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GORRtSPONDlNGE

DE GUILUUME LE TACITURNE,

PRINCE D'ORANGE.

lUP D E». DBTROYF.

CORRESPONDANCE

GCILLÀUMELE TACITURNE.

PRINCE D'ORANGE,

PUBLIÉE POUR LA PREMIÈRE FOIS;

•CITll

DB PliCES INÉDITES SUR L'ASSASSINAT DB CB PRINCB

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Sor les récompenses accordées far Philippe II il la faDilIe de I^Hhaiar Gérard;

|)ar M* (êat\]avli.

Archiviste gënëral du royaume, membre de rAcadéniie royale des Scienees, ries Lrtires et des Beaux- Arts, de la Commission royale d^hisloire, etc., ete.

TOME TROISIÈME.

BRUXELLES, LEIPZIG, GÂND,

G. MUQUAUDT. 1051

"I-» *

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PRÉFACE.

I.

II.

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La Correspondance dont nous avons entrepris la pu* .^

blication s'étend, dans ce volume, du mois de mai 1S68 au mois d'août 1S77 : c'est l'époque la plus périlleuse et la plus glorieuse à la fois de la vie du prince d'Orange. ''

L'intérêt qui s'y attache se reflète dans les lettres que nous avons recueillies : la msgeure partie de celles-ci a 1

une valeur historique incontestable. %

Nous les faisons suivre (car notre but est principale^ ment de fournir des matériaux pour l'histoire de Guil- ^

laume le Taciturne, laquelle trouvera un jour, il faut l'espérer , un écrivain digne du sujet), nous les faisons suivre, disons-nous, de documents qui les complètent, ou du moins qui ajoutent un nouveau jour à celui qu'elles ^

répandent sur ces dix années, si remplies et si mémo-* râbles, de la vie du prince. Tels sont :

Il

Une relation circonstanciée de son expédition dans les Pays-Bas en 1568^ écrite par le secrétaire d'État Josse de Courtewille ;

La correspondance que le duc d'Albe entretint avec l'évêque de Liège, pendant tout le temps que cette expé- dition dura;

Des instructions, des lettres, des rapports, concernant les négociations secrètes qui, depuis la fin de 1 S73 jusqu'au commencement de 1S7S, furent entamées avec le prince ;

Enfin, les instructions des ambassadeurs que don Juan d'Autriche et les états généraux assemblés à Bruxelles envoyèrent au prince, à Gertrudenberg , au mois de mai J 577 ; un mémoire détaillé sur les conférences de ces ambassadeurs avec lui, et le rapport qu'ils firent aux états , à leur retour.

\J Appendice se compose de quarante-cinq pièces; les lettres qui le précèdent sont au nombre de cent treize. Ce troisième volume comprend donc cent cinquante-huit documents ^ qui voient le jour pour la première fois.

Afin d'en faire apprécier l'importance, nous jetterons un coup d'œil sur les faits qu'ils révèlent, ou qu'ils ser- vent à éclaircir. Nous nous occuperons aussi de quelques événements auxquels ils se rattachent d'une manière plus ou moins directe.

II.

Les prévisions de Guillaume le Taciturne, lorsqu'il quitta les Pays-Bas, ne s'étaient que trop tôt réalisées : l'arrivée du duc d'Albe et de l'armée espagnole dans ces provinces avait été suivie d'une série d'actes arbitraires

III

et de mesures oppres^ves. Les comtes d'Egmonl et de Bornes arrêtés traîtreusement et enfermés dans une étroite prison ; une foule de gentilshommes et de boui^eois par- tageant le sort de ces deux seigneurs ; le comte de Buren enlevé de Louvain, au mépris des privilèges de l'univer- sité, et transporté en Espagne ; les conseils de justice et les magistrats des villes dépouillés de leur juridiction ; un tribunal d'exception établi pour connaître des délits commis pendant les troubles ; la confiscation érigée en principe , non-seulement à l'égard des condamnés, mais envers les suspects, envers ceux même dont le seul crime était d'être allé chercher à l'étranger un refuge contre la tyrannie ; le droit de vie et de mort exercé par le duc d'Albe , car le conseil des troubles instruisait les procès, mais le duc s'était réservé le pouvoir de rendre les sen- tences : monstruosité abominable, dont on chercherait en vain un second exemple dans toute notre histoire ; une autorité sans contrepoids, entre les mains d'un homme qui ne connaissait d'autre règle que sa volonté; partout la défiance, l'intimidation, la stupeur, et, comme une conséquence naturelle du système de gou- vernement qui venait d'être inauguré, la stagnation du commerce, le malaise de l'industrie, la misère des classes laborieuses : tel était le spectacle qu'offraient les Pays- Bas au commencement de 1568.

Les Belges appelaient de tous leurs vœux un libéra- teur : Guillaume entendit leur voix; il répondit à leur appel.

C'était, de sa part, une entreprise bien aventureuse, disonslemot, bien téméraire, que d'engager lalutte contre le duc d'Âlbe, ou plutôt contre Philippe H, qui donnait

IV

une approbation entière aux actes de son lieutenant. Le Roi avait dans les Pays-Bas des forces considérables, et les trésors du nouveau monde lui donnaient le moyen de les augmenter^ autant qu'il le voudrait ^ par des levées faites , soH dans l'intérieur du pays, soit en Allemagne , en Espagne, en Italie. Guillaume était sans troupes et sans argent. Ces obstacles ne Tarrétèrent pais.

En attendant qu'il eût rassemblé une armée à la tête de laquelle il entrerait lui-même en Belgique, il essaya, dans le but d'encourager ses partisans, d'exciter les peu- ples à l'insurrection, et de se rendre maître de quelques places il se pût fortifier, des expéditions sur plusieurs points du pays. Le 20 avril 1568, Jean de Montigny, seigneur de Villers, franchit, par son ordre, la frontière du côté de Maestricht , avec un corps de 2,S00 à 3,000 hommes. Quatre jours après , le comte Louis de Nassau envahit la Frise. Un troisième corps, sous les ordres du seigneur de Cocqueville, gentilhomme normand, devait dans le même temps faire irruption, du côté de l'Artois; mais il ne fut prêt qu'à la fin de juin.

Ces tentatives eurent toutes trois une issue malheu- reuse, quoique le comte Louis eût d'abord remporté une victoire signalée sur l'armée espagnole, à Heyligerlée ('). Guillaume n'en continna pas moins les préparatifs qu'il avait commencés.

Maximilien H, à la suggestion de la cour de Madrid,

( ') Nous avons publié la Correspondance du due d'Albe sur l'invasion du comte Louis de Nassau en Frise, en 4568, et les batailles de Heyligerlée et de Gemmitigen, Muquardt, 1850. In<^** de 168 pages.

V

intervint^ pour lai ordonner de cesser ses armements (p. 1-5). Guillaume les justifia, dans la réponse qu'il fit à l'Empereur (p. 6-19), par le tableau des actes arbi- traires, tyranniques et cruels auxquels s'était livré le duc d'Albe, depuis son arrivée aux Pays-Bas. Il déclara, du reste, que son but n'était point d'entreprendre sur la souveraineté du Roi : tout ce qu'il voulait, c'était que les habitants des Pays-Bas jouissent de la liberté de reli- gion, que le gouvernement fût ôlé au duc d'Albe, que les anciens privilèges fussent rétablis, et les biens rendus à ceux qui en avaient été dépouillés : quant à lui per- sonnellement, il ne demandait qu'une réparation d'hon-* neur et la mise en liberté de son fils, le comte de Buren (p. 17).

La saison était déjà bien avancée, lorsque le prince d'Orange eut réuni ses forces : ce fut seulement dans la nuit du 5 au 6 octobre qu'il passa la Meuse. Le lende- main, il occupa Stockem, ville de l'évéchéde Liège; de il se dirigea vers Tongres.

Il n'avait pas sans motifs pris son chemin par le pays de Liège ('). Il comptait dans cette principauté de nom-

(') Il y a, au dépôt des archives de TEtat, h Liège, un registre extrêmement intéressant sur l'expédition du prince d'Orange en 4568; il est intitulé : Sentences çrimineUeSf 4568-4573 ; on lit en tête des actes qui y sont transcrits : En cestuy présent registre Simt contenus , escripts et annotés tous jugemens et sen- tenees crimtnelz des matfaicteurs, rendus par ks très-honnorez seigneurs messieurs les eschevins de Liège, en vertu des confessions, eognoissanees et accusations par les prisonniers pour ce fais : le tout aussi par bonne ordre rédigiés en escript; encommenchiés à temps de Voppugnation et camp de prince d'Orainge mis et assis

VI

breux adhérents^ et beaucoup de Liégeois, entraînés par l'exemple de Guillaume de la Marck, seigneur de Lumey

par-devant la cité de Liège, qui est advenu le jour de la commé- moration des âmes et fidèles trespa^sseis, en la [este de tous les saincts, 4568.

On trouve dans ce registre diverses sentences rendues contre des adhérents du prince d'Orange. Voici les noms des individus que les rigueurs de la justice atteignirent :

Collard del Sarte le jeune, dit le thonnier, condamné, le 9 no- vembre 1568, à être pendu et étranglé; exécuté le même jour;

Jean le Dauphin, de la porte Sainte-Marguerite, condamné, le 17 novembre, à être pendu et étranglé; exécuté le 18 ;

Comitte de le Zenne^ ministre et prédicant, condamné, le iO no- vembre 1568, à être pendu et étranglé ; exécuté le 12 ;

Charles le Brun, condamné, le 11 novembre 1568, à être pendu et étranglé; exécuté le 12;

Adam, fils d'Art de Thier, condamné, le 22 novembre 4568, à être pendu et étranglé ; exécuté le 25 ;

Pierre Franckonet, condamné, le 12 janvier 1569, à un bannis- sement perpétuel ;

Nicolas, fils de Martin 3forlet, condamné, le 12 mars 1569 , à être pendu et étranglé; exécuté le ;

Lambert, fils de Simon d'Heur, dit le tambourier, condamné, le 21 juin 1569, à être pendu et étranglé; décapité le 22;

Wilhaume Gérard, dit Wilhot, condamné, le 4 avril 1569, à avoir la tête tranchée ; exécuté le 5 ;

Andrieu Bourktte, condanmé par les prévôt et cour souveraine de Bouillon, le 7 juillet 1569, à avoir la tête tranchée, son corps mis en quatre quartiers, pour être pendus à quatre fourches, et la tête élevée sur une potence ; exécuté le ;

Philippe del Neufforge, condamné à ;

Jean Doley, condamné, le 8 novembre 1569, à avoir la tête tranchée, et, s'il ne persévérait en la foi catholique, à être pendu et étranglé; exécuté le ,..• ;

VII

et de Seraing, qui se rendit depuis si fameux (')^ étaient venus se ranger sous ses drapeaux ; nous citerons, parmi les plus notables : le chanoine Philippe de la Marck, frère du seigneur de Lumey, Jean d'Haultepenne , sei- gneur de Barvéa, le baron de Brandebourg, le jeune seigneur de Haneffe, Éverard de Mérode, seigneur du Val, le seigneur de Bétho, Guillaume de Barchon, que le prince fit maître de son artillerie, André Bourlette, auquel il confia l'emploi de munitionnaire ('), Philippe de Neufibrge, Érard Spirinek, Edmond de Marneffe, Hubert, son frère, Bernard de Haccourt, Guillaume de Crahain (').

Gheret (Gérard) Van den Howe, condamné, le 8 mars 1570, à un bannissement perpétuel ;

Guillaume DefalUf condamné, le 25 juin 1571, à être pendu et étranglé'; exécuté le

Les interrogatoires et les dépositions des condamnés, ainsi que de plusieurs autres individus qui furent arrêtés, mais que les juges renvoyèrent absous, fournissent^ des détails dont je ferai usage. Voici, par exemple, une particularité qui peut intéresser les peintres. Gérard Dayeneff dépose que les partisans des gueux portaient des écharpes bleues a leur chapeau, et Adam de Thier, que Vécharpe bleue était l'enseigne du prince d'Orange.

(■) D'après la déposition de Marie, femme d'Amould Lagali, qui servait dans l'armée du prince d'Orange, le seigneur de Lumey était « vestu de gris, & la mode des cordeliers. » (Reg. Sentences criminelles, 4568-4573.)

(^) M. Bakhuizen van den Brink a répandu beaucoup d'intérêt sur ce personnage, dans une notice pleine de recherches curieuses qu'a publiée la feuille hollandaise de Gids, 1844, n""" 5, 4 et 5.

(^) Déposition de Jean d'Haultepenne , André Bourlettc , Philippe de Neufforge, Jean Maretz. (Reg. Sentences criminelles, 4568-457S.)

VIII

On avait donné l'espoir au prince d'Orangé qu'il obtiendrait le passage par Liège et des vivres pour son armée : il en écrivit aux seigneurs de Waroux et de fleers, qui avaient une grande influence dans la cité; mais ils ne voulurent pas accepter ses lettres ('). Il s'adressa alors au magistrat et aux métiers (p. i9) : le magistrat lui répondit que sa demande ce ne concernoit » seulement le fait particulier des burgemaistres, jurez, » conseil et trente-deux bons mestiers, mais ossy la grâce i> de leur révérendissime et illustrissime seigneur et » prince monseigneur de Liège, messieurs de son véné- » rable chapitre, messieurs de la noblesse, les bonnes » villes, plat pays et généralement lous les trois eslatz » du pays de Liège et conté de Looz y> (p. 21, 350). Quelques jours après, il demanda aux bourgmestres de pouvoir, au moins, lever, à Liège et daqs les environs, les pionniers dopt il avait besoin (p. 22) : les bourg- mestres s'excusèrent, comme la première fois, sur ce que la chose n'était pas de leur compétence (p. 27).

Guillaume n'ignorait point que c'était l'évêque qui avait dicté ces réponses (p. 550). Il écrivit à Groesbeck, pour se plaindre de sa conduite, et le sommer de lui faire compter 100,000 écus, le menaçant, en cas de refus, de tirer vengeance du « tprt et oultraige que lui et les sieqs » avoient receu du prélat )> (p. 23, 28). L'évèquc répondit, avec beaucoup de raison, « qu'il n'avoit riens )> faict que pour la conservation de son église et pays, » selon que, outre le droit naturel, son debvoir envers

(■) Confessions de Philippe de Neufforge et d'André Bourletle. (Reg. Sentences criminelles, 4S68-4S73.)

IX

» ses subjectz, et mesmes les reeès et ordonnances, tant » impériales que circulaires^ lui commandoient. » . Il ajouta que, si le prince trouvait qu'il eût agi contre les- dits reoés ou ordonnances, il était prêt à en répondre devant l'Empereur, ou devant la cbambre impériale

(p. 28).

Après être entré dans Tongres, le prince d'Orange se

porta du côté de Saint-Trônd, ^i lui ouvrit également ses portes, quoiqu'elle eût pu se défendre, avec les gens de guerre que l'évéque y avait mis, si les bourgeois, ainsi que Groesbeck l'écrivit au duc d'Albe, <€ eussent esté » affectionnez comme ilz debvoient» (p. 329,3S{4,355). Le prince fut informé alors qu'un secours qu'il attendait de France, sous la conduite de Genlis, avait passé la Meuse, près Charlemont : il prit le chemiu de Jodoigne, bourg du Brabant wallon, pour y opérer sa jonction avec ces auxiliaires.

Le duc d'Albe, aussitôt qu'il avait su que le prince s'approchait des Pays-Bas, avait rassemblé ses troupes à Maestricht (p. 320-32i) : il s'était entouré des prin- cipaux chefs de l'armée espagnole : don Fadrique et don Fernand de Tolède, ses fils ; Ghiappin Vitelli, Berlay- mont, Noircarmes, Meghem, La Gressonnière (p. 322). A la suite d'une mûre délibération sur le parti qu'il prendrait, pour s'opposer aux rebelles, il avait résolu ce de . non se mettre en hazard de bataille , sinon avecq i> son avantage, mais bien leur «stre continuellement à » la main, pour les combatre par la faim, et les faire » serrer, et leur empescher les emprinses qu'ils pourriont » avoir sur villes, et, s'offrant quelque conjoncture, leur » donner une bonne main n (p. 323-328).

X

Sa conduite fut de tout point conforme à ce plan de campagne. Il suivit en queue l'armée du prince, la har-* celant sans cesse, s'attachant à couper ses convois, et prenant des positions avantageuses pour soutenir la ba- taille, si le prince voulait la lui livrer (p. 336, 337).

Le 12 octobre , entre Tongres et Saint-Trond , il lui tua 600 hommes, et lui prit plus de cent chariots de bagage (p. 327). Le 20, il atteignit encore son arrière- garde, au passage de la Jauche, et la mit entièrement en déroute. Dans cette affaire, le prince perdit 3,000 de ses meilleurs soldats, sans compter les blessés : le S** de Mal- bergh, un des chefs de son armée, fut tué ; le comte de Hooghstraeten reçut une blessure dont il mourut quelque temps après ; Philippe de Marbais, S^ de Louverval, tomba au pouvoir des Espagnols (p. 330, 331).

Guillaume s'était flatté que son entrée dans le Brabant porterait ses partisans à se déclarer : aucun d'eux ne bougea ; aucune ville, ne fit entendre le moindre cri de révolte : la terreur qu'inspirait le duc d'Albe était trop grande !

D'ailleurs, Ferdinand de Tolède avait pris ses mesures pour empêcher que le prince n'occupât, même momen- tanément, des points de quelque importance. Gilles de Berlaymont, baron de Hierges, secondé de Philippe de Lannoy, &" de Beauvoir, et de Gaspard de Robies, S»" de Billy, était dans Tirlemont avec des forces imposantes (p. 327, 328, 332). Oudart de Bournonville, S' de Ca- près, défendait Louvain ; le duc lui avait donné 1,400 ar- quebusiers wallons à pied, sous les ordres de Mondragon et du bâtard de Bugnicourl(p. 327). La garde de Malines était confiée à Eustache de Croy, S^ de Grecque, qui

XI

avait deux enseignes allemandes, et la compagnie wal- lonne de Ferry de Carondelet, S' de Potelles (p. 328). A Bruxelles, le duc d'Arschot répondait de la sûreté de la ville, garantie par une garnison de dix enseignes wal* lonnes ayant à leur tête Jean de Croy, comte du Rœulx (p. 328),

Genlis joignit l'armée du prince trois ou quatre jours après l'affaire du 20 octobre. Le secours qu'il lui amenait, a n'estoit si grand' chose comme le bruit avoit couru : car » il estoit de peu de gens de fait, mais en grand nombre » et mal armez , et avec femmes et enfans, comme s'ilz )> feussent venuz avec intention de transmigrer du tout , » et faire une colonie au Pays-Bas (p 331). »

Guillaume tint conseil, avec ses lieutenants et les chefs des troupes françaises^ sur ce qu'il fallait entreprendre. Tenter de s'emparer de quelque ville en Brabant, c'eût été s'exposer à un échec certain : Louis de Nassau, le comte de Hooghstraeten, Genlis, Feuquières furent d'avis de retourner vers Liège, pour y entrer de gré, ou de force ('). Lumey, qui, en cas de réussite, devait avoir le gouvernement de la principauté, se joignit à eux ('). Le prince se rangea à leur opinion.

II commença par écrire à Tévéque et au chapitre, pour avoir le passage par la cité et des vivres (p. 29, 3i) : ayant essuyé d'eux un refus auquel il s'attendait (p. 30), il vint mettre le siège devant la ville, le 3 novembre (p. 362-363).

(') Confessions de Philippe de Neufforge et d'André Bourlettc. (Reg. Sentences crimineUeSj 4 568-4 573.)

XII

"•

L'évéque avait refusé, un mois auparavant, le secours que le duc d'Albe lui offrait. Il le réclama cette fois (p. 359-364). Le duc envoya, à Liège et à Huy, quel- ques compagnies wallonnes, dont l'arrivée fortiGa le courage des .habitants (p. 334). Groesbeck, de son côté, veillait, avec vigilance et énergie, à la défense de la ville : accompagné des chanoines de sa cathédrale, il parcourait les rues et les remparts, exhortant les bour- geois, de la parole et de la main, à défendre vaillam- ment leurs foyers, leurs familles , leurs fortunes , leur patrie, et, plus que tout cela, ajoutait-il, leur religion et la cause de Dieu et de l'Église (')•

Le prince, trouvant ainsi la ville à l'abri d'une sur- prise, et informé que l'armée royale n'était plus qu'à deux lieues de lui, comprit que son expédition était manquée. Après avoir fait mine de donner l'assaut dans la nuit du 4 au 5 (p. 36S-366), il décampa le matin, et se dirigea, à marches forcées, vers la France, il entra le 17 (p. 335). Wolfgang de Bavière, duc de Deux-pPonts, amenait d'Allemagne, en ce temps, aux protestants français, un secours de 8,000 cavaliers et 6,000 fantassins (*) ; Guillaume réunit ses forces aux siennes , en Bourgogne , et tous deux allèrent joindre l'armée de Tamiral Coligni. Guillaume prit part à quel- ques-unes des affaires de la campagne de 1 569 : il licencia ensuite ses troupes, et repartit pouE l'Allemagne (^).

(') Dewez, Histoire du pays de Liège, t. Il, p. 476 et 178. (*) SisMONDi, Histoire des Français, t. XIII, p. i99, édit. de la Sociëté typographique belge. (^] GnoBN VAN Prinsterer, Archives, etc., t. III, p. 522, 535.

.V-

XIII

Ce triste résultat de ia première expédition du prinee dans les Pays-Bas eût découragé tout autre que lui : mais la résolution, la constance, formaient les traits saillants de son caractère : il ne se laissa point abattre par le malheur. En attendant des conjonctures plus pro- pices, il travailla sans relâche à susciter des ennemis à Philippe n, en Allemagne, en Angleterre, en France; il organisa ces troupes de gueux de mer qui se rendirent si redoutables aux flottes espagnoles.

Le duc d'Albe ne manqua pas d'exalter le succès qu'il avait obtenu sur le prince : « La campagne est achevée, » écrivît-il au Roi, et Votre Majesté y a gagné la répu- » tation et l'autorité que son saint zèle mérite... Ces » rebelles sont sortis des États de Votre Majesté, sans y » avoir fait plus que n'eût pu faire une troupe de » 200 chevaux qui les aurait traversés^ en brûlant sur » son passage deux monastères et quelques églises; ils » en sont sortis défaits , mourant de faim ( car le pain n leur a manqué pendant quinze jours), et après avoir » vu la plus grande partie de leurs gens passés au fil de » l'épée ('). »

(') Esto, senor, es acabado, y can tan grande rreputadon y

authoridad de V. M^. cuanto su sancto zelomerece Estos

rrebeldes han salido de los Estados de V. Jf . ton no haver écho en ellos mas effecto del que piidieran hazer dodentos cavallos que atravessaran por ellos, quemando dos abbadias y algunasyggU- sias; desechos, hambreados, que estuvieron pasados de quince dias sin corner -pan, degoUada la mayor parte de su génie. (Lettre du duc au Roi, du 25 Dovembre 4568, aux Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 539.)

XIV

III.

Si, sur l'expédition de 1S68, nous avons recueilli de nombreux et de précieux documents, nos recherches ont eu un résultat à peu près nuK en ce qui concerne les actions du prince, depuis son entrée en France, au mois de novembre de cette année, jusqu'au mois d'avril 1S72. Quatre lettres, c'est tout ce que nous avons trouvé de lui, pour cette époque de sa vie. Deux sont adressées à Charles IX (p. 34, 35) : par la troisième (p. 36-38), Guil- laume donne des pleins pouvoirs, à l'effet de traiter, en son nom , avec les bourgeois d'Audenarde , à Jacob Blommaert, qui, ainsi qu'on le verra plus loin, sut jus- tifier cette marque de confiance. La dernière (p. 3^) est écrite à Richard Claessens, ministre de l'Évangile à Enkhuizen; le prince l'y engage à seconder les efforts de ses amis en Hollande.

IV.

Guillaume était à Dillenbourg, dans son comté de Nassau, lorsqu'il reçut la nouvelle inattendue de la sur- prise de la Briele (!«'' avril 1572). Il n'entrevit pas d'abord toutes les conséquences de ce hardi coup de main, et il en témoigna même du mécontentement (') :

(') Voy.y ci-après, p. 370, ce que Philippe de Mamix dit, h ce sujet, au mois de décembre 4573, au seigneur de Noircarmes.

M. Groen tan Prinstbrer avait déjà fait la même remarque : X Le prince, dit-il, ayant reçu l'importante nouvelle de la prise

XV

mais la révolte deFlessingue (6 avril), l'entrée des gueux de mer dans Delfshaven (7 avril) et dans Schiedam (40 avril), les émeutes de Rotterdam (8 avril) et de Gouda (10 avril), lui ouvrirent bientôt les yeux sur l'importance du service que Lumey lui avait rendu. Ce n'était pas peu de chose, en effet, que d'avoir enfin, dans les Pays-Bas , après tant d'efforts infructueux , un point d'appui pour ses partisans, et une base pour ses opérations futures.

Enflammer le zèle de ses amis ; faire appel au patrio- tisme de tous ceux qui supportaient avec impatience la domination espagnole ; pousser les uns et les autres à la révolte, et rassembler une armée pour marcher à leur secours : tels furent, dès ce moment, les divers objets qui préoccupèrent le prince d'Orange, et auxquels il consacra toute sa sollicitude, toute son activité.

INous publions les lettres qu'il écrivit aux villes de Gouda (p. 40), de Middel bourg (p. 47), d'Enkhuizen (p. SO), de Harderwyck et de Zwoll (p. 56) : on les lira avec un vif intérêt (').

Le 29 juin, Guillaume partit de Dillenbourg, suivi de 1 ,000 chevaux (') : il avait eu la plus grande peine ,

» de la Briele, en fut médiocrement satisfait; il craignait qu'on n n'eût commencé d'une manière inconsidérée, et s'était toujours n efforcé de prévenir un mouvement trop partiel. » {Archives, etc., t. III, p. 448.)

(■) Il écrivit vraisemblablement dans le même sens aux autres yUles de Hollande, de Zélande, de Gueldre et de Frise.

('] NouveUes de Liège, dans la Correspondance de Gueldre et Zutphenj aux Archives du Royaume, papiers d'État, t. XV, fol. 64.

XTI

faute d'argent , à lever une armée suffisante pour entrer en campagne; ses troupes n'étaient même pas toutes réunies. II passa le Rhin le 8 juillet {% avec celles qu'il avait à sa disposition, et pénétra en Gueldre : le 17, il fit sommer Ruremonde, qui refusa de lui ouvrir ses portes. Il réitéra cette sommation le 22 ; elle fut accueillie par un nouveau refus. Alors il résolut de donner l'assaut. Après six heures de combat, le 23 , dans la matinée, la ville tomba en son pouvoir (').

Cette conquête n'avança pas beaucoup ses affaires : l'argent lui manquait toujours; les troupes qui devaient le joindre étaient encore en Allemagne. II lui fallut donc attendre, pour poursuivre ses opérations, l'arrivée des auxiliaires sur lesquels il comptait, et l'envoi des sommes que les états de Hollande avaient votées pour le soutien de la guerre (') .

Tandis qu'il était campé à Aldenhoven, près de Rure- monde, un gentilhomme de Maximilien II (^) vint lui signifier un mandement impérial. On a vu que Maxi- milien avait voulu s'opposer à l'expédition de 1S68. Instruit , par une lettre que le prince lui écrivit de Dil- lenbourg , le 28 juin, de son intention de prendre une seconde fois les armes ^ il chercha à l'en détourner : il ne se borna pas aux voies de la persuasion ; mais il le menaça de procéder contre lui , au cas qu'il persistât dans son

(>) Grobn van Prinstercr^ Archives, etc., t. III, p. 448 et 466. (•) /Md., p. 481-483.

(') Voy., dans les Archives, etc., t. III, p. 479, 485 et 488, ses lettres au comte Jean de Nassau, des 25 juillet. 5 et 4 1 août i 572. (4) Jonas d'Offenbourg. Voy. ci-après, p. 63.

xvn

entreprise ('). Plus tard , il lui adressa le mandement dont je viens de parler, mandement par lequel les ritmai- tres qui suivaient le prinee , el le prinee lui-même, s'il ne désarmait pas, étaient mis.au ban de TEmpire (').

Une mesure aussi rigoureuse Q) peut étonner , de la part d'un monarque qui , en plus d'une eirconstance , avait hautement blâmé l'administration du duc d'Albe; elle s'explique pourtant , si l'on réfléchit que , depuis 1568 (^), mais surtout depuis le mariage de l'archidu- chesse Anne, sa Gllc, avec Philippe II , Maximilien avait sensiblement incliné vers la politique espagnole , et que, dans ce moment même, il aspirait à voir appeler un des archiducs au gouvernement des Pays-Bas (^).

(') Voy. sa lettre du 19 juillet 1572, dans les Archives^ etc., t. m, p. 473-479.

(') Voy. la Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, etc., t. II, p. 287.

Le duc d'Albe se montra fort satisfait de ce procédé de Maximilien : « L'Empereur, ëcrivit-il à Philippe II, se conduit & » présent très-bien. » Ibid.

(3) Maximilien n'avait pas cru pouvoir aller jusque-U en 1568. Voy. la Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays- Bas, etc., t. II, p. 44.

(^) On peut consulter, à ce sujet, sa lettre à Philippe II, du 17 janvier 1569, dans la Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, etc., t. II, p. 54. Nous nous permettrons de renvoyer aussi le lecteur à la note que nous avons lue à l'Acadé- mie, le l^février 1845, et qui est insérée dans ses Bulletins, t. XII, i^ partie, p. 149-169, sous le titre de Deux lettres autographes de Philippe II à Maximilien II, sur les matières religieuses,

(5) Voy. la très-curieuse lettre écrite à Philippe II, le 12 octo- bre 1 572, par son ambassadeur à Vienne, le comte de Monteagudo,

m. à

XVIII

La réponse du prince d'Orange à l'Empereur^ qu'on trouvera dans ce volume (p. 63-69), est pleine de dignité et de convenance. S'il a pris les armes, dit-il, c'est pour sa juste défense contre le duc d'Âlbe et contre le despotisme inouï que ce lieutenant du roi d'Espagne exerce dans les Pays-Bas : il ne lui restait d'autre moyen de prévenir la ruine de sa chère patrie, l'anéan- tissement total des libertés de la nation, la perte de ses propres biens, et la tache qu'une plus longue inaction aurait imprimée à son honneur. Non-seulement le droit écrit, ajoute-t-il, mais encore le droit de la nature et des gens, l'autorisent à repousser la force par la force, après qu'il a épuisé les voies amiables afin d'obtenir justice. Il espère donc que l'Empereur, comme souve- rain chef de la chrétienté et ennemi de toute tyrannie, accueillera ses excuses.

Pendant ces mouvements du prince d'Orange, le duc d'Albe se disposait à reprendre Mons, dont le comte Louis de Nassau s'était emparé, le 24 mai, par un coup de main non moins hardi que celui qui avait rendu Guillaume de la Marck maître de la Briele.

Les rapports entre les cours d'Espagne et de France étaient, à cette époque, d'une nature délicate : à Madrid et à Bruxelles, on se défiait des projets de Charles IX, et ce n'était pas sans raison, à en juger du moins par la conduite que le fils de Catherine de Médicis tint jusqu'au jour éclata la Saint-Barthélémy (') ; on supposait même

dans la Corre$pondance de Philippe II sur les affaires des Pays^ Bas, etc. t. il, p. 284. (■) Voy., dans la Correspondance de Philippe II sur les affaires

XIX

qu'il n'était pas étranger à l'entreprise du comte Louis de Nassau (^). Dans ces conjonctures, le duc d'Àlbe jugea qu'il fallait à tout prix chasser de Mons le frère du prince d'Orange. Quoique chaque jour l'insurrection fit des progrès dans les provinces du nord, il n'hésita pas à les dégarnir pour former le corps d'armée qu'il envoya en Hainaut. 11 conGa le commandement des troupes qui devaient faire le siège de Mons à son fils , don Fadrique de Tolède : lui-même il quitta Bruxelles, le 26 août, avec le duc de Medina-Celi, pour diriger cette impor*- tante opération (*).

Le prince d'Orange, ayant reçu les renforts qu'il atten- dait et une partie des sommes votées par les états de Hollande, avait, le 23 août, passé la revue de son armée Q. Aussitôt qu'il apprit le départ du duc d'Albe, il se mit en marche. Son but était à la fois de secourir Mons, et de soulever le pays qu'il traverserait.

11 arriva jusqu'au cœur du Brabant, sans avoir ren- contré d'obstacles ni à Herenthals, ni à Tirlemont, ni à Diest. Le 30 août, au matin, Bernard de Mérode,

desPay&'Bas, etc., t. II, p. 269, ce que Charles IX écrivait, le â7 avril 4572, au comte Louis de Nassau. Sur les rapports qui existaient entre les cours d'Espagne et de France en 1572, nous avons donné quelques détails peu connus dans les Particularités inédites sur la SUBarthéUmy, que contiennent les Bulletins de l'Académie, t. XVI, i" partie, p. 235-257.

(■) Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays^ BaSj etc. , t. Il, p. 259.

(») JWa., p. 274.

(3) Lettre du S' de Willerval, gouverneur de Bois*le-Duc, au duc d'Albe, du 28 août 1572. (Papiers d'État.)

XX

seigneur de Waroux^ l'un de ses lieutenants, entra dans Malines, dont les habitants lui ouvrirent eux-mêmes les portes. Le prince se présenta en personne devant Lou- vain. A près une résistance qui fît d'autant plus d'honneur aux bourgeois, que la ville était sans garnison, et que la plus grande partie des élèves de l'université, ainsi que des gens d'église, l'avalent abandonnée ('), un accord fut con- clu, le S septembre, entre lui et le magistrat. Aux termes de cet accord, la ville ne reconnaissait pas son autorité, mais elle devait lui fournir de l'argent et des vlvres('). Le lendemain, Termonde recevait ses troupes Q). Le 7, sa

(■) Lettre du magistrat et de runivcrsité de Louvain au duc d'Arschot, du i" septembre 1572. (Papiers d'État.)

(') Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays- Bas j etc., t. II, p. 277 et 282.

(^) Nous publions (p. 69-70) la lettre qu'il avait écrite aux habi- tants de Termonde, aussitôt après son arrivée à Malines.

Le conseil d'État et le comte du Aœulx, gouverneur de Flandre, n'avaient rien négligé, pour prévenir la perte de Termonde. Le conseil avait commis le S' de Wiese au gouvernement et super-^ intendance de la ville ; il y avait envoyé François de Halewin , S' de Zweveghem, avec la mission d'engager le magistrat et les bourgeois à recevoir garnison. De son côté, le comte du Rœulx avait détaché de ses troupes 430 arquebusiers commandés par le S' d'Eecke, pour aller les secourir : lui-même était en chemin, résolu de s'enfermer dans leur ville, lorsqu'il apprit qu^elle était rendue.

Une lettre qu'il adressa, de Gand, le 7 septembre, au duc d'Albe , contient, sur ce sujet, les détails qui suivent : « Je ne tt doubte , écrit-il, que Yostre ExceUence sera advertye de la » prinse de la ville de Tenremonde, qui advint hier au matin, » environ les dix heures. Hier, au matin, me partys avecq les » S" de Moscron et de Comhuuse, pour aller audict Tenremonde,

XXI

bannière flottait sur ]es murs de la ville et du château d'Audenarde, grâce à l'heureuse témérité de Jacob Blommaert, qu'il avait désigné, dès l'année précédente (p. 36-38), pour en prendre possession en son nom (').

» sur l'asseurance que m'en ayoit donné le magistrat de la ville, » lesquelz ne vouloyent guamison, sinon moy seul, ou avecq fort » peu de compaignye. J'avois pourveu leurs envoyer gens, quatre » jours devant : ilz ne les vouUurent seulement recepvoir, mais » leur mandèrent quïlz eussent à sortir hors de leur territoire. r* Moy venu à un quart de lieue dudict lieu, ayant passé le bacq, H trouviz un prebstre, lequel me dict que les ennemys estoyent » en la ville. Alant ung peu plus avant, vint ung gentilhomme » mien, lequel j'avoyz envoyé devant, me disant avoir parlé à n homme sortant de la porte, quy les avoit veu sur le Marchiet : » quy me feit repasser le bacq, et retourner en ce lieu, quy ne fut » sans dangier. »

Le duc d'Albe fut très-irrité contre les Termondais : il trouva « leur malice par trop extrêmement grande, » d'avoir voulu attirer dans leur ville le comte du Rœulx et ceux de sa compagnie, pour se saisir de leurs personnes. (Lettre au comte du Rœulx, du 10 sep- tembre.) Aussi, informé qu'ils avaient envoyé un messager au magistrat d'Anvers, avec une lettre, il ordonna au S' de Champa- gney de faire pendre et étrangler ce malheureux; et, malgré toutes les représentations que Ghampagney et le duc d'Arschot lui firent, il persista dans cet ordre barbare. (Papiers d'État.)

(') Sur la surprise d'Audenarde par Jacob Blommaert, une lettre du comte du Rœulx au duc d'Albe, écrite de Gand, le 9 sep- tembre, fournit de curieux détails. En voici un extrait :

<t Monseigneur, je n'ay plus tost sccu advertir Vosti*e Excellence de la prinse d'Audenarde, pour ne bien sçavoir les particularitez, quy sont, ad ce que j'entendyz, hier au soir, et encoire h ce matin, par gens venans dudict lieu, que, les ennemis s'estant mis en em- bûche, en une grange prez de la ville, vindrent trois h la porte, avec longs manteaulx, sans espées, et chascun une pistoUe dessoubz

XXII

Si le prince parvenait à débloquer Mons, une insur- rection générale pouvait être la suite de ce succès. Dans

ledict manteau; et estoit la porte serrëc, n'ayant que le guysset ouvert. Cependant que Ton escripyoit le nom du premier, deman- dant leur nom aux deux aultres, dirent Orange. Jectant leur manteau par terre, tuèrent tout roide deux de la garde, de fachon qu'ilz se trouvèrent cinq pour garder ledict guysset, incontinent accoururent environ soixante hommes quy estoyent en embûche en ladicte grange. De se partit ung de leurs gens & cheval, cour- rant vers le Marchiet, et y arrivé cria Grange, et dict à la garde que personne ne se bouge, et h la meisme heure toute ladicte garde sortist, sans faire aulcune résistence : quy estiont ceulx que, par consentement de Vostre Excellence, ceulx de ladicte ville avoyent levez, desquelz estoit capitaine le S' de la MouUerie, présente- ment prisonnier aux ennemys, comme aussy sont les eschevins. De allèrent vers le chasteau, estoit M. de Courtewille, grand bailly, et misrent le feue dedens la porte, et encoire à ung aultre endroict, tellement que, ayant forché ledict de Courtewille, Font tué en combatant, avecq sept de ses soldatz, et le viij** se jecta en le rivière de l'Escault, lequel s'est saulvé à nayge. S'estoyent des douze que je luy avoy envoyé, par commandement de Vostre Excellence, desquelz en avoit renvoy quatre, disant en avoir assez. Cecy est advenu environ les dix heures dimanche, cependant que Ton chantoit la grande messe. Beaucoup de poeuple se sont joinctz avecq eulx. Ils ne sont que cent cinquante, ou au plus deux cens, de ceulx quy ont fait l'entreprinse, desquelz est capitaine Jacob Blommaert, marchant de ladicte ville, banny des troubles der- nières pour la religion, et avoit intelligence en ladicte ville, et principalement avecq l'hoste de l'Éléphant, nommé Jooris Ver- muelen, lequel il a faict son lieutenant. Hz ont tenuz la poortc vingt-quatre heures serrée, et sont en fort grande craincte. »

Le baron de Rassenghien, gouverneur de Lille, Douai et Orchics, écrivait au duc, le i8 septembre :

ti Je suis seurement advcrty, par homme sorty hier d'Aude-

XXIII

tous les Pays - Bas régnait une vive fermentation. A Bruges^ les bourgeois n'avaient pas voulu permettre que le comte du Rœulx Ç) fit entrer des gens de guerre dans la ville ; le peuple poussait des cris de mort contre les Espagnols ; il n'attendait qu'un signal pour se muti- ner f ). A Bruxelles^ malgré la présence du conseil d'Etat et d'une garnison espagnole et allemande, la commune faisait éclater sa sympathie pour le prince (^).

narde, que, mardy dernier, les garehons ayantz surprins ladicte ville, feirent reveue de tout che quy estoit de leur party; et se sont trouvez en nombre de xj°, la pluspart paysans et héréticques y retirez des lieux voysins, bien armés, mais fort mal habilles à s'en ayder, ayant pour chiefz ung détailleur de drap, banny de ladicte ville, nommé Blommaert, avecques ung Baillent et Lati^i- moulle, qui estiont prisonniers au chastean de ladicte ville, sauver; de la deffaicte de devant Mons.... » (Papiers d'État.)

(') Jean de Groy, comte du Rœulx, gouverneur de Flandre.

(') Le comte du Rœulx écrivait au duc d'Albe, le i8 juillet : « Ceulx de ceste ville sont prestz à leur mutiner d'heure à aultre,

» au moins le menu peuple Le commun d'ichy ne voeult

» recepvoir nus étrangiers; mesmes ne voeulent lesser entrer » ceulx quy sont levés pour le Francq ...... Le peuple des vilages

» et le menu de la ville sont plus favorables aux ennemis qu'à

nous Le peuple ne voeult obéyr ny à moy, ny au magis-

n trat »

11 lui mandait, le i9 : ««Le poeuple a esté toutte ceste nuyct en H armes , allant et venant en troupes par la ville , criant qu'ilz » voulloyent avoir la nation espaignole quy est en ceste ville,

» morte Le poeuple est pirre que ne serroye (saurais) escripre

A à y. E., sans nulle obéissance, et ne trouve le magistrat nul » moyen de les rapaiser. n (Papiers d'État.)

(') Dans deux lettres que le duc d'Arschot adressait au duc d'Albe, de Bruxelles, le 5i oùt, il lui <Jisait que la commune

XXIV

A Breda, la nouvelle de la prise de Malines avait été accueillie avec transport; plus de deux cents d'entre les bourgeois étaient allés joindre les insurgés (^). Il n'y avait pas de province, pas de ville, l'on ne souhaitât la chute de cet odieux gouvernement qui avait couvert le pays d'échafauds, attenté aux privilèges les plus chers à la nation, et porté le coup de grâce à la prospérité publique par l'établissement du 10^ denier (^).

Mais la révolution qui s'était opérée dans la politique de Charles IX venait de changer subitement la face des affaires ('). Le prince d'Orange ne pouvait désormais attendre du roi de France les secours qui lui avaient été

n'était pas en la dévotion requise : u Vostre Excellence, ajoutait-il, » cognoissant Thumeur de grand partie du populape, peult bien » considérer qu'il y fait grandement à craindre un grand désor- » dre et scandai, et quelque chose encores de pis »

Le conseil d'État lui écrivait, à son tour, le i*^ septembre, qu'on découvrait de plus en plus «< les mauvaises humeurs et altérations » de ce populace. » (Papiers d'État.)

(■) Lettre de A. d'Estourmel, S' de St-Remy, gouverneur de Breda, au duc d'Albe, du 6 septembre i57â.

(') Citons encore ici un document officiel : « Sy Voslre Excel- M lence n'envoyé bientost gens, et en grant nombre, je ne voy poinct qu'ilz ne fâchent beaucoup de mal , et qu'ilz n'entrent » bien avant au pays, pour estre le poeuple à tous costez fort mal » affectionné au service de S. M., et ce, comme ilz disent, pour

» avoir esté fort mal traictié » (Lettre du comte du Rœulx au

duc d'Albe, écrite de Gand, le 7 septembre 1573, dans la collec- tion des papiers d'État.)

(3) Le prince écrivait au comte Jean de Nassau, son frère : «I S'il ne fut entrevenu (l'événement delà St-Barthélemy), nous » estion» desjà pour cest heure maistres du duc d'Albe, et eussions V capitulé h nostre plaisir. » (Archives, etc., t. 111, p. 505.)

XXV

promis; il avait, au contraire, en lui, un ennemi de plus. L'armée qui assiégeait Mons était supérieure à la sienne, et par le nombre, et par l'expérience et la disci- pline des soldats. Arrivé devant cette ville le 8 septem- bre, il essaya en vain d'y jeter des renforts : il ne put se faire jour à travers les retranchements des Espagnols. Il eut bien quelque avantage dans une première escar- mouche (') : mais, le 9, il essuya un échec au village de Jemniapes, et une camisade dirigée par Julian Romero, dans la nuit du li au 12, lui fit éprouver des pertes con- sidérables (^). Dès lors il était évident que toute tenta-

(■) Archives, etc., t. III, p. 506.

(') Les relations du duc d'Albe sur ces affaires ne sont pas entièrement d'accord avec ceUe que contient la lettre du prince an comte Jean de Nassau, publiée par M. Groen van Prinsterer, Archives, etc., t. II!, p. 501-510.

Voici ce que le duc écrivait à Frédéric Perrenot, seigneur de Champagney, gouverneur d'Anvers, le 13 septembre :

« Monsieur de Champagney, pour vous faire part de ce que passe icy, je vous advise que, le viij* du présent, environ le midy, le prince d'Oranges, avec toutes ses forces, se présenta sur un hault à demy quart de lieue à l'opposite de nous, si qu'il n'y avoit que une plaine entre deux, en laquelle se rendirent incontinent force de nos chevaulx-légers et aultres, pour les approcher et reco- gnoistre : ce que se feit avec quelques escarmouches légères, qui nous menarent jusques à la nuict, que chascun se retira et logea.

» Lendemain matin, grande partie de la cavalerie de l'ennemi vint se monstrer et tenir au mesme hault du jour précédent, et, entretant que se faisoyent les escarmouches, l'on s'apperceust que leur bagaige et aultre partie de leur cavalerie, comme aussi Tinfan- terie, caloyent à leur gauche main , h intention de gaigner le villaige de Gemappc, et passage y estant, pour jecter dedans Mons les gens à ce destinez; mais l'on y avoit si bien pourveu, et se

XXTI

tive ultérieure serait inutile ; il se décida donc à battre en retraite. Il reprit le chemin par lequel il était venu,

poarveut à l'instant davantaige, par hacquebouserie espagnole et walone^ ordonnée à la garde et défense dudict passage, que, forceans les ennemis quicter l'entrée que desjà ilz avoyent com- mencé faire dudict villaige, s'attacbarent en la campaigne si vive- ment et furieusement à eulx, secondez de quelque bien peu de cavallerîe, qu'en furent tuez sur la place bon nombre d'hommes, et entre iceulx quelques principaux, et beaucoup de chevaulx, et plusieurs blessez, tant par ladicte hacquebouserie et cavallerie nostre, que l'artillerie qui estoit en une tranchée, faicte en cest endroict-là, desquelz ce que s'est entendu par prisonniers prins depuis) beaucoup sont morts, retournez en leur camp.

» Le jour ensuyvant, l'ennemy ne se bougea ny monstra, que s'entend avoir esté pour faire reposer et curer lesdicts blessez.

» Le jour après, xj* de cedict mois, l'ennemy alla loger au vil- laige d'Hermigny, h une lieue de Mons, du costé tirant vers Binche, aussi avec desseing de faire entrer par le secours promis h Mons; cequeluifust empesché par une camisade que, à minuict, lui fust dressé par xîj" hacquebousiers, qui exploictarent si vivement ce que leur avoit esté enchargé que, commenceans à une heure, ne cessarent ung moment l'exécution jusques à trois heures du matin, qu'ilz tuarent grand nombre d'hommes et chevaulx, de façon que, hier de bon matin, ledict ennemy se leva comme demy-rompu, et, laissant audict villaige grand nombre de tentes et pavillons tendus et beaucoup de bagaige et hardes, alla loger & Péroné, près ledict Binche, de j'ai rapport que ce matin il s'est parti, et qu'il prend le chemin de la chaulcée.

» Dont j'ai bien voulu vous advertir si particulièrement, h ce que, scachant k la vérité les choses comme elles passent, veissiés comment Dieu, quand luy plaist, dissipe les conseiiz et desseings des malings, et les communicquez à tous ceulx que cognoissez désireux et zéleux du bien des affaires de Sa Majesté, y ajoustant que j'espère bientost, par la grâce de Dieu, la réduction de ccslc ville de Mons en l'obéissance de Sadicte Majesté, et tourner teste

XXVII

ne s'arréftani que peu de jours à Malines (^), retirant suc- cessivenient ses garnisons de Ruremonde, de Gueldre, de Waebtendonek, de Boxraeer(^); et, au commence- ment d'octobre, il licencia son armée (*), « délibéré,

vers les aultres, poar pareillement les y remectre, cercher rennemy la part que le pourrons trouver, et le chasser hors le pays. »

(■) 11 y arriva le 48 septembre, dans l'après-dinée, avec treize cents chevaux reîtres, « tous accoustrez d'une mesme couleur, quy u estoit noir. » Tous les sermens en armes, et enseignes déployées, ainsi que la garnison, étaient rangés sur le Marché, et firent une salve en son honneur. Après avoir harangué le peuple, il leva une main, « disant : Quy m'ayme face le semblable, ce que tous en » général feyrent. » (Rapport envoyé au duc d'Albe, le 19 septem- bre, par le duc d'Arschot, dans la collection des papiers d'Ëtat.)

U quitta Malines le 23.

(') Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays- Bas, etc., t. II, p. 286.

(') La déclaration suivante de deux soldats allemands, faits prisonniers le i9 septembre, au matin, par les chevaux-légers de don Bemardino de Mendoça, donne des détails intéressants sur l'état de l'armée du prince, au moment de sa retraite :

«( Premièrement, que le comte Emels VanMandreslot, marischal du camp dudict prince, a charge de neufi cornettes de reytres, de trois cens chevaulx chascune cornette.

» Le S' Torfendal a trois cornettes.

» Le S' d'Afenstein a la cornette dicte du sang.

» Le S' Wolfersave a la cornette du prince.

» Wertembourg une cornette.

» Ludovic Rompf une cornette.

» Desquelles cornettes il en y a trois à Malines et Tenremondc, soubz la charge dudict Torfendal.

n 11 y a audict camp vingt-quatre enseignes de gens de pied, tant soubz la charge dudict Mandreslot, que du conte Henry de Nassau, frère dudict prince.

XXVIII

» avec la grâce de Dieu (ainsi l'écrivit-il au comte Jean » de Nassau, son frère), de s'aller tenir en Hollande et » Zélande, et de faire illecq sa sépulture (^). »

▼.

Notre Correspondance comprend quatorze lettres, pour les temps qui s'écoulèrent depuis le mois de sep- tembre 1572 jusqu'au mois d'août 1576.

Deux de ces lettres sont dignes d'une mention par- ticulière : c'est celle que Philippe de Marnix , S' de Sainte-Âldegonde, écrivit, de sa prison, à La Haye, le 7 novembre J573 (p. 75), et la réponse que le prince y fit le 28 novembre (p. 88).

Marnix était tombé aux mains des Espagnols, par la lâcheté des soldats qui l'accompagnaient, dans une expé- dition que le prince lui avait confiée. S'il avait eu ce malheur quelques semaines plus tôt, il eût infailliblement été mis à mort Q : le duc d'Âlbe ne voulait entendre â

Il y a aussi audict camp trois pièces d'artillerie portant les balles de la grosseur de deux poings, et cinq pièces de campaigne.

» Et sy a aussy trois chariotz de pouldre h cannon. »

Cette déclaration fut faite, le 19 septembre, à Bruxelles, en présence du duc d'Arschot, qui l'envoya, le même jour, au duc d'Albe. (Papiers d'Ëtot.)

(■) ArchiveSy etc., t. III, p. 5i2, et t. IV, p. 4.

(') On peut voir, ci-après, p. 84, ce que le prince d'Orange écrivait h Julian Romero, le 8 novembre : «( Quant audict seigneur >> Philippe de Marnix, pour aultant que je suis bien asseuré, s'il » vient entre les mains du duc d'Albe, il le fera mourir, ainsi )> qu'il a fait tant d'aultres, etc. »

XXIX

aucun échange, à aucun rachat de prisonniers ; il avail ordonné qu'on pendit tous les insurgés que prendraient les troupes royales, afin qu'il ne parût pas que la guerre se fit comme entre deux princes, tandis qu'il s'agissait seulement de châtier des rebelles ('). Mais, depuis que les Hollandais avaient en leur pouvoir le comte de Boussu et quelques autres hommes de marque, la crainte de représailles qui n'eussent été que trop justifiées, avait agi sur l'esprit du duc, et l'exécution des prisonniers avait été arrêtée (').

Vers le même temps, le duc chargea le S' de Noir- carmes, à qui il venait de confier le gouvernement de Hollande, en remplacement de Boussu, de négocier indi- rectement avec les villes de ce pays, pour les engager à rentrer sous l'obéissance du RôiQ. Noircarmes crut que Marnixlui serait un instrument précieux, non-seulement pour traiter avec les villes, mais aussi pour amener le prince d'Orange à un arrangement. Ce fut à son instiga- tion, que Marnix écrivit la lettre du 7 novembre (^).

On voudrait en vain le dissimuler : Marnix ne montre pas, dans cette lettre, la fermeté dont il donna tant de preuves en d'autres occasions : quoiqu'il dise que ce n'est la crainte des ennemis ni de la mort qui le fait parler, il est évident qu'il subit, malgré lui peut-être, l'influence de la position il se trouve. Sans cela, insisterait-il

(') Correspondance de Philipp Bas, etc., t. 11, p. 445. (') Ibid.

(3) Ibid., p. 437. (♦) Voy. ci-après, p. 369-372.

XXX

autant pour que le prince s'accommode avec le Roi? Irait-il jusqu'à déclarer que, plutôt que de continuer la guerre, ceux qui désirent pratiquer la religion nouvelle doivent s'expatrier, quand bien même on ne leur laisse- rait la disposition d'aucune partie de leurs biens? Atta- cherait-il si peu d'importance aux garanties à obtenir en faveur de ceux qui avaient pris part à la révolte?

Le prince ne lui répond, qu'après avoir communiqué sa lettre aux états et « à d'autres gens de bien et de » qualité, car il ne veut, en acquit du serment et obli- » gation qu'il a à eux, user d'aucune autorité, ny de son » propre mouvement entamer^chose quelconque à leur » desceu, non plus qu'en aultre affaire concernant le bien » dupays» (p. 89). Les états et lui, Marnix ne l'ignore pas, n'ont jamais rien tant désiré et ne désirent encore que la tranquillité et prospérité publique, au moyen d'une bonne et sûre paix ; c'est à regret qu'ils ont pris les armes ; ils ne l'ont fait que pour ne pas tomber dans une servitude intolérable; ils souhaiteraient, plus que personne, la fin des misères et des désolations dont le pays souffre. Mais, si la paix devait leur apporter plus de malheurs, d'inconvénients et de désavantages, sous le rapport de la gloire de Dieu, aussi bien qu'au point de vue de la patrie, n'est-il pas préférable pour eux d'en- durer toutes les incommodités de la guerre? Comment pourraient-ils se fier aux promesses qu'on leur ferait , après ce qui s'est passé aux Pays-Bas, à la suite de l'ac- cord conclu avec la duchesse de Parme ; après le massa- cre de la St-Barthélemy; après ce qui arriva, sous le règne de Charles-Quint, au landgrave de Hesse et au marquis de Brandebourg ? La maxime adoptée par le

XXXI

concile de Constance, qu'il ne faut garder aucune foi aux hérétiques, ne leur enseigne-t-elle pas ce qu'ils ont à attendre de leurs ennemis? Marnix doit donc peu s'éton- ner, s'ils ne voient a aulcun moyen de conclure et cm- » brasser quelque paix et accord. >)

M. Gbobn van Prinsterer a publié la réplique de Marnix ('). LeS** de Sainte-Aldegonde y répète ces argu- ments, — propres à amollir le courage du prince et à faire fléchir sa constance, que la guerre entraine «tous » desbordemens , dissolutions, énormités et licences; » qu'on voit , dans toutes les histoires anciennes et mo- dernes^ de semblables guerres civiles avoir une issue funeste , tandis que , au commencement , on eût pu obtenir des conditions « aucunement tolérables : » il cite, à l'appui de sa thèse , des exemples tirés de la guerre du Péloponèse , de la vie de César , de l'invasion des Goths et des Vandales. Il s'attache, au surplus, à lever les scru- pules du prince fondés sur le peu de confiance qu'on pouvait avoir dans les promesses du gouvernement espa- gnol : selon lui , il fallait d'abord traiter des conditions d'un accommodement ; ensuite on conviendrait des assu- rances qui seraient données en garantie de l'accord , et , si le prince ne les trouvait suffisantes, « un chascun seroit » en son entier, comme du commenchement. » On verra, plus loin , que , en 1577, Marnix tenait un tout autre langage !

Quatre lettres sont écrites, de Delft, par le prince, au mestre de camp Julian Romero, qui venait de s'emparer de La Haye.

(>) Archives, etc., t. IV, p. 286-393.

XXXII

Ce vétéran des troupes espagnoles avait pris la résolu- tion de retourner dans son pays en même temps que le due d'Aibe (') : avant de quitter l'armée , il désira avoir une entrevue avee le prince ; il espérait lui persuader sans doute de prendre le parti de la soumission. Quoi- qu'il n'y fût pas autorisé ('), il lui écrivit pour cet objet : il connaissait personnel fcment le prince^ ayant servi sous ses ordres et ceux du comte d'Eginont^ lorsque Philippe II, en 1SS9, avait confié à ces deux seigneurs le commande- ment en chef de l'infanterie espagnole restée aux Pays-Bas.

JuIianRomero, dans sa lettre, parlait aussi des prison- niers, qu'il proposait de traiter, à l'avenir, avec moins de barbarie. Le prince lui répond que, pour sa part, il n'a <c jamais eu aultre volunté, » et qu'il eût ce esté très- » aise de venir cesser touttes les cruaultez et inhuma- » nitez, cy-devant non usitées. » Quant à l'entrevue, il s'en excuse ; mais il offre , si Romero a quelque chose à lui dire, de lui envoyer une personne de confiance (p. 81-82).

Dans sa seconde lettre, il remercie le général espagnol du bon traitement qu'il fait à Marnix ; il exprime le regret que le départ de Romero lui cause ; il le prie de remon- trer au Roi l'état des Pays-Bas , et leur ruine certaine, si Sa Majesté n'y pourvoit point par les mesures néces- saires ; il lui demande enfin l'échange ou le rachat de Marnix. (p. 83-84).

(•) Correspondance de Philippe II sur les affaires des Pays- Bas, etc., t. II, p. 452.

(') Le grand commandeur de GasUlle trouva cette démarche inconsidérée, et Ten blâma. /6ûl., p. 45i.

XXXIII

La troisième parait servir de réponse ai une proposition de Julian Romero, louchant l'échange de Marnix contre le comte de Boussu , proposition que le prince n'accepte pas, comme étant a hors de propos et raison. » 11 est prêt toutefois, si Romero a c< envie de lui faire entendre autre » chose, » à lui envoyer deux personnages; pour recevoir cette communication (p. 8S).

C'était au prince, et non à d'autres, que le mestre de camp voulait avoir affaire. Il n'insista donc pas sur la conférence qu'il avait mise en avant , et il engagea le prince à s'expliquer davantage sur ce qu'il souhaitait , par son intermédiaire, représenter au Roi. La réponse de Guillaume fait la matière de sa quatrième lettre. Il y donne clairement à connaître que les pays révoltés ne se soumettront que moyennant « la permission de povoir » servir Dieu selon son sainet commandement et paroi le, » et de vivre selon les anchiennes libertez et jurez privi- >* léges»(p. 86-87).

Il y a trois lettres adressées par le prince à une autre notabilité de l'armée espagnole, le colonel Mondragon.

Mondragon , après une brillante défense , avait été obligé de rendre Middelbourg, au mois de février 1574. Un des articles de la capitulation portait qu'il se consti- tuerait prisonnier en Hollande, si quelques-uns des gens des états que les troupes royales avaient en leur pou- voir, et nommément Marnix, n'étaient pas mis en liberté dans le délai de deux mois. Le grand commandeur de Castille refusa l'élargissement de ces derniers, tout en s'op- posantà cequeMondragonaccomplit sa promesse. C'était placer dans une position fâcheuse pour son honneur un des plus braves officiers que Philippe II eut aux Pays-Bas.

III. c

XXXIV

Les deux premières lettres do prince (p. 96, 98) ont pour objet de rappeler à Mondragon ses engagements, et de le sommer, « comme gentilhomme et homme d'hon- » neur, » de les remplir. Par la dernière , qui est du S mai 1574 (p. 99-101), le prince consent à lui accorder encore quinze jours pour la restitution des prisonniers hollandais, à condition que, si elle continue d'éprouver des obstacles de la part du gouverneur général, Mondra- gon viendra tenir prison à Gertrudenberg. Les prison- niers réclamés par le prince ne furent pas rendus , et Mondragon ne parut pas en Hollande. Plus tard, il éleva une chicane, par rapport à Jacob Simonszoon, qu'il avait renvoyé au prince (p. 399). Cette contestation prit fin au mois d'octobre, Marnix ayant, à cette époque, été relâché.

Les cinq autres lettres sont écrites aux ministres des églises belges en Angleterre (p. 73); au seigneur de Noircarmes (p. 93) ; à la garnison de Middelbourg (p. 95); à Sybrant Munter (p. 102); au comte Wolfgang de Hohenlohe (p. 104). Nous n'avons aucune observation particulière à faire sur leur contenu.

VI.

Depuis que le prince d'Orange avait levé l'étendard de la révolte, Philippe II ni le duc d'Àlbe n'avaient jamais voulu entendre parler de négociations directes ou indirectes avec lui. Ils s'étaient indignés, en 1568, que l'Empereur lui eût envoyé une ambassade spéciale, en même temps qu'au duc, pour les engager l'un et l'autre à s'abstenir d'hostilités; ils n'avaient pu comprendre

XXXV

qu'on ne fit aucune différence entre un souverain et un vassal rebelle ('). En i57S, Philippe II, parlant à l'am- bassadeur de France, avait rejeté bien loin Fidée d'un accommodement quelconque entre lui et le prince (^). L'année suivante, le duc d'Àlbe avait infligé un blâme sévère à Antonio Guaras, agent espagnol à Londres, qui avait prêté l'oreille à des propositions des ministres d'Eli- sabeth tendantes à réconcflier le prince avec le Boi(^); il avait repoussé une ouverture de l'archevêque de Cologne faite dans le même sens (^); enfln il s'était montré très- mécontent que Noircarmes (') eût cherché à nouer des relations avec le prince, en y employant Marnix, devenu prisonnier des Espagnols (^) : « Que ce rebelle, disait-il à » l'envoyé de Cologne, mette bas les armes, et sollicite » son pardon, alors on verra ce qu'on aura à faire Ç). »

(') Correspondance de Philippe If sur les affaires des Pays- Bas, etc., t. II, p. 44, 46, 48, 57, 58 .

(')/Wd., p.289.

(') Ibid., p. 369.

(^) Ibid., p. 395.

(5) Voy. ci-après, p. 369.

(*) Voy. ci-dessus, p. xxviii. Le duc écrivait à Requesens, de Bellefontaine en Bourgogne, le i<^ janvier i574 : El camino que Norcames ha tomado no me ha contentado nada.. . . Que, si cuando el me escribiô que, pues las mllas non venian a tratarcon él^ s% yo hcbria por bien que tratase con ellas, y yo le respondi que si, de muy buena voluntad, no se ha de entender de alli, ni yo nunca entendis que se hubiese en ninguna manera del mundo de entrar con el principe de Oranges en platica, ni que se hubiese por su mano de tractar con las villas..,. (Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 56i .)

(7) Correspondance de Philippe //, etc., t. Il, p. 395.

XXXVI

Requesens adopta d'abord les principes de son prédé- cesseur : il désapprouva les lettres écrites par Julian Romero au prince ('); il fit savoir à Noircarmes qu'il ne fallait entrer dans aucune négociation avec les villes de Hollande par le moyen de ce dernier Q. Mais, après la perte de Middelbourg (18 février 1S74)^ et malgré la victoire de Moock (14 avril), il changea d'opinion : il n'avait pas tardé à s'apercevoir que, si l'on ne donnait sa- tisfaction au prince, les troubles des Pays-Bas n'auraient pas de fin. II autorisa donc, au mois d'avril 1S74, le doeleur Elbertus Leoninus, qui avait eu antérieurement des raj)ports d'intimité et de confiance avec le prince, à lui envoyer Hugo Bonté, ex-pensionnaire de Middel- bourg : le but ostensible du voyage de Bonté était d'en- tretenir le stathouder des affaires particulières de la dame de Vredembourg (*) ; le motif réel en était de le pressentir sur ses intentions. Boute retourna, une seconde fois, dans le mois de juin, vers Guillaume le Taciturne, toujours envoyé par Leoninus, et avec l'assentiment du

(') Correspondance de Philippe fl, etc., t. II, p. 45i.

(•) Ibid., p. 438.

(3) Maximilicn Morillon écrivait à Granvelle, le 26 avril i574 : «( La dame de Vredeburch, fille bastarde du dernier duc de Guel- » dres, at soubstenu trois sièges de ceulx de Bomele, qui à la fin » ont amené grosse artillerie, de sorte qu'elle at esté constraincte » de se rendre. Ils l'ont mené prisonnière avec ses filles en leur » ville, la menassant de pendre, lui ravi tous ses meubles, rasé n son chasteau, que l'on ne sçauroit redresser pour 80,000 florins, » tel qu'il cstoit. Mais le prince d'Orengcs l'at fait délivrer, et ren- n voie avec ses filles. ...» [Archives ou Correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau, t. IV, p. 382.)

XXXVIl

gouverneur général. Dans le même temps, Frédéric Per- renot, S^ de Cbampagney, faisait sonder Guillaume, d'abord par le S' de Rivière et l'avocat Treslong, ensuite par Mamix, qui n'avait pas encore recouvré sa liberté. Toutes ces démarches n'ayant abouti à rien, Requesens, au mois de novembre, après la levée du siège de Leyde, se décida à en faire une lui-même : il députa Leoninus au prince.

On ne savait, jusqu'ici, presque rien de ces différentes négociations : Guillaume, dans ses lettres au comte Jean de Nassau, son frère, que M. Grobn van Prinsterbr a publiées, dit à peine quelques mots de la mission de Leoninus. Aussije m'estime heureux d'avoir pu recueillir des pièces telles que les instructions et les rapports de Bonle (p. 373-581 et 384-392), de Marnix, (p. 397- 402), de Rivière et Treslong (p. 393-397) ; la commission de Leoninus, ses instructions, sa correspondance avec le grand commandeur, et enfin une relation circonstan- ciée de son voyage en Hollande et en Zélande (p. 403- 430). Certes, on ne saurait désirer des documents plus instructife, plus complets. J'y ai ajouté une déclaration de Marnix, du 21 novembre 1S73, sur les conditions auxquelles il croyait que le prince consentirait à poser les armes (p. 367), et une lettre de Koircarmes sur les ouvertures qu'il lui avait fait faire par Marnix (p. 369- 373).

Le langage de Guillaume aux divers envoyés de Requesens mérite d'être le sujet de plus d'une observa- tion. Il faut remarquer, en premier lieu, sa fidélité aux engagements qu'il a contractés envers les états de Hol- lande et de Zélande. Bonté le presse de solliciter, pour

XXXVIII

lui et pour les provinces insurgées, le pardon du Roi : il s'y refuse, « actendue l'union qu'il avoit avecq les )> estatz susdicts , el que telle déelairalion, sans consen- » tement desdicts estatz , eauseroit préjudice à l'union

» susdicte, subçons et arrière-pensées; que lesdicts

» affaires touchoient ausdicts estatz, desquelz il estoit » serviteur et esleu deffendeur : déclarant qu'il se con- » formeroit à ce que par lesdicts estatz seroit trouvé

» raisonnable ; se référant tousjours à ce que lesdicts

» estatz consenti roient ou accepteroient , sans l'advis et

» consentement desquelz il ne povoit riens faire >>

(p. 578 et 380).

On ne peut en cela l'accuser de dissimulation, car, ainsi qu'on l'a vu, à Marnix, qui avait sa confiance en- tière, il avait écrit en des termes absolument semblables; et lorsque, plus tard, à Rotterdam, Marnix lui soumit un projet de requête pour le grand commandeur de Castille, il lui déclara encore « n'avoir jamais voulu faire ny » attenter chose de conséquence, de soy-mesme, sans » advis et auctorité des députez des estatz; aussy, que » cest affaire ne le concernoit en son particulier, mais à » tout le pays en général ; ne vouloit partant rien faire » ny concluyre là-dessus... » (p. 400).

U dit de même à Leoninus : « qu'il estoit obligé par » serment avec les estatz;.... (p. 424); qu'il laissoit » toutes choses adviser et résouldre par les estatz, prc- » mièrement, et qu'il ne traictoit riens sans leur volunlé » et délibération précédente... » (p. 427).

On verra, dans la suite, qu'il ne dévia jamais de ce chemin , que lui traçaient la loyauté et Thonneur.

Une autre déclaration, également importante, résulte

XXXIX

de ses réponses aux envoyés de Requesens : c'est qu'il était prêt à se retirer du pays, une fois les troubles apai* ses, si les états de Hollande et de Zélande le trouvaient bon (p. 396 et 400). Déjà, au mois de novembre i 575, Marnix exprimait l'opinion que le prince « seroit bien » content de poser les armes et quicter le pays de par » deçà; » mais il était dans Terreur, ou feignait de l'être, en supposant que Guillaume se bornerait à demander, pour ses coreligionnaires , la jouissance de leurs biens, loin de leur patrie (p. 368). Les dispositions de Guil- laume, à cet égard, ne sont rien moins qu'équivoques; il mandait à ses frères, dès le S février de la même année iS73, que toute négociation devrait être subor- donnée au libre exercice de la religion protestante, au rétablissement des anciens privilèges, et à la sortie du pays des Espagnols et autres étrangers ('). Il leur renou- velait cette déclaration le i5 novembre suivant (^), trois jours après sa lettre à Julian Romero dont nous avons ci-dessus rappelé les termes. Marnix, lorsqu'il se rendit à Rotterdam, put d'ailleurs s'assurer, par lui- même, qu'il s'était mépris sur les intentions du prince (p. 400-401).

La défiance que Guillaume avait de Philippe II et de ses ministres, défiance qu'on ne put jamais parvenir à déraciner de son esprit^ se manifeste dans ses commu- nications avec les envoyés de Requesens (p. 389).

Nous y trouvons encore un témoignage desaconstance,

(•) Archives ou Correspo^idance inédite de la maison d'Oratige-- D{assau, t. IV, p. 50. (*) Ibid., p. 236.

XL

et de sa résolution de poursuivre jusqu'à la fin l'entre- prise à laquelle il avait voué sa vie^ quelque tournure que prissent les événements. Bonté, pour l'ébranler, lui fait envisager la puissance du Roi : il répond « qu'il » congnoist Sa Majesté estre très-puissant, mais qu'il y » a un roy plus puissant, à sçavoir : Dieu le Créateur, )> et qu'il espère que ce roy sera pour lui. .. ; qu'en tous » événemens, ilz auroient moyen de tenir du moings » quatre ou cinq places, par deux, trois ou quatre années, durant lesquelles pourroient survenir telles » interventions dont Sa Majesté seroit esmerveillée » (p. 380). Et une autre fois il ajoute que, si on les réduit à l'extrémité, ils mettront la Hollande et la Zélande en une main plus forte ^ que ce pays est une belle fille qui ne manque pas de prétendants (p. 392).

Enfin, nous recueillons, dans les rapports de Bonté, un trait de magnanimité qui doit trouver place ici. L'ex-pensionnaire de Middelbourg, suivant les instruc- tions qu'il a reçues de Leoninus, engage le prince à considérer les fatigues qu'il a supportées déjà, les périls qu'il a courus, l'inconstance du sort de la guerre, surtout quand celle-ci dépend du peuple, qui est si variable: il lui représente qu'on n'obtient jamais de meilleures con- ditions que durant la prospérité; il l'exborte à profiter de l'occasion, pour se remettre en repos, lui, ses enfants, ses amis et ses adhérents (p. 375). Rien de tout cela n'émeut Guillaume : il dit à Bonté c< qu'il sçait bien les » ruses (peines) et variations des guerres, mesmes » fundées sur ung populace , mais que les estatz de n Hollande et Zellande ont mis tel ordre qu'il espère » que par le populace n'adviendra quelque désordre, et

XLI

» que, s'il advient quelque adversité, il ne sera en )> paine, comme ayant assez vescu, et qu'il mourra » avec quelque gloire... » (p. 579).

En définitive, la mission de Leoninus ne fut pas tout à fait sans fruit : elle amena, elle prépara les conférences qui s'ouvrirent à Breda, au mois de février 1575, et l'on vit siéger, en face des ministres de Philippe H, des députés du prince d'Orange et des provinces révoltées.

Les archives de Bruxelles renferment de nombreux et de précieux documents sur le congrès de Breda. Je ne les ai pas insérés dans ce volume ; ils y auraient occupé trop de place : d'ailleurs, ils ne concernent pas person- nellement le prince d'Orange. Peut-être, plus tard, en ferai-je l'objet d'une publication spéciale.

VII.

Guillaume allait enfin recueillir le fruit de tanl de travaux, de sacrifices, de persévérance. Exaspérée par les mutineries et les brigandages dont les troupes espa- gnoles se rendirent coupables, après la prise deZiericzée, la nation entière se leva pour chasser les étrangers du sol belge ; à la voix des états de Brabant, des députés do toutes les provinces obéissantes s'assemblèrentàBruxelles, et une de leurs premières résolutions fut de traiter avec le prince d'Orange et les états de Hollande et de Zélande : déjà le comte du Bœulx et les états de Flandre avaient sollicité des secours du prince, pour bâter la reddition du château de Gand .

Ce fut en cette ville qu'eurent lieu les négociations

XLII

entre les commissaires des provinces obéissantes et ceux des provinces révoltées; elles eurent pour résultat le traité si célèbre dans notre histoire, sous le nom de Pacification de Gand, traité qui accordait au prince, non-seulement tous les points vainement réclamés par lui au congrès de Breda, la sortie des étrangers, la convocation des états généraux pour régler les affaires de la religion , la restitution des biens confisqués , mais d'autres encore qui avaient leur importance.

La politique de Guillaume obtenait un éclatant triom- phe. Mais aussi que d'habileté n'avait-il pas déployée, pour attacher à sa cause tous ceux qui pouvaient en assurer le succès ! Ce volume en offre plus d'un témoi- gnage. Nous appelons l'attention sur ses lettres à Guil- laume de Bornes, S*" de Hèze (p. 106), à Henri de Bloyere(p. ilO, il2), deux des promoteurs du mouve- ment populaire de cette époque, au marquis de Havre (p. 130). Nous signalons encore aux historiens ses deux lettres aux états généraux (p. Ii7-i20 et 140-156), la dernière surtout, il engage les représentants de la nation à exprimer au Roi leur ferme volonté de main- tenir les franchises et les droits du pays.

Celles que les états généraux lui écrivent, pour lui pro- poser d'entrer en négociation (p. 113, 115, 116); celles qu'il adresse à ses députés à Gand (p. 121, 124. 139), au colonel YandenTympel (p. 122), au comte du Rœulx (p. 126), au conseil d'État (p. 127, 137, 15S), four- nissent des éclaircissements qui ne sont pas sans utilité.

XLIII

VIII.

Au moment même toutes les provinces des Pays- Bas signaient, à Gand, par leurs députés, une réconci- liation et une union si ardemment désirées, un nouveau gouverneur arrivait à Luxembourg : c'était un prince du sang royal, comme la nation Tavait toujours demandé; c'était un fils de Charles^Quint dont les Belges conser- vaient avec vénération la mémoire ; c'était un héros dont la victoire de Lépante avait rendu le nom célèbre dans toute la chrétienté ; c'était don Juan d'Autriche enfin .

Cet événement dérangeait les combinaisons du prince d'Orange. Aussi nât-il tout en œuvre pour détourner les états généraux de traiter avec don Juan. On verra, dans notre Recueil, ce qu'il écrivait, le 14 novembre, les IS et 26 janvier, le 2 février, aux états généraux (p. 137, 179, 201, 203), et sa lettre du 19 décembre au duc d'Arschot (p. 171); on s'arrêtera surtout aux instructions qu'il donnait, le 17 et le 26 janvier, d'abord à Alexandre de Zoete et à Guillaume de Manlde, ensuite à Henri de Bloyere, envoyés par lui vers le comte de Lalaing, le sénéchal de Hainaut, le vicomte de Gand, les S" de Montigny, de Hèze, de Bersele, de Noy elles, de Glymes et de la Motte (p. 181, 188, 194. 195), car c'est dans ces communications faites à des gentilshommes qui s'étaient hautement déclarés pour lui, qu'il faut cher- cher la manifestation de ses vues, le fond de sa pensée. Ces derniers documents peuvent, sans contredit, être cités parmi les plus intéressants de notre Recueil. Le

XLIV

prince,' dans l'instruction du 17 janvier, u hésite pas à conseiller de a rompre du tout et à plat » la négociation commencée avec don Juan, si l'on ne préfère renouveler te coup de main du 4 septembre contre « les personnes » principales du gouvernement et du conseil d'Estat » (p. 186-187); il laisse assez comprendre qu'il incline vers ce dernier parti.

Les seigneurs que nous venons de nommer, suppo* sant que doa Juan ne consentira pas à la sortie des Espagnols, qu'ainsi les négociations avorteront, engagent le prince à venir à Bruxelles, pour se joindre à eux : ils promettent de lui faire ouvrir le château de Gand , de recevoir ses troupes en garnison à Termonde, de lui laisser le choix de la garde qu'il voudra avoir ; ils jurent qu'il ne sera rien attenté sur sa personne, « et qu'ilz » l'empescheront et vengeront jusques à la dernière goutte » de leur sang. » Ils ne lui demandent qu'une chose : c'est de donner l'assurance que , par lui , ni par ceux de sa suite, (( il ne sera riens attempté ni innové contre la reli- » gion catholicque romaine» (p. 189-191, 192*193).

Le prince leur répond , sur le point de sa venue à Bruxelles, que, «comme il n'a rien plus chier que de » leur faire service, en cas qu'ilz le désirent et requiè- » rent, et qu'il puisse avancer par ce moyen le bien et » repos de la patrie , qui est le but principal et unique » de toutes ses actions , il ne fera difficulté de s'y ache- » miner (p. 198) » : mais, « affin que les chemins et » passages ne luy puissent estre ostcz , clos ou couppez )> du costé d'Anvers, » il les prie d'ajouter la ville de Huist à celles qu'on lui a offertes pour sa garantie. Quant à ce qui concerne la religion catholique, il s'engage à la

XLV

respecter, « bien entendu qu'il lui sera loisible avoir » l!exercice de sa religion en sa maison (p. i99). »

Si le prince se défiait du conseil d'État et de la majo- rité des états généraux, ce n'était pas sans raison, car ils ne lui étaient rien moins que favorables. Tandis que les états lui faisaient part des incidents de la négociation avec don Juan (p. i 6^-4 68, 178), ils se plaignaient aussi des infractions qui étaient commises, de son côté , à la paix de Gand, et insistaient pour qu'elles fussent redres- sées (p. i69, i77, i80). Le conseil d'État se joignait à eux dans ces réclamations (p. 170).

Enfin le parti qui, dans les états généraux, voulait un arrangement avec le Roi, l'emporta: don Juan avait fait d'ailleurs toutes les concessions exigées de lui. Toutefois, avant de « résouldrc, ny prendre conclusion finale », les états députèrent le S*" de Willerval et le pensionnaire Buys, accompagnés du docteur Gaill , ambassadeur de l'Empereur, pour communiquer au prince a la démenée » et négociation de cest a£Eaire » (p. 20^208).

Guillaume ne pouvait évidemment pas se prononcer sur un objet d'une aussi haute importance, sans connaître l'opinion des états de Hollande et de Zélande, qui n'étaient pas réunis. Peut-être aussi était-il bien aise de gagner du temps. Don Juan, qui avait apposé sa signature au traité, pressait cependant les états généraux de con- clure; les ambassadeurs de l'Empereur, du duc de Clèves et de l'évéque de Liège agissaient dans le même sens. II y eut une réunion particulière du conseil d'État et des membres les plus influents des états généraux , l'on décida qu'il n'avait pas été rendu compte au prince d*Orange de la négociation, pour qu'il l'approuvât,

XLVI

seulement pour rinstruire de ce qui se passait ; qu'il n'était donc pas besoin d'attendre sa réponse ('). Cet avis prévalut dans le sein des états généraux, et, le i7 février, le traité, revêtu de la signature des parties contractantes, fut publié solennellement du haut de la maison de ville de Bruxelles.

Les états envoyèrent au prince, pour justifier la réso- lution qu'ils avaient prise, François de Halewin, seigneur de Zweveghem, et le pensionnaire Meetkercke. Nous publions leur lettre (p. 2i2-2i7), et l'instruction qu'ils donnèrent â leurs députés (p. 218-22i).

Comme on devait s'y attendre, le prince et les états de Hollande et de Zélande élevèrent plus d'une objection contre le traité : ils finirent néanmoins par déclarer qu'ils le signeraient , moyennant que les états généraux s'obligeassent à cesser toute ultérieure communication avec don Juan, si les Espagnols et autres étrangers n'étaient pas sortis des Pays-Bas à l'époque fixée (p. 22S-232). Un passage de la réponse (p. 225-224)

(') Cette particularité nous a été révélée par une lettre de don Juan au Roi, du 22 février, conservée aux Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 575. Voici comme don Juan s'y exprime : .... Sejuntaron los del consejo de Estado con los diputadott par- ticulares de los estados, y tractaron entre si que hs dichos esta- dos no habian dodo cuenta de lo que habian hecho al principe para que tubiese mano en que se hiciese o dejase de ha^er la paz, sino por tenerle avisado, como hasta alli^ de lo que pasaba, y que no era menester, para concluiry esperar su respuesta, pues tenian ya los capilulos firmados de mi mano ; y con esta resolucion se fueron à los estados à los diez y siete dcste por la manana ; y hahiendola consultado con ellos, determinaron todos que se con- cluyesse y publicase luego la paz.

^-- XLVII

mais que le prince fit à la lettre des états généraux , mérite quelque attention, car on y trouve le germe des doléances qu'il fit entendre depuis sur la conduite tor- tueuse de don Juan; après avoir dit aux états qu'il s'en tenait au rapport de leurs députés^ il ajoute : a Seul- » lement, vous prieray, messieurs, d'avoir tousjours » bon regard que l'affaire de ceste pacification soit telle- » ment conduite, qu'elle ne tire plus de maulx et incon- » véniens après soy, que Ton n'a veu du passé. »

Bien des personnes alors suspectaient la sincérité de don Juan, et ne croyaient pas qu'il eût l'intention d'ac- complir ses promesses, surtout en ce qui concernait la sortie des Espagnols. Le prince d'Orange était de ce nombre ('). Don Juan écrivit au Roi que cette persua- sion seule avait engagé le prince à accepter le traité de Marche f ). Le docteur del Rio, que Guillaume venait de relâcher, à la demande des états généraux et du con- seil d'État, portait le même jugement sur le motif qui l'avait fait agir (^). L'un et l'autre étaient convaincus

(') Voy. ses lettres du 18 décembre au comte de Boussu, et du 6 février au comte Jean de Nassau, dans les Archives^ etc., t. V, p. 570 et Gid. Voy. aussi ce que dit M. Groen yàn Prinsterer, t. VI, p. 84.

(») ....En este medio fui avisado por diversas incw que el prin- cipe de Oranges se dexaba entender que le pesaba de haber fir- modo la paz, y que lo habia hecho, no pudiendo créer que yo hubiese de cumplir lo que habia prometido sobre la salida de los Espanoles, y que ténia determinado de romper por cualquiera via que a esto sefaltase.... (Lettre du 16 mars 1577, aux Archives de SimsacaSj papeles de Estado, liasse 574. j

(') .... Que al principe ha pesado mucho de aprobar las paceSy y que, si lo hizOy fuè por parecerle que S. À. no cumpliria lo que

XLVIII

que, se voyant déçu de son attente, il saisirait toutes les oecasions de troubler la paix.

Sa conduite, on doit en convenir, donne à ces conjec- tures un caractère de réalité. II ne néglige rien pour brouiller les états avec don Juan, avant que ce prince soit reçu à Bruxelles et accepté comme gouverneur. Le besoin de repos el de tranquillité se faisait généralement sentir dans le pays : u il rend inutile ce concours de » volontés pacifiques ; il redouble d'efforts pour prévenir » une réconciliation quil juge funeste; il commente » chaque démarche de manière à y trouver matière de » soupçon... (^). » M. GaoEif van Prinsterbr explique ainsi sa politique : ce II avait beaucoup de motifs pour » désirer la paix ; il en avait un plus grand pour la » combattre : le zèle pour la religion évangélique, puis- » que la partie adverse mettait chaque fois en avant le » maintien exclusif du catholicisme (^). »

Entre les divers documents de cette époque que ren- ferme notre Recueil, nous en signalerons deux les senti- ments et les desseins du prince se révèlent d'une manière plus particulière : nous voulons parler de Tinstruction donnée au S' de Mansart le 6 mars 1577(p. 2S7-262), et de la leltre écrite, vers la même époque, par Philippe de Marnix à Gaspar Schetz, S' de Grobbendoncq (p. 24i- 2S6). Cette dernière, Marnix s'applique à démontrer

promeHa, o que no se vendria a Lovayna, y que enîiende por derto que no las guardarâ, sino que, salidos las Espanoles^ ront" perd la guerra,., (Avis de del Rio, remis à don Juan et envoyé au Roi le 16 mars, avec la lettre mentionnée en la note précédente.)

(') Grobn van Prinstbrer, Archives, etc., t. VI, p. x.

(') Ibid., p. xLVii.

XLIX

qu'on ne peut se fier ni à don Juan ^ ni à Philippe II, et qu'on se bercerait d'illusions^ en se flattant que le Roi eût résolu de remplacer la rigueur par la clémence dans le gouvernement des Pays-Bas , est certainement l'une des pièces les plus remarquables sorties de la plume du S"" de Ste-Aldegonde.

Les lettres écrites au prince par les états généraux et le conseil d'État, ainsi que ses réponses , concernent : la restitution du docteur del Rio et des autres prisonniers gardés tant en Zélande, qu'en Hollande, à Groningue et à Grave ( p. 233, 235, 239, 263, 277) ; les Français qui s'étaient retirés à ^ieuport(p. 237, 240); les plaintes des habitants de Harlem sur la manière dont ils étaient traités par le prince (p. 238); les réclamations qu'éle- vaient différentes personnes afin de rentrer dans leurs biens en Hollande et en Zélande (p. 276); le rétablisse- ment de la liberté du commerce, par l'abolition des impôts que, dans ces deux provinces , on levait sur le passage des marchandises (p. 275, 278, 283) ; l'envoi à Bruxelles de commissaires des états de Hollande, pour s'entendre sur le règlement des monnaies (p. 236, 26S, 278); la réintégration dans sa charge du bailli de Pontviiet (p. 286). Dans une de leurs lettres, celle du 3 avril i577, les états généraux instruisent le prince de quelques particularités relatives à don Juan d'Au- triche (p. 284-285).

Il y a deux lettres du prince au duc d'Arschot. Dans l'une , il recommande Jacques Calvart au duc pour la place d'inspecteur des assurances à Anvers (p. 287). L'autre roule sur différentes matières, et notamment sur le désir que Philippe de Croy lui avait manifesté d'avoir

III. d

L

avec lui une entrevue (p. 269). Déjà les rapports entre le chef de l'opposition calviniste et le chef de la noblesse catboliqtfe n'étaient plus tels qu'ils avaient été au temps de la pacification de Gand : Guillaume remercie néan- moins le duc « de la peine qu'il continue à prendre , de » plus en plus, pour le bien et tranquillité du pays; » il lui exprime sa reconnaissance, « voyant de quelle sin- )> cérité fraternelle il poursuit la bonne affection que tous- » jours il lui a portée : » mais il évite de lui parler de la situation des affaires, et se sert d'un prétexte pour refuser l'entrevue demandée. Cette lettre est du 24 mars 1577; le duc était en ce moment auprès de don Juan, à Louvain.

Breda n'avait pas été rendu au prince : il écrit aux états généraux pour s'en plaindre, et demander que la pacification de Gand soit exécutée (p. 266). Dans sa lettre du 24 mars au duc d'Arschot, il insiste sur ce point. JNous donnons en note (p. 267, 270-274) qjuelques pièces qui servent à éclaircir les faits relatifs à la récla- mation du prince.

Mentionnons enfin, pour terminer cette revue de la partie de notre Recueil qui est antérieure à la réception de don Juan d'Autriche, les lettres de Guillaume au comte de Lalaing (p. 279) et aux échevins de Gand (p. 281 ), concernant deux des compagnies du prince qui occupaient le château, et qu'on voulait en faire sortir.

Don Juan, quoiqu'il se fût mis d'accord avec les états généraux, avait bien compris«que rien ne serait fait, tant que le prince d'Orange ne reconnaîtrait pas l'autorité

Ll

du Roi : « car, écrivaît-i) à Philippe H, c'est le pilote qui » conduit cette barque, et lui seul peut la perdre, ou la » sauver. Les plus grands obstacles seraient donc éeartés, » si Ton parvenait à le gagner ('). »

Il avait pensé d'abord à offrir au prince de conférer au comte de Buren, son fils, ses gouvernements et ses charges, à condition que lui-même se retirerait en Alle- magne (^), et cet arrangement avait été fort goûté du Roi (^) : mais il vit bientôt que le prince n'y donnerait pas les mains. Une pareille transaction eût été acceptée peut-être quelques années auparavant : le nouvel aspect qu'avaient pris les affaires , les engagements réciproques que les états des provinces insurgées et lui avaient con- tractés, ne permettaient plus à Guillaume d'y souscrire.

Pendant que don Juan était à Louvain, il conféra sur ce sujet avec le duc d'Arschot, et ils convinrent que le docteur Leoninus, muni d'une lettre du duc, irait trouver le prince. Pour donner plus de poids à la négociation,

( * ) .... Siendo el timon que guia y goviema esta barca, es tant - bien el que la puede perder 6 salvar, y con ganarle a él, se qui- taria la mayor dificultad é impedimiento que agora tiene este negocio,.,. (Lettre du 16 mars iS??, aux Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 574.)

(*) .... Si, con el condede Bura, pudiésemos sacar à su padre de Olanda y Gelanda, y que se fuese d Àlemaniay y il quedase en el gobtemo y cargos, téngolo por importante. Harasse h que se pudiere. (Lettre de don Juan au Roi, du â février i577, ibid., liasse 575.)

(^) Philippe II écrivait à don Juan, le 6 avril i577 : Lo que tra- tavades con el duque de Àrscot, que el de Oranges se retire, entrando en su lugar su hijo, séria un muy buen negodo , y asi sera bien que prosigais la plàtica. (Ibid,, liasse 570.)

LU

doD Juan voulut parler lui-même à Leoninus. Il le char- gea de représenter au prince le danger et les incommo- dités auxquels il s'était exposé, en venant d'Espagne pour pacifier les Payâ-Bas; les faveurs qu'il apportait à ces provinces , de la part du Roi ; ce qu'il avait fait pour la conclusion du traité; son intention de l'entretenir. Leoninus devait ajouter qne la sortie des Espagnols s'ef- fectuait avec toute la presse possible; qu'en cela et en toutes autres choses, ce que don Juan avait promis serait réalisé; que, loin de songer à y apporter la moindre altération, il prendrait les armes contre quiconque Tem- péchierait de remplir ses engagements ; qu'en garantie de sa parole, il s'était mis au pouvoir des états. Il dirait encore à Guillaume qu'il avait le moyen de rendre au Roi un service en récompense duquel il obtiendrait, non-seulement le pardon de ses fautes , mais encore la grâce du monarque et tous les honneurs qu'il pourrait désirer; qu'ainsi il assurerait l'avenir de sa maison; que don Juan lui serait bon ami, et, comme tel, qu'il ferait pour lui plus peut-être qu'il ne pensait. Il engagerait le prince à considérer que, le Roi ayant accordé aux états ce qu'ils demandaient, et à lui ce qu'il pouvait prétendre, il ne saurait se disculper, envers Dieu et envers le monde, de ce qu'il avait fait, ni de ce qu'il ferait encore, s'il per- sistait dans son opposition ; qu'alors, avec juste cause, chacun se tournerait contre lui, et qu'il en résulterait la ruine de sa maison. Il lui protestait que D. Juan était bien éloigné de vouloir suivre les traces de ses prédécesseurs ; quil ne venait que pour pardonner, mettre en oubli les choses passées, réduire le gouvernement des Pays-Bas à leur forme ancienne, et y établir une paix au moyen de

LUI

laquelle ils pussent se relever des malheurs dont ils avaient souffert. Enfin il lui dirait que, si c'était pour cela qu'il avait pris les armes, il ne lui restait évidem^ ment pas de motif de les conserver en mains ; qu'il devait donc se résoudre, non-seulement à maintenir la paix, mais encore à rétablir en Hollande et en Zélande la reli- gion catholique, avec l'autorité du Roi ; que, s'il voulait écrire à don Juan, don Juan lui répondrait de manière à lui donner toute satisfaction Q).

Il y a une justice à rendre à don Juan : c'est que, dans les ouvertures qu'il faisait faire au prince d'Orange, il était de bonne foi. Une lettre qu'il écrivit au Roi, le 16 mars, en fournit la preuve. Après avoir déclaré fran- chement au monarque que son nom (celui du Roi) est autant abhorré et méprisé aux Pays-Bas, qu'on y aime et craint celui du prince ('), il lui parle de la mission de Leoninus : « Je négocie avec le prince, dit-il à Philippe II, » pour lui donner toutes sûretés , car je vois que l'éta- » blissement de la paix, ainsi que le maintien de la » religion catholique et de l'obéissance due à Votre » Majesté, dans céis provinces, dépendent maintenant de » lui, et que les choses en sont arrivées au point qu'il » faut faire de nécessité vertu. S'il prête l'oreille à mes » propositions, ce ne sera qu'à des conditions très-avan- » tageuses pour lui : mais il faudra en passer par là, » plutôt que de perdre tout f ). »

(■} Lettre de don Juan au Roi, du 16 mars 1577, aux Archives de Simancas, papeles de EstadOy liasse 574.

(•) El nombre y serviào de V. M'^.es tan aborreddo y poco eiîimadOy cuanto temido y amado el del principe de Oranges. ...

(*) y<y haciendo negociacianes con el principe de Oranges, para

LIV

Leo^inus \^^) parlit de Louvain le 8 mars (i577); le ii, il arriva à Middelbourg, était le prince. Guil- laume, averti de sa venue, le manda incontinent. Léo* ninus, après lui avoir remis la lettre du duc d'Arschot, lui parla dans le sens des instructions verbales de don Juan, en insistant sur ce que toutes les sûretés qu'il demanderait pour la restitution de son fils, de ses biens et de ses états ('), lui seraient données. Il lui dit, de plus, que le duc d'Arscbot était prêt à venir le trouver en tel lieu qu'il jugerait convenable, pour conférer sur les points en litige ; que don Juan même s'offrait à avoir une entrevue avec lui, sans égard au péril qu'il pourrait courir (').

Le prince répondit qu'il remerciait très-humblement

assegurarU , parque veo que en su mano esta agora cl estableci' miento de la paz y quietud destos Estados en la religion catàlica y debida obedienda de V. Jkf^*, y que las cosas han Uegado à terminas que es fuerza hazer de la necessidad virtud^ y cuanda él acuda à esta pldtica, sera con mucha ventaja y seguridad de su négocia, y hcJbrase de pasar par eUoy par que no se pierda tado. . . . (Lettre du i6 mars 1577, aux Archives de Simancas , pope/es de Estadoy liasse 574.)

(■) Tous les détails que je donne sur la mission de Leoninus sont tirés d'une relation qu'il en fit, à son retour de Louvain, le 18 mars, dont j'ai trouvé une traduction espagnole aux Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 574, et dont le texte original n'existe pas dans ce dépôt, non plus qu'aux Archives de Bruxelles. J'ai nécessairement l'abréger; mais j'ai reproduit toutefois tous les détails essentiels qu'elle contient.

(') De su hija, bienes y estados,

(') .... Que Su Alteza se cantentaba de ponerse à peligro par camunicar con él.

tv

Son Allesse de la grande et singulière affection, ainsi que de la bonne intention , qu'elle témoignait pour le repos public; qu'il la remerciait aussi, en son particulier, des offres qu'elle lui avait fait faire; qu'il ne désirait rien plus que de la servir, et de contribuer à ce que la paix fût entretenue ; qu'il lui serait agréable de communiquer avec le duc d'Ârschot (') et de remercier Son Altesse par lettre, mais qu'il ne pouvait ni n'oserait faire l'un ni l'autre, sans en donner connaissance aux états, par l'avis desquels il s'était conduit dans toutes les occurrences (') ; qu'en agissant autrement, il pourrait se rendre suspect de trahison et d'intelligences secrètes Q) ; qu'en consé- quence, il devait différer de donner suite aux ouvertures

(') Il est à remarquer que, peu de temps auparavant, le prince avait exprimé au duc d'Arschot le désir d'avoir une entrevue avec lui, et que le duc s'en était excusé, jusqu'à ce qu'il y fût autorisé par don Juan. C'est ce qui résulte du passage suivant d'uue lettre de don Juan au Roi , en date du 22 février 1577 : El de Oranges embiô âpedir que el de Ariscot le viese, ean el cual, aunque le ha dejado entender que importaria al bien delnegocio^ ha cUcho que no lo harà, hasta hahlarme, y tener àrden mia para ello. (Ar- chives de Simancas, papeles de Bstado, liasse 573.)

Le 23 mars, le duc, qui venait de prendre possession du château d'Anvers, écrivit au prince, pour lui proposer à son tour une entre- vue {Archives, etc., t. YI. p. 23). Guillaume lui fit la réponse que nous avons rapportée ci-dessus, p. l. .

(') .... Que él no podia ni o&aria hacer lo uno ni lo otro, sin dar cuenta y advertir dello â hs estados, por parescer de los cuaks él habia siempre hecho lo necessario en todas las occurreficias,.,.

(^) .... De suerte que el escrihir él à Su Alteza al présente, o entrar en communicacion con el dicho seTior duque, podria facil- mente caer en peligro y sospecha de traidoti y sécrétas inteligencias, si él hiciese algunas cosas sin el dicho advertimiento.

LVI

qui lui étaient faites, jusqu'au 25 mars, que les états de Hollande et de Zélande s'assembleraient à Dordrecht.

A la suite de beaucoup d'autres discours tenus à Leoninus , tant avant qu'après le diner (^), le député de don Juan dit au prince que Son Altesse ne s'était fait accompagner, en venant aux Pays-Bas, d'aucunes trou- pes ; qu'elle s'était livrée au duc d'Arschot; qu'elle était entrée à Louvain sans garde, sous la seule promesse des bourgeois et des étudiants , et après avoir licencié ses gens de guerre ; que tout cela montrait en elle des inten- tions sincères. Il engagea le prince à ne pas laisser échapper une occasion si favorable de mettre sa maison a couvert de toute chance : il lut cita les exemples de Marins , de Sylla , de Jules César et d'autres promoteurs de guerres civiles. Quelques propos furent encore échan- gés. En se retirant , Leoninus pria le prince de penser mûrement à ce qu'il lui avait proposé, et d'invoquer Dieu pour qu'il lui donnât de bonnes inspirations.

Le soir, le docteur de Louvain reçut la visite de deux des conseillers intimes du prince. Sainte- Aldegonde et Arnould Van Dorp. Ceux-ci lui dirent qu'ils connais- saient l'objet de sa mission; que le prince, qui les envoyait, le leur avait confié; qu'ils trouvaient très- dangereuse pour Son Excellence la négociation, en la manière dont elle était proposée. Une discussion s'établit ensuite entre eux sur les sûretés qui pourraient être offertes au prince.

Le lendemain matin (12 mars), Leoninus retourna

(■) Despues de muchos discursos que me hizo asi antes de corner cotno despues,»*.

LVII

chez le prince, qui, la veille, l'avait invité à souper. Guil- laume lui dit que, ayant demandé à Dieu de l'inspirer, il estimait que le plus sûr parti était d'avertir avant tout les états, envers lesquels il avait des obligations, comme leur serviteur (^). Il ajouta qu'il ne pouvait oublier ce qui était arrivé aux comtes d'Egmont et de Bornes , ni la manière dont avait été violée la promesse faite aux gentilshommes confédérés par la duchesse de Parme, ni la conduite du roi de France envers l'amiral Coligni ; qn'il avait des avis d'Espagne, d'Italie, d'Allemagne et des Pays-Bas qu'on était décidé à lui faire la guerre , ainsi qu'aux états de Hollande et de Zélande; qu'ils pre- naient leurs mesures en conséquence; qu'ils savaient aussi qu'un nonce du pape était arrivé aux Pays-Bas, pour conclure une ligue contre eux (^).

(■) .... Que hallaba lo mas seguro advertir primeramente a los estadoSy à los cuales él estaba ohligado camo servidor....

{*) €e nonce s'appelait Sega ; il était ëvéque de Ripa. Suivant une note d'Antonio Ferez écrite sur une lettre de l'évéque au Roi que j'ai vue aux Archives de SimancsiS j papeks de Esiadoy liasse 572, il avait été envoyé aux Pays-Bas par le pape, pour y appuyer les négociations de don Juan avec les états : en outre, il était porteur de brefs, de dépêches et de 50,000 ducats destinés à faciliter l'entreprise d'Angleterre, au cas que don Juan pût faire sortir par mer les troupes espagnoles.

Le nonce arriva à Louvain au mois de mars ; les états généraux le firent complimenter et le défrayèrent. Le i 7 mars, il se présenta à leur assemblée, et les félicita sur le traité qu'ils avaient conclu avec don Juan. {Bésol. des états généraux, publiées par M. de Jonge, t. 11, p. 440,145, 144,451.)

Dans une lettre du 21 juillet 4577, don Juan rend au Roi le meilleur témoignage de la personne de l'évéque de Ripa et du

LVIII

LeoniDUS lui répondit que le naturel de don Juan ne ressemblait pas à celui du roi de France et du duc d'Albe ; i]ue, d'ailleurs, il y avait une grande différence entre les cas cités par lui et le sien, car aucune garantie n'avait été donnée à l'amiral ni aux comtes d'Egmont et de Homes, tandis qu'il recevrait, lui, des sûretés qui le mettraient hors de toute inquiétude; que, quant aux nouvelles dont il avait parlé, elles étaient inexactes.

Cette conférence dura trois heures. Le prince et Leoni- nus se mirent ensuite à table. L'après-midi, la conver- sation roula principalement sur les affaires d'Amsterdam. Des députés de cette ville , ainsi que Philippe Vander Meeren, S' de Saventhem et de Sterrebeke, venaient d'arriver à Middei bourg, avec une commission des états généraux, et Leoninus leur était adjoint. Le prince donna aux députés satisfaction sur les points qui faisaient l'objet de leurs instructions Q).

Ce jour-là, Leoninus soupa encore avec le prince. Le repas fini, la conversation reprit sur la négociation dont Leoninus était chargé. Le prince se plaignit que les états généraux se fussent tant pressés de conclure avec don Juan : il signala plusieurs articles du traité qui ne pouvaient qu'augmenter les défiances, et donner matière à de nou- veaux embarras ; rengagement, pris par les états, d'en- tretenir et de faire entretenir la religion caCholique romaine, répugnait surtout à la pacification de Gand,

zèle qu'il a montré pour le service de S. M. Ce prélat venait d*étre appelé à la nonciature de Madrid. (Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 574.)

(') Voy. les Résolutions des états généraux, etc., t. II, p. iâ7, 449-455.

LIX

qui avait remis ce point à une assemblée future des états généraux. Leoninus s'appliqua à réfuter les objections de son interlocuteur.

Le i5, l'envoyé de don Juan prit congé du prince. Il eut avec lui une dernière conférence, ils se trouvè- rent seuls, comme aux entrevues précédentes. Leoninus renouvela ses remontrances; le prince persista dans l'intention d'en rendre compte aux états de Hollande et de Zélande : ne pas le faire, c'était, selon lui, s'exposer à se perdre d'un côté, et à encourir, de l'autre, l'indignation de ceux qui le soupçonneraient de les avoir trahis ('). Leoninus, à qui il délivra la réponse qu'il faisait au duc d'Arschot, le pria de lui déclarer s'il y avait quelque apparence d'un arrangement pour l'avenir : ayant, lui dit-il, entrepris beaucoup de voyages et consumé une bonne partie de sa vie dans Tintérét de la pacification et du repos public, il ne voulait plus s'en mêler dorénavant. Le prince répondit que, pour lui. il n'espé- rait pas qu'on pût parvenir à s'entendre ('), et il engagea Leoninus à se trouver à Dordrecbt, lorsque les états s'y assembleraient.

(') El dieho principe me dijo que hallaba me» seguro depread- vetiir los estadas, diciendo que otramente podria eaer en peligro de êer derrocado por acâ, y por otra parte, con los de Holanda y ineurrir en indinacion y sospecha de (raictbn.

(').... Ze dixe que habia hecho muchos viajeSf y conmmido buena parte de mi vida en el provecho de la pacificacion y reposa publico, rogàndole que me quisiese declarar si habia aparencia de algun frutopara elvenidero provecho, porque dixe que queria reposar de aqui adelante, y si ténia esperanza de algun succsso, sobre lo cual me dixo que él no lo ténia para si,,,.

LX

Don Juan s'était promis un autre résultat de Fambas- sade de Leoninus. Ge qui est digne de remarque, quand on réfléchit à son caractère impétueux et irritable, c'est que le mauvais accueil fait à ses propositions ne le détourna pas de les renouveler. Il espérait ôter au prince les craintes et les soupçons qui l'agitaient, surtout s'il pouvait l'amener à avoir une entrevue avec lui : « Nous ne sommes pas dans un temps, écrivit-il au » Roi, l'on doive avoir des préférences, ni s'arrêter » à des points d'étiquette : il faut tâcher de rétablir l'État » par tous les moyens possibles , car la véritable auto- » rite, la véritable réputation consiste à le conserver ; et » je ne connais d'autre voie, pour prévenir sa ruine, » que la réduction de cet homme, qui exerce tant » d'influence sur la nation Q). »

11 se convainquit bientôt que sa confiance reposait sur des fondements peu solides, et que le prince, loin d'être disposé à entrer dans ses vues, était aussi éloigné que jamais, soit de souscrire au traité de Marche, soit d'accepter les assurances qu'il pourrait lui offrir (').

(') Con todo esto, salidos los Espanoles de AmbereSf pienso volver d darle otro tiento, procurando satisfacer à sus temores y sospechaSf y si él se contenta de hablarme, de muy buena gana lo consentirez y iré para ello à Amberes : que y a, senor, no estamos en tiempo de hacer eleccion, ni de mtrar en puntos de ineideneia^ sino de reparar el Estado por todas las vias posibles, pues en la conservadon dél consiste la verdadera autoridad y reputacion, y yo ninguno remedio veo para que aqui no se pierda, sino es reducir à este hombre que tanta parte tiens en los demàs,..» (Lettre du 16 mars 1577, aux Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 574.)

(») D. Juan écrivait au Roi, le 9 mars 1577, h propos du prince :

LXI

Cependant, après qu'il eut été reçu à Bruxelles, il crut devoir, pour satisfaire au vœu de la nation, tenter auprès du prince une démarche solennelle : il proposa aux états généraux que des députés lui fussent envoyés, de leur part et de la sienne, avec la mission de régler tous les points qui étaient restés en débat entre eux et lui ('). Les états, accédant à son désir, nommèrent GasparSchetz et le docteur Leoninus (') ; don Juan fit choix, pour le représenter, du duc d'Ârschot, du baron de Hiergeç, du S' de Willerval et d'Adolphe de M eetkercke. Le docteur GailU ambassadeur de l'Empereur, fut adjoint à ces députés.

Les conférences eurent lieu à Gertrudenberg. Schetz et Leoninus, arrivés les premiers dans cette ville, eurent,

Enfin se déjà entender que no pasarà par h capitulado, y que yo no podré hacer cosa que le asegure. (Archives de Simancas, papeles de EstadOy liasse 574.)

(') RésoluHons des états généraux, etc., t. II, p. â7i.

(*) On lit, dans les Résolutions des états généraux, t. Il, p. 274, à la date du 7 mai : « Que, oultre ceulx qui ont esté dénommez pour se trouver vers mons' le prince d'Orainge, sçavoir le S' de » Grobbendonck et le docteur Léonin , sont conmiis le comte de » Lalaing, le S' de Ghampaigny et le pensionnaire Meetkercke. n Il est probable que les états revinrent sur la nomination de Lalaing et de Ghampagny, et qu'ils le firent d'après le désir de don Juan, qui n'aimait ni l'un ni l'autre : quant à Meetkercke , il fut choisi par don Juan lui-même, pour être l'un de ses députés.

Le prince d'Orange témoigna un vif regret que le comte de Lalaing ne fut pas l'un des commissaires : c'est ce qu'on lit dans une des lettres de don Juan au Roi, datée du 28 mai : Sintiô mucho que no fuese uno de los comisarios el conde de LakUng. (Archives de Simancas, papeles de Estado, liasse 573.)

LXII

le 13 mai, une entrevue avec le prince ; ils le revirent le 14 : cette fois, il était accompagné des députés de Hollande et Zélande : Sainte-Âldegonde, Nyvell, Yander Mylen/Coninck et Vossbergen, Les envoyés des élats généraux n'avaient à s'occuper, spécialement, que de points d'un intérêt secondaire : les discussions impor- tantes s'ouvrirent après l'arrivée des députés de don Juan, le 20 mai ; elles durèrent plusieurs jours, sans amener les résultats que, dans les provinces obéissantes, on dési- rait si vivement.

Sur ces conférences de Gertrudenberg, nous publions plusieurs pièces qui exciteront l'attention des bistoriens : la relation qu'en rédigea un des conseillers du prince (p. 447-4S9) leur fournira surtout des particularités intéressantes.

Nous regrettons beaucoup de n'avoir trouvé, ni aux archives de Bruxelles, ni dans le dépôt de Simancas, la lettre autographe que don Juan écrivit au prince ; mais nous donnons la réponse qu'y fit le prince, également de sa main (p. 289-291) : elle n'est pas l'un des documents les moins curieux de ce volume.

L'avantage que nous avons eu de pouvoir consulter, à Simancas, la correspondance de don Juan. d'Autriche avec Philippe II, nous met à même d'ajouter aux parti- cularités contenues dans la relation dont nous parlions tout à l'heure, quelques détails qui ont aussi leur intérêt. Don Juan rend compte au Roi, par des lettres du 28 et du 29 mai , de propos que le prince a tenus au duc d'Arsehot et au baron de Hierges. Selon ce qu'il rap- porte, le prince a dit au dernier qu'il fallait contenter le peuple ; que ce qui se faisait pour le peuple avait des

LXlll

effets durables, tandis que la volonlé des rois étail éphé- mère (^). Au duc, il a déclaré que, si on ne lui remettait promptement Utrecht, il le prendrait. En outre, il lui a donné le conseil de ne pas se fier au Roi, lui disant que, s'il le faisait, il exposerait sa tète ; que, quant à lui, janjais il n'aurait cette confiance , parce que le Roi l'avait sou- vent trompé; que d'ailleurs le Roi avait pour maxime que la foi donnée aux hérétiques ne devait pas être gar- dés; einfin, qu'il était chauve déjà et calviniste, et qu'il voulait mourir ainsi {').

Cette attitude de Guillaume le Taciturne fut certaine- ment une des causes qui portèrent don Juan à prendre un parti désespéré. Il voyait que, sans le concours du prince d'Orange, le rétablissement de l'autorité royale dans les Pays-Bas était impossible, à moins d'y employer la force, car, du fond de la Hollande, le prince inspirait, dirigeait ce qui se faisait à Bruxelles : « Les gens d'ici, » écrit-il au Roi le Si mai , sont comme ensorcelés par » lui; ils l'aiment, le craignent, et veulent l'avoir pour » seigneur. Ils Taverlissent de tout, et ne prennent aucune » résolution sans le consulter (^). » Ces renseignements

(') ... Acomejaba.,, à Mos. de Hierges que alpuebh se debia tener cantento, que esta era h durabk, y la volunUul de los reyes perecedera, (Lettre du 29 mai 4577.)

(') Dijo al duquey $egun refiere, que, si no le daban luego Utreckt, èl la tomaria, y anode que él le aconsejô que no se fiase de V, M*, ; que se eonsiderase con la cabeça a las pies, si lo hacia; que éljamas se fiaria, porque lo habia V. M^. engàhado muchas veces; y refiere que tiene F. M. por consejo que hœreticis non est servanda fides; que es ya calbo y calbanista, y que en eslo morirà,,,. (Lettre du 28 mai 4577.)

(^) La intencion y obras del de Oranges son de suerte que iras

LXIV

ne manquaient pas d'exactitude. Don Juan était encore dans le vrai, lorsqu'il disait à Philippe II : « Ce que » le prince abhorre le plus au monde, c'est Votre » Majesté (^) : » mais comprend-on qu'il ait ajouté ces horribles paroles : ce S'il pouvait boire le sang de Votre » Majesté, il le ferait (^)? »

Quelques semaines après les conférences de Ger- irudenberg, Guillaume le Taciturne adressa aux états généraux une lettre notable, pour insister sur l'accom- plissement de la pacification de Gand. Nous donnons (p. 292-296) le texte original de cette lettre, dont on ne connaissait qu'une rraduction hollandaise, publiée par P. Boa.

Nous en donnons deux autres du même temps , qui sont tout aussi remarquables. La première est celle que Gaspar Schetz écrit au prince, afin de l'engager à se dépouiller de la défiance qu'il a du Roi (p. 297-30i); la seconde est la réponse du prince (p. 302-307). La substance en est qu'il ne peut placer nulle confiance dans don Juan, non plus que dans le Roi.

Cinq lettres d'un moindre intérêt terminent cette partie de la Correspondance : elles concernent la resti- tue tratar de la ruina destos hombres, los tiene encantados^ parque k aman, y temen, y quieren por senor, EUos le avisan de toda, y sin él no resuelven cosa, (Archives de Simancas, papeles de Eslado, liasse 575.)

(*} £a cosaque mas abhorrece en esta vida es Vuestra Magestad. (Lettre du 28 juillet i977, aux Archives de Simancas, papeles de ' Estado, liasse 574.)

(■) ..,»Silepudiessevever la sangre, loharia. (Lettre du 28 juil- let, ci-dessus citée.)

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lotion de Nieuport, et l'envoi à Bruxelles de députés des états de Hollande et Zélande^ ainsi que de maîtres de leurs monnaies. Sur les sollicitations que les états géné- raux lui font à cet égard (p. 308, 509, 3H ), Guillaume donne des réponses satisfaisantes (p. 313. 3iS).

Plus d'un dépôt de titres, indépendamment des Ar- chives du royaume de Belgique, et plus d'une biblio- thèque ont été mis à contribution pour le volume qui parait aujourd'hui : nous avons emprunté une partie des lettres dont il se compose, aux Archives royales de Simancas , aux Archives des affaires étrangères à Paris , aux Archives du département du Nord à Lille, aux Archives de TÉtat à Mons , aux Archives communales d'Ypres,à la Bibliothèque royale de Bruxelles, à la Bibliothèque de la Chambre des Représentants.

MM. les conservateurs de ces dépôts divers ont tous des droits à notre gratitude; nous nous faisons un devoir de leur en offrir Texpression. Mais nous avons surtout à remercier M. Mignbt, ancien directeur des Archives des afiaires étrangères , et don Manuel Garcia , garde des Archives royales de Simancas, pour la bienveillance avec laquelle ils ont facilité nos recherches.

M. DiEGERiGR, archiviste de la ville d'Ypres, nous a fait de nombreuses et d'importantes communications, que nous ne saurions assez reconnaître. Avant que les archives d'Ypres eussent été commises aux soins de M. DiBGBRiCR, on ignorait que ce dépôt renfermât des

III.

LXVI

liasses volumineuses de lettres missives^ à partir de la fin du xv^ siècle; elles avaient échappé, on rie sait comment, à l'attention de son prédécesseur, M. LAMUiif, qui s'était tant occupé des titres et de l'histoire de sa ville natale. Au' mérite d'avoir tiré de l'oubli, . nous ne disons pas découvert, on a trop abusé du mot , cette belle collection , qui est presque unique en son genre dans nos archives municipales, Diegericr joint celui de l'avoir classée, et de la mettre à la portée de toutes les personnes qui désirent en faire usage. Pour notre part , que de lois déjà n'y avons-nous pas eu recours! M. Disgbuicr rend, tous les jours, non-seule- ment à la ville d'Ypres, mais aux études historiques en général, des services que nous aimons à proclamer ici. Ce n'est pas lui qu'on confondra jamais avec ces déposi- taires égoïstes et inintelligents qui, ne tirant aucun parti des trésors placés sous leur garde ('), en dérobent soi-" gneusement la connaissance à ceux qui pourraient les faire valoir.

(*) M. Diegericr a publié, avec M. Kervyn de VoLiLAEnsBERB, des Documents historiques inédits concernant les troubks des Pays- BaSy 1577-i2$84, etc., 2 vol. in-S"*, qui jettent un grand Jour sur les éy^nements de cette époque. .. .

i

CORRESPONDANCE

INÉDITE

DB GOILAIIIE LE TACITDME,

PRINCE D'ORANGE.

DYIII.

L'EMPEREUR MÂXIHILIEN II AU PRINCE D'ORANGE.

Averti des armements que le prince fait contre les Pays-Bas, il Tinvite à les

cesser.

ViBNRB, .. MAI 1568.

Wir, MAxiMiLiAN^etc, empietcn dem hochgebornen unserm und des Reichs lieben, getreuen Wilhelmen PriiUzen zu Ura- nîen, Graven zu Nassau und Catzeneinbogcn, unser gnad uod ailes guets. Hochgeboroer, iieber, getreuer^ Uns langt von mehr underscheidlichen Orten glaublichen, wie wir denn auch dessen von des Durcbleuchtigsten Fursten, herrn Phi- lipsen, Khunigszu Hispanienund beider Sicelien, etc.^ unsers freundtlichen lieben Vettern, Sehwagern und Bruders^ yetzi- ger regierung Sr. L. Niderburgundisehen Erblande^ grund- lichen und aigentlichen Bericht empfangen, wasmassen du nuhn ain Zeit hero, von Dillenburg und andern Orten aus, im heîUgen Reiche mit fertigung offner PatenteU; Kriegsbe-

m. I

^ 2 -

stallungen und aiuem neben Anthonien von Lalaing, Gravcn von Hochstrassen, getlianen sondern Ausschreiben, dich nit allein one ailes unnser vorwissen , zugeben und verwilligung ainer aufwiglung, vergaderung und zusamenrottirung reuter und knechte understanden, sonder noch darzu elliche Diffa- mation-und Schmachschrifften zu aufwôgung der Underthanen im vermelten Sr. des Khunigs zu Hispanien L. Niderburgun- dischen Erblanden hin und wîder aufzuprengen, aueli vor wenigTagen inn Sr. L. hertzogthumb Geldern aînen Hauffen Kriegsvoleks zu Ross und Fuess gegen und wider die gedach- ten Niderburgundischen Erblande und das darin gegenwesend khunîglich Gubernement und die Regîerung inn Anzug zu pringen, desgleichen ain Schloss in Westerwoldinger-Landt , 80 dem Edlen^ unserm und des Reichs lieben getreuen Johann von Ligny, Graven zu Arnberg, Freyherrn zu Barbanson, Riiiern de^ Qrdens; des ^uldenen Velliss, etc., als aînem Standt derselben Niderburgundischen Erblande, zugehôrig, abzubringen und ainzuneaien angeraast haben, und mit Bewerbung, Vergaiderung und Versamblung aines noch mehrern Anhangs von Kriegsvoleks zu Ross und Fuess immer fortfarest, des Vorhabens, wie dann auch berurte deine Patenten y Ausschreiben und Bestallungen selbst under- seheidlich ausweisen und mitpringen , die gedachten Nider- burgundischen Erblande mit Herreskrafft zu ûberfaUen, zu vergewaltigen und under dem furgeben und praCext under- bringung der Liberté t und anderer Verenderungen , den gemainen Friden mit der That zu betrueben und zum besehwerlichsten anzufechten , ailes unsern und des Hailigen Raiohs Ordhui^en^ Satzungen und Abscheiden, und sonder- lich der Constitution des gemainen hocbbeteurten Landlfri;- dens und desselben hailsamen Executions-Ordnung stiracks zuwider und entgegen. Wann nuhn wolgedachter unser freundlich lieber VeUer^

5 -

Schwager und Bruedec der Khunig zu Hispanien, vonwcgen bemelter Sr. L. Niderlande ain furnemb aasehniichs Mitglied des Hailigen Aeichs, zu demselben contribuiert, und darbey mit Stimm und Standt wol herkomen und derwegen solche Niderlande auch mit bethadingten mass dem Reiche zugethan, und dem angeregten haiisamen Landtfrideni auch unserm und des Haih'gen Reichs Schutz und Protection einverleibt seind^ und wir.danna yon Sr. des Khunigs zu Hispanien L. ;und Dero^vilgedaehter Niderlande, auch darînn vorï Sr. L. bestell- ten.yetzigen Regierung wegen, auf die oberzelte deine landt- fridbrûchige Zunotigungen und Vergewaltigungen und noch femere verpotne Begînnen, Anscblâge und Kriegsrustung, umb geprauehung unsers kaîserlicben Ampts und gepurliche Abwendung, verm g und naeh Ausweisung obberurten des hochbeteurlen Landlfridens und andern Constitution und Ordnungen eipbsiglich ersuebt und angerueffen worden : wir uns auch hiei*auf unserer kaîserlicben Gepûr, und was uns dièses und dergleicben Fâlle zu erhaltung des geliebten Fri- dens gegen ainem Standt wie dem andern wol aignen und geziemen tliuet, gnedig und rechtmessiglich erindert, auch vermehrt und befunden, wo dem aliem, aiso wie angeregte uns einkonjne Khundtschafften und Beridit mitpringen, und die von dir underschiedlich aussgegebne Sehrifften, Bestall- brief> Patenten und Ausschreiben durch dich zu Dillenbarg und anderer Orten im Hailigen Reiche also gleichmessig ver- fertigt worden , dass du dem mehrberurten gemainen haiisa- men Landtfriden und andern Reichsconstitutioncn, Ordnungen und Absehieden hôehiich zuwider gehandlet, daraus auch noch mehrere Betruebung desselben haiisamen Landtfridens und mercklich unrhue, auch verderbliche weitherung Unrath jxi befabren sein wûrde, demé uns aber, aïs dem Oberhaupt, zuzusehen kàinswegs gepuren will, wi6 uns auch dessen mit Nichten'gemaint ist.

-. 4 _

Gepieten wir dir demnach, von Romischer kaiserlicher Macht, bei privierung, entsazung und verlierung aller und jeder dciner Régalien und anderer Lehen-Privilegien, Frey- haiten, Begnadungen, Rechtcn und Gerechtigkaiten , sovil du deren von uns und unsern vorfaren, Rômischen Kaisern und Khfinigen, uns und dera Hailigen Reiche hast, darzu aueh vermeidung unseren und des Reiehs hoehsten Ungnad, Straf und Peen des Landfridens ('), crnstlich und rediglich mit disem Brief, und woUen dass du, nach uberantwortung und verkûndigung dises unsers kaiserlichen Mandats, von angeregtem deinem thâtiichen landtfridbrûchigen fûrnemen und verpotnen Kriegsrûstung gentzlieh abstehest, auch hin- fôro^ gegen offlbemelten Niderlanden oder ainichen derselben Standt oder aueh andern sonderbaren Personen, mît der That und ausser Reehtens niehts furncmest, dass bemelt Schloss Wedde, und was du obgedaehten Graven zu Arenberg oder jemandt anderm bissher obgesetztermassen aigens gewalts abgetrungen^ widcrumb verlassen, und dem jetztbemelten Graven zu Arnberg, oder wem dieselbige abgetrungne Plâtz und gueter zugehôren, restituierest und einrâumest, das ver- gaderte Kriegsvoick zu Ross und Fuess trennest^ dem bestell- ten Lauff und Anritt abschaffest, die bestallungen, wo die aufgerichtet, cassierest und aufhebest, auch mit dem allem durchaus still und zu Rhue stehest, und aiso dem vilberurten Landtfriden stracks gemess lebest und nachkomest.

Und wofern du gegen vorwolgedachtes unsers freundtlichcn lieben Vettern, Brueders und Schwagers des Khunigs zu His- panien, S. L. oder erwelten Dero Gubernement und Regie-

(*) La minute, d*après laquelle nous publions cette pièce, subit, avant d*être mise au net, des changements que nous crojrons devoir faire connaître*

A la place des mots des Landfridens , la première rédaction portait : inn bcruerten Landtfriden b^riffen , und sunderlich unserer und des « Reiehs Âcht und Âberacht. »

~ 5

ring inn den Niderlanden , dessgleicben ainem oder dem andern derselben Lande Standt, oder auch ainer oder mehr sonderbarn Personen, ainiche befuegte sprueh und forderung zu haben vermainest, dasselbig an gepurenden Enden^ dureb den ordenlichen weg des Reehtens suchest und aussfurest, auch dieh desselben Ausstrags inn allerweg settigen und ^"benuegen lassest^ und inn dem allem nit ungehorsamb seiest noch anders thuest in kain Weise, umb des Reichs schwere und hôchste Ungnad^ Straff und Peen zu vermeiden ('). Datum zu Wien> den tag Maii 68.

Hinote, au Archives impériales, & Tienne.

(') JLa première rédaction contenait, avant zu vermeiden, les mots : sunder" Ueh auch die Acht und Aberacht, et, après, Palinéa qui suit :

« Haîssen und laden dich auch hiemit von obangeregter Rômischen Kaiser- lichen Macht emsthch und wollen, dass du auff den ain und zwantzigsten Tag des mondts junii nachstkûnfftig vor uns, wo wir damais sein werden, sdbst persônlich erscheinest, glaubliche anzaig zu thuen, dass du disen unseren Slaiserlicben Mandat ailes seines Innhalts gehorsamblich nachkomen seiest und volge gethan habest, oder solcher deiner begangnen gewaltthfi- tigen landtfridbrûchigcn Handlung und beharrlichen ungehorsambs halben, inn obberûrter Peen und Straff und sonderlich unsere und des Reicbs Acbt und Aberacht gefallen sein, mit Recht erkennen und erkleren, oder aber recfatmessige ursachen, ob du ainiche hattest, einpringen, warumb solches ailes nit gescbehen soll. Dann du komest und erscheinest alsdann aho oder nieht, so werdet nichts destoweniger mit obberûrter Erkierung und Denui^ tiation procedirt und verfaren, auch sonst inn anderwege dassjhenig von uns forgenomen und gehandlet werden, dass uns aïs Rômischen Kaiser nach Gelcgenheit der Sachen zu handien und zu thuen gepurt. Damach wisse dich zu richten, denn also ist unser ernstlich Hainung. »

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DIX.

LE PRINCE D'ORANGE A L'EMPEREUR MAXIMILIEN II (•).

(traduction de l'allemand.)

Réponse à la lettre précédente. Il justiûe sa résolution de prendre les armes, avec le secours de ses alliés, par un exposé des actes arbitraires, tyranniques et cruels auxquels s'est Ityrë le duc d*Albe, depuis son arrirée aux Pays-Bas.

DlLLBRBOURG, 12 lODT i568.

«

Sire, j'ay receu, le xxv^'jour de juing dernier^ en toute révé- rence, le mandement de Vostre Majesté Impériale, émanée moy et aultres mes alliez, sans doubte sur le maulvais rapport faict par noz adversaires, sans fondement ou preuve quelconque. Et^ combien que je ne doubte nullement Vostredicle Majesté aura desjà entendu^ de par aulcuns princes électeurs et aultres bonnes remonstrances, la grande tyrannie et cruaulté non ouye dont, un temps en çà, ceulx du présent, inhumain et intoUérable gouvernement es pays d'embas ont usé et exer- citéy espérant que Vostredicte Majesté aura donné plus de foy aux informations desdiels princes électeurs , fondées en toute vérité, que aux remonstrances non fondées de mesdicts adver- saireSy si est-il toutesfois que ma nécessité et honneur requiert de déduyre au long à Vostre Majesté ce que s'ensuyt^ pour la

(1) M. Groen van Prinsterer a donné, dans les Archives ou Correspondance inédite de la maison d'Orange- Nassau, Supplément, p. 91-98, un extrait de cette lettre, d*après une traduction faite récemment par M. Âltmeyer. La traduction que nous insérons ici est complète : elle fut faite, dans le temps même, par le secrétaire chargé de la correspondance d^ÂlIemagne, Scharen- berger. Nous croyons que , si elle ne se fait pas remarquer par Télégance du style, elle est recommandable par sa fidélité et son exactitude.

