections, les anses dont le trajet soit it Sp STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX DES GASTÉROPODES 161 varie avec la situation de la cellule d’origine (fig. 2, mc-f a) sont coupées à différents niveaux et l’on ne peut plus trouver la continuité qui existe Fi6. 3. — Coupes sériées, pratiquées à travers les ganglions viscéraux postérieurs de l’Aphysie (Aphysia punctata). Ccv, connectif cérébro-viscéral; Cv, cellules volumineuses, envoyant leurs pro- longements pd dans le nerf G; C'v', cellules de même ordre envoyant leurs prolon- gements Pd, dans le nerf Br; Np, n'p', nerfs péricardiaques ; R, nerf rectal cons- titué par des fibres nerveuses fines; G, nerf génital recevant directement les gros cylindraxes des cellules Cv; Br, nerf branchial, présentant à l’origine une moitié interne à gros cylindraxes comme le nerf G et une moitié externe à fibres nerveuses fines comme le nerf R. avec la cellule-mère au moyen des colorations carminées ordinaires. La figure 2 montre dans le cerveau de l’Aelix un faisceau pyramidal jp d 162 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE qui descend de la masse ganglionnaire commissurale pour se rendre aux ganglions pédieux en décrivant une courbe remarquable. L'origine directe des nerfs peut être masquée par la névroglie, par les collatérales et les terminales des cylindraxes, mais nous pensons que c’est en grande partie l'existence de ces anses qui a donné lieu à toutes les contradictions dont nous avons parlé plus haut. Pour savoir comment se comportent les cylindraxes centripètes chez Fic. 4. — Coupe oblique superficielle, pratiquée dans la région postéro-externe du cerveau de l’Arion rufus L. Cg. petites cellules sphériques de la région protocérébrale ou cellules du type ll; Fa, faisceau antérieur du nerf olfactif; Fp, faisceau postérieur du même nerf; Ty, terminaison en Y du nerf de l’otocyste; Not, nerf de l'otocyste; Ccv, connectif cérébro-viscéral; Ccp, connectif cérébro-pédieux. les Gastéropodes, nous avons étudié parmi les nerfs de la sensibilité spéciale le nerf de l’otocyste, les nerfs optique et olfactif n'étant pas favorables à cette étude à cause de leurs connexions intimes. Ce dernier présente, en outre, deux faisceaux ascendants centrifuges (fa-fp., fig. 4), partant du lobe cérébro-viscéral comme si (de même qu'il y a chez les Crustacés des yeux sessiles et des yeux pédonculés) le véritable lobule olfactif était porté à l'extrémité du nerf. La figure 4 reproduit une coupe du nerf de l’otocyste dont l'orientation est particulièrement heureuse. On voit les quelques cylindraxes dont se compose le nerf se terminer en Y dans une trame fine de substance ponc- tuée sans contracter aucune union directe avec les cellules voisines (1). (1) Von Lenhôssek a décrit une bifurcation en Y pour les fibres centripètes du Lombric (Ursprung, Verlauf und Endigung der sensibeln Nervenfasern bei Lumbricus. Archiv für microscopische Anatomie, 39, 1892). STRUCTURE DU SYSTÈME NERVEUX DES GASTÉROPODES 163 Le schéma du réflexe nerveux dans lequel on suppose l'existence d’une fibre centripète se rendant à une cellule sensitive qui est à son tour en communication avec une cellule motrice pourvue d’un cylindraxe centri- fuge n’est done pas exact. Dans le cas actuel, il faut supprimer la cellule sensitive à la place indiquée et la reporter à l’origine du cylindraxe centripète, c'est-à-dire dans la vésicule auditive elle-même. D'après ce qui précède, on peut dire que la substance ponctuée de Leydig n’est en réalité qu’une trame fibrillaire ayant pour substratum le tissu de névroglie. Le terme de substance ponctuée n'a pas de raison d'être puisqu'il s’agit d'un entrelacement de fibrilles protoplasmiques. La : trame fibrillaire épaisse des ganglions viscéraux et pédieux est constituée par les prolongements centrifuges des cellules ganglionnaires, par les col- latérales de ces prolongements quand ils en présentent et par les termi- nales des cylindraxes. Comme les prolongements ont une épaisseur variable avec le volume des cellules qui leur donnent naissance et que les cellules dans les centres sous-œæsophagiens sont grandes, moyennes et petites, comme d’un autre côté les collatérales ont un diamètre moindre que le prolongement d’origine, il en résulte que le fouillis fibrillaire pro- duit par ces divers éléments est très hétérogène et peut se présenter avec un aspect différent avec chaque nouvelle mise au point. Les trames fibrillaires des régions sensorielles (fig. 2. mt, mi, me) (région protocérébrale et ganglions olfaelifs) frappent au contraire par leur homogénéité et par leur finesse extrême. Les histologistes qui les ont étudiées chez les Arthropodes les ont trouvées si différenciées qu'ils ont créé pour elles des noms spéciaux (masses médullaires). Leur homogénéité et leur finesse peuvent s'expliquer de la manière suivante : 1° Les fibrilles qui entrent dans leur constitution sont d’une finesse extrême ; leur épais- seur est proportionnelle, en effet, à celle de la couche protoplasmique qui leur donne naissance, et celle-ci est, comme on sait, extrêmement mince (cellules du type IT, cg. fig., 2 et 4). 2? Toutes les cellules du type IT offrant la même taille, les fibrilles sont aussi forcément semblables. Il y a bien des fibres provenant des cellules ganglionnaires qui s’y rendent, mais elles sont également fines, parce que, à ce niveau, elles sont réduites à leurs divisions ultimes comme cela a lieu, par exemple, d’une façon très nelte pour les cylindraxes ascen- dants des nerfs tentaculaires avant leur épanouissement dans les gan- glions correspondants. Cette explication est générale. Elle peut s'étendre aux autres animaux et à l'homme lui-même. Les trames de la rétine adjacentes aux petites cellules granuleuses seront plus fines que celles qui seront formées par les grosses cellules nerveuses, en quelque région qu'on les observe. ACTION DE L'ACIDE LACTIQUE SUR LE CHIMISME STOMACAL PAR MM. À. GILBERT et $. À. DOMINICI Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 16 décembre 1893. Nous avons étudié chez le chien l’action de l'acide lactique sur le chi- misme stomacal {1). Nos recherches comprennent trois séries d'expériences. La première série a élé poursuivie chez un chien auquel nous avions pratiqué une fistule gastrique. Dans chaque expérience, nous avons fait ingérer à cet animal, à jeun depuis vingt-quatre heures, 200 grammes de viande bouillie; puis aussitôt, par la voie fistulaire, nous avons intro- duit dans l’estomac 200 centimètres cubes d’une solution d’acide lactique, dont le titre acide, Gps € en acide chlorhydrique, a été de 6 puis de 3 p. 4000 (2). Consécutivement à l'emploi de la solution lei c'est-à-dire à 6 p. 1000, l’analyse du contenu stomacal, pratiquée selon la méthode de MM. Hayem et Winter, nous a donné les chiffres suivants : Après un quart d'heure : == 107088 D = — 0.345 Et==#0;088 HEE0 Ge —h 00 0 Après une demi-heure : D 07161: C0 011 A #0 2506 = 0180 HERO Ne ON 0.011 (1) Voir, sur le même sujet : A. Gilbert, in G. Hayem. Lecons de thérapeu- tique, t. IV. La médication antidyspeptique, page 413. (2) Le titre acide 3 a été obtenu par l’addition à un litre d’eau de 10 grammes d'acide lactique, et le titre 6 par l'addition de 20 grammes. BIOLOGIE. MÉMOIRES. — 92 SÉRIE, Te Vo 15 166 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Après trois quarts d’heure : M0 00 GC — 0.00% A0 2207) F2 041102 0 = 12,25 0.00% Dans chacune de ces trois expériences le liquide retiré de l’estomacs’est montré particulièrement abondant. Consécutivement à l'emploi de la solution faible d'acide lactique, nous avons obtenu ces autres chiffres : Après un quart d'heure : ne 0200 CO = 0.008 AD ()120 F1 0;087 F0 moe 18.0 0.908 Après une demi-heure : T0 212 CO = 0.043 — 0.184 F=—=107199 == 107080 CD == 0.00 0.073 Après trois quar(s d'heure : : He ES C —= 0.142 — 9 309 Er 010 H:=—= 0 Cu 2 17 0.142 Après une heure : T — 0.299 C — 0.163 A = 0,315 FE —="0:13# He 0 | Ce) 0.165 Les chiffres ci-dessus doivent être comparés aux suivants qui expriment le chimisme stomacal de l’animal en expérience consécutivement à l’in- gestion de 200 grammes de viande bouillie immédiatement suivie de l'in- troduction dans l'estomac de 200 grammes d’eau distillée. Extraction après un quart d'heure : 20160 HR 0 AU— 10143 NOIRE C0 036 CUS ME 0.036 Après une demi-heure : | "0226? He 07014 AN— 10 MO PROMIS C0 MAO CE 41 (O1 ACTION DE L'ACIDE LACTIQUE SUR LE CHIMISME STOMACAL 167 Après trois quarts d'heure : T = 0.401 H— "0:02? A 07292 F — 0,109 C — 0.270 a —1 0.292 Après une heure : T — 0.401 0 — 0,369 = 0116 CG — 0.285 ai— 1728 0.285 La deuxième série d'expériences a été poursuivie chez un chien auquel nous faisions ingérer 200 grammes de viande bouillie et dans l'estomac duquel nous portions aussitôt 400 grammes d’une solution d’acide lac- tique au moyen d’une sonde, qui, munie d’un appareil aspirateur, était également utilisée pour l'extraction du contenu stomacal. Nous avons employé dans cette série une solution du titre acide de 6 p. 1000 et une solution du titre de 1.5 p. 1000. La solution forte nous a donné les chiffres suivants, le liquide extrait de l’estomac étant, notaminent pendant la première heure, très abon- dant : Après un quart d'heure : = 02080 C0; 018 À — 0.410 F — 0.062 H — 0 CON 0.018 Après une demi-heure : D — 04151 C — 0.040 A — 0.460 F — 0.091 H4=—=°0 = 141:0 0 040 Après une heure : "0190 C — 0.073 A — 0.460 = (0) 17 H=°0 QG == 60 0.073 Après une heure et quart : MAO? GC = 0.036 A — 0.432 F — 0.146 H #0 CE 0) 0.056 Après une heure et demie : 1==07190 C0; 033 A — 0.405 F1 —0:457 H = 0 ei 20 168 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Après deux heures : DESN0E2506 C — 0.085 A — 0.405 0 HE 20 CN = 7 0,085 L'emploi de la solution faible nous a donné ces autres chiffres. Après un quart d'heure : T + 0106 0210 0 A — 0.447 F— 0.07 . Le CE E . Æ © Après une demi-heure : DDASS 07058 A — 0.202 F — 0.080 =: 6, —= 9.56 0.073 Après une heure : VOIE Ce 0:22) AM A0 50 Ee=—=202087 He 210 A — 117200 0.227 Au delà d’une heure il était impossible d'extraire de l'estomac une quantité suffisante de liquide pour l'analyse. Aux chiffres ci-dessus doivent être comparés les ci-dessous obtenus avec l’eau simple, administrée comme les solutions lactiques en même temps que la viande à la dose de 400 grammes. Après un quart d'heure : 1 =—="0:080 C0 029 AN AUA0E0E —10 091 H=S0 = il,5 0.029 Après une demi-heure : M0 MS? Gr D 107 — 0.134 ES 102 080 HO = 42 0.102 Après une heure : D —= 0:365 C = 0,234 A — 0.304 = °0"181 H=="0 CN 20) 0.234 Après une heure, l'estomac ne renfermait plus une quantité de liquide suffisante pour l'analyse. FASO ACTION DE L'ACIDE LACTIQUE SUR LE CHIMISME STOMACAL 169 Ces deux séries d'expériences montrent que l'acide lactique possède sur le début de la digestion gastrique une action marquée. Il entrave cette digestion, ainsi que le prouve l’abaissement des chiffres qu expriment la richesse du contenu stomacal en chlore total et en acide chlorhydrique libre ou combiné. Ses effets sont d'autant plus sensibles que la dose en est plus élevée et, lorsque celle-ci est notable, il peut aller jusqu’à annihiler presque Sep Èeraent le travail chimique de l'estomac. L'acide lactique élève initialement le taux acide de la masse stoma- cale; cela se conçoit aisément. Très marquée, lorsque l'acide a été admi- nistré à haute dose, l’hyperacidité baisse ensuite peu à peu. Vraisembla- blement l'acide lactique suscite dans la muqueuse stomacale un courant exosmotique qui a pour conséquence un afflux de liquide dans la cavité gastrique, la dilution de son contenu et aussi la diminution de son aci- dité. Cette hypothèse, du moins, est rendue plausible par la présence dans l’estomac d’une grande quantité de liquide consécutivement à l’em- ploi de l'acide lactique. Il restait à déterminer la destinée du bol alimentaire dans les condi- tions expérimentales où nous nous étions placés. Était-il évacué par l’estomac dans l'intestin, non digéré, ou bien finissait-il par subir les modifications