Une copie de la lettre originale du prince existe aux Archives dn Royaume.

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jusiification et innocence de moy et de mesdicts alliez, actendu que nous sommes accusez, sicomme nous eussions faict contre les constitutions et ordonnances du Saint-Empire, et aussi brassé et perpétré quelques aultres choses illicites; requérans, sur ce, que Vostredicte Majesté (endevers laquelle tous ceulx estans pressez contre droict et équité cherchent leur dernier refuge, comme au suprême magistrat) nous veuille assister de son bon conseil, et tenir en sa protection.

Et, pour le premier, Sire, suis-je assez informé du contenu de la paix et constitutions du Saint-Empire, érigez tant sur le faict de la religion que des choses prophanes; mais au contraire il ne me souvient pas d^avoir excédé, en chose quelconque, les- dictes ordonnances et constitutions, selon que mesdicts adver- saires peuvent avoir rapporté à Vostredicte Majesté, sans fon- dement quelconque, comme Vostredicte Majesté treuvera en vérité, par ceste mienne tant fondée déduction de cest affaire.

.Mais, en tous événemens^ fust grandement à souhaiter que lesdictes constitutions et provisions tant nécessaires et prouflGta- bles fussent observées de Tune et Faultre partie, sans entourber ou molester personne au contraire : car, certes, plusieurs inconvéniens, sicomme effusion de sangchrestien, confiscations et saisissemens des biens de beaucoup de gens innocens , bannissemens en exils et aultres persécutions et inhumanitez en puissent estre obviez par l'observation desdictes ordonnances impériales.

Toutesfois, comment icelles sont esté observées, ung bon temps en çà, par les adversaires de moy et de mes alliez, le duc d'AIve et sa suyte sanguinaire, cela font apparoir souffi- samment les cruaultés et tyrannies, ensamble les inhumaines exécutions et persécutions usez de par ledict duc d'Alve, à sa malheureuse venue es pays d'embas, à rencontre de beaucoup de mille et mille personnes innocens, comme aussi il continue encoires journellement, sans cesser.

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Car^ en premier lieu, il est chose notoire et manifeste que par cy-devant la duchesse de Parme, lors régente de par Sa Majesté Gathoh'cque en sesdicts Pays-Bas, a expressément per- mis et accordé les presches de la paroUe de Dieu, soubz pro- messe que nul mal adviendroit à ceulx qu'avoient ouy ou encoires yroient ouyr lesdictes presches, selon que, par le com- mandement de ladicte duchesse, j'ai faict publier ladicte per- mission par mesgouvernemens, moy obligeant, quant et quant, devers les subjectz, que cecy scroit inviolablement accomply et observé, comme, en cas de besoing, se pourroit apparoir par bons documents. Quoy toutesfois nonobstant, ledict duc d'AIvc a, du commenchement, ung excessif nombre des bons et léaulx vassaulx et subjectz tout misérablement mis en exil, et deschassez de leur famille, femmes et cnffans, à cause qu'ilz se sont trouvés èsdicles presches.

Ayant aussi incontinent procédé, parmy quelque certaine citation prétendue, vaine et hors de tout droict, sur le poinct de confiscation et occupation de leurs biens et meubles, sans aulcune observation de Tordre ordinaire des procès judicielz, ains de facto, toutesfois soubz le prétexte et couleur sicomme lesdicts povres gens fussent rebelles et héréticques, confisqué leursdicts biens, en commcnchant ainsi le procès a prœda et executione, non-seullement contre les communs droictz escrîptz, mais aussi directement à rencontre les contraictz, obligations, astriclions et juramens faictz et strictement affir- mez et ratiffiez de par Sa Majesté et les estatz de ses pays patrimoniaulx, comme aussi ledict duc d'Alve a faict exécu- ter et tuer, tant en publicque que à la cachette, beaucoup de gens de bien, sicomme bourgeois, marchans et nobles, à cause de la religion, assçavoir : quelcungs par estranglcment, feu, glaive et aultres horribles manières de faire, et plusieurs aultres laissé mourir et consommer en estroicie prison , et certains aultres laissé misérablement et tirannicquement tor-

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quer et inartirizer^ que, après avoir soufFert grande marlire« leur a convenu finir innocentement leur vie.

El; affin que ledict duc d'Alve face apparoir de plus son affection sanguinaire et tyrannicquc; il a, passé peu de temps, faict appréhender, tout sur une nuict (>), en toutes les villes des pays d'embas, ung grand nombre de ceulx qu*il a tenu suspect en leur foy, et les faict mectre hors leurs maisons et lictz en prison, pour en après, à sa commodité, faire son plaisir et volunté avecq lesdicts prisonniers, et de luy applic- quer et approprier les biens de ceulx estans ainsi déchassez, mors, condamnez et exécutez, contre droict et coustume ordi- naire, et par ce exposé les susdicls riches pays d'embas, non- seuUement en extrême servitude et esclavonerie , et quant et quant en misère, calamité et dangier indicible, ains tendt après de mectre lesdicts pays en plus grande misère, voire en entière ruyne et destruction, en cas que sa cruelle entreprinse ne soit rompue par Tayde de Dieu, avecq aulcuns aultres moyens convenables : et tout cecy, nonobstant la grande fidélité que les pays de par deçà ont tousjours portée à Sa Majesté Catho- licque et à feu l'empereur Charles, en contribuant plusieurs grandes aydes, montans aux aulcunes millions ; mesmemcnt, que lesdicts pays se sont dernièrement offertz de contribuer jusques à trente cens mille florins, moyennant qu'ilz puissent cstre libres de leur conscience, et que, oultre cela, en toutes choses politicques, estre obéyssans à Sadicte Majesté. Oires doncques, si cecy est une rébellion ou désobéissance, comme le duc d'Alve et ses adbérens donnent à cognoistre, est en soy- mesme plus liquide et clair, que d*eslre besoing à déduyre par longs escriptz.

Et combien que, à la requeste de madame de Parme, alors

(I) Le 3 mars iS68, à minuit. Voy. notre Notice sur le çontoil des troubles, dans les Bulletins de rAcad<fmic, t. XVI, lr« partie.

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gouvernante, Sadicte Majesté s'est déclairée et asseurée aux auleuns signeurs et gentilzhommes qu'ilz n^auroient à crain- dre aulcun mal ou dangier, à cause de leur requeste présentée pour hoster l'inquisition et les plaeartz d'exécution , si est-ce qu'il est notoire que le duc d'Alve, durant ceste sienne cruelle domination, a entièrement contrevenu à la susdicte promesse et asseurance de Sadicte Majesté et de madame de Parme, à la grande dérision et vilipendence des personnaiges se ayans fiez à ladicte promesse, lesquels sont esté mis en prison, et les biens des fugitifz, de quelque religion qu'ilz sont, sans aulcune distinction, confisquez : le tout, contre droict, ordonnances et mesmement contre les susdicts privilèges, contraictz et asseurance, de par Sadicte Majesté mesme, jurée et accordée aux susdicts Pays-Bas.

Par il appert assez que ledict duc d'Alve contrevient et mésuse sa commission qu'il a de Sadicte Majesté, au grand pré- judice et destruction des léaulx vassaulx et subjectz de Sadicte Majesté : car il n'est à présumer que Sadicte Majesté, comme roy débonnaire et de bonté, ait jamais esté d'intention, ny encoires moins pensé, d'user de telle cruaulté, contre le ser- ment d'icelle, et que le duc d'Alve a faict cecy de sa propre auctorité : de sorte que les affaires es pa!s d'embas sont deve- nuz en tel estât, que l'on ne respecte personne, de quelle con- dition ou religion qu'elle soit, estant pourveu de quelques biens.

Je ne veulx dire quel mal, insolence et désordre font jour- nellement les gens de guerre dudict duc d'Alve aux Pays-Bas, dont chascun homme de bien debvra plus désirer de veoir la mort des siens, que lesdicts scandales. Et, combien que moy, pour mon particulier intérest, durant le temps de mes gou- vememens, voire le temps estant parvenu à mon eage, n'ay jamais prins plus à cœur que de planter et augmenter l'auc- torité, puissance et réputation de Sadicte Majesté, et que les pays d'icelle pourroient vivre en paix, union et prospérité , et

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que tout dangier et dommaige seroit osté, ce que j'ay démons- tré une bonne espace de temps, en despendant mes propres biens, non sans grand dangier de mon corps et vie, toutes- fois, ce nonobstant, Ton a confisqué mes propres biens, pays et subjectz, non plus ne moins que aulcuns aultres de haulte et basse condition , et ce tant seullement par forme d'une sinistre citation et proclamation, sicomme j'eusse affecté la supériorité et haulteur de Sa Majesté Gatholicque, pour me faire signeur des pays de par deçà, et ainsi perpétrer crimen fiAellioms; lesquelz mes pays me sont encoires, pour le présent, ostez par force, et contre tout droict, les recés et. ordonnances de l'Empire.

toutesfois je puis attester, avecq Nostre-Signeur Dieu et la conscience de mon àme, devant Vostre Majesté Impériale, que Ton me faict grand tort en cest endroict, et que cecy m'est imputé par mes adversaires, tant seullement pour excuser leur vengeance tirannicque et infraction de la paix publicque : ce que Ton peut facillement comprendre, tant seullement par ce que j'ay résigné librement mes gouverne- mens de Hollande, Zeelande et Utrecht, pour éviter toutes suspicions, et ayant ainsi délaissé les principales villes, forte- resses et chasteaulx de mesdicts gouvememens, et en après me retiré, non secrètement, ains publicquement, vers Allemagne.

Ce que je aurois jamais faict, quand mon intention fusse esté aultre, suppliant que les principaulx officiers desdictes forteresses puissent estre interroguez si je leur ay oncques requis de mectre forteresse ou ville en mes mains, pour mon particulier prouffit.

Mais que le duc d'Alve, avecq ses adhérons, sont les vrays rebelles et ennemis non tant seullement de Sa Majesté Catho- licque et ses pays d'embas, mais aussi de Vostre Majesté Impé- riale et de tout l'Empire, estant leur intention (corne ilz ont practicqué passé longtemps, joinctement le cardinal de Gran-

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velle) de mcctre les pays d'embas en servitude perpétuelle, ct^ de Taultre costel, d'oster le gouvernement à Sa Majesté Catho* licque et son filz^ et conséquamment la vraye succession, à Vostre Majesté Impériale et ses hoirS; desdicts pays d'embas, et par ainsi entièrement gouverner lesdicts pays sans enipes- chement quelconque, pour en après invahir les Estatz de l'Empire, les mectre fil à fil en leur puissance, et introduyre illecq la mesme tyrannie, come ilz font présentement ausdicts Pays-Bas. Ce que tout Ton peult facillement comprendre et appercevoir par les espoventables et misérables exemples des exécutions, persécutions et tyrannies passées, mesmement parce que ledict due d'Alve n'a pas seuUement faict exécuter beaucop des gens de bien innocens, tant nobles que non nobles, ayans porté le cœur en bon endroict endevers Sa Majesté Gatholicque, ains aussi partie des plus principaulx signeurs de l'Ordre, ausquelz estoit commandé de Sadicte Majesté le gouvernement desdicts Pays-Bas, débouté hors le pays, et partie d'iceulx misérablement et cruellement meur- dryz et tuez, sans la moindre juste occasion : le tout, à l'inten- tion malicieuse pour, par ce moyen, entièrement abolir et extirper les plus éminens signeurs, qui leur pourroient donner aulcun obstacle et empeschement en leurs cmprinses inhu- maines, lendans à l'infraction de la paix et mutineries, et en après attirer à leur propre volunté le gouvernement du pays, et se faire signeurs d'icelluy : ce que peult aussi clèrement apparoir par ce qu'ilz ont tant practicqué par leur astuce, que Sadicte Majesté Gatholicque a prins prisonnier son filz unic- que('}, à telle fin qu'il ne se polroit mesler ou entreprendre des affaires du pays de par deçà, estant si misérablement gasté par ledict duc d'Alve. Comme aussi icelluy duc d'Alve, pour démonstrer tant plus

(I) Don Carlos.

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son ennemîtié et illicites entreprinses , n*a espargné mon propre filz , le conte de Bure, luy ayant dernièrement osté de Louvain^ il estoit mis à l'estude, pour d'aultant mieulx estre servy de lui Sadicte Majesté à l'advenir, et ainsi Famené prisonnier, sans faulte à telle intention qu*il me pense lier mes mains de telle sorte, affin que je n*auray moyen de luy faire empeschement en son règne tyrannicque.

Et, combien que moy, comme celluy qu*est tant offensé à tort, auray eu juste occasion de penser, avecq mes alliez, aux telz moyens d'obvier aulcunement à telz oultrages et forces illicites, estans expressément contre les ordonnances et recez de l^Empire et des droictz escriptz, et de user de la deffension permise, si est-ce que^ pour démonstrer tant plus ma paisi- bîlité; et pour éviter la dangereuse conséquence, j'ay bien voulu souffrir tout cecy pour quelque temps^ que d'entre- prendre la résistence, soubz l'espoir que, par rinlercession de Vostre Majesté Impériale, lesdicts affaires seriont moyennes et appaisés , ou du moings mis ordre et provision contre les emprinses et forces dudiet duc d'Alve, usez jusques à oires à rencontre de moy et aultres personnes inculpables, de basse et haulte condition.

Mais, Sire, comme je treuve, non sans grande perplexité, que la susdicte tyrannie et persécution ne se diminue en chose quelconcque, ains que icelle s'augmente plustost de jour en aultre, en accroissant de telle sorte que le semblable n'a esté jamais veu ny ouy en Germanie, car, depuis Tarrivement dudiet duc es Pays-Bas, il a faict misérablement mourir, et aulcuns déchasser hors le pays, non seuUement ceulx de la religion , ains aussi aulcuns aultres personnaiges inculpables , ayansesté pourveu déquelques biens; et, pour d'aultant plus monstrer son affection tyrannicque (comme Vostre Majesté peult sçavoir), il a faict exécuter, à Bruxelles, le premier et second de juing dernier, jusques à soixante gentilzhommes et

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aultres riches marchans et bourgeois, et eneoires ung assez grand nombre es aultres villes, après la eonCscation de leurs biens. Et, n'en estant eneoires content de tout ce, cpmm'il dit est, il a faict décapiter, le v' jour dudict mois, les deux cheva* liers de l'Ordre et contes d'Egmont et Homes, et, pour faire tant plus de honte et scandale ausdicts exécutés et leurs parents, il a faict mectre leurs testes sur quelque baston ou fourche pour aulcunes heures de loing, nonobstant les services par eulx faictz, en plusieurs guerres, &feu l'empereur Charles , et de- puis à Sa Majesté Gatholicque, à leur grande despence et dan- gier de leur vie, comme il est notoire à chascun, et le tout, sans les avoir préalablement ouyz et sans aulcun procès, tout à rencontre des droictz divins et naturelz, et des recez et ordonnances de l'Empire, et, après ceste misérable exécution, derechief recommenché appréhender plusieurs personnes.

Par laquelle auparavant jamais ouye tyrannie et persécu- tion, ledict duc d'Alve a causé partout telle peur, que aulcuns milles personnes, et mesmement ceulx estans .principaulx papistes, se sont retirez en dedens peu de temps hors les Pays- Bas, en considération que ceste tyrannie s'exerce contre tous, sans aulcune distinction de la religion ; se ayant ledict duc d'Alve. laissé ouyr qu'il ne vouldroit pas seuUem'ent cercher ma personne, mais aussi tous ceulx qu'estoient enfuyz en l'Empire et aultre part, selon tout son pouvoir : dont j'ay eu plusieurs véritables adverlences. Par Vostre Majesté a facil- jément à comprendre l'intention du duc d'Alve et ses adhéréns s'extendt, assçavoir : de tuer et extirper ma personne, mes confrères de l'Ordre et estatz à luy faisant empeschement en ceste sienne illicite emprinse, et en après le reste de la noblesse, bourgeois et marchans tenir pour leurs esclaves, ains d'encommencher ung tel estrange régiment par ilz pour- iroiént subjecter avecq le temps les princîpaultez et villes citéonvoysinnes en leur puissance , et annichiller et cesser

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tout bon police, les privilèges, droictz et usanoes du pays, et par ainsi mectre lesdicls pays en extrême misère, pour extirper avecq le temps la religion, non-seul lement es dicts Pays-Bas, ains aussi en la nation allemande; et finallement desrober et démectre Sa Majesté Gatholicque et son filz de leur possession et gouvernement, et par conséquent aussi Vostre Majesté Im- périale et ses hoirs de la succession desdicts Pays-Bas, et ainsi exercer leur tyrannie en devers les aultres Estatz de l'Empire : ce que ensuyvra en brief, en cas que Ton n*en obvie bien tost par moyens convenables.

Or, si les susdicts affaires du duc d'Àlve correspondent avecq les constitutions et ordonnances impériales faictes sur le faict de la religion et paix publicque ; samblablement , si ung tel infracteur de la paix, ayant si souventesfois contrevenu ausdictes ordonnances et loix de TEmpire, et néantmoins se oser vanter et nommer, au nom de Sa Majesté Gatholicque, pour ung Estât dudict Empire, à son advantage prétendu, se debvra joyr et user du bénéfice desdictes ordonnances ; item, si Ton pourra prendre de maulvaise part que, pour oster la force non ouye par laquelle tous mes biens et meubles me sont ostez, voire pour saulver et conserver mon corps et vie, j'ay prins aulcunement ou prendrois encoires en main la deffence nécessairement permise par tous droictz, recez, ordonnances et statutz de TEmpire, j'aimeray mieulx de mectre tout cela à la congnoissance de Vostre Majesté Impériale, sicomme em- pereur de droict, cnsamble à celle de tous les princes élec- teurs, princes et aultres Estatz du Saint-Empire, que d'arrester ou donner de fascberie à Vostredicte Majesté par mes longs e^criptz.

Tôulesfois, je veulx espérer, comme déraison, puisque entre aultres est exprimé, es mandemens de Vostredicte Ma^ * jesté, que entré les Estatz de l'Empire se doibt observer une. esgalité sur le poinct de la conservation de la paix publicque,

1

i6

que pour ce Fon debvrci avoir converly ledîcl duc d'Alve de SCS forces et tyrannies, ou du moins pourveu et ordonné pour, à Tadvcnir, moy, sicomme ung naturel et obéissant Estât de TEmpire, non donner aulcun empeschement ou obstacle en mienne très-juste deffension.

Et comme, par plusieurs faicts et violences dont ledîct duc d*Alve a usé, depuis sa venue es Paîs-Bas, mesmement par les exécutions tyrannicques et contre droict exercées aux personnes des susdicts signeurs de l'Ordre, est souffisamment à entendre et appercevoir que de son costel n'est à espérer aultre droict, sinon la susdicte inhumaine procédure^ voire plus cruelle extirpation, et que, ouitre cela, il n'est espoir, à cause des sinistres practicques de mes adversaires , que Sa Majesté mesme ( selon sa propre bonté et clémence ) aura quelque regard en cest endroict, ou que le duc mesme désistera de son inhumaine tyrannye, considéré mesme que Sa Majesté n'a respecté son propre filz, par les instigations et practicques desdicts adversaires : en considération de quoy, moy^ avecq aultres mes signeurs et amys alliez, sommes esté meu de prendre en main la deffence et résistence licite pour ma pro- pre sustentation et deffension des Pays-Bas, mesmement pour le commun bien de l'Empire, et ce à la très-instante requeste de plusieurs obéissans subjectz de Sadicte Majesté, puisqu'il n'y a aultre moyen de plus de mitigation : ce que toutesbis je vouldroys plus voluntiers avoir délaissé, comme Vostredicte Majesté a facillement peu appercevoir de par ma longue pa- cience.

Et, combien que je ne faiz doubte que ceste mienne chres- tienne et licite entreprinse sera interprétée par mes adversaires sicomme je vouldrois par ce moyen résister et rebeller contre Sadicte Majesté Catholicque, et par ainsi repoulsser non-seul- lement Sadicte Majesté, ains aussi ses vrays successeurs et héritiers de leur régiment et succession, et ainsi m'advancher

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-••..--"■• .■ ._-i7-v:- ■■ .......

«

ei\ CQ$( endroict plus .qu'it:ne me convenpit,. steac-ce que je' puis attester^ piâr-poroliç de prince, tesmoiagnaiit aussi àyeeq Diéti, que telles x)U seroblajbles pensées ae sont jamatîs énitrée^ en Mon qœur, et que, parçesté mieniie entreprisse très^héciés-' satre, .n'ayjamaîs' aultro chose, prétendu ou cbeccbé^ sinon, radvahcheinent de Ihenseur de Diea'^ le premier. (sonsént^/ luealietpefaiiâsion.du libre exercice x)e la religionVausèi^ 4^e :. ' Sa 5f âjesté Gatliolicque, ses paîs et subjeélz seroient rjedresselB en leur pfemifire prospérité, et d'ores en avant vivre en ob$^ :dîèQ^ i^ne^ souht Sadicte Abyestéret lesy^ays sacoeâdeuVs^- dlcetle, aûsquelz ja succession des Pais-Bas appartient- de . drpiçt' et: p^r ce moyen estredélivrez'de la persécution du duo d'Alve et ses. gens de guerre, pour déréchief parvenir a leurs amùens privilèges , coïitrâtdt^ et ôrdonfiancès jurées par Sa Miyésiémesinevet finablement,- que les povres chres*^ (ièns fugiâfz. puissent recouvrer leui*s biens bstez par iorce^* et' que moy puisse estre restitiié de mon hôniieur^ et quant çt quant assèuré de mon corps, et mesmêment de'mbn iilz. ... Et, en cas que je poûrroîs estre asseùré de. 'cecy, je m'offre et me vewlx avoir trës-^humbtement déclairè. eri devers Vostre

Majeaté-lmpérialéy'de superséder iout entièremem detuadicte

tfèstoécessaire deffence, et donner quant et qiianl à eognoistré à tout iemôncte que mon Iiitentiôn et desseing n a esté oncques aultre que^ après radVànchèmént fbohnéur de Dieu, pracurer et promovoir la baulteur de Sadicte Majesté Caâiô- licque et le bien, prospérité et saïut de ses païsj .«ubjectz^ et. ' ... inrays successeurs d!iceulx, préseo? et aultres advenir.

.Âfais.coiJidoiey.deBiou costel, Fespoir est fort petite voyant . la préseBte tyrannie du duc d'Alve, que si tost l'oir eiïr pourra . mèctre ordre, pour ce il me convient d^atlendre pacjemménl et obéissammen t la grâce de Dieu {es mains duquel reposent tous les cœurs des roix et princes)^ et entre-temps efforcer de prendre eh main la deffence permise en iôus droictz^ r ecâs et

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- f 8

ordonnances de .l'Empire, pour, en assislence et nyde de aul- très jnes signeurs et alliez, povoir, à roon possible, rencontrer et sustenir les forces non ouyes de Fennemy de moy, de ia patrie^ voire du Roy et de Vostredicte Majesté.

Ordoncques, puisque, par ceste fondée en toute vérité, mesxnapar aultre mienne Justification que j'ay faict impri- mer («)i dont Vostre Majesté trouvera icy-joinct ung double, Vostredicte Majesté aura à veoir que j'ay jamais contrarié à Sadicte Majesté Catholicque en chose quelconcque, ains plus- test advaAché la prospérité de Sadicte Majesté et de ses pays, selon nf>a possibilité, neespargnant ma personne et mes biens , ce que j'entends encoircs faire d'ores en avant durant ma vie, en toute humilité et deue obéissance ; et que à rencontre Ton voit clèremeht que le duc d'Alvc, sicomme ennemy ouvert de Sadicte Majesté, de ses pays et subjectz, ne pense ou traicte auhre chose, sinon comment il polroit oster à Sadicte Majesté Catholicque, à son filz, et par conséquent aux aultres vrayz héritiers leur succession, et par ce moyen mectre les pays en perpétuelle servitude , extirper la religion chrestienne, et après dépescher ma personne, avecq aultres obéissants vassaulx et subjectz de Sadicte Majesté, pour extendre sa tyrannie aultre part, et que, oultre cela , que ledict duc a jusques à présent tant énormément contrarié aux ordonnances delà paix publicque, le bénéfice de laquelle lui-mesmc s'est démis ipso fado, et par ainsi donné occasion très-évidente de ceste mienne juste résislence : de sorte que j'espère que Vostre Majesté Impériale, après la lecture de ceste mienne Justification, me . tiendra pour excusé des injures et diffamations de mes adver- saires et de toute mienne entreprinse, et d'entendre ceste nostre

(>) La Jiutification du prince d'Orange contre les fauix bUumeê que tes calumnialeurs taschent à luy imposer à tort, impriracc au mois d*avril 1568. Yov. le tome II, p< viti.

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résistence très-juste^ chrestienne et conforme aux ordonnances et exécutions de la paix publicque, sans nous foire quelque empesebement, ains plustost faire à nous, povres et désolez chrestiens, toute assistence et faveur, selon qu'il appartient à Toffice et auctorité de Vostre Majesté d'estre le dernier refuge à tous ceulx qui se treuvent agraivez à tort et contre raison, En quoy^ etc. De Dillenbourg, le i2 août 1568.

Guillaume, prince d'Orange.

M innte, «ai Arobites du Royaume : LtUre§ dt et A OuiHaumf d* ffa$iauy t. V.

DX.

LE PRINCE D'ORANGE AU MAGISTRAT ET AUX MÉTIERS

DE LIÈGE.

Il demande le libre passage par cette ville, ainsi que des vivres et les antres

choses dont il a besoin.

Au CHATIAU DB WlTTHIM, 4 OCTOBaS tS68.

Le prince d'Oranges, conte de Nassou, seigneur baron de

Breda, DiEST, etc.

Messieurs, me confiant qu'estes assez informez des urgentes causes qui m'ont constraint de prendre à la main la présente deffense contre Thorrible et non jamais ouye cruaulté et tiran- nye puis naguaires exercée par le duc d'AIve et ses adhérens contre les poevres chresUens et autres inhabitans du Pays-Bas, ne m'cxtenderay à vous en faire icy aucune spécification.

V m *i iV

^^

Et comme; à «est e&c^ il a pieu au Seîgpaeur Dieu me aôifiner |iréserilement le moîéiî, par ceste année iavèc laquelle j soubz cohduyte de Sa Divine Majeslé, j'espère de délivrer si eifécrèfeles. oi^pressîoos nèn-seulemeni ledict Pays-Pas, arnsattssjr garantir et préserver de semblable tirannie tous aiitres pays ch^onvoisîns^ sur lesquels ledict d'Alve^pré- téna d^éxten(îre avec le teihps sa faige et foreur, et les mettre aux mesmes servitude et inquisition, come il a fait ledict Pays-Bas; ainsy qùfe pui&iiagaires il a démonstré, en occu- pant et se saisissant des terres et seigneuries de TEmpire, vous erivây partant bien vouilu sur ce faire ce mot, jpour vous pryér que me voeillîez donner libre passage, avec ceste mienne armée, par vostre ville de Liège, comme suis ihformé que ne pourroys avoir meilleur passage qiie par icelle, ou enlour, ^ -m'iïssisteir de vivres^ autres choeses nécessaires, en les paiant raisonable prix : ce qi^e seray prest de déservir, en temps et lieu, vers vous. Et, espérant que, pour la singulière âfifectloïï qu'avez à rentrelénèiiaent des previléges de l*Empire et de vostre propre bien et salùl,"raesmes pour ne tomber en après entre les mains de si barbares et cruelz tirans , ne me vol<fréff refuser ceste mienne Juste demande, et par empes- cher ung si grand bien que Seigneur Dieu présente main- tenant pour la délivrance de tous oppressez., me déporteray vous faire icy plus longues lettres, vous pryant itérativement - que, 4es raisons susdictes considérées,, me vuilliés accomodef en cecy, et sur ce. déclarer et mander- vostre bonne volunté el tésoïutioh le plus toesl qu'il serai possîblq, moins endé- dens vingte-quattre heures , pour point perdre le temps et ôéeasibik que Dieu présente maintenant; Et à tant prieray Dieu : à vous, messieurs, octroyer en tout heur sa très^béningné grâce. Escripte en la maison forie de Wytlhem, chez mon csimpr le quattresme jour d'octobre lîî68;

Messieurs, en faisant ce que dessus vous ay requis, iien-r

■^. .

dray la main et donneray tel wdre ^rs-^q^.^xeccite Ç% qu*îi n'adviendra nulle folle (') ou pîttage en. vôstre pay^/ .

Vostre bien bon amy à vous faire service,

GuilEe Dfi Nassau*. / .

^fiscriptwn .- A messieurs les burgemaistf es ; jurer, conseil Cl -^-généralité des trengle-deuxmestiers de ta bonne ville Liège*

Arehi ves de la Tîlk de Li4g« rAf^dni oi» rpou ^ eotueti ^ «»{<«, du 5 avril 1568 au 10 février 1570.

DXI.

LE ÏÀGIStBÂT DE LIÈGE AU PRINCE D'ORÂNGË.

Il s'excuse de donner réponse k la lettre précédente.

I *

LiâGB, 9 OCTOBÀB lJfB8.

Monsieur, aieans, par la trompette de Vostre Excellence, porteur.de oeste, receu cejourd'huy, entre les buyi<it i^uéff heures de matïn> leures de Vostredicte ËxcelIcnGe daultécs de quéttréme de mois, n'avons volu failUr de incontinent en faire overture et déclaration : dont, selon l'advis et délibéra- - tiohsur'ce priese/ advertissons Vostre Excellence que les . demandes y contenues ne concernent seulement le fait.{)arti-:. eulier des burgemaistres, jurez, conseil et trengtc-deux bons mestiers de césle cité, mais ossy la grâce de nostre rëvérèh-

(*) Exercite, armée. («) Fottf, foule.

. «

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dissime et illustrissime seigneur et prince monseigneur de

Liége^ messieurs de son vénérable cbappitre, messieurs de la

noblesse, les bonnes villes, plat pays et généralement de tous

les trois estatz de cestuy pays de Liège et conté de Looz. Par

quoy ne porions, sur le contenu desdîctes lettres de Vostre-

dicte Excellence, donner autre resitonce, espérant que Vostre-

dicte Excellence 9 attendu l'équité d'icelle, ne le prendrat

de maie part. Et sur cC; faisant fin par noz bien affectueuses

recomandations à la bonne grâce de Vostre Excellence, pryons

le Créateur luy octroyer la sienne. De Liège, le cinquème

d'octobre 1S68.

Les burgemaistres, jurez et conseil

de la cité de Liège.

Suscription : A mons' mons' le prince d'Oranges^ conte de Nassau^ etc.

ArcbWei de la Tille do Liège : BêgUtn tma rsees Ai eomtU de vOU, da 5 «Tril 1568 «q 10 jotn U70.

DÎII.

LE PRINCE D'ORANGE AU MAGISTRAT DE LIÈGE.

demande de pouvoir lever, à Liëge et aux environs, les pionniers qui lui

sont nécessaires.

Ao CAMP, pais DB ToiteaBB, iO octobbb iS$68.

Le paiNCB d'Oranges, conte de Nâssou^ seigneur baron de

Breda, Diest, etc.

Messieurs y comme ^ tant pour la conduycte de mon artil- lerye que autrement, j'ay bcsoing d'avoir encoires quelque

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nombre de pyoniers^ vous ay bien vouDu prier, par e^ste, de donner à présent porteur, Ëverard GraneouUe, eongié et licence de faire sonner le tambourin en vostre ville de Liège et enthour, pour povoir lever tel nombre de pioniers qu'il pourra recouvrer : ce que serray prest de déservir vers vous, l'occasion s'offrant. Quy sera l'endroit prieray le Créateur vous octroier sa très-béningne grâce. Doiz mon camp , prés de Tongre, ce x' jour d'octobre 1568.

Vostre bien aSectioné amy à voslre eomandement ,

GdiîXe de Nassau.

Suscriptiùn : A messieurs les burghematstres, jurez et conseil de la bonne ville de Liège.

Archives de U rille de Liégo : RtgiUrt aux t«c9» du conuil ville, du 5 aTril 1588 au 10 féTrter 1570. Archives de l'Eut à Liège : Registre aux $en- teneeê criminelle* eommeneéet au temps de l'oppu' gnatioH et camp du prince d'Orange.

DXIIL

LE PRINCE D'ORANGE AU PRINCE-ÉVÊQUE DE LIÈGE (»).

ihe plaini de la conduite de l'ëvéque et de son chapitre, et leur demande, en réparation de ses griefs, une somme de 100,000 écus.

Au CAMP, PtBS DB ToifGRSS, 10 OCTOBRE 1K68.

Monsieur, j'avois tousjours espéré que vous, estant prince de l'Empire, comme vous déclairés, vous fussiez aussy con-

0) Gérard de Groesbeck ou Groisbcck, nomme, le mai 1362, coadjatcur

loMié aux rècSs et uArioes ^i^Uuy.. D^nt tdutesfon, en mon ^emboiét, eôinnie, puis quelque tempfs de çà, me suis assez appèreeu^ avez usé (mit au •eoptfQÛre; ne m'^yant-faret seule- ment espier et aguetterde tous côuslés, ains aussy, contre lOût dfoiet 7 raison ei rancienoeiihértétludict Empiré, vous .ét/ccux dé.yoMre chapitre avez outragé miit et moins .que [mmaîneméot traicté ceux que sçavcz se vouloir employer pour la liberté du bien publiçq et.mon service : estant le tout si notaire qu'il n'est besoîng le vous icy spéciGer, ores que, comme sçavez assez, à tous ceux dudiet Empire, et de toutte ancienneté^ a esté permis se mettre librement et franchement au service de tous princes et seigneurs- qui les requerroient, outre ce qu'avez assisté et aydé , comme faictes encores pour rheure, Tenneray du bien pubtieq et de moy, tant que vivres (^•) que autrement^ de.tout vostre pouvoir, comme j*ay encorcs veu jpar une lettre que monsièdr de Berlaymont vous escript : .dont aussy ne puis délaisser me resenlir gi^andement en .vostre endroict. Et, ores que pour ce ne suis aucunement d'inten- tion de.foTcGv aucuns de \ot subj^ctz ou inhabitans de ce pays, pour l'outraige toutesfeis que vous et tous ceux jde-^voslre chapitre, avez faict, en ee que dessus, à moy et aux miens, je vous demande la sonmie de cent mil escus au soleil, lesquelz vous prie me - faire tenir et délivrer promptement et sans aucun délay^ et me donner sur cestevostre responce^ endedaas vingt-quatre heures^ à Bourchloon ('), ou entour, afin que,

de Tcvéque Robert de Berghes, fut élu pour lui succéder au moh dVril 1K64. Sod élection fut confirmée par une bulle du pape, du 17 dcâ calendea du mois de janvier de Tannée suivante, et, le 3 juin ll>65, il fît sa joyeuse entrée à Li^é. -

^ouft ayons publié, dansjes Analeçk» beisiguety p. i7^20S et â6S-S98^ la correspondance de Gérard de Groesbeck avec Marguârite. d*Antriche, dachessc Parme, régenté des Pays-Bas, dans les années 1566 et lt^7.

(') Sic dam le manuscrit. Il làut lire : tant de vivres.

{*) BaurcfUoon, Looz*

86lonîcelle, je. seiche éomment je me debvrois reîgler. vers V0U8 et k bien de. vostre chapitre. Et sur ce, ihonsieujTvj^ prieray Dieu vous octroyer sa saincte gr&ce. Datte de mon camp, pre2 de Tongre, ce dtxiesme jour d'octobre 1 568.

Copie da tem|M, aux Arehives dd Roytmne t Lettre» de et à G%iUaMme de Naesau, t. V.

DXIV.

LE PRINCE-ÉVÉQUE DE LIÈGE AU PRINCE D'ORANGE.

. . .

Réponse a la lettre précédente. ILjustiûe sa conduite, et offre d^en rendre. '^ \. compte devant rEmpereur, ou fa chambre impériale.

'

LiéQI, Il OCTOMB 1068.

Monsieur, j'ay cejourd'htiy receu vostre lettre d^hier. Pour .responce à laquelle, comme dictes, monsieur, que je suis prince d'Empire, certes, à raison de Testât qde( combien qu'indigne) je tiens, que je ne le doibs, ni ne puis nier, et pourtant me suis, avecq mon chapitre et mes aultres estatz , toujours conduict selon les recès et constitutions dudiet Empire et du circle westphalien d'icelluy, soubs lequel moy, mon église et pays resortissons, sans avpir ce que puissions sçavoir) oiïensé en cest endroict. Et signamment, quant à aguetz (•) dont vostre lettre parle, je n'ay, en cesle ny aultre chose, riens faict que pour la conservation de mon Église et pays, selon que, outre le droict naturel, mon debvoir envers

O ^Sri«e(z^ espionnage.

se- més subjectz, et mesmes les reeès et ordonnances, tant impë- rialles que circulaires, me commandent, sans avoir voulu ny vouloir faire aucun tort ou déplaisir à vous, monsieur, ny à personne. Et si, d'adventure, il vous pourroit sembler que j'eusse en aucune manière faict ou usé contre lesdicts recès ou ordonnances, ou traicté personne contre raison ou la liberté permise audict Empire, j'ay, monsieur, comme sçavez, mon supérieur, la Majesté Impérialle, devant laquelle, ou bien la chambre impérialle, je doibs et partant suis prest et offre d*ester en droict, si, contre moy, mesdicts chapitre, estats et pays, vous, monsieur, ou aultre quece fust, prétendez aul- cune réparation d'offense. Et, en oultre, quant aux lettres que monsieur de Berlaymont me pourroit avoir escrit, vous sçavés, monsieur, que ne puis empescher que quiconque veult ne me puisse escrire ce que bon luy semble ; et pourtant ne vous saurois sur ce respondre autre chose, mesmes ne m'estant lesdictes lettres parvenues en mains. Et finallement, touchant les vivres furnys au camp du roi catholicque, il m'a convenu ( ') en ce aussy obéir aux mandemens de Sadicte Majesté Impé- rialle et accordz passez audict circle. Dont , monsieur, je tourne à vous requerrir, comme puis naguères ay faict , de vous vouloir conduire réciproquement, envers moy et mesdicts chapitre et aultres estats et pays, selon les recès et constitu- tions impérialles et circulaires susdictes. Et à tant, monsieur, je prie le Créateur vous octroyer sa saincte grâce. De Li^e, ce xj* d'octobre 1568.

Copie da temps, «ax Archivai da Roytume : LfUr0Ê de el A GwUaum de ffouau, t. V.

(0 // m'a cofivenu, j*ai dû, j*ai été obligé, etc.

27

DXV.

LE MAGISTRAT DE LIÈGE AU PRINCE D'ORANGE.

Réponse & la lettre du 10 octobre, Il 8*excuse de satisfaire à la demande

du prince.

LliOB, 12 OCTOBRE 1S68.

Monsieur, après avoir, cejourd'huy, sur le punet Jes ix heures de matin, receu des mains d'ung nommé Adam de Thier les lettres de Vostre Excellence en daulte de x* de présent, n^avons failly incontinent les communicquer en conseil de la cité, selon la résolution duquel, et pour responce d'icelles, advertissons Vostre Excellence que la demande y contenue ne dépend de nostre auctorité, ains appartient à mons"" rêvé- rendissime et illustrissime nostre prince. Supplions pour ce Yostredicte Excellence avoir ceste nostre responce pour agréable. A tant^ monsieur, le Créateur maintiengne Vostre Excellence en sa sainte grâce. De la cité de Liège, ce xij* jour d'octobre 1568, environ les ix heures de matin.

Vozbonsamys, les burghemaistres, jurez et conseil de la cité de Liège.

SuKiription : A mons' mons' le prince d*Orange , conte de Nassau 9 seigneur baron de Breda, Diest, etc.

ArehWei de la tille de Li^ge : Rtffittrt du rteês du eimêHI de 9iU$, du » atril 1508 an 10 féTrier 1570.

- 28 -

DXVI.

LE PRINCE D'ORANGE AU PRINCE-ÉVÊQUE DE LIÈGE,

Il lui réitère la sommation contenue dans sa lettre du 10 octobre.

Au CAMP, À LOOZ, 12 OCTOUE.

Monsieur, je vous tiens mémoratif du contenu de ma lettre à vous hier envoyée par le messager de la ville de Tongre; estant bien esbahy que n'ay encoires aucune response sur icelle. Par quoy ay bien voullu faire suivre ceste itérative^ avecq copie de ma précédente, pour vous oster foutte excuse d'ignorance de ma sérieuse et dernière resolution, avant que d'entreprendre chose qui pourroit tendre à grand préjudice et intérest de vous et de vbstre chapitre, pour venger le grand tort et oultraige que moy et les miens ont receu de vouç. Et povez estre asseuré que, avant vingt-quattre heures, verrez par effect que ne suis d'intention de laisser passer la chose ainsy, si avant que ne vous rengez à la raison, avecq protes- tation que suis constrainct de le faire pour ma réputation, et que en cecy je n'entens de riens endommaiger la noblesse, ny les villes de ce paîs, sinon seulement ce qui vous pourroit toucher et ceuh de vostre chapitre, comme ceùlx qui m'en ont donné l'occasion. Par quoy, en cas que désirez éviter cecy, me pourrez incontinent mander vostre résolution, car autrement povez estre asseuré que suis délibéré de passer oultre, comme ceste contient. Qui sera l'cndroict prieray Dieu vous ,

monsieùrv avoir en sa saincté gardé'. Démon camp, à fiitrch- l()on/cçxîj*J6ur d'octobre 1868.

. . Le bien voslre, GuiLLE DE Nassau.

Stàcripiion -t A monsieur monsieur l'Êvesque de Liège.

Copio dq timp, «ux ArehÎTei do. Royaune : Ltutêê dàftiiSwmtuÊauAlfoiMnitfy.

oxvii.

LE PRINCE D'ORANGE ÀD WUNCE-ÉVÊQUE DE LIÈGE.

.

.. U cfemaDde le. libre pas6é£;0 de ses. troupes par la vUlédè ÏÀég9

En son C4IIP, 3 ROTBIIBRB 1508.

•• .•■■-.

Monsieur et messieurs, J'ay receu, ly er soir tard, vostre leurc, au contenu de laquelle (") ay voulu prévenir hier et avant hier, vous envoyant mes gens pour vous adviser ce qii'ay voullu requérir de la ville de Liège, assavoir : que libre pasçaige, avecq seurté réciproque, me soit accordé et donné parmy le pont d'icelie, pour la chevallerîe et charraige, et, pour Finfanterie, ' deiNftteaux; âvecq vivres nécessaires, pour pris raisonnables : ce qu'estimoy .nullement me debvoir estre refusé , si avant qu<H} ne 66 veult. ouvertement formaliser mon ennemy. Dont désire, encores ce soir, par respôhce expresse, estre advisé de vostre délibération eteffect d^icelïuy, affin qu'il ne soit besôing

^ Ç) Je n*«i pas trouvé telle leltM.

30

attendre autre voye que d'fiinitié : que, autrement, serons à bon droict constrainct de prendre protestations bien' expressé- ment que, si par telle voye adviennent choses redundantes au préjudice de la ville et bourgeois d^icelle, ou aultres, que la coulpe n'est mienne, qui n'ai désiré jamais ny désire encores qu'amityé réciproque avecq le pays et ville de Liège i vous donnant sur ce le bon soir, en attendant, ceste vespre, vostre absolute responce. De mon camp, ce iij** de novembre 1868.

Copie du temps, aux Arehlres du Royavme : Lotret d9 eC d ArfUaiMiM d* Nnaau, l- V.

DXVIIL

L'ÉVÊQUE ET LE CHAPITRE DE LIÈGE AU PBINCE

D'ORANGE.

Ils refusent le passage de la manière qae le prince le demande, et protestent contre les hostilités qu*il pourrait commettre.

LlifiB, 5 NOVBMBRB iK68.

Monsieur, nous serions marriz que de nostre cousié fût venue aulcune occasion d'ennemitié contre vous, et pensons que c'est chose (rop cogneue, qu'elle ne l'est point. Et, quant il vous eust pieu vous conduire , au passaige par ceste cité et vivres que demandés, suyvant le mandement et ordonnances impérialles et circulaires, donnant la caution requise, n'eus- sions faict faulte à chose qui fût de nostre devoir : mais, à la manière que demandés ledict passaige, sçavez, autant que nous, qu'il ne nous est aucunement permis, ains, par dessus

51 -

lesdictes ordonnances, par Sadicte Majesté Impérialle expressé- ment défendu. Et pour ce ne debvriez prétendre que pour oe nous veuillons nous formaliser voz ennemis, que jamais ne sera ni ne fut nostre intention ; et voudrions que, de vostre part, il vous pleut, monsieur, vous conduire semblablement en. nostre endroict. Et, quant vouidriez faire aultrement, protestons bien et acertes que ce n'est a nostre occasion ou coulpe, en tant que, faisans autrement, ne pourrions éviter Tin- dignation de Sadicte Majesté et autres Estats du Saint-Empire, mais au contraire, nous et les subjectz de ce pais, avons bien grande occasion de nous douloir de la manière que vous et les vostres usent avecques nous. Et à tant, etc. Datée le 3 de novembre lti68.

Copie du temps, aai ArehÎTes da Royaaine : Ltttru ti à GwMtmmê de Ffoiêtm, t. V.

DXIX.

LE PRINCE D'ORANGE A L'ÉVÊQUE ET AU CHAPITRE

DE LIÈGE.

Il demande itéra tivement le passage et des vivres. En son camp, 4 novesibsb 1568.

Monsieur et messieurs, j*ay receu vostre lettre, et me déplaist veoir, par icelle, qu'on ne cherche sinon me délayer et faire perdre temps, car pouvez avoir entendu, par ma lettre d'hier^ que mon intention n'est nullement me conduire hosti- lement en vostre pais et villes^ si avant qu'on ne me donne roccaaion; et eusse partant espéré ne m'estre refusé ma

.a2

demande tant raisonnable , ayant, offert donner a^seiiranee . réeiph)que et suffisante, pur ostQgiers, que nul malny^foulle : seroit faiste à la ville par moiltlict pas^aige, qui ni*at aussy çsineu vous adviser faire passer l'infanterie par l)atteaur. Et, eômnie il 4ne déplairait an cueurde veoir ce qu'H pdurrott advenir à la Ville, ensemble au plat pais et tant de belles imonàstères et maisons^ à cause de ce refus, vous ay bien^voulii faireœste itérative, et vous requérir me mander; au point du jour, Yostpe absolute. respoi^ce, si ùie seront aceordez le pasr saige et vivres sur pris raisonnable, point : protestant dere^ etief tout le mal qui adviendra, en cas^ de refu^ ou tihérieur délay^ n'estre ma coulpe. Et, quant à ee que peult estre foret jusques à présent, vous„ monsieur, sçavez qui en ayt donné première occasion. Et à tant, monsieur; Nostrc-Seigneur vous ait en sa saincte garde. De mon camp, ce matin, à trois lieu res, iiîj'^ de novembre 1568.

Copiç da tempSf *ax Arehives du Rflyanmc : Ltêirt* H à Ctûnaum» ffaèiou, t. V. '

DXX.

> . . . . '

LÉVÉQUE ET LE CHAPITRE DE LIÈGE AU PRINCE

B'ORANGE.

Ils répondent à la lettre précédente par un nouveau refus.

Monsieur^ nous avons receu vostre lettre itérative, datée de trois heures ce matin. Et, pour y respondrC; signamment

35

dictes que sçavons qui ait donné premier occasion de ce que par vos gens peult avoir esté faict jusques à présent contre ce pays, vous avons ouvertement déclairé, par nostre responee d'hier, que n'a oncques esté ny est nostre intention de faire, ny de faict n'avons faict, chose du monde qui vous peust ou deust offenser; nous reiglant tousjours (comme tenuz sommes et aultrement faire ne pouvons) selon les constitutions et ordonnances, aussi commandemens exprés de la Majesté Impe- rialle et de l'Empire, nostre légitime supériorité. Et, quant à vostre demande de passaige par ceste cilé et vivres , avecq l'asseurance en vostredicte lettre touchée, certes, monsieur, la conduicte que voz gens, depuis leur entrée en ce pays, tant endroit les villes de Loz et St-Tron, comme autre part, et à cest heure contre ceste cité, ont tenu et tiennent, sans que quelqu'un de nous vous ait onc vollu faire la moindre offence, ains tout plaisir et service possible, ne nous peult aucunement asseurer que le passaige par vous demandé s'y feroit sans péril et dommaige d'icelle. Par quoy vous prions estre excusez de vostredicte demande, et que veuillez prendre ceste nostre nécessaire excuse de bonne part. Et h tant, monsieur, prions DOsUre seigneur Dieu vous octroyer sa saincte grâce. De Liège, ce iiij" de novembre, devant midy, 1568.

Copie an temps, «ax Arebire« da Rojawne : Ltllref (/t ex d GuiUawM de fftiau, t- V.

III.

«

« \

84 ~

DHI.

LE PRINCE D'ORANGE AU ROI DE FRANCE ('). ' Il fta remet i ce qa'il dëeUré aa colonel Sdiombetg, envoyé da Roi. '

Humou, 31 vicBMBH 1!(68.

Sire, ayant receu lettre qu'il a pieu à Vosire Majesté m'éscripre par te S' eollbrinet Schomberg, et entendu de luy charge, suyvant l'eseript qu'il m'a apporté (•), signé la main de Vostre Majesté, j'ay respondu audict escrîpt, et dis* courru avec ledict S* de Schomberg, commcj en ma con- science, et pour mon debvoir et honneur, bien et grandeur de Vostre Majesté, je me sens obligé. Sur quoy me remeetant, je n'ennuyeray Vostredicte Majesté de plus longue lettré; seuUement la supplieray très-humblement me voùlloii* Fàir^ cest honneur, que de recepvoir ces miennes actions selon le zèle dévot et sincère affection que j'ay de veoir Vostre Majesté parvenir au comble de ses nobles et vertueux désifs, comme Dieu m'en est tesmoing. Lequel, en cest endroîct, je supplieray (après avoir très-humblement baisé led mains de Vostre Majesté) donner à icelle, en santé, très-heureuse et longue vie. De Helimora^ ce xxj'' jour de décembre 1568.

De Vostre Majesté très-humble et très-obéisant serviteur,

GuiLLE DE Nassau. SmcripUcn : Au Koy.

Original , «u ArehiTM da dlp«rt«B«Bt da lloid t à Lille : porlefeailU ans IcttrM niuiTct, n* 54.

(0 Charles IX.

(') Voy. Gbobn tan PMirsTiBti, Archives de la maison dVrange-Pfauau, t. III, p. 511.

3K

DXXII.

LE PRINCE D'ORANGE AU ROI DE FRANCE.

Remerciments. Envoi d'une personne qu^il a chargée de dire quelques

particularités au Roy, de sa part*

DlLLBNBOUaO, iO MAI 1571

Sire, je remercie très- humblement Vostre Majesté de la lettre qu'il vous a pieu m'escrire^ et prendre de bon part l'offre que vous at esté faicte de mon service, en laquelle affection tout ainsi comme je puis asseurer Vostre Majesté de demeurer toutte ma vie, aussi je la supplie qu'il luy plaise continuer vers moy sa faveur de plus en plus, laquelle, enter aultres choses, elle m'at nagerres monstre au redressement des affaires de ma principaulté d'Oranges. Au rest , Sire , j'ay donné charge à ce porteur de dire à Vostre Majesté quelques particularités de ma part, auquel yl vous plairat donner audience et adjouster foy, priant Dieu, après avoir présenté mes très-humbles recommandations en la bonne grâce de Vostre Majestéi qui la veuille conserver longtemps en pros- périté, avecque longe et heureuse vie. De Dillenberch, de may 8*^1571.

De Vostre Majesté très-hunible et irès-obéisant serviteur,

GuiïXe de Nassau.

Suicription s Au Roy.

Original aatographe, aax Arthivei do dëpirtemnit du Nord, A Lille : portefeuille aax letlrci mlMiiref, n«S5.

- 36

DXXIIL

COMMISSION DONNÉE PAR LE PRINCE D'ORANGE A JACQUES BLOMMAERT (').

n lai donne plein pouvoir de traiter avec les bourgeois et habitants d*Aude- narde, afin qu^ils remettent leur ville entre ses mains , et, au cas qu*ils s*y refusent, de s*ero parer de la ville. Il vent que les habitants soient main- tenus dans leurs anciens privilèges et libertés. Il révoque la commission ipi^il avait donnée, le 9 juin précédent, pour le même objet, h Jacques Blommaert et à Jacques Van Miegen conjointement.

DlLLKRBOUBG, 26 AOUT 1571.

WiLHELH, by der gratien Goidts, prince van Oraengîen, grave van Nassau , van Gatzenellenbogen , van Vianden, van Dietz, van Bueren^ etc., heere ende baroen van Breda, van Diest, van Grimbergen. van Arlay, van Noseroy, van Chas- teau-Belyn, etc., borchgrave van Antwerpen ende van Besan- chon, stadthouder ende capiteyn gcnerael van HoIIandt, Zeelandt, West-Vrieslandt ende Utrecbt. Allen den genen die dese jegenwoordige sien sullen, saluyt. Doen te weeten, . dat alsoe wy niet op en houden aile nutte ende bequame mid- delen te soeken om métier hulpe ende genade Goidts die Nederlanden cens te verlossen van bel jammer, ellende, sla- vernye ende tyrannie daer die goede ingesetenen derselver landen jegenwoirdelyck innegestelt syn door die grouwelyck- heden ende ongeboirde boosheden, by den hertoge van Alva ende synen aenhanck voirtsgekeert sedert syne aencompste

m

(*) Gel acte du prince d*Orange, à une époque il n'existait, aux Pays-Bas, la moindre apparence d'un soulèvement, est digne d*un« attention particu- lière : il prouve que le prince n'avait pas été découragé par le mauvais succès de son entreprise, en 1568.

37

aldaer, ende volcomelyck geinformeert synde van de goede ende sunderlinge affectie die daertoc is dragende die eersame Jaoob Blominaert) ende die goede midileien die hy heefll om van onsen wegen inné te becomen die stadt van Audenaerde in Vlaenderen, wy ons betrouwende op die goede neersticheyt ende getrouwicheyt desselfs Jacobs Blommaert, hebben hem gegeven macht, autoriteyt, ende bevel, hem stellende ende committerende by desen^ om van onsen wegen te gaen naer die voirschreven stadt Audenaerde, ende metten borgeren ende innewoonderen derselver te handelen ende te tracteren, op dat sy dieselve stadt in onse handen leveren villen oft, inge- valle sy des niet villich en syn, gheven wy hem macht, by desen, om die voirschreven stadt Audenaerde, met alsulcken hoop volcx aïs hy daertoe noodich bevynden sal, by aile wcgen ende middelen hem moegelyck synde inné te neemen, ende dieselve innegenomen hebbende , met allen den borgers ende innewoonders te stellen, te houden ende te mainteneren in bueren ouden vrybeden ende privilegien. Wel verstaende dat die voirschreven Jacob Blommaert ende dieghene die met hem syn sullen, denselven boi^eren oft ingesetenen egheen hinder, letsel oft overlast en sullen mogen doen, maer hên behoeden ende beschermen van allen overlast der Spaengnaerden, ende allen anderen die dese saLe souden contraire mogen syn, maer die selve innewoonders houden ende doen houden, in aile goede politie , rusle ende vrede , ende volgcns alsulcken instrucUe als wy hem naederhandt seynden sullen. Mit exprès bevel ende verbot , nochtans dat hy Jacob Blommaert desen aengaende ende 'tgene hierboven staet, nict en sal moegen yet b^innen oft aengrypen, voor ende aleer dat hy ander ende breeder ordinantie daer toe van ons oft van onsen zeer lieven ende wel beminden broeder, Grave Lodewyck van Nassau, etc., hebben en bekomen sal. Cassercnde oock hiermcdc alsulcke onse commissie als wy ten eynde voirschreven op don negensten

L.

38

dach junii leslgeleden gegeven hebben ^ op den voirsclireven Jacob Blommaert ende Jacob Van Miegen t'samen. Bidden daerom eenen jegelyck, hern Jacob Blommaert ende die met hem synsullen, hier inné aile hulpe ende bystandt iedocn des moegelyck vordt. Des t'oircondeu hebben wy dese met onsen naeme geteekeiit^ ende ons secreet segel daer beneffens doen drucken. Ghegeven tôt Dillenberch^ op den zessentwintich- sten dach van augusto, in 'tjaer ons Heeren duysent vyff hon- dert een ende t'sevenlich.

GuiLkE DE Nassau.

By bevele van Sync Excellentie : Brunypickx.

Original t aux ArcbÎTes da Rojraamc : LeUru d$ cl à GuiUamme tU NcMau^ t V.

DXXIV.

LE PRINCE D'ORANGE A RICHARD CLAESENS (').

11 lui annonce Tenvoi 4e quelques émissaires, et le prie de les bien accueillir.

DiLLBKBOuao, 20 DicBHBas 1571.

De prince van Orangien, grave van Nassau, etc., heere eki?e

BAROEN VAN BreDA, VAN DiEST, ETC.

Eersame, discrète, Hcve, besundcre, nlsoe wy jeghenwoôr- delick etlycke stucken, daer l'gemcync welvaircn aen gelegen

(■) L'original de cette lettre fut saisi, le 12 mai 1572, sur un nommé Hubrecht Aerents, natif d'Amsterdam , qui voulait entrer k Middclbourg, €t les bourgmestres et échevins de cette ville en envoyèrent copie au duc d'Albe le 16 du m^me mois.

so- is, gecommunioeert hebben metten eerzamen Willem Jàn ReyeFszoeD, borgméester van Leyden, Malhias Franszoen, Dierick Geirtszoen , brouwé in den griexe A , ende Dierick Geirtszoeo van Kessel , hebben wy hènlieden ende eicken vaiï heo belast u diezelve zaeekea van onsen wegen te ver-* claeren, biddende' u dahrom dat ghy hènlieden ende den gbaien van hen, die aen u commen zal, dacrop aile goet gehoor ende gelooveo gheven wilt als ons zelven, waeraen wy nyet en willen twyffelen, overmidCs de goede affectie, die wy wetçh ghy lot yoorderinghe ende welvaeren der gemeynen zaecken zyt draeghende. Ëerzaipe, discrète, lieve, besundere, onse Heer Godt zy met u. Gescreven tôt Dillenberch , op ten xxvj*" dach van december 1571,

U goede vrindt,

GuiLLE DB Nassau.

SuscripHon : Den eerzamen, discreten, onsen lieven, besun- deren Richart Claessens, minisler van den woorde Godts tôt Enchuysen.

Copié autheatiqac da temps, aux Archive* d a Royaume : LtUra d«Hà GMiUawM û» Ifauau, t. V.

40

DXXV.

LE PRINCE D'ORANGE AUX BOURGMESTRES, ÉCHEYINS

ET HABITANTS DE GOUDA (').

Supposant que ceux de Goada se sont assoeiës à Pinsiimction de la HoUande, il les félicite de cette résolution, les exhorte à y persévérer, et à faire guerre ouverte aux Espagnols. 11 s^engage à les aider de toutes ses forces ; mais, la révolte ayant été imprévue, et ses ressources étant épuisées, il s^altache à leur faire sentir la néeessité d*uBe contribution patriotique, pour parvenir au but désiré.

DiLLBifBouRO, 22 avril 1872.

Die prin€B van Oraengien^ grave van Nassau , etg.^ iieere

ENDE BAROEN VAN BrEDA^ VAN DiEST, ETC.

Eersame, discrète, lieve, besundere, wy hebben , zoo vuy t vele verscheydenen brieven aen ons geschreven, als vuyt het aendienen van andere geloofweerdighe lieden, wel ende gron- delycL verstaen den standt ende gelegentheyt der gemeyne zaken aldaer, ende insonderheyt boe datghylieden in aen- merckinghe der grooter, swarer ende onverdrachlycker Uran- nye, moetwily gewelt ende verdrucLinghe, die de hertoge van Alva met zynen Spangnaerden over u ende allé die ingesete- nen des Nederlants dagelycx meer ende meer tôt noch toe heeft gedreven, ende noch dagelycx is dryvende, tôt grooten ende openllycken verderff ende vuyterste onderghanck des gantsschen landts, sont hebben eenen moet gegrepen^ ende u openbaerlyck verclaert; nyet alleen met woorden, macr oyck

(') Les bourgmestres de Gouda envoyèrent cette lettre, sans Pouvrir, le 7 mai, au duc d*Albe.

41

met dagelycke executien, derselvigen zyne tirnnnyen ende moetwillicheden nyet langer te willen lyden, maer metter daet ende gewelt denselvigen allen mogelyeken wederstandt doen.

Hetwelcke hoewel hel langhe te voren wel hadde behoii^en le gesehieden, van wegen der schoone gelegentheden, die God de Heere ulieden, ende den gantsschen lande wel eertyts heeft verleent, ende insonderheyt te dycr tyt daer wy met eenen goeden hoop ruyteren ende kneehten ende met aile onse maeht in het landt gevallen waren, op hope dat ghy lîeden uwe verlossinghe sont hebben ter herten genomen.

Nochtans diewyle sulcx te dyer tyd nyet gesehiet en is^ overmîdts dat het Godt gelieft heeft den gantsehen lande het boose ende tirannissche voirnemen soc voirschreven hertoge van AI va noeh meer aeu den dach te brengen^ ende eenen jegelyeker noch merckelycker te openbaren.

Soo en cunnen wy nyet anders achten dan dat God die Heere uwe herten als nu beweeght heeft ende wil met zyne goddetycke hulpe de zake daertoe brcngen, dat de Voirgenoemde tiFBnnye vuyten lande geroeyt ende goede vrede ende ruste t*samen met eenen vryen aenroepinge zyns heyligen naems^ ende goede borgerlycke vryheyt der îngesetenen des lants weder macfi ingevoert werden tôt wederoprechtinghe ende grooten welvaert des gantscheo landts^ dat nu soo lange swaerlyck verdruekt ende benauwt; ja sehiergiiantsschelycken is verdes- trueert geweest.

Hier en tussehen en eunnen wy nyet nalaten u te kennen te ghcven y dat wy wel verhopet hadden dat dieghene die oir- zakc daertoe gegheven hd^n , in eene. zoo gewichtige zake met sulcker haeste nyet en souden hebben voirtgevairen , sonder ons daervan voirderhandt wetenschap ende vollen berieht te laten doene, ende onse bevel ende bedencken daerop te verwaehten.

^ 42

fnsonderbeyt aengemerckt dat wy niei alîed vlyt ende arbeyt daernae sonder ophouden trachtedeo^ dat de zake. zoo verre hadde mogen gebracht werden/dat hien hetzelve te gelegenér tyt ende met betere bequaemheyt ende meerdere vruchl hadde mogen te weghe brengen , ende hadden scheoii daertoe gereetschap ghemaeckt, verhopendê ulieden te bequamer tyt sbIqx te laten weien.

Nocbtans diewyle dat nu scboon die zake is aengegrepen, ende zoo wyt gebracht, dat raen nyet en can te rugge, sonder éen opentlyek verderf^len gantsschen volcx, die sich aireede zoo verre vercleert hebben , ende dën^ Spangnaerden den inghanck geweygert, ende dat wy oyck daerb^neven nyet en twyffelen dft ghy lieden en hebt u daertoe b^heven uyt enckele liefde ende goetwillicheyt, die ghy lot Godes eere, tôt welvaert ende yerlossinghe uwes vaderlants vuyt eene zoo jamtnerlycke verdruckinghe ende slavernye, ende oyck tôt onsen dienste zytdragende, nyet ander en wetende, oft suldx en zoude deur onsen bevel ende met onsen weten syh aenge- vangen geworden.

Soe en cunnen wy niet naelaten, u deshâlven |;roote)ycx te bedancken ende onse meyninge ende i)edenekeo daerop te laten weten, als dat wy gheenssins ulieden en kunoen raden, dat ghy met een merckelycke gevaerlyjskheyt ende peryckel ùwer aller lyff ende goet (hetwelcke gtiy nyet anders en beboirt te àchten dan verbeurt te wesen nae des bertoges van ' Alve meyninghe) soudet nu te rugge keeren, ofte u voirder stille houden, maer vêle meer aehten g^ntschelyeken van noode, daervan wy u oyck. wiUen gebeden ende ernstelyck vermaent hebben, dat ^hy met eenen mannelycke vrymoedicheyt ende . coenhéyt voertvaerjl in de aengevangenen vercleringhe, ghant* schelyçk verwerpende van u een zoo onbillyck ende onvei** draechlyck jock der Spaignaerden, die nae u goet ende bloet, nae uwe vrouwen ende kindcren ontwyffolyck slacn, ende u

I

k

43 -

tegen de zelve ridderlyeken stellendc mit allerley middelen, die u Godt de Heere, een verlosser der armer verdruckte menschen^ in haiiden verleenen zal.

Ende derhalven willet u opentlyck tegen deselve Spai- gnaerdeo ende haren aenhanck omwerpen, handelende met hen als met openbaren ende gesworen vyanden Godes ende des Conincx , ende insanderheyt onses gantschen vaderlânts, ende sparende dieselve in gbeenerley wyse, maer vuyt aile steden, dorpen ende viecken dezelve, zoo vele als bet u mogelyck îs , met den viere ende met den sweerde ende met aile andere. vyantlycke middelen vuytroedende, ende wel toe^ siende, dat zy nyet, overmidts uwe siecbticheyt ende goether- tîcheyt ofte uwe slappicheyt ende eleynmoedicbeyt^ ofte.oyek wel uwe tweedraehticbeyt, eenen moet grypende, u iersl overvallende , ende in een jammerlyck verderfF (alzoo zy van gantscber berten begbeeren ende sicb met aile necrsticheyt dacrtoe bevlytigen) en brengen, betweleke ghylieden in ernsten bedeneken moet^ sonders selven met valsche smeeekworden te laten overredeu, als oft gbylieden eenighe genade, verghe- vingC) ofte barmherticbeyt by hen zout cunnen verwerven, dewyle zy doeb nemmermeer bet leet en zuUen vergbeten dat zy van nliedea meynen ontfangen te bebben.

Wâerinne bet jammerlyck ende beclagelyck exempel der borgeren tôt Rotterdam, ende oyck tôt Delfshaven, ulieden, ende allen uwen mitborgeren ende nabueren tôt eenen gewis-. sea spiegel dienen ean , welcke naedat zy zioh met sotioone ende smeekende woirden hadden laten bewegen om de Sper- gnaerden. inné te nemen^ zyn deur eene duUe, rasende ende ponienschelyeke wreetfaeyt ende beestelyeke tirannye derzel- ver seer deerlyck vermoort geworden, jae oyck een grooten deel onder ben hebben bare Ueve buysvrouwen ende jonghè kinderkens tôt versadingbe der ongeboirder bloetgtericbeyt dcser tirannen moeten te voren gbevcn; ende voer bare oogen

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zien vermelen, hetweicke Godt die Heere daerom heefl toe- gelaeteu , om dat ghylieden ende andere diçn het aenghaet, zyne ende uwe gesworene vyanden nyet en zoudt verschoe- nen noch sparen, als ofter mede te handelen waire als met menschen, dewyle het blyckelyck is dat zy aile wilde dieren in wreetheyt ende moetwillicheyt verre te boven ghaen, der- balven ghylieden uulaernae oyck behoirt te houden.

Soe verre als het ons aenghaet, wy willen u zeer gheerne met aile mogentlycke middelen te hulpe comen, ende zoo verre als onse verniogen strecken ean, aile ontset doen, ende daertoe en willen wy nyets sparen, dat in onsermachtzy, jae oyck tôt onse eygen leven toe , hetweicke wy tôt verlossin- ghe uwerliedcn ende uwer medeborgeren vuyt die wreede tirannissche handen der Spaignaerds te wagen gereet ende ombeswaert zyn.

Naer naedemmael dat onse middelen zeer cleyne zyn^ gemerct nyet alleen dat wy eenen langen tyt hier voren ailes wat ons overgebleven was mildichlyckende vrymoidelyck daer- toe verstrccket hebben, maer oyck, om dat wy met dese onver* sienlycke beroerte verrasschet geweest zynde> nyet en hebben cunnen de gereetsehepen (ahEoo wy wel hadden voirgenomen) in tyten te weghe brengen.

Soo is onse genadich ende vlytich begheeren aen ulieden, in aenmerckinghe dat dese zake uwe leven, uwe salicheyt beyde tytiyck ende eeuwelyck, uwe vrouwen ende kinderen, jae aile uwe naeoomelingen betreft, dat ghy doch nyet en wilt tôt verlossinghe ende bevryinghe derzelver vuyt een zoo scbendich ende jammerlyck jock, ende alzoo grousame ende wreede tirannye een weynicb ghelts aensien ; maer vêle eer bedencken dat het ghelt tôt dien eynde van Godt gegeven ende geschapen is , om in de noot te gebruyeken , hetweicke die- ghene die nyet doen en willen ofte en cunnen, zynde verblindt vuyt gierichey t ofte eenighe andere onmatighe begheerlyckhey t^

45

vallen ontwyffelyck in de straffe Godes, ende in des duîvels stricken, ende worden den laelsten door haer eyndelyck ver- derff haren vyanden tôt eenen spot, ende haren kinderen ende nacomelingen tôt eenschendighe ende eeuwîchduerende viecke der oneere*

Derhalven soo willet dese saeeken in ernsten insien ende ons met ghelt^ zoo vele als ghy immers te wege cunnet bren- ghen^ ende aïs desen uwen tegenwoirdigen grooten noot na uwe eygene acbtinghe is vereysschende, te kulpe comen, ende in aile steden^ dorpen ende viecken zoo vele ghclts opiichten aïs het a mogelyck zyn zal, denckende by u zelven, ende oyek eenen jegelycken desselfs vermanende , dat ghy met eene geringhe somme ghelts aile de reste dergoederen, ryckdomen ende schatten, die Godt ulieden ende uwen kinderen verleent heeft ofte noch verleenen can^ kundt behouden ende bewaren, ende daer en tegen willende te deser tyt ende in desen noot een cleyne somme sparen, zult aile uwe haven ende goeden beyde ruirende ende liggende , ja uwe eygene leven , uwe huysvrouwen ende kinderen den wreeden spaenschen tirannen in handen leveren ende in hare gewelt overleveren» om u derselver te berooven, ende hare onversadelyeken begheer- lyckbeden ende moetwillighe schandelycke lusten daermede tevolbrenghen.

Daeromme , indyen ghylieden uwe eygen gheit ende goet, uwe eygen leven ende eere lieff ende weerdt hebty soo wilt aile cleynmoedicheyt ende andere seiiadelycke aenmerckin- ghen ter zyden stellende, u selven vuyt desen aenstaende noot t'samen met ons helpen verlossen , dewyle wy daertoe nyet ter weerelt en willen sparen noch verschoonen, dat eenichasins in onser macht zy.

Ghy zult ontwyfSelyck Gode den almaehtigen Heeren een6n aengenamen dienst daeraen doen, ende hem oirsaecke gheven dat hy zyne aenbewesene gonade ende barmherticheyt tôt den

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eynde loe volvueren zal, ende zult ons oyck, die wy von zynen wegen beroepen ende verordent zyn om u in desen uwen tegénwoordigen noot le helpen, in dese onse vrymoedige ende goetwillighe geneghentheyt tôt uwaert, ende in onsen voirnemen grootelycx verstercken , ende oyck allen uwen nabueren eencn moct in 't herle gheven, op dat zy, uwe exempel navolgende; oyck naer hare verlossinghe met ernsten staen, om deselve met Godes hulpe te wege te brenghen.

Ende daerenboven zult oyck allen vremden potentaten, vorsten, heeren ende voickeren die meyninghe indrucken, dat ghy van herten de zaecke meynet^ ende daerdore zult ghy se veroirsaecken om zulck met een vrymoedich ende geneycht hert u aile hulpe ende bystandt te doen.

Derhalven wy u anderwerff bidden ende vermanen, dat ghy daerin nyet en wilt slap noch traech wesen, maer doen alsoo de liefde, die ghy tôt Godes eere ende tôt uwe eygen vader- landt ende oyck lot uwe eygene eere, lot uwe vrouwen ende kindèren, lot uwe vryheyt, voerspoel, welvaert ende eygen leven draget, is heysschende.

Begheerende ghy wilt ons met den iersten eene vaste reso- lutie uwer meyningc ende uwes voirnemens laten weten, op dat wy nu nyet wederomme, gelyck als wy wel hier vor tyden gedaen hebben, op eene ongewisse hope, eene alsoo gewich- tighe zaecke aengrypen, ende daernaer verlaten ende van allen menschen onse eygene verderff over ons halen : want soudet ghy nyet stanthafftelyck ende mannelyck in dese zake voirt- varen (hetwelcke wy van ulieden gheenssins verhopen) zoo ware het vêle beter nyet aentevangen, ofte immers in tyts aile dingen te laten vallen^ hetwelcke wy u selven gheven le bedencken, hiermede u den almachtigen Heere bevclende, die uwe herten doir zynen heyligen gheesl stercken wil, ende u wysheyt, verstandt ende vrymoedicheyl verleenen, om zynen willen te volbrengen, lot lofTende prys zyns namen ende uwer

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- «

eygei) welvaert ende salicheyt. Geschreven tôt Dillenberch, op ten tweentwintichsten daeb vai^April 1579.-

l) gude vrinl, GùiLÏE DE Nassau.

Sitêcription: Den eersainen, discreten^ onsea lieven besundèrea goedeyrienden, borgemeesteren, scbepcneD, regbeerdereii; borgberea ende andere goede innewoonderen der stede van der.Gotiwe.

Orif^iutl, aux Archiw eu Boyaame; istUrtt de et à GmUmmt dt Naami, t. Y.

DXXVI.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ROURGMESTRÉS , ÉCHEVINS ET HARITANTS DE MIDDELROURG (').

Il les exhorte à snivre Texempie de ceux de Flessingue, et leur promet, en

ce cas, de les secourir.

DiLLBRBOORG, l** MAI 1572.

Difi pamcE VAN Orâignibn, grave van Nassau, etc.^ heere ende

BAROEN VAN BrEDA ENDE VAN DiEST, ETC.

Eersame, discrète, lieve, besundere, hoewel wy altyt vei*- hoept hadden, hebbende nu zoo vele by experientie versoeht die verdruckinghe ende tirannye des bertogben van Alva ende van zynen godioosen aenhangen, ende. in wat eeuwighe dienst-

Ç) On lit au dos de cette lettre : « Recepta 16 may 1572, par mains d*ung » marinier breton. ».

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baerheyt ende slavernye zy uiieden ende eenen j^dyeken van u dagelycx, zoo lancx zoo mer, suecken te treckeo ende ten eeuwigen dageo te houden , hebbende oyek daert^ns ghesien met wat vlyt ende getrouwicheyt wy over etlycke jaren sonder opbouden gearbeyt hebben, om metter hulpe ende genade Godts uiieden van dezelve tîranuye ende slavernye te ver- lossen ende wederom te stellen in uwen ouden welvarenden State, ende te doen genyeten uwe oude vryheden, rechten ende privilegien, dat ghylieden om u eygen welvaren ons daertoe aile hulpe ende bystandt zoudet gedaen hebben, besundere aïs u Godt almachtich alsulcken middelen toeseynden zouden dat ghy zulcx sonder eenich gevaer ofte peryekel gedoen condet, aizoo u tegenwoirdelyck die middelen daertoe genoech voircomen zyn, siende goetwillichlyek die goede ingesetenen der stede van Vliessingen sich daer toe begbeven hebben, ende zoo wy verstaen uiieden te meer reysen zeer minnelyek versocht, omme met heurlieden in verbintenisse le treden, ende alzoo des te liehtelycker met gelycker hant van aile voirschreven tirannyeende slavernye verlostworden, waerinne nochtans ghylieden tôt noch toe in gebreke gebleven zyt y 'twelekeons nyet weynichen verwondcrt, hebbende daeromme nyet willen laten overmidts die goede ende sunderlinghe afieetie, die wy uiieden aïs staende onder onsen gouverne- ment altyt gedragen hebben, dese tegenwoordighe te scliry- ven, ende daerby wel bertelyek te vermanen dat ghy aile dese zaken wel rypelyck overdenekende, midtsgaders wat uiieden, uiieden kinderen y jae kintskihderen te gesehieden staet , zoo verre die Spaignaerts tôt heuren vermete comen , ghylieden nu met ernsten sueekt alsuleken onverdraehelyck ende onmen- sehelyck jock van uwen baise te werpen, ende met die van Vlies- singen voirselireven vereenicht ende heure vrymœdelyeken naevolchty sonder uiieden dore eenighe ongesehickte vreese , ydele hope, valsehe beloften, zuete ofte smeeckende woirden

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u ceDÎcbssins te laten vervueren ofte verleyden ; want zy u die nyet langher bouden en zullen als den noot des tyts en wert beyssehende , ende u daernae des te meer in't geheelyek ende in den gront, zoo verre ben raogelyck is, verdrucken ende l'onderbrenghen, daer wy ter contrairen wel bereel zyn, în- dyen gliylieden tôt 'tgbene voirscbreven is verstaen wilt, t'uwer verlossingbe lyff ende gboet, ende ailes wat in onsen vermo- gen is te wagen ende by te zetten, om u die vrybeyt uwer conscientie ende dVoordt Godts, midtsgaders u oude recbten ende privilegien te doen genyeten ende restituèrent u daertoe belovende dat wy u ende elck uwer van allen gewalt ende over- last der Spaignaerden ende allen anderen die der zaken souden mogen contraire zyn, zelen vry, ombelast, ende ombescbadicbt bouden, ende die overtrederen anderen ten exempel doen straflen : insgelycx dat wy ulieden zullen bouden ende doen bouden , in ulieder ouder gerechticbeden , voirdeelen ende privilegien, eensamentlyck in uwe gewoonlycke vrye bande- lingbe, visseberye, barinckvanck, ende aile andere, ende dat gbylieden met uwen sebepen zult alomme n)ogen varen ende op uwe oude vrydom, tollen^ ende gerecbticbeden, midtsga- ders dat wy ulieden ende uwe stadt met onsen perzoon, ende met aile onse macbt ende met sebepen van oyrloge ende heyrcracbt sullen hulpen, bystaen ende bescbermen tegen aile gewelt des tyrans, ende boven dyen t'zynen tyde , neffens die Catbolyke Majesteyt allen vlyt doen , om desen uwen goeden dienst by Zyner Majesteyt te doen bekennen, met eenighe sunderlinghe privilegien, buyten andere plaetssen. Maer indien gby lieden zulcx versuympt ende weygert, des wy nyet en verbopen, willen wy onscbuldieb gebouden worden van de lasten, scbaden ende eeuwicb verdriet, dat u daerover aen- comen moebte, des wy liever verbuedt, ende u daervan verlost sagen. Dat kenne Godt die u , Eerzame, discrète , lieve , besundere, wil verlecnen 'tgbene

flT. 4

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ulieden ^ tôt uwen welvaren salich is. Gcschreven tôt Dillen- berch, opden îersten mayc 157^2.

U goede vrient, GuiLLE DE Nassai;.

Stucription : Den eersamen , disQreten , oozen zeer lievcn, besunderen, borgemêesteren, scbepenen, regecrderen, bor- gers, endc aile andere goede ingeseteoen der stcde van Middelborch in Zeelandt.

OrîgiMl, ai» ArchlTes du Royavme : VHtrt» «t à GmUawmf de Pfanuau^ t. V.

DXXVII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX BOURGMESTRES, ÉCHEVINS

ET HABITANTS D'ENKHUÏSEN (').

II espère qii*ils sont prêts à d<*montrer^ par des faits, la liaine qaHIs portent aox Espagnols. Il les prëinanit contre Pastace des Espagnols et les pro- messes trompeuses que ceux-ci pourraient leur faire. Il les exhorte k poursuivre Vœuvre comoiencëe de la délivrance du pays, leur promet son appui, et les invite à obëir en tout à son frère le comte Louis, qui doit déjh être entré dans le pays.

DlLLBRBODBG, 5 MAI 1572.

Die PRINCE VAN Orangik, grave VAX Nassau, etc., ïiere î:ndk

BAROEN VAN BrEDA, YAN DiEST, ETC.

Eersaeme, wyse, discrète, lieve, besundere, wy verbopen dat ghy u nae inhout onsen Icsten scryvens aliiier zuUet heb-

(>) Cette lettre ftil apportée à Enkhuisen le 16 mal, elle y causa une cer-

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ben aile vlyt ende neersticheyt aengeleeght , om datseWe dat wy u screven, daedelyck nae te comen, soe dat ghylieden alnu suit opentlyck uwer sin ende meyninghe verelaert hebben tegen den hartoghe van Al va ende zynen aenhanck, ende oyok tegeiyck metter daet bewysen die lofflycke ende vierîgbe be- gheerte die gliylieden tôt verlossinghe uwes vaderlants vuyt die sebendighe ende onverdraehiyeke tirannye der Spangnaer- den zyt draghende.

Dewyle wy nu genoeebsam, nyet alleen vuyt verscheyden aengeven geloofiweerdige personen verstaen, maer oyck metter daet ende ervarentheit versocht ende vernomen hebben^ dat die voorgenoemde Spangnaerts, naevolgende den gewoontlycken aert haerder Hstieheyt , ende ontrouwer vaisschey t, zuUen aile middelen aenwenden ende aile dobbelheyt ende listighe iugen gebruycken^ om ulieden in eenich verdrach off versoeninge met hem le brenghen, latende u verdraghen, jae oyek met uwe eygen burgeren, aïs dat ghylieden nyet en zoudet hebben misdaen, ende dat zy u oyek in gbeeuderley wyse en soecken te beswaeren off moeyelyek te vallen, met andere dusdanige rancken ende practycken meer, die zy met vêle scbone bclof- ten, ende oyck met swaren eetplicht, zoe het van noode it^ syn connen versieven ende toemaeeken*

Soe en hebben wy nyet willen naelatcn vanwegen der goet- willigher genegentheyt , die wy tôt ulieden ^ ende des ghants- sen Nederlants welvaert zyn draghende, ende der hertelycke sorchvuldicbeyt, die ons nimmermeer en laet vieren noch ophouden van aile ghoede middelen te overleggen, die tôt volbrenghinghe uwer vryheyt ende verlossinghe zouden cunnen vorderlyck wesen, ulieden met desen brieff nu ander-

UineëmotioD. Les bourgmestres se virent obligés de Tonvrir, en la présence de quelques gens de la commune; mais ils déclarèrent aussitôt qu^ils n'obtem- péreraient pas à son contenu. (Lettre du comte de Boussu au duc d'AIbOn du 17 mai i^m.)

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werft, met allen vlyt ende ernst te vermanen ende te bidden, dat ghy u egheenssints met alsoedanighe raneken en latet beweghen, u indachtieh houdende der exempelen, die nu onlanex verleden ulieden noeh voir de oogben sweven, als naementlyek hoe dat dieselve Spangnaerden hare beloften den edellieden, die die supplicatie tegen die inquisitie hadden overgegeven, onverschaempt ende sonder eenige swaricheyt hebben gebroken, boe zy oyek met sommighe vernaempste heren soe in Spangnien als in Neerlant, ontrouwelyck ende tirannelyek zyn ommegegaen, naedat zy hen die ogen met vêle schone beloften ende suete woorden badden verbonden ende verblînt.

Jae oyck, boe zy met haren eygben cryscbkneebten, tegen die beloften die zy ben gedaen, ende met swaren eedt, jae met briçff ende zegel bevesticbt hadden, hebben gehandelt^ op dat wy nu onvermeldet laeten diverssehe ende noch ainu bloyende wonde uwer naebueren tôt Rotterdam, tôt Berghen- op-'tSoom ende elders, die sy soc jammerlyck ende soe scen- delyck bedrogen ende deur valsscbe dubbelbeyt ende logen- taligbe beloften overredet bebbende, soe wredelyck ende onmenscbelyck vermoort ende omgebracht hebben; boewel dat wy aebten hiertoe ghene exempelen zeer nodich te wesen, om alsulx (e bewysen, naedemael zy doch voer een eeuwigbe gewisse regel ende vaste propositie houden, dat zy met rechte ende met ghoeder conscientie wel vry ende ombehindert mogen alderleys beloven ende toesweren denghenen , die zy vanwegen eeniger mishandelinge tegen heuren staet ende grootheyt in zin hebben te straffen, sonder eenichsints gehou- den te wesen baeren eedt ofte beloofte in 'tminste ofte in 't meeste naer te comen, derhalven nae dyen zy ontwyffelyck genoech achten gewichtigoirsaecken tegens ulieden te hebben om u te straffen ;

Dewylezy beneven de weygeringhe des thienden pennincks,

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die zy voer een opentlycke rebellicheyt ende wederspannichey t beuden, oyck die weygeringhe der Spaensschen knechten^ ende aile *tgene dat bynnen corten tyt herwaerts tôt bescberminghe ende bevryinghe uws vaderlants van ulieden gesciet is, zuUen ontwyffelyck aiso duden als dat ghylieden daerduer die Majes- teyt zoudet vercort, ende derbaiven lyff ende giioet, sonder eenigbe genade verbeurt bebben ,

Soesiet wel toe, soe lieff aïs ghy u leven ende u welvaert ende salieheyt bebt, dat gby u met ghene schone beloftcn ofte soet eallen eeniebsints en laet bewegben.

Want dat ghylieden u soudet vuyt eenige aensien van moeyten, swaricbeden off periculen, die u daervuyt souden mogben onstaen , soe gby in uwe voornemen volstandicb bleeff , laeten verscricken , des en eunnen wy ons tôt uwaerts egbeenssins verzien, gemeret nvfe aen ons altyt bewesene goede affectie ende genegentbeyt, welcke met een dadelycke vromiebeyt ende vrymoedicbeyt van ulieden zyn bevesticht geworden , ende dat daerbeneven aile gelegentbeyt des tyts ende des tegenwoirdigen stants opentlyck doet blycken , dat ulieden eghene swaricbeyt nocb gevaerlyebeyt biervuyt en can onstaen, by dyen ghy met een stantaftieb onversaeff gemoet in uwe voernemen blyft volherdende, maer veel eer; daer en tegben, soe ghy soudet willen wanekelen ende doer de wyfsehc cleynmoedicbeyt , betweleke wy van u egheenssints en ver- hopen, u van den ander scheyden oft oyek van uwe aengcvan- gene vrymoedieheyt affstaen, en staet u voerwaer anders nyet te verwachten dan een jammerlycke ende eeuwieh verderff uwcr personen, vrouwen ende kyndercn, ende aller uwer goeden ende baven, jae des gantsschen vaderlants in aller eeu- wieheyt, gelyck als aile verstendigbe mensseben, in aensien der onmensscelyek blootgbieriebeyt , dobbelheyt, vaisscbeyt ende ontrouwe, tVamen oyck des ouden bacts ende nyts der Spangnaerden , die sy tegben bet gantssc Nedcrlant over

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menige jaeren io haere harten hebben gedraghen, lichcelyck cannen oirdelen.

Daerom wiilet dese saecke ernstelyck ter herten nemen, ende eene geringbe moeyte, die mogelyck hiervuyt soude connen ontstaen, uHeden nyet en laet verdrieten, niacr de- wyle gby alsoe vromelyck begonneu bebt, ende dat u God die Hère die bandt biedt, ende ulieden die aider schoonste gelegenibeden verleent, die ghy immermeer soude eonnen gewensschen, zoe siet toe dat ghyliedcn Godes gave ende nengebodene genade nyet en verworpet, maer veele eere voir- trect, ende uwe eygene verlossinghe, die u die Hère God zelve aenbiet, totten eynde toe voivuert, indacbtieh vt^esende des* ghene dat onse Hère spreect : dat zab'cb is hy die totten eynde toe volbart, ende des woorts Pauii : dat nyemanl geeroont en wort dan dieghene die wettelyck ende ridderlyck campei. Hoewel dat wy eghene aenstaende swaricbeyt ter vereit en connen vermercken, maer veel eer zien, dat beneven die ghoede borgberlycke vryheyt, vrede, rustc ende eeuwigbe welvaert, die ghy u selven ende uwen kinderen hiermede ver- weT\en suit, oyck daervuyt ulieden ende nvfe naecomelioglien in eeuwiebeyt eenen sebonen loff ende prys vanwegben aisulcker raanlycker vrymoedicheyt by allen voleken ende nacièn vereryghen suit.

Derbalven wy egbeenssins en verhopen dat gbyiieden door eenich boochpoehende dreyghen der vianden, alsoo oyek nyet door eenich haer schoonspreecken u zuUet laten van den recbten wech dersdver aengevangene deucbdelycheyt affbren- ghen, maer vele eer met gedult verwacbten dieschone lustigbe vruchte ende genyeten, die u hiervuyt ontwyfelyck staet te verhopen, als naemelyck die gewisse beboedinghe ende bevry- dinghe uwer goederen, ende uwe neringbe die men u sochle gehelyck vuyt den bandt te rucken, ende eene onilastinge van alsoe menige onverdrachlyckc imposten ende bcswaringen, die

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roen a nyel voer een maent off een jaer, macr in alte eeuwic- heyt sochte op te leggen, ende însonderheyt een eeuwighe ver- lossinghe uwer vrouwen ende kinderen, jae uwes eygens lyffs ende bloets, vuyt die moeiwillighe scliendelycheyt ende bloel- dorstighe wreetbeyt der spaensschcr tirannen, t'samen met een ewighe voerspoet^ welvaert ende gelucksalicheyt uwes gansMhen vaderlants.

Daerom bout u vastendeombeweeebt op dit vertrouwen op Godt de Hère, die u nyet en sal verlaten, soe gby u sclven nyet en verlaet.

Soe vêle als ons aengbaet, wy willen u met allé middeleu, die ons mogelyck en zyn, te bulpe comen ende en willen gansselyck uyets verscboonen nocb sparen van aile 'tgenedat in onse macbt is, verhopende soe gby u stantafticb boudet, in eorten suit melter daet vernemen dat wy uwe saeeken ende die verlossingbe des gantssen lants ter berten genomen bebben, betwelcke wy ons vertrouwen op den Heer nyet te vei^heeffs zyn en zal.

Ende bierop laeten wy u weten, dat wy beneven die pro- visie, die wy tôt uwer beseermîngbe ende ontset gedaen bebben, also ulieden bekent is, bebben oyek den welgeboren grave Lodewyck van Nassau, onsen lieven ende wel beminden broe^ der, in aile neersticbeyt ende ernstafticbeyt gebeden, dat by ulieden in baeste nae de middelen, die bem God aldaer verte- nen sal, te buipe corne, bet welcke wy verbopen by alreede sal gedaen bebben, off immers sonder versuymen doen sal. Derbalven wy van ulieden begberen, gby willet u tôt bem ende den zynen als tôt ons sels in aile goetwillicbeyt ende biliicke geboorsaembeyt dragben, tôt nut ende welvaert uwer stadt, ende tôt vorder verlossingbe des gansseben vaderlants^ ende insunderbeyt, soe gby onse b^beren nae inbout onses aen ulieden lests gescreven brieffven, nocb nyet en bebt te wercke gestellt, willet ten aider eersten sonder versuymen verrichten ende te wegben bringben. Iliermede blyft den

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almachtigen God bevolen, die ulieden met zynen gheest eode craebt stercke (^ns zyne ende onss aller vianden. Gescreven tôt Dilleobercb, op den v^ dach mey, anno 1573.

U gude vrint,

GuiLLE DE Nassau.

Suscription : Den eersaemen, wysen, discreten, onssen iieven, besuDderen, burgemeesteren , scepenen, regeerders, bor- ghers ende andere gboede inwoonders der stede van Ene- huyse.

Copie da temps, aax Arehives du Royaume : Papiers d^Élat, Correspondance de Hollande et ZéUnde* t. XVI, fol. 4.

DXXVIII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ROURGHESTRES, ÉGHEYINS ET HARITANTS DE HARDERWYCK (*).

Il leur annonce qu*il a envoyé des troupes, avec des officiers, dans plusieurs villes des Pays-Bas, et les prie de leur donner toute assistance. Il les exhorte à réunir leurs efforts pour délivrer le pays de la tyrannie des Espagnols , et reconquérir leurs anciennes libertés.

DlLLBMBOOEG, 20 MAI 1572.

Die pbince van Oraengien, grave van Nassau, etc., iieere,

ENDE BAROEN VAN BrEDA, VAN DlEST, ETC.

Eersame, wyse, lieve, besondere, alzoo wy van over menigen tyt berwaerten gearbeydet hebben ende allen moge-

f) Cette même lettre lut adressée par le prince h plusieurs autres villes. Nous en avons, aux Archives, une copie que les bourgmestres et échevins de

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lyeken middelen daerop aengeleghl, dat wy mochlen die groot, sware, ende onrechlveerdighe tirannyn ende moetwil- licbeyt, daermede nu ter tyt het landt jammerlyck is ver- druckt^ ende onder etlycke Spaegnaerden oneerlyeke dienst- baerheyt gebracht, afwenden, ende die gantssche Nederlanden wederom in bare oude vrylieyt^ privilegien, recbten, ende hergebracbte loffelyeke usantien, ende gerechticbeden (die haer nu ofte gantsseiyekcn ontnomen, ofl immers zeer onder: drucketende vermindert zyn), midtsgaders oyekin haereoude fleur ende voirspoedicbeyt wederom opbrengen, doch nu in- sonderbeyt, dewyle God beel onlancx de herten der ingesete- nen des lants aizoo beroert ende verwecket beeft, dat baerder vêle sieb vrymoedichlyck vercleertbebben, namelyck aizulc- ker onweerdiger ende onlydelycker tirannye vyant te wesen, ende dieselve nyet langer te willen dulden, ons om bulpc ende ontset hebben aengeroepen, biddende ende verzoekende ons zeer oytmoedicblyck, dat wy se in desen haren grooten noot ende peryckel, daer de ceuwigbe welvaert des gantschen landts onlwyffelyek aengelegen is, nyet en zouden verlaten : soo hebben wy acbtervolgende daerin de schuldighe plieht onser beroepingbe ende onses eedts , daermede wy God y den Coninck ende den gantseben lande verbonden ende ver- pliebt zyn, ons met een ehristelyek ende vorstelyek mcde- lyden laten bewegen om sulcx ter herten te nemen, ende derhalven zommighe onser oversten, hoplieden, endeanderen daertoe van onsentwegen gevolmacbticht, in eenighe by u nagesetene steden geschickt, denwelcken God de Heere geluek' ende voirspoetgegeven beeft dat, zy in dezelveu zyn onlfangen geworden, ende boudeuse in des Conincx ende onsen name, tôt der tyt toe, dat wy bier en tusschen ons met eenen goeden

Zwoll envoyèrent au baron de Hierges, gouverneur de Gueldre, et qu*il fit parvenir au duc d*Albe le 22 juin. Le comte Vanden Berghe Pavait, quelques jours au|>aravant, envoyée à ceux de Zwoll par un trompette.

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hoop ruyters cnde knechten mogen bereyden , om hen ende allen anderen goeden , getrouwen borgeren ende ingesetenen des landts meerdere hulpe ende ontset, ende den tirannisschen vyandt meerder afbreeck ende vederstandt le doene.

Soo is onse ernstelyeke ende hertgrondelyck begheeren aen ulieden, ghy willei derzelven uwen nabueren iofflyck exempel navolgen, ende onse hoplieden ende knechten, die wy tôt dien eynde ulieden toeschicken, oyck met aile gewil- lighe vriendelyckheyt in uwer stadt aennemen, op aisuicke conditien ende voirwaerden aïs wy hen hebben doen voir- houden, namelyck dat zy dezelve stadt, onder des Ck)nincx, onser, ende uwe geboirsaemheyt zullen in goede vrede ende rechte borgerlyeke politie ende ordeninge houden, uwe rechten cnde privilegien helpen voirsiaen ende vermeerderen^ ende aile boose, quaetwiliighe , tirannisehe vyanden des vader- lants, inidtsgaders baren moetwil, wreetheyt ende dertelheyl helpen weren ende vaytroedcn, ons tôt ulieden, ende tôt uwe goede vromieheyt ende getrouwicbeyt vastelyck verziende, dat ghy diesselfen in gheene weygeringhe u en zullet ialen gevinden, op dat ghylieden alleene nyet en wordet gehouden, aïs die den vaderlande hare sebuldighe plieht ende getrouwic- beyt in der nool zoudet hebben geweygert, waerdoir ghylieden hier naermaelen nyet alleen van nwen nagesetenen in den vader- lande, maer oyck van aile vremde natien soudet beschuldi^et werden, aïs oyrsaecke wesende, dat uwe medebroederen ende nabueren doir een ongehoirde, ende onmenschelyekc wreet* heyt der Spaensche tirannen jammerlyck vermoort ende ver- uyelt, ende 'tgantschc landt verwoest ende verdorven zoude wesen, dewyle zulex geschapen is daervuyt te volgen, by dien dat vuyt oirsaeke uwer weygeringhe de Spaengnaerten quamen de vucrhnndt te crygen, hetwelcke uwe kinderen ende kindts- kinderen. jae allen uwen nacomdingen in eeuwicheyt God in de hcmcl souden mocten beclagen, dat doir dcse uwe slappie-

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beyt ende weeckmoedicheyt zy in eene schandelyoke ende jammerlycke siavernye ende dienstbaerheyt gevallen waren.

Hetwelcke wy nemmermeer en verhopen aïs dat ghy soudt een alsaicke schancvlecke over ulieden laten gaen, maer vêle eer vertrouwen wy, dat ghy uwe vryheyt, die u van uwen voirvaderen met grooten lofF ende roem is nagelateu geweest, ende die ghylieden hier voirtyden zoo lange hebt bewaert ende voirgestaen, zult betrachten ende u selven indach- tich houden, vaii dat ghy genoech gesien ende gemerckt hebt^ dat men u aile uwe privilegien ende vryheden nioetwillichlyek beeft gesocht te ontnemen^ ende u tôt slaven der Spaensschen tirannye te roaken, hetwelcke ontwyfFelyck nu al te w^he zoude gebracbt zyn geweest, soo zy aen andere plaetssen de overhandtnae haerder begheerte hadden raogen crygen.

Derlialven ulieden goede voirsiehticheyt ontwytfelyck toe- staet, u zelven nyet te laten duncken, dat zuleke haer voir- nemen opgehouden zy, dewyle het alleen eenen'tyd lanck is vuytgestelt ende opgesehorst tôt beter gelegentheyt, weleke nu ontwyffelyck sich liehtelyek begheven zoude, indien ghy- lieden uwe eygene salicheyt nyet en willet ter herten neraen, 001 desen onsen oversten, hoplieden ende knechten^ die wy te dyen eynde ulieden toeschicken, gewillichlyck acntenemen, ende in onse goet ende beylich voirnemen (alzoo wy op u vertrouwen) helpen stercken, tôt uwe eygene welvaert, ende tôt verlossingbe ende behoudînghe des gantssehen vader- lantes; gemerckt insonderheyt dat de vyant van zoo vêle verscfaeyden plaetssen aengegrepen wordt, ende derhalven zoo vêle sal te doen crygen, dat zuld^es sonder eenich peryckel ofke noot sal van ulieden cunnen geschieden.

Derhalven wy ulieden andermale zeer ernslelyken ende hertgrondelyck bidden, hetzelve te willen doene, hiermede ulieden den almachtigen God bevelende, die u goeden raet, ende wysheyt gheven wii^ opdat ghy eene zoo schoonen

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gelcgentheyt nu nyel en versuyraet, ende hier namaelen te vcrgheeffs beclaegbl. Geschreven tôt Dillenberch, op ten xx~ dach may 1572.

U gudt vrint

GdiîXe de Nassau.

Original, aux Arehlves dn Ro/aaine : LtfirM dt et

DXXIX.

LE PRINCE D'ORANGE AUX CAPITAINES, BOURGMESTRES, ÉCHEVINS ET BOURGEOIS DE FLESSINGUE.

11 désavoue la conduite de soo lieutenant T^Seeraerts, qui s^était approprié tout le butin pris sur les Espagnols et les Portugais {^).

DlLLBlIBOURG, 25 JUIN 1<S7S.

Dm PRiKCE VAN Orangen, grave van Nassau, heere ende baroen

VAN Breda, van Diest, etc., etc.

Eersaeme, wyse, discrète, lieve, bcsundere, y/y syn in gcloefflycke ervairongh kommen, wellicher gestait ghy gantz oevel tbovreden und onsteit zyt, oirsaeckeu halven dat onser stadthalder T'Seraets den gantzen Hispanischen und Portu- gallischen buyt aen sicb geslagben^ onder schyn und mantel al soH sullicx vuyt onsen bevele und tôt onsen eygen oirboir

0 Voy., sur la conduite de T*Seeraerts , la Correspondance inédife de la tnaiion d'Orange^^assau, t. III, pasêim»

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und nulz geschehen. Des wy over ail nyet allein ghein genue- gen gehacit, sonder sullicx melgantz beschwerden und onlus- tigen gemocdt vernomen und verslanden, diewyle ons daeraen groitsmehe, onher uud onreehl geschiet, alzoe yederem und u oyck wol kondieh, dal wy nyet allein ailes wat wy in der werell hebben, sonder oyck lyff und bloet voirstrecken und waghen, om u und dat gantz vatterlandt vuyt die tirannissche rege- rongh in die aide beroempde vryheyt wederomme te brengen. Soe dat daervuyt liechtelyek afftonhemen , dat wy soe om der gelyeke dingen nyet gedencken, meber gemeller T'seraerls handel und voirnheraen, nyet allein one onsen bevelh, sonder oyck willen und wetcn, und thot synen und syns aenhancks eygen nutz alzoe ghesehiet , des ons nyet weynieh bevrempt und uns thot hem des nyet versehen hadden , diewyle hem nyet onbetwust onse gantze meynongh dat is, dat sullieke buyt onder u, die om ons und die gemcyne wolvaert voel lyden, und dat uwe verliesen, gelyckelyck vuytgedeyit soll worden. Des wy u genediger meynongh nyet en hebben willen verhalden, daemit ghy op wegeund middel trachtetom 'tgliene wy u toegeschickt und uwe is te bekommen : hiermede blyfft dem almoegenden Heeren bevolen, die u met syneGodt- lycke Genaeden und waicht tegens syne und onse vianden stercke. Geschreven te Dillembergh den xxiij''° dach des maents junii xv" Ixxii.

Smeripiion : Den eersaemen, wysen und discreten, onsen lieven besunderen capiteinen, burgermeesteren, schepenen und borgberen der goede stede van Vlissinghen*

Copie de It main da teerétalre Berty, aax ArehiTes Rojaame : LeMrn dtHà (ruiMaiifiM de Iftunm, t. V.

62 ~

DXXX.

LE PRINCE D'ORANGE A JEAN DE STALRERG, AMMAN

DE KRIECKENREEGK.

Il le requiert de se rendre auprès de lui, le 19 juillet» avec les nobles et les

hommes de fief de son ammanie.

Alosrribghbm, 15 jfuiLUiT 1S72.

wllhblm^ von g0tte8 gnaden, phintz zu ullanien, graff zv

Nassauw, Gatzenellebogen, etc.

Unsern gunstigen Grusz bevorn. Ehrnvestcr, lieber, besonder, Wir moigen euch nit verhalten, dasz wîr vor wenich tagcn mit unserm Kreichsvblckh , so wir zu abwen- dungh desz von Alba und seines ahnhangs bisz anhero geubte unerborte Tyranne^ , sonderlich aber zu widerbringungh und handthabungh der Niederlenden wolberbrachten Privî- legien und Frcyheithen, u. s. w., ailes in gehorsamen dienst der Kœn. Maj. in Hispanien, unsers gnedigsten Herrn, auch rhuw und wolfart der Nîederlanden, versamblet und ahn- genommen, durch Gottes gnadt und hilff bisz hieher in die Vogthey Geldern ahnkhomen. Derwegen unser gnedichs und ernstes gesynnen, Ibr wollen ausz ursachen, daran dem gantzen Niederlandt und auch eueh selbst hoieh und vieil gelegen, wie Ibr von uns ankhomendt zuvernommen, eueh sampt dennen vom Adell und Lehenleuthen , so in dem Ambt euwers bevelbs seeszhafft, gegen austehenden Sambs- tagh, den 19'"^ dieszes jetzwerenden monats , zu vormîttagh, ungesaumbt und ohne furwendungh eeniger Endtschuldi- gungh. hieher ghen Aldenkirchen, zu uns, bey vorlusz euwer liegender und fharender haab^ guebter und Lehnsgerechtig-

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keit, so Ihr durcbausz in dem Furstenthumb Geldern habt, gewiszlich verfuegen und nit auszpleiben, versehen wir uns zu eucb genziîch. Datum zu Aldenkirchen in unserm Veldt- legeF; ahm 15 Julii anno 1572.

WlLHELH, PKINTZ Z(J UrANIEN.

Smcripiion : Dem ehrnvesten, unserm lieben^ besondern Johannen von Stalbergen, amptman zu Krikenbeckh.

Original, oax Archives do Royaume : LtUrtt de el à GmiUtmiM de Ifattau, t. V.

Dmi.

LE PRINCE DORANGE A L'EMPEREUR MAXIMILIEN II (•).

11 s'excuse d*obtempérer ao mandement que PEmpereur lui a fait signifier, et justifie la détermination qu'il a prise de faire la guerre au ducd'Albe.

En son camp, 27 août lSf72.

Très-invincible Empereur, après nos très-humbies offres de service, nous ne pouvons nous cacher que nous avons receu les ordres qu*il vous a pieu nous donner par Jonas de Offen-

(') La pièce que nous reproduisons ici porte le titre suivant, qui lui fut donné par le comte de Wynants, directeur des Archives de TÉtat, de 1773 à 179i : Traduction de la lettre du prince d'Orange (écrite par ledit prince » en allemand, ensuite traduite en latin, dont celle-ri est traduite en fran- çais) à S. M. l'Empereur, en date du 27 août 1572, par laquelle il répond » aux ordres qui lui avaient été donnés de la par de Sa Majesté.

l'ai trouvé, aux archives de Simancas, Papeles de Eêtado, liasse 668, une copie de la version latine.

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Jburg, ambassadeur de Votre Impériale Majesté (' ). El, quoique eès ordres ne regardent pas seulement ma personne, mais ôiissi mes très-chers frère et eoUsin) Louis, comté INiassau, et Wilhelm, comté de Bergh, cependant, pouf le respect ei '

. ' la due obéissance que j'ai toujours porté envers Votre Majesté Impériale^ je les ai reçus très-respectueusement.

Èl^ quant à ce qui concerne ma personne, je lie doute aucu- nement que Votre Majesté Impériale aura déjà entendu, par les précédentes informations que je lui ai très-humblement réitérées, et dont il n'est pas nécessaire et seroit même trop long

.de îes répéter par cette, les très-grandes causer qui. mont

t>bligé< ainsi que le reste de mes amis et de mes compagnons, à . prendre les armes pour ma juste défense et inévitable cbnser-r valîon contre le cruel duc d'Albe, "ses adhérens, ^t contre. la tyrannie inouïe qu'il a, depuis plusieurs années, exercé, dans

. les Pays-Bas, envers les personnes du haut, nioyeii et bas état : pQur quelles causes je n'aurois jamais pu être persuadé que , Votre Majesté Impériale auroit pu être induite, pai" ceux qui travaillent à faire perdre aii roi d'Espagne ses Pays-Bas^ et inèchinent la ruine totale desdits pays, de faire publier iin

. mandement si sévère, surtout lorsque je viens à considérer .

' que Votre Majesté Impériale a été instruite* du tout, et. que l'impérieuse et hautaine administration du doc d'Albe a été jugéepar Votredicte Majesté, pour ces pays, foirt pernicieuse, et que j'ai recouru, avec mes confédérés^ vers Votre Majesté Im- périale et vers les princes électeurs de TEmpire, pour obtenir des moyens amiables ou dus de droit pour un accommodement : mais toutes nos peines furent inutiles ^ de sorte que je n'ai . *' trouvé (l'autre expédient, avec mes conjoints, si je ne vôulois

{}) Voir, dans la Correêpondance de Philippe Jlêurhs affaires -dêê Pttys-. Hm, elc., t. li, p. 287, ce que le duc d'Albe écrivait au Koi, au sujet de cel. . acte de r Km pereur, le 13 octobre 1572. -

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pas le trouble et la misère de ma chère patrie, ainsi que la perle totale de ses privilèges, libertés, immunités et jurisdictions, sous le joug insupportable de la tyrannie du due d'Albe, et si je ne voulois aussi la perte de mes propres biens et de mes sujets, el mettre mon honneur et ma réputation dans les plus grands opprobres et dans la plus extrême misère, que de voler au secours de mes amis fidèles, à Tinstanee des sujets les phis affligés, et de faire la guerre, au nom du Dieu tout-puissant, contre le due d'Albe. Et, comme tout homme sensé ne portera autre jugement de moi, puisque non-seulement le droit écrit, maïs aussi le droit de la nature et des gens, que j'ai si souvent réclamé en vain (comme il est connu & Votre Majesté que toute espérance est évanouie et ôtée, et que le duc d'AIbe a mis ma tète à prix), ne me donne d'autre moyen, comme der- nière ressource, que de repousser la Torce par la force, les armes par les armes, et que les empereurs romains ont très- sagement pourvu que, si quelqu'un ne peut amener son adver- saire, par voie légitime, par-devers une partie qui ne leur est pas suspecte, et le tribunal ordinaire du pays, pour obtenir une sentence, il lui fut permis de la demander par force. Or, puisque je n'ai pu avoir, jusqu'à présent, ni du mandement mentionné, aucune voie ni raison par lesquelles j'aurois pu être induit d'ester en justice avec mes amis, qui sont réduits dans la dernière nécessité pour soutenir mes intérêts, je pro- teste, devant Dieu et devant Votre Sacrée Majesté Impériale, puisqu'on me refuse justice devant un tribunal qui n'est point suspect à aucune des parties, que c'est malgré moi que je viens à entreprendre une guerre dans laquelle je ne chercherai rien autre chose que ce qui m'est dû, et qu'un chacun peut espérer de droit.

Mais, pour ce qui regarde ledit mandement, il est fort exagéré que les Pays-Bas sont le principal membre de l'em- pire germanique, et que, dans cette expédition , l'on agit de

m. 5

66

fait contre la paix publiée dans TEmpire, et contre les autres ordonnances, ce qui est traité fort au long dans ledit mande- menty il est à remarquer avec quelle cruauté et inhumanité Ton a mis à mort et massacré, depuis plusieurs années jusqu'à présent, dans ces Pays-Bas, plusieurs milliers de chrétiens qui faisoient profession de la confession d*Augsbourg, ce qui n'a pas été la moindre cause de la révolte qui y est arrivée. Si donc la paix de la religion, publiée dans ce pays comme prin- cipal membre, fusse restée durable, et que personne ne fusse conduit au supplice, mais qu'au contraire Ton se fût servi de cette même paix comme d'un remède salutaire, la première cause et la principale racine eût été coupée. De plus, si cette paix, et ce qui a été, avant icelleet après, sagement décrété par le St-Empire^ devroit avoir lieu envers moi et les miens, îi seroit très-raisonnable que le duc d'Albc fût obligé de garder et respecter ce même décret et constitution, qui cependant, a son arrivée et au commencement de son cruel gouvernement, n'a pas agi suivant les droits prescrits, encore moins suivant la teneur et lordonnance de ladite paix, mais au contraire a pris la voie de fait, et a agi contre le serment que son maître, le roi d'Espagne, nous avoit prêté ; a fait massacrer des per- sonnes de tout état, de princes, de comtes, de nobles et du peuple, sans les entendre même en jugement, ou, après les avoir dépouillés de leurs biens, de leurs terres et possessions, les a exilés et chassés misérablement de leur patrie, s'est em- paré de leurs biens, et dans toutes choses a agi à sa volonté, dans lesquelles il n*a rien moins respecté que les lois du St-Em- pire et les constitutions de ladite paix, comme aussi il a non-seulement refusé d'obéir aux ordonnances que le St-Em- pire lui envoioit, mais même n'a pas craint d'être assez hardi d'assurer et de protester même que l'empire germanique n'avoii rien à démêler avec lui. Puisque donc il a perpétré tous ces crimes contre les constitutions de l'Empire, il paroit

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évidemment tout contraire qu'il veuille présentement jouir et se servir de ces mêmes constitutions, et assurément il seroit injuste que ce qu'il trouve juste et raisonnable pour sa cause, ne pourroit servir à nous^ qui sommes dépouillés de tous biens meubles et immeubles, pour notre propre défense, et que nous serions obligés de recourir à la voie de justice « pour récupérer ce qui nous vient, contre tout droit et équité.

Puisque donc, invincible Empereur, de tout ce que dessus il paroit clairement par quel moyen le duc d'Albe continue de plus en plus à exercer sa tyrannie, et ne désire rien autre chose que de ruiner et de perdre de fond en comble ces Pays- Bas, et ne fait que cruellement persécuter et extirper de pau- vres et misérables chrétiens qui font profession de la religion fondée sur la vraie parole de Dieu, je ne puis, avec mes adhé- rens, non-seulement parvenir à obtenir quelque restitution, voyant qu'on n'ait aucun égard à nos demandes, instances et patience; mais même, pour la multitude des charges, les dures vexations et l'envahissement de nos propres biens (dont il y a six ans que nous sommes, quoique innocens, misérablement privés), nou^ sommes jusqu'à ce jour obligés d'errer, sans avoir une demeure asseurée, étant partout dans un péril con- tinuel par les menaces du duc d'Albe.

C'est pourquoi la pitié chrétienne que je porte envers les habitans des Pays-Bas si durement traités, ému par la quantité de leurs larmes, touché par leurs tristes instances et demandes, et obligé par le serment que je leur ai prêté en ce nom, et par l'extrême nécessité tant mienne que de mes sectateurs, m'a forcé, pour la défense et conservation des provinces héréditai- res des Pays-Bas de S. M. le roi d'Espagne, mon très-honoré et très-clément seigneur, de m'opposer, de toutes mes forces qui me sont données par la nature , par le droit et par les constitutions du St-Empire, a cette cruelle et insupportable tyrannie du duc d'Albe.

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Cesl donc avec assurance que j'espère que Votre Impériale Majesté, dont la prudence est si grande, pèsera meurement avec clémence toutes ces circonstances, et verra quels périls et quelles afflictions m'ont une seconde fois induit à entre- prendre cette guerre pour ma défense naturelle.

C'est pourquoi Votre Impériale Majesté aura, d'un cœur sincère et chrétien , une patience beaucoup plus grande avec moi, les miens et les États des Pays-Bas déjà ruinés, qui^ contre tout droit et justice, et même pas coupables, sommes chassés de notre patrie et dépouillés de nos biens, sans qu'il y eut aucune sentence de droit portée contre nous, et présentement, pendant plusieurs années exilés, sommes par-ci par-là errans dans la misère^ sans pouvoir espérer qu'on veuille nous écouter. Et, comme je ne doute aucunement que Votre Impériale Ma- jesté, comme le souverain chef de toute la chrétienneté, à qui toute tyrannie déplait hautement, ne prendra aucun mauvais soupçon de mes actions et de celles de mes amis, qui n'ont rien autre à cœur que le salut et le bien-être de la patrie, j'espère que, pour les raisons que nous avons ici dessus allé- guées, elle voudra bien nous avoir pour excusés.

Ce sera une grande consolation pour Votre Impériale Ma- jesté, qui est estimée de tout homme prudent et savant, aussi bien que pour les affligés et désolés habitans des Pays-Bas, et nous ferons et tâcherons, de toutes nos forces et facultés, de nous rendre recommandables envers Votredite Majesté Impériale^ la suppliant très-humblement qu'elle veuille, ayant entendu notre partie adverse, bien interpréter nosdites rai- sons, et de ne pas prendre de mauvaise part le retardement que nous avons fait, non sans aucune juste cause, de répondre à Votre Majesté.

Je supplie très-humblement Votre Majesté de vouloir me prendre, avec tous les miens, sans votre protection et défense, priant le Très-Haut de vous donner une longue et parfaite

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saDté; de rendre votre règne heureux, et vous laisser jouir d'une paix profonde. Donné dans notre camp, le 27 août, en l'année 1572.

De Votre Majesté le très-humble et très-obéissant,

GUILLAUUE y PAn LA GRACE DE DlEU , PRINCE d'OrANGE ,

COMTE DE Nassau et de Gatzenelenboge.

Copie da XVIII* liiele, aax Arehives do Royaume : LtUm eUetà (hùUaumt dt Ifaftau, t. T.

DHXIL

LE PRINCE D'ORANGE A CEUX DE TERMONDE.

Il les exhorte à se ranger de son parti, suivant I^exemple de ceux de Hollande, de Zélande, de Malines et d*autres villes et provinces» et à accepter, pour leur défense, la garnison qu*il leur envoie.

MaLIUBS, i^f SBPTBMBBK f K72.

Messieurs^ vous aurez entendu en quel équipaige je me suis mis, avecq mes alliez, tant par Tassistence de ceulx d'Hollande et Zéiande, que d*aultres noz amis, pour délivrer la patrie de la tyrannie du duc d'Albe^ depuis la venue duquel avecq les siens (comme sçavez), tout bien et bonheur, justice et police ont esté déchassez, et les subgeclz réduictz à tels termes et extrémitez, que povreté, voires servitude, les menace de près^ dont le Roy, nostre sire, est indubitablement du tout ignorant, estant comme ensorcelé ou mieux détenu en tutèle de cedictduc,. avecq ceulx de Tinquisilion d*Espaigne, et qu'ainsy soit, iceulx, abusahs de la bonté nayve de Sa Majesté, par le samblant de pieulx zèle et intégrité foincte, ne font que charger continuel- lement les bons subgectz par faulx rapportZ; si bien que, sans

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plus s*informer, ou les oyr en leurs raisons , icelle Sa Majeslé en a mis le chastoy entre leurs mains et povoir tirannicque. Or, combien que moy et mes alliez sommes assez délibérez d'assaillir et, à Faide de Dieu, défaire ce commun ennemy de la patrie et oppresseur des vefves et orphelins, sans espargner corps ny biens, ce sera toutesfois à moindre péril et hasard , si vous aultres, messieurs, à l'exemple desdicts d'Hollande et Zélande, Malines et aultres villes et provinces, vous rengez à nostre assistence, en acceptant, pour la tuilion de la ville contre ces communs ennemys, la garnison que je vous envoyé, n'est que vous aymeriez mieulx de mesmes en faire et lever soubz mon auctorité, dont je me remectz à vostre discrétion : ce que causera finablement qu'ayans par ensamble rappelle d'exil les bonnes mœurs, justice, pollice, négociation, et l'an* cienne liberté en la patrie, Sa Majesté se pourra à l'advenir servir du moyen de ses féaulx subgectz , comme ont faict les bons princes, ses devanciers : protestant, en cas que, au con- traire, et à faulte d'assislence mutuelle, la patrie vient à estre dépopulée, dévastée, voires par telle occasion réduicte (que Dieu ne veulle) au povoir de prince estrangier, que ceste semonce me servira de tesmoingnaige, devant Dieu et ses anges, que la faulte sera à imputer aux seulz refusans et rejectans au loing le bien à eulx présenté. Et, sur l'espoir que ne vouldriez estre du nombre de telz , ains trop bien du nombre de ceulx estans délibérez d'aider leurs voisins et patriotes en ce que l'obligation à la patrie vous commande, je prieray le Tout* Puissant à vous, messieurs, vouloir donner sa gr&ce. Do Malines, ce premier de septembre iS72.

Vostre plus seur et aflectionné amy,

GiiUe de Nassau.

Copies da temp», aoi Archives du Royaume : LHtrtt de et à GuUiaume de Naetau, I. V; et oux ArehiTca de Simancfts: Pa,feUM de JSiteido, liuse 550.

1

71

Dxniu.

COMMISSION DONNÉE PAR LE PRINCE D'ORANGE

A PIERRE CLARISSE (•).

Il le charge de lever, en Angleterre, une enseigne de gens de pied.

Dblpt, K oécbmbbb 1572.

GuiLLAUMB, par lo grâce de Dieu, prince d'OrangC; conte de Nassau^ de Calzeuelleboghe, de Vianen, de Dictz, de Beuren, de Leerdamine, etc., seigneur et baron de Breda^ de Diest, de Grimberghe , d'Arley, de Nozeroy, etc., viconte d'Anvers et de Besanchon, gouverneur et capitaine général d'Hollande, Zeelande, Westvryse et Utrecht. Schavoir faisons que, pour le bon rapport que faict nous at esté de la personne

(^) Le baron de Rassenghien, Maximilien Vilain, gouverneur de Lille^ Dooaî et Orehies, écrivait au duc d*Albe le 17 avril 1573 :

« Quelques deulx jours avant les Pasques dernières, Ton appréhcn-

dnst, à Comynes, termes de che gouvernement, deulx garchons, qui sont esté depuis exécutez par le feu en ccste ville , qui confessiont estre complices d'ungne conspiration et surprinse que Tennemy pensoit faire aulx Pasques sur la ville de Nieupoort, sans cognoistre toutesfois comment nequy debvoit faire ladicte emprinse, sinon qu*ilz estiont advertys se trouver au jour de Pasques vers ledict Nieupoort, ilz trouveriont leurs chiefz et capitaines, et que Ton leur avoit dict qu^il y avoit bien xxvi capitaines despescbés par le prince d^Orenges, pour faire gens en Angleterre et partout, estimantz que des bannys de par dechà, retirez en Angleterre, debvoit venyr la principalle troupe pour surprendre ladicte ville : che qui fust confirmé oussy de mesmes par aulcons, lesquels au mesme tamps furent prins au quartier d*Ypre > selon que suis esté adverty par la communication qu*eusmcs des confessions réciprocques desdicts prisonniers ; et, sur Tung desdicts prisonniers appré- hendé audict Ypre , fust trouvée copye de certaine commission du prince d*Orenges, parlant sur ung Pierre Clarisse, que j*cntens estre cordoannier, natif de Neuf-Église et banny, dont me fust envoyée copyc, laquelle j*ay bien voUu chy joindre. » (Archives du Royaume, papiers d'Élat.)

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de Pierre Clarisse, et de sa diligence et bonne expérience, luy avons donné congié, povoir et aucthorité spécialle de, par nous et pour nostre service, aller en Angleterre, et illeeq lever, cuillier et faire une enseigne de gens de pied, de trois cens testes, ou environ, et iceulx mener par deçà, pour les employer et ainsi que, pour la tuition, seureté et défencede ce pays, et pour nostre service, sera trouvé nécessaire^ de faire faire ausdicts soldatz le serment de fidélité, tel qu*on est accous- tumé de faire entre les gens de guerre; de tenir lesdicts sol- datz en bon ordre, rigle et discipline militaire ; aussi qu'ilz fâchent bon guet et guarde aulx lieux et places quy leur seront commises et ordonnez, et, au surplus, faire tout ce qu'à bon capitaine et soldatz compète et appertient de faire : et ce à la soldée et traictcraent que cy*aprez sera par nous ordonné. Requérons partant à tous, de quelque qualité ou con- dition qu'ilz soyent, de donner ausdicts Pierre Clarisse et ses soldatz, en ce quedessuz , toutte bonne; faveur, aydeet assis- lence, et les laisser passer librement et franchement, pour venir devers nous : ce que nous recognoistrons très-volontiers vers ung chascun. En tesmoing de quoy, avons signé ceste de nostre nom, et faict mcctre nostre sceau de secret en placcart. Donné en la ville de Deift, le v*" jour du mois de décem- bre 1572.

On lit au bas de la commission :

«( Moy, Pierre Clabisse, capitaine en dessoubz la charge de mons'. le prince d'Orange, ay donné congié et licence à Jehan de Bray et aultres de mes soldatz de povoir chercher la guerre ilz treuveront leurs ennemys, et se retirer à Ziricxzé par* devers le gouverneur, en attendant ma venue, priant à tous capitaines et gouverneurs de ne les vouloir empescher.

» Par moy : Pierre Clarisse, signé de ma main. » En dessous es toit peinct ung corbeau. »

73

DXXXIV.

LE PRINCE D'ORANGE AUX MINISTRES, ETC., DES ÉGLI- SES DE NORWICH , THETFORD ET IPSWICH.

Il se plaint du peu d*ardeur avec lequel ils secourent leurs coreligionnaires des Pays-Bas, les exhorte à plus de charité , et les prie d^ajouter foi et créance & ce que leur dira^ de sa part, M«. Liérîn CaWaert.

DiLFT, 27 FivHiBa 1573.

DlB PRINCE VAN OrANGIBN, GRAVE VAN NaSSOU, ETC., ilBERE ENDË

BARON VAN BrEDA, VAN DiBST, ETC.

Eersame, lieve, besundere, wy zouden Doodeloos achten ulieden noch parlieulierlyk te scriveii, boven *tgheene dat wy geDeralycker aen alien den uuytlandtsehen gemeenten in Ingclandt vergadert gescreven hebben, waert by aldem dat etiyeke particulieren deur heure te veele groote giericheyt ons daerloe nict en liadden bedwongcn, ende willende daeroai hiermede gheensins noteren dengbenen , die wy weten dat doir die waeracbtighe christelyeke liefde die zy hebben, om heure eonseientie te quyten in 'tgecne zy tôt voirderinge van Godts woordt noodich bevindcn, is alleenelyckons voornemen tegenwoirdelyck, by desen aentegrypen diegheene, die deur (e vecle giericheyt liever zouden lyden 'tverderft van een ontal- lick getal vromen christenen, dan doir eene cleyne mededey- linghe heurder goeden diezelve mitsgaders die vryheyt haers vaderlants te helpen beschermen ende versterkcn. Ende alzulck zyn daer dit tegenwoirdich ons scryven aen addrescheert, nyet dat wy daerdeur vcrhoopen diezelve tôt eenich bewegin- ghé oft verbeteringhe te brengben^ want verhardt wesemle in

74

heur groote giericheyt , zoude zulcx qualick van heur te ver- waehten zyn, rpaer alleenlyck in gevalle in dese zaeekenaemaels niet geschiede^ tegens onse hope ende goede meyninghe, dat al zulcken ongeluek onses goedes voornemens nyet ons tôt cenighe negligentie oft slappicheyt toegescreven en werde , maer der ontrouwe van ghene, die eerstlyk met veele bieden , ende groote beloften ons tôt bescherminghe ende deffentîe van dese zaecken geroupen hebben, werde toegeleyt. Aengesien God almachtich bekendt is wat ons tôt alzulck voorhemen gebrocht heeft^ ende zal zyne goddelycke majesteit alzulcke te veele groote ondanekbaerheyt ende wanirouwen ongestraft nyet laeten blyven, jae der menschen vervolch ende haet en zul- len zy nietconnen ontviieden, die verwerpende heure voorge- houdene trouwe ende beiofte, nyet ons alleenlyck, maer Godt, heuren naesten ende heur zelven verlaeten. M' Lieven Cal- vaert (^), dienaer des woorts Godts, zal uluyden breeder onse meyninghe mitsgaders den staet van gemeene zaecken alhier verclaeren. Begerende daerom ghylieden hem daerop gclooft aïs ons selven, ende u daernaer reguleert^ dat wy metter daet mogen sporen alzulcke christelycke liefde in uluyden te zyn als ghy u zoo hoochelyck beroempt.

- Eersame^ lieve, bezondere, onsen Heere God zy met u. Geschreven tôt Deift, op den xxvij~ february a* 1573.

U goede vrient,

GuiuE DE Nassau.

Suscriptiofi : Den dienaren des woordts, ouderlinghen^ diaco- nen ende andere der gemeenten Godes,buiten Nederlanden, vergadert te Noorwits, Tetfort ende Ipswich.

Original, aux Arehivei d^Yprea.

(') Od peut consulter^ sur ce personnage, la Correspondance inédite de to maison d'Orange-Nassau, t. IV, V, VI et VIII.

75

Dxnv.

PHILIPPE DE MARNIX, S' DE SAINTE-ALDEGONDE (•),

AU PRINCE D'ORANGE.

Il le prie de traiter de son échange et de celui des autres prisonniers. A cette occasion, il rengagea songer aux moyens de faire la paix; il lui soumet différentes considérations propres à Vy déterminer. Il serait d*aTis que le prince accueillit le désir de Julian Romero d*avoir une entre* vue avec lui. 11 termine, en demandant que le prince lui fasse tenir quelque argent.

La Hais, 7 rotimbrb 4973.

Monseigneur, je ne faiz nulle double que le commun bruyct n ait desjà donné à entendre à Vostre Excellence le triste acci-

(') n avait été fait prisonnier par les troupes espagnoles logées par le duc d*Albe en Hollande, dans les premiers jours de novembre. Le prince d*Orange écrivait au S' de Lumbres, de Delft, le 13 de ce mois : « Espérant » faire garder le Macslant-Sluys, j^avois envoie monsieur de Sainte- Aldegoude » pour la fortifier : mais, avant que les ouvraigcs ont esté en deffence, Ten-

nemy, conduit par les paysans d'un autre chemin qu'on les attendoit, Pont » enfoncé, où, à mon très-grand regret, ledict S' de Sainte-Aldegonde, qui

aultrement se montroit vaillant, mais ayant esté délaissé de ses soldats, a

esté prins avec autres, et mené à La Haye. » {Archives ou Correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau, t. IVyp. 259.)

Ce fut Philippe de Sainte-Aldegonde, seigneur de Moircarmes, auquel le dued'Albe availconfié le gouvernement de la Hollande après la pertedu comte deBoussu, qui fit exciter Marnix à écrire au prince, pour lui proposer de négocier ayec le Roi. Hais Bor s'est trompé, et, après lui, M. Groen Van Prin- sterer, en disant que Requesens approuva ces tentatives d'accommodement : le grand commandeur écrivit, au contraire, le 29 décembre, à Noircarmes, qu'il ne convenait d'admettre aucun traité par le moyen du prince d'Orange. ( Voy. la Correspondanm de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, etc., t. II, p. i38.)

On trouvera, dans V Appendice, une très-curieuse lettre de Noircarmes sur ce sujet, écrite au duc d'Albe, le 10 décembre 1573.

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dent quy nous est survenu. Je dis triste, non pas tant pour révénement en soy, puisqu'à un homme vertueulx et craignant Dieu ne peult rien survenir de triste, comme pour la plus grande laschelé des soldaiz , et singulièrement des gens de cheval, quy ont occasionné les soldatz de s'oublyer sy avant comme ilz ont faict : mais j'espère que le mesme bruyt; et certain tesmoignaige de ceulx qui s'y sont trouvez présens^ aura desjà (*) Voslre Excellence non-seulement de ma disculpe et innocence, mais aussy du fldel debvoir que je y ay faict, lequel je ne tascheray d'imprimer h Vostre Excellence par parolles, affm qu il ne samble que je me deffie de la bonne opinion qu'icelle at tousjours eu de moy; mais pluslost m'ad- vancheray à la supplier très-humblement que, puisque mon- sieur le mestre du camp don Julian Komero, es mains duquel nous sommes tombez pour nostre bonheur, nous faict ceste faveur et grâce, par-dessus une infinité de courtesies et gracieuselez qu'en nostre endroict il at usé, qu'il nous donne espérance que , Vostre Excellence vouidrat entendre à changement d aulcuns prisonniers, puisqu'il en y a quelques- ungs quy luy sont bons amys, que Vostre Excellence veulle aussy user de ceste faveur et grâce en nostre endroict, qu'elle monstre par effect qu'elle nous tient pour ses fidelles servi- teurs : ce que je supplie d'autant plus voluntiers, que j'estime que une façon de mener guerre que l'on at, par cy-devant, du temps passé, açcoustumé d'user allendroit des prisonniers, est non-scuUement plus humaine et beaucoup meilleure que ceste barbafe cruaulté quy desjà a commencé prendre pied d'ung costel et d'aultre, mais aussy est plus conforme au debvoir d'homme chrestien^ et singulièrement à la profession que nous faisons, voyant que aultrement nous tomberons en

(1) Sic dans la copie. Le copiste parait avoir oublié ici le mot convaincu ou un autre équivalent.

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juste blasme de inique cruaulté : ce qui causera que nostre querelle deviendra odieuse, en lieu qu'elle est bonne et favo- rable, et mesmes nous fermera les aureilles de nostre Roy à ne vouloir entendre à nulle pitié et clémence envers ses pou- vres subgectz, desjà tant de temps sy misérablement affligez. Par quoy je m'asseure que Voslre Excellence userat en cest endroict de sa douleeur et bénignité, que non-seuUement le respect de nous, ses fidèles serviteurs, mais.aussy son juge- ment et prudence accoustumé, luy enseignent, et pourtant la supplie vouloir envoyer homme exprès, ou lettres, audict mestre de camp, pour traicter résolutement et fructueusement sur l'entrechange des prisonniers, de costé et d*aultre. Et dadvantaige, je m'advanceray de supplier pareillement Vostre Excellence de vouloir de plus prez penser à quelques bons et propres moyens que icelle aultresfois m'a mis en avant, pour traicter quelque bonne paix, veu que je treuve que Sa Majesté n'en sera par adventure sy très-esloignée, comme nous esti- mons bien, présupposant qu'il s'inclinera à pitié et miséri- corde, plustost que de permectre que ses subjectz soyent ainsy pitoyablement ruynez. De ma part, puisque je vois que nostre religion, par laquelle nous nous fondons simplement et seuUement sur la parolledeDieu, est tant hayeet descryée, qu'il est impossible qu'en ce mondeicy elle ait lieu de repos, sans croix et persécutions, quy sont tousjours nécessairement joinctes à Tévangille de Christ, j'estime qu'il vault beaucoup mieux quicter toutes les commoditez de la patrie et des biens de ce monde, et vivre en un pays estrange, possédant son âme en pacience, que non pas estre en guerre continuelle, laquelle ne peult amener qu'un ravage de touttes impiétez, malheuretés, et de tout ce qui provoque l'ire de Dieu.

Vostre Excellence at desjà monstre le zèle quelle at d'ad- vancer ceste cause. Il est temps (je vous prie de ne prendre de mouvaise part ce que je dis) de monstrer à tous ceulx quy

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blasment voz actions, et taschent de les opprimer par calump^ nies, de monstrer évidamment que n'avez oncques désiré de rien empiéter sur la Majesté du Roy ; voires que, après la gloire et honneur de Dieu, avez tasché d*advancer en tout et partout la grandeur d'icelle. Quant au peuple, sy Ton povoit obtenir asseuranee qu'il ne sera molesté ny inquiété pour les choses passées, ce que j'espère que Ton obtiendroit bien, il resteroit une seule difficulté pour ceulx quy veullent en leurs consciences maintenir ceste religion tant haye, sans laquelle ilz s'asseurent ne pouvoir estre sauvez : ou, par adventure, que le Roy sera content de leur octroyer, ou liberté de conscience (ce qu'à grand*paine je me puis persuader), ou bien qu'ilz se pourront retirer en pays estrange, avecq quelque peu de leurs biens. Et, quand il ne leur vouldroit laisser suyvre les biens, encoires ne voy-je pas que leur condition seroit beaucoup pire qu'elle est maintenant en ceste triste guerre, la fin de laquelle ne peult estre aultre que pouvreté et misère extrême de tout le pays; et, par adventure, nous estans retirez. Dieu nous donnera quelque occasion de faire quelque part sy bon service au Roy, qu'il sera content de nous prester une aureille plus bénigne, ou bien par adventure de nous souffrir en son pays : & quoy ne fault espérer, tant que ceste guerre dure, car, ores que nostre intention ne soit nullement de mener la guerre à Sa Majesté, toutesfois jamais nous ne le sçaurions persuader aultrement à ceulx quy n'entendent le fondement de nostre cause, et jamais ne vouldront y entendre, sy longuement qu'ilz auront ceste persuasion.

Ce que je diz n'est pas par deffiance que j'ay de la puis- sance de Dieu, mais pour ce que je considère que plus souvent Dieu exerce et monstre sa puissance en nostre infirmité et en nostre patience, que non pas en noz armes. Vostre Excellence cognoist les humeurs du peuple, et sçait combien peu Ton s'y doibt fier : par quoy je la supplie d'y penser, et à bon eschient :

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ce qui ne procède d'aulcune crainte des ennemis ou de la morty Dieu m'en est tesmoing en ma conscience, mais par une considération des jugemens du Seigneur et des affaires quy se présentent. Aussy ne suys-je persuadé de nul aultre de Tescripre, sinon qu'il me samble advis que ce seroit ung moyen de retirer Vostre Excellence hors de beaucoup de paines, la purger de beaucoup de blasmes, et délivrer le pays d'une grande misère, veu roesmement que, le duc d'AIbe se retirant, j'espère que le peuple pourra joyr de la clémence naturelle du Roy, ou sinon, au moins, ung rigoureux gouverne- ment sera plus supportable, que ne leur est le fardeau de ceste guerre, s'il dure plus longtemps. Je vouldrois avoir moyen de parler trois motz à Vostre Excellence, et elle enten- droît de quel cœur ceci me procède. Tant y at que, si Vostre Excellence y veult entendre, il me samble que Dieu vous en ouvre les moyens, car ledîct mestre de camp aussy, estant d'intention de partir pour Espaigne, et se retirer lundy d'icy, m'a dict qu'il désireroitfortde parler à Vostre Excellence, pour la bonne affection que, du passé, il vous at porté, espérant que cela pourrat servir grandement à Vostre Excellence. Que s'il estoit possible, sans mectre vostre personne en dangier, je le désirerois fort, et en supplieroye Vostre Excellence très-hum- blement. Que sçait-on sy Dieu, par telz moyens, veult avoir pitié de ce pouvre pays ! Toutesfois, Vostre Excellence est sy saige et advisé, que je n'ose m'advancher de pour rien luy conseillier, espérant qu'elle prendra ce que j'en ay escript, de bonne part.

Au reste, me confiant aux faveurs accoustumez de Vostre Excellence, lesquelz ma conscience me déclaire, en ce mal- heur quy est survenu, n'avoir par aulcune miesne faulte mérité de perdre, je la supplieray de me vouloir faire tenir quelque argent, pour nous entretenir icy en prison, veu que, mons' Julian Romero se partant d'icy, et venant pour gou-

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verneur d'Hollande nions' de Noircarmes, je crains que nous soyons mis en oubly, et que personne ne portera nul soing de nous. Ledict S' Julian m'a promis de nous faire tenir ce que Vostre Excellence m'envoyera : par quoy je la supplie très- humblement nous vouloir assister, afBn que ne périssions de pouvreté et de faim. Et à tant, après avoir très-humblement baisé les mains de Vostre Excellence, prieray Dieu vous donner, monseigneur, son saint esprit, pour conduire toutes ses actions & sa gloire et consolation de sa pouvre église désolée. Escript en prison à La Haye, le vij"* de novembre 1S73.

De Vostre Excellence très-humble serviteur,

Piîi DE Marnix.

Ceulx quy sont icy avecq moy en prison, sont : Wingaer- den, lieutenant de Wilcke, Bon Augers, Putman, Berenger, mon enseigne et quelques autres officiers. Les auUres tous sont ailleurs, à part.

Copie do temps, aux Archives do Simancas : Papeltt de Ettado, Hosse 5i>0.

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Dxnvi.

LB PRINCE D'ORANGE A JULIAN ROMERO (').

Il se réjouit de ce que Julian Romero ne Ta pas oublié. Il ne demande pas mieux que de voir la guerre devenir moins cruelle. Il n*acccpte pas TeotreTue que Romero lai propose ; mais il est prêt à y envoyer quefqii*un à sa place.

DtLFT, 7 ROTBHBBB 1575.

Monsieur, ayant reseu la lettre que m'avez escript ce jour- d'buy ('), j'ay esté tré&-aise de veoir par icelle la bonne souve- nance que avez ancores de voz anchiens amys^ et que les changemens et diversités des affaires passées ne m*ont encores du tout mis en oubly vers vous.

Or, au regard de l'intention que vous avez de faire bonne guerre, pouvez tenir pour tout certain que, de ma part, doiz le commenchement des guerres présentes, je n*ay jamais eu

(!) Le prince mandait à ses frères, le 13 novembre : « Le S' Julian Romero » m*ù escript troys ou quatre foys des lettres plaines de courtoisies et honestes offres, auxquelles luy ay respondu en pareils termes. {Corretpondance inédite de la maison d'Orange-JVassau, t. IV, p. 238.)

Jolian Romero avait été Tun des capitaines de Tinfanterie espagnole que Philippe II laissa aux Pays-Bas, en 1559, et dont le commandement en ch^ fut donné au comte d*Egmont et au prince d*Orange.

Lorsqu'il apprit que le duc d'Albe retournait en Espagne, il annonça rintention de quitter aussi les Pays-Bas ; il y avait, h cette époque, quarante ans quHl était au service. Le duc d*Albe et le grand commandeur de Gastille eurent beaucoup de peine à le faire renoncer k ee dessein , quoique le Roi eût expressément ordonné qu'aucun des chefs militaires n'abandonnât son poste. (Voy . la Correfptmdance de Philippe II sur les affaires des Pays-Bas, t.ll,p.415et432.)

{*) Je n'ai pas trouvé cette lettre dans les Archives de Simancas.

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aultre volunté, et j*eusse esté très-aise de veoir cesser touttes les cruaultez et înhumanilez cy-devant non usitées. Quant h ce que^ devant vostre partement vers Espaigne, vous désirez de pouvoir parier à moy, je ne puis laisser à vous dire qu'oires que j'aurois bien bonne envye de vous veoir aussi, pour cer- taines raisons, toutesfois, je ne treuve qu'en ceste saison, puis- sions faire une telle entreveue en la forme que demandez. Toutesfois, sy vous avez quelque chose à n)e dire, je vous envoyeray quelque homme confident, pour vous saluer de ma part, lequel d'ung chemin parlera avecq vous touchant les prisonniers dont m'escripvez, à condition que, pour sa seureté, vous m'envoyez icy ung de qualité semblable à cellui quy yra devers vous. Je vous eusse volun tiers faict tenir ceste encores ce soir ; mais, s estant celluy quy me présenta la lettre absenté, sans qu'on l'ait sceu retrouver, je suis esté constrainct vous des- pescher ceste fermée. Et sera l'endroit je supplierai Dieu vous avoir en sa garde. Escript à Delfc, ce vij*" jour de novem- bre <573.

Vostre bien bon amy à vous faire service,

GuilIe de Nassau.

Suscription : A monsieur monsieur Julian Romero, mestre du camp et général de l'infanterie espagnolle estant présente- ment par deçà de La Haye.

Copie do tcmpi, «sx Arehires de Simaneat : Papelei de Ettado, liasse 1403.

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DXXXVII.

LE PRINCE D'ORANGE A JULIAN ROMERO.

Il le remercie du bon traitement qu*il fait à Philippe de Mamix.~FI regrette son départ, et rengage à remontrer aii Roi Tëtat présent des Pays-Bas.-^ Il lui propose rechange de Philippe de Marnix contre quelqu^un des capi- taines espagnols qu*îl tient prisonniers.

DsLrT, 8 IfOTBMBRB i873.

Monsieur, fay veu, par vostre lettre que m'escrîpvez en res- ponee de In mienne , le bon traictement que vous faictes à monsieur Philippe de Marnix : dont je ne veux délaisser de vous remerchier de telle courtésie et gratiosîté , eomme aussi j'ay tôusjours espéré semblables honnesteiez de vous. J'ay aussi cc^neu, par vostre susdiete lettre, que vous estes prest partir demain vers Espaigne, et que, à ce regard, vous n'aurez loisir de parler au gentilhomme que je vous voulois envoyer. Or, ce que je désirois par luy vous comunicquer, estoit, en premier lieu , le marissement que j'ay de vostre retraicte de ces pays, suyvant que, par vostre lettre d'hier, m'aviez faîcl entendre, pour aultanl que, vous demeurant par deçà, j*avois espéré que, par vostre bon moyen, crédit et authorité, nous eussions cy-après fait bonne guerre, ainsy que, par cy-devant, entre toutes aultres nations at tôusjours esté practicqué, faisant cesser touttes cruaultez tant indignes de chrestiens : ce que je crains maintenant, par vostre absence , ne se pourra sy bien effectuer. D'aullre part , je vous eusse faict prier de remons- trer à Sa Majesté Testât présent de ses pauvres Pays-Bas, et la ruyne certaine d'iceulx que toutes ces misères tirent à présent, afin que, pour ce^ Sa Majesté soit servye d*entendre une fois au

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vray & ses affaires, considérant le grand déservice que en ung besoing Sa Majesté trouveroit , estant sesdicts pays réduictz en telles extrémitez Ton les voit aller , sy en temps n*y est prévenu :ce que, par vostre bonne discrétion, je m'asseure vous sçaurez très*bien persuader à Sadicte Majesté. Et, de vostre part, povez croire et tenir pour tout certain, soit que les affaires viègnent bien ou mal , trouverez en moy tousjours ung servi- teur et bien affectionné amy vostre ; et me déplaist bien que pour ce coup les occasions ne se sont présentées de pouvoir moy-mesme parler & vous. Quant audicl seigneur Philippe de Marnix , pour aultant que je suis bien asseuré , s'il vient entre les mains du duc d'Alve , il le fera mourir, ainsi qu'il at faict tant d'aultres , et que par ce je seray constrainct de faire le semblable envers ceulx que je tiens ou pourrois encores tenir prisonniers . dont seroit dommaige de perdre ainsy ces gens de bien, vous me pourrez mander vostre intention, sy vouidriez rendre ledict de Marnix en eschange d'aulcun capi- taine que je tiens prisonnier et vous me vouldrez nommer, désirant avoir sur ce vostre responce, ou si plus tost vous le vouidriez mectre à rançon. Du soldat que m'envoyastes hier, je n'ay oy depuis aultres nouvelles : estant retrouvé, je le vous renvoyeray. Et en cest endroict prieray Dieu, monsieur, vous avoir en sa saincte garde. Escript à Delft , ce viij^ jour de novembre \ 573.

Vostre bien bon amy à vous faire service ,

GuiîIe de Nassau.

Suscription : A monsieur monsieur Julian Romero» mestredu camp et général de Tinfanterie espagnole estant présente- ment par deçà.

Copie do temps, «qx Arehivet de Simanetf : Poftltt d* BiUtêOt llasM 1403.

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DXXXVUL

LE PRINCE D'ORANGE A JULIAN ROMERO.

Il est prêt à envoyer deux personnages pour traiter avec lui ; mais il ne peut admettre rechange de Philippe de Mamix contre le comte de Boussu.

Dklft, 9;noviiibrb 1573.

Monsieur, vostre lettre m'at esté délivrée à cest instant, selon laquelle je n'eusse fally d'envoyer, incontinent après, deux personnaiges de ma part vers vous, à la HomeBrtigghe, en reeepvant deux qualiffiez de vostre costel , pour leur seu- reté. Mais Tinégalilé du changement de monsieur de Marnix allendroit du comte de Boussu , est sy hors de propos et raison, que ne vois de povoir venir aulcun fruict par Tenvoy desdicts personnaiges. Néantmoings, s'il y at aultre chose qu'avez envie de me faire entendre, suis content de vous envoyer de ma part deux personnaiges pour demain au matin, à huit heures, au lieu que dessus, avecq passeport lihre pour aller et retourner pour ceulx que vous m'envoyerez, lesquels seront receuz devant la ville, dans nostre trenchie, et s'achemi- neront quant et quant (■) les nostres devers vous, estans garnis de semblable passeport pour aller et retourner librement. Sur quoy, n'estant ceste à aultre effect, je supplieray Dieu vous maintenir, monsieur, à tousjours en sa sainte garde. Escript à Deift, ce ix* jour de novembre 1 573.

Vous ne trouverez, s'il vous plaist, mauvaix que je vous ay faict attendre sy longtemps au lieu vous estes venu, d'aul- tant que, venant de pourmener, j'ay receu vostre lettre assez

(') Quant et quant, en mémo temps.

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tdrd, et n'avoye personne chez moy pour faire la rcsponce. Vous me pourrez encor ce soir mander sy estes délibéré de m'envoyer demain deux personnaiges de vostre coustel, les- quelz, venant à l'heure susdiete & noz faulbourgs, y recepvront mon passeport, et pourront d'un chemin les miens recepvoir vostre passeport pour ceulx que je vous envoyeray. Et vous pouvez asseurer, sur ma paroUe, par ceste, que ceulx que m'envoyerez pourront venir et retourner librement et fran- chement.

Vostre bien bon aniy à vous faire service ,

GuiûE DE Nassau.

Copie du lemps, aux Archives de Sîmâactt : Papeles de Bêtado, liasse 5SQ.

DHXIX.

LE PRINCE D ORANGE A JULIAN ROMERO,

Il rassure qu*il sera toujours son serviteur et amî. Il rengage à supplier le Roi de considérer de plus près Tétat des Pays-Bas. 11 déplore les mauvais effets des conseils donnés au monarque, et dit les conditions aux- quelles les provinces soulevées rentreraient sous son autorité.

DblPT, 10 ROVBHBEI iS75.

Monsieur, j'avois ce matin tenu prest deux personnaiges^ pour les vous envoyer, suyvant le contenu de ma lettre d'hier : mais , puisque ne samblez estre de ceste opinion , fault le remectre jusques à ce que Dieu présente aultre occasion. Ce néantmoings, pouvez estre asseurc que vous aurez tousjours

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en moy ung serviteur et bon amy. Je n'ay osé m'advancer demander à Sa Majesté par vous aultre chose ^ sinon ce que vous ay escript par mes précédentes : mais^ s'il me fust permis luy présenter mes très-humbles représentations, vous en prîeroye de bien bonne affection le vouloir faire , ensamble , selon vostre offre, de vous employer en tous bons offices devers Sadicté Majesté, afGn qu'il luy plaise considérer de plus prez le faict de ses pays patrimoniaulx j puisque c'est pour son propre bien, et repos d'iceulx pays. Par me samble, à correction, que ceulx quy ont conseillé et conseillent encores à Sadicte Majesté de dépendre tant de millions, pour gaster sesdicts pays et conquérir ce quy est sien , au lieu que telle despence serviroit . mieulx estant, employée en aultres endroictz, ne luy sont fidelz ministres, serviteurs, ni subjectz, puisque, avec la seule permission de povoir servir Dieu selon son sainct commandement et parolle , et de vivre selon les anchiennes libériez et jurez privilèges du pays, soubz Fobéys^ sance entière de Sa Majesté, s'eust peu et se pourroit encores facilement remédier à tout : au moyen de quoy se éviteroyent les inconvéniens quy aultrement sont apparans de s'augmenter de tous costelz de plus en plus, au grand préjudice de la gran- deur de Sa Majesté , laquelle désirerions tous veoir plustost aecroistre que s'abaisser et diminuer par ces troubles et dissen- tions civiles. Sur quoy, n'allant ceste à aultre effect , je sup^ plieray Dieu, monsieur, vous avoir en sa saincte garde. Escript à Deift, ce x"" jour de novembre 1S73.

Vostre bien bon amy à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Suscrijaion : A monsieur monsieur Julian Romero, mestre du camp et général de Tinfanterie espagnole estant présente- ment par deçà La Haye.

Copie du tempi, aux Archircs de SimaBC» : Pfipe<«t rf0 £t(arfo» liasse 550.

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DXl.

LE PRINCE DORANGE A PHILIPPE DE MARNIX.

Réponse à ses lettres des 7 et 21 novembre.— Satisfaction que les états et lui ont de la conduite de Marnix. Démarches qu*il a déjà faites pour obtenir que Marnix fût échangé. Il a consulté les états et d^autres gens de bien et de qualité sur la proposition de Marnix de traiter avec les Espagnols ; tons, ainsi que lui, ont été d^une opinion contraire. Il entre dans de longues considérations pour justifier cette manière de voir.

DeLFT, 28 NOTEMBBB 1573.

Monsieur de Marnix , j ay receu deux de voz lettres, l'une du vij* et la seconde du xxj* jour de ce mois , par lesquelles me touchez principallemcnt deux points, faisant récit, par Le premier, comment les choses sont passées au temps de vosire prinsc. Et, quant aux excuses que vous faictes pour vostre regard, pouvez estre asseuré que moy et les estats sommes fort bien satisfaitz du bon debvoir qu'avez rendu : à cesle cause , povez estre à vostre repos, et vous tenir asseuré que nous aurons tousjours vous et vos affaires pour recommandez. J'espère bien que monsieur de Noircarmes et le S' Francisco de Valdez vous traiteront ainsy que le S' Julian Romero a commencé; et, en cas qu'ilz en facent aultrement, jeseray constrainct de faire le semblable à ceulx que nous tenons pri- sonniers. Je seray bien aise d'entendre leur voulunté quant aux entrechanges , suy vaut ce que je l'avoy cscript audict sei- gneur Francisco de Valdez; mais, jusques ores, n'ay responce de luy touchant quelques-ungs que, par ung billet joinct à ma lettre, je luy avois dénommé pour ung commenchement, dont vous estiez Tung.

Or, quant & l'aultre point, par lequel il semble que, pour tirer ce peuple horsceste fâcheuse guerre, me \eullez induire

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et persuader à quelque traicté et accord préjudiciable, et atti- rant plustost ruyne que la conservation du pays , je ne veulx vous eéler d'avoir communiqué voz lettres aux estatz de ces pays, et à d'aultres gens de bien et de qualité, pour avoir sur vostre mis en avant leur advis, et entendre leur volunté, ne veullant, pour l'acquit du serment et obligation que j'ay à eulx, user d'auleune authorité^ ny de mon propre mouvement entamer chose quelconque à leur desceu, non plus qu'en aultre affaire concernant le bien du pays , ainsy qu'il est notoire à chascun que je n'ay jamais faict. Et , ayant les estatz , avecq les aultres susdicts , meurement délibéré sur ce faict, et selon l'exigenee pesé toutes les circonstances d'icelluy, ont unanime- ment déclairé qu'ilz sçavent bien, comme je faîctz aussy, que tous hommes , et singulièrement les chrestiens , ont comman- dement exprés de Dieu de pourchasser paix, et quC; oultre le debvoir quy les oblige de luy rendre obéyssance, leur inclina- Uon naturelle les incite à désirer union et concorde, et consé- quamment leur repos. Aussy vous sçavez bien particulière- ment et certainement que , dès le commenchement , ainsy depuis et continuellement, nous n'avons riens tant désiré, ny désirons encores maintenant, que la tranquillité et prospé- rité du pays , par une bonne et seure paix , ayans tousjours esté irès-mariz, comme encores nous sommes à présent, de tant de eruaultez , injustices , inhumanitez et aultres violences exécutées contre tous droictz divins et humains, quy ont donné occasion aux troubles, et obligé, voire comme constrainct, ung chascun , en son endroict et selon sa qualité , à prendre les armes , non poinct contre Sa Majesté , mais pour se garantir et obvier à ce qu'ilz ne fussent finablement du tout et à jamais accablez et ruinez par une servitude et tirannie intoUérable de corps, de biens et des consciences, de laquelle nécessairement s'ensuyvoit une désolation horrible, par une fuite et retraicte de la pluspart des habitans du pays es bois et forrestz, avecq

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femmes et enffans , en estât plus calamiteux et misérable que les troubles et guerres soustenues en bonne conscienoe devant Dieu ne peuvent apporter , lesquelles néantmoings se trou- vans tousjours accompagnez d'une infiiiitéd*afOiclionsetincon- véniens , il n'y a chose que lesdicts estatz et moy ne désirions plus ardamment que une heureuse fin aux misères et désola- tions dessus alléguées , et vivre en heureuse prospérité soubz Tobéyssance entière de Sa Majesté. Et, comme nous nous sen- tons obligez devant Dieu , et affectionnez en nos cœurs , de pourchasser et embrasser ung sy grand bien , ainsy au con- traire ^ quant il seroit question d'accord ou de paix qui nous apporteroit plus de malheurs , inconvéniens et désavantaiges , tant de la gloire de Dieu , laquelle sur toutes choses nous sommes tenuz de pourchasser , que de la patrie , nous nous sentons obligez d'endurer plustost tout le malaise , fâcheries et incommoditez de la guerre , que de nous plonger volontai- rement , et à nostre eschient , pour quelque peu d'aise , ung repos imaginaire et paix mal asseurée , et conséquamment de petite durée, aux maulx et inconvéniens sy grands et horribles qu'avons de nostre temps veu advenir en telz et semblables accordz : car il vous souvient que^ de l'accord faiet en l'an xv^'lxvj avec tant de solempnitez, et par le commandement mesmes de madame la duchesse de Parme, pour lors régente, et de ceulx de son conseil , n'est succédé aultre chose que l'extirpation de la vraye religion selon la parollede Dieu, avecq meurtres de tant de milliers d'enffans de Dieu , exécutions et bannissemens des seigneurs, gentilshommes, bourgeois et tant d'aultres personnes de touttes qualitez et sexe , lesquelles , se fians à semblables pardons et traictez, ont esté sy misérable- blcment trompez , perdans leurs vies et biens, avec la ruyne générale de tout le pays* Aussy le massacre de France (>), non-

(') La SainUBarlhéfemy.

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obstant la paix sy soiempuelleroent jurée, ne peult estre effacée de noz cœurs, ains nous apprend comment nous nous debvons fier, de tant plus qu'estant ledîct massacre advenu bonne espace après In guerre, estans touttes choses paisibles, et mesmes en temps de nopces et festins , debvons à bonne raison penser ce que nous aurions à attendre , estant le pays encore plain de gens de guerre, et notamment espaignolz.

Je laisse icy, pour brieffveté, à réciter plusieurs aultrcs exemples advenuz en Allemaigne et aulires lieux, comme monsieur de Noircarmes en sçait mieux à parler que aultre homme du monde j et surtout celluy de feu le lantgrave de Hessen, savoir : des motz einich et ewidi ; aussy de celluy du marquis Albert de Brandeboui^^ et se peuvent tousjours, en tout événement , servir de leur maxime bastie au concile de G>n8tance , qu'il ne fault garder aulcune foy à ceulx qu'ilz trouvent pour hérétiques. Et n'y a celluy quy ne sache bien de quelle main et par quy ledict massacre de France (■) et la pluspart desdicts exemples et aultres pareils accidens, quy ont esté en train ailleurs , ayent esté practiquez , assavoir : par ceulx qui nous ont constrainctz et forcez à prendre les armes : joinct qu'il est assez notoire & quelle intention ilz sont venus à ce Pays-Bas : car, dez le commenchement de leur entrée, n'ont tâché que à mectre en avant touttes cruaultez , inhumanitez, tirannies et oppressions, tendantes à réduire ce pays et les subjectz d'icelluy, d'une honneste liberté et franchise que Sa Majesté leur avoit si solempnellement jurée, eu une par trop exhorbitante et intoUérable servitude. A cela ont servy les horribles exécutions, depuis les plus grands jusques aux plus petiiz, les bannissemens de sy grand nombre de bons et léaulx

Q) Le prince d*Orange veut faire entendre ici que la Saint-Barthëlemy avait été conseillée par le duc d'Albe ; mais c*est une imputation sans fondement. (Voy*, dans les Bulletins de FAcadëmie royale de Belgique, t. XVI, partie I^*, p. 238, mes Particularilés inédites sur la Saint-Barthélemy.)

92 -

subjectz et vassaux de Sa Majesté, le reoversement et cassation de tous droietz, privilèges , iibertez et immunitez, les concus- sions et exactions insupportables, les meurtres de divers bour- geois, les forceries et violemens des femmes et jeunes filles, les ravissemens des biens d*ungchascun, la cessation etruyne de toutte trafficque et commerce, ^t finablement touttes inhu- manitez, violences et outrages quy se soyent oncques peu excogiter : dont n*a sceu procéder que le dangier évident d'une altération des cœurs des subjectz allendroit de leur prince.

Nous disons tout cecy, pour en partye respondre à vostre lettre, et aussy affin qu*il puist estre cogneu que nous ne voyons aulcun moyen de conclure et embrasser quelque paix et accord , nous confians sy avant en la bénignité et aaîfve clémence de Sa Majesté que , sy elle at envye (comme n'en faisons doubte) de délivrer son pays de ces maux et dissen- sions civiles , elle nous accordera ce point, comme du tout juste et nécessaire , pour mectre ung repos durable et fin asseurée à ces misères et calamitez. Et ne doubtons aulcune- ment que non -seulement nions' de Noircarmes et le S' de La Motte ('), mais aussy tous hommes debon jugement, trouveront ce poinct sy raisonnable, que, s'ilz ont devant les yeulx et au cœur le désir de voir fin à ces troubles et misères , qu'ilz adviseront eulx-mesmes tous moyens possibles à ce que puis- sions y parvenir : d'uultant que ne povons aulcunement esti- mer, oires que présentement ilz nous soyent ennemys, qu'ilz vouldroyent toutesfois nous conseiller chose diverse à ce que dict est , pour nous précipiter de fanctaisie et nous perdre voluntairement; et, ce faisant , feront les offices requiz à bons subjectz de Sa Majesté, luy conseillans la conservation de son pays, et consécutivement son propre bien et grandeur. Par

(I) Valentin do Pardicu, S' de La Motte, nomme l*un des lieutenants de Tartillerie le 13 novembre 1572.

93

Sa Majesté acquerra réputation devers ung chascun , comme ayant, par sa naïfve clémence, et de son propre mouvement, remis son pays en tranquillité et paix heureuse et asseurée. Et, comme nous demandons journellement à Dieu ung tel bien, ainsy Taitendans de celluy qui, inspiré du Seigneur, nous le peult promptement donner, sommes et serons tous- jours prestz et désireux de Fentendre, et d'embrasser et recepvoir à eesteffect ses justes commandemens. Et, en cest endroict, faisant icy fin , je supplieray le seigneur Dieu vous avoir, monsieur deMarnix, en sa saincte garde et protection. Ëscript à Delft, ce xxviij"" jour de novembre 1573.

Voslre bien bon amy,

GuiîXe de Nassau (■)•

Copie da temps , aux ArehÎTes Simanear : Papêlêê dt Ettado, liasse 550.

DXLI.

LE PRINCE D'ORANGE AD SEIGNEUR DE NOIRCARMES (•).

U rengage à se tenir en garde contre les mauvais desseins des Espagnols. -* Il lui envoie deux lettres interceptées de Frédëric Vuyten Ham.

PLEssnvevi, 7 jaryisb 1174.

Monsieur, l'ancienne cognoissance et amitié qu'avons eu ensemble, pour avoir esté compaignons de la chambre de feu

(1) Marniz fit à cette lettre, le 4 décembre suivant, une réponse étendue, dont j*ai trouvé une copie aux Archives de Simancas, Papales de Estado, liasse 1403, et une traduction espagnole dans le même dépôt, liasse S58. Je ne la donne pas, parce qu'elle a été publiée par M. Groen Van Prinsterer, Archivée, etc., t. IV, p. 286-295.

(') Voy. le tome II , p. 4S7. Ce seigneur mourut à Utrecht le b mars 1674.

I

94

l'empereur Charles^ me cause vous escripvre ce mot, et par icelluy vous faire entendre qu'ayant examiné de bien prez Tintention des Espaignolz, dont toutes leurs actions confirment mon opinion, en ay conceu une impression (elle, qu'à la fin, pour toute récompense de vôstre léal service, ilz tasche- ront, par touts moyens^ et selon leurs conspirations (procédant d'envie et d'ambition), de vous et aultres seigneurs et gentils- hommes du Pays-Bas faire aller le pas de feuz messieurs le comte d'Ëgmont et de Hornes, n'ayans chose plus pour recom- mandée , que d'extirper la noblesse dudict pays , pour à toute oultrance et suberbité gouverner à leur fantasie icelluy. Et, d'aultant que cecy ne me procède d'aultre part que d'une syncère et vraye affection, vous prye accepter ceste mienne advertence d'une mesme affection, et le croire pour vostre bien, s'il vous plaist. Je vous envoyé cy-joinct deux lettres qui sont esté avec aultres interceptées, venants d'Utrecht, afiin que povez veoir en partie en quel degré d'estime, et pour vous, et pour nostre nation, tient ce notable Frederick Vuyten Ham O? comme, du mesme (avec aultre oportunité), je vous pourrois monstrer par lettres escriptes de la main de Mon- dragon, usant semblables et aultres exhorbitants propos, en reproche et contempnation de nostredicte nation du Pays- Bas. C'est doncques à vous et à touts aultres qui aguisez le couteau pour vous coupper la gorge, de s'adviser en temps, pour s'asseurer et rendre peine de mectre en repos et relever ce pauvre pays, tant foulé et oppressé par toute cruaulté : à quoy Dieu vous tend à ceste heure la main ; priant à icellui qu'il vous en donne le cœur et l'affection, et en santé, mon-

(1) L^unc de ces lettres était adressée à D. FernaDdo de Tolède, mestre de camp du tercio de Lombardie, Tautre à Martin d*Orcbais, capitaine au même régiment. Dans toutes les deux, Frédéric Vuyten Ham s^exprimait, sur le compte des Wallons et de M. de Noircarmcs lui-même, en des termes peu (lutteurs.

95

sieur^ bonne vie et longue. Eseript à Fli^singhes, ee vij'' de janvier 1574.

» ••

Voslre bien bon amy à vous faire service,

"* * " ' ' .

GuïîIe DE Nassau. ... Sùsmptmi : A monsieur monsieur de Nôircarnies.

Copie du temps , aux Archives de Sfmaoeaa. Pofeles «/eÀtfffto, liasse 557.

DXLII.

« * »

LE PRINCE D'ORANGE AUX COLONEL, CAPITAINES ET SOLDATS DE LA GARNISON DE MIDDELBOÙRG:

Il les prévient qu^il ne laissera plus passer personne de Middelbour^, ni d^Amemuiden, et que si, par leur opiniâtreté, ils causent la mort de quel- ques-uns des habitants, il les traitera comme des meurtriers.

FLBSSIlfGtJB, 11 JANVtBft 157i.

Messieurs, la grande quantité du pouvre peuple qui est hier, venu, tant par eau que par terre; languissant et mourant -de faîm, nous a esmeu de vous advertir que avons arresté et résolu de ne recevoir ni laisser passer aucun, venant de Mid- délbourg, ou d'Armuyden. Partant, si, par vostre opiniastreté, à faute de nourriture, en faictes sortir quclques-ungs, et que ainsi soyez cause de leur mort, nous déclairons et protestons, parla présente, que, vous mectant Dieu (comme nous espé- rons) en noz mains, serez traictez non-seulement comme soldats , ains comme cruels et inhumains meurdriers des

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subjectzde Sa Majesté. Par quoy adviserez en temps à ce que vous avez à faire. Escrîpt à Vlissinghen, ce ij'' de janvier 1574.

GoiLLE DB Nassau.

Smcription .-Messieurs les coronel, capitaines et soldalz estans présentement en garnison en la ville de Middelbourg et Armuyden.

Copie da temps, a«z Archives de Simulées : Pape/Mif* JPMocfo, liesse 550.

DXLIIL

LE PRINCE D'ORANGE AU COLONEL MONDRAGON (').

Le grand commandeur de Gastille n*ayant pas voulu entendre à rechange des prisonniers , le prince somme Mondragon de venir se remettre entre ses mains, à Gertrudcnberg.

BOMHBt, 23 AVRIL 1S74.

Monsieur de Mondragon , à cest instant , je reçois vostre lettre du xx* jour de ce mois, par laquelle j'enlens le debvoir et la diligence que, selon vostre promesse, avez faictepour la

(1) Un des articles de lacapilalation de Middelbourg, conclue, le 18 février, entre le prince d^Orange et Mondragon, qui commandait dans cette ville, portait ce qui suit : Si promettra ledicl seigneur Mondragon , sur sa foy, de v retourner entre les mains de Son Excellence, en cas que, endedans deux » mois prochainement venans, il ne fait délivrer de prison et retourner en » sauveté, soit en lieu de Hollande ou de Zeellande, estant sous le oommande- » ment de Son Excellence, Philippe de Mamix, seigneur du Mont-Sie-Alde- 9 gondc, le capitaine Jacob Simonsz, un Italien prisonnière La Haye, nommé

97 -

(léHvrancé des prisonniers, selon le traicté y et puis , que le gouverneur ne veult entendre à ladicte délivrance, ayant desjà promis à mons' de Bossu les mesmes prisonniers : en quoy il s'abuse bien, pour estre tant hors de raison, comme vous povez assez considérer ^ous-mesmes. Je suis bien esmerveiilé du refuz qu'il vous fatçt en cela, et c'est une récompense bien maigre poursi grands et signalez services que, passé si longues années, vous avez faict à Sa Majesté. Par quoy , puisqu'il est ainsi, et que , Dieu mercy , il n'y at par delà présentement aucuns prisonniers de qualité, desquels nous vouldrions faire cschange à vostre personne , vous aurez , suivant vostredicte promesse, à vous rendre incontinent entre noz mains, venant dedens la ville de Sainte-Geerrrudenberch, j'ay commandé au gouverneur de vous recepvoir et traicter. Et , ne faisant «loubte que, comme gentilhomme et homme d'honneur, vous vous acquicterez de vostredicte promesse , je ne vous feray ceste plu9 longue I si ce n'est pour prier Dieu qu'il vous ayt ^ moifisieur de Mondragon, en sa saincte garde. Ëscript à Bommel, ce xiiij' jour d'apvril 1574.

Vostre bien bon amy à vous faire service ,

' GuiîXe de Nassau.

Suêcription : A monsieur monsieur de Mondragon, coronel.

Coprâ dn teoips, au •rehiTM da H. le d«« CaruBtB, à BeaiiBoiit.

Citadelle, le lieutenant de WiUeken Van Ângren et le capitaine Petain. ( La Petit, Grande chronique de Hollande, t. II, p. 276.)

Marnix et les autres prisonniers mentionnés en cet article avaient été promis aux parents du comte de Boussu par le grand commandeur de Castille, pour le rachat de ce seigneur : il se refusa donc aux instances de Mondragon, et, en même temps, il ne Toulut pas permettre qu*il allftt, selon son offre, se consti- tuer prisonnier. (Test ce qui résulte d'une lettre de Requesens lui-même, écrite à Philippe II le 2i février (Archives de Simancas, Papelee de Eslado, liasse 5tt7), et -ce qui disculpe Mondragon des reproches que lui adresse le prince d*Orange, dan&une lettre au comte Jean de Nassau, du 28 septembre {Archives, etc., t.. V, p. 71 ).

m. 7

98

DXUV.

LE PRINCE D0RÂN6E AU COLONEL MONDRAGON.

. 11 lui réitère la aomimition eonlenue dans sa lettre précédente.

DoiDaBCBT, 3 MAI 1574.

Monsieur de Mondragon, ne sçachant si vous aurez reeeu mes lettres du xxiij'' jour du mois passé , responsives à vostre lettre que, peu de jours auparavant, m'aviez escript, j'ay bien voulu vous faire encores ceste itérative, pour vous admonester et sommer, afin que, suivant vostre promesse, et vous acquic- tant d'icelle en gentilhomme et homme de bien, ayez, inconti- nent ceste veue , comme par madicte précédente je vous ay escript , à vous trouver dans la ville de Sainte-Geertruden- berch , j'ay commandé au gouverneur de vous recepVoir et traicter. Et , vueillant espérer que ne mancquercz à vostre debvoir , je ne feray ceste plus longue , si ce n'est pour prier Dieu qu'il vous ayt , monsieur de Mondragon , en sa saincte garde. Escript à Dordrcehl, ce iij° jour de may 1 574.

Vostre bien bon amy à vous faire service,

GujïXe de Nassau.

SmcripHofi : A monsieur monsieur de Mondragon, coronel.

Copie da temps, eu erchÎTef de H. le due de Ceraman , à Beaamont.

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DXIV.

LE PRINCE D'ORANGE AU COLONEL MONDRAGON.

Il lai accorde une prolongation de qainae jours, pour traiter de rechange

des prisonniers.

DOIDKCHT, \i MAI 1574.

Monsieur de Mondragon^ j'ay receu voz lettres du iiij'' de ce mois, responsives aux miennes du xxiij* d*apvril et iij' de ce mois. Je m'attendoye que la considération de voz services eust surmonté la difficulté dont vous faictes mention, pour ne vous mectre en paine de demander prolongation de temps à pour- suivre la délivrance des prisonniers contenuz en l'accord de Middelbourg, pour vous exempter des incommoditez de vous venir rendre prisonnier, veu singulièrement que, de ma part, favois suffisamment déclairé, dez le commenchement, que ny la raison, ny mon intention, pourroit faire attendre Teschange de M. le comte de Bossu à aucuns desdicts prisonniers, afin que ce discours ne retardast Taccomplissement de vostre pro- messe. Mais, puisque monsieur le commandeur mayeur ne vous a donné le consentement convenable en cest endroit C'),

(*) Le grand commandeur était fort embarrasse. Les parents du comte de Boussu le sollicitaient de n^ëchanger Marnix et les autres prisonniers que contre ce seigneur : le prince d^Orange, de son côté, déclarait que pareil échange ne pouvait avoir lieu j il réclamait Tcxécution de rengagement qu^avait pris Mondragon, des services duquel le gouverneur général ne voulait pas se priver. Cet embarras de Rcquesens se manifeste dans la lettre suivante qu*il écrivit au duc d^Arschot et au baron de Berlaymont, et dont Toriginal est nu château deBeaumont,dans les archives de M. le duc de Garaman :

« Messieurs, j*ay receu vostre lettre du xiiij* du présent, et est ainsy que,

I *

I « * *

100

et que vous demandez eneoires quelque temps ou tcrtnef espérant y parvenir, combien que, à la vérité, il y ait quelque occasion de mescontentement aux prisonniers de prolor>gér leur prison, néantmoins, pour vous donner 6 eognoistre com-

incontinent après m^avoir enchargë de ee gouvernement; je ôÛris de doiïner non-seuUenient îe S' d^AIdegonde, mais aussy aaltres prisonniers, si je les eusse, pour la personne du conte de Boussu , et, quand bien je ne les eusse promis, je les donneroye de nouveau bien voluntiers, quand iisproufiteroient pour la liberté dudit conte, la personne duquel j*estime plus que tous les prisonniers qu*il y pourroit avoir, comme je sçay que aussy en faict compte le Roy, estant tant bon serviteur de Sa Majesté, et ayant oombatu et se perdu tant bonnorabiement. Mais il y a environ de trois mois que son frère, le Sr de Haulssy, me dict que, s*estant traicté avec le prince d*Oranges sur ledict escbange, il avoit désabusé , et dict qu'il ne relaxeroit Icdict eonte pour St«-Âldegonde, demandant, pour ieelluy conte, son filx le conte de Bueren, ou quatre cens mil escuz : dont Pung et Paultre est bien bors de propos. Par-dessus quoy, se voit le mesme par les lettres que ledict prince a escript ù Mondragoji, dont j*ay faict joindre copies è cestes. Quoy considéré , me samble quePon pourroit relaxer ledict S^'.-Aldegonde pour le coulonnel Mon- dragon, important au service de Sa Majesté de point perdre sa personne, tant pour la qualité dMcelle et de ses services, que pour estre présentement à sa ebài^e la garde de la pluspart des places que tenons en Brabant et des^ isles de Suytbevelandt, et la Tbole est réparti son régiment, et. le chasteaa.de Gand, avec aultres charges. Et, nonobstant tout cela, si f eusse aulcun espoir que le conte de Boussn pourroit sortir de prison pour ledict Atdegonde, je laisseroye dix fois retourner vers ledict prince ledict Mondragon et autant d'autres ses semblables, pour ce qu'en cest endroit je ne fais aulcunecomp»- ration, comme auâsy ne y est* elle. Mais je ne sçauroye entendre pourquoy Ton vcùft qne soit tant dommageable à Mondragon, ce que ne peult aulcu- nement proufiter audict conte de Boussu. En quoy toutesfois je n'ay volu me rcsouldre, ^ans le traicter derechicf avec ledict S' de Hanissy, et luy avoir donné assés long temps, pour veojr s'il pourroit tirer de prison son (rère pour ledict Aldegodde : sur quoy il m'a promis se rcsouldre dedans deux jours, fit n'a ma promesse susdicle esté de tenir icclluy à jamais, avec si peu d'espoir d'en tirer aulcung fruict, ayant desjà attendu six mois jusques qu'est venu la susdicte déclaration dudict prince d'Oranges. Et Dieu sera servi Doa« mectre entré mains d'aoltres prisonniers de plus d'importance, ou aultres occasions de recouvrer ledict conte de Boussu, la délivrance et liberté duquel, croyez-moy, je ne désire moins que ses frères , parens et tous aultres qui traictentses affaires, pour le mcriter tant sa personne. Vous priant considérer

-- 101

bien je désire vous gratiflier, je suis eonteiU de vous nccorcler . cncoires le terme de quinze jours, eômmcncheans à la date de la présente et finissant le xix" éhsuivani, pour en ce teaips faire rendre lesdicts prisonniers en lieu seur^ ou vous trouver et tneclrè entre' noz mains, aùdlct temps , à Saint^-Géertru- . denbereh. Ce néahtmoins, j'entends qiie, par cest oetroy et prolongation de temps, ne soit aucunement préjudicié- aUéré ou innové Taccord de Middelbourgy aiïis que^ demeurant icél- luy en son entier, vous ayés d'abondant à m'envoyer une nou- * velle promesse, signée d je vosti'e maio, qu'en dedens ledici terme vous accomplirez ce que dessus. Et, me confiant que, comme gentilhomme, d'honneur, n'y ferez faulté^, prieray le Créateur vous donner, monsieur^ de Mondriagon, sa saincte garde. Escript à Dordrecht^ ce v* jour de may 1 S74.

Vostre bien bon amy à vous faire service, .. . ._

Gdillk de Nassau.

SmMripHon : A monsieur monsieur Mondragoiir

Copie du temps , aux arehiTC8.de M. leduc'de . Caraina», à Asunnobt.

le tout, et m*y respondre avec toute briefyetë, et me recommandant là-dessus à TOUS,, avec prière au Créateur quMl vous ait,- ipessieurs , en sa saincte garde. D'Anvers, le zyîj« jour de may i\S7é.

. » Le tout vostre bon amy,

« Bon Lms os HsQcnBiis. a . '

Ifarniz fut mis en liberté le ItS octobre, et par se trouva d^;agée la parole d«, Hfondragon.

- 102

DXLVL

LE PRINCE D'ORANGE A SYBRANT MUNTER.

Il lui ordonne de rendre compte à Philippe Vander Aa de toutes les rançons qu^il a eues des ennemis, et de n^cnplus exiger à Tavenir sans Tiulervention du même Vander Aa.

DORDUGRT, 13 MAI 1575.

Db prince van Oraengien, grave van Nassau, heere ende

BAROEN VAN BrEDA, VAN DlEST, ETC.

Eersame , vrome , lieve, besunderc, alzoe wy onlancx jonc- keren Philipsen Vander Aa endc Heynrick van Brouckhoven coromissie gegeven bebben, met specialen last ende bevel om van allen gouverneurs , oversten , capiteynen , ende anderen dien't beboirt, van onsen wegen aflf te voirderen ende t'ontfan- gen den vyffden perininek van allen rantsonnemenlen, zoo van persoonen ende goederen aïs oyck van allen bevyten, die sy op onsen vyanden haelen ende nemen zouden, endebinnen onder iialven jaere berwaerts gehaelt ende genonien bebben , ende dat voir onse gerecbticheyt : soo eest dal , boewel wy niet en iwyffelen gby daer van alreede goede kennisse bebt, wy nocb- tans by desen u zulcx wel bebben willen verwittigen, ende daer beneffens ordonneren , dat ghy den bovengenoemden Vander Aa oft synen gecomitleerden, des gesommeert synde , behoirlicke reekeninge doet van allen rantçonnementen ende bevyten by u gedaen, gehadt ende ontfangen, 't zy van goederen ofle persoonen, binnen onder balven jaere berwaerts, ben van den zelven insgelycx overleverende 't vyffde deel voir onse gerecbticheyt; u oyck wel expressclyek verbiedende, van nu

103 -

voirtaen ^heene gevangene persoonen ofte goederen op den vyanden gehaelt, racer te rançonneeren oh te vereoopen, sonder ierst ende alvoiren den voirscreven Vaoder Aa oft synen geeomitteerden dacrvan te waersehouwen ^ ten eynde onse gereeliticheydt van 't v* deel bewaert , ende by hem ontfangen worde. Ende oft ghy jegenwoirdelycken eenige gevangen, ofte goederen onder den vyant gehaelt onder u haddet , zult van stonden aene dese gesien, hemVander Aa zulcx laeten weten; ende des ailes le doene, ende in onse meyninge in desen naer te comen^ in egheenen gebreecke en syt , ten eynde wy nyet veroirsaeckt en worden anders daerinne te versien.

Eersame, vrome, licve, besundere, onse Heere Godt zy met u. Geschreven tôt Dordrecht, op ten xîij''* may 157S.

U goede vriendt,

GiiiLLB DE Nassau.

Smcription:ï)en eersamen, vromen, onsen lieven, besunderen hopman Sybrant Munter , liggende jegenwoordelyck in den Clundert.

Original, au ArehiTes do Rojaome : LeUr$» dt9tà (rMttcmint i9 Nûsiau, t. V.

104

DXIVIK

. . _ . .... .••,»,

LE PRINCe D'ORANGB AU COMTE W0LF6AN6 DE

HOHENLOHE.

' »

Après lui a^oir donné des nouyêHef de sasantë, il Tentrctient la sittiAlioa difficile il se trouve, tUendn qu*il n*a de secours allendre de personne.

11. a prfs toutes les mesures nécessaires pour la conservation de Zirikzëe.

Il espère que, parmi ceux qui le combattent, il y en aura qui ouvriront enfin les yeux, et il compte, en tout cas, sur la protection du Tout-Puissant.

I

ROTTBBDAH, 18 DiCBMBIB tB7K.

Unser freundtlicb dienst und was wir sonst mher liebs tind guts vermogen zuvor. Wolgeborner, freundtKcher, lieber Schwager und Bruder^ mit vorstefaender gelegenheit haben wir nitt khunnen .timbgehen E. L. zu schreiben und dicselbe zu avisiren, das wir sampt unser freundliichen liebefn gemah- Un y Gott hab lob^ nocfa bei guter leibs gesundtheit und wol gehcn^ unss auch nicbts anmudigers, den dergleichen von E. L. zu vernelimen. Dan, ob wir woU von unserp wieder- wertigen Feinden denn Spannicrn zu wasser und landtalfent- lialben angefochten vnd beleidigr, geben wir doch den muedt darumb nitt verloren, ùnd wiederselzen unss nach eyssersten vermogen alleiii unbillichen gwaidt von unss abzuwenden, zweiffcln auch nrcht, Gotfwerde dresen gantzen handel aller- gnedigst regieren, ess sde gleich, wenn ess wolle, lieb oder Icidt. Und wiewoU wir schier von Jedermann verlassen vnd hindange- setzt und von niemantzs einiche hûlffzu erwarltenn^ verhoffen wir doch beistandt vnd trost von dem^ in welches ohamen wir in gcfahr stehen, demnaehdie sach also ciirisUich und^hrlich, das man kheine gefahr darumb solfe schcuen Aocti abschlagen.

JMilder Stadt Ziricksee stehet es^ dass wrr den Ilerr^ davor zu daokheD. Ui auff drei Monat langh. mit noUurffUgeft Pro^ viand jetzl versehen, so woUen wir aucb furbass daran sein daffiil von dag zu dag wa$9 mherere darein gebrachi werden mocfatv wliBWoll wir. dess stetttgen langen Kri^ ûït Kficgs- vplck und guten leuthen defn^assen erschôpQlt und Qmplôsst, das wir nichts ansehnliefas noch lôUichs- vermôgen ausszo-; richtenr.; Vèrsehen. unss aber doch gènt^licb, e$â wfipdén anch etlijdie sein, die dieAugen auffUiun-vif^ sdbsteigennensoliaïuzs in aeht haben. und der armbn Landl und Leiitb sicb werden annheoien, iind unss beipfliehl unnd bûlffibun. So ess au4?b wieder zQversieht sehon nit gesebebçn solte^ lebt doch d(çr ussterblicbe Gott nocb, weicber den g^waldt «eineis Arms ofit eneigel und oocb beweisen kban. Welobes wir £• L., der wir zu dienen und freundUicben willen zu erweisen wol ge- Beigt^.nil soUen verbaUen*. Und wqnscben E. L. .âaœpt derselbeu liebea gemhai, iieben deir unseru, .ein glûc^iiges neues Jabr, und* aile glueklicbë wolfabrt. Dalum Rouerdan>^ deu 18"'' decembris Anno 75.

Von Goiles gnadeo Wilublii Pamrz zo Uhranhbii, Graif zu Nassau, Catzenelnbogen u. s. w.

Icb bitt E. L. gants freundilieb., sie wolle der wolgebprne ineiner freundilicbe liebe.frau muller, sampt grave rAlbertien vnd E. L. gemahelin meiner freundtlicben liebéii. scbwester, und allen andern gutlen iierrn und freunden meinen Dienst verinelden, boff der Alm^bticb wert nûcb noch.diè genad erzeigeu das icb aile £. L. nocb ainmal wer seben und den- selbigen angenem Dienst laisten..

E. L. dienstwilliger BrudeTj

WlLLHELM PbINTZ tjRAMÉIt. '

Origdial, aux Arebiifes du Ro^aame : Lêttref de tt d Cui7/aiimei/« iVattMatf, 1. V.

106 -

DXLVIII.

LE PRINCE D'ORANGE AU SEIGNEUR DE HÈZB (•).

11 le félicite de la détermination qa*il a prise de s^oppojser, par les armes, k la tyrannie des Espagnols; Tediorte à y persévérer ; lui promet son appui et celui des états de Hollande dans cette entreprise, et enfin le prie d'ajouter foi et créance à la personne qu'il lui enroie.

MlDDCLBOUaG, !•' AODT i576.

Monsieur mon cousin, aiant entendu que les eslats du pays se sont finalement résolus de ne souffrir plus longtans eeste

f) Guillaume de Homes, seigneur de Hèie. Ce jeune seigneur joua un rôle actif dans les troubles de cette époque t mais il ne montra guère moins de versatilité que d'ardeur dans ses opinions. Nommé par les états de Brabant chef des gens de guerre à pied qu'ils levèrent, au mois d'août 1K76, pour résister aux Espagnols (Registre aux actes des états de Brabant de 1S76, 330) , il en pi'ofita pour s'arroger, à Bruxelles, une autorité sans limites. Ce fut lui qui, le é septembre, exécuta le fameux coup de main contre le conseil d'État , que les patriotes accusaient iVeipagnolitme. Même après la réunion des états généraux, il ne voulut reconnaître de pouvoir supérieur au sien : il se permettait d'ouvrir les lettres adressées aux états eux-mêmes, et quelquefois il les retenait; il exigeait que toute personne, et jusqu'aux membres des états, qui voulait sortir de Bruxelles, prit un passeport de lui; il répondit un jour à des députés des états qui étaient venus réclamer la mise en liberté des membres du conseil d'État, « qu'ils se déportassent d'ulté- » rieure intercession, ou autrement qu'il envoyeroit lesdicts prisonniers à » Vilvoerden. {Ré$oluiion$ det étais généraux publiées par M. de Jonge, t. 1, p. 75, li5, lee, 167.)

En ce temps-là, il était tout dévoué au prince d^Orange, dont, le 82 novem- bre, il fit entrer les troupes dans Bruxelles, en dépit de l'opposition de la haute noblesse catholique (Gbobh Vàn PaiRSTBasa, Archives, etc., t. V, p. 406, 418, 1S06, 513, 541). Don Juan d'Autriche, à son arrivée à Louvain, au mois de mars 1577, chercha à le gagner : il fit des difficultés d'abord ; mais enfin il alla trouver le prince , et accepta la promesse d'une pension annuelle de

407

lirannie et insolence des Espagnols , laquelle les a desjà si longtans oppressez dessoubz un joug trop infâme et intolé-

5,000 florius, aussitôt après que don Juan aurait été reçu au gouveroement des Pays-Bas. (Lettre de don Juan à Philippe II, du 16 mars 1577, aux Archives de Simancas.)

Cette faveur, toutefois, ne détacha point Guillaume de Bornes du parti du prince d^Orange, et ne le rendit pas plus docile aux ordres et aux désirs de doo Juan. Ce prince le lui reprocha dans le manifeste qu^il fit paraître après sa retraite à Luxembourg Pareillement, y dit-il , le sieur de Hèzc, auquel, a peu de jours auparavant. Son Ahèze avoit faict la grande mercède que » chacun sçait, et consëqaemment debvoit tant plus estre prompt à servir et » obéir Sadicte Altèze, néantmoins, estant appelle, par deux ou trois fois, de » venir vers icelle, n*en fit compte, segaudissaut de sa désobéissance, et ne se » trouva vers icelle que trois jours après, retenant aussi toujours sa garde et gouveroonent de la ville de Bruxelles, chose non accoustumée estre faicte » iiy soufferte en présence du lieutenaiU général y tenant sa cour. » {Véri- rilable récit des choseê paêsées es Pays-Bas depuis la venue du seigneur don Jehan d'Auslrice, etc. Luxembourg, 1377, in-i®.)

Mais, en'tS78, le seigneur de Hèze changea d^opinion et de conduite : de concert avecCmmaiiuel-de Lalaing, baron de Montigny, qui, comme lui, avait sous ses ordres un régiment de gens de pied wallons, il se mit à la tête du parti des tnaf contents , c'est-à-dire, en opposition ouverte avec le prince d^Orange et les états généraux. Instruit de cette circonstance , le prince de Pftrme, Alexandre Famèse , en profita, pour attirer le seigneur do Hèse au parti du Roi.

Il servait à peine depuis une année dans les troupes royales, lorsque Far- oèse fut averti, par le baron de Montigny, quMl avait des intelligences avec le prince d*Orange et le duc d^Alençon. L'ordre fut donné de l'arrêter, et s'exécata le il juin 1580. (Lettre du prince de Parme au Roi, du 13 juin , aux Archives de Simancas.) Famèse nomma, pour lui faire son procès, des conseillers tirés des conseils de Flandre, d'Artois, de Hainaut et de la gouver- nance de Lille. Par fentence du 81 octobre 1S80, Guillaume de Homes fut déclaré « avoir commis et perpétré crime de lèze-majesté, et, pour ces causes, » condempné au dernier supplice par l'espée. » L'exécution de cette sentence eut lieu sur la place du château du Quesnoy, le 8 novembre. Ilèze mourut en bon catholique, mais avec assez peu de courage { /Uicamente)^ apfès avoir été assisté jusqu'au dernier moment par l'archevêque de Cambrai. Il fut enterré en l'église du Quesnoy, dans la chapelle des seigneurs de Scmpy, ses prédécesseurs maternels. (Lettre de Famèse au Roi , du 15 novembre 1580, aux Archives de Simancas. Lettre française de Famèse , du 16 novembre, aux Archives du Royaume.)

t08^-

rable^ mai» veuillent en (aire une fin avec les armes en main, comme par leulroffice et s^rnteat ilz sont tenus à Dieu et au peuple de le' faire » et le debvoiént avoir fait longtans a /et qu*à cest effecl, vous vous, seriez emploie avec toute vertu et iiïBgnanimîté , je n*ay sceu obmêctre vous escripre la pré* sente/ pour vous congratuler^- de la part diS toute la patrie , laquelle vous en sera éternelleitient et à toute vostré postérité très-obligée, ejL vous prier qu'avec une constance digne de vous et de Vos aneestres y vous poursuiviez courageusement l'exë- cutioû de ceste entreprinse, laquelle indubitablement redon- dera à Tbonneur de Dieu, à ung singulier bien tout le pays> au. vray service de Sa Majesté et à une trèsrgraKHie réputation iet honneur de vous et de toute vostre postérité. Et, comme j'ay de toute mavie tasché à ee mesme but, comme je tasehe encor à' présent, asscavoir : que ce.povre pays> se puisse. une ibis redresser de ocste malheureuse et inC&me tiraonieen son aochienile et légitime liberté y ainsi que toutes mes. actions pourront clairement tesihoingner à tous ceuh qui les einami- neront sans passion , j'ay bien vouUir , par ce présent porteur, . auquel \\ vous plaira adjouter toute foy, mesmes en quelques autres points dont particulièrement je Tay encbai^ , vous faire d^larer la bonne et entière affection que j'ay à . vous seconder en tout ce qui sera en ma puissance, vouft priant de faire estât de moy/ comote d'un amy vostrci aussi entier et cordial .que puissie:^ avoir, et vous asseurer que, moy, pu bien tout ce pays-icy, pourrons, selon les moiens qu'avons, vous assister et seconder à l'effect de ce que dessus , ne faul* drons à faire tout bon debvoir, comme qui ne désirons rien tant que de veoir une fois les calamités présentes du pays eb'angéesen une bonne et légitime liberté, aceompaignée d'une seure et heureuse paix ; à laquelle ne pouvans jamais atteindre, ny mesmes aspirer , que par inoieii des armes, lesquelles seules peuvent faire la raison de tant d'horribles insolences et

*•••>• , ^

- 109 --

tirannies qu'avons trop- loagians soufferte^, vous prîerày derechef ne vous laisser intimider ou persuader par menaces, ou par anèchemens que Ton vous puisse mettre en avant, mesmes estant les choses desjir venues si avant que vous ne pouvés^ en sorte du monde, reculer on abandonner cesie enlreprinse; sans vous, précipiter, à >vostre escient , en une misérable ruine^. de laquelle, après la grâce de Dieu y vostre seule constance et niagnanimité vous pourra préserver.. En laquelle continuant avec une bonne conscience, et vous pro- posant ce but que desjà. vous vous estes proposé, vous ne pouvez doubter que ne soiez secondé de toutes gens de bien» mesmes de ceux qui encore à présent ne s'osent déclarer; et singulièrement vous* voua' pouvez asseurer que ta béntgniié^t feveqr de Dieu ne vous abandonnera jamais : auquel;, après m'estrelrès^alFectueusement recommandé i vos bonnes graeesi je priera j vous donner, monsieur mon cousin, avec une saincte et teufiUe persévérance et magnanimité, une bonne yssue tle voK desseings , et, en santé, vie bonne et longue. De Middel- borcfa, ce premier d'aoust 1K76.

Vostre bien bon cousin h vous faire service,

GiiLLE PB Nassau. *

jSu$cri0afi : A ^monsieur nu>nsieur. de Hèze, etc. , moii. bon cousin.

Origintl , ans Arehirct do Rojanae : VS» intitulé pMcw rf» Mû«#MM «iJefo, t. Il, fol. 66S.

«

110

DXLIX.

LE PRINCE D'ORANGE A HENRI DE BLOYERE (•).

li le remercie des peines qu^il se donne pour la délivrance de la patrie, et le prie de les continuer, en lui promettant son concours en toutes occasions. Il envoie son avis sur ce qu*il y aurait à faire pour perfectionner Ton- vrage commencé.

MlDDBLBOUlC, iOSBVTBMBai 1876.

Mons' Henry de Bloeyere , aiant entendu les bons offices que continuez tousjours de faire à la délivrance de nostre povre patrie, desjà si longtans affligée et presques accablée par la tyrannie des estrangers , et au restablissement de la légitime liberté et du repos et tranquillité dicelle, je n*ay peu obmectre, pour l'affection que j'ay à la mesme cause, à laquelle piéça par tous moyens possibles je voy m'employant, de vous en remer-

(') Ce personnage fut un de ceux qui secondèrent, avec le plus de dévoue- ment et de zèle, les desseins du prince d'Orange. On ne voit pas si, k cette époque, il exerçait quelque charge ; mais il n*est pas douteux qu^il n*eûl une grande influence à Bruxelles, puisque, au mois de février IK77, il osa arrêter un courrier qui apportait des lettres de TEmpereur aux états généraux, et décacheter ces lettres. {Réêolution$ des états généraux, etc., t. H, p. 63 et 66.)

En 1578, de Bloeyere se rend è Gand, avec deux autres députés de la commune de Bruxelles , pour faire renouveler le traité d^union du Brabant et de la Flandre, de 1339. En 1579, il est Tun des colonels de la bourgeoisie. En 1580, Tarchiduc Mathias le nomme premier échevin. Enfin, Tannée sui- vante, il est promu à la charge de premier bourgmestre, qu^il occupe pendant quatre années. (Histoire de Bruxelles, par A. Hbiinb et A. Wadtebs, t. I, p.482,821,532, 5^.)

Le manuscrit Pièces historiques du seixihne siècle , conservé aux Archives du Boyaume, contient beaucoup de lettres originales adressées à Henri de Bloeyere, en 1583. 11 y est qoafilié de maître d*bdtcl du duc d'Anjou et bourg- mestre de Bruxelles.

r

m

cîer bien affectueusement , et vous prier de vouloir continuer tousjours de bien en mieux, à cause que le fruicl de vos labeurs gist à la persévérance. Et, de ma part, vous vous povez asseurer qu'en tant qu'il sera en ma puissance , je ne faudray à vous seconder et à le recognoitre par tous moyens possibles, et à toutes occasions qui s'offriront. J'envoye , par ce présent porteur ('), quelque mémoire et advis de ce qu'il me semble que Ton pourroit faire pour heureusement encheminer ce qui est commencé (*) ; je ne fay doubte qu il ne vienne en voz mains, et vous prie de le poiser et considérer diligemment, vous asseurant qu'en tout cela je ne cerche et ne désire rien que ce qui est pour le bien général de tout le pays, et sioguliè- rement pour Tasseurance de vous autres de par delà. Et à tant, après m'estre de bien bon cueur recommandé à vostre bonne grâce , prieray Dieu , vous donner , mons' de Bloeyere , en santé, vie bonne et longue. Escrit à Middelburg, ce x"* de septembre 1876.

Vostre bien bon amy,

GuiLLB DE Nassau.

Susçriptiùn : A mons' Henry de Bloyere, mon bon amy, à Bruxelles.

Original, aax Archiret da Rojtome : VS. iotiCulé IHietê du tetjiênu mUcU, l. II, fol. 667.

(') Jean de Thëron. Voyez la lettre suivante.

(*) L^arrestation des membres du conseil d^État , opérée , le 4 septembre, par le seigneur de Hèze, Bloeyere et leurs adhérents. Voyes V Histoire de BrtuMêêy de MM. Hbmnb et Waut»s, t. I, p. 140,

"- +40

.,*. Xly.t ,.

01,

jiE PBINCE û'ORANQB A HENRI DE BLOBm».

.*

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\\k tpprîs avec plaisir que Bloéyere ne cesse de s^einplo^èr mi rétablissisiMii.

do la liberté et de la tranquillité du pays, èi Pen remercie dei*eefaef. Jl

' : lui renvoie le sieur Théron, auquel il le prie d^ajouterfoi et créance.

MiDDBiiBOQafi» 96 siFTiMBai 1B76.

Monsiear de Bloyere^ le sieur Jehan de Théron (>) m'a hier délivré vostre lettre du ^iiij* jour de ce mois , responsive à la raicniie du x* d'icelluy, laquelle :ai'a esté bien fort aggréahie , pdur avoir veu par ieelle, et aussi entendu par lé. rapport

. dudiot Théron, que ne cessez de vous employer oMtiouette- nient , avecq toute diligence ^ vigilance et dextérité possible ^

;au restablissement de la légitime liberté , tranquillité et repos nostre commune patrie : dont je ne veiilx délaisser aultre fois vous louer et remerchier, en asseurance que, vous conti- nuant eh si bons ofBees^ le seigneur Dieu, par sa grâce, déli- vrera ces pays des misàres et calamitez ausquelles, par la

'^uperbèetintollérable domination des ^trangiers, ilz selrou- voyent plongez et quasi du tout accablez : chose (')V oultre le grand bien que toute la patrie qn recepvra , redoiidera aussy en particulier À vostre grand honneur. Et de moy, comme ju$- quesiey je n'ay espai^néÀ oest effeei chose que Dteu m*avoit conçue en ce monde, âussy ne fauldray d'employer à ce coup

.(>) Votei encore un personaage dont le ooneonra fut des plus utiles au prince d'Orange. On peut consulter, nrr ce qui le concerne, H. Gaosii Van PtiimTKàBa,^fvAtt]M, etc., t. y et Vf, pojnivt, et Vfftsfoire 4e Bruxelle$, de MM. Hbnnk et Wautbbs^ 1. 1, i73, MZ, t(64. (') Le mot qui parait devoir élire ajouté ici.

^^z

lous les moyens qui me restent pour le recouvrement du bien et liberté de ce pays, ainsi que plus amplement entendrez par ledict Théron, lequel je vous prie eroyre comme moy-mesraes, et an seigneur Dieu, qu'il vous ait en sa saincte garde et protec- tion. Escriptà Middelburgh, cexxvj'jour de septembre 1576.

Vostre bien bon amy à vous faire plaisir,

GuilIe DR Nassau.

Stiscripiion : \ Monsieur Bloyere, mon bien bon amy.

Original, aux Arehives da Royaume : MS. inlitulé PUen du seisiime nêtU, 1. 1 1, fol . 67 1 .

DU.

LES ÉTATS DE BRADANT , DE FLANDRE ET DE HAINAUT

AU PRINCE D'ORANGE,

Ils lui envoient le S' dH)etingen, pour lui faire connaître qu'ils sont prêts à entrer en nëgociation avec lui, à certaines conditions.

BrUXBLLIS, 27 8BPTBMBR8 1576.

Monseigneur, comme Ton a entendu, par lettre de Vostre Excellence , le désir qu elle a de rentrer en communication pour le faict de la pacification, envoyons le S' de Ouetingue('); porteur de ceste, pour luy faire entendre que. s'il luy plaist

(*) Jean de Mol, seigneur d'Oetingen. Son- instruction est dans les RétolU" lion» des était généraux, publiées par M. de Jonge, t. f , p. 235.

III. 8

lU --

envoyer ses députez iey, pour eutendre à la pacification, ilz seront les bien venuz.

Toutesfois on ne luy veult celer que ledict envoy ne portera fniiet, n'est que veuillez asseurer de ne vouloir riens innover au faict de nostre religion anchienne catholique romaine, ny de Tobéissanee deue au Roy, nostre prince naturel, et, cepen- dant, faire de vostre costé ordonner cessation d'armes, comme ferons du nostre, et faire retirer les gens que le S' d'Àussy (') a, sans charge, faict entrer jusques à Gand \f) ; et^ si le lieu ne vous plaist, Ton dénommera aultre convenable. Sur quoy, nous recommandans afiectueusement, prions le Créateur don- ner, monseigneur, à Vostre Excellence le comble de ses désirs. De Bruxelles, le xvtxf de septembre 1576.

De Vostre Excellence affectionnez en service,

Les députez des estatz de Brabant, Flandres et Haynault.

Par charge expresse des seigneurs députez :

Cornélius Wbllbmans.

Susçription : A monseigneur monsg' le prince d*Oranges.

Oopie da tanpi, •» Arehivet d^Yprct.

(*) Jacques de Bouasu, seigneur de Haussy, frère du comte Maximiiien de Doassu. .

(■) Voy. PiBTBR Bot, liv. IX, fol. f72 vo.

I

115

DLII.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils lui renvoient le seigneur de Haussy, (mur lui expliquer lo malenlemlu qui a donne lieu h leur lettre du 27* TIs le remercient du secours qu^'l a fait passer à Gand, et le prient de nommer le plus tôt possible ses députés^ pour traiter avec les leurs de la pacification.

BtoiiLLis, S9 SBrTBHBas 1576.

Monseigneur, ayantà cest instant entendu le rapport de mon- sieur d'Aussy, du besogné faict avec Vostre Excellence, suy- vant le pied de Vinstruction à luy donnée, dont il nous a faict aussy ostension, et Tasseuranee qu'il nous a faict de n*avoyr excédé en aulcun point d*icelle, avons assez apperceu que certain rapport faict, auparavant son retour, à messieurs du conseil d'Estat et à nous, assavoir : que ledict S*^ d' Aussy auroyt accordé aux soldatz du secours envoyé par Vostre Excellence exercice de leur religion, et, pour asseurance d'ieelluy, mectre la ville de TEscluse en voz mains, n*estoit véritable. Sur quoy, craindant les inconvéniens, avions esté meuz requérir Vostre Excellence, par celles que le S*^ d'Uuytinghe vous aura pré- senté de nostre part, de retirer ledict secours que ledict S' d' Aussy, sans cherge, auroyt faict entrer jusques à Gand : en quoy y a eu du malentendu, par. les raisons que dessus; priant Vostre Excellence , bien affectueusement , que , sans avoyr regard à ladicte clause, plaise h icelle députter pour entendre à la pacification, le plus tost qu'elle pourra. En quôy désirons procéder en toulte confidence, rondeur et fidélité, reciprooquement , recevant pour aggréable et remerciant Vostre Excellence dudict secours, de tant plu$ que rordre et

116 -

conduide desdicts soldatz est conforme à nostre intention, sçavoyr : que riens ne sera par eulx attenté au préjudice de l'exercice de la religion catholieque romaine, et deue obéis- sance à Sa Majesté.

Monseigneur, nous prions le Créateur maintenir Vostre Ex- cellence en sa saincte grâce, après noz affectueuses recomman- dations à la vostre. De Bruxelles, ce xxix"" de septembre 1576.

De Vostre Excellence affectionnez en service,

Les estatz du Pays-Bas assemblez à Bruxelles.

StiscriptioH : A monseigneur monsg* le prince d^Oranges.

Copie da tempi, à la bibliothèqae de la Chtmbre des Eeprétentanti : Rttmril dt piètêi rcJaciwv tmx ^«Ua ^in^iw, 1576-1B80, 1. 1, fol. 25.

DLIIl.

INSTRUCTION DES ÉTATS GÉNÉRAUX POUR LE S' DE HAUSSY, ENVOYÉ VERS LE PRINCE D'ORANGE.

Points à régler pour la négociation entre les états généraux, d^one part, le prince et les états de HoUandeetZélande, d*autre part.

BbUXILLBS, 30 SIPTBMBBI 1((76.

Afân que monsieur d'Aussy entende ce que, de la part des estatz icy assemblez, il aura à traicter avec le prince d'Orenges et les estatz d'Hollande et Zeelande : avant de venir en quelque communication^ donneront asseurance par escript, signée de leur part, comme il appartient, de riens attempter ou laisser attempter, directement ou indirectement, au préju-

117

dice de ia rdigion catholicque romaine et deue obéissance du roi catholicque d'Espaigne, nostre sire.

Et, ce faict^ pourra ledict S' d'Auchy entendre, dudict S' prince et estatz d'Hollande et Zeelande, quel lieu sem- blera convenir pour, avecq les députiez d'un costel et d'aultre, traicter sur la pacification tant désirée, soyt en ceste ville de Bruxelles, Gand, ou Bruges^ en donnant touttes seuretés à ce requises.

Au surplus, ledict S' d'Auchy se réglera selon la lettre le jour d'hier escripte audict seigneur prince, dont luy est baillée copie. Faiet audict Bruxelles , le dernier de septem- bre 1576.

Copie da temps , à la bibliothé(|{^De de la Chambre des Reprteentants : ReeiuU dt fUtu rdtAvm •«« Aoto géniraMm^ 1576-1580, 1. 1. fol. 25 et 26.

DLIV.

LE PMNCE D'ORANGE AUX ÉTATS DE BRABANT , DE FLANDRE ET DE HAINAUT.

Rëporise à leur lettre du 27 septembre. Il lui sera très-agréable de voir une bonne union et intelligence établie entre eux et lui. 11 est prêt à leur envoyer ses députés, mais il demande que les conférences aient lieu a Gand, et non à Bruxelles. Il leur donne toute satisfaction quant au maintien de la religion catholique et à Tobéissance due au Roi. Il s*en remet, en ce qui concerne une cessation d^armcs, & ce qui sera traité par leurs députés et les siens. Suivant leur désir, il a rappelé ses gens de guerre qui étaient entrés à Gand.

MiDDXLBOuac, 5 ocTOBas 1576.

Messieurs, j'ay reeeu^ par M. d'Oelingen, voslre lettre par laquelle me mandés que^ sur les lettres qu'ay escript, vous

\

«8 ~

auriez entendu le désir que j*averoye de rentrer en comniu * nication pour le faict de la paeification, et que, à oest effect, si je voulois envoyer mes députez par delà, pour entendre à ladiete pacification, ilz seroient les très-bien venus. Ce que j'ay esté bien joieulx d'entendre, d'aultant que, comme je n'ay oncques eu, comme aussy n'ont eu ceulx depar deehà, aulcune querelle ou différend avecq vous , messieurs , aussy ce me seroit une chose très-aggréable que une bonne union et intelli- gence fust établie et confirmée entre nous, d'aultant plus que maintenant nous voions les communs perturbateurs du repos publicq, contre lesquels nous avons par dechà, jusques à cest heure, mené la guerre, se déclarer si avant qu'ilz sont aussi bien vos ennemys que les nostres.

Par quoy, aussitost que me mandei*ez le jour préfix et ordonné à cest effect entre vous, ne fauldray à envoyer les députez, tant de ma part que de la part d'Hollande et Zee- lande, vous priant que ce soit en la ville de Gand, à cause que le lieu de Bruxelles ne me semble, pour le présent, estre sans grandes et évidentes difficultez, pour la longueur et dan- gier des chemins. Sur quoy seroit bon et nécessaire que me envoiassiés ung saulf-conduicl bien ample pour ceulx qui yront par delà, affin que librement et seurement ilz puissent y aller et retourner.

Et, touchant le poinct auquel m'advertissez que ledicc envoy ne pourtera fruict, n'est que je veulle asseurer de ne vouloir rien innover au faict de la religion catholique romaine, vous pouvez être mémoratyfz de toutes les déclarations que tousjours j'ay faictes, tant par lettres que par les rapports de ceulx qui sont allez et venuz d'ung costé et d'aultre, que mon intention n'a oncques esté de introduire aulcung changement ou innovation par delà à l'endroict la religion, dont vous vous pouvez encoir tenir asseurez, veu que desjà, par plusieurs fois, nous avons protesté d'estrc contens que lea choses demeu-

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rcnt en fôtat, jusques- à ce que; les Espagnols éstans retirez, tous nous différens puissent estre amiablement vuydez en une assemUée libre et légitime des estats généraulx de tout le pays. Qui me faictvous prier bien affectueusement ne penser que je veulle, soit par inconstance^ ou àultrement, violer ma pro- messe;.et par conséquent ne veuillez adjouster foy aux rap- portz que l'on vous en pourvoit avoir faiz, car le& instructions, signées de ma main, que j-ay données à M' d'Aucby ('), pour le regard du secours que l'on m'a requis d'envoyer en Flan- dres, ne font nulle mention d*aulcune innovation : seullement; sur le poinct je fuz requis de ne permettre aux soldatz exercice de leur religion, je l'ai accordé^ moiennant que l'on ne cherchast occasion ny prétexte de les maltraicter, sur ce que l'on les pourroit trouver avoir chanté des psaulmes, ou faict des prières en leurs maisons et hors de garde : ce que je fiz pour Tasseurance desdicts soldatz, et pour éviter que, sur prétextes si l^ers , l'on ne donnast occasion à débatz et désordres , et à traicter mal ceulx qui estoient venus pour leur faire service, sans leur avoir donné ministre^ ny autrement permission de faire exercice de leur religion. Et pourtant, vous prie derechef que vous vous fiiez sur ma promesse, et, sans vous amuser à semblables menutez , qui retardent touttes bonnes et impor- tantes délibérations, et servent de prétexte aux calomniateurs pour avoir semences de chicanes et dissencions entre nous, vous travailliez unanimement à repousser l'ennemi commun, lequel nous menasse de ruyne, si nous ne luy résistons d'ung commun accord.

Quant à l'autre point de l'obéissance deue au Roy, vous vous povez asseurer que je ne prétens, en façon quelconque,

_

(*) Elles sont en hollandais dans Pibtbb Bob, liv. IX, fol. 172 V. L'original en était probablement en français : il y en a une copie aux archives d'Yprcs.

120

de retirer ces pays de l'obéissance légitime de Sa ' Majesté, comme aussi ce n'at esté mon but, ains seulement de les déli- vrer de la tirannie inique et insupportable par laquelle Ton nous a voulu mectre le pied sur la gorge ; et partant^ nous trouverez tousjours prests à nous soubzmectre en tout ce que sera de raison et équité, comme ceulx qui de tout leur cœur sont désireux du restablissement de Tanchienne tranquillité, repos et prospérité de nostre commune patrie.

Au regard du troisiesme poinct, qui est de poser les armes d'ung costel et d'aultre, pour ce qu'il sera particulièrement (<) des députeZ; je m'y remectray. Et, quant à ce que concerne le rappel de mes gens qui sont à Gand, vous aurez entendu, par ledict S' d'Auchy, comment ilz y sont venus, et que je n'ay rien prétendu que la conservation de ceste ville, laquelle je ne puis obmeetrequeje ne vous prie, sur toutes choses, avoir pour recommandé, affin de la secourir à bon escient, veu que, si elle se perdoit, vous povez estre asseurez que toute la Flandre, et mesme tout le pays, s'en porteroit très-mal ; et toutesfois je les ay, à la semonce de voslre lettre, remandez. Qui est l'en- droict je prieray Dieu, messieurs, vous donner, en santé, bonne vie et longue.

Escript à Middelbourch, ce iij*"'' d'octobre 4576.

Vostre très-affectionné amy et patriot à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Siisaiption : A messieurs messieurs les députez des estais de Brabant, Flandres et Haynault, à Bruxelles.

Copia du XYlil* siècle, à It Bibliolhdqae rojale : VS no 0238 iAlitulé : Mémoim pour Mtrvir à rhùtoirt du XVi* 9iieU, penr dont In trouU€9 H gutrrêaehiUt de* Pmft-Bm», etc., fol. 7. Copie du XYII* siècle dans le MS 7223 de la même Bibliothèque, fol. 8 v«.

(I) il y H quelques mots oublies dans la copie.

421

DLV.

LE PRINCE D'ORANGE A MM. VAN DORP ET DE RYCKE (').

11 leur réitère Tordre de faire cvacaer Gand par ses troupes, à moins que eeux de la ville et les autres membres de Flandre ne veuillent les y retenir.

MiDDBLBOUIGi 3 OGTOBEB 1576.

Messieurs van Dorp et de Rycke, je vous ay hier eseript que, suivant la lettre que j'avois receue des estais de Brabant^ Flandres et Haynault, vous ordonnissiez au S"* Vanden Tym- pel (^') de retirer noz gens, avecq le meilleur ordre et plus grande seurlé que possible sera : ce que je vous ai bien voulu répéter par la présente, à cause que, faisant responce à la lettre desdicts estatz, je leur mande que je les ay rappeliez. Je vous prie doncques ainssy le faire, sy ce n'est, comme je vous ay hier eseript, ceulx de Gand et les aultres membres de Flandres les veuillent retenir : auquel cas, vous leur remonstrerez qu'ilz ayent à envoyer, en toute diligence, vers leurs députez qui sont à Bruxelles, pour leur commander qu'ilz ayent, de leur part, à remonster à bon escient ausdicts estatz quelle est leur opinion et volonté, comme aussy, en cas qu ilz les retiennent, les sollicitiez afGn qu'ilz m'escripvent lettres réquisitoires pour i'effect de les y laisser, affin que par icelles je me puisse servir

(') Aemt ou Arnould Van Dorp, seigneur de Tamise, et Pierre de Rycke, bailli de Flessingue, furent deux des députés du prince d^Orange et des états de Hollande et de Zclande, qui signèrent la pacification de Gand.

Sur Van Dorp on peut consulter M. Grobn Vak PaiHST£RBa, Archiva, etc., 1. 111, p. i28, t. V, p. 400 et 410, t. VI, p. I8.>.

(*) Voy. la lettre suivante.

122 -

vers Icsdicts estatz ; mesmes qu*ilz le déclarassent à monsieur d*Ouetinghe^ présent porteur, pour le faire par luy conGrmer ausdicts èstatz. Qui est Fendroict je prie Dieu vous avoir, messieurs van Dorp et de. Rycke , en sa saincte garde et protection.

Escript à Middelbourg, ce ii]""" d'octobre 1 S76 .

Vostre bien bon amy, GciîIe de Nassau.

Stucription : A messieurs messieurs van Dorp et de Rycke, estant de présent en la ville de Gand.

Copie da temps, au Arekifet d^Tprel.

DLVL

LE PRINCE D'ORANGE AU COLONEL VANDEN TYMPEL («).

II le prie de tenir bonne correspondance avec MH. van Dorp et de Rycke, jet de faire entendre au magistrat de Gand que, ses gens étant régulièrement payés, ceux chez qui ils logent n*ont rien à leur fournir.

H1DDILBOVB6, ioGTOBaa 1K76.

Monsieur vanden Tympel, j'ay receu vostre lettre, et vous remercie de ce que me mandez sy particulièrement la dispo-

(>) Olivier vanden Tympel , seigneur de Corbeke-sur-Dyle, était fils de Jean, patricien de Louvain. Ce fut lui qui, le 92 novembre 1876, entra dans Bruxelles, à la tète des troupes du prince d*Orange. Au mois de juin 1K79, Parcbiduc Matbias le nomma gouverneur de cette ville. « Cet officier, d*un » caractère hardi et entreprenant, était tout dévoué au prince d^Orangc :

r

123

sition des affiiires de par delà, priant qu'y veuillez continuer et tenir bonne correspondence avec messieurs Dorp et Rycke, pour, par ensemble, adviser comment vous aurez à vous régler. Je vous prie aussi de faire entendre à ceulx du magistrat de Gand que mes gens sont payés de huict en huict jours, et que partant ceulx qui les logent ne sont tenuz de leur bailler aucune chose^ et que je ne les ay envoyé pour donner quelque charge^ ains seullement pour les ayder et secourir contre leurs ennemis. A tant, je prie Dieu vous avoir, monsieur vanden Tympely en sa saincte garde et protection.

Escript à Middelburch, ce iuf^ d'octobre 1 576.

Vostre bien bon amy, 6un.LE DE Nassau.

*

Svscriptitm : A monsieur vanden Tympel , commajidanl mes compagnies estant à Gand.

Copie da temps, eus Arehivcs d^Yprea.

9 protestant, il favoriu de toat son pouvoir le noaveau culte, et plus d'une » fois pourtant, il prit les catholiques sous sa sauvegarde ; capitaine, il 9 déploya, pendant toute la durée de son commandement, des talents qui, » employés sur un plus vaste théâtre, Teussent placé au rang de nos grands » guerriers. Si tous les généraux des états avaient eu la même ardeur et les 9 mêmes qualités, jamais les Espagnols ne seraient rentrés en Belgique. » {Hiêtoire de Bruxelles, par A. Henné et A. WAorias, 1. 1, p. 511.)

11 commandait encore dans Bruxelles, lorsque celte ville se rendit au prince de Parme, en 1585.

124

DLVir.

LE PRINCE D'ORANGE A MM. VAN DORP ET DE RYCKE.

11 leur réitère les ordres contenus dans sa lettre de la veille. Il les charge de donner des explications au comte du Rœulx sur Tassistance que ceux des pays de Waes et de Beveren ont sollicitée de Tamiral Treslong, et qu*il leur a accordée.

HlODELBOUaG, i OCTOBaB 1576.

Messieurs van Dorp et de Rycke^ j'ay receu vostre lettre escriple du jour d'Iiier, et par îcelle entendu Testât des affaires de par delà : dont je suis esté très-content, et vous prie, ce pendant que serez encoire là^ de continuer en ce bon debvoir.

Je vous ay hier escript, parmons'' Mol, une lettre laquelle j*espère vous aurez receu. Et, encoire que je ne doubte que n'ayez bien entendu le contenu d'icelle, sy est que je ne me puis passer de le répéter icy sommairement^ et vous prier de vous vouloir régler selon icelle, touchant la retraicte de noz gens, laquelle je vous prie de faire, n'est que ceulx de Gand et les aultres membres soyent d'opinion de les retenir : auquel cas les solliciterez, afin qu'ilz envoient à leurs députez estans è Bruxelles, pour faire déclairer aux estatz leurdicte opinion : ce que mesme ilz pourroient faire par ledict S' de Mol, en cas qu1l soit encoire là, en faisant aussy entendre à icelluy les comportemens de noz gens, et le contentement que le peuple en a, afin d'anéantir les calomnies qu'aulcuns mal- veuillans vouldroient advancher par devers lesdicts estatz, contre la vérité.

Je vous prie de faire entendre à monsieur de Reulx que, comme il avoil donné licence à ceulx du pays de Waes de

12»

faire levée de quelques gens , pour se garder contre la furie espaignole, ilz auroient envoie vers moy^ pour avoir quelque assistenee : ce que je leur refusiz, pour ne sembler vouloir entreprendre quelque chose sur ceulx qui sont du gouverne- ment dudict S' de Reulx. Toutesfois, depuis^ lesdicts de Waes et de Bèvre se sont adressez à l'admirai Treslong, estant en nostre flotte, le priant de leur vouloir bailler trois ou quatre de ses gens, pour estre commandeurs et conducteurs de ceulx qui estoient levez par permission dudict S' de Reulx, pour la conservation dudict pays de Waes et de Bevere, lesquelz sont aullrement rudes et ignares aux affaires de guerre. Et voylà toute la levée qui s*est faicte, de mon costé, ausdicls quartiers : dont je vous prie d'en vouloir advertir ledict seigneur, et Tas* seurer que je ne désire rien entreprendre es lieux de son gouvernement. Qui sera l'endroit je prieray Dieu vous avoir, messieurs de Dorp et de Rycke, en sa saincte protection « Ëscriptà Middelbourg, ce iiij"* d'octobre 1576.

Vostre bien bon amy, GuiLLE DE Nassau.

Suscription : A messieurs van Dorp et de Rycke, estant de présent à Gand.

Copie dn temps, «ai Areklree d^Vpnt.

126

DLVIIL

LE PRINCE D'ORANGE AU COMTE DU ROEULX (•).

Il est prêt i le secourir d'artillerie ; mais il désire préalablement avoir l'assu- rance demandée par ses députés.

MiDDBuooM, 7 ocTosac 1B76.

Monsieur, j'ai rcceu vostre lettre du sixiesme de ce présent mois, par le S' de Strasselles (»), et désirerois bien que fussiez assisté des pièces d'artillerie que avons iey : mais il n'est fais- sable, n'est que préallablement vous ayez satisfaict au poinct de l'asseurance que à juste cause mes députez ont demandé à vous, ensemble aux députez des quattre membres, tellement que je puisse contenter ceulx d'Hollande et Zélande. A quoy je vous prie de tenir la bonne main^ et m'advertir de vostre intention , laquelle attendant , je donneray ordre de faire apprester autant de pièces que je porray trouver vous estre commodes. Qui serat l'endroict [où], me recommandant bien affectueusement à vostre bonne grâce, je prie Dieu vous donner, monsieur, en santé bonne et longue vie. De M iddel- bpurg, ce vij* d'octobre a*» 1576.

Vostre bien bon ami à vous faire service,

GuiïXe de Nassai;,

Suscription : A monsieur monsieur le conte du Rœulx.

Copie do temps, aax ArehÎTet da Royaume : Littnt de 9t à Chùllaume de NatsaM, t. V.

(1) Jean de Croy, comte dci Rimilz, qiie le due d*AI|)e, au mois de juillet 11(72, avait commis au gonyernement de la Flandre. (Voy. la CorresfHmdance de Philippe il $ur Utr affaires des Payê^Bas, etc., t. Il, p. 70f .)

0 Le comte du Rœulx avait chaîné le seigneur de Strasselles de lui demander deux canons et trois demi-canons qui étaient à Flessingue.

-.127

DlIX.

LE PRINCE D'ORANGÉ A CEUX DU CONSEIL D'ÉTAT (•).

Il leur fait, connaître la substancede certaines lettres du Roi et de son secrétaire

m

Çayas, qui ont été interceptées, et qu*il a fait déchiffrer. -^ Il y trouve la preuve que le Roi ne cherche qu*à les tromper, et que, s*ik ne prennent des résolutions énergiques, ils seront perdus, ainsi que- pays.

MlbDBLOOOBO, 13 OCTOBBB 1576.

Messieurs , suivant la bonne afTection que j'ay tousjours portée et continue encore de porter au bien de la patrie et de vous outres, messieurs, j'ay estimé que ce me seroit grande faute, sy je ne vdus communicquoy tout ce qui, tombant entre mes mains, peut servir au bien et avancement de la proispérité et tranquillité du paîs. Gela est cause que, m'ayantésté envoie de Flandres quelque pacquet venant d'Espaigne, accompaigné d'une lettre de monsieur de Reiix, n*ay volu pbmectre de vous en advertir, puisque, sur les lettres contenues audïct pacquet, vous pourrés trouver grand fondement de donner ordre èi la seurté vostre et celle de la patrie : car, entre autres lettres, y en a deux du Roy et une de son secrétaire Çayas, escrittés en ciffre, de S*-Lorenzo, le xj" de septembre dernier, envoiées à Rhodas , pour responce sur les siennes du xv** d'aoust et du

(*) Guillaume écrivit dans \t même sens aux états généraux assemblés à Bruxelles, aux états des provinces et aux magistrats des villes: Des copies de ses. lettres aux états géqéraux et au magistrat de Gand sontrConserviies dans les archives dTpres : nous avons, aux Archives du Royaume, Lettres de et à Guillaume de Nassau, t. V, une copie authentique de celle qui fut adressée aux consaux de la ville de Tournai, et une copie de colle que reçut le piagistrat de Bruxelles.

128 .—

vij* du mesme, el pareillement sur celles du xvj", xvij* et xxvij" de juillet, portées en Espaigne par Juan de Oleagui, laquelle eiffre il a pieu à Dieu nous donner moien de découvrir; et y avons trouvé évidemment que Ton cerche entièrement de vous abuser, comme il se void clairement par une copie de la lettre que le Roy vous a escrit aussi du x" de septembre, translatée de françois en espaignol, et envoiée en ladicle eiffre audict Rhodas ( luy deflendanl toutesfois bien expressément de ne vous descouvrir qu'il Fait reeeu) : par laquelle il se voit que ce que le Roy vous escrit ne sont que belles parolles pour vous endormir et abuser, veu mesmes que la résolution se prend que Ton aura en toutes façons à oster les armes aux estais, et faire que les Espaignols ayent k demeurer au pays, et que, sy lesdicts estats, ou le peuple, continue de s*y opposer, Ton donne congé ausdicts Espaignols de faire, pour leur seurté et maintènement, ce qu'ilz trouveront convenir, avec menasses bien expresses, nommément sur monsieur le duc d'Arscot et monsieur de Champagney, et tous autres qui sont de leur humeur, qui est de n'estre trop affectionnez aux Espaignols ; ainsy toutesfois qu'on doibve dissimuler avec eux jusques à la venue de don Juan d'Austria , lequel s'appreste pour venir avec trois eens chevaux par la Bourgoigne, en toute diligence, et mettre ordre à tout. Or, messieurs, vous voyez par en quel estât sont vos affaires, et avec quelle vertu et résolution, accompaigné de prudence, vous devez vous gouverner, en cas que voulez secouer ce joug tant indigne de ceste superbe nation : car vous estes asseurez que, sy vous n'y allez résolu- tement et , comme l'on dit , la teste baissée , que vous estes perdus entièrement avec nostre povre patrie, d'autant mesmes que par lesdictes lettres est commandé audict Rhodas de dresser, avant son parlement (pour lequel le Roy luy donne congé de revenir en Espaigne), une ample instruction pour ledict don Juan d'Auslria, selon Inquelle il aura à se gouverner

129

tant es affaires ecclésiastiques , politicques, que militaires^ et, comme Albornos escrit à Zanchio d*Avila (aussi en ciffre), il se gouvernera selon l'advis qu*a donné ledict Zanchio, lequel on admire et loue jusques au ciel en Espaigne , pour avoir ainsy assisté e( favorisé les rebelles et mutinez espaignols d'Alost, lesquelz sont esté déclarez pour ennemis du Roy et de la patrie : en quoy vous pouvez clairement remarquer ce que vous en debvez espérer. Et, pour ce que j'ay estimé que cecy vous touchoit grandement, je n*ay vollu faillir de vous eo advertir en toute diligence, attendant que, le reste estant tout déchiffré, les lettres originelles soient mises en lumière (■), afin que, cependant, selon vostre bonne prudence, vous advi- siés sur vostre fait, pour ne vous laisser abuser, et par cy-après servir de misérable spectacle à toute la postérité : dont Dieu vous veuille garder, et auquel, après m*estre recommandé à vostre bonne grâce, je prie Dieu vous donner, messieurs , en santé bonne vie et longue. De Middelbourg, ce .. d'octo- bre 1576 (-).

Vostre très-affectioné amy à vous faire service,

GuiîIe DR Nassau.

SmcripHon : A messieurs messieurs les députez du conseil d'Estat, à Bruxelles.

Original, aux Anliivea da Royanme : /.«(tr« tt à GwUoMmuAU Ifautmf i V.

(I) Ces lettres furent-elles en effet imprimées? C*est ce que je n*ai pu vérifier. Je dirai seulement que j*en ai fait en vain la recherche dans les collections que possède la Bibliothèque royale.

(') J*ai donné a cette lettre la date du 13 octobre, parce que c*est celle que portent les lettres écrites aux états généraux, ainsi qu*aux magistrats de Bruxelles et de Gand. On lit d*ailleurs, au dos, de la main du secrétaire Berty : A«. à Bruxeliet, le Xff d'octobre 1576.

III. 9

130 -

DIX.

LE PRINCE D'ORANGÉ AU MARQUIS DE HAVRE (•).

Il se félicite que M. de Havre se soit soavenu de lai. Il lui donne son ovis touchant une levée de retires, ainsi qae sur les moyens do se procurer de Pargent en Allemagne, en lui faisant sentir que les états doivent surtout s^aider eux-mêmes.

MiDDiLBouae, 28 octobab 1S76.

Monsieur, je suis très-joyeulx qu'après ung si long temps, finallement vous vous estes souvenu de voz anciens, bons et

(') Charles-Philippe de Cfoy, frère puioé du duc d*Arschot, et fils pos- thume de Philippe II, sire de Croy, premier duc d^Arschot, et d^Anne de Lorraine. le i" septembre f 5i0, il fut tenu sur les fonts de baptême par Charles-Quint et Philippe II, dans la chapelle royale de Bruxelles, en pré- sence des reines douairières de France et de Uongrie, sœurs de TEmpereur : c^est ce qui lui fit donner les noms de Charles-Philippe.

Il avait à peine dix-neuf ans, lorsque, en i568, le duc d*Albe Penvoya aux frontières de Hainaut,pour attendre le secours que Charles IX devait y faire passer sous la conduite du maréchal de Cessé. La même année, il fut député vers le roi de France, à Metz. {Rapport sur différentes séries de documenis concernant l'histoire de la Belgique, conservées à Lille , p. 319.)

Le grand commandeur de Castille, don Luis de Requesens, ayant résolu, en 1574, de lever trente-cinq compagnies d^infanterie wallonne, donna à M. de Havre le commandement de vingt de ces compagnies. (Lettre de Requesens au Roi, du 2i février 157i, aux archives de Simancas.) La même année, le Roi lui conféra la charge de la bande d^ordonnance vacante par la mort de Philippe de Sto*Aldegonde, seigneur de Noircarmes, et érigea, en sa faveur, la terre de Havre en marquisat. (Lettres du Roi à Requesens, des i% mai et 10 août 11(74, ihid.) Le nouveau marquis se rendit en Espagne, en 1079, pour exprimer sa reconnaissance au Roi : Requesens, sans laisser ignorer au monarque qu*il était un peu fou et léger {loquillo y insubstancieJ)^ le lui recommanda, en rendant au témoignage favorable de setf sentiments. (Lettres à Philippe II, du -24 septembre 157i et du 15 mai 157!$, ihid,)

Philippe II, qui désirait être agréable à la maison de Croy, accueillit fort bien et traita avec beaucoup de distinction le marquis de Havre. (Lettre du

ir>i

serviables omis, ne ra'estant jamais peu persuader qu'oblinnce fût cause d'ung si long silence, mais plustost aultres occasions qui se sont présentées cy-devant : car, quant à ce 'qui s'est passé

Roi tt Reqacsans, du 24 août iim.ibid.) Le 28 jaio f{(76, ii le manda à l^Escurial, Parma de ses maioa chevalier, et le fit gentilhomme de sa cham- bre. (Lettre de Baltbazar Schetz aux états de Brabant, écrite de Madrid, le Iv juillet f 576, dans le registre 530 des états de Brabant.) Quelques jours après, il le renvoya aux Pays-Bas, avec une mission importante pour le conseil d^Etat et les états des provinces.

Charles'-Philippe de Croy prit une grande part aux négociations entre les états généraux et don Juan d^Autriche, vers lequel il fut député h Luxem- bourg. SM faut en croire don Juan, il lui proposa de se foire souverain des PayS'Bas ; il lui offrit aussi de le débarrasser du seigneur de €hampagney, Frédéric Ferrcnot, frère du cardinal de Granvelle, qui lui faisait une oppo- sition passionnée. (Lettres de don Juan au Roi, des 2 février et 28 mars 1977, aux archives de Simancas.)

A son retour d'Espagne, le marquis de Havre avait siégé au conseil d^JBtat, aans commission ni autorisation du Roi ; il demanda avec instances h don Juan d^intercéder auprès du monarque, pour qu^il reçût les patentes décon- seiller : don Juan, tout en le signalant à Philippe 1! comme un très-grand eoqnin (muy grandiasimo vellaco)^ appuya son désir, par le motif qu*il fallait ménager un personnage qui pouvait faire beaucoup de bien et de tnal. Philippe y souscrivit. (Lettres de don Juan au Roi, du 22 décembre 1576, et «lu Roi à don Juan, du .. janvier 1577, ibid.) Don Juân eût voulu qu*6n employ&t le marquis de Havre à Madrid, car son ambition n*était pas encore salisiiBite, et il prétendait au commandement du château d^Anvers; mais le Roi rejeta bien loin cette idée. (Lettres de don Juan au Roi, du 6 mars1S(77, et du Roi à don Juan, du 6 avril, ibid.)

Les états généraux avaient fait le marquis de Havre général de la cavalerie; il se démit de cette charge dans la séance du 11 juin lCn7. {RésoltUiùns deê étaU généraux j t. II, p. 367.) Il suivit, ainsi que le duc d^Arschot, son frère, don Juan à Namur ; mais, aussitôt qu'ils apprirent que le château d*Anvers était tombé au pouvoir des états, ils se sauvèrent Fun et Paulre de Namur, et accoururent h Bruxelles. (Lettre de don Juan au Roi, du 2 août 1577, ibid.)

Les états envoyèrent le marquis, avec d*autres députés, à la reine Elisa- beth ; ils le revêtirent de l'emploi de chef des finances, et, en 1578, ils lui confièrent le commandement d*un régiment de reîtres. (Recueil conservé à la bibliothèque de la chambre des représentants.) Au mois de janvier 1579, Tarchiduc Mathias et les états le députèrent dans les provinces wallonnes, avec Tabbc de Saint-Bernard et le conseiller d'Etat Adolphe de Meetkcrcke, pour

132

depuis la révolte des Espnignolz, j'ay tousjonrs bien entendu voz très-grandes occupations , et davantaige, mons* le duc d*Arschot me faisoit ce bien de me visiter par lettres. Ce m'es-

détourner ces provinces de traiter avec Philippe II. (/6id.) H déploya beau- coup de zèle dans cette mission : ce qui n^empéeho pas qu*à la suite des con- férences de Colognr, il ne suivit Tezeniple de son frère, en sollicitant du Roi sa réconciliation.

Philippe 11 accueillit le repentir des deux chefs de la maison de Croy; mais il Ht une distinction entre eux : il ne voulut pas que la charge de con- seiller d^État fût rendne au marquis de Havre, tandb qu*il ordonna au prince de Parme de réintégrer dans cette charge le duc d*Arschot. (Lettre au prince de Parme, du 26 novembre 1B80, aux archives de Simaucas.)

Charles-Philippe de Croy fut, à ce qu^il pamit, tenu éloigné des affaires publiques jusqu^en 1587. Le duc de Parme, ayant résolu, cette année-lè, d^cnvoyer neuf des compagnies d^ordonnances des Pays-Bas au due de Lor- raine, pour qu^il pût empêcher le passage de son pays aux gens deguerre que les huguenots français avaient levés en Allemagne, en confia le eoromandemeot au marquis de Havre , allié à la maison du duc. Xe marquis justifia le choix qui avait été fait de lui.(Correspondance du duc de Parme avec le Roi, ibid,)

Philippe II voulut reconnaître le service qu^il avait rendu en cette occasion ; il eut égard aussi a la recommandation du duc de Parme : il ordonna donc, l^nnée suivante, que le marquis eût entrée an conseil d*Etat, suivant sa patente de 11S77. (Lettre du 12 novembre 1588 au duc de Parme, aux archives du royaume.) A partir de cette époque, il devint un des membres les plus zélés du gouvernement, et il entretint avec le Roi une correspondance suivie, comme le prouvent les réponses de ce monarque conservées aux archives du royaume.

En 159^, Pempereur Rodolphe II ayant convoqué la diète à Ratisbonne, Tarchiduc Ernest y députa, pour représenter le cercle de Bourgogne, le marquis de Havre et le président du conseil de Luxembourg, Hattestein. Le Roi approuva beaucoup la nomination du marquis, « pour sçavoir les bonnes » qualitez et parties qui concurroient en sa personne, pour bien s*acquiter de telle charge, comme il feroit de toute autre que luy seroit commise. » (Lettre à Tarchiduc Ernest, du 19 mai lB9i, aux archives du rojraume.) Il exprima au marquis lui-même sa satisfaction , lorsquM eut connaissance de ce qui avait été négocié à la diète. (Lettre du 2 novembre 15m.)

Sous le règne des Archiducs, Charles-Philippe de Croy, qui était devenu le doyen des conseillers d^État, eut une grande part à la direction des afiltires publiques. Ces princes le nommèrent, le 22 octobre 1599, Pun des chefs, et, le 18 juin 1603, premier chef de leurs finances. {CoUection de doeumnUs inédite concernant l'histoire de la Belgique, t. I, p. il 9.) En 150i, Tempe-

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toyt, avecq rayson , assez, sachant que, comme entre bons frères, il n'y aulroit rien séparé entre vous. Je vous remerchie affectueusement des lettres que maintenant il vous plaist de m*escripre, mais encoire plus de la bonne opinion que vous avez de moy, assavoir : que je vouldroy bien m'employer h donner bon conseil à nostre pouvre patrie : ce que j'espère faire, tant que Dieu m*en donnera les moyens^ jusques au dernier souspir de ma vie. Mais, quant au conseil qu'il vous plaist et à messieurs des estatz de me demander^ je me trouve en doubte et perplexité : car^ comme ainssy soit qu'en touts affaires de grande conséquence, comme est celuy qui se pré- sente, quant il faut prendre et donner conseil, il sert grande- ment de cognoistre Testât des aflaires, non-seullement en groz, mais aussy les circumstances et dépendances, la résolution de ce faict se rend plus difficile, quand la diversité des parti- culiers, la différence des humeurs des personnes et l'ignorance de la disposition des voluntez d'ung chascun^ sur lesquelles choses se fondent ordinairement les résolutions, sont ou du tout incogneues, ou bien peu cogneues. Toutesfois^ ne veullant deffaillir à mon debvoir et à vostre désir, auquel je désire en tout et partout complaire, je dirai mon advis, me submectant au jugement de vous, de messieurs du conseil d'Estat et des estatz. Quant à la difficulté de la levée des gens de cheval des Allemans^ il me samble que vous avez très-bien considéré les inconvénients d'ungne part et d'aultre : ce néantmoings, il me samble ('), auquel & présent vous vous trouvez^ qu'il fauU

reur Rodolphe II Tavait créé prince de TEmpire, et il avait reçu le collier de la Toison d'Or le 21 décembre 1599.

n mourut le 2S, suivant la HUtoria de la insigne àrden del Toyêon de Oro, par don Jolum ob Pirbdo t Salaiab, 1. 1, p. 277, et,, selon le Suppléa ment au Nobiliaire des Pays-Bas, p. 153, le 25 novembre li)13, U'ssant quatre enfants de sou mariage avec Diane de Dommarlin.

(') Le copiste doit avoir oublié iei quelques mots équivalents à vu VétaU

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donner tel ordre qu'auleun n*ait occasion de se mcscon- tenter , tant que faire se poulra : par quoy il me samble , si vous donnez charge au colonel Jehan van Tiersen de vous amener mil chevaulx, que ce sefa bien assez; et, combien que vous en donniez bientost la charge, vous ne les aurez pas plus tost que de deux mois, que cela debvra suffire, pour ceste heure, de ceste part. Quant à Taultre, d*aultant que je ne le cognoy points je ne vous en puis dire auUre chose : mais» quant à ceulx qui sont encore en France, soubz la charge de Mandcsloo ^ Schoonberch et Ott von Plot, quand vous serez d'accord de vous servir de deux mil chevaulx, que ce sera assez. Pour ce faire^ il fauldra, ou prendre deux eolonnelz qui en ayent chascun mille, ce que croy qu'ilz ne vouldront faire, ou bien les laisser conduire par ung seul. Et^ quant aux aul- 1res deux mille^ les fauldroit retenir^ leur donnant le wart- ghelt, assavoir : à trois ou quatre dalers pour trois mois, qui leur donnera occasion de contentement. Ce néantmoings^ il leur fauldroit faire entendre les causes pour lesquelles à pré- sent on se contenteroit de sy petit nombre, et, quant aux chefz, seroit bon leur faire offre à chascun d*une cbaisne de mille escuz , pour plus leur donner occasion de se contenter, et ce, en cas qu*on convienne avecq eulx. Pour conduire cest affaire, seroit requiz d'avoir gens bien cognoissans comment se traictent les marchés avecq les AUemaus, avecq lesquelz il se fault conduire fort discrètement, et coucher tout bien clai- rement : aultrement, ilz prendront leur avantaige partout ilz pourront. Et, combien que je ne double que n'ayez beau- coup de gens assez ydoines, toutesfpis je n'ay laissé, de peur de faulte, de vous envoyer te commissaire Stensel van Manis* loo, qui est homme bien entendu en telz affaires, et qui m'a non-seullement bien servy , mais aussy de grands princes , comme le roy de Dannemarcq, mesmes à feu de très-heureuse mémoire l'empereur Charles, et, en ce dernier voiage, à mons'

135 ~

le duc Casimîrus; duquel sy vous voyez que vous en volez servir, pourrez traicter de son appoinetement. Que, sy vous en avez aultres plus idoines, il vous plaira de me le. renvoyer. Quant aux conditions, je désire bien qu'elles soient les meil* leures qu'il sera possible.; mais je doubte fort que malaisé- ment ilz soyent amenez à prendre aultres conditions que celles qu'ilz ont eu en France. Quoy qu'il en soit Je ne suis pas d'advis qu'on les laisse faire marché ailleurs , par faulte de quelque condition tolérable , attendu que l'ambassadeur du roy d'Ës* peingne qui est en France, et aultres ennemis dont nous n'avons point de faulte en France, ne laisseroient passer une telle occasion, sans en faire leur prouffîct. Je suis pareillement d'advis, si ilz demandent leurs arriéraiges, qu'on leur accorde ce qui se trouvera leur estre légitlimement deu. Quant au nombre, il est pour le présent assez soufIQssant, jusqucs % ce que nous entendions quelz plus grandz effortz vouldra faire l'ennemy. Que sy, comme il se fault attendre, le Roy nous envoyé une puissante armée , je suis asseuré que le duc Casimirus, pour la bonne yolunté qu'il nous porte, vouldra bien nous secourir, et inesme. avec conditions raisonnables, advancer deux cent mille florins. De ce aussy que je ne suys pas d'advis qu'on prenne plus de deux mille de ceux qui sont en Franche, je ne le dis pas sans considération : car, ayant tiré sur le nombre deux mille bons ehevaulx, comme il est à pré- supposer que celluy qui les vouldra conduire s'accompaingnera le mieux qu'il pourra, le reste ne sera pas grande chose, joinct que plusieurs sont morts, etd'aultres, commej'ay bien entendu, se sont deffaictz de leurs ehevaulx et armes.

Vous me dites aussy, monsieur, que le crédit des vostres est fort diminué envers noz vpisins, comme Liège, Aix et Couloigne , lesquelz , craingnans que les Espaingnobs ne de- meurent maistres, ne veullent adventurer leurs deniers, et là-dessus me demandez mon conseil. Sur quoy il me samble,

n

136

aussy soubz meilleur advis, que, sans mespriser l'aide et moyens de noz voysins et aultres estrangiers, il est nécessaire^ premièrement, de se résouldre à mectre ung bon ordre entre les estatz, et s'ayder de ses moyens, devant toutes choses : car ilz se trouveront plus seurs, plus promptz et plus grandz, et ne tirans point après soy de telles queues, que les deniers pris sur les estrangiers, qui ne se tirent que à grands fraiz, et se rem- bourseront avecq des interrestz bien pesans, et souvent ne se peuvent tirer qu'en une grande longueur et incertitude ; qui me faict dire qu'il fault principallement veiller sur ce poinct. Geste résolution, encores que nous n'ayons esté aydé d'aulcun argent estrangier, nous a faict soustenir une guerre sy longue et çoustageuse : à quoy jamais nous ne fussions parvenuz, sinon par le moyen de l'ordre et bon accord qu'il y a eu entre nous, à raison du grand désir qu'avons eu de nous délivrer de la tirannie et servitude de ces estrangiers; et cecy se pourra facilement exécuter partout , moyennant une bonne union et accord entre tous les estatz, et la considération qu'il y va du salut publicq. Touttesfois, estant trouvé bon de de- mander secours par prest à noz voisins, il me sambleroit qu'il fauldroit choisir gens propres et bien vouluz qui traictassent avecq quelques villes d'AUemaingne, maritimes et aultres, comme Brèmes, Hambourg, Lubeck, Straetsburg, Ausburg, Francofort et Ulme , pour avoir d'icelles quelque somme en prest, soubz une bonne obligation des bonnes villes de par dechà, ou bien, si elles ne vouloyent donner argent, au moins avec elles (') qu'elles voulsissent respondreà ceulxqui vous en vouidroyent prester, soubz la contre-obligation desdictes villes de par dechà. Que, si l'on recherche les gentilshommes du pays de Holsteyn et voisins, je ne fais doubte qu'il ne se treuve des moyens de ceste part.

(1) Il faut lire probablement : traicter avec eUea,

137

Qui est le meilleur advis que je vous puis donner pour le présent, vous suppliant de eroire que, oultre Tanchienne obli- gation d'amitié qu'il y a entre nous, je me sens encore beau- coup plus affectionné è vous ayder et secourir de tous mes moyens, depuis que vous avez pris une si belle et si louable résolution, laquelle estant suivie des aultres seigneurs du pays, je ne fais doubte que bientost nous ne voyions nostre patrie délivrée par les bons offices de monsieur le duc, vostre frère, et vous. Quy fera que de ma part je me sentiray infi- niment vostre obligé, pour m y employer, partout j'auray quelques moyens, pour vostre service, d'aussy bon cœur que, après avoir présenté mes humbles recommandations à voz bonnes grâces, je prieray Dieu, monsieur, de vous donner, en bonne et longue vie, heureuse yssue de voz entreprinses. Escriptà Middelbourcb, ce xxviij"" d'octobre 1576.

Copie du temps, aux Arehîvet de U ville d'TpMS»

DLXI.

LE PRINCE D'ORANGE AUX DÉPUTÉS DU CONSEIL]

D'ÉTAT.

11 les prie de prendre do bonne part la réponse qu^il a faite au marquis

de Havre.

MiDDELBOUaO, 29 0€TOBRB 1576.

Messieurs , j*ai receu lettres de monsieur le marquis de Hiivré, par lesquelles il me mande que, suivant vostre advis,

iZS

il me prie de donner conseil touchant la levée des rdsters, tant ceulx qui sont encores en France au service du roy de France, qu'aullres qui sont offerts par aucuns coronnelz allemans ; davantaige, pour le mauvais crédit qu'à présent ont les estats vers les villes voisines. Il me prie aussy de mander quel seroit mon advis sur ces deux difBcultez. A quoy, mes- sieurs, j'ai respondu ainsy comme j*ai peu, c'est*à-dire comme cellui qui y estant esloingné du pays, ne peult pas cognoisUre plusieurs particularités qui seroient bien nécessaires à cellui qui donne conseil. Néantmoings J'ai proposé à mondict sieur le marquis de Havre ce qui m'a semblé le plus expédient en Tung et en l'aultre faict. Toutesfois, ce que touche le crédit, il me semble que , sy Ton n'embrasse les affaires à meilleur escient et avecq ung couraige plus uni et résolu, il diminuera encore de jour en jour davantaige. Ce que j'espère que vous recevrez d'aussy bonne part comme il vous est proposé, vous asseurant que je demeurerai tousjours prestà vous faire service, d'aussy bon cœur qu'après m'estre bien affectueusement recommandé à voz bonnes grâces, je prie Dieu vous donner, messieurs, en santé bonne vie et longue. De Middelburg , ce xxix" d'octo- bre 1576.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Suscription : A messieurs messieurs les députez du conseil d'Ëstat du Roy.

Originil, aux ArebWes da Rojaamo : LeUru de $i à OwUkmmêdt Nmaam, t. V.

159

BLXIL

LE PRINCE D'ORANGE A SES DÉPUTÉS A 6AND.

11 les informe qu*ii a mandé quatorae ou qiiinxe compagnies de Hollande» pour le secours de la ville d'Anvers. 11 désire savoir Tordre qui devra être observé par ces compagnies, et de quelle manière seront payés les gens de guerre qu'on tirera à Tavenir de Hollande et de Zélande.

MioDBiBouao, Z\ ocToaaB 1576.

Messieurs , ceste servira pour vous advertir que j'ai mandé quatorze ou quinze eompaignies d'Hollande, pour les employer au secours de la ville d'Anvers : mais, comme je ne sçais quel ordre je debvray suivre en cela^ ce que lesdictes eompaignies auront à faire et avecq quy à se renger, je vous prie d'en parler avecq messieurs les députez de delà, et me faire enten- dre leur et vostre advis, comme aussy de sonder d'eulx quelle correspondance il y a entre eulx et les sieurs contes d'£ber- steyn et Cbampigny. D'aultre part aussi, je vous prie de communicquer avec eulx touchant le payement des gens de guerre qui se tireront d ores en avant de ces pays. Et» sur ce, je prie Dieu vous donner, messieurs , en santé bonne vie et longue. Ëscript à Middelbourg, ce dernier d'octobre 1576.

Vostre bien bon amy a vous faire plaisir,

GuiîIe de Nassau.

Copies da XVlll* siéele, i la BiblIolhéqa« royale : MS. n" 0238, p. 31 , et da XVII* siècle, US. 712S do la mène Biblio- tlièqae, fol. 49.

140

DLXIII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX (').

U les engage i écrire au Roi ane lettre ils expriment leur ferme Intention de maintenir le pays en ses droits, libertés et anciennes coutumes, et de le délivrer de la tyrannie des Espagnols. II leur déduit longuement les motifs qui doirent les y déterminer.

Sans oatb (.. NOTiiiBaK 1B76).

Messieurs, me trouvant en continuel soucy de l'issue de voz affaires, desquelles je voy apparentement dépendre le salut et

(1) J^avais d*abord conçu des doutes sur rauthenticité de cette lettre, non- seulement parce qu*elle n*est pas datée, mais aussi parce que je ne Pai trouvée nulle part ailleurs que dans le manuscrit des Affaires étrangères, à Paris, d*où elle est tirée, et qu*il n*en est fait mention dans aucun des recueils d*actes des états généraux que j*ai consultés, non plus que dans les RéêobUvms publiées par M. de Jonge.

Les raisons suivantes m*ont engagé à revenir de mon opinion : ioles pièces dont se compose le manuscrit des Affaires étrangères paraissent avoir été réunies par une personne qui avait puisé à de bonnes sources j 2* pour le fonds, comme pour la forme, cette lettre en rappelle d*autres de la même époque, écrites par le prince d^Orange ; elle a surtout beaucoup de rapport avec celle du 30 novembre 1576 que j*ai publiée, en 1830, dans les Anaiectee belgiqueSf p. 301-511 ; cette dernière lettre se termine ainsi : « Messieurs,

ores que ce que par cy -devant vous ay eseript soyt quasy U meêtne du

contenu que deuuê, etc. » Le prince semble se référer, dans ce passage, à la nouvelle lettre que je mots en lumière.

Il reste à fixer la date du document. Après en avoir considéré le contenu avec attention, je suis porté à croire que Guillaume récrivit avant qu'il fût informé de Tarrivée de don Juan d'Autriche à Luxembourg, et dans le temps que ses députés négociaient, à Gand, avec ceux des états généraux.

Dans le manuscrit d'où la lettre est extraite, on lit en tête : Lettre de momeigneur le prince d'Orange au» eetatz générauix de» Paye-Boe, écrite en l'an 1576.

Ul

délivrance de tous ces pays de par deçà , et considérant de bien près toutes les qualitez et circonstances dloelles, je trouve qu'il y a quelque poincts qui nierveilleusement retardent, et presque de tout arrestent, le cours de vostre prospérité, que je ne puis obmectre de vous déclarer^ pour ce que , par aven* ture, en une si grande multitude d'affaires très-pesants ^ il pourroit estre qu'ils fussent moins considérés : dont vostre cause pourroit recevoir intérest. et voz adversaires très-grand avantaige.

L'un est qu'au lieu de presler au Roy une obéissance deue et légitime, conforme aux previléges^ droictz, libériez et usances de noz ancestres y l'on se laisse esblouir les yeulx et l'enlendement d'un vain masque et apparence de ce que aucuns flatteurs, aians plustost esgard è leur prouffit particulier, qu'au bien publicq, ou au service du Roy^ mectent en avant très- faulses enseignes, soubs ombre d'une volonté du Roy, déguisée à leurs appétits et fantaisies : car il est certain que, tout ainsi quC; le subject et vassal ne porte ce respect et révérence à son prince et souverain seigneur, qu'il luy obéisse sans con- tredict, en tout et partout, en choses légitimes , on n'en peut espérer que toute confusion, désordre et rébellion, digne d'estre punie très-griefvement et exemplairement, ainsi pareillement, au contraire, quant, au lieu de justice, droicture et vérité, l'on ne peut alléguer aultre chose que la seule volonté du roy ou prince , et mesmes d'un prince très-mal informé des occur- rences et qualitez des affaires , et que , de peur de l'offenser, l'on crainct de remédier à ung déluge de maux très-évidens, et de faire son debvoir, auquel l'on est appelle de Dieu et des loix , à la conservation de la patrie , de peur d'offenser celuy lequel est luy-mesme, selon Dieu et les hommes, et l'obligation de son serment et du debvoir de sa vocation, assubjecti aux loix de justice, cela est encore une confusion beaucoup plus horrible, d'aultant que c'est le vray fondement de toute tiran-

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Die, par laquelle toutes républicques et polices néoessaircment viennent à estre ruinées de fond en comble; et, si alors on ne se résoult fermement et couragieusement de marcher en toute droieture et rondeur, sans avoir esgard ny à bon gré, ny i mauvais gré que Ton puisse attendre du roy, certes , en lieu de mectre remède au mal , Ton ne faict que l'augmenter et empirer de plus en plus, jusques à ce que Ton se soit du tout enveloppé es filets de ruine irréparable.

De cecy procède ung autre mal : e*est que , cependant que les uns voudroient bien cheminer droictement, et les aultres« qtii ne se peuvent résoudre, tirent toosjours la charue de Tautre cosié, cerchans des conseils différens , tantost pour contraster aux premiers , tantost pour déguiser les matières et avoir à l'avenir quelques échappatoires, pour oster la coulpe de dessus eulx et la mectre sur les aultres, il n^en peult ensuivre qu'une ruine, inégalité et diversité de volontés , conseils et délibéra* fions, laquelle retarde , voire et arreste , le cours de toutes bonnes exécutions : car il fault nécessairement que ceste iné- galité engendre deffiance des ungs aux aultres, de laquelle procède disunion, vraie et presque unique mère et cause de la ruine et perdition de toutes républiques , ainsi que Ton peult évidemment veoir à l'œil par les exemples de touts eages.

Car, afin que je ne vienne à refreschir les playes de nostre propre corps, et ne vous remectre au-devant la mémoire des choses passées, lesquelles nous voudrions estre ensevelies en oubliance éternelle, comme sont les désastres advenuz aux seigneurs d'Egihont et Homes, et presque à la plus belle fleur de la noblesse et de la bourgeoisie de par deçà , l'occasion desquels n'est procédée d'aultre source et origine que de ce que dict est, certes, si vous considérez de près, non-seule- ment la suitte des histoires anciennes, mais aussi les calamités advenues fraischement, de nostre temps et de celui de noz pères, aux peuples à Tentour de nous, vous trouverez qu'en

us

France, Italie, Allemaigne, que mesmes en Hongrie, Afrique et Baiimrie, la foreur du Turcq ravage tout ce par elle passe, presque tous les maux et calamitez qui leur sont adve- nus ont esté attirez par ceste maudite désunion , laquelle est coustumière de renverser en ung instant les Estalz les plus ferrres et plus florissans qui soient au inonde.