chimiques normales, en d’autres termes lPacide lactique occasionnait-il l’indigestion gastrique ou bien retardait-il seulement le processus gastrique physiologique? À ces questions répond notre troi- sième série d'expériences. Cette série a été faite chez un animal dont le chimisme après l’inges- tion de 200 grammes de viande bouillie et de 400 centimètres cubes d’eau aistillée, était exprimée par les chiffres suivants : Après une demi-heure : 010 HÙ—=°0 — 0.086 F7 07055 CG — 0.073 = oi 0.073 Après une heure : T — 0.255 H — 0 A — 0.150 F — 0.080 CAO, CRDP ES 0.175 Nous avons fait ingérer à cet animal 200 grammes de viande bouillie, et nous avons introduit dans son estomac 400 centimètres cubes d’une solu- tion d’acide lactique du titre acide 6. Au lieu de procéder comme précé- demment, à savoir, extraire la totalité du contenu gastrique au bout d’un laps de temps déterminé, nous en avons, d'heure en heure, de la pre- 170 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE mière heure à la quatrième, retiré une partie minime, cependant suffi- sante pour l'analyse. Celle-ci nous a donné les chiffres suivants : Au bout d’une heure : T — 0.109 FE — 0.080 Après deux heures : 0.234 Bi 00147 Après trois heures : 40590 Re ONTES Après quatre heures : I (0), Hit = 0245 H C C Q Il | (M [nl D] (æ») © 0.331 11.4. © .368 Co => ES [æ) ES [æ] OT 42 ©% = © es ! © CE En procédant de même, la première extraction can faite au bout dé deux heures, nous avons obtenu ces autres chiffres : Après deux heures : NA 0 01» Fi 0407 Après trois heures : 110202 EH 07 182 Après quatre heures : 1e 0280 D DATE C Q Q = IL Il Enfin, en pratiquant la première avons eu ces derniers chiffres : T — 0.409 F — 0.102 H C I 0.205 extraclion après quatre heures À œ Il | 0.418 1.36 Après cinq heures, l'estomac ne contenait plus de chyme. , nous TS ET M D ACTION DE L'ACIDE LACTIQUE SUR LE CHIMISME STOMACAL 171 Ces résultats montrent avec une grande netteté que l’acide lactique à haute dose (8 grammes) n’occasionne pas l’indigestion gastrique. Il entrave le travail chimique de l'estomac au point de l’annihiler tout d’abord. Il lui permet ensuite de s’effectuer peu à peu, si bien qu'au bout de la troisième heure il atteint à peu près le point où le conduit en une heure le processus physiologique. Ultérieurement, il se parachève entiè- rement et l’intestin recoit de l'estomac, comme à l’état normal, le bol ali- mentaire sous la forme de chyme (1). En un mot, l'administration de l’acide lactique permet de réaliser une véritable bradypepsie et l'on concoit que la thérapeutique puisse ration- nellement l'utiliser dans certains cas pathologiques. 4 (1) Récemment, M. Winter a montré que la phase active de la digestion normale comprend deux périodes : 19 Une période préparatoire assez courte, pendant laquelle les divers élé- ments dissous du contenu gastrique, tendent à se mettre entre eux dans un état d'équilibre dont toutes les conditions ne sont pas encore bien détermi- nées. Pendant toute cette période préparatoire le rapport T/F reste petit (de 1 à 4.70; le plus souvent 1.25 normal) et constant. 20 Une période qui fait suite à la précédente et pendant laquelle s’accom- plit la dissolution des matières alimentaires. Dans cette seconde période le rapport T/F croît jusqu'à une limite supérieure qui, normalement, oscille entre 3 et 3.6. En appliquant ces données sur le rapport T/F aux expériences ci-dessus, on voit que l’aide lactique prolonge démesurément la première période, la période préparatoire et d'autant plus que la quantité d'acide ingérée est plus considérable. (Travail du Laboratoire de Thérapeutique de lu Faculté.) Se : 1* Sa REES . Dee Lt CONTRIBUTION A L'ÉTUDE L'ACTION IMMÉDIATE DES BAINS FROIDS LES TEMPÉRATURES FÉBRILES M. C. SIGALAS (Mémoire lu à la Société de biologie dans la séance du 16 décembre 1893.) I. — Au cours de recherches sur l’action des bains froids considérés au point de vue des abaissements de température et des pertes de chaleur qu'ils infligent à l'organisme, nous avons eu l’occasion d’administrer un certain nombre de bains à des sujets fébricitants et de relever sur eux les températures rectale et axillaire, avant, pendant et après l'application de l’eau froide (1). Ce sont les résultats de ces déterminations, avec les tracés thermomé- triques qu'elles nous ont fournis, que nous.avons l'honneur de soumettre à la Société. Technique. — On sait que tous les partisans de la méthode des bains froids n’adoptent pas dans toute sa rigueur la formule de Brand : Donner un bain de 20-degrés et de 15 minutes de durée toutes les jois que la tempé- rature du malade dépasse 39 degrés. « On ne donne plus invariablement les ‘bains à 20 degrés, écrit le professeur Lépine ;.… à l'Hôtel-Dieu de Lyon, la moyenne de la température des bains est plutôt 24 degrés que 20, peut-être même 925 degrés. On débute souvent à 25 ou 26 degrés et . même 28, Ce n’est pas là un bain {iède, mais ce n’est pas un bain froid intolérable, tant s’en faut » (2). Cette température voisine de 25 degrés est aussi celle qu'a adoptée M. le professeur Arnozan : le baiïn le plus froid, enseigne ce clinicien, même dans des cas à température très (4) Nos expériences ont été faites à l'hôpital Saint-André de Bordeaux, dans le service de M. le professeur Arnozan, et avec l’aide obligeante de son interne, M. Lafarelle. (2) Lépine. Traitement de la fièvre typhoïde par le bain froid, in Semaine médicale, 24 août 1892. BIOLOGIE. MÉMOIRES. — 9C SÉRIE, %. V. 16 174 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE élevée, n’est pas toujours le meilleur, et c’est l'eau de 95 à 30 degrés qui lui a fourni les plus heureux résultats (1). Ceci dit, voici comment nous procédions : les deux températures, rectale et axillaire, étaient d’abord prises sur le malade couché dans son lit, au moyen de thermomètres à petit réservoir exactement vérifiés. Le sujet nu était ensuite introduit, avec loutes les précautions voulues, dans le bain à 25 degrés ou à une température voisine de 25 degrés; la tête seule était laissée hors de l’eau et des affusions étaient constamment faites sur le crâne et sur la face avec une eau plus froide que celle de la baignoire. Pendant toule la durée du bain, le thermomètre à maxima élait maintenu dans le rectum, dans le but de déterminer s’il se produi- sait, ou non, une élévation de la température centrale pendant l’immer- sion. Lorsque le malade accusait une sensation de froid très vif ou qu'on le voyait /rissonner fortement, on le retirait suivant les cas ou on lui disait de se retirer du bain. Il était ensuite légèrement essuyé puis recouvert d’une couverture de laine. Deux thermomètres étaient aussilôt introduits, l’un dans le rectum, à la place du thermomètre à maxima, l’autre dans le creux axillaire, et on lisait les deux températures, toutes les cinq minutes, pendant des temps qui ont varié de une heure à deux heures et plus après la sortie du bain (2). Il nous a été permis d'étudier ainsi sur quatre malades soumis au trai- tement par les bains froids — dans dix-huit expériences complètes — l'influence de la réfrigération sur la température fébrile : 1° pendant la durée de l'immersion ; 2° après la sortie du bain. Voici les résultats de celte étude : Oss, I (résumée). — S... J..., dix-huit ans et demi, peintre, entre à l'hôpital Saint-André, salle 20, lit n° 9, dans le service de M. le professeur Arnozan. Température axillaire, 390,2. Le malade insiste sur les violents maux de tête et les épitasxis qu'il a eus. Malgré l'absence de diarrhée et de taches rosées leuticulaires bien nettes, on porte le diagnostic de fiévre typhoïde et on décide de baigner le malade. La marche de la maladie vérifie ce diagnostic, A partir du 1% juin, les symptômes s’amendent, la température descend et le malade guérit sans complications. Il sort de l'hôpital le 21 juin. On trouvera plus loin, résumées dans un tableau, les déterminations thermométriques que nous avons faites sur ce malade dans huit expé- (1) Arnozan. Cours de thérapeutique, 1892-1893. Notes manuscrites. (2) Nous n'avons pu employer qué très rarement sur les sujets fébricitants, un thermomètre inscripteur de Richard, que nous avons fait construire pour obtenir directement la courbe des variations de la température centrale, à cause de la douleur occasionnée chez les malades par l'introduction de l’am- poule rectale, trop volumineuse. ACTION IMMÉDIATE DES BAINS FROIDS SUR LES TEMPÉRATURES FÉBRILES 179 riences. Nous nous bornons à donner ici un des tracés obtenus, celui qui correspond au bain n° 6. La ligne pleine représente les températures axillaires; la courbe des températures reclales est fisgurée par la ligne pointillée : 40° | 39 38: 31° 20 30 EU) Fic. 1. — Courbes des températures axillaires et rectales. Os. I. Exp. 6. Début du bain : #4. h. 20. — Durée = 14 minutes. (Les températures sont portées en ordonnées, les temps en abscisses.) Ces deux courbes, et celles que l’on peut construire avec les chiffres du tableau relatifs aux huit premières expériences, permettent de définir ainsi l'effet thermique produit par l’eau froide : pendant l'immersion, les deux températures, axillaire et rectale, subissent un abaissement. Get abaissement est, comme on doit s’y altendre, beaucoup plus marqué pour la température axillaire que pour la température rectale. Dans les moments qui suivent l'immersion, la température rectale continue à baisser, tandis que la température axillaire remonte. Après un temps variable, lorsque la différence entre les deux températures est redevenue voisine de celle du début, elles prennent toutes les deux une marche ascendante, pour atteindre les valeurs primitives. La lecture du thermo- mètre rectal à maxima, effectuée à la sortie du baïn, n’a jamais indiqué une ascension de la température centrale pendant l'immersion. Oss. IL (résumée). — G. U..., vingt-sept ans, entre à l'hôpital Saint-André dans le service de M. le professeur Arnozan, le 15 juin 1893, avec le diagnostic de dothiénentérie ; température axillaire, 39,3. Malgré les doutes sur l'exac- titude du diagnostic provoqués par l'absence de diarrhée,. de taches 176 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE rosées.…, elc..., et la présence de râles sous-crépitants très nombreux dans toute l'étendue du poumon gauche, on soumet le malade à la balnéation. Au bout de deux jours, il se produit une défervescence brusque ; les râles pulmo- naires vont s’affaiblissant et la convalescence s'établit. Diagnostic rétrospeclif probable : broncho-pneumonie. Les expériences 9 et 10 du tableau se rapportent à ce malade. Voici les courbes des tempéralures axillaire et rectale fournies par le neuvième bain. : Fie. 2. Os. Il. Æzp. 9. Début du bain : 2 h. 45. — Durée — 15 minutes. On voit immédiatement que l’allure de ces deux courbes thermiques est la même que dans le cas qui précède. Les différences portent beaucoup plus sur la quantité que sur la qualité des phénomènes observés. Pas d'élévation de la température centrale pendant l'immersion. Signalons l’abaissement relativement considérable de la température centrale provoqué chez notre pneumonique par des bains à température assez élevée : 27°,5 à 30 degrés. Os. IIL (résumée). — L. A..., trente-trois ans, entre à l’hôpital Saint-André, service de M. le professeur Arnozan, le 20 juin 1893. Son interrogatoire est impossible à cause du délire dans lequel il est plongé. Température axillaire : 390,4, Quelques taches sans siguification précise à la partie inférieure gauche de l'abdomen. Diarrhée très abondante. Abdomen douloureux. Du côté de l'appareil pulmonaire, submatité des deux côtés. Murmure vésiculaire très diminué, respiration rude et soufflante. Aux deux bases, congestion avec prédominance de ràles fins. On incline vers le diagnostic de diothiénentérie et on décide d'employer les bains froids. Aucune amélioration; le malade ACTION IMMÉDIATE DES BAINS FROÏDS SUR LES TEMPÉRATURES FÉBRILES Â77 meurt le huitième jour. A l’autopsie, pas de lésions intestinales ; les poumons sont farcis de tubercules