Or, pour obvier à ces inconvénients, et d'un coup retrancher le filet de tous empescbemens et retardemens qne voz adver- saires entrelascbent au milieu de vostre négociation , je me suis avisé d'un remède, à mon avis (soubs vostre correction) , non-seulement propre et expédient , mais aussi du tout néces- saire, et mesme tel que, oultre une seureté entière que vous en recevrez, encor y advancerez-vous le vray service du Roy, en détournant la ruine de ces pays , et si gaignerés-vous un bruict de louange immortelle, avec une faveur indicible envers tous princes et potentats, peuples et nations estrangères : c'est que vous vous résolvez, joinctement et unanimement, de mander au Roy, par un courier et lettre expresse, vostre intention et ferme arrest à Tendroiet de maintenir vostre patrie en ses droitz,'libertez et coustumes anciennes, et la retirer, soit par bon gré ou mauvais gré, bors de insupportable tirannie des Espaignolz , toutesfois dessoubs Tobéissance légitime et deue de Sa Majesté, ainsi que vous la luy avez jurée et promise, eomme, au réciprocque, il vous a promis et juré de vous main* tenir en voz droitz et libertez susdicts, auxquelles vous enten* dez résolutement de demeurer, quoy qu'il en puisse advenir; le supplier très-humblement de ne le trouver mauvais , et de ne se laisser induire à user quelque violence ou voie d'armes» pour vous constraindre soubz un joug de servitude duquel et Dieu , et la nature, et vos loix , droictz et previléges , et son serment et obligation, et la succession de vos ancestres, et le debvoir de vostre honneur, vous ont faictz et renduz à jamais libres : pour ce que, aultrement, par les obligations que vous

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avez à Dieu et au service du Roy, au bien général du peuple et aux droictz et previléges receuz de vosdicts ancestres, et jurez bien et solennellement par vous et par Sa Majesté mesme , et finalement à vostre honneur, vous seriez, selon conscience, obligez de repousser une telle violence et iniquité par armes, et cercher touts aultres remèdes, jusques à adventurer le der* nier homme de par deçà y plustost que de le vouloir endurer ou souffrir en façon que ce fust, suivant presque le formulaire de la lettre qui , à ces effectz , va cy-jointe, a laquelle vous pourriez adjouster et diminuer ce que bon vous semblera, moiennant que vous ne tombiez en aulcune dissimulation ou desguisement que vous pouroit par cy-après estre domma- geable, et ne Vous mettiez en aulcune obligation qui pouroit préjudicier à ce que , par cy-après y par advis général de tous estatZy seroit trouvé bon et convenable pour le repos et paci- fication généralle de tout le pays^ et que cestedicte lettre fût signée de tous les estatz du pays, et mesmes des prineipaulx ordres des couvents, et de tous ceulx en général qui sont, ou en aulcune dignité au pays, ou en aulcun crédit vers le Roy, ou bien ont obligation à pourveoir au bien et salut général.

Par ce moien-icy , premièrement, aiant déclairé vostre inten- tion à Sa Majesté , vous vous donnerez comme un espron et vif éguillon à poursuivre magnanimement vostre saincte et louable entreprinse> sans plus rien déguiser, et aurez occasion de pourveoir tant mieulx à toutes choses nécessaires; puis, vous arracherés tous ces masques fardés lesquels , soubz ombre de n*oser desplaire au Roy, vont nageants entre deux eaues, et empeschent le cours de toutes bonnes délibérations, se persuadans qu'ilz demeureront en grâce, ou, pour le moins, en une si grande multitude de délinquans, trouveront lieu, ou d'eschappatoire, ou de miséricorde, de n'avoir si mal fait que les aultres ; laquelle inégalité de volontez et faulse amorce de tromperies^ qui est ia vraye peste de toute vostre négociation.

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vous arracherez du miilien de vous, et^ eslablissani une égalité partout , vous dresserez une ferme union et concorde gêné- ralle, obligeant tous et un chascun, par ce moien, & remettre la main à la besoingne, à boD escient et sans aulcune dissimu* lation. Qui est te seul moyen d*encheminer voz affaires i une bonne fin, ainsi que tous exemples de confédérations faictes de tout temps monstrent évidemment : car, tout ainsi qui! est impossible qu'un chariot marche droit, ayant les roues mal et inégalement proportionnées ^ ainsi ne se peult-il faire qu'une confédération et société ne se rompe et ne réussisse à très-mauvaise fin, quand il n'y a point une égalle obligation de tendre à un but commun et général. Voilà pourquoi les anciens, quand ilz faisoient quelque confédération . et société par ensemble , usoient de cérémonies , ou d'avaller du sang , ou de tuer quelque beste , ou aultre chose semblable , par laquelle ilz maudissoient et maulgréoient tous ceulx de leur compaignie qui ne chemineroient d'un pied d'obligation égal et conforme à la fin qu'ilz s'estoient proposée. Et noz ances- tres y toutes et quantes fois qu'ilz ont voulu à bon escient maintenir leurs privil^es et libertez, et s'opposer à la tyrannie et violence des mauvais ministres de leurs princes et souve- rains seigneurs , ilz se sont addressez au maistre mesme , et luy ont franchement déclaré et remonstré leur intention ^ sans en rien dissimuler les matières, et mesme luy ont faict ratifier les confédérations que, pour l'asseurance de leurs libertez et privilèges, ilz faisoient entre eulx par ensemble, soubz obli- gations très-eslroictes de vie et d'honneur, pour eulx et pour toute leur postérité , maintenans que le service du prince en dépcndoit, ainsi qu'il appert par les Chartres de Cortemberg et leurs confirmations , et par celuy que Ton appelle dm toal- êchen charter; les déclarations et alliances faictes entre les villes de Louvain et Bruxelles, avec Thielmont, Anvers, Liere, Herentals et autres villes de Brabani, en l'an 1361, le

m. I o

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lendemain de Saint-Jacques, ei semblablement par rallianee faicte entre Brabant et Malines, environ le lûesme temps ; item, entre le ducq et les villes de Flandres, en Tan 1339, le iij* d*octobre; item , le cbartre des quatre, faict le xvij* de juing Fan 1368; en Talliance entre les villes de Brabant et celles de Tricht, Limborg, Daelhem^ faicte Tan 1 304, le viij* de mars, et de la nouvelle alliance faicte entre les villes de Brabant de demeurer en leurs libertés, faicte en l'an 1371, le xviij* de février^ et le chartre du duc Wenceslaus, de Fan 1373, le jour de Saint-Lambert ; item, par l'acte du duc Jehan de Brabant, faict et passé en l'an 1421, le yj* de mai; item, par l'alliance faicte entre les villes, de l'an 1514, le xvj"" de février, et une infinité d'autres semblables. Et cela seul a esté cause qu'ils nous ont laissé tant et de si beaux privilèges, droictz, cous* tûmes , que nous nous pouvons vanter estre le peuple dessoubz le ciel qui, avecq la fidélité loyalle et les bons services faicts ft leurs princes, ont scexi le mieulx conjoindre une liberté franche ^t inviolable , laquelle aussi nous ne pouvons main-^ tenir que par la mesme voie qu'elle nous- a esté acquise et maintenue jQsques au présent.

D'autre costé, je vous prie, considérez comment cesie vostre résolution donnera à penser au Roy, et luy fera changer les conseils violents que, jusques ores, on l'a faict suivre par cy-devant. On luy a donné à entendre que ce n'estoit qu'un tas de rebelles et mutins, ou des hérétiques luthériens, comme ilz les. appellent, qui cerchoient remuement d'Estat et de religion, et^ pour cda^ se servoient d'un prétexte forgé de la tyrannie et insolence des Espaignolz, mais que, en général, tout le pays et commun peuple en estoit assez content et satis- fait, ou, pour le moins, s'en tiendroient bien contents, s'il n'y avoit un ou deux des principaux qui les incitassent à se mu* tiner, et, comme le Roy mesme me disoit en termes exprès et formels, quand il estoit question, en l'an 1559, de faire sortir

U7

les £spfiigno1z : Qite, si los estados uo tuviessen pilares^tw hMarian ion alto (^). Maintenant, il verra, au contraire, que c*est une voix généralle de tout le peuple, aussi bien de petits que degrandz, etdegrandzque de petits, aussi bien des prélatz, abbés, moines, religieux, que des seigneurs^ gentilshommes, bourgeois et paysans ; brief, qu'il n'y a aage, sexe, condition ny qualité des personnes qui ne le crie d*une mesme voix et désire d*une mesme volonté : & quoy certes jamais il ne voudra ou s'osera opposer; et, quand il le voudroit faire, il donnerait manifestement à entendre à toui le monde son grand tort, et la grande justice que vous auriez à vous opposer à telle iniquité, violence et manifeste tyrannie. Mais, certes, si, alors estant luy-mesmes icy présent, et ayant la fleur de la gendar- nierîe espaignolle en aussi grand nombre que maintenant ; aiant aussi à la main et à son commandement ung nombre florissant de gendarmerie allemande et wallone pour les oon- joiadrej ne voyant pas aussi une telle et si ferme résolution des estatz, ny la meilleure partie des justes causes et motifs que depuis ont esmeu et incité le pays contre lesdicts Ëspai- gnolz, et n'ayant nul ennemy dedans les entrailles de son pays, beaucoup moins en Hollande et Zélande, qui en est comme la clef principalle, lesquelz s'eussent peu joindre avec les estatz, ni une telle et si suspecte pacification entre les évangéliques et catholiques de la France (>), toutesfois il a mieux aimé de retirer ses Espaignolz ('), quoyqu'à regret, que de bazarder son Estât par voye d'armes, contre le consen- tement des estatz, que devez-vous penser qu'il fera mainte- nant, là il verra une résolution si magnanime, si ferme et

(*) Que, si les états n^avaient pas des soutiens, ils ne parleraient pas si haut.

O Allusion à la cinquième paix ou paix de Monsieur, signée à Chastenoy, le 6 mai iS76. (Voy. Sishohdi, HiiMre des Français, t. XIII, p. 395.)

(') En 1K63.

U8

si unie de tous les estatz par ensemble, mesmes aeoompagnée des effectz y il se trouve absent , menasse du Tureq en Ëspaigne, dans les entrailles de son royaulme; il n'y a ici qjue une poignée des Espaignolz , desquelz la fleur princi^ pale esi oheute en ces guerres intestines , sans oncques avoir sceu conquester la moindre province de son pays sur oeulx qu'ilz appellent, par mocquerie, povres geux; il ha des* pouillé les garnisons de Sicille , de Naples et de Milan et Sar^ deyne , pour estoupper (') à grand malayse les bresches et ruines de ceste troupe de par deçà ; il voit si grandes et si intollérables insolences, iniquitez et superbitez, tyrannies et hostilitez des Espaignolz , lesquelles ne peuvent ni doivent par raison estre souffertes, sans très-grande infamie et déshon^ neur, et finalement il verra que vous vous pouvez tous- jours joindre avec nous , et mesmes que desjà vous vous estes y joincts ('), et que plustost vous estes d'intention de vous jetter entre les bras des anciens ennemys de la maison d'Ans* trice ('), lesquelz, estans pacifiés entre eulx, n'attendent qu'une semblable occasion , que de plus longtemps endurer telles indignités? où, dis-je, il verra et considérera toutes ces circonstances^ estimez-vous aussy qu'il voudra encor plus^ longtemps bpiniastrer, après avoir receu de vous une semblable lettre et déclaration comme est celle que je vous envoyé id joincte? Et, quand il le voudroit faire, pensez-vous qu'il en pourra venir au bout? Un faisceau , estant deslié en plusieurs petites verges ou baguettes, se rompt bien aisément; mais, quand il est très-bien conjoint et lié par ensemble, il n'y a bras si robuste qui le puisse forcer. Ainsi pareillement , si vous vous tenez joints et unis, comme nécessairement vous

{') Bêioupper, boucher.

(') Ceci parait se rapporter aux négociations entamées à Gand.

0 C*est-à-dirc des Français.

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ferez, si vous suivez ce.conseil, et que, par eeste déclaration, vous establissez une obligation pareille entre tous de maintenir ce faiet jusques au dernier homme, toute la Hispaigne et Italie n'est bostante pour vous faire mal.

Vous voyez ee qu'ilz ont iey faiet, en Hollande et Zélande^ Tespaee tantost de eincq ans ; et toutesfois, ceulx qui y sont natifs et habitués du pays mesme, comme d'Amsterdam et d'Utrecht en Hollande , et de Middelbourg et Zierickzée en Zélande , nous ont faiet cent fois plus de dommage, que non pas euix, avec toutes leurs bravades. Et néantmoins, qu'est-ce ceste petite poignée des villes, au pris de toutes led provinces qui se sont joint maintenant en ceste querelle , mesmes si elles se veulent tecor joindre avec nous ? Mais il y a encor un autre point : c'est que le Roy a estimé et estimera tousjours, jusques à tant que vous ayez prinse la résolution susdicte et le pied que je vous propose, qu'il sera bien aisé de vous disjoindre et sépa- rer les uns des aultres, promettant à l'un une croisade (') , à l'autre une pension ou autre mercède, et donnant pardon aux uns et récompense aux autres : car c'est la seule vraye ruse de ceulx qui veulent opprimer un peuple, ou rompre une confédération, lorsqu'ilz voyent qu'ilz n'en peuvent autrement venir au bout. Par ceste ruse, mit le roy Louis XI* les roys de France hors de page, comme ilz disent, c'est-à-dire hors de toute subjection et obéissance des loix , et réduisist le pays en servitude, promettant à son frère le duché de Guienne, au dncq de Bourgoingne, Charles le Hardy, le duché de Nor- mandie, avec Péronne et les autres villes de la rivière de Somme, et, par-dessus, quelque honnorable pension , et aux aultres autres dioses semblables, chascun selon sa qualité. Ainsi disjoignit-on naguerres ceulx de la religion en France,

<*) Cest-à*dire la croix d'un des ordres militaires dont lo Roi disposait, ci à laquelle un refenu annuel était attaché.

180 -

par l'amorce du royaume de Sardine promise au roy de Navarre, père de eestuy-cy. En Allemaigne, l'on trouva moien de disjoindre et séparer les princes, afin qu'ilz ne se résolus* sent à embrasser, d'un consentement commun, la oonfédÀ* i:ation de Smalcalde : qui fut cciuse que Allemaigne 9e yeit en bien peu de temps réduite soubz le jôug de l'Espagnol ^ mais, aussi tost que, s'apercevant de leur erreur, ilz se remirent en union et se confédérèrent par ensemble, se déclarans vouloir résolutement maintenir leurs droietz et privilèges, tout aussi- tpst furent-ils redressez au premier estât de leur liberté.

Mais il ne fault cereher les exemples si loing, lesquelz se présentent à nostre porte. Je vous prie, qu'est-ce qui nous a par deçà ammenez les Espaignolz, seule occasion de tool nostre mal, sinon pardons, promesses çt beauh semblants? L'on a désuny les volontez de ceulx qui s'y deb voient opposer ; et, de faict, n'avez-vous pas veu les lettres de l'ambassadeur d'Ëspaigne en France, escriptes à madame de Parme, com- mencement de ces troubles (') 7 Que dis*je de l'ambassadeur? le Roy mesme, sa propre main, escrivit lettres à mes- sieurs d'Egmont et de Hornes, et à moy aussy, déclarant que luy avions faict services fort signalez, desquelz il nous remer- cioit; recognoissant qu'avions, par nostre bonne conduite et dextérité, conservé ses pays, et requérant que voulsissions continuer en cela, avecq asseurance qu'il ne fauldroit à le recognoistre par toute gratitude, i^ar lequel moyen il sceut si bien entretenir et endormir les coeurs de ceulx qui s'y fioient et pensoient n'avoir guères meffaict, qu'il empescha que jamais Ton ne se peult resouldre unanimement à empescher que le ducq d'Alve ne nous ammenast, avec ses Espaignolz , ce dé-

(*) Guillaume veut parler ici de la lettre de doo Franoès de Alava, publiée h la suite de sa Juitificatùm de 1568. Mais, comme nous en avons déjà fait robservatioo, 1. 1, p. Uivii, note 1, cette lettre était controiivée.

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luge des maux et calamités que nous avons veu et seniy conlj^ ouellement depuis ce temps-là. Que si, dès alors, ilz eussent suivy ce présent conseil, et mandé au Roy, pour leur ferme résolution, qullz n'estpient nullement d'intention de recevoir les oompaignies envoiées, du depuis, avec le ducq d*Alve, nous ne serions pour le présent en peines nous noi|s retrouvons ; mais, par les ruses susdictes^ on les a empeschés de veoir ce qui estoit expédient, et d'exécuter ce que salutairement jlz auroient peu veoir. ou délibérer. Or, il ne nous fault pas doubter qu'il? ne feront à présent tout le mesme, voire d'autant plus indus* trieusement, qu'ilz voient qu'ilz en ont maintenant plus de besoing. Et, de faict, vous trouverez que desjà, dès maintenant, ces ruses ont esté mises en campagne. Mais, si vous leur voulez couper la broche, et retrancher toute espérance de vous pouvoir attrapper par ce moien-Ià, le vray et unicq remède est que vous suiviez le pied que je vous propose, et vous leur ferez perdre toute ^pérance de faire leur profit par semblables amorses, et que, quant et quanl(' ), vous vous entretiendrez en voslre union. Car ilz seroient constraints de quitter ceste voie, et se résouldre, ou à vous accorder vostre demande, ou à user de force mani- feste, puisqu'ilz verront que vous estes résoluz de ne croire plus à promesses, mais seulement aux effectz. Et, s'ilz se résolvent à suivre la force., tousjours.vousaurez cest avantage, que vous ne pourrez estre surprins, mais aurez le loisir et moien de pour- veoir à voz affaires, , au contraire, si vous ne prennez le pied susdict, l'on vous persuadera et donnera à entendre que le Roy est très-content de faire tout ce que requerrez, comme desjà vous voiez qu'aucuns, mesmes du conseil de par deçà, ont commencé à user de ceste ruse. Cependant, on fera les prépa- ratifs à loysir, et, ayant gaigné, lantost les uns, tantost les aultrcs, Ton vous accablera, avant que vous y ayez pensé à

(') QuafU et quant, en même temps.

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bon escient. De sorte que vous voiez que, en toutes manières, il est nécessaire que vous vous résolviez à ce que dict est , joinct que maintenant vous ne pouvez entrecognoistre vos amis d'avec voz ennemis : car, tant qu'ilz voient que vous estes les plus forts, ou, pour le moins, qu'ilz ne se peuvent dédarer sans hazard, ilz sont masqués et font semblant d'estre avec vous, ou, pour le moins, ilz demeurent neutres ; et c'est cela qui vous ruine et rompt le cours de voz desseings. 11 faut doncques avoir une pierre de toucbe : c'est de subsigner la déclaration de telle sorte que vous aurez moien et occasion de vous fier ou deffier d'eulx.

En oultre, vous donnerez, par ceste déclaration, à tous voz amis et bienveillans occasion et cause de se déclarer de vostre costé. Les princes d'Allemagne, les seigneurs et gentilzhommes de France , mesme la royne d'Angleterre et tous les aultres potentats de la chrestienté, qui par cy-devant ont avecq com- passion veu voz misères et afflictions, toutesfois n'y ont voulu mettre la main, car ilz ont tousjours pensé, puisque vous le souffriez volontairement, qu'il n'y avoit raison de vous en tirer bors.

Et, ores qu'ilz considérassent que plusieurs gémissoient soubz le fardeau, et mesme que desjà l'on s'en mescontentoit tout ouvertement, toutesfois il n'y avoit personne qui s'y voulust ou osast fier, pour ce qu'ilz ne voioient nulle décla- ration généreuse ni magnanime de voz volontés, et estimoient tousjours que vous vous laisseriez plustost accabler soubz le pied, que de repousser une si inique violence par voie d'ar- mes. Et, quand ilz ont veu que vous avez prins les armes» encor ont-ilz estimé que ce n'est qu'une levée de boucliers et un soulèvement d'une populace, laquelle, ne plus ne moins qu'une vague de mer, s'abaisse et s'appaise, tout aussy tost qu'elle s'est eslcvéc : ce que je vous puis tesmoigner, en vérité, qu'il a plusieurs fois esté mis en avant et ireprocbé, je dis de

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princes el de gens de grande esioffe. Mais, quand iiz verront que vous vous estes déclarés de la Taçon susdtete, et qu'il n'y a moien de reculer en manière que ce soit, ce sera alors qu'ilz auront du cœur, et vous ferez qu'en estans requis, ilz ne faul- dronl à vous donner toute ayde et assistance, où, au con< traire y ilz dissimuleront tousjours, tant qu'ilz verront que vous aultres laissez encor quelque lieu à la dissimulation.

Voiez seulement l'exemple de ceulx de par deçà. Je vous asseure bien qu'il y en a une infinité qui jugent que tout cest aflaire qu'avez entreprins réussira finallement en fumée, puis- qu'il voient qu'il n'y a nulle déclaration manifeste qu'oblige les uns, aussi bien que les aultres, et qui vous empesche de reculer^ et pourtant, plusieurs font difficulté de s'en mesler, où, au contraire, quand ilz verront que vous vous soiez déclarés en la façon susdicte, il n'y aura personne qui n'ac- courre à votre assistence, et vous demeure fidelle jusques à la dernière goutte de sang : oultre ce que, par ce moien, vous vous acquerrez, par tout le monde, une gloire et réputation d'hommes couragieus et magnanimes, et qui sçavez que c'est de maintenir vostre liberté, et d'obéir quant et quant au prince. Vous servirez d'exemple de vertu à tous peuples libres, et de terreur à tous tyrans et iniques oppresseurs de républiques ; et si laisserez-vous et à vostre postérité ung exemple très- louable et très-utile au maintiennement de leurs privilèges et libertez, ainsi que voz ancestres vous ont laissé, quand îlz ont procédé en la mesme rondeur en toutes leurs déclarations susdictes, et notamment envers le ducq Jehan de Brabant : de façon que vous rendrez à la postérité le fondament de leur liberté ferme et immuable, qu'est Tobéissance qui est deue au prince juste et légitime; joinct que satisferez en cela au deb- voir de voz consciences, et de lobligation qu'avez à vostre ser- ment, et au rang que vous teaez, en représentant le corps universel de tout le peuple, duquel vous avez la liberté et salut

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comme en dépost, aiam à cest effeot receu à voz mains le serment du Roy, afin de le faire maintenir en tpute rondeur et sincérité, sans aulcun desguisement ou dissimulation:; et pourtant estes lenuz, devant Dieu et tous hommes du monde^ de le faire.

Qui est cause que je vous prie d'y vouloir penser à bon escient, ne faisant doubte qu'aiant bien meurement poisé le^ raisons et considérations susdictesi, vous ne trouviez c^t advis bon et salutaire. Que, si toutesfois vous en jugiez aultrement, je vous prie de penser que cecy ne procède, sinon d'un zèle entier et ardent que j*ay à vostre bien et salut, et à la liberté de la patrie, soubz Tobéissance légitime de Sa Majesté.

Arehlvet des ÂlTairofl étraDgiret, à Parlt : MS. Islilalé Payt-Au, 1569^1583, fol. 194-301 (>).

(') Ce manuscrit 9 auquel j*ai fait, comme on le verra, plusieurs autres emprunts, paraît être du commencement du XVlIc siècle ; il a 150 feuillets cotés des n»* 131-280.

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DLXIV.

LE PRINCE D'ORANGE AU CONSEIL D'ÉTAT,

11 leur recomniaode le colonel écossais Balfour que les états de Hollande et de Zélandc ont remercié de ses services, et qui a encore avec lui douse eompagnies en bon ordre (*).

MlDOStMOaO, 1«r nOTIMBlB 1576.

Messieurs, comme il a pieu ce bon Dieu regarder tellemeni les pays de par deçà en miséricorde, que les remeetre par ensemble en paix et accord, les estatz d*HolIande, pour aucu- nement se relever des charges jusques icy par eulx supportées, ont esté d'advis de casser le couronnel Henry Balfour, escos- sois» qui a encoire douze compaignies escoissoises en bon ordre et bien armées, prestes à s*en retourner en leur pays, si avant qu'on n'ayt plus à faire de leur service par deçà. Or , d'aul- tant qu'il seroit dommaige de laisser perdre tant de. bons hommes, et que ledict Balfour s'est, tousjours et en tous lieux et occasions qui se sont présentées, fort bien et vaillamment porté, et tenant ses gens en bon ordre et discipline, j'ay esiymé fort à propos de vous en faire ce mot , pour vous rendre ce tesmoignaige de luy ; et, comme je m'asseure bien vous vqul- driez servir des meilleurs et plus expérimentez gens de guerre

(I) On lit, dans les RéêohUionê de$ étaUgénèrauXy 1. 1, p. 96, & la date du 5 novembre : « Que ceulx du conseil de la guerre donnent advis sur la lettre

du prince d^Orainge, touchant de retenir ou non retenir en senrice le

couronnel Henry Balfour, cscoissois, avec douze enseignes escoissoises en

bop ordre et bien armées.

Les états généraux prirent, en effet, à leur service le colonel Balfour. (Grobii van PaiNSTBRBa, Archivée, etc., t. V, p. S55.) EniS$79, cetolBcier était, avec son régiment, dans Maestrichl. (ihid., t. VI, p. 531.)

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que pourriez recouvrir^ j'ay bien voulu envoyer le susdict Bal- four vers vous, afin que, si le trouvez bon et ayez à faire de son service, vous puissiez convenir avecluy, pendantque ses gens sont encoir par deçà. J'en ay aussy parlé au S' Jehan Thaon, qui va en compaignie dudict couronne!, et vous en fera plus ample ouverture. Je vous prie Tavoir pour recommandé, pour Tamour de moy. Et, en tout aultre endroict j*auray moien de m'eraployer pour vostre service, je le feray d aussy bonne volunté que je me recommande bien affectueusement en voz bonnes grâces, priant Dieu vous donner, messieurs, en bonne santé heureuse et longue vie. Escript à Middelburch, ce pre- mier jour de novembre 1 576.

Vostre bien bon et très-affectioné amy à vous faire

service, _

GuiLLE DE Nassau.

Sttscription : A messieurs messieurs du conseil d*Estat de Sa Majesté, à Bruxelles.

Original, aux Archives du Royaume : UUre» de et à Gwttawme de /VaMa«, t, V.

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DLXV.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il dédait au long le^ raisons pour lesquelles il serait dangereux de traiter d*une cessation d*arnies avec don Juan d*Âutricbe. Il n^est pas contraire cependant i toute négociation ; mais il voudrait qu*au préalable, don iuan fit retirer les Espagnols, restituât les pririléges, et approuTât tout ce que les états ont fait. Il engagera les états de Hollande et de Zélande à envoyer leun députés à Bruxelles. —lia, selon le désir des états géné^ raux, fait partir pour Gand quatorze ou quinte eomptgnies.

MiDùiLBOOae, fi hotimbu 1S76.

Messieurs, j'oy receu vostre lettre dotée, du dixiesme de ce présent mois, par laquelle désirez enlendre mon advis sur la cessation d'armes que l'on vous a mis en avant de la part de don Joan d'Austria, suyvant les lettres qu'il en a escript h messieurs du conseil d'Estat, ensamble et celle que Roda escript à monsieur le duc d'Arschot, desquelles m'avez envoyé les copies, et ce affin de pouvoir donner responce uniforme auxdictes lettres, convenablement à l'union et concorde desja entre nous conclue et arrestée. J'ay aussi poisé les raisons et motifz pour lesquelz il semble advis qu'il y auroit raison d'entendre à ladicte cessation. Or, après avoir le tout miz en meure délibération, je trouve, soubz correction de vous aul- tresy messieurs, que l'effect de ladicte cessation est plain de dangiers, qui nous menassent touts ensemble de ruine cer* taine, car il est assez aysé à entendre, mesme par les lettres de Roda, que ce n'est le bien et repos du pays qu'il cherche par ceste cessation d'armes, mais que son but estoit de faire lever le siège de Gand et Valenchiennes. Davantage, est à considérer que, par ladicte cessation, nous rendons les forces

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de noz ennemis gaillardes, et les nostres entièrement foibles et abbatues : ear il est certain que, sy on la leur accorde, ilz rendront cependant toute diligence possible de transporter leurs butins pillez de la ville d'Anvers à Maestricht, et de ne feront faulte d'envoyer incontinent en Allemaigne, pour en tirer prompt secours, lequel, partie par argent, partie par raucthorité du nom dudict don îoan, ne leur manquera point. D'aultre cosié, ledict don Joan aura moien et loisir de prac- tiquer et gaigner, ou pour tout le moins refroidir les princes et potentatz voisins : à quoy il n'obliera d'emploier tout son esprit et toutes forces possibles, et, cependant, nous amusans soubz la couleur de cessation d'armes, ne se laissera de se préparer, tant en Allemaigne que ailleurs, pour nous courir sus, en voyant l'opportunité : comme aussy est à craindre que voz soldatz, estant oisiffz et sans faction, seront aisezi estre gaignez par ledict don Joan; voire et. plusieurs aultres qui à présent ne sont de tout résoluz, se trouveront esbranlez par les ruses et practiques des promesses, menasses et aultres allèchements : joinct qu'en général tout le peuple, oyant ce nom de cessation d'armes, estimera pouvoir desjà jouir de quelque relasche, et, comme s'il estoit en paix et hors de tout danger de guerre, ne fauldra de s'endormir et se rendœ tant plus froid et moins volontaire à furnir aux nécessitez de la guerre : au moien de quoy, il s'exposera à toutes invasions de l'ennemy, ainsy que desjà plusieurs fois j'ay trouvé, par expé- rience, que tousjours il en advient, quand il est question de semblable cessation. Et, en oultre, ledict don Joan fera cepen- dant pourveoir les villes d'Anvers, Maestricht et aultres de vivres et toutes aultres nécessitez qu'il fauldra pour la guerre, dont, maintenant, ilz ne sont pas beaucoup pourveuz. .

Voilà pourquoy j'estime ceste négociation de trefves estre fort dangereuse. Et toutesfois, pour ce que les raisons par vous alléguez de l'aultre costé sont aussy de grand poix et

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considération^ il fault incontinenl, pour y pourveoir, donner Tordre requis et convenable à la fortifleation et deue garnison des villes d'importance, lesquelles, puisque Dieu nous a faict la grftce de prendre le chasteau de Gand, j'estime se poulront bien garder avec les forces que nous avons^ quant elles seront bien réparties : par mesme nous leur poulrons donner grand empeschement de se pourveoir des choses nécessaires, estans tousjours sur noz gardes, et prévenans les desseingz dudictdon Joan, et surtout mectans .ordre, en toute diligence, que nous soions asseurez de la ville de Luxembourgh et Thionville, ainsy que j'ay touché en mon advis concernant le faict de don Joan, puisqu'il nous emporte, par-dessus toutes aultres choses, de les avoir entre noz mains, avant que l'on y pourveoye, ou que l'on nous este les moiens, chose que nous seroit grandement préjudiciable. Et toutesfois, nonobstant ce que dict est, je ne serois hors d'opinion de traicter avecq ledict don Joan, pourveu que, préallablement, il ait à faire retirer les Espaignolz, et nous ait donné asseurance de noz privilèges et libertez, en approuvant tout ce qui a esté faict par les estatz. Mais, avant de traicter, y fauldroit en veoir les effectz, car, aultrement, je crains que sans doubte nous tomberons aux inconvénients susdicts.

Quant à ce que requerrez que j'envoie quelques-ungz des estatz de Hollande et Zeelande, je ne fauldray à fajre toute diligence pour envoîer en Hollande, affin qu'ilz en députent quelques-ungz à cest effect.

Suyvant que m'avez escript touchant l'envoy de quelques compaignies, je n'ay volu faillir dy satisfaire, et, à cest effect, en ay envoyé quatorze ou quinze compaignies , lesquelles , cejourd'huy ou demain, seront toutes à Gand, vous priant de prendre bon couraige. ne doublant poinct que Dieu nous donnera l'îàsue désirée, faisans chascun nosire debvoir. Qui est l'endroict où. après avoir présenté mes bien affectueuses recom-

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mandations à voz bonnes grâces, je prie Dieu vous donner, messieurs, en santé bonne vie et longue. Escriptà Middelburgh» le xiiij" de novembre 1576.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Su9cription : A messieurs messieurs les députez des estatz du Pays-Bas, assemblez à Bruxelles.

Copie da temps, aux ArchÎTCS de la ville d*Ypret.

BIXVI.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il leur envoie le S' Charles de Beaolieu, afîo de connaître leurs intentions sur le libre passage des bateaux allant vers Flandre et Angleterre, ainsi que sur le fait des licences. -^ Il les prie de faire fournir Tëtain nécessaire à la fonderie de H alines, pour la confection de serpentines et de fauconneaux.

MiDDBLBOUaO, 10 DéCBMBaB 1576.

Messieurs, estant journellement iey sollicité, de plusieurs marchans et aultres personnes, aussy de quelques Anglois, Por- tugais et Italiens, de pouvoir mener leurs biens et marchandises qu'ilz ont encoires en Anvers, vers Flandres et Angleterre, pour, par ce moyen, les saulver des mains des Espaignolz, et précaver qu'une aultre fois ilz ne leur soient ostez, et que aul- tres aussi, sans le demander, passent journellement plusieurs batteauh avecq leurs biens d'Anvers O^ en quoy l'on me rap-

(>) Ce passage est iniQtelligîble; il doit avoir été mal copié dans les deux manuscrits.

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porte qu'il y a plusieurs biens appertenans auxdicts Espai- gnolz , et ne veuUant de ma part rien disposer en cecy qui pouroit tourner au préjudice de la généralité du pays, j'ay bien volu envoyer vers vous le sieur Charles de Beaulieu , présent porteur, pour vous remonstrer ce faict plus particu- lièrement, et vous prier que, Payant entendu, et mis l'affaire en bonne considération, me veuillez sur tout par luy mander vostre bon advis, affin que je sache comment en cecy me reigler.

J'ay de mesme donné charge audîct de Beaulieu de vous parler du faict des licentes, vous priant aussi d'y adviser, et r^rder quel pied on y pourra prendre, remectant la reste des affaires aux députez d'Hollande et Zeelande, lesquelz j'espère seront de bien brief prez de vous.

Donc, n'estant ceste à aultre fin, je vous présenterai icy mes très-affectueuses recommandations en vostre bonne grâce, priant Dieu vous donner, messieurs , en bonne santé heureuse ei longue vie. Escript à Middelbourg, ce x* jour de décembre 1 S76.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiLLB DE Nassau.

P. S. Messieurs, comme Roger Lestimmer, commis à la garde des munitions à Matines, m'advise, par ses lettres, que quatre demy-serpentines et six faulconaux se laissent è fondre, à faute de huit cent livres d'estaing, il plaira & mesdicts seigneurs faire ordonner de les achepter, pour faire fondre lesdictes pièces, et de mesme donner ordonnance de les monter incon- tinent, qui viendront fort bien à propos.

Copie du XVIII« siècle, i la Bibliothèque rajnle, HS. U2W, fol. 34, et du XVII* siècle, dans le MS. 7223 de la même Dibliothéqae, rol.79.

III. II

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DLXVIL

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

lis répondent sur les points que le seigneur de Si«-Aldegonde leur a remon- trés, de sa part, touchant le comte de Schwartzbourg , le choix d'an personnage de qualité en Allemagne pour tenir correspondance avec eux , la restitution qu^il sollicite de la ville de Grave, la soumission de Harlem aux états et au gouvernement de Hollande, et rassurent qu*ils veulent

. maintenir en tous ses points la pacification de Gand. Ils lui envoient le S* de Trelon, pour lui rendre compte de Tétat des négociations avec don Joan d*Autriche.

BaOXBLLBS, 17 DiCKMBBB 1876.

Monseigneur, ks grandz empeschemens survenuz par la ve- nue du S' don Joan et aultrement; nous ont causé que n'avons si tost respondu à plusieurs poinetz représentez tant par celles que Vostre Excellence nous a escript, du xix" de novembre, comme par le S' de S^^'-Aldegonde ('), à la sollicitation duquel

(1) Les lettres du prince du 19 novembre sont probablement celles dont il est question dans le procès-verbal de la séance des états généraux du ^ du même mois : « Le S' d*Aldegonde s*est trouvé auprès de messieurs les dépu- te2 des estatz du Pays-Bas , et , en apportant lettres de crédence de » monsieur le prince d*Orange, il a faict rapport de ces charges qu*il a eu » de Son Excellence de plusieurs poinetz. » {Réwduiiotu det élaU gêné'' raux, etc., 1. 1, p. 139.)

Quant aux sollicitations de Philippe de Marnix, nous avons trouvé, dans le MS. 9238 de la Bibliothèque royale, le mémoire suivant, qui fut par lui exbibé aux états généraux, le 13 décembre 1S7tf :

« I. A supplié avoir briefve et absolute responce sur les points par luy auparavant exhibez par escript, au n^m de H. le prince d*Orenges, aflin qu*il puisse s*en retourner selon la charge et commandement qu*il a,

m Et nommément, sur le poinct concernant M. le comte de Zwartzembourg, si Ton désire, ou non.

» II. Item, si Ton veut prendre quelque seigneur en Allemaigne en ser-

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avons avisé, touchant les offres du service et assistcnce de mons' le conte de Zwartsenbourg, de surceoir encoires quel-* ques jours nostre résolution^ pour ne la povoir donner abso- lute, jusques la responce oye des Espaignolz s'ilz vouldront obéyr au commandement de Son Altèze, et se retirer de ces pays : requérant bien affectueusement Vostre Excellence vouloir choisir et nous dénommer personnaige de qualité, soufBssant et propice, en Allemaigne, pour tenir correspon-

yice, pour dresser intelligence avec<{ les princes et villes, et employer en toutes autres occurrences.

> 111. Aussy a fait rencbarge i ce que la ville de Grave soit remise entre les outtiia de aatoadict seigneurie prince d*Orenges, suivant la teneur de Taccord de pacification.

IV. Pareillement, que ceulz de Harlem soyont deschargez de garnison, et, suivant ledict accord, remis et rejoinets avec le gouvernement de Hol- lande, moyennant que ledit seigneur prince d^Orenges donne contente- ment et satisfaction aux habitans sur les poincts dont ils ponrroient préten- dre estre grevez soubz sou gouvernement , si aulcuns y a desquels ils vouldroient se plaindre : le tout, cnsuyvant la teneur de la susdicte pacifi- cation.

» y. Il a aussy donné i entendre les bruits et adverlissemens que Ton a de tous costez des levées que don Jehan d'Autriche faict en toute diligence, alléguant à ce propos la lettre interceptée quemondict seigneur le prince lui a envolée.

» VI. Finallement, il a prié et remonstré que Ton ne veuille adjouter foy aux calomnies et faulx rapports que Ton sème de mondict seigneur prime, ou de ses gens, comme s*ilz cstoicnt contrevenus à aulcuns poincts de la pm-i- iication, à cause que ceulx qui les seimcnt, ne taschent que faire discorde et désunion ; et pourtant prie que Ton s'en informe bien à la vérité, et, du reste, que Ton se déporte de toutes défiances, et maintiène ledict contrat en tous ses points inviolablement, ainsi que ledict seigneur prince et ceulx de son party sont résoluz de faire de leur costel.

» VII. Maintenant, il n'a voulu laisser d'exhiber cy-joinct le descilTreracnt et déclaration du billet que luy a esté ballic, escrit, comme il présume, par le colonel Polviller et son fils.

VIIl. Suppliant aussi qu'il plaise à messieurs lesdicts estatz l'admettre pour, au nom de mondict seigneur le prince d'Orenges, onyr et entendre le rapport que feront messieurs venants de don Jehan.

PBILfrri DB MAtlTIX. »

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dence. et y foire les bons offices que Vostre Excellence a Tort bien et disertementconcheu.

Nous ne fauldrons tenir la bonne main que Vostre Excel- lence sera restituée et restablie en la possession de la ville de Grave appartenante à ycelle, qui aussy, doiz maintenant et sans aulcune difficulté, en poelt joyr, destituer et restablir tclz officiers, recepveurs des comptes et revenuz, et aultre- ment, saulf touttesfois les régales et aultres droicts que Sa Majesté y poeult aVoir, suyvant les lettres de fengaigement d'ieelle, ou aultrement. Nous avons requis le S' conte de Bossu, qui briefvement passe en Gheldres, de solliciter les villes de Harlem, Amsterdam et aultres, de se joindre promptement aux estatz, et entendre ce qu'elles vouldront proposer et pré- tendre à Tendroict de leur retour soubz le gouvernement de Vostre Excellence, saulf tousjours nostre saincte foy et religion catholicque romaine et l'obéyssance deue à Sa Majesté, pour, le tout entendu, en donner plaine raison et satisfaction à Vostre Excellence, en conformité du traicté de la pacification, que voulons et désirons entretenir et maintenir en tous ses poinctz et articles^ comme espérons et ne doubtons Vostre Excellence fera aussy de son costé : le veullant derechief bien asseurer que, de nostre part, ne sera donné occasion d'aul- cune discorde ou division, tant soit petitte. Et, sur ce, nous recommandans bien humblement à la noble et bonne gréce de Vostre Excellence , prions Dieu donner à icelle, monsei- gneur, en santé heureuse et longue vie. De Bruxelles, ce xvij* décembre 1S76.

Enthtèrement affectionnez au service de Vostre Excel- lence ,

Les estatz généraulx assemblez è Bruxelles.

Monseigneur, combien que avons requis au S' de Trelon de verbalement faire rapport à Vostre Excellence de tout ce

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que avons traicté avec le seigneur don Jehan , et oultrement communiquer à icelle les poinclz eonCenuz en 9011 instruction allant quant à ceste, si est que, à cause de la maladie dudict S' de Trelon, avons délivré le tout au S' de Auwegbeni, et^ endedans trois ou quattre jours, passera par Zélande mon- sieur le conte de Boussu, duquel Vostre E^cellenee entendra plus amplement nostre intention de bouche*

Copie lempt, «ax Arehivat da Royaane : L§ttn* dêttà GuiiUmmê de tftuUM, t. V, et aux Arahives de la ville d^Yprea.

DLXVIU.

INSTRUCTION DONNÉE PAR LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU S' DE TRELON (•), ENVOYÉ VERS LE PRINCE D'ORANGE.

Relation sommaire des nëgociatioiis des états avec don Juan d^Autriche.

BrUXBLLBS, i7 DSCBHBEB 1576.

I. Premiers; sera délivré k M. de Treslon l'instruction des estatz du xxiiij novembre f 576^ baillée h messieurs le prélat de St'Guilain, marquis de Havrech, baron de Liedekercke, de ce que, de par lesdicts estatz, ilz auroient à traicter avecq le seigneur don Jehan d'Austrice, à Luxembourg.

II. Item, trois copies contenants les remonstrances desdites députez faictes & Son Altèze, tant en vertu de ladtcte instruc- tion, que des lettres à eulx escriptes ; les responces, réplicques et résolutions ensuyvies.

(1) Louis de Blois, seigneur de Trelon, qui avait succédé, dans la charge de mailre de l*artillerie, au comte de Meghem.

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lII.Ck)piede la lettre desdicts députez auxdicts estatz, escriptc de Luxembourg le iîj* décembre 1 876.

IV. Oultre lesquelles pièces, lesdicts députez ont oy et en- tendu, par la bouche dudict seigneur don Jehan, en devises familières, ce que s'ensuyt :

Son Altèze a ouvertement, et par plusieurs fois, diçt qu'il avoit expresse charge , de par le Roy, de faire sortir la gen- darmerie espaignoUe : ce qu'aussy il promectoit et feroit, sans faillir à sa promesse, d'autant que tenoit beaucoup à sa parolie, et la vouloit garder véritable.

Confessoit bien que nous avons raison grande de nous plaindre et douloir des oultraiges des Espaignolz , comme avoit aussy souventes fois mesmes dict au Roy, mais ne sça- voit entendre que, puisqu'il apportoit vrays remèdes pour remectre le pays en paix et repos, que nous ne les voulions amplecter. Que, partant, nous estions expressément contre le Roy, par. non avoir voulu obéyr à celluy qu'il avoit envoie à si bonne J5n et intention , combien que Son Altèze le vouloit tout pardonner et oublier , si avant que nous mesmes le dési- rions et nous voulussions soubmectreàla religion catholicque et l'obéissance de Sa Majesté, comme estions tenus, et avons souventes fois déclairé; aultrement, vouloit bien déclairer qu'il nous apportoit la guerre : à quoy Sa Majesté ne fauldroit d'employer toutes ses forces et amis, aimant toutesfois mieulx assopir toutes choses par clémence et doulceur.

Et, par ce que le pays estoit en armes et en troubles, et que les seigneurs et magistratz n'estoient maistres de la com- mune, n'estoit merveille s'il demandoit avoir garde allemande.

Viendroit vers Marche en Famine, requérant que le conseil d'Estat et députez des estatz, en nombre compétant, vinssent a Namur, pour illecq achever les affaires de si grande impor- tance, qu'il ne povoit traicter sans ad vis dudict conseil.

Lors regarderoit de s^accommoder à la pacification déjà

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faicte, si avant qu*elle esloit raisonnable et point répugnante à la religion catbolicque roniayne ^ ny obéissance deue à Sa Majesté.

Que le Roy ouvriroit la voye de justice au prince d'Orenges, pour se justifier et puiser de son faict, comme souventes fois ledict seigneur prince avoit mesmes demandé au Roy.

Que, de par Sa Majesté , il avoit bien eu l'authorité de faire la pacification , mais n'avoit point charge de jurer celle desjà faicte sans le sceu du Roy et le sien, ne sçachant si elle estoit raisonnable, ou contraire à la religion catbolicque et autho- rifé du Roy : desqueb deux poincts il vouloit premiers estre asseuré, et lors aimeroit mieulx passer ce qui a esté faict par les estatz et le conseil d'Estat, et que se fera encoires par Tas* semblée générale desdicts estatz, que de le jurer.

Que, ayant sur ce que dessus communicqué avecq le conseil d'£stat et lesdicts estatz, pour sa descharge envers Sa Majesté, il ne doubtoit que serions bientost d'accord^ et qu*il se mectroit entre nos mains sans aulcune garde.

Sur ce que lesdicts députez disoient à Son Altéze estre advertis que M. de Strozzi, colonel général de Tinfanterie franchoise, avoit depuis naguaires deffaict douze cens. Espai* gnols qui s'estoient embarquez dans des vaisseaux de Portugal, pour, par quelque moyen que ce fust, faire descente en ce pays, et que Tadmiral de Portugal qui les conduisoit est prins pri- sonnier, Son Altèze a respondu, en vérité et bonne foy, n*en savoir rien, et croire véritablement qu'il n'en y a rien.

Et, comme lesdicts députez disoient avoir entendu que Son Altèze avoit donné commissions et retenues à quelques reytres de Mandesloot, ayans servi en France, il confessoit avoir accepté deux mille reytres, et retenu encoires aultres reytres en wartgelt : en quoy il pensoit avoir fait le vray debvoir de sol- dat, s'estant par ce moyen fait fort et asseuré contre les estatz, qui faisoient gens à tous costez , et , d'ung chemin , auxdicts

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estatz oster le moyen de s'en servir desdicCs reylres contre luy, mais que, par ceste bonne coojoincture , ne nous deb- vons doubler d'iceulx reytres, d'autant que, n'en ayant à ccst heure à faire, il les casseroit et licentieroit à bonne foy : nous promeclans aatre fois , à bonne foy, qu'il feroit indubi* tablement partir les Espaignols et leurs adbérans et eslran- giers gens de guerre, et ne vouUant faillir à sa parolle et promesse, à condition toutesfois que nous fissions aussi casser et partir les estrangiers par nous acceptez en service.

Nous priant que voulissions avoir confiance en luy, aultant que désirions son amitié, d'autant que la diffidence ne povoit estre avecq vray amour, et qu'il désire, non estre nostre gou- verneur, mais frère, amy et compaignon , et user en tout et partout de nostre advis et conseil, et nous faire tout le bien à luy possible, si' nous-mesmes le voulons; disant et répétant souventesfois : Messieurs, aydez-moy, je vous prie, conseiUez- moy, aydez-vous vo^-mesmes, et regardez devant voius; vestez- vous de ma robe et de mapeauf vestez ma personne, et nèoy de la vostre : veuUant , par ce, donner à cognoistre que , sy nous estions en son lieu, serions aussy perplexes que lui pour res- pondre, et nous descbarger envers Sa Majesté en affaires de si grande importance , ayant si petit nombre de gens de conseil auprès soy.

Disant ledict seigneur don Jehan que leKoy ne voloit avoir tué ne massacré l^icts Espaignols, mais les voloit en Bar- barie , pour estre tous vieux , fort bons et vaillants soldats ; promettant toutesfois d'en faire droict et justice de ceulx qui l'ont mérité.

Finalement, lesdicts députez ne sçauroient juger, sinon que ledict seigneur don Jetian procède en tout à bonne foy, rondeur et sincérité , et qu'il est venu pour remectre le pays en repos et sa pristine fieur, etc.

V. En ouhre, ledict sieur de Treslon fera tout debvoir de

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recouvrer pouldre d'artillerie pour les estatz y au plus grand prouffit que faire se poulra , jusques à la somme de trois mille florins, selon l'ordonnance par lesdicts estatz à cest effecC à lui baillée.

VI Requirera aussy Son Excellenoe ne ff»re ni laisser faire quelque hostilité ou incursion sur les villes de Hollande qui n'ont encoires déclairé se voloir joindre aux estatz, et estre oomprins à la pacification, d'autant que, vraysemblablement, icelles , ou aulcunes d'icellcs , sont esté empeschées de faire ladicte déclaration, par craincte des gens de guerre y estant en garnison ;

Du moings , s'abstenir desdictes incursions et hostilitez , jusqu'à ce que lesdicts estatz ayent sur ce leur déclaration : à laquelle fin, ilz envoyeront quelque personnaige de qualité vers lesdictes villes :

De tant plus que les lettres par messieurs du conseil d'Estat escrites tant à ceux de Amsterdam, Waterland et aultres, sont esté délivrées par un messagier de l'escuierie de Sa Majesté au président de Hollande Suys, en la ville d'Utreclit; sans qu'on sache si icelles sont esté envoyées aux magistratz des- dictes villes.

Vil. Touchant le seigneur comte de Buren , représentera à Son Excellence qu*il est mis en premier lieu de la liste des pri- sonniers de par decbà, pour estre relaxé.

VIII. A laquelle fin, se bailleront à mons' de Treslon copies des lettres de ceux de Harlem , Amsterdam et autres de Waterland qui déclarent se voloir joindre auxdicts estatz, etobéyr.à ce que messieurs du conseil d'Ëstat leur ordon* neront.

Fait à Brusselles, le xvij*" de décembre 1576.

Copie da XVIII* siècle, à la Bibliolhèqae rojale ; NS. 9238, fol. 43

170

DLXIX.

LE CONSEIL D'ÉTAT AD PRINCE D'ORANGE.

Il le prie de donner des ordres pour que tout acte d^hostilité soit suspendu contre les villes de Harlem, d*Âmsterdani et autres de Hollande qui vou- dront se joindre aux états généraux.

BiDXBLLBS, 18 OÉCBMBEB 1876.

Monsieur, les dépuiez des estatz généraulx estans assem- blez en ceste ville, nous ont faict entendre qu'ilz envoyent présentement quelque leur député celle part^ pour, entre aultresy vous advertir que le conte de Boussu suyvra, de cy à peu de jours, vers Haerlem et Amsteiredamme, pour les sol- liciter à se joindre avecques eulx, et nous ont requis vouloir accompaigner leurdict député de ce mot, pour vous faire sçavoir les dcbvoirz faictz avec lesdicts de Haerlem et Amstel- redamme, à TefTect susdict, qui est que, leur ayant esté eseript le xxij'' du passé, et réitéré le cincquiesnie du présent, n'en avons, jusques ores, eu responce, ne sçaehants si les messa- gers pourroyent avoir passé fortune par chemin , combien que, passé longtemps, ilz ayent eseript icy qu*ilz ne dési- royent rien tant que la pacification, si que ne faisons doubte que, les informant ledict conte de Boussu de tout ce que passe icy, ilz se résouldront promptement à Fadjonction et union avec les estatz généraulx, qui nous ont requis vouloir partant vous prier, comme prions d*affection, vouloir donner ordre que tout acte d'hostilité cesse et soit supersédé allencontre lesdictes villes et aultrcs d'Hollande, jusques à ce que se aura adverlissement dudict conte de son besoigné avec icelles. Et

171

là-dessus, prierons le Créateur qu'il vous ait, monsieur, en sa séincte garde. De Bruxelles, le xviij'' jour de décembre 1576.

Hiniite, am Arehive* da Rojsaat : LHtm dt ttàGwUUuÊmê tU Nuua», t. V.

un.

LE PRINCE D'ORANGE AU DUC D'ARSCHOT (').

Il le remercie de la eommonication d'une lettre intereeptëe de don Juan à Roda, et d*ane lettre du conseil dIStat à don Juan. Il approuve cette dernière, sauf en ce qui concerne les lettres interceptées, auxquelles, selon lui, il faudrait donner de la publieitë. 11 n'est pas d'avis que la cessation d'armes convenue avec don Juan soit prolongée.

MlDABLlOUaG, 19 DiCBMiaB iS76.

Monsieur, j'ay receu vostre lettre (*), ensamble les deux copies qu'il vous a pieu m'envoyer : Tune, de la lettre que le seigneur don Jean escrit & Roda ; Tautre, de celle que vous, messieurs du conseil d'Estat , escrivés audict seigneur don Jean. Dont certes je vous en remercie très-affectueusement, comme aus^i de la bonne correspondance qu'il vous a pieu tenir avecq moy, ensamble de l'asseurance que me donnez de vouloir icelle tousjours continuer, d'une affection entière et

(1) J'ai donné, sur ce personnage, des détails biographiques assez étendus <Ians ma Notice deê Archives de M, le duc de Caramany précédée de recherches historiques sur les princes de Chimay el les comtes de Beaumont, p. 22-31 .

{*) Celle du 10 décembre, publiée par M. GaocN van PainsTEaEa, Archives, etc., t V, p. 558.

172 ~

fraternelle, dont je me sens vostre bien obligé , et pour raison de quoy, je vous prie de vous asseurer que vous me trou- verez, en pareille affection, tousjours prest à vous faire ser- vice, partout il vous plaira de me faire la faveur de m'em- ployer.

Quant à la lettre que vous et mesdicts sieurs du conseil escrivés audiet don Jean (*), je trouve, monsieur, fort bon que

j(*) Cette lettre est assez importante pour que nous la donnions ici : « Mooseigneor, afin que tous feroomptes eessent, puisque la oonjoneture k laquèle Testai des afhires de par deçi se trouve le requiert ainsy, pour n*en faire faulte au Boy et à la fidélité que nous iuy debrons, d*aultant que s*agit de Iuy perdre totalement ou asseurer ces pays, nous ne pouvons laisser d*advertir Vostre Altèze que Ton a surpris et nous apporté vingt-six lettres d*îeelle, dont quatre estoient pour Hieronimo de Roda, des ^ et 2fi«, et deux du 27* de novembre, quelques-unes dupliequces, et les autres pour divers chefz de guerre espaignols, une pour le pagador Lexalde, deux superscriptes chascune aux trois ooronnels ensemble : PolvUler, Fransperg ci Charles Fugger, et une au due de Brunâvieq, avec aultres d'Octavio de Gonzaga, Diego Felices, don Alonso de Sottomayor, et aultres de la suitte de Voâtre Altèze; lesquèles, k grande difficulté, Ton a empesché, jusques içy, qu^elles ne vinssent aux mains des estatz : dont, toutesfois, comme iJz sont advertis, on ne sçait encoires si on les pourra bonnement sauver, vea la suspicion qu*ilz ont que Vostre Allèze ne procède de la sincérité qu*il conviendroit; faisans toutes recerches et diligences possibles pour s^acertener de son intention, et procéder tellement qu'il ne faull que Vostre Àllèze sVsbahisse si tous pacquetz et lettres s'ouvrent : car ilz ne sçavent que penser, voyans les longueurs, après tant de bonnes offres faictes par Vostre Altèze, de la part de Sa Majestié et sienne, en particulier, à divers qui ont parlé à icelle, tant au nom des estatz que de ce conseil, auquel monsieur de Ras- senghien a fait rapport que Sa Majesté cntendoit que Vostre Altèze, pour monstrer la confidence que le Roy vouloit qu*elle Ht de ceulz de ce pays, vint, avec ce peu de compaignie qu'elle amena d'fispaigne, de;icendre à la maison de moy, duc d'Arschot, et se conformant, en tout et par tout, à Tadvis de ce conseil, et ordonnant tout ce que, par ensemble. Ton adviseroit convenir pour la redresse et asseuranoe des affiûres de ces pays, avec expresse charge de faire retirer les Espaignolz, en cas que aullre chose ne se peut persuader ausdicts estatz; que Vostre. Altèze aussy feroit justice de œulx contre lesquelz il y auroit légitime plainte. Ce que, depuis, Baptiste Dubois, venant d*Espaigne dernièrement, et envoie par Voslre Altèze, non-seulement

i7Z

luy avez si clairement et rondement mandé vostre advis sur celle qu'il avoit eserit audict Roda, car, en ce teiiis, Ton ne

a reoonfermë de la bouche de Sa Majesté, mais eneoires qoe tout œcy s'exé- catast, orejt que tes estais ne posissent les armes, Telleinent qu*il leur semble qae (ayant envoie Sa Majesté Vestre Altèse en la manière qu'elle est sortie d'£spaigne, sçachant combien les Espaignols sont icy abhorris) ce ne debvoît estre son intention que Vostre Altize deut prendre en sa compaignie ledict don Alonso et Felices, ce qu^on a incontinent présumé venir du conseil de Tambassadeur d^Espaigne qui est en France, lequel Ton sçait estre tota- lement imbeu des opinions du feu grand commandeur de Castille et de Hieronimo de Roda, comme les correspondences qu'il a tenu avec cbascun d'eulz, tant du vivant du premier, que depuis, le tesmoignent. Ce que consi- dérant par Vostre Altèze comme il convient, elle jugera facilement qu'avons esté justement meuz à la supplier, comme la supplions, qu'elle ne gaste , pour quelques tels respects, voires fusse le sien particulier, pour seryir k la pompe et réputation que ces Espaignolz luy vouidroient mettre en teste, ce que Sa Majesté a ordonné et ordonne tant bien, se resentant (po»- sible) après en avoir fait trop dure expérience, de ce que feu l'empereur Charles cincquiesme, de glorieuse mémoire, père de Vostre Altèse (comme il y a longtemps que se dict communément en ces pays), l'advertit que la présumption des Espaignols seroit cause de luy perdre ses Estatx : car, de vray, l'ambition, finarderie et peu de vérité des Espaignols, que ung chas-* eun dict avoir eu par deçà, est auitant contraire de l'humeur de ce pays que le feu de l'eau, pour ce que icy il feult doulceur, affabilité, sincérité et vérité, tèlement que, si au contraire une fois ils se persuadent par deçà qu'on les veult mener, et, disant d'un, faire d'aultre, c'est parachever et conduire à totale perdition ce que reste. Et s'asseure Vostre Altèse qu'ils ne sont êi enfiuns, ny si simples par deçè, qu'ils se laissent mener par les nez comme buffles (quoy que les Espaignols en pensent et présument), quan<l une fois ils se persuaderont que il n'y a de quoy fier, ce qu'il fault craindre qu'ils ne doutent de Vostre Altèse, voyant qu'elle défend en publicq que les Espaignols n'aillent vers elle, et cependant elle leur correspond tous les jours, et prend et demande leur conseil, coomie l'on voit perses lettres \ requérant aussy Koda, en icelles, de luy envoier cifres, et, monstrant que nulles lettres vont de Vostre Altèse aux Espaignob, ny des Espaignols pour ieelle, que par icy, cependant, par aultres endroicts , l'on voit l'intelligence qui se tient. Vostre Altèze se souvienne aussy que le grand commandeur de Castille se perdit par là, s'estant laissé préoccuper du duc d'Alve, et, depuis, de Hieronimo de Roda, de qui l'on a trouvé plusieurs lettres pleines de men- songes, eseriptesau Roy roesme, tant audacieux est-il, lequel Vostre Altèze

174

peult traicter les affiùres trop ouvertement et sincèrement, puisque c'est le seul moyen que Ton doibt tenir en ces occu-

per ses lettres auetorise, et luy donne son lieu, qui est bien loing de désad- Touer ce qu^il a usurpé et fourfaîct. Car mesmes Vostre AUèze le loue, déprimant en effect ce conseil, et, devray, la lettre de Vostre Altèze, escripte à moy,Ie duc d^Ârschot, datée le 211* du passé, donne assez à soupçonner que Vostre Âltèze n*a pas Topinion de ce cohseil que, de raison toulesfois, elle debvroit avoir, combien que le Roy, par les lettres que Vostre Âilèse mesme a envoie, apportées d^Espaigne par le secrétaire Vasseur, monstre bien à qui il défère plus. Vostre Altèse aussy, par toutes ses lettres interceptées, se faict commun avec les Esptignols qui sont par defè, ea leur cassa, comme si elle tenoit ceulx de ces pays pour ennemis de Sa Majesté, Icsqueli ne le sont aucunement, mais bien professent-ilz Tcstre des Ëspaignolz et de leurs vices, lesquels ilz disent que, pour servir à leur ambition et convoitise, ilz ont trahi le Roy et ses pays. Et, à ce compte, si les estalz parvenoient à ces lettres, Vostre Altèze se peult imaginer combien ilz penseroient estre loing du chastoy qu^ilz se promettent des Espaignolz, par le moien de Vostre Altèze, puisqu^icelle, par ses lettres à Sancho d^Avila, non-seulement excuse, mais quasi advoue Tadvenu en Anvers, et à Roda le mesme ; et Vostre Altèze, par ses lettres aux coronnels allemans (aueteurs, avec Sancho d*Avila, de tous les troubles et commotions nous nous voions), loue leur conduite, et les remercie de celle-là, et de leur fidélité envers le Roy. Escrivantaussy, en la sorte qu'elle faict, à la pluspart de ceulx pour lesquels nous avons les lettres , les consultant éncoires pour avoir leur advis , est loiog de les esti- mer coulpables de lèse»majesté, et traistres à Sa Majesté, comme les estatz prétendent, et de faire déclarer les coronnels schelms à PEn^pire : car Vostre Altèze pourra veoir Tintention des estatz en la requeste qu*ilz présentent sur le sacq et massacre d'Anvers, et par certain escript qui contient ToccasioD de la séquestration d'aulcuns dudict conseil, et en ung extraict àe ce qu'ils font remonstrer à TEmpire contre les coronnels. Ce que nous faisons sçavoir à Vostre Altèze, pour luy faire mieux entendre en quels termes nous som- mes, et luy dire, pour nostre descharge, que, par dilayer les moyens que Vostre Altèze a déclaré avoir en charge, et monsieur de Rassenghien, et, depuis, Baptiste Dubois, envoie par Vostre Altèze, ceulx que le Roy veult user, si Vostre Altèze se veult fier des Espaignolz icy, et suyvre leur advîs, les voulant porter et favoriser contre ceulx du pays, qui, avec tant de raison, ont faict leurs plaintes contre eulx à Vostre Altèie, ce sera la cause de perdre ces pays, et possible la religion, et d*y faire appeler les estrangiers,. pour s'exempter, comme ilz disent ouvertement, de la tirannie et oppression des Espaignolz. Dont nous ne pouvons laisser 4'aussy advertir le Roy, et de ce

175

rences. Qui est cause que je vous diray librement, sur le poinct vous faictes entendre qu'avecq grande difficulté Ton

que se passe, afin qu*il sçache noz debvoirs, el nous tienne descoulpez de ce que adviendra, si cecy doibt traîner en ceste sorte les efficaz effcctz promis, desquelz seulz, et de la ^lérité, dépend, sans plus, Tespoir et saint des aflaires ausquelz nous nous trouvons, et non en négociations, envoyz et renvoyz pleins de soupçon : se persuadans les estatz que, par cecy, Vostrc Altèze les veult endormir, faisant gens à tons costez, dont Ton voit quelque chose ansdictes lettres, et que Vostre Altèze attend argent pour conforter ceulx qui ont brnsié, pillé et massacré partout, violans tons droictz, lois et jnstice : ce qu*i!z ont opinion que Dieu, à la fin, ne vouldra plus permettre. » Monseignnir, nous baisons tris-humblement les mains à Vostre Altèze, et supplions le Créateur Pînspirer comme il convient pour son service et celluy de Sa Majesté, et le repos et tranquillité de ce pays. De Bruxelles, le viij* jour de décembre iK76. «

Le 10 décembre, le conseil d'État écrivit encore à don Juan : « Monseigneur, à peine estoit hier sorti de ceste ville le courrier avec nostrc lettre du jour précédent, par laquelle advertissions Vostre Altèze des siennes interceptées qui nousavoyent esté apportées, que les estatz assambiez en ceste ville envoyarentvers nous leurs députez, nous remonstrer qu'ilz estiont certainement advertiz de Tinterception desdictes lettres, et nous requérir, avec fort grande instance, d'en avoir vision et lecture, laquelle ne voyants comme leur pouvoir refuser, envoyasmes vers eulx le S' de V^ilerval pour la leur faire, comme a esté faict, avec leur grande altération , après avoir entendu le tout, comme disions à Vostre Altèze que nous nous en doublions grandement. Et avons bien volu en advertir Vostre Altèze, afin qu'elle sceut ce que passe en cest endroict, et qu'il n'a esté excusable, en façon possible, leur eommunicquer lesdictes lettres : suppliants partant Vostre Altèze con- sidérer le tout comme il convient, et une fois adjouster foy è ce que tant luy avons escript estre requis d'accélération & s'accommoder à ce que luy avons représenté, estants en très-grande doubte que la dllation en cela, jusques à présent, sera cause de desservice irréparable à Sa Majesté. Que pleust à Dieu

que Vostre Allèze fust esté servie de le croire dois la première heure »

Don Juan répondit le 12 :

« Et, quant à ce que m'escripvez que, par mes lettres intercep- tées, il samhle que j'advoue le faict des Espaignolz et aultres estrangers. Dieu me garde, comme il m'a gardé jusques à ceste heure, d'advouer chose mal faicte. Mais vous devez considérer que, m'aiant Sa Majesté donné charge de faire sortir hors ces pays lesdicts Espaignolz, que son intention n'a pas esté que l'on les massacra, ains bien les renvoya, pour estre employez ail-

I

176

a empesché jusques icy que les lettres interceptées ne vinssent aux mains des estatz, etc., que cela poura sambler estrange à plusieurs, et engendrer quelques soubçons, lesquels, à mon advis, seroit beaucoup meilleur d'éviter, que de faire accroistre : vous suppliant très -affectueusement, monsieur, prendre de bonne part ce que je vous en dis, comme procédant d'une sincérité de cœur et d'une amitié fraternelle que je vous porte.

Quant à ce qu'il vous plaist me demander advis pour accorder quinze jours de prolongation pour la cessation d'armes, je ne vous en puis escripre aultre chose que ce que j'ay plusieurs fois mandé à messieurs des estatz, que je pense vous aurez veu, et en quoy encore présentement je persiste, d'aultant que toutes ces prolongations sont très-dangereuses, et qu'elles ne peuvent estre suivies que de très-peniicieuses conséquences.

Le meilleur seroit de se résouldre promptement , veu mesmement que, de leur costé, ilz font tous préparatifz : en sorte que si, du nostre, nous n'advisons à nostre faict, je crains que nous nous trouverons tellement surprins, qu'il sera trop tard à y povoir mectre ordre, et prévenir les inconvéniens qui nous menacent de bien près ; ausquels , Dieu m'est tesmoing, j'ay tousjours désiré et désire encore d'obvier par tous les moyens convenables et certains, comme aussi je m'as- seure que vous y tiendrez la bonne main. Qui me gardera de faire ceste plus longue, priant Dieu, après m'estrc recom- mandé très-affectueusement à vostre bonne grâce, vous donner,

leurs en son service. Bt, partant, ne debves trouver estrange que, en les condempnant en ung endroîct, j*excuse leur Intime deffense en PanUre, et je ne procure d*estrc cnnemy de nulle nation, vous priant vouloir consi- dérer, par voslre prudence et discrétion, ce que requièrent toutes affaires d*Estat, et nomméement de telle et si grande importance et conséquence que sont celles à présent » {Papiers d'Éiat.)

-• 177

Monsieur, en santé bonne vie et longue. Eseript de Middel* bourg, ce xîx* de décembre 1 576.

Voire très-affeclîoné aniy à vous faire service ,

GuiîXe de Nassau.

Copie du XVTII* siècle, à U Bibliolhéqoe royale : MS no 0238, foi. 58, et da XVII« siéele, dans le M S. 7223 de U même Bibliotbéqae« fol. 93 t».

DLXXL

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils lui signaleot diverses infractions à la pacification de Gand commises en Hollande, et le prient de les redresser. Ils Tinforment d*une proposition qne leur ont faite les ambassadeurs de TEmpereur et du prince de Liège, et ajoutent qu*ils attendent la réponse définitive de don Juan.

Naiiur. 31 oécBMBRk 1876.

Monseigneur, nous avons entendu que ceulx de Hollande auroient déclairé ceulx d'Amsterdam, Haerlem, Weesp, Afuyde et Schoonhoven pour ennemis, nonobstant qu'ilz et leurs soldatz se soient joinctz et déclairez unis avecq nous, doiant partant joyr du bénéfice de la pacification arrestée en- tre nous ; pareillement, que les soldatz d'Oudewaetere (0 se desbordent et saccagent les églises et imaiges illecq. Qui nous

(1) Voy. les Réêolutionê des états généraux, publiées par Af. de Jongc, 1. 1, p. ifii.

III. la

1

178 -

a causé vous prier et requérir bien instamment de y vouiloîr meetre et donner l'ordre qu'il convient, à ce que aulcun inconvénient ou désordre ne s'eslève de ce costé-Ià, veu que sommes délibérez^ comme plusieurs fois avons asseuré Vostre Excellence, de maintenir ladicte pacification en touts ses poinctz et articles^ comme espérons aussi que sera faict de la part d'icelle et desdiets de Hollande et Zélandc.

Il plaira à Vostre Excellence d'entendre que les ambassa- deurs de l'Empereur et du prince' de Liège nous sont hier venuz trouver en ce lieu, nous proposant la charge expresse qu'ilz ont d'assister à traicter et apoincter avecq le seigneur don Jehan, demandant si, pour un si grand bien ^ ne voul- drions aller & Huy^ pour communicqucr avec Son Altèze. A quoy avons respondu qu'il suffit de l'avoir honoré plus que nul autre prince, en estant venuz à telle compagnie jusques aux extrémitez des pays de Sa Majesté. Et ainsi se sont enche- minez, avecq noz députez, vers Sadicte Altéze, pour entendre ceste derniè)*e fois sa résolution absolute, qu'attendons d*heure à aultre, délibérez néantmoings de partir d'iey endedaas deux ou trois jours. Cependani prions Dieu le Créateur donner à Vostre Excellence y monseigneur, sa sainte et digne grâce, nous recommandans bien humblement en la bonne faveur d'icelle. De Namur, ce dernier de décembre 1576.

De Vostre Excellence très-humbles et affectionnés en

service ,

Les estats généraux du Pays-Bas.

Par charge expresse desdiets estatz : Cornélius Wbellbmans.

Cé|ne da XVUI* tiMe, à !■ Bibiiothéqve ro^e, MS. n* 9238, fol. 74, etda XVII* «éde, dans HS. 7233 de la néme Biblioih4qve, fol. 122 to.

179

DLXXIL

PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il les avertit des approvisionnements que font les Espagnols qai oceupeut

Anvers.

MlDDBLMVta, 15 JAlIVIBt tS77.

Messieurs, j'ay entendu que les Espaîgnolz font journelle- ment mener, des quartiers de Breda^ Berghes et aullres lieux, force grains vers la ville d'Anvers : qui donne assez è présu- mer qu'ilz n*ont guerres intention de se partir, ains que plus- tost ilz tâchent à se pourveoir pour longtemps : ce que je n'ay vollu laisser de vous advertir, afBn que y donnés tel ordre que pour le service de la patrie vous trouvères convenir. Et à tant, je prie Dieu vous donner, après m cstre bien affectueu- sement recommandé à voz bonnes grâces, messieurs, en santé bonne vie et longue. Ëseript à Middelborg, ce xv"* de janvier 1577.

Vostre très-affeetioné amy et patriot à vous faire service,

GuiUE DE Nassau.

SttëaiptioH : A messieurs messieurs les députez des estatz généraulxdu Pays-Bas, présentement assemblez à Bruxelles.

Copie du temps , à la Bibliothèque de la Chambre dca Représentants : RetueU dt fiècn rtUuive» aux #rat« généraux, 1576-1580, t. I, fol. 12U.

180

DLXXIIL

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

lis envoient au prince et aux états de Hollande et Zëlande Elbertus Leoninus et Frédéric de Boyemer, pour traiter avec eux concernant Amsterdam, Harlem, Schoonhoven et quelques autres villes de Hollande.

BaUXBLLlS, 16 J4KVIM !l{77*

Monseigneur, de la part des députez de Harlem, Amster- dam, Sehoonhoven et quelques auUres villes et places d'Hol- lande, nous a par plusieurs fois esté remonstré comme icelles sont, par les gens de guerre de Vostre Excellence et des estatz d*Hollande, molestez, travaillez, voires expugnez, comme s*ilz fussent ennemys publicqs du pays, touttesfois ilz ont ouvertement, en ceste nostre assemblée, désiré estre joinctz, uniz et associez avecq les estatz généraulx des Pays-Bas, et déclairez pour telz debvoir cstre admis , en vertu de la paci- fication. Or, comme avons opinion que en cecy il y a quelque malentendu entre Vostre Excellence et eulx, que se pourra facillement vuyder par communication, vous avons bien voulu advenir, par cestes, qu'avons député vers Vostre Excellence et estatz de Hollande mess" Elbertus Leoninus et Frédéric de Boyemer (•), docteurs es droictz, pour traicter et moyenner le susdict affaire, lesquelz fineront en deux jours ; prians que, jusques à leur venue, et jusques avoir entendu ce que de vostre pari ilz traicteront avecq Vostre ExcellencCi plaise à îcelle faire cesser les armes et tout acte d'hostilité : espérant que nosdicts députez donneront è Vostre Excellence et ausdicts estatz tout contentement raisonnable.

(') Voy, les Résolutûmê dw était génémnx, etc. , t. II, p. 19.

i81

Monseigneur, nous supplions le Créateur vouloir conserver Vostre Excellence en bonne prospérité^ nous recommandant affectueusement à la bonne grâce d'icelle. De Bruxelles^ ce xyj* de janvier 1577.

De Vostre Excellence les très-affectionnez en service,

Les estatz généraulx des Pays-Bas assamblez à Bruxelles.

Smcription : A monseigneur monsieur le prmce d'Oranges.

Copie du temps , lUX Arehivet de la Tille d^Ypres.

Diniv.

INSTRUCTION POUR LES SEIGNEURS DE HAUTAIN ET DE MANSART (•), ENVOYÉS PAR LE PRINCE D ORANGE A BRUXELLES.

Plaintes des bourgeois de plasieurs Tilles des Pays-Bas contre la mauvaise direction des affaires. Idée, mise en avant , de se saisir de nouveau de ceux qui sont à la tête du gouyemement, et de rompre les négociations avec don Juan d'*Autriche.

MlDDBLBOUBO, 17 JAMVIIE XUfTî*

Instruction f ponr messieurs de ilauUain et de JUansard, de ce qu'Uz auront à dire et représenter , de la part de monseigneur le prince d'Orange, à messieurs le conte de Lalaing, le sénesehal d'Haynau, le viconte de Gand, de Moniigny, de Hèze, de Beerssele, de NoyeUes, de Glimes et de la Motte,

Premièrement , lesdicts seigneurs de Haultain et de Man- sard présenteront les très-affectueuses recommandations de

f ) Alexandre de Zoete , S' de Hautain , rt Guillaume de Maulde, S' de Mansart. De Zœte avait déjà été envoyé par le prince vers ic comte do L«aIaiog, le 28 décembre 1576. Voy. Archives, etc., t. V, p. 579.

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mondict seigneur le prince aux bonnes grâces des seigneurs susdicts.

Après, ilz leur.déclareront que ce que ledict seigneur prince les a envoyé devers eulx, ne procède d'aultre chose, que de la grande affection qu'il porte, tant à eulx en leur particulier, comme à la patrie en général , à cause qu'il voit que mainte- nant il s*agit du salut, conservation et délivrance d'icelle, ou* bien de sa ruine, désolation et servitude à jamais, et que ledict seigneur prince ne se fust encore iiasté i leur envoier son intention, s'il n'eut eu certaines advertences, tant d'Aile- maigne, que de France, Lorraine et d'ailleurs, des grands préparatifs de don Joan , au grand intérest d eulx et de nous tous.

II y a encores ung aultre poinct qui Ha meu : c'est que plu- sieurs bourgeois, Lint de Bruxelles et Gand que d'aultres villes, luy sont venu plaindre le mauvais ordre qu'il leur samble que l'on donne aux affaires : leiir estant advis que l'on ne cerche aultre chose que de les mener à la boucherie,, et sur ce ont demandé et instament sollicité d'avoir ladvis dudict seigneur prince, lequel ne leur a rien voulu respondre, ! sans avoir préallablement eu l'advis desdicts seigneurs, afin que toutes choses aillent avecq uug bon accord d'intelligence!

Or, leurs plaintes sont, en premier lieu, qu'ilz ne peuvent avoir grande fiance d'aulcuns magistralz et pensionnaires estans en l'assemblée des estatz, à cause qu'ilz sont entière- ment faictz de la main de ceulx qui ont porté le parti du ducq d'Alve et des Espaignolz; secondement, qu'ilz voient tes affaires de jour à aultre dilayéeset suspendues: qui ne peult que redonder i leur entière ruine et perdition , veu qu'il . appert manifestement que par ces dilais les occasions de bien faire escbappent sans fruict, nonobstant que le pays.se mange par la gendarmerie j et; cependant, don Joan se fortifie, pour, à la despourveue, les accabler tout d'ung coup ;

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Qu'ilz voient aussi que, par loulcs le$ villes, il y a des ^ens qui ne font que persuader le peuple d'abandonner les estatz et se retirqr vers don Joan , avec grandes promesses d*ung eosté et d'aultre, avec menaces contre ceuh qui se sont mons- tres volontaires et affectionnez aoxdicts estatz et à la liberté de la patrie;

Qu'ilz voient plusieurs choses , qui seroient nécessaires de venir à la cognoissance des estatz généranh , esire par tous moiens cachées et couvertes ; dont l'on ne peult recueillir aullre chose, sinon que Ton y pro<5àdé de mauvais pied; '

Que le bruiet est que plusieurs ont receu grandes pro- messes, mesmes qu'il y en a quelques-uns qui .desjà ont pensions , pour aider à tromper le povrê peuple et habitans des villes;

Qu'en ce temps il y a si grands et pesans affairés è la main, Ton voit qu'une bonne partie de eeulxqui doibvent gouverner, ne s'adonnent qu'à boire, et passer le temps inutilement ;

Qu'il y 'a grand désordre et inégalité à rassamblée des estatz , en ce qui toTichc^ le recueillement des voix , pour ce que une ville de Malinés, ou de Lille, et aultres semblables , qui sont comptées pour provinces h part ^ ont aultant de voix qu'un pals de Flandres, Brabant, Hollande et aultres qui sont plaines de villes ;

Qu'ilz tiennent entre plusieurs une grande irrésolution et inconstance , qui ne peult sinon à la parfin amener une totale perdition et ruine sur ee povre pais, d'aultant plus qu'ilz voient que ceulx qui se sont monsbrez les plus affectionnez ù la pairie et à la liberté d'ioelle , sont maintenant reculez et cassez, et comme abandonnez à la mercy de li^urs haineux et malveillans : dont le peuple prend conjecture de ce que. peu- vent attendre eeulx de la commune qui s'en sont meslez plus avant;

Aussi, qu'ilz voient manifestement que le traîelé de la paci-

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fication ne s'observe pas, mais que, contre toutes promesses falotes , Ton passe tousjours oultre à traicter avec don Joan, mesmes qu'on reçoit ses commandemens, tout ainsi comme si desjà il estoit advoué et déelalré gouverneur général du pays, nonobstant qu'il n'ait rien accompli de tout ce qu'on luy a mis en avant, et mesmes que l'on voit évidemment qu'il n'est aulcunement délibéré de Faccomplir : chose directement con- traire à tout ce que Ton a, de par tous les estaiz, promis et tant de fois ratifié, et sur quoy tout le traicté de ladicte pacifi- cation a esté fondée basti et arresté.

Telles semblables choses, dont iiz font ung grand et parti- culier dénombrement, les rendent si estonnez, qu'ils nesçavent quelle résolution prendre.

Et sont apparents de se jecter à l'abandon, et , pour sauver leurs vies , biens, femmes et enfants, à la fin , comme par désespoir, se résouldre sur l'ung de ces deux poincts, assça- voir : ou de prendre les armes à la main , de leur authorité propre, ou bien se ranger du costé de don Joan : car, voians que aultrement ilz demeureront louflDurs suspendus entre le ciel et la terre, n'attendans que le coi^ de la mort, ilz aiment mieulx , en prenant party, se jecter à l'abandon , que de demeurer plus longtemps en ceste perplexité , de laquelle ilz ne peuvent attendre qu'une certaine ruine.

Or, est-il à considérer quels inconvénients et désordres sont à craindre, si l'on laisse le povre peuple en ce désespoir, vcu que, tant d'ung costé que d'aultre, l'on n'en peult attendre qu'une horrible désolation de nostre povre patrie. El toutes- Ibis, prenant regard aux cruelles injustices et tyrannies usitées du (emps du ducq d'Alve et de ses successeurs, et voiant qu'à présent l'on est sur le pied de tomber au mesme inconvénient, Ton ne peult trouver eslrange ceste crainte et sollicitude du povre peuple , désirant en temps y pourveoir, sans y tomber une aultre fois.

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Et samble, à la vérité, que tous cœurs généreux doibvent rendre peine et meetre toute leur eslude k consoler, ayder et conseiller ledict peuple tout perplex , et embrasser tellement cest affaire y et avec tel chaleur et ordre, que l'on le puisse tirer hors de ce trouble, eslonnement et deffiance, et mener à ung repos et tranquillité , luy donnant occasion de remectre en toute confiance ses affaires entre mains de gens tellement ydoines et qualifiés pour mener un tel faict, que l'on puisse éviter qu'ilz ne viennent à la résolution susdicte, laquelle ne pourroit sinon apporter d'ung costé ou d'aultre une piteuse issue.

Cela est la cause pourquoy mondict seigneur a envoie les- dicts seigneurs députez vers eulx , pour leur représenter les choses bien vivement , et aultant particulièrement que faire se pourra ; les priant bien affectueusement et obteslant, sur le debvoir qu'ilz ont à la patrie et à leur propre salut, qu'ilz veuillent y adviser à bon escient, et penser à quelques bons et prompts remèdes, et qu'iceulx soient mis en exécution sans aulcun dilay ou retardement. Que ledict seigneur prince ne fauldra , de tout son pouvoir, à les suivre et seconder, en- sarable et ceulx du pays d'Hollande et' Zeelnnde, qui sont totalement affectionnez et résolus d'ensuivre et tenir tous et quelconques les poincts de ladicte pacification, sans y contre- venir, ou souffrir qu'il y soit contrevenu en façon quelconque.

Que, si lesdicts seigneurs conte de Lalaing, séneschal de llaynau, vicontc de Gand, de Montigny, de Hèze, deBers- sele, de Noyelles, de Glimes et de la Motte, ou par ensamble, ou quelqu'un à port , proposent quelques bons et prompts remèdes, par lesquels il y ait apparence de pouvoir remectre les affaires en estât, lesdicL<{ députez ne fauldront à inconti- nent en advertir Son Excellence, ou bien l'ung d'eulx se viendra retrouver vers luy, afin que, l'affaire estant commu- nicqué, l'on le puisse, quant et quant, mettre en exécution.

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Mais^ si lesdicts seigneurs ne veuillent ou ne puissent pour rbeure meltré quelque prompt remède en avant , et qu^ilz désirent en entendre Tadvis dudict s^gneur prince , lesdicts députez leur déclareront ce que s*cnsuit, assçavoir : '

Que Son Excellence a esté , par plusieurs et diverses per- sonnes bien affectionnées au publicq , requis et instament solUeité de consentir que Ton peult s'asseurer des personnes principalles qui sont aujourd*huy au gouvernement et du conseil d*Estat, comme de ceulx desquels l'on a opinion en commun qu'ilz cmpeschent et recullent radvaneement des affaires susdicts, et monstrent, ou avoir intelligence secrète avec don Joan , ou eslre mal affectionnez à la liberté de la patrie y ou bien n'estre idoines à conduire, un affaire de telle importance, mais que môndict seigneur le prince n*a jamais voulu permectre une telle chose , craindant quelque plus grand désordre, et pour ce qu'il ne peult juger asseurément ce qui eh est à la vérité.

Et toutesfois , si lesdicts seigneurs mesmçs trou voient bon de le faire, soubz condition que nul mal adviendroit auxdictes personnes asseurées, ains seulement qu'ilz seroient tenus en seure garde, jusques à ce que quelque meilleur ordre fust establi, ledict seigneur prince le remect à leur bonne discré- tion , confessant , pour sa part , qu'il ne sçache à présent meilleur et plus souverain remède aux inconvénients susdicts, lesdicts seigneurs le trouvassent convenir, et non aultre- ment.

Que si , au contraire , ilz ne trouvent pas bon de procéder par ceste voye, et que toutesfois ilz ne sçachent eulx-mesmes mectrc nul moyen en avant qui puisse donner remède à ce que dict est, en tel cas, lesdicts seigneurs députez remonstre- ront ausdicts seigneurs susnommez que , puisque tous ces inconvénients susdicts, avec une infinité d'aultres qui nous talonnent de bien près , sont procédez du traité et communi-

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cation que l'on* a tenue avec don Jloan, il est impossible de les oster ou remédier, sans rompre du tout et à plat ceste n^ociation^ et totalement se résouldre à jamais plus ne Touîr en façon que ce soit , tenant pour enneinis de la patrie ceulx qui entreront en communication avec luy, ou quelqu'un de sa part, jusques h tant que les EspaignoU soient préallablement sortis de pays , et la pacification accordée^ ratifiée et effectuée en tous ses poincts, le faict des estatz advoué, et les privilèges redressez. Et, comme ainsi soit que toutes les ligues et asso- ciations faictes du passé tendent à ce mesme but, insisteront vers lesdicts seigneurs conte de Lalaing, séneschal de Hayn- nau, viconte de Gand et aultres susdicts, de se joindre, en ceste cause, avec mondict seigneur le prince et les estatz de Hollande 'et Zeelande, et se faire ung chascun fort des pro- vinces et villes de son gouvernement, et gentilzhommes de sa suite, sur l'asseurance certaine que ceulx de Geldres, Frise et Groeninge ne fauldront à se joindre ; et tascheroht , par tous nioiens possibles , les susdicts députez d'en avoir asseurance desdicts seigneurs, soit par escript, ou aultrement. Faict à Middelbourg, ce xvij* de janvier 1577.

ArchJTet d«s Affaires élraafèrcs, i Paris : NS. intiluléPayfJSM, 154»-lS63,fol 13.

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DLXXV.

LE PRINCE DORÂNGE A HENRI DE BLOEYERE.

11 le prie d'assister les S^ de Hautain et de Mansart dans leur mission à

Bruxelles.

MiDDBLBOUaO, 17 JANTlBa 1577.

Monsieur du Blouir, envoiant présentement vers BruxeHes les sieurs d'Hautain et de Mansard, pour représenter quelques poincts i aucuns seigneurs et gentilhommes de par delà, et sachant la bonne affection que vous portez au bien général de nostre pairie, je les ay enchargé de les vous communicquer, vous priant là-dessus bien particulièrement leur volloir faire entendre vostre bon advis, ensamble de les assister en ce que vous sera possible, et au resie les croire en ce qu'ilz vous diront de ma part. A tant, je prie Dieu vous donner, monsieur du Blouir, en santé bonne vie et longue. Escrit à Middel- burg, ce xvij* de janvier 1577.

Vostre bien bon amy à vous faire plaisir,

GuiîXe de Nassau. SuscriptUm : A monsieur monsieur du Blouir.

Original , aax ArehÎTcs du Royavme : MS. intitalé Piitts Al ingUmê «iMe, t. Il, fol. 675.

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DLXXVL

INSTRUCTION DBS SEIGNEURS DE HAVRE, DE LALAING, DE FRESIN , DE BERSELE ET DE HÈZE AU SIEUR DE BLOEYERE, ENVOYÉ VERS LE PRINCE D'ORANGE.

nUîmatum envoyé par les états généraux à don Juan.-^Résolution d'appeler le prince, en cas de rupture avec don Juan, et de lui donner toutes les g;arantîes qu*il peut désirer. -— Nécessité de Punion.

BauxuLis, 83 JARViia ISI77»

indrueUon $t mémoire de ee que U eieur Henry de Bloeyere, de la part des eeigneurs êoubsignés, aura à déclairer à moniteur le prince d'Orainge,

Premiers, lediet de Bloeyere présentera à mondiet seigneur le prinee ses lettres de erédenee, avecq les affectueuses recom- mandations desdicts seigneurs.

En oultre, remonstrera audict seigneur prince qu'il ne veulle imputer à faulle d'affection que lesdicts seigneurs n*ont^ en ceste conjointure, plus souvent escript, d'aultant que ilz ont esté tenus en suspens par la venue de don Jehan, et la diversité des humeurs et opinions que sur icelie sont tombez aux estatz généraulx.

Mais, s'estant assez manifestée Tintention et volunté dudict don Jehan peu favorable au pays, par plusieurs et divers moyens, lesdicts estatz générauh et lesdicis seigneurs ont esté résolu de ne plus négocier ny traicter aveCq icelluy don Joan.

Toulesfois, ayant lediet don Joan escript lettres à ceulx du conseil d*Estat, affin de se trouver à Hoye ('), pour leur communicquer chose importante, et après ayant requis que lesdicts esiatz généraulx y voulsissent joindre leurs députez, il

«

(') Huy.

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a esté aiivisé et accordé qiie, pour la dernière fois, seroient envoyés vers ledict don Joan certains députez, avec limitation qu'ilz ne pouroient besoigner avecq ledict don Joan, plus de quattre jours, sur Tcffectuel furnissenoent de ses promesses, selon qu'est plus ampiement porté par leur instruction, qtie ira quant à ceste*

Néantntoins, ayant lesdicls seigneurs soupçon légittime et bien probable que ledict don Joan ne satisfera aulcuiiement à ses promesses à faire sortir les Espagnolz et leurs adhérens hors les pays, ou pour le moins hors les villes et forteresses par eulx occupées, mais que ces entrëveues et communica- tions luy servoient seulement de dilay pour cependant gain- gner aulcungz desdicts estatz, et les mettre en division, ilz ont, en pleine assemblée desdictz estatz , reprins et remis en délibération ce point de prier ledict seigneur prince qu'il se voulsist joindre avecq eulx en leur conseil et assemblée : ce que a esté accordé et résolu par tous lesdicts estatz , moyen- nant que Ton tarderoit quattre jours, pour s'accommoder à la précédente résolution et envoy desdicts députez.

Dont lesdicts seigneurs ont particulièrement voulu faire advertir ledict seigneur prince, ensemble de ce qu'ilz ont depuis résolu appart , et en adverty mons' le duc d'Arsehot par lettres, comme se peult voir par la copie d'icelles (■). Et, pour satisfaire à mondict seigneur prince de bonne asseu- rance, ilz sont résoluz de luy faire ouvrir le chasteau et ville de Gand , et y mettre telle garnison comme bon luy semblera^ soit de ses propres soldatz, ou aultres ;

Qu'ilz feront aussy debvoir de luy faire avoir le passaige par la ville de Termonde. et y mettre telle garnison comme dessus ;

Qu'il aura aussy, en la ville de Bruxelles et aultre part, telle garde comme il choisira ;

(>) Elle ne se trouve pas dans le manuscrit d^où cette instruction est tirée.

Î9I

Et promettront cl jureront lesdicts seigneurs ijue ne sera riens attenté sur la personne dudiet S' prince, et qu*ilz rempesche- ront et vengeront jusques h la dernière goutte de leur sang ;

Que aussy le Sass de Gand sera fortifié, et en oultre tout faict ce que ledict seigneur prince trouvera en raison conve- nir, et que lesdicts seigneurs pourront faire et accomplir pour son asseurance ;

Que, au réciprocque , icelluy seigneur prince promettra et asseurera lesdicts seigneurs et estaiz généraulx que, par luy ny aulires estans soubz son commandement, ne sera riens attempté ny innové eontre la religion eatholicque romaine, uy donné, ny souffert estre donné aulcun scandale ou offen- sion à icelle , par quelque presche ou exercice puMieque con- traire à ladicte religion catbolicque romaine, mais qu'il fera chastier exemplairement les contrcventeurs, comme perturba- teurs du repos publicque,*

Que, sur ces conditions, ledict seigneur prince se veulle pré- parer de venir par deçà, du moins, et pour le premier, à Gand, luy estant apareillé Touverture du chastemi et ville, comme dessus, attendant la venue vers lùy d'aulcunsdesdicts seigneurs qui partiront, incontinent lesdicts quattre jours passez.

Au surplus, ledict de Bloeyer remonstrera audict seigneur prince, par tous les motifs possibles, combien qu1l est néces- saire, tant à luy, auxdicts seigneurs, que à la patrie, qu*ilz se joindent ensemble, par conseil, forces et tous aultres nM>yens, et que Ton ne doibt négliger ny laisser passer ceste présente occasion que semble bien estre la principalie et dernière, a laquelle l'on ne peult faillir que avecq ruyne de tous les pays.

Ainsy faict en la ville de Bruxelles, le xxiij"" jour de janvier xv* soixante-dix sept. '

Minute et copie du temps, aux Arehires da Roytame : MS. intilnlë pneu du MiMiim riiak, t. H, fol. 517 et &21.

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DLXXVIL

LES SEIGNEURS DE HAVRE , DE LALAING, DE FRESIN, DE BERSELE ET DE HÈZE AU PRINCE DORANGE.

Ils répètent ce qui est dit dans Pinstruction précédente touchant I^altimatum signifié à don Juan, et le prient de se préparer à venir les assister de sa présence et de ses conseils.

BlUULLBS, 3^ JAHTIBI iS{77.

Monsieur, nous ne doublons que ne soyez assez adverty que farrivement de don Joan d'Austrioe nous ait offert matière de plusieurs difiicultez et tardance, et que aussy a esté besoing de nous accommoder à la concurrence des affaires pour ung temps, et mesmes à la diversité des humeurs et opinions de la grande assemblée qu'avons en nos estatz généraulx. Mais, voyans que les desseingz dudict don Joan ne sont telz que bien désirons et nostre commun repos et tranquillité le requiert, avons résolu, ausdicts estatz généraulx, et signamment entre nous, de ne perdre plus temps en communications avecq ledict don Joan, après le terme préfigé à noz députez à présent et pour la dernière fois envoyez vers icelluy don Joan, ne comprenant que quattre' jours pour traicter, selon Tinstrue- lion dernière donnée auxdicts députez, que pensons aurez veu, ayans de besoingner en et partout à nostre défence, par telle diligence et debvoir que nous sera possible, si ne voyons l'entier effect de nostre juste querelle. Dont n'avons voulu faillir vous advertir par ceste lettre, et ce que le por- teur vous dira ; ensemble, monsieur, prier bien humblement, comme prions par cestes, vous vouloir tenir prest pour nous venir assister de vostre présence, advis et bon conseil, parmy

193 -

les asscur«')nccs que vous ferons avoir, selon que, parles per- sonnaiges de qualité qui, de la part desdicts estatz, seront bîentost envoyez vers vous, sera déclairé et monstre. Et, en eonformité de ce, avons escript lettres i monsieur le duc d*Arscliol, contenant nostre dernière résolution et intention , dont copie va cy-jointe. Et, d'aulrant que avez part h noz affaires, et que sçavons Taffeclion qu avez à nostre commune tranquillité, espérons que ne ferez difficulté ny délay de vous accommoder à ce que nous désirons et requérons tant affec- tueusement de vous. En quoy nous reposans, ferons fin à ceste, avec noz très-affectueu$es recommandations, suppliant Nostre- Seigneur Dieu vous, monsieur, octroyer sa sainte grâce, et à nous la vostre. De Bruxelles, le xxîiij** jour de janvier xv** soixante dix-sept.

Voz bien humbles cousins à vous faire service .

Charles-Philippe de Croy., Philippe de Lalaing. Charles de Gavre. Jehan de Bersble. Guillaume de Hornbs.

Suiciifplion : A monsieur monsieur le prince d'Orainge.

Hinato et copie du temi», aax Arehlresda Royaume : MS. intitulé Pika du XYh tiieU, t. Il, fol 516 et r>]9.

m. l'i

194

à

DLXXVIII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX SEIGNEURS DE HAVRE, DE LALAING, DE HÈZE, DE BERSELE ET DE FRESIN.

Réponse à la lettre précédente. 11 les remercie de leur bonne et sincën; affection, et s^en remet k ce qne lenr dira, de sa part, le S* de Bloeyere.

HiDDBLaouBO, 2ï{ JAinrisa 1577*

Messieurs, j'ay receu vostre lettre que m'avez envoyée par le S' Bloyer, présent porteur, et bien particulièrement en- tendu tout ce que luy avez enchargé de ma part {sic). En quoy ne puis assez vous remerchier de la faveur et honneur que me faictes par ces tesmoingnaiges si évidens de vostre bonne et sincère affection en mon endroict, en laquelle vous pouvez estre asseurés que je vous corresponderay avec tout service, en toutes occasions qui se pourront offrir, et ausquelles il vous plairat m'employer. Et, au regard de ma venue par delà, de laquelle luy avez donné charge à la procurer, comme je luy ay bien amplement et par le menu déclaré mon intention , pour la vous communicquer, ensemble quelques autres poincts particuliers, je ne vous empescheray plus longtemps à en faire long discours, affin de ne faire tort à la suffisance dudict S' Bloyer; seuUement, je vous prieray luy adjouster foy en ce qu'il vous dira de ma part. Et, sur ce, me recom- mandant très -affectueusement à voz bonnes grâces^ prieray Dieu vous donner, messieurs, en santé, longue et heureuse vye. Escript à Middelbourg, le xxv'' de janvier <S77.

GUILLE DE NaÇSAU.

Copie du temps, aazArohÎTes dn RoTavae: MS. iniiCnlé Pihw dH XVh tiM», u II, fol. 679.

i9K ~

DLXm.

INSTRUCTION POUR LE SIEUR DE BLOEYERE, RENVOYÉ PAR LE PRINCE D'ORANGE A BRUXELLES.

Félicitations sur la résolution prise par les états généraux de rompre avec don Juan. Protestation de dévouement à la patrie.^ Le prince est disposé à se rendre h Bruxelles. Il demande, pour son assurance, la ville de Hulst. Promesse de n'attenter en rien contre la religion catholique. Plaintes contre le conseil d*État, à cause de la collation du gouvernement de Ter Goes au S' de Serooskereke.

M IDDILBOUIG, S6 JARVISa 1877.

insiruetUm et mémoh^ de ee quê le sieur Henry de Bioeyer aura à dire à messeigneurale marquis de Havre, conte de Lalaing, mons^ de Hèze, Bersele et Fresin, de la part de monseigneur le prince d'Orenge.

Premièrement, il présentera à mesdiets seigneurs les recommandations très - affectueuses de mondict seigneur prince.

Puis après , les remerciera , de la part dudict seigneur prince, de ce qu'il leur a pieu si particulièrement l'informer et advertir des choses qui passent par delà, et notamment de ce qui se traicte avecq don Jean.

Et n estoit gii besoing qu'ilz eussent usé d'aucunes excuses en son endroit, pour n'avoir en ceste conjonture escript plus souvent : car, combien que leurs lettres et advertissements luy ayent toufijours esté très-agréables, néanmoins, cc^nois- sant la multitude des négoces qui se présentent en un tel temps, accompagné de la diversité des humeurs de ceux qui ont à opiner sur affaires de si grande conséquence, ledict sieur prince s'est tousjours tenu très^content et satisfaict de ce qu'il leur a pieu luy communiquer desdicts affaires, mosmes d'au*

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Unnt qu'il se tenoit pour tout asseuré, aussy bien de leur bonne prudence et discrétion en la conduite d'icelles^ comme de l'intégrité de leur affection, tant envers la patrie en général comme aussy envers luy en particulier : dont il se tient et tiendra à jamais leur obligé. Et comme, du passé, toiisjours il s'est voué et dédié, avec tout ce qui est en son pouvoir, au service der ladicte patrie et au leur en particulier, pour les seconder et assister des moiens et facuUez qu'il plait è Dieu luy impartir, ainsy h présent il s'y dédie encore de nouveau, désirant de tout son cœur s'emploier à l'advancement de la prospérité et liberté de ladicte patrie.

Qui est cause qu'il n'a voulu obmettre de leur congratuler à présent le bien que Dieu fait à ladicte patrie, de les avoir tous conjointz et unis en une ferme et salutaire résolution de ne plus négocier ni traicter avecq don Jean d'Austriche, espérant qu'avecq la grâce de Dieu, icelle réussira à un bien général et au restablissement de l'ancienne félicité et liberté de ce povre peuple, et les délivrera une fois de ceste conti- nuelle suitte des malheurs et calamitez qui jusques ores Font presque accablée, par l'extrême insolence et superbeté des estrangers , soufferte et endurée avecq trop longue patience.

Car, ores queledict seigneur prince n'ait oncques révoqué en double que lesdicts seigneurs, selon la singulière prudence et bon jugement dont Dieu les avoit doués, n'eussent bien aysé- ment peu remarquer et descouvrir la sinistre intention dudict don Jean, de laquelle ledict seigneur prince leur a donné plu- sieurs advertissements, et qui de soy-mesme s'est si manifes- tement fait cognoistre, non seulement en ses lettres et propos, mais en tous ses traictés et actions, notoirement favorables et advantageux au party de ceux que lesdicts seigneurs et tout le pays en général ont déclairé et tiennent pour ennemis capi- taux de la patrie, et pour rebelles, perturbateurs du repos publicq, si est-ce que ceste résolution est d'autant plus

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louable, que^ procédant d'une telle multitude d'opinions, entre lesquelles il est impossible qu'il n'y ayt tousjours diversité et aucune fois contrariété d'humeurs et d'advis, elle laisse à tout homme de sain jugement une impression d'une concorde et constante union entre lesdicts seigneurs et messieurs les Estatz, accompagnée d'une prudence générale, de laquelle on ne peut espérer, par la grâce de Dieu, sinon toute bonne et heureuse issue.

Ce qui a d'autant plus accreu le désir et zèle que ledict sei- gneur prince a tousjours eu de leur pouvoir en quelque chose servir et assister^ pour, au moien d'une ferme et générale conjonction de cœurs, volontez^ conseilz et moiens des uns et des autres, tant plus tost parvenir à ce but que lousies bons et iidclles patriotz se sont proposé, qui est de restablir la povre et affligée patrie en son ancienne fleur et prospérité.

Par quoy, sur ce que lesdicts seigneurs requièrent, en con- formité de ce qui a esté résolu par tous les estatz, que ledict seigneur prince se veuille joindre avecq eux en leur conseil et assemblée, sur la condition insérée en l'instruction dudict sieur Henry de Bloyere , prie ledict seigneur prince lesdicts seigneurs de se vouloir asseurer qu il aura et maintiendra en ce poinct-icy toute la mesme affection et zèle qu'il a, en tputes autres choses, au bien de la patrie et à leur service en particulier.

Et, à cest effect, ores qu'il sache "et entende fort bien que lesdicts seigneurs et tous les aultres messieurs des estatz qui conduisent les affaires du pays, sont doués de telle prudence, conseil et moiens qu'ilz n'ont nul besoing de sa présence, sans laquelle ilz sçauront, avecq Tayde de Dieu, bien ache- miner les affaires à une bonne et désirable issue, et que, d'au- tre costé, ledict seigneur prince recognoist aussy que, en ces pays dllollande et Zélande, il y a bien autant et si impor- tants affaires, que plustost il auroit besoing de requérir aydo

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et assistenoe d'ailleurs, pour esire soulagé, que de vouloir assister ou soulager les autres, ce néantmoins, comme il n*a rien plus chîer que de leur faire service, en cas qu*ilz le dési- rent et requièrent, et qu'il puisse avancer par ce moyen le bien et repos de ladicte patrie , qui est le but principal et unique de toutes ses actions, il ne fera difSculté de s'y ache- miner, pour y servir selon que lesdicts seigneurs, ensemble et messieurs les estatz, le vouidront emploier.

Pour laquelle chose, ledict seigneur prince, en son parti- culier, ne désire, comme aussy n'a oncqûes désiré, avoir autre asseurance que la seule bienveuillance et bonne affec- tion de ceux au service desquelz pièça il a vouée et dédiée sa vie et tout ce qu'il a en sa puissance, qui sont mesdicts sieurs les estatz et autres habitantz du pays, d'autant plus que les- dicts seigneurs luy font ceste faveur, de luy promettre et asseurer qu'ilz ne souffriront qu'aucun tort luy soit fait, jus- ques à y employer leur vie et sang, laquelle asseurance certes il estime plus que toutes les asseuranees du monde, les remer- ciant Irès-affectueusement.

Mais, toutesfois, comme il est, par le debvoir d'honneur et delà charge qu'il a receue, principalement tenu et obligé d'avoir esgard aux pays d'Hollande et Zélande, desquelz il est gouverneur, et que, pour cest effect, la raison veut qu'il leur donne contentement et satisfaction, avant que de les aban- donner, avecq asseurance de les venir retrouver toutes et quantes fois que leur nécessité le pourroit requérir, sans que, par négligence, inadvertence, ou faute d^avoir donné ordre requis, les passages puissent estre couppés ou empeschés par les ennemis; mesmes que, pour réciproque obligation qu'il y a entre ceux desdicts paysd'HoUandc et Zélande et ledict S' prince, grandement accreue par l'association et alliance cstroite qu'ilz ont faite, à l'occasion des guerres passées, ledict S' prince est obligé un ce poinct s*aecommoder à leur instante requesle, il

199

n'a trouvé sinoD très-bon l'offre qu'il a pieu auxdiets seigneurs luy faire au regard de Tasseurance qu'ils mettent en avant pour ledict S' prince, les remerciailt très-affectueusement de l'équitable rc^rd qu'ilz ont prins en eeste endroict. En confiance de quoy aussy, il les prie que, pour la tnesme con- sidératioD que dessus, et aflSn que les chemins et (lassages ne luy puissent estre ostez, clos ou couppez du costé d'Anvers, ilz veulent y adjouster la ville de Hulst, laquelle en ce regard est très-nécessaire, pour tenir le chemin de Zélande tousjours ouvert et à commandement, à cause que, sans ladicte ville de Hukt, les fortz que l'on feroit au Sas seroient subjeetz aux excursions et invasions continuelles de Tennemy, et mesmè ne pourraient affranchir le passage.

Et, quant à ce que lesdicts seigneurs désirent qut ledict seigneur prince promette et asseure, tant à eux qu'aux estatz généraulx, que par luy, ny autres estans sous son comman- dement, ne sera attenté ni innové contre la religion catho- lique romaine, ni donné aucun scandale ou offensioA, etc., parpreschesou exercices publicqs contraires à ladicte religion, déclarera ledict sieur Henry de Bloyere, de la part et au nom comme dessus, que ledict seigneur prince est bien content de leur promettre et asseurer que, de sa part, ni de la part de ceux qui sont de sa suite, ou de son obéissance, nulle inno- vation ne sera faite ni attentée à l'endroit de ceux qui suivent la religion caiholicque romaine, ni aussy donné aucune fâcherie, empeschement ou schandale par preschcs ou exer- cices publicqs contraires à ladicte religion : biçn entendu qu'il sera loisible audict seigneur prince avoir l'exercice de sa religion en sa maison, laissante la discrétion desdicts seigneurs et autres sieurs des estatz d'y mettre, au reste, en ce fait tel ordre comme en raison ilz trouveront convenir, moiennant que le traicté de la pacification soit en tous ses poincts gardé et entretenu .

200

En oultre, déclarera que lediet seigneur prince a entendu que messieurs du conseil d'Ëstat auroyent mis et estably le sieur de Serouskerke (^ au gouvernement de Tergoes, estant au pays de Zélande, sans le sceu ou adveu dudict seigneur prince : ce qu'il n*a peu trouver sinon fort estrange, comme directement contrevenant non-seulement au traicté de la paci- fication, mais aussy à ce que eux, lesdicts seigneurs, luy ont présentement fait déclarer par lediet sieur de Bloyere, puis* que^ monstrant avoir toute confiance audict seigneur prince, et mesme présentant luy donner asseurance pour sa personne au pays de Flandres , le fait susdict de mesdicts sieurs du conseil d'Estat ne monstre autre chose que d une manifeste diffidence, mesmes en choses qui concernent son gouverne- ment. Qui est cause que lediet seigneur prince les prie fort affectueusement d'y vouloir donner ordre convenable, à ce que, ces nouvelletés et semenses de deffiancc estantz ostées, ladicte pacification soit en touts ses poincts inviolablement entretenue.

Finalement, se souviendra de proposer le poinct qui con- cerne la levée de deux cents chevaux, tout ainsy que lediet seigneur prince Ta faict proposer aux estatz.

Fait à Middelbourg, ce xxvj* de janvier 1577.

GuiLLB DE Nassau.

Copie du temps, aux Archives du Royaume : MS. intitulé Piiee$duXVI*9iieU, t. II, fol. 52».

(1) Philibert de Serooskerckc, qui était rentmaitre général de Zélande avant Tinsurrection de celte province.

20i

DIXXX.

LE PBINGE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il les prie d*ajouter foi et créance à ce que le S' de Bloeyere leur dira de

sa part.

MlOOBLBOVAG, 26 JAMVIBB 1577.

Messieurs, comme le présent porteur, le S' Henry de Bloyer, m'a représenté quelques poinets , de la part de messieurs le marquis d'Havrech, conte de Lalaing, mons' d'Heze, deBer- selle et de Fresin ; je luy ay bien particulièrement déclairé mon intention sur le tout, et Fay quant et quant prié de vous communicquer aucunes choses en mon nom^ sur lesquelles je vous prie luy ajouster pleine foy etcrédence. Qui est l'endroict y après m'estre très-affectueusement recommandé à vostre bonne grâce, je prie Dieu vous donner, messieurs^ en santé bonne^ heureuse vie et longue. De Middelbourg, ce xxvj'' de janvier 1577.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GoiLLE DE Nassau.

Stucription : A messieurs messieurs les députez des Estatz généraux des Pays-Bas^ à Bruxelles.

Original, aux Arebivet dn Royaume : HS. iatitolé PHeti du XVh êUelt, t. Il, fol. 683.

802 ~

uxni.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX^

Il leur fait remettre, pour qu*lk en disposent comme ils trouveront contenir, certains objets qui ont été pris par des soldats de la garnison de NieuporU

MnDKLBOoaoySOjAiiTiia Itf77*

Messieurs, suyvant que je vous avois, passé quelque temps, escript de certaines bagues, lesquelz par aulcuns de la gar- nison de Nyeuport avoyent esté prins, et que depuis eeulx de Franeq, poursuivans la restitution desdictes bagues, m'ont monstre certaines lettres que leur avez escriptes, par lesquelles vous désiriez que je mectrois lesdictes bagues entre leurs mains, je n'eusse failly de me conformer en cela à vostre bonne volunté. Mais, estans encoires quelques aultres que pré- tendent ausdictes bagues , j'ay advisé pour le meilleur de les envoyer entre voz mains, dépeschant , à cest effect, présente- ment Charles de Beaulieu, porteur de ceste, qui vous délivrera lesdictes bagues, pour par vous en estre ordonné comme trouverez convenir ; et suis esté d'aullant plus occasionné de ce faire, affin que puissiez veoir que je n*y prétens rien pour mon particulier. Qui sera Tendroict auquel, après mes très- afTeclueuses recommandations à vostre bonne grâce, je sup- piieray Dieu vous avoir, messieurs , en sa saincte garde et protection. Escript à Middelburg, ce pénultiesme jour de janvier 1 577.

Vostre bien bon amy et patriot à vous faire service,

GuiUe de Nassau.

Copie du XVU* liécle , i la Biblolhéquc royale : NS. 7223. fol. 132 to.

805

DIXXXII.

LE PRINCE DORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il leur envoie une lettre éerîte par Alonso de Vargaset les autres chefs espa- gnols aux capitaines allemands. Il est conraineu que don Joan veut les troinper. Il les prévient que Tennemi a des vues sur Douai.

MiDOBLBouas, 2 vÉvaiBft itni.

Messieurs, m'estant venu entre mains le double d'une lettre escripte par Alonzo de Vergas et aultres Espaignolz aux capi- taines aliemans qui sont en la ville de Bois-le-Ducq , j'ay estimé bon de vous envoyer ledict double, encoires que je pense bien que vous sera esté communiequé devant la réception de ee$te« Il est ainsi que le susdict double est ung peu incorrec- tement escript ; et toutesfois , vous pourrez veoir par icelluy Tentreprinse desdicts Ëspaignolz , et que leur desseing n'est auhre que de continuer la guerre, et de se fortiffier tousjours de plus en plus, et nous oster tous moyens par lesquels nous pourrions cy-après prévaloir d'eulx : à quoy toutes ces lon- gueurs et dilays dont Ton use leur serviront grandement^ car debvons estre asseurez que leur délibération n'est aultre que de nous tromper, quelques propos que don Jehan ou aultres peulvent tenir au contraire. A quoy, messieurs, pour l'affec- tion que j'ai à vostre bien et de toute la patrie, je ne puis sinon vous prier d'avoir en temps bon et soigneux regard, ayant pitié de ce povre pais et tant de peuple, devant que ledict pays soit assaiily à l'impourveu, et du tout accablé : dont indubita- blement s'ensuyvroient les maulx et inconvéniens que facille- ment povez considérer, et desquels tout le monde vous donneroit la coulpe.

D'aultrc part, comme je suis adverty de quelque practicque

204

que Fennemy tient sur la ville de Douay, en espoir de la sur- prendre, tant plus aisément pour le peu de guet et garde que Ton y tient , je n'ay pareillement, pour Facquict de mon deb- voir, peu faillir de vous en escripre par ceste, pour estre asseuré que, le sachant, vous y mectrez Tordre requis, de tant plus queladicte ville est de l'importance que un chascun sçaît. Et, de ma part, j*auray moyen de m*employer pour vostre service, povez estre asseurez que je le feray d'aussi bonne et prompte volunté que, me recommandant bien affectueusement en voz bonnes grâces , je supplieray Dieu vous avoir , mes- sieurs, en sa saincte garde et protection. Escript à Middel- bourg, le ij* jour de février 1577.

Votre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuilF.e de Nassau.

Suscription : A messieurs messieurs les députez des estatz généraulx du Païs-Bas, estant présentement assamblez à Bruxelles.

Copie du XVIII* siècle, ft la Bibliothèque royale : H S. 11° 923B, pag. 105.

DIXXXIII.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

lU lui envoient le S' de Willerval et le pensionnaire Buys, accompagnes du docteur Gaill, ambassadeur de TEmpereur, pour lui communiquer ce qui a été traité avec don Juan d*Autricbe, et entendre son avis.

BrUXELLBS, 7 FÉVRIER 1577.

Monseigneur , comme nous avons commence i\ conférer, en ccslc ville, avccq le S' Oclavio de Gonzagn, envoyé de don

r

905

Jehan d'Aiistrice, en présence des seigneurs ambassadeurs de la Majesté Impérialle, tant pour la sortie des Espnignolz, que pour remeetre le pays en toute tranquillité, n'avons volu nuleunement résouldre, ny prendre conclusion finale, sans premièrement communicquer^avecq Vostre Excellence la démenée et négociation de cest affaire, afBn de tenir la bonne correspondance convenue, traictant la pacification. A laquelle fin, avons commis et député le S' de Willerval, avecq le pen- sionnaire docteur Paoul Buis, accompaigné du docteur Andrieu Gaill , conseillier de la court de l'Empereur et son ambassa- deur, pour en informer Vostredicte Excellence , et sur ce en- tendre la bonne intention d'icelle : prians que ausdicts députez adjoustez foy et crédenee en tout ce qu*ilz déclaireront de nostre part touchant ladicte négociation (').

Au surplus, nous recommandans à la bonne grâce de Vostre Excellence, prierons le souverain Créateur la vouloir main- tenir en sa saincte garde , et donner accomplissement de ses nobles et vertueulx désirs. De Bruxelles, ce vij* de feb- vrier 1577.

De Vostre Excellence très-affection nez en service,

Les estatz généraulx du Pays-Bas assemblez à Bruxelles.

Par ordonnance desdicts estatz : Cornélius Weellbmans.

Copie du temps, à la Bibllothâque de la Chambre det Représen- tants : AeotMtl piieu rriaiiveê ou» HaU généraux, 1578-1580, t. I, fol. 180.— Copie du XV III* siéele, à la Bibliothèque royale : MS. 9238, pag. 88.

(1) L^'nstruction de ces députés a été publiée par M. Db Jongb^ Résolution» des éiats généraux, t. II, p. 4é\'i43.

806

DLXXXIV.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE DORANGE (•).

Ils le prient de s^employer auprès du magistrat de Middolboui^^ pour que ce magistrat délivre les lettres d*obIigation demandées par la reine d*An- gleterre.

BauxsLLBS, 9 rAtRiBa i ?S77.

Monseigneur, par le formulaire de la lettre d'obligation joinct à eestes« verra Votre Excellence ce que a opéré Fenvoy de M. de Sweveghem (*) verslasérénissime royne d'Angleterre, dont il est retourné avec bonne et fructueuse responce, ayant $a Majesté Réginale desjà furny et preste libérallement la somme de vingt mil livres sterling , monnoye d'Angleterre, sans demander aulcun frais ou interrest, pour l'espace de six mois , à charge toutesfois de faire avoir à Sadicte Majesté obligation , selon que contient ledict formulaire , de six villes de par deçà, savoir : Bruxelles, Gand, Bruges, IVieuport, Dun- kerke et Middelbourg en Zélande. Par quoy, comme l'am- bassadeur de ladicte royne, estant en cette ville , nous a faicC grande instance pour avoir lesdictes obligations endedans quarante jours , qu'expirent le vingt et sixiesme de ce mois , comme à Sa Majesté a esté promis, avons bien voulu faire ce mot à Vostre Excellence , et prier très-affectueusement , par Roland de Courtewille (*), porteur de cesle, de vouloir pro-

(') Le conseil d*État adressa an prince, pour le même objet, une lettre dont la minute est aux Archives du Royaume, Lettres de et à Guitiamme de Nae- eau, t. V.

(') François de Halevin, chevalier, S' deZweveghem, grand bailli et capi- taine des ville et cbflteau d^Andenarde.

0 On lit, dans les Béeotutionê des étais généraux, t. Il, p. 76, i la date du

807

curer envers ceulx de Middelbourg que ilz ne se veuillent monstrer rétifz à faire despescher ladiete obligation en per- chemin, suyvant ledict formulaire, et la sceller de leur seel, et la nous envoyer par ce mesme porteur, le plus tost qu'il sera possible, afBn de par ce moyen non-seullement asseurer ladiete royne , et le sieur de Sweveghem acquicter de sa promesse* mais aussy pour l'incliner à nous assister d'aultre plus grande somme en noz nécessitez urgentes, comme ledict sieur de Swe- veghem nous a rapporté qu'elle est contente de faire, pour par ce moyen plus tost meetre le pays de par deçà en repos et tranquillité : en quoy , grAces à Dieu , il y a grand commen- chement; promectans, par cestes, léallementet de bonne foy, les désaequicter, indempner et descharger de ladiete obliga- tion, ensemble de tous domaiges et interrest queà ceste cause pourries supporter; obligeant à cest effect nous et chascun de nous , noz personnes et biens quelconques , sans fraulde ou malengien, oulire ce que icelle nous rendra toujours obligez à le recognoistre. A tant , monseigneur, en nous recomman- dans bien affectueusement à sa bonne grâce, prions Nostre- Seigneur Dieu Vostre Excellence conserver en prospérité et bonne et longue vie. De Bruxelles , le ix'' jour de febvrier XV* soixante-dix-sept.

De Vostre excellence bien bons et affectionnez amis.

Les estats générauk du Pais-Bas assembler à Bruxdles.

Copie do XVIII* tiède, à la BiblioUièqaf rojale : MS. n* 88W, fê§, 107.

il février : « Le S' de Conrteville est commis pour obtenir CMitioiii det » villes de Bniges, Nyeuport et de Middelborch, pour Tasseurance du prest de la royne d'Angleterre. »

208 -

DIXXXV-

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils le requièrent de donner satisfaction h ceux d^\rasterdam, qui se sont joints aux états généraux, et ont adhéré à la pacification de Gand.

Brdxbllbs, 15 révaiBa 1577.

Monseigneur, désirans ceux de la ville d'Amsterdamme se joindre avec les autres estatz, ont envoyé à rassambléed'iceulx, en ceste ville, leurs députez , garnis de povoir et commission suffisante. Et , après avoir déclaré , avec bonne promptitude et allégresse , qu*ilz ont tousjours esté d'intention sincère et encore sont que de se conformer en tout et par tout au traicté de la pacification, sans, en façon que ce soit, euh en vouloir disjoindre, affin qu'ilz puissent mieux jouir du fruict de ladicte pacification , les avons receu et admis en Tunion et accord desdicts estatz, en advouant et tenant par eux pour agréable ledict traicté de paix faict en la ville de Gand , en tous et chascun ses poincts et articles.

Mais y comme pour eux submettre et retourner soubz le gouvernement de Vostre Excellence, il conviendra par icelle leur être faicte satisfaction, tant pour le fait de la religion que aultrement, selon qu*est porté par ledict traité, à quelle fin ilz envoyeront au plus tost vers Vostredictc Excellence, pour sur ce traicter avec icelle, n'avons voulu obmectre de bien instamment la requérir de donner plain contentement ausdicts d'Amsterdamme , et cependant faire cesser toutes surprinses , envahies et actes d'hostilité, affin qu'ilz puissent avec aultres mieux joyr du fruict de ladicte pacification, si qu'il appartient. Et, nous confions à plain que Vostre Excellence se conformera

209

voluntiers à ladicte pacification, comme , de nostre part, ne défauldrons à jamais , ne ferons eeste plus longue y que pour prier nostre bon Dieu vous donner, monseigneur, ses saintes grâces, avec le comble des vertueulx désirs de Vostre Excel- lence : présentante icelle nos meilleures et affectueuses recom- mandations. De Bruxelles, le xiij' de febvrier 1577'.

De Vostre Excellence les très-affectionnez en service,

Les estatz généraux du Païs-Bas assemblez è Bruxelles.

Par ordonnance desdicts estatz : Cornélius Wbellemans.

Stiscripiion : A monseigneur mons' le prince d'Oranges.

Copia du temps, aux ArehiTes la ville dTpres- Copie du XVIII* siéele, à la Bibliothèque royale : MS. n > 9238, p 99.

DIXXXVI.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D»ORANGE.

Ils le prient de roeUre des bateaux à la dispositioo des deux compagnies allemandes étant k Goes, pour qu^eltes puissent se rendre vers le quar- tier de Bots-le-Duc.

BftoxBLLBS, 13 piTRiia {yj7.

Monseigneur, comme les deux eompaignies allemandes estans en la ville et isle de la Goes se sont, passé quelque temps, accordez de sortir de là, toutes et quantesfois que par messeigneurs du conseil d'Estat ce leur seroit ordonné, et

III. i4

1

2!0 -

que, ce nonobstant, il semble se seroient montré rétiefs, ayans esté à ce semoncez par commissaire exprès envoyé vers eux , pour les tirer de : craindans que ceste fantaisie leur pouroit accroistre, si plus longuement on tardast l'exécution dudici accord, avons, avec délibération de mesdicts seigneurs du con- seil d'Etat et de guerre, advisé leur escrire et mander bien expressément qu'ilz ayent incontinent à sortir de ladicte ville et isic, suivant ce qu'ilz ont promis de faire, leur escrivant Icdict conseil d'Estat présentement en conformité de ceste. Et comme, h cest efTect, a esté trouvé expédient, pour oster aus- dicts soldatz toute occasion d'excuse, et rendre ladicte retraite plus facile et seure, les faire embarquer et transporter par eau vers le quartier de Bolduc, pour s'y joindre avec les cincq compaignies d'Allemans du régiment du feu comte d'Everstain échappez de la défaite d'Anvers , servira ceste pour supplier Vostre Excellence qu'il luy plaise ausdictes compaignies alle- mandes prester à ceste fin batteaux, et les accommoder audict voyage, selon que, pour veoir ladicte sortie effectuée, icelic trouvera convenir. A tant, monseigneur, prions le Créateur donner à Vostre Excellence, après nous estre très>affectueu- sèment recommandez à la bonne gr&ce d icelle, l'enlier accom- plissement de ses hauts et vertueux désirs. De Bruxelles, le xiij* de febvrier 1577.

De Vostre Excellence très-humbles et très-alTectionnez serviteurs,

Les estatz généraux des Pays-Bas.

Par ordonnance desdicts seigneurs des estatz : Cornélius Weellbmans.

Copie dtt XVni'iiéele, à la Bibliothèque royale : MS. ii*9238, p. 103.

2n

DIXXXVIL

LE PRINCE D ORANGE AU S' DE HÈZE.

Il le prie (le recevoir, conjointement avec le S' de Bloeyere, Je serment de Jacques Yander Noot, nommé par lui drossard de la terre de Diest.

MiDDiLBOUtG, rivant 1SJ77.

Monsieur mon cousin, vous aurez entendu comme, depuis

quelques jours en çà, j*ay commis le sieur Jacques Yander

IVoot à Testât de drossart de mes ville, terre et seigneurie de

Diest. Et comme, par la commission que sur ce je luy ay

faict e^çpédier, il est chargé de faire le serment de Gdélité

entre mes mains, et que toutesfois, pour aulcuns aultres

aflaires, il ne se peult îcy trouver devers moy, j*ay bien voulu

vous prier, comme je faiz bien affectueusement, qu'il vous

plaise prendre la peine, avecq monsieur de Bloyere, présent

porteur, que, mandant devers vous le susdict Vander Noot,

vous prenez par ensamblc de luy le serment contenu en sa-

dicte commission. J'ay, à cest effect. faict expédier ung povoir

sur vous et ledict de Bloyere, comme entendrez de luy, vous

asseuranl que m'y ferez plaisir bien aggréable, lequel seray

toiisjours prest de déservir vers vous, d'aussy prompte et

bonne volunté que, me recommandant bien affectueusement

en vostre bonne grâce, je supplie Dieu vous donner, monsieur

mon cousin, en bonne santé, beureusc et longue vie. Escript

à Middelbourg, ce xiiij* jour de febvrier 1377.

Vostre bien bon cousin à vous faire service,

GuiIXe de Nassau.

Suscription : A monsieur mon cousin monsieur le baron de Hèze, etc.

Original, aux ArchiTesdu Rojaune : MS. inlKulé Piietê du XVh êiicU, t. Il, fol eS7.

21^2

DlXXXYlll.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE DORANGE.

Ils lai font connaître en détail les motifs qui les ont détermines, avant d^avoir reçu sa réponse, à signer le traité ayec don Juan d^Au triche, et Tinforment des nouveaux ordres qu^a donnés le conseil d*Etat pour le rappel des gar- nisons de Harlem, Schoonboven et Muiden.

Bavzbllbs, 46 iT 17 riraïKa 12(77.

Monseigneur, comme, dès le xitij** de ce mois, les ambassa- deurs de la Majesté Impériale et aultres députez ayans esté vers Son Altèze, soyent retournez en ceste ville, rapportans le traité sur la pacification et retraicte des soldarts estrangiers, soubsigné par Sadicte Altéze, en la mesme forme et substance que l'avions envoyé à Vostre Excellence par le S' de Willerval et docteur Paul Buys, accompaignez de l'ambassadeur de l'Empereur, docteur Gaill, excepté seullement quelques chan- gemens es iiîj* (contenant prorogation de xv jours à xx) et xiiij** articles, est dict, au lieu que la moictié de la somme y mentionnée debvoit estre délivrée es mains de Son Altèze incontinent, etc., que ladicte somme sera proportionnelle- ment délivrée es mains de Sadicte Altèze, ou celluy qui sera par luy commis, à la discrétion des seigneurs ambassadeurs, pour faire sortir les gens de guerre espaignolz, italiens, bour* goingnons et aultres estrangiers, hors des chasteau et ville d'Anvers, et hors de tous et chascuns les aultres cliasteaulx^ villes et forteresses de Sa Majesté, hormis les Allemans, tant que Ton ayt achevé de compter avecq eulx, et Taultre moictié sera remise par lesdicts estatz, par lettres de change souflBs- santés, à Genua, pour estre à celluy qui en aura pouvoir de Sadicte Altèze, délivrée illecques, endedans deux mois après

213

que lesdicts Espaignolz, Italiens et Bourgoingnons seront sortis hors desdictes ville et chasteau d'Anvers, ieeulx ambas* sadcurs, avecques Sa Grâce Illustrissime de Liège, sont, le jour d'hier, avant midy, coniparuz en l'assemblée des estatz généraolx (O» nous remonstrans, par plusieurs bons moyens et raisons, que le susdict changement n'estoit de telle impor-

(■) Voy. les RéêoluHoni dê$ étaU gétUratus, 1. 1, p. 91 .