crus. Diagnostic : granulie aiguë. Les expériences 11, 12,13 et 14 ont été faites sur ce sujet. Le tracé ci-dessous est celui du onzième bain. LOPION EDS TASER ON 20020 NS ON h Fic. 3. Os. IT. Exp. 11. Début du bain : 10 h. 20. — Durée = 13 minutes. Les remarques que nous avons faites au sujet de l'observation I, appli- cables aux courbes prises sur le deuxième malade, sont aussi vraies pour les expériences 11 et 12. Mais nous devons faire une mention spéciale des bains n°° 13 et 14 (voir tableau), les seuls dans lesquels nous ayons observé une élévation de la température rectale pendant l'immersion. Dans l'expérience 13, celte ascension a été de 00,12; dans l'expérience 14, de 00,15. Ogs. IV (résumée). — A..., Ch. dix-sept ans, tourneur, entre à l'hôpital Saint-André, dans le service de M. le professeur Arnozan, le 3 juillet 1893. Facies très pâle, torpeur très grande. Depuis cinq ou six jours malaise général avec maux de tête et fièvre intense. Pas d’épistaxis. Diarrhée très abondante. Température : 390,6. Langue rôtie. Douleurs dans la fosse iliaque droite. Taches rosées nombreuses et très nettes. Diagnostic : fièvre typhoïde. On 178 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE baigne le malade à partir du 3 juillet. Dès le 20 juillet, la température baisse à 36°,9 — 370,5. On peut considérer le malade comme guéri. Ce typhique nous a donné les résultats des expériences 15, 16, 17 et 18. La figure 4 représente les courbes des températures axillaire et rectale prises dans l'expérience 16. Fi. X. Ons. IV. Exp. 16. Début du bain : # h. 20. — Durée — 15 minutes. Ici encore, absence constante d’élévation de la température centrale pendent l'immersion. Quant aux tracés thermométriques, leur interpré- tation entraîne les mêmes remarques que ceux des trois malades précé- dents relativement à la marche des températures centrale et axillaire pendant et après le bain. Le tableau qui suit résume toutes nos déterminations. II. — Si l'on fait les mêmes mesures thermométriques sur les sujets sains, les résultats auxquels on est conduit et qui corroborent ceux auxquels est arrivé le D' Aubert (de Lyon), par une méthode semblable (1), sont différents de ceux observés sur les sujets fébricitants : 1° au point de vue de la marche de la température rectale pendant l’immersion; l’ascen- sion est ici la règle; ® au point de vue de la marche de cette tempéra- ture après la sortie du bain. La température axillaire, au contraire, paraît êlre modifiée semblable- ment dans sa marche chez les sujets sains et chez les sujels fébricitants. Nous avons cru inutile de faire un grand nombre d'expériences, (4) Aubert, Physiologie des bains froids. Lyon médical, 1883. ON. ‘UOSTIQn) "AUOWnau TE "oproydhy auaa ‘uosrian NOSIVNINUAL LA IfRUtAY UE) ait SE) on 3S @’ Q € Sos] 800 mS à LS = ; TS | 600 RSA D = S <(68'00 d — — © — *[ NOILVAUHSA() 4Q 4IQV'IVN AUOILV UAANAL NANASSIVIV L | A REPAS 9°66 &°66 76 f GC 66 F6 9 66 9°66 S'6E cm mm LT ss. 6epe e°6 66 T6 C'6E '66 16€ ÿ 66 (68 ( 66 6 SE © 68 20°6€ T°6€ L'66 L'8E D°8E L°8E GT°8E D'SE GS C'SE SE L'SE « NE 6°LE 09°LE L'Ee 6€ G°6E 16€ 176€ E°6E Ca°6E G'6€ &'GE 2 GE T'6E C'GC GE E°GE T°6E T'6E « 66 6°8€ S'8E L'SE 98€ G'8E F'SE E°86 c'SE ST'SE GT'8E T'8E « 8€ 166 66 S'GE TIGE g'66 G'GE T'68 T'GE T'6E LOGE GO'GE T'6E G'6€ G°6E GES LOSC NOPS ENT EME :S6 GL8E DUSEL ÈS CSC GULÉ RMS NLENRUIE LAN one LCQ «€ « «C « « Lte «€ « «€ 6°68 °68 a'6€ T'68 6e «68 U 68 © 6 € 66 LO°6E V'6C G'68 7°66 G'6€ 1°6€ « 66 6°8€ 8°8€ L' SE 9°8E 98€ G'8E P'SE °8E T'SE TUE G'LE S'LE 'LE S'8E L'8E L'SE L'8E G9/8€ L'8E L'S6 EL 86 8 86 G°SE « 66 T'6E ST'GE J°6€ H'86 ETS CC'88 G'8€ GT'SE D'8E « 8e G'LE 6'LE G'LE B'LE L'LE 9J'LE T°LE 9°80 S'8E FIS6 EISE c'86 V'8E CO'SE CE 6'LE S'LE S'LE CL'LE SL'LE 6'LE G°86 PISE 8186 GS J'8E © 8e GILE S8'LE L'LE COLE S'LE E'Le G'LE ST'LE GO'SE 986 CIS GY'BE r'8e €'8e g'8e Se m'8e fc 86 E'Se Tee G'8c G'SE 786 BIS GIE G'86 QT:88 € 86 LE G8'LE S'LE L'LE GO'LE 9'LE T'6E V 66 L'GE 2 86 S°86 ( 86 6 LE L'86 G 86 T°86 . 6 € 6 86 & GY°6E Y°6€ 6 GY°86 7 86 7 86 GE 86 LE G8S'LE S°LE BUREAË G9°66 9/66 GU66 GC OP GE OC CODE Et 8€ 69° (a 6 6:86 8:86 SL°86 L°86 L°86 L'86 9° 86 Y'S6 GE 86 G'86 9° Se GE 6°68 Cc'6e 6£ C8°SE ss; 8 ss GG ep «pe « G 6€ ) Ÿ 978€ je 86 SC'SE SG 86 S 6 9'LE 0° LE GE GERGTAG E DE RG 66 S° 66 a ; 66 686 878€ SE ILSENINS EURE CAGE SE MENSCRNIGESE 86 MSG MSG 626 GRIGNGSELE Ç 66 66 % GE SE 66 6 66 6 66 6°66 SG°6€ ec* G a Ge SEE CAUSE TROUS CET ie SGUSE GORE LE ML GECEE GC LE c LE G'LE GC 66 GT 66 ST 66 FT 66 6e 1°66 G6 8€ 686 G'86 6:86 8 86 9°86 86 LE SC 6€ ou 66 86 & 28e SJ US 6-66 7:66 67266 G°66 L'°86 8€ “ee JEUX QUE 616€ CAS CE « Le 166 FRS 6766 6 66 7 66 S CRE GES ETS ECS CENE GC 86 6 86 6 86 6 86 Se LE FoLC LE © LE 66 S°68 9°86 G°'86 © 86 6 LE 9'S6 L'8SE 8'86 686 Ce CURE SES 66 me GG 66 LE pLe SRG EE GE 86 7 86 se 9°86 SMDG 9° JCROMICECEIS 1:66 « € 66 $0°66 CHOC CNOMACERCANE 6: 6 G° ç 6 66 (cunaydhiosur aupowuowusay 27 2200 ap] 299 D : _ G'66 S°LE C'6E C le G°6€ 8° LE 6 68 Y'LE 668 9°LE 766 8 JE ER 9768 698 Y°66 T'98 « « L'66 GLEN 9R06 9°66 9°66 JO GRACE 9°6£ GO 8€ LUS L'86 6° LE 6 86 1206 8°8€ 8°9€ GG se 9°66 8° LS 9°L6 7 86 9 86 CALE CE 966 L'66 G'LE 8°96 € GE G0°66 LG Gr*96 L'66 S°66 LE G°96 L'86 L'8£ € 96 6€ T 68 T°6$8 LC («€ ‘4 "V 4 dis de Forel, que je désignerai:sous le nom de faisceau lenticu- laire de Forel, et l’anse du noyau lenticulaire. Les fibres verticales se rendent, les unes dans la calotte du pédoncule — radiations de la .calotte d'Edinger, — les autres au noyau rouge, ainsi que j'ai pu le constater dans un cas. de lésion corticale ancienne, les autres enfin, et ce sont de beau- coup les plus nombreuses, descendent et constituent le pied du pédon- cule cérébral. Quant aux fibres du segment rétro-lenticulaire (Girl), elles {1} Cette division de la capsule interne en région thalamique et sous- thalamique, ainsi que la division de son segment postérieur en segment pos- térieur proprement dit et en segment rétro-lenticulaire sont Cmpranteess à mon Traité d'anatomie des centres ner veux, actuellement sous presse. 196 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE se rendent au pulvinar, au corps genouillé externe et au tubercule quadrijumeau antérieur, noyaux de substance grise qui constituent les centres d'origine des fibres visuelles. Dans cette même région sous- oplique enfin, on voit apparaître un faisceau horizontal, appartenant à la partie antérieure de ce segment rétro-lenticulaire, et venant se Jeter dans la partie postérieure du segment postérieur de la capsule. Ce fais- ceau, qui constitue le faisceau dit « de Türck », prend peu à peu en descendant une direction verticale, et correspond au cinquième externe environ du pied du pédoncule. T'els sont les renseignements que nous fournit à l’état normal, l'étude des coupes microscopiques sériées pratiquées dans le sens horizontal. Sur des coupes vertico-transversales microscopiques et sériées de tout un hémisphère, il est facile en outre de se rendre compte des particularités de texture des régions thalamique et sous-thalamique de la capsule, et de voir entr’autres, que le faisceau de Türck ne fait pas partie de la capsule interne, car il passe au-dessous du noyau lenticulaire, et va se jeter directement dans la partie supéro-externe du pied du pédoneule. J'arrive maintenant à l'exposé des résultats que m’a fournis, sur la cons- titution de la capsule interne et du pied du pédoncule, l'étude des dégé- nérescences produites par des lésions corlicales, résultats que je résume- rai sous forme de conclusions. 1° L'étage inférieur du pédoncule, est formé de fibres qui toutes viennent directement de la corticalité et sans interruption au niveau des ganglions centraux. — Cette proposition est basée sur un cas de dégénérescence totale du pied du pédoncule d’origine corticale, observé dans un cas d'hé- miplégie droite avec aphasie totale, remontant à onze ans. Toute la face externe de l'hémisphère gauche, ainsi que la moitié anté- rieure de la circonvolution frontale interne et le lobe orbitaire étaient transformés en une plaque jaune; l'hémisphère était très réduit de volume. Sur cet hémisphère débité en coupes sérites après durcissement, je pus constater : 1° une dégénérescence totale des fibres verticales du segment postérieur de la capsule interne dans les régions thalamique et sous-thalamique, avec intégrité des fibres horizontales dans les mêmes régions (1;; une dégénérescence totale du segment antérieur et du seg- ment rétro-lenticulaire de la capsule interne; une dégénérescence lotale du pied du pédoncule, dont il ne restait pas une seule fibre saine; une dégénérescence d’un secteur du noyau rouge; une atrophie secondaire lrès marquée de la couche optique ainsi que des corps genouillés externe et interne ; l’intégrilé du ruban de Reil; une dégénérescence secondaire bul- bo-protubérantielle avec alrophie totale de la pyramide; une dégénéres- (4) Cette intégrité des fibres horizontales est constante dans tous les cas de dégénérescence secondaire de la capsule, à la suite de lésions corticales. TETE TRAJET INTRA-CÉRÉBRAL DES FIBRES DE L'ÉTAGE INFÉRIEUR 197 cence secondaire médullaire, occupant le faisceau pyramidal croisé dans toute la hauteur, et le cordon de Türck jusqu’au niveau de la région lombaire. Ge cas qui, à ma connaissance, est le seul jusqu'ici connu, de dégéné- rescence totale du pied du pédoncule d’origine exclusivement corticale — car dans les faits de von Bechterew et de Rossolymo, les ganglions cen- traux et la capsule interne participaient à la lésion, — démontre donc, que les fibres qui constituent l'étage inférieur du pédoncule, viennent toutes el sans exception, directement de la corticalité. Mais comme la lésion corticale était ici extrêmement étendue, on ne pouvait se baser sur ce cas pour établir la topographie corticale exacte des fibres constiluant cet étage inférieur et, pour arriver à établir cette topo- graphie, j'ai étudié successivement, et toujours par la même méthode, des cas à lésion corticale limitée et dans lesquels cette dégénérescence faisait défaut, et d'autres à lésions corticales limitées également, et dans les- quels cette dégénérescence existait non plus totale, mais limitée à telle ou telle partie du pédoncule et de la capsule interne. Tout d’abord, pour ce qui concerne le lobe occipital, le cunéus, les lobules lingual et fusiforme, l'étude de quatre cas de lésions corticales limitées à ces régions, m'a montré que les lésions du lobe occipital, retentissent ni sur l'étage inférieur du pédoncule qui est toujours sain dans ces cas, ni sur le segment postérieur de la capsule interne; le segment rétro-lenticulaire est en effet seul altéré dans ces cas. Viallet, dans ses recherches sur les centres cérébraux de la vision, pratiquées sous ma direction, est arrivé aux mêmes résultats (1). La description des dégénérescences, dans les cinq cas d'hémianopsie étudiés dans cet important travail, montre qu'il faut établir une distinc- tion entre le lobe occipital et les lobes temporal et pariétal, au point de vue du trajet des fibres de projection émanées de ces différents territoires corticaux. Tant que la lésion est limitée au lobe occipital, ainsi que les trois premières observations de son travail en fournissent la preuve, — que l’on ait affaire à une atrophie partielle du cunéus (obs. I), à un ramollissement total de ce dernier (obs Il), à une destruction des lobes lingual et fus'forme et de la pointe occipitale (obs. INT), la dégénérescence de la capsule est toujours cantonnée — dans la région rétro-lenticulaire de cette dernière, elle se poursuit dans le pulvinar, le corps genouillé externe, le tubercule quadrijumeau antérieur, mais respecte absolument le pied du pédoncule. Il en est de même pour les lésions situées à la con- vexité du lobe occipital, jusqu’au pli courbe inclusivement. Par contre, dès que les altérations corticales empiètent sur les iobes temporal et pariétal, la topographie de la dégénérescence capsulaire (1) Vialet. Les centres cérébraux de la vision et l'appareil nerveux visuel intra- cérébral, avec 90 fig. Paris, 1893. 198 MÉMOIRES DE LA SOCIÈTE DE BIOLOGIE change, la zone dégénérée gagne le segment postérieur de la capsule interne, et se poursuit dans la région correspondante du pied du pédon- eule. C’est donc au niveau du lobe pariétal, que s'opère la division entre les fibres capsulaires proprement dites qui continuent leur trajet dans le pédoncule, et les fibres rétro-lenticulaires qui s'arrêtent dans les noyaux gris centraux. | | 2° Le faisceau interne du pédoncule, comprenant environ le cinquième de ce dernier, reçoit ses fibres de l’opercule rolandique el de la partie adjacente de l'opercule frontal. Cette proposition est basée sur l'examen en coupes sériées, de trois cas de lésions limitées à l’opercule frontal et rolandique. Dans deux de ces cas il s'agissait de porencéphalie acquise, empiétant de 1 centimètre environ sur la substance blanche sous-jacente; dans le troisième, d’une plaque jaune. Dans ces trois cas la lésion, très exactement limitée, — suriout dans les deux premiers où elle était taillée pour ainsi dire à l’emporte-pièce, — occupait le pied de la troisième frontale et l’extrémité tout à fait inférieure des frontale et pariétale ascendantes. Dans ces trois cas, on avait noté pendant la vie une paralysie du facial inférieur et de la langue du côté opposé à la lésion, ainsi que des troubles de la déglutition. Dans un de ces cas où la lésion siégeait à gauche, le malade était atteint depuis sept ans d'aphasie motrice, avec agraphie totale pour l'écriture spontanée et sous dictée, et conservation de la faculté de copier. Sur les coupes sériées de la capsule interne, on constatait dans ces trois cas l’existence d'une zone de dégénérescence occupant le genou de la capsule en entier, ainsi que la partie externe du cinquième antérieur de son segment postérienr. Le segment antérieur de la capsule était nor- mal ainsi que son segment rétro-lenticulaire. La zone dégénérée se limi- tait, en descendant, à la partie antérieure du segment postérieur de la capsule et, au niveau du pied du pédoncule, occupait le segment le plus interne de ce dernier, dans une étendue équivalant environ à son cinquième interne. La protubérance présentait des fibres dégénérées dans son seg- ment antérieur et les coupes du bulbe ne dénotaient pas d’une manière nette, l'existence de fibres dégénérées dans la pyramide correspondante, qui paraissait cependant très légèrement diminuée de volume, par rap- port à celle du côté sain. Il résulte donc des trois cas précédents, que le faisceau interne du pédon- cule tire son origine corlicale du pied de la troisième frontale, ainsi que de l’extrémité tout à fait inférieure des frontale et pariétale ascendantes, et que ce faisceau correspond au genou de la capsule interne dans la région thalamique de cette dernière. Ce faisceau interne, désigné aussi quelquefois sous le nom — de faisceau psychique ou intellectuel — n’est ni plus ni moins psychique ou intellectuel que les autres faisceaux du pédoncule. Il correspond en effet, non pas au segment antérieur de la cap- 4 d : 1 TRAJET INTRA-CÉRÉBRAL DES FIBRES DE L'ÉTAGE INFÉRIEUR 199 sule interne qui était sain dans ces trois cas, et qui relie l’écorce frontale à la couche optique — fibres cortico-thalamiques — mais bien au genou et à la partie antérieure —le cinquième environ — de son segment postérieur. Ce faisceau interne du pédoncule, n’est pas davantage constitué par l’anse du noyau lenticulaire ainsi que Huguenin, dont l'opinion a été admise par Brissaud, l’a avancé. Sur des coupes microscopiques sériées de pièces normales, on voit en effet que l’anse du noyau lenticulaire appartient, non au pied du pédoncule mais à l’étage supérieur ou calotte, dont elle occupe la partie antéro-interne. Le locus niger en effet, sépare l'anse len- ticulaire du pied du pédoncule. Dans les cas que je viens de rapporter l’anse du noyau lenticulaire était intacte, ainsi que l'anatomie normale le faisait du reste prévoir. 3° Le faisceau externe du pédoncule ou faisceau « de Türck», tire son origine de la partie moyenne du lobe temporal, et en particulier de l'écorce des deuxième et troisième circonvolulions temporales. Cette conclusion est basée sur l'examen en coupes sériées, de la cap- sule interne et du pédoncule, dans quatre cas de lésions anciennes — pla- ques jaunes, — limitées à la partie moyenne des circonvolutions tempo- rales et prédominant dans trois de ces cas, sur les deuxièmes et troisièmes circonvolutions de cette région. L'origine corticale du faisceau externe du pédoncule est encore très discutée. Pour Meynert, dont les idées ont été adoptées par Huguenin, ce faisceau viendrait de l'écorce occipitale, et serait constitué par des fibres sensitives, opinion qui a été admise et développée depuis par Charcot, Ballet, Brissaud. Pour Zacher, ce faisceau externe viendrait à la fois de l'écorce occipitale et de l’écorce temporale. Les recherches pratiquées dans les quatre cas dont je viens de parler, démontrent d’une manière évidente, que le faisceau externe du pédon- cule ou faisceau de Türck, naît exclusivement de la partie moyenne de l'écorce temporale, et surtout de la partie moyenne des deuxième et troi- sième circonvolutions temporales. Dans ces quatre cas, l'examen en coupes sériées de la capsule interne et du pédoncule dénotait les parti- cularités suivantes : dans toute la région thalamique, le segment posté- rieur de la capsule était intact dans toute son étendue, et la dégénéres- cence @e la partie postérieure de ce segment, n'apparaissait que dans la région sous-thalamique moyenne, et se continuait de haut en bas jusqu’à l’étage inférieur du pédoncule, dont le cinquième externe était totale- ment dégénéré. Dans ces quatre cas enfin, le segment antérieur et le segment rétro-lenticulaire de la capsule étaient intacts. Les résultats précédents étaient du reste à prévoir, en se basant sur l'anatomie normale, car, sur des coupes vertico-transversales microsco- piques et sériées d’un hémisphère entier, il est facile de voir que les fibres du segment externe du pedoncule, viennent de l’écorce temporale et abordent le pédoncule à la partie externe de la région sous-optiorc. 200 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE En résumé, le faisceau externe du pédoncuie ou faisceau de Türck, vient du lobe temporal et non du lobe occipital, et nous savons aujour- d'hui de par l'observation clinique et de par la physiologie expérimen- tale, que ce faisceau n'est pas un faisceau sensitif. Mes malades, en effet, ne présentaient pas de troubles de la sensibilité générale, et on sait que Ferrier n’a pas constaté de troubles de la sensi- bilité chez les singes auxquels il avait sectionné le faisceau externe du pédoncule cérébral. Ce faisceau constitue un faisceau de projection tem- poro-protubérantiel. Les fibres qui viennent de la première temporale s'arrêtent dans le corps genouillé interne, ainsi que l’ont montré von Monakow et Zacher, et sont vraisemblablement en rapport avec la fonction auditive, mais nous ne savons pas quelles sont les fonctions des fibres qui constituent le faisceau de Türck proprement dit, et qui viennent de la partie moyenne des deuxième et troisième temporales, ainsi que le montrent les faits que je viens de rapporter. Ce faisceau s’épuise dans la protubérance, et si quelques-unes de ses fibres vont jusqu’au bulbe, elles ne passent pas par la pyramide, car dans les cas que j'ai observés, la pyramide bulbaire était intacte. 4° La partie moyenne du pied du pédoncule cérébral, est constituée par des fibres qui tirent leur origine corticale des cinq sixièmes supérieurs de la région rolandique, — frontale et pariétale ascendantes, — la partie tout à fait postérieure des deuxième et troisième frontales y comprises, du lobule paracentral et de la partie antérieure du lobe pariétal. Ges fibres descendent directement dans le pied du pédoncule, et s’y trouvent d'autant plus rap-. prochées du faisceau de Türck, qu’elles proviennent de régions plus éle- vées de l’écorce. Toutes ces fibres appartiennent au faisceau pyramidal. Gette conclusion est basée sur l'examen en coupes sériées de onze cas de lésions corticales, occupant la région rolandique dans une étendue variable. La démonstration anatomique de l’existence d’un système de fibres cortico-pyramidales, fut établie expérimentalement par Gudden en 1872. En pratiquant sur des chiens nouveau-nés l’ablation du gyrus sigmoïde, Gudden montra qu’on observait constamment, dans ce cas, une atrophie to- tale de la pyramide bulbaire correspondante. J’eus moi-même en 1875 (1), l’occasion de constater la même dégénérescence de la pyramide, dans un cas de lésion pathologique du gyrus sigmoïde rencontrée chez un chien, et en 1876, mon illustre et regretté maître Vulpian, reproduisit expéri- mentalement cette dégénérescence chez l'animal adulte. Les recherches de Flechsig (1876), basées sur l'anatomie de développe- ment, nous montrèrent quel était chez le nouveau-né le trajet du faisceau pyramidal dansle pédoncule et dans la capsule interne, et Charcot(1876)(2) (1) Soc. de Biologie, 1875. (2) Arch, de Phys. norm. et pathol., 1876. TRAJET INTRA-CÉRÉBRAL DES FIBRES DE L'ÉTAGE INFÉRIEUR 204 établit que chez l'homme, le faisceau moyen du pédoncule dégénérait à la suite des lésions de la zone corticale motrice. Si nous savons donc actuellement, que le faisceau moyen ou pyramidal du pied du pédoncule dégénère à la suite de lésions de l'écorce, par contre, nous ne savons pas encore quel est le trajet intra-cérébral exact de ce faisceau, et c’est dans le but de rechercher ce trajet que j'ai étudié, à l’aide de coupes microscopiques sériées, onze hémisphères cérébraux porteurs de lésions anciennes de la zone rolandique, et qui se décom- posent de la manière suivante : A. — Trois cas de lésions corticales, localisées à la partie moyenne des circonvolutions frontale et pariétale ascendantes, avec participation de la partie tout à fait postérieure de la deuxième frontale. Dans ces trois cas, la dégénérescence occupait dans la région thala- mique et sous-thalamique de la capsule interne, le tiers moyen du segment postérieur de cette capsule. À ce niveau, les fibres verticales avaient com- plètement disparu, tandis que, comme toujours du reste dans ces cas, les fibres à direction horizontale étaient respectées. Dans le pied du pédon- cule la lésion occupait le deuxième quart interne. Le segment antérieur et le segment rétro-lenticulaire de la capsule étaient intacts. B. — Quatre cas de lésions corticales, localisées au tiers supérieur de la région rolandique, y compris le pied de la première frontale. Dans ces quatre cas, la zone de dégénérescence occupait dans la région thalamique de la capsule la partie postérieure du segment postérieur de cette dernière, qui contenait cependant encore un certain nombre de fibres saines, dans son extrémité tout à fait postérieure. Dans la région thalamique infé- rieure, par suite de l’arrivée du faisceau de Türck normal, ia zone de dégé- nérescence du segment postérieur était refoulée en avant, et le cinquième postérieur de ce segment était intact. Dans ces différents cas, le segment antérieur et le segment rétro-lenticulaire de la capsule étaient normaux. Dans le pédoncule, la zone dégénérée occupait le troisième quart interne du pied, en dedans du faisceau externe contenant plus de fibres que le faisceau de Türck proprement dit. C. — Deux cas de lésions corticales, localisées à l'extrémité tout à fait supérieure de la zone rolandique, avec participation à la lésion du lobule paracentral et de l’extrémilé antérieure du lobe pariétal. Iei, la zone de dégénérescence occupait, dans la région thalamique de la capsule, la partie postérieure du segment postérieur de cette dernière, jusqu'au niveau de la région sous-optique, région où, par suite de l’apparition du faisceau de Türck normal, la zone de dégénérescence était repoussée un peu en avant, et était limitée en arrière par les fibres saines du faisceau précé- dent. Dans ces deux cas, comme