J*ai sous les yeux le jourual d^an député, qui contient plus de détails que le procès-verbal de cette assemblée ; j*en extrais ce qui suit, à la date du 15 férrîer:

Rapporté, en présence des conxaiilx d*Estat et privé de Sa Majesté, de Téves- que de Liège, des seigneurs ambassadeurs de TEmpire et du duc de Clève, par le S' archidiacre de Brabaut, Livinus Torrentinus, conseiller de monseigneur de Liège, ayant esté vers don Jean, avec Tun des ambassadeurs de PEmpe-

reur et , en la compaignie du S' Octavio de Gonzaga, luy porter

raccord de pays projecté et approuvé par les estatz, aMn de le faire approuver aussy et signer de par luy , que ledict don Jean avoyt approuvé et signé Icdict accord, saulf quelque changement es iiij* et xiiij* articles dMcclluy, lequel changement (comme il disoyt) n*e$toyt de gnind effect et préjudice, et estoyt tel que, au lieu de deux quinzaines luy accordées. Tune pour faire sortir les Espaignolz, Italiens et Bourguignons hors des chasteau, ville d^Anvers et aultres forteresses qu'ils tiennent, et Taultre pour faire sortir hors du pays de par deçà , estoyt mys deux vingtaines, et, en second lieu, que la moytic des six cens mille florins accordes libéralement i don Jean seroyt prestement consignée es mains des ambassadeurs de TEmpereur et du duc de JuUiers, pour, à leur discrétion, proportionnément estre distribuez è don Jean, ou son commys k ce, pour faire sortir lesdicts soldats cspaignolz, italiens et bourguignons des chasteau et ville d^Anvers et aultres forteresses ; et Taultre moytié consignée par lettres de change à Gennes, pour la furnir, endedens deux moys après la sortye desdicts soldats desdicls chasteau et ville d*Anvers et autres forts ; ou que ladicte moytié se debvoy t seullement consigner, après la sortye desdicts soldats hors desdicts chasteau, ville d'Anvers et aultres fors, et Panltre assignée par lettres de change à Milan ou à Gennes, pour estre payée, quant lesdicts soldats y seroyent parvenus.

Lequel accord fut leu de poiuct à aultre, et par nostre greffier rcprius ladicte correction, et, après délibération prinse sur ladicte correction, et ouy Tadvys desdicts seigneurs des consaux d*£stat et privé , anroyt esté après suspendue néantmoings la signature, jusques le rapport oy du besoingné de ceulx envoyez vers le prince d^Orenges , et en at esté despesché acte pour le S' Escovcdo, secrétaire dudf et don Jean, quy, Icjour précédent, estoyt venu

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tance que, pour icelluy, deussions aulcunement différer et moins refuser racceptation dudict accord, requérans à tant très-instamment que, pour le plus grand bien et salut de la patrie, voulsissions procéder à la signature d'icelluy. Et, jasott que trouvions ledict changement admissible, et que fussions de tant plus enclins de Tapprouver, et procéder à la signature dudict accord, parce que Jehan Escovedo, secrétaire du Roi, nostre sire, estoit arrivé joinctement lesdicts ambassadeurs, avecq charge expresse de Sadicte Altèze de, prestement ladietc signature faicfte, le signifier aux Espaignolz et aultres estran- giers estans es chasteau et ville d'Anvers, et les sommer de se retirer endedans le terme préfigé, se conformans en tout audict accord, sy est-ce, toutesfois, que n'aurions, le jour d*hier, à tout ce voulu entendre, en considération que n'avions encoires responce de Vostre Excellence, que néantmoings espérions et attendions, en bien grande dévotion, d'heure & aulfre. Et comme, ce matin, lesdicts ambassadeurs et commis de Sadicte Grâce Illustrissime seroient retournez, nous pres- sant, avecq bien grande instance, de procéder à ladicte signa- ture et approbation (')i avons esté extrêmement marry du long séjour dudict S' de Wiilerval, et que par ce demourions si longtemps frustrez de l'advis de Vostredicte Excellence en chose tant importante et n'admettant, sans grandissimes périlz

à Bruxelles, soubz passe-port luy donné, avec Sotomaior, accompaiguc de vingt-quaUre chevaulz, pour, oprès ledict acte receu, s*acheniiner pour Anvers, affia de faire insinuation , de la part dudict don Jean, ausdicts soldats espaignolz. italiens et bourguignons, de leur sortye, comme dessus.

Et esloyt deux heures après mydy avant que la sortie de l*assamblée se fit, pour raison dudict accord, et partant Ton ne besoigna plus riens pour ce jour-là.

(') Voy.lcs Ré$olutioiu des états généraux, t. II, p. 92.

Le journal dont j*ai parle plus haut est d*accord ici avec le procès-verbal ; seulement il porte : Depuis, les voix recollées, fut arresté que Ton le signeroit (le traité) prestement , k tout le moins* dedens le soir, et que Tou » le dclivreroit à Escovedo. »

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et dommaigesy aulcun délay ou remise. Et, nous retrou vans en ceste perplexité, et que toutesfois n'attendions attester (') sans préalable advisdeVostre Excellence, néantmoings, Gnalement vaincuz par beaucoup de trés-urgentes raisons, sicomme, entre aultres, qu'il n'y a riens, audict traicté signé par Sadicte Âltèze, contre le prétendu de Vostre Excellence, mais bien à Tadvantaige d'icelle, allendroict de vostre filz, monseigneur le conte de Buren, effect et accomplissement de la paciGcation faicle à Gand, et actuelle rétracte des Espaignolz et estran- giers tant désirée, laquelle eussions retardé, différant ladicte signature, nen sans très-grands et irrécupérables dangiers de tout ce pays, et hazard de perdre telle bonne occasion, à la diminution de nostre réputation envers tous, n'avons sceu remectre ladicte signature en ultérieur dilay , que jusques ce soir, espérant, endedans ce temps, ressentir quelque responoe de Vostre Excellence , laquelle prions bien affectueusement ne prendre d'aultre que de bonne part sy, après sy long séjour, ce que dessus considéré, passons à ladicte signature : ce que ferons, soubz plaihière confidence que le bon zèle de Vostre Excellence tend avecq nous au mesme but du repos, bien et tranquillité de nostre pauvre commune patrie. Et en cest endroict supplions le Tout-Puissant donner à Vostre Excel- lence, monseigneur, le comble de ses très-nobles et vcrtuculx désirs, nous recommandans bien humblement en la bonne grâce d'icelle. De Bruxelles, le xvj* de febvrier 1577.

Postdata. Monseigneur, nonobstant la résolution d'hier, avons, pour le respect que portons à Vostre Excellence, dif- féré la signature et publication dudict accord jusques à ceste heure de midy [^), niesme pour la grande instance et poursuite

(>) Sic dans la copie. Mi^is ces mots sont évidemment mal écrits. Peat-étre faut^il lire arre$ier, au lieu de atleiter,

(') On lit, dans les Réêolulions des iiaU généraux, t. Il, p. 93, à la date du

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desdicts ambassadeuts, lesquels nous ont remonstré combien d*înconvénien$ ce dilay emporte pour Tuniversalité de ce pays, et que différer d'advouer et signer ung party tant raisonnable et advantagieux, et pour lequel avons tant travaillé, seroit provocquer contre nous la juste indignation de Dieu, de TEm* pereur, royne d'Angleterre, princes de TEmpire et tous âultres potentatz de la christienneté , lesquelz nous ont de toutes parlz conseillé et enhorté de ce faire, comme feroyent sans faultc ceux qui vouldroyent mectre empeschement à une œuvre tant christienne , sainte et à ce désolé pays nécessaire, et, oultre ce, pour nous et nostre postérité asseurer, puisque messire Jehan d'Austrice se mect en nous mains . sans tiltro ou qualité de gouverneur, jusques à ce qu'il ayt effectué ce que ledict traité porte, et demourant jusques lors le conseil d'Estat en Tautborité au gouvernement général qu'il a eu jus- ques astheure. Ledict traicté sera aussy ratifié, signé et seellé par icelle Sa Majesté en Espaigne, de sorte que le vouloir empescher seroit empescher la retraicte effectuelle des Espai- gnolz, pour nouvelle occasion survenue que Sa Majesté poulroit prétexter , y joinct que la commune, partout lasse de ces longeurs et dilays, se commenchoit à s'altérer. Davantaige, monseigneur, combien que Ton ayt donné

17 février : « U est résolu que, doiz que la collation et signature soit fiiiete, 9 on publiera le traité de paix, v Le journal de notre député est encore ici plus explicite; voici comment il sVzprime :

« A la requeste et advys de messeigneurs du conseil d^Estat et les ambas- sadeurs, résolu que, la collation faicte, les signatures requises adjoustées, on publiroyt le traictc de pacification avec don Jean, signé par ledict don Jean. Lequel, quant et quant, fut collationé, présens lesdicts évesque de Liège, ambassadeurs et conseils d*£stat et privé, et puys signé par d^Over- loepe, audiencier, Weelmans, greffier des esta ta , ledict évesque de Li^e et ambassadeurs, et, sur les une heure après mydy, fut publyé, présens lesdicts conseils d^Estat et prive, févesquc de Liège et ambassadeurs, et seigneurs des estatz, sur la maison de ville, lieu ordinaire de faire publi- cation : le peuple en bon nombre venu sur le Marché, pour Touyr»

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charge au baron d'Hicrges de retirer les garnisons de Harlem, Scboonboven, Mesen, Muyden('), ce que depuis, par lettres des estatz d'Hollande et Zeelande du xiij* de présent, s'entend n'cstrc effectué (ce que estimons estre advenu, pour le grand tour que convient prendre audict S' de Hierge par Haultepenne, Aix et pays de Juilliers et de Glève, pour encheminer hors du dangier des cnnemys), messieurs du conseil d'Estat donnent par leurs lettres nouvelle rencharge aux capitaines d'icellcs garnisons de y obéir promptement, lesquelles seront mises es mains de leurs députez icy y pour plus prompte adresse. De Bruxelles, ce xvij' de fcbvrier 1877.

De Vostre Excellence très-affectionnez en service.

Les estatz généraulx du Pays-Bas assemblez à Bruxelles.

Par ordonnance expresse desdicts seigneurs estatz : Cornélius Weellbmans.

Copif da lem|w, aux ArchÎTCt dt la villt d^Y|irfa.

(■) Voy . les Ré9oltUwn$ deê états généraux, t. Il, p. 93.

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DLXXXIX.

INSTRUCTION POUR LE S' DE ZWEVEGHEM ET LE CON- SEILLER DE MEETKERCKE, ENVOYÉS PAR LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE (•).

Elle contient un exposé des motifs qui les ont déterminés à signer et publier

le traité fait avec don Juan d* Autriche.

BftUXILLBS, 48 PBVBIBE 1S$77.

instruction pour me$êire François de HaUetoin, seigneur de Sioeveghem, yrand baiiiy et capitaine des ville et ehcuteau d'Audenarde, et Adolf de Aleelkercke, conseillier du paSs du Franc, envoyez de la part des estatz généraube des Pais -Bas du Roy vers monseigneur le prince d'Oranges,

Premiers, déclaircroDt à Son Excellence que^ pour tenir bonne correspondence avec icelle, les estatz d'Hollande, Zé- lande et associez, ilz n'ont jamais voulu obmectre de l'advertir particulièrement de tout ce que s'estoit traicté avec messire Jean d'Auslriche. depuis son arrivée, tant à Luxembourg, qu'à Marche en Famine et à Iluy, et mesme dernièrement, par le S' de Willerval et docteur Paul Buys , envoyez avec le docteur Andrieu Gaill, ambassadeur de TEmpereur, de tout le besoigné en celte ville de Brusselles avec Octavio Gonzaga, par intercession de Ms' l'évesque et prince de Liège et autres

(>) On ne trouve pas, dans les Résolutions des états généraux, celle en vertn de laquelle le S** de Zweveghem et le pensionnaire Meetkercke furent députés au prince d*Orange. On y lit seulement, à la date du 48 février : « Le S^* de

* Zwevcghcm est commis se trouver en Angleterre, doiz qu^il aura esté vers

* roons' le prince d*Orange »

Dans le journal d^un député, dont il est parlé ci-dessus, cette résolution est plus développée. Voici comme elle est conçue : « Le S^ de Zweveghem est m commys se trouver en Angleterre, dès qii*il aura esté devers le prince m d*Orange, il est commys d*aller avec le pensionnaire Medeckerke, pour » TadvcrUr des choses passées touchant la pacification, et induire à condos- w cendre à icelle, suyvans les points d*instruction. »

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ambassadeurs de FEmpereur, pour sur ce avoir Tadvis de Son Excellence, à laquelle ilz ont aussi envoyé le concept de raccord sur ce dressé.

Et comme, le \ïy de ce mois. Son Âltèze, après avoir faict quelque petit changement aux iiij* et xiiij* articles dudit accord, Fa approuvé et signé, lesdicts estatz, ayant ouy les raisons qui ont à ce meu Son Altèze , n'ont trouvé aucune difficulté audict changement : dont toutesfois, par les députez d*Hollande, ilz ont bien voulu advertir Son Excellence, pour le respect qu'ilz luy portent : ayant néantmoins diiïéré de signer ledict accord jusques au xvj^dece mois, en espoir d'avoir nouvelles de leurs- dicls députez et advis de Son Excellence, pour estre la pluspart des articles auparavant débatus.

Lequel jour estant venu, ont cncores envoyé en poste mes- sire Bucho Ayta, archidiacre d'Ipre, vers Gand, qui, ayant dieminé toute la nuit, et retourné en grandissime diligence, a apporté lettres dudictseigneurdeWillerval, du xiiij*de ce mois, contenantes que Son Excellence vouloit faire sur ce assembler les estatz d*Hollande et Zélande , nonobstant qu'ilz ayent à Brusselles leurs députez en nombre compétent, qui ont esté présens en toutes les résolutions, et ont donné ou peu donner leur advis, en vertu de leurs procures, comme les députez des autres estatz, estans à ce suffissament authorisez, sans qu'il soit besoing de convoquer à chasque fois les estatz par- ticuliers, ce qu'eust donné trop grande dilation et longeur en cestuy affaire, auquel on a tousjours tant travaillé, pour accé- lérer le parlement desdicts Espaignolz, principal fondement de la pacification faicte à Gand : de sorte que lesdicts estatz généraux, estans à ce pressez par le secrétaire, du Roy, Esco* vedo, et desdicts ambassadeurs de TEmpereur, et admonestez de plusieurs roys et princes, n'ont, le xvij" de ce mois, peu plus longtems différer la signature et publication dudict accord, pour plusieurs raisons très-urgentes :

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Premiers, que, le tout bien pesé et considéré, ne se trouvera rien qui ne soit grandement à Fadvantage , bien , prouGt et repos du paîs, et conforme aux advis cy-devant par Son Excel- lence donnez ausdicts estatz.

Secondement, par ce traicté est entièrement a'ggréée, ap- prouvée et ratifiée la pacification faicte à Gand le viij novembre, et, conforme à icelle, accordée l'assemblée des estaiz généraulx, se pourra mettre ordre en toutes choses qui se proposeront, et estre suppléé ce que pourroit ^tre obmis en ladicte pacifica- tion et accord.

Les Espaignolz, Italiens, Bourgoignons, Allemans et autres estrangers devront sortir hors de ce pais, sans y pouvoir retourner, ne soit par le consentement des estatz.

Tous les privilèges, coustumes, usances des pays de par deçà seront obervez et entretenus.

Item, en vertu de cestuy accord, est expressément dit que M' le conte de Buren sera restitué èsdicts Pa^s-Bas, la pacification faicte à Gand ne le contenoit point expressément, comme n*ayant esté en la puissance des estatz.

Avec plusieurs autres poinctz et articles servans grandement au bien, honneur et repos dudict pays : de sorte qu'on espéroîl que Son Excellence eût aussi trouvé bon ledict accord, d'autant qu'ilz n'ont sceu imaginer aucune raison pour quoy on deut avoir empesché ou diflféré ladicte signature ou publication.

Item, que, par le retardement de la sortie desdicts Espai- gnolz et autres estrangers , la ville de Bolduc estoit en grand dangier d'estre par eux occupée, par le moyen des Allemans y cstans. Avec ce, non-seulement la ville d'Anvers, Maestricht et autres, mais tout le pays en général, estoit grandement inté- ressez au trafic, et, par le dégast des gens de guerre, voires des nostres propres^ fort oppressé : de sorte qu'en plusieurs lieux, on ne sçavoit lever les aydes accordez, ny aussi aucuns deniers h frais ou à rente, au secours desdicts estatz, sans lesquels tou-

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tesfoison ne pouvoit mener ia guerre, lesdicts eslalz auront à ceste heure bon moyen et crédit de lever deniers à frais, mêmes en Anvers et autres lieux.

Et seront lesdictes villes plus tost soulagées des foules, opressions, branscatz et tirannies desdicts soldatz, et se fera cessation d'armes et actes d'boslilitez.

Toutesfois^ cependant, lesdicts estatz ne fauldront d*avoir Tœil au guet^ et empescher que les Espaignolz et leurs adhé- rens ne fassent quelque emprinse, et seront sur leur garde, comme s'il fût guerre ouverte^ jusques à l'entier accomplisse- ment dudict accord.

Et, pour plus grande asseurance, Son Âltéze despeschera acte de promesse de faire ledict accord a prouver, signer et sceller par Sa Majesté en Espaigne.

Y joint que. Son Altéze se mettant entre les mains desdicts estatz, et soubz garde de leurs soldats, avant d*estre accepté au gouvernement, icelle donne ausdicts estatz assez grande occa- sion de 6er en luy.

Et, outre ce, se voyoit grande apparence de quelque alté- ration populaire, si on eût différé ladicte signature et publi- cation : ce qu*a aussi fait haster lesdicts estatz, pour éviter si grand mal et danger.

Finalement, lesdicts députez feront tout bon debvoir et

office pour incliner Son Excellence afin de luy faire touver bon

' ledict accord par eux fait avec messire Jean d'Austriche, au

nom de Sa Majesté. A quoy ilz s'ayderont de tous moyens et

raisons qu'ilz trouveront convenir (')•

Fait à Bruxelles, le xviij* de febvricr 1577.

Copie du XVIII* tléele, i U Blbliolkéqo* royale : MS.ii»a238,paK. lOB.

(') Le S^ de Zveveghem et Meetkercke firent rapport de leur mission aux états généraux, dans la séance du 27 février. Ce rapport est inséré dans les Résolutions, et^,, t. Il, p. 4^6448.

1

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DXG.

LE PRINCE DORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX (').

11 leur dit ce qui a retardé sa réponse sur le traité n^ocié avec don Juan d* Autriche , et s^en réfère h Pécrit quMI a remis & leurs députés.

MioDBLBOuao, 18riTBiu i577«

Messieurs, s'estanl monsieur de Willcrval trouvé icy avecq Vadvocat d*Hollande, M'** Paul Buys, et mons' le docteur Gail,

(*) La lettre ci-après, écrite aux états généraux, de Middelbourg, le 18 fé- vrier, par le S' de Willerval, contient de curieuses particularités sur sa négociation avec le prince d^Orange :

Messeigneurs,&ccst instant, Penvoyé par monsieur Parchidiacre d*Tpre, demeurée Gand, m*a donné celles qu^il a pleut h Voz Seigneuries de m*es- cripre, par lesquelles j^apercbois mes précédentes, jusques & trois de mes lettres, n^estre tombées en vos mains. J^avisoys à me^seignenrs que roonsei- gnelir le prince d^Orenge ne donneroit response & mes prétentions, jusques à Parrivée descslatz de Hollande, qu^il avoit mandé, pour d^icbcnz tirer leur oppinion, afin de conjoinctement se résouldre, avec cheux de Zélande, à Pa- gréation du dernier traictc faîct avecq Spn Altèze, avant mon partement de Bruxelles, ou bien (comme il est jusques à ceste heure le plus aparenl) de mettre à Voz Seigneuries au debvant les difficultez qu*ilz trouvent à Pad- vouer. Et tombe, à ce qu^cn puis tirer par jugement, le refroidissement ou dilais que fînablement ledict prince etlesdicts estatz y pouront prendre, sur le peu d^asscurancc qu*ilz se promectent que monseigneur don Jean tiendra ses promesses, se mettaas, à toutte heure, debvant les yculx les exemples passez.

» Toutcsfois, sachant combien il importe de rendre à Voz Seigneuries per- tinent compte de ma cberge, et voiant que, jusques à la venue desdicts estatz, je n*auroie response sur Pagréation prétendue, me suis muny de pacience, laissant escouler les jours, non sans me ramentevoir, maison vain, puisqu^arestément Sadicte Seigneurie m*avoit, en première instance, dict que, sans entendre Poppinion des dessusdicts estatz, il ne résouidroit de chose qne tant importe le salut universel de ces déplorables pais.

Et, ce qui sert d*accessoirc à ce retardement, c*cst, messcigneurs, les

[

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ambassadeur de la Majesté Impériale, à ce par vous requis , il m'a faiet veoir les articles de la pacification conceue entre vous et don Jean d*Austrice. Et , comme sur icelle vous désirez avoir mon advis et des estatz d'Hollande et Zélandc, je n'eusse tant retenu ledict S' de Willerval par deçà, si le mauvais temps

changemens que, à ce soir, Sadicte Seigneurie nous a dit que Voz Sei- gneuries font au dessusdict traicté, adjoustant que mon enyoy en ce lieu ne sert que d^ung faint prétexte, à. raison que, pour supplier à Son Excellence qu^elIc veulle aggréer ledict traicté, Voz Seigneuries m^ont faict venir vers icelle, et, avant entendre sa résolution, non-seul lement vous avez escript à Son Altèze que, soubdain qu^elIe aura signé le mentionné traicté, vous, messeigoeurs, le su}r\Tez, mais luy auriés. accorde ses nouvelles prétentions, consistantes en deux poinetz : le ralongemcnt du terme de la sortie des Espaignolz, et la clause effnece de ne délibvrer les trois cent mille florins qu*ilz ne soient sortis des villes et chasleaux qu^ilz occupent. Iceux soubdaius changemens et octrois font que les poursuites se trouvent souvent vainnes, et que les diffidences s^acroissent, que debvrions plustost extaindre que aug- menter.

Voilà, messeigneurs, tout ee que puis dire, par ceste, qui ne vat, an surplus, que pour supplier Voz Seigneuries de croire que je m*emploie , k mon possible, h haster mon retour, que j^cstime sera demain , pour autant que cejourd^huy lesdicts estatz de Hollande sont arrivés en ceste ville : fort mary du long séjour que suis esté forcé d^ faire, sachant combien il est de dëservice. Sy est-il que me suis mis pour but ne pouvoir me retrouver vers Voz Seigneuries sans response, laquelle je crains fort ne raporter, dont gran- dement m^en desplaict, du tout conforme à voz Vertueux désirs. Qui sera Tendroit oiî priray au 'Oéateur de'donner à messeigneurs toutte prospérité , me recommandant humblement à la bonne grâce de Leurs Seigneuries. »

Le lendemain, 19 février, le S' de Willerval annonçait aux états généraux son départ pour Bruxelles , et il ajoutait : Somme, monsieur le prince et » estatz d^Hollande , bien affectionnez au vray, ne demandent (comme \oz » Seigneuries verront par mon rapport) que Passeurancc requise à Testablis- » sèment perpétuel d^une si chrestienne paix que S. M. nous donne en noz » jours, et ne contrediront Voz Seigneuries en Taggréation dMcelle, suy vaut » le contenu de la copie que je leur ay lente , si avant que messeigneurs aussy les asseurent de ce qu^ilz requièrent ; et , comme leur requeste n*est » hors de propos, je puis par cestes dire h Voz Seigneuries que de leur costé n*y aura rompture. {Recueil de pièces relatives aux étals généraux, 1576- 1580, t. I, fol. 196 et 21^, à la Bibliothèque de la Chambre des Repré- sentants.)

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qui a couru ces jours passez n'eust empesché les estatz d*Hol- lande à se trouver plustost îcy, estans seullement arrivez hier sur le soir. Gejourd'huy , j'ay avecq euh délibéré sur lesdîcts articles, et avons par ensemble déclairé nostre intention audict sieur docteur et à mons' de Willerval, par escript, par lequel vous verrez nostre bonne affection de veoir ce pays en bon repos et tranquillité, et Fentendrez encores plus amplement d'eulx , suyvant ce que leur ay prié de vous en faire particu- lier récit. Qui me gardera d*entrer icy en plus long discours, me remectant à leur rapport : seullement vous prieray, mes- sieurs, d'avoir tousjours bon regard que laffaire de ceste paci- fication soit tellement conduicte, qu'elle ne tire plus de maulx et inconvéniens après soy, que l'on n'a veu du passé. Sur quoy^ pour fin de ceste , je vous présenteray mes très-affectueuses recommandations à voz bonnes grâces, priant Dieu vdus avoir, messieurs, en sa sainte garde et protection. Escript à Middel- boui^, ce wii]** jour de febvrier 1S77.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Su9cripUon : A messieurs messieurs les députez des estatz généraulx assemblez à Bruxelles.

Copies dn temps, k la Bibliothèque de le Chambre dea Repréaentanu : Rêctmi dt jMiew nfalÎMa «M HmU géninnuBf 1576-IS80, 1. 1, fol. 196, etau Arehivet de la tille d^Yprca.

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I

4i5

DXCI.

DÉCLARATION DD PRINCB D'ORANGE ET DES ÉTATS DE . HOLLANDE ET ZÉLANDE SUR LE TRAITÉ PAIT AVEC DON JUAN D'AUTRICHE (').

Ils louent la bonne intention des états généraux ; mais le traité ne leur parait pu y correspondre.** Ils se plaignent de Huterdietion de la liberté de convoquer rassemblée générale des états, des serments inusités imposés h ceux-ci, de la détention du comte de Buren, de ce que la pacification de Gand n*est pas approuvée en termes catégoriques , de ce qu*i! n*est pas parlé assex honorablement delà reine d'Angleterre et du due d^Anjou ; du défaut d*assuranees pour les habitants de Hollande et Zélande, et même pour ceux des provinces qui reconnaissent Tautorité du Roi. Ils offrent toutelbis de signer le traité, à certaines conditions qu*ils énoncent.

MtnDBLBomift, 19 rivaiia 1877.

Monseigneur le prince d'Orenges el les estatz d'Hollande el Zélande^ après avoir veu la lettre de crédence que, de la part de messieurs les estatz généraulx des pays de par deçà, mons' de Willerval et maistre Paulus Buys, advoeat d'Hollande, en compaignie de monsieur l'ambassadeur de l'Empereur, è ce bien instamment requis, ont apporté audict seigneur prince, et par icdie entendu que lesdicts seigneurs estatz désiroient avoir leurs advis sur aulcuns articles ooncluz y en manière d'édict perpétuel, au nom du Roy, tendans à establir pacifica- tion entre les pays de par deçà et don Jehan d'Austrioe , lesquels articles pareillement leur ont esté exhibez, iizont i^espondu et respondeut ce que s'ensuyt :

C'est assçavoîr que , en r^ard desdiets articles , ilz n'ont

(1) P. Boa , Nederlandtsche OoHoghen, liv. X , foL 22t^2SW , a donné une traduction hoUaaibûse de oet écrit.

III. i5

^6

pu, sinon grandement louer et approuver le sainct zèle et louable désir et intention que mesdicts seigneurs les estatz monstrent d'avoir à remectre une fois nostre pauvre et affligée patrie à. ung repos et tranquillité si longtemps désirée « et se sont persuadez bien fermement que lesdicts seigneurs estatz ne se soyent en cela proposé nul aultre but , sinon de délivrer une fois ce pauvre peuple , affligé de tant de misères et cala- mitezy desquelz ilz sont desjà presque du tout accablez par la cruelle et insupportable tirannye de la superbe nation espai- gnole , et de la forme illégitime du gouvernement par eulx introduict, et, quant et quant, de donner à Tadvenir bon ordre et remède asseuré , pour ne tomber d'ores en avant en sem- blables înconvéniens , par une ferme et inviolable manuten- tion des privilèges, droictz et libériez anchiennes du pays , et singulièrement que leur intention ait esté, par lesdicts articles, maintenir en tout et partout la dernière pacification, faicte et conclue en la ville de Gand le viij** du mois de novembre der- nièrement passé , ainsy que , en toutes leurs lettres , actes et protestations , ilz ont tousjours promis et asseuré : chose certes digne de louenge étemèle , mesme envers toute la pos- térité.

Mais toutesfois, après que lesdicts seigneurs prince et estatz d'Hollande et Zélande euissent bien particulièrement et par le menu rapporté lesdicts articles , de poinct en poinct, tant à la présente disposition des af&ires , et à la nécessité qui les con- strainct de bien peser toutes circonstances ^ comme aussy au temps passé de noz ancestres, lesquelz n'ont jamais , en sem- blables occurences , obmis de requérir et obtenir privilèges nouveaulx et bien louables de leurs princes, il leur estoit advis que par iceulx articles n'estoit encoire enthièrement ny du tout satisfaict au zèle et désir dessus mentionné desdicts seigneurs estatz.

Car, premièrement, il sembloit que lesdicts privilèges

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anchiens du pays , que eulx désirent par toules voyes establir, â*y trouvoient par voye indirecte fort intéressez, tant en ce que la liberté de convocquer les estatz généraulx y estoit obliquement ostée à ceulx à quy ^ de tout droict, d^ancliien- neté elle appartient , comme en ce que les estatz du pays sont astrainctz à obligations et sermens nouveaulx et inusitez. Puis roeisme Ton y pouvoit remarcquer infraction manifeste d*iceulx, en la détention innicque du comte de Buren , que tout le monde sçait avoir esté enlevé , contre tout droicl , raison et privilèges diceulx pays : ce qui sambloil d'aultant plus ù con- sidérer que, iceulx privilèges se trouvans enfrainctz ainsy, du beau commenchement, en ung acte qui debvoit expressément tendre au restablissement et conservation d'iceulx, mesmes au regard d'une personne particulière et qui ne avoit mesfaict en chose quelconoque, donnoit bien peu d*occasion d'espérer qu'ilz seroient entrelcnuz, par cy-après, envers le peuple et villes en général , contre lesquelz on ne fauldra de trouver matière pour les charger de crimes de rébellion et de lèse- majesté : joinct que, par le faict susdict, est contrevenu mani- festement à ladicte pacification de Gand , combien que le pré- judice que l'on faict à icelle, et la totalle annichilation à laquelle pourrait sembler que lesdiets articles tendent , appert plus évidemment en ce que l'approbation et aggréalion d'icelle n'est aulcunement simple ny cathégoricque , ainsy que la raison cl rimportance d'ung tel faict requéroit , mais dépendant entliiè* rement de certaines astrictions et relations limitées et subjectes à une infinité de cavillations, et de tout semblables à celles qui, du temps de madame de Parma , ont esté cause d'uDgne hor- rible effusion de sang ; contre lesquelles meismes avoit esté, par les députez desdicts seigneurs prince et estatz d'Hollande et Zélande, protesté et obtenu acte publieq , sur l'aggréation faicte par le conseil d'Estat, presque en termes semblables. Puis aussy y trouvoient lesdiets seigneurs prince et estatz

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d*Hollande et Zélandcanicuns poinctz tellement préjudiciables^ selon leur jugement, à la réputation et honneur de la patrie, qu'il sembloit qu'à jamais en eust peu demeurer engravé une lâche de déshonneur h la mémoire et au nom de nostre posté* rite , de ce que nous aurions mis en composition avecq ceulx que nous avons , par édict publicq et par auctorité du Roy et des estatz , déclarez | rebelles] , et particulièrement, par une instruction , faict accuser devant les estatz du Sainct-Empire, comme schelms , meschans et rebelles , et qui ont faict ligues et conspirations avec les Espaignolz ; meisme , que plus est , que nous aurions souffert, et à nostre eschient, laissé emporter noz bagues, joyauk, argent , denrées, marchandises et brant- schatz hors de nostre patrie, sans aulcune contradiction.

En oultre , il sembloit ausdicts seigneurs prince et estatz d'Hollande et Zélande que le respect , honneur et gratitude que devons , tant à la sérénissime royne d'Angleterre, comme à monseigneur le duc ('), frère du roy de France , lesquelz nous ont , à nostre besoing . monstre si bonne et entbière volunté et affection de nous assister de leurs moyens, pour nous tirer hors de l'oppression et servitude en laquelle nous noua trouvions, n'y estoit assez deuement poisé ny respecté, puisque la raison eust bien voulu que Ton les y eust comprins en termes plus exprès et honorables.

Et finalement, ne trouvoient que, par lesdicts articles, fusl pourveu d'aulcune asseurance aux habitans des pays d'HoU lande et Zélande, ausquelz , au traicté dernier de Breda, Ton a faict offres beaucop plus avantageuses et raisonnables d'as- seurance ; et encoire dernièrement, au traicté de la pacification faicteà Gond, eust esté faict le semblable, n'estoitque leurs députez, déclairans, et de bouche et par escript, qu'ilz n'en- tendoient en sorte quelconcque traieter avecq aultrcs que avecq

(>) I«e duc d^ Anjou.

229

les estatz meismes, vouloient monstrer la bonne foy de laquelle iiz procédoient en leur endroiet : protesUins toutedfois que, si Ton eust esté dlntention de reeepvoir don Jehan, et qu'il eust fallu traîeter avecq luy en oeste façon comme Ton faiet main* tenant, qu'ils eussent demandé aultres asseurances, comme la raison ei disposition des affaires le requéroit. El touiesTois, par ees articles, non-seullement il ne se faict nulle mention d'asseurances, mais non pas meismes de restituer les particu- liers en leur enthier louchant les biens, estatz et gouvernemens qu'ilz ont en pluisieurs lieux de par deçà, et pareillement en la France-Conté de Bourgoingne : ce que toutesfois , suivant le pied de la pacification { laquelle pour lors . ne se faisant qu'avec les estatz gcnéraulx des pays de par deçà, ne pouvoit spécifier ce poinct expressément), sembleroit, scion toute raison, devoir estre conditionné.

Et, qui plus est, ilz n'y pouvoient remarcquer aulcune asseurance meisme pour les aultres provinces et tout le pouvre peuple de par delà, considéré qu'il n'y avoit nulle mention de démolition des citadelles et chasteaulx, à l'occasion desquels sont sortis des mauli infiniz, comme à ung chascun est notoire, ny meismes aulcune particularité ny explication de ceste ou- bliaiicc dont il y est faicte mention : ce que ne peult estre sinon suspect audict peuple , lequel , ayant esté ouvertement menasse, encor mesme au dernier recés de Huy, auroit certes bon besoing d'estre bien asseuré pour l'advenir , lorsque , le pays estant désarmé, don Jehan sera estably en auctborité de gouverneur; mesme quand ce ne seroit que pour le regard des exemples du passé. Voire, au contraire, il semble que l'on veuille s'accommoder aux esiatz , en matière de gouverneurs qui soient à leur gré , tant seullement pour ce coup , comme sy, par cy-après, Ion estoit d'intention de leur rcarancher tous moyens de se tenir asseurés contre la mauvaise volunté de ceulx ciue Ion prétendroit de leur donner pour gouverneur».

230

Bricfy il y avoit pluisieiirs semblables articles et aultres les- quelz sembloient ausdicts seigneurs prince et estatzil^HoIlandc et Zélande très-dignes d*estre bien poisés et reniarcqués, et pourtant estoient d'intention de les nicctre particulièrement par escript, pour les envoyer à mesdicts seigneurs les estatz, et leur déclarer, quant et quant, qu'à Tadvis desdicts seigneurs prince et estatz d'Hollande et Zélande , il estoit maintenant temps de demander et poursuyvre, à l'exemple de nos ances^ très, d'obtenir ampliation et extension des privilèges , droictz et libertez qu'avons receuz d'eulx , meismes en une telle con- joincture et opportunité qui se présente , pour ne tumber une aultre fois, par cy-après, en semblables inconvéniens. Mais, comme ilz estoient empescbez a déduire les poinciz susdicts et aultres semblables , et les mectre par escript, pour la un susdicte, voicy qu'on leur apporte copie des lettres que mes- dicts seigneurs estatz avoient escript audict don Jehan, par lesquelles ilz ont veu que, sans attendre leur responce, il leur a pieu de conclure avecq ledict don Jehan , et le requérir de signer les articles susdicts, avecq promesse de les faire publier et de le recepvoir déans le pays. Dont certes lesdicts seigneurs prince et estatz d'Hollande et Zélande ont esté bien esbahys de veoir ung tel changement, considéré que la date desdictes lettres estoit presque du mesme temps (comme aussy elles leur furent délivrées après ung petit intervalle) que ledict S' de Willerval les estoit venu trouver : car, oultre la contra- riété que trouvoient en ce faict, encoire leur sembloit ceste accélération d'une affaire de telle conséquence, et de laquelle dépend enthièrement le salut ou la ruine de tout le pays de par deçà, estre assez précipitée; et toutesfois, comme ilz esti- ment et croient fermement que cela ayt esté faict pour tant pluslost veoir le pays délivré des Espaignolz et aultres estran- giers oppresseurs de la patrie , ilz ne peuvent aultre chose , sinon de souhaiter, comme ilz souhaitent de tout leur cœur,

231

et prier Dieu que l'issue en puisse estrc telle connue tous les bons palriotz désirent.

De leur part , puisque maintenant il seroit superflu d'allé- guer raisons au contraire, ou débattre sur une cliose faicie , ilz promectent et asseurent mesdicls seigneurs les estatz que , par tous moyens , ilx maintiendront la pacification faicte à Gand, comme ausay ilz espèrent que telle est l'intention d'iceulx dicts seigneurs : ce que ilz prient, en toutes occasions, vouloir monstrer par les effectz , ainsy que de leur costel ilz sont prestz de faire. Et toutesfois, afQn que Ton voye par l'effect qu'ilz ne désirent aultre chose que de procurer la retraicle desdicts Espaignolz et aultres estraingiers, et le resta- blissemcnt de la paix et tranquillité, ensemble et des ancbiens privilèges, droictz et libertez du pays, ilz sont contentz de approuver et signer les articles susdicts, moyennant et à con- dition que, préallablement, il plaise & mesdicts seigneurs les estatz résouldre fermement et irrévocablement, et de ce leur donner acte obligatoire, en forme deue, signé des gouverneurs des provinces, chiefz et coUonelz, que, en casque, après le terme prins et accordé audict don Jehan pour la sortie des Espaignolz estant expiré, lequel commencera à estre compté d'ung certain jour de ce mois présent, que eulx-meismes luy dénommeront, lesdicts Espaignolz ne soient sortiz réellement et de faict hors des pays de par deçà, que alors, pour une fois éviter les dilays et longueurs qui jusques à présent nous ont esté si dommageables, lesdicts seigneurs estatz rompront et retrancheront toute ultérieure communication avecq luy , et poorsuyveront ladicteretraicte par voye d'armes, sans jamais plus entendre à aulcun traicté ou communicaUon , quelle qu'elle puisse estre, et que aussy il leur plaise donner acte et obligation semblable, en forme de reversai, que, après ladicte retraicte des estraingiers, eulx, ny lesdicts gouverneurs, chiefz et collonelz ne recepvront, advoueront ne recognoistront ledict

don Jehan, ny aultre, pour gouverneur du pays, jusques à ce que, préallablement, il ayt restably et enthièrement satisfaict à tous les poinctz qui sont aulcunement répugnants et contraires . auxdicts privilèges, droictz et libertez du pays, ou aulcune- ment en préjudice de la pacification de Gand , en conformité de laquelle tous et ung chascun seront remis en la possession de leurs biens, tant de Bourgoingne que de par deçà; ains que tous lesdicts privilèges et libertez soient confirmez, ratifiez et establiz , selon ce que lesdicts seigneurs estatz ont solemnèlc- ment promis, au temps de ladicte pacification de Gand, par leur lettre eseripte a leurs députez , en date du xxviij* d'oc- tobre dernier 1576 (').

Faictà Middelbourg« lexix* jourde febvricr 1577.

GuiHe de Nassau.

Par ordonnance des estatz d*Hollande et Zélande :

C. Taymon.

Cofiia in tflB|M, à U BîUiotbéqM de la Cbmbre àm Beprétenianla : BâeutU piiem rtUtitm «w Htat ginimmg, 1S76-1S(», c. 1, fol. 200-303.

(>) Les ëftats généraux délivrèrent au prince d*Orange et aux étals de Hol- lande et Zélande Pacte suivant, dont Boa a publié aussi une traduction hollandaise, et que M. Gbobn Van PainsTsaKa {Àrefiives, etc., t. VI, p. 7) a fait connaître dans son texte original :

« Ai\jourd*htiy, le premier jour de mars 1577, messieurs les estata gêné* raulx des Pays-Bas, ayans veu Tcscript de mons' le prince dH>range et des estats d'Hollande et Zélande, exhibé sur Taccord faict entre don Jehan d*Austrice, chevalier de Tordre du Thoyson d*Or, et les estais généraulx des Pnys-Bas, en date du xix« de febvrier dernier, ioeaix estats généraulx dé- clairent leur intention avoir esté tousjours, et estre encores,de maintenir par cflect la paciGcation faicto à Gand , au mois de novembre dernier, entre rExccllence dudict seigneur prince, estats d*Hollande, Zélande et leurs associfX, et lesdicts estais généraulx, et, entre anltres, faire redresser tout ce que se trouvera estre faict et attenté au ooniraire,et au dehors des privi- lèges, droictz, libertez et usaiges des Pays-Bas, tant en général que en parti- culier ; aussy, qu*ilz entendent faire, par force d'armes, sortir les soudartz f sfiaignols , italiens et bourgoingnons hors des Pays-Bas , en conforroilë

253

DXGIL

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils le prient de renvoyer h Bruxelles le docteur del Rio et les nulres députes

qui sont en son pouvoir.

BBOXiUiiSt 19 riTBisR 1Q77.

Monseigneur, comme, par le traité de la pacification qu'il a pieu h Dieu eslre servy nous envoyer, soit capitulé, entre auitres, que tous et chascun les prisonniers a cause des chan- geniens , altérations et troubles derniers , soyent eslar^sis librement et franchement, d'une part et d'aultre, sans payer ranchon, que désirons estre accomply et effectué, selon qu'es- pérons et nous confions que, du costé de noz parties, sera aussi effectué, suyvant ladicte capitulation et la promesse que nous en a faiete le S' Escovedo, endéans cincq jours après Tinsinualion que sera faiete aux Espaignolz, auquel effecl il s'acliemîne prestemenl, nous avons bien volu, par le S' de

dudiet icoord , eo cas que ioeulx soldats ne soyent sortis réellement et de faict hors lesdiots pays endedens le temps préfini , selon le commandement exprès & eolx faict de la part de Sadiete Altèse, sans plus entendre a anlcung traictié ou communication pour dilayer la relraicle dosdicts Espaignolz. Et, puisque les gouTcmeurs des provinces^ ehiefz et colonneli de gens de guerre sont tenuz selon ce se reigler, on les rcquièrera qu*ila Teuillent semblable- ment signer pareille résolution. Dont a esté dépesché le présent acte, et, à Tordonnance de tous lesdâcts estati généraulx, signé par le grelBer deceulx de firabant, les jour et an que dessus. > {Recueil de pièccB rdatives aum étvUe généraux, iS{76-19S0, t. I , fol. S34, àla Bibliothèque de la Chambre des Représentants.)

On lity dans les Réeolutionê de» étais généraux, t. Il, p. 118, à la date du !«' mars : Touchant l'acte que s'accorde a mons* le prince d'Orainge et » ceulx d'Uollande et Zélande, se fera par la pluralité des voix, bdou l'opi- nion des cstatx de Brabant et de Flandre leute. n

234

Courtewillc (*) qu'envoyons exprès, prier Voslre Exeellence de vouloir, avee bonne et seure garde, envoyer incontinent en eestc ville le docteur del Ryo (*) et Escossois, et aultres prisonniers que povez avoir auprez de vous et en vostfe puis- sance, à cause des troubles et guerre passez, pour procéder à l'accomplissement de ladicte pacification, comme est requis et raisonnable. Et, soubz espoir qu'ainsi le ferez, d'aultant que désirez le bien et eslargissement du S' d'Aigmont et aultres seigneurs bons patriotz , finirons eeste par uoz bien aflec- tueuses recommandations aux bonnesi grâces de Vostre Excel- lence, priant le Créateur donner à icelle longue et prospère vie. De Bruxelles, ce xix'' de febvrier 1577.

De Vostre Excellence les très-affectionnez en service,

Les estatz généraulx des Pays-Bas assemblez à Bruxelles.

Copie do tempe, aai ArehivM de U villa d*Ypre«.

(1) On lit, dans les Réêolution» des états généraitx, t. II, p. 97, i k date da 19 féTrier : « Le S** Courleville est commis à se trouver en Zélande vers Son » Excellence, pour faire ramener tous prisonniers vers Bruxelles, afin que » relaxation en soit faicte, doix que les Espaignols auront en ce satisfaîct de » leur cosUS.

(') Louis del Rio, Tun des membres influent^du conseil des troubles, avait été arjrétë lors du coup de main exéeaU, le 4 septembre 1876, contre le conseil d*£(at, et envoyé plus tard au prince d*Onmge, en Zélande.

- 23îi

DX€lli.

LB CONSEIL D'ÉTAT AU PRINCE D'ORANGE. Il «e joint «m 4UU gêaénax, pour dMundw le noroi de* prlMoniers.

Baoxnus, 19 rirMU 1577.

Monsieur, comme, par Taecord faict avec mcssirc Jehan d*Auslriee, d*uoe part, et les estatz généraulx des pays de par deçà, d'aultrc^ dont vous avez esté advcrti, est, entre aultres, dict et convenu que les prisonniers de costé et d'aultre seroyent relaxez sans rançon, et que lesdicts estatz iey assem- blez nous ayent faiet entendre qu'ilz désirent y satisfaire de leur part, et partant nous ayent requis vous escripvre que veuillez faire renvoyer les prisonniers qui vous ont esté envoyez d'icy , et aultres estans par delà appréhendez depuis ces der- niers troubles, que ne leur avons sceu refuser : ce est cause de vous avoir faict despescher la présente, afin qu'il vous plaise de donner ordre au renvoi desdicts prisonniers. Et, ne servant ceste pour aultre, nous prierons le Créateur qu'il vous doint, monsieur, bonne et longue vie. De Bruxelles, le xix* jour de febvrier 1577.

HÎBvle, awi Archives du Royaume : iillrct di «l i Gnillammide ffatstm, t. V.

936

DX€IV.

LE CONSEIL D'ÉTAT AU PRINCE D'ORANGE.

Il le prie de faire en sorte que les ëttCs de Hollande envoient des députés k Bruxelles, pour conférer avec les états généraux sur le règlement delà monnaie.

BaoxiLLis, 19 rivRiXR 1577.

Monsieur, les députez des estalz généraulz assemblez en eesle ville nous ont faiet entendre que, ayant comraunicqué avec les députez de Hollande, ayans esté icy, sur le faiet de la nionnoye, pour adviser quelque commun pied, n'ont seeu s'accorder ensemble, et que partant ilz vous escripvent, aGn que veuillez donner ordre que quelques-ungz, s*entendans bien sur le faiet de la monnoye, viennent icy, de la part des estatz dudicl Hollande^ à Teffet susdici, nous requérant de vouloir accompaigner leur lettre de ce mot nostre, comme faisons, pour vous requérir que le veuillez faire ainsy, afin que, par mutuelle communication, se puist tant mieulx trouver ledict pied, comme il est bien besoing pour les ungz et les aultres. Qui sera Tendroil où, après noz affectueuses recommandations, supplierons le Créateur vous donner, monsieur, ce que plus vouldriés luy demander. De Bruxelles, le xix'jour de febvrier 1577.

■inate« aux Arehives da Bojra«Be : iftitru dt et à GmilUum» Mmutm, C V.

237

MCV.

LE CONSEIL DÉTAT AU PIIINCB D'ORANGE.

Il le prie de donner des ordres a Nieuport, au snjet des Français qui pour- raient s^y retirer, afin de prévenir tous troubles et îneonTénients.

BrDXBLLBS, 20 ViTBIBB 1577.

Monsieur, comme Ton nous advertit que, depuis ces nouveaulx troubles suscitez en France, pluisicurs s*en retirent et aménagent par deçà, etraesmesen la ville de Nieuport, nous n*avons sceu obmectre de vous faire despescher la présente, pour vous requérir et prier, comme requérons et prions, que veuillez donner ordre et commander bien expressément que audict Nieuport se prengne et porte Tesgard, avec le soing que le temps présent requiert, que nul inconvénient y puist advenir ni succéder, âu préjudice du repos publicq et de la seureté des pays de par deçà, comme nous nous con6ons en- tièrement que ferez. Et là-dessus prierons le Créateur qu*il vous doint, monsieur, ce que plus vouldriés luy demander. De Bruxelles, le xx* jour de febvrier 1577.

M Idum, «ox Arebires do floyaamc : Ltttm dt H àGwna%mtd9litu9Wy\.X,

238

D΀V1.

LES ÉTATS GÉNÉBAIDL AU PBINCE D'OBANGS.

Ils le prient de traiter les babilMittde Harfem enreonfomitté de ee qui a été

conTenu dans la paciGeatîon de Gand.

BtOZtLLBS, 20 rSTHIBB 1577.

Monseigneur, nous avons receu la lettre de Vostre Excel- lence, du xvj' de cestuy-cy, et, quant et quant, ouy le rapport de Tescoutctte d*Harlem sur le piteux estât de ladicte ville, à nostre grand regret et commisération de la pauvreté et misère que les habitans endurent, nonobstant la déclaration par leurs députez icy faicte de se vouloir joindre, et réèlement s'avoir uniz avecq les aultres estatz icy assemblez, dont Vostre Excel- lence a esté assez advertye : par toutte hostilité envers ceulx de Harlem debvoit cesser, de quelle part que ce fust, con- forme la pacification faicte h Gand. Nâantmoings, attendu et bien considéré les calamitez et misères icy remonstrées, pour promptement remédier à icelles, avons trouvé bon de faire sortyr et partyr incontinent les souldars et gens de guerre qui sont en garnison en icclle ville. Sur quoy nous avons derechieff, comme avons aultrefois, escript lettres ausdicts gens de guerre, et requiz lettres du conseil d'Estat à cest mesme cffect : prians Vostre Excellence de vouloir tenir la main que la ville et ses habitans soyent tellement traictez, en leur extrême nécessité, comme la raison requiert, suyvant ladicte pacification faicte h Gand, laquelle prétendons entièrement maintenir, mesmes au regard de la satisfaction amiable que doibt estre donnée aux villes qui retournent soubz le gouvernement de Vostre Excel* lence. A tant, monseigneur, ferons fin de cestc, nous recom-

239 -

mandans bien affectueusement aux bonnes grâces de Vostre Excellence, priant au Créateur donner à icelle longue et pros- père vie. De Bruxelles, le xx* de febvrîer 1577.

De Vostre Excellence les très affectionnez en service,

Les estatz généraulx assemUez à Bruxelles.

Par ordonnance desdicts estatz :

Coit!«eLlCS WCELLEMANS.

Copi* en iMBpt, avs AreUret de !• ville d*Yprct.

DXGVn.

LE PRINCE DORANGE AD CONSEIL D'ÉTAT.

Il renvoie le docteur del Rio, Paul de Somere et un Écossais qui lui avaient

été amenés prisonniers.

MiDDBLBocio , 2i riraiBR 1877.

Messieurs, suyvant les lettres que m'avés escrit par le S' Courtewyle, je vous renvoie le docteur del Ryo, TEscos- soîs (') et Paul de Zomcre, lesquels m*ont, passé quelques jours, esté icy amenés prisonniers. Quant à aultres, je n'en fiçay nuls. Et t tant , après m'estre très-affectueusement recommandé à vostre bonne grâce, je prie Dieu vous donner.

(0 Cëtait un gentilhomme écossais, du nom de Hamillon, et frère de celui qui avait tué le bâtard d*£cosse« (Lettre d^Escovedo à Philippe il, du 21 fc- Trier 1577, aux Archives de Simancas.)

240

messieurs, en santé bonne vie et longue. Escrit «n Middelbourg, ce xxiiij'^de febvrier 1577.

Voslre très-affectioné amy à vous faire service,

GuiLLE DE Nassau.

Suscriplion : A messieurs messieurs du conseil d'Estat de Sa Majesté, h Bruxelles.

OrigintI, «m Arehivw da Royaune : Lêttm Jt et à auiUtnme Ntmau, t. V.

DXGVUL

LE PRINCE D'ORANGE AU CONSEIL D'ÉTAT.

Réponse à la lettre du conseil dn 20 rëvrier. Gentilshommes français dont il a autorisé le séjour k Nieuport. 11 répond de la tranquillité de cette ville, tant quelle sera occupée par ses gens.

MiDDBLBOuaa, 2tt rétraiEa 1877.

Messieurs^ j'ay receu vostre lettre, escritte du xx* de ce pré- sent mois, et par icelle entendu que vous sériés ndverti que, depuis les nouvoaulx troubles suscités en France, plusieurs se retirent et aménagent par deçà, et mesmes en la ville de Nieu- port. Sur quoy je n*ay voUu faillir de vous advenir que,^ passé quelque temps, j'ay escrit au magistrat et capitaine estant audict Nieuport, afin qu'ilz laissassent entrer et séjour- ner en ladiete ville quelques gentilhommes françois, qui s*estoient ofTers pour le service de ce pays, en dessoubz de monsieur de Gammache, au cas qu'il eût obtenu commission

241

des estatz généraulx pour faire une cornette do ehevaolx : qui me fait vous prier que pour leur regard ne vous mectiés en auleune peine^ el vous asseurer que, sy longtemps que mes gens seront audict Nieuport, n'adviendra auleun ineonvénient ny préjudice au repos publicque. Et là-dessus je prieray Dieu, messieurs, vous donner en santé bonne vie et longue. Escrit à Middelbourg, ce xxv* de febvrier 1577.

Vostre trèsaifectioné amy à vous faire service,

Guiû!e de Nassau.

Original , aux Archives du Rojauroa : IttUrtf ec à Gninmwmt MmBâtm, C. V.

DXGIX.

PHILIPPE DE MARNIX, S' DE SAINTE-ALDEGONDE, A 6ASPAR SCHETZ, S' DE GROBBENDONCQ (•).

Il lui soumet ses doutes et ses objections touchant les deux points suivants, sur lesquels Schetx avait écrit au prince d*Orange, savoir : que défiance qu'on avait conçue du Roi et de don Joan d*Autrichey était mal fondée, et que le Boi avait résolu 4fi remplacer la rigueur par la clémence dans le gouvernement des Pays-Bas.

Sans datb (rm ns pivaisa 1577).

Monsieur de Grobbendoncq, il a pieu depuis. naguerres à monseigneur le prince me monstrer la lettre que luy avez

(') Qq<>> ^00 M amiz en dise, il est évident que cette lettre a été écrite sous rinspiration et même par Tordre du prince d^Orange, et e^est ce qui m*a engagé, indépendattimeDt de son Importance, k lui donner place ici.

Dans le manuscrit d*où elle est tirée, elle ne porte point de date ; on lit seulement en tête : LeUred%Sr dtSainie-'Atdegotuie, conseiller de mùnstignefêr

III.

242

cscfite (*)• Sur laquelle je ne puis me tenir que, par manière de discours, je ne vous en escrive ce qui m'est tombé en Ten- tendement, cependant que je la lisois, non pas du poinct qui concerne voz excuses sur le propos dont faictes mention, car j'estime que Son Excellence en aura receu ample satisfaction, mais seulement touchant les devises que eusmes par ensemble, estant à Bruxelles, sur lesquelles m'a semblé que le dernier poinct de vostre lettre tomboit, confessez avoir tenu la main, tant qu'en vous a esté, à l'accord faict avec don Jean, et ce, comme je puis recueillir, pour deux raisons : Tune, pour avoir clairement veu que diffidence qui empeschoit un si grand bien estoit mal fondée; l'aultre, pour ce qu'il vous constoit asseurément que le roy d'Espaigne a changé d'avi$ à l'endroit du gouvernement de ces pays, s'estant résolu d'en- suivre la voye de clémence, puisque celle de la rigueur n'y a servi de riens, et ne luy est aulcunement advantagieuse.

Or, avant de passer oultre, je vous prie de croire quejen'ay nulle charge de mondict S' le prince , mon maistre, de vous escrire, et aussi qu'il ne m'a déclairé soù advis à l'endroit de vostre lettre , mais que, de mon propre mouvement , j'ay envie d'en discourir avec vous, afin d'estre liquidé d'aulcunes difBcuUez qui sur cecy se présentent en inon esprit, soubz espérance que, si vous m'y donnez satisfaction, cela servira pour en attirer plusieurs à vostre opinion, et pourra estre cause d'oster une grande partie de la diffidence qui y reste, et nous faict encoir beaucoup de mal et d'empeschemens.

le.prince d'Orange, escriie au S^ de Grobbendoncq, au mois de'..,.,..,. 1K77. J*ai cru pouvoir la dater de la fin de lévrier, parce qu*il résulte de son contenu même qu*elle fut écrite après la conclusion du traité des étals avec don Juan ; que Marnix y rappelle au S' do Grobbendoncq « les devises qu*ils eurent par ensemble, estant à Bruxelles, » et que- ce ministre du prince d*Orange abandonna rassemblée des états, le jour ils résolurent de signer le traité sans attendre Tavis du prince. (') Cette lettre du S' de Grobbendoncq n*a pas été publiée.

243

Or^ je ne puis, en premier lieu, comprendre pourquoy vous dites que la difûdence qui cstoit entre les estatz du pays et don Jehan estoit mal fondée : car, au contraire, il semble à plusieurs que, si les estatz eussent voulu mesurer les choses à la vérité, et non pas à Taffection précipitée qu*ilz avoient de veoir une fin des troubles, ilz debvoient, selon toutes raisons, déclairer ouver- tement don Jehan pour ennemy, comme il appert, par toutes ses actions, suyvant la charge qu'il a eue du Roy, qu'il s*est tous- jours tenu du party des Espaignolz, bannis et déclairez rebelles, et a approuvé et ratiGé leurs actions, sinon en chasque poinct particulier, au moins en général, ayant trouvé bonne la déclara- tion de la guerre et de l'hostilité qu ilz ont monstrée aux estatz. Car, que Ton considère toutes les lettres du Roy escriptes à ceulx du conseil, aux particuliers espaignolz, et singulière- ment & Roda, lorsqu'il dépescha don Jehan d'Espaigne, et qu'on confronte particulièrement celles du secrétaire Çayas^ Albornos et plusieurs aultres, l'on trouvera manifestement que le Roy et tout son conseil d'Espaigne tiennent lesdîcts Espaignolz pour les meilleurs ministres de Sa Majesté, et n'ont rien en si grande recommandation que leur salut et con- ser\'ation, è raison de laquelle le Roy, par lettre expresse, leur donne congé et licence, en cas de rompement, de pouvoir faire la guerre et tous actes d'hostilité contre les estatz, mec- tant le jugement de cecy à la discrétion de Roda : en quoy tout homme de sain jugement voit estre comprinse l'appro- bation du sacq de Maestricht, d'Anvers et de toutes les aultres villes, bourgs et villaiges qu'ilz ont pillé, saccaigé et bnislé. Et, en conformité de cela, afin que Ton ne pense que depuis il auroit changé d'avis, don Jehan a escript depuis naguerres audict Roda et Montesdoca que , si les gens des estatz s'appro- choient plus près, ilz leur fissent du pis qu'ilz pouroient. Aussi a-l'on advertissemens, tant d'Allemaigne que de France et d'Angleterre, qu'en Espaigne ont esté faicts publiquement

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(les feus de joye pour la misérable désolation de la ville d'Anvers. Quoy qu'il en soit, tant y a que don Jehan, eseri- vant qu'il eroit fort bien que cela ne se pouvoit éviter ny excuser qu'il ne se feit, monstre évidemment de l'approuver comme juste, raisonnable et nécessaire, et, par conséquent, comme ung service aggréable au Roy : mais, que plus est, le Roy mesme les congratule et se rcsjouit de la deffaicte de Thiimont, leur promectant récompense pour avoir si bien faict, et les enhorte de secourir le chasteau de Gand, assiégé par les estatz et par Fauthorité du conseil d*Estat, et deffaire tous ceulx qui y estoient devant.

Aussi appert-il que tant le Roy que don Jehan tiennent et ont tousjours tenu trés-étroicte correspondance avecq Roda et les aultres chefz des rebelles, par cyfres et auhres voies secrètes : mesmes, Ton a veu que les Espaignolz sont tous- jours allez et revenus vers luy sans passeport et sauvegarde; que le Roy leur commande de celer, non-seulement aux estatz, mais au conseil d'Ëstat mesme, son advis et délibération tou- chant les fortz et paiement (>) des Espaignolz, et que don Jehan, suyvant sa charge bien expresse, a tousjours usé et use encore de leur conseil et advis eu tout ce qui se présente. Il appert manifestement que ceulx-cy ne font rien sans le sceu et adveu exprés du Roy et de don Jehan d'Austrice. Encores dernièrement, à Huy, toutes ses actions et propositions ont monstre bien clairement qu'il se tenoit du party des Espai- gnolz, déclairez ennemis des estatz : ce qui appert mesme eneoir par la paix dernière, en laquelle il n'a rien capitulé si soigneusement comme la satisfaction et contentement desdicts Espaignolz, ausquels, ung peu paravant, il s'estoit accommodé si avant que d'avoir donné par escript que, pour ce que eulx ne vouloient sertir, sinon par mer et accompaignez avec les

(*) Peul-éire faut-il lire partemcnt.

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Allemansy il falloit nécessairement passer par , en quoy il ne s'est nullement porté pour juge, et moins encore pour médiateur, mais pour partie adverse des estatz, veu que aulire- ment il debvoit avoir cogneu la cause, et prononcé sentence en faveur de celuy qui auroit eu .droict, et ccmdamné Taullre : mais, au contraire, approuvant en tout et partout le party des Espaignolz, en leur procurant toute satisfaction et contente* ment, il a tousjours , jusques à ce partement des ambassa- deurs, usé, & l'endroict des estatz, du terme et mot de par- don, déelairant évidamment qu'il tenoit lesdicts estatz pour rebelles et criminels de lèse-majesté, auxquels toutesfois le Roy, par sa grâce et «clémence accoustumée, seroit content de pardonner ; ayant depuis, par le moyen desdicts ambassa- deurs, changé seulement le mot de pardon en ung mot d'où- bliance, équipollant toutesfois en la grammaire lyrannyque de Machiavelle, et au reste ayant tousjours monstre qu'au faict de la pacification de Gand, il entend avoir esté commis par eulx crime de lèse-majesté. De façon que je ne puis com- prendre comment vous accusez la def&ance comme ayant esté mal fondée, puisqu'il semble, au contraire, que le phiegme de ceulx du pays est plustost accusé de ee qu'ils ont ainsi froidement laissé escouler et esvanouir tant et si manifestes causes de deffiance envers celny qui a tenu et tient encore manifestement le party de leurs ennemis et adversaires jurez. La seconde raison par vous alléguée est que le Roy a changé de conseil et résolution, et veult d'ores en avant gou- verner par clémence. Certes, s'il éstoit ainsi, et que tous les ^eets le monstrassent à veue d'oeil (ce que non), si est-ce que Ton pourroit conclure que, s'il a changé à présent, il pourra eneoir bien changer une aultre fois , et d'aultant plus vray- semblablement, qu'il est plus aysé de se remectre à son naturel accoustumé, quand on s'en est desvoyé, que d'abandonner la coustuniie en laquelle on s*est tousjours maintenu, pour

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embrasser une façon nouvelle : car la coustume, comme vous sçavez, est une seconde nature, principalement en choses d*Estat, qui sont fondées en longues et meures délibérations, et èsquelles tous cbangemens (ores mesmes qu*iiz soient en mieulx)' attirent ordinairement des grands et dangereux esbran- lemens. Car, que le gouvernement rigoreux et par force luy a esté ooustumier et naturel, vous-mesmes le confessez, disant qu'après tant de remonstrances, il a finalement apprins de ne procéder plus comme il a voit tousjours faict du passé, combien, certes, que je ne puis veoirque aulcunes remonstrances ayent beaucoup servi en cest endroit, jusques au partement de don Jehan d'Espaigne, et son instruction toute furnie : car Ton peult recueillir, par les lettres du Roy, qu'il a eu charge de réduire ce pays en une pleine obéissance, par quelque voye que ce fût, et de faire guerre à toute oultrance à monseigneur le prince d'Orange et à ceulx d'Hollande et Zeelande, et cependant de dissimuler avecq les aultres seigneurs, jusques à ce qu'il auroit bon moien d'exécuter ses desseings : qui n'est, certes, sinon que Taccoustumée façon laquelle il a tousjours auparavant usée jusques à l'heure présente; et ne sçay quelles remonstrances luy peuvent avoir esté faictes avec si grande efficace ou éloquence, depuis le partement de don Jehan, ne fût par don Jehan, ou par les Espaignolz mesmes : ce qui n'est vraysemblable, puisqu'ilz ont assez clairement monstre par les eflects l'opinion qu'ilz en ont.

Vous alléguez aussi qu'il s'est trouvé mal conseillé de prendre la voye de force^ et que pour cela il auroit changé. Mais encore ne voy-je en cela grande apparence, veu que, à mon petit jugement, s'il s'estoit trouvé mal conseillé du passé, il auroit changé de gens de conseil, ou auroit cerché conseil vers ceulx du contraire party, ou pour le moins donné quelque démonstration par les eÏTects de regret que ce luy seroit d'avoir suivy mauvais conseil. Dont eneor l'on ne voit nulle appa-

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rence : car Hoppenis, lequel estoit soûl au conseil qui luy pôuvoit donner sain advis, est mort en ces eutrefaictes (Dieu veuille que ce ne soit à la façon de messieurs de Bergues et Montigny!); le duc d'AIve est en crédit aultant que jamais; les aultres du conseil d'Espaigne n'ont eu ny veu nulle appa- rente raison de changer d'advis^ depuis que tous ont unani- mement tant loué et extollé (') les prouesses de Sancho d'Avila et de ses autres complices, si ce n'est que^ par aventure, que vous estimez que Tattestation des prélalz et docteurs de par deçà au faicl de la religion, et celle du conseil d^Estat au faict de l'aulhorité du Roy, ayent esbranlé tout le conseil d'Espai- gne. Mais je ne le puis bonnement croire^ ni mesmes penser que vous le croyiez : car je me persuade que vous m'accor- derez que FEspaignoI ne donnera jamais tel crédit à gens de la qualité comme il tient ceulx de par deçà^ puisque, à l'en- droit de la religion, ilz estiment nos prélatz et docteurs chres^ tiens trop grossiers et enfarinez de luthéranisme , pour changer l'impression des dictateurs et docteurs de la théologie et inqui- sition espaignole, et mesme attribuent presque aultant ou plus de coulpe aux prélatz de ces troubles, qu'à aultrc quel-< conque. Et, quant au conseil d'Estat, vous-mesme sçavez que ce conseil d'Estat qui a ordonné cette attestation n'est pas approuvé du Roy, car le principal, Roda, en estoit dehors ; les aultres ont été prisonniers, ou intimidés, ou au moins sans authorité , et ceulx qui y ont opiné sont esté, ou le duc d'Aerschot desjà sententié par la lettre du Roy, avec tous ceulx de son humeur, ou ceulx qui ont esté, sans authorité du Roy, tirez du conseil privé au conseil d'Estat : de façon qu'il n'y a nulle raison ny apparence de croire que Fadvis et l'attestation de ceulx-là auroit persuadé au Roy, ou à son conseil, d'avoir esté mal conseillez auparavant.

(1) Extellé, exalté.

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Mais vous alliez que^ pour le regard du succès des aflairesy luy a esté force de gouverner par bénévolence : certes, s*il en est ainsi, il est donc forcé clément. Or, vous sçavçz comment force, ou contrainte, et bénévolence s'accordent. Uog lion se trouvera bien forcé d*estre doulx, estant en cage, bien enchaîné et garotté, par toutes les mines ou caresses qu*il sçust faire. J'estimeroie mal conseillé eelluy qui voudroit se mettre dessoubz ses pattes, espérant que, par force, il devien- droit doulx et paisible.

Voire mesme, il semble qu'il n'y ait argument ni raison qui puisse plus eflBcacieusement conclure au contraire^ car les roys n'oublient jamais l'injure que Ton leur a faicte. A raison de quoy est très-bien advisé par le saige Salomon que Tire du roy est le messager de mort ; et, plus grande est l'injure, plus grand est aussy le couroux et la passion de vengeance. Or, il n'y a au monde injure plus grande que l'on puisse faire à ung roy, que de le renger à tels termes qu'il soit forcé par ses propres subjets d'user de bénévolence, malgré qu'il en ait': car, si les particuliers estiment promesses extorquées par force estre de nulle valeur, que jugerons-nous d'un roy espaignol , nourri en telle grandeur et majesté? Pensons-nous qu'il se laissera amener qu'il soit forcé de quitter la force, pour embrasser la bénévolence de ceulx des- quels il se sent outraigé d'une injure plus grande qu'il puisse recevoir? Vous dictes que vous en avez certains advertisse- mens d'Espaigne et aultres divers indices : mais, je vous {MÎe, estimez-vous qu'il soit difficile au roy d'Espaigne de faire publier tels advertissemens comme il luy semble bon et eon- veuable pour Texécution de ses desseings, ayant mesme tool son conseil de son humeur? Qui est-ce, ou en France, ou par deçà , qui eût cru que le roy Qiarles n'ait gardé sa foy inviolable à l'admirai, lequel il ne nommoit aultrement que père; au roy de Navarre, auquel il donnoit sa propre sœur?

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Et tous les advis, presque de tout le monde, s*y aocordoient. Mais je laisse les aultres. Le roy d^Espaigne mesme, par les lettres qu'il eseript à Roda, en eiffi*e, ne monstre-il pas évidem- ment que son conseil propre ne cognoist le but de sa prétension, puisque tant soigneusement il commande que l'on donne à eeulx du conseil d'£atat à entendre tout autre chose que ce qui estoit à la vérité ? Et Çayas, son secrétaire, eseript à Hoda que Ton avoit abbreuvé le conseiller Hqpperus d'opinions toutes contraires à la vérité, afin que Ton ne se doub^st de la vérité de ce qui en estoit« Et nous avons veu, du commencement, les ruses que l'on a usé, par faulx advis et advertissemens subornez, et toutesfois autentiques par la propre main du Roy et signature, qu'il avoit pour agréaMez les services de mondict seigneur le prince et de messieurs d'Egmont et de Homes et aultres seigneurs.

ie pourroye ici alléguer une infinité d'exemples qui me serviroient à prouver le contraire , mesme de ses ancestres , tant de la maison d'Austriee que de Bourgoigne et Espaigne , lesqueb, ayant enduré la moindre force ou injure de leurs subjectSy l'ont si bien sceu mener à point, qu'ilz ont donné occasion de croire à toute la postérité que leurs successeurs n'oublieront jamais leur réputation si avant que de se laisser forcer à user de clémence et douceur contre leur gré. Mais, pour éviter toute prolixité, je diray seulement que, si Ton me peult alléguer ung exemple seul, depuis que le monde est monde, qu'une telle chose est pratiquée , et qu'ung roy, ayant esté contraint par ses subjects de quitter la force et gouverner par bénévolence, malgré qu'il en ait, ait continué et maintenu ceste bénévolence , je suis content de croire que roy d'Es- paigne oubliera toutes clioses passées, et usera d'ores en avant de démence et douceur, plus que oncques roy ne fist au monde.

Mais voz raisons mesnies me font croire tout le contraire : car vous dictes que le Roy a considéré que ny la situation du

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payS; environné de tant de puissans voysins , ny la multitude de tant de fortes villes , ny aussi le naturel des manans y ne peult comporter ce gouvernement du passé. Or, comme vous inférez par I& que doncques il changera ou a changé de réso- lution ou de desseing y et veult d'ores en avant gouverner par voie de clémence, ainsi j'infère , tout au contraire, que , puis- que le Roy a trouvé, par les effects, que les moiens dont il a usé pour parvenir à son desseing et résolution n'ont esté con- venables , qu'il changera de moiens , et en cerchera d'autres, mais non pas de résolution. Car il a trouvé la faulte aux moiens , et non pas & la résolution : ce que , par toutes ses lettres et toutes ses actions, et par toutes les personnes dont il se sert en son conseil , desquels la résolution est tousjours la mesme('); mais les moiens sont ung peu changez^ suyvant le conseil de Lisander, que, la peau de lion ne peult servir, ily fault coudre la peau du renard. Et, de faict, vous le voyez en la procédure de don Jehan : car ce seroit chose trop simple, de penser que, ayant à Huy si ouvertement proposé son intention et celle du Roy , suyvant son instruction , il auroit , en ung jour après , entièrement changé de résolution sur affaires de si grande importance , et ce seroit aussi à luy une inconstance trop grande et insupportable. Mais considérez bien le tout, et vous trouverez que les moiens sont changez, et non pas le but. Auparavant, il ne vouloit aulcunemen^ approuver la pacification, sinon en réservant les poincts dont il se pouroit repentir, et notament les deux chefz, l'un de la religion, et l'autre de Tauthorité et réputation du Roy, et aussy la délivrance du conte de Bueren ; après , voiant qu'il n'a peu atteindre à son but par cesté voyc , il en a choisi une aultre , disant qu'il approuve , pour ce qu'il a eu telle attestation à l'endroit des poincts susdicts, et relaschera le conte de Bueren,

(I) Ce passage doit avoir été trooqac par le copiste.

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après que monseigneur le prinee aura satisfaîct en une chose qui est en la puissance des estatz d'Hollande et Zeelande , et non pas en la sienne : de façon qu'il a seulement changé la peau et couverture de la beste , demeurant tousjours sur sa première intention. Et , de faict , certes le Roy a trop faict de peines et despenses, et a mis sa réputation et tout son Estât en trop grand bransle, pour, si légièrement et si tost, sans aultre urgente nécessité, quitter le tout, et s'accommoder mainte- nant à Tappétit des estatz du pays , pour dépendre de leur bénévolence.

Du commencement:, s'il se fût ad visé de laisser ces pays en leur forme de gouvernement légittime, selon leurs privilèges, droicts et libertez, avant que d'avoir employé tant de forces et tant de millions d'escus, il y auroit quelque apparence; mais maintenant, il ne peult retirer le pied , sans mettre sou authprité et réputation comme sur ung escbauffault, pour servir à toute la postérité d'exemple d'ung roy qui se seroit laissé donner la loy par ses subjects y c'est y à mon jugement, ung grand abus de penser qu'il quittera ses desseings et sa résolution précédente , pour embrasser une aultre forme de gouvernement, toute contraire à la première.

Vous voyez que les roys de France , quelque mine qu'ilz ayent faicte, quelques édits qu'ilz ayent proposez , et quoy- qu'ilz ayent espuisé leurs trésors , foulé et ruiné leur Estât si opiniastrément, ilz mainiieunent, plus que jamais qu'ilz n'ont faict auparavant, ne souffrir en façon que ce soit, aultre façon de gouvernement que celle que du passé ilz ont voulu establir par feu et par flammes. Et , si vous dictes que le roy d'Es- paigne est pressé d'une nécessité assez urgente, en considéra- tion de ces pays environnés de tant de puissans voisins, et la force et multitude des villes , et le naturel des manans , je rcspons qu'auparavant il a bien sceu tout cela; et encor der- nièrement , quand il escrivit les lettres à Roda , il n'ignoroit

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rien de oe qu'il sçait à présent touchant ces trois poinets sus- dicts : mais il pense qu'il luy est bien aysé d'y remédier, et , puisqu'il a veu que par les raoiens du passé il n'a riens prouf- iité y il pense finalement , par aultres voies , parvenir à son desseing. Car l'estroicte alliance qu'il a avec le roy de France remédiera bien aisément au premier poinct des puissans voisins; l'autre, de la multitude et puissance des villes , il sera bien aisé à rabattre, pourveu seulement que don Jehan soit une fois receu es places fortes et villes frontières, veu qu'il donnera tel ordre, à l'advenir, que la faulte que le duc d'Alve a commise, pour n'avoir pourveu les ports de mer de citadelles et garni- sons, ne sera plus à craindre; et , comme il voit que d'avoir bravé, avant que de tenir les forces , a esté grande occasion de les perdre du tout, il sçaura fort bien s'accommoder à la volonté des habitans , jusques à ce qu'il les tienne serrez. Et après, asseurez-vous que le naturel des manans (qui estoit le iij* poinct) ne l'empeschera point d'exécuter tous ses desseings, à son plaisir.

Vous me dictes que les estatz mectent si bon ordre, qu'il ne pourra faire sa volonté. Mais, au contraire, je crains que don Jehan y donnera tel ordre que les estatz n'oseront plus parler, ny mesmes se porter pour estatz. Et cela certes est bien plus vraysemblable : car, si maintenant, au temps que don Jehan a esté à Luxembourg , sans authorité ou tiltre de gouverneur, et ayant eu les estatz presque toutes les villes et fortresses en leurs mains , et pouvans commander absolument, ilz n'ayent jamais seeu mettre ordre à une armée qui estoit desjà en cam* paigne, et laquelle, de son propre gré et de pure volonté, s'es- toit venu rendre à leur dévotion, et n'ont jamais peu battre et chasser hors du pays une poignée d'Espaignolz , ny mesmes maintenir entre eulx une telle quelle apparence de discipline et ordre militaire, de façon que leurs soldatz propres leur ont faict plus de mal que s'ilz eussent esté enticmis, si qu'eulx-

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mesmes ont oonfessé, à pur et à plain, que la faulte d'ordre et d'argent les a contraincts d'entrer en cest appoinctement avecq don Jehan, quelle raison y a-il dépenser que par cy-après ilz pourront dresser armées, don Jehan sera dedans le pays comme maistre absolut , et avec toutes les fortresses en ses mains, et toutes les garnisons à son serment et è sa dévotion , pour les brider?

Que , si vous alléguez que les Espaignolz seront hors du pays, je responds que cela est bien doubteux encor; et^ ores qu'il fust desjè certain et exécuté , si sçaura-on bien le chemin par ilz seront allez , pour les faire revenir j si on en a besoing. Et , quant aussi ce ne seroit , si est-ce que Ton trou- vera et Allemans et Wallons , et Françoys et Flamands ^ et toutes sortes de nations à foison , pour mectre ces pays-iey en une servitude plus dure et intollérable qu'ilz ne furent onc- ques. Et de nous fier sur le Turcq , est une maigre et mal asseurée espérance : car le Turcq peult tourner ses forces contre les Vénétiens, ou aultres Italiens, ou contre les Perses, ou entrer mesmes en quelque trefve ou accord avec TEspai- gnol. Ety quand ainsi ne seroit, si trouvera-on bien moien, en ung besoing, de se passer d'ung quatre ou cinq mille Espai- gnolz , pour résister au Turcq , sans mettre le pays de par Aex^ en danger d'estre perdu, ainsi que les Espaignolz en font leur compte.

Or , je me doubte bien que pièça vous pensez en vous- mesme que tous ces discours ne sont que conjectures et raisons qui se peuvent débattre , comme Ton dict , m utranup»e par-- tenif et, pourtant, il vault mieulx embrasser une paix présente, attendant le hazard de Tadvenir , que de se mectre en une guerre certaine , et attendre l'événement de la guerre , beau-^ coup plus hazardeuse que la paix. Sur quoy , avant que de respondre , je diray un mot : c'est que, si nous pensons que la guerre maintenant seroit si doubteuse contre don Jehan, qu'il

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vauU mieux embrasser la paix à tel prix que nous pouvons^ que de repousser ung joug qui .n'est pas encor mis sur noz espaules , on peult bien conclure que beaucoup plus hazar- deuse et desraisonnable sera la guerre à Tadvenir, quand nous vouidrions secouer le joug desjà receu , veu que, mainte- nant il y a peu de moien de mener guerre , alors il n*en y aura du tout nul.

Mais je veulx laisser toutes conjectures, et venir à démon- strations. Je croy que vous m'accorderez que, quand don Jehan vous présentera le gouvernement de ces pays tout tel et en telle forme comme estoit du temps de Fempereur Charles le V, de très-heureuse mémoire , qu'il n'y aura personne des estatz qui vouldra ou osera s'y opposer^ puisqu'en toutes capitu- lations , il semble qu'ilz ont eux-mesmes mis ce pied et ceste forme en avant, et don Jehan et le Roy mesme déclaircnt ouvertement que telle est leur intention. Gecy n'est plus con- jecture : est la certaine volonté et résolution des uns et des aultres.

Or, je vous prie maintenant, considérez par qui et de quel temps ont esté bastis les pUiccarts dont tous ces maulx sont ensuivis : n'est-ce pas du temps de l'cnïpereur Charles ? Et toutes les persécutions dressées contre les povres gens de la religion : n'est-ce pas du temps de l'empereur Charles ? Mais laissons la religion , puisque le nom seul- en est si odieux que Ton n'en veult ouyr parler. Venons au gouvernement politi- que. Qui a basti la citadelle de Gand et la citadelle d'Utrecht? n'est-ce pas l'empereur Charles?

Il fault doncq dire que , par ceste paix, don Jehan pourra bastir tant de citadelles qu'il luy plaira. Et l'empereur Charles, quand il luy a pieu, n'a•^il pas faict guerre et paix? levé armées par mer et par terre, sans advis ou consentement des estatz? Le mesme pourra doncq faire don Jehan, au nom du Roy! Et n'a-t-il pas mis toutes telles garnisons es fortresses et villes

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frontières comme il luy a pieu? 11 fauldra doncques accorder le mesme àdon Jehan. Et^ quant cecysera faict, je vous prie, quel moien auront les estatz de s'opposer à ses desseings y ou quand pourront-ils empeseher qu'il ne prenne par la teste ceulx qu'il luy plaira, et qu'il pende et coupe testes, et brusle ceulx qu'il lui plaira , puisque l'empereur Charles a eu ceste mesme puissance? Et pensons-nous que don Jehan voudra souffrir que les estatz facent ou ordonnent les placcarts, tou- chant Tordre politique, qu'il faudra obsen'cr à l'endroit de la religion, ainsi qu'a esté capitulé à la pacification deGand? Ne dira-t-il pas que, du temps de l'empereur Charles, les estatz ne l'ont pas faict?De façon que nous tomberons tousjours aux mesmes inconv^niens \ voire, de fièvre nous tomberons en hault mal , comme l'on dict.. Car, je vous prie , quelle asseu- rance a-l'on eapitulée en ce traicté de paix? De ma part, je n'en voy nulle du monde : car , si les estatz généraux trour yent bon que monseigneur le prince et ceulx de la religion sortent le pays (ores que j'estime bien que ceulx d'Hollande et Zeelande, auxquels cest affaire touche le plus près , ne s'y accommoderont pas bientost), si toutesfois il est trouvé, géné- ralement et sans contradiction , bon et nécessaire qu'ilz sor- tent, il fauldra que monseigneur le prince s'y accommode; et hélas ! je vous prie, qui tiendra Flissingiien et les aultres ports de la mer ? Ne sera-ce pas don Jehan ? et n'y mectra-il pas tels chefz et telles garnisons qu'il voudra? et pourra-il pas faire venir tant de gens, par mer et par terre, comme il lui plaira, sans que ung seul homme s'y ose ou puisse opposer ?

Par quoy tant s'en fault que cest accord avecq don Jehan soit faict à l'advantaige de Son Excellence , comme il semble que vous le prennez , que , si ce n'estoit ce seul poinct que, à l'assemblée libre et solemnelle des estatz généraulx, selon l'ancienne coustume et usance des pays de par deçà, la plura- lité de voix n'y sert de rien, et que, pour ce, l'une province ne

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pailt cstre préjudit;iée par les auUres, non plus qu'aux moiens généraulx des contributions ou aydes , une ehaseune pro- vince faict son rapport et a sa voix libre , j'estimeroie que mesme la pacification de Gand seroit & son très-grand désavan- taige^ voire mesmes à la ruine générale de tous les pays de par deçà , i cause qu'il est bien asseuré que don Jehan trouveroît facillement moien de gaingner la pluralité des voix des estatz, pour condamner mondict seigneur le prince et ceulx de la religion, en cas que ce jugement de pluralité ne fût directe- ment contre les droicts, libertez et usances anciennes du pays, et par conséquent de desgarnir le pays de toutes asseurances, et le priver de toutes forces à jamais ; et cela estoit cause , quand on traictoit ladicte pacification , que nous voulusmes premièrement sçavoir si on recepvroit don Jehan , ou aultre gouverneur venant d'Espaigne^ alléguans que» si on estoit de telle intention, que nous demandions toutes aultres asseu- rances, que non pas en cas que nous eussions à traicter seu- lement avecq les estatz. Mais comment a-I'on tenu la pro- messe qu'alors on nous fil ? je vous le laisse penser : tant y a que, de ma part, je ne puis comprendre, en mon entendement, que ceste paix soit & l'advantaige, je ne diray pas de monsei- gneur le prince, mais non pas mesme du pays , et ne trouve les raisons que vous alléguez en vostre lettre d'aulcun poix pour m'induire à vostre advis.

Et toutesfois, comme j'ay conceu une ferme opinion de vostre bonne prudence et jugement, accompaigné d'une sincère affection envers la patrie, qui m'a faict vous aimer tousjours et honorer, mesmes avant avoir eu ce bien de vous cognoistre, je vous ay bien voulu proposer mes difficultez, par ceste présente lettre, afin que, si vous avez tant de loisir, il vous plaise m'en esclaircir l'entendement , et que je puisse en donner satisfac- tion à plusieurs aultres qui sont aussi de la mesme opinion comme moy : ce que je tiendray à grand bénéfice et obliga-

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lion, et seray prest de le desservir et reeognoistre en tous endroiets il vous plaira me commander.

Et, sur ce, me recommandant trés-affectueusement en voslre bonne grâce , prieray Dieu vous donner , monsieur de Grob* bcndoneq, en santé^ bonne vie et longue.

Archives des affaires étrangères à Paris : HS. intitulé Pê^i-mu, lSeB-1688, fol. 2«7 n-lSS.

DC.

INSTRUCTION DU S' DE MANSART, ENVOYÉ PAR US PRINCE D'ORANGE A BRUXELLES (•).

Nécessité de prendre des mesures, avant la réception de D. Juan d'Autriche, pour se mettre à Tabri des vengeances du Roi et de ses ministres. Le prince conseille la démolition des citadelles, ou du moins qu'il y soit établi des gouverneurs auxquels on puisse se fier. Il propose divers person- nages pour la citadelle d'Anvers. Il voudrait que les états généraux maintinssent énergiquement leur autorité. Alliance i faire contre D. Juan et les Espagnols , au cas que ceux-ci ne soient pas sortis des Pay»-Bes dans le délai fixé.

HlDDBLBOOaO, 6 HAIS 1077.

inslruetionf pour êieur de Man$ard , de ia part de numâeigneur U prince d'Orange, de ce qu'il aura à faire entendre aux eeigneure, geniihhomme* et aultree auxquels il a lettrée de cridence.

Après les très-affectueuses recommandations de monsieur le prince à leurs bonnes grâces, il leur donnera ses lettres de

{}) Il est digne de remarque que , ni dans M. Gaosn Van PainsTiRRa , ni

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i^rëdence, et leur déclarera, de sa part, que^ puisque, après tant de travaulx et peines, il a pieu à Dieu donner ouverture à la délivrance de tous ces povres pays hors d'une tyrannie insupportable, si longtemps endurée, et desjà parvenu^ i tel comble que Ton pouvoit estimer toute espérance de recouvrer à jamais l'ancienne liberté estre du toufc^faillie, sembleroit estre entièrement nécessaire de ne laisser passer aulcuns moiens ou opportunilez pour nous maintenir en la liberté qui se présente, et éviter toutes occasions qui nous pourroient faire retomber soubz le joug de ladicte tyrannie :

Ainsi qu'il est bien à présumer que, le Roy se résentant des choses passées, pareillement plusieurs ses ministres, s'estimans avoir esté injuriez et diminuez en leur auétorilé et réputation par rassemblée des estatz et aultres choses qui sont ensuivies, ne faudront de cercher et practiquer tous moiens possibles pour s'en venger, et réduire le pays en une totale subjection, plus dure et plus servile qu'elle n'a oncques esté passé; mesme donneront ordre de ne tomber doresnavant plus en ce dangier : à l'effect de quoy, fauldra dresser une telle tyrannie, et boucherie si cruelle des principaux du paîs, que tout ce qui s'est faict du passé semblera grande clémence et douceur au pais.

Et pourtant est nécessaire d'y pourveoir en temps, avant que don Joan, estant receu pour gouverneur, ait moien de planter et faire raciner la semence d'une domination absolue et sou- veraine.

Joinct aussi qu'il touchera grandement à leur honneur et

dans Boa, on ne trouve rien sur cette mission que le prince d*Oninge donna au Sv de Mansart. Le manuscrit d^où la pi^ est tirée, n*en contient aucune autre qui soit relative à la même affaire.

On peut supposer que le S' de Mansart fut envoyé aux mêmes personnes vers, lesquelles le prince Pavait député, le 17 janvier précédent (Voy. ci-des* sus, p.! 81.)

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réputation d'avoir entreprins ung acte si honnorable, et le laissé ainsi à my-chemin et imparfaiet : dont ne pourroit venir qu'un grand blasme et intérest à tous ceulx du pals.

Que. pour ces considérations, et pour éviter les inconvéniens susdicts, il est, sur toutes choses, requis d'entretenir toute union et bonne intelligence entre les estais et les gouverneurs par les provinces, ensemble et les colopneh, et d'obvier unani- mement, par tous moiens, aux menées et practiques par les*- quelles on taschera d'y semer la zizanie ou du malentendu^ pour séparer leurs forces.

Et, comme il est bien, sur toutes choses, è craindre que, par le moien et soubz la faveur des citadelles, on taschera de redresser l'ancienne tyrannie, et de mectre les villes principales en subjection, il serait nécessaire de tenir la main à ce que, de bonne heure, les citadelles fussent rasées, ou pour le moins démantelées du costé'des villes, avant que les faulteurs de tyrannie y puissent nicher ou escloire le fruict de leurs perni- cieux desseings.

Car, par ce moien, tout le pais sera asseuré de ne pouvoir jamais estre surprins à la despourveue : ce que âultrement seroit impossible d'obtenir, et l'occasion de la defKance des habitans, dont procèdent ordinairement toutes altérations et mescontentement, sera du tout, ou en grande partie, retran- chée, et le commerce et trafficq ancien, dont dépend la pros^ périté des pays, se pourra redresser et resiablir en sa première fleur.

Mais, en cas que l'on ne puisse si tost parvenir è la démo- lition des citadelles, que pour le moins on regarde d'y establir telz gouverneurs et capitaines desquelz on se puisse entière- ment confier, sans aulcune crainte qu'ilz se laissent gaignef ou corrompre, et qu'en cecy le droict et auctorité de chascune province et des villes soit gardée, tellement que ceulx de •Flandres pourvoient les citadelles qui sont en Flandres, et

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ceulx de Brabant, celles qui sont en Brabant, et ainsi des auhres.

Mais, surtout, que l'on ait bon œil sur la citadelle d'Anvers, en cos qu'elle ne soit rasée, puisque d'ieelle dépend toute Tasseurance du reste du pais, et priueipallement de eeulx de Brabant, et, icelle estant entre les mains de don Jehan, ou de quelqu'un qui ne soit deuement, naturellement et entièrement affectionné et obligé à maintenir la liberté de la patrie, tout ce qui a esté faict jusques ores ne servira de rien. Il fault qu'on la pourvoie de quelque patriote bien asseuré , lequel soit bra- bançon, et, selon les anciennes ioix et privil^es de Brabant, soit autorisé d'en avoir la superintendence.

A quoy sembleroit à mondict seigneur prince que Ton pourroit choisir, ou mons' d'Egmont, ou mons' de Héase, ou de Mérodej ou de Bersele, tant pour estre les plus anciens ba- rons de Brabant, comme pour les bons et notables ofBees qu'ilz ont faict, en ces occurrences du passé, au restabiisse- nient de la liberté de la patrie, et pour estre du tout asseuré d'eulx qu'ilz n'entreront jamais en intelligence avec don Joan d'Austrice, ou ceulx de son party, pour les laisser prendre trop grande puissance par-dessus l'auctorité des estatz.

Aussi samble-il audict seigneur prince estre requis que l'on advise aux moiens de maintenir les estatz en autorité , sans les laisser tellement soubz le joug du conseil d'Estat, ou de don Joan, comme il semble que l'on prétend et tascbe desjà qu'ilz n'aient par après aulcun moien de s'assembler, quand iiz Touldroient , et moins d'adviser ou de déterminer sur les affaires du pays.

A cause que de cecy dépend entièrement la manutention 'des. privilèges, droicts et libertez du pais, tant pour estre ce poinct le principal et comme le fondement de tous les aultres, ainsi que par lesdicts privil^es bien clairement il appert, comme pour ce que, en cas que l'on permette au conseil d'Estat

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d'opprimer Fautorité desdicts estatz, ainsi que sans aulcun dotibte iiz tascheront par tous moiens possibles de faire, c'est ekose asseurée que don Jehan pourra bien facilement attain- dre à une puissance souveraine et absoiute par le moien des consaulx d'Estal, lesquelz n'oseront en rien luy contredire, et ne vouidront, pour maintenir la liberté ou authorité des estatz, desquelz îlz sont mesmes comme jaloux, se meetre en maie grâce de celuy auquel seul ilz auront et serment et obli- gation : au moyen de quoy, ledict don Jehan aura moien, à la parfin, d'opprimer non-seulement lesdicts estatz, mais aussi mesme ceulx dudict conseil qui l'auront assis et establi au trosne de ceste souveraine domination, ainsi que de l'advis de Roda, donné au Roy, il appert manifestement esire leur intention.

Et surtout fault considérer que, si l'on ne pourveoit à ce poinct avec toute diligence, dextérité et chaleur, il n'est nulle- ment à doubter que don Jehan n'aura moien de tellement gaigner les uns et les aultres, partie par douceur, partie par menaces et terreur, que, mesme du beau commencement et à l'entrée, trouvera moien de pouvoir rongner et retrancher la liberté des estatz que, selon les loix et privilèges, ilz doivent avoir en l'assemblée générale que l'on fera après la retraicte des Espaignolz, de telle feçon que, n*osant personne opiner librement sur les affaires qui concernent l'establissoment du repos général, tout le fruict que l'on attend de la pacifleation faicte à Gand, et de tant de peines et travaulx et dangers ésquelz on s'est mis depuis pour redresser les affaires sur le pied qui est à présent, sera perdu et esvanouy.

Au moien dequoy, il obtiendra facilement en ladicte assem- blée pouvoir et octro^r de destituer les gouverneurs des pro- vinces, que les estatz ont mis et establi durant ces troubles et altérations passées, d'aultant plus que les principaux qui seront du conseil d'Ëstat, et les plus favorisez de don Jehan,

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se sentons intéressez par ledici establissement, tiendront de toute leur puissance la main à ce que. les giAivernemens soient ostez à ceulx qui les ont à présent^ et remis entre mains des aultres qui les ont par cy-devant obteniiz du duc d'Alve, ou aultres autheurs et promoteurs de ladicte tyrannie, tellement que don Jehan, par ceste voye, se rendra maistre absolu et souverain de tout, et aura moien de se venger de ceulx qui se sont jusques ores entremeslez en ces affaires.

Finalement, il leur proposera que, pour une fois couper tous délais et prolongations qui nous sont très-pernicieuses, il est du tout nécessaire que, suivant ce que desjà ilz ont promis audict seigneur prince et estatz dlIoUande et Zélande, ilz se résolvent de se joindre, et que réellement ilz se joignent par une ferme et très-estroicte alliance, et promettent Fung à l'aultre, par serment et toutes manières d'obligations requises, en cas que les Espaignolz ne soient sortis au terme que leur a esté préfix, qu'ilz rompront avec don Joan, sans luy donner plus de dilay ou prolongation de terme, et sans recevoir aul- cune excuse ou exception, soit d'impossibilité, ou aultre quel- conque, ni jamais plus entrer en aulcune communication ou traiclé avec l'un ou l'aultre quelconque de sa part, mais, d'un commun consentement, par voye de faict et d'armes, tasehe- ront de déchasser les Espaignolz hors du pays, suivant la promesse qu'ilz en ont faict à la pacification de Gand, et tien- dront pour ennemis tous ceulx qui leur voudront persuader d'entendre à aultres dilaig ou remises^ et que dès maintenant Ton advise aux moiens, en cas que cecy advint, de mener la guerre.

Faict par Son Excellence à. Middelbourg, le vj* de mars 1877.

ArchiTM des Albiros 4lniif4rcs, 4 Paria : HS. intitulé Pay«.^4i, IMB-ISSS , fol. 21S-216.

263

DGI

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

lU le prient d'écrire k ceux de GroDÎngue et des Ommelandes, afin qu'ils relâchent le S' de Billy , sans quoi le comte d'Egmont et les autres sei- gneurs prisonniers des Espagnols seront pas mis en liberté. Si des prisonniers existaient encore eo Hollande et en Zélande, ils le prient qplement de les renvoyer.

fiauiiLLsSy 12 MARS 1877.

Monseigneur , comnie Vostre Excellence seet que , par la traicté de la dernière paciification , est accordé que tous les prisonniers, d'une part et d*aultre, seront rendus et mis en liberté, sans payer rancbon, suyvant quoi Vostre Excellence meismes a consenty que fussent ramenez par dechà ceulx qui estoyent en Zélande; et entendans que les estatz et babitans de Groeningbe et des Ommelandes font difGculté de relàcber le S' de Villy (') , sans vostre ad vis et consentement , aussy pour les extorsions, pillaiges, injures et menaces qu'il poeult avoir faict pendant son gouvernement, et aultres raisons con- tenues en certain billet que nous a envoyé le S' de Hierges, à raison de quoy ne poons joyr de la délivrance et restitution de môns' d'Egmont et aultres bons seigneurs, à noslre grand regret et douleur, de tant plus que ce leur sera redoubler le mal, sy, sortans les Espaignolz d'Anvers, ilz sont amenez avecq eulx , nous sommes advisez d'envoyer ce porteur exprès par devers Vostre Excellence, avecq le double du billet susdict,

aussy la liste des prisonniers que prétendent et répètent les^

(') Gaspar de Robles, Sr de f^illy.

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dict» Espaignolz : la priant et requérant bien instamment qu1l plaise icelle, en faveur desdicls prisonniers et de nous, eseripre auxdicts de Groeninghe et des Omelandes qu'ilz ayent à envoyer et seeuremeut faire mettre lediet S' de Villy et sa suyte , ensemble tous tek aultres prisonniers qu'ilz poeul- vent avoir et tenir, entre les mains dudict S' de Hierges : leur donnant, par Vostre Excellence, solution et satisfacUon à tout ce qu'ilz représentent, comme, par sa dextérité singulière, elle sçavera fort bien faire , y estant la matière et fondement assez suffissent, spéciallement au regard de la personne dudict S' de Villy, que touttes hostillitez sont ensepvelies par la pacifica- tion , et qu'on n'en peult par raison rechercher les personnes en leurs corps et vies, mais bien sur leurs biens, quy demo- reront tousjours affectez è leurs prétentions et actions : enten- dant que lediet S' de Villy ha du bien en bonne quantité, tant en Frize que en Artois, pardessus tous ses meubles et deniers dont ilz se poeulvent tenir saisiz et namptis. Combien que le seul regard du mal et inconvénient qu'en pouroit réussir contre noz bons seigneurs et amyz prisonniers, debveroit sufBr pour faire cesser touttes telles difficultez , veu meismement que la vie dudict de Villy, ores qu'on la luy voulsist ester, ne restituera les pertes et injures passées, néantmoins, par-dessus tout cela, sommes advertiz que Son Altèze a déclaré qu'estant lediet de Villy relaxé , en faira la raison à tous ceulx quy la vouidront demander contre ses corps et biens , et cependant les nostres seront en liberté. Ce nous seroit grant plaisir de reeepvoir ce bien de vostre main et assistence , et en serons , comme lesdicts prisonniers , de tant plus obligez à luy faire tous services. Il plaira à Vostre Excellence de faire délivrer et confier ses lettres à oedict porteur, pour passer oultre, à la plus grande diligence que sera possible, luy donnant toute faveur à ces fins. Nous la prions davantaige, s'il y a encoire quelques prisonniers en Zélande ou Hollande, qu'il plaise les

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renvoyer par declià au plus tost que sera possible , comme bien espérons de la grande faveur qu'elle porte à la direction de nul aflîiires et délivrance de nosdicts prisonniers.

Monseigneur, Dieu vueille conserver Vostre Excellence en sauté parfaicte , nous recommandans bien humblement à la noble et bonne grâce d'icelle. De Bruxelles , ce xij* de mars 1577.

De Vostre Excellence très-affectionnez en service ,

Les estatz generaulx des Pays-Baâ assemblez audict Bruxelles.

Stiscription : A monseigneur mons' le prince d*Orenge.

Copi« da temps^ anx ArehlTM de la rille d*Ypres.

DGIL

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Us le prient d*enyoyer k Bruxelles les maîtres des monnaies de Hollande et de Zélande, afin de conférer avec ceux des Pays-Bas sur les mesures à prendre en cette matière.

BaoxsLLis, 18 MAas iK77.

Monseigneur, comme le faict des monnoyes, en ceste nostre union, désire une mutuelle correspondence , selon que par aultres noz lettres avons représenté à Vostre Excellencu, meisroemeni requiert accélération , pour assoupir et retren- chicr les întérestz que plussieurs en ressentent, etpoulront

266 -

souffrir davantaige & Tadvenir y prions derechieff et requérons bien instamment que plaise i Vostre Exeellence d'envoyer jcy, à plus tost que sera possible, les maistres des monnoyes de Hollande et Zélande , pour conférer avccq ceulx de par decbà , et sur le tout prendre et arrester ung bon pied, à la conservation du droict d'ung ebascun, et contentement de noz voisins : dont j& avons ressenty quelque doléanee , signamment d'AIIemaigne.

Monseigneur, Dieu^ nostre créateur , voelle à Vostre Excel lence donner heureuse et longue vie , nous recommandans bien humblement à la bonne grâce d'icelle. De Bruxelles, ce xviij*demars i577.

De Vostre Excellence très-affectionnez en service,

Les estatz généraulx des Pays-Bas*

Stucriptkni : A monseigneur monseigneur le prince d'Orainge.

C«p{e do tempi, 4 la Bibllotbèqo* do la Chambre ^ daa Rapréi«BUnls : JImmiI de fiàeu rtialiMf «aut

tfCoM 9inérm»M, 1576-1580, t. I, fol. 235.

DGIIL

LE PRINCE DORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

n les prie d^ordonner aa colonel Verdugo de remettre le château de Breda

entre ses mains.

Ziiaïuis, 18 MAas 1K77.

Messieurs, comme j*ay esté adverty que les Allemans <|ui sont en garnison à Brcda , sollicitent fort instamment- envers

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le eoionne) Verdugo de pouvoir entrer dans leehasteaude Breda^ à son partement, en intention de le tenir en asseurance de leur paiement, à faulte duquel ilz seroyent délibérez de mectre le feu dans la ville ; et considérant que c'est une affaire de grande conséquence, mesme pour tout le pays de Brabant, et qu*en particulier je suis tenu de porter soing pour mes subjects , j'ay escript une lettre audict colonnel Verdugo, le priant qu'il vouisist reraectre ledict chasteau entre mes mains, ou de celluy que de ma part j*y commectray, me pennectant d'y meetre jusques à environ cent soldatz, pour la garde dudict chasteau et asseurance de la ville; et,' pour ce que la brefveté du temps ne souffroit le délay d'escrire à Bruxelles , pour ea avoir préallablement vostre ordonnance, ains}' qu'il requiéroit, je luy ai promis qu'en cas que vous aultres, messieurs, et le conseil d'Estat, me déclariés par une responce ne trouver bon que mes gens y soient, qu'à iïnstant je les feray retirer, sans aulcun refus ou difficulté (') : à quoy aussy, certes, je ne voul- droye en sorte quelconcque faire faulte. Mais, comme ainsy

(1) L*extrait saivant d*une lettre écrite aa duc d^Arschot , le 19 mars , par Guillaume de Angelis, que le conseil d*État ayait envoyé à Breda, pour y ioTeotorier rartillerie et les munitions de guerre, contient quelques éclair- cissements sur les faits avancés par le prince d*Ortnge :

Monseigneur, le S* Francisco Verdugo, quy at en garde le chasteau, m*at à cest instant déclaré que Jeronimo de Roda loy at cejourd*bui ordonné qu*il aye à mectre le. chasteau es mains des Allemans quy sont icy en gurni- zoen, sottbs Frunsberghen : chose qui seroit indiciblement au très-grand regret du povre peuple de Breda, quy at esté tant travaillé et affligé. D*aultre part, ledict Verdugo est fort sollicité de mons' le prince d*Orenghes pour avoir ledict chasteau, et tiens que le conte de Hollocque est présentement à Sevenberghen , et entour, avecque environ huyct cens hommes, pensant entrer à toute heure : mais, selon qu^entens dudict Verdugo, il actendrat Tordre que Sun Altèze y vouldra donner, pour en sortir à son honneur : ne voulant celler à Vostre Excellence qu^ay trouvé ledict chasteau de Breda grandement fumy d*artillerie de fors, pouldre, boulletz, picques, harnoix,

morillons et vivres raisonnablement » (Archives du Royaume,

papiers d'État.)

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soit que, par le iraicté de la pacification , il est expressément stipulé que je seray remis en mon bien, comme j'estoye au- paravanty et que, ensuyvant le contenu d'ioelluy, il vous a pieu naguères m'ordonner lettres au feu S' de St-Reray (>) pour ce mesme effect , je vous prie bien affectueusement de vouloir à présent aussi trouver bon et ordonner audict colonne! Verdugo qu'il ait à remectre ledict chasteau entre mes mains, affin que, s'il ne l'aura encor faict, il le face incontinent, en vertu de vostre ordonnance, ainsi qu'il a promis, ou bien, si desji il l'aura fuict à ma requeste, que ladicle ordonnance luy pusse servyr de dis- coulpe et de garant. Ce faisant, ferez droict et raison, en con- formité dudict traicté de la pacification, et m'obligerez de tant plus i m'employer tousjours, en toute promptitude, à vous faire servyoe. Et à tant , me recommandant très-affectueusement à voz bonnes grâces , je prie Dieu vous donner, messieurs, en santé bonne vie et longue. Escript à Ziericzée, ce xviij* de mars 1S77.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiîXb de Nassau.

Suicriptian : A messieurs messieurs les députez des estaiz généraulxdu Pays-Bas, présentement assemblez & Bruxelles.

Copie do t«iD|M, ««x ArchÎTes de Je vilie d*Ypree*

(1) Le feu Sr de Saint -Remy, dont parle ici le prince d'Orange, éuit A. d^Estourmel, que le duc d*Albe avait commis au gouvernement de Breda.

261)

DCIV.

LE PRINCE D'ORANGE AU DUC D ARSCHOT,

Réponse à ses lettres des S2 et 23 mars. II a appris arec plaisir IVvacua- tîon, par les Espagnols, delà ville et du chAteau d'Anvers, ainsi que de la ville de Lierre. Il remercie le duc de Taffection qu'il lui témoigne, et de la peine qu'il prend pour le bien du pays. Il fera retirer les bateaux de guerre qui sont sur la rivière d'Anvers. Il désirerait, autant que le due, avoir une entrevue avec lui; mais il est obligé de partir pour la Hollande. Son intention n'est pas, comme on en fait courir le bruit, de mettre le comte de Hohenloe et ses gens à fireda. Du reste, il demande que cette ville lui soit remise, conformément i la pacification de Gand.

MlDDBLBODlG, Si MAIS VS77.

Monsieur, j'ay, cejoard*huy après midy, par le sieur de Blaesere que m'avez envoyé, receu deux lettres vostres, Tune du xxij"^ et la seconde du xxiij"^ jour de ce mois (■), ayant esté bien aise d'entendre, par icelles, la sortie des Espaignolz hors In ville et cbasteau d'Anvers, ensamble de la ville de Liére, joinctement vostre entrée audict Anvers, avec les aultres particularitez que ce gentilhomme m'a déclairé de bouche, de vostre part. Dont ne veulx délaisser à vous remercier très- aflfectueusement de ce qu'il vous plaist m'en communicquer si amplement, et singulièrement de la paine que je vois vous continuez à prendre, de plus en plus, pour le bien et tranquillité de ces pays si longtemps agitez par tant de tem* pestes : dont moy, et tous aultres bien affectionnez au repos d'icelluy, vous en demeurerons à tousjours obligez, mesme- ment moy en particulier, voyant de quelle sincérité frater-

(>) M. Groin van PaiiitTsaift a pubiiéces deux lettres dans les Archives, etc., t. VI, p. iSetSi.

270 ^

nelle vous poiirsuyvcz la bonne affection que de tout temps m'avez porté, à laquelle pouvez estre asseuré que ne fauldray de correspondre en toute intégrité.

Au regard de ce que m*escrivez que vouidroy faire retirer les bateaulx de guerre est ans encoires sur la rivière d'Anvers, pour oster toute doubte à ceulx qui font venir et passer leurs biens et marchandises par eaue, et afin que Tentrecours de la trafficque et marchandise puisse estre libre, je les feray incon- tinent descendre jusques aux limites de Zélande, et donneray ordre que les allants et venants ne soyent par eulx inquiétez. Et, quant à nostre entrevue, pouvez estre asseiiré que, pour la bonne affection que je vous ay tousjours porté, je la désire de tout mon cœur, suyvant quedesjà, par diverses fois, je vous ay escript : mais, comme je parte apprès-demain vers Hollande, à l'assamblée des estalz, et que monsieur le docteur Leoninus y doibt venir dans sept ou huict jours, je communicqueray plus amplement avec luy sur la commodité qu'il y pourra avoir pour nostredicte entrevue.

D'aultre part, j'ay veu ce que, par vostre deuxième lettre, m'escrivez de ma ville et maison de Breda, et mesme que le bruict est que je désire y faire entrer le conte de Holenlo avec ses gens ('). Sur quny je vous puis .bien asseurer mon inten-

(I) Le duc d*Ar9cbot était asseï favorable à la prétenlion du prince d^Orange; toutefois, il n^aimait guère que le prince fit occuper le château de Breda. En même temps qu*il adressait au prince la lettre du 22 mars, pubHéc par M. GaoBR van PaiNsTBBsa {ArefUms, etc., t. Vf, p. 18), il écrivait au conseil d'État : « 11. me semble qu*il neseroit expédient de laisser entrer an « chasteau de Breda les gens de Freundsberghe, en tant que cela pouroit » donner quelque dégoust au prince d*Orange ; aussi no convient-il que ledict » S^ prince y face mettre quelques-ungs des siens cstans de la religion....

Cette lettre était à peine expédiée, qu'il en ftisait parvenir au conseil d'Etat une autre ainsi conçue : Messieurs, j'ay entendu, dépuis mes précé- dentés , que Verdugo a laissé entrer les Alleaians déans le chasteau de » Breda. Il me semble du tout convenir que, attendant que le prince y poura n pourveoir , que y commectez quelque homme de bien , et que vous eserip-

V

«- 271

tion n'avoir jamais esté de commettre ledict conte è la garde de ladicte place : mais, entendant que les Allemans estoyent

ves, joinctenient ayec œalz des estas géoénulz, aax AUemaos qn^ils aient

à sorlîr et y laisser entrer celuy que vonidres ordonner. » (Archives du Royaume, papiers d^État.)

Le même jour (22 mars), les états généraux exprimaient Fayis que le prinee fût mis en possession de la ville et château de fireda, sauf la souveraineté du Roi, et requéraient le conseil d*État de prendre des mesures en conséquence.

Hais ce conseil éleva des difficultés; il écrivit, le %A mars, au duc d'Arschot :

« Monsieur, vos deux lettres du jour d*hier sur le faict de Breda sont arri- vées icy, comme nous estions traictans sur le mesme affaire, à sçavoir la restitution des ville et chasteau dudict Breda , que les estats généraulx avec grande instance requièrent luy estre faicte, comme vous plaisra veoir par la copie cy-gointe de la remonstrance et réquisition que, ià-dessus, ils nous ont baillé par escript. Ce que, combien qn^il se fonde sur la pacification faicte à Gand, est toutesfois ung laict méritant d*estre traicté avec grande consi- dération, et que y soit procédé avec toute meureté, comme semble par vos- dictes lettres que Tayes aussy fort prudemment considéré, disant en avoir escript aadict prince, comme le porte particulièrement une d*ieelles; et ajrants, suyvant ceste importance, délibéré là-dessus, il nous a semblé que bdicte restitution ne se pourra bonnement excuser, mais, avant la &ire ou commander, que Ton doibt faire sortir les Allemans estants entres audict cbasteau de Breda, et se tenir en kville jnsquesàce que on leur aura assigné auitre lieu, ou donné contentement, suyvant le traicté d^aceord fiict entre monseigneur don Jehan et les estats généraulx, auquel effect ( puisque les Allemans, de coustume, n*obéissent que à leur couronnci) nous a semblé d*es- cripvre la lettre cy-joincte au baron de Freundsbergh, afin qu'il ordonne & sesdictes gens la sortie dudict chasteau, et le livrer & celuy que Ton y envoyera, cmnme, sMI vous plaist, monsieur, ponrres veoir par le double de ladicte lettre que se vous envoyé quant et ceste, afin qu*en sçachant le contenu, veuilles, par assistance des ambassadeurs impériauix, traicteravec ledict baroD de Freundsbergh qu*il s*accommode ft ce que dessus, chose conforme audict traicté d'accord ; et que Ton doibt envoyer quelques Illln ou cent bons soldats et confidens, de ceulx des estatz, avec ung bon chef, pour entrer audict chasteau au mesme moment que lesdicts Allemans en sortiront : lequel chef, natif de Brabant, puis mesmes les bourgeois dudict Breda le deman- dent, comme Pescript Angelis, vous plaisra ordonner el faire marcher vers ledict Breda avec lesdict 1111» ou cent soldats et les lettres dudict couronnel. Et, estants lesdicts chef et soldats entres audict chasteau, après la sortie des Alleoians, a en oultre semblé que lors se pourra appostiller, sur ladicte

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<incores en la ville. j*nvoy bien délibère d'envoyer quelques eîncquante ou soixante soldats, naturelz du pays, sur roadicte

remoastmice des estais gënénnbE, qae ladicte restîtation se fera au prince d^Oranges, moyennaot que, penoDoèlenient, ou par son procureur, il preste le serment ordonne par deçi estre faîct par ceulx qui, en vertu de ladicte pacification de 6and, retournent & leurs biens, et que se restituent 4 Sa Ma- jesté les artilleries et munitions apparlenans & icelie, laissant audict ehasteau celles qui en sont d*ancienneté. Et, Icdict prince vînt à se douloir de ce que dessus, a samblë que luy pourra esire respondu et remonstré que, jus- ques à tant que les estatz généraulx seront assembles, par lesquels seront ▼uydes les poincts de la pacification encoires indécis, ne s*est trouTé con- venable que une telle place, au mitant du pays, demeure sans garnison i la part de Sadicte Majesté. Vous priant, monsieur, ordonner que cecy se effectue ainsy, et nous faire entendre, tout au plus tost, ce que vous aura pieu y faire, pour, selon ce, nous rcigler envera les estati, auxquels avons remis de rien dire jusques avoir eu vostre responce sur oeste, avec laquelle se vous renvoyent lesdictes lettres de Angelis , et celle du magistrat de Breda

Le due d^Arscbot répondit, de Lonvain, au conseil d^État, le S7 mara :

« Pour aultant quVei fort bien considéré et ad visé sur Timportanee de eest affaire, je me conforme entièrement à vostre opinion. Cependant, sera bon que vous anltres, messieurs, commettez quelque ung pour prandre la charge et garde du ehasteau de Breda avec quelques cent soldats catbolieques cl naturels du pays, attendant que la restitution de la place se fera : car, quant à moy^, je ne sçaurois qui dénommer. J^avois pensé à Vandermera : mais j*entends qu'il est absent. Il me semble que le S' de Mol seroit bien idoine k ceste charge, et mesmes aggréable au prince d*Oraînges. Je vous prie y pourveoir incontinent, et faira entendre le tout aux estats et audict $r prinee. ....••

Le conseil d'État transmit en conséquence aux états généraux un aete servant de réponse à son avis du 22 mars; mais les états le lui renvoyèrent, avec des changements proposés par eux, « leur semblant qu*il seroit moins » suspect et de plus grand contentement i monsieur le prince d'Oniages, » en ceste forme »

Le conseil d*Ëtat acoepta la rédaction des états généraux, non sans igouter toutefois quelque chose à leur projet. L*acte fut conçu comme suit :

« Sur ce que roessîeun les estats ont faict entendra à messeignenn du conseil d*£stat qu'ils avoyent adrisé que monsieur le prinee d*Oranges serait mis en la possession des ville et ehasteau de Breda, saulf la souveraineté du Roy, requérons que lesdiots du conseil d*listat tiengnent la main que cela s'effectue, et qu'ensuyvant co, ordonnent à ceulx qui tiennent ledict ehasteau

273

maison, pour éviter toutes foulies et inconvéoients qui pour- royent iUeeq advenir, et cein mesme pour Tadvertenee que

poar le présent, de le vuyder el le livrer es mains dudiet S' prince, ensuy- Tant la pacification faicte à GanJ, sarable à mesdicts seigneurs du conseil d'Batat que, pour satisfaire à icelle pacification, Icdict seigneur prince pourra appréhender et se mectre en possession desdietes yille et ehasteau de Breda, moyennanC que, personnelfemeot, ou par procureur, il preste le serment ordonné par deçà estre faictpar ceulx qui, en vertu de ladicte pacification, retournent & leurs biens, tel que ledict seigneur prince, estatz de Hollande et Zélande ordonnent estre faict par delà , par les chevaliers de rOrdre ou •altres seigneurs prtneipaulx de par deçà, ou leurs procureurs, ayans bien par delà, mutalis mutandis, et en oultre, que séparation se face des artilleries et munitions appartenans à Sa Majesté, et de celles estans d*ancienneté dudîct chasteaii. Et néantmoins, pour garder la souveraineté de Sadieto Majesté, en conformité du traicté d^aceord faict entre monseigneur don Jehan el lesdicts estâtz généranix, par lequel se dict que les villes et ehasteau Ix quy estoîentoccopex par les Espaignolz ou leurs adhérons, après leur partomenf, doibvent estre mis, par ad vis desdicts du conseil, es mains de personnaiges luitiirelx des Pays-Bas et qualifie! selon les privilèges dUceuIx, et, pour ceste fois, aggréables ausdicts estais, sera commandé aux Allemans estons audiet cbastean d*en sortir, et le rendre et mectre es mains de Philippe Vander M ereo , seigneur de Saventhem, que lesdiets du conseil d'Estat ont advisé sera aggréable ausdicts estats généraulz, pour, avecq quelques cinc- quante ou soixante soldats, naturelz du pays et du serment des estatz, par- dessus vingt-cinq y estons d^ancicnneté, tenir garnison audiet ehasteau pour quelque temps, et jnsques à ce que aultrement sera ordonné, et sur le ser- ment, que ledict S' de Saventhem sera tenu de faire, de entretant garder ledict ehasteau pour Sa Majesté et lesdicts estatz, en considération qu*icellay, est une forteresse au mitant du pays, et partant bien requiz qu^il y ait quelque garnison de la part de Sodiete Majesté, comme souverain, pour aoleun temps : le tout, néantmoins, sans préjudice au droict dudiet S' prince endroict la plaine joyssanee et possession en tous fruicti et prouffilz, insti* iQtîoo et destitution de tous officiers non concemans la souveraineté, et en toutes aoltres qualités, comme seigneur desdiçtes ville et ehasteau, conforme aux aecordz, lois, privilèges etcoustumes du pays. Faict à Bruxelles, le xxvij« jour deraarslS77.

Quoique cet écrit fût daté du 27 mars, c*était seulement dans la séance du S avril, assistaient le président Sasbont, le baron de Rassenghien, le S' d*Indevelde, le prévôt Foneq et Gaspar Schets, S' de Grohbendoncq, qu'il avait été définitivement arrêté. (Archives du Royaume^ papiers d*£tat.)

Le prince d'Orange eut connaissance de Tun et de Poutre écrit. En rcmer-

III. i8

274

j'avoy eu que les AUemans avoyent délibéré de piller la ville, et mettre le feu au chasteau. Par quoy, mousieur, je vous prie très-affectueusement de tenir la bonne main, vers les estatz généraulx, que lesdicts Allemans soyent au plus tost mis hors madicte maison et ville de Breda, afin que je puisse librement joyr de mon bien, suyvant le traicté de la pacification, et envoyer, pour la garde de madicte maison, quelques quarante ou cincquante soldatz miens, naturelz du pays, et je y don- neray tel ordre que riens n'y sera attenté contre la pacifica- tion, suyvant que je Fay plus particulièrement faict entendre à ce gentilhomme, de bouche, auquel j'ay aussy déclairé mon intention sur Taultre poinct que, de vostre part, il m'a rap- porté : qui me gardera d'en faire icy rediete ; seuUement, vous prieray sur ce le croire comme moy-mesme. Et, vous présen- tant, en cest endroict, mes très-affectueuses recommandations à vostre bonne grâce, je supplieray Dieu vous donner, monsieur, en bonne santé, longue et heureuse vie. Escript à Middelbourg, ce xxiiij" jour de mars Î577.

Vostre très-affectioné frère et amy à vous faire service,

GuiîIe de Nassau.

SmcriptUm : A monsieur monsieur le duc d'Arsscbot.

Copie du temps, anx Arehiret dn Royaume : LtUreê éUità CrHiUmMM de Ifauâ», t. V.

ciant les états généraax de leurs bannes intentions, il ne dissimula point le mécontentement que lui causait le procédé du conseil d*É(ftt. il le troam « du tout contre la pacification de Gand ; n il loi sembla qne ce n*étail « le vray pied qui pour restablinenient d'une bonne et asseurée paix seroîc requis ; » il se plaignit de ceux qui, « oontrarians ainsy tousjours aux bonnes « et salutaires résolutions des estatx , et renversant les fondamens desjà si » bien mis pour le repos général, « donnaient occasion de craindre qu*i fin on ne se trouTât frastré du fruit tant désiré de Unis les travaux passés.

Il engageait les états h « maintenir leur authorité, et ne souffrir qu'à

» l'appétit d'aucuns mal affectionnei an bien pnUicq, une pacification si » solennellement feicte f At ainsy indignement enfrainoCe et violée. » (Béndu- fions des étais généraux, etc., t. II, p. 403.)

278

DCV.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE (•).

Ils lui euvoienl le docteur Elbertus Looninus, poar lui remontrer certains points relatifs au rétablissement de la liberté du commerce.

BaDiBLLSs,2l MAas f877.

Monseigneur, comme c'est chose juste et bien raisonnable que, se retîrans les Espaignoiz^ noz adversaires, le commerche soit restably en toute liberté^ et que d'ores en avant les pro- vinces puissent joyr d'une mutuelle correspondence , avons enchargé & mons' le docteur Elbertus Leoninus, député vers Vostre Excellence, de remonstrer aulcuns poLncts et articles bien nécessaires, concernans ce mesme faict. Prions Vostre Excellence vouloir donner audict S' docteur toute foy et cré- dence; «us»y incliner et faire advouer le tout, comme respec- tant et concernant grandement le bien, proflict, repos et salut commun de toutes les provinces : auquel effect, monseigneur, après noz bien humbles recommandations à la bonne grâce de Vostre Excellence, prions Dieu donner à icelle très-heureuse et longue vie. De Bruxelles, ce xxiiij" de mars iS77.

De Vostre Excellence très-affeclionnez en service,

Les estatz généraulx des Pays-Bas,

Désirans, sur toutte chose, maintenir l'union et pacification

(1) M. De Jorgb a publié, Résoluiion$ de$ étais généraux, t. II , p. iSi, rînstruction qui fut donnée à Leoninus ; mais il n*cn assigne pas la date. Les BimfMhmt, duresle, BeeentiemiMit rien de relaiif à oeHe aiissioQ du docteur de Lonvain.

276

entre nous faicte, sans en rien manquer de nostre parolle, comme aussy avons bien volontiers entendu, par les dernières de Vostre Excellence, apportées par ledict S' docteur, que de vostre costé le désirez aussy ensuyvre et entretenir, nous advisérons de remédier les plainctes faictes par ceulx de Harlem contre le capitaine Lamarselle (').

Copie da.tempf, au ArehWes dt la ville dTprei.

DGVI.

tES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils Jui tnnnnettent, en le priant d'y avoir égard, les réclamations de plu- sieurs particuliers se plaignant de ne pouvoir rentrer dans leurs biens en Hollande et en Zélande. -^ Ils recourent aussi h son intervention, pour . que le magistrat de Middelbourg envoie Tobligation qui lui a été demandée | que ceux de Grave remettent les prisonniers qu^ils détiennent; que les maîtres des monnaies de Hollande viennent à Bruxelles, et enfin que les impositions dont ils se sont plaints précédemment soient abolies.

BaUXBLLBS, 30 MARS 1677.

Monseigneur, plusieurs gentiizhommes et diverses aultres personnes particulières nous ont rcmonstré que , nonobstant le traicté et pacification faicte à Gand^ suyvanl lequel est per- mis à touis estraingiers fugitiffs, retournez par dechà, ou non,

(1) €ë Sr de la Margelle (et non Lamarselle) commandait une compagnie d*infanterîe wallonne à Harlem.

- Î77

de joyr de leurs biens, sans anlcune dîflBcuICé, mesmement de leurs rentes sur les domaines de Sa Majesté et estatz de oe pays, ne poeolveot touttesfois obtenir la joyssance de leurs biens et rentes de pareille nature, au quartier de Holbodc et Zediande : quy les a nécessité de user de plusieurs intéreslz, comme appert par leur requeste cy-joincte, nous rcquérans d'en vouloir rescripre et recommander leur faict à Vostre Excellence, en ceste conjoncture que les estatz se vont tenir à Dordrecht. Ce que ne leur avons peu dényer, comme chose dépendante de ladicte pacification ; et vous prions bien instam- ment de vouloir donner ordre et provision par delà, et ordonner aux recepveurs des estatz, demaines et touts aultres qu'il appartiendra, qu*ilz aycnt à satisfaire et payer lesdicts rentiers de leur deu, suyvant ladicte paciffication, comme se faict icy à touts indifférament : en quoy espérons Vostre Excellence ne trouvera que raison. Laquelle aussy nous requé- rons vouloir ordonner à ceulx de Middelbourg d'envoyer leur obligation qu'ilz ont cy-devant accordé, pour la royne d'Angle- terre, dont leur a esté envoyé le formulier ('), de tant que cela requiert célérité, pour ihirer le secours que Sa Majesté nous at promis, quy nous est présentement fort nécessaire pour dégrosser et purger noz affaires, comme Vostre Excellence peult sçavoir. Au reste, comme l'on se retrouve en paine de ravoir monsieur d'Egghemont et aultres prisonniers, pour ce que ne sçavons rassembler ceulx qui sont tenuz par delà, et qu'entre aultres , ceux de Grave ont faict reffus d'envoier à mons* de-Hierges ceulx qu'ilz détiennent, n'est que Vostre Excellence leur ce commande, quy mesmement nous faict craindre que l'Espaignol n'en prétende couleur de dilayer sa retraicte, requérons pareillement Vostre Excellence leur escriprc, à toutte diligence, d'envoyer lesdicts prisonniers,

(I) Voy. ci -dessus 9 p. 206.