dans les précédents, le segment anté- rieur et le segment rétro-lenticulaire étaient intacts, et la zone de dégéné- rescence dans le pied du pédoncule, limitée en dehors par le faisceau de 202 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Türck, dont la dimension était normale, occupait par conséquent une situation un peu plus externe que dans le cas précédent, et correspondant assez exactement au quatrième cinquième interne de ce pied. Dans deux cas de lésion corticale, occupant les deux tiers supérieurs de la zone rolandique, la dégénérescence occupait, dans la partie thala- mique de la capsule, les deux tiers postérieurs du segment postérieur sauf au niveau de la partie tout à fait postérieure de ce dernier. Ici, encore, au niveau de la région sous-optique, la zone de dégénérescence se déplaçait en avant par suite de l’arrivée des fibres saines du faisceau de Türck, et dans le pied du pédoncule la zone dégénérée correspondait au tiers moyen. Dans ces onze cas enfin, il existait une dégénérescence secondaire très accusée dans la protubérance, le bulbe et la moelle épinière, et la pyra- mide bulbaire présentait au microscope, des lésions dégénératives extré- mement accusées. L'étude de ces onze cas montre donc que les fibres du faisceau pyramidal sont des fibres de toute longueur, venant de la corticalité et descendant directement dans le pied du pédoncule, sans s’arrêter dans les ganglions centraux. En d’autres termes, ces fibres pyramidales se comportent de la même manière que celles qui constituent les faisceaux interne et externe du pied du pédoncule, qui, elles aussi, descendent directement de la corticalité. Pour ce qui concerne l'étendue occupée dans Le pied du pédoncule par les fibres pyramidales, mes recherches confirment l'opinion de Charcot, qui admettait que ces fibres occupaient une étendue plus grande que celle que leur assignait Flechsig. Pour Charcot, le faisceau pyramidal représentait « au moins les deux quarts moyens de l’étage inférieur », et j'admets, pour ma part, que son étendue est un peu plus grande. Si on divise le pied du pédoncule en cinq parties, Je crois que les trois cin- quièmes moyens appartiennent au faisceau pyramidal. Il me resterait maintenant à établir, quel est le rapport qui existe dans les régions thalamique et sous-thalamique de la capsule interne, entre les fibres qui appartiennent au système du pied du pédoncule, et celles qui appartiennent au système cortico-thalamique et cortico-sous-thala- mique. Ces deux systèmes de fibres sont-ils isolés en faisceaux et partant plus ou moins séparés les uns des autres, ou ce qui est plus que probable, sont-ils intimement mélangés entre eux? La solution de cette question ne peut être donnée par la méthode des dégénérescences secondaires, car le système cortico-pédonculaire et le système cortico-thalamique et sous- thalamique dégénèrent ensemble à la suite de lésions corticales. La méthode des dégénérescences ne peut nous indiquer qu’une chose et je viens de la montrer, c’est que les fibres du pied du pédoncule ont toules leurs origines dans la corticalité. Les recherches que je viens d'exposer, et qui ne sont que le résumé SA à TRAJET INTRA-CÉRÉBRAL DES FIBRES DE L'ÉTAGE INFÉRIEUR 203 succinct d’un travait complet que je publierai plus tard, démontrent done que tout l'étage inférieur du pédoncule, est formé par des fibres venant directement de la corticalité et sans interruption aucune sur leur trajet. En d’autres termes, le pied du. pédoncule représente un système de neu- romes corticaux formés de fibres de toute longueur, contrairement à ce qu'’admettent encore quelques anatomistes, pour lesquels les fibres de la corticalité ne descendraient pas directement de l’écorce dans le pied du pédoncule, mais pénétreraient en grande partie dans les ganglions cen- traux. Cette opinion, qu'il est difficile de comprendre, lorsque l’on étudie des coupes microscopiques sériées, traitées par les méthodes de Weigert et de Pal, ne peut tenir devant les résultats que fournissent l’étude des dégénérescences secondaires par lésions corticales, la pathologie et la physiologie expérimentales. Ces neurones corticaux sont disposés dans la corticalité comme suit. (Voy. schéma.) Le système de neurones qui constitue le cinquième interne du pied du pédoncule, correspond à l’opercule rolandique et à la partie adjacente de l’opercule frontal. Le système de neurones qui constitue le cinquième externe du pied du pédoncule ou faisceau « de Türck », correspond à la partie moyenne du lobe temporal, et surtout à la partie moyenne des deuxième et troisième circonvolutions temporales. Le système de neurones qui constitue les trois cinquièmes moyens du pied du pédoncule ou neurones du système pyramidal, correspond aux quatre cinquièmes supérieurs de la région rolandique, au lobule para- acentral et à la partie antérieure du lobe pariétal. Dans le pied du pédon- cule, ces fibres se rapprochent d'autant plus du faisceau de Türck, sans toutefois jamais l’atteindre, qu'elles proviennent de parties plus élevées de la corlicalité motrice. Cette division de l’étage inférieur du pédoncule est du reste arbitraire, et ne s'applique réellement qu’au faisceau de Türck. En effet, les fibres qui constituent les quatre cinquièmes internes du pied du pédoncule appartiennent à un seul et même système de neurones corticaux, étendu de l’opercule rolandique et de la partie adjacente de l’opercule frontal, jusqu’au bord supérieur des circonvolutions frontale et pariétale ascen- dantes, et comprenant en outre la portie tout à fait posiérieure des pre- mière et deuxième circonvolutions frontales, le lobule paracentral et la partie antérieure du lobe pariétal. Les fibres de ces neurones occupent, ainsi que Je viens de le montrer, dans le segment postérieur de la cap- sule interne, une situalion d'autant plus antérieure, qu’elles proviennent de régions moins élevées de la zone rolandique et, par la même raison, occupent dans le pied du pédoncule une situation d'autant plus interne. Le système de neurones corticaux qui donne naissance au faisceau de Türck constitue seul un système à part, et le faisceau de Türck peut être —S fi FT ce LC JRAJET INTRA-CÉRÉBRAL DES FIBRES DE L'ÉTAGE INFÉRIEUR 205 considéré comme un faisceau spécial, pour une raison, d'ordre purement anatomique du reste, qu'il tire de son origine particulière — partie moyenne du lobe temporal et principalement des deuxième et troisième temporales — et de ce fait, qu’il n'appartient pas, comme les autres par- ties du pied du pédoncule, à la région thalamique de la capsule interne. Le faisceau de Türck, en effet, passant au-dessous du novau lenticulaire, ne peut aborder la capsule interne que dans la région sous-optique. L'origine et le trajet de ce ce faisceau de Turck, expliquent pourquoi on a cru pendant longtemps, que ce faisceau ne dégénérait jamais, et c'était là encore un argument qu’on invoquait en faveur de sa fonction sensitive. En réalité ce faisceau dégénère comme les autres (1), et s’il dé- génère moins souvent que ces derniers, surtout que le faisceau moyen du pédoncule, cela tient uniquement à ce fait, que les lésions de l'écorce temporale, et en particulier des deuxième et troisième circonvolutions de cette région, sont sensiblement moins communes que celles de la région rolandique. S’il dégénère plus rarement encore à la suite de lésions des masses centrales, cela tient à ce qu'il n’apparaît que dans la région sous- optique. C’est aujourd'hui, en effet, un fait bien connu, que les lésions de la partie postérieure du segment postérieur de la capsule interne dans la région thalamique, se traduisent par une dégénérescence secon- daire de la partie du pied du pédoncule contiguë au faisceau de Türck, sans que ce dernier participe à l’altération. Mais, que par une éventualité, que je crois très rare, la lésion porte sur la partie postérieure de la capsule interne dans la région sous-optique, c'est-à-dire dans la région où ce faisceau de Türck aborde la partie postérieure de la capsule, alors ce faisceau dégénérera dans toute son étendue, ainsi que j'ai pu le cons- tater dans deux cas, étudiés au moyen de la méthode des coupes micros- copiques sériées. EXPLICATION DES FIGURES Le schéma ci-contre, est destiné à représenter l'origine corlicale et le trajet intra-cérébral des fibres de l'étage inférieur du pédoncule, étudié dans vingt-trois cas de lésions corticales, par la méthode des coupes microsco- piques sériées. La figure { représente une face externe d'hémisphère droit, sur laquelle a été représentée l’origine corticale des fibres de cet étage inférieur. Ee lobule paracentral n’a pas été représenté, et doit être compris dans la zone supé- rieure de la région rolandique. Les figures 2 et 3 représentent, réduite, une coupe horizontale microsco- pique de la capsule interne, colorée par la méthode de Weigert, passant pour la figure 2 par la région thalamique, et pour la figure 3 par la région sous- thalamique. La figure 4 représente une coupe horizontale, traitée par la (1) Cas de Jelgersma, Winkler, Zacher. 206 . : MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE D A ER ER EP EE RE RSR QE même méthode et passant par la partie inférieure du pédoncule cérébral. Le pied du pédoncule a été divisé en cinq segments. Cia, segment antérieur de la capsule interne; Cip, segment postérieur de la capsule interne; Cirl, segment rétro- noirs de la capsule interne; CL, corps de Luys; coa, commissure antérieure ; F1, F2, F3, les trois circon- raisins frontales; Fa, frontale ascendante ; ti f2, premier et deuxième sillons frontaux ; i, So insulaire ; Ia, Ip, nenenoons antérieure el pos- térieure de asbl io, sillon inter-occipital; NC, noyau caudé; NC’, queue du noyau caudé; NL3, putamen : NL2 NL ous pallidus; 01, 02, 03, les {rois do Bcciptales 20 2, nue sillon occipital; OpF, oper- cule frontal; OpR, opercule rolandique ; P, étage inférieur du pédoncule ; P1, P2, circonyvolutions pariélales supérieure et inférieure; Pc, pli courbe; por, sillon post-rolandique ;. pri, prs, sillons prérolandiques. inférieur et supé- rieur ; Qa, tubercule quadrijumeau antérieur; Qp, tubercule quadrijumeau postérieur; R, scissure de Rolando; S, scissure de Sylvius; STh, région sous- optique; T, faisceau de Türck : 11-12 273 1lesstrois circonvolutions. tempo- rales ; t1, t2, premier et deuxieme. chou temporaux ; Tga, pilier antérieur sl trigone ; ÿ À, faisceau le Vicq- d’ AZyr. M A Te RECHERCHES SUR UN MICROBE TROUVÉ DANS DEUX CAS D'ICTÈRE GRAVE PAR RANGLARET INTERNE DES HOPITAUX ET J. MAHEU PRÉPARATEUR AU LABORATOIRE DE M. CHAUVEAU Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 30 décembre 1893. Après les travaux de Lancereaux (1882), Landouzy (1883), Rondot (1884), Deschamps (1890), tendant à prouver la nature infectieuse de l’ic- tère grave, la solution de cé problème intéressant semblait ne pouvoir être résolue que par une étude bactériologique approfondie. Nous avons déjà rapporté à la Société de Biologie (1) un cas d’ictère grave où l’examen bactériologique nous a permis d'isoler un microorga- nisme spécial. Depuis lors un deuxième cas d'ictère grave s’étant présenté dans le ser- vice du D° Ferrand, à l'Hôtel-Dieu, nous avons pu retrouver ce même microbe et l’étudier complètement. Ce sont les résultats de ces recherches précédées des deux observations cliniques que nous nous proposons d'exposer dans ce travail. I OBSERVATIONS Ogs. I. — La nommée Mirabel (Yvonne), âgée de on a ans, _giletière. entre à l'Hôtel-Dieu, dans le service de M. le D' Ferrand;:le 23 décembre 1893. Cette malade est apportée à l'hôpital dans un état d’adynamie complet. De son entourage on ne peut avoir que les renseignements suivants : Cette femme était accouchée, depuis environ trois mois; son enfant était en nour- rice, bien portant; les suites de couches avaient été normales. Vers le 21 dé- cembre elle est prise brusquement de malaise général avec courbature, fris- sons, fièvre, céphalée. Elle n’a ni diarrhée, ni point de côté. Le lendemain elle perd complètement connaissance, et le 23 elle est conduite à l’Hôtel- Dieu, où elle occupe Le lit n° 18 de la salle Sainte-Anne. Le 24 décembre, à l'examen on se trouve en présence d’une femme : à facies un peu jaune le, la respiration sans être gênée est bruyante, le coma com- (1) Séance du 8 juillet 1893. 208 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE plet, les membres soulevés retombent comme des masses inertes; les pupilles ne sont ni dilatées, ni contractées anormalement; le ventre est un peu bal- lonné, il semble qu'il y ait du gargouillement dans la fosse iliaque droite. On retire, par le cathétérisme, un peu d'urine, ne contenant, ni sucre, ni albumine. Dans les poumons, légers râles de congestion aux bases. Pas d’autre bruit anormal. Au cœur, on ne trouve aucun souffle pathologique; il y a une tachycardie qui se manifeste par un pouls battant de 120 à 125 pulsations. La température est de 40 degrés le matin. Il n’y a pas d’exagération des réflexes et le coma n’est interrompu par aucune crise épileptoïde. Le 25 décembre, la malade semble revenue un peu à elle; elle est dans un état subcomateux. Elle peut avaler elle-même le lait et le bouillon qu’on lui présente. La température est Loujours très élevée, 390,8 le matin. La teinte jaune pâle semble s’être prononcée, elle est subictérique. Le 26 décembre, la température est tombée à 37 degrés, le pouls reste à 120, irrégulier, petit, dépressible. La teinte subictérique se fonce de plus en plus; elle est particulièrement nette sur la conjonctive. L’atlention étant ainsi portée du côté du foie, la percussion de cet organe permet de constater une diminution de la zone de matité normale. Le 27. Même état d’adynamie et de prostration. La température reste à 37°,5 le matin. Le pouls est de plus en plus fréquent et dépressible. La teinte subictérique persiste sans augmenter. Les urines sont fortement colorées, elles contiennent des traces d’albumine. Dans la nuit du 27 au 28. Epistaxis légère. Le 28. — La malade meurt au cours d’une hémoptysie abondante. Autopsie. Poumons. — Congeslion des bases. Impossible de déterminer le point de lhémorragie terminale. Cœur. — Petit. Myocarde pâle, teinte feuille morte. Rien dans les valvules. Intestin. — Pas trace d'hémorragie. Reins. — Paraissent normaux à la coupe. Rate. — Légèrement hypertrophiée, Utérus. — Rien de spécial. Cerveau et méninges. — Congestion cérébrale, mais aucune lésion de mé- ningite. Foie. — Teinte jaunâtre. Atrophie manifeste, 1,150 grammes (y compris la vésicule biliaire). Au microscope les cellules hépatiques ont disparu et sont remplacées par une gangue amorphe dans certaines parties, les plus grave- ment atteintes ; ailleurs, les cellules persistent, mais le protoplasma a disparu etelles sont infiltrées de granulations graisseuses et de pigment biliaire. Ous. 11. — Le nommé D... (Louis), soixante-deux ans, journalier, entre le 30-juin à l’Hôtel-Dieu, EE Saint- DITES, lit n° 17, dans le service de M. le Dr Ferrand. EU. SUR UN MICROBE TROUVÉ DANS DEUX CAS D'ICTÈRE GRAVE 209 Cet homme, qui est de grande taille, d'apparence robuste, bien constitué, ne donne que peu de renseignemeuts sur ses antécédents héréditaires et personnels. Il assure n'avoir jamais été malade; pas d'affection syphilitique antérieure; pas de jaunisse. Maladie actuelle. Sa maladie actuelle aurait débuté assez brusquement le mercredi 28 juin. Cet homme, bien portant jusque-là, éprouve, ce jour-là, une lassitude extrême ; il a, dit-il, mal partout, dans la tête, les membres, sans qu'il lui soit possible de localiser sa douleur; son appétit est brusquement supprimé, la constipa- tion est opiniâtre : pas de douleur abdominale. Tous ces symptômes persistant le lendemain 29 juin, le malade se décide à se présenter à l'hôpital, où il est admis d'urgence le vendredi soir 30 juin. Examen du malade à son entrée, le 1er juillet. Outre les signes fonctionnels déjà énumérés, on note chez ce malade un abattement considérable; une perte totale de forces. Ses réponses sont lentes et difficiles; il semble y avoir un peu de stupeur cérébrale. La pression est douloureuse sur les masses musculaires, les membres et sur la face interne des libias. L'examen successif de tous les organes reste absolument négatif. Les poumons et le cœur sont sains. Le ventre, un peu sensible à la pression, ne présente aucun point particu- lièrement douloureux. Le foie est normal et ne dépasse pas le rebord des fausses côtes. À ce moment, il n'existe pas trace d’ictère. Cependant l’état général du malade paraît mauvais; la langne est sèche et saburrale, la température est assez notablement abaissée, le thermomètre marque en effet 35°,8 sous l’aisselle. Le pouls est à 80 pulsations. 2 juillet. — Ictère des conjonctives; teinte subictérique de la peau; pouls plus rapide, légère dyspnée. La constipation persiste; les urines, rares, sont de couleur très foncée. Ces urines sont traitées par le réactif de Gmelin : on y voit apparaître les diverses couches caractéristiques de la présence des matières colorantes de la bile; la coloration verte en particulier est très nette. Au-dessus des disques de matière colorante, on aperçoit un léger nuage blanchâtre qui semble indiquer la présence de l’albumine. Celle-ci est retrouvée par la chaleur, et son dosage donne 0 gr. 50 par litre. 3 juillet. — L'ictère a beaucoup augmenté, les téguments sont d’un aspect jaune foncé. Depuis le milieu de la nuit, le malade a du délire; de temps à autre, il se lève de son lit, comme s’il se disposait à partir; on le fait se recoucher sans peine. Il est calme et tranquille; mais demande plusieurs fois d’un ton suppliant qu'on le laisse partir, il est attendu au Palais-Royal, dit-il. La température axillaire marque 38°,3. La respiration est précipitée, le pouls, petit, rapide, presque incomptable. On diagnostique un ictère grave et on ordonne un « lavement des peintres »; le lavement, administré à onze heures, est suivi de selles absolument décolorées. BioLoatE. MÉmoiREs. — 90 SÉRIE, 7. V. 19 2410 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Dans les heures qui suivent, l'agitation et le délire augmentent rapidement. On est obligé de lui mettre, pour le maintenir, la camisole de force. Enfin, vers quatre heures de l'après-midi, le malade meurt au milieu d'une crise épileptiforme. Trois heures après la mort, le corps est absolument brülant. La température n'a pas été prise. Les téguments sont devenus jaunes noir, aucune hémorragie n’a été obser- vée dans le cours de l'affection. Autopsie. Les poumons sont congeslionnés, mais on n'y trouve aucun point din- duration. Le cœur est mou, la couleur du myocarde est un peu pâle, se rapprochant de la teinte feuille morte. Les valvules de l'aorte sont remarquablement saines. Le péricarde contient un peu de liquide hémorragique. L'intestin et l'estomac sont marbrés, verdâtres, en état manifeste d’alléra- tion cadavérique. Le foie pèse 1,650 grammes ; sur la face externe, rien d'appréciable. La vésicule biliaire est remplie d’un liquide vert foncé, très fluide ; on n’y trouve aucun calcul. Les voies biliaires sont libres. A la coupe, le tissu hépatique présente une coloralion jaune verdàtre ; il se déchire avec une extrême facilité, et la surface de déchirure est granuleuse. Les reins sont augmentis de volume, le droit pèse 220 grammes, le gau- che 210. A la coupe, le parenchyme est un peu congestionné; les substances médul- laire et corlicale paraissent saines. La rate est petite, diffiuente, formant une sorte de bouillie d'un rouge vineux. Les autres organes ne présentent rien d’anormal. IT EXAMEN BACTÉRIOLOGIQUE I. — Les recherches portent, pour le premier cas, sur le foie, la rate et les poumons. Les cultures sur plaques nous mettent en présence d'espèces absolument différentes que nous isolons. 1° Colonies blanc sale, saillantes, liquéfiant la gélaline, lle gros, étranglés, mobiles, aérobies, que nous reconnaissons comme étant le Bac- lerium lermo. 29 Colonies d’abord blanches, puis devenant de plus en plus jaunes pour arriver au jaune d’or, liquéfiant la gélaline. C’est le Sfaphylococcus p yogenes aureus. 3° Colonies blanches, saillantes, ayant l’apparence de SUN Cie à la surface de la gélatine et ne la liquéfiant pas. Ces colonies qui n’ont été relrouvées que dans le poumon sont constiluées par le B. de la pneumonie. SUR UN MICROBE TROUVÉ DANS DEUX CAS D'ICTÈRE GRAVE 211 4° Enfin une colonie spéciale qu'il est impossible d'identifier et que nous soupeonnons être l’un des agents pathogènes de l'ictère grave. IL. —— Dans le second cas, nous avons obtenu d’emblée des cultures pures du microbe dont nous avons parlé dans le premier cas. Ici nos recherches ont porté sur le foie, la rate, le poumon droit et le cœur droit, pous l'avons en même temps retrouvé dans les reins, mais associé à un B. septique de Passet. L'examen histologique des pièces nous a montré la présence, dans les coupes, du même bacille disposé en petits groupes, et rarement isolé. [IT CARACTÈRES DES CULTURES Culture sur plaques. — Sur plaques les colonies mettent de 24 à 48 heures à se développer, à une température de 20 degrés. Examinées à un grossissement de 30 diamètres, elles ont au bout de 24 heures l’appa- rence d’un disque légèrement transparent. Après 20 heures elles ont l’ap- parence d’un disque transparent renfermant un noyau opaque, s'étendant de plus en plus à mesure que la culture vieillit. Ce noyau est ridé et gra- nuleux ; c'est alors que la culture devient saillante. Dans certains cas, il peut naitre des prolongements très légers de la périphérie; la colonie perd alors ses contours réguliers. Ces colonies, blanches ou légèrement jau- nâtres, sont composées de Bacille liquéfiant la gélatine (fig. 1). Culture sur gélose. — Au bout de36 heures de culture à 35 degrés, il se forme une culture allongée suivant la strie d’inoculation ; celte culture est crémeuse, à contours réguliers, elle est formée de colonies rondes agglomérées. La surface en est légèrement ridée. Cuilure sur gélatine. — Sur la gélatine ensemencée en strie et maintenue à 20 degrés la culture est la même que sur agar, mais plus blanche, et plus humide. Au bout de 48 heures, il se forme un sillon blanc qui prend du relief au bout de 2 ou 3 jours ; il est formé par la réunion d’une grande quantité de colonies rondes, ses bords sont comme taillés à l'emporte-pièce; 5 ou 6 jours après la gélatine se liquéfie. Sur gélatine ensemencée en profondeur on remarque un léger enton- noir entre 38 el 52 heures. L’entonnoir est rempli de colonies. La cul- ture a l’apparence d’un clou à bords irréguliers; autour de ce clou, qui est brillant, se forme une zone ronde, qui est plus elaire, et qui n’atteint jamais les bords du tube. La traînée est toujours un peu plus fortement accentuée est très visible le troisième jour. La liquéfaction commence alors et s’opère très lentement de haut en bas. Quand elle est totale, il se forme des disques gélatineux résultant de l’agglomération de colonies, puis, le tout tombe au fond du liquide; si l’on remet ce dépôt en suspension il prend l'apparence de flocons. PAS LU 9 219 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE D'autrefois, dans les ensemencements en profondeur d’une grande quantité de gélatine, dans un ballon d'Erlenmeyer par exemple, la traînée offre sur son parcours de gros renflements en boules lui donnant l'appa- rence d’une corde à nœuds. Ces boules se forment dès le commencement de la liquéfaction. Culture sur pommes de terre. — Au bout de vingt-six heures, on a des Frc: de Culture sur plaque de gélatine. a. — Colonie examinée au microscope après 24 heures de culture. LL — — — — = EC — — —— — -— 2 jours — d — — — — — à — — f. — Gélatine se liquéfiant autour de la colonie au 4° jour. colonies en plaques blanches plissées, sèches et saillantes se détachant pour tomber dans l’eau de cuisson. Ces colonies se composent de bacilles primitifs, présentant cependant des tendances à l’allongement. Milieux liquides. Culture dans le bouillon. — Le bouillon de viande peptonisé se trouble totalement après une exposition de 48 heures à l’étuve à 33 degrés, un voile boursouflé non adhérent au ballon se forme à la surface. Au bout d’une semaine, des flocons se forment dans le Sd ÉD NE à ot ie GÉ ATE S de LÉ + ANATOLE 7 Mes SUR UN MICROBE TROUVÉ DANS DEUX CAS D'ICTÈRE GRAVE 913 ballon et tombent au fond. En même temps, le bouillon devient de plus en plus alcalin. Il renferme des bacilles en filaments, un peu plus gros que les bacilles primitifs. Si on ensemence du bouillon dans lequel on a ajouté du glucose ou du saccharose, la réaction devient de plus en plus acide ; en outre, si l’on ajoute du carbonate de chaux dans la liqueur, il y a formation immédiate et légère de bulles gazeuses. La lactose n’est pas décomposée. re 2; Res: 0 Bacille cultivé sur pomme de terre, Culture sur bouillon au 5° jour. examiné après 26 heures de culture. Object. 