378

signamment Gaspart Ghonnies, bien et seurement, es raains dudict S' de Hîerges, cessant et portposant touttes aultres dif» ficultez, veue ia grande conséquence; au surplus, qu'il plaise à Vostre Excellence faire venir par dechà les maîtres des mon- noyés, et abolir touttes impositions qui se praçtiquent par delà, à nostre préjudice.

Nous adviserons de secourir eeulx de Zieriezée, dont Vostre Excellence nous a escript, de tout ce que polrons bonnement.

Monseigneur, noz bien humbles recommandations prémises à la bonne grâce de Vostre Excellence, prions Dieu donner à icelle trés-heureuse et longue vie. De Bruxelles, le pénultiesme demarsiK77.

De Vostre Excellence très-affectueux et appareillez en service ,

Les estais généraulx des Pays-Bas.

Par ordonnance desdicts estais : Cornélius Weellbmans,

Svscription / A monseigneur mons"" le prince d*Orangos.

C«pic teaps , au AnhiTct la flllt d' Yprea.

279 -^

DCVII.

LE PRINCE DORANGE AU COMTE DE LALAING (').

Il a donoë ordre aux compagnies des capitaines Sonnevelt et de Bivery» qui sont aa château de Gand, d>a sortir, comme le comte l*a prescrit : toute- fois, il désirerait avoir une déchaîne de ceux de Gand.

Monsieur , je reçois présenteinc ni une lettre du capitaine Sonnevelt, estant, aveeq sa compaignie, en garnison au chas- teau de Gaod , me mandant que , par une lettre vostre , vous luy commandez de sortir incontinent ledict chasteau , aveeq sadicle compaignie et celle du S' de Bivery, sans aultrement luy mander entre les mains de qui il aura à laisser la garde dudict chasteau. Or^ monsieur , vous sçavez que ladicte coni- pajgnie, estant des miennes, a esté mise dans ledict chasteau ,

(') Philippe, comte de Lakùag, doyen des pairs de Bainaut, sénéchal de Flandre, sire du pays d^Ëscornaix, baron de Wavrin, etc., avait été nommé grand bailli de Uainaut, par lettres patentes du 20 mars 157i (n. st.) : cette commission n*était que provisionnelle ; mais elle lui fut confirmée, li était, à cette époque , chef et capitaine d^une compagnie de 40 hommes d*armes dVrdonnance. Lors des événements de 1576, il montra beaucoup de dévoue- ment ponr le prince d*Orange, et une grande animosité contre les Espagnols : mais, plus tard, il travailla h la reconciliation des provinces wallonnes avec Philippe 11. Il écrivit à ce monarque, le 7 mai 1979, itne lettre que nous avons vue aux Archives de Simancas, et dans laquelle il rassurait de sa iidéUté, ainsi que de son désir de maintenir la religion catholique, non moins que Tobéissance due au souverain. Le prince de Parme Tenvoya, au mois de juin 1580, à Luxembourg, au-devant de sa mère, à qui Philippe II venait de nouveau de conférer le gouvernement des Pays-Bas. Farnèse écrivait de lui à Philippe II, le 7 juillet 1581 : EspoqtUta eo$a; pero eue peneamientoe no eon nada buenos, y loedeeumuger, que le gobiema, peores. (Archives de Simancas.) Il mourut, le 25 mai 1582, à Valcucienncs, des suites d^uu coup de pied de cheval. (Lettre du prince de Parme a Philippe II, du 31 mai 1582.)

~ Î80

incontinent après la conqueste d'ideluy, pour donner conten- tement aux bourgeois et habitans de Gand, sur le grand espoir quf leur avoil esCé donné ^ mesmement de vous , que ledict ehasteau seroit dénooly, incontinent qu'il viendroit es mains des cstatz généraulx. Dont faict à présumer que , voyans les bourgeois sortir la susdicte compaignie, et qu'au lieu d'abatre ledict ehasteau, Ton vouldroit, par aventure, introduire illecq des aultres compaignies, ilz viendront facillement à concepvoir quelque opinion qu'on les vouidroit cy-après maltraieler, dont pouroient sourdre quelques grans inconvéniens. Et cependant, toutesfois j ne vueillant de ma part contrarier à ce qu'en cest endroit peult estre ordonné par delà , j'escrips présentement au susdict capitaine Sonnevelt qu'il ait à vous obéir, et sortir ledict ehasteau, ayant sur ceste leKre responce et aultre com- mandement de vous , et moyennant aussy que je puisse estre hors de toute reproche, mesmement de ceulx de Gand. A Toc- casion de quoy , je désircrois préallablement sçavoir leur inten- tion et avoir d'eulx une descbarge , afin que, si par cy-après leur survint quelque inconvénient, eomme aultre part, par le moyen des citadelles, on a vcu advenir, riens ne soit imputé a moy ny aux miens. Je vous en escrips si librement, monsieur, pour le grand désir que j'ay de veoir le bien et prospérité du pays, et vostre réputation, vous priant, h ce regard, d'y penser de prez , et mesmes combien il importe qu'au susdict ehas- teau ne soit mise garnison sur laquelle vpus' n'auriez point , peult-estre , aulcun commandement. £t , sur ce , me recom- mandant très-affectueusement en vostre bonne grâce, je sup- plieray Dieu vous donner, monsieur, en bonne santé, heu- reuse vie et longue. Escript à Dordrecht , ce premier jour d'apvrill577.

Copie do tenpf, ans ArehÎTM 4a Rojaniae : lt$trt$

881

DGVIII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉCHEVINS DE GAND (•).

U leur envoie copie de sa lettre au comte de Lalaing, et leur demande ane décharge pour le fait de la sortie des compagnies commandées par les sieurs SonneveU et de fiivery.

DoaoaBcaT, !«»• atbil 1877.

Die pniNCE var Oraemgbn^ grave van Nassau, etc., hbere ende

BARON VAN BrEDA, VAN DiEST, ETC.

Edele, ecrntfeste, eersame, wyse, lieve, bysondere goedo vrienden , capiteyn Sonnevelt, ligghende van onsen weghen op 'i casteel van Ghendt in garnisoen , heeft ons tegenwoir- delyck gescreven, ende overgesonden copie van zeker brieven van den grave van Lalaing, by de weleke den voorschreven

(') La demande contenue dans cette lettre embarrassa fort les ëchevins de Gand. Ils résolurent d^y répondre que, les Espagnols ayant rendu le château de Gand aux comtes du Rœulx, de Lalaing et autres seigneurs ayant la $uper- intêndanee de la guerre, ceux-ci y avaient mis la garnison qu'ils avaient trouvé convenir, sans Tintervention du magistrat; que le magistrat n*avait donc pas à s^immiscer dans ce qui concernait le changement de la garnison, et que néanmoins ils remerciaient le prince. Ils consultèrent, sur cette réponse, avani de Tenvoyer, le conseil de Flandre, le comte du Rmalx, gou- verneur de la province, le conseil d'Etat et les états généraux.

Le conseil d*Ktat leur fit savoir qu'il Tapprouvait, ajoutant : « Et, quant » à la descharge demandée, puisqu'il n*y a aucune charge en son endroict, » il n'y gist anssy point de descharge : ce que luy ferez aussy entendre sur a ce point, et que cesle déclaration voslrc luy doiht servir pour descharge;

Î82 -

capiteyn bevolen wordt, staens voets , met zyn vaendel ende H vaendel van den heere van Bivery , uut den voorschreven cnsleele te trecken, sonder hem te laelen weten wat hy metten casteeie zal hebbente doen, oftein wyens handen ende bewae- renisse hy \ selve zal moghen ^tellen , begherende daeromme van ons te weeten wat hy daerînne te doeu hebben zal , nu is 'taizo datf acngesien dat îs een saecke van grooter impor- tantien, ende ulieden, myn heeren, sunderlynghe grooteUex aengaende, soo scryven wy daerop onse meenynghe aan den grave van Lalaing , so ghy 't selve zult moghen sien by de copie onser missive hier byghevuecbt. Ende nochtans, nyet willende contrarieren in 't ghene dies aengaende gheresolveert mach zyn , soo hebben wy den voorscreven Sonnevelt bevolen 't scryven des heeren graven van Lalaing naertecommen, ende dien volgens uut den casteeie te vertrecken , soo wanneer iiy op ons voirseid scryven aen den grave gedaen ^ ende van hem wyder bevel daertoe hebben zal. Mits oock dat wy van als moghen ontschuldicht zyn, sunderlinghe hy ulieden, uut redenen van den welcken wy wel souden begheren ulieder meenynghe hierop te weeten. Ende even verre ghy zulcx goet vindec , dai by uHeden ierst ende voor ai gegeven worde scrif- telicke ontlastynghe in handen van den voorscreven Sonne- velt, voir ons ende den onsen, op dat y ingevalle doir 't selve 't vertreck ende invoerynghe van anderen garnisoenen byn- nen denzelven slote, ulieden hier naemaels eenighe inconve- nienten overquamen (soo als men eklers , door middelen van den citadellen, gesien heeft), omme ofte den onsen dies aen- gaende nyet gheimputeert en worde. Edele , erntfeste , eersame , wyse , lieve , besundere goede

» et le mesme pourrei-yous faire entendre an capitaine Sonnevelt. (Lettre du 17 avril itS77.)

U est à remarquer qae, le 8 avril, le comte de Lalaing avait donné contre- ordre aux compagnies de Sonnevelt et de Bivery.

283

vrienden, onse Heere God zy met uiieden. Gescreven tôt Dor- dreeht, den iersten dach van april aiino xv* Ixxvij.

Uiieden zeergoede vriendt^ GuiElb de Nassau.

Su9cripHon : Den edelen^ emtfesten» ersaemen^ wysen, onsen lieven, besUnderen goeden, vrienden^ borgemeester, sce- penen ende raede der stede van Ghendt.

C«pt« da teapf, %vx ArehWM du Roytome : lêttm dÊ$tà Gmlîtnmt de JV(M«ms t. Y.

D€IX.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Âprts lui aToir tniioncé qd*ïU ont obt«nu, par leun flollicitatums, qa^il aoit remis en possasaîon de la yille et du château de Brada, ils rariennent sur plusieurs objets dont ils Tont entretenu précédemment : le rappel des Taisseaux de guem qu*il a sur TEscaut, près d* Anvers; raboHtion des imp6ts levés sur les marchandises par les états de Hollande et de Zélande; le règlement des monnaies. -- Ils Tinlorment ensuite du désir manifesté par don Juan de venir à Bruxelles , et de la manière dont sa demande a été éludée; dn complot qui aurait été tramé contra ce prince, etc.

BacxiuLts, 3 Avaii 1977.

Monseigneur, il plaira à Vostre Excellence ne prendre mal, sy la nécessité des eropeschemens oontînuellement survenans nous a ung peu retardé de respondre et escripre & icelie. Nous avons loutesfois sollicité le faict de voz ville et chasteau de Breda, tellement que Vostre Excellence peult entrer en pos- session de son droict, suyvant la pacification de Gand, eon-

284

forme à l'acte sur ce dressée, qu*avons désiré préallablement envoyer à Vostre Excellence (*), pour luy donner toute satis- faction, et sçavoir sur ce Tintention d'icelle. Nous Tavons aui- tre fois requis de retirer son armée de mer, comme encoire la requérons bien instamment , tant les batteaulx quy sont à Topposit d'Anvers, comme les galères proches le fort de Burcht, et aultres, affin de restablir en toute heurté le com- merche et trafficque, et que à mesme fin soient abolies lés licenteS) gabelles et impositions que ceulx d'Hollande et Zeelaude ont, puis aulcunes années, levez sur les marchan- dises de par deçà, veu que, en vertu de l'union et pacification, les ungs et les aultres doivent ressentir et jouyr de pareille liberté. Le faict des monnaies aussy est de grandissime consé- quence, comme aultres fois a esté remonstré à Vostre Excel- lence : par quoy la requérons derechief vouloir icy envoyer au plus tost les maiàtres des monnoies desdictes provinces, pour avecq iceulx de par deçà y prendre et arrester un bon pied. Tous nos prisonniers de Gheldres et Frize, mesmement ceulx pour qui avions dernièrement escript à Vostre Excellence, sont esté, puis quelques jours, envoyez par mons'' de Hierges en la ville de Maseyck, et espérons que les Espaignolz consi- gneront mons^ d'Egmont et aultres es mains du S^ prince de Liège, pour les faire la délivrance à mesme temps et heui*e. Son Altèze nous avoit faict déclairer, ces jours passez, qu'icelle désiroil venir icy le jour d'hyer, pour proposer quelque chose : sur quoy, y ayans délégué les S'' de St.-Gislain et de Zweve- ghem, nous sommes excusez, sur les bons jours de ceste saincte semaine, que chascun désire entendre, plus qu'en aultre temps, à son salut : ce qu'il a receu de bonne part, disant qu'il n'avoit pour aultre chose désir de faire ce voyaige, que |)0ur nous rendre tant plus asseurez de ses promesses, voircs

(i) Vay. la iiolo k la page 373.

28»

nous offirir, par-dessus Tacccord faict entre nous, toul ce que raisonnablement sçaverions désirer et demander , et que son intention avoit esté de confidamment venir seul et sans garde, affin que réciprocquement le peuple restablîsse la confidence en son endroict. L'esquipaige et train de Sadicte Altéze arriva jeudy dernier à Louvain. Puis quelques jours, a esté proposé, en nostre assamblée, que Son Altéze avoit divers rapports que aulcuns assez cognuz et estans en ceste ville auroient conspiré contre sa personne de le mectre à mort, ou le bien trousser et ramener captif à la Rochelle : sur quoy, considérans que cela résoultoit contre la foy publicque par nous donnée à Son Altéze, rayant receu en nostre protection et sauvegarde, priasmes que les aucteurs ne fussent déclarez en nostre assara- bléC; mais que, par le conseil d*Estat et quelques seigneurs principaulx y adjoinctz de nostre part, fussent examinez les indices, et s*ilz estoient suffisans. Ce faict, et pour ce que n'avons aulcune auctorité de judicature, le tout fust remis en la discrétion dudict conseil, pour en estre disposé comme seroit trouvé convenir : submectant par ainsy tous ceulx de nostre assamblée à ce que en pourra succéder, si quelqu'un fust esté trouvé coulpable. Suyvant quoy, et pour l'importance du cas, l'asseura (?) des personnes du S' de Bonnivet et Belangre- . ville, leur donnant garde en leurs logis. Touttesfois, pour les considérations qui ont peu m'ouvoir, ladicte garde fut retirée quelques jours ensuivans, et lesdicts gentilzhommes laissez en liberté (')• Nous en escripvons amplement à monsieur le ducq d'Alencbon, affin qu'il n'en soit aultrement informé qu'à la vérité, et ne prende de malle part, car nous désirons vivre et nous maintenir sans offenser personne, et, par ce moyen, procurer ung repos universel à ces provinces : à quoy aussy

(I) Voy. les Rétoludons des étatê générawc, t. If, p. 171, 172, 173, 175, 176, 181, 190, 477.

^

- 286

prions et requérons bien instammenl Vostre Exoellence vou- loir tenir la bonne main , comme celle qui , pour divers respects et qualitez, le peult grandement avancher et pro- mouvoir. De quoy avons enthière et parfaicte confidence , et qu'elle ne vouidra souffirir aulcune innovation par nouvelles fortifications, nyaultrement, dont se poiroit engendrer quelque suspicion ou diffidence. A tant, monseigneur, etc. De Bruxel- les, ce iij* d'apvril 1577.

De Vostre Excellence très - affectionnez en service.

Les estatz généraux des Pays-Bas.

SuscripNon : A monseigneur mons"" le prince d*Oranges.

Copit da cempt, •«! Arekivw de la ?ill« d^pret.

DCX.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AD PRINCE DORANGE.

Ils le prient de faire rétablir dans sa charge le iMiilli de Pontviiet, au pays de

Tholen.

BauxBLLis, 6 AtaiL 1877.

Monseigneur, ayant receu les requestcs quy vont icy jointes, n'avons trouvé meilleur expédient que de les renvoyer à Vostre Excellence, et la prier et requérir bien instantement, en faveur du suppliant, qu'il plaise à icelie, selon le désir qu'elle a tousjours eu à maintenir la pacification faicte à Gand, et en conformité d'icelle, conunander et ordonner à Liévin Werckende, on aullre se disant pourvcu de Testât de

287

bailly de Pontrliet, pays de la Thole, de s'en déporter, ei en laisser joyr et possesser paisiblement ledict suppliant, jusques que par l'a^samblée des estatz généraulx prochaine en soit auUrement ordonné ; nous faisant ce bien^ de nous advertir de ce que Vostre Ëxceilence aura trouvé convenable en cest endroict.

Monseigneur^ Dieu, nostre créateur, veuille à icelle donner très-heureuse et longue vie, nous recommandans bien hum- blement à la bonne grâce d'icelle. De Bruxelles, ce vj"* d'ap- vrii 1577.

De Vostre Excellence très-aifectionnez en service.

Les estatz généraulx des Pays-Bas.

Swscriptio7i : A monseigneur mons' le prinoe d'Oranges.

Copie tempe, eu Aithifee 4e Je viUe ilTpree.

DCXl.

LE PRINCE D'ORANGE AU DUC D'ARSGHOT.

Il lai recommande Jacques Galvart poor h place d'inspecteur des assurances^

h Anrers.

DoRDiaciiT, 6 ATaiL i877.

Monsieur, comme, par la convention faicte avecq les Espai- gnols, et la réelle sortie d'iceuix, Testât du registre des polices et asseurances est vaquant en Anvers (■), je vous ay bien

(') Par une ordonnance rendue & Anvers, sous le nom du Roi, le 90 jan- vier IS70 (lS7i , n. st.), le duc d^Albe arait réglé tout ce qui concernait les assurances contre les risques de mer. L*article7de cette ordonnance comoMt'

288

voulu affectueusement prier et requérir, par oestes, de vou« loir, en ma faveur, tenir pour recommandé, en la poursuyte d'ieelluy estât, le S' Jacques Galvarl (■)> lequel, qualifié selon les privilèges du pays pour le déservir, en faict requeste à messieurs du cpnseil d'Estat, entre lesquels vous, monsieur, tenant le premier et principal lieu , et le favorisant, selon la prière très-aiTectueuse que je vous en fais, et qui est la première que je vous ay faicte en matière semblable, je ne fais double qu'il ne luy soit facile d'obtenir Teffect de sa poursuite (^). De quoy vous ayant derechef prié très- affectueusement, et asseuré qu'en ce me ferez ung singulier plaisir, je vous présenteray mes très-affectueuses recommandations à vostre bonne grâce, priant Dieu vous donner, monsieur, en parfaicte santé heureuse et longue vie. De Dordrecht, ce vj* d apvril 1 577.

Vostre très-affectionné frère et amy à vous faire service,

GuiilE DE Nassau.

Suscriptiœi : A monsieur monsieur le ducq d'Arschot.

Original, aazArehiTM dn Boyawne : Lmmdieî à GwUmmu de iVoftois t V.

tait Diego Gonzalei Gante, secrétaire du ducv« pour entendre au faict desdîctcs » asseuraBces , tenir regard et soiog particulier que rien ne se fit contre ce »-qni estoit statué par iadicte ordonnance, et, à ces fins, enregistrer ot mettre » au net tous et quelconques oontractz et inslrumens dUcelles aaseurancet. »

(') Ce Calvart était natif d^AuTers. Il avait habité en Espagne et en Por- tugal , et parlait plusieurs langues. Peut-être était-il parent du ministre Calvart dont il est plusieurs fois question dans les Archit>e8 publiées par M. Gaoïif VAir PamsTsaiR.

(') En envoyant cette lettre au conseil d^Etat, le 18 avril, le duc d^Arechot lui disait qu*il convenait préalablement de faire « tenir information de la vie s et côUTcrsation de Calvart, du lieu de sa résidence, s*it aroît esté absent du » pays, et surtout de sa religion et autres circonstances. H ne recomman- dait Calvart que pour autant qu*après ces informations, il fût trouvé « idoine » et capable. (Papiers d^État.)

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DCXIL

LE PRINCE DORANGE A DON JUAN D'AUTRICHE («).

Réponse aux lettres de D. Juan. Il est henreuz d'apprendre que D. Juan veuille se conduire autrement que ses prédécesseurs. Il Tassfire que, en ce cas, lui et ceux de Hollande et de Zélande rentreront sous rautorité du Roi ; mais il demande, en preuve des intentions manifestées par D. Juan, que la pacification de Gand soit sinoèrement exécutée.

GsâTauDBRBiae, 24 mai ilSi77.

Monseigneur, les lettres dont il a pieu à Vostre Altèze m'honnorer ('); lesquelles j*ayreceu par les mains de mons' le due d'Arschot, mesme celle que, en tesmoignage de tant plus sincère et franche affection, il luy a pieu m'escrire de sa main propre, m'ont merveilleusement aecreu l'obligation en laquelle desjà sa bénigne courtoisie m'avoit mis auparavant, pour le respect de l'honneur et faveur tant signalée qu'il luy plaist en icelles me faire et promectre , me conviant si humainement et avecq tel soin à une vie tranquille, seure et honnorable, en laquelle lui semble consister le comble du bonheur et félicité de ceste vie mortelle, en me promettant si libéralement sa faveur et grâce. En respect de quoy, je ne veulx faillir, en mon particulier, de correspondre à ceste bénignité vostre, avec tout

(') Le prince écrivit cette lettre de sa main.

On trouvera, dans VAppendice, divers documents concernant les n^^ia- tiens de Gertrudenberg.

(^ Je n^ai trouvé ces lettres de D. Joan , ni dans nos Archives , ni ailleurs. D. Manuel Garcia, garde des archives royales de Simancas, a eu la complai- sance d*en faire la recherche dans ce dépôt; il n*a pas été plus heureux que moi. Cependant, il résulte des pièces mêmes que j*ai rapportées de Simancas, que D. Juan envoya au Roi copie de ses deux lettres.

II. 19

290

debvoir de très-humble service, vous suppliant, monseigneur, croire que, Vostre Allèzc voudra m'honnorer de ses com- mandemens, elle m'y trouvera aultant fidèle et affectionné que serviteur qu'elle puisse avoir.

MaiSf certes , le contentement que j'ay receu est que Tobli* gation en laquelle Vostre Altèze m'a mis, au regard du poinct auquel il luy a pieu me déclarer que son intention est de se

conduire en ceste charge tout aultrement que n'ont faict les aultres gouverneurs qui ont esté devant icelle, et ne se pro- poser aultre but que la pacification et quiétude du povre peuple de ce pays, a esté encore de tant plus grande et plus parfaicte, que plus sans comparaison je respecte, comme de tout temps j'ay respecté, le bien, repos et seureté publicq, que non pas le mien propre, aiant, au pris d'iceluy, tousjours mis dessoubz les pieds mon regard particulier, ainsi que suis encore résolu de faire, tant que la vie me demeurera.

Cela me faict supplier très-humblement à Vostre Altèze qu'il luy plaise constamment et sincèrement maintenir ce seul et unique but ea toutes ses actions, et croire qu'en tel cas non- seulement m'efforceray de tout mon pouvoir à m'acquitter du deu de mes obligations, mais mesmes ne voudray jamais espargner ny ma vie propre, ny tout ce qui est en ma petite puissance, pour, selon mes facultez, seconder et servir Vostre Altèze en une œuvre si saincte et louable, comme celuy qui dès pièça me suis du tout dédié et voué au service de Sa Majesté et au salut de ma patrie. Mesmes, Vostre Altèze se pourra asseurer que ceulx de ces pays d'Hollande et Zélande rendront è Sa Majesté et à Vostre Altèze toute deue et légitime obéis- sance, comme, de ma part, je ferai aussi, avec telle fidélité et promptitude que bons vassaulx et subjectz sont obligez de faire.

Mais, monseigneur, après avoir le tout bien meurement considéré, et, au plus près qu'il m'a été possible, examiné ce

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que^ de la part de Vostre Altéze, mondict S' le dueq d'Ar- sciiot et ses collègues m'ont proposé, je trouve que, tout ainsi comme le traicté de pacification faict en la ville de Gand a esté l'unicque entrée et commencement à délivrer ce povre peuple afflige de tant d'oppressions, ainsi le seul et unique moien pour parvenir au comble du repos el tranquillité tant désirée, consiste en la sincère et réelle manutention et entier accom- plissement de tous les poincts contenus en icelle.

Voilà pourquoy, monseigneur, je veulx bien supplier à Vostre Altèze très-humblement de démonti'er en cela, par eflect, l'entier bénéfice et contentement qu'icelle m'asseure, par sesdictes lettres, estre délibérée de vouloir donner à ces pays, veu que les yeux d'un chascun sont dressez à ceste mire de la rondeur et sincérité de laquelle on procédera à l'effectuation dudict traicté de Gand, pour d'icelle faire jugement de ce que l'on pourra espérer en ce qui reste encor pour l'entière perfec- tion du repos et tranquillité publicque* Or, aiant sur ce propos plus amplement discouru avec lédict S' ducq et messieurs ses collègues, pour ne faschcr Vostre Altèze de plus long discours, me remectray du surplus à ce qu'ilz en diront à Vostre Altèze, et, finissant ceste par mes très-humbles recommandations à voz bonnes grâces, prierai Dieu vous donner, monseigneur, en parfaicte santé bonne vie et longue. De Ste.-Gheertruden- berghe, le xxiiij'' jour de may 1 577.

De Vostre Altèze très-humble serviteur,

GtiiLLE DE Nassau. Suscription : A Son Altèze.

Arehifcf des Affaires étnagéres, à Paris ; MS. intitulé Pay«-J}M, 156»-1583, fol. 240 (*)•

(7 J*ai trouvé, aux archÎTes de Simancas, Papde$ de Eêtado, liasse 1(72, une Induction espagnole de cette lettre.

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DCXIII.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX (•)•

Il insiste sar l'acoomplissement de la pacification de Gand. II justifie sa conduite et celle des états de Hollande enrcn la ville d'Amsterdam.

HAattii, 20 imn 1S77.

Messieurs , il n'y a celuy d'entrie vous lequel ne voie et confesse que la pacification faicte à Gand le vii]"" de novembre n'ait esté. l'unieque et souverain remède à une infinité de mauh et calamitez èsquelles nostre povre patrie se trouve réduicte; et n'ait, quant et quant, destourné le joug insupportable de la tyrannie estrangière, de laquelle l'on nous vouloit oppresser, ensemble et toutte nostre postérité à jamais.

A quoy, de quelle intégrité et rondeur, et avec quelz tra- vaulx et dangiers, je me soye emploie , y aiant libéralement bazardé tous mes amis, frères, biens, possessions, renommée et la vie propre, est aussy notoire à un chascun, comme pareil- lement la promptitude, bonne foy et constance de laquelle les estatz de ces pays d'Hollande et Zélande se sont employez en ceste cause, aiant, de leurs propres corps, vies et moiens, basty le pont par lequel on est parvenu à un bien si singulier et souhaitable, est tellement cogneue à un chascun, que j'esti- meroys chose superflue d'en faire icy quelque discours.

Et néantmoins, comme, au moien des ruses et practiques

(I) PiBTBt BoR a donné une traduction en hollandais de cette lettre, Hfeier- landUcfie Oorlogen, liv. X, fol. 2XS5 ; mais il m*a paru qu^une pièce aussi importante devait être connue dans son texte original.

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sinistres d*auicuns, lesquelz, se trouvans peu affectionnez à la patrie , et ne prctendans que de monter au comble des estatz et honneurs y par les ruines d'icelle^ soubz umbre d*aultres couvertures , taschent à ramener les premières dissentions et guerres civiles, ces bénéfices que avons receuz de la niain et faveur singulière de Dieu , polroient bientost estre mis en oubly.

Il est ainsy que , pour le debvoir que j'ay à la patrie , et l'affection que tousjours fay portée et porte encorcs & vostre service , je ne puis obmettre de vous prier bien affectueuse- ment et enhorter à bon escient, comme je prie et enhorte par cestes, que, si tout le reste vient, ou par oubliancc à estre' mis en nonchaloir, ou , par l'esblouissant lustre de quelques cou- leurs et umbres empruntées, à estre reculé de vostre veue et souvenance, au moins il vous plaise continuellement vous représenter devant les yeulx le bien que toutte la patrie a receu de ladicte pacification, afin que vous entendiés ainsy, comme il est à la vérité , que , comme Tentrée de Tespérance qu'un chascun a conceu de veoir ce pais restably en son ancien repos, fleur et prospérité, a commencé par icelle, ainsy n'y a nul moien au monde de mener ce bon et heureulx commen- cement à une issue désirée, sinon par l'entier et réel accom- plissement et parfaicte observation des poinctz y contenuz et capitulez.

Cela est cause que je vous prie, messieurs, que, mettant eecy en telle considération comme Timporlance d'un tel faict mérite, vous vueilliés une fois tenir la main, à bon escient, à ce que ladicte pacification tant salutaire à tout le pais, et laquelle vous avés sy solemnellement jurée et tant de fois ratifiée, puisse à la parfin estre parfaictement accomplie : car, jusques à présent, il semble que nous en tenions plustost une umbrc et imaige en apparence, que non pas la vérité et le corps. Quy faict qu'en général nous nous trouvons privez du

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principal fruict d'icelle^ assçavoir d'une ferme conjonction el sincère amitié, avec asseurée confiance des ungs envers les aultres , veu qu'encores, pour l'heure du présent, ainsy que nous avons plus amplement remonstré à mess" de Grobben- donck et docteur Leoninus, voz députez, Ton ne voit encores ny les biens estre restituez, ny les gouvernemens réunis, ny les estrangiers qui s'estoient déclarez les plus grans ennemis de la patrie, et avoient pillé et saccagé les biens et lacultez des habitans, en estre retirez, ny les prisonniers mis en liberté, ny les. exilez admis à demeurer en leur patrie, ny les privilèges anciens restituez, ny les attentatz faictz au contraire d*iceulx, abroguez. Mesmes, il semble que derechief l'on dresse prac- ticques et menées pour petit à petit fouUer l'authorité des estatz, et remettre en crédit les estrangiers, eulx qui ont esté la cause et source de la ruine publicque ; voires qu'on tasche de remettre en vigueur l'es placcarts sur le faict de la religion, en redressant les eschaffaulx, pour tyranniser les consciences des povres habitans, et par ainsy faire repulluler pernicieuses semences de dissentions qui nous ont amené toutes les cala- mités, misères et désolations du passé. Lesquelles choses, messieurs , ainsy que pouvés bien aisément juger, selon la prudence dont Dieu vous a doué, ne peuvent, sinon accroistre les deffiances, et engendrer grandes altérations d*une part et d*aultre, dont est fort à craindre que sy, par le réel accom- plissement de ladiete paciGcation, vous n'y mettes ordre, nous polrions bien tomber en pires termes que n'avons estéoncques auparavant: oullre ce que, par cemoien, vous perdrés, envers tous peuples, provinces et nations estrangières, la réputation et louange que desjà vous avés acquise par un acte sy héroîcque et magnanime, d'aultant qu'ungchascun, voiant qu'après avoir sy bien commencé, vous laissez imparfaicte une chose en laquelle gist tout vostre bien, salut et liberté, et ouvrez la porte & ceulx quy par cy-après vouldroicnt prendre la ven-

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geancc de vous telle qu'ilz désirent , et quant et quant vous réduire, ensemble et toutte vostre postérité, dessoubz un joug de servitude beaucoup plus intoUérable que n*a esté ecUe du passé, ne poulront juger aultrement^ sinon que ce qu*a esté par vous faict jusques ores soit plustost procédé de quelque passion et impatience mal fondée, que de conseil arresté et de constante magnanimité et verlueuse résolution fondée en jus- tice et équité. Au moien de quoy, ung chascun tournera la faveur et bicnvueillance que Ton vous a porté jusques à main- tenant, en une haine et moequerie : ce que vous povéséviter, en procurant le parfaict et réel accomplissement de tous les poincts de ladicte pacification, ainsy que derechief je vous prie bien affectueusement, et enhorte fort sérieusement de vouloir faire, et m*en mander vostre bon ad vis.

Au reste , je ne puis aussy obmettre de vous dire que nous avons esté advertyz que aulcuns de noz malvueillans auroient semé le bruict comme sy nous menions icy la guerre contre ceulx d'Amsterdam, ou que leur usassions de manière d'hosti- lité, chose quy ne se trouvera jamais à la vérité, mais, au con- traire, nous les admettons par deçà librement et franchement, ne plus ne moins que les aultres habitans de Hollande, combien . que , quand les nostres viennent en leur ville , iiz leur font poser les armes, et leur usons de toutte honnestetc cl courtoisie possible : mesmes, au traicté de la satisfaction, leur avons accordé tout ce qu'ilz ont peu demander , moiennant seule- ment qu'ilz se rengeassent en union avec ceulx de Hollande, comme ilz sont accoustumez, es charges et impositions géné- rales , et se déportassent de touttes procédures et manières d'bostilitez, veu que, suivant la pacification faiete à Gand ^ ilz sont tenuz de ce faire , et que ceste union est le seul fonde- ment et fin principalle pour laquelle l'article de la satisfaction a esté inséré en ladicte pacification , sans laquelle la paix ne peult en effect consister. Et toutesfois, se monslrans rétifz à

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choses sy équitables , ilz donnent assez à cognoistre qu*ilz n'ont pas grande envie de maintenir la paix et le repos cKi paîs, ainsy que mesdicts sieurs de Grobbendonck et Leoninus^ et mesmes les aultres seigneurs envoiez de par Son Altèze , ont peu veoir et cognoistre. Dont j*ay bien voulu vous advertir, aflBn que puissiés en jugier à la vérité , et donner ordre à ce que la paix générale puisse estre maintenue , ainsy que pour le bien et repos du pais il appartient.

Quy est Tendroict , après m'avoir très-affectueusement recommandé à voz bonnes grâces , je prie Dieu vous donner messieurs, en santé bonne vie et longue. De la ville de Haerlem^ ce xx* de juing 1577.

Vostre très-affectioné amy et patriot à vous faire service,

GuiîXb de Nassau.

Suscription : A messieurs messieurs les députez des estatz généraulx des Pays-Bas, assemblez à Bruxelles.

Copies dn tem|», anxarehiTes des états de Hainaat« à Mons : reg. Actes de$ im$, de 1516 d 1577, fol. 2IO5 et à la Bibliothdqiie de la Chambre des Représcnunts : Heeneil de piéees relative* oms ittU» génirmiXy 1576-1580, (. I, fol. 378.

1*

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DCXIV.

GASPAR SCHETZ, » DE GROBBENDONCQ, AU PRINCE

D'ORANGE.

Délai qa*apportent les états généraux à se résoudre sur ce qui a été négoeié à Gertrudenberg. Scheti engage le prince à se dépouiller de la défiance qu*il a du Roi. Il lui fait envisager les conséquences fâcheases qu*ane nouvelle rupture pourrait avoir pour lui et sa maison. -* Il lui envoie un mémoire concernant le comté de Charolais, et termine en le priant de le foire payer des rentes qu*il a sur les domaines de Hollande.

BauzBLLBs, 90 tviH iV77^

Monseigneur^ combien que le docteur Leoninus et moy avons faict le debvoir, vers Son Altèze et aussi les estatz géné- raulx ('), tel que de nous ont peu attendre ceulx qui cognois- sent le bon zèle que portons au repos publicq, ^i est-ce que^ jusques ores, on n'a sceu sortir de la généralité ici assemblée la résolution requise. Vostre Excellence sçaitqu*en icelle con- current plusieurs testes et humeurs ^ et sur ce sçaura fonder la patience que luy convient prendre en tout ce que se repré- sente en cest affaire publicq , prennant tousjours son but au repos commun, contre lequel ne doibt militer passion aulcunc particulière. Et , pour satisfaire à mon débvoir et à l'affection qu*ay tousjours porté particulièrement à Vostre Excellence , ne puis laisser de dire à icelle , encor ce coup, que luy est nécessaire se dépouiller d'une partie de la diffidence contre le Roy, nostre maistre, que j'ay senti luy estre enraciné au cœur, si très-grande qu'elle nous a empesché et empeschera tous- jours toutes les bonnes négociations, et, quand sommes au

(') Voy., dans V Appendice, leur rapport aux étals généraux.

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poinci pour conclure, nous rejectera à chasque fois en quelque ^despération.

Si Vostre Excellence se vouloit mectre devant les yeulx que le Roy, nostre maistre^ après si longue guerre, si grande el inutile despense , s'est trouvé mal conseillé d'avoir, de deux voyes de gouverner, plustost choisy celle de la rigueur que de bénévolence, en ungpays ne le pouvant comporter, et que, par ce, il at, en la fin, soit par nécessité, ou par inspiration divine, changé d'opinion ; et, d'aultre part, que le seigneur don Jehan jusques à présent a si bien correspondu à ladicte changée opinion de Sa Majesté, s'accômmodant tellement avecq les estatz, qu'on ne se peult avecq raison doubter d'aultre inten- tion; aussi, qu'il s'est si avant abandonné, sans aultres forces que celles des estatz, que, quand il prétendroit aultre chose, mal le pourrait cBectuer, ce seroient toutes considérations que pouroient délivrer le cœur de Vostre Excellence de ladicte trop grande diffidence, laquelle nous est assez préjudiciable en ceste conjoncture. Et, par ce, je supplie humblement Vostre Excellence d'en lieu de tant deffier, bien penser et examiner comment et combien icelle se doibt et peult fier, et en ce s'eslargir tant qu'elle pourra pour ledict repos et bien publicq, ' pour lequel en ung besoing convient bazarder tout le particu- lier, jusques à la personne propre, comme ont tousjours faict les grands hommes ; et Vostre Excellence n'a aussi failli à le faire, et si heureusement jusques à maintenant, que le monde, d une voix , luy attribue le bénéfice du maintien nement des libériez et privilèges du pays, lequel ne vouldroy que Vostre Excellence perdisse, et conséquement ledict pays, comme adviendroit , si icelle donnoit quelque occasion de changer nostre repos eu nouvelle guerre, qu'à Dieu ne plaise.

Et, puisqu'ainsi est que , du costé du seigneur don Jehan , je trouve bonne volonté d'asseurer Vostre Excellence et les estatz d'Hollande et Zélande , à quoy correspondent les cstacz

299 *-

générauh icy assemblez, et concordent aussy les ambassadeurs de l'Empereur, lesquels y attireront conjoinctement les princes d'AlIemaigne, il me semble, è correction, que la forme et ma- nière de Fasseurance sera bien trouvable, si Vostre Excellence se veult mectre à y penser , soit par le moyen que de présence ay mis en avant , dont je tiens que Vostre Excellence debvra avoir mémoire , ou aultre , de sorte que au premier scrupule qu'icelle me mit en avant fusse remédié. Me sembleroit aussi que, quand au second scrupule, touchant le poinct de l'exer- cice de la religion, remis aux estatz généranlx, sera bien trouvable tel expédient que, de Tung costé, on ait contente- ment, et, de l'aultre eosté, aussi satisfaction. Lesquels deux poincts widez, je vois assez évidemment que toutes aultres difficultez , que ne sont qu'accessoires, cesseront.

Par quoy , supplie derechef à Vostre Excellence y penser, et peser ce que luy pourroit advenir après la rompture de nouvelle guerre, si Sa Majesté se délibérât de dépendre quel- ques millions , comme icelle, estant trop irritée et stimulée oultre raison , pouroit trouver , quand ce ne fust que par moien des ecclésiastiques; davantaige, quel désavantaige seroit à Vostre Excellence , si Sadicte Majesté fist la guerre avec ravoye(*) de ses estatz et subjects, que ny le ducq d'Alve, ny le commandador major, n'ont sceu faire, et pourroit facilement advenir maintenant , si Vostre Excellence , par ladicte diffi- dence non fondée , fust réputé pour cause de ladicte guerre, comme pourroit aussi, en tel cas, la fortune de guerre, laquelle s'a monstre jusques ores tant favorable, tourner visaige, qu'est ung cas, après les grandes félicitez , fort crain- dible. Et mesmes à Vostre Excellence et à sa postérité convient maintenant plus de cercher le repos, pour establir sa maison et grandeur d'icelle , que continuation de guerre , laquelle ne

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luy peiilt donner nultre fruict que le seul maintiènement de sa personne y avecq bien grand hazard de laisser sa maison du tout ruinée après sa mort.

Et, pour ce, monseigneur, considérant que la guerre sera doresnavant tant odieuse , et oultre ce dangereuse à Vostre Excellence et non duisante à sa postérité, et, de Taultre costé» que le seul appuy du peuple , dont Vostre Excellence s*est soustenu durant ces garbouUes et guerres, ne sera tant asseuré en temps de paix, je supplie très-humblement qu*icelle, pour une fois se mectre en bon et asseuré estât, se dispose à quelque forme de confiance sur Sa Majesté, ou sur le S' don Jehan, telle toutesfois qu'elle soit par les Estatz et princes voisins corroborée, et ainsi si asseurée que avec raison on s'en doibve contenter, et ne se laisser de ce divertir par les propos ordi* naires : quod hoBreticis non est servanda fides, et quod regum irœ 8unt immortales, car à Tung se peult bien remédier par l'autorité du pape, interposita fide publica Imperatoris et prin- cipum Imperii, et, au contraire, de l'aultre, il y a des exemples innumérables, es histoires anciennes et modernes, combien que, lors quand me trouvay vers Vostre Excellence, n'en avoy la fresche souvenance. Et, quand tout est bien considéré, se trouvera que les grands princes mettent leurs affections aux vassaulx, selon les services et commoditez qu'ilz en peuvent tirer, sans estre subjects aux affections particulières, pour leur faire bien ou mal, que Vostre Excellence doibt, par son expé- rience, mieulx sçavoir que moy. A laquelle je supplie hum- blement me pardonner que me suis eslargi si avant, et vouloir le tout imputer au bon zèle qu'ay , tant au bien publicq , que au bien particulier de Vostre Excellence , laquelle ne pourra jamais avoir bien en ce monde , si elle ne se dépouille , par quelque façon que ce soit, de ladicie excessive difSdence.

Et, sur ce, finirai ce propos, envoiant à Vostre Excellence, joinct à ccsle, ung escript concernant la conté de Gharolois,

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contenant particulièrement Testât et conditions de ladiete conté, comme icelle m*avoit requis. Laquelle conté, à ce que j'ay veu, est plus honnorable que prouf&tàble pour le présent; mais il y a grande matière pour espérer plus grand' valeur, mesmes quand on pourroit obtenir la souveraineté du roy de France, qui semble en temps présent assez practiquable.Vostre Excellence verra lèdict escript, et me pourra mander son bon plaisir endroit du change contre son bien de Bourgoigne : en quoy m'emploieray de si bonne affection que Vostre Excellence me le pourra commander et fier.

Je supplie à Vostre Excellence donner ordre que doresna- vaut je puisse estre bien payé de mes rentes qu'ay sur les domaines de Sa Majesté en Hollande, puisqu'ay eu cincq ans patience, sans sçavoir par quel bout me sauver de la perte. Aussi supplie de ravoir ma requeste donnée aux estatz d'Hol- lande, touchant le don faict à la Royne, nostre maistresse, avec quelque bonne et favorable apostille. Et sur ce, monsei- gneur, je prie Dieu avoir Vostre Excellence en sa saincte garde et protection. De Bruxelles, le xx** de juing 1577.

De Vostre Excellence humble serviteur,

Gaspar Schetz.

Suscription: A monseigneur monseigneur le prince d'Orange.

Archives des Affaires étrangères, à Paris : MS. loUlalé Payi-Boê, 1560-1583, fol. 241 t«-243.

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DCXV.

LE PRINCE D0RAN6E AU S' DE GROBBENDONGQ.

Réponse à la lettre précédente. Il prend en patience le délai que les états généraux mettent à se résoudre. Il déclare qn*il ne peut avoir conBcnee dans le Roi, ni dans don Juan, tant que la pacification de Gand ne sera pas exécutée. Il remercie le S' de Grobbendoncq du mémoire concernant le comté de Gharolais.

Alcxhâai, 38 JUIN iS{77.

Monsieur de Grobbendoncq, vostre lettre du xx"* de juing m'a bien suffisament représenté devant les yeulx la conti- nuation de vostre bon zèle envers le bien et repos de la patrie, tant en ce que m'enhortés de fonder la patience qu'il me convient prendre sur la diversité des humeurs qui se trouve en la généralité de par delà, pour ne trouver estrange le peu de résolution qui en est sortie, sur le bon rapport que vous et le docteur Leoninus leur avés faict, comme pareille- ment en ce qu'avec tel soing vous taschés de m'oster toute di/fidence, laquelle vous dictes avoir trouvé enracinée en mon cœur, et estimés que ce soit le seul empeschement de toutes bonnes négotiations.

Or, quant au premier poinct, je n'en puis dire aultre chose, sinon volontiers, tant que faire se pourra, je supporteray les humeurs de ceulx qui ainsi dilaient leurs résolutions, quel- ques divers qu'ilz soient, moiennant que Ton entende que l'effect de tout ce que j'ay demandé ne tend, sinon à l'establis- sèment du bien, repos et tranquillité générale, tant s'en fault que je veuille opposer aulcune particulière passion mienne au repos publicq.

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Touchant raultrc, je suis bien de vostre opinion, que la difiidence nous est fort préjudiciable en ceste conjonture, et ne veulx ra'accordcr à ceulx-là qui estiment qu'en tous gou- vememens bien policés , la difBdence doibt tousjours demeu- rer pour contrepois ou bride de la tyrannie. Mais aussi (') vous me confesserez que, comme entre vrais aniis y a bonne confiance, ainsi entre ennemis n'y peult avoir que defBance, laquelle si on veult osier, il fault premièrement oster (*) l'ini- mitié qui en est cause, et faire la paix : dont appert que la seule pacification est celle qui oste la deffiance.

Or, nous avons faict une pacification non moins solemnèle que salutaire à tout le pays.

Par quoy, puisqu'il est question d'oster la deffiance, il fault commencer par ce bout-l^, en accomplissant ceste pacifica- tion, et, en laissant toutes cavillations à part, fault raonstrer qu'il n'y a plus d'inimitié ny soupçon qui nous empesche de suivre et accomplir le contract faict et accordé des deux parties.

Mais maintenant nous voions, au contraire, que de vostre eosté Ton est si plain de deffiance, que l'on ne accomplit ung seul poinct de ladicte pacification, mais on la enfraint journel- lement de plus en plus, comme si jamais elle n'avoit esté faicte ny jurée : car à grand'peine trouvera-l'on ung seul article, depuis le premier jusques au dernier, lequel ait esté de vostre costé franchement et réellement accompli.

Ou l'on y trouve des cavillations et subterfuges, ou l'on y forge des glosses sophistiques, pour n'accomplir ce que la raison commande, et le serment et obligation contraint de faire, ou l'on use de dissimulations, ou l'on cerche dilais, ou bien on le refuse à pur et à plain. Ainsi retient-on les gou-

0 Ce mot manque dans la lettre originale. (<) Le mot osier manque aussi dans l*original.

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vernemens désunis , les biens confisquez y les prisonniers en arrest, les garnisons estrangiéres déans le pays, les cittadelles, vrais nids et repaires de tyrannie, en pied, les privilèges du pays obscurcis et annichilez, les placcarts, ou, pour le moins, Teffect d'iceux, en vigueur, les eitoiens et habitans des villes en exil, et en général tous ceulx de la religion en hayne irré- conciliable.

Et, quand nous nous en plaingnons. Ton veuU avoir de nous nouvelles asseurances que nous accomplirons les poincts les- quels se doibvent, au primes, traicter à l'assemblée générale des eslats, comme s'il n'y estoit sufBsament pourveu par ladicte pacification, à laquelle nous avons, de nostre part, satisfait et satisfaisons de poinct en poinct.

Et, nonobstant tout cecy, on ne nous parle que de quiter toute défiance, quoyque, tout au contraire, par les effectz, l'on nous monstre, non-seulement que l'on ne se fie point en nous, mais mesme qu'on ne veult poinct que nous nous fiions en eulx !

Car, tout ainsi comme leurs dilais, tergiversations et gloses controuvées, par lesquelles ils taschent de décliner l'accom- plissement des articles de la pacification, ensemble et les asseurances nouvelles qu'ils requièrent de nous et nous pré- sentent de leur part, déclarent évidamment le peu de fiance qu'ils ont en nous, aussi pareillement le traictement qu'ils fout, et à moy, et à tous les nostres, par continuation d'exils, détentions de biens et des corps, voire aussi par exécutions corporelles, aussi rigoureuses que sçauroient porter les plac- carts, nous advisent combien de confiance nous povons et devons asseoir en leurs bonnes volontez envers nous. Et pour- tant me samble qu'il ne fault ainsi du tout rejeter les propos ordinaires dont faictes mention en vostre lettre, assçavoir : quod hœreiicis non sit servandafides, et quod regum irœ sitU imtnor- taies : car le premier semble cncor se vérifier à présent par

305

Texemple de ladiele pacification tout fraischement promise et jurée, et rien moins qu'accomplie; Taultre est encore sous- tenu sur les mesmes bases et fondemens desquels il a pris sa première origine. Et , puisque la cause de Tire ne cesse encores, il n'y a pas grande apparence que Feffect doive cesser : car, quant à ce que vous allégués que la nécessité ou inspira- tion divine auroit changé l'opinion du Roy, tant s'en fault que cela me puisse persuader, que, au contraire, si auparavant je n'eusse eu nulle defBance, vous me la fériés avoir par cestc allégation, laquelle ne me donne nul aultre fondement de confiance, que celle qui est la vraie mère de toute simulation et dissimulation, assçavoir : la nécessité.

Car, quant à l'inspiration divine, puisqu'elle est incogoeue aux hommes, aussi n'en peult-on juger que par les efiects, lesquels, si l'on ne voit aultres quejusques à présent, on aura tousjours occasion de doubter que le S' don Jehan ait plustost correspondu à la résolution que le Roy avoit prise dès alors qu'il l'envoyast par deçà, et escrivoit à Roda qu'il dissimulast avec ceulx du pays jusques à meilleure opportunité, que non pas à quelque changement d'opinion survenu du depuis, dont on ne voit encor nulles aultres apparences que celles que, selon vostre propre confession, la nécessité a extorquées.

Mais, si en effect nous voions que i on oste les soupçons et deffiances que sans cause on a prins sur nous, qui avons franchement accompli de nostre cosié la pacification , et que, réellement et sans cercher subterfuge , on mect en effect ce qui reste des points d'icelle de ce costé*là, non-seulement nous osterons toute defOanee, mais aussi nous nous compor- terons, au reste, avec telle équité et modestie, que tout le monde cognoistra que nous ne vouldrons en sorte quelconque estre autheurs de quelque nouvelle guerre, comme aussi nous espérons réçiprocquement que les estatz de par delà ne met- tront ainsi du tout en oubly les grands travaulx et dangers par

III.* »o

306

nous icy soustenus, et lesquels, par la grâce et bénédiction de DieU) ont esté les vrais moiens par lesquels le pays en général a esté délivré de l'insupportable tyrannie dont il se trouvoit oppressé, qu*ils nous vouidroient faire la guerrCi ou souffrir qu'on la nous fisse, mesmes n'aians nulle aultre occa- sion ny tiltre, sinon que nous désirons, en tout et partout, maintenir la pacification par eulx establie et jurée ; mesmes voians bien clairement que, s'ilz se résolvoient à cela, oultre les mauix et calamitez ordinaires que apporte la guerre quant et soy, encor seroit-ce le vray pied et moien pour se priver eux-mesmes de toutes leurs libertés, droicts et privilèges, et se faire entièrement opprimer, voire se rendre du tout serfs et esclaves de la sanglante tyrannie de leurs malveuillans et des estrangers, à cause que ceulx qui dès pièça ont prétendu à ce but, ne désireroient et mesmes ne pourroient au monde avoir plus beau moien pour parvenir à leurs desseins, et prendre la vengeance d'eulx telle qu'ils désirent. Et pourtant je vous prie bien affectueusement vouloir tenir la main, tant qu'eu vous sera, afin que la paix une fois faicte puisse estre observée et maintenue inviolablement, et, au moien d'icelle, le pays remis en son ancienne fleur et prospérité.

Au reste, j'ai veu ce que m'escrivés touchant la conté de Gharolois : sur quoi je vous remercie bien affectueusement de la peine qu'y avez prise. Et, ores qu'en lisant le discours quy va joinct, contenant les particularités, il m'est souvenu de ce que souloit dire Périsson, le plaisant de feu l'empereur Charles, pocù menos hanrra y tnas provecho (0^ néantmoins il me semble advis qu'il est encor trop bon heure d'en disposer, puisque mon bien de Bourgoingne ne m'est encor remis entre les mains, et qu'il semble mesmes qu'il y a peu d'apparence que l'on le veuille faire, puisque l'on me oppose tant de dif-

»

(') Un peu inoins d*honncur et plus de profit.

r'

307

ficuhés à In restitution du bien de par deçà. Par quoy je treuve eonvoiîr de surseoir eneor ceste délibération^ non-seulement afin que je ne compte sans mon hoste, comme l'on dict, mais aussi de peur que^ si je disposoye quelque chose de ceey, ou que Taffaire peult sortir effect, sans que préallablement Ton m*eût remis mesdicts biens de Bourgoingne librement entre les mains, cela pourroit aulcunnement tourner en préjudice aux aultres gentilshommes qui ont des biens en Bourgoingne, sans avoir le moien de faire eschanges contre aultres biens situez en Charolois, ou en France.

Qui sera l'endroit je fineray ceste, par mes bien affec* tueuses recommandations à vostre bonne grâce. Je prie Dieu vous donner, monsieur de Grobbendoncq , en santé, bonne vie et longue. De Alcmaer, ce xxviij' jour de juing 1S77.

Vostre bien bon amy à vous faire service,

GuilLe de Nassau.

Suscripiion : A monsieur monsieur de Grobendoncq .

Original, d«M Its arehivet de M. le due d^Urael. Cofûe, aai arcbivee des ASiIree étnngéret, à Parie, HS. intitalé Payf-Aw, 1Se9.1968, fol. 243 ¥«-246.

308

DCXVl.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE (').

lU lai envoyent Philippe de fiaesdorp, chargé de rëclamer de lui Péyaciiation

de Nîenport.

Bruxelles, 3 joillet 1877.

r

Monseigneur 9 comme avons donné ordre de contenter le coronel Bertolt Entens (*) et ses gens, ensemble les trois compaignies franchoises par Vostre Excellence et estatz de Hollande et Zélande envoyées à nostre secours, dont nous nous tenons grandement obligez à Vostre Excellence et ausdicts estatz : à ceste cause, et que ne reste à accomplir aulcune chose de ce que entre nous, touchant ce faict, auroit esté accordé, envoyons le gentilhomme, porteur de cestes, Phi- lippe de Baesdorp, escheviu de Bruges, afin de vous remons- trer ce que dessus, et requérir d'ung train, comme faisons par cestes, vouloir retirer voz gens de la ville de Nieuport en Flandres, laissant et rendant icelle entre les mains monsieur du Rœulx, commis au gouvernement de Flandres, pu aultre qui sera à celle fin ordonné. Et nous obligerez de tant plus à tenir toute bonne, sincère et mutuéle correspondence, amour et amitié, à radvanchement du service de Dieu, de Sa Srla-^ jesté, bien et repos des pays : prians le Créateur maintenir Vostre Excellence en santé et bonne vie. nous recommandans

(■) Voy. les Réâoiuiions de$ é(atê généraux, etc., t. Il, p. 376 et 377. (') Sur cet officier, ou peut consulter les Archives de M. Gboek tan Pbins- TERKR, t. III, p. 46^, IV, 69, V, 91.

r

509

à la bonne grftoe d'ioelle. De Bruxelles, le îij* jour de juillet

1577(0.

De Vostre Excellence très 'affectionnez serviteurs,

Les estatz généraux des Pays-Bas.

Par ordonnance desdicts estatz : Cornélius Wbbllbbians.

Minute, «ux Arehivet dn Royaume : Lettres de «f A GvùUaum d* Naa$au, t. V.

D€XVII.

LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

Ils le prient de faire en sorte que les états de Hollande et de Zëlande renvoient des députés à leur assemblée. Ils insistent pour que des maîtres de la monnaie de Hollande et Zélande viennent conférer avec eux sur les affaires des monnaies.

BaOZBLLBS, 3 JUILLET 4577.

Monsieur, d'aultant que les affaires quy se traietent jour- nellement en Qostreassembléesontde fort grande importance^ éi iouchent aussy bien Vostre Excellence et les estatz d'Hol- lande et Zélande que nous, sommes esté meuz de faire plusieurs debvoirs et instances vers icelle et lesdicts estatz, affin qu*ilz

(>) 11 existe, aux archives de la ville d^Ypres, une copie de cette lettre, avec la date du li juin. La minute qui en est conservée aux Archives du Royaume, avait en effet reçu d*abord cette date ; mais on y substitua depuis celle du 3 juil- let, sans doute à cause qu*il survint des circonstances qui firent relardei- Tenvoi du S' de Baesdorp au prince d*.Orange.

310

eussent à renvoyer icy leurs députez, pour nous assister de eonseil et advis ; mais jusques ores n*avons eu sur ce aulcune responce. Par quoy retournons à prier Vostre Excellence en- coires ceste fois, allBn qu*icellc vueille adhorter et admonester lesdicts eslalz d'Hollande et Zélande à ce que dessus^ affin qu'ilz puissent estre présens à tout ce qui se traicte et repré- sente icy, et avecq nous besoigner, adviser et résouldre, de main commune^ comme aultresfois ilz ont faict, de tant plus que leur présence servira grandement pour faire accroistre la bonne conjonction, affection et confidence de tout costé, d'avoir meilleure correspondence ensamble, éviter beaucop de scru- pules et suspicions, quy par ceste séparation s'engendrent, el faire que toutes choses seront mieulx entendues, interprétées et dirigées, au plus grand bien et prouflBct du pays général, comme singulièrement désirons.

D'aulire part, venons derechief prier Vostre Excellence, affin que son plaisir soit d'envoyer par deçà, au plus tost, les géné- raulx et maistres de la monnoye dudict Hollande et Zélande, pour avecq nous traicter sur le redressement de ladicte mon- noye, en conformité de ce que par la paciffication a esté accordé, pour le bien du trafficq et commerce.

Et comme, monsieur, espérons que Vostre Excellence et lesdicts eslatz d'Hollande et Zélande ne fauldront de s'accom- moder à nous èsdicts deux pointz tant raisonnables, ne ferons ceste plus longue, et la finirons par noz humbles recomman- dations à vostre bonne grâce, supplians Dieu le Créateur à Vostre Excellence octroyer l'accomplissement de ses nobles et vertueulx désirs. De Bruxelles, ce iij*de juillet 1577.

De Vostre Excellence très - affectionnez et appareillez serviteurs,

Les estatz généraulx des Pays-Bas.

Copie du tempi, auz Archives do Royaome : £«Mr«t de «< d GëXkawM de Nout», U V.

- 3H

DCXVIU.

INSTRUCTION DE PHILIPPE DE BAESDORP, ENVOYÉ PAR LES ÉTATS GÉNÉRAUX AU PRINCE D'ORANGE.

»

Il est chargé de solliciter rëvacuation de Nieuport, et les autres points mentionnés dans les deux lettres des états généraux, du 3 juillet.

BlDXELLKS, K JUILLET i877.

iHêtrudion, de la part de» estatz généraulx assemblez à Bruxelles, donnée à

Philippe de Baesdorp, esehevin de Bruges.

Se transportera vers messieurs le prince d*Oranges et estatz d'Hollande et Zélandc(si besoing est), remonstrant que touttes choses sont accomplies à raison desquelles la ville de Nieuport en Flandres auroit esté mise entre les mains dudict seigneur prince, estatz de Hollande et Zélande, ou leurs gens, et partant requérera que ladicte ville de Nieuport se rende es mains du gouverneur de Flandres, ou aultre à celle fin par luy commis, en retirant roondict S** le prince, estatz de Hol- lande et Zélande, leurs gens; et, sur ce, usant de toutes raisons à ce propos servantes.

Fera debvoir (s*il resloit en aulcung poinct quelque diffi- culté, mesmement de courtresse de deniers, ou sur le faict des chevaulx de Bertelt Entens ) de donner contentement audictS*^ prince, estatz de Hollande et Zélande, par le meilleur moyen à luy possible; spéciallement remonstrer la bonne confidence des estatz généraulx, qui se sont du tout fiez à Son Excellente et estatz de Hollande et Zélande, lesquelz, partant, ne feront difficulté rendre et retirer leurs gens de ladicte ville de Nieuport, pour quelque peu de reste de x ou xi]"* florins.

512

ou moins, si aulcune y ayoit, laquelle les estatz offrent et présentenl de payer, au contentement de Son Excellence, estatz de Hollande et Zélande; aucthorisant les estatz généraulx ledict Baesdorp, porteur de cestes, de bailler obligations au nom des estatz génërauh, ou sur son crédit, jusques à x ou xij"" florins, ou en dessoubz, dont il sera tenu quicte et indempne, ensamble de tous coustz, dommaiges et intérestz en dépendans.

Fînallement, ledict Baesdorp poursuyvra, vers ledict S' prince d*Orenges, responce sur les poinctz comprins en la lettre desdicts estatz, cejourd'huy à Son Excellence escripte(\), dont luy sera^ à ceste fin, donnée copie.

Actum à Bruxelles, k l'assamblée desdicts estatz, le iij* de juillet 1577.

Par ordonnance desdicts seigneurs estaiz : Cornélius Weellemans.

On lU à la marge :

Son Alièze^ ayant ouy en conseil la lecture de ceste instruction, ensemble copie de la leUre que les estatz géné- raulx assamblez à Bruxelles escripvent aux prince d'Oranges et estatz d'Hollande et Zellande, et ayant le tout trouvé bon, Taggrée, ensemble l'allée, à cest effect, de Philippe de Baes- dorp vers lesdicts prince et estatz de Hollande et Zélande. Faict au conseil d'Estat, tenu à Malines, le cincquiesme jour de juillet 1577. .

Bbrty.

Copie 4a tomps, mnt Arahives im hoymuuê : iMtru de et à GwUltmiM dt Noêitm, t. V.

(') Celle qui précède.

313 -

DCXIX.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Réponse i leurs lettres du 3 juillet. Il annonce renvoi prochain, par les états de Hollande et de Zélande, de députés, qui seront accompagnés de maîtres des monnaies. Il est prêt i leur remettre la ville de Nieuport ; mais il pense qu*il vaudrait mieux que ses gens Toccupassent encore quelque temps»

ALCKMAAa, 20 JUILLET 1577.

Messieurs, j'ay receu les lettres que m'avez envoyé par le S^ Philippe de Baesdorp, présent porteur, et bien entendu le contenu d*icelles, eomme aussy ce que d'abondant ledict S' de Baesdorp m'a dédairé de vostre part. Sur quoy je n'ay voulu faillir de vous servir ceste pour responce, vous advisant 'que eomme^ depuis quelques mois en çè, messieurs des estatz de Hollande et Zélande sont continuellement esté fort empes- chez pour casser, descompter et donner contentement aux gens de guerre qui ont servy jusques à maintenant, il ne leur a esté possible d'envoyer par delà leurs députez si tost qu'ilz eussent bien désiré : mais , maintenant que la meilleure partie de leur travail audict faicc de cassement et descompte est passé, ilz ont résolu de les envoyer dïcy à peu de jours ('), pour, par ensamble avec ceulx des aultres provinces, traicter, besoingner et comunicquer en ce qui concerne le bien, utilité et advanchement des affaires des pays, lesquelz aussy amène- ront, quant et quant eulx ('), quelquesungz qui auront charge touchant le faict des monnoyes dont vous m'escripvez.

(') Les députés des états de Hollande et de Zélande n*arrivèrent à Bruxelles que le 19 août. Gbobn van PainsTsaBa, Archive», etc., t. VI, p. 161. (') Quant et quaiU eulx, avec eux.

314

Je vous remercie trés-affectueusement du bon debvoir qu'avez faict du descompte avecq les gens de guerre qui vous ont esté envoyez de ce quartier, et suys bien joyeulx de ce que j'entends que vous vous estes contentez de leur service, et aussy quiceulx en ont receu la satisfaction qu'ilz ont tousjours espéré.

Quant à ce qui touche la ville de Nieuport, et affin que je la remecte entre voz mains, en cela il n'y aura nulle difficulté : mais m'a semblé bon, avant que de retirer mes gens, de vous remonstrer qu'à mon advis, il servira beaucoup à vostre con- servation de les y tenir encoires, si longtemps que les AUemans ne sont sortiz du pays. Néantmoins, sur cecy je me rapporte à ce qu'il vous plaira en disposer, m'offirant, toutes les fois que bon vous semblera, de vous bailler lettres de commandement au capitaine que je y ay , affin qu'il en sorte. Et, sur ce, après m'estre très-alTectueusement recommandé en vos bonnes grâ- ces, je prie Dieu vous donner, messieurs, en santé, bonne vie et longue. Ëscript à Alcmar, ce xx*" jour de juillet 1577.

Vostre très-affectioné patriot et amy à vous faire service,

GuiIZe de Nassau.

StucrijMon : A messieurs mess'* les députez des estatz gêné* raulx des Pays-Bas, présentement assemblez à Bruxelles.

Copie du tempsi «nx Arebivef de U ville dTpres.

515

D€XX.

LE PRINCE D'ORANGE AUX ÉTATS GÉNÉRAUX.

Il leur remet, sur la demande itcratÎTe qu^ils lui en ont faite, un ordre, pour le capitaine qui commande h Nîeuport, de se retirer de cette ville, tout en renouvelant ses observations sur les inconvénients qui peuvent résulter de eette retraite*

Habliv, 15 AOUT 1577.

Messieurs, j*ay receu la lettre qu'il vous a pieu m'escripre par les S'* Yman et Canis, députez des quatre membres de Flandres, touchant la restitution de la ville de Nieuport entre les mains desdicts quatre membres. Sur quoy ne vous feray long discours , sinon que , comme je vous ay dernièrement escript et faict dire par le S' Baesdorp , que je serois prest de ce faire toutes et quantes fois que m'en requerreriez , vous ayant néantmoings pour lors prié, par ledict Baesdorp, de vouloir considérer si ce seroit chose advantageuse pour le pays de retirer mes gens dudict lieu, sy longtemps que les Allemans oecupoyent encoires plusieurs villes et places de grande consé- quence. Or, voyant présentement que vous désirez que j'ac- complisse ma promesse en cest endroict, et pour vous démonstrer la sincérité de laquelle j'ay tousjours procédé et veulx encoires d'ores en avant procéder avec vous, je vous envoyé une lettre, cy-joincte, au capitaine quy commande mes gens estans audict Nieuport , par laquelle je Tencharge, à la première présentation qu'il vous plaira luy faire faire d'icelle, qu'il se retire en Walcheren avecq ses gens : à quoy je m'as- seure entièrement qu'il obéira, comme la raison le veult. Toutesfois, je ne puis laisser de vous prier encoire une fois de

316

considérer si ce sera chose de laquelle vous et le pays en puissent estre servy. S'il y a moyens en mon endroict, duquel je vous pourray faire quelque aultre bon et agréable service , je ne fauldray de m'y employer de telle promptitude et affec- tion que j*ay tousjours faict pour le bien publieq de nostre pouvre et affligée patrie. Me recommandant au surplus bien affectueusement à voz bonnes grâces, je prie Dieu vous donner, messieurs , en santé , heureuse vie et longue. De Harlem , ce XV* jour d*août 1577.

Vostre trés-affectioné patriot et amy è vous faire service,

GuiîXe de Nassau.

S$iieiripUon : A messieurs messieurs les députez des estatz généraulx des Pays-Bas, présencemeot assemblez à Bruxelles.

C«pl« da t«B|M, au Ardiifcs de la Tîtfo d^Tprea.

APPENDICE.

A.

RELATION

t>B

L'EXPÉDITION DU PRINCE D'ORANGE

Ȉl8 LIS PATS-II8, n 4968 (*).

Relation da suec^ de remprinse d^Onnges do costel de Liëge et Brabant, Pan 1868.

Il est notoire à ung chascunquel succès ont eu les emprinses du prince d'Oranges, premièrement celle qu'il fit exécuter au mois d'avril, au mesme temps que l'on estoit examinant sa cause en Bruxelles, et quelques jours auparavant qu'il fât condempné, la- quelle se tourna en fumée avecq la deffaite de ses gens ft Dalhem, à quatre lieues de Remunde (').

Aussi sçait-l'on la fin que eut celle du conte Loys de Nassau,

(') Cette intéressante relation est Pouvrage du secrétaire d^Ëtat Courte- wille, qui accompagna le duc d^Âlbe pendant toute sa campagne contre le prince d^Orango. Elle est conservée, en minute, aux Archives du Royaume, dans la collection des papiers d'État.

(') Nous avons donné des détails sur celte expédition dans le Correspond dance du duc d*Albe sut l'invasion du comte Louis de Hfassau en Frise, etc. , p. 7-9.

320

son frère, près de la ville de Groeninghe et vers Bmpdem, le duc d'Alve le deffit et rompit du tout (').

Et mesmes le succès de ceulx qui en la mesme saison estiont entrez au conté d'Artois, tous rebelles, ou du roy catholicque, ou du roy très-chrestien, lesquelz le conte du Rœulx et visconte de Gand aviont jette hors du pays, par charge de Son Excellence, et le maressal de Gossë, d'aultre costel, les avoit trouvé à Sainct- Walery (»).

L'on pensoit que, avec ces succès tant contraires au prince, il se contenteroit et désisteroît de tenter Dieu davantaige ; et ainsi Son Excellence, laquelle n'a jamais eu intention de offenser personne, comm'il est apparu bien clairement au reguard du conte d'Emp- dem, qui avoit donné tant d'occasions de resentement, si Son Excellence s'en eust voulu venger (ce qu'estoit en sa main), s'en retourna de h Utrecht, proposant d'aller donner ordre à ce que restoit pour l'establissement des affaires des Pays-Bas, tant au fait de la religion que aultrement.

Mais incontinent lui vindrent nouvelles comme le prince re- commenchoit & joindre fort grandes forces, tant de cheval que de pied, et en beaucoup de lieux, avecq desseing d'envahir les Pays-Bas. Et, oires que Ton ne sceust pour où, toutesfois Son Excellence se doubta incontinent que ce seroit pour Lyége et Bra- bant; et, sur toutte aventure, comme ceste comarque estoit au milieu de la frontière qui confine vers Alemaigne, il luy sembla que le meilleur seroit de s'opposer, avec toutte son armée, du costel de Maestricht, ville principale sur la rivière deMeuie, pourvoyant les aultres villes frontières selon la nécessité de chascone, puis- que de il seroit à la main pour tous aultres costelz.

Et ainsi, fit incontinent faire les diligences et provisions néces- saires, en joindant tous les gens de guerre qui estiont répartiz parmy le pays, tant de pied que de cheval, aiant jà, quelque temps auparavant, apperceu (') mil chevaulx-légiers, du mesme

(*) Voy. la Corretjpmuiance citée à la page prccédenic. (') Voy. la même Corregpondance, p. 10 et 11 . (') djtpfirceUj fait tenir prêts.

T>H

pays, en dessoubz de mons' de Noircarmes, pour les lever en cas

de besoing, et fait lever aultretant de gens de pied (aussi du pays)

que moQtiont les guamisons ordinaires, pour les povoir tirer au

mesme cas, et laisser les nouveaux en leur lieu, oultre les bendes

ordinaires d'hommes d'armes, et les compaignyes de chevaulx-

légiers que Son Excellence avoit amené avecq luy de Italie,

espaignolz, italiens et bourgoignons , et deux mil noirs harnas,

qui estiont en service, ausquelz tous il fit prendre le chemin de

Maestricht, pour préocuper la Meuze : non qu'il ne sceust bien

que le passaige ne sepourroit destourber ('), en ceste saison de

l'année, veuiUant le prince cheminer une nuict, puisque ladicte

rivière se povoit passer à guet de tous costelz, mais seulement

pour destourber l'assemblée que, aultrement, ledict prince eust

peu faire par là, et afin qu'il ne peult asseoir ou mettre le pied en

aucune ville sur la rivière de Meuze : que n'a esté peu d'empes-

chôment au prince, parce que, pour cela, U a esté forcé, de faire

son assemblée fort avant en Alemaigne, plus hault que Couloigne,

vers Ândemac. Dont il n'a gaigné guaires d'amis, pour le domaige

qu'en ont receu beaucoup de vassaulx de princes de l'Empire, et

signamment des Électeurs de Trêves et de Couloigne, et en partie

de celluy de Mayence et du duc de Glëves, oultre celluy qu'a esté

fait aux vassaulx de Sa Majesté , arrestans les marchans et aultres

personnes des Pays-Bas, et détenant les marchandises qu'ilz me^

niont par la rivière de Rhyn vers Alemaigne , jusques à brasca-

ter (*) la ville d'Aix (par il pasça depuis), pour les biens qu'il

y avoit, appartenans à vassaulx du Roy, sans tenir respect ny h

l'Empire, ny aux constitutions dïcelluy : chose fort contraire à ce

qu'il avoit fait imprimer et semer par le pays ('), qu'il ne venoijt

faire domaige aux vassaulx du Roy, ains pour les deffendre et

maintenir en leurs previléges.

Et, cependant , il eust temps de pourveoir à tout ce qu'estoit

(*) Deslourher, empêcher. (*) Brascaicr, mettre à contribution.

(') AHiision à la Jmtificafion et h lu Déelnration du prince dont nous avons parle, t. Il, p. vin.

m. 31

1

329 -

fi<k-.essairc : en quoy Son Excellence trouvit fort grande correspon-

m

dencc et voluntc en toutes les nations qu'il avoit avecq luy, entre les- quelz ileust, son conseil ordinaire, ses deux filz, don Faderieque et le prieur de Gastille, oultre le conestable de Navarre, qui arriva depuis , et le marquis de Getenona , qu'est le S*" Ghappyn Vitelli , marèschal général du camp, et les S" de Berlaymont, Noircarmes, conte de Meghem , le S' Francisco d'Yvarra , du conseil de guerre de Sa Mftjesté, et le S' de La Cressonnière, qui avoit charge de l'artillerye , et aucune fois aultres , selon qu'ilz se trouviont pré- sens , et selon la qualité des matières. Aussi les Alemans , tant de cheval que de pied , se monstrarent fort promptz en tout ce que s'offroit, oultre le grand nombre de seigneurs et gentilzhommes libres desdicts Pays-Bas, qui veniont, de jour & aultre, servir à leurs despens, et la vigilance et intégrité des gouverneurs provinciaulx et particuliers , et consaulx et magistratz , lesquelz , et les villes principales, Son Excellence confirmoit et animoit : prévenant aux occasions qui les pourriont refroider à ce qu'ilz estiont obligez ; commandant de faire publier placcartz contre ceulx qui semiont livres ou faisiont oflices en faveur des rebelles , dont il n'y a eu faulte au Pays-Bas, ny en Alemaigne : en Flandres , en accusant Son Excellence comme tyran et destructeur de leurs previléges, et en Alemaigne, comme ambitieulx, et comme si les Alemans deus- sent avoir poeiur que , après avoir subjugé les Pays-Bas (selon que ilz disiont ), il ne passast en Alemaigne , avecq beaucoup d'aultres menterie» et choses puériles. *

Entre aultres , considérant Son Excellence que les soldartz s'en vont diminuant , quand ilz demeurent longtemps en la campaignc, et davantaige en automne, et estant l'hiver à la main, luy sembla convenir lever mcontinent aultre bon nombre de gens dcguerre, de cheval et de pied (oires qu'il fût suffisant avec ceulx qu'il avoit jà, pour résister au prince, comm'il a apparu depuis), pou^asseurer son affaire, sur tout événement, comme elle eust fait par ce boult , s'il luy fut advenu quelque désastre, ou le prince eust tardé davan- taige à se retirer qu'il n'a fait.

. Enfin, aiant le prince tardé quelques jours, depuis que l'on avoit dit qu'il estoit en ordre , il descendit, peu & peu , par le pays de

523

Couloigne et le ducé de Juliers, vers Aix, et de au chasteau de Wlthein, jadis du conte de Gulembourg, lequel il print, comme lieu qui ii'estoittenable.

Et, au boult de trois ou quattre jours qu'il avoit esté k Withem, attendant le conte de Barby , aleman , avecq mil chevaulx , et , aiant la lune à sa faveur, qui estoit lors playne et luisoit toutte la nuict, se partit, h six heures du soir, le cinquiesme d'octobre, et chemina tant que, le lendemain, au point du jour, il arriva à Stockem , ville de l'évcsque de Lyége, sur la Meuze, du costel de Brabant , passant toute son armée k guet : que ne se povoit empes- cher (comme est dit cy-dessus) , principalement ne l'empeschant ceîilx de Stockem , qui ne recognoissent aultre que l'évcsque de Lyége , auquel Son Excellence avoit offert gens et ayde pour la guardc de ses villes, en cas qu'il le voulsist accepter; l'advisant de l'inconvénient qu'il luy en pourroit suyvre et k sesvassaulx , en non le faisant : mais, pour lors, l'évcsque ne sceust tant faire avecq ceulx de son chapitre et ses vassaulx, qu'ilz acceptassent tel offre , que, depuis, ilz ont trouvé fort à leur avantaige et nécessaire.

Ce que voiant Son Excellence , qui estoit au mesme temps, avecq son camp, près de Maestricht ^ à deux lieues du mesme chasteau de Withem, et trois de Stockem , le prince estoit passé, .oires que, beaucoup de temps auparavant, il eust en son concept ce que sur tout événement il auroit k faire, toutesfois lui sembla nécessaire de discourir deréchief, selon les choses d'allors , quelle plus apparente fin pourroit tenir le prince , et quelle Son Excel- lence debvroit avoir au contraire, et les moyens qu'il y avoit pour destourber celle du prince et venir à la sienne, afin que, selon cela, il peust encheminer et guyder ses affaires : en quoy se offrirent beaucoup de considérations fort différentes de celles que s'estiont offertes du passé, et entre aultres celles que s'ensuyvent.

Du passé, il luy avoit esté nécessaire de se déterminer incon- tinent) et rompre les assemblées, avant qu'elles passassent plus avant, et devant que le prince vint avec touttes ses forces au mitant du pays, comme se disoit qu'il feroit : qui fut esté grand cmpeschement, en cas que celles de Groeninghe et d'Artois fuis- sent demeurées en pied, et ainsi toutte dilation fut esté de grand

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préjudice ; et, de ceste sorte, estant Son Excellence alors acteur, luy convenoit assaillir : ce qu'il fit.

Il se considéroit que les quartiers de Groeninghe et d'Artois dcmeurîont asseurez, et que le prince estoit près de luy, avec touttes ses forces joinctes : par cessoit la considération de les rompre, avant qu'elles fussent en pied, et que ledict prince debvroît maintenant estre l'acteur, et Son Excellence le dëfen-* seur.

Du passé, il n'avoit à faire sinon avecq partie des ennemys, et mettoit aussi seulement en dangîer partie de ses gens.

Icy, se aventuroit le tout.

Du passé, se aventuroit au boult du pays, et il n'y avoit tant de danger que l'ennemy peust faire grand progrès, oires que les affaires luy succédassent bien.

Icy, se voioit Son Excellence en part , succédant mal les choses, les ennemys poviont passer incontinent jusques aux entrailles du pays.

Du passé. Son Excellence trouvit le pays, assavoir en Groe- ninghe, commode pour gens de pied (que Son Excellence comptoit d'avoir meilleurs que ceulx des ennemys), et nulement à propos pour gens de cheval.

Icy, s'entroit en ung pays playn, ouvert et fort propre pour chevalerye, dont le prince prévaloit en nombre.

Du passé. Son Excellence avoit villes fort bonnes au doz, assa- voir celle de Groeninghe en Groeninghe, laquelle guardée, n'y avoit que craindre d'aultres, et, en Artois, beaucoup et fort bonnes, et les unes près des aultres, l'on povoit prendre son refuge et se reikire en cas de désastre.

Icy, n'y avoit nulles villes fortes, oires que beaucoup fort grandes et riches, mais telles qu'il fut esté besoing d'ung demy- camp pour les deffendre.

Du passé. Son Excellence povoit commander partout, comme gouverneur et lieutenant de Sa Majesté.

Icy, au pays de Liège, par les ennemis debviont passer, pour entrer en Brabant, ne povoit riens commander, sinon requérir, et principalement aux villes.

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Du passé. Son Excellence prévoyoit que le temporiser luy causeroit grands inconvëniens.

Icy, se Yoioit que le temporiser avec le prince le feroit perdre, puisqu'en ne faisant riens, c'estoit se perdre du tout.

Du passé, l'esté estoit en faveur de ceulx qui voulioot envahir.

Icy, Ton estoit en Tautomne, de façon qu'en temporisant, l'on prévoyoit que la mesme saison de Tannée seroit en grande partie cause d'achever l'affaire.

Aussi se trouvoit fort différent le respect que dcbvoit tenir le prince de celluy de Son Excellence.

Le prince venoit comme celluy qui n'avoit que perdre ;

Son Excellence, au contraire, comme celluy qui n'avoit que gaigner.

Et, olres que le prince perdit tous ses gens, ce n'cstoit le priver de la mauvaise volunté qu'il avoit, et de povoir retourner avecq autant de forces, en cas que l'argent ne luy faillit, lequel luy deffaillant , ne demouroit moins perdu , luy empescheant son emprinse, que s'il se fut vaincu en bataille.

Son Excellence, au contraire, perdant ses gens, qui estoit la fleur des forces ordinaires du Roy, tant d'Espaignolz comme des Pays-Bas et aultres, il ne povoit faire compte d'en recouvrer d'aultres, si loyaulx et de tel zèle au service de Dieu et de la reli* gion catholicque ; et, quelque grande victoire qu'il peust avoir, ce i^e seroit sans perte, et, par aventure, de personnaiges quïl eust mieulxvalu de n'avoir perdu, que d'avoir rompu l'ennemi, puis- qu'il y avoit aultre moyen de l'y faire venir de soy-méme.

Quelque peu que les affaires succédassent bien au prince, il eust fort encouraigé les fauteurs qu'il avoit dedans le pays, il ne cessoit de faire mauvais offices, rebeller et lever les villes.

Au contraire, quelque peu de mauvais succès que eust eu Son Excellence, les bons du pays, et principalement les doubteux, et qui estiont escoutaus quelle fin ces choses prendriont, eussent perdu le cœur et se fussent estonnez.

Enfin, Son Excellence entendoit fort bien que, en aventurant, elle meltroit en hazard non-seulement ses gens et les Pays-Bas, mais aussi tous les aultres pays de Sa Majesté, avec le royauhuc

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de France, pour ce qu'en dëpendoit, et, que pis est (ce que Son Excellence cstoit obligé de considérer avant touttes choses), la religion catholicque.

Par où. estant icy les considérations et respectz tant différentz des passez, Son Excellence se résolvit aussi de tenir chemins différentz, comme celluy qui debvoit estre le deffenscur, et non Tàgresseur.

Conforme à ça, se résolvit à non se mettre en hazard de bataille, sinon avecq son avantaige, mais bien leur estre continuellement à la main ( comme il a tousjours esté , depuis le commenche- ment jusques à la fin), pour les combatre par la faim, et les faire serrer, et leur empescher les emprinses qu'ilz pouriont avoir sur villes, et, s'offrant quelque conjoncture, leur donner une bonne main. Et ainsi se partit, le vij"* d'octobre, qui cstoit joeudy, et s'avancha d'une grande lieue vers eulx, en certaine censé, à demye- lieue de Maestricht, aiant réparty les hommes d'armes en trois esquadrons, desquelz le conte de Meghem menoit Tung, le seigneur de Berlaymont l'aultre , et le iij* le guardist Son Excellence pour soy, mais depuis le donna en charge au conte de Lalain, pour estre continuellement auprès : ce que ne povoit faire Son Excel- lence. Les aultres régimens de gens de cheval et de pied aviont }h leurs coronnelz et maistres de camp.

Or, aiant Son Excellence, le jour ensuyvant, qui estoit vendredy, viij" du mois, envoyé ses avant-coureurs, pour prendre langue, ellesceust incontinent que les ennemis estiont en pied, et traver- siont le pays, vers la ville de Tongres, qui est aussi de l'évc^que de Liège, à trois lieues de Maestricht, et, la mesine nuict, ilz campa- rent & demye-lieue de Son Excellence, laquelle demeura en la mesme censé, pour ce jour-là.

Et, le sembdy, ix* du mois, choisit ï'assiète qui luy sembla plus convenable, sur aventure que l'on luy voulsist donner la bataille, comme s'entendoit par la famé publicque : mais les ennemis ne firent aultre démonstration, que de passera ung quart de lieue de \hjh veue du camp de Son Excellence, d'où l'on leur tira quelques coups d'artillerye, et ainsi passirent leur chemin vers Tongres, avecq leur bagaige, au costel pluà seur. Si Son Excellence eust voulu lâcher la bride à ses gens, qui ne désiriont que combatre.

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l'afittire fust bientost esté desmedé, et se croit que la fin fût esté u son avantaîge : mais, pour les considérations dictes cy-devant, Son Excellence ne le voulut consentir, et du mesme advis furent les personnaiges principaulx qui estiont près de luy, et de tant moins pour ce qu'en les allant combatrei il laissoit son assiète, et alloit a celle des ennemis, beaucoup plus avantaigeuse pour eulx.

De pouryeut incontinent i Thilmont ('), il envoya le bKroii de Hierges (*), avecq dix enseignes d'infanterye,Walons, en laquelle il avoit fait faire une partie de provision de victuailles.

Le X" de octobre, qui estoit dimenche, partit Son Excellence pour fiilsscm ('), une lieue de Tongres, à la main droitte des enne- mis, et pourveut aussi incontinent, de là, à Louvayn, il envoya le S' de Câpres (4), avec le capitaine Mondragon, qui menoit quatre cens harquebouziers de pied , et le bastard de Bugnicourt, qui avoit aussi aultres deux cens, tous Walons.

Le lundy, xj* de octobre, se partirent les ennemis de Tongrçs, et chcminarent environ une lieue de vers Saint-Tron, à main droite, ilz se miitot sur une montaigne, et, ce jour-là. Son Excellence ne bougea, attendant nouvelles de ce qu'ilz feriont.^ .

Le mardy, xij^ du mois, du matin, se partit aussi d'où il estoit vers Tongres, et si à la queue des ennemis, que Ton tua, entre soldartz et aultres dismandez (^), environ six cens hommes, qui n'estiont encoires arrivez à leur camp, et leur saccagea-^l'on plus de cent chariotz de bagaige, beaucoup d'iceulx chargez de calices et ornemens d'église, lesquelz ilz alliont desrobant et saçcaigeant de toutes pariz.

Ce jour de mardy, et le jour ensuyvant, les ennemis demeu- rarentsur leur montaigne, et le duc à trois quartz de lieux d'eulx.

Le jeudy, xiiij* du mois, passirent les ennemis plus avant, aiussi à main droite de Saint-Tron, et à demye-lieuc de là, et le

(>) Tirlemont.

(') Gilles de Bcrlaymont, fils du baron de Bcrlaymont, couseillci' d'Etal et gOiivcrDeur du comté de Namur.

(>) Bilsen. . (*) Oudart de Bouriiouvillc, S^ de Câpres. (^) Dismandez, débandés, de rc$i)agnoi dcsmandados.

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dac passa aussi le mesme jour uiiie demye^lieue plus oulUre de Tongresy en ung villaige qui s'appelle Konich8eiii(*), pouFs'ayder de la chaussée, qui estoit chemin plus commode pour mener son camp et r«rtillerye. Et , aient entendu que les dix enseignes qu'il aroit enroyé à Tbilmont n'estiont suffisantes pour la guarder, estant la ville si griinde, il y enroia, davantaige, le S"* de Beau- voir ('), coronel de six compaignies de Walons vienlx ordinaires, avec sept cens harquebutiers, qu'il en sacqua, et le capitaine Monteros, aveeq sa compaignye de cent harqnebuziers k cheval, espaignolz, et envoya aussi k Malynes le S' de Querecques(''), il fit passer deux enseignes alemandes, du régiment du conte Alberico de Lodron, qui estiont demeurez en Anvers, et le S' de Potelles (^}, avecq une compaignye de Walons, recommandant la ville de Bruxelles au duc d'Arschot, qui estoit demeuré là, avecq la reste du conseil d'Estat de Sa Majesté, pour gouverner les choses de dedens le pays, cependant que Son Excellence serolt occupé en cdles de la guerre ; il fit venh* après le conte du Rœulx, avecq ses dix enseignes, aussi walones.

Et, pour faire serrer de plus près les ennemis, et leur oster touttes commoditez, fit publier que nulz vassaulx de Sa Majesté fussent si hardiz de leur tenir correspondence, ny de les favoriser de vivres, ny aultrement, ains que chascun retirast ses biens aux viUes, chose qui ne povoit faillir de faire perdre les ennemis en brief, par fauite de vivres, si le mesme se fût fait au pays de Liège, estant le duc, comme il estoit, continuellement à leur queue, et, de l'aultre coslel, aiant villes si principales et si pour- veues de gens de guerre, en barbe, et les païsans retirez : par se povoit ensuyvre, par force, que les ennemis se crevassent d'une part ou d'aultre. Mais les vivres dont ceulx de Liège les secouriont, ou par poeur, ou soubz espérence de eschapper de leurs mains,

C) Coninxheim.

(') Philippe de Lannoy, S** de Beauvoir, le mémo qui, en 1567, avait dëfaii les gueux à Âustruveel. Voy. le t. II, p. cxxv et suiv.

(') Probablement Eustaclie de Croy, S' de Grecque.

(*) Ferry de Carondelet, Sr de Potelles. Il était, en 1560, gouverneur, capitaine et prévôt d*Avesnes.

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comme neutres, les enlretindreni quelque temps, et principale- ment la commodité qn'ilz trouvèrent decJens Tongres et Sainct- Tron, qui est aussi ville de l'évesque, et ilz eurent sembla- blement ouverture des portes.

Le zv«, qui estoit vendrcdy, Son Excdlenoo chemina aussi la desroute (') des ennemys, et se mit ù voue d'eulx, en ung villaige qui s'appelle fieuren (') , et demcurarent les deux camps le sembdy etdimenche, escarmouchant quasi tousjours depuis le matin jusques au soir.

Allors Fon sceust que, ce que le prince s'estoit détenu, ces deux jours-là et aulfires deux , en i'aultre montaigne , avoît esté pour attendre le S' de Genliz, françois, qui luy debvolt venir avec certain nombre de rebelles de France, de eheval et de pied, lequel estoit entré parle pays d'Ardennes, et vint passer la rivière de Meuze , près de Charlemont , saccageant et ruynant les monas- tères, comme aviont lait les aultres, etencoircs pis, parce que Ton y mit le feu.

Le prince, estant adverty de ceste entrée, se mit eu chemin vers eolx, et partit le lundy, i8 du mois ; et le duc, continuant sa déter- mination de leur estre tousjours à la main, mais avec respect de se mettre en lieu avantaigeulx, partit aussi le mesme jour, et logea à Groswaren (^). Et , le xix« du mois d'octobre, poursuyvant les deux camps leur chemin, ilz se trouvarent fort près l'ung de Taultre, et incontinent Son Excellence choisit Tassiète que luy semUoit plus à propos, il mit ses gens en ordre, avec intention de attendre les ennemis, en casqu'ilz le voulissent assaillir, toutes- fois sans trenchiz, et en lieu lesdicts ennemis luy poviont donnei* la bataille, si tant ilz la désiriont , comme en estoit le bruit; mois eulx, au contraire, se mirent sur une aultre montaigne plus av«.n- tagense, sans faire aucun progrès. Et ainsi, ce jour-là, ne se passa chose de moment , excepté que, après quelques coups d'artillerye,

(i) Uœmina la detnmte, suivit le chemin : ioculioii espagnole. {*) lleurc-ie-Tixhe, à trois quarts de lieue de Tougres, sur la chaussée de Lic{;e. (*) Corswai-em.

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d'une part et d'aultre, le capitaine Saloe, aveeq sa compaignye de deux cens harquebuziers walons, aiant aux espaules aultres trois cens et le capitaine Montesdocq, qui alloit aveeq eulx, les fit baban- donner une maison forte, aveeq un jardin, que bon nombre de harquebouziers du prince avoit oecupë, à la pointe de sa montaigne, de laquelle il se retira en arière, il avoit ses escadrons de gens de pied, et le duc demeura celle nuict il estoit, assavoir : en ung viliaige nommé Walshoutem (■), & demye-lieue des ennemys. Le XX*, qui estoit merquedy , le prince se partit de 11, cheminant vers Judoigne (*) , il avoit conclud de s'assembler avec les François : mais, saichant Son Excellence qu'il avoit k passer ung ruisseau qui s'appelle la Jaulche , petit mais di£Scii , ne voulut perdre l'occasion de donner une main à l'arrière-guarde, s'il estoit possible. Et, h ce propos, après avoir passé une partie des gens du prince, iit dresser une escarmoucbe fort verde, et peu h peu occupa la montaigne le camp du prince s'estoit monstre le jour de devant, et, après, une aultre plus avant, guaires loingdudict ruisseau, Tescarmoucbe s'alloit cschauiTant de plus en plus, de manière que du camp du prince se tirarent. trois ou quatre coups d'artillerye, qui avoit passé le ruisseau. Que voiant Son Excel- lence, fît incontinent amener quelques pièces d'artillerie siennes, desquelles Ton tira environ xxv coups : par où, et par la bonne dUigence des harquebuziers espaignolz et walons , qu'il avoit fait s'acheminer devant , et quelques chevaulx alemans, italiens, bour- geignons et aultres dismandez qui se joindirent, ce que restoit de l'arrière-garde des ennemis fut du tout deffait et mis ii vaude* route (^}, moururent, de diverses nations, tant de pied que de cheval , plus de trois mil hommes , et des meilleurs qu'ilz avioni en leur camp , oires que pour lors ne se créoit que de deux mil : ce que s'est sceu depuis plus particulièrement par ceulx qui les ont enterré et par le dict des prisonniers, estant échappé beaucoup de bleschez, qui depuis sont mortz , ouUrc ce que la campaigne

(I) IIautaio-rÉvéquc(?).

C) Jodogiie.

(') A vauderoule, en désordre.

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demouroit semée d'armes et arquebouzes. Et , comme le pays estoit fort mauvais, et le prince s'estoit retiré sur uDghault l'on ne poToit venir, sans passer ledict ruysseau, que fut esté luy donner le mesme avantaige sur le duc que le duc avoit eu sur lui, ne se fit aultre progrès. L'on y print une cornette de cheval des ennemis, demeurant le porteur mort sur la place. Aussi demeura mort le S' de Malberghe (*) , coronnel des Gascons, qui avoit esté ung des plus grandz rebelles, et quelques aultres qui aviont charge, et, entre iceulx, deux capitaines de noirs hamas, qu'ils appellent ritmaistres, de principale qualité. Xe conte de Hoochstraete (') y fut blessé, et le S' de Louverval {% aussi rebelle principal, lequel l'on print vif et est encoires prisonnier.

Geste main leur fut donnée en entrant en Brabant, et si à temps qu'ilz estiont attendant leur secours de France , d'heure à aultre, lequel leur vint trois ou quatre jours après , et n'estoit si grand' chose comme le bruit avoit couru : car il esloit de peu de gens de fait, mais en grand nombre et mal armez, et avec femmes et enfans , comme s'ilz fussent venuz avez intention de transmigrer du tout, et faire une colonie au Pays-Bas ; mais ce peu leur vint si à propos, que, sans cela, ilz poviont tenir de Ik en avant la journée pour perdue, comme en effèct ilz l^i teniont encoires,. parce que , de Ik en avant, ilz ne firent chose de moment.

Les François estiont descenduz jusques vers Wavre, à quatre bonnes lieues de Bruxelles et aultretant de Louvayn, pour se joindre avecq le prince : ce que voyant Son Excellence, et que ledict prince avoit passé le pays de Lyége, et estoit aux confins de Brabant, et que, nonobstant tout ce qu'il avoit peu faire, le suy- vant h la queue, ne délaissoit pourtant le prince de trouver provi- sion de vivres au pays de Lyége, oires que avec difficulté, il lui sembla estre besoing de prendre ung aultre pied et, au lieu de les suyvre à la queue, comm'il avoit fait jusques là, aller devant et

(') Bernard de Malbergh, gentillioinme du l^uxeoibourg, TundessignaUiircs du compromis. O Antoine de Lalaing. (') Philippe de Marbais, S' de Louverval.

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9e mettre prés de Louvayn, puisque de il povoit couTrir les principales villes de Brabaot ; et ainsi, le mesoie jour de la fae- tion, et après icelle achevée, sans perdre temps, s'avancha vers Thîlmont, et campa celle mesme nnict en ung villaige qui s'appelle Wint (').

Le joeudy, xxj% passit deux ruysseaux et ladicte villeT de Thile*- moQt, se mettant en ung villaige qui s'appelle SinterPieter^ Wisnac (*), elle demeura le jour ensuivant.

Le sembdy, xxiij% s'avancha jusques à Bevecum (% deux lieues de Louvayn, et le dimence, xxiiij^', arriva bien près dudiet Louvayn, en l'abbaye de Parcq.

Et, considérant que la ville de Thilmont, qui est de gi^and circuit et peu peuplée, demouroit la plus i la nain à l'ennemy, oultre les gens de guerre qu'il y avoit mis dedans, il lui sembla bien de la renforcer du régiment du S' de Billy (4), qui estoit de cincq enseignes, et des quatre cens harquebouziers du capitaine Mondragon, tous Waloiis, lequel il n'y avoit danger de tirer hors de Louvayn, puisque Son Excellence estoit aux portes avec son camp, et de quatre compâignyes de chevaulx-légiers espaignols et une de harquebouziers, aussi à cheval, Walons, pour copper les vivres qui veniont aux ennemis du costel de Liège, par lediet Thilmont demeuroit asseuré.

Et, estant ainsi avec son camp près de Louvayn, il demeura jusques au vendredy, xxix% attendant ce qucferiont les ennemis, au contraire de ce que l'on présumoit que le prince entreroitplus avant, pour se joindre avecq les François, Son Excellence fut advertye qu'ilz s'estiont retirez de Wavre, pour se joindre au prince : qui estoit indice de peu de moyen qu'ilz aviont pour passer plus oultre, comme se vit incontinent par l'effect, pour ce que, de en avant, ilz ne firent nul progrès, excepté que, après avoir demeuré quelques jours, ilz firent ung tour vers Thil- mont , pour la rccognoistre, et logearent près de une nuict :

' 0 Wingbe-St-George (?). (') Vissenaekeii-St-Picrrc. (') Bevecom, en wallon Bauvcchain. {") Gaspar de Robles.

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mais, après avoir veii le bon ordre qu'il y avoit dedens, dësespërez delà povoir prendre, retoumarent k passer le ntysseau de Jaulce, plas bas que le lien où, quelques jours auparayaiut, ilz aviojit eu la perte en leur arrière-guarde. Majs aussi peu se passa eeste retraicte de Thilmont, sans qu'ilz receussent domaige, parce que ceulx de Thilmont leur tuarent environ cinq cens hommes dis- roandez, entre soldatz, chartons et aultres, oultre les chariotz qu'ilz prîndrent.

Son Excellence ne poeut, pour lors, entendre leur dessefng, ny à quo}' servoit ceste retraitte si soubdaine : mais, après, se sceut que c'estoit pour la perte qu'ilz avîont receu, le xx" de octobre, des meilleures gens qu'ilz aviont , et pour l'ordre que Son Excel- lence avoit donné, en pourvoyant les villes, et en leur estant toutte commodité de vivres, pour povoir passer plus oultre, et que beaucoup de sotdartz commenchiont & murmurer et dire qu'ilz s'en vouliont retourner en leur pays, et qu'ilz aviont trouvé tout au contraire de ce que l'on leur avoit donné à entendre, et que, en lieu de trouver en Brabant qui les recueilliist,' comme ilz espériont, n'aviont mangé pain depuis qu'ilz y estiont entrez. Par se voit combien il eust importé que Son Excellence eust eu commandement partout, puisque, li il commandoit, les ennemis ne trouvarent riens, et lii non (comme au pays de Liège), ilz n'ont laissé d'avoir tousjours quelque refreschissement, sans lequel ilz n'eus- sent tant duré, comme se vit incontinent, quand ceulx de Liège ouvrirent les yeulx et se déclairarent, comme se dira ci-après.

Quoy voiant. Son Excellence se détermina de les poursuj^re derechief, et ainsi s'en retourna incontinent, avecq tout son camp, vers eulx, et partit d'auprès de Louvayn le vendredy, xxix* de octobre, qui estoit le mesme jour que les ennemis s'estiont approchez de Thilmont, et se logea li Bevecum, il avoit logé auparavant, et séjourna \h le sembdy, xxx** du mois, et, le xxxj*', passa la ville de Thilmont, et se logea en ung villaige qui se nomme Eesmael (■), près dudict ruysseau de Jaulce, oùluy vindrent lettres de Tévesque de Liège, par lesquelles il l'advisoit

(I) Esemael, à une liciie de Tirlemont.

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qu'il estoit détermine, avecq ceulx de son chapitre, que, tout le tempsque dureroient ces troubles, Ton recepvroit, en leurs maisons, ehasteaulx et villes fortes , tel secours de gens de guerre que Son Excellence y vouldroit envoyer, et à telle heure qu'il luy plafroit, de nuict ou de jour, remettant le tout & Son Excellence. Et ainsi Son Excellence envoya incontinent trois compaignyes en Uuy, qui est ville de Tëvesque sur la rivière de Meuze, quatre lieues de Liège, et y a ung chasteau, pour ce que, selon le chemin que pre- niont les ennemis, il ^embloit qu'ilz se retirîont vers là, ou vers Liëge, estoit l'évesque avecq beaucoup de ses vassaulx.

Le lundy, premier de novembre, qui estoit jour de tous les Saincts, Son Excellence ne.se bougea.

Entendant les ennemis que Son Excellence les alloit aultre fois suyvant avecq son camp, se donnirent plus de haste pour povoir passer la Meuze, en cas qu'ilz peussent : mais elle estoit si creue, qu'il n'y avoit plus moyen de la povoir passer h guet, et l'on avoit retiré tous les baiteaulx de quoy ilz se eussent peu servir. Par ou, ne trouvant aultre remède, s'en allèrent contre Liège, ilz firent démonstration de vouloir passer, ou par amitié, ou par force : mais l'évesque leur refusa le passaige par sa ville ('), lequel et ses vassaulx estiont tant plus encouragez, pour le secours que Son Excellence leur avoit envoyé du costel de Huy, com- mandant au capitaine M.ondragon, avecq ung aultre qui estoit avec luy, que incontinent il se jetta dedens Liège par l'aultre costel de la rivière de Meuze ; et envoya en Huy, en son lieu, le S' de Hierges avecq son régiment. Et, cependant, Son Excellence passa oultre avecq son camp le chemin de Lyége, partant de Ecsmael le mardy, ij' de novembre, et arriva, ce mesme jour, au pays de Liège, à St-Joris-Ivect^ où. il séjourna le jour ensuivant, attendant nouvelles des ennemis. Et, le joeudy, quatriesme du mois de novembre, passa k Pucey (') ; le vendredy, v^, k Lamine : de sorte que, voiant le prince la détermination de ceulx de Liège et le camp de Son Excellence deux lieues de Ik ; fort empeschè et

(1) Voy. ci-dessus, p. 29 et suiv.

(*) Poucet, village h une demi-licuc d*IIannuC.

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en payne pour la faim que ses gens enduriont, oultre les murmura- tions par faulte de payement, n'aiant reeeu que ung mois de trois qn'ilz aviont servy, se partît de 1&, mais non sans domaige, luy aiant tué ceulx de Lyége plus de quatre cens hommes et prins plus de cent chariotz, et, pour la hasie qu'il se donna, aiant che- mine une lieue et demie, laissa deriëre deux pièces d'artillerye, et print le chemin de la chaussée qui va de en France, pour ne savoir aultre chemin pour retourner plus seurement.

Et ainsi chemina, de jour et de nuict, avec la plus grande dili- gence qu'il luy fut possible, bruslant les villaiges par il passoit, pour ester au duc la commodité de les povoir suyvre, lequel pour cela ne le laissit de faire, mesmes le suyvit tousjours k queue, depuis le commenchement jusques à une ville de l'évesque de Çamhray qui s'appelle le Chasteau en Gambrésis, Son Excel- lence arriva le xvij* de novembre, et les ennemis entrarent en France, cheminant continuellement quatre et cincq lieues le jour, assavoir : de Jaulche k Gemblours ('), de & Gossylies (*), et de \k a Bins ('), de à Tanière, que sont cincq lieues grandes, de au Quesnoy, et de à Werchyn , de près de Bouchayn , et de audiet Chasteau en Gambrésis, Son Excellence avoit envoyé devant le S' de Molayn, ung des capitaines du régiment du S' de Hierges, avecq quelques harquebuziers, qui guardit la ville, se jettant dedens par le meillieu du camp des ennemis, qui In bastiontdesjà, desquelz il en tua beaucoup. Et avoit Sou Excel- lence donné ordre à tous costelz par ledict prince debvoit passer, que ceulx du pays se retirassent avecq leurs biens dedens les villes, et qu'ilz luy ôtissent toutes les commoditez dont il se peuroit ayder, conforme à ce que auparavant avoit esté fait en Brabant.

Quelques-ungz du camp du prince s'estiont dismandez vers Namur ; mais ceubc du pays de Namur en tuarent plus de quatre cens , et ne failloit jour que Ton ne tuast une infinité : qui est

(*) Gembloux. (') Gosselies. O Binche.

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chose &oâle de croire, en teBe retnritte si grande, qui dura dix ou unse jours , de gens si las et travaillez et h demy mortz de faim, aiant toujours ung camp si puissant & queue, ouitre les chevavix que Son Excellence avoit envoyé devant , pour leur donner en teste et aux eostelz , et la guerre que les païsans leur faisiont , principalement en entrant au conté de Haynau , la pluspart sont accoustumez & la guerre dois leur jeusne eaige, de manière que Ton peult dire de vray que, ouitre la deffaile du xx^ d'octobre, ilz perdirent environ trois mil soldatz, comme dessus. Ton leur a deffait , en divers aultres eostelz , entre soldartz et aultres de leur camp, de toutte qualité, depuis qu'ilzsont entrez au Pays-Bas jusques à en sortir, plus de cincq mil hommes.

Par se volt que les emprinses du prince luy sont succédées tout au contraire de ce qu'il s'avoit promis, puisque non-seule- ment il n'a riens fait au Pays-Bas, pour il avoit dressé son camp, (d'aultant que, en mettant le pied en Brabant , l'on luy rompit incontinent -son arrière^guorde , et la reste fut eonstrainie & se retirer par pure faim), mais toutte la guerre qu'il a fait a esté sur les Estatz de l'Empire, lesquelz il se vantoit détenir pour protec- teurs. Les gens qu'il avoit tiré d'Alemaigne, aveeq promesse de les faire tous riches, sont demeurez mortz en partie, et la reste affamez et mal payez , sont esté constrainctz de se saulver aveeq luy. Le peu de gens qu'il povoitencoires avoir abuzé au Pays-Bas, soubz promesses de les mettre en liberté et hors de la tjrannie en laquelle il leur donnoità entendre qu'ilz estiont , et aveeq pro- testation de ne venir sinon comme amy , voiant qu'il ne leur faisoit non-seulement démonstration de bien, ains au contraire de mal , arrestant les marchans et leurs biens, et bruslant à tous eostelz , ont perdu couraige ; et les aultres, qui aviont cogneu auparavant ses abusions ( comme de dix les noeuf le cognoissiont) , l'ont reprins, et leur est accreue l'envye de se venger des feux et aultres doroaiges que Ton leur a fait.

Aussi se voit par quel salutaire conseil Dieu a inspiré au duc, de temporiser et ne se mettre en hazard de bataille, sinon aveeq son grand avantaige , ains plustost combatre ses ennemis avec la liiim , et, k cest effect, les suyvrc de près et pour (s'offrant l'oeca-

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sion) leur donner une main , comme il advint, sans que jamais ilz fussent si hardiz de le venir assaillir, oires qu'il n'ait tenu que à eulx, comm'îl est dit, s'estant veuz trois fois si près l'ung de Taultre, que l'artillerye donnoît de Tune part et l'aultre, et les deux fois sans que le duc eust aucuns tranchiz, qui demeure maintenant avecq son camp gaillard et entier, pour en cas qu'il en soit besoing aultre fois^ et tous les Pays-Bas à repos, lesquelz ont monstre par l'œuvre combien le prince estoit abusé , pensant qu'ik se révolte- riont & sa venue , aiant porté les armes en ce camp contre luy beaucoup plus de gens de ceste nation que d'aultres, et ceulx de dedens demeurez fermes et entiers. Dont Dieu est à louer, qui a deffendu sa cause , et par la main de qui les roys gouvernent ; et se doibt espérer que, comme touttes ses oeuvres sont parfaites , il les guydera, jusques à la fin, conmie il convient & son service.

III. '>.2

338

B.

CORRESPONDANCE

DU

DUC D'ALBE AVEC L'ÉVÉQUE DE LIÈGE,

•va

L'IITASION DD PMHCI D'OIAHCB DIHS GS PATS, U 4568 (*)•

I.

Le duc d'Albe à Vévèque de Liège.

UtBBCHT, iO AOUT 1568.

MoQsiear, je ne double point qae n'ayez, si bien que moy, en- tendu les grandes levées et amas de gens de guerre, tant à cheval que de pied, que présentement faict le prince d'Oranges envers Soist, au pays de Hessen, au évesché de Paderbom, et ailleurs par celle traicte-là ('). Mais je ne sçay si estes adverti, comme je suys, qu'ilz prétendent dresser leur chemin par vostre pays : qui m'a meu le vous faire sçavoir par ceste expresse, afin qu'en temps veuillez donner ordre à l'empeschement de l'entrée et du passaige

(I) Toutes les lettres que je publie ici sont tirées de la collection des papiers d*ÉUt, aux Archives du Royaume, reg. intitulé CorrespondanetaveeVévêq^iê de Liège, U II, années i;$68-i572.

(*) Par celle traicte^, vers ce pays-là.

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par iceulx yoz pays, et que nulz vivres leur soyent a4niiQisU*ez ; aussy que soit allé au devant de toutes surprisses, tant de la cité de Liège que aultres voz villes, et surtout que les intelligences secrètes que les ennemiz peuvent avoir par dedans le pays, ne puissent estre exécutées : vous asseurant qu'en mon endroict , je seray en ordre et à poinct pour vous secourrir avec toutes mes forces, si en aurez besoing. A tant, je prieray le Créateur, après mes cordialles recommandations, vous donner, monsieur, l'entier de voz vertueulx désirs. D'Utrecht, le x*" jour d'aousl 1568.

L'entièrement vostre bon ami.

II.

Le duc (VAIbe à l'évéque de Liège.

Bois-LB-Duc, 16 AOUT 1S68.

Monsieur, je vous escripvis dois Utrccht, vous faisant entendre les advertences que j'avoy comment les adversaires et ennemiz du Roy dressoyent leur desseing contre Liège. Et, pour ce que, de jour h aultre, me viennent advis conGrmans le mesme, voires qu'ilz auroyentbien grandes intelligences en vostre cité, j'ay bien voulu aultre fois le vous faire sçavoir par ceste présente, et vous admo- nester et requérir de incontinent donner ordre h la bonne et seure garde de ladicte cité et d'aultres voz villes, et que se puist aller au-devant des secrètes practicques et menées que y peuvent tramer lesdicts ennemiz, vous asseurant qu'il en est plus que temps, et qu'il ne convient s'y laisser endormir, pour estre adverti que, comme lesdicts ennemiz ne peuvent porter longtemps les frais de l'entretènement d'une telle armée que l'on dict ilz mectent ensem- ble, ilz se donneront toute la presse possible pour exécuter leurs emprinses et desseings ; vous priant aussy que veuUez en oultre

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donner ordre que, s'ilz approchent en ça, ilz ne puissent estre accommodez de vivres, ny aultres leurs nécessitez, ains que les gens de guerre de Sa Majesté, que pour la commune défense je fay en toute diligence marcher et se joindre vers Maestricht, en soyent assistez, et que h noz commissaires des vivres soit donné toute l'addresse, ayde et advancement possible. Et, en mon endroict, je voy vous approchant, pour faire teste ausdicts ennemis, et m'op- poser à tout ce que je pourray veoir qu'ilz vouldront emprendre contre les pays de Sadicte Majesté, et aussy, comme desjà vous ay dict, pour vous secourrir de tout ce que je pourray, si je voy qu'ilz s'addressent contre vous, ou voz pays. Par ou vous prie que continuèlement me participez ce que pourrez entendre de leur conduicte, pour tant myeulx sçavoir diriger ce que je verray con- venir, pour le bien de Tung et Taultre. A tant, etc. De Bois-le-Ducq, le xvj* jour d'aoust 1568.

L'entièrement vostre bon ami.

III.

[Jèvêqtie de Liège au duc d'Albe, Liège, 17 aodt 1568.

Monsieur, estant allé mettre provisions nécessaires sur ma mai- son de Huy, pour Tasseurance d'icclle contre les emprinses estans h la main, dont j'avois eu quelques advcrtissemens, je receoz devant-hier illecq la lettre de Vostre Excellence CvScrite à Utrecht, en date du x** de ce mois, m'advertissant desdictes emprinses, conformément à ce que de divers coustelz avois entendu, assavoir que les auteurs desdictes emprinses prétendoient avec leur com- paignie dresser leur chemin par mon païs, et me requérant, de plus, pourveoir en cest endroict, comme icelle lettre de Vostre

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Excellence plus à plein contient. Dont, aussy tost que j'euz mis ordre aux affaires de madicte maison et de ma ville de Huy, ni'en suis retourné vers Liège, pour, suyvant lesdicts advertissemens, faire, à tout mon povoir et en toutte diligence, les provisions requises, et dresser les moyens nécessaires à l'asseurance de mon païs : merciant très-affectueusement Vostre Excellence de la bonne affection qu'elle continue de monstrer vers moy et mondict païs par son offi«, à raison de quoy je me cognois estre avec icelluy pats & tousjours obligé & icelle. Sur quoy, monsieur, m'iray bien humblement recommander à la bonne grâce de Vostre Excellence, priant le Créateur donner i icelle en parfaicte santé longue et heureuse vie. De Liège, ce xvij^ d'aougst 1568.

De Vostre Excellence l'entièrement à luy faire humble service,

Gérardt, cvcsque de Liège.

Le duc d'Albe à l'évèque de Liège. Bru.xellbs, 22 AOUT 1SJ68.

Monsieur, ce matin m'est venu advis comme les ennemiz, entre aultres leurs desseingz, pourjectent dépasser (s'ilz peuvent, fault-il dire) la Meuzc h Visey, et de se impatroner de Tongren. Or, il ne fault que je me mecte en peine pour vous représenter (le sça- chant myeulx que moy) combien il y a peu de chemin dudict Visey à Tongren, et combien de discommodité appor^roit et à vous et à nous, si les ennemiz venoyent à exécuter ce leur desseing. Par quoy, désirant y contreminer et pourveoir au bien de l'ung et Faultre , et ayant mandé venir vers Maestricht la infanterie vieille walonne des frontières de Ilaynnault et Artois, il se m'est

i'

342

occumi (■) , à l'occasion susdicte, qu'il ne seroit hors de propos de faire arresterladicte infanterie ungpeu autour de Tongren,jusques à veoir le chemin que prétendront prendre les ennemiz, pour, selon ce, la jecter plus avant. Et, pour ce que je ne suys moings soigneulx de veoir vostre pays excuse de foules, que celluy du Roy, mon maistre, ce que se fera avec trop plus de facilité, mectant ladicte infanterie dedans ville que la laissant dehors, ce me meult vous prier affectueusement de vouloir estre content que, pour commune tuition et défense, ladicte infanterie puist entrer, à son arrivée, audict Tongren, je despesche, tout à cest instant, homme exprès, poiu* les loger, accommoder et tenir la main qu'îlz payent raisonnablement, et ne facent fouUes quelzconcques. Et, vous feissiés en cela difficulté, je vous déclaire, monsieur, que je trouve ce desseing de Tongren si important, tant pour vous que nous, que je suys forcé entretenir quelque peu ladicte infanterie aux villaiges autour dudict Tongren, et seray fort marry, si la dis- cipline ne s'y observera si estroictement que je désireroye et Tay commandé, pour souloir estre ordinairement plus licencieuse aux champs qu'en ville close, quelque diligence que l'on commande et use pour y aller au devant. Et, puisque Sa Majesté est forcée à ceste guerre, pour estre assaillie de ses rebelles, contre lesquelz sa défense est de tant plus légittime, les incommoditez que ses voisins en pourront inévitablement sentir, en sont, en son endroict, aussy tant plus excusables. A tant, monsieur, je prieray le Créateur vous donner ce que plus luy vouldriés demander. De Bois-le-Ducq, le xxij* jour de aoust 1568.

L'entièrement vostre bon amy.

(>) // se m'est oceurru, il m'a paru*

343

V.

L'ivique de Liège au duc d'Albe. LiteK, 24 AOUT i'm.

Monsieur, j'ay, ce matin, receu les lettres de Vostre Excellence du xxij*' de ce mois, par lesquelles icelle désire que je face donner entrée en ma ville de Tongre à quelque infanterie que y arrive- roit, pour suporter le plat pais d'alentour des foules que autre- ment y pouriont faire lesdicts gens de guerre. Dont, monsieur, remémorant ce que desjà icy-devant, tant par lettres que par envoy de mes commiz, ay en ce mesme endroit faict entendre, je suys, comme alors, constraint de prier Vostre Excellence m'avoir en ce, avecq madicte ville de Tongre, excusez, ne povant bon* nement faire ladicte ouverture, ne admectre tèle entrée, sans exprès sceu et adveu de mes estatz. Et, aiant regard que pièça, par tant de réitérez passaiges, demeures, longs séjours et repassaiges des gens de guerre de Sa Majesté, ce païs at esté, plus que h son possible, mangé et foulé, signament autour dudict Tongre, ou il y at eu gendarmerie jusques au-devant des portes, par longue espace de temps, tellement que, pour la povreté des subjectz, n'est possible de recouvrer d'eulx paiement, ne des contributions de FEmpire^ ne des subsides de ce païs, quelle semonce, debvoir et diligence qu'en soit, par la Majesté Impériale, par diversses lettres et envoy d'ung sien commiz & cest effect expressément, la semaine passée, envolé, et de ma part conformément, esté faicte, je voul- drois supplier Vostre Excellence déporter ledict quartier de ce passaige, ou du moins le faire accélérer tant que seroit possible, de tant que, y faisant demeure ou séjour, je ne vois comment povoir faire acomoder les gens de guerre de Sa Majesté Gatho- licque de vivres et autres nécessitez, comme j'en ay donné espoir au S' de Zweveghem, et en aura faict raport à Vostre Excellence, pour estre ce païs ung des principaulx pour sa fertilité, et assicte

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assez voisine h la Meuze, dont je pensois tirer la pluspart desdicls vivres, comme déclarera le gentilhomme porteur de cestes, mon escuier, h Vostre Excellence plus à plein. En quoy je prîeray icelle Toyr et croire, me confiant en la bonne affection qu'elle m'a tous- jours monstrce, et à ce mien pais et subjectz, k laquelle aussy en tous endroitz possibles vouldrions correspondre. Dont ne feray ceste plus longue, sinon de prier itcrativcment pour solagement et suport de mesdicts subjectz, et à Dieu, monsieur, donner à Vostre Excellence en santé tout acroissement de prospérité et longue vie. De Liège, ce xxiiij** d'aougst 1568.

De Vostre Excellence rentièrement à luy faire humble service,

GéitARDT, évesque de Liège.

VI.

Le duc d'Albe à révèque de Liège.

MaBSTHICHT, ^ SBPTBMBMB 1S68.

Monsieur, je renvoyé vers vous le S** de Zweveghem, pour vous représenter et requérir quelques choses concemans le bien com- mun du Roy, mon maistre, et de ses paysj et de vous et les vostres, que de luy entendrez plus amplement : vous priant luy donner en cela briefve audience et entière foy, comme k moy-mesme, et vous y résouldre selon que me samble que pour le bien de Tung et l'aultre debvez faire. A tant, monsieur, je me recommande bien affectueusement à vous, et prie Dieu vous donner très-bonne et longue vie. De Maeslricht, le iiij" jour de septembre 1568.

L'entièroment vostre bon aray.

34S

VU

Instruction du S*" de Zweveghem,

BIaKATRIGHT, 4 SBPTEMBBB 1568.

Instruction pour vous, messire François de Halewin, clievalier, seigneur de Zweyegliem, de ce que aurez h négocier avec monsieur l*éyesque de Liège, devers lequel vous envoyons présentement.

Vous irez incontÎDent trouver ledict S' évesque ; et, après luy avoir présenté noz lettres que luy escripvons et vous seront déli-^ vrées de crédence, le prierez de nostre part qu'il veuille bien, et avec l'attention qu'il convient, considérer le temps qui court, et comme l'ennemy qui présentement s'attend, est commun au Roy et luy, aux pays et cstatz de l'ung et Taultre, et que partant mutuelle et réciprocque confidence, intelligence, ayde et assis- tcnce entre nous deux, et les forces de l'ung et l'aultre, sont plus que nécessaires pour tant myeulx pouvoir se opposer h ce que l'ennemy vouldroit entreprendre, et luy rompre ses desseingz.

Or, comme noz forces sont incomparablement plus grandes que celles dudict S' évesque, vous luy représenterez que c'est de nous qu'il et ses pays doibvent espérer et attendre d'estre secourruz et défenduz, et que l'on doibt s'asseurer que nous employerons à leur secours avec toutes nosdictes forces, ou partie d'icelles, selon l'exigence et nécessité, si tant estoit que l'ennemy s'adressast contre eulx : estimant leur pays et ceulx de Sa Majesté tous ungz au regard de la guerre que présentement l'on prétend nous faire.

En oultre, vous luy représenterez, et ferez bien clairement entendre, quel dommaige pourriont recepvoir ses pays et ceulx de Sadicte Majesté, si noz ennemiz s'empariont d'une de ses villes, desquelles nous voulons bien croire que ledict S' évesque pourra bien gai*der et défendre la cité de Liège, veu les préparatifz qu'entendons 8*y faire à c'est effect, et laquelle toutesfois nous voul- drions aussy de nostre costé secourir, si tant fust qu'en fussions

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346 -

requis; mais les aultres, estans plusieurs et plus esloignées, pour- riont courir danger, avant que il y pourroit pourveoir, du moings souffissamment , ne ayant , par adventure, le moyeii si prompt comme il pourroit estre de besoing, et que nous, qui sommes bien délibérez de cheminer tousjours de çà et de 1&, en faisant teste à l'ennemy, selon que verrons sa conduicte, pourrons estre trop plus à la main, pour, par noz forces, povoir pourveoir à la garde et défense de celles de ses villes que verrions en avoir mestier, si tant estoit que nous fust permis, en ce cas, y faire entrer de noz gens de guerre : ce que trouvons entièrement convenir et néces- saire, pour aller au-devant de tous inconvéniens.

Par quoy le prierez, de nostre part, qu'il veuille fermement croire et faire entendre à tous les siens qu'il appartiendra, que ne prétendons aultre chose fors que la commune défense, et' prévenir le dommaige qui, s'inférant k Tung, ne peult sinon grandement préjudicier à l'aultre, et que, partant, il yeuille estre content et consentir que, advenant le besoing de jecter quelques gens de guerre, peu ou beaucoup, selon la nécessité, en quékque vOle sienne, fl veuille, dès maintenant, commander qn'ilz y soyent receuz et logez, sans attendre si tard que, quand on le voulsist faire, le moyen en fust osté : luy offrant, de nostre part, que, pour son appaisement et des siens, nous serons aussy contens et com- manderons que les gens que vouldrons faire entrer en aulcune de ses villes luy facent serment, s'il le demande, et, en oultre, de luy donner toute aultre asseurance que se pourroit raisonnablement demander et bonnement bailler. A quoy vous efforcerez de le persuader, par les motifz susdicts et par aultres que par vostre dextérité et prudence sçaurés fort bien y adjouster. Et annoterez, par escript, la responce que là-dessus vous sera donnée, pour, k vostre retour vers nous, nous en faire ample relation et rapport.

Faict, soubz nostre nom, k Maestricht, le iiij^ jour de septem- bre 1568.

347

VIII.

Vévéque de Liège au duc d^Albe»

LiSOB, 17 SBFTBMBAB 1568.

Monsieur, je ne doibs laisser, pour le regard du bien et repos, tant des païs de Sa Majesté Catholicque, que de cestuy mien, d'ad- vertir Vostre' Exeellence comment se sont trouvez cejourd'huy devers moy aueons mes subjeetz, inhabîtans de ceste mienne cité, lesquels, pour Tacquict de leur debvoir et pour le serment qu'ilz ont à moy, m'ont, au vray et h bonnes enseignes, adverty d'avoir esté sollicitez, de la part du prince d'Oranges, de vouUoir addres- ser et practicquer l'entrée et passaigedudict prince, avec ses gens, par iedle mienne cité et païs. Je ne laisseray de faire toutte extrême diligence à m'apperoevoir plus avant de ces menées, et d'y pourveoir k tout mon povoir k rencontre, et de plus, au besoing, faire part h Vostre Excellence de ce que j'en pourrois entendre davantaige. Sur ce, monsieur, m'iray bien humblement reciHnmander à la bonne grAce de Vostre Excellence, priant le Créateur donner à icelle en parfaite santé longue et heureuse vie. De Liège, ce xvij* de septembre 1568.

De Vostre Excellence l'entièrement à luy faire humble service,

GéRARDT, évesque de Liège.

n

348 -

IX.

Vévéque de Liège au duc d'Albe.

LliCK, 29 8KPTBMBKB 1568.

Monsieur, je mercie très-affectueusement Yostre Excellence de l'advertissement qu'il luy a pieu me donner par sa dernière, en date d'hier, sur l'arrivée des ennemiz à Witthem et Hechelen. Les dernières nouvelles que j'en avois eu hier, furent qu'ilz avoient [faict] quelques courses entre Fuecht, villette du pais de Juillers, et Heynsberch. Je ne fauidray, selon que Y. Exe. me requiert, l'advertir en diligence des nouvelles que, d'heure à autre, me pourront venir de leurs desseingz, et des lieux vers je pourrois entendre qu'ilz se vouldroient dresser. Aussy pourvoyeray-je, à tout mon extrême, à ceste cité contre inconvénient, et qu'ilz ne soyent serviz de vivres : merciant finallement, comme dessus, Yostre Excellence du secours et l'assistence dont il luy a pieu, suyvant sa bonne affection vers moy et mon pais, me faire offre. Sur quoy, monsieur, m'iray humblement recommander à la bonne grâce d'icelle Yostre Excellence, priant le Créateur luy donner en santé longue vie', avec tout heur et prospérité. De Liège, le xxix" de septembre 1568.

De Yostre Excellence renlicrement à luy faire humble service,

Gérardt, évesquc de Liège.

349

X.

L'évéque de Liège au duc d'Albe.

LliCS, 1 OCTOBRE 1:>68.

Monsieur, depuis ma dernière, ne m'est jusques icy venu autre, sinon que le prince d'Orange se tient encoir à l'endroict de Gulpen, el qu'il est avenu, quelques trois ou quatre jours passez, que trois chartons, habitans de ma ville de Maeseyck, menans de Coufoigne trois charrettes de vin, ont esté saisiz par les gens dudict prince, et menez à son camp, lesdicts vins, charrettes et chevaulx ont esté déclairez prins, h titre que mon païsseroit partie contraire audict prince ; mais ont lesdicts chartons depuis esté relaxez : dont il m'a semblé en escrire audict prince, et en demander restitution, se conformant, tant en cestuy que autres endroictz, aux recez et ordonnances de l'Empire. Au reste, monsieur, les affaires de ceste cité vont. Dieu loué, jusques à présent avec bon repos et union de mes bourgeois, et je vois (') continueUement pourvoyant à nostre asseurance, y ayant desjà faict entrer bon nombre des subjeclz d'alentour, et en attens encoir davantaige, avec une bonne partie des plus apparens de la noblesse de mon pais, pour conforter lesdicts bourgeois, et addresser leur bonne volunté. Et de ce que s'addorra (') davantaige, ne feray faulte ny dilay d'en faire part à« Vostro Excellence, à la bonne grâce de laquelle m'iray humble- ment recommander, et prier le Créateur pour sa prospérité et longue vie. De Liège, ce premier d'octobre 1568.

De Vostre Excellence l'entièremeut à luy faire humble

service,

GiÊRARDT, évesque de Liège.

(») Je vois, je vais.

(•) ytuhrru, s'adonnera, surviendra.

380

XI.

L'évéque de Liège au due d'Albe.

LiioB, S ocTomi IS68.