1/15 Verick. oc. 1. Object. 1/16 Verick. oc. 1. À È : LS 4 à à SES \ 2 $ \ A ? n'a N Nu Le 25 Ni \ 4 % N Le ee Las de Fic. 4. F1G. 5. Culture sur bouillon sucré au 3 jour. Culture sur bouillon sucré au 5° jour. Object. 1/16 Verick. oc. 4. Object. 1/16 Verick. oc. 1. Culture sur bouillon glycériné. — Dans ce milieu, le développement est bien moins rapide et surtout bien moins abondant que dans le bouillon ordinaire. Culture en bouillon sucré. — Dans les bouillons renfermant 30 p. 100 de sucre, ou bien encore dans les bouillons préparés suivant la formule suivante : Par litre de bouillon : Mme dE Mean SO0Pcrammmres 9214 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Chlorure /dersodinm eee tante ) grammes. SUCLE) CAN EEE PE RPC LE 23 — PEpPlOnC NP RES à 5 — Phosphate de chaux UNE MU RDA ES À EE EE STD RE AE DEEE A QT O ES des traiînées blanchätres gélatineuses prennent naissance 48 heures après une incubaltion à 35 degrés. Cependant 15 heures après l’ensemen- cementle bouillon ne renferme que des bacilles primitifs; après 24 heures, ce sont des chaïnettes de bacilles ; enfin après 45 heures, on ne voit plus que de longs filaments affectant la forme d'S. L'ensementement de tubes de gélatine avec ce bouillon ne donne que des types primitifs. Culture dans l'urine. — Dans ce milieu, on remarque Île même dévelop- pement que dans le bouillon; la réaction est, de même, alcaline. Culture dans le lait. — Les caractères changent, en même temps que la forme des vases dans lesquels se font les cultures. Dans les tubes, il se forme un coagulum épais à la surface, puis ce coagulum, au bout de quelque temps gagne le fond et le sérum se trouve absolument limpide et presque incolore; puis le précipité se redissout en grande partie. Le liquide présente une réaction acide. Dans un grand ballon d'Erlenmeyer où le liquide se trouve répandu, en grande surface etsur une faible épaisseur, la coagulation ne se produit qu’au bout d’un mois de cullureet il n’y a pas de réaction chromogène. Nous nous proposons de donner plus tard les résultats de l'action chi- mique des produits solubles de ce microbe sur les éléments du lait. IV DIFFÉRENCIATION AVEC LE bacillus sublilis. De tous les microbes connus, le bacillus subtilis, seul, offre beaucoup de points d’analogie avec le microbe dont nous nous occupons ici. Voici donc les caractères pouvant servir à différencier ces deux bacilles. Le 2. subtilis donne un aspect moins crémeux sur la gélose. Dans le bouillon, le voile est plus épais, adhère aux parois du ballon, le liquide reste limpide. Le B. sublilis ne fait fermenter ni la glucose, ni la saccharose, ni la lactose. Tandis que le bacille qui nous occupe est aérobie-anaérobie, se repro- duit sous une couche d'huile, le 2. subtilis, lui, reste stérile dans les mêmes conditions sur plaque. Les colonies du sublilis donnent des expansions nombreuses, alors que celui-là donne des colonies circulares, ou très légèrement irradiées. Le 2. subtilis coagule le lait quelle que soil la forme du vase et dans un temps maximum de 3 jours. RS SC SUR UN MICROBE TROUVÉ DANS DEUX CAS D'ICTÈRE GRAVE 215 Notre microbe ne présente pas de cils vibratils et se reproduit par segmentation; le Z. subtilis donne naissance à des spores très apparentes. De plus, le mierobe que nous avons isolé se décolore très légèrement par le Gram, tandis que le subtilis reste pleinement coloré. Y MORPHOLOGIE. Les bacilles mesurent de 1 x à 2 y de long sur 0.5 & de large ; ils sont droits, ou légèrement incurvés, les bouts sont ronds, Ils présentent un léger étranglement. Ils sont souvent aussi réunis en chapelets ou chai- nettes (Streptobacillus). Ils fixent assez bien les couleurs d’aniline et prennent le Gram. Sur les coupes nous nous sommes toujours servis avec succès de la méthode de Kühne. La coloration des cultures âgées est très difficile. - vI POLYMORPHIE, Tous les caractères morphologiques que nous venons d’énumérer ne sont pas stables, étant donné que le bacille en question peut passer par différentes formes ; en un mot, il est polymorphe. Ainsi dans la culture sur pomme de terre les bacilles présentent de la tendance à l'allongement. Mais dans les bouillons sucrés, comme on l’a vu plus haut, ces variations sont plus facilement visibles. En effet, après 15 heures de culture il existe seulement des bacilles primitifs mais, 24 heures après ensemencement, on trouve dans le liquide de longs filaments en forme d'S présentant des ramifications; 5 jours après, tous ces filaments s’enchevêtrent pour former des arabesques. C’est à ce moment que la reproduction s’opère par sectionnement. En effet une goutte de la culture colorée par le violet de gentiane ou ja méthode de Gram montre les bacilles colorés dans toute leur masse, sauf aux points qui vont se sectionner. Il se forme à cet endroit une espèce de cloison. VII ACTION PATHOGÈNE L’expérimentation a porté sur des cobayes, des souris et lapins. 1° L'ingestion par les voies digestives a toujours donné des résultats négalifs ; 2° Les inoculations par scarification ont amené la formation d'un nodule assez volumineux. Ce noyau d’inflammation a évolué assez rapidement vers la suppuration. L’autopsie des animaux sacrifiés ne révèle aucune lésion des organes; 3° Les inoculations intra-veineuses sont très septiques. La mort sur- vient du quatrième au cinquième jour ; ces inoculations déterminent des granulations dans le foie et la rate; 216 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 4° Deux cobayes sur quatre sont morts en quarante-huit heures après inoculations sous-cutanées au niveau du foie. L'autopsie des cobayes permet de découvrir les lésions suivantes : œdème au point d’inoculation; autour de cet œdème, abcès périhépatique. Le foie est atrophié, gris à la coupe; les cellules hépatiques sont légèrement atrophiées dans les parties superficielles. La bile est fluide ; examinée après fixation à l'alcool et l’éther etcolorée sur lamelles, ou remarque une grande quantité des microbes que nous venons d'étudier. La rale et le poumon renferment aussi ce même microbe (autopsie faite cinq heures après la mort). Un lapin sacrifié après cinq jours offre des lésions à peu près analo- gues. Les ensemencements des différents organes provenant de ces autop- sies (rate, foie, poumon, bile) ont reproduit des cultures généralement pures de ce microbe. Du vivant des animaux, leur sang, servant à ense- mencer des tubes de gélatine, n’ont donné aucun résultat. Les recherches sont poursuivies en ce moment pour parvenir à décou- vrir les produits solubles sécrétés par ce microbe, cependant nous avons remarqué que les cultures devenaient de plus en plus faibles; en effet, si l’on reprend sur des animaux des cultures pures et qu'on les réinocule à un second animal, les lésions seront les mêmes, mais avec diminution considérable des effets. Plus on fait de cultures de ce microbe, moins il est virulent, à l'encontre de ce qui a lieu généralement. Toutes les cultures isolées dans les deux cas ont donné lieu à des recherches similaires et ont fourni des résultats semblables. IX CONCLUSIONS En résumé, nous nous sommes trouvés en présence d’un microbe spé- cial recueilli dans deux cas d’ictère grave; nous avons pu isoler complè- tement ce microbe et nous avons suffisamment montré qu'il a des carac- tères parfaitement distincts. Nos inoculations, elles-mêmes, nous ont donné des résultats précis et importants puisque les animaux inoculés sont morts, et que, chez eux, à l’autopsie, nous avons trouvé une légère atrophie des cellules hépatiques. Est-ce à dire que nous voulons donner ce microbe comme l’agent spécifique de la maladie? Assurément non. Cependant nous avons tenu à faire connaître les résultats de nos re- cherches sur ce microorganisme, pour montrer qu'il s’agit là d’un nouvel agent pathogène, intéressant et peut-être utile à connaître. Le hasard nous l'a fait rencontrer dans deux cas d'ictère grave, où il a dü jouer tout au moins le rôle d'infection surajoutée. Peut-être le retrouverait-on dans d’autres infections secondaires, si nombreuses, dont les éléments microbiens sont encore peu connus. ” Y 5 bébcesn, dd. due UT à AT 2 TE ES SUR LES GANGLIONS ET PLEXUS NERVEUX DE L'INTESTIN PAR M. RAMON Y CAJAL Mémoire lu à la Société de Biologie dans la séance du 30 décembre 1893 (1). Nous avons l’honneur de présenter à la Société de Biologie, comme mémoire, un résumé des travaux, encore inédits, du professeur Ramon y Cajal, de la Faculté de Madrid, sur la structure des ganglions viscéraux et en particulier des plexus de Meïssner et d'Auerbach, chez les Mammi- fères. Ces recherches ont été exécutées à l’aide de la méthode de Golgi et surtout de l’imprégnation double de Cajal chez le cobaye, le lapin, le chien, le rat, la souris et le bœuf. GANGLIONS VISCÉRAUX Les ganglions du plexus cæliaque (semi-lunaires et solaires), ceux du plexus hypogastrique, le ganglion ophtalmique, le sphénopalatin et pro- bablement aussi les ganglions du cœur appartiennent à la catégorie des gauglions du grand sympathique vertébral. Les cellules de ceux-ci pos- sèdent, comme nous l’avons déjà montré, deux ordres d’expansions : les ramifications protoplasmiques, se terminant dans l'épaisseur du ganglion lui-même, et le prolongement nerveux cylindraxile ou fibre de Remak qui sort du ganglion pour former en grande partie la commissure longi- tudinale sympathique et les rami communicantes. IL existe cependant encore deux espèces de ganglions, dont on ne con- naît les cellules que d’une façon incomplète; on en ignore la morpho- logie et on ne sait si elles sont bâties sur le type du sympathique verté- bral ou si elles possèdent des caractères particuliers. A l’une de ces deux espèces de ganglions appartiennent ceux de l'intestin (plexus d'Auerbach et de Meissner), de la vessie et de l’œsophage; à l’autre, les pelits gan- glions monocellulaires qui se trouvent dans les interstices du tissu glan- (1) Traduit et présenté par M. le D: L. Azoulay. 218 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE a ——_—2—EELEZEZLUEEUEEUUEUEEEZEZEZLd dulaire ou dans l'épaisseur des villosités : cellules interstitielles des glandes de Lieberkün, du pancréas, des glandes salivaires, ete. Pour éviter toute périphrase, nous appellerons ces derniers ganglions interslitiels etles premiers ganglions viscéraux proprement dits. Ganglions viscéraux proprement dits.— On peut considérer comme type aus am Fr1G.114. Cellules des ganglions de Meissner du cobaye. (On n’a pas représenté le ganglion lui-même.) a, b, c, cellules imprégnées isoiément, multipolaires, avec des expansions qu'on peut suivre très loin; d, e, cellules imprégnées en même temps que quelques fascicules du plexus de Meissner; f, g, fibres ramifiées; 7, expansion cellulaire donnant naissance à un fascicule de fibres. de ce genre les ganglions du plexus d’Auerbach et de Meissner de l’in- testin. Nous allons décrire, pour plus de clarté, les ganglions du plexus de Meissner seulement; cela ne présente aucun inconvénient, la struc- ture des ganglions de ces deux plexus étant tout à fait analogue. Le plexus de Meissner, situé comme chacun sait, au-dessous des glandes de Lieberkün, dans le tissu conjonctif sous-muqueux, offre à l'étude deux éléments: les fascicules de fibres nerveuses, et les ganglions. s ‘4 À L 1 | TPE SIVIT STATE SUR LES GANGLIONS ET PLEXUS NERVEUX DES INTESTINS 219 Fascicules. — Les auteurs qui les ont étudiés spécialement avec la mé- thode des acides et du chlorure d’or, E. Müller et Berckley qui leur ont appliqué la méthode au chromate d'argent, en ont exposé la plupart des détails; aussi y insisterons-nous peu pour n'avoir pas à répéter des faits par trop connus. Chaque petit faisceau est composé d’un nombre variable de fibres nerveuses, bien isolées, d’épaisseurs diverses, variqueuses, dépourvues de myéline et réunies dans le sens de leur longueur par un ciment, qui ne prend nullement l’imprégnation au chromate d'argent dans les pré- parations bien réussies. Il se forme, au point de rencontre de plusieurs faisceaux, des chiasmas, entre-croisements au niveau desquels, comme l’a fait remarquer E. Müller, chaque fibre nerveuse conserve son indépendance absolue, tout en pas- sant d'un fascicule à l'autre, situé du même côté ou du côté opposé du chiasma. Quelques-unes des fibres nerveuses, épaisses, se bifurquent, en arrivant à un chiasma, fournissant des branches égales ou inégales qui pénètrent dans deux fascicules distinets. Ganglions. — Is sont formés, chez le. cobaye qui a été principalement notre malériel d'étude, par trois éléments : des cellules nerveuses au nombre de deux à huit, des fibres de passage, et des collatérales. a) Cellules. — Leur volume variable est d'ordinaire assez considé- rable; leur forme est franchement éloilée, c’est-à-dire qu'elles sont multi- polaires, comme l'avaient déjà signalé plusieurs auteurs (Schwalbe, Ran- vier, Toldt, etc.); les expansions auxquelles elles donnent ainsi naissance varient entre trois et huit. On peut cependant voir des cellules bipolaires, mais c’est l'exception. Quel que soit le nombre des expansions, celles-ci se. comportent tou- jours de la même façon si l’impréguation est complète, on peut suivre chaque expansion à une grande distance, el on observe alors que soit près, soit Join du corps cellulaire, elle se ramifie pour donner lieu à deux, trois ou plusieurs fibres variqueuses. Ces dernières conservent indé- finiment leur même diamètre, même après avoir pénétré dans les fasci- cules du plexus. D'ordinaire, les plus grosses expansions se résolvent à peu de distance de leur origine en un petit faisceau de fibres qu'il n’est pas possible de distinguer de celles des fascicules du plexus de Meissner dans lesquels elles s’incorporent. Les expansions plus grêles se ramifient au contraire; néanmoins, en suivant quelques-unes d’entre elles à travers le plexus, nous avons élé à même d’apercevoir deux ou trois dichotomies qu’elles formaient au niveau des chiasmas. Quant à la nature des expansions des cellules de ces ganglions, nous dirons seulement que malgré toute notre attention nous n'avons rien pu trouver qui les différenciât en expansions courtes ou protoplasmiques et longue ou fibre de Remak. 220 . MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE b) Fibres de passage. — En outre des expansions produites par les cellules, tout ganglion possède une infinité de fibres fines et grosses, simple continuation des fibres amenées au ganglion par les fascicules. Ces fibres lraversent parfois le ganglion pour faire partie des faisceaux qui sortent du côté opposé ; d’autres passent d’un fascicule à l’autre sans s'insinuer entre Îles cellules. Iln’est pas rare, non plus, de voir quelques- unes de ces fibres se bifurquer, en arrivant au ganglion, et fournir ainsi une branche à deux faisceaux différents. Nous devons faire observer que ni les cellules, ni leurs expansions ne prennent le précipité de chromate d'argent, lorsque les fibres de passage d Fe. 2. Coupe longitudinale d’un ganglion d’Auerbach du cobaye de 4 jours. a, cellule inférieure avec des expansions peu nombreuses; c, cellule extrêmement riche en expansions ; b, expansion extra-ganglionnaire d'une cellule; d, fibres de passage; e, fibres musculaires circulaires coupées en travers. se trouvent bien colorées dans une préparation, ce qui a lieu très souvent. Cela semblerait indiquer une différence de nature entre ces fibres et celles qui naissent des cellules. c) Collatérales. — On parvient à distinguer, à l’aide d'objectifs apo- chromatiques, dans l’intérieur des ganglions des fibres extrêmement fines, à varicosités très abondantes. Au lieu de traverser de part en part le ganglion comme les fibres de passage, ces fibres ont un trajet flexueux entre les cellules autour desquelles elles produisent un riche plexus de grande complication. Beaucoup de ces fibres se ramifient sur leur par- cours et se terminent par des extrémités libres renflées, situées sur le corps des cellules. D'où proviennent ces fibres singulières, éléments importants de la structure des ganglions ? Pour quelques-unes, nous ne pouvons en indi- quer l’origine d’une façon décisive, tant leur trajet est compliqué ; pour 3 À 1 À 1 É 4 L sis PESTE CD EU ñ dt dt rc fn dE one osé Co Le dr 4 EE 7 SUR LES GANGLIONS ET PLEXUS NERVEUX DES INTESTINS 2921 d’autres, nous affirmons résolument que ce sont des collatérales des fibres de passage, collatérales nées à angle droit ou aigu au nombre de deux et même de trois. Faisons remarquer cependant que la plupart des fibres de passage sont dépourvues de collatérales. On retrouve dans le plexus d’Auerbach, avec de légères variantes, la structure que nous venons de décrire dans le plexus de Meissner, c'est-à- dire, des ceilules multipolaires, des fibres de passage et des collatérales. Nous ne ferons qu’ajouter une donnée qui a peut-être une certaine impor- tance : c'est que, dans à peu près toutes les préparations du plexus d’Auerbach, les fibres qui sont les seules exclusivement à s’impréguer sont les fibres procédant du grand sympathique général, amenées par les nerfs mésentériques dans les ganglions et les fascicules interganglion- naires du plexus. Dans certaines occasions, il est possible de poursuivre une fibre sympathique générale à travers deux ou trois ganglions du plexus, et d’assurer alors qu’une bonne partie, sinon la totalité, des fibres de passage des ganglions sont simplement des fibres de Remak venus du dehors pour se mettre en rapport avec les cellules du ganglion au moyen de collatérales et peut-être aussi d’arborisalions terminales (fibres venant peut-être du plexus solaire ou des ganglions du sympa- thique abdominal). Toutes les fibres de passage appartiennent-elles au grand sympathique général ? Cela nous parait vraisemblable, mais nous ne saurions l’affirmer sans crainte, car nous manquons encore de preuves plus convaincantes. De toutes nos observations il semble donc résulter très probablement qu’il existe dans la charpente des ganglions intestinaux deux facteurs : Des cellules nerveuses dont les expansions se distribueraient aux fibres musculaires lisses ou aux cellules glandulaires, et des fibres du sympa- thique général, répandues dans tous les ganglions intestinaux qu’elles mettent en rapport avec la gaine ganglionnaire du sympathique verté- bral ou avec d’autres centres nerveux. Ganglions interstitiels. — Ils sont représentés par des cellules nerveuses, isolées, abondamment disséminées entre les acini des glandes salivaires (Fusari et Panarci), dans le tissu conjonctif interstiliel du pancréas (Cajal, CI. Sala, E. Müller) et enfin entre les glandes de Lieberkühn et dans l'épaisseur des villosités intestinales (Drasch, Cajal, Müller). Nous les avons retrouvés aussi en grand nombre sur la face interne de la couche musculaire des fibres circulaires, où elles forment, en s’unissant à de nom- breux fascicules parallèles aux fibres contractiles, un plexus extrêmement riche (plexus musculaire profond). Toutes ces cellules sont tantôt fusiformes, lantôt triangulaires, tantôt étoilées. Leurs expansions, épaisses à l’origine, ne tardent pas à se divi- ser et à se subdiviser, formant ainsi un plexus enchevêtré, qui s'ajoute à celui des ganglions viscéraux voisins. Ces expansions semblent s’anaslo- moser entre elles pour constituer des réseaux très serrés. C'est donc dans 19 19 L2 MÉMOIRES DE LA SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE l'intestin que nous verrions se produire pour la première foiside véritables réseaux anastomotiques. Maïs n'oublions pas qu'il se pourrait très bien que ces anastomoses ne soient qu’apparentes et qu’elles ne représentent en réalité que de simples chiasmas ou entre-croisements de fibres fines émanées des fascicules voisins. Les fibres plus ténues semblent se termi- D;o) F DA ONE ll OHiojo ÿ ‘000! Fic. 3- Cellules nerveuses du plexus périglandulaire et des villosités de l'intestin du cobaye. a, ©, cellules triangulaires et étoilées; b, d, cellules fusiformes du plexus péri- glandulaire; on voit les prolongements de ces cellules donner lieu à de véritables fascicules ; e, cellule fusiforme; f, cellule triangulaire ou étoilée de la villosité, dont les expansions forment un réseau peut-être apparent. ner soit dans les fibres lisses : cellules musculaires de la villosité, couche musculaire de la muqueuse, couche des fibres contractiles circulaires, cte., soit dans les cellules glandalaires : glandes de Brunner et de Lieberkühn, au moyen d’extrémités libres garnies d’une varicosité. Celles-ci s'ap- pliquent sur le protoplasma des éléments auxquels les fibres sont desli- nées. Disons en passant que les auteurs qui ont opéré avec le bleu de mé- (hylène (Arnstein, Cajal et Relzius) ou avec la méthode au chromate j de dei éédhiner a neo à à cafe nd D dos dl Sd É ; 1 È SUR LES GANGLIONS ET PLEXUS NERVEUX DE L'INTESTIN 9293 d'argent (Müller, Berckley et Cajal) sont unanimes à admettre que les fibres nerveuses sympathiques se terminent librement aussi bien sur les cellules musculaires que sur les cellules glandulaires. Du reste, il est très difficile de déterminer, même dans les préparations les meilleures, des fibres nerveuses du plexus des villosités et du plexus périglandulaire si ces fibres proviennent exclusivement de cellules inlerstilielles ou de fibres venues du plexus de Meissner. En résumé, quoique nos recherches sur les ganglions viscéraux et intersliliels soient bien loin d’être terminées, nous pouvons donner comme probables les propositions suivantes. 1. Les ganglions viscéraux sont constitués par des cellules multipolaires dont les expansions, après s’êlre ramifiées plusieurs fois, passent dans les plexus qui se terminent dans les fibres musculaires lisses ou dans les cellules glandulaires. 2. Tout ganglion possède aussi des fibres de passage (qui se continuent peut-être avec les fibres du grand sympathique vertébral) et des colla- térales se terminant entre les cellules nerveuses. 3. Toute glande, et peut-être tout groupe, si pelit soit-il, de fibres lisses, contient des cellules nerveuses interstitielles dont les expansions renfor- cent le plexus formé par les ganglions viscéraux et les fibres du grand sympathique vertébral. 4. Tout chiasma représente non seulement un point d’entre-croisement mais encore un point de bifurcation pour quelques fibres nerveuses de passage et pour des expansions des cellules ganglionnaires viscérales. 5. Il n'existe d’anastomoses ni entre les cellules des ganglions viscé- raux, ni entre les fibres de passage, ni entre les collatérales. Il en est probablement de même pour les cellules interstitielles. — Paris. — Imprimerie de la Cour d'appel. L. MareTueux, directeur, 1, rue Cassette. VAN ES D D à 5 . ) AS ” te RP RSR PE Er Enr rpen ee meer ed RCE RIRE" 71 ». . ge Ge bé de gen 2 L 7 s < ne moments ee anses di 16e papet im et-qu ver ete - - — ge Ne IRON EN PI RAPRRE none ee D deg n—s 2 ci pen nt © mg > È “un amgnt A m0 à LOC 2 ne ce DRE A that de à dm sh CORRE PARDON TEPE AAA Domi 0 à AURA 202 te 1 RO À A à « OU A de A SR » COTE EE « MA DR MS AS SA Riéh s,R CCE PE DEN A £ ‘ DORE ERRECEPENTE V4: 2 hr je À vera c …. PC Er > Cove D dés di © chu - « oh 2 : = nd * s . 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