Monsieur, ce matin, est venu devant ceste cité une troni|)elte envoyée par le prince d'Orange, avec une lettre d'icelluy prince, addressante, non pas à moy, mais aux bourgmestres, jurez, con- seil et trente-deux mestiers de madicte cité ('), par laquelle il demande estre fumy, avec son armée, de vivres, et luy estre donné passaige par madicte cité, ou tout auprès d'icelle. Sur laquelle lettre lesdicts bourgmestres, jurez, conseil et trente-deux mestiers luy ont, à cest instant, suyvant mon advis, envoyé responce, par escrit (*), que la disposition sur lesdictes demandes dépend de la volunté et consentement de moy et de mes estatz, comme ceulx auxquels cela appartient, et que à tant il se tinst content, et eust tel respect à madicte cité et pais que, selon les ordonnances et constitutions du Sainct-Empire (duquel nfadicte cité et pais estoit membre), il sçavoit convenir. C'est cy, monsieur, la substance de ladicte responce, dont n'ay vouUu laisser d'advertir incontinent Vostre Excellence, comme ne fauldray de luy faire aussy part de ce que cy-après s'addorra. Et sur ce, feray fin par mes bumbles ^reoommandations à la bonne grâce de Vostre Excellence, et prières à nostre seigneur Dieu luy donner en santé longue et heureuse vie. De Liège, ce v* d'octobre 1568.

De Vostre Excellence l'entièrement à luy faire humble

service,

Gébardt, évesque de Liège.

(i) Elle est insérée ci^Sessos, p* 19. (') Elle est ci-dessus, p. 21 .

351

XII. L'évéque de Liège au duc d'4lbe.

L1B6I, 7 OGTOBIK 1568.

Monsieur, j'ay, à cest instant, receu celle de Yostre Excellence d'hier, m'advertissant da passaige de la cavallerie du prince d'Orange, et de sa diligence à faire passer son infanterie deçà de la Menze. Je dépeschay, monsieur, hier soir, entre neuf et dix heures^ responce à Yostre Excellence sur son avant-dernière, de mesme date d'hier, par laquelle luy escriveis, entre autres choses, d'envoyer en diligence une enseigne vers ma ville de Hasselt, laquelle maintenant je redouble, en y envoyant deux, que je fais en ce point sortir de ceste cité : par j'espère que y sera pourveu, comme aussy je donne présentement ordre et provision à l'asseu*- rance de Tongre. Et, avec ce, m'en vois besoignant en outre, avec mesdictes et autres villes de ce coustel-là, sur l'ouverture par Yostre Excellence demandée, selon la nécessité croissante, en sorte qu'elles ne fussent assez pourveues. Et à tant, monsieur, feray fin de ceste par mes humbles recommandations à la bonne grâce de Yostre Excellence, priant le Créateur donner h icelle tout heur et prospérité. De Liège, ce vij« d'octobre 1568.

De Yostre Exeellenee l'entièrement k luy faire humble service,

Gérardt, évesque de Liège.

352

XIII.

L'évêque de Liège au duc d'Alhe. f.iieK, 8 ocTOBiE {!i6S.

Monsieur, incontinent après ma dernière d'hier dépesohée, j'a\% pour addresse de ce que, par icelle, escriveis h Vostre Excellence sur le poinct d'ouverture, en sa dernière de deyant-'liier soir tou- ché, donné charge et povoir à mon grand mayeur de Liège (lequel j'envoyay hier, avec les deux enseignes dont par madicte dernière ay escrit, vers ma ville de Hasselt) d'admettre et laisser entrer tel secours de Vostre Excellence en madicte ville qu'il trouveroit de besoing, si et quand il verra la nécessité s'en addonner, à l'occa- sion de quelque invasion qu'on feist sur ledict Hasselt, ou autre ville ou maison et chasteau mien et de mon pais, moyennant (con- forme à ce que Vostre Excellence m'a escrit) le serment desdicts gens de secours, de garder et tenir madicte ville pour moy, mon église et païs, et d'en sortir à toutte ma semonce. C'est, monsieur, oe que j'ay peu obtenir et faire présentement endroict le poinct susdict : dont j'espère qu'il plaira à Vostre Excellence le prendre de bonne part. J'eusse aussy dépesché semblables commissions et povoirs pour mon capitaine estant h Maeseyck, et pour mon dros- sard de Stochem : mais, entendant l'accès à cqs endroictz estre empesché et autant qu'impossible, ne m'a semblé conseillé de les envoyer, de peur que le porteur n'en tumbast en inconvénient. Sur ce, monsieur, feray mes humbles recommandations à la bonne grâce de Vostre Excellence, priant le Créateur luy donner tout heur et contentement. De Liège, ce viij« d'octobre 1568.

De Vostre Excellence l'entièrement h luy faire humble

service ,

GÉnARDT, évesque de Liège.

353

XIV.

L'évéque de Liège au duc d'Albe.

Liées, 1^' OCTOBRE 1-Î68.

Monsieur, j'ay desjà cy-devant, tant par crédence comme par mes lettres, fait entendre à Vostre Excellence le regret et déplaisir que j'ayois de la conduicte de ceulx de ma ville de Tongre, et de ce qii'ilz n*estoicnt souvenantz des comandemens et instructions qu'ilz avoîent de moy sur la conduite et ordre qu'ilz debvoient tenir, en ce temps sy perplex et dangereux ('). Je mercie Vostre Excellence humblement que, à mon respect, elle passe ceste leur offense par dissimulation, m'en remectant la correction et cliastoy : à quoy tiendray la main, incontinent que l'occasion s'y adonnerat et en auray l'oportunitc, les choses remises en plus de repos et tranquillité. Je trouverois merveilleusement estrange qu'ilz rece- lassent autres réfugez en madicte ville, oultre ceulx miz entre les mains des gens de Vostre Excellence, après le cry, publication et comandement y faict de manifester lesdicts réfugez, mesmes après la Visitation faicte des lieux on nvoit opinion qu'ilz seroient receuz et cachez, davantaigc,. après répétition, dudict comande- ment et Visitation itérative offerte par toute ladicte ville, et signamment des lieux que dessus : dont espérois que Vostre Excellence auroit contentement, et dont, de bon cœur, derechief la prie.

Monsieur, je suys asseuré que du corps de ceste cité ne se sont envoyez vivres vers le camp du prince d'Orange ; ne sçay sy par- ticulièrement quelqu\ing des manans d'icelle se seroit advancé de les y mener : que me déplairoit. Je y ay donné autant d'ordre et provision qu'il m'at esté possible, et ne cesse encoires de pour-

(') Groesbcck nvaît envoyé, le 13 octobre, le prévôt de la cathcdiolc de Linge au due d^Albc, pour lui faire eetic communication.

III. 33

384

veoir à en garder lesdicts bourgois. Je vouldrois avoir tant d'obéis- sance comme est requiz, et pour mon acquit le désire. Il me con- vient, monsieur, passer oultre avecq pacience, pour ne donner matière k plus de trouble et commotion, en ce temps sy enclin à toute rébellion, et non pour faulte de bonne volunté que j'ay à la justice et raison, et au service de Sa Majesté Catholicque et de Vostre Excellence.

J'ay commencé à donner provision et ordre sur la retraicte des batteaux, et ne fauldray d'y achever, et, à la reste, ay petit moyen d'cmpescher le passaige de ceulx qui descendent de France , pour estrc l'eaue basse , et tant de guetz et passaîges que se retreuvent par ceste rivière, et, en oultre, pour estre incertain ilz voul- dront passer. Ne fauldray toutesfois d'y faire tout ce que me sera possible.

A cest heure ay-je receu lettres de mon capitaine de Dînant, ausquelles il a joinctes celles que luy at escript l'abbé de Saint- Hubert, et peu auparavant d'autres de mon chastelain de Franchi- mont, que j'envoye avecq cestes, pour advertir Vostre Excellence des lieux se retreuvent les susdicts venans du costé de France.

Monsieur, & cestc mesme heure me viengnent nouvelles comme le prince d'Orange, par une siène trompette, at demandé l'entrée de ma ville de Saînt-Truon : que at meu ceulx de madicte ville envoier vers luy, luy dire et faire entendre leurs excuses, leS'» quel es n'ayant voulu recepvoir, a persisté de vouloir avoir ladicte ouverture , synon que i^ demain le matin il entcndoit y mectre le siège. En ladicte ville ay quelque petit nombre de soudartz, et se treuve icelle assez munie, et défensable, pouryeue d'artillerie et choses nécessaires pour ladicte défense ; et y sont entrez les reli- gieux, religieuses et paysans d'alentour en bon nombre. Les bour- gois d'icelle sont bien bonnes gens et catholicqucs, s'estans jusques h présent maintenuz en l'obéissance de Dieu, l'église catholicque romaine et la nostre : que me donne tant plus de soucy d'entendi*e à leur protection, garde et défense, et me constraint, monsieur, prendre recours vers Vostre Excellence, et luy faire humble requcste les adsister et donner secours , tel qu'il luy plaira et se trouvera souffissant pour la garde et défense d'icelle» que, suyvant

353

Voeffrc que à Vostre Excellence il al pieu icy-deyant me fuire, feront serment) & mon église et à moy, de garder ladicte ville, et s'y conduire hpnestement et raisonnablement en gens de guerre, à la moindre fouUe des sul>jectz d!icelie, d'en Srortir et Tabandonner toutes les fois que d^ qui part ili; cn.seront requiz^ non pas pour défiance que j'aye de Vostre Excellence, mais pour satisfaction de mes estatz et subjectz de cestoy mon pais j comme cecy, et autres choses touchaqt cest affaire, seront plus k plain déclarées à Vostre Bicellence par ces porteurs^ mon confrère le prévost Liège «t le S^ de PAngély^ aûsquelz la prie vouloir donner bérïigne audience et ptàin crédit, et à Dieu, monsieur, avoir Vostre Excellence en. sa saincte protection et garde, me recomandant humblement à la bonne grâce d'icelle. De Liège, ce xv* d'octobre, de soir, 4S68«

De Vostre Excellence Fentièrement à luy faire humble, service, .

GëRABDT, éresque Liège.

1

XV.

Vévéijue de Liège au duc d*Atbe.

LlÉOE, 17 OCTOBRE 1!$68.

MonsieW*, i*ay, k mon très-grand regret, entendu que ma ville de Saint-Tren est venue aupovoir du prince d'Oranges, et ce par la diversité d'inclination des bourgeois ii.la garde d'icelle, estant. aiAtroment bien défensahle avee les gens de* guerre quç à mon petite povoir j'y avois mis dedens, si lesdicts bourgeois eussent esté affectionnez oomme ils debvoîent* Et, attendu l'ouverte bos- tilit^'dudict i^rince, dédairée par ce que dessus contre mon pa!s^ afin que semblable inconvénient n'advienne à mes. autres vijles de entoor, je suis résolu i ce que, debvant ladicte dédaraiion d'hos-

' jf'

tilitc, ne m'eust aucunement este permis , assavoir : d'y pourveoir à l'encontre, comme Vostre Excellence m'en vouldra doimer advis, en y faisant entrer tel secours (au moyen du serment dont il a pieu k Vostre Excellence cy-devant m'escrire) que, pour le service de Dieu, Sa Majesté Catholicque et Tasseurance d'icelles viHes, semblera à Vostre Excellence nécessaire et expédient. Sur ce, monsieur, après mes humbles recommandations à la bonne grâce de Vostre Excellence, je prie le Créateur donner & icelle en par- faicte santé bonne et longue vie. De Liège, le xvîj"" d'octobre 1568.

Monsieur, à l'effect de ma résolution susdicte, j'envoyeray au plus fost à Vostre Excellence légation espécialle.

De Vostre Excellence l'entièrement à luy faire humble service ,

Gerardo, vescovo di Liège.

XVI.

L'évêque de Liège au duc d'Alhe.

LiéGK, 21 OCTOBRE 1568.

Monsieur , pour oster le regret que Sa Majesté Catholicque et Vostre Excellence eust peu concevoir, à cause que les villes de mon pais ne seroient assez pourveues , et que partant en fust avenu inconvénient aux paîz de Sadicte Majesté, le prévost de Liège , mon confrère, par ma commission, a faict dernièrement offire k Vostre Excellence qu'il luy pleust dénommer les villes elle vouldroit envoyer son secours : sur quoy il m'a rapporté que Vostre Excellence demandoit asseurance d'avoir ouverture et entrée, poursondict secours, entouttes mes villes générallemcnt, selon les nécessitez qui se pourroient addonner. J'avais, monsieur, auparavant de tant plus résoluement peu offrir & Vostre Excellence,

387

en façon et aux conditions du passe escrites, rouverture et entrée do celles de mesdictes villes qu^elle m'avoit dénommées, assavoir : Se Hasselt et autres de ce quartier-là, que, par-dessus ce que le danger y estoit plus apparent, j'y avois, comme encoîrcs ajij mes gens, lesquelz, suy vant ma commission, en eussent peu addrcsser l'ouverture pour le secours de Voslre Excellence, si d'adVenture les bourgeois en eussent faict dîfHeulté. Et certes , Dieu sçait , monsieur, ma bonne et prompte volunté et affection de satisfaire h Vostre Excellence, en tout ce que pourroit concerner Taddresse et maintien de nostre saincte foy catholicque, et le service de Sa Majesté et bien de ses païs , dont Vostre Excellence auroit plus manifestes espreuves, si j'estois secondé-et obéy par mes subjectz, comme la raison vouldroit bien, et si je n'eusse les peines et tra- vaulx inesoyables que j'ay , k retenir mesmes eeulx de ceste mienne cité d'altération, en ce temps si addonné h troubles. Par quoy, comme ladicte demande de Vostre Excellence, concernant génërallement tonttes les villes de mon païs, est cbose qui ne dépend de mon seul povoir, j'espère que Vostre Excellence, en regard de ma volunté et affection snsdicte, prendra de bonne part que^ pour le {urésent, je luy die seullement que je suis desjà traîctant, avec la plus grande diligence, et le plus acertes qu'il m'est possible, avec mesdictes villes, affîn que Vostre Excellence ait, sur ce que dessus, résolution telle que (comme j'espère) pour estre à son contentement : dont, endedens bien peu de jours, et plus tost que me sera possible, advertîray Vostre Excelleniee. Et à tant, monsieur, m'iray humblement recommander & la bonne grâce de Vostre ExceUenoe, priant le Créateur donner à ieelle en parfaicte santé longue et heureuse vie. De Liège, ce xxj** d'octobre 1568.

De Vostre Excellence Tentièrement à luy faire humble service ,

GéRAUDT, évesquc de Liège.

\

338

XVIL

Le due d'Albe à l'Mque de Liège'.

'Av omr se Pa«c, 24octoub <S66,

.. Monsieur, ce que j'ay h tous dire, en responee à vostre lettre ;duxxj<'de oe présent mois, .n'est .aultre chose que ce que. j'ay décWé au provost de Liëge et aultres voz députez qui derDJére* msnfrsûnt venu me trouver de vostro part,et de vous adnloiiester de le voiilofr bien considérer et prendre ù coeur, coînmc Taffaire le requiert, etdesjà, passé longtemps, je le tous ay représente et contiiiuèlementraft«sehy : tous pouvant bien assenrer que, comme 'Buyï tout iîertain que Tennemy n'est pour pouvoir faire alilean effort contre les villes de par deçà, estans les plus principales dasjà pourveues, etceste armée à la main, ilne peultsynoa serésouldiie à s'impatroner des villes de vostre EMat^ pour' y yvemer, s'il en a desseing et en trouvera le moyen j pour après, hors d'ioeUes^ venir nous bire la guerre, laquelle, en ce cas, vous entendez fort bien que se jectera du tout en vostre pays, auquel, non plus que au •nostre , ne sommes pourrie comporter , pour nous endomager* •Quy me faict, peur fin de eeste, vous exhortori ia résotulion oon* forme à ma déclâratîoh fafcte h vosdicts députez^ laquelle je suys geur qu'enfin, prendant les choses comm'ilconvient, trouverez pour * le plus salutaire, A tant, etc. Du camp à Pàreq lez-Louvain, ïç xxilij* jotir d'octobre 1568.

3S9

XVIII. L'évéque de Liège au duc d'Albe.

LiioE^ 25 OCTOBRE I5C8.

Monsieur y suyvant ma précédente à Vostre Excellence escrite depuis le dernier retour de mon confrère le prévost de Liège, et son rapport de ce que Vostre Excellence luy avoit dict sur les ckoses que je l'avoys envoyé remoustrer à icelle , j'ay, inconti- nent après madicte précédente, en date du xxj^ de ce mois dépes- chée (dont le porteur n'est cncoir à ce poinct de retour devers moy), envoyé en diligence mes commiz vers mes villes, pour les induire si avant que , a Fendroict de ce que madicte précédente portoit , je peusse donner à Vostre Excellence autant de satisfac- tion et contentement comme noia volunté et affection a tousjo.urs ^té boiine et prompte h- ce que pourroit concerner la défense* et maintien de nostresainctefoy christienne, le service de Sa Majesté Catholicque et Vostre ExceUence , et l'addresse du bjen des païz de Sadictç Majesté et de cestuy mien. Qr, suivant madicte volunté et affection, .n'ay voullu laisser de traicter cependant avecq mon chapitre, afin d'addresser ce qu'estoit plus en mon povoir, tou- chant ceste matière* Et s'est ledict chapitre résolu que, durant ces troubles, les capitaines et gardes de mes maisons et chasteaux de Bouillon, Huy, Dyuant, Stochem et Francimont dorroot resppcti- vement ouverture desdictes maisons et chasteaux k tel secours de gens de guerre qu'il plaira à Vostre Excellence y envoyer, et à toutt' heure qu'il semblera à icelle l'apparence de nécessité le requérir, moyennant les conditions contenues es lettres closes que, à l'effect de donner ladicte ouverture, je dépesche présente- ment auxdicts capitaines et gardes, desquelles lettres j'envoye : cy'joinctz les duplicatz ('}, dépeschez en toutte telle manière comme

(I) Ces lettres, signées à la fois de Tcvéque et du notaire (secrétaire) du

oCO -

mesdictes lettres, afïin que le secours qu'il plaira à Vostre Exeel- lence envoyer, les monstre auxdicts capitaines et gardes, pour avoir ladicte ouverture ; aussy aura Vostre Excellence, avec cestc, en une cëdulle y enclose, le serment que lesdjcts capitaines et gardes feront passer {sic) par les capitaines et gens de secours susdicts , et prendront d'iceux ('). Cecy je prie Vostre Excellence voulloir prendre de bonne part, estant ce que jusques ores ay peu effec- tuer, en attendant que mes villes se lairront induire au semblable : de quoy, et ce que j'en auray peu obtenir , comme porte madicte précédente, ne fauldray d'advertir diligemment Vostre Excellence. Et, au reste, la supplie vouloir continuer d'avoir mon païs en celle bonne et favorable recommandation qu'il luy a pieu tousjours l'avoir, et aussy dernièrement déclairer à mondict confrère , et, avec ce, prendre de bonne part que mondict chapitre ne se soit osé plus tost résouldre en ce que dessus , pour de tant mieulx éviter touttes calomnies et inconvénicnsqui en eussent peu suyvre. Et, espérant avoir un mot de lettre de Vostre Excellence sur ceste mienne , avec les pièces y joinctes, en feray fin par mes humbles recommandations à icelle, priant, monsieur, nostre seigneur Dieu

cljapitre, enjoignaient aux capitaines des places « d*en donner uuverUire, » et entrée et demeure en icelles, à tout secours de gens de guerre, Ici et à » toutt*heQre que hault et puissant prince monsieur le duc d*Albe y voul- » droit envoyer, » après que les chefs de ce secours et leurs gens auraient présenté un duplicata des mêmes lettres, et prêté le serment prescrit.

(') Le serment h faire par les officiers et soldats du duc d^Albe portait : qu*ils seraient fidèles et léaux à monseigneur le révérendissime et illustris- sime évéque de Liège, son église et pays; qu*ils garderaient Icalenienl, et de tout leur pouvoir, la maison et ch&teau ils étaient reçus, pour lesdits évéque, église et pays de Liège; qu*y étant entrés, ils s*y conduiraient hon- nêtement, en bons soudarts, sans faire ou souffrir qu^il fût fait aucune con- cussion, tort ou injure à ceux qui, de la part de Sa Grâce Révérendissime, y seraient, ni sur le pays et habitants à Tcnviron, et que, toutes les fois que, de la part dudit seigneur évcque, ils en seraient requis, ils sortiraient de ladite maison, la laissant audit seigneur évêque, sans, à l'occasion de la garde et défense d*icelle, prétendre ni demander aucune chose contre Sadite Sei- gneurie Révérendissime, son église ou pays, pour raison de ladite garde et service à lui, son église et pays fait, pour gages, salaires, ou pour quelconque autre occasion que ce pourroit être.

361 -

luy donner en parfaicte santé longue et heurcase vie. De Liège, ce xxV d'octobre 1568,

De Vostre ExcelJence l'eotlèrement à Juy faire humble

G^RARDT , évesque de Liège.

service ,

XIX.

L'Mque de Liège au duc d'Albe.

LiÉCB, 31 OCTOBRE 1568.

Monsieur, j'ay, sur ce poinct, receu cdie de Vostre Excellence de devant-hier, en conformité de laquelle avois aussy entendu que les ennemiz avoient la teste sur ceste cité, ou sur Huy, et con- tinue , d'heure à autre, à m'y pourveoir à rencontre, à tout mon povoir, en tous deux endroictz, merciant très-affectueusement Vostre Excellence qu'il luy plaise nous venir en secours , et veuil- lent espérer que, avec la grâce de Dieu, pourrons en tant soustenir l'ennemy. Et , quant à luy payer chose aucune , vrayment , mon- sieur, j'en ay autant peu de moyen comme en ay tousjours eu et eu ay de vouUoir et intention , n'estant à ce délibéré, tant qu'en en moy sei'a. J'espère que Vostre Excellence aura bien receu mes dernières du xxv® de ce mois , par lesquelles luy ay escrlt sur l'ou-. verture de mes maisons à donner au secours qu'il plaira à Vostre Excellence y envoyer, la suppliant voulloir particulièrement dresser quelque secours sur la maison de Huy, au plus tost que faire se puisse. Je suis en point pour envoyer devers icelle le prc- vost de Liège, pour luy dire ce qu'ay besoigné touchant l'ouver- ture de mes villes. Auquel me remectant , feray fin de cestc par mes humbles recommandations à Vostre Excellence, priant le

^

5«2

Ci*é«tcup donner à icellc ea santé longue et heureuse vje. De tiége, ce 4ei*QieF d'octobre, è six heures devant midy, 1 lf68.

Yostrê Excellence rentièremént à lay faire humble service,

GjâBARDT, évcsque de Liëge.

XX. - ^ ,

L'évéque de Liège m duc d*Albe,

LiicB, 5 NovEMims 1568.

Monsieur, j'ay receti, cejburd'hy mâtin, par le porteur de mon pecquet du xxv« du passé, la responce de Vostre Excellence sur icelluy pacguet, escrite k Ezemaie, du premier de ce mois, et, ^nyiron les îiîj heures après niidy , un* aultre lettre Vostre Excellence en mesme ditte. Je mercie très-a&ectueusemeut Vos^e Excelletice de la bonne affection dont il luy plaist s'employer à iiotis <ionner couraige. L'ennemy nous est sur ce poinct dcyant les portes, ^t se faict icy tout debvoir à luy faire rësistencé, en. sorte que je veulx espérer, en la grâce de Dieu, qu'on luy empeschera sa mauvaise volunté. Si prierois humblement Vostre Excellence qu'il luy pleust nous faire la faveur de secours de quelque demy-dou- zaine d'enseignes , et icelles de- nostre langue, sll estoit possible, ou bien Àllemandz^ afin qu'il y puisse avoir d'autant meilleur accord et/intelligenceei^tre kelles et ma bourgeoisie : faisant cheminer lesdictes enseigneis, le plus tost et promptement qu'il fust possible , par l'autre cost^ de la rivière, si qu'elles se rendent sur la porte du, pont d'Americourt.('), où, à toutt'heure de leur arrivée, avec attestatoires de Vostre Excellence, leur feray donner ouveifturé, et ne seront moins agi*éables et bien venues & madicle

<") D*Amercœur.

- 363

bourgeoisie, que à moy. Et, au reste, nous^ croistra de tant plos te eourai^ë (}u'eiitendrODS l'approcfao de Vostre Excellence, à kqpeîlc m'iray. bien humblement recommander , priant nostrc seigneur Dieu donner, monsieur, ^ Vostre Excellence tou(heQr et contente» Oleilt. De tiége, le ifj*' de novembre 1568, sur le soir.

Vostre Excellenee rentièrement k luy faire humble

service,

Gébarot, évesque de Liège.

"li^"^"""'"'»"*^»»"

XXI.

Vévéque de JLiég^ au duc d'Albe. LiÉoi, 3^N0fBiiBftK 4568..

« *

Monsieur^ suyvant celle que j'ay c^ourd'huy escril à Vostre Excellence^ sur ses deux dernières du premier de ce mois, pair laquelle l'uy advertié comment l'ennemy nous estoit cejourd'huy ▼eau devant les portes, et qu'espérions, Dieu aydant, luy fiaire résistence, et luy empescher sa mauvaise intention, priant Vostre Excellence nous faire la faveur de secours de quelque -clemy-^ou^ zâlne d'enseignes, de nostre langue, s'il.estoit possible, oii, au moins, d'Allemans,.afin qull y eûst d'autant meilleure intelligence et accord entrelesdictés enseignes et ma bourgeoisie^ ne puis laisser d'advertir Vostre Excellence que ledict enneAiy a commencé desjà à faire quelque trandiée^ et faict semblant de jtiolis batârel te prince d'Oranges m'a envoya encoir ee soir une lettre par trom-. pette ('), par laquelle il demande passaige par ceste cité el vivres ; je luy ay respondn qu'il nie linst pour excusé, obstaht les ordon- nances iuipériaUes (^). Et comme, après madiçlé response, j'àllens

(1) Cwl la lettre BXVll, |>. î», rinlcssus.

(') Cette réponse est celle qui est iosérée ci-dessus, p. 30.

> - .

3G4

que ledict prince essayera de faire ce qu'il pourra^ je m*avanceray & réitérer ma prière à Vostre Excellence de povoir, au plus tost et promptement que faire se pourra, avoir ledict secours, que Vostre Excellence pourra envoyer par Tautre costé de la rivière, afin qail se vienne rendre sur la porte de madictc cité., dicte la p(M*te du pont d'Âmericourt. Et , à toutt'heure que ledict secours arrivera, avec lettre de Vostre Excellence, ne fauldray luy faire donner ouverture, et sera agréable et bien venu, autant k madicte bour- geoisie, que à moy, laquelle est de fort bon couraige pour se défendre & tout son povoir , et de tant plus sera, entendant l'ap- procbe de Vostre Excellence, ainsy que j'ay tout cecy semblable- ment escrit par madicte précédente, et Tay bien vouUu répéter, tant pour le bening offre que Vostre Excellence m'en a voullu faîroj si auparavant comme encoir dernièrement, par le chevalier Cigoi- gne (duquel j'ay, à ce soir, receu la crédence de Vostre Excellence, et ouy ce que, suyvant icelle, il m'a dict), comme aussy pour le besoing que présentement en avons. Au reste , je laisse au bon plaisir et affection de Vostre Excellence vers moy et mon païs le secours qu'elle nous vouldra donner par dehors la cité, qui pourra^ fort empescherle desseing et en(,reprinse de l'ennemy. Et sur ce , monsieur, m'iray bien humblement recommander à la bonne grâce de Vostre Excellence, priant le Créateur donner à icelle en santé longue et heureuse vie. De Liège, ce iij® de novembre, vers minuyct, 1568.

De Vostre Excellence l'enlièrement k luy faire humble

service,

Gérardt^ évesque de Liège.

k

r

365

XXII.

L'évique de Liège au due d'Albe.

LiKGB, 5 NOTBHBRE 1 568.

Monsieur, depuis ma dernière d'hier soir, Tennemy, inconti- nent après mynuict, a faict semblant de livrer Tassault à ceste cité : mais, voyant les nostres bien en ordre et animez h luy faire rësis- tence, semble que sur ce poinct il s'en va retirant, et ne sçavons enooir vers il tient la teste. Et partant, j'envoye en diligence vers ma ville de Huy à advertir le colonnel de Montdragon (*) de ce que dessus, si d'adventure l'ennemy se voulust retirer vers cest endroict-U, et ne fauldrons de luy envoyer, au besoing, ce que povons avoir icy de secours. Aussy tost qu'aurons quelque plus grand esclarcissement et asseurance vers l'ennemy pré- tend de tirer, Vostre Excellence en sera advertye. Au reste, l'en- nemy a usé de son accoustumé h l'encontre des maisons de Dieu et monastères d'alentour de ceste cité, y ayant boutté le feu, et espéciallement en l'abbaye de Saint-Lorens et Saint-Gilles, dont j'espère que la justice divine ne tarde à luy en paier ce qu'il mérite. Sur ce, monsieur, après mes humbles recommandations k la bonne grâce de Vostre Excellence, je prie le Créateur donner à icelleen santé longue et heureuse vie. De Liège, ce v* de novem- bre 1568, à six heures devant midy.

De Vostre Excellence l'entièrement & luy faire humble service,

GéRARDT, évesque de Liège.

(1) Voy. ci-dessus, p. 334.

366 -^

, xxm.

- - - VévAffuedt Liège au dut iVAlbe. .

.

Liias, 3 NovBMBth 4068. .,

. : , : : i r

Monsieur, ta présente sera en conformité d'un* i^ultre que j'ay dépesché vers Vostre Excellence cejourd'huy, quelques, heures passées^ paç l'adverteis comment l'enneray, peu d^tieures après mynuict dernière, a faict semblant de nous youlloir donner l'as- sault^ mais, nous voyant bien en ordre et animez .i luy faire résistence, donna apparence de se retirer, sans avoir assailly^ •ayant boutté le feu en aucuns monastères (et espéçiallement ceux de Satnt-Lorens et de Saint^Gilles, tout près de ceste cité) et autres muisons aux faulxbourgz d'icelle. Et sembloit, jusques alors quo j'escriveis madicte dernière, que I-ennemy ayoit la teste vers ma ville de Huy. Je me doubte que Vostre Excellence ne reoevjni madicte lettre devant ceste, pour ce que, lorsque je l'escriveis, je ne sçavois bonnement Vostre Excellea.ce se trouvoit i mais, m'estant depuis venue celle de Vostre Excellence d'hier, escriûs ik mon chastelain de Huy , qu'icelluy chastelain m'envoya^ o^y voullu. laisser de dépescher ce porteur, pour dire que^ attendu la rèû'aicte de Tennemy vers ledict Buy, j ay. cootreniandé le S'co- lonnel Mondragon, Cistant (commis je présume) en chemin pour nous venir secourir icy, afin qu'il s'en riçtourne.ver^ ledict Huy. Et, selon que je m'iray, d'instant à autre, éclerdssant de plus eu . plus que Tennemy a la (este vers ledict Hyy, je prendray partv d'y renvoyer le capitaine Vilain avec son enseigne, et auâ$y unc- autre mienne enseigne. Sur ce, etc. De Liège, ce v** de hovem-^ bre 1568, à un' heure après midy.

De Vostre Excellence l'entièremeut i\ luy faire humble service,

Gébardt, évesqbc de Liège.

«

567 -

« I

0.

NÉGOCIATIONS

SBCItETK9

AVEC LE PRINCE D'ORANGE,

U\i 1573 A 1575.

Déclaration de Philippe de Màrnix) S^ de Sté-Aldegonde'y su)* les conditions auxquelles le prince d'Orange consentiraità poser les armes et à quiUer le pays.

La Haye, 21 NcyrKStBRB \^7Ô.

Je, PhiUppe de Marnîx, estant demande par mons' de la Mqitiev en prëéence de mons'' Valdcz, mestre de camp, sur qoel^ueseer*- tains poinctz que j'avoy, ces jours passez, touchez en une inien^c lettre addressante à monseigneur le prince d'Oranges (■), sur quelles conditions je estimoye qne iedict S' prince d'Oranges vouldroit entendre, pour remectre ce pais en union et tranquil-' lité, ay respondu, selon mon jugement et opinion, sans préjudice de personne, que, tant que j'ay peu cognoistrele cœur et intcn* tion de mondict S' prince, par sa conversation et propos qu'ay eu

^») Voy. c.i-dcssus, p. 7") oi 88.

et entendu de luy, son but et intention n'estre aulcunement de usurper quelque chose sur la grandeur ou magesté du roy d'Es- paigne, ny pareillement d'esmouvoir les subjeetz d'icelle à quelque mauvaise affection contre Sadicte Magestë, et que pourtant je me persuadoye, corne je me persuade encoires à présent, que, s'il plaisoit h Sa Magesté, par sa clémence royalle, d'ocfroier à ses subjeetz et vassaulx, lesquels, pensans faire leur salut, se sont retirez de l'obéissance d4i pape de Rome et de la religion ancbiennc romaine , pour suivre une aultre qu'ike nomment réformée ou évangélicquc, qu'ilz peussent vivre en liberté de leurs consciences, fust'Ce déans les pays et terres du Roy, \h il plairoit h Sa Majesté ordonner, ou bien hors desdicts pays, avecq la jouyssance de leurs biens, pour se povoir soustenir, mondict S*^ prince seroit bien content de poser les armes, et quicter le pays de par deçà, quant à sa personne. Aussy j'estime et me persuade, touttesfois sans préjudice de personne, qu'il induirat les estatz et aultrcs à qui il touche, de faire le mesme. Tant y a que je m'asseure bien, quant h ceulx qui bien entendent ce faict, et sont esté esmcuz du zèle susdict de leur salut, n'en feront nulle difficulté ; voire, en quelque endroict qu'ilz soient, se tiendront tousjours pour subjeetz de Sa Majesté, et seront très-prestz d'exposer leurs vies en tout service, Sa Majesté sera servie de leur commandeis et de paier telles impositions, tailles et charges comme par Sa Majesté seront ordonnées et mises sur le pays, sans faire difficulté en chose qu'il plaira h Sa Majesté leur commander. Faict ce xxj® de novembre 1573.

Copies du temps, aux Arehirea de Simanns : PapHei dtEêtado, liasses 558 et 1403.

369 --

11.

Lettre de Philippe de Ste^Aldegondey S^de NoxrcarmeSj au due d'Albe, sur l'examen qu'il a fait de Philippe de Mamix , mr les lettres de celui-ci au prince d'Orange et la réponse du prince^ et ^nfin sur le parti qu'il compte encore tirer de Mamix.

UtUCHT, 10 DiciMBEB 1S75.

Monseigneur, suyvantmon miseii avant à Yostre Excellence^ et le commandement que îcelle m'a faict^ partant de ce pays, j'ay envoyé, par diverses personnes, es villes tenans partie contraire, les induite à rendre l'obéissance qu'ilz doibvent à Sa Majesté, et, suyvant ce, je me suis assez appercheu que les advertences de tous costez envoyés dont esté aux estatz occasion de s'estre rassem- blez avecq le prince.

Aussy, conforme au commandement de Yostre Excellence , Philippe de Mardix at esté amené en ceste ville et au chasteau. L'ayant, le mesme jour de son arrivée, mandé vers moy, l'ay examiné sur les intelligences que le prince povoit avoir eu avecq les villes de Hollande : à quoy m'a respondu que ledict prince n'en avoit eu nulles avecq icelles, mais bien entre aulcuns particuliers et de petite estouffe, lesquelz l'ont sollicité^ disant que, venant en icelles, chascun grendroit aan party, actendu que le pays estoit générallement tant altéré, pour aulcunes raisons qu'il déclaira spécificquement, que l'occasion luy serviroit, moyennant qu'il la print à son temps.

Quant à Mons, a déclairé n'y avoir eu aulcune personne entre- mis pour ieelle, sinon ung nommé Anthoine Olivier, Tourqueau et ung aultre duquel il ne sçait le nom, que je pensé estre Henry Fiefvé, dont les deux estiont banniz ; mesmes, que le prince et tous deux la tenoient pour une folle et incertaine entreprinse, en tant que, le jour qu'ilz entrarent en sy petit nombre que chascun sçait,

\h n'avoycnt que sept hommes h leur dévotion en ladicte ville, III. 94

370

assavoir, comme le présuppose : les trois prénommez et quatre estrangiers, franchois.

En Zellande, et signament h Flissinghes, n'y at eu aulcune intel- ligence (h ce qu'il dit) : mais, estans lesdicts de Flissinghes révoltez, ont envoyé au prince, afïin d'avoir son assistence : de quoy, de prime face, il fut bien esbahy, disant que surtout il n'eust jamais espéré de ce costé-là, l'attribuant & permission de Dieu ; mesme- ment, que le prince print de fort mauvaise part, quant il entendit que Lumez (') s'estoit emparé de La Briele, ayant déterminé pour cela ne se bouger en façon nulle, comme il n'eust faict asseuré- roent, n'eust esté ce que depuis succéda audict Flissinghes.

Je pense bien, pour le rooings il est à présumer, que, estant pressé, s'il ne demeure pertinax, comme Vostre Excellence at ven faire casy tous les aultres, il en pourroit peult-étre dire davan- taige : mais, comme cela est incertain, et que je ne doubte Vostre Excellence se contentera que je me serve de luy en l'affaire que j'ay en mains, pour la réduction des pays de Hollande et Zellande, il ne m'a samblé convenir le debvoir faire, car, si je ne me trompe, il y fera des bons offices.

Le seigneur de la Motte, quy l'at amené, m'a délivré la lettre dudict prince et des estatz, dont le double va cy-joinct (*), respon- sive à deux dudict de Marnix; aussy ung acte du xxj* de novem- bre 1575 (^), et la copie de' celle que ledict de Marnix at respondu au prince et estatz (4).

La lettre dudict prince est faicte h sa poste, et contient beau- coup des choses estranges et hors de propoz. Mais je ne m'y aireste pas beaucoup , moyennant que l'effect que Vostre Excellence désire, se consuyre : de quoy, si je doiz dire vray, je ne suys du tout hors d'espoir, d'aultant que j'entens de bon lieu que les estatz pressent ledict prince, désirans se réconcilier avecq Sa Majesté, soubz la certaine confidence qu'ilz ont que Sa Majesté usera vers

(0 Guillaume de la Marck, seigneur de Lumey et de Seraing. (*) Celle du 28 novembre, insérée ci-dessus, p. 88. (') Celui qui précède.

{*) Cette réponse est la lettre du 4 décembre, que M. Gaobii vaic PMNSTBncn a publiée. Voy. ci-dessus, p. 95, note t.

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culx de dcmence, bénignité et grâce. Aussy, sy Voatre Excellence considère bien ladicte lettre, notamment la conclusion d'iceile, elle verrat assez clairement à Tœuil, en trois ou quatre poinctz d'icelle, qu'ilz le confessent assez, et le désirent encores plus : à quoy accédant l'asseurance^ que ledict de Marnix me donne, sçavoir bien que, nonobstant toutes les difficultez qu'ilz allèguent, ledict prince entendra volontiers à quelque communication, sans s'arrester aux difficultez qu'il diet, me cause l'espérance que j'ay« Et, sy Yostre Excellence me demande en quoy consistera la prin- cipale et dernière difficulté, je dirai qa'ji mon advis, ce sera sur laisser sùyTre leurs biens, ou partie d'iceulx, aux personnes quy, nonobstant le pardon de Sa Majesté, ne veuUans abbandonner leur secte, se vouldront retirer hors du pays ; et cela se voit amplement par l'acte déclaratif que ledict de Marnix at faict de son intention, sur la première lettre qu'il a escript au prince, duquel il dict assez avoir sceu la volunté par forme de conversa- tion, et encores plus par ladicte lettre, quant il dict ces motz : «(Et, » quant il ne leur vouidroit laisser snyvre les biens, encoires ne » voy-je poinct que leur condition seroit beaucoup plus pire » qu'elle est maintenant en ceste triste guerre, la fin de laquelle )i ne peult estre aultre que pouvreté et 'misère extrême de tout le )i pays ('): » ce qu'il confirme tousjours de nouveau touttes les fois qu'il en est demandé.

Et, d'aultant que , passant ceste affaire oultre, il pourreît estre qu'ilz demanderiont (entrans en communication) ex qtta patestate hoc faciSy Vostre Excellence advisera s'il conviendrat avoir quel- ques lettres ou commission de Sa Majesté, en forme requise , ou- quél ('} cas sera, ce me samble, nécessaire m'adjoindre quelque conseiller et secrétaire, ou, pour le moings, ung secrétaire, lequel je désirerois estre fierty, tant pour ses qualités et souffisance, qu'aultres raisons non hors de propos. Et , combien que Yostre Excellence me face ceste faveur, de se confier tant de moy,quede remectreà moy seul ce faict, dont je la remercie très-humblement,

(•) Voy. ei-dcssus, p. 78. (') Owpiel, auquel.

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sy me samblMl convenir au service de Dîea et de Sa Majesté ne laisser ung sy grand faiz du tout à moy : laissant à part qtte jus^ teroent je pourrois estre taché de grandissime présumption. Je pense bien qu'en cas que Vostre Excellence soit déterminé mectre une fin à ces guerres civiles et rébellions par ceste voie, laquelle Vostre Excellence escript estre la meilleure, elle se résouldra, si elle envoyé quelqun à cest effect, de sti souvenir du proverbe : Si vis mitiere, mitte gratum^ mais soubz correction toutesfois.

Je feray examiner Mamix encores une fois ^ et mectre son dict par escript par l'auditeur, affin que Vostre Excellence le voyepltis particulièrement , mais sans le presser, jusques à ce que je voye quel progrès aura ma poursuyte ; lequel (■') je supplie Vostre Excel- lence ne trouver mauvais que je retiègne icy jusques à en veoir la fin. Vostre Excellence sçait qu'en toutes choses, pour les bien

moyenner, il faut ung , et ce que le reflEt^in en espagnol dict

à ce propos : veuUant bien dire à Vostre Excellence que, sy cest homme ne faicttout ce qu'il pourra afin que le pays se réduise soubz l'obéyssance de l'église romaine et de Sa Majesté, je ne m'y cognoy poinct; et , au pis-ailer, il n'y at aultre inconvénient que différer h quelque temps procéder contre luy, quy n'est grand, à mon jugement, puisque c'est principallement pour les choses passées.

Je n'ay poinct voulu refraindre du tout les passions que ledict de Mamix at au faict de sa secte , ayant seuUement rendu peine qu'il mist ce qui faisoit au cas pour persuader la communication, affin de, par icelle, parvenirau but que Vostre Excellence prétend, à cause que, sy j'eusse faict aultrement, le prince d'Oranges eust peu présumer que sa lettre estoit forchée, et non escripte proprio tnotu : quy eust causé, plus de soubçon et moings de force vers ledict priUce.

Je supplie de, en toute diligence, avoir responce de Vostre Ex- cellence (') , car je présuppose que, quelque tost qu'elle viègne , j'fluray eu nouvelles du prince et des estatz. Quy est, monsei- gneur, l'endroit où, me recommendant très-humblement à la bonne

Ç) (Test de Marnix qo*il parle ici.

(*) Ce fat le grand commaDdeur de Gastille, don Luis de Reqaesens, qui répondit à Noircarmes. Voy. ci-dessus, p. 75, note t.

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gfèeede Vostre Excellence, je prie Dieu impartir à icelle, en pros-> périté, la sienne. DIJtrecht, le x* de décembre i575.

De Yostre Ei^cellence très-humble et obéissant serviteur,

P. DE NOIRCARMES.

Copie da teapt» aox Archives d^ SimaBeas PupêUi dt BêUub, liaeie Ml .

m.

Instruction donnée par le docteur Etbertue Leoninus à ffugo Bonté, ex-pensionnaire de Middelbourg, envoyé par lui vers le prince d'Orange, pour l'entretenir des intérêts de la dame de Vredembourg, et l'engager, d cette occasùm, d se réconcilier

avec le Roi; suivie du rapport de Bonté (■).

Sans datb (ateil 1574).

Premiers, il présentera ma lettre de crédence à Son Excellence^ suppliant qu'il plaise à icelle l'entendre» avecq ce que, suyvant

(1) Le grand commandeur de Caslille éerivail ù Philippe 11, le 15 mal 1&74 : « Les ennemis ayant, le mois passé, arrêté et mis en prison madame de

Vredembourg, un docteur Leoninus, qui est professeur à Louvain et homme 9 honorable, me demanda la permission d*envoyer ua ex-pensionnaire de » Middelbourg, qui est aussi un digne homme, pour traiter avec le prince 9 d^Orange des affaires de ia4itedame. Je la lui accordai. Leoninus croyait que » son envoyé pourrait, a cette occasion, apprendre du prince s^ii avait quelque » espoir de la clémence de V. M., et quelque intention d*y recourir. V. M. » trouvera, ci-jointe , copie de Tinstruction que Leoninuç dit avoir donnée à Tex-pensionnairo, et de la relation que celuirci a faite de sa négociation a avec le prince. » (Archives de Simancas, Papeies de Estado, liasse 598.)

Leoninus était bien connu du prince d'Orange, avec qui il avait parlementé, de la part de Tuniversité et de la ville, lorsque le prince s'était approché de Louvain, au mois.de septembre 1972. 11 avait eu même avec lui des relations antérieures et asseï intimes, comme nous l'apprend la proposition que le grand commandeur de Castille fit, le 24 novembre 1574, h l'assemblée du

- 374

ceste instruction, sera déclaré diserètemeal, afin que ledictElbeiv tus Leoninus ne viègne en dangier.

Item, déclarera que, considérant la nature et inclination de Son Exccllenee, et ayant veu le regret, la paine et travail faict par Son Excellence, devant son premier partement du pays, pour oster toutes soubçons, et rentrer en la bonne grâce de Sa Majesté, j'ay faict touttes consolations (?) et intercessions possibles pour redresser les affaires ; ce que lors n'est succédé, mais sont ensuy vies incon-* venions plus grands.

Durant lequel, j'ay tousjours esté enclin ad consilia pacts, et faict mon mieulx vers les seigneurs et bons personnaiges de ma cognoissance, pour mouvoir Sa Majesté affin que, par voye de clémence, les pays pourroyent estre remis en repos et tranquillité, et que Son Exeellence pourroit estre receu en grâce, comme m'a tousjours samblé que Son Excellence désiroit, et mesmes déclai- roit encores assez dernièrement à Louvain et Malines (*), comme j'ay aussy depuis déclaré aux bons personnaiges, il venoit à propos, pour (sy avant qu'il seroit possible) adresser l'affaire, assou- pir la grande guerre, et éviter ultérieur dégast et ruyne de tous innocens et bonnes personnes.

Et comme, depuis, encores plus grands inconvéniens en sont ensuyviz, et que les affaires en sont en estât quy est & présent, sy est-il qu'il trouve la meilleure occasion q^'il pourroit estre pour venir en repos, par l'affection et bon vouloir des bons personnaiges

conseil d*État, des évéques, des ^ouverueurs et des chefs des conseils de justice des proYinces. Requesens dit, dans cette proposition, en parlant de Leoninus : « Quelque bon personnaige, honune ponfident et délateur du bien » publicq, ayant eu cy-devant grande familiarité avec le prince, et auquel, » à son partement de ce pais de par deçà, avoit déclairé plusieurs secretzj » mesmes qu'il luy déplaisoit grandement estre tombé en disgrâce de S. M , et » ne désiroit que rentrer en la grâce d*icelle, comme cncoires depuis il luy » avoit faibt entendre, auroit requis de pouvoir faire quelque office pour » assentir présentement la disposition dudict prince : ce que S. £. n*a voulu

» rejecter » (Archives Royaume, papiers d*Etat : reg. Nàgaciaiitm

de Breda, 1574-1 57S, t. J , fol. 4.)

(0 Lorsque le prince avHÎt occupe Alalincs et était venu jusqu^auz portes de Louvain, en 1^7)2.

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quy vouldroient vouluntiers éviter ultérieure guerre et plus grans inconvéniens : à quoy Son Excellence pourroit donner bonne matière et plus grande occasion, s'elle estoit de la mesme inten- tion, et pouYoit permectre et laisser intercéder, non par manière de formel traicté quoy, comme est à présumer. Sa Majesté ne Touldroit entendre), mais par voye et tiltre de clémence, grâce et pardon, comme entre supérieur, vassal et subjectz est accoustumé, et selon droîct appertient : et présume que Son Excellence, estant aultrement bien asseuré par l'intercession des aultres princes et potentatz, ne désire aultre chose.

Et samble (soubz correction) que Son Excellence, pour soy remectre, avecq ses enflants, amys et pays ayans tenuz son parti, en repos, ne doibt laisser passer ceste occasion, considérans les grandes ruses {') et dangiers passez, et que la fortune de guerre est variable par légières occasions, principallement quant la guerre est fundée sur le commun, à toutes heures variable, et que jamais on ne faict meilleur party, en semblables appaisemens, que durant la prospérité.

Davantaige, vient bien à peser le grand dommaige et oppression de plusieurs innocens, avecq aultres inconvéniens quy pourroient encores ensuyvre et venir à la charge de Son Excellence, persé- vérant en la guerre non nécessaire, depuis qu'icelle peult venir en repos , oultre le dangier de la grande puissance , alliances et aultres moyens que Sa Majesté peult avoir, pour enfin avoir la réduction de ses pays et subjectz.

Priant pourtant qu'il plaise à Son Excellence meurement con- sidérer et peser cest affaire, et me faire tenir telle responce, d'es- cript, ou débouche, comme Son Excellence trouvera convenir. Je ne délaisseray prier Dieu et m'employer (comme j'ay faict tous- jours) pour le repos et bien publicq.

Je, Hugo Bontius, confesse avoir rcceu semblable escript de monsieur le docteur N., pour l'exploicter il appertiendroit, en

(0 RtueUf travaux, peines.

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verlu d'une letlre de pecommendàtion et crëdeDce touchant le con^ tenu de ceste instruction, ensamble des affaires de madame de Weerdembourg et miennes.

Quoy ensuyvant, en vertu d'appostille mise sur ma rcqueste, et ayaQt receu saulf-conduict du prince d'Oranges, impétré par les gens de Weerdembourg, me suis traùsportë, le xix'd'apvril i574, de Bois:le*Duc en la ville de fiommel, ledict prince estoit ; et, le trouvant hors la porte et visitant les rempars et fossëz, et ordon- nant munition de ladicte ville , ay présenté ladicte lettre de recommendation et crédence, suppliant de la vouloir bénignement reccpvoir, et me donner audience en conformité d'icelle, et ce à part, ailih que lêdict docteur ne tumbât en dangier.

Sur quoy , recepvant la lettre susdicte , il me respondit qu'il estoit pour lors empesché , mais que luy suyvroie en son logis ;

et , me présentant à son logis , entrant avecq

pluisieurs aultres, me voyoit et touchoit son chappeau, sans me parler root ; et , voyant qu'il passoit l'heure de disnier, et qu'on se mectoit à table, je suis entré en une hostellerie.

Et, iooontinent après le disné, suis retourné à sondict logis; et, sytost que je suis venu, il me faisoît appeller par ung de ses gens, et entrer en sa chambre, et le secrétaire sortir, de manière que j'avois opportunité d'en parler secrètement, et en absence de tousaultres.

Et, après la révérence et recommendation faicte, j'ay, de la part de monsieur le docteur, prié, suyvant ma charge, qu'il plai- roit avoir pitié de la dame de Weerdembourg, ayant respect a sa qualité, maison , charge des enffans et excessives pertes et cala- mitez, et que luy plairoit donner ordre que ultérieure démolition de la maison ne seroit faicte, et qu'elle pourroit avoir relaxacioii de la saisine de ses biens, et que sa maison et village d'Ammeroy (■) pourroit estre conservé à ladicte dame, sans semblable ruyne, et que, à ceste occasion , ledict docteur estoit arrivé audict Bois-le- Duc, pour assister de conseil à ladicte dame , selon les obligations qu'il tenoit anchiennementà ladicte maison de Weerdenburch.

Pour le dcuxicsme poinct , je dcclairoys que j'cstois natif de

(I) Amcrougeu (?).

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Middelbourg , m'ayant tenu , avecq la vefve de mon frère et son pupille , depuis l'an xv"* Ixviij, en Brabant ; me tenant présente- ment aux estudes de Louvain chez le docteur Leoninus , et que j'avoye à pousuyvre certain procès en la chancellerie de Brabant y ayant tralctë ladictc vefve de son second mariage avecq ung de Tournay, et estant le susdict pupiUe à l'escoUei Gand : suppliant, à l'occasion susdiete, luy plairoit avoû* excusé nostre absence, sans saisir ou laisser occuper nov biens en vertu des placcartz publiez en Hollande et Zellande.

Dernièrement, je disoye d'estre enchargé, par ledict docteur et de sa part, luy déclarer en confidence, secrètement, certain poinct d'importance concernant le bien et repos publicque, priant d'y vouloir entendre bénigoement.

Quoy ensuyvant, j'ay déclairé les poinctz et raisons contenues en la susdicte instruction, sans riens obmectre ou excéder, et sans toutesfois exhiber ladicte instruction ; et, après avoir le tout déclairé, je disoye la chose du dernier poinct estre d'importance, et luy phurolt meurement y considérer et peser, et me donner telle responce, d'escript, ou de bouche, comme lui trouveroit appertenir.

Sur quoy I premièrement , estant debout et après quelque temps assiz^ il me respondit, par ordre et de poinct en poinct , comme s'ensuyt, et est la responce en substance telle :

Quant à la dame de Weerdembourg , qu'il regrettoit fort le désastre à elle advenu, mais qu'elle se le debvoit imputer, n'ayant voulu rendre la maison, estant deux ou trois fois sommée, et après que la garnison, estant sur ladicte maison, endommageoit ceulx de Bommel et les lieux circunvoisins, ayans pillé la maison et villaige du capitaine de Bommel, de sorte que, à la grande instance dudict capitaine et aultres de Bommel , il n'avoit peu aultrement faire, déclairant qu'il ne povoit deffendre l'ultérieure démolition de la maison, k cause de l'assiète, et qu'estant derechief amparé , elle pourroit endommaiger ceub dudict Bommel; et, quant à la maison d'Ammcroy et ses biens , qu'il avoit donné certains arti- cles, ausquelz sy elle se conformeroit , n^auroit plus grands dom- maiges, et seroit la maison d'Ammeroy conservée ; mais, sy la

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garnison estant audict Ammeroy y demeuroit , qu'il seroit con- strainct de faire le semblable au faict de Weerdemburch , sans toutesfois me monstrer ou déclairer lesdicts articles.

£t , quant à mon faict , respondit qu'il regarderoit la requeste. avecq meilleur loisir, demandant la spécificacion des biens, laquelle disoye ne povoir promptement exhiber, priant de vouloir avoir pour recommandé ma requeste : ce qu'il déclairoit vouloir faire.

Touchant le dernier poinct, le confessoit estre d'importance, et qui requiroit meurement estre délibéré et pesé; mais, à cause qu'il avoit auparavant considéré et communicqué avecq les cstatz de Hollande et Zellande semblables poinctz et raisons, qu'il povoit promptement respondre : disant, en premier lieu, qu'il cognoissoit l'inclination dudict docteur au repos pubh'cq, et que luy remer- cioit d'une sy bonne affection, estant bien aise de l'entendre par ceste advertence ; ensemble, qu'il remerchioit les bons person- naiges qu'ilz avoient semblable vouloir et désir, et que de luy on pourroit asseurer qu'il ne désiroit aultre chose que veoir l'union des pays et repos publicq, et que pour ce prioit journellement Dieu le Créateur, et que au mesme effect l'Empereur et aultres avoient intercédé, et luy avecq les estatz de Hollande et Zélande avoyent supplié que Sa Majesté, bénignement et par sa clémence et naïfve bonté, vouldroit remectre le pays en repos, mais que jamais oncques ont peu estre oyz, et que pourtant ilz avoient faict imprimer dernièrement une de leurs requestes (') , pour estre de tant plus publicquc et entendue de Sa Majesté : disant qu'il craindoit que ultérieure intercession seroit aussy sans fruict et effect, et que le docteur et aultres personnaiges qui se vouidroient mesler de ladicte intercession pourroient venir en dangier, et estre frus- trez de leur bonne intention. Et, quant k l'intercession par voye et tiltre de grâce et pardon, disoit que à icelle luy ne povoit donQer charge de sa part et sur son nom, ou absolutement déclairer d'en estre content, actendue l'union qu'il avoit avecq les estatz susdicts, et que telle dédairation, sans consentement desdicts estatz, causeroit préjudice k l'union susdicte, subçons et arrière-

(1) Elle est dans P. Bor, i\cda'landlëc/ie Oorioghvn, liv. VI, fol. 3i2.

379

I

i I

pensées de ses gens, et troublement entre lessouldlttz, et que ies- dicts affaires touchoient de plus ausdicts estalz , desquelz il estoit serviteur et eslu deOendeur : déclairant qu'il se eonformeroit à ce que par lesdicts estatz seroit trouvé raisonnable ; faisant néant- moins de la paroUe de pardon quelque difficulté, vcu qu'en vraye et pure conscience, comme disoit, devant Dieu et les hommes, ne povoit trouver avoir offencé Sa Majesté, ains que, de sa personne, avecq le dangier de sa vie, avoit voulu servir, pour conserver le pays en Fobéyssance de Sa Majesté, en la dernière sédition faicte en Anvers, du succès et événemens duquel dépendoit tous les aultres pays et villes, combien pour ce avoit receu mal- contentement, et que luy at esté proscrit, ses biens confisquez, son enfiant du pays et de luy esloigné ^ et ce sans forme légittime de Justice, ou estre légittimement admis à ses deffences : dont at esté eonstrainct et nécessité, selon le droict de nature, de se mectre à défence par aultres voyes (en cas de justice déniée) permises, et que les susdicts estatz avoyent aussy bien justes raisons de leurs deffences.

Adjoustant, toutesfois, qu'il luy sembloit qu'ultérieure voyc d'intercession n'estoit nécessaire, et qu'auroit long train, mesmes incertain et subject k pluisieurs événeinens , et que, actendu les requestes et intercessions précédentes. Sa Majesté povoit faire dédairation, sans forme de quelque traicté, en donnant si bons moyens et raisonnables, et asseurances sy fermes, que lesdicts estatz avec luy s'y pourroient fier et asseurer, et que luy trouvoit bon préalablement ausdicts estatz communicquer lesdicts moyens et seurtez, disant de craindre la difficulté des moyens et asseurance.

Et, quant aux raisons et moyens adjoustez par ladicte instruc- tion, pour mieux persuader, disoit qu'il sçavoit bien les ruses et variations de guerre, mesmes fundéessur ung populace, mais que les estatz de Hollande et Zellande avoyent mis tel ordre qu'il espé- roit que par le populace n'adviendroit quelque désordre, et que, sïl advenoit quelque adversité , qu'il ne seroit en paine , comme ayant assez vescu, et qu'il mourroit avecq quelque gloire, regret- tant toutesfois les dégastz et oppressions qui se commectoyent, mais disoit qu'il ne sçavoit remédier.

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Et, quant k la puissance de Sa Majesté, disoit qu'il cognoissoit Sa Majesté estre très-puissant , mais qu'il y avoit un roy plus puissant, à soavoir Dieu le Créateur, espérant qu'il seroit pour luy; adjoustant que luy avecq lesdicts estatz seroit bien aise, sy Sa Majesté (comme le bruict estoit) se trouvoit par deçà : car espéroit qu'îoelle, estant par deçè, et voyant le désordre de son pays, entendroit plustost leur juste querelle, ou que, aultrement et en tous événemens, ilz auroyent moyen de tenir du moings quatre ou cincq places, par deux, trois ou quatre années, durant lesquelles pourroient survenir teUes interventions dont Sa Majesté seroit esmerveillé.

Enfin il déclairoit qu'il laissoit et vouloit bien que ladicte inter- cession se feroit, mais ne povoit donner cbarge, sans le consen- tement desdicts estatz, que ladicte intercession se feroit en son nom et à son instance, répétant aulcunes fois qu'il craindoit que icelle intercession seroit sans effect, comme les précédentes, mesmes actendu que, discourrant sur les personnaiges estans encores vivans, il disoit que les aulcuns estoient trop jeusnes pour ung tel affaire, les aultres de quelque pois, mais que, allentour de Sa Majesté, il auroit des aultres au contraire, de plus grande autho- rité, tallement qu'il craindoit que lesdicts personnaiges seroyent trompez, et qu'il seroit dolent, sy ainsy advenoit à son occasion : faisant la principale difficulté sur la garnison estrangière, demeu^ rant laquelle disoit estre impossible de tenir bon moyen d'appai- sement ou d'asseurement, et qu'il craindoit que Sa Majesté ne vouldroit laisser sortir ladicte garnison du pays ; se référant tous- jours à ce que lesdicts estatz consentiroient ou accepteroient, sans Tadvis et consentement desquelz il ne povoit riens faire oultre le contenu de la requeste imprimée, à cause de ladicte Union.

Sur quoy réplicant, disoye n'avoir charge d'entendre aux justi- fications et raisons deffensives par luy déclairées, et moyens de proposer, ou examiner les moyens ou asseurances, mais tant seul- lement d'entendre qu'en donnant bons moyens et asseurances, sy se consentiroit que en la intercession l'on useroit de voye et tiltre de grâce et pardon, veu qu'icelle estoit convenable au cas présent, et à luy^ comme vassal, honnorable, et aussy proufitable au pays,

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meames plus solide et ferme que formelz traictez, actendu que tels engendroyent souyentesfois une aigreur du supérieur contre son vassal et subject, ee que cesse par voye de démence, grâce et pardon, et est du meilleur cffect et plus solide. A quoy dupli- cant^ il disoit avoir faict ces discours, tant de deffences que moyens et assenrance, pour tant mieux donner à entendre la matière, et que, de se contenter d'intercession par tiltre de grâce et pardon, il ne povoit donner aultre particulière déclaration que dessus, pour rintérest et raisons susdictes.

Ainsi faisant fin, je prioye qu'il plairoit sur ce donner ung mot de lettre : ce qu'il proûieit et en a faict, m'ayant, par son secré- taire^ faict délivrer, le jour ensuyvant, une lettre close avecq une requeste imprimée, pour les faire tenir es mains dudict docteur. Et suis ainsy incontinent party de là, ayant, à mon retour, rendu ladicte lettre, avecq ladicte requeste, es mains dudict docteur.

Copie da temps, aux Arehivei deSimencts : P^pêUi dt EUttdo, liasse 558.

IV.

Instruction donnée à Hugo Bonté, envoyé une seconde fois au prince d'Orange par le docteur Leoninus^ et rapport de Bonté (').

( Tradoetion du franfats.) 29 iOIN-i JUILLET 1^74.

El declarara que el doctor, haviendo entendido la respuesta que el principe dié en Bomel, y hecho relacion délia a los senores y

(1) Je ii*ai trouTé, ni aux archives de Bruxelles, ni dans celles de Sinlancas, le texte origiùal de ce document.

J*ai essayé d*en faire connaître la subélance en français, pour les personnes qui n^entendentr pas la langue espagnole.

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personages, teniendo el negocio muy a cargo, ha hecho su dever para passarlo adelante, y que los dichos senores han dado parte al senor comendador mayor de cierta platica tocante al repose y tranquilidad publica. Y, porque saben que Su Mag^ es indinadoa dulzura y demencia, y que el principe, por la dicha respuesta, decia que Su Mag^ podia, sîn otra interoesion y formai tratado, hazer, por su clemencia, declaracion con medios razonables, comunicados a los stados de Holanda y Zelanda, a los dichos senores parece conveniente que el principe, con los dichos esta- dos, embien algunos diputados, personas discretas y pacificas, al pays de Lieja, es a saber a Guringen, Stockem 6 Hassel, para alli, con algunos de los dichos senores de authoridad y peso, entrar en comunicacion, declarar sus puntos y difficultades que pueden tener, allende el perdon, para que juntos preparen los medios assegurados de la pacifieacion, y ponerlos en razon, de tal manera que se puedan mostrar a Su Mag^, y moverle a passallos por su clemencia, y esto devajo de bueno y seguro salvo conducto, tanto del dicho senor comendador mayor, de la parte de Su Mag"*, como del obîspo de Lieja, lo uno y lo otro sin perjuicio de ambas partes : queriendo advertir sinceramente que, como los dichos senores y el dicho doctor son cathélicos, no podran ni querran hazer instancia con Su Mag^ tocante a alguna mudanza de la fee y reli- gion cathôlica ; visto assimisrao que los otros stados del pays, en su ultima requesta, han declarado querer vivir y morîr en la fee cathélica romana, pero que de otra manera ellos speren, allende la razonable satisfaccion para dar a los dichos stados, a acomodarle a él por su persona y bienes, para que pueda quedar en reposo y vivir en seguridad, y ser reduzidos los paises en union y tranqui- lidad.

Haviendo recivido yo esta instruccion de mosieur el doctor Elbertus Leoninus, parti de fiolducq a 29 de junio, y lleguë a ultime del mismo en Rotterdam, dondc el principe se halla. Y haviéndole hablado, rcquiriéndolc me quisicsse assistir para

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hallor audiencia, ha sido differido hasta prîmero de julio, que haviendo presentado la caria de creencia. de! doctory me hizo Uamar, entre las 9 y las iO, en su camara, a parte, retirandose los senores y otros fuera del apossento. Y comcnzando a hablar, me dixo haver leido la carta del doctor, que era en creencia de lo ({^e yo le havia de dezir, y que assi queria entender lo que le €ievia dcclarar. A lo quai, despues de haver hecho la reverencia acostumbrada, le hize parte de lo contenida en la instmiccion, sin obmilir ninguna cosa ni excéder délia, sin dalle copia ni ser ])edîda; y haviendo acabado y requeridole'lo pesasse bien todo, y me diesse respuesta conforme a la importancia del négocie, y a lo que le pareclesse convenir, me reffirié generalmente lo que yo havia dicho, y respondié, agradeciendo al dicho doctor la buena affidon que mostrava al bien y reposo publico, declarando que ël y los estados de Hollanda y Zellanda no desseavan otro que ver reducidas las cosas en reposo y tranquilidad, y poder servir a Su Mag^ con toda obediencia, a gloria de Diosy grandezadeSuMag', con el establecimiento de las antiguas leyes, privilégies y liver- tades del pays. Y quanto a la comunicacion, dixo que no la queria admitir, pero que la comunicaria a los stados : todavia, queriendo dcclarar francamente lo que le parecia, dixo que ni él, ni los stados, hallavan segura la comunicacion, y que ninguno se querria arriscar en lugar de diputado, no osandosse fiar ni con salvo conductx), ni con hostages, por no guardarse la fee, como ël decia, por la promesa hecha a los gentileshombres por madama de Parma, que despues no se observé, y assimismo por el jura- mento solenme de Mondragon tan enganoso ; item, por la buelta de très prisioneros de la Haya, que el dia siguiente murieron, y haviendo sido abiertos, se hallaron emponzonados ; item, por la destruccion de los Moros ; por lo que se intenté contra su propia persona : de suerte que los diputados temerian ser emponzoîka- dos, 6 muertos de algun soldado, 6 tercera persona de que se pre- tenderia ignorancia : mayormente considerando que el papa dis- pensa por los juramentos, y que el concilio de Constancia permite, en conformidad de vuestra doctrina, que no se ha de guardar fee a los hereges, como vosotros nos estimays ; anadiendo que la dicha

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comunicaciort séria no solamentc iuutil, pero que era enderezada a la diminucion delà grandeza de Su Mag^, por razon de haver capi- tuladoeogafiosamcnte con sus subditos ; declarandd que le pareeia (aunque esto era contra ël) que Su Mag^ , siendo bien y verdade^ ramente informado del estado y miseria de! dicho pays, y junta- mente de los verdaderos y convenientes remedios de que se podria usar, podra, por su gracia y demencia, bazer una dedaradon motu propio, por forma de edicto, tan amplia y razonable como los negocios lo requîeren, y que pueda ser sufficiente para la satîsfaccion de los stados sobredicbos, considerando que la grande llaga requière grande remedio^ y que, quando los remedios son asy estrechos y no convenientes, que la llaga se empeora de mas eu mas, 6, al contrario, siendo la declaracion razonable y assegiirada , los payses se reducirian a la obediencia y servido de Su Mag^, y que esta declaracion séria mas conveniente a la grandeza de Su Mag', y de mayor efficacia , y assimismo mas agradable al pueblo.

Y en consideracion de los lugares nombrados para la comuni* cacion, le pareeia estavan muy lexos, y que yendo los diputados tan largo camino , podrian venir a pdigro de muerte, pasando las tierras destos payses, por ponzoiîa, assaltos 6 de otra manera, concluyendo todavia no querer admitir la dicha proposidon sin ultima comunicacion con los stados, con advertencia que no veya que la dicha comunicacion truxesse algun fructo, y que todo lo que havia dicho servia para declarar las diiOcultades aparentes.

Sobre lo quai haviendo pedido licencia para brevemente repli- car, dixe que quanto al agradecimiento, yo haria la relacion, sabiendo el desseo que el doctor ténia de la padficacion de los stados y reposo publioo ; y quanto al dano de los diputados, que no dévia presumir ni créer que en una comunicacion publica y de tan grande imporlancia, se haria aqudlo en los dichos dipu- tados, que irian con tan seguros salvoconductos , ni violaria la fe contra toda razon, y derecho comun a todas las nadones; y que quanto a las dichas promesas hechas por Madama , emponaona- miento, conspiracion contra él y otros, que no sabia nada : que él mirase bien si le havian puesto en aquella opinion por informa*-

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dones. No embargante esto, estava en que no se teftia fee, ni podîa fiarae.

En lo que toca al punto principal de la comunicacion , dixe que aquella tio solamente era de provecho, mas necesaria, vistas las miserias y calamtdades de los payses, y que de otra manera con- verna quedar en guerra perpétua, hasta que el une fuesse vencido, en lo quai dcTÎa pesar el poder de Su Mag^., durante lavariedad de la fortuna y instabilidad del pueblo^ y que no dévia entender que esta comunicacion tendia a la diniinucion de la grandeza de Su Mag'., visto que no havia question del tratado formai, mas de la pacifi(!acion por via de gracia, y que esta comunicacion serviria solamente para abrir el camino y mejor informacion de las quexas allende del perdon, y preparacion de los medios convenientes a la pecificacion^ para despues, por la clemencia de Su Mag<>., scr mas absolutamente proveydo y remediado.

Y quanto al punto de la religion, suplicava no quisiese insistir; que él, estando en la catbolica, se havia hallado mal, y despues él y los estados insistian para el establecimiento de las ancianas leyes, que era mas que razon que Su Mag' assimismo insistiesse en el establecimiento de la anciana religion. Mas él persistia en lo que primero havia dicho^ din partirse dello hasta morîr , y que havia esta différencia entre las leyes politicas^ en que se respe- ta va el superior, y entre la religion, donde se mirava solamente a la gloria de Dios y salud de su aima, diziendo al fin que yo aguardaria mas particular resolucion, hasta que él lo huviesse comunicado con los estados.

El vîemes no fuy Uamado ; mas yendo él a Schedam , le hablé en el camino , para que se accordasse del negocio. Respondiéme que a su venida ternia resolucion ; y uno de los stados me hablé aqud dia, diziendo saber la caussa de mi venida, haviendola enten- dido del principe , mas que no se entenderia en nada, estando las guamiciones estrangeras en el pays , y que eUos querian quedar en libertad de su religion.

Sabado siguiente, très dejullio, fuy llamadodel principe; y estando en su camara solos, comenzé a referir la proposicion que yo havia hecho, siguiendo mi instruccion, por saber, coroo él decia,

m. :ti>

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*

si él lo havia todo bien entendido; y despues vino a dar en las caussas de la diffidencia, y en effecto reffiriô lo que antes havia dicho, y al fin dîxo que si bien la deseonfianza le caussava gran escrupulo, y que los stades no bayian querido, a instaneia dd conde de la Roche, entender en semejante eolnunicacion, en tanto que las guarniciones estrangeras estavan en el pays, como assimismo Boyssot ni Junius no querian yr a Utrechl. por hostages, en re?- peclo de lo que se havia començado a ncgociap pop el senor de 9te-Aldegonde, que todavia él consenlia agora en la comunicacion en Voordcn, cerca de Utpécht, en el fticrte dicho Camerick, 6 en el fueptc cerca de Husden, 6 al fuerte de Mondragon junto a Sancta Getrudembepghe, y que en la dicha comunicacion sus diputados ppopomian sus agravios y qucxas, y que supplîcarian que Su Mag* pop su clemencia tornasse a poner los payses en su peposo y tranquilidad, y que pequiria que. los diputados de esta parte fuessen del pays, y que les dapia su salvo conducto segupo y. sels hostages de igual qualidad y condicion de sus diputados, los quales , nombpandolos , dixo sep seys, Boyssot , Junius, Nivelt j como gentileshpmbpes, y Boychoipst y Paulus Buys, con uno qiic scpvipîa de secpetapio , los quales él entendis havian de topnap à corner y cenap en HoUanda, y que los hostages no estuviessen en Hollanda , sino dupante la comunicacion : diciendo todavia no havep hablado , pop la ausencia^ a todos los dichos diputados , y que no savia si elles qucppian emppendei' esta pelîgrosa comission. Y quanto al punto de la peligion , pepsîstia, anadiendo ni mas ni menos que , quedando la religion cathélica en estes payses, se podra estoblecep en Holanda y Zelanda, mediante que se dexasen los ostpos con la suya nucva, como ya esta en la dicha Holanda y Zelanda, assimismo pop provision, y hasta que por un libpe con- cilie fuesse diffinido, aunque él decia temep pop el dicho estable- eimiénto la discnsion entre el pueblo.

Sobpe lo quai yo dixe, confopme a mi instruccion , que la mu- danza de la religion no podia sep pecivida ; y él , respondiendo , deda que el Turco (siendo muy escpupuloso en su se<^) permitia lodo genepo de religion, y el papa los Judios. A lo quai replieando, dixe que un ppîncipe cpistiano, entrando en las entpanas de su

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oonsciencîa, y no hallando mas que una sola y verdadera fee y reli- gion, la quai seguia, no podia permitir, contra su conscienoia, olra ninguna, y que el negocio del Turco, el diablo haliaya ypermiUa aqucl medios para sembrar muchos errores *, y los Judios etan tôle- rados^ porconocer que eran reprobados, y manifcstar mas la gloria de Crlsto por elles crucificado.

Despues de muchos propésitos, dixo temia que la livertad de la religion causaria athéisme. Demas desto , dezia que era tiempo ' que Su Mag^ proveyesse en otra forma , porque él adrertia no qucrer encubrîr que siendo oppresses por la continuaeion de las guerras 6 adversa fortuna, meterian el pays en mano mas fuerte, pagando algun trîbuto, 6 haciendo alguu reconocimiento, dexan- dolos en su livertad , y que los payses eran una donzella hermossa bien aderezada, que ténia muchos que la pedian, y que estaria tan fuerte y armada que podria resistir al Turco.

Sobre lo quai , haviendolo bien considerado , volvi domingo , en la manana, y teniendo audiencia , hize repiticion de lo que de parte de Su Hag^ no se consentiria tratar, es a saber el punto de la religion, tocante h su mudanza, pidiendo para tanto mejor hazer mi respuesta y no excéder de mi comission, no teniendo cargo de pedir comunicacion, persistiendo ellos en la mudanza dicha, que fuesse servido declarar dos puntos, que son si él entendia que sus diputados representarîan solamente sus travajos y requesta, pidiendo el remédie , 6 si procederian mas adelante a la prepane don de los medios y seguridades necessarias ; el otro, si tratando de los medios , entendia tratar del punto de la religion en la dicha comunicacion, 6 dexallo. Sobre lo quai respondiù era su intençion que sus diputados no solamente representassen sus trabajos y pidiessen el remédie, pero tambien tratar de la preparacion de los medios y seguridades, y que de otra manera la declaracion séria de poco fructo; mas, quanto a la religion, era contento no tocassen en ella , y que ël lo dexava todo a la discrecion de los senores de por aca, aunque todavia temia poderse persuadir mal el pueblo, ni que se vernia a la'conclussion, 6 algun buen effecto, sin permitir la dicha religion libre.

Y pidiendo yo licencia , tomando carias de creencia para raons'

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el doctor, eon erbîUete que contienelos nombres de los diputados,

me volvi, y présenté la que traîa , y hize declaracion dd présente

discurso al dicho doctor.

Hugo Bontius.

Copie du trmps, oux Archives de Siraaiiet»: Fupt(e$ 4$ BtUuhj llttM SSt.

Traduction.

Instruction de Bontb. Il déclarera que le docteur a fait rapport aux seigneurs et bons personnages j qui en ont rendu compte au grand commandeur, de la réponse donnée parle prince à Bommel. Suivant eux, le prince et les états de Hollande et Zélande devraient envoyer quelques députés, discrets et amis de la paix, au pays de Liège, savoir : à Curange, Stockem, ou Uasselt, pour, avec quel- ques-uns desdits seigneurs , étant d'autorité et de poids, débattre les difficultés qui les arrêtent, au sujet du pardon, et convenir d'un arrangement tel que le Roi, dans sa clémence, pût l'approu-^ ver : lesdits députés recevraient un sauf-conduit en bonne forme, tant du grand commandeur, que de l'évéque de Liège.

Bonté avertira sincèrement le prince que, comme lesdits sei-^ gneurs et ledit docteur sont catholiques, ils ne pourront ni vou- dront faire d'instances auprès du Roi touchant quelque changement de la foi et religion catholique, vu même que les autres états du pays, dans leur dernière requête, ont déclaré qu'ils voulaient vivre et mourir dans la foi catholique romaine, mais qu'ils espè- rent que, en outre d'une raisonnable satisfaction pour les états de Hollande et Zélande, on trouvera le moyen de l'accomoder, lui, pour sa personne et ses biens , de manière qu'il puisse vivre en repos et sûreté, et que la tranquillité et l'union soient rétablies dans le pays.

Rapport db Bonté. Il est parti de Bois-le-Duc, le 29 juin, et est arrivé le 50 à Rotterdam, se trouvait le prince. Son audience a été différée jusqu'au 1** juillet, que le prince le fit appeler, entre neuf et dix heui-es, en sa chambre, il resta seul avec lui. Ayant

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éié inyité par le princç à lui exposer l'objet de sa missioui il lui déclara ce dont il était chargé, en se renfermant strictement dans son instruction ; après avoir acheyé, il le pria de bien penser à tout, et de lui donner réponse.

Le prince répondit qu'il remerciait le docteur de sa bonne affec- tion pour le bien et repos public ; que lui et les états de Hollande et Zélande ne désiraient rien plus que le rétablissement du repos et de la tranquillité, et de pouvoir servir le Roi en toute.obéissance, pour la gloire de Dieu et la grandeur de Sa Majesté, avec le rétablis- sement des anciennes lois, privilèges et libertés du pays. Quant à la communication proposée, il dit qu'il en référerait aux états, mais que, pour parler franchement, ni lui ni les états ne la trou*- veraient sûre, et que personne ne voudrait se risquer à s'y rendre, n'osant se fier ni sur des saufs-conduits, ni sur des otages, car la foi donnée ne se gardait pas : il allégua, à ce sujet, la promesse faite aux gentilshommes par madame de Parme, et qui ne fut pas observée ; le serment solennel et si trompeur de Hondragon (■) ; le retour de trois prisonniers de La Haye, qui, le jour suivant, moururent empoisonnés ; la destruction des Maures; enfin ce qui avait été tenté contre sa propre personne : de sorte que lea députés craindraient de périr par le poison, ou d'être mis k mort par quelque soldat, ou par d'autres, d'autant plus que le papa dispensait des serments, et que le concile de Constance permettait de violer la foi donnée aux hérétiques*

11 ajouta que non-seulement ladite communication serait inutile, mais qu'elle tendrait à la diminution de la grandeur du Roi, puisqu'il n'aurait traité avec ses sujets que pour les tromper. Selon lui. Sa Majesté, étant bien et au vrai informée de l'état misérable du pays, ainsi que des vrais remèdes dont il fallait user, pourra, par sa grâce et clémence, faire, t»iofupropno, une déclaration, par forme d'édit, aussi ample et raisonnable que les affaires l'exigent, et suffisante pour la satisfaction des états susdits, attendu qu'une grande plaie veut un grand remède, et que, quand le& remèdes ne sont pas ceux qui conviennent, la plaie devient de plus en plus

(I) Voy. ci-dessus, p. 96 cl sutv.

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profonde : au contraire, si la déclaration donnait les garanties nécessaires, les pays se réduiraient à l'obéissance du Roi. Et une telle déclaration conviendrait mieux à la grandeur du Roi, aurait plus d'eiBcacilé, et serait plus agréable au peuple.

Quant aux lieux proposés pour les conférences, il lui paraissait qu'ils étaient bien éloignés, et que les députés, en passant par ces proYinces, courraient risque d'être empoisonnés, ou assaillis, sa conclusion étant, du reste, qu'il ne roulait accepter lesdites confé- rences, sans en avoir communiqué avec les états.

Bonté répliqua qu'il ferait rapport au docteur Leoninus des remerciments du prince^ que les députés que nommeraient les états de Hollande et Zélande n'auraient pas & craindre le moindre mal, car. il serait contre toute raison et contre le droit commun à toutes les nations qu'oA violât la foi qui leur serait donnée ; qu'il ne savait rien des promesses de madame de Parme, ni des tentatives d'empoisonnement et de conspiration faites contre le prince, ou d'autres ; que les conférences proposées étaient non-seu- lement utiles, mais nécessaires, vu les misères et calamités du pays ; que, si IW ne les acceptait pas, il faudrait demeurer en une guerre perpétuelle, jusqu'à ce que l'un des deux tùi vaincu ; que, dans ce cas, le prince devait considérer la puissance du Roi, les caprices de la fortune et l'inconstance du peuple ; que cette com- munication ne pouvait préjudicier h la grandeur du Roi, puisqu'il ne s'agissait point de faire un traité formel, mais de pacifier les provinces révoltées par voie de grâce ; que, par conséquent, elle servirait à ouvrir le chemin et à préparer les moyens de la pacifi- cation ; que, à l'égard du point de la religion, il suppliait le prince de ne pas insister, puisque, lui et les états réclamant le rétablis- sement des anciennes lois, il était plus que raisonnable que le Roi prétendit aussi le rétablissement de l'ancienne religion. Bonté ter- mina, en disant qu'il attendrait le résultat de la communication du prince avec les états.

Le vendredi, il ne fut pas appelé : mais, le prince étant parti pour Schiedam, Bonté le priai, en chemin, de ne pas oublier l'affaire. Le prince répondit que, k son retour, il ferait savoir sa résolution. Un membre des états parla le même jcfur h Bonté, lui disant qu'il

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avait appris par le prinoe la cause de sa veouç; mais qu'on n'écou* terait rien, tant que les garnisons étrangères seraient dans k pays^ et qu'ils voulaient conserver la liberté de religion.

Le samedi, 3 juiUèt, le prince manda Bonté : étant seul avec lui dans sa chambre, il commença par rappeler, article par article, la proposition que celui-ei lui avait faite. 11 revint ensuite sur les causes de la défiance : néanmoins, et quoique cette défiance fit naître en lui un grand serupule; que les états, sur les instances du comte de la Roclie ('), eussent rejeté une telle communication, tant que les garnisons étrangères n'auraient pas quitté le pays; que, de méme^ Boisot ni Junius ne voulaient allar à Utrecht pour otages, relativement à la négociation conmicncée par le S' de Ste-Aldegonde (*), il dit qu'il consultait maintenant k cette com- munication, pourvu qu'elle se tint à Woerden, près d'Utrecht, au fort dit Camineky ou iu fort près de Huesden, ou au fort de Mon- dragon joignant k Gertrudenberg ; que, li, ses députés propose- raient leurs griefs, et qu'ils supplieraient le Roi de rendre la tran* quillité au pays. Il demanda, que les députés à nommer du cAté du Roi fussent du pays ; il offrit de leur donner un sauf-conduit et six otages/d'une quidité égale à ses députés, qui seraient Boisot, Junius, Nyvelt, Boioborst, Paul Buys et un sixième, qui servirait de-secrétaire. En ce qui concernait le point de la religion, il per^ sîsta, ajoutant, ni pkis ni moins,.que, si la religion catJbolique était maintenue dans les provinces obéissantes, elle pourrait être établie en Hollande et Zélande, moyennant que la religionnouvelle y sub- sistât, et ce toutefois par provision, et jusqu'à décision d'un libre concile.

Bonté dit que le changement de la jreligîon ne pouvait être admis. Le prince répondit que le Turc , tout scrupuleux qu'il fût sur le point de sa secte, permettait toute espèce de religion, et que le pape lui-même tolérait les juifs. Bonté répliqua qu'un prince chrétien, et qui, après avoir consulté sa conscience, ne trouvait qu'une seule et vraie foi et religion, n'en pouvait autoriser d'autre ;

( >) Bon Fernande de Lannoy, gouverneur Hollande. (') Voy. ci-après, p. 597.

592 ->

que la tolérance du Turc était un moyen inventé par le diable, pour semer de nombreuses erreurs; que, si les juifs étaient souf- ferts h Rome, c'était afin de mieux manifester la gloire du Christ crucifié par eux.

Après beaucoup de propos , le prince dit qu'il craignait que la liberté de religion n'engendrât l'athéisme. Il dit encore qu'il était temps que le Roi adoptât un autre système, car il voulait bien ne pas laisser ignorer que, si, par la continuation de la guerre, ou par des malheurs, ils étaient réduits à l'extrémité, ils mettraient le pays en une main plus forte; que le pays était une belle fiUe, qui avait beaucoup de prétendants, et qu'il serait si bien fortifié et armé, qu'il pourrait résister au Turc.

Bonté retourna, le dimanche matin, auprès du prince. Il lui demanda son intention sur les deux points suivants, savoir : i**s'il entendait que ses députés présentassent seulement ses griefs, avec demande qu'ils fussent redressés, ou bien s'ils traiteraient aussi des moyens et sûretés nécessaires ; 2^ si, en traitant des moyens, il entendait que le point de la religion fût discuté. Le prince répondit que ses députés auraient non-seulement à exposer ses griefs et à en solliciter le redressement, mais encore à négocier sur les moyens et sûretés; qu'autrement, la communication serait de peu de fruit, mais que, quant à la religion, il était content qu'ils ne s'en occupassent pas, etqu'illaissaitenti&rement ce point k la discrétion des seigneurs belges, quoiqu'il craignit qu'il fut impossible de faire entendre raison au peuple, et qu'on ne put en venir à une bonne conclusion, si la liberté de religion n'était permise.

Bonté, ayant pris congé et obtenu du prince des lettres de créance pour le docteur Leoninus, revint et fit au docteur le pré- sent rapport.

~ 59S

V.

Rapport de ce que le S^ de la Hivière et l'avocat Treslong ont négocié à Rotterdam avec le prince d'Orange (').

(Tradoetioa du français .) Sars Date (Mortfort, 20 joillbt i574)f

SiguieDdo cierta comunicacion que se tubo con mons' de Cham- pagney en la villa de Dtrecht , y cierto mémorial que nos dié , partimos de la dicha villa a treee del présente mes ; llegamos el mismo dîa al anochecer k Roterdam ; à la roanana , que fué a los catorce, entre oeho y nueve horas, tubimos audieneia con el prin- cipe, al eual (comunicandole diverses négocies) venîmos a dar en el de las alteraciones pressentes , representandole que para fene- cerlas séria cosa conveniente, y para observar el respeoto debido a Su Magestad, que las villas reveladas tratasen oon el Rey, nuestro senor, por requesta, suplieando a Su Magestad fuese servido de remediarlo, y que para esto servia y era muy a propdsito la mur- danza del gobierno y la gracia de Su Magestad, con otras muchas particularidades. A todo lo cual el dicho principe nos respondîô parecerle bien que las dichas alteraciones se apaciguasen y aca- basen de una vez, y que, por evitar la ultima destruccion del pais, lo mas presto séria lo mejor , pero que no sabia la forma en que buenamente podria tratarlo con el pueblo, tocando en el negocio

(1) Le texte original de celte pièce, comme celui de la précédente, manque dans les archives de Braxelles et de Simancaa.

Jean de Matenesse, S' de Matènes, Rivière el Opmeer, el Jean de Treslong, avocat de la cour Hollande, s^étaient retirés à Utrecht. P. Boa, Nedertandt- iche Oorloghen, liv. Vil, foi. 43.

Ce fut sous le prétexte d^alTaires particulières, qu'ils allèrent trouver le prince. Treslong était rarocat de madame d*Asscndelit.

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de la religion, considerado que el dicho pueblo y burgesses de las dichas villas estan tan puestos en ella , qae le parecia cosa bien dificil extirparla ; que cuanto a su persona , él era contento, acquietadas las dichas alteraciones, en caso que Su Magestad fuese servido, retirarse fuera del dicho pais, y que sçria cosa razonable comunicar con los diputados de las dichas villas : ordenando a la misma fin que un Pablo Buis (el cual, habiendo el dicho dia cornu- . nicado con nosotros sobre el dicho negocio, nos déclaré tener comision de juntar los diputados de las villas) lo pusiese en egecu- cion. Y asi seis de ellos vinieron a nuestra casa aquel dia, despues de corner. El uno se llamaba Nivelt , escutete de la villa de Dor- drecht, otro Gamerlin de la villa de Delft, Wiilen Jan Reierz de Leiden, y otro euyo nombre es long de Gouda , y otro burgo- maestre de Dordrecht, cuyo nombre no sabemoe, acompanados con el dicho Pablo finis , los cuales (despues de muchas platicas que tubimos) nos dedararon a boca su resolucion, y que ellos nos la darian por escrito.

El dia siguiente, que fue viernes diez y seis, antes de comer, y no embargante esto , nos digeron que muchas veoes , por sus requestas impresas , habian dedarado los remedios y cosas a ellos convenientes. Y habieiido aguardado casi todo el dia , sin haber Goroprendido nada , enviâmes a la noche al dicho Buis , para que nos dièse el escripto. Vinose a las ocho boras a nuestra casa, escu- sandose, con las grandes ocupaciones que tenta, no haberle sido posible poner en escripto aquel dia la negociacion , pero que sin falta estaria en érden para el siguiente , que fue sabado, diez y siete , en el cual y otro ( no embargante que hkâmos nuestras diligencias para que nos dièse el escripto ) no lo pudimos haber hasta los diez y nueve , escusandose con las ocupaciones, y ana- diendo que se habia de visitar por los dichos diputados.

Esto es lo que pasô lunes eu la noche en nuestra presencia, habiendo en este medio, viernes, sabado y domingo, comunicado con otros muchos en particular sobre el dicho négocie, los cuales pmr su parecer nos declaraban ser lo mejor, por rematar estas alte- raciones, convenir, cuanto a lo primero,quitar las armas al pueblo y comunidad, haciendo salir a los estrangeros fuera del pais, y

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que, hecho esto, el pueblo se dejaria eonducîr niejor cuanto al neisocio de la religion ; y lo mismo nos dijo el principe a los dichos diez y nueve, en la noche.

Y habiendo recibido el dîeho escrito, partîmos de RoUerduu otro dia, que fueron vcinte^ y la misma noche Ueganos a Monibri, dondc hallamos al seiior de Champagney, a quien dimos la dicha rcsolucion.

C^« ém tempt, a«x Arvkivttde Sinancas : PapdMdâ Bêtado, liasM 558.

TreuluctioH.

Suivant certaine communication qu'ils eurent avec M. de Cham- pagney (') h Utrecht, et certain mémorial qu'il leur donna, le S' delà Rivière et Treslong partirent de cette ville le 4 5 juillet ; ils arrivèrent le même jour à Rotterdam. Le 44, entre huit et neul' heures du matin, ils eurent audience do prince d'Orange. Après l'avoir entretenu de diverses affaires, ils en vinrent aux troubles présents, et lui remontrèrent que, pour y mettre un terme, en observant le respect du au Roi, il conviendrait que les villes révoltées adressassent à Sa Majesté une requête, ils la supplie- raient de remédier aux maux que souffrait le pays. Ils lui firent observer que le changement survenu dans le gouvernement ren- dait cette démarche très-opportune.

Le prince leur répondit qu'il désirait, comme eux, la fin des troubles, et que le plus têt serait le mieux, si Ton voulait éviter l'entière destruction du pays, mais qu'il ne voyait pas bonnemeni comment on pourrait contenter le peuple sur l'article de la reli-

(1) Champagney ayant dit au grand commandeur de Casttlle que certains de ses amis ataicnt des intelligences en Hollande, Reqnesens lui avait donné commission verlMile d*écouter ce que les villes de ce pays demanderaient. ( Lettre de Requesens au Roi, du 13 février 1974, aux archives de Simancas.)

Le Roi autorisa le grand commandeur à entrer en négociation avec les rebelles,, pourvu que ce ne fût pas au préjudice de son autorité et de la reli- gion. ( Lettre de Philippe II a Re<iu«scus, du 30 mars 1574.)

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gion, car ledit peuple et les bourgeois des villes étaient « attachés à la religion qu'ils avaient emt»ra8sée, qu'il lui paraissait bien difficile de l'extirper ; que, quant h sa personne, il était prêt, une fois les troubles apaisés, à se retirer du pays, si c'était la volonté du Roi. Il ajouta qu'il convenait de traiter de cette matière avec les députés desdites villes, et il donna ses ordres, à cette fin, à un certain Paul fiuys.

Le même jour, après diner, six des députés des villes vinrent au logis du S' de la Rivière et de Treslong : c'étaient Nyvelt, écoutète de Dordrecht; Camerlynck, de Delft('); Guillaume- Jean Reyersz., de Leyde; Long(*), de Gouda, et un bourgmestre de Dordrecht, accompagnés dudit Paul Buys. Après beaucoup de propos, ils firent connaître verbalement leur résolution, en annon- çant qu'ils la donneraient par écrit.

Le vendredi 16, avant midi, ils dirent à la Rivière et k Treslong que, plusieurs fois, par leurs requêtes imprimées, ils avaient formulé leur opinion sur les moyens de pacifier le pays, sans délivrer aux envoyés de Champagney l'écrit qu'ils avaient an- noncé. Ceux-ci envoyèrent dans la soirée chez Buys, pour l'avoir. Il vint les trouver à huit heures, en s'excusant de ce retard sur ses grandes occupations, et en leur promettant l'écrit pour le jour suivant. Néanmoins, ni ce jour^là, qui était le 17, ni le 18, ils ne purent l'obtenir, malgré leurs démarches, et ce fut seulement 1^ 19, que Buys le leur délivra (^).

Les 16, 17 et 18, ils communiquèrent avec beaucoup d'autres en particulier sur cette affaire. Tous leur déclarèrent que le meilleur moyen de mettre fin aux troubles était d'ôter les armes au peuple et a la commune^ en faisant sortir les étrangers du pays; que, cela effectué, le peuple se laisserait plus facilement conduire sur le point de la religion. Le prince leur dit la même chose le 19, dans la soirée.

La {livière et Treslong, ayant reçu ledit écrit, partirent de Rot-

(I) 11 était membre du conseil du prince d'Orange.

(') Ce nom est probablement mal écrit dans la pièce espagnole.

(') II est dans P. fion, ScderlandUche OorUnjhen, liv. VII, fol. 43.

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terdam le 20. Le même jour, ils art*ivèrent à Monfoit, ils trouvèrent le S' de Ghampagney, k qui ils en firent la déli- vrance.

VI.

Méfnùire de Philippe de Marnixj S' de Ste-Aldegtmde, sur ce qu'il a négocié, à Rotterdam^ avec te prince d'Orange (').

Sans datk (fin de jvillet 1574).

«

Ayant proposé h monsieur le prince d'Oranges que, 4 mon instance, l'on m'avoit permis de faire ung tour jusques k Rot-

(') Le grand eomroandear de Castille ëcrivait au Roi, le 2S jiliUet : A Iob 17 deste, fué Aldegonda, hnbiendo hecho juratnento de bolver dentro de sieie diaê, de nuu de lo qucUquedaron en poder de Champani, por tiu rehenes, un moiT de Carnée, eu eunado, y oiro toi Juniue de Anvere, muy confidente del principe j y todosheregee como il (Le 17 de ce mois, Ste-Aldegonde est parti pour Rotterdam, après avoir fait serment de retourner dans les sept jours, et remis en outre au pouvoir de Champagney, comme otages, un monsieur de Cames, son beau-frère, et un certain Junius, d^Ânvers, qui a grande part à la confiance du prince : l*un et Vautre hérétiques comme le prince même).

Diaprés une lettre de Champagney au grand commandeur, du 21 juillet, Junius avait quitté les Pays-Bas, depuis dix-sept ans. II était venu en Zélande, do Paris, il se trouvait pour les affaires de TÉlectcur palatin. Son intention, ajoutait Perrenot, paraissait être de retourner dans les terres de rÉlecleur, ou il avait sa demeure et ses biens.

A Toccasion de ce voyage de Marnix à Rotterdam, plusieurs lettres avaient été échangées entre lui et le prince d*Orange; c*est ce que nous apprend la lettre ci-dessns citée du grand commandeur, du 25 juillet : No embîo d V. Magdy dit-il au Roi, oopja de una infinidad de cartae que tenido de Champani, y de oirae taniae que le he reepondido, y de tnuchae que A Idegonda ha eecripto al principe, y de eus reepueetae, por no canear d Â/agd con papelee de poea tubetancia, porque todae son de las generalidades que he dieho,

598

terdam, afin d'adviser sur lès raoîens d'eschanger les prisonniers, suppliant Son Excellence k ce que (fût-ce en entendant k la déli- vrance de monsieur de Bossu, ou autrement) icelle voulsist me faire quelque ouverture, pour sortir de ma prison en liberté, pro- posant que, il vouldroit entendre à raisonnables conditions pour la délivrance dudict S' conte de Bossu, j'espéroye bien que de l'aultre costel on y prestroit roreille, pour Taffection qn'avoit monsieur le grand commandeur, et autres seigneurs de par deçà, de veoir ledict seigneur conte en sa liberté.

Après quelque délibération, et plusieurs propos tenmc là-dessus, m'ha ledict seigneur prince donné pour responce finale, qu'il estoit content de condescendre à tout ce que seroit treuvé raisonnable quant à l'eschange de tous les autres prisonniers, si avant qu'il seroit mesme content que les ungs, tous ensemble d'ung costel, fussent eschangez contre les autres de l'autre costel, seullement excepté ledict conte de Bossu, lequel il ne pouvoit encoires à pré- sent reUcher, en façon quelconque, tant pour ce qu'il n'y avoit nul, entre les prisonniers, de la qualité dont il estoit, et aiant heu telle maniance d'affaires comme luy, comme aussi d'autant que jamais le peuple ny les estatz ne permectroient que- celluy lequel congnoissoit si bien le pays, et avoit tel crédit, fiît remis en liberté, craignant tousjours qu'il ne seroit leur ennemy en ceste guerre.

Et, quant à mon regard, bien promectoit-il que tousjours l'on traicteroit ledict S' conte de Bossu de la mesme façon qu'il enten- droit que je seroy traicté de l'autre costel, mais ne sçavoit autre moyen à présent, servant à ma délivrance, n'estoit que l'on me voulsist relâcher en vertu du traicté de Middelbourg , faict par mons' de Mondragon, ou cschanger contre mons' de Crunighen,

y êobre con que Meguridad yrin el didio Aldegonda d wr<9 con el principe, y que rehenes quedarian acd por él.

Ces lettres, dont Requesens ne jugea pas h propos d'envoyer copie au Roi, je les ai vainement recherchées dans nos Archives : il est probable qu'elles furent brûlées, avec les papiers de Requesens, au château d^ Anvers, le S juil- let 1576. ( Voy. la Corresjwndance de Philippe II sur les affaire» des Paya- Bas, etc., 1. 1, p. xviii.)

399

ou bien qfxù Ton acceptât ce que dessus, assavoir : que tous pri'<- sonniérs, de quelque qualité qu'ilz fussent, seroient remis en liberté, tant d'ung costel que d'autre, excepté seullement ledict seigneur de Bossu, pour les considérations susdictes ;

Et, quant à Mondragon, qu'il ne se pouvoit persuader qu'il vouidroit attendre et soutenir le blasme auquel il venoit à encou- rir, en cas qu'il mancquàt k sa promesse, comme jusques ores il avoit faict.

Sur lesquelles entrefaictes, il receut une lettre dudict S' Mon- dragon, par laquelle il luy mandoit qu'il estoit résolu de retourner en prison, à toutes heures que ledict seigneur prince luy renvoie- roit Jacop Simonszoon. Là-dessus, dict Son Etcellence que ledict Mondragon n'estoit aucunement fondé, pour trois raisons :

Premièrement, pour ce que, selon tout droict et toute raison de contractz et pactes, soit en guerre ou en paix, celluy qui s'est obligé à faire plusieurs choses ensemble, ou bien se soubmectre h quelque peine ou amende, en aiant satisfait à aucunes d'icelles, n'est aucunement exempt ny quicte de son obligation, jusques à tant qu'il ayt satisfait à toutes, et, quant à avoir renvoie ledict Jacop Simonszoon, il peult bien méliorer la condition de oeluy à qui il s'est obligé, mais non pas la détériorer ou empirer, selon les loix expresses du droict commung ; r

Secondement, pour ce que ledict Mondragon ha relAché ledict Jacop Simonszoon, sans avoir rien conditioné ny spéciffié avec luy, et mesmes sans l'avoir intimé audict seigneur prince, de façon qu'il avoit desji longtemps esté en sa liberté, avant que ledict seigneur prince en sceut rien : et pourtant' concluoit que par Ih il n'ha nullement satisfaict audict contract;

Et tiercement, pour ce que Jcdict Mondragon ha escrit expres- sément audict seigneur prince qu'il pouvoît faire dudict Jacop Simonszoon ce que bon luy sembloit, comm'il appert par sa lettre, que Son Excellence m'ha monstre, s'estant par du tout déporté de l'action en droict qu'il henst peu prétendre audict Jacop Simonszoon, si aucun y avoit.

Ce nonobstant, ledict seigneur prince ha déclaré que, pour couper broche à toutes excuses, il est content de renvoier ledict

400 -

Jacop Simonâzoon, ores qu'il n'y soit obligé, pour les raisons qde dessus.

Or, aiant, avecTopportunitë de ceste négociation, proposé audict seigneur prince l'extrême calamité et désolation du pays que l'on (lebvoit indubitablement attendre de ceste guerre, ilz ne vouldroient regarder aux moiens d'appaider cçs troubles, et là-dôs- sus luy aiant communicqué quelque forme de requeste que j'arois couchée par escript, pour luy persuader et induire les villes sépa- rées des autres h la présenter à monsieur le grand commandeur, après avoir protesté de l'entière affection qu'il avoit à la tran- quilité et repos de ces pays, ha déclaré ledict S' prince n'avoir jamais voulu faire ny attenter chose de conséquence de soy-mesme, sans advis cl auctorité des députez des estatz desdictes villes ; aussi que cest affaire ne le coneernoit en son particulier, mais à tout le pays en général : ne vouloit partant rien faire ny ooncluyre là-dessus ; bien vouloit tenir la bonne main , selon toute sa possi- bilité, à ce que les affaires puissent estre acheminées k quelque bonne paix^ mais que cela dépendoit de ces autres susdicts, d'au- tant que, quant h luy, il estoit content, si ceulx^à le treuvoient bon, de se retirer du pays^ afin que tant mieulx ilz puissent par-* venir à ce que dessus.

Ce néantmoings, vouloit bien déclarer que desjà l'on estoit sur ce faict entré en communication avec monsieur de Mathènes et Tadvocat Treslon, mais que la résolution desdicts estatz, ou dé* putez des villes, selon qu'il avoit peu entendre, n'estoit nullement conforme à ce que je luy avois proposé, veu mesmes le grand changement qui depuis mon absence estoit entrevenu, tant en Hollande qu'en Zélande, touchant le faict de la religion, voire plus grand que je ne sçauroie croire.

Mais qu'il ne véoit nul meilleur moien, selon qu'il avoit long- temps et meurement délibéré avec eulx là-dessus, sinon que, puisque les estatz généraulx du pays avoient protesté de vouloir maintenir la religion romaine, que ceulx d'Hollande et Zélande se remectroient en ce faict sur ce que par la générale et légittime assemblée des estatz du pays pourroit estre treuvé le plus conve- nable : mais, d'entrer en quelque résolution touchant ce faict , ou

'

401

d'une façon, ou d'autre, cependant que les estrangiers seraient dedens le pays, ne le treuvoient nullement convenable, ny au bien et repos dudict pays, ny à leur seurlë.

Or, alant sur ce mesme propos requis de coramunîoquer avec Icsdicts députez , je fus remis jusques tant que les susdicts de Mathcnes et Treslong seroient expédiez.

Alors, après leur avoir proposé le susdict formulaire de supp]ica* tion, et tâché par plusieurs raisons de les y induire, fus entièrement remis à ce qu'ilz avoient donné, par escrit, au susdtct de Mathènes et Treslong, et toutesfols, ii mon instance, me promirent d'examiner plus meurcment ladicte supplication , et , après y avoir délibéré dessus, me donner. leur résolution par escrit.

Durant lequel temps, je receuz la lettre de monsieur de Cham- peigney ('), par laquelle il déclairoit le peu de satisfaction qu'il avoit de ladicte response faicte auxdicts de Mathènes et Treslong ; et , prenant ceste nouvelle occasion, je insistay fort vers monsieur le prince de se vouloir emploier à ce qu'ilz s'accommodassent à ce que dessus , et quant et quant leur proposay aussi à eùlx le mesme , alléguant les inconvéniens mentionnez en ladicte lettre : sur quoy, après plusieurs propos de costel et d'autre, ii l'instance dudict S' prince , ilz furent contens de changer la forme de leur première responce , et me promirent la me bailler telle qu'il n'y auroit occasion de s'en mescontenter. Et finallement , pour leur

(1) La lettre dont Marnbc parle ici, lui fut écrite par M. de Champagney, de Montfort, le 21 juillet: P. Boa en donne une traduction hollandaise, NederlandUche Oorloghen, liv. VIT, fol. 430.

Dans celte lettre, Champagncy exprime son étonnemcnt de n*avoîr aucune nouvelle de lui. Il annonce le relourde M. de la Rivière et deTavocat Treslong. L^ëcrtt qu^ils lui ont rapporté des états de Hollande, ne le satisfait pas du tout : le titre qu*y prennent les états, les causes qu*ils allèguent de leur séparation des autres provinces, les moyens qu*ils proposent, ne sont pas admissibles. Marniz doit donc sVfforcer d^obtenir un autre résultat. Champa- gney terminait ainsi : « Je me confie que vous saurez mener i fin raffaire,

par le crédit que vous avez auprès de tous ceux de lè-bas, eu voulant

vous y employer comme vouS me Pavez promis et comme j*y compte : et » vous pouvez être certain que, de mon côté, je ne manquerai pas de faire

mon possible pour que ces choses aient une bonne issue.

m. »6

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dernière résolution, me baillèrent la supplication que ay apporté avec moy (') , protestans bien hault et der qiie c'estoît tout ce à quoy ilz pouvoient condescendre , et qu'encoires ilz se mectoient en très-grand bazart d'estre blasmez du peuple d'eslrevenu jusques la, d'autant. qu'il y avoit peu de fiance, et ung chascung penseroit que tout cecy pourroit servir à les amuser et finalement abbuser, et par ainsi tomberoit le pays en beaucoup plus grands troubles et désordres qu'il n'est à présent ; mesmes furent une fois en bransle et quasi délibérez de n'y vouloir prester nulle audience, ains rejecter du toiit ceste practicque, comme celle qu'ilz soupçon- noient estre dressée à quelque autre fin , n'beust esté que ledict S' prince, par son auctorité et persuasion, les y ramenât , m'aiant aussi asseuré que c'estoit tout l'extrême que je pourrois obtenir d'eulx, quelque peine ou travail que je y voulsisse mectre. Sur quoy me suis revenu , & mon jour préfix , avec ladicte supplica- tion, laquelle ilz me baillèrent environ une heure devant mon partemeut.

NEb de Mârnix (').

Copie da temps , aux Arebives do Royaume : papiers d^é|al, rtf . I9é§oeiati9ii de Bndm, 1674-lft75, 1. 1, fol. 12 et tiiv.

(I) Elfe est dans Bm, Nederlandtêche Oorloghen, Ihr. VII, fol. i4.

(^ £n envoyant au Roi, le 18 août, copie du rapport de Marnix et de Tavis qu^il avait rapporté, Kequesens lui disait : En todo hay tanpoca enmienda, que no me paresciô escuehalio, y asH se ha cortado aqueUapidiica (Il y a si peu d*amendemèiit eu tout cela, que je n^ai pas cru devoir y prêter Toreillc, et ainsi cette négociation a pris (in).

403

VII.

Lettre du grand cùmmandeur de Castilïe au docteur Elbertus LeonxnuSy lui donnant commission de se rendre vers te prince d^Orange.

BrOZBLLES, 30NOTBMDRI IS7i.

Don Loys de Requesbns et de ÇimioA, grand commandeur de Castille, lieutenant, gouverneur et capitaine général.

Très-cher et bien amé, comme il soit que les nobles et villes d'Hollande et Zélande, disants représenter les estatz dudict pays, ayent exhibé, passé quelque temps, certain escript par dcclal- royent vouloir supplier le Roy de regarder de ses yeulx amiables et miséricordieux le pitoyable et calamiteux estât desdicts pays, pour réduire iceulx en bonne tranquillité, commerce et repos, déclairants mesmement ne convenir aulcunement de capituler par eulx, ses subjectz, avec Sa Majesté, laquelle ilz vouloyent révérer, servir et obéir en toute humilité, comme leur prince et seigneur, et que à ces fijis ayent exhibé certaine requeste que aions envoyé à Sa Majesté, pour la veoir et y ordonner (sur quoy nous ait déclairé son intention et bon voulloir, comme pareillement avons le tout communicqué à eeulx du conseil de Sadicte Majesté, estans par deei, pour y avoir leur advis) ; et il soit que, considérant que cecy seroit procédé, selon ce que le prince d'Orenges auroit déclairé à certain personnaige, ayant paravant communicqué avec luy, de vostre part, que lesdicts estalz feroyent, de tout quoy nous auriés lors falct rapport : pour ceste cause, cognoissant vostre bonne dextérité et prudence, et confians à vostre prudhommie, nous, soubz ceste confidence, suînes contents que aillez prompte- ment vers ledict prince d'Orenges, la part qu'il sera, pour luy faire entendre que nous sûmes prestz de les ouyr et fiiire sçavoir l'intention et volunté de Sadicte Majesté. Partant, suyvant ce (pm

"^

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a offert ledict prince d'Orengesi vostre commis, pourront lesdîcCs de Hollande et Zélande envoyer leurs députez, au lieu et jour que leur déclairerez, vers les commissaires de Sa Majesté, qui auront tout povoir, h ces fins, de leur respondre, tant sur le contenu de leurdicte requeste, qued'aultres poinctz qu'ilz vouldront remous- trer et supplier : luy déclairant que, si avant qu'ilz ne demandent de Sa Majesté, sinon remède par clémence, et toutes choses justes et raisonnables, lesquelles Sadicte Majesté leur puist octroyer, sans offenser Thoniieur de Dieu, ne Tauthorité et réputation d'icelle Sa Majesté (laquelle les suppliants protestent mesmemeot vouloir révérer et honnorer). Sa Majesté sera contente les leur impartir et octroyer. Et, à ces fins, vous envoyons le passe-port et instruction comment vous aurez h vous conduire et reigler. De tout quoy, à v4)stre retour, nous ferez la relation. A tant, trèsHsher et bien amé, Nôstre-Seigneur soit garde de vous. De Bruxelles, le dernier jour de novembre 4574.

Minute, aux Arehircs da Rojanme : Papiers d'État, reg. iVtffoetflttM de Brtdm, 1574-1575, t. i , M. 40.

Vin.

Instruction donnée par le grand commandeur de Castille

à Leoninwi.

BrITXBLLES, 30 NOTBMRRK {(f7i.

Mcmoircet instruction pour vous, mcssirc Elbcrtus Lconiiius, docteur et professeur es droiclz , de ce que ourez i faire vers le prinee d'Oranges, «liez présentement.

Vous vous trouverez, avec voz passe-port et instruction, à Bois- Ic^Ducq, pour aller trouver ledict prince d'Omngcs, aux fmscon-

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lenuz en ûoz lettres que vous avons faiet escripre) et, pour les pcriiz du chemin, pourrez envoyer vers luy avec voz lettres, pour avoir passe-port et saulf-conduict, comme trouverez convenir à vostre asseurance.

A vostre arrivée vers luy, luy exposerez le contenu de vostre oommisaion, et entendrez son intention, ensemble des aultres de Hollande et Zélande qui se sont présentement séparez de l'obéis- sance de Sa Majesté.

Leur déclairant, par ensemble ou à part (comme verrez myeulx à propos), la bonne inclination et propension de Sa Majesté de les traicter béoignement et clémentement , puisque ilz offrent la révérer, servir et retourner en son obéissance, et qu'ilz ne dési- rent que faire leurs remonstrances, pour mectre le pays en repos, tranquillité, commerce et bon estât : car tel est le désir de Sa Majesté de délivrer tous ses pays de tous travaulx et calamitez, remédiant, par bons expédlens, tous ces troubles et désordres.

Suyvant quoy, direz que sûmes contents, au nom de Sadicte Majesté, qu'ilz envoyent leurs députez, soyent ceulx que ledict prince d'Oranges a cy-devant nommé à vostre commis, ou aultres qu'ilz vouldront, pour dire ce qu'iiz vouldront proposer et requérir. Sur quoy ordonnerons commissaires, que y envoyerons lors, de la part de Sadicte Majesté, avec tout pouvoir et auctorité de les ouyr et appoincter leurs rcquestes.

Que le lieu nous plûist que ledict prince a proposé le premier, assçavoir : que leurs députez viengnent à certain jour à Ste-Geer- trudeberghe, et les commissaires nostres iront à Breda, et que entre ces deux villes se choisira ung lieu dont vous accorderez avec luy, au pays toutesfois d'obéissance de Sa Majesté, se trouveront lesdicts commissaires et députez, pour conférer par ensemble et y appoincter parles commissaires de Sadicte Majesté, et pourront, sur le soir, chascun retourner à sa chascune, tant que le tout soit achevé.

£t, à ces fins, envoyeronsi lettres de sauIf--conduictz pour lesdicts députez, en bonne et ample forme, comme il convient, lesprcndant cependant en protection de Sa Mfyesté : leur disant que, s'ilzi veuillent obtenir quelque chose de Sadicte Majesèé, qu'ilz n^ doib-

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Yent \uj demander que choses justes, raisonnables, et qui sont en son povoir, et qu'ilz doibvent regarder d'y employer personnes amies plustost du repos publicq, que non des troubles, et singuliè- rement qui ne soient opiniastres.

Comme, de la part de Sa Majesté, envoyerons seigneurs et per^ sonnaiges de bon jugement, sçavoir, et amateurs de Tbonneur de Dieu et du Roy, ensemble du bien publicq, dont par raison ilz debvront avoir très*grand contentement.

Finablement, ferez et direz tout ce que, par vostre discrétion, trouverez appartenir k la pacification des troubles et k l'efféct des choses dictes, et qui soyent ii l'honneur de Dieu, réputation et auctorité de Sa Majesté, et bénéfice publicq. Faict à Bruxelles, soubz nostre nom, le dernier jour de novembre 4874.

Mioato, aux Arobi?«s du Royaume : Papiers d*Etai, reg. Nésceituùm i9 Brnla, 1574.1575, t. I. fol. 45.

IX.

Instruction particulière pour Leoninus,

BlUXBLLIf, oO MOYBMBftB 187^.

Mémoire pour vous, messire Elbert Lconin, docteur et pro- fesseur es droîctz, touchant certain point délaissé en une aultre instruction que tous a «sCé baillé.

Qui est , si tant estoit que le prince d'Oranges, ne veuillant se fier es saulf-conduictz qui se bailleroyent aux députez qui vien- droyent k la communication, persistétque fussentdonnez ostagers, comment aurez ii vous reigler, en ce cas vous luy remonstrerez qu'il n'a point de besoing desdicts ostagers, et qu'il se peult et

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doibt bien confier en Sa Majesté , laqueUe il peult bien entendre que ne vouldroit avoir quelcpie note de point garder sa parole , encoires pour personnages de si petite importance que sont ceulx qui pourront estre députez à ladictè communication, et que, mons- trant se fier en la parole de Sa Majesté, ne pourra que donner occasion à icelle à plus de clémence : avec aultres raisons que bi^i sçaurez y adjouster au mesme effect. Et, tout cela ne opérast rien, pour leur donner la plaine mesure, et afin que, soubz umbre de ce, ne soit retardé ung si grand bien qui peult advenir au pays qui appertient à Sadicte Majesté , vous direz que sûmes contents donner quelques ostagers , de mesme qualité que ceulx dudict Hollande, et iceulx déposer et consigner es mains d'ung prince voisin , comme l'archevesque de Coulogne ou évesque de Liège, pour seureté desdicts députez , et que de cela l'on se doibt contenter. Paict à Bruxelles, le dernier jour de novembre 1574.

Minnle, aux Arehivet du Rojraume : Papiers à'Éui, Kg. NégoeiMùm Bndot 1574-1575, t. I, fol. 48.

X.

Première kUre de Leoninue au grand eotnmundeur de Castilky

sur m mission.

B018-LE-DUC, 9 DéCKMDRE 1574.

Monseigneur,

Monsieur, j'avoy dépesché mon homme, le primier de ce moys de décembre, pour avoir le pasport d'Hollande, qui est retournée hier à soir bien tardt , m'apportant ledict pasport, avec une lettre du prince d'Oren'ges , contenant que je seroye bien venu : mais,

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pour ce que j'avoys escript, par ma lettre, entre aultres, que je viendroy par charge à luoy donné pour communiquer plus avent sur ce qu'avoyt cy--devant esté besoingé par le pensionare Bonté, il me respondit par sadictc lettre que , en cas que je n'avoye plus ample charge que de bisoinger en conformité de la proposi- tion dudict pensionaire, que ma venue par delà ne pouroit aroir grandt fruict, et que de ce il me vouloit bien adyertir. A raison de quoy , et pour ce que ma commission se réfère à la négotîation dudict Bonté , j'ay consydérée n'estre l'honneur ny le service de Sa Majesté d'aller plus avant , devant entendre plus amplement riiitention de Vostre Excellence et dudict prince, ayant, pour ceste cause, dépesché ledict pensionaire vers Hollande, subz uiiibre que le pasport donné par ledict prince, estant escript par ha6te,a quelque faulte et omission, et pour entendre les diflicultes pour lesquelles ledict prince et estatz d'Hollande et Zélande ne vouldroyent entrer en communication, en conformité et selon les termes de ladicte négotîation , dont le principal est de non mou- voir la dispute de la religion. J'entens que les députez desdicts pays ont esté présens à la résolution et response donnée par ledict prince, et qu'ilz craindcnt que ce qu'on traitera ne sera observé : pour à quoy obvier, j'ay donné ample instruction audict Bonle , avec présentation que, en cas que je puisse venir par delà , avec espoir d'en faire quelque fruict, je lesdonneray plus grande satis- faction et contentement de la bonne inclination et cinsère désir de Sa Majesté et Vostre Excellence du repos publicquc et asseurancc durable. Ce que j'ay bien vouly advertir Vostre Excellence, affin qu'elle soit informée de ce que j'ay jusques ores faict et besoigné, en vertu de ma commission, etoussy afin que le bon plaisir d'icelle soit me mander ce que debvray faire , en cas qu'ilz ne veulent entrer en communication , selon les limites et restrictions de la négotîation dudict Bonté, assavoir : si je dois persister es termes de ladicte ncgotiation, ou me élargif et obtenir que leurs députez viennent en communication , pour proposer tous leurs doléances , cl ce qu'ilz penseront estre raisonable pour la pacification , saulf l'honneur de Dieu et auctorité de Sa Majesté, et que, en cas qu'ilz pro|>o$cnt l'article de la religion, réserve par la uégotiation dudict

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fioote, Il soit débattu en la communication et conférence de com- missaires de Sa Majesté. Sur quoy, et toutes aultrcs choses qui pourront oceurrir en cest endroit, je supplie que plaise h Vostre Excellence me mander son intention, pour me entbièrement con- former h icelle.

Monseigneur, je supplie Dieu le Créateur vouloir maintenir Vostre Excellence en toute prospérité. De Bolduc, ce 9 de décembre, l'an 1574.

Le prince et ceux d'Hollande ne sçavent encoires nulle certitude de la venue du compte de Swartsenberch.

De Vostre Excellence très-humble serviteur,

Elbehtus Leonincs.

Originel autographe, aux Arehires du Rojaiinc : Papiers d'État* rrg ffégotiation de Brtdat 1574- 1575, t. I, fol. 53.

XI.

Réponse du (jrand conimaîideur de CasHlle à la lettre précédente,

Bruxelles, 1 1 uêcliibbk Ui?^.

Don Loys de Kkquesejvs lt Çuniga, grand commandeur de Castille, etc., lieutenant, gouverneur et capitaine général.

me

Très-cher et bien amé, pour respondre à vostre lettre du dix du présent, nous eussions désiré que vous-mesmes fussiés passé en Hollande, pour gaigner temps. Toutesfois, puisque y avez eu les considérations que dictes, nous samble que nullement debvez laisser de parachever vostre voyage, et négocier selon voz instruc- tions, ainsy que confions de Voz sçavoir et prudence ; et pouvez hardiemcnt asseurer le prince d'Orcnges qu'avez plus de povoir

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que n'a eu par ci-devant Bonté, lequel n'allolt que de vostre part, et V0U8 par l'adveu et autorité d'aulcuns bons personnaiges. Aussi, puisque luy pouvez dire qu'en tout ce qu'ilz demanderont dechoses raisonnables, sans l'offense de l'bonneur de Dieu et de l'autorité de Sa Majesté, l'on s'accommodera à ce que sera juste, vous estes assés autborisé : mais ne trouvons nullement convenir que (soit par lettres ou de bouche) vous faictes audict prince, ou aultres aulcuns, espoir ou ouverture que on les oyra au faict de la religion, pour y donner cbangement. El, à ces fins, remonstrerez tout ce qui peult servir à cest effect, tant du zèle que Sa Majesté porte &la religion catholicque, et que, pour chose qui puist advenir, ne permettra, en ce pays, aulcune nouvellité en icelle, comme aussy pour ce que luy-mesmcs a esté content que ce point fust laissé derrière, et que les requeste et remonstrance de ceulx qui se disent estatz d'Hollande et Zélande, sur lesqueUes Sa Majesté a déclaré son intention, ne font aulcune mention de ladicte religion : vous servant aussi de touts aultres moyens convéniens, voires de ce que la religionfrid d'Allemaigne ne permect aux subjectz de donner loy k leur prince et seigneur audict faict de la religion , ains icelluy dépend de la volunté desdicts princes, à laquelle les subjectz sont constrainctz se conformer, ou desplacer : luy remons- trant, en oultre, qu'il ne doibt refuser la courtoisie que Sa Majesté leur offre, d'ouir par commissaires ce qu'ilz vouldrout remons- trer : nous samblant en tous cas que debvez user de toute dili- gence pour avoir l'issue de vostre négociation. A tant, etc. De Bruxelles, le xj** jour de décembre 4574.

Minute, aux Archives du Royaume : Papiers (fl^tat, rcg. Pfégociation dt Bredu, 1574-1Ô75, t I, fol. 55.

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XII.

Devxième lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille.

Boift-LS-DuG, DÉCEMBRE 1574. MoifSEIGIfEUR,

Monsieur, le pensionaire Bonté est, su]rYant mes précédentes du 9 de ce mois de décembre, allé en Hollande, et d'illec retournée hier à soir, ayant trouvé le prince à Rotterdam, en chemin vers Zélande, en haste, tellement qu'il n'a parlé audict prince, sinon en allant, encor suyvi d'une grande compaignie; néamoins, m'at rap- porté ledict Bonté, en général, que les dîfficultées dont j'ay faict mention es mes précédentes n'estoyent pour retarder ma venue, ou rejecter la communication, mais h cause de la diffidence auregardt des moyens et seurtez, et qu'ilz craindroyent, soubz umbre de la communication, estre abusez, disant que leur précédente requeste n'auroit esté envoyée à Sa Majesté, mais rejetée et renvoyée. J'ad- jouste qu'il ne véoit que la communication pouroit avoir bon succès et effect, h cause qu'ilz insisteroyent au poinct de la religion, u hquelleSa Majesté ne vouldroit condescendre, sans toutefoys décla- rer catégoricquement s'ilz viendroyent en communication, post« posant l'article de la religion du commenchement, ou non, mais me remectant aux estatz, disant que je pourroy communicquer avec eux en son absence, et que, dedens x ou xij jours, il retour- neroit de Zélande t par quoy je suys en double si je doys corn- mencher à communicquer avec lesdicts estatz, en son absence, ou attendre son retour. Ce que j'ay bien voulu advertir VostreExcel- lence, pour l'importance de l'affaire, ayant réservé ma commission encoires enthière, affin d'icelle pouvoir exploicter avec milleur fruict, et partout en conformité de l'intention, de Vostre Excel- lence : n'obmettant que les subjectz de Hollande (selon ce que je entens) vouldroyent bien avoir une paix asseurée, et qu'ilz ont

n

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attendu et attendent encoires ma venue par delà, laquelle j'avan- cheray, après que j'averay responce de Vostre Exeellence, tant sur le contenu de cestes, que de mes précédentes.

Monseigneur, je supplie Dieu le Créateur de maintenir Vostre Excellence en sa sainte garde. De fiolduc, ce i 2* jour de décembre, Fan 1574.

De Vostre Excellence trcs-humble serviteur,

Elbertus Leoninus.

Orignal aologitphe, aux Archivet da Royaume : Papiers d'État, reg. JV^>9«eMtioii de BrtHm, 1574-1575, t. I, fol 57.

XllI.

Troisième lettre de Leoninus au grand commandeur de Caslilk.

B4)|S-LE-DUC, 15 DÉCEMBRE VS7^. MONSBIG.NEUIl ,

Monseur, ce iZ"* de décembre m'ont estez délivrées les lettres de Vostre Excellence, datées du i dudict mois, et, pour responce, il plaira à Vostre Excellence entendre que, oaltre les raisons contenues en mes premières lettres, l'occasion n'a esté de commu- uicquer avec le prince et estatz, à cause du soubdain partement dudict prince vers Zélande, et aultres raisons lesquelles je décla- reray, & mon retour, à Vostre Excellence. Et, combien je pense que ledict prince sera encoires absent 8 ou 10 jours, toutesfois (suy- vant le contenu desdictes lettres de Vostre Excellence, et pour ce que ledict prince m'a faict dire que je conuaencheroy parler, en son absence, à ceulx desdicts estatz, attendant son retour), me transporteray demain vers Hollande, espérant que Dieu me don- nera grAce d'exploter ma commission, selon les oportunités, les«

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quelles j'aiiray en considération, à Thonneur de Dieu, candeur de Sa Majesté et selon l'intention de Vostre Excellence, et me guarderay bien d'aulcunement donner espoir, ou ouverture, qu'ilz seront ouyz au faict et changement de la religion, mais, au con- traire, m'efTorceray de les enduyre h délaisser ledict poinet, en conformité que le pensionaire Bonté avoit besoigné cy-devant : servant ma précédente lettre seulement aflin de sçavoir, si avant que je ne pourrois gaigner ledict poinet, du commenchement et devant Pentrée de ladicte communication, si je debvroys refuser icelle communication, ou non, veu qu'estant entré en communi- cation, on pourroit bonnement, et avecq mélîeur raison, rejectcr ledict poinet, avec satisfaction raisonable sur leurs aultres doléan- ces; mesmes, considéré qu'il est à craindre que les altérez et prescheurs s'enforceront d'empescher, ou troubler du commen- chement, la communication et voye de la pacification, et que aul- cuns des aultres ne vouldront délaisser le manteau de la religion, jusques k ce qu'ilz seront aultrement plus asseurez, selon ce que Vostre Excellence pourra entendre par mes aultres lettres du jour de hier.

Monseigneur, je supplie Dieu le Créateur de vouloir maintenir Vostre Excellence en sa saincte garde. De Bois-le-Ducq, ce i5* dé- cembre, l'an 4574,

De Vostre Excellence très-humble serviteur,

Elbertcs Leoninus.

Original, nos Arebircs dn Roytnino : Papiers d^état, reg. ffégoeiMion tf« Bnda, 1975-1575, t. I, M. 99.

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XIV

Quatriènte lettre de Leohinus au grand commandeur de Caslille.

DBLPTfSi nàCBVBRfi 1H7^.

Monseigneur ,

Monsieur, suyvant mes dernières escriptes à Bolduc, me suis transporte en Hollande, et arrive en la ville de Ddft le iS*" de ce mois, et, le i9* ensuyvant, m'a esté délivre une lettre du prince d'Orenges, en date du 10" dudict mois, par laquelle il déclaroit que, en son absence, je m'addresseroy h ceulx du conseil, aux* quels il avoit commandé d'entendre ce que j'auroys à dire, et de me faire avoir access aux commissaires des estatz et villes. Quoy ensuyvant, ay eu audience, le SI* dudict mois, envers oeolx dudict conseil, assemblez avec les commissaires desdicts eslatz et villes. Et a esté ma proposition conforme à ma commission; mais n'ay encoires nulle résolution, h causse qu'on attend le retour dudict prince, et qu'ilz ont faict évocquer commissaires de toutes villes : de manière qu'il me convient encoires attendre jusques à l'assemblée de tous. Ayant leur déclairation et résolutioQ,ne délaisseray incontinent à retourner, avec l'ayde de Dieu, lequel je prie vouloir tenir Vostre Excellence en sa saincte guarde. De Delft, je 24« de décembre, l'an i 574.

De Vostre Excellence très-humble serviteur,

Elbertus Leoninus.

Original* aax Archives da Rojanoie: Papier* d*Ktal, reg. lïéfociaUon dt Bnda, 1574-1575, t. I. fol. ai.

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XV.

Cinquièîne kUre de Leoninu9 au grand commandeur de CasiiUe,

DSLPT, 20 DiCBMBRS 1574.

Monseigneur,

Monsieur, ayant, selon mes précédentes, iey à Delft, attendu le retour du prince d'Orenges et résolution des estatz, j'ay receu une lettre dudict prince , le 24" de ce mois, par laquelle il m'advisoit que, pour certaines affaires, il ne pouvoit encoires du brief retourner, et que pourtant, si bon me sembleroit, je me pourrois transporter vers luy en Zélande , & Middelburcb , pour faire ultérieure conférence sur ce que j'avoys icy proposé aux estatz. Quoy suyyant, me mettray en chemin cejourd'huy pour Zélande, & Feffect snsdict, espérant que du brief je firaniy raport à Yostre Excellence du tout.

Monseigneur, je prie Dieu le Oéateur vouloir maintenir Yostre Excellence en sa saincte guarde. De Delft, ce 29* de décembre, l'an i574.

De Yostre Excellence très-humble serviteur,

Elbertds Leoninus.

Original, «m ArchivM du Rojanve : Paplen d*Étal, reg. Négoeiatùm d$ BrUtL^ 1574-1574, 1. 1, fol. 64.

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xvr.

Sixième lettre de Leoninus au grand commamleur de CastUk.

Monseigneur,

Monsieur, siljrvant mes dernières, cscriptes à Delft, je me suis transporté, eu conformité de la lettre du prince d'Orenges, en Zélande, et suis arrivé à Midddburch le dernier jour du mois de décembre dernièrement passé, et ay esté bien receu et eu audience, par trois ou quatre fois, vers ledict prince : mais, h causse que les- villes d'Hollande n'ont encoires envoyé leur résolution, n'ay peu jusques ores avoir absolute responce. Bien est vray que, selon que me semble, tous inclinent à la communication ; mais la chose est retardée, à raison de la diiBdence qu'ilz prétendent, et multi- tude des membres des estatz , tant d'Hollande que Zélande , et qu'ilz font quelque scrupule sur le narré et clauses de ma com- mission : espérant néantmoins d'avoir bientost la responce finaiie, avec laquelle je ne retarderay incontinent retourner. Il y a esté grand bruyct de la venue du conte de Swartsenburch, mais il n'est encoires venu, et ne peulx entendre certaines novelles.

Monseigneur , je prie Dieu le Créateur de vouloir maintenir Vostre Excellence en sa saincte garde. De Middelburch , ce xj'' de janvier, l'an 4575, stiL rom.

De Vostre Excellence très-humble serviteur,

Elbertus Leoninus.

Original, aax Ârehires da Royaume : Papiers d'Élat, reg. Hfégotiûtion d$ Brtda, 1574-1575,1. !, fol. 68.

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XVII.

Rapport de Leoninus sur sa mission vers le prince (V Orange.

29iARViBn l!>73.

Verbal du docteur Ëlbcrtus Leoninus, de son voyaigc vers le prince d*Orangcs, es mois de ddccmbrc et janvier li>7i.

Je, Elbcrlus Leoninus, docteur es droicl2, accompaigné de M^ Hugo Bontc, me suis transporte, en vertu de la susdicte com- mission , le premier jour de décembre, à Bois-le^Duc, je suis demouré certains jours, attendant le passe-port du prince d'Orenges, lequel me fut apporté, le 9^ dudict mois, avecq une missive dudict prince, contenant quejcseroys le très-bienvenu, mais qu'il crain- doit que je ne ferofs grand fruict, si je n'avoys aultre charge que de procéder sur ce que cy-devant avois commenché par M'* Hugo Honte, dont j'avoys faict mention en ma lettre escripte audict prince.

Quoy voyant, j*ay dépeschéledict Bonté avecq une aultre lettre, par laquelle je désirois estre adverty des causes et difficultez mentionnées en ladicte lettre, ensemble d*avo3rr ung passe-port plus ample que icelluy qu'il m'avoyt envoyé. Sur quoy ledîct Honte est allé, ayant trouvé ledict prince à Rotterdam , en chemin pour aller en Zélande, et obtient l'ampliation dudict passe-port , avecq déclaration qu'il avoit escript ladicte lettre, non pour retarder ma venue, ny rejecter la communication , mais pour la diffidence, et difficultés des moyens et seurettez^ mesmes au regard de la religion , adjoustant que, en son absence, je me pourrois trouver à Delfft , vers ceulx de son conseil , qui me donncroyent accès vers les députez des estatz.

Ayant rcccu ceste responce, et après que j'avoys donné adver- tence, et reccu la seconde jussion de monseigneur le commandeur

m. 37

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mayeur, me suis mîz en chemin le xiv° dudict mois, et suis, non sang dangier de tcmpeste et invasion des soldatz escossois de Lou- vestain, arrivé au soir à Gorcum, bien tard ; et, trouvant les portes serrées , j'envoyois vers le lieutenant du gouverneur et bourge- maistres, qui sont incontinent venuz pour m'ouvrir la porte , et me recepvoyent et traictoyent civilement ledict soir, & cause de l'ancienne cognoissance, et que je les avois assiste, par cy-devant, en leur procès. Et, le jour ensuyvant, pour ce que la tempeste m'empcschoit d'aller plus avant , suis Ih demouré , et ay receu de cculx de Gorcum la continuation de la mesme bëndvolenoe.

Le xvj* dudict mois , ilz m'ont faict entrer en une leur navire de guerre, et conduire en icelle, par ledict lieutenant , en la ville de Dordrecht , laquelle je suis entré k la veue de beaucoup des gens, principalement matelotz, qui se estoyent assemblez, à cause que l'artillerie de ladicte navire en estoit déchargée, en arrivant ; et, à mon entrée, lesdictes gens parlèrent diversement. £t, estant entré le logis des Troys Roy s y m'est venu parler le secrétaire de la ville, me demandant la cause de ma venue, et si j'avois licence. A qui je déclaroy d'estre commissaire envoyé de la part de Sa Majesté, et luy monstroys le passe-port dudict prince : dont il ûgl rapport, et retournit avecq l'esQOultet de ladicte ville, appelle Nyvcldt , qui me congratuloyent. Et je les ay tenu avecq moy au souppé, ensemble ledict lieutenant et ung gentilhomme nommé Blanckeville, qui m'avoyent accompaigné. Et est survenu le gou- verneur de Gorcum, retournant de Delfit.

Le jour ensuyvant , à sçavoir le xvij<' dudict mois , refoumit ledict escoultet , me requirant de vouloir demourer, pour faire le disner avecq ceulx du magistrat de la ville ; mais, comme j'avoy dict, au soir précédent, de vouloir partir, les remerchois, pour ne donner occasion de soupçon de chcrcer oportunité de parler, ou informer. Et suis allé , avecq ledict escoultet et convoy des soldatz, en une navire, pour Rotterdam, je suis arrivé le mesme jour, entre trois et quatre heures. Et, après que j'estois entré en mon logis, sont venuz deux capitaynes de ladicte ville, déclarants, en cholère, qu'ilz sçavoyent que j'estoys docteur de Louvain, me demandant la cause de ma venue, et si j'avoys licence. Sur quoy

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je rcspondiz d'cfttre commissaire, et, a eulx monstrant deux pasfic^ portz dudict prince, desqudles ilz se conientoyent, les ay prie pour demeurer avecq moy au souppé, afin de donner plus grand appaisement.

. Le jour suyvant , qui cstôit le xv^ij**, je me suis allé par une petite baroque à Delfft, ou je suis arrivé entre unze et douze heures dudict jour; et, estant entrez en une hostèlerie, j'ay envoyé ledict Bonté, avecq mon passe^port , vers le capitain de ladicte ville, et bientost m'est venu congratuler le bourgemaistre de ladicte ville, nommé Ccmincks, cy^^evant escolier de Louvaiu, qui , voyant que je n'estois bien logé, me présentoit procurer aultre logis, que j'acceptois , de manière que ledict bourgemaistre rctoumoit le matin suyvant, et me mesnoit en une hostèlerie nommé Montfort, je me trouvots bien accomodé , avecq hoste et hostesse de bonne sorte et qualité. Et , pour ce que plusieurs du magistrat , bourgeois et aultres gens du bien me venoyent congratuler et parler, ceulx du conseil du prince ihandirent h mon hoste de ne me laisser parler k personne , et , davantage , m'envoyèrent une lettre escripte par ledict prince, par laqudle il m'advisoiC que, en son absence, je m'addresserois à ceulx de son conseil estant audict DcIlTt , qui me feroyent avoir audience vers les estatz d'Hollande. Et , en conforrailé de ce , j'ay envoyé ledict Bonté audict conseil pour en avoir audience, et luy fust respondu qu'ilz me feroyent appeller par quelque ung, quant Foportunité seroyt.

Et, comme la chose se dilayoit, et quedemeuroys seul au logys, sans que personne pou voit avoir accès sans licence , j'ay derechef envoyé vers ledict conseil , sachant que les estatz estoyent aussy assemblez, ainsi que, le xxj"" dudict décember, vers le soir, le gref- fier dudict conseil, nommé Genitz , me venoyt appeller , et con- duire vers ceulx dudict conseil et estatz, et ay trouvé environ douze ou treize personnes, tant du conseil que des estatz , asçavoir : dudict conseil, Verlaen, Vander Mylen, Gamerlinck, Wyngacrdt, Vander A, M'° Paulus Buys, estant dudict conseil et advoeat des estatz d'Hollande et Zélande; item, Adriaen de Blyenburch , du magistrat de Dordrecht, Coninckx, bourgemaistre de Deifft; item, les bourgcmaistrcs de Schoonhoven, Goude et Rotterdam, et

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aultres, lous assyz à une tablc^ jusqucs à ce que j'estois entré dedans, quant ilz soy levirent, pour me con^atuler.

Et, après les salutations et qu'ilz estoyent assyz^ je proposois d'cstre enchargé, de la part de Sa Majesté, me trouver vers le prince d'Orenges et estatz d'Hollande et Zélande, pour déclarer certaines choses, et que ledict prince m'avoit avisé, par ladicte lettre, m'addresser, en son absence, à ceulx de son conseil, don- nant le choix à eulx s'ilz vouloyent ouyr ma proposition en son absence, ou le différer jusques à son retour. Sur quoy ilz avisoyent quelque temps à part ; en après, me faisoyent déclarer que dési- rayent bien ouyr ma proposition : quoy suyvant, j'ay commencé mon harangue, remonstrant les troubles, misères et calamitez des pays, l'inclination de Sa Majesté à clémence, et dcsir de monsei- gneur le commandeur mayeur et aultres seigneurs à l'avanche- ment de ladicte clémence, tellement que l'occasion d'estrc remédié auxdicts troubles et calamitez estoit si grande comme pourroit estre, et que Sa Majesté condescenderoit & toutes choses justes et raisonnables, saulf l'honneur de Dieu et réputation de Sa Majesté : remonstrant à eulx le contenu de leur escript et requeste aultre- foys envoyé, ensemble comme j'avoys paravant escript et envoyé M'"" Hugo Bonté audict prince, en mon privé nom, au sceu et inhortation de bons seigneurs de par dechà , et que, au commen- cement du moys de juillet deiiiier, ledict prince avoyt consenti et dénommé certains déj^iutez, pour entrer en communication et remonstrer leur doléances par requeste, aflSn d'y estre remédié par clémence, et qu'on entreroyt en ladicte communication, sans mentionner du changement de la religion, comme aussy ieur- dict escript et requeste ne faysoit aulcune mention d'icelluy : les remonstrant les calamitez qu'estoyent, et dangiers qui pourroyent survenir, avecq toutes aultres choses et raisons qui pourroyent aulcunement servir, et requirant d'y vouloir mcuremeiit penser, et me donner telle response comme, selon l'importance de l'affaire et occasion qu'estoit, convenoit aux bons vassaulx et subjectz ; effarant l'intercession et faveur de Son Excellence et de tous aultres bons seigneurs.

Quoy faict, ilz m'ont remerchié de la peine que j'avoys prins.

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par la bouche dndîct adrocat, et requis de monstrer ma commis- sion, Jaquellej'ay monstre, et, depuis la lecture, ilz ont demandé copie, laquelle je les ay octroyé. Quoy faict, ilz ont déclaré de vouloir penser sur ladicte proposition et contenu de ladicte com- mission, pour la oommunicquer aux aultres estatz, et envoyer audict prince.

Depuis, je suis demeuré audict Delfft, attendant le retour dudict prince, et ce que les estatz feroyent. Et, pour ce que j'avois longue- ment attendu, sans que je pouvois parler h personne (saulf que, avecq licence, aulcuns de leur religion me venoyent veoir, et que M^Cornelis Conincks, Hugo Jacobzoon, Almonde, bourgemaistres, etlepensionareBuese, deDelflt, m'ont donné le souppé, le âS"* du- dict mdis), et que percevois que ceulx dudict conseil et aultres preiioyent de mauvaise part le narré de madicte commission, pour empescher l'entrée de la communication, et me tenir comme venu saRÀ pouvoir et commission addressant & eulx, et qu'ilz avoyent envoyé deux commissaires dudict conseil, asçavoir Wyngaerdt et Camerlînck, versledictprince^ j'ay escrîpt audict prince, meplain- dant du retardement, et déclarant que ma commission s*addressoit prineipalement à sa personne, désirant pourtant sçavoir en quel lieu jelepourrois trouver, ou rencontrer. Sur quoy j'ay receu une lettre dudict prince, contenant que luy n'estoit possible de retour- ner du brieff en Hollande, et que pourtant, se bon me scmbleroyt^ me pourrois trouver à Middelborch, et que je serois bien venu.

Après la recepte de ceste, j'ay requis que aulcuns dudict conseil me vouldroyent venir parler. Et, ce suivant, me sont vcnuz parler deux conseillers, asçavoir Verlaen et VanderMylen,âuxquelz j'ay déclaré le contenu de ladicte lettre, et demandé d'entendre sur icelluy l'intention dudict conseil, afin de ne donner occasion de quelque aultre empeschement, si j'eusse party à leur insceu. Et, après avoir faict leur rapport, ilz sont retournez, me déclarant que ceulx du conseil me donnoient le choix et option d'y aller ou demourer, pour attendre à Delfft le retour de leurs députez. Sur quoy j'ay dict que, à raison que ma commission s'addressoit prin- cipalement à la personne dudict prince, je trouvois convenir, pour m'acquitter, d'y aller ; et en après, ayant ouy ceulx du conseil

cestc mienne résolution, Hz me faisoyent dire que le prince leur avoit aussi escript, et chargé de m'assister et faire conduirç scii* rement, et que feroyent venir l'admirai d'Hollande. Mais, à cause que l'admirai n'estoit point encoii'es prest, et que m'eusse fallu attendre encoires uug jour, je disois que seroît assez d'ayoir ung petit bateau, avec quelque convoyjusquesi Dordrecht* Et ainsi me fit compaignic le capitaine Crep, avecq ung rot (*) de ses soldats, ilern ung liallebardier du prince. Ainsi allasmes, leâd'dedéoember, à Rotterdam ; et sortant dudict DcliTt, environ les unze heures, le Marché estoil plein des gens, qui me faisoyent quasi terlous révë^ renée, tant sur ledict Marché, que allant par tes rues, jusques au bateau.

Et, estant arrivé audict Rotterdam, et passaat plus oultrc, me sont suyviz les bourgemaistres jusques à la Teste, me eongralu* lantz et priantz de vouloir retourner du moins une heure, pour faire quelque petit bancquet, qu'ilz disoyént esiro prest : dont je les ay remerchié, et offert tout bon office que pourrois faire pour eulx. Et, entrant avecq roondict capitaine et convoy ledict Dor- drecht, logismes aux Troys RoySy et vient incontinent l'escoultet Nyveldt pour congratuler, me déclarant qu'il viendroit, avecq aulcuns de la ville, souppcr avecq moy, comme ilzviénoycataussy, asçavoir ledict Nyveldt, Vander Mylen, Gornelis Van Beveren, bourgemaistre, BHcnborch et M^° Paul, secrétaire, et me faisoyent par leurs messaigiers présenter 24 pots de vin du Rbyn. Et par- lismes de diverses choses, et, entre aultres, ilz pressoyeiit tous* jours la diiïîdence et craincte de tromperie, allégcaos, entre aullres, qu'ilz avoyentreccu lctti*esde Sa Majesté, comme cscriptes en Espaignc, et que toutcsfois c'estoit la mesme main d'iceliuy qui avoit escript à Bruxelles aultres lettres, de lu part de Son Excellence. Et me faisoyent monstrer lesdictcs lettres , et, Icis voyant, je ti*ouvois que le contenu desdietes lettres estoit escript par d'Entières (*) en Espaigne, et que la superscription estoit

(0 liât, dëtaciicmcut.

(^) Arnould d'£nnetièrcs, qui avaif remplace Courtewilte comme secrétaire (P£lal des Pays-Bas, à Madrid.

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seulement faict par aultre main : ce que enfin eulx cognoîssoicnt aussv.

Le SO"** au matin, partismes vers ZéJande, accompnignez du lieutenant et porteur d'enseigne dudict escoultet, avecq certain nombre des soldatz, et, sortant de la ville, je véois modestie .et signification du désir de repos entre les bourgeois. Et, estant en mer, eusmes quelque tempeste, tellement que descendismes à Oelkensplaete. Et néantmoins, vers le soir, rentrismes en la navire, et summes, le 51*"% non sans aultre tempeste, arrive à la teste de Middelboi*ch, où, demeurant encoires au bateau, escripvois une lettre audict prince que j'estoîs arrivé, prianC de pouvoir entendre, et estre dressé au logis il me vouldroit faire loger, pour ne donner soupçon, si j'eusse prins logis h mon appétit ; laquelle lettre j'ay envoyée audict prince, k Middelburch. Et, quant il me sembloit qu'elle pourroit estre délibvrce audict prînce,*je sortiz pour aller à la ville; et, sur le demy-ehemin, me reeon- troyent cincq capitaines, qui me reccuprent avecq certain nombre des soldatz, qui faisoyent le salve avecq leur harquebuzes, et me menoyent en l'abbaye, au logiz de Charles Boisôtt, qui me rencon- tryt et menoit dedans la chambi*e, le disné estoit prest, bien magnificquement, et demouroyent tous les capitaines. Durant ledict disner, venoit le maistre dliostel du prince, appelle Nuwen, avecq ung aultre gentilhomme, nommé Yander Tempel ('), me congratuler au nom dudict prince, et mander que je viendrois souper avecq luy*

Après disner, et les tables levées, me venirent aussy congra- tuler le S' de Sainte-Aldcgondc et doctor Junius, et divisammes ensemble généralement. Et après, ledict Boisott et Junius, avecq les capitaines et aultres gentilhommes, me roesnircnt au logiz de Symon €ost , cy-devant bourgcmaistrc de Middelborch , et encoires catholicque, à l'opposite de la maison de la ville, la garde estoit.

Au soir, le prince me faisoit quérir par deux gentilhommes, à sçavoir mons' de Uaultain et son maistre d'hostel Nuwen, pour

(') Voy. ci-dessus, p. 122.

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soupper. Et, quant j'estoys en sa chambre, me disoitlc bien venu, et que la venue de ma personne estoit aggréable, mais non la commission, à Iny paravant communicqué par lesdicts députez du conseil. Sur quoy je respondiz que, ayant bien entendu le tout, il. trouveroitaultrement ; priant que luy plairoit différer Taudience de ma proposition jusques au jour ensûyvant, qui estoit le primier de ccst anné : ce qu'il consentit. Et allasmes souper, avecq une grande compaignie; mais, durant ledict souper et après, il se monstroit assez aspre.

L'aultre jour, à sçavoir le premier de Tanné, il me mandoità huict heures du matin, et me donnoit, tout seul en sa chambre, audience, laquelle duroit plus de deux heures : ayant faict remoos- trance du désordi*e du pays ; de ses fortunes et dangiers qu'avoyent cstées et estoyent cncoircs; de la bonne inclination de Sa Majesté, ci intercession de Son Excellence et aultres seigneurs et poten- tatz, et qu'il avoit occasion de s'exempter des garbouilles, et- se remettre, avecq ses enfans et amys, en estât, et restablir la mayson de Nassau^ délaissant la nouvelle religion, et faisont bon office du vasal fidel. Sur quoy il me faisoit plusieurs plainctes, et disoit qu'il ne i)OUvoit attendre que d'estre trompé, et que cela se pouvoit entendre par ma commission ; item, qu'il estoit obligé par serment avecq les estatz ; qu'ilz ne vouldront jamais délaisser la nouvelle religion, faisantz difficulté de procéder sur ma com^ mission, h cause qu'elle contenoit que les nobles et villes, se dtsantz représenter les estatz d'Hollande et Zélande, avoyent supplié : ce que disoit signifier faulse tiltre, et usurpation de qua- lité non véritable, laquelle les estatz ne vouloyent confesser; item , que ladicte commission contenoil/ que les estatz avoyent déclaré de vouloir supplier, dontilz disoyent suyvir que les estatz avoyent demandé licence pour pouvoir supplier ; davantage, que ladicte commission contenoit qu'ilz avoyent déclaré ne convcnii* aulcuncmcnt de capituler avecq Sa Majesté, et que le contraire estoit apparissant par l'escript et requeste desdicts estatz: item, que ladicte commission portoit que ledict cscript et requeste avoit esté envoyé vers Sa Majesté en Espaigne, où, au contraire, apparoit, par libres imprimez en Hollande et fcttres du seigneur de Cham-

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paigny, que ladîetc rcqueste avoit esté rejectd ci renvoyé par ledict seîg' de Champaigny au doctor Junius , sans qu'il avoit ose présenter. Davantage, disoit estre mîz en ladicte commission fort captieusementj et pour mouvoir soupçon et diffidencc entre luy et lesdicts estatz, qu'il avoit déclaré que les estatz feroyent, etc., et qu'ilz avoyent suspect ladicte obscurité et généralité , présu- mante qu'il auroit déclairé quelque chose à leur préjudice : car, disoitr-il, on pourroit dire que les estatz feroyei^ la délibvrance de Vlissinghen, ou quelque aultre chose semblable, y adjoustant qu'on présumoit que le mot clémence estoit adjousté en ladicte commission, pour les restraindre au commenchemcnt à la voye du pardon, tellement qu'il disoit qu'on tenoit ladicte commission entièrement fraudulente, captieuse et insuiSsante, et que les estatz ne vouidroyent procéder ne faire quelque chose en vertu d'icelle.

Après qu'il avoit finy sa paroUe, je commenchois à déclarer que ladicte commission estoit donné à la bonne foy, sans aulcune fraude, et que les motz se disantz représenter les estatz, etc., estoyent insérez li bonne intention, pour ce qu'il n'y avoit nulle dénomination des personnes ou villes en Fescript ou requeste exhibé ; ensemble, pour non préjudider à Testât ecclésiasticque, villes Amsterdam, Harlem et aultres membres qui de tout^ an- cienneté ont esté entre lesdicts estatz : dont toutefoys n'est faict mention en ledict. escript et requeste; ensemble, pour ce que la séparation des provinces cause doubte de l'administration, que n'en peult estre jugé, sinon par communication et résolution d'yeelle. Et , au regard de ce que dict est en ladicte commission, que les nobles et villes avoyent déclaré de vouloir supplier le Roy, disoy estre véritable que àudlct escript sont contenus les mots supplier et bidden, et que, toutefois, ledict escript, n'estant mjz en forme requeste, a esté prins et entendu seulement pour le vouloir de supplier, et que conséquement ladicte requeste est ensuyvie; en oultrc, estre vray que ladicte commission se réfère à l'cscript des députez des estatz d'Hollande et Zciunde, requeste des nobles et villes desdicls pays, et à la communication cy-devant advisée, de sorte que ex vi relalwnis, mesmcs au regard de la

.

» . "

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capitulation, tout le narré de ladicte commission doibt astre tnteiv prêté et entendu selon les termes et limites dudict escript, requeste et concept de ladiete communication, pour laquelle les députez ont esté autrefois dénommez, mcsmes considéré que les affaires sont en la mesme estât en laquelle ilz estoyent aupara- vant et au temps de ladicte requeste, veu que le gouvernement et administration d'Hollande et Zélande se contînuoit encoires au nom de Sa Majesté, et que pour icelle (selon ce que j'entendois) ilz prioyent encoires publicquement en Hollande et Zélande. Et, touchant ce qu'on dictque Fescript et requeste seroyent renvoyez, je disois qu'ilz debvroyent considérer que les copies sont deroou- rez, comme il apart par l'exhibition d'icelles, lesquelles contien- nent les mesmes remonstranccs, et sont de semblable effeot avecq les originales : ce que a esté considéré par Sadicte Majesté, avecq aultrcs remonstranccs et intentions, de manière que icelle a esté esmeue d'incliner à clémence et doulceur, avecq intention de pourvcoir, comme en raison seroit trouvé convenir, et k ung bon père et prince naturel appertient, en respect de ses vassaulx et subjectz, ayant sur ce escript son intention à l'Excellence du commandeur maieur, qui, suyvant le bon playsir de Sa Majesté^ avecq l'advls d'aultres seigneurs et personnages, et aussy en la conformité de la dernière dausulc dudict escript in verbis : want die vernoemde staten vastelick vertrouwen dat d'Excdlencie van den commandeur mayeur ende allen anderen ghetrouwen vasallm ends dienaren vanSyne Majesteyt dielmnden sullen houden, etc., a dépesché ladicte commission, alïin d'ouyr, au nom et parchaigc de Sa Majesté, les députez du prince et desdicts eslatz en leurs doléances contenues èsdicts escript et requeste, et auUrcs qu'ilz vouldront proposer, et sur tout déclarer la bonne intention de Sadicte Majesté; et, pour donner plus grand contentement, devant remédier à tout par la bénigne autborilé de Sadicte Majesté, avolt esté trouvé convenable, et le plus scur, d'entrer préaUa- blemcnt en conférence et communication par députez et commis* saircs, d'ung costé et d'aultre, selon et suyvant le concept susdict, et par les députez autrefoys dénommez, ou aultrcs que plairoit déiiommcr, sur les poincls contenuz èsdicts escript et requeste ; et

4

an

ce, avecq dëclaration, ouvertement comprinseen ladicte commi»- si(m, que, si avant qu'ilz ne demandent de Sa Majesté, se non remède par clémence ou goedertieren insicht, et choses justes et raysonnables , lesquelles Sadicte Majesté peult octroyer, sans offenoer l'honneur de Dieu, ny son authorité (laquelle Icsdicts cstatz protestent vouloir et honorer et révérer), que Sa Majesté seroit content les impartir et octroyer. Et, quant aux motz de ladicte commission que les estatz feroyent, etc., disois que les* dicts motz importoyent et signifioient que ledict prince avoit déclaré à mon commis que les députez des estatz, venbnt en com- munication^ remonstreroyent leurs doléances par requcstè, aflîn que plairoit à Sa Majesté y remédier par clémence, me raportant, sur ce. Il la déclaration dudict prince mesme. item, que le mot de démence n'estoit si reslrainct comme ilzprétendoyent, et qu'ilz {louvoyent et debvoyent tous ces difiicultez délaisser, comme im- pertinentes, avecq plusieurs aultres circonstances.

Lesquelles entenduz, ledict prince se rendoit plus duulx , et dlfioit qu'il entendoit que les choses se pouvoyent aulcunemcnt ainsi interpréter, mais qu'il n'estoit besoingne d'en ftiirc si longue narrée, et que les Hollandois estoyent grosses, et n'entendoyent telles subtilitez, mais qu'ilz concepvoyent, par cela , plus grand soupçon et cralncte : adjoustant, ncantmoings, que, ce non obstant, il remonstreroit le tout aux estatz, et rendroit peine de les enduyre de changer leur opinion, et modérer, voircs changer la rcsponee, laquelle ilz avoyent conoeu et envoyé d'Hollande. Et, quant au changement de la religion, il persistoit, y adjoustant tousjours que, en cas qu'il vouldroit, luy seroit impossible de l'effectuer vers les estatz et peuple.

Le 5" jour dudict janvier, ayant requiz audience, je suis mandé pour disner, et après il me donnoit derccheff audience , avecq Bonté, bien par l'espace d'une heure et demye, nous débat- tismes derecheff les difiicultez de la commission. Et scmbloit ledict prince encoircs plus enclin, disant qu'il laissoit toutes choses adviser et résouldre par les estatz prcmièrenieiU, et qu'il no traictoit riens sans leur volunté et délibération pi'écédcnte, mais qu'il enlrcviendroit cl fcroil bonne office de les enduire, si avant

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qu'il seroit possible. Et se roonstrit ledict prince, après ledict temps, entièrement doulx et amiable vers moi. Et, comme lesdîcts estatz avoyent aussi faict une grande contradiction et discours sur les motz de ladicte commission, suyvant ce qu'a off^t ledict prince, est vray que ledict prince m'a déclaré qu'il feroit trencher ladicte contradiction, confessant d'avoir offert, et qu'il estoit content d'offrir encoires, comme après il a aussi déclaré devant les estatz.

Le 4", souppay avecq Junius, estoit Boisot, Aldegonde, monsieur de la Garde, Vandcn Dorp; et partirent lendemain S^^-Aldegonde et de la Garde, avecq monsieur de la Sale, respec- tivement pour Engleterre et France, comme on disoit.

Le b% j'ay souppé sur Dorp , estoyent les seigneurs de Nyvelte, Mansart, et le dyckgrave Weickendet et doctor Junius.

Le 8*, j'ay disné avecq le prince.

Le iO"*, alloit le prince à Vlissinghen, pour amplier la ville.

Le 14", il alloit à Ter Veren, et retournoit le 17".

Le 18**, j'ai souppé sur Vanden Dorp avecq le prince, le comte de Culenborch, sa femme, et tous aultres principaulx.

Pendant les jours susdicts, les députez d'Hollande et estatz de Zélande faysoyent plusieurs assemblées, pour la responce, et moy, ayant la commodité d'entrer es compaignies susdictes, et d'avoir aulcuns avecq moy pour dîsner ou soupper^ me plaindoyc des diflicultez qu'ilz faisoyent, démonstrant vivement le contraire, principalement Boisott, Junius, Vanden Dorp et âultres, et me suis accommodé pour venir èsdictes compaignies, à raison que aullrement je ne pouvois avoir occasion de parler à personne, ny faire quelque fruict, mcsmes vers ceiilx de consistoires, qui gou- vcrnoyent tout : ayant souventefoys esté prié à disner et souper par aultres bourgeois, mais ne pouvoyent avoir licence.

Le 20*, le prince me mandit devant disner, et monstroit la première responce des estatz, estant de 12 feuîles, fort exorbi- tante. Depuis, il me monstroit ung aultre de six ou sept feulles, aussy réformé, et, pour le 3°, la dernière, laquelle il disoit estre l'cxtrcme ; et néantmoins disoit de me vouloir communicquer, devant la conclusion et signature. Et, la ayant leu, je disois que

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tout cstoit superflue, et qu'on pouvoit passer et venir en commu- nication , faisant une simple proteste de demeurer entiers et sans préjudice. A quoy ledîct prince s'indinoit assez, mais disoit que la résolution des estatz estoit contraire, et qu'il he pouvoit chan- ger : néantmoins, m'a permis de noter aulcuns passages, estant trop aigres, lesquels, sortant de sa chambre, il a communicqué ausdicts estatz et députez, et tant faict qu'ilz ont consenty d'estrc trenchez quinze passaiges. Enfin, m'ont appelle, et faict trencher en ma présence, par laquelle occasion j'ay derecheff remonstré la superfluité, jusques à ce que ledict prince me rompit le propos, disant : « Vous nous faictes icy trencher la paroUe de Dieu ; que « voulés-vous estre miz en lieu de cela ? la saincte Marie et tous u les sainctz ? » Sur quoy je responds que ouy, et que, faysant cela, tertous auroyent bien, et que luy seroit tenu comme avoit esté tenu Martyn Van Rossem de la royne d'Hungarie. Et enfin, voyant que je ne pouvois plus mouvoir, je disois que, combien îlz descendoyent à la communication, que toutefois je ne pouvois simplement reccpvoir leur response, h cause des difBcultez et dausules portez par icclle , mais que j'estois content de raporter le tout à Son Excellence, sur certaine déclaration et protest, lequel ilz ont consenty d'cstre adjousté au fin de ladicte response, selon le contenu de l'escript que je raporte, respeclîvcment signé par ledict prince, advocat des estatz et secrétaire dudict prince, déclarant d'avoir observé toutes occasions, et que j'ay faict toutes remonstrances, tant en publicq qu'en privé et particulier, pour mouvoir ledict prince, ceulx des estatz et particuliers, à délaisser leur religion, et retourner en obéissance de Sa Majesté, requirant instantement qu'ilz vouidroyent tenir ladicte communication , délaissant le changement de la religion : en quoy ilz n'ont voulu estre retrainct, espérant toutesfois d'avoir esmeu les ceurs de plusieurs.

Et j'ay trouvé qu'il y a encoires plusieurs catholicqucs; mais la plus grande partie est enchauflc par une impression de crainte et dilHdence, et, davantaige, sont tertous environnez et en In puissance du prince, de ceulx de son conseil, des députez des estatz et des magistratz, pour la plus grand' pari de la nouvelle

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religion, ensemble des ministres, consistoriaulx, capitaines, sol* datz, matelotz «t banniz de ees payz, qui s'enforcent de per- suader n'estre anltrc moyen d'asseurance que par la religion, à causé de leurs liges et confédérations, disans ouvertement, oultre ce que peull estre en Angleterre et Âlmaigne et ces aultres pays, d-avôir intdligeriee en France et avecq le Turoq. Et, en parti-* ciilier, j'ay représenté audict prince les dangiers passez, le hasard et incertitude de Tadvenir, et qu'il pourroit estre gatté, avecq sa postérité, par une mutina tion des matelotz, des soidatz, du peu- ple, item d'une trahison, d'une adverse fortune , ou par une mortalité naturelle de sa persone, et que, pourtant, y convenoit se exempter des troubles, conserver sa mayson, et se mettre à repos, sans laisser passer l'occasion : ce qui me passit par silence, sans en faire contradiction. Et, pour le dernier, j'ay apperceu que leur principal dessein est de donner droict à tous plaindans de tous costés, avecq profession de liberté, pour troubler le tout, et attirer ainsi les ceurs du peuple et des aultres.

Ce que desus contient les principaulx poinctz de ce que je, ElbertusLeoninussusdict, ay besoigné, en vertu de ladlcte commis* sion, en Hollande et Zélande : dont j'ay faict rapport au mondict seigneur le commandeur mayeur, en Anvers, le 26° de janvier dernier ; et depuiz, asçavoir le 29** dudict mois, par charge de Son Excellence, itérntivcment faict raport du mesme au monsieur du Saint^Bavon, en Uruxelles : ayant délaissé ladicte responce dudict prince et estnlz, «avecq ma déclaration et protest susdict, es mayns de Son Excellence.

Elbërtcjs Leoninus.

()ri;iin.-il. nu« ArchÎTcs do Royaomc ; Papiers d'Élat, rcg. Négociation Ht Bndaf 1574-l57Jt fol. 71-79.

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*

NÉGOCIATIONS

DE GERTRUDENBERG, KN IS77.

I.

Instruction de Gcmpar Schetz et du docteur Leoninus^ envoyés pai les états généraux au prince d'Orange et aux états de Hollande et Zélaîide {'),

nRt]XELLE<« 9 MAI 1^)77.

iDsIruction pmir incssirc Gaspar Schclz, chevalier, boroii de Wczcmale, «oigncup de Grobendoncq, etc., trésorior gt^ncrol des finances do Sa Majesté, et le docteur Elbcrlns Leoiiinus, députes par les estais gcnéraulx vers inoi)> sieur le prince dH)ranges et cstatz de Hollandp et Zélnnde.

liCS cstatz, ayans ouy le rapport dudict S' docteur (^), et prc« miérement touchant le poinct des licentcs et aultres charges mises

(') P. Bon a public, en hollandais, Nmleriandlsche Oorloghen, liv. X, fol. 24i et saiv., la proposition que Selicts et l^oninus liront au prince d*Orangc et aux états de Hollande et Zêlandc, à Gcrlrudenbcr^ le 14 mai; la réponse du prince et des états, en dnir du 17 mai; la réplique des députés ^\o'^ états généraux, du 25 mai. La proposition du 1i nVs( guèirqu^uiie paraphrasée de Pinstruction que nous donnons ici.

(*) Voy. ci-dessus, p. 273.

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et practicqucz, durans ees troubles, sur les marchandises passant par Hollande et Zélande, que lesdicts de Hollande et Zëlande sont f ntentionnez de continuer , ont enchargé ausdicts députez d'in* sister vers ledict S*" prince et estatz, affin d'oster lesdicts licentcs, charges, convoy-gelt et passeport-geit, et aultres telles nouvelles charges imposez depuis ledict temps des troubles, et remectre le tout en son premier estât , pour ne poinct contrevenir aux entre- cours faictz avecq les roynulmes de France, Portugal, Angleterre, pays d'Oostlande et aultres provinces circonvoîsins , et aussy , pour du tout observer le traicté de pacification faict à Gand, par est dict ladicte pacification estre faicte pour le redressement et maintiennement de tous anchiens droictz, coustumes et libertés, unicque et souverain remède pour restaurer lesdicts pays en leur anchienne fleur et vigeur au faict de la négotiation et commerce , et ne divertir, à l'occasion desdictes grandes charges, la traffîcque ailleurs hors de ees pays , ce que redonderoit enthièrement à la ruyne desdicts Pays-Bas.

Remonstreront que lesdictes licentes et impositions sont direc- tement répugnantes contre le privilège comprins en la Joyeuse Entrée de Sa Majesté au pays et ducé de Brabant, par laquelle Sadicte Majesté a promis que les inhabitans et subjectz de Brabant polront librement et franchement naviger et passer en Hollande, Zélande et aultres pays , en payant seuUement l'anchien droict accousthumé de tollieu ; voires est dict davantaige, par ladicte Joyeuse Entrée^ que tous marchans, de quelque pays ou nation qu'ilz soyent, aultant bien estrangiers que inhabitans, polront , avecq leurs biens, marchandises et denrées, naviguer, passer, aller, converser, retourner, achapter et vendre librement et paisi- blement en tout le Pays-Bas, et signamment au pays de Brabant et d'Oultre-Meuse, bon leur sembleroit , en payant l'anchien droict de tollieu et anchienne charge.

Et, l'on trouveroit expédient et nécessaire de mectre sus les- dictes licentes et impositions nouvelles ( qui est encoires à résoul- dre) , il conviendroit ce faire par l'auctorité de Sa Majesté , et du consentement et aggréation de tous les estatz dudict pays, pour ce. deuement convocqucz et assemblez , et que lesditcs licentes et

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impositions fussent généralles par toiil le pays, et au prouffict de la {çcnëralité des estatz, n'estant raisonnable que une ou deux provinces, au grand préjudice dos aultres , qui avecq la gênerai i(é se treuvent chargées, en prouffîctcnt.

Et, comme ceulx d'Amsterdam ont présenté certaine requeste ausdicts cstatz, se plaignantz de telles charges et impositions nou- velles que font ceulx desdîcts d'Hollande , allencontre de leurs privilèges, ladicte pacification , au préjudice du commerce , de la marchandise et aultrcment , lesdicts députez le représenteront à Sadicte Excellence et estatz de Hollande , priant pareillement de les vouloir descharger et maintenir en leurs privilèges, délivrant ausdicts députez copie de ladicte requeste, h cest effcct et pour meilleure instruction ;

Semblablement, de les vouloir traicter doulccment et donner toute satisfaction, suyvant le traicté et capitulation de la pacifica- tion faicte par les estatz généraulx avecq ledict S' prince et estatz de Hollande et Zélande,$ans user de voye rigoreuse et contraincte, comme ilz se plaignent.

Et, comme journelles plainctes se font aux estatz que Ton con- strainct les marchans et leurs navires chargées de marchandises destinées pour Anvers, de payer le tonlicu de Zélande , contraire a l'anchienne usance, selon laquelle, pour accomoder les marchans et ne tarder leur voyaige, sont accoustumez de payer ledict droict en Anvei*9, requéreront lesdicts députez audict prince et estatz de Zélande de ne vouloir donner y h l'occasion du payement dudict droict, aulcun empeschement aux marchans, maroniers et navieurs andict Zélande, ains permectre libre passaige, en payant ledict droict de tonlieu en Anvers, comme sont accoustumez : auquel fin, lesdicts d'Anvers envoyent présentement leurs députez.

Et, quanta la contribution par ceulx dudict Hollande et Zélande offerte, remonstreront l'obscurité et incertitude d'icelle , à cause des conditions y apposées, ensemble la disproportion et inégalité au regard des charges et contributions des pays et provinces de par dechJi, lesquelles ont payé le centiesme et supportent journel- lement les grandz impostz au prouffict de la cause commune, de sorte que ceulx de Hollande et Zélande, selon toute raison,

in. aS

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RDchienne coiistumo et pncificntîon de Gand, se doîbvent aussy resentîr diidjct centiesmo^ et pro rata de leurs biens contribuer, ou rédimer Icdiet ccntiesme, comme aulciincs provinces oiit faiet, sans s'en excuser soubz umbre des inundations et àultrcs dpm- maiges, veu que on plusieurs aultrcs lieux de ces pays sont adve- nues semblables dommaiges, par les saccaigenients des villes, villaiges, maisons bruslez, percement des dicqucs et inundations, et que nëantmoings ledict centicsme se liève èsdicts lieux, faisant défalcation pro rata dampni : comme lesdicts estatz généraulx seront contens que l'on face le semblable en Hollande et Zéiande, à cause des terres inundées et aultrement détériorées, pour leur bonne corrcspondence et égalité partout, suyvant laquelle il con- vient aussy que ceulx dudict Hollande et Zélande correspondent, en la généralité des impostz généraulx, jusques à la concurrence des impostz qu'on paye en ces pays.

Et, pour ce que la quote, au regard dudict centiesme et impostz généraulx et aultrement, montera à beaucoup plus grande somme pour huyct moys, que leur offre et présentation ne porte, deman- deront lesdicts députez, au nom desdicts estatz, qu'ilz veuillent à tant moins, promptement et par provision, fumir la somme de cent cinequante mille florins, k répartir les cent et vingt mille pour le payement et cassement du régiment des S^de Boussu, Meghem et Hierges, estant en Gueldres , Utrecht et pays à Tenviron, con- sidérant que par ce moyen lesdicts estatz de Hollande ^t Zélande seront grandement bénéficiez , et que de leur part poiront lîecn- tier aultres soldatz qu'ilz ont jusques à présent entretenus pour se contre-asseurer de ce quartier, oultre et par-dessus le prouflict que redondera k la généralité;

Et les aultres trente mille, parfaict desdicts cent cinequante, promptement au dickaige de Ziericxzée, par forme de prest , h défalquer à Sa Majesté , si avant qu'elle est chargée de la restau- ration desdicts dicquaiges, à la première ayde quy se pourra accorder au prouflict de Sadicte Majesté par la généralité, consen- tant que ceulx dudict Ziericxzée puissent employer leurs moyens généraulx , qu'ilz lèveront en l'isle de Schouwen , au-dessus de ladicte somme de trente mille florins , qu'il conviendra pour la

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réparation de leurs dicques, pourven que le eompte et estât de leursdicts moyens, tant en miise que en rcecpte /soit ^ehd 9^ cognoissance de la généralité j pour par les estatz généraulx eslre pareillement donnez k Sa Majesté çn tant moins des aydesli aceor- der. h icelle.

Et y pour aultant qu'il touche les conditions portées pap la ^•* ponce donnée audict sieur docteur, les estatz tiendront la bonne main, aflin que ausdiets estatz de Hollande et -Zélande soit donnée plaine satisfaction, au plus tost. que sera possible. .

Item, remerchieront lesdiçts députez ledict'S''.[M*inc^.c]t çstatz. de. Hollande et Zélande des bons debvoîrs, offices et aésistenèé qu'ilz ont faict, en ceste guerre mesme , d'aroir preste les artrlle- rtes,^ pouldres, bouletz et aultres munitions de gjierrc, requéraiis lesdicts estatz de Hollande et Zélande de vouloir faire et dresser estât des mises par eulx supportez pour raison desdictes artille-' ries et munitions de guerre, pour leur en donner contentement et satisfaction, n'estoit .que lesdicts.de Hollande et Zélande vpulsîs-^' sent aultant gratifier la cause commune t que de aussy. les advan- cher sur leurs quotes et contributions : de quoy leur en sera tenu compte par la généralité.

Item, comme les estatz sont advertis que les soldatz es|)aignolz,. italiens et bourgoignons sont sortys de ces pay$> sans espoir d'y retourner, à cause de quoy lesdicts estatz ont trouvé expé- dient, pour se descharger, de licentier une partie de leur gcndal*- merie, et entre aultres les régimens et gens de cheval qu^ ledict S' prince a envoie à l'assistence desdicts estatz, lesdicts députez, par-dessus les remerchiemens, requerront Son Excellence qu'il ayt, selon la capitulation et sa promesse , de rendre et remectre es mains des estatz de Flandres la ville de Nyeupôrt , en des^ chergeant les paovres manans et habitans d'iccDe ville des guar- nisons dont si longtemps, tant d'ung costel que d'aultre, ilz ont esté chergez.

Et, au regard de rcxemptioadeguarni^ou^ que ledict S' prince requiert, par ses lettres du xxiij^ du passé en sa ville de Warnestôn, lesdicts députez déclaireront que lesdjcts estatz tiendront yôlqnr tiers la main h ladicte e;xemption, qomme le semblable feront pôm*

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rcxemption requise pour la ville et chasteau de Breda , tant que ledict S' prince aura matière de toute satisfaction.

Item, insisteront, comme aultresfois ledict docteur a faîct, affin que ledict S' prince et estatz d'Hollande et Zélande veuillent envoyer par deçà leurs maistres et génëraulx des monnoyes, et aultres cognoissants et expérimentez au faict , prix et cours des monnoyes, afin de communicquer avecq eulx, et sur tout prendre ung bon pied, pour le bien et utilité du pays, et au plus tost que sera possible, pour ne causer plus grand intérest.

Item, auront en recommandation vers ledict S' prince, et assis- teront , autant que leur sera possible , l'affaire et réquisition de ceulx de Huesden et Steenbergen, pour leurs descharges des tailles, impositions et quotisations que font , assçavoir : à ceulx dudict Huesden, Jacques Scholenet Cornilles Colwick, eulx disans d'avoir commission desdictz estatz d'Hollande, et à ceulx de Steenbergen par les gens du conte de Hollocq, estantz au fort de Nîeuwgastel. Et, pour meilleure instruction desdicts députez , seront délibvrez copies des lettres des estatz généraulx escriptes à cest effect audict S' prince.

Et, comme le fort dudict Nieuwgastel est basty sur le pays de Brabant , durant les troubles , pour empescher la navigation , ce que doit cesser présentement , insisteront de faire démolir ledict fort, et en osier les soldatz et aultres semblables , comme a esté faict en plusieurs endroictz de la part desdicts estatz.

En oultre , sont lesdicts députez commis par les estatz géné- raulx d'entendre à toutes plainctes , doléances et requestes que se polroient faire par aulcuns particuliers audict S' prince et estatz de Hollande et Zélande, pour en faire rapport et advertence ausdicts estatz généraulx , et y pourveoir et donner l'ordre requiz , et affin de tenir bonne correspondence.

Davantaige , lesdicts députez déclaireront audict S' prince que l'assignation des deux mille livres d'Arthois, faicte au S' conte de Mansfelt sur le recheveur des confiscations de Vianden, dont ledict S' prince par ses lettres s'est plainct, devra sortir son effect, si avant que lesdicts deux mil livres ayent esté receuz par ledict reeepveur devant le Sain^Jcan xv<> Ixxvj , et non aullrcment ,

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suyvaDt le xiiîj* et xv* articles de la pacification faicte à Gand.

Et, quant au faict de ceulx d'Utrecht, Son Altèze est intentionnée au plus tost d'envoyer vers ledict S' prince quelques personnaiges plainement instruictz, qui luy bailleront contentement, requérant que , cependant , ledict seigneur prince veuille tenir le tout en suspens et estât, et que plus grand aigreur n'advienne entre les borgeois et soldatz.

Finablement , requerront lesdicts députez ledict S' prince et estatz de Hollande et Zélande de vouloir signer l'acte de l'union , remonstrant pertinamment qu'il est du tout requiz et nécessaire que ledict acte soit signé et entretenu pour la conservation et main- tiénement des pays , et estre prestz et appareillez & toutes forces estrangières , et aultres occurences que pourroient troubler le repos commun, comme h ceste fin les estatz généraulx ont requiz, par lettres , les estatz particuliers de chascune province, juges provincîaulx et subalternes de vouloir faire le mesme : à quoy plusieurs ont j& satisfaict, espérant qu'il n'y aura aulcune difficulté pour le regard des aultres , d'aultant plus que messieurs du con- seil d'Estatont dépesché lettres, h ceste fin, nusdicts provinciaulx. Faict à Bruxelles, le ix"" de may 1577. '

Moy présent et soubsigné,

CORNBLIVS WbELLEMANS»

Copie du temps, à la Bibliolhôqoc de la Cbamlirf des lldprésentBiits : Keeuni de fiiees reUuivêt aux était généraux, 1570-ia80» t. I, M. 312-31(>.

438

II.

Imtruçiioîi du duc d'Arschot, du barbn de Hierges, du seigneur de Willeh>al et d^ Adolphe de Meetkercke, envoyés par don Juan d'Autrichii au prince d^Oranyeet aux étais de Hollande et Zélgnde('). . . . '

BaUxelibs, 15 MAI 12)77.

. Instructioii {N>ur vous, mon bon cousin, le ducq d^Arscliol,

prince de Cliimoy et Porebien, oonte de Beaulmont,

clievûlier de la TIwison d*Ôr, du conseil d*ËsUit de ^

- Majesté; messire Gilles de Barlaymont, chevalier, baron

' de Ilierges,gouver|neur et capitaine général de Gucl>

. dres, Zùlplien, Overyssel et Lingcn; messire Adrien

d^Oiguies; cljevélier,'seigneui* de Willcrvai , et Adolph

(le Meelkercke, conseiller et trésorier du terroir du

Francq, -assistez de mcssirc Andrieu Gh&ill^ de ee que

a urez h fai re et négocier, au voyaige que vous ferez vers

le prince -d'Oranges et estalz de Hollande et Zeelaiidc,

. prcsente^i^t assemUcz en Uarlem.

. Premièrement, leur déelairerez comment, ilz auront entendu la .sortie, des Espaignolz, Italiens et Bourgoignons, gens de guerre, iiers des pays de par deçà, selon la promesse que en avions faict, meismes que, à la réquisition, des estatz généraulx de par deçà, avons, doiz Je ily° de ce mois,, accepté le gouvernement général de çesdlcls pays, à nous commis et encliargé par Sa Majesté. . Laquelle pareillement, selon la proflUesse que en avons faict, a ratiffié, approuvé et émologué le traicté par nous faict avecq les- dicts estatiE, dont icelle Sa Majesté a loué etremerchié Dieu, et en

(*)Oih trouve, dans P. Buu, liv. X, une traduction hollandaise de la fu-o- poMtiojj faite par les envoyés de D. Juan au prince d'Orange et aux états géné'raiu, ainsi que de la n^ponse de ceux-^i ; mais» par une faute typogra- pfiiquc sans doute, la prcinicre est datée du 13, tandis qu'elle est du 23.

^ 439

sçait bon grë à ceulx quy se sont «raployez au faict de ladictc pacification <ît accord.

Que, partant^ ne resie aultre chose que faire sentir bu peuple le fruyct et effeçt de ladrctepaix, le délibvrant des trayaulxj misères et calamitez souflertes du passé, èsquelles Voyons ce$ povres pays constitue:; et plongez par les guerres civiles et intes- tines passées, en réintégrant la bonne et mutuelle amitié, union, accord, et intelligence quy souloit estre entre les subjectz et provinces de par dechi, soubz l'obéissance et auctorité de Sa Majesté.

Que cela ne se peult faire tant que les causes d'offense, dissen- tion et diffidence durent entre les meismes subjectz, et josques à ce que chascun s'employe, sincèrement et sans dissimulation, pour diriger ses actions à une meisme tin et but, pour le service Dieu, de Sa Majesté^ repos et tranquillité publicque.

Et, comme la première chose à quoy nous nous summes, dès l'iiistant de Tacceptation de ce gouvernement, voulu employer, a esté et est vouloir entendre comme toutes choses se sont passées, et Testât elles sont présentement, pour y donner Tordre et remède requis, nous a samblé entièrement nécessaire, pour nostre debvoir et acquict, et en conformité de la bonne et saincte volunté de Sa Majesté, de commenoho* faire toutes choses pour quiéter et pacifBer les pays, et les remectre en leur anehienne fleur, splendeur et grandeur.

Nous n'ayons trouvé les choses (comme est Testât présent des pays) encoires en telz termesi que, pour le service de Dieu, de Sadicte Majesté et commun bénéfice de la patrie, eussions bien désiréi, estant le tout plain d'armes, discontentement, suspicion et diflidénce, nourrice de tout disçord et dissention : à quoy nous Semble convenir de promptement applicquer le remède, trouvant iMnde non*seullement ester toutes causes de difiidence et suspi- cion, mais aussy tout ce que ponrroit justement donner quelque umbre ou couleur do cela.

Pour ceste cause, veuilfans faire (ifiice de père de la patrie, et pour acquict du lieu et charge que tenons de Sa Majesté, nous a semblé convenil* vous envoier vers ledict prince d-Oraiâges et

1

440

estatz susdicls, pour leur déclairer vouloir considérer que Sa Majesté, et nous en son nom, avons réèlement et de faict satisfait à tout ce que a esté promis par lesdicts traictez, avecque offre que, s'il reste encoires quelque chose à furnir, que sûmes prestz d'y satisfaire promptement, comme réciproquement désirons et les requérons qu'ilz facent de leur costel, pour marcher de pas esgal en toute sincérité, comme il ccmvient de faire entre bons, fidelz et loyaulx subjectz et vassaulx, quy doibvent tendre à ung mesme but^ selon que espérons aussy ilz feront, veu mesmes qu'il emporte que ainsy se face pour leur propre bien et repos.

Qui plus est, entendons que l'édict perpétuel de la pacification du xij° et xvij° de febvrier, publié par deçà dez le xvij" dudict mois, n'est encoires publié èsdicts pays de Hollande et Zeelande, et que le tout demeure illecq en termes conune sy Sa Majesté n'auroit eu pour aggréable le traicté que les estatz généraulx de par deçà auroient faict avecqceulx d'Hollande etZeelande et leurs associez.

Pour ceste cause, affin de establir quelque fundament de meil- leure asseurance au peuple, les rcquérerez, de la part de Sa Majesté et nostre, que incontinent veuillent solempnellement publier icelluy édict, ensemble la ratification que Sadicte Majesté eu a faict, du vij" d'apvril dernièrement passé : le tout en la manière accoustumée, et comme en semblable cas se doibt faire ;

Et conséquammcnt, qu'ilz veuillent cesser de faire chose qui puist donner quelque empeschement à la bonne et mutuelle intel- ligence quy doibt estre réintégrée et remise par ledict accord, communicquant amiablement avecq les susdicts, pour sçavoir quel ordre et moyen il y auroit pour oster iceulx empeschemens, et asseurer les affaires, comme il convient enU'c mesmes subjectz, pour, au plus tost, délibvrer les pays de ces présentes calamitcz, comme singulièrement désirons, Sa Majesté et nous.

Et, pour aultant que, enti*e aultres choses quy se font, con- traires à ladicte bonne et sincère amitié, entendons cslre ce que se faict par ledict prince d'Orainges et estatz de Hollande et Zee- lande contre ceulx d'Ambstelredam, Utrecht, Heusden et aultres, aussy pour le regard des fortifications qu'ilz continuent faire, mesmes es lieux non nécessaires^ par l'entretènement des gens de

441

guerre, tant de mer que de terre, impositiops nouvelles, grande- ment préjudiciables au traflîcque, navigation et commerce de ces pays, et aultres choses, vous traicterez avecque culx sur tous ces poinctz, et par ordre»

Touchant iedict Ambstelredam, direz que, combien par ledict traiclé ledict prince d^Oraingcs ne peult demander, comme gouver- neur de Hollande, ny aultrement, quelque auctorité sur eulx, sans prëallablement leur avoir donné satisfaction (qui s'entend k leur contentement, ou tant que ceulx quy ont auctorité d'arbitrer là-dessus, en ayent ordonné), que toutesfois (comme s'ilz se vouloient eulx-mesmes seulz dire droict) ilz les pressent, tant par mer que par terre, pour les contraindre à faire leur volunté :

Faisant fortresses par terre, et tenant gens de guerre & l'entour de ladicte ville ; ensemble mettant quelque battcau armé au canal d*Ambslelredam, quy ne cessent donner continuel empeschcment et moleste ausdicts d'Ambstelredam, cmpeschants ainsy le com- merce, navigation et traûcque de ladicte ville, quy doibt néant- moings estre libre à tous, selon ledict traicté. Le mesme est des ville et chasteau de Heusden, et de quelques aultres lieux qu'il Tcult remectre soubz son gouvernement, plus par force et aucto- rité, que non par amiable accordt et satisfaction, au contentement des magistratz et inhabitans.

Pareillement, entendons que ledict prince d'Orainges ne cesse faire toutes instances et poursuytes, tant par lettres que ses agens et ministres, afin de entrer au gouvernement des cité, villes et pays d'Utrecht, contendant par cela les séparer des aultres pro- vinces de par deçà, avecque lesquelles, ces guerres dernières et depuis, elles ont tenus et esté joinctes, combien que, par traicté faici par lesdicts estatz avecque luy et ceulx de Hollande et Zee- lande, ne soit riens parlé dudict Utrecht.

Que, sy sur ce poinct il vous dict que lesdictes cité, villes et pays d'Utrecht sont de son gouvernement, estant indivisiblement annexez à Hollande, vous vous servirez, pour réplicques, des allé- gations, raysons et moyens contenuz en l'advis du grand conseil et aultres escripts quy vous seront donnés pourvostrc plus ample information et instruction.

44î2 -

. £i iiéantmoings, sur l'ung et Taultre potnct, ei tous àultres différcDS qu'il pourra avoir avecq eulx, vous ojEfrirez entrer^ par cotnraissaircs^ en plus ample conférence . et communication (sy

. Qicstier esl) , pour, par droict et raison , les 4;ermiiier amiable* ment, comme en. td cas appartient, foisant que, cependant, toutes voycs de faict, vexations et molçstations cessent.

Di^z pareillement que, puisque la paix est faicte, publiée et confirmée, qu'il ne doibt fortiifier les places de son gouvèrae- ment, encoircs moings faire nouveaulx forts, comme il faict es environs de Harlhem, Ambstelredam, Goroqum, Zevenberges et aultres lieux, voires fortifier ceulx que on luy a voluntaircment mis es mains, comme estants de son gouvernement de Zeelande et Hollande, que Ton pourroit prendre pour argument de peu de voUinté de conserver la pacification et de se désister des armes : caU^e tle mettre les pays, d'une part et d'aultre, en ces despenses, ctcoQséquamment continuer les maulx quy viennent en semblables effectz, et par dinsy priver les bons subjectz de la joyssance de la paix tant d4!Ûrée.

L'on nous dict ausay que aulcuns ses agens font- certains mau- vais ofiices par Frizo, Gelre, Overyssele, Grocningen et i l'environ, pour les distraire de l'obéissance, de Sa Majesté, et 4e l'union et accord des aultres provinces, y semans^ par. les. ministres calvi* .jiîstes, anabaptistes et. aultres^ leurs opinions erroqées, pour reoiucr mcsnaige, et mectre le tout en nouveau garboulle et con- fusion. Lemesmé ilz font secrètement en plusieurs lieux des pays et provinces de par deçà, intcrturbants par ce moyen Testât et repos publicq.

\ Davantaigc., entre aultres poinctz èsquels lesdicts prinee d'Orange, esti^ de Hollande et Zeelande contreviennent au traictë de la pacification, est que Ton entend que,, nonobstant que^ par

* Paqcprd de. satisfacrtion qu'ils ont faict et traicté avccq les magis- trat,'b^ùrgoois et habitai^ de la vill« de ^iSierixzée ,cp Zeelapde, qu'ik qe feroient riens contre la religion ancienne catholicque romaine, ain^ la laisseroicnt paisiblement faire et exercer, comme d\\ passé, que ùéautmoings, sy tost qu'ilz sont entrez dedens, oùt commencez à faille tout le; contraire, assavoir : d'y planter l'cxcr-

443

cice de leur nouvelle façonne faire, et y.uscr de tous moyens pour exterminer l'ancienne religion, et mesmement se dîctqullz en usent ainsy h$ aultres lieux que ledict. prince a receu,- pour les réduire 3oiïb2 son gouverneinent de Hollande et Zeelande.

PàreillenieDt, on entend que, en préjudice de rartîcle de la restitution des foriresses. artillerie, baiteau^ et aultres choses- appiaKenaits à Sa Majesté^ dont-sedoibt traicter À l'assiiniblée de^ estatz généraulx, .^e refond une .bonne partie d'içcUe artillerie', e'u'estôicnt lé3 armes de Sa Majesté^ et y apposent celles dudict prince d*0range3, poUr ester la oogiioissance d'ieellc artillerie : ec t]ue se tlebvra aussy remonstrer^ alfin qac Ton procède cin tout de bonàéfoyjcôtnme il convient^ '

Remonstrèree aussy, comme ceulx du conseil de Sa Majesté en* Hollande, résidens h Utrecht, ayants^, Japrcs leur sortie dllollande:,. il lecq -demandé' territoire, dût administré justice à diverses parties, ^t pronoilï6é' grande quantité dè\sGntencea, desquelles les officiers du prince d'Oragges, ayàns à présent charge la justice audict Hollande, refusent Texéculion, estant partant les parties cônstrèintes par^devant eulx de reêommeûcher leurs procès^.et; de nouveau hltenter leurs actions^ non. sans grand pr^udieei*'dc rauptprité dudiet conseil, et conséquamment de cdle Sa Ma.- jesté^ et point '«ans grans fraiz, pained, dommaiges et intérestz des parties : sur quoy pi*Ocurerez estre donné ordre que les susdîcts officiers souffiN^ut ladicle exécution', étcë des sentences n*est9nt2 par appd ou aultrement suspendues, du meings par manière de prcfvtsion, et sans préjudice du viij* article de la pacification, ou par auHre voye j comme l'on trouvera convenir.

Aussy parlerez que, combien que, de ce costé, l'on ayt rendu à chascun costé les biens- immeubles confisquez,* connue il «voit esté convenu, par tnricté, de ainsy le faii'e réciprocquemcnt^que néantmolngs, du costé de Hollande et Zeelande, pluâienrsi laat ecclésiaeticques que aullrc's subjectz de' par deçà, âe*plaîgnenÇ que Fdn ne leur a fiiict jUsqucs & présent nuUe ^tisfaclîon ny rest;tu>- tiôii cffiîctnelle (signament quant on entend qu'ib sont catiioliàiues;): h'^quey est besoing aussy pourveoir.

Que, sy ledict prince d'Oranges vous parioit de Breda.et de soiii

—— 444

bien de Baurgoigne et Luxembourg, quy ne luy seroît encoires rendu, luy rcspondrez, quant k celluy de Breda, qu'il n'y a nulle difficulté de le laisser joyr de tout son bien et revenu, sans en rien retenir par Sa Majesté, mais, comme il est vassal d'icelle, et que présentement ledict Breda est la plus prochaîne ville de Ste-Gertrudenberghe, qu'il tient soubz ses armes avecq gens de guerre, que la garnison, quy est signament au chasteau, ne se peult quicter encoires, tant que de costé et d'aultre effeçtuelle- ment soient posées les armes. Aussy il sçait que peult Sadictc Majesté (comme ducq de Brabant, souverain seigneur dudict Breda) avoir, pour son service et seureté de la place, telles gens de guerre qu'il trouve nécessaire, comme il laict générallement en toutes les places de ses subjectz et vassaulx de par deçà, quelz qu'ilz soient.

Touchant les biens dudict Bourgoigne et Luxembourg, il sçait que ces provinces ne sont comprinses en l'accord : néantmoins, donnant contentement raisonnable à Sa Majesté, de sorte que par effect on se puist asseurer de sa bonne volunté, il ne tiendra à cela que on ne face ce qu'il requerra à Sadicte Majesté.

Davantaige, puisque avons faict sortir lesdicts Espaignolz, Ita- liens et Bourgoignons, soldatz, dont on se plaignoit, et que les cstatz besoignent continuellement h licencier les AUemans, gens de guerre estrangiers (chose que nous désirons bien grandement estre effectuée), direz ausdicts de Hollande et Zeelande que som- mes délibérez convocquer au plus tost lesdicts estatz généraulx, ensuivant ledict ui° article de paix , comme certes il convient totallemcnt faire, pour une fois, au plus tost, rendre une bonne et sincère paix et tranquillité aux pays, de costé et d'aultre, afin de une fois mectre toutes choses en ordre et repos.

£t, pour aultant que les estatz de par deçà se sentent grande^ ment préjudiciez , grevez et intéressez par aulcuncs nouvelles charges^ gabelles et impositions quy se prennent sur denrées et marchandises allans, venaus et passans par les pays de Hollande et Zeelande, quy iHîdonde contre l'auclorité de Sa Majesté et béné- fice de ces pays, pour l'intérest que iceulx resentent en Tempes- chcmcnt de la navigation , manufactures et marchandises , cl

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anitres pointz (comme lesdicts estatz ont par cî-devant remonstre ausdîcts de Hollande et Zeelande, et requis y estre remédié, de quôy n'ont encoires peu riens obtenir), iceulx estatz de par deçà ont présentement renvoyé, vers ledict prince d'Oranges et ceulx de Hollande et Zeelande, leurs dépotez, selon l'instruction qu'ilz leur ont donné. Vous regarderez partant, de la part de Sadicte Majesté et nostre, comme gouverneur général, de leur donner faveur et assistence, et faire instance affin que promptement il y soit remédié, ainsy qu'il appartient.

Et de ce que aurez faict et négocié, nous advertirez diligemment et continuellement.

Faict à Bruxelles, le xv* jour de may 1577.

Jehah.

Comme, depuis ce que dessus dépcsché, nous a esté monstre ung placcart , publié en Hollande et Zeelande , au nom de Sa Majesté, par advis du prince d'Oranges, en date du ij* de ce mois, dont vous sera donnée copie, touchant de faire déclaration et annotation du surplus des biens ecclésiasticques estants en icelles provinces, pour les vendre et aliéner, et applicqucr aux maistrcs d'cscolles, ministres, serviteurs ou dogmatiseurs de leur religion, nous en sommes estez grandement esmerveillez, et fâchez de veoir une chose sy exhorbitante et injuste, mesmes contre le traicté de paix, et nommécment contre les xx* et xxj* articles de la paciGca- tion, par ou il est dict que, pour les biens des ecclésiasticques, dont les abbayes, diocèses, fondations et résidences sont situées hors de Hollande et Zeelande, et toutesfois ont des biens en icoulx pays, retourneront à la propriété et jouyssance de leurs biens; et, au regard de ceulx résidens en Hollande et Zeelande, est dict, que pour leurs biens, dont la pluspart estoit vendue ou aliénée, leur seroit donnée raisonnable alimentation, ou aultrement leur seroit permis la joyssance de leurs biens, au choix desdicls estatz : le tout par provision, jusques que sur leur prétention seroit ordonné par lesdicts estatz généraulx.

Par quoy, cependant, ne se doibt riens attenter ou innover davantaige, au préjudice desdicts ecclésiasticques : aultrcmcnl,

1

revoit faire préjudice irréparable à ieeulx, voire cereher moyen pQUr{b<nniiir] irrémédiablement et perpiHuelleineiit hors desdietcs provinces. l'aneienne reiijgioa catholicque romaine,: dont sedoibt Iraicter h ladicle assambïéecies estatz génà'aulx, aveeque ce- que toute, ladicte annotation et usurpation des biens eeclésiastioqnes est, comme* dict est, pour.domtèr aux chiefe et ministres et dog^ matiseurs des seçtea.fioaCraires à ladiete [religion] -catholioiuc': rhose.encoircs nuH(Q]neAt sooffirable. .

Par quoy, ferez instance que ledict piq/ccart soft ineontineot révocqué publicqueqient par édict contraire, et que soit suroée (^) toute Tcxécution ; mesmeroent que, pour le passé, soit donnée compétente récompense, du moins alimentation, ausdicts ecclé- siasticques çatholicques, po^r ce que du passé l'on leur a prins et aliéné.

Quant au faict de la religion, sy lesdicts de Hollande et Zee- lande vous en parlent, leur direz que, touchant ce faict, vous n'en parlez, po^r estre ung point remis à ladiete assamblée généralte, selon le ni* article de la pacification;

. Seullement direz que, pour, donner OKdre à.eela,jqut.«8t tant nécessaire de faire au plus tost, se doibt accélérer ladicte commu- nication, selon que cy-dessus est contenu, persistant toujours que lesdicts.de Hollande et Zedonde ne doibvent ledre ou attenter^ cependant, chose par ladicte condition des çatholicques soit faicte détérieure(^) en icdles provinces; .

Par ordonnance de Son Altèze :

Bertv.

Copie da temps* h U Bibliotli4q«e de la Chambre de» Représentants : Beeueil de piieu reUuiveM an» . > étuugénérauxylSJB^I^m^U fol. 922-317.

(0 SurcéBy suspendue. (*) Détcrienre, pire.

447

HI.

Relation des conférences de Gertrudenberg (').

Mai 1577.

Vraye narration des propos de cosic et d^aullre teniiz entre les députez de don Jehan et monseigneur le prince et députez d'Hollande et Zeelande, h Gheertnidenbcrgbe, au mois de may t577.

£stans assamblez mons' le dticq d'Arschot, mons' d'Hierges, mous' de Willerval, iqods' de Grobbendoncq, Meelkercke et doc- teur Elbertus LeoDÎniis. assistez de doetor GailL ambassadeur d<Sputë de la Majesté Impériale, d'un costé,

Et mous' le prince d'Orenges, les seigneurs de Ste-Aldegondc, Nyvelt, Vander Mylen, Coninck et- Vossbergcn, de l'aultrc,

MoBS' Meetkerçke a premier porté la paroilc ; et, après avoir faict quelque remonstrance de la sincérité et fidelle diligence en laquelle don Joan d'Austricbe, après avoir esté accepté pour gou- verneur,.avoit usé h I exécution des promesses par luy faictes, le bénéfice qu'il avoit faiet aux pays, à faire sortir les £spaignolz, et qu'il «stoit encore prest de poursuyvre, et mener à fin ce qu'il avoit si bien commencé, pour remectre ces pays en leur premier repos et tranquillité, et en l'ancienne fleur et prospérité de laquelle ilz estoient descheus par la façon de gouvernement de ses prédécesseurs et l'insolence des estrangiers ; désirant gouverner tout d'une autre sorte, et remectre le gouvernement entièrement par le conseil et advis de ceulx du pays, ainsi que pour le plus grand bien et repos d'icculx sera trouvé convenir, a passé oultre à remonstrer comment aussy la raison voudroit, puisqu'il se

(>) On l'cconnait, en lisant cette curieuse rejation , qu^elle fut roiivrngr d^m des conscillcr5» du prince; peùt-^tre Panteur en est-il Philippe de Mamix hii-mcmc.

U8

monstre si affectionné et voluntaîre à redresser tontes choses sur ung bon pied de vraie union et concorde, qu'il eût aussi asseu- rance, da costé de mons' le prince et pays d'Hollande et Zeelande, qu'après avoir faict toutes choses comme dict est, et réduit lepavs en meilleur estât, qu'ils ne feront difficulté de leur costé de se renger aussi à la raison, et k la deue obéissance de Sa Majesté, et que, ostans de leur costé toute deffiance et sinistre soupçon, ils procureront de tout leur pouvoir ceste union tant désirée, et se rengeront avec les aulti'cs provinces en un corps, souhs une mesme obéissance, comme ils ont esté par cy-devant et de toute ancienneté.

Or, comme il a plusieurs choses par lesquelles il semble que l'on n'ait envie ni parfaicte intention de venir k ce poinct, ains, au contraire, qu'ils se voudroienl tenir t-ousjours séparés et en perpé- tuelle deffiance et disunion, il seroit [besoin], avant toutes choses, et avant que Son Altèze passast plus oultre en ce qu'il a commencé, de remédier ces choses, et que, pour cest effect^ ainsi que la paci- Gcation faicte à Marclie-en-Famine avec Son Altèze et les estatz généraulx du pays, et puis confirmée et émologuée par édict per- pétuel , et après encore ratifiée par expresse authorité deSa Bfajesté, fauldroit aussi que ceux d'Hollande et Zeelande la feissent publier en leurs provinces et villes, pour estre acceptée et aggréée unani- mement de tout le monde, veu que, aultrement, tant qu'elle ne sera publiée, il semble que lesdlcts d'Hollande et Zeeknde vpu- droient se tenir séparés des aultres, sans entrer ou se joindre en ceste union généralle, qui est le vray et unique moyen du salut et conservation du pays.

Aussi seroit*il requis.de surséer les fortifications des villes et aultres places, lesquelles non-seulement on va continuant, mais aussi érigeant de nouveau, chose qui semble contrevenir i l'effect de la paix : car, n'estans ennemis les uns des aultres, et n'aiants occasion et matière de se deffier, n'est besoing de se munir et fortifier les uns contre les aultres, si l'on ne veult engendrer def- fiance et donner place aux soupçons d'hostilité.

Semblablement, comme Son Altèze a entendu que non-seule- ment on faict fondre journellement nouvelle artillerie, et se pour-

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veoir de toutes sortes de munitions, tout ainsi comme si Tonestoit encor en guerre, mais aussi que l'on refond les vielles pièces armoyrës des armes de Sa Majesté, et qu'on y faict imprimer aultres armes, chose du tout contraire à la pacification de Gand, et prëjudîciaUe k l'article qui dict u qu'aux assemblées générallcs » sera ordonné et statué à l'endroict de la restitution d'artiUeries, » amonidons, fortresses, navires, etc., de Sa Majesté, » désireroit Son Altise qu'à oecy fiist pourveu, et qu'on se déportast d'ores en avant desdictes fonderies et refonditions, comme pareillement que Ton se déportast de faire ligues et alliances secrètes et séparées, soit avec princes estrangers, ou aultrement avec les provinces voisines, puisque cela ne peult sinon engendrer toute deffiance, et nourrir la matière de mauvaise intelligence des uns avec les aultres, joinct que c'est contre le debvolr de l'obéissance que les subjects ont à leur prince naturel.

fit, au resle^ désireroit Son Altèze que, suivant ce qu'a esté résolu k la pacification de Gand, et ce que Son Altèze a aussi ratifié et promis de sa part, l'on veuille procura, au plus tost que faire se pourra, que l'assemblée généralle des estatz se puisse tenir en la forme qui est contenue en ladicte pacification, et que, pour cest effèct, l'on veuille adviser aux moyens par lesquels on pourra les faire assembler, et du temps et autres circonstances h ce requises.

Monseigneur le prince, ayant ouy ce que dessus, après s'cstre ung petit retiré en la chambre prochaine avec les députez des estatz d'Hollande et Zeclande, et depuis estre retourné, a respondu que, aiant entendu les points proposés par messieurs les ambassa- deurs et députez de Son Âltèze, pour ee qu'il y avoit plusieurs articles d'importance et sur lesquels il faudroit communicquer par ensemble, désiroit les avoir par escript, pour y pouvoir respondre particulièrement et ainsi qu'il conviendroit.

Là-dessus, D' Elbertus Leoninus print la paroUe, après toutesfois qu'ils eussent entre eux parlé ensemble h l'oreille, et dict que, pour éviter prolixité d^écritures, laquelle n'engendroit sinon con- fusion, il leur sembloit n'estre nécessaire de rien mettre par escript, et que pourtant, par manière de conférence, ils voulsîssent

m. ?9

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regarder de respondre sur les poincts proposez, et tascber de par- venir à ceste union et concorde tant désirée, propoeans aussi de leur oosté les poincts qui leur pourroient engendrer scrupule et difficulté on deffîance, afin que, par amiable conférence, Ton peut entendre l'un Tautre , et, s'il estoit possible, atteindre au but de concorde et d'union, laquelle est tant désirée de tous costés.

Sur quoy mondict seigneur prince respondit qu'ils désireroient bien que rien ne fûttraitté, sinon par escript, veu que autrement l'on pourroit dire, de costé et d'autre, choses que après seroient interprétées autrement, ou que l'on nieroit avoir esté traittées, comme desjft nous voyons (disoit-il), par expérience, en ce trailté tant solemnel de la pacification de Gand, qu'on taschede le rendre infructueux et inutil, soubs ombre qu'aucuns points qui ont esté débatus de bouche, et point couchés si particulièrement, sont tirés tout en un autre sens, comme mesmement celuy des gou- vememens donnés par commission de Sa Majesté, qui est unpoinct tout clair*; que néanlmoins on y cerche des glosses et cavillalioos, pour obscurcir la volonté et intention des contractans, soubs ombre que le nom d'Utrecht n'y a esté mis expressément par escript : ajoutant à ce qu'il avoit dict que les escritures engcn- droient confusion, laquelle n'est esclaircie que par les escripts, et pourtant ne veuillent traitter d'ores en avant autrement que par escript.

U-dessus, ledict docteur répliqua que Ton ne vouloist poinct faire difficulté en cela, mais que, premièrement, par amiable con- férence, ils voulsissent donner à cognoistre les points ausquelz ils se sentoient grevés, afin qu'on regardât de leur [donner] conten- tement, et qu'ils demandassent ce que leur sembloit convenir pour leur seurté.

Monseigneur le prince respondit : «< Mais, puisque I'oq ne garde n pas ce que a esté promis si solemnellemenl à Gand, et confirmé » par serment de tous les estats et de plusieurs nobles et villes en n particulier, ratifié par don Johan et par Sa Majesté, quelle espé- n rance peult-on avoir que ce que Ton promcctra d'ores en avant n doive estre maintenu et gardé? »

«c En quoy est-ce, » disoit le seigneur de Grobbcndoncq, » que

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vous vous plaignes que la pacification ne soil entretenue ? De M Breda el de son fils^ furent les disputes du premier jour de la » garnison de Breda (')• »

<( Mais, u disoient les aultres, u prennes le cas que la pacifica- H tion soit accomplie, car on le ne peut faire tout en un temps. » Don Johan a desji bien commencé : il faut du temps pour para- » chever le reste, et si fault-il débatre ces points doubteux, afin » qu'il puisse estre esclaircy à quoy il est obligé, et à quoy non : » car, quant au faict d'Utrecht, ce n'est merveille qu'il n'y a satis- » faict, puisqu'il ne trouve Utrecht spécifié en la pacification, et » qu'on luy allègue par bon conseil plusieurs raisons considéra- » blés, disputobles, pour quoy il ne seroit tenu de le faire. »

u Voire, n dict monseigneur le prince, « mais, k ce compte-la, » on pourroit tirer toutes choses du monde en débat, et n'y a rien » si clair que l'on ne pourra disputer : » ce que fut encor amplifié par le S' de Ste^Aldegondc, et conclu par Son Excellence que, premièrement, ils satisfissent aux articles de ladicte pacification, et, que lors, les estatz estans assemblés, l'on proposeroit, de costé et d'autre, les auti*es points servans à plus grande asseurance.

Là-dessus, le docteur Leoninus proposa qu'il y avoit & consi- dérer que l'assemblée généralle des estatz n'estoit sans danger, pour le grand nombre de ceulx qui y assistent, et la diversité et discrépance des humeurs, mesmes de ceux qui ne sont tousjours les plus discrets et entendus : alléguant sur ce l'exemple de l'as- semblée des estaiz de la France, que nous avons veu avoir engen- dré plus de dissensions et de matières de guerres qu'il n'y avoit auparavant; et pourtant seroit bon de considérer si, par amiable conférence des points qui sont en difficulté, et desquels reste encor quelque scrupule de deffiance, l'on pouroit excuser ceste assem- blée générale, et éviter le danger qui en pourroit sortir.

Sur quoy (me semble) fut respondu par Son Excellence qu'il y avoit grande différence de Testât de ces pays à Testât de la France, puisque le peuple et tout le corps estoit icy d'une mesme inten-

{*) Ce passage est inintelligible. Quelques mots doivent manquer daAs le manuscrif.

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lion et Tolontë, snns estre deschîrë en partialités et factions de malsons, comme en France, et que, puisqu'en la pacification de Gand, l'on estoit convenu des points qui pour lors pouvoient estre appointés, pour vivre les uns avec les aultres en union et amitié, jusqu'à ce que l'on auroit moien et loisir de pourveoir h tous les aultres, aians remis la décision d'iceux h ladicte assemblée gêné- nille, il estoit plus que raisonnable que, premièrement. Ton satis- feit aux articles de ladicte pacification, et que le reste fut remis auxdicts estats, ils pensoient proposer les poincts desquels on les interroguoit & présent.

«c Mais, » dirent les aultres, «c cependant que l'on attend ladicte » assemblée , vous povés proposer en quoy vous vous sentes n grevés, ou que c'est que vous demandez pour vostre asseu- w rance. «

K Nous n'avons rien i proposer, n dict Son Excellence, « ny de » qnoy'nous plaindre, moyennant qu'on satisface aux articles de » la pacification : car, puisqu'il est accordé h Gand qu'on se main- n tiendra les uns avec les aultres en la façon y spécifiée, jusques h » ladicte assemblée, nous sommes contents et entendons nous y y* tenir, sans demander aulcune aultre asseurance, nousremettans » du surplus à ladicte assemblée, n

« Mais, » dict monsieur de Gobdendoneq, (si bien me sou* vient), « quelle asseurance nous donnerés-vous d'entretenir la H pacification? »

«1 Nous ne sommes tenus de donner aulcuné asseurance, n dict le seigneur prince, « car l'effect de la pacification apporte son asseurance quant et soy, veu que ceulx qui ont esté la traittans » de la part des estats généraulx, et depuis advoués d'iceulx, ont n pnfposé les articles et poincts y contenus pour moyens d'asseu* » rance provisionnelle, tant que les estats généraulx seront assem- blés, disans que les uns feront ainsy et les aultres ainsi, et U- n dessus se sont accordés, il fault donc se tenir auxdicts moyens » et s'en contenter, ou il fault nécessairement désadvouer et rom- » pre ladicte pacification. Regardés si vous la voulés advouer, ou » non, car, si vous voulés la tenir, il fault accomplir de vostre n costé les points y contenus, comme nous sommes prests de

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» nosbre part à les accomplir, et, s'il y a quelque chose à redire » jusques à présent, œ que nous espérons que non, nous sommes M contens d'y satisfaire. »

«I Voire, » dict quelqu'un d'entre eulx, « de sorte que vous M voudriés qu'après vous avoir [remis] toutes les villes et places » d'Hollande et Zeelande qu'on vous a desjà mises en main, et » eneor vous avoir livré le gouvernement d'Utrecht et d'Amster- » dam, nous n'aurions nulle asseurance de vostre costé que vous » tiendriés la pacification.

«( Mais, respondlt le seigneur prince, « si nous accomplissons w dès maintenant la pacification, que veutron plus de nous, ou » quelle asseurance sommes-nous tenus de bailler ? »

n A 00 compte-là, » dirent les aultres, « après avoir tout ce que » vous demandés, et vous estre par ce moien. fortifiés plus que » ne fustes onques, vous pourriez nous faire la guerre. »

u La guerre? n répondit le prince, «< qu'est-ce que vous crai- » gnez ? Nous ne sommes qu'une poignée de gens, un ver, contre » le roy d'Espaigne; et vous estes xv provinces contre deux : » qu'avez«vou8 k craindre? »

Sur quoy quele'un d'enUre eulx (je croy que ce fut Meetkercke) : u Nous avons bien veu, » dit-il, «( ce que vous povés faire, quand » vous estes maistres de la mer, et pourtant ne vous faictes pas si » petits comme vous faietes. »

Là-dessus le S' de Ste-Âldegonde répliqua : « Jamais nous ne vous avons faict ny peu ihire la guerre, sinon défensive» Or, si » nous la voulons faire défensive, il fault que soyons offensez les » premiers, car nous n'irons jamais assaillir les aultresprovinces. »

« Voire, i* dict quelcun d'enUre eulx, «c on sçait bien comment » cela va, et que la guerre défensive ne se faict, sinon qu'elle soit » quant et .quant offensive, » alléguant là-dessus la prinse de Geertrudenberge.

Sur quoy les nostres dirent : u Si on ne nous assault point, » vous estes bien asseurés que nous ne vous ferons jamais la » guerre. »

Y adjoustant Vossbergeu, touchant Geertrudenberge : «EUeestôit » du gouvernement de Son Excellence, et membre d'Hollande,

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» mesme appartenante à Son Excellence, et n*a este prinse par » force, sinon par finesse et par faulte de bonne garde des Tostres. >•

« Mais, » dict monseigneur le prince, « la pacification de Gand » pourvoit il cecy. Vous auUrcs, ou tos députez, vous avez juge » que vous estiés bien gardes avec les poincts y contenus, et que » n'aviés à faire d'autre garand, comme de faict vous n'aviez , n remettans le reste à l'assemblée : il faut doneques que vous vous » en contentez, car de vous faire la guerre, c'est une chose sans » fondement et sans apparence. Que si vous creussiez qu'il n'y » avoit rien à craindre pour vous, vous n'eussiez pas oblié de demander asseurance ; mais vous avez veu en quelle rondeur » nous allions avec vous en ce temps*lli, desgamissant ce pays » pour vous assister, mesmes avant que la paix fât conclue ; et , H ores que nous eussions esté, fondés de demander asseuranccs, » toutcsfois nous ne l'avons voulu faire, pour ce que nous trait- » tions avec les estats en confiance, ayants déclaré bien expresse-^ » ment que, si nous eussions eu ii traitter avec le Roy, ou avec » autre de sa part, que nous eussions voulu estre gardés d'aultres asseurances : mais, de nostre costé, n'y a eu question de donner )i aulcune asseurance, comme nous n'avions et n'avons encor » moyen de vous assaillir, comme aussi ne nous seroit expédient. »

Sur ce propos, le S' de Grobbepdoncq dict : « Pour dire la » vérité, nous nous fions bien à vous que ne nous ferez la guerre ; » mais nous voyons, d'autre costé, que vous voulez partout n espandre vostre religion, et ne vous contentez de la maintenir » entre vous, si vous ne procurés par tous moyens de la estendre u en nos provinces. Or, quelle asseurance auronfr-nous, quand on » vous aura accordé tout ce que vous demandés, que vousn'inno- » verez rien contre la pacification , au faict de la religion ? »

« L'asseurance que nous sçaurions bailler, n dict le seigneur prince, « est que nous accomplirons réellement la pacification, en u laquelle nous avons promis de nostre costé ne donner scan- » dale, ni faire innovation par delà. Nous entendons de nous tenir )i à ce que nous avons promis, n

u Mais, » dict le S' de Willerval (me semble), «c cela ne sont » que promesses. Vous voulez qu'on croye k vos parolles, et vous

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» ne voulës pas croire aux paroUes et promesses de don Jehan, ou » aux nostrcs. »

« II n'est pas icy question de croire, ou de ne croire poinct, n dict le seigneur prince. « Que don Jehan et vous aultres accom- M plissiës le traicté de pacification, et alors nous vous croirons, et » verrons par effect que vous cheminez de bon pied avec nous : » mais vous nous donnés occasion de delBance, quand nous » voyons que vous cberchcK des eschappatoires pour n'accomplir » ladicte pacification que vous avez promise, soubs ombre de nous » proposer des aultres points pour nostre a^seurance , lesquels » doivent eatre remis h l'assemblée généralle des estats. »

Là-dessus dict Leoninus : « Nous avons aussi proposé des poincts » auxquels vous n'avez accompli la pacification. »

Vander Mylen réplique : « Nous vous avons là-dessus satisfaict » quant aux principaux, et, quant au reste, sommes prestz d'y M satisfaire, combien qu'il n'y ait chose en laquelle nous avons » cnfrainct premiers, car ce dont on nous accuse, nous l'avons }> faict, à l'exemple que ceux de Gand nous ont donné, par sentence » prononcée, de sorte que, s'il y a violation, elle vient de vous, et non pas de nous. >*

u Mais, dict le S' de Grobbendoncq, « le principal poinct de » la pacification contient que vous submeltés le faict de l'exercice » de vostre religion aux estats généraux : quelle asseurance avon»-nous que, lorsque vous serez satisfaictis en ce que vous n demandés, vous accomplii*és ce poinct? »

« Maïs quelle occasion vous avons -nous donné, » dict le S' prince, « de vous déifier de nous, puisque nous avons accompli » de nostre costé la pacification? Puisque sommes esté une fois n d'accord, vous vous en deviez contenter. » ^

u Mais, doncques, promettés-vous, » dict le S' de Grobben- donck, «i de vous submetti*e à tout ce que les estats généraulx » ordonneront, tant en cecy comme en tous aultres poincts, ainsy » que vous estes obligés par la pacification ? »

» Je ne sçay , dict le seigneur prince : » car vous avés dcsjà en*- » frainte et violée la pacification, ayant faict accord avec don Jean » sans nostre adveu, et puis l'aiant encor reccu pour gouverneur, n

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« De sorte, » dict le S' de Grobbendoncq, «< que vousne votidréfï » pas accepter la décision des estats? »

i( Je ne dîç pas cela, » dict le soigneur prince ; « mais telle » pourroit-^Ile estre que nous l'accepterions, telle aussi que non. Mais nous voudrions illec -proposer et dëbatre nos raisons, » pour entendre combien avant nous sericois obligi^s de nous y » submettre, puisque nous ne sommes en nostre entier, comme n nous estions du temps de la première subraission faite k n Gand. »

«c Mais on vous remettra en vostre entier, i* dictGrobbendonçq.

<( Vous ne pouvés, » répliqua le S' prince, « car w>us avez n entièrement enfrainte la pacification.

n Doncques, » dit Meetkercke, « nous ne faisons rien, et vous » voulés entièrement tenir la pacification pour rompue. ••

«( Ce n'est pas nous, » dict le S' prince , « qui l'avons rompue, i> mais vous ; et tputesfois nous ne refusons pas de nous y sub* » mettre , moiennapt que nous puissions alléguer nos raisons, et )) sans préjudice estre remis en nostre entier. Mais desjà vous n nous ave^ condamné , par la promesse que vous avez donnée k don Jehan de maintenir la religion catholique romaine en tout n et partout, et faict faire serment à tous. qu'ils la maintien- n droient , de sorte que nous n'avons rien i espérer du jugement » des estats, que d'estre condemnés à pur et à plain. n

«( Vous ne voudriés doncques, » diçt le S' de Grobbendoncq , a VOUS submettre aux estats touchant l'exercice de la religion ? »

«( Non certes, » dict le prince, h car, pour vousxtire la vérité , n nous voyons que vous nous voulés extirper , et npus ne vou^ » Ions point estre extirpés. »

i( Jlo ! » dict le duc d'Arschot,. «( il n'y a personne qui veuille cela ! ». Ce qu'aussi dict le S' de Hierges.

«( Si faict certes, » dict le prince. « Nous nous sommes submis n à vous en bonne foy , espérans que vous jugeriés pour le bien )i du pays, sans avoir esgard à aultre chose , ce que seroit convc- » nable ; et vous allés , à la volunté de don Jehan , vous obliger » que vous maintiendrés et ferés maintenir en tout et partout la n religion catholique romaine, et faictes une ligue là-dessus, vou-

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» lant oblJger tout le inonde à pareille promesse, que ne peult » estre accomplie qu'en nous extirpant, r*

Là-dessus dit le docteur Leoninus : « Ce que s'est promis en » runion des estats n'a jamais esté à ceste intention, voire p'y ont n jamais pensé ; mais ils se sont voulu garder plus seurement , et » empescher qu'ils ne se desbandassent. »

« Mais, » dict le prince, «c ils estoient desjà ligués par ensemble » en vertu de la pacification de Gahd , laquelle les oblige aussi » estroittement que sçaveroit faire la nouvelle union. »

Sur quoy Âldegonde adjousta que c'estoit une chose inique, quo le traitté de Gand qui avoit esté faict si solennellement, et qu'on avoit promis de faire signer par .tous les principaux nobles, magis- trats et officiers, n'y en avoit rien esté faict ; et une nouvelle union, ' faicte par advis et autborité des particuliers, pour ce que la con- scrvittion de la religion romaine y estoit promise , on la vouloit faire signer et agréer de tout le monde, et que là-dessus il fallust, ou qu'on se rendit suspect de n'estre de la religion romaine , oti que l'on condemnât nostre cause par manifeste préjugé.

Les aultres dirent que leur intention n'avoit oncques esté telle, et qu'on nous en donneroit acte déclaratoire de leu|* intention. «c Mais, » répliquèrent les aultres, u pour cela ilz ne seront quiètes V de Tobligation de leur serment et promesse, de laquelle, quand » ils seront semonsés par don Jehaii à l'assemblée des estats » généraulx , il faudra nécessairement qu'ils satisfacent , ou qu'ils » demeurent peijures, nonobstant leur acte ou déclaration. »

Là-dessus, doctor Gaiil print la parolle, et dict en latin que celuy qui avoit faict la loy , la pouvoit rompre, et pourtant les estats, qui avoient faict ceste union, la pouvoicnt iqterpréter, et abolir ce qu'il leur sembloit.

Aldegonde respondit, aussi en latin, qu'il y avoit grande diffé^ renée entre une loy et serment : car celuy qui a fait le. serment ne s'en peut dispenser , puisqu'il le faict k Dieu , et prend le sacré nom de Dieu pour tesmoing et pour juge, un législateur en une loy positive est luy-mesme le juge.

Sur quoy fut répliqué par le docteur Leoninus que, en tous con- tracts, quand le stipulateur quîttoit l'aiiltre de sa promesse, que

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le promettant estoit quitte et deschargë , quoyqull se fust obligé avec serment.

Aldegonde respondit qu'il n'y avoit aussi rien de pareil encela, veu qa'icy ils n'aToicnt rien contracté avecq nous dont nous les puissions absouldre, ni mesmes avec don Jehan, mais qu'en l'union ils s'estoient obligez, devant la face de Dieu, de maintenir ce qu'ils avoient promis. Et , quant on le voudroit ainsi prendre, qu'ils avoient contracté les uns avec les aultres, encor ne pouvons- nous estre pourtant délivrés du préjudice desji donné , car ils avoient donné k cognoistre l'intention et volonté de leur cœur {dederant speàmen anttni et voluntatis)^ laquelle volonté demeu- rant en eux, ne pouroient estre nos juges ni arbitres, puisqu'elle estoit manifestement partialle.

Leoninus insista fort là-dessus que la promesse avoit esté faicte au regard des xv provinces , et non pas d'Hollande et Zedande.

Sur quoy fust allégué parVosbergen, lequel produisoit la copie de rédict de pacification, qu'il y avoit ces mots « en tout et par- tout » lisant en flamcng : m ende over al, qtii adjousta : « Certes, » 8% taeuissetis, non phUosophi[ut olim philosopho fuit objectum)y » sedjudices fuissetis. »

Eux répliquèrent que cela s'entendoit des provinces de par delà. Les nostres insistèrent qu'en quelque façon que l'on l'entendit , que tousjours estoit-ce un manifeste préjugé donné contre nous, et pourtant n'estoit raisonnable que nous nous submettissions à leur jugement.

Finalement , comme cecy fut encor quelque temps débatu de costé et d'autre, le docteur Leoninus vint a dire que, laissant ceste dispute , il falloit venir à quelque accord , requérant pour cela qu'ils voulsissent bailler oultre les poincts lesquels , le jour de la conférence particulière tenue eu la grande sale , en l'absence de monseigneur le prince, et d'autre costé de mons' le ducq d'Arschot et mons' d'Hierges (') 9 ^t qu'ils les voulsissent addoucir comme ils avoient promis de faire.

m

Les aultres respondirént qu'ils estoient prestz, et les baîllcreat

(') Quelques mots manquent encore ici.

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quant et quant , requérans aussi qu'ilz bailleroient leurs poincts par escript , tant cculx qu'ilz avoient proposez maintenant , que ceux que mess** Schetz et Leoninus avoient proposés auparavant : ce que fut accordé, et ainsy on se sépara.

Sinon que mons' de Grobbcndoncq et docteur Leoninus y demeurèrent encor , et eurent divers propos, sur les madères susdictes , avec le seigneur prince et les députez; suivant lesquels Son Excellence les admonesta bien sérieusement, leurremonstrant leur debvoir estre de maintenir les privilèges et libertés du pays, et que eux, au contraire , taschoient de réduire le pays en servi- tude.

Arebives des Affaires étrangères, à Paris : MS. intilttlt^ Payf-Aw, 1560-1583, fol. 229-336.

IV.

Rapport fait aux éiaîs généraux par le seigneur de Grobbendancq et le docteur Leoninus sur leur négociation à Gertrudenberg.

Bbuxillib, 51 MAI 1S77.

Sommaire recueil de ce qu*a esté besoingnc, par le sei- gneur de Grobbendoncq et le docteur Leoninus, avecq le pcince d^Orainges et députez d*ilollande et Zcelandc, ensuyvant la commission et instruction à eulx donnée par messeigneurs les députez des estais généraulx assambk'z à Bruxelles.

Premiers, sont Icdict S' de Grobbcndoncq et docteur Leoninus arrivez h Sainte-Gecrtrudenberge, le xij** de ce mois de may, où, [îlz ont] entendu que le S' prince d'Orainges estoiten chemin, pour se trouver audict Saînte-Gcertrudenberge, à l'occasion de quoy ne sont passez plus oultre. Et ledict S' prince est illecq arrivé le jour ensuyvant, assçavoir le iZ^ dudict mois, après disnée. Entendant

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ledict S' de Grobbendoncq et Leoninus son arrivement, s'ont trouvez à la porte de Sainte-Gcertrudenberge, h l'enti*ée dudict S' prince , Faiant aocompaîgné jusques à son logis, ilz ont demandé assignation des lieu et heure pour avoir audience. A qnoy respondit ledict prince, nionstrant bénévolcnce, d'estre con* tent de les ouyr promptement. Quoy ensuyvant, ont lesdicts S' de Grobbendoncq et docteur Leoninus , après les très-aifectueuses recommandations de messeigneurs les estaiz généraulx, proposé les poinctz et articles dont ilz estoient enchargez, asscavoir :

. : ' . . (').

Sur lesquelz poinctz a ledict S' prince amplement discourra avecq ledict Grobbendoncq et Leoninus, en déclairant de vouloir remédier en tout que seroitde raison, mais que luy ne pouvoit seul déterminer aulcune chose, sans les députez des estatz, lesquelz il attcndoit le mesme jour : requérant lesdicts commissaires de vou- loir, le jour ensuyvant, retourner et proposer ce dont ilz estoient cnchargcz. Quoy ensuyvant, sont lesdicts commissaires retournez Taultre jour, asscavoir le xiiij" de may, au logis dudict prince, où, en sa présence et de quatre députez d'Hollande etZeelande, après la présentation des lettres de crédeoce, ilz ont>derechieff proposé et remonstré amplement tout ce qu'ilz avoient proposé le jour précédent audict S' prince. Et, après aulcunes conférences, ont ledict prince et députez requis d'avoir, par escript, tous les poinctz et articles susdicts, pour plus sceurement respondre sur ung chascun : ce que eulx at esté accordé. Et ont lesdicts commis- saires, le mesme jour, exhibé tous lesdicts poinctz et doléances, en deux escriptz, dont ilz ont lors envoyé copie à messeigneurs les eslatz, et représentent avecq ccstes le double d'iceulx.

Après l'exhibition desdicts escriptz, est le prince d'Orainges tombé en inaladie, et ont lesdicts députez différé trois jours, à cause de ladictc maladie, leur responce, laquelle nous fut délivrée le xvij* de may, aussy par deux escriptz, dont les doubles sonticy

(I) Nous avons retranché toute la proposiliou faite au prince d*Oraiigc, parce qu'elle n'est qu'une paraphrase de l'instruction des députés , insérée ci-dessus, p> 451-438.

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joincls, oultre les copies envoyez de Sainte-Geertrudenberge à jnesseigneurs les estatz.

Le XYiij*, a este adverti que messeigneurs le due d'Arschot, baron de Hierges etaultres estoîent en chemin, avecq l'ultérieureeharge. Et, comme ledict prince recepvoit, le xix", une lettre de mon- seigneur le duc d'Arschot, contenant que Son Excellence avecq les aultres seigneurs arriveroîent audict jour à Breda, et, le jour ensuyvant, k Sainte-Geertrudenberge, ledict prince, à cause qu'il attencloit ses fèbres'(') le jour ensuyvaut, a requis ledict docteur Leoninus de vouloir prier, de sa part, que lesdicts seigneurs, le duc d'Arschot et aultres, voulsissent arrester encoires le diroenchc, qu'estoit le xix" de raay, h Breda. Quoy ensuyvant, s'en est ledic» docteur Leoninus, avecq Tadvis et conseil du S' de Grobbendoncq (qu'estoit aussy malade), transporté audict Breda, pour en advertir lesdicts seigneurs duc, baron de Hierges et aultres de Tintention dndict S' prince, ensemble de tout ce qu'ilz avoient négocié avecq ledict S' prince et députez.

Et ledict docteur Leoninus est retourné le mesmejour k Sainte- Geertrudenberge, sont aussy arrivez lesdicts S' duc et aultres, le Inndy a{M*ès; et, après avoir disné avecq ledict S' prince, lesdicts seigneurs ont eu audience , en présence desdicts S' de Grobbendoncq et docteur Leoninus : où, entre les aultires pro- postz, a esté représenté le faict d'Amstelredamme, avecq aultres plainctes d'ung costé et d'aullre.

Le xxj*jour de may, ont esté députez les S" de Willerval, Grob- bendoncq , Mcetkercken et Leoninus, pour communicquer, avecq les députez d'Hollande et Zeelande, sur le faict d'Amstelredamrae et aultres articles. Et, entre plusieurs aultres propostz, ont esté représentez les diffîcultez quy tomboîen t sur le faict d'iceulx d'Ams- telrcdamme, ausquelz les députez déclairoicnt avoir accordé le libre exercice de la religion catholicqne romaine, en conformité de In pacification faicte à Gand, saulf qu'ilz d«inandoient quelque lieu pour la sépulture d'iceulx de la religion réformée, laquelfe ceulx d'Amstelredarame refusoient admcctrc .en leur ville et territoire.

(•) Febresj fièvres.

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Le second poînct estoit que ceulx d'Amstelredaminc deman- dotent asseurance que {personne ne pourroit cstre de magistrat, quy n'estoît poînct catholîcque : ce que lesdictz députez disoient eslre superflu, à cause que ceulx du magistrat avoient le choix d'iceulx qu'on prennolt au magistrat.

Le iij*' estoit touchant le paelkiët, laquelle ceulx d'Amstelre- damme remandolent, comme à eulx compétant, en vertu de par- ticulier achapt et privilège; et, combien on faisoit grande instance |K)ur remectre lesdicts d'Amstelredamme en leur ancien privilège, toutesfois lesdicts députez ont persisté au contraire, disant que ladicte paelkist estoit purement donné à ceulx d'Enchuysen, et que pourtant la restitution debvroit cstre différée, à la déclaration des députez quy seroient ordonnez pour la liquidation des biens aliénez : soutenant que ledict privilège debvroit estre tenu pour aliéné, où, au contraire, fut dict que l'article de la paciflcation ne coucernoit les privilèges des villes et aultres communaultez, les* quelz debvoient, devant toutes choses, estre restabliz.

Le iiij* estoit des soldatz, en nombre de six cens ou environ, estante en ladicte ville, lesquelz le prince et estatz d'Hollande vouloient estre cassez, permectant ausdicts d'Amstelredanune de relever et entretenir leurs guides en la manière aocoustumèe , avccq plusieurs discours sur ce faicts, d'ung costé et d'aultre.

La dernière difficulté estoit touchant les contributions, à cause que ledict prince et estatz entendoientque ceulx d'Amstdredamme debvroient contribuer, comme membre d'Hollande, également nvecq les autres villes d* Hollande, es charges faictes depuis la pacification, retenant à eulx les charges faictes durant les troubles, où, au contraire, c^ulx d'Amstelredamme ont soustenu qu'ilz debvoient passer de contribuer en conformité des estatz gène- raulx.

Et, combien oh a faict tout debvoir pour induire les parties en accord, toutesfois n'est »ledict accord succédé, sinon que après , par diverses fois , on a derechief communiqué et intercédé , de sorte que enfin ceulx d'Amstelredamme, aiant satisfaction et accom- plissement de tous aultres poinctz, en forme comme ilz estoient par eulx demandez, eussent condescendu, avec prèallable ordonnance

465 -

de Son Altèze et estatz génëraulx, fust eoncédë quelque lieu non saerë, k leurs despens , pour la sépulture d'iceulx de la religion réformée , moyennant que ladicte sépulture se feroit sans solem- nité, exhortation et convoyé des gens, ou aultre exercice exté- rieure : dont lesdicts S' prince et députez se contentoient. Davan-^ taige, estoicnt lesdicts d*Amstelrcdamme assez contens de remectre aux députez des estatz le différent de la paelkistj et aussy délaisser l'ultérieure asseurance, touchant la création des magistratz. Mais, quant aux contributions et entretënement des soldatz , ont per- sisté, et délivré certain escript contenant leurs poincts et raisons, lequel fust présenté audict S' prince et députez, dont la copie est icy joincte.

Enfin, assçavoir le dernier jour du partement^lesdicts seigneurs, a esté derechieff proposé le faict desdicts d'Arostelredamme, au gardain (■} et après au logis dudict S' prince, quy enfin dédairoit qu'il seroit content de délaisser à ceulx d'Amstelredamme trois cents souldartz d'iceulx qu'ilz avoient, soubz deux capitaines , lesquelz il prendroit des quatre, moyennant que lesdicts capitaines et souldartz (croient serment à Sa Majesté, audict S' prince comme gouverneur, et à ceulx de la ville, et que, en lieu d'iceulx quy se retireroient avecq le temps, on prendroit aultres bourgeois, avecq le sceu et consentement d'iceulx du magistrat. Sur quoy ceulx d'Amstelredamme disoient que le nombre de trois cents n'estoit bastant pour leur asseurance , et qu'ilz trouvoient difficulté au regard du serment que lesdicts soldartz feroient audict S' prince.

Finablement , voyant que n'avoit nul moyen d'appoincter les parties èsdicts deux poinctz, assçavoir des souldartz et contribu- tions , l'on a mis en avant de faire demeurer lesdicts d'Amstelre- damme eu la générallité, sans les incorporer audict Hollande. Surquoy lesdicts prince et députez ont respondu qu'ilz estoicnt bien contens de délaisser ceulx d'Amstelredamme en la générallité ; et, estans requis comment ilz useroient de leurs privilèges et traf- ficques, demeurans en la générallité, ilz ont respondu qu'ilz laisse- roient h eulx leurs biens et négociations par Hollande et Zeelande,

(1) Gardain, jard i n .

1

464

en la mesme manière comme à ceulx d'Anvers, de Gand, el aiillres villes d'auUres provinces, mais qu'ilz ne laisseroient arriver audict Amstelredamme les grandes flot^ venants d'Oosteland , h cause, comme ilz prétendoient , que lesdictes flotes venoienl par la canal et golfe de la mer d'Hollande , donné par bénéfice de nature aux Hollandois incorporez et membres dudict Hollande.

Dernièrement, ont ledict S' de Grobbendoncq et docteur Leoni- nus exhibé audict S^ prince certaine réplicque par escript, par laquelle ilz débatoient aulcuns poinctz contenuz en leur responoc, demandants effectuation des auUres poinctz accordez, comme plus amplement apert par la copie dudict escript, joincte avecq cesles.

La reste de la négociation desdicts seigneurs a esté rapporté à Son Altèze, et par icelle (comme l'on entend ) communiqué h mes- seigneurs les esta tz. Et sont lesdicts S"* commissaires partiz dudict S^ prince et députez, avec bonne grâce et amitié, et soubz promesse de faire rapport d'ung costé et d'aultre.

Item, convient noter que lesdicts S' prince et députez font aultre répartition des 150 mil florins, par eulx présentez, que messeigneurs les estatz avoient faict : car ilz entendent applîcquer les cent mil florins au dicaige Ziericxzée, et les restans cinc- quante mil florins au payement des souldatz des estatz généraulx. Sur quoy et pourtant convient que messeigneurs advisent et résouldent sur les poinctz susdicts.

Faict à Bruxelles, le dernier jour de may 1577.

m

Elbertus Leoninus.

Copie du lemps, A la bîbliothéqae de la Chambre de« Rpprésenlants : Henuil de pièets relativet aux Mat» ffénémux, 1576-1580, 1. 1, fol. 344-348.

FIN DU TOHE TROISIÈME.

TABI.E.

«*-»■

P.|.

PRÉFACE I

CORRESPONDANCE DE GUILUUME LE TACITURNE.

DVIII. L*emperear Haximilien II aa prince d*Oraiige. De

Vienne, le . . mai 1568 i

DIX. Le prince d*Orange à Pemperenr Maximilien II. De Dil-

lenbourg, le 13 août 1568 6

DX. Le prince d^Orange au magistrat et aux métiers de Liège.

Da château de Witthem, le 4 octobre 1S{68 19

DXI. Le magistrat de Liège an prince d*Orange. De Liège ,

le «octobre 1568 2!

DXII. Le prince d*Orange au magistrat de Liège. Du camp ,

près de Tongres , le 10 octobre 1 568 22

DXIII. Le prince d^Orange au prince-èvéque de Liège. Du camp,

près de Tongres, le 10 octobre 1568 23

DXIV. Le prince-évéque de Liège au prince d*Orange. De

Liège, le 11 octobre 1568 25

DXV. Le magistrat de Liège au prince d^Orange. De Liège ,

le 12 octobre 1 568 .' 27

DXVI. Le prince d*Orange au prince -èvéque de Liège. Du

camp,àLooz, le 18 octobre 1568 28

DXV II. Le prince d*Orange au prince -èvéque de Liège. De

son camp, le 3 novembre 1568 29

DXVIII. L*èvâque et le chapitre de Liège au prince d*Urange.

De Liège, le 3 novembre 1568 30

DXIX. Le prince d*Orange à Tèvdque et au chapitre de Liège.

De son camp, le 4 novembre 1568 31

DXX. L^èvéque et le chapitre de Liège au prince d*Orange.

De Liège, le 4 novembre 1568 . . 32

DXXI. Le prince d^Orange au roi de France. De Helimora,

21 décembre 1568 3i

DXXII. Le prince d*Orange au roi de France. De Dillenbourg,

le 10 mai 1 571 35

m. 3o

466

DXXIII. Commission donnéo par le prince d*Orange.à Jacques

Blommaert. De Dillenbourg, le 26 août iV7i 96

DXXIV. Le prince d*Orange à Richard Claessens. De Dillenbourg,

le 26 décembre 1 571 38

DXXV. Le prince d*Orange.auz bourgmestres, écheWns et habi- tants de Gouda. De Dillenbourg, le 22 avril 1572. ... iO DXXVl. Le prince d'Orange aux bourgmestres, ëchevins et habi- tants de Middelbourg. De Dillenbourg, le mai 1572. 47 DXXVII. Le prince d'Orange aux bourgmestres, cchevins et habi- tants d'Enkhuisen. De Dillenbourg, le K mai 1572. . . 50 DXXV in. Le prince d'Orange aux bourgmestres, ëchevins et habi- tants de Harderwyck. De Dillenbourg, le mai 1572. 56 DXXIX Le prince d'Orange aux capitaines, bourgmestres, ëche- vins et bourgeois de Flessingue. De Dillenbourg , le

25 juin 1572 60

DXXX. Le prince d'Orange à Jean de Stalberg, amman de Kriec-

^ kenbeeck. De Âldenkircben, le 1 5 juillet 1572. 62

DXXXI. Le prince d*Orange à l'empereur Haximilien II. De son

camp, le 27 août 1572 63

DXXXII. Le prince d'Orange à ceux de Termonde. DeMalines,

le 1«r septembre 1572 69

DXXXIIl. Commission donnée par le prince d*Orange à Pierre

Clarisse. De Deift, le 5 décembre 1572 71

DXXXI V. Le Prince d'Orange aux ministres, etc., des églises de Norwich , Thetford et Ipswicb. De Delft , le 27 fé- .

vrier 1573 73

DXXXV. Philippe de Marnix, S' de Sainte-Aldegonde , au prince

d'Orange. De Haye, le 7 novembre 1573 73

DXXXVI. Le prince d'Orange à Julian Romero. De Delft, le 7 no- vembre 1575 81

DXXXVn. Le prince d'Orange à Julian Romero. De Delft, le 8 no- vembre 1573 85

DXXXVI II. Le prince d'Orange à Julian Romero. De Delft, le 9 no- vembre 1573 85

DXXXI X. Le prince d'Orange à Julian Romero. De Delft, le 10 no- vembre 1573 86

DXL. Le prince d'Orange à Philippe de Marnix. De Delft, le

28 novembre 1573 88

DXLI . Le prince d'Orange au seigneur de Noircarmes. De Fles- singue, le 7 janvier 1574 93 /

DXLIl. Le prince d'Orange aux colonel, capitaines et soldats de ^

la garnison de Middelbourg. De Flessingue, le 1 1 jan- vier 157i 95

467

DXLIll. Le prince d^Orange au colonel Mondragon. De Bommel,

le23avriH57^ 96

DXLI Le prince d*Orange au colonel Mondragon. De Dordrecht,

Ie3maii874 98

DXL V . Le prince d*Orange au colonel Mondragon . De Dordrecht,

Ie5roaii57^ 99

DXL VI. Le prince d*Orange à Sybrant Munter. De Dordrecht,

le 13 mai 1575 102

DXLVII. Le prince d'Orange au eomle Wolfgang de Hohenlohe.

De Rotterdam, le 18 décembre 1K75 10^

DXLVIII. Le prince d*Orange au seigneur de Pèze. De Hiddel-

bourg, le août 1576 106

DXLIX. Le prince d*Orangeà Henri de Bloeyere. De Middelbourg,

le 10 septembre 1S76 110

DL. Le prince d'Orange à Henri de Bloeyere. De Middel- bourg, le 26 septembre 1576 112

DLL Les états de Brabant, de Flandre et de Hainaut au

prince d'Orange. De Bruxelles, le 27 septembre 1 576. 115 DLII. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles ,

le29 septembre 1576 115

DLIII* Instruction des états généraux pour le S^ de Haussy, en- voyé vers le prince d'Orange. De Bruxelles, le 30 sep-

tembre 1 576 116

DLIV. Le prince d'Orange aux états de Brabant, de Flandre et

de Hainaut. De Middelbourg, le 3 octobre 1576 117

DLV. Le prince d'Orange à MM. Van Dorp et de Rycke. De

Middelbourg, le 3 octobre 1576 121

DLVI. Le prince d'Orange au colonel Vanden Tympel. De Mid- delbourg, le 4 octobre 1576 122

DLVII. Le prince d'Orange à MM. Van Dorp et de Rycke. De

Middelbourg, le i octobre 1576 12i

DLVIII. Le prince d'Orange au comte du Rœulx. De Middel-

^bourg, le 7 octobre 1576 126

DLIX. Le prince d'Orange à ceux du conseil d'Etat. De Middel- bourg, le 13 octobre 1576 127

DLX. Le prince d'Orange au marquis de Harré. De Middel- bourg, le 28 octobre 1576 130

DLXI. Le prince d'Orange aux députés du conseil d'Ëtat. De

Middelbourg, le 29octobre 1576 137

DLXII. Le prince d'Otange k ses députés a Gand. De Middel- bourg, le 31 octobre 1576 139

DLXIII. Le prince d'Orange aux états généraux. Novembre

1576 liO

468

DLXI V. Le prince d*Oraiige tu conseil d'État. De Mtddelbourg,

le novembre 1S76 15SS

DLXV. Le prince d'Orange aux états généraux. De Middelbourg,

le H novembre 1576 1S7

DLX VL Le prince d'Orange aux états généraux. De Bliddelbonrg,

le 10 décembre 1SS76 160

DLX VII. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 17 décembre 1S76 162

DLXVIII. Instruction donnée par les états généraux au S' de Tre- Ion, envoyé vers le prince d'Orange. De Bruxelles,

le 17 décembre 1576 165

DLXIX. Le conseil d'Etat au prince d'Orange. De Bruxelles, le

18 décembre 1576 170

DLXX. Le prince d'Orange au duc d'Arschot. De Middelbourg,

le 19 décembre 1576 171

DLXXI. Les états généraux au prince d'Orange. De Namur, le

31 décembre 1576 177

DLXXII. Le prince d'Orange aux états généraux. De Middelbourg,

le 15 janvier 1577 179

DLXXIII. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 16 janvier 1577 180

DLXXI V. Instruction pour les seigneurs de Hautain et de Mansart, envoyés par le prince d'Orange à Bruxelles, De Mid- delbourg, le 17 janvier 1577 181

DLXXV. Le prince d'Orange à Henri de Bloeyere. De Middel- bourg, le 17 janvier 1577 188

DLXXVl. Instruction des seigneurs de Havre, de Lalaing, de Fresin , de Bersele et de Hèze au sieur de Bloeyere, envoyé vers le prince d'Orange. De Bruxelles, le

23 janvier 1 577 189

DLXXVII. Les seigneurs de Havre, de Lalaing, de Fresin, de Ber- sele et de Hèze au prince d'Orange. De Bruxelles^,

le 24 janvier 1577 192

DLXXVIII. Le prince d'Orange aux seigneurs de Havre, de Lalaing, de Hèze, de Bersele et de Fresin. De Middelbourg,

le 25 janvier 1577 194

DLXXIX. Instruction pour le sieur de Bloeyere, renvoyé par le prince d'Orange à Bruxelles. De Middelbourg, le

26 janvier 1577 198

DLXXX. Le prince d'Orange aux états généraux. Dt Middelbourg,

le 26 janvier 1 577 201

DLXXXl . Le prince d'Orange aux états généraux. De Middelbourg,

le 30 janvier 1577 202

469

DLXXXII. Le prince d*Orange aux états généraux. De Middelbourg,

le 2 février ««77 205

DLXXXIII. Les états généraux au prince d*Orange. De Bruxelles,

le 7 février 1577 2M

DLXXXIV. Les états généraux an prince d'Orange. De Bruxelles,

le 9 février 1ÎÎ77 206

DLXXXV. Les états généraux an prince d'Orange. De Bruxelles,

le 13 février i»77.. 208

DLXXXVL Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 13 février 1577 209

DLXXXVll. Le prince d*0 range au S' de Hèze. De Middelbourg, le

U février 1577 211

DLXXXVlll . Les états généraux aux prince d'Orange. De Bruxelles,

Iesl6ctl7 février 1577 212

DLXXXiX. Instruction pour le S' de Zwevegbem et le conseiller de Meetkercke, envoyés par les états généraux au prince

d'Orange. De Bruxelles, le 18 février 1577 218

DXC. Le prince d'Orange aux états généraux. De Middelbourg,

le 18 février 1577 222

DXCI. Déclaration du prince d*Orange et des états de Hollande et Zélande sur le traité fait avec don Juan d' Autriche.

De Middelbourg, le 19 février 1577 225

DXCII. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 19 février 1577 235

DXCIII. Le conseil d'État au prince d'Orange. De Bruxelles, le

19 février 1577 235

DXGIV. Le conseil d'État au prince d'Orange. De Bruxelles, le

19 février 1577 236

DXCV. Le conseil d'État au prince d'Orange. De Bruxelles, le .

20 février 1577 237

DXCVL Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 20 féyrier 1577 238

DXCVIL Le prince d'Orange au conseil d'Etat. De Middelbourg,

le 24 février 1577 239

DXCVIU. Le prince d'Orange au conseil d'État. De Middelbourg,

le 25 février 1577 240

DXCIX. Philippe de Mamix, S* de Sainte-Aldegonde, h Gaspar

Sehetz, S' de Grobbendoncq. Fin de février 1577.. . . 241 DC. Instruction du S' de Mansart , envoyé par le prince

d'Orange à Bruxelles. De Middelbourg, le 6 mars 1 577 . 257 DCI. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 12 mars 1577 265

470

DGII. Les états généraux au prince d*Orange. De Bruxelles,

le 1 8 mars 1577 265

DCIII. Le prince d*Orangc aux états généraux. De Zierikzée,

le 18 mars 1577 266

DCI V. Le prince d'Orange au duc d*Arschot. De Hiddelbourg ,

le 24 mars 1577 269

DCV. Les états généraux au prince d^Orange. De Bruxelles,

le24 mars 1577 275

DCVI. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 30 mars 1577. 276

DCVII. Le prince d*Orange au comte de Lalaing. De Dordrecht,

le avril 1577 279

DCV 111. Le prince d'Orange aux échevins de Gand . De Dordrecht,

le avril 1577 281

DCJX. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 3 avril 1577 283

DCX. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 6 avril 1577 286

DCXI« Le prince d'Orange au duc d'Arschot. De Dordrecht,

le 6 avril 1577 287

DCXII. Le prince d'Orange à don Juan d'Autriche. De Gertru-

dcnberg, le 24 mai 1577 289

DCXIII. Le prince d'Orange aux états généraux. De Harlem,

le 20 juin 1577 292

DCXIV . Gaspar Schetz^ S' de Grobbendoncq, au prince d'Orange.

De Bruxelles , le 20 juin 1577 297

DCXy. Le prince d'Orange au S' de Grobbendoncq. D'Alck-

maar, le 28 juin 1577 302

DCX VI. Les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles,

le 3 juillet 1577 308

DCXVIL Les états généraux au prince d'Orange, De Bruxelles,

le 3 juillet 1577 309

DCXyiil. instruction de Philippe de Baesdorp, envoyé par les états généraux au prince d'Orange. De Bruxelles, le

5 juilleH577 311

DCXIX. Le prince d'Orange aux états généraux. D'Alckmaar,

le 20 juillet 1577. 313

DCXX. Le prince d'Orange aux états généraux. De Harlem,

le 15 août 1577 315

471

APPENDICE.

A. RiLATION DB L*£XPÉDlT10If DU PRIHGS D*OlâlVGI DAHS LIS PaYS-BaS,

EN 1868 319

B. C0AU5?0NDARCB DU DUC D*AlBB ATBC L*i?iQDE DB Ll^GB, SDB l'iNTAHIOM

DU PBIHCB D^ObARGB DAlfS CB PATS, BN 1868.

1 . Le duc d*Albe k Vévéque de Liège. D'Utrecbt, le 10 août 1568 . 358

II. Leducd*AlbeàrëyéquedeLiége.I)eBois-le-Dac,lel6toûtl868 539

III. L*ëvéque de Liège au duc d'Albe. De Liège, le 17 août 1568 . . 340

IV. Le doc d*Albe à révéque de Liège. I>e Bruxelles, le 22 août 1868. 341 V. L*èyéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le U août 1868. . . 343

VI. Le duc d*Albe k Tèvéque de Liège. De Maestricbt, le 4 septem- bre 1868 ZU

VII. Instruction du S' de Zweveghem. De Maestricbt, le 4 septembre

1868 3i8

VIII. L*èvéquede Liège au duc d*Albe. De Liège, le 17septembre 1868. 347

IX. L*èvéquede Liège auducd'Albe. De Liège, le 29 septembre 1868. 348

X. L*èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le l«r octobre 1868. 340

XI. L*èvéque de Li^e au duc d*Albe. De Liège, le 8 octobre 1868. 380

XII. L'èvéque de Liège au duc d^Albe. De Liège, le 7 octobre 1868. 381

XIII. L*èyéque de Liège au duc d'Albe. De Liège, le 8 octobre 1868. 382

XIV. L*èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 18 octobre 1868. 383 XV. L*èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 17 octobre 1868. 388

XVI. LMvèque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 21 octobre 1568. 386 XVII. Le duc d*Albe k Tévéque de Liège. Du camp de Parc, le 24 oc- tobre 1868 358

XVIII . L'èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 25 octobre 1 568. 359

XIX. L^èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 31 octobre 1868. 361

XX. L*èyéque de Liège au duc d*AIbe. De Liège, le 3 novembre 1 868. 362

XXI . L^èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 3 novembre 1 868. 363

XXII. L*èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 8 novembre 1868. 368

XXIII. L^èvéque de Liège au duc d*Albe. De Liège, le 5 novembre 1 568. 366

C. NleOCIATIORB SBCaiTBS AVBC LB PBINCB d'ObARGB, DB 1873 A 1878.

I. Déclaration de Philippe de Marniz, S* de Ste-Aldegonde, sur les conditions auxquelles le prince d^Orange consentirait k poser les armes et k quitter le pays. De La Haye, le 21 no- vembre 1873 367

472

II. Lettre de Philippe de Ste-AIdegonde, S' de Noircannes, au duc d*Albe, sur l*exameo qu*il a fait de Philippe de Marnix , sur les lettres de celui-ci au prince d*OraDge, sur la réponse du prince, et enfin sur le parti qu*il compte encore tirer de Marnix. D'Utreçht, le 10 décembre 1575 369

III. Instruction donnée par le docteur Elbertus Leoninus à Hugo

Bonté, ex-pensionnaire de Middelbourg, envoyé par lui yen le prince d*Orange, pour Tentretenir des intérêts de la dame de Vredembourg, et rengager, à cette occasion, k se réconci- lier avec le Roi ; suivie du rapport de Bonté. Avril 1574. . . . 375

IV. Instruction donnée k Hugo Bonté, envoyé une seconde fois au

prince d^Orange par le docteur Leoninus , et rapport de

Bonté. 29 juin- 4 juillet 157i 581

V. Rapport de ce que le Sr de la Rivière et Tavocat Treslong ont négocié à Rotterdam avec le prince d'Orange. De Montfort,

le 20 juillet 1574 595

VI. Mémoire de Philippe de Marnix, S^ de Ste-Aldegonde, sur ce qu^il a négocié, k Rotterdam, avec le prince d^Orange. Fin de

juillet 1574 597

Vil. Lettre du grand commandeur de Castille au docteur Elbertus Leoninus, lui donnant commission de se rendre vers le prince

d'Orange. De Bruxelles, le 30 hovembre 1574 405

VIII. Instruction donnée par le grand commandeur de Castille k

Leoninus. De Bruxelles , le 50 novembre 1574 404

IX. Instruction particulière pour Leoninus. De Bruxelles, le 30 no- vembre 1574 406

X. Première lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille,

sur sa mission. De Bois-le-Duc, le 9 décembre 1574 407

XI. Réponse du grand commandeur de Castille k la lettre précé- dente. De Bruxelles, lell décembrel574 409

XII. Deuxième lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille.

De Bois-le-Dnc, le 12 décembre 1574 411

XIII. Troisième lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille.

De Bois-le-Duc, le 15 décembre 1574. «... 412

XIV. Quatrième lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille.

De Delft, le 24 décembre 1574 414

XV. Cinquième lettre de Leoninus au grand commandeur de Cas-

tille. De Delft, le 29 décembre 1574 415

XVI. Sixième lettre de Leoninus au grand commandeur de Castille.

De Middelbourg, le 11 janvier 1575 416

XVII. Rapport de Leoninus sur sa mission vers le prince d'Orange.

29 janvier 1